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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le jeudi 10 décembre 1981 - Vol. 26 N° 18

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures dix-huit minutes)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Moment de recueillement.

Vous pouvez vous asseoir. Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.

Avis de la Commission de la fonction publique

sur deux règlements au Conseil du trésor

Conformément aux dispositions de l'article 30 de la Loi sur la fonction publique, je dépose copie de l'avis de la Commission de la fonction publique sur deux règlements au Conseil du trésor.

M. le leader, au nom du ministre de l'Éducation.

Rapports annuels de l'Ordre des arpenteurs-géomètres

et de la Corporation professionnelle des médecins

M. Charron: Au nom de mon collègue, M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel 1980-1981 de l'Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec et le rapport annuel 1980-1981 de la Corporation professionnelle des médecins du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapports déposés.

M. le ministre de l'Environnement.

Rapport annuel du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement

M. Léger: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 1980-1981 du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Rapport annuel de l'Office du crédit agricole

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1981 de l'Office du crédit agricole du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Questions orales des députés.

M. le député de Jean-Talon.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Position du congrès

du Parti québécois

et prospectus d'émissions

d'obligations du Québec

M. Rivest: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Nous avons pris connaissance du télégramme que le ministre des Finances a adressé en fin de soirée, hier, au premier ministre affirmant sa croyance à l'accession du Québec à la souveraineté par la voix exprimée par le premier ministre, à savoir que cela devait se faire par une majorité des électeurs québécois; de plus, qu'il devait y avoir dépôt d'une offre d'association.

Est-ce que l'on doit interpréter le sens du télégramme du ministre des Finances comme l'expression de sa volonté de se dissocier des conclusions du congrès du Parti québécois?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, le député de Jean-Talon propose des choses qui ne sont pas toutes opposées. Il est utile que je relise la lettre que j'ai fait parvenir, hier, au premier ministre et que j'ai rendue publique: "M. le premier ministre, compte tenu de l'ambiguïté que certaines de mes positions antérieures ont pu entraîner dans l'opinion publique, je tiens à vous dire que j'accepte volontiers d'appuyer les deux conditions fondamentales que vous avez posées quant au cheminement vers la souveraineté, c'est-à-dire la nécessité d'offrir une forme d'association avec le Canada et, d'autre part, quelle que soit la forme que prendra la consultation des Québécois sur leur avenir, que la majorité d'entre eux soient d'accord pour que la souveraineté puisse être assurée. "Vous êtes, M. le premier ministre, depuis longtemps et pour longtemps encore celui qui représente, articule et oriente les espoirs des Québécois. Je tiens donc à vous

assurer de ma profonde conviction que vous devez rester à la tête du parti."

Je laisse maintenant au député de Jean-Talon les exégèses qu'il voudra tirer de ma lettre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je regrette que le ministre des Finances hésite devant l'Assemblée nationale, contrairement au chef du gouvernement, à affirmer publiquement qu'il se dissocie des conclusions du Parti québécois. J'inviterais le ministre des Finances à réfléchir sur la réponse que le premier ministre a fournie lundi dernier au chef de l'Opposition, à savoir que le moment de réflexion que le premier ministre s'accordait correspondait essentiellement - le premier ministre me corrigera si j'interprète mal ses propos - à sa difficulté de concilier ses fonctions de chef de gouvernement et ses fonctions de chef d'un parti qui s'engagerait dans la voie dictée par le congrès du Parti québécois en ce qui concerne la souveraineté.

Or, le ministre des Finances a, en tant que ministre des Finances, des responsabilités également très précises et très particulières. Il est en outre autorisé par décret à approuver les prospectus d'émissions d'obligations du gouvernement. Il est le seul à avoir ce pouvoir et cette autorité. Or, dans les prospectus d'émissions d'obligations qui constituent la base contractuelle adressée à la Security Actions Commission, par exemple, aux États-Unis ou aux commissions des valeurs mobilières, on décrit, bien sûr, la nature des émissions d'obligations du Québec.

Une voix: Est-ce que c'est une question additionnelle?

M. Rivest: Oui, un instant. On donne la structure d'organisation politique du Québec et on ajoute - et c'est la responsabilité du ministre des Finances - des considérations d'ordre politique qui sont extrêmement importantes. Le ministre des Finances sait la manière dont ces textes doivent être rédigés parce qu'il s'agit du taux d'intérêt, des intérêts vitaux, je pense, des Québécois et de la crédibilité du Québec sur les marchés financiers et économiques internationaux.

Or, M. le Président, en 1976...

Des voix: Question.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, votre question, s'il vous plaît!

M. Rivest: Je demande au ministre des Finances comment il va assumer la plénitude de ses responsabilités quand, depuis 1976, on sait le volume des emprunts que le gouvernement du Québec ou Hydro-Québec et les autres sociétés ont contractés.

Des voix: Question. C'est un discours. M. Rivest: En 1976...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je pense qu'il serait temps que vous posiez votre question.

M. Rivest: M. le Président, est-ce que, pour les emprunts passés contractés entre 1976 et aujourd'hui, le ministre des Finances va corriger les prospectus? Ces prospectus se lisaient comme suit, M. le Président, et je vais en faire une traduction rapide pour ne pas impatienter davantage nos collègues: "The state policy of the Parti québécois", et non du gouvernement, - c'est dans le prospectus - considérant l'avenir du Québec, de la province de Québec, est d'atteindre et de réaliser la souveraineté politique du Québec par des moyens démocratiques tout en maintenant une union, une association économique et commerciale avec le reste du Canada. Est-ce que le ministre des Finances doit, en vertu des règlements de la Commission des valeurs mobilières, prévenir les détenteurs obligataires du Québec, les créanciers du Québec, du changement survenu à l'intérieur du Parti québécois parce que ces emprunts ont été contractés sur la base de ces prospectus? Deuxièmement, de quelle manière le ministre des Finances va-t-il rédiger, lui qui semble vouloir se dissocier des conclusions du parti...

Une voix: Ce n'est pas une question.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. le député.

Une voix: C'est une bonne question. M. Rivest: De quelle manière va-t-il...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît'. M. le député, en terminant votre question.

M. Rivest: Je répète ma question au cas où le ministre des Finances ne l'aurait pas entendue à cause des bruits. Est-ce que le ministre des Finances va corriger la rédaction puisque c'est le Parti québécois et non le gouvernement? Deuxièmement, pour les emprunts à venir, de quelle manière va-t-il - et lui seul a l'autorité pour le faire -rédiger ce texte? Comment va-t-il concilier ses opinions, celles-là mêmes du premier ministre et du gouvernement et celles du Parti québécois, et quelles seront les conséquences économiques et financières pour les Québécois des résultats du congrès du Parti québécois?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Parizeau: Tout cela est un peu bizantin, M. le Président. Oui, tout à fait. Là, je comprends...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Parizeau: ... fort bien que le député de Jean-Talon n'a absolument pas regardé la proposition 17 du congrès. Il a voulu se transformer en exégète du congrès, mais il n'a même pas lu les textes si je comprends bien. Il n'y a rien, dans la proposition 17, puisqu'il se réfère à ce qui a été adopté au congrès du Parti québécois, qui contredit ce qui peut apparaître dans le prospectus. C'est une résolution votée par le congrès. Elle indique, au sujet de l'association: "s'il le juge à propos", parlant clairement du gouvernement. Le gouvernement, clairement, dit: Oui, il le juge à propos. Donc, la souveraineté-association telle que décrite dans les prospectus est parfaitement correcte, le demeure et le demeurera.

Quant à ma façon de remplir mes responsabilités à l'égard de ces prospectus, il est évident que les prospectus n'ont jamais reflété autre chose que le point de vue et la politique du gouvernement.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon, sans préambule.

M. Rivest: Je prends volontiers la parole du ministre des Finances, mais si la différence n'est pas à ce point substantielle, comment explique-t-il que le premier ministre menace de démissionner sur la résolution 17?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Je ne pense pas que le premier ministre soit jamais intervenu quant à la formule 17, ou enfin, la proposition 17. Le premier ministre a indiqué, ce que je crois être éminemment raisonnable à cet égard, que manifestement le congrès ne met pas suffisamment l'accent sur l'association et son contenu. À cet égard, je pense que pour ce qui a trait à mes positions personnelles là-dessus, la lettre que j'ai envoyée hier devrait satisfaire les scrupules, un peu curieux d'ailleurs, du député de Jean-Talon. À moins vraiment que le député de Jean-Talon veuille passer au Parti québécois et veuille absolument savoir dans quoi il s'embarque. Cela, je le souhaite vivement, mais je n'ai pas l'impression que ce soit pour demain. (10 h 30)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Que le ministre des Finances se rassure, le député de Jean-Talon n'a pas l'intention de passer au Parti québécois. Je répète ma question: En regard de la dette obligataire du Québec, en regard des emprunts futurs et en regard, surtout, des conséquences économiques et financières que cela peut avoir - on ne met pas cela dans les prospectus pour le simple plaisir - est-ce que le ministre...

M. Charron: M. le Président, question de règlement. C'est exactement la même question que tout à l'heure, on ne peut pas l'appeler question additionnelle.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, votre question.

M. Rivest: Est-ce que je peux répéter, M. le leader du gouvernement...

M. Charron: Non.

M. Rivest: ... par votre bienveillance, que c'est en regard de la question que j'ai posée sur le prospectus? C'est important pour l'intérêt économique des Québécois. D'après ce que je crois comprendre - le ministre des Finances me corrigera - il indiquerait à cette Chambre, par la nature de ses réponses, que la résolution adoptée par le Parti québécois ne change substantiellement rien de ce qui est écrit ici,, dans le prospectus, alors qu'il demande l'avis du premier ministre.

Peut-être devrais-je poser ma question au premier ministre et lui demander si, à son avis, le congrès du Parti québécois change radicalement ce qui est ici inscrit dans le prospectus des emprunts du gouvernement sous la signature et l'approbation du ministre des Finances en vertu d'un décret ministériel. Je pose cette question au premier ministre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier ministre.

Une voix: On va en avoir, une réponse, là.

M. Lévesque (Taillon): Ce qui m'importe, au point de vue de la crédibilité du gouvernement et de la crédibilité, bien sûr, du ministre des Finances dans l'exercice de ses fonctions, c'est quand même d'abord et avant tout - cela a été le début de la réponse du ministre des Finances - la lettre que j'ai reçue de lui hier. Je ne vois pas pourquoi on ferait des exégèses à n'en plus finir, parce que chaque parti peut avoir ses problèmes d'ajustement. Je ne pense pas que

ce soit à l'Opposition de régler les nôtres, pas plus qu'on prétendra régler ceux que vous avez.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Question principale, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question principale.

La responsabilité du premier ministre

M. Gratton: J'aimerais poser ma question au premier ministre, laquelle pourra peut-être alimenter la réflexion qu'il poursuit présentement. Selon ses déclarations des derniers jours, il songerait à démissionner de son poste de président du Parti québécois et, peut-être, à partir de là, comme premier ministre, parce qu'il est profondément indigné par deux décisions prises par les délégués au congrès péquiste de fin de semaine.

Premièrement, celle d'exclure toute offre d'association au reste du Canada et, deuxièmement, surtout, celle de considérer une simple majorité des sièges aux prochaines élections comme suffisante pour déclencher le processus d'accession à l'indépendance. Pourtant, le premier ministre a lui-même souscrit à chacune de ces deux idées dans le passé et, notamment, entre autres occasions, en octobre 1971, alors qu'il déclarait au journaliste Robert McKenzie, du Toronto Star: "Si vous avez la majorité au Parlement, vous êtes le gouvernement. Voilà la tradition parlementaire britannique démocratique et c'est ce que nous appliquerons le jour où nous formerons le gouvernement élu pour appliquer un programme que chacun connaît." À ce moment, le programme que chacun connaissait c'était l'indépendance.

Deuxièmement, M. le Président, au lendemain du dernier conseil général en novembre dernier, le premier ministre a répété plusieurs fois que l'association n'était pas un élément essentiel dans son option, allant même jusqu'à dire que le trait d'union entre les mots "souveraineté" et "association", il n'y avait jamais tenu.

Ma question est la suivante, M. le Président. Compte tenu de ses déclarations et des propos incendiaires et même à certains égards grossiers que le premier ministre a lui-même tenus depuis le 5 novembre dernier, ne considère-t-il pas que, si ces deux décisions qui soulèvent maintenant son indignation sont imputables, comme il l'a lui-même affirmé, à la manipulation des délégués par ce qu'il a qualifié d'agents provocateurs, il est lui-même le principal agent provocateur dans cette affaire?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, j'aurais le goût de ne pas répondre au député parce qu'il est évident qu'on essaie de nous rentrer dans toutes sortes de plomberies invraisemblables, mais je lui rappellerai simplement ceci. On a un parti politique qui a toujours considéré que les idées étaient importantes, mais que les idées à l'état pur, cela n'existe pas dans le monde. Il y en a d'autres qui considèrent que les idées cela n'a pas d'importance, qu'il y a seulement les intérêts qui comptent. Ce parti qui est venu au monde en 1968, c'est sûr, au début, pendant quelques années sur certains points, il a cherché sa pensée. C'est sûr. Il y a une certaine tradition britannique qu'on examinait aussi, mais il est venu, à un moment donné, une sorte de décision qui s'est manifestée pour la première fois clairement aux élections de 1973. Aux élections de 1973, on disait bien qu'une victoire parlementaire amorcerait un processus, mais que ce processus ne pouvait se réaliser sans l'approbation d'une majorité populaire.

À ce moment, c'était sous la forme qu'un projet constitutionnel serait soumis à l'ensemble de la population; si ce n'était pas approuvé, bien, forcément, cela n'irait pas plus loin. Depuis, notre pensée comme parti n'a jamais dévié là-dessus. Il faut - quant à moi, la mienne ne dévie pas non plus - une majorité populaire. Pour ce qui est du trait d'union, etc., le député ne me rentrera pas dans la plomberie parce que ça, c'est vraiment une chose sur laquelle la réflexion se fait de ce côté-ci, elle ne se fait pas de l'autre, Dieu sait.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Le premier ministre nous dit que la pensée du parti n'a jamais dévié depuis 1973. C'est de son propre aveu et tout le monde peut réaliser que la pensée du parti a dévié en fin de semaine dernière puisque le premier ministre lui-même s'interroge sur l'opportunité de rester comme président du parti.

Ma deuxième question additionnelle, M. le Président, je la pose très candidement au premier ministre.

Des voix: Ah! Ah!

M. Gratton: Je suis sûr qu'il va me répondre tout aussi candidement, M. le Président. Dans la plomberie dont il parle,

est-ce que, finalement, la vraie raison de cette crise de conscience du premier ministre n'est pas plutôt les nombreux scandales qui ont été dénoncés...

Des voix: Ah!

M. Gratton: ...depuis quelques semaines, l'affaiblissement sans précédent de la position du Québec à la suite des négociations constitutionnelles, notamment la perte du droit de veto, la situation catastrophique sur le plan financier au Québec? Bref, M. le Président, est-ce que ce n'est pas tout simplement un constat d'échec lamentable après cinq ans de gouvernement qui amène le premier ministre à songer à démissionner?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pense que la question mérite une seule et simple réponse: II est évident que jour après jour l'Opposition exploite de son mieux -c'est de bonne guerre - les difficultés que traverse actuellement la société québécoise.

Des voix: Voyons donc!

M. Lévesque (Taillon): C'est sûr, c'est sûr.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

S'il vous plaît, à l'ordre! M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): C'est, évidemment, un des soucis que quiconque est un peu responsable dans le poste que j'occupe en ce moment ne peut pas éviter d'avoir. Tout cela fait partie, évidemment, du contexte dans lequel on se débat, c'est sûr. C'est tout ce que je peux dire pour l'instant.

Le Président: Question principale, M. le député de Beauce-Sud.

Le boycottage des conférences fédérales-provinciales sur l'agriculture

M. Mathieu: Oui. Merci, M. le Président.

M. le Président, tandis que les agriculteurs se demandent s'il est possible de vivre de l'agriculture dans la conjoncture économique actuelle, le ministre, lui, boycotte les forums privilégiés où se dessinent les grandes stratégies agricoles pour les années à venir. Fidèle à la consigne séparatiste, le ministre de l'Agriculture refuse de participer à plusieurs colloques, conférences ou retire ses fonctionnaires de divers comités. Exemple: il y avait un comité de formé, Québec-Canada, pour le problème du gel des pommiers. Le 9 novembre, le ministre a retiré ses fonctionnaires. Symposium des plantes fourragères: Québec absent. Je ne les énumérerai pas tous.

M. le Président, il y a une conférence qui s'est terminée hier à Ottawa: Le défi des années quatre-vingt, une stratégie agro-alimentaire pour le Canada. Cette conférence avait pour but d'établir les perspectives agricoles des dix ou quinze années à venir. Elle faisait suite à un document soumis depuis le mois de juillet.

On sait que les dépenses fédérales en agriculture, au Québec, sont très importantes.

Une voix: II a sauvé un voyage en avion.

M. Mathieu: Dépenses fédérales en agriculture, 247 500 000 $; stabilisation des revenus comprenant les produits laitiers, 153 000 000 $; production et commercialisation, 35 000 000 $ et j'en passe, pour arriver finalement à un chiffre global d'environ 476 000 000 $, sans compter les prêts par la Société du crédit agricole. Pendant que se partage l'assiette au beurre...

Le Président: Question, s'il vous plaît.

M. Mathieu: ... le Québec est absent. Cela inquiète les agriculteurs du Québec, notamment les producteurs de lait. (10 h 40)

La question que je pose au ministre est celle-ci: Premièrement, après la publication du document Le défi des années quatre-vingt, par le ministre de l'Agriculture du Canada, en juillet 1981, est-il exact que le ministre de l'Agriculture a refusé, à la demande de M. Wheelan, ministre fédéral de l'Agriculture, de rencontrer, à plusieurs reprises, le ministre fédéral de l'Agriculture?

Deuxièmement, ne croit-il pas qu'en boycottant ainsi les conférences fédérales-provinciales, il agit au détriment des agriculteurs du Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, j'ai remarqué que le député de Beauce-Sud a eu des renseignements sur la conférence fédérale-provinciale qui a eu lieu cette semaine, mais il n'a pas mentionné la partie la plus intéressante qui était essentiellement le dévoilement de statistiques du gouvernement fédéral. Elles disent que pour l'année 1982, selon les prévisions du gouvernement fédéral, les revenus nets des agriculteurs canadiens passeraient de 4 800 000 000 $ à 3 400 000 000 $, une diminution de 15%.

Dans le même document, le gouvernement fédéral dit: Alors que les revenus des agriculteurs canadiens baisseront de 15%, ceux des agriculteurs québécois augmenteront de 15%. J'ai trouvé les chiffres du député de Beauce-Sud un peu forts. Je lui ferai remarquer que la seule différence qu'il y a entre les politiques de l'ensemble du Canada et celles du Québec -c'est peut-être une des raisons, j'imagine, peut-être pas la seule, mais une des bonnes raisons - c'est que les politiques du Québec sont différentes de celles du reste du Canada, de sorte qu'il y a une différence aussi grande que ça dans les augmentations de revenus. Ce n'est pas la seule raison, c'est une des raison. Le document dont vous parlez, M. le Président - justement, un journaliste m'a demandé ce que j'en pensais, j'ai dit: Pas beaucoup. En anglais "Not much". Il a dit: Vous pensez la même chose que les agriculteurs. Il avait demandé l'opinion des agriculteurs. Le député de Beauce-Sud ne semble pas l'avoir demandée -c'est un document qui a été publié pour le début des années quatre-vingt, qui est un ensemble de banalités où il n'y a aucune perspective d'indiquée, aucune direction concrète d'indiquée. Quant aux perspectives de rencontre avec M. Wheelan, j'ai offert, au cours de l'automne, à peu près cinq dates différentes de rencontre avec M. Wheelan mais - et je ne le blâme pas, parce que je sais quelles peuvent être ses activités - il n'était pas libre à aucune des dates que je lui ai proposées. À cette conférence, on donnait les données statistiques qu'on peut prendre dans les publications; d'ailleurs, vous avez des publications, vous pouvez les lire, je peux les lire aussi.

Concernant la politique des grains de provende, le gouvernement fédéral a refusé la position du Québec. Cette position est connue puisque nous l'avons énoncée. Le ministre de l'Agriculture du Québec, avec l'Union des producteurs agricoles, la Coopérative fédérée du Québec et l'Association des meuniers québécois a énoncé la politique du gouvernement concernant les grains de provende. Le gouvernement libéral, à Ottawa, n'a pas voulu accéder aux demandes du monde agricole dans l'ensemble du Québec. Aller répéter la même chose à une conférence fédérale-provinciale... Je pense que c'est une position connue de tous comme étant équitable pour les grains de provende au Canada.

Des voix: Bravo!

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Si je comprends bien, M. le Président, le ministre agit déjà comme si le Québec était séparé. Il a aqi de la même manière.

Une voix: Très bien!

M. Mathieu: Est-ce qu'il pense ainsi agir dans l'intérêt des producteurs laitiers quand on sait que le Québec produit 52% du lait du Canada et représente 26% de lapopulation du Canada?

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, si ce que le député de Beauce-Sud dit est vrai, ce doit être bon. S'il dit que je me comporte déjà comme si j'étais dans un Québec séparé, ça donne les résultats qu'on vient de voir. Le fédéral prévoit 15% d'augmentation du revenu des agriculteurs au Québec; cela voudrait dire que c'est une bonne attitude.

Je dois dire que je ne peux pas agir comme dans un Québec séparé, c'est faux, mais il y a des conférences qui ne sont pas utiles. Il y a un ensemble de rencontres, au fond, qui ne sont pas véritablement utiles. Dans les rencontres utiles - le premier ministre l'a mentionné - savoir les rencontres à caractère économique où il sera nécessaire d'être représenté, nous irons. Par exemple, lundi, je suis allé à la conférence concernant, pour l'année 1982, le plan d'allocation des quotas dans les poissons parce que ça avait une implication directe sur les pêcheurs québécois. Mais quand il s'agit de remettre un document qui est public depuis des mois et d'avoir des statistiques qui sont publiées dans des revues, je vais vous dire bien franchement, je pense que j'ai épargné de l'argent à la province.

