L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le mardi 1 décembre 1981 - Vol. 26 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Un moment de recueillement, s'il vous plaît.

Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Dépôt de documents. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

Rapport sur l'aide financière

du gouvernement à l'industrie

de la chaussure

M. Biron: M. le Président, tel que je m'y suis engagé hier vis-à-vis du député de Notre-Dame-de-Grâce, je dépose un rapport sur l'aide financière apportée à l'industrie de la chaussure au Québec par le gouvernement du Québec de 1978 à 1981, qui totalise 10 350 000 $, de même qu'une copie de lettre que j'ai expédiée hier avec mon collègue, le ministre d'État au Développement économique, à M. Herb Gray, ministre de l'Industrie et du Commerce fédéral.

Le Président: Document déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période de questions orales des députés. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

La situation financière de l'UQAM

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre de l'Éducation qui n'est pas encore arrivé. Étant donné l'urgence et l'importance de la question, on en conviendra, je l'adresserai au premier ministre. Il s'agit de l'avenir immédiat de l'Université du Québec à Montréal, l'UQAM, qui est menacée par la formule de financement adoptée par le ministre de l'Éducation récemment. Techniquement, l'UQAM serait en faillite, aussi bizarre ou tragique que ça paraisse à quelqu'un qui écoute cela. On n'en croit pas nos oreilles. Est-ce que le premier ministre peut s'engager - je pense que l'engagement du premier ministre est important à ce stade-ci, M. le Président, parce que les engagements du ministre de l'Éducation sont assez fragiles - ici pour faire en sorte que ni la croissance - parce que l'Université du Québec à Montréal, contrairement à plusieurs autres, est une université en croissance - ni l'existence, de l'UQAM ne soient menacées et que des mesures immédiates soient prises pour permettre qu'elle continue de vivre et de croître.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, en attendant que, peut-être, mon collègue de l'Éducation soit ici pour entrer plus dans le détail, il est évident que l'expression "techniquement en faillite" fait partie d'une sorte de dramatisation qui est compréhensible. Mais pour répondre très directement à la question du député, premièrement, ni de près ni de loin, il ne peut être question que l'UQAM soit en danger de quoi que ce soit qui l'empêche de fonctionner convenablement ou qui l'empêche de faire sa croissance normale, parce que je suis d'accord avec le député, c'est une des universités qui sont encore en pleine croissance. D'autre part, je pense que tout le monde se rend compte - et je suis sûr à l'UQAM comme ailleurs - qu'il va falloir, tout en faisant des croissances ou, comme on le dit assez souvent, du progrès quand même, essayer d'être le plus rigoureux possible dans les gestions budgétaires et cela fait partie des contraintes de la conjoncture que nous traversons.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je ne sais pas si le premier ministre se rend compte que l'UQAM est, puisqu'on l'appelait l'université populaire, dans un milieu populaire de Montréal et a grandi, a accru, augmenté ses effectifs de façon spectaculaire, en fait, depuis quelques années. Le premier ministre se rend-il compte que l'UQAM devra imposer un contingentement sur sa clientèle, contrairement au voeu d'accessibilité qui est exprimé par le gouvernement - ce sont des voeux encore - si le gouvernement ne prend pas des mesures concrètes en dehors de la formule de financement qui est actuellement appliquée?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): On vient de me souligner, M. le Président, que le ministre de

l'Éducation devrait être ici dans guelques instants. Si le député de Marguerite-Bourgeoys veut garder sa deuxième question qui entre un peu plus - je m'excuse de l'expression - dans la plomberie budgétaire, probablement que le ministre pourra y répondre.

Le Président: Question principale, Mme la députée de Chomedey.

L'avenir des COFI

Mme Bacon: En l'absence du ministre de l'Immigration, ma question s'adresserait au premier ministre, M. le Président.

Il y a eu des crédits supplémentaires de 750 000 $ qui ont été votés pour le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles et, malgré ces crédits supplémentaires, le budget de 1981-1982 demeure inférieur de 15,8% à celui de 1980-1981, malgré aussi les nouvelles responsabilités relatives aux communautés culturelles qui lui ont été attribuées au lendemain des dernières élections. À nos yeux, cette baisse de 15,8% est d'autant plus dramatique qu'elle s'effectue au détriment de l'élément adaptation des immigrants. Il y a une baisse à cet élément de 30% pour le budget de moins qu'en 1980-1981. Des 350 000 $ des 750 000 $ qui sont votés, qui sont transférés, s'agit-il à ce moment-là du financement du Comité d'implantation du plan d'action à l'intention des communautés culturelles, ce qu'on appelle CIPA, ou si on a décidé de financer les COFI? On sait qu'il y a un problème au niveau des COFI. Est-ce qu'on continuerait de financer le COFI Oliva-Asselin afin d'assurer sa survie et d'enlever l'incertitude et l'inquiétude des gens qui travaillent et des gens qui bénéficient de ses services? On a quand même fait une promesse aux gens des COFI d'assurer leur survie. En même temps, est-ce qu'on a trouvé, dans ces crédits, l'argent nécessaire pour rouvrir le COFI de la Mauricie et le COFI Yvette-Chantrier?

Le Président: M. le ministre de l'Immigration.

M. Godin: J'ai manqué le début du préambule et je m'en excuse, M. le Président. Quand on ne voyage pas en avion, on arrive un peu en retard.

Je vais répondre à la partie de votre question que j'ai entendue. Sur le COFI Oliva-Asselin, l'activité sera maintenue au même niveau que l'an dernier, à peu de choses près. Quant à celui de la Mauricie, il n'est pas question de le rouvrir parce que le flot des réfugiés a beaucoup diminué pour les raisons que vous savez, mais il n'a jamais été question que le Québec soit fermé à tout jamais à un nouvel influx de réfugiés si jamais la situation mondiale devait nous mener là. Maintenant, je n'ai pas entendu le début de votre question.

Le Président: Question additionnelle, Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: Mon inquiétude vient du fait qu'on a coupé de 30% le budget au niveau de l'adaptation des immigrants. Je pense qu'on sait l'importance d'une bonne adaptation des immigrants au Québec, une nouvelle vie au Québec. On sait aussi que le ministère a formé ce comité CIPA qui doit être en action, j'espère, en ce moment et fournir les données nécessaires au ministre pour continuer son travail. Est-ce qu'on a l'intention d'augmenter ou de faire davantage au niveau de l'adaptation des immigrants? (10 h 20)

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: M. le Président, quant à l'adaptation, un immigrant - comme vous connaissez très bien la définition - qui vient ici avec un emploi en poche n'a pas à passer par le COFI et par une phase d'adaptation puisqu'il rentre, par exemple, chez Pratt et Whitney ou Canadair le lendemain de son arrivée ici. L'adaptation s'adresse surtout aux réfugiés. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, le nombre de réfugiés, suite à la diminution des départs des pays du Sud-Est asiatique, a beaucoup diminué; c'est ce qui explique que ça se reflète sur le budget et les services. Il y a moins de réfugiés, donc il y a moins de budget pour l'adaptation. Mais, si jamais il devait y en avoir plus, il y aura une révision en conséquence.

Le Président: Question principale, M. le député de Viger.

Conférence fédérale provinciale sur le tourisme

M. Maciocia: M. le Président, le premier ministre a annoncé récemment que le gouvernement du Québec n'avait plus l'intention de participer aux conférences fédérales-provinciales. Or, les 10 et 11 décembre aura lieu à Ottawa une rencontre fédérale-provinciale des ministres responsables du tourisme afin d'étudier un plan national du tourisme élaboré par le ministre fédéral des petites entreprises et du tourisme.

On sait que le gouvernement du Québec a diminué ses crédits à la promotion touristique. On sait aussi que le gouvernement du Québec est la deuxième province en importance pour les entrées touristiques, après l'Ontario, et qu'actuellement, elle est en décroissance et Dieu sait combien le gouvernement actuel a besoin d'argent.

Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Est-ce que le gouvernement québécois a l'intention de participer à cette rencontre?

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: La réponse est non, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Viger.

M. Maciocia: Comme je l'ai dit tout à l'heure, M. le Président, on sait que le gouvernement du Parti québécois n'est pas au bord de la faillite, mais presque, et que de l'argent est en jeu actuellement sur ce plan touristique. On sait aussi que, jusqu'à maintenant, le ministre ne nous a jamais informés s'il était allé chercher de l'argent pour le Centre des congrès de Montréal, la part que le gouvernement fédéral veut donner pour la rénovation du Vieux-Montréal et à la modernisation de certains centres de ski du Québec.

Je voudrais savoir si le ministre a l'intention, dans la situation actuelle, de faire les démarches nécessaires pour aller chercher à peu près 50 000 000 $.

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: M. le Président, d'abord, je voudrais corriger le préambule du député de Viger. Lorsqu'il dit que le gouvernement du Québec a diminué ses crédits à la promotion touristique, c'est totalement faux. Les crédits sont aussi comptabilisés maintenant à plusieurs endroits et, en particulier, au Palais des congrès de Montréal qui sert à l'heure actuelle, en permanence, à des gens qui se promènent à travers l'Amérique du Nord pour inviter les touristes et les agents touristiques à venir au Québec d'une façon particulière.

Quant aux sommes qui sont engagées par le gouvernement fédéral pour nous aider à payer la construction du Palais des congrès de Montréal, c'est exact qu'il y a une somme de 24 000 000 $ qui doit être transférée d'une journée à l'autre ou d'une semaine à l'autre au gouvernement du Québec. Si c'a pris un peu de temps, c'est que nous étions en négociation avec les ministères fédéraux concernés pour essayer d'obtenir plus que 24 000 000 $. Ces 24 000 000 $, c'est en dollars de 1978, selon le coût de 1978 du Palais des congrès de Montréal. Maintenant que nous sommes en 1981, tout près de 1982, nous estimons que cette somme devrait être d'environ 32 000 000 $, et c'est ce qui est en négociation.

À tout événement, nous avons décidé de prendre les 24 000 000 $ en acompte et de continuer à négocier pour des sommes additionnelles, si possible.

Quant au Vieux-Montréal, je pense que c'est une intervention que le gouvernement fédéral voulait faire dans un domaine de juridiction strictement provinciale et qui regarde les Affaires municipales. Je pense que mon collègue des Affaires municipales pourra répondre à cette question.

Pour ce qui est des sommes d'argent disponibles pour le ski, on est en train de négocier avec le fédéral présentement. On en est venu à une entente, mon collègue du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et moi-même et on négocie présentement avec le fédéral les sommes d'argent nécessaires pour la promotion du ski au Québec.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Président: Question additionnelle?

M. Levesque (Bonaventure): Non, c'est simplement que le ministre des Affaires municipales a été invité par le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme à donner un complément de réponse.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: Je crois que ce projet relève plutôt du ministre des Affaires culturelles, à l'heure actuelle.

Des voix: Ah!

M. Léonard: Le Vieux-Montréal.

M. Levesque (Bonaventure): II semble que, maintenant, ce soit au tour du ministre des Affaires culturelles de donner un complément de réponse.

Des voix: Ah!

Le Président: Est-ce que vous avez une question additionnelle, M. le député de Viger?

M. Maciocia: Oui.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, lorsqu'il y a confusion, comme on vient de le constater, c'est normalement le premier ministre qui doit régler la question et répondre.

Des voix: Ah!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président,

comme ex-pionnier du Vieux-Montréal, ayant participé modestement à une certaine relance qui s'accentue, tout ce que je peux dire, c'est que j'encourage tous nos concitoyens à aller visiter cette espèce de renaissance de la partie probablement idéale de la métropole où, c'est vrai, le fédéral a des intérêts, où, c'est vrai, la ville de Montréal est de plus en plus intéressée et où, je crois, si tout le monde y participait, on pourrait refaire d'un vieux centre-ville un centre-ville flambant neuf avec vue sur le fleuve. Je crois que cela mérite mieux que les plaisanteries faciles du député de Bonaventure.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de règlement.

Des voix: Ah;

Le Président: Question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux protester immédiatement contre les dernières paroles du premier ministre. Je ne pense pas que ce soit le cas, du moins de la façon dont on a qualifié mes propos. Je dirai simplement que s'il y a plaisanterie, c'est de voir de quelle façon le gouvernement sombre présentement dans la confusion la plus totale.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, au ministre de l'Éducation.

La situation financière de l'UQAM (suite)

M. Lalonde: M. le Président, ce n'est pas une question additionnelle. Étant donné que le ministre de l'Éducation vient de nous rejoindre, j'aimerais rappeler la question que j'avais adressée au premier ministre. J'aimerais la reformuler, M. le Président. On sait ce que les promesses du ministre valent, étant donné qu'il a été rabroué sévèrement par le Conseil de presse pour avoir trompé la population en ce qui concerne sa promesse de l'âge d'admission à l'école. Mais, dans le cas de l'UQAM, il y avait eu promesse des fonctionnaires d'injecter 3 000 000 $ pour permettre à l'UQAM de passer à travers. Comme c'était une promesse de fonctionnaires, on espérait que celle-là serait respectée. J'aimerais demander au ministre ce qu'il va faire pour s'assurer que la vie, que la croissance de l'UQAM ne sera pas empêchée par les politiques de financement du gouvernement actuel.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Laurin: M. le Président, l'Université du Québec est dans une situation particulière, en ce sens qu'une grande partie de sa clientèle est une clientèle adulte et des adultes à temps partiel. Ceci peut expliquer pourquoi elle est en croissance de clientèle d'une façon aussi considérable. Par ailleurs, c'est aussi une université qui partage les caractéristiques des autres universités québécoises et, en ce sens, j'aimerais bien rappeler ici que le gouvernement du Québec, depuis plusieurs années, fournit un effort financier beaucoup plus considérable que ses voisins et même les États américains, pour le financement de ses universités. C'est près de 18% plus que l'Ontario, et on le comprend facilement lorsqu'on compare la charge de cours des professeurs au Québec avec celle des voisins, la taille des groupes-cours, lorsqu'on compare aussi la rémunération des professeurs par rapport à celle de nos voisins et celle des États américains.

Nous nous posons la question à savoir si la collectivité québécoise entend continuer à accorder à ses universités autant d'efforts financiers que ce qu'elle a fait dans le passé. Pour ma part je serais enclin à répondre oui, mais à la condition que nous rentabilisions davantage nos investissements, eu égard à la fidélité à l'idéal d'accessibilité et de démocratisation que nous avons toujours eu, mais cela implique des réaménagements qui font justement l'objet des ateliers que nous tenons à l'heure actuelle.

En ce qui concerne la situation particulière de l'Université du Québec à Montréal, nous lui avons donc demandé, comme aux autres universités, un plan d'équilibre, un plan de redressement, pour les prochaines années. L'UQAM a présenté ce plan d'équilibre et de redressement au conseil d'administration de l'Université du Québec, mais ce plan d'équilibre et de redressement ne m'a pas encore été transmis. Aujourd'hui même, les autorités de l'Université du Québec rencontrent les fonctionnaires, les officiers supérieurs du ministère de l'Éducation pour étudier en détail toutes ces questions et, en particulier, le financement des nouvelles clientèles pour lequel nous avons fait des efforts considérables au cours des dernières années. Il semble, cependant, que ces améliorations que nous avons apportées ne sont pas encore adéquates pour le financement complet de ces nouvelles clientèles. (10 h 30)

À la suite de cette rencontre qui a lieu ce matin, je crois que je serai en mesure de pouvoir enfin travailler d'une façon pratique, concrète, à une nouvelle proposition de financement des nouvelles clientèles, de même que de redressement financier de l'Université du Québec. Je crois être en mesure d'apporter une nouvelle proposition

d'ici deux semaines.

Pour répondre maintenant à la question plus particulière du député de Marguerite-Bourgeoys...

Des voix: Ah!

M. Laurin: ... en ce qui concerne la promesse qui a été faite, effectivement, j'ai fait dire à l'Université du Québec que le ministère de l'Éducation était prêt à faire des efforts particuliers pour l'amener à régler son problème, précisément du fait que c'est une université populaire qui remplit un rôle que ne remplissent pas, actuellement, d'autres universités au Québec. Mais vous comprendrez qu'avant de consentir cet effort financier additionnel nous voulions procéder à cette évaluation rigoureuse de la situation actuelle en regard de nos contraintes financières. C'est à la suite de cette analyse rigoureuse et de cette discussion de diverses hypothèses que le ministère de l'Éducation sera prêt à faire l'effort financier nécessaire pour que l'Université du Québec à Montréal continue d'assumer son rôle essentiel pour la collectivité québécoise. Il n'y a personne plus que moi qui puisse s'en réjouir.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Pour rendre cela digestible à tout le monde, est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il est exact qu'à sa demande des fonctionnaires du ministère de l'Éducation ont fait une promesse d'injecter non pas des grands mots, des discours, mais 3 000 000 $? Est-ce vrai que cela a été promis à l'UQAM qui, elle, l'a intégré à son plan de financement qui a été refusé par le conseil de l'Université du Québec justement parce que cette promesse ne semblait pas assez solide comme, souvent, les promesses du ministre de l'Éducation sont un peu fragiles?

Le Président: M. le ministre.

M. Laurin: Nous avons promis à l'Université du Québec à Montréal le support nécessaire, aux conditions que je viens d'énoncer, et ce support arrivera très bientôt.

M. Lalonde: Combien, M. le Président? Écoutez, il y a des gens qui sont inquiets.

M. Laurin: Combien? Le montant dépend des discussions que nous avons actuellement et qui sera nécessaire pour couvrir les besoins de l'Université du Québec à Montréal.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question additionnelle. Est-ce qu'il a été question d'un chiffre de 3 000 000 $?

M. Laurin: II a été question de quelques millions, mais le montant exact sera déterminé en fonction des analyses que nous menons et de l'étude de diverses hypothèses qui feront l'objet de discussions au cours des prochains jours.

Le Président: Merci. Question principale. M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Le ministre des Finances était ici tantôt. Est-ce qu'il est tout proche? Le voici.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

Caisses d'entraide économique et Mouvement Desjardins

M. Ryan: Le gouvernement a déposé hier un projet de loi sur le réaménagement des caisses d'entraide économique. On sait que le gouvernement, dans ce dossier, jusqu'à l'intérêt plutôt récent du ministre des Finances pour ce mouvement, a fait montre d'une négligence extrêmement répréhensible. Il était au courant des dangers qui planaient sur le mouvement depuis au moins trois ans et a commencé à agir quand la crise s'est déclenchée, au mois de mai dernier. Au cours des derniers mois, on avait entendu dire que l'on recherchait une solution du côté du Mouvement des caisses populaires Desjardins. La solution que le ministre propose, avec le projet de loi no 40, ne tient pas du tout compte des caisses populaires Desjardins. Je voudrais demander au ministre, ce matin: Qu'est-ce qui s'est passé avec le Mouvement des caisses populaires Desjardins, quelles sortes de discussions ont eu lieu, où en sont les conversations actuellement? Le ministre a-t-il conclu qu'il n'y a rien à faire avec les caisses populaires Desjardins dans ce dossier et envisage-t-il, éventuellement, d'étendre aux caisses populaires les mêmes avantages que ceux qu'il est en train de proposer pour les caisses d'entraide économique?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, à l'éqard d'une question aussi importante que celle-là, je suis un peu navré que le chef de l'Opposition officielle - comment dire? - y mette une touche qu'on me permettra de dire un peu partisane, à mon sens. Non, on devra simplement reconnaître une chose, c'est qu'au moment ou dès que j'ai été nommé ministre des Institutions financières, j'ai eu ce dossier de façon immédiate et, à toutes fins utiles, je dirais qu'une bonne

partie de mon travail à ce ministère, depuis que j'y suis, est consacrée justement aux caisses d'entraide.

Mais pour revenir à la question que le chef de l'Opposition posait, il y a au moins deux démarches à envisager. La première consiste à donner l'assise juridique au plan de relance que la nouvelle équipe de dirigeants des caisses d'entraide a mis au point. Il y a eu un plan de relance, il a été examiné et proposé par une équipe tout à fait nouvelle de dirigeants des caisses d'entraide et, pour que ce plan de relance puisse fonctionner, il faut évidemment des changements dans la structure juridique des caisses d'entraide et il faut, d'autre part, un certain nombre d'avantages de caractère fiscal sur lequel le gouvernement, d'ailleurs, s'était déjà engagé depuis le mois d'août. Ce que j'ai déposé hier à l'Assemblée nationale, c'est en somme l'assise juridique qui permet au plan de relance, à ce que l'on appelle communément maintenant le plan Dugal de fonctionner. Les membres de chaque caisse d'entraide - il faut bien comprendre le sens de l'opération - à l'occasion des assemblées du 30 janvier vont avoir à déterminer si le plan de relance, appuyé sur la loi que j'ai déposée hier, est intéressant pour eux ou pas. Chaque caisse pourra en décider.

Parallèlement à cette opération, les caisses populaires, le Mouvement Desjardins s'intéresse depuis déjà passablement de temps à une formule qui pourrait être une solution et on n'a pas, bien sûr, à décourager une initiative comme celle-là. J'imagine que cela peut être intéressant pour les membres de chaque caisse d'entraide d'avoir un choix et ce ne serait pas du tout anormal ou aberrant qu'il en soit ainsi.

Dans nos discussions avec le Mouvement Desjardins, nous en sommes, au fond, à peu près à ceci. Je résume brièvement, mais je pense ne pas trahir l'essentiel en disant ceci: Le Mouvement Desjardins semblerait disposé à absorber les caisses d'entraide, à faire une proposition à l'ensemble des caisses d'entraide, mais à les absorber une à une dans chacune des unions régionales et à les transformer, en somme, en caisses populaires. Pour cela, le Mouvement Desjardins demande un certain nombre de garanties d'ordre financier au cas où, dans une caisse ou dans une autre, la valeur des prêts de l'actif masquerait des pertes possiblement plus élevées que celles que l'on envisage à l'heure actuelle. Ce n'est pas, en soi, une demande déraisonnable.

D'autre part, cependant, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire à cette Chambre il y a déjà quelques mois, les caisses d'entraide ont joué et peuvent jouer un rôle important sur le plan du crédit industriel et commercial à la petite et à la moyenne entreprise, surtout en région, pas tellement dans la ville de Montréal ou dans la ville de

Québec, mais dans les régions. Cela a toujours été, depuis plusieurs années, très important. Il s'agit de savoir dans quelle mesure le Mouvement Desjardins, tout en absorbant les caisses d'entraide, peut leur garder une certaine spécificité sur le plan du crédit industriel et commercial. Nous en sommes là. (10 h 40)

II y a eu plusieurs conversations entre le Mouvement Desjardins et moi à ce sujet. Ils en ont eu d'ailleurs entre eux, les dirigeants du Mouvement Desjardins. Je les ai vus, je pense, la semaine dernière, enfin, il y a sept ou huit jours. Je dois les revoir à nouveau. Encore une fois, il faut bien comprendre qu'il n'est pas question de donner au Mouvement Desjardins - comment dire? -les mêmes avantages fiscaux puisque cela ne se présente pas du tout de la même façon. Ce n'est pas le même genre de capitalisation. D'ailleurs, il n'a jamais demandé, dans le cas où il ferait une proposition d'absorption des caisses d'entraide, les mêmes avantages fiscaux. Il demande certaines garanties de type financier.

Je n'ai aucune espèce d'objection à poursuivre les tractations avec le Mouvement Desjardins. C'est ce que je fais, d'ailleurs. On essaie de le faire dans des conditions aussi raisonnables que possible et, encore une fois, le texte de loi que j'ai présenté hier n'est en aucune façon coercitif. Cela n'oblige pas une caisse d'entraide à se transformer, mais, si une caisse d'entraide le veut, sur cette base juridique, elle peut le faire.

D'autre part, s'il y a une proposition du Mouvement Desjardins que les membres de telle ou telle caisse d'entraide ou de toutes trouvent plus satisfaisante, ce serait normal qu'ils aient le choix.

À cet égard, le gouvernement cherche essentiellement, avec les intéressés, à trouver un moyen qui permette, sous une forme ou sous une autre, de consolider et de relancer les caisses d'entraide.

Le Président: Question additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Tout d'abord une sous-question relative à un reproche que le ministre m'adressait. Il m'a reproché d'avoir injecté une certaine note de partisanerie dans le débat. Je vais lui demander, au niveau des faits, s'il est vrai que le gouvernement avait dans ses tiroirs, depuis le début de l'année 1978, un rapport qui le prévenait presque en toutes lettres de tous les dangers qui allaient se manifester trois ans plus tard et que rien n'a été fait pendant ce temps-là? Est-ce que c'est vrai ou faux?

Je sais que le ministre a été nommé responsable des institutions financières il y a

quelques mois seulement et il s'est occupé activement du dossier depuis, mais il faisait partie du gouvernement avant ça aussi. Je voudrais qu'il nous dise franchement si j'ai exagéré en disant qu'il y avait un rapport très substantiel à la disposition du ministre responsable et du gouvernement et que la Chambre ici n'en a jamais été informée non plus que le public. Ce rapport contenait à peu près tout le diagnostic qu'on pouvait désirer et de très bonnes recommandations.

Deuxièmement, je lui demande très brièvement s'il considère - j'ai vu qu'il avait l'esprit ouvert de ce côté-là, j'en suis très heureux - qu'une forme ou une autre de participation du Mouvement Desjardins à la solution du problème des caisses d'entraide économique ne pourrait pas être avantageuse en raison des ramifications extraordinaires du Mouvement Desjardins, de la solidité financière de cette institution, qui pourrait être extrêmement utile, en vue de faire face aux nouveaux problèmes qui pourront se présenter pour les caisses. Je crois comprendre qu'il n'a pas exclu cette possibilité et que la situation de privilégier le projet de loi ne ferme pas nécessairement la porte à de nouvelles démarches en vue de trouver des modes d'intégration éventuelle.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Je pense qu'effectivement, le chef de l'Opposition officielle vient assez bien de résumer ma position dans ce dossier, sauf peut-être quant à dire ceci: Pour n'importe quel type d'institution financière, il y a deux objectifs, l'un, c'est la protection de l'épargnant; l'autre, c'est l'ajout ou l'appoint au développement économique. Autant que faire se peut, il faut essayer de préserver ces deux objectifs, c'est-à-dire assurer la protection de l'épargnant et, d'autre part, essayer de faire en sorte que les caisses d'entraide continuent de jouer dans le domaine du prêt industriel et commercial le rôle qu'elles jouaient jusqu'à maintenant.

Il est évident que le plan de relance des caisses d'entraide met davantage l'accent sur les deux objectifs. Il est clair que la démarche du Mouvement Desjardins met davantage l'accent sur un objectif. Cela n'en rend pas ses propositions mauvaises pour ça. Il faut, encore une fois, rester aussi ouvert que possible. Je pense, encore une fois, qu'il ne serait pas mauvais que les membres des caisses d'entraide, après tout, on ne parle pas seulement ici des institutions, ce sont des individus, il y a presque 400 000 personnes qui sont impliquées dans cette affaire. Il est très important qu'elles puissent examiner rationnellement des options et se décider le mieux possible. C'est, je pense, essentiellement le sens de l'action que je cherche à mener. Maintenant, quant aux documents, au rapport dont a été saisi le ministère des Institutions financières dans le passé à ce sujet, je reconnais volontiers ce que dit le chef de l'Opposition. Je reconnais aussi, cependant, qu'il y a eu rapports et contre-rapports, il y a eu beaucoup de papiers, dans un sens ou dans l'autre, qui se sont accumulés au fil des années. J'ai eu l'occasion d'expliquer en Chambre ce que je pensais de ce nouvel emploi dont j'ai hérité et les contraintes que représente pour un ministère d'avoir eu, je crois - je ne me souviens plus très bien du chiffre que j'ai cité à l'Assemblée nationale - onze titulaires en quatorze ans. Cela ne simplifie pas les choses. L'important, c'est de prendre les dossiers au point où ils en sont et de chercher à régler les problèmes le plus rapidement possible. C'est ce à quoi je m'occupe actuellement.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question additionnelle.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, question additionnelle.

M. Lalonde: On sait que la Commission des valeurs mobilières a accumulé un certain nombre de connaissances dans ce dossier et le rapport de 1978, justement, émanait de la Commission des valeurs mobilières. Est-ce que le ministre peut nous assurer qu'il communiquera, s'il en existe, les recommandations... Je devrais commencer par une autre question: Est-ce que le ministre a consulté la Commission des valeurs mobilières sur l'à-propos des dispositions de son projet de loi? Est-ce qu'il peut nous promettre de communiquer à la Chambre, avant l'étude de ce projet de loi, les recommandations de la Commission des valeurs mobilières à ce propos?

Le Président: M. le ministre.

M. Parizeau: Je dois rencontrer le président de la Commission des valeurs mobilières, cette semaine, sur une certain nombre de sujets, dont celui-là. Je pense que ça ne créera aucune espèce de difficulté, quand nous passerons en commission, d'indiquer le point de vue de la Commission des valeurs mobilières à cet effet. Cela me semblerait une démarche tout à fait raisonnable.

M. Gratton: Question principale.

Le Président: Question principale, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Merci, M. le Président.

Le Président: Par la suite, M. le député

de Richelieu, en espérant que vous soyez plus rapide.

Difficultés financières de Camp Gatineau Inc.

M. Gratton: Comme preuve, M. le Président, que la vitesse ne tue pas toujours. Ma question aurait été adressée au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, mais je ne sais pas s'il est revenu d'Haïti. En tout cas, je souhaite vivement qu'il n'y soit pas retenu ou détenu trop longtemps. En son absence, j'adresserai ma question au ministre responsable de l'OPDQ, que ce soit le ministre d'État à l'Aménagement ou le ministre d'État au Développement économique. C'est au sujet du Camp Gatineau Inc., cette colonie de vacances pour personnes handicapées située dans l'Outaouais qui accueille chaque année pas moins de 1200 handicapés de toutes les régions du Québec et qui est menacée de mettre fin à ses activités à compter du 31 décembre si elle n'obtient pas une aide financière substantielle qu'elle a demandée depuis longtemps au gouvernement du Québec à même l'entente fédérale-provinciale sur le développement touristique.

En février dernier, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche s'était engagé à négocier avec le ministère de l'Expansion économique régionale fédéral une enveloppe pour fournir une aide financière de l'ordre de 450 000 $ pour éviter, justement, que cette colonie de vacances ne ferme ses portes. Or, je suis informé, ce matin, que deux des quatre employés permanents du Camp Gatineau ont dû être mis à pied aujourd'hui. Je suis informé également que, faute d'un engagement ou d'une assurance quelconque de la part du gouvernement du Québec, le conseil d'administration maintient sa décision et se voit dans l'obligation de mettre fin à ses activités à compter du 31 décembre.

Ma question est donc la suivante: Quand le gouvernement pourra-t-il indiquer au conseil d'administration ce qu'il entend faire pour tâcher de maintenir cette colonie de vacances ouverte, compte tenu de l'engagement du ministre responsable du MEER, M. De Bané, qui s'est dit tout à fait disposé que le Québec puise, à même l'entente qui existe déjà, les fonds nécessaires à partir d'un projet qui n'est pas encore amorcé?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Aménagement. (10 h 50)

M. Gendron: M. le Président, je voudrais d'abord rappeler au député de

Gatineau, aux collègues de cette Chambre ainsi qu'à la population en général que le ministre d'État à l'Aménagement, actuellement, est responsable du fonds de développement régional, mais n'est pas le répondant de l'OPDQ. Je suis obligé de mentionner au député de Gatineau que je pourrais prendre avis de la question et faire des vérifications en l'absence du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, parce que le dossier dont vous parlez est la responsabilité du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui devait faire des ententes, comme vous l'avez mentionné, par rapport à l'entente auxiliaire concernant les infrastructures touristiques. Je vais prendre avis de la question et cela me fera plaisir demain de donner une réponse précise à votre question précise: Qu'en est-il exactement?

Le Président: Question principale.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Très brièvement. J'accepte volontiers la réponse du ministre. J'aurais souhaité que le premier ministre, responsable de l'OPDQ... Mais je conviens qu'il ne peut pas être au courant de tous ces détails, quoiqu'il s'agisse d'un débat quand même important en cette année internationale des handicapés.

J'aimerais simplement demander au ministre d'État à l'Aménagement qui prend avis de la question de prendre avis également du contenu d'une lettre, dont je lui remettrai copie après la période des questions, signée par M. De Bané, ministre responsable du MEER, et qui se lit partiellement comme suit. Il écrit au président de la Corporation du Camp Gatineau: "Vous comprendrez mon étonnement alors que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche souhaite voir l'inscription de ce projet à l'entente. Devant cet état de fait et compte tenu de la nature de cette initiative, j'accepterais volontiers de substituer un projet déjà inscrit à l'entente, mais non amorcé, en faveur de celui du Camp Gatineau."

Je demande donc au ministre de faire diligence pour qu'on donne à Camp Gatineau, au conseil d'administration, l'assurance qu'ils pourront continuer leurs activités une fois que la négociation aura été terminée. Je demande également, M. le Président, au ministre de prendre note du fait que, dans les circonstances actuelles, sans aucun engagement de personne, le conseil d'administration n'est même pas habilité à faire les emprunts nécessaires pour maintenir ses dépenses d'opération courantes. Donc, il y a extrême urgence.

M. Martel: M. le Président.

Le Président: Question principale, M. le député de Richelieu.

Projet d'usine Renault au Québec

M. Martel: Le député de Richelieu, de ce temps-ci, n'est pas tellement heureux des problèmes de bateaux. Ma question portera sur les autos et elle s'adresse au ministre d'État au Développement économique de même qu'au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Elle a trait aux dizaines de millions de dollars que s'apprête à investir la société Renault au Canada dans la construction d'usines d'assemblage d'automobiles et également de fabrication de pièces de ces automobiles.

J'aimerais demander à mes collègues, dans un premier temps, quelles sont les mesures qui ont été prises jusqu'à maintenant pour que le Québec ait sa part et contrebalance un peu les pertes subies à la suite de la décision arbitraire du gouvernement fédéral lorsqu'on a vu Volkswagen s'établir en Ontario. À mon collègue, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, j'aimerais demander s'il entend mettre la Société générale de financement, c'est-à-dire sa principale filiale, Marine Industrie, dans le coup, à la suite de son programme donné par l'Assemblée nationale de diversifier sa production. Compte tenu du haut taux de chômage que nous connaissons dans la région du Richelieu, je pense que Marine Industrie sera en mesure de mettre ses investissements en application. Aussi, par le fait même, nous avons vu, depuis quelques semaines, qu'il y a des gens à Montréal qui cherchent une fabrique pour faire ce prototype de taxi qui s'appelle le CSM, qui semble être un taxi révolutionnaire, voué à un marché des plus intéressants en Amérique du Nord.

Le Présidents M. le ministre d'État au Développement économique.

M. Landry: M. le Président, en plus de ce qu'a dit le député, un des fondements du dossier québécois dans cette affaire d'implication de la régie Renault, c'est que le marché du Québec a toujours absorbé autour de 70% des véhicules Renault vendus sur le marché canadien, ce qui est une incitation purement économique à la régie Renault de considérer l'espace québécois comme lieu de fabrication des véhicules.

Cependant, ce n'est pas encore en ces termes-là que cela se présente. La régie Renault, comme chacun le sait, a acquis le constructeur américain American Motors, qui possède déjà ses installations aux États-Unis, bien sûr, et en Ontario pour quelques ateliers. Ce qu'il s'agit de savoir maintenant, c'est le contenu québécois que donnera la régie Renault aux véhicules qu'elle fabriquera en Amérique du Nord, dans l'état actuel des informations, ni au Québec, ni dans le reste du Canada, mais aux États-Unis. De ce point de vue, sans pouvoir faire d'annonce formelle, les nouvelles sont relativement bonnes. D'abord, depuis des mois, avec l'ancien gouvernement français comme avec le nouveau, au niveau ministériel comme au niveau des fonctionnaires, les contacts du Québec ont été très bien établis. J'ai moi-même rencontré les autorités supérieures de la régie Renault en décembre 1980, de même que le ministre de l'Industrie et de l'Économie en France à l'époque, M. Monory, et nous les avons sensibilisés vigoureusement, si je puis dire, au problème.

Au changement de gouvernement, lors de la visite au Québec de M. Rocard, le sujet de la régie Renault a été inscrit en tête de liste de nos entretiens et, la semaine dernière, le secrétaire général associé du gouvernement au Développement économique, mon sous-ministre, en fait, M. Jean Vézina, était en France, au siège social de la régie Renault, et c'est de l'ensemble de ces informations, plus le travail fait par le ministère de l'Industrie et du Commerce et son sous-ministre, qui a rencontré régulièrement les autorités de la régie, que je tire ces nouvelles relativement optimistes quant à un contenu québécois important intégré à un véhicule Renault fabriqué en Amérique du Nord.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de...

M. Biron: ... complément de réponse.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: Le député de Richelieu avait demandé aussi si la Société générale de financement ou Marine Industrie pouvait être intéressée à s'associer à Renault ou tout autre fabricant d'automobiles. La réponse, bien sûr, M. le Président, c'est oui. Nous voulons nous associer à l'entreprise privée partout ou c'est possible, afin de créer de nouveaux emplois au Québec parce qu'on s'aperçoit, dans le fond, que pour développer notre entreprise chez nous, développer nos emplois, il ne faut pas trop compter sur le gouvernement fédéral de ce temps-là, il faut surtout compter sur nos propres moyens.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je pense que cela s'adresse au ministre d'État au Développement économique. Dans un article paru récemment dans la Presse au sujet de Renault, on disait

que d'après Renault le coût et de l'installation et de l'opération ici au Québec, s'ils décidaient d'y installer leurs usines de pièces de rechange, serait sensiblement plus élevé que s'ils décidaient de les installer ailleurs. Ils parlaient de quelques millions de dollars. Je demande au ministre si la compagnie lui a expliqué la nature de ces excédents de coûts pour cette compagnie qui est intéressée à s'installer ici et, si oui, est-ce vrai que les coûts sont plus élevés pour un investissement de cette nature? Si c'est le cas, quelle est la nature de ces coûts plus élevés ici, au Québec, qu'ailleurs?

Le Président: M. le ministre d'État au Développement économique.

M. Landry: C'est très simple, M. le Président. La question du député est bien posée. La différence de coûts vient du fait qu'ailleurs ils y sont déjà. Renault a acquis American Motors et American Motors possède déjà des ateliers de montage et de fabrication de pièces soit en Ontario, soit aux États-Unis. Comme, à cause de la crise de l'automobile nord-américaine, les surfaces de montage d'American Motors sont en grande partie inemployées, cela coûte moins cher d'utiliser une usine déjà en place que d'en construire une à partir de zéro. Je pense que c'est l'essence même de la différence de coûts dont parle le député.

Cependant, ce à quoi j'ai fait allusion dans ce que j'appelle les nouvelles intéressantes, ce n'est pas l'ouverture au Québec d'une usine de montage d'automobiles, c'est l'ouverture au Québec d'une usine de pièces d'un type nouveau, donc, qui ne sont pas fabriquées ailleurs. Là, la différence de coûts dont il parle n'existe pas. Au contraire, il y aurait plutôt une différence en faveur du Québec parce qu'il s'agirait de pièces en aluminium et, pour aller un peu plus loin dans le raisonnement, greffé sur une autre implantation française sur laquelle nous comptons et pour laquelle les nouvelles sont également bonnes, qui est dans l'aluminium.

Le Président: Fin de la période des questions.

Complément de réponse de la part du ministre des Affaires sociales à Mme la députée de L'Acadie. (11 heures)

Négociations avec les médecins omnipraticiens

M. Johnson (Anjou): M. le Président, pour revenir à une question qui était posée hier par la députée de L'Acadie au sujet des négociations et qui demandait des réponses précises sur ces négociations, les voici. D'abord, j'ai rencontré les présidents des deux fédérations dans les semaines qui ont suivi ma nomination au mois de mai. Par la suite, dans le cas des omnipraticiens, parce que je pense qu'il y a une distinction extrêmement importante à faire entre les spécialistes et les omnipraticiens dans ce dossier - la Fédération des médecins omnipraticiens voulait d'abord traiter de certains problèmes avant d'engager des discussions sur l'ensemble. C'est ce que la fédération nous a fait savoir, notamment la psychiatrie à Sainte-Croix de Drummondville, les urgences à Montréal, les omnipraticiens pratiquant l'anesthésie en régions éloignées et les omnipraticiens, de façon générale, en régions éloignées.

Or, deux de ces dossiers ont été réglés pendant l'été; quant au troisième, nous avons transmis des offres au syndicat, mais, jusqu'à maintenant, il n'a pas répondu de façon favorable aux offres que nous lui avons faites. Quant au dernier dossier, qui touche toute la question de la répartition des médecins sur le territoire, comme on le sait, le projet de loi contient certaines dispositions, les autres restant à négocier dans le cadre de l'entente à renouveler.

Par ailleurs, le 19 août 1981, j'ai rencontré, en compagnie du négociateur gouvernemental, M. Lucien Bouchard, et du sous-ministre responsable des relations de travail au ministère, l'exécutif de la fédération. C'était quelques jours avant le départ du Dr Hamel et le Dr Czitrom, qui est le président par intérim du syndicat, était présent à la réunion. Nous avons échangé sur la perspective d'une négociation qui n'aurait lieu qu'à l'automne et ils savaient - ils n'ont pas à être surpris de cela - que la négociation ne serait prête que pour l'automne. On leur en a parlé, je leur ai même dit à ce moment-là, d'ailleurs, qu'ils ne devaient pas compter sur cette négociation pour s'assurer d'une garantie absolue du maintien de leur pouvoir d'achat.

Le 21 août, il y a eu, comme le 4, le 21, le 22 et le 27 octobre, des réunions touchant les urgences à Montréal. Le 21 août également, le 15 septembre, le 18 septembre, le 27 octobre et le 19 novembre, il y a eu des réunions concernant les omnipraticiens anesthésistes, à la demande même du syndicat. Le 29 octobre, M. Lucien Bouchard, responsable de la négociation, en compagnie du sous-ministre aux relations de travail et du représentant du ministre des Affaires sociales à la table, a rencontré les représentants de la FMOQ pour discuter de l'ensemble du dossier.

Par ailleurs, le 19 novembre, comme on le sait, j'ai déposé le projet de loi et, ce jour-là, j'ai communiqué avec les présidents des différents syndicats impliqués ainsi que des différents ordres professionnels impliqués et d'autres groupes.

Finalement, je voudrais apporter une

précision quant à quelque chose que j'ai déclaré hier. Quand j'ai dit que le syndicat avait déposé une brique, la FMOQ a déposé une brique en septembre 1979. Or, après cette date, la FMOQ a accepté le renouvellement d'une entente pour un an en acceptant de toucher seulement les tarifs et la dimension pécuniaire. Comme il s'agit de montants de l'ordre d'environ 350 000 000 $ et de santé publique, nous serons prêts et nous continuons d'être prêts à négocier avec le Syndicat des omnipraticiens, mais peut-être faudrait-il qu'il revoie les documents qu'il a déposés en 1979. Je présume qu'il a préparé des mises à jour, étant donné que, de leur côté, les spécialistes, eux, déposent régulièrement, depuis un certain nombre de semaines, des documents qui sont des mises à jour de documents antérieurs ou de nouvelles demandes syndicales.

Le Président: Une très courte question additionnelle.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre a quand même pris au moins cinq ou six minutes pour sa réponse.

Le Président: C'est la tradition pour les compléments de réponse, une courte question additionnelle et une courte réponse également.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Il semble confirmer le fait que les seuls dossiers où on a négocié sont des dossiers très sectoriels. Dans le cas de la situation des urgences ou des ambulances, je pense que c'est à la demande du ministre et que, à ce moment-là, la FMOQ a accordé la collaboration à laquelle le ministre s'attendait puisque c'était un dossier très urgent et très chaud pour lui et on en est arrivé à une entente.

Ma question précise est celle-ci: Est-ce que, à ce moment-ci, le ministre peut nous dire si la FMOQ a été convoquée pour une négociation touchant le renouvellement général de son entente? Y a-t-il des rencontres de prévues ou, selon l'autre hypothèse, la FMOQ a-t-elle refusé de se rendre à des demandes de rencontres de négociation avec le ministère?

Le Président: M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): D'abord, sur le fait qu'il n'y ait eu que des discussions concernant ce qu'on appelle de petits dossiers ou des dossiers sectoriels, il faut bien comprendre que c'était un préalable syndical. Ce sont les syndicats qui nous ont demandé de disposer de ces sujets avant de discuter de l'entente générale. Nous avons voulu accepter cela.

Deuxièmement, je me suis entendu avec les présidents des syndicats de médecins pour que nous ne négociions pas le renouvellement général de l'entente durant l'été et ils étaient d'accord. Ils étaient avertis et nous avons dit: Nous en discuterons cet automne. Ils ont dit: Très bien, on comprend; vous venez d'arriver au ministère, mais il est peut-être normal que vous donniez des mandats, que vous exigiez des travaux particuliers et que vous fixiez des objectifs comme nouveau responsable de ce dossier dans le gouvernement. Ils ont accepté ça. Ils n'ont pas à jouer aux surpris et ils n'ont pas à déchirer leurs vêtements devant des assemblées syndicales dans les arénas. Ils le savaient.

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur une question de règlement.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai posé une question courte et précise au ministre. Est-ce que son ministère a convoqué - je ne parle pas de l'été, je le sais que vous vous étiez entendus, mais en septembre et en octobre - la FMOQ pour des rencontres de néqociations, est-ce que la FMOQ a refusé de se rendre à ces rencontres en vue de la discussion du renouvellement général de l'entente?

Le Président: M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): ... les dernières personnes qui ont annulé des rencontres, ce n'est pas nous, c'est le syndicat. Deuxièmement, avant le dépôt du projet de loi, le 19 - et je pense que la députée de L'Acadie, M. le Président, devra accepter, je présume, avec votre tolérance, que je relève les inexactitudes de ses préambules. Le 19, au moment du dépôt du projet de loi, j'ai communiqué par téléphone avec le Dr Desjardins, de la FMSQ, et le Dr Czitrom, président intérimaire de la FMOQ, les omnipraticiens. À ce moment, je les ai avertis que dès l'après-midi, au moment du dépôt du projet de loi, il y aurait des représentants du ministère des Affaires sociales qui leur donneraient les textes, qui leur fourniraient les pochettes et seraient prêts à répondre aux rencontres. Lors de cette réunion, M. Corbeil, mon représentant - si vous voulez me permettre de répondre, je comprends qu'on veut se faire les haut-parleurs du syndicat des médecins en face, mais il y a peut-être des limites - lors de cette rencontre, M. Corbeil, qui est le représentant à la table de la FMOQ, a assuré les représentants syndicaux des

omnipraticiens qu'il était prêt, une fois qu'ils auraient pris connaissance de ces documents, à discuter de tout sujet dont ils voudraient discuter. Et la prochaine réaction que nous avons eue, c'est le syndicat qui a émis un communiqué en disant qu'il ne retournerait pas à la table de négociations tant que nous ne retirerions pas le projet de loi.

Depuis ce temps, il organise des manifestations, il prépare des élections à la tête du syndicat. Je présume qu'après le 12 il fera autre chose que de marquer dans son bulletin: Contester d'abord, négocier ensuite. Ce n'est pas le gouvernement qui marque ça, ce sont les omnipraticiens. Contester d'abord, négocier ensuite, dans un bulletin paru au mois d'octobre. Je présume que quand le syndicat aura élu un président, un nouvel exécutif, le cas échéant, après le 12 décembre, quand il sera venu faire sa parade à la commission parlementaire ou à la porte de la commission parlementaire, on pourra s'asseoir. Nous, on est prêt à négocier. On attend qu'il nous suggère des textes.

M. Scowen: Question de règlement.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Ce matin, M. le Président, le ministre de l'Industrie et du Commerce a rendu publique une déclaration ministérielle qu'il n'a pas envoyée à nos bureaux à l'avance comme traditionnellement. J'ai deux petites questions...

Le Président: II n'y a pas eu de déclaration ministérielle, ce matin, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y a eu un dépôt de document. Non. Période des questions, demain matin, 10 heures.

Motions non annoncées.

Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Qu'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 11 h 09)

(Reprise de la séance à 11 h 15)

Mise aux voix des motions de sous-amendement et d'amendement

à la motion déterminant

les conditions sans lesquelles

le Québec ne peut accepter le projet

de rapatriement de la constitution

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Veuillez prendre vos sièges. À l'ordre! Nous allons donc procéder à la mise aux voix de la motion de sous-amendement de M. Levesque (Bonaventure) qui propose que la motion d'amendement soit amendée en retranchant tous les mots après le mot "femmes". Que ceux et celles qui sont pour cette motion de sous-amendement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): Je pense que, pour quelqu'un qui nous écoute à ce moment-ci, on ne sait pas du tout de quoi il s'agit. Je pense qu'il serait important de lire la motion d'amendement...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): ... et de lire la motion de sous-amendement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! La motion d'amendement se lisait comme suit; c'était la motion principale, une motion d'amendement de M. Dussault (Châteauguay) qui proposait que la motion en discussion soit amendée en insérant dans le paragraphe 3, entre le sous-paragraphe b et le sous-paragraphe c, le sous-paragraphe suivant qui se lisait: "L'égalité entre les hommes et les femmes, pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence." Donc, le but du sous-amendement est de faire disparaître tout ce qui se trouve après le mot "femmes".

Que ceux et celles qui sont pour le sous-amendement veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt, Mme Bacon, MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss, Dauphin, Hains.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Morin (Louis-Hébert), Laurin, Bérubé, Landry, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey...

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: ... MM. Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, Léger, Clair, Richard, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard,

Fréchette, Baril (Arthabaska), Mme Harel...

Des voix: Oh!

Le Secrétaire adjoint: ... MM. Ouellette, Proulx, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, de Belleval, Martel, Mme Juneau...

Des voix: Oh, c'est à son tour!

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: ... MM. Fallu, Grégoire, Bordeleau, Leduc, Marquis, Charbonneau, Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Champagne, Payne, Paré, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Dupré.

Le Secrétaire: Pour: 38

Contre: 70

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion rejetée. (11 h 20)

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Sur la motion d'amendement présentée par le député de Châteauguay, est-ce que je peux proposer le même vote, mais inversé?

Mise aux voix de la motion principale telle qu'amendée

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette proposition est adoptée? Adopté.

Nous allons la relire avec la motion principale.

Je relis la motion principale. Sur proposition de M. Lévesque (Taillon), "que l'Assemblée nationale du Québec, rappelant le droit du peuple québécois à disposer de lui-même et exerçant son droit historique à être partie prenante et à consentir à tout changement dans la constitution du Canada qui pourrait affecter les droits et les pouvoirs du Québec, déclare qu'elle ne peut accepter le projet de rapatriement de la constitution sauf si celui-ci rencontre les conditions suivantes: "1. On devra reconnaître que les deux peuples qui ont fondé le Canada sont foncièrement égaux et que le Québec forme à l'intérieur de l'ensemble fédéral canadien une société distincte par la langue, la culture, les institutions et qui possède tous les attributs d'une communauté nationale distincte; "2. Le mode d'amendement de la constitution: a) ou bien devra maintenir au Québec son droit de veto, b) ou bien sera celui qui a été convenu dans l'accord constitutionnel signé par le Québec le 16 avril 1981 et confirmant le droit du Québec de ne pas être assujetti à une modification qui diminuerait ses pouvoirs ou ses droits et de recevoir, le cas échéant, une compensation raisonnable et obligatoire; "3. Étant donné l'existence de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, la charte des droits inscrite dans la constitution canadienne ne devra inclure que: a) les droits démocratiques, b) l'usage du français et de l'anglais dans les institutions et les services du gouvernement fédéral, c) l'égalité - c'est l'amendement proposé - entre les hommes et les femmes, pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence d) les libertés fondamentales, pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence, e) les garanties quant à l'enseignement dans la langue des minorités anglaise ou française, pourvu que le Québec reste libre d'y adhérer volontairement, puisque sa compétence exclusive en cette matière doit demeurer totale et inaliénable et que la situation de sa minorité est déjà la plus privilégiée au Canada; "4. On donnera suite aux dispositions déjà prévues dans le projet du gouvernement fédéral concernant le droit des provinces à la péréquation et à un meilleur contrôle de leurs richesses naturelles."

Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Morin (Louis-Hébert), Laurin, Bérubé, Landry, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, Léger, Clair, Richard, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard, Fréchette, Baril (Arthabaska), Mme Harel, MM. Ouellette, Proulx, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, de Belleval, Martel, Mme Juneau, MM. Fallu, Grégoire, Bordeleau, Leduc, Marquis, Charbonneau, Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Champagne, Payne, Paré, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Dupré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss, Dauphin, Hains.

Le Secrétaire: Pour: 70 Contre: 38

Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion adoptée.

Avis à la Chambre, M. le leader.

Recours à l'article 34

M. Lalonde: M. le Président, en vertu de l'article 34...

Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 34, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: En vertu de l'article 34, M. le Président. Il s'agit du projet de loi sur l'Assemblée nationale. On sait qu'un avant-projet de loi avait été déposé il y a déjà un an et demi, il avait été étudié par une sous-commission de l'Assemblée nationale à deux reprises, des indications sérieuses avait été données ce projet de loi serait étudié pendant cette session. Je demanderais au leader s'il a l'intention d'inviter l'Assemblée nationale à étudier ce projet de loi sur l'Assemblée nationale bientôt, c'est-à-dire avant Noël. S'il y avait des difficultés concernant un chapitre ou l'autre, par exemple le salaire des députés ou des choses comme ça, serait-il possible de diviser le projet de loi pour que les dispositions qui sont prêtes à être soumises, surtout celles concernant la réforme de l'Assemblée nationale, pour permettre aux députés de travailler, soient étudiées le plus tôt possible?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: M. le Président, le préambule du député est exact, un avant-projet de loi a été soumis et étudié en sous-commission à deux reprises d'ailleurs et, à ce chapitre, on peut dire qu'une bonne partie du travail avait été fait, mais pas totalement, car, même dans les aspects du cadre juridique de l'Assemblée nationale, on s'est aperçu qu'au point de vue constitutionnel, par exemple, une bonne partie du travail restait à vérifier, puisqu'il s'agit de la loi constituante même de cette Assemblée.

Si le projet de loi n'a pas été déposé avant le 1er décembre, donc si nous ne visons pas à le voir adopté avant Noël, la raison fondamentale est la suivante: nous sommes à écrire un tout nouveau régime de retraite concernant les membres de cette Assemblée. Après avoir tenté vainement -c'est ce qui a expliqué le délai - de modifier, dans un sens ou dans l'autre, par une poignée ou par l'autre, le régime de retraite que connaissent les membres de cette Assemblée, le Conseil des ministres a pris la décision de récrire d'une manière tout à fait complète un régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale qu'on appellerait un régime 2.

La mise en place de ce régime, sa texture, je dirais, de même que le temps que ça prend à l'écrire sur le plan juridique, afin que tous et chacun des droits et privilèges de l'Assemblée y soient écrits sans aucune ambiguïté, tout cela fait que nous ne croyons pas être en mesure de le faire pour Noël; donc, nous profitons de l'ajournement d'après les Fêtes, de janvier et de février, pour rédiger cet aspect et le présenter dès la reprise de la session, après Noël.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon, en vertu de l'article 34.

M. Rivest: M. le Président, au sujet de la loi 22, Loi modifiant la Loi sur la fonction publique, qui a, d'après les notes explicatives, pour objet de fractionner l'unité de négociation des agents de la paix, est-ce l'intention du gouvernement de convoquer une commission parlementaire pour recevoir les différents groupes qui sont sans doute intéressés à se faire entendre avant l'adoption en deuxième lecture de ce projet de loi?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Non, M. le Président, ce n'est pas notre intention, parce que à moins de me tromper, et que le député me le prouve, je crois que la démonstration de la situation est amplement faite depuis plusieurs mois. Il n'y a guère de membres de l'Assemblée qui, s'ils s'en donnent la peine, n'ont pas à portée de la main une documentation émanant d'un groupe ou de l'autre de ceux qui sont en contestation actuellement, qui leur permettra de prendre une bonne décision en cette matière.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le

député de Berthier, en vertu de l'article 34.

M. Houde: M. le Président, si je me reporte au feuilleton d'aujourd'hui, à la lettre e), page 2, je lis: "Loi assurant la reprise des services de transport par traversier entre Sorel et Saint-Ignace." M. le leader du gouvernement, pourriez-vous me dire ce matin, à la suite de la déclaration faite en Chambre hier disant, et je cite: "La réalité est bien simple, nous espérons, encore à ce moment, ne pas avoir à le déposer du tout, ce qui veut dire le résultat concret d'une négociation qui a donné des signes encourageants..." Je parle toujours du cas des traversiers. Je voudrais, après les renseignements que j'ai pu obtenir ce matin, qu'à la suite de ce qui s'est dit hier, d'après le leader du gouvernement toujours... C'est qu'il n'y a eu aucune négociation hier, il n'y en a pas encore ce matin au moment où je parle. (11 h 30)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, j'aimerais que vous posiez votre question, en vertu de l'article 34.

M. Houde: Merci, M. le Président. M. le leader du gouvernement, qu'entendez-vous faire aujourd'hui, après six mois de grève bientôt dans ce fameux conflit? Assez, c'est assez!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Ce que nous entendons faire à la suite du bris de négociation, hier midi, de tout espoir de tentative de solution, nous allons écrire le projet de loi et le déposer demain matin.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laprairie, en vertu de l'article 34.

M. Saintonge: M. le leader, vous avez mentionné la semaine dernière que vous deviez produire, avant la fin de la semaine, le mandat confié au vérificateur concernant les fêtes nationales. Est-ce qu'on peut l'attendre incessamment de même que les rapports comptables pour la région de Montréal et celle du Saguenay-Lac-Saint-Jean?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: C'est vrai, M. le Président, que j'ai fait cette promesse aux députés. Le problème, c'est que mon collègue titulaire de ce ministère n'est pas présent. Je prends donc sur moi de lui fournir tous les documents disponibles demain matin.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je remercie le leader pour la réponse qu'il m'a donnée en ce qui concerne la Loi sur la Législature. J'ai été interrompu. Je voulais lui demander une autre précision. A-t-il considéré ou le gouvernement a-t-il considéré la possibilité d'aller de l'avant avec le reste du projet de loi, s'il est prêt, parce qu'il y a beaucoup de dispositions qui intéressent beaucoup les députés, quitte à suspendre la question des salaires ou des pensions? Je comprends le problème de rédaction que le leader nous décrivait, mais serait-il possible de déposer le plus tôt possible, avant l'ajournement de Noël, le reste du projet pour que l'Assemblée et la population puissent en être saisies, quitte à l'étudier un peu plus tard?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Vous me demandez à ce moment-là de revenir sur une préférence - je ne peux pas employer un autre mot - que j'ai déjà exprimée aux membres de la sous-commission, lorsque nous l'avons étudié, en ce sens que je souhaite faire de cette loi de l'Assemblée nationale, cette modernisation de la Loi sur la Législature, des droits et privilèges de l'Assemblée, de leurs indemnités et de leur régime de retraite, de notre pouvoir de convoquer des commissions parlementaires, etc., une espèce de charte de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire la véritable loi constituante. Lorsque quelqu'un ici au Québec ou ailleurs examinera le fonctionnement de cette Législature et voudra savoir comment fonctionne l'Assemblée nationale du Québec, ce sera un document auquel il pourra se référer.

Je comprends que le député de Marguerite-Bourgeoys nous dise: On pourrait faire tout un aspect de la question et le déposer d'une manière et garder le chapitre des indemnités et des régimes de retraite dans une autre loi, mais ma préférence encore à ce moment-ci, M. le Président, est de faire une seule et même loi avec l'ensemble de cette disposition.

Je croyais d'ailleurs, M. le Président, au moment où j'avais exprimé cette préférence à la table de la sous-commission, avoir rejoint l'opinion de plus d'un membre, y compris de ceux de l'autre côté de l'Assemblée, ce qui fait que je ne vois pas l'opportunité de changer d'opinion à ce moment-ci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avis à la Chambre.

M. le leader.

Avis à la Chambre

M. Charron: Je voudrais indiquer à l'Assemblée que nous appelons aujourd'hui le projet de loi no 16 qui concerne Hydro-Québec. C'est un débat sur lequel nos amis ont déjà télégraphié leur impatience d'intervenir et qu'ils souhaitent faire selon les droits et privilèges qui sont les leurs et que je respecte. Je me dois quand même d'indiquer à ce moment-ci que, dès que ce projet de loi sera adopté en deuxième lecture et aura été envoyé en commission parlementaire pour son étude article par article, nous avons l'intention d'appeler les projets de loi qui sont à l'article 7 et à l'article 17 du feuilleton d'aujourd'hui et qui sont au nom du ministre des Affaires municipales.

Or, quel que soit le moment où interviendra cette deuxième lecture, ce sont les deux projets de loi qui suivront et j'inciterais l'Opposition et les députés ministériels qui veulent intervenir sur les projets de loi de nature municipale à se préparer, puisque ce sont les prochains à venir.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, puis-je demander au leader parlementaire du gouvernement s'il a mis de côté l'étude du projet de loi auquel se référait tout à l'heure le député de Berthier, parce que apparemment il y avait urgence. Est-ce que ça devra attendre?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Je ne peux indiquer maintenant, M. le Président, le moment où j'appellerai la loi sur la traverse Sorel-Berthier que je déposerai demain, qui est à mon nom, pour une excellente raison qui est d'intérêt public et que je m'empresse d'expliquer à l'Assemblée en espérant avoir son approbation. Il est possible que le dépôt du projet de loi, donc de la prise de connaissance du contenu de cette loi, ait un effet sur les négociations et j'indique tout de suite qu'en déposant demain le projet de loi je n'entends pas, du même coup, invoquer la suspension des travaux réguliers de l'Assemblée. Évidemment, je ne le déposerai pas pour le laisser au feuilleton pendant trois semaines. Je vous donne tout de suite cette assurance, mais il me semble que le dépôt du projet de loi justifierait une attente de 24 heures pour voir si la connaissance de ce projet de loi a un effet. Si elle n'en n'a pas, je crois que nous devrons nous résigner à intervenir d'une manière que prescrit notre règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Alors, je vous prierais d'appeler l'article 9, M. le Président.

Projet de loi no 16

Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture du projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, nous entamons ce matin le débat de deuxième lecture du premier projet de loi à l'ordre du jour de notre régime sessionnel du mois de décembre. Je voudrais dire au départ que j'éprouve une certaine fierté, une fierté que je crois partagée par beaucoup des citoyens de mon comté et de ma région, que ce soit un député de Shawinigan qui aujourd'hui s'occupe d'Hydro-Québec et qui s'occupe éqalement, à cette Assemblée nationale, de piloter un des projets de loi les plus importants pour ce qui est du présent et de l'avenir d'Hydro-Québec.

Ce projet de loi couvre essentiellement cinq aspects de la Société Hydro-Québec: d'abord, une nouvelle structure financière; deuxièmement, la fin d'un régime d'exemption fiscale; troisièmement, l'établissement d'une politique de dividendes; quatrièmement, un changement dans l'établissement des politiques tarifaires d'Hydro-Québec et, enfin, la possibilité pour Hydro-Québec non seulement d'aider, mais de financer les programmes d'économie d'énergie.

Vous allez me permettre, M. le Président, de faire un bref historique et de nous rappeler qu'Hydro-Québec, durant les vingt dernières années, a subi un changement considérable dans sa taille, en particulier, dans l'ampleur de ses actifs, dans l'ampleur de ses investissements. En regardant ce qu'est devenue Hydro-Québec aujourd'hui, il faut bien s'arrêter et constater, ce que les Québécois ont acquis, pour un versement de 300 000 000 $ et une dette obligataire d'à peu près 300 000 000 $, par l'achat de sept compagnies privées. Depuis 1963, HydroQuébec est devenue, après presque vingt ans, la plus grande corporation de tout le Canada; Elle est également devenue la plus importante compagnie de services publics non seulement du Canada, mais de tout le continent nord-américain.

Sur une échelle internationale, HydroQuébec, en termes de capacité d'emprunt, est devenue énorme, c'est aujourd'hui le quatrième plus gros emprunteur du monde entier, c'est-à-dire après le Fonds monétaire

international, après la Bangue mondiale et après le gouvernement de la Suède.

C'est donc dire que ce que d'aucuns, il y a 20 ans, envisageaient avec une certaine anxiété, pour ne pas dire une certaine inquiétude, lorsque le gouvernement du Québec avait décidé de faire l'acquisition des compagnies privées d'électricité, pour que les Québécois prennent en main le développement d'une ressource naturelle fondamentale dans leur économie, il faut bien le dire, après 20 ans, Hydro-Québec en est devenue un fleuron. (11 h 40)

Je vous réfère, M. le Président, aux états financiers de l'année 1980. Je vais donner quelques chiffres. Les revenus bruts d'Hydro-Québec en 1980 sont de 2 443 586 000 $; ses revenus nets sont maintenant rendus à 746 083 000 $; ses actifs, au fil des années, ont grandi d'une façon vertigineuse et ont atteint en 1980 la taille de 18 012 459 000 $; les prévisions de croissance, quant aux actifs d'Hydro-Québec, sur l'horizon 1985, font qu'Hydro, en 1985, aura des actifs de l'ordre de 35 000 000 000 $. Il faut également dire, qu'au cours des années, les réserves d'Hydro-Québec - ou son équité - ont grandi au fil de sa croissance. En 1980, les réserves d'Hydro-Québec atteignaient 4 374 109 000 $.

Il faut bien constater aussi qu'avec les investissements massifs qu'a dû réaliser Hydro-Québec pour répondre aux besoins de croissance, de la demande hydroélectrique des Québécois, Hydro-Québec a dû emprunter au fil des années, de sorte qu'aujourd'hui, sa dette à long terme est à peu près au niveau de 12 000 000 000 $. Je rappelle essentiellement qu'avec une réserve de 4 300 000 000 $, pour une dette à long terme de 12 000 000 000 S, on voit tout de suite qu'il existe là un rapport de 1 à 3 et c'est un ratio important à retenir parce qu'on aura l'occasion d'y revenir, j'imagine, à de nombreuses reprises au cours de ce débat.

C'est donc dire que le ratio de l'équité par rapport à la dette à long terme, ce que, dans le jargon, nous appelons le 25-75, existe actuellement, il a toujours existé dans le passé, il continuera d'exister dans l'avenir. Je rappelle essentiellement aussi qu'en 1980 et ça aussi ça apparaît aux états financiers d'Hydro-Québec, ça peut être vérifié - Hydro, avec 2 416 167 abonnés toutes catégories, a vendu, au total 104 000 000 000 de kilowattheures.

C'est donc devenu une grande entreprise. Ce qu'il nous faut maintenant faire, c'est nous demander si une compagnie qui est devenue plus grande qu'Alcan, Bell et Canadien National, quant à ses actifs, doit continuer d'exister sans une structure de capital-actions. Nous avons donc pris la décision de doter Hydro-Québec, en continuant l'entreprise, d'un fonds social de 5 000 000 000 $; c'est-à-dire que 50 000 000 d'actions d'une valeur nominale de 100 $ constitueront son trésor ou encore son capital autorisé. Il va sans dire qu'avec la réserve dont j'ai fait état tantôt, qui se chiffre aujourd'hui à 4 374 109 000 $, Hydro-Québec émettra au gouvernement du Québec les actions qui seront détenues, comme c'est le cas dans toutes les sociétés d'État, 43 741 090 actions au ministre des Finances.

Hydro-Québec sera donc dotée d'une structure de capital comme toute grande corporation en Amérique du Nord, d'autant plus qu'Hydro-Québec est la plus grande, pour ce qui est des utilités publiques, sur ce continent.

Hydro-Québec aura donc comme tout le monde un capital-actions normal. Il sera d'autant plus facile de faire des comparaisons d'un chiffrier d'états financiers d'une corporation par rapport à l'autre. Je suis convaincu, M. le Président, qu'Hydro-Québec continuera de grandir.

J'ai parlé tantôt de la croissance de ses actifs. Il est bien évident que, dans la même proportion, ses revenus bruts vont continuer de croître, ses revenus nets également. C'est un peu le sens de toute cette restructuration financière que nous faisons dans le projet de loi no 16, c'est l'essentiel de l'article premier du projet de loi.

Dans un deuxième temps, nous voudrions qu'à partir du moment où HydroQuébec devient une grande compagnie avec son capital-actions, qu'elle devient en quelque sorte normale par rapport à des entreprises qui pourraient s'y comparer, elle se place dorénavant sur un pied d'égalité par rapport aux autres sociétés d'État et aux autres corporations privées d'utilité publique, c'est-à-dire qu'Hydro-Québec paie comme tout le monde ses taxes et ses impôts.

Les libéraux nous reprochent que ce que nous faisons avec Hydro-Québec constitue une opération de déguisement. Je voudrais essentiellement rappeler que l'esprit et le coeur du projet de loi no 16 se retrouvent dans suffisamment de détails pour que l'on puisse retrouver dans le projet de loi no 16 à peu près le mot-à-mot, sur certains plans, du discours du budget du 10 mars dernier. Je rappelle essentiellement que depuis de 10 mars dernier les électeurs se sont prononcés. Je comprends que la restructuration de la fiscalité applicable à Hydro-Québec n'a sûrement pas été un des grands enjeux de la campagne électorale, cela va sans dire, mais il est bien évident, par ailleurs, que le 10 mars dernier, en toutes lettres dans le discours du budget, les intentions du gouvernement ont été dites et très clairement annoncées.

Hydro-Québec, comme toute autre

société d'État à caractère commercial ou industriel, manufacturier si on aime mieux, comme la SGF, comme la SAQ, comme SIDBEC, comme SOQUEM, comme REXFOR, paiera ses taxes et ses impôts. Egalement, il n'y a jamais personne qui s'est demandé pourquoi Bell Canada, qui est une compagnie privée d'utilité publique placée en quelque sorte dans une situation de monopole, payait des taxes. On n'a jamais entendu un discours nous dire qu'il n'était pas normal que Bell Canada paie ses taxes foncières, paie ses taxes aux municipalités, paie ses taxes de vente, paie sa contribution aux régimes d'assurance-maladie; même chose pour les compagnies Shell, Esso, Consolidated-Bathurst, Domtar; bref, tout le monde est sur un même pied.

Combien de fois, combien de discours on a entendus je dirais dans les milieux d'affaires en particulier, où très souvent, vis-à-vis des sociétés d'État, on disait: Oui, c'est bien beau, vos sociétés d'État font des profits, mais elles ne paient pas leurs taxes et leurs impôts. Je crois pouvoir rejoindre une des préoccupations du Conseil du patronat, par exemple, ou encore des chambres de commerce qui ont toujours souhaité une espèce d'égalité, une espèce de justice sur le plan de la fiscalité. Je pense que c'est normal que dans l'avenir HydroQuébec soit assujettie comme toute corporation privée ou publique au paiement de ses taxes et de ses impôts.

Il faut bien dire que jusqu'à présent Hydro-Québec payait une bonne partie, payait des en-lieu de taxes plutôt que de payer des taxes foncières aux commissions scolaires locales ou régionales ou encore aux municipalités, que, bien sûr, Hydro-Québec payait sa contribution d'employeur aux régimes d'assurance-maladie. Ce que le projet de loi vient ajouter, c'est que, quant aux autres taxes, Hydro-Québec sera comme tout le monde, pour en particulier la taxe sur le capital.

Je suis convaincu que mon collègue des Finances, qui aura l'occasion d'intervenir dans ce débat, va toucher beaucoup plus en profondeur cet aspect-là. J'ajoute cependant qu'Hydro-Québec, par cette restructuration financière que nous faisons dans sa loi en la dotant d'un capital-actions, en disant que désormais Hydro-Québec paiera ses taxes et ses impôts, devient un citoyen corporatif normal, comme tout le monde. Et en ce qui est de la fiscalité, M. le Président, c'est l'essentiel de ce que contient l'article 4 du projet de loi. (11 h 50)

II faut bien dire cependant qu'Hydro-Québec, à la différence des autres corporations, n'est pas assujettie au paiement de l'impôt sur le revenu des corporations. Mais, M. le Président, avec l'adoption du projet de loi no 16, désormais Hydro-Québec, qui est devenue une entreprise très rentable, très bien gérée, très bien administrée, d'une solidité financière exemplaire, Hydro-Québec a maintenant atteint la taille où elle se doit de contribuer elle aussi à l'économie nationale, c'est-à-dire à contribuer, à verser à ses actionnaires un dividende.

Entendons-nous bien là-dessus, M. le Président. Il ne s'agit pas pour Hydro-Québec de payer un impôt au titre de la Loi sur le revenu des corporations. Il ne s'agit pas d'un impôt sur le revenu des revenus nets d'Hydro-Québec après dividende. Il s'agit essentiellement, pour Hydro-Québec, de payer un dividende à ses actionnaires. Et cela aussi, M. le Président, a été très bien dit et très bien expliqué dans le discours sur le budqet du 10 mars dernier.

Cette politique de dividende va permettre à tous les contribuables québécois de voir le retour d'un investissement fait il y a près de 20 ans. Pour à peu près 600 000 000 $, je le rappelais tout à l'heure, Hydro-Québec faisait l'acquisition de sept compagnies privées d'électricité. C'était au cours de l'année 1963. Cet argent, qui a été investi, depuis bientôt 20 ans, a rapporté des profits et ces profits, au fil des années, ont été accumulés et ont été versés en réserve à Hydro-Québec. Cette réserve est d'aujourd'hui de 4 374 109 000 $ et c'est à partir de cette réserve plus ces emprunts qu'Hydro-Québec a investi massivement dans le développement hydroélectrique du Québec.

Mais, M. le Président, il faut faire, je pense, une nuance importante. Lorsque nous disons qu'Hydro-Québec appartient à tout le monde, cela signifie qu'Hydro-Québec appartient à tous les contribuables du Québec, non seulement aux consommateurs du Québec, non seulement aux consommateurs d'hydroélectricité, Hydro-Québec appartient à tout le monde. Et ce n'est pas parce que je serais consommateur de 600 kilowattheures par mois ou encore de 900 kilowattheures par mois ou encore de 2000 ou de 3000 ou de 10 000 kilowattheures que je suis plus propriétaire. La propriété d'Hydro-Québec n'a absolument rien à voir avec le niveau de consommation que chacun d'entre nous peut faire sur une base mensuelle ou sur une base annuelle.

Il est donc normal que ce ne soient pas les seuls consommateurs qui bénéficient de l'existence d'Hydro-Québec parce que ce sont tous les Québécois et tous les contribuables du Québec qui en sont les actionnaires. Il est donc sain, normal et parfaitement juste que tous les Québécois en retirent un dividende. Et ce dividende, le discours sur le budqet du 10 mars dernier le disait très clairement, sera versé au fonds consolidé.

Quand j'entends parfois l'Opposition, M. le Président, en particulier sur la question tarifaire, j'essaie de comprendre son raisonnement et je vais tenter de l'expliquer,

du moins du mieux que je peux le comprendre, et on aura l'occasion de me répondre, j'en suis convaincu.

