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(Dix heures quinze minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Un moment de recueillement, s'il vous plaît.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents. M. le ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme.
Rapport sur l'aide financière
du gouvernement à l'industrie
de la chaussure
M. Biron: M. le Président, tel que je m'y suis
engagé hier vis-à-vis du député de
Notre-Dame-de-Grâce, je dépose un rapport sur l'aide
financière apportée à l'industrie de la chaussure au
Québec par le gouvernement du Québec de 1978 à 1981, qui
totalise 10 350 000 $, de même qu'une copie de lettre que j'ai
expédiée hier avec mon collègue, le ministre d'État
au Développement économique, à M. Herb Gray, ministre de
l'Industrie et du Commerce fédéral.
Le Président: Document déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Période de questions orales des députés. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
La situation financière de l'UQAM
M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre de l'Éducation qui n'est pas encore
arrivé. Étant donné l'urgence et l'importance de la
question, on en conviendra, je l'adresserai au premier ministre. Il s'agit de
l'avenir immédiat de l'Université du Québec à
Montréal, l'UQAM, qui est menacée par la formule de financement
adoptée par le ministre de l'Éducation récemment.
Techniquement, l'UQAM serait en faillite, aussi bizarre ou tragique que
ça paraisse à quelqu'un qui écoute cela. On n'en croit pas
nos oreilles. Est-ce que le premier ministre peut s'engager - je pense que
l'engagement du premier ministre est important à ce stade-ci, M. le
Président, parce que les engagements du ministre de l'Éducation
sont assez fragiles - ici pour faire en sorte que ni la croissance - parce que
l'Université du Québec à Montréal, contrairement
à plusieurs autres, est une université en croissance - ni
l'existence, de l'UQAM ne soient menacées et que des mesures
immédiates soient prises pour permettre qu'elle continue de vivre et de
croître.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, en
attendant que, peut-être, mon collègue de l'Éducation soit
ici pour entrer plus dans le détail, il est évident que
l'expression "techniquement en faillite" fait partie d'une sorte de
dramatisation qui est compréhensible. Mais pour répondre
très directement à la question du député,
premièrement, ni de près ni de loin, il ne peut être
question que l'UQAM soit en danger de quoi que ce soit qui l'empêche de
fonctionner convenablement ou qui l'empêche de faire sa croissance
normale, parce que je suis d'accord avec le député, c'est une des
universités qui sont encore en pleine croissance. D'autre part, je pense
que tout le monde se rend compte - et je suis sûr à l'UQAM comme
ailleurs - qu'il va falloir, tout en faisant des croissances ou, comme on le
dit assez souvent, du progrès quand même, essayer d'être le
plus rigoureux possible dans les gestions budgétaires et cela fait
partie des contraintes de la conjoncture que nous traversons.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je ne sais pas si le premier ministre se rend compte
que l'UQAM est, puisqu'on l'appelait l'université populaire, dans un
milieu populaire de Montréal et a grandi, a accru, augmenté ses
effectifs de façon spectaculaire, en fait, depuis quelques
années. Le premier ministre se rend-il compte que l'UQAM devra imposer
un contingentement sur sa clientèle, contrairement au voeu
d'accessibilité qui est exprimé par le gouvernement - ce sont des
voeux encore - si le gouvernement ne prend pas des mesures concrètes en
dehors de la formule de financement qui est actuellement appliquée?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): On vient de me souligner, M. le
Président, que le ministre de
l'Éducation devrait être ici dans guelques instants. Si le
député de Marguerite-Bourgeoys veut garder sa deuxième
question qui entre un peu plus - je m'excuse de l'expression - dans la
plomberie budgétaire, probablement que le ministre pourra y
répondre.
Le Président: Question principale, Mme la
députée de Chomedey.
L'avenir des COFI
Mme Bacon: En l'absence du ministre de l'Immigration, ma question
s'adresserait au premier ministre, M. le Président.
Il y a eu des crédits supplémentaires de 750 000 $ qui ont
été votés pour le ministère de l'Immigration et des
Communautés culturelles et, malgré ces crédits
supplémentaires, le budget de 1981-1982 demeure inférieur de
15,8% à celui de 1980-1981, malgré aussi les nouvelles
responsabilités relatives aux communautés culturelles qui lui ont
été attribuées au lendemain des dernières
élections. À nos yeux, cette baisse de 15,8% est d'autant plus
dramatique qu'elle s'effectue au détriment de l'élément
adaptation des immigrants. Il y a une baisse à cet élément
de 30% pour le budget de moins qu'en 1980-1981. Des 350 000 $ des 750 000 $ qui
sont votés, qui sont transférés, s'agit-il à ce
moment-là du financement du Comité d'implantation du plan
d'action à l'intention des communautés culturelles, ce qu'on
appelle CIPA, ou si on a décidé de financer les COFI? On sait
qu'il y a un problème au niveau des COFI. Est-ce qu'on continuerait de
financer le COFI Oliva-Asselin afin d'assurer sa survie et d'enlever
l'incertitude et l'inquiétude des gens qui travaillent et des gens qui
bénéficient de ses services? On a quand même fait une
promesse aux gens des COFI d'assurer leur survie. En même temps, est-ce
qu'on a trouvé, dans ces crédits, l'argent nécessaire pour
rouvrir le COFI de la Mauricie et le COFI Yvette-Chantrier?
Le Président: M. le ministre de l'Immigration.
M. Godin: J'ai manqué le début du préambule
et je m'en excuse, M. le Président. Quand on ne voyage pas en avion, on
arrive un peu en retard.
Je vais répondre à la partie de votre question que j'ai
entendue. Sur le COFI Oliva-Asselin, l'activité sera maintenue au
même niveau que l'an dernier, à peu de choses près. Quant
à celui de la Mauricie, il n'est pas question de le rouvrir parce que le
flot des réfugiés a beaucoup diminué pour les raisons que
vous savez, mais il n'a jamais été question que le Québec
soit fermé à tout jamais à un nouvel influx de
réfugiés si jamais la situation mondiale devait nous mener
là. Maintenant, je n'ai pas entendu le début de votre
question.
Le Président: Question additionnelle, Mme la
députée de Chomedey.
Mme Bacon: Mon inquiétude vient du fait qu'on a
coupé de 30% le budget au niveau de l'adaptation des immigrants. Je
pense qu'on sait l'importance d'une bonne adaptation des immigrants au
Québec, une nouvelle vie au Québec. On sait aussi que le
ministère a formé ce comité CIPA qui doit être en
action, j'espère, en ce moment et fournir les données
nécessaires au ministre pour continuer son travail. Est-ce qu'on a
l'intention d'augmenter ou de faire davantage au niveau de l'adaptation des
immigrants? (10 h 20)
Le Président: M. le ministre.
M. Godin: M. le Président, quant à l'adaptation, un
immigrant - comme vous connaissez très bien la définition - qui
vient ici avec un emploi en poche n'a pas à passer par le COFI et par
une phase d'adaptation puisqu'il rentre, par exemple, chez Pratt et Whitney ou
Canadair le lendemain de son arrivée ici. L'adaptation s'adresse surtout
aux réfugiés. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, le
nombre de réfugiés, suite à la diminution des
départs des pays du Sud-Est asiatique, a beaucoup diminué; c'est
ce qui explique que ça se reflète sur le budget et les services.
Il y a moins de réfugiés, donc il y a moins de budget pour
l'adaptation. Mais, si jamais il devait y en avoir plus, il y aura une
révision en conséquence.
Le Président: Question principale, M. le
député de Viger.
Conférence fédérale provinciale
sur le tourisme
M. Maciocia: M. le Président, le premier ministre a
annoncé récemment que le gouvernement du Québec n'avait
plus l'intention de participer aux conférences
fédérales-provinciales. Or, les 10 et 11 décembre aura
lieu à Ottawa une rencontre fédérale-provinciale des
ministres responsables du tourisme afin d'étudier un plan national du
tourisme élaboré par le ministre fédéral des
petites entreprises et du tourisme.
On sait que le gouvernement du Québec a diminué ses
crédits à la promotion touristique. On sait aussi que le
gouvernement du Québec est la deuxième province en importance
pour les entrées touristiques, après l'Ontario, et
qu'actuellement, elle est en décroissance et Dieu sait combien le
gouvernement actuel a besoin d'argent.
Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme. Est-ce que le gouvernement québécois a l'intention de
participer à cette rencontre?
Le Président: M. le ministre.
M. Biron: La réponse est non, M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Viger.
M. Maciocia: Comme je l'ai dit tout à l'heure, M. le
Président, on sait que le gouvernement du Parti québécois
n'est pas au bord de la faillite, mais presque, et que de l'argent est en jeu
actuellement sur ce plan touristique. On sait aussi que, jusqu'à
maintenant, le ministre ne nous a jamais informés s'il était
allé chercher de l'argent pour le Centre des congrès de
Montréal, la part que le gouvernement fédéral veut donner
pour la rénovation du Vieux-Montréal et à la modernisation
de certains centres de ski du Québec.
Je voudrais savoir si le ministre a l'intention, dans la situation
actuelle, de faire les démarches nécessaires pour aller chercher
à peu près 50 000 000 $.
Le Président: M. le ministre.
M. Biron: M. le Président, d'abord, je voudrais corriger
le préambule du député de Viger. Lorsqu'il dit que le
gouvernement du Québec a diminué ses crédits à la
promotion touristique, c'est totalement faux. Les crédits sont aussi
comptabilisés maintenant à plusieurs endroits et, en particulier,
au Palais des congrès de Montréal qui sert à l'heure
actuelle, en permanence, à des gens qui se promènent à
travers l'Amérique du Nord pour inviter les touristes et les agents
touristiques à venir au Québec d'une façon
particulière.
Quant aux sommes qui sont engagées par le gouvernement
fédéral pour nous aider à payer la construction du Palais
des congrès de Montréal, c'est exact qu'il y a une somme de 24
000 000 $ qui doit être transférée d'une journée
à l'autre ou d'une semaine à l'autre au gouvernement du
Québec. Si c'a pris un peu de temps, c'est que nous étions en
négociation avec les ministères fédéraux
concernés pour essayer d'obtenir plus que 24 000 000 $. Ces 24 000 000
$, c'est en dollars de 1978, selon le coût de 1978 du Palais des
congrès de Montréal. Maintenant que nous sommes en 1981, tout
près de 1982, nous estimons que cette somme devrait être d'environ
32 000 000 $, et c'est ce qui est en négociation.
À tout événement, nous avons décidé
de prendre les 24 000 000 $ en acompte et de continuer à négocier
pour des sommes additionnelles, si possible.
Quant au Vieux-Montréal, je pense que c'est une intervention que
le gouvernement fédéral voulait faire dans un domaine de
juridiction strictement provinciale et qui regarde les Affaires municipales. Je
pense que mon collègue des Affaires municipales pourra répondre
à cette question.
Pour ce qui est des sommes d'argent disponibles pour le ski, on est en
train de négocier avec le fédéral présentement. On
en est venu à une entente, mon collègue du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche et moi-même et on négocie présentement
avec le fédéral les sommes d'argent nécessaires pour la
promotion du ski au Québec.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Président: Question additionnelle?
M. Levesque (Bonaventure): Non, c'est simplement que le ministre
des Affaires municipales a été invité par le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme à donner un complément de
réponse.
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: Je crois que ce projet relève
plutôt du ministre des Affaires culturelles, à l'heure
actuelle.
Des voix: Ah!
M. Léonard: Le Vieux-Montréal.
M. Levesque (Bonaventure): II semble que, maintenant, ce soit au
tour du ministre des Affaires culturelles de donner un complément de
réponse.
Des voix: Ah!
Le Président: Est-ce que vous avez une question
additionnelle, M. le député de Viger?
M. Maciocia: Oui.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, lorsqu'il y a
confusion, comme on vient de le constater, c'est normalement le premier
ministre qui doit régler la question et répondre.
Des voix: Ah!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président,
comme ex-pionnier du Vieux-Montréal, ayant participé
modestement à une certaine relance qui s'accentue, tout ce que je peux
dire, c'est que j'encourage tous nos concitoyens à aller visiter cette
espèce de renaissance de la partie probablement idéale de la
métropole où, c'est vrai, le fédéral a des
intérêts, où, c'est vrai, la ville de Montréal est
de plus en plus intéressée et où, je crois, si tout le
monde y participait, on pourrait refaire d'un vieux centre-ville un
centre-ville flambant neuf avec vue sur le fleuve. Je crois que cela
mérite mieux que les plaisanteries faciles du député de
Bonaventure.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de
règlement.
Des voix: Ah;
Le Président: Question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux
protester immédiatement contre les dernières paroles du premier
ministre. Je ne pense pas que ce soit le cas, du moins de la façon dont
on a qualifié mes propos. Je dirai simplement que s'il y a plaisanterie,
c'est de voir de quelle façon le gouvernement sombre présentement
dans la confusion la plus totale.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, au ministre de
l'Éducation.
La situation financière de l'UQAM
(suite)
M. Lalonde: M. le Président, ce n'est pas une question
additionnelle. Étant donné que le ministre de l'Éducation
vient de nous rejoindre, j'aimerais rappeler la question que j'avais
adressée au premier ministre. J'aimerais la reformuler, M. le
Président. On sait ce que les promesses du ministre valent, étant
donné qu'il a été rabroué sévèrement
par le Conseil de presse pour avoir trompé la population en ce qui
concerne sa promesse de l'âge d'admission à l'école. Mais,
dans le cas de l'UQAM, il y avait eu promesse des fonctionnaires d'injecter 3
000 000 $ pour permettre à l'UQAM de passer à travers. Comme
c'était une promesse de fonctionnaires, on espérait que
celle-là serait respectée. J'aimerais demander au ministre ce
qu'il va faire pour s'assurer que la vie, que la croissance de l'UQAM ne sera
pas empêchée par les politiques de financement du gouvernement
actuel.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Laurin: M. le Président, l'Université du
Québec est dans une situation particulière, en ce sens qu'une
grande partie de sa clientèle est une clientèle adulte et des
adultes à temps partiel. Ceci peut expliquer pourquoi elle est en
croissance de clientèle d'une façon aussi considérable.
Par ailleurs, c'est aussi une université qui partage les
caractéristiques des autres universités québécoises
et, en ce sens, j'aimerais bien rappeler ici que le gouvernement du
Québec, depuis plusieurs années, fournit un effort financier
beaucoup plus considérable que ses voisins et même les
États américains, pour le financement de ses universités.
C'est près de 18% plus que l'Ontario, et on le comprend facilement
lorsqu'on compare la charge de cours des professeurs au Québec avec
celle des voisins, la taille des groupes-cours, lorsqu'on compare aussi la
rémunération des professeurs par rapport à celle de nos
voisins et celle des États américains.
Nous nous posons la question à savoir si la collectivité
québécoise entend continuer à accorder à ses
universités autant d'efforts financiers que ce qu'elle a fait dans le
passé. Pour ma part je serais enclin à répondre oui, mais
à la condition que nous rentabilisions davantage nos investissements, eu
égard à la fidélité à l'idéal
d'accessibilité et de démocratisation que nous avons toujours eu,
mais cela implique des réaménagements qui font justement l'objet
des ateliers que nous tenons à l'heure actuelle.
En ce qui concerne la situation particulière de
l'Université du Québec à Montréal, nous lui avons
donc demandé, comme aux autres universités, un plan
d'équilibre, un plan de redressement, pour les prochaines années.
L'UQAM a présenté ce plan d'équilibre et de redressement
au conseil d'administration de l'Université du Québec, mais ce
plan d'équilibre et de redressement ne m'a pas encore été
transmis. Aujourd'hui même, les autorités de l'Université
du Québec rencontrent les fonctionnaires, les officiers
supérieurs du ministère de l'Éducation pour étudier
en détail toutes ces questions et, en particulier, le financement des
nouvelles clientèles pour lequel nous avons fait des efforts
considérables au cours des dernières années. Il semble,
cependant, que ces améliorations que nous avons apportées ne sont
pas encore adéquates pour le financement complet de ces nouvelles
clientèles. (10 h 30)
À la suite de cette rencontre qui a lieu ce matin, je crois que
je serai en mesure de pouvoir enfin travailler d'une façon pratique,
concrète, à une nouvelle proposition de financement des nouvelles
clientèles, de même que de redressement financier de
l'Université du Québec. Je crois être en mesure d'apporter
une nouvelle proposition
d'ici deux semaines.
Pour répondre maintenant à la question plus
particulière du député de Marguerite-Bourgeoys...
Des voix: Ah!
M. Laurin: ... en ce qui concerne la promesse qui a
été faite, effectivement, j'ai fait dire à
l'Université du Québec que le ministère de
l'Éducation était prêt à faire des efforts
particuliers pour l'amener à régler son problème,
précisément du fait que c'est une université populaire qui
remplit un rôle que ne remplissent pas, actuellement, d'autres
universités au Québec. Mais vous comprendrez qu'avant de
consentir cet effort financier additionnel nous voulions procéder
à cette évaluation rigoureuse de la situation actuelle en regard
de nos contraintes financières. C'est à la suite de cette analyse
rigoureuse et de cette discussion de diverses hypothèses que le
ministère de l'Éducation sera prêt à faire l'effort
financier nécessaire pour que l'Université du Québec
à Montréal continue d'assumer son rôle essentiel pour la
collectivité québécoise. Il n'y a personne plus que moi
qui puisse s'en réjouir.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Pour rendre cela digestible à tout le monde,
est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il est exact qu'à sa demande
des fonctionnaires du ministère de l'Éducation ont fait une
promesse d'injecter non pas des grands mots, des discours, mais 3 000 000 $?
Est-ce vrai que cela a été promis à l'UQAM qui, elle, l'a
intégré à son plan de financement qui a été
refusé par le conseil de l'Université du Québec justement
parce que cette promesse ne semblait pas assez solide comme, souvent, les
promesses du ministre de l'Éducation sont un peu fragiles?
Le Président: M. le ministre.
M. Laurin: Nous avons promis à l'Université du
Québec à Montréal le support nécessaire, aux
conditions que je viens d'énoncer, et ce support arrivera très
bientôt.
M. Lalonde: Combien, M. le Président? Écoutez, il y
a des gens qui sont inquiets.
M. Laurin: Combien? Le montant dépend des discussions que
nous avons actuellement et qui sera nécessaire pour couvrir les besoins
de l'Université du Québec à Montréal.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question
additionnelle. Est-ce qu'il a été question d'un chiffre de 3 000
000 $?
M. Laurin: II a été question de quelques millions,
mais le montant exact sera déterminé en fonction des analyses que
nous menons et de l'étude de diverses hypothèses qui feront
l'objet de discussions au cours des prochains jours.
Le Président: Merci. Question principale. M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Le ministre des Finances était ici tantôt.
Est-ce qu'il est tout proche? Le voici.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
Caisses d'entraide économique et Mouvement
Desjardins
M. Ryan: Le gouvernement a déposé hier un projet de
loi sur le réaménagement des caisses d'entraide
économique. On sait que le gouvernement, dans ce dossier, jusqu'à
l'intérêt plutôt récent du ministre des Finances pour
ce mouvement, a fait montre d'une négligence extrêmement
répréhensible. Il était au courant des dangers qui
planaient sur le mouvement depuis au moins trois ans et a commencé
à agir quand la crise s'est déclenchée, au mois de mai
dernier. Au cours des derniers mois, on avait entendu dire que l'on recherchait
une solution du côté du Mouvement des caisses populaires
Desjardins. La solution que le ministre propose, avec le projet de loi no 40,
ne tient pas du tout compte des caisses populaires Desjardins. Je voudrais
demander au ministre, ce matin: Qu'est-ce qui s'est passé avec le
Mouvement des caisses populaires Desjardins, quelles sortes de discussions ont
eu lieu, où en sont les conversations actuellement? Le ministre a-t-il
conclu qu'il n'y a rien à faire avec les caisses populaires Desjardins
dans ce dossier et envisage-t-il, éventuellement, d'étendre aux
caisses populaires les mêmes avantages que ceux qu'il est en train de
proposer pour les caisses d'entraide économique?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, à l'éqard
d'une question aussi importante que celle-là, je suis un peu
navré que le chef de l'Opposition officielle - comment dire? - y mette
une touche qu'on me permettra de dire un peu partisane, à mon sens. Non,
on devra simplement reconnaître une chose, c'est qu'au moment ou
dès que j'ai été nommé ministre des Institutions
financières, j'ai eu ce dossier de façon immédiate et,
à toutes fins utiles, je dirais qu'une bonne
partie de mon travail à ce ministère, depuis que j'y suis,
est consacrée justement aux caisses d'entraide.
Mais pour revenir à la question que le chef de l'Opposition
posait, il y a au moins deux démarches à envisager. La
première consiste à donner l'assise juridique au plan de relance
que la nouvelle équipe de dirigeants des caisses d'entraide a mis au
point. Il y a eu un plan de relance, il a été examiné et
proposé par une équipe tout à fait nouvelle de dirigeants
des caisses d'entraide et, pour que ce plan de relance puisse fonctionner, il
faut évidemment des changements dans la structure juridique des caisses
d'entraide et il faut, d'autre part, un certain nombre d'avantages de
caractère fiscal sur lequel le gouvernement, d'ailleurs, s'était
déjà engagé depuis le mois d'août. Ce que j'ai
déposé hier à l'Assemblée nationale, c'est en somme
l'assise juridique qui permet au plan de relance, à ce que l'on appelle
communément maintenant le plan Dugal de fonctionner. Les membres de
chaque caisse d'entraide - il faut bien comprendre le sens de
l'opération - à l'occasion des assemblées du 30 janvier
vont avoir à déterminer si le plan de relance, appuyé sur
la loi que j'ai déposée hier, est intéressant pour eux ou
pas. Chaque caisse pourra en décider.
Parallèlement à cette opération, les caisses
populaires, le Mouvement Desjardins s'intéresse depuis
déjà passablement de temps à une formule qui pourrait
être une solution et on n'a pas, bien sûr, à
décourager une initiative comme celle-là. J'imagine que cela peut
être intéressant pour les membres de chaque caisse d'entraide
d'avoir un choix et ce ne serait pas du tout anormal ou aberrant qu'il en soit
ainsi.
Dans nos discussions avec le Mouvement Desjardins, nous en sommes, au
fond, à peu près à ceci. Je résume
brièvement, mais je pense ne pas trahir l'essentiel en disant ceci: Le
Mouvement Desjardins semblerait disposé à absorber les caisses
d'entraide, à faire une proposition à l'ensemble des caisses
d'entraide, mais à les absorber une à une dans chacune des unions
régionales et à les transformer, en somme, en caisses populaires.
Pour cela, le Mouvement Desjardins demande un certain nombre de garanties
d'ordre financier au cas où, dans une caisse ou dans une autre, la
valeur des prêts de l'actif masquerait des pertes possiblement plus
élevées que celles que l'on envisage à l'heure actuelle.
Ce n'est pas, en soi, une demande déraisonnable.
D'autre part, cependant, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire
à cette Chambre il y a déjà quelques mois, les caisses
d'entraide ont joué et peuvent jouer un rôle important sur le plan
du crédit industriel et commercial à la petite et à la
moyenne entreprise, surtout en région, pas tellement dans la ville de
Montréal ou dans la ville de
Québec, mais dans les régions. Cela a toujours
été, depuis plusieurs années, très important. Il
s'agit de savoir dans quelle mesure le Mouvement Desjardins, tout en absorbant
les caisses d'entraide, peut leur garder une certaine spécificité
sur le plan du crédit industriel et commercial. Nous en sommes
là. (10 h 40)
II y a eu plusieurs conversations entre le Mouvement Desjardins et moi
à ce sujet. Ils en ont eu d'ailleurs entre eux, les dirigeants du
Mouvement Desjardins. Je les ai vus, je pense, la semaine dernière,
enfin, il y a sept ou huit jours. Je dois les revoir à nouveau. Encore
une fois, il faut bien comprendre qu'il n'est pas question de donner au
Mouvement Desjardins - comment dire? -les mêmes avantages fiscaux puisque
cela ne se présente pas du tout de la même façon. Ce n'est
pas le même genre de capitalisation. D'ailleurs, il n'a jamais
demandé, dans le cas où il ferait une proposition d'absorption
des caisses d'entraide, les mêmes avantages fiscaux. Il demande certaines
garanties de type financier.
Je n'ai aucune espèce d'objection à poursuivre les
tractations avec le Mouvement Desjardins. C'est ce que je fais, d'ailleurs. On
essaie de le faire dans des conditions aussi raisonnables que possible et,
encore une fois, le texte de loi que j'ai présenté hier n'est en
aucune façon coercitif. Cela n'oblige pas une caisse d'entraide à
se transformer, mais, si une caisse d'entraide le veut, sur cette base
juridique, elle peut le faire.
D'autre part, s'il y a une proposition du Mouvement Desjardins que les
membres de telle ou telle caisse d'entraide ou de toutes trouvent plus
satisfaisante, ce serait normal qu'ils aient le choix.
À cet égard, le gouvernement cherche essentiellement, avec
les intéressés, à trouver un moyen qui permette, sous une
forme ou sous une autre, de consolider et de relancer les caisses
d'entraide.
Le Président: Question additionnelle, M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Tout d'abord une sous-question relative à un
reproche que le ministre m'adressait. Il m'a reproché d'avoir
injecté une certaine note de partisanerie dans le débat. Je vais
lui demander, au niveau des faits, s'il est vrai que le gouvernement avait dans
ses tiroirs, depuis le début de l'année 1978, un rapport qui le
prévenait presque en toutes lettres de tous les dangers qui allaient se
manifester trois ans plus tard et que rien n'a été fait pendant
ce temps-là? Est-ce que c'est vrai ou faux?
Je sais que le ministre a été nommé responsable des
institutions financières il y a
quelques mois seulement et il s'est occupé activement du dossier
depuis, mais il faisait partie du gouvernement avant ça aussi. Je
voudrais qu'il nous dise franchement si j'ai exagéré en disant
qu'il y avait un rapport très substantiel à la disposition du
ministre responsable et du gouvernement et que la Chambre ici n'en a jamais
été informée non plus que le public. Ce rapport contenait
à peu près tout le diagnostic qu'on pouvait désirer et de
très bonnes recommandations.
Deuxièmement, je lui demande très brièvement s'il
considère - j'ai vu qu'il avait l'esprit ouvert de ce
côté-là, j'en suis très heureux - qu'une forme ou
une autre de participation du Mouvement Desjardins à la solution du
problème des caisses d'entraide économique ne pourrait pas
être avantageuse en raison des ramifications extraordinaires du Mouvement
Desjardins, de la solidité financière de cette institution, qui
pourrait être extrêmement utile, en vue de faire face aux nouveaux
problèmes qui pourront se présenter pour les caisses. Je crois
comprendre qu'il n'a pas exclu cette possibilité et que la situation de
privilégier le projet de loi ne ferme pas nécessairement la porte
à de nouvelles démarches en vue de trouver des modes
d'intégration éventuelle.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Je pense qu'effectivement, le chef de l'Opposition
officielle vient assez bien de résumer ma position dans ce dossier, sauf
peut-être quant à dire ceci: Pour n'importe quel type
d'institution financière, il y a deux objectifs, l'un, c'est la
protection de l'épargnant; l'autre, c'est l'ajout ou l'appoint au
développement économique. Autant que faire se peut, il faut
essayer de préserver ces deux objectifs, c'est-à-dire assurer la
protection de l'épargnant et, d'autre part, essayer de faire en sorte
que les caisses d'entraide continuent de jouer dans le domaine du prêt
industriel et commercial le rôle qu'elles jouaient jusqu'à
maintenant.
Il est évident que le plan de relance des caisses d'entraide met
davantage l'accent sur les deux objectifs. Il est clair que la démarche
du Mouvement Desjardins met davantage l'accent sur un objectif. Cela n'en rend
pas ses propositions mauvaises pour ça. Il faut, encore une fois, rester
aussi ouvert que possible. Je pense, encore une fois, qu'il ne serait pas
mauvais que les membres des caisses d'entraide, après tout, on ne parle
pas seulement ici des institutions, ce sont des individus, il y a presque 400
000 personnes qui sont impliquées dans cette affaire. Il est très
important qu'elles puissent examiner rationnellement des options et se
décider le mieux possible. C'est, je pense, essentiellement le sens de
l'action que je cherche à mener. Maintenant, quant aux documents, au
rapport dont a été saisi le ministère des Institutions
financières dans le passé à ce sujet, je reconnais
volontiers ce que dit le chef de l'Opposition. Je reconnais aussi, cependant,
qu'il y a eu rapports et contre-rapports, il y a eu beaucoup de papiers, dans
un sens ou dans l'autre, qui se sont accumulés au fil des années.
J'ai eu l'occasion d'expliquer en Chambre ce que je pensais de ce nouvel emploi
dont j'ai hérité et les contraintes que représente pour un
ministère d'avoir eu, je crois - je ne me souviens plus très bien
du chiffre que j'ai cité à l'Assemblée nationale - onze
titulaires en quatorze ans. Cela ne simplifie pas les choses. L'important,
c'est de prendre les dossiers au point où ils en sont et de chercher
à régler les problèmes le plus rapidement possible. C'est
ce à quoi je m'occupe actuellement.
M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question
additionnelle.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, question additionnelle.
M. Lalonde: On sait que la Commission des valeurs
mobilières a accumulé un certain nombre de connaissances dans ce
dossier et le rapport de 1978, justement, émanait de la Commission des
valeurs mobilières. Est-ce que le ministre peut nous assurer qu'il
communiquera, s'il en existe, les recommandations... Je devrais commencer par
une autre question: Est-ce que le ministre a consulté la Commission des
valeurs mobilières sur l'à-propos des dispositions de son projet
de loi? Est-ce qu'il peut nous promettre de communiquer à la Chambre,
avant l'étude de ce projet de loi, les recommandations de la Commission
des valeurs mobilières à ce propos?
Le Président: M. le ministre.
M. Parizeau: Je dois rencontrer le président de la
Commission des valeurs mobilières, cette semaine, sur une certain nombre
de sujets, dont celui-là. Je pense que ça ne créera aucune
espèce de difficulté, quand nous passerons en commission,
d'indiquer le point de vue de la Commission des valeurs mobilières
à cet effet. Cela me semblerait une démarche tout à fait
raisonnable.
M. Gratton: Question principale.
Le Président: Question principale, M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Merci, M. le Président.
Le Président: Par la suite, M. le député
de Richelieu, en espérant que vous soyez plus rapide.
Difficultés financières de Camp Gatineau
Inc.
M. Gratton: Comme preuve, M. le Président, que la vitesse
ne tue pas toujours. Ma question aurait été adressée au
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, mais je ne sais pas s'il
est revenu d'Haïti. En tout cas, je souhaite vivement qu'il n'y soit pas
retenu ou détenu trop longtemps. En son absence, j'adresserai ma
question au ministre responsable de l'OPDQ, que ce soit le ministre
d'État à l'Aménagement ou le ministre d'État au
Développement économique. C'est au sujet du Camp Gatineau Inc.,
cette colonie de vacances pour personnes handicapées située dans
l'Outaouais qui accueille chaque année pas moins de 1200
handicapés de toutes les régions du Québec et qui est
menacée de mettre fin à ses activités à compter du
31 décembre si elle n'obtient pas une aide financière
substantielle qu'elle a demandée depuis longtemps au gouvernement du
Québec à même l'entente fédérale-provinciale
sur le développement touristique.
En février dernier, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche s'était engagé à négocier avec le
ministère de l'Expansion économique régionale
fédéral une enveloppe pour fournir une aide financière de
l'ordre de 450 000 $ pour éviter, justement, que cette colonie de
vacances ne ferme ses portes. Or, je suis informé, ce matin, que deux
des quatre employés permanents du Camp Gatineau ont dû être
mis à pied aujourd'hui. Je suis informé également que,
faute d'un engagement ou d'une assurance quelconque de la part du gouvernement
du Québec, le conseil d'administration maintient sa décision et
se voit dans l'obligation de mettre fin à ses activités à
compter du 31 décembre.
Ma question est donc la suivante: Quand le gouvernement pourra-t-il
indiquer au conseil d'administration ce qu'il entend faire pour tâcher de
maintenir cette colonie de vacances ouverte, compte tenu de l'engagement du
ministre responsable du MEER, M. De Bané, qui s'est dit tout à
fait disposé que le Québec puise, à même l'entente
qui existe déjà, les fonds nécessaires à partir
d'un projet qui n'est pas encore amorcé?
Le Président: M. le ministre d'État à
l'Aménagement. (10 h 50)
M. Gendron: M. le Président, je voudrais d'abord rappeler
au député de
Gatineau, aux collègues de cette Chambre ainsi qu'à la
population en général que le ministre d'État à
l'Aménagement, actuellement, est responsable du fonds de
développement régional, mais n'est pas le répondant de
l'OPDQ. Je suis obligé de mentionner au député de Gatineau
que je pourrais prendre avis de la question et faire des vérifications
en l'absence du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, parce
que le dossier dont vous parlez est la responsabilité du ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui devait faire des ententes, comme
vous l'avez mentionné, par rapport à l'entente auxiliaire
concernant les infrastructures touristiques. Je vais prendre avis de la
question et cela me fera plaisir demain de donner une réponse
précise à votre question précise: Qu'en est-il
exactement?
Le Président: Question principale.
M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Très brièvement. J'accepte volontiers
la réponse du ministre. J'aurais souhaité que le premier
ministre, responsable de l'OPDQ... Mais je conviens qu'il ne peut pas
être au courant de tous ces détails, quoiqu'il s'agisse d'un
débat quand même important en cette année internationale
des handicapés.
J'aimerais simplement demander au ministre d'État à
l'Aménagement qui prend avis de la question de prendre avis
également du contenu d'une lettre, dont je lui remettrai copie
après la période des questions, signée par M. De
Bané, ministre responsable du MEER, et qui se lit partiellement comme
suit. Il écrit au président de la Corporation du Camp Gatineau:
"Vous comprendrez mon étonnement alors que le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche souhaite voir l'inscription de ce
projet à l'entente. Devant cet état de fait et compte tenu de la
nature de cette initiative, j'accepterais volontiers de substituer un projet
déjà inscrit à l'entente, mais non amorcé, en
faveur de celui du Camp Gatineau."
Je demande donc au ministre de faire diligence pour qu'on donne à
Camp Gatineau, au conseil d'administration, l'assurance qu'ils pourront
continuer leurs activités une fois que la négociation aura
été terminée. Je demande également, M. le
Président, au ministre de prendre note du fait que, dans les
circonstances actuelles, sans aucun engagement de personne, le conseil
d'administration n'est même pas habilité à faire les
emprunts nécessaires pour maintenir ses dépenses
d'opération courantes. Donc, il y a extrême urgence.
M. Martel: M. le Président.
Le Président: Question principale, M. le
député de Richelieu.
Projet d'usine Renault au Québec
M. Martel: Le député de Richelieu, de ce temps-ci,
n'est pas tellement heureux des problèmes de bateaux. Ma question
portera sur les autos et elle s'adresse au ministre d'État au
Développement économique de même qu'au ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Elle a trait aux dizaines de millions
de dollars que s'apprête à investir la société
Renault au Canada dans la construction d'usines d'assemblage d'automobiles et
également de fabrication de pièces de ces automobiles.
J'aimerais demander à mes collègues, dans un premier
temps, quelles sont les mesures qui ont été prises jusqu'à
maintenant pour que le Québec ait sa part et contrebalance un peu les
pertes subies à la suite de la décision arbitraire du
gouvernement fédéral lorsqu'on a vu Volkswagen s'établir
en Ontario. À mon collègue, le ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme, j'aimerais demander s'il entend mettre la
Société générale de financement,
c'est-à-dire sa principale filiale, Marine Industrie, dans le coup,
à la suite de son programme donné par l'Assemblée
nationale de diversifier sa production. Compte tenu du haut taux de
chômage que nous connaissons dans la région du Richelieu, je pense
que Marine Industrie sera en mesure de mettre ses investissements en
application. Aussi, par le fait même, nous avons vu, depuis quelques
semaines, qu'il y a des gens à Montréal qui cherchent une
fabrique pour faire ce prototype de taxi qui s'appelle le CSM, qui semble
être un taxi révolutionnaire, voué à un
marché des plus intéressants en Amérique du Nord.
Le Présidents M. le ministre d'État au
Développement économique.
M. Landry: M. le Président, en plus de ce qu'a dit le
député, un des fondements du dossier québécois dans
cette affaire d'implication de la régie Renault, c'est que le
marché du Québec a toujours absorbé autour de 70% des
véhicules Renault vendus sur le marché canadien, ce qui est une
incitation purement économique à la régie Renault de
considérer l'espace québécois comme lieu de fabrication
des véhicules.
Cependant, ce n'est pas encore en ces termes-là que cela se
présente. La régie Renault, comme chacun le sait, a acquis le
constructeur américain American Motors, qui possède
déjà ses installations aux États-Unis, bien sûr, et
en Ontario pour quelques ateliers. Ce qu'il s'agit de savoir maintenant, c'est
le contenu québécois que donnera la régie Renault aux
véhicules qu'elle fabriquera en Amérique du Nord, dans
l'état actuel des informations, ni au Québec, ni dans le reste du
Canada, mais aux États-Unis. De ce point de vue, sans pouvoir faire
d'annonce formelle, les nouvelles sont relativement bonnes. D'abord, depuis des
mois, avec l'ancien gouvernement français comme avec le nouveau, au
niveau ministériel comme au niveau des fonctionnaires, les contacts du
Québec ont été très bien établis. J'ai
moi-même rencontré les autorités supérieures de la
régie Renault en décembre 1980, de même que le ministre de
l'Industrie et de l'Économie en France à l'époque, M.
Monory, et nous les avons sensibilisés vigoureusement, si je puis dire,
au problème.
Au changement de gouvernement, lors de la visite au Québec de M.
Rocard, le sujet de la régie Renault a été inscrit en
tête de liste de nos entretiens et, la semaine dernière, le
secrétaire général associé du gouvernement au
Développement économique, mon sous-ministre, en fait, M. Jean
Vézina, était en France, au siège social de la
régie Renault, et c'est de l'ensemble de ces informations, plus le
travail fait par le ministère de l'Industrie et du Commerce et son
sous-ministre, qui a rencontré régulièrement les
autorités de la régie, que je tire ces nouvelles relativement
optimistes quant à un contenu québécois important
intégré à un véhicule Renault fabriqué en
Amérique du Nord.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de...
M. Biron: ... complément de réponse.
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: Le député de Richelieu avait
demandé aussi si la Société générale de
financement ou Marine Industrie pouvait être intéressée
à s'associer à Renault ou tout autre fabricant d'automobiles. La
réponse, bien sûr, M. le Président, c'est oui. Nous voulons
nous associer à l'entreprise privée partout ou c'est possible,
afin de créer de nouveaux emplois au Québec parce qu'on
s'aperçoit, dans le fond, que pour développer notre entreprise
chez nous, développer nos emplois, il ne faut pas trop compter sur le
gouvernement fédéral de ce temps-là, il faut surtout
compter sur nos propres moyens.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je pense que cela s'adresse au ministre d'État
au Développement économique. Dans un article paru
récemment dans la Presse au sujet de Renault, on disait
que d'après Renault le coût et de l'installation et de
l'opération ici au Québec, s'ils décidaient d'y installer
leurs usines de pièces de rechange, serait sensiblement plus
élevé que s'ils décidaient de les installer ailleurs. Ils
parlaient de quelques millions de dollars. Je demande au ministre si la
compagnie lui a expliqué la nature de ces excédents de
coûts pour cette compagnie qui est intéressée à
s'installer ici et, si oui, est-ce vrai que les coûts sont plus
élevés pour un investissement de cette nature? Si c'est le cas,
quelle est la nature de ces coûts plus élevés ici, au
Québec, qu'ailleurs?
Le Président: M. le ministre d'État au
Développement économique.
M. Landry: C'est très simple, M. le Président. La
question du député est bien posée. La différence de
coûts vient du fait qu'ailleurs ils y sont déjà. Renault a
acquis American Motors et American Motors possède déjà des
ateliers de montage et de fabrication de pièces soit en Ontario, soit
aux États-Unis. Comme, à cause de la crise de l'automobile
nord-américaine, les surfaces de montage d'American Motors sont en
grande partie inemployées, cela coûte moins cher d'utiliser une
usine déjà en place que d'en construire une à partir de
zéro. Je pense que c'est l'essence même de la différence de
coûts dont parle le député.
Cependant, ce à quoi j'ai fait allusion dans ce que j'appelle les
nouvelles intéressantes, ce n'est pas l'ouverture au Québec d'une
usine de montage d'automobiles, c'est l'ouverture au Québec d'une usine
de pièces d'un type nouveau, donc, qui ne sont pas fabriquées
ailleurs. Là, la différence de coûts dont il parle n'existe
pas. Au contraire, il y aurait plutôt une différence en faveur du
Québec parce qu'il s'agirait de pièces en aluminium et, pour
aller un peu plus loin dans le raisonnement, greffé sur une autre
implantation française sur laquelle nous comptons et pour laquelle les
nouvelles sont également bonnes, qui est dans l'aluminium.
Le Président: Fin de la période des questions.
Complément de réponse de la part du ministre des Affaires
sociales à Mme la députée de L'Acadie. (11 heures)
Négociations avec les médecins
omnipraticiens
M. Johnson (Anjou): M. le Président, pour revenir à
une question qui était posée hier par la députée de
L'Acadie au sujet des négociations et qui demandait des réponses
précises sur ces négociations, les voici. D'abord, j'ai
rencontré les présidents des deux fédérations dans
les semaines qui ont suivi ma nomination au mois de mai. Par la suite, dans le
cas des omnipraticiens, parce que je pense qu'il y a une distinction
extrêmement importante à faire entre les spécialistes et
les omnipraticiens dans ce dossier - la Fédération des
médecins omnipraticiens voulait d'abord traiter de certains
problèmes avant d'engager des discussions sur l'ensemble. C'est ce que
la fédération nous a fait savoir, notamment la psychiatrie
à Sainte-Croix de Drummondville, les urgences à Montréal,
les omnipraticiens pratiquant l'anesthésie en régions
éloignées et les omnipraticiens, de façon
générale, en régions éloignées.
Or, deux de ces dossiers ont été réglés
pendant l'été; quant au troisième, nous avons transmis des
offres au syndicat, mais, jusqu'à maintenant, il n'a pas répondu
de façon favorable aux offres que nous lui avons faites. Quant au
dernier dossier, qui touche toute la question de la répartition des
médecins sur le territoire, comme on le sait, le projet de loi contient
certaines dispositions, les autres restant à négocier dans le
cadre de l'entente à renouveler.
Par ailleurs, le 19 août 1981, j'ai rencontré, en compagnie
du négociateur gouvernemental, M. Lucien Bouchard, et du sous-ministre
responsable des relations de travail au ministère, l'exécutif de
la fédération. C'était quelques jours avant le
départ du Dr Hamel et le Dr Czitrom, qui est le président par
intérim du syndicat, était présent à la
réunion. Nous avons échangé sur la perspective d'une
négociation qui n'aurait lieu qu'à l'automne et ils savaient -
ils n'ont pas à être surpris de cela - que la négociation
ne serait prête que pour l'automne. On leur en a parlé, je leur ai
même dit à ce moment-là, d'ailleurs, qu'ils ne devaient pas
compter sur cette négociation pour s'assurer d'une garantie absolue du
maintien de leur pouvoir d'achat.
Le 21 août, il y a eu, comme le 4, le 21, le 22 et le 27 octobre,
des réunions touchant les urgences à Montréal. Le 21
août également, le 15 septembre, le 18 septembre, le 27 octobre et
le 19 novembre, il y a eu des réunions concernant les omnipraticiens
anesthésistes, à la demande même du syndicat. Le 29
octobre, M. Lucien Bouchard, responsable de la négociation, en compagnie
du sous-ministre aux relations de travail et du représentant du ministre
des Affaires sociales à la table, a rencontré les
représentants de la FMOQ pour discuter de l'ensemble du dossier.
Par ailleurs, le 19 novembre, comme on le sait, j'ai
déposé le projet de loi et, ce jour-là, j'ai
communiqué avec les présidents des différents syndicats
impliqués ainsi que des différents ordres professionnels
impliqués et d'autres groupes.
Finalement, je voudrais apporter une
précision quant à quelque chose que j'ai
déclaré hier. Quand j'ai dit que le syndicat avait
déposé une brique, la FMOQ a déposé une brique en
septembre 1979. Or, après cette date, la FMOQ a accepté le
renouvellement d'une entente pour un an en acceptant de toucher seulement les
tarifs et la dimension pécuniaire. Comme il s'agit de montants de
l'ordre d'environ 350 000 000 $ et de santé publique, nous serons
prêts et nous continuons d'être prêts à
négocier avec le Syndicat des omnipraticiens, mais peut-être
faudrait-il qu'il revoie les documents qu'il a déposés en 1979.
Je présume qu'il a préparé des mises à jour,
étant donné que, de leur côté, les
spécialistes, eux, déposent régulièrement, depuis
un certain nombre de semaines, des documents qui sont des mises à jour
de documents antérieurs ou de nouvelles demandes syndicales.
Le Président: Une très courte question
additionnelle.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre a quand
même pris au moins cinq ou six minutes pour sa réponse.
Le Président: C'est la tradition pour les
compléments de réponse, une courte question additionnelle et une
courte réponse également.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Il semble confirmer le fait que les seuls
dossiers où on a négocié sont des dossiers très
sectoriels. Dans le cas de la situation des urgences ou des ambulances, je
pense que c'est à la demande du ministre et que, à ce
moment-là, la FMOQ a accordé la collaboration à laquelle
le ministre s'attendait puisque c'était un dossier très urgent et
très chaud pour lui et on en est arrivé à une entente.
Ma question précise est celle-ci: Est-ce que, à ce
moment-ci, le ministre peut nous dire si la FMOQ a été
convoquée pour une négociation touchant le renouvellement
général de son entente? Y a-t-il des rencontres de prévues
ou, selon l'autre hypothèse, la FMOQ a-t-elle refusé de se rendre
à des demandes de rencontres de négociation avec le
ministère?
Le Président: M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): D'abord, sur le fait qu'il n'y ait eu que des
discussions concernant ce qu'on appelle de petits dossiers ou des dossiers
sectoriels, il faut bien comprendre que c'était un préalable
syndical. Ce sont les syndicats qui nous ont demandé de disposer de ces
sujets avant de discuter de l'entente générale. Nous avons voulu
accepter cela.
Deuxièmement, je me suis entendu avec les présidents des
syndicats de médecins pour que nous ne négociions pas le
renouvellement général de l'entente durant l'été et
ils étaient d'accord. Ils étaient avertis et nous avons dit: Nous
en discuterons cet automne. Ils ont dit: Très bien, on comprend; vous
venez d'arriver au ministère, mais il est peut-être normal que
vous donniez des mandats, que vous exigiez des travaux particuliers et que vous
fixiez des objectifs comme nouveau responsable de ce dossier dans le
gouvernement. Ils ont accepté ça. Ils n'ont pas à jouer
aux surpris et ils n'ont pas à déchirer leurs vêtements
devant des assemblées syndicales dans les arénas. Ils le
savaient.
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur
une question de règlement.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai posé une
question courte et précise au ministre. Est-ce que son ministère
a convoqué - je ne parle pas de l'été, je le sais que vous
vous étiez entendus, mais en septembre et en octobre - la FMOQ pour des
rencontres de néqociations, est-ce que la FMOQ a refusé de se
rendre à ces rencontres en vue de la discussion du renouvellement
général de l'entente?
Le Président: M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Johnson (Anjou): ... les dernières personnes qui ont
annulé des rencontres, ce n'est pas nous, c'est le syndicat.
Deuxièmement, avant le dépôt du projet de loi, le 19 - et
je pense que la députée de L'Acadie, M. le Président,
devra accepter, je présume, avec votre tolérance, que je
relève les inexactitudes de ses préambules. Le 19, au moment du
dépôt du projet de loi, j'ai communiqué par
téléphone avec le Dr Desjardins, de la FMSQ, et le Dr Czitrom,
président intérimaire de la FMOQ, les omnipraticiens. À ce
moment, je les ai avertis que dès l'après-midi, au moment du
dépôt du projet de loi, il y aurait des représentants du
ministère des Affaires sociales qui leur donneraient les textes, qui
leur fourniraient les pochettes et seraient prêts à
répondre aux rencontres. Lors de cette réunion, M. Corbeil, mon
représentant - si vous voulez me permettre de répondre, je
comprends qu'on veut se faire les haut-parleurs du syndicat des médecins
en face, mais il y a peut-être des limites - lors de cette rencontre, M.
Corbeil, qui est le représentant à la table de la FMOQ, a
assuré les représentants syndicaux des
omnipraticiens qu'il était prêt, une fois qu'ils auraient
pris connaissance de ces documents, à discuter de tout sujet dont ils
voudraient discuter. Et la prochaine réaction que nous avons eue, c'est
le syndicat qui a émis un communiqué en disant qu'il ne
retournerait pas à la table de négociations tant que nous ne
retirerions pas le projet de loi.
Depuis ce temps, il organise des manifestations, il prépare des
élections à la tête du syndicat. Je présume
qu'après le 12 il fera autre chose que de marquer dans son bulletin:
Contester d'abord, négocier ensuite. Ce n'est pas le gouvernement qui
marque ça, ce sont les omnipraticiens. Contester d'abord,
négocier ensuite, dans un bulletin paru au mois d'octobre. Je
présume que quand le syndicat aura élu un président, un
nouvel exécutif, le cas échéant, après le 12
décembre, quand il sera venu faire sa parade à la commission
parlementaire ou à la porte de la commission parlementaire, on pourra
s'asseoir. Nous, on est prêt à négocier. On attend qu'il
nous suggère des textes.
M. Scowen: Question de règlement.
Le Président: Question de règlement, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Ce matin, M. le Président, le ministre de
l'Industrie et du Commerce a rendu publique une déclaration
ministérielle qu'il n'a pas envoyée à nos bureaux à
l'avance comme traditionnellement. J'ai deux petites questions...
Le Président: II n'y a pas eu de déclaration
ministérielle, ce matin, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. Il y a eu un dépôt de document. Non.
Période des questions, demain matin, 10 heures.
Motions non annoncées.
Enregistrement des noms sur les votes en suspens.
Qu'on appelle les députés.
(Suspension de la séance à 11 h 09)
(Reprise de la séance à 11 h 15)
Mise aux voix des motions de sous-amendement et
d'amendement
à la motion déterminant
les conditions sans lesquelles
le Québec ne peut accepter le projet
de rapatriement de la constitution
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Veuillez
prendre vos sièges. À l'ordre! Nous allons donc procéder
à la mise aux voix de la motion de sous-amendement de M. Levesque
(Bonaventure) qui propose que la motion d'amendement soit amendée en
retranchant tous les mots après le mot "femmes". Que ceux et celles qui
sont pour cette motion de sous-amendement veuillent bien se lever, s'il vous
plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Je pense que, pour quelqu'un qui nous
écoute à ce moment-ci, on ne sait pas du tout de quoi il s'agit.
Je pense qu'il serait important de lire la motion d'amendement...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): ... et de lire la motion de
sous-amendement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! La
motion d'amendement se lisait comme suit; c'était la motion principale,
une motion d'amendement de M. Dussault (Châteauguay) qui proposait que la
motion en discussion soit amendée en insérant dans le paragraphe
3, entre le sous-paragraphe b et le sous-paragraphe c, le sous-paragraphe
suivant qui se lisait: "L'égalité entre les hommes et les femmes,
pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire
prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence." Donc, le
but du sous-amendement est de faire disparaître tout ce qui se trouve
après le mot "femmes".
Que ceux et celles qui sont pour le sous-amendement veuillent bien se
lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure),
O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt, Mme Bacon,
MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln,
Paradis, Scowen, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau,
Polak, Maciocia, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss,
Dauphin, Hains.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Morin
(Louis-Hébert), Laurin, Bérubé, Landry, Lazure, Gendron,
Mme LeBlanc-Bantey...
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: ... MM. Marcoux, Biron, Godin,
Rancourt, Léger, Clair, Richard, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand,
Duhaime, Garon, Tardif, Léonard,
Fréchette, Baril (Arthabaska), Mme Harel...
Des voix: Oh!
Le Secrétaire adjoint: ... MM. Ouellette, Proulx, Mme
Lachapelle, MM. Vaugeois, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, de Belleval, Martel,
Mme Juneau...
Des voix: Oh, c'est à son tour!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: ... MM. Fallu, Grégoire,
Bordeleau, Leduc, Marquis, Charbonneau, Boucher, Beauséjour,
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Perron, Blais,
Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort, Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Champagne, Payne, Paré,
Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Dupré.
Le Secrétaire: Pour: 38
Contre: 70
Abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion rejetée. (11
h 20)
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Sur la motion d'amendement présentée
par le député de Châteauguay, est-ce que je peux proposer
le même vote, mais inversé?
Mise aux voix de la motion principale telle
qu'amendée
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette
proposition est adoptée? Adopté.
Nous allons la relire avec la motion principale.
Je relis la motion principale. Sur proposition de M. Lévesque
(Taillon), "que l'Assemblée nationale du Québec, rappelant le
droit du peuple québécois à disposer de lui-même et
exerçant son droit historique à être partie prenante et
à consentir à tout changement dans la constitution du Canada qui
pourrait affecter les droits et les pouvoirs du Québec, déclare
qu'elle ne peut accepter le projet de rapatriement de la constitution sauf si
celui-ci rencontre les conditions suivantes: "1. On devra reconnaître que
les deux peuples qui ont fondé le Canada sont foncièrement
égaux et que le Québec forme à l'intérieur de
l'ensemble fédéral canadien une société distincte
par la langue, la culture, les institutions et qui possède tous les
attributs d'une communauté nationale distincte; "2. Le mode d'amendement
de la constitution: a) ou bien devra maintenir au Québec son droit de
veto, b) ou bien sera celui qui a été convenu dans l'accord
constitutionnel signé par le Québec le 16 avril 1981 et
confirmant le droit du Québec de ne pas être assujetti à
une modification qui diminuerait ses pouvoirs ou ses droits et de recevoir, le
cas échéant, une compensation raisonnable et obligatoire; "3.
Étant donné l'existence de la Charte québécoise des
droits et libertés de la personne, la charte des droits inscrite dans la
constitution canadienne ne devra inclure que: a) les droits
démocratiques, b) l'usage du français et de l'anglais dans les
institutions et les services du gouvernement fédéral, c)
l'égalité - c'est l'amendement proposé - entre les hommes
et les femmes, pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de
faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence d)
les libertés fondamentales, pourvu que l'Assemblée nationale
conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa
compétence, e) les garanties quant à l'enseignement dans la
langue des minorités anglaise ou française, pourvu que le
Québec reste libre d'y adhérer volontairement, puisque sa
compétence exclusive en cette matière doit demeurer totale et
inaliénable et que la situation de sa minorité est
déjà la plus privilégiée au Canada; "4. On donnera
suite aux dispositions déjà prévues dans le projet du
gouvernement fédéral concernant le droit des provinces à
la péréquation et à un meilleur contrôle de leurs
richesses naturelles."
Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever,
s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Morin
(Louis-Hébert), Laurin, Bérubé, Landry, Lazure, Gendron,
Mme LeBlanc-Bantey, MM. Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, Léger, Clair,
Richard, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Duhaime, Garon, Tardif,
Léonard, Fréchette, Baril (Arthabaska), Mme Harel, MM. Ouellette,
Proulx, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, de
Belleval, Martel, Mme Juneau, MM. Fallu, Grégoire, Bordeleau, Leduc,
Marquis, Charbonneau, Boucher, Beauséjour, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Perron, Blais, Blouin, Gauthier,
Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort, Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Champagne, Payne, Paré,
Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Dupré.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure),
O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme
Bacon, MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières,
Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier,
Rocheleau, Polak, Maciocia, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss,
Dauphin, Hains.
Le Secrétaire: Pour: 70 Contre: 38
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion adoptée.
Avis à la Chambre, M. le leader.
Recours à l'article 34
M. Lalonde: M. le Président, en vertu de l'article
34...
Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 34,
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: En vertu de l'article 34, M. le Président. Il
s'agit du projet de loi sur l'Assemblée nationale. On sait qu'un
avant-projet de loi avait été déposé il y a
déjà un an et demi, il avait été
étudié par une sous-commission de l'Assemblée nationale
à deux reprises, des indications sérieuses avait
été données ce projet de loi serait étudié
pendant cette session. Je demanderais au leader s'il a l'intention d'inviter
l'Assemblée nationale à étudier ce projet de loi sur
l'Assemblée nationale bientôt, c'est-à-dire avant
Noël. S'il y avait des difficultés concernant un chapitre ou
l'autre, par exemple le salaire des députés ou des choses comme
ça, serait-il possible de diviser le projet de loi pour que les
dispositions qui sont prêtes à être soumises, surtout celles
concernant la réforme de l'Assemblée nationale, pour permettre
aux députés de travailler, soient étudiées le plus
tôt possible?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: M. le Président, le préambule du
député est exact, un avant-projet de loi a été
soumis et étudié en sous-commission à deux reprises
d'ailleurs et, à ce chapitre, on peut dire qu'une bonne partie du
travail avait été fait, mais pas totalement, car, même dans
les aspects du cadre juridique de l'Assemblée nationale, on s'est
aperçu qu'au point de vue constitutionnel, par exemple, une bonne partie
du travail restait à vérifier, puisqu'il s'agit de la loi
constituante même de cette Assemblée.
Si le projet de loi n'a pas été déposé avant
le 1er décembre, donc si nous ne visons pas à le voir
adopté avant Noël, la raison fondamentale est la suivante: nous
sommes à écrire un tout nouveau régime de retraite
concernant les membres de cette Assemblée. Après avoir
tenté vainement -c'est ce qui a expliqué le délai - de
modifier, dans un sens ou dans l'autre, par une poignée ou par l'autre,
le régime de retraite que connaissent les membres de cette
Assemblée, le Conseil des ministres a pris la décision de
récrire d'une manière tout à fait complète un
régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale qu'on
appellerait un régime 2.
La mise en place de ce régime, sa texture, je dirais, de
même que le temps que ça prend à l'écrire sur le
plan juridique, afin que tous et chacun des droits et privilèges de
l'Assemblée y soient écrits sans aucune ambiguïté,
tout cela fait que nous ne croyons pas être en mesure de le faire pour
Noël; donc, nous profitons de l'ajournement d'après les
Fêtes, de janvier et de février, pour rédiger cet aspect et
le présenter dès la reprise de la session, après
Noël.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jean-Talon, en vertu de l'article 34.
M. Rivest: M. le Président, au sujet de la loi 22, Loi
modifiant la Loi sur la fonction publique, qui a, d'après les notes
explicatives, pour objet de fractionner l'unité de négociation
des agents de la paix, est-ce l'intention du gouvernement de convoquer une
commission parlementaire pour recevoir les différents groupes qui sont
sans doute intéressés à se faire entendre avant l'adoption
en deuxième lecture de ce projet de loi?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Non, M. le Président, ce n'est pas notre
intention, parce que à moins de me tromper, et que le
député me le prouve, je crois que la démonstration de la
situation est amplement faite depuis plusieurs mois. Il n'y a guère de
membres de l'Assemblée qui, s'ils s'en donnent la peine, n'ont pas
à portée de la main une documentation émanant d'un groupe
ou de l'autre de ceux qui sont en contestation actuellement, qui leur permettra
de prendre une bonne décision en cette matière.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député de Berthier, en vertu de l'article 34.
M. Houde: M. le Président, si je me reporte au feuilleton
d'aujourd'hui, à la lettre e), page 2, je lis: "Loi assurant la reprise
des services de transport par traversier entre Sorel et Saint-Ignace." M. le
leader du gouvernement, pourriez-vous me dire ce matin, à la suite de la
déclaration faite en Chambre hier disant, et je cite: "La
réalité est bien simple, nous espérons, encore à ce
moment, ne pas avoir à le déposer du tout, ce qui veut dire le
résultat concret d'une négociation qui a donné des signes
encourageants..." Je parle toujours du cas des traversiers. Je voudrais,
après les renseignements que j'ai pu obtenir ce matin, qu'à la
suite de ce qui s'est dit hier, d'après le leader du gouvernement
toujours... C'est qu'il n'y a eu aucune négociation hier, il n'y en a
pas encore ce matin au moment où je parle. (11 h 30)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, j'aimerais que vous posiez votre question, en vertu de
l'article 34.
M. Houde: Merci, M. le Président. M. le leader du
gouvernement, qu'entendez-vous faire aujourd'hui, après six mois de
grève bientôt dans ce fameux conflit? Assez, c'est assez!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Ce que nous entendons faire à la suite du bris
de négociation, hier midi, de tout espoir de tentative de solution, nous
allons écrire le projet de loi et le déposer demain matin.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laprairie, en vertu de l'article 34.
M. Saintonge: M. le leader, vous avez mentionné la semaine
dernière que vous deviez produire, avant la fin de la semaine, le mandat
confié au vérificateur concernant les fêtes nationales.
Est-ce qu'on peut l'attendre incessamment de même que les rapports
comptables pour la région de Montréal et celle du
Saguenay-Lac-Saint-Jean?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: C'est vrai, M. le Président, que j'ai fait
cette promesse aux députés. Le problème, c'est que mon
collègue titulaire de ce ministère n'est pas présent. Je
prends donc sur moi de lui fournir tous les documents disponibles demain
matin.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je remercie le leader pour la réponse qu'il
m'a donnée en ce qui concerne la Loi sur la Législature. J'ai
été interrompu. Je voulais lui demander une autre
précision. A-t-il considéré ou le gouvernement a-t-il
considéré la possibilité d'aller de l'avant avec le reste
du projet de loi, s'il est prêt, parce qu'il y a beaucoup de dispositions
qui intéressent beaucoup les députés, quitte à
suspendre la question des salaires ou des pensions? Je comprends le
problème de rédaction que le leader nous décrivait, mais
serait-il possible de déposer le plus tôt possible, avant
l'ajournement de Noël, le reste du projet pour que l'Assemblée et
la population puissent en être saisies, quitte à l'étudier
un peu plus tard?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Vous me demandez à ce moment-là de
revenir sur une préférence - je ne peux pas employer un autre mot
- que j'ai déjà exprimée aux membres de la
sous-commission, lorsque nous l'avons étudié, en ce sens que je
souhaite faire de cette loi de l'Assemblée nationale, cette
modernisation de la Loi sur la Législature, des droits et
privilèges de l'Assemblée, de leurs indemnités et de leur
régime de retraite, de notre pouvoir de convoquer des commissions
parlementaires, etc., une espèce de charte de l'Assemblée
nationale, c'est-à-dire la véritable loi constituante. Lorsque
quelqu'un ici au Québec ou ailleurs examinera le fonctionnement de cette
Législature et voudra savoir comment fonctionne l'Assemblée
nationale du Québec, ce sera un document auquel il pourra se
référer.
Je comprends que le député de Marguerite-Bourgeoys nous
dise: On pourrait faire tout un aspect de la question et le déposer
d'une manière et garder le chapitre des indemnités et des
régimes de retraite dans une autre loi, mais ma préférence
encore à ce moment-ci, M. le Président, est de faire une seule et
même loi avec l'ensemble de cette disposition.
Je croyais d'ailleurs, M. le Président, au moment où
j'avais exprimé cette préférence à la table de la
sous-commission, avoir rejoint l'opinion de plus d'un membre, y compris de ceux
de l'autre côté de l'Assemblée, ce qui fait que je ne vois
pas l'opportunité de changer d'opinion à ce moment-ci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avis à la
Chambre.
M. le leader.
Avis à la Chambre
M. Charron: Je voudrais indiquer à l'Assemblée que
nous appelons aujourd'hui le projet de loi no 16 qui concerne
Hydro-Québec. C'est un débat sur lequel nos amis ont
déjà télégraphié leur impatience
d'intervenir et qu'ils souhaitent faire selon les droits et privilèges
qui sont les leurs et que je respecte. Je me dois quand même d'indiquer
à ce moment-ci que, dès que ce projet de loi sera adopté
en deuxième lecture et aura été envoyé en
commission parlementaire pour son étude article par article, nous avons
l'intention d'appeler les projets de loi qui sont à l'article 7 et
à l'article 17 du feuilleton d'aujourd'hui et qui sont au nom du
ministre des Affaires municipales.
Or, quel que soit le moment où interviendra cette deuxième
lecture, ce sont les deux projets de loi qui suivront et j'inciterais
l'Opposition et les députés ministériels qui veulent
intervenir sur les projets de loi de nature municipale à se
préparer, puisque ce sont les prochains à venir.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, puis-je
demander au leader parlementaire du gouvernement s'il a mis de
côté l'étude du projet de loi auquel se
référait tout à l'heure le député de
Berthier, parce que apparemment il y avait urgence. Est-ce que ça devra
attendre?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Je ne peux indiquer maintenant, M. le
Président, le moment où j'appellerai la loi sur la traverse
Sorel-Berthier que je déposerai demain, qui est à mon nom, pour
une excellente raison qui est d'intérêt public et que je
m'empresse d'expliquer à l'Assemblée en espérant avoir son
approbation. Il est possible que le dépôt du projet de loi, donc
de la prise de connaissance du contenu de cette loi, ait un effet sur les
négociations et j'indique tout de suite qu'en déposant demain le
projet de loi je n'entends pas, du même coup, invoquer la suspension des
travaux réguliers de l'Assemblée. Évidemment, je ne le
déposerai pas pour le laisser au feuilleton pendant trois semaines. Je
vous donne tout de suite cette assurance, mais il me semble que le
dépôt du projet de loi justifierait une attente de 24 heures pour
voir si la connaissance de ce projet de loi a un effet. Si elle n'en n'a pas,
je crois que nous devrons nous résigner à intervenir d'une
manière que prescrit notre règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Affaires du jour, M. le
leader du gouvernement.
M. Charron: Alors, je vous prierais d'appeler l'article 9, M. le
Président.
Projet de loi no 16
Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture du
projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec. M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: M. le Président, nous entamons ce matin le
débat de deuxième lecture du premier projet de loi à
l'ordre du jour de notre régime sessionnel du mois de décembre.
Je voudrais dire au départ que j'éprouve une certaine
fierté, une fierté que je crois partagée par beaucoup des
citoyens de mon comté et de ma région, que ce soit un
député de Shawinigan qui aujourd'hui s'occupe
d'Hydro-Québec et qui s'occupe éqalement, à cette
Assemblée nationale, de piloter un des projets de loi les plus
importants pour ce qui est du présent et de l'avenir
d'Hydro-Québec.
Ce projet de loi couvre essentiellement cinq aspects de la
Société Hydro-Québec: d'abord, une nouvelle structure
financière; deuxièmement, la fin d'un régime d'exemption
fiscale; troisièmement, l'établissement d'une politique de
dividendes; quatrièmement, un changement dans l'établissement des
politiques tarifaires d'Hydro-Québec et, enfin, la possibilité
pour Hydro-Québec non seulement d'aider, mais de financer les programmes
d'économie d'énergie.
Vous allez me permettre, M. le Président, de faire un bref
historique et de nous rappeler qu'Hydro-Québec, durant les vingt
dernières années, a subi un changement considérable dans
sa taille, en particulier, dans l'ampleur de ses actifs, dans l'ampleur de ses
investissements. En regardant ce qu'est devenue Hydro-Québec
aujourd'hui, il faut bien s'arrêter et constater, ce que les
Québécois ont acquis, pour un versement de 300 000 000 $ et une
dette obligataire d'à peu près 300 000 000 $, par l'achat de sept
compagnies privées. Depuis 1963, HydroQuébec est devenue,
après presque vingt ans, la plus grande corporation de tout le Canada;
Elle est également devenue la plus importante compagnie de services
publics non seulement du Canada, mais de tout le continent
nord-américain.
Sur une échelle internationale, HydroQuébec, en termes de
capacité d'emprunt, est devenue énorme, c'est aujourd'hui le
quatrième plus gros emprunteur du monde entier, c'est-à-dire
après le Fonds monétaire
international, après la Bangue mondiale et après le
gouvernement de la Suède.
C'est donc dire que ce que d'aucuns, il y a 20 ans, envisageaient avec
une certaine anxiété, pour ne pas dire une certaine
inquiétude, lorsque le gouvernement du Québec avait
décidé de faire l'acquisition des compagnies privées
d'électricité, pour que les Québécois prennent en
main le développement d'une ressource naturelle fondamentale dans leur
économie, il faut bien le dire, après 20 ans, Hydro-Québec
en est devenue un fleuron. (11 h 40)
Je vous réfère, M. le Président, aux états
financiers de l'année 1980. Je vais donner quelques chiffres. Les
revenus bruts d'Hydro-Québec en 1980 sont de 2 443 586 000 $; ses
revenus nets sont maintenant rendus à 746 083 000 $; ses actifs, au fil
des années, ont grandi d'une façon vertigineuse et ont atteint en
1980 la taille de 18 012 459 000 $; les prévisions de croissance, quant
aux actifs d'Hydro-Québec, sur l'horizon 1985, font qu'Hydro, en 1985,
aura des actifs de l'ordre de 35 000 000 000 $. Il faut également dire,
qu'au cours des années, les réserves d'Hydro-Québec - ou
son équité - ont grandi au fil de sa croissance. En 1980, les
réserves d'Hydro-Québec atteignaient 4 374 109 000 $.
Il faut bien constater aussi qu'avec les investissements massifs qu'a
dû réaliser Hydro-Québec pour répondre aux besoins
de croissance, de la demande hydroélectrique des
Québécois, Hydro-Québec a dû emprunter au fil des
années, de sorte qu'aujourd'hui, sa dette à long terme est
à peu près au niveau de 12 000 000 000 $. Je rappelle
essentiellement qu'avec une réserve de 4 300 000 000 $, pour une dette
à long terme de 12 000 000 000 S, on voit tout de suite qu'il existe
là un rapport de 1 à 3 et c'est un ratio important à
retenir parce qu'on aura l'occasion d'y revenir, j'imagine, à de
nombreuses reprises au cours de ce débat.
C'est donc dire que le ratio de l'équité par rapport
à la dette à long terme, ce que, dans le jargon, nous appelons le
25-75, existe actuellement, il a toujours existé dans le passé,
il continuera d'exister dans l'avenir. Je rappelle essentiellement aussi qu'en
1980 et ça aussi ça apparaît aux états financiers
d'Hydro-Québec, ça peut être vérifié - Hydro,
avec 2 416 167 abonnés toutes catégories, a vendu, au total 104
000 000 000 de kilowattheures.
C'est donc devenu une grande entreprise. Ce qu'il nous faut maintenant
faire, c'est nous demander si une compagnie qui est devenue plus grande
qu'Alcan, Bell et Canadien National, quant à ses actifs, doit continuer
d'exister sans une structure de capital-actions. Nous avons donc pris la
décision de doter Hydro-Québec, en continuant l'entreprise, d'un
fonds social de 5 000 000 000 $; c'est-à-dire que 50 000 000 d'actions
d'une valeur nominale de 100 $ constitueront son trésor ou encore son
capital autorisé. Il va sans dire qu'avec la réserve dont j'ai
fait état tantôt, qui se chiffre aujourd'hui à 4 374 109
000 $, Hydro-Québec émettra au gouvernement du Québec les
actions qui seront détenues, comme c'est le cas dans toutes les
sociétés d'État, 43 741 090 actions au ministre des
Finances.
Hydro-Québec sera donc dotée d'une structure de capital
comme toute grande corporation en Amérique du Nord, d'autant plus
qu'Hydro-Québec est la plus grande, pour ce qui est des utilités
publiques, sur ce continent.
Hydro-Québec aura donc comme tout le monde un capital-actions
normal. Il sera d'autant plus facile de faire des comparaisons d'un chiffrier
d'états financiers d'une corporation par rapport à l'autre. Je
suis convaincu, M. le Président, qu'Hydro-Québec continuera de
grandir.
J'ai parlé tantôt de la croissance de ses actifs. Il est
bien évident que, dans la même proportion, ses revenus bruts vont
continuer de croître, ses revenus nets également. C'est un peu le
sens de toute cette restructuration financière que nous faisons dans le
projet de loi no 16, c'est l'essentiel de l'article premier du projet de
loi.
Dans un deuxième temps, nous voudrions qu'à partir du
moment où HydroQuébec devient une grande compagnie avec son
capital-actions, qu'elle devient en quelque sorte normale par rapport à
des entreprises qui pourraient s'y comparer, elle se place dorénavant
sur un pied d'égalité par rapport aux autres
sociétés d'État et aux autres corporations privées
d'utilité publique, c'est-à-dire qu'Hydro-Québec paie
comme tout le monde ses taxes et ses impôts.
Les libéraux nous reprochent que ce que nous faisons avec
Hydro-Québec constitue une opération de déguisement. Je
voudrais essentiellement rappeler que l'esprit et le coeur du projet de loi no
16 se retrouvent dans suffisamment de détails pour que l'on puisse
retrouver dans le projet de loi no 16 à peu près le
mot-à-mot, sur certains plans, du discours du budget du 10 mars dernier.
Je rappelle essentiellement que depuis de 10 mars dernier les électeurs
se sont prononcés. Je comprends que la restructuration de la
fiscalité applicable à Hydro-Québec n'a sûrement pas
été un des grands enjeux de la campagne électorale, cela
va sans dire, mais il est bien évident, par ailleurs, que le 10 mars
dernier, en toutes lettres dans le discours du budget, les intentions du
gouvernement ont été dites et très clairement
annoncées.
Hydro-Québec, comme toute autre
société d'État à caractère commercial
ou industriel, manufacturier si on aime mieux, comme la SGF, comme la SAQ,
comme SIDBEC, comme SOQUEM, comme REXFOR, paiera ses taxes et ses impôts.
Egalement, il n'y a jamais personne qui s'est demandé pourquoi Bell
Canada, qui est une compagnie privée d'utilité publique
placée en quelque sorte dans une situation de monopole, payait des
taxes. On n'a jamais entendu un discours nous dire qu'il n'était pas
normal que Bell Canada paie ses taxes foncières, paie ses taxes aux
municipalités, paie ses taxes de vente, paie sa contribution aux
régimes d'assurance-maladie; même chose pour les compagnies Shell,
Esso, Consolidated-Bathurst, Domtar; bref, tout le monde est sur un même
pied.
Combien de fois, combien de discours on a entendus je dirais dans les
milieux d'affaires en particulier, où très souvent,
vis-à-vis des sociétés d'État, on disait: Oui,
c'est bien beau, vos sociétés d'État font des profits,
mais elles ne paient pas leurs taxes et leurs impôts. Je crois pouvoir
rejoindre une des préoccupations du Conseil du patronat, par exemple, ou
encore des chambres de commerce qui ont toujours souhaité une
espèce d'égalité, une espèce de justice sur le plan
de la fiscalité. Je pense que c'est normal que dans l'avenir
HydroQuébec soit assujettie comme toute corporation privée ou
publique au paiement de ses taxes et de ses impôts.
Il faut bien dire que jusqu'à présent Hydro-Québec
payait une bonne partie, payait des en-lieu de taxes plutôt que de payer
des taxes foncières aux commissions scolaires locales ou
régionales ou encore aux municipalités, que, bien sûr,
Hydro-Québec payait sa contribution d'employeur aux régimes
d'assurance-maladie. Ce que le projet de loi vient ajouter, c'est que, quant
aux autres taxes, Hydro-Québec sera comme tout le monde, pour en
particulier la taxe sur le capital.
Je suis convaincu que mon collègue des Finances, qui aura
l'occasion d'intervenir dans ce débat, va toucher beaucoup plus en
profondeur cet aspect-là. J'ajoute cependant qu'Hydro-Québec, par
cette restructuration financière que nous faisons dans sa loi en la
dotant d'un capital-actions, en disant que désormais Hydro-Québec
paiera ses taxes et ses impôts, devient un citoyen corporatif normal,
comme tout le monde. Et en ce qui est de la fiscalité, M. le
Président, c'est l'essentiel de ce que contient l'article 4 du projet de
loi. (11 h 50)
II faut bien dire cependant qu'Hydro-Québec, à la
différence des autres corporations, n'est pas assujettie au paiement de
l'impôt sur le revenu des corporations. Mais, M. le Président,
avec l'adoption du projet de loi no 16, désormais Hydro-Québec,
qui est devenue une entreprise très rentable, très bien
gérée, très bien administrée, d'une solidité
financière exemplaire, Hydro-Québec a maintenant atteint la
taille où elle se doit de contribuer elle aussi à
l'économie nationale, c'est-à-dire à contribuer, à
verser à ses actionnaires un dividende.
Entendons-nous bien là-dessus, M. le Président. Il ne
s'agit pas pour Hydro-Québec de payer un impôt au titre de la Loi
sur le revenu des corporations. Il ne s'agit pas d'un impôt sur le revenu
des revenus nets d'Hydro-Québec après dividende. Il s'agit
essentiellement, pour Hydro-Québec, de payer un dividende à ses
actionnaires. Et cela aussi, M. le Président, a été
très bien dit et très bien expliqué dans le discours sur
le budqet du 10 mars dernier.
Cette politique de dividende va permettre à tous les
contribuables québécois de voir le retour d'un investissement
fait il y a près de 20 ans. Pour à peu près 600 000 000 $,
je le rappelais tout à l'heure, Hydro-Québec faisait
l'acquisition de sept compagnies privées d'électricité.
C'était au cours de l'année 1963. Cet argent, qui a
été investi, depuis bientôt 20 ans, a rapporté des
profits et ces profits, au fil des années, ont été
accumulés et ont été versés en réserve
à Hydro-Québec. Cette réserve est d'aujourd'hui de 4 374
109 000 $ et c'est à partir de cette réserve plus ces emprunts
qu'Hydro-Québec a investi massivement dans le développement
hydroélectrique du Québec.
Mais, M. le Président, il faut faire, je pense, une nuance
importante. Lorsque nous disons qu'Hydro-Québec appartient à tout
le monde, cela signifie qu'Hydro-Québec appartient à tous les
contribuables du Québec, non seulement aux consommateurs du
Québec, non seulement aux consommateurs
d'hydroélectricité, Hydro-Québec appartient à tout
le monde. Et ce n'est pas parce que je serais consommateur de 600
kilowattheures par mois ou encore de 900 kilowattheures par mois ou encore de
2000 ou de 3000 ou de 10 000 kilowattheures que je suis plus
propriétaire. La propriété d'Hydro-Québec n'a
absolument rien à voir avec le niveau de consommation que chacun d'entre
nous peut faire sur une base mensuelle ou sur une base annuelle.