Le Président: Question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: On veut Hermann! On veut Hermann!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député.

Le problème du chômage

M. Scowen: Ma question s'adresse au ministre d'État au Développement économique. Lundi, je lui ai posé une question concernant le problème très grave dans le domaine de l'emploi au Québec et il n'y a pas répondu. Depuis ce temps, on a reçu plusieurs appels de gens qui ont insisté pour qu'on pose à nouveau la question. Dans sa réplique, le ministre demandait un délai de quelques mois pour améliorer sa politique économique et pour éclaircir ses idées. Il a insulté à peu près tout le monde, il a blâmé les autres, mais il n'a pas répondu.

Ce matin, je veux reposer la question très clairement et très sobrement. Qu'est-ce que le ministre a l'intention de faire, dans l'immédiat, pour tenter de régler ce problème alors qu'on a vu, depuis un an, la création de 180 000 emplois dans les autres provinces du Canada et une perte de 67 000 emplois au Québec.

Le Président: M. le ministre.

M. Landry: La question du député de Notre-Dame-de-Grâce est posée en termes plus sobres que lorsqu'il a posé l'autre question et je vais essayer de répondre en termes plus sobres. J'ai été vraiment indigné dans ma réponse, l'autre jour, et je l'ai laissé voir peut-être d'une manière intempestive. Ce matin, mon indignation est la même et je vais essayer de la laisser voir d'une façon plus articulée.

Premièrement, lorsque les taux d'intérêt étaient compatibles avec un développement économique acceptable, nous avons mis en place un réseau de politiques économiques au cours de notre premier mandat, qui a donné des résultats que le Québec n'avait jamais connus en termes de création nette d'emplois...

Des voix: ...

M. Landry: Est-ce que j'ai, M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Landry: Est-ce que j'aurais, par hasard, interrompu le député lorsqu'il posait sa question?

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Landry: Est-ce que mes collègues, de ce côté-ci de la Chambre, auraient nui au député de Notre-Dame-de-Grâce dans son expression?

Une voix: Non.

M. Landry: Ne penseriez-vous pas normal, M. le Président, que nos amis d'en face fassent de même pendant que je réponds?

Des voix: ... Une voix: Oui.

M. Landry: Je continue ma réponse en disant que ce réseau de politiques énonomiques passait par la concertation de tous les agents, syndicats, patrons, gouvernement. Il a débouché sur un énoncé de politique économique qui a fait que le Québec a été la seule province du Canada, incluant le gouvernement canadien, à avoir une politique économique claire qui s'est traduite par le programme de textile, vêtement, chaussure, bonneterie, meuble, qui a littéralement sauvé cette industrie alors que les fédéraux s'apprêtent de nouveau à l'assassiner - nous sommes d'accord, les gens d'en face et moi-même sur ce sujet - le programme de rééquipement et de relance des pâtes et papiers alors que notre industrie se repliait de 3% de sa valeur de marché, par année, depuis quelques années, les programmes agricoles dont je ne parlerai pas puisque mon collègue de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation les a si bien illustrés et qui ont fait de l'agriculture et de l'agro-alimentaire le fer de lance du développement économique. L'opération solidarité économique...

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement. (10 h 50)

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, le député de Notre-Dame-de-Grâce a posé une question et, en conformité avec notre règlement, s'est efforcé qu'elle soit très courte et précise. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a demandé au ministre ce qu'il allait faire désormais à la suite des chiffres que le député a avancés relativement à la perte de 67 000 emplois au cours de l'année par le Québec. Le ministre ne répond pas à cette question, M. le Président. Il est en train de faire une conférence sur les quatre années précédentes du mandat du gouvernement. Ce n'est pas du tout la question posée par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Si on veut avoir une période des questions où on va réellement respecter le règlement, sa lettre et son esprit, il faudra arrêter ce genre de réponse qui pourrait faire l'objet d'une conférence à la chambre de commerce et cela pourrait être intéressant. Mais, présentement, il y a une question précise du député au ministre.

Le Président: Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition, j'ai déjà dit et je répète que je n'ai à interpréter ni le sens des questions ni le sens des réponses...

Une voix: La longueur.

Le Président: Sauf que le règlement dit, effectivement, que les questions doivent être brèves et précises et les réponses également. M. le ministre.

M. Landry: M. le Président, le député de Bonaventure est un vieux parlementaire et joue de toutes les astuces, mais c'est en

même temps, de notoriété publigue, un homme d'une relative sagesse. Il ne peut pas ne pas savoir que, lorsqu'il est question d'un désastre économique - je l'ai admis sur un ton élevé il y a quelques jours et je l'admets sur un ton modéré aujourd'hui - qui n'a pas d'équivalent depuis la crise de 1929, il est faux qu'un ministre responsable puisse y répondre en cinq sec, trois phrases et deux coups de cuillère à pot. Ce n'est pas vrai, c'est à l'encontre du bon sens. Je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce veut avoir une réponse et s'il veut l'avoir, qu'il me laisse l'élaborer. On n'est pas en train de discuter de l'emplacement d'une sous-station d'Hydro-Québec...

M. Scowen: Question de règlement.

Le Président: Question de règlement, M. le député.

M. Scowen: Je suis aussi conscient que le ministre de l'histoire économigue des quatre dernières années au Québec. Si je ne suis pas d'accord, je suis quand même conscient, mais cela ne m'intéresse pas ce matin. La question que j'ai posée concernait l'avenir.

Le Président: M. le ministre.

M. Landry: Que cela n'intéresse pas le député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est une chose, que cela ait intéressé l'électorat du Québec au point de nous ramener ici avec 80 sièges et près de 50% des voix en est une autre.

Je fais donc le lien avec toutes ces politiques qui ont été mises en place et qui, à un taux d'intérêt...

M. Scowen: M. le Président...

Le Président: M. le député, sur une question de règlement?

M. Scowen: Oui.

Le Président: M. le député.

M. Scowen: Considérant que le ministre ne veut pas répondre, je retire la question.

Une voix: II n'y a plus de question, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En ce qui me concerne, c'est peut-être un précédent. Je sais qu'on peut proposer un amendement et, par une motion, le retirer avec un débat. Est-ce qu'on peut retirer une question qui a été posée? Je m'interroge encore. La question ayant été posée, je pense qu'elle... À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre!

La question ayant été posée, je demanderais au ministre d'y répondre brièvement.

M. Landry: Le député de Notre-Dame-de-Grâce devrait savoir que les paroles, une fois qu'elles sont échappées, ne sont plus rattrapables. Je le comprends, par ailleurs, étant donné la superficialité de sa question. Si j'avais moi-même été dans l'Opposition et que j'en avais posé une pareille, je l'aurais rapidement retirée, c'est bien entendu.

Brièvement, puisque vous m'avez invité à la brièveté, M. le Président, je ne reviendrai pas sur les politiques mises en place et qui performaient d'une façon extraordinaire. Je vais réaffirmer avec force que l'unique cause de la catastrophe économique que nous vivons présentement est la politique suicidaire...

Des voix: Le fédéral! Des voix: Le PQ!

M. Landry: Vous voyez, M. le Président, comme ces gens...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Des deux côtés de la Chambre, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre, en concluant.

M. Landry: Je réitère donc, en conclusion, et je suis prêt à une question avec débat là-dessus, à un débat du vendredi ou du samedi, si vous le voulez...

Une voix: Du dimanche!

M. Landry: ... que ce qui assassine la PME québécoise présentement, c'est une politique suicidaire et irresponsable pratiquée par la Banque du Canada, et son gouverneur en particulier, dont on vient d'augmenter le salaire à près de 100 000 $ par année, alors qu'il trouve que le salaire minimum est trop élevé.

J'ai dit à la blague, avant que cette Assemblée ne commence, que si notre Assemblée nationale en avait le pouvoir, je ferais motion pour qu'on retire l'Ordre du Canada à M. Bouey, ordre qu'on lui a donné il y a une quinzaine de jours. C'est vraiment de l'indécence politique et économique.

Des voix: Oh!

M. Landry: Et je signale à tous les chômeurs victimes de la catastrophe que celui qui est le principal artisan de leur malheur...

Des voix: Le fédéral! Des voix: Le PQ!

M. Landry: M. le Président, encore une fois!

M. Charron: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En concluant, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Landry: Je signale aux chômeurs victimes de la catastrophe...

Une voix: La catastrophe péquistel Des voix: Le PQ!

M. Landry: ... que celui qui est l'artisan...

Des voix: Le PQ!

M. Charron: M. le Président, je vous en prie, cela fait trois fois que vous les rappelez à l'ordre. Il ne reste qu'une phrase au ministre d'État au Développement économique à prononcer. Si cela ne les intéresse pas, cela intéresse sûrement les citoyens du Québec qui nous écoutent.

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vous avez entendu comme nous que le ministre refuse de répondre aux questions.

Des voix: Oh!

M. Levesque (Bonaventure): Le député a dû retirer sa question, c'est clair: Le ministre ne peut pas répondre. C'est une catastrophe et le gouvernement du Parti québécois est responsable de la catastrophe.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'Opposition, j'estime qu'en vertu de notre règlement on peut, par une motion de retrait, retirer un amendement, mais notre règlement est silencieux sur le retrait d'une question. La question ayant été posée, elle mérite une réponse et je demande instamment au ministre de conclure. M. le ministre.

M. Landry: M. le Président, la conclusion se complique à mesure que les interruptions d'en face fusent et je suis obligé d'ajouter une phrase pour dire que le député de Bonaventure connaît beaucoup mieux les procédures parlementaires que les mécanismes économiques, sa dernière phrase en est la preuve.

Je reviens donc à ma conclusion...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: Oui?

M. Levesque (Bonaventure): ...sur une question de privilège. J'ai été mis en cause directement et je demanderais au ministre d'État au Développement économique de bien vouloir comparer son expérience dans le domaine des affaires avec celle de celui qui vous parle.

Des voix: Ah! Ah! Ah! Bravo! Le Président: M. le ministre.

M. Landry: J'aurais presque souscrit aux applaudissements de l'Opposition car je pense que le métier de vendeur d'automobiles, qui est un métier éminemment respectable dans notre civilisation, méritait une bonne salve d'applaudissements et le député de Bonaventure l'a eue, mais il ne me fera pas croire qu'assurer un service tertiaire, si respectable soit-il, donne une expérience dans le développement industriel.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre: À l'ordre!

Question principale, M. le député de Matapédia. (11 heures)

M. Gratton: M. le Président, question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège.

M. Landry: Question de règlement, d'abord.

Le Président: M. le ministre, sur une question de règlement.

M. Landry: Vous avez statué...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président, vous m'avez reconnu.

Le Président: M. le ministre et, par la suite... M. le député de Gatineau, sur une question de règlement.

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je vous demanderais de faire remarquer au ministre que ça fait déjà quinze minutes qu'il parle sur sa dernière phrase.

M. Bédard: Question de règlement.

Le Président: M. le ministre, sur une question de règlement.

M. Landry: M. le Président, vous aviez bien statué que le député ne pouvait pas retirer sa question. Il avait droit à ma réponse. J'ai essayé, péniblement je l'admets, de la donner. J'ai été interrompu une quinzaine de fois. Quand ce n'était pas par des horions ou des hurlements, c'était par des questions de règlement. Je termine, en disant, encore une fois, M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: M. le Président, vous avez déjà rendu une décision. Vous devez appeler une question principale du député de Matapédia.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je pense que ni l'intervention du député de Gatineau ni celle du ministre n'étaient des questions de règlement. M. le député de Matapédia.

M. Marquis: M. le Président, pour aller dans la même veine, ma question s'adresse au ministre d'État au Développement économique. La question sera courte et je laisse au ministre le soin de répondre correctement et dans les meilleurs délais.

Programme fédéral d'aide aux régions

II y a quelques semaines, le ministre d'État délégué aux petites entreprises et au tourisme, M. Charles Lapointe, déclarait à Matane, lors d'un colloque sur le tourisme, que d'ici trois à six mois le gouvernement fédéral s'engagera résolument dans des fonds d'aide directe aux régions hors des ententes Canada-Québec. Cela devrait être confirmé prochainement par le ministre de l'Expansion économique régionale, celui qu'on appelle chez nous le Père Noël pas de sac, M. De Bané. Puis-je connaître, de la part du ministre d'État au Développement économique, quelles seront les conséquences...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marquis: Je l'ai déjà rencontré dans un débat de trois heures.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député.

M. Marquis: M. le Président, est-ce que je pourrais savoir de la part du ministre d'État au Développement économique quelles seraient les conséquences d'un tel geste sur les priorités québécoises en matière de développement économique?

Le Président: Brièvement, M. le ministre, en vous indiquant qu'il reste deux minutes à la période des questions.

M. Landry: D'abord, je dois dire que le ministre fédéral a bien mal commencé son affaire parce qu'à peu près au moment où il disait cela, j'ai ici la coupure des journaux: 63 000 PME partent en guerre contre le budget fédéral. Il aurait dû commencer par faire un budget qui, comme le dit le communiqué des PME, n'aurait pas étouffé le Québec de toutes les manières possibles et imaqinables. Écoûtez bien cela, ce n'est pas le congrès du Parti québécois ni quelque autre de nos instances. M. Pierre Clément -j'espère que le député de Bonaventure nous écoute - porte-parole du Québec de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes dit que le gouvernement fédéral est en train d'étouffer le Québec -des mots plus forts que ceux que j'emploie -de toutes les manières possibles et imaginables.

Cela couvre tout le terrain. Ce que dit le député de Matapédia va dans la même veine. Hélas! pour des raisons partisanes qui, dans certains cas, jouxtent le fanatisme, le gouvernement du Canada a décidé, en passant par-dessus la tête du gouvernement du Québec et de ses instances légitimes, d'intervenir directement dans le développement des régions sans nous consulter. J'ai même reçu - je le communique à la Chambre et je vais déposer la lettre - une lettre de M. De Bané qu'il a appelée d'un certain qualificatif du temps des fêtes m'interdisant - M. le Président, écoutez cela, nos amis d'en face aussi -d'annoncer un projet de développement au Québec si je n'avais pas eu son accord et si je ne l'avais pas consulté, sans quoi le fédéral ne financerait plus. C'est là que nous en sommes.

Des voix: Oh! Scandale!

M. Landry: M. le Président, si les fédéraux ont réussi en agissant indirectement à assassiner l'économie québécoise, qu'est-ce que cela va être quand ils vont agir directement?

Le Président: Fin de la période des questions.

M. le ministre de la Justice, en complément de réponse à une question du député de Portneuf.

M. le ministre.

Résultat de l'enquête de la SQ à la radiotélévision des débats

M. Bédard: M. le Président, plusieurs fois au cours des dernières semaines, il a été question en cette Chambre et en dehors de cette Chambre d'allégations d'utilisation de matériel de radiotélédiffusion des débats de l'Assemblée nationale. C'est ce que certains ont, entre autres, appelé le dossier de la

pornographie. De fait, ce dossier comporte quatre volets, à savoir disparition supposée d'équipement de télédiffusion des débats, enregistrement de commerciaux privés à l'Assemblée nationale, entrave à la justice, enregistrement de films pornographiques à l'Assemblée nationale.

M. le Président, le fait que l'intégrité même de l'Assemblée nationale ait été mise en cause m'oblige à être plus explicite que d'ordinaire et je pense que tous mes collègues de l'Assemblée nationale en conviendront. Une enquête a été menée par la Sûreté du Québec sur les différentes allégations. Le résultat de cette enquête a été communiqué à un substitut du Procureur général le 7 décembre. Celui-ci a analysé tous les faits recueillis, tous les témoignages et a produit son rapport le 8 décembre. Je suis donc en mesure maintenant de transmettre à la Chambre les résultats de cette enquête comme je m'étais engagé à le faire. D'abord, je dois indiquer que toutes les allégations véhiculées à l'égard de ces faits ont été soigneusement vérifiées de même que tout élément pertinent porté à la connaissance des enquêteurs en cours de route. À cette fin, notamment, environ 75 personnes ont été interrogées afin de vérifier les faits et d'obtenir la corroboration de leurs dires.

Les résultats sont donc les suivants: Premièrement, à l'égard des allégations de disparition d'équipement de la télédiffusion des débats, après de nombreuses vérifications, il appert que l'équipement manquant ne serait constitué que de cassettes, soit 318, 186 audios et 132 vidéos, et non des 1 200 dont il avait été question. Il faut comprendre qu'il est de la nature même de ce service de fournir à plusieurs organismes, et plus particulièrement la radio et la télévision, des cassettes reproduisant les débats de l'Assemblée nationale. D'autre part, aucun système efficace de contrôle n'a été instauré avant la mi-août 1980, soit près de deux ans après le commencement de ses activités. Or, si l'on considère que 23 100 cassettes ont été achetées depuis le début des activités, il faut convenir que la disparition de 1,3% de ces cassettes constitue presque un tour de force dans de telles conditions puisque certaines, comme on le sait très bien, se brisent, d'autres s'usent ou se perdent. En conclusion, l'enquête policière ne révèle aucune infraction criminelle décelée à ce chapitre. (11 h 10)

Deuxièmement, en ce qui a trait à l'enregistrement des commerciaux privés, l'enquête a mis en lumière trois montages commerciaux, deux en septembre 1979 et un le 10 août 1980 et ce, effectués principalement par un employé d'Auvinic. La même enquête a toutefois révélé qu'en aucun temps le tournage de ces mêmes films n'avait eu lieu à l'Assemblée ou avec de l'équipement de l'Assemblée nationale. Donc, la seule opération a consisté à se servir de certains appareils situés à l'Assemblée nationale en apportant tout le matériel nécessaire afin de ne faire que le montage. Or - et c'est très important - à l'époque des deux premiers tournages, les appareils n'appartenaient pas à l'Assemblée nationale, mais à la compagnie Auvinic. Il n'existait aucune clause d'exclusivité quant à la location de ces appareils par la compagnie Auvinic à l'Assemblée nationale. Puisque cette opération n'a pas empêché quelque opération que ce soit à l'Assemblée nationale, tout en ne prenant rien qui appartenait à l'Assemblée nationale, telle une cassette, aucune infraction n'a pu alors être commise. Ceci est encore plus frappant lors du troisième et dernier montage du 10 août 1980 puisque cette date se situe dans la période de flottement entre la fin du contrat de services, à savoir le 6 août 1980, et la décision de l'Assemblée nationale, le 19 août 1980, d'exercer son option d'achat sur ledit équipement.

De plus, M. Rheault, directeur de la télédiffusion des débats de l'Assemblée nationale, et M. J. Besner, vice-président d'Auvinic, avaient alors autorisé l'utilisation des appareils situés à l'Assemblée nationale pour effectuer le montage commercial. En conséquence, aucune infraction criminelle n'a été décelée à ce chapitre.

Troisièmement, le 6 novembre, M. André Lavoie, directeur des médias, signait une directive interdisant aux employés de, parler aux enquêteurs sans son autorisation et ce fait a été soulevé ici, à l'Assemblée nationale, par le député de Portneuf. Cette directive provenait d'une demande du directeur du personnel, M. Mario Trudel, de voir à s'assurer que, malgré les enquêtes en cours, le déroulement normal des travaux soit maintenu de la part des employés dans leurs différentes affectations. Il semble donc évident que l'efficacité était le seul but de cette directive et qu'en aucun temps l'intention d'André Lavoie n'était d'entraver le cours de la justice. Aucune infraction criminelle ne peut donc être reconnue à ce titre et on comprendra beaucoup mieux plus tard.

Quatrièmement, la question de l'enregistrement de films pornographiques à l'Assemblée nationale. Toutes les allégations de tournage ou de production reposaient dans cette affaire sur les dires de deux individus qui ont, d'ailleurs, déclaré ne pas avoir été témoins des événements qu'ils prétendaient dénoncer. À tout événement, environ 75 personnes ont été interrogées dans cette affaire et toutes les vérifications ont été faites.

Il ressort clairement ceci. Dans un premier temps, l'enquête révèle qu'à trois

occasions identifiées il y aurait eu visionnement en cercle très restreint, entre employés de la télédiffusion des débats, de cassettes prétendument érotiques, préenregistrées et apportées de l'extérieur, sur un appareil loué à l'Assemblée nationale par la compagnie Auvinic dans le cadre de son contrat de services. Ces cassettes ne provenaient donc en aucune façon de l'Assemblée nationale.

Un premier visionnement d'une cassette eut lieu en août ou septembre 1978, soit avant même l'entrée en vigueur du contrat de location, le 3 octobre 1978, entre Auvinic et l'Assemblée nationale. Une duplication du film apporté de l'extérieur fut effectuée à cette occasion. Un second visionnement s'est déroulé entre octobre 1978 et septembre 1979. Il s'agissait d'une cassette américaine apportée de l'extérieur qui n'a pas été doublée et qui fut retournée à la personne qu'il l'avait prêtée; trois employés étaient présents. Enfin, un troisième vidéo a été visionné par deux personnes durant la même période. Encore là, il s'agissait d'un vidéo apporté de l'extérieur et aucune duplication n'a été faite.

Bien que je ne cautionne en aucune façon une telle conduite, je dois souligner que le visionnement en privé de films ou de cassettes, fussent-ils même érotiques ou obscènes, ne constitue pas une infraction criminelle aux termes du Code criminel du Canada. Mon rôle n'étant pas de porter un jugement moral, mais bien d'administrer le Code criminel du Canada, je dois me limiter à cette évaluation et conclure à cet égard qu'il n'y a pas eu d'infraction criminelle à ce chapitre.