Lors de la dernière commission parlementaire, après avoir fait tout un plat dans les premières minutes de la commission, nos amis d'en face ont préféré partir en laissant un chiffre sur la table. Plutôt que de parler de 16% d'augmentation, ce qui était la proposition en discussion, les libéraux ont dit: II faudrait couper ça en deux et proposer 8,3% ou 8,6%. Autrement dit, le tarif hydroélectrique serait à peu près de cinq points en bas du niveau de l'inflation.

Cela aurait eu comme résultat, bien sûr, que les consommateurs d'hydroélectricité auraient épargné d'autant sur leur facture, mais c'aurait eu aussi comme résultat de commettre de graves injustices. Par exemple, il faut bien comprendre que les citoyens du Québec, les consommateurs domestiques, consomment à peu près 30% de l'électricité produite. Ils contribuent à peu près pour une même proportion dans les ventes d'Hydro-Québec. Les grandes entreprises, quant à elles, les multinationales, les grands commerces, les moyens comme les petits, les tarifs grande puissance, moyenne puissance et petite puissance fixés d'une façon aussi artificielle vers le bas, c'aurait eu pour effet que les plus riches dans notre société auraient payé le moins cher leur électricité.

Cela aurait également eu pour effet secondaire directement relié de priver les moindres consommateurs de revenus légitimes et, par voie de conséquence, de les priver du juste retour de leurs investissements dans Hydro-Québec en atténuant leurs dividendes. Ce dividende sera donc déclaré chaque année et versé au fonds consolidé. Est-ce qu'il y a là, en soi, un scandale? Je rappelle qu'en Alberta, où on a mis sur pied le "Heritage Fund", ou le fonds du patrimoine, concernant les revenus du pétrole et du qaz, qui sont des ressources non renouvelables, 70% des revenus fiscaux du gaz et du pétrole sont versés au fonds consolidé. Au Québec, il s'agit d'une ressource renouvelable. Il est donc normal que ces dividendes soient versés entièrement au fonds consolidé.

Je rappelle à nos amis d'en face que le discours sur le budget disait ceci: Une partie des dividendes d'Hydro-Québec servirait à financer et à être investie dans le capital-actions des sociétés d'État axées sur le développement économique et une partie servirait à financer les programmes de développement économique pour soutenir l'effort de l'entreprise privée. On en a eu des exemples encore tout récemment dans le domaine, par exemple, des pâtes et papiers, dans le domaine du textile, de la chaussure. Je voudrais essentiellement lire un paragraphe du discours sur le budget, à la page 24: "Puisque les redevances que nous tirerons d'Hydro-Québec proviennent de ressources perpétuellement renouvelables, il est normal qu'elles soient versées au Trésor public. Nous en affecterons dorénavant une partie à deux types d'opérations reliées directement au développement économique: d'une part, aux programmes de modernisation des entreprises privées, qui prennent de plus en plus de place dans nos budgets et qui doivent se développer bien plus encore et, d'autre part, aux souscriptions au capital-actions des sociétés d'État au fur et à mesure de l'évolution de leurs plans d'expansion."

Pour ce qui est des sociétés d'État, nous aurons, au fil des années, à verser et à souscrire du capital-actions, par exemple, dans la Société générale de financement, très certainement dans la Société nationale de l'amiante, très certainement dans la Société québécoise d'initiatives pétrolières, certainement aussi dans la Société québécoise d'exploration minière, SOQUEM. (12 heures)

Enfin, le but de cette espèce de recyclage du retour de nos investissements dans Hydro-Québec par voie de dividendes aura pour effet d'injecter de l'argent frais, de l'argent neuf, dans le développement de nos sociétés d'État, en particulier celles axées sur le développement des ressources naturelles, ce qui pourra également aider les ministères à vocation économique à financer et à mettre sur pied, grâce au fonds consolidé, des programmes d'aide, de soutien et d'appui au secteur privé.

Ce que nous retrouvons dans ce projet de loi, M. le Président, c'est que nous ne voulons pas que qui que ce soit pense que le gouvernement du Québec peut piger à pleines mains dans le trésor d'Hydro-Québec sans aucune balise, sans aucun critère. Le projet de loi est là-dessus très explicite. Vous allez en retrouver le détail à l'article 3.

Bien brièvement, M. le Président, le dividende est plafonné au départ à 75% -c'est l'article 15.2 - des revenus nets d'exploitation et des revenus nets de placement, moins la dépense brute d'intérêt. C'est un maximum. Année après année, le gouvernement fera l'évaluation, une fois que les états financiers pour l'année en cours auront été connus, de ce qu'il serait souhaitable de déclarer comme dividendes en provenance d'Hydro-Québec. Mais, en aucun cas ni en aucune circonstance, ce dividende ne pourrait dépasser 75% du revenu net d'exploitation plus le revenu net de placement moins les dépenses brutes d'intérêt.

Deuxième volet, M. le Président, dans la loi elle-même, et non pas par un règlement, nous ajoutons ce que j'appellerais des balises. Nous mettons dans une loi deux critères que les financiers d'Hydro-Québec connaissent très bien, c'est-à-dire le ratio de

l'équité par rapport à la dette à long terme et la nécessité de couvrir les intérêts par un. Là-dessus, je l'ai expliqué tantôt, les réserves d'Hydro-Québec sont de l'ordre de 4 300 000 000 $, son capital-actions, une fois le projet de loi no 16 adopté, sera du même montant par rapport à une dette à long terme de 12 000 000 000 $. Je pense que cela est vite compté, 4 sur 12 ou 3 fois 1 ou 25/75. C'est la situation actuelle et c'est la situation que les financiers, qu'ils soient des États-Unis ou d'ailleurs dans le monde, examinent pour bien vérifier, lorsqu'un placement est fait à Hydro-Québec, lorsqu'on achète les obligations à long terme d'Hydro-Québec, bien entendu, que la situation financière d'Hydro-Québec, au fil des années, lui permettra de faire honneur à ses obligations.

Je rappelle essentiellement que ce ratio de 25/75 est très exigeant, que l'Ontario Hydro, par exemple, ne l'atteint pas à l'heure actuelle, et BC Hydro non plus. Ce qu'il est important de bien souligner, c'est que, sur ces deux critères, la couverture d'intérêt à un et le ratio d'équité de dette à long terme ne font en quelque sorte que transposer dans une loi ce qu'Hydro-Québec connaît depuis 20 ans. À New York comme à Londres, comme à Tokyo, comme à Düsseldorf, tous ceux qui s'occupent du financement d'Hydro-Québec, qu'ils soient courtiers ou banquiers, parce que beaucoup de gens s'occupent du financement d'Hydro-Québec - je le disais tantôt - c'est le quatrième plus gros emprunteur sur cette planète - tous le savent que, lorsqu'on regarde les états financiers d'Hydro-Québec et qu'on veut faire du financement, ce dont on veut s'assurer, c'est qu'il y aura toujours au moins une équité ou un avoir propre qui appartient aux actionnaires, qui sera égal au tiers de la dette à long terme, et, également, que les revenus d'exploitation seront toujours au moins suffisants pour couvrir les intérêts sur la dette courante. Tout le monde sait cela, sauf, peut-être, les libéraux d'en face.

Ces deux critères, moi, en tout cas, M. le Président, comme Québécois, me rassurent énormément, cela ne me cause aucune espèce d'inquiétude. Nous sommes ensemble et collectivement, vous comme moi, les propriétaires, et c'est avec fierté que je le dis, d'une des plus grandes entreprises du monde. Il n'y a personne au Québec qui va poser un seul geste, quel qu'il soit, qui viendrait mettre en péril la solidité financière d'Hydro-Québec, sa capacité d'emprunter, sa capacité d'investir et sa capacité de s'administrer également.

Le projet de loi donne ces garanties. Il les donne non seulement à Hydro-Québec comme telle, à son conseil d'administration, mais surtout à nos concitoyens qui en sont les propriétaires.

Ce projet de loi va également introduire ce que j'appellerais une nouvelle mécanique dans l'établissement de la tarification d'Hydro-Québec. Je lisais dans le Journal de Montréal d'hier des choses assez étonnantes. Aussi bien en parler tout de suite parce qu'on va en entendre parler pendant probablement une bonne partie de la journée. C'est du lundi 30 novembre. M. Bélanger, économiste et fiscaliste - c'est sans aucun doute le premier discours de deuxième lecture de l'Opposition officielle sur le projet de loi - dit ceci: "En ce qui concerne la position industrielle concurrentielle du Québec, le Manitoba vient de geler ses tarifs d'électricité pour cinq ans et ceux de l'Ontario ont auqmenté d'environ la moitié des nôtres au cours des dernières années."

Il n'y a rien comme dire seulement la moitié de la vérité, M. le Président. C'est exact, ce qu'a dit M. Bélanger, mais il aurait peut-être dû ajouter ceci: Le gouvernement qui a gelé les tarifs d'hydroélectricité au Manitoba était présidé par M. Lyon, qui vient de perdre ses élections. Il y a peut-être un point d'interrogation là.

Deuxièmement... Peut-être que vous devriez écouter ceci, M. le député d'Outremont. Est-ce que vous savez que la politique tarifaire du Manitoba constitue en soi de la folie furieuse? Un gel des tarifs de l'électricité pendant cinq ans, ça veut dire ceci. Que Manitoba Hydro renonce à des revenus légitimes à un point tel, et vous vérifierez cela, que Manitoba Hydro fonctionne à déficit. C'est le fonds consolidé du gouvernement du Manitoba qui contribue, avec les revenus de tous les contribuables, qu'ils soient consommateurs d'hydroélectricité ou non, peu importe leur niveau de consommation. On prend l'argent dans les poches du monde pour renflouer la Manitoba Hydro. Ce n'est pas le meilleur exemple.

Quand le député de Notre-Dame-de-Grâce dit que SIDBEC accumule aussi des déficits, c'est vrai, mais je rappellerai au député de Notre-Dame-de-Grâce que s'il avait peut-être mieux conseillé son patron, l'ancien ministre de l'Industrie et Commerce, M. Saint-Pierre, dans le temps, il n'y aurait peut-être pas eu l'aventure de SIDBEC-Normines et on ne perdrait pas 35 000 000 $ ou 40 000 000 $ par année dans une pareille folie.

M. Scowen: Question de privilège. Une voix: II répondra.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, d'une façon ou d'une autre, ce n'est pas à vous à décider s'il y a question de privilège ou pas. (12 h 10)

Je suis obligé - on en a fait mention en cette Chambre - tout d'abord d'écouter le début de la question de privilège pour voir si c'en est une, car tout député a un droit qui doit être respecté. J'ai cependant souvent dit qu'à l'intérieur d'un discours, on peut avoir des divergences d'opinions et c'est par le moyen d'une réponse à ce discours qu'on peut les faire valoir. Mais, pour que je puisse déterminer si c'en est une, il faut au moins commencer par l'écouter.

M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Mon nom a été mis en cause dans l'affaire de SIDBEC-Normines et je pense avoir le droit, comme député, de répondre immédiatement à son argumentation, c'est très important. Premièrement...

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip, sur une question de règlement.

M. Chevrette: Le député de Notre-Dame-de-Grâce aura tout le loisir, pendant son discours, de réfuter les allégations de notre collègue. Il n'y a aucune question de règlement qui devrait être permise à ce stade-ci sur le contenu. Il n'a pas été mis en cause comme individu, absolument pas. Le député de Notre-Dame-de-Grâce devrait répondre...

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est ce que j'avais suggéré au député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est-à-dire de le faire à l'intérieur de sa réponse, mais il reste quand même qu'il a commencé à parler sur sa question de privilège et, pour le moment, je n'ai rien entendu qui ne soit pas partie à une question de privilège.

M. Scowen: Merci, M. le Président. Le ministre a suggéré que le député de Notre-Dame-de-Grâce actuel, qui était, en 1975, fonctionnaire au sein du gouvernement provincial, avait été impliqué directement dans la décision du gouvernement de M. Bourassa d'aller de l'avant dans le projet de SIDBEC-Normines. Je veux dire deux choses parce que je crois important que ce soit très clair dans l'esprit de tout le monde.

Premièrement, même si j'étais là à l'époque, je n'étais certainement pas partie à cette décision; deuxièmement, cela a été fait en 1975, si ma mémoire est bonne. Vous avez eu l'occasion de corriger la situation en 1976, en 1977, en 1978, en 1979, en 1980 et en 1981; vous n'avez rien fait!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je dois vous dire que c'est la largesse du président qui vous a permis de bien situer le début, mais la fin de votre argumentation n'était pas dans le cadre d'une question de privilège. Le début de votre argumentation en était une, mais la fin n'en était pas une. En conséquence, pour la compréhension des gens de cette Assemblée, il vous aurait été plus facile, je pense, de répondre à cette question à l'intérieur de votre discours.

M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je ne voudrais pas éterniser le débat sur la question de SIDBEC parce que ce n'est pas le temps d'en parler, mais je ne laisserai certainement pas passer la dernière affirmation du député de Notre-Dame-de-Grâce et cela justifie exactement ce que j'ai dit dans un premier temps: C'est avec des personnages dotés d'un pareil cerveau qu'on se retrouve dans des fiascos financiers. Vous dites qu'on aurait pu corriqer la situation en 1975, en 1976, en 1977, en 1978, en 1979, en 1980 et en 1981. Je vous dis que c'est impossible parce que votre gouvernement avait signé des contrats et que, de ce côté-ci, nous respectons les contrats.

Des voix: Ah! Ah!

M. Scowen: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je voudrais bien savoir si c'est une vraie question de privilège parce que, comme vous le savez, j'ai, comme président, l'habitude de préserver le droit de parole de celui qui l'exerce en vertu de l'article 100. Vous avez deux moyens de pouvoir corriger une affirmation: le premier est de le faire pendant votre discours et le deuxième est qu'à la fin du discours du ministre, vous pourrez lui poser une question. Comme j'ai le devoir de protéger le droit de parole, je pense que vous aurez amplement d'occasions, si vous différez d'opinion avec le ministre, de faire valoir vos arguments.

Je voudrais bien que ce soit vraiment une question de privilège; sinon, je vous arrêterai dès le départ.

M. Scowen: II a parlé de mon cerveau!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, on avait compris qu'il n'avait parlé de rien!

M. Gratton: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: Oui, sur une question de règlement, M. le Président, avec tout le respect que je vous dois. Vous avez vous-même avoué que mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, tantôt, a fait une question de privilège qui en était réellement une, tout au moins au départ. Il a voulu rétablir des faits qui n'ont rien à voir avec ce débat, à toutes fins utiles, mais qui sont évoqués par le ministre des Richesses naturelles. M. le Président, je termine avec une phrase...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, vous savez très bien -non, ce n'est pas une question de bâillon -qu'à l'intérieur de cette salle les gens se parlent sans que j'aie la possibilité d'entendre, puisqu'ils sont assis à leur siège et, dans certaines circonstances, qu'ils ne sont pas assis à leur siège. Le ministre a compris comme moi, j'en suis assuré, puisque mes oreilles sont attentives aux discours qui sont prononcés, que le député de Notre-Dame-de-Grâce, malgré qu'il n'ait pas le droit de parole, a prononcé le mot SIDBEC et, en conséquence, le ministre, dans son discours, puisqu'il était présent pour répondre aux questions sur Hydro-Québec, a répondu à cette question. Maintenant, le débat étant clos sur cette question, j'aimerais qu'on revienne au débat de deuxième lecture sur le projet de loi no 16. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, c'est vrai qu'il y aurait peut-être des parallèles intéressants à faire entre les déficits de Manitoba Hydro et de SIDBEC, mais cela pourrait faire l'objet d'un débat, un vendredi, si le coeur vous en dit. On pourra se reprendre. Je voudrais peut-être revenir à l'article du Journal de Montréal.

M. Scowen: M. le Président, question de privilège. S'il vous plaît...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, selon un terme bien connu par les avocats, prima facie, à première vue, comme on dit en français, je ne vois rien qui a trait à une question de privilège. M. le ministre.

M. Scowen: Je pose une question de règlement, alors. Je vous pose une question.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: M. le Président, si je comprends bien, vous avez demandé au ministre de ne plus faire allusion à la question de SIDBEC dans son discours.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je dois vous dire que le ministre a le droit d'être protégé quant à son droit de parole et je ne voudrais pas, en aucune façon, dire qu'il y aurait eu obstruction à son droit de parole, mais j'aimerais bien qu'on permette au ministre de terminer son intervention d'une heure. En conséquence, M. le ministre, vous avez le droit de parole.

M. Chevrette: Est-ce que je peux demander à mon collègue, M. le Président, de ne pas faire exprès et de ne pas parler du cerveau de Notre-Dame-de-Grâce.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, lorsque des interventions viennent des députés libéraux d'en face sur des questions de privilège j'espère que vous faites l'arrêt de la pendule sur mon temps et que je ne serai pas pénalisé, parce que j'ai des choses à dire.

Je voudrais peut-être revenir, M. le Président, à ce que je disais tantôt, concernant le Journal de Montréal du lundi 30 novembre, dans lequel M. Rélanger que nos amis d'en face connaissent bien, fiscaliste, économiste, que j'avais l'habitude de respecter, nous parlait de l'Ontario. "M. Bélanger signale que le Manitoba vient de geler ses tarifs d'électricité pour cinq ans -on en a parlé tantôt - et que ceux de l'Ontario ont augmenté d'environ la moitié des nôtres au cours des dernières années. À preuve, écrit-il, elle sera de 9,6% en 1982, en Ontario, ce qui est exact, M. le Président, comparativement à 16,3% au Québec, ce qui est également exact."

Il ajoute ceci: "Au train où vont les choses, de dire l'économiste, l'avantage que nous avons encore sur notre proche concurrent industriel fondra graduellement." Un citoyen du Québec qui lit le Journal de Montréal en est induit à croire que si nos augmentations tarifaires sont plus élevées que celles de l'Ontario, d'une année par rapport à l'autre, non seulement il y aurait un rapprochement, M. le Président, mais il y aurait un dépassement. Ce que M. Bélanger sait et ce que M. Bélanger aurait dû dire, en parlant des dernières années, il aurait peut-être dû mentionner qu'en 1976 les tarifs de l'Ontario Hydro ont augmenté de 22% et qu'en 1977 les tarifs de l'Ontario Hydro ont auqmenté de 30,3%. Alors, si on additionne 30% et 22% vous pouvez penser que ça va faire 52,3%, mais ce n'est pas exact. Cela donne 58% parce qu'il y a un facteur composé. (12 h 20)

M. le Président, pour les années suivantes, pour éviter des recherches aux gens d'en face, en Ontario, c'est en 1978, 9,4%, en 1979, 9,8%, en 1980, 8,6%, en

1981, 9,3% et cette année, 9,6%. Je vais vous faire la proposition suivante: supposons que, l'année dernière, les tarifs d'Hydro-,Québec avaient augmenté de 30,3% et qu'en 1979, les tarifs avaient augmenté de 22%. M. le Président, quelqu'un qui a une tête sur les épaules, qui compte avec un crayon et une feuille de papier va se rendre compte bien vite qu'en prenant une pareille avance sur la fixation des tarifs que les années qui vont suivre, on peut prendre cela un peu plus "relax". Mais qu'est-ce qui s'est produit en Ontario? Pourquoi l'Ontario a-t-il été obligé de grimper les tarifs comme cela? Il y a eu du suréquipement et à tel point que le gouvernement de l'Ontario a institué une commission royale d'enquête pour savoir comment cela se faisait.

À l'heure actuelle, M. le Président, nous avons encore un avantage comparatif marqué sur l'Ontario. Je vais me référer essentiellement à la proposition tarifaire que nous avons acceptée et qui est entrée en vigueur pour l'année 1982. En quoi le projet de loi 16 vient-il influencer l'établissement de la politique tarifaire au Québec? Pour la raison suivante, M. le Président. La loi 41, qui est la loi constitutive d'Hydro-Québec, dit ceci à l'article 22, tel qu'amendé, c'est 22.1 tel qu'amendé, je crois, en décembre 1978: "Pour la réalisation de ces objets, la société prévoit les besoins du Québec en énergie et les moyens de les satisfaire dans le cadre des politiques énergétiques que le lieutenant-gouverneur en conseil peut par ailleurs établir."

Traditionnellement, de par sa loi, Hydro-Québec a toujours eu comme politique d'établir un tarif suivant le plus bas prix possible, eu égard à une saine gestion financière. Qu'est-ce que la loi actuelle va dire, M. le Président? "Les taux et les conditions auxquels l'énergie est fournie doivent être compatibles avec une saine administration financière." La saine administration financière implique que, nécessairement, Hydro-Québec dans la proposition qu'elle fait au gouvernement et dans les travaux de la commission parlementaire qui suit toujours le dépôt de la proposition tarifaire par Hydro-Québec et ensuite, le Conseil des ministres, dans sa réflexion, tiennent compte et doivent tenir compte si on parle d'une saine administration financière, des taux d'inflation, des taux d'intérêt qui influent sur les coûts d'exploitation, du prix des énergies concurrentielles et aussi de la capacité de payer des consommateurs.

Traditionnellement, il faut se rappeler -et cela remonte à peine à deux ans - il faut bien comprendre que dans le bilan énergétique, non seulement au Québec, mais partout ailleurs, les prix des énerqies concurrentielles ont été non seulement bousculés, mais complètement bouleversés. Il faut bien se rappeler qu'en 1971, les cheikhs d'Arabie nous vendaient leur pétrole 1,70 $ le baril et au'ujourd'hui, c'est 36 $. Il faut comprendre aussi qu'à cette époque et jusqu'à il y a deux ans à peine, il en coûtait moins cher pour chauffer sa maison au mazout léger no 2, à l'huile, comme on dit, que de chauffer à l'électricité. Il en coûtait également moins cher pour les régions du Québec qui étaient desservies de se chauffer au gaz naturel.

C'est donc dire qu'Hydro-Québec, depuis le tout début, que ce soit depuis 1944 ou encore davantage, depuis 1963, a dû se battre sur un marché concurrentiel, contre des formes d'énergie concurrentielles qui, elles, ont toujours été, jusqu'à tout récemment, meilleur marché que l'électricité. Cela explique, bien sûr, que, pendant un certain temps, il y a même eu des campagnes de promotion parce qu'il fallait qu'Hydro-Québec se batte pour bâtir son marché. Mais, M. le Président, la situation a bien changé. On ne peut pas établir pour toujours des règles de fonctionnement et des règles du jeu, penser que l'univers entier est immuable et que la planète a cessé de tourner. L'inflation, par exemple, pour l'année 1982; les fédéraux s'occupent de n'importe quoi, ils s'en occupent mal par ailleurs, sauf de s'occuper de couper l'inflation et de couper les taux d'intérêt. Un taux d'inflation plus élevé que 1% par mois, depuis la crise économique des années 1929 et 1930, il n'y a pas un Québécois et il n'y a pas un Canadien non plus qui se souvient de ça. Mais, en 1982, l'inflation va être de l'ordre de 13%. Cette année, elle est de plus de 12%. Quand on dit qu'on tient compte de l'inflation et de la capacité de payer, on en tient effectivement compte dans la proposition tarifaire et le tarif qui est en vigueur. Je vais m'expliquer, M. le Président.

La hausse moyenne, cette année, est de 16,7% dans le secteur domestique. HydroQuébec nous demandait 17,5%, nous avons retenu 16,7% et récupéré sur le tarif grande puissance. Faisons un raisonnement simple sur les deux dernières années. La hausse moyenne, en 1981, le tarif qui est en vigueur, est de 10,6%. Ce tarif-là, je le rappelle, a été décidé en 1977 pour les années 1978, 1979 et 1980. Nous avons donc derrière nous pour 1979, 13,9%, 13,6%, l'année suivante, et cette année, en 1981, 10,6%. L'inflation est plus élevée que cette hausse. Cette année, l'inflation est de 13%, nous allons donc récupérer sur les deux années en tenant compte de la capacité de payer. Ce que nos amis d'en face ne disent pas souvent mais que les consommateurs, eux, comprennent, c'est le phénomène suivant.

Le consommateur, au Québec, voit sur sa facture de 600 à 650 kilowattheures par mois - ce qui constitue à peu près le cas de

99,9% de notre population - c'est-à-dire les besoins essentiels pour éclairer sa maison, pour les appareils: radio, télévision et possiblement une cuisinière électrique. C'est le cas de 90%. La hausse ou le tarif de cette année est de 13,2%. Ce même consommateur qui se sert de l'électricité pour son eau chaude va comptabiliser 300 à 350 kilowattheures par mois de plus. C'est 71% des consommateurs; 71% des abonnés domestiques à Hydro-Québec sont dans cette situation; besoins essentiels, plus eau chaude. Quelle est la hausse pour 1982? 13%. Nous ne récupérons même pas le manque à gagner pour l'année en cours. Nous avons dit: 13%, ce serait raisonnable, compte tenu de la capacité de payer.

Ces consommateurs qui sont à l'hydroélectricité pour leurs besoins essentiels et pour leurs besoins d'eau chaude, pour une faible partie au Québec - et c'est ça qui est renversant, M. le Président, parce que les libéraux n'ont pas encore compris. Savez-vous, M. le Président, qu'il y a seulement 35% des Québécois qui chauffent leur résidence à l'électricité? Les autres sont à l'huile, comme on dit, ou au mazout léger no 2 au prix que vous connaissez et qui va tripler d'ici 1986. Les libéraux sont des irresponsables lorsqu'ils nous proposent de hausser le prix du chauffage à l'électricité de 8,3% pendant que leurs amis fédéraux, avec des ententes avec les provinces productrices, signent, pour 1981, 1982, 1983, 1984 et 1985, l'entente de cinq ans qui va porter le prix du pétrole au Canada à 75% du prix mondial ou à 85% du prix Chicago, 300%. (12 h 30)

En vertu de quelle intelligence économique est-ce qu'on donnerait l'électricité, on braderait l'électricité? Vous souhaiteriez peut-être qu'on fasse comme le Manitoba, qu'Hydro-Québec marche à déficit et qu'à même le fonds consolidé, on rembourse.

M. le Président, ça va sûrement intéresser le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y avait un petit papier dans le Financial Post, tout récemment, que vous avez sûrement lu: "We must pay full cost of electricity". Je vous dis tout de suite, M. le Président, que je ne suis pas d'accord avec les 93 économistes qui se sont réunis en colloque, en aucune manière, pour que, dans l'immédiat, dans le court terme ou dans le moyen terme, au Québec, on ajuste le prix de l'hydroélectricité par rapport au coût marginal de production. Qu'est-ce que ça veut dire? Qu'on ferait payer le coût réel, le prix Baie-James. C'est vite compté, M. le Président.

La première phase des travaux de la Baie-James va donner 10 000 mégawatts, 15 000 000 000 $ ou encore 1 500 $ d'investissement par kilowattheure. Si vous le prenez sur une base tarifaire, ça veut dire vingt-neuf millième de dollar au kilowattheure. Si vous allez aux états financiers d'Hydro-Québec, à la page F-22, pour les sceptiques, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous allez voir à Ventes et revenus consolidés, 1976-1980, pour l'année 1981, le revenu moyen du kilowattheure, 0,02320 $. Notre gouvernement n'a aucune intention, dans l'immédiat ou dans l'avenir, d'ajuster le prix de l'hydroélectricité en fonction du coût marginal de production ou encore du prix de construction du dernier kilowattheure produit dans la dernière centrale construite. Mais on ne partage pas ce point de vue. Je voudrais simplement lire un paragraphe, M. le Président, et je n'ai pas la version française. Je vais vous lire ça en anglais, tranquillement: "From the perspective of the 93 protesting economists, the electricity subsidy transmits the wrong price signals to the marketplace, it encourages society to demand more electricity, even when investment in conservation of natural gas could meet our energy needs at a lower cost."

Fcoutez bien ceci: "To remove electricity's artificial advantage in the marketplace", Lipsey - c'est l'économiste à la tête de ce colloque, que vous connaissez sans doute bien - and his colleagues are promoting the electrical equivalent to the world price for oil, replacement cost pricing; electricity simply would be priced at the cost of a new unit of electricity." 93 économistes. Nous ne partageons pas du tout ce point de vue, M. le Président. Il faut cependant dire que, sur le plan de la rationalité économique, sur le plan du coût réel de l'énerqie, surtout que les énergies deviennent de plus en plus concurrentielles, cela pourrait avoir un certain sens. Mais ça ne tiendrait pas compte de la capacité de payer des consommateurs, particulièrement ceux qui sont au tarif domestique.

Nous avons tenu compte de cette capacité de payer des consommateurs. Ceux qui vont se plaindre le plus du fait qu'en 1982, par exemple, le tarif général grande puissance, pour les contrats normalisés parce que, pour les contrats dits particuliers qui ont été signés par des gouvernements qui sont venus avant nous, on ne peut rien y faire, mais sur le tarif grande puissance, pour les contrats normalisés, la hausse, pour 1982, est de 20,3%. Cela nous conserve quand même un avantage concurrentiel de 12 points par rapport à l'Ontario. Vous vérifierez vos chiffres.

M. Bélanger nous donne un bon conseil, dans le même journal. Je salue le chef de l'Opposition, le débat de deuxième lecture a commencé hier, M. le député d'Argenteuil, dans le Journal de Montréal. Donc, le journal rapporte ceci, concernant un tarif qui inciterait les investissements: "À cet égard,

il signale qu'en maintenant des taux d'électricité aux niveaux les plus bas possible, nous pourrions attirer davantage les industries à haute intensité d'énergie, les alumineries en particulier et l'industrie manufacturière en général."

Je suis un peu surpris que M. Bélanger n'ait pas été informé qu'il y a au-delà d'un an le gouvernement du Québec, lors d'une conférence de presse dont on nous a même reproché l'emphase ou l'ampleur, a rendue publique une politique de développement axée sur l'hydroélectricité et, en particulier, dans le secteur de l'aluminium. La politique tarifaire qui existe à l'heure actuelle dans le secteur de l'aluminium, c'est la suivante: Nous offrons, sur une période de vingt ans, le tarif grande puissance actuel. Nous allons assurer à l'entreprise, dans le seul secteur de l'aluminium, transformation primaire, que durant les vingt prochaines années la hausse du tarif qui lui est applicable ne dépassera pas 10% par année. Cela fait un an que c'est sorti, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Nous disons ensuite qu'il y a un escalier pendant la 21e, la 22e, la 23e, la 24e et, finalement, la dernière année. Il y a les cinq dernières années de rattrapage qui font en sorte que, le premier matin de la 26e année, le tarif alors en vigueur, tarif grande puissance, bien sûr, revient.

Je sais que les libéraux ne sont pas d'accord avec cela. Ils ne savent même pas que la politique tarifaire a été rendue publique. Ce que nous entendons faire - la question est posée non seulement au ministère de l'Énergie et des Ressources, mais elle le sera très bientôt au Conseil des ministres - nous appliquons cette politique dans le secteur des alumineries. Cela a donné un résultat jusqu'à maintenant. La compagnie Reynolds a décidé d'investir 500 000 000 $ à Baie-Comeau pour moderniser ses installations actuelles et augmenter sa capacité de production en prenant de l'expansion. Nous sommes, à l'heure où je vous parle, sur le point de nous entendre avec le quatrième producteur mondial d'aluminium, la compagnie Pechiney Ugine Kuhlmann. J'espère que nos négociations vont aboutir, mais nous n'avons pas l'intention de donner l'énergie, nous n'avons pas l'intention de la brader. Je dirais que ce que nous visons, ce sont les investissements qui apportent des capitaux, mais qui créent de l'emploi. C'est cette souplesse nécessaire dans l'établissement d'une politique tarifaire qu'apporte le projet de loi no 16. J'aurais une question à poser à nos amis en face.

Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant, M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, si vous vouliez me donner cinq minutes, parce qu'il y a eu beaucoup d'interruptions...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je n'ai aucun pouvoir, M. le ministre...

M. Duhaime: Je suis convaincu que si on me donnait trois ou quatre minutes...

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Consentement, M. le ministre. (12 h 40)

M. Duhaime: Un livre blanc a été publié par nos amis d'en face. Je dois avouer au chef de l'Opposition que c'est moi qui ai ajouté la couverture rouge, pour bien l'identifier. Il y a des pages qui concernent l'énergie. Je voudrais, pour qu'on se retrouve, que vous vous référiez à - je ne connais pas vos codes - ECVIII-2, et je le cite - un attendu pour introduire la proposition. "Attendu que l'objectif majeur de la politique du Parti libéral du Québec est d'améliorer le bilan énergétique et la sécurité des approvisionnements par une réduction graduelle de notre dépendance envers le pétrole - je suis parfaitement d'accord avec cela. C'est inscrit mot à mot dans le livre blanc sur l'énergie publié en 1978 - par l'augmentation de la pénétration du gaz naturel - on est d'accord - par l'utilisation de l'énergie électrique, par des économies d'énergie et par la recherche des énergies nouvelles"... On est d'accord avec l'"attendu", mais je pense que le député d'Argenteuil va convenir avec moi que son livre rouge, en particulier les bouts sur l'énergie, a été publié après le livre blanc de mon collègue, Guy Joron.

L'"attendu", à la page ECVIII-4, au niveau des économies d'énergie et des énergies nouvelles, 4.1 dit: "En visant l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel énergétique - d'accord, écoutez bien ceci - à ne plus maintenir les prix artificiellement bas et à aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par des mesures sociales plus appropriées."

M. le Président, je pense que je devrais avoir une réponse. Je comprends, en lisant cela, qu'il n'y aurait plus de prix artificiellement bas.

M. Ryan: Est-ce que je pourrais poser une question, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition, après son discours, vous aurez la possibilité de prendre la parole. Ah! M. le ministre accepte dès maintenant? Allez-y donc, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Est-ce que le...

M. Duhaime: Vous me posez une question? J'en suis très honoré.

M. Ryan: ... ministre pourrait dire s'il a trouvé dans le livre rouge du Parti libéral un passage où nous disons que nous sommes en faveur du prix international du pétrole, comme le gouvernement actuel?

Le Vice-Président (M. Jolivet): ...

M. Ryan: Oui, parce qu'il veut prétendre que nous sommes en faveur de la politique du gouvernement en matière de prix de l'énergie, ce qui est entièrement faux.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, en terminant cependant.

M. Duhaime: Vous allez être capable de répondre, M. le député d'Argenteuil.

M. le Président, en ce qui me concerne, pour autant que le pétrole est importé de l'Ouest canadien, des Rocheuses, du Venezuela, du Mexique, de l'Arabie ou d'où vous voudrez, le prix du pétrole n'est pas fixé par le Québec. On est d'accord là-dessus?

J'ajoute, pour l'information du député d'Argenteuil, que le prix du gaz naturel, dans l'entente qui a été signée pour cinq ans, est plafonné à 65% du prix du pétrole. Le Québec n'a rien à voir avec cela.

Quand on parle du prix international pour le pétrole, oui, M. le député d'Argenteuil, c'est ce vers quoi on s'en va et c'est drôle qu'on y va drôlement plus vite après le référendum qu'avant le référendum, par exemple, parce qu'on a entendu pas mal de discours dans le genre le pied sur la "hose". Jean Chrétien et compagnie, Lalonde et les autres disaient: Faites attention, parce que, si vous répondez oui au référendum, peut-être que M. Lougheed va mettre son pied sur la "hose", comme j'ai entendu pendant des discours. C'est complètement ridicule.

M. le député d'Arqenteuil, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Moi je vous ai posé une simple question et je voudrais que vous m'expliquiez tantôt ce qu'il y a dans votre intervention. C'est marqué ceci: "À ne plus maintenir les prix artificiellement bas." Je dois convenir que vous n'avez quand même pas la prétention, M. le député d'Arqenteuil, de fixer à partir de votre siège le prix du pétrole au Canada ou encore le prix international du pétrole et le prix du gaz naturel. J'imagine que, si votre parti s'occupe d'un prix quelconque dans le dossier de l'énerqie, ça doit être le prix de l'hydroélectricité. "À ne plus maintenir les prix artificiellement bas et à aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par des mesures sociales plus appropriées." Moi je me rappelle, et vous lirez la transcription de notre commission parlementaire.

M. le député de Saint-Laurent ne l'a pas dit, mais a fait allusion au prix marginal de production; autrement dit, le prix réel pour l'hydroélectricité. Quand votre livre blanc sur l'énerqie, auquel j'ai ajouté un couvert rouge, parle de mesures concernant les plus pauvres, moi ça m'amène à lire ceci. Vous auriez l'intention, vous autres les libéraux, d'augmenter le prix de l'hydroélectricité encore plus que l'inflation, d'approcher du coût marginal de production et d'avoir des mesures sociales pour les plus pauvres, les plus démunis, que ce soit sur le plan domestique ou au niveau des entreprises.

Si je me trompe, je vais me lever de mon siège. Si M. le député d'Argenteuil peut me donner une explication intelligente à son papier, je vais me lever et je vais dire que je me suis trompé. Mais c'est ma compréhension, d'après les papiers que j'ai pu lire jusqu'à maintenant.

M. le Président, je terminerai ici en rappelant essentiellement que sur le plan de 1' "attendu", dans ce document-là, on est parfaitement d'accord avec ça. Non seulement on est d'accord, mais on est en train de le réaliser. Par exemple, le bilan énergétique; la part de l'électricité, on veut la faire passer de 26% en 1976 à 42% en 1990, à 50% en l'an 2000. Ce que je dis, c'est qu'on est en train de réaliser cet objectif beaucoup plus vite que prévu. Dans le dossier du gaz naturel, 6% dans le bilan en 1976, nous visions de 12% à 14%. On est au niveau de 15% à 16% et les optimistes parlent de 20%. Moi je voudrais demander au député d'Outremont comment il pourrait faire en sorte de favoriser la pénétration du gaz naturel si celui-ci est plus cher que l'hydroélectricité.

Dans le dossier des économies d'énergie, le programme d'économie d'énergie était en marche dans le secteur résidentiel, Énergain était annoncé. J'aurais voulu pouvoir développer ce point d'une façon un peu plus détaillée sur les économies d'énergie. J'en ai été empêché, je vois la pendule. Je voudrais terminer en disant essentiellement ceci: Cette nouvelle structure financière qu'introduit le projet de loi 16, cette nouvelle politique d'équité fiscale pour Hydro-Québec par rapport aux autres sociétés d'État et par rapport aux sociétés privées d'utilité publique, une plus grande souplesse tant pour Hydro-Québec que pour le gouvernement dans l'établisssement des tarifs d'hydroélectricité, le soutien, l'appui et l'application de programmes d'économie d'énergie et le financement des programmes d'économie d'énergie, tout cela devrait faire en sorte que nous puissions atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés dans le livre blanc en 1978. Bien sûr, j'aurais voulu

parler du dossier nucléaire, mais je reviendrai là-dessus.

Je termine en exprimant à l'avance mes remerciements, pour le passé et pour l'avenir, pour l'étroite collaboration que le conseil d'administration d'Hydro-Québec et son président ont eue à mon égard et à l'égard de ceux de mon cabinet qui suivent ce dossier. Vous allez me permettre également, M. le Président, devant toute la population du Québec, d'exprimer toute mon admiration à l'égard de M. Robert Boyd qui a servi Hydro-Québec pendant 37 ans, qui a vraiment marqué Hydro-Québec et qui a décidé aujourd'hui de prendre, ce que j'appellerais, un repos bien mérité, le repos du guerrier. Je voudrais exprimer toute mon admiration aux travailleurs d'Hydro-Québec, ceux qui ont fait Churchill, ceux qui ont fait la Manie, la Manie-Outardes et la Baie-James.

En terminant, avant que la question ne vienne de l'autre côté, je dis: Soyez sans aucune inquiétude, le 15 décembre, un nouveau PDG prendra la relève à HydroQuébec. Son nom sera connu en temps utile. Je voudrais lui souhaiter la bienvenue à Hydro-Québec et lui dire qu'ensemble, nous allons continuer à travailler pour qu'Hydro demeure notre fleuron, un objet de fierté légitime pour tous les Québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, je demande la suspension des travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Adopté.

Suspension des travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 50)

(Reprise de la séance à 15 h 04)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous pouvez vous asseoir.

La parole est au député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention ce matin le ministre de l'Énergie et des Ressources tenter de justifier les hausses accélérées des tarifs d'électricité dans cette province par des théories pseudo-énergétiques.

À ce sujet, il a emprunté d'ailleurs au ministre des Finances un discours que ce dernier nous a servi dernièrement, lorsqu'il nous a annoncé la hausse vertigineuse des taxes sur l'essence.

Paraît-il que c'est pour des objectifs vertueux que le ministre des Finances et le ministre de l'Énergie se sont ligués pour augmenter de 0,30 $ le gallon d'essence et pour augmenter, l'année prochaine, les tarifs d'électricité de 16,3%. Paraît-il que c'est pour favoriser les économies d'énergie.

En effet, comment convaincre les chauffeurs de taxi et comment convaincre les commissions de transport qu'ils doivent, eux aussi, participer à l'effort d'économie d'énergie. Il fallait y penser, et le ministre des Finances et le ministre de l'Énergie ont trouvé la solution. Comment convaincre les consommateurs d'électricité qu'ils doivent arrêter de chauffer leur maison à l'électricité, alors qu'il y a quelques années Hydro-Québec, avec l'appui du gouvernement de ce temps-là, avait justement encouragé tout le monde à utiliser l'électricité?

Mais le ministre n'aura convaincu personne si ce n'est, bien sûr, le ministre des Finances et lui-même, parce que tous et chacun ont reconnu les véritables intentions du gouvernement. C'est transformer Hydro-Québec en percepteur d'impôt. D'ailleurs, il est significatif que les propositions qui nous sont faites dans ce projet de loi dérivent directement, comme l'a dit si bien le ministre ce matin, du discours sur le budget du mois de mars que le ministre des Finances nous avait servi immédiatement avant les élections et qui, d'ailleurs, fut critiqué par le premier ministre comme étant une catastrophe. Je crois que tous ceux qui subissent les coupures budgétaires et qui ont à faire face à toutes les incongruités de ce budget reconnaissent que, réellement, c'est une catastrophe. Le projet de loi no 16 dérive directement de ce discours sur le budget, et c'est également une catastrophe.

J'aimerais, pour être un peu plus sérieux et avant d'aller plus loin, poser la question: Qu'est-ce que c'est que la loi no 16? Là-dessus, je crois que nous nous rejoignons des deux côtés de la Chambre, c'est un projet de loi qui aura des répercussions considérables sur Hydro-Québec, telle que nous la connaissons maitenant. Nous sommes d'accord sur ce point.

Mais on peut se poser la question: Qu'est-ce qu'Hydro-Québec? Qu'est Hydro-Québec pour les Québécois et les Québécoises? Bien sûr, c'est la plus importante société au Canada, 18 000 000 000 $ d'actif, M. le Président, et cette société a été classée par le Financial Post comme étant justement la première société au Canada par ses actifs et par ses réalisations.

Les Québécois sont fiers d'Hydro-Québec, parce qu'ils en sont les véritables actionnaires depuis, bien sûr, la nationalisation de 1963. À ce sujet, M. le Président, il faut se rappeler que l'État n'a

pas investi un cent dans cette entreprise. Toutes les sommes nécessaires ont été empruntées par Hydro-Québec et ont été payées directement par les consommateurs utilisant de l'électricité. C'est donc dire que tous et chacun parmi nous, nous croyons que nous sommes les véritables actionnaires d'Hydro-Québec et non pas l'État.

Les Québécois sont également fiers des réussites technologiques d'Hydro-Québec, quand on pense aux grands barrages et je pense, bien sûr, à Manicouagan V, au barrage Daniel-Johnson, qui fut une des premières en Amérique du Nord et qui a permis à nos ingénieurs d'aller vendre ces technologies à travers le monde, et que l'on songe également aux lignes de transport d'énergie à haut voltage qui furent les premières au monde et qui, encore une fois, ont permis au Québec d'acquérir une technologie que nous n'avions pas avant.

Les Québécois sont également fiers de l'impact économique d'Hydro-Québec, parce que c'est une dimension, M. le Président, qu'on oublie trop facilement. En effet, depuis que le Parti libéral du Québec, qui était alors le gouvernement, a lancé la Baie-James, les investissements d'Hydro-Québec ont augmenté année après année pour atteindre jusqu'à récemment 25% de tous les investissements qui se sont faits au Québec. Et ceci a permis justement une création considérable d'emplois qui a monté certaines années jusqu'à 18 000 emplois. Tout cela a permis le développement des grands bureaux de génie-conseil dont tous et chacun nous sommes si fiers qui, à partir de cette technologie, à partir de ces grands travaux, ont pu parcourir le monde et faire en sorte que notre technologie, avec l'appui d'Hydro-Québec International, puisse ajouter à ces retombées économiques.

Les Québécois sont fiers du fait qu'Hydro-Québec ou je devrais dire, ils étaient fiers du fait qu'à venir jusqu'à maintenant, les tarifs d'Hydro-Québec étaient, comme on le disait, les plus bas au monde. J'en parlerai tout à l'heure parce que je reviendrai justement sur la comparaison que le ministre a faite avec l'Ontario, pour constater que, de plus en plus, nous aurons la vie difficile au Québec puisque notre tarification, malgré ce qu'en a dit le ministre ce matin, se rapproche dangereusement de celle de provinces avec lesquelles nous sommes en concurrence pour attirer l'industrie. (15 h 10)

Les Québécois sont fiers de cette richesse naturelle, la ressource hydroélectrique, qui leur appartient, ou qui leur appartenait, devrais-je dire, qui nous permettait d'attirer des industries et qui, justement, nous permettait de développer notre économie et de créer de l'emploi. C'était et c'est encore, jusqu'à l'adoption de ce projet de loi, un atout important de notre développement économique.

Tout cela appartenait et appartient encore à tous les Québécois. À vous, M. le Président, à nous tous au Québec, à vous, monsieur, et à vous, madame, qui m'écoutez présentement, tous, depuis la nationalisation, nous étions et nous sommes encore actionnaires d'Hydro-Québec. Cela, c'était avant la loi 161 Savez-vous qui sera, maintenant, le seul actionnaire d'Hydro-Québec une fois que la loi 16 sera adoptée? Curieuse coïncidence, alors que, jusqu'à maintenant, c'étaient les 6 000 000 de Québécois, dorénavant, nous aurons un seul actionnaire qui sera, vous le devinez, le ministre des Finances. C'est une coïncidence, je dirais, tout à fait extraordinaire que l'on puisse faire, par ce projet de loi, un changement substantiel à la mission d'Hydro-Québec et faire en sorte qu'une société qui appartenait à tous et chacun d'entre nous devienne la propriété du seul ministre des Finances de la province de Québec.

Pour quelle raison? C'est bien simple, c'est que le ministre des Finances veut en faire une sorte de Société des alcools ou une sorte de Loto-Québec, la société qui s'occupe de Loto-Québec, dont l'existence ne se justifie que pour remplir les coffres du gouvernement. Vous irez dans les comtés, vous irez dans les régions et on vous dira que c'est un argument qui porte.

Une voix: On va voir si vous serez fort, vous, ce soir.

M. Fortier: Oui. Il s'agit là de la spoliation d'un bien public. C'est le bris d'un contrat social existant depuis 1962 entre le gouvernement et la population du Québec. À ce sujet, j'aimerais citer ce que M. Lesage disait en 1962. On se rappellera toute l'importance accordée à cette guestion, c'est-à-dire la nationalisation des compagnies privées, il y a près de 20 ans maintenant, lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se faire plébisciter sur la question de la nationalisation de l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre de l'époque, l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection de l'automne 1962, déclarait: "De quelle façon allons-nous nous y prendre pour que les 5 600 000 Québécois deviennent les propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés de l'expansion économique de leur province, l'électricité?" C'est un extrait tiré de la Presse du 6 octobre 1962.

La façon choisie, on la connaît maintenant. Ce fut une élection qui permit aux quelque 5 600 000 Québécois de devenir propriétaires et actionnaires de cette richesse naturelle. Or, le gouvernement actuel tient-il compte de ces 6 000 000 de Québécois qui sont maintenant actionnaires

et propriétaires de cette richesse naturelle? Je ne le crois pas, M. le Président.

Quels sont les changements majeurs du projet de loi no 16? Quels changements apporte-t-on à la Loi sur l'Hydro-Québec? Je viens de parler d'un changement fondamental, c'est-à-dire d'un changement qui va faire en sorte que les propriétaires ne seront plus les Québécois, mais que le seul propriétaire sera le ministre des Finances. Mais quels sont les changements qui affecteront Hydro-Québec comme telle? Il y a, d'une part, la modification substantielle à la mission d'Hydro-Québec, et vous me permettrez de citer l'article 22, tel qu'il se lisait précédemment et tel qu'il se lit maintenant. On disait, au préalable, depuis la nationalisation de l'électricité, et même bien avant: "La société a pour objet de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière." J'insiste là-dessus: "... aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière." Que dit l'article 22 maintenant, une fois que le projet de loi no 16 sera adopté, si jamais il l'est? Il dit ceci: "La société a pour objet de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec." On a enlevé un élément de phrase qui est essentiel et qui est extrêmement important pour tous les actionnaires, pour tous et chacun, tant que nous sommes.

Deuxièmement, il y a un changement substantiel. Il y avait l'article 16 qui se lisait comme suit: "La société ne paie aucun loyer ou redevance au gouvernement ni aucune taxe ou contribution en vertu de la Loi sur les impôts; il en est de même des compagnies dont elle détient au moins quatre-vingt-dix pour cent des actions." Ce sont, M. le Président, deux changements extrêmement importants: changement radical à la mission d'Hydro-Québec quant à la nécessité pour elle de fournir l'électricité aux plus bas coûts possible et, d'autre part, une facilité qu'on lui donnait d'arriver à cet objectif en faisant en sorte qu'elle ne soit pas assujettie à des taxes ou des dividendes, si ce n'est que pour des montants très minimes.

Qu'est-ce que cela veut dire, M. le Président? Cela veut dire que, dorénavant, Hydro-Québec n'a plus pour objet d'assurer aux consommateurs et à l'industrie les meilleurs tarifs au monde, parce que, il faut bien le constater, il y a une relation directe entre les charges fiscales qu'une société doit supporter et le coût de revient qui est généré par ces coûts, en plus des autres coûts directs, et qu'en conséquence les prix de vente des produits qu'une compagnie met sur le marché doivent être plus élevés si ses charges fiscales sont plus élevées.

Il s'agit là d'un changement substantiel de politique depuis la nationalisation et depuis que tous les gouvernements ont limité le fardeau fiscal d'Hydro-Québec justement pour permettre ces tarifs les plus bas.

À ce sujet, j'aimerais vous lire une citation tirée du rapport de la Commission royale d'enquête sur la fiscalité de décembre 1965, c'est-à-dire deux ans après la nationalisation, où on disait ceci: "On ne saurait donc relever les redevances imposées présentement à l'Hydro-Québec sans compromettre ou annuler les avantages mêmes de la nationalisation en faveur de l'industrialisation des régions défavorisées car une augmentation sensible des redevances de l'Hydro-Québec entraînerait une hausse des taux de l'électricité, qui, tel un nouvel impôt, frapperait la consommation des particuliers et accroîtrait les frais d'exploitation des sociétés industrielles."

C'est là où j'aimerais m'inscrire en faux contre l'argument du ministre qui disait, ce matin: "Hydro-Québec est une société comme une autre au Québec." Ce n'est pas vrai. Hydro-Québec n'est pas une société comme une autre!

Mais s'il s'agit d'un changement si substantiel et si ce changement peut amener des impacts négatifs sur notre économie, pourquoi le gouvernement a-t-il alors agi de la façon qu'il l'a fait? J'y ai fait allusion tout à l'heure, c'est bien sûr à cause de ses difficultés financières, qui sont si importantes qu'il a décidé d'imposer des taxes indirectes par l'entremise d'Hydro-Québec. Malgré le fait que le ministre ne semble pas aimer l'expert en fiscalité qu'est Marcel Bélanger, j'aimerais quand même citer certains des chiffres qu'il a avancés parce que, si j'avais avancé mes propres chiffres, on m'aurait critiqué, mais comme Marcel Bélanger est une personnalité que tout le monde reconnaît...

Une voix: C'est un libéral!

M. Fortier: Oui, c'est un libéral, mais un libéral extrêmement compétent. C'est malheureux, mais je ne peux absolument rien y faire si les personnes compétentes sont libérales.

Une voix: Bravo! Bravo!

M. Fortier: Marcel Bélanger, dans ce tableau qui résume le fardeau fiscal d'Hydro-Québec d'une façon magistrale, a extrapolé jusqu'en 1985 en utilisant les données qu'Hydro-Québec nous a fournies en commission parlementaire. Il y fait état entre autres, du fait qu'Hydro-Québec paie des taxes municipales. Depuis 1980, d'ailleurs, Hydro-Québec est soumise à un impôt de 3% sur son revenu brut, ce qui augmente son fardeau financier d'environ

50 000 000 $ à 60 000 000 $ depuis 1980. Depuis 1979, Hydro-Québec est soumise à la taxe de vente sur les achats, ce qui n'était pas le cas auparavant. Elle est soumise, bien sûr, au financement des programmes de santé qui a doublé cette année. Comme on sait qu'Hydro-Québec est un employeur des plus importants au Québec, ce fardeau fiscal devient très onéreux pour elle. (15 h 20)

Dorénavant, elle sera soumise à la taxe sur le capital; comme j'en ai fait état il y a quelques minutes, elle était exemptée de ces taxes jusqu'à maintenant et, dorénavant, elle devra payer 100 000 000 $ par année comme taxe sur le capital. Bien sûr, il y aura les dividendes qu'elle devra verser. Ces dividendes, l'an prochain, seront plutôt minimes selon l'opinion du ministre des Finances, soit de quelque 28 000 000 $. Il a, d'ailleurs, dit, lors du dépôt du budget supplémentaire, qu'il était très désappointé parce qu'il croyait que c'était pour être bien plus élevé que cela. Mais en 1985 ces dividendes pourraient être de l'ordre de 900 000 000 $.

Si vous additionnez tous ces chiffres, vous voyez que le fardeau fiscal d'Hydro-Québec était, en 1978, en 1979 et dans les années précédentes, de l'ordre de 50 000 000 $. Vous vous apercevez qu'en 1980 ce fardeau fiscal a augmenté à 78 000 000 $, c'est-à-dire une augmentation d'environ 60% et, ensuite en 1981, à 176 900 000 $, c'est-à-dire une augmentation de 369% et ainsi de suite.

Ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, de plus, les consommateurs d'électricité doivent payer une taxe de vente sur leur consommation électrique. Le ministre faisait des comparaisons, ce matin, avec d'autres provinces; il a oublié de mentionner, ce qui est extrêmement important, qu'en Ontario il n'y a pas de taxe de vente sur l'électricité, mais nous en avons une, ici, au Québec, et cette taxe de vente va en s'accroissant, puisque les tarifs électriques iront en croissant durant les années qui viennent, et rapportera, en 1982, quelque 160 000 000 $.

Si vous faites le total du fardeau fiscal relié à l'électricité, c'est-à-dire si vous ajoutez les taxes qu'Hydro-Québec doit payer et la taxe de vente que les usagers doivent payer, vous vous rendez compte que ce fardeau augmente d'une façon vertigineuse. Ce fardeau qui était de l'ordre de 124 000 000 $ en 1978 passera à 455 000 000 $ en 1982 pour atteindre 2 500 000 000 $ en 1985. C'est donc une augmentation vertigineuse qui fait que dans une période d'environ cinq ans le fardeau fiscal est multiplié par environ 10.

Mais ce qui est encore plus significatif que les hausses de taxes qui se sont ajoutées à Hydro-Québec, ces dernières années et qui iront en s'accroissant d'une façon exponentielle durant les années qui viennent, c'est le fait que si on compare le fardeau fiscal imposé à Hydro-Québec à celui qui est imposé à Hydro-Ontario, on s'aperçoit qu'en 1982, ce fardeau fiscal ne sera que de 102 000 000 $ en Ontario et qu'il sera de 455 000 000 % au Québec.

C'est donc dire que le fardeau fiscal sera quatre fois plus élevé au Québec qu'en Ontario. Il ne faut pas se surprendre si Hydro-Québec se sent obligée d'augmenter ses tarifs justement pour aller chercher ses revenus additionnels, pour pouvoir, par la suite, refiler ces augmentations au gouvernement. Je reviendrai d'ailleurs tout à l'heure sur la comparaison avec l'Ontario. À cause de ces augmentations de taxes, de ces augmentations de la fiscalité qui sont imposées maintenant à Hydro-Québec et qui sont répercutées sur les tarifs, ces derniers deviendraient dans l'avenir beaucoup plus élevés que ceux qui seront pratiqués par notre province voisine. Bien sûr, le ministre qui ne voulait pas accepter cette comparaison, ce matin, avec l'Ontario disait: Vous savez, ce n'est pas une province avec laquelle on peut faire une comparaison parce que le programme d'investissements n'est pas aussi important que celui du Québec. Il nous a donnés certaines statistiques. Avec raison, il nous a dit que les augmentations de tarifs d'Hydro-Ontario depuis cinq ans n'avaient augmenté que de 57%.

Il est vrai qu'en 1976 et 1977, il y a eu des augmentations en Ontario qui étaient extrêmement importantes. Depuis cinq ans, les augmentations de tarifs en Ontario n'ont été que de 57%. Quelles ont été les augmentations d'Hydro-Québec depuis que le Parti québécois est au pouvoir, c'est-à-dire de 1977 à 1982? Elles ont été de 97%, M. le Président, alors que l'inflation, durant la même période, n'était que de 62%. Je ne ferai pas de comparaison avec Manitoba Hydro, puisque le ministre nous dit que c'est une mauvaise comparaison, mais je la ferai avec Hydro-Ontario.

Un chiffre qui ne trompe pas, M. le Président, c'est que les hausses de tarif en 1982, au Québec, seront en moyenne de 16,3%, alors qu'en Ontario, elles ne seront que de 9,6%. Mais ce qui est le plus extraordinaire, c'est que si vous examinez le tarif domestique qui s'applique aux usagers, vous constatez qu'en 1981 la différence était de l'ordre de 15%, et ceci avant l'augmentation de 1982. Mais encore là, il faut faire une remarque. Il faut dire qu'il y a une taxe sur l'électricité au Québec, alors qu'il n'y en a pas en Ontario. Et si vous prenez en considération la taxe de vente qui s'applique au Québec ainsi que les hausses de tarifs qui s'appliqueront en Ontario et au Québec en 1982, vous constatez que pour le tarif domestique, la différence s'amenuise dangereusement.

En ce qui concerne la moyenne puissance - et c'est le tarif qui s'applique surtout à la petite et à la moyenne entreprise - on s'aperçoit, en examinant les tableaux que nous a fournis Hydro-Québec lors de la dernière commission parlementaire, que pour la puissance de facturation et la consommation-type - c'est le tableau 3 qu'Hydro-Québec nous avait donné - on s'aperçoit que pour une consommation, supposons, de 200 000 kilowattheures, la différence entre Hydro-Québec et Hydro-Ontario est très minime, en fait, 6359 $ contre 6767 $. Il y a un fait certain, c'est que les tarifs qui s'appliquent même à l'industrie deviennent très voisins l'un de l'autre.

Si l'on prend en considération le fait qu'il n'y a pas de taxe de vente en Ontario, on peut dire avec certitude, M. le Président, qu'il y a un grave danger que, très bientôt, les tarifs d'Hydro-Ontario soient aussi bas que ceux du Québec et que les tarifs d'Hydro-Québec les dépassent même dans l'avenir.

Malgré ce qu'a dit Hydro-Québec en commission parlementaire, j'ai eu la curiosité, M. le Président, de faire venir la soumission qu'Hydro-Ontario avait faite à l'Ontario Energy Board. Comme vous le savez, M. le Président, en Ontario, on fait l'analyse de la tarification d'une façon beaucoup plus sérieuse qu'ici. Mon collègue, le député de Mont-Royal, pendant plusieurs années, avait demandé que les études de tarification soient faites par un comité d'experts, de façon à protéger les contribuables, de façon à protéger les consommateurs. Cela fait plusieurs années que cela se fait en Ontario et l'on doit constater que les augmentations de tarif sont beaucoup plus raisonnables que celles qui sont pratiquées au Québec.

Le ministre nous disait ce matin: On ne peut pas faire de comparaison, parce que Hydro-Ontario est suréquipée. Je ne comprends pas le raisonnement du ministre. Si Hydro-Ontario s'est suréquipée et si, justement, il y a un suréquipement qui fait qu'en Ontario il y a une capacité de produire de l'électricité qui soit plus grande que la demande de l'Ontario, il me semblerait, M. le Président, que la tarification aurait dû augmenter davantage puisque l'Ontario devait subir les immobilisations, l'intérêt, le paiement de capital qui s'imposent dû au fait qu'ils étaient suréquipés et qu'ils devaient payer ces coûts, alors même qu'ils ne pouvaient vendre cette électricité aux consommateurs de l'Ontario.

Par ailleurs, j'ai comparé aussi, M. le ministre, les investissements qui seront faits en Ontario en 1982. Chose assez surprenante, parce que Hydro-Québec semblait nous dire qu'il n'y avait pas de comparaison à faire, en Ontario, en 1982, les investissements seront de l'ordre de 2 400 000 000 $, alors qu'au Québec les investissements seront de 2 500 000 000 $. Il faut en conclure, M. le Président, qu'on peut faire une comparaison avec l'Ontario, que les charges financières auxquelles est sujette Hydro-Ontario sont très semblables à celles auxquelles est soumise Hydro-Québec.

J'étais à Shawinigan en fin de semaine et des gens me disaient: Vous savez, il paraît que le ministre de l'Énergie a pris récemment la décision de s'acheter un poêle à bois. Je le comprends, M. le Président - et c'est ça que ses commettants m'ont dit, vous en avez deux poêles à bois - parce qu'il savait, lui, quelles augmentations nous étions pour avoir en 1982. Il a pris les devants. (15 h 30)

Lorsque le ministre fait des comparaisons avec le gaz, j'aimerais bien que le ministre nous dise toute la vérité. Je voudrais porter à votre attention, M. le ministre, que le communiqué de presse que vous avez publié dernièrement annonçant l'augmentation de 16,3% des tarifs d'Hydro-Québec en 1982 contenait un tableau qui était faux lorsqu'on comparait l'électricité avec le gaz. En effet, il y avait un tableau attaché - le tableau C - à votre communiqué de presse qui semblait indiquer qu'en 1982 il en coûterait quelque 10% meilleur marché pour se chauffer au gaz plutôt qu'à l'électricité.

M. le Président, lorsque j'examine les chiffres, je constate qu'il avait oublié d'ajouter au prix du gaz la taxe de vente sur ce produit-là. Si vous ajoutez la taxe de vente qui s'applique au gaz naturel, tout comme à l'électricité, on arrive à la conclusion que la différence entre l'électricité et le gaz, en 1982, sera de l'ordre de 3% ou 4%. Aussi bien dire qu'en 1982, à toutes fins utiles, il n'y aura pas de différence. On peut se poser la question si le ministre, en augmentant les tarifs d'électricité, avait en tête cet objectif de favoriser le gaz, parce qu'il n'atteint nullement son objectif.

Mais qu'est-ce qui s'est passé? Si les tarifs de l'Hydro-Ontario deviennent semblables ou très proches de ceux d'Hydro-Québec, je dois admettre, M. le Président, que je ne comprends pas. Encore là, dans la documentation qui m'a été fournie par l'Hydro-Ontario, je constate, comme tout le monde le sait d'ailleurs, qu'Hydro-Ontario génère son électricité en très grande partie par le nucléaire. 36% de l'électricité est générée par le nucléaire, 34% de l'électricité générée en Ontario vient des produits fossiles comme le gaz, le charbon, l'huile, le pétrole. La différence vient des ressources hydroélectriques. Nous savions tous, M. le Président, que nous avions des ressources hydroélectriques considérables. Nous savions tous que ces ressources hydroélectriques

devaient nous donner en principe la tarification la plus basse au monde. Comment se fait-il que nous en sommes presque au point où notre province voisine aura une tarification à peu près semblable à celle d'Hydro-Québec? Je crois, M. le Président, et ceci mériterait une analyse -que, durant les quatre dernières années, sous l'égide du Parti québécois, il a favorisé des augmentations de tarification considérables et qu'il désire en favoriser de plus grandes à l'avenir, ce qui explique justement que nous sommes en train de perdre au Québec cet atout considérable qu'étaient nos richesses naturelles, nos ressources hydroélectriques.

J'essaie de comprendre pour quelle raison le gouvernement et le ministre ont choisi ce moment pour accélérer les coûts d'Hydro-Québec. Bien sûr, ils ont besoin d'argent, mais il y a des impacts négatifs d'une importance significative. Il y a un impact négatif, en premier lieu, auprès des consommateurs qui sont déjà frappés par des taxes indirectes de toutes sortes, qui doivent faire face à des augmentations du coût de l'essence. Ils doivent également faire face à des hausses de tarif d'électricité qui dépassent de beaucoup celles qui seront effectives dans la province voisine.

Dans la Presse du mercredi 25 novembre, je vois que certaines personnes, entre autres M. Maurice Théault, de Montréal, écrivaient des lettres à l'éditeur. M. Théault disait ceci: "Alors que le gouvernement péquiste se targue d'être davantage social-démocrate que les administrations précédentes et prétend établir un moins mauvais équilibre entre les biens nantis et les mal nantis, en pratique, ce gouvernement approuve une structure tarifaire d'Hydro-Québec qui pénalise davantage les personnes âgées et seules, forcées à l'austérité." On ne peut passer sous silence le fait que ces augmentations, depuis cinq ans, et les augmentations d'électricité dans l'année qui vient, vont frapper durement certaines personnes qui ont de la difficulté à faire face à la conjoncture économique.

Je rappelle, comme je l'ai dit tout à l'heure, que ce sont ces gens qui sont les vrais actionnaires d'Hydro-Québec et non pas le gouvernement. Ce qui est plus important pour l'avenir, c'est que cette augmentation du fardeau fiscal d'Hydro-Québec l'empêchera de jouer pleinement son rôle de moteur de l'économie. En fin de semaine dernière justement, le conseil d'administration d'Hydro-Québec a approuvé des coupures de 190 000 000 $ dans les programmes d'investissement de l'an prochain.

En commission parlementaire, à la fin du mois dernier, M. le Président, Hydro-Québec nous avait annoncé des coupures budgétaires de l'ordre de 370 000 000 $. C'est donc dire qu'à cause de la conjoncture économique et à cause des nouvelles taxes qui seront imposées à Hydro-Québec, le conseil d'administration a dû couper, pour l'an prochain, son programme d'investissement de 560 000 000 $. Pourtant, Hydro-Québec, par l'entremise de son trésorier, au mois de février 1981, lors de la commission parlementaire, alors qu'elle nous présentait son programme d'investissements, nous disait justement qu'il serait extrêmement difficile pour elle de financer son programme d'investissements, puisque le crédit devenait de plus en plus difficile à réaliser. M. Lafond, le trésorier, nous disait justement qu'Hydro-Québec aurait besoin de toutes ces ressources financières.

Comment comprendre, dans une telle situation, que le ministre des Finances et que le ministre de l'Énergie n'aient pas prêté attention à cette remarque d'Hydro-Québec, à cet avertissement que le trésorier d'Hydro-Québec leur donnait? Comment comprendre, alors que le chômage deviendra aigu l'an prochain et pire qu'il ne l'est cette année, que le gouvernement fasse en sorte qu'Hydro-Québec doive couper son programme d'investissements?

M. le Président, je ne comprends pas. L'autre jour, je parlais justement avec mon collègue de Bonaventure qui me disait que plusieurs de ceux de son comté qui allaient travailler à la Baie-James depuis 1970 ont bien constaté et ont bien réalisé que le voyage de retour qu'ils venaient de faire récemment serait le dernier voyage puisque, la demande baissant, ils ne pourront plus retourner à la Baie-James dans l'avenir. Ces travailleurs disaient au député de Bonaventure: Cela va prendre un autre gouvernement libéral pour faire en sorte qu'il y ait un autre programme d'investissements, pour faire en sorte que les travailleurs puissent se trouver de l'emploi à l'avenir.

Bien sûr, ce matin, le ministre nous a dit que, malgré les hausses de tarifs accélérées auxquelles seront assujettis tous les clients d'Hydro-Québec, il est possible de faire des tarifs d'exception. Il est vrai -nous le savons - que le gouvernement a adopté une loi qui permet au gouvernement de négocier avec certaines entreprises qui viennent s'établir au Québec et de leur donner des tarifs plus avantageux qu'à ceux qui sont déjà installés ici depuis plusieurs années. Il faut bien comprendre que si le gouvernement décide de donner à la Reynolds une tarification beaucoup plus basse que celle qui est pratiquée normalement, le manque à gagner d'Hydro-Québec devra être payé par quelqu'un d'autre. Ceci devra être payé soit par nous, les consommateurs, ou par le gouvernement, par le biais des taxes. À ce moment, on revient justement au même problème: le fait d'augmenter la tarification d'une façon significative va sûrement dans l'avenir empêcher le gouvernement d'être aussi généreux qu'il a pu l'être dans le

Cet affaiblissement d'Hydro-Québec arrive dans une mauvaise conjoncture. Mon collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce l'a dit à plusieurs reprises, le Québec s'affaiblit. Cet affaiblissement d'Hydro-Québec que l'on semble provoguer arrive justement au moment où le Parti guébécois a réussi ce tour de force de faire en sorte que, sur le plan économique, la province se soit affaiblie beaucoup plus que le restant du Canada. En effet, je constate - mes collègues connaissent ces statistiques - que le chômage est beaucoup plus important qu'il ne l'était sous le gouvernement libéral qui vous a précédés - de fait, il est maintenant de 29% à comparer au reste du Canada, alors qu'il était de 22% à ce moment - et que les immobilisations ont baissé d'une façon considérable. C'est à ce moment que le gouvernement qui nous dirige décide de prendre des décisions qui affectent la mission d'Hydro-Québec et qui affectent surtout sa mission de créateur d'emplois. (15 h 40)

M. le Président, je laisse le soin à la population de juger ce gouvernement qui pratique des politiques économiques qui soient si néfastes pour la province de Québec. J'aimerais, par ailleurs, revenir sur cet argument qu'a utilisé le ministre. Il a dit: Vous savez, le projet de loi no 16 n'affectera pas la gestion d'Hydro-Québec, alors qu'en fait il s'agit, à toutes fins utiles, d'une mise en tutelle d'Hydro-Québec. Malgré les dénégations du ministre, il faut bien constater que le projet de loi no 16 diminue considérablement la marge de manoeuvre d'Hydro-Québec pour lui permettre justement de réaliser ses objectifs.

J'aimerais faire état, M. le Président, d'un rapport confidentiel qui fut préparé par des cadres d'Hydro-Québec et qui fut envoyé au conseil d'administration d'Hydro-Québec le 15 avril 1981. On y analysait les conséquences néfastes des intentions du gouvernement à ce moment-là et qui sont maintenant intégrées dans le projet de loi no 16. On y disait que le budget présenté le 10 mars 1981 entraîne pour Hydro-Québec les conséquences suivantes.

Il y avait certaines conclusions sur le plan financier et d'autres sur la mission et la gestion d'Hydro-Québec. On disait que ce qui est maintenant dans la loi no 16 amènerait la confusion et la dilution des responsabilités en matière de tarification et de prévision de la demande ainsi que des difficultés d'établir des plans valables à long terme.

On disait qu'il s'agissait là d'une atteinte à la responsabilité de l'entreprise en ce qui a trait à la saine administration financière. On disait que c'était un danger de réduire l'autonomie de gestion interne essentielle au bon fonctionnement d'une société d'État. C'était là, M. le Président, sommairement, le jugement porté par les cadres d'Hydro-Québec sur les intentions du gouvernement quant à l'autonomie que, dit-il veut laisser Hydro-Québec.

Il est bien certain que si les dividendes sont déclarés par le gouvernement et non pas par Hydro-Québec elle-même, il sera à peu près impossible pour Hydro-Québec de planifier sa gestion financière. Si elle ne peut planifier elle-même ses besoins financiers à long terme, comment peut-elle planifier ses investissements à long terme, puisque ces mêmes investissements se font sur des périodes de temps allant de cinq à dix ans?

C'est donc dire, M. le Président, que ce projet de loi no 16, qui ajoute un fardeau fiscal extrêmement important à Hydro-Québec et qui, de plus, diminue l'autonomie de gestion d'Hydro-Québec, va rendre la vie extrêmement difficile à ceux qui auront la charge de diriger Hydro-Québec dans l'avenir.

Le ministre nous disait ce matin: Ne vous inquiétez, pas, M. Boyd quittera Hydro-Québec le 15 décembre prochain et, le 16 décembre dans la matinée, il y aura un nouveau président.

M. le Président, je ne comprends pas, il s'agit d'une compagnie qui a des actifs de 18 000 000 000 $. Il s'agit d'une des plus importantes compagnies au Canada. Il m'aurait semblé que le président d'Hydro-Québec qui devra prendre la place de M. Boyd aurait dû être en place depuis plusieurs mois déjà. Il m'aurait semblé que les conseils de M. Boyd pour ce nouveau président auraient été extrêmement importants pour lui faciliter la tâche.

Je ne peux comprendre que le ministre et que le premier ministre ne réalisent pas toute la difficulté qu'ils vont créer à Hydro-Québec en retardant la nomination de ce président, mais je crois qu'on peut comprendre que les gens du secteur privé qui ont été approchés et qui, eux, connaissent la gestion financière ont eu beaucoup de réticence à accepter un poste qui, dorénavant, ne permettra pas à une personne compétente de gérer Hydro-Québec comme elle l'entend à l'intérieur des politiques du gouvernement. Je crois que la difficulté du premier ministre de trouver un candidat s'insère justement à l'intérieur de ce dilemme.

Il s'agit donc, M. le Président, de changements substantiels. Changements substantiels dans la mission d'Hydro-Québec, changements substantiels dans la capacité d'Hydro-Québec de gérer et de planifier ses propres affaires, changements substantiels dans l'avenir quant à la tarification future d'Hydro-Québec. Ceci, il faut bien le dire, va être fait sans aucune consultation avec la population. Elle qui avait été consultée lorsqu'on avait créé Hydro-Québec telle qu'on

la connaît maintenant, en 1963; elle qui avait dit oui à cette nationalisation, qui avait dit oui au gouvernement libéral qui avait décidé de donner une ampleur extraordinaire à cette société d'État, cette population ne sera pas consultée en relation avec le projet de loi numéro 16 qui modifie substantiellement la mission et l'avenir d'Hydro-Québec.

Pourtant, M. le Président, lors de la commission parlementaire de février dernier, des syndicats, la FTQ et la CSN, des associations professionnelles, un qroupe qui était le Front commun pour un débat public sur l'énergie, tous avaient demandé un débat public pour permettre à la population d'intervenir et de s'exprimer sur les choix énergétiques et les implications économiques qui affectent Hydro-Québec.