Il est donc normal que ce ne soient pas les seuls consommateurs qui
bénéficient de l'existence d'Hydro-Québec parce que ce
sont tous les Québécois et tous les contribuables du
Québec qui en sont les actionnaires. Il est donc sain, normal et
parfaitement juste que tous les Québécois en retirent un
dividende. Et ce dividende, le discours sur le budqet du 10 mars dernier le
disait très clairement, sera versé au fonds consolidé.
Quand j'entends parfois l'Opposition, M. le Président, en
particulier sur la question tarifaire, j'essaie de comprendre son raisonnement
et je vais tenter de l'expliquer,
du moins du mieux que je peux le comprendre, et on aura l'occasion de me
répondre, j'en suis convaincu.
Lors de la dernière commission parlementaire, après avoir
fait tout un plat dans les premières minutes de la commission, nos amis
d'en face ont préféré partir en laissant un chiffre sur la
table. Plutôt que de parler de 16% d'augmentation, ce qui était la
proposition en discussion, les libéraux ont dit: II faudrait couper
ça en deux et proposer 8,3% ou 8,6%. Autrement dit, le tarif
hydroélectrique serait à peu près de cinq points en bas du
niveau de l'inflation.
Cela aurait eu comme résultat, bien sûr, que les
consommateurs d'hydroélectricité auraient épargné
d'autant sur leur facture, mais c'aurait eu aussi comme résultat de
commettre de graves injustices. Par exemple, il faut bien comprendre que les
citoyens du Québec, les consommateurs domestiques, consomment à
peu près 30% de l'électricité produite. Ils contribuent
à peu près pour une même proportion dans les ventes
d'Hydro-Québec. Les grandes entreprises, quant à elles, les
multinationales, les grands commerces, les moyens comme les petits, les tarifs
grande puissance, moyenne puissance et petite puissance fixés d'une
façon aussi artificielle vers le bas, c'aurait eu pour effet que les
plus riches dans notre société auraient payé le moins cher
leur électricité.
Cela aurait également eu pour effet secondaire directement
relié de priver les moindres consommateurs de revenus légitimes
et, par voie de conséquence, de les priver du juste retour de leurs
investissements dans Hydro-Québec en atténuant leurs dividendes.
Ce dividende sera donc déclaré chaque année et
versé au fonds consolidé. Est-ce qu'il y a là, en soi, un
scandale? Je rappelle qu'en Alberta, où on a mis sur pied le "Heritage
Fund", ou le fonds du patrimoine, concernant les revenus du pétrole et
du qaz, qui sont des ressources non renouvelables, 70% des revenus fiscaux du
gaz et du pétrole sont versés au fonds consolidé. Au
Québec, il s'agit d'une ressource renouvelable. Il est donc normal que
ces dividendes soient versés entièrement au fonds
consolidé.
Je rappelle à nos amis d'en face que le discours sur le budget
disait ceci: Une partie des dividendes d'Hydro-Québec servirait à
financer et à être investie dans le capital-actions des
sociétés d'État axées sur le développement
économique et une partie servirait à financer les programmes de
développement économique pour soutenir l'effort de l'entreprise
privée. On en a eu des exemples encore tout récemment dans le
domaine, par exemple, des pâtes et papiers, dans le domaine du textile,
de la chaussure. Je voudrais essentiellement lire un paragraphe du discours sur
le budget, à la page 24: "Puisque les redevances que nous tirerons
d'Hydro-Québec proviennent de ressources perpétuellement
renouvelables, il est normal qu'elles soient versées au Trésor
public. Nous en affecterons dorénavant une partie à deux types
d'opérations reliées directement au développement
économique: d'une part, aux programmes de modernisation des entreprises
privées, qui prennent de plus en plus de place dans nos budgets et qui
doivent se développer bien plus encore et, d'autre part, aux
souscriptions au capital-actions des sociétés d'État au
fur et à mesure de l'évolution de leurs plans d'expansion."
Pour ce qui est des sociétés d'État, nous aurons,
au fil des années, à verser et à souscrire du
capital-actions, par exemple, dans la Société
générale de financement, très certainement dans la
Société nationale de l'amiante, très certainement dans la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières, certainement aussi dans la Société
québécoise d'exploration minière, SOQUEM. (12 heures)
Enfin, le but de cette espèce de recyclage du retour de nos
investissements dans Hydro-Québec par voie de dividendes aura pour effet
d'injecter de l'argent frais, de l'argent neuf, dans le développement de
nos sociétés d'État, en particulier celles axées
sur le développement des ressources naturelles, ce qui pourra
également aider les ministères à vocation
économique à financer et à mettre sur pied, grâce au
fonds consolidé, des programmes d'aide, de soutien et d'appui au secteur
privé.
Ce que nous retrouvons dans ce projet de loi, M. le Président,
c'est que nous ne voulons pas que qui que ce soit pense que le gouvernement du
Québec peut piger à pleines mains dans le trésor
d'Hydro-Québec sans aucune balise, sans aucun critère. Le projet
de loi est là-dessus très explicite. Vous allez en retrouver le
détail à l'article 3.
Bien brièvement, M. le Président, le dividende est
plafonné au départ à 75% -c'est l'article 15.2 - des
revenus nets d'exploitation et des revenus nets de placement, moins la
dépense brute d'intérêt. C'est un maximum. Année
après année, le gouvernement fera l'évaluation, une fois
que les états financiers pour l'année en cours auront
été connus, de ce qu'il serait souhaitable de déclarer
comme dividendes en provenance d'Hydro-Québec. Mais, en aucun cas ni en
aucune circonstance, ce dividende ne pourrait dépasser 75% du revenu net
d'exploitation plus le revenu net de placement moins les dépenses brutes
d'intérêt.
Deuxième volet, M. le Président, dans la loi
elle-même, et non pas par un règlement, nous ajoutons ce que
j'appellerais des balises. Nous mettons dans une loi deux critères que
les financiers d'Hydro-Québec connaissent très bien,
c'est-à-dire le ratio de
l'équité par rapport à la dette à long terme
et la nécessité de couvrir les intérêts par un.
Là-dessus, je l'ai expliqué tantôt, les réserves
d'Hydro-Québec sont de l'ordre de 4 300 000 000 $, son capital-actions,
une fois le projet de loi no 16 adopté, sera du même montant par
rapport à une dette à long terme de 12 000 000 000 $. Je pense
que cela est vite compté, 4 sur 12 ou 3 fois 1 ou 25/75. C'est la
situation actuelle et c'est la situation que les financiers, qu'ils soient des
États-Unis ou d'ailleurs dans le monde, examinent pour bien
vérifier, lorsqu'un placement est fait à Hydro-Québec,
lorsqu'on achète les obligations à long terme
d'Hydro-Québec, bien entendu, que la situation financière
d'Hydro-Québec, au fil des années, lui permettra de faire honneur
à ses obligations.
Je rappelle essentiellement que ce ratio de 25/75 est très
exigeant, que l'Ontario Hydro, par exemple, ne l'atteint pas à l'heure
actuelle, et BC Hydro non plus. Ce qu'il est important de bien souligner, c'est
que, sur ces deux critères, la couverture d'intérêt
à un et le ratio d'équité de dette à long terme ne
font en quelque sorte que transposer dans une loi ce qu'Hydro-Québec
connaît depuis 20 ans. À New York comme à Londres, comme
à Tokyo, comme à Düsseldorf, tous ceux qui s'occupent du
financement d'Hydro-Québec, qu'ils soient courtiers ou banquiers, parce
que beaucoup de gens s'occupent du financement d'Hydro-Québec - je le
disais tantôt - c'est le quatrième plus gros emprunteur sur cette
planète - tous le savent que, lorsqu'on regarde les états
financiers d'Hydro-Québec et qu'on veut faire du financement, ce dont on
veut s'assurer, c'est qu'il y aura toujours au moins une équité
ou un avoir propre qui appartient aux actionnaires, qui sera égal au
tiers de la dette à long terme, et, également, que les revenus
d'exploitation seront toujours au moins suffisants pour couvrir les
intérêts sur la dette courante. Tout le monde sait cela, sauf,
peut-être, les libéraux d'en face.
Ces deux critères, moi, en tout cas, M. le Président,
comme Québécois, me rassurent énormément, cela ne
me cause aucune espèce d'inquiétude. Nous sommes ensemble et
collectivement, vous comme moi, les propriétaires, et c'est avec
fierté que je le dis, d'une des plus grandes entreprises du monde. Il
n'y a personne au Québec qui va poser un seul geste, quel qu'il soit,
qui viendrait mettre en péril la solidité financière
d'Hydro-Québec, sa capacité d'emprunter, sa capacité
d'investir et sa capacité de s'administrer également.
Le projet de loi donne ces garanties. Il les donne non seulement
à Hydro-Québec comme telle, à son conseil
d'administration, mais surtout à nos concitoyens qui en sont les
propriétaires.
Ce projet de loi va également introduire ce que j'appellerais une
nouvelle mécanique dans l'établissement de la tarification
d'Hydro-Québec. Je lisais dans le Journal de Montréal d'hier des
choses assez étonnantes. Aussi bien en parler tout de suite parce qu'on
va en entendre parler pendant probablement une bonne partie de la
journée. C'est du lundi 30 novembre. M. Bélanger,
économiste et fiscaliste - c'est sans aucun doute le premier discours de
deuxième lecture de l'Opposition officielle sur le projet de loi - dit
ceci: "En ce qui concerne la position industrielle concurrentielle du
Québec, le Manitoba vient de geler ses tarifs
d'électricité pour cinq ans et ceux de l'Ontario ont
auqmenté d'environ la moitié des nôtres au cours des
dernières années."
Il n'y a rien comme dire seulement la moitié de la
vérité, M. le Président. C'est exact, ce qu'a dit M.
Bélanger, mais il aurait peut-être dû ajouter ceci: Le
gouvernement qui a gelé les tarifs d'hydroélectricité au
Manitoba était présidé par M. Lyon, qui vient de perdre
ses élections. Il y a peut-être un point d'interrogation
là.
Deuxièmement... Peut-être que vous devriez écouter
ceci, M. le député d'Outremont. Est-ce que vous savez que la
politique tarifaire du Manitoba constitue en soi de la folie furieuse? Un gel
des tarifs de l'électricité pendant cinq ans, ça veut dire
ceci. Que Manitoba Hydro renonce à des revenus légitimes à
un point tel, et vous vérifierez cela, que Manitoba Hydro fonctionne
à déficit. C'est le fonds consolidé du gouvernement du
Manitoba qui contribue, avec les revenus de tous les contribuables, qu'ils
soient consommateurs d'hydroélectricité ou non, peu importe leur
niveau de consommation. On prend l'argent dans les poches du monde pour
renflouer la Manitoba Hydro. Ce n'est pas le meilleur exemple.
Quand le député de Notre-Dame-de-Grâce dit que
SIDBEC accumule aussi des déficits, c'est vrai, mais je rappellerai au
député de Notre-Dame-de-Grâce que s'il avait
peut-être mieux conseillé son patron, l'ancien ministre de
l'Industrie et Commerce, M. Saint-Pierre, dans le temps, il n'y aurait
peut-être pas eu l'aventure de SIDBEC-Normines et on ne perdrait pas 35
000 000 $ ou 40 000 000 $ par année dans une pareille folie.
M. Scowen: Question de privilège. Une voix: II
répondra.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, d'une façon ou d'une autre, ce n'est pas à
vous à décider s'il y a question de privilège ou pas. (12
h 10)
Je suis obligé - on en a fait mention en cette Chambre - tout
d'abord d'écouter le début de la question de privilège
pour voir si c'en est une, car tout député a un droit qui doit
être respecté. J'ai cependant souvent dit qu'à
l'intérieur d'un discours, on peut avoir des divergences d'opinions et
c'est par le moyen d'une réponse à ce discours qu'on peut les
faire valoir. Mais, pour que je puisse déterminer si c'en est une, il
faut au moins commencer par l'écouter.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Mon nom a été mis en cause dans
l'affaire de SIDBEC-Normines et je pense avoir le droit, comme
député, de répondre immédiatement à son
argumentation, c'est très important. Premièrement...
M. Chevrette: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip, sur une
question de règlement.
M. Chevrette: Le député de
Notre-Dame-de-Grâce aura tout le loisir, pendant son discours, de
réfuter les allégations de notre collègue. Il n'y a aucune
question de règlement qui devrait être permise à ce
stade-ci sur le contenu. Il n'a pas été mis en cause comme
individu, absolument pas. Le député de Notre-Dame-de-Grâce
devrait répondre...
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est ce que j'avais
suggéré au député de Notre-Dame-de-Grâce,
c'est-à-dire de le faire à l'intérieur de sa
réponse, mais il reste quand même qu'il a commencé à
parler sur sa question de privilège et, pour le moment, je n'ai rien
entendu qui ne soit pas partie à une question de privilège.
M. Scowen: Merci, M. le Président. Le ministre a
suggéré que le député de Notre-Dame-de-Grâce
actuel, qui était, en 1975, fonctionnaire au sein du gouvernement
provincial, avait été impliqué directement dans la
décision du gouvernement de M. Bourassa d'aller de l'avant dans le
projet de SIDBEC-Normines. Je veux dire deux choses parce que je crois
important que ce soit très clair dans l'esprit de tout le monde.
Premièrement, même si j'étais là à
l'époque, je n'étais certainement pas partie à cette
décision; deuxièmement, cela a été fait en 1975, si
ma mémoire est bonne. Vous avez eu l'occasion de corriger la situation
en 1976, en 1977, en 1978, en 1979, en 1980 et en 1981; vous n'avez rien
fait!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je dois vous dire que c'est la largesse du
président qui vous a permis de bien situer le début, mais la fin
de votre argumentation n'était pas dans le cadre d'une question de
privilège. Le début de votre argumentation en était une,
mais la fin n'en était pas une. En conséquence, pour la
compréhension des gens de cette Assemblée, il vous aurait
été plus facile, je pense, de répondre à cette
question à l'intérieur de votre discours.
M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je ne voudrais pas
éterniser le débat sur la question de SIDBEC parce que ce n'est
pas le temps d'en parler, mais je ne laisserai certainement pas passer la
dernière affirmation du député de
Notre-Dame-de-Grâce et cela justifie exactement ce que j'ai dit dans un
premier temps: C'est avec des personnages dotés d'un pareil cerveau
qu'on se retrouve dans des fiascos financiers. Vous dites qu'on aurait pu
corriqer la situation en 1975, en 1976, en 1977, en 1978, en 1979, en 1980 et
en 1981. Je vous dis que c'est impossible parce que votre gouvernement avait
signé des contrats et que, de ce côté-ci, nous respectons
les contrats.
Des voix: Ah! Ah!
M. Scowen: M. le Président, question de
privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je voudrais bien savoir si c'est une vraie question de
privilège parce que, comme vous le savez, j'ai, comme président,
l'habitude de préserver le droit de parole de celui qui l'exerce en
vertu de l'article 100. Vous avez deux moyens de pouvoir corriger une
affirmation: le premier est de le faire pendant votre discours et le
deuxième est qu'à la fin du discours du ministre, vous pourrez
lui poser une question. Comme j'ai le devoir de protéger le droit de
parole, je pense que vous aurez amplement d'occasions, si vous différez
d'opinion avec le ministre, de faire valoir vos arguments.
Je voudrais bien que ce soit vraiment une question de privilège;
sinon, je vous arrêterai dès le départ.
M. Scowen: II a parlé de mon cerveau!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président, on avait compris qu'il
n'avait parlé de rien!
M. Gratton: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, sur une question de règlement.
M. Gratton: Oui, sur une question de règlement, M. le
Président, avec tout le respect que je vous dois. Vous avez
vous-même avoué que mon collègue de
Notre-Dame-de-Grâce, tantôt, a fait une question de
privilège qui en était réellement une, tout au moins au
départ. Il a voulu rétablir des faits qui n'ont rien à
voir avec ce débat, à toutes fins utiles, mais qui sont
évoqués par le ministre des Richesses naturelles. M. le
Président, je termine avec une phrase...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, vous savez très bien -non, ce n'est pas une question de
bâillon -qu'à l'intérieur de cette salle les gens se
parlent sans que j'aie la possibilité d'entendre, puisqu'ils sont assis
à leur siège et, dans certaines circonstances, qu'ils ne sont pas
assis à leur siège. Le ministre a compris comme moi, j'en suis
assuré, puisque mes oreilles sont attentives aux discours qui sont
prononcés, que le député de Notre-Dame-de-Grâce,
malgré qu'il n'ait pas le droit de parole, a prononcé le mot
SIDBEC et, en conséquence, le ministre, dans son discours, puisqu'il
était présent pour répondre aux questions sur
Hydro-Québec, a répondu à cette question. Maintenant, le
débat étant clos sur cette question, j'aimerais qu'on revienne au
débat de deuxième lecture sur le projet de loi no 16. M. le
ministre.
M. Duhaime: M. le Président, c'est vrai qu'il y aurait
peut-être des parallèles intéressants à faire entre
les déficits de Manitoba Hydro et de SIDBEC, mais cela pourrait faire
l'objet d'un débat, un vendredi, si le coeur vous en dit. On pourra se
reprendre. Je voudrais peut-être revenir à l'article du Journal de
Montréal.
M. Scowen: M. le Président, question de privilège.
S'il vous plaît...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce, selon un terme bien connu par les avocats, prima
facie, à première vue, comme on dit en français, je ne
vois rien qui a trait à une question de privilège. M. le
ministre.
M. Scowen: Je pose une question de règlement, alors. Je
vous pose une question.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, si je comprends bien, vous
avez demandé au ministre de ne plus faire allusion à la question
de SIDBEC dans son discours.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce, je dois vous dire que le ministre a le droit
d'être protégé quant à son droit de parole et je ne
voudrais pas, en aucune façon, dire qu'il y aurait eu obstruction
à son droit de parole, mais j'aimerais bien qu'on permette au ministre
de terminer son intervention d'une heure. En conséquence, M. le
ministre, vous avez le droit de parole.
M. Chevrette: Est-ce que je peux demander à mon
collègue, M. le Président, de ne pas faire exprès et de ne
pas parler du cerveau de Notre-Dame-de-Grâce.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, lorsque des interventions
viennent des députés libéraux d'en face sur des questions
de privilège j'espère que vous faites l'arrêt de la pendule
sur mon temps et que je ne serai pas pénalisé, parce que j'ai des
choses à dire.
Je voudrais peut-être revenir, M. le Président, à ce
que je disais tantôt, concernant le Journal de Montréal du lundi
30 novembre, dans lequel M. Rélanger que nos amis d'en face connaissent
bien, fiscaliste, économiste, que j'avais l'habitude de respecter, nous
parlait de l'Ontario. "M. Bélanger signale que le Manitoba vient de
geler ses tarifs d'électricité pour cinq ans -on en a
parlé tantôt - et que ceux de l'Ontario ont augmenté
d'environ la moitié des nôtres au cours des dernières
années. À preuve, écrit-il, elle sera de 9,6% en 1982, en
Ontario, ce qui est exact, M. le Président, comparativement à
16,3% au Québec, ce qui est également exact."
Il ajoute ceci: "Au train où vont les choses, de dire
l'économiste, l'avantage que nous avons encore sur notre proche
concurrent industriel fondra graduellement." Un citoyen du Québec qui
lit le Journal de Montréal en est induit à croire que si nos
augmentations tarifaires sont plus élevées que celles de
l'Ontario, d'une année par rapport à l'autre, non seulement il y
aurait un rapprochement, M. le Président, mais il y aurait un
dépassement. Ce que M. Bélanger sait et ce que M. Bélanger
aurait dû dire, en parlant des dernières années, il aurait
peut-être dû mentionner qu'en 1976 les tarifs de l'Ontario Hydro
ont augmenté de 22% et qu'en 1977 les tarifs de l'Ontario Hydro ont
auqmenté de 30,3%. Alors, si on additionne 30% et 22% vous pouvez penser
que ça va faire 52,3%, mais ce n'est pas exact. Cela donne 58% parce
qu'il y a un facteur composé. (12 h 20)
M. le Président, pour les années suivantes, pour
éviter des recherches aux gens d'en face, en Ontario, c'est en 1978,
9,4%, en 1979, 9,8%, en 1980, 8,6%, en
1981, 9,3% et cette année, 9,6%. Je vais vous faire la
proposition suivante: supposons que, l'année dernière, les tarifs
d'Hydro-,Québec avaient augmenté de 30,3% et qu'en 1979, les
tarifs avaient augmenté de 22%. M. le Président, quelqu'un qui a
une tête sur les épaules, qui compte avec un crayon et une feuille
de papier va se rendre compte bien vite qu'en prenant une pareille avance sur
la fixation des tarifs que les années qui vont suivre, on peut prendre
cela un peu plus "relax". Mais qu'est-ce qui s'est produit en Ontario? Pourquoi
l'Ontario a-t-il été obligé de grimper les tarifs comme
cela? Il y a eu du suréquipement et à tel point que le
gouvernement de l'Ontario a institué une commission royale
d'enquête pour savoir comment cela se faisait.
À l'heure actuelle, M. le Président, nous avons encore un
avantage comparatif marqué sur l'Ontario. Je vais me
référer essentiellement à la proposition tarifaire que
nous avons acceptée et qui est entrée en vigueur pour
l'année 1982. En quoi le projet de loi 16 vient-il influencer
l'établissement de la politique tarifaire au Québec? Pour la
raison suivante, M. le Président. La loi 41, qui est la loi constitutive
d'Hydro-Québec, dit ceci à l'article 22, tel qu'amendé,
c'est 22.1 tel qu'amendé, je crois, en décembre 1978: "Pour la
réalisation de ces objets, la société prévoit les
besoins du Québec en énergie et les moyens de les satisfaire dans
le cadre des politiques énergétiques que le lieutenant-gouverneur
en conseil peut par ailleurs établir."
Traditionnellement, de par sa loi, Hydro-Québec a toujours eu
comme politique d'établir un tarif suivant le plus bas prix possible, eu
égard à une saine gestion financière. Qu'est-ce que la loi
actuelle va dire, M. le Président? "Les taux et les conditions auxquels
l'énergie est fournie doivent être compatibles avec une saine
administration financière." La saine administration financière
implique que, nécessairement, Hydro-Québec dans la proposition
qu'elle fait au gouvernement et dans les travaux de la commission parlementaire
qui suit toujours le dépôt de la proposition tarifaire par
Hydro-Québec et ensuite, le Conseil des ministres, dans sa
réflexion, tiennent compte et doivent tenir compte si on parle d'une
saine administration financière, des taux d'inflation, des taux
d'intérêt qui influent sur les coûts d'exploitation, du prix
des énergies concurrentielles et aussi de la capacité de payer
des consommateurs.
Traditionnellement, il faut se rappeler -et cela remonte à peine
à deux ans - il faut bien comprendre que dans le bilan
énergétique, non seulement au Québec, mais partout
ailleurs, les prix des énerqies concurrentielles ont été
non seulement bousculés, mais complètement bouleversés. Il
faut bien se rappeler qu'en 1971, les cheikhs d'Arabie nous vendaient leur
pétrole 1,70 $ le baril et au'ujourd'hui, c'est 36 $. Il faut comprendre
aussi qu'à cette époque et jusqu'à il y a deux ans
à peine, il en coûtait moins cher pour chauffer sa maison au
mazout léger no 2, à l'huile, comme on dit, que de chauffer
à l'électricité. Il en coûtait également
moins cher pour les régions du Québec qui étaient
desservies de se chauffer au gaz naturel.
C'est donc dire qu'Hydro-Québec, depuis le tout début, que
ce soit depuis 1944 ou encore davantage, depuis 1963, a dû se battre sur
un marché concurrentiel, contre des formes d'énergie
concurrentielles qui, elles, ont toujours été, jusqu'à
tout récemment, meilleur marché que l'électricité.
Cela explique, bien sûr, que, pendant un certain temps, il y a même
eu des campagnes de promotion parce qu'il fallait qu'Hydro-Québec se
batte pour bâtir son marché. Mais, M. le Président, la
situation a bien changé. On ne peut pas établir pour toujours des
règles de fonctionnement et des règles du jeu, penser que
l'univers entier est immuable et que la planète a cessé de
tourner. L'inflation, par exemple, pour l'année 1982; les
fédéraux s'occupent de n'importe quoi, ils s'en occupent mal par
ailleurs, sauf de s'occuper de couper l'inflation et de couper les taux
d'intérêt. Un taux d'inflation plus élevé que 1% par
mois, depuis la crise économique des années 1929 et 1930, il n'y
a pas un Québécois et il n'y a pas un Canadien non plus qui se
souvient de ça. Mais, en 1982, l'inflation va être de l'ordre de
13%. Cette année, elle est de plus de 12%. Quand on dit qu'on tient
compte de l'inflation et de la capacité de payer, on en tient
effectivement compte dans la proposition tarifaire et le tarif qui est en
vigueur. Je vais m'expliquer, M. le Président.
La hausse moyenne, cette année, est de 16,7% dans le secteur
domestique. HydroQuébec nous demandait 17,5%, nous avons retenu 16,7% et
récupéré sur le tarif grande puissance. Faisons un
raisonnement simple sur les deux dernières années. La hausse
moyenne, en 1981, le tarif qui est en vigueur, est de 10,6%. Ce
tarif-là, je le rappelle, a été décidé en
1977 pour les années 1978, 1979 et 1980. Nous avons donc derrière
nous pour 1979, 13,9%, 13,6%, l'année suivante, et cette année,
en 1981, 10,6%. L'inflation est plus élevée que cette hausse.
Cette année, l'inflation est de 13%, nous allons donc
récupérer sur les deux années en tenant compte de la
capacité de payer. Ce que nos amis d'en face ne disent pas souvent mais
que les consommateurs, eux, comprennent, c'est le phénomène
suivant.
Le consommateur, au Québec, voit sur sa facture de 600 à
650 kilowattheures par mois - ce qui constitue à peu près le cas
de
99,9% de notre population - c'est-à-dire les besoins essentiels
pour éclairer sa maison, pour les appareils: radio,
télévision et possiblement une cuisinière
électrique. C'est le cas de 90%. La hausse ou le tarif de cette
année est de 13,2%. Ce même consommateur qui se sert de
l'électricité pour son eau chaude va comptabiliser 300 à
350 kilowattheures par mois de plus. C'est 71% des consommateurs; 71% des
abonnés domestiques à Hydro-Québec sont dans cette
situation; besoins essentiels, plus eau chaude. Quelle est la hausse pour 1982?
13%. Nous ne récupérons même pas le manque à gagner
pour l'année en cours. Nous avons dit: 13%, ce serait raisonnable,
compte tenu de la capacité de payer.
Ces consommateurs qui sont à l'hydroélectricité
pour leurs besoins essentiels et pour leurs besoins d'eau chaude, pour une
faible partie au Québec - et c'est ça qui est renversant, M. le
Président, parce que les libéraux n'ont pas encore compris.
Savez-vous, M. le Président, qu'il y a seulement 35% des
Québécois qui chauffent leur résidence à
l'électricité? Les autres sont à l'huile, comme on dit, ou
au mazout léger no 2 au prix que vous connaissez et qui va tripler d'ici
1986. Les libéraux sont des irresponsables lorsqu'ils nous proposent de
hausser le prix du chauffage à l'électricité de 8,3%
pendant que leurs amis fédéraux, avec des ententes avec les
provinces productrices, signent, pour 1981, 1982, 1983, 1984 et 1985, l'entente
de cinq ans qui va porter le prix du pétrole au Canada à 75% du
prix mondial ou à 85% du prix Chicago, 300%. (12 h 30)
En vertu de quelle intelligence économique est-ce qu'on donnerait
l'électricité, on braderait l'électricité? Vous
souhaiteriez peut-être qu'on fasse comme le Manitoba,
qu'Hydro-Québec marche à déficit et qu'à même
le fonds consolidé, on rembourse.
M. le Président, ça va sûrement intéresser le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y avait un petit papier
dans le Financial Post, tout récemment, que vous avez sûrement lu:
"We must pay full cost of electricity". Je vous dis tout de suite, M. le
Président, que je ne suis pas d'accord avec les 93 économistes
qui se sont réunis en colloque, en aucune manière, pour que, dans
l'immédiat, dans le court terme ou dans le moyen terme, au
Québec, on ajuste le prix de l'hydroélectricité par
rapport au coût marginal de production. Qu'est-ce que ça veut
dire? Qu'on ferait payer le coût réel, le prix Baie-James. C'est
vite compté, M. le Président.
La première phase des travaux de la Baie-James va donner 10 000
mégawatts, 15 000 000 000 $ ou encore 1 500 $ d'investissement par
kilowattheure. Si vous le prenez sur une base tarifaire, ça veut dire
vingt-neuf millième de dollar au kilowattheure. Si vous allez aux
états financiers d'Hydro-Québec, à la page F-22, pour les
sceptiques, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous allez
voir à Ventes et revenus consolidés, 1976-1980, pour
l'année 1981, le revenu moyen du kilowattheure, 0,02320 $. Notre
gouvernement n'a aucune intention, dans l'immédiat ou dans l'avenir,
d'ajuster le prix de l'hydroélectricité en fonction du coût
marginal de production ou encore du prix de construction du dernier
kilowattheure produit dans la dernière centrale construite. Mais on ne
partage pas ce point de vue. Je voudrais simplement lire un paragraphe, M. le
Président, et je n'ai pas la version française. Je vais vous lire
ça en anglais, tranquillement: "From the perspective of the 93
protesting economists, the electricity subsidy transmits the wrong price
signals to the marketplace, it encourages society to demand more electricity,
even when investment in conservation of natural gas could meet our energy needs
at a lower cost."
Fcoutez bien ceci: "To remove electricity's artificial advantage in the
marketplace", Lipsey - c'est l'économiste à la tête de ce
colloque, que vous connaissez sans doute bien - and his colleagues are
promoting the electrical equivalent to the world price for oil, replacement
cost pricing; electricity simply would be priced at the cost of a new unit of
electricity." 93 économistes. Nous ne partageons pas du tout ce point de
vue, M. le Président. Il faut cependant dire que, sur le plan de la
rationalité économique, sur le plan du coût réel de
l'énerqie, surtout que les énergies deviennent de plus en plus
concurrentielles, cela pourrait avoir un certain sens. Mais ça ne
tiendrait pas compte de la capacité de payer des consommateurs,
particulièrement ceux qui sont au tarif domestique.
Nous avons tenu compte de cette capacité de payer des
consommateurs. Ceux qui vont se plaindre le plus du fait qu'en 1982, par
exemple, le tarif général grande puissance, pour les contrats
normalisés parce que, pour les contrats dits particuliers qui ont
été signés par des gouvernements qui sont venus avant
nous, on ne peut rien y faire, mais sur le tarif grande puissance, pour les
contrats normalisés, la hausse, pour 1982, est de 20,3%. Cela nous
conserve quand même un avantage concurrentiel de 12 points par rapport
à l'Ontario. Vous vérifierez vos chiffres.
M. Bélanger nous donne un bon conseil, dans le même
journal. Je salue le chef de l'Opposition, le débat de deuxième
lecture a commencé hier, M. le député d'Argenteuil, dans
le Journal de Montréal. Donc, le journal rapporte ceci, concernant un
tarif qui inciterait les investissements: "À cet égard,
il signale qu'en maintenant des taux d'électricité aux
niveaux les plus bas possible, nous pourrions attirer davantage les industries
à haute intensité d'énergie, les alumineries en
particulier et l'industrie manufacturière en général."
Je suis un peu surpris que M. Bélanger n'ait pas
été informé qu'il y a au-delà d'un an le
gouvernement du Québec, lors d'une conférence de presse dont on
nous a même reproché l'emphase ou l'ampleur, a rendue publique une
politique de développement axée sur
l'hydroélectricité et, en particulier, dans le secteur de
l'aluminium. La politique tarifaire qui existe à l'heure actuelle dans
le secteur de l'aluminium, c'est la suivante: Nous offrons, sur une
période de vingt ans, le tarif grande puissance actuel. Nous allons
assurer à l'entreprise, dans le seul secteur de l'aluminium,
transformation primaire, que durant les vingt prochaines années la
hausse du tarif qui lui est applicable ne dépassera pas 10% par
année. Cela fait un an que c'est sorti, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Nous disons ensuite qu'il y a un escalier pendant la 21e, la 22e, la
23e, la 24e et, finalement, la dernière année. Il y a les cinq
dernières années de rattrapage qui font en sorte que, le premier
matin de la 26e année, le tarif alors en vigueur, tarif grande
puissance, bien sûr, revient.
Je sais que les libéraux ne sont pas d'accord avec cela. Ils ne
savent même pas que la politique tarifaire a été rendue
publique. Ce que nous entendons faire - la question est posée non
seulement au ministère de l'Énergie et des Ressources, mais elle
le sera très bientôt au Conseil des ministres - nous appliquons
cette politique dans le secteur des alumineries. Cela a donné un
résultat jusqu'à maintenant. La compagnie Reynolds a
décidé d'investir 500 000 000 $ à Baie-Comeau pour
moderniser ses installations actuelles et augmenter sa capacité de
production en prenant de l'expansion. Nous sommes, à l'heure où
je vous parle, sur le point de nous entendre avec le quatrième
producteur mondial d'aluminium, la compagnie Pechiney Ugine Kuhlmann.
J'espère que nos négociations vont aboutir, mais nous n'avons pas
l'intention de donner l'énergie, nous n'avons pas l'intention de la
brader. Je dirais que ce que nous visons, ce sont les investissements qui
apportent des capitaux, mais qui créent de l'emploi. C'est cette
souplesse nécessaire dans l'établissement d'une politique
tarifaire qu'apporte le projet de loi no 16. J'aurais une question à
poser à nos amis en face.
Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant, M. le
ministre.
M. Duhaime: M. le Président, si vous vouliez me donner
cinq minutes, parce qu'il y a eu beaucoup d'interruptions...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je n'ai aucun pouvoir, M.
le ministre...
M. Duhaime: Je suis convaincu que si on me donnait trois ou
quatre minutes...
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Consentement, M. le ministre. (12 h 40)
M. Duhaime: Un livre blanc a été publié par
nos amis d'en face. Je dois avouer au chef de l'Opposition que c'est moi qui ai
ajouté la couverture rouge, pour bien l'identifier. Il y a des pages qui
concernent l'énergie. Je voudrais, pour qu'on se retrouve, que vous vous
référiez à - je ne connais pas vos codes - ECVIII-2, et je
le cite - un attendu pour introduire la proposition. "Attendu que l'objectif
majeur de la politique du Parti libéral du Québec est
d'améliorer le bilan énergétique et la
sécurité des approvisionnements par une réduction
graduelle de notre dépendance envers le pétrole - je suis
parfaitement d'accord avec cela. C'est inscrit mot à mot dans le livre
blanc sur l'énergie publié en 1978 - par l'augmentation de la
pénétration du gaz naturel - on est d'accord - par l'utilisation
de l'énergie électrique, par des économies
d'énergie et par la recherche des énergies nouvelles"... On est
d'accord avec l'"attendu", mais je pense que le député
d'Argenteuil va convenir avec moi que son livre rouge, en particulier les bouts
sur l'énergie, a été publié après le livre
blanc de mon collègue, Guy Joron.
L'"attendu", à la page ECVIII-4, au niveau des économies
d'énergie et des énergies nouvelles, 4.1 dit: "En visant
l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel
énergétique - d'accord, écoutez bien ceci - à ne
plus maintenir les prix artificiellement bas et à aborder les
problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par des
mesures sociales plus appropriées."
M. le Président, je pense que je devrais avoir une
réponse. Je comprends, en lisant cela, qu'il n'y aurait plus de prix
artificiellement bas.
M. Ryan: Est-ce que je pourrais poser une question, M. le
Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de
l'Opposition, après son discours, vous aurez la possibilité de
prendre la parole. Ah! M. le ministre accepte dès maintenant? Allez-y
donc, M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Est-ce que le...
M. Duhaime: Vous me posez une question? J'en suis très
honoré.
M. Ryan: ... ministre pourrait dire s'il a trouvé dans le
livre rouge du Parti libéral un passage où nous disons que nous
sommes en faveur du prix international du pétrole, comme le gouvernement
actuel?
Le Vice-Président (M. Jolivet): ...
M. Ryan: Oui, parce qu'il veut prétendre que nous sommes
en faveur de la politique du gouvernement en matière de prix de
l'énergie, ce qui est entièrement faux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, en
terminant cependant.
M. Duhaime: Vous allez être capable de répondre, M.
le député d'Argenteuil.
M. le Président, en ce qui me concerne, pour autant que le
pétrole est importé de l'Ouest canadien, des Rocheuses, du
Venezuela, du Mexique, de l'Arabie ou d'où vous voudrez, le prix du
pétrole n'est pas fixé par le Québec. On est d'accord
là-dessus?
J'ajoute, pour l'information du député d'Argenteuil, que
le prix du gaz naturel, dans l'entente qui a été signée
pour cinq ans, est plafonné à 65% du prix du pétrole. Le
Québec n'a rien à voir avec cela.
Quand on parle du prix international pour le pétrole, oui, M. le
député d'Argenteuil, c'est ce vers quoi on s'en va et c'est
drôle qu'on y va drôlement plus vite après le
référendum qu'avant le référendum, par exemple,
parce qu'on a entendu pas mal de discours dans le genre le pied sur la "hose".
Jean Chrétien et compagnie, Lalonde et les autres disaient: Faites
attention, parce que, si vous répondez oui au référendum,
peut-être que M. Lougheed va mettre son pied sur la "hose", comme j'ai
entendu pendant des discours. C'est complètement ridicule.
M. le député d'Arqenteuil, ne me faites pas dire ce que je
n'ai pas dit. Moi je vous ai posé une simple question et je voudrais que
vous m'expliquiez tantôt ce qu'il y a dans votre intervention. C'est
marqué ceci: "À ne plus maintenir les prix artificiellement bas."
Je dois convenir que vous n'avez quand même pas la prétention, M.
le député d'Arqenteuil, de fixer à partir de votre
siège le prix du pétrole au Canada ou encore le prix
international du pétrole et le prix du gaz naturel. J'imagine que, si
votre parti s'occupe d'un prix quelconque dans le dossier de l'énerqie,
ça doit être le prix de l'hydroélectricité.
"À ne plus maintenir les prix artificiellement bas et à aborder
les problèmes de pauvreté qui pourraient en découler par
des mesures sociales plus appropriées." Moi je me rappelle, et vous
lirez la transcription de notre commission parlementaire.
M. le député de Saint-Laurent ne l'a pas dit, mais a fait
allusion au prix marginal de production; autrement dit, le prix réel
pour l'hydroélectricité. Quand votre livre blanc sur
l'énerqie, auquel j'ai ajouté un couvert rouge, parle de mesures
concernant les plus pauvres, moi ça m'amène à lire ceci.
Vous auriez l'intention, vous autres les libéraux, d'augmenter le prix
de l'hydroélectricité encore plus que l'inflation, d'approcher du
coût marginal de production et d'avoir des mesures sociales pour les plus
pauvres, les plus démunis, que ce soit sur le plan domestique ou au
niveau des entreprises.
Si je me trompe, je vais me lever de mon siège. Si M. le
député d'Argenteuil peut me donner une explication intelligente
à son papier, je vais me lever et je vais dire que je me suis
trompé. Mais c'est ma compréhension, d'après les papiers
que j'ai pu lire jusqu'à maintenant.
M. le Président, je terminerai ici en rappelant essentiellement
que sur le plan de 1' "attendu", dans ce document-là, on est
parfaitement d'accord avec ça. Non seulement on est d'accord, mais on
est en train de le réaliser. Par exemple, le bilan
énergétique; la part de l'électricité, on veut la
faire passer de 26% en 1976 à 42% en 1990, à 50% en l'an 2000. Ce
que je dis, c'est qu'on est en train de réaliser cet objectif beaucoup
plus vite que prévu. Dans le dossier du gaz naturel, 6% dans le bilan en
1976, nous visions de 12% à 14%. On est au niveau de 15% à 16% et
les optimistes parlent de 20%. Moi je voudrais demander au député
d'Outremont comment il pourrait faire en sorte de favoriser la
pénétration du gaz naturel si celui-ci est plus cher que
l'hydroélectricité.
Dans le dossier des économies d'énergie, le programme
d'économie d'énergie était en marche dans le secteur
résidentiel, Énergain était annoncé. J'aurais voulu
pouvoir développer ce point d'une façon un peu plus
détaillée sur les économies d'énergie. J'en ai
été empêché, je vois la pendule. Je voudrais
terminer en disant essentiellement ceci: Cette nouvelle structure
financière qu'introduit le projet de loi 16, cette nouvelle politique
d'équité fiscale pour Hydro-Québec par rapport aux autres
sociétés d'État et par rapport aux sociétés
privées d'utilité publique, une plus grande souplesse tant pour
Hydro-Québec que pour le gouvernement dans l'établisssement des
tarifs d'hydroélectricité, le soutien, l'appui et l'application
de programmes d'économie d'énergie et le financement des
programmes d'économie d'énergie, tout cela devrait faire en sorte
que nous puissions atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés
dans le livre blanc en 1978. Bien sûr, j'aurais voulu
parler du dossier nucléaire, mais je reviendrai
là-dessus.
Je termine en exprimant à l'avance mes remerciements, pour le
passé et pour l'avenir, pour l'étroite collaboration que le
conseil d'administration d'Hydro-Québec et son président ont eue
à mon égard et à l'égard de ceux de mon cabinet qui
suivent ce dossier. Vous allez me permettre également, M. le
Président, devant toute la population du Québec, d'exprimer toute
mon admiration à l'égard de M. Robert Boyd qui a servi
Hydro-Québec pendant 37 ans, qui a vraiment marqué
Hydro-Québec et qui a décidé aujourd'hui de prendre, ce
que j'appellerais, un repos bien mérité, le repos du guerrier. Je
voudrais exprimer toute mon admiration aux travailleurs d'Hydro-Québec,
ceux qui ont fait Churchill, ceux qui ont fait la Manie, la Manie-Outardes et
la Baie-James.
En terminant, avant que la question ne vienne de l'autre
côté, je dis: Soyez sans aucune inquiétude, le 15
décembre, un nouveau PDG prendra la relève à
HydroQuébec. Son nom sera connu en temps utile. Je voudrais lui
souhaiter la bienvenue à Hydro-Québec et lui dire qu'ensemble,
nous allons continuer à travailler pour qu'Hydro demeure notre fleuron,
un objet de fierté légitime pour tous les
Québécois. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, je demande la suspension des
travaux jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Adopté.
Suspension des travaux jusqu'à 15 heures, cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprise de la séance à 15 h 04)
Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous pouvez vous
asseoir.
La parole est au député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, j'ai écouté
avec beaucoup d'attention ce matin le ministre de l'Énergie et des
Ressources tenter de justifier les hausses accélérées des
tarifs d'électricité dans cette province par des théories
pseudo-énergétiques.
À ce sujet, il a emprunté d'ailleurs au ministre des
Finances un discours que ce dernier nous a servi dernièrement, lorsqu'il
nous a annoncé la hausse vertigineuse des taxes sur l'essence.
Paraît-il que c'est pour des objectifs vertueux que le ministre
des Finances et le ministre de l'Énergie se sont ligués pour
augmenter de 0,30 $ le gallon d'essence et pour augmenter, l'année
prochaine, les tarifs d'électricité de 16,3%. Paraît-il que
c'est pour favoriser les économies d'énergie.
En effet, comment convaincre les chauffeurs de taxi et comment
convaincre les commissions de transport qu'ils doivent, eux aussi, participer
à l'effort d'économie d'énergie. Il fallait y penser, et
le ministre des Finances et le ministre de l'Énergie ont trouvé
la solution. Comment convaincre les consommateurs d'électricité
qu'ils doivent arrêter de chauffer leur maison à
l'électricité, alors qu'il y a quelques années
Hydro-Québec, avec l'appui du gouvernement de ce temps-là, avait
justement encouragé tout le monde à utiliser
l'électricité?
Mais le ministre n'aura convaincu personne si ce n'est, bien sûr,
le ministre des Finances et lui-même, parce que tous et chacun ont
reconnu les véritables intentions du gouvernement. C'est transformer
Hydro-Québec en percepteur d'impôt. D'ailleurs, il est
significatif que les propositions qui nous sont faites dans ce projet de loi
dérivent directement, comme l'a dit si bien le ministre ce matin, du
discours sur le budget du mois de mars que le ministre des Finances nous avait
servi immédiatement avant les élections et qui, d'ailleurs, fut
critiqué par le premier ministre comme étant une catastrophe. Je
crois que tous ceux qui subissent les coupures budgétaires et qui ont
à faire face à toutes les incongruités de ce budget
reconnaissent que, réellement, c'est une catastrophe. Le projet de loi
no 16 dérive directement de ce discours sur le budget, et c'est
également une catastrophe.
J'aimerais, pour être un peu plus sérieux et avant d'aller
plus loin, poser la question: Qu'est-ce que c'est que la loi no 16?
Là-dessus, je crois que nous nous rejoignons des deux côtés
de la Chambre, c'est un projet de loi qui aura des répercussions
considérables sur Hydro-Québec, telle que nous la connaissons
maitenant. Nous sommes d'accord sur ce point.
Mais on peut se poser la question: Qu'est-ce qu'Hydro-Québec?
Qu'est Hydro-Québec pour les Québécois et les
Québécoises? Bien sûr, c'est la plus importante
société au Canada, 18 000 000 000 $ d'actif, M. le
Président, et cette société a été
classée par le Financial Post comme étant justement la
première société au Canada par ses actifs et par ses
réalisations.
Les Québécois sont fiers d'Hydro-Québec, parce
qu'ils en sont les véritables actionnaires depuis, bien sûr, la
nationalisation de 1963. À ce sujet, M. le Président, il faut se
rappeler que l'État n'a
pas investi un cent dans cette entreprise. Toutes les sommes
nécessaires ont été empruntées par
Hydro-Québec et ont été payées directement par les
consommateurs utilisant de l'électricité. C'est donc dire que
tous et chacun parmi nous, nous croyons que nous sommes les véritables
actionnaires d'Hydro-Québec et non pas l'État.
Les Québécois sont également fiers des
réussites technologiques d'Hydro-Québec, quand on pense aux
grands barrages et je pense, bien sûr, à Manicouagan V, au barrage
Daniel-Johnson, qui fut une des premières en Amérique du Nord et
qui a permis à nos ingénieurs d'aller vendre ces technologies
à travers le monde, et que l'on songe également aux lignes de
transport d'énergie à haut voltage qui furent les
premières au monde et qui, encore une fois, ont permis au Québec
d'acquérir une technologie que nous n'avions pas avant.
Les Québécois sont également fiers de l'impact
économique d'Hydro-Québec, parce que c'est une dimension, M. le
Président, qu'on oublie trop facilement. En effet, depuis que le Parti
libéral du Québec, qui était alors le gouvernement, a
lancé la Baie-James, les investissements d'Hydro-Québec ont
augmenté année après année pour atteindre
jusqu'à récemment 25% de tous les investissements qui se sont
faits au Québec. Et ceci a permis justement une création
considérable d'emplois qui a monté certaines années
jusqu'à 18 000 emplois. Tout cela a permis le développement des
grands bureaux de génie-conseil dont tous et chacun nous sommes si fiers
qui, à partir de cette technologie, à partir de ces grands
travaux, ont pu parcourir le monde et faire en sorte que notre technologie,
avec l'appui d'Hydro-Québec International, puisse ajouter à ces
retombées économiques.
Les Québécois sont fiers du fait qu'Hydro-Québec ou
je devrais dire, ils étaient fiers du fait qu'à venir
jusqu'à maintenant, les tarifs d'Hydro-Québec étaient,
comme on le disait, les plus bas au monde. J'en parlerai tout à l'heure
parce que je reviendrai justement sur la comparaison que le ministre a faite
avec l'Ontario, pour constater que, de plus en plus, nous aurons la vie
difficile au Québec puisque notre tarification, malgré ce qu'en a
dit le ministre ce matin, se rapproche dangereusement de celle de provinces
avec lesquelles nous sommes en concurrence pour attirer l'industrie. (15 h
10)
Les Québécois sont fiers de cette richesse naturelle, la
ressource hydroélectrique, qui leur appartient, ou qui leur appartenait,
devrais-je dire, qui nous permettait d'attirer des industries et qui,
justement, nous permettait de développer notre économie et de
créer de l'emploi. C'était et c'est encore, jusqu'à
l'adoption de ce projet de loi, un atout important de notre
développement économique.
Tout cela appartenait et appartient encore à tous les
Québécois. À vous, M. le Président, à nous
tous au Québec, à vous, monsieur, et à vous, madame, qui
m'écoutez présentement, tous, depuis la nationalisation, nous
étions et nous sommes encore actionnaires d'Hydro-Québec. Cela,
c'était avant la loi 161 Savez-vous qui sera, maintenant, le seul
actionnaire d'Hydro-Québec une fois que la loi 16 sera adoptée?
Curieuse coïncidence, alors que, jusqu'à maintenant,
c'étaient les 6 000 000 de Québécois, dorénavant,
nous aurons un seul actionnaire qui sera, vous le devinez, le ministre des
Finances. C'est une coïncidence, je dirais, tout à fait
extraordinaire que l'on puisse faire, par ce projet de loi, un changement
substantiel à la mission d'Hydro-Québec et faire en sorte qu'une
société qui appartenait à tous et chacun d'entre nous
devienne la propriété du seul ministre des Finances de la
province de Québec.
Pour quelle raison? C'est bien simple, c'est que le ministre des
Finances veut en faire une sorte de Société des alcools ou une
sorte de Loto-Québec, la société qui s'occupe de
Loto-Québec, dont l'existence ne se justifie que pour remplir les
coffres du gouvernement. Vous irez dans les comtés, vous irez dans les
régions et on vous dira que c'est un argument qui porte.
Une voix: On va voir si vous serez fort, vous, ce soir.
M. Fortier: Oui. Il s'agit là de la spoliation d'un bien
public. C'est le bris d'un contrat social existant depuis 1962 entre le
gouvernement et la population du Québec. À ce sujet, j'aimerais
citer ce que M. Lesage disait en 1962. On se rappellera toute l'importance
accordée à cette guestion, c'est-à-dire la nationalisation
des compagnies privées, il y a près de 20 ans maintenant,
lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se faire
plébisciter sur la question de la nationalisation de
l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre de
l'époque, l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection
de l'automne 1962, déclarait: "De quelle façon allons-nous nous y
prendre pour que les 5 600 000 Québécois deviennent les
propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés
de l'expansion économique de leur province,
l'électricité?" C'est un extrait tiré de la Presse du 6
octobre 1962.
La façon choisie, on la connaît maintenant. Ce fut une
élection qui permit aux quelque 5 600 000 Québécois de
devenir propriétaires et actionnaires de cette richesse naturelle. Or,
le gouvernement actuel tient-il compte de ces 6 000 000 de
Québécois qui sont maintenant actionnaires
et propriétaires de cette richesse naturelle? Je ne le crois pas,
M. le Président.
Quels sont les changements majeurs du projet de loi no 16? Quels
changements apporte-t-on à la Loi sur l'Hydro-Québec? Je viens de
parler d'un changement fondamental, c'est-à-dire d'un changement qui va
faire en sorte que les propriétaires ne seront plus les
Québécois, mais que le seul propriétaire sera le ministre
des Finances. Mais quels sont les changements qui affecteront
Hydro-Québec comme telle? Il y a, d'une part, la modification
substantielle à la mission d'Hydro-Québec, et vous me permettrez
de citer l'article 22, tel qu'il se lisait précédemment et tel
qu'il se lit maintenant. On disait, au préalable, depuis la
nationalisation de l'électricité, et même bien avant: "La
société a pour objet de fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux
citoyens du Québec aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière." J'insiste là-dessus: "... aux taux
les plus bas compatibles avec une saine administration financière." Que
dit l'article 22 maintenant, une fois que le projet de loi no 16 sera
adopté, si jamais il l'est? Il dit ceci: "La société a
pour objet de fournir l'énergie aux municipalités, aux
entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec." On
a enlevé un élément de phrase qui est essentiel et qui est
extrêmement important pour tous les actionnaires, pour tous et chacun,
tant que nous sommes.
Deuxièmement, il y a un changement substantiel. Il y avait
l'article 16 qui se lisait comme suit: "La société ne paie aucun
loyer ou redevance au gouvernement ni aucune taxe ou contribution en vertu de
la Loi sur les impôts; il en est de même des compagnies dont elle
détient au moins quatre-vingt-dix pour cent des actions." Ce sont, M. le
Président, deux changements extrêmement importants: changement
radical à la mission d'Hydro-Québec quant à la
nécessité pour elle de fournir l'électricité aux
plus bas coûts possible et, d'autre part, une facilité qu'on lui
donnait d'arriver à cet objectif en faisant en sorte qu'elle ne soit pas
assujettie à des taxes ou des dividendes, si ce n'est que pour des
montants très minimes.
Qu'est-ce que cela veut dire, M. le Président? Cela veut dire
que, dorénavant, Hydro-Québec n'a plus pour objet d'assurer aux
consommateurs et à l'industrie les meilleurs tarifs au monde, parce que,
il faut bien le constater, il y a une relation directe entre les charges
fiscales qu'une société doit supporter et le coût de
revient qui est généré par ces coûts, en plus des
autres coûts directs, et qu'en conséquence les prix de vente des
produits qu'une compagnie met sur le marché doivent être plus
élevés si ses charges fiscales sont plus
élevées.
Il s'agit là d'un changement substantiel de politique depuis la
nationalisation et depuis que tous les gouvernements ont limité le
fardeau fiscal d'Hydro-Québec justement pour permettre ces tarifs les
plus bas.
À ce sujet, j'aimerais vous lire une citation tirée du
rapport de la Commission royale d'enquête sur la fiscalité de
décembre 1965, c'est-à-dire deux ans après la
nationalisation, où on disait ceci: "On ne saurait donc relever les
redevances imposées présentement à l'Hydro-Québec
sans compromettre ou annuler les avantages mêmes de la nationalisation en
faveur de l'industrialisation des régions défavorisées car
une augmentation sensible des redevances de l'Hydro-Québec
entraînerait une hausse des taux de l'électricité, qui, tel
un nouvel impôt, frapperait la consommation des particuliers et
accroîtrait les frais d'exploitation des sociétés
industrielles."
C'est là où j'aimerais m'inscrire en faux contre
l'argument du ministre qui disait, ce matin: "Hydro-Québec est une
société comme une autre au Québec." Ce n'est pas vrai.
Hydro-Québec n'est pas une société comme une autre!
Mais s'il s'agit d'un changement si substantiel et si ce changement peut
amener des impacts négatifs sur notre économie, pourquoi le
gouvernement a-t-il alors agi de la façon qu'il l'a fait? J'y ai fait
allusion tout à l'heure, c'est bien sûr à cause de ses
difficultés financières, qui sont si importantes qu'il a
décidé d'imposer des taxes indirectes par l'entremise
d'Hydro-Québec. Malgré le fait que le ministre ne semble pas
aimer l'expert en fiscalité qu'est Marcel Bélanger, j'aimerais
quand même citer certains des chiffres qu'il a avancés parce que,
si j'avais avancé mes propres chiffres, on m'aurait critiqué,
mais comme Marcel Bélanger est une personnalité que tout le monde
reconnaît...
Une voix: C'est un libéral!
M. Fortier: Oui, c'est un libéral, mais un libéral
extrêmement compétent. C'est malheureux, mais je ne peux
absolument rien y faire si les personnes compétentes sont
libérales.
Une voix: Bravo! Bravo!
M. Fortier: Marcel Bélanger, dans ce tableau qui
résume le fardeau fiscal d'Hydro-Québec d'une façon
magistrale, a extrapolé jusqu'en 1985 en utilisant les données
qu'Hydro-Québec nous a fournies en commission parlementaire. Il y fait
état entre autres, du fait qu'Hydro-Québec paie des taxes
municipales. Depuis 1980, d'ailleurs, Hydro-Québec est soumise à
un impôt de 3% sur son revenu brut, ce qui augmente son fardeau financier
d'environ
50 000 000 $ à 60 000 000 $ depuis 1980. Depuis 1979,
Hydro-Québec est soumise à la taxe de vente sur les achats, ce
qui n'était pas le cas auparavant. Elle est soumise, bien sûr, au
financement des programmes de santé qui a doublé cette
année. Comme on sait qu'Hydro-Québec est un employeur des plus
importants au Québec, ce fardeau fiscal devient très
onéreux pour elle. (15 h 20)
Dorénavant, elle sera soumise à la taxe sur le capital;
comme j'en ai fait état il y a quelques minutes, elle était
exemptée de ces taxes jusqu'à maintenant et, dorénavant,
elle devra payer 100 000 000 $ par année comme taxe sur le capital. Bien
sûr, il y aura les dividendes qu'elle devra verser. Ces dividendes, l'an
prochain, seront plutôt minimes selon l'opinion du ministre des Finances,
soit de quelque 28 000 000 $. Il a, d'ailleurs, dit, lors du dépôt
du budget supplémentaire, qu'il était très
désappointé parce qu'il croyait que c'était pour
être bien plus élevé que cela. Mais en 1985 ces dividendes
pourraient être de l'ordre de 900 000 000 $.
Si vous additionnez tous ces chiffres, vous voyez que le fardeau fiscal
d'Hydro-Québec était, en 1978, en 1979 et dans les années
précédentes, de l'ordre de 50 000 000 $. Vous vous apercevez
qu'en 1980 ce fardeau fiscal a augmenté à 78 000 000 $,
c'est-à-dire une augmentation d'environ 60% et, ensuite en 1981,
à 176 900 000 $, c'est-à-dire une augmentation de 369% et ainsi
de suite.
Ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, de plus, les consommateurs
d'électricité doivent payer une taxe de vente sur leur
consommation électrique. Le ministre faisait des comparaisons, ce matin,
avec d'autres provinces; il a oublié de mentionner, ce qui est
extrêmement important, qu'en Ontario il n'y a pas de taxe de vente sur
l'électricité, mais nous en avons une, ici, au Québec, et
cette taxe de vente va en s'accroissant, puisque les tarifs électriques
iront en croissant durant les années qui viennent, et rapportera, en
1982, quelque 160 000 000 $.
Si vous faites le total du fardeau fiscal relié à
l'électricité, c'est-à-dire si vous ajoutez les taxes
qu'Hydro-Québec doit payer et la taxe de vente que les usagers doivent
payer, vous vous rendez compte que ce fardeau augmente d'une façon
vertigineuse. Ce fardeau qui était de l'ordre de 124 000 000 $ en 1978
passera à 455 000 000 $ en 1982 pour atteindre 2 500 000 000 $ en 1985.
C'est donc une augmentation vertigineuse qui fait que dans une période
d'environ cinq ans le fardeau fiscal est multiplié par environ 10.
Mais ce qui est encore plus significatif que les hausses de taxes qui se
sont ajoutées à Hydro-Québec, ces dernières
années et qui iront en s'accroissant d'une façon exponentielle
durant les années qui viennent, c'est le fait que si on compare le
fardeau fiscal imposé à Hydro-Québec à celui qui
est imposé à Hydro-Ontario, on s'aperçoit qu'en 1982, ce
fardeau fiscal ne sera que de 102 000 000 $ en Ontario et qu'il sera de 455 000
000 % au Québec.
C'est donc dire que le fardeau fiscal sera quatre fois plus
élevé au Québec qu'en Ontario. Il ne faut pas se
surprendre si Hydro-Québec se sent obligée d'augmenter ses tarifs
justement pour aller chercher ses revenus additionnels, pour pouvoir, par la
suite, refiler ces augmentations au gouvernement. Je reviendrai d'ailleurs tout
à l'heure sur la comparaison avec l'Ontario. À cause de ces
augmentations de taxes, de ces augmentations de la fiscalité qui sont
imposées maintenant à Hydro-Québec et qui sont
répercutées sur les tarifs, ces derniers deviendraient dans
l'avenir beaucoup plus élevés que ceux qui seront
pratiqués par notre province voisine. Bien sûr, le ministre qui ne
voulait pas accepter cette comparaison, ce matin, avec l'Ontario disait: Vous
savez, ce n'est pas une province avec laquelle on peut faire une comparaison
parce que le programme d'investissements n'est pas aussi important que celui du
Québec. Il nous a donnés certaines statistiques. Avec raison, il
nous a dit que les augmentations de tarifs d'Hydro-Ontario depuis cinq ans
n'avaient augmenté que de 57%.
Il est vrai qu'en 1976 et 1977, il y a eu des augmentations en Ontario
qui étaient extrêmement importantes. Depuis cinq ans, les
augmentations de tarifs en Ontario n'ont été que de 57%. Quelles
ont été les augmentations d'Hydro-Québec depuis que le
Parti québécois est au pouvoir, c'est-à-dire de 1977
à 1982? Elles ont été de 97%, M. le Président,
alors que l'inflation, durant la même période, n'était que
de 62%. Je ne ferai pas de comparaison avec Manitoba Hydro, puisque le ministre
nous dit que c'est une mauvaise comparaison, mais je la ferai avec
Hydro-Ontario.
Un chiffre qui ne trompe pas, M. le Président, c'est que les
hausses de tarif en 1982, au Québec, seront en moyenne de 16,3%, alors
qu'en Ontario, elles ne seront que de 9,6%. Mais ce qui est le plus
extraordinaire, c'est que si vous examinez le tarif domestique qui s'applique
aux usagers, vous constatez qu'en 1981 la différence était de
l'ordre de 15%, et ceci avant l'augmentation de 1982. Mais encore là, il
faut faire une remarque. Il faut dire qu'il y a une taxe sur
l'électricité au Québec, alors qu'il n'y en a pas en
Ontario. Et si vous prenez en considération la taxe de vente qui
s'applique au Québec ainsi que les hausses de tarifs qui s'appliqueront
en Ontario et au Québec en 1982, vous constatez que pour le tarif
domestique, la différence s'amenuise dangereusement.
En ce qui concerne la moyenne puissance - et c'est le tarif qui
s'applique surtout à la petite et à la moyenne entreprise - on
s'aperçoit, en examinant les tableaux que nous a fournis
Hydro-Québec lors de la dernière commission parlementaire, que
pour la puissance de facturation et la consommation-type - c'est le tableau 3
qu'Hydro-Québec nous avait donné - on s'aperçoit que pour
une consommation, supposons, de 200 000 kilowattheures, la différence
entre Hydro-Québec et Hydro-Ontario est très minime, en fait,
6359 $ contre 6767 $. Il y a un fait certain, c'est que les tarifs qui
s'appliquent même à l'industrie deviennent très voisins
l'un de l'autre.
Si l'on prend en considération le fait qu'il n'y a pas de taxe de
vente en Ontario, on peut dire avec certitude, M. le Président, qu'il y
a un grave danger que, très bientôt, les tarifs d'Hydro-Ontario
soient aussi bas que ceux du Québec et que les tarifs
d'Hydro-Québec les dépassent même dans l'avenir.
Malgré ce qu'a dit Hydro-Québec en commission
parlementaire, j'ai eu la curiosité, M. le Président, de faire
venir la soumission qu'Hydro-Ontario avait faite à l'Ontario Energy
Board. Comme vous le savez, M. le Président, en Ontario, on fait
l'analyse de la tarification d'une façon beaucoup plus sérieuse
qu'ici. Mon collègue, le député de Mont-Royal, pendant
plusieurs années, avait demandé que les études de
tarification soient faites par un comité d'experts, de façon
à protéger les contribuables, de façon à
protéger les consommateurs. Cela fait plusieurs années que cela
se fait en Ontario et l'on doit constater que les augmentations de tarif sont
beaucoup plus raisonnables que celles qui sont pratiquées au
Québec.
Le ministre nous disait ce matin: On ne peut pas faire de comparaison,
parce que Hydro-Ontario est suréquipée. Je ne comprends pas le
raisonnement du ministre. Si Hydro-Ontario s'est suréquipée et
si, justement, il y a un suréquipement qui fait qu'en Ontario il y a une
capacité de produire de l'électricité qui soit plus grande
que la demande de l'Ontario, il me semblerait, M. le Président, que la
tarification aurait dû augmenter davantage puisque l'Ontario devait subir
les immobilisations, l'intérêt, le paiement de capital qui
s'imposent dû au fait qu'ils étaient suréquipés et
qu'ils devaient payer ces coûts, alors même qu'ils ne pouvaient
vendre cette électricité aux consommateurs de l'Ontario.
Par ailleurs, j'ai comparé aussi, M. le ministre, les
investissements qui seront faits en Ontario en 1982. Chose assez surprenante,
parce que Hydro-Québec semblait nous dire qu'il n'y avait pas de
comparaison à faire, en Ontario, en 1982, les investissements seront de
l'ordre de 2 400 000 000 $, alors qu'au Québec les investissements
seront de 2 500 000 000 $. Il faut en conclure, M. le Président, qu'on
peut faire une comparaison avec l'Ontario, que les charges financières
auxquelles est sujette Hydro-Ontario sont très semblables à
celles auxquelles est soumise Hydro-Québec.
J'étais à Shawinigan en fin de semaine et des gens me
disaient: Vous savez, il paraît que le ministre de l'Énergie a
pris récemment la décision de s'acheter un poêle à
bois. Je le comprends, M. le Président - et c'est ça que ses
commettants m'ont dit, vous en avez deux poêles à bois - parce
qu'il savait, lui, quelles augmentations nous étions pour avoir en 1982.
Il a pris les devants. (15 h 30)
Lorsque le ministre fait des comparaisons avec le gaz, j'aimerais bien
que le ministre nous dise toute la vérité. Je voudrais porter
à votre attention, M. le ministre, que le communiqué de presse
que vous avez publié dernièrement annonçant l'augmentation
de 16,3% des tarifs d'Hydro-Québec en 1982 contenait un tableau qui
était faux lorsqu'on comparait l'électricité avec le gaz.
En effet, il y avait un tableau attaché - le tableau C - à votre
communiqué de presse qui semblait indiquer qu'en 1982 il en
coûterait quelque 10% meilleur marché pour se chauffer au gaz
plutôt qu'à l'électricité.
M. le Président, lorsque j'examine les chiffres, je constate
qu'il avait oublié d'ajouter au prix du gaz la taxe de vente sur ce
produit-là. Si vous ajoutez la taxe de vente qui s'applique au gaz
naturel, tout comme à l'électricité, on arrive à la
conclusion que la différence entre l'électricité et le
gaz, en 1982, sera de l'ordre de 3% ou 4%. Aussi bien dire qu'en 1982, à
toutes fins utiles, il n'y aura pas de différence. On peut se poser la
question si le ministre, en augmentant les tarifs d'électricité,
avait en tête cet objectif de favoriser le gaz, parce qu'il n'atteint
nullement son objectif.
Mais qu'est-ce qui s'est passé? Si les tarifs de l'Hydro-Ontario
deviennent semblables ou très proches de ceux d'Hydro-Québec, je
dois admettre, M. le Président, que je ne comprends pas. Encore
là, dans la documentation qui m'a été fournie par
l'Hydro-Ontario, je constate, comme tout le monde le sait d'ailleurs,
qu'Hydro-Ontario génère son électricité en
très grande partie par le nucléaire. 36% de
l'électricité est générée par le
nucléaire, 34% de l'électricité
générée en Ontario vient des produits fossiles comme le
gaz, le charbon, l'huile, le pétrole. La différence vient des
ressources hydroélectriques. Nous savions tous, M. le Président,
que nous avions des ressources hydroélectriques considérables.
Nous savions tous que ces ressources hydroélectriques
devaient nous donner en principe la tarification la plus basse au monde.
Comment se fait-il que nous en sommes presque au point où notre province
voisine aura une tarification à peu près semblable à celle
d'Hydro-Québec? Je crois, M. le Président, et ceci
mériterait une analyse -que, durant les quatre dernières
années, sous l'égide du Parti québécois, il a
favorisé des augmentations de tarification considérables et qu'il
désire en favoriser de plus grandes à l'avenir, ce qui explique
justement que nous sommes en train de perdre au Québec cet atout
considérable qu'étaient nos richesses naturelles, nos ressources
hydroélectriques.
J'essaie de comprendre pour quelle raison le gouvernement et le ministre
ont choisi ce moment pour accélérer les coûts
d'Hydro-Québec. Bien sûr, ils ont besoin d'argent, mais il y a des
impacts négatifs d'une importance significative. Il y a un impact
négatif, en premier lieu, auprès des consommateurs qui sont
déjà frappés par des taxes indirectes de toutes sortes,
qui doivent faire face à des augmentations du coût de l'essence.
Ils doivent également faire face à des hausses de tarif
d'électricité qui dépassent de beaucoup celles qui seront
effectives dans la province voisine.
Dans la Presse du mercredi 25 novembre, je vois que certaines personnes,
entre autres M. Maurice Théault, de Montréal, écrivaient
des lettres à l'éditeur. M. Théault disait ceci: "Alors
que le gouvernement péquiste se targue d'être davantage
social-démocrate que les administrations précédentes et
prétend établir un moins mauvais équilibre entre les biens
nantis et les mal nantis, en pratique, ce gouvernement approuve une structure
tarifaire d'Hydro-Québec qui pénalise davantage les personnes
âgées et seules, forcées à
l'austérité." On ne peut passer sous silence le fait que ces
augmentations, depuis cinq ans, et les augmentations
d'électricité dans l'année qui vient, vont frapper
durement certaines personnes qui ont de la difficulté à faire
face à la conjoncture économique.
Je rappelle, comme je l'ai dit tout à l'heure, que ce sont ces
gens qui sont les vrais actionnaires d'Hydro-Québec et non pas le
gouvernement. Ce qui est plus important pour l'avenir, c'est que cette
augmentation du fardeau fiscal d'Hydro-Québec l'empêchera de jouer
pleinement son rôle de moteur de l'économie. En fin de semaine
dernière justement, le conseil d'administration d'Hydro-Québec a
approuvé des coupures de 190 000 000 $ dans les programmes
d'investissement de l'an prochain.
En commission parlementaire, à la fin du mois dernier, M. le
Président, Hydro-Québec nous avait annoncé des coupures
budgétaires de l'ordre de 370 000 000 $. C'est donc dire qu'à
cause de la conjoncture économique et à cause des nouvelles taxes
qui seront imposées à Hydro-Québec, le conseil
d'administration a dû couper, pour l'an prochain, son programme
d'investissement de 560 000 000 $. Pourtant, Hydro-Québec, par
l'entremise de son trésorier, au mois de février 1981, lors de la
commission parlementaire, alors qu'elle nous présentait son programme
d'investissements, nous disait justement qu'il serait extrêmement
difficile pour elle de financer son programme d'investissements, puisque le
crédit devenait de plus en plus difficile à réaliser. M.
Lafond, le trésorier, nous disait justement qu'Hydro-Québec
aurait besoin de toutes ces ressources financières.
Comment comprendre, dans une telle situation, que le ministre des
Finances et que le ministre de l'Énergie n'aient pas prêté
attention à cette remarque d'Hydro-Québec, à cet
avertissement que le trésorier d'Hydro-Québec leur donnait?
Comment comprendre, alors que le chômage deviendra aigu l'an prochain et
pire qu'il ne l'est cette année, que le gouvernement fasse en sorte
qu'Hydro-Québec doive couper son programme d'investissements?
M. le Président, je ne comprends pas. L'autre jour, je parlais
justement avec mon collègue de Bonaventure qui me disait que plusieurs
de ceux de son comté qui allaient travailler à la Baie-James
depuis 1970 ont bien constaté et ont bien réalisé que le
voyage de retour qu'ils venaient de faire récemment serait le dernier
voyage puisque, la demande baissant, ils ne pourront plus retourner à la
Baie-James dans l'avenir. Ces travailleurs disaient au député de
Bonaventure: Cela va prendre un autre gouvernement libéral pour faire en
sorte qu'il y ait un autre programme d'investissements, pour faire en sorte que
les travailleurs puissent se trouver de l'emploi à l'avenir.
Bien sûr, ce matin, le ministre nous a dit que, malgré les
hausses de tarifs accélérées auxquelles seront assujettis
tous les clients d'Hydro-Québec, il est possible de faire des tarifs
d'exception. Il est vrai -nous le savons - que le gouvernement a adopté
une loi qui permet au gouvernement de négocier avec certaines
entreprises qui viennent s'établir au Québec et de leur donner
des tarifs plus avantageux qu'à ceux qui sont déjà
installés ici depuis plusieurs années. Il faut bien comprendre
que si le gouvernement décide de donner à la Reynolds une
tarification beaucoup plus basse que celle qui est pratiquée
normalement, le manque à gagner d'Hydro-Québec devra être
payé par quelqu'un d'autre. Ceci devra être payé soit par
nous, les consommateurs, ou par le gouvernement, par le biais des taxes.
À ce moment, on revient justement au même problème: le fait
d'augmenter la tarification d'une façon significative va sûrement
dans l'avenir empêcher le gouvernement d'être aussi
généreux qu'il a pu l'être dans le
Cet affaiblissement d'Hydro-Québec arrive dans une mauvaise
conjoncture. Mon collègue, le député de
Notre-Dame-de-Grâce l'a dit à plusieurs reprises, le Québec
s'affaiblit. Cet affaiblissement d'Hydro-Québec que l'on semble
provoguer arrive justement au moment où le Parti guébécois
a réussi ce tour de force de faire en sorte que, sur le plan
économique, la province se soit affaiblie beaucoup plus que le restant
du Canada. En effet, je constate - mes collègues connaissent ces
statistiques - que le chômage est beaucoup plus important qu'il ne
l'était sous le gouvernement libéral qui vous a
précédés - de fait, il est maintenant de 29% à
comparer au reste du Canada, alors qu'il était de 22% à ce moment
- et que les immobilisations ont baissé d'une façon
considérable. C'est à ce moment que le gouvernement qui nous
dirige décide de prendre des décisions qui affectent la mission
d'Hydro-Québec et qui affectent surtout sa mission de créateur
d'emplois. (15 h 40)
M. le Président, je laisse le soin à la population de
juger ce gouvernement qui pratique des politiques économiques qui soient
si néfastes pour la province de Québec. J'aimerais, par ailleurs,
revenir sur cet argument qu'a utilisé le ministre. Il a dit: Vous savez,
le projet de loi no 16 n'affectera pas la gestion d'Hydro-Québec, alors
qu'en fait il s'agit, à toutes fins utiles, d'une mise en tutelle
d'Hydro-Québec. Malgré les dénégations du ministre,
il faut bien constater que le projet de loi no 16 diminue
considérablement la marge de manoeuvre d'Hydro-Québec pour lui
permettre justement de réaliser ses objectifs.
J'aimerais faire état, M. le Président, d'un rapport
confidentiel qui fut préparé par des cadres d'Hydro-Québec
et qui fut envoyé au conseil d'administration d'Hydro-Québec le
15 avril 1981. On y analysait les conséquences néfastes des
intentions du gouvernement à ce moment-là et qui sont maintenant
intégrées dans le projet de loi no 16. On y disait que le budget
présenté le 10 mars 1981 entraîne pour Hydro-Québec
les conséquences suivantes.
Il y avait certaines conclusions sur le plan financier et d'autres sur
la mission et la gestion d'Hydro-Québec. On disait que ce qui est
maintenant dans la loi no 16 amènerait la confusion et la dilution des
responsabilités en matière de tarification et de prévision
de la demande ainsi que des difficultés d'établir des plans
valables à long terme.
On disait qu'il s'agissait là d'une atteinte à la
responsabilité de l'entreprise en ce qui a trait à la saine
administration financière. On disait que c'était un danger de
réduire l'autonomie de gestion interne essentielle au bon fonctionnement
d'une société d'État. C'était là, M. le
Président, sommairement, le jugement porté par les cadres
d'Hydro-Québec sur les intentions du gouvernement quant à
l'autonomie que, dit-il veut laisser Hydro-Québec.
Il est bien certain que si les dividendes sont déclarés
par le gouvernement et non pas par Hydro-Québec elle-même, il sera
à peu près impossible pour Hydro-Québec de planifier sa
gestion financière. Si elle ne peut planifier elle-même ses
besoins financiers à long terme, comment peut-elle planifier ses
investissements à long terme, puisque ces mêmes investissements se
font sur des périodes de temps allant de cinq à dix ans?
C'est donc dire, M. le Président, que ce projet de loi no 16, qui
ajoute un fardeau fiscal extrêmement important à
Hydro-Québec et qui, de plus, diminue l'autonomie de gestion
d'Hydro-Québec, va rendre la vie extrêmement difficile à
ceux qui auront la charge de diriger Hydro-Québec dans l'avenir.
Le ministre nous disait ce matin: Ne vous inquiétez, pas, M. Boyd
quittera Hydro-Québec le 15 décembre prochain et, le 16
décembre dans la matinée, il y aura un nouveau
président.
M. le Président, je ne comprends pas, il s'agit d'une compagnie
qui a des actifs de 18 000 000 000 $. Il s'agit d'une des plus importantes
compagnies au Canada. Il m'aurait semblé que le président
d'Hydro-Québec qui devra prendre la place de M. Boyd aurait dû
être en place depuis plusieurs mois déjà. Il m'aurait
semblé que les conseils de M. Boyd pour ce nouveau président
auraient été extrêmement importants pour lui faciliter la
tâche.
Je ne peux comprendre que le ministre et que le premier ministre ne
réalisent pas toute la difficulté qu'ils vont créer
à Hydro-Québec en retardant la nomination de ce président,
mais je crois qu'on peut comprendre que les gens du secteur privé qui
ont été approchés et qui, eux, connaissent la gestion
financière ont eu beaucoup de réticence à accepter un
poste qui, dorénavant, ne permettra pas à une personne
compétente de gérer Hydro-Québec comme elle l'entend
à l'intérieur des politiques du gouvernement. Je crois que la
difficulté du premier ministre de trouver un candidat s'insère
justement à l'intérieur de ce dilemme.
Il s'agit donc, M. le Président, de changements substantiels.