Enfin, concernant le point qui m'apparaît le plus important, parce qu'il a jeté le discrédit sur l'Assemblée nationale et les personnes qui l'entourent, je suis en mesure de dire que l'enquête révèle clairement que les allégations de fabrication, de production, de tournage de films ou de vidéos pornographiques à l'Assemblée nationale avec ou sans du matériel ou du personnel de l'Assemblée nationale sont sans aucun fondement. En termes clairs, il n'y a jamais eu de tels faits et toutes les allégations qui ont été colportées dans cette affaire sont fausses. Toutes les insinuations qui ont été véhiculées à cet égard sont conséquemment non seulement injustifiées, mais encore, pourrais-je dire, irresponsables et préjudiciables. Aucune accusation n'a donc à être portée dans cette affaire.

En terminant, je souhaiterais donc, en toute honnêteté et équité, que cette mise au point recueille une diffusion aussi large que les insinuations diffamantes ont connue dans cette affaire. Non seulement est-il indispensable que des réputations soient rétablies, mais il est encore impératif que l'intégrité et la dignité des institutions comme l'Assemblée nationale, qui ont été éclaboussées, soient restaurées dans l'opinion publique. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je remercie le ministre de la Justice et Procureur général de la réponse qu'il nous fournit ce matin. La question que j'avais posée portait sur différents éléments relatifs à l'enquête menée par la Sûreté du Québec. Cette question portait sur plusieurs volets dont a fait état le ministre de la Justice ce matin. Elle portait, dans un premier temps, sur l'écoute électronique illégale entre fonctionnaires. À ce chapitre, le ministre de la Justice aurait pu confirmer ce matin que des poursuites ont été entreprises; d'ailleurs, elle met en cause un ex-fonctionnaire de l'Assemblée nationale et un employé travaillant actuellement à l'Assemblée nationale qui auront à comparaître à la Cour des sessions de la paix demain.

Le deuxième volet de l'enquête portait sur le rapport du Vérificateur général, lequel indiquait la disparition de 1200 cassettes. Je prends acte de la réponse du ministre, ce matin, à savoir que 318 cassettes seulement auraient manqué et que le contrôle s'est véritablement installé à compter du mois d'août 1980. La conclusion du ministre, somme toute, c'est qu'il manque seulement 1,3% des cassettes qui ont été utilisées à l'Assemblée.

Le ministre nous informe qu'il n'y a eu aucune disparition d'équipement à l'Assemblée, contrairement aux informations que plusieurs personnes ont eu l'occasion de recevoir et de transmettre à la Sûreté du Québec. Le ministre nous indique qu'effectivement, des commerciaux privés auraient été peut-être pas produits, mais montés. On pourra revenir là-dessus. Je dois dire que si le ministre de la Justice avait fait une déclaration ministérielle, ce matin, on aurait pu voir le texte, mais on pourra se référer au journal des Débats.

M. Bédard: M. le Président, question de privilège.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, sur une question de privilège.

M. Bédard: Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté lorsque le député mentionne que j'aurais pu faire une déclaration ministérielle, si je n'en ai pas fait, vous le savez, c'est qu'il n'y a jamais eu de déclaration ministérielle faite par un ministre de la Justice concernant un dossier. Des réponses doivent être apportées à des questions, et c'est ce que j'ai fait ce matin.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: D'accord. De toute façon, on pourra lire le journal des Débats demain et revenir ultérieurement sur d'autres questions. Ce que je retiens essentiellement de la réponse du ministre - si ce n'est pas le cas, il pourra me corriger - c'est qu'il y aurait eu le montage de commerciaux privés à l'Assemblée nationale, mais à une période où les équipements n'appartenaient pas à l'Assemblée nationale.

Films pornographiques, maintenant. Le ministre de la Justice et Procureur général confirme qu'il y aurait eu, à trois reprises, le visionnement en privé, et par un groupe restreint, de films pornographiques. Dans un cas - je voudrais qu'il soit un peu plus clair là-dessus - il y aurait eu une duplication. Est-ce à dire qu'il y aurait eu une reproduction d'un film pornographique produit à l'extérieur, visionné ici et reproduit ici même, avec des équipements qui nous appartiennent ou qui, possiblement, ne nous appartenaient pas, selon la date où cette duplication aurait été faite? Je demanderais au ministre de la Justice d'être plus clair à cet égard. (11 h 20)

Pour le moment, la question principale que je voudrais poser au ministre de la Justice est la suivante. Le Procureur général du Québec peut-il m'informer si, dans le cadre de l'enquête de la Sûreté du Québec, cette dernière a eu l'occasion et la possibilité de visionner les 300 cassettes qui auraient été saisies par la Gendarmerie royale du Canada à la mi-novembre 1981, durant la période où la Sûreté du Québec menait une enquête sur ces sujets.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, lorsqu'il y a eu - j'ai d'ailleurs répondu en Chambre -une telle saisie de cassettes par la Gendarmerie royale, ce qui a été évoqué par le député de Portneuf, j'avais indiqué que les cassettes qui ont fait l'objet de la saisie n'avaient aucun rapport avec l'enquête qui se poursuivait. D'ailleurs, la Sûreté du Québec est entrée en communication avec la GRC et absolument aucun élément concernant ces cassettes ne peut, de quelque façon que ce soit, être relié au sujet dont nous parlons ce matin.

Pour ce qui est de la duplication, M. le Président, contrairement à ce que dit le député de Portneuf, j'ai été très clair dans la déclaration, il y en a eu une. L'enquête démontre que la duplication d'une cassette, dans de telles circonstances, ne peut faire l'objet d'une plainte criminelle. Cette duplication a été faite en un seul exemplaire et simplement pour fins personnelles alors que c'est l'élément distribution qui, à un moment donné, peut faire l'objet d'une plainte criminelle.

Une voix: Avec l'équipement de l'Assemblée nationale.

M. Bédard: M. le Président, je l'ai très bien mentionné dans ma déclaration et j'inviterais le député de Portneuf à bien la lire avant de s'aventurer, par des questions, à vouloir mettre en doute quoi que ce soit. À ce moment-là, je n'aurai pas la même attitude étant donné les responsabilités que j'ai à remplir; tout le monde le comprendra. Comme je l'ai dit, la duplication dont on parle a été faite avant même que le matériel soit la propriété de l'Assemblée nationale.

Le Président: Motions non annoncées. Complément de réponse. M. le ministre.

Le Marathon international de Montréal

M. Lessard: Je m'excuse, M. le Président. Je voudrais déposer, à la suite d'une question du député de Marguerite-Bourgeoys, les états financiers, vérifiés par la firme Viau, Rouleau, Brosseau et Associés, du comité organisateur du Marathon international de Montréal pour l'année 1980. En ce qui concerne les états financiers de l'année 1981, l'année financière du Marathon international de Montréal se terminant le 31 décembre, eh bien, vous conviendrez que je ne peux les avoir, mais aussitôt que je les aurai, il me fera plaisir de les déposer.

J'ajoute ceci. Je ne suis aucunement le ministre de tutelle du Marathon international de Montréal. Le Marathon international de Montréal est un organisme sans but lucratif dans ses structures.

Des voix: Ah!

M. Lessard: Je répète que le Marathon international de Montréal est un organisme sans but lucratif dans ses structures. C'est un organisme à qui nous accordons une subvention de 300 000 $ sur un budget total de 1 000 0000 $, comme nous subventionnons des centaines d'organismes au Québec. Merci, M. le Président.

Une voix: C'est un drame.

Le Président: Document déposé. Motions non annoncées. Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre. M. le leader.

Avis à la Chambre

M. Charron: M. le Président, j'ai des

avis un peu spéciaux à donner à l'Assemblée. Je demanderais donc, avant que les députés disparaissent pour aller aux différentes commissions qui seront appelées à siéger, qu'on soit, pour un instant, attentif. L'organisation de la journée est un peu compliquée, aujourd'hui.

Selon l'entente intervenue lorsque nous avons essayé ensemble, l'Opposition et nous-mêmes, de planifier une journée qui ferait l'affaire de tous et qui nous permettrait d'avancer dans notre menu, nous en sommes arrivés à cet ordre des travaux.

D'abord, ce matin, il y aura, dès la reprise des affaires du jour, une dernière réplique de l'Opposition sur le projet de loi concernant les caisses d'entraide économique qui est à l'étude depuis hier. Ce sera l'intervention du député qui a demandé l'ajournement du débat. Il y aura la réplique du ministre des Finances et nous procéderons ensuite, c'est-à-dire vers midi ou midi 15, à un vote enregistré sur ce projet de loi. Je dis donc à tous ceux qui s'éloigneront de l'Assemblée tout à l'heure de s'attendre à être rappelés dans quelques minutes. Le mieux serait tout simplement de rester ici.

La deuxième étape serait, après le vote, que nous entamions l'étude du projet de loi 32. J'ai proposé que nous fassions au moins l'intervention en deuxième lecture du ministre des Finances et, si l'Opposition choisit de s'y greffer immédiatement, libre à elle, sinon nous suspendrions immédiatement les travaux pour permettre à des réunions de caucus de se tenir à l'heure du lunch. Lorsque nous reviendrons à 15 heures, où que nous en soyons rendus sur le projet de loi no 32, nous le laisserons en plan jusqu'à demain matin et nous consacrerons les huit heures de la journée qui restent, selon le règlement, à l'étude du budget supplémentaire.

Dans une consultation avec l'Opposition, qui nous a manifesté ses sujets d'intérêt, et dans une planification de la présence à tour de rôle des titulaires de ministères sur lesquels l'Opposition veut inscrire un débat dans le cadre de la discussion du budget supplémentaire, cela nous amène à ce programme approximatif, M. le Président.

Dès 15 heures, lorsque nous reviendrons et que l'Assemblée se transformera en commission plénière comme il se doit pour étudier le budget supplémentaire, nous consacrerons la première demi-heure au ministère des Affaires culturelles. De 15 h 30 à 16 h 30, encore une fois approximativement, le ministère de l'Agriculture. De 16 h 30 jusqu'à 17 heures, votre ministère de l'Assemblée nationale, M. le Président. À 17 heures, le ministère des Communications. De 17 h 30 à 18 heures et de 20 heures à 20 h 30, donc en deux tranches d'une demi-heure, le ministère de l'Éducation. À 20 h 30 c'est le ministre des Finances qui répondra aux questions concernant le ministère des Affaires sociales, notre collègue des Affaires sociales étant à ce moment-là en commission parlementaire. À 21 heures, c'est le ministère de l'Industrie et du Commerce. À 21 h 45, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. A 22 h 30, celui des Transports et à 23 heures, pour terminer notre journée, le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre jusqu'à minuit.

Lorsqu'à minuit nous serons arrivés à terme dans l'étude du budget supplémentaire, nous l'adopterons comme le prévoit le règlement et nous ajournerons nos travaux jusqu'à demain matin 10 heures. Quand nous reviendrons à 10 heures demain matin, lorsque je donnerai les avis, j'indiquerai tout simplement à la Chambre que nous achevons l'étude du projet de loi 32 et que nous étudions également le projet de loi 22 en deuxième lecture. Nous devrions terminer avant 18 heures vendredi soir le projet de loi 22 qui est au nom de Mme la ministre de la Fonction publique. Quand je dis vers 18 heures, c'est que dès 20 heures, sur ce projet de loi explicitement, nous aurons des invités en commission parlementaire qui nous donneront leur opinion avant que nous procédions à l'étude article par article de ce projet de loi.

Je ne peux indiquer à ce moment-ci encore si l'Assemblée siégera vendredi soir jusqu'à minuit, comme le permet le règlement, ou si nous aurons plutôt trois commissions parlementaires et que l'Assemblée ajournera ses travaux à 18 heures. Je ne suis pas suffisamment certain du menu que j'avance pour pouvoir tout de suite permettre aux députés de planifier leur départ pour leur circonscription respective. Dès que je le saurai je l'indiquerai à l'Assemblée.

Sur ces avis, M. le Président, je dois aussi indiquer qu'après consultation je crois être en mesure d'obtenir un consentement, puisque c'est sur la proposition même de l'Opposition et que de notre côté nous n'avons pas d'objection, il y aura ce matin trois commissions parlementaires pendant que la Chambre siégera, c'est-à-dire celle des engagements financiers que j'ai déjà annoncée depuis quinze jours et qui se réunira à la salle 91; à la salle 81-A, ce sont nos abonnés de l'énergie et ressources qui continueront leur intéressante discussion et, au salon rouge, la commission des affaires sociales poursuivra les auditions sur le projet de loi 27. (11 h 30)

Je fais donc une double motion pour qu'il y ait consentement à ce que trois commissions siègent en même temps, plutôt que deux comme le prescrit le règlement; deuxièmement, que ce soit ces trois commissions que je viens de mentionner, aux lieux et heures que j'ai indiqués, qui se

réunissent.

Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion est-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vote enregistré.

Recours à l'article 34

M. Lalonde: M. le Président, avant de passer à ce vote...

Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 34.

M. Lalonde: ... je n'ai pas voulu interrompre le leader, mais, en vertu de l'article 34, est-ce qu'il peut nous faire part d'une décision sur la politique ou la proposition du ministère de l'Éducation quant à la restructuration scolaire? Est-ce que ce sera déposé à l'Assemblée avant la fin de la semaine prochaine ou si c'est remis à l'an prochain?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Autant que je sache - je peux me réserver de revérifier auprès de mon collègue - comme il s'agit d'un morceau important et qu'il n'est pas encore à l'étude au Conseil des ministres, je serais le tout premier surpris qu'il soit déposé sous quelque forme que ce soit à l'Assemblée avant notre ajournement de la semaine prochaine.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Verdun, en vertu de l'article 34.

M. Caron: Ma question s'adresse au leader; c'est au sujet de la Communauté urbaine de Montréal. Le leader pourrait-il nous dire, d'ici à la semaine prochaine, s'il y aura un projet de loi qui sera déposé à ce sujet pour étude au cours du mois de janvier ou de février?

M. Marcoux: Dans le temps des fêtes!

M. Charron: Peut-être. Je dois dire peut-être parce que nous avons entamé la discussion, au Conseil des ministres, sur un mémoire venant de notre collègue des Affaires municipales. Nous l'avons réinscrit à l'ordre du jour de la réunion de la semaine prochaine et, si nous arrivons au consensus espéré et s'il est possible de le rédiger sous forme de loi, nous le déposerons avant l'ajournement, mais je ne peux présumer de la décision du Conseil des ministres de la semaine prochaine. Je peux juste vous confirmer que c'est actuellement sur la table du Conseil des ministres. Cela l'a été hier et ce le sera la semaine prochaine.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier, en vertu de l'article 34.

M. Sirros: Oui, M. le Président. J'aimerais demander au leader s'il a eu le temps de considérer la demande que je lui ai faite hier et dont il a pris avis, concernant le rapport Landry.

M. Charron: J'ai eu le temps de la considérer, mais je n'ai pas eu le temps de parler à mon collègue des Affaires sociales qui est le premier intéressé, mais une personne très importante de mon cabinet me souffle à l'instant que le document en question sera déposé à la table de la commission parlementaire aujourd'hui.

M. Sirros: Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vote enregistré.

Qu'on appelle les députés!

(Suspension de la séance à 11 h 32)

(Reprise de la séance à 11 h 40)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! Qu'on puisse procéder rapidement. Le but - s'il vous plaît - du vote est d'accepter les deux motions, à savoir qu'en même temps que la Chambre siège il y ait trois commissions parlementaires et qu'elles siègent au salon rouge, à la salle 81-A et à la salle 91-A. Je vais les nommer: affaires sociales, salon rouge; énergie et ressources, 81-A; engagements financiers, 91-A. Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Bérubé, Landry, Lazure, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, Léger, Clair, Richard, Chevrette, Bertrand, Duhaime, Tardif, Fréchette, Baril (Arthabaska), M. Ouellette, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Gagnon, Guay, Dussault, de Belleval, Martel, Mme Juneau, MM. Fallu, Grégoire, Bordeleau, Leduc, Marquis, Charbonneau, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Champagne, Rodrigue, Payne, Paré, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux,

Vaillancourt (Orford), Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte, Paré, Gratton, Fortier, Bissonnet, Polak, Maciocia, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss, Hains.

Le Secrétaire: Pour: 95

Contre: 0

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Vous pouvez donc procéder, M. le leader, aux affaires du jour.

M. Charron: Je vous prierais de rappeler le projet de loi 40, M. le Président, c'est-à-dire l'article 3) du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Peut-être un instant pour permettre aux gens de se rendre aux commissions parlementaires.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): ...puis-je poser une question à mon vis-à-vis? Lorsqu'il a parlé des crédits supplémentaires, il a donné un certain ordre des travaux. Nous remarquons qu'il ne couvre que la période de sept heures sur les huit prévues par le règlement. Le ministre a retenu sans doute nos suggestions quant au temps à accorder à chaque ministère, mais si nous avons laissé une heure, c'était au cas où il y aurait des ministériels qui auraient quelques questions à poser. C'est pourquoi nous n'avions pas utilisé cette heure-là; mais si on s'en tient à sept heures, nous insisterons pour que le dialogue se fasse entre le gouvernement et l'Opposition d'une façon assez stricte.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Oui, cette banque de temps, si je peux m'exprimer ainsi, permettra sans doute durant l'échange à des députés ministériels de glisser des questions d'information également. Elle sera équitablement répartie, j'imagine, selon le désir des députés ministériels sur l'espace de temps, mais aussi une utilisation que notre règlement nous force à prévoir de cette autre heure qui reste, c'est-à-dire les remarques préliminaires qui seront très brèves - on m'en assure - du ministre des Finances avant de passer aux Affaires culturelles de même que le droit de conclure qui est prescrit dans notre règlement peut- être pour cinq ou dix minutes.

Je profite aussi de l'occasion pour corriger une indication que je donnais à l'Assemblée tout à l'heure. Il n'y aura pas de vote comme tel à la fin de la journée d'aujourd'hui du fait que le discours sur le budget est toujours en suspens. Donc, à ce moment-là, nous ferons tout jusqu'à l'étape finale du vote en attendant que le débat sur le discours sur le budget soit terminé. À ce moment-là, nous adopterons les deux en même temps.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

S'il vous plaît!

Projet de loi no 40

Deuxième lecture (suite)

Reprise du débat sur la motion de M. Parizeau proposant que le projet de loi no 40, Loi sur les sociétés d'entraide économique et modifiant diverses dispositions législatives soit maintenant lu la deuxième fois. La parole est au chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Le projet de loi no 40 est sûrement l'un des plus importants que nous soyons appelés à étudier au cours de la présente session. Il met en cause l'avenir d'une institution qui a connu, au cours des 20 dernières années, un développement phénoménal, qui a été victime, un moment donné, de son propres succès et qui a connu, au cours de cette année, des difficultés financières qui ont compromis son existence même. C'est d'autant plus dommage d'enregistrer ce fait que c'est par milliers que l'on compte les entreprises, surtout petites et moyennes, et surtout dans les régions où l'accès au capital est plus limité, à qui ce mouvement a rendu des services énormes, de même qu'à nos concitoyens. On estime à des milliers et des milliers le nombre d'emplois qui ont pu être créés ou maintenus qrâce aux prêts faits à des entreprises de toutes sortes par les caisses d'entraide économique. Au moment où les caisses connaissent des difficultés, je pense qu'il convient de signaler en tout premier lieu le rôle extrêmement positif qu'elles ont joué dans le développement économique régional au cours des 20 dernières années.

Nous avons fortement souligné de ce côté-ci de la Chambre la responsabilité très lourde qui incombe au gouvernement dans le déroulement des événements qui ont conduit à la crise des derniers mois. Les caisses d'entraide économique se sont trouvées aux prises avec des problèmes de liquidité extraordinairement aigus surtout le printemps dernier. À ce moment, quand nous interrogions le ministre des Finances en

Chambre, il nous parlait en termes très feutrés, en termes voilés qui évitaient pudiquement de toucher au coeur du problème. Je le comprends, il était nouveau dans ses fonctions de ministre des Institutions financières et Coopératives à l'époque, il ne voulait pas jeter le blâme sur ses prédécesseurs immédiats mais le gouvernement avait quand même été en fonction pendant les cinq années précédentes. Le ministre avait eu, je crois, trois prédécesseurs dans l'équipe ministérielle qui est encore au pouvoir. Il y avait eu M. Joron, il y avait eu Mme Lise Payette et il y avait eu aussi celui qui est actuellement ministre des Affaires sociales. Ces trois ministres ont sans doute eu sur leur pupitre, pendant toutes ces années, des rapports de la Commission des valeurs mobilières qui signalaient des carences de structure dans les caisses d'entraide économique et qui recommandaient, de manière urgente, d'instituer des réformes qui auraient permis d'éviter la crise du printemps dernier. Évidemment, le ministre ne pouvait pas faire allusion à toutes ces choses parce qu'on sait que le gouvernement a tout intérêt à garder ses divisions pour les réunions du cabinet comme on vient de le voir encore ces jours-ci, mais nous, de l'Opposition, avons le devoir et le droit strict de signaler que le gouvernement a péché par incurie, par inaction, par paresse dans un dossier qui commandait son attention la plus immédiate.

Dans le rapport que la Commission des valeurs mobilières avait soumis au gouvernement, je me rappelle qu'on insistait en particulier sur le mode artificiel de financement des caisses d'entraide économique, sur la manière dont on prélevait à l'avance les cotisations des sociétaires pour en imputer une bonne partie aux revenus ou aux bénéfices de l'année. De cette manière, on pouvait déclarer des intérêts plus élevés sur les épargnes des sociétaires sans que ce soit des revenus réels. C'étaient, en somme, des revenus anticipés, mais qu'on engageait tout de suite dans des déboursés immédiats. (11 h 50)

On avait parlé également de la manière dont se faisait le recrutement des sociétaires et des épargnants. C'est un recrutement qui se faisait à coups de pression; je ne dis pas à coups de tordage de bras, mais sous la pression de vendeurs dont la Commission des valeurs mobilières avait malheureusement constaté qu'ils n'étaient pas toujours qualifiés pour exercer ces fonctions. C'est étonnant qu'on ait laissé en circulation pendant des années - je ne sais pas - au moins entre 200 et 300 représentants permanents, je pense, qui ne répondaient pas toujours aux normes de compétence qu'on était en droit d'exiger d'eux. Je pense qu'il faut adresser un reproche sévère au gouvernement pour l'incurie dont il a fait preuve dans ce dossier.