Le 2 mars 1981, le ministre Bérubé avait justement donné son appui inconditionnel à un débat public qui permettrait à la population de se prononcer sur ces problèmes. D'ailleurs, je vois que dans le Devoir du 5 octobre dernier, justement ceux qui étaient regroupés en front commun pour demander un débat sur l'énergie disent ceci: " Quant à nous, nous voulons rappeler le mandat d'Hydro-Québec: fournir de l'électricité aux Québécois au meilleur coût possible. Pourquoi changer ce mandat sans débat, comme se propose de le faire le projet de loi no 16? Je crois qu'il est indécent pour le gouvernement de procéder de la façon qu'il le fait maintenant sur un sujet aussi important. J'ai fait état des impacts négatifs que ce projet de loi aura sur Hydro-Québec, des impacts négatifs qu'il aura sur les consommateurs et sur les individus, des impacts négatifs qu'il aura sur l'industrie qui pourrait venir s'établir au Québec dans l'avenir.

Je ne peux comprendre qu'on puisse chanqer la mission d'Hydro-Québec sans consulter cette population qui s'est exprimée si clairement dans le passé, non seulement sur la propriété d'Hydro-Québec, mais également sur cet objectif de fournir l'électricité au plus bas coût possible. On peut, bien sûr, rêver de nouvelles politiques énergétiques. Mais il me semblerait, M. le Président, que ces nouvelles politiques énergétiques devraient être débattues et discutées avec la population. J'aimerais faire un appel à tous les députés qui sont dans cette salle, des deux côtés de la Chambre, pour qu'ils comprennent les impacts négatifs de ce projet de loi; pour qu'ils comprennent qu'il est extrêmement important que la population se prononce avant même que le projet de loi no 16 soit adopté.

Je terminerai là-dessus, M. le Président, et je voudrais que l'on comprenne que le projet de loi no 16 est un projet de loi prématuré, en ce sens qu'il se trouve à conclure un débat qui n'a jamais eu lieu. En effet, si, en 1962, le qouvernement libéral s'est senti dans l'obligation d'aller consulter la population sur la nationalisation de l'électricité, quand on sait toutes les conséquences que cela a eu sur le développement du Québec, on ne peut que s'attendre que, près de 20 ans plus tard, le même exercice se répète, compte tenu de la problématique énergétique mondiale et de la situation du Québec. Nous avons insisté, de ce côté-ci de la Chambre, et personnellement je l'ai fait à plusieurs reprises, pour qu'on ait un débat public sur l'avenir énergétique du Québec. Nous ne sommes pas les seuls à le souhaiter. Je l'ai dit, les syndicats, les groupes écologiques et un grand nombre d'autres organismes le réclament avec insistance. On ne peut que constater qu'au sujet d'un débat public sur l'énergie et sur l'avenir de Hydro-Québec, le gouvernement se retrouve devant un front commun à peu près unanime. M. le Président, je termine là-dessus, je demande bien sincèrement à tous les députés de cette Chambre de demander au ministre des Finances et au ministre de l'Énergie de surseoir à leur projet de loi. Je vous remercie. (15 h 501

Le Président suppléant (M. Laplante): M. le député de Roberval.

M. Michel Gauthier

M. Gauthier: Je vous remercie, M. le Président. Je dois vous souligner ma joie de participer à ce débat sur la loi 16 qui est certainement une des lois, sinon la loi la plus importante sur laquelle nous aurons à travailler au cours de cette session.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je ne peux laisser passer l'intervention du député d'Outremont qui a fait, cela va sans dire, un effort louable, mais dont les arguments pour rejeter la loi nous permettent de penser qu'il veut continuer la tradition qu'on a tenté d'établir de ce côté de la Chambre depuis le début de cette Législature, à savoir de traîner les citoyens dans la confusion la plus totale avec des montagnes de chiffres et des choses à peu près inaccessibles pour l'ensemble de la population.

Si j'ai bien écouté et bien compris l'intervention du député d'Outremont, il y a deux arguments, que je n'oserais pas appeler des arguments majeurs parce que c'était simplement des arguments centraux, autour desquels il a articulé sa plaidoirie. Si les citoyens du Québec ont regretté un temps, au moment où ils ont eu à subir l'augmentation des tarifs d'électricité, de nous avoir reporté au pouvoir en avril, aujourd'hui, ils doivent être très heureux si on considère que le critique officiel de l'Opposition en matière d'énergie serait

possiblement, c'est logique de le croire, l'éventuel ministre de l'Énergie dans un cabinet d'un gouvernement libéral. Que penser d'un ministre de l'Énergie dont le modèle principal, dont l'idéal serait d'orienter notre Hydro-Québec sur Hydro-Ontario? Hydro-Ontario qui est beaucoup moins importante qu'Hydro-Québec, beaucoup moins rentable qu'Hydro-Québec, qui participe beaucoup moins au fardeau fiscal des contribuables de l'Ontario, qui possède beaucoup moins d'expertise technique que n'en possède Hydro-Québec et qui, malgré tous ces désavantages, réussit tout de même à vendre son électricité 12% plus cher aux contribuables de l'Ontario que ne le fait Hydro-Québec. Imaginez le ministre de l'Efnergie que ça donnerait!

Le deuxième argument était visiblement destiné à semer la confusion dans la population en disant - et on l'a entendu à plusieurs reprises - Hydro-Québec appartenait à tous les citoyens du Québec, elle ne vous appartiendra plus, elle appartiendra à l'État. M. le Président, les citoyens qui m'écoutent et qui sont propriétaires d'Hydro-Québec, est-ce qu'il y en a un qui a déjà essayé de demander à Hydro-Québec de participer à sa charge fiscale? Est-qu'il y a un citoyen qui a déjà essayé d'aller faire accélérer ou d'aller ralentir un projet poursuivi par HydroQuébec? Cette notion théorique de propriété, les gens n'en sont pas dupes. Le seul moyen d'intervenir auprès d'une société d'État, de l'ensemble des sociétés d'État, comme auprès d'Hydro-Québec, c'est, bien sûr, via le gouvernement, via les représentants des citoyens. Cette notion de propriété théorique ne veut rien dire dans le vécu des gens.

J'aimerais, avant d'aborder la loi 16 comme telle, essayer d'expliquer aux citoyens ce qui a poussé le ministre de l'Énergie et le gouvernement du Québec à apporter une hausse des tarifs d'électricité dans une période qui, cela va sans dire, est particulièrement difficile pour l'ensemble de la population du Québec. Pourquoi augmenter les tarifs d'électricité alors que les citoyens doivent faire face à des taux d'intérêt considérables, à différentes difficultés économiques et à du chômage?

D'abord, le député d'Outremont a parlé d'éviter le gaspillage. Cela va de soi, c'est un des objectifs, éviter le gaspillage, qui peut être rejoint par une augmentation des tarifs. Mais, j'en conviens, c'est bien pauvre comme argumentation de base. La véritable raison qui a amené le gouvernement à permettre à Hydro-Québec de hausser ses tarifs c'est plutôt de rendre Hydro-Québec plus rentable afin que celle-ci puisse, comme c'est son devoir, participer davantage au fardeau fiscal de l'ensemble des citoyens. Le gouvernement voulait d'abord et devait, cela va de soi, aligner le prix de l'hydroélectricité et, d'une certaine façon, le rendre concurrentiel avec le prix des autres énergies.

Tout le monde aura compris que si cette opération n'avait pas été faite, d'abord on aurait assisté à un phénomène de transfert absolument massif de tous les systèmes de chauffage, par exemple, à l'électricité. S'il en coûtait deux fois ou trois fois moins cher pour utiliser un appareil quelconque, que ce soit un appareil de chauffage ou autre, s'il en coûtait deux ou trois fois moins cher de le faire via l'électricité, on aurait assisté, bien sûr, à un transfert absolument rapide et radical à cette source d'énergie.

Ceci aurait entraîné - et cela, les gens vont le comprendre facilement - une consommation absolument énorme dans les prochaines années, dans les prochains mois. Et Hydro-Québec, bien sûr, qui produit l'électricité et qui peut encore aménager des rivières du Québec, on le sait, est quand même limitée par le temps et par l'argent, dans ce développement. Hydro-Québec devait faire face - si on n'avait pas augmenté les tarifs - à une hausse absolument vertigineuse de la demande et avec un équipement, insuffisant - les citoyens qui ont déjà manqué d'électricité le 21 décembre le savent - elle devait faire face à une hausse de la demande d'énergie qu'elle n'aurait pas été capable d'absorber à très court terme. Cela est un élément. Il faut absolument - et cela répond à toutes les lois logigues - que le prix des énergies, d'une certaine façon, soit en concurrence.

Deuxièmement, si on avait refusé d'ajuster les taux, il y aurait eu pour HydroQuébec un manque à gagner passablement important. Ce manque à gagner, j'aimerais l'expliquer comme ceci: dans la consommation électrique globale au Québec, ce que les gens doivent savoir, c'est que 75% de l'énergie électrique consommée l'est par des entreprises, par des compagnies ou est de l'électricité qu'on exporte ailleurs. Les autres 25% représentent la consommation quotidienne de Monsieur Tout-le-monde, de l'ensemble des citoyens du Québec.

Si le gouvernement n'avait pas ajusté d'une façon assez raisonnable et importante les taux d'électricité, c'est donc dire que, bien sûr, Monsieur Tout-le-monde aurait bénéficié d'une certaine réduction de sa facture d'électricité. Mais c'est là un profit bien éphémère puisque les gros consommateurs d'électricité, ceux qui en auraient le plus profité, ça aurait été les entreprises du Québec, les entreprises de l'extérieur, les entreprises fortement consommatrices d'électricité, et Dieu sait si ce ne sont pas toujours celles qui sont dans des situations financières pénibles. En accordant cette hausse, en plus d'aligner le prix de l'électricité sur le prix des autres énergies - et cela était nécessaire, on l'a vu

tout à l'heure - le surplus des profits enregistrés par notre Hydro-Québec, ce surplus des profits qui est fourni à 75%, je le rappelle, par des entreprises ou par des clients éventuels qui achètent l'électricité du Québec, les 75% de ce surplus et les 25% de ce surplus qui provient des consommateurs sont réinjectés au total dans le budget du Québec, de telle sorte que les citoyens voient, par le fait même, leur fardeau fiscal réduit. Imaginez, où un gouvernement libéral prendrait-il l'argent que nous allons aller chercher à Hydro-Québec, qui nous appartient, qui est notre entreprise, où prendrait-il l'argent que nous allons aller chercher via cette hausse de tarif? (16 heures)

Je le rappelle, de cette somme budgétaire qui est incluse, qui sera injectée pour soulager les citoyens, 75% proviennent non pas de Monsieur Tout-le-Monde, mais de l'ensemble des entreprises et des gens qui achètent notre électricité. C'est là de la véritable responsabilité administrative pour des gens qui, depuis quelques jours, se permettent de faire des motions de censure à l'endroit du gouvernement, imaginez! pour mauvaise administration. Ces gens-là sont en train de dire aux citoyens du Québec qu'ils auraient préféré que des sommes qui seront injectées par Hydro-Québec, 75% provenant des entreprises et des gens de l'extérieur, on les redonne aux entreprises, on les redonne aux Américains. Imaginez quel serait le fardeau fiscal des citoyens. Il n'y a pas eu encore d'explication là-dessus; possiblement qu'avec le déroulement de ce débat, on en saura un peu plus dans les prochaines heures. On l'espère en tout cas.

Le gouvernement a essayé de respecter tout de même, il faut le dire, des propositions d'augmentations des tarifs d'électricité, des augmentations réalistes. Il y a un certain nombre de principes, vous savez, M. le Président, qui ont été respectés par le ministre de l'Énergie qui a étudié le dossier avec tout le sérieux qu'on lui connaît et qui a essayé de garder pour les dépenses de base, la consommation de base de l'ensemble des citoyens, une hausse d'environ 12,5% par année, c'est-à-dire le taux de l'inflation. Bref, l'électricité pour notre consommation de base a auqmenté à peu près au même niveau que l'inflation à chaque année. Cela est un premier principe. Ce n'est tout de même pas dramatique.

Deuxièmement, le ministre a essayé de conserver pour les entreprises du Québec, et il a réussi, comme pour les consommateurs du Québec, nos concitoyens qui nous ont élus, il a essayé de conserver, dis-je, un avantage relatif par rapport au prétrole. Il faut que cela soit économigue d'utiliser de l'électricité parce que cette électricité nous appartient. Également, le ministre a essayé d'obtenir d'Hydro-Québec, de notre société, qu'on a payée avec notre argent, un meilleur rendement de cet argent pour participer activement au projet social que le Québec est en train de se bâtir, de se donner.

Enfin, le ministre a bien voulu - et qui le lui reprocherait - rentabiliser d'une certaine façon les ventes d'électricité qu'on fait à l'étranqer. Il est normal, puisqu'on désire cette énergie et qu'on en fournit à des étrangers, que ceux-ci aient à payer un prix juste et raisonnable, un prix qui nous permette de faire un certain profit.

M. le Président, pour revenir à la loi no 16. D'abord, les gens l'auront compris, il n'y a rien de dramatique là-dedans, l'objectif premier est de traiter Hydro-Québec sur le même pied que l'ensemble des sociétés d'État ou sur le même pied que l'ensemble des sociétés, des entreprises privées qu'on a au Québec. Est-ce qu'il y a quelque chose de dramatique là-dedans? Est-ce que les citoyens du Québec se sentent profondément blessés ou est-ce qu'ils se sentent lésés du fait que leur gouvernement veut qu'Hydro-Québec soit traitée comme toutes les entreprises du Québec? Je ne le pense pas, M. le Président.

De plus, le ministre a exprimé, par ce projet de loi, la ferme volonté - cela touche les gens dans leur guotidien, lorsgu'ils paient leur note d'impôt - de récupérer, au nom des citoyens du Québec, les avantages de la nationalisation, les avantages du fait qu'à un moment donné de notre histoire, les citoyens du Québec ont accepté d'acheter les barrages hydroélectriques et de devenir propriétaires d'Hydro-Québec. Encore là, je devrai exprimer mon étonnement qu'un éventuel gouvernement libéral s'insurge contre le fait qu'on veuille qu'Hydro-Québec, qu'on a payée, que les citoyens ont payée à force de sacrifices et d'impôts, de participer elle aussi, dans cette période difficile, à la réalisation de notre projet collectif. Est-ce qu'il y a quelque chose de scandaleux là-dedans? Est-ce que les citoyens du Québec sont scandalisés que le qouvernement demande à Hydro-Québec de faire son effort, elle aussi? Je ne le pense pas.

En terminant, que sert aux citoyens d'investir dans des entreprises d'État, dans des entreprises publiques si ça ne rapporte jamais? Notre but est évident, et vous l'aurez compris, les citoyens l'auront compris. Lorsqu'on développe les sociétés d'État, lorsqu'on utilise l'arqent des contribuables pour investir dans notre économie, ce n'est pas pour créer des sociétés d'État comme celles auxquelles on a été habitués sous le régime libéral, des sociétés d'État déficitaires, qu'on devait renflouer à même nos taxes. Ce que le gouvernement veut faire et ce que les citoyens doivent savoir, c'est que le qouvernement rentabilise les sociétés d'État et a bien l'intention de les faire participer

très activement à l'effort collectif des Québécois. Cela, les citoyens le savent, et c'est pour ça qu'ils nous ont fait confiance le 13 avril et qu'ils nous feront confiance encore. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, nous avons encore, à l'occasion de ce débat, eu droit à des formes de langage qui, je dois le dire, comme le reste de mes collègues, d'ailleurs, cachent une grande partie de la vérité. C'est ainsi qu'on entend beaucoup d'arguments fondés sur la nécessité d'adopter, par le biais de cette loi, une politique énergétique qui fait gravement défaut au Québec depuis cinq ans, malgré les promesses répétées qu'on a entendues de l'autre côté de la Chambre. C'est sous un langage qui continue à camoufler et déguiser les véritables intentions du gouvernement que nous constatons l'introduction de cette mesure dans cette Chambre.

Évidemment, avec le gouvernement actuel, il y a une certaine expertise dans le langage de camouflage. On a pu le constater, sans faire de l'histoire tellement ancienne, à l'occasion du référendum, une question alambiquée; à l'occasion des élections, qui étaient précédées du budget, le 10 mars, où on annonçait des réductions d'impôt de 2% pour l'an prochain - et ça n'existe plus - et à l'occasion de cette même élection, où il y avait une mise en veilleuse d'une option qui est sans doute - on le verra en fin de semaine - fondamentale pour le parti gouvernemental. Au niveau de la constitution, les grands défenseurs des intérêts des Québécois n'ont pas été capables de faire valoir le veto traditionnel du Québec, n'ont pas été capables de représenter avec dignité, avec fierté et avec bonne foi, surtout, le caractère de la dualité du pays, du Canada.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

Maintenant, nous avons, sous le couvert du langage d'une politique énerqétique, une manifestation de la volonté du gouvernement de changer le rôle d'Hydro-Québec. Hydro-Québec a toujours été au service des Québécois, non pas au service du gouvernement du Québec. Il y a là une distinction fondamentale dans le débat auquel nous participons aujourd'hui.

À l'origine, très clairement, depuis au moins 1962 ou 1963, lors de la nationalisation de l'électricité, Hydro-Québec devait fournir - c'était là son mandat clair, net et précis - l'électricité aux Québécois au plus bas taux possible. C'est ça, un mandat clair, un mandat net, un mandat précis. C'est à la lumière de ce mandat d'Hydro-Québec, depuis une vingtaine d'années maintenant, que nous avions pu, nous, Québécois, ressentir une fierté très certaine devant cet organisme qui est l'expression même du dynamisme de notre société, grâce à son autonomie de fonctionnement que consacrait un mandat clair, net et précis, grâce à l'absence d'ingérence de la part du gouvernement dans le fonctionnement de tous les jours, dans l'établissement des stratégies à long terme d'Hydro-Québec, grâce aussi, évidemment - cela s'ensuit - à l'engagement, à la formation de professionnels, d'experts de tous les niveaux, de toute nature, afin de donner à la société Hydro-Québec l'envergure qu'on lui connaît non seulement ici au Québec et en Amérique du Nord, mais sur le plan international. (16 h 10)

C'est donc de cette façon, grâce à ce mandat de fournir aux Québécois - c'était un objectif extrêmement précis - l'électricité au plus bas coût possible, qu'on pouvait voir, à ce moment-là, cette société être gérée d'une façon extraordinairement professionnelle, qu'on pouvait voir les retombées qu'elle créait par son existence même, retombées des investissements faramineux que nous avons faits dans le domaine de l'éducation pour nos jeunes et pour lesquels nous créions au Québec des débouchés extrêmement attrayants, d'abord à l'intérieur d'une grande société d'État et ensuite dans tous les domaines de l'activité de haute technologie.

Intervient maintenant le projet de loi no 16, facteur, pour le moins, d'incertitude dans les développements, dans les projets d'investissement d'Hydro-Québec. On peut voir ces flottements, ces hésitations, depuis maintenant plusieurs mois à Hydro-Québec, comme l'a évoqué mon collègue d'Outremont, compte tenu de l'hésitation, de la négligence du gouvernement à pourvoir au remplacement d'un président-directeur général. Une société de cette envergure ne se mène pas à la petite semaine. On n'engage pas à la dernière minute quelqu'un qui voudrait bien s'en occuper. C'est un manque de la part du gouvernement d'où les flottements, d'où l'abaissement, si on veut, la réduction du dynamisme, la diminution du dynamisme qui caractérisait la société Hydro-Québec depuis si longtemps.

S'ajoute aussi au projet de loi no 16 et à tous les facteurs d'incertitude qu'il contient, l'incompréhension flagrante du gouvernement pour tous les éléments si délicats qui doivent être équilibrés si on veut qu'Hydro-Québec continue à connaître ce

dynamisme que son autonomie de gestion, que l'absence d'ingérence du gouvernement pouvait déterminer et aider à déterminer.

C'est l'ensemble de tous ces facteurs qui faisait que, depuis des années, HydroQuébec était véritablement au service de tous les Québécois. Encore une fois, on y revient, il y a beaucoup d'arguments. Le gouvernement fait valoir les prix du pétrole, les prix du gaz, mais je voudrais souligner, M. le Président, que c'est le 10 mars 1981, à l'occasion d'un discours sur le budget par un ministre des Finances et non lors d'une déclaration d'un ministre de l'Énergie et des Ressources, que nous avons appris le rôle qui venait de changer à Hydro-Québec. Qu'on vienne aujourd'hui plaider que c'est le ministère de l'Énergie et des Ressources qui a le leadereship dans ce dossier et que les députés de l'autre côté passent leur temps à justifier des hausses inqualifiables de tarifs d'électricité que devront subir les consommateurs québécois, sous le couvert d'une politique énergétique, alors que c'est le ministre des Finances qui a lui-même annoncé qu'à l'avenir, c'est une machine à impôt et non pas une machine à électricité qu'Hydro-Québec, c'est absolument faire des raccourcis qui sont inadmissibles pour les Québécois dans ce débat.

Mais comment Hydro-Québec, selon le bon vouloir du ministre des Finances, devient-elle une machine à impôt? C'est tellement évident; malheureusement, on doit continuer à le redire. On a décrit ici, en cette Chambre, l'impasse financière, le cul-de-sac financier dans lequel se retrouve le gouvernement maintenant, après cinq ans de gestion, moins compétente qu'on ne l'eût cru, des fonds publics. La dette publique des Québécois est passée à 6000 $ par Québécois, 25 000 % par famille québécoise. C'est le niveau de la dette publique, ici au Québec, qui a plus que triplé depuis cinq ans.

Et les impôts élevés à travers tout cela. Évidemment, si les revenus du gouvernement ont doublé, les impôts ont doublé quelque part, beaucoup plus que le taux d'inflation ne l'aurait suggéré. À travers tout cela, des taxes indirectes en plus qui ont presque doublé, elles aussi, depuis cinq ans, qu'il s'agisse - c'est toujours la même chose avec ce gouvernement - de taxes indirectes, d'impôts déguisés, de machines à percevoir les impôts, comme on peut le voir, par exemple, au niveau des différents monopoles d'État: la Société des alcools dont les profits augmentent d'année en année, non pas à cause de son efficacité, il n'y a pas de concurrence, mais parce que les prix montent tous les ans. C'est une machine à percevoir les impôts que de vendre du scotch, du vin et de la bière.

Deuxièmement, Loto-Québec, autre monopole d'État où on laisse voir aux gens les plus démunis de notre société - et les gens de Loto-Québec le savent, les gens du ministère du Revenu le savent - l'espoir que fait miroiter le gouvernement d'un jour décrocher le gros lot, alors qu'en réalité il y a 320 000 chômeurs et qu'on devrait peut-être s'employer à trouver du travail tous les jours plutôt que le gros lot le vendredi.

À travers ces taxes indirectes comme l'augmentation de la taxe sur l'essence, encore une fois présentée sous le couvert d'une politique énerqétique, il faut entendre - j'y reviendrai - comment c'est sous le couvert de la grande politique énergétique de l'augmentation des prix de l'énergie dans le monde que les Québécois paient maintenant, depuis deux semaines, 0,30 $ le gallon d'essence de plus que les provinces voisines.

Le ministre des Finances avait annoncé - et vous verrez, M. le Président, que nous ne parlerons pas trop longtemps du ministre de l'Énergie et des Ressources - en effet, c'est le ministre des Finances - c'est une mesure financière, la loi no 16, à toutes fins utiles, qui a annoncé la façon dont le gouvernement du Québec entend établir des relations extrêmement différentes à l'égard d'Hydro-Québec. Le ministre des Finances parlait de redistribuer; je le cite, M. le Président, le 10 mars dernier: "II faut donc considérer, ce qui est d'ailleurs manifeste, que la nationalisation de l'électricité est le meilleur placement qu'ait jamais fait la collectivité québécoise et qu'il est maintenant temps que les 300 000 000 $ ainsi investis - je corrige, M. le Président, c'était plutôt empruntés et non pas investis -par le gouvernement, en 1963 commencent à rapporter à l'ensemble de la population. C'est-à-dire qu'à partir de 1982 HydroQuébec... paiera au gouvernement une redevance."

Il ne s'agissait pas, en 1963, d'un investissement de 300 000 000 $, mon collègue d'Outremont l'a dit, c'était un emprunt d'Hydro-Québec. Hydro-Québec avait décidé, parce que les Québécois l'avaient demandé, d'acquérir des compagnies privées d'électricité afin de pouvoir coordonner le développement de cette immense richesse naturelle qui est la nôtre. À partir de ce moment-là, comment peut-on prétendre qu'aujourd'hui on redistribue à l'ensemble des citoyens des avantages qui viennent de la nationalisation de nos ressources hydroélectriques? Comment le ministre a-t-il pu dire tout à l'heure, dans sa présentation, que tous les citoyens doivent en bénéficier et non seulement les consommateurs d'électricité? Si le ministre de l'Énerqie et des Ressources a vu une différence au Québec entre des citoyens et des consommateurs d'électricité, je le prie de nommer ceux qui sont citoyens sans être consommateurs d'électricité. Il devra faire l'inventaire des gens qui, peut-être comme

lui, non seulement chauffent au bois mais s'éclairent à la chandelle, font fonctionner leur grille-pain au gaz naturel ou leur réfrigérateur au pétrole. Tous les Québécois doivent acguitter une facture d'Hydro-Québec tous les deux mois. Tous les Québécois bénéficient donc des avantages que pourraient représenter des hausses de tarifs qui seraient raisonnables, qui seraient conformes à la vocation qu'Hydro-Québec a toujours eue de fournir aux Québécois l'électricité au meilleur taux possible. C'était là le mandat que le gouvernement du Québec vient de changer et c'est simplement une autre fonction de redistribution qu'il s'est donnée.

Le ministre des Finances redistribue son déficit chez les consommateurs d'électricité. C'est de cela qu'il s'agit, en le versant au fonds consolidé, quels que soient les voeux pieux du ministre des Finances à savoir que les sociétés d'État qui sont en pleine croissance bénéficieront d'apports nouveaux, d'argent neuf, etc., comme l'a dit le ministre de l'Énergie, ce matin. On redistribue le déficit entre les citoyens au lieu d'avouer ouvertement que le gouvernement devrait continuer, en l'absence de la hausse des tarifs de l'électricité, de nous taxer encore davantage, nous, les Québécois, qui détenons déjà ce championnat. En taxant tous les citoyens qui sont consommateurs d'électricité, c'est-à-dire tous les Québécois - on peut faire tout un plat du fait qu'une grande partie de la consommation est attribuable aux entreprises - il n'en reste pas moins que l'entreprise doit répercuter ses coûts quelque part chez les consommateurs. Que ce soit direct ou indirect, dans les cas où il y a exportation, tant mieux, mais dans les cas de consommation interne des biens et services qui sont produits par les entreprises québécoises, il y a une répercussion dans la poche de tous les citoyens. C'est un impôt qui, comme tous les autres que nous avons eu l'occasion de décrire ici en cette Chambre, est régressif. (16 h 20)

Encore une fois, pour le bénéfice du groupe des onze députés du côté gouvernemental qui n'ont pas encore compris ce qu'est un impôt régressif, c'est un impôt qui frappe en argent de la même façon et du même montant les gens qui gagnent beaucoup ou les gens qui gagnent moins. C'est un impôt qui frappe de façon injuste et inéquitable les citoyens les plus démunis de notre société. Ces porte-parole, ces gardiens de la foi et du dogme de la social-démocratie devraient s'en convaincre une fois pour toutes et se joindre, au moins encore une fois, à l'Opposition qui réclame un arrêt de ces impôts absolument inconsidérés que les classes les plus démunies de notre société continuent à absorber.

Par ailleurs, encore une fois, le gouvernement - évidemment, nous l'avons décrit - devant sa situation financière est en train de créer une mesure qui forcera HydroQuébec à emprunter davantage malgré les appels à la prudence que le ministre des Finances lançait en 1977 et encore une fois en mars dernier, compte tenu des hauts taux d'intérêt et surtout du haut volume des emprunts du gouvernement du Québec. Donc, Hydro-Québec devra emprunter, si elle ne peut plus, comme s'en inquiétait le ministre des Finances, payer ses barrages comptant; c'est évident, c'est manifeste, c'est clair.

Le ministre, dans sa présentation ce matin, nous a indiqué que tout ce qui touchait la couverture d'intérêt ou les taux de capitalisation, sur lesquels je reviendrai extrêmement brièvement, ne font qu'institutionnaliser ou consacrer dans des textes ce que les prêteurs de capitaux, les prêteurs auxquels Hydro-Québec s'adresse, compte tenu de ses grands besoins financiers, avaient fini par accepter, c'est-à-dire qu'Hydro-Québec continuait à faire des profits de façon telle que la couverture d'intérêt était de plus en plus solide et que le taux de capitalisation était également lui-même de plus en plus élevé, donc, protégeait le remboursement pour l'avenir et le paiement des intérêts pour les années courantes.

Mais, de la façon que la loi 16 prévoit les couvertures d'intérêt, c'est-à-dire cette somme que doit conserver dans ses coffres, si on veut, Hydro-Québec afin de rencontrer le service de la dette, le paiement des intérêts tous les ans, ce concept également du taux de capitalisation qu'on doit - une société bien administrée se doit de le faire -conserver des avoirs propres, plutôt que d'avoir recours à des emprunts, ces deux concepts, de la façon qu'ils sont rédigés et introduits dans cette loi, ne sont finalement que des limites à l'appétit du gouvernement.

Ce ne sont plus - parce que c'était la tendance - des manifestations de l'efficacité et de la bonne gestion, de la bonne administration dont Hydro-Québec faisait preuve. Ces mesures de couverture d'intérêt et de taux de capitalisation sont devenues des freins à l'appétit de plus en plus vorace du ministre des Finances et ce sont les prêteurs - c'est le moins qu'on puisse dire car il y a eu des changements depuis que cette mesure a été introduite en juin - qui ont exigé que le gouvernement en revienne un peu parce que effectivement HydroQuébec se diriqeait vers une situation où la converture d'intérêt, la possibilité de rencontrer les frais de financement et les obligations de rembourser les emprunts étaient si attrayantes qu'on pourrait prétendre, sans trop se tromper, que la cote de crédit, c'est-à-dire le taux d'intérêt auquel Hydro-Québec aurait pu emprunter dans l'avenir, était probablement en voie de

s'améliorer dans les deux cas, mais ce n'est plus ce qui arrive.

Afin de protéger les prêteurs, le gouvernement a dû s'astreindre à se limiter lui-même dans ses appétits de telle sorte qu'il ne se déclarera pas trop de dividendes afin de ne pas mettre en danger la cote de crédit d'Hydro-Québec, cote de crédit qui, si ce n'était du gouvernement du Québec et de son ingérence dans le fonctionnement d'Hydro-Québec, serait probablement meilleure qu'elle ne l'est actuellement. En effet, chaque déclaration farfelue et échevelée de la part du gouvernement du Québec a un impact direct sur la cote d'amour ou la cote de crédit auprès des marchés prêteurs, la cote de crédit d'Hydro-Québec et c'est justement pour cette raison qu'il faut tenter de maintenir le plus de différence, le plus de distinction possible entre les besoins du gouvernement comme tel et les besoins purement de gestion et d'administration d'Hydro-Québec. Ce que cette loi, ce que ce projet de loi tente de faire, c'est plutôt une mainmise de l'État du Québec sur Hydro-Québec. C'est donc un changement fondamental dans le rôle d'Hydro-Québec qui n'est plus au service des Québécois, mais plutôt au service du gouvernement du Québec et de son déficit. On ne distribuera plus, M. le Président, les avantaqes de nos ressources aux citoyens, mais plutôt au gouvernement et au ministre des Finances, notamment.

Ce projet de loi touchant Hydro-Québec est d'une portée telle, à cause de ce changement fondamental, que tous les Québécois devraient s'opposer à son adoption. En Opposition responsable, M. le Président, c'est précisément ce que nous entendons faire.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du Revenu.

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: M. le Président, c'est évidemment avec beaucoup de plaisir que je veux apporter mon humble contribution a ce débat. Je voudrais dès maintenant vous signaler qu'en écoutant le préambule du député d'Outremont, j'ai sérieusement reconsidéré l'opportunité d'intervenir dans le présent débat parce que, effectivement, si le député d'Outremont s'en était tenu à son préambule ou à la philosophie que ce préambule dégageait, j'avais l'impression que nous étions tous prêts à voter tout de suite cette loi d'une façon unanime. Au fur et à mesure que l'intervention a proqressé, j'ai vite déchanté, M. le Président, et j'ai réalisé qu'effectivement les positions qui existent de part et d'autre apparaissent tout à fait irréconciliables et que les distances qui nous séparent sont infranchissables. Par ailleurs, c'est à partir de ces prémisses dont je viens de parler, prémisses qui procèdent de faits de même nature, que nous arrivons à des conclusions fondamentalement différentes.

Je voudrais, quant à moi, M. le Président, délaissant la nature des interventions qu'on vient d'entendre, qui se sont centrées sur la technicité de ces lois, les implications d'ordre économique, orienter cette intervention vers un peu d'historique politique du Québec. Je voudrais essayer de démontrer - j'espère que je réussirai à le faire - que les gens qui en 1962 et en 1963 ont préconisé et réalisé la nationalisation de l'électricité avaient, entre autres objectifs, comme point d'arrivée, si on me passe l'expression, celui que nous avons sur la table aujourd'hui. Pour le faire, M. le Président, vous allez comprendre que je me référerai à ce qui a été dit, ce qui a été publié, ce qui a été écrit au cours des années 1962 et 1963, alors que le gouvernement de cette époque a effectivement réalisé la nationalisation de l'électricité.

La conclusion a laquelle j'en arriverai, M. le Président - à tort ou à raison, bien sûr, on l'évaluera - m'amènera à la conviction profonde que le même parti politique qui a été à l'origine de la nationalisation de l'électricité, qui l'a effectivement réalisée est maintenant, il me semble, en train de renier ce qu'il a alors préconisé et publicisé. (16 h 30)

Court retour historique, effectivement. Revenons au début des années soixante, alors qu'un parti politique, dirigé par un chef qui s'appelait M. Jean Lesage, a fait une campagne électorale en nous disant, en disant aux Québécois et aux Québécoises: "II faut que ça change." Plusieurs d'entre nous -je vois le député d'Orford qui était à l'époque de la bataille - ont accepté de suivre le parti politique de l'époque dans la voie, dans le chemin qu'il traçait. "Il faut que ça change", disait-on. Il faut remettre de l'ordre dans les affaires de l'État et il faut donner, disait-on aussi, aux Québécois et aux Québécoises ce à quoi ils ont droit, leur donner ce qui leur appartient effectivement. Cette invitation qu'on a faite au cours du printemps de l'année 1960 a été acceptée par l'électorat du Québec. Cette invitation a été reçue, M. le Président, par le peuple du Québec et, après cette campagne électorale qui a été coiffée de ce slogan "II faut que ça change", le Parti libéral du Québec a été porté au pouvoir pour y demeurer jusqu'au 5 juin 1966.

À l'intérieur de son premier mandat, M. le Président, après 1960, plus précisément environ deux années après la prise du pouvoir, le gouvernement d'alors a arrêté l'importante décision suivante: au niveau d'une décision politique, ce gouvernement a

décidé de procéder à l'acquisition de plusieurs sociétés privées d'électricité pour que cette richesse naturelle devienne la propriété et l'entière propriété de l'État. C'était, M. le Président - on va en convenir - une décision de principe importante, une décision en même temps audacieuse et une décision, bien sûr, portant à beaucoup de conséquences. Cette décision, on l'a jugée si importante, on l'a jugée si audacieuse, M. le Président, et on a convenu qu'elle portait à tellement de conséquences que le gouvernement de l'époque a pris la sage décision de demander à la population du Québec de ratifier le choix que lui, le gouvernement, avait arrêté et ce, par la voie d'une élection générale.

Là, M. le Président, plusieurs vont se souvenir sous quel thème très précis on a alors lancé cette consultation populaire, après deux ans de mandat, compte tenu de l'importance de la décision qui avait été prise. Vous allez vous en souvenir, M. le Président, de ce thème qui a présidé à toute cette campagne de 1962, c'était "Maîtres chez nous". En 1962, lorsqu'on a demandé à la population de ratifier la décision politique qui avait été prise, on l'a soumise, à son approbation en lui disant: En agissant de telle sorte, nous allons devenir maîtres chez nous. En plus d'indiquer au peuple du Québec que, par la nationalisation de l'électricité, il était sur la voie de devenir maîtres chez lui, on voyait aussi ces immenses panneaux-réclame, M. le Président, sur lesquels on voyait cette clé, cette immense clé qui devait, de fait, servir à ouvrir les portes de l'économie québécoise, servir à ouvrir les portes de l'autodétermination au moins économique des Québécois. Nous nous souvenons de ça. La démarche qu'aura entreprise le gouvernement de l'époque a reçu l'aval de la population, le 14 novembre 1962. Le peuple du Québec a dit à son gouvernement à cette époque: Nous vous donnons cette autorisation. Nous ratifions, en quelque sorte, la décision politique que vous avez prise en nous disant que nous allions devenir maîtres chez nous et en nous disant que, dorénavant, nous aurions la clé effectivement qui nous ouvrirait ces portes de l'autodétermination économique.

M. le Président, dans la discussion du projet de loi qui est devant nous et pour en comprendre la pleine philosophie, il me semble important, comme je vous le signalais, il y a un instant, de retenir peut-être quelques-uns des principes de base qui ont présidé, d'abord, à la décision du gouvernement de procéder à la nationalisation; deuxièmement, la décision du peuple de ratifier cette décision. Les principes de base qui ont motivé l'action du gouvernement à cette époque, on les retrouve à l'intérieur d'un programme électoral - ce qui est tout à fait normal - un programme électoral qui a été publicisé à l'occasion de l'élection de la nationalisation, un programme électoral qu'on a envoyé partout à travers le Québec et qui était à la disposition des Québécois, un programme dont se sont servis les Québécois pour prendre une décision, à savoir s'il était utile ou pas de nationaliser l'électricité comme le qouvernement l'avait décidé.

M. le Président, je vous invite et j'invite les collègues de cette Chambre à faire une brève revue des principaux extraits que l'on retrouve dans ce programme électoral. Si on veut regarder les choses de façon objective, on verra que l'un des objectifs que l'on poursuivait à l'époque, l'un des buts que le gouvernement de l'époque avait en tête, c'était justement, avec le cours des ans, avec le temps, d'arriver à réaliser un projet de loi comme celui qui est à l'étude actuellement.

Je me permets donc, M. le Président, avec votre permission, de citer quelques extraits de ce programme électoral de 1962. Certaines gens vont certainement reconnaître ce programme électoral. Ainsi, par exemple, le préambule du programme, ce qui attirait d'abord notre attention comme Québécois, c'était la toute petite phrase suivante: "L'ère du colonialisme économique est finie dans le Québec; maintenant ou jamais, maîtres chez nous." C'était, M. le Président, et fondamentalement, le leitmotiv de cette campagne électorale. Le principe fondamental, nous disait-on. C'est à partir de cette philosophie qu'on a demandé aux Québécois de ratifier, de cautionner la décision politique qui avait été prise.

Plus avant dans ce même programme, M. le Président, on précisait des choses. On donnait des évaluations de ce que la nationalisation allait nous apporter. On disait combien de compagnies il fallait nationaliser, par exemple. On disait également quels allaient être les effets de la nationalisation. On considérait nombreux ces effets. Parmi un des effets qu'on prévoyait à l'époque, c'est précisément celui qu'on est en train de réaliser actuellement. J'appuie l'affirmation que je viens de faire, M. le Président, en vous référant à la page 7 de ce programme électoral du Parti libéral de 1962. Parmi la longue série d'effets bénéfiques que devait nous donner la décision de la nationalisation, il y avait celui que je vous cite immédiatement: "La nouvelle Hydro deviendra la propriété collective de 5 300 000 actionnaires, à part entière, fiers de leur avoir commun et fiers de leur puissance nouvelle." Il y a seulement une chose qu'il faudrait changer, M. le Président, c'est le chiffre qui est là, au lieu de 5 300 000, il faudrait déborder quelque peu, soit 6 000 000. (16 h 40)

II me semble que cet effet, encore une

fois, est précisément celui qui est recherché par le projet de loi no 16 qui est devant nous. Le député de Roberval a expliqué comment et pourquoi nous allons devenir effectivement les vrais actionnaires d'Hydro-Québec. Toujours dans le même programme électoral, et en conclusion, on nous disait ceci: "La nationalisation, étape de la libération économique." Ce qui suit me paraît important: "Un peuple comme le nôtre doit se servir des instruments de libération économique dont il peut disposer". Il doit se servir des instruments de libération économique dont il peut disposer. Or, je sais que le débat ne fait que commencer, mais je voudrais bien que quelqu'un de l'autre côté puisse nous expliquer comment on peut interpréter le projet de loi no 16, qui est devant nous autrement que comme un des objectifs qu'on visait en 1962, c'est-à-dire se servir de cette nationalisation comme un instrument de libération économique dont nous pourrons disposer.

On continuait, dans le même programme électoral du Parti libéral: "D'abord, nous devons nous affirmer dans des domaines comme ceux des finances, de l'industrie et du commerce. Nous en avons fini d'être des spectateurs de l'activité des autres. Nous devons être actifs si nous voulons survivre." Finalement, on disait: "Par une politique de planification économique mise sur pied de façon démocratique, le Québec verra enfin où il va et saura résoudre à l'avance les problèmes dont, jusqu'ici, il avait à supporter les conséquences."

M. le Président, ces quelques passages auxquels je viens de référer étaient, en 1962, les principes de base d'un gouvernement libéral. Quand j'écoute la discussion, quand je considère le sens vers lequel elle s'oriente actuellement, il me semble que le Parti libéral actuel a divorcé d'avec la cohérence que l'on retrouve dans sa publicité de 1962. Il a carrément divorcé d'avec cette cohérence et je ne suis pas optimiste au point de prétendre que la réconciliation est possible. Ce qui est visé par ce projet de loi, c'est de nous donner les instruments et les outils dont nous avons besoin. C'est pour ça qu'au-delà des autres considérations qui peuvent retenir notre attention, je voulais tout simplement relever ce passage d'histoire, revenir quelque vingt ans en arrière pour démontrer qu'effectivement, l'orientation actuelle du Parti libéral est tout à fait à l'inverse de celle qu'on nous a présentée et qu'on a acceptée en 1962.

Pour ces considérations, M. le Président, il est bien clair que c'est sans aucune hésitation que je donnerai mon appui à ce projet de loi no 16.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. Le parrain du projet de loi no 16, le ministre de l'Énergie et des Ressources, nous a vanté ce matin la qualité de son qouvernement à respecter les contrats. Or, la question que je me pose, c'est: Que fait-il de ce contrat passé avec toute la population du Québec en 1962 et que vient d'évoquer son collègue, le ministre du Revenu? Que fait-il de ce contrat au moment où il nous demande aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, de le déchirer en appuyant le projet de loi no 16? Je comprends que, lorsqu'il s'agit d'aller siphonner les fonds d'Hydro-Québec pour remplir les trous que leur collègue, le ministre des Finances, a créés ici et là, le respect de la signature sur un contrat, l'engagement moral envers toute une population prennent le bord du panier assez rapidement merci.

Lorsque j'entends le ministre du Revenu faire cette comparaison des 5 600 000 actionnaires-propriétaires - ils sont maintenant 6 000 000 de propriétaires-actionnaires d'Hydro-Québec - est-ce que le ministre du Revenu en connaît beaucoup de compagnies qui ne consultent les actionnaires qu'à tous les 20 ans et, dans ce cas-ci, qui ne les consultent même pas, mais qui tentent par le biais d'un projet de loi de parler d'une nouvelle politique énergétique? Est-ce qu'il y a beaucoup de compagnies qui ne se réunissent même pas à tous les 20 ans? Le ministre pourra répondre à ma question tantôt en vertu de l'article 96. Pour le moment, j'aimerais continuer.

M. Fréchette: Vous aimez mieux... J'étais prêt.

M. Gratton: De quoi l'Assemblée nationale est-elle saisie avec ce projet de loi no 16, dont le titre pourtant inoffensif, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec, est bien caractéristique de ce gouvernement qui, sous des titres tout à fait anodins, avec des notes explicatives encore plus anodines et des discours que je ne qualifie pas, ceux qu'on a entendus maintenant, vient rassurer la population? Il n'y a rien là, mes chers amis! On est seulement en train de faire une passe, de passer un petit Québec aux 6 000 000 de citoyens, c'est le moins qu'on puisse dire.

Si j'avais eu à écrire les notes explicatives qu'on nous lit au moment du dépôt du projet de loi en première lecture, je les aurais rédigées à peu près comme ceci: Le projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur l'Hydro-Québec afin principalement: 1. de transformer HydroQuébec en percepteur d'impôts pour le gouvernement du Québec; 2. de permettre au gouvernement péguiste d'imposer des impôts

indirects par le biais de hausses des tarifs d'électricité que devront payer tous les Québécois; 3. de permettre surtout au gouvernement péquiste de camoufler sa mauvaise administration des cinq dernières années. Voilà de quoi il s'agit! Je dis que c'est le vrai, le seul objectif du projet de loi no 16. Si, comme l'ont dit mes collègues d'Outremont et de Vaudreuil-Soulanges avant moi, le gouvernement, fidèle à son habitude de cacher ses vraies intentions derrière les mots, préfère nous parler aujourd'hui d'une nouvelle politique énergétique, je dis que ce n'est pas par le biais de la présentation du projet de loi no 16 qu'il devrait procéder, même à ce moment, parce que de l'avis de tous, sauf peut-être quelques péquistes, s'il en reste, qui sont encore ébahis par l'assurance de plus en plus artificielle du ministre des Finances, sauf pour ceux-là, tous sont d'avis que ce projet de loi est nettement prématuré.

M. le Président, il est prématuré parce qu'il constitue, à mon avis, un manque de respect flagrant, d'abord pour les véritables intéressés, les citoyens qui, dans les faits, sont les seuls et uniques propriétaires de cette richesse naturelle que constitue l'hydroélectricité. On se rappellera toute l'importance accordée à cette dimension il y a près de 20 ans maintenant, en 1962, lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se faire plébisciter sur la question de la nationalisation de l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre du temps, l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection de l'automne 1962, déclarait, je cite: "De quelle façon allions-nous nous y prendre pour que les 5 600 000 Québécois deviennent les propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés de l'expansion économique de leur province, l'électricité?" (16 h 50)

La façon choisie, M. le Président, on la connaît maintenant, ce fut une élection qui permit à ces 5 600 000 Québécois de se rendre propriétaires et actionnaires de cette richesse naturelle.

Or, le gouvernement actuel, qui veut maintenant modifier d'une façon draconnienne le mandat d'Hydro-Québec, tient-il compte maintenant des 6 000 000 de propriétaires et d'actionnaires? La réponse est non.

Je soutiens que cette façon de procéder est inacceptable. L'Opposition officielle a le devoir de s'y opposer, parce que le projet de loi no 16 constitue ensuite un autre manque de respect, parce qu'il trahit dans son fondement même le mandat accordé au gouvernement par la population en 1962. Ce n'est pas la première fois qu'il le fait; je l'ai expliqué à deux reprises ici à l'Assemblée nationale. Il a trahi le mandat qu'il a reçu le 20 mai 1980 lors du référendum; il a trahi le mandat du 13 avril où les citoyens du Québec avaient demandé au gouvernement, avaient mandaté le gouvernement de protéger les droits du Québec alors qu'il a perdu notre droit de veto. Voilà qu'avec le projet de loi no 16, on vient encore trahir le mandat de la population donné à l'élection de 1962.

On se rappellera que les électeurs de l'époque confièrent à Hydro-Québec la responsabilité d'administrer, de régir et de développer autant le réseau de distribution que tout l'appareil de production d'énergie hydroélectrique. La société d'État devenait donc dans les faits le mandataire exclusif de la population. Or, les termes et le cadre de ce mandat étaient définis de la manière suivante.

Je cite maintenant le premier ministre actuel qui était alors ministre des Richesses naturelles - c'était en février 1962: "... et pour que le mouvement - intégration et rationalisation des réseaux - se fasse vraiment pour tous les citoyens du Québec, de le confier à Hydro, entreprise d'État qui, depuis 1944, a pour mission de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière..." On retrouve toujours cette définition de la vocation d'Hydro-Québec au premier alinéa de l'article 22 de sa loi constitutive. Elle est techniquement maintenue dans le projet de loi no 16 à l'article 6.

M. le Président, qu'est-ce qui peut alors justifier notre appréhension? Rien de plus simple. À de nombreuses reprises, ce gouvernement, celui du Parti québécois, nous a présenté des projets de loi pleins de riches et beaux principes humanitaires, mais, à l'examen et à la pratique, on s'est rendu compte que ces principes étaient édulcorés et diminués; en fait, ils étaient devenus des demi-principes. Il en est de même pour le projet de loi actuellement devant cette Chambre.

Pour le vérifier, tentons de déterminer qu'est-ce que peut signifier le principe selon lequel Hydro-Québec doit fournir de l'électricité "aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière". Allons voir ce que signifie ces mots en français et non en langage péquiste faux et déformant, M. le Président. Pour ce faire, laissons l'actualité de 1962 nous indiquer cela. Je cite encore l'actuel premier ministre. Le 10 avril 1962, devant le Canadian Club de Montréal, c'était rapporté par La Voix de l'Est: "La distribution à prix honnête de l'énergie électrique, indispensable moyen de mise en valeur". De manière plus explicite, il disait, selon ce qui est rapporté dans le journal Le Devoir du 4 octobre 1962 - je cite toujours René Lévesque - "La mesure en elle-même est rentable. L'Hydro-Québec récupérerait, au lendemain de la

nationalisation, un profit de 40 000 000 $: impôt fédéral des compagnies, 15 000 000 $ et profit annuel des compagnies, 25 000 000 $. Ce profit de l'Hydro-Québec ne sera naturellement pas net, l'entreprise d'État devra verser 20 000 000 $ par année d'intérêt. Il restera donc 20 000 000 $ de profits nets dont les citoyens du Québec plutôt que les capitalistes étrangers seront bénéficiaires et qui pourraient être utilisés -écoutez bien cela - en diminution de tarifs, en modernisation dans les secteurs les plus défavorisés ou en hausse de taxes scolaires et municipales payées par l'Hydro." Ne pensez pas que ce n'est pas beau! C'est ce que l'actuel premier ministre disait en 1962.

Une voix: Dans sa jeunesse.

M. Gratton: C'est dans ces termes précis et explicites que l'actuel premier ministre, alors ministre des Richesses naturelles, définissait "aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière".

En d'autres mots, à ce moment-là, une saine administration signifiait, pour le premier ministre, le profit brut, moins le paiment d'intérêts égale profit net, donc diminution des tarifs, développement du réseau, paiement de taxes municipales et scolaires au profit de tous les citoyens. Ce sont là, M. le Président, les conditions dont a parlé le ministre du Revenu, que les citoyens ont posées à la nationalisation des compagnies privées d'électricité en 1962. Comment le premier ministre peut-il maintenant proposer une nouvelle définition, qui peut se résumer comme suit: profit brut moins paiement d'intérêt, moins redevance à M. Parizeau égale profit net, augmentation des tarifs pour tous les citoyens? Il y a quand même une nuance, M. le Président.

Je demande au premier ministre si le prix de l'électricité sera honnête et juste, pour employer ses termes, lorsqu'il servira en bonne partie non pas pour le fonctionnement de la société d'État, non plus pour le développement du réseau ni pour maintenir les tarifs à un niveau acceptable, mais plutôt pour payer et défrayer les coûts de la bêtise administrative péquiste qui dure depuis 5 ans. Je vous ferai grâce de vous en faire une énumération; d'autres y reviendront peut-être de ce côté-ci.

Le premier ministre, que fait-il de l'engagement qu'il a pris devant les citoyens en 1962 sur la base du prix de l'électricité honnête? La même chose qu'avec les mandats du 20 mai et du 13 avril, M. le Président. Donc, je repose la question. Le projet de loi numéro 16 maintient-il le sens véritable de la vocation d'Hydro-Québec? La réponse est non, puisque, avec le projet de loi numéro 16, les fonds prévus pour le maintien, la qualité et le développement du réseau sont maintenant fondus avec la redevance gouvernementale, ce qui les rend supérieurs à ce qu'ils sont en termes réels. Le prix demeure-t-il honnête et juste? Encore là, la réponse est non, puisque, à partir du projet de loi numéro 16, les prix aux usagers ne seront qu'en partie le reflet de ce qu'ils reçoivent en termes de services, le reste étant une prime forcée à la mauvaise administration péquiste. Oui, M. le ministre, c'est ça.

En 1962, les citoyens ont-ils permis et ont-ils songé qu'on puisse modifier la vocation première d'Hydro-Québec à des fins de camouflage de mauvaise administration? La réponse est non, car les citoyens ne savaient pas ce qui les attendait en 1976. En 1962, on ne savait pas qu'on aurait en 1981 un gouvernement dont le gaspillage des fonds publics passerait à l'histoire.

Je disais que le projet de loi est prématuré. Il est prématuré à un deuxième titre, en ce sens qu'il se trouve à conclure un débat qui n'a jamais eu lieu. En effet, si en 1962 le gouvernement libéral de l'époque s'est senti l'obligation de consulter la population sur la nationalisation de l'électricité, par le biais d'une élection alors qu'il s'agissait pour celle-ci de devenir propriétaire. Quand on sait toutes les conséquences que cela a eu sur le développement du Québec, ne serait-il pas normal que, 20 ans plus tard, au moment où on demande à cette population de réinvestir dans Hydro-Québec, sans pour autant en recevoir des bénéfices ou des services additionnels, ne serait-il pas normal, dis-je, qu'on la consulte à nouveau, surtout que cet investissement ne lui rapportera rien?

Voyons encore ce que disait le premier ministre actuel en 1962. - Je cite René Lévesque devant le Canadian Club, toujours, 9 avril 1962: "Au nombre de ses responsabilités - oui, il allait plus souvent au Canadian Club dans le temps, M. le Président - il s'en trouve une, particulièrement importante, qui consiste pour le gouvernement de l'État du Québec à défendre le patrimoine national et en faire profiter au premier chef ses propres ressortissants". Il disait plus tard, le 3 mai: Cela va coûter cher, bien sûr, mais à long terme, ça rapportera. Le 28 juin 1962, René Lévesque répétait qu'il fallait faire passer l'intérêt de la province même avant l'intérêt d'un parti.

Mais à qui rapportera la redevance exigée par Hydro-Québec? Aux citoyens, qui auront à subir sans distinction des hausses de tarifs qui ne correspondent pas aux services réels obtenus, ou au ministre péquiste des Finances, qui se sert d'Hydro-Québec et des revenus qu'elle produit pour camoufler sa mauvaise administration? Ou encore au Parti québécois qui, après plus de 5 ans de pouvoir, se rend bien compte qu'il a mis la

province dans une situation financière telle qu'il n'hésite pas à mettre en péril l'avenir énergétique du Québec pour tenter de camoufler ses erreurs? (17 heures)

On a insisté, M. le Président, de ce côté-ci, pour qu'un débat public sur l'avenir énergétique du Québec soit tenu. Nous ne sommes pas les seuls à le souhaiter. Syndicats, groupes écologistes et un grand nombre d'autres organismes le réclament avec insistance. On ne peut que constater qu'au sujet du débat public sur l'énergie, le gouvernement se retrouve devant un front commun unanime. C'est d'ailleurs cette unanimité qui réussissait à convaincre l'ex-ministre de l'Énergie et des Ressources, M. Yves Bérubé, qui déclarait ce qui suit en mars dernier: "Les interventions, lors des quatre premières journées de la commission parlementaire, ont démontré la très grande unanimité entourant la tenue d'un débat public. Au moment où le Québec s'achemine vers des choix majeurs de société, la population doit absolument être sensibilisée aux alternatives qui s'offriront à elle et elle doit de plus avoir la possibilité de faire connaître ses choix." Comme par hasard, il s'agissait d'une déclaration à la veille de la dernière élection.

Le porte-parole de l'Opposition, mon collègue d'Outremont, intervenait lui aussi à ce sujet, et je cite le Soleil du 3 mars 1981: "Le député Pierre Fortier, d'Outremont, s'est en effet dit surpris de voir enfin le ministre acquiescer à la proposition d'un débat public sur toutes les facettes de l'énergie, lui qui écartait jusqu'à tout récemment cette option. Selon M. Fortier, la volte-face du ministre s'explique sans doute par la proximité des élections générales et ne constitue guère plus qu'une promesse électorale."

Que s'est-il passé depuis? Quant à nous, nous continuons d'exiger la tenue d'un débat public sur l'avenir énergétique du Québec. Quant au gouvernement, le problème demeure le même puisque d'une part, bâtir le Québec, l'énoncé politique économique de l'actuel gouvernement, prévoit toujours qu'à partir de 1985, on aura atteint le sommet de notre développement hydroélectrique et que, d'autre part, on a à peine déterminé les facteurs qui, à long terme, influenceront nos surplus énergétiques auxquels sont intéressés nos voisins Américains et que, finalement, il demeure impossible pour le gouvernement de se donner des priorités en matière de recherche et de développement tant qu'on n'aura pas déterminé les formes d'énergie que les Québécois entendent privilégier.

Quant au gouvernement, qu'a-t-il fait, lui, depuis mars dernier et surtout depuis l'élection du 13 avril, à part de changer de ministre par un qui nous a dit, à quelques occasions, qu'il demeurait ouvert à ce débat public sur la politique énergétique, mais qui se traduit dans les faits par quoi? Un projet de loi pour camoufler d'autres intentions de son collègue, le ministre des Finances. De quelle ouverture parlait-il il y a à peine cinq mois? Au minimum, il aurait dû refuser de parrainer le projet de loi, puisque celui-ci devrait être parrainé par le ministre des Finances. Sous cette loi présentement devant nous, se cache d'abord, sous le titre de redevances, un impôt, un impôt peut-être pas aussi clair que celui sur le revenu, mais un impôt à la sauce péquiste c'est-à-dire indirect, sournois, réqressif et vicieux.

Je dirai en terminant qu'en définitive, le projet de loi no 16 est précipité parce qu'il n'a pas été soumis à l'attention des intéressés, les Québécois propriétaires et, en plus, qu'il devance une consultation que la conjoncture actuelle nous oblige à tenir le plus tôt possible. Dans cette perspective, il n'y a pas plusieurs manières, il n'y en a qu'une et, encore là, je cite le premier ministre actuel, ministre des Richesses naturelles en 1962, qui disait en février 1962: "Je fais cette déclaration uniquement pour bien remettre les faits à leur place et selon leur valeur réelle. Je crois que, sur l'électricité, richesse vitale du Québec, les Québécois ont le droit strict d'être renseignés d'une façon qui leur permette d'avoir l'opinion la plus avertie possible. Je veux rappeler aujourd'hui qu'il faut tout de même traiter avec sérieux une question d'une telle importance."

On dit: Bravo! Ce qui était vrai en 1962 est encore plus vrai en 1981. Je répète ce que mon collègue de Vaudreuil-Soulanges, je pense, disait et je cite ici le front commun pour un débat public sur l'énergie, édition de la Presse du 23 septembre 1981: "II serait important que ce débat sur l'énergie ne soit pas reporté après que toutes les décisions engageant l'avenir énergétique et économique du Québec aient été coulées dans le ciment."

Il serait donc important qu'avant de voter le projet de loi numéro 16, on fasse cette consultation auprès de la population, auprès des actionnaires; qu'on fasse ce débat public qui, tous le reconnaissent, doit avoir lieu et que seul le gouvernement du Parti québécois refuse. C'est pourquoi, comme en 1962, je serais tenté de proposer au gouvernement qu'il tienne une élection sur une question aussi fondamentale. Il me semble que consulter les actionnaires d'Hydro-Québec, les 6 000 000 de

Québécois, après 20 ans, ce ne serait quand même pas exagéré sur le plan de la consultation.

Motion de report

Comme j'ai déjà réclamé les élections référendaires et que je n'ai pas réussi, je ferai la seule chose que le règlement de

l'Assemblée nationale me permette à ce moment-ci et, en vertu de l'article 121, je propose que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots " dans douze mois".

Je termine en disant que si je limite cela à douze mois, c'est que le règlement m'empêche de le faire pour une période plus longue. Je demande aux députés péquistes, à ceux qui ont encore une conscience, je les préviens que s'ils rejettent cette motion de report du revers de la main, ils auront à répondre, en fin de semaine, à leurs militants. À un des députés à qui je demandais ce matin...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Gratton: Je dis que ce député que j'ai croisé ce matin arborait le slogan du congrès: C'est souverainement le temps. Je lui ai posé la question: C'est souverainement le temps de faire quoi? Ah! il m'a dit: Toutes sortes d'affaires.

Je leur dis qu'en fin de semaine ils seront l'objet de questions de la part de leurs militants - il y en a encore des militants honnêtes chez eux. Je suggère qu'à ce moment-ci...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Gratton: Avec ce que vous tentez de faire avec Hydro-Québec, il serait souverainement le temps que vous passiez des paroles aux actes et que vous respectiez la population du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion d'amendement étant recevable, elle est donc reçue et, à partir de maintenant, nous avons... Je n'ai pas à décider de son adoption, mais pour le moment tout ce que je peux vous dire, c'est que le "temps est venu" à dix minutes d'intervention sur cet amendement.

M. le député de Charlesbourg.

M. Denis de Belleval

M. de Belleval: M. le Président, le député de Gatineau nous suppliait de déclencher des élections plutôt que d'étudier ce projet de loi, mais le député de Gatineau est masochiste: battre les libéraux une fois par année, il me semble que c'est suffisant.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. de Belleval: M. le Président, le député de Gatineau, en présentant sa motion dilatoire, a commis un lapsus qui démontre bien que leur argumentation fondamentale, à savoir qu'il faudrait tenir un débat public là-dessus, ne tient pas puisqu'il a lui-même indiqué que, douze mois étant le maximum permis par le rèqlement, ce n'est pas suffisant parce qu'au fond il préférerait que le projet de loi soit remis à beaucoup plus tard. Par conséquent, lui-même ne prend pas au sérieux le débat qui pourrait avoir lieu à l'intérieur de cette période de douze mois que je suppose serait effectivement bien suffisante et, au fond, il s'agit d'un stratagème...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. de Belleval: ... d'un faux-fuyant; ils ne sont absolument pas intéressés à tenir un débat de fond là-dessus. Je comprends pourquoi ils ne veulent pas avoir un débat de fond là-dessus, d'une certaine façon. Ce débat, il a eu lieu, et je veux rappeler brièvement les différentes étapes de ce débat et terminer par une des dernières étapes dont je comprends les députés de l'Opposition de ne pas vouloir se rappeler. (17 h 10)

Dès 1973, 1974, M. le Président, à l'époque du gouvernement Bourassa, deux ministres de l'Énergie, MM. Massé et Cournoyer, avaient déposé ce qui constituait le premier exposé d'ensemble d'un gouvernement du Québec sur une politique ou les grandes avenues d'une politique énergétique pour le Québec. Il y a eu à cette époque pas mal de débats autour des grandes options que proposait le gouvernement Bourassa durant ces années.

En 1978, le présent gouvernement déposait un livre blanc qui, justement, donnait les grandes lignes de force, si l'on veut, les grandes avenues, les grands choix qui s'offraient au Québec durant les prochaines années en matière de politique énergétique et, en particulier, se trouvait à rajeunir, ni plus ni moins, les hypothèses déjà énoncées par MM. Massé et Cournoyer. Qu'on se rappelle brièvement quelles étaient ces grandes lignes de force, à savoir compter d'abord et avant tout, bien sûr, sur les ressources hydrauliques québécoises développables, deuxièmement, favoriser la pénétration ici du gaz naturel pour mieux équilibrer notre bilan énergétique, remettre à plus tard l'utilisation de l'énergie nucléaire sur laquelle on entretient beaucoup de réserves et qui, de toute façon, ne pourrait être disponible chez nous qu'à des prix beaucoup plus élevés pour l'instant que ce que l'on peut obtenir à partir de l'énergie hydraulique.

Ensuite, M. le Président, il y a eu une campagne électorale, celle de 1981, où le Parti libéral lui-même a proposé aux électeurs une politique énergétique. Je

comprends le Parti libéral de ne pas vouloir raviver le contenu même de cette politique qu'il a proposée aux électeurs il y a peine six mois. Et que disait-on dans cette politique, ce qui démontre bien l'incohérence, la démagogie et l'insignifiance de certains arquments que nous avons entendus, en particulier ceux du député d'Outremont et du député de Vaudreuil-Soulanges? Qu'est-ce que l'on disait dans ce document libéral proposé il y a à peine six mois à l'adoption de la population? On disait: "Attendu que l'objectif majeur de la politique du Parti libéral du Québec est d'améliorer le bilan énergétique et la sécurité des approvisionnements par une réduction graduelle de notre dépendance envers le pétrole - c'est presque mot à mot le livre blanc du gouvernement de 1978, M. le Président - par l'augmentation de la pénétration du gaz naturel, par l'utilisation de l'énergie électrique, par des économies d'énergie et par la recherche des énergies nouvelles..."

Et que faisait-on de ce principe, M. le Président, quand venait le temps de l'appliquer concrètement, par exemple, à la question dont on discute? Écoutez cela, M. le Président: "Au niveau des économies d'énergie et des énergies nouvelles," en visant l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel énergétique, à ne plus maintenir les prix artificiellement bas et à aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par des mesures sociales plus appropriées." Je répète, durant la dernière campagne électorale, ils se sont déjà prononcés là-dessus en disant: à ne plus maintenir les prix artificiellement bas en ce qui concerne l'électricité.

Cela, c'était dans leur livre rouge de la dernière campagne électorale et, à cette époque, déjà le ministre des Finances avait déposé son budget prévoyant le projet de loi no 16, la modification de la structure d'Hydro-Québec en structure par actions. Et le peuple du Québec s'est prononcé à l'occasion de la campagne électorale et il a appouvé les orientations du présent gouvernement.

Non seulement cela, M. le Président, mais au mois d'août dernier, à la suite de la campagne électorale et du choix que la population a fait des différentes options, une commission parlementaire a été tenue où toutes ces questions ont été discutées en long et en large. Autrement dit, le débat a eu lieu, il ne servirait à rien de le maintenir. Au contraire, l'Opposition libérale elle-même s'est prononcée sur le fond même de ces débats, elle a pris position et elle est en faveur, dans son programme politique, de ne pas maintenir artificiellement des prix trop bas de l'électricité. (17 h 20)

De ce point de vue, ce que nous devrions avoir de l'Opposition, c'est une motion de blâme pour nous accuser de maintenir encore trop bas... Oui, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Laplante): Je voudrais savoir si vous parlez au nom du gouvernement.

M. de Belleval: Oui, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Laplante): Pendant une demi-heure?

M. de Belleval: Oui.

Le Président suppléant (M. Laplante): Maintenant, je vous demanderais de parler sur la motion de report.

M. de Belleval: C'est ce que j'explique, M. le Président. Cette motion de report dit que le débat n'a pas eu lieu. J'ai essayé de démontrer, durant les dix dernières minutes, que, effectivement, ce débat avait eu lieu, et non seulement qu'il avait eu lieu, depuis 1973, 1974, sous l'ancien gouvernement libéral, non seulement en 1978, avec l'ancien ministre de l'Énergie et des Ressources, M. Joron, mais aussi lors de la dernière campagne électorale, alors que le Parti libéral lui-même s'était prononcé contre le maintien de taux artificiellement bas dans le domaine de l'électricité.

De ce point de vue, ce que nous devrions avoir de l'Opposition libérale, c'est une motion de blâme, entre autres, parce qu'on maintient peut-être, de leur point de vue, d'après ce qu'ils disaient dans leur propre programme politique, des taux artificiellement bas en ce qui concerne, par exemple, les petits consommateurs d'électricité. Pour moins de 600 kilowatts de consommation, l'augmentation des tarifs prévue pour cette année n'est que de 12%. Donc, elle est exactement en ligne avec le taux d'inflation. Ce qui veut dire que si ces taux étaient artificiellement bas, d'après le Parti libéral, lors de la campagne électorale, je suppose qu'encore aujourd'hui, il devrait nous blâmer de maintenir des taux aussi bas et de ne proposer que des augmentations aussi faibles.

Sinon, comme le disait le député de Saint-Laurent, qui a quitté son siège parce qu'il blâmait la démagogie et les contradictions de l'Opposition, si les libéraux étaient cohérents, ils mettraient de l'avant leur programme politique et ils nous diraient: Messieurs, vous maintenez trop bas les tarifs de l'électricité par rapport à ce que nous disions dans notre programme électoral, en particulier: "favoriser l'augmentation de la pénétration du gaz naturel". Dans ce domaine, c'était le député d'Outremont, tout à l'heure, qui nous blâmait de ne pas avoir maintenu une différence assez grande entre le

prix... '

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: M. le Président, avant que vous ne remplaciez votre prédécesseur au fauteuil, ce dernier avait indiqué au député de Charlesbourg qu'il s'agissait de discuter d'une motion de report à douze mois. J'en conviens, il voudrait bien faire le grand débat public qu'on voudrait faire au cours des douze prochains mois pendant la demi-heure dont il dispose, mais ce n'est pas de ça qu'il s'agit; il doit traiter de la motion de report. Dites-nous pourquoi vous voterez pour la motion de report que je viens de proposer.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Charlesbourg.

M. de Belleval: M. le Président, ce que j'essaie de démontrer tout simplement, c'est que le débat que réclame l'Opposition, elle ne le réclame pas sérieusement puisque le député de Gatineau lui-même s'est contredit en disant que le report de ce projet de loi devrait être supérieur à douze mois, alors que douze mois seraient fort suffisants pour maintenir le débat en question.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse. Jusqu'à maintenant, je pense que le débat s'est déroulé d'une façon différente de celle que j'entends depuis quelques instants. Chacun, à ma gauche et à ma droite, a eu l'occasion de parler sans être interrompu par personne. En vertu de l'article 100, je demanderais de laisser la possibilité au député de Charlesbourg de bien faire son intervention. Vous savez très bien, M. le député de Maskinongé, ce que la présidence a déjà dit sur la question des motions de report. On demande toujours aux intervenants d'être dans le sujet, mais il est très difficile de déterminer s'ils sont hors du sujet ou dans le sujet. En conséquence, je suis assuré que vous me laisserez la possibilité, comme président de déterminer s'il est dans le sujet ou non. M. le député.

M. de Belleval: M. le Président, ce que j'essaie de démontrer, c'est que le débat que réclame l'Opposition, mais qu'elle ne réclame pas de façon sincère puisque le député de Gatineau a parlé d'un report à plus de douze mois alors qu'une période de douze mois serait fort suffisante pour tenir ce débat, a déjà eu lieu, qu'il a eu lieu depuis de nombreuses années et qu'en particulier, il a eu lieu lors de la campagne électorale. Je suis bien obligé de me reporter au contenu même du programme politique, que proposait le Parti libéral lors de la campagne électorale, qui touchait ce sujet, pour démontrer que le débat a véritablement eu lieu. Par conséquent, cette motion de report est hypocrite, démagogique et insignifiante.

Alors, le député d'Outremont, tout à l'heure, disait: La différence entre le tarif de l'électricité et celui du gaz naturel n'est pas assez élevée, ce qui n'aura pas pour effet d'augmenter suffisamment la pénétration du gaz naturel au Québec.

Quelle belle contradiction! Il nous blâmait ni plus ni moins de ne pas avoir assez augmenté les tarifs d'électricité pour permettre la pénétration du gaz naturel au Québec, conformément au programme politique libéral, lors de la dernière campagne électorale. Ces gens disaient: "Favoriser l'augmentation de la pénétration du gaz naturel", c'est-à-dire augmenter davantage les tarifs d'électricité plus rapidement que ceux du gaz naturel pour favoriser cette pénétration du gaz naturel. Ce qui constituait un des fondements de leur politique énergétique lors de la dernière campagne électorale. De la même façon qu'ils étaient favorables, lors de la dernière campagne électorale, à une augmentation rapide des taux d'électricité, ils disaient: "Ne plus maintenir les prix artificiellement bas comme ils le sont", à l'époque de la campagne électorale. Je viens de le rappeler, nous n'avons augmenté, c'est-à-dire que la proposition d'augmentation des tarifs pour cette année, pour les "bas" consommateurs, ceux dont les besoins essentiels sont assurés par l'électricité, c'est-à-dire ceux qui consomment moins de 600 kilowatts, n'est que de 12%. Donc, je suppose - je reviens sur cet argument - qu'ils devraient nous blâmer de ne pas avoir haussé suffisamment ces tarifs d'électricité, conformément à leur programme politique.

Mais on sait ce qui est arrivé de ce programme électoral. Ils ont fait le débat, à ce moment-là. Ils l'ont proposé à la population. Le débat a eu lieu...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. de Belleval: ...et ils ont été battus, M. le Président. Ils ont été battus.

Des voix:

M. de Belleval: Par conséquent, je maintiens que ce débat a eu lieu, qu'il a été très considérable, que toutes les avenues ont été largement explorées, que ces messieurs, lors de la campagne électorale, au moment où ils étaient convaincus qu'ils prendraient le

pouvoir, sachant gu'à peut-être quelgues jours d'avis, ils seraient obligés de tenir leurs promesses, les perspectives qu'ils développaient envers les Québécois à cette époque... Ils écrivaient des choses responsables. Ils disaient à peu près la même chose que ce que disait le livre blanc du gouvernement présenté par M. Joron. Ils disaient: "Oui, il ne faut pas conserver, de façon artificiellement bas, les tarifs d'électricité. Il faut favoriser l'introduction du gaz naturel."

Sur le plan de l'énergie nucléaire, pudiquement, ils ne disaient pas trop de choses parce que, évidemment, il y avait une grande contradiction entre les propositions du député d'Outremont qui était favorable à l'énergie nucléaire; il vient d'une grande société d'ingénieurs conseils qui, justement, construit des centrales nucléaires; on le comprend. Mais les autres membres du parti disaient: Écoutez, cher M. Fortier, mon cher Fortier - le député d'Outremont s'appelle ainsi - ce n'est pas très politique de proposer des centrales nucléaires. Alors, pudiquement, ils n'en parlaient pas beaucoup. Vous lirez cela, M. le Président, tous les fondements principaux d'une politique énergétique. On les retrouvait dans le programme du Parti libéral lors de la dernière élection et figurez-vous que même là-dessus ils disaient aux Québécois, et je le répète encore une fois parce qu'il le faut: "Attendez-vous à des hausses importantes des tarifs d'électricité parce qu'il ne faut plus maintenir les prix artificiellement bas."