Changements substantiels dans la mission d'Hydro-Québec, changements
substantiels dans la capacité d'Hydro-Québec de gérer et
de planifier ses propres affaires, changements substantiels dans l'avenir quant
à la tarification future d'Hydro-Québec. Ceci, il faut bien le
dire, va être fait sans aucune consultation avec la population. Elle qui
avait été consultée lorsqu'on avait créé
Hydro-Québec telle qu'on
la connaît maintenant, en 1963; elle qui avait dit oui à
cette nationalisation, qui avait dit oui au gouvernement libéral qui
avait décidé de donner une ampleur extraordinaire à cette
société d'État, cette population ne sera pas
consultée en relation avec le projet de loi numéro 16 qui modifie
substantiellement la mission et l'avenir d'Hydro-Québec.
Pourtant, M. le Président, lors de la commission parlementaire de
février dernier, des syndicats, la FTQ et la CSN, des associations
professionnelles, un qroupe qui était le Front commun pour un
débat public sur l'énergie, tous avaient demandé un
débat public pour permettre à la population d'intervenir et de
s'exprimer sur les choix énergétiques et les implications
économiques qui affectent Hydro-Québec.
Le 2 mars 1981, le ministre Bérubé avait justement
donné son appui inconditionnel à un débat public qui
permettrait à la population de se prononcer sur ces problèmes.
D'ailleurs, je vois que dans le Devoir du 5 octobre dernier, justement ceux qui
étaient regroupés en front commun pour demander un débat
sur l'énergie disent ceci: " Quant à nous, nous voulons rappeler
le mandat d'Hydro-Québec: fournir de l'électricité aux
Québécois au meilleur coût possible. Pourquoi changer ce
mandat sans débat, comme se propose de le faire le projet de loi no 16?
Je crois qu'il est indécent pour le gouvernement de procéder de
la façon qu'il le fait maintenant sur un sujet aussi important. J'ai
fait état des impacts négatifs que ce projet de loi aura sur
Hydro-Québec, des impacts négatifs qu'il aura sur les
consommateurs et sur les individus, des impacts négatifs qu'il aura sur
l'industrie qui pourrait venir s'établir au Québec dans
l'avenir.
Je ne peux comprendre qu'on puisse chanqer la mission
d'Hydro-Québec sans consulter cette population qui s'est exprimée
si clairement dans le passé, non seulement sur la
propriété d'Hydro-Québec, mais également sur cet
objectif de fournir l'électricité au plus bas coût
possible. On peut, bien sûr, rêver de nouvelles politiques
énergétiques. Mais il me semblerait, M. le Président, que
ces nouvelles politiques énergétiques devraient être
débattues et discutées avec la population. J'aimerais faire un
appel à tous les députés qui sont dans cette salle, des
deux côtés de la Chambre, pour qu'ils comprennent les impacts
négatifs de ce projet de loi; pour qu'ils comprennent qu'il est
extrêmement important que la population se prononce avant même que
le projet de loi no 16 soit adopté.
Je terminerai là-dessus, M. le Président, et je voudrais
que l'on comprenne que le projet de loi no 16 est un projet de loi
prématuré, en ce sens qu'il se trouve à conclure un
débat qui n'a jamais eu lieu. En effet, si, en 1962, le qouvernement
libéral s'est senti dans l'obligation d'aller consulter la population
sur la nationalisation de l'électricité, quand on sait toutes les
conséquences que cela a eu sur le développement du Québec,
on ne peut que s'attendre que, près de 20 ans plus tard, le même
exercice se répète, compte tenu de la problématique
énergétique mondiale et de la situation du Québec. Nous
avons insisté, de ce côté-ci de la Chambre, et
personnellement je l'ai fait à plusieurs reprises, pour qu'on ait un
débat public sur l'avenir énergétique du Québec.
Nous ne sommes pas les seuls à le souhaiter. Je l'ai dit, les syndicats,
les groupes écologiques et un grand nombre d'autres organismes le
réclament avec insistance. On ne peut que constater qu'au sujet d'un
débat public sur l'énergie et sur l'avenir de
Hydro-Québec, le gouvernement se retrouve devant un front commun
à peu près unanime. M. le Président, je termine
là-dessus, je demande bien sincèrement à tous les
députés de cette Chambre de demander au ministre des Finances et
au ministre de l'Énergie de surseoir à leur projet de loi. Je
vous remercie. (15 h 501
Le Président suppléant (M. Laplante): M. le
député de Roberval.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Je vous remercie, M. le Président. Je dois
vous souligner ma joie de participer à ce débat sur la loi 16 qui
est certainement une des lois, sinon la loi la plus importante sur laquelle
nous aurons à travailler au cours de cette session.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je ne peux laisser passer
l'intervention du député d'Outremont qui a fait, cela va sans
dire, un effort louable, mais dont les arguments pour rejeter la loi nous
permettent de penser qu'il veut continuer la tradition qu'on a tenté
d'établir de ce côté de la Chambre depuis le début
de cette Législature, à savoir de traîner les citoyens dans
la confusion la plus totale avec des montagnes de chiffres et des choses
à peu près inaccessibles pour l'ensemble de la population.
Si j'ai bien écouté et bien compris l'intervention du
député d'Outremont, il y a deux arguments, que je n'oserais pas
appeler des arguments majeurs parce que c'était simplement des arguments
centraux, autour desquels il a articulé sa plaidoirie. Si les citoyens
du Québec ont regretté un temps, au moment où ils ont eu
à subir l'augmentation des tarifs d'électricité, de nous
avoir reporté au pouvoir en avril, aujourd'hui, ils doivent être
très heureux si on considère que le critique officiel de
l'Opposition en matière d'énergie serait
possiblement, c'est logique de le croire, l'éventuel ministre de
l'Énergie dans un cabinet d'un gouvernement libéral. Que penser
d'un ministre de l'Énergie dont le modèle principal, dont
l'idéal serait d'orienter notre Hydro-Québec sur Hydro-Ontario?
Hydro-Ontario qui est beaucoup moins importante qu'Hydro-Québec,
beaucoup moins rentable qu'Hydro-Québec, qui participe beaucoup moins au
fardeau fiscal des contribuables de l'Ontario, qui possède beaucoup
moins d'expertise technique que n'en possède Hydro-Québec et qui,
malgré tous ces désavantages, réussit tout de même
à vendre son électricité 12% plus cher aux contribuables
de l'Ontario que ne le fait Hydro-Québec. Imaginez le ministre de
l'Efnergie que ça donnerait!
Le deuxième argument était visiblement destiné
à semer la confusion dans la population en disant - et on l'a entendu
à plusieurs reprises - Hydro-Québec appartenait à tous les
citoyens du Québec, elle ne vous appartiendra plus, elle appartiendra
à l'État. M. le Président, les citoyens qui
m'écoutent et qui sont propriétaires d'Hydro-Québec,
est-ce qu'il y en a un qui a déjà essayé de demander
à Hydro-Québec de participer à sa charge fiscale?
Est-qu'il y a un citoyen qui a déjà essayé d'aller faire
accélérer ou d'aller ralentir un projet poursuivi par
HydroQuébec? Cette notion théorique de propriété,
les gens n'en sont pas dupes. Le seul moyen d'intervenir auprès d'une
société d'État, de l'ensemble des sociétés
d'État, comme auprès d'Hydro-Québec, c'est, bien
sûr, via le gouvernement, via les représentants des citoyens.
Cette notion de propriété théorique ne veut rien dire dans
le vécu des gens.
J'aimerais, avant d'aborder la loi 16 comme telle, essayer d'expliquer
aux citoyens ce qui a poussé le ministre de l'Énergie et le
gouvernement du Québec à apporter une hausse des tarifs
d'électricité dans une période qui, cela va sans dire, est
particulièrement difficile pour l'ensemble de la population du
Québec. Pourquoi augmenter les tarifs d'électricité alors
que les citoyens doivent faire face à des taux d'intérêt
considérables, à différentes difficultés
économiques et à du chômage?
D'abord, le député d'Outremont a parlé
d'éviter le gaspillage. Cela va de soi, c'est un des objectifs,
éviter le gaspillage, qui peut être rejoint par une augmentation
des tarifs. Mais, j'en conviens, c'est bien pauvre comme argumentation de base.
La véritable raison qui a amené le gouvernement à
permettre à Hydro-Québec de hausser ses tarifs c'est plutôt
de rendre Hydro-Québec plus rentable afin que celle-ci puisse, comme
c'est son devoir, participer davantage au fardeau fiscal de l'ensemble des
citoyens. Le gouvernement voulait d'abord et devait, cela va de soi, aligner le
prix de l'hydroélectricité et, d'une certaine façon, le
rendre concurrentiel avec le prix des autres énergies.
Tout le monde aura compris que si cette opération n'avait pas
été faite, d'abord on aurait assisté à un
phénomène de transfert absolument massif de tous les
systèmes de chauffage, par exemple, à
l'électricité. S'il en coûtait deux fois ou trois fois
moins cher pour utiliser un appareil quelconque, que ce soit un appareil de
chauffage ou autre, s'il en coûtait deux ou trois fois moins cher de le
faire via l'électricité, on aurait assisté, bien
sûr, à un transfert absolument rapide et radical à cette
source d'énergie.
Ceci aurait entraîné - et cela, les gens vont le comprendre
facilement - une consommation absolument énorme dans les prochaines
années, dans les prochains mois. Et Hydro-Québec, bien sûr,
qui produit l'électricité et qui peut encore aménager des
rivières du Québec, on le sait, est quand même
limitée par le temps et par l'argent, dans ce développement.
Hydro-Québec devait faire face - si on n'avait pas augmenté les
tarifs - à une hausse absolument vertigineuse de la demande et avec un
équipement, insuffisant - les citoyens qui ont déjà
manqué d'électricité le 21 décembre le savent -
elle devait faire face à une hausse de la demande d'énergie
qu'elle n'aurait pas été capable d'absorber à très
court terme. Cela est un élément. Il faut absolument - et cela
répond à toutes les lois logigues - que le prix des
énergies, d'une certaine façon, soit en concurrence.
Deuxièmement, si on avait refusé d'ajuster les taux, il y
aurait eu pour HydroQuébec un manque à gagner passablement
important. Ce manque à gagner, j'aimerais l'expliquer comme ceci: dans
la consommation électrique globale au Québec, ce que les gens
doivent savoir, c'est que 75% de l'énergie électrique
consommée l'est par des entreprises, par des compagnies ou est de
l'électricité qu'on exporte ailleurs. Les autres 25%
représentent la consommation quotidienne de Monsieur Tout-le-monde, de
l'ensemble des citoyens du Québec.
Si le gouvernement n'avait pas ajusté d'une façon assez
raisonnable et importante les taux d'électricité, c'est donc dire
que, bien sûr, Monsieur Tout-le-monde aurait
bénéficié d'une certaine réduction de sa facture
d'électricité. Mais c'est là un profit bien
éphémère puisque les gros consommateurs
d'électricité, ceux qui en auraient le plus profité,
ça aurait été les entreprises du Québec, les
entreprises de l'extérieur, les entreprises fortement consommatrices
d'électricité, et Dieu sait si ce ne sont pas toujours celles qui
sont dans des situations financières pénibles. En accordant cette
hausse, en plus d'aligner le prix de l'électricité sur le prix
des autres énergies - et cela était nécessaire, on l'a
vu
tout à l'heure - le surplus des profits enregistrés par
notre Hydro-Québec, ce surplus des profits qui est fourni à 75%,
je le rappelle, par des entreprises ou par des clients éventuels qui
achètent l'électricité du Québec, les 75% de ce
surplus et les 25% de ce surplus qui provient des consommateurs sont
réinjectés au total dans le budget du Québec, de telle
sorte que les citoyens voient, par le fait même, leur fardeau fiscal
réduit. Imaginez, où un gouvernement libéral prendrait-il
l'argent que nous allons aller chercher à Hydro-Québec, qui nous
appartient, qui est notre entreprise, où prendrait-il l'argent que nous
allons aller chercher via cette hausse de tarif? (16 heures)
Je le rappelle, de cette somme budgétaire qui est incluse, qui
sera injectée pour soulager les citoyens, 75% proviennent non pas de
Monsieur Tout-le-Monde, mais de l'ensemble des entreprises et des gens qui
achètent notre électricité. C'est là de la
véritable responsabilité administrative pour des gens qui, depuis
quelques jours, se permettent de faire des motions de censure à
l'endroit du gouvernement, imaginez! pour mauvaise administration. Ces
gens-là sont en train de dire aux citoyens du Québec qu'ils
auraient préféré que des sommes qui seront
injectées par Hydro-Québec, 75% provenant des entreprises et des
gens de l'extérieur, on les redonne aux entreprises, on les redonne aux
Américains. Imaginez quel serait le fardeau fiscal des citoyens. Il n'y
a pas eu encore d'explication là-dessus; possiblement qu'avec le
déroulement de ce débat, on en saura un peu plus dans les
prochaines heures. On l'espère en tout cas.
Le gouvernement a essayé de respecter tout de même, il faut
le dire, des propositions d'augmentations des tarifs
d'électricité, des augmentations réalistes. Il y a un
certain nombre de principes, vous savez, M. le Président, qui ont
été respectés par le ministre de l'Énergie qui a
étudié le dossier avec tout le sérieux qu'on lui
connaît et qui a essayé de garder pour les dépenses de
base, la consommation de base de l'ensemble des citoyens, une hausse d'environ
12,5% par année, c'est-à-dire le taux de l'inflation. Bref,
l'électricité pour notre consommation de base a auqmenté
à peu près au même niveau que l'inflation à chaque
année. Cela est un premier principe. Ce n'est tout de même pas
dramatique.
Deuxièmement, le ministre a essayé de conserver pour les
entreprises du Québec, et il a réussi, comme pour les
consommateurs du Québec, nos concitoyens qui nous ont élus, il a
essayé de conserver, dis-je, un avantage relatif par rapport au
prétrole. Il faut que cela soit économigue d'utiliser de
l'électricité parce que cette électricité nous
appartient. Également, le ministre a essayé d'obtenir
d'Hydro-Québec, de notre société, qu'on a payée
avec notre argent, un meilleur rendement de cet argent pour participer
activement au projet social que le Québec est en train de se
bâtir, de se donner.
Enfin, le ministre a bien voulu - et qui le lui reprocherait -
rentabiliser d'une certaine façon les ventes d'électricité
qu'on fait à l'étranqer. Il est normal, puisqu'on désire
cette énergie et qu'on en fournit à des étrangers, que
ceux-ci aient à payer un prix juste et raisonnable, un prix qui nous
permette de faire un certain profit.
M. le Président, pour revenir à la loi no 16. D'abord, les
gens l'auront compris, il n'y a rien de dramatique là-dedans, l'objectif
premier est de traiter Hydro-Québec sur le même pied que
l'ensemble des sociétés d'État ou sur le même pied
que l'ensemble des sociétés, des entreprises privées qu'on
a au Québec. Est-ce qu'il y a quelque chose de dramatique
là-dedans? Est-ce que les citoyens du Québec se sentent
profondément blessés ou est-ce qu'ils se sentent
lésés du fait que leur gouvernement veut qu'Hydro-Québec
soit traitée comme toutes les entreprises du Québec? Je ne le
pense pas, M. le Président.
De plus, le ministre a exprimé, par ce projet de loi, la ferme
volonté - cela touche les gens dans leur guotidien, lorsgu'ils paient
leur note d'impôt - de récupérer, au nom des citoyens du
Québec, les avantages de la nationalisation, les avantages du fait
qu'à un moment donné de notre histoire, les citoyens du
Québec ont accepté d'acheter les barrages hydroélectriques
et de devenir propriétaires d'Hydro-Québec. Encore là, je
devrai exprimer mon étonnement qu'un éventuel gouvernement
libéral s'insurge contre le fait qu'on veuille qu'Hydro-Québec,
qu'on a payée, que les citoyens ont payée à force de
sacrifices et d'impôts, de participer elle aussi, dans cette
période difficile, à la réalisation de notre projet
collectif. Est-ce qu'il y a quelque chose de scandaleux là-dedans?
Est-ce que les citoyens du Québec sont scandalisés que le
qouvernement demande à Hydro-Québec de faire son effort, elle
aussi? Je ne le pense pas.
En terminant, que sert aux citoyens d'investir dans des entreprises
d'État, dans des entreprises publiques si ça ne rapporte jamais?
Notre but est évident, et vous l'aurez compris, les citoyens l'auront
compris. Lorsqu'on développe les sociétés d'État,
lorsqu'on utilise l'arqent des contribuables pour investir dans notre
économie, ce n'est pas pour créer des sociétés
d'État comme celles auxquelles on a été habitués
sous le régime libéral, des sociétés d'État
déficitaires, qu'on devait renflouer à même nos taxes. Ce
que le gouvernement veut faire et ce que les citoyens doivent savoir, c'est que
le qouvernement rentabilise les sociétés d'État et a bien
l'intention de les faire participer
très activement à l'effort collectif des
Québécois. Cela, les citoyens le savent, et c'est pour ça
qu'ils nous ont fait confiance le 13 avril et qu'ils nous feront confiance
encore. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vaudreuil-Soulanges.
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, nous
avons encore, à l'occasion de ce débat, eu droit à des
formes de langage qui, je dois le dire, comme le reste de mes collègues,
d'ailleurs, cachent une grande partie de la vérité. C'est ainsi
qu'on entend beaucoup d'arguments fondés sur la nécessité
d'adopter, par le biais de cette loi, une politique énergétique
qui fait gravement défaut au Québec depuis cinq ans,
malgré les promesses répétées qu'on a entendues de
l'autre côté de la Chambre. C'est sous un langage qui continue
à camoufler et déguiser les véritables intentions du
gouvernement que nous constatons l'introduction de cette mesure dans cette
Chambre.
Évidemment, avec le gouvernement actuel, il y a une certaine
expertise dans le langage de camouflage. On a pu le constater, sans faire de
l'histoire tellement ancienne, à l'occasion du référendum,
une question alambiquée; à l'occasion des élections, qui
étaient précédées du budget, le 10 mars, où
on annonçait des réductions d'impôt de 2% pour l'an
prochain - et ça n'existe plus - et à l'occasion de cette
même élection, où il y avait une mise en veilleuse d'une
option qui est sans doute - on le verra en fin de semaine - fondamentale pour
le parti gouvernemental. Au niveau de la constitution, les grands
défenseurs des intérêts des Québécois n'ont
pas été capables de faire valoir le veto traditionnel du
Québec, n'ont pas été capables de représenter avec
dignité, avec fierté et avec bonne foi, surtout, le
caractère de la dualité du pays, du Canada.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):
Maintenant, nous avons, sous le couvert du langage d'une politique
énerqétique, une manifestation de la volonté du
gouvernement de changer le rôle d'Hydro-Québec.
Hydro-Québec a toujours été au service des
Québécois, non pas au service du gouvernement du Québec.
Il y a là une distinction fondamentale dans le débat auquel nous
participons aujourd'hui.
À l'origine, très clairement, depuis au moins 1962 ou
1963, lors de la nationalisation de l'électricité,
Hydro-Québec devait fournir - c'était là son mandat clair,
net et précis - l'électricité aux Québécois
au plus bas taux possible. C'est ça, un mandat clair, un mandat net, un
mandat précis. C'est à la lumière de ce mandat
d'Hydro-Québec, depuis une vingtaine d'années maintenant, que
nous avions pu, nous, Québécois, ressentir une fierté
très certaine devant cet organisme qui est l'expression même du
dynamisme de notre société, grâce à son autonomie de
fonctionnement que consacrait un mandat clair, net et précis,
grâce à l'absence d'ingérence de la part du gouvernement
dans le fonctionnement de tous les jours, dans l'établissement des
stratégies à long terme d'Hydro-Québec, grâce aussi,
évidemment - cela s'ensuit - à l'engagement, à la
formation de professionnels, d'experts de tous les niveaux, de toute nature,
afin de donner à la société Hydro-Québec
l'envergure qu'on lui connaît non seulement ici au Québec et en
Amérique du Nord, mais sur le plan international. (16 h 10)
C'est donc de cette façon, grâce à ce mandat de
fournir aux Québécois - c'était un objectif
extrêmement précis - l'électricité au plus bas
coût possible, qu'on pouvait voir, à ce moment-là, cette
société être gérée d'une façon
extraordinairement professionnelle, qu'on pouvait voir les retombées
qu'elle créait par son existence même, retombées des
investissements faramineux que nous avons faits dans le domaine de
l'éducation pour nos jeunes et pour lesquels nous créions au
Québec des débouchés extrêmement attrayants, d'abord
à l'intérieur d'une grande société d'État et
ensuite dans tous les domaines de l'activité de haute technologie.
Intervient maintenant le projet de loi no 16, facteur, pour le moins,
d'incertitude dans les développements, dans les projets d'investissement
d'Hydro-Québec. On peut voir ces flottements, ces hésitations,
depuis maintenant plusieurs mois à Hydro-Québec, comme l'a
évoqué mon collègue d'Outremont, compte tenu de
l'hésitation, de la négligence du gouvernement à pourvoir
au remplacement d'un président-directeur général. Une
société de cette envergure ne se mène pas à la
petite semaine. On n'engage pas à la dernière minute quelqu'un
qui voudrait bien s'en occuper. C'est un manque de la part du gouvernement
d'où les flottements, d'où l'abaissement, si on veut, la
réduction du dynamisme, la diminution du dynamisme qui
caractérisait la société Hydro-Québec depuis si
longtemps.
S'ajoute aussi au projet de loi no 16 et à tous les facteurs
d'incertitude qu'il contient, l'incompréhension flagrante du
gouvernement pour tous les éléments si délicats qui
doivent être équilibrés si on veut qu'Hydro-Québec
continue à connaître ce
dynamisme que son autonomie de gestion, que l'absence d'ingérence
du gouvernement pouvait déterminer et aider à
déterminer.
C'est l'ensemble de tous ces facteurs qui faisait que, depuis des
années, HydroQuébec était véritablement au service
de tous les Québécois. Encore une fois, on y revient, il y a
beaucoup d'arguments. Le gouvernement fait valoir les prix du pétrole,
les prix du gaz, mais je voudrais souligner, M. le Président, que c'est
le 10 mars 1981, à l'occasion d'un discours sur le budget par un
ministre des Finances et non lors d'une déclaration d'un ministre de
l'Énergie et des Ressources, que nous avons appris le rôle qui
venait de changer à Hydro-Québec. Qu'on vienne aujourd'hui
plaider que c'est le ministère de l'Énergie et des Ressources qui
a le leadereship dans ce dossier et que les députés de l'autre
côté passent leur temps à justifier des hausses
inqualifiables de tarifs d'électricité que devront subir les
consommateurs québécois, sous le couvert d'une politique
énergétique, alors que c'est le ministre des Finances qui a
lui-même annoncé qu'à l'avenir, c'est une machine à
impôt et non pas une machine à électricité
qu'Hydro-Québec, c'est absolument faire des raccourcis qui sont
inadmissibles pour les Québécois dans ce débat.
Mais comment Hydro-Québec, selon le bon vouloir du ministre des
Finances, devient-elle une machine à impôt? C'est tellement
évident; malheureusement, on doit continuer à le redire. On a
décrit ici, en cette Chambre, l'impasse financière, le cul-de-sac
financier dans lequel se retrouve le gouvernement maintenant, après cinq
ans de gestion, moins compétente qu'on ne l'eût cru, des fonds
publics. La dette publique des Québécois est passée
à 6000 $ par Québécois, 25 000 % par famille
québécoise. C'est le niveau de la dette publique, ici au
Québec, qui a plus que triplé depuis cinq ans.
Et les impôts élevés à travers tout cela.
Évidemment, si les revenus du gouvernement ont doublé, les
impôts ont doublé quelque part, beaucoup plus que le taux
d'inflation ne l'aurait suggéré. À travers tout cela, des
taxes indirectes en plus qui ont presque doublé, elles aussi, depuis
cinq ans, qu'il s'agisse - c'est toujours la même chose avec ce
gouvernement - de taxes indirectes, d'impôts déguisés, de
machines à percevoir les impôts, comme on peut le voir, par
exemple, au niveau des différents monopoles d'État: la
Société des alcools dont les profits augmentent d'année en
année, non pas à cause de son efficacité, il n'y a pas de
concurrence, mais parce que les prix montent tous les ans. C'est une machine
à percevoir les impôts que de vendre du scotch, du vin et de la
bière.
Deuxièmement, Loto-Québec, autre monopole d'État
où on laisse voir aux gens les plus démunis de notre
société - et les gens de Loto-Québec le savent, les gens
du ministère du Revenu le savent - l'espoir que fait miroiter le
gouvernement d'un jour décrocher le gros lot, alors qu'en
réalité il y a 320 000 chômeurs et qu'on devrait
peut-être s'employer à trouver du travail tous les jours
plutôt que le gros lot le vendredi.
À travers ces taxes indirectes comme l'augmentation de la taxe
sur l'essence, encore une fois présentée sous le couvert d'une
politique énerqétique, il faut entendre - j'y reviendrai -
comment c'est sous le couvert de la grande politique énergétique
de l'augmentation des prix de l'énergie dans le monde que les
Québécois paient maintenant, depuis deux semaines, 0,30 $ le
gallon d'essence de plus que les provinces voisines.
Le ministre des Finances avait annoncé - et vous verrez, M. le
Président, que nous ne parlerons pas trop longtemps du ministre de
l'Énergie et des Ressources - en effet, c'est le ministre des Finances -
c'est une mesure financière, la loi no 16, à toutes fins utiles,
qui a annoncé la façon dont le gouvernement du Québec
entend établir des relations extrêmement différentes
à l'égard d'Hydro-Québec. Le ministre des Finances parlait
de redistribuer; je le cite, M. le Président, le 10 mars dernier: "II
faut donc considérer, ce qui est d'ailleurs manifeste, que la
nationalisation de l'électricité est le meilleur placement qu'ait
jamais fait la collectivité québécoise et qu'il est
maintenant temps que les 300 000 000 $ ainsi investis - je corrige, M. le
Président, c'était plutôt empruntés et non pas
investis -par le gouvernement, en 1963 commencent à rapporter à
l'ensemble de la population. C'est-à-dire qu'à partir de 1982
HydroQuébec... paiera au gouvernement une redevance."
Il ne s'agissait pas, en 1963, d'un investissement de 300 000 000 $, mon
collègue d'Outremont l'a dit, c'était un emprunt
d'Hydro-Québec. Hydro-Québec avait décidé, parce
que les Québécois l'avaient demandé, d'acquérir des
compagnies privées d'électricité afin de pouvoir
coordonner le développement de cette immense richesse naturelle qui est
la nôtre. À partir de ce moment-là, comment peut-on
prétendre qu'aujourd'hui on redistribue à l'ensemble des citoyens
des avantages qui viennent de la nationalisation de nos ressources
hydroélectriques? Comment le ministre a-t-il pu dire tout à
l'heure, dans sa présentation, que tous les citoyens doivent en
bénéficier et non seulement les consommateurs
d'électricité? Si le ministre de l'Énerqie et des
Ressources a vu une différence au Québec entre des citoyens et
des consommateurs d'électricité, je le prie de nommer ceux qui
sont citoyens sans être consommateurs d'électricité. Il
devra faire l'inventaire des gens qui, peut-être comme
lui, non seulement chauffent au bois mais s'éclairent à la
chandelle, font fonctionner leur grille-pain au gaz naturel ou leur
réfrigérateur au pétrole. Tous les Québécois
doivent acguitter une facture d'Hydro-Québec tous les deux mois. Tous
les Québécois bénéficient donc des avantages que
pourraient représenter des hausses de tarifs qui seraient raisonnables,
qui seraient conformes à la vocation qu'Hydro-Québec a toujours
eue de fournir aux Québécois l'électricité au
meilleur taux possible. C'était là le mandat que le gouvernement
du Québec vient de changer et c'est simplement une autre fonction de
redistribution qu'il s'est donnée.
Le ministre des Finances redistribue son déficit chez les
consommateurs d'électricité. C'est de cela qu'il s'agit, en le
versant au fonds consolidé, quels que soient les voeux pieux du ministre
des Finances à savoir que les sociétés d'État qui
sont en pleine croissance bénéficieront d'apports nouveaux,
d'argent neuf, etc., comme l'a dit le ministre de l'Énergie, ce matin.
On redistribue le déficit entre les citoyens au lieu d'avouer
ouvertement que le gouvernement devrait continuer, en l'absence de la hausse
des tarifs de l'électricité, de nous taxer encore davantage,
nous, les Québécois, qui détenons déjà ce
championnat. En taxant tous les citoyens qui sont consommateurs
d'électricité, c'est-à-dire tous les
Québécois - on peut faire tout un plat du fait qu'une grande
partie de la consommation est attribuable aux entreprises - il n'en reste pas
moins que l'entreprise doit répercuter ses coûts quelque part chez
les consommateurs. Que ce soit direct ou indirect, dans les cas où il y
a exportation, tant mieux, mais dans les cas de consommation interne des biens
et services qui sont produits par les entreprises québécoises, il
y a une répercussion dans la poche de tous les citoyens. C'est un
impôt qui, comme tous les autres que nous avons eu l'occasion de
décrire ici en cette Chambre, est régressif. (16 h 20)
Encore une fois, pour le bénéfice du groupe des onze
députés du côté gouvernemental qui n'ont pas encore
compris ce qu'est un impôt régressif, c'est un impôt qui
frappe en argent de la même façon et du même montant les
gens qui gagnent beaucoup ou les gens qui gagnent moins. C'est un impôt
qui frappe de façon injuste et inéquitable les citoyens les plus
démunis de notre société. Ces porte-parole, ces gardiens
de la foi et du dogme de la social-démocratie devraient s'en convaincre
une fois pour toutes et se joindre, au moins encore une fois, à
l'Opposition qui réclame un arrêt de ces impôts absolument
inconsidérés que les classes les plus démunies de notre
société continuent à absorber.
Par ailleurs, encore une fois, le gouvernement - évidemment, nous
l'avons décrit - devant sa situation financière est en train de
créer une mesure qui forcera HydroQuébec à emprunter
davantage malgré les appels à la prudence que le ministre des
Finances lançait en 1977 et encore une fois en mars dernier, compte tenu
des hauts taux d'intérêt et surtout du haut volume des emprunts du
gouvernement du Québec. Donc, Hydro-Québec devra emprunter, si
elle ne peut plus, comme s'en inquiétait le ministre des Finances, payer
ses barrages comptant; c'est évident, c'est manifeste, c'est clair.
Le ministre, dans sa présentation ce matin, nous a indiqué
que tout ce qui touchait la couverture d'intérêt ou les taux de
capitalisation, sur lesquels je reviendrai extrêmement brièvement,
ne font qu'institutionnaliser ou consacrer dans des textes ce que les
prêteurs de capitaux, les prêteurs auxquels Hydro-Québec
s'adresse, compte tenu de ses grands besoins financiers, avaient fini par
accepter, c'est-à-dire qu'Hydro-Québec continuait à faire
des profits de façon telle que la couverture d'intérêt
était de plus en plus solide et que le taux de capitalisation
était également lui-même de plus en plus
élevé, donc, protégeait le remboursement pour l'avenir et
le paiement des intérêts pour les années courantes.
Mais, de la façon que la loi 16 prévoit les couvertures
d'intérêt, c'est-à-dire cette somme que doit conserver dans
ses coffres, si on veut, Hydro-Québec afin de rencontrer le service de
la dette, le paiement des intérêts tous les ans, ce concept
également du taux de capitalisation qu'on doit - une
société bien administrée se doit de le faire -conserver
des avoirs propres, plutôt que d'avoir recours à des emprunts, ces
deux concepts, de la façon qu'ils sont rédigés et
introduits dans cette loi, ne sont finalement que des limites à
l'appétit du gouvernement.
Ce ne sont plus - parce que c'était la tendance - des
manifestations de l'efficacité et de la bonne gestion, de la bonne
administration dont Hydro-Québec faisait preuve. Ces mesures de
couverture d'intérêt et de taux de capitalisation sont devenues
des freins à l'appétit de plus en plus vorace du ministre des
Finances et ce sont les prêteurs - c'est le moins qu'on puisse dire car
il y a eu des changements depuis que cette mesure a été
introduite en juin - qui ont exigé que le gouvernement en revienne un
peu parce que effectivement HydroQuébec se diriqeait vers une situation
où la converture d'intérêt, la possibilité de
rencontrer les frais de financement et les obligations de rembourser les
emprunts étaient si attrayantes qu'on pourrait prétendre, sans
trop se tromper, que la cote de crédit, c'est-à-dire le taux
d'intérêt auquel Hydro-Québec aurait pu emprunter dans
l'avenir, était probablement en voie de
s'améliorer dans les deux cas, mais ce n'est plus ce qui
arrive.
Afin de protéger les prêteurs, le gouvernement a dû
s'astreindre à se limiter lui-même dans ses appétits de
telle sorte qu'il ne se déclarera pas trop de dividendes afin de ne pas
mettre en danger la cote de crédit d'Hydro-Québec, cote de
crédit qui, si ce n'était du gouvernement du Québec et de
son ingérence dans le fonctionnement d'Hydro-Québec, serait
probablement meilleure qu'elle ne l'est actuellement. En effet, chaque
déclaration farfelue et échevelée de la part du
gouvernement du Québec a un impact direct sur la cote d'amour ou la cote
de crédit auprès des marchés prêteurs, la cote de
crédit d'Hydro-Québec et c'est justement pour cette raison qu'il
faut tenter de maintenir le plus de différence, le plus de distinction
possible entre les besoins du gouvernement comme tel et les besoins purement de
gestion et d'administration d'Hydro-Québec. Ce que cette loi, ce que ce
projet de loi tente de faire, c'est plutôt une mainmise de l'État
du Québec sur Hydro-Québec. C'est donc un changement fondamental
dans le rôle d'Hydro-Québec qui n'est plus au service des
Québécois, mais plutôt au service du gouvernement du
Québec et de son déficit. On ne distribuera plus, M. le
Président, les avantaqes de nos ressources aux citoyens, mais
plutôt au gouvernement et au ministre des Finances, notamment.
Ce projet de loi touchant Hydro-Québec est d'une portée
telle, à cause de ce changement fondamental, que tous les
Québécois devraient s'opposer à son adoption. En
Opposition responsable, M. le Président, c'est précisément
ce que nous entendons faire.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Revenu.
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, c'est
évidemment avec beaucoup de plaisir que je veux apporter mon humble
contribution a ce débat. Je voudrais dès maintenant vous signaler
qu'en écoutant le préambule du député d'Outremont,
j'ai sérieusement reconsidéré l'opportunité
d'intervenir dans le présent débat parce que, effectivement, si
le député d'Outremont s'en était tenu à son
préambule ou à la philosophie que ce préambule
dégageait, j'avais l'impression que nous étions tous prêts
à voter tout de suite cette loi d'une façon unanime. Au fur et
à mesure que l'intervention a proqressé, j'ai vite
déchanté, M. le Président, et j'ai réalisé
qu'effectivement les positions qui existent de part et d'autre apparaissent
tout à fait irréconciliables et que les distances qui nous
séparent sont infranchissables. Par ailleurs, c'est à partir de
ces prémisses dont je viens de parler, prémisses qui
procèdent de faits de même nature, que nous arrivons à des
conclusions fondamentalement différentes.
Je voudrais, quant à moi, M. le Président,
délaissant la nature des interventions qu'on vient d'entendre, qui se
sont centrées sur la technicité de ces lois, les implications
d'ordre économique, orienter cette intervention vers un peu d'historique
politique du Québec. Je voudrais essayer de démontrer -
j'espère que je réussirai à le faire - que les gens qui en
1962 et en 1963 ont préconisé et réalisé la
nationalisation de l'électricité avaient, entre autres objectifs,
comme point d'arrivée, si on me passe l'expression, celui que nous avons
sur la table aujourd'hui. Pour le faire, M. le Président, vous allez
comprendre que je me référerai à ce qui a
été dit, ce qui a été publié, ce qui a
été écrit au cours des années 1962 et 1963, alors
que le gouvernement de cette époque a effectivement
réalisé la nationalisation de l'électricité.
La conclusion a laquelle j'en arriverai, M. le Président -
à tort ou à raison, bien sûr, on l'évaluera -
m'amènera à la conviction profonde que le même parti
politique qui a été à l'origine de la nationalisation de
l'électricité, qui l'a effectivement réalisée est
maintenant, il me semble, en train de renier ce qu'il a alors
préconisé et publicisé. (16 h 30)
Court retour historique, effectivement. Revenons au début des
années soixante, alors qu'un parti politique, dirigé par un chef
qui s'appelait M. Jean Lesage, a fait une campagne électorale en nous
disant, en disant aux Québécois et aux Québécoises:
"II faut que ça change." Plusieurs d'entre nous -je vois le
député d'Orford qui était à l'époque de la
bataille - ont accepté de suivre le parti politique de l'époque
dans la voie, dans le chemin qu'il traçait. "Il faut que ça
change", disait-on. Il faut remettre de l'ordre dans les affaires de
l'État et il faut donner, disait-on aussi, aux Québécois
et aux Québécoises ce à quoi ils ont droit, leur donner ce
qui leur appartient effectivement. Cette invitation qu'on a faite au cours du
printemps de l'année 1960 a été acceptée par
l'électorat du Québec. Cette invitation a été
reçue, M. le Président, par le peuple du Québec et,
après cette campagne électorale qui a été
coiffée de ce slogan "II faut que ça change", le Parti
libéral du Québec a été porté au pouvoir
pour y demeurer jusqu'au 5 juin 1966.
À l'intérieur de son premier mandat, M. le
Président, après 1960, plus précisément environ
deux années après la prise du pouvoir, le gouvernement d'alors a
arrêté l'importante décision suivante: au niveau d'une
décision politique, ce gouvernement a
décidé de procéder à l'acquisition de
plusieurs sociétés privées d'électricité
pour que cette richesse naturelle devienne la propriété et
l'entière propriété de l'État. C'était, M.
le Président - on va en convenir - une décision de principe
importante, une décision en même temps audacieuse et une
décision, bien sûr, portant à beaucoup de
conséquences. Cette décision, on l'a jugée si importante,
on l'a jugée si audacieuse, M. le Président, et on a convenu
qu'elle portait à tellement de conséquences que le gouvernement
de l'époque a pris la sage décision de demander à la
population du Québec de ratifier le choix que lui, le gouvernement,
avait arrêté et ce, par la voie d'une élection
générale.
Là, M. le Président, plusieurs vont se souvenir sous quel
thème très précis on a alors lancé cette
consultation populaire, après deux ans de mandat, compte tenu de
l'importance de la décision qui avait été prise. Vous
allez vous en souvenir, M. le Président, de ce thème qui a
présidé à toute cette campagne de 1962, c'était
"Maîtres chez nous". En 1962, lorsqu'on a demandé à la
population de ratifier la décision politique qui avait été
prise, on l'a soumise, à son approbation en lui disant: En agissant de
telle sorte, nous allons devenir maîtres chez nous. En plus d'indiquer au
peuple du Québec que, par la nationalisation de
l'électricité, il était sur la voie de devenir
maîtres chez lui, on voyait aussi ces immenses panneaux-réclame,
M. le Président, sur lesquels on voyait cette clé, cette immense
clé qui devait, de fait, servir à ouvrir les portes de
l'économie québécoise, servir à ouvrir les portes
de l'autodétermination au moins économique des
Québécois. Nous nous souvenons de ça. La démarche
qu'aura entreprise le gouvernement de l'époque a reçu l'aval de
la population, le 14 novembre 1962. Le peuple du Québec a dit à
son gouvernement à cette époque: Nous vous donnons cette
autorisation. Nous ratifions, en quelque sorte, la décision politique
que vous avez prise en nous disant que nous allions devenir maîtres chez
nous et en nous disant que, dorénavant, nous aurions la clé
effectivement qui nous ouvrirait ces portes de l'autodétermination
économique.
M. le Président, dans la discussion du projet de loi qui est
devant nous et pour en comprendre la pleine philosophie, il me semble
important, comme je vous le signalais, il y a un instant, de retenir
peut-être quelques-uns des principes de base qui ont
présidé, d'abord, à la décision du gouvernement de
procéder à la nationalisation; deuxièmement, la
décision du peuple de ratifier cette décision. Les principes de
base qui ont motivé l'action du gouvernement à cette
époque, on les retrouve à l'intérieur d'un programme
électoral - ce qui est tout à fait normal - un programme
électoral qui a été publicisé à l'occasion
de l'élection de la nationalisation, un programme électoral qu'on
a envoyé partout à travers le Québec et qui était
à la disposition des Québécois, un programme dont se sont
servis les Québécois pour prendre une décision, à
savoir s'il était utile ou pas de nationaliser
l'électricité comme le qouvernement l'avait
décidé.
M. le Président, je vous invite et j'invite les collègues
de cette Chambre à faire une brève revue des principaux extraits
que l'on retrouve dans ce programme électoral. Si on veut regarder les
choses de façon objective, on verra que l'un des objectifs que l'on
poursuivait à l'époque, l'un des buts que le gouvernement de
l'époque avait en tête, c'était justement, avec le cours
des ans, avec le temps, d'arriver à réaliser un projet de loi
comme celui qui est à l'étude actuellement.
Je me permets donc, M. le Président, avec votre permission, de
citer quelques extraits de ce programme électoral de 1962. Certaines
gens vont certainement reconnaître ce programme électoral. Ainsi,
par exemple, le préambule du programme, ce qui attirait d'abord notre
attention comme Québécois, c'était la toute petite phrase
suivante: "L'ère du colonialisme économique est finie dans le
Québec; maintenant ou jamais, maîtres chez nous." C'était,
M. le Président, et fondamentalement, le leitmotiv de cette campagne
électorale. Le principe fondamental, nous disait-on. C'est à
partir de cette philosophie qu'on a demandé aux Québécois
de ratifier, de cautionner la décision politique qui avait
été prise.
Plus avant dans ce même programme, M. le Président, on
précisait des choses. On donnait des évaluations de ce que la
nationalisation allait nous apporter. On disait combien de compagnies il
fallait nationaliser, par exemple. On disait également quels allaient
être les effets de la nationalisation. On considérait nombreux ces
effets. Parmi un des effets qu'on prévoyait à l'époque,
c'est précisément celui qu'on est en train de réaliser
actuellement. J'appuie l'affirmation que je viens de faire, M. le
Président, en vous référant à la page 7 de ce
programme électoral du Parti libéral de 1962. Parmi la longue
série d'effets bénéfiques que devait nous donner la
décision de la nationalisation, il y avait celui que je vous cite
immédiatement: "La nouvelle Hydro deviendra la propriété
collective de 5 300 000 actionnaires, à part entière, fiers de
leur avoir commun et fiers de leur puissance nouvelle." Il y a seulement une
chose qu'il faudrait changer, M. le Président, c'est le chiffre qui est
là, au lieu de 5 300 000, il faudrait déborder quelque peu, soit
6 000 000. (16 h 40)
II me semble que cet effet, encore une
fois, est précisément celui qui est recherché par
le projet de loi no 16 qui est devant nous. Le député de Roberval
a expliqué comment et pourquoi nous allons devenir effectivement les
vrais actionnaires d'Hydro-Québec. Toujours dans le même programme
électoral, et en conclusion, on nous disait ceci: "La nationalisation,
étape de la libération économique." Ce qui suit me
paraît important: "Un peuple comme le nôtre doit se servir des
instruments de libération économique dont il peut disposer". Il
doit se servir des instruments de libération économique dont il
peut disposer. Or, je sais que le débat ne fait que commencer, mais je
voudrais bien que quelqu'un de l'autre côté puisse nous expliquer
comment on peut interpréter le projet de loi no 16, qui est devant nous
autrement que comme un des objectifs qu'on visait en 1962, c'est-à-dire
se servir de cette nationalisation comme un instrument de libération
économique dont nous pourrons disposer.
On continuait, dans le même programme électoral du Parti
libéral: "D'abord, nous devons nous affirmer dans des domaines comme
ceux des finances, de l'industrie et du commerce. Nous en avons fini
d'être des spectateurs de l'activité des autres. Nous devons
être actifs si nous voulons survivre." Finalement, on disait: "Par une
politique de planification économique mise sur pied de façon
démocratique, le Québec verra enfin où il va et saura
résoudre à l'avance les problèmes dont, jusqu'ici, il
avait à supporter les conséquences."
M. le Président, ces quelques passages auxquels je viens de
référer étaient, en 1962, les principes de base d'un
gouvernement libéral. Quand j'écoute la discussion, quand je
considère le sens vers lequel elle s'oriente actuellement, il me semble
que le Parti libéral actuel a divorcé d'avec la cohérence
que l'on retrouve dans sa publicité de 1962. Il a carrément
divorcé d'avec cette cohérence et je ne suis pas optimiste au
point de prétendre que la réconciliation est possible. Ce qui est
visé par ce projet de loi, c'est de nous donner les instruments et les
outils dont nous avons besoin. C'est pour ça qu'au-delà des
autres considérations qui peuvent retenir notre attention, je voulais
tout simplement relever ce passage d'histoire, revenir quelque vingt ans en
arrière pour démontrer qu'effectivement, l'orientation actuelle
du Parti libéral est tout à fait à l'inverse de celle
qu'on nous a présentée et qu'on a acceptée en 1962.
Pour ces considérations, M. le Président, il est bien
clair que c'est sans aucune hésitation que je donnerai mon appui
à ce projet de loi no 16.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président. Le parrain du projet
de loi no 16, le ministre de l'Énergie et des Ressources, nous a
vanté ce matin la qualité de son qouvernement à respecter
les contrats. Or, la question que je me pose, c'est: Que fait-il de ce contrat
passé avec toute la population du Québec en 1962 et que vient
d'évoquer son collègue, le ministre du Revenu? Que fait-il de ce
contrat au moment où il nous demande aujourd'hui, à
l'Assemblée nationale, de le déchirer en appuyant le projet de
loi no 16? Je comprends que, lorsqu'il s'agit d'aller siphonner les fonds
d'Hydro-Québec pour remplir les trous que leur collègue, le
ministre des Finances, a créés ici et là, le respect de la
signature sur un contrat, l'engagement moral envers toute une population
prennent le bord du panier assez rapidement merci.
Lorsque j'entends le ministre du Revenu faire cette comparaison des 5
600 000 actionnaires-propriétaires - ils sont maintenant 6 000 000 de
propriétaires-actionnaires d'Hydro-Québec - est-ce que le
ministre du Revenu en connaît beaucoup de compagnies qui ne consultent
les actionnaires qu'à tous les 20 ans et, dans ce cas-ci, qui ne les
consultent même pas, mais qui tentent par le biais d'un projet de loi de
parler d'une nouvelle politique énergétique? Est-ce qu'il y a
beaucoup de compagnies qui ne se réunissent même pas à tous
les 20 ans? Le ministre pourra répondre à ma question
tantôt en vertu de l'article 96. Pour le moment, j'aimerais
continuer.
M. Fréchette: Vous aimez mieux... J'étais
prêt.
M. Gratton: De quoi l'Assemblée nationale est-elle saisie
avec ce projet de loi no 16, dont le titre pourtant inoffensif, Loi modifiant
la Loi sur l'Hydro-Québec, est bien caractéristique de ce
gouvernement qui, sous des titres tout à fait anodins, avec des notes
explicatives encore plus anodines et des discours que je ne qualifie pas, ceux
qu'on a entendus maintenant, vient rassurer la population? Il n'y a rien
là, mes chers amis! On est seulement en train de faire une passe, de
passer un petit Québec aux 6 000 000 de citoyens, c'est le moins qu'on
puisse dire.
Si j'avais eu à écrire les notes explicatives qu'on nous
lit au moment du dépôt du projet de loi en première
lecture, je les aurais rédigées à peu près comme
ceci: Le projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur
l'Hydro-Québec afin principalement: 1. de transformer HydroQuébec
en percepteur d'impôts pour le gouvernement du Québec; 2. de
permettre au gouvernement péguiste d'imposer des impôts
indirects par le biais de hausses des tarifs d'électricité
que devront payer tous les Québécois; 3. de permettre surtout au
gouvernement péquiste de camoufler sa mauvaise administration des cinq
dernières années. Voilà de quoi il s'agit! Je dis que
c'est le vrai, le seul objectif du projet de loi no 16. Si, comme l'ont dit mes
collègues d'Outremont et de Vaudreuil-Soulanges avant moi, le
gouvernement, fidèle à son habitude de cacher ses vraies
intentions derrière les mots, préfère nous parler
aujourd'hui d'une nouvelle politique énergétique, je dis que ce
n'est pas par le biais de la présentation du projet de loi no 16 qu'il
devrait procéder, même à ce moment, parce que de l'avis de
tous, sauf peut-être quelques péquistes, s'il en reste, qui sont
encore ébahis par l'assurance de plus en plus artificielle du ministre
des Finances, sauf pour ceux-là, tous sont d'avis que ce projet de loi
est nettement prématuré.
M. le Président, il est prématuré parce qu'il
constitue, à mon avis, un manque de respect flagrant, d'abord pour les
véritables intéressés, les citoyens qui, dans les faits,
sont les seuls et uniques propriétaires de cette richesse naturelle que
constitue l'hydroélectricité. On se rappellera toute l'importance
accordée à cette dimension il y a près de 20 ans
maintenant, en 1962, lorsqu'un gouvernement du Parti libéral
décidait de se faire plébisciter sur la question de la
nationalisation de l'électricité. C'est d'ailleurs le premier
ministre du temps, l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer
l'élection de l'automne 1962, déclarait, je cite: "De quelle
façon allions-nous nous y prendre pour que les 5 600 000
Québécois deviennent les propriétaires et les actionnaires
de l'une des principales clés de l'expansion économique de leur
province, l'électricité?" (16 h 50)
La façon choisie, M. le Président, on la connaît
maintenant, ce fut une élection qui permit à ces 5 600 000
Québécois de se rendre propriétaires et actionnaires de
cette richesse naturelle.
Or, le gouvernement actuel, qui veut maintenant modifier d'une
façon draconnienne le mandat d'Hydro-Québec, tient-il compte
maintenant des 6 000 000 de propriétaires et d'actionnaires? La
réponse est non.
Je soutiens que cette façon de procéder est inacceptable.
L'Opposition officielle a le devoir de s'y opposer, parce que le projet de loi
no 16 constitue ensuite un autre manque de respect, parce qu'il trahit dans son
fondement même le mandat accordé au gouvernement par la population
en 1962. Ce n'est pas la première fois qu'il le fait; je l'ai
expliqué à deux reprises ici à l'Assemblée
nationale. Il a trahi le mandat qu'il a reçu le 20 mai 1980 lors du
référendum; il a trahi le mandat du 13 avril où les
citoyens du Québec avaient demandé au gouvernement, avaient
mandaté le gouvernement de protéger les droits du Québec
alors qu'il a perdu notre droit de veto. Voilà qu'avec le projet de loi
no 16, on vient encore trahir le mandat de la population donné à
l'élection de 1962.
On se rappellera que les électeurs de l'époque
confièrent à Hydro-Québec la responsabilité
d'administrer, de régir et de développer autant le réseau
de distribution que tout l'appareil de production d'énergie
hydroélectrique. La société d'État devenait donc
dans les faits le mandataire exclusif de la population. Or, les termes et le
cadre de ce mandat étaient définis de la manière
suivante.
Je cite maintenant le premier ministre actuel qui était alors
ministre des Richesses naturelles - c'était en février 1962: "...
et pour que le mouvement - intégration et rationalisation des
réseaux - se fasse vraiment pour tous les citoyens du Québec, de
le confier à Hydro, entreprise d'État qui, depuis 1944, a pour
mission de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises
industrielles et commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles
avec une saine administration financière..." On retrouve toujours cette
définition de la vocation d'Hydro-Québec au premier alinéa
de l'article 22 de sa loi constitutive. Elle est techniquement maintenue dans
le projet de loi no 16 à l'article 6.
M. le Président, qu'est-ce qui peut alors justifier notre
appréhension? Rien de plus simple. À de nombreuses reprises, ce
gouvernement, celui du Parti québécois, nous a
présenté des projets de loi pleins de riches et beaux principes
humanitaires, mais, à l'examen et à la pratique, on s'est rendu
compte que ces principes étaient édulcorés et
diminués; en fait, ils étaient devenus des demi-principes. Il en
est de même pour le projet de loi actuellement devant cette Chambre.
Pour le vérifier, tentons de déterminer qu'est-ce que peut
signifier le principe selon lequel Hydro-Québec doit fournir de
l'électricité "aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière". Allons voir ce que signifie ces mots en
français et non en langage péquiste faux et déformant, M.
le Président. Pour ce faire, laissons l'actualité de 1962 nous
indiquer cela. Je cite encore l'actuel premier ministre. Le 10 avril 1962,
devant le Canadian Club de Montréal, c'était rapporté par
La Voix de l'Est: "La distribution à prix honnête de
l'énergie électrique, indispensable moyen de mise en valeur". De
manière plus explicite, il disait, selon ce qui est rapporté dans
le journal Le Devoir du 4 octobre 1962 - je cite toujours René
Lévesque - "La mesure en elle-même est rentable.
L'Hydro-Québec récupérerait, au lendemain de la
nationalisation, un profit de 40 000 000 $: impôt
fédéral des compagnies, 15 000 000 $ et profit annuel des
compagnies, 25 000 000 $. Ce profit de l'Hydro-Québec ne sera
naturellement pas net, l'entreprise d'État devra verser 20 000 000 $ par
année d'intérêt. Il restera donc 20 000 000 $ de profits
nets dont les citoyens du Québec plutôt que les capitalistes
étrangers seront bénéficiaires et qui pourraient
être utilisés -écoutez bien cela - en diminution de tarifs,
en modernisation dans les secteurs les plus défavorisés ou en
hausse de taxes scolaires et municipales payées par l'Hydro." Ne pensez
pas que ce n'est pas beau! C'est ce que l'actuel premier ministre disait en
1962.
Une voix: Dans sa jeunesse.
M. Gratton: C'est dans ces termes précis et explicites que
l'actuel premier ministre, alors ministre des Richesses naturelles,
définissait "aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière".
En d'autres mots, à ce moment-là, une saine administration
signifiait, pour le premier ministre, le profit brut, moins le paiment
d'intérêts égale profit net, donc diminution des tarifs,
développement du réseau, paiement de taxes municipales et
scolaires au profit de tous les citoyens. Ce sont là, M. le
Président, les conditions dont a parlé le ministre du Revenu, que
les citoyens ont posées à la nationalisation des compagnies
privées d'électricité en 1962. Comment le premier ministre
peut-il maintenant proposer une nouvelle définition, qui peut se
résumer comme suit: profit brut moins paiement d'intérêt,
moins redevance à M. Parizeau égale profit net, augmentation des
tarifs pour tous les citoyens? Il y a quand même une nuance, M. le
Président.
Je demande au premier ministre si le prix de l'électricité
sera honnête et juste, pour employer ses termes, lorsqu'il servira en
bonne partie non pas pour le fonctionnement de la société
d'État, non plus pour le développement du réseau ni pour
maintenir les tarifs à un niveau acceptable, mais plutôt pour
payer et défrayer les coûts de la bêtise administrative
péquiste qui dure depuis 5 ans. Je vous ferai grâce de vous en
faire une énumération; d'autres y reviendront peut-être de
ce côté-ci.
Le premier ministre, que fait-il de l'engagement qu'il a pris devant les
citoyens en 1962 sur la base du prix de l'électricité
honnête? La même chose qu'avec les mandats du 20 mai et du 13
avril, M. le Président. Donc, je repose la question. Le projet de loi
numéro 16 maintient-il le sens véritable de la vocation
d'Hydro-Québec? La réponse est non, puisque, avec le projet de
loi numéro 16, les fonds prévus pour le maintien, la
qualité et le développement du réseau sont maintenant
fondus avec la redevance gouvernementale, ce qui les rend supérieurs
à ce qu'ils sont en termes réels. Le prix demeure-t-il
honnête et juste? Encore là, la réponse est non, puisque,
à partir du projet de loi numéro 16, les prix aux usagers ne
seront qu'en partie le reflet de ce qu'ils reçoivent en termes de
services, le reste étant une prime forcée à la mauvaise
administration péquiste. Oui, M. le ministre, c'est ça.
En 1962, les citoyens ont-ils permis et ont-ils songé qu'on
puisse modifier la vocation première d'Hydro-Québec à des
fins de camouflage de mauvaise administration? La réponse est non, car
les citoyens ne savaient pas ce qui les attendait en 1976. En 1962, on ne
savait pas qu'on aurait en 1981 un gouvernement dont le gaspillage des fonds
publics passerait à l'histoire.
Je disais que le projet de loi est prématuré. Il est
prématuré à un deuxième titre, en ce sens qu'il se
trouve à conclure un débat qui n'a jamais eu lieu. En effet, si
en 1962 le gouvernement libéral de l'époque s'est senti
l'obligation de consulter la population sur la nationalisation de
l'électricité, par le biais d'une élection alors qu'il
s'agissait pour celle-ci de devenir propriétaire. Quand on sait toutes
les conséquences que cela a eu sur le développement du
Québec, ne serait-il pas normal que, 20 ans plus tard, au moment
où on demande à cette population de réinvestir dans
Hydro-Québec, sans pour autant en recevoir des bénéfices
ou des services additionnels, ne serait-il pas normal, dis-je, qu'on la
consulte à nouveau, surtout que cet investissement ne lui rapportera
rien?
Voyons encore ce que disait le premier ministre actuel en 1962. - Je
cite René Lévesque devant le Canadian Club, toujours, 9 avril
1962: "Au nombre de ses responsabilités - oui, il allait plus souvent au
Canadian Club dans le temps, M. le Président - il s'en trouve une,
particulièrement importante, qui consiste pour le gouvernement de
l'État du Québec à défendre le patrimoine national
et en faire profiter au premier chef ses propres ressortissants". Il disait
plus tard, le 3 mai: Cela va coûter cher, bien sûr, mais à
long terme, ça rapportera. Le 28 juin 1962, René Lévesque
répétait qu'il fallait faire passer l'intérêt de la
province même avant l'intérêt d'un parti.
Mais à qui rapportera la redevance exigée par
Hydro-Québec? Aux citoyens, qui auront à subir sans distinction
des hausses de tarifs qui ne correspondent pas aux services réels
obtenus, ou au ministre péquiste des Finances, qui se sert
d'Hydro-Québec et des revenus qu'elle produit pour camoufler sa mauvaise
administration? Ou encore au Parti québécois qui, après
plus de 5 ans de pouvoir, se rend bien compte qu'il a mis la
province dans une situation financière telle qu'il
n'hésite pas à mettre en péril l'avenir
énergétique du Québec pour tenter de camoufler ses
erreurs? (17 heures)
On a insisté, M. le Président, de ce côté-ci,
pour qu'un débat public sur l'avenir énergétique du
Québec soit tenu. Nous ne sommes pas les seuls à le souhaiter.
Syndicats, groupes écologistes et un grand nombre d'autres organismes le
réclament avec insistance. On ne peut que constater qu'au sujet du
débat public sur l'énergie, le gouvernement se retrouve devant un
front commun unanime. C'est d'ailleurs cette unanimité qui
réussissait à convaincre l'ex-ministre de l'Énergie et des
Ressources, M. Yves Bérubé, qui déclarait ce qui suit en
mars dernier: "Les interventions, lors des quatre premières
journées de la commission parlementaire, ont démontré la
très grande unanimité entourant la tenue d'un débat
public. Au moment où le Québec s'achemine vers des choix majeurs
de société, la population doit absolument être
sensibilisée aux alternatives qui s'offriront à elle et elle doit
de plus avoir la possibilité de faire connaître ses choix." Comme
par hasard, il s'agissait d'une déclaration à la veille de la
dernière élection.
Le porte-parole de l'Opposition, mon collègue d'Outremont,
intervenait lui aussi à ce sujet, et je cite le Soleil du 3 mars 1981:
"Le député Pierre Fortier, d'Outremont, s'est en effet dit
surpris de voir enfin le ministre acquiescer à la proposition d'un
débat public sur toutes les facettes de l'énergie, lui qui
écartait jusqu'à tout récemment cette option. Selon M.
Fortier, la volte-face du ministre s'explique sans doute par la
proximité des élections générales et ne constitue
guère plus qu'une promesse électorale."
Que s'est-il passé depuis? Quant à nous, nous continuons
d'exiger la tenue d'un débat public sur l'avenir
énergétique du Québec. Quant au gouvernement, le
problème demeure le même puisque d'une part, bâtir le
Québec, l'énoncé politique économique de l'actuel
gouvernement, prévoit toujours qu'à partir de 1985, on aura
atteint le sommet de notre développement hydroélectrique et que,
d'autre part, on a à peine déterminé les facteurs qui,
à long terme, influenceront nos surplus énergétiques
auxquels sont intéressés nos voisins Américains et que,
finalement, il demeure impossible pour le gouvernement de se donner des
priorités en matière de recherche et de développement tant
qu'on n'aura pas déterminé les formes d'énergie que les
Québécois entendent privilégier.
Quant au gouvernement, qu'a-t-il fait, lui, depuis mars dernier et
surtout depuis l'élection du 13 avril, à part de changer de
ministre par un qui nous a dit, à quelques occasions, qu'il demeurait
ouvert à ce débat public sur la politique
énergétique, mais qui se traduit dans les faits par quoi? Un
projet de loi pour camoufler d'autres intentions de son collègue, le
ministre des Finances. De quelle ouverture parlait-il il y a à peine
cinq mois? Au minimum, il aurait dû refuser de parrainer le projet de
loi, puisque celui-ci devrait être parrainé par le ministre des
Finances. Sous cette loi présentement devant nous, se cache d'abord,
sous le titre de redevances, un impôt, un impôt peut-être pas
aussi clair que celui sur le revenu, mais un impôt à la sauce
péquiste c'est-à-dire indirect, sournois, réqressif et
vicieux.
Je dirai en terminant qu'en définitive, le projet de loi no 16
est précipité parce qu'il n'a pas été soumis
à l'attention des intéressés, les Québécois
propriétaires et, en plus, qu'il devance une consultation que la
conjoncture actuelle nous oblige à tenir le plus tôt possible.
Dans cette perspective, il n'y a pas plusieurs manières, il n'y en a
qu'une et, encore là, je cite le premier ministre actuel, ministre des
Richesses naturelles en 1962, qui disait en février 1962: "Je fais cette
déclaration uniquement pour bien remettre les faits à leur place
et selon leur valeur réelle. Je crois que, sur
l'électricité, richesse vitale du Québec, les
Québécois ont le droit strict d'être renseignés
d'une façon qui leur permette d'avoir l'opinion la plus avertie
possible. Je veux rappeler aujourd'hui qu'il faut tout de même traiter
avec sérieux une question d'une telle importance."
On dit: Bravo! Ce qui était vrai en 1962 est encore plus vrai en
1981. Je répète ce que mon collègue de
Vaudreuil-Soulanges, je pense, disait et je cite ici le front commun pour un
débat public sur l'énergie, édition de la Presse du 23
septembre 1981: "II serait important que ce débat sur l'énergie
ne soit pas reporté après que toutes les décisions
engageant l'avenir énergétique et économique du
Québec aient été coulées dans le ciment."
Il serait donc important qu'avant de voter le projet de loi
numéro 16, on fasse cette consultation auprès de la population,
auprès des actionnaires; qu'on fasse ce débat public qui, tous le
reconnaissent, doit avoir lieu et que seul le gouvernement du Parti
québécois refuse. C'est pourquoi, comme en 1962, je serais
tenté de proposer au gouvernement qu'il tienne une élection sur
une question aussi fondamentale. Il me semble que consulter les actionnaires
d'Hydro-Québec, les 6 000 000 de
Québécois, après 20 ans, ce ne serait quand
même pas exagéré sur le plan de la consultation.
Motion de report
Comme j'ai déjà réclamé les élections
référendaires et que je n'ai pas réussi, je ferai la seule
chose que le règlement de
l'Assemblée nationale me permette à ce moment-ci et, en
vertu de l'article 121, je propose que la motion en discussion soit
modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la
fin les mots " dans douze mois".
Je termine en disant que si je limite cela à douze mois, c'est
que le règlement m'empêche de le faire pour une période
plus longue. Je demande aux députés péquistes, à
ceux qui ont encore une conscience, je les préviens que s'ils rejettent
cette motion de report du revers de la main, ils auront à
répondre, en fin de semaine, à leurs militants. À un des
députés à qui je demandais ce matin...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Gratton: Je dis que ce député que j'ai
croisé ce matin arborait le slogan du congrès: C'est
souverainement le temps. Je lui ai posé la question: C'est
souverainement le temps de faire quoi? Ah! il m'a dit: Toutes sortes
d'affaires.
Je leur dis qu'en fin de semaine ils seront l'objet de questions de la
part de leurs militants - il y en a encore des militants honnêtes chez
eux. Je suggère qu'à ce moment-ci...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Gratton: Avec ce que vous tentez de faire avec
Hydro-Québec, il serait souverainement le temps que vous passiez des
paroles aux actes et que vous respectiez la population du Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion d'amendement
étant recevable, elle est donc reçue et, à partir de
maintenant, nous avons... Je n'ai pas à décider de son adoption,
mais pour le moment tout ce que je peux vous dire, c'est que le "temps est
venu" à dix minutes d'intervention sur cet amendement.
M. le député de Charlesbourg.
M. Denis de Belleval
M. de Belleval: M. le Président, le député
de Gatineau nous suppliait de déclencher des élections
plutôt que d'étudier ce projet de loi, mais le
député de Gatineau est masochiste: battre les libéraux une
fois par année, il me semble que c'est suffisant.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. de Belleval: M. le Président, le député
de Gatineau, en présentant sa motion dilatoire, a commis un lapsus qui
démontre bien que leur argumentation fondamentale, à savoir qu'il
faudrait tenir un débat public là-dessus, ne tient pas puisqu'il
a lui-même indiqué que, douze mois étant le maximum permis
par le rèqlement, ce n'est pas suffisant parce qu'au fond il
préférerait que le projet de loi soit remis à beaucoup
plus tard. Par conséquent, lui-même ne prend pas au sérieux
le débat qui pourrait avoir lieu à l'intérieur de cette
période de douze mois que je suppose serait effectivement bien
suffisante et, au fond, il s'agit d'un stratagème...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. de Belleval: ... d'un faux-fuyant; ils ne sont absolument pas
intéressés à tenir un débat de fond
là-dessus. Je comprends pourquoi ils ne veulent pas avoir un
débat de fond là-dessus, d'une certaine façon. Ce
débat, il a eu lieu, et je veux rappeler brièvement les
différentes étapes de ce débat et terminer par une des
dernières étapes dont je comprends les députés de
l'Opposition de ne pas vouloir se rappeler. (17 h 10)
Dès 1973, 1974, M. le Président, à l'époque
du gouvernement Bourassa, deux ministres de l'Énergie, MM. Massé
et Cournoyer, avaient déposé ce qui constituait le premier
exposé d'ensemble d'un gouvernement du Québec sur une politique
ou les grandes avenues d'une politique énergétique pour le
Québec. Il y a eu à cette époque pas mal de débats
autour des grandes options que proposait le gouvernement Bourassa durant ces
années.
En 1978, le présent gouvernement déposait un livre blanc
qui, justement, donnait les grandes lignes de force, si l'on veut, les grandes
avenues, les grands choix qui s'offraient au Québec durant les
prochaines années en matière de politique
énergétique et, en particulier, se trouvait à rajeunir, ni
plus ni moins, les hypothèses déjà énoncées
par MM. Massé et Cournoyer. Qu'on se rappelle brièvement quelles
étaient ces grandes lignes de force, à savoir compter d'abord et
avant tout, bien sûr, sur les ressources hydrauliques
québécoises développables, deuxièmement, favoriser
la pénétration ici du gaz naturel pour mieux équilibrer
notre bilan énergétique, remettre à plus tard
l'utilisation de l'énergie nucléaire sur laquelle on entretient
beaucoup de réserves et qui, de toute façon, ne pourrait
être disponible chez nous qu'à des prix beaucoup plus
élevés pour l'instant que ce que l'on peut obtenir à
partir de l'énergie hydraulique.
Ensuite, M. le Président, il y a eu une campagne
électorale, celle de 1981, où le Parti libéral
lui-même a proposé aux électeurs une politique
énergétique. Je
comprends le Parti libéral de ne pas vouloir raviver le contenu
même de cette politique qu'il a proposée aux électeurs il y
a peine six mois. Et que disait-on dans cette politique, ce qui démontre
bien l'incohérence, la démagogie et l'insignifiance de certains
arquments que nous avons entendus, en particulier ceux du député
d'Outremont et du député de Vaudreuil-Soulanges? Qu'est-ce que
l'on disait dans ce document libéral proposé il y a à
peine six mois à l'adoption de la population? On disait: "Attendu que
l'objectif majeur de la politique du Parti libéral du Québec est
d'améliorer le bilan énergétique et la
sécurité des approvisionnements par une réduction
graduelle de notre dépendance envers le pétrole - c'est presque
mot à mot le livre blanc du gouvernement de 1978, M. le Président
- par l'augmentation de la pénétration du gaz naturel, par
l'utilisation de l'énergie électrique, par des économies
d'énergie et par la recherche des énergies nouvelles..."
Et que faisait-on de ce principe, M. le Président, quand venait
le temps de l'appliquer concrètement, par exemple, à la question
dont on discute? Écoutez cela, M. le Président: "Au niveau des
économies d'énergie et des énergies nouvelles," en visant
l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel
énergétique, à ne plus maintenir les prix artificiellement
bas et à aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient
en découler par des mesures sociales plus appropriées." Je
répète, durant la dernière campagne électorale, ils
se sont déjà prononcés là-dessus en disant:
à ne plus maintenir les prix artificiellement bas en ce qui concerne
l'électricité.
Cela, c'était dans leur livre rouge de la dernière
campagne électorale et, à cette époque, déjà
le ministre des Finances avait déposé son budget prévoyant
le projet de loi no 16, la modification de la structure d'Hydro-Québec
en structure par actions. Et le peuple du Québec s'est prononcé
à l'occasion de la campagne électorale et il a appouvé les
orientations du présent gouvernement.
Non seulement cela, M. le Président, mais au mois d'août
dernier, à la suite de la campagne électorale et du choix que la
population a fait des différentes options, une commission parlementaire
a été tenue où toutes ces questions ont été
discutées en long et en large. Autrement dit, le débat a eu lieu,
il ne servirait à rien de le maintenir. Au contraire, l'Opposition
libérale elle-même s'est prononcée sur le fond même
de ces débats, elle a pris position et elle est en faveur, dans son
programme politique, de ne pas maintenir artificiellement des prix trop bas de
l'électricité. (17 h 20)
De ce point de vue, ce que nous devrions avoir de l'Opposition, c'est
une motion de blâme pour nous accuser de maintenir encore trop bas...
Oui, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Laplante): Je voudrais
savoir si vous parlez au nom du gouvernement.
M. de Belleval: Oui, M. le Président.
Le Président suppléant (M. Laplante): Pendant une
demi-heure?
M. de Belleval: Oui.
Le Président suppléant (M. Laplante): Maintenant,
je vous demanderais de parler sur la motion de report.
M. de Belleval: C'est ce que j'explique, M. le Président.
Cette motion de report dit que le débat n'a pas eu lieu. J'ai
essayé de démontrer, durant les dix dernières minutes,
que, effectivement, ce débat avait eu lieu, et non seulement qu'il avait
eu lieu, depuis 1973, 1974, sous l'ancien gouvernement libéral, non
seulement en 1978, avec l'ancien ministre de l'Énergie et des
Ressources, M. Joron, mais aussi lors de la dernière campagne
électorale, alors que le Parti libéral lui-même
s'était prononcé contre le maintien de taux artificiellement bas
dans le domaine de l'électricité.
De ce point de vue, ce que nous devrions avoir de l'Opposition
libérale, c'est une motion de blâme, entre autres, parce qu'on
maintient peut-être, de leur point de vue, d'après ce qu'ils
disaient dans leur propre programme politique, des taux artificiellement bas en
ce qui concerne, par exemple, les petits consommateurs
d'électricité. Pour moins de 600 kilowatts de consommation,
l'augmentation des tarifs prévue pour cette année n'est que de
12%. Donc, elle est exactement en ligne avec le taux d'inflation. Ce qui veut
dire que si ces taux étaient artificiellement bas, d'après le
Parti libéral, lors de la campagne électorale, je suppose
qu'encore aujourd'hui, il devrait nous blâmer de maintenir des taux aussi
bas et de ne proposer que des augmentations aussi faibles.
Sinon, comme le disait le député de Saint-Laurent, qui a
quitté son siège parce qu'il blâmait la démagogie et
les contradictions de l'Opposition, si les libéraux étaient
cohérents, ils mettraient de l'avant leur programme politique et ils
nous diraient: Messieurs, vous maintenez trop bas les tarifs de
l'électricité par rapport à ce que nous disions dans notre
programme électoral, en particulier: "favoriser l'augmentation de la
pénétration du gaz naturel". Dans ce domaine, c'était le
député d'Outremont, tout à l'heure, qui nous blâmait
de ne pas avoir maintenu une différence assez grande entre le
prix... '
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, sur une question de règlement.
M. Gratton: M. le Président, avant que vous ne remplaciez
votre prédécesseur au fauteuil, ce dernier avait indiqué
au député de Charlesbourg qu'il s'agissait de discuter d'une
motion de report à douze mois. J'en conviens, il voudrait bien faire le
grand débat public qu'on voudrait faire au cours des douze prochains
mois pendant la demi-heure dont il dispose, mais ce n'est pas de ça
qu'il s'agit; il doit traiter de la motion de report. Dites-nous pourquoi vous
voterez pour la motion de report que je viens de proposer.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, ce que j'essaie de
démontrer tout simplement, c'est que le débat que réclame
l'Opposition, elle ne le réclame pas sérieusement puisque le
député de Gatineau lui-même s'est contredit en disant que
le report de ce projet de loi devrait être supérieur à
douze mois, alors que douze mois seraient fort suffisants pour maintenir le
débat en question.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je m'excuse. Jusqu'à maintenant, je pense que le
débat s'est déroulé d'une façon différente
de celle que j'entends depuis quelques instants. Chacun, à ma gauche et
à ma droite, a eu l'occasion de parler sans être interrompu par
personne. En vertu de l'article 100, je demanderais de laisser la
possibilité au député de Charlesbourg de bien faire son
intervention. Vous savez très bien, M. le député de
Maskinongé, ce que la présidence a déjà dit sur la
question des motions de report. On demande toujours aux intervenants
d'être dans le sujet, mais il est très difficile de
déterminer s'ils sont hors du sujet ou dans le sujet. En
conséquence, je suis assuré que vous me laisserez la
possibilité, comme président de déterminer s'il est dans
le sujet ou non. M. le député.
M. de Belleval: M. le Président, ce que j'essaie de
démontrer, c'est que le débat que réclame l'Opposition,
mais qu'elle ne réclame pas de façon sincère puisque le
député de Gatineau a parlé d'un report à plus de
douze mois alors qu'une période de douze mois serait fort suffisante
pour tenir ce débat, a déjà eu lieu, qu'il a eu lieu
depuis de nombreuses années et qu'en particulier, il a eu lieu lors de
la campagne électorale. Je suis bien obligé de me reporter au
contenu même du programme politique, que proposait le Parti
libéral lors de la campagne électorale, qui touchait ce sujet,
pour démontrer que le débat a véritablement eu lieu. Par
conséquent, cette motion de report est hypocrite, démagogique et
insignifiante.
Alors, le député d'Outremont, tout à l'heure,
disait: La différence entre le tarif de l'électricité et
celui du gaz naturel n'est pas assez élevée, ce qui n'aura pas
pour effet d'augmenter suffisamment la pénétration du gaz naturel
au Québec.
Quelle belle contradiction! Il nous blâmait ni plus ni moins de ne
pas avoir assez augmenté les tarifs d'électricité pour
permettre la pénétration du gaz naturel au Québec,
conformément au programme politique libéral, lors de la
dernière campagne électorale. Ces gens disaient: "Favoriser
l'augmentation de la pénétration du gaz naturel",
c'est-à-dire augmenter davantage les tarifs d'électricité
plus rapidement que ceux du gaz naturel pour favoriser cette
pénétration du gaz naturel. Ce qui constituait un des fondements
de leur politique énergétique lors de la dernière campagne
électorale. De la même façon qu'ils étaient
favorables, lors de la dernière campagne électorale, à une
augmentation rapide des taux d'électricité, ils disaient: "Ne
plus maintenir les prix artificiellement bas comme ils le sont", à
l'époque de la campagne électorale. Je viens de le rappeler, nous
n'avons augmenté, c'est-à-dire que la proposition d'augmentation
des tarifs pour cette année, pour les "bas" consommateurs, ceux dont les
besoins essentiels sont assurés par l'électricité,
c'est-à-dire ceux qui consomment moins de 600 kilowatts, n'est que de
12%. Donc, je suppose - je reviens sur cet argument - qu'ils devraient nous
blâmer de ne pas avoir haussé suffisamment ces tarifs
d'électricité, conformément à leur programme
politique.
Mais on sait ce qui est arrivé de ce programme électoral.
Ils ont fait le débat, à ce moment-là. Ils l'ont
proposé à la population. Le débat a eu lieu...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. de Belleval: ...et ils ont été battus, M. le
Président. Ils ont été battus.
Des voix:
M. de Belleval: Par conséquent, je maintiens que ce
débat a eu lieu, qu'il a été très
considérable, que toutes les avenues ont été largement
explorées, que ces messieurs, lors de la campagne électorale, au
moment où ils étaient convaincus qu'ils prendraient le
pouvoir, sachant gu'à peut-être quelgues jours d'avis, ils
seraient obligés de tenir leurs promesses, les perspectives qu'ils
développaient envers les Québécois à cette
époque... Ils écrivaient des choses responsables. Ils disaient
à peu près la même chose que ce que disait le livre blanc
du gouvernement présenté par M. Joron. Ils disaient: "Oui, il ne
faut pas conserver, de façon artificiellement bas, les tarifs
d'électricité. Il faut favoriser l'introduction du gaz
naturel."
Sur le plan de l'énergie nucléaire, pudiquement, ils ne
disaient pas trop de choses parce que, évidemment, il y avait une grande
contradiction entre les propositions du député d'Outremont qui
était favorable à l'énergie nucléaire; il vient
d'une grande société d'ingénieurs conseils qui, justement,
construit des centrales nucléaires; on le comprend. Mais les autres
membres du parti disaient: Écoutez, cher M. Fortier, mon cher Fortier -
le député d'Outremont s'appelle ainsi - ce n'est pas très
politique de proposer des centrales nucléaires. Alors, pudiquement, ils
n'en parlaient pas beaucoup. Vous lirez cela, M. le Président, tous les
fondements principaux d'une politique énergétique. On les
retrouvait dans le programme du Parti libéral lors de la dernière
élection et figurez-vous que même là-dessus ils disaient
aux Québécois, et je le répète encore une fois
parce qu'il le faut: "Attendez-vous à des hausses importantes des tarifs
d'électricité parce qu'il ne faut plus maintenir les prix
artificiellement bas."