J'ai écouté le ministre des Finances avec beaucoup d'attention, hier soir, quand il a présenté le projet de loi no 40 et, ensuite, le projet de loi no 38. J'ai été étonné de constater que nulle part dans son exposé il n'a présenté un état de la situation des caisses d'entraide économique. Nous marchons, de ce côté-ci de la Chambre et de l'autre, à coups d'expressions voilées, de langage entendu, mais jamais on n'a déposé à la Chambre une documentation qui aurait permis de se faire une idée nette de la situation véritable du mouvement des caisses d'entraide économique au moment où le gouvernement propose d'engager des fonds publics considérables dans le renchaussement de ces institutions qu'on avait laissé glisser dans des habitudes pas toujours conformes aux saines normes de gestion des institutions financières.

Par exemple, quelle est la situation financière de la Fédération des caisses d'entraide économique? Les prêts de celle-ci sont assez faciles à vérifier, ses placements sont assez faciles à vérifier. C'est beaucoup moins considérable que pour l'ensemble des caisses affiliées. Quelles sont ses dépenses, quelles sont ses sources de revenus, quelles sont ses possibilités de financement au cours des années à venir? On n'a absolument rien là-dessus. Le gros point d'interrogation, c'est évidemment la situation financière de chaque caisse et, en particulier, la valeur des placements qui ont été faits par les caisses parce que c'est là qu'est l'origine de tout le problème.

Cela fait six mois que le gouvernement patauge dans le dossier des caisses d'entraide économique, de manière très directe, le ministre des Finances les a prises sous son parrainage immédiat. Aujourd'hui, quand nous nous interrogeons là-dessus, nous n'avons aucune espèce de documentation ou d'information fiable qui nous permettrait de savoir sur quelle base nous allons tantôt donner notre consentement aux mesures que le ministre propose dans le projet de loi no 40, en particulier.

Par exemple, quelle est la nature des placements qui ont été faits par les caisses d'entraide économique? Est-ce que ces placements ont été faits, comme le soulignait hier soir le député de Charlevoix, dans le secteur de l'hôtellerie, dans le secteur de la restauration, dans le secteur du commerce de détail, dans le secteur de la construction d'édifices à bureaux, dans le secteur de l'industrie du textile, de l'industrie de la chaussure? Dans quels secteurs exactement? Est-ce que c'est vrai que tous les prêts des caisses d'entraide ont servi à des fins industrielles et commerciales? Je suis convaincu qu'il y a une bonne partie des placements des caisses d'entraide qui sont aussi des placements

hypothécaires assez ordinaires.

En tout cas, nous ne le savons pas. Nous n'avons pas obtenu de la part du ministre les renseignements qui nous permettraient de nous faire une idée sérieuse des données sur lesquelles nous serons appelés à prendre des décisions. On a parlé beaucoup de retrait de fonds au cours de la période du printemps. Tout cela a été arrêté avec la divulgation du plan Dugal au cours de l'été. Quelle a été l'ampleur des retraits de fonds? Quel a été l'effet de ces retraits de fonds sur la situation liquide de chaque caisse et du mouvement dans son ensemble? Quelles conséquences ont découlé, pour les sociétaires et pour certains qui en ont un besoin aigu, du gel des sorties de fonds décrété par la nouvelle direction du mouvement des caisses d'entraide l'été dernier? Nous ne le savons pas.

De ce point de vue, le ministre nous a laissés dans une situation d'incertitude, dans une situation d'imprécision qui contraste avec le caractère très précis du langage qu'il nous a tenu en ce qui concerne les mesures qu'il envisage et sa conception générale du rôle des caisses d'entraide. Si le ministre pouvait compléter son exposé... Je ne prétends pas qu'il puisse le faire dans l'exposé de conclusion qu'il présentera tantôt. Je pense qu'en prévision du travail qui devra s'accomplir en commission parlementaire, il serait normal qu'on présente à chaque député intéressé une documentation pertinente. Surtout, j'imagine que les dirigeants du mouvement des caisses d'entraide devraient être capables de nous présenter, en préparation de ces discussions, des informations détaillées qui nous permettraient de nous faire une idée plus juste de la responsabilité qu'on nous demande de prendre dans ce dossier.

Au sujet de la solution Dugal que le gouvernement endosse en présentant le projet de loi no 40, notre porte-parole attitré dans ce dossier, le député de Westmount, a laissé entendre hier que nous ne ferions pas d'objection. Nous voulons que ce mouvement survive. Nous voulons surtout qu'il reprenne cette voie très dynamique qu'il a suivie pendant de nombreuses années. Par conséquent, nous sommes prêts à collaborer a la mise en oeuvre des solutions qui auront été jugées raisonnables. Le plan Dugal, dans l'ensemble, est une solution que les sociétaires doivent avoir la chance d'accepter s'ils la jugent bonne, au sens de leurs intérêts et dans le sens de la mission qui a été confiée aux caisses d'entraide économique.

Je voudrais seulement souligner quelques éléments du plan Dugal qui méritent d'être signalés, ne serait-ce que pour montrer que l'on introduit des changements très importants et qu'on ne doit pas le faire à la légère. Je suis sûr que le ministre a dû y penser longuement, mais quand même, je vais les souligner parce que, ensuite, je voudrais parler des solutions possibles sur lesquelles nous sommes très en quête de renseignements à l'heure actuelle.

La formule mise de l'avant par les dirigeants actuels des caisses comporte d'abord l'abandon de la formule coopérative. Le président du Mouvement Desjardins le disait très clairement, dans une conférence de presse qu'il donnait la semaine dernière. Il disait: "Par le projet de loi no 40, le gouvernement privilégie dans les circonstances la formule capitaliste au détriment de la formule coopérative." Je pense que c'est évident - le ministre lui-même en convient - cela se passe de démonstration. Mais ce qui est plus difficile à admettre, c'est qu'on a laissé une institution fonctionner pendant des années sous l'enseigne de la formule coopérative. On l'a laissée utiliser toute la popularité de cette formule, toute la confiance qu'elle crée dans l'esprit de la population, et que, soudain, parce qu'on s'est trouvé aux prises avec des problèmes qu'on avait mal prévus, on décide, sous l'impulsion d'une équipe nouvelle, de passer, du jour au lendemain, de la formule coopérative à la formule capitaliste.

J'ai lu, à ce sujet, les exposés qu'ont présentés M. Dugal et ses collègues a des assemblées d'information tenues à travers le Québec au cours des derniers mois, et je suis franchement étonné de l'espèce de légèreté avec laquelle on abandonne la formule coopérative purement et simplement. J'ai essayé de trouver, dans les exposés que j'ai lus, des passages qui témoigneraient d'une certaine compréhension pour la formule coopérative, et je vous dis franchement que je n'en ai pratiquement pas trouvé, pas plus d'ailleurs que je n'en ai trouvé dans la présentation qu'a faite hier le ministre des Finances. Personnellement, je regrette profondément qu'on ait investi tant d'énergie et de capitaux dans le développement d'un grand mouvement à caractère coopératif et qu'aujourd'hui on se fasse dire, sur le ton d'un chirurgien qui vous annonce que vous devez vous faire enlever un de vos organes principaux, sinon le coeur, qu'on va procéder à un changement que tout le monde accepte. Je pense que cela comporte des leçons.

Le ministre, hier, nous disait qu'il tire bien des enseignements de ce qui s'est passé depuis quelques mois. Je pense que pour les dirigeants de nos institutions coopératives, cette expérience comporte une leçon très importante. On ne saurait trop insister sur l'importance capitale de la dimension éducation dans le travail des caisses populaires et de toutes les autres entreprises coopératives. Il y a bien des organismes, malheureusement, qui se servent de l'étiquette coopérative et qui, souvent, n'en

ont pas compris l'esprit et les exigences. (12 heures)

Je ne prétends pas - nous le verrons tantôt, j'y reviendrai à propos du Mouvement Desjardins - qu'il était absolument nécessaire d'éviter ce dénouement. Peut-être ne peut-il point être évité à l'heure actuelle et j'évite de porter un jugement catégorique. Je soulève cependant cette question en exprimant des regrets très profonds.

Deuxièmement, la formule mise de l'avant par l'équipe Dugal comporte le gel des épargnes des sociétaires. D'abord, depuis l'été dernier, personne ne peut retirer de capital social des caisses d'entraide. Je pense surtout à ceux qui ont investi leurs épargnes dans le mouvement des caisses d'entraide parce qu'on leur avait garanti de manière presque automatique un rendement de 10%, 11% ou 12%.

Avec le plan Dugal, il y a au moins une partie du capital social qui devra être transformée en capital-actions sans aucune perspective à court terme de récupération, sinon sous la forme des allégements fiscaux que le gouvernement va consentir pour l'année 1981 et l'année suivante. À part cela, ils risquent de se trouver avec cette partie des épargnes qu'ils ont investies dans le mouvement des caisses d'entraide Gros-Jean comme devant. Ils devront se dire: Nous avons peut-être fait une erreur à ce moment-là. Il n'y a aucune garantie de récupération de ces sommes.

Deuxièmement, pour les parties qui seront transformées en dépôts à terme, on ne sait pas quelle sorte de dépôts à terme ce sera. Est-ce que ce seront des dépôts de six mois, d'un an, de deux ans ou de trois ans? Quel sera le rendement sur ces dépôts? On n'a aucune indication. Tout cela va fonctionner en tenant compte évidemment des possibilités, des ressources du mouvement, de ses capacités de gestion, etc.

Il y a un gel de l'épargne des sociétaires au moins partiel qui est un précédent assez grave, surtout dans le secteur coopératif. Je me demande, avec mes collègues qui sont intervenus sur cette question, si le gouvernement ne devrait pas envisager la possibilité pour ceux qui sont vraiment dans une situation où ils ont besoin de recouvrer leur mise, au moment où on procédera à un inventaire - quand on va faire le plan de transformation, il va falloir arriver avec un inventaire complet de tout; supposez, par exemple, qu'on établisse la valeur des avoirs d'une caisse à 75% de la valeur originelle - si on donnait au moins la possibilité aux détenteurs de capital-social de pouvoir se retirer dans ces conditions-là, de pouvoir, s'ils ont des raisons sérieuses, au jugement par exemple de la Commission de crédit ou du Conseil de surveillance ou du conseil d'administration, se retirer. Si on leur ouvrait au moins cette possibilité, il me semble que ce serait une solution plus humaine, plus compréhensive et, surtout, plus conforme à l'esprit coopératif.

Je sais que, d'autre part, il faut qu'une décision collective soit prise. Je pense que c'est l'ancien ministre des Transports, le député de Charlevoix, qui rappelait hier: "j'ai l'honneur depuis de nombreuses, années d'être chargé de la liquidation d'une coopérative. J'ai appris dès le début de cette liquidation que l'élément qui vient en tout dernier lieu, quand on veut rembourser, c'est, évidemment, le capital social." Dans les coopératives ordinaires, la grosse différence, c'est que le capital social a infiniment moins d'importance qu'il en avait dans les caisses d'entraide économique. Cela a été une des grandes erreurs des caisses d'entraide de recruter une proportion très forte de leurs capitaux sous la forme de capital social, sans qu'on fasse comprendre aux sociétaires qu'on recrutait les implications exactes de cette politique.

En conséquence de ces erreurs d'aiguillage qui ont été faites pendant de nombreuses années et tolérées par le gouvernement, je pense que le ministre a l'obligation d'examiner la possibilité, par tous les moyens, de donner satisfaction aux sociétaires qui pourraient avoir des raisons sérieuses de désirer recouvrer leur capital social pour faire face à d'autres obligations qu'ils peuvent avoir.

La troisième caractéristique du plan Dugal - je pense que nous regrettons tous cela profondément - c'est que le mouvement des caisses d'entraide économique, à toutes fins utiles, tombe sous le contrôle direct du ministre des Finances. Le ministre l'a souligné lui-même hier, l'ampleur des contrôles que comporte le projet de loi no 40 est extraordinaire. À court terme - c'est très fort, évidemment - le mouvement a tellement besoin de l'aide du ministre des Finances, il est obligé de se soumettre à tous ses diktats, à toutes les conditions qu'il voudra imposer. Si c'était seulement à court terme, je pense que nous serions prêts à faire une grosse partie du chemin avec lui.

Quand je regarde les perspectives d'avenir, les pouvoirs que s'attribue le ministre en matière d'inspection, d'imposition de ceci ou de cela, de ratification d'à peu près toutes les choses importantes que pourront décider les caisses d'entraide à l'avenir, j'ai des inquiétudes et je pense que c'est un prix très lourd à porter, surtout pour une institution qui a été fondée dans un esprit et sous la formule coopérative. Je pense que cette dépendance excessive dans laquelle elle se trouvera à l'avenir, par rapport au ministre des Finances, est sûrement un dénouement qui doit nous inspirer de sérieuses inquiétudes.

Je signale enfin les chances d'avenir. Nous allons souhaiter qu'elles soient les

meilleures possible, mais cela va demander énormément de travail. Le facteur clé, dans la réussite d'une institution financière, est évidemment la confiance que cette institution est capable d'engendrer dans l'esprit des citoyens.

J'en viens à un autre aspect. Le ministre nous disait hier...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition, j'aurais besoin d'un consentement pour vous permettre de terminer car votre temps est écoulé. S'il y a consentement, je n'ai pas d'objection.

M. Parizeau: Consentement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a consentement. Allez, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: On n'était pas sûr qu'il était même requis, étant donné les arrangements qui ont été faits. Mais cela n'est pas grave, comme il est accordé, je l'apprécie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je n'étais pas au courant.

M. Ryan: Je pense que nous avons tous à coeur le bien de cette institution et nous poursuivons, par conséquent, le débat dans le même esprit constructif dans lequel il s'est déroulé jusqu'à maintenant.

Le ministre nous disait hier qu'il est tout intéressé à favoriser une liberté de choix aussi grande que possible pour les sociétaires qui auront une décision très importante à prendre au début de l'année 1982, mais je me demande sincèrement s'il a pris tous les moyens pour que cette liberté de choix soit réelle et véritable. Ceci m'amène à parler de la possibilité de l'implication du Mouvement des caisses populaires Desjardins dans la recherche d'une solution.

Je voudrais tout d'abord préciser qu'il y a bien des malentendus qui circulent là-dessus. J'entends encore des gens dire aujourd'hui: On intéresserait bien le Mouvement des caisses populaires Desjardins aux caisses d'entraide économique, mais ce sont des institutions conservatrices qui ne connaissent rien dans le prêt industriel et commercial, qui se bornent à pratiquer une politique de bas de laine, une politique de prêt conservateur, des prêts sur l'habitation qui sont assurés de procurer des revenus intéressants aux caisses, qui ne comportent pratiquement aucun risque de perte ou de dilution au cours des années, etc. On entend tous ces bobards à propos des caisses populaires comme s'ils s'appliquaient encore à la situation d'aujourd'hui.

J'avais accès, ces temps derniers, à des renseignements qui montrent qu'on est bien loin, actuellement, de la situation qui existait autrefois. J'ai moi-même été dirigeant de caisse populaire pendant de nombreuses années. Quand j'étais dirigeant de la caisse Saint-Louis-de-France à Montréal, nous commencions, à ce moment-là, à intéresser les caisses au prêt industriel et commercial et tout ce qui était envisagé, si mes souvenirs sont bons, c'était la possibilité, pour une caisse locale, de consacrer une petite partie de son avoir propre à des investissements dans des institutions nouvelles qu'était, à ce moment-là, à créer le Mouvement Desjardins autant dans le domaine financier que dans celui de l'assurance ou du prêt à l'entreprise, etc. Depuis ce temps, il s'est fait un progrès énorme.

Je constate que l'encours des caisses populaires dans le domaine du prêt industriel et commercial dépasse aujourd'hui 1 000 000 000 $, c'est-à-dire que les caisses populaires ont autant d'argent investi dans le domaine industriel et commercial, à l'heure actuelle, que tout ce qui a pu être investi jusqu'à maintenant par le mouvement des caisses d'entraide économique. Ce rôle n'implique pas seulement les grandes institutions du Mouvement Desjardins, il implique, au contraire, toutes les fédérations. J'ai des renseignements ici. La Fédération du centre du Québec a investi 102 000 000 $ avec ses caisses, évidemment. (12 h 10)

Une chose intéressante à noter, c'est que c'est la caisse individuelle qui fait le gros des prêts dans ce secteur. C'est elle qui fait tous les prêts dans le secteur du prêt personnel et du prêt à l'habitation sur hypothèque et même dans le secteur industriel et commercial. Je regarde la Fédération du centre du Québec, c'est la Mauricie, 99 000 000 $ prêtés à des entreprises commerciales et industrielles par les caisses individuelles; 2 800 000 $ par la fédération, pour un total de 102 000 000 $. Dans la région de Québec où nous sommes, 272 000 000 $ en tout. Dans la région de Montréal, 204 000 000 $. La péninsule et les îles, 33 000 000 $. Estrie, 39 000 000 $. Le Bas-Saint-Laurent, 39 000 000 $.

Saguenay-Lac-Saint-Jean, 24 000 000 $.

Richelieu-Yamaska, 67 000 000 $. La-naudière-Joliette, 46 000 000 $.

Les caisses d'économie, c'est un mouvement qui a été affilié aux caisses populaires ces dernières années. Ce sont des caisses qui regroupent surtout des travailleurs qui ont bâti des caisses sur les lieux du travail, comme vous le savez sans doute, M. le Président. Cela fait un total, seulement pour les caisses individuelles et les fédérations, de 851 000 000 $.

Si vous ajoutez, en plus, les prêts qui sont faits, toujours dans le domaine industriel

et commercial par La Sauvegarde, par l'Assurance-Vie Desjardins, par la Fiducie du Québec, par le Crédit industriel Desjardins, par la Société d'investissement Desjardins, il y en a pour 260 000 000 $. Cela fait en tout au-delà de 1 100 000 000 $ au 31 décembre 1980. Comme nous sommes tout près du 31 décembre 1981, j'ose croire que ce chiffre aura augmenté probablement de 10% au cours de l'année, ce qui devrait donner au-delà de 1 200 000 000 $, comme nous le disions tantôt.

Un autre point très intéressant, c'est la présence de nombreux professionnels du prêt industriel et commercial dans le Mouvement Desjardins. Je pense que nous serions tous d'accord pour convenir qu'une des grandes faiblesses des caisses d'entraide économique au cours des dernières années, a été l'absence de personnel qualifié pour procéder aux évaluations qui étaient nécessaires. Avant le consentement en vue d'un prêt, il faut procéder à une évaluation très sérieuse de la valeur d'une entreprise, de ses chances de développement, des possibilités de succès, des plans de promotion que mettent en oeuvre ses dirigeants, etc. Dans le Mouvement Desjardins, on comptait, en janvier 1981, à titre d'employés permanents, 77 analystes financiers spécialisés au crédit industriel et commercial. En outre, 27% de toutes les caisses populaires du Québec étaient accréditées comme prêteurs en vertu de la loi fédérale sur les prêts aux petites entreprises en date de mai 1981.

Tout ceci pour conclure, encore une fois, M. le Président, que le Mouvement des caisses populaires Desjardins dispose d'un équipement extraordinaire dont les éléments essentiels doivent être portés à la connaissance de ceux qui auront à prendre des décisions du côté des caisses d'entraide économique. Je le dis sans aucune pensée d'impérialisme, je tiens à signaler très clairement que, dans mon esprit et dans celui de mes collègues, la décision revient exclusivement aux sociétaires des caisses d'entraide économique et que le rôle du gouvernement et de ceux qui s'intéressent à ce dossier, y compris évidemment les responsables du Mouvement Desjardins, c'est de faciliter la décision la plus rationnelle et la plus responsable de la part des sociétaires.

Ce qui me frappe à propos du Mouvement Desjardins, c'est la manière assez déroutante dont semblent avoir été conduites les conversations avec les responsables du Mouvement Desjardins au cours des derniers mois. Ceci implique autant le gouvernement que les dirigeants des caisses d'entraide économique. Je lisais, dans les journaux d'avant-hier ou d'hier, le compte rendu d'un discours de M. Dugal devant la Chambre de commerce de Montréal. Je comprends l'impatience qu'il a pu éprouver en apprenant peut-être certaines petites nouvelles. Il y a toujours des choses qui se passent au niveau local et qui peuvent, à un moment donné, susciter des réactions d'impatience chez quelqu'un. Je l'entendais parler du Mouvement des caisses populaires avec une espèce de désinvolture que j'ai trouvée excessive. Je ne pense pas que ce soit le type de langage qu'on attende d'un homme qui a dans ses mains l'avenir d'un mouvement réunissant des épargnes d'une valeur de plus de 1 000 000 000 $ en provenance de milliers de citoyens du Québec.

Ce que j'ai pu apprendre, par une conférence de presse que donnait ces temps derniers le président du Mouvement Desjardins, M. Blais, c'est que, dès l'été dernier, le Mouvement Desjardins a soumis au ministre des Finances une proposition qui eût consisté essentiellement à réaliser ou à poursuivre les objectifs suivants: d'abord, faire en sorte que les membres des caisses d'entraide économique ne perdent pas les économies confiées à ces institutions. Je crois que c'est un objectif auquel nous souscrivons tous. Deuxièmement, faire en sorte que tout déficit, toute perte identifiable encourue par ces institutions soit garantie par le gouvernement. Évidemment, ce n'était pas chèque en blanc que les caisses populaires demandaient au gouvernement. Je pense que la manière dont c'est formulé ici pourrait laisser entendre qu'ils veulent un blanc-seing à vie de la part du gouvernement.