Le député de Saint-Laurent, qui a quitté son siège, voulait tenir le même lanqage qu'il tenait durant la campagne électorale et que le Parti libéral tenait durant la campagne électorale parce que c'était un langage responsable. Il a quitté son siège parce que ses anciens collègues ont refusé de tenir un langage responsable sur l'ensemble de la situation économique du gouvernement et du Québec en particulier sur la question énergétique. Ils renient les principes qu'ils ont mis de l'avant lors de la dernière campagne électorale et maintenant ils ne font que de la démagogie, c'est-à-dire tenter de faire croire à la population qu'on pourrait encore maintenir artificiellement bas les prix de l'électricité, alors qu'ils disaient le contraire lors de la campagne électorale.

Comment peut-on qualifier ce comportement? Est-ce qu'ils sont tombés sur la tête, M. le Président? Non, je suis certain que le député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas tombé sur la tête. Le député de Gatineau n'est pas devenu fou, il n'est pas tombé sur la tête. Non, ce qu'ils sont devenus - et ce que disait le député de Saint-Laurent - c'est irresponsables, démagogiques et on pourrait dire menteurs. C'est-à-dire que ce qui était responsabilité et vérité au mois d'avril dernier, à savoir ne plus maintenir artificiellement bas les tarifs de l'électricité, aujourd'hui ils ont fait cela avec leur programme électoral... C'est cela qu'ils ont fait avec leur programme électoral et ils disent maintenant aux Québécois: Oubliez notre programme électoral, oubliez les grands principes d'une politique énerqétique libérale que nous tenions au mois d'avril dernier...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. de Belleval: ... faisons de la démagogie, faisons croire n'importe quoi à la population. Je comprends pourquoi ils voudraient maintenant tenir un débat. Ils voudraient réécrire ce livre rouge qui leur colle aux fesses et qui dit le contraire de ce qu'ils disent aujourd'hui.

Je suppose que le député de Vaudreuil-Soulanges ne peut pas être fier, compte tenu du nom qu'il porte...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. de Belleval: ... des espoirs que certains voient en lui, d'être obligé de renier ni plus ni moins le programme électoral sur lequel il s'est fait élire dans Vaudreuil-Soulanges. Il renie actuellement le programme électoral sur lequel il s'est fait élire et il a le front de demander un débat public là-dessus. Alors que lui-même s'est présenté sur ces principes, s'est fait élire là-dessus, aujourd'hui il parle contre ces mêmes principes, à savoir que lors de la campagne électorale il disait: II faut augmenter considérablement les tarifs de l'électricité parce qu'on ne peut plus les maintenir artificiellement bas.

Aujourd'hui qu'est-ce qu'il nous dit? Il nous dit le contraire. Ce que nous avons décidé, M. le Président, c'est de présenter maintenant ce projet de loi, conforme dans ses principes au livre rouge libéral durant la campagne électorale et conforme aussi au livre blanc proposé par le ministre en 1978, M. Joron. Nous avons décidé qu'il était temps de proposer cela. C'était leur politique lors de la campagne électorale. C'est notre politique. Pour une fois il y avait unanimité entre les partis politiques. Eux et nous étions sur la même longueur d'onde. Ils étaient d'accord qu'on ne pouvait maintenir encore artificiellement bas les tarifs de l'électricité.

Je leur pose la question: Comment pouvez-vous concilier ce que je viens de lire, qui est dans votre livre rouge, sur lequel, M. le député de Vaudreuil-Soulanges, vous vous êtes fait élire, avec le discours qu'a tenu le député d'Outremont, avec le discours que vous-même avez tenu, avec les insignifiances que vous avez dites depuis tantôt? Comment pouvez-vous concilier le programme électoral

que vous avez proposé aux Québécois au mois d'avril et les discours que nous venons d'entendre? (17 h 30)

Je pense qu'ils ne peuvent pas répondre à cette question. C'est évident, ils sont en pleine contradiction, mais nous pouvons y répondre parce que nous tenons exactement le même langage. C'est la raison pour laquelle je me vois obligé de renvoyer ces messieurs à leurs devoirs. Je leur demande de relire le programme électoral qu'ils ont présenté aux Québécois. Vous le relirez, tout à l'heure, quand vous parlerez sur la motion de report ou plus tard, quand votre motion aura été battue et qu'on reviendra sur le fond. Ayez le front de relire ce programme. Ayez le front de relire les phrases que je viens de lire et comparez-les aux phrases que vos recherchistes vous écrivent et que vous répétez comme des perroquets en disant que tout cela est épouvantable, qu'il faudrait faire croire aux Québécois que le Père Noël existe et qu'encore aujourd'hui une augmentation, par exemple, de 12% des tarifs d'électricité pour les petits consommateurs...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. de Belleval: C'est incompatible avec le langage qu'ils tenaient lors de la campagne électorale. Pour toutes ces raisons, je suis obligé de demander, évidemment, que cette motion soit rejetée. Et, en même temps... Est-ce que l'Opposition pourrait me laisser terminer, M. le Président? J'ai presque terminé. Je comprends que cela vous fasse mal.

Une voix: Cela nous fait rire et ça fait quasiment mal.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela a été un moment difficile. Mon expérience m'avertissant que nous passerons ensemble une partie importante de la soirée et de la nuit peut-être, je vous demanderais, sans vous nommer, de permettre que chacun termine son intervention. De la même façon, on aura l'occasion d'en faire une de l'autre côté tout à l'heure. J'ai besoin, sans les nommer, de l'aide de certaines personnes qui se trouvent à ma gauche et à ma droite.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Charlesbourg.

M. Lalonde: Étant donné que vous avez parlé des personnes à votre gauche, M. le Président, vous savez que vous pouvez toujours compter sur...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Je n'ai parlé ni de gauche ni de droite seulement, mais des deux à la fois.

M. le député de Charlesbourg.

M. de Belleval: M. le Président, combien de minutes me reste-t-il à intervenir?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Sept ou huit environ.

Une voix: Consentement.

M. de Belleval: M. le Président, c'est beaucoup trop et je n'abuserai pas de la patience de cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. de Belleval: M. le Président, j'ai écouté attentivement tantôt le député d'Outremont, je ne l'ai pas interrompu. J'ai écouté le discours du député de Vaudreuil-Soulanges, j'ai pris des notes, ce qui me permet, d'ailleurs, maintenant de relever les contradictions entre ce qu'il a dit il y a quelques minutes et ce qu'il écrivait dans son programme électoral au mois d'avril dernier. Il parlait, d'ailleurs, de politiques cohérentes, dynamiques et visionnaires. Il parlait aussi de se maintenir dans le giron d'une politique énergétique pancanadienne. C'est ce qu'il écrivait. Ils y croyaient, à ce moment-là, et ils disaient vouloir promouvoir l'augmentation graduelle de la pénétration du gaz naturel; ils se prononçaient contre de bas tarifs artificiellement maintenus bas dans le domaine de l'électricité. C'est ce qu'il disait, M. le Président. Est-ce que je peux avoir l'autorisation de déposer en cette Chambre, pour rafraîchir la mémoire des débris de cette armée qui ont quand même réussi à survivre au désastre du 13 avril dernier, à ces débris...

M. Scowen: M. le Président, est-ce que je peux vous demander une directive?

M. de Belleval: Est-ce que je peux déposer le document qu'ils ont proposé à la population lors de ce grand désastre?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député, j'ai cru comprendre qu'on me demandait une directive. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je me demande si vous pensez qu'on peut demander au député de lire la partie de notre programme qui touche l'énergie au complet, d'un bout à l'autre. Il lui reste du temps et, comme cela, il pourrait éclairer tout le monde. Il déforme

énormément...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'était pas une demande de directive. M. le député de Charlesbourg.

M. de Belleval: M. le Président, je comprends qu'ils demandent que je lise tout cela; ils ne s'en souviennent pas! Je vais vous en lire un petit bout, M. le Président. "Attendu..." Ils procèdent de façon solennelle. C'est à la page EC-Vlll/2: ils ont des codes, à part cela. C'est la recommandation EC-V1. Ce doit être pour mêler la Gendarmerie royale qui doit les espionner comme elle nous espionne, M. le Président. "Attendu que le Parti libéral du Québec -c'est eux autres ça - veut replacer les questions énergétiques dans un contexte canadien et tirer tous les avantages économiques de notre situation énergétique -je ne peux pas lire tout ça, M. le Président. C'est l'attendu principal. Je vais déposer le document, pour être certain. Écoutez ça, M. le Président. Quatrièmement, il y a toute une série de recommandations sur le pétrole, il y en a pour le gaz naturel. Ils veulent un débat sur la politique énergétique, M. le Président, je leur rends hommage. Ils avaient déjà tout fait ça. "Un gouvernement - ils se prétendaient bientôt gouvernement, c'est écrit - du Parti libéral du Québec s'engage... "Il s'engageait à quoi? "à ne plus maintenir les prix artificiellement bas dans le domaine de l'électricité". Il s'engageait à hausser les tarifs d'électricité.

M. le Président, de toute évidence, le député de Notre-Dame-de-Grâce a besoin que je lui rafraîchisse la mémoire. Par conséquent, je dépose en cette Chambre le programme électoral du Parti québécois -excusez. Regardez la couleur, M. le Président, vous verrez mon lapsus. Remarquez qu'ils seraient bien fiers de nous le refiler maintenant, parce qu'ils sont en train de parler contre leur propre programme électoral. Je sollicite le consentement unanime de cette Chambre pour déposer le programme électoral du Parti libéral du Québec qui contredit tout ce que nous avons entendu depuis quelques minutes et qui maintenant fait la honte de ce parti, déjà sans chef et désormais sans armes.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant. J'ai vu plusieurs personnes se lever, mais en vertu de l'article 96, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: J'aimerais corriger les faits. Pendant que j'étais absent - j'ai écouté, de mon bureau - le député de Charlesbourg a fait état que le débat public avait eu lieu. Je ne lui en veux pas. Il a parlé à travers son chapeau. C'est un domaine qu'il ne connaît pas. J'aimerais établir, M. le Président, avec preuve à l'appui, que le débat public n'a pas eu lieu. Ce que nous demandons est tout à fait léqitime.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, évidemment, ce n'est pas en vertu de l'article 96. C'est une reprise du débat. Vous aurez l'occasion de reparler sur l'amendement. M. le député de... Oui, il y a M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: C'est en vertu de l'article 100, M. le Président. Je veux poser une question au député. M. le Président, étant donné le tintamarre qu'il y avait de l'autre côté et tout le bruit...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Vous avez parlé d'une question en vertu de l'article 100. Juste un instant. Il faut bien s'assurer. Done, vous voulez... S'il vous plaît. Je n'ai pas voulu vous interrompre inutilement, mais en vertu de l'article 100, vous avez la possibilité, M. le député de poser une question. La coutume veut, en cette Chambre, que normalement la question posée par un individu en vertu de l'article 100 soit posée par le côté opposé et non pas par les députés... S'il vous plaît! S'il vous plaît! J'ai bien dit: La coutume veut, mais si vous voulez me laisser terminer, vous allez comprendre le reste. La coutume veut, mais il n'y a rien qui interdit, cependant, qu'une question soit posée par un député du côté de celui qui est déjà intervenu. Donc, je ne veux, en aucune façon vous enlever ce droit qui vous appartient. (17 h 40)

M. le député de Dubuc.

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de quel article?

M. Blank: L'article 100 dit: "Tant qu'un député a la parole..." Le député a repris son siège, il n'a plus la parole, alors il ne peut pas poser de question.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je comprends votre point de règlement, sauf que l'habitude veut que - je l'ai souvent demandé moi-même comme président - tant et aussi longtemps qu'un député a la parole, on doit essayer de ne pas l'interrompre et me faire signe qu'on veut poser une question, en vertu de l'article 100. À plusieurs occasions, le député a posé la question de la façon dont le député de Dubuc avait commencé à la poser, de telle sorte que je lui accorde ce droit qu'il a.

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement. Naturellement, je n'ai pas objection à ce que le député de Dubuc pose toutes les questions à qui il voudra, mais j'aimerais, sans en appeler de votre décision, tout en la respectant, attirer votre attention sur le fait que si vous acceptez ce précédent, toute l'économie de notre règlement pourrait être modifiée de sorte que 80 ou 75 députés du même parti que l'intervenant - et on pourrait faire ça, de notre côté, toute la soirée aussi pourraient lui poser des questions qui, une fois la réponse donnée, pourraient encore éterniser le débat. C'est un précédent très dangereux pour l'application de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Simplement pour vous dire M. le député que c'était ce que j'avais voulu laisser sous-entendre, soit d'éviter que ça puisse provoquer des débats. Vous savez très bien aussi en même temps que le député auquel on pose une question n'est pas obligé de répondre. Je comprends aussi ce que le député de Saint-Louis disait tout à l'heure, majs je veux simplement lui rappeler que j'ai souvent demandé comme président, au moment où quelqu'un essaie d'interrompre une personne pendant son discours - M. le député, s'il vous plaît, je pense que ce moment de réflexion peut nous aider d'attendre la fin de l'intervention, de façon à éviter qu'on interrompe indûment la personne. C'est ce que le député de Dubuc avait fait. Cependant, il me fait signe que, compte tenu des circonstances, il permet au député de Gatineau de faire son intervention, en vertu de l'article 96.

M. Gratton: Oui, M. le Président, et contrairement au député de Dubuc, je me conformerai complètement au règlement. J'ai évoqué deux motifs principaux à l'appui de la présentation de la motion de report à douze mois. Le premier était, bien sûr, celui dont a traité longuement le député de Charlesbourg, à savoir qu'il me semblait opportun qu'on ait une période de douze mois, période maximale permise par le règlement de l'Assemblée nationale pour faire le débat public en question.

J'ai aussi évoqué, en parlant de l'expérience de 1962, de l'aspect de la consultation, la nécessité, pour le gouvernement, au moment où il s'apprête à chambarder la vocation d'Hydro-Québec, de faire ce qu'on a fait en 1962, c'est-à-dire consulter la population. J'ai même dit: On pourrait, pour le faire, comme en 1962, tenir une élection. Comme je sais que le gouvernement n'a pas l'intention de décréter des élections, ni là-dessus ni sur autre chose, connaissant d'avance les résultats, c'est ce qui explique que j'aie dit...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: M. le Président, c'est même le leader du gouvernement qui chahute, je pense que ce n'est pas normal, ça.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Allez!

M. Gratton: Je termine, M. le Président, en disant que c'est dans ce sens que j'ai dit que si le règlement de l'Assemblée nationale me permettait d'inscrire une motion de report à plus de douze mois, cela aurait été uniquement dans le but de permettre au gouvernement de faire la consultation qui s'impose, par le biais d'une élection. Le règlement ne le permettait pas, ce qui explique que j'ai inscrit douze mois.

C'était facile à comprendre, il s'agissait d'écouter.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Au nom du parti... M. le député de Portneuf. Allez.

M Michel Pagé

M. Pagé: Non, M. le Président, dix minutes seulement.

Merci, M. le Président. Je veux intervenir sur la motion présentée par mon collègue de Gatineau. Entendre le discours qui vient d'être prononcé par le député de Charlesbourg, c'est avoir une preuve éclatante, je pense, que parfois un ou des députés peuvent se satisfaire de bien peu. On constate que le député de Charlesbourg, à défaut d'être membre du gouvernement, accepte maintenant de parler au nom du gouvernement.

Le projet de loi 16 est certainement un des projets, comme d'autres l'ont signalé cet après-midi, les plus importants, sinon le plus important de la présente session. J'ai écouté attentivement le discours de mon collègue d'Outremont, celui de mon collègue de Vaudreuil-Soulanges, celui de mon collègue de Gatineau tout à l'heure; j'ai aussi écouté avec beaucoup d'intérêt et d'attention le discours du député de Saint-Maurice et ministre de l'Énergie et des Ressources. Cela touche Hydro-Québec, une société qui nous appartient, une société qui avait comme ultime objectif, avant la présentation du projet de loi no 16, aujourd'hui, de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises

industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec, "aux taux - c'est là que c'est important - les plus bas compatibles avec une saine administration financière."

C'est donc dire qu'Hydro-Québec devait profiter à l'ensemble des Québécois, et la loi conviait les administrateurs et la direction d'Hydro-Québec à rechercher, en tout temps, les tarifs les plus bas possible pour les contribuables que nous sommes, tous et chacun et chacune d'entre nous.

Ce projet de loi vient modifier la structure financière d'Hydro-Québec. Ce projet de loi qui est le résultat de l'affaiblissement de l'économie du Québec, depuis quelques années, constitue, en quelque sorte, le moyen pour le gouvernement du Québec de combler des déficits, des manques à gagner et d'aller chercher de façon indirecte ce qu'il n'a pas le courage, ni le culot, ni le front de faire directement.

M. le Président, on sait que le gouvernement du Québec est formé de gens qui devaient bien administrer notre province et qui invitaient les Québécois à rester forts le 13 avril dernier. Force nous est de constater aujourd'hui qu'on se retrouve dans une situation où on aura bientôt à la fin de l'année un peu plus de 3 000 000 000 $ de déficit au Québec, représentant une augmentation de 280% par rapport au déficit de 1976. Ce sont les bons administrateurs, les gens compétents, les gens qui connaissent cela du Parti québécois. On se retrouve donc avec un besoin d'argent qui est accru. Ce qu'on a fait, on a tenté par tous les moyens indirects d'aller combler, d'aller chercher ces montants: taxe sur l'essence, augmentation de plusieurs taxes indirectes. On aura l'occasion de revenir sur chacune d'entre elles. Oui, je reviens sur la motion. Vous allez voir qu'on pourra discuter assez longtemps. On espère qu'on pourra discuter des deux côtés de la Chambre.

M. le Président, j'en étais à vous dire qu'avec le projet de loi ils transforment, somme toute, comme le disait mon collègue de Gatineau, Hydro-Québec en un percepteur d'impôt pour le gouvernement du Québec et ils permettent à Hydro-Québec d'imposer des taxes qui iront renflouer les déficits du Parti québécois, l'incompétence, la mauvaise gestion du Parti québécois qui est beaucoup plus préoccupé par la constitution, la souveraineté avec ou sans trait d'union avec l'association, qu'il ne peut l'être par l'économie. (17 h 50)

Ce projet de loi vise essentiellement à camoufler la mauvaise administration du PQ. Ce qu'on dit par la motion de report à douze mois, ce n'est pas compliqué. On dit: Comme contribuables du Québec, les contribuables qu'on représente, on en a assez des augmentations de taxes et on ne peut pas se permettre d'accepter un hold-up comme celui-là, parce que ce projet de loi permettra au gouvernement, M. Jacques Parizeau en tête, d'aller chercher jusqu'à 75% des profits engendrés par les activités d'Hydro-Québec sous forme de dividendes. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que les profits qui avant servaient à Hydro-Québec pour réinvestir, pour dépenser des montants combien importants - le programme d'investissement prévu pour 1982, c'était un peu plus de 2 000 000 000 $ - risqueront à l'avenir d'entrer dans les coffres et dans les budgets réguliers du gouvernement du Québec pour payer l'épicerie et payer les dépenses courantes du gouvernement, purement et simplement.

Ce projet de loi prévoit des augmentations de tarifs substantielles; c'est 16,7% à compter du 1er janvier. On dit à tout cela: Assez, c'est assez, cela n'a pas de bon sens. La semaine passée, c'était l'augmentation de l'essence, c'était l'augmentation des plaques d'immatriculation, on vient de perdre la diminution de 2%...

M. de Belleval: Question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Charlesbourg sur une question de privilège, en vous rappelant que, si cela a trait à votre discours, vous avez le droit, en vertu de l'article 96, d'intervenir à la fin. Si c'est en vertu d'une opinion différente, il y a d'autres façons que de soulever une question de privilège. Je l'ai souvent dit aussi: On peut clarifier la situation lors d'une intervention future.

M. le député de Charlesbourg.

M. de Belleval: M. le Président, vous me rappellerez à l'ordre si je ne suis pas conforme à vos... J'accepte vos recommandations. Si mes remarques ne sont pas conformes à ce que vous venez de dire, vous me le direz et j'accepterai votre décision sans problème. C'est parce que le député de Portneuf vient d'induire la Chambre en erreur et aussi la population qui nous écoute en disant qu'un des objets du projet de loi, c'est de permettre l'augmentation des tarifs et il a mentionné un chiffre, je pense, de 16%. M. le Président, ce projet de loi n'a aucun rapport avec l'augmentation des tarifs d'Hydro-Québec.

Le Vice-Président CM. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président.

M. Gratton: Qu'est-ce que tu contes là? Voyons donc.

M. Pagé: Si le projet de loi 16 avait pu être discuté au complet au caucus du Parti

québécois, comme cela pourrait être le cas, si le PQ acceptait de reporter à douze mois l'étude du projet de loi, le ministre, non pas le ministre, je m'excuse, ce n'est pas lui, le député de Charlesbourg, ex-ministre des Transports serait en mesure de comprendre le projet de loi. Avec le projet de loi no 16, vous allez fouiller dans les poches d'Hydro-Québec; vous pouvez possiblement prendre jusqu'à 70% des dividendes et cela obligera Hydro-Québec à augmenter ses tarifs. On sait tellement cela que l'augmentation des tarifs prévue est déjà de 16,7% pour le 1er janvier prochain, 16,7% que le contribuable du Québec devra payer de plus qu'il paie actuellement, après avoir fait l'objet d'augmentations de taxes indirectes soutenues et régulières depuis plusieurs mois au Québec, à cause de l'incompétence non seulement de ces gens, mais surtout de celle du député de L'Assomption et ministre des Finances.

M. le Président, la motion de douze mois, qu'est-ce qu'elle vise? Quel est son objet? C'est tout d'abord de permettre une meilleure consultation. Je ne suis pas convaincu que le député de Champlain a eu l'occasion de discuter à fond ce projet de loi. Je ne suis pas convaincu que les nouveaux députés d'arrière-ban, qui viennent d'arriver ici, qui ont été élus le 13 avril dernier, ont pu discuter ce projet de loi ni qu'ils ont eu l'occasion de discuter, la semaine dernière, du règlement qu'a présenté un membre du Conseil des ministres et qui visait essentiellement à enlever l'aide sociale aux personnes de 18 à 21 ans. À ce moment-là, le caucus du Parti québécois a fait le travail qu'il avait à faire. Je serais curieux, par exemple, de voir le travail que vous pourriez faire à l'égard du projet de loi no 16, si vous aviez la chance d'être consultés, premièrement.

Une voix: ... est d'accord.

M. Pagé: Je ne suis pas convaincu de cela, M. le Président. Le député de Vanier et ministre des Communications se doit d'être d'accord; il est lié par la solidarité ministérielle.

M. le Président, cela nous permettrait de tenir un véritable débat public sur l'énergie. Le député d'Outremont aura l'occasion de revenir un peu plus tard dans ce débat pour démontrer clairement que ce débat ne s'est pas tenu. Le député de Charlesbourg, tout à l'heure, a erré dans les faits, lorsqu'il a soutenu qu'un tel débat s'était déjà tenu au Québec.

Cela nous permettrait de voir aussi quel serait l'effet pour les contribuables du Québec de vivre une augmentation aussi substantielle. On sait que le petit contribuable, le citoyen moyen au Québec a été frappé durement, depuis quelque temps.

On n'a même pas eu l'occasion de discuter le budget les 25 heures qui nous sont allouées. On n'a pas eu le temps d'échanger avec les membres du gouvernement sur les études et les analyses qu'ils ont dû faire avant de taxer le contribuable comme il le sera, avec le budget Parizeau. La consultation de la période de 12 mois nous permettrait de voir l'effet sur le plan d'investissement d'Hydro-Québec, de l'application de la loi no 16.

Quant au programme d'investissement, c'est là que je vais invoquer le deuxième motif pour lequel la motion est tout à fait justifiée. J'invite les députés de la région de Québec, le député de Charlesbourg notamment, qui a pris la parole tantôt, le ministre des Communications, non, lui, je ne l'invite pas, parce que, de toute façon, il a la solidarité ministérielle, et qu'est-ce qu'il ne ferait pas pour rester ministre, pauvre petit gars! Alors M. le Président, j'invite donc le député de Limoilou, j'invite le député de Chauveau notamment, mon voisin de comté, j'aimerais que le ministre de l'Énergie et des Ressources... Cette période nous permettrait de voir l'effet de la loi no 16 sur un projet comme celui qui est dans le comté de Portneuf, le projet Delaney, qui devait se réaliser cette année. On sait que le projet Delaney, c'est un projet par lequel Hydro-Québec prévoyait - je dis bien prévoyait - construire une centrale à réserve pompée, qui aura comme objectif de combler les besoins d'électricité en période de pointe.

M. Duhaime; M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, une question de règlement.

M. Duhaime: M. le Président, je comprends qu'il est 18 heures moins trois minutes, que le député de Portneuf veut s'adresser à ses électeurs et leur parler du projet Delaney, mais je vais répondre tout de suite à la question qu'il m'a posée.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse M. le ministre. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, j'aime autant vous dire qu'à Hydro-Québec, d'après les études qu'elle a faites, le ministre de l'Énergie en est certainement au fait, il ressort clairement que d'ici quelques années, nous aurons besoin d'une production hydroélectrique en période de pointe pour alimenter le Québec. Depuis plusieurs années, Hydro-Québec prépare un projet important, primordial pour le développement économique de la réqion de Québec, notamment, un projet qui permettra de produire en période de pointe 2110 mégawatts, ce qui est tout

prêt de 10% de la production du Québec actuellement, qui demandera un investissement de 2 milliards de dollars. Je soutiens, comme député - c'est mon appréhension très nette - que, compte tenu que le projet de loi no 16 permettra au gouvernement d'aller puiser dans les revenus d'Hydro-Québec, en déclarant des dividendes qui vont aller jusqu'à 75%, cette société a déjà annoncé, a déjà confirmé des diminutions de 570 000 000 $ des investissements qu'elle entendait faire l'année prochaine. Je termine là-dessus, M. le Président. Pour ce motif...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, question de règlement de la part du leader du gouvernement. Question de règlement.

M. Bertrand: M. le Président, je pense qu'il y a un règlement dans le cadre de ce débat sur la motion de report qui stipule que chaque député a droit à dix minutes. Voudriez-vous nous indiquer, s'il vous plaît à quelle heure a commencé de parler le député de Portneuf et est-ce que ses dix minutes sont épuisées à ce moment-ci?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette question étant une demande, je dois vous dire, M. le leader, que le député, avec les interruptions qu'il a eues... J'ai la latitude cependant de vérifier ces interruptions, et je me permets de dire qu'il lui restait le temps qu'il fallait avant de suspendre. M. le ...

Une voix: C'est parce qu'il voulait passer à la télévision.

M. Pagé: Avant d'être interrompu, j'en étais à dire que je peux affirmer l'appréhension que les gens de Portneuf ont et que leur député a: c'est que le projet de loi no 16 amène un risque sérieux non seulement de reporter à plusieurs années, mais de faire en sorte que le projet Delaney, qui a été élaboré par Hydro-Québec, au sujet duquel le président-directeur général de la société, M. Boyd, répondant à la commission parlementaire du 24 février, disait qu'Hydro-Québec avait besoin de la réalisation de ce projet... L'amorce des travaux devait se faire en 1981. Le ministre n'est certainement pas sans savoir qu'il devait se dépenser 13 000 000 $ cette année, 24 000 000 $ en 1982. Notre appréhension est sérieuse et on craint que la loi no 16 ne vienne mettre fin à la réalisation d'un tel projet. Ce sont là 2 000 000 000 $ d'investissement dans la région de Québec, la création de plusieurs centaines, de quelques milliers d'emplois. Ce sera important pour tous nos comtés, les comtés péquistes comme les comtés libéraux, évidemment. Car on sait combien la région de Québec peut être frappée par un taux de chômage élevé, actuellement. Je veux avoir l'assurance du ministre de l'Énergie et des Ressources.

On sait que le projet est sur la table du Conseil des ministres depuis déjà un bon bout de temps. Je voudrais, et c'est la demande que je formule aujourd'hui, que le ministre de l'Énergie et des Ressources profite du débat sur le projet de loi no 16 pour confirmer la volonté du gouvernement de réaliser le projet Delaney, qui sera bénéfique, qui commandera un investissement de 2 000 000 000 $ dans le centre de la région de Québec et nous dise selon quel échéancier il sera réalisé.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint.

M. Bertrand: J'allais dire au député de Portneuf que si c'est le projet de l'année, il ne peut pas y avoir un report de douze mois.

M. le Président, nous allons suspendre jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Suspension des travaux jusqu'à 20 heures et le député de Verchères aura le droit de parole.

(Suspension de la séance à 18 h 01)

(Reprise de la séance à 20 h 07)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

Vous pouvez vous asseoir.

La parole est au député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, on discute actuellement d'une motion de report qui voudrait faire en sorte que le projet de loi qui est actuellement à l'étude soit mis sur les tablettes pendant un an. Pour quelle raison? On a entendu deux intervenants libéraux cet après-midi et les deux arguments qui ont été avancés sont les suivants. D'abord, selon eux, il y a un débat à faire sur l'avenir énergétique au Québec. Ce débat, disent-ils, n'a pas été fait et ce débat devrait, à leur avis, être fait avant que l'on discute du projet de loi parce que ce projet de loi affecte l'avenir énergétique du Québec. Premier argument.

Deuxième argument, plus camouflé, c'est celui du député de Portneuf qui dit, lui: II faut empêcher le gouvernement de taxer plus parce que le gouvernement allant fouiller dans les poches d'Hydro-Québec oblige Hydro-Québec à augmenter ses tarifs et, donc, c'est une taxe déguisée. C'est cela les deux arguments de nos adversaires.

M. le Président, si je comprends bien,

les applaudissements de mes amis d'en face -c'est peut-être la première fois en cinq ans que je les traite d'amis - témoignent que j'ai bien résumé leurs arguments. Donc, si on se comprend sur l'argumentation de nos adversaires, maintenant on va voir si cette argumentation est fondée parce que c'est cela, la question. Vous pouvez toujours essayer d'invoquer l'importance de reporter le débat à un an en vous basant sur certains arguments, il reste à savoir si ces arguments sont fondés.

D'abord, est-ce qu'il y a un débat à faire sur l'avenir énergétique? Peut-être. On peut diverger d'opinion pour savoir si ce débat a déjà eu lieu, a suffisamment eu lieu ou n'a pas eu lieu du tout. Ce qu'il est important de savoir si ce débat devait avoir lieu, c'est: est-ce que le projet de loi affecterait l'avenir énergétique du Québec et est-ce qu'en discutant de l'avenir énergétique du Québec on mettrait en cause le projet de loi qui est devant nous actuellement? La réponse, c'est non parce que ce qui est en cause actuellement devant l'Assemblée nationale, ce n'est pas l'avenir énergétique, comme le prétendent les libéraux. Ce qui est en cause actuellement, c'est l'utilisation que le gouvernement du Québec veut faire de fonds publics qui existent et qui vont exister à cause du simple fait que les gens paient leur électricité, et qu'on voudrait peut-être utiliser différemment au cours des prochaines annnées.

M. le Président, je suis convaincu que les profanes qui nous écoutent, les gens qui ne comprennnent pas grand -chose - c'est la majorité des gens, et je suis un de ceux-là -qui ne comprennent pas grand chose à toute la complexité du dossier énergétique, comprennent une chose clairement: c'est qu'il n'y a pas beaucoup de relation entre l'utilisation qu'on veut faire des fonds publics, d'une part, et l'avenir énergétique, d'autre part. Il n'y a pas de relation entre ces deux questions. Et qu'on n'essaie pas de créer une fausse relation pour camoufler sa propre turpitude parce qu'on est un petit peu embêté avec un programme électoral qui dit exactement ce que le gouvernement est en train de faire.

C'est cela, le problème des libéraux. Ce n'est pas le gouvernement du Québec, actuellement, qui a un problème, c'est le Parti libéral qui est poigné à vivre avec un programme politique qui dit exactement ce que le gouvernement du Québec est en train de faire. Sauf que quand on est dans l'Opposition, il faut s'opposer. Le problème, c'est que, quand on s'oppose à son propre programme politique, il faut camoufler cela, il faut trouver de bonnes raisons, du moins des raisons qui ont l'air de poigner. Le problème, c'est que vos raisons ne poignent pas. En tout cas, celles-là ne poignent pas, parce qu'il n'y a pas de relation. Aucun des députés libéraux qu'on a entendus jusqu'à maintenant dans ce débat n'a été capable d'établir comment il y avait une relation entre l'avenir énergétique et l'utilisation différente qu'on veut faire des fonds publics qui existent à même la société d'État qui s'appelle Hydro-Québec. Cela est le premier argument, donc dégonflé votre premier argument.

Deuxième argument: le gouvernement veut taxer plus. Il veut taxer plus parce qu'il va aller fouiller dans la poche d'Hydro-Québec et, en faisant cela, il va augmenter la tarification. Ce n'est pas exact, M. le Président. Il n'a jamais été question d'augmenter les tarifs d'électricité au cours des prochaines années, pour faire en sorte que le gouvernement aille chercher plus d'argent. Ce n'est pas exact. Ce n'est pas exact, sauf que cela embête les libéraux parce que c'était pour eux un bon argument pour camoufler, encore une fois, le fait que, dans leur programme politique, ils proposaient exactement ce que le gouvernement est en train de faire. Qu'est-ce que vous voulez, c'est embêtant pour un parti d'Opposition de proposer exactement ce que le gouvernement est en train de faire. Tous les partis d'Opposition, dans n'importe quel Parlement du monde, seraient coincés comme vous l'êtes actuellement si vous étiez pris à vous faire remettre dans la figure -on va vous le faire toute la nuit s'il le faut votre programme politique qui dit exactement de faire ce qu'on est en train de faire.

M. le Président, il n'est pas question d'augmenter les tarifs au cours des prochaines années parce que ce qu'il est question de faire c'est, de toute façon, d'accumuler des fonds qui seront disponibles parce que la demande baisse et les projets d'investissement, en conséquence, ne sont pas aussi importants que certains le prévoyaient. Une masse d'argent sera disponible. On peut faire deux choses avec cette masse d'argent: payer "cash" certains projets qui, de toute façon, vont devoir se faire. Cela veut dire que notre génération paierait comptant et on donnerait aux générations à venir des services gratuits, des services qui, d'autre part, seront utilisés pendant des générations.

Je pense que les gens qui nous écoutent n'ont pas le goût de payer comptant de futurs barrages, de futures installations qui vont servir pendant 100 ans, 150 ans, 250 ans. Personne, au Québec, n'a le goût de payer comptant, actuellement, des installations qui vont durer beaucoup plus longtemps qu'eux-mêmes sur cette terre. Les gens comprennent ça. Ils comprennent que, dans ce cas, si le gouvernement trouve que ça n'a pas d'allure - eux aussi trouvent que ça n'a pas d'allure - de payer "cash" en une génération des installations qui vont durer longtemps, il peut faire deux choses. Il peut

dire: On va baisser vos tarifs d'électricité. Mais en faisant ça, qu'est-ce qu'on va faire? En baissant les tarifs d'électricité, on va amener une utilisation accrue de l'électricité et on va revenir au même point, parce que si on baisse les tarifs, les gens qui utilisent le gaz ou l'huile décideront d'utiliser l'électricité parce que ce sera moins coûteux.

Ou alors on peut faire ce que le gouvernement fait actuellement. C'est la raison pour laquelle il faut le faire maintenant et ne pas attendre dans douze mois. Il faut utiliser cette masse d'argent qui sera disponible et faire en sorte, comme le suggère le programme du Parti libéral, d'investir soit dans le développement économique, soit dans le développement social, réduire les inégalités au Québec, ce que propose le programme du Parti libéral.

Maintenant, parce que c'est embêtant, parce qu'on veut jouer son rôle d'Opposition jusqu'au bout, jusqu'à l'absurde, on préfère déchirer son programme politique, on préfère le mettre de côté et dire au gouvernement: Ne faites pas ce qu'on vous disait de faire il y a sept mois, faites donc l'absurde maintenant. Le problème, c'est que si vous avez changé d'idée, si vous avez décidé d'être incohérents jusqu'à l'absurde, on n'est pas obligé de le faire. Je pense que les gens qui nous écoutent comprennent ça. Ils n'ont pas le goût de suivre le Parti libéral dans l'absurde. Ils n'ont pas le goût de payer "cash", pour utiliser l'expression populaire, des installations qui vont servir pendant des générations. Les gens ont le goût d'utiliser plutôt les fonds disponibles pour faire en sorte que le développement économique du Québec s'accélère. C'est ça le bon sens de cette motion.

Dans ce sens-là, les deux arguments qu'on nous a présentés pour dire qu'il fallait reporter ce projet à douze mois, les deux arguments qu'on nous a présentés comme camouflage de la motion dilatoire ne tiennent pas. Le débat qu'il nous propose n'est pas pertinent à la question qui est actuellement en discussion et, deuxièmement, il n'est pas question pour le gouvernement du Québec de taxer plus. Il est question d'utiliser de l'argent qui est là de toute façon pour donner des meilleurs services aux gens plutôt que de payer "cash" des choses qui, de toute façon, vont être utilisées pendant des générations. Cela non plus ne prend pas un cours universitaire pour comprendre cela et on n'a pas besoin d'un cours d'ingénieur comme le député d'Outremont pour le comprendre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Des voix: Bravo!

M. Scowen: Nous aurons l'occasion, demain, M. le Président...

M. Duhaime: M. le Président, je m'excuse auprès de mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce. Je voudrais soulever une question de privilège.

Des voix: Oh!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de privilège.

M. Duhaime: Je voudrais, M. le Président, revenir sur l'intervention du député d'Outremont, un peu avant l'ajournement, qui disait, à mon endroit, que lors d'une conférence de presse à l'annonce de la tarification pour l'année 1982, j'avais déposé un tableau qui, d'après son jugement, serait faux et qui comprendrait, à son dire, des chiffres quant au gaz naturel ne tenant pas compte de la taxe. Je voudrais déposer devant l'Assemblée nationale le tableau C dont il a été question.

Une voix: ...pas de document. Une voix: Oui.

M. Duhaime: Au gaz naturel, il y a un astérisque et c'est marqué, au bas de la page, "sans taxe".

Une voix: Dépôt.

Une voix: Consentement.

M. Fortier: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je voudrais simplement bien faire remarquer qu'une question de privilège n'entraîne pas un débat, cependant.

Une voix: Non.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Ce sera très limité. Je n'ai malheureusement pas le document en question avec moi, mais cela me fera plaisir de le donner au ministre en temps et lieu. Dans ce document que j'ai en ma possession et qui nous est parvenu de son directeur des relations publiques, il est fait mention des différents coûts de l'énergie pour chauffer un bungalow. Dans les coûts se rattachant à l'électricité, on a inclus le coût de la taxe sur l'électricité. Dans les coûts qui sont donnés pour le chauffage au gaz, on a oublié d'inclure la taxe sur le gaz. Cela me fera plaisir de remettre également le document au ministre pour qu'il en prenne

connaissance. Je ne l'accuse pas d'avoir fait lui-même cette erreur, mais je dis qu'il est malheureux qu'un ministre donne une conférence de presse et qu'il induise la population en erreur sur ce sujet.

Une voix: Très bien.

M. Duhaime: M. le Président.

Une voix: Là, cela va finir en débat.

Une voix: Un "filibuster".

Une voix: Quelle motion est-ce que vous débattez?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse. J'ai bien fait attention à mes dires, tout à l'heure, parce que je ne veux en aucune façon qu'il y ait de débat. Je pense qu'il y a d'autres façons de présenter ces questions et, en conséquence, je donne la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.

Des voix: Bravo!

M. Duhaime: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement, M. le ministre.

M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je voudrais, si nos collègues d'en face sont d'accord, déposer un document. Le député d'Outremont vient de nous dire qu'il n'en avait pas pris connaissance lui-même. Alors, je me demande sur quoi il s'est basé pour faire son affirmation. Je n'ai pas l'habitude de mettre dans des pochettes de presse des originaux et des copies qui iraient en sens contraire. C'est marqué très clairement...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

S'il vous plaît! M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. (20 h 20)

Une voix: Très bien.

M. Reed Scowen

M. Scowen: M. le Président, est-ce que tout ce débat faisait partie de mes dix minutes?

Une voix: Non, non, non.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous pouvez y aller, M. le député. Vous pouvez y aller.

M. Scowen: Merci. Nous aurons l'occasion de parler du fond de la question demain, mes collègues et moi. Je veux simplement ce soir vous donner une ou deux raisons pour lesquelles il est très important de reporter immédiatement ce projet de loi.

Premièrement, je dois avertir les membres de l'autre formation qui vont parler après moi que plus tard ce soir mon collègue, le député d'Outremont qui va parler au nom de notre formation, va vous expliquer comment vous êtes complètement dans l'erreur quand vous dites que nous avons effectivement proposé dans notre livre rouge la même chose que vous proposez aujourd'hui. Je vous avertis maintenant que vous perdez votre temps si vous continuez de marcher sur cette piste parce qu'il va vous contredire clairement dans une heure ou deux.

M. le Président, le député de Verchères parlait au nom des profanes de son comté et je pense que c'est un peu à cause des gens de tous les comtés du Québec qui ne comprennent pas la portée de ce projet de loi qu'on veut qu'il soit reporté. Je veux fournir, en des termes les plus clairs possible, juste un exemple des conséquences que ce projet de loi va avoir pour chacune des familles du Québec. Pour vous donner un exemple plus clair, une famille québécoise achète aujourd'hui de l'électricité d'Hydro-Québec. Il y a un fil qui est branché et l'électricité arrive dans la maison. En conséquence, à tous les deux mois on paie une facture. Il y a un coût et un bénéfice. C'est très clair, on y est habitué. HydroQuébec crée un service d'électricité et on paie Hydro-Québec pour ce service. Ce qui est proposé maintenant, c'est de créer un deuxième fil qui commence dans les fonds publics, dans le bureau de M. Parizeau, qui va passer par Hydro-Québec jusqu'à votre maison. La seule distinction entre ce fil et l'autre, qu'on connaît déjà, c'est que c'est un fil qui passe dans un sens unique. Il y a des coûts, on va avoir les coûts, mais pas les bénéfices. Chaque mois, on aura une facture additionnelle cachée à l'intérieur de la facture d'Hydro-Québec, des sommes importantes qui vont passer de vous, citoyens du Québec, par l'entremise d'Hydro-Québec, directement dans le fonds consolidé de M. Parizeau. Combien?

M. Picotte: Probablement que le député de Verchères va comprendre.

M. Scowen: Si ce projet de loi est adopté, avec tout ce qui entoure ce projet de loi, on va avoir une hausse radicale, pas moins de six taxes très importantes. Premièrement, la taxe foncière municipale va augmenter, d'ici 1985, de 6 000 000 $ à 16 000 000 $. Hydro-Québec va payer les 16 000 000 $ et ce sera ajouté à votre facture. L'impôt municipal sur le revenu passera de 51 000 000 $ à 130 000 000 $. La taxe de vente sur les achats d'Hydro-Québec, une autre taxe nouvelle, passera de 12 000 000 $ à 28 000 000 t. L'impôt sur

les programmes de santé, qu'Hydro-Québec sera dorénavant obligée de payer, passera de 9 000 000 * à 30 000 000 $.

J'arrive au sujet le plus intéressant. La nouvelle taxe sur le capital passera de zéro, l'année passée, à 147 000 000 $ en 1985. Les dividendes, proposés dans ce projet de loi, de zéro aujourd'hui, passeront à 905 000 000 $ et, finalement, la taxe de vente pour les usagers passera de 120 000 000 $ à 290 000 000 $. D'ici 1985, les taxes perçues par le ministre des Finances, par le biais d'Hydro-Québec et payées par les consommateurs d'électricité, passeront de 200 000 000 $ à 1 500 000 000 $ pour une augmentation de 700%.

Pendant cette période de cinq ans, Hydro-Québec va payer un montant de 3 000 000 000 $ de plus qu'elle aurait payé autrement, 3 000 000 000 $ qui seront, à leur tour, appliqués à votre facture. 3 000 000 000 $, qu'est-ce que cela veut dire? C'est difficile à comprendre. Il faut l'expliquer dans les termes de chaque famille. Il y a au Québec, si ma mémoire est bonne, 1 500 000 familles. Cela veut dire combien par famille? J'ai une petite calculatrice et je vais faire les calculs pour vous. Qu'est-ce que vous pensez, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Un instant. J'essaie de vous suivre dans votre discussion. S'il vous plaît! J'ai essayé avec attention de bien vous suivre. J'expliquerai à celui qui va me remplacer au cours de la nuit les problèmes qui existent au niveau de la définition de l'amendement ainsi que de la motion principale. J'ai dit qu'il fallait être très large parce qu'il y a une ligne de démarcation très difficile à tracer. Je précise à tous les autres députés qui auront à intervenir sur l'amendement, que l'amendement porte sur le report à douze mois de l'étude du projet de loi no 16. Je sais que vous essayez, comme tous les autres vont le faire, d'ailleurs, je ne veux pas vous accuser ni les autres, de donner les raisons pour lesquelles il faut reporter ce projet de loi à douze mois. J'aimerais quand même avoir l'assurance que dans ce que j'ai comme intelligence à saisir de votre discours, c'est bien sur la motion d'amendement que vous parlez et non pas sur la motion de fond.

M. Scowen: M. le Président...

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement. Tout ce que le député... Mais je soulève... Le Vice-Président (M. Jolivet): Ah bon! C'est différent, parce que je n'avais pas...

M. Lalonde: Vous êtes appelé à appliquer le règlement, ce que vous faites avec beaucoup de sagesse, M. le Président. Je le dis sérieusement. Ce n'est pas facile. Ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce est en train d'expliquer, c'est qu'il y a 1 500 000 000 $ de raisons pour reporter le projet à un an.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Ce que je voulais faire, M. le Président, c'est de vous donner seulement un exemple d'un manque de compréhension, de connaissance de la part de la population dans le fait de reporter l'adoption de ce projet de loi. Avec votre permission, je vais continuer de donner cet exemple. Je suis persuadé que les citoyens de Verchères, cette fin de semaine, si je m'explique bien, c'est ce qui va arriver ici, vont demander au député de Verchères d'appuyer notre motion de report. C'est très important. Je suis arrivé à la fin de mon exposé, M. le Président. Je veux vous dire que je viens de faire le calcul. Ces 3 000 000 000 $ valent 2000 $ par famille. D'ici 1985, chaque famille québécoise, à cause de ce projet de loi, va voir sa facture d'électricité directe ou indirecte augmenter de 2000 $ sans recevoir une quantité additionnelle d'électricité. C'est une perte totale pour ce contribuable qui va passer directement de sa maison à Hydro-Québec et ensuite aux coffres de M. Parizeau. C'est une taxe cachée qui s'élève à 400 $ en moyenne par année ou si vous voulez à 35 $ par mois. C'est pourquoi le Parti libéral a demandé ce soir que ce projet de loi soit reporté pour que la population ait le temps nécessaire de l'étudier. Ce n'est plus le projet de loi no 16; c'est le projet de loi 2000, 2000 $ de plus par famille. C'est ce que ce projet de loi va coûter aux contribuables québécois.

Dans son discours cet après-midi, M. le Président, le ministre disait que c'était normal qu'Hydro-Québec se comporte comme une société privée. Ce n'est pas normal. Ce n'est pas normal du tout qu'un monopole d'État qui est organisé et créé pour donner des services à la population soit obligé de s'organiser comme une société du secteur privé. Je pense que ce parti en face doit être le premier à le comprendre. Je pense que d'après la population, c'est beaucoup plus normal qu'Hydro-Québec continue de poursuivre le mandat qui a été confié à cette société il y a plus de 25 ans, qui est de fournir l'électricité à la population aux prix les plus bas possible, compatibles avec une saine gestion financière. C'est cet aspect, les prix les plus raisonnables possible que le Parti québécois est en train d'enlever à cette société.

En terminant, M. le Président, - je

regrette d'être obligé de terminer, parce que j'ai été interrompu par tout le monde, même le président, mais je pense que j'ai terminé quand même, on va reprendre demain matin l'essentiel, la raison essentielle pour laquelle on demande que ce projet de loi soit reporté, c'est que les gens de Verchères, les gens de Notre-Dame-de-Grâce, les gens de vos comtés à vous, messieurs, ne comprennent pas que ce projet de loi va leur coûter, d'ici 1985, en moyenne 400 $ de plus par année sur leur facture d'électricité sans recevoir aucune augmentation dans ce qui est fourni. Est-ce clair? (20 h 30)

Des voix: Oui.

M. Scowen: Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre.

M. Leduc: Oui, question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement.

M. Leduc: Je voudrais poser une question au député. Comment fait-il pour arriver au chiffre de 2000 $ par famille? Cela nous étonne beaucoup, M. le Président. C'est la première fois qu'on entend ce chiffre et on aimerait entendre quelques explications de la part du député.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Notre-Dame-de-Grâce veut-il répondre?

M. Scowen: Est-ce que je peux...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, vous avez la parole.

M. Scowen: Très bien. Cela va prendre deux minutes. Je vais prendre le tableau qui a été produit par M. Marcel Bélanger quant aux impôts additionnels qui seront...

Des voix: Ah! Ah!

M. Scowen: Je pense que c'est une source très respectable. On a calculé les impôts additionnels qui seront perçus d'Hydro-Québec par le gouvernement d'ici cinq ans. Je dois ajouter que c'est une prévision optimiste dans le sens que c'est basé sur une augmentation de 13% seulement des tarifs moyens, ce qui est loin d'être probable. De toute façon, si j'ajoute tous les impôts additionnels basés sur 1980 qui seront payés par Hydro-Québec à ce gouvernement, j'arrive à peu près à 3 000 000 000 $. Si je divise 3 000 000 000 $ par 1 500 000 familles québécoises, j'arrive à 2000 $ par famille. Je viens de le faire avec ma petite calculatrice et, si vous ne me croyez pas, je suis prêt à vous la prêter.

M. Grégoire: Permettez-vous une question?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Non. M. le député, vous aurez l'occasion d'intervenir. M. le député de Frontenac, le député de Notre-Dame-de-Grâce acceptant d'y répondre, allez.

M. Grégoire: M. le Président, c'est juste une demande de précision sur les chiffres que vient de nous donner le député de Notre-Dame-de-Grâce. J'aimerais lui demander comment il se fait, s'il y a 3 000 000 000 $ d'impôts de plus ou de taxes différentes à Hydro-Québec, que, malgré tout, nous sommes 12% moins cher qu'en Ontario et le moins cher en Amérique du Nord? Est-ce que ça veut dire que nous sommes les meilleurs administrateurs?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Premièrement, M. le Président, c'est exactement à cause de notre situation très concurrentielle aujourd'hui, qui ne sera plus concurrentielle après que vous aurez adopté ce projet de loi, si on subit ses conséquences pendant cinq ans, qu'on propose que ce soit reporté.

En deuxième lieu, M. le Président, je veux rappeler au député de Frontenac que, d'après les livres bleus et Bâtir le Québec même, nous ne sommes pas le moins cher en Amérique du Nord; il y a au moins deux ou trois endroits aux États-Unis où l'électricité est moins chère. II y a une ville dans l'État de Washington, une deuxième au même endroit et la province du Manitoba. M. le Président, ça me fera plaisir de descendre les deux livres, L'électricité et Bâtir le Québec, et de vous donner les endroits précis, je l'ai dans mon bureau. Ce sont vos documents à vous. Il n'y a pas de problème. Est-ce que vous voulez que je les descende?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci, M. le député.

M. le député de Beauce-Nord.

M. Adrien Ouellette

M. Ouellette: Merci, M. le Président. J'ai presque envie de m'excuser de mettre fin au débat qui s'était engagé entre le député de Notre-Dame-de-Grâce et certains collègues, puisqu'on aurait pu permettre au député de Notre-Dame-de-Grâce de nous faire part de ses connaissances géographiques qui ne figurent pas sur sa calculatrice électronique, mais vous pourrez toujours

reprendre le débat en d'autres lieux.

Je n'avais pas l'intention d'intervenir sur ce projet de loi parce que, après avoir pris connaissance du programme électoral du Parti libéral, j'étais certain que l'Opposition libérale se rallierait spontanément au projet de loi no 16 et approuverait le geste que le gouvernement du Québec s'apprête à poser. Quand j'ai entendu le député de Gatineau faire une motion de report à douze mois, il a bien fallu, comme mes collègues, que je me rende compte que ce que les libéraux écrivent dans leur programme électoral ne correspond pas toujours aux propos qu'ils tiennent à l'Assemblée nationale au lendemain des élections.

Essentiellement...

Une voix: Ils n'ont jamais respecté leurs programmes.

M. Ouellette: Le raisonnement que tiennent les gens de l'Opposition peut se résumer ainsi, ils nous disent: Hydro-Québec, depuis 1963, depuis la nationalisation, appartient en totalité aux Québécois et devrait servir d'abord les intérêts des Québécois. Je pense que jusque-là, il n'y aura pas de chicane possible et c'est une des rares fois d'ailleurs, où, à ma connaissance, il y a une parfaite unanimité sur le parquet de l'Assemblée nationale.

Mais ils poussent, hélas! leur raisonnement un peu plus loin en disant: Si vous voulez que l'ensemble des citoyens du Québec profite de cette propriété qui est la sienne, c'est-à-dire Hydro-Québec, vous devez abaisser les taux ou les tarifs hydroélectriques au minimum, afin qu'on puisse tous utiliser cette électricité à meilleur compte et que tous les Québécois puissent en profiter à ce titre. Car, disent-ils, tous les citoyens du Québec utilisent l'électricité. Là-dessus, je crois qu'on va être encore d'accord. C'est clair que, du bébé dans son incubateur jusqu'au doyen des Québécois, nous avons tous besoin d'électricité, chaque jour, dans notre vie. Personne ne va contester ça.

Alors, leur raisonnement consiste à dire: Si on abaisse les tarifs, on fait en sorte que chaque Québécois profite de la propriété qu'il a, Hydro-Québec. Mais là où il y a un problème, c'est au niveau du degré de consommation. Personne n'osera prétendre que chaque Québécois, chacun des 6 000 000 de Québécois utilise la même quantité d'électricité. C'est bien sûr qu'il y a différents degrés d'utilisateurs. Par exemple, le propriétaire d'une maison individuelle avec chauffage à l'huile utilise beaucoup moins d'électricité que celui qui a la même maison avec un chauffage à l'électricité. C'est certain que celui qui est propriétaire d'un grand commerce utilise beaucoup plus d'électricité que le citoyen ordinaire. Cela va en s'accroissant, à mesure que les entreprises grandissent.

Si on suivait le raisonnement du Parti libéral, on aurait ceci comme situation: abaissons les tarifs et faisons économiser de l'argent à ceux qui utilisent beaucoup d'électricité et beaucoup moins d'argent à ceux qui l'utilisent peu. Ce qui revient exactement à dire: aidons les riches et faisons payer la facture par les moins riches. C'est exactement la situation qu'on obtiendrait si on suivait non pas ce qu'ils ont écrit dans leur programme électoral, mais dans ce qu'ils défendent aujourd'hui sur le parquet de l'Assemblée nationale.

Comme Québécois et comme membre du Parti québécois, donc, comme social-démocrate, j'ai toujours prétendu que ce n'était pas à une société d'État comme Hydro-Québec de voir à ce qu'un équilibre se fasse au niveau des revenus d'une société. Ce n'est pas du tout le rôle d'une société d'État, mais c'est bel et bien celui d'un gouvernement. Le projet de loi no 16 qui est devant nous vise justement à inviter Hydro-Québec à jouer son rôle de société à l'intérieur du Québec en payant à l'État québécois une juste contribution, au même titre que toutes les autres sociétés d'État et que toutes les entreprises privées sur le territoire de ce même Québec. (20 h 40)

En allant chercher ainsi les quelques millions et même les quelques dizaines de millions, à une société d'État au même titre qu'aux autres sociétés, c'est bien sûr que M. Parizeau disposera d'une somme d'arqent lui permettant de faire une redistribution beaucoup plus équitable que celle qui s'appuierait exclusivement sur la capacité qu'ont les citoyens d'utiliser en petite ou en plus grande quantité les kilowatts qui sont produits par notre société d'État.

Je reviens donc à mon préambule. Je suis étonné de voir que le Parti libéral, ayant écrit une chose dans son livre rouge, dans son programme électoral, quelques mois plus tard, se tourne carrément de bord et soutienne exactement le contraire. Tout à l'heure, le député de Notre-Dame-de-Grâce nous annonçait ou plutôt celui de Marguerite-Bourgeoys - je ne sais trop - qu'un de leurs collègues allait essayer de démentir ce fait. Avant même qu'il ne le fasse, qu'il me soit permis de lire à nouveau un tout petit paragraphe qui figure dans le programme électoral du Parti libéral, programme qu'ils ont défendu durant la campagne électorale d'avril 1981 et qui se lit ainsi - vous allez voir que cela confirme très exactement tout ce que je viens d'avancer - au paragraphe 4, partie I: "En visant l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel énergétique à ne plus maintenir les prix artificiellement bas et aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par

des mesures sociales plus appropriées."

C'est donc dire qu'ils reconnaissaient, au moment où ces gens ont écrit leur programme électoral, que c'est le rôle du gouvernement de voir à ce que les citoyens reçoivent tous un revenu équitable et suffisant pour leur assurer une vie décente. Ce n'est pas du tout le rôle d'Hydro-Québec. Au contraire, le rôle d'Hydro-Québec, c'est d'assurer que chaque citoyen puisse avoir accès à la production hydroélectrique au meilleur coût possible, mais à des coûts qui sont comparables aux autres énergies qui sont offertes aux citoyens du Québec.

Je répète donc que je ne comprends vraiment rien à l'attitude des libéraux. Je serai forcé de m'opposer à cette motion de report, car il m'apparaît urgent qu'on règle ce problème pour le mieux-être de l'ensemble de tous les contribuables québécois qui depuis 1963 ont contribué d'abord à l'acquisition, ensuite à la mise en place et au développement d'Hydro-Québec. Si j'étais malin, je rappellerais aux libéraux d'en face que ce que nous faisons par le projet de loi no 16, à toutes fins utiles, c'est finir "la job" qu'ils ont commencée en 1963, c'est-à-dire que pour une fois, enfin, le gouvernement du Québec aura réellement nationalisé Hydro-Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec, premièrement, prévoit, qu'Hydro versera des dividendes au gouvernement. Deuxièmement, il prévoit que le surplus susceptible de distribution pour une année financière donnée est égal à 75% du total du revenu. Ce que les députés d'en face refusent de reconnaître, ce n'est pas qu'on s'oppose aux augmentations d'Hydro. Si Hydro a besoin d'augmentation pour ses propres fins d'exploitation et d'investissement, qu'elle vienne devant la commission parlementaire, on va l'approuver. Ce à quoi on s'oppose, c'est que les tarifs d'Hydro soient utilisés pour payer les dettes du gouvernement. Est-ce clair?

M. le Président, cela s'appelle exploiter la population par le gouvernement. C'est une exploitation pure et simple. Si une multinationale posait un tel geste, il y aurait un drame chez le Parti québécois. On s'opposerait, parce que imaginez-vous qu'on veut augmenter les profits pour payer des dettes. C'est ce que le gouvernement veut faire. Le député de Gatineau, à juste titre, a fait une motion en vue de reporter à douze mois l'étude et peut-être l'adoption ou la non-adoption, selon ce qui va arriver au cours des douze mois, du projet de loi. Il y a de bonnes raisons et des précédents à cela. L'année dernière, à ce moment-ci, ce même gouvernement a présenté une loi sur SOQUIP. On s'y est opposé; on a fait les mêmes procédures que maintenant et savez-vous ce qui est arrivé, M. le Président? On s'est aperçu qu'on a obtenu d'autres informations. On n'avait pas besoin des sommes d'argent que le gouvernement voulait. Il a amendé son projet de loi et les fonds publics qui ont été donnés à SOQUIP ont été réduits. On a économisé des fonds publics pour les contribuables. C'est cela qu'on a fait l'année dernière et c'est cela qu'on essaie de faire ici avec ce projet de loi.

Il arrive, M. le Président, que des membres " du gouvernement font des affirmations ou donnent des informations erronées. Des fois, c'est de bonne foi, des fois, c'est voulu. Imaginez-vous que dans cette Chambre on adopte un projet de loi tel que le projet de loi no 16 avec de mauvaises informations. Ce sont des milliards qui sont en jeu. On demande de le reporter à douze mois pour obtenir les bonnes informations.

M. le Président, je voudrais donner un exemple de ce que je viens de vous dire. On découvre après coup que des affirmations faites par des membres du gouvernement sont fausses. La semaine dernière, le député de Gatineau - on le félicite pour la motion qu'il nous a proposée ce soir - a porté à l'attention de cette Assemblée le fait que le Dr Marc Lavallée, l'ex-président péquiste de Montréal-Centre, a porté, auprès du leader parlementaire et du ministre de l'Environnement, des accusations de patronage et de gaspillage de fonds publics. C'était la déclaration, l'affirmation du député de Gatineau.

Uhe voix: C'est vrai.

M. Ciaccia: Le député de Châteauguay, lui, a d'affirmé que le Dr Lavallée s'était exprimé sous le coup de la colère et de l'émotion et qu'il regrettait ses propos selon lesquels l'Office franco-québécois pour la jeunesse, relevant de M. Claude Charron, était un autre "nid à patronage", permettant d'accorder des voyages outre-mer à des petits amis.

Des voix: Ah!

M. Dussault: Question de règlement, M. le Président.

Une voix: Ah! cela fait mal.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, je ne voudrais pas avoir à vous demander de faire

une question de privilège. Aussi, je vous demanderais, s'il vous plaît, que le député de Mont-Royal s'en tienne à la pertinence du débat.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de règlement.

M. Lalonde: Sur la question de règlement, M. le Président, je pense que tout le monde a compris que le député de Mont-Royal tentait de démontrer que si le gouvernement faisait ce qu'on lui demande, c'est-à-dire remettre à plus tard justement ce projet de loi, il aurait le temps de réfléchir, et que si le député de Châteauguay avait fait la même chose, avant de dire des sottises comme celles qu'il a dites il y a quelques jours, il ne serait pas dans la situation où il est actuellement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président...

M. Dussault: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: ... les propos que tenait le député de Mont-Royal, avant les sottises dont parlait le député de Marguerite-Bourgeoys, ne sont pas pertinents, parce que la réplique du Dr Lavallée à ce que j'ai dit n'a rien à voir avec le...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Je crois que nous devons nous en tenir à la pertinence du débat et je demande au député de Mont-Royal de continuer.

M. Ciaccia: M. le Président, je veux donner comme exemple... C'est pertinent au débat que je donne ces exemples. On demande de reporter à douze mois parce que si, durant ce temps, on a d'autres informations, peut-être que la loi sera amendée ou retirée.

Je veux donner un exemple de mauvaises informations qu'on a subséquemment trouvées fausses et où on a donné les bonnes informations à la population.

Le député de Châteauguay avait affirmé que le Dr Marc Lavallée n'avait pas dit ces choses-là, qu'il était en colère. Aujourd'hui, pour vous démontrer comment la vérité sort de ces choses-ci, le Dr Lavallée a dit: "Non seulement je ne regrette rien, mais mes questions sont demeurées sans réponse. De plus je n'ai jamais communiqué avec M. Dussault. Il sort cela de son imagination. Je ne m'exprimais pas sous le coup de la colère et de l'émotion. Ce que je demandais au gouvernement, c'est..." (20 h 50)

M. Dussault: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Alors, M. le Président, je vais faire une question de privilège non seulement sur les propos que tient présentement le député de Mont-Royal, mais aussi sur la relation que le journaliste du Journal de Montréal et de Québec a ...

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de privilège, M. le Président.

M. Ciaccia: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement. Vous savez très bien - M. le député ne le sait peut-être pas; là, on voit pourquoi il n'a jamais été vice-président -que ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Lalonde: Non mais, quand même, s'il avait une question de privilège à soulever à l'encontre d'une déclaration d'un journaliste, il fallait qu'il vous donne un avis une heure avant la séance.

M. Dussault: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay, sur une question de privilège toujours?

M. Dussault: M. le Président, toujours sur ma question de privilège. De toute façon, ça rejoindra ce que j'allais dire à propos du journaliste parce que c'est la même chose. Ce que me prête comme propos M. le député de Mont-Royal, ce n'est pas exact. Ce que j'ai dit lorsque je suis intervenu en début de discours hier... M. le Président, c'est une question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vous écoute.

M. Dussault: Ce que j'ai dit, M. le Président, lorsque je suis intervenu en début

de discours hier, c'est que le Dr Lavallée a dit des choses que j'étais convaincu aujourd'hui qu'il regrettait. M. le Président, je n'ai pas dit que j'ai consulté ou que j'ai parlé au téléphone avec le Dr Lavallée; je n'ai jamais dit ça. Ce que j'ai dit, c'est qu'il a dit des choses sous le coup de la colère et de l'émotion et que j'étais convaincu qu'aujourd'hui il les regrettait. Il nous dit publiquement qu'il ne les regrette pas, tant pis pour lui.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole.

M. Ciaccia: M. le Président, j'espère que tout le temps qui a été perdu sur cette question de règlement sera enlevé sur mon temps de parole. Je suis heureux de voir que le député de Châteauguay confirme ce que je viens de dire et qui a été répété ce matin dans le Journal de Montréal,

M. Dussault: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, tout ce que j'ai dit tout à l'heure était à l'encontre de ce que disait le député de Mont-Royal. Je ne confirme pas; au contraire, je dis que je n'ai pas dit les choses comme ça.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal, continuez.

M. Ciaccia: Je vois que le député de

Châteauguay ne confirme pas ce qu'il vient de confirmer avant qui avait non confirmé ce qu'il vient de dire.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Alors, je continue avec les propos du Dr Lavallée pour rétablir la vérité, les faits. Il dit: " Ce que je demandais au gouvernement, c'est comment Mmes Denise Malouin et Jacinthe Rouleau avaient pu obtenir des voyages outre-mer...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le leader adjoint.

M. Ciaccia: J'ai le droit de parole, M. le Président?

M. Bertrand: Oui, vous avez le droit de parole. Tout en comprenant à quel point vous avez à interpréter avec beaucoup de largesse des propos qui peuvent être tenu des deux côtés de la Chambre, M. le Président, on ne viendra quand même pas me faire croire que les propos que le député de Mont-Royal est en train de tenir à partir de l'article paru dans un journal, sur la base des déclarations faites par Marc Lavallée, ont quelque chose à voir avec la motion de report qu'on discute.

Si tel est le cas, M. le Président, qu'on en fasse état. Mais je pense que, dans le contexte de cette motion de report, le député de Mont-Royal devrait comprendre qu'il est normal qu'on le rappelle à l'ordre, si justement il est en train de se fourvoyer complètement et qu'il n'appuie pas - parce que c'est son rôle en ce moment, d'appuyer la motion de report de son collègue de Gatineau - son collègue. Il devrait l'appuyer.

M. Gratton: Question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je voudrais dire, à titre de parrain de la motion de report, que je considère que les propos que tient présentement le député de Mont-Royal sont tout à fait dans l'ordre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous constatez que parler sur une motion de report, c'est difficile. Je vous demanderais votre collaboration pour vous en tenir au sujet et je donne la parole au député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, pour un instant sur la question de règlement, je ne parle pas sur mon temps pour la motion. En réponse à la question de règlement soulevée par le leader adjoint les propos que je tiens maintenant, les exemples que je donne sont pertinents à la motion de report de 12 mois. J'appuie entièrement mon collègue, le député de Gatineau, et si le leader adjoint du gouvernement me permettait de terminer mon exposé, il verrait exactement comment les faits que je vais apporter sont pertinents.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Justement, M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole et terminez votre intervention.

M. Ciaccia: Merci beaucoup M. le Président. J'espère que, cette fois-ci, on va me laisser continuer à donner les raisons pour lesquelles on doit appuyer la motion du député de Gatineau.

Il y a certaines affirmations qui sont faites, des fois, en cette Chambre et vous voyez maintenant les discussions. M. le Président, si on avait l'occasion de discuter des chiffres et de toute l'information du projet de loi, peut-être cela changerait-il complètement le projet de loi.

Je vais vous donner un autre exemple. Le Dr Lavallée continue et dit: "Quels étaient les comptes de dépenses de M. Pierre Simard, chef de cabinet de M. Charron, au cours du premier mandat du gouvernement? Et comment M. Marcel Léger avait-il pu se faire installer un système téléphonique sophistiqué, un appareil de télévision et divers gadgets au coût de 8000 $ dans sa limousine?

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît;

M. Ciaccia: II y a une question de crédibilité du gouvernement, ici. Le gouvernement nous présente un projet de loi par lequel il veut aller chercher 1 500 000 000 $. Il nous demande de le croire. Il nous demande de croire ce qu'il nous dit ici, que les dividendes seront utilisés pour telle et telle fins. On pourrait demander au ministre... Non, M. le Président, j'ai été interrompu. Vous me dites qu'il me reste seulement une minute, j'ai été interrompu à peu près huit minutes...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le député de Mont-Royal, j'ai inclus le temps des interruptions et il vous reste environ une minute. Je vous ai dit tout à l'heure que je calculais le temps des interruptions pour vous le donner. M. le député de Châteauguay, question de ...

M. Dussault: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Dussault: Si je comprends bien, M. le Président, vous acceptez l'argumentation du député de Mont-Royal à l'effet que c'est pertinent parce que c'est la crédibilité du gouvernement qui est en cause. À ce compte-là, il n'y a plus de règlements qui tiendront à l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je crois que ceux qui ont la parole portent la responsabilité de leurs paroles aussi. Je crois que le député de Mont-Royal peut terminer.

M. Ciaccia: La question qui se pose c'est: Pourquoi faire payer les contribuables pour le patronage des petits amis du leader parlementaire et les gadgets du ministre de l'Environnement par des dividendes d'Hydro? C'est pour cela qu'on veut remettre ça à douze mois.

M. le Président, en terminant, je pourrais vous dire que même les péquistes d'arrière-ban, ceux qui sont vraiment honnêtes et ont vraiment à coeur les intérêts du Québec, une fois qu'on aura fait les enquêtes sur la SHQ où des millions sont impliqués, qu'ils demandent si le ministre de l'Environnement a dépensé 8000 $ pour des gadgets. On peut trouver et aller récupérer des sommes dans l'enquête sur la SHQ. En terminant, peut-être qu'après douze mois, on aura récupéré toutes ces sommes et que ce ne sera pas nécessaire d'aller chercher des dividendes d'Hydro pour payer le patronage, le gaspillage, la mauvaise administration.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Groulx.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci, M. le Président, je suis le député de Terrebonne et je vous remercie.

Je vais d'abord essayer de m'en tenir à la motion et surtout essayer de ne pas ternir trop de réputations de façon effrontée. La motion de report de ce soir me surprend et, comme nouveau député, c'est la première fois que je suis témoin d'une motion de report; elle me frappe en pleine figure. (21 heures)

Je suis désolé et déçu que l'Opposition apporte cette motion de report. Lors de mon arrivée dans cette Chambre, je me disais: L'Assemblée nationale est divisée en deux parties, les ministériels qui légifèrent et l'Opposition qui fait son devoir. Le gouvernement propose une loi, la loi no 16, il légifère, il prend ses responsabilités. L'Opposition veut se défiler de ses responsabilités en faisant une motion de report. Cela me surprend énormément, mais lorsque je constate que, ce matin, il y a eu un vote aussi, il y a eu une autre motion de report ce matin: l'Opposition a voté contre le fait qu'il y a deux nations au Canada, elle a voté contre ce projet, donc elle a reporté sa décision à plus tard. Or, c'est normal que ce soir, elle s'essaie une deuxième fois. Mais je ne crois pas, comme beaucoup de mes confrères et consoeurs... est-ce qu'il y en a ce soir? Carmen, Mme la députée de Johnson, Mme Lavoie-Roux, Mme Dougherty, député de Westmount, excusez-moi, je ne crois pas, dis-je, comme les autres membres de ce côté-ci de la Chambre, que c'est à cause de leur programme électoral que les libéraux veulent cette motion de report. Je crois que c'est à cause de la motion de ce matin. Pour être constants avec eux, il faut absolument que les représentants du peuple québécois ne prennent pas leurs responsabilités, parce que d'après eux, il n'y a pas de peuple québécois, ils ont voté contre ce matin. Pour être logiques avec eux, il faut qu'ils soient logiques avec ce que M. Trudeau a dit... le peuple québécois, il ne dit pas le peuple, il dit: "La tribu québécoise n'a aucune responsabilité intellectuelle." Donc, ils se doivent d'être

constants avec eux et de faire le report pour que nous ne puissions pas, de ce côté-ci, prendre notre part de responsabilité. Je trouve cela désolant, dégueulasse. Si on ne me croit pas, j'ai cité livre en main, je peux citer tous ces nobles attributs que donne à notre tribu votre chef en chef.

Je peux en citer un extrait, si vous voulez. M. Trudeau, en parlant de nous au début des années soixante, en parlant du peuple canadien-français à l'époque, disait à ceux qui voulaient leur État nation, je crois que ce sont les ministériels, "mais la tragédie sans rémission serait de ne pas voir que la nation canadienne-française est trop anémiée culturellement, trop dépourvue économiquement - cette loi veut nous pourvoir économiquement. Il faut que vous suiviez les ordres de M. Trudeau, essayez de la faire passer outre - trop attardée intellectuellement - attardé, c'est un grand mot, il faudrait que "grattons" un peu cette idée - trop sclérosée spirituellement." De plus, il ajoute: "On compte que la naissance de notre État nation, c'est-à-dire l'accession à notre souveraineté, libérera mille énergies insoupçonnées." Il dit que l'on compte sur cela, mais bref: "On croit à une énergie créatrice qui donnerait du génie à des gens qui n'en ont pas." On parle de vous aussi de l'autre côté de la Chambre, on dit "donner du génie à des gens qui n'en ont pas" et apporterait le courage et l'instruction à une nation indolente et ignorante.

Ce matin, en rejetant le fait qu'il y ait deux peuples, vous avez fait une motion de report. Vous avez repoussé à plus tard. Vous attendez les ordres du chef. Vous attendez qu'il vous dise: Continuez de défendre les Québécois, la race canadienne-française n'existe pas, ce n'est qu'une tribu qui joue au sorcier et fume le calumet sous les wigwams. C'est cela qu'ils nous disent. C'est pour cela, que vous ne voulez pas que de ce côté-ci de la Chambre on prenne nos responsabilités financières. Vous voulez reporter cela à un an, deux ans si c'était possible. Pas de limite.