Le député de Saint-Laurent, qui a quitté son
siège, voulait tenir le même lanqage qu'il tenait durant la
campagne électorale et que le Parti libéral tenait durant la
campagne électorale parce que c'était un langage responsable. Il
a quitté son siège parce que ses anciens collègues ont
refusé de tenir un langage responsable sur l'ensemble de la situation
économique du gouvernement et du Québec en particulier sur la
question énergétique. Ils renient les principes qu'ils ont mis de
l'avant lors de la dernière campagne électorale et maintenant ils
ne font que de la démagogie, c'est-à-dire tenter de faire croire
à la population qu'on pourrait encore maintenir artificiellement bas les
prix de l'électricité, alors qu'ils disaient le contraire lors de
la campagne électorale.
Comment peut-on qualifier ce comportement? Est-ce qu'ils sont
tombés sur la tête, M. le Président? Non, je suis certain
que le député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas tombé sur
la tête. Le député de Gatineau n'est pas devenu fou, il
n'est pas tombé sur la tête. Non, ce qu'ils sont devenus - et ce
que disait le député de Saint-Laurent - c'est irresponsables,
démagogiques et on pourrait dire menteurs. C'est-à-dire que ce
qui était responsabilité et vérité au mois d'avril
dernier, à savoir ne plus maintenir artificiellement bas les tarifs de
l'électricité, aujourd'hui ils ont fait cela avec leur programme
électoral... C'est cela qu'ils ont fait avec leur programme
électoral et ils disent maintenant aux Québécois: Oubliez
notre programme électoral, oubliez les grands principes d'une politique
énerqétique libérale que nous tenions au mois d'avril
dernier...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. de Belleval: ... faisons de la démagogie, faisons
croire n'importe quoi à la population. Je comprends pourquoi ils
voudraient maintenant tenir un débat. Ils voudraient
réécrire ce livre rouge qui leur colle aux fesses et qui dit le
contraire de ce qu'ils disent aujourd'hui.
Je suppose que le député de Vaudreuil-Soulanges ne peut
pas être fier, compte tenu du nom qu'il porte...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. de Belleval: ... des espoirs que certains voient en lui,
d'être obligé de renier ni plus ni moins le programme
électoral sur lequel il s'est fait élire dans
Vaudreuil-Soulanges. Il renie actuellement le programme électoral sur
lequel il s'est fait élire et il a le front de demander un débat
public là-dessus. Alors que lui-même s'est présenté
sur ces principes, s'est fait élire là-dessus, aujourd'hui il
parle contre ces mêmes principes, à savoir que lors de la campagne
électorale il disait: II faut augmenter considérablement les
tarifs de l'électricité parce qu'on ne peut plus les maintenir
artificiellement bas.
Aujourd'hui qu'est-ce qu'il nous dit? Il nous dit le contraire. Ce que
nous avons décidé, M. le Président, c'est de
présenter maintenant ce projet de loi, conforme dans ses principes au
livre rouge libéral durant la campagne électorale et conforme
aussi au livre blanc proposé par le ministre en 1978, M. Joron. Nous
avons décidé qu'il était temps de proposer cela.
C'était leur politique lors de la campagne électorale. C'est
notre politique. Pour une fois il y avait unanimité entre les partis
politiques. Eux et nous étions sur la même longueur d'onde. Ils
étaient d'accord qu'on ne pouvait maintenir encore artificiellement bas
les tarifs de l'électricité.
Je leur pose la question: Comment pouvez-vous concilier ce que je viens
de lire, qui est dans votre livre rouge, sur lequel, M. le
député de Vaudreuil-Soulanges, vous vous êtes fait
élire, avec le discours qu'a tenu le député d'Outremont,
avec le discours que vous-même avez tenu, avec les insignifiances que
vous avez dites depuis tantôt? Comment pouvez-vous concilier le programme
électoral
que vous avez proposé aux Québécois au mois d'avril
et les discours que nous venons d'entendre? (17 h 30)
Je pense qu'ils ne peuvent pas répondre à cette question.
C'est évident, ils sont en pleine contradiction, mais nous pouvons y
répondre parce que nous tenons exactement le même langage. C'est
la raison pour laquelle je me vois obligé de renvoyer ces messieurs
à leurs devoirs. Je leur demande de relire le programme électoral
qu'ils ont présenté aux Québécois. Vous le relirez,
tout à l'heure, quand vous parlerez sur la motion de report ou plus
tard, quand votre motion aura été battue et qu'on reviendra sur
le fond. Ayez le front de relire ce programme. Ayez le front de relire les
phrases que je viens de lire et comparez-les aux phrases que vos recherchistes
vous écrivent et que vous répétez comme des perroquets en
disant que tout cela est épouvantable, qu'il faudrait faire croire aux
Québécois que le Père Noël existe et qu'encore
aujourd'hui une augmentation, par exemple, de 12% des tarifs
d'électricité pour les petits consommateurs...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. de Belleval: C'est incompatible avec le langage qu'ils
tenaient lors de la campagne électorale. Pour toutes ces raisons, je
suis obligé de demander, évidemment, que cette motion soit
rejetée. Et, en même temps... Est-ce que l'Opposition pourrait me
laisser terminer, M. le Président? J'ai presque terminé. Je
comprends que cela vous fasse mal.
Une voix: Cela nous fait rire et ça fait quasiment
mal.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela a été
un moment difficile. Mon expérience m'avertissant que nous passerons
ensemble une partie importante de la soirée et de la nuit
peut-être, je vous demanderais, sans vous nommer, de permettre que chacun
termine son intervention. De la même façon, on aura l'occasion
d'en faire une de l'autre côté tout à l'heure. J'ai besoin,
sans les nommer, de l'aide de certaines personnes qui se trouvent à ma
gauche et à ma droite.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Charlesbourg.
M. Lalonde: Étant donné que vous avez parlé
des personnes à votre gauche, M. le Président, vous savez que
vous pouvez toujours compter sur...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Je n'ai parlé ni de gauche ni de droite seulement,
mais des deux à la fois.
M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, combien de minutes me
reste-t-il à intervenir?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Sept ou huit environ.
Une voix: Consentement.
M. de Belleval: M. le Président, c'est beaucoup trop et je
n'abuserai pas de la patience de cette Chambre.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. de Belleval: M. le Président, j'ai écouté
attentivement tantôt le député d'Outremont, je ne l'ai pas
interrompu. J'ai écouté le discours du député de
Vaudreuil-Soulanges, j'ai pris des notes, ce qui me permet, d'ailleurs,
maintenant de relever les contradictions entre ce qu'il a dit il y a quelques
minutes et ce qu'il écrivait dans son programme électoral au mois
d'avril dernier. Il parlait, d'ailleurs, de politiques cohérentes,
dynamiques et visionnaires. Il parlait aussi de se maintenir dans le giron
d'une politique énergétique pancanadienne. C'est ce qu'il
écrivait. Ils y croyaient, à ce moment-là, et ils disaient
vouloir promouvoir l'augmentation graduelle de la pénétration du
gaz naturel; ils se prononçaient contre de bas tarifs artificiellement
maintenus bas dans le domaine de l'électricité. C'est ce qu'il
disait, M. le Président. Est-ce que je peux avoir l'autorisation de
déposer en cette Chambre, pour rafraîchir la mémoire des
débris de cette armée qui ont quand même réussi
à survivre au désastre du 13 avril dernier, à ces
débris...
M. Scowen: M. le Président, est-ce que je peux vous
demander une directive?
M. de Belleval: Est-ce que je peux déposer le document
qu'ils ont proposé à la population lors de ce grand
désastre?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député, j'ai cru comprendre qu'on me demandait une directive. M.
le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je me demande si vous pensez qu'on peut demander au
député de lire la partie de notre programme qui touche
l'énergie au complet, d'un bout à l'autre. Il lui reste du temps
et, comme cela, il pourrait éclairer tout le monde. Il
déforme
énormément...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'était pas une
demande de directive. M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, je comprends qu'ils
demandent que je lise tout cela; ils ne s'en souviennent pas! Je vais vous en
lire un petit bout, M. le Président. "Attendu..." Ils procèdent
de façon solennelle. C'est à la page EC-Vlll/2: ils ont des
codes, à part cela. C'est la recommandation EC-V1. Ce doit être
pour mêler la Gendarmerie royale qui doit les espionner comme elle nous
espionne, M. le Président. "Attendu que le Parti libéral du
Québec -c'est eux autres ça - veut replacer les questions
énergétiques dans un contexte canadien et tirer tous les
avantages économiques de notre situation énergétique -je
ne peux pas lire tout ça, M. le Président. C'est l'attendu
principal. Je vais déposer le document, pour être certain.
Écoutez ça, M. le Président. Quatrièmement, il y a
toute une série de recommandations sur le pétrole, il y en a pour
le gaz naturel. Ils veulent un débat sur la politique
énergétique, M. le Président, je leur rends hommage. Ils
avaient déjà tout fait ça. "Un gouvernement - ils se
prétendaient bientôt gouvernement, c'est écrit - du Parti
libéral du Québec s'engage... "Il s'engageait à quoi?
"à ne plus maintenir les prix artificiellement bas dans le domaine de
l'électricité". Il s'engageait à hausser les tarifs
d'électricité.
M. le Président, de toute évidence, le
député de Notre-Dame-de-Grâce a besoin que je lui
rafraîchisse la mémoire. Par conséquent, je dépose
en cette Chambre le programme électoral du Parti québécois
-excusez. Regardez la couleur, M. le Président, vous verrez mon lapsus.
Remarquez qu'ils seraient bien fiers de nous le refiler maintenant, parce
qu'ils sont en train de parler contre leur propre programme électoral.
Je sollicite le consentement unanime de cette Chambre pour déposer le
programme électoral du Parti libéral du Québec qui
contredit tout ce que nous avons entendu depuis quelques minutes et qui
maintenant fait la honte de ce parti, déjà sans chef et
désormais sans armes.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant. J'ai vu
plusieurs personnes se lever, mais en vertu de l'article 96, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: J'aimerais corriger les faits. Pendant que
j'étais absent - j'ai écouté, de mon bureau - le
député de Charlesbourg a fait état que le débat
public avait eu lieu. Je ne lui en veux pas. Il a parlé à travers
son chapeau. C'est un domaine qu'il ne connaît pas. J'aimerais
établir, M. le Président, avec preuve à l'appui, que le
débat public n'a pas eu lieu. Ce que nous demandons est tout à
fait léqitime.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, évidemment, ce n'est pas en vertu de l'article 96.
C'est une reprise du débat. Vous aurez l'occasion de reparler sur
l'amendement. M. le député de... Oui, il y a M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: C'est en vertu de l'article 100, M. le
Président. Je veux poser une question au député. M. le
Président, étant donné le tintamarre qu'il y avait de
l'autre côté et tout le bruit...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Vous avez parlé d'une question en vertu de
l'article 100. Juste un instant. Il faut bien s'assurer. Done, vous voulez...
S'il vous plaît. Je n'ai pas voulu vous interrompre inutilement, mais en
vertu de l'article 100, vous avez la possibilité, M. le
député de poser une question. La coutume veut, en cette Chambre,
que normalement la question posée par un individu en vertu de l'article
100 soit posée par le côté opposé et non pas par les
députés... S'il vous plaît! S'il vous plaît! J'ai
bien dit: La coutume veut, mais si vous voulez me laisser terminer, vous allez
comprendre le reste. La coutume veut, mais il n'y a rien qui interdit,
cependant, qu'une question soit posée par un député du
côté de celui qui est déjà intervenu. Donc, je ne
veux, en aucune façon vous enlever ce droit qui vous appartient. (17 h
40)
M. le député de Dubuc.
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de quel
article?
M. Blank: L'article 100 dit: "Tant qu'un député a
la parole..." Le député a repris son siège, il n'a plus la
parole, alors il ne peut pas poser de question.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je comprends votre point de règlement, sauf que
l'habitude veut que - je l'ai souvent demandé moi-même comme
président - tant et aussi longtemps qu'un député a la
parole, on doit essayer de ne pas l'interrompre et me faire signe qu'on veut
poser une question, en vertu de l'article 100. À plusieurs occasions, le
député a posé la question de la façon dont le
député de Dubuc avait commencé à la poser, de telle
sorte que je lui accorde ce droit qu'il a.
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement. Naturellement, je n'ai pas objection à ce que le
député de Dubuc pose toutes les questions à qui il voudra,
mais j'aimerais, sans en appeler de votre décision, tout en la
respectant, attirer votre attention sur le fait que si vous acceptez ce
précédent, toute l'économie de notre règlement
pourrait être modifiée de sorte que 80 ou 75 députés
du même parti que l'intervenant - et on pourrait faire ça, de
notre côté, toute la soirée aussi pourraient lui poser des
questions qui, une fois la réponse donnée, pourraient encore
éterniser le débat. C'est un précédent très
dangereux pour l'application de notre règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Simplement pour vous dire M. le député que c'était
ce que j'avais voulu laisser sous-entendre, soit d'éviter que ça
puisse provoquer des débats. Vous savez très bien aussi en
même temps que le député auquel on pose une question n'est
pas obligé de répondre. Je comprends aussi ce que le
député de Saint-Louis disait tout à l'heure, majs je veux
simplement lui rappeler que j'ai souvent demandé comme président,
au moment où quelqu'un essaie d'interrompre une personne pendant son
discours - M. le député, s'il vous plaît, je pense que ce
moment de réflexion peut nous aider d'attendre la fin de l'intervention,
de façon à éviter qu'on interrompe indûment la
personne. C'est ce que le député de Dubuc avait fait. Cependant,
il me fait signe que, compte tenu des circonstances, il permet au
député de Gatineau de faire son intervention, en vertu de
l'article 96.
M. Gratton: Oui, M. le Président, et contrairement au
député de Dubuc, je me conformerai complètement au
règlement. J'ai évoqué deux motifs principaux à
l'appui de la présentation de la motion de report à douze mois.
Le premier était, bien sûr, celui dont a traité longuement
le député de Charlesbourg, à savoir qu'il me semblait
opportun qu'on ait une période de douze mois, période maximale
permise par le règlement de l'Assemblée nationale pour faire le
débat public en question.
J'ai aussi évoqué, en parlant de l'expérience de
1962, de l'aspect de la consultation, la nécessité, pour le
gouvernement, au moment où il s'apprête à chambarder la
vocation d'Hydro-Québec, de faire ce qu'on a fait en 1962,
c'est-à-dire consulter la population. J'ai même dit: On pourrait,
pour le faire, comme en 1962, tenir une élection. Comme je sais que le
gouvernement n'a pas l'intention de décréter des
élections, ni là-dessus ni sur autre chose, connaissant d'avance
les résultats, c'est ce qui explique que j'aie dit...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Gratton: M. le Président, c'est même le leader du
gouvernement qui chahute, je pense que ce n'est pas normal, ça.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Allez!
M. Gratton: Je termine, M. le Président, en disant que
c'est dans ce sens que j'ai dit que si le règlement de
l'Assemblée nationale me permettait d'inscrire une motion de report
à plus de douze mois, cela aurait été uniquement dans le
but de permettre au gouvernement de faire la consultation qui s'impose, par le
biais d'une élection. Le règlement ne le permettait pas, ce qui
explique que j'ai inscrit douze mois.
C'était facile à comprendre, il s'agissait
d'écouter.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Au nom du parti... M. le député de Portneuf. Allez.
M Michel Pagé
M. Pagé: Non, M. le Président, dix minutes
seulement.
Merci, M. le Président. Je veux intervenir sur la motion
présentée par mon collègue de Gatineau. Entendre le
discours qui vient d'être prononcé par le député de
Charlesbourg, c'est avoir une preuve éclatante, je pense, que parfois un
ou des députés peuvent se satisfaire de bien peu. On constate que
le député de Charlesbourg, à défaut d'être
membre du gouvernement, accepte maintenant de parler au nom du
gouvernement.
Le projet de loi 16 est certainement un des projets, comme d'autres
l'ont signalé cet après-midi, les plus importants, sinon le plus
important de la présente session. J'ai écouté
attentivement le discours de mon collègue d'Outremont, celui de mon
collègue de Vaudreuil-Soulanges, celui de mon collègue de
Gatineau tout à l'heure; j'ai aussi écouté avec beaucoup
d'intérêt et d'attention le discours du député de
Saint-Maurice et ministre de l'Énergie et des Ressources. Cela touche
Hydro-Québec, une société qui nous appartient, une
société qui avait comme ultime objectif, avant la
présentation du projet de loi no 16, aujourd'hui, de fournir
l'énergie aux municipalités, aux entreprises
industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec, "aux
taux - c'est là que c'est important - les plus bas compatibles avec une
saine administration financière."
C'est donc dire qu'Hydro-Québec devait profiter à
l'ensemble des Québécois, et la loi conviait les administrateurs
et la direction d'Hydro-Québec à rechercher, en tout temps, les
tarifs les plus bas possible pour les contribuables que nous sommes, tous et
chacun et chacune d'entre nous.
Ce projet de loi vient modifier la structure financière
d'Hydro-Québec. Ce projet de loi qui est le résultat de
l'affaiblissement de l'économie du Québec, depuis quelques
années, constitue, en quelque sorte, le moyen pour le gouvernement du
Québec de combler des déficits, des manques à gagner et
d'aller chercher de façon indirecte ce qu'il n'a pas le courage, ni le
culot, ni le front de faire directement.
M. le Président, on sait que le gouvernement du Québec est
formé de gens qui devaient bien administrer notre province et qui
invitaient les Québécois à rester forts le 13 avril
dernier. Force nous est de constater aujourd'hui qu'on se retrouve dans une
situation où on aura bientôt à la fin de l'année un
peu plus de 3 000 000 000 $ de déficit au Québec,
représentant une augmentation de 280% par rapport au déficit de
1976. Ce sont les bons administrateurs, les gens compétents, les gens
qui connaissent cela du Parti québécois. On se retrouve donc avec
un besoin d'argent qui est accru. Ce qu'on a fait, on a tenté par tous
les moyens indirects d'aller combler, d'aller chercher ces montants: taxe sur
l'essence, augmentation de plusieurs taxes indirectes. On aura l'occasion de
revenir sur chacune d'entre elles. Oui, je reviens sur la motion. Vous allez
voir qu'on pourra discuter assez longtemps. On espère qu'on pourra
discuter des deux côtés de la Chambre.
M. le Président, j'en étais à vous dire qu'avec le
projet de loi ils transforment, somme toute, comme le disait mon
collègue de Gatineau, Hydro-Québec en un percepteur d'impôt
pour le gouvernement du Québec et ils permettent à
Hydro-Québec d'imposer des taxes qui iront renflouer les déficits
du Parti québécois, l'incompétence, la mauvaise gestion du
Parti québécois qui est beaucoup plus préoccupé par
la constitution, la souveraineté avec ou sans trait d'union avec
l'association, qu'il ne peut l'être par l'économie. (17 h 50)
Ce projet de loi vise essentiellement à camoufler la mauvaise
administration du PQ. Ce qu'on dit par la motion de report à douze mois,
ce n'est pas compliqué. On dit: Comme contribuables du Québec,
les contribuables qu'on représente, on en a assez des augmentations de
taxes et on ne peut pas se permettre d'accepter un hold-up comme
celui-là, parce que ce projet de loi permettra au gouvernement, M.
Jacques Parizeau en tête, d'aller chercher jusqu'à 75% des profits
engendrés par les activités d'Hydro-Québec sous forme de
dividendes. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que les profits qui
avant servaient à Hydro-Québec pour réinvestir, pour
dépenser des montants combien importants - le programme d'investissement
prévu pour 1982, c'était un peu plus de 2 000 000 000 $ -
risqueront à l'avenir d'entrer dans les coffres et dans les budgets
réguliers du gouvernement du Québec pour payer l'épicerie
et payer les dépenses courantes du gouvernement, purement et
simplement.
Ce projet de loi prévoit des augmentations de tarifs
substantielles; c'est 16,7% à compter du 1er janvier. On dit à
tout cela: Assez, c'est assez, cela n'a pas de bon sens. La semaine
passée, c'était l'augmentation de l'essence, c'était
l'augmentation des plaques d'immatriculation, on vient de perdre la diminution
de 2%...
M. de Belleval: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Charlesbourg sur une question de privilège, en vous rappelant que, si
cela a trait à votre discours, vous avez le droit, en vertu de l'article
96, d'intervenir à la fin. Si c'est en vertu d'une opinion
différente, il y a d'autres façons que de soulever une question
de privilège. Je l'ai souvent dit aussi: On peut clarifier la situation
lors d'une intervention future.
M. le député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, vous me rappellerez
à l'ordre si je ne suis pas conforme à vos... J'accepte vos
recommandations. Si mes remarques ne sont pas conformes à ce que vous
venez de dire, vous me le direz et j'accepterai votre décision sans
problème. C'est parce que le député de Portneuf vient
d'induire la Chambre en erreur et aussi la population qui nous écoute en
disant qu'un des objets du projet de loi, c'est de permettre l'augmentation des
tarifs et il a mentionné un chiffre, je pense, de 16%. M. le
Président, ce projet de loi n'a aucun rapport avec l'augmentation des
tarifs d'Hydro-Québec.
Le Vice-Président CM. Jolivet): M. le député
de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président.
M. Gratton: Qu'est-ce que tu contes là? Voyons donc.
M. Pagé: Si le projet de loi 16 avait pu être
discuté au complet au caucus du Parti
québécois, comme cela pourrait être le cas, si le PQ
acceptait de reporter à douze mois l'étude du projet de loi, le
ministre, non pas le ministre, je m'excuse, ce n'est pas lui, le
député de Charlesbourg, ex-ministre des Transports serait en
mesure de comprendre le projet de loi. Avec le projet de loi no 16, vous allez
fouiller dans les poches d'Hydro-Québec; vous pouvez possiblement
prendre jusqu'à 70% des dividendes et cela obligera Hydro-Québec
à augmenter ses tarifs. On sait tellement cela que l'augmentation des
tarifs prévue est déjà de 16,7% pour le 1er janvier
prochain, 16,7% que le contribuable du Québec devra payer de plus qu'il
paie actuellement, après avoir fait l'objet d'augmentations de taxes
indirectes soutenues et régulières depuis plusieurs mois au
Québec, à cause de l'incompétence non seulement de ces
gens, mais surtout de celle du député de L'Assomption et ministre
des Finances.
M. le Président, la motion de douze mois, qu'est-ce qu'elle vise?
Quel est son objet? C'est tout d'abord de permettre une meilleure consultation.
Je ne suis pas convaincu que le député de Champlain a eu
l'occasion de discuter à fond ce projet de loi. Je ne suis pas convaincu
que les nouveaux députés d'arrière-ban, qui viennent
d'arriver ici, qui ont été élus le 13 avril dernier, ont
pu discuter ce projet de loi ni qu'ils ont eu l'occasion de discuter, la
semaine dernière, du règlement qu'a présenté un
membre du Conseil des ministres et qui visait essentiellement à enlever
l'aide sociale aux personnes de 18 à 21 ans. À ce
moment-là, le caucus du Parti québécois a fait le travail
qu'il avait à faire. Je serais curieux, par exemple, de voir le travail
que vous pourriez faire à l'égard du projet de loi no 16, si vous
aviez la chance d'être consultés, premièrement.
Une voix: ... est d'accord.
M. Pagé: Je ne suis pas convaincu de cela, M. le
Président. Le député de Vanier et ministre des
Communications se doit d'être d'accord; il est lié par la
solidarité ministérielle.
M. le Président, cela nous permettrait de tenir un
véritable débat public sur l'énergie. Le
député d'Outremont aura l'occasion de revenir un peu plus tard
dans ce débat pour démontrer clairement que ce débat ne
s'est pas tenu. Le député de Charlesbourg, tout à l'heure,
a erré dans les faits, lorsqu'il a soutenu qu'un tel débat
s'était déjà tenu au Québec.
Cela nous permettrait de voir aussi quel serait l'effet pour les
contribuables du Québec de vivre une augmentation aussi substantielle.
On sait que le petit contribuable, le citoyen moyen au Québec a
été frappé durement, depuis quelque temps.
On n'a même pas eu l'occasion de discuter le budget les 25 heures
qui nous sont allouées. On n'a pas eu le temps d'échanger avec
les membres du gouvernement sur les études et les analyses qu'ils ont
dû faire avant de taxer le contribuable comme il le sera, avec le budget
Parizeau. La consultation de la période de 12 mois nous permettrait de
voir l'effet sur le plan d'investissement d'Hydro-Québec, de
l'application de la loi no 16.
Quant au programme d'investissement, c'est là que je vais
invoquer le deuxième motif pour lequel la motion est tout à fait
justifiée. J'invite les députés de la région de
Québec, le député de Charlesbourg notamment, qui a pris la
parole tantôt, le ministre des Communications, non, lui, je ne l'invite
pas, parce que, de toute façon, il a la solidarité
ministérielle, et qu'est-ce qu'il ne ferait pas pour rester ministre,
pauvre petit gars! Alors M. le Président, j'invite donc le
député de Limoilou, j'invite le député de Chauveau
notamment, mon voisin de comté, j'aimerais que le ministre de
l'Énergie et des Ressources... Cette période nous permettrait de
voir l'effet de la loi no 16 sur un projet comme celui qui est dans le
comté de Portneuf, le projet Delaney, qui devait se réaliser
cette année. On sait que le projet Delaney, c'est un projet par lequel
Hydro-Québec prévoyait - je dis bien prévoyait -
construire une centrale à réserve pompée, qui aura comme
objectif de combler les besoins d'électricité en période
de pointe.
M. Duhaime; M. le Président, question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, une
question de règlement.
M. Duhaime: M. le Président, je comprends qu'il est 18
heures moins trois minutes, que le député de Portneuf veut
s'adresser à ses électeurs et leur parler du projet Delaney, mais
je vais répondre tout de suite à la question qu'il m'a
posée.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse M. le
ministre. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, j'aime autant vous dire
qu'à Hydro-Québec, d'après les études qu'elle a
faites, le ministre de l'Énergie en est certainement au fait, il ressort
clairement que d'ici quelques années, nous aurons besoin d'une
production hydroélectrique en période de pointe pour alimenter le
Québec. Depuis plusieurs années, Hydro-Québec
prépare un projet important, primordial pour le développement
économique de la réqion de Québec, notamment, un projet
qui permettra de produire en période de pointe 2110 mégawatts, ce
qui est tout
prêt de 10% de la production du Québec actuellement, qui
demandera un investissement de 2 milliards de dollars. Je soutiens, comme
député - c'est mon appréhension très nette - que,
compte tenu que le projet de loi no 16 permettra au gouvernement d'aller puiser
dans les revenus d'Hydro-Québec, en déclarant des dividendes qui
vont aller jusqu'à 75%, cette société a déjà
annoncé, a déjà confirmé des diminutions de 570 000
000 $ des investissements qu'elle entendait faire l'année prochaine. Je
termine là-dessus, M. le Président. Pour ce motif...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, question de règlement de la part du leader du
gouvernement. Question de règlement.
M. Bertrand: M. le Président, je pense qu'il y a un
règlement dans le cadre de ce débat sur la motion de report qui
stipule que chaque député a droit à dix minutes.
Voudriez-vous nous indiquer, s'il vous plaît à quelle heure a
commencé de parler le député de Portneuf et est-ce que ses
dix minutes sont épuisées à ce moment-ci?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette question
étant une demande, je dois vous dire, M. le leader, que le
député, avec les interruptions qu'il a eues... J'ai la latitude
cependant de vérifier ces interruptions, et je me permets de dire qu'il
lui restait le temps qu'il fallait avant de suspendre. M. le ...
Une voix: C'est parce qu'il voulait passer à la
télévision.
M. Pagé: Avant d'être interrompu, j'en étais
à dire que je peux affirmer l'appréhension que les gens de
Portneuf ont et que leur député a: c'est que le projet de loi no
16 amène un risque sérieux non seulement de reporter à
plusieurs années, mais de faire en sorte que le projet Delaney, qui a
été élaboré par Hydro-Québec, au sujet
duquel le président-directeur général de la
société, M. Boyd, répondant à la commission
parlementaire du 24 février, disait qu'Hydro-Québec avait besoin
de la réalisation de ce projet... L'amorce des travaux devait se faire
en 1981. Le ministre n'est certainement pas sans savoir qu'il devait se
dépenser 13 000 000 $ cette année, 24 000 000 $ en 1982. Notre
appréhension est sérieuse et on craint que la loi no 16 ne vienne
mettre fin à la réalisation d'un tel projet. Ce sont là 2
000 000 000 $ d'investissement dans la région de Québec, la
création de plusieurs centaines, de quelques milliers d'emplois. Ce sera
important pour tous nos comtés, les comtés péquistes comme
les comtés libéraux, évidemment. Car on sait combien la
région de Québec peut être frappée par un taux de
chômage élevé, actuellement. Je veux avoir l'assurance du
ministre de l'Énergie et des Ressources.
On sait que le projet est sur la table du Conseil des ministres depuis
déjà un bon bout de temps. Je voudrais, et c'est la demande que
je formule aujourd'hui, que le ministre de l'Énergie et des Ressources
profite du débat sur le projet de loi no 16 pour confirmer la
volonté du gouvernement de réaliser le projet Delaney, qui sera
bénéfique, qui commandera un investissement de 2 000 000 000 $
dans le centre de la région de Québec et nous dise selon quel
échéancier il sera réalisé.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint.
M. Bertrand: J'allais dire au député de Portneuf
que si c'est le projet de l'année, il ne peut pas y avoir un report de
douze mois.
M. le Président, nous allons suspendre jusqu'à 20
heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Suspension des travaux jusqu'à 20 heures et le
député de Verchères aura le droit de parole.
(Suspension de la séance à 18 h 01)
(Reprise de la séance à 20 h 07)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
Vous pouvez vous asseoir.
La parole est au député de Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: M. le Président, on discute actuellement
d'une motion de report qui voudrait faire en sorte que le projet de loi qui est
actuellement à l'étude soit mis sur les tablettes pendant un an.
Pour quelle raison? On a entendu deux intervenants libéraux cet
après-midi et les deux arguments qui ont été
avancés sont les suivants. D'abord, selon eux, il y a un débat
à faire sur l'avenir énergétique au Québec. Ce
débat, disent-ils, n'a pas été fait et ce débat
devrait, à leur avis, être fait avant que l'on discute du projet
de loi parce que ce projet de loi affecte l'avenir énergétique du
Québec. Premier argument.
Deuxième argument, plus camouflé, c'est celui du
député de Portneuf qui dit, lui: II faut empêcher le
gouvernement de taxer plus parce que le gouvernement allant fouiller dans les
poches d'Hydro-Québec oblige Hydro-Québec à augmenter ses
tarifs et, donc, c'est une taxe déguisée. C'est cela les deux
arguments de nos adversaires.
M. le Président, si je comprends bien,
les applaudissements de mes amis d'en face -c'est peut-être la
première fois en cinq ans que je les traite d'amis - témoignent
que j'ai bien résumé leurs arguments. Donc, si on se comprend sur
l'argumentation de nos adversaires, maintenant on va voir si cette
argumentation est fondée parce que c'est cela, la question. Vous pouvez
toujours essayer d'invoquer l'importance de reporter le débat à
un an en vous basant sur certains arguments, il reste à savoir si ces
arguments sont fondés.
D'abord, est-ce qu'il y a un débat à faire sur l'avenir
énergétique? Peut-être. On peut diverger d'opinion pour
savoir si ce débat a déjà eu lieu, a suffisamment eu lieu
ou n'a pas eu lieu du tout. Ce qu'il est important de savoir si ce débat
devait avoir lieu, c'est: est-ce que le projet de loi affecterait l'avenir
énergétique du Québec et est-ce qu'en discutant de
l'avenir énergétique du Québec on mettrait en cause le
projet de loi qui est devant nous actuellement? La réponse, c'est non
parce que ce qui est en cause actuellement devant l'Assemblée nationale,
ce n'est pas l'avenir énergétique, comme le prétendent les
libéraux. Ce qui est en cause actuellement, c'est l'utilisation que le
gouvernement du Québec veut faire de fonds publics qui existent et qui
vont exister à cause du simple fait que les gens paient leur
électricité, et qu'on voudrait peut-être utiliser
différemment au cours des prochaines annnées.
M. le Président, je suis convaincu que les profanes qui nous
écoutent, les gens qui ne comprennnent pas grand -chose - c'est la
majorité des gens, et je suis un de ceux-là -qui ne comprennent
pas grand chose à toute la complexité du dossier
énergétique, comprennent une chose clairement: c'est qu'il n'y a
pas beaucoup de relation entre l'utilisation qu'on veut faire des fonds
publics, d'une part, et l'avenir énergétique, d'autre part. Il
n'y a pas de relation entre ces deux questions. Et qu'on n'essaie pas de
créer une fausse relation pour camoufler sa propre turpitude parce qu'on
est un petit peu embêté avec un programme électoral qui dit
exactement ce que le gouvernement est en train de faire.
C'est cela, le problème des libéraux. Ce n'est pas le
gouvernement du Québec, actuellement, qui a un problème, c'est le
Parti libéral qui est poigné à vivre avec un programme
politique qui dit exactement ce que le gouvernement du Québec est en
train de faire. Sauf que quand on est dans l'Opposition, il faut s'opposer. Le
problème, c'est que, quand on s'oppose à son propre programme
politique, il faut camoufler cela, il faut trouver de bonnes raisons, du moins
des raisons qui ont l'air de poigner. Le problème, c'est que vos raisons
ne poignent pas. En tout cas, celles-là ne poignent pas, parce qu'il n'y
a pas de relation. Aucun des députés libéraux qu'on a
entendus jusqu'à maintenant dans ce débat n'a été
capable d'établir comment il y avait une relation entre l'avenir
énergétique et l'utilisation différente qu'on veut faire
des fonds publics qui existent à même la société
d'État qui s'appelle Hydro-Québec. Cela est le premier argument,
donc dégonflé votre premier argument.
Deuxième argument: le gouvernement veut taxer plus. Il veut taxer
plus parce qu'il va aller fouiller dans la poche d'Hydro-Québec et, en
faisant cela, il va augmenter la tarification. Ce n'est pas exact, M. le
Président. Il n'a jamais été question d'augmenter les
tarifs d'électricité au cours des prochaines années, pour
faire en sorte que le gouvernement aille chercher plus d'argent. Ce n'est pas
exact. Ce n'est pas exact, sauf que cela embête les libéraux parce
que c'était pour eux un bon argument pour camoufler, encore une fois, le
fait que, dans leur programme politique, ils proposaient exactement ce que le
gouvernement est en train de faire. Qu'est-ce que vous voulez, c'est
embêtant pour un parti d'Opposition de proposer exactement ce que le
gouvernement est en train de faire. Tous les partis d'Opposition, dans
n'importe quel Parlement du monde, seraient coincés comme vous
l'êtes actuellement si vous étiez pris à vous faire
remettre dans la figure -on va vous le faire toute la nuit s'il le faut votre
programme politique qui dit exactement de faire ce qu'on est en train de
faire.
M. le Président, il n'est pas question d'augmenter les tarifs au
cours des prochaines années parce que ce qu'il est question de faire
c'est, de toute façon, d'accumuler des fonds qui seront disponibles
parce que la demande baisse et les projets d'investissement, en
conséquence, ne sont pas aussi importants que certains le
prévoyaient. Une masse d'argent sera disponible. On peut faire deux
choses avec cette masse d'argent: payer "cash" certains projets qui, de toute
façon, vont devoir se faire. Cela veut dire que notre
génération paierait comptant et on donnerait aux
générations à venir des services gratuits, des services
qui, d'autre part, seront utilisés pendant des
générations.
Je pense que les gens qui nous écoutent n'ont pas le goût
de payer comptant de futurs barrages, de futures installations qui vont servir
pendant 100 ans, 150 ans, 250 ans. Personne, au Québec, n'a le
goût de payer comptant, actuellement, des installations qui vont durer
beaucoup plus longtemps qu'eux-mêmes sur cette terre. Les gens
comprennent ça. Ils comprennent que, dans ce cas, si le gouvernement
trouve que ça n'a pas d'allure - eux aussi trouvent que ça n'a
pas d'allure - de payer "cash" en une génération des
installations qui vont durer longtemps, il peut faire deux choses. Il peut
dire: On va baisser vos tarifs d'électricité. Mais en
faisant ça, qu'est-ce qu'on va faire? En baissant les tarifs
d'électricité, on va amener une utilisation accrue de
l'électricité et on va revenir au même point, parce que si
on baisse les tarifs, les gens qui utilisent le gaz ou l'huile
décideront d'utiliser l'électricité parce que ce sera
moins coûteux.
Ou alors on peut faire ce que le gouvernement fait actuellement. C'est
la raison pour laquelle il faut le faire maintenant et ne pas attendre dans
douze mois. Il faut utiliser cette masse d'argent qui sera disponible et faire
en sorte, comme le suggère le programme du Parti libéral,
d'investir soit dans le développement économique, soit dans le
développement social, réduire les inégalités au
Québec, ce que propose le programme du Parti libéral.
Maintenant, parce que c'est embêtant, parce qu'on veut jouer son
rôle d'Opposition jusqu'au bout, jusqu'à l'absurde, on
préfère déchirer son programme politique, on
préfère le mettre de côté et dire au gouvernement:
Ne faites pas ce qu'on vous disait de faire il y a sept mois, faites donc
l'absurde maintenant. Le problème, c'est que si vous avez changé
d'idée, si vous avez décidé d'être
incohérents jusqu'à l'absurde, on n'est pas obligé de le
faire. Je pense que les gens qui nous écoutent comprennent ça.
Ils n'ont pas le goût de suivre le Parti libéral dans l'absurde.
Ils n'ont pas le goût de payer "cash", pour utiliser l'expression
populaire, des installations qui vont servir pendant des
générations. Les gens ont le goût d'utiliser plutôt
les fonds disponibles pour faire en sorte que le développement
économique du Québec s'accélère. C'est ça le
bon sens de cette motion.
Dans ce sens-là, les deux arguments qu'on nous a
présentés pour dire qu'il fallait reporter ce projet à
douze mois, les deux arguments qu'on nous a présentés comme
camouflage de la motion dilatoire ne tiennent pas. Le débat qu'il nous
propose n'est pas pertinent à la question qui est actuellement en
discussion et, deuxièmement, il n'est pas question pour le gouvernement
du Québec de taxer plus. Il est question d'utiliser de l'argent qui est
là de toute façon pour donner des meilleurs services aux gens
plutôt que de payer "cash" des choses qui, de toute façon, vont
être utilisées pendant des générations. Cela non
plus ne prend pas un cours universitaire pour comprendre cela et on n'a pas
besoin d'un cours d'ingénieur comme le député d'Outremont
pour le comprendre. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
Des voix: Bravo!
M. Scowen: Nous aurons l'occasion, demain, M. le
Président...
M. Duhaime: M. le Président, je m'excuse auprès de
mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce. Je voudrais soulever une
question de privilège.
Des voix: Oh!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, question
de privilège.
M. Duhaime: Je voudrais, M. le Président, revenir sur
l'intervention du député d'Outremont, un peu avant l'ajournement,
qui disait, à mon endroit, que lors d'une conférence de presse
à l'annonce de la tarification pour l'année 1982, j'avais
déposé un tableau qui, d'après son jugement, serait faux
et qui comprendrait, à son dire, des chiffres quant au gaz naturel ne
tenant pas compte de la taxe. Je voudrais déposer devant
l'Assemblée nationale le tableau C dont il a été
question.
Une voix: ...pas de document. Une voix: Oui.
M. Duhaime: Au gaz naturel, il y a un astérisque et c'est
marqué, au bas de la page, "sans taxe".
Une voix: Dépôt.
Une voix: Consentement.
M. Fortier: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je voudrais simplement
bien faire remarquer qu'une question de privilège n'entraîne pas
un débat, cependant.
Une voix: Non.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Ce sera très limité. Je n'ai
malheureusement pas le document en question avec moi, mais cela me fera plaisir
de le donner au ministre en temps et lieu. Dans ce document que j'ai en ma
possession et qui nous est parvenu de son directeur des relations publiques, il
est fait mention des différents coûts de l'énergie pour
chauffer un bungalow. Dans les coûts se rattachant à
l'électricité, on a inclus le coût de la taxe sur
l'électricité. Dans les coûts qui sont donnés pour
le chauffage au gaz, on a oublié d'inclure la taxe sur le gaz. Cela me
fera plaisir de remettre également le document au ministre pour qu'il en
prenne
connaissance. Je ne l'accuse pas d'avoir fait lui-même cette
erreur, mais je dis qu'il est malheureux qu'un ministre donne une
conférence de presse et qu'il induise la population en erreur sur ce
sujet.
Une voix: Très bien.
M. Duhaime: M. le Président.
Une voix: Là, cela va finir en débat.
Une voix: Un "filibuster".
Une voix: Quelle motion est-ce que vous débattez?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse. J'ai bien
fait attention à mes dires, tout à l'heure, parce que je ne veux
en aucune façon qu'il y ait de débat. Je pense qu'il y a d'autres
façons de présenter ces questions et, en conséquence, je
donne la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.
Des voix: Bravo!
M. Duhaime: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, M. le ministre.
M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je voudrais, si nos
collègues d'en face sont d'accord, déposer un document. Le
député d'Outremont vient de nous dire qu'il n'en avait pas pris
connaissance lui-même. Alors, je me demande sur quoi il s'est basé
pour faire son affirmation. Je n'ai pas l'habitude de mettre dans des pochettes
de presse des originaux et des copies qui iraient en sens contraire. C'est
marqué très clairement...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. (20 h 20)
Une voix: Très bien.
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, est-ce que tout ce
débat faisait partie de mes dix minutes?
Une voix: Non, non, non.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous pouvez y aller, M. le
député. Vous pouvez y aller.
M. Scowen: Merci. Nous aurons l'occasion de parler du fond de la
question demain, mes collègues et moi. Je veux simplement ce soir vous
donner une ou deux raisons pour lesquelles il est très important de
reporter immédiatement ce projet de loi.
Premièrement, je dois avertir les membres de l'autre formation
qui vont parler après moi que plus tard ce soir mon collègue, le
député d'Outremont qui va parler au nom de notre formation, va
vous expliquer comment vous êtes complètement dans l'erreur quand
vous dites que nous avons effectivement proposé dans notre livre rouge
la même chose que vous proposez aujourd'hui. Je vous avertis maintenant
que vous perdez votre temps si vous continuez de marcher sur cette piste parce
qu'il va vous contredire clairement dans une heure ou deux.
M. le Président, le député de Verchères
parlait au nom des profanes de son comté et je pense que c'est un peu
à cause des gens de tous les comtés du Québec qui ne
comprennent pas la portée de ce projet de loi qu'on veut qu'il soit
reporté. Je veux fournir, en des termes les plus clairs possible, juste
un exemple des conséquences que ce projet de loi va avoir pour chacune
des familles du Québec. Pour vous donner un exemple plus clair, une
famille québécoise achète aujourd'hui de
l'électricité d'Hydro-Québec. Il y a un fil qui est
branché et l'électricité arrive dans la maison. En
conséquence, à tous les deux mois on paie une facture. Il y a un
coût et un bénéfice. C'est très clair, on y est
habitué. HydroQuébec crée un service
d'électricité et on paie Hydro-Québec pour ce service. Ce
qui est proposé maintenant, c'est de créer un deuxième fil
qui commence dans les fonds publics, dans le bureau de M. Parizeau, qui va
passer par Hydro-Québec jusqu'à votre maison. La seule
distinction entre ce fil et l'autre, qu'on connaît déjà,
c'est que c'est un fil qui passe dans un sens unique. Il y a des coûts,
on va avoir les coûts, mais pas les bénéfices. Chaque mois,
on aura une facture additionnelle cachée à l'intérieur de
la facture d'Hydro-Québec, des sommes importantes qui vont passer de
vous, citoyens du Québec, par l'entremise d'Hydro-Québec,
directement dans le fonds consolidé de M. Parizeau. Combien?
M. Picotte: Probablement que le député de
Verchères va comprendre.
M. Scowen: Si ce projet de loi est adopté, avec tout ce
qui entoure ce projet de loi, on va avoir une hausse radicale, pas moins de six
taxes très importantes. Premièrement, la taxe foncière
municipale va augmenter, d'ici 1985, de 6 000 000 $ à 16 000 000 $.
Hydro-Québec va payer les 16 000 000 $ et ce sera ajouté à
votre facture. L'impôt municipal sur le revenu passera de 51 000 000 $
à 130 000 000 $. La taxe de vente sur les achats d'Hydro-Québec,
une autre taxe nouvelle, passera de 12 000 000 $ à 28 000 000 t.
L'impôt sur
les programmes de santé, qu'Hydro-Québec sera
dorénavant obligée de payer, passera de 9 000 000 * à 30
000 000 $.
J'arrive au sujet le plus intéressant. La nouvelle taxe sur le
capital passera de zéro, l'année passée, à 147 000
000 $ en 1985. Les dividendes, proposés dans ce projet de loi, de
zéro aujourd'hui, passeront à 905 000 000 $ et, finalement, la
taxe de vente pour les usagers passera de 120 000 000 $ à 290 000 000 $.
D'ici 1985, les taxes perçues par le ministre des Finances, par le biais
d'Hydro-Québec et payées par les consommateurs
d'électricité, passeront de 200 000 000 $ à 1 500 000 000
$ pour une augmentation de 700%.
Pendant cette période de cinq ans, Hydro-Québec va payer
un montant de 3 000 000 000 $ de plus qu'elle aurait payé autrement, 3
000 000 000 $ qui seront, à leur tour, appliqués à votre
facture. 3 000 000 000 $, qu'est-ce que cela veut dire? C'est difficile
à comprendre. Il faut l'expliquer dans les termes de chaque famille. Il
y a au Québec, si ma mémoire est bonne, 1 500 000 familles. Cela
veut dire combien par famille? J'ai une petite calculatrice et je vais faire
les calculs pour vous. Qu'est-ce que vous pensez, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Un instant.
J'essaie de vous suivre dans votre discussion. S'il vous plaît! J'ai
essayé avec attention de bien vous suivre. J'expliquerai à celui
qui va me remplacer au cours de la nuit les problèmes qui existent au
niveau de la définition de l'amendement ainsi que de la motion
principale. J'ai dit qu'il fallait être très large parce qu'il y a
une ligne de démarcation très difficile à tracer. Je
précise à tous les autres députés qui auront
à intervenir sur l'amendement, que l'amendement porte sur le report
à douze mois de l'étude du projet de loi no 16. Je sais que vous
essayez, comme tous les autres vont le faire, d'ailleurs, je ne veux pas vous
accuser ni les autres, de donner les raisons pour lesquelles il faut reporter
ce projet de loi à douze mois. J'aimerais quand même avoir
l'assurance que dans ce que j'ai comme intelligence à saisir de votre
discours, c'est bien sur la motion d'amendement que vous parlez et non pas sur
la motion de fond.
M. Scowen: M. le Président...
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement. Tout ce que le député... Mais je
soulève... Le Vice-Président (M. Jolivet): Ah bon! C'est
différent, parce que je n'avais pas...
M. Lalonde: Vous êtes appelé à appliquer le
règlement, ce que vous faites avec beaucoup de sagesse, M. le
Président. Je le dis sérieusement. Ce n'est pas facile. Ce que le
député de Notre-Dame-de-Grâce est en train d'expliquer,
c'est qu'il y a 1 500 000 000 $ de raisons pour reporter le projet à un
an.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Ce que je voulais faire, M. le Président, c'est
de vous donner seulement un exemple d'un manque de compréhension, de
connaissance de la part de la population dans le fait de reporter l'adoption de
ce projet de loi. Avec votre permission, je vais continuer de donner cet
exemple. Je suis persuadé que les citoyens de Verchères, cette
fin de semaine, si je m'explique bien, c'est ce qui va arriver ici, vont
demander au député de Verchères d'appuyer notre motion de
report. C'est très important. Je suis arrivé à la fin de
mon exposé, M. le Président. Je veux vous dire que je viens de
faire le calcul. Ces 3 000 000 000 $ valent 2000 $ par famille. D'ici 1985,
chaque famille québécoise, à cause de ce projet de loi, va
voir sa facture d'électricité directe ou indirecte augmenter de
2000 $ sans recevoir une quantité additionnelle
d'électricité. C'est une perte totale pour ce contribuable qui va
passer directement de sa maison à Hydro-Québec et ensuite aux
coffres de M. Parizeau. C'est une taxe cachée qui s'élève
à 400 $ en moyenne par année ou si vous voulez à 35 $ par
mois. C'est pourquoi le Parti libéral a demandé ce soir que ce
projet de loi soit reporté pour que la population ait le temps
nécessaire de l'étudier. Ce n'est plus le projet de loi no 16;
c'est le projet de loi 2000, 2000 $ de plus par famille. C'est ce que ce projet
de loi va coûter aux contribuables québécois.
Dans son discours cet après-midi, M. le Président, le
ministre disait que c'était normal qu'Hydro-Québec se comporte
comme une société privée. Ce n'est pas normal. Ce n'est
pas normal du tout qu'un monopole d'État qui est organisé et
créé pour donner des services à la population soit
obligé de s'organiser comme une société du secteur
privé. Je pense que ce parti en face doit être le premier à
le comprendre. Je pense que d'après la population, c'est beaucoup plus
normal qu'Hydro-Québec continue de poursuivre le mandat qui a
été confié à cette société il y a
plus de 25 ans, qui est de fournir l'électricité à la
population aux prix les plus bas possible, compatibles avec une saine gestion
financière. C'est cet aspect, les prix les plus raisonnables possible
que le Parti québécois est en train d'enlever à cette
société.
En terminant, M. le Président, - je
regrette d'être obligé de terminer, parce que j'ai
été interrompu par tout le monde, même le président,
mais je pense que j'ai terminé quand même, on va reprendre demain
matin l'essentiel, la raison essentielle pour laquelle on demande que ce projet
de loi soit reporté, c'est que les gens de Verchères, les gens de
Notre-Dame-de-Grâce, les gens de vos comtés à vous,
messieurs, ne comprennent pas que ce projet de loi va leur coûter, d'ici
1985, en moyenne 400 $ de plus par année sur leur facture
d'électricité sans recevoir aucune augmentation dans ce qui est
fourni. Est-ce clair? (20 h 30)
Des voix: Oui.
M. Scowen: Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Fabre.
M. Leduc: Oui, question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement.
M. Leduc: Je voudrais poser une question au député.
Comment fait-il pour arriver au chiffre de 2000 $ par famille? Cela nous
étonne beaucoup, M. le Président. C'est la première fois
qu'on entend ce chiffre et on aimerait entendre quelques explications de la
part du député.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce veut-il répondre?
M. Scowen: Est-ce que je peux...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, vous avez la
parole.
M. Scowen: Très bien. Cela va prendre deux minutes. Je
vais prendre le tableau qui a été produit par M. Marcel
Bélanger quant aux impôts additionnels qui seront...
Des voix: Ah! Ah!
M. Scowen: Je pense que c'est une source très respectable.
On a calculé les impôts additionnels qui seront perçus
d'Hydro-Québec par le gouvernement d'ici cinq ans. Je dois ajouter que
c'est une prévision optimiste dans le sens que c'est basé sur une
augmentation de 13% seulement des tarifs moyens, ce qui est loin d'être
probable. De toute façon, si j'ajoute tous les impôts additionnels
basés sur 1980 qui seront payés par Hydro-Québec à
ce gouvernement, j'arrive à peu près à 3 000 000 000 $. Si
je divise 3 000 000 000 $ par 1 500 000 familles québécoises,
j'arrive à 2000 $ par famille. Je viens de le faire avec ma petite
calculatrice et, si vous ne me croyez pas, je suis prêt à vous la
prêter.
M. Grégoire: Permettez-vous une question?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Non. M. le
député, vous aurez l'occasion d'intervenir. M. le
député de Frontenac, le député de
Notre-Dame-de-Grâce acceptant d'y répondre, allez.
M. Grégoire: M. le Président, c'est juste une
demande de précision sur les chiffres que vient de nous donner le
député de Notre-Dame-de-Grâce. J'aimerais lui demander
comment il se fait, s'il y a 3 000 000 000 $ d'impôts de plus ou de taxes
différentes à Hydro-Québec, que, malgré tout, nous
sommes 12% moins cher qu'en Ontario et le moins cher en Amérique du
Nord? Est-ce que ça veut dire que nous sommes les meilleurs
administrateurs?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Premièrement, M. le Président, c'est
exactement à cause de notre situation très concurrentielle
aujourd'hui, qui ne sera plus concurrentielle après que vous aurez
adopté ce projet de loi, si on subit ses conséquences pendant
cinq ans, qu'on propose que ce soit reporté.
En deuxième lieu, M. le Président, je veux rappeler au
député de Frontenac que, d'après les livres bleus et
Bâtir le Québec même, nous ne sommes pas le moins cher en
Amérique du Nord; il y a au moins deux ou trois endroits aux
États-Unis où l'électricité est moins chère.
II y a une ville dans l'État de Washington, une deuxième au
même endroit et la province du Manitoba. M. le Président,
ça me fera plaisir de descendre les deux livres,
L'électricité et Bâtir le Québec, et de vous donner
les endroits précis, je l'ai dans mon bureau. Ce sont vos documents
à vous. Il n'y a pas de problème. Est-ce que vous voulez que je
les descende?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci, M. le
député.
M. le député de Beauce-Nord.
M. Adrien Ouellette
M. Ouellette: Merci, M. le Président. J'ai presque envie
de m'excuser de mettre fin au débat qui s'était engagé
entre le député de Notre-Dame-de-Grâce et certains
collègues, puisqu'on aurait pu permettre au député de
Notre-Dame-de-Grâce de nous faire part de ses connaissances
géographiques qui ne figurent pas sur sa calculatrice
électronique, mais vous pourrez toujours
reprendre le débat en d'autres lieux.
Je n'avais pas l'intention d'intervenir sur ce projet de loi parce que,
après avoir pris connaissance du programme électoral du Parti
libéral, j'étais certain que l'Opposition libérale se
rallierait spontanément au projet de loi no 16 et approuverait le geste
que le gouvernement du Québec s'apprête à poser. Quand j'ai
entendu le député de Gatineau faire une motion de report à
douze mois, il a bien fallu, comme mes collègues, que je me rende compte
que ce que les libéraux écrivent dans leur programme
électoral ne correspond pas toujours aux propos qu'ils tiennent à
l'Assemblée nationale au lendemain des élections.
Essentiellement...
Une voix: Ils n'ont jamais respecté leurs programmes.
M. Ouellette: Le raisonnement que tiennent les gens de
l'Opposition peut se résumer ainsi, ils nous disent:
Hydro-Québec, depuis 1963, depuis la nationalisation, appartient en
totalité aux Québécois et devrait servir d'abord les
intérêts des Québécois. Je pense que
jusque-là, il n'y aura pas de chicane possible et c'est une des rares
fois d'ailleurs, où, à ma connaissance, il y a une parfaite
unanimité sur le parquet de l'Assemblée nationale.
Mais ils poussent, hélas! leur raisonnement un peu plus loin en
disant: Si vous voulez que l'ensemble des citoyens du Québec profite de
cette propriété qui est la sienne, c'est-à-dire
Hydro-Québec, vous devez abaisser les taux ou les tarifs
hydroélectriques au minimum, afin qu'on puisse tous utiliser cette
électricité à meilleur compte et que tous les
Québécois puissent en profiter à ce titre. Car,
disent-ils, tous les citoyens du Québec utilisent
l'électricité. Là-dessus, je crois qu'on va être
encore d'accord. C'est clair que, du bébé dans son incubateur
jusqu'au doyen des Québécois, nous avons tous besoin
d'électricité, chaque jour, dans notre vie. Personne ne va
contester ça.
Alors, leur raisonnement consiste à dire: Si on abaisse les
tarifs, on fait en sorte que chaque Québécois profite de la
propriété qu'il a, Hydro-Québec. Mais là où
il y a un problème, c'est au niveau du degré de consommation.
Personne n'osera prétendre que chaque Québécois, chacun
des 6 000 000 de Québécois utilise la même quantité
d'électricité. C'est bien sûr qu'il y a différents
degrés d'utilisateurs. Par exemple, le propriétaire d'une maison
individuelle avec chauffage à l'huile utilise beaucoup moins
d'électricité que celui qui a la même maison avec un
chauffage à l'électricité. C'est certain que celui qui est
propriétaire d'un grand commerce utilise beaucoup plus
d'électricité que le citoyen ordinaire. Cela va en s'accroissant,
à mesure que les entreprises grandissent.
Si on suivait le raisonnement du Parti libéral, on aurait ceci
comme situation: abaissons les tarifs et faisons économiser de l'argent
à ceux qui utilisent beaucoup d'électricité et beaucoup
moins d'argent à ceux qui l'utilisent peu. Ce qui revient exactement
à dire: aidons les riches et faisons payer la facture par les moins
riches. C'est exactement la situation qu'on obtiendrait si on suivait non pas
ce qu'ils ont écrit dans leur programme électoral, mais dans ce
qu'ils défendent aujourd'hui sur le parquet de l'Assemblée
nationale.
Comme Québécois et comme membre du Parti
québécois, donc, comme social-démocrate, j'ai toujours
prétendu que ce n'était pas à une société
d'État comme Hydro-Québec de voir à ce qu'un
équilibre se fasse au niveau des revenus d'une société. Ce
n'est pas du tout le rôle d'une société d'État, mais
c'est bel et bien celui d'un gouvernement. Le projet de loi no 16 qui est
devant nous vise justement à inviter Hydro-Québec à jouer
son rôle de société à l'intérieur du
Québec en payant à l'État québécois une
juste contribution, au même titre que toutes les autres
sociétés d'État et que toutes les entreprises
privées sur le territoire de ce même Québec. (20 h 40)
En allant chercher ainsi les quelques millions et même les
quelques dizaines de millions, à une société d'État
au même titre qu'aux autres sociétés, c'est bien sûr
que M. Parizeau disposera d'une somme d'arqent lui permettant de faire une
redistribution beaucoup plus équitable que celle qui s'appuierait
exclusivement sur la capacité qu'ont les citoyens d'utiliser en petite
ou en plus grande quantité les kilowatts qui sont produits par notre
société d'État.
Je reviens donc à mon préambule. Je suis
étonné de voir que le Parti libéral, ayant écrit
une chose dans son livre rouge, dans son programme électoral, quelques
mois plus tard, se tourne carrément de bord et soutienne exactement le
contraire. Tout à l'heure, le député de
Notre-Dame-de-Grâce nous annonçait ou plutôt celui de
Marguerite-Bourgeoys - je ne sais trop - qu'un de leurs collègues allait
essayer de démentir ce fait. Avant même qu'il ne le fasse, qu'il
me soit permis de lire à nouveau un tout petit paragraphe qui figure
dans le programme électoral du Parti libéral, programme qu'ils
ont défendu durant la campagne électorale d'avril 1981 et qui se
lit ainsi - vous allez voir que cela confirme très exactement tout ce
que je viens d'avancer - au paragraphe 4, partie I: "En visant
l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel
énergétique à ne plus maintenir les prix artificiellement
bas et aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient en
découler par
des mesures sociales plus appropriées."
C'est donc dire qu'ils reconnaissaient, au moment où ces gens ont
écrit leur programme électoral, que c'est le rôle du
gouvernement de voir à ce que les citoyens reçoivent tous un
revenu équitable et suffisant pour leur assurer une vie décente.
Ce n'est pas du tout le rôle d'Hydro-Québec. Au contraire, le
rôle d'Hydro-Québec, c'est d'assurer que chaque citoyen puisse
avoir accès à la production hydroélectrique au meilleur
coût possible, mais à des coûts qui sont comparables aux
autres énergies qui sont offertes aux citoyens du Québec.
Je répète donc que je ne comprends vraiment rien à
l'attitude des libéraux. Je serai forcé de m'opposer à
cette motion de report, car il m'apparaît urgent qu'on règle ce
problème pour le mieux-être de l'ensemble de tous les
contribuables québécois qui depuis 1963 ont contribué
d'abord à l'acquisition, ensuite à la mise en place et au
développement d'Hydro-Québec. Si j'étais malin, je
rappellerais aux libéraux d'en face que ce que nous faisons par le
projet de loi no 16, à toutes fins utiles, c'est finir "la job" qu'ils
ont commencée en 1963, c'est-à-dire que pour une fois, enfin, le
gouvernement du Québec aura réellement nationalisé
Hydro-Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, le projet de loi no 16, Loi
modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec, premièrement,
prévoit, qu'Hydro versera des dividendes au gouvernement.
Deuxièmement, il prévoit que le surplus susceptible de
distribution pour une année financière donnée est
égal à 75% du total du revenu. Ce que les députés
d'en face refusent de reconnaître, ce n'est pas qu'on s'oppose aux
augmentations d'Hydro. Si Hydro a besoin d'augmentation pour ses propres fins
d'exploitation et d'investissement, qu'elle vienne devant la commission
parlementaire, on va l'approuver. Ce à quoi on s'oppose, c'est que les
tarifs d'Hydro soient utilisés pour payer les dettes du gouvernement.
Est-ce clair?
M. le Président, cela s'appelle exploiter la population par le
gouvernement. C'est une exploitation pure et simple. Si une multinationale
posait un tel geste, il y aurait un drame chez le Parti
québécois. On s'opposerait, parce que imaginez-vous qu'on veut
augmenter les profits pour payer des dettes. C'est ce que le gouvernement veut
faire. Le député de Gatineau, à juste titre, a fait une
motion en vue de reporter à douze mois l'étude et peut-être
l'adoption ou la non-adoption, selon ce qui va arriver au cours des douze mois,
du projet de loi. Il y a de bonnes raisons et des précédents
à cela. L'année dernière, à ce moment-ci, ce
même gouvernement a présenté une loi sur SOQUIP. On s'y est
opposé; on a fait les mêmes procédures que maintenant et
savez-vous ce qui est arrivé, M. le Président? On s'est
aperçu qu'on a obtenu d'autres informations. On n'avait pas besoin des
sommes d'argent que le gouvernement voulait. Il a amendé son projet de
loi et les fonds publics qui ont été donnés à
SOQUIP ont été réduits. On a économisé des
fonds publics pour les contribuables. C'est cela qu'on a fait l'année
dernière et c'est cela qu'on essaie de faire ici avec ce projet de
loi.
Il arrive, M. le Président, que des membres " du gouvernement
font des affirmations ou donnent des informations erronées. Des fois,
c'est de bonne foi, des fois, c'est voulu. Imaginez-vous que dans cette Chambre
on adopte un projet de loi tel que le projet de loi no 16 avec de mauvaises
informations. Ce sont des milliards qui sont en jeu. On demande de le reporter
à douze mois pour obtenir les bonnes informations.
M. le Président, je voudrais donner un exemple de ce que je viens
de vous dire. On découvre après coup que des affirmations faites
par des membres du gouvernement sont fausses. La semaine dernière, le
député de Gatineau - on le félicite pour la motion qu'il
nous a proposée ce soir - a porté à l'attention de cette
Assemblée le fait que le Dr Marc Lavallée, l'ex-président
péquiste de Montréal-Centre, a porté, auprès du
leader parlementaire et du ministre de l'Environnement, des accusations de
patronage et de gaspillage de fonds publics. C'était la
déclaration, l'affirmation du député de Gatineau.
Uhe voix: C'est vrai.
M. Ciaccia: Le député de Châteauguay, lui, a
d'affirmé que le Dr Lavallée s'était exprimé sous
le coup de la colère et de l'émotion et qu'il regrettait ses
propos selon lesquels l'Office franco-québécois pour la jeunesse,
relevant de M. Claude Charron, était un autre "nid à patronage",
permettant d'accorder des voyages outre-mer à des petits amis.
Des voix: Ah!
M. Dussault: Question de règlement, M. le
Président.
Une voix: Ah! cela fait mal.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, je ne voudrais pas avoir
à vous demander de faire
une question de privilège. Aussi, je vous demanderais, s'il vous
plaît, que le député de Mont-Royal s'en tienne à la
pertinence du débat.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de
règlement.
M. Lalonde: Sur la question de règlement, M. le
Président, je pense que tout le monde a compris que le
député de Mont-Royal tentait de démontrer que si le
gouvernement faisait ce qu'on lui demande, c'est-à-dire remettre
à plus tard justement ce projet de loi, il aurait le temps de
réfléchir, et que si le député de Châteauguay
avait fait la même chose, avant de dire des sottises comme celles qu'il a
dites il y a quelques jours, il ne serait pas dans la situation où il
est actuellement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président...
M. Dussault: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: ... les propos que tenait le député de
Mont-Royal, avant les sottises dont parlait le député de
Marguerite-Bourgeoys, ne sont pas pertinents, parce que la réplique du
Dr Lavallée à ce que j'ai dit n'a rien à voir avec
le...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît!
Je crois que nous devons nous en tenir à la pertinence du
débat et je demande au député de Mont-Royal de
continuer.
M. Ciaccia: M. le Président, je veux donner comme
exemple... C'est pertinent au débat que je donne ces exemples. On
demande de reporter à douze mois parce que si, durant ce temps, on a
d'autres informations, peut-être que la loi sera amendée ou
retirée.
Je veux donner un exemple de mauvaises informations qu'on a
subséquemment trouvées fausses et où on a donné les
bonnes informations à la population.
Le député de Châteauguay avait affirmé que le
Dr Marc Lavallée n'avait pas dit ces choses-là, qu'il
était en colère. Aujourd'hui, pour vous démontrer comment
la vérité sort de ces choses-ci, le Dr Lavallée a dit:
"Non seulement je ne regrette rien, mais mes questions sont demeurées
sans réponse. De plus je n'ai jamais communiqué avec M. Dussault.
Il sort cela de son imagination. Je ne m'exprimais pas sous le coup de la
colère et de l'émotion. Ce que je demandais au gouvernement,
c'est..." (20 h 50)
M. Dussault: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: Alors, M. le Président, je vais faire une
question de privilège non seulement sur les propos que tient
présentement le député de Mont-Royal, mais aussi sur la
relation que le journaliste du Journal de Montréal et de Québec a
...
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de privilège, M. le
Président.
M. Ciaccia: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement.
M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.
Vous savez très bien - M. le député ne le sait
peut-être pas; là, on voit pourquoi il n'a jamais
été vice-président -que ...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Lalonde: Non mais, quand même, s'il avait une question
de privilège à soulever à l'encontre d'une
déclaration d'un journaliste, il fallait qu'il vous donne un avis une
heure avant la séance.
M. Dussault: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay, sur une question de privilège
toujours?
M. Dussault: M. le Président, toujours sur ma question de
privilège. De toute façon, ça rejoindra ce que j'allais
dire à propos du journaliste parce que c'est la même chose. Ce que
me prête comme propos M. le député de Mont-Royal, ce n'est
pas exact. Ce que j'ai dit lorsque je suis intervenu en début de
discours hier... M. le Président, c'est une question de
privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vous
écoute.
M. Dussault: Ce que j'ai dit, M. le Président, lorsque je
suis intervenu en début
de discours hier, c'est que le Dr Lavallée a dit des choses que
j'étais convaincu aujourd'hui qu'il regrettait. M. le Président,
je n'ai pas dit que j'ai consulté ou que j'ai parlé au
téléphone avec le Dr Lavallée; je n'ai jamais dit
ça. Ce que j'ai dit, c'est qu'il a dit des choses sous le coup de la
colère et de l'émotion et que j'étais convaincu
qu'aujourd'hui il les regrettait. Il nous dit publiquement qu'il ne les
regrette pas, tant pis pour lui.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal, vous avez la parole.
M. Ciaccia: M. le Président, j'espère que tout le
temps qui a été perdu sur cette question de règlement sera
enlevé sur mon temps de parole. Je suis heureux de voir que le
député de Châteauguay confirme ce que je viens de dire et
qui a été répété ce matin dans le Journal de
Montréal,
M. Dussault: M. le Président, question de
privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, tout ce que j'ai dit tout
à l'heure était à l'encontre de ce que disait le
député de Mont-Royal. Je ne confirme pas; au contraire, je dis
que je n'ai pas dit les choses comme ça.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal, continuez.
M. Ciaccia: Je vois que le député de
Châteauguay ne confirme pas ce qu'il vient de confirmer avant qui
avait non confirmé ce qu'il vient de dire.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Alors, je continue avec les propos du Dr
Lavallée pour rétablir la vérité, les faits. Il
dit: " Ce que je demandais au gouvernement, c'est comment Mmes Denise Malouin
et Jacinthe Rouleau avaient pu obtenir des voyages outre-mer...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint.
M. Ciaccia: J'ai le droit de parole, M. le Président?
M. Bertrand: Oui, vous avez le droit de parole. Tout en
comprenant à quel point vous avez à interpréter avec
beaucoup de largesse des propos qui peuvent être tenu des deux
côtés de la Chambre, M. le Président, on ne viendra quand
même pas me faire croire que les propos que le député de
Mont-Royal est en train de tenir à partir de l'article paru dans un
journal, sur la base des déclarations faites par Marc Lavallée,
ont quelque chose à voir avec la motion de report qu'on discute.
Si tel est le cas, M. le Président, qu'on en fasse état.
Mais je pense que, dans le contexte de cette motion de report, le
député de Mont-Royal devrait comprendre qu'il est normal qu'on le
rappelle à l'ordre, si justement il est en train de se fourvoyer
complètement et qu'il n'appuie pas - parce que c'est son rôle en
ce moment, d'appuyer la motion de report de son collègue de Gatineau -
son collègue. Il devrait l'appuyer.
M. Gratton: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je voudrais dire, à
titre de parrain de la motion de report, que je considère que les propos
que tient présentement le député de Mont-Royal sont tout
à fait dans l'ordre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous constatez que parler
sur une motion de report, c'est difficile. Je vous demanderais votre
collaboration pour vous en tenir au sujet et je donne la parole au
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, pour un instant sur la
question de règlement, je ne parle pas sur mon temps pour la motion. En
réponse à la question de règlement soulevée par le
leader adjoint les propos que je tiens maintenant, les exemples que je donne
sont pertinents à la motion de report de 12 mois. J'appuie
entièrement mon collègue, le député de Gatineau, et
si le leader adjoint du gouvernement me permettait de terminer mon
exposé, il verrait exactement comment les faits que je vais apporter
sont pertinents.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Justement, M. le
député de Mont-Royal, vous avez la parole et terminez votre
intervention.
M. Ciaccia: Merci beaucoup M. le Président.
J'espère que, cette fois-ci, on va me laisser continuer à donner
les raisons pour lesquelles on doit appuyer la motion du député
de Gatineau.
Il y a certaines affirmations qui sont faites, des fois, en cette
Chambre et vous voyez maintenant les discussions. M. le Président, si on
avait l'occasion de discuter des chiffres et de toute l'information du projet
de loi, peut-être cela changerait-il complètement le projet de
loi.
Je vais vous donner un autre exemple. Le Dr Lavallée continue et
dit: "Quels étaient les comptes de dépenses de M. Pierre Simard,
chef de cabinet de M. Charron, au cours du premier mandat du gouvernement? Et
comment M. Marcel Léger avait-il pu se faire installer un système
téléphonique sophistiqué, un appareil de
télévision et divers gadgets au coût de 8000 $ dans sa
limousine?
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît;
M. Ciaccia: II y a une question de crédibilité du
gouvernement, ici. Le gouvernement nous présente un projet de loi par
lequel il veut aller chercher 1 500 000 000 $. Il nous demande de le croire. Il
nous demande de croire ce qu'il nous dit ici, que les dividendes seront
utilisés pour telle et telle fins. On pourrait demander au ministre...
Non, M. le Président, j'ai été interrompu. Vous me dites
qu'il me reste seulement une minute, j'ai été interrompu à
peu près huit minutes...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le
député de Mont-Royal, j'ai inclus le temps des interruptions et
il vous reste environ une minute. Je vous ai dit tout à l'heure que je
calculais le temps des interruptions pour vous le donner. M. le
député de Châteauguay, question de ...
M. Dussault: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement.
M. Dussault: Si je comprends bien, M. le Président, vous
acceptez l'argumentation du député de Mont-Royal à l'effet
que c'est pertinent parce que c'est la crédibilité du
gouvernement qui est en cause. À ce compte-là, il n'y a plus de
règlements qui tiendront à l'Assemblée nationale.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je
crois que ceux qui ont la parole portent la responsabilité de leurs
paroles aussi. Je crois que le député de Mont-Royal peut
terminer.
M. Ciaccia: La question qui se pose c'est: Pourquoi faire payer
les contribuables pour le patronage des petits amis du leader parlementaire et
les gadgets du ministre de l'Environnement par des dividendes d'Hydro? C'est
pour cela qu'on veut remettre ça à douze mois.
M. le Président, en terminant, je pourrais vous dire que
même les péquistes d'arrière-ban, ceux qui sont vraiment
honnêtes et ont vraiment à coeur les intérêts du
Québec, une fois qu'on aura fait les enquêtes sur la SHQ où
des millions sont impliqués, qu'ils demandent si le ministre de
l'Environnement a dépensé 8000 $ pour des gadgets. On peut
trouver et aller récupérer des sommes dans l'enquête sur la
SHQ. En terminant, peut-être qu'après douze mois, on aura
récupéré toutes ces sommes et que ce ne sera pas
nécessaire d'aller chercher des dividendes d'Hydro pour payer le
patronage, le gaspillage, la mauvaise administration.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Groulx.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci, M. le Président, je suis le
député de Terrebonne et je vous remercie.
Je vais d'abord essayer de m'en tenir à la motion et surtout
essayer de ne pas ternir trop de réputations de façon
effrontée. La motion de report de ce soir me surprend et, comme nouveau
député, c'est la première fois que je suis témoin
d'une motion de report; elle me frappe en pleine figure. (21 heures)
Je suis désolé et déçu que l'Opposition
apporte cette motion de report. Lors de mon arrivée dans cette Chambre,
je me disais: L'Assemblée nationale est divisée en deux parties,
les ministériels qui légifèrent et l'Opposition qui fait
son devoir. Le gouvernement propose une loi, la loi no 16, il
légifère, il prend ses responsabilités. L'Opposition veut
se défiler de ses responsabilités en faisant une motion de
report. Cela me surprend énormément, mais lorsque je constate
que, ce matin, il y a eu un vote aussi, il y a eu une autre motion de report ce
matin: l'Opposition a voté contre le fait qu'il y a deux nations au
Canada, elle a voté contre ce projet, donc elle a reporté sa
décision à plus tard. Or, c'est normal que ce soir, elle s'essaie
une deuxième fois. Mais je ne crois pas, comme beaucoup de mes
confrères et consoeurs... est-ce qu'il y en a ce soir? Carmen, Mme la
députée de Johnson, Mme Lavoie-Roux, Mme Dougherty,
député de Westmount, excusez-moi, je ne crois pas, dis-je, comme
les autres membres de ce côté-ci de la Chambre, que c'est à
cause de leur programme électoral que les libéraux veulent cette
motion de report. Je crois que c'est à cause de la motion de ce matin.
Pour être constants avec eux, il faut absolument que les
représentants du peuple québécois ne prennent pas leurs
responsabilités, parce que d'après eux, il n'y a pas de peuple
québécois, ils ont voté contre ce matin. Pour être
logiques avec eux, il faut qu'ils soient logiques avec ce que M. Trudeau a
dit... le peuple québécois, il ne dit pas le peuple, il dit: "La
tribu québécoise n'a aucune responsabilité
intellectuelle." Donc, ils se doivent d'être
constants avec eux et de faire le report pour que nous ne puissions pas,
de ce côté-ci, prendre notre part de responsabilité. Je
trouve cela désolant, dégueulasse. Si on ne me croit pas, j'ai
cité livre en main, je peux citer tous ces nobles attributs que donne
à notre tribu votre chef en chef.
Je peux en citer un extrait, si vous voulez. M. Trudeau, en parlant de
nous au début des années soixante, en parlant du peuple
canadien-français à l'époque, disait à ceux qui
voulaient leur État nation, je crois que ce sont les
ministériels, "mais la tragédie sans rémission serait de
ne pas voir que la nation canadienne-française est trop
anémiée culturellement, trop dépourvue
économiquement - cette loi veut nous pourvoir économiquement. Il
faut que vous suiviez les ordres de M. Trudeau, essayez de la faire passer
outre - trop attardée intellectuellement - attardé, c'est un
grand mot, il faudrait que "grattons" un peu cette idée - trop
sclérosée spirituellement." De plus, il ajoute: "On compte que la
naissance de notre État nation, c'est-à-dire l'accession à
notre souveraineté, libérera mille énergies
insoupçonnées." Il dit que l'on compte sur cela, mais bref: "On
croit à une énergie créatrice qui donnerait du
génie à des gens qui n'en ont pas." On parle de vous aussi de
l'autre côté de la Chambre, on dit "donner du génie
à des gens qui n'en ont pas" et apporterait le courage et l'instruction
à une nation indolente et ignorante.
Ce matin, en rejetant le fait qu'il y ait deux peuples, vous avez fait
une motion de report. Vous avez repoussé à plus tard. Vous
attendez les ordres du chef. Vous attendez qu'il vous dise: Continuez de
défendre les Québécois, la race
canadienne-française n'existe pas, ce n'est qu'une tribu qui joue au
sorcier et fume le calumet sous les wigwams. C'est cela qu'ils nous disent.
C'est pour cela, que vous ne voulez pas que de ce côté-ci de la
Chambre on prenne nos responsabilités financières. Vous voulez
reporter cela à un an, deux ans si c'était possible. Pas de
limite.
Je tiens à vous dire ceci: Nous serons ici, les
ministériels 120 heures, 140 heures, 200 heures d'affilée s'il le
faut, mais nous prendrons nos responsabilités parce que nous, nous
croyons que nous sommes un peuple, et un peuple prend ses
responsabilités même si cela coûte cher, même si cela
nous blesse politiquement. Il faut que nous prenions nos
responsabilités, et ce n'est pas les dernières lamentations de ce
qui reste d'une supposée tribu qui va empêcher les gens de ce
côté-ci de la Chambre de prendre leurs responsabilités.