Je pense que ce qui était signifié, c'était une garantie de responsabilité du gouvernement pour les pertes vérifiables jusqu'au moment de la mise en commun des avoirs et peut-être pour une période, une durée limitée qui aurait servi à assurer la transition. Encore là, c'est assez normal que ceux qui ont été responsables des erreurs passées en assument le coût et, dans ce cas-ci, il s'aqit, au premier chef, évidemment, des responsables du mouvement des caisses et des sociétaires et aussi du gouvernement. On demandait ensuite que l'intégration au Mouvement des caisses populaires Desjardins se fasse par étapes, et ceci dans le but de permettre de mesurer la situation exacte de chaque caisse. On demandait que les membres des caisses populaires, ceux qui recevraient les sociétaires des caisses d'entraide, ne soient pas pénalisés financièrement, et enfin, que l'accord majoritaire des sociétaires des caisses d'entraide soit assuré avant qu'on procède de cette manière.

Tout ceci n'a pas semblé aboutir jusqu'à octobre dernier, le 15 octobre dernier. Le Mouvement des caisses populaires et d'économie Desjardins présente au ministère des Institutions financières et Coopératives une nouvelle proposition inspirée des mêmes objectifs qui avaient été proposés

au cours de l'été, mais comportant des précisions nombreuses quant au rôle respectif que pourrait jouer, dans une solution comme celle-là, le Mouvement Desjardins, le gouvernement et les responsables des caisses d'entraide économique. J'aimerais que le ministre, dans sa réponse tantôt, nous dise ce qu'il est advenu de cette proposition qui avait été faite par le Mouvement Desjardins en date du 15 octobre dernier. Je crois comprendre - et là-dessus le ministre me corrigera si je fais erreur - que l'élément clé de la solution proposée par le Mouvement Desjardins était énoncé sous le titre "rôle du gouvernement". On demandait au gouvernement de faire en sorte que puisse être facilitée la prise en charge par le Mouvement Desjardins de la gestion et du contrôle de la Fédération des caisses d'entraide en tant que telle.

Je comprends que cela puisse poser un problème pour ceux qui assurent actuellement la direction du mouvement des caisses d'entraide et surtout de la fédération, mais je vois mal comment une solution d'ensemble pourrait être envisagée si on ne règle pas le problème de la fédération. Le ministre pourra trouver refuge dans une apparence de solution alternative qui consisterait à dire aux sociétaires de chaque caisse d'entraide: Si vous voulez, vous pouvez présenter une motion, en fabriquer une vous-mêmes en vertu de laquelle vous souhaiteriez vous intégrer plutôt à une caisse populaire ou à la Fédération des caisses populaires régionales de votre région. Mais je pense que c'est plus que cela qu'il faut envisager. Le ministre nous a dit qu'il avait eu des conversations avec les responsables du mouvement des caisses encore ces temps derniers. Je suis très intéressé à ce qu'il nous dise clairement, avant que nous nous prononcions sur le projet de loi, où en sont ces conversations et quel genre de formule pourrait être proposée comme solution alternative raisonnable.

À l'intention de ceux que cette question intéresse, en particulier des milliers de sociétaires, des caisses d'entraide ou du Mouvement des caisses Desjardins, je voudrais souligner que, selon les dires de M. Raymond Blais, le président du Mouvement Desjardins, de la grande confédération qui réunit toutes les institutions du Mouvement Desjardins, 26 caisses d'entraide auraient adressé au Mouvement Desjardins des demandes de négociations et des résolutions en ce sens. Il ajoute ceci: "sans aucune démarche de notre part." Je pense qu'en tout il y a 75 caisses d'entraide économique. S'il y en a 26 qui ont pris l'initiative de s'adresser au Mouvement Desjardins pour lui demander des propositions ou des informations quant à des possibilités d'intégration, je pense que c'est extrêmment significatif.

M. Blais rendait publique une note qui a été rédigée par le président de la Caisse d'épargne et d'entraide économique de Québec, que connaît sans doute le député de Charlesbourg, qui vient d'arriver à côté du ministre des Finances. Voici une caisse qui fonctionnait bien. Voici une caisse qui n'était pas affiliée, à ma connaissance, à la Fédération des caisses d'entraide économique, mais qui fonctionnait suivant les mêmes principes, les mêmes objectifs généraux et les mêmes méthodes. Les dirigeants de cette caisse, devant la situation qui semblait s'aggraver l'été dernier dans l'ensemble du mouvement, ont pris l'initiative d'ouvrir des pourparlers avec le Mouvement Desjardins.

Finalement, ils en sont venus à une entente. La Caisse d'épargne et d'entraide économique de Québec est devenue une caisse populaire ou elle est en train de le devenir. Au bout de la ligne, je pense qu'elle se spécialisera peut-être un peu plus que d'autres institutions dans les prêts industriels et commerciaux mais elle offrira ou elle offre peut-être déjà - je n'ai pas tous les détails - les services qu'offre une caisse populaire.

Je tiens ici à citer brièvement ce qu'a dit Me Andre Cossette, notaire et président de cette caisse: "Tout d'abord, écrit-il à M. Ouellet, président de la fédération de Québec des caisses populaires Desjardins, je veux souligner très particulièrement l'accueil courtois et même empressé qu'a reçu notre institution lorsqu'elle s'est adressée au Mouvement Desjardins à la suite de la situation de panique qui a été créée au mois de juin 1981. Des personnes fort qualifiées furent chargées de l'examen de notre dossier, l'ont étudié et ont imaginé avec notre concours plusieurs hypothèses de solution sans qu'il nous soit demandé en retour quelque engagement que ce soit, ni même de rémunération. Je veux bien croire que notre caisse avait peut-être une situation privilégiée, en ce sens qu'elle avait un portefeuille d'hypothèques exemplaire, qu'elle s'était donné des règles d'éthique et que l'ensemble de ses activités reflétait davantage un caractère nettement coopératif, mais rien n'obligeait les caisses populaires à nous accueillir comme vous l'avez fait, sinon les fortes convictions que vous avez, eu égard aux responsabilités sociales économiques et démocratiques que vous assumez comme président de la fédération. "Qu'il me soit aussi permis de relever le fait que vos représentants ont toujours fait abstraction de la situation défavorable dans laquelle notre caisse se trouvait, sauf dans les cas où c'était nécessaire pour des fins d'analyse et de perspective, qu'ils ne l'ont jamais exploitée, qu'elle n'a pas été évoquée autrement que pour en arriver à une situation acceptable pour les parties en cause. Il n'est pas éloigné de la vérité de

dire que dans le monde ordinaire des affaires, le plus fort profite de la situation du plus faible et, bien souvent, tend à exploiter à la limite la position défavorable du plus faible. Tel n'a pas été le cas dans nos négociations. Il faut bien reconnaître en cela une attitude et un comportement spécial du monde coopératif. Personnellement, je suis persuadé que c'est cette ambiance coopérative, qu'il faut sauvegarder, qui constituera toujours la marque distinctive du Mouvement Desjardins."

En d'autres mots - et ceci est très important, M. le Président - si les caisses d'épargne et de crédit devaient se comporter en affaires comme les autres institutions financières, elles ne rempliraient plus leur mission et ne pourraient plus se justifier d'avoir un statut spécial.

Dans ce grand contexte, je pense que le ministre avait une responsabilité tout à fait spéciale en ce qui touche l'exploration d'une possibilité de solution avec le Mouvement Desjardins. Or, qu'est-ce que nous dit le président du Mouvement Desjardins? Dans une conférence de presse qu'il donnait ces jours derniers il dit ceci: "Notre proposition d'octobre dernier a obtenu un accord de principe du ministre, lequel par la suite nous a référés aux cadres supérieurs du ministère pour en discuter les modalités concrètes d'application. Cette rencontre a effectivement eut lieu mais n'a pas donné lieu, selon nous, aux résultats escomptés. Jusqu'à maintenant, dans les pourparlers que nous avons eus, nous sommes demeurés sous l'impression que l'on voyait le Mouvement Desjardins assumer la plus grande part de responsabilité dans le dénouement de la question épineuse des caisses d'entraide. D'une part, nous n'avons pas vraiment senti l'affirmation ferme d'une volonté politique de régler ce dossier avec nous et, d'autre part, il nous a été impossible - à eux autres aussi, pas seulement à nous - d'obtenir les informations nécessaires qui nous auraient permis d'apprécier la situation financière actuelle des caisses d'entraide."

Je pense que c'est important; ce sont des considérations très importantes auxquelles le gouvernement doit apporter une réponse satisfaisante s'il veut que nous adoptions ce projet de loi en toute confiance.

Je voudrais terminer par une dernière considération. Le ministre a laissé entendre, dans ses propos de conclusion, hier, qu'une guillotine de contrôles de toutes sortes va tomber sur les institutions financières, en particulier les institutions qui se spécialisent dans le prêt aux individus et aux entreprises, les institutions qui accueillent les épargnes des citoyens du Québec à des fins de prêt et de placement.

Le ministre trouvera, de notre côté, une oreille attentive et accueillante dans toute la mesure où il nous présentera des réformes qui seront raisonnables et compatibles avec la nature de nos institutions. Je souhaite que le ministre ne vienne pas nous proposer comme modèle, pour les caisses populaires, la Loi sur les banques du Canada. Je pense que la Loi sur les banques du Canada a été conçue en fonction d'un régime oligopolistique, un régime qui comporte seulement une dizaine de banques sur lesquelles, par conséquent, vu le pouvoir immense qui leur est dévolu par la loi, il importe d'exercer des contrôles minutieux qui, d'ailleurs, n'ont pas toujours été exercés sur certaines parties de l'activité des banques.

Je dis au ministre qu'il doit éviter de penser à la législation future en ce qui touche les caisses populaires Desjardins en s'inspirant de l'exemple que nous discutons aujourd'hui parce que, à ce moment-là, je pense qu'il ferait fausse route. S'il veut moderniser la législation coopérative en ce qui touche en particulier les caisses populaires, je voudrais qu'il le fasse en tenant compte de l'expérience de ces institutions et de la très grande mesure de discipline qu'elles se sont donnée elles-mêmes au cours des années et qu'elles sont capables de se donner encore. Je ne voudrais pas qu'on aboutisse à un régime bureaucratisé à l'extrême où, encore une fois, la présence des inspecteurs du gouvernement serait toujours requise et où on écraserait les institutions sous le poids d'un contrôle infiniment lourd.

Je le dis avec d'autant plus de conviction que nous sommes en train d'étudier d'autres projets de loi qui vont dans le même sens, c'est-à-dire dans le sens de cette philosophie réglementariste qui est, hélas, trop caractéristique du gouvernement actuel. On discute actuellement du projet de loi no 27 qui vise une véritable mise en tutelle des institutions hospitalières et des établissements de services sociaux. On a le projet de loi no 16 qui comporte une véritable mise en tutelle d'Hydro-Québec, à notre point de vue. Je ne voudrais pas que, dans le domaine des institutions financières, sous prétexte qu'un mouvement a connu des difficultés auxquelles il fallait apporter des solutions, on vienne essayer d'encarcaner d'une manière excessive d'autres mouvements, en particulier le Mouvement des caisses populaires Desjardins dont la clé du succès a été, jusqu'à maintenant, la très grande liberté, la très grande mesure de responsabilité laissée aux sociétaires, aux dirigeants locaux, régionaux et nationaux.

J'invite le ministre des Finances à aborder ce volet de sa responsabilité avec une infinie circonspection au cours des mois à venir et je le préviens tout de suite que les méthodes assez brutales, assez autoritaires qui ont pu être justifiées dans le traitement du cas qui s'est présenté ces

derniers mois seraient complètement contre-indiquées dans le cas d'institutions qui ont même réussi à passer à travers une période comme celle que nous venons de vivre d'une manière infiniment plus méritoire et plus louable que le gouvernement et le ministre des Finances eux-mêmes.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Finances, votre droit de réplique.

M. Jacques Parizeau (réplique)

M. Parizeau: M. le Président, avant d'exercer ce droit de réplique, je voudrais faire une petite mise au point qui, je pense, s'applique aussi bien à nous, de notre côté, qu'à nos amis d'en face et qu'à vous, M. le Président. Dans ce débat, je ne suis pas le ministre des Finances; je suis le ministre des Institutions financières. J'imagine que c'est une étiquette qui me colle à la peau depuis tellement longtemps... Mais c'est comme ministre des Institutions financières que je présente ce projet de loi.

M. le Président, je remercie le chef de l'Opposition comme, d'ailleurs, quelques-uns de ses collègues, pour les interventions qu'ils ont faites depuis hier soir parce que je pense que ces interventions révèlent, à bien des égards, cette espèce de sens des responsabilités que nous cherchons tous à exercer dans la situation présente. (12 h 30)

Ce qui s'est produit avec les caisses d'entraide est une chose qui s'est produite dans d'autres pays, en d'autres endroits, et a toujours été difficile, parce que cela n'est pas facile. Une crise de confiance à l'égard d'organismes de dépôt n'est jamais facile. Quand cette crise de confiance apparaît, il est important de chercher à rétablir à la fois la viabilité financière de l'institution en question et, pour autant qu'il est possible, petit à petit et graduellement, le climat de confiance qui s'appliquait à cette institution, mais qui, comme tout phénomène de confiance, peut s'exporter, se diffuser un peu partout à l'égard d'autres institutions de dépôt.

C'est donc quelque chose de sérieux. Dans ce sens, je veux bien - c'est de bonne guerre - qu'on remonte quelques années en arrière, plus ou moins, pour dire: Voici ce qui aurait dû être fait et qui ne l'a pas été. Je comprends que les gens de l'Opposition auront tendance à mettre l'accent plutôt sur les quatre dernières années et que moi, j'aurai plutôt tendance à mettre l'accent sur les quatorze dernières années. Tout cela est de bonne guerre, mais cela ne règle rien.

Nous avons donc essentiellement à chercher des solutions, je dis bien des solutions qui soient, autant que faire se peut, susceptibles de rétablir la situation financière, d'assurer une fonction très utile comme nous avons tous eu l'occasion de le souligner et, troisièmement, de rétablir la confiance. Bien sûr, cela ne se fait pas par des déclarations tonitruantes. Le chef de l'Opposition me disait que j'ai utilisé dans le débat du printemps, à cet égard, des termes feutrés. Je continue d'utiliser des termes feutrés. La confiance, par définition, est quelque chose de feutré et, encore une fois, ce n'est pas par des déclarations tonitruantes - et Dieu sait si, parfois, on aurait le goût d'en faire - qu'on peut rétablir le climat nécessaire.

Il y a cependant un certain nombre de choses qui me semblent découler soit de l'intervention du chef de l'Opposition, soit de certaines autres interventions qui ont été faites jusqu'à maintenant. Il faudrait bien saisir que, depuis que je suis entré en fonction, j'ai demandé des enquêtes d'ordre financier, très précises, non seulement sur les caisses d'entraide dont nous parlons, mais sur plusieurs autres types d'institutions de dépôt au Québec. Cela me paraîtrait inconcevable que, pour se tracer le cheminement à venir, non seulement dans ce cas-ci, mais dans les autres cas auxquels faisait allusion le chef de l'Opposition, on n'ait pas une base extrêmement précise sur le plan financier de la performance des mouvements et de chaque institution financière. C'est la base évidente de travail. Comment ne pas être trop laxiste ou trop dur? C'est d'abord de savoir précisément dans quelle situation financière on se situe et quelles sont les perspectives. C'est toujours là-dessus que cela est basé. Cela, maintenant, nous l'avons. Cela a pris plusieurs mois, forcément, inévitablement, mais, enfin, maintenant, c'est en main. Je pense que le chef de l'Opposition avait tout à fait raison de le dire, peut-être pas dans un droit de réplique qui doit s'exercer en quelques minutes, mais peut-être à l'occasion de la commission à laquelle nous allons siéger. Il y a, je pense, une série de renseignements élémentaires d'ordre financier qu'au moins la commission doit avoir. Je me chargerai de communiquer, à cet égard, passablement de renseignements qui, je pense, seront utiles.

Ceci étant dit, et simplement à titre d'introduction, je voudrais dire quelques mots sur le projet de loi lui-même appuyant, ainsi que je l'ai dit hier, donnant l'assise juridique du plan Dugal et faire quelques commentaires sur l'état de nos tractations avec le Mouvement Desjardins des caisses populaires.

Il est clair que le plan Dugal amène l'abandon de la formule coopérative pour une transformation en société à capital-actions. C'est un virage, c'est plus un virage qu'un abandon. Pour des raisons d'ordre financier, il faut qu'un capital permanent apparaisse

dans le plan Dugal, un capital qui ait plus de permanence que celui que l'on trouve habituellement dans des coopératives d'épargne et de crédit. Seulement, on voit bien, par le comité de surveillance, par le conseil de crédit, par le rapport entre les nouvelles sociétés d'entraide et leurs nouvelles fédérations, que l'on garde un bon nombre de caractéristiques de l'ancien système. Et je pense que c'est normal, pour les raisons d'ailleurs que donnait le chef de l'Opposition. Les gens ont pris l'habitude de travailler dans ce genre de structure et, dans la mesure où on peut maintenir ce cadre qu'ils connaissent bien, mais que, d'autre part, on constate qu'il faut prendre un virage, il faut essayer de marier les deux. C'est un peu le sens de plusieurs des dispositions du projet de loi que nous avons devant nous.

Il n'est pas tout à fait, il n'est sûrement plus la coopérative telle qu'on l'a connue, mais ce n'est pas du tout la société par actions de type courant. C'est une des raisons pour lesquelles la loi est assez longue et pour lesquelles, d'ailleurs, elle a des caractéristiques qui lui sont propres.

D'autre part, il est vrai que ce texte de loi prévoit une forme de gel des épargnes. Remarquons bien que le gel des épargnes est prévu dans nos lois déjà. Comment est-ce que le gel des épargnes dans les caisses d'entraide a pu être établi jusqu'à maintenant? Pas par une loi qui l'imposait spécifiquement, pas, contrairement à ce que certains ont pensé, par des sortes d'instructions qui viendraient du ministère, mais en vertu de l'article 31 des coopératives d'épargne et de crédit. C'est en vertu de cet article 31, qui existe depuis fort longtemps, à ma connaissance depuis sept ou huit ans dans la législation, que, caisse d'entraide par caisse d'entraide, le gel a pu être établi.

Le législateur avait prévu cela à l'époque. Je comprends qu'on peut dire que le législateur a été très négligent depuis bien des années dans notre système, mais, au moins, il avait prévu cette possibilité et Dieu sait si elle aura été utile dans les mois que nous avons connus.

Maintenant, la nouvelle loi, dans un certain sens, arrange, réarrange, si l'on peut dire, ce gel des épargnes en disant: Nous allons établir une partie des parts sociales en capital-actions autour du cadre. D'autre part, le reste sera transformé en dépôts à terme. En dépôts à terme qui auront quelles caractéristiques? Celles d'être appariés à la nature des engagements. C'est la seule chose prudente à faire.

Le problème des caisses d'entraide, accentué par un bon nombre de choses dont parlait le chef de l'Opposition, c'est le problème de toute institution financière. C'est le plus vieux problème qu'il y a dans le système des institutions de dépôts partout dans le monde. Il est imprudent d'emprunter à court terme pour prêter à long terme. C'est la plus vieille règle, celle d'éviter, comme on dit en anglais, "to borrow short to lend long". C'est connu comme Barrabas dans la Passion.

Il est clair que, si vous ramassez du dépôt à demande... Parce que, lorsqu'on parle des parts sociales des coopératives, il ne faut pas se faire d'illusions. Dans un certain nombre de cas, cela peut être remboursable à demande. C'est de l'argent qui peut être demandé en tout temps.

Donc, on obtient de l'argent à demande et on commence à l'investir dans des prêts d'un an. Passe encore. Deux ans, trois ans, quatre ans. Alors qu'en tout temps, ces gens-là, si les taux d'intérêt augmentent sur le marché, s'il y a des possibilités d'investissement plus acceptables, plus payantes, peuvent retirer leur argent. Mais c'est un problème qui est vieux comme le monde. Encore une fois, dans tous les pays, on a connu cela. Donc, on restructure, à l'occasion de ce projet de loi, on dit: une partie va être en capital permanent et l'autre partie, en dépôts, qui, pendant un certain temps en tout cas, seront appariés puisqu'il faut, pour rembourser ces dépôts, que le remboursement des prêts vienne.

Il ne faut pas en faire une question de principe, M. le Président. C'est simplement une question de réagir prudemment et correctement, je pense, à une situation de fait devant laquelle nous sommes placés. Il est évident que, pour des raisons humanitaires, comme le disait tout à l'heure le chef de l'Opposition, il faut probablement permettre à un certain nombre de membres de trouver une certaine souplesse de remboursement accéléré. Déjà, par l'article 34 de la loi, on prévoit un créneau. Oh! on me dira: II n'est pas large, le créneau. J'en suis conscient, à cet effet. Je sais, d'autre part, que la Fédération des caisses d'entraide cherche aussi certains aménagements pour des cas un peu criants, je pense à des personnes très âgées, par exemple, dont le REER est là, dont le REER est à l'heure actuelle dans une caisse d'entraide. (12 h 40)

Certes, le problème est bien compris. Je pense effectivement qu'il faut quelques portes qui ne pourront pas, compte tenu des circonstances réelles, être très grandes mais, au moins, pour des raisons humanitaires élémentaires, peuvent s'appliquer.

On me dit que ces caisses d'entraide, conformément au plan Dugal et à la loi qui nous est présentée, tombent sous la coupe du ministre - j'insiste à nouveau - non pas des Finances, mais des Institutions financières et Coopératives. Oui et non, il y a deux éléments de contrôle dans la loi. Il y en a qui sont transitoires, et je rappelle ici que

par, sa nature même, c'est une loi transitoire. C'est la raison pour laquelle on prévoit qu'au bout d'une certaine période de temps le ministre doit retourner faire rapport à la commission des institutions financières de l'Assemblée nationale parce que, normalement, à ce moment-là, on aura une loi plus générale - que nous n'avons pas encore au Québec - des compagnies de fiducie et de prêts. Normalement, ces dispositions transitoires devraient alors être enlevées et les sociétés dont nous parlons devraient rentrer dans un cadre plus général.