Je tiens à vous dire ceci: Nous serons ici, les ministériels 120 heures, 140 heures, 200 heures d'affilée s'il le faut, mais nous prendrons nos responsabilités parce que nous, nous croyons que nous sommes un peuple, et un peuple prend ses responsabilités même si cela coûte cher, même si cela nous blesse politiquement. Il faut que nous prenions nos responsabilités, et ce n'est pas les dernières lamentations de ce qui reste d'une supposée tribu qui va empêcher les gens de ce côté-ci de la Chambre de prendre leurs responsabilités. Jamais, M. le Président, jamais. Quelle logique peut-on voir dans ce report? M. le député de Vaudreuil-Soulanges nous dit que le déficit est excessif, que le gouvernement ne sait pas administrer. Le député de Vaudreuil-Soulanges nous dit cela, il a le droit de le dire. Cependant, savoir administrer... Quand nous avons besoin de fonds pour administrer, notre responsabilité est d'aller en chercher. C'est notre responsabilité. Même si, de l'autre côté, on fait des ah! ah! et si on fait des oui! oui! on va y aller, c'est sûr.

Eh bien, M. le Président, bien que de l'autre côté, on crie, je m'en fous. De ce côté-ci, avec tous les gens qui sont assis avec moi, je voterai contre cette motion, même si nous devions gratter un peu plus fort pour que la rivière Gatineau coule plus fort. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Marquette.

M. Claude Dauphin

M. Dauphin: Merci, M. le Président.

Pour commencer, contrairement à mon collègue et ami de Terrebonne, mes propos ne porteront pas sur la constitution mais bien sur la motion de report présentée par le député de Gatineau à laquelle je souscris entièrement, sans hésitation et de façon inconditionnelle.

Mes propos seront pour justifier les raisons qui me motivent, en tant que parlementaire responsable, à appuyer justement cette motion de report du député de Gatineau. M. le Président, le but premier du projet de loi no 16 est de siphonner les fonds d'Hydro-Québec pour combler les déficits monstrueux du gouvernement du Parti québécois, plus spécialement du député de L'Assomption, ministre des Finances.

Comme on l'a dit tantôt, motion de report pour deux raisons principales. La première est que même l'actuel président du Conseil du trésor et ex-ministre de l'Énergie et des Ressources était en faveur d'un débat public sur la question, étant donné son importance. Importance, comme je disais, parce que ce projet de loi no 16 bouleverse complètement les structures d'Hydro-Québec et bouleverse du même coup l'utilisation des fonds d'Hydro-Québec.

La deuxième raison qui me motive à appuyer effectivement cette motion de report, c'est le fait que ce projet de loi est totalement inacceptable pour le peuple québécois. Vous savez, M. le Président, qu'en 1963, lorsque le gouvernement libéral a décidé de nationaliser l'électricité, c'était dans le but bien précis de procurer de l'hydroélectricité aux Québécois au meilleur coût possible. Tout le monde sait maintenant qu'avec ce projet de loi et les décisions gouvernementales, tous les bénéfices que nous avions en tant que Québécois pour inciter nos entreprises à obtenir de l'électricité au meilleur coût possible, ces beaux jours sont maintenant terminés de par les attitudes du gouvernement et de par les

mesures qu'il entend prendre.

Selon l'information qui nous a été fournie en commission parlementaire le 25 août 1981, Hydro-Québec paiera en dividendes, de 1981 à 1885, 1 600 000 000 $, en plus de payer des taxes sur le capital d'environ 400 000 000 $ pour cette même période. Ce qui veut dire qu'en cinq ans, c'est une taxe indirecte de 2 000 000 000 $ que les Québécois paieront en acquittant leur compte d'électricité.

M. le Président, le gouvernement du Parti québécois a une caractéristique qui lui est propre, c'est effectivement, comme plusieurs de mes collègues l'ont dit depuis ce matin, d'être le spécialiste des taxes déguisées. On commence par l'augmentation de 60% des droits d'immatriculation. La présidente de la Régie de l'assurance automobile du Québec, Mme Sotiau, nous disait en conférence de presse, alors qu'elle était près du ministre des Transports actuel, qu'à la Régie de l'assurance automobile du Québec, cela allait bien, que les fonds étaient suffisants et qu'il n'y avait aucune motivation d'augmenter les droits d'immatriculation de cette façon-là, de 60%, sauf qu'il y a eu un ordre du ministre des Finances de les augmenter encore une fois pour combler les déficits. (21 h 10)

On pense aussi, M. le Président, à la taxe sur l'essence, une augmentation de 0.30 $ le gallon. On dit que ce n'est pas grave mais, finalement, ceux qui utilisent l'essence, c'est tout le monde, ce ne sont pas seulement les millionnaires. Pour l'électricité, c'est la même chose, ce ne sont pas seulement les millionnaires qui l'utilisent.

J'entendais un député nous dire, cet après-midi, en se frottant les mains, que c'étaient surtout les entreprises et les corporations qui paieraient le plus l'augmentation qu'on nous propose. Mais une chose est certaine, c'est qu'en taxant doublement les corporations, les industries et entreprises du Québec, cela a un effet indirect et même un effet direct sur les consommateurs qui devront payer la note de cette augmentation. Autrement dit, le gouvernement, depuis cinq ans, affaiblit le Québec sur le plan économique et a réussi à accumuler une dette publique de 15 000 000 000 $. Il veut aujourd'hui réparer son incurie administrative en faisant payer le prix aux gagne-petit et aux consommateurs.

Ce que le gouvernement impose à Hydro-Québec nuira considérablement à l'économie du Québec en incitant les industries à s'établir en Ontario. On a vu les gens d'en face, cet après-midi, rire de M. Bélanger, qui est un expert en fiscalité; il est compétent, il est libéral, et il l'a voulu. M. Bélanger, qui est compétent en la matière, malgré ce que peuvent prétendre les gens de l'autre côté, disait que si on maintenait les taux de l'électricité au taux le plus bas possible, nous pourrions attirer davantage les industries à haute consommation d'énergie telles les alumineries et l'industrie manufacturière en général.

Au contraire, avec le projet de loi no 16 - c'est ce qui nous motive à appuyer cette motion de report - les prix de l'électricité, au lieu de servir au développement économique du Québec, augmenteront très rapidement dans les prochaines années et les profits serviront à combler les déficits du gouvernement plutôt qu'à faciliter son développement et diminuer ses emprunts. Le gouvernement, au lieu de se servir de notre principale richesse naturelle pour attirer les industries... On parlait de chômage, on a eu l'occasion d'intervenir à maintes reprises sur le chômage au Québec, on détient le championnat du chômage, au Québec, et on cherche par tous les moyens à éloigner les industries plutôt qu'à les attirer en augmentant démesurément les tarifs hydroélectriques.

Le pire, dans cette loi et ces augmentations, c'est, encore une fois, qu'après l'augmentation du prix de l'essence et bien d'autres, on cherche à étouffer ces pauvres consommateurs et contribuables. Où est le groupe des onze? Probablement que pendant l'intersession, au mois de janvier ou de février, ils vont nous sortir des documents, mais je pense qu'il serait maintenant temps que ces gens nous en parlent un peu. C'est plutôt le groupe des neuf; apparemment, il y en a deux de moins maintenant.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Marquette, j'aimerais que vous reveniez à la pertinence du débat. Vous parlez davantage de la loi.

M. Dauphin: C'est justement ce qui me justifiait d'appuyer cette motion de report étant donné l'importance du projet de loi et tous les bouleversements qu'il occasionne.

Ce que j'ai à dire brièvement, en terminant, c'est que lors de la dernière campagne électorale, le Parti québécois disait à la population du Québec: II n'est pas question de faire de l'indépendance l'enjeu de la campagne électorale. Au lendemain des élections, aussitôt qu'on est arrivé ici, dans tous les discours des gens de l'autre côté, c'est comme si l'indépendance était faite ou devait être faite dans les prochaines semaines. Ils disaient à la population qu'ils seraient de bons administrateurs, qu'ils formeraient un bon gouvernement. On se rend compte, depuis quelques semaines, que c'est la pire administration qu'on n'ait jamais eue au Québec, et je pense que les gens vont en juger, pour employer l'expression du

premier ministre ce matin.

Enfin, faute de pouvoir retirer le projet de loi, en tant que membre de l'Opposition, et de changer le gouvernement, je souligne que j'appuierai la motion du député de Gatineau, et j'espère que la majorité dans cette Chambre en fera autant. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont.

M. Picotte: M. le Président, je m'excuse auprès de mon collègue. Je voudrais souligner que mon collègue d'Outremont parle au nom du parti, donc, pendant trente minutes.

Le Vice-Président (M. Rancourt): J'en prends note, M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: Merci beaucoup, M. le Président.

Des voix: ConsentementI Consentement!

M. Fortier: Deux fois dans la même journée, ce n'est pas trop.

M. Gendron: Une heure!

M. Fortier: Ma voix vous tiendra éveillés, messieurs.

M. le Président, avant de parler en faveur de la motion, j'aimerais revenir sur la question de privilège qu'a soulevée le ministre. De fait, j'ai examiné son communiqué de presse et il avait partiellement raison. J'ai dit qu'il avait trompé la population en faisant état de chiffres qui étaient trop favorables au gaz naturel parce qu'il avait présumé du fait que peut-être le ministre des Finances se rendrait à sa demande d'enlever la taxe de vente sur le gaz. J'aurais dû être plus précis et j'aurais dû dire qu'il a trompé la population à l'aide d'un astérisque et il a raison sur ce point. De fait, il y a bien un astérisque sous "gaz naturel" et on a oublié d'inclure, dans les montants qui comparent les chiffres dont on fait état dans ce communiqué de presse, un chiffre qui modifie substantiellement la comparaison qui est faite.

Dans ce communiqué de presse, j'aimerais également souligner, M. le Président, dans les augmentations, au tableau B - j'espère que le ministre ne m'en voudra pas de le souligner pour ceux qui croyaient que les gens les plus démunis pourraient bénéficier de l'aide du gouvernement - que ceux qui consommeraient 600 kilowattheures et moins auront, cette année, une augmentation de 13,2% alors qu'Hydro-

Québec avait proposé 11,8%. On voit jusqu'à quel point ces gens-là sont sociaux-démocrates et aident justement les gens à faible revenu.

J'aimerais revenir à la motion de report, M. le Président, et pour...

Le Vice-Président (M. Jolivet): ...de la part du ministre, toujours d'après la même façon de voir les choses, je voudrais éviter un débat. Mais je pense que, M. le député d'Outremont, sur sa question de privilège, en réponse à une demande que vous avez faite, a débordé un peu vers la fin, ce qui vous permet d'accéder à une question de privilège que, j'ai l'impression, vous soulevez.

M. Duhaime: M. le Président, je n'ai pas en main le tableau D, mais je l'ai en mémoire. Je voudrais que le député d'Outremont nous dise quelle était la proposition d'Hydro-Québec sur l'échelle de 900 kilowattheures par mois et le tarif que le gouvernement a retenu.

Une voix: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Duhaime: Sur le tableau D, le même tableau qui vient d'être évoqué.

Le Vice-Président (M. Jolivet):

J'aimerais que le député d'Outremont, en vertu de son droit de parole, revienne sur l'amendement de façon qu'on soit bien clair. Actuellement, nous sommes sur l'amendement. Je vais, malheureusement, être peut-être un peu plus strict qu'on ne l'a été jusqu'à maintenant en vous disant toujours que cela a été un peu difficile de déterminer si vous parliez sur la motion de report ou sur la motion principale, qui est le projet de loi comme tel. Compte tenu de la soirée que nous avons à passer, des impressions et de l'expérience que j'ai, je vais être un peu plus sévère sur l'opportunité de votre discusssion sur la motion d'amendement.

M. Fortier: Je vous remercie, M. le Président. J'ai tout à fait l'intention d'être pertinent pour répondre au ministre, puisqu'il m'a posé une question. Je ne lui en veux pas, peut-être qu'il n'est pas au courant du communiqué de presse, mais s'il veut avoir de plus amples informations, il peut s'enquérir auprès de son sous-ministre.

Des voix: Ah!

M. Fortier: Pour revenir à la motion, M. le Président...

M. Duhaime: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de privilège.

M. Duhaime: Le député d'Outremont dit que je ne suis pas au courant de mon communiqué. Le communiqué, je l'ai entre les mains, et je vais répondre à la question, s'il refuse. Sur le niveau de 900 kilowattheures par mois...

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Une voix: Un instant, M. le Président.

Une voix: C'est une vraie question de privilège.

Une voix: Ah oui!

Une voix: Une vraie, vraie, vraie.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement, de la part du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, très rapidement. Vous savez que le ministre aura un droit de réplique. Si les propos du député d'Outremont ne lui plaisent pas, il aura l'occasion de le souligner dans sa réplique. Ce qu'il est en train de faire, c'est un débat, ce que vous voulez éviter.

M. Bertrand: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint.

M. Bertrand: Vous me permettrez de... Une voix: Debout!

M. Bertrand: ...faire remarquer au député de Marguerite-Bourgeoys qu'un député a le droit, en tout temps, dès que se sont produits les événements qui pourraient amener un député à poser une question de privilège de se lever. C'est dans le règlement. Si le député a le sentiment qu'on a induit la Chambre en erreur, c'est son devoir de se lever immédiatement et d'invoquer une question de privilège et de rectifier les faits. C'est ce que le député de Saint-Maurice et ministre de l'Énergie et des Ressources s'apprêtait à faire. Je pense qu'il s'agit vraiment, dans les circonstances, d'une question de privilège. (21 h 20)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vois qu'on abuse encore une fois des questions de privilège, malheureusement, de part et d'autre. Je m'excuse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je ne voudrais pas vous rappeler à l'ordre, mais le député d'Outremont a soulevé deux questions de privilège.

Je vous dis dès le départ que je refuserai, même si le règlement m'y oblige d'une certaine façon, des questions de privilège qui ont pour but d'engendrer un débat de part et d'autre. J'aimerais qu'on soit bien conscient d'une chose: il y a des façons de répondre à des arguments apportés. L'une des façons, c'est de permettre à celui qui suivra dans la motion de fond de pouvoir intervenir et rectifier ce qui semble, à la vue d'une personne, une fausse interprétation ou une erreur que la personne qui parle a commise pendant son discours.

M. le député... M. le député... Ce n'est pas une question de sourire; c'est une question de s'en tenir au règlement.

M. le député et ministre de l'Énergie et des Ressources, sur une question de privilège, si j'ai bien entendu, en espérant que c'est une question de privilège.

M. Duhaime: Je peux vous expliquer en quoi cela constitue une question de privilège, M. le Président. Le député d'Outremont, cet après-midi, sur la première question de privilège, a dit que le tableau C qui avait été déposé lors d'une conférence de presse était faux. Je suis ravi de reconnaître qu'il connaît la différence entre une annotation qui lui permet de faire le calcul. En posant sa question en commentaire tout à l'heure, il a ouvert un autre dossier en disant que le tableau B était faussé et que je devais m'adresser à mon sous-ministre. Ce n'est pas mon sous-ministre qui fait les communiqués de presse. Je voudrais rectifier les faits. Il a parlé de 600 kilowattheures, M. le Président...

M. Fortier: M. le Président, question de règlement. Je n'ai pas dit...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le ministre vient d'indiquer que j'ai dit que le tableau B était erroné. Je n'ai pas dit cela. Je n'ai fait que citer les chiffres qui sont inclus dans ce tableau B, tout simplement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Duhaime: Le député d'Outremont a dit que j'avais induit la Chambre en erreur parce que la proposition initiale d'Hydro-Québec était de 11,8%...

M. Bertrand: On ne veut pas laisser parler le ministre, c'est effrayant.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, sur une question de

règlement.

M. Gratton: M. le Président, vous voyez, c'est évident que ce n'est pas une question de privilège puisque, de part et d'autre, on se répond, on engendre un débat. Le règlement de l'Assemblée nationale est clair. Je suggère, si le ministre veut intervenir pour rectifier des faits qui lui paraissent erronés, qu'il le fasse en exerçant son droit de parole sur la motion que j'ai présentée, mais qu'il arrête d'interrompre mon collègue d'Outremont qui a droit à son opinion, lui aussi. Ce n'est pas parce qu'il n'est pas du Parti québécois que le député d'Outremont n'a pas le droit de dire ce qu'il pense.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, vous savez qu'il est souvent difficile d'interpréter une question de privilège tant qu'on ne l'a pas entendue. Une des choses que je dois vous dire, c'est que vous avez profité de votre question de règlement pour justement terminer sur une note qui peut engendrer des débats. Je suis à même, comme je le disais à quelqu'un aujourd'hui, de déterminer de mon siège si c'est une question de privilège ou pas. Au moment où le ministre parlait, j'ai bien compris, jusqu'à maintenant, que c'était une question de privilège et je lui laisse terminer sa question de privilège.

M. Duhaime: Pour revenir à ce que le député d'Outremont indiquait tantôt, au tableau B, sur l'échelle de consommation de 600 kilowattheures par mois, Hydro-Québec nous proposait 11,8% et nous avons retenu 13,2%. Sur l'échelle de 900 kilowattheures par mois, Hydro-Québec nous proposait 18,5% et nous avons retenu 13%. Cela veut dire que, pour le plus grand nombre de consommateurs au Québec, pour leurs besoins essentiels et l'eau chaude, c'est-à-dire 71% et 99%, la hausse dans le domestique est au niveau de l'inflation, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont, vous commencez maintenant votre droit de réplique.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Excusez, M. le député. J'ai bien dit "votre droit de réplique", mais ce n'est pas cela que je voulais dire; c'est plutôt votre droit de parole.

M. Fortier: J'ai bien compris et je vais m'astreindre à vos recommandations.

J'ai entendu, cet après-midi, le député de Charlesbourg et d'autres députés faire état des différents arguments pour lesquels ils désirent voter contre la motion de report.

J'aimerais revenir sur certains de ces arguments et vous dire pourquoi je ne peux les accepter.

Certains ont dit: L'Opposition ne fait que jouer son rôle d'opposition. Je n'admets pas cette réplique puisque, à la fin de mon allocution cet après-midi, j'ai bien fait état du fait que je demandais à tous les députés de se rallier à ma proposition et d'agréer avec moi qu'il y avait suffisamment de matières sérieuses pour surseoir à l'adoption de ce projet de loi. Ce n'est que par la suite, lorsque nous nous sommes rendus compte que les députés du côté ministériel ne voulaient pas accepter notre argumentation, à savoir que le projet de loi no 16 aurait un impact extrêmement important sur l'avenir d'Hydro-Québec et sur l'avenir économique du Québec, que nous avons dû nous résigner et que mon collègue de Gatineau a dû se résigner à proposer une motion de report.

Par ailleurs, comme plusieurs ont fait état du programme du Parti libéral du Québec, si vous me le permettez, étant donné qu'on en a cité certaines parties mais qu'on a omis d'en citer certaines autres, j'espère avoir votre consentement pour rétablir la vérité sur ce point. Je crois que ce que je vais dire est en relation avec la motion de report.

Dans le préambule, justement sur la section qui traite de l'énergie, on dit ceci: "Depuis son accession au pouvoir, le Parti québécois n'a, en effet, rien fait de concret pour améliorer la position énergétique du Québec, si ce n'est la poursuite du développement de la Baie-James et la tentative de s'en approprier le mérite alors que le projet fut mis de l'avant par le gouvernement libéral précédent". Enfin, j'espère que tout le monde est d'accord, même le Parti québécois. "Autre esquive intolérable dans le domaine du gaz naturel, alors que le gouvernement péquiste s'est rendu responsable de nombreux et coûteux retards dans la construction du gazoduc du Québec." J'espère encore une fois qu'ils sont d'accord avec notre programme.

Sur le plan de l'énergie électrique, il y avait une section 1.2 où on faisait état, justement, des mécanismes qui habilitaient le gouvernement à analyser les demandes d'augmentation des tarifs d'Hydro-Québec. On doit se rendre compte que notre recommandation était très pertinente. Comme il en a été fait état cet après-midi, comme le projet de loi no 16 va faciliter dans l'avenir des augmentations de tarif considérables, il nous semblerait, à nous du Parti libéral du Québec, que les demandes d'augmentation d'Hydro-Québec devraient être analysées d'une façon plus rigoureuse, à l'aide d'experts. D'ailleurs, lors de la commission parlementaire du mois de février,

de part et d'autre de la commission, des députés des deux partis, tous s'étaient résignés, je crois, à faire en sorte qu'à l'avenir nous puissions en arriver à des évaluations beaucoup plus pertinentes à ce sujet.

Mais je crois que le paragraphe le plus pertinent au débat est l'article 1.3 où, justement, nous demandons un débat public. On dit ceci: "Un Parti libéral du Québec au pouvoir s'engage à examiner publiquement, avec tous les groupes intéressés, l'ensemble des problèmes énergétiques à long terme du Québec, à reconsidérer plus en profondeur les moyens pratiques d'assurer les économies d'énergie, à étudier plus particulièrement les implications de l'utilisation de l'énergie nucléaire, du charbon, du gaz, des énergies redécouvertes et nouvelles et à déterminer pour les consommateurs les coûts découlant de ces programmes respectifs".

Il est bien clair que nos amis d'en face ont voulu souligner certains articles, mais ils ont oublié de souligner l'article le plus important qui, justement, demandait un débat public avant même que les politiques énergétiques d'un gouvernement libéral puissent être mises en application. C'est là, je crois, où nous sommes d'opinions différentes des deux côtés de la Chambre.

Quant à l'article 4.1, qui en a fait sourire plusieurs, où on lisait que le "Parti libéral du Québec verrait à viser l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel énergétique, à ne plus maintenir les prix artificiellement bas", je dirais simplement ceci: Nous n'avons pas dit que nous étions d'accord pour pousser les prix artificiellement hauts. Je crois M. le Président, qu'il y a, encore une fois, une différence essentielle et que nos amis d'en face ne veulent pas la voir. (21 h 30)

En ce qui concerne la loi no 16, on a également dit, cet après-midi, qu'il n'y avait pas de relation pertinente entre le projet de loi no 16 et la tarification. Je voudrais, si vous le permettez, faire état du rapport de la commission élue permanente de l'énergie et des ressources du 25 août 1981 où on a traité du projet de loi no 16. Le rapporteur était le député d'Abitibi-Est. On dit ceci: "M. Duhaime prend la parole et insiste principalement sur les sujets qui suivent: l'adoption du projet de loi entraînera des changements majeurs concernant la tarification d'Hydro-Québec." Je crois que c'est très clair. "La nouvelle tarification d'électricité, la pierre angulaire de toute politique d'économie d'énergie." Je saute un paragraphe pour arriver à "l'importance de permettre des hausses de prix de l'électricité afin de suivre la hausse du prix des autres modes énergétiques." Voilà le rapport de la commission parlementaire, M. le Président, et voilà comment il y a une relation directe entre la loi 16 et la tarification à venir d'Hydro-Québec.

Je voudrais, par ailleurs, insister sur le fait que, lors de cette commission parlementaire, nous avons dit, je crois, avec raison que, si Hydro-Québec n'avait pas à payer des taxes qui, à ce moment, avaient été établies par Hydro-Québec à 198 000 000 $ et qui, par la suite, je l'admets, ont été ramenées à des montants un peu plus modestes, peut-être de l'ordre de 130 000 000 $ ou 140 000 000 $... Il n'en reste pas moins que l'augmentation de 16,3% qui était proposée par Hydro-Québec devait amener dans les coffres d'Hydro-Québec un montant de 400 000 000 $. De ces 400 000 000 $, 130 000 000 $ à 140 000 000 $ vont être utilisés pour payer des taxes qu'Hydro-Québec n'avait pas à payer dans le passé. C'est la raison pour laquelle nous avons fait une règle de trois et nous avons dit: Si Hydro-Québec a besoin d'une augmentation de 16,3% pour générer 400 000 000 $ et s'il fallait enlever de ces 400 000 000 $ un montant d'environ 130 000 000 $ à 140 000 000 $ qui normalement ne seraient pas payés au gouvernement, il serait, bien entendu, tout à fait possible de diminuer l'augmentation des tarifs à des pourcentages qui seraient beaucoup plus raisonnables compte tenu de l'inflation et compte tenu de la capacité de payer des contribuables et des clients d'Hydro-Québec.

M. le Président, la loi 16 aura des répercussions considérables; elle aura des répercussions sur le financement d'Hydro-Québec, elle aura des répercussions sur sa capacité de réaliser son programme d'équipements et elle aura des répercussions également sur les politiques énergétiques du Québec. Si on ne veut pas prendre ma parole - et je crois que j'en ai parlé cet après-midi j'aimerais tout simplement citer le président du conseil d'Hydro-Québec, M. Bourbeau, lors de la commission parlementaire du 25 août. Il a dit ceci: "Le projet de loi no 16 entraîne une modification substantielle non seulement de la structure financière de la société d'État, mais aussi de sa mission au sein de la société québécoise. Pour nous, l'élément clé du discours sur le budget, c'est l'instauration d'une politique de transfert de fonds d'Hydro-Québec au gouvernement."

Un peu plus loin, le président du conseil disait ceci: "Le financement des projets d'Hydro-Québec annoncé lors de la commission parlementaire de l'énergie et des ressources en février dernier sera plus difficile à réaliser que prévu, d'une part, en raison des besoins d'emprunt plus élevés et en raison des transferts de fonds liés aux nouvelles taxes et aux versements de dividendes." Le président du conseil d'Hydro-Québec a fait une relation directe entre la

loi 16 et les programmes d'équipements d'Hydro-Québec.

D'ailleurs, en fin de semaine dernière, le Devoir faisait état, des coupures budgétaires qu'Hydro-Québec devra réaliser l'an prochain et soulignait justement que: "Ces décisions, publiées dans deux communiqués distincts, ont surtout été prises en tenant compte des contraintes financières auxquelles fait face la société hydroélectrique québécoise. Ces difficultés ont deux sources: l'impossibilité d'assumer des frais d'intérêt de plus en plus élevés sur les emprunts et la décision du gouvernement du Québec de puiser des dividendes dans les profits de sa filiale."

Je pourrais également citer, M. le Président, un journal qui s'appelle "En grande", qui vient de la Société d'énergie de la Baie-James, et où le PDG de cette société indique que, l'année prochaine, la Société d'énergie de la Baie-James devra faire des coupures considérables dans son programme d'équipements, ce qui aura pour effet de couper des emplois qui devaient être originellement de l'ordre de 8000 emplois pour tomber à quelque 5000; coupure de 3000 emplois, l'an prochain, due à des coupures qu'Hydro-Québec a dû faire en fonction des taux d'intérêt et en fonction des taxes et des dividendes qu'Hydro-Québec devra payer au gouvernement.

Je crois, M. le Président, que ces exemples suffiront pour convaincre à peu près tout le monde que le projet de loi no 16 va, de fait, avoir un impact déterminant sur la capacité d'Hydro-Québec de créer de l'emploi et sur sa capacité de réaliser son programme d'équipements. Il se pourrait même qu'Hydro-Québec soit obligée, à l'avenir, de modifier son programme d'équipement pour tenir compte de sa capacité d'emprunt et de sa capacité de payer son programme d'équipements. Tout le monde sait que si Hydro-Québec avait les moyens d'emprunter les sommes d'argent nécessaires et de bâtir des centrales hydroélectriques, elle pourrait aménager certaines rivières qui pourraient, de fait, produire de l'électricité à meilleur compte que d'autres formes d'énergie. Mais tout le monde sait également que ces projets demandent des sommes considérables en capital. S'il arrivait qu'Hydro-Québec ne puisse aller chercher ces fonds, ne puisse emprunter l'argent nécessaire à cause des limites d'emprunt auxquelles elle fait face présentement et à cause du fait qu'elle doit, d'une part, emprunter pour réaliser son programme d'équipements et, d'autre part, emprunter pour refiler les sommes d'argent au gouvernement, il se pourrait que son programme d'équipements puisse être modifié.

Je donne un exemple, M. le Président. Tout le monde sait qu'il est possible de générer de l'électricité avec des centrales d'énergie au charbon, et tout le monde sait que la capitalisation de ce type de centrales est à peu près la moitié ou le tiers des centrales hydroélectriques. Il se pourrait bien, M. le Président, que, dans l'avenir, si Hydro-Québec était contrainte à faire des choix énergétiques pour s'adapter aux contraintes financières, Hydro-Québec serait amenée à faire des choix énergétiques pour tenir compte, justement, de ces contraintes financières qui sont imposées et qui seront imposées par le gouvernement sur Hydro-Québec.

C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous soutenons qu'il y a une relation directe entre les choix énergétiques que nous serons appelés à faire dans l'avenir, entre les choix de sociétés que nous serons appelés à faire dans l'avenir. C'est la raison pour laquelle nous soutenons qu'il y a une relation directe entre la loi no 16, le programme d'équipements, les choix énergétiques et les choix de sociétés que nous aurons à faire dans l'avenir. Nous savons fort bien que si les centrales au charbon coûtent deux fois moins cher que les centrales hydroélectriques, ces centrales au charbon peuvent créer des pluies acides qui causent des problèmes considérables dans les lacs du nord et je me demande si la population serait en faveur d'un tel choix. Mais peut-être qu'Hydro-Québec y sera contrainte dans l'avenir et cela sera fait par la faute du gouvernement qui est au pouvoir. Nous disons ceci: II est irraisonnable qu'un gouvernement puisse prendre une décision comme celle-là sans consulter le public.

Le député de Charlesbourg a également fait mention qu'il y a eu des commissions parlementaires et que, de fait, le débat public avait eu lieu. Je n'en veux pas au député de Charlesbourg, parce qu'il n'était pas là à ce moment-là. Il ne savait pas que, de fait, nous n'avons pas eu de débat public. Nous avons eu, bien sûr, au mois de février dernier, une commission parlementaire qui n'a traité que du programme d'équipements d'Hydro-Québec de 1980 à 1990. Nous avons eu une commission parlementaire traitant de la loi no 16, le 25 août dernier, et nous avons eu une commission parlementaire traitant de la tarification, le 29 septembre dernier. Nous n'avons pas eu de débat public et si, M. le Président, vous voulez avoir des preuves à ce sujet, je peux vous citer ici une étude qui a été faite par Hydro-Québec, - c'est extrêmement bien fait - l'analyse des comparutions des groupes socio-économiques à la commission parlementaire du mois de février où, justement, on fait état de huit associations qui ont demandé un débat public. Je les mentionne: La Confédération des syndicats nationaux, l'Ordre des ingénieurs du Québec, l'Association des ingénieurs conseils du Québec, l'Office de la protection du

consommateur, le Conseil régional de développement de l'Est du Québec, le Regroupement pour la surveillance nucléaire et l'Alliance Tournesol, l'Association des mines de métaux du Québec et la Ligue des droits et libertés. J'aimerais vous dire certaines des raisons qui ont poussé ces associations à réclamer un débat public. (21 h 40)

Je voudrais citer justement l'Office de la protection du consommateur, Étant donné les augmentations de tarif considérables que nous aurons dans l'avenir, je crois que le commentaire est pertinent. L'office signale que les consommateurs ne disposent jusqu'à présent d'aucun véritable instrument d'intervention sur les activités d'Hydro-Québec si ce n'est que par l'intermédaire de leurs élus et d'une certaine participation au conseil d'administration d'Hydro-Québec. L'office réclame donc l'institution d'un forum public permanent où les citoyens pourront se faire entendre sur les questions énergétiques et sur les politiques d'Hydro-Québec, comme cela existe en Ontario.

Par ailleurs, la Ligue des droits et libertés dit qu'elle désire un débat public, et elle propose que ce débat se fasse à un niveau local et partout au Québec. Plusieurs groupes remettent en cause les projets d'Hydro-Québec parce qu'ils visent une croissance électrique exponentielle, visent un endettement exponentiel et visent des coûts aux consommateurs accrus de façon logarithmigue. Je me demande, M. le Président, quelle serait la réaction de la Ligue des droits et libertés si elle avait été au courant de la loi no 16?

Comme le député de Charlesbourg a dit que le débat public avait eu lieu, je vais citer le ministre de l'Énergie et des Ressources qui a précédé mon collègue, le député de Saint-Maurice. Le ministre a dit ceci, lors de la commission parlementaire du 3 mars: "Un autre point qui a fait l'unanimité, c'est certainement la demande d'un débat public face aux grandes options énergétiques au Québec. On a retrouvé des compagnies pétrolières, des compagnies gazières et des organismes publics voués à la lutte contre l'énergie nucléaire. On a retrouvé, au sein de l'ensemble des citoyens, une volonté d'avoir un débat public en profondeur."

C'est ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources disait au lendemain ou à la fin de la commission parlementaire du mois de mars dernier. Justement, il a émis un communiqué - à ce moment-là, c'était le ministre Bérubé qui parlait - qui donnait un appui inconditionnel à un vaste débat public sur l'énergie au Québec. "Le ministre de l'Énergie et des Ressources, M. Bérubé, vient de donner son appui inconditionnel à la tenue d'un vaste débat public sur l'énergie au Québec. C'est ce qu'il a fait savoir, aujourd'hui, au moment de la reprise des travaux de la commission parlementaire examinant le plan d'équipements d'Hydro-Québec. Le ministre Bérubé a expliqué que les interventions, lors des quatre premières journées de la commission parlementaire, ont démontré la très grande unanimité entourant la tenue d'un débat public." Justement, du journal Le Soleil, j'ai une coupure qui dit: "Bérubé demande un débat public sur l'énergie."

On veut nous faire croire que le débat public a eu lieu. Il n'a pas eu lieu, tout le monde le demande et la loi 16 est une raison de plus pour l'avoir.

J'aimerais également citer ce petit rapport, La politique québécoise de l'énergie, trois ans d'action, qui a été publié, il y a deux mois, par le ministre Duhaime. On y lit ceci, à la page 29: "À l'issue de cette dernière commission parlementaire - il référait justement à la commission parlementaire dont je viens de faire état -le ministre de l'Énergie et des Ressources avait fait part de son intention de saisir le gouvernement de la possibilité qui soit tenu un débat public."

On voit déjà que le gouvernement cherchait à diminuer l'importance de la déclaration du ministre Bérubé. Mais voici ce qui est plus pertinent encore: "Ce débat pourrait être organisé par la Régie de l'électricité et du gaz à qui un mandat serait confié à cette fin." Le ministre continue - j'imagine que c'est un document qui est publié sous l'empire du ministre - en disant: "Une analyse a été entamée afin de déterminer la meilleure formule que pourrait prendre un tel débat et d'identifier les modalités selon lesquelles ce débat pourrait être administré."

M. le Président, je crois que j'ai démontré assez abondamment que nous avons besoin d'un débat public, que la loi no 16 va avoir un impact considérable sur l'économie du Québec, sur Hydro-Québec, que le débat public n'a pas eu lieu, que le ministre Bérubé nous l'a promis, que le ministre Duhaime, dans cette brochure portant sur trois ans d'action, nous dit qu'il est en train d'étudier la possiblité d'organiser un tel débat public.

Je crois que toutes ces raisons sont suffisantes pour justifier que cette Chambre approuve la motion qui est devant nous de retarder l'adoption du projet de loi no 16 pour environ 12 mois et que, durant cette période, le ministre aura le temps nécessaire pour organiser le débat public et pour permettre à la population du Québec, qui comprend les vrais actionnaires d'Hydro-Québec, de dire ce qu'elle a à dire sur ce projet de loi, sur notre avenir énergétique et sur notre développement économigue à partir d'Hydro-Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: En réponse à une question du député de Verchères qui m'avait demandé le nom des autres régions de l'Amérique du Nord qui ont des tarifs plus bas que chez nous...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! J'ai entendu le député de Frontenac qui vous avait posé des questions. Comme il n'est pas là, vous répondrez à une prochaine occasion.

M. Scowen: C'est simplement que lorsque j'ai cité les noms, j'ai dit que j'allais les confirmer avec des documents. C'est une liste de cinq régions et je vais les citer, si...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Bertrand: M. le Président, nous n'avons pas à obtenir de la part du député de Notre-Dame-de-Grâce quelque réponse à quelque question que ce soit. Il n'est pas ici en période des questions, il n'est pas encore, que je sache, ministre dans un gouvernement quelconque...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader. Je m'excuse, il y a eu une question de posée, selon l'article 100, et j'ai bien entendu que le député de Notre-Dame-de-Grâce irait chercher les réponses. Si le député de Frontenac veut toujours avoir les réponses, je permettrais très rapidement...

M. Grégoire: Non, M. le Président, je ne tiens pas à avoir sa réponse.

M. Rivest: Question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège.

M. Rivest: Je pense que c'est un privilège du député de Notre-Dame-de-Grâce qui a été interrogé par le député de Frontenac et, pour justifier ses affirmations...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, est-ce que vous permettez... Ce n'est une question de permission, mais je crois, personnellement, que comme il y a eu une question de posée et que vous avez accepté d'avoir une réponse, vous pourriez donner votre réponse très rapidement, nommer les régions, point.

M. Grégoire: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: ...question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, j'ai posé la question tout à l'heure, le député de Notre-Dame-de-Grâce s'est levé pour répondre, mais il n'avait pas de réponse, il n'était pas capable de répondre. Là, il est sorti, est allé consulter, il est allé à la bibliothèque et il revient...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, très rapidement, s'il vous plaît!

M. Scowen: Le député de Frontenac m'avait demandé le nom des régions en Amérique du Nord où le prix de l'électricité est moins élevé qu'au Québec. Il prétendait qu'il n'en existait aucune. J'ai dit qu'il y en a plusieurs. Je vais maintenant citer les régions mentionnées dans le livre Bâtir le Québec, qui concerne l'électricité, qui a été rendu public il y a à peine un an. Les chiffres sur lesquels le tableau est basé, sont ceux de 1978. Les régions où... Excusez-moi, le document est...

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Rapidement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: C'est le document le plus récent du gouvernement qui est disponible actuellement. Les chiffres qui sont cités dans ce document gouvernemental montrent que les régions suivantes sont moins chères que chez nous: Bonneville Power Corporation, en Oregon, aux États-Unis; Pacific Power and Light Corporation, en Oregon, aux États-Unis; la ville de Seattle, dans l'État de Washington, aux États-Unis, et la province de la Colombie britannique, au Canada, est exactement égale à chez nous en 1978. Depuis ce temps, comme tout le monde le sait, le Manitoba est devenu aussi concurrentiel que nous autres. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, s'il vous plaît! (21 h 50)

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais vous dire d'abord que j'ai écouté avec beaucoup d'attention les interventions des libéraux d'en face, à savoir s'il y a un lien quelconque entre l'intelliqence de reporter de douze mois l'étude de ce projet de loi et un débat sur l'énergie. J'ai écouté attentivement le député de Portneuf qui nous

a parlé du projet de Delaney, un autre qui nous a parlé de la tarification, etc. Le député d'Outremont vient de dire la même chose en parlant de la tarification.

Je voudrais rectifier un certain nombre de choses. Pour la tarification de 1982 et celle des années à venir, il n'y a pas de rapport entre la tarification qui est en vigueur ou qui entrera en vigueur dans l'avenir et un objectif de dividendes. Je m'explique. En 1978, Hydro-Québec a fait une proposition tarifaire sur trois ans pour les années 1979, 1980 et 1981. À l'automne 1978, ni Hydro-Québec, ni le gouvernement n'avaient parlé d'établir une politique de dividendes pour Hydro-Québec. La tarification proposée par Hydro-Québec a été de 17%, 17% et 17% de hausse pour les années 1979, 1980 et 1981. À l'automne 1978, une commission parlementaire a entendu HydroQuébec, comme cela se fait à chaque proposition tarifaire, et le gouvernement a retenu une tarification, pour 1979, de 13,9% de hausse au lieu de 17%, de 13,6% au lieu de 17%, pour 1980, et de 10,8% au lieu de 17%, pour l'année 1981. Aux états financiers d'Hydro-Québec, à la page F-3, vous allez lire que pour l'année 1979, avec une tarification proposée par Hydro-Québec de 17%, qui a été refusée par le gouvernement, nous avons accepté 13,9%, cela a donné des profits nets d'exploitation de 746 211 000 $. L'année suivante, en 1980, avec un tarif en vigueur de 13,6% de hausse, cela a donné des revenus nets de 746 083 000 $.

Je ne vois pas, M. le Président, en quoi on peut maintenant, à l'occasion du débat sur le projet de loi 16, dire que le gouvernement se fixe des objectifs sur des dividendes alors que, selon tout le sens, l'esprit et le coeur du projet de loi no 16, comme cela se fait dans tout bilan de toute corporation de la taille d'Hydro-Québec, le dividende est un résultat.

Je suis étonné que le député d'Outremont revienne avec de grandes propositions de démocratie libérale sur l'établissement d'un mécanisme de consultation pour étudier une proposition d'Hydro-Québec, parce que, si mon souvenir est bon, en septembre 1981, probablement que le député d'Outremont avait d'autres problèmes dans son caucus, d'autres discussions probablement constitutionnelles sur une motion qui était débattue à l'Assemblée nationale, mais le Parti libéral a tout simplement refusé de siéger en commission parlementaire lors de l'étude de la dernière proposition tarifaire. Il a fait ce qu'on appelle un "show". Cela donne comme résultat que tout à l'heure le député d'Outremont a reconnu lui-même une marge d'erreur, même encore aujourd'hui imprécise, alors qu'il disait qu'il y avait 198 000 000 $ attribuables à la politique de dividendes. S'il était resté présent avec ses collègues libéraux, les qens d'Hydro-Québec et le ministre des Finances ont expliqué très clairement qu'il y avait une correction à faire sur une page - je pense que c'était à la page 40 du mémoire d'Hydro-Québec -soit de ramener le chiffre de 198 000 000 $ à 110 000 000 $.

Cela veut dire, M. le Président, que les libéraux, quand ils demandent un mécanisme de consultation et qu'une commission parlementaire siège, refusent même se siéger. Ils nous disent aujourd'hui: II faudrait faire un débat public sur l'énergie. J'ai été plutôt prudent concernant ce débat sur l'énergie et j'avoue honnêtement que j'y réfléchis sérieusement, mais je ne vois pas de lien direct entre une discussion sur l'énergie de façon générale et le fait de doter Hydro-Québec d'une structure de capital-actions, de doter Hydro-Québec d'une politique de dividendes, de doter Hydro-Québec de moyens financiers pour lui permettre de financer des programmes d'économie d'énergie, parce que notre lit, nous l'avons fait en publiant un livre blanc sur l'énergie en 1978. Tout récemment, je rendais public le bilan de 3 ans d'action. Qu'est-ce qui est arrivé après 3 ans? Je me demande ce qu'on peut débattre en public. J'ai perdu mon livre rouge, je ne sais pas quel bord il a pris!

Une voix: II est déposé.

M. Duhaime: II est déposé. Si vous lisez le livre rouge à EC-VIII-4, vous allez voir qu'on est d'accord des deux côtés de la Chambre pour faire en sorte qu'on se débranche du pétrole importé le plus rapidement possible. On est d'accord là-dessus. On est d'accord également pour dire qu'il faut que la part de l'hydroélectricité, qui était de 26% du bilan énergétique global en 1976, soit haussée, on l'a chiffrée à 42% en 1978 et on en est à un objectif de 50% en 1990. On est d'accord là-dessus. On est d'accord également, M. le Président, pour encourager la pénétration du gaz naturel, sauf que nos amis d'en face pensent pouvoir encourager la pénétration du gaz naturel en ayant un prix de l'hydro-électricité qui serait inférieur au prix du gaz naturel. Nous avons fait le suivi de la politique établie dans le livre blanc de 1978 et ça paraît dans les 3 ans d'action, puisque SOQUIP, avec la Caisse de dépôt, s'est portée acquéreur d'un bloc d'actions majoritaires, tant dans Gaz Métro que dans Gaz Inter-Cité, et c'est le Québec qui a maintenant le contrôle effectif de ces deux compagnies distributrices de gaz.

S'il y a quelque chose sur quoi on s'entend, des deux côtés de la Chambre, c'est donc pour dire qu'il faut que le gaz naturel pénètre au Québec le plus rapidement possible. Et s'il y en a dans nos amis d'en face qui ont l'occasion de parler avec un,

deux ou trois des 74, la seule chose qui accroche dans le dossier de la pénétration du gaz naturel, c'est que les fédéraux ne sont pas encore convaincus que le gazoduc doit se rendre dans le Bas-Saint-Laurent et dans la Vallée de la Matapédia, mais on va s'en occuper.

Le livre rouge du Parti libéral dit qu'il faut favoriser les économies d'énergie. On est d'accord là-dessus. On a sur pied le programme Énergiebus qui est en vigueur depuis deux ans. J'ai lancé il y a quelques mois en compagnie du PDG d'Hydro-Québec, M. Boyd, le nouveau projet Énergain, qui va susciter au Québec, sur les 8 années, un milliard de dollars d'investissements de la part des consommateurs, avec l'appui financier d'Hydro-Québec qui va pouvoir obtenir des taux d'intérêt beaucoup plus intéressants que ce que la Banque du Canada peut nous offrir de ce temps-ci. C'est très ambitieux comme programme. On veut rejoindre un million de résidences, d'unités de logement pendant 8 ans. On est donc d'accord là-dessus. Dans le domaine des énergies nouvelles, le livre rouge dit: Vous devriez faire un effort dans la recherche et le développement. On le fait, M. le Président. Je vais vous donner un exemple: Dans le dossier de l'hydrogène liquide, Hydro-Québec, avec Noranda, a un projet qui est en cours dans une phase industrielle, un des plus avancés de toute l'Amérique du Nord. On s'en occupe de la recherche et du développement dans les énergies nouvelles: la biomasse, le vent, le soleil, la tourbe, etc.

Il y a quelques années, au Québec, quand les gens ont commencé à réclamer un débat sur l'énergie, il y avait une raison. C'est que le gouvernement, au début des années 70, et Hydro-Québec avaient décidé d'ouvrir la filière nucléaire. Des hommes, des femmes et des enfants au Québec ont dit: Cela est dangereux. Malgré toutes les demandes qui ont été formulées pour que le débat soit public, rien n'a été fait. Aujourd'hui, on nous dit qu'il faudrait un débat public sur l'énergie pour discuter du nucléaire, pour entendre le lobby nucléaire du Québec avec probablement Canatom et tous ses intérêts d'ingénieurs, ingénieurs conseils, contracteurs, etc.

M. Fortier: Question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège.

M. Fortier: J'aimerais corriqer les propos du ministre. J'ai fait état du programme du Parti libéral du Québec qui demande un débat public sur l'énergie pour l'ensemble de toutes les questions énergétigues. Il n'a jamais été question de l'énergie nucléaire.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre. (22 heures}

M. Duhaime: Je ne prétends pas ça, M. le député d'Outremont, mais vous allez admettre avec moi que le nucléaire, ça fait partie de l'énergie que, forcément, ces autres questions sont réglées et que s'il reste seulement celle-là, on va parler seulement de ça.

Hydro-Québec, la semaine dernière, à son conseil d'administration, a pris une décision. Elle a décidé que son droit de se porter acquéreur de la centrale nucléaire de Gentilly I, qui est une "réguine", en bon français, qui a fonctionné pendant quelques heures en 1971, qui a coûté les yeux de la tête, qui ne vaut pas 5 cents, les fédéraux voulaient nous le passer, même pour 1,00 $ M. le Président, c'est sans doute ce que vous m'indiquez.

Au sujet de Gentilly II, on a décidé qu'en 1982, la centrale était pour entrer en opération. On veut maintenir, dans le plein sens du moratoire qu'on a décidé, une expertise technique, minimale, dans le secteur nucléaire et on a décidé également, à Hydro-Québec, d'arrêter les études d'avant-projet de Gentilly III et de Gentilly IV. Cela signifie qu'en ce qui concerne notre gouvernement, le moratoire nucléaire, il existe, et je comprends le Mouvement écologiste de nous souligner que Three Mile Island, Harrinqton, USA, est quand même proche de nous quand le vent est sud-nord. Je comprends la préoccupation de nos concitoyens. Mais dans l'évaluation de la croissance de la demande énergétique au Québec, il faut bien se rendre compte - et je pense que le député d'Outremont va l'admettre - qu'il n'y a pas d'urgence de choisir la filière nucléaire ou pas avant les années 1995 ou 1996. Les libéraux nous proposent de faire ça dans les prochains douze mois. J'avoue que je ne les comprends pas.

J'avoue aussi ne pas les comprendre parce que ce projet de loi a été déposé en cette Chambre au mois de juin 1981. Une commission parlementaire a siégé au mois d'août 1981, je crois que c'est le 25. Depuis ce temps, l'Assemblée nationale s'est réunie à deux reprises, à la mi-octobre, et depuis trois semaines et demie. Savez-vous que les libéraux n'ont pas posé une seule question sur le débat de l'énergie? Ils ont eu l'occasion de tenir au moins quatre débats, pendant quatre vendredis...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, vous devez conclure, s'il vous plaît!

M. Duhaime: J'allais conclure, M. le Président. La raison véritable du report à douze mois, c'est que les libéraux n'ont strictement rien à dire, absolument rien.

Peut-être que ça leur donnerait l'occasion de nous expliquer, parce que le député d'Outremont ne l'a pas encore fait, le 4.1, il a lu seulement les deux premières lignes, EC-VIII-4 sur les tarifs: "En visant l'efficacité et l'augmentation de notre potentiel énergétique, à ne plus maintenir les prix artificiellement bas et à aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par des mesures sociales plus appropriées." What does that mean?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont, c'est une question de?

M. Fortier: D'une part, le ministre vient de me poser une question.

M. Gratton: C'est une question de privilège.

M. Fortier: C'est en vertu de l'article 96, M. le Président, je voudrais corriger certains...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, est-ce que vous permettez une question?

M. Gratton: Non, c'est une question de privilège.

M. Fortier: C'est en vertu de l'article 96.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, le député d'Outremont voudrait vous poser une question. Est-ce que vous permettez cette question?

M. Duhaime: M. le Président, je vais vous demander une directive avant.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vous écoute.

M. Gratton: Question de règlement.

M. Duhaime: Cela me fera plaisir de consentir à ce qu'on me pose une question. La seule condition, M. le Président, c'est que je voudrais avoir le loisir d'y répondre.

M. Gratton: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Gratton: M. le député d'Outremont n'a pas demandé la permission de poser une question au ministre, il a indiqué qu'il voulait intervenir en vertu de l'article 96, c'est-à-dire pour rétablir les faits sur le discours qu'il a déjà prononcé sur cette motion.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Voulez-vous utiliser l'article 96?

M. Fortier: Je n'ai pas voulu interrompre le ministre alors qu'il parlait, mais j'aimerais utiliser cet article pour corriger certains faits, justement, dont il a fait état dans son discours. Ce sera très bref, M. le Président.

J'aimerais simplement corriger un ou deux faits. Le premier a trait à l'explication que le ministre a donnée de la sortie de la députation libérale lors de la dernière commission parlementaire. Je voudrais simplement...

Des voix: Ah! Ah!

M. Fortier: M. le Président, je veux simplement dire ceci. Nous avons demandé d'avoir de meilleurs moyens pour étudier la tarification d'Hydro-Québec. Ceci n'a rien à voir avec la commission parlementaire tel qu'elle est pratiquée maintenant.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je crois qu'on déborde l'article 96 actuellement. Qui demande la parole? M. le député de Pontiac.

M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir dans ce débat sur la motion de report présentée par le député de Gatineau et concernant le projet de loi no 16. Le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec, est prématuré et l'adoption de ce projet de loi présentement constitue un manque de respect flagrant d'abord pour les véritables intéressés, les citoyens qui, dans les faits, sont les seuls et uniques propriétaires de cette richesse naturelle que constitue l'hydroélectricité.

Une voix: C'est vrai.

M. Middlemiss: On se rappellera toute l'importance accordée à cette dimension il y a près de 20 ans maintenant lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se faire plébisciter sur la question de la nationalisation de l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre du temps, l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection de l'automne 1962, déclarait: "De quelle façon allons-nous nous y prendre pour que les 5 600 000 Québécois deviennent les propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés de l'expansion économique dans leur province, l'électricité?"

Aussi, M. le Président, le projet de loi no 16 constitue ensuite un autre manque de respect parce qu'il trahit dans son fondement même le mandat accordé au gouvernement

par la population en 1962. On se rappellera que les électeurs de l'époque confièrent à Hydro-Québec la responsabilité d'administrer, de régir et de développer autant le réseau de distribution que tout l'appareil de production d'énergie hydroélectrique. La société d'État devenait donc, dans les faits, le mandataire exclusif de la population. Or, les termes et le cadre de ce mandat étaient définis de la manière suivante, et je cite M. René Lévesque, ministre des Richesses naturelles du temps: "Et pour que le mouvement, l'intégration et la rationalisation des réseaux se fassent vraiment pour tous les citoyens du Québec, il faut le confier à Hydro-Québec, entreprise d'État qui, depuis 1944, a pour mission de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière."

Alors, M. le Président, si, en 1962, les Québécois sont devenus les actionnaires et les propriétaires de la richesse hydroélectrique, alors, toute modification du mandat accordé à Hydro-Québec cette année-là ne peut se faire sans qu'au préalable l'on consulte les propriétaires et les actionnaires véritables. Si, en 1962, on a senti le besoin de consulter la population sur la nationalisation de l'électricité, il nous apparaît tout aussi nécessaire de la consulter de nouveau. Si, en 1962, de l'initiative du gouvernement de l'époque, les citoyens sont devenus propriétaires et actionnaires de l'hydroélectricité, alors, on devrait, lorsque l'on décide de modifier l'orientation de celle-ci, consulter ces mêmes actionnaires et propriétaires, et, à la suite de près de 20 ans d'exploitation, leur permettre d'évaluer les résultats et de suggérer les orientations. Aussi, si, en 1962, on a senti le besoin d'aller consulter la population pour nationaliser l'électricité en lui offrant la possibilité de devenir propriétaire, il apparaît pour le moins évident que, si on a l'intention de modifier la vocation d'Hydro, donc de changer l'orientation de 1962, on devrait retourner voir ces mêmes citoyens. M. le Président, si, selon M. Lévesque, en 1962, en matière d'électricité, les Québécois ont le droit strict d'être renseignés, alors, compte tenu des modifications apportées par le projet de loi no 16, les Québécois ont le droit strict de connaître les intentions du gouvernement et de pouvoir se prononcer. (22 h 10)

Ce principe que nous défendons aujourd'hui, M. le Président, ressemble étrangement aux principes que nous avons évoqués pour adresser au gouvernement du Canada notre résolution du 2 octobre dernier concernant le rapatriement unilatéral de la constitution. Oui, M. le Président, la décision rendue par la Cour suprême du Canada énonçait que l'action unilatérale de rapatriement de la constitution, même si elle était légale, serait inconstitutionnelle parce que contraire aux conventions. Pour utiliser le qualificatif des gens d'en face, ce serait immoral.

Dans le cas de la loi 16, le gouvernement du Parti québécois veut à son tour procéder de façon unilatérale et changer d'une façon draconienne la raison d'être d'Hydro-Québec. Ceci, M. le Président, sans consulter...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Pontiac, je vous écoute et je cherche actuellement où est la pertinence du débat sur la motion de report. Si vous voulez y revenir.

M. Middlemiss: C'est pour ça, M. le Président, que nous avons la motion de report. Le geste que veut poser le gouvernement du Parti québécois veut se faire sans consulter et en mettant à l'écart l'opinion des actionnaires, oui, les citoyens du Québec qui pourtant ont été consultés et qui ont donné leur approbation à la nationalisation d'Hydro-Québec en 1962. M. le Président, nous serions d'accord si ces changements rapportaient aux citoyens du Québec, mais à qui rapporteront les redevances exigées d'Hydro-Québec? Aux citoyens, aux agriculteurs, aux PME qui auront à subir sans distinction des hausses de tarifs qui ne correspondent pas aux services réels obtenus, ou au ministre péquiste des Finances qui se sert d'Hydro et des revenus qu'elle produit pour camoufler sa mauvaise administration?

M. le Président, nous, de ce côté de la Chambre, nous sommes trop respectueux des droits des citoyens du Québec pour nous rendre complices de ce geste ou laisser passer sans commentaire un tel projet. C'est pour les raisons mentionnées ci-haut que nous demandons le report de cette loi pour une période d'un an.

En terminant, si, en 1962, selon M. René Lévesque, saine administration signifiait profits bruts, moins paiements d'intérêts, égalent profits nets, diminution des tarifs, développement du réseau, paiement de taxes municipales et scolaires; si, en 1962, les citoyens ont fait d'Hydro-Québec leur mandataire à cette condition, alors, la modification des conditions du contrat passé entre le gouvernement et les citoyens qui se traduit par profits bruts, moins paiements d'intérêts, moins redevances à Parizeau, égalent profits nets, augmentation des tarifs, cette modification au contrat doit être soumise de nouveau aux citoyens. M. Lévesque, le prix de l'électricité sera-t-il honnête et juste lorsqu'il servira en bonne partie, non pas pour le fonctionnement de la société d'État, non plus pour le développement du réseau, ni pour maintenir

les tarifs à un niveau respectable, mais plutôt pour payer et défrayer les coûts de la bêtise administrative péquiste qui dure depuis cinq ans? M. Lévesque, que faites-vous de l'engagement que vous avez pris devant...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse de vous déranger, mais je dois vous rappeler que la motion a pour but de faire un report de douze mois. C'est une motion d'amendement et, juste au moment où vous avez dit que vous étiez sur le point de terminer, vous avez recommencé à parler sur le fond. M. le député, sur la motion d'amendement, s'il vous plaît. M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: M. le Président, je conviens avec vous qu'il peut y avoir des écarts à l'occasion. Je suis sûr que le député de Pontiac sera le premier à reconnaître que dans le cadre de son intervention il a pu y avoir des écarts, mais j'aurais voulu qu'on fasse le même rappel au député...

Une voix: ...

M. Gratton: Un instant! Un instant!

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je suis capable de me faire respecter moi-même. M. le député, je tiens à vous rappeler la pertinence du débat et j'ai, comme président, à déterminer quand même si vos propos sont pertinents ou pas. Je vous ai dit qu'ils n'étaient pas pertinents et je vous demande de respecter la pertinence dans le temps qu'il vous reste. M. le député.

M. Gratton: Puis-je finir ma question de règlement, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, je demande au député de Pontiac de terminer.

M. Gratton: En vertu de quel règlement puis-je m'exprimer sur une question de règlement, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, je peux vous répondre en vous disant ceci: Quand je suis intervenu, c'était pour dire au député de Pontiac qu'il ne respectait pas la pertinence. Je n'ai pas à juger des actes qui ont été posés avant. Je vous dis que, quant à moi, le député de Pontiac ne tenait pas des propos pertinents. Je lui demande de conclure conformément à la pertinence. M. le député de Pontiac.

M. Gratton: Une demande de directive, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau, sur une directive.

M. Gratton: Comment pourrais-je faire connaître à l'Assemblée aussi bien qu'à ceux qui nous surveillent que lorsque le député de Terrebonne nous a lu tantôt de longs extraits de Cité libre, qu'il attribuait au premier ministre canadien, Pierre Elliott Trudeau, il n'était pas lui non plus conforme au règlement et que personne, ni la présidence ni les députés de ce côté-ci, ne l'a rappelé à l'ordre?

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Gatineau, je ne veux pas que le débat sur cette question se fasse. Si, tout à l'heure, vous avez jugé que le député de Terrebonne n'était pertinent, c'était à vous d'en appeler à la présidence. Je n'ai en aucune façon entendu cette demande et je demande au député de Pontiac de terminer.

M. le député de Pontiac, en concluant.

M. Middlemiss: Merci de nouveau, M. le Président, mais je terminais.

Pour revenir à la motion de report de douze mois, M. le Président, c'est pour penser à ce projet de loi et, aussi, je pense que c'est très pertinent de dire qu'en 1962, lorsqu'on a nationalisé Hydro-Québec, il y avait des raisons pour lesquelles on l'a fait. On dit: Ne devrait-on pas reconsidérer toutes ces idées? Donc, M. le Président, M. le premier ministre, que faites-vous de l'engagement que vous avez pris devant les citoyens, en 1962, sur la base d'un prix d'électricité honnête? Lui réservez-vous le même sort que vous avez accordé au droit de veto du Québec en matière constitutionnelle, soit l'abandon? Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

M. Picotte: M. le Président, j'aimerais vous demander une directive.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je commencerai par demander aux gens de s'asseoir, parce que je ne sais pas qui demande la parole.

M. Picotte: Je voudrais vous demander une directive.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip adjoint, sur une demande de directive.

M. Picotte: Merci, M. le Président. Est-ce que tantôt, selon la décision que vous avez rendue, nous devons comprendre de ce côté-ci de la Chambre qu'à l'avenir vous devrez vous-même demander des questions de règlement à votre présidence ou si vous

devez attendre que...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé, je pense que vous êtes un peu impertinent envers la présidence. Je tiens à vous le rappeler, M. le député. Je vous trouve impertinent envers la présidence. Je suis prêt, M. le député... M. le député! M. le député! Je n'ai pas l'habitude, je le répète pour la troisième fois, de faire des choses à la légère. J'ai simplement demandé de respecter ce que j'avais dit, au moment où j'étais ici, sur la pertinence du débat. Je dois vous dire qu'à ce niveau, que ce soit à ma gauche ou à ma droite, j'ai l'intention de le faire respecter. M. le député de Nelligan. (22 h 20)

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: La raison pour demander le renvoi de cette loi à douze mois, c'est que cette loi 16 change tout à fait les objectifs d'Hydro-Québec fixés en 1962 par le présent premier ministre, M. Lévesque, et le premier ministre d'alors, M. Lesage. Les objectifs étaient de produire de l'hydroélectricité aux taux les plus bas, à travers une société d'État qui serait possédée par tous les citoyens du Québec, alors au nombre de 5 600 000 . Or, cette loi va changer les objectifs d'Hydro-Québec, tout d'abord en changeant les actionnaires, les contribuables et les citoyens québécois, pour donner des actions à 88% au gouvernement du Québec, dont le seul mandataire sera le ministre des Finances.

Une voix: Un vol! Une voix: Un hold-up!

M. Lincoln: En plus de quoi, à travers ce stratagème, quelque chose comme 3 200 000 000 $ de dividendes d'Hydro-Québec, sous forme de taxes cachées, vont aller vers le ministre des Finances, de 1981 à 1985, soit 3 200 000 000 $. Or, pendant l'élection d'avril 1981, il n'a jamais été soufflé mot de cette question si importante pour les contribuables québécois. Est-ce que les taux les plus bas, l'objectif no 1 de 1962, c'est 3 200 000 000 $ entre 1981 et 1985 qui vont être donnés au gouvernement, sous forme de taxes, dividendes d'Hydro-Québec?

Le député de Roberval disait tout à l'heure qu'il est fier que les sociétés d'État comme Hydro-Québec se mettent enfin à contribuer à la collectivité québécoise. Je veux lui demander quelle est la différence entre une taxe directe au contribuable et une taxe qui arrive via un dividende d'Hydro-Québec. En fait, il n'y a aucune différence en espèces. La seule différence, c'est que le dividende d'Hydro-Québec, c'est encore une fois une autre taxe cachée, une autre forme d'impôt caché, comme l'essence, comme les plaques d'immatriculation, comme les permis de conduire, comme les 8% de taxe sur les factures d'Hydro-Québec. Parlant des 8% de taxe d'Hydro-Québec c'était 76 000 000 $ en 1976, 120 000 000 % en 1980, et ce sera 290 000 000 $ en 1985.

Excusez-moi, M. le Président, mais il y a un document du Parti libéral qui a été cité tout à l'heure, moi aussi, je compte citer un petit document qui doit être connu par nos amis là-bas, qui s'appelle le programme officiel du Parti québécois. Ils applaudissent le programme qu'ils n'ont pas lu, parce que le programme, chapitre 2, la fiscalité, dit à l'article 13, "abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité pour usage domestique". Ils ne connaissent pas leur programme. Qu'est-ce que vous attendez? Qu'est-ce que vous attendez, pour suivre votre propre programme, vous qui allez en congrès au cours de ce week-end? J'attends que les onze chevaliers sans peur et sans reproche disent: Allez! Allons nous battre pour notre programme, article 13, voilà! Vous reprochez au Parti libéral... Oui, M. Blais, j'espère que vous allez faire quelque chose pour essayer d'enlever...

M. Blais: M. le Président, question de privilège, s'il vous plaît!

Le Vice-Président (M. Jolivet):

J'attendais cette occasion, parce que cela fait plusieurs fois que j'ai l'occasion de dire ce qu'est une question de privilège. Avant que vous posiez votre question de privilège, M. le député, je vais me permettre, quand même, de citer quelques extraits d'articles qui nous permettent de conclure ce qu'est une question de privilège. C'est peut-être important de le faire à cause de l'abus qu'on en fait et pour que les gens comprennent ce qu'est une question de privilège.

L'article 48: "Une violation des droits de l'Assemblée ou d'un de ses membres constitue une question de privilège." Pour bien la saisir et la comprendre, j'aimerais qu'on m'écoute.

La deuxième, c'est l'article 49, paragraphe 2, qui dit: "Un député peut toujours soulever une question de privilège à l'Assemblée immédiatement après qu'ont été prononcées les paroles ou que se sont déroulés les événements qui y donnent lieu." Ceci fait référence à l'article 46 de la Loi sur la Législature qui prévoit des actes défendus et considérés comme infractions aux privilèges de l'Assemblée nationale: "La Chambre ne peut créer de nouveaux privilèges que ceux énumérés à l'article 46." Citation de Beauchesne, quatrième édition, articles 103 et 113 et W.F. Dawson, dans Procedure in Canadian House of Commons, 1962, page 47.

Vous allez me permettre de lire la Loi

sur la Législature pour ceux qui n'ont pas eu l'occasion de la lire ou qui l'ont oubliée. "Les actes suivants sont défendus et considérés comme infractions aux dispositions de la présente sous-section: injures; premièrement, commettre des voies de fait sur la personne d'un député, ou proférer des injures ou publier des écrits diffamatoires à son adresse, pendant la session ou pendant les vingt jours qui précèdent et les vingt jours qui suivent chaque session; deuxièmement, molester, menacer ou tenter de violenter ou d'intimider un député; troisièmement, chercher à corrompre un député en lui offrant des présents ou l'acceptation, par l'un d'eux, des présents ainsi offerts..."

S'il vous plaît, M. le député, vous pouvez peut-être en rire, mais n'oubliez pas que c'est la Loi de la Législature. "Quatrièmement, commettre des voies de fait sur la personne des officiers de l'Assemblée nationale et apporter des empêchements à l'accomplissement de leurs devoirs; cinquièmement, suborner ou tenter de suborner quelqu'un au sujet du témoignage qu'il doit rendre devant l'Assemblée nationale ou l'une de ses commissions; sixièmement, présenter à l'Assemblée nationale ou à l'une de ses commissions quelque document faux ou falsifié dans le dessein de tromper; septièmement, contrefaire, falsifier ou altérer illégalement les archives de l'Assemblée nationale ou de l'une de ses commissions ou les documents ou pétitions présentés ou produits devant l'Assemblée ou la commission ou destinés à l'être, ou apposer ou souscrire le nom d'une personne sur ces documents ou pétitions dans le dessein de tromper ou d'induire en erreur."

Si j'ai fait cette intervention, c'est dans le but de permettre de considérer une chose importante, c'est qu'une interprétation des faits de part et d'autre de l'Assemblée ne constitue pas une question de privilège. Cela constitue, cependant, des divergences d'opinions qu'il vaut, comme je l'ai souvent répété, la peine de corriger au moment jugé opportun. Ainsi, guand on est dans des moments comme ceux-ci, un discours prononcé du côté gauche peut avoir une réponse dans un discours suivant par une autre personne du côté droit, de telle sorte que ce qu'on a comme interprétation des faits - qu'ils soient de bonne foi ou de mauvaise foi interprétés selon la pensée de chacun - peut se corriqer dans les minutes qui suivent l'intervention du député qui a le droit de parole. C'est dans ce sens que je vous demande de bien comprendre qu'une question de privilège a quand même une portée plus importante que l'utilisation qu'on essaie d'en faire souvent dans des circonstances comme ce soir.

C'est pour cela que je vous ai dit tout à l'heure que je serais plus sévère sur ce qu'est une question de privilège. Il y a toujours moyen de répondre à ces questions autrement qu'en soulevant une question de privilège qui parfois n'en est pas vraiment une. Il est évident que la présidence ne doit jamais refuser des questions de privilège. On doit les écouter pour savoir si c'en est une, mais, de grâce, permettez à chacun de faire le travail qu'il a à faire de façon à ne pas nuire et à ne pas permettre des débats qui n'en finissent plus sur des questions qui parfois ne sont pas des questions de privilège. (22 h 30)

M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: J'espère, M. le Président, que vous n'allez pas me retirer ces quelques minutes que vous avez prises.

Excusez-moi, M. le Président, ce que je disais au député de Terrebonne, ce n'était pas malveillant du tout. Je trouve que c'est un homme très sincère, très convaincu, mais par la surprise qu'il y a eu de l'autre côté, je crois que celui-ci n'avait pas lu le programme de son parti. Nous, du Parti libéral, on lit toutes ces choses. Je lui disais que c'était la raison pour laquelle on demandait douze mois, parce que le Parti québécois ne bougeant pas très vite, cela va lui prendre au moins douze mois pour réaliser ce programme. J'espère que le député de Terrebonne et ses collègues vont travailler pendant ces douze mois de sursis à rédiger l'article 13 et, je le répète, "abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité pour usage domestique." Merci. Voilà. On ne leur laissera certainement pas oublier cela.

Là, on revient au projet de loi no 16. La raison pour laquelle nous demandons douze mois de sursis, c'est justement pour que les objectifs d'Hydro-Québec ne soient pas détournés en donnant le mandat au ministre des Finances de récolter des sommes aussi importantes. Nous sommes d'accord pour dire qu'il est un gentilhomme de premier ordre, mais, comme Yvan Guay le disait dans la Presse, l'autre jour: "Un économiste qui fait montre d'une telle imprévoyance, qui commet de telles erreurs de gestion - (en parlant des déficits du gouvernement) - gonfle les revenus et sous-estime les dépenses et qui fait des déficits qui grandissent de jour en jour, parce qu'ils sont toujours mal calculés et sous-estimés, ferait mieux d'exercer ses autres talents et devenir, par exemple, un bon joueur de guitare." On ne veut pas confier les actions d'Hydro-Québec à un joueur de guitare. C'est la raison pour laquelle nous demandons douze mois de sursis pour remplacer le joueur de guitare par les 6.3 millions actionnaires d'Hydro-Québec, comme c'est le cas maintenant.

En fait, Yvan Guay disait encore: "Mais

comme l'État ne peut que donner d'une main à la population ce qu'elle lui arrache de l'autre, M. Parizeau n'avait qu'une solution: camoufler le plus possible les impôts afin de pouvoir les accroître plus facilement. C'est ainsi que les sociétés d'État, en particulier la SAQ, Loto-Québec, Hydro-Québec, sont systématiquement utilisées comme des percepteurs d'impôt par les hausses de prix et tarifs. De telles mesures ont permis à M. Parizeau non pas d'indexer les tables d'impôt pour tous, mais d'alléger l'impôt sur le revenu de quelques catégories de contribuables et d'abolir la taxe de vente sur le textile, les vêtements, la chaussure, etc., voyant que ces réductions d'impôt étaient électoralement rentables. Comme l'accroissement des impôts indirects et cachés ne sont pas suffisants, M. Parizeau a massivement emprunté et c'est pourquoi la dette globale du Québec a triplé en cinq ans."

Une voix: Triplé en cinq ans.

M. Lincoln: Triplé en cinq ans. Nous, de ce côté-ci, nous demandons d'abord au Parti québécois de prendre les douze mois qu'on lui suggère pour, d'abord, abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité pour usage domestique; deuxièmement, de laisser réfléchir tous les intéressés dans ce dossier pour qu'on revienne aux objectifs principaux et initiaux d'Hydro-Québec, soit les tarifs aux taux les plus bas, compatibles avec une gestion financière saine, comme le disait le premier ministre, M. Lévesque, quand il était un bon libéral. Je comprends que cela a changé depuis. Troisièmement, nous lui demandons de laisser Hydro-Québec à ses actionnaires originaux, tous les citoyens du Québec et non pas au mandataire, le joueur de guitare, le ministre des Finances.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, j'ai attendu quelques secondes pour voir s'il y avait un député de l'autre côté qui aurait le courage de se lever pour tenter de contrer les arguments qui pleuvent de ce côté-ci. Il semble que ce soit le découragement, de l'autre côté. Étant donné que c'est un projet de loi qui a tellement de conséquences pour tous les Québécois, nous n'allons pas nous laisser décourager par l'incompréhension que nous voyons de l'autre côté, nous avons tout le temps, le règlement est en notre faveur et aussi, j'en suis sûr, les Québécois veulent que le gouvernement prenne un peu plus de temps avant de les assommer une deuxième fois en deux semaines.

M. le Président, cette motion de report, c'est-à-dire cette demande faite au gouvernement par le député de Gatineau de reporter à douze mois l'étude de ce projet de loi no 16, est fondée sur plusieurs raisons, en particulier, sur la nécessité d'avoir un débat public avant de prendre des décisions aussi importantes, aussi coûteuses pour tous les Québécois sur la politique énergétique. Ce débat aura servi au moins à voir un peu plus clair dans le jeu du gouvernement.

On sait que le ministre de l'Énergie est un peu l'exécutant, sinon l'exécuteur du ministre des Finances dans ce projet de loi. En effet, le ministre des Finances, lors de son discours sur le budget du mois de mars dernier, avant les élections, avait annoncé cette charge massive de l'État contre Hydro-Québec. C'est une conséquence de cette décision du ministre des Finances que le pauvre ministre de l'Énergie soit obligé d'essayer d'expliquer pourquoi il fait ça actuellement sans qu'il y ait eu le débat public que tous les intéressés demandent, et même son prédécesseur au siège de l'Énergie, M. Bérubé.

J'entendais le ministre de l'Énergie et des Ressources argumenter de la façon suivante: C'est faux de dire que le projet de loi no 16 aura des conséquences directes sur la tarification. Même s'il n'y avait pas de projet de loi no 16 en 1978, dit-il, cela a augmenté de tant pour cent, tant pour cent. C'est vrai. Mais comment peut-il expliquer aux gens, comme résultat du projet de loi no 16 et de la décision du ministre des Finances de permettre au gouvernement de sortir d'Hydro-Québec 75% de ses revenus nets chaque année... Hydro-Québec, normalement et depuis nombre d'années, consacre ses revenus nets au développement de son réseau, de son équipement, au maintien d'un service efficace à tous les Québécois et au maintien des tarifs les plus bas possible conformément au mandat qui lui a été donné il y a une vingtaine d'années par la loi actuelle. Comment expliquer où HydroQuébec va trouver son argent, si les trois quarts de ses profits se retrouvent dans les coffres du ministre des Finances chaque année? Avec quoi Hydro-Québec va-t-elle continuer de développer l'équipement, continuer de donner un service efficace, à moins d'augmenter les tarifs?

M. le Président, je ne peux pas suivre, et je ne pense pas que les Québécois puissent suivre le ministre de l'Énergie dans ce raisonnement. Hydro-Québec n'imprime pas les dollars et elle doit emprunter. Peut-être qu'Hydro-Québec devra emprunter davantage. Mais, le cas échéant, le ministre des Finances a fait preuve d'une incohérence que même un joueur de guitare, comme dit le député de Nelligan, n'aurait pas.