Jamais, M. le Président, jamais. Quelle logique peut-on voir dans ce
report? M. le député de Vaudreuil-Soulanges nous dit que le
déficit est excessif, que le gouvernement ne sait pas administrer. Le
député de Vaudreuil-Soulanges nous dit cela, il a le droit de le
dire. Cependant, savoir administrer... Quand nous avons besoin de fonds pour
administrer, notre responsabilité est d'aller en chercher. C'est notre
responsabilité. Même si, de l'autre côté, on fait des
ah! ah! et si on fait des oui! oui! on va y aller, c'est sûr.
Eh bien, M. le Président, bien que de l'autre côté,
on crie, je m'en fous. De ce côté-ci, avec tous les gens qui sont
assis avec moi, je voterai contre cette motion, même si nous devions
gratter un peu plus fort pour que la rivière Gatineau coule plus fort.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Marquette.
M. Claude Dauphin
M. Dauphin: Merci, M. le Président.
Pour commencer, contrairement à mon collègue et ami de
Terrebonne, mes propos ne porteront pas sur la constitution mais bien sur la
motion de report présentée par le député de
Gatineau à laquelle je souscris entièrement, sans
hésitation et de façon inconditionnelle.
Mes propos seront pour justifier les raisons qui me motivent, en tant
que parlementaire responsable, à appuyer justement cette motion de
report du député de Gatineau. M. le Président, le but
premier du projet de loi no 16 est de siphonner les fonds d'Hydro-Québec
pour combler les déficits monstrueux du gouvernement du Parti
québécois, plus spécialement du député de
L'Assomption, ministre des Finances.
Comme on l'a dit tantôt, motion de report pour deux raisons
principales. La première est que même l'actuel président du
Conseil du trésor et ex-ministre de l'Énergie et des Ressources
était en faveur d'un débat public sur la question, étant
donné son importance. Importance, comme je disais, parce que ce projet
de loi no 16 bouleverse complètement les structures
d'Hydro-Québec et bouleverse du même coup l'utilisation des fonds
d'Hydro-Québec.
La deuxième raison qui me motive à appuyer effectivement
cette motion de report, c'est le fait que ce projet de loi est totalement
inacceptable pour le peuple québécois. Vous savez, M. le
Président, qu'en 1963, lorsque le gouvernement libéral a
décidé de nationaliser l'électricité,
c'était dans le but bien précis de procurer de
l'hydroélectricité aux Québécois au meilleur
coût possible. Tout le monde sait maintenant qu'avec ce projet de loi et
les décisions gouvernementales, tous les bénéfices que
nous avions en tant que Québécois pour inciter nos entreprises
à obtenir de l'électricité au meilleur coût
possible, ces beaux jours sont maintenant terminés de par les attitudes
du gouvernement et de par les
mesures qu'il entend prendre.
Selon l'information qui nous a été fournie en commission
parlementaire le 25 août 1981, Hydro-Québec paiera en dividendes,
de 1981 à 1885, 1 600 000 000 $, en plus de payer des taxes sur le
capital d'environ 400 000 000 $ pour cette même période. Ce qui
veut dire qu'en cinq ans, c'est une taxe indirecte de 2 000 000 000 $ que les
Québécois paieront en acquittant leur compte
d'électricité.
M. le Président, le gouvernement du Parti québécois
a une caractéristique qui lui est propre, c'est effectivement, comme
plusieurs de mes collègues l'ont dit depuis ce matin, d'être le
spécialiste des taxes déguisées. On commence par
l'augmentation de 60% des droits d'immatriculation. La présidente de la
Régie de l'assurance automobile du Québec, Mme Sotiau, nous
disait en conférence de presse, alors qu'elle était près
du ministre des Transports actuel, qu'à la Régie de l'assurance
automobile du Québec, cela allait bien, que les fonds étaient
suffisants et qu'il n'y avait aucune motivation d'augmenter les droits
d'immatriculation de cette façon-là, de 60%, sauf qu'il y a eu un
ordre du ministre des Finances de les augmenter encore une fois pour combler
les déficits. (21 h 10)
On pense aussi, M. le Président, à la taxe sur l'essence,
une augmentation de 0.30 $ le gallon. On dit que ce n'est pas grave mais,
finalement, ceux qui utilisent l'essence, c'est tout le monde, ce ne sont pas
seulement les millionnaires. Pour l'électricité, c'est la
même chose, ce ne sont pas seulement les millionnaires qui
l'utilisent.
J'entendais un député nous dire, cet après-midi, en
se frottant les mains, que c'étaient surtout les entreprises et les
corporations qui paieraient le plus l'augmentation qu'on nous propose. Mais une
chose est certaine, c'est qu'en taxant doublement les corporations, les
industries et entreprises du Québec, cela a un effet indirect et
même un effet direct sur les consommateurs qui devront payer la note de
cette augmentation. Autrement dit, le gouvernement, depuis cinq ans, affaiblit
le Québec sur le plan économique et a réussi à
accumuler une dette publique de 15 000 000 000 $. Il veut aujourd'hui
réparer son incurie administrative en faisant payer le prix aux
gagne-petit et aux consommateurs.
Ce que le gouvernement impose à Hydro-Québec nuira
considérablement à l'économie du Québec en incitant
les industries à s'établir en Ontario. On a vu les gens d'en
face, cet après-midi, rire de M. Bélanger, qui est un expert en
fiscalité; il est compétent, il est libéral, et il l'a
voulu. M. Bélanger, qui est compétent en la matière,
malgré ce que peuvent prétendre les gens de l'autre
côté, disait que si on maintenait les taux de
l'électricité au taux le plus bas possible, nous pourrions
attirer davantage les industries à haute consommation d'énergie
telles les alumineries et l'industrie manufacturière en
général.
Au contraire, avec le projet de loi no 16 - c'est ce qui nous motive
à appuyer cette motion de report - les prix de
l'électricité, au lieu de servir au développement
économique du Québec, augmenteront très rapidement dans
les prochaines années et les profits serviront à combler les
déficits du gouvernement plutôt qu'à faciliter son
développement et diminuer ses emprunts. Le gouvernement, au lieu de se
servir de notre principale richesse naturelle pour attirer les industries... On
parlait de chômage, on a eu l'occasion d'intervenir à maintes
reprises sur le chômage au Québec, on détient le
championnat du chômage, au Québec, et on cherche par tous les
moyens à éloigner les industries plutôt qu'à les
attirer en augmentant démesurément les tarifs
hydroélectriques.
Le pire, dans cette loi et ces augmentations, c'est, encore une fois,
qu'après l'augmentation du prix de l'essence et bien d'autres, on
cherche à étouffer ces pauvres consommateurs et contribuables.
Où est le groupe des onze? Probablement que pendant l'intersession, au
mois de janvier ou de février, ils vont nous sortir des documents, mais
je pense qu'il serait maintenant temps que ces gens nous en parlent un peu.
C'est plutôt le groupe des neuf; apparemment, il y en a deux de moins
maintenant.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Marquette, j'aimerais que vous reveniez à la
pertinence du débat. Vous parlez davantage de la loi.
M. Dauphin: C'est justement ce qui me justifiait d'appuyer cette
motion de report étant donné l'importance du projet de loi et
tous les bouleversements qu'il occasionne.
Ce que j'ai à dire brièvement, en terminant, c'est que
lors de la dernière campagne électorale, le Parti
québécois disait à la population du Québec: II
n'est pas question de faire de l'indépendance l'enjeu de la campagne
électorale. Au lendemain des élections, aussitôt qu'on est
arrivé ici, dans tous les discours des gens de l'autre
côté, c'est comme si l'indépendance était faite ou
devait être faite dans les prochaines semaines. Ils disaient à la
population qu'ils seraient de bons administrateurs, qu'ils formeraient un bon
gouvernement. On se rend compte, depuis quelques semaines, que c'est la pire
administration qu'on n'ait jamais eue au Québec, et je pense que les
gens vont en juger, pour employer l'expression du
premier ministre ce matin.
Enfin, faute de pouvoir retirer le projet de loi, en tant que membre de
l'Opposition, et de changer le gouvernement, je souligne que j'appuierai la
motion du député de Gatineau, et j'espère que la
majorité dans cette Chambre en fera autant. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Outremont.
M. Picotte: M. le Président, je m'excuse auprès de
mon collègue. Je voudrais souligner que mon collègue d'Outremont
parle au nom du parti, donc, pendant trente minutes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): J'en prends note, M. le
député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Merci beaucoup, M. le Président.
Des voix: ConsentementI Consentement!
M. Fortier: Deux fois dans la même journée, ce n'est
pas trop.
M. Gendron: Une heure!
M. Fortier: Ma voix vous tiendra éveillés,
messieurs.
M. le Président, avant de parler en faveur de la motion,
j'aimerais revenir sur la question de privilège qu'a soulevée le
ministre. De fait, j'ai examiné son communiqué de presse et il
avait partiellement raison. J'ai dit qu'il avait trompé la population en
faisant état de chiffres qui étaient trop favorables au gaz
naturel parce qu'il avait présumé du fait que peut-être le
ministre des Finances se rendrait à sa demande d'enlever la taxe de
vente sur le gaz. J'aurais dû être plus précis et j'aurais
dû dire qu'il a trompé la population à l'aide d'un
astérisque et il a raison sur ce point. De fait, il y a bien un
astérisque sous "gaz naturel" et on a oublié d'inclure, dans les
montants qui comparent les chiffres dont on fait état dans ce
communiqué de presse, un chiffre qui modifie substantiellement la
comparaison qui est faite.
Dans ce communiqué de presse, j'aimerais également
souligner, M. le Président, dans les augmentations, au tableau B -
j'espère que le ministre ne m'en voudra pas de le souligner pour ceux
qui croyaient que les gens les plus démunis pourraient
bénéficier de l'aide du gouvernement - que ceux qui
consommeraient 600 kilowattheures et moins auront, cette année, une
augmentation de 13,2% alors qu'Hydro-
Québec avait proposé 11,8%. On voit jusqu'à quel
point ces gens-là sont sociaux-démocrates et aident justement les
gens à faible revenu.
J'aimerais revenir à la motion de report, M. le Président,
et pour...
Le Vice-Président (M. Jolivet): ...de la part du ministre,
toujours d'après la même façon de voir les choses, je
voudrais éviter un débat. Mais je pense que, M. le
député d'Outremont, sur sa question de privilège, en
réponse à une demande que vous avez faite, a
débordé un peu vers la fin, ce qui vous permet d'accéder
à une question de privilège que, j'ai l'impression, vous
soulevez.
M. Duhaime: M. le Président, je n'ai pas en main le
tableau D, mais je l'ai en mémoire. Je voudrais que le
député d'Outremont nous dise quelle était la proposition
d'Hydro-Québec sur l'échelle de 900 kilowattheures par mois et le
tarif que le gouvernement a retenu.
Une voix: Ce n'est pas une question de règlement.
M. Duhaime: Sur le tableau D, le même tableau qui vient
d'être évoqué.
Le Vice-Président (M. Jolivet):
J'aimerais que le député d'Outremont, en vertu de son
droit de parole, revienne sur l'amendement de façon qu'on soit bien
clair. Actuellement, nous sommes sur l'amendement. Je vais, malheureusement,
être peut-être un peu plus strict qu'on ne l'a été
jusqu'à maintenant en vous disant toujours que cela a été
un peu difficile de déterminer si vous parliez sur la motion de report
ou sur la motion principale, qui est le projet de loi comme tel. Compte tenu de
la soirée que nous avons à passer, des impressions et de
l'expérience que j'ai, je vais être un peu plus
sévère sur l'opportunité de votre discusssion sur la
motion d'amendement.
M. Fortier: Je vous remercie, M. le Président. J'ai tout
à fait l'intention d'être pertinent pour répondre au
ministre, puisqu'il m'a posé une question. Je ne lui en veux pas,
peut-être qu'il n'est pas au courant du communiqué de presse, mais
s'il veut avoir de plus amples informations, il peut s'enquérir
auprès de son sous-ministre.
Des voix: Ah!
M. Fortier: Pour revenir à la motion, M. le
Président...
M. Duhaime: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, question
de privilège.
M. Duhaime: Le député d'Outremont dit que je ne
suis pas au courant de mon communiqué. Le communiqué, je l'ai
entre les mains, et je vais répondre à la question, s'il refuse.
Sur le niveau de 900 kilowattheures par mois...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Une voix: Un instant, M. le Président.
Une voix: C'est une vraie question de privilège.
Une voix: Ah oui!
Une voix: Une vraie, vraie, vraie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, de la part du député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, très rapidement. Vous
savez que le ministre aura un droit de réplique. Si les propos du
député d'Outremont ne lui plaisent pas, il aura l'occasion de le
souligner dans sa réplique. Ce qu'il est en train de faire, c'est un
débat, ce que vous voulez éviter.
M. Bertrand: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint.
M. Bertrand: Vous me permettrez de... Une voix: Debout!
M. Bertrand: ...faire remarquer au député de
Marguerite-Bourgeoys qu'un député a le droit, en tout temps,
dès que se sont produits les événements qui pourraient
amener un député à poser une question de privilège
de se lever. C'est dans le règlement. Si le député a le
sentiment qu'on a induit la Chambre en erreur, c'est son devoir de se lever
immédiatement et d'invoquer une question de privilège et de
rectifier les faits. C'est ce que le député de Saint-Maurice et
ministre de l'Énergie et des Ressources s'apprêtait à
faire. Je pense qu'il s'agit vraiment, dans les circonstances, d'une question
de privilège. (21 h 20)
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vois qu'on abuse encore
une fois des questions de privilège, malheureusement, de part et
d'autre. Je m'excuse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je ne
voudrais pas vous rappeler à l'ordre, mais le député
d'Outremont a soulevé deux questions de privilège.
Je vous dis dès le départ que je refuserai, même si
le règlement m'y oblige d'une certaine façon, des questions de
privilège qui ont pour but d'engendrer un débat de part et
d'autre. J'aimerais qu'on soit bien conscient d'une chose: il y a des
façons de répondre à des arguments apportés. L'une
des façons, c'est de permettre à celui qui suivra dans la motion
de fond de pouvoir intervenir et rectifier ce qui semble, à la vue d'une
personne, une fausse interprétation ou une erreur que la personne qui
parle a commise pendant son discours.
M. le député... M. le député... Ce n'est pas
une question de sourire; c'est une question de s'en tenir au
règlement.
M. le député et ministre de l'Énergie et des
Ressources, sur une question de privilège, si j'ai bien entendu, en
espérant que c'est une question de privilège.
M. Duhaime: Je peux vous expliquer en quoi cela constitue une
question de privilège, M. le Président. Le député
d'Outremont, cet après-midi, sur la première question de
privilège, a dit que le tableau C qui avait été
déposé lors d'une conférence de presse était faux.
Je suis ravi de reconnaître qu'il connaît la différence
entre une annotation qui lui permet de faire le calcul. En posant sa question
en commentaire tout à l'heure, il a ouvert un autre dossier en disant
que le tableau B était faussé et que je devais m'adresser
à mon sous-ministre. Ce n'est pas mon sous-ministre qui fait les
communiqués de presse. Je voudrais rectifier les faits. Il a
parlé de 600 kilowattheures, M. le Président...
M. Fortier: M. le Président, question de règlement.
Je n'ai pas dit...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, M. le député d'Outremont.
M. Fortier: M. le ministre vient d'indiquer que j'ai dit que le
tableau B était erroné. Je n'ai pas dit cela. Je n'ai fait que
citer les chiffres qui sont inclus dans ce tableau B, tout simplement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Le député d'Outremont a dit que j'avais
induit la Chambre en erreur parce que la proposition initiale
d'Hydro-Québec était de 11,8%...
M. Bertrand: On ne veut pas laisser parler le ministre, c'est
effrayant.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, sur une question de
règlement.
M. Gratton: M. le Président, vous voyez, c'est
évident que ce n'est pas une question de privilège puisque, de
part et d'autre, on se répond, on engendre un débat. Le
règlement de l'Assemblée nationale est clair. Je suggère,
si le ministre veut intervenir pour rectifier des faits qui lui paraissent
erronés, qu'il le fasse en exerçant son droit de parole sur la
motion que j'ai présentée, mais qu'il arrête d'interrompre
mon collègue d'Outremont qui a droit à son opinion, lui aussi. Ce
n'est pas parce qu'il n'est pas du Parti québécois que le
député d'Outremont n'a pas le droit de dire ce qu'il pense.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, vous savez qu'il est souvent difficile d'interpréter une
question de privilège tant qu'on ne l'a pas entendue. Une des choses que
je dois vous dire, c'est que vous avez profité de votre question de
règlement pour justement terminer sur une note qui peut engendrer des
débats. Je suis à même, comme je le disais à
quelqu'un aujourd'hui, de déterminer de mon siège si c'est une
question de privilège ou pas. Au moment où le ministre parlait,
j'ai bien compris, jusqu'à maintenant, que c'était une question
de privilège et je lui laisse terminer sa question de
privilège.
M. Duhaime: Pour revenir à ce que le député
d'Outremont indiquait tantôt, au tableau B, sur l'échelle de
consommation de 600 kilowattheures par mois, Hydro-Québec nous proposait
11,8% et nous avons retenu 13,2%. Sur l'échelle de 900 kilowattheures
par mois, Hydro-Québec nous proposait 18,5% et nous avons retenu 13%.
Cela veut dire que, pour le plus grand nombre de consommateurs au
Québec, pour leurs besoins essentiels et l'eau chaude,
c'est-à-dire 71% et 99%, la hausse dans le domestique est au niveau de
l'inflation, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont, vous commencez maintenant votre droit de réplique.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Excusez, M. le
député. J'ai bien dit "votre droit de réplique", mais ce
n'est pas cela que je voulais dire; c'est plutôt votre droit de
parole.
M. Fortier: J'ai bien compris et je vais m'astreindre à
vos recommandations.
J'ai entendu, cet après-midi, le député de
Charlesbourg et d'autres députés faire état des
différents arguments pour lesquels ils désirent voter contre la
motion de report.
J'aimerais revenir sur certains de ces arguments et vous dire pourquoi
je ne peux les accepter.
Certains ont dit: L'Opposition ne fait que jouer son rôle
d'opposition. Je n'admets pas cette réplique puisque, à la fin de
mon allocution cet après-midi, j'ai bien fait état du fait que je
demandais à tous les députés de se rallier à ma
proposition et d'agréer avec moi qu'il y avait suffisamment de
matières sérieuses pour surseoir à l'adoption de ce projet
de loi. Ce n'est que par la suite, lorsque nous nous sommes rendus compte que
les députés du côté ministériel ne voulaient
pas accepter notre argumentation, à savoir que le projet de loi no 16
aurait un impact extrêmement important sur l'avenir d'Hydro-Québec
et sur l'avenir économique du Québec, que nous avons dû
nous résigner et que mon collègue de Gatineau a dû se
résigner à proposer une motion de report.
Par ailleurs, comme plusieurs ont fait état du programme du Parti
libéral du Québec, si vous me le permettez, étant
donné qu'on en a cité certaines parties mais qu'on a omis d'en
citer certaines autres, j'espère avoir votre consentement pour
rétablir la vérité sur ce point. Je crois que ce que je
vais dire est en relation avec la motion de report.
Dans le préambule, justement sur la section qui traite de
l'énergie, on dit ceci: "Depuis son accession au pouvoir, le Parti
québécois n'a, en effet, rien fait de concret pour
améliorer la position énergétique du Québec, si ce
n'est la poursuite du développement de la Baie-James et la tentative de
s'en approprier le mérite alors que le projet fut mis de l'avant par le
gouvernement libéral précédent". Enfin, j'espère
que tout le monde est d'accord, même le Parti québécois.
"Autre esquive intolérable dans le domaine du gaz naturel, alors que le
gouvernement péquiste s'est rendu responsable de nombreux et
coûteux retards dans la construction du gazoduc du Québec."
J'espère encore une fois qu'ils sont d'accord avec notre programme.
Sur le plan de l'énergie électrique, il y avait une
section 1.2 où on faisait état, justement, des mécanismes
qui habilitaient le gouvernement à analyser les demandes d'augmentation
des tarifs d'Hydro-Québec. On doit se rendre compte que notre
recommandation était très pertinente. Comme il en a
été fait état cet après-midi, comme le projet de
loi no 16 va faciliter dans l'avenir des augmentations de tarif
considérables, il nous semblerait, à nous du Parti libéral
du Québec, que les demandes d'augmentation d'Hydro-Québec
devraient être analysées d'une façon plus rigoureuse,
à l'aide d'experts. D'ailleurs, lors de la commission parlementaire du
mois de février,
de part et d'autre de la commission, des députés des deux
partis, tous s'étaient résignés, je crois, à faire
en sorte qu'à l'avenir nous puissions en arriver à des
évaluations beaucoup plus pertinentes à ce sujet.
Mais je crois que le paragraphe le plus pertinent au débat est
l'article 1.3 où, justement, nous demandons un débat public. On
dit ceci: "Un Parti libéral du Québec au pouvoir s'engage
à examiner publiquement, avec tous les groupes intéressés,
l'ensemble des problèmes énergétiques à long terme
du Québec, à reconsidérer plus en profondeur les moyens
pratiques d'assurer les économies d'énergie, à
étudier plus particulièrement les implications de l'utilisation
de l'énergie nucléaire, du charbon, du gaz, des énergies
redécouvertes et nouvelles et à déterminer pour les
consommateurs les coûts découlant de ces programmes
respectifs".
Il est bien clair que nos amis d'en face ont voulu souligner certains
articles, mais ils ont oublié de souligner l'article le plus important
qui, justement, demandait un débat public avant même que les
politiques énergétiques d'un gouvernement libéral puissent
être mises en application. C'est là, je crois, où nous
sommes d'opinions différentes des deux côtés de la
Chambre.
Quant à l'article 4.1, qui en a fait sourire plusieurs, où
on lisait que le "Parti libéral du Québec verrait à viser
l'efficacité et l'augmentation pour notre potentiel
énergétique, à ne plus maintenir les prix artificiellement
bas", je dirais simplement ceci: Nous n'avons pas dit que nous étions
d'accord pour pousser les prix artificiellement hauts. Je crois M. le
Président, qu'il y a, encore une fois, une différence essentielle
et que nos amis d'en face ne veulent pas la voir. (21 h 30)
En ce qui concerne la loi no 16, on a également dit, cet
après-midi, qu'il n'y avait pas de relation pertinente entre le projet
de loi no 16 et la tarification. Je voudrais, si vous le permettez, faire
état du rapport de la commission élue permanente de
l'énergie et des ressources du 25 août 1981 où on a
traité du projet de loi no 16. Le rapporteur était le
député d'Abitibi-Est. On dit ceci: "M. Duhaime prend la parole et
insiste principalement sur les sujets qui suivent: l'adoption du projet de loi
entraînera des changements majeurs concernant la tarification
d'Hydro-Québec." Je crois que c'est très clair. "La nouvelle
tarification d'électricité, la pierre angulaire de toute
politique d'économie d'énergie." Je saute un paragraphe pour
arriver à "l'importance de permettre des hausses de prix de
l'électricité afin de suivre la hausse du prix des autres modes
énergétiques." Voilà le rapport de la commission
parlementaire, M. le Président, et voilà comment il y a une
relation directe entre la loi 16 et la tarification à venir
d'Hydro-Québec.
Je voudrais, par ailleurs, insister sur le fait que, lors de cette
commission parlementaire, nous avons dit, je crois, avec raison que, si
Hydro-Québec n'avait pas à payer des taxes qui, à ce
moment, avaient été établies par Hydro-Québec
à 198 000 000 $ et qui, par la suite, je l'admets, ont été
ramenées à des montants un peu plus modestes, peut-être de
l'ordre de 130 000 000 $ ou 140 000 000 $... Il n'en reste pas moins que
l'augmentation de 16,3% qui était proposée par
Hydro-Québec devait amener dans les coffres d'Hydro-Québec un
montant de 400 000 000 $. De ces 400 000 000 $, 130 000 000 $ à 140 000
000 $ vont être utilisés pour payer des taxes
qu'Hydro-Québec n'avait pas à payer dans le passé. C'est
la raison pour laquelle nous avons fait une règle de trois et nous avons
dit: Si Hydro-Québec a besoin d'une augmentation de 16,3% pour
générer 400 000 000 $ et s'il fallait enlever de ces 400 000 000
$ un montant d'environ 130 000 000 $ à 140 000 000 $ qui normalement ne
seraient pas payés au gouvernement, il serait, bien entendu, tout
à fait possible de diminuer l'augmentation des tarifs à des
pourcentages qui seraient beaucoup plus raisonnables compte tenu de l'inflation
et compte tenu de la capacité de payer des contribuables et des clients
d'Hydro-Québec.
M. le Président, la loi 16 aura des répercussions
considérables; elle aura des répercussions sur le financement
d'Hydro-Québec, elle aura des répercussions sur sa
capacité de réaliser son programme d'équipements et elle
aura des répercussions également sur les politiques
énergétiques du Québec. Si on ne veut pas prendre ma
parole - et je crois que j'en ai parlé cet après-midi j'aimerais
tout simplement citer le président du conseil d'Hydro-Québec, M.
Bourbeau, lors de la commission parlementaire du 25 août. Il a dit ceci:
"Le projet de loi no 16 entraîne une modification substantielle non
seulement de la structure financière de la société
d'État, mais aussi de sa mission au sein de la société
québécoise. Pour nous, l'élément clé du
discours sur le budget, c'est l'instauration d'une politique de transfert de
fonds d'Hydro-Québec au gouvernement."
Un peu plus loin, le président du conseil disait ceci: "Le
financement des projets d'Hydro-Québec annoncé lors de la
commission parlementaire de l'énergie et des ressources en
février dernier sera plus difficile à réaliser que
prévu, d'une part, en raison des besoins d'emprunt plus
élevés et en raison des transferts de fonds liés aux
nouvelles taxes et aux versements de dividendes." Le président du
conseil d'Hydro-Québec a fait une relation directe entre la
loi 16 et les programmes d'équipements d'Hydro-Québec.
D'ailleurs, en fin de semaine dernière, le Devoir faisait
état, des coupures budgétaires qu'Hydro-Québec devra
réaliser l'an prochain et soulignait justement que: "Ces
décisions, publiées dans deux communiqués distincts, ont
surtout été prises en tenant compte des contraintes
financières auxquelles fait face la société
hydroélectrique québécoise. Ces difficultés ont
deux sources: l'impossibilité d'assumer des frais d'intérêt
de plus en plus élevés sur les emprunts et la décision du
gouvernement du Québec de puiser des dividendes dans les profits de sa
filiale."
Je pourrais également citer, M. le Président, un journal
qui s'appelle "En grande", qui vient de la Société
d'énergie de la Baie-James, et où le PDG de cette
société indique que, l'année prochaine, la
Société d'énergie de la Baie-James devra faire des
coupures considérables dans son programme d'équipements, ce qui
aura pour effet de couper des emplois qui devaient être originellement de
l'ordre de 8000 emplois pour tomber à quelque 5000; coupure de 3000
emplois, l'an prochain, due à des coupures qu'Hydro-Québec a
dû faire en fonction des taux d'intérêt et en fonction des
taxes et des dividendes qu'Hydro-Québec devra payer au gouvernement.
Je crois, M. le Président, que ces exemples suffiront pour
convaincre à peu près tout le monde que le projet de loi no 16
va, de fait, avoir un impact déterminant sur la capacité
d'Hydro-Québec de créer de l'emploi et sur sa capacité de
réaliser son programme d'équipements. Il se pourrait même
qu'Hydro-Québec soit obligée, à l'avenir, de modifier son
programme d'équipement pour tenir compte de sa capacité d'emprunt
et de sa capacité de payer son programme d'équipements. Tout le
monde sait que si Hydro-Québec avait les moyens d'emprunter les sommes
d'argent nécessaires et de bâtir des centrales
hydroélectriques, elle pourrait aménager certaines
rivières qui pourraient, de fait, produire de
l'électricité à meilleur compte que d'autres formes
d'énergie. Mais tout le monde sait également que ces projets
demandent des sommes considérables en capital. S'il arrivait
qu'Hydro-Québec ne puisse aller chercher ces fonds, ne puisse emprunter
l'argent nécessaire à cause des limites d'emprunt auxquelles elle
fait face présentement et à cause du fait qu'elle doit, d'une
part, emprunter pour réaliser son programme d'équipements et,
d'autre part, emprunter pour refiler les sommes d'argent au gouvernement, il se
pourrait que son programme d'équipements puisse être
modifié.
Je donne un exemple, M. le Président. Tout le monde sait qu'il
est possible de générer de l'électricité avec des
centrales d'énergie au charbon, et tout le monde sait que la
capitalisation de ce type de centrales est à peu près la
moitié ou le tiers des centrales hydroélectriques. Il se pourrait
bien, M. le Président, que, dans l'avenir, si Hydro-Québec
était contrainte à faire des choix énergétiques
pour s'adapter aux contraintes financières, Hydro-Québec serait
amenée à faire des choix énergétiques pour tenir
compte, justement, de ces contraintes financières qui sont
imposées et qui seront imposées par le gouvernement sur
Hydro-Québec.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous soutenons
qu'il y a une relation directe entre les choix énergétiques que
nous serons appelés à faire dans l'avenir, entre les choix de
sociétés que nous serons appelés à faire dans
l'avenir. C'est la raison pour laquelle nous soutenons qu'il y a une relation
directe entre la loi no 16, le programme d'équipements, les choix
énergétiques et les choix de sociétés que nous
aurons à faire dans l'avenir. Nous savons fort bien que si les centrales
au charbon coûtent deux fois moins cher que les centrales
hydroélectriques, ces centrales au charbon peuvent créer des
pluies acides qui causent des problèmes considérables dans les
lacs du nord et je me demande si la population serait en faveur d'un tel choix.
Mais peut-être qu'Hydro-Québec y sera contrainte dans l'avenir et
cela sera fait par la faute du gouvernement qui est au pouvoir. Nous disons
ceci: II est irraisonnable qu'un gouvernement puisse prendre une
décision comme celle-là sans consulter le public.
Le député de Charlesbourg a également fait mention
qu'il y a eu des commissions parlementaires et que, de fait, le débat
public avait eu lieu. Je n'en veux pas au député de Charlesbourg,
parce qu'il n'était pas là à ce moment-là. Il ne
savait pas que, de fait, nous n'avons pas eu de débat public. Nous avons
eu, bien sûr, au mois de février dernier, une commission
parlementaire qui n'a traité que du programme d'équipements
d'Hydro-Québec de 1980 à 1990. Nous avons eu une commission
parlementaire traitant de la loi no 16, le 25 août dernier, et nous avons
eu une commission parlementaire traitant de la tarification, le 29 septembre
dernier. Nous n'avons pas eu de débat public et si, M. le
Président, vous voulez avoir des preuves à ce sujet, je peux vous
citer ici une étude qui a été faite par
Hydro-Québec, - c'est extrêmement bien fait - l'analyse des
comparutions des groupes socio-économiques à la commission
parlementaire du mois de février où, justement, on fait
état de huit associations qui ont demandé un débat public.
Je les mentionne: La Confédération des syndicats nationaux,
l'Ordre des ingénieurs du Québec, l'Association des
ingénieurs conseils du Québec, l'Office de la protection du
consommateur, le Conseil régional de développement de
l'Est du Québec, le Regroupement pour la surveillance nucléaire
et l'Alliance Tournesol, l'Association des mines de métaux du
Québec et la Ligue des droits et libertés. J'aimerais vous dire
certaines des raisons qui ont poussé ces associations à
réclamer un débat public. (21 h 40)
Je voudrais citer justement l'Office de la protection du consommateur,
Étant donné les augmentations de tarif considérables que
nous aurons dans l'avenir, je crois que le commentaire est pertinent. L'office
signale que les consommateurs ne disposent jusqu'à présent
d'aucun véritable instrument d'intervention sur les activités
d'Hydro-Québec si ce n'est que par l'intermédaire de leurs
élus et d'une certaine participation au conseil d'administration
d'Hydro-Québec. L'office réclame donc l'institution d'un forum
public permanent où les citoyens pourront se faire entendre sur les
questions énergétiques et sur les politiques
d'Hydro-Québec, comme cela existe en Ontario.
Par ailleurs, la Ligue des droits et libertés dit qu'elle
désire un débat public, et elle propose que ce débat se
fasse à un niveau local et partout au Québec. Plusieurs groupes
remettent en cause les projets d'Hydro-Québec parce qu'ils visent une
croissance électrique exponentielle, visent un endettement exponentiel
et visent des coûts aux consommateurs accrus de façon
logarithmigue. Je me demande, M. le Président, quelle serait la
réaction de la Ligue des droits et libertés si elle avait
été au courant de la loi no 16?
Comme le député de Charlesbourg a dit que le débat
public avait eu lieu, je vais citer le ministre de l'Énergie et des
Ressources qui a précédé mon collègue, le
député de Saint-Maurice. Le ministre a dit ceci, lors de la
commission parlementaire du 3 mars: "Un autre point qui a fait
l'unanimité, c'est certainement la demande d'un débat public face
aux grandes options énergétiques au Québec. On a
retrouvé des compagnies pétrolières, des compagnies
gazières et des organismes publics voués à la lutte contre
l'énergie nucléaire. On a retrouvé, au sein de l'ensemble
des citoyens, une volonté d'avoir un débat public en
profondeur."
C'est ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources disait au
lendemain ou à la fin de la commission parlementaire du mois de mars
dernier. Justement, il a émis un communiqué - à ce
moment-là, c'était le ministre Bérubé qui parlait -
qui donnait un appui inconditionnel à un vaste débat public sur
l'énergie au Québec. "Le ministre de l'Énergie et des
Ressources, M. Bérubé, vient de donner son appui inconditionnel
à la tenue d'un vaste débat public sur l'énergie au
Québec. C'est ce qu'il a fait savoir, aujourd'hui, au moment de la
reprise des travaux de la commission parlementaire examinant le plan
d'équipements d'Hydro-Québec. Le ministre Bérubé a
expliqué que les interventions, lors des quatre premières
journées de la commission parlementaire, ont démontré la
très grande unanimité entourant la tenue d'un débat
public." Justement, du journal Le Soleil, j'ai une coupure qui dit:
"Bérubé demande un débat public sur l'énergie."
On veut nous faire croire que le débat public a eu lieu. Il n'a
pas eu lieu, tout le monde le demande et la loi 16 est une raison de plus pour
l'avoir.
J'aimerais également citer ce petit rapport, La politique
québécoise de l'énergie, trois ans d'action, qui a
été publié, il y a deux mois, par le ministre Duhaime. On
y lit ceci, à la page 29: "À l'issue de cette dernière
commission parlementaire - il référait justement à la
commission parlementaire dont je viens de faire état -le ministre de
l'Énergie et des Ressources avait fait part de son intention de saisir
le gouvernement de la possibilité qui soit tenu un débat
public."
On voit déjà que le gouvernement cherchait à
diminuer l'importance de la déclaration du ministre
Bérubé. Mais voici ce qui est plus pertinent encore: "Ce
débat pourrait être organisé par la Régie de
l'électricité et du gaz à qui un mandat serait
confié à cette fin." Le ministre continue - j'imagine que c'est
un document qui est publié sous l'empire du ministre - en disant: "Une
analyse a été entamée afin de déterminer la
meilleure formule que pourrait prendre un tel débat et d'identifier les
modalités selon lesquelles ce débat pourrait être
administré."
M. le Président, je crois que j'ai démontré assez
abondamment que nous avons besoin d'un débat public, que la loi no 16 va
avoir un impact considérable sur l'économie du Québec, sur
Hydro-Québec, que le débat public n'a pas eu lieu, que le
ministre Bérubé nous l'a promis, que le ministre Duhaime, dans
cette brochure portant sur trois ans d'action, nous dit qu'il est en train
d'étudier la possiblité d'organiser un tel débat
public.
Je crois que toutes ces raisons sont suffisantes pour justifier que
cette Chambre approuve la motion qui est devant nous de retarder l'adoption du
projet de loi no 16 pour environ 12 mois et que, durant cette période,
le ministre aura le temps nécessaire pour organiser le débat
public et pour permettre à la population du Québec, qui comprend
les vrais actionnaires d'Hydro-Québec, de dire ce qu'elle a à
dire sur ce projet de loi, sur notre avenir énergétique et sur
notre développement économigue à partir
d'Hydro-Québec. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: En réponse à une question du
député de Verchères qui m'avait demandé le nom des
autres régions de l'Amérique du Nord qui ont des tarifs plus bas
que chez nous...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
J'ai entendu le député de Frontenac qui vous avait posé
des questions. Comme il n'est pas là, vous répondrez à une
prochaine occasion.
M. Scowen: C'est simplement que lorsque j'ai cité les
noms, j'ai dit que j'allais les confirmer avec des documents. C'est une liste
de cinq régions et je vais les citer, si...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.
M. Bertrand: M. le Président, nous n'avons pas à
obtenir de la part du député de Notre-Dame-de-Grâce quelque
réponse à quelque question que ce soit. Il n'est pas ici en
période des questions, il n'est pas encore, que je sache, ministre dans
un gouvernement quelconque...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader. Je
m'excuse, il y a eu une question de posée, selon l'article 100, et j'ai
bien entendu que le député de Notre-Dame-de-Grâce irait
chercher les réponses. Si le député de Frontenac veut
toujours avoir les réponses, je permettrais très
rapidement...
M. Grégoire: Non, M. le Président, je ne tiens pas
à avoir sa réponse.
M. Rivest: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège.
M. Rivest: Je pense que c'est un privilège du
député de Notre-Dame-de-Grâce qui a été
interrogé par le député de Frontenac et, pour justifier
ses affirmations...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, est-ce
que vous permettez... Ce n'est une question de permission, mais je crois,
personnellement, que comme il y a eu une question de posée et que vous
avez accepté d'avoir une réponse, vous pourriez donner votre
réponse très rapidement, nommer les régions, point.
M. Grégoire: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Frontenac.
M. Grégoire: ...question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, j'ai posé la
question tout à l'heure, le député de
Notre-Dame-de-Grâce s'est levé pour répondre, mais il
n'avait pas de réponse, il n'était pas capable de
répondre. Là, il est sorti, est allé consulter, il est
allé à la bibliothèque et il revient...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M.
le député de Notre-Dame-de-Grâce, très rapidement,
s'il vous plaît!
M. Scowen: Le député de Frontenac m'avait
demandé le nom des régions en Amérique du Nord où
le prix de l'électricité est moins élevé qu'au
Québec. Il prétendait qu'il n'en existait aucune. J'ai dit qu'il
y en a plusieurs. Je vais maintenant citer les régions
mentionnées dans le livre Bâtir le Québec, qui concerne
l'électricité, qui a été rendu public il y a
à peine un an. Les chiffres sur lesquels le tableau est basé,
sont ceux de 1978. Les régions où... Excusez-moi, le document
est...
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Rapidement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: C'est le document le plus récent du
gouvernement qui est disponible actuellement. Les chiffres qui sont
cités dans ce document gouvernemental montrent que les régions
suivantes sont moins chères que chez nous: Bonneville Power Corporation,
en Oregon, aux États-Unis; Pacific Power and Light Corporation, en
Oregon, aux États-Unis; la ville de Seattle, dans l'État de
Washington, aux États-Unis, et la province de la Colombie britannique,
au Canada, est exactement égale à chez nous en 1978. Depuis ce
temps, comme tout le monde le sait, le Manitoba est devenu aussi concurrentiel
que nous autres. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, s'il vous
plaît! (21 h 50)
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais vous dire d'abord
que j'ai écouté avec beaucoup d'attention les interventions des
libéraux d'en face, à savoir s'il y a un lien quelconque entre
l'intelliqence de reporter de douze mois l'étude de ce projet de loi et
un débat sur l'énergie. J'ai écouté attentivement
le député de Portneuf qui nous
a parlé du projet de Delaney, un autre qui nous a parlé de
la tarification, etc. Le député d'Outremont vient de dire la
même chose en parlant de la tarification.
Je voudrais rectifier un certain nombre de choses. Pour la tarification
de 1982 et celle des années à venir, il n'y a pas de rapport
entre la tarification qui est en vigueur ou qui entrera en vigueur dans
l'avenir et un objectif de dividendes. Je m'explique. En 1978,
Hydro-Québec a fait une proposition tarifaire sur trois ans pour les
années 1979, 1980 et 1981. À l'automne 1978, ni
Hydro-Québec, ni le gouvernement n'avaient parlé d'établir
une politique de dividendes pour Hydro-Québec. La tarification
proposée par Hydro-Québec a été de 17%, 17% et 17%
de hausse pour les années 1979, 1980 et 1981. À l'automne 1978,
une commission parlementaire a entendu HydroQuébec, comme cela se fait
à chaque proposition tarifaire, et le gouvernement a retenu une
tarification, pour 1979, de 13,9% de hausse au lieu de 17%, de 13,6% au lieu de
17%, pour 1980, et de 10,8% au lieu de 17%, pour l'année 1981. Aux
états financiers d'Hydro-Québec, à la page F-3, vous allez
lire que pour l'année 1979, avec une tarification proposée par
Hydro-Québec de 17%, qui a été refusée par le
gouvernement, nous avons accepté 13,9%, cela a donné des profits
nets d'exploitation de 746 211 000 $. L'année suivante, en 1980, avec un
tarif en vigueur de 13,6% de hausse, cela a donné des revenus nets de
746 083 000 $.
Je ne vois pas, M. le Président, en quoi on peut maintenant,
à l'occasion du débat sur le projet de loi 16, dire que le
gouvernement se fixe des objectifs sur des dividendes alors que, selon tout le
sens, l'esprit et le coeur du projet de loi no 16, comme cela se fait dans tout
bilan de toute corporation de la taille d'Hydro-Québec, le dividende est
un résultat.
Je suis étonné que le député d'Outremont
revienne avec de grandes propositions de démocratie libérale sur
l'établissement d'un mécanisme de consultation pour
étudier une proposition d'Hydro-Québec, parce que, si mon
souvenir est bon, en septembre 1981, probablement que le député
d'Outremont avait d'autres problèmes dans son caucus, d'autres
discussions probablement constitutionnelles sur une motion qui était
débattue à l'Assemblée nationale, mais le Parti
libéral a tout simplement refusé de siéger en commission
parlementaire lors de l'étude de la dernière proposition
tarifaire. Il a fait ce qu'on appelle un "show". Cela donne comme
résultat que tout à l'heure le député d'Outremont a
reconnu lui-même une marge d'erreur, même encore aujourd'hui
imprécise, alors qu'il disait qu'il y avait 198 000 000 $ attribuables
à la politique de dividendes. S'il était resté
présent avec ses collègues libéraux, les qens
d'Hydro-Québec et le ministre des Finances ont expliqué
très clairement qu'il y avait une correction à faire sur une page
- je pense que c'était à la page 40 du mémoire
d'Hydro-Québec -soit de ramener le chiffre de 198 000 000 $ à 110
000 000 $.
Cela veut dire, M. le Président, que les libéraux, quand
ils demandent un mécanisme de consultation et qu'une commission
parlementaire siège, refusent même se siéger. Ils nous
disent aujourd'hui: II faudrait faire un débat public sur
l'énergie. J'ai été plutôt prudent concernant ce
débat sur l'énergie et j'avoue honnêtement que j'y
réfléchis sérieusement, mais je ne vois pas de lien direct
entre une discussion sur l'énergie de façon
générale et le fait de doter Hydro-Québec d'une structure
de capital-actions, de doter Hydro-Québec d'une politique de dividendes,
de doter Hydro-Québec de moyens financiers pour lui permettre de
financer des programmes d'économie d'énergie, parce que notre
lit, nous l'avons fait en publiant un livre blanc sur l'énergie en 1978.
Tout récemment, je rendais public le bilan de 3 ans d'action. Qu'est-ce
qui est arrivé après 3 ans? Je me demande ce qu'on peut
débattre en public. J'ai perdu mon livre rouge, je ne sais pas quel bord
il a pris!
Une voix: II est déposé.
M. Duhaime: II est déposé. Si vous lisez le livre
rouge à EC-VIII-4, vous allez voir qu'on est d'accord des deux
côtés de la Chambre pour faire en sorte qu'on se débranche
du pétrole importé le plus rapidement possible. On est d'accord
là-dessus. On est d'accord également pour dire qu'il faut que la
part de l'hydroélectricité, qui était de 26% du bilan
énergétique global en 1976, soit haussée, on l'a
chiffrée à 42% en 1978 et on en est à un objectif de 50%
en 1990. On est d'accord là-dessus. On est d'accord également, M.
le Président, pour encourager la pénétration du gaz
naturel, sauf que nos amis d'en face pensent pouvoir encourager la
pénétration du gaz naturel en ayant un prix de
l'hydro-électricité qui serait inférieur au prix du gaz
naturel. Nous avons fait le suivi de la politique établie dans le livre
blanc de 1978 et ça paraît dans les 3 ans d'action, puisque
SOQUIP, avec la Caisse de dépôt, s'est portée
acquéreur d'un bloc d'actions majoritaires, tant dans Gaz Métro
que dans Gaz Inter-Cité, et c'est le Québec qui a maintenant le
contrôle effectif de ces deux compagnies distributrices de gaz.
S'il y a quelque chose sur quoi on s'entend, des deux côtés
de la Chambre, c'est donc pour dire qu'il faut que le gaz naturel
pénètre au Québec le plus rapidement possible. Et s'il y
en a dans nos amis d'en face qui ont l'occasion de parler avec un,
deux ou trois des 74, la seule chose qui accroche dans le dossier de la
pénétration du gaz naturel, c'est que les fédéraux
ne sont pas encore convaincus que le gazoduc doit se rendre dans le
Bas-Saint-Laurent et dans la Vallée de la Matapédia, mais on va
s'en occuper.
Le livre rouge du Parti libéral dit qu'il faut favoriser les
économies d'énergie. On est d'accord là-dessus. On a sur
pied le programme Énergiebus qui est en vigueur depuis deux ans. J'ai
lancé il y a quelques mois en compagnie du PDG d'Hydro-Québec, M.
Boyd, le nouveau projet Énergain, qui va susciter au Québec, sur
les 8 années, un milliard de dollars d'investissements de la part des
consommateurs, avec l'appui financier d'Hydro-Québec qui va pouvoir
obtenir des taux d'intérêt beaucoup plus intéressants que
ce que la Banque du Canada peut nous offrir de ce temps-ci. C'est très
ambitieux comme programme. On veut rejoindre un million de résidences,
d'unités de logement pendant 8 ans. On est donc d'accord
là-dessus. Dans le domaine des énergies nouvelles, le livre rouge
dit: Vous devriez faire un effort dans la recherche et le développement.
On le fait, M. le Président. Je vais vous donner un exemple: Dans le
dossier de l'hydrogène liquide, Hydro-Québec, avec Noranda, a un
projet qui est en cours dans une phase industrielle, un des plus avancés
de toute l'Amérique du Nord. On s'en occupe de la recherche et du
développement dans les énergies nouvelles: la biomasse, le vent,
le soleil, la tourbe, etc.
Il y a quelques années, au Québec, quand les gens ont
commencé à réclamer un débat sur l'énergie,
il y avait une raison. C'est que le gouvernement, au début des
années 70, et Hydro-Québec avaient décidé d'ouvrir
la filière nucléaire. Des hommes, des femmes et des enfants au
Québec ont dit: Cela est dangereux. Malgré toutes les demandes
qui ont été formulées pour que le débat soit
public, rien n'a été fait. Aujourd'hui, on nous dit qu'il
faudrait un débat public sur l'énergie pour discuter du
nucléaire, pour entendre le lobby nucléaire du Québec avec
probablement Canatom et tous ses intérêts d'ingénieurs,
ingénieurs conseils, contracteurs, etc.
M. Fortier: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège.
M. Fortier: J'aimerais corriqer les propos du ministre. J'ai fait
état du programme du Parti libéral du Québec qui demande
un débat public sur l'énergie pour l'ensemble de toutes les
questions énergétigues. Il n'a jamais été question
de l'énergie nucléaire.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre. (22
heures}
M. Duhaime: Je ne prétends pas ça, M. le
député d'Outremont, mais vous allez admettre avec moi que le
nucléaire, ça fait partie de l'énergie que,
forcément, ces autres questions sont réglées et que s'il
reste seulement celle-là, on va parler seulement de ça.
Hydro-Québec, la semaine dernière, à son conseil
d'administration, a pris une décision. Elle a décidé que
son droit de se porter acquéreur de la centrale nucléaire de
Gentilly I, qui est une "réguine", en bon français, qui a
fonctionné pendant quelques heures en 1971, qui a coûté les
yeux de la tête, qui ne vaut pas 5 cents, les fédéraux
voulaient nous le passer, même pour 1,00 $ M. le Président, c'est
sans doute ce que vous m'indiquez.
Au sujet de Gentilly II, on a décidé qu'en 1982, la
centrale était pour entrer en opération. On veut maintenir, dans
le plein sens du moratoire qu'on a décidé, une expertise
technique, minimale, dans le secteur nucléaire et on a
décidé également, à Hydro-Québec,
d'arrêter les études d'avant-projet de Gentilly III et de Gentilly
IV. Cela signifie qu'en ce qui concerne notre gouvernement, le moratoire
nucléaire, il existe, et je comprends le Mouvement écologiste de
nous souligner que Three Mile Island, Harrinqton, USA, est quand même
proche de nous quand le vent est sud-nord. Je comprends la préoccupation
de nos concitoyens. Mais dans l'évaluation de la croissance de la
demande énergétique au Québec, il faut bien se rendre
compte - et je pense que le député d'Outremont va l'admettre -
qu'il n'y a pas d'urgence de choisir la filière nucléaire ou pas
avant les années 1995 ou 1996. Les libéraux nous proposent de
faire ça dans les prochains douze mois. J'avoue que je ne les comprends
pas.
J'avoue aussi ne pas les comprendre parce que ce projet de loi a
été déposé en cette Chambre au mois de juin 1981.
Une commission parlementaire a siégé au mois d'août 1981,
je crois que c'est le 25. Depuis ce temps, l'Assemblée nationale s'est
réunie à deux reprises, à la mi-octobre, et depuis trois
semaines et demie. Savez-vous que les libéraux n'ont pas posé une
seule question sur le débat de l'énergie? Ils ont eu l'occasion
de tenir au moins quatre débats, pendant quatre vendredis...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, vous
devez conclure, s'il vous plaît!
M. Duhaime: J'allais conclure, M. le Président. La raison
véritable du report à douze mois, c'est que les libéraux
n'ont strictement rien à dire, absolument rien.
Peut-être que ça leur donnerait l'occasion de nous
expliquer, parce que le député d'Outremont ne l'a pas encore
fait, le 4.1, il a lu seulement les deux premières lignes, EC-VIII-4 sur
les tarifs: "En visant l'efficacité et l'augmentation de notre potentiel
énergétique, à ne plus maintenir les prix artificiellement
bas et à aborder les problèmes de pauvreté qui pourraient
en découler par des mesures sociales plus appropriées." What does
that mean?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Outremont, c'est une question de?
M. Fortier: D'une part, le ministre vient de me poser une
question.
M. Gratton: C'est une question de privilège.
M. Fortier: C'est en vertu de l'article 96, M. le
Président, je voudrais corriger certains...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, est-ce
que vous permettez une question?
M. Gratton: Non, c'est une question de privilège.
M. Fortier: C'est en vertu de l'article 96.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, le
député d'Outremont voudrait vous poser une question. Est-ce que
vous permettez cette question?
M. Duhaime: M. le Président, je vais vous demander une
directive avant.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vous
écoute.
M. Gratton: Question de règlement.
M. Duhaime: Cela me fera plaisir de consentir à ce qu'on
me pose une question. La seule condition, M. le Président, c'est que je
voudrais avoir le loisir d'y répondre.
M. Gratton: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement.
M. Gratton: M. le député d'Outremont n'a pas
demandé la permission de poser une question au ministre, il a
indiqué qu'il voulait intervenir en vertu de l'article 96,
c'est-à-dire pour rétablir les faits sur le discours qu'il a
déjà prononcé sur cette motion.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Voulez-vous utiliser
l'article 96?
M. Fortier: Je n'ai pas voulu interrompre le ministre alors qu'il
parlait, mais j'aimerais utiliser cet article pour corriger certains faits,
justement, dont il a fait état dans son discours. Ce sera très
bref, M. le Président.
J'aimerais simplement corriger un ou deux faits. Le premier a trait
à l'explication que le ministre a donnée de la sortie de la
députation libérale lors de la dernière commission
parlementaire. Je voudrais simplement...
Des voix: Ah! Ah!
M. Fortier: M. le Président, je veux simplement dire ceci.
Nous avons demandé d'avoir de meilleurs moyens pour étudier la
tarification d'Hydro-Québec. Ceci n'a rien à voir avec la
commission parlementaire tel qu'elle est pratiquée maintenant.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je
crois qu'on déborde l'article 96 actuellement. Qui demande la parole? M.
le député de Pontiac.
M. Robert Middlemiss
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
d'intervenir dans ce débat sur la motion de report
présentée par le député de Gatineau et concernant
le projet de loi no 16. Le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur
l'Hydro-Québec, est prématuré et l'adoption de ce projet
de loi présentement constitue un manque de respect flagrant d'abord pour
les véritables intéressés, les citoyens qui, dans les
faits, sont les seuls et uniques propriétaires de cette richesse
naturelle que constitue l'hydroélectricité.
Une voix: C'est vrai.
M. Middlemiss: On se rappellera toute l'importance
accordée à cette dimension il y a près de 20 ans
maintenant lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se
faire plébisciter sur la question de la nationalisation de
l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre du temps,
l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection de l'automne
1962, déclarait: "De quelle façon allons-nous nous y prendre pour
que les 5 600 000 Québécois deviennent les propriétaires
et les actionnaires de l'une des principales clés de l'expansion
économique dans leur province, l'électricité?"
Aussi, M. le Président, le projet de loi no 16 constitue ensuite
un autre manque de respect parce qu'il trahit dans son fondement même le
mandat accordé au gouvernement
par la population en 1962. On se rappellera que les électeurs de
l'époque confièrent à Hydro-Québec la
responsabilité d'administrer, de régir et de développer
autant le réseau de distribution que tout l'appareil de production
d'énergie hydroélectrique. La société d'État
devenait donc, dans les faits, le mandataire exclusif de la population. Or, les
termes et le cadre de ce mandat étaient définis de la
manière suivante, et je cite M. René Lévesque, ministre
des Richesses naturelles du temps: "Et pour que le mouvement,
l'intégration et la rationalisation des réseaux se fassent
vraiment pour tous les citoyens du Québec, il faut le confier à
Hydro-Québec, entreprise d'État qui, depuis 1944, a pour mission
de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises
industrielles et commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles
avec une saine administration financière."
Alors, M. le Président, si, en 1962, les Québécois
sont devenus les actionnaires et les propriétaires de la richesse
hydroélectrique, alors, toute modification du mandat accordé
à Hydro-Québec cette année-là ne peut se faire sans
qu'au préalable l'on consulte les propriétaires et les
actionnaires véritables. Si, en 1962, on a senti le besoin de consulter
la population sur la nationalisation de l'électricité, il nous
apparaît tout aussi nécessaire de la consulter de nouveau. Si, en
1962, de l'initiative du gouvernement de l'époque, les citoyens sont
devenus propriétaires et actionnaires de
l'hydroélectricité, alors, on devrait, lorsque l'on décide
de modifier l'orientation de celle-ci, consulter ces mêmes actionnaires
et propriétaires, et, à la suite de près de 20 ans
d'exploitation, leur permettre d'évaluer les résultats et de
suggérer les orientations. Aussi, si, en 1962, on a senti le besoin
d'aller consulter la population pour nationaliser l'électricité
en lui offrant la possibilité de devenir propriétaire, il
apparaît pour le moins évident que, si on a l'intention de
modifier la vocation d'Hydro, donc de changer l'orientation de 1962, on devrait
retourner voir ces mêmes citoyens. M. le Président, si, selon M.
Lévesque, en 1962, en matière d'électricité, les
Québécois ont le droit strict d'être renseignés,
alors, compte tenu des modifications apportées par le projet de loi no
16, les Québécois ont le droit strict de connaître les
intentions du gouvernement et de pouvoir se prononcer. (22 h 10)
Ce principe que nous défendons aujourd'hui, M. le
Président, ressemble étrangement aux principes que nous avons
évoqués pour adresser au gouvernement du Canada notre
résolution du 2 octobre dernier concernant le rapatriement
unilatéral de la constitution. Oui, M. le Président, la
décision rendue par la Cour suprême du Canada
énonçait que l'action unilatérale de rapatriement de la
constitution, même si elle était légale, serait
inconstitutionnelle parce que contraire aux conventions. Pour utiliser le
qualificatif des gens d'en face, ce serait immoral.
Dans le cas de la loi 16, le gouvernement du Parti
québécois veut à son tour procéder de façon
unilatérale et changer d'une façon draconienne la raison
d'être d'Hydro-Québec. Ceci, M. le Président, sans
consulter...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Pontiac, je vous écoute et je cherche
actuellement où est la pertinence du débat sur la motion de
report. Si vous voulez y revenir.
M. Middlemiss: C'est pour ça, M. le Président, que
nous avons la motion de report. Le geste que veut poser le gouvernement du
Parti québécois veut se faire sans consulter et en mettant
à l'écart l'opinion des actionnaires, oui, les citoyens du
Québec qui pourtant ont été consultés et qui ont
donné leur approbation à la nationalisation d'Hydro-Québec
en 1962. M. le Président, nous serions d'accord si ces changements
rapportaient aux citoyens du Québec, mais à qui rapporteront les
redevances exigées d'Hydro-Québec? Aux citoyens, aux
agriculteurs, aux PME qui auront à subir sans distinction des hausses de
tarifs qui ne correspondent pas aux services réels obtenus, ou au
ministre péquiste des Finances qui se sert d'Hydro et des revenus
qu'elle produit pour camoufler sa mauvaise administration?
M. le Président, nous, de ce côté de la Chambre,
nous sommes trop respectueux des droits des citoyens du Québec pour nous
rendre complices de ce geste ou laisser passer sans commentaire un tel projet.
C'est pour les raisons mentionnées ci-haut que nous demandons le report
de cette loi pour une période d'un an.
En terminant, si, en 1962, selon M. René Lévesque, saine
administration signifiait profits bruts, moins paiements
d'intérêts, égalent profits nets, diminution des tarifs,
développement du réseau, paiement de taxes municipales et
scolaires; si, en 1962, les citoyens ont fait d'Hydro-Québec leur
mandataire à cette condition, alors, la modification des conditions du
contrat passé entre le gouvernement et les citoyens qui se traduit par
profits bruts, moins paiements d'intérêts, moins redevances
à Parizeau, égalent profits nets, augmentation des tarifs, cette
modification au contrat doit être soumise de nouveau aux citoyens. M.
Lévesque, le prix de l'électricité sera-t-il honnête
et juste lorsqu'il servira en bonne partie, non pas pour le fonctionnement de
la société d'État, non plus pour le développement
du réseau, ni pour maintenir
les tarifs à un niveau respectable, mais plutôt pour payer
et défrayer les coûts de la bêtise administrative
péquiste qui dure depuis cinq ans? M. Lévesque, que faites-vous
de l'engagement que vous avez pris devant...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je m'excuse de vous déranger, mais je dois vous
rappeler que la motion a pour but de faire un report de douze mois. C'est une
motion d'amendement et, juste au moment où vous avez dit que vous
étiez sur le point de terminer, vous avez recommencé à
parler sur le fond. M. le député, sur la motion d'amendement,
s'il vous plaît. M. le député de Gatineau, sur une question
de règlement.
M. Gratton: M. le Président, je conviens avec vous qu'il
peut y avoir des écarts à l'occasion. Je suis sûr que le
député de Pontiac sera le premier à reconnaître que
dans le cadre de son intervention il a pu y avoir des écarts, mais
j'aurais voulu qu'on fasse le même rappel au député...
Une voix: ...
M. Gratton: Un instant! Un instant!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! Je suis capable de me faire respecter moi-même. M.
le député, je tiens à vous rappeler la pertinence du
débat et j'ai, comme président, à déterminer quand
même si vos propos sont pertinents ou pas. Je vous ai dit qu'ils
n'étaient pas pertinents et je vous demande de respecter la pertinence
dans le temps qu'il vous reste. M. le député.
M. Gratton: Puis-je finir ma question de règlement, M. le
Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, je demande au député de Pontiac de terminer.
M. Gratton: En vertu de quel règlement puis-je m'exprimer
sur une question de règlement, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, je peux vous répondre en vous disant ceci: Quand je suis
intervenu, c'était pour dire au député de Pontiac qu'il ne
respectait pas la pertinence. Je n'ai pas à juger des actes qui ont
été posés avant. Je vous dis que, quant à moi, le
député de Pontiac ne tenait pas des propos pertinents. Je lui
demande de conclure conformément à la pertinence. M. le
député de Pontiac.
M. Gratton: Une demande de directive, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, sur une directive.
M. Gratton: Comment pourrais-je faire connaître à
l'Assemblée aussi bien qu'à ceux qui nous surveillent que lorsque
le député de Terrebonne nous a lu tantôt de longs extraits
de Cité libre, qu'il attribuait au premier ministre canadien, Pierre
Elliott Trudeau, il n'était pas lui non plus conforme au
règlement et que personne, ni la présidence ni les
députés de ce côté-ci, ne l'a rappelé
à l'ordre?
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le député de Gatineau, je ne veux pas que le débat sur
cette question se fasse. Si, tout à l'heure, vous avez jugé que
le député de Terrebonne n'était pertinent, c'était
à vous d'en appeler à la présidence. Je n'ai en aucune
façon entendu cette demande et je demande au député de
Pontiac de terminer.
M. le député de Pontiac, en concluant.
M. Middlemiss: Merci de nouveau, M. le Président, mais je
terminais.
Pour revenir à la motion de report de douze mois, M. le
Président, c'est pour penser à ce projet de loi et, aussi, je
pense que c'est très pertinent de dire qu'en 1962, lorsqu'on a
nationalisé Hydro-Québec, il y avait des raisons pour lesquelles
on l'a fait. On dit: Ne devrait-on pas reconsidérer toutes ces
idées? Donc, M. le Président, M. le premier ministre, que
faites-vous de l'engagement que vous avez pris devant les citoyens, en 1962,
sur la base d'un prix d'électricité honnête? Lui
réservez-vous le même sort que vous avez accordé au droit
de veto du Québec en matière constitutionnelle, soit l'abandon?
Merci beaucoup.
Des voix: Bravo!
M. Picotte: M. le Président, j'aimerais vous demander une
directive.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je commencerai par
demander aux gens de s'asseoir, parce que je ne sais pas qui demande la
parole.
M. Picotte: Je voudrais vous demander une directive.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip adjoint, sur
une demande de directive.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Est-ce que
tantôt, selon la décision que vous avez rendue, nous devons
comprendre de ce côté-ci de la Chambre qu'à l'avenir vous
devrez vous-même demander des questions de règlement à
votre présidence ou si vous
devez attendre que...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Maskinongé, je pense que vous êtes un peu impertinent envers la
présidence. Je tiens à vous le rappeler, M. le
député. Je vous trouve impertinent envers la présidence.
Je suis prêt, M. le député... M. le député!
M. le député! Je n'ai pas l'habitude, je le répète
pour la troisième fois, de faire des choses à la
légère. J'ai simplement demandé de respecter ce que
j'avais dit, au moment où j'étais ici, sur la pertinence du
débat. Je dois vous dire qu'à ce niveau, que ce soit à ma
gauche ou à ma droite, j'ai l'intention de le faire respecter. M. le
député de Nelligan. (22 h 20)
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: La raison pour demander le renvoi de cette loi
à douze mois, c'est que cette loi 16 change tout à fait les
objectifs d'Hydro-Québec fixés en 1962 par le présent
premier ministre, M. Lévesque, et le premier ministre d'alors, M.
Lesage. Les objectifs étaient de produire de
l'hydroélectricité aux taux les plus bas, à travers une
société d'État qui serait possédée par tous
les citoyens du Québec, alors au nombre de 5 600 000 . Or, cette loi va
changer les objectifs d'Hydro-Québec, tout d'abord en changeant les
actionnaires, les contribuables et les citoyens québécois, pour
donner des actions à 88% au gouvernement du Québec, dont le seul
mandataire sera le ministre des Finances.
Une voix: Un vol! Une voix: Un hold-up!
M. Lincoln: En plus de quoi, à travers ce
stratagème, quelque chose comme 3 200 000 000 $ de dividendes
d'Hydro-Québec, sous forme de taxes cachées, vont aller vers le
ministre des Finances, de 1981 à 1985, soit 3 200 000 000 $. Or, pendant
l'élection d'avril 1981, il n'a jamais été soufflé
mot de cette question si importante pour les contribuables
québécois. Est-ce que les taux les plus bas, l'objectif no 1 de
1962, c'est 3 200 000 000 $ entre 1981 et 1985 qui vont être
donnés au gouvernement, sous forme de taxes, dividendes
d'Hydro-Québec?
Le député de Roberval disait tout à l'heure qu'il
est fier que les sociétés d'État comme Hydro-Québec
se mettent enfin à contribuer à la collectivité
québécoise. Je veux lui demander quelle est la différence
entre une taxe directe au contribuable et une taxe qui arrive via un dividende
d'Hydro-Québec. En fait, il n'y a aucune différence en
espèces. La seule différence, c'est que le dividende
d'Hydro-Québec, c'est encore une fois une autre taxe cachée, une
autre forme d'impôt caché, comme l'essence, comme les plaques
d'immatriculation, comme les permis de conduire, comme les 8% de taxe sur les
factures d'Hydro-Québec. Parlant des 8% de taxe d'Hydro-Québec
c'était 76 000 000 $ en 1976, 120 000 000 % en 1980, et ce sera 290 000
000 $ en 1985.
Excusez-moi, M. le Président, mais il y a un document du Parti
libéral qui a été cité tout à l'heure, moi
aussi, je compte citer un petit document qui doit être connu par nos amis
là-bas, qui s'appelle le programme officiel du Parti
québécois. Ils applaudissent le programme qu'ils n'ont pas lu,
parce que le programme, chapitre 2, la fiscalité, dit à l'article
13, "abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité pour
usage domestique". Ils ne connaissent pas leur programme. Qu'est-ce que vous
attendez? Qu'est-ce que vous attendez, pour suivre votre propre programme, vous
qui allez en congrès au cours de ce week-end? J'attends que les onze
chevaliers sans peur et sans reproche disent: Allez! Allons nous battre pour
notre programme, article 13, voilà! Vous reprochez au Parti
libéral... Oui, M. Blais, j'espère que vous allez faire quelque
chose pour essayer d'enlever...
M. Blais: M. le Président, question de privilège,
s'il vous plaît!
Le Vice-Président (M. Jolivet):
J'attendais cette occasion, parce que cela fait plusieurs fois que j'ai
l'occasion de dire ce qu'est une question de privilège. Avant que vous
posiez votre question de privilège, M. le député, je vais
me permettre, quand même, de citer quelques extraits d'articles qui nous
permettent de conclure ce qu'est une question de privilège. C'est
peut-être important de le faire à cause de l'abus qu'on en fait et
pour que les gens comprennent ce qu'est une question de privilège.
L'article 48: "Une violation des droits de l'Assemblée ou d'un de
ses membres constitue une question de privilège." Pour bien la saisir et
la comprendre, j'aimerais qu'on m'écoute.
La deuxième, c'est l'article 49, paragraphe 2, qui dit: "Un
député peut toujours soulever une question de privilège
à l'Assemblée immédiatement après qu'ont
été prononcées les paroles ou que se sont
déroulés les événements qui y donnent lieu." Ceci
fait référence à l'article 46 de la Loi sur la
Législature qui prévoit des actes défendus et
considérés comme infractions aux privilèges de
l'Assemblée nationale: "La Chambre ne peut créer de nouveaux
privilèges que ceux énumérés à l'article
46." Citation de Beauchesne, quatrième édition, articles 103 et
113 et W.F. Dawson, dans Procedure in Canadian House of Commons, 1962, page
47.
Vous allez me permettre de lire la Loi
sur la Législature pour ceux qui n'ont pas eu l'occasion de la
lire ou qui l'ont oubliée. "Les actes suivants sont défendus et
considérés comme infractions aux dispositions de la
présente sous-section: injures; premièrement, commettre des voies
de fait sur la personne d'un député, ou proférer des
injures ou publier des écrits diffamatoires à son adresse,
pendant la session ou pendant les vingt jours qui précèdent et
les vingt jours qui suivent chaque session; deuxièmement, molester,
menacer ou tenter de violenter ou d'intimider un député;
troisièmement, chercher à corrompre un député en
lui offrant des présents ou l'acceptation, par l'un d'eux, des
présents ainsi offerts..."
S'il vous plaît, M. le député, vous pouvez
peut-être en rire, mais n'oubliez pas que c'est la Loi de la
Législature. "Quatrièmement, commettre des voies de fait sur la
personne des officiers de l'Assemblée nationale et apporter des
empêchements à l'accomplissement de leurs devoirs;
cinquièmement, suborner ou tenter de suborner quelqu'un au sujet du
témoignage qu'il doit rendre devant l'Assemblée nationale ou
l'une de ses commissions; sixièmement, présenter à
l'Assemblée nationale ou à l'une de ses commissions quelque
document faux ou falsifié dans le dessein de tromper;
septièmement, contrefaire, falsifier ou altérer
illégalement les archives de l'Assemblée nationale ou de l'une de
ses commissions ou les documents ou pétitions présentés ou
produits devant l'Assemblée ou la commission ou destinés à
l'être, ou apposer ou souscrire le nom d'une personne sur ces documents
ou pétitions dans le dessein de tromper ou d'induire en erreur."
Si j'ai fait cette intervention, c'est dans le but de permettre de
considérer une chose importante, c'est qu'une interprétation des
faits de part et d'autre de l'Assemblée ne constitue pas une question de
privilège. Cela constitue, cependant, des divergences d'opinions qu'il
vaut, comme je l'ai souvent répété, la peine de corriger
au moment jugé opportun. Ainsi, guand on est dans des moments comme
ceux-ci, un discours prononcé du côté gauche peut avoir une
réponse dans un discours suivant par une autre personne du
côté droit, de telle sorte que ce qu'on a comme
interprétation des faits - qu'ils soient de bonne foi ou de mauvaise foi
interprétés selon la pensée de chacun - peut se corriqer
dans les minutes qui suivent l'intervention du député qui a le
droit de parole. C'est dans ce sens que je vous demande de bien comprendre
qu'une question de privilège a quand même une portée plus
importante que l'utilisation qu'on essaie d'en faire souvent dans des
circonstances comme ce soir.
C'est pour cela que je vous ai dit tout à l'heure que je serais
plus sévère sur ce qu'est une question de privilège. Il y
a toujours moyen de répondre à ces questions autrement qu'en
soulevant une question de privilège qui parfois n'en est pas vraiment
une. Il est évident que la présidence ne doit jamais refuser des
questions de privilège. On doit les écouter pour savoir si c'en
est une, mais, de grâce, permettez à chacun de faire le travail
qu'il a à faire de façon à ne pas nuire et à ne pas
permettre des débats qui n'en finissent plus sur des questions qui
parfois ne sont pas des questions de privilège. (22 h 30)
M. le député de Nelligan.
M. Lincoln: J'espère, M. le Président, que vous
n'allez pas me retirer ces quelques minutes que vous avez prises.
Excusez-moi, M. le Président, ce que je disais au
député de Terrebonne, ce n'était pas malveillant du tout.
Je trouve que c'est un homme très sincère, très convaincu,
mais par la surprise qu'il y a eu de l'autre côté, je crois que
celui-ci n'avait pas lu le programme de son parti. Nous, du Parti
libéral, on lit toutes ces choses. Je lui disais que c'était la
raison pour laquelle on demandait douze mois, parce que le Parti
québécois ne bougeant pas très vite, cela va lui prendre
au moins douze mois pour réaliser ce programme. J'espère que le
député de Terrebonne et ses collègues vont travailler
pendant ces douze mois de sursis à rédiger l'article 13 et, je le
répète, "abolir la taxe de vente sur les comptes
d'électricité pour usage domestique." Merci. Voilà. On ne
leur laissera certainement pas oublier cela.
Là, on revient au projet de loi no 16. La raison pour laquelle
nous demandons douze mois de sursis, c'est justement pour que les objectifs
d'Hydro-Québec ne soient pas détournés en donnant le
mandat au ministre des Finances de récolter des sommes aussi
importantes. Nous sommes d'accord pour dire qu'il est un gentilhomme de premier
ordre, mais, comme Yvan Guay le disait dans la Presse, l'autre jour: "Un
économiste qui fait montre d'une telle imprévoyance, qui commet
de telles erreurs de gestion - (en parlant des déficits du gouvernement)
- gonfle les revenus et sous-estime les dépenses et qui fait des
déficits qui grandissent de jour en jour, parce qu'ils sont toujours mal
calculés et sous-estimés, ferait mieux d'exercer ses autres
talents et devenir, par exemple, un bon joueur de guitare." On ne veut pas
confier les actions d'Hydro-Québec à un joueur de guitare. C'est
la raison pour laquelle nous demandons douze mois de sursis pour remplacer le
joueur de guitare par les 6.3 millions actionnaires d'Hydro-Québec,
comme c'est le cas maintenant.
En fait, Yvan Guay disait encore: "Mais
comme l'État ne peut que donner d'une main à la population
ce qu'elle lui arrache de l'autre, M. Parizeau n'avait qu'une solution:
camoufler le plus possible les impôts afin de pouvoir les accroître
plus facilement. C'est ainsi que les sociétés d'État, en
particulier la SAQ, Loto-Québec, Hydro-Québec, sont
systématiquement utilisées comme des percepteurs d'impôt
par les hausses de prix et tarifs. De telles mesures ont permis à M.
Parizeau non pas d'indexer les tables d'impôt pour tous, mais
d'alléger l'impôt sur le revenu de quelques catégories de
contribuables et d'abolir la taxe de vente sur le textile, les vêtements,
la chaussure, etc., voyant que ces réductions d'impôt
étaient électoralement rentables. Comme l'accroissement des
impôts indirects et cachés ne sont pas suffisants, M. Parizeau a
massivement emprunté et c'est pourquoi la dette globale du Québec
a triplé en cinq ans."
Une voix: Triplé en cinq ans.
M. Lincoln: Triplé en cinq ans. Nous, de ce
côté-ci, nous demandons d'abord au Parti québécois
de prendre les douze mois qu'on lui suggère pour, d'abord, abolir la
taxe de vente sur les comptes d'électricité pour usage
domestique; deuxièmement, de laisser réfléchir tous les
intéressés dans ce dossier pour qu'on revienne aux objectifs
principaux et initiaux d'Hydro-Québec, soit les tarifs aux taux les plus
bas, compatibles avec une gestion financière saine, comme le disait le
premier ministre, M. Lévesque, quand il était un bon
libéral. Je comprends que cela a changé depuis.
Troisièmement, nous lui demandons de laisser Hydro-Québec
à ses actionnaires originaux, tous les citoyens du Québec et non
pas au mandataire, le joueur de guitare, le ministre des Finances.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, j'ai attendu quelques
secondes pour voir s'il y avait un député de l'autre
côté qui aurait le courage de se lever pour tenter de contrer les
arguments qui pleuvent de ce côté-ci. Il semble que ce soit le
découragement, de l'autre côté. Étant donné
que c'est un projet de loi qui a tellement de conséquences pour tous les
Québécois, nous n'allons pas nous laisser décourager par
l'incompréhension que nous voyons de l'autre côté, nous
avons tout le temps, le règlement est en notre faveur et aussi, j'en
suis sûr, les Québécois veulent que le gouvernement prenne
un peu plus de temps avant de les assommer une deuxième fois en deux
semaines.
M. le Président, cette motion de report, c'est-à-dire
cette demande faite au gouvernement par le député de Gatineau de
reporter à douze mois l'étude de ce projet de loi no 16, est
fondée sur plusieurs raisons, en particulier, sur la
nécessité d'avoir un débat public avant de prendre des
décisions aussi importantes, aussi coûteuses pour tous les
Québécois sur la politique énergétique. Ce
débat aura servi au moins à voir un peu plus clair dans le jeu du
gouvernement.
On sait que le ministre de l'Énergie est un peu
l'exécutant, sinon l'exécuteur du ministre des Finances dans ce
projet de loi. En effet, le ministre des Finances, lors de son discours sur le
budget du mois de mars dernier, avant les élections, avait
annoncé cette charge massive de l'État contre
Hydro-Québec. C'est une conséquence de cette décision du
ministre des Finances que le pauvre ministre de l'Énergie soit
obligé d'essayer d'expliquer pourquoi il fait ça actuellement
sans qu'il y ait eu le débat public que tous les
intéressés demandent, et même son
prédécesseur au siège de l'Énergie, M.
Bérubé.
J'entendais le ministre de l'Énergie et des Ressources argumenter
de la façon suivante: C'est faux de dire que le projet de loi no 16 aura
des conséquences directes sur la tarification. Même s'il n'y avait
pas de projet de loi no 16 en 1978, dit-il, cela a augmenté de tant pour
cent, tant pour cent. C'est vrai. Mais comment peut-il expliquer aux gens,
comme résultat du projet de loi no 16 et de la décision du
ministre des Finances de permettre au gouvernement de sortir
d'Hydro-Québec 75% de ses revenus nets chaque année...
Hydro-Québec, normalement et depuis nombre d'années, consacre ses
revenus nets au développement de son réseau, de son
équipement, au maintien d'un service efficace à tous les
Québécois et au maintien des tarifs les plus bas possible
conformément au mandat qui lui a été donné il y a
une vingtaine d'années par la loi actuelle. Comment expliquer où
HydroQuébec va trouver son argent, si les trois quarts de ses profits se
retrouvent dans les coffres du ministre des Finances chaque année? Avec
quoi Hydro-Québec va-t-elle continuer de développer
l'équipement, continuer de donner un service efficace, à moins
d'augmenter les tarifs?