Il y a donc des dispositions qui sont transitoires et qui correspondent essentiellement à la situation de fait de ces institutions, actuellement, qui ont besoin d'être à la fois surveillées et contrôlées, mais en faisant très attention de prendre le virage avec elles. On ne peut pas leur imposer des choses. En somme, on ne peut pas leur imposer, au point de départ, leur point d'arrivée. C'est la raison pour laquelle un certain nombre de contrôles s'expliquent.

Il y en a d'autres qui ont des caractéristiques non seulement plus permanentes, mais d'application beaucoup plus générale. De celles-là, je dirai quelques mots quand je reviendrai à la fin, tout à l'heure, dans quelques minutes, en parlant justement des perspectives d'avenir qu'ouvrait le chef de l'Opposition tout à l'heure.

Passons maintenant à la question du plan du Mouvement Desjardins à l'égard des caisses d'entraide, de leurs propositions. Je pense que le chef de l'Opposition a tout à fait raison de soulever le rôle grandissant des caisses populaires dans le domaine du crédit industriel et commercial. C'est vrai que, depuis quelques années, il y a eu là une ouverture très intéressante. Mon problème, cependant, est le suivant. D'abord, c'est loin d'être généralisé dans tout le Québec également; il y a des endroits où les caisses populaires font du bon travail sur le plan du crédit industriel et commercial, dans d'autres, moins, parce que c'est un mouvement qui fonctionne seulement depuis quelques années, il est encore inégalement efficace selon les régions. D'autre part, il porte sur des montants qui sont importants, mais qui ne sont pas à ce point plus importants que le rôle massif que les caisses d'entraide ont aussi joué jusqu'ici.

Tout en reconnaissant que la priorité principale - on s'entend tous là-dessus - est la protection de l'épargne, je pense néanmoins que ce rôle des caisses d'entraide, dans le domaine du crédit industriel et commercial en région doit être, autant qu'il est possible, sauvegardé et marié, bien sûr, ajusté à celui, croissant, que jouent les caisses populaires.

Il est clair que le Mouvement Desjardins a demandé au gouvernement des garanties; cela se comprend. Ce ne sont pas des garanties qui représentent un chèque en blanc. Il est évident que je ne peux pas simplement dire: Faites-moi un rapport tous les trois mois des pertes que vous aurez subies et passez à la caisse. Il n'y a pas un gouvernement responsable qui réagirait de cette façon. Il y a donc à définir les formes de la qarantie qui, normalement, ne devraient pas représenter pour le gouvernement - à supposer que le Mouvement Desjardins prenne toutes les caisses d'entraide - on en conviendra, je pense, un montant supérieur à celui que présentent les avantages fiscaux donnés aux sociétés d'entraide. Un des guides pour moi depuis le début de ces discussions, c'est de dire, pour ne pas favoriser financièrement une formule aux dépens de l'autre, qu'elles doivent coûter des montants à peu près de même ordre. Là-dessus, je n'en disconviens pas.

La meilleure des façons, encore une fois, d'éviter de favoriser clairement un groupe plutôt que l'autre sur le plan financier, c'est de dire: Du point de vue du gouvernement, voici à peu près ce que nous sommes prêts à mettre sur la table pour toute formule. Je signale déjà que le montant dont nous parlons, c'est-à-dire quelque chose qui est autour de 90 000 000 $, est un effort sur le plan financier dans un chaos fiscal de l'autre qui est assez inédit, M. le Président. Il n'y a pas beaucoup de gouvernements qui ont fait des choses comme ça à l'égard d'institutions de dépôts. Je suis très conscient, surtout dans le contexte budgétaire extrêmement serré dans lequel nous sommes, en mettant des sommes pareilles sur la table ou en discutant de sommes pareilles, de faire quelque chose d'assez inédit au Canada. Ce n'est pas très fréquemment qu'on pose des gestes de cet ordre. Il faut donc ajuster une proposition du Mouvement Desjardins, une proposition venant de lui, correspondant à plusieurs des principes qu'il a expliqués dans ses plans et qu'on voit apparaître d'ailleurs dans le communiqué de presse de M. Blais et, d'autre part, certaines exigences en termes de garanties du gouvernement qui ne veut pas s'embarquer dans n'importe quoi, qui dit qu'il faut quand même que ce soit limité à un certain montant et, d'autre part, le maintien, en autant qu'il est possible, d'une fonction de prêt industriel et commercial dans les caisses d'entraide absorbées par le Mouvement Desjardins, mais qui peut se marier avec ses autres activités.

Il s'est passé, je le reconnais, au cours des derniers jours, de curieux incidents. Le lendemain d'une rencontre que j'avais avec M. Blais, ici à Québec, il avait prévu une conférence de presse. Il a sorti des documents dont le chef de l'Opposition a cité certains extraits. J'aurais peut-être voulu, cependant, que le chef de l'Opposition lise aussi des extraits de ma lettre à lui,

que j'ai rendue publique ce soir-là, et qui était très explicite, elle aussi. Justement parce que nous nous étions vus la veille, après le communiqué dont faisait état le chef de l'Opposition, M. Blais a cependant annoncé: Vous savez, nous gardons les portes ouvertes pour des négociations avec le gouvernement. J'ai dit la même chose. Ce qui est un peu paradoxal, c'est que mardi matin dernier, quelques heures après cet incident, les deux équipes se retrouvaient en conclave dans un de mes bureaux. Il n'y a pas eu de fumée blanche à la fin de la journée, mais à la fin de la journée on pouvait rapporter progrès considérablement. C'est ça. Si je comprends bien, les deux équipes se retrouvent à nouveau samedi.

M. Ryan: Les caisses d'entraide et le Mouvement Desjardins?

M. Parizeau: Non.

M. Ryan: Le gouvernement...

M. Parizeau: Je parle d'une réunion entre le Mouvement Desjardins et le gouvernement, parce qu'il est évident qu'il faut d'abord définir les choses dont je parlais tout à l'heure, la nature des garanties. C'est la démarche essentielle qui doit être faite entre le gouvernement et le Mouvement Desjardins pour que le gouvernement sache exactement dans quoi il s'embarque. Qu'il y ait besoin de tractations entre les deux mouvements, ensuite, cela va de soi. J'ai bon espoir, de la façon dont cela se déroule à l'heure actuelle, qu'autour de Noël, peu avant Noël, normalement, cela devrait être fixé, mais je réitère - et c'est ce que j'ai dit - qu'encore une fois, je crois qu'il nous faut appuyer juridiquement le plan Dugal lui donner une assise juridique, ce que nous faisons avec le projet de loi. Il nous faut d'autre part, en tout sens de responsabilité et de bonne foi avec le Mouvement Desjardins, être en mesure d'en arriver à une proposition alternative et alternative qui ne marquerait pas sur le plan financier que le gouvernement est prêt à mettre énormément d'argent d'un côté et à peu près pas d'argent de l'autre. Si le gouvernement réagissait comme cela, on pourrait dire: II est irresponsable, mais c'est justement ce qu'on veut éviter.

Je termine, M. le Président, en disant quelques mots sur les perspectives d'avenir de la réglementation et des lois s'appliquant aux institutions financières d'une façon générale au Québec. Il faut faire très attention, M. le Président, quand on regarde ce qui s'est développé historiquement chez nous, de ne pas considérer qu'il y avait des lois fédérales très astreignantes, très précises, impliquant de nombreux contrôles et - là, je vais faire bondir mes amis d'en face - qu'on devait refuser, parce que c'était fédéral et outaouais, alors que nous, au nom de la québécitude, on peut se passer de tout cela.

Il faut bien comprendre qu'une bonne partie des lois et des règlements qui s'appliquent à Ottawa, aux banques, aux compagnies d'assurances, à des institutions de dépôts ou de prêts sont des règles qui découlent de la sagesse financière universelle. Elle ne sont pas outaouaises en principe. On retrouve cela à peu près partout dans les gouvernements qui ont décidé d'avoir une protection convenable des épargnants dans les institutions de dépôts. (12 h 50)

II faut faire attention ici de distinguer deux choses: ces règles élémentaires qui relèvent encore une fois de la prudence et de la sagesse financière universelle de contrôle d'actions dont parlait le chef de l'Opposition, de bureaucratie galopante, je rappelle, par exemple, que les contrôles du gouvernement fédéral à l'égard des compagnies d'assurances continuent d'être assurés par une petite équipe d'actuaires au bureau du surintendant, équipe minuscule, mais remarquablement renseignée.

Il y a une chose. On peut accuser les bureaucraties de galoper partout, mais pas chez le Surintendant fédéral des assurances. Cela a commencé comme un petite équipe, cela reste une petite équipe, mais qui fout la crainte de Dieu, si je peux m'exprimer ainsi, dans tout le milieu financier. Le personnel de l'inspecteur général des banques à Ottawa, je ne sais pas s'il dépasse dix" personnes. La dernière fois que je l'ai consulté - j'admets que cela fait plusieurs années - il n'y avait pas dix personnes là-dedans, mais le poste était remarquablement respecté.

Il ne s'agit pas de multiplier les contrôles tatillons. L'important, cependant, c'est que ce qu'on a appris de pays en pays sur les règles de prudence élémentaires à l'égard des institutions de dépôts, qu'elles soient coopératives ou qu'elles soient de nature capitaliste, soit graduellement introduit chez nous davantage qu'il ne l'a été, en reconnaissant les différences qu'il y a entre une coopérative et une société capitaliste, je n'en disconviens pas. Je plaide, M. le Président, essentiellement, ici, pour que bien des gens qui sont passés avant nous dans beaucoup d'autres systèmes et qui ont constaté les mêmes problèmes et en sont arrivés à des solutions d'application qénérale, nous les retrouvions dans nos propres législations. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de deuxième lecture est-elle acceptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Adoption de ce projet de loi.

M. Chevrette: Je demande la suspension des travaux jusqu'à 15 heures.

Oui, il faut faire une motion, M. Parizeau, pour déférer...

Renvoi à la commission des institutions financières et coopératives

M. Parizeau: C'est moi qui vais faire la motion. Je propose que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions financières et coopératives.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion est acceptée?

M. Chevrette: Adopté. Suspension de nos travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 53)

(Reprise de la séance à 15 h 15)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, avant que je ne fasse motion pour appeler l'article 1 et vous inviter à quitter votre fauteuil pour en prendre un autre, je voudrais immédiatement indiquer qu'il y aura une modification dans le cadre du débat que nous aurons sur le budget supplémentaire. En effet, 30 minutes avaient été demandées par l'Opposition pour l'étude des crédits de l'Assemblée nationale, mais l'Opposition a décidé de retirer cette demande pour que ces 30 minutes soient allouées au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, ce qui fait donc un total de 90 minutes pour ce ministère. Ces crédits seront étudiés immédiatement après ceux du ministère des Affaires culturelles. C'est la seule modification au programme aujourd'hui.

Je voudrais aussi indiquer, M. le Président - vous aurez peut-être à le faire tout à l'heure - que dans ce temps ne sont pas comprises l'intervention qu'aura à faire le ministre des Finances au début, quinze minutes, et la réplique à laquelle a droit l'Opposition, c'est-à-dire quinze minutes.

Sur ce, conformément à l'article 129 du règlement et à l'article 1 du feuilleton d'aujourd'hui, M. le Président, je ferai motion pour que vous quittiez immédiatement votre fauteuil pour former la commission plénière de l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant de vous accorder cette possibilité, M. le whip adjoint de l'Opposition a quelque chose à déclarer.

M. Picotte: Pour confirmer l'entente au sujet du ministère de l'Agriculture, je tiens à préciser de plus que, sur ces 90 minutes, 30 minutes seront consacrées aux pêcheries.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Bertrand: Effectivement, M. le Président, je suis en mesure de corroborer les dires du député de Maskinongé. 30 minutes seront spécifiquement allouées au secteur des pêcheries.

Étude des crédits supplémentaires

Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion pour transformer cette Assemblée en commission plénière pour l'étude des crédits est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Commission plénière

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Cette Assemblée se transforme donc en commission plénière.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Finances, vous avez la parole.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, au moment où nous nous préparons à examiner les crédits supplémentaires pour l'année financière se terminant le 31 mars 1982, je voudrais faire précéder la discussion détaillée de ces crédits de certaines remarques d'ordre général, en particulier pour ce qui a trait à une caractéristique, je pense importante de ces crédits cette année, c'est-à-dire la place considérable qu'occupent les modifications apportées au service de la dette, en particulier les taux d'intérêt, et aux conséquences d'une inflation un peu plus rapide que prévue.

En fait, comme j'ai eu l'occasion de le dire d'ailleurs à l'occasion du mini-budget d'il y a quelques jours, ces deux facteurs représentent presque la moitié de tous les crédits qui sont actuellement demandés. On les voit apparaître sans doute au ministère des Finances, mais on les voit aussi dispersés dans d'autres ministères, si bien qu'il faut considérer que l'impact majeur que l'on trouve dans ces crédits supplémentaires, c'est, d'abord et avant tout, les dépenses

d'intérêt et, secondairement, mais facteur important aussi, l'accélération de l'inflation.

J'aimerais donc profiter de cette occasion, si on peut s'exprimer ainsi, pour discuter justement à la fois des taux d'intérêt et de l'inflation, de la façon dont cette flambée s'est produite depuis quelgue temps, des conséquences que cela a, bien sûr, sur les budgets des gouvernements, mais, d'autre part aussi, sur l'économie d'une façon plus générale.

En fait, si on peut s'exprimer ainsi, l'histoire commence à la fin de 1979 alors que le gouvernement des États-Unis se rend compte qu'il est en face d'un taux d'inflation très élevé qui va atteindre, sur une base annuelle, au début de 1980, presque 15%. Et l'on décide donc, au États-Unis, à ce moment, comme jamais on ne l'avait fait dans le passé, de chercher, en restreignant l'expansion de la masse financière et en faisant augmenter les taux d'intérêt, de ralentir l'économie et, dans ces conditions, d'amener une chute dans le taux d'inflation. (15 h 20)

II va donc y avoir, dans un premier temps, de la fin 1979 jusqu'au milieu de 1980, des taux très élevés aux États-Unis, une chute au cours de l'été, une augmentation à nouveau jusqu'au début de 1981, une sorte d'effort délibéré de ralentir l'inflation en se servant de la politique monétaire et de très hauts taux d'intérêt. On verra à ce moment-là apparaître des taux d'intérêt comme jamais on n'en avait vu dans l'histoire contemporaine des États-Unis.

On ne peut pas dire que l'expérience a été, aux États-Unis, totalement décevante. Mais on se rend compte très bien au début de 1981, ici, au moment où nous préparons nos budgets. Il y a une sorte de flottement aux États-Unis où on se rend compte qu'il semble y avoir une sorte de résistance du taux d'inflation à baisser en bas de 10%. Et, après une pause, les autorités monétaires américaines vont décider à nouveau d'augmenter les taux d'intérêt très fortement dans le deuxième trimestre de 1981. Bien sûr, à force d'augmenter les taux d'intérêt de cette façon, l'économie américaine va commencer à glisser et c'est ainsi qu'à l'heure actuelle elle se trouve en situation de récession.

Au Canada on peut dire que jusqu'à l'été dernier on a suivi à peu près ce qui se passait aux États-Unis. Sur le plan des taux d'intérêt on a évoqué à ce moment-là l'image de la chaloupe canadienne et du bateau américain qui montent et baissent avec la marée. Il n'y a pas à proprement parler de politique canadienne particulièrement originale, d'autant plus que les possibilités au Canada de lutter, d'atteindre les mêmes résultats sur le plan de l'inflation qu'aux États-Unis sont beaucoup plus faibles dans la mesure même où, il faut s'en souvenir, les ajustements au prix du pétrole, aux conditions internationales du prix du pétrole sinon au prix lui-même, sont déjà passés aux États-Unis, qui les ont derrière eux, alors que nous, au cours de cette époque, l'entente entre Ottawa et Edmonton n'est toujours pas signée.

On sait donc que les ajustements majeurs dans le prix du pétrole vont venir et que dans ces conditions le Canada risque d'avoir pendant quelques années un taux d'inflation beaucoup plus élevé que le taux américain. Mais, quoi qu'il en soit, sur le plan de la politique monétaire, le Canada suit les États-Unis à peu près jusqu'à l'été 1981. Et là, il se passe quelque chose de tout à fait différent en ce sens que le taux de change du dollar canadien se met à baisser, à dégringoler, en fait, et, on s'en souvient, va toucher 0.80 $, à un moment donné, c'est-à-dire le deuxième plus bas taux de l'histoire.

À ce moment, il y avait deux possibilités, ou bien établir une forme partielle de contrôle des changes, non pas le contrôle des changes généralisé, mais, par exemple, des formes de contrôle des changes applicables aux mouvements de capitaux, et on sent très bien gu'à Ottawa il y a eu une sorte de tentation à cet égard pendant quelques jours... Finalement, on est revenu à la méthode beaucoup plus classique qui consiste à avoir des taux d'intérêt plus élevés encore qu'aux États-Unis de façon à être certain d'attirer des capitaux américains. C'est ainsi qu'en juillet, août, septembre, une partie d'octobre, les autorités monétaires canadiennes vont placer les taux d'intérêt, aussi bien à court terme qu'à long terme, beaucoup plus haut que les taux américains. On verra des écarts de 4%, de 5% apparaître, qu'on n'avait jamais vus, dans le passé, jamais.

Effectivement, cela a redressé le taux de change du dollar canadien, c'est indiscutable, mais ces taux d'intérêt beaucoup plus élevés qu'aux États-Unis, les plus élevés, en fait, de tout le monde industriel, ont provoqué un effet déplorable sur l'économie canadienne, un effet qu'on appelle souvent l'effet de pare-brise, c'est-à-dire qu'on compare la politique monétaire un peu à un frein. On descend le frein un peu et il ne se passe rien - effectivement, l'économie se développait brillamment au Canada en avril, mai et juin - on pousse le frein encore un peu plus bas, il ne se passe toujours rien, et un bon jour, on frappe le plancher avec le frein et on passe par le pare-brise. C'est exactement ce qui est arrivé à l'économie canadienne qui a subi un choc à la baisse, en septembre, extraordinairement dur partout au Canada. Ici, on peut faire autant de politique

partisane qu'on voudra, mais le taux de change a augmenté de 1,2% ou 1,3% dans toutes les régions canadiennes le même mois. Jamais on n'avait vu celai

En fait, à Ottawa, on a évogué, à un moment donné, la perspective d'une sorte d'erreur de calcul, mais les chiffres d'octobre l'ont confirmé et les chiffres de novembre aussi. Il est clair qu'à vouloir pratiguer cette politique de taux d'intérêt très élevés, on a pris le risque de casser l'économie. Et nous en subissons tous, à l'heure actuelle, les conséquences. D'abord, ces taux d'intérêt, il faut les payer; que ce soit le consommateur, le propriétaire d'une maison ou les gouvernements, tout le monde y passe. Des taux d'intérêts comme ceux que nous avons connus ont un effet de déstabilisation sur tous les budgets, que ce soient des particuliers, des gouvernements ou des entreprises.

D'autre part, ce coup qu'on a donné à l'économie trouve les gouvernements extrêmement mal placés pour réagir. Normalement, ils devraient réagir très fortement pour essayer de donner un coup de main à l'économie, encore que c'est toujours un peu bizarre de voir les gouvernements chercher à donner un coup de main à l'économie pendant que l'autorité monétaire fait exprès pour qu'elle tombe. Même quand on demande au gouvernement, à l'heure actuelle, de faire quelque chose; si l'autorité monétaire veut démolir l'économie et prend les moyens nécessaires non seulement pour la ralentir, mais pour la casser littéralement, faire quelque chose contre vos propres autorités monétaires, les gouvernements sont assez mal placés pour réagir. D'abord, le gouvernement fédéral veut réduire son déficit et il le fait de deux façons: d'abord, en augmentant les impôts, parce que, même son entente avec Edmonton lui rapporte davantage de dollars sur le pétrole, mais ça ne suffit pas, alors, le budget fédéral augmente les impôts au net et, d'autre part, réduction annoncée des transferts aux provinces, de façon que le déficit fédéral tombe et soit envoyé au gouvernement des provinces et, singulièrement, comme j'ai eu l'occasion de le démontrer dans cette Chambre, au gouvernement du Québec.

Le gouvernement du Québec, lui, est placé devant l'impact indiscutable de ces taux d'intérêt considérables et de l'accélération de l'inflation qui s'est produite, ainsi que je l'ai dit tout à l'heure, et, d'autre part, devant la perspective de revenus qui, dans le secteur privé, ne vont pas augmenter aussi rapidement qu'ils le devraient, à cause de ce qui s'est produit, et puis, d'autre part, d'une chute absolue dans les transferts du gouvernement fédéral au Québec qui représentent le quart de tous nos revenus. Dans ces conditions, le gouvernement fédéral s'est placé dans la situation de ne pas pouvoir réagir beaucoup dans la situation économique actuelle. Le gouvernement de Québec est placé dans cette situation, pour une part à cause de l'impact des dépenses accrues et pour une part parce que le gouvernement fédéral coupe une partie de nos revenus.