J'aimerais citer une déclaration que le ministre des Finances nous pontifiait lors de

son discours sur le budget de 1977-1978, le 12 avril 1977. Il venait d'arriver au pouvoir, c'était son premier budget, et voici ce qu'il disait: "II n'importe pas seulement que le gouvernement se restreigne - on parlait de couper dans le gras - il faut aussi que ses sociétés d'État limitent leurs appels au marché financier. À cet égard, un dégonflement est inévitable. J'ai, en outre, exprimé à la direction d'Hydro-Québec mon souci que cette société modère ses appels au marché." (22 h 401

D'un côté, il demande à Hydro-Québec de ne pas emprunter. Il lui enlève les trois quarts de ses profits et il voudrait qu'Hydro-Québec continue à donner un bon service. Alors, si l'on n'a pas le droit d'emprunter et qu'il y a un "hold-up" de 75% de ses revenus nets chaque année, la seule source, quelle sera-t-elle? La tarification. Si une seule des conséquences de ce report que nous demandons aux députés péquistes d'appuyer était de soulager les Québécois d'une autre taxe cachée, M. le Président, la motion du député de Gatineau aurait valu la peine qu'on l'appuie.

Une voix: Très bien.

M. Lalonde: Donc, argument tarification du ministre de l'Énergie et des Ressources qui, malheureusement, ne tient pas. L'autre argument, c'est la politique énergétique. Son prédécesseur espère avoir un débat public là-dessus. La CSN, l'Office de la protection du consommateur, la Ligue des libertés et toutes sortes d'autres organismes intéressés demandent un débat public sur l'énergie. Le ministre de l'Énergie et des Ressources vient nous dire, ce soir, que le débat a été tenu. Mais, M. le Président, c'est rire du monde et je ne pense pas que les Québécois puissent accepter que, dans le but de donner suite à une décision du ministre des Finances, le ministre de l'Énergie et des Ressources vienne prétendre ici, à la face de tous les Québécois, qu'il y a eu un débat public sur l'énergie. Cela n'est pas vrai. Cela n'a pas été fait. Il me semble que c'est clair. Est-ce qu'il y en a eu un? Non. Il y a eu quelques commissions parlementaires sur la tarification, sur les programmes d'équipements, mais ce n'est pas cela un débat sur l'énergie. Quelle sorte d'énergie allons-nous favoriser? Quel est le programme énergétique, à long terme, que le gouvernement va favoriser? Cela n'a pas été fait. Le financement, comment va-t-il être fait? Cela n'a pas été fait. On nous impose un projet de loi qui va permettre au gouvernement de siphonner Hydro-Québec, qui va augmenter les tarifs, cela est inévitable, et on refuse un vrai débat sur l'énergie qui est devenue une question si importante dans toutes les sociétés modernes d'aujourd'hui.

M. le Président, je pense que l'aveu le plus évident des intentions de ce gouvernement à l'égard de l'énergie électrique, c'est d'enlever dans la loi actuelle sur Hydro-Québec un des éléments de son mandat les plus importants pour la population, c'est-à-dire fournir à la population de l'énergie électrique aux taux les plus bas. Pourquoi le gouvernement veut-il enlever cela? Parce qu'il sait très bien que, maintenant, Hydro-Québec ne sera plus l'Hydro-Québec des Québécois, mais une espèce de vache à lait du gouvernement. Là-dessus, M. le Président, nous allons nous battre, nous allons nous prévaloir de tous les droits que le règlement nous permet d'utiliser pour combattre cette prise de contrôle du gouvernement, cet enlèvement que le gouvernement fait d'Hydro-Québec qui ne sera plus l'Hydro-Québec des Québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Frontenac.

M. Gilles Grégoire

M. Grégoire: M. le Président, je ne voudrais pas, en commençant, laisser passer, sans dire un mot, les railleries qu'a eues tantôt le député de Nelligan à l'endroit du ministre des Finances du Québec, car on sait que ce dernier est le meilleur ministre des Finances...

Des voix: Ah!

M. Grégoire: ... que le Québec ait jamais eu.

Des voix: Bravo!

M. Grégoire: M. le Président, je vous dirai ceci: Si on veut voir et réaliser là où se trouve le trouble, là où se trouve le mauvais ministre des Finances, qu'on aille voir à Ottawa...

Des voix: Ah!

M. Grégoire: ... qui endure des taux d'intérêt usuraires et voleurs, qui endure un taux d'inflation incroyable et qui endure un taux de chômage impossible.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Frontenac, vous étiez le premier tout à l'heure à demander la pertinence de l'autre côté. J'espère que vous allez vous y tenir.

M. Grégoire: M. le Président, j'en ai assez dit sur les railleries du député de Nelligan. Il ne faut pas en ajouter plus. Ce qui me surprend, M. le Président, ce sont les arguments qui nous arrivent de l'autre côté

pour nous demander: Retardez donc de douze mois l'adoption de la loi. M. le Président, remontons à 60 mois. Il y a 60 mois, en 1976, toutes les sociétés d'État ou à peu près toutes étaient en déficit et, à ce moment, le gouvernement ne pouvait pas attendre douze mois, les créanciers couraient après pour lui faire payer les déficits des sociétés d'État. 60 mois plus tard, fort heureusement, le gouvernement actuel n'a pas attendu douze mois, ni douze autres mois, ni douze autres mois comme vous nous le demandiez. Il y a eu de l'action. 60 mois plus tard, toutes les sociétés d'État, toutes sauf une, font des profits; toutes les sociétés d'État, sauf une, font des profits.

Quand toutes les sociétés d'État faisaient des pertes, faisaient des déficits, le gouvernement libéral était obligé de prendre les impôts du peuple pour payer les déficits des sociétés d'État. Les hommes qui réalisaient les pertes des sociétés d'État couvraient les pertes avec les impôts de tous ceux qui nous regardent, de tous ceux qui nous entendent. Nous, on n'a pas attendu douze mois, même si vous nous l'avez demandé souvent. En 60 mois, toutes les sociétés d'État sont devenues à profits. Elles font de l'argent. Si on prenait les impôts du peuple pour payer les pertes, les déficits des sociétés d'État il y a cinq ans, pourguoi est-ce qu'on ne prendrait pas maintenant les profits des sociétés d'État pour soulager le peuple des impôts?

Une voix: Dehors les patroneux.

M. Grégoire: Si l'ancien gouvernement des déficits se faisait courir par les créanciers pour payer les déficits, pourquoi est-ce que le gouvernement qui fait des profits avec les sociétés d'État ne prendrait pas ces profits pour soulager les impôts? Vous êtes contre ça! Ce n'est pas compréhensible.

Vous dites: les tarifs. M. le Président, on dit qu'il y a de l'impôt, qu'il y a des dividendes, qu'il y a des taxes, tout, mais, malgré tout, en 1981, au moment où je vous parle, les tarifs d'Hydro-Québec sont plus bas que les tarifs d'Hydro-Ontario. On est plus bas malgré qu'on aille chercher des dividendes, qu'on aille chercher des impôts. On est plus bas qu'Hydro-Ontario. Vous autres, vous faisiez des pertes avec toutes les sociétés d'État. Nous autres, on a su remonter la gestion de l'administration et, même si on va chercher des dividendes, les tarifs sont plus bas.

Dans le domaine domestique - je vais vous citer trois chiffres - tarifs en vigueur actuellement, factures mensuelles, Hydro-Québec 30,40 $; Hydro-Ontario 35,70 $. Différence: 17,4% en faveur des Québécois. Tarif général, petite puissance, Hydro-Québec, 47,49 $ par mois; Ontario, 70,77 $.

Vous pouvez vous exclamer. 49% moins cher au Québec gu'en Ontario. Mais, guand on arrive chez les gros - je ne suis pas encore tout à fait chez les gros - chez les moyens, tarif général, moyenne puissance, 30 000 kilowattheures par mois, 1374 $ au Québec, 1598,40 $ en Ontario. Différence: 16,3% en faveur des Québécois. Je me demande ce que vous avez à vous plaindre. Je me demande pourquoi vous voulez retarder une loi comme celle-là de douze mois. Je me demande pourquoi. M. le Président, depuis cinq ans que je suis ici, c'est peut-être la vingtième fois que je vois l'Opposition nous demander: Retardez donc, retardez donc. C'est la vingtième fois. Attendez donc six mois. Attendez donc douze mois. Comme disait le député de Gatineau tantôt, s'ils pouvaient nous dire: Attendez donc deux ans, attendez donc quatre ans, ils nous demanderaient d'attendre. Pourquoi attendre? (22 h 50)

Une voix: ... démocratique.

M. Grégoire: Démocratique, oui. La démocratie, cela fait six mois que cette loi est au feuilleton. Comme disait le ministre tout à l'heure, vous ne vous y êtes jamais intéressés. Quand il y a eu une commission parlementaire pour discuter des tarifs de l'électricité, eux autres, ils ont attendu à la porte pendant qu'on était en dedans. Ils n'ont pas attendu douze mois. Ils attendaient à la porte et ils n'ont pas voulu entrer. Ils sont sortis. Ils n'ont pas voulu venir discuter de la tarification. Ils n'ont pas voulu venir discuter de la loi 16. Ils sont sortis et, aujourd'hui, ils disent: Attendez donc. Vous n'aviez qu'à être présents quand il y une commission parlementaire fut convoquée pour étudier ces projets de loi, pour étudier la tarification. Vous vous êtes sauvés. Vous n'avez pas voulu rester. M. le Président, je vous dis une chose: Attendre douze mois, attendre six mois, attendre dix-huit mois, c'est un gouvernement qui ne fait rien. C'est un gouvernement inactif. C'est justement parce que le gouvernement actuel a décidé d'agir, de prendre ses responsabilités, d'aller de l'avant que les sociétés d'État aujourd'hui sont à profit.

Je me rappelle, M. le Président, qu'on nous a demandé d'attendre douze mois lorsqu'il a été question de créer la Société nationale de l'amiante. Vous nous avez demandé d'attendre douze mois. Aujourd'hui, la Société nationale de l'amiante emploie plusieurs centaines de travailleurs et a réalisé des profits de 9 000 000 $ l'an dernier. Si on avait attendu, combien de centaines de chômeurs de plus au Québec, si on avait attendu vos douze mois, vos vingt-guatre mois, vos trois ans ou vos quatre ans? On n'a pas attendu. Aujourd'hui, la Société nationale de l'amiante est devenue le plus gros transformateur d'amiante au Canada,

parce qu'on n'a pas attendu. On a triplé en trois ans la transformation de l'amiante au Québec. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas attendu, parce qu'on a agi.

Des voix: Bravo!

M. Grégoire: Aujourd'hui, M. le Président, la Société nationale de l'amiante réalise des profits de 9 000 000 $. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas attendu comme vous nous l'aviez demandé. Si on avait attendu comme vous nous le demandiez, cela ne serait pas fait. Là, vous l'avez sur le nez.

Je me rappelle fort bien, cela a duré toute une nuit. Ce soir, cela va peut-être durer encore toute la nuit, mais lorsqu'il a été question de créer la Société nationale de l'amiante, on avait fini à cinq heures du matin. Tous ceux qui étaient là ont parlé. Vous nous demandiez d'attendre douze mois. On n'a pas attendu. Aujourd'hui, regardez les résultats. On est propriétaire de deux mines, de cinq industries et de deux centres de recherche, parce qu'on n'a pas attendu. On passera encore la nuit s'il le faut, mais la loi, on va l'adopter. On n'attendra pas. C'est le temps de l'action. C'est le temps de bouger et on va bouger, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 96? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en vertu de l'article 96.

M. Scowen: M. le Président, j'ai parlé dans mon discours - le député de Frontenac également - des sociétés d'État et j'invite le député de Frontenac à rectifier ses propos, parce que je pense qu'il a induit la Chambre en erreur quand il a dit qu'il n'y a qu'une seule société d'État qui ne fait pas ses frais. Il y a...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député! M. le député, je vais vous rappeler l'article 96. L'article 96 a pour but de rectifier... Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je suis capable de le dire. De rectifier des paroles que le député de Frontenac aurait dites en regard de votre discours et, avec ce que vous venez de me dire, je suis assuré que M. le député de Frontenac n'a jamais attaqué le contenu de votre discours et, en conséquence, ce n'est pas en vertu de l'article 96.

M. le député de Verdun.

M. Lucien Caron

M. Caron: M. le Président, au début de mon intervention, je voudrais dire que je ne suis pas d'accord avec le député de Frontenac de vouloir laisser au ministre des Finances la balance du budget de la province. Pour autant que je suis concerné, avec tout le respect que j'ai pour le ministre des Finances, je ne le laisserais pas contrôler mon petit budget de 30 000 000 $ de la municipalité de Verdun. M. le Président, avec un petit budget de 30 000 000 $, nous avons eu un surplus de 2 000 000 $ à Verdun. Je pense qu'il est temps que le premier ministre le nomme à Hydro-Québec ou ailleurs pour qu'il puisse être remplacé par un homme qui va savoir contrôler ses chiffres et savoir où il s'en va, car on s'en va vers la faillite.

Je voudrais parler sur la motion de report de mon collègue de Gatineau, pour reporter à douze mois le projet de loi no 16 à cause de l'importance que ce projet de loi a pour nous. Je vois le vice-premier ministre qui est ici, on ne voit pas les autres, les anciens ministres. Ce n'est pas naturel d'être ici, ils sont fatigués, ils se promènent en grosse limousine, ou en avion, ils volent haut, ils volent bas, cela n'a pas d'importance, l'argent des contribuables. Aujourd'hui, ils sont bien avancés. Mais, messieurs de la "pool room", vous verrez ce que je vous dis, je vous parle en tant qu'homme d'expérience, M. le Président.

J'ai vécu des deux côtés de la Chambre et je vois que le vice-premier ministre est souriant, il connaît le danger. Mes amis, je vous considère comme des amis, c'est un message que je vous donne ce soir, parlez donc à vos ministres, surtout les anciens qui se promènent un peu partout, comme le ministre du Loisir, qui devrait être ici plutôt qu'à Haïti, aller dire que le Québec, ça va mal. Si ça va mal, c'est parce que vous autres, vous le voulez. Je suis un type dont la porte est encore ouverte et je peux vous dire que, lundi, hier, exactement - c'est pour ça que je peux endosser mon collègue de Gatineau - j'ai reçu à mon bureau 22 personnes. Vous riez, vous autres, vous fermez vos portes. Oui, c'est vrai! Vous ne répondez pas au téléphone, on le sait, on nous appelle dans nos comtés, certains d'entre vous, pas tout le monde, mais certains d'entre vous. Sur 22 personnes, 20 sont insatisfaites du gouvernement actuel. On en a une preuve. Le premier ministre est allé dans le comté de Hull en fin de semaine. Il a été obligé de passer par la porte d'en arrière, pour sortir de la station radiophonique.

Imaginez-vous! Quand le premier ministre est obligé de passer par la porte d'en arrière, c'est grave. S'il fallait que le maire, comme moi... je passe encore par la porte d'en avant et je suis respecté, on l'a prouvé, le 1er novembre, M. le Président. Si on veut reporter le projet de loi à environ 12 mois, c'est qu'on voudrait avoir des commissions parlementaires. De notre côté,

M. le ministre des Communications, un petit message que je vous donne en passant, on veut la démocratie, autant que vous avez voulu l'avoir. Vous l'avez chanté, mais maintenant que vous êtes au pouvoir, que vous avez essayé de tout faire pour gagner le référendum, à n'importe quel prix, votre élection à n'importe quel prix, là, le Québec est quasiment au bord de la faillite, et qu'est-ce qu'on fait? On augmente les taxes. On le prouve, l'augmentation d'Hydro-Québec au Québec, de 1977 à 1982, représente 97%.

On se plaignait. M. Joron, qui est parti, j'imagine, parce qu'il était tanné d'être avec vous, se plaignait le mardi 21 novembre 1972 d'une petite augmentation de 4% à cette époque. Imaginez-vous, M. le Président, s'il n'est pas temps qu'on ouvre les portes du parlement et qu'on entende les gens sur l'importance de ce projet de loi. Vous le savez, c'est à la dernière minute que cela se brasse. Je me rappelle, il y en avait six de ce côté-ci et ils en menaient du train, les six collègues de l'Opposition du temps. Ils en voulaient, des commissions parlementaires. Ils nous blâmaient d'inscrire des projets de loi à la dernière minute. Je suis bien d'accord avec tout cela. On a payé notre dette en 1976. Le Parti libéral a payé sa dette en 1976. Aujourd'hui, pourquoi essaie-t-on de faire pire qu'on a fait? C'est là qu'est l'erreur. Je vous dis qu'on ne vous pardonnera pas cela. (23 heures)

Je vois le ministre de l'Énergie qui s'est acheté, lui aussi, une petite fournaise pour chauffer au bois, parce qu'il a peur! Probablement parce qu'il sait qu'il achève son temps, il s'est dit: Je vais ménager le reste de mon argent.

M. le Président, ce projet de loi implique non seulement les changements de statut d'Hydro-Québec, mais aussi donne au gouvernement la possibilité de hausser les tarifs d'Hydro-Québec pour financer des déficits budgétaires. On ne peut pas, être d'accord de notre côté si on veut être sincères envers nous-mêmes et envers tous les contribuables du Québec. Il y a une certaine classe peut-être qui peut se permettre de payer un certain montant. Mais je pense que vous avez oublié qu'au Québec il y a beaucoup de personnes qui sont retraitées. Si le ministre des Affaires sociales était ici, il vous le dirait. Vous avez aussi, par malheur, beaucoup de gens qui sont sur l'aide sociale et d'autres qui ne peuvent pas se trouver de travail. Imaginez-vous, à partir du 1er janvier, 17% d'augmentation! Vous me direz peut-être que sur une facture de 50 $ ou de 60 $, ce n'est pas énorme, mais quand c'est six ou sept mois par année de chauffage à l'électricité...

Je pense que c'est une des raisons pour lesquelles j'endosse la motion de mon savant collègue de Gatineau. Jusqu'à maintenant, il vous a prouvé que dans cette Chambre il fait un excellent travail. Je ne peux pas faire autrement ce soir que d'endosser sa motion. J'espère que de l'autre côté, surtout les députés d'arrière-ban, ne suivront pas les ministres, parce que certains de ces ministres vous induisent en erreur. Je vous passe un certain message, mais je pense que vous ne le prendrez pas parce que vous allez avoir peur, vous allez peut-être être pénalisés dans certains voyages. Cela arrive si on parle trop. C'est drôle, tout le monde se lève. Quand on passe par le Parlementaire, parfois on entend des grondements, les gens ne sont pas contents.

Une voix: Des péquistes?

M. Garon: C'est entendu, ce sont des péquistes qui ne sont pas contents, même sur les augmentations de salaires. Je suis bien content qu'on n'ait pas appelé le projet de loi sur les augmentations de salaires, parce que j'aurais aimé parler des augmentations de salaires. Le gouvernement a été prudent. Vous avez été très prudents de ne pas appeler le projet de loi sur les augmentations de salaires, parce que j'aurais aimé en parler. Avec le nombre de jours qu'on a travaillé dans cette Chambre jusqu'à maintenant, il y en a beaucoup qui auraient aimé avoir notre position parce que c'est très rentable.

M. le Président, j'espère que les gens d'en face vont voter avec mon collègue de Gatineau pour reporter d'environ douze mois l'étude de ce projet de loi pour qu'on puisse montrer que nous sommes ouverts à la démocratie, entendre les organismes, les conseils municipaux. Avec la loi 57, on vous a donné cela d'une main et on vous l'a enlevé tout de suite de l'autre. On peut en parler, de cela. On aura l'occasion dans d'autres projets de loi d'en parler. C'est un gouvernement qui fait énormément de publicité, mais, quand cela vient à la réalité, c'est disgracieux de voir comment on peut aller fouiller dans la poche du plus petit. On l'a prouvé avec l'augmentation de la taxe sur l'essence. On touche tout le monde au Québec avec cette augmentation. On a fait cela en peu de temps.

Oui, M. le vice-premier ministre, vous souriez, mais allez dans votre comté et vous allez voir que les gens sont de moins en moins heureux du Parti québécois. J'espère que, dans un avenir très rapproché, vous aurez l'audace de vous présenter devant la population du Québec et je suis convaincu qu'elle vous dira: Merci, on en a assez de vous autres.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le

député de Sainte-Anne.

S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, j'espère que le bruit qui émane de l'autre côté de la Chambre ne sera pas compté sur mon temps. On va m'écouter en vertu de l'article 100. Le président vient d'expliquer le règlement, les questions de privilège. Ecoutez, parce que j'ai quelque chose à dire. Je vais peut-être vous convaincre, écoutez bien.

M. le Président, sur la motion de report, il faut d'abord que je fasse une rectification sur ce que le député de Frontenac vient de dire. Il a dit tout à l'heure: Eux autres, libéraux, se sont sauvés, quand il y a eu une commission parlementaire. Savez-vous que j'étais là? Cette commission avait trait à l'étude du projet de tarification soumis par HydroQuébec. On était à cette commission pour cela, mais on a constaté très rapidement qu'il s'agissait de tricher la population, de faire le grand show, de faire venir les employés d'Hydro-Québec, de parler de la tarification. Mais on a bien fait la preuve -je vais le démontrer tout à l'heure - que la loi 16, qui n'était même pas adoptée à ce moment-là, préparait une grande offensive en vue de cette augmentation. On a fait la preuve de cela. L'affaire de la taxe sur le capital qu'Hydro doit payer, le dividende qu'Hydro doit payer obligatoirement, cela ne se trouve pas dans les descriptions de l'étude du projet de tarification. On a fait la preuve de cela et on le savait depuis le début. On est parti, parce qu'on s'est dit: On ne va pas rester ici à participer à un grand show. Essayer de tricher la population, on ne le fait pas. Le projet de loi no 16 n'est pas encore adopté, on ne peut donc pas en parler. C'est la raison pour laquelle on est parti, on ne s'est pas sauvé. On n'a pas voulu participer à ce jeu.

M. le Président, je dis que la population a le droit d'avoir une enquête sur la politique énergétique dont les péquistes ont parlé tout à l'heure et cet après-midi. C'est une politique bien connue. C'est ridicule. Savez-vous ce qu'ils ont dit? Que c'est important que le prix de l'électricité d'Hydro soit en relation étroite avec le prix du pétrole et le prix du gaz naturel. C'est la politique établie. On n'a jamais étudié cela en détail. J'aimerais bien l'étudier, parce qu'on aurait des choses à dire là-dessus.

Savez-vous, on a une commodité qui s'appelle l'électricité, dans la province de Québec, qui nous appartient à tout le monde, aux Québécois et aux Québécoises. Cela nous appartient. C'est malheureux, cela sera transféré à M. Parizeau qui va devenir le seul actionnaire de toutes ces actions, mais cela appartenait et cela appartient encore à la population du Québec.

Une voix: 6 000 000 de Québécois.

M. Polak: On aurait dû faire bénéficier la population du produit et des gains nets d'Hydro-Québec. Savez-vous qu'en Alberta, on se sert du pétrole pour le bénéfice de la population, parce qu'il n'y a pas de taxe provinciale? Là-bas, on paie 0,314 $ pour le pétrole, tandis qu'ici à Montréal, on paie 0,46 $. Savez-vous qu'en Arabie Saoudite, où il a beaucoup de pétrole aussi, on paie peut-être 0,05 $ ou 0,06 $ le litre et non pas 0,46 $, comme à Montréal, parce qu'ils se disent comme politique: On a une commodité; on a une ressource naturelle qui appartient à la collectivité; on va en faire bénéficier la collectivité. C'est cela qu'on n'a pas fait ici.

M. le Président, si M. Parizeau n'avait pas tellement d'appétit et si M. Parizeau ne voulait pas aller chercher 200 000 000 $ dans les coffres d'Hydro-Québec, on ne serait pas obligé d'augmenter le tarif par un pourcentage de 16,7%. Je parle des tarifs domestiques. (23 h 10)

Je vais vous citer ce que le ministre et les députés ministériels ont dit, tout à l'heure, pendant la discussion, pour justifier cette taxe sur le capital et le paiement des dividendes. Ils ont dit qu'Hydro devrait être traitée comme un citoyen coopératif normal et que, de toute façon, le paiement des dividendes n'est qu'un retour aux contribuables du Québec des dividendes sur les sommes investies par les consommateurs. Cela, c'est une belle théorie. Ils disent: Nous, on a investi dans Hydro-Québec, cet organisme est devenu riche, donc, on va reprendre les profits pour les verser dans les coffres de l'État. De plus, ils disent que tous les contribuables du Québec sont propriétaires d'Hydro-Québec et qu'il est maintenant temps qu'Hydro-Québec retourne à la collectivité lesdits dividendes. Ce sont de belles paroles. La collectivité, maintenant, recevra tous ces dividendes.

Ce n'est pas nous qui les recevrons, c'est le trésor. Savez-vous ce qu'on fera avec cet argent? Il sera encore utilisé pour le gaspillage des fonds publics. Si le ministre et le gouvernement avaient l'intention de faire bénéficier la population des dividendes gagnés par Hydro-Québec, pourquoi ne pas payer ces dividendes par une réduction du taux de l'électricité pour le consommateur domiciliaire qui est le plus touché par l'inflation? C'est bien beau de dire à un citoyen qu'on augmente le taux de l'électricité de 16,7%, mais qu'il ne doit pas être triste parce qu'Hydro-Québec verse des millions de dollars au trésor public sur lequel les gens n'ont aucun contrôle. Nous savons tous combien il y a du gaspillage des fonds

publics et je ne connais pas un citoyen qui ne préférerait pas voir une diminution du taux de l'électricité au lieu de le transférer au fonds consolidé.

Je voudrais faire la preuve sur une chose que la population ne connaît pas. C'est pour ça qu'on a présenté cette motion de report pour un an, parce que le public n'est pas au courant, il veut le savoir et on doit en discuter. Lors de la dernière commission parlementaire, j'ai posé une question à M. Bourbeau, président du conseil d'administration d'Hydro-Québec. C'est à la page B-1229 du journal des Débats. Je cite mes propres paroles et, par la suite, la réponse de M. Bourbeau. Je cite le journal des Débats, je n'invente rien. J'ai dit à M. Bourbeau: "Vous dites qu'on a besoin, pour 1982, de 295 900 000 $, incluant la taxe sur le capital." "... On va mettre à part, 98 700 000 $, que vous, Hydro-Québec, n'étiez jamais obligée de payer auparavant, mais maintenant, on exige que vous la payiez." Cette somme de 98 700 000 $, c'est la taxe sur le capital. Voici la question que j'ai posée à M. Bourbeau:

En ce qui concerne le surplus, si vous prenez les deux années 1981-1982, que vous n'étiez jamais obligée, vous, Hydro-Québec, de verser au gouvernement, cela donne un total, ces deux chiffres ensemble, de 155 500 000 $. Je continuais, en septembre, en commission parlementaire: Si le gouvernement péquiste, demain, disait: On va changer. C'est grave, l'opinion publique ne veut plus. Vous avez raison, les pauvres. Oubliez cette loi 16. On va donner instruction à Hydro-Québec de retourner au public l'argent dont vous n'avez plus besoin, y inclus le surplus et la taxe sur le capital, on va abolir cela. Je posais la question: "Cela veut dire, M. Bourbeau, qu'il y a à ce moment une marge de 155 500 000 $. Est-ce vrai, oui ou non?" À la suite de quoi, M. Bourbeau a répondu: "C'est vrai, oui."

C'est la preuve que la taxe sur le capital et les dividendes étaient bien inclus quand Hydro-Québec a fait ses calculs de tarifs. Au cas où il y aurait encore un doute qu'Hydro-Québec, en préparant son projet de tarification, n'avait pas pris en considération les effets de la loi no 16 qui, à ce moment, n'était même pas en vigueur, je cite la réponse donnée par un autre officier d'Hydro-Québec, M. Bolduc, à la page B-1254: "Notre prévision tient également compte de modalités de la taxe sur le capital de 1981 qui serait, selon ce que nous avons anticipé, payables en 1982 et elle a aussi tenu compte de certaines modalités qui nous avaient été indiquées il y a plusieurs mois comme étant probables, de paiement de la taxe sur le capital de l'année 1982."

On ne peut pas avoir de preuve plus claire, Les officiers, les hauts fonctionnaires d'Hydro-Québec l'ont confirmé à ce moment-là. C'est la raison pour laquelle on demande de reporter l'étude de ce projet de loi à un an pour qu'il y ait une étude par ceux qui la demandent.

On a parlé du groupe des onze -malheureusement, je pense qu'il n'y en a pas beaucoup qui sont ici ce soir de ce groupe des onze - qui avaient eu le courage, après le discours sur le budget, de le critiquer. Mais, tout de même, ils avaient voté pour le budget. Ces onze-là, s'ils ont du courage et s'il y en a d'autres parmi vous qui ont du courage, allez donc voter en faveur de notre motion de reporter l'étude de ce projet de loi et vous irez à votre congrès en fin de semaine dire à vos militants que vous avez eu le courage de vos convictions, que vous n'avez pas agi comme des petits moutons, que vous avez eu le courage. Allez dire cela à vos militants et je pense qu'on va vous apprécier, même dans votre parti, en fin de semaine. Je suis certain que, demain, vous allez encore vous lever en bloc. Vous avez ri de nous autres parce que, à un moment donné, il y a eu un vote sur une affaire sérieuse. On a parlé des neuf qui ont voté contre. Le savez-vous? Au moins, ces neuf-là avaient...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Sainte-Anne, votre temps est terminé.

M. Polak: Merci, M. le Président. M. Brassard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le chef de l'Opposition.

M. Brassard: M. le Président. Une voix: II a été reconnu. M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, les raisons pour lesquelles l'Opposition demande le report de ce projet de loi n'ont rien d'artificiel. Ce projet de loi implique des choix tout à fait fondamentaux pour notre société et nous ne voulons pas qu'ils soient faits à la vapeur ou à la sauvette, comme c'est arrivé déjà trop souvent sous le gouvernement actuel.

Il y a d'abord un choix évident qui nous est proposé au sujet de la vocation d'Hydro-Québec comme société d'État. J'entendais tantôt le député de Frontenac dire que les sociétés d'État ont commencé à réaliser des surplus sous le gouvernement actuel. C'est complètement faux. Cela fait très longtemps qu'Hydro-Québec réalise des surplus. Si le député de Frontenac avait réfléchi à son affaire un petit peu, il se serait rendu

compte que, entre une société à caractère monopolistique comme Hydro-Québec et d'autres sociétés qui sont dans une position concurrentielle, il y a une énorme différence qui ne permet aucune comparaison superficielle comme celle qu'il a faite.

Hydro-Québec a été, jusqu'à maintenant, une société autonome, une société à qui le législateur a délibérément confié une grande marge de liberté financière et administrative pour qu'elle puisse s'acquitter de ses lourdes responsabilités avec toute la latitude en matière de choix des moyens, avec tout le poids nécessaire. Or, le projet de loi qu'on nous présente aujourd'hui tend - ce n'est pas la première fois; c'est le deuxième projet qu'on nous présente en l'espace de deux ans qui va dans la même direction - vers une domestication très dangereuse d'Hydro-Québec.

Quand celui qui se présente comme l'actionnaire principal - on sait qu'au bout de la ligne cela se résumera à un personnage, le ministre des Finances - peut dicter le montant du dividende qui sera versé au gouvernement par la société, cela veut dire qu'indirectement il peut exercer un contrôle presque dictatorial sur un grand nombre de décisions fondamentales de cette société autant en matière de tarification, de qualité de services que d'équipement. Nous croyons qu'un choix comme celui-là a déjà été fait trop souvent sans que le gouvernement en mesure les répercussions. La Caisse de dépôt et placement du Québec, pour ne mentionner qu'un exemple, est la victime de ces pressions d'un actionnaire qui se sent trop proche propriétaire. On se demande, à entendre parler et agir parfois la Caisse de dépôt, si elle est devenue simplement un instrument docile et domestiqué aux mains du gouvernement plutôt que l'instrument autonome, vigoureux et libre qu'avait construit le gouvernement libéral qui l'a créé il y a une quinzaine d'années.

Je regarde le sort que le gouvernement est en train de faire aux universités. Sous prétexte de leur fournir de l'aide financière, voici que le ministre de l'Éducation, très représentatif en cela de l'orientation du gouvernement actuel, est en train de les réduire à la domesticité et à l'esclavage financier et administratif. Regardez le sort que le gouvernement impose aux commissions scolaires depuis quelques années. On est gêné. Il faudrait qu'on dépose un projet en vertu duquel le gouvernement voudra tout simplement se débarrasser des commissions scolaires. Nous ne voulons pas que la même domestication, le même écrasement arrive dans le cas d'Hydro-Québec et c'est pour ça que nous exigeons qu'un examen très approfondi soit fait de toutes les implications de ce projet de loi. Le projet comporte des implications très importantes pour l'orientation générale des finances publiques. Cela, c'est capital aussi. (23 h 20)

Je pense qu'on peut caractériser la politique fiscale et financière du gouvernement péquiste par deux traits qui sont évidents. D'abord, une politique de camouflage de déficits. On nous a parlé de santé des finances publiques depuis que le gouvernement actuel est en place et, chaque année, l'état des finances publiques n'a cessé de se détériorer à un rythme qui s'accélère d'année en année. Deuxièmement, comme on n'a pas le courage de dire franchement aux contribuables le genre de gestion qu'on est en train de faire, on taxe indirectement, on taxe par des voies camouflées. On l'a fait par la taxe sur les salaires sous prétexte de financer les programmes de soins médicaux et hospitaliers. On l'a fait plus récemment par les taxes sur l'essence. Cela ne paraît pas. Cela passe sur le dos des multinationales, sur le dos de l'Alberta, sur le dos des étrangers, mais ce gouvernement-ci est en train de s'engraisser au détriment des consommateurs d'essence, une manière hypocrite et indirecte qui frappe beaucoup plus les petits et les faibles que les gros.

Nous ne voulons pas qu'il fasse la même chose avec Hydro-Québec. Il est déjà en train de le faire à un rythme très rapide et, si le projet de loi, comme il nous est présenté, allait être adopté aussi rapidement que le voudrait le gouvernement, le danger que s'aggrave et s'accentue cette tendance très dangereuse que le gouvernement actuel a imprimée aux finances publiques et à la fiscalité serait aggravé considérablement et je pense que c'est la pire calamité qui pourrait être infligée aux contribuables.

D'autres de mes collègues, en particulier le député d'Outremont, ont souligné combien inconséquente est la politique du gouvernement qui s'engageait, il y a quelques mois à peine, presque en sanglotant, à tenir un débat public sur les grands choix énergétiques que devra faire notre société pour la prochaine génération. Il est évident que ce débat n'a jamais eu lieu nulle part. Peut-être que le genre de débat qui s'est produit à la commission parlementaire a-t-il pu satisfaire certains députés complaisants et ultra dociles du côté gouvernemental. Mais il n'y a pas un citoyen ou un observateur sérieux qui aura le culot de soutenir qu'on aurait jamais tenu un débat sur les grandes orientations énergétiques de l'avenir au Québec. Ce débat reste à faire et, avant même qu'il ait eu lieu, le gouvernement voudrait nous imposer une orientation tout à fait fondamentale. Nous disons au gouvernement: Tenez donc vos promesses et vos engagements et ensuite vous nous arriverez avec un projet comme celui-ci.

Hydro-Québec, M. le Président, est un

instrument de développement économique extrêmement important. Ses politiques d'achat, ses politiques de développement, ses politiques d'embauche, ses politiques d'emprunt et de financement ont un impact considérable sur tout l'ensemble de la société québécoise. Le gouvernement lui-même dépend dans une très large mesure des politiques de financement d'Hydro-Québec parce que, quand ça va mal pour lui, il peut être tenté de lui refiler une partie plus importante du fardeau. Quand cela va bien, il peut être tenté de piger dans la caisse d'Hydro-Québec pour se financer. Nous autres, nous voulons qu'Hydro-Québec garde son potentiel comme l'un des instruments majeurs du développement économique du Québec au même titre, par exemple, et encore sur une échelle plus importante que la Caisse de dépôt et placement, que le Mouvement des caisses populaires, que la Coopérative fédérée et d'autres grandes institutions économiques et financières que nous avons et nous trouvons que, si ce projet allait être adopté inconsidérément et prématurément, c'est la vocation économique d'Hydro-Québec et la santé de notre économie qui risqueraient d'en être affectées.

M. le Président, nous sommes à un tournant où la santé de l'économie est extrêmement compromise. Je lisais dans un journal, samedi dernier, qu'au cours du mois de septembre, les demandes de prestations d'assurance-chômage ont augmenté de 44% au Québec par rapport au mois d'août, augmentation de 44% dans l'espace d'un mois. Du mois de septembre de l'année dernière au mois de septembre de cette année, l'augmentation est de l'ordre d'au moins 40%. Des chômeurs, c'est ce que vous fabriquez, messieurs du gouvernement, par milliers, surtout depuis un an, par vos politiques qui découragent les investissements et qui font fuir les citoyens du Québec pour aller chercher du travail ailleurs.

Nous sommes à une époque où jamais les déficits gouvernementaux n'ont été aussi élevés, où jamais le fardeau fiscal direct et indirect du contribuable québécois n'a été aussi élevé que sous le gouvernement actuel, où jamais le rythme de progression de l'endettement collectif, de l'endettement public du Québec n'a été aussi spectaculaire, aussi effréné que sous ce gouvernement qui se piquait de mettre de la santé dans les finances publiques quand il a pris le contrôle des affaires, il y a quelques années.

Étant donné, M. le Président, ce caractère extrêmement fluide et dangereux de la conjoncture économique actuelle, nous disons au gouvernement que ce n'est pas le temps de céder à la tentation des embardées comme celle que nous propose le projet actuel et c'est pour cela que nous aurions tous intérêt à appuyer la motion de report du député de Gatineau et à reporter d'un an l'examen de ce projet afin que nous ayons tous approfondi davantage les implications très dangereuses qu'il contient.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, le fait que le chef de l'Opposition ait choisi d'intervenir sur cette motion dilatoire qui a été présentée par le député de Gatineau... C'est d'ailleurs la deuxième fois en autant de jours qu'il se rallie à la position du député de Gatineau. Hier, c'était sur le plan constitutionnel. Ce soir, c'est sur une motion de report de douze mois. Je prends comme indication, du fait que le chef de l'Opposition choisisse d'intervenir sur une telle motion et constatant le nombre, ce soir, exceptionnel, de nos amis...

Une voix: ...

M. Charron: Cela ne m'inquiète pas du tout. Je veux dire que le nombre de présences ce soir, auquel ils nous ont si peu habitués et gâtés, devrais-je dire, des députés libéraux est sans aucun doute une indication qu'ils ont l'intention d'intervenir en bon nombre. C'est tout à fait leur droit. Nous allons, avec beaucoup de patience, entendre chacune des répétitions d'arguments qui ont déjà été posés et notre intention n'est nullement d'interdire au cours de cette séance aujourd'hui le débat de ce soir. Je vous en prie. Je suis très heureux de vous offrir cette collaboration.

M. le Président, venons-en non pas au principe du projet de loi sur lequel le député d'Argenteuil est largement intervenu, mais sur l'à-propos d'un report de douze mois, comme le règlement l'avait invité à le faire. J'en ai entendu beaucoup, de ces arguments, certains moins sérieux, d'autres complètement farfelus. Prenons ceux que j'ai entendus comme étant des arguments de valeur, je dirais, qui pourraient, à n'importe quel citoyen, laisser croire qu'il y a un bien-fondé à reporter ce débat. Ce que ne disent pas les députés libéraux qui sont intervenus depuis le début, c'est que ce projet de loi n'a pas été déposé hier et l'invitation à prendre du temps sur un geste aussi majeur, qui pourrait être justifiée s'il y avait à peine dix jours, une semaine ou vingt-quatre heures que nous avions déposé ce projet de loi, doit être prise dans une toute autre considération quand il s'agit d'une mesure inscrite dans le budget préélectoral du gouvernement.

Lorsque le gouvernement a présenté cette intention, non seulement était-elle écrite, annoncée dans le discours sur le budget, comme l'a rappelé le ministre de

l'Énergie et des Ressources ce matin, non seulement était-elle écrite, le nouveau qu'elle constitue, je suis bien prêt à admettre qu'il s'agit d'une nouveauté dans les rapports entre Hydro-Québec et le gouvernement, personne ne le contestera au cours du débat sur le principe, cette nouveauté n'est pas apparue hier, elle était annoncée dans le budget du gouvernement. Pendant la campagne électorale, M. le Président, avez-vous entendu des rangs de l'autre côté, un mot, une ligne, un discours sur ce sujet? Cela ne les préoccupait pas du tout, M. le Président. (23 h 30)

Le Président: M. le leader, s'il vous plaît, je ne veux pas vous interrompre, mais j'étais à côté tout à l'heure, et j'écoutais religieusement, comme tout le monde, le discours prononcé par le chef de l'Opposition. Je demanderais la même façon d'agir pour tous les autres discours, parce que je pense que c'est la façon la plus simple de bien entendre et de bien écouter les propos qui sont tenus. Je vous demanderais de laisser le leader faire son discours, comme le prévoit le règlement, à l'article 100. M. le leader.

M. Charron: Merci, M. le Président. Ou ils n'en ont pas parlé pendant la campagne électorale, ou, s'ils en ont parlé, ce que j'ignore, pour ma part, ils ont eu la réponse de la population, ils sont à votre gauche, M. le Président, ce soir.

Non seulement cela n'a pas été caché, à l'entrée même de la campagne électorale, c'est écrit noir sur blanc dans le budget, une des mesures, sans aucun doute, les plus commentées du budget au départ, mais, cet été, à la suggestion même de l'Opposition et sans que cela nous force en quoi que ce soit, puisqu'il s'agit d'une chose tout à fait normale, lorsque quelqu'un, je ne me souviens plus qui, de l'autre coté, a suggéré que le projet de loi, lorsqu'il fut déposé, il y a même des gens, le député d'Outremont s'en souviendra, qui me posaient des questions lorsque la fin de mai arrivait, pour voir si ce fameux projet de loi ne serait pas déposé, quelque part avant le 31 mai, pour être discuté en juin. C'est moi qui lui ai dit que, comme il s'agissait d'une mesure importante, il fallait un certain temps; or, ce temps, aujourd'hui, est écoulé.

À l'époque, je lui répondais: Non, je ne le déposerai pas le 31 mai pour adoption le 19 juin ou le 21 juin, à la vapeur, nous allons nous contenter de le déposer et nous allons l'étudier tout le temps qu'il faudra, en commission parlementaire, ce que nous avons fait. Nous l'avons présenté en commission parlementaire, tout ceux qui ont voulu venir comparaître sur ce sujet, donner leur opinion, l'ont fait. La société Hydro-Québec était là, avec toute sa batterie, d'experts, sur place pour répondre aux questions, aux interrogations, aux angoisses de l'Opposition officielle. Qu'est-ce qu'ils ont fait, M. le Président, pendant ce délai que nous leur avons accordé et pendant cette commission parlementaire? Ils sont sortis, comme des enfants d'école, parce qu'ils n'avaient pas la motion qu'ils voulaient présenter, au tout départ, pour encarcaner le débat.

Mais si ce débat, comme dit le chef de l'Opposition, et je conteste cette affirmation, est véritablement, comme je viens de l'entendre dire, un débat sur les grands choix énergétiques de l'avenir, entre vous et moi, il en met beaucoup, ce soir, le chef de l'Opposition, quand il parle de ce projet de loi. Soit, si ce débat qui concerne les relations entre une société et le gouvernement du Québec se trouve, par le fait même, à affecter les grands choix énergétiques de l'avenir, pourquoi, lorsque nous avions cette société devant nous, non seulement avant même de quitter comme des enfants la commission parlementaire, si c'était de cette importance majeure, est-ce que c'était le temps de faire un petit "show" partisan, comme de dire: Si ma motion n'est pas reçue, nous nous retirons, peu importe l'importance du sujet. Comme s'il s'agissait d'une affaire de dernière heure ou de dernière seconde! Si ce qui vous préoccupe en si grand nombre ce soir était aussi important, pourquoi n'avez-vous pas pris vos responsabilités premières et participé de façon première aux travaux de la commission parlementaire? Une chance qu'il y avait des députés du Parti québécois.

Depuis le 11 mars que cette décision est étalée sur la place publique, commentée, livrée à l'étude de n'importe quel parlementaire qui aurait voulu participer à la commission! Ce soir, sortant des limbes, l'Opposition officielle nous arrive et nous dit: II nous faut douze mois de plus pour y réfléchir, parce que c'est majeur.

M. le Président, je vais vous poser une question avant de terminer. Pensez-vous que, dans douze mois, le parti politique qui écrivait dans son programme que les taux d'électricité au Québec étaient artificiellement bas - c'est dans son cahier du mois d'avril dernier - qui avait une politique qui courait la chèvre et le chou, comme des députés qui sont intervenus l'ont fait, pensez-vous que, dans douze mois, il y aurait quelque chose de changé dans son opinion? Pensez-vous que dans douze mois, vraiment, il profiterait de la période pour étudier, alors qu'on vient de leur offrir dix, onze ou douze mois tout à fait ouverts à la discussion avec une commission parlementaire qu'ils ont désertée? Voyons donc! N'importe qui écoutant ces débats ce soir sait très bien que ce que l'Opposition est en train de faire, c'est simplement de perdre du temps sur un projet de loi qu'elle a refusé d'étudier de façon attentive.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont, en vertu de quel règlement? Je tiens à vous faire remarquer, M. le député, qu'en vertu de l'article 96, vous devez rectifier des propos du leader qui auraient transformé ce que vous avez dit dans votre discours...

M. le député, simplement parce que je suis debout, vos propos n'ont pas été enregistrés, je vous le fais remarquer. Je vous demandais en vertu de quoi. Vous m'avez répondu en vertu de l'article 96, et là, vous me revenez en vertu de l'article 49.2, sur une question de privilège.

M. Fortier: S'il vous plaît, une question de privilège. Je crois que le leader n'y a pas fait attention, mais il a induit cette Chambre en erreur lorsqu'il a dit que la députation libérale avait quitté la commission parlementaire qui a discuté du projet de loi no 16. C'est faux. Nous sommes sortis de la commission parlementaire, mais c'était sur la tarification et nous avons expliqué pourquoi. À ce sujet, je crois que ce que le leader a dit contredit...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je voudrais simplement vous faire remarquer -je vais vous reconnaître ensuite, M. le député - que la première partie de votre propos était en vertu d'une question de privilège, mais que votre deuxième partie donnait ouverture à un débat que je n'accepterai pas, et vous le savez très bien. M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: M. le Président, cette motion me fournit l'occasion d'émettre certains commentaires en ce qui a trait au comportement du gouvernement. Ayant pris connaissance du projet de loi no 16, j'ai pu constater, à ma grande surprise, un revirement d'attitude tout à fait contraire à la raison d'être et au programme du Parti québécois. En fait, ce gouvernement, lui qui nous rebat les oreilles depuis cinq ans en nous disant que le respect des droits collectifs des Québécois passe avant toute chose, qu'ils sont sacrés et même indéniables, il vient tout juste de nous prouver, noir sur blanc, qu'il peut en tout temps se soustraire traîtreusement à un engagement et à un principe fondamental qu'il a toujours soutenus.

M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Excusez-moi.

M. Dubois: M. le Président, ce revirement indique bien l'irresponsabilité, le manque d'honnêteté intellectuelle et la mesquinerie qui caractérisent nos amis d'en face. Depuis son existence, Hydro-Québec a toujours été un bien collectif, une richesse collective appartenant aux Québécois, un outil de développement privilégié dont tous les Québécois étaient fiers; c'était un orgueil collectif de savoir que cette richesse nous appartient. Voilà qu'aujourd'hui ce n'est plus cela. Cette richesse collective s'est subitement transformée en un bien individuel, une richesse individuelle ou, si vous préférez, elle est devenue la proie privilégiée d'un seul individu qui s'appelle le ministre des Finances. C'est effectivement d'un bien collectif, M. le Président, que ce Parti québécois, spécialisé en propagande séparatiste, a décidé de s'emparer, dépouillant ainsi tous les Québécois du peu qu'il leur restait. (23 h 40)

M. le Président, la motion de report à douze mois présentée par mon collègue, le député de Gatineau, a essentiellement pour but d'amener le gouvernement à consulter la population avant de saisir le fruit de son bien collectif. Nous ne pouvons laisser aller un tel projet de loi sans défendre de toutes nos forces les intérêts supérieurs de tous les Québécois.

Hydro-Québec, conçue par le Parti libéral, a toujours servi à bâtir le Québec. Ce fut une convention qui a toujours été respectée et reconnue, mais voilà qu'aujourd'hui le Parti québécois s'en sert pour affaiblir le Québec. J'ai bien dit "affaiblir le Québec", puisque la mission particulière et unique de cette société d'État a toujours été de développer et d'investir dans le seul domaine privilégié en matière énergétique que possèdent les Québécois.

M. le Président, nous de ce côté-ci, oui, nous du Parti libéral, on ne peut pas laisser affaiblir le Québec; on ne peut pas laisser aller ce siphonnage de fonds; on ne peut pas laisser aller au Parti québécois la clef de notre future expansion économique. On ne peut pas, non plus, laisser sans défense les 6 000 000 d'actionnaires du Québec qui sont les seuls et uniques propriétaires d'Hydro-Québec.

M. le Président, cela nous prend douze mois de répit pour empêcher ce gouvernement irresponsable de "dépocher" systématiquement les Québécois de leur principal outil et pouvoir de développement. Hydro-Québec ne serait plus au service de la population, mais bien au service d'un gouvernement péquiste en faillite qui ne sait plus où piger ses dollars pour survivre.

La mission d'Hydro-Québec ne peut être si sauvagement interrompue. Ce camouflage sous le couvert du projet de loi no 16 doit être démasqué et combattu. Ce siphonnage de fonds sous le couvert d'une politique énergétique décrit bien le genre de gouvernement que l'on a. Je veux dénoncer formellement cette politique déloyale et

catastrophique que tente de nous faire avaler le Parti québécois.

M. le Président, la population du Québec a droit, à titre d'actionnaire, d'être consultée et de décider de l'avenir de ses biens, puisque les deux raisons d'être de cette société d'État sont totalement remises en question par cette mesure péquiste. Depuis 1962, les Québécois savent que leur société d'État, qui s'appelle Hydro-Québec, a pour mission de leur fournir de l'énergie au meilleur coût possible et aussi de développer au maximum notre unique source d'énergie renouvelable.

Les Québécois savent aussi que ce siphonnage de fonds fera diminuer les investissements d'Hydro-Québec, diminuera la construction, l'équipement et, par conséquent, créera de nouvelles mises à pied, comme si le Québec pouvait se payer le luxe de supporter quelques milliers de chômeurs additionnels. C'est cela, le résultat du geste que veut poser le gouvernement. C'est cela que nous voulons stopper et c'est pour cela que nous sommes en train de débattre cette motion de report ce soir, M. le Président.

Pour mieux faire comprendre tout le sens de cette motion, il serait utile, et même important, de retourner un peu en arrière. Je dois préciser que la journée du 13 avril 1981, avec le résultat que l'on connaît, y est pour quelque chose. Depuis le 16 novembre 1976 jusqu'au 13 avril 1981, le gouvernement a plongé le Québec dans un déficit accumulé d'environ 8 000 000 000 $. Vous comprendrez pourquoi, maintenant, le gouvernement actuel aura siphonné, dans cinq ans, au-delà de 3 000 000 000 $ des coffres d'Hydro-Québec. Le gouvernement, durant cette période, pour des fins électoralistes et partisanes, a englouti les contribuables du Québec dans la pire situation financière de toute l'Amérique du Nord. Vous savez que, jusqu'au 13 avril, il n'y avait rien de trop beau ni de trop cher au Québec.

Pour se faire réélire, les péquistes ont mis le paquet. Il ont délibérément endetté et hypothéqué tous les Québécois, si bien qu'aujourd'hui la note nous est présentée d'une façon dissimulée, d'une façon tronquée, masquée et en catimini, comme seuls les péquistes savent le faire. La note est douloureuse et néfaste pour tout le Québec: des taxes cachées, des taxes indirectes, des taxes sournoises, 0,30 $ le gallon d'essence, appropriation de fonds d'Hydro-Québec, augmentation du prix des plaques d'immatriculation, augmentation allant jusqu'à 100% des droits et permis dans plusieurs domaines, et j'en passe énormément, tout en n'oubliant pas les nombreuses coupures budgétaires et les restrictions dans le domaine hospitalier, par exemple.

La grande foire péquiste du soir du 13 avril, on en a des reliquats qui font mal aujourd'hui. Ils font reculer le Québec dans son développement, ils font reculer le Québec dans ses services sociaux, dans son éducation, dans nos services hospitaliers. Notre motion a sa raison d'être et elle s'inscrit très bien dans le coup de force du 13 avril, coup de force que les Québécois ne sont pas à la veille d'oublier.

C'est avec beaucoup de regret que je me devais de faire part à la population d'un bout de vérité si désagréable pour tous ceux et celles qui ont cru ou qui ont eu confiance dans toutes les manigances du Parti québécois. Enfin, j'indique que la motion actuellement débattue devrait recevoir l'approbation de tous les membres de cette Assemblée. Ce serait tout au moins un geste de respect envers une population déjà trop accablée et énormément appauvrie collectivement. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: M. le Président, mesdames et messieurs du Québec, je voudrais appuyer la motion de report du projet de loi no 16 du député de Gatineau. Tous les Québécois sont fiers d'Hydro-Québec. Depuis la nationalisation des sociétés privées d'électricité en 1963, ils se sentent les vrais actionnaires de cette société d'État qui est classée la première par ses actifs et par ses profits. Les Québécois et les Québécoises, en plus d'être fiers de la réussite financière d'Hydro-Québec, sont aussi fiers de ses réussites technologiques. Hydro-Québec nous appartient, c'est à nous. La population du Québec sait très bien la raison principale qui a motivé la nationalisation de l'électricité au Québec en 1963. C'était de fournir aux Québécois l'hydroélectricité québécoise aux meilleurs coûts possible. Tout le monde sait que nous avons bénéficié, jusqu'à ces dernières années, de tarifs extrêmement bas. Malheureusement, avec le Parti québécois, le Québec est à perdre l'avantage économique dont il jouissait depuis des décennies. Or, le gouvernement péquiste veut changer les règles du jeu. Il veut siphonner les fonds d'Hydro-Québec pour payer des- déficits et il veut également mettre cette société en tutelle.

Voilà deux bonnes raisons pour reporter le projet de loi no 16. Ce projet de loi va couronner les interventions du gouvernement péquiste. Le projet de loi no 16 vise à retirer à Hydro-Québec l'obligation de produire l'électricité aux plus bas coûts possible et lui ajoute celle de payer au gouvernement les dividendes et une taxe sur le capital, une autre raison pour le reporter. (23 h 50)

En fait, le gouvernement exige d'Hydro-Québec qu'elle hausse ses tarifs de façon artificielle afin de pouvoir bénéficier des plus gros dividendes possible. C'est là une mesure régressive qui affecte les gagne-petit et M. et Mme Tout-le-Monde. C'est vous, messieurs et mesdames du Québec, qui paierez pour l'incompétence du gouvernement.

Ce n'est pas la faute d'Ottawa si on a le projet de loi no 16. Ce n'est pas la faute des provinces anglophones. C'est la faute du gouvernement du Québec, un gouvernement incompétent et malhonnête qui n'a pas le courage d'admettre franchement qu'il est près de la faillite. C'est clair, le gouvernement n'a pas d'argent parce qu'il n'a pas su planifier ses besoins financiers et cherche à tout prix à s'approprier la poule aux oeufs d'or, Hydro-Québec.

Ladies and gentlemen, bill no 16 is an irresponsible short-term cover-up which is courting a long-term disaster for the economy of Québec. The government does not...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée, je ne voulais pas vous interrompre, mais je voudrais demander qu'on vous permette d'intervenir. J'entendais des bruits. Mme la députée.

Une voix: La pouponnière en arrière.

Mme Dougherty: Bill 16, I believe, is an irresponsible short-term cover-up which is courting long-term disaster for the economy of Québec. The Government has not got the guts to tell the people the truth that the Government is close to bankrupcy. The Government needs more money to help fill the 500 000 000 $ hole discovered last year in education, to pay for the exorbitant commitments made in the collective agreements signed, by the Government's own admission, without knowing the real cost of those agreements, to pay for all the unnecessary repairs in this National Assembly. While children go short on text books and musical instruments in our schools and handicapped children have inadequate services, we are fancying up the National Assembly. The Government needs money to pay for the scandalous deficits incurred by the mismanaged "fête nationale" celebrations.

The Parti québécois, Ladies and Gentlemen, does not even know how to run a parade and now they want to take over Hydro-Québec. They want to take over Hydro-Québec, the most successful enterprise in the province of Québec, the pride of all Quebeckers, and it is going to be used as a funnel for funds to pay off the Government's deficit, to help hide the financial incompetence of the Parti québécois.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée, je m'excuse encore une fois, s'il vous plaît! Les caucus, à l'extérieur. M. le député.

Une voix: Manque de respect.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je vous ai demandé, je m'excuse, je ne veux pas vous nommer, mais ici, en avant, j'entends autre chose que le discours. Mme la députée, s'il vous plaît!

Mme Dougherty: The Government intends to use Hydro-Québec as a funnel for funds to pay off the Government's deficit, to hide their own incompetence, to fill the 3 000 000 000 $, 4 000 000 000 $ growing up dollar hole in our budget which is getting bigger every day.

Ladies and Gentlemen, it is your Hydro bills that are going to stuff that hole. But, even worse, what is going to happen to Hydro-Québec? What will be the impact on Hydro-Québec? Does the Government not understand that the principal reason that Hydro-Québec has been so successful is because it has been operated without Government interference? Bill 16 would destroy the very thing which has allowed Hydro-Québec to flourish, to create jobs for Quebeckers and to be the motor of the economy of Québec. Cannot the Government see that exorbitant cost of electricity will discourage the use of electricity and to tend favor other power sources such as those which can be bought from outside Québec? Is this the energy policy of Québec? Who knows? We do not have an energy policy in Québec and that is why we have got to put off this motion until we have an energy policy for Québec.

Ladies and Gentlemen, tonight, I have the black eye, but if we let Bill 16 go through, it is going to be René Lévesque that has the black eye for a long, long time.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Orford.

M. Georges Vaillancourt

M. Vaillancourt (Orford): Je m'en voudrais de ne pas dire quelques mots sur la motion de report de douze mois du député de Gatineau.

M. le Président, si nous demandons au gouvernement de prendre quelques mois de plus, c'est pour lui permettre de réviser sa décison de transformer Hydro-Québec qui est une compagnie privée de la couronne, compagnie qui a été créée par le gouvernement dans le but de fournir à la population du Québec un approvisionnement en électricité de bonne qualité et à bon marché. M. le Président, je me souviens, en

1962, lorsque le premier ministre actuel, l'honorable René Lévesque, était le promoteur, le leader qui avait obligé, qui avait forcé le gouvernement à faire une élection pour demander à la population du Québec le mandat d'exproprier les compagnies privées afin de donner à la population du Québec une électricité de qualité sur tout le territoire du Québec. La population a trouvé que le mandat qui lui était demandé était raisonnable. À ce moment-là, je me souviens que l'honorable premier ministre René Lévesque, alors ministre des Richesses naturelles, avait fait le tour du Québec, et nous l'avions aidé à faire le tour du Québec. Je possède encore dans mes dossiers un film d'une durée d'environ une demi-heure, trois quarts d'heure. Le ministre d'alors vantait et demandait à la population de voter fortement pour le Parti libéral afin de fournir à la population de l'électricité à bon marché.

Aujourd'hui, je me demande pourquoi le premier ministre, avec son gouvernement, veut transformer, avec le projet de loi no 16, Hydro-Québec qui est actuellement une compagnie de la couronne. Il veut en faire une compagnie publique avec un fonds social de 5 000 000 000 $ divisé en 50 000 000 d'actions d'une valeur nominale de 100 $ chacune. (Minuit)

M. le Président, je me demande où le gouvernement prend son mandat pour faire ces changements. J'admets qu'il peut le faire comme gouvernement, mais ce n'est pas le mandat que la population du Québec lui a donné le 13 avril dernier.

M. le Président, pour que le gouvernement fasse de tels changements, il doit certainement être pris de panique avec son administration et ses déficits accumulés exorbitants de plusieurs milliards depuis 1976, qui sont de l'ordre de 12 000 000 000 $ à 15 000 000 000 $ d'endettement.

Le ministre des Finances, avec l'imagination qu'on lui connaît, a certainement été cette fois-ci le promoteur de ce projet de loi afin de renflouer son budget déficitaire par une taxe camouflée sur les comptes d'électricité. Cette taxe va aller chercher des fonds dans les poches de tous les Québécois et Québécoises, riches comme pauvres, comme on l'a fait avec les plaques d'immatriculation, avec l'augmentation de 0,30 $ sur le prix de l'essence, celle sur les primes d'assurance automobile, et la taxe sur le financement de la santé, qui a été doublée lors du dernier budget.

M. le Président, si nous demandons de reporter à 12 mois l'étude en deuxième lecture, c'est que nous croyons que le gouvernement n'a pas réalisé toutes les implications de la portée de ce projet de loi, vu l'impossibilité de payer des assistés sociaux, des personnes âgées, des petits salariés qui travaillent au salaire minimum, leur impossibilité d'arriver à payer de telles augmentations de taxe sur leur compte d'électricité en plus des autres que j'ai énumérés plus haut.

Comment pensez-vous, M. le Président, qu'un père de famille qui a une famille de trois, quatre, cinq enfants ou plus, qui travaille au salaire minimum ou un père de famille qui est sans travail et qui vit de l'aide sociale va arriver? Nous comprenons qu'avec un taux de chômage d'environ 11%, il y a certainement plusieurs pères de famille qui vivent avec un revenu d'aide sociale, c'est-à-dire avec un revenu en bas du seuil de la pauvreté. Tous ces pères et mères de famille, M. le Président, sont obligés de se servir de l'électricité pour s'éclairer et se chauffer. M. le Président, si nous demandons au ministre de l'Énergie aujourd'hui de reporter à douze mois avant de faire adopter ce projet de loi, c'est pour toutes ces raisons. M. le Président, que vont-ils payer, ces assistés sociaux, ces pères et mères de famille, de plus que ce qu'ils paient actuellement en 1981? Que vont-ils payer, à partir du 1er janvier 1982, avec cette augmentation de 16,3% pour diverses consommations calculées pour une période de 60 jours? Ici, j'ai un tableau qui indique qu'à partir du 1er janvier 1982, un compte d'électricité pour 1000 kilowatts coûte actuellement 36 $, et va augmenter à 40,80 $. Un compte de 1500 kilowatts qui coûte en 1981 48 $, va augmenter à 54,30 $, plus la taxe de vente. Pour un consommateur de 3000 kilowatts, c'est 88 $ en 1981, ce sera 102,84 $ en 1982 et cela augmente continuellement ainsi.

M. le Président, je pense que la motion du député de Gatineau est sérieuse et le gouvernement doit réellement réviser son tir sur ce projet de loi et essayer de comprendre toutes les personnes qui vont avoir à payer ces augmentations mais qui n'en ont certainement pas les moyens. Pour toutes ces raisons, M. le Président, je voterai pour la motion de report du député de Gatineau.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Laprairie.

M. Jean-Pierre Saintonge

M. Saintonge: M. le Président, je voudrais ajouter ma voix à celle de mon collègue de Gatineau qui a proposé la motion de report du projet de loi no 16, ainsi qu'à celle de mes nombreux autres collègues qui sont intervenus sur le sujet, avant cette heure tardive, puisqu'il est déjà plus de minuit, pour tenter de stopper la marche de

ce projet de loi qui amène les Québécois à la noirceur, camouflage de la mauvaise administration du gouvernement québécois.

Le motif à l'appui du rejet de ce projet de loi no 16 est simple et évident: ce projet de loi est prématuré. D'abord, l'adoption d'un tel projet de loi constitue un manque de respect flagrant pour l'ensemble des citoyens du Québec. En effet, tous les Québécois sont fiers d'Hydro-Québec. Depuis la nationalisation des compagnies d'électricité, il y a presque vingt ans, les Québécois se sentent les vrais actionnaires, les seuls et uniques propriétaires de cette richesse naturelle que constitue l'électricité. Lorsqu'il fut temps pour le gouvernement libéral, en 1962, de prendre une décision sur la question de la nationalisation de l'électricité, de prendre une décision pour savoir si tous les Québécois deviendraient les propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés de l'expansion économique de la province, à savoir l'électricité, comme le disait le premier ministre Jean Lesage, le gouvernement a choisi de faire une élection, de consulter la population. La réponse de la population québécoise fut non équivoque.

Présentement, dans le cadre de la présentation du projet de loi no 16, le gouvernement tient-il compte des propriétaires et actionnaires de cette société d'État? La réponse est non. Que veut faire le gouvernement péquiste avec le projet de loi no 16? Il veut siphonner les fonds d'Hydro-Québec pour payer ses déficits et mettre cette société d'Etat en tutelle Le projet de loi no 16 trahit, dans son fondement même, le mandat accordé au gouvernement en 1962. Les termes et le cadre de ce mandat étaient définis comme suit: "Fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière." Ce sont les termes mêmes du ministre des Richesses naturelles de l'époque, M. René Lévesque.

Cette définition de la vocation d'Hydro-Québec se retrouve à l'article 22 de sa loi constitutive et est techniquement maintenue dans le projet de loi actuel. Si on regarde de plus près le principe même de cette vocation réelle d'Hydro-Québec, soit de fournir l'électricité aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière, nous devons nous rendre compte que le projet de loi no 16 vient bafouer ce principe de la vocation même d'Hydro-Québec tel que les électeurs l'ont approuvé en 1962.

En effet, avec le projet de loi no 16, les fonds prévus au maintien, à la qualité et au développement du réseau sont maintenant fondus avec la redevance gouvernementale qu'Hydro-Québec devra assumer, ce qui les rend supérieurs à ce qu'ils sont en termes réels. Le prix de fourniture de l'électricité est-il honnête et juste? Non, car les prix aux usagers ne seront qu'en partie le reflet de ce qu'ils reçoivent, le reste étant l'obligation de payer au gouvernement des dividendes et une taxe sur le capital en raison des besoins pressants du gouvernement actuel, qui ont pour cause la mauvaise administration financière du gouvernement péquiste. Les citoyens n'ont pas permis et n'ont jamais sonqé, en 1962, que l'on puisse modifier la vocation première d'Hydro-Québec, soit fournir l'électricité au taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière, à des fins de camouflage, de mauvaise administration. (0 h 10)

Si, en 1962, le gouvernement libéral de l'époque a consulté, a senti l'obligation d'aller consulter la population, on ne peut que s'attendre que le présent gouvernement, presgue vingt ans plus tard, répète le même exercice. Aussi, l'Opposition a insisté pour qu'un débat public sur l'avenir énergétique du Québec soit tenu. L'Opposition n'était pas seule à souhaiter un tel débat. Un grand nombre d'organismes, de groupes écoloqiques, de syndicats le réclamaient avec insistance. L'ex-ministre de l'Énergie et des Ressources semblait d'accord en mars 1981, comme on l'a cité précédemment. Le ministre actuel avait laissé l'ouverture possible en juin dernier, mais si cette ouverture, si minime soit-elle, avait existé, l'actuel ministre n'aurait certes pas parrainé le projet de loi no 16 qui vient modifier le paramètre majeur de toute la question énergétique du Québec, car, sous cette loi qui est devant nous, se cache, sous le titre de redevances, un impôt à la sauce péquiste, un impôt indirect, sournois, régressif. C'est Hydro-Québec qui jouera le rôle de percepteur. On vient donc amputer la véritable vocation d'Hydro-Québec, car si Hydro-Québec est devenue ce qu'elle est aujourd'hui, c'est qu'elle possédait vraiment cette capacité d'administrer sainement ses affaires au seul et unique profit des Québécois. Si on transforme Hydro-Québec, qui est le principal outil de développement énergétique au Québec, pour qu'elle devienne à la solde d'un gouvernement, aux seules fins de camouflage de mauvaise administration en percevant des impôts indirects, comment alors mener un débat public sain et efficace?

En définitive, le projet de loi no 16 est précipité parce qu'il n'a pas été soumis à l'attention des intéressés et qu'en plus il devance une consultation que la conjoncture actuelle nous obliqe à tenir le plus tôt possible. C'est pourquoi j'appuie sans réserve la motion de report de mon confrère, le député de Gatineau, et souhaite ardemment que toute cette Chambre en fasse autant afin de permettre à toute la population de se prononcer publiquement sur le sujet.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le

député de Vaudreuil-Soulanges. M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, après avoir reproché à d'autres Canadiens de s'être servis de la nuit pour jouer des mauvais tours aux Québécois, on voit maintenant le gouvernement du Québec qui, en pleine nuit, est en train d'essayer de faire adopter un projet de loi, le projet de loi no 16. C'est en pleine nuit qu'à ce moment-ci nous débattons de l'opportunité d'examiner tout de suite ce projet de loi ou, comme nous le suggérons, d'en reporter l'étude à douze mois, parce que, des deux côtés de la Chambre, nous avons souscrit depuis longtemps à un principe très clair, très simple qui est d'ouvrir un large débat public sur toute la question énergétique afin que les Québécois puissent être consultés, afin que les Québécois puissent s'exprimer. Je n'en ai comme exemple frappant que le Parti québécois lui-même qui, dans son programme, édition 1980, souhaitait "fournir à la population une information objective sur le contenu scientifique et les conséquences des choix énergétiques sur le plan humain, et mettre sur pied des mécanismes de consultation permettant aux différentes couches de la population de s'exprimer et de discuter abondamment des différents aspects de la politique énergétique afin de prendre position."

Ce n'est qu'au hasard de différents discours sur le budget, sur des mesures budgétaires, sur les lois sur le revenu, sur les lois fiscales et, tout à fait subsidiairement et incidemment, à l'occasion de débats que le ministre de l'Énergie lui-même pouvait mener que nous avons été appelés à discuter de la politique énergétique du Québec. C'est un non-sens. Ce serait un non-sens, d'autant plus que ce voeu que le parti ministériel exprimait en 1980 s'est retrouvé encore une fois durant la campagne électorale d'avril dernier, alors que, dans son programme d'engagements, si je comprends bien, et d'actions prioritaires du gouvernement du Parti québécois, on retrouvait comme engagement: "procurer l'énergie nécessaire au développement du Québec et, ce faisant, stimuler la croissance économique tout en respectant l'environnement et en impliquant les citoyens dans les choix." Aucune occasion n'a été véritablement donnée, depuis le 13 avril dernier, aux citoyens du Québec d'examiner les choix énergétiques qui se posent dans notre société.

Il est plus que temps que ce débat s'engage non seulement pour déterminer les choix énergétiques qui s'imposent, mais également afin de bien démêler - dans l'esprit du gouvernement tout au moins, c'est la preuve qu'on en a depuis quelques jours - s'il s'agit d'une mesure, amendant la loi qui régit Hydro-Québec, qui se rapproche des politiques énergétiques ou des politiques fiscales. Il faudrait exactement savoir si c'est une politique énergétique de même nature que l'augmentation de l'impôt sur l'essence ou s'il s'agit d'une mesure fiscale véritablement présentée à l'occasion du discours sur le budget, en mars, comme d'habitude, et exceptionnellement en novembre, comme on en a été témoin il y a deux semaines.

Le gouvernement du Québec doit faire preuve de cohérence, en matière énergétique. Et pour faire preuve de cohérence, il doit posséder toutes les informations nécessaires afin d'en arriver à une décision éclairée. Il faut examiner quelles seront les sources alternatives d'énergie, quelles seront les énergies nouvelles, quelle préférence ou avantage est donné à l'utilisation de certaines formes d'énergie plutôt qu'à d'autres. C'est au niveau du débat énergétique qu'on pourrait régler ces problèmes.

Au niveau des nécessités financières, des besoins financiers de l'État, encore une fois il faudrait de la cohérence. Il faut démêler ces problèmes. Est-ce qu'il s'agit d'un effort pour rendre encore plus confuse la façon dont le gouvernement décide de financer ses dépenses? Est-ce qu'il s'agit ici, encore une fois, d'une addition à la complexité grandissante des sources de revenu du gouvernement du Québec depuis cinq ans, complexité qui ne tient qu'à une seule chose: le désir pour le gouvernement de cacher et de déguiser véritablement, aux yeux de la population, les sources de revenu qu'il va chercher dans les poches des contribuables? Il y a non seulement des impôts directs, il y a également des impôts indirects.

Déjà, M. le Président, il y avait tout un débat à faire sur ces deux formes d'imposition, mais la finance-fiction n'ayant pas de limite, de l'autre côté de la Chambre, on est maintenant devant des concepts comme des redevances, des dividendes sur nos sociétés d'État, des dividendes sur les profits d'une compagnie de production d'électricité, la société Hydro-Québec.

Il est plus que temps de faire la lumière, dans ce dernier cas, sur cette portion des tarifs d'Hydro-Québec qui sont les résultantes du fardeau fiscal imposé à Hydro par le gouvernement depuis quelques années, les composantes de ces dépenses qui tiennent aux différents impôts qu'Hydro doit payer aux municipalités en "en lieu" de taxes ou autrement, sa participation aux programmes de santé et toutes les autres charges, comme la taxe sur le capital qui lui est imposé maintenant et qui, de zéro, passe à 140 000 000 $, dans le temps de le dire

d'un discours sur le budget.

Il est temps de démêler à travers tout cela quels sont véritablement les besoins d'Hydro-Québec comme société productrice d'électricité pour les Québécois, quels sont ses besoins et jusqu'à quel point elle doit ajuster ses tarifs afin de faire face à ses dépenses et, finalement, à l'intérieur de ce débat, sur les aspects purement financiers de cette mesure, quels sont les besoins du gouvernement, comment la population pourra juger, quel est le débat public qui est intervenu, afin que nous puissions voir vraiment quels sont les besoins du gouvernement qui causent des hausses de tarifs, comment cette augmentation, qui a été approuvée récemment ou qui le sera, peut véritablement être divisée, à quelle portion on doit attribuer les besoins d'Hydro-Québec, à quelle portion on doit voir quelle est la résultante du fardeau fiscal qu'Hydro-Québec doit supporter et, finalement, quelles sont les véritables besoins du gouvernement. (0 h 20)

Mais il faut encore plus avoir le temps de faire la lumière sur la véritable nature, la nature même d'Hydro-Québec. Est-ce une émanation de l'État au même titre que Loto-Québec? Est-ce que c'est le gouvernement qui véritablement est propriétaire, gérant et gestionnaire de cette société dans la mesure où il s'en sert simplement pour percevoir des impôts? Est-ce qu'on va, comme on achète un billet de Loto, payer une facture d'Hydro-Québec, simplement pour donner des revenus au gouvernement du Québec? Est-ce que cette société, Hydro-Québec, doit être autonome dans ses modes de fonctionnement? Est-ce qu'on doit accepter, comme on semble le suggérer du côté du gouvernement, que ce dernier aille se mêler, s'ingère purement et simplement dans les stratégies à long terme, dans les plans de développement financier d'Hydro-Québec? Est-ce que on peut vraiment savoir à quoi sert Hydro-Québec? Est-ce qu'on doit en croire les différents intervenants qui nous ont tenu des propos forts variés du côté du gouvernement depuis quelques heures?