M. le Président, je ne peux pas suivre, et je ne pense pas que
les Québécois puissent suivre le ministre de l'Énergie
dans ce raisonnement. Hydro-Québec n'imprime pas les dollars et elle
doit emprunter. Peut-être qu'Hydro-Québec devra emprunter
davantage. Mais, le cas échéant, le ministre des Finances a fait
preuve d'une incohérence que même un joueur de guitare, comme dit
le député de Nelligan, n'aurait pas.
J'aimerais citer une déclaration que le ministre des Finances
nous pontifiait lors de
son discours sur le budget de 1977-1978, le 12 avril 1977. Il venait
d'arriver au pouvoir, c'était son premier budget, et voici ce qu'il
disait: "II n'importe pas seulement que le gouvernement se restreigne - on
parlait de couper dans le gras - il faut aussi que ses sociétés
d'État limitent leurs appels au marché financier. À cet
égard, un dégonflement est inévitable. J'ai, en outre,
exprimé à la direction d'Hydro-Québec mon souci que cette
société modère ses appels au marché." (22 h 401
D'un côté, il demande à Hydro-Québec de ne
pas emprunter. Il lui enlève les trois quarts de ses profits et il
voudrait qu'Hydro-Québec continue à donner un bon service. Alors,
si l'on n'a pas le droit d'emprunter et qu'il y a un "hold-up" de 75% de ses
revenus nets chaque année, la seule source, quelle sera-t-elle? La
tarification. Si une seule des conséquences de ce report que nous
demandons aux députés péquistes d'appuyer était de
soulager les Québécois d'une autre taxe cachée, M. le
Président, la motion du député de Gatineau aurait valu la
peine qu'on l'appuie.
Une voix: Très bien.
M. Lalonde: Donc, argument tarification du ministre de
l'Énergie et des Ressources qui, malheureusement, ne tient pas. L'autre
argument, c'est la politique énergétique. Son
prédécesseur espère avoir un débat public
là-dessus. La CSN, l'Office de la protection du consommateur, la Ligue
des libertés et toutes sortes d'autres organismes
intéressés demandent un débat public sur l'énergie.
Le ministre de l'Énergie et des Ressources vient nous dire, ce soir, que
le débat a été tenu. Mais, M. le Président, c'est
rire du monde et je ne pense pas que les Québécois puissent
accepter que, dans le but de donner suite à une décision du
ministre des Finances, le ministre de l'Énergie et des Ressources vienne
prétendre ici, à la face de tous les Québécois,
qu'il y a eu un débat public sur l'énergie. Cela n'est pas vrai.
Cela n'a pas été fait. Il me semble que c'est clair. Est-ce qu'il
y en a eu un? Non. Il y a eu quelques commissions parlementaires sur la
tarification, sur les programmes d'équipements, mais ce n'est pas cela
un débat sur l'énergie. Quelle sorte d'énergie allons-nous
favoriser? Quel est le programme énergétique, à long
terme, que le gouvernement va favoriser? Cela n'a pas été fait.
Le financement, comment va-t-il être fait? Cela n'a pas été
fait. On nous impose un projet de loi qui va permettre au gouvernement de
siphonner Hydro-Québec, qui va augmenter les tarifs, cela est
inévitable, et on refuse un vrai débat sur l'énergie qui
est devenue une question si importante dans toutes les sociétés
modernes d'aujourd'hui.
M. le Président, je pense que l'aveu le plus évident des
intentions de ce gouvernement à l'égard de l'énergie
électrique, c'est d'enlever dans la loi actuelle sur Hydro-Québec
un des éléments de son mandat les plus importants pour la
population, c'est-à-dire fournir à la population de
l'énergie électrique aux taux les plus bas. Pourquoi le
gouvernement veut-il enlever cela? Parce qu'il sait très bien que,
maintenant, Hydro-Québec ne sera plus l'Hydro-Québec des
Québécois, mais une espèce de vache à lait du
gouvernement. Là-dessus, M. le Président, nous allons nous
battre, nous allons nous prévaloir de tous les droits que le
règlement nous permet d'utiliser pour combattre cette prise de
contrôle du gouvernement, cet enlèvement que le gouvernement fait
d'Hydro-Québec qui ne sera plus l'Hydro-Québec des
Québécois. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Frontenac.
M. Gilles Grégoire
M. Grégoire: M. le Président, je ne voudrais pas,
en commençant, laisser passer, sans dire un mot, les railleries qu'a
eues tantôt le député de Nelligan à l'endroit du
ministre des Finances du Québec, car on sait que ce dernier est le
meilleur ministre des Finances...
Des voix: Ah!
M. Grégoire: ... que le Québec ait jamais eu.
Des voix: Bravo!
M. Grégoire: M. le Président, je vous dirai ceci:
Si on veut voir et réaliser là où se trouve le trouble,
là où se trouve le mauvais ministre des Finances, qu'on aille
voir à Ottawa...
Des voix: Ah!
M. Grégoire: ... qui endure des taux
d'intérêt usuraires et voleurs, qui endure un taux d'inflation
incroyable et qui endure un taux de chômage impossible.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Frontenac, vous étiez le premier tout à l'heure à
demander la pertinence de l'autre côté. J'espère que vous
allez vous y tenir.
M. Grégoire: M. le Président, j'en ai assez dit sur
les railleries du député de Nelligan. Il ne faut pas en ajouter
plus. Ce qui me surprend, M. le Président, ce sont les arguments qui
nous arrivent de l'autre côté
pour nous demander: Retardez donc de douze mois l'adoption de la loi. M.
le Président, remontons à 60 mois. Il y a 60 mois, en 1976,
toutes les sociétés d'État ou à peu près
toutes étaient en déficit et, à ce moment, le gouvernement
ne pouvait pas attendre douze mois, les créanciers couraient
après pour lui faire payer les déficits des
sociétés d'État. 60 mois plus tard, fort heureusement, le
gouvernement actuel n'a pas attendu douze mois, ni douze autres mois, ni douze
autres mois comme vous nous le demandiez. Il y a eu de l'action. 60 mois plus
tard, toutes les sociétés d'État, toutes sauf une, font
des profits; toutes les sociétés d'État, sauf une, font
des profits.
Quand toutes les sociétés d'État faisaient des
pertes, faisaient des déficits, le gouvernement libéral
était obligé de prendre les impôts du peuple pour payer les
déficits des sociétés d'État. Les hommes qui
réalisaient les pertes des sociétés d'État
couvraient les pertes avec les impôts de tous ceux qui nous regardent, de
tous ceux qui nous entendent. Nous, on n'a pas attendu douze mois, même
si vous nous l'avez demandé souvent. En 60 mois, toutes les
sociétés d'État sont devenues à profits. Elles font
de l'argent. Si on prenait les impôts du peuple pour payer les pertes,
les déficits des sociétés d'État il y a cinq ans,
pourguoi est-ce qu'on ne prendrait pas maintenant les profits des
sociétés d'État pour soulager le peuple des
impôts?
Une voix: Dehors les patroneux.
M. Grégoire: Si l'ancien gouvernement des déficits
se faisait courir par les créanciers pour payer les déficits,
pourquoi est-ce que le gouvernement qui fait des profits avec les
sociétés d'État ne prendrait pas ces profits pour soulager
les impôts? Vous êtes contre ça! Ce n'est pas
compréhensible.
Vous dites: les tarifs. M. le Président, on dit qu'il y a de
l'impôt, qu'il y a des dividendes, qu'il y a des taxes, tout, mais,
malgré tout, en 1981, au moment où je vous parle, les tarifs
d'Hydro-Québec sont plus bas que les tarifs d'Hydro-Ontario. On est plus
bas malgré qu'on aille chercher des dividendes, qu'on aille chercher des
impôts. On est plus bas qu'Hydro-Ontario. Vous autres, vous faisiez des
pertes avec toutes les sociétés d'État. Nous autres, on a
su remonter la gestion de l'administration et, même si on va chercher des
dividendes, les tarifs sont plus bas.
Dans le domaine domestique - je vais vous citer trois chiffres - tarifs
en vigueur actuellement, factures mensuelles, Hydro-Québec 30,40 $;
Hydro-Ontario 35,70 $. Différence: 17,4% en faveur des
Québécois. Tarif général, petite puissance,
Hydro-Québec, 47,49 $ par mois; Ontario, 70,77 $.
Vous pouvez vous exclamer. 49% moins cher au Québec gu'en
Ontario. Mais, guand on arrive chez les gros - je ne suis pas encore tout
à fait chez les gros - chez les moyens, tarif général,
moyenne puissance, 30 000 kilowattheures par mois, 1374 $ au Québec,
1598,40 $ en Ontario. Différence: 16,3% en faveur des
Québécois. Je me demande ce que vous avez à vous plaindre.
Je me demande pourquoi vous voulez retarder une loi comme celle-là de
douze mois. Je me demande pourquoi. M. le Président, depuis cinq ans que
je suis ici, c'est peut-être la vingtième fois que je vois
l'Opposition nous demander: Retardez donc, retardez donc. C'est la
vingtième fois. Attendez donc six mois. Attendez donc douze mois. Comme
disait le député de Gatineau tantôt, s'ils pouvaient nous
dire: Attendez donc deux ans, attendez donc quatre ans, ils nous demanderaient
d'attendre. Pourquoi attendre? (22 h 50)
Une voix: ... démocratique.
M. Grégoire: Démocratique, oui. La
démocratie, cela fait six mois que cette loi est au feuilleton. Comme
disait le ministre tout à l'heure, vous ne vous y êtes jamais
intéressés. Quand il y a eu une commission parlementaire pour
discuter des tarifs de l'électricité, eux autres, ils ont attendu
à la porte pendant qu'on était en dedans. Ils n'ont pas attendu
douze mois. Ils attendaient à la porte et ils n'ont pas voulu entrer.
Ils sont sortis. Ils n'ont pas voulu venir discuter de la tarification. Ils
n'ont pas voulu venir discuter de la loi 16. Ils sont sortis et, aujourd'hui,
ils disent: Attendez donc. Vous n'aviez qu'à être présents
quand il y une commission parlementaire fut convoquée pour
étudier ces projets de loi, pour étudier la tarification. Vous
vous êtes sauvés. Vous n'avez pas voulu rester. M. le
Président, je vous dis une chose: Attendre douze mois, attendre six
mois, attendre dix-huit mois, c'est un gouvernement qui ne fait rien. C'est un
gouvernement inactif. C'est justement parce que le gouvernement actuel a
décidé d'agir, de prendre ses responsabilités, d'aller de
l'avant que les sociétés d'État aujourd'hui sont à
profit.
Je me rappelle, M. le Président, qu'on nous a demandé
d'attendre douze mois lorsqu'il a été question de créer la
Société nationale de l'amiante. Vous nous avez demandé
d'attendre douze mois. Aujourd'hui, la Société nationale de
l'amiante emploie plusieurs centaines de travailleurs et a
réalisé des profits de 9 000 000 $ l'an dernier. Si on avait
attendu, combien de centaines de chômeurs de plus au Québec, si on
avait attendu vos douze mois, vos vingt-guatre mois, vos trois ans ou vos
quatre ans? On n'a pas attendu. Aujourd'hui, la Société nationale
de l'amiante est devenue le plus gros transformateur d'amiante au Canada,
parce qu'on n'a pas attendu. On a triplé en trois ans la
transformation de l'amiante au Québec. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas
attendu, parce qu'on a agi.
Des voix: Bravo!
M. Grégoire: Aujourd'hui, M. le Président, la
Société nationale de l'amiante réalise des profits de 9
000 000 $. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas attendu comme vous nous l'aviez
demandé. Si on avait attendu comme vous nous le demandiez, cela ne
serait pas fait. Là, vous l'avez sur le nez.
Je me rappelle fort bien, cela a duré toute une nuit. Ce soir,
cela va peut-être durer encore toute la nuit, mais lorsqu'il a
été question de créer la Société nationale
de l'amiante, on avait fini à cinq heures du matin. Tous ceux qui
étaient là ont parlé. Vous nous demandiez d'attendre douze
mois. On n'a pas attendu. Aujourd'hui, regardez les résultats. On est
propriétaire de deux mines, de cinq industries et de deux centres de
recherche, parce qu'on n'a pas attendu. On passera encore la nuit s'il le faut,
mais la loi, on va l'adopter. On n'attendra pas. C'est le temps de l'action.
C'est le temps de bouger et on va bouger, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 96?
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en vertu de l'article
96.
M. Scowen: M. le Président, j'ai parlé dans mon
discours - le député de Frontenac également - des
sociétés d'État et j'invite le député de
Frontenac à rectifier ses propos, parce que je pense qu'il a induit la
Chambre en erreur quand il a dit qu'il n'y a qu'une seule société
d'État qui ne fait pas ses frais. Il y a...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député! M. le député, je vais vous rappeler
l'article 96. L'article 96 a pour but de rectifier... Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je
suis capable de le dire. De rectifier des paroles que le député
de Frontenac aurait dites en regard de votre discours et, avec ce que vous
venez de me dire, je suis assuré que M. le député de
Frontenac n'a jamais attaqué le contenu de votre discours et, en
conséquence, ce n'est pas en vertu de l'article 96.
M. le député de Verdun.
M. Lucien Caron
M. Caron: M. le Président, au début de mon
intervention, je voudrais dire que je ne suis pas d'accord avec le
député de Frontenac de vouloir laisser au ministre des Finances
la balance du budget de la province. Pour autant que je suis concerné,
avec tout le respect que j'ai pour le ministre des Finances, je ne le
laisserais pas contrôler mon petit budget de 30 000 000 $ de la
municipalité de Verdun. M. le Président, avec un petit budget de
30 000 000 $, nous avons eu un surplus de 2 000 000 $ à Verdun. Je pense
qu'il est temps que le premier ministre le nomme à Hydro-Québec
ou ailleurs pour qu'il puisse être remplacé par un homme qui va
savoir contrôler ses chiffres et savoir où il s'en va, car on s'en
va vers la faillite.
Je voudrais parler sur la motion de report de mon collègue de
Gatineau, pour reporter à douze mois le projet de loi no 16 à
cause de l'importance que ce projet de loi a pour nous. Je vois le vice-premier
ministre qui est ici, on ne voit pas les autres, les anciens ministres. Ce
n'est pas naturel d'être ici, ils sont fatigués, ils se
promènent en grosse limousine, ou en avion, ils volent haut, ils volent
bas, cela n'a pas d'importance, l'argent des contribuables. Aujourd'hui, ils
sont bien avancés. Mais, messieurs de la "pool room", vous verrez ce que
je vous dis, je vous parle en tant qu'homme d'expérience, M. le
Président.
J'ai vécu des deux côtés de la Chambre et je vois
que le vice-premier ministre est souriant, il connaît le danger. Mes
amis, je vous considère comme des amis, c'est un message que je vous
donne ce soir, parlez donc à vos ministres, surtout les anciens qui se
promènent un peu partout, comme le ministre du Loisir, qui devrait
être ici plutôt qu'à Haïti, aller dire que le
Québec, ça va mal. Si ça va mal, c'est parce que vous
autres, vous le voulez. Je suis un type dont la porte est encore ouverte et je
peux vous dire que, lundi, hier, exactement - c'est pour ça que je peux
endosser mon collègue de Gatineau - j'ai reçu à mon bureau
22 personnes. Vous riez, vous autres, vous fermez vos portes. Oui, c'est vrai!
Vous ne répondez pas au téléphone, on le sait, on nous
appelle dans nos comtés, certains d'entre vous, pas tout le monde, mais
certains d'entre vous. Sur 22 personnes, 20 sont insatisfaites du gouvernement
actuel. On en a une preuve. Le premier ministre est allé dans le
comté de Hull en fin de semaine. Il a été obligé de
passer par la porte d'en arrière, pour sortir de la station
radiophonique.
Imaginez-vous! Quand le premier ministre est obligé de passer par
la porte d'en arrière, c'est grave. S'il fallait que le maire, comme
moi... je passe encore par la porte d'en avant et je suis respecté, on
l'a prouvé, le 1er novembre, M. le Président. Si on veut reporter
le projet de loi à environ 12 mois, c'est qu'on voudrait avoir des
commissions parlementaires. De notre côté,
M. le ministre des Communications, un petit message que je vous donne en
passant, on veut la démocratie, autant que vous avez voulu l'avoir. Vous
l'avez chanté, mais maintenant que vous êtes au pouvoir, que vous
avez essayé de tout faire pour gagner le référendum,
à n'importe quel prix, votre élection à n'importe quel
prix, là, le Québec est quasiment au bord de la faillite, et
qu'est-ce qu'on fait? On augmente les taxes. On le prouve, l'augmentation
d'Hydro-Québec au Québec, de 1977 à 1982,
représente 97%.
On se plaignait. M. Joron, qui est parti, j'imagine, parce qu'il
était tanné d'être avec vous, se plaignait le mardi 21
novembre 1972 d'une petite augmentation de 4% à cette époque.
Imaginez-vous, M. le Président, s'il n'est pas temps qu'on ouvre les
portes du parlement et qu'on entende les gens sur l'importance de ce projet de
loi. Vous le savez, c'est à la dernière minute que cela se
brasse. Je me rappelle, il y en avait six de ce côté-ci et ils en
menaient du train, les six collègues de l'Opposition du temps. Ils en
voulaient, des commissions parlementaires. Ils nous blâmaient d'inscrire
des projets de loi à la dernière minute. Je suis bien d'accord
avec tout cela. On a payé notre dette en 1976. Le Parti libéral a
payé sa dette en 1976. Aujourd'hui, pourquoi essaie-t-on de faire pire
qu'on a fait? C'est là qu'est l'erreur. Je vous dis qu'on ne vous
pardonnera pas cela. (23 heures)
Je vois le ministre de l'Énergie qui s'est acheté, lui
aussi, une petite fournaise pour chauffer au bois, parce qu'il a peur!
Probablement parce qu'il sait qu'il achève son temps, il s'est dit: Je
vais ménager le reste de mon argent.
M. le Président, ce projet de loi implique non seulement les
changements de statut d'Hydro-Québec, mais aussi donne au gouvernement
la possibilité de hausser les tarifs d'Hydro-Québec pour financer
des déficits budgétaires. On ne peut pas, être d'accord de
notre côté si on veut être sincères envers
nous-mêmes et envers tous les contribuables du Québec. Il y a une
certaine classe peut-être qui peut se permettre de payer un certain
montant. Mais je pense que vous avez oublié qu'au Québec il y a
beaucoup de personnes qui sont retraitées. Si le ministre des Affaires
sociales était ici, il vous le dirait. Vous avez aussi, par malheur,
beaucoup de gens qui sont sur l'aide sociale et d'autres qui ne peuvent pas se
trouver de travail. Imaginez-vous, à partir du 1er janvier, 17%
d'augmentation! Vous me direz peut-être que sur une facture de 50 $ ou de
60 $, ce n'est pas énorme, mais quand c'est six ou sept mois par
année de chauffage à l'électricité...
Je pense que c'est une des raisons pour lesquelles j'endosse la motion
de mon savant collègue de Gatineau. Jusqu'à maintenant, il vous a
prouvé que dans cette Chambre il fait un excellent travail. Je ne peux
pas faire autrement ce soir que d'endosser sa motion. J'espère que de
l'autre côté, surtout les députés
d'arrière-ban, ne suivront pas les ministres, parce que certains de ces
ministres vous induisent en erreur. Je vous passe un certain message, mais je
pense que vous ne le prendrez pas parce que vous allez avoir peur, vous allez
peut-être être pénalisés dans certains voyages. Cela
arrive si on parle trop. C'est drôle, tout le monde se lève. Quand
on passe par le Parlementaire, parfois on entend des grondements, les gens ne
sont pas contents.
Une voix: Des péquistes?
M. Garon: C'est entendu, ce sont des péquistes qui ne sont
pas contents, même sur les augmentations de salaires. Je suis bien
content qu'on n'ait pas appelé le projet de loi sur les augmentations de
salaires, parce que j'aurais aimé parler des augmentations de salaires.
Le gouvernement a été prudent. Vous avez été
très prudents de ne pas appeler le projet de loi sur les augmentations
de salaires, parce que j'aurais aimé en parler. Avec le nombre de jours
qu'on a travaillé dans cette Chambre jusqu'à maintenant, il y en
a beaucoup qui auraient aimé avoir notre position parce que c'est
très rentable.
M. le Président, j'espère que les gens d'en face vont
voter avec mon collègue de Gatineau pour reporter d'environ douze mois
l'étude de ce projet de loi pour qu'on puisse montrer que nous sommes
ouverts à la démocratie, entendre les organismes, les conseils
municipaux. Avec la loi 57, on vous a donné cela d'une main et on vous
l'a enlevé tout de suite de l'autre. On peut en parler, de cela. On aura
l'occasion dans d'autres projets de loi d'en parler. C'est un gouvernement qui
fait énormément de publicité, mais, quand cela vient
à la réalité, c'est disgracieux de voir comment on peut
aller fouiller dans la poche du plus petit. On l'a prouvé avec
l'augmentation de la taxe sur l'essence. On touche tout le monde au
Québec avec cette augmentation. On a fait cela en peu de temps.
Oui, M. le vice-premier ministre, vous souriez, mais allez dans votre
comté et vous allez voir que les gens sont de moins en moins heureux du
Parti québécois. J'espère que, dans un avenir très
rapproché, vous aurez l'audace de vous présenter devant la
population du Québec et je suis convaincu qu'elle vous dira: Merci, on
en a assez de vous autres.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Anne.
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Maximilien Polak
M. Polak: M. le Président, j'espère que le bruit
qui émane de l'autre côté de la Chambre ne sera pas
compté sur mon temps. On va m'écouter en vertu de l'article 100.
Le président vient d'expliquer le règlement, les questions de
privilège. Ecoutez, parce que j'ai quelque chose à dire. Je vais
peut-être vous convaincre, écoutez bien.
M. le Président, sur la motion de report, il faut d'abord que je
fasse une rectification sur ce que le député de Frontenac vient
de dire. Il a dit tout à l'heure: Eux autres, libéraux, se sont
sauvés, quand il y a eu une commission parlementaire. Savez-vous que
j'étais là? Cette commission avait trait à l'étude
du projet de tarification soumis par HydroQuébec. On était
à cette commission pour cela, mais on a constaté très
rapidement qu'il s'agissait de tricher la population, de faire le grand show,
de faire venir les employés d'Hydro-Québec, de parler de la
tarification. Mais on a bien fait la preuve -je vais le démontrer tout
à l'heure - que la loi 16, qui n'était même pas
adoptée à ce moment-là, préparait une grande
offensive en vue de cette augmentation. On a fait la preuve de cela. L'affaire
de la taxe sur le capital qu'Hydro doit payer, le dividende qu'Hydro doit payer
obligatoirement, cela ne se trouve pas dans les descriptions de l'étude
du projet de tarification. On a fait la preuve de cela et on le savait depuis
le début. On est parti, parce qu'on s'est dit: On ne va pas rester ici
à participer à un grand show. Essayer de tricher la population,
on ne le fait pas. Le projet de loi no 16 n'est pas encore adopté, on ne
peut donc pas en parler. C'est la raison pour laquelle on est parti, on ne
s'est pas sauvé. On n'a pas voulu participer à ce jeu.
M. le Président, je dis que la population a le droit d'avoir une
enquête sur la politique énergétique dont les
péquistes ont parlé tout à l'heure et cet
après-midi. C'est une politique bien connue. C'est ridicule. Savez-vous
ce qu'ils ont dit? Que c'est important que le prix de
l'électricité d'Hydro soit en relation étroite avec le
prix du pétrole et le prix du gaz naturel. C'est la politique
établie. On n'a jamais étudié cela en détail.
J'aimerais bien l'étudier, parce qu'on aurait des choses à dire
là-dessus.
Savez-vous, on a une commodité qui s'appelle
l'électricité, dans la province de Québec, qui nous
appartient à tout le monde, aux Québécois et aux
Québécoises. Cela nous appartient. C'est malheureux, cela sera
transféré à M. Parizeau qui va devenir le seul actionnaire
de toutes ces actions, mais cela appartenait et cela appartient encore à
la population du Québec.
Une voix: 6 000 000 de Québécois.
M. Polak: On aurait dû faire bénéficier la
population du produit et des gains nets d'Hydro-Québec. Savez-vous qu'en
Alberta, on se sert du pétrole pour le bénéfice de la
population, parce qu'il n'y a pas de taxe provinciale? Là-bas, on paie
0,314 $ pour le pétrole, tandis qu'ici à Montréal, on paie
0,46 $. Savez-vous qu'en Arabie Saoudite, où il a beaucoup de
pétrole aussi, on paie peut-être 0,05 $ ou 0,06 $ le litre et non
pas 0,46 $, comme à Montréal, parce qu'ils se disent comme
politique: On a une commodité; on a une ressource naturelle qui
appartient à la collectivité; on va en faire
bénéficier la collectivité. C'est cela qu'on n'a pas fait
ici.
M. le Président, si M. Parizeau n'avait pas tellement
d'appétit et si M. Parizeau ne voulait pas aller chercher 200 000 000 $
dans les coffres d'Hydro-Québec, on ne serait pas obligé
d'augmenter le tarif par un pourcentage de 16,7%. Je parle des tarifs
domestiques. (23 h 10)
Je vais vous citer ce que le ministre et les députés
ministériels ont dit, tout à l'heure, pendant la discussion, pour
justifier cette taxe sur le capital et le paiement des dividendes. Ils ont dit
qu'Hydro devrait être traitée comme un citoyen coopératif
normal et que, de toute façon, le paiement des dividendes n'est qu'un
retour aux contribuables du Québec des dividendes sur les sommes
investies par les consommateurs. Cela, c'est une belle théorie. Ils
disent: Nous, on a investi dans Hydro-Québec, cet organisme est devenu
riche, donc, on va reprendre les profits pour les verser dans les coffres de
l'État. De plus, ils disent que tous les contribuables du Québec
sont propriétaires d'Hydro-Québec et qu'il est maintenant temps
qu'Hydro-Québec retourne à la collectivité lesdits
dividendes. Ce sont de belles paroles. La collectivité, maintenant,
recevra tous ces dividendes.
Ce n'est pas nous qui les recevrons, c'est le trésor. Savez-vous
ce qu'on fera avec cet argent? Il sera encore utilisé pour le gaspillage
des fonds publics. Si le ministre et le gouvernement avaient l'intention de
faire bénéficier la population des dividendes gagnés par
Hydro-Québec, pourquoi ne pas payer ces dividendes par une
réduction du taux de l'électricité pour le consommateur
domiciliaire qui est le plus touché par l'inflation? C'est bien beau de
dire à un citoyen qu'on augmente le taux de l'électricité
de 16,7%, mais qu'il ne doit pas être triste parce qu'Hydro-Québec
verse des millions de dollars au trésor public sur lequel les gens n'ont
aucun contrôle. Nous savons tous combien il y a du gaspillage des
fonds
publics et je ne connais pas un citoyen qui ne préférerait
pas voir une diminution du taux de l'électricité au lieu de le
transférer au fonds consolidé.
Je voudrais faire la preuve sur une chose que la population ne
connaît pas. C'est pour ça qu'on a présenté cette
motion de report pour un an, parce que le public n'est pas au courant, il veut
le savoir et on doit en discuter. Lors de la dernière commission
parlementaire, j'ai posé une question à M. Bourbeau,
président du conseil d'administration d'Hydro-Québec. C'est
à la page B-1229 du journal des Débats. Je cite mes propres
paroles et, par la suite, la réponse de M. Bourbeau. Je cite le journal
des Débats, je n'invente rien. J'ai dit à M. Bourbeau: "Vous
dites qu'on a besoin, pour 1982, de 295 900 000 $, incluant la taxe sur le
capital." "... On va mettre à part, 98 700 000 $, que vous,
Hydro-Québec, n'étiez jamais obligée de payer auparavant,
mais maintenant, on exige que vous la payiez." Cette somme de 98 700 000 $,
c'est la taxe sur le capital. Voici la question que j'ai posée à
M. Bourbeau:
En ce qui concerne le surplus, si vous prenez les deux années
1981-1982, que vous n'étiez jamais obligée, vous,
Hydro-Québec, de verser au gouvernement, cela donne un total, ces deux
chiffres ensemble, de 155 500 000 $. Je continuais, en septembre, en commission
parlementaire: Si le gouvernement péquiste, demain, disait: On va
changer. C'est grave, l'opinion publique ne veut plus. Vous avez raison, les
pauvres. Oubliez cette loi 16. On va donner instruction à
Hydro-Québec de retourner au public l'argent dont vous n'avez plus
besoin, y inclus le surplus et la taxe sur le capital, on va abolir cela. Je
posais la question: "Cela veut dire, M. Bourbeau, qu'il y a à ce moment
une marge de 155 500 000 $. Est-ce vrai, oui ou non?" À la suite de
quoi, M. Bourbeau a répondu: "C'est vrai, oui."
C'est la preuve que la taxe sur le capital et les dividendes
étaient bien inclus quand Hydro-Québec a fait ses calculs de
tarifs. Au cas où il y aurait encore un doute qu'Hydro-Québec, en
préparant son projet de tarification, n'avait pas pris en
considération les effets de la loi no 16 qui, à ce moment,
n'était même pas en vigueur, je cite la réponse
donnée par un autre officier d'Hydro-Québec, M. Bolduc, à
la page B-1254: "Notre prévision tient également compte de
modalités de la taxe sur le capital de 1981 qui serait, selon ce que
nous avons anticipé, payables en 1982 et elle a aussi tenu compte de
certaines modalités qui nous avaient été indiquées
il y a plusieurs mois comme étant probables, de paiement de la taxe sur
le capital de l'année 1982."
On ne peut pas avoir de preuve plus claire, Les officiers, les hauts
fonctionnaires d'Hydro-Québec l'ont confirmé à ce
moment-là. C'est la raison pour laquelle on demande de reporter
l'étude de ce projet de loi à un an pour qu'il y ait une
étude par ceux qui la demandent.
On a parlé du groupe des onze -malheureusement, je pense qu'il
n'y en a pas beaucoup qui sont ici ce soir de ce groupe des onze - qui avaient
eu le courage, après le discours sur le budget, de le critiquer. Mais,
tout de même, ils avaient voté pour le budget. Ces onze-là,
s'ils ont du courage et s'il y en a d'autres parmi vous qui ont du courage,
allez donc voter en faveur de notre motion de reporter l'étude de ce
projet de loi et vous irez à votre congrès en fin de semaine dire
à vos militants que vous avez eu le courage de vos convictions, que vous
n'avez pas agi comme des petits moutons, que vous avez eu le courage. Allez
dire cela à vos militants et je pense qu'on va vous apprécier,
même dans votre parti, en fin de semaine. Je suis certain que, demain,
vous allez encore vous lever en bloc. Vous avez ri de nous autres parce que,
à un moment donné, il y a eu un vote sur une affaire
sérieuse. On a parlé des neuf qui ont voté contre. Le
savez-vous? Au moins, ces neuf-là avaient...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M.
le député de Sainte-Anne, votre temps est terminé.
M. Polak: Merci, M. le Président. M. Brassard: M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le chef de
l'Opposition.
M. Brassard: M. le Président. Une voix: II a été
reconnu. M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, les raisons pour lesquelles
l'Opposition demande le report de ce projet de loi n'ont rien d'artificiel. Ce
projet de loi implique des choix tout à fait fondamentaux pour notre
société et nous ne voulons pas qu'ils soient faits à la
vapeur ou à la sauvette, comme c'est arrivé déjà
trop souvent sous le gouvernement actuel.
Il y a d'abord un choix évident qui nous est proposé au
sujet de la vocation d'Hydro-Québec comme société
d'État. J'entendais tantôt le député de Frontenac
dire que les sociétés d'État ont commencé à
réaliser des surplus sous le gouvernement actuel. C'est
complètement faux. Cela fait très longtemps
qu'Hydro-Québec réalise des surplus. Si le député
de Frontenac avait réfléchi à son affaire un petit peu, il
se serait rendu
compte que, entre une société à caractère
monopolistique comme Hydro-Québec et d'autres sociétés qui
sont dans une position concurrentielle, il y a une énorme
différence qui ne permet aucune comparaison superficielle comme celle
qu'il a faite.
Hydro-Québec a été, jusqu'à maintenant, une
société autonome, une société à qui le
législateur a délibérément confié une grande
marge de liberté financière et administrative pour qu'elle puisse
s'acquitter de ses lourdes responsabilités avec toute la latitude en
matière de choix des moyens, avec tout le poids nécessaire. Or,
le projet de loi qu'on nous présente aujourd'hui tend - ce n'est pas la
première fois; c'est le deuxième projet qu'on nous
présente en l'espace de deux ans qui va dans la même direction -
vers une domestication très dangereuse d'Hydro-Québec.
Quand celui qui se présente comme l'actionnaire principal - on
sait qu'au bout de la ligne cela se résumera à un personnage, le
ministre des Finances - peut dicter le montant du dividende qui sera
versé au gouvernement par la société, cela veut dire
qu'indirectement il peut exercer un contrôle presque dictatorial sur un
grand nombre de décisions fondamentales de cette société
autant en matière de tarification, de qualité de services que
d'équipement. Nous croyons qu'un choix comme celui-là a
déjà été fait trop souvent sans que le gouvernement
en mesure les répercussions. La Caisse de dépôt et
placement du Québec, pour ne mentionner qu'un exemple, est la victime de
ces pressions d'un actionnaire qui se sent trop proche propriétaire. On
se demande, à entendre parler et agir parfois la Caisse de
dépôt, si elle est devenue simplement un instrument docile et
domestiqué aux mains du gouvernement plutôt que l'instrument
autonome, vigoureux et libre qu'avait construit le gouvernement libéral
qui l'a créé il y a une quinzaine d'années.
Je regarde le sort que le gouvernement est en train de faire aux
universités. Sous prétexte de leur fournir de l'aide
financière, voici que le ministre de l'Éducation, très
représentatif en cela de l'orientation du gouvernement actuel, est en
train de les réduire à la domesticité et à
l'esclavage financier et administratif. Regardez le sort que le gouvernement
impose aux commissions scolaires depuis quelques années. On est
gêné. Il faudrait qu'on dépose un projet en vertu duquel le
gouvernement voudra tout simplement se débarrasser des commissions
scolaires. Nous ne voulons pas que la même domestication, le même
écrasement arrive dans le cas d'Hydro-Québec et c'est pour
ça que nous exigeons qu'un examen très approfondi soit fait de
toutes les implications de ce projet de loi. Le projet comporte des
implications très importantes pour l'orientation générale
des finances publiques. Cela, c'est capital aussi. (23 h 20)
Je pense qu'on peut caractériser la politique fiscale et
financière du gouvernement péquiste par deux traits qui sont
évidents. D'abord, une politique de camouflage de déficits. On
nous a parlé de santé des finances publiques depuis que le
gouvernement actuel est en place et, chaque année, l'état des
finances publiques n'a cessé de se détériorer à un
rythme qui s'accélère d'année en année.
Deuxièmement, comme on n'a pas le courage de dire franchement aux
contribuables le genre de gestion qu'on est en train de faire, on taxe
indirectement, on taxe par des voies camouflées. On l'a fait par la taxe
sur les salaires sous prétexte de financer les programmes de soins
médicaux et hospitaliers. On l'a fait plus récemment par les
taxes sur l'essence. Cela ne paraît pas. Cela passe sur le dos des
multinationales, sur le dos de l'Alberta, sur le dos des étrangers, mais
ce gouvernement-ci est en train de s'engraisser au détriment des
consommateurs d'essence, une manière hypocrite et indirecte qui frappe
beaucoup plus les petits et les faibles que les gros.
Nous ne voulons pas qu'il fasse la même chose avec
Hydro-Québec. Il est déjà en train de le faire à un
rythme très rapide et, si le projet de loi, comme il nous est
présenté, allait être adopté aussi rapidement que le
voudrait le gouvernement, le danger que s'aggrave et s'accentue cette tendance
très dangereuse que le gouvernement actuel a imprimée aux
finances publiques et à la fiscalité serait aggravé
considérablement et je pense que c'est la pire calamité qui
pourrait être infligée aux contribuables.
D'autres de mes collègues, en particulier le député
d'Outremont, ont souligné combien inconséquente est la politique
du gouvernement qui s'engageait, il y a quelques mois à peine, presque
en sanglotant, à tenir un débat public sur les grands choix
énergétiques que devra faire notre société pour la
prochaine génération. Il est évident que ce débat
n'a jamais eu lieu nulle part. Peut-être que le genre de débat qui
s'est produit à la commission parlementaire a-t-il pu satisfaire
certains députés complaisants et ultra dociles du
côté gouvernemental. Mais il n'y a pas un citoyen ou un
observateur sérieux qui aura le culot de soutenir qu'on aurait jamais
tenu un débat sur les grandes orientations énergétiques de
l'avenir au Québec. Ce débat reste à faire et, avant
même qu'il ait eu lieu, le gouvernement voudrait nous imposer une
orientation tout à fait fondamentale. Nous disons au gouvernement: Tenez
donc vos promesses et vos engagements et ensuite vous nous arriverez avec un
projet comme celui-ci.
Hydro-Québec, M. le Président, est un
instrument de développement économique extrêmement
important. Ses politiques d'achat, ses politiques de développement, ses
politiques d'embauche, ses politiques d'emprunt et de financement ont un impact
considérable sur tout l'ensemble de la société
québécoise. Le gouvernement lui-même dépend dans une
très large mesure des politiques de financement d'Hydro-Québec
parce que, quand ça va mal pour lui, il peut être tenté de
lui refiler une partie plus importante du fardeau. Quand cela va bien, il peut
être tenté de piger dans la caisse d'Hydro-Québec pour se
financer. Nous autres, nous voulons qu'Hydro-Québec garde son potentiel
comme l'un des instruments majeurs du développement économique du
Québec au même titre, par exemple, et encore sur une
échelle plus importante que la Caisse de dépôt et
placement, que le Mouvement des caisses populaires, que la Coopérative
fédérée et d'autres grandes institutions
économiques et financières que nous avons et nous trouvons que,
si ce projet allait être adopté inconsidérément et
prématurément, c'est la vocation économique
d'Hydro-Québec et la santé de notre économie qui
risqueraient d'en être affectées.
M. le Président, nous sommes à un tournant où la
santé de l'économie est extrêmement compromise. Je lisais
dans un journal, samedi dernier, qu'au cours du mois de septembre, les demandes
de prestations d'assurance-chômage ont augmenté de 44% au
Québec par rapport au mois d'août, augmentation de 44% dans
l'espace d'un mois. Du mois de septembre de l'année dernière au
mois de septembre de cette année, l'augmentation est de l'ordre d'au
moins 40%. Des chômeurs, c'est ce que vous fabriquez, messieurs du
gouvernement, par milliers, surtout depuis un an, par vos politiques qui
découragent les investissements et qui font fuir les citoyens du
Québec pour aller chercher du travail ailleurs.
Nous sommes à une époque où jamais les
déficits gouvernementaux n'ont été aussi
élevés, où jamais le fardeau fiscal direct et indirect du
contribuable québécois n'a été aussi
élevé que sous le gouvernement actuel, où jamais le rythme
de progression de l'endettement collectif, de l'endettement public du
Québec n'a été aussi spectaculaire, aussi
effréné que sous ce gouvernement qui se piquait de mettre de la
santé dans les finances publiques quand il a pris le contrôle des
affaires, il y a quelques années.
Étant donné, M. le Président, ce caractère
extrêmement fluide et dangereux de la conjoncture économique
actuelle, nous disons au gouvernement que ce n'est pas le temps de céder
à la tentation des embardées comme celle que nous propose le
projet actuel et c'est pour cela que nous aurions tous intérêt
à appuyer la motion de report du député de Gatineau et
à reporter d'un an l'examen de ce projet afin que nous ayons tous
approfondi davantage les implications très dangereuses qu'il
contient.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Claude Charron
M. Charron: M. le Président, le fait que le chef de
l'Opposition ait choisi d'intervenir sur cette motion dilatoire qui a
été présentée par le député de
Gatineau... C'est d'ailleurs la deuxième fois en autant de jours qu'il
se rallie à la position du député de Gatineau. Hier,
c'était sur le plan constitutionnel. Ce soir, c'est sur une motion de
report de douze mois. Je prends comme indication, du fait que le chef de
l'Opposition choisisse d'intervenir sur une telle motion et constatant le
nombre, ce soir, exceptionnel, de nos amis...
Une voix: ...
M. Charron: Cela ne m'inquiète pas du tout. Je veux dire
que le nombre de présences ce soir, auquel ils nous ont si peu
habitués et gâtés, devrais-je dire, des
députés libéraux est sans aucun doute une indication
qu'ils ont l'intention d'intervenir en bon nombre. C'est tout à fait
leur droit. Nous allons, avec beaucoup de patience, entendre chacune des
répétitions d'arguments qui ont déjà
été posés et notre intention n'est nullement d'interdire
au cours de cette séance aujourd'hui le débat de ce soir. Je vous
en prie. Je suis très heureux de vous offrir cette collaboration.
M. le Président, venons-en non pas au principe du projet de loi
sur lequel le député d'Argenteuil est largement intervenu, mais
sur l'à-propos d'un report de douze mois, comme le règlement
l'avait invité à le faire. J'en ai entendu beaucoup, de ces
arguments, certains moins sérieux, d'autres complètement
farfelus. Prenons ceux que j'ai entendus comme étant des arguments de
valeur, je dirais, qui pourraient, à n'importe quel citoyen, laisser
croire qu'il y a un bien-fondé à reporter ce débat. Ce que
ne disent pas les députés libéraux qui sont intervenus
depuis le début, c'est que ce projet de loi n'a pas été
déposé hier et l'invitation à prendre du temps sur un
geste aussi majeur, qui pourrait être justifiée s'il y avait
à peine dix jours, une semaine ou vingt-quatre heures que nous avions
déposé ce projet de loi, doit être prise dans une toute
autre considération quand il s'agit d'une mesure inscrite dans le budget
préélectoral du gouvernement.
Lorsque le gouvernement a présenté cette intention, non
seulement était-elle écrite, annoncée dans le discours sur
le budget, comme l'a rappelé le ministre de
l'Énergie et des Ressources ce matin, non seulement
était-elle écrite, le nouveau qu'elle constitue, je suis bien
prêt à admettre qu'il s'agit d'une nouveauté dans les
rapports entre Hydro-Québec et le gouvernement, personne ne le
contestera au cours du débat sur le principe, cette nouveauté
n'est pas apparue hier, elle était annoncée dans le budget du
gouvernement. Pendant la campagne électorale, M. le Président,
avez-vous entendu des rangs de l'autre côté, un mot, une ligne, un
discours sur ce sujet? Cela ne les préoccupait pas du tout, M. le
Président. (23 h 30)
Le Président: M. le leader, s'il vous plaît, je ne
veux pas vous interrompre, mais j'étais à côté tout
à l'heure, et j'écoutais religieusement, comme tout le monde, le
discours prononcé par le chef de l'Opposition. Je demanderais la
même façon d'agir pour tous les autres discours, parce que je
pense que c'est la façon la plus simple de bien entendre et de bien
écouter les propos qui sont tenus. Je vous demanderais de laisser le
leader faire son discours, comme le prévoit le règlement,
à l'article 100. M. le leader.
M. Charron: Merci, M. le Président. Ou ils n'en ont pas
parlé pendant la campagne électorale, ou, s'ils en ont
parlé, ce que j'ignore, pour ma part, ils ont eu la réponse de la
population, ils sont à votre gauche, M. le Président, ce
soir.
Non seulement cela n'a pas été caché, à
l'entrée même de la campagne électorale, c'est écrit
noir sur blanc dans le budget, une des mesures, sans aucun doute, les plus
commentées du budget au départ, mais, cet été,
à la suggestion même de l'Opposition et sans que cela nous force
en quoi que ce soit, puisqu'il s'agit d'une chose tout à fait normale,
lorsque quelqu'un, je ne me souviens plus qui, de l'autre coté, a
suggéré que le projet de loi, lorsqu'il fut déposé,
il y a même des gens, le député d'Outremont s'en
souviendra, qui me posaient des questions lorsque la fin de mai arrivait, pour
voir si ce fameux projet de loi ne serait pas déposé, quelque
part avant le 31 mai, pour être discuté en juin. C'est moi qui lui
ai dit que, comme il s'agissait d'une mesure importante, il fallait un certain
temps; or, ce temps, aujourd'hui, est écoulé.
À l'époque, je lui répondais: Non, je ne le
déposerai pas le 31 mai pour adoption le 19 juin ou le 21 juin, à
la vapeur, nous allons nous contenter de le déposer et nous allons
l'étudier tout le temps qu'il faudra, en commission parlementaire, ce
que nous avons fait. Nous l'avons présenté en commission
parlementaire, tout ceux qui ont voulu venir comparaître sur ce sujet,
donner leur opinion, l'ont fait. La société Hydro-Québec
était là, avec toute sa batterie, d'experts, sur place pour
répondre aux questions, aux interrogations, aux angoisses de
l'Opposition officielle. Qu'est-ce qu'ils ont fait, M. le Président,
pendant ce délai que nous leur avons accordé et pendant cette
commission parlementaire? Ils sont sortis, comme des enfants d'école,
parce qu'ils n'avaient pas la motion qu'ils voulaient présenter, au tout
départ, pour encarcaner le débat.
Mais si ce débat, comme dit le chef de l'Opposition, et je
conteste cette affirmation, est véritablement, comme je viens de
l'entendre dire, un débat sur les grands choix
énergétiques de l'avenir, entre vous et moi, il en met beaucoup,
ce soir, le chef de l'Opposition, quand il parle de ce projet de loi. Soit, si
ce débat qui concerne les relations entre une société et
le gouvernement du Québec se trouve, par le fait même, à
affecter les grands choix énergétiques de l'avenir, pourquoi,
lorsque nous avions cette société devant nous, non seulement
avant même de quitter comme des enfants la commission parlementaire, si
c'était de cette importance majeure, est-ce que c'était le temps
de faire un petit "show" partisan, comme de dire: Si ma motion n'est pas
reçue, nous nous retirons, peu importe l'importance du sujet. Comme s'il
s'agissait d'une affaire de dernière heure ou de dernière
seconde! Si ce qui vous préoccupe en si grand nombre ce soir
était aussi important, pourquoi n'avez-vous pas pris vos
responsabilités premières et participé de façon
première aux travaux de la commission parlementaire? Une chance qu'il y
avait des députés du Parti québécois.
Depuis le 11 mars que cette décision est étalée sur
la place publique, commentée, livrée à l'étude de
n'importe quel parlementaire qui aurait voulu participer à la
commission! Ce soir, sortant des limbes, l'Opposition officielle nous arrive et
nous dit: II nous faut douze mois de plus pour y réfléchir, parce
que c'est majeur.
M. le Président, je vais vous poser une question avant de
terminer. Pensez-vous que, dans douze mois, le parti politique qui
écrivait dans son programme que les taux d'électricité au
Québec étaient artificiellement bas - c'est dans son cahier du
mois d'avril dernier - qui avait une politique qui courait la chèvre et
le chou, comme des députés qui sont intervenus l'ont fait,
pensez-vous que, dans douze mois, il y aurait quelque chose de changé
dans son opinion? Pensez-vous que dans douze mois, vraiment, il profiterait de
la période pour étudier, alors qu'on vient de leur offrir dix,
onze ou douze mois tout à fait ouverts à la discussion avec une
commission parlementaire qu'ils ont désertée? Voyons donc!
N'importe qui écoutant ces débats ce soir sait très bien
que ce que l'Opposition est en train de faire, c'est simplement de perdre du
temps sur un projet de loi qu'elle a refusé d'étudier de
façon attentive.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont, en vertu de quel règlement? Je tiens à vous faire
remarquer, M. le député, qu'en vertu de l'article 96, vous devez
rectifier des propos du leader qui auraient transformé ce que vous avez
dit dans votre discours...
M. le député, simplement parce que je suis debout, vos
propos n'ont pas été enregistrés, je vous le fais
remarquer. Je vous demandais en vertu de quoi. Vous m'avez répondu en
vertu de l'article 96, et là, vous me revenez en vertu de l'article
49.2, sur une question de privilège.
M. Fortier: S'il vous plaît, une question de
privilège. Je crois que le leader n'y a pas fait attention, mais il a
induit cette Chambre en erreur lorsqu'il a dit que la députation
libérale avait quitté la commission parlementaire qui a
discuté du projet de loi no 16. C'est faux. Nous sommes sortis de la
commission parlementaire, mais c'était sur la tarification et nous avons
expliqué pourquoi. À ce sujet, je crois que ce que le leader a
dit contredit...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je voudrais simplement
vous faire remarquer -je vais vous reconnaître ensuite, M. le
député - que la première partie de votre propos
était en vertu d'une question de privilège, mais que votre
deuxième partie donnait ouverture à un débat que je
n'accepterai pas, et vous le savez très bien. M. le député
de Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: M. le Président, cette motion me fournit
l'occasion d'émettre certains commentaires en ce qui a trait au
comportement du gouvernement. Ayant pris connaissance du projet de loi no 16,
j'ai pu constater, à ma grande surprise, un revirement d'attitude tout
à fait contraire à la raison d'être et au programme du
Parti québécois. En fait, ce gouvernement, lui qui nous rebat les
oreilles depuis cinq ans en nous disant que le respect des droits collectifs
des Québécois passe avant toute chose, qu'ils sont sacrés
et même indéniables, il vient tout juste de nous prouver, noir sur
blanc, qu'il peut en tout temps se soustraire traîtreusement à un
engagement et à un principe fondamental qu'il a toujours soutenus.
M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Excusez-moi.
M. Dubois: M. le Président, ce revirement indique bien
l'irresponsabilité, le manque d'honnêteté intellectuelle et
la mesquinerie qui caractérisent nos amis d'en face. Depuis son
existence, Hydro-Québec a toujours été un bien collectif,
une richesse collective appartenant aux Québécois, un outil de
développement privilégié dont tous les
Québécois étaient fiers; c'était un orgueil
collectif de savoir que cette richesse nous appartient. Voilà
qu'aujourd'hui ce n'est plus cela. Cette richesse collective s'est subitement
transformée en un bien individuel, une richesse individuelle ou, si vous
préférez, elle est devenue la proie privilégiée
d'un seul individu qui s'appelle le ministre des Finances. C'est effectivement
d'un bien collectif, M. le Président, que ce Parti
québécois, spécialisé en propagande
séparatiste, a décidé de s'emparer, dépouillant
ainsi tous les Québécois du peu qu'il leur restait. (23 h 40)
M. le Président, la motion de report à douze mois
présentée par mon collègue, le député de
Gatineau, a essentiellement pour but d'amener le gouvernement à
consulter la population avant de saisir le fruit de son bien collectif. Nous ne
pouvons laisser aller un tel projet de loi sans défendre de toutes nos
forces les intérêts supérieurs de tous les
Québécois.
Hydro-Québec, conçue par le Parti libéral, a
toujours servi à bâtir le Québec. Ce fut une convention qui
a toujours été respectée et reconnue, mais voilà
qu'aujourd'hui le Parti québécois s'en sert pour affaiblir le
Québec. J'ai bien dit "affaiblir le Québec", puisque la mission
particulière et unique de cette société d'État a
toujours été de développer et d'investir dans le seul
domaine privilégié en matière énergétique
que possèdent les Québécois.
M. le Président, nous de ce côté-ci, oui, nous du
Parti libéral, on ne peut pas laisser affaiblir le Québec; on ne
peut pas laisser aller ce siphonnage de fonds; on ne peut pas laisser aller au
Parti québécois la clef de notre future expansion
économique. On ne peut pas, non plus, laisser sans défense les 6
000 000 d'actionnaires du Québec qui sont les seuls et uniques
propriétaires d'Hydro-Québec.
M. le Président, cela nous prend douze mois de répit pour
empêcher ce gouvernement irresponsable de "dépocher"
systématiquement les Québécois de leur principal outil et
pouvoir de développement. Hydro-Québec ne serait plus au service
de la population, mais bien au service d'un gouvernement péquiste en
faillite qui ne sait plus où piger ses dollars pour survivre.
La mission d'Hydro-Québec ne peut être si sauvagement
interrompue. Ce camouflage sous le couvert du projet de loi no 16 doit
être démasqué et combattu. Ce siphonnage de fonds sous le
couvert d'une politique énergétique décrit bien le genre
de gouvernement que l'on a. Je veux dénoncer formellement cette
politique déloyale et
catastrophique que tente de nous faire avaler le Parti
québécois.
M. le Président, la population du Québec a droit, à
titre d'actionnaire, d'être consultée et de décider de
l'avenir de ses biens, puisque les deux raisons d'être de cette
société d'État sont totalement remises en question par
cette mesure péquiste. Depuis 1962, les Québécois savent
que leur société d'État, qui s'appelle
Hydro-Québec, a pour mission de leur fournir de l'énergie au
meilleur coût possible et aussi de développer au maximum notre
unique source d'énergie renouvelable.
Les Québécois savent aussi que ce siphonnage de fonds fera
diminuer les investissements d'Hydro-Québec, diminuera la construction,
l'équipement et, par conséquent, créera de nouvelles mises
à pied, comme si le Québec pouvait se payer le luxe de supporter
quelques milliers de chômeurs additionnels. C'est cela, le
résultat du geste que veut poser le gouvernement. C'est cela que nous
voulons stopper et c'est pour cela que nous sommes en train de débattre
cette motion de report ce soir, M. le Président.
Pour mieux faire comprendre tout le sens de cette motion, il serait
utile, et même important, de retourner un peu en arrière. Je dois
préciser que la journée du 13 avril 1981, avec le résultat
que l'on connaît, y est pour quelque chose. Depuis le 16 novembre 1976
jusqu'au 13 avril 1981, le gouvernement a plongé le Québec dans
un déficit accumulé d'environ 8 000 000 000 $. Vous comprendrez
pourquoi, maintenant, le gouvernement actuel aura siphonné, dans cinq
ans, au-delà de 3 000 000 000 $ des coffres d'Hydro-Québec. Le
gouvernement, durant cette période, pour des fins électoralistes
et partisanes, a englouti les contribuables du Québec dans la pire
situation financière de toute l'Amérique du Nord. Vous savez que,
jusqu'au 13 avril, il n'y avait rien de trop beau ni de trop cher au
Québec.
Pour se faire réélire, les péquistes ont mis le
paquet. Il ont délibérément endetté et
hypothéqué tous les Québécois, si bien
qu'aujourd'hui la note nous est présentée d'une façon
dissimulée, d'une façon tronquée, masquée et en
catimini, comme seuls les péquistes savent le faire. La note est
douloureuse et néfaste pour tout le Québec: des taxes
cachées, des taxes indirectes, des taxes sournoises, 0,30 $ le gallon
d'essence, appropriation de fonds d'Hydro-Québec, augmentation du prix
des plaques d'immatriculation, augmentation allant jusqu'à 100% des
droits et permis dans plusieurs domaines, et j'en passe
énormément, tout en n'oubliant pas les nombreuses coupures
budgétaires et les restrictions dans le domaine hospitalier, par
exemple.
La grande foire péquiste du soir du 13 avril, on en a des
reliquats qui font mal aujourd'hui. Ils font reculer le Québec dans son
développement, ils font reculer le Québec dans ses services
sociaux, dans son éducation, dans nos services hospitaliers. Notre
motion a sa raison d'être et elle s'inscrit très bien dans le coup
de force du 13 avril, coup de force que les Québécois ne sont pas
à la veille d'oublier.
C'est avec beaucoup de regret que je me devais de faire part à la
population d'un bout de vérité si désagréable pour
tous ceux et celles qui ont cru ou qui ont eu confiance dans toutes les
manigances du Parti québécois. Enfin, j'indique que la motion
actuellement débattue devrait recevoir l'approbation de tous les membres
de cette Assemblée. Ce serait tout au moins un geste de respect envers
une population déjà trop accablée et
énormément appauvrie collectivement. Merci, M. le
Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Joan Dougherty
Mme Dougherty: M. le Président, mesdames et messieurs du
Québec, je voudrais appuyer la motion de report du projet de loi no 16
du député de Gatineau. Tous les Québécois sont
fiers d'Hydro-Québec. Depuis la nationalisation des
sociétés privées d'électricité en 1963, ils
se sentent les vrais actionnaires de cette société d'État
qui est classée la première par ses actifs et par ses profits.
Les Québécois et les Québécoises, en plus
d'être fiers de la réussite financière
d'Hydro-Québec, sont aussi fiers de ses réussites technologiques.
Hydro-Québec nous appartient, c'est à nous. La population du
Québec sait très bien la raison principale qui a motivé la
nationalisation de l'électricité au Québec en 1963.
C'était de fournir aux Québécois
l'hydroélectricité québécoise aux meilleurs
coûts possible. Tout le monde sait que nous avons
bénéficié, jusqu'à ces dernières
années, de tarifs extrêmement bas. Malheureusement, avec le Parti
québécois, le Québec est à perdre l'avantage
économique dont il jouissait depuis des décennies. Or, le
gouvernement péquiste veut changer les règles du jeu. Il veut
siphonner les fonds d'Hydro-Québec pour payer des- déficits et il
veut également mettre cette société en tutelle.
Voilà deux bonnes raisons pour reporter le projet de loi no 16.
Ce projet de loi va couronner les interventions du gouvernement
péquiste. Le projet de loi no 16 vise à retirer à
Hydro-Québec l'obligation de produire l'électricité aux
plus bas coûts possible et lui ajoute celle de payer au gouvernement les
dividendes et une taxe sur le capital, une autre raison pour le reporter. (23 h
50)
En fait, le gouvernement exige d'Hydro-Québec qu'elle hausse ses
tarifs de façon artificielle afin de pouvoir bénéficier
des plus gros dividendes possible. C'est là une mesure régressive
qui affecte les gagne-petit et M. et Mme Tout-le-Monde. C'est vous, messieurs
et mesdames du Québec, qui paierez pour l'incompétence du
gouvernement.
Ce n'est pas la faute d'Ottawa si on a le projet de loi no 16. Ce n'est
pas la faute des provinces anglophones. C'est la faute du gouvernement du
Québec, un gouvernement incompétent et malhonnête qui n'a
pas le courage d'admettre franchement qu'il est près de la faillite.
C'est clair, le gouvernement n'a pas d'argent parce qu'il n'a pas su planifier
ses besoins financiers et cherche à tout prix à s'approprier la
poule aux oeufs d'or, Hydro-Québec.
Ladies and gentlemen, bill no 16 is an irresponsible short-term cover-up
which is courting a long-term disaster for the economy of Québec. The
government does not...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée, je ne voulais pas vous interrompre, mais je voudrais
demander qu'on vous permette d'intervenir. J'entendais des bruits. Mme la
députée.
Une voix: La pouponnière en arrière.
Mme Dougherty: Bill 16, I believe, is an irresponsible short-term
cover-up which is courting long-term disaster for the economy of Québec.
The Government has not got the guts to tell the people the truth that the
Government is close to bankrupcy. The Government needs more money to help fill
the 500 000 000 $ hole discovered last year in education, to pay for the
exorbitant commitments made in the collective agreements signed, by the
Government's own admission, without knowing the real cost of those agreements,
to pay for all the unnecessary repairs in this National Assembly. While
children go short on text books and musical instruments in our schools and
handicapped children have inadequate services, we are fancying up the National
Assembly. The Government needs money to pay for the scandalous deficits
incurred by the mismanaged "fête nationale" celebrations.
The Parti québécois, Ladies and Gentlemen, does not even
know how to run a parade and now they want to take over Hydro-Québec.
They want to take over Hydro-Québec, the most successful enterprise in
the province of Québec, the pride of all Quebeckers, and it is going to
be used as a funnel for funds to pay off the Government's deficit, to help hide
the financial incompetence of the Parti québécois.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la
députée, je m'excuse encore une fois, s'il vous plaît! Les
caucus, à l'extérieur. M. le député.
Une voix: Manque de respect.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je vous ai demandé, je m'excuse, je ne veux pas
vous nommer, mais ici, en avant, j'entends autre chose que le discours. Mme la
députée, s'il vous plaît!
Mme Dougherty: The Government intends to use Hydro-Québec
as a funnel for funds to pay off the Government's deficit, to hide their own
incompetence, to fill the 3 000 000 000 $, 4 000 000 000 $ growing up dollar
hole in our budget which is getting bigger every day.
Ladies and Gentlemen, it is your Hydro bills that are going to stuff
that hole. But, even worse, what is going to happen to Hydro-Québec?
What will be the impact on Hydro-Québec? Does the Government not
understand that the principal reason that Hydro-Québec has been so
successful is because it has been operated without Government interference?
Bill 16 would destroy the very thing which has allowed Hydro-Québec to
flourish, to create jobs for Quebeckers and to be the motor of the economy of
Québec. Cannot the Government see that exorbitant cost of electricity
will discourage the use of electricity and to tend favor other power sources
such as those which can be bought from outside Québec? Is this the
energy policy of Québec? Who knows? We do not have an energy policy in
Québec and that is why we have got to put off this motion until we have
an energy policy for Québec.
Ladies and Gentlemen, tonight, I have the black eye, but if we let Bill
16 go through, it is going to be René Lévesque that has the black
eye for a long, long time.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Orford.
M. Georges Vaillancourt
M. Vaillancourt (Orford): Je m'en voudrais de ne pas dire
quelques mots sur la motion de report de douze mois du député de
Gatineau.
M. le Président, si nous demandons au gouvernement de prendre
quelques mois de plus, c'est pour lui permettre de réviser sa
décison de transformer Hydro-Québec qui est une compagnie
privée de la couronne, compagnie qui a été
créée par le gouvernement dans le but de fournir à la
population du Québec un approvisionnement en électricité
de bonne qualité et à bon marché. M. le Président,
je me souviens, en
1962, lorsque le premier ministre actuel, l'honorable René
Lévesque, était le promoteur, le leader qui avait obligé,
qui avait forcé le gouvernement à faire une élection pour
demander à la population du Québec le mandat d'exproprier les
compagnies privées afin de donner à la population du
Québec une électricité de qualité sur tout le
territoire du Québec. La population a trouvé que le mandat qui
lui était demandé était raisonnable. À ce
moment-là, je me souviens que l'honorable premier ministre René
Lévesque, alors ministre des Richesses naturelles, avait fait le tour du
Québec, et nous l'avions aidé à faire le tour du
Québec. Je possède encore dans mes dossiers un film d'une
durée d'environ une demi-heure, trois quarts d'heure. Le ministre
d'alors vantait et demandait à la population de voter fortement pour le
Parti libéral afin de fournir à la population de
l'électricité à bon marché.
Aujourd'hui, je me demande pourquoi le premier ministre, avec son
gouvernement, veut transformer, avec le projet de loi no 16,
Hydro-Québec qui est actuellement une compagnie de la couronne. Il veut
en faire une compagnie publique avec un fonds social de 5 000 000 000 $
divisé en 50 000 000 d'actions d'une valeur nominale de 100 $ chacune.
(Minuit)
M. le Président, je me demande où le gouvernement prend
son mandat pour faire ces changements. J'admets qu'il peut le faire comme
gouvernement, mais ce n'est pas le mandat que la population du Québec
lui a donné le 13 avril dernier.
M. le Président, pour que le gouvernement fasse de tels
changements, il doit certainement être pris de panique avec son
administration et ses déficits accumulés exorbitants de plusieurs
milliards depuis 1976, qui sont de l'ordre de 12 000 000 000 $ à 15 000
000 000 $ d'endettement.
Le ministre des Finances, avec l'imagination qu'on lui connaît, a
certainement été cette fois-ci le promoteur de ce projet de loi
afin de renflouer son budget déficitaire par une taxe camouflée
sur les comptes d'électricité. Cette taxe va aller chercher des
fonds dans les poches de tous les Québécois et
Québécoises, riches comme pauvres, comme on l'a fait avec les
plaques d'immatriculation, avec l'augmentation de 0,30 $ sur le prix de
l'essence, celle sur les primes d'assurance automobile, et la taxe sur le
financement de la santé, qui a été doublée lors du
dernier budget.
M. le Président, si nous demandons de reporter à 12 mois
l'étude en deuxième lecture, c'est que nous croyons que le
gouvernement n'a pas réalisé toutes les implications de la
portée de ce projet de loi, vu l'impossibilité de payer des
assistés sociaux, des personnes âgées, des petits
salariés qui travaillent au salaire minimum, leur impossibilité
d'arriver à payer de telles augmentations de taxe sur leur compte
d'électricité en plus des autres que j'ai
énumérés plus haut.
Comment pensez-vous, M. le Président, qu'un père de
famille qui a une famille de trois, quatre, cinq enfants ou plus, qui travaille
au salaire minimum ou un père de famille qui est sans travail et qui vit
de l'aide sociale va arriver? Nous comprenons qu'avec un taux de chômage
d'environ 11%, il y a certainement plusieurs pères de famille qui vivent
avec un revenu d'aide sociale, c'est-à-dire avec un revenu en bas du
seuil de la pauvreté. Tous ces pères et mères de famille,
M. le Président, sont obligés de se servir de
l'électricité pour s'éclairer et se chauffer. M. le
Président, si nous demandons au ministre de l'Énergie aujourd'hui
de reporter à douze mois avant de faire adopter ce projet de loi, c'est
pour toutes ces raisons. M. le Président, que vont-ils payer, ces
assistés sociaux, ces pères et mères de famille, de plus
que ce qu'ils paient actuellement en 1981? Que vont-ils payer, à partir
du 1er janvier 1982, avec cette augmentation de 16,3% pour diverses
consommations calculées pour une période de 60 jours? Ici, j'ai
un tableau qui indique qu'à partir du 1er janvier 1982, un compte
d'électricité pour 1000 kilowatts coûte actuellement 36 $,
et va augmenter à 40,80 $. Un compte de 1500 kilowatts qui coûte
en 1981 48 $, va augmenter à 54,30 $, plus la taxe de vente. Pour un
consommateur de 3000 kilowatts, c'est 88 $ en 1981, ce sera 102,84 $ en 1982 et
cela augmente continuellement ainsi.
M. le Président, je pense que la motion du député
de Gatineau est sérieuse et le gouvernement doit réellement
réviser son tir sur ce projet de loi et essayer de comprendre toutes les
personnes qui vont avoir à payer ces augmentations mais qui n'en ont
certainement pas les moyens. Pour toutes ces raisons, M. le Président,
je voterai pour la motion de report du député de Gatineau.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Laprairie.
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: M. le Président, je voudrais ajouter ma voix
à celle de mon collègue de Gatineau qui a proposé la
motion de report du projet de loi no 16, ainsi qu'à celle de mes
nombreux autres collègues qui sont intervenus sur le sujet, avant cette
heure tardive, puisqu'il est déjà plus de minuit, pour tenter de
stopper la marche de
ce projet de loi qui amène les Québécois à
la noirceur, camouflage de la mauvaise administration du gouvernement
québécois.
Le motif à l'appui du rejet de ce projet de loi no 16 est simple
et évident: ce projet de loi est prématuré. D'abord,
l'adoption d'un tel projet de loi constitue un manque de respect flagrant pour
l'ensemble des citoyens du Québec. En effet, tous les
Québécois sont fiers d'Hydro-Québec. Depuis la
nationalisation des compagnies d'électricité, il y a presque
vingt ans, les Québécois se sentent les vrais actionnaires, les
seuls et uniques propriétaires de cette richesse naturelle que constitue
l'électricité. Lorsqu'il fut temps pour le gouvernement
libéral, en 1962, de prendre une décision sur la question de la
nationalisation de l'électricité, de prendre une décision
pour savoir si tous les Québécois deviendraient les
propriétaires et les actionnaires de l'une des principales clés
de l'expansion économique de la province, à savoir
l'électricité, comme le disait le premier ministre Jean Lesage,
le gouvernement a choisi de faire une élection, de consulter la
population. La réponse de la population québécoise fut non
équivoque.
Présentement, dans le cadre de la présentation du projet
de loi no 16, le gouvernement tient-il compte des propriétaires et
actionnaires de cette société d'État? La réponse
est non. Que veut faire le gouvernement péquiste avec le projet de loi
no 16? Il veut siphonner les fonds d'Hydro-Québec pour payer ses
déficits et mettre cette société d'Etat en tutelle Le
projet de loi no 16 trahit, dans son fondement même, le mandat
accordé au gouvernement en 1962. Les termes et le cadre de ce mandat
étaient définis comme suit: "Fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux
citoyens aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration
financière." Ce sont les termes mêmes du ministre des Richesses
naturelles de l'époque, M. René Lévesque.
Cette définition de la vocation d'Hydro-Québec se retrouve
à l'article 22 de sa loi constitutive et est techniquement maintenue
dans le projet de loi actuel. Si on regarde de plus près le principe
même de cette vocation réelle d'Hydro-Québec, soit de
fournir l'électricité aux taux les plus bas compatibles avec une
saine administration financière, nous devons nous rendre compte que le
projet de loi no 16 vient bafouer ce principe de la vocation même
d'Hydro-Québec tel que les électeurs l'ont approuvé en
1962.
En effet, avec le projet de loi no 16, les fonds prévus au
maintien, à la qualité et au développement du
réseau sont maintenant fondus avec la redevance gouvernementale
qu'Hydro-Québec devra assumer, ce qui les rend supérieurs
à ce qu'ils sont en termes réels. Le prix de fourniture de
l'électricité est-il honnête et juste? Non, car les prix
aux usagers ne seront qu'en partie le reflet de ce qu'ils reçoivent, le
reste étant l'obligation de payer au gouvernement des dividendes et une
taxe sur le capital en raison des besoins pressants du gouvernement actuel, qui
ont pour cause la mauvaise administration financière du gouvernement
péquiste. Les citoyens n'ont pas permis et n'ont jamais sonqé, en
1962, que l'on puisse modifier la vocation première
d'Hydro-Québec, soit fournir l'électricité au taux les
plus bas compatibles avec une saine administration financière, à
des fins de camouflage, de mauvaise administration. (0 h 10)
Si, en 1962, le gouvernement libéral de l'époque a
consulté, a senti l'obligation d'aller consulter la population, on ne
peut que s'attendre que le présent gouvernement, presgue vingt ans plus
tard, répète le même exercice. Aussi, l'Opposition a
insisté pour qu'un débat public sur l'avenir
énergétique du Québec soit tenu. L'Opposition
n'était pas seule à souhaiter un tel débat. Un grand
nombre d'organismes, de groupes écoloqiques, de syndicats le
réclamaient avec insistance. L'ex-ministre de l'Énergie et des
Ressources semblait d'accord en mars 1981, comme on l'a cité
précédemment. Le ministre actuel avait laissé l'ouverture
possible en juin dernier, mais si cette ouverture, si minime soit-elle, avait
existé, l'actuel ministre n'aurait certes pas parrainé le projet
de loi no 16 qui vient modifier le paramètre majeur de toute la question
énergétique du Québec, car, sous cette loi qui est devant
nous, se cache, sous le titre de redevances, un impôt à la sauce
péquiste, un impôt indirect, sournois, régressif. C'est
Hydro-Québec qui jouera le rôle de percepteur. On vient donc
amputer la véritable vocation d'Hydro-Québec, car si
Hydro-Québec est devenue ce qu'elle est aujourd'hui, c'est qu'elle
possédait vraiment cette capacité d'administrer sainement ses
affaires au seul et unique profit des Québécois. Si on transforme
Hydro-Québec, qui est le principal outil de développement
énergétique au Québec, pour qu'elle devienne à la
solde d'un gouvernement, aux seules fins de camouflage de mauvaise
administration en percevant des impôts indirects, comment alors mener un
débat public sain et efficace?
En définitive, le projet de loi no 16 est précipité
parce qu'il n'a pas été soumis à l'attention des
intéressés et qu'en plus il devance une consultation que la
conjoncture actuelle nous obliqe à tenir le plus tôt possible.
C'est pourquoi j'appuie sans réserve la motion de report de mon
confrère, le député de Gatineau, et souhaite ardemment que
toute cette Chambre en fasse autant afin de permettre à toute la
population de se prononcer publiquement sur le sujet.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Vaudreuil-Soulanges. M. Daniel
Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président,
après avoir reproché à d'autres Canadiens de s'être
servis de la nuit pour jouer des mauvais tours aux Québécois, on
voit maintenant le gouvernement du Québec qui, en pleine nuit, est en
train d'essayer de faire adopter un projet de loi, le projet de loi no 16.
C'est en pleine nuit qu'à ce moment-ci nous débattons de
l'opportunité d'examiner tout de suite ce projet de loi ou, comme nous
le suggérons, d'en reporter l'étude à douze mois, parce
que, des deux côtés de la Chambre, nous avons souscrit depuis
longtemps à un principe très clair, très simple qui est
d'ouvrir un large débat public sur toute la question
énergétique afin que les Québécois puissent
être consultés, afin que les Québécois puissent
s'exprimer. Je n'en ai comme exemple frappant que le Parti
québécois lui-même qui, dans son programme, édition
1980, souhaitait "fournir à la population une information objective sur
le contenu scientifique et les conséquences des choix
énergétiques sur le plan humain, et mettre sur pied des
mécanismes de consultation permettant aux différentes couches de
la population de s'exprimer et de discuter abondamment des différents
aspects de la politique énergétique afin de prendre
position."
Ce n'est qu'au hasard de différents discours sur le budget, sur
des mesures budgétaires, sur les lois sur le revenu, sur les lois
fiscales et, tout à fait subsidiairement et incidemment, à
l'occasion de débats que le ministre de l'Énergie lui-même
pouvait mener que nous avons été appelés à discuter
de la politique énergétique du Québec. C'est un non-sens.
Ce serait un non-sens, d'autant plus que ce voeu que le parti
ministériel exprimait en 1980 s'est retrouvé encore une fois
durant la campagne électorale d'avril dernier, alors que, dans son
programme d'engagements, si je comprends bien, et d'actions prioritaires du
gouvernement du Parti québécois, on retrouvait comme engagement:
"procurer l'énergie nécessaire au développement du
Québec et, ce faisant, stimuler la croissance économique tout en
respectant l'environnement et en impliquant les citoyens dans les choix."
Aucune occasion n'a été véritablement donnée,
depuis le 13 avril dernier, aux citoyens du Québec d'examiner les choix
énergétiques qui se posent dans notre société.
Il est plus que temps que ce débat s'engage non seulement pour
déterminer les choix énergétiques qui s'imposent, mais
également afin de bien démêler - dans l'esprit du
gouvernement tout au moins, c'est la preuve qu'on en a depuis quelques jours -
s'il s'agit d'une mesure, amendant la loi qui régit Hydro-Québec,
qui se rapproche des politiques énergétiques ou des politiques
fiscales. Il faudrait exactement savoir si c'est une politique
énergétique de même nature que l'augmentation de
l'impôt sur l'essence ou s'il s'agit d'une mesure fiscale
véritablement présentée à l'occasion du discours
sur le budget, en mars, comme d'habitude, et exceptionnellement en novembre,
comme on en a été témoin il y a deux semaines.
Le gouvernement du Québec doit faire preuve de cohérence,
en matière énergétique. Et pour faire preuve de
cohérence, il doit posséder toutes les informations
nécessaires afin d'en arriver à une décision
éclairée. Il faut examiner quelles seront les sources
alternatives d'énergie, quelles seront les énergies nouvelles,
quelle préférence ou avantage est donné à
l'utilisation de certaines formes d'énergie plutôt qu'à
d'autres. C'est au niveau du débat énergétique qu'on
pourrait régler ces problèmes.
Au niveau des nécessités financières, des besoins
financiers de l'État, encore une fois il faudrait de la
cohérence. Il faut démêler ces problèmes. Est-ce
qu'il s'agit d'un effort pour rendre encore plus confuse la façon dont
le gouvernement décide de financer ses dépenses? Est-ce qu'il
s'agit ici, encore une fois, d'une addition à la complexité
grandissante des sources de revenu du gouvernement du Québec depuis cinq
ans, complexité qui ne tient qu'à une seule chose: le
désir pour le gouvernement de cacher et de déguiser
véritablement, aux yeux de la population, les sources de revenu qu'il va
chercher dans les poches des contribuables? Il y a non seulement des
impôts directs, il y a également des impôts indirects.
Déjà, M. le Président, il y avait tout un
débat à faire sur ces deux formes d'imposition, mais la
finance-fiction n'ayant pas de limite, de l'autre côté de la
Chambre, on est maintenant devant des concepts comme des redevances, des
dividendes sur nos sociétés d'État, des dividendes sur les
profits d'une compagnie de production d'électricité, la
société Hydro-Québec.
Il est plus que temps de faire la lumière, dans ce dernier cas,
sur cette portion des tarifs d'Hydro-Québec qui sont les
résultantes du fardeau fiscal imposé à Hydro par le
gouvernement depuis quelques années, les composantes de ces
dépenses qui tiennent aux différents impôts qu'Hydro doit
payer aux municipalités en "en lieu" de taxes ou autrement, sa
participation aux programmes de santé et toutes les autres charges,
comme la taxe sur le capital qui lui est imposé maintenant et qui, de
zéro, passe à 140 000 000 $, dans le temps de le dire
d'un discours sur le budget.
Il est temps de démêler à travers tout cela quels
sont véritablement les besoins d'Hydro-Québec comme
société productrice d'électricité pour les
Québécois, quels sont ses besoins et jusqu'à quel point
elle doit ajuster ses tarifs afin de faire face à ses dépenses
et, finalement, à l'intérieur de ce débat, sur les aspects
purement financiers de cette mesure, quels sont les besoins du gouvernement,
comment la population pourra juger, quel est le débat public qui est
intervenu, afin que nous puissions voir vraiment quels sont les besoins du
gouvernement qui causent des hausses de tarifs, comment cette augmentation, qui
a été approuvée récemment ou qui le sera, peut
véritablement être divisée, à quelle portion on doit
attribuer les besoins d'Hydro-Québec, à quelle portion on doit
voir quelle est la résultante du fardeau fiscal qu'Hydro-Québec
doit supporter et, finalement, quelles sont les véritables besoins du
gouvernement. (0 h 20)
Mais il faut encore plus avoir le temps de faire la lumière sur
la véritable nature, la nature même d'Hydro-Québec. Est-ce
une émanation de l'État au même titre que
Loto-Québec? Est-ce que c'est le gouvernement qui véritablement
est propriétaire, gérant et gestionnaire de cette
société dans la mesure où il s'en sert simplement pour
percevoir des impôts? Est-ce qu'on va, comme on achète un billet
de Loto, payer une facture d'Hydro-Québec, simplement pour donner des
revenus au gouvernement du Québec? Est-ce que cette
société, Hydro-Québec, doit être autonome dans ses
modes de fonctionnement? Est-ce qu'on doit accepter, comme on semble le
suggérer du côté du gouvernement, que ce dernier aille se
mêler, s'ingère purement et simplement dans les stratégies
à long terme, dans les plans de développement financier
d'Hydro-Québec? Est-ce que on peut vraiment savoir à quoi sert
Hydro-Québec? Est-ce qu'on doit en croire les différents
intervenants qui nous ont tenu des propos forts variés du
côté du gouvernement depuis quelques heures?