Cela n'est pas une situation particulièrement réjouissante. Je pense que la première tâche sur laquelle on doit essayer de s'associer, c'est d'amener les autorités monétaires canadiennes à reconsidérer jusqu'à un certain point, peut-être pas totalement -c'est toujours des questions de dosage ça -cette espèce de symbolisme qu'ils ont fait du taux de change. On ne peut tout de même pas créer le chômage qu'on a créé depuis trois mois uniquement pour éviter de perdre ou de gagner deux points sur le taux de change. Il y en a qui disent: Oui, mais enfin, quand le taux de chanqe baisse cela accélère l'inflation. Je veux bien. Mais pas dans des proportions qui sont saisissantes. Il faut une baisse de 3% sur le taux de change pour ajouter 1% sur le taux d'inflation. Pour faire monter le dollar canadien de 0,81 $ à 0,84 $, c'est-à-dire éviter de 1% la hausse de l'inflation, on ne fait pas perdre leur emploi à travers le Canada à des centaines de milliers de gens. Il y a là une sorte de perspective qu'il faut graduellement changer parce qu'il est clair qu'à l'heure actuelle ce qui gêne le plus le développement de l'économie canadienne et l'économie du Québec, c'est d'abord et avant tout la politique du taux d'intérêt. C'est très net par rapport à tous les autres facteurs.

C'est dans ce sens, M. le Président, que l'on trouvera dans les crédits supplémentaires qui sont devant nous, d'une part, la traduction de certains des phénomènes dont je viens de parler et, d'autre part, évidemment, les ajustements que nous faisons chaque automne dans les prévisions de dépenses de chacun des ministères, soit parce que certains programmes coûtent plus cher que prévu, soit parce qu'il y a eu des réorientations dans les programmes ou les intentions du gouvernement. Je termine ces observations à peu près à l'intérieur de l'enveloppe de temps que l'on m'avait allouée. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Vaudreuil-Soulanges. (15 h 30)

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. Je serai bref parce que nous avons hâte de ce côté-ci d'entrer dans le vif du sujet et les détails des programmes des différents ministères qui sont touchés par ces crédits supplémentaires. J'aurais peut-être des commentaires à trois volets. D'abord,

quant à la nature des besoins qu'on constate dans les crédits supplémentaires que le ministre explique évidemment en grande partie, en majeure partie, par les taux d'intérêt plus élevés que prévu par les temps qui courent, et sur la période qui est couverte par le budget courant d'une part et d'autre part, évidemment, par les effets de l'inflation et donc de l'indexation dans certains cas dans les conventions collectives, les modes de rémunération à travers la fonction publique et les répercussions que doit supporter l'État sur l'augmentation de coûts lors de l'achat de biens et services qui sont nécessaires à l'administration des services du gouvernement.

Je réitérerais, quant à nous, qu'évidemment, l'influence des taux d'intérêt plus élevés n'en est que plus marquée dans un contexte où le niveau des emprunts du gouvernement est élevé. Je réitérerais, évidemment, à ce moment-là, la nécessité très réelle pour le gouvernement de continuer à rechercher - et nous tenterons de l'appuyer chaque fois que ce sera possible une façon de réduire le niveau des emprunts du gouvernement du Québec.

Quant à l'inflation, évidemment, et je l'ai évoqué, c'est surtout au niveau de l'impact dans les conventions collectives des formules qui reflètent les différences du taux d'inflation d'un trimestre à l'autre qui sont les plus importantes à retenir. Dans cet esprit, encore une fois, je pense qu'il s'impose à la raison que la façon dont ont été négociées et réglées les conventions collectives préréfendaires demeurent quand même, encore une fois, directement coupables de l'obligation dans laquelle se trouve le ministre des Finances de se représenter devant la Chambre à la suite de son discours sur le budget supplémentaire de novembre.

Deuxième ordre de commentaires quant au rôle du gouvernement fédéral que le ministre évoque, très certainement à l'égard des taux d'intérêt, d'une part, a-t-il raison en grande partie, quoique nous ne puissions pas imaginer indéfiniment nous sentir absolument coupés de la réalité nord-américaine dont évidemment nous connaissons également les soubresauts. Par ailleurs, au niveau de la décision fédérale telle qu'annoncée de réduire ses paiements de transfert aux provinces, on peut prétendre que c'est là une tentative - comme le prétend le gouvernement - de déstabiliser notamment les finances de la province de Québec, mais on peut également retenir dans cet effort que fait le gouvernement fédéral depuis quelques années ou quelques mois, de toute façon, pour redresser, comme l'ont fait d'autres provinces du Canada, le niveau de ses dépenses, de redresser cet emballement qu'ont connu les dépenses publiques fédérales - il n'y a aucun doute dans l'esprit de personne - qu'il a été lui aussi à ce niveau coupable en alimentant l'inflation, coupable du climat économique que nous connaissons maintenant. Il a pris la décision de réduire ses dépenses. Qu'on vienne nous dire aujourd'hui que c'est simplement un transfert de déficit vers les provinces plutôt que d'y voir une occasion, salutaire sans doute, de se discipliner à essayer, dans les gouvernements qui sont bénéficiaires de transferts du fédéral, de réduire les dépenses là aussi, c'est également, à mon sens, un point de vue qu'on doit faire valoir, une occasion d'autodiscipline et de meilleure gestion qu'on doit saisir au passage.

Évidemment, cela n'arrange rien de blâmer les autres. On peut reconnaître la situation difficile dans laquelle des décisions qui viennent d'ailleurs peuvent nous mettre mais, encore là, on n'a rien réglé si on ne fait que s'en plaindre. Je pense qu'il faut saisir ces occasions pour se discipliner nous-mêmes.

Troisièmement - nous pourrons peut-être entrer de cette façon dans le vif du sujet, certainement à l'égard des Affaires culturelles en tout premier lieu - ce que nous tenterons de vérifier par les questions que nous poserons cet après-midi et en soirée, c'est quels sont les usages de fonds publics que le gouvernement a retenus comme prioritaires par rapport à ce que les Québécois souhaiteraient. C'est-à-dire quels sont les autres usages auxquels les fonds publics auraient pu être employés. Quelles sont les véritables priorités... Je veux bien comprendre qu'on accepte que les taux d'intérêt élevés et l'inflation sont responsables d'une grande partie du déficit accru du gouvernement, mais on m'expliquera comment un budqet de fonctionnement de la Commission d'étude sur le cinéma et l'audiovisuel, 235 000 $, a quelque chose à voir avec l'intérêt et l'inflation. Comment 675 000 $ de programmes de communication relatifs à la révision constitutionnelle sont attribuables à l'intérêt et l'inflation. Comment 800 000 $ de révision de la programmation budgétaire afférente au projet de l'ACDI, relation et coopération internationales aux Affaires intergouvernementales, cela peut être relié aux taux d'intérêt et à l'inflation. Et j'en passe de meilleures. Mes collègues, qui ont le mandat de demander certains éclaircissements à vos collègues de différents ministères, feront ressortir, dans de nombreux cas, que les dépenses additionnelles de l'État, que les programmes de dépenses du gouvernement du Québec, que la croissance de ces dépenses n'ont absolument rien à voir avec les taux d'intérêt élevés et avec le rythme d'inflation que nous connaissons. Pour l'instant, cela conclut mes remarques d'introduction.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Est-ce que je pourrais demander l'autorisation au député de Vaudreuil-Soulanges de souligner un renseignement que j'ai oublié d'indiguer tout à l'heure? Ce n'est pas du tout une réponse à ce qu'il vient de dire.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, je vous en prie.

Le Président (M. Rancourt): Oui, M. le ministre.

M. Parizeau: Je pense que, dans les débats que nous avons à l'éqard des crédits qui sont devant nous et d'autres débats, d'ailleurs, qui y sont reliés, il serait utile de savoir ceci, qu'on vient de me communiquer. Il y a eu, dans les journaux et dans certaines interventions, je pense, ici aussi, un certain nombre de références à la cote de crédit du gouvernement du Québec depuis guelgues semaines. Il y a eu des propos assez alarmistes à ce sujet.

Je pense qu'il est peut-être de l'intérêt de la Chambre de savoir que mon sous-ministre vient de me confirmer que Standard and Poor's nous a confirmé ce matin la cote AA.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bravo! C'est une réaction de notre part, M. le Président. Vous constaterez, je pense, que les responsables de la mission du développement économigue et la plupart de nos collègues, de toute façon, dans ce débat sur les finances publiques, n'ont pas tenté d'alarmer la population. Il y a eu effectivement, dans certains médias, quelques reportages qui ont fait grand état de choses qui étaient coutumières. Les révisions de cote sont effectivement des activités de ces maisons de crédit ou de cote de crédit qui sont dans le cours normal de leurs affaires. Ce qui était exceptionnel, c'était un budget en plein automne. Évidemment, cela appelait une visite, elle aussi assez rare, assez exceptionnelle de la part de Moody's et Standard and Poor's.

Dans ce sens, nous nous réjouissons, évidemment, que la cote de crédit du Québec soit maintenue. Nous constatons avec la population que c'est à cause de la hausse de taxes considérable que le ministre des Finances nous a annoncée le 17 novembre. Je vous remercie.

Affaires culturelles

Le Président (M. Rancourt): Donc, nous allons commencer l'étude des crédits par ceux du ministère des Affaires culturelles.

M. le ministre.

M. Richard: M. le Président, juste un moment, s'il vous plaît, pour permettre aux fonctionnaires d'entrer à l'Assemblée.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Richard: Oui, M. le Président, nous sommes prêts. Je voudrais tout simplement vous indiquer que le budget supplémentaire réclamé pour le ministère des Affaires culturelles se chiffre par environ 1 700 000 $, soit plus précisément 1 494 000 $ au programme des bibliothègues municipales et 235 000 $ pour la Commission d'étude sur le cinéma. (15 h 40)

Comme M. le député de Vaudreuil-Soulanges a posé une question, tout à l'heure, au ministre des Finances en ce qui a trait au montant de 235 000 $ pour la Commission d'étude sur le cinéma, je voudrais apporter la réponse immédiatement en lui rappelant que mon prédécesseur aux Affaires culturelles, appuyé en cela par le Conseil des ministres, avait créé cette Commission d'étude sur le cinéma. Je voudrais également rappeler que l'industrie mondiale du cinéma est en crise, que le Québec, malheureusement, n'échappe pas à cette crise et que, même au Québec, se posent des problèmes particuliers en ce qui a trait au développement de l'industrie cinématographique. C'est pour essayer de parvenir à des solutions concrètes que cette commission a été mise sur pied, qu'elle est au travail, qu'elle a même déjà entrepris, il y a quelques jours, des audiences publiques. Cette commission semble très bien fonctionner jusqu'à maintenant. Il fallait donc qu'un budget soit prévu pour le fonctionnement de cette commission. C'est un budget extrêmement modeste - je me demande même s'il ne s'agit pas d'une première - qui se chiffre par 250 000 $. Si on réclame, pour cette année, 235 000 $, c'est que, déjà, un montant d'environ 15 000 $ avait été dépensé dans le cadre du budget précédent. Il reste donc une somme de 235 000 $. J'ai déjà en main une lettre du président de la Commission d'étude sur le cinéma, M. Fournier, qui m'assure - je n'en suis pas peu fier - que le budget de la commission serait respecté en même temps que le délai qui lui a été accordé pour remplir son mandat. Voilà ce que j'avais à dire, M. le Président, en réponse à la question qui a été posée par M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Merci, M. le Président. M. le ministre, je regarde le programme 1, élément 2, un montant de 1 474 000 $

concernant le programme d'aide au fonctionnement des bibliothèques municipales principalement. Est-ce que c'est bien cela?

M. Richard: C'est exact, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: À quoi cette augmentation est-elle due? Est-ce dû aux prévisions?

M. Richard: M. le député de Laprairie, le programme de construction des bibliothèques municipales a connu un tel succès que nous sommes, en quelque sorte, victimes du succès de ce programme qui est apparu assez attrayant pour un très grand nombre de municipalités. C'est ainsi que, victimes du succès de ce programme qui avait été amorcé par mes prédécesseurs, il nous faut maintenant combler ce manque à gagner de 1 500 000 $ environ pour donner suite aux engagements que nous avons à l'égard des municipalités.

M. Saintonge: Est-ce que ce nouvel engagement vous permettra de verser aux municipalités, dans un délai plus bref, les montants qui leur sont dûs actuellement? Je pense que le ministère a envoyé à plusieurs municipalités des lettres d'intention mentionnant que les montants qui devraient être versés actuellement sont retardés, dans certains cas, jusqu'au 1er avril prochain, sommes que les municipalités devaient entrer dans le budget de cette année.

M. Richard: Cela n'est pas anormal. Nous versons les subventions aux municipalités dans des délais normaux compte tenu des lenteurs administratives absolument inévitables et compte tenu qu'il faut passer par le Conseil du trésor.

M. Saintonge: C'est normal que les versements dûs aux bibliothèques municipales soient retardés jusqu'au début d'avril prochain? Dans certains cas, semble-t-il, du moins en partie - je ne dirais pas en totalité - M. le ministre, je pense qu'une bonne partie des montants des subventions qui devaient revenir aux municipalités sont retardés jusqu'en avril prochain, c'est-à-dire pour le prochain budget du gouvernement.

M. Richard: Sur 12 500 000 $ affectés à ce programme de construction des bibliothèques municipales, il y a une somme d'environ 1 500 000 $ qui sera versée un peu plus tard et les municipalités ont été prévenues en conséquence.

M. Saintonge: D'accord. Maintenant, j'aurais une question supplémentaire. Cela ne concerne pas un programme affecté, mais les conseils régionaux de la culture de même qu'un grand nombre d'intervenants culturels à travers le Québec se plaignent que le ministère accuse actuellement un retard exceptionnel quant aux versements des subventions aux organismes culturels pour l'exercice financier 1981-1982. Les deux tiers de l'exercice sont pratiquement complétés. Jusqu'à maintenant, il semblerait que, dans beaucoup de cas, des lettres d'intention ont été transmises et que seuls les organismes qui font l'objet d'engagements triennaux auraient reçu une première tranche de leur subvention. Maintenant, en l'absence des ressources financières promises par le ministère, ces organismes n'ont d'autre choix actuellement que de retarder la réalisation de certains projets, de retenir des salaires, de faire des mises à pied ou encore de faire des emprunts à des taux d'intérêt assez élevés. Ces situations ont été dénoncées publiquement dans les journaux ou dans des publications et m'ont même été transmises personnellement lors d'une visite que je faisais récemment à travers le Québec dans les différents conseils régionaux de la culture et en visitant certains intervenants.

Dans tous ces cas-là, il semble que ces situations empêchent les orqanismes culturels de planifier correctement leur action et dans certains cas mettent même leur existence en péril. Est-ce que le ministre pourrait assurer les organismes culturels en question que les subventions promises par le ministère seront versées incessamment et qu'ils ne seront pas les victimes de la gestion financière du gouvernement actuel?

M. Richard: M. le Président, je peux assurer M. le député de Laprairie que les subventions seront versées dans des délais qu'on dit normaux. Vous savez, la coutume a toujours voulu que le ministère verse les subventions aux différents organismes en deux tranches, parfois même en trois tranches. Je reconnais toutefois avec M. le député de Laprairie qu'il y a des lenteurs qu'on me dit normales, mais que je voudrais bien, quant à moi, corriqer, parce que cela me paraît un peu lent comme mécanisme à certains moments. Non seulement cela me paraît un peu lent, cela me paraît nuire au bon fonctionnement de certains organismes qui comptent absolument sur ces subventions.

Déjà, j'ai mis en branle certaines dispositions pour faire en sorte qu'à l'avenir les subventions soient versées plus rapidement aux organismes. Je voudrais quand même rappeler au député de Laprairie que c'est le CT de normalisation qui doit être accepté par le Conseil du trésor qui ralentit le plus souvent le fonctionnement.

M. Saintonge: D'accord, M. le ministre, je comprends que c'est le CT, mais ce que je voudrais quand même vous souligner, c'est que, d'après les représentations que certains

organismes ont faites, c'est un retard quand même assez exceptionnel, pour cette année du moins. L'autre fait, étant donné que ces organismes doivent, pour fonctionner, aller emprunter à des banques à des taux qui sont assez élevés, la question qu'on se pose très souvent est de savoir si le ministre acceptera de prendre l'engagement de couvrir les frais d'emprunt en question de telle sorte que ces organismes culturels qui ont des montants... Il faut quand même comprendre que le budget total affecté aux Affaires culturelles est très minime, je comprends que vous êtes aux prises avec cela et que vous le déplorez autant qu'on peut le déplorer, mais les ressources qui sont affectées à chacun des organismes culturels sont très minimes. Si les versements de subventions retardent tellement qu'ils sont obligés d'emprunter, le montant effectif affecté au développement culturel est d'autant diminué si ces organismes doivent payer des emprunts.

M. Richard: Vous avez raison, sauf que les organismes qui sont habitués à recevoir des subventions du ministère des Affaires culturelles et qui vivent de ces subventions savent généralement que ces subventions sont versées en deux tranches. Il y a eu un retard cette année, mais ce retard a été rattrappé en totalité la semaine dernière.

M. Saintonge: Je vérifierai, c'est tout à fait récent.

M. Richard: Mais, M. le député de Laprairie, j'ai déjà demandé aux principaux fonctionnaires du ministère de faire en sorte d'accélérer les procédures de versement des subventions.

M. Saintonge: Maintenant, M. le ministre, j'aimerais passer à un autre sujet, celui des conseils régionaux de la culture. Je sais que le ministère a entrepris avec les conseils régionaux il y a quelques mois une réflexion avec un comité bipartite sur le sens du développement culturel régional, sur le rôle respectif de ces conseils régionaux, notamment les implications de la régionalisation des services du ministère. Ma question est celle-ci: Dans quel sens s'orientent les travaux du comité bipartite concernant les objets de discussion, principalement dans les cas suivants: la création des directions régionales et le statut des conseils régionaux de la culture? Il y a également un autre point important, les critères de répartition des crédits entre les diverses régions. Toujours au niveau de la répartition des crédits, qu'est-ce que le ministère entend faire au niveau de la reconnaissance de la région des Laurentides et de la région de Lanaudière comme régions autonomes et indépendantes, avec plein budget de fonctionnement pour chacune de ces régions?

M. Richard: M. le député de Laprairie, une rencontre est prévue pour mercredi prochain, justement, avec les conseils régionaux de la culture pour leur faire part des décisions qui ont été prises en rapport avec la régionalisation du ministère des Affaires culturelles.

M. Saintonge: Est-ce que le ministère a guand même l'intention de donner suite à ce que vous aviez annoncé aux conseils régionaux? Votre prédécesseur avait déjà annoncé, au niveau de la région des Laurentides et de la région de Lanaudière, une possibilité d'être reconnues comme régions autonomes, c'est-à-dire avec plein budget; actuellement, ces deux régions fonctionnent avec un demi-budget. Je pense que votre prédécesseur s'était engagé éventuellement à donner un plein budget à ces régions.

M. Richard: M. le député de Laprairie, je suis très content que vous me posiez la question parce que je devais, le 8 novembre dernier, aller annoncer aux conseils régionaux de Lanaudière et des Laurentides qu'on les reconnaîtrait comme conseils régionaux de plein droit. Je n'ai pas eu l'occasion d'y aller parce que j'ai dû annuler ce voyage que je devais faire à Saint-Jérôme pour l'annoncer. Vous me fournissez une occasion de l'annoncer sauf, bien entendu, que je tiens quand même compte des recommandations qui me sont faites par la table de concertation des conseils réqionaux de la culture en ce qui a trait aux subventions qui doivent être accordées à l'un et à l'autre des conseils régionaux de la culture pour la répartition de l'enveloppe budgétaire globale allouée aux conseils régionaux de la culture.

Quand je dis que ces régions seront reconnues de plein droit, c'est toujours en tenant compte de la recommandation de la table de concertation des conseils régionaux de la culture en ce qui a trait à la répartition de l'enveloppe budgétaire.

M. Saintonge: La table de concertation comprend maintenant huit conseils seulement?

M. Richard: Oui, je pense que c'est la grande difficulté qui se pose présentement. Ce n'est pas toujours facile de travailler et d'élaborer des politiques en concertation avec les conseils régionaux de la culture parce qu'il y a trois conseils régionaux de la culture sur onze qui ne participent pas à la table de concertation. Il y a le conseil régional de l'Estrie, celui du Saguenay-Lac-Saint-Jean et celui de l'Outaouais. Je crois

savoir que l'Outaouais songe à se joindre bientôt à la table de concertation. Cela pose des problèmes que vous pouvez concevoir assez facilement parce que quand je dois annoncer une politique aux conseils régionaux de la culture, normalement, il va sans dire que j'ai intérêt à l'annoncer à ceux avec qui on définit et élabore ces politiques, c'est-à-dire avec la table de concertation, mais on risque que ceux qui ne participent pas à cette table s'en plaignent.

M. Saintonge: D'accord, mais si on parle des régions de Lanaudière et des Laurentides - je reviens à ces deux cas -est-ce que je dois comprendre que votre décision se prend uniquement du point de vue administratif, alors qu'au point de vue financier les principales récriminations de ces conseils étaient qu'on fonctionnait avec un demi-budget seulement au lieu d'un plein budget? Je comprends que la table de concertation des conseils de la culture a un mot important à dire, mais est-ce que le ministre endosse l'énoncé de politique antérieur fait par son prédécesseur, à savoir que le budget était donné pour la première année, mais que pour les années subséquentes ce serait un plein budget?

M. Richard: M. le député de Laprairie, j'ai une proposition qui a été soumise par la table de concertation, donc, une proposition à laquelle ont été associés les deux conseils régionaux de la culture auxquels vous faites référence. Je tiendrai évidemment compte de cette proposition.

M. Saintonge: J'imagine que les conseils régionaux seront mis au courant de ces propositions.

M. Richard: Oui, bien sûr.

M. Saintonge: Est-ce qu'on peut compter que vous pourrez en déposer une copie à l'Assemblée nationale pour qu'on en soit également informé?