Un député, l'autre côté, aurait admis qu'il s'agissait de lever des impôts, d'où la loi no 16. Grand bien lui fasse, et je suis sûr que le ministre de l'Énergie en est parfaitement heureux. Il avait l'air par ailleurs surpris.

Est-ce qu'on doit utiliser Hydro-Québec pour payer des dividendes pour protéger la cote de crédit du gouvernement et d'Hydro-Québec? Un autre intervenant a fait valoir ce point de vue. Est-ce qu'on doit utiliser les augmentations de tarifs pour changer toute notre société, comme certains autres députés l'ont fait valoir, afin d'amener des choix, de forcer les citoyens à faire des choix particuliers dans leur mode de fonctionnement? De la même façon que le prix de l'essence étant trop cher, on ne pourra même plus se promener en taxi électrique. Est-ce exactement là où sont les choix?

Il faut le savoir, M. le Président, et, pour le savoir, il faut reporter à au moins 12 mois - c'est le maximum prévu par le règlement - l'étude de ce projet de loi afin que les Québécois aient la chance, une fois pour toutes, au moins tous les 20 ans ce n'est pas trop demander, de décider quels sont les objectifs de la politique énerqétique et de la politique fiscale du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Chapleau

M. John J. Kehoe

M. Kehoe: Merci, M. le Président, il est déjà minuit et demi, ça fait au-delà de quatre heures et demie que les brillants orateurs de l'Opposition font valoir des arguments afin de convaincre les têtes dures de nos amis d'en face de comprendre le règlement et la résolution que nous avons devant nous maintenant. Permettez-moi, comme Irlandais, d'apporter non pas de nouveaux arguments, mais une approche différente pour les faire comprendre une fois pour toutes la nécessité de reporter à 12 mois la résolution que nous avons sur la table cette nuit.

Permettez-moi de commencer par un argument historique. L'électricité a toujours été une affaire d'une forte importance pour la province de Québec, pour l'économie, pour la mythologie de notre province. Nous avons eu des slogans, nous avons eu des chansons, nous avons eu des livres, concernant l'électricité de la province de Québec. C'a toujours été une affaire d'importance capitale pour les Québécois.

Il faut remonter à 1962, lorsque le Parti libéral a commencé à porter un intérêt particulier au problème de l'électricité dans la province de Québec, pour comprendre son importance. C'est donc durant cette période, je me souviens très bien, que l'on lançait les slogans. C'était le beau temps de la province de Québec. C'était le temps de devenir maître chez nous. C'était le temps de cesser d'être des porteurs d'eau et de devenir propriétaires de nos établissements. C'était le temps de commencer vraiment à être propriétaires de nos institutions. Dans ce temps-là, nous avons entendu dire que, dans l'économie moderne, l'électricité est à l'origine de tout le développement industriel, que la nationalisation de l'électricité, étape indispensable d'une politique vraiment nationale, aurait des avantages directs et indirects pour tous les citoyens.

Or, je prétends ceci. Le gouvernement de ce temps a cru bon de demander à la population un mandat pour transformer

Hydro-Québec en une société de la couronne, indépendante du gouvernement et dont les profits reviendraient au Québec. Maintenant, si on change le statut de cette société, il serait beaucoup plus important qu'on retourne à la population pour demander ce qu'elle pense par le biais d'un plébiscite ou d'un référendum. En 1962, la population a donné le mandat au gouvernement de lui fournir de l'électricité au meilleur coût possible. Est-ce que le gouvernement actuel tient compte de ce mandat donné par quelque 6 000 000 de Québécois qui sont maintenant des propriétaires et des actionnaires?

Si le gouvernement demandait à la population actuelle s'il devrait hausser le tarif domestique de 16,7%, quelle serait la réponse? Non, certainement non. En ce temps-là, Hydro-Québec était au service de la population. Maintenant, Hydro-Québec est au service du Parti québécois.

Le projet de loi de loi 16 - on emploie souvent ce mot - trahit le mandat accordé par la population en 1962. Or, que veut faire la loi 16? Premièrement, elle veut changer le statut de cette société en la transformant en une société à capital. À ce sujet, je dis tout simplement que le gouvernement n'a pas le mandat d'agir ainsi. Deuxièmement, il veut siphonner les fonds de la nouvelle société à capital-actions pour payer ses déficits et cela, par une taxe déguisée, indirecte et régressive qui frappe les riches et les pauvres de la même manière.

Durant les deux discours inauguraux, M. Lévesque a parlé de l'honnêteté et de la transparence de son gouvernement. À la veille du scrutin du mois d'avril dernier, le gouvernement a promis que le tarif de l'électricité n'augmenterait pas plus vite que l'inflation. Huit mois plus tard, après les élections naturellement, il annonce une augmentation de 3% à 4% plus élevée que la hausse du coût de la vie, une augmentation de 16,7% du tarif domestique. Le gouvernement ne donne pas l'exemple de la modération et de la frugalité qu'il attend de nous. Coupez dans le gras et nous frapperons dans le tas!

Troisièmement, c'est bien évident qu'il veut, en quelque sorte, mettre cette société en tutelle. On peut se demander d'ailleurs si la mise en tutelle d'Hydro-Québec n'a pas vraiment commencé en 1976 lors de la prise du pouvoir du Parti québécois. Depuis cette date, le gouvernement a pris une série de mesures, que d'autres de mes collègues ont mentionnées tantôt et qu'on n'a pas le temps de répéter, qui, quand on les ajoute les unes aux autres, atteignent exactement cet objectif. Le projet de loi no 16 vient couronner les différentes interventions faites par le gouvernement pour assurer le contrôle d'Hydro-Québec. (0 h 30)

Permettez-moi, en terminant, M. le Président, de citer un article qui a paru dans le Soleil le 23 octobre dernier: Le gouvernement est affamé, Hydro-Québec est riche, c'est une vraie poule aux oeufs d'or. Le premier pige allègrement dans la seconde pour éponger ses besoins présents, mais l'entreprise devra emprunter encore plus au taux courant, et quels sont ceux qui paieront la note, pensez-vous? C'est un tour de passe-passe. C'est le contribuable consommateur qui blâmera Hydro-Québec - pas lui-même -qui blâmera Hydro-Québec et pas le gouvernement, tandis que le gouvernement s'en tire avec les honneurs de la guerre et des dividendes astronomiques.

C'est évident que j'approuve, pour toutes ces raisons, la motion de reporter, pour une période de douze ans, pour donner... Ce serait encore mieux douze ans, mais je pense que douze mois suffiront pour que le gouvernement comprenne le bon sens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Henri.

M. Roma Hains

M. Hains: L'heure avance, M. le Président, mais le courant n'est pas encore coupé. De plus en plus, le qouvernement actuel poursuit son infiltration dans tous les domaines, et ce fut une clé de succès pour lui durant les campagnes électorales, mais, dans le domaine financier, elle dégénère vite en un instrument de trouble et de perturbation sociale.

Cette infiltration financière sous forme d'impôt s'exerce avec une puissance de succion qui menace dangereusement toute l'économie familiale de chaque foyer, et en même temps l'économie de la province. Comme dans la fable de La Fontaine: Tous n'en mourront pas, mais tout le monde en est profondément touché.

Après la taxe sur les chambres d'hôpitaux, sur l'immatriculation et l'assurance automobile, sur l'essence aux stations de service, voilà qu'on discute aujourd'hui sur la loi no 16 qui viole la vraie vocation d'Hydro-Québec, comportant une nouvelle taxe de plus de 16%.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Hains: Comme un bon professeur, je pense que je vais baisser la voix.

Oui, ce nouveau projet de loi viole l'objectif initial d'Hydro-Québec qui avait pour objet de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises et aux citoyens du Québec aux coûts les plus bas compatibles avec une saine administration financière.

Ce fut par une élection, en 1962, que le premier ministre d'alors, M. Jean Lesage,

consultait les Québécois sur la nationalisation de l'électricité. Il reçut l'approbation des électeurs et les Québécois et les Québécoises devinrent subséquemment les propriétaires et les actionnaires de leur vaste entreprise énergétique.

Aujourd'hui, plus de 6 000 000 d'habitants et de citoyens se voient imposer une nouvelle loi sans aucune consultation. C'est faire montre d'un sans-gêne flagrant que d'imposer à ces mêmes citoyens et citoyennes un changement de statut et des hausses de tarifs qui se perpétueront au moins pendant cinq ans, selon un plan quinquennal déjà bien établi.

On nous présente un projet de loi tout teinté de riches principes humanitaires, mais d'une transparence plus que douteuse. Le projet de loi ne respecte vraiment pas la vocation première d'Hydro-Québec, soit de fournir l'électricité aux taux les plus bas possible. Les profits prévus pour le développement de l'entreprise tomberont dorénavant dans la caisse gouvernementale et les prix aux usagers dépasseront les services fournis. Le surplus sera versé encore pour combler des déficits budgétaires qui ne cessent de surprendre et de s'aggraver.

Tout se fait dans l'ombre, M. le Président, à I'insu du grand public. C'est pourquoi l'Opposition libérale tient à exprimer avec véhémence son opposition à un tel projet de loi. L'ex-ministre Joron avait pourtant insisté dans son livre blanc sur la nécessité d'une participation de tous les citoyens dans ce débat et le ministre Bérubé lui-même avait donné aussi son appui inconditionnel à un vaste débat public sur l'énergie au Québec. Soudain, c'est comme s'il y avait eu une panne d'électricité, on est tombé dans la noirceur, on a préparé un projet de loi, on a saboté sans vergogne le statut et les fonds d'Hydro-Québec, d'où est sorti le projet de loi no 16 pour renflouer le trésor public qui coule à pic dans une désastreuse aventure financière.

Nous sommes, M. le Président, dans un vrai carrousel et cela tourne tellement vite qu'on y perd la tête et son gousset. Durant cette période pénible que nous traversons, le gouvernement, au lieu de laisser respirer les citoyens et de les laisser vivre difficilement leur vie actuelle, au lieu d'encourager le développement économique par des tarifs raisonnables, ce gouvernement, dis-je, s'acharne à vouloir tarifier l'électricité sur la même base que le pétrole et le gaz naturel. Il en résultera, évidemment, des surplus considérables pour Hydro-Québec mais, au lieu de faire fructifier ces surplus au profit de notre société Hydro-Québec, on siphonnera ces fonds supplémentaires pour la caisse ministérielle. D'où la nécessité de revoir ce fameux projet de loi.

Le gouvernement, M. le Président, joue la comédie en s'affichant de la social- démocratie qui respecte et aide le simple citoyen mais qui, en réalité, le matraque sans gêne et sans remords par des taxes régressives qui le frappent tout autant que les mieux nantis. Ce n'est qu'une parodie que de lui dire par en avant qu'on ne lui impose aucun nouvel impôt et de lui vider les poches par en arrière avec des taxes de plus en plus coûteuses. C'est ce que me disait dernièrement un ami qui avait le sens de l'humour. Il disait ceci: Les PQ sont vraiment hypocrites, ils nous passent la main dans le dos par en avant et nous crachent dans la face par en arrière.

Des voix: Ah! Ah! C'est en plein cela.

M. Hains: C'est mon ami qui m'a dit cela. Oui, c'est vraiment le triste jeu de ce gouvernement qui s'ingénie à trouver des nouvelles sources déguisées de recettes, tout en laissant croire à des réductions d'impôt, mais le public n'est pas aussi crédule et dupe que le présent gouvernement ose le croire et la colère gronde vraiment dans notre peuple, actuellement. Aurait-on vraiment pu s'imaginer que dans une même année financière on écoperait d'une taxe doublée sur le carburant, la portant de 20% à 40%, et que d'un même souffle on augmenterait la facture d'électricité de 16%, sans mentionner toutes les autres taxes subsidiaires? Malgré tout, ce gouvernement ne cesse de patauger dans des déficits sans précédent de 3 000 000 000 $ par année. Oui, le public réagit déjà violemment et le gouvernement va peut-être l'apprendre drôlement par la voix de ses membres qui se réuniront en fin de semaine prochaine. Espérons qu'ils ne parleront pas uniquement de leur moyen d'accéder à l'indépendance, mais qu'ils trouveront un peu de temps pour parler des moyens d'accéder à une saine économie et d'alléger le fardeau des taxes et des impôts déguisés qui écrasent radicalement nos citoyens et citoyennes du Québec. Nous demandons donc au gouvernement de surseoir à son adoption afin d'examiner davantage toutes les implications. Je vous remercie. (0 h 40)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Vous me permettrez d'identifier mon macaron, puisqu'on me demande ce que c'est. Il s'agit de la photo de l'hôpital de Saint-Georges-de-Beauce, avec l'inscription: "On le garde, c'est un tout." Autrement dit, les Beaucerons veulent garder leur butin, comme les Québécois veulent garder leur butin et ne veulent pas se faire voler leur Hydro-Québec.

M. le Président, je veux d'abord

féliciter mon collègue, le brillant député de Gatineau, qui a si spontanément eu la clairvoyance de présenter cette motion de report. Avec toute son expérience politigue, le député s'est bien aperçu que cette loi était inacceptable, qu'elle était dangereuse, hypocrite, camouflée, à l'image du PQ. On se souvient de vos slogans, messieurs: Faut rester forts! Faut pas se faire avoir. Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de faire à la population? Faut rester forts!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député, je ne voulais pas vous interrompre, mais il y a une question...

M. Laplante: C'est parce que les portes sont toutes grandes ouvertes, est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité de les fermer pour le prendre vivant?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Nous avons donc, nous de l'Opposition le devoir de protéger les Québécois contre cet envahissement qu'on veut faire aujourd'hui, protéger les gagne-petit, protéger nos agriculteurs, protéger nos promoteurs de petite et moyenne entreprise. J'invite les citoyens à se réveiller, pour bien comprendre. Je vous fais remarquer, malgré qu'il soit presgue une heure...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Je m'excuse. Vous savez, M. le député, à moins qu'ils aient leur téléviseur ouvert, ils peuvent difficilement se réveiller. M. le député, s'il vous plaît, en espérant qu'on puisse lui permettre de continuer son intervention.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je vois que vous avez de l'enthousiasme, vous ne perdez rien pour attendre. Oui, je voudrais inviter les citoyens à prendre conscience de la pilule qu'on est en train de leur faire avaler, avec cette taxe déguisée, hypocrite. Savez-vous que les tarifs d'Hydro-Québec augmenteront, de 1979 à 1982, de 97%? Pourquoi? Pour faire le jeu des objectifs du Parti québécois. Nous savons que le Parti québécois a des objectifs politiques. Ce qu'il veut faire, c'est l'indépendance du Québec, ce n'est pas autre chose, tandis que nous, de l'Opposition libérale, nous avons des objectifs économiques. L'histoire est là pour le prouver. La mission que le Parti libéral du Québec a remplie depuis le début de la Confédération est là pour en témoigner. Le PQ veut s'emparer d'Hydro-Québec pour la siphonner à ses fins politiques.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Mathieu: J'ai le regret de dire à ces messieurs qu'ils ne savent pas administrer. Pendant les quatre premières années de pouvoir, ils ont dépensé 10 000 000 000 $ de plus qu'ils n'en ont encaissés. Pourquoi? Pour faire plaisir aux gens, pour passer le référendum? On ne savait jamais quand le fameux référendum était pour arriver. Il fallait des beaux budgets, il fallait faire plaisir aux gens. Conséquence de cela, une administration tout à fait inacceptable.

M. le Président, quelles seraient maintenant les conséquences de ce projet de loi no 16 qui est à l'étude devant nous? Pour la classe agricole, quelles en seraient les conséquences? D'abord, vous savez que la fiscalité présentement est très traîtresse, devrais-je dire, pour les agriculteurs. On leur dit: Oui, produisez. Ensuite, on s'organise pour que, sur le plan fiscal, l'agriculteur doive incorporer sa ferme, faire un transfert, et là, on l'attend à la croisée des chemins, on l'attend avec la taxe sur le gain de capital, avec l'impôt sur le roulant, sur les guotas, sur les animaux. Maintenant, avec cette hausse d'électricité...

Je vais vous lire une lettre en date du 5 novembre 1981, qui provient du cabinet du ministre de l'Énergie et des Ressources, signé Pierre Ypperciel. Je laisse tomber le nom de la ferme en question. "M. le député, la présente donne suite à votre lettre du 15 septembre 1981, concernant la plainte de votre citoyen. Comme il a été expliqué lors de la visite du vérificateur d'Hydro-Québec, le tarif D-l dont elle bénéficie ne s'applique plus à son entreprise parce qu'elle ne répond plus aux critères qui en justifient l'application, à savoir que cette ferme est incorporée et qu'en conséquence, elle est considérée comme une personne morale, et cela en correspondance avec les articles 2.7 c) et d) du règlement tarifaire d'Hydro-Québec. Espérant ces informations pertinentes, je vous prie d'agréer l'expression de mes meilleurs sentiments." C'est cela, incorporez-vous, et ensuite, on vous attend à la croisée des chemins avec les tarifs d'électricité.

Je voudrais parler également des conséquences très graves pour certaines institutions de mon comté. Je prends une institution comme le Séminaire de Saint-Georges que le gouvernement est en train d'asphyxier en lui coupant les vivres en plein exercice financier, comme il l'a fait le printemps dernier. Maintenant, on augmente les tarifs d'Hydro-Québec. On augmente la taxe sur les services de santé. On sait que voulez le fermer, mais les Beaucerons ne vous laisseront pas faire, je vous le dis!

C'est la même chose pour l'hôpital de Saint-Georges. Hier, le ministre des Affaires sociales disait dans un bulletin de nouvelles, sur les ondes de CKRB, qu'il voulait faire la

fusion pour que les Beauceronnes aient l'assurance de ne pas être obligées d'accoucher dans les couloirs. C'est absolument mépriser une institution qui donne des services aussi bons que de dire de telles choses. C'est tout à fait condamnable. (0 h 50)

M. le Président, vous me faites signe que mon temps presse, qu'il me reste une minute. Je vous dirai, en concluant, que vous ne pouvez toujours pas dire, messieurs du gouvernement, que cela dépend d'Ottawa, que cela dépend de Bourassa; cela dépend de vous autres. Vous avez toujours l'habitude de dire que cela dépend des autres, mais c'est vous autres, ce n'est pas les autres. Une chance que nous avons la certitude, avec le programme énergétique du Canada, que le prix du pétrole que nous allons payer ne dépassera pas 75% du prix international. Si on s'en remettait à vous autres, qu'est-ce qu'on paierait? On paierait le gallon d'essence à peu près à 5 $ ou 6 $ en 1986.

M. le Président, vous comprendrez que j'appuie fortement la motion de report présentée avec autant d'à-propos par mon collègue, le député de Gatineau. Je tiens à le féliciter et j'invite tous les membres à faire preuve d'autant d'enthousiasme et à se joindre à nous pour voter pour cette motion de report.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Communications.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais joindre ma voix à celle du député de Beauce-Sud pour remercier le député de Gatineau d'avoir présenté une motion de report dans le cadre de ce débat sur le projet de loi no 16.

Des voix: Bravo!

M. Bertrand: De ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, nous voulons vous dire toute notre satisfaction de voir le Parti libéral, dans ce deuxième mandat de notre gouvernement, reprendre de plus belle cet exercice des motions de report.

Je voudrais, M. le Président, pour l'ensemble de la population, expliquer pourquoi le Parti libéral du Québec siège encore à votre gauche aujourd'hui au moment où on se parle. C'est à cause et grâce aux motions de report que ces députés ont décidé de faire discuter en cette Assemblée nationale depuis le 15 novembre 1976 et je vais vous en donner des preuves.

M. le Président, est arrivée la loi 101 sur la langue. L'Opposition libérale a décidé d'une motion de report: il faut que ce soit reporté à six mois. Ils ont été battus là-dessus. La loi 101 est devenue l'une, sinon la plus populaire des lois votées par l'Assemblée nationale du Québec durant notre dernier mandat.

On a présenté la loi 70 créant la Société nationale de l'amiante. L'Opposition libérale a présenté une motion de report. Nous avons voté la Loi créant la Société nationale de l'amiante...

Des voix: Bravo!

M. Bertrand: ... malgré la motion de report et, aujourd'hui, la population s'en réjouit particulièrement dans la région de l'amiante.

Des voix: Bravo!

M. Bertrand: M. le Président, au cours du dernier mandat, nous avons présenté le projet de loi 125, Loi sur l'aménagement du territoire. L'Opposition libérale a déposé une motion de report. Nous l'avons battue. Nous avons voté la loi 125 et aujourd'hui les municipalités régionales de comté s'installent partout sur le territoire du Québec. C'est une loi bienvenue.

Des voix: Bravo!

Une voix: Des bonnes lois.

M. Bertrand: M. le Président, nous avons déposé le projet de loi 116 dans le domaine de l'agriculture, modifiant les dispositions de la Régie des marchés agricoles. L'Opposition a déposé une motion de report. On a battu la motion de report. On a voté la loi et les agriculteurs sont contents aujourd'hui qu'on ait adopté cette loi.

On a déposé le projet de loi 121 modifiant la Loi constituant la Société nationale de l'amiante pour pouvoir exproprier la compagnie Asbestos. L'Opposition libérale a présenté une motion de report. Nous avons battu cette motion de report. Aujourd'hui, on a réussi à s'entendre avec la compagnie Asbestos. Elle est maintenant la propriété des Québécois. Nous en sommes contents, M. le Président, et la population aussi.

Des voix: Bravo!

M. Bertrand: On a déposé le projet de loi 10, Loi sur la représentation électorale, pour permettre que la démocratie soit -c'était un de ses objectifs - mieux réalisée. L'Opposition libérale a fait quoi? Elle a présenté une motion de report. Nous l'avons battue, nous avons adopté la Loi sur la représentation électorale, ce qui fait qu'aujourd'hui nous avons une meilleure carte

électorale, donnant plus de justice à l'ensemble de nos concitoyens.

On a déposé la loi no 43, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture, sur la question des petits abattoirs, vous vous en rappellerez? Qu'est-ce qui s'est passé, de l'autre côté? Motion de report. On les a battus sur la motion de report. Les petits abattoirs, on s'en est occupé et les agriculteurs sont contents.

M. le Président, on a déposé la loi no 92, Loi sur la consultation populaire, pour aller consulter la population. L'Opposition libérale a déposé une motion de report, on l'a quand même adoptée, on est allé devant la population et on vous a permis de gagner démocratiquement.

On a déposé la loi no 67, créant la Régie de l'assurance automobile. Motion de report pour empêcher cette réforme. On a battu la motion de report, on a donné une loi créant la régie de l'assurance automobile, puis, les Québécois, qui craignaient cette loi à cause des épouvantails que vous aviez soulevés, se sont réjouis de l'adoption de la Loi sur l'assurance automobile.

M. le Président, prenez nos délibérations de 1976, de 1977, de 1978, de 1979, et de 1980, l'ensemble de l'action de ce gouvernement était marqué au coin de la volonté d'aller de l'avant, de faire progresser la société québécoise et de prendre nos responsabilités, malgré les motions de report qui nous ont été continuellement apportées par l'Opposition libérale. Il y en a une liste, de motions de report et je n'ai fait qu'en mentionner quelques-unes. Neuf motions de report, M. le Président, toutes sur des lois qui, aujourd'hui, sont acceptées, comprises par la population et que les gens sont contents d'avoir, parce qu'ils avaient un gouvernement d'action.

M. le Président, les motions de report, les gens ont vu ça pendant 4 ans. Ils ont vu un Parti libéral, aller de motion de report en motion de report pour empêcher le gouvernement d'agir. Ils se sont dit: Voilà une Opposition libérale, voilà un parti politique qui traîne de la patte, qui ne veut pas avancer, qui n'est pas capable de prendre des décisions, qui veut tout remettre aux calendes grecques. Est-ce que nous allons, nous la population, confier à ce parti les responsabilités d'un gouvernement? Ils se sont dit, on va leur retourner leur médecine, à ces gens de l'Opposition libérale, et la population, elle, a décidé de présenter, le 13 avril, une motion de report à l'endroit du Parti libéral du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Vous lui permettrez de terminer, il lui reste 3 minutes.

M. Bertrand: M. le Président, on a fait des motions de report de 6 mois, des motions de report de 3 mois, des motions de report de 12 mois, aujourd'hui. La population elle, vient de faire une motion de report de 60 mois pour le Parti libéral. N'ayant pas compris la leçon, ils sont en train de recommencer, encore une fois, pour des lois qui, dans 5 ans, seront applaudies par la population. Puis les gens auront le goût de dire, quand viendra le temps de l'élection -bien trop vite pour vous autres - : Ces gens-là, qui ont tenté encore une fois d'empêcher ce gouvernement d'assumer les responsabilités qu'on lui a demandé d'assumer le 13 avril dernier en toute connaissance de cause, puisque les principes mêmes contenus dans ce projet de loi étaient déjà établis durant la campagne électorale et présentés dans le budget avant qu'on aborde la campagne électorale. (1 heure)

Les gens se demandent: Qu'est-ce que cette motion de report? La seule valable sur laquelle on s'est prononcé, c'est réglé, c'était le 13 avril. À compter de maintenant, vous, les libéraux, comprenant un peu ce qui vous est arrivé le 13 avril et réalisant ce que cela a donné comme résultat que ces motions de report au cours des cinq dernières années, voulez-vous laisser ce gouvernement prendre ses responsabilités, s'occuper des affaires des Québécois. De votre côté, réglez donc vos problèmes internes, reportez donc vos congrès de ceci ou de cela. Branchez-vous sur les questions qui, à l'heure actuelle, font l'objet de zizanie à l'intérieur de votre caucus, foutez-nous donc la paix et laissez-nous donc travailler pour le bien-être des Québécois. Attendez donc la motion de report qui viendra en 1985, au moment où les Québécois, constatant que ce gouvernement prend ses affaires en main, décideront de nous reporter au pouvoir pour un autre mandat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. J'ai quelques corrections à apporter à certains propos que le ministre vient de tenir. La motion de report vise, non pas à essayer d'arrêter le gouvernement d'agir mais, à essayer d'arrêter ces taxes cachées que le gouvernement impose continuellement. Il s'agit d'essayer d'arrêter ces taxations cachées qui, depuis le 13 avril, en 16 mois, depuis qu'on est ici. Je n'étais pas ici en 1976 pour participer à toutes ces autres motions de report qui avaient peut-être une autre valeur mais je vais vous parler un peu de ce qui est arrivé dans cette Chambre depuis sept mois, depuis que moi, je suis ici.

Première chose que le gouvernement a

faite depuis le 13 avril, c'est de couper. Couper où? Surtout aux endroits qui touchent les plus démunis de la société, les gens qui ont le plus besoin d'être protégés par le gouvernement, par n'importe quel gouvernement, mais surtout par une gouvernement qui se veut social-démocrate. Ce n'est pas du tout de la social-démocratie, c'est de la "social-dégradation" complète maintenant.

C'est surtout du ministre des Finances qu'émane le projet de loi no 16 que nous demandons aujourd'hui de reporter et non pas du ministre de l'Énergie qui aurait dû, avant de présenter un tel projet de loi, tenir un débat public sur l'énergie et les choix énergétiques du Québec. Parce que le choix qu'on doit faire aujourd'hui devrait subir un examen public en pleine lumière. Une période de douze mois serait peut-être le temps nécessaire pour le faire.

Le projet de loi 16 émane plutôt des besoins financiers du gouvernement après cinq ans de pouvoir et d'actions, non pas sérieuses, planifiées et ordonnées, mais irresponsables qui nous ont conduits, en cinq ans, à tripler le déficit budgétaire de cette province et à se trouver aujourd'hui avec des trous à gauche et à droite.

Et, si vous ne le savez pas, il y a un autre trou d'à peu près 500 000 000 $ qui s'en vient dans les établissements de santé et de services sociaux. Ça n'apparaît nulle part dans les états financiers du gouvernement mais attendez, ça s'en vient.

Entre-temps, comme le député de Nelligan disait, notre ministre des Finances va jouer de la guitare et danser le flamenco pendant que tous les citoyens vont subir des taxes cachées, honteuses qui touchent de façon radicale les gens qui sont le moins capables de payer. Regardez un peu les effets de la loi 16 sur la population québécoise qui est déjà la plus endettée au Canada tout entier. Une dette publique per capita de 5276 $.

Comme disait aussi le député de Notre-Dame-de-Grâce, les effets qu'on va subir de cette loi, d'ici cinq ans, feront en sorte que chaque famille aura déboursé 2000 $ de plus pour la moindre petite augmentation de consommation d'électricité, pour les 1 500 000 familles du Québec, directement de leur poche. C'est peut-être bien pour les présidents des multinationales, c'est peut-être bien pour des ministres et même pour des députés, mais expliquez-moi comment c'est pour quelqu'un qui vit sur l'assurance-chômage. Là aussi, comme on vient de le constater, les gens qui font des réclamations ça augmente de 40% en un an. Cela est l'action du gouvernement, comme disait le ministre tout à l'heure, 40% d'augmentation du chômage, mais les gens qui vivent sur l'assurance-chômage, sur l'assistance sociale, sur leur pension de vieillesse, où est-ce qu'ils vont trouver ces 2000 $ de plus pour sortir de leurs poches, qui ne sont pas artificiellement vides, mais sont réellement vides? Peut-être qu'on nous faisait dire tout à l'heure que les prix de l'électricité étaient artificiellement bas, mais ce n'est sûrement pas les poches des gens qui auront à payer qui sont artificiellement vides. Ils vivent une situation aujourd'hui qui est très réelle, très dramatique.

Ceux qui ont à vivre avec des miettes parce qu'il n'y a pas de travail, parce qu'ils sont sur l'assistance sociale, parce qu'ils vivent sur des revenus fixes, les personnes âgées sur leur pension de vieillesse, où est-ce qu'ils vont trouver l'argent pour payer les extravagances ou les irresponsabilités de ce gouvernement depuis cinq ans? C'est absolument - il y a des mots qu'on ne dit pas à l'Assemblée nationale semble-t-il -mais je dirais simplement honteux, aberrant, écoeurant.

Le projet de loi no 16, M. le Président, vient changer le fondement, la raison d'être d'Hydro-Québec. On a des ressources énergétiques ici au Québec qui sont renouvelables, non polluantes et qui devraient nous servir pour notre avenir. Dans les temps que l'on vit aujourd'hui, dans notre monde moderne, on sait que l'énergie devient une ressource de plus en plus en demande et de plus en plus nécessaire pour une société.

Alors, au lieu de faire profiter les contribuables de cette ressource, nous allons en faire profiter le ministre des Finances pour essayer de camoufler son incapacité de gérer cette province et son budget de façon responsable et sérieuse. Chaque année nous avons eu des prévisions plus grandes de revenus et moins grandes de dépenses que ce qu'on a eu en réalité. C'est à cause de ce "mismanagement" qu'on vient aujourd'hui nous présenter un projet de loi no 16 pour changer la raison d'être d'Hydro-Québec, pour qu'Hydro-Québec ne soit plus vraiment obligée de fournir l'électricité au plus bas coût possible et compatible avec une saine administration. C'est plutôt pour aider le ministre des Finances à combler ses trous et à camoufler ses déficits depuis les cinq dernières années. C'est absolument inacceptable, et je crois que la motion de report à ce moment-ci est tout à fait à l'heure, même si l'heure est 1 h 10; on sera ici jusqu'à 4 heures, 5 heures, 6 heures du matin, s'il le faut, pour essayer de faire comprendre à ces gens d'en face que les Québécois ne peuvent plus subir ce genre de taxation irresponsable.

Depuis le 13 avril que je suis ici comme nouveau député, on a subi non seulement les coupures dans les services nécessaires et essentiels pour la population québécoise, mais on aussi eu à subir au moins quatre ou cinq taxes cachées, des taxes régressives et discriminatoires dans le

sens qu'elles ne tiennent aucunement compte de la capacité des personnes de payer. Cela, dans n'importe quel cours de science politique primaire, vous allez voir que cela s'appelle des taxes régressives. Comme j'ai dit déjà dans un autre discours, si M. Reagan les avait faites j'aurais compris.

Le ministre des Communications, tout à l'heure, a essayé de nous dire toutes les choses que le gouvernement a faites et auxquelles la population québécoise a réagi avec plaisir. Il n'est pas allé si loin que nous dire qu'il y a des gens qui vont danser dans les rues parce qu'ils auront à défrayer encore plus, 16,7% je crois, sur leur compte d'électricité. Pourquoi? Pour simplement camoufler les déficits que ce gouvernement a créés depuis les cinq dernières années. Il n'a pas dit cela parce qu'il sait que c'est absolument faux, parce qu'il sait que c'est absolument de la démagogie et rien d'autre, un grand show. Il y a des gens qui ont parlé de show mais on en a vu un tout à l'heure, un show avec les gestes qu'il fallait, avec des doigts qu'il fallait pointer de l'autre côté, etc., mais la substance? Absolument rien. (1 h 10)

Personne n'a parlé de la dette publique, personne n'a parlé du fait qu'Hydro-Québec n'était pas créée pour aider le ministre des Finances à combler ses trous; Hydro-Québec était créée, il y a 20 ans, pour assurer que les Québécois et les Québécoises pourraient avoir l'électricité aux meilleurs coûts possible et compatibles avec une saine gestion. Qu'est-ce qui arrive maintenant? Tout à coup, le ministre des Finances lui-même, même pas le conseil d'administration d'Hydro-Québec, mais le ministre des Finances lui-même décidera, quand il le veut, qu'il peut aller chercher jusqu'à 75% des profits d'Hydro-Québec. Imaginez cela pour un instant dans le sens suivant: Vous avez le pouvoir, M. le Président, de décider vous-même combien vous allez chercher dans les poches des citoyens par une tierce personne.

Vous savez, à côté de cela, que vous avez un déficit qui va en augmentant; c'est 3 000 000 000 $ aujourd'hui, 4 000 000 000 $ peut-être l'année prochaine, 5 000 000 000 $ peut-être après. Venez me dire, à ce moment-là, que les décisions que le ministre des Finances va prendre seraient liées aux besoins d'Hydro-Québec, par rapport à ses investissements, etc. Ce serait surtout, M. le Président, en fonction des besoins du ministre des Finances et rien d'autre, sans tenir compte des gens qui sont dans le besoin réel, sans tenir compte de leur capacité de payer, et de passer de la soi-disant social-démocratie à la vrai social-rétrogradation.

Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: M. le Président, j'appuie sans réserve la motion de report de mon collègue, le député de Gatineau. Il faut mettre un terme à cette forme de taxation camouflée par un gouvernement péquiste qui se dit social-démocrate et pratique la social-démagogie. M. le Président, certains journalistes ont qualifié le ministre des Finances de grand magicien financier. C'est peut-être pour quelques-uns, spécialement nos amis d'en face, un titre flatteur, mais, lorsqu'on consulte le Petit Larousse, on s'aperçoit que le mot magie est défini comme l'art prétendu de produire par certaines pratiques des effets contraires aux lois naturelles.

La population québécoise, M. le Président, n'a pas élu un gouvernement pour se faire donner un spectacle, elle l'a élu pour administrer les fonds publics. C'est contre les lois naturelles, que le ministre des Finances est devenu le ministre de la taxation indirecte et camouflée. J'appuie cette motion, car la population a un droit légitime d'être mise au courant, elle doit être consultée et elle doit donner son consentement à une loi qui a pour but de changer la raison d'être d'Hydro-Québec.

Ce gouvernement n'a pas osé augmenter les impôts, sauf la suppression de la réduction du 2%, car on aurait jugé cela très impopulaire chez l'électorat, mais ce gouvernement nous trahit; une taxe indirecte, camouflée a tendance à cacher la vérité. La vérité, M. le Président, c'est que ce gouvernement a endetté chaque Québécois, comme l'a mentionné mon collègue, le député de Laurier, au niveau le plus élevé de son histoire. Une taxe indirecte par l'entremise de tarifs gouvernementaux démontre le manque de transparence de ce gouvernement. Lorsque l'État contrôle exclusivement certaines industries non concurrentielles comme les spiritueux, l'électricité et bientôt beaucoup d'autres, le gouvernement peut imposer à la population le prix qu'il veut et le pauvre citoyen n'a aucun autre choix que de payer et se taire. On sera peut-être surpris, parce que les citoyens en ont assez et on ne pourra pas trop les blâmer s'ils se révoltent contre la hausse de 16,7% d'Hydro-Québec. Il n'y a pas très longtemps, la Régie de l'assurance automobile, une autre entité du gouvernement du Québec, a annoncé une augmentation catastrophique du coût de l'immatriculation et de l'assurance automobile. Pour ceux qui ont une automobile pour usage personnel - au Québec, il y en a au-delà de 2 000 000 - ça veut dire une augmentation de 60%. En termes de cents et de piastres, cela veut

dire que ceux qui ont payé 123 $ l'an dernier paieront cette année 153 $. Les voitures pour usage personnel ne sont pas la seule cible, d'autres moyens de transport font face à une augmentation allant de 15% à 100%. En plus, le ministre des Transports nous a annoncé qu'il augmentera la prime pour le permis de conduire, qui passera de 19 $ à 23 $ par année, c'est-à-dire de 38 $ à 46 $, tous les deux ans. On a justifié cette augmentation en nous disant qu'il était normal de porter la prime du Québec au niveau de celle de l'Ontario, mais nos amis d'en face n'emploient pas le même argument, lorsque ce gouvernement se permet d'augmenter l'essence de 0,30 $ le gallon.

J'appuie la motion de report car, en fait, la loi qui nous a été présentée par le gouvernement lui permettrait d'exiger des dividendes d'Hydro-Québec et d'imposer une augmentation de tarification de l'ordre de 16,7%. Soulignons, M. le Président, qu'Hydro-Ontario n'augmente que de 9,3% cette année. Les Québécois étaient sous l'impression qu'une industrie nationalisée comme l'électricité vendrait son produit à des prix basés sur les coûts de production et qu'il ne serait jamais question d'aller chercher des dividendes a Hydro-Québec pour subventionner la mauvaise administration d'un gouvernement qui détient le championnat du gaspillage.

Permettez-moi de vous en donner quelques exemples, dans le domaine de l'éducation. On sait fort bien que c'est ce gouvernement qui a placé des commissions scolaires en tutelle, pour signer une entente avec les professeurs et cette entente cause présentement une mise en disponibilité de 3743 professeurs, payés à ne rien faire et qui coûtent à l'État 102 000 000 $ par année. 102 000 000 $, M. le Président! Dans cette même entente, on permet à un professeur de recevoir un boni pour des enfants en supplément dans sa classe et, en même temps, dans la salle de repos à côté de sa classe, il y a des professeurs qui sont payés à ne pas enseigner. Je trouve ça scandaleux.

L'augmentation sur l'essence, sur l'immatriculation, l'augmentation proposée ne touche pas seulement les individus, elle touche aussi les institutions publiques; les commissions scolaires ne sont pas exclues, elles sont aussi frappées par ces taxes indirectes et camouflées. Où prendra-t-on l'argent pour faire face à ces augmentations, puisque les commissions scolaires ne peuvent pas toucher les 87% de leur budget qui sont assujettis à des règlements du ministère de l'Éducation du Québec? Elles devront malheureusement piger dans le budget du matériel didactique, qui est aussi indispensable pour l'enseignement que le professeur dans la classe.

Le 18 novembre, lors de ma réplique au message inaugural, je déplorais le sort que subissait l'éducation des adultes. En bref, à cause des coupures illogiques et draconiennes, les activités sont réduites dans des centres plus éloignés de la clientèle, avec des frais d'inscription qui ont doublé et, dans plusieurs cas, triplé. (1 h 20)

Faut-il rappeler que les citoyens qui ont besoin de ces services sont des gens qui veulent maintenir ou accroître leur compétence ou s'ajuster à l'évolution technique? Tout cela, non pas par caprice, M. le Président, mais pour demeurer compétitif sur le marché du travail. La situation que je décrivais était celle du premier semestre, avant toutes les augmentations, mais, dans les conditions présentes et à l'approche du second semestre, l'éducation des adultes va disparaître, car ses usagers ne sont pas des salariés à 30 000 $, 40 000 $ ou 50 000 $ par année. Ceux qui sont chanceux gagnent un peu plus que le salaire minimum. Les moins chanceux, il y en a 320 000 dans la province de Québec, sont des chômeurs et ceux qui demeurent dans les régions périphériques ne pourront pas faire le plein pour se rendre à ces cours.

M. le Président, j'aurais une suggestion pour nos amis d'en face, c'est de mettre de l'ordre dans leur cuisine avant d'aller cuisiner ailleurs.

J'appuie la motion de report présentée par mon collègue, le député de Gatineau, car il faut arrêter ce gouvernement qui étouffe les Québécois par des lois camouflées. Assez, c'est assez! Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. Richard French

M. French: M. le Président, il me fait plaisir d'avoir l'occasion d'intervenir dans ce débat sur la motion de report du projet de loi pour une période de douze mois, motion qui a été présentée cet après-midi dans cette Chambre avec tellement de présence d'esprit et de spontanéité par le député de Gatineau, motion qui vise à retarder pour fins de consultation le projet de loi 16 sur la "péquisation" d'Hydro-Québec. Ce délai est essentiel pour que le débat public qui est nécessaire puisse avoir lieu. Qui est si pressé dans le dossier? Il n'y a qu'un petit nombre de personnes au Québec. On les trouve, pour la plupart, dans le Conseil des ministres du gouvernement du Québec. Il n'y a pas un chat ailleurs au Québec qui s'intéresse à ce qu'Hydro-Québec devienne sous la tutelle du gouvernement du Québec.

La dernière fois qu'un changement d'une telle ampleur a été prévu pour l'industrie de l'électricité au Québec, il a

fallu une élection pour régler cette question. Cette fois-ci, on veut nous faire avaler la "péquisation" d'Hydro sans aucun débat public, sans aucune consultation digne du mot.

Le gouvernement essaie de nous faire accepter le projet de loi 16 en plein "sprint" d'avant Noël, espérant que la population va oublier éventuellement d'où viennent les augmentations de tarifs d'électricité qui s'ensuivront inévitablement. Il est essentiel que nous nous arrêtions, que nous nous demandions précisément ce que nous faisons de cet instrument extraordinaire, de cette partie de notre patrimoine économique qu'est Hydro-Québec. C'est une institution qui jouit d'une réputation internationale sur le plan de la recherche, sur le plan de la technologie énergétique, sur le plan de l'administration de grandes entreprises. La "péquisation" d'Hydro-Québec nous amènerait sans aucun doute à l'établissement d'Hydro comme une succursale du fisc québécois, comme un tentacule du ministre et du ministère du Revenu. Il s'agit encore une fois de la mise en tutelle, d'une façon ou d'une autre, on arrive toujours à en trouver une, d'une institution qui fonctionne bien, qui fonctionne efficacement, qui fonctionnait à un coût modique par le gouvernement le plus centralisateur qu'on n'ait jamais vu au Québec.

Il faut absolument consulter les employés et les cadres d'Hydro et leur demander s'ils veulent devenir les employés d'une institution qui se fera saigner chaque fois qu'un gouvernement se trouvera en besoin de fric. Pensent-ils que les vicissitudes des finances publiques au Québec vont créer un contexte de prise de décisions au sein d'Hydro qui serait apte à favoriser un sain développement de cette compagnie? Les employés et les cadres d'Hydro seraient-ils favorables à ce que la présidence d'Hydro exige à l'avenir une soumission au gouvernement, un à-plat-ventrisme devant le pouvoir politique, de sorte qu'aucun administrateur qui se respecte n'accepterait ce poste? C'est cela qui est impliqué par le projet de loi actuel.

La présidence d'Hydro actuellement est un poste qui a énormément de poids dans la société québécoise. De par la loi dont on discute ce soir, la présidence d'Hydro deviendrait une tablette confortable pour les ministres épuisés, pour les fonctionnaires dociles plutôt qu'un défi formidable pour n'importe quel homme d'affaires, comme elle l'est actuellement.

M. Robert Boyd, le président sortant, peut actuellement tenir une place importante dans n'importe quelle réunion d'hommes d'affaires ou d'administrateurs du monde. Si jamais le projet devant nous n'était pas reporté, si jamais ce projet de loi était adopté, le futur président d'Hydro serait inéluctablement contaminé aux yeux de ses pairs par la mainmise du gouvernement sur son institution. Est-ce que c'est cela que veulent les Québécois et les Québécoises pour leur symbole no 1 du savoir-faire? Veulent-ils la mise en tutelle par un gouvernement qui arrive à peine à bien gérer ses propres ministères? M. le Président, c'est évident qu'il y a une différence idéologique, une différence de fond entre les deux côtés de cette Assemblée.

Les péquistes croient que plus de gouvernement, plus d'employés publics, plus de contrôle ministériel égalent plus de justice sociale. Or, nous, les libéraux, nous croyons précisément que cette équation est vétuste et fausse, qu'elle est fausse depuis une bonne décennie maintenant, au moins, et qu'un rééquilibre entre le secteur public et le secteur privé s'impose d'urgence.

La "péquisation" d'Hydro-Québec, M. le Président, inutile de le dire, va à l'encontre de ce rééquilibre nécessaire. C'est pour cela qu'il est prématuré de la considérer maintenant sans que des débats de fond n'aient lieu, des débats de fond sur l'étatisation de l'économie québécoise.

Il y a bien sûr une autre dimension que la dégénération inévitable lorsqu'une institution indépendante passe sous la tutelle directe du pouvoir politique. C'est le sort du consommateur d'électricité sous le régime de la "péquisation" d'Hydro-Québec.

Le député de Charlesbourg, cet après-midi, a essayé de nous convaincre que le projet de loi devant nous n'a rien à faire avec la hausse des tarifs d'Hydro-Québec. Avec cette assurance et 0,40 $, vous achèterez une tasse de café. Quel sophisme!

Il y a une seule et unique raison pour laquelle ce projet de loi est devant nous ce soir. Le gouvernement du Québec a besoin d'argent. Il voit dans Hydro-Québec un mécanisme extraordinaire pour percevoir de l'argent par le biais des tarifs d'électricité. Ce n'est pas compliqué, c'est très facile. (1 h 30)

Le projet de loi, c'est un pont entre les besoins du gouvernement et la possibilité d'aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables. On ne veut pas voir construire ce pont. C'est le fameux jeu des taxes cachées. Si on examine l'hebdomadaire Les Affaires pour la semaine du 28 novembre 1981, on apprend que, chaque fois que vous paierez votre compte d'électricité d'Hydro-Québec en 1982, vous fournirez 14% de votre paiement total au trésor québécois. Donc, vous payez 14% de plus que ce que vous devriez payer si le prix de l'électricité était basé uniquement sur les coûts de production. C'est possible qu'on ne veuille pas exiger simplement le prix de production. C'est possible que l'écart entre ce qu'on exige et ce qu'on exigerait si on exigeait seulement le coût de production soit alloué à des fins

utiles. Mais si le ministre prévoit faire un tel geste, qu'il identifie clairement où vont ces sommes et à quelles fins elles seront utilisées.

Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant.

M. French: Le grand désavantage des taxes cachées, c'est qu'elles sont carrément régresssives; elles frappent davantage les gagne-petit et les plus démunis que les plus favorisés. J'invite le ministre de l'Énergie, j'invite le ministre des Finances à venir avec moi, dans le mois de janvier, dans mon comté voir les gens de l'âge d'or qui sont aussi pauvres là que dans n'importe quel autre comté de la province, à venir avec moi parler à la vieille dame qui ne peut plus payer son compte d'électricité. À ce moment-là il pourra expliquer à cette dame-là pourquoi son compte d'électricité est 14% plus cher qu'il devrait l'être s'il était juste basé sur le coût de production. C'est pour ça que j'appuie la motion de mon collègue, le député de Gatineau.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Viger.

M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: M. le Président, en écoutant tantôt le ministre des Communications, il semble, d'après lui, que tout va bien ici au Québec. Il semble que la province est en excellente santé financière. Pourtant, la population est au courant, M. le Président, que la province actuellement est sur le bord de la faillite. Quand les banquiers sont à la porte - c'est ça que disait le député de Mont-Royal - ça veut dire qu'on n'est pas loin de la catastrophe.

M. le Président, je vais voter pour la motion de report qui a été présentée par le député de Gatineau, pour plusieurs raisons. L'annonce de la hausse de tarifs d'Hydro-Québec confirme encore une fois la mauvaise administration à laquelle le Parti québécois nous a habitués au cours de son premier mandat. Ces hausses records s'ajoutent au bien triste palmarès économique de ce gouvernement. Hydro-Québec, depuis son instauration en 1962 par le gouvernement libéral de M. Jean Lesage, a toujours été synonyme de fierté, de prospérité et de saine gestion, et je déplore l'utilisation qu'entend faire le gouvernement de cette société publique. Pour essayer de masquer son incompétence à administrer les finances publiques, le gouvernement Lévesque entend transformer Hydro-Québec en une compagnie uniquement destinée à produire de l'argent.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement, M. le député de Chambly?

M. Tremblay: J'ai l'impression, M. le Président, que le député ne nous donne pas de raisons pourquoi on devrait reporter le débat.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, j'ai bien compris que le député de Viger avait dit qu'il donnait les raisons pour lesquelles il appuyait la motion de report. Donc, dans ce sens, je ne peux faire autre chose que lui permettre de continuer.

M. Maciocia: M. le Président, ça prouve encore, à 1 h 30 de la nuit, la mauvaise foi de ce gouvernement. Encore une fois, ce sont tous les Québécois qui souffriront de cette politique économique plus que douteuse du Parti québécois.

N'est-ce pas ce même gouvernement qui, par la voix de son premier ministre, avouait récemment que le dernier budget avait été préparé en catastrophe, à la sauvette, dans une démarche bassement électoraliste? Nous nous référons à ce budget Parizeau qui a enlisé les Québécois dans un gouffre économique sans fond, puisque le déficit dépassera les 3 500 000 000 $. Maintenant, le gouvernement du Parti québécois veut se servir d'Hydro-Québec pour imposer un fardeau supplémentaire aux Québécois en voulant augmenter substantiellement les tarifs aux abonnés.

Quand on pense qu'une société publique est transformée en machine à faire de l'argent pour tenter d'éponger une partie du déficit, ce n'est qu'un autre indice de l'incompétence chronigue du gouvernement en matière économique. Qui paiera pour ces taxes déguisées? Nos chômeurs, nos personnes âgées, nos assistés sociaux, nos handicapés et tous les Québécois sans exception. Le ministre des Finances ne fait aucune distinction; il frappe tout le monde avec la même brutalité, et pendant ce temps, les députés d'arrière-ban applaudissent pour mettre la faute des problèmes économiques sur le dos du fédéral. C'est une honte. Les Québécois qui ont écouté le ministre des Finances, le soir du budget, ont dû être écoeurés de la bière qu'ils prenaient puisque, dorénavant, même la bière sera taxée.

Le projet de loi no 16 a largement déplu aux créanciers internationaux du Québec et d'Hydro-Québec. Non content d'affaiblir sa crédibilité par son administration sans direction, le ministre a entraîné avec lui la société d'État qui constituait, jusqu'à ce qu'il la mette en tutelle financière, l'élément le plus constant du Québec auprès des marchés monétaires européens et américains. Quand on sait que, pour 1982, 48% des besoins financiers d'Hydro-Québec découlent directement de la mise en tutelle de la société d'État, je mets le gouvernement au défi de nous fournir les hausses réelles qu'aurait décrétées Hydro-

Québec si le gouvernement ne l'avait pas obligée à lui verser une partie importante de ses profits.

La transparence, ce n'est pas, comme semble le croire le ministre de la Justice, de se contenter de demander des enquêtes policières à la Sûreté du Québec. C'est aussi fournir des détails sur les moyens qu'un gouvernement utilise pour taxer les contribuables. On se souviendra, au sujet de la hausse des tarifs et d'impôts déguisés annoncée, que le ministre de l'Énergie déclarait que les Québécois pouvaient suivre son exemple et installer dans leur demeure un poêle à bois afin de réduire leur consommation mensuelle d'électricité et de bénéficier d'une hausse modérée de leur taux. J'invite aujourd'hui le ministre à visiter certains immeubles à logements de mon comté pour qu'il puisse répéter sa suggestion aux résidents des septièmes étages ou à ceux des sous-sols dont la seule source d'énergie pour se chauffer est l'électricité.

La population du Québec connaît la raison principale qui a motivé la nationalisation de l'électricité au Québec en 1963: fournir aux Québécois l'hydroélectricité québécoise au plus bas coût possible. Avec la loi 16, cet objectif fondamental d'Hydro-Québec disparaît. En effet, dorénavant, en plus de rencontrer les besoins financiers d'Hydro-Québec, par exemple, pour le paiement des intérêts sur le capital emprunté dans le passé, pour le paiement des intérêts sur les nouvelles immobilisations, pour faire face aux dépenses d'opération, salaires etc., Hydro-Québec devra trouver des surplus, des profits additionnels pour payer quoi? Pour payer la taxe sur le capital et les dividendes. Le gouvernement fait hausser les tarifs de façon à pouvoir bénéficier des plus gros dividendes possibles. Pour un gouvernement social-démocrate, c'est vraiment fantastique. C'est vraiment fantastique pour un gouvernement qui se dit pour les petits et qui s'en prend aux petits. La loi no 16, on pourrait la définir en quelques mots: une autre façon de siphonner l'argent du peuple québécois. (1 h 40)

Je conclus en me demandant si les Québécois n'écoperont pas encore de cet essoufflement du gouvernement du Parti québécois. Je voterai en faveur de la motion du député de Gatineau, car cette société qui était l'objet de fierté de la population deviendra un autre outil de taxation même pas déguisé de tous les Québécois et surtout les plus démunis.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau M. Rocheleau: M. le Président, les paupières se font lourdes du côté ministériel. Québécois, Québécoises, dormez tranquilles. L'Opposition libérale veille au grain.

M. le Président, la mémoire est une faculté qui oublie, surtout lorsqu'il manque quelque chose entre les deux oreilles. À deux heures moins le quart de la nuit, nous devons mettre en garde le parti gouvernemental et c'est une des raisons pour lesquelles mon collègue de Gatineau, Michel Gratton, a présenté cette motion de report.

M. le Président, en 1960, alors que le gouvernement libéral était élu, à peine deux ans plus tard, le gouvernement majoritaire commandait une nouvelle élection sur la nationalisation de l'électricité. Alors nous allions reprendre en main une de nos richesses naturelles qui était pour les Québécois et les Québécoises quelque chose de très important où tous les Québécois et toutes les Québécoises devenaient actionnaires à un projet de cette importance.

Aujourd'hui, on tente de changer les jeux. On oublie que les grandes mesures au Québec ont été passées par le Parti libéral. On oublie trop souvent que le gouvernement actuel, c'est des "coupeux" de rubans; "coupeux" de rubans de projets entrepris par le gouvernement libéral.

La Baie-James dont le parti ministériel a eu le plaisir de couper le ruban, est un projet qui va faire de l'avenir du Québec une richesse au Québec, c'est-à-dire aurait fait... mais non, le ministre de la surtaxe, M. Parizeau, décidait de draîner une société d'État qui allait être pour tous les Québécois une réalisation et une richesse naturelle à développer.

On ne tient pas compte, c'est une des raisons pour lesquelles nous avons déposé cette motion de report, du mal que le gouvernement fait actuellement aux petits contribuables. Après l'assurance automobile, l'immatriculation, le carburant à 0,30 $ de plus le gallon, le champagne des Québécois, la bière, les cigarettes, c'est maintenant au tour de l'électricité. On en a assez, M. le Président, de surtaxer nos Québécois par des taxes indirectes. On semble penser que les Québécois et les Québécoises vont jeter le blâme sur la société d'État dans ce cas-ci. Pourquoi n'a-t-on pas encore nommé le nouveau président de la société hydroélectrique? Une société d'État actuellement à la dérive, qui subit les menaces du ministre des Finances, qui ne sait plus où aller chercher l'argent.

M. le Président, on n'a sûrement pas pensé aux veuves, aux assistés sociaux, aux personnes âgées qui ont à peine une pension de subsistance. On n'a pas pensé aux petits; l'économie chambranlante actuelle que crée le parti séparatiste draine ses économies par les augmentations que les Québécois et les Québécoises subissent actuellement. M. le Président, c'est de l'irresponsabilité et j'ose

souhaiter que la motion de report que nous avons déposée permettra, plus particulièrement à tous les députés péquistes... Malheureusement, ils n'ont pas l'occasion de critiquer le gouvernement, parce que, quand le leader parlementaire tire sur la chaîne, toutes les pattes se lèvent.

M. le Président, on nous dit que la loi 16 a été déposée avant les élections du 13 avril, c'est-à-dire qu'on a mentionné, M. le Président, que nous avions révisé... Au mois de juin, je m'excuse. On la sort maintenant des boules à mites et on sort les taux, un taux de 16,3%. Quand on parle de bonne administration, M. le Président, qu'on n'active pas cette inflation galopante que connaît le Québec actuellement. Quand le ministre des Finances dit aux Québécois et aux Québécoises de se serrer la ceinture, je dis: Attachez-vous la ceinture, vous êtes après vous faire déculotter.

M. le Président, en 1976, nous avons commencé à connaître le déclin au Québec, la perte d'industries, la perte d'emplois, l'insécurité. En 1981, ce gouvernement, avant le 13 avril, promettait à tous les Québécois et Québécoises une administration saine et avait remis en veilleuse sa séparation. À peine quelques mois après, un nouveau budget fut présenté, et c'est encore une des raisons pour lesquelles nous avons déposé cette motion de report pour permettre aux Québécois et Québécoises de respirer. De respirer, M. le Président, parce qu'ils ne sont plus capables d'en prendre. En 1981, on se dirige vers une faillite certaine. Les banquiers sont aux portes, on examine nos états financiers, on examine l'administration de ce gouvernement depuis 1976 et on s'apeuré. (1 h 50)

Cela peut vouloir dire quoi, M. le Président, dans les prochains mois, dans les prochaines semaines peut-être? Un changement dans nos taux d'intérêt privilégiés. Je demande à ce gouvernement d'être plus réaliste. Ne pensez pas, parce qu'il vous reste quelques années avant une prochaine élection... Parce qu'on se rend compte que vous avez peur d'aller au peuple, vous devriez suivre l'exemple de votre premier ministre qui, alors qu'il était ministre des Richesses naturelles, en 1962, est allé au peuple pour consulter. Vingt ans plus tard, allez au peuple pour consulter de nouveau, parce que vous ne dirigez plus le Québec de la façon que les Québécois et les Québécoises veulent être dirigés. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank M. Blank: Merci à mes collègues.

Certainement, des "jolly good fellow", ces "jolly good fellow" vont expliquer à la population du Québec pourquoi, ce soir, on appuie la motion du député de Gatineau de reporter ce projet de loi de douze mois. Ce projet de loi no 16 fait des choses en cachette; comme on dit, c'est la "trade mark" de ce gouvernement de faire des choses en cachette, d'essayer de couvrir leurs arrières, de couvrir leurs avants, de tout couvrir. La seule chose qu'ils ne couvrent pas, ce sont les taxes, les taxes sont ouvertes. C'est le gouvernement de la taxation. Ici, dans ce projet de loi, on retrouve deux principes qui ont été approuvés ou expliqués par deux députés du gouvernement. Le député de Roberval a mentionné "que tout le monde doit participer au fardeau fiscal du gouvernement". C'est vrai, si le gouvernement a besoin d'argent, il doit aller le chercher chez les citoyens. Je suis d'accord avec lui. Mais faites ça au moins ouvertement, faites ça au moins honnêtement. Dites à la population: J'ai besoin de taxes et on va vous taxer. Ne faites pas ça en cachette, par en arrière, avec un projet de loi qui, comme vous le dites, va changer la structure d'Hydro-Québec, c'est seulement une augmentation de tarifs pour les fins d'Hydro-Québec. Ce n'est pas vrai. Le député de Roberval nous a dit ça, il veut que toute la population participe au fardeau fiscal. Le fardeau est tellement lourd!

Je pense que le député de Laurier, ou je ne sais plus quel député, a parlé du ministre des Finances en disant qu'il y a des gens qui ont dit que c'était un magicien, à cause de sa manière de procéder. Oui, c'est vrai, c'est un magicien: il fait disparaître les épargnes des Québécois. C'est un vrai magicien. Aussi, je pense que c'est le ministre du Revenu qui a dit qu'on doit utiliser les outils dont on a besoin. Besoin pourquoi? Pour taxer la population. Depuis 1978, le gouvernement a pris, par la porte d'en arrière, le contrôle d'Hydro-Québec, c'est une mise en tutelle, dans un sens, avec le nouveau conseil d'administration et toutes les nominations de gens comme conseillers spéciaux; on a nommé l'ancien secrétaire de M. Joron, M. Claude Dumais, assistant spécial du conseil du Québec. Qu'est-ce qu'il y a là? C'est un messager entre le premier ministre et Hydro-Québec. Faites ça, faites ça, faites ça.

En fait, Hydro-Québec est en tutelle maintenant. C'est un des outils dont le gouvernement a besoin, comme le ministre du Revenu l'a dit, et on l'utilise pour des fins... La façon dont il a fait ça avec le projet de loi, c'est une façon de percevoir des taxes en cachette. Le problème, c'est que les populations ne sont pas tellement au courant et le gouvernement dit aussi que ça fait partie de la politique énergétique. Mais, si ça fait partie de la politique énergétique,

pourquoi n'a-t-on pas ce débat public dont on a besoin pour éclairer la population. Le gouvernement a peut-être raison, mais pourquoi a-t-il peur de faire un débat public et demander à toutes sortes de gens de donner leur idée, leur pensée? C'est la raison de cette motion. On veut qu'on reporte ce projet de loi pour donner une chance à des groupes, à des citoyens de donner leur avis. Ce n'est pas seulement sur ce projet de loi, ils ont peut-être raison, mais on ne le sait pas. Est-ce que cela fait partie de l'ensemble de la politique énergétique du gouvernement? On ne le sait pas.

C'est l'ancien ministre lui-même, M. Bérubé, qui a demandé un débat public sur l'énergie. Il a dit: Une très grande unanimité entoure la tenue d'un débat public sur l'énergie. C'était même au cours des audiences de la commission parlementaire étudiant un programme décennal d'équipement d'Hydro-Québec. C'est la commission dont parlait le député de Charlesbourg quand il a dit: À cette commission, on n'a pas discuté du programme énergétique du Québec. On a seulement discuté d'une petite partie de cette affaire. On ne sait pas encore si on a intérêt à procéder avec l'électricité, le gaz, le nucléaire, on ne le sait pas. On ne le sait pas vraiment. Il y a des groupes qui sont venus devant cette commission demander un débat public. Le gouvernement ne veut pas. Pourquoi?

La vraie raison, M. le Président, c'est que ce projet de loi n'a aucun rapport avec la politique énergétique du gouvernement. C'est seulement un projet de loi pour taxer les gens du Québec. Ils ont peur d'y aller directement pour exiger des taxes, comme le député de Roberval l'a suggéré dans ce sens. Tous mes collègues ont expliqué pourquoi vous avez besoin de cet argent, le gaspillage, les dépenses, les trous. Vous avez besoin d'argent, on le sait. Vous essayez de l'avoir par toutes sortes de moyens, des taxes indirectes. Vous cachez cela derrière les tarifs d'électricité. La taxe sur l'essence, c'est aussi une taxe publique, mais cachée. Les gens ne savent pas c'est une taxe qui n'est pas fixée par des cents, comme en Ontario, c'est un pourcentage. Le 1er janvier, quand le prix du pétrole augmentera en Alberta ou en Arabie Saoudite, cela va augmenter la taxe québécoise. On va payer encore 0,02 $ ou 0,03 $ le gallon de plus. Aujourd'hui, c'est 0,30 $ de plus; le 1er janvier, ce sera 0,33 $ ou 0,34 $ de plus. On n'a pas besoin d'un projet de loi, on n'a pas besoin de publicité. Les gens ne le savent pas. Tout se passe en cachette, comme maintenant. On est ici, ce soir, il est deux heures moins une minute de la nuit, le 2 décembre. Je demanderais au greffier de changer la date sur la table. On est rendu au 2 décembre.

Franchement, à deux heures du matin, on discute quelque chose de très sérieux. Les gens du Québec doivent savoir ce qui se passe. Qu'on change la date, on va faire la motion après. On va changer la date. On discute quelque chose de très sérieux. De l'autre côté, il y a beaucoup de farces, mais ici on est très sérieux. C'est très sérieux, cette affaire. On a essayé de taxer la population du Québec par la porte d'en arrière. Les gens du Québec ont le droit de le savoir, mais à deux heures du matin il n'y a pas beaucoup de gens qui regardent la télévision, qui voient ce qui se passe. J'espère que ce gouvernement qui se dit transparent n'a pas peur que les Québécois puissent regarder cela à la télévision à des heures raisonnables.

Motion d'ajournement

Pour cette raison, conformément à l'article 77, je fais une motion pour qu'on ajourne ce débat pour donner une chance à la population du Québec de savoir ce qui se passe ici.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement, sur la motion d'ajournement de ce débat.

M. Bertrand: II n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II n'y a pas de consentement. (2 heures)

M. Blank: Voilà, M. le Président, j'ai failli dire votre Seigneurie, la tactique exacte de ce gouvernement. En pleine nuit, quand on demande un ajournement, si on donne les vraies raisons, les raisons pour lesquelles on doit ajourner ce débat à cette heure-ci, il y a silence. Les gens du gouvernement ont peur d'expliquer à la population pourquoi ils sont tellement pressés de la taxer.

Est-ce que vous avez tellement besoin d'argent que vous ne puissiez pas attendre au matin? Est-ce que vraiment les banquiers frappent à la porte? Je pense au député de Hull, qui dit que les banquiers sont à la porte. Peut-être qu'ils sont là, peut-être qu'il y a un huissier avec un bref de saisie, je ne le sais pas. Nous, on veut voir dans la journée ce qui va se passer. Pourquoi avez-vous peur des Québécois, pourquoi?

Ici, on fait ça à deux heures du matin et je suis certain qu'il y a moins de 500 personnes qui regardent la télévision à cette heure-ci. Durant la journée, il y en a peut-être 50 000, mais vous avez peur de ces 50 000. Ou peut-être que ce sont vos militants qui regardent la télévision à cette heure-ci, ce sont des gens qui aiment travailler dans la noirceur, dans la nuit, je

ne le sais pas. Mais nous, on veut travailler à la lumière du jour, on n'a pas peur des Québécois, des Québécoises. Mais... - Une lumière de nuit, c'est noir - ...M. le Président, voyant que le gouvernement n'a aucune raison à me donner pour expliguer pourquoi on ne veut pas s'en tenir à ma motion d'ajournement, je demanderais un vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, le député de Saint-Louis ayant fait sa motion d'ajournement, le leader adjoint ayant donné comme réponse tout simplement qu'il n'acceptait pas cette motion, le député de Saint-Louis ayant utilisé, en vertu des règlements, son droit de réplique, cela clot le débat. Je dois donc demander le vote enregistré. Qu'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 2 h 03)

(Reprise de la séance à 2 h 11)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

Veuillez prendre vos sièges, s'il vous plaît!

La motion qui est devant nous et qui doit être mise aux voix est une motion ayant pour but d'ajourner le débat. Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Lalonde, Mme Bacon, MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Maciocia, Cusano, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Houde, Middlemiss, Dauphin, Ha ins.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Gendron, Rancourt, Bertrand, Duhaime, Tardif, Léonard, Fréchette, Baril (Arthabaska), Proulx, Gagnon, Dussault, de Belleval, Mme Juneau, MM. Fallu, Bordeleau, Bisaillon, Leduc, Marquis, Charbonneau, Lavigne, Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamin-que), Champagne, Paré, Tremblay, Lafrenière, Beaumier, Lachance, Dupré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Le Secrétaire: Pour: 33

Contre: 40

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est donc rejetée. M. le député de D'Arcy McGee. Un instant, M. le député. M. le leader.

M. Charron: Le député de D'Arcy McGee me permettrait-il d'adresser une question à l'Opposition qui vient de manifester le désir d'ajourner le débat? Souhaiteriez-vous qu'on vote immédiatement sur la motion?

Des voix: Non.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Simplement une question de prudence. Pour ceux qui auront peut-être à sortir quelques instants prendre l'air, il y eu, durant la veillée, du verglas de telle sorte que c'est un peu plus dangereux que prévu à l'extérieur. Je vous demande donc, si jamais vous sortez, de faire attention.

M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: M. le Président, je me demande pourquoi le leader du gouvernement a demandé si on voulait voter avant mon discours. A-t-il peur de mon discours? Est-ce que je vais convaincre quelques péquistes de voter pour la motion?

Il est maintenant 2 heures quinze minutes du matin et vous savez pourquoi nous sommes ici à cette heure-là? C'est parce que le gouvernement avait peur de convoquer l'Assemblée nationale au mois de septembre, au mois d'octobre. Pourquoi? Parce que le gouvernement avait peur de faire face aux questions de l'Opposition, des questions qui portent sur la banqueroute économique de ce gouvernement, sur la banqueroute financière du gouvernement péquiste, sur la banqueroute constitutionnelle du gouvernement péquiste et sur la banqueroute morale de ce gouvernement péquiste.

Je suis en faveur de la motion pour reporter l'étude du projet de loi no 16 à douze mois afin de consulter la population pour voir ce que le peuple veut et aussi pour faire un débat sur cette question qui est englobée dans le projet de loi no 16. Il faut aussi évaluer l'impact de cette loi sur les individus, sur les compagnies qui sont déjà installées au Québec et aussi sur les compagnies qui aimeraient s'installer un jour au Québec.

En 1962, lorsqu'on a nationalisé Hydro-Québec, il y avait deux grandes objectifs. Premièrement, on a voulu fournir l'électricité à un prix abordable à tous les Québécois. Deuxièmement, on a voulu attirer les industries au Québec avec des tarifs

concurrentiels. C'est évident, vous savez comme moi que nous avons atteint ces objectifs sous le gouvernement libéral précédent. Autrefois, on a dit que les turbines ont tourné pour tous les Québécois, maintenant on dit que les turbines ne tournent que pour le ministre des Finances.

Le gouvernement péquiste est en train d'affaiblir Hydro-Québec et aussi d'affaiblir le Québec. Cela me rend triste de le constater, mais les chiffres ne sont pas comme les péquistes, les chiffres ne mentent pas. Affaiblir Hydro-Québec, j'ai dit. Premièrement le fardeau fiscal d'Hydro-Québec va augmenter de 176 900 000 $, en 1981, à 1 256 000 000 $, en 1985. Deuxièment, Hydro-Québec va se trouver dans une position difficile pour faire des emprunts sur le marché financier. Dans cinq ans, entre 1981 et 1985, le total du fardeau fiscal d'Hydro-Québec serait de l'ordre de 3 400 000 000 $. Hydro-Québec sera la vache à lait pour remplir les coffres de l'État. Et qui va payer pour tout cela? Ce sera vous, M. le Président, moi et tous les autres Québécois et Québécoises. (2 h 20)

Le gouvernement péquiste a affaibli l'économie du Québec de l'ordre de 20% en quatre ans. Il y a plus de chômage aujourd'hui, plus de chômage en 1977 et 1980 que durant les quatre années précédentes. Entre 1973 et 1976, on a créé plus d'emplois au Québec par rapport à la moyenne canadienne qu'entre 1977 et 1980. Entre 1973 et 1976, nous avons eu plus d'investissements industriels au Québec par rapport à la moyenne canadienne qu'entre 1977 et 1980. Tout cela pour démontrer comment le gouvernement péquiste a affaibli le Québec.

Enfin, M. le Président, notre dette, la dette des Québécois a triplé depuis que le gouvernement péquiste est au pouvoir. Entre 1867 et 1976, nous avons accumulé une dette de 5 000 000 000 $, mais entre 1977 et 1980 cette dette a triplé et vous avez bien deviné, M. le Président, notre dette maintenant est de 15 000 000 000 $. L'intérêt seulement sur cette dette coûte 1000 $ par année à chaque famille. Qui paie pour tout cela? C'est évident, c'est nous. Mais il faut se demander comment on fait pour payer l'intérêt sur cette dette et payer pour les autres dettes que le Parti québécois, le gouvernement péquiste a encourues.

Premièrement, nous avons l'impôt sur le revenu le plus élevé au Canada, plus élevé qu'à Terre-Neuve, plus élevé qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, plus élevé qu'en Ontario et je passe toutes les autres provinces. Vous savez cela comme moi, M. le Président, parce que vous avez une feuille de paie aussi et nous avons moins que les Ontariens, moins que les Terre-Neuviens, moins que les Albertains et moins que les Canadiens qui vivent dans d'autres provinces.

Deuxièmement, nous payons cette dette par des taxes cachées. Il y a la taxe cachée sur l'assurance automobile. Ce n'était pas nécessaire de la part de ce gouvernement d'augmenter le tarif pour l'assurance automobile, ce n'était pas nécessaire pour financer le plan d'assurance automobile. Nous avons eu une augmentation sur l'immatriculation des véhicules, pourquoi? Non pas parce que cela coûtait plus cher, mais pour financer le gouvernement par une autre taxe cachée.

Nous avons une troisième taxe cachée sur l'essence. Ce gouvernement péquiste a augmenté la taxe sur l'essence de 20% à 40%, c'est-à-dire une augmentation de 100%. Nous payons plus cher l'essence au Québec que dans toute autre province canadienne. Les Canadiens paient moins cher même à l'Île-du-Prince-Édouard, à Terre-Neuve et ailleurs.

Maintenant, le gouvernement péquiste veut nous imposer une autre taxe cachée, cette fois par le truchement d'Hydro-Québec. Ces taxes cachées sont des taxes régressives. C'est incroyable, mais vrai; ce gouvernement, qui se veut socialiste, est en train de nous imposer des taxes réqressives. Je lance un défi aux députés socialistes péquistes, il y en a encore quelques-uns, il y a le groupe des onze dissidents qui est maintenant le groupe des onze marionnettes.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! J'ai beaucoup de difficulté à entendre le député actuellement. Il y a un bourdonnement dans la Chambre qui fait que même moi j'ai de la difficulté à entendre.

S'il vous plaît; Le député d'Arcy McGee a encore une minute...

M. Marx: M. le Président, le député de Hull, il y a quelques minutes, a dit que nos amis d'en face n'ont rien entre les oreilles. Maintenant, je peux vous dire qu'ils n'ont pas d'oreilles non plus pour entendre.