Un député, l'autre côté, aurait admis qu'il
s'agissait de lever des impôts, d'où la loi no 16. Grand bien lui
fasse, et je suis sûr que le ministre de l'Énergie en est
parfaitement heureux. Il avait l'air par ailleurs surpris.
Est-ce qu'on doit utiliser Hydro-Québec pour payer des dividendes
pour protéger la cote de crédit du gouvernement et
d'Hydro-Québec? Un autre intervenant a fait valoir ce point de vue.
Est-ce qu'on doit utiliser les augmentations de tarifs pour changer toute notre
société, comme certains autres députés l'ont fait
valoir, afin d'amener des choix, de forcer les citoyens à faire des
choix particuliers dans leur mode de fonctionnement? De la même
façon que le prix de l'essence étant trop cher, on ne pourra
même plus se promener en taxi électrique. Est-ce exactement
là où sont les choix?
Il faut le savoir, M. le Président, et, pour le savoir, il faut
reporter à au moins 12 mois - c'est le maximum prévu par le
règlement - l'étude de ce projet de loi afin que les
Québécois aient la chance, une fois pour toutes, au moins tous
les 20 ans ce n'est pas trop demander, de décider quels sont les
objectifs de la politique énerqétique et de la politique fiscale
du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Chapleau
M. John J. Kehoe
M. Kehoe: Merci, M. le Président, il est
déjà minuit et demi, ça fait au-delà de quatre
heures et demie que les brillants orateurs de l'Opposition font valoir des
arguments afin de convaincre les têtes dures de nos amis d'en face de
comprendre le règlement et la résolution que nous avons devant
nous maintenant. Permettez-moi, comme Irlandais, d'apporter non pas de nouveaux
arguments, mais une approche différente pour les faire comprendre une
fois pour toutes la nécessité de reporter à 12 mois la
résolution que nous avons sur la table cette nuit.
Permettez-moi de commencer par un argument historique.
L'électricité a toujours été une affaire d'une
forte importance pour la province de Québec, pour l'économie,
pour la mythologie de notre province. Nous avons eu des slogans, nous avons eu
des chansons, nous avons eu des livres, concernant l'électricité
de la province de Québec. C'a toujours été une affaire
d'importance capitale pour les Québécois.
Il faut remonter à 1962, lorsque le Parti libéral a
commencé à porter un intérêt particulier au
problème de l'électricité dans la province de
Québec, pour comprendre son importance. C'est donc durant cette
période, je me souviens très bien, que l'on lançait les
slogans. C'était le beau temps de la province de Québec.
C'était le temps de devenir maître chez nous. C'était le
temps de cesser d'être des porteurs d'eau et de devenir
propriétaires de nos établissements. C'était le temps de
commencer vraiment à être propriétaires de nos
institutions. Dans ce temps-là, nous avons entendu dire que, dans
l'économie moderne, l'électricité est à l'origine
de tout le développement industriel, que la nationalisation de
l'électricité, étape indispensable d'une politique
vraiment nationale, aurait des avantages directs et indirects pour tous les
citoyens.
Or, je prétends ceci. Le gouvernement de ce temps a cru bon de
demander à la population un mandat pour transformer
Hydro-Québec en une société de la couronne,
indépendante du gouvernement et dont les profits reviendraient au
Québec. Maintenant, si on change le statut de cette
société, il serait beaucoup plus important qu'on retourne
à la population pour demander ce qu'elle pense par le biais d'un
plébiscite ou d'un référendum. En 1962, la population a
donné le mandat au gouvernement de lui fournir de
l'électricité au meilleur coût possible. Est-ce que le
gouvernement actuel tient compte de ce mandat donné par quelque 6 000
000 de Québécois qui sont maintenant des propriétaires et
des actionnaires?
Si le gouvernement demandait à la population actuelle s'il
devrait hausser le tarif domestique de 16,7%, quelle serait la réponse?
Non, certainement non. En ce temps-là, Hydro-Québec était
au service de la population. Maintenant, Hydro-Québec est au service du
Parti québécois.
Le projet de loi de loi 16 - on emploie souvent ce mot - trahit le
mandat accordé par la population en 1962. Or, que veut faire la loi 16?
Premièrement, elle veut changer le statut de cette société
en la transformant en une société à capital. À ce
sujet, je dis tout simplement que le gouvernement n'a pas le mandat d'agir
ainsi. Deuxièmement, il veut siphonner les fonds de la nouvelle
société à capital-actions pour payer ses déficits
et cela, par une taxe déguisée, indirecte et régressive
qui frappe les riches et les pauvres de la même manière.
Durant les deux discours inauguraux, M. Lévesque a parlé
de l'honnêteté et de la transparence de son gouvernement. À
la veille du scrutin du mois d'avril dernier, le gouvernement a promis que le
tarif de l'électricité n'augmenterait pas plus vite que
l'inflation. Huit mois plus tard, après les élections
naturellement, il annonce une augmentation de 3% à 4% plus
élevée que la hausse du coût de la vie, une augmentation de
16,7% du tarif domestique. Le gouvernement ne donne pas l'exemple de la
modération et de la frugalité qu'il attend de nous. Coupez dans
le gras et nous frapperons dans le tas!
Troisièmement, c'est bien évident qu'il veut, en quelque
sorte, mettre cette société en tutelle. On peut se demander
d'ailleurs si la mise en tutelle d'Hydro-Québec n'a pas vraiment
commencé en 1976 lors de la prise du pouvoir du Parti
québécois. Depuis cette date, le gouvernement a pris une
série de mesures, que d'autres de mes collègues ont
mentionnées tantôt et qu'on n'a pas le temps de
répéter, qui, quand on les ajoute les unes aux autres, atteignent
exactement cet objectif. Le projet de loi no 16 vient couronner les
différentes interventions faites par le gouvernement pour assurer le
contrôle d'Hydro-Québec. (0 h 30)
Permettez-moi, en terminant, M. le Président, de citer un article
qui a paru dans le Soleil le 23 octobre dernier: Le gouvernement est
affamé, Hydro-Québec est riche, c'est une vraie poule aux oeufs
d'or. Le premier pige allègrement dans la seconde pour éponger
ses besoins présents, mais l'entreprise devra emprunter encore plus au
taux courant, et quels sont ceux qui paieront la note, pensez-vous? C'est un
tour de passe-passe. C'est le contribuable consommateur qui blâmera
Hydro-Québec - pas lui-même -qui blâmera Hydro-Québec
et pas le gouvernement, tandis que le gouvernement s'en tire avec les honneurs
de la guerre et des dividendes astronomiques.
C'est évident que j'approuve, pour toutes ces raisons, la motion
de reporter, pour une période de douze ans, pour donner... Ce serait
encore mieux douze ans, mais je pense que douze mois suffiront pour que le
gouvernement comprenne le bon sens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Saint-Henri.
M. Roma Hains
M. Hains: L'heure avance, M. le Président, mais le courant
n'est pas encore coupé. De plus en plus, le qouvernement actuel poursuit
son infiltration dans tous les domaines, et ce fut une clé de
succès pour lui durant les campagnes électorales, mais, dans le
domaine financier, elle dégénère vite en un instrument de
trouble et de perturbation sociale.
Cette infiltration financière sous forme d'impôt s'exerce
avec une puissance de succion qui menace dangereusement toute l'économie
familiale de chaque foyer, et en même temps l'économie de la
province. Comme dans la fable de La Fontaine: Tous n'en mourront pas, mais tout
le monde en est profondément touché.
Après la taxe sur les chambres d'hôpitaux, sur
l'immatriculation et l'assurance automobile, sur l'essence aux stations de
service, voilà qu'on discute aujourd'hui sur la loi no 16 qui viole la
vraie vocation d'Hydro-Québec, comportant une nouvelle taxe de plus de
16%.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Hains: Comme un bon professeur, je pense que je vais baisser
la voix.
Oui, ce nouveau projet de loi viole l'objectif initial
d'Hydro-Québec qui avait pour objet de fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises et aux citoyens du Québec aux
coûts les plus bas compatibles avec une saine administration
financière.
Ce fut par une élection, en 1962, que le premier ministre
d'alors, M. Jean Lesage,
consultait les Québécois sur la nationalisation de
l'électricité. Il reçut l'approbation des électeurs
et les Québécois et les Québécoises devinrent
subséquemment les propriétaires et les actionnaires de leur vaste
entreprise énergétique.
Aujourd'hui, plus de 6 000 000 d'habitants et de citoyens se voient
imposer une nouvelle loi sans aucune consultation. C'est faire montre d'un
sans-gêne flagrant que d'imposer à ces mêmes citoyens et
citoyennes un changement de statut et des hausses de tarifs qui se
perpétueront au moins pendant cinq ans, selon un plan quinquennal
déjà bien établi.
On nous présente un projet de loi tout teinté de riches
principes humanitaires, mais d'une transparence plus que douteuse. Le projet de
loi ne respecte vraiment pas la vocation première d'Hydro-Québec,
soit de fournir l'électricité aux taux les plus bas possible. Les
profits prévus pour le développement de l'entreprise tomberont
dorénavant dans la caisse gouvernementale et les prix aux usagers
dépasseront les services fournis. Le surplus sera versé encore
pour combler des déficits budgétaires qui ne cessent de
surprendre et de s'aggraver.
Tout se fait dans l'ombre, M. le Président, à I'insu du
grand public. C'est pourquoi l'Opposition libérale tient à
exprimer avec véhémence son opposition à un tel projet de
loi. L'ex-ministre Joron avait pourtant insisté dans son livre blanc sur
la nécessité d'une participation de tous les citoyens dans ce
débat et le ministre Bérubé lui-même avait
donné aussi son appui inconditionnel à un vaste débat
public sur l'énergie au Québec. Soudain, c'est comme s'il y avait
eu une panne d'électricité, on est tombé dans la noirceur,
on a préparé un projet de loi, on a saboté sans vergogne
le statut et les fonds d'Hydro-Québec, d'où est sorti le projet
de loi no 16 pour renflouer le trésor public qui coule à pic dans
une désastreuse aventure financière.
Nous sommes, M. le Président, dans un vrai carrousel et cela
tourne tellement vite qu'on y perd la tête et son gousset. Durant cette
période pénible que nous traversons, le gouvernement, au lieu de
laisser respirer les citoyens et de les laisser vivre difficilement leur vie
actuelle, au lieu d'encourager le développement économique par
des tarifs raisonnables, ce gouvernement, dis-je, s'acharne à vouloir
tarifier l'électricité sur la même base que le
pétrole et le gaz naturel. Il en résultera, évidemment,
des surplus considérables pour Hydro-Québec mais, au lieu de
faire fructifier ces surplus au profit de notre société
Hydro-Québec, on siphonnera ces fonds supplémentaires pour la
caisse ministérielle. D'où la nécessité de revoir
ce fameux projet de loi.
Le gouvernement, M. le Président, joue la comédie en
s'affichant de la social- démocratie qui respecte et aide le simple
citoyen mais qui, en réalité, le matraque sans gêne et sans
remords par des taxes régressives qui le frappent tout autant que les
mieux nantis. Ce n'est qu'une parodie que de lui dire par en avant qu'on ne lui
impose aucun nouvel impôt et de lui vider les poches par en
arrière avec des taxes de plus en plus coûteuses. C'est ce que me
disait dernièrement un ami qui avait le sens de l'humour. Il disait
ceci: Les PQ sont vraiment hypocrites, ils nous passent la main dans le dos par
en avant et nous crachent dans la face par en arrière.
Des voix: Ah! Ah! C'est en plein cela.
M. Hains: C'est mon ami qui m'a dit cela. Oui, c'est vraiment le
triste jeu de ce gouvernement qui s'ingénie à trouver des
nouvelles sources déguisées de recettes, tout en laissant croire
à des réductions d'impôt, mais le public n'est pas aussi
crédule et dupe que le présent gouvernement ose le croire et la
colère gronde vraiment dans notre peuple, actuellement. Aurait-on
vraiment pu s'imaginer que dans une même année financière
on écoperait d'une taxe doublée sur le carburant, la portant de
20% à 40%, et que d'un même souffle on augmenterait la facture
d'électricité de 16%, sans mentionner toutes les autres taxes
subsidiaires? Malgré tout, ce gouvernement ne cesse de patauger dans des
déficits sans précédent de 3 000 000 000 $ par
année. Oui, le public réagit déjà violemment et le
gouvernement va peut-être l'apprendre drôlement par la voix de ses
membres qui se réuniront en fin de semaine prochaine. Espérons
qu'ils ne parleront pas uniquement de leur moyen d'accéder à
l'indépendance, mais qu'ils trouveront un peu de temps pour parler des
moyens d'accéder à une saine économie et d'alléger
le fardeau des taxes et des impôts déguisés qui
écrasent radicalement nos citoyens et citoyennes du Québec. Nous
demandons donc au gouvernement de surseoir à son adoption afin
d'examiner davantage toutes les implications. Je vous remercie. (0 h 40)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Vous me permettrez
d'identifier mon macaron, puisqu'on me demande ce que c'est. Il s'agit de la
photo de l'hôpital de Saint-Georges-de-Beauce, avec l'inscription: "On le
garde, c'est un tout." Autrement dit, les Beaucerons veulent garder leur butin,
comme les Québécois veulent garder leur butin et ne veulent pas
se faire voler leur Hydro-Québec.
M. le Président, je veux d'abord
féliciter mon collègue, le brillant député
de Gatineau, qui a si spontanément eu la clairvoyance de
présenter cette motion de report. Avec toute son expérience
politigue, le député s'est bien aperçu que cette loi
était inacceptable, qu'elle était dangereuse, hypocrite,
camouflée, à l'image du PQ. On se souvient de vos slogans,
messieurs: Faut rester forts! Faut pas se faire avoir. Est-ce que c'est ce que
vous êtes en train de faire à la population? Faut rester
forts!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député, je ne voulais pas vous interrompre, mais il y a une
question...
M. Laplante: C'est parce que les portes sont toutes grandes
ouvertes, est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité de les fermer pour le
prendre vivant?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Nous avons donc, nous
de l'Opposition le devoir de protéger les Québécois contre
cet envahissement qu'on veut faire aujourd'hui, protéger les
gagne-petit, protéger nos agriculteurs, protéger nos promoteurs
de petite et moyenne entreprise. J'invite les citoyens à se
réveiller, pour bien comprendre. Je vous fais remarquer, malgré
qu'il soit presgue une heure...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Je
m'excuse. Vous savez, M. le député, à moins qu'ils aient
leur téléviseur ouvert, ils peuvent difficilement se
réveiller. M. le député, s'il vous plaît, en
espérant qu'on puisse lui permettre de continuer son intervention.
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je vois que vous avez
de l'enthousiasme, vous ne perdez rien pour attendre. Oui, je voudrais inviter
les citoyens à prendre conscience de la pilule qu'on est en train de
leur faire avaler, avec cette taxe déguisée, hypocrite.
Savez-vous que les tarifs d'Hydro-Québec augmenteront, de 1979 à
1982, de 97%? Pourquoi? Pour faire le jeu des objectifs du Parti
québécois. Nous savons que le Parti québécois a des
objectifs politiques. Ce qu'il veut faire, c'est l'indépendance du
Québec, ce n'est pas autre chose, tandis que nous, de l'Opposition
libérale, nous avons des objectifs économiques. L'histoire est
là pour le prouver. La mission que le Parti libéral du
Québec a remplie depuis le début de la
Confédération est là pour en témoigner. Le PQ veut
s'emparer d'Hydro-Québec pour la siphonner à ses fins
politiques.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Mathieu: J'ai le regret de dire à ces messieurs qu'ils
ne savent pas administrer. Pendant les quatre premières années de
pouvoir, ils ont dépensé 10 000 000 000 $ de plus qu'ils n'en ont
encaissés. Pourquoi? Pour faire plaisir aux gens, pour passer le
référendum? On ne savait jamais quand le fameux
référendum était pour arriver. Il fallait des beaux
budgets, il fallait faire plaisir aux gens. Conséquence de cela, une
administration tout à fait inacceptable.
M. le Président, quelles seraient maintenant les
conséquences de ce projet de loi no 16 qui est à l'étude
devant nous? Pour la classe agricole, quelles en seraient les
conséquences? D'abord, vous savez que la fiscalité
présentement est très traîtresse, devrais-je dire, pour les
agriculteurs. On leur dit: Oui, produisez. Ensuite, on s'organise pour que, sur
le plan fiscal, l'agriculteur doive incorporer sa ferme, faire un transfert, et
là, on l'attend à la croisée des chemins, on l'attend avec
la taxe sur le gain de capital, avec l'impôt sur le roulant, sur les
guotas, sur les animaux. Maintenant, avec cette hausse
d'électricité...
Je vais vous lire une lettre en date du 5 novembre 1981, qui provient du
cabinet du ministre de l'Énergie et des Ressources, signé Pierre
Ypperciel. Je laisse tomber le nom de la ferme en question. "M. le
député, la présente donne suite à votre lettre du
15 septembre 1981, concernant la plainte de votre citoyen. Comme il a
été expliqué lors de la visite du vérificateur
d'Hydro-Québec, le tarif D-l dont elle bénéficie ne
s'applique plus à son entreprise parce qu'elle ne répond plus aux
critères qui en justifient l'application, à savoir que cette
ferme est incorporée et qu'en conséquence, elle est
considérée comme une personne morale, et cela en correspondance
avec les articles 2.7 c) et d) du règlement tarifaire
d'Hydro-Québec. Espérant ces informations pertinentes, je vous
prie d'agréer l'expression de mes meilleurs sentiments." C'est cela,
incorporez-vous, et ensuite, on vous attend à la croisée des
chemins avec les tarifs d'électricité.
Je voudrais parler également des conséquences très
graves pour certaines institutions de mon comté. Je prends une
institution comme le Séminaire de Saint-Georges que le gouvernement est
en train d'asphyxier en lui coupant les vivres en plein exercice financier,
comme il l'a fait le printemps dernier. Maintenant, on augmente les tarifs
d'Hydro-Québec. On augmente la taxe sur les services de santé. On
sait que voulez le fermer, mais les Beaucerons ne vous laisseront pas faire, je
vous le dis!
C'est la même chose pour l'hôpital de Saint-Georges. Hier,
le ministre des Affaires sociales disait dans un bulletin de nouvelles, sur les
ondes de CKRB, qu'il voulait faire la
fusion pour que les Beauceronnes aient l'assurance de ne pas être
obligées d'accoucher dans les couloirs. C'est absolument mépriser
une institution qui donne des services aussi bons que de dire de telles choses.
C'est tout à fait condamnable. (0 h 50)
M. le Président, vous me faites signe que mon temps presse, qu'il
me reste une minute. Je vous dirai, en concluant, que vous ne pouvez toujours
pas dire, messieurs du gouvernement, que cela dépend d'Ottawa, que cela
dépend de Bourassa; cela dépend de vous autres. Vous avez
toujours l'habitude de dire que cela dépend des autres, mais c'est vous
autres, ce n'est pas les autres. Une chance que nous avons la certitude, avec
le programme énergétique du Canada, que le prix du pétrole
que nous allons payer ne dépassera pas 75% du prix international. Si on
s'en remettait à vous autres, qu'est-ce qu'on paierait? On paierait le
gallon d'essence à peu près à 5 $ ou 6 $ en 1986.
M. le Président, vous comprendrez que j'appuie fortement la
motion de report présentée avec autant d'à-propos par mon
collègue, le député de Gatineau. Je tiens à le
féliciter et j'invite tous les membres à faire preuve d'autant
d'enthousiasme et à se joindre à nous pour voter pour cette
motion de report.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Communications.
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais joindre ma voix
à celle du député de Beauce-Sud pour remercier le
député de Gatineau d'avoir présenté une motion de
report dans le cadre de ce débat sur le projet de loi no 16.
Des voix: Bravo!
M. Bertrand: De ce côté-ci de la Chambre, M. le
Président, nous voulons vous dire toute notre satisfaction de voir le
Parti libéral, dans ce deuxième mandat de notre gouvernement,
reprendre de plus belle cet exercice des motions de report.
Je voudrais, M. le Président, pour l'ensemble de la population,
expliquer pourquoi le Parti libéral du Québec siège encore
à votre gauche aujourd'hui au moment où on se parle. C'est
à cause et grâce aux motions de report que ces
députés ont décidé de faire discuter en cette
Assemblée nationale depuis le 15 novembre 1976 et je vais vous en donner
des preuves.
M. le Président, est arrivée la loi 101 sur la langue.
L'Opposition libérale a décidé d'une motion de report: il
faut que ce soit reporté à six mois. Ils ont été
battus là-dessus. La loi 101 est devenue l'une, sinon la plus populaire
des lois votées par l'Assemblée nationale du Québec durant
notre dernier mandat.
On a présenté la loi 70 créant la
Société nationale de l'amiante. L'Opposition libérale a
présenté une motion de report. Nous avons voté la Loi
créant la Société nationale de l'amiante...
Des voix: Bravo!
M. Bertrand: ... malgré la motion de report et,
aujourd'hui, la population s'en réjouit particulièrement dans la
région de l'amiante.
Des voix: Bravo!
M. Bertrand: M. le Président, au cours du dernier mandat,
nous avons présenté le projet de loi 125, Loi sur
l'aménagement du territoire. L'Opposition libérale a
déposé une motion de report. Nous l'avons battue. Nous avons
voté la loi 125 et aujourd'hui les municipalités
régionales de comté s'installent partout sur le territoire du
Québec. C'est une loi bienvenue.
Des voix: Bravo!
Une voix: Des bonnes lois.
M. Bertrand: M. le Président, nous avons
déposé le projet de loi 116 dans le domaine de l'agriculture,
modifiant les dispositions de la Régie des marchés agricoles.
L'Opposition a déposé une motion de report. On a battu la motion
de report. On a voté la loi et les agriculteurs sont contents
aujourd'hui qu'on ait adopté cette loi.
On a déposé le projet de loi 121 modifiant la Loi
constituant la Société nationale de l'amiante pour pouvoir
exproprier la compagnie Asbestos. L'Opposition libérale a
présenté une motion de report. Nous avons battu cette motion de
report. Aujourd'hui, on a réussi à s'entendre avec la compagnie
Asbestos. Elle est maintenant la propriété des
Québécois. Nous en sommes contents, M. le Président, et la
population aussi.
Des voix: Bravo!
M. Bertrand: On a déposé le projet de loi 10, Loi
sur la représentation électorale, pour permettre que la
démocratie soit -c'était un de ses objectifs - mieux
réalisée. L'Opposition libérale a fait quoi? Elle a
présenté une motion de report. Nous l'avons battue, nous avons
adopté la Loi sur la représentation électorale, ce qui
fait qu'aujourd'hui nous avons une meilleure carte
électorale, donnant plus de justice à l'ensemble de nos
concitoyens.
On a déposé la loi no 43, Loi modifiant la Loi sur le
ministère de l'Agriculture, sur la question des petits abattoirs, vous
vous en rappellerez? Qu'est-ce qui s'est passé, de l'autre
côté? Motion de report. On les a battus sur la motion de report.
Les petits abattoirs, on s'en est occupé et les agriculteurs sont
contents.
M. le Président, on a déposé la loi no 92, Loi sur
la consultation populaire, pour aller consulter la population. L'Opposition
libérale a déposé une motion de report, on l'a quand
même adoptée, on est allé devant la population et on vous a
permis de gagner démocratiquement.
On a déposé la loi no 67, créant la Régie de
l'assurance automobile. Motion de report pour empêcher cette
réforme. On a battu la motion de report, on a donné une loi
créant la régie de l'assurance automobile, puis, les
Québécois, qui craignaient cette loi à cause des
épouvantails que vous aviez soulevés, se sont réjouis de
l'adoption de la Loi sur l'assurance automobile.
M. le Président, prenez nos délibérations de 1976,
de 1977, de 1978, de 1979, et de 1980, l'ensemble de l'action de ce
gouvernement était marqué au coin de la volonté d'aller de
l'avant, de faire progresser la société québécoise
et de prendre nos responsabilités, malgré les motions de report
qui nous ont été continuellement apportées par
l'Opposition libérale. Il y en a une liste, de motions de report et je
n'ai fait qu'en mentionner quelques-unes. Neuf motions de report, M. le
Président, toutes sur des lois qui, aujourd'hui, sont acceptées,
comprises par la population et que les gens sont contents d'avoir, parce qu'ils
avaient un gouvernement d'action.
M. le Président, les motions de report, les gens ont vu ça
pendant 4 ans. Ils ont vu un Parti libéral, aller de motion de report en
motion de report pour empêcher le gouvernement d'agir. Ils se sont dit:
Voilà une Opposition libérale, voilà un parti politique
qui traîne de la patte, qui ne veut pas avancer, qui n'est pas capable de
prendre des décisions, qui veut tout remettre aux calendes grecques.
Est-ce que nous allons, nous la population, confier à ce parti les
responsabilités d'un gouvernement? Ils se sont dit, on va leur retourner
leur médecine, à ces gens de l'Opposition libérale, et la
population, elle, a décidé de présenter, le 13 avril, une
motion de report à l'endroit du Parti libéral du
Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Vous lui permettrez de terminer, il lui reste 3 minutes.
M. Bertrand: M. le Président, on a fait des motions de
report de 6 mois, des motions de report de 3 mois, des motions de report de 12
mois, aujourd'hui. La population elle, vient de faire une motion de report de
60 mois pour le Parti libéral. N'ayant pas compris la leçon, ils
sont en train de recommencer, encore une fois, pour des lois qui, dans 5 ans,
seront applaudies par la population. Puis les gens auront le goût de
dire, quand viendra le temps de l'élection -bien trop vite pour vous
autres - : Ces gens-là, qui ont tenté encore une fois
d'empêcher ce gouvernement d'assumer les responsabilités qu'on lui
a demandé d'assumer le 13 avril dernier en toute connaissance de cause,
puisque les principes mêmes contenus dans ce projet de loi étaient
déjà établis durant la campagne électorale et
présentés dans le budget avant qu'on aborde la campagne
électorale. (1 heure)
Les gens se demandent: Qu'est-ce que cette motion de report? La seule
valable sur laquelle on s'est prononcé, c'est réglé,
c'était le 13 avril. À compter de maintenant, vous, les
libéraux, comprenant un peu ce qui vous est arrivé le 13 avril et
réalisant ce que cela a donné comme résultat que ces
motions de report au cours des cinq dernières années, voulez-vous
laisser ce gouvernement prendre ses responsabilités, s'occuper des
affaires des Québécois. De votre côté, réglez
donc vos problèmes internes, reportez donc vos congrès de ceci ou
de cela. Branchez-vous sur les questions qui, à l'heure actuelle, font
l'objet de zizanie à l'intérieur de votre caucus, foutez-nous
donc la paix et laissez-nous donc travailler pour le bien-être des
Québécois. Attendez donc la motion de report qui viendra en 1985,
au moment où les Québécois, constatant que ce gouvernement
prend ses affaires en main, décideront de nous reporter au pouvoir pour
un autre mandat.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Laurier.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. J'ai quelques
corrections à apporter à certains propos que le ministre vient de
tenir. La motion de report vise, non pas à essayer d'arrêter le
gouvernement d'agir mais, à essayer d'arrêter ces taxes
cachées que le gouvernement impose continuellement. Il s'agit d'essayer
d'arrêter ces taxations cachées qui, depuis le 13 avril, en 16
mois, depuis qu'on est ici. Je n'étais pas ici en 1976 pour participer
à toutes ces autres motions de report qui avaient peut-être une
autre valeur mais je vais vous parler un peu de ce qui est arrivé dans
cette Chambre depuis sept mois, depuis que moi, je suis ici.
Première chose que le gouvernement a
faite depuis le 13 avril, c'est de couper. Couper où? Surtout aux
endroits qui touchent les plus démunis de la société, les
gens qui ont le plus besoin d'être protégés par le
gouvernement, par n'importe quel gouvernement, mais surtout par une
gouvernement qui se veut social-démocrate. Ce n'est pas du tout de la
social-démocratie, c'est de la "social-dégradation"
complète maintenant.
C'est surtout du ministre des Finances qu'émane le projet de loi
no 16 que nous demandons aujourd'hui de reporter et non pas du ministre de
l'Énergie qui aurait dû, avant de présenter un tel projet
de loi, tenir un débat public sur l'énergie et les choix
énergétiques du Québec. Parce que le choix qu'on doit
faire aujourd'hui devrait subir un examen public en pleine lumière. Une
période de douze mois serait peut-être le temps nécessaire
pour le faire.
Le projet de loi 16 émane plutôt des besoins financiers du
gouvernement après cinq ans de pouvoir et d'actions, non pas
sérieuses, planifiées et ordonnées, mais irresponsables
qui nous ont conduits, en cinq ans, à tripler le déficit
budgétaire de cette province et à se trouver aujourd'hui avec des
trous à gauche et à droite.
Et, si vous ne le savez pas, il y a un autre trou d'à peu
près 500 000 000 $ qui s'en vient dans les établissements de
santé et de services sociaux. Ça n'apparaît nulle part dans
les états financiers du gouvernement mais attendez, ça s'en
vient.
Entre-temps, comme le député de Nelligan disait, notre
ministre des Finances va jouer de la guitare et danser le flamenco pendant que
tous les citoyens vont subir des taxes cachées, honteuses qui touchent
de façon radicale les gens qui sont le moins capables de payer. Regardez
un peu les effets de la loi 16 sur la population québécoise qui
est déjà la plus endettée au Canada tout entier. Une dette
publique per capita de 5276 $.
Comme disait aussi le député de Notre-Dame-de-Grâce,
les effets qu'on va subir de cette loi, d'ici cinq ans, feront en sorte que
chaque famille aura déboursé 2000 $ de plus pour la moindre
petite augmentation de consommation d'électricité, pour les 1 500
000 familles du Québec, directement de leur poche. C'est peut-être
bien pour les présidents des multinationales, c'est peut-être bien
pour des ministres et même pour des députés, mais
expliquez-moi comment c'est pour quelqu'un qui vit sur
l'assurance-chômage. Là aussi, comme on vient de le constater, les
gens qui font des réclamations ça augmente de 40% en un an. Cela
est l'action du gouvernement, comme disait le ministre tout à l'heure,
40% d'augmentation du chômage, mais les gens qui vivent sur
l'assurance-chômage, sur l'assistance sociale, sur leur pension de
vieillesse, où est-ce qu'ils vont trouver ces 2000 $ de plus pour sortir
de leurs poches, qui ne sont pas artificiellement vides, mais sont
réellement vides? Peut-être qu'on nous faisait dire tout à
l'heure que les prix de l'électricité étaient
artificiellement bas, mais ce n'est sûrement pas les poches des gens qui
auront à payer qui sont artificiellement vides. Ils vivent une situation
aujourd'hui qui est très réelle, très dramatique.
Ceux qui ont à vivre avec des miettes parce qu'il n'y a pas de
travail, parce qu'ils sont sur l'assistance sociale, parce qu'ils vivent sur
des revenus fixes, les personnes âgées sur leur pension de
vieillesse, où est-ce qu'ils vont trouver l'argent pour payer les
extravagances ou les irresponsabilités de ce gouvernement depuis cinq
ans? C'est absolument - il y a des mots qu'on ne dit pas à
l'Assemblée nationale semble-t-il -mais je dirais simplement honteux,
aberrant, écoeurant.
Le projet de loi no 16, M. le Président, vient changer le
fondement, la raison d'être d'Hydro-Québec. On a des ressources
énergétiques ici au Québec qui sont renouvelables, non
polluantes et qui devraient nous servir pour notre avenir. Dans les temps que
l'on vit aujourd'hui, dans notre monde moderne, on sait que l'énergie
devient une ressource de plus en plus en demande et de plus en plus
nécessaire pour une société.
Alors, au lieu de faire profiter les contribuables de cette ressource,
nous allons en faire profiter le ministre des Finances pour essayer de
camoufler son incapacité de gérer cette province et son budget de
façon responsable et sérieuse. Chaque année nous avons eu
des prévisions plus grandes de revenus et moins grandes de
dépenses que ce qu'on a eu en réalité. C'est à
cause de ce "mismanagement" qu'on vient aujourd'hui nous présenter un
projet de loi no 16 pour changer la raison d'être d'Hydro-Québec,
pour qu'Hydro-Québec ne soit plus vraiment obligée de fournir
l'électricité au plus bas coût possible et compatible avec
une saine administration. C'est plutôt pour aider le ministre des
Finances à combler ses trous et à camoufler ses déficits
depuis les cinq dernières années. C'est absolument inacceptable,
et je crois que la motion de report à ce moment-ci est tout à
fait à l'heure, même si l'heure est 1 h 10; on sera ici
jusqu'à 4 heures, 5 heures, 6 heures du matin, s'il le faut, pour
essayer de faire comprendre à ces gens d'en face que les
Québécois ne peuvent plus subir ce genre de taxation
irresponsable.
Depuis le 13 avril que je suis ici comme nouveau député,
on a subi non seulement les coupures dans les services nécessaires et
essentiels pour la population québécoise, mais on aussi eu
à subir au moins quatre ou cinq taxes cachées, des taxes
régressives et discriminatoires dans le
sens qu'elles ne tiennent aucunement compte de la capacité des
personnes de payer. Cela, dans n'importe quel cours de science politique
primaire, vous allez voir que cela s'appelle des taxes régressives.
Comme j'ai dit déjà dans un autre discours, si M. Reagan les
avait faites j'aurais compris.
Le ministre des Communications, tout à l'heure, a essayé
de nous dire toutes les choses que le gouvernement a faites et auxquelles la
population québécoise a réagi avec plaisir. Il n'est pas
allé si loin que nous dire qu'il y a des gens qui vont danser dans les
rues parce qu'ils auront à défrayer encore plus, 16,7% je crois,
sur leur compte d'électricité. Pourquoi? Pour simplement
camoufler les déficits que ce gouvernement a créés depuis
les cinq dernières années. Il n'a pas dit cela parce qu'il sait
que c'est absolument faux, parce qu'il sait que c'est absolument de la
démagogie et rien d'autre, un grand show. Il y a des gens qui ont
parlé de show mais on en a vu un tout à l'heure, un show avec les
gestes qu'il fallait, avec des doigts qu'il fallait pointer de l'autre
côté, etc., mais la substance? Absolument rien. (1 h 10)
Personne n'a parlé de la dette publique, personne n'a
parlé du fait qu'Hydro-Québec n'était pas
créée pour aider le ministre des Finances à combler ses
trous; Hydro-Québec était créée, il y a 20 ans,
pour assurer que les Québécois et les Québécoises
pourraient avoir l'électricité aux meilleurs coûts possible
et compatibles avec une saine gestion. Qu'est-ce qui arrive maintenant? Tout
à coup, le ministre des Finances lui-même, même pas le
conseil d'administration d'Hydro-Québec, mais le ministre des Finances
lui-même décidera, quand il le veut, qu'il peut aller chercher
jusqu'à 75% des profits d'Hydro-Québec. Imaginez cela pour un
instant dans le sens suivant: Vous avez le pouvoir, M. le Président, de
décider vous-même combien vous allez chercher dans les poches des
citoyens par une tierce personne.
Vous savez, à côté de cela, que vous avez un
déficit qui va en augmentant; c'est 3 000 000 000 $ aujourd'hui, 4 000
000 000 $ peut-être l'année prochaine, 5 000 000 000 $
peut-être après. Venez me dire, à ce moment-là, que
les décisions que le ministre des Finances va prendre seraient
liées aux besoins d'Hydro-Québec, par rapport à ses
investissements, etc. Ce serait surtout, M. le Président, en fonction
des besoins du ministre des Finances et rien d'autre, sans tenir compte des
gens qui sont dans le besoin réel, sans tenir compte de leur
capacité de payer, et de passer de la soi-disant
social-démocratie à la vrai social-rétrogradation.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Viau.
M. William Cusano
M. Cusano: M. le Président, j'appuie sans réserve
la motion de report de mon collègue, le député de
Gatineau. Il faut mettre un terme à cette forme de taxation
camouflée par un gouvernement péquiste qui se dit
social-démocrate et pratique la social-démagogie. M. le
Président, certains journalistes ont qualifié le ministre des
Finances de grand magicien financier. C'est peut-être pour quelques-uns,
spécialement nos amis d'en face, un titre flatteur, mais, lorsqu'on
consulte le Petit Larousse, on s'aperçoit que le mot magie est
défini comme l'art prétendu de produire par certaines pratiques
des effets contraires aux lois naturelles.
La population québécoise, M. le Président, n'a pas
élu un gouvernement pour se faire donner un spectacle, elle l'a
élu pour administrer les fonds publics. C'est contre les lois
naturelles, que le ministre des Finances est devenu le ministre de la taxation
indirecte et camouflée. J'appuie cette motion, car la population a un
droit légitime d'être mise au courant, elle doit être
consultée et elle doit donner son consentement à une loi qui a
pour but de changer la raison d'être d'Hydro-Québec.
Ce gouvernement n'a pas osé augmenter les impôts, sauf la
suppression de la réduction du 2%, car on aurait jugé cela
très impopulaire chez l'électorat, mais ce gouvernement nous
trahit; une taxe indirecte, camouflée a tendance à cacher la
vérité. La vérité, M. le Président, c'est
que ce gouvernement a endetté chaque Québécois, comme l'a
mentionné mon collègue, le député de Laurier, au
niveau le plus élevé de son histoire. Une taxe indirecte par
l'entremise de tarifs gouvernementaux démontre le manque de transparence
de ce gouvernement. Lorsque l'État contrôle exclusivement
certaines industries non concurrentielles comme les spiritueux,
l'électricité et bientôt beaucoup d'autres, le gouvernement
peut imposer à la population le prix qu'il veut et le pauvre citoyen n'a
aucun autre choix que de payer et se taire. On sera peut-être surpris,
parce que les citoyens en ont assez et on ne pourra pas trop les blâmer
s'ils se révoltent contre la hausse de 16,7% d'Hydro-Québec. Il
n'y a pas très longtemps, la Régie de l'assurance automobile, une
autre entité du gouvernement du Québec, a annoncé une
augmentation catastrophique du coût de l'immatriculation et de
l'assurance automobile. Pour ceux qui ont une automobile pour usage personnel -
au Québec, il y en a au-delà de 2 000 000 - ça veut dire
une augmentation de 60%. En termes de cents et de piastres, cela veut
dire que ceux qui ont payé 123 $ l'an dernier paieront cette
année 153 $. Les voitures pour usage personnel ne sont pas la seule
cible, d'autres moyens de transport font face à une augmentation allant
de 15% à 100%. En plus, le ministre des Transports nous a annoncé
qu'il augmentera la prime pour le permis de conduire, qui passera de 19 $
à 23 $ par année, c'est-à-dire de 38 $ à 46 $, tous
les deux ans. On a justifié cette augmentation en nous disant qu'il
était normal de porter la prime du Québec au niveau de celle de
l'Ontario, mais nos amis d'en face n'emploient pas le même argument,
lorsque ce gouvernement se permet d'augmenter l'essence de 0,30 $ le
gallon.
J'appuie la motion de report car, en fait, la loi qui nous a
été présentée par le gouvernement lui permettrait
d'exiger des dividendes d'Hydro-Québec et d'imposer une augmentation de
tarification de l'ordre de 16,7%. Soulignons, M. le Président,
qu'Hydro-Ontario n'augmente que de 9,3% cette année. Les
Québécois étaient sous l'impression qu'une industrie
nationalisée comme l'électricité vendrait son produit
à des prix basés sur les coûts de production et qu'il ne
serait jamais question d'aller chercher des dividendes a Hydro-Québec
pour subventionner la mauvaise administration d'un gouvernement qui
détient le championnat du gaspillage.
Permettez-moi de vous en donner quelques exemples, dans le domaine de
l'éducation. On sait fort bien que c'est ce gouvernement qui a
placé des commissions scolaires en tutelle, pour signer une entente avec
les professeurs et cette entente cause présentement une mise en
disponibilité de 3743 professeurs, payés à ne rien faire
et qui coûtent à l'État 102 000 000 $ par année. 102
000 000 $, M. le Président! Dans cette même entente, on permet
à un professeur de recevoir un boni pour des enfants en
supplément dans sa classe et, en même temps, dans la salle de
repos à côté de sa classe, il y a des professeurs qui sont
payés à ne pas enseigner. Je trouve ça scandaleux.
L'augmentation sur l'essence, sur l'immatriculation, l'augmentation
proposée ne touche pas seulement les individus, elle touche aussi les
institutions publiques; les commissions scolaires ne sont pas exclues, elles
sont aussi frappées par ces taxes indirectes et camouflées.
Où prendra-t-on l'argent pour faire face à ces augmentations,
puisque les commissions scolaires ne peuvent pas toucher les 87% de leur budget
qui sont assujettis à des règlements du ministère de
l'Éducation du Québec? Elles devront malheureusement piger dans
le budget du matériel didactique, qui est aussi indispensable pour
l'enseignement que le professeur dans la classe.
Le 18 novembre, lors de ma réplique au message inaugural, je
déplorais le sort que subissait l'éducation des adultes. En bref,
à cause des coupures illogiques et draconiennes, les activités
sont réduites dans des centres plus éloignés de la
clientèle, avec des frais d'inscription qui ont doublé et, dans
plusieurs cas, triplé. (1 h 20)
Faut-il rappeler que les citoyens qui ont besoin de ces services sont
des gens qui veulent maintenir ou accroître leur compétence ou
s'ajuster à l'évolution technique? Tout cela, non pas par
caprice, M. le Président, mais pour demeurer compétitif sur le
marché du travail. La situation que je décrivais était
celle du premier semestre, avant toutes les augmentations, mais, dans les
conditions présentes et à l'approche du second semestre,
l'éducation des adultes va disparaître, car ses usagers ne sont
pas des salariés à 30 000 $, 40 000 $ ou 50 000 $ par
année. Ceux qui sont chanceux gagnent un peu plus que le salaire
minimum. Les moins chanceux, il y en a 320 000 dans la province de
Québec, sont des chômeurs et ceux qui demeurent dans les
régions périphériques ne pourront pas faire le plein pour
se rendre à ces cours.
M. le Président, j'aurais une suggestion pour nos amis d'en face,
c'est de mettre de l'ordre dans leur cuisine avant d'aller cuisiner
ailleurs.
J'appuie la motion de report présentée par mon
collègue, le député de Gatineau, car il faut arrêter
ce gouvernement qui étouffe les Québécois par des lois
camouflées. Assez, c'est assez! Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Westmount.
M. Richard French
M. French: M. le Président, il me fait plaisir d'avoir
l'occasion d'intervenir dans ce débat sur la motion de report du projet
de loi pour une période de douze mois, motion qui a été
présentée cet après-midi dans cette Chambre avec tellement
de présence d'esprit et de spontanéité par le
député de Gatineau, motion qui vise à retarder pour fins
de consultation le projet de loi 16 sur la "péquisation"
d'Hydro-Québec. Ce délai est essentiel pour que le débat
public qui est nécessaire puisse avoir lieu. Qui est si pressé
dans le dossier? Il n'y a qu'un petit nombre de personnes au Québec. On
les trouve, pour la plupart, dans le Conseil des ministres du gouvernement du
Québec. Il n'y a pas un chat ailleurs au Québec qui
s'intéresse à ce qu'Hydro-Québec devienne sous la tutelle
du gouvernement du Québec.
La dernière fois qu'un changement d'une telle ampleur a
été prévu pour l'industrie de l'électricité
au Québec, il a
fallu une élection pour régler cette question. Cette
fois-ci, on veut nous faire avaler la "péquisation" d'Hydro sans aucun
débat public, sans aucune consultation digne du mot.
Le gouvernement essaie de nous faire accepter le projet de loi 16 en
plein "sprint" d'avant Noël, espérant que la population va oublier
éventuellement d'où viennent les augmentations de tarifs
d'électricité qui s'ensuivront inévitablement. Il est
essentiel que nous nous arrêtions, que nous nous demandions
précisément ce que nous faisons de cet instrument extraordinaire,
de cette partie de notre patrimoine économique qu'est
Hydro-Québec. C'est une institution qui jouit d'une réputation
internationale sur le plan de la recherche, sur le plan de la technologie
énergétique, sur le plan de l'administration de grandes
entreprises. La "péquisation" d'Hydro-Québec nous
amènerait sans aucun doute à l'établissement d'Hydro comme
une succursale du fisc québécois, comme un tentacule du ministre
et du ministère du Revenu. Il s'agit encore une fois de la mise en
tutelle, d'une façon ou d'une autre, on arrive toujours à en
trouver une, d'une institution qui fonctionne bien, qui fonctionne
efficacement, qui fonctionnait à un coût modique par le
gouvernement le plus centralisateur qu'on n'ait jamais vu au Québec.
Il faut absolument consulter les employés et les cadres d'Hydro
et leur demander s'ils veulent devenir les employés d'une institution
qui se fera saigner chaque fois qu'un gouvernement se trouvera en besoin de
fric. Pensent-ils que les vicissitudes des finances publiques au Québec
vont créer un contexte de prise de décisions au sein d'Hydro qui
serait apte à favoriser un sain développement de cette compagnie?
Les employés et les cadres d'Hydro seraient-ils favorables à ce
que la présidence d'Hydro exige à l'avenir une soumission au
gouvernement, un à-plat-ventrisme devant le pouvoir politique, de sorte
qu'aucun administrateur qui se respecte n'accepterait ce poste? C'est cela qui
est impliqué par le projet de loi actuel.
La présidence d'Hydro actuellement est un poste qui a
énormément de poids dans la société
québécoise. De par la loi dont on discute ce soir, la
présidence d'Hydro deviendrait une tablette confortable pour les
ministres épuisés, pour les fonctionnaires dociles plutôt
qu'un défi formidable pour n'importe quel homme d'affaires, comme elle
l'est actuellement.
M. Robert Boyd, le président sortant, peut actuellement tenir une
place importante dans n'importe quelle réunion d'hommes d'affaires ou
d'administrateurs du monde. Si jamais le projet devant nous n'était pas
reporté, si jamais ce projet de loi était adopté, le futur
président d'Hydro serait inéluctablement contaminé aux
yeux de ses pairs par la mainmise du gouvernement sur son institution. Est-ce
que c'est cela que veulent les Québécois et les
Québécoises pour leur symbole no 1 du savoir-faire? Veulent-ils
la mise en tutelle par un gouvernement qui arrive à peine à bien
gérer ses propres ministères? M. le Président, c'est
évident qu'il y a une différence idéologique, une
différence de fond entre les deux côtés de cette
Assemblée.
Les péquistes croient que plus de gouvernement, plus
d'employés publics, plus de contrôle ministériel
égalent plus de justice sociale. Or, nous, les libéraux, nous
croyons précisément que cette équation est vétuste
et fausse, qu'elle est fausse depuis une bonne décennie maintenant, au
moins, et qu'un rééquilibre entre le secteur public et le secteur
privé s'impose d'urgence.
La "péquisation" d'Hydro-Québec, M. le Président,
inutile de le dire, va à l'encontre de ce rééquilibre
nécessaire. C'est pour cela qu'il est prématuré de la
considérer maintenant sans que des débats de fond n'aient lieu,
des débats de fond sur l'étatisation de l'économie
québécoise.
Il y a bien sûr une autre dimension que la
dégénération inévitable lorsqu'une institution
indépendante passe sous la tutelle directe du pouvoir politique. C'est
le sort du consommateur d'électricité sous le régime de la
"péquisation" d'Hydro-Québec.
Le député de Charlesbourg, cet après-midi, a
essayé de nous convaincre que le projet de loi devant nous n'a rien
à faire avec la hausse des tarifs d'Hydro-Québec. Avec cette
assurance et 0,40 $, vous achèterez une tasse de café. Quel
sophisme!
Il y a une seule et unique raison pour laquelle ce projet de loi est
devant nous ce soir. Le gouvernement du Québec a besoin d'argent. Il
voit dans Hydro-Québec un mécanisme extraordinaire pour percevoir
de l'argent par le biais des tarifs d'électricité. Ce n'est pas
compliqué, c'est très facile. (1 h 30)
Le projet de loi, c'est un pont entre les besoins du gouvernement et la
possibilité d'aller chercher de l'argent dans les poches des
contribuables. On ne veut pas voir construire ce pont. C'est le fameux jeu des
taxes cachées. Si on examine l'hebdomadaire Les Affaires pour la semaine
du 28 novembre 1981, on apprend que, chaque fois que vous paierez votre compte
d'électricité d'Hydro-Québec en 1982, vous fournirez 14%
de votre paiement total au trésor québécois. Donc, vous
payez 14% de plus que ce que vous devriez payer si le prix de
l'électricité était basé uniquement sur les
coûts de production. C'est possible qu'on ne veuille pas exiger
simplement le prix de production. C'est possible que l'écart entre ce
qu'on exige et ce qu'on exigerait si on exigeait seulement le coût de
production soit alloué à des fins
utiles. Mais si le ministre prévoit faire un tel geste, qu'il
identifie clairement où vont ces sommes et à quelles fins elles
seront utilisées.
Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant.
M. French: Le grand désavantage des taxes cachées,
c'est qu'elles sont carrément régresssives; elles frappent
davantage les gagne-petit et les plus démunis que les plus
favorisés. J'invite le ministre de l'Énergie, j'invite le
ministre des Finances à venir avec moi, dans le mois de janvier, dans
mon comté voir les gens de l'âge d'or qui sont aussi pauvres
là que dans n'importe quel autre comté de la province, à
venir avec moi parler à la vieille dame qui ne peut plus payer son
compte d'électricité. À ce moment-là il pourra
expliquer à cette dame-là pourquoi son compte
d'électricité est 14% plus cher qu'il devrait l'être s'il
était juste basé sur le coût de production. C'est pour
ça que j'appuie la motion de mon collègue, le
député de Gatineau.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Viger.
M. Cosmo Maciocia
M. Maciocia: M. le Président, en écoutant
tantôt le ministre des Communications, il semble, d'après lui, que
tout va bien ici au Québec. Il semble que la province est en excellente
santé financière. Pourtant, la population est au courant, M. le
Président, que la province actuellement est sur le bord de la faillite.
Quand les banquiers sont à la porte - c'est ça que disait le
député de Mont-Royal - ça veut dire qu'on n'est pas loin
de la catastrophe.
M. le Président, je vais voter pour la motion de report qui a
été présentée par le député de
Gatineau, pour plusieurs raisons. L'annonce de la hausse de tarifs
d'Hydro-Québec confirme encore une fois la mauvaise administration
à laquelle le Parti québécois nous a habitués au
cours de son premier mandat. Ces hausses records s'ajoutent au bien triste
palmarès économique de ce gouvernement. Hydro-Québec,
depuis son instauration en 1962 par le gouvernement libéral de M. Jean
Lesage, a toujours été synonyme de fierté, de
prospérité et de saine gestion, et je déplore
l'utilisation qu'entend faire le gouvernement de cette société
publique. Pour essayer de masquer son incompétence à administrer
les finances publiques, le gouvernement Lévesque entend transformer
Hydro-Québec en une compagnie uniquement destinée à
produire de l'argent.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement, M. le député de Chambly?
M. Tremblay: J'ai l'impression, M. le Président, que le
député ne nous donne pas de raisons pourquoi on devrait reporter
le débat.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, j'ai bien compris que le député de Viger
avait dit qu'il donnait les raisons pour lesquelles il appuyait la motion de
report. Donc, dans ce sens, je ne peux faire autre chose que lui permettre de
continuer.
M. Maciocia: M. le Président, ça prouve encore,
à 1 h 30 de la nuit, la mauvaise foi de ce gouvernement. Encore une
fois, ce sont tous les Québécois qui souffriront de cette
politique économique plus que douteuse du Parti
québécois.
N'est-ce pas ce même gouvernement qui, par la voix de son premier
ministre, avouait récemment que le dernier budget avait
été préparé en catastrophe, à la sauvette,
dans une démarche bassement électoraliste? Nous nous
référons à ce budget Parizeau qui a enlisé les
Québécois dans un gouffre économique sans fond, puisque le
déficit dépassera les 3 500 000 000 $. Maintenant, le
gouvernement du Parti québécois veut se servir
d'Hydro-Québec pour imposer un fardeau supplémentaire aux
Québécois en voulant augmenter substantiellement les tarifs aux
abonnés.
Quand on pense qu'une société publique est
transformée en machine à faire de l'argent pour tenter
d'éponger une partie du déficit, ce n'est qu'un autre indice de
l'incompétence chronigue du gouvernement en matière
économique. Qui paiera pour ces taxes déguisées? Nos
chômeurs, nos personnes âgées, nos assistés sociaux,
nos handicapés et tous les Québécois sans exception. Le
ministre des Finances ne fait aucune distinction; il frappe tout le monde avec
la même brutalité, et pendant ce temps, les députés
d'arrière-ban applaudissent pour mettre la faute des problèmes
économiques sur le dos du fédéral. C'est une honte. Les
Québécois qui ont écouté le ministre des Finances,
le soir du budget, ont dû être écoeurés de la
bière qu'ils prenaient puisque, dorénavant, même la
bière sera taxée.
Le projet de loi no 16 a largement déplu aux créanciers
internationaux du Québec et d'Hydro-Québec. Non content
d'affaiblir sa crédibilité par son administration sans direction,
le ministre a entraîné avec lui la société
d'État qui constituait, jusqu'à ce qu'il la mette en tutelle
financière, l'élément le plus constant du Québec
auprès des marchés monétaires européens et
américains. Quand on sait que, pour 1982, 48% des besoins financiers
d'Hydro-Québec découlent directement de la mise en tutelle de la
société d'État, je mets le gouvernement au défi de
nous fournir les hausses réelles qu'aurait
décrétées Hydro-
Québec si le gouvernement ne l'avait pas obligée à
lui verser une partie importante de ses profits.
La transparence, ce n'est pas, comme semble le croire le ministre de la
Justice, de se contenter de demander des enquêtes policières
à la Sûreté du Québec. C'est aussi fournir des
détails sur les moyens qu'un gouvernement utilise pour taxer les
contribuables. On se souviendra, au sujet de la hausse des tarifs et
d'impôts déguisés annoncée, que le ministre de
l'Énergie déclarait que les Québécois pouvaient
suivre son exemple et installer dans leur demeure un poêle à bois
afin de réduire leur consommation mensuelle d'électricité
et de bénéficier d'une hausse modérée de leur taux.
J'invite aujourd'hui le ministre à visiter certains immeubles à
logements de mon comté pour qu'il puisse répéter sa
suggestion aux résidents des septièmes étages ou à
ceux des sous-sols dont la seule source d'énergie pour se chauffer est
l'électricité.
La population du Québec connaît la raison principale qui a
motivé la nationalisation de l'électricité au
Québec en 1963: fournir aux Québécois
l'hydroélectricité québécoise au plus bas
coût possible. Avec la loi 16, cet objectif fondamental
d'Hydro-Québec disparaît. En effet, dorénavant, en plus de
rencontrer les besoins financiers d'Hydro-Québec, par exemple, pour le
paiement des intérêts sur le capital emprunté dans le
passé, pour le paiement des intérêts sur les nouvelles
immobilisations, pour faire face aux dépenses d'opération,
salaires etc., Hydro-Québec devra trouver des surplus, des profits
additionnels pour payer quoi? Pour payer la taxe sur le capital et les
dividendes. Le gouvernement fait hausser les tarifs de façon à
pouvoir bénéficier des plus gros dividendes possibles. Pour un
gouvernement social-démocrate, c'est vraiment fantastique. C'est
vraiment fantastique pour un gouvernement qui se dit pour les petits et qui
s'en prend aux petits. La loi no 16, on pourrait la définir en quelques
mots: une autre façon de siphonner l'argent du peuple
québécois. (1 h 40)
Je conclus en me demandant si les Québécois
n'écoperont pas encore de cet essoufflement du gouvernement du Parti
québécois. Je voterai en faveur de la motion du
député de Gatineau, car cette société qui
était l'objet de fierté de la population deviendra un autre outil
de taxation même pas déguisé de tous les
Québécois et surtout les plus démunis.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Hull.
M. Gilles Rocheleau M. Rocheleau: M. le Président, les
paupières se font lourdes du côté ministériel.
Québécois, Québécoises, dormez tranquilles.
L'Opposition libérale veille au grain.
M. le Président, la mémoire est une faculté qui
oublie, surtout lorsqu'il manque quelque chose entre les deux oreilles.
À deux heures moins le quart de la nuit, nous devons mettre en garde le
parti gouvernemental et c'est une des raisons pour lesquelles mon
collègue de Gatineau, Michel Gratton, a présenté cette
motion de report.
M. le Président, en 1960, alors que le gouvernement
libéral était élu, à peine deux ans plus tard, le
gouvernement majoritaire commandait une nouvelle élection sur la
nationalisation de l'électricité. Alors nous allions reprendre en
main une de nos richesses naturelles qui était pour les
Québécois et les Québécoises quelque chose de
très important où tous les Québécois et toutes les
Québécoises devenaient actionnaires à un projet de cette
importance.
Aujourd'hui, on tente de changer les jeux. On oublie que les grandes
mesures au Québec ont été passées par le Parti
libéral. On oublie trop souvent que le gouvernement actuel, c'est des
"coupeux" de rubans; "coupeux" de rubans de projets entrepris par le
gouvernement libéral.
La Baie-James dont le parti ministériel a eu le plaisir de couper
le ruban, est un projet qui va faire de l'avenir du Québec une richesse
au Québec, c'est-à-dire aurait fait... mais non, le ministre de
la surtaxe, M. Parizeau, décidait de draîner une
société d'État qui allait être pour tous les
Québécois une réalisation et une richesse naturelle
à développer.
On ne tient pas compte, c'est une des raisons pour lesquelles nous avons
déposé cette motion de report, du mal que le gouvernement fait
actuellement aux petits contribuables. Après l'assurance automobile,
l'immatriculation, le carburant à 0,30 $ de plus le gallon, le champagne
des Québécois, la bière, les cigarettes, c'est maintenant
au tour de l'électricité. On en a assez, M. le Président,
de surtaxer nos Québécois par des taxes indirectes. On semble
penser que les Québécois et les Québécoises vont
jeter le blâme sur la société d'État dans ce cas-ci.
Pourquoi n'a-t-on pas encore nommé le nouveau président de la
société hydroélectrique? Une société
d'État actuellement à la dérive, qui subit les menaces du
ministre des Finances, qui ne sait plus où aller chercher l'argent.
M. le Président, on n'a sûrement pas pensé aux
veuves, aux assistés sociaux, aux personnes âgées qui ont
à peine une pension de subsistance. On n'a pas pensé aux petits;
l'économie chambranlante actuelle que crée le parti
séparatiste draine ses économies par les augmentations que les
Québécois et les Québécoises subissent
actuellement. M. le Président, c'est de l'irresponsabilité et
j'ose
souhaiter que la motion de report que nous avons déposée
permettra, plus particulièrement à tous les députés
péquistes... Malheureusement, ils n'ont pas l'occasion de critiquer le
gouvernement, parce que, quand le leader parlementaire tire sur la
chaîne, toutes les pattes se lèvent.
M. le Président, on nous dit que la loi 16 a été
déposée avant les élections du 13 avril,
c'est-à-dire qu'on a mentionné, M. le Président, que nous
avions révisé... Au mois de juin, je m'excuse. On la sort
maintenant des boules à mites et on sort les taux, un taux de 16,3%.
Quand on parle de bonne administration, M. le Président, qu'on n'active
pas cette inflation galopante que connaît le Québec actuellement.
Quand le ministre des Finances dit aux Québécois et aux
Québécoises de se serrer la ceinture, je dis: Attachez-vous la
ceinture, vous êtes après vous faire déculotter.
M. le Président, en 1976, nous avons commencé à
connaître le déclin au Québec, la perte d'industries, la
perte d'emplois, l'insécurité. En 1981, ce gouvernement, avant le
13 avril, promettait à tous les Québécois et
Québécoises une administration saine et avait remis en veilleuse
sa séparation. À peine quelques mois après, un nouveau
budget fut présenté, et c'est encore une des raisons pour
lesquelles nous avons déposé cette motion de report pour
permettre aux Québécois et Québécoises de respirer.
De respirer, M. le Président, parce qu'ils ne sont plus capables d'en
prendre. En 1981, on se dirige vers une faillite certaine. Les banquiers sont
aux portes, on examine nos états financiers, on examine l'administration
de ce gouvernement depuis 1976 et on s'apeuré. (1 h 50)
Cela peut vouloir dire quoi, M. le Président, dans les prochains
mois, dans les prochaines semaines peut-être? Un changement dans nos taux
d'intérêt privilégiés. Je demande à ce
gouvernement d'être plus réaliste. Ne pensez pas, parce qu'il vous
reste quelques années avant une prochaine élection... Parce qu'on
se rend compte que vous avez peur d'aller au peuple, vous devriez suivre
l'exemple de votre premier ministre qui, alors qu'il était ministre des
Richesses naturelles, en 1962, est allé au peuple pour consulter. Vingt
ans plus tard, allez au peuple pour consulter de nouveau, parce que vous ne
dirigez plus le Québec de la façon que les
Québécois et les Québécoises veulent être
dirigés. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Saint-Louis.
M. Harry Blank M. Blank: Merci à mes collègues.
Certainement, des "jolly good fellow", ces "jolly good fellow" vont
expliquer à la population du Québec pourquoi, ce soir, on appuie
la motion du député de Gatineau de reporter ce projet de loi de
douze mois. Ce projet de loi no 16 fait des choses en cachette; comme on dit,
c'est la "trade mark" de ce gouvernement de faire des choses en cachette,
d'essayer de couvrir leurs arrières, de couvrir leurs avants, de tout
couvrir. La seule chose qu'ils ne couvrent pas, ce sont les taxes, les taxes
sont ouvertes. C'est le gouvernement de la taxation. Ici, dans ce projet de
loi, on retrouve deux principes qui ont été approuvés ou
expliqués par deux députés du gouvernement. Le
député de Roberval a mentionné "que tout le monde doit
participer au fardeau fiscal du gouvernement". C'est vrai, si le gouvernement a
besoin d'argent, il doit aller le chercher chez les citoyens. Je suis d'accord
avec lui. Mais faites ça au moins ouvertement, faites ça au moins
honnêtement. Dites à la population: J'ai besoin de taxes et on va
vous taxer. Ne faites pas ça en cachette, par en arrière, avec un
projet de loi qui, comme vous le dites, va changer la structure
d'Hydro-Québec, c'est seulement une augmentation de tarifs pour les fins
d'Hydro-Québec. Ce n'est pas vrai. Le député de Roberval
nous a dit ça, il veut que toute la population participe au fardeau
fiscal. Le fardeau est tellement lourd!
Je pense que le député de Laurier, ou je ne sais plus quel
député, a parlé du ministre des Finances en disant qu'il y
a des gens qui ont dit que c'était un magicien, à cause de sa
manière de procéder. Oui, c'est vrai, c'est un magicien: il fait
disparaître les épargnes des Québécois. C'est un
vrai magicien. Aussi, je pense que c'est le ministre du Revenu qui a dit qu'on
doit utiliser les outils dont on a besoin. Besoin pourquoi? Pour taxer la
population. Depuis 1978, le gouvernement a pris, par la porte d'en
arrière, le contrôle d'Hydro-Québec, c'est une mise en
tutelle, dans un sens, avec le nouveau conseil d'administration et toutes les
nominations de gens comme conseillers spéciaux; on a nommé
l'ancien secrétaire de M. Joron, M. Claude Dumais, assistant
spécial du conseil du Québec. Qu'est-ce qu'il y a là?
C'est un messager entre le premier ministre et Hydro-Québec. Faites
ça, faites ça, faites ça.
En fait, Hydro-Québec est en tutelle maintenant. C'est un des
outils dont le gouvernement a besoin, comme le ministre du Revenu l'a dit, et
on l'utilise pour des fins... La façon dont il a fait ça avec le
projet de loi, c'est une façon de percevoir des taxes en cachette. Le
problème, c'est que les populations ne sont pas tellement au courant et
le gouvernement dit aussi que ça fait partie de la politique
énergétique. Mais, si ça fait partie de la politique
énergétique,
pourquoi n'a-t-on pas ce débat public dont on a besoin pour
éclairer la population. Le gouvernement a peut-être raison, mais
pourquoi a-t-il peur de faire un débat public et demander à
toutes sortes de gens de donner leur idée, leur pensée? C'est la
raison de cette motion. On veut qu'on reporte ce projet de loi pour donner une
chance à des groupes, à des citoyens de donner leur avis. Ce
n'est pas seulement sur ce projet de loi, ils ont peut-être raison, mais
on ne le sait pas. Est-ce que cela fait partie de l'ensemble de la politique
énergétique du gouvernement? On ne le sait pas.
C'est l'ancien ministre lui-même, M. Bérubé, qui a
demandé un débat public sur l'énergie. Il a dit: Une
très grande unanimité entoure la tenue d'un débat public
sur l'énergie. C'était même au cours des audiences de la
commission parlementaire étudiant un programme décennal
d'équipement d'Hydro-Québec. C'est la commission dont parlait le
député de Charlesbourg quand il a dit: À cette commission,
on n'a pas discuté du programme énergétique du
Québec. On a seulement discuté d'une petite partie de cette
affaire. On ne sait pas encore si on a intérêt à
procéder avec l'électricité, le gaz, le nucléaire,
on ne le sait pas. On ne le sait pas vraiment. Il y a des groupes qui sont
venus devant cette commission demander un débat public. Le gouvernement
ne veut pas. Pourquoi?
La vraie raison, M. le Président, c'est que ce projet de loi n'a
aucun rapport avec la politique énergétique du gouvernement.
C'est seulement un projet de loi pour taxer les gens du Québec. Ils ont
peur d'y aller directement pour exiger des taxes, comme le député
de Roberval l'a suggéré dans ce sens. Tous mes collègues
ont expliqué pourquoi vous avez besoin de cet argent, le gaspillage, les
dépenses, les trous. Vous avez besoin d'argent, on le sait. Vous essayez
de l'avoir par toutes sortes de moyens, des taxes indirectes. Vous cachez cela
derrière les tarifs d'électricité. La taxe sur l'essence,
c'est aussi une taxe publique, mais cachée. Les gens ne savent pas c'est
une taxe qui n'est pas fixée par des cents, comme en Ontario, c'est un
pourcentage. Le 1er janvier, quand le prix du pétrole augmentera en
Alberta ou en Arabie Saoudite, cela va augmenter la taxe
québécoise. On va payer encore 0,02 $ ou 0,03 $ le gallon de
plus. Aujourd'hui, c'est 0,30 $ de plus; le 1er janvier, ce sera 0,33 $ ou 0,34
$ de plus. On n'a pas besoin d'un projet de loi, on n'a pas besoin de
publicité. Les gens ne le savent pas. Tout se passe en cachette, comme
maintenant. On est ici, ce soir, il est deux heures moins une minute de la
nuit, le 2 décembre. Je demanderais au greffier de changer la date sur
la table. On est rendu au 2 décembre.
Franchement, à deux heures du matin, on discute quelque chose de
très sérieux. Les gens du Québec doivent savoir ce qui se
passe. Qu'on change la date, on va faire la motion après. On va changer
la date. On discute quelque chose de très sérieux. De l'autre
côté, il y a beaucoup de farces, mais ici on est très
sérieux. C'est très sérieux, cette affaire. On a
essayé de taxer la population du Québec par la porte d'en
arrière. Les gens du Québec ont le droit de le savoir, mais
à deux heures du matin il n'y a pas beaucoup de gens qui regardent la
télévision, qui voient ce qui se passe. J'espère que ce
gouvernement qui se dit transparent n'a pas peur que les
Québécois puissent regarder cela à la
télévision à des heures raisonnables.
Motion d'ajournement
Pour cette raison, conformément à l'article 77, je fais
une motion pour qu'on ajourne ce débat pour donner une chance à
la population du Québec de savoir ce qui se passe ici.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du
gouvernement, sur la motion d'ajournement de ce débat.
M. Bertrand: II n'y a pas de consentement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II n'y a pas de
consentement. (2 heures)
M. Blank: Voilà, M. le Président, j'ai failli dire
votre Seigneurie, la tactique exacte de ce gouvernement. En pleine nuit, quand
on demande un ajournement, si on donne les vraies raisons, les raisons pour
lesquelles on doit ajourner ce débat à cette heure-ci, il y a
silence. Les gens du gouvernement ont peur d'expliquer à la population
pourquoi ils sont tellement pressés de la taxer.
Est-ce que vous avez tellement besoin d'argent que vous ne puissiez pas
attendre au matin? Est-ce que vraiment les banquiers frappent à la
porte? Je pense au député de Hull, qui dit que les banquiers sont
à la porte. Peut-être qu'ils sont là, peut-être qu'il
y a un huissier avec un bref de saisie, je ne le sais pas. Nous, on veut voir
dans la journée ce qui va se passer. Pourquoi avez-vous peur des
Québécois, pourquoi?
Ici, on fait ça à deux heures du matin et je suis certain
qu'il y a moins de 500 personnes qui regardent la télévision
à cette heure-ci. Durant la journée, il y en a peut-être 50
000, mais vous avez peur de ces 50 000. Ou peut-être que ce sont vos
militants qui regardent la télévision à cette heure-ci, ce
sont des gens qui aiment travailler dans la noirceur, dans la nuit, je
ne le sais pas. Mais nous, on veut travailler à la lumière
du jour, on n'a pas peur des Québécois, des
Québécoises. Mais... - Une lumière de nuit, c'est noir -
...M. le Président, voyant que le gouvernement n'a aucune raison
à me donner pour expliguer pourquoi on ne veut pas s'en tenir à
ma motion d'ajournement, je demanderais un vote enregistré.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, le
député de Saint-Louis ayant fait sa motion d'ajournement, le
leader adjoint ayant donné comme réponse tout simplement qu'il
n'acceptait pas cette motion, le député de Saint-Louis ayant
utilisé, en vertu des règlements, son droit de réplique,
cela clot le débat. Je dois donc demander le vote enregistré.
Qu'on appelle les députés.
(Suspension de la séance à 2 h 03)
(Reprise de la séance à 2 h 11)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
Veuillez prendre vos sièges, s'il vous plaît!
La motion qui est devant nous et qui doit être mise aux voix est
une motion ayant pour but d'ajourner le débat. Que ceux et celles qui
sont pour cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure),
O'Gallagher, Ciaccia, Lalonde, Mme Bacon, MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron,
Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte, Gratton,
Rivest, Fortier, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Maciocia, Cusano, Sirros,
Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Houde,
Middlemiss, Dauphin, Ha ins.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Gendron, Rancourt,
Bertrand, Duhaime, Tardif, Léonard, Fréchette, Baril
(Arthabaska), Proulx, Gagnon, Dussault, de Belleval, Mme Juneau, MM. Fallu,
Bordeleau, Bisaillon, Leduc, Marquis, Charbonneau, Lavigne, Boucher,
Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens,
Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Rochefort, Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamin-que), Champagne, Paré, Tremblay,
Lafrenière, Beaumier, Lachance, Dupré.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Le Secrétaire: Pour: 33
Contre: 40
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est donc
rejetée. M. le député de D'Arcy McGee. Un instant, M. le
député. M. le leader.
M. Charron: Le député de D'Arcy McGee me
permettrait-il d'adresser une question à l'Opposition qui vient de
manifester le désir d'ajourner le débat? Souhaiteriez-vous qu'on
vote immédiatement sur la motion?
Des voix: Non.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Simplement une question de prudence. Pour ceux qui auront peut-être
à sortir quelques instants prendre l'air, il y eu, durant la
veillée, du verglas de telle sorte que c'est un peu plus dangereux que
prévu à l'extérieur. Je vous demande donc, si jamais vous
sortez, de faire attention.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Herbert Marx
M. Marx: M. le Président, je me demande pourquoi le leader
du gouvernement a demandé si on voulait voter avant mon discours. A-t-il
peur de mon discours? Est-ce que je vais convaincre quelques péquistes
de voter pour la motion?
Il est maintenant 2 heures quinze minutes du matin et vous savez
pourquoi nous sommes ici à cette heure-là? C'est parce que le
gouvernement avait peur de convoquer l'Assemblée nationale au mois de
septembre, au mois d'octobre. Pourquoi? Parce que le gouvernement avait peur de
faire face aux questions de l'Opposition, des questions qui portent sur la
banqueroute économique de ce gouvernement, sur la banqueroute
financière du gouvernement péquiste, sur la banqueroute
constitutionnelle du gouvernement péquiste et sur la banqueroute morale
de ce gouvernement péquiste.
Je suis en faveur de la motion pour reporter l'étude du projet de
loi no 16 à douze mois afin de consulter la population pour voir ce que
le peuple veut et aussi pour faire un débat sur cette question qui est
englobée dans le projet de loi no 16. Il faut aussi évaluer
l'impact de cette loi sur les individus, sur les compagnies qui sont
déjà installées au Québec et aussi sur les
compagnies qui aimeraient s'installer un jour au Québec.
En 1962, lorsqu'on a nationalisé Hydro-Québec, il y avait
deux grandes objectifs. Premièrement, on a voulu fournir
l'électricité à un prix abordable à tous les
Québécois. Deuxièmement, on a voulu attirer les industries
au Québec avec des tarifs
concurrentiels. C'est évident, vous savez comme moi que nous
avons atteint ces objectifs sous le gouvernement libéral
précédent. Autrefois, on a dit que les turbines ont tourné
pour tous les Québécois, maintenant on dit que les turbines ne
tournent que pour le ministre des Finances.
Le gouvernement péquiste est en train d'affaiblir
Hydro-Québec et aussi d'affaiblir le Québec. Cela me rend triste
de le constater, mais les chiffres ne sont pas comme les péquistes, les
chiffres ne mentent pas. Affaiblir Hydro-Québec, j'ai dit.
Premièrement le fardeau fiscal d'Hydro-Québec va augmenter de 176
900 000 $, en 1981, à 1 256 000 000 $, en 1985. Deuxièment,
Hydro-Québec va se trouver dans une position difficile pour faire des
emprunts sur le marché financier. Dans cinq ans, entre 1981 et 1985, le
total du fardeau fiscal d'Hydro-Québec serait de l'ordre de 3 400 000
000 $. Hydro-Québec sera la vache à lait pour remplir les coffres
de l'État. Et qui va payer pour tout cela? Ce sera vous, M. le
Président, moi et tous les autres Québécois et
Québécoises. (2 h 20)
Le gouvernement péquiste a affaibli l'économie du
Québec de l'ordre de 20% en quatre ans. Il y a plus de chômage
aujourd'hui, plus de chômage en 1977 et 1980 que durant les quatre
années précédentes. Entre 1973 et 1976, on a
créé plus d'emplois au Québec par rapport à la
moyenne canadienne qu'entre 1977 et 1980. Entre 1973 et 1976, nous avons eu
plus d'investissements industriels au Québec par rapport à la
moyenne canadienne qu'entre 1977 et 1980. Tout cela pour démontrer
comment le gouvernement péquiste a affaibli le Québec.
Enfin, M. le Président, notre dette, la dette des
Québécois a triplé depuis que le gouvernement
péquiste est au pouvoir. Entre 1867 et 1976, nous avons accumulé
une dette de 5 000 000 000 $, mais entre 1977 et 1980 cette dette a
triplé et vous avez bien deviné, M. le Président, notre
dette maintenant est de 15 000 000 000 $. L'intérêt seulement sur
cette dette coûte 1000 $ par année à chaque famille. Qui
paie pour tout cela? C'est évident, c'est nous. Mais il faut se demander
comment on fait pour payer l'intérêt sur cette dette et payer pour
les autres dettes que le Parti québécois, le gouvernement
péquiste a encourues.
Premièrement, nous avons l'impôt sur le revenu le plus
élevé au Canada, plus élevé qu'à
Terre-Neuve, plus élevé qu'à
l'Île-du-Prince-Édouard, plus élevé qu'en Ontario et
je passe toutes les autres provinces. Vous savez cela comme moi, M. le
Président, parce que vous avez une feuille de paie aussi et nous avons
moins que les Ontariens, moins que les Terre-Neuviens, moins que les Albertains
et moins que les Canadiens qui vivent dans d'autres provinces.
Deuxièmement, nous payons cette dette par des taxes
cachées. Il y a la taxe cachée sur l'assurance automobile. Ce
n'était pas nécessaire de la part de ce gouvernement d'augmenter
le tarif pour l'assurance automobile, ce n'était pas nécessaire
pour financer le plan d'assurance automobile. Nous avons eu une augmentation
sur l'immatriculation des véhicules, pourquoi? Non pas parce que cela
coûtait plus cher, mais pour financer le gouvernement par une autre taxe
cachée.
Nous avons une troisième taxe cachée sur l'essence. Ce
gouvernement péquiste a augmenté la taxe sur l'essence de 20%
à 40%, c'est-à-dire une augmentation de 100%. Nous payons plus
cher l'essence au Québec que dans toute autre province canadienne. Les
Canadiens paient moins cher même à
l'Île-du-Prince-Édouard, à Terre-Neuve et ailleurs.
Maintenant, le gouvernement péquiste veut nous imposer une autre
taxe cachée, cette fois par le truchement d'Hydro-Québec. Ces
taxes cachées sont des taxes régressives. C'est incroyable, mais
vrai; ce gouvernement, qui se veut socialiste, est en train de nous imposer des
taxes réqressives. Je lance un défi aux députés
socialistes péquistes, il y en a encore quelques-uns, il y a le groupe
des onze dissidents qui est maintenant le groupe des onze marionnettes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
J'ai beaucoup de difficulté à entendre le député
actuellement. Il y a un bourdonnement dans la Chambre qui fait que même
moi j'ai de la difficulté à entendre.
S'il vous plaît; Le député d'Arcy McGee a encore une
minute...
M. Marx: M. le Président, le député de Hull,
il y a quelques minutes, a dit que nos amis d'en face n'ont rien entre les
oreilles. Maintenant, je peux vous dire qu'ils n'ont pas d'oreilles non plus
pour entendre.
J'ai lancé un défi au groupe des onze dissidents, qui est
maintenant le groupe des onze marionnettes. Ces onze, les socialistes, comment
peuvent-ils expliquer les taxes régressives au peuple
québécois? Une augmentation de 100% de la taxe sur l'essence,
expliquez-moi ça, vous, les députés socialistes
péquistes. Ca veut dire quoi, une taxe régressive? Ça veut
dire que, quand le millionnaire remplit le réservoir de sa voiture, il
paie les mêmes 30 $ ou 40 $...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député, vous devez conclure, s'il vous plaît!
M. Marx: M. le Président, si on m'interrompt, est-ce que
c'est moi qui doit couper mon discours?
Le Vice-Président (M. Rancourt): J'ai
calculé le temps et vous devez terminer. S'il vous plaît,
si vous voulez terminer. J'ai calculé le temps des interruptions. S'il
vous plaît!
M. Marx: Merci, M. le Président. Je terminais de toute
façon. J'aimerais savoir comment ces députés socialistes
peuvent expliquer le fait qu'une taxe régressive sur l'essence frappe le
qagne-petit comme le millionnaire; les deux doivent payer le même montant
d'argent pour remplir leur résevoir d'automobile. Comment peuvent-ils
expliquer cette taxe régressive? Le tarif d'Hydro-Québec, cette
taxe cachée, est une autre taxe régressive.
L'électricité est une nécessité.
En terminant, M. le Président, toute cette opération
visée par le projet de loi no 16 est une taxe cachée. J'appuie
donc la motion de mon collègue, le député de Gatineau, et
avant de procéder avec ce projet de loi... Voilà des
péquistes socialistes qui vont voter avec nous, comme le
député de Sainte-Marie, le député de Rouyn-Noranda
peut-être...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Votre temps est
écoulé, M. le député de D'Arcy McGee. C'est
terminé.
M. Marx: S'il vous plaît, M. le Président, en
terminant, j'aimerais remercier les députés socialistes
péquistes qui vont voter avec nous ce soir.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Robert Baldwin.
M. Gratton: Sur une question de procédure, M. le
Président, très brièvement, je m'en excuse auprès
de mon collègue de Robert Baldwin. Il me semble que compte tenu de
l'heure, pour les habitués de la télévision
américaine, compte tenu aussi du prénom de mon collègue de
Robert Baldwin, n'auriez-vous pas dû le présenter en disant: "Here
is Johnny"?
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: Merci, M. le député de Gatineau. Ce
n'est tout de même pas très drôle, ce projet de loi, cette
taxe cachée. Cette motion de reporter à douze mois l'étude
de ce projet de loi a pour but de donner à la population du
Québec une période pour apprécier l'impact négatif
de ce projet de loi sur l'économie des individus comme sur
l'économie de nos industries. Un projet de loi qui change le râle
fondamental d'Hydro-Québec, une compagnie qui a été
créée pour produire de l'électricité pour la
population à un coût modique pour la changer du jour au lendemain
en une compagnie qui perçoit de l'impôt, devrait être
scruté à la lumière du jour, et non pas à 2 h 30 du
matin. (2 h 30)
Depuis 1976, nous avons entendu les orateurs du PQ, soit ici en Chambre,
ou même à l'extérieur...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je
demande la collaboration des deux côtés de cette Chambre pour
justement permettre au député de Robert Baldwin de faire son
intervention.
M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je disais que,
depuis 1976, on entend les orateurs du PQ nous parler d'économie
à la sauce péquiste. Le projet de loi 16 est un résultat
de cette économie péquiste qui résulte tout simplement
d'une mauvaise administration. On devrait prendre les douze prochains mois pour
examiner ce projet de taxes indirectes qui, de l'opinion de ce
côté de la Chambre, fait seulement affaiblir notre principal atout
économique, Hydro-Québec.
Les ténors du PQ ont crié à tout vent, partout,
qu'il faut contrôler tous les leviers de notre économie. Pour
faire cela, il faut la souveraineté, l'indépendance, il faut
contrôler toutes les taxes, tous les impôts pour développer
notre économie séparés de tous les autres, mais,
cependant, sans doute, avec l'argent emprunté des autres. Pour le PQ,
contrôler les leviers de notre économie, cela se résume
à contrôler toutes les taxes, tous les impôts. On a vu cela
pendant les débats sur le référendum où on n'a pas
cessé de parler d'indépendance. Toutes ces paroles
d'indépendance, de séparation ont été suspendues,
mises en veilleuse avant le 13 avril dernier. On y est revenu, par exemple,
tout dernièrement, dans les débats des derniers mois, où
les débats ont même pris un ton dangereusement antianglais, pour
ne pas dire quasiment raciste.
Le résultat de cette préoccupation, avec
l'indépendance du Québec, et depuis cinq ans...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît,
à l'ordre!
M. O'Gallagher: Quand on discute d'un projet de loi qui comprend
une taxe tellement coûteuse à la population, soit 2000 $ par
famille d'ici 1985, cette population a le droit strict d'examiner le coût
de ce projet de loi ainsi que le coût de l'indépendance que vous
prônez. Cette préoccupation, avec l'indépendance, nous
donne aujourd'hui le championnat du chômage du Canada, un nouveau record
pour le Québec, 11,5% de nos travailleurs sont en chômage. Nous
détenons aussi le championnat du déficit accumulé, 15 000
000 000 $, trois fois le déficit de 1976. Qu'est-ce que cela va
être dans cinq ans, avec votre
administration? 45 000 000 000 $?
Nous détenons aussi le championnat des déficits annuels, 3
300 000 000 $. C'est plus que trois fois le déficit accumulé des
provinces de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Ecosse, de
l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et du
Manitoba. L'Ontario a seulement 475 000 000 $ de déficit; nous, nous
avons le championnat, 3 300 000 000 $, ce sera 4 000 000 000 $ à la fin
de l'année et on prévoit 5 000 000 000 $ pour l'année
prochaine. Tout cela nous donne le championnat des plus taxés au
Canada.
Avec ce projet de loi et les autres lois, avec la taxe sur l'essence,
une augmentation de 100%, 0,30 $ le gallon, avec la taxe sur les plaques
d'immatriculation comme celle sur l'assurance automobile, qui n'a pas
été demandée par la Régie de l'assurance automobile
- elles ont toutes été imposées par le ministre des
Finances, une augmentation n'a pas été demandée non plus
par la Régie de l'assurance-maladie - on met tout cela ensemble et on a
encore le championnat des plus taxés de toutes les façons,
directement et indirectement.
Les taxes indirectes provenant du projet de loi no 16 sont les
suivantes: la taxe foncière sur toutes les installations
d'Hydro-Québec de 6 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera
à 16 000 000 $, en 1985; l'impôt sur le revenu
d'Hydro-Québec de 51 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera
à 130 000 000 $, en 1985; la taxe de vente sur les achats
d'Hydro-Québec de 12 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera
à 28 000 000 $, en 1985; l'impôt sur les programmes de
santé de 9 000 000 $, aujourd'hui, s'élèvera à 30
000 000 $, en 1985; la taxe sur le capital d'Hydro-Québec de
zéro, aujourd'hui, s'élèvera à 147 000 000 $, en
1985; la taxe sur les dividendes d'Hydro-Québec de zéro,
aujourd'hui, s'élèvera à 905 000 000 $, en 1985; la taxe
de vente pour les usagers de 120 000 000 $, aujourd'hui,
s'élèvera à 290 000 000 $, en 1985. Tout cela
représente 3 000 000 000 $ d'ici 1985, 2000 $ par famille pour les
services d'électricité.
Vous avez beau rire, vous autres, mais votre programme de 1980, le
programme du PQ, l'article 13, à la page 17, dit ceci: "Abolir la taxe
de vente sur les comptes d'électricité pour usage domestique."
C'est bien beau, ce sont de vrais menteurs.
M. Ciaccia: Des menteurs publics!
M. O'Gallagher: M. le Président, il y a une chose que je
trouve déplorable dans cela, c'est l'impact direct de cette taxe qui
affectera les travailleurs, la jeunesse. Cela va réduire les
investissements de 369 000 000 $ pour l'année 1982. Qu'est-ce que cela
veut dire en nombre de jobs à la Baie-James? Combien de jobs seront
perdus l'an prochain, messieurs les travailleurs qui nous écoutent?
Combien de jobs perdus représentent ces 369 000 000 $ pour
l'année 1982? Combien de jobs cela en coûtera-t-il au nouveau
projet des rivières Rupert, Broadback et Nottaway? Combien de jobs?
Combien de jobs cela en coûtera-t-il au projet dont a fait mention le
député de Portneuf cet après-midi, ici, dans la
région de Québec?
Le projet de la Baie-James lancé par le gouvernement
libéral, en 1974, a créé des milliers d'emplois pendant la
construction des installations. Ils étaient peut-être temporaires,
mais le but était de produire de l'énergie renouvelable, à
prix modique, pour encourager l'industrie permanente au Québec. Pour
créer des emplois permanents, M. le Président, ce gouvernement
utilise ce levier majeur de notre économie non pas pour servir les
citoyens, non pas pour attirer des industries, non pas pour rendre nos
industries plus compétitives sur les marchés mondiaux et
nord-américains, mais pour payer le gaspillage honteux des fonds
publics. M. le Président, j'appuie entièrement la proposition du
député de Gatineau de remettre à 12 mois l'adoption de ce
projet de loi. Merci. (2 h 40)
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Chomedey. Auparavant, j'aimerais, s'il vous
plaît, qu'on puisse écouter les orateurs de cette Chambre, parce
que j'y ai beaucoup de difficulté et ça fait partie du travail.
Mme la député de Chomedey.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: M. le Président, à 2 h 40 du matin, il
nous est encore permis de nous exprimer en cette Chambre, malgré les
insolences que nous avons entendues depuis cet après-midi et durant
toute la soirée, malgré la mesquinerie qui a été
quand même monnaie courante de l'autre côté de cette
Chambre, malgré l'arrogance de ce gouvernement, malgré aussi le
manque de courage des gens d'en face qui n'ont pas eu le courage même
d'appuyer leur ministre. Nous appuyons cette motion de report du
député de Gatineau parce que nous voulons que la population soit
capable de s'exprimer d'une façon démocratique. On a beaucoup
parlé de transparence de l'autre côté de la Chambre, mais
on est en train de l'oublier et ça, trop rapidement.
Les Québécois auraient pu attendre du gouvernement une
nette volonté de réconciliation vers un objectif commun, soit
celui de poursuivre le progrès du Québec. Je crains aujourd'hui
que l'ampleur des inconséquences du présent gouvernement ne
soient ressenties durement non seulement
pour les deux ou trois prochaines années, mais, guand on voit le
projet de loi 16, pour quelgues générations à venir.
Le Québec écope aujourd'hui d'une situation inconfortable
sur le plan financier, plus qu'hier encore, mais inconfortable aussi et
incertaine sur le plan politique.
Une voix: La pertinence!
Mme Bacon: Qu'en est-il des effets ressentis par la population?
Cette population est de plus en plus convaincue que l'administration du
gouvernement québécois se traduit par un échec complet:
échec des politiques visant à protéger les moins bien
nantis de la société québécoise; échec du
contrôle des dépenses publiques; échec des politiques dites
expansionnistes. Le gouvernement du Parti québécois nous dit
qu'il doit redonner confiance aux Québécois et leur faire
recouvrer un sentiment de sécurité. Je pense qu'avant qu'ils
aient le goût de construire un Québec fort et concurrentiel, on
connaîtra encore beaucoup d'échecs, M. le Président.
C'est un échec aussi pour ce qui est du fardeau des
Québécois. On en a la preuve aujourd'hui avec le projet de loi no
16; on veut encore aller chercher de l'argent dans les poches des
Québécois. On aura préféré augmenter les
taxes, déguisées ou non, comme cette augmentation de tarifs pour
acquitter les coûts de la fameuse social-démocratie, au lieu de
donner un répit aux consommateurs, et ce sont ces
consommateurs-là que nous voulions voir à la commission
parlementaire.
Quand on a refusé de participer à cette commission
parlementaire, qui a eu lieu en août et septembre, on a voulu qu'il y ait
un débat public qui se fasse et que l'ensemble de la population vienne
s'exprimer devant les parlementaires et dire à la face même de ce
gouvernement ce qu'elle avait à demander à ce même
gouvernement, qu'elle puisse aussi exprimer les craintes et aussi les espoirs
qu'elle pouvait avoir. Je pense que c'est ce qu'on a empêché
l'ensemble de la population de faire au nom de différents organismes qui
voulaient s'y présenter.
Au lieu de donner un répit aux consommateurs, comme je le disais
tantôt, et d'encourager le développement économique
grâce à des tarifs d'électricité relativement bas,
le gouvernement a décidé de fixer les prix de cette forme
d'énergie en fonction de ceux des autres sources, c'est-à-dire,
le pétrole et le gaz naturel.
Il est évident qu'il en résultera pour Hydro-Québec
des surplus appréciables qui seront canalisés vers l'État,
plutôt que de servir à améliorer la situation de l'ensemble
des Québécois et de la grande société
québécoise: non seulement améliorer l'ensemble de la
société mais améliorer aussi le développement du
Québec tout entier.
Le projet de loi 1.6, et c'est pour cela que je voterai pour la motion
de report, est à double titre prématuré. La méthode
choisie, l'adoption de ce projet de loi, constitue un manque de respect
flagrant, d'abord pour les véritables intéressés, les
citoyens qui, dans les faits, sont les seuls et uniques propriétaires de
cette richesse naturelle que constitue l'hydroélectricité.
On se rappellera toute l'importance accordée à cette
dimension il y a près de vingt ans maintenant - il faut le rappeler ce
soir - lorsqu'un gouvernement du Parti libéral décidait de se
faire plébisciter sur la question de la nationalisation de
l'électricité. C'est d'ailleurs le premier ministre du temps,
l'honorable Jean Lesage, qui, pour expliquer l'élection de l'automne
1962 - encore une fois, il faut le rappeler - nous déclarait: "De quelle
façon allons-nous nous y prendre pour que les 5 600 000
Québécois deviennent les propriétaires et les actionnaires
de l'une des principales clés de l'expansion économique de leur
province, l'électricité?" La façon choisie,
évidemment, on la connaît. Ce fut une élection qui permit
aux Québécois de se rendre propriétaires et actionnaires
de cette richesse naturelle.
Or, le gouvernement actuel tient-il compte de ces quelque 6 000 000 de
propriétaires et actionnaires?
Le projet de loi 16 constitue aussi un autre manque de respect parce
qu'il trahit, dans son fondement même, le mandat accordé au
gouvernement par la population en 1962. Il faut encore y retourner. On se
rappellera que les électeurs de l'époque confièrent
à Hydro-Québec la responsabilité d'administrer, de
régir et de développer autant le réseau de distribution
que tout l'appareil de production d'énergie hydroélectrique. La
société d'État devenait donc, dans les faits, le
mandataire exclusif de la population. Or, les termes et le cadre de ce mandat
étaient définis de la façon suivante, que je cite parce
que ça fera peut-être plaisir aux voisins d'en face. C'est
l'ancien ministre des Richesses naturelles, le premier ministre actuel, qui le
définissait. Il nous disait: Et pour que le mouvement
d'intégration et de nationalisation des réseaux se fasse vraiment
pour tous les citoyens du Québec, il faut le confier à Hydro,
entreprise d'État qui, depuis 1944, a pour mission de fournir
l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou
commerciales et aux citoyens aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière. On retrouve toujours cette définition
de la vocation d'Hydro-Québec au premier alinéa de l'article 22
de sa loi constitutive et elle est techniquement maintenue dans le projet de
loi 16 à l'article 6.
Où allons-nous et qu'est-ce qui peut
justifier notre appréhension? Rien de plus simple. À de
nombreuses reprises, ce gouvernement, celui du Parti québécois,
nous a présenté des projets de loi pleins et riches de beaux
principes humanitaires. Mais, à l'examen et à la pratique, on
s'est rendu compte que ces principes étaient diminués. En fait,
ils étaient devenus des demi-principes. Il en est de même pour le
projet de loi actuellement devant cette Chambre, et c'est pour ça que je
voterai pour la motion de report. Pour le vérifier, tentons de
déterminer ce que peut signifier le principe selon lequel
Hydro-Québec doit fournir de l'électricité - je le redis
encore -aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration
financière. C'est le premier ministre actuel qui le disait, l'ancien
ministre des Richesses naturelles. Il avait peut-être subi l'influence du
Parti libéral à ce moment-là, ce qu'il semble oublier
aujourd'hui de même que ses troupes.
Le Devoir du 4 octobre 1962 écrivait ceci: "La mesure est
elle-même rentable. Hydro-Québec, au lendemain de la
nationalisation, récupérerait un profit de 40 000 000 $. Ce
profit d'Hydro-Québec ne serait naturellement pas net. L'entreprise
d'État devra verser 20 000 000 $ par année
d'intérêt. Il restera donc 20 000 000 $ de profit net dont les
citoyens du Québec, plutôt que les capitalistes étrangers,
seront bénéficiaires et qui pourront être utilisés
en diminution des tarifs, en modernisation dans les secteurs les plus
défavorisés ou en hausses de taxes scolaires et municipales
payées par Hydro." Le projet de loi 16 demeure à un second titre
prématuré, en ce sens, qu'il se trouve à conclure un
débat qui n'a jamais eu lieu. Je sais que vous me rappelez encore
à l'ordre, M. le Président, mais j'en aurais encore beaucoup
à dire.
Des voix: Continuez. Consentement. (2 h 50)
Mme Bacon: Nous devons déplorer, M. le Président,
l'attitude des gens d'en face qui ont constamment abreuvé les gens de
l'Opposition de leurs railleries au cours de cette discussion où nous
avions la possibilité de nous exprimer. Mais quand, au Québec, on
ne pourra plus s'exprimer pour représenter 46% de la population, M. le
Président, ça deviendra drôlement inquiétant pour
l'ensemble de la population.
Le ministre des Communications a beau nous faire un petit spectacle pour
essayer d'imiter le leader du gouvernement, je serais un peu inquiète
à la place du leader du gouvernement parce que, quand le ministre des
Communications en est rendu à ne même plus regarder la
caméra de télévision, M. le Président, ça
commence à être grave pour le leader du gouvernement. On a beau
vouloir soulever les troupes du parti au pouvoir...
Je termine, je conclurai en disant, encore une fois, que je continuerai
toujours de supporter ce report parce qu'il est nécessaire et urgent que
la population vienne ici, face au gouvernement, face aux membres de
l'Opposition pour exprimer non seulement ses craintes, mais aussi ses
espoirs.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: M. le Président, à 2 h 50 du matin,
ceux qui nous écoutent et qui entendent "cacasser" de l'autre
côté de la Chambre doivent sans doute se demander ce qui se
produit. Brièvement, il se produit deux choses un peu anormales dans
cette Chambre. La première chose, c'est que le gouvernement actuel
insiste pour procéder en pleine nuit à l'imposition d'une taxe de
17% sur l'hydroélectricité. La deuxième chose qui se
passe, et cela aussi les habitués de nos débats vont s'en rendre
compte, c'est que de l'autre côté il n'y a personne qui se
lève depuis un certain temps pour défendre cette
hausse-là.
Une voix: Ils ont honte. Des voix: Honte!
M. Paradis: Ils sont à peu près 17 en cette
Chambre, 17 députés péquistes de l'autre
côté, responsables chacun pour 1% de cette augmentation. J'ose
croire qu'à l'occasion de leur prochaine visite dans leur comté
ils raconteront à leurs électeurs de quelle façon ils ont
participé à ce hold-up en pleine nuit.
Le député de Gatineau a présenté une motion
de report dans le présent débat pour permettre au gouvernement de
prendre le temps nécessaire pour aller consulter la population sur cette
augmentation. C'est drôlement intéressant dans ce
dossier-là de retourner, 20 ans après, consulter la population,
parce qu'on se rappelle qu'en 1962 l'actuel premier ministre, qui est notre
premier ministre à tous, était ministre de l'Énergie dans
un gouvernement libéral et que, lorsqu'il était libéral,
il avait eu le cran, il avait eu le courage d'aller consulter la population sur
la création d'Hydro-Québec.
J'ai une question du leader adjoint du gouvernement qui me demande
où j'étais à ce moment-là. J'avais douze ans et
j'écoutais votre père faire des discours dans le comté de
Brome-Missisquoi contre le premier ministre actuel. J'écoutais en 1962,
à l'âge de douze ans, le premier ministre actuel nous dire
qu'Hydro-Québec était une société dont tous les
Québécois seraient actionnaires, qu'on deviendrait 6 000 000
d'actionnaires
de cette société. J'écoutais également
à l'époque le premier ministre actuel nous dire que cette
ressource hydroélectrique, que nous possédions tous comme
Québécois, servirait de levier à notre économie du
Québec, servirait à attirer chez nous des investissements qui
créeraient des jobs pour nos travailleurs, pour nos travailleuses au
Québec.
Qu'est-ce qui arrive, vingt ans après, en 1982? Je retrouve ce
même premier ministre à la tête d'un gouvernement qui, en
pleine nuit, à 2 h 55 du matin, veut dire à la population: Ce que
je vous ai donné, à l'époque, je vous le reprends. Je vous
vole les actions que vous aviez d'Hydro-Québec, des actions qui
étaient censées vous apporter des taux
d'électricité abordables, des taux d'électricité
dont vous auriez pu bénéficier. C'était cela, votre
dividende sur votre action. Mais votre dividende, je le prends et je le donne
au ministre des Finances. Pour faire quoi? Pour donner de meilleurs services
dans les hôpitaux?
Des voix: Non.
M. Paradis: Pour donner de meilleurs services
d'éducation?
Des voix: Non.
M. Paradis: Pour créer davantage de programmes dans les
secteurs économiques?
Des voix: Non.
M. Paradis: Pour venir en aide à la PME?
Des voix: Non.
M. Paradis: Pour venir en aide à l'agriculture?
Des voix: Non.
M. Paradis: II prend ce dividende, qui était le bien, la
propriété de chacun des citoyens du Québec, et il le donne
au ministre des Finances qui, pendant ce temps, effectue des coupures dans
chacun des services que je viens d'énumérer. On penserait qu'en
accaparant, en pleine nuit, des dividendes qui appartiennent à ces
Québécois, en coupant les services, on diminuerait au moins le
déficit; mais non, en plus, on augmente le déficit du
Québec. Allez donc comprendre quelque chose à ce magicien de
l'économie, à ce joueur de guitare, comme l'a mentionné ce
soir mon collègue de Nelligan. Allez donc comprendre quelque chose aux
politiques économiques du ministre des Finances.
Je prends un peu en pitié, ce soir, le ministre de
l'Énergie et j'aurai à prendre en pitié, dans les jours
qui suivront, le ministre du Revenu eux qui sont les exécutants de ce
grand argentier qu'est M. Parizeau. On prend la corporation
québécoise la plus riche, la plus dynamique, celle qui
enorgueillit chacun des Québécois, pour la confier à qui?
À un ministre des Finances qui nous a déjà fait un budget
de l'An 1. On la confie à un ministre des Finances qui est l'ancien
administrateur du journal Le Jour. On la confie à un ministre des
Finances qui a mené les finances de la province de Québec au bord
de la faillite. C'est là où on est rendu. On donne cela à
un gars qui a fait ses preuves comme cela, on lui donne ce qu'on a de plus cher
et ce qui constitue la plus grande valeur au Québec. On lui en donne la
propriété, on lui donne les actions de chacun des
Québécois.
Au nom des gens que je représente, au nom des gens qui m'ont
élu ici, au nom de vos électeurs, protégez donc les
actions d'Hydro-Québec de vos électeurs, arrangez-vous donc pour
que les sacrifices que ces gens ont faits pour bâtir Hydro-Québec
ne soient pas perdus et que lorsqu'arrivent les dividendes aujourd'hui on ne
les leur vole pas en pleine nuit, à 3 heures du matin, pour les donner
au ministre des Finances qui a un record d'administration de faillite!
Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce l'a mentionné
tantôt - je devrais dire hier -pour chacune des familles qui nous a
envoyés ici les représenter, la taxe sur laquelle vous aller
voter et sur laquelle vous ne voulez pas prendre le temps d'aller les
consulter, va coûter, en moyenne, 2000 $ par famille dans les cinq
prochaines années. Est-ce que vous y avez pensé? Est-ce que vous
allez oser vous représenter devant ces gens-là? 2000 $ par
famille, pour des ministres, c'est peut-être correct; pour des
députés, ça peut peut-être passer, mais pour les
travailleurs québécois, pour ceux qui ne peuvent se trouver du
travail dans la société québécoise à cause
des politiques économiques de ce gouvernement, c'est
indécent.
En 1962, le premier ministre actuel du Québec, sous la
bannière libérale, nous a donné Hydro-Québec. En
1982, le même individu, sous la bannière péquiste, cette
fois-ci, nous vole les actions d'Hydro-Québec qu'il nous a
données, en pleine nuit. En 1962, quand le premier ministre nous a
donné des actions d'Hydro-Québec, il nous a dit qu'il nous
sortait des années de noirceur. Aujourd'hui, je devrais dire, ce matin,
à 3 heures, au moment où ils nous les volent, ils nous replongent
dans un régime de noirceur, un régime péquiste. Merci, M.
le Président. (3 heures)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jeanne-Mance.
M. Michel Bissonnet
M. Bissonnet: M. le Président, je commence à
être un peu fatigué, rendu à 3 heures du matin, mais cela
ne m'empêchera pas d'appuyer - selon mon état de santé - la
motion du député de Gatineau. Je veux supplier ce gouvernement
péquiste, et je le fais de bonne foi, messieurs, d'appuyer cette motion
car moi, en 1962, quand on a parlé de la nationalisation
d'Hydro-Québec, j'étais heureux. Mais quand on regarde les
coûts de cette nationalisation à cause de la faute de ce
gouvernement, en 1981, je suis moins heureux. Ce gouvernement qui se dit un
gouvernement de transparence, dans les municipalités, quand on a des
règlements de zonage à changer, la population est
consultée. Le projet de loi no 16, qui est un changement important dans
nos lois, on a fait une élection provinciale en 1962 sur ce sujet,
aujourd'hui, en 1981, on devrait avoir le mérite, l'objectivité,
MM. les députés du Parti québécois, d'accepter que
notre population, nos Québécois puissent se présenter ici
et discuter avec nous de ce projet de loi.
Ce projet de loi fait d'Hydro-Québec un percepteur d'impôts
au Québec, d'impôts indirects. Les assistés sociaux, qui
ont une augmentation en janvier 1981 de 9%, ce n'est pas drôle, M. le
leader parlementaire. C'est drôle! Les assistés sociaux ont une
augmentation d'indexation du coût de la vie de 9%. Ils auront une
augmentation d'électricité de l'ordre de 16,3% plus 8% sur les
16,3% en taxe de vente. Actuellement, quand on donne à une personne
seule 331 $ par mois, on fixe son loyer à 85 $ par mois. On ne traite
pas nos assistés sociaux comme il se doit.
Cette motion de report se veut une motion pour que la population puisse
s'exprimer sur ce projet de loi. C'est une motion de report financière.
Le gouvernement a intérêt à ce que notre population puisse
être consultée. Vous n'avez pas le droit de refuser à nos
concitoyens québécois de pouvoir donner leur opinion sur ce
projet de loi.
D'ailleurs, le ministre a souhaité un débat public sur
cette question. Je ne suis pas pressé. Je suis fatigué à
cette heure-ci. On n'a qu'à penser à toutes les augmentations,
aux taxes indirectes que mes collègues ont soulignées au
gouvernement et à la population. Taxes d'essence. Il y a eu un
débat ici, vendredi matin, sur le taxi, et je peux vous dire que c'est
un problème plus qu'immédiat. Les chauffeurs de taxi, les
chauffeurs de camion et autres moyens de transport ont eu des augmentations,
les épiceries augmentent et c'est dû à cette augmentation
de la taxe sur l'essence.
Je demande au gouvernement d'appuyer cette motion de report et de ne pas
nous faire traîner. Nous faisons ça de façon
sérieuse et dans l'intérêt de la population.
J'ai bien hâte qu'on vous rencontre, MM. les membres du
gouvernement, dans une prochaine élection. Faites-la quand vous voudrez,
nous, on sera prêt; ne soyez pas inquiets, on ne la perdra pas. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, mes collègues et
moi-même avons essayé, je pense, de convaincre les
députés du Parti québécois, ce qu'il en reste ici,
ce soir, que l'augmentation des tarifs d'Hydro-Québec de l'ordre de 13%
et 14% constituait, dans le contexte économique actuel, l'une des
mesures les plus inacceptables qu'un gouvernement ait jamais adoptées
à l'égard des citoyens du Québec.
Cette mesure, il faut le rappeler, n'arrive pas dans un contexte de
croissance économique et de développement économique du
Québec. Elle arrive au moment où les citoyens, très
concrètement - et tout le monde le sait - sont pris avec des taux
d'intérêt sur leur maison. Les petites entreprises, les petits
commerçants et les petits industriels voient leur marge de crédit
dans les banques réduite. Un nombre considérable d'entreprises
dans les secteurs les plus fragiles de notre économie sont
menacés de fermeture. Le gouvernement du Québec choisit
précisément ce moment pour alourdir davantage le fardeau
financier de l'ensemble de nos concitoyens.
Le journal Les Affaires, par exemple, cette semaine, donnait le total du
bilan de l'administration péquiste. À 3 heures du matin, on
pourrait penser que c'est un journal du matin mais c'est un hebdomadaire. Les
taxes indirectes, camouflées du gouvernement péquiste, c'est plus
de 86%. Où est la franchise et la transparence du gouvernement?
Une voix: La faute d'Ottawa.
M. Rivest: C'est une publication que vous connaissez sans doute,
M. le Président. Les gens du Parti québécois disaient ceci
dans cet engagement à propos d'Hydro-Québec, une
société québécoise que l'on disait forte, au cours
de la dernière campagne électorale. Et c'est ce que vous avez
répété, les députés péquistes qui
restent pour cette veillée d'armes en ce qui concerne
Hydro-Québec. M. le Président, j'espère que
vous-même, vous allez vous le rappeler comme tout le monde, comme le
public en général: Enfin - disaient les députés ou
candidats péquistes - il est devenu évident
qu'Hydro-Québec est d'ores et déjà devenu le meilleur
placement qu'aient
jamais réalisé les Québécois.
Mes collègues ont cité des propos de M. Lesage et de M.
René Lévesque, du temps où il était ministre
libéral, et c'était exact. C'est pour ça que ce soir, on
se bat, c'est pour ça que demain, nous allons continuer le combat et
c'est pour ça qu'en commission parlementaire, au niveau de cette taxe
injuste et régressive, le Parti libéral du Québec va mener
la lutte jusqu'au bout. Cela doit être clair. (3 h 10)
Ce qu'il faut reprocher très directement aux canditats
péquistes ainsi qu'aux députés péquistes actuels,
c'est que durant la dernière campagne électorale, au printemps
dernier, ces gens disaient, en parlant du deuxième mandat de ce
gouvernement: Le gouvernement péquiste s'engage - c'est un engagement et
c'est écrit noir sur blanc dans vos propres publications -à ce
que les Québécois, comme propriétaires, puissent tirer les
bénéfices maximaux d'Hydro-Québec en tant que
consommateurs. Alors, qu'est-ce qu'ils ont à dire ce soir? Et je
comprends que pas un seul, depuis une heure, n'intervient pour donner la
réplique aux députés, parce que vous trahissez votre
engagement électoral qui est écrit noir sur blanc. Parce que,
justement, par votre décision, par la décision du ministre des
Finances, qu'est-ce qui se produit? Vous faites payer les consommateurs, vous
dénaturez le sens même d'Hydro-Québec, le sens même
de la nationalisation d'Hydro-Québec et, faut-il le rappeler?
simplement, on peut dire que ce sont des députés libéraux
qui font de l'opposition et tout cela.
Prenez un homme, je pense, qui a le respect de tout le monde, M. Marcel
Bélanger, qui a été le conseiller financier de M. Lesage,
le conseiller financier de M. Bertrand, le conseiller financier de M. Johnson.
M. Marcel Bélanger a été un de ceux qui ont
été responsables de l'ensemble des mesures économiques et
financières de la révolution tranquille que vous chantez dans vos
chansons péquistes. Mais vous allez apprendre à respecter le sens
de la révolution tranquille. M. Marcel Bélanger a fait une
étude de la situation actuelle, qui est dénoncée ici par
le journal Les Affaires, de ce que le gouvernement est en train de faire avec
Hydro-Québec.
Il ne faut pas oublier, M. le Président, que, dans la loi
même d'Hydro-Québec, que le bill 16 va massacrer, pour essayer de
combler les trous du ministre des Finances, dans la loi d'Hydro-Québec,
l'article 22 précise que le mandat d'Hydro-Québec est de fournir
aux Québécois consommateurs, comme vous le dites dans vos
publications, de l'énergie au taux le plus bas. Qu'est-ce que vous
faites actuellement avec cette taxe pour financer les déficits
budgétaires du ministre des Finances? Vous dénaturez
complètement le sens et la fonction première
d'Hydro-Québec et vous voudriez que l'Opposition en cette Chambre vous
appuie et ne dise rien face à cette attitude qui est tout à fait
inqualifiable? En plus, à un moment précis où les
contribuables québécois et les consommateurs, pour lesquels vous
aviez les mots les plus doucereux au moment de la campagne électorale,
à un moment précis où les consommateurs ont à faire
face à des contraintes économiques extrêmement
difficiles.
Est-ce que cela est acceptable, M. le Président? C'est totalement
inacceptable et c'est pour cela que l'on continuera jusqu'au bout de nous
opposer à cette mesure, et d'ailleurs, cette mesure n'est pas la seule
que le gouvernement prend; on a évoqué ce soir la taxe sur
l'essence, toutes ces autres taxes. Cela frappe les gens ordinaires. Et tous
ces beaux vocables qu'on évoque autour de la social-démocratie et
de la justice, et que le Parti québécois, c'est fait pour les
petits, on l'a signalé ce soir. Qui est le plus frappé par ces
taxes? Qu'est-ce que cela va coûter? Mon collègue de
Brome-Missisquoi parlait de 2000 $ par famille. Les plus riches de notre
société, 2000 $ par famille sur une période de cinq ans,
pourront faire face à la note, mais les plus démunis de notre
société? Vos propres documents, le document publié par
votre collègue, le verbeux ministre d'État au
Développement économique, M. Bernard Landry, a établi
qu'il y avait un million de Québécois qui vivaient sous le seuil
de la pauvreté. Savez-vous que ces gens-là devront payer la
facture? Est-ce que c'est juste de faire payer ces gens de la même
manière que ce que vous allez faire payer aux mieux nantis de notre
société? Vous êtes-vous simplement posé la
question?
Ce soir, on essaie de vous amener à réfléchir pour
arriver à prendre des décisions qui, sur le plan financier, sur
le plan économique et sur le plan strict de la justice, soient
conhérentes avec les discours que vous faites à tout venant. Il
va falloir que vous le prouviez et que vous livriez la marchandise, et c'est
cela qu'on vous demande par cette motion. Évidemment, on utilise tous
les moyens parlementaires et on va continuer de les utiliser parce qu'on a le
sentiment, et tous mes collègues, ce soir, l'on évoqué
à l'occasion de leurs discours, qu'il faut respecter le patrimoine, cela
fait partie de notre patrimoine. Le patrimoine, c'est un autre mot
péquiste que vous avez toujours au bout des lèvres.
Hydro-Québec fait partie de notre patrimoine, ça doit être
respecté et vous allez respecter le sens d'Hydro-Québec.
Deuxièmement, on va prendre tous les moyens nécessaires
pour que les Québécois, en particulier les moins nantis de notre
société, ne fassent pas les frais de votre
mauvaise gestion financière, ne fassent pas les frais de tout le
gaspillage, de toutes les difficultés que vous avez créées
par les dépenses somptuaires que vous avez faites. Les conventions
collectives que vous avez signées à la veille du
référendum mettent les finances publiques dans une situation
extrêmement difficile. Vous ne vous servirez pas d'Hydro-Québec
et, surtout, vous ne ferez pas porter les augmentations sur le dos des gens les
plus vulnérables de notre société pour vous donner des
allures de bons gestionnaires des finances publiques, parce qu'il n'y a pas un
Québécois ou, en tout cas, il y en a certainement de moins en
moins, qui va continuer de vous croire, de la façon dont vous vous
comportez.
C'est pour ça que le député de Gatineau a
présenté sa motion et c'est pour ça que tous les
députés de l'Opposition vont continuer de l'appuyer. Comme mon
collègue, le député de Jeanne-Mance, l'a dit, je
demanderais aux députés péquistes - je suis convaincu
qu'il y en a qui peuvent endosser notre démarche, qui comprennent le
sens de notre démarche, mais ils sont réduits à cette
condition de machine à voter - comme ils l'ont fait en d'autres
occasions, d'avoir le courage de se lever et de dire: L'Opposition a
parfaitement raison de combattre le projet de loi no 16 comme elle a raison,
également, de s'opposer à la hausse du prix de l'essence parce
que c'est une taxe brutale et régressive. C'est le journal Les Affaires,
le monde du patronat qui, dans son éditorial, par exemple, conclut
exactement de cette façon sur les mesures de M. Parizeau: "Une taxe
brutale et régressive". Vous vous faites dire ça par les milieux
d'entreprises que vous avez toujours décriés. Ce sont maintenant
ces milieux d'entreprises qui s'opposent à vos politiques, car elles
aboutissent à des injustices sociales. C'est ça, le sens profond
de la démarche que vous faites avec la loi 16 et c'est pour ça
qu'on s'y oppose.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Berthier.
Une voix: Prends ton temps, tranquillement, Albert.
M. Albert Houde
M. Houde: Merci, M. le Président. Je regarde l'heure,
ça fait au-delà de sept heures que nous discutons, les
députés de l'Opposition, pour essayer de faire entendre le bon
sens aux gens d'en face. J'espère qu'à la suite des discussions
de ce soir et de cette nuit les gens pourront comprendre et voter pour la
motion de report du projet de loi no 16 que mon camarade, le
député de Gatineau, nous a présentée.
Des voix: Oh!
M. Houde: Mon camarade. M. le Président, le geste
posé par mon collègue de Gatineau avant la suspension pour le
souper en est un de bon sens et de sagesse. Oui, tous les moyens parlementaires
mis à la disposition de l'Opposition seront accueillis par la population
du Québec qui nous écoute actuellement comme autant de gestes
positifs à leur endroit. Cependant, je regrette que notre
règlement ne prévoie pas un report sur une plus grande
échéance de ce projet de loi. C'est une véritable
déchéance administrative, parce que, au fond on pourrait bien se
passer de cette bebelle administrative du Parti québécois.
M. le Président, je vous dirai que le projet de loi no 16 est un
hold-up commis par le ministre des Finances à l'endroit des
contribuables québécois. Je vous dirai aussi que l'augmentation
des tarifs d'Hydro-Québec me fait penser à un homme qui voudrait
aider un de ses copains en train de s'enliser dans un marais de boue en lui
enfonçant les épaules et la tête dans cette "swamp" qu'est
devenue l'administration des finances publiques du ministre Parizeau. (3 h
20)
M. le Président, ce bourbier sent mauvais; il infeste le climat
économique québécois et met en fuite les investisseurs.
Comment peut-on, en l'espace de quelques semaines, augmenter la taxe sur
l'essence, songer à augmenter le taux d'assurance automobile et,
finalement, les tarifs d'électricité? C'est pour cette raison que
je devrai accepter la motion de report présentée par mon
collègue de Gatineau, pour remettre à douze mois l'étude
du projet de loi no 16 sur Hydro-Québec.
Comme la fée Carabosse, le ministre Parizeau jette à tout
ce qu'il touche un mauvais sort. Je le soupçonne actuellement
d'être capable de changer un lingot d'or en une carte de membre du Parti
québécois. Cela ne vaut pas cher et c'est toute une
dévaluation. Oui, M. le Président, je boycotte ouvertement cette
augmentation injuste. D'ici un an, j'espère que le gouvernement
péquiste aura perdu sa future élection référendaire
et sera devenu un tiers parti marginal.
M. le Président, mes électeurs du comté de Berthier
ne m'ont pas élu pour accepter sans rien dire ces coups de massue
économique du ministre Parizeau à leur endroit. Je parle au nom
du bon sens et de la saine administration économique. Mes
électeurs de Berthier, comme ceux de tout le Québec, ont besoin
non seulement d'un répit, mais aussi d'un climat de confiance qui
permettra à la population de recharger ses batteries
financières.
En terminant, je me rappelle toutes ces campagnes de publicité
encourageant les Québécois et les Québécoises
à utiliser l'électricité en leur disant que
l'électricité, c'est l'énergie qui ne coûte pas
cher, qui
évite la pollution et qui est propre, propre, propre. Sachez, ce
soir, M. le Président, qu'il y a plus de 12 012 Québécois
à reprocher à M. Parizeau de transformer en un luxe
l'électricité, qui est devenue une nécessité dans
la vie quotidienne.
M. le Président, en concluant, je prends mes électeurs de
Berthier à témoin, il faut que cette nouvelle catastrophe
péquiste soit retardée d'un an. D'ici là, les
députés d'en face disparaîtront de la carte
électorale et tout rentrera dans l'ordre au niveau économique.
Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo! Une voix: Très bien!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Papineau.
Des voix: Oh!
M. Mark Assad
M. Assad: M. le Président, notre collègue,
l'honorable député de Gatineau, est arrivé avec une
motion...
Une voix: II est 3 h 25.
M. Assad: Merci, M. le leader. Il est arrivé avec une
motion et je crois que c'est fort approprié dans le moment. Pour faire
suite à notre collègue, le député de Jean-Talon,
qui avait cité des extraits de notre économiste et fiscaliste
bien connu, Marcel Bélanger, j'ai trouvé qu'il y avait là
des éléments très importants. C'est un homme qui a
vécu comme économiste les années de la révolution
tranquille et qui a compris l'importance et la profondeur pour l'avenir des
Québécois de tous les changements qui se faisaient durant les
années soixante. Sauf que dans des déclarations fort
surprenantes, l'économiste Marcel Bélanger a fait remarquer
qu'à cause des difficultés que le gouvernement traverse, il en
profite pour dire que les taux d'Hydro-Québec, qui étaient
censés être à bon marché pour les
Québécois, sont maintenant ajustés à la hausse
dramatiquement. Marcel Bélanger dit: "Ces théories du sain
équilibre entre les différentes formes d'énergie et de la
prévention du gaspillage font singulièrement l'affaire du
gouvernement qui patauge dans des déficits budgétaires sans
précédent." C'est surprenant, M. le Président, qu'un
économiste emploie des termes comme ça, quand il dit qu'on
patauge dans des déficits sans précédent de 3 000 000 000
$, et en augmentant les tarifs.
Une voix: C'est épouvantable!
M. Assad: C'est amusant à ce propos de voir avec quelle
facilité le présent gouvernement trouve de nouvelles sources
déguisées de recettes fiscales tout en laissant croire à
des réductions d'impôt.
Pendant que le gouvernement siphonne d'une façon massive notre
société hydroélectrique, le gouvernement de l'Ontario,
lui, se contente d'imposer un fardeau fiscal raisonnable à son Hydro.
Les factures d'électricité ne sont pas soumises à des
taxes de vente dans la province de l'Ontario comme ici, au Québec.
L'écart entre le Québec et l'Ontario va certainement
réduire l'avantage que nous avons connu par les années
passées pour attirer des industries.
À l'heure actuelle, les tarifs d'électricité au
Manitoba sont sensiblement égaux à ceux du Québec, tandis
qu'en Ontario, ils sont légèrement supérieurs. La province
du Manitoba vient tout récemment de geler pour une période de
cinq ans les tarifs hydroélectriques. Est-ce que le présent
gouvernement est prêt à s'engager, pour suivre l'exemple du
Manitoba, à geler les tarifs? Pourtant, nos ressources
hydroélectriques sont beacoup plus vastes, ça ne se compare pas
avec le Manitoba. De toute façon, le Manitoba a les moyens de geler les
tarifs pour cinq ans.
Une voix: Ici, on va geler les prestations pour les
assistés sociaux.
M. Assad: Voici, M. le Président, une autre citation de M.
Marcel Bélanger qui est très à point: "Au lieu de se
servir de l'électricité comme d'un levier économique en
maintenant des taux avantageux, l'actuel gouvernement utilise de plus en plus
cette richesse pour tenter d'éponger des déficits
budgétaires qui ne cessent de s'élever. Les répercussions
d'une telle politique peuvent s'avérer très graves pour notre
économie."
Évidemment, tous mes collègues l'ont
démontré ici. Je suis sûr qu'actuellement le ministre des
Finances est très conscient et certainement - c'est le cas de dire - est
au courant des difficutés que cela va créer pour notre
économie. Au lieu d'avoir des augmentations des recettes de
l'État, elles sont à la baisse, et nos dépenses
augmentent.
Il faudrait tenir compte de l'orage des taxes, surtout sur l'essence,
l'assurance-maladie, les plaques d'automobile et, surtout de l'inflation qu'on
connaît; il faudrait penser aussi à la fin de l'aide aux petites
municipalités qui sont obligées d'augmenter les taxes en
conséquence. Ce gouvernement a coupé quasiment toute l'aide aux
petites municipalités. Plusieurs députés ici, en Chambre,
en sont très conscients. (3 h 30)
Compte tenu que le chômage est le plus élevé depuis
la crise des années trente, compte tenu des propos du premier ministre
qui, dans son discours inaugural, sympathise -
il l'a dit lui-même - avec des centaines de milliers de familles
québécoises qui sont durement frappées par l'inflation
qu'on connaît, et compte tenu que notre collectivité
québécoise possède une source d'énergie très
importante et que nous, plus que n'importe quelle autre province, au
Québec, nous possédons le pouvoir de freiner l'augmentation de
cette source d'énergie, dans les temps qui courent, avec l'inflation et
l'augmentation des taxes qu'on a vue, ici depuis quelques semaines, la
population en bénéficierait si ce gouvernement voulait remettre
ses augmentations en attendant qu'on ouvre un débat public sur cette
question d'énergie.
M. le Président, cela fait sept, huit mois qu'on attend parler de
la transparence de ce gouvernement. Ce serait très
apprécié de tous les Québécois si ce soir le
gouvernement voulait démontrer un peu de sa transparence au lieu de son
intransigeance. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Richmond.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: Merci, M. le Président. En ce presque
début de matinée, je veux d'abord remercier, au nom de tous mes
électeurs, mon collègue de Gatineau pour la motion intelligente
dont il nous a fait part hier soir afin que nous puissions davantage
approfondir les conséquences du geste que se propose de poser le
gouvernement. S'agit-il d'un luxe de reporter d'un an l'adoption d'un projet de
loi qui vient siphonner les fonds d'Hydro-Québec? Je crois
personnellement que non. M. Parizeau, il y a quelques semaines, a
installé un premier siphon dans la poche gauche des contribuables
québécois lors de la présentation de son mini-budget en
instaurant l'augmentation d'une nouvelle taxe sur l'essence. Il vient ce soir
d'installer un second siphon dans la poche droite du contribuable
québécois, soit l'augmentation de la tarification
d'Hydro-Québec.
On se croirait, M. le Président, reculé à la belle
époque des vampires où maître Dracula ne ratait pas une
occasion de faire chaque jour de nouvelles victimes. Nous avons notre Dracula
québécois, notre ministre des Finances, M. Parizeau. Et quel
contraste avec l'année 1962...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, à
l'ordre!
M. Vallières: ... où, sous Jean Lesage, les
Québécois ont décidé de devenir maîtres de
leur électricité! Rappelons-nous-le, M. le Président, ils
l'ont fait à la condition qu'on les assure que cette
électricité leur serait fournie au plus bas coût possible.
Mais ce projet de loi no 16, dont nous demandons le report, vient changer de
façon unilatérale les règles du jeu. Je crois que cela
constitue une injustice à l'endroit de nos concitoyens qui ont
indiqué qu'ils étaient en faveur de la nationalisation, mais
à condition que l'électricité leur soit fournie au plus
bas coût possible.
Je veux, M. le Président, citer M. Joseph Bourbeau,
président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, qui est
venu comparaître devant les membres de la commission parlementaire de
l'énergie et des ressources le mardi 25 août 1981. Je pense qu'il
est important de savoir ce que les hauts dirigeants d'Hydro-Québec
voient dans les intentions du gouvernement actuel. Je cite M. Bourbeau: "Les
amendements apportés aux articles 22 et 22.1 de la Loi sur
Hydro-Québec sont importants. Ils modifient le mandat même de la
société d'État. L'article 22 définit ainsi ce
nouveau mandat: "La société a pour objet de fournir
l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et
commerciales et aux citoyens du Québec. Les taux et les conditions
auxquels l'énergie est fournie doivent être compatibles avec une
saine administration financière." M. Bourbeau poursuit:
"Hydro-Québec se voit donc soustraite de son obligation actuelle de
fixer les prix de l'électricité aux taux les plus bas compatibles
avec une saine administration financière. Le tarif applicable à
chaque catégorie d'abonnés n'a plus à refléter le
coût réel du service fourni à cette catégorie."
Je pense qu'il était important de mentionner qu'une personne
aussi neutre que le président d'Hydro-Québec nous indique
lui-même que la vocation d'Hydro-Québec sera nettement
modifiée si on adopte ce projet de loi no 16. Nous avons demandé
le report à douze mois de ce projet de loi, désirant qu'une vaste
consultation soit entreprise, désirant permettre au gouvernement
d'éviter d'agir avec précipitation. Mais, évidemment, au
début du mandat d'un gouvernement, il semble être plus facile de
faire la grande passe à nos concitoyens. On a commencé avec
l'essence, on continue avec la tarification d'Hydro-Québec et
probablement qu'à la veille d'une élection, on aura un peu de
"candies" pour faire oublier les mauvais gestes du gouvernement.
Je citerai M. Yvan Guay qui nous dit, dans la Presse du samedi 28
novembre 1981: "Pour les citoyens du Québec comme pour ceux d'ailleurs,
un bon gouvernement est celui qui donne le plus en services, allocations, et
demande le moins en impôts et en restrictions. C'est évidemment
une réaction d'enfant à l'égard de ses parents. Les masses
populaires sont ainsi, et c'est sur cette base que M. Parizeau a conçu
ses budgets. Mais comme l'État ne peut donner
d'une main à la population ce qu'elle lui arrache de l'autre, M.
Parizeau n'avait qu'un solution: camoufler le plus possible les impôts
afin de pouvoir les accroître plus facilement et créer ainsi
l'illusion d'un bon gouvernement."
Je pense, M. le Président, qu'il est important, dans la
conjoncture que nous connaissons actuellement, de dénoncer les
intentions du gouvernement qui se prépare à agir comme un bon
"gangster", un bon pilleur. Cela me fait penser au contribuable qui
déciderait d'aller voler son voisin et qui, après l'avoir
volé, par geste de délicatesse, lui enverrait des fleurs pour lui
dire, finalement: Je ne suis pas si méchant que ça, je t'ai
volé, mais je te donne des fleurs.
Pourquoi agir précipitamment et à la hâte? Pourquoi
vouloir être aussi rapide pour "faire les poches" des contribuables du
Québec? Nous savons que le gouvernement est un bon percepteur. Nous
savons aussi qu'il est un très mauvais payeur. Il suffit de faire du
bureau de comté de façon régulière pour se rendre
compte que le gouvernement est peut-être cet animal qui paie le plus mal
ses créanciers, qu'il s'agisse d'agriculteurs, d'industriels, de
municipalités ou de journaliers.
Je veux que mes électeurs sachent que je suis contre cette loi
matraque et en faveur de son report à l'an prochain. Nous nous sommes
permis de nous donner l'essence la plus chère au Canada, et
bientôt peut-être aurons-nous les tarifs
d'électricité les plus élevés au Canada. Je
voudrais demander à mes collègues d'en face, les
députés péquistes, s'ils ont demandé à leurs
électeurs ce qu'ils en pensent, à leurs militants
également. Dans la région de l'Estrie, dernièrement, des
militants péquistes se sont opposés à la taxe sur
l'essence. Si on les consultait, est-ce qu'ils ne diraient pas qu'ils sont
également contre ce projet de loi no 16? Je suis heureux de constater la
présence de nombreux députés péquistes de l'Estrie
en cette Chambre: le député d'Arthabaska, la
députée de Johnson, le député de
Saint-François, le député de Sherbrooke. J'aimerais que
ces collègues... (3 h 40)
Une voix: Ce sont des couche-tard.
M. Vallières: ... se préoccupent davantage de ce
que pensent leurs concitoyens. Je suis sûr qu'au cours de la
dernière campagne électorale, ils se sont faits les ardents
défenseurs des gagne-petit. Pourquoi ne continueraient-ils pas, ne
passeraient-ils pas de la parole aux actes en appuyant notre motion qui vise
précisément à protéger les catégories les
plus démunies de notre population?
Il faut espérer que ce projet de loi qui frappe tragiquement tout
le monde sans distinction, indépendamment du revenu...
J'espère que nos collègues de l'Estrie, vous incluant,
pourront se brancher et voter en faveur de cette motion intelligente.
Voici la question que vous devez vous poser: Est-ce que je veux ou non
que M. Parizeau fasse les poches des contribuables? Dans mon esprit, il n'y a
aucun doute, je ne le veux pas. Je vois que vous êtes sur le point de
m'indiquer que je dois céder la parole...
Une voix: Consentement.
M. Vallières: ... à un autre intervenant. Je veux
tout simplement, en terminant...
Une voix: Consentement.
M. Vallières: ... indiquer que ce que nous voulons, de ce
côté-ci de la Chambre, c'est aider davantage le gouvernement
à prendre conscience des graves problèmes que notre
société vivra. Vous devriez nous remercier. Le Parti
québécois devrait nous remercier, par cette motion de report, de
l'assurer de notre collaboration à une meilleure compréhension
des incidences de ce projet de loi, de lui permettre de comprendre notre
volonté ferme d'éviter au gouvernement de faire une gaffe
gouvernementale et monumentale, de lui fournir l'occasion de
réfléchir davantage sur le geste qu'il se prépare à
poser, de lui permettre d'agir aussi avec franchise. Je dirai oui à
cette motion de report et, par conséquent, non au changement de vocation
d'Hydro-Québec, non au siphonnage des fonds d'Hydro-Québec, non
à ce nouvel affaiblissement économique que nous propose le Parti
québécois. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président. Une voix: 3 h 45. Une voix:
Presque.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Un mal qui répand la terreur, mal que le
gouvernement en sa fureur inventa pour punir le peuple du Québec.
Des voix: Ah!
M. Bourbeau: Le projet de loi no 16, puisqu'il faut l'appeler par
son nom...
Une voix: La loi Parizeau.
M. Bourbeau: ... capable d'enrichir, en un jour, le
député de L'Assomption, fait la guerre aux
Québécois. Ils ne mourront pas tous, M. le Président, mais
tous seront frappés.
Si j'ai choisi de parodier le fabuliste, c'est pour dénoncer ce
projet de loi inique qu'est le projet de loi no 16, qui est susceptible de
causer un grave préjudice aux Québécois et d'entraver
l'avenir du Québec.
Si j'appuie la motion de report du député de Gatineau,
c'est afin de permettre que la population soit bien informée, au cours
de l'année qui vient, du projet de loi no 16.
Le projet de loi no 16 crée un système incohérent.
Ce projet de loi est incohérent. Il crée une
société à capital-actions qui n'a qu'un seul actionnaire,
qui est un paravent pour le gouvernement et qui accorde au ministre des
Finances la totalité du capital-actions de cette
société.
Or, M. le Président, la loi dit que les dividendes qui seront
payés par cette société ne seront pas
déclarés par la compagnie, mais seront requis parl'actionnaire. Voilà qui est assez étonnant et voilà
ce qu'on n'a jamais vu dans aucune loi.
Incohérente cette loi 16 parce qu'elle va jusqu'à
déclarer que, même si c'est une société à
capital-actions, la Loi sur les compagnies du Québec ne s'applique pas
à cette société. Voilà qui est tout à fait
nouveau également.
Incohérente également parce que c'est la première
fois qu'on voit une société dont les règlements n'ont pas
à être ratifiés par les actionnaires, et on s'étonne
que nous, de l'Opposition, soyons tout à fait surpris des pirouettes
qu'a dû effectuer le gouvernement pour pondre une loi semblable?
Pourquoi souhaitons-nous le report, l'étude de cette loi 16 au
cours des prochains mois? La loi 16 c'est, en définitive, la mainmise du
gouvernement sur Hydro-Québec. Autrefois Hydro-Québec
était une société de la couronne qui répondait
à l'Assemblée nationale et dont les actionnaires étaient
les Québécois, les usagers. Dorénavant,
Hydro-Québec sera soumise aux volontés du gouvernement et de ses
fonctionnaires.
La loi 16 c'est le droit que s'arroge le gouvernement d'extirper des
fonds d'Hydro-Québec pour combler les trous créés par sa
mauvaise gestion des affaires publiques.
À quoi devrons-nous nous attendre à l'avenir? Puisque
dorénavant Hydro-Québec peut servir à n'importe quoi, on
devra s'attendre, en payant mensuellement nos comptes
d'électricité, à ce que les factures que nous acquitterons
servent à toutes sortes de choses. J'aimerais, à ce sujet,
évoquer un événement qui s'est produit il n'y a pas
tellement longtemps, alors que le gouvernement avait décidé en
avril 1980, par une décision du Conseil des ministres, de se donner la
possibilité de décréter des tarifs spéciaux dans le
cas de grandes entreprises. Récemment, dans le cas de la Reynolds
Aluminum, le gouvernement a décidé de fixer des tarifs tout
à fait spéciaux pour cette compagnie afin de l'inciter à
s'établir à Baie-Comeau sur la Côte-Nord. Or,
Hydro-Québec a déjà dans sa tarification les clauses qui
lui permettent de consentir des tarifs spéciaux à de grandes
entreprises. On comprendra que ces tarifs sont plus bas que ceux chargés
aux consommateurs normaux, puisque ces sociétés consomment
beaucoup d'électricité et en conséquence elles
bénéficient de ce qu'on peut appeler des tarifs de gros.
Or, dans le cas de la Reynolds, M. le Président, on a
été beaucoup plus loin que jamais auparavant et, afin
probablement d'acheter la paix dans un conflit ouvrier qui existait à ce
moment-là, on a sacrifié énormément d'argent. Si
vous consultez les gens qui sont au courant de l'affaire, vous vous rendrez
compte que le gouvernement a forcé Hydro-Québec à
concéder ce qui est estimé à au-delà de 1 000 000
000 $ au cours des dix prochaines années en faveur de la Reynolds
Aluminum. Ces sommes énormes que le gouvernement a
concédées à titre de subventions déguisées
à la Reynolds, au lieu de provenir du fonds consolidé de la
province, proviendront des goussets d'Hydro-Québec et, en
conséquence, seront acquittés par les usagers, ceux qui
consomment l'électricité, c'est-à-dire chacun d'entre
nous. (3 h 50)
Voilà une façon déguisée de ne pas avoir
à payer des subventions et de les faire payer par Hydro-Québec.
Dorénavant, on devra donc s'attendre qu'Hydro-Québec devienne un
payeur pour le gouvernement. On pourra probablement s'attendre
qu'Hydro-Québec comble les déficits des fêtes de la
Saint-Jean l'an prochain, comme cela s'est fait l'an dernier. On sait
jusqu'à quel point certains hauts fonctionnaires d'Hydro-Québec
se sont servis d'Hydro-Québec, du personnel d'Hydro-Québec et de
ses services dans une opération de tordage de bras. On ne saura plus,
dorénavant, où vont les fonds d'Hydro-Québec.
La loi 16, dont nous demandons le report, parle aussi des tarifs qui,
dorénavant, seront fixés par le ministre des Finances. Quand les
citoyens du Québec acquitteront leurs factures à l'avenir, qu'ils
se disent bien que ce n'est pas Hydro-Québec qui leur envoie des
factures et qui les augmente, mais c'est le gouvernement, c'est le ministre des
Finances qui déterminera le montant des factures mensuelles
d'Hydro-Québec.
Finalement, la loi 16 est une opération de taxation
détournée à laquelle nous ne pouvons pas et ne devons pas
souscrire. C'est pourquoi, je le répète, j'appuierai avec
enthousiasme la motion de report du député
de Gatineau. Je vous remercie, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Maskinongé.
Des voix: Bravo!
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Au moment où les citoyens s'apprêtent
à se lever pour venir écouter la période des questions
à l'Assemblée nationale, nous, les gens de l'Opposition,
essayons, avec énormément de difficulté, de faire entendre
raison à ce gouvernement concernant une taxe déguisée
qu'on s'apprête à délivrer au peuple du Québec.
J'écoutais un de mes collègues tantôt qui disait qu'un
éditorialiste avait mentionné que M. Parizeau serait
peut-être bien mieux d'aller jouer de la guitare électrique. Je
dirais qu'il doit profiter du temps pendant lequel il peut jouer de la guitare
électrique parce que, lorsque ce projet sera accepté, il n'aura
même plus le moyen de jouer de la guitare électrique, il faudra
qu'il gratte! Il faudra qu'il fasse comme les citoyens les plus démunis
du Québec, qu'il gratte davantage.
Cela ne m'a pas surpris que mon collègue de Gatineau
décide de faire une motion de report, pour la simple et bonne raison que
c'est le seul moyen que possède l'Opposition...
M. Fréchette: Grattons!
M. Picotte: Le ministre du Revenu dit "grattons" parce qu'il en
arrache et il en fait arracher aux citoyens. Mais vous ne perdez rien pour
attendre, il y a une belle petite loi à votre nom, mon cher ministre, et
on va s'amuser encore et passablement longtemps. On se propose même,
étant donné que la loi est encore pire, de faire appel à
d'anciens collègues qui ont déjà siégé en
cette Chambre pour venir vous parler de cette taxe déguisée.
Il n'y a rien de surprenant dans la présentation de cette motion
de report parce que c'est la seule façon que possède l'Opposition
pour demander à ce gouvernement d'éloigner cette taxe et d'y
penser deux fois avant d'agir de cette façon. J'écoutais le
brillant député de Vanier...
Une voix: Oh non!
M. Picotte: ... spécialiste de la caméra, qui
essayait de faire croire aux citoyens du Québec que ça n'a rien
donné à l'Opposition de faire des motions de report.
Rappelez-vous, lorsque M. Luc Cyr, je m'excuse... lorsque le
député de Crémazie, alors ministre des Affaires
municipales, avait présenté la loi no 31 autorisant les
municipalités à prélever une taxe sur les plaques
d'immatriculation d'automobile. Grâce à une motion de report, M.
le Président, le gouvernement a fait marche arrière.
Ce n'est pas grave, parce que, vous savez, le ministre des Transports du
temps, qui n'est plus ministre du tout aujourd'hui, a simplement trouvé
une autre façon, avec l'assurance automobile, de taxer ces mêmes
citoyens. Malgré tout, M. le Président, l'Opposition a
réussi, avec cette motion de report, à enlever une taxe aux
citoyens du Québec.
Ce gouvernement est un spécialiste de la taxe. Si on faisait une
motion de report toutes les fois que ces gens agissent de façon
hypocrite, on aurait passé notre temps à l'Assemblée
nationale à faire des motions de report, parce qu'il y aura une taxe sur
les plaques d'automobile.
Vous pouvez bien ne pas me trouver fort, M. le député de
Joliette-Montcalm, vous venez à peine de vous lever, ça
paraît, vous n'êtes pas encore réveillé.
Mais vous allez vous réveiller quand les citoyens vont vous dire
dans votre comté: Pourquoi avez-vous voté telle taxe? C'est
là que vous allez vous apercevoir que cela s'est passé à
l'Assemblée nationale.
M. le Président, j'espère, malgré tout, et j'ai une
raison encore spéciale - c'est une raison de coeur évidemment -
de demander de reporter la loi de douze mois, c'est parce que cela me fait de
la peine, que je suis peiné de m'apercevoir que toutes les fois qu'on a
des coups bas à faire à la population, on les fait faire par le
député de Saint-Maurice. Quand il a été le temps
d'enterrer la faune québécoise, M. le Président, on a fait
faire le plan des ZEC, des ZAC, des ZIC et des ZUC par le député
de Saint-Maurice, si bien qu'aujourd'hui, il n'y a presque plus de poisson dans
les rivières et que bientôt, il n'y aura plus de gibier dans la
forêt, M. le Président, il va y en avoir juste en face de nous
autres des gibiers.
On a fait du député de Saint-Maurice le fossoyeur de la
faune québécoise. Arrive le moment où il faut taxer les
citoyens les plus démunis, on prend encore le député de
Saint-Maurice et on lui fait présenter le projet de loi no 16. Il
devrait s'apercevoir que, si on l'a appelé 16, c'était pour lui
dire: Cesse donc de taxer les citoyens du Québec. C'est ça qu'on
veut dire. Voyons donc! C'est plein de bon sens.
M. le Président, c'est encore lui qui va faire en sorte que le
citoyen démuni du Québec va payer plus cher. Évidemment,
cela va être canalisé dans ce qu'on appelle le fil spécial
dont mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce a dit tantôt: II va
y avoir deux fils conducteurs. Un d'électricité et l'autre va
"ploguer" le citoyen pour lui faire payer des taxes
éhontées, camouflées, hypocrites. C'est ça qu'on va
faire faire par le député de Saint-Maurice, on fait cela à
un petit gars de la Mauricie. En tout cas, vous ne pouvez pas savoir comment
cela me peine. Probablement que, lorsqu'il aura fait ce coup bas, on va le
nommer ministre des Affaires extérieures, pour qu'il s'en aille le plus
loin possible. Les gens vont être tannés de le voir agir ainsi
à l'Assemblée nationale. M. le Président, il est encore
temps pour le député de Saint-Maurice de réviser ses
positions, même si ses collègues n'ont pas parlé
là-dessus. Il sait qu'il ne les approuve pas, d'ailleurs. Je suis
allé jaser en catimini avec quelques députés tantôt,
M. le Président, on m'a vu d'ailleurs, je suis bien libre pour en
parler. On nous dit: Les gars, ne lâchez pas. Vous avez bien raison. Que
le whip ne me demande pas de nommer des noms, parce qu'il va rester surpris,
mais je ne le ferai pas.
Des voix: Mentionnez-les!
M. Picotte: Même le leader du gouvernement me faisait signe
tantôt que cela ne pressait pas. Je ne sais pas s'il était
d'accord avec nous autres. Plus cela retarde, plus cela fait son affaire, parce
qu'il espère lui aussi que le député de Saint-Maurice va
finir par comprendre le bon sens. C'est ça la réalité.
Pardon? Oui, mais j'ai été inspiré par les trois poupons
qu'il y avait devant moi tantôt: le député de
Saint-Jacques, le député d'Abitibi et le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue. (4 heures)
Je pense que le gouvernement devrait se rendre compte que les citoyens,
dans ce contexte économique qu'on vit présentement, contexte
difficile, en ont assez d'être taxés. Il y a d'autres
façons de taxer à d'autres endroits, j'imagine. Faites-le
clairement, vous n'êtes pas obligés de faire comme le premier
ministre, toujours passer par la porte d'en arrière lorsque cela ne fait
pas votre affaire, faites-le clairement. Dites aux citoyens: On a besoin de
taxes et on vous taxe tout simplement, mais qu'on sache que ce sont des taxes
décrétées directement par le ministre des Finances. Ne
taxez pas en disant que c'est la faute d'Hydro-Québec, parce que c'est
toujours la faute de tout le monde avec vous autres, mais c'est toujours le
même citoyen qui paie.
Cependant qu'il est encore temps, j'espère qu'il y aura
quelqu'un, à l'intérieur du caucus du Parti
québécois, qui saura ramener ce gouvernement à la raison.
Il est vrai que les ministres sont coupés de la réalité;
à part quelques-uns qui n'ont pas grand-chose à faire, qui sont
ici de temps en temps, ils sont coupés de la réalité parce
qu'ils volent, eux autres, ils sont hauts, ils sont plus hauts que le peuple.
Ce caucus de députés fort sympathiques que l'on connaît,
d'ailleurs, des "back-benchers", je le sais, on leur demande d'être tout
simplement des robots à voter, dans certaines circonstances. Mais, en
caucus, ne nous le dites pas, ne dites pas que cela vient de nous autres, ne
dites pas qu'on vous a sensibilisés à ça, mais prenez donc
vos responsabilités et demandez donc au Conseil des ministres de
surseoir à cette taxe. Donnez-vous donc un an pour penser à votre
affaire. Donnez donc un an aux citoyens du Québec pour se ramasser assez
d'argent pour être capables de vous payer toutes les autres taxes que
vous allez pouvoir décréter dans le futur budget. Ce n'est pas
surprenant que le ministre des Finances, qui est fort sympathique et qui est un
fort gentilhomme, administre les finances du Québec de la façon
dont il les administre parce qu'il a déjà fait ses preuves avec
le journal Le Jour, et j'ai l'impression que les gens en ont soupé.
M. le député de Gatineau, la population du Québec
vous remercie d'avoir fait une motion de report, en espérant que ce
gouvernement saura comprendre le bon sens une fois pour toutes.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Bonaventure et leader de l'Opposition.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, pour dire
comme Mme la députée de Johnson, c'est mon tour. Il est 4 h 04
exactement, du matin, oui, et il y aura bientôt 24 heures que nous sommes
ici réunis, à l'Assemblée nationale. J'imagine que cela
fait partie de la réforme du parlementarisme préconisée
par le Parti québécois. Cela doit faire partie des voeux
exprimés à maintes reprises par ces gens lorsqu'ils
étaient ici, qui se plaignaient évidemment des sessions à
la vapeur, etc., des projets de loi que nous étudiions un peu tard dans
la soirée. Là, il passe 4 heures du matin et on essaie à
ce moment-ci de communiquer avec nos concitoyens sur un projet de loi
extrêmement important. Si nous sommes encore ici, c'est parce que nous
sommes conscients de la responsabilité qui est nôtre et, en
même temps, nous voulons simplement faire notre devoir de parlementaires
et de citoyens.
M. le Président, je veux d'abord féliciter le
député de Gatineau pour avoir présenté cette motion
de report, la seule d'ailleurs que notre règlement nous permet de
présenter en deuxième lecture. M. le Président, reporter
ce projet de loi à douze mois, c'est d'abord dire qu'il n'est pas dans
l'intérêt de la population. Si ce n'était pas, M. le
Président, de la condition de faillite
du gouvernement du Parti guébécois, croyez-vous
réellement que nous aurions devant nous ce projet de loi? Personne ne
peut défendre ce projet de loi, même pas les meilleurs orateurs et
les meilleurs communicateurs du Parti québécois. Eux qui s'en
vont bientôt à un congrès plénier, j'espère
qu'ils vont rencontrer des militants qui se feront voir, connaître et
entendre et qui protesteront contre ce projet de loi, ce qu'il contient et les
conséquences qui s'ensuivront s'il devait être adopté.
M. le Président, nous avons droit également et plus que
jamais à un débat public, qui n'a pas eu lieu. Lors des
élections du 13 avril 1981, qui d'entre vous a parlé de cela?
Jamais je n'ai entendu ni vu les ministres en particulier se promener dans les
comtés, le mien inclusivement; jamais n'a-ton parlé d'un tel
projet de loi ou de telles intentions du gouvernement. Oui, c'était
caché dans le budget à je ne sais quelle page, ou sous-paragraphe
untel, qu'il y aurait des redevances. Mais est-ce qu'on a parlé
réellement de la signification de ce projet de loi no 16? Jamais, M. le
Président, et nous arrivons ici en fin de session maintenant, en pleine
nuit, et on nous demande: Votez-nous cela au plus tôt, on a besoin
d'argent. Comme on l'a dit tout à l'heure, les créanciers sont
à la porte. M. le Président, ce n'est pas un projet de loi digne
d'un gouvernement québécois.
Ce que nous avons voulu faire ensemble en 1962 avec l'élection
sur la nationalisation de l'électricité; lorsque nous avons
donné suite aux voeux de la population en 1963, c'était pourquoi,
M. le Président? Quel était le mandat que le peuple nous donnait?
C'était d'avoir une société Hydro-Québec qui devait
fournir de l'électricité aux taux les plus bas compatibles avec
une saine administration. M. le Président, ce projet de loi que nous
avons devant nous veut dire qu'Hydro-Québec devra fournir
l'électricité. A quel taux? Aux taux compatibles avec les
déficits du gouvernement, M. le Président, et non pas avec une
saine administration financière, non plus aux taux les plus bas, M. le
Président. Puis-je citer, si on me le permet, très
brièvement, un éditorial de M. Yvan Guay dans la Presse du 12
septembre 1981? Après avoir évoqué les démissions
qui ont eu lieu à Hydro-Québec depuis qu'on connaît les
intentions véritables du gouvernement et particulièrement du
ministre des Finances, après avoir évoqué les
démissions de M. Lucien Saulnier, de M. Edmond Lemieux et de M. Robert
Boyd, l'éditorialiste nous dit ceci: "Bien sûr, les
démissions des grands commis de l'État se font dans un rituel
selon lequel les démissionnaires invoquent des raisons personnelles et
le gouvernement affirme regretter sincèrement le départ de
personnes aussi dévouées et compétentes. Mais l'hypocrisie
de toute cette phraséologie ne trompe personne, surtout pas les
intéressés. En l'occurrence, le départ de M. Boyd,
annoncé pour le 15 décembre prochain, consacre la fin
d'Hydro-Québec." Il continue en disant: "...telle qu'elle avait
été créée à la suite de l'élection
référendum de 1962, qui portait sur la nationalisation des
entreprises hydroélectriques." (4 h 10)
II continue, M. le Président: "II est assez ironique de constater
que l'un des principaux accoucheurs d'Hydro-Québec, M. Lévesque,
alors député libéral, soit maintenant le principal
fossoyeur de cette entreprise collective." Il poursuit: "Les citoyens doivent
se rendre compte que le projet de loi no 16 de M. Parizeau va changer
totalement la nature d'Hydro-Québec; cette société
d'État à vocation économique avait été
créée autonome dans le but de la rendre indépendante des
partis en l'affranchissant des politiques à courte vue des
gouvernements. La charte d'Hydro-Québec l'obligeait à satisfaire
tous les besoins en électricité des citoyens aux plus bas
coûts compatibles avec une saine gestion de l'entreprise. C'est pourquoi
tous les surplus de revenus d'Hydro étaient réinvestis dans
l'entreprise pour améliorer le service et réduire les besoins
d'emprunt. Or, le projet Parizeau va obliger l'Hydro à verser au
trésor public la moitié de ses surplus, soit au moins 900 000 000
$ par année, dès 1985."
C'est-à-dire qu'on va aller siphonner près de 1 000 000
000 $ par année. Mais qu'est-ce que ça va faire, ça, M. le
Président? Évidemment, ça va s'ajouter à tout ce
qui a été siphonné par ce gouvernement depuis quelques
mois en particulier. On s'est attaqué aux primes d'assurance maladie, on
a doublé ça pour l'employeur, après avoir fait tout ce
qu'il était possible de faire pour aller chercher de l'argent, emprunter
à la Caisse de dépôt qui est supposée être le
chien de garde des épargnes des Québécois et des
travailleurs québécois. On est allé dans les permis de
conduire, dans l'immatriculation des véhicules automobiles, dans
l'assurance automobile. On est allé même annuler ce qu'on avait
promis, dans l'impôt sur le revenu. On s'est fait applaudir ici
même dans cette Chambre, à l'occasion d'un discours sur le budget
qui ne présentait qu'à peu près cela de positif.
Après avoir été applaudi pendant quelques mois, lorsque le
temps vient de mettre en application cette bonne nouvelle, on l'annule, M. le
Président. Impôt sur les successions, tous les impôts
imaginables, on est allé siphonner.
Maintenant, on s'en va où? À HydroQuébec, une
institution nationale, une institution dont nous sommes fiers qui devient
maintenant simplement une machine à aller chercher de l'argent pour
essayer de
renflouer un gouvernement en faillite. C'est ça, la
véritable signification du projet de loi no 16. Je vous dis que, si nous
faisons une motion de report à douze mois, ce n'est pas simplement par
caprice. Nous ne sommes pas ici, à 4 heures douze minutes du matin,
simplement pour le plaisir d'y être et nous devrons être ici encore
dans quelques heures, dès ce matin, pour continuer cette bataille. Nous
allons faire cette bataille au nom des citoyens du Québec, M. le
Président. Nous sommes fiers d'apporter cette motion ce soir. Et vous,
vous ne devriez jamais être fiers de ce projet de loi qui n'a rien
à faire avec la promotion des meilleurs intérêts
d'Hydro-Québec et de la société québécoise.
Vous devriez avoir honte, à ce moment-ci, d'apporter un tel projet de
loi qui n'est qu'une opération de camouflage, un peu comme le projet de
loi que nous présente le ministre du Revenu. Imaginez-vous, M. le
Président, lorsqu'on sait que le dernier siphonnage a été
la taxe sur l'essence, de 20% à 40%, on a doublé encore, on a
monté de 0,30 $ le gallon dans une seule nuit.
Je termine en disant ceci: Regardez la transparence de ce gouvernement,
lorsqu'on présente le projet de loi pour donner suite à ce
deuxième budget dans la même année du gouvernement actuel;
on a le projet de loi no 39, c'est là qu'on parle des 40% sur l'essence,
0,30 $ le gallon, mais on appelle ça Loi modifiant le régime des
droits relatifs au commerce des boissons alcooliques et certaines dispositions
législatives. Est-ce que c'est assez bien camouflé, M. le
Président? Gouvernement de camouflage, M. le Président.
Gouvernement indigne qui devrait démissionner.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
d'amendement sera adoptée?
Des voix: Adopté. Adopté.
M. Charron: M. le Président, en vertu de l'article 106, je
propose que le vote sur cet amendement ait lieu juste avant les affaires du
jour.
M. Levesque (Bonaventure): C'est votre discrétion.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, c'est ma
discrétion, M. le leader de l'Opposition, tout comme aussi la coutume
veut que jamais le président ne refuse une telle demande du leader. En
conséquence, le vote sera reporté avant l'appel des affaires du
jour.
M. Charron: M. le Président, je propose l'ajournement de
la Chambre à dix heures ce matin.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée? Adopté. La Chambre est ajournée à dix
heures ce matin.
(Fin de la séance à 4 h 15)