J'ai lancé un défi au groupe des onze dissidents, qui est maintenant le groupe des onze marionnettes. Ces onze, les socialistes, comment peuvent-ils expliquer les taxes régressives au peuple québécois? Une augmentation de 100% de la taxe sur l'essence, expliquez-moi ça, vous, les députés socialistes péquistes. Ca veut dire quoi, une taxe régressive? Ça veut dire que, quand le millionnaire remplit le réservoir de sa voiture, il paie les mêmes 30 $ ou 40 $...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député, vous devez conclure, s'il vous plaît!

M. Marx: M. le Président, si on m'interrompt, est-ce que c'est moi qui doit couper mon discours?

Le Vice-Président (M. Rancourt): J'ai

calculé le temps et vous devez terminer. S'il vous plaît, si vous voulez terminer. J'ai calculé le temps des interruptions. S'il vous plaît!

M. Marx: Merci, M. le Président. Je terminais de toute façon. J'aimerais savoir comment ces députés socialistes peuvent expliquer le fait qu'une taxe régressive sur l'essence frappe le qagne-petit comme le millionnaire; les deux doivent payer le même montant d'argent pour remplir leur résevoir d'automobile. Comment peuvent-ils expliquer cette taxe régressive? Le tarif d'Hydro-Québec, cette taxe cachée, est une autre taxe régressive. L'électricité est une nécessité.

En terminant, M. le Président, toute cette opération visée par le projet de loi no 16 est une taxe cachée. J'appuie donc la motion de mon collègue, le député de Gatineau, et avant de procéder avec ce projet de loi... Voilà des péquistes socialistes qui vont voter avec nous, comme le député de Sainte-Marie, le député de Rouyn-Noranda peut-être...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Votre temps est écoulé, M. le député de D'Arcy McGee. C'est terminé.

M. Marx: S'il vous plaît, M. le Président, en terminant, j'aimerais remercier les députés socialistes péquistes qui vont voter avec nous ce soir.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Robert Baldwin.

M. Gratton: Sur une question de procédure, M. le Président, très brièvement, je m'en excuse auprès de mon collègue de Robert Baldwin. Il me semble que compte tenu de l'heure, pour les habitués de la télévision américaine, compte tenu aussi du prénom de mon collègue de Robert Baldwin, n'auriez-vous pas dû le présenter en disant: "Here is Johnny"?

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, M. le député de Gatineau. Ce n'est tout de même pas très drôle, ce projet de loi, cette taxe cachée. Cette motion de reporter à douze mois l'étude de ce projet de loi a pour but de donner à la population du Québec une période pour apprécier l'impact négatif de ce projet de loi sur l'économie des individus comme sur l'économie de nos industries. Un projet de loi qui change le râle fondamental d'Hydro-Québec, une compagnie qui a été créée pour produire de l'électricité pour la population à un coût modique pour la changer du jour au lendemain en une compagnie qui perçoit de l'impôt, devrait être scruté à la lumière du jour, et non pas à 2 h 30 du matin. (2 h 30)

Depuis 1976, nous avons entendu les orateurs du PQ, soit ici en Chambre, ou même à l'extérieur...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je demande la collaboration des deux côtés de cette Chambre pour justement permettre au député de Robert Baldwin de faire son intervention.

M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je disais que, depuis 1976, on entend les orateurs du PQ nous parler d'économie à la sauce péquiste. Le projet de loi 16 est un résultat de cette économie péquiste qui résulte tout simplement d'une mauvaise administration. On devrait prendre les douze prochains mois pour examiner ce projet de taxes indirectes qui, de l'opinion de ce côté de la Chambre, fait seulement affaiblir notre principal atout économique, Hydro-Québec.

Les ténors du PQ ont crié à tout vent, partout, qu'il faut contrôler tous les leviers de notre économie. Pour faire cela, il faut la souveraineté, l'indépendance, il faut contrôler toutes les taxes, tous les impôts pour développer notre économie séparés de tous les autres, mais, cependant, sans doute, avec l'argent emprunté des autres. Pour le PQ, contrôler les leviers de notre économie, cela se résume à contrôler toutes les taxes, tous les impôts. On a vu cela pendant les débats sur le référendum où on n'a pas cessé de parler d'indépendance. Toutes ces paroles d'indépendance, de séparation ont été suspendues, mises en veilleuse avant le 13 avril dernier. On y est revenu, par exemple, tout dernièrement, dans les débats des derniers mois, où les débats ont même pris un ton dangereusement antianglais, pour ne pas dire quasiment raciste.

Le résultat de cette préoccupation, avec l'indépendance du Québec, et depuis cinq ans...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, à l'ordre!

M. O'Gallagher: Quand on discute d'un projet de loi qui comprend une taxe tellement coûteuse à la population, soit 2000 $ par famille d'ici 1985, cette population a le droit strict d'examiner le coût de ce projet de loi ainsi que le coût de l'indépendance que vous prônez. Cette préoccupation, avec l'indépendance, nous donne aujourd'hui le championnat du chômage du Canada, un nouveau record pour le Québec, 11,5% de nos travailleurs sont en chômage. Nous détenons aussi le championnat du déficit accumulé, 15 000 000 000 $, trois fois le déficit de 1976. Qu'est-ce que cela va être dans cinq ans, avec votre

administration? 45 000 000 000 $?

Nous détenons aussi le championnat des déficits annuels, 3 300 000 000 $. C'est plus que trois fois le déficit accumulé des provinces de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Ecosse, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et du Manitoba. L'Ontario a seulement 475 000 000 $ de déficit; nous, nous avons le championnat, 3 300 000 000 $, ce sera 4 000 000 000 $ à la fin de l'année et on prévoit 5 000 000 000 $ pour l'année prochaine. Tout cela nous donne le championnat des plus taxés au Canada.

Avec ce projet de loi et les autres lois, avec la taxe sur l'essence, une augmentation de 100%, 0,30 $ le gallon, avec la taxe sur les plaques d'immatriculation comme celle sur l'assurance automobile, qui n'a pas été demandée par la Régie de l'assurance automobile - elles ont toutes été imposées par le ministre des Finances, une augmentation n'a pas été demandée non plus par la Régie de l'assurance-maladie - on met tout cela ensemble et on a encore le championnat des plus taxés de toutes les façons, directement et indirectement.

Les taxes indirectes provenant du projet de loi no 16 sont les suivantes: la taxe foncière sur toutes les installations d'Hydro-Québec de 6 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera à 16 000 000 $, en 1985; l'impôt sur le revenu d'Hydro-Québec de 51 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera à 130 000 000 $, en 1985; la taxe de vente sur les achats d'Hydro-Québec de 12 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera à 28 000 000 $, en 1985; l'impôt sur les programmes de santé de 9 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera à 30 000 000 $, en 1985; la taxe sur le capital d'Hydro-Québec de zéro, aujourd'hui, s'élèvera à 147 000 000 $, en 1985; la taxe sur les dividendes d'Hydro-Québec de zéro, aujourd'hui, s'élèvera à 905 000 000 $, en 1985; la taxe de vente pour les usagers de 120 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera à 290 000 000 $, en 1985. Tout cela représente 3 000 000 000 $ d'ici 1985, 2000 $ par famille pour les services d'électricité.

Vous avez beau rire, vous autres, mais votre programme de 1980, le programme du PQ, l'article 13, à la page 17, dit ceci: "Abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité pour usage domestique." C'est bien beau, ce sont de vrais menteurs.

M. Ciaccia: Des menteurs publics!

M. O'Gallagher: M. le Président, il y a une chose que je trouve déplorable dans cela, c'est l'impact direct de cette taxe qui affectera les travailleurs, la jeunesse. Cela va réduire les investissements de 369 000 000 $ pour l'année 1982. Qu'est-ce que cela veut dire en nombre de jobs à la Baie-James? Combien de jobs seront perdus l'an prochain, messieurs les travailleurs qui nous écoutent? Combien de jobs perdus représentent ces 369 000 000 $ pour l'année 1982? Combien de jobs cela en coûtera-t-il au nouveau projet des rivières Rupert, Broadback et Nottaway? Combien de jobs? Combien de jobs cela en coûtera-t-il au projet dont a fait mention le député de Portneuf cet après-midi, ici, dans la région de Québec?

Le projet de la Baie-James lancé par le gouvernement libéral, en 1974, a créé des milliers d'emplois pendant la construction des installations. Ils étaient peut-être temporaires, mais le but était de produire de l'énergie renouvelable, à prix modique, pour encourager l'industrie permanente au Québec. Pour créer des emplois permanents, M. le Président, ce gouvernement utilise ce levier majeur de notre économie non pas pour servir les citoyens, non pas pour attirer des industries, non pas pour rendre nos industries plus compétitives sur les marchés mondiaux et nord-américains, mais pour payer le gaspillage honteux des fonds publics. M. le Président, j'appuie entièrement la proposition du député de Gatineau de remettre à 12 mois l'adoption de ce projet de loi. Merci. (2 h 40)

Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la députée de Chomedey. Auparavant, j'aimerais, s'il vous plaît, qu'on puisse écouter les orateurs de cette Chambre, parce que j'y ai beaucoup de difficulté et ça fait partie du travail. Mme la député de Chomedey.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, à 2 h 40 du matin, il nous est encore permis de nous exprimer en cette Chambre, malgré les insolences que nous avons entendues depuis cet après-midi et durant toute la soirée, malgré la mesquinerie qui a été quand même monnaie courante de l'autre côté de cette Chambre, malgré l'arrogance de ce gouvernement, malgré aussi le manque de courage des gens d'en face qui n'ont pas eu le courage même d'appuyer leur ministre. Nous appuyons cette motion de report du député de Gatineau parce que nous voulons que la population soit capable de s'exprimer d'une façon démocratique. On a beaucoup parlé de transparence de l'autre côté de la Chambre, mais on est en train de l'oublier et ça, trop rapidement.

Les Québécois auraient pu attendre du gouvernement une nette volonté de réconciliation vers un objectif commun, soit celui de poursuivre le progrès du Québec. Je crains aujourd'hui que l'ampleur des inconséquences du présent gouvernement ne soient ressenties durement non seulement

pour les deux ou trois prochaines années, mais, guand on voit le projet de loi 16, pour quelgues générations à venir.

Le Québec écope aujourd'hui d'une situation inconfortable sur le plan financier, plus qu'hier encore, mais inconfortable aussi et incertaine sur le plan politique.

Une voix: La pertinence!

Mme Bacon: Qu'en est-il des effets ressentis par la population? Cette population est de plus en plus convaincue que l'administration du gouvernement québécois se traduit par un échec complet: échec des politiques visant à protéger les moins bien nantis de la société québécoise; échec du contrôle des dépenses publiques; échec des politiques dites expansionnistes. Le gouvernement du Parti québécois nous dit qu'il doit redonner confiance aux Québécois et leur faire recouvrer un sentiment de sécurité. Je pense qu'avant qu'ils aient le goût de construire un Québec fort et concurrentiel, on connaîtra encore beaucoup d'échecs, M. le Président.

C'est un échec aussi pour ce qui est du fardeau des Québécois. On en a la preuve aujourd'hui avec le projet de loi no 16; on veut encore aller chercher de l'argent dans les poches des Québécois. On aura préféré augmenter les taxes, déguisées ou non, comme cette augmentation de tarifs pour acquitter les coûts de la fameuse social-démocratie, au lieu de donner un répit aux consommateurs, et ce sont ces consommateurs-là que nous voulions voir à la commission parlementaire.

Quand on a refusé de participer à cette commission parlementaire, qui a eu lieu en août et septembre, on a voulu qu'il y ait un débat public qui se fasse et que l'ensemble de la population vienne s'exprimer devant les parlementaires et dire à la face même de ce gouvernement ce qu'elle avait à demander à ce même gouvernement, qu'elle puisse aussi exprimer les craintes et aussi les espoirs qu'elle pouvait avoir. Je pense que c'est ce qu'on a empêché l'ensemble de la population de faire au nom de différents organismes qui voulaient s'y présenter.

Au lieu de donner un répit aux consommateurs, comme je le disais tantôt, et d'encourager le développement économique grâce à des tarifs d'électricité relativement bas, le gouvernement a décidé de fixer les prix de cette forme d'énergie en fonction de ceux des autres sources, c'est-à-dire, le pétrole et le gaz naturel.

Il est évident qu'il en résultera pour Hydro-Québec des surplus appréciables qui seront canalisés vers l'État, plutôt que de servir à améliorer la situation de l'ensemble des Québécois et de la grande société québécoise: non seulement améliorer l'ensemble de la société mais améliorer aussi le développement du Québec tout entier.

Le projet de loi 1.6, et c'est pour cela que je voterai pour la motion de report, est à double titre prématuré. La méthode choisie, l'adoption de ce projet de loi, constitue un manque de respect flagrant, d'abord pour les véritables intéressés, les citoyens qui, dans les faits, sont les seuls et uniques propriétaires de cette richesse naturelle que constitue l'hydroélectricité.

On se rappellera toute l'importance accordée à cette dimension il y a près de vingt ans maintenant - il faut le rappeler ce soir - lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se faire plébisciter sur la question de la nationalisation de l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre du temps, l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection de l'automne 1962 - encore une fois, il faut le rappeler - nous déclarait: "De quelle façon allons-nous nous y prendre pour que les 5 600 000 Québécois deviennent les propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés de l'expansion économique de leur province, l'électricité?" La façon choisie, évidemment, on la connaît. Ce fut une élection qui permit aux Québécois de se rendre propriétaires et actionnaires de cette richesse naturelle.

Or, le gouvernement actuel tient-il compte de ces quelque 6 000 000 de propriétaires et actionnaires?

Le projet de loi 16 constitue aussi un autre manque de respect parce qu'il trahit, dans son fondement même, le mandat accordé au gouvernement par la population en 1962. Il faut encore y retourner. On se rappellera que les électeurs de l'époque confièrent à Hydro-Québec la responsabilité d'administrer, de régir et de développer autant le réseau de distribution que tout l'appareil de production d'énergie hydroélectrique. La société d'État devenait donc, dans les faits, le mandataire exclusif de la population. Or, les termes et le cadre de ce mandat étaient définis de la façon suivante, que je cite parce que ça fera peut-être plaisir aux voisins d'en face. C'est l'ancien ministre des Richesses naturelles, le premier ministre actuel, qui le définissait. Il nous disait: Et pour que le mouvement d'intégration et de nationalisation des réseaux se fasse vraiment pour tous les citoyens du Québec, il faut le confier à Hydro, entreprise d'État qui, depuis 1944, a pour mission de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière. On retrouve toujours cette définition de la vocation d'Hydro-Québec au premier alinéa de l'article 22 de sa loi constitutive et elle est techniquement maintenue dans le projet de loi 16 à l'article 6.

Où allons-nous et qu'est-ce qui peut

justifier notre appréhension? Rien de plus simple. À de nombreuses reprises, ce gouvernement, celui du Parti québécois, nous a présenté des projets de loi pleins et riches de beaux principes humanitaires. Mais, à l'examen et à la pratique, on s'est rendu compte que ces principes étaient diminués. En fait, ils étaient devenus des demi-principes. Il en est de même pour le projet de loi actuellement devant cette Chambre, et c'est pour ça que je voterai pour la motion de report. Pour le vérifier, tentons de déterminer ce que peut signifier le principe selon lequel Hydro-Québec doit fournir de l'électricité - je le redis encore -aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière. C'est le premier ministre actuel qui le disait, l'ancien ministre des Richesses naturelles. Il avait peut-être subi l'influence du Parti libéral à ce moment-là, ce qu'il semble oublier aujourd'hui de même que ses troupes.

Le Devoir du 4 octobre 1962 écrivait ceci: "La mesure est elle-même rentable. Hydro-Québec, au lendemain de la nationalisation, récupérerait un profit de 40 000 000 $. Ce profit d'Hydro-Québec ne serait naturellement pas net. L'entreprise d'État devra verser 20 000 000 $ par année d'intérêt. Il restera donc 20 000 000 $ de profit net dont les citoyens du Québec, plutôt que les capitalistes étrangers, seront bénéficiaires et qui pourront être utilisés en diminution des tarifs, en modernisation dans les secteurs les plus défavorisés ou en hausses de taxes scolaires et municipales payées par Hydro." Le projet de loi 16 demeure à un second titre prématuré, en ce sens, qu'il se trouve à conclure un débat qui n'a jamais eu lieu. Je sais que vous me rappelez encore à l'ordre, M. le Président, mais j'en aurais encore beaucoup à dire.

Des voix: Continuez. Consentement. (2 h 50)

Mme Bacon: Nous devons déplorer, M. le Président, l'attitude des gens d'en face qui ont constamment abreuvé les gens de l'Opposition de leurs railleries au cours de cette discussion où nous avions la possibilité de nous exprimer. Mais quand, au Québec, on ne pourra plus s'exprimer pour représenter 46% de la population, M. le Président, ça deviendra drôlement inquiétant pour l'ensemble de la population.

Le ministre des Communications a beau nous faire un petit spectacle pour essayer d'imiter le leader du gouvernement, je serais un peu inquiète à la place du leader du gouvernement parce que, quand le ministre des Communications en est rendu à ne même plus regarder la caméra de télévision, M. le Président, ça commence à être grave pour le leader du gouvernement. On a beau vouloir soulever les troupes du parti au pouvoir...

Je termine, je conclurai en disant, encore une fois, que je continuerai toujours de supporter ce report parce qu'il est nécessaire et urgent que la population vienne ici, face au gouvernement, face aux membres de l'Opposition pour exprimer non seulement ses craintes, mais aussi ses espoirs.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, à 2 h 50 du matin, ceux qui nous écoutent et qui entendent "cacasser" de l'autre côté de la Chambre doivent sans doute se demander ce qui se produit. Brièvement, il se produit deux choses un peu anormales dans cette Chambre. La première chose, c'est que le gouvernement actuel insiste pour procéder en pleine nuit à l'imposition d'une taxe de 17% sur l'hydroélectricité. La deuxième chose qui se passe, et cela aussi les habitués de nos débats vont s'en rendre compte, c'est que de l'autre côté il n'y a personne qui se lève depuis un certain temps pour défendre cette hausse-là.

Une voix: Ils ont honte. Des voix: Honte!

M. Paradis: Ils sont à peu près 17 en cette Chambre, 17 députés péquistes de l'autre côté, responsables chacun pour 1% de cette augmentation. J'ose croire qu'à l'occasion de leur prochaine visite dans leur comté ils raconteront à leurs électeurs de quelle façon ils ont participé à ce hold-up en pleine nuit.

Le député de Gatineau a présenté une motion de report dans le présent débat pour permettre au gouvernement de prendre le temps nécessaire pour aller consulter la population sur cette augmentation. C'est drôlement intéressant dans ce dossier-là de retourner, 20 ans après, consulter la population, parce qu'on se rappelle qu'en 1962 l'actuel premier ministre, qui est notre premier ministre à tous, était ministre de l'Énergie dans un gouvernement libéral et que, lorsqu'il était libéral, il avait eu le cran, il avait eu le courage d'aller consulter la population sur la création d'Hydro-Québec.

J'ai une question du leader adjoint du gouvernement qui me demande où j'étais à ce moment-là. J'avais douze ans et j'écoutais votre père faire des discours dans le comté de Brome-Missisquoi contre le premier ministre actuel. J'écoutais en 1962, à l'âge de douze ans, le premier ministre actuel nous dire qu'Hydro-Québec était une société dont tous les Québécois seraient actionnaires, qu'on deviendrait 6 000 000 d'actionnaires

de cette société. J'écoutais également à l'époque le premier ministre actuel nous dire que cette ressource hydroélectrique, que nous possédions tous comme Québécois, servirait de levier à notre économie du Québec, servirait à attirer chez nous des investissements qui créeraient des jobs pour nos travailleurs, pour nos travailleuses au Québec.

Qu'est-ce qui arrive, vingt ans après, en 1982? Je retrouve ce même premier ministre à la tête d'un gouvernement qui, en pleine nuit, à 2 h 55 du matin, veut dire à la population: Ce que je vous ai donné, à l'époque, je vous le reprends. Je vous vole les actions que vous aviez d'Hydro-Québec, des actions qui étaient censées vous apporter des taux d'électricité abordables, des taux d'électricité dont vous auriez pu bénéficier. C'était cela, votre dividende sur votre action. Mais votre dividende, je le prends et je le donne au ministre des Finances. Pour faire quoi? Pour donner de meilleurs services dans les hôpitaux?

Des voix: Non.

M. Paradis: Pour donner de meilleurs services d'éducation?

Des voix: Non.

M. Paradis: Pour créer davantage de programmes dans les secteurs économiques?

Des voix: Non.

M. Paradis: Pour venir en aide à la PME?

Des voix: Non.

M. Paradis: Pour venir en aide à l'agriculture?

Des voix: Non.

M. Paradis: II prend ce dividende, qui était le bien, la propriété de chacun des citoyens du Québec, et il le donne au ministre des Finances qui, pendant ce temps, effectue des coupures dans chacun des services que je viens d'énumérer. On penserait qu'en accaparant, en pleine nuit, des dividendes qui appartiennent à ces Québécois, en coupant les services, on diminuerait au moins le déficit; mais non, en plus, on augmente le déficit du Québec. Allez donc comprendre quelque chose à ce magicien de l'économie, à ce joueur de guitare, comme l'a mentionné ce soir mon collègue de Nelligan. Allez donc comprendre quelque chose aux politiques économiques du ministre des Finances.

Je prends un peu en pitié, ce soir, le ministre de l'Énergie et j'aurai à prendre en pitié, dans les jours qui suivront, le ministre du Revenu eux qui sont les exécutants de ce grand argentier qu'est M. Parizeau. On prend la corporation québécoise la plus riche, la plus dynamique, celle qui enorgueillit chacun des Québécois, pour la confier à qui? À un ministre des Finances qui nous a déjà fait un budget de l'An 1. On la confie à un ministre des Finances qui est l'ancien administrateur du journal Le Jour. On la confie à un ministre des Finances qui a mené les finances de la province de Québec au bord de la faillite. C'est là où on est rendu. On donne cela à un gars qui a fait ses preuves comme cela, on lui donne ce qu'on a de plus cher et ce qui constitue la plus grande valeur au Québec. On lui en donne la propriété, on lui donne les actions de chacun des Québécois.

Au nom des gens que je représente, au nom des gens qui m'ont élu ici, au nom de vos électeurs, protégez donc les actions d'Hydro-Québec de vos électeurs, arrangez-vous donc pour que les sacrifices que ces gens ont faits pour bâtir Hydro-Québec ne soient pas perdus et que lorsqu'arrivent les dividendes aujourd'hui on ne les leur vole pas en pleine nuit, à 3 heures du matin, pour les donner au ministre des Finances qui a un record d'administration de faillite!

Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce l'a mentionné tantôt - je devrais dire hier -pour chacune des familles qui nous a envoyés ici les représenter, la taxe sur laquelle vous aller voter et sur laquelle vous ne voulez pas prendre le temps d'aller les consulter, va coûter, en moyenne, 2000 $ par famille dans les cinq prochaines années. Est-ce que vous y avez pensé? Est-ce que vous allez oser vous représenter devant ces gens-là? 2000 $ par famille, pour des ministres, c'est peut-être correct; pour des députés, ça peut peut-être passer, mais pour les travailleurs québécois, pour ceux qui ne peuvent se trouver du travail dans la société québécoise à cause des politiques économiques de ce gouvernement, c'est indécent.

En 1962, le premier ministre actuel du Québec, sous la bannière libérale, nous a donné Hydro-Québec. En 1982, le même individu, sous la bannière péquiste, cette fois-ci, nous vole les actions d'Hydro-Québec qu'il nous a données, en pleine nuit. En 1962, quand le premier ministre nous a donné des actions d'Hydro-Québec, il nous a dit qu'il nous sortait des années de noirceur. Aujourd'hui, je devrais dire, ce matin, à 3 heures, au moment où ils nous les volent, ils nous replongent dans un régime de noirceur, un régime péquiste. Merci, M. le Président. (3 heures)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, je commence à être un peu fatigué, rendu à 3 heures du matin, mais cela ne m'empêchera pas d'appuyer - selon mon état de santé - la motion du député de Gatineau. Je veux supplier ce gouvernement péquiste, et je le fais de bonne foi, messieurs, d'appuyer cette motion car moi, en 1962, quand on a parlé de la nationalisation d'Hydro-Québec, j'étais heureux. Mais quand on regarde les coûts de cette nationalisation à cause de la faute de ce gouvernement, en 1981, je suis moins heureux. Ce gouvernement qui se dit un gouvernement de transparence, dans les municipalités, quand on a des règlements de zonage à changer, la population est consultée. Le projet de loi no 16, qui est un changement important dans nos lois, on a fait une élection provinciale en 1962 sur ce sujet, aujourd'hui, en 1981, on devrait avoir le mérite, l'objectivité, MM. les députés du Parti québécois, d'accepter que notre population, nos Québécois puissent se présenter ici et discuter avec nous de ce projet de loi.

Ce projet de loi fait d'Hydro-Québec un percepteur d'impôts au Québec, d'impôts indirects. Les assistés sociaux, qui ont une augmentation en janvier 1981 de 9%, ce n'est pas drôle, M. le leader parlementaire. C'est drôle! Les assistés sociaux ont une augmentation d'indexation du coût de la vie de 9%. Ils auront une augmentation d'électricité de l'ordre de 16,3% plus 8% sur les 16,3% en taxe de vente. Actuellement, quand on donne à une personne seule 331 $ par mois, on fixe son loyer à 85 $ par mois. On ne traite pas nos assistés sociaux comme il se doit.

Cette motion de report se veut une motion pour que la population puisse s'exprimer sur ce projet de loi. C'est une motion de report financière. Le gouvernement a intérêt à ce que notre population puisse être consultée. Vous n'avez pas le droit de refuser à nos concitoyens québécois de pouvoir donner leur opinion sur ce projet de loi.

D'ailleurs, le ministre a souhaité un débat public sur cette question. Je ne suis pas pressé. Je suis fatigué à cette heure-ci. On n'a qu'à penser à toutes les augmentations, aux taxes indirectes que mes collègues ont soulignées au gouvernement et à la population. Taxes d'essence. Il y a eu un débat ici, vendredi matin, sur le taxi, et je peux vous dire que c'est un problème plus qu'immédiat. Les chauffeurs de taxi, les chauffeurs de camion et autres moyens de transport ont eu des augmentations, les épiceries augmentent et c'est dû à cette augmentation de la taxe sur l'essence.

Je demande au gouvernement d'appuyer cette motion de report et de ne pas nous faire traîner. Nous faisons ça de façon sérieuse et dans l'intérêt de la population.

J'ai bien hâte qu'on vous rencontre, MM. les membres du gouvernement, dans une prochaine élection. Faites-la quand vous voudrez, nous, on sera prêt; ne soyez pas inquiets, on ne la perdra pas. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: M. le Président, mes collègues et moi-même avons essayé, je pense, de convaincre les députés du Parti québécois, ce qu'il en reste ici, ce soir, que l'augmentation des tarifs d'Hydro-Québec de l'ordre de 13% et 14% constituait, dans le contexte économique actuel, l'une des mesures les plus inacceptables qu'un gouvernement ait jamais adoptées à l'égard des citoyens du Québec.

Cette mesure, il faut le rappeler, n'arrive pas dans un contexte de croissance économique et de développement économique du Québec. Elle arrive au moment où les citoyens, très concrètement - et tout le monde le sait - sont pris avec des taux d'intérêt sur leur maison. Les petites entreprises, les petits commerçants et les petits industriels voient leur marge de crédit dans les banques réduite. Un nombre considérable d'entreprises dans les secteurs les plus fragiles de notre économie sont menacés de fermeture. Le gouvernement du Québec choisit précisément ce moment pour alourdir davantage le fardeau financier de l'ensemble de nos concitoyens.

Le journal Les Affaires, par exemple, cette semaine, donnait le total du bilan de l'administration péquiste. À 3 heures du matin, on pourrait penser que c'est un journal du matin mais c'est un hebdomadaire. Les taxes indirectes, camouflées du gouvernement péquiste, c'est plus de 86%. Où est la franchise et la transparence du gouvernement?

Une voix: La faute d'Ottawa.

M. Rivest: C'est une publication que vous connaissez sans doute, M. le Président. Les gens du Parti québécois disaient ceci dans cet engagement à propos d'Hydro-Québec, une société québécoise que l'on disait forte, au cours de la dernière campagne électorale. Et c'est ce que vous avez répété, les députés péquistes qui restent pour cette veillée d'armes en ce qui concerne Hydro-Québec. M. le Président, j'espère que vous-même, vous allez vous le rappeler comme tout le monde, comme le public en général: Enfin - disaient les députés ou candidats péquistes - il est devenu évident qu'Hydro-Québec est d'ores et déjà devenu le meilleur placement qu'aient

jamais réalisé les Québécois.

Mes collègues ont cité des propos de M. Lesage et de M. René Lévesque, du temps où il était ministre libéral, et c'était exact. C'est pour ça que ce soir, on se bat, c'est pour ça que demain, nous allons continuer le combat et c'est pour ça qu'en commission parlementaire, au niveau de cette taxe injuste et régressive, le Parti libéral du Québec va mener la lutte jusqu'au bout. Cela doit être clair. (3 h 10)

Ce qu'il faut reprocher très directement aux canditats péquistes ainsi qu'aux députés péquistes actuels, c'est que durant la dernière campagne électorale, au printemps dernier, ces gens disaient, en parlant du deuxième mandat de ce gouvernement: Le gouvernement péquiste s'engage - c'est un engagement et c'est écrit noir sur blanc dans vos propres publications -à ce que les Québécois, comme propriétaires, puissent tirer les bénéfices maximaux d'Hydro-Québec en tant que consommateurs. Alors, qu'est-ce qu'ils ont à dire ce soir? Et je comprends que pas un seul, depuis une heure, n'intervient pour donner la réplique aux députés, parce que vous trahissez votre engagement électoral qui est écrit noir sur blanc. Parce que, justement, par votre décision, par la décision du ministre des Finances, qu'est-ce qui se produit? Vous faites payer les consommateurs, vous dénaturez le sens même d'Hydro-Québec, le sens même de la nationalisation d'Hydro-Québec et, faut-il le rappeler? simplement, on peut dire que ce sont des députés libéraux qui font de l'opposition et tout cela.

Prenez un homme, je pense, qui a le respect de tout le monde, M. Marcel Bélanger, qui a été le conseiller financier de M. Lesage, le conseiller financier de M. Bertrand, le conseiller financier de M. Johnson. M. Marcel Bélanger a été un de ceux qui ont été responsables de l'ensemble des mesures économiques et financières de la révolution tranquille que vous chantez dans vos chansons péquistes. Mais vous allez apprendre à respecter le sens de la révolution tranquille. M. Marcel Bélanger a fait une étude de la situation actuelle, qui est dénoncée ici par le journal Les Affaires, de ce que le gouvernement est en train de faire avec Hydro-Québec.

Il ne faut pas oublier, M. le Président, que, dans la loi même d'Hydro-Québec, que le bill 16 va massacrer, pour essayer de combler les trous du ministre des Finances, dans la loi d'Hydro-Québec, l'article 22 précise que le mandat d'Hydro-Québec est de fournir aux Québécois consommateurs, comme vous le dites dans vos publications, de l'énergie au taux le plus bas. Qu'est-ce que vous faites actuellement avec cette taxe pour financer les déficits budgétaires du ministre des Finances? Vous dénaturez complètement le sens et la fonction première d'Hydro-Québec et vous voudriez que l'Opposition en cette Chambre vous appuie et ne dise rien face à cette attitude qui est tout à fait inqualifiable? En plus, à un moment précis où les contribuables québécois et les consommateurs, pour lesquels vous aviez les mots les plus doucereux au moment de la campagne électorale, à un moment précis où les consommateurs ont à faire face à des contraintes économiques extrêmement difficiles.

Est-ce que cela est acceptable, M. le Président? C'est totalement inacceptable et c'est pour cela que l'on continuera jusqu'au bout de nous opposer à cette mesure, et d'ailleurs, cette mesure n'est pas la seule que le gouvernement prend; on a évoqué ce soir la taxe sur l'essence, toutes ces autres taxes. Cela frappe les gens ordinaires. Et tous ces beaux vocables qu'on évoque autour de la social-démocratie et de la justice, et que le Parti québécois, c'est fait pour les petits, on l'a signalé ce soir. Qui est le plus frappé par ces taxes? Qu'est-ce que cela va coûter? Mon collègue de Brome-Missisquoi parlait de 2000 $ par famille. Les plus riches de notre société, 2000 $ par famille sur une période de cinq ans, pourront faire face à la note, mais les plus démunis de notre société? Vos propres documents, le document publié par votre collègue, le verbeux ministre d'État au Développement économique, M. Bernard Landry, a établi qu'il y avait un million de Québécois qui vivaient sous le seuil de la pauvreté. Savez-vous que ces gens-là devront payer la facture? Est-ce que c'est juste de faire payer ces gens de la même manière que ce que vous allez faire payer aux mieux nantis de notre société? Vous êtes-vous simplement posé la question?

Ce soir, on essaie de vous amener à réfléchir pour arriver à prendre des décisions qui, sur le plan financier, sur le plan économique et sur le plan strict de la justice, soient conhérentes avec les discours que vous faites à tout venant. Il va falloir que vous le prouviez et que vous livriez la marchandise, et c'est cela qu'on vous demande par cette motion. Évidemment, on utilise tous les moyens parlementaires et on va continuer de les utiliser parce qu'on a le sentiment, et tous mes collègues, ce soir, l'on évoqué à l'occasion de leurs discours, qu'il faut respecter le patrimoine, cela fait partie de notre patrimoine. Le patrimoine, c'est un autre mot péquiste que vous avez toujours au bout des lèvres. Hydro-Québec fait partie de notre patrimoine, ça doit être respecté et vous allez respecter le sens d'Hydro-Québec.

Deuxièmement, on va prendre tous les moyens nécessaires pour que les Québécois, en particulier les moins nantis de notre société, ne fassent pas les frais de votre

mauvaise gestion financière, ne fassent pas les frais de tout le gaspillage, de toutes les difficultés que vous avez créées par les dépenses somptuaires que vous avez faites. Les conventions collectives que vous avez signées à la veille du référendum mettent les finances publiques dans une situation extrêmement difficile. Vous ne vous servirez pas d'Hydro-Québec et, surtout, vous ne ferez pas porter les augmentations sur le dos des gens les plus vulnérables de notre société pour vous donner des allures de bons gestionnaires des finances publiques, parce qu'il n'y a pas un Québécois ou, en tout cas, il y en a certainement de moins en moins, qui va continuer de vous croire, de la façon dont vous vous comportez.

C'est pour ça que le député de Gatineau a présenté sa motion et c'est pour ça que tous les députés de l'Opposition vont continuer de l'appuyer. Comme mon collègue, le député de Jeanne-Mance, l'a dit, je demanderais aux députés péquistes - je suis convaincu qu'il y en a qui peuvent endosser notre démarche, qui comprennent le sens de notre démarche, mais ils sont réduits à cette condition de machine à voter - comme ils l'ont fait en d'autres occasions, d'avoir le courage de se lever et de dire: L'Opposition a parfaitement raison de combattre le projet de loi no 16 comme elle a raison, également, de s'opposer à la hausse du prix de l'essence parce que c'est une taxe brutale et régressive. C'est le journal Les Affaires, le monde du patronat qui, dans son éditorial, par exemple, conclut exactement de cette façon sur les mesures de M. Parizeau: "Une taxe brutale et régressive". Vous vous faites dire ça par les milieux d'entreprises que vous avez toujours décriés. Ce sont maintenant ces milieux d'entreprises qui s'opposent à vos politiques, car elles aboutissent à des injustices sociales. C'est ça, le sens profond de la démarche que vous faites avec la loi 16 et c'est pour ça qu'on s'y oppose.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Berthier.

Une voix: Prends ton temps, tranquillement, Albert.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. Je regarde l'heure, ça fait au-delà de sept heures que nous discutons, les députés de l'Opposition, pour essayer de faire entendre le bon sens aux gens d'en face. J'espère qu'à la suite des discussions de ce soir et de cette nuit les gens pourront comprendre et voter pour la motion de report du projet de loi no 16 que mon camarade, le député de Gatineau, nous a présentée.

Des voix: Oh!

M. Houde: Mon camarade. M. le Président, le geste posé par mon collègue de Gatineau avant la suspension pour le souper en est un de bon sens et de sagesse. Oui, tous les moyens parlementaires mis à la disposition de l'Opposition seront accueillis par la population du Québec qui nous écoute actuellement comme autant de gestes positifs à leur endroit. Cependant, je regrette que notre règlement ne prévoie pas un report sur une plus grande échéance de ce projet de loi. C'est une véritable déchéance administrative, parce que, au fond on pourrait bien se passer de cette bebelle administrative du Parti québécois.

M. le Président, je vous dirai que le projet de loi no 16 est un hold-up commis par le ministre des Finances à l'endroit des contribuables québécois. Je vous dirai aussi que l'augmentation des tarifs d'Hydro-Québec me fait penser à un homme qui voudrait aider un de ses copains en train de s'enliser dans un marais de boue en lui enfonçant les épaules et la tête dans cette "swamp" qu'est devenue l'administration des finances publiques du ministre Parizeau. (3 h 20)

M. le Président, ce bourbier sent mauvais; il infeste le climat économique québécois et met en fuite les investisseurs. Comment peut-on, en l'espace de quelques semaines, augmenter la taxe sur l'essence, songer à augmenter le taux d'assurance automobile et, finalement, les tarifs d'électricité? C'est pour cette raison que je devrai accepter la motion de report présentée par mon collègue de Gatineau, pour remettre à douze mois l'étude du projet de loi no 16 sur Hydro-Québec.

Comme la fée Carabosse, le ministre Parizeau jette à tout ce qu'il touche un mauvais sort. Je le soupçonne actuellement d'être capable de changer un lingot d'or en une carte de membre du Parti québécois. Cela ne vaut pas cher et c'est toute une dévaluation. Oui, M. le Président, je boycotte ouvertement cette augmentation injuste. D'ici un an, j'espère que le gouvernement péquiste aura perdu sa future élection référendaire et sera devenu un tiers parti marginal.

M. le Président, mes électeurs du comté de Berthier ne m'ont pas élu pour accepter sans rien dire ces coups de massue économique du ministre Parizeau à leur endroit. Je parle au nom du bon sens et de la saine administration économique. Mes électeurs de Berthier, comme ceux de tout le Québec, ont besoin non seulement d'un répit, mais aussi d'un climat de confiance qui permettra à la population de recharger ses batteries financières.

En terminant, je me rappelle toutes ces campagnes de publicité encourageant les Québécois et les Québécoises à utiliser l'électricité en leur disant que l'électricité, c'est l'énergie qui ne coûte pas cher, qui

évite la pollution et qui est propre, propre, propre. Sachez, ce soir, M. le Président, qu'il y a plus de 12 012 Québécois à reprocher à M. Parizeau de transformer en un luxe l'électricité, qui est devenue une nécessité dans la vie quotidienne.

M. le Président, en concluant, je prends mes électeurs de Berthier à témoin, il faut que cette nouvelle catastrophe péquiste soit retardée d'un an. D'ici là, les députés d'en face disparaîtront de la carte électorale et tout rentrera dans l'ordre au niveau économique. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Une voix: Très bien!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

Des voix: Oh!

M. Mark Assad

M. Assad: M. le Président, notre collègue, l'honorable député de Gatineau, est arrivé avec une motion...

Une voix: II est 3 h 25.

M. Assad: Merci, M. le leader. Il est arrivé avec une motion et je crois que c'est fort approprié dans le moment. Pour faire suite à notre collègue, le député de Jean-Talon, qui avait cité des extraits de notre économiste et fiscaliste bien connu, Marcel Bélanger, j'ai trouvé qu'il y avait là des éléments très importants. C'est un homme qui a vécu comme économiste les années de la révolution tranquille et qui a compris l'importance et la profondeur pour l'avenir des Québécois de tous les changements qui se faisaient durant les années soixante. Sauf que dans des déclarations fort surprenantes, l'économiste Marcel Bélanger a fait remarquer qu'à cause des difficultés que le gouvernement traverse, il en profite pour dire que les taux d'Hydro-Québec, qui étaient censés être à bon marché pour les Québécois, sont maintenant ajustés à la hausse dramatiquement. Marcel Bélanger dit: "Ces théories du sain équilibre entre les différentes formes d'énergie et de la prévention du gaspillage font singulièrement l'affaire du gouvernement qui patauge dans des déficits budgétaires sans précédent." C'est surprenant, M. le Président, qu'un économiste emploie des termes comme ça, quand il dit qu'on patauge dans des déficits sans précédent de 3 000 000 000 $, et en augmentant les tarifs.

Une voix: C'est épouvantable!

M. Assad: C'est amusant à ce propos de voir avec quelle facilité le présent gouvernement trouve de nouvelles sources déguisées de recettes fiscales tout en laissant croire à des réductions d'impôt.

Pendant que le gouvernement siphonne d'une façon massive notre société hydroélectrique, le gouvernement de l'Ontario, lui, se contente d'imposer un fardeau fiscal raisonnable à son Hydro. Les factures d'électricité ne sont pas soumises à des taxes de vente dans la province de l'Ontario comme ici, au Québec. L'écart entre le Québec et l'Ontario va certainement réduire l'avantage que nous avons connu par les années passées pour attirer des industries.

À l'heure actuelle, les tarifs d'électricité au Manitoba sont sensiblement égaux à ceux du Québec, tandis qu'en Ontario, ils sont légèrement supérieurs. La province du Manitoba vient tout récemment de geler pour une période de cinq ans les tarifs hydroélectriques. Est-ce que le présent gouvernement est prêt à s'engager, pour suivre l'exemple du Manitoba, à geler les tarifs? Pourtant, nos ressources hydroélectriques sont beacoup plus vastes, ça ne se compare pas avec le Manitoba. De toute façon, le Manitoba a les moyens de geler les tarifs pour cinq ans.

Une voix: Ici, on va geler les prestations pour les assistés sociaux.

M. Assad: Voici, M. le Président, une autre citation de M. Marcel Bélanger qui est très à point: "Au lieu de se servir de l'électricité comme d'un levier économique en maintenant des taux avantageux, l'actuel gouvernement utilise de plus en plus cette richesse pour tenter d'éponger des déficits budgétaires qui ne cessent de s'élever. Les répercussions d'une telle politique peuvent s'avérer très graves pour notre économie."

Évidemment, tous mes collègues l'ont démontré ici. Je suis sûr qu'actuellement le ministre des Finances est très conscient et certainement - c'est le cas de dire - est au courant des difficutés que cela va créer pour notre économie. Au lieu d'avoir des augmentations des recettes de l'État, elles sont à la baisse, et nos dépenses augmentent.

Il faudrait tenir compte de l'orage des taxes, surtout sur l'essence, l'assurance-maladie, les plaques d'automobile et, surtout de l'inflation qu'on connaît; il faudrait penser aussi à la fin de l'aide aux petites municipalités qui sont obligées d'augmenter les taxes en conséquence. Ce gouvernement a coupé quasiment toute l'aide aux petites municipalités. Plusieurs députés ici, en Chambre, en sont très conscients. (3 h 30)

Compte tenu que le chômage est le plus élevé depuis la crise des années trente, compte tenu des propos du premier ministre qui, dans son discours inaugural, sympathise -

il l'a dit lui-même - avec des centaines de milliers de familles québécoises qui sont durement frappées par l'inflation qu'on connaît, et compte tenu que notre collectivité québécoise possède une source d'énergie très importante et que nous, plus que n'importe quelle autre province, au Québec, nous possédons le pouvoir de freiner l'augmentation de cette source d'énergie, dans les temps qui courent, avec l'inflation et l'augmentation des taxes qu'on a vue, ici depuis quelques semaines, la population en bénéficierait si ce gouvernement voulait remettre ses augmentations en attendant qu'on ouvre un débat public sur cette question d'énergie.

M. le Président, cela fait sept, huit mois qu'on attend parler de la transparence de ce gouvernement. Ce serait très apprécié de tous les Québécois si ce soir le gouvernement voulait démontrer un peu de sa transparence au lieu de son intransigeance. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: Merci, M. le Président. En ce presque début de matinée, je veux d'abord remercier, au nom de tous mes électeurs, mon collègue de Gatineau pour la motion intelligente dont il nous a fait part hier soir afin que nous puissions davantage approfondir les conséquences du geste que se propose de poser le gouvernement. S'agit-il d'un luxe de reporter d'un an l'adoption d'un projet de loi qui vient siphonner les fonds d'Hydro-Québec? Je crois personnellement que non. M. Parizeau, il y a quelques semaines, a installé un premier siphon dans la poche gauche des contribuables québécois lors de la présentation de son mini-budget en instaurant l'augmentation d'une nouvelle taxe sur l'essence. Il vient ce soir d'installer un second siphon dans la poche droite du contribuable québécois, soit l'augmentation de la tarification d'Hydro-Québec.

On se croirait, M. le Président, reculé à la belle époque des vampires où maître Dracula ne ratait pas une occasion de faire chaque jour de nouvelles victimes. Nous avons notre Dracula québécois, notre ministre des Finances, M. Parizeau. Et quel contraste avec l'année 1962...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, à l'ordre!

M. Vallières: ... où, sous Jean Lesage, les Québécois ont décidé de devenir maîtres de leur électricité! Rappelons-nous-le, M. le Président, ils l'ont fait à la condition qu'on les assure que cette électricité leur serait fournie au plus bas coût possible. Mais ce projet de loi no 16, dont nous demandons le report, vient changer de façon unilatérale les règles du jeu. Je crois que cela constitue une injustice à l'endroit de nos concitoyens qui ont indiqué qu'ils étaient en faveur de la nationalisation, mais à condition que l'électricité leur soit fournie au plus bas coût possible.

Je veux, M. le Président, citer M. Joseph Bourbeau, président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, qui est venu comparaître devant les membres de la commission parlementaire de l'énergie et des ressources le mardi 25 août 1981. Je pense qu'il est important de savoir ce que les hauts dirigeants d'Hydro-Québec voient dans les intentions du gouvernement actuel. Je cite M. Bourbeau: "Les amendements apportés aux articles 22 et 22.1 de la Loi sur Hydro-Québec sont importants. Ils modifient le mandat même de la société d'État. L'article 22 définit ainsi ce nouveau mandat: "La société a pour objet de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux citoyens du Québec. Les taux et les conditions auxquels l'énergie est fournie doivent être compatibles avec une saine administration financière." M. Bourbeau poursuit: "Hydro-Québec se voit donc soustraite de son obligation actuelle de fixer les prix de l'électricité aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière. Le tarif applicable à chaque catégorie d'abonnés n'a plus à refléter le coût réel du service fourni à cette catégorie."

Je pense qu'il était important de mentionner qu'une personne aussi neutre que le président d'Hydro-Québec nous indique lui-même que la vocation d'Hydro-Québec sera nettement modifiée si on adopte ce projet de loi no 16. Nous avons demandé le report à douze mois de ce projet de loi, désirant qu'une vaste consultation soit entreprise, désirant permettre au gouvernement d'éviter d'agir avec précipitation. Mais, évidemment, au début du mandat d'un gouvernement, il semble être plus facile de faire la grande passe à nos concitoyens. On a commencé avec l'essence, on continue avec la tarification d'Hydro-Québec et probablement qu'à la veille d'une élection, on aura un peu de "candies" pour faire oublier les mauvais gestes du gouvernement.

Je citerai M. Yvan Guay qui nous dit, dans la Presse du samedi 28 novembre 1981: "Pour les citoyens du Québec comme pour ceux d'ailleurs, un bon gouvernement est celui qui donne le plus en services, allocations, et demande le moins en impôts et en restrictions. C'est évidemment une réaction d'enfant à l'égard de ses parents. Les masses populaires sont ainsi, et c'est sur cette base que M. Parizeau a conçu ses budgets. Mais comme l'État ne peut donner

d'une main à la population ce qu'elle lui arrache de l'autre, M. Parizeau n'avait qu'un solution: camoufler le plus possible les impôts afin de pouvoir les accroître plus facilement et créer ainsi l'illusion d'un bon gouvernement."

Je pense, M. le Président, qu'il est important, dans la conjoncture que nous connaissons actuellement, de dénoncer les intentions du gouvernement qui se prépare à agir comme un bon "gangster", un bon pilleur. Cela me fait penser au contribuable qui déciderait d'aller voler son voisin et qui, après l'avoir volé, par geste de délicatesse, lui enverrait des fleurs pour lui dire, finalement: Je ne suis pas si méchant que ça, je t'ai volé, mais je te donne des fleurs.

Pourquoi agir précipitamment et à la hâte? Pourquoi vouloir être aussi rapide pour "faire les poches" des contribuables du Québec? Nous savons que le gouvernement est un bon percepteur. Nous savons aussi qu'il est un très mauvais payeur. Il suffit de faire du bureau de comté de façon régulière pour se rendre compte que le gouvernement est peut-être cet animal qui paie le plus mal ses créanciers, qu'il s'agisse d'agriculteurs, d'industriels, de municipalités ou de journaliers.

Je veux que mes électeurs sachent que je suis contre cette loi matraque et en faveur de son report à l'an prochain. Nous nous sommes permis de nous donner l'essence la plus chère au Canada, et bientôt peut-être aurons-nous les tarifs d'électricité les plus élevés au Canada. Je voudrais demander à mes collègues d'en face, les députés péquistes, s'ils ont demandé à leurs électeurs ce qu'ils en pensent, à leurs militants également. Dans la région de l'Estrie, dernièrement, des militants péquistes se sont opposés à la taxe sur l'essence. Si on les consultait, est-ce qu'ils ne diraient pas qu'ils sont également contre ce projet de loi no 16? Je suis heureux de constater la présence de nombreux députés péquistes de l'Estrie en cette Chambre: le député d'Arthabaska, la députée de Johnson, le député de Saint-François, le député de Sherbrooke. J'aimerais que ces collègues... (3 h 40)

Une voix: Ce sont des couche-tard.

M. Vallières: ... se préoccupent davantage de ce que pensent leurs concitoyens. Je suis sûr qu'au cours de la dernière campagne électorale, ils se sont faits les ardents défenseurs des gagne-petit. Pourquoi ne continueraient-ils pas, ne passeraient-ils pas de la parole aux actes en appuyant notre motion qui vise précisément à protéger les catégories les plus démunies de notre population?

Il faut espérer que ce projet de loi qui frappe tragiquement tout le monde sans distinction, indépendamment du revenu...

J'espère que nos collègues de l'Estrie, vous incluant, pourront se brancher et voter en faveur de cette motion intelligente.

Voici la question que vous devez vous poser: Est-ce que je veux ou non que M. Parizeau fasse les poches des contribuables? Dans mon esprit, il n'y a aucun doute, je ne le veux pas. Je vois que vous êtes sur le point de m'indiquer que je dois céder la parole...

Une voix: Consentement.

M. Vallières: ... à un autre intervenant. Je veux tout simplement, en terminant...

Une voix: Consentement.

M. Vallières: ... indiquer que ce que nous voulons, de ce côté-ci de la Chambre, c'est aider davantage le gouvernement à prendre conscience des graves problèmes que notre société vivra. Vous devriez nous remercier. Le Parti québécois devrait nous remercier, par cette motion de report, de l'assurer de notre collaboration à une meilleure compréhension des incidences de ce projet de loi, de lui permettre de comprendre notre volonté ferme d'éviter au gouvernement de faire une gaffe gouvernementale et monumentale, de lui fournir l'occasion de réfléchir davantage sur le geste qu'il se prépare à poser, de lui permettre d'agir aussi avec franchise. Je dirai oui à cette motion de report et, par conséquent, non au changement de vocation d'Hydro-Québec, non au siphonnage des fonds d'Hydro-Québec, non à ce nouvel affaiblissement économique que nous propose le Parti québécois. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président. Une voix: 3 h 45. Une voix: Presque.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Un mal qui répand la terreur, mal que le gouvernement en sa fureur inventa pour punir le peuple du Québec.

Des voix: Ah!

M. Bourbeau: Le projet de loi no 16, puisqu'il faut l'appeler par son nom...

Une voix: La loi Parizeau.

M. Bourbeau: ... capable d'enrichir, en un jour, le député de L'Assomption, fait la guerre aux Québécois. Ils ne mourront pas tous, M. le Président, mais tous seront frappés.

Si j'ai choisi de parodier le fabuliste, c'est pour dénoncer ce projet de loi inique qu'est le projet de loi no 16, qui est susceptible de causer un grave préjudice aux Québécois et d'entraver l'avenir du Québec.

Si j'appuie la motion de report du député de Gatineau, c'est afin de permettre que la population soit bien informée, au cours de l'année qui vient, du projet de loi no 16.

Le projet de loi no 16 crée un système incohérent. Ce projet de loi est incohérent. Il crée une société à capital-actions qui n'a qu'un seul actionnaire, qui est un paravent pour le gouvernement et qui accorde au ministre des Finances la totalité du capital-actions de cette société.

Or, M. le Président, la loi dit que les dividendes qui seront payés par cette société ne seront pas déclarés par la compagnie, mais seront requis parl'actionnaire. Voilà qui est assez étonnant et voilà ce qu'on n'a jamais vu dans aucune loi.

Incohérente cette loi 16 parce qu'elle va jusqu'à déclarer que, même si c'est une société à capital-actions, la Loi sur les compagnies du Québec ne s'applique pas à cette société. Voilà qui est tout à fait nouveau également.

Incohérente également parce que c'est la première fois qu'on voit une société dont les règlements n'ont pas à être ratifiés par les actionnaires, et on s'étonne que nous, de l'Opposition, soyons tout à fait surpris des pirouettes qu'a dû effectuer le gouvernement pour pondre une loi semblable?

Pourquoi souhaitons-nous le report, l'étude de cette loi 16 au cours des prochains mois? La loi 16 c'est, en définitive, la mainmise du gouvernement sur Hydro-Québec. Autrefois Hydro-Québec était une société de la couronne qui répondait à l'Assemblée nationale et dont les actionnaires étaient les Québécois, les usagers. Dorénavant, Hydro-Québec sera soumise aux volontés du gouvernement et de ses fonctionnaires.

La loi 16 c'est le droit que s'arroge le gouvernement d'extirper des fonds d'Hydro-Québec pour combler les trous créés par sa mauvaise gestion des affaires publiques.

À quoi devrons-nous nous attendre à l'avenir? Puisque dorénavant Hydro-Québec peut servir à n'importe quoi, on devra s'attendre, en payant mensuellement nos comptes d'électricité, à ce que les factures que nous acquitterons servent à toutes sortes de choses. J'aimerais, à ce sujet, évoquer un événement qui s'est produit il n'y a pas tellement longtemps, alors que le gouvernement avait décidé en avril 1980, par une décision du Conseil des ministres, de se donner la possibilité de décréter des tarifs spéciaux dans le cas de grandes entreprises. Récemment, dans le cas de la Reynolds Aluminum, le gouvernement a décidé de fixer des tarifs tout à fait spéciaux pour cette compagnie afin de l'inciter à s'établir à Baie-Comeau sur la Côte-Nord. Or, Hydro-Québec a déjà dans sa tarification les clauses qui lui permettent de consentir des tarifs spéciaux à de grandes entreprises. On comprendra que ces tarifs sont plus bas que ceux chargés aux consommateurs normaux, puisque ces sociétés consomment beaucoup d'électricité et en conséquence elles bénéficient de ce qu'on peut appeler des tarifs de gros.

Or, dans le cas de la Reynolds, M. le Président, on a été beaucoup plus loin que jamais auparavant et, afin probablement d'acheter la paix dans un conflit ouvrier qui existait à ce moment-là, on a sacrifié énormément d'argent. Si vous consultez les gens qui sont au courant de l'affaire, vous vous rendrez compte que le gouvernement a forcé Hydro-Québec à concéder ce qui est estimé à au-delà de 1 000 000 000 $ au cours des dix prochaines années en faveur de la Reynolds Aluminum. Ces sommes énormes que le gouvernement a concédées à titre de subventions déguisées à la Reynolds, au lieu de provenir du fonds consolidé de la province, proviendront des goussets d'Hydro-Québec et, en conséquence, seront acquittés par les usagers, ceux qui consomment l'électricité, c'est-à-dire chacun d'entre nous. (3 h 50)

Voilà une façon déguisée de ne pas avoir à payer des subventions et de les faire payer par Hydro-Québec. Dorénavant, on devra donc s'attendre qu'Hydro-Québec devienne un payeur pour le gouvernement. On pourra probablement s'attendre qu'Hydro-Québec comble les déficits des fêtes de la Saint-Jean l'an prochain, comme cela s'est fait l'an dernier. On sait jusqu'à quel point certains hauts fonctionnaires d'Hydro-Québec se sont servis d'Hydro-Québec, du personnel d'Hydro-Québec et de ses services dans une opération de tordage de bras. On ne saura plus, dorénavant, où vont les fonds d'Hydro-Québec.

La loi 16, dont nous demandons le report, parle aussi des tarifs qui, dorénavant, seront fixés par le ministre des Finances. Quand les citoyens du Québec acquitteront leurs factures à l'avenir, qu'ils se disent bien que ce n'est pas Hydro-Québec qui leur envoie des factures et qui les augmente, mais c'est le gouvernement, c'est le ministre des Finances qui déterminera le montant des factures mensuelles d'Hydro-Québec.

Finalement, la loi 16 est une opération de taxation détournée à laquelle nous ne pouvons pas et ne devons pas souscrire. C'est pourquoi, je le répète, j'appuierai avec enthousiasme la motion de report du député

de Gatineau. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Maskinongé.

Des voix: Bravo!

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Au moment où les citoyens s'apprêtent à se lever pour venir écouter la période des questions à l'Assemblée nationale, nous, les gens de l'Opposition, essayons, avec énormément de difficulté, de faire entendre raison à ce gouvernement concernant une taxe déguisée qu'on s'apprête à délivrer au peuple du Québec. J'écoutais un de mes collègues tantôt qui disait qu'un éditorialiste avait mentionné que M. Parizeau serait peut-être bien mieux d'aller jouer de la guitare électrique. Je dirais qu'il doit profiter du temps pendant lequel il peut jouer de la guitare électrique parce que, lorsque ce projet sera accepté, il n'aura même plus le moyen de jouer de la guitare électrique, il faudra qu'il gratte! Il faudra qu'il fasse comme les citoyens les plus démunis du Québec, qu'il gratte davantage.

Cela ne m'a pas surpris que mon collègue de Gatineau décide de faire une motion de report, pour la simple et bonne raison que c'est le seul moyen que possède l'Opposition...

M. Fréchette: Grattons!

M. Picotte: Le ministre du Revenu dit "grattons" parce qu'il en arrache et il en fait arracher aux citoyens. Mais vous ne perdez rien pour attendre, il y a une belle petite loi à votre nom, mon cher ministre, et on va s'amuser encore et passablement longtemps. On se propose même, étant donné que la loi est encore pire, de faire appel à d'anciens collègues qui ont déjà siégé en cette Chambre pour venir vous parler de cette taxe déguisée.

Il n'y a rien de surprenant dans la présentation de cette motion de report parce que c'est la seule façon que possède l'Opposition pour demander à ce gouvernement d'éloigner cette taxe et d'y penser deux fois avant d'agir de cette façon. J'écoutais le brillant député de Vanier...

Une voix: Oh non!

M. Picotte: ... spécialiste de la caméra, qui essayait de faire croire aux citoyens du Québec que ça n'a rien donné à l'Opposition de faire des motions de report. Rappelez-vous, lorsque M. Luc Cyr, je m'excuse... lorsque le député de Crémazie, alors ministre des Affaires municipales, avait présenté la loi no 31 autorisant les municipalités à prélever une taxe sur les plaques d'immatriculation d'automobile. Grâce à une motion de report, M. le Président, le gouvernement a fait marche arrière.

Ce n'est pas grave, parce que, vous savez, le ministre des Transports du temps, qui n'est plus ministre du tout aujourd'hui, a simplement trouvé une autre façon, avec l'assurance automobile, de taxer ces mêmes citoyens. Malgré tout, M. le Président, l'Opposition a réussi, avec cette motion de report, à enlever une taxe aux citoyens du Québec.

Ce gouvernement est un spécialiste de la taxe. Si on faisait une motion de report toutes les fois que ces gens agissent de façon hypocrite, on aurait passé notre temps à l'Assemblée nationale à faire des motions de report, parce qu'il y aura une taxe sur les plaques d'automobile.

Vous pouvez bien ne pas me trouver fort, M. le député de Joliette-Montcalm, vous venez à peine de vous lever, ça paraît, vous n'êtes pas encore réveillé.

Mais vous allez vous réveiller quand les citoyens vont vous dire dans votre comté: Pourquoi avez-vous voté telle taxe? C'est là que vous allez vous apercevoir que cela s'est passé à l'Assemblée nationale.

M. le Président, j'espère, malgré tout, et j'ai une raison encore spéciale - c'est une raison de coeur évidemment - de demander de reporter la loi de douze mois, c'est parce que cela me fait de la peine, que je suis peiné de m'apercevoir que toutes les fois qu'on a des coups bas à faire à la population, on les fait faire par le député de Saint-Maurice. Quand il a été le temps d'enterrer la faune québécoise, M. le Président, on a fait faire le plan des ZEC, des ZAC, des ZIC et des ZUC par le député de Saint-Maurice, si bien qu'aujourd'hui, il n'y a presque plus de poisson dans les rivières et que bientôt, il n'y aura plus de gibier dans la forêt, M. le Président, il va y en avoir juste en face de nous autres des gibiers.

On a fait du député de Saint-Maurice le fossoyeur de la faune québécoise. Arrive le moment où il faut taxer les citoyens les plus démunis, on prend encore le député de Saint-Maurice et on lui fait présenter le projet de loi no 16. Il devrait s'apercevoir que, si on l'a appelé 16, c'était pour lui dire: Cesse donc de taxer les citoyens du Québec. C'est ça qu'on veut dire. Voyons donc! C'est plein de bon sens.

M. le Président, c'est encore lui qui va faire en sorte que le citoyen démuni du Québec va payer plus cher. Évidemment, cela va être canalisé dans ce qu'on appelle le fil spécial dont mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce a dit tantôt: II va y avoir deux fils conducteurs. Un d'électricité et l'autre va

"ploguer" le citoyen pour lui faire payer des taxes éhontées, camouflées, hypocrites. C'est ça qu'on va faire faire par le député de Saint-Maurice, on fait cela à un petit gars de la Mauricie. En tout cas, vous ne pouvez pas savoir comment cela me peine. Probablement que, lorsqu'il aura fait ce coup bas, on va le nommer ministre des Affaires extérieures, pour qu'il s'en aille le plus loin possible. Les gens vont être tannés de le voir agir ainsi à l'Assemblée nationale. M. le Président, il est encore temps pour le député de Saint-Maurice de réviser ses positions, même si ses collègues n'ont pas parlé là-dessus. Il sait qu'il ne les approuve pas, d'ailleurs. Je suis allé jaser en catimini avec quelques députés tantôt, M. le Président, on m'a vu d'ailleurs, je suis bien libre pour en parler. On nous dit: Les gars, ne lâchez pas. Vous avez bien raison. Que le whip ne me demande pas de nommer des noms, parce qu'il va rester surpris, mais je ne le ferai pas.

Des voix: Mentionnez-les!

M. Picotte: Même le leader du gouvernement me faisait signe tantôt que cela ne pressait pas. Je ne sais pas s'il était d'accord avec nous autres. Plus cela retarde, plus cela fait son affaire, parce qu'il espère lui aussi que le député de Saint-Maurice va finir par comprendre le bon sens. C'est ça la réalité. Pardon? Oui, mais j'ai été inspiré par les trois poupons qu'il y avait devant moi tantôt: le député de Saint-Jacques, le député d'Abitibi et le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. (4 heures)

Je pense que le gouvernement devrait se rendre compte que les citoyens, dans ce contexte économique qu'on vit présentement, contexte difficile, en ont assez d'être taxés. Il y a d'autres façons de taxer à d'autres endroits, j'imagine. Faites-le clairement, vous n'êtes pas obligés de faire comme le premier ministre, toujours passer par la porte d'en arrière lorsque cela ne fait pas votre affaire, faites-le clairement. Dites aux citoyens: On a besoin de taxes et on vous taxe tout simplement, mais qu'on sache que ce sont des taxes décrétées directement par le ministre des Finances. Ne taxez pas en disant que c'est la faute d'Hydro-Québec, parce que c'est toujours la faute de tout le monde avec vous autres, mais c'est toujours le même citoyen qui paie.

Cependant qu'il est encore temps, j'espère qu'il y aura quelqu'un, à l'intérieur du caucus du Parti québécois, qui saura ramener ce gouvernement à la raison. Il est vrai que les ministres sont coupés de la réalité; à part quelques-uns qui n'ont pas grand-chose à faire, qui sont ici de temps en temps, ils sont coupés de la réalité parce qu'ils volent, eux autres, ils sont hauts, ils sont plus hauts que le peuple. Ce caucus de députés fort sympathiques que l'on connaît, d'ailleurs, des "back-benchers", je le sais, on leur demande d'être tout simplement des robots à voter, dans certaines circonstances. Mais, en caucus, ne nous le dites pas, ne dites pas que cela vient de nous autres, ne dites pas qu'on vous a sensibilisés à ça, mais prenez donc vos responsabilités et demandez donc au Conseil des ministres de surseoir à cette taxe. Donnez-vous donc un an pour penser à votre affaire. Donnez donc un an aux citoyens du Québec pour se ramasser assez d'argent pour être capables de vous payer toutes les autres taxes que vous allez pouvoir décréter dans le futur budget. Ce n'est pas surprenant que le ministre des Finances, qui est fort sympathique et qui est un fort gentilhomme, administre les finances du Québec de la façon dont il les administre parce qu'il a déjà fait ses preuves avec le journal Le Jour, et j'ai l'impression que les gens en ont soupé.

M. le député de Gatineau, la population du Québec vous remercie d'avoir fait une motion de report, en espérant que ce gouvernement saura comprendre le bon sens une fois pour toutes.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Bonaventure et leader de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, pour dire comme Mme la députée de Johnson, c'est mon tour. Il est 4 h 04 exactement, du matin, oui, et il y aura bientôt 24 heures que nous sommes ici réunis, à l'Assemblée nationale. J'imagine que cela fait partie de la réforme du parlementarisme préconisée par le Parti québécois. Cela doit faire partie des voeux exprimés à maintes reprises par ces gens lorsqu'ils étaient ici, qui se plaignaient évidemment des sessions à la vapeur, etc., des projets de loi que nous étudiions un peu tard dans la soirée. Là, il passe 4 heures du matin et on essaie à ce moment-ci de communiquer avec nos concitoyens sur un projet de loi extrêmement important. Si nous sommes encore ici, c'est parce que nous sommes conscients de la responsabilité qui est nôtre et, en même temps, nous voulons simplement faire notre devoir de parlementaires et de citoyens.

M. le Président, je veux d'abord féliciter le député de Gatineau pour avoir présenté cette motion de report, la seule d'ailleurs que notre règlement nous permet de présenter en deuxième lecture. M. le Président, reporter ce projet de loi à douze mois, c'est d'abord dire qu'il n'est pas dans l'intérêt de la population. Si ce n'était pas, M. le Président, de la condition de faillite

du gouvernement du Parti guébécois, croyez-vous réellement que nous aurions devant nous ce projet de loi? Personne ne peut défendre ce projet de loi, même pas les meilleurs orateurs et les meilleurs communicateurs du Parti québécois. Eux qui s'en vont bientôt à un congrès plénier, j'espère qu'ils vont rencontrer des militants qui se feront voir, connaître et entendre et qui protesteront contre ce projet de loi, ce qu'il contient et les conséquences qui s'ensuivront s'il devait être adopté.

M. le Président, nous avons droit également et plus que jamais à un débat public, qui n'a pas eu lieu. Lors des élections du 13 avril 1981, qui d'entre vous a parlé de cela? Jamais je n'ai entendu ni vu les ministres en particulier se promener dans les comtés, le mien inclusivement; jamais n'a-ton parlé d'un tel projet de loi ou de telles intentions du gouvernement. Oui, c'était caché dans le budget à je ne sais quelle page, ou sous-paragraphe untel, qu'il y aurait des redevances. Mais est-ce qu'on a parlé réellement de la signification de ce projet de loi no 16? Jamais, M. le Président, et nous arrivons ici en fin de session maintenant, en pleine nuit, et on nous demande: Votez-nous cela au plus tôt, on a besoin d'argent. Comme on l'a dit tout à l'heure, les créanciers sont à la porte. M. le Président, ce n'est pas un projet de loi digne d'un gouvernement québécois.

Ce que nous avons voulu faire ensemble en 1962 avec l'élection sur la nationalisation de l'électricité; lorsque nous avons donné suite aux voeux de la population en 1963, c'était pourquoi, M. le Président? Quel était le mandat que le peuple nous donnait? C'était d'avoir une société Hydro-Québec qui devait fournir de l'électricité aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration. M. le Président, ce projet de loi que nous avons devant nous veut dire qu'Hydro-Québec devra fournir l'électricité. A quel taux? Aux taux compatibles avec les déficits du gouvernement, M. le Président, et non pas avec une saine administration financière, non plus aux taux les plus bas, M. le Président. Puis-je citer, si on me le permet, très brièvement, un éditorial de M. Yvan Guay dans la Presse du 12 septembre 1981? Après avoir évoqué les démissions qui ont eu lieu à Hydro-Québec depuis qu'on connaît les intentions véritables du gouvernement et particulièrement du ministre des Finances, après avoir évoqué les démissions de M. Lucien Saulnier, de M. Edmond Lemieux et de M. Robert Boyd, l'éditorialiste nous dit ceci: "Bien sûr, les démissions des grands commis de l'État se font dans un rituel selon lequel les démissionnaires invoquent des raisons personnelles et le gouvernement affirme regretter sincèrement le départ de personnes aussi dévouées et compétentes. Mais l'hypocrisie de toute cette phraséologie ne trompe personne, surtout pas les intéressés. En l'occurrence, le départ de M. Boyd, annoncé pour le 15 décembre prochain, consacre la fin d'Hydro-Québec." Il continue en disant: "...telle qu'elle avait été créée à la suite de l'élection référendum de 1962, qui portait sur la nationalisation des entreprises hydroélectriques." (4 h 10)

II continue, M. le Président: "II est assez ironique de constater que l'un des principaux accoucheurs d'Hydro-Québec, M. Lévesque, alors député libéral, soit maintenant le principal fossoyeur de cette entreprise collective." Il poursuit: "Les citoyens doivent se rendre compte que le projet de loi no 16 de M. Parizeau va changer totalement la nature d'Hydro-Québec; cette société d'État à vocation économique avait été créée autonome dans le but de la rendre indépendante des partis en l'affranchissant des politiques à courte vue des gouvernements. La charte d'Hydro-Québec l'obligeait à satisfaire tous les besoins en électricité des citoyens aux plus bas coûts compatibles avec une saine gestion de l'entreprise. C'est pourquoi tous les surplus de revenus d'Hydro étaient réinvestis dans l'entreprise pour améliorer le service et réduire les besoins d'emprunt. Or, le projet Parizeau va obliger l'Hydro à verser au trésor public la moitié de ses surplus, soit au moins 900 000 000 $ par année, dès 1985."

C'est-à-dire qu'on va aller siphonner près de 1 000 000 000 $ par année. Mais qu'est-ce que ça va faire, ça, M. le Président? Évidemment, ça va s'ajouter à tout ce qui a été siphonné par ce gouvernement depuis quelques mois en particulier. On s'est attaqué aux primes d'assurance maladie, on a doublé ça pour l'employeur, après avoir fait tout ce qu'il était possible de faire pour aller chercher de l'argent, emprunter à la Caisse de dépôt qui est supposée être le chien de garde des épargnes des Québécois et des travailleurs québécois. On est allé dans les permis de conduire, dans l'immatriculation des véhicules automobiles, dans l'assurance automobile. On est allé même annuler ce qu'on avait promis, dans l'impôt sur le revenu. On s'est fait applaudir ici même dans cette Chambre, à l'occasion d'un discours sur le budget qui ne présentait qu'à peu près cela de positif. Après avoir été applaudi pendant quelques mois, lorsque le temps vient de mettre en application cette bonne nouvelle, on l'annule, M. le Président. Impôt sur les successions, tous les impôts imaginables, on est allé siphonner.

Maintenant, on s'en va où? À HydroQuébec, une institution nationale, une institution dont nous sommes fiers qui devient maintenant simplement une machine à aller chercher de l'argent pour essayer de

renflouer un gouvernement en faillite. C'est ça, la véritable signification du projet de loi no 16. Je vous dis que, si nous faisons une motion de report à douze mois, ce n'est pas simplement par caprice. Nous ne sommes pas ici, à 4 heures douze minutes du matin, simplement pour le plaisir d'y être et nous devrons être ici encore dans quelques heures, dès ce matin, pour continuer cette bataille. Nous allons faire cette bataille au nom des citoyens du Québec, M. le Président. Nous sommes fiers d'apporter cette motion ce soir. Et vous, vous ne devriez jamais être fiers de ce projet de loi qui n'a rien à faire avec la promotion des meilleurs intérêts d'Hydro-Québec et de la société québécoise. Vous devriez avoir honte, à ce moment-ci, d'apporter un tel projet de loi qui n'est qu'une opération de camouflage, un peu comme le projet de loi que nous présente le ministre du Revenu. Imaginez-vous, M. le Président, lorsqu'on sait que le dernier siphonnage a été la taxe sur l'essence, de 20% à 40%, on a doublé encore, on a monté de 0,30 $ le gallon dans une seule nuit.

Je termine en disant ceci: Regardez la transparence de ce gouvernement, lorsqu'on présente le projet de loi pour donner suite à ce deuxième budget dans la même année du gouvernement actuel; on a le projet de loi no 39, c'est là qu'on parle des 40% sur l'essence, 0,30 $ le gallon, mais on appelle ça Loi modifiant le régime des droits relatifs au commerce des boissons alcooliques et certaines dispositions législatives. Est-ce que c'est assez bien camouflé, M. le Président? Gouvernement de camouflage, M. le Président. Gouvernement indigne qui devrait démissionner.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion d'amendement sera adoptée?

Des voix: Adopté. Adopté.

M. Charron: M. le Président, en vertu de l'article 106, je propose que le vote sur cet amendement ait lieu juste avant les affaires du jour.

M. Levesque (Bonaventure): C'est votre discrétion.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, c'est ma discrétion, M. le leader de l'Opposition, tout comme aussi la coutume veut que jamais le président ne refuse une telle demande du leader. En conséquence, le vote sera reporté avant l'appel des affaires du jour.

M. Charron: M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à dix heures ce matin.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. La Chambre est ajournée à dix heures ce matin.

(Fin de la séance à 4 h 15)

Document(s) associé(s) à la séance