M. Richard: Sans la moindre hésitation, quand j'aurai rencontré les conseils régionaux de la culture, mercredi prochain.

M. Saintonge: D'accord. Maintenant, au niveau des conseils régionaux toujours, en juin dernier, lors de l'étude des crédits, vous vous étiez engagé, ni plus ni moins, à déposer pour la fin de l'année un projet de loi sur les conseils régionaux de la culture. Vous avez fait allusion à cela lors de l'étude des crédits. Qu'advient-il de ce projet ou de votre intention à ce sujet? Est-ce que vous avez l'intention de déposer un projet de loi concernant l'avenir des conseils de culture, dans le sens de l'orientation à donner, avec une structure au niveau des conseils régionaux, ou si vous voulez fonctionner de la même façon qu'antérieurement par un décret?

M. Richard: M. le Président, pas dans l'immédiat. Ce que j'ai plutôt l'intention de faire dans l'immédiat, c'est de faire une tournée de consultation de tout le Québec sur la régionalisation du ministère des Affaires culturelles. Les conseils régionaux de la culture sont des organismes jeunes dont le développement est inégal, dont l'action aussi n'est pas toujours la même. Je trouve important de laisser bouillonner tout ce qu'il y a au sein des conseils de la culture un certain temps avant d'aboutir, le cas échéant, à un projet de loi, parce qu'il y a, bien sûr, dans certains endroits, des problèmes de représentativité; dans d'autres, il n'y a pas de problème de représentativité. Il y a certains conseils régionaux de la culture qui sont d'un dynamisme vraiment remarquable et qui méritent d'être encouragés. D'autres n'ont pas encore pris l'élan, en tout cas, qu'on souhaiterait qu'ils prennent.

M. Saintonge: J'ai pu constater moi-même, M. le Président, effectivement, par une tournée que j'ai faite durant l'été et le début de l'automne, que ce que vous venez de dire est vrai. Quand vous me parlez d'une tournée de consultation à travers le Québec, cela va supposer des coûts de déplacement et d'autres coûts supplémentaires au niveau du ministère. Est-ce qu'il n'y aurait pas plutôt l'occasion de convoquer une commission parlementaire à cette fin où nous pourrions participer à une consultation des différents conseils régionaux?

M. Richard: M. le Président, je pense que, lorsqu'une démocratie ne peut plus se payer le luxe de permettre à ses représentants à l'Assemblée nationale et aux ministres d'aller consulter les citoyens dans les régions, je trouverais cela extrêmement malheureux et je pense que vous en conviendrez. C'est précisément ce qu'il y a de moins coûteux. Je serais disposé à faire le calcul des coûts, la comparaison des coûts entre une commission parlementaire et le coût d'un voyage, dut-il se faire en avion, d'un ministre dans une région, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Oui, M. le ministre, mais, quand même, je peux vous dire que j'ai rencontré certains conseils régionaux qui souhaitent ardemment une consultation dans le genre de celle que vous venez de donner ou simplement une consultation par un comité.

M. Richard: M. le député de Laprairie, vous qui avez donné des conférences de

presse pour dire que vous vouliez faire une tournée de tout le Québec, voilà que vous refuseriez le même privilège au ministre des Affaires culturelles?

M. Saintonge: Ce n'est pas mon intention.

M. Richard: Votre tournée a dû comporter des coûts, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Sûrement, mais on n'a pas volé seulement dans les avions du gouvernement. Ce que je veux mentionner, et je suis d'accord avec vous, c'est la possibilité d'une consultation qui peut se faire en région; elle peut se faire aussi par une commission plénière où les conseils de culture pourraient venir témoigner.

M. Richard: Vous comprendrez bien, M. le député de Laprairie, que ce que souhaitent d'abord les citoyens du Québec et les intervenants culturels, c'est que le ministre se déplace et aille rencontrer les gens sur place. C'est ce que j'ai l'intention de faire dans une tournée de tout le Québec.

M. Saintonge: D'accord.

M. Richard: Ce sera à peu près ma deuxième parce que j'ai à peu près déjà, ne vous en déplaise, fait le tour du Québec.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: M. le Président, je voudrais rassurer les membres de l'Opposition. Cela n'est pas une question plantée ou des sujets plantés, parce que le ministre n'était absolument pas au courant de mon désir de faire une intervention à ce moment-ci. Je voudrais revenir à la question des bibliothèques. En milieu rural, en tout cas, c'est le cas de ma circonscription, nous avons le service offert par l'intermédiaire des bibliothèques centrales de prêts et c'est un service qui est extrêmement apprécié de la part de la population au fur et à mesure que ça se développe. Sur les 34 municipalités de mon comté, seulement une municipalité reçoit les subventions directement et les autres, c'est-à-dire seulement 6 sur 34, reçoivent des volumes, de l'aide par l'intermédiaire de la bibliothèque centrale de prêts, région de Québec. Le problème, M. le Président, c'est que présentement il y a de nombreuses autres municipalités qui aimeraient se prévaloir des possibilités d'accès à la lecture. Des demandes ont été faites. Dans certains cas, cela remonte aussi loin qu'il y a deux ans. J'aimerais savoir du ministre si dans les crédits de 1 474 000 $ dont il est question ici, il y en a qui sont prévus pour accorder des subventions additionnelles aux bibliothèques centrales de prêts.

M. Richard: Ce budget supplémentaire qui est réclamé n'est pas pour des bibliothèques centrales de prêts, mais plutôt pour la construction des bibliothèques. C'est dans le programme de construction des bibliothèques municipales.

En ce qui a trait à la question que vous avez posée, le programme de développement des bibliothèques centrales de prêts va se poursuivre à un rythme un peu plus lent compte tenu des disponibilités budgétaires, mais il va se poursuivre. Je voudrais vous apporter des chiffres à cet égard en vous rappelant qu'il y a trois ou quatre ans nous étions les derniers au Canada en ce qui a trait au nombre de bibliothèques au Québec, les tout derniers. On n'avait pas à se glorifier de cette situation. Pour préciser, je voudrais vous dire que de I960 à 1976, c'est-à-dire en seize ans, l'État québécois avait investi 22 000 000 $ dans des programmes de construction de bibliothèques, ce qui était évidemment très peu. De 1976 à 1981, donc, en cinq ans, ce sont 49 000 000 $ qui ont été investis dans un programme de construction de bibliothèques, ce qui nous a permis de rattraper un certain retard, mais il reste encore des choses à faire et le retard n'est pas rattrapé au complet par rapport à l'ensemble du Canada.

Une des difficultés, M. le député de Rellechasse, c'est que les municipalités dans les provinces voisines et notamment en Ontario sont davantage disposées à investir dans le développement culturel en particulier dans les bibliothèques. Ainsi, en Ontario, dans les années 1979 ou 1980, je crois, les municipalités ontariennes versaient aux bibliothèques municipales 100 000 000 $ et le gouvernement ontarien, 22 000 000 $, donc, 122 000 000 $ qui étaient injectés -parce que déjà ces chiffres sont dépassés -par le gouvernement ontarien et les municipalités, mais 100 000 000 $ par les municipalités, ce qui est extrêmement important. Au Québec, en 1981-1982, l'État québécois a investi 16 000 000 $ et les municipalités, 29 000 000 $ uniquement dans les programmes de fonctionnement des bibliothèques. Je ne parle pas de construction, c'est uniquement pour le fonctionnement des bibliothèques. L'Ontario, donc, 122 000 000 $ et le Québec, 45 000 000 $. Vous voyez un peu la différence et quel retard il nous reste encore à combler, mais ce retard ne saurait être comblé qu'avec la collaboration des municipalités.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: J'aurais une question qui concerne la Commission des biens culturels. Dans son neuvième rapport déposé à l'Assemblée nationale il y a quelques jours, la commission formule l'importante recommandation de faire le point après dix ans d'application de la Loi sur les biens culturels. C'est en vue de préciser l'action future de tous les agents engagés dans la conservation et l'utilisation de biens culturels. Un peu dans le même sens, si on se souvient, lors de l'étude des crédits en juin dernier, le député de Jean-Talon, M. Jean-Claude Rivest, suggérait la tenue d'une commission parlementaire sur ce sujet, à laquelle seraient invités les groupes intéressés. Le ministre, à ce moment-là, semblait d'accord avec cette suggestion de l'Opposition. Aujourd'hui, je reprends cette idée mise de l'avant par M. Rivest pour demander au ministre s'il est toujours d'accord avec cette suggestion de l'Opposition qui va un peu dans le même sens que la recommandation de la Commission des biens culturels. Si son intention est à cet effet, dans quel délai compte-t-il y donner suite? Est-ce que ce serait au cours de la prochaine session? Il faut se rendre compte aussi que, récemment, on mentionnait quand même le Conseil de la culture de l'Est du Québec, qui déclarait que la Loi sur les biens culturels est inopérante, inefficace et que les fonctionnaires sont incapables de la faire respecter quand ils ne transgressent pas eux-mêmes cette loi.

À ce moment-là, on a fait état d'un dossier noir et blanc qui a été remis au ministre et on a rapporté qu'il n'y avait pas eu d'agir depuis cet été. Il y a 18 monuments historiques classés ou reconnus qui sont actuellement en état de détérioration assez avancée. Quelle est l'intention du ministère à cet égard?

M. Richard: Nous avons en préparation un projet de modifications à la Loi sur les biens culturels d'une part. Donc, à ce moment-là, forcément, la commission des affaires culturelles sera convoquée pour étudier ce projet. D'autre part, j'ai un énoncé de politique en ce qui a trait au parc immobilier du ministère qui est prêt à toutes fins utiles. Je devrais normalement être en mesure de le rendre public dans les prochaines semaines, c'est-à-dire au cours du mois de janvier, je l'espère, et, au plus tard, au cours du mois de février.

M. Saintonge: Merci, M. le ministre. Compte tenu du temps à notre disposition, je pense que je vais laisser la parole à mes confrères.

Le Président (M. Rancourt): Est-ce que vous voulez dire que nous sommes prêts à adopter le programme I? Donc, programme 1, adopté?

M. Bertrand: Adopté. Programme 2.

M. Richard: La culture cède la place à l'agriculture.

Le Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint.

Agriculture, Pêcheries et Alimentation

M. Bertrand: Oui, VI. le Président. Je remercie le ministre des Affaires culturelles et son équipe. Nous allons maintenant prendre les 90 minutes à venir pour le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation en rappelant que 60 minutes seront consacrées plus spécifiquement à l'Agriculture et 30 minutes aux Pêcheries.

J'inviterais donc le ministre de l'Aqriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et son équipe de fonctionnaires à se joindre à nous.

M. Bissonnet: M. le Président, est-ce que c'est le ministère des Communications après le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation?

Le Président (M. Rancourt): Oui, nous passerons par la suite aux Communications. Donc, nous sommes prêts pour le début des crédits supplémentaires du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. le ministre.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Président (M. Rancourt): Oui, M. le leader.

M. Levesque (Bonaventure): Si on me le permet, j'ai discuté de cette question avec mon collègue, le député de Beauce-Sud; si le ministre n'a pas d'objection et si vous, en particulier, M. le Président, et spécialement vous, vous n'y voyez pas d'objection, nous pourrions commencer par la demi-heure consacrée aux Pêcheries.

M. Garon: Le seul petit problème, c'est que j'avais demandé aux gens qui doivent venir avec moi concernant les Pêcheries, d'être ici. J'avais anticipé qu'on commencerait par l'Agriculture et de prendre les Pêcheries par après. Je n'ai pas objection à accommoder le député de Bonaventure, leader de l'Opposition...

M. Levesque (Bonaventure): Bon, les voilà:

M. Garon: Non, M. Pelletier n'est plus aux Pêcheries.

M. Levesque (Bonaventure): II est changé.

Une voix: II connaît cela tout de même.

M. Garon: S'il y avait des questions pour lesquelles je n'aurais pas les réponses immédiatement, je pourrais peut-être à ce moment-là les réserver pour y répondre un peu plus tard.

M. Levesque (Bonaventure): Je n'ai pas l'intention d'être très technique. J'aurai d'autres occasions d'avoir des réponses dans certains domaines. N'ayant qu'une demi-heure, je suis obligé de procéder assez rapidement sur deux ou trois sujets que je voudrais aborder assez brièvement mais pour avoir la réponse la plus objective possible de la part du ministre.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre, vous avez le droit de parole, si vous voulez débuter.

M. Garon: Je laisserais immédiatement la parole au député de Bonaventure, puisqu'il n'y a pas de crédits supplémentaires dans le secteur des pêches, et je pense bien qu'il veut surtout poser des questions d'information, c'est ce que j'ai compris d'après son propos.

Le Président (M. Rancourt): Donc, M. le leader.

M. Levesque (Bonaventure): La première question que je veux poser au ministre - et il n'en sera pas surpris - c'est: comment progresse le projet de réouverture des chantiers maritimes de Paspébiac? (16 h 101

M. Garon: Concernant le chantier maritime de Paspébiac, j'ai déjà dit antérieurement où on en était. Je pense que c'est au printemps que j'ai dit qu'on avait loué la bâtisse à Paspébiac. Il y avait un groupe qui s'intéressait à la construction maritime. Maintenant, tous les contrats sont donnés selon des soumissions pour la construction des bateaux. À ce moment-là, selon que le groupe concerné obtiendra des contrats ou non pour la construction de bateaux... À moins qu'on construire des bateaux en dehors des contrats donnés pour la construction de bateaux de pêche par le ministère des Pêcheries du Québec...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, pour rafraîchir la mémoire du ministre, puis-je lui rappeler une visite dont il nous a favorisés dans le comté de

Bonaventure quelques semaines avant les élections générales du mois d'avril, dont le ministre doit se souvenir d'une façon assez agréable, après tout. J'ai ici devant moi un communiqué provenant du cabinet du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Si on me le permet, encore une fois, pour rafraîchir la mémoire du ministre, voici ce que disait ce communiqué émis par son cabinet. Source, Simon Bégin, 643-2325. C'est bien le numéro de téléphone du ministre. "Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, M. Jean Garon, a annoncé aujourd'hui, à Bonaventure, la réouverture prochaine du chantier maritime de Paspébiac." Le communiqué continue avec tous les détails de location, etc., et se termine avec cette phrase où on reconnaît le ministre dans son optimisme proverbial: "Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation se réjouit que cet édifice du gouvernement du Québec retrouve sa vocation de construction navale. Il espère que la reprise des activités au chantier maritime de Paspébiac permettra de fournir de meilleurs services aux pêcheurs de la région, de réactiver l'économie de Paspébiac et de stimuler le programme de renouvellement de la flotte de pêche du Québec."

M. le Président, avec un tel communiqué de presse, avec une telle annonce, probablement que le ministre est venu nous voir avec les moyens les plus modernes de communication pour nous annoncer cette bonne nouvelle. J'étais dans mon comté, à Paspébiac, où je demeure, et j'ai en vain regardé s'il y avait la moindre activité autour de cet édifice qui appartient au qouvernement. Les chantiers maritimes de Paspébiac ont été mis en place au début des années soixante et il y a là tout l'équipement, la bâtisse, mais tout est entouré d'un grand silence "garonien", pour employer un nouveau mot du lexique des pêches.

M. Garon: Je viens de dire que nous avons fait ce qui relève du gouvernement, c'est-à-dire que nous avons mis le chantier à la disposition d'un promoteur, qui s'appelle Chaleur 2000 Inc. Il y avait des actionnaires et ce promoteur a loué le chantier. Ce qui est arrivé par la suite - vous me forcez à entrer dans les détails - c'est qu'il y a eu des divisions entre les actionnaires, ce que je ne pouvais pas prévoir puisque je leur avais fait des conditions acceptables. Je peux vous dire qu'on n'avait pas loué le chantier très cher à l'entreprise pour qu'elle puisse faire de la construction navale. Si, par la suite, les actionnaires ne parviennent pas à s'entendre entre eux et abandonnent leur projet, ce n'est pas la faute du

gouvernement, ce n'est pas la faute du ministère. Nous avons fait tout ce qui pouvait être requis de la part du gouvernement, mais l'autre part appartenait aux promoteurs eux-mêmes.

M. Levesque (Bonaventure): Le ministre dit...

M. Garon: Cela arrive souvent au ministère que je fais des propositions à des gens qui ont un projet qui a du bon sens. Je fais une proposition et c'est à eux à le mettre en marche ensuite. Mais, une fois qu'ils ont eu l'offre du gouvernement, s'ils décident, pour différentes raisons, de ne pas faire fonctionner leur projet...

M. Levesque (Bonaventure): Mais le ministre n'aurait-il pas été plus prudent, avant de faire ce voyage pour venir nous annoncer la réouverture des chantiers maritimes, d'attendre que quelque chose de concret se passe? Avez-vous présentement reçu..

M. Garon: On avait loué le chantier.

M. Levesque (Bonaventure): Oui, avez-vous reçu...

M. Garon: On avait loué le chantier à l'entreprise pour la construction navale.

M. Levesque (Bonaventure): Vous l'avez loué.

M. Garon: C'était déjà pas mal.

M. Levesque (Bonaventure): Vous avez loué le chantier. C'est parfait.

M. Garon: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Maintenant, est-ce que vous avez été payé? Est-ce qu'il a payé son loyer? Est-ce que la compagnie a payé son loyer?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: Non, mais il est arrivé des divisions au sein des actionnaires et on me dit que leur projet n'a pas fonctionné et ils ont évacué les lieux.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'ils sont entrés dans les lieux? Au mois de juin, vous me disiez qu'ils ne pouvaient pas.

M. Garon: Ils étaient en location. On leur a loué. Ils ont signé un bail de location avec le ministère.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vous avez dit vous-même...

M. Garon: Ils avaient quatre mois pour aménager les lieux.

M. Levesque (Bonaventure): Oui. Vous avez dit vous-même, au mois de juin...

M. Garon: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): ...lorsqu'on vous a interrogé là-dessus, le 16 juin 1981, qu'ils ne pouvaient pas s'installer avant que certaines personnes d'un autre ministère évacuent les lieux. Or, vous prétendiez, à ce moment-là, que cela prendrait un mois et demi pour le faire. Or, au mois de juillet, au mois d'août, au mois de septembre, au mois d'octobre, au mois de novembre et présentement, est-ce qu'il y a eu occupation des lieux, installation de cette compaqnie qu'évoque le ministre présentement?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: Nous avons rempli les engagements que nous avions pris. Nous avons loué le chantier à l'entreprise. Nous avions dit, à ce moment-là, qu'il y aurait un autre ministère qui devait évacuer les lieux, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, et il a évacué les lieux un mois et demi plus tard, tel que convenu. Ensuite, le locataire était en droit d'occuper les lieux pour faire son chantier de construction navale. Maintenant, il n'a pas mis à exécution son projet. Qu'est-ce que vous voulez que je fasse?

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le ministre sait s'il y a eu réellement un bail qui a été signé?

M. Garon: II y a eu un bail qui a été siqné.

M. Levesque (Bonaventure): Ne pense-t-il pas qu'à ce moment-là, il y a des obligations qui ont été contractées de part et d'autre?

M. Garon: II y a des obligations qui ont été contractées et le ministère a rempli ses obligations.

M. Levesque (Bonaventure): Et est-ce qu'il a l'intention de voir à ce que l'autre partie au contrat respecte ses obligations?

M. Garon: II a l'intention de voir à ce que l'autre partie au contrat respecte ses obligations.

M. Levesque (Bonaventure): De quelle façon?

M. Garon: Maintenant, comme il ne remplit pas ses obligations, il a été mis en demeure d'évacuer les lieux pour que nous reprenions la possession du chantier qu'il était en mesure d'occuper.

M. Levesque (Bonaventure): Évacuer les lieux, mais, s'ils n'étaient pas là, comment font-ils pour évacuer les lieux?

M. Garon: Comme locataire, il avait loué. Alors, il était le locataire de la bâtisse.

M. Levesque (Bonaventure): Ah! M. le Président, à quand la prochaine annonce par le ministre de la réouverture des chantiers maritimes de Paspébiac?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: Vous savez...

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le ministre... Pardon?

M. Garon: ...c'est un chantier maritime qui est fermé depuis longtemps, depuis 1968. Nous l'avons offert et à pas très cher, vous savez. Je peux vous dire que c'était seulement quelques centaines de dollars par mois, la location pour l'entreprise, pour le chantier maritime. Si vous tenez compte des investissements qu'il y a là et de la valeur du chantier, c'était vraiment un prix nominal. Alors, si...

M. Levesque (Bonaventure): Vous aviez dit que c'était 6000 $ par année.

M. Garon: C'est cela. C'est ce que j'avais dit, quelques centaines de dollars par mois. Alors, c'est un prix nominal pour le type d'équipement qu'il y a là. Maintenant, je ne peux pas...

M. Levesque (Bonaventure): J'avais demandé au ministre s'il avait, vis-à-vis de ces promoteurs-là, fait une certaine enquête pour connaître la valeur de ces personnes. Le ministre m'a dit: Oui, on a fait des enquêtes là-dessus.

M. Garon: Les gens ont fait...

M. Levesque (Bonaventure): Et j'ai posé la question suivante au ministre, au mois de juin. J'ai dit: Avez-vous reçu un dépôt, quelque chose, des cautionnements, des garanties? La réponse de M. Garon: On a fait une enquête approfondie sur les promoteurs, une enquête de crédit, de solvabilité. J'ai posé la question suivante: Est-ce que le ministre aurait objection à me procurer le résultat de ces enquêtes, etc.?

Est-ce que le ministre peut me promettre qu'il va aller voir lui-même le genre d'enquêtes qui ont été faites? La réponse est oui. Je lui posais la question: Est-ce qu'il voudra m'en faire rapport? Le ministre a dit oui. Je lui ai demandé dans quel délai. Il m'a dit: Dans quelques jours. C'est le ministre qui m'a dit cela. Je n'ai jamais entendu parler du ministre après ça. (16 h 20)

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: Je vous l'ai dit, je peux mettre des noms au bout si vous voulez. Il y a des actionnaires d'une entreprise. Les actionnaires ne s'entendent pas entre eux et le principal actionnaire qui est un M. Ferguson - si vous voulez des noms - décide de se retirer du projet et de ne plus fonctionner. C'était l'homme clé dans toute l'entreprise. Que voulez-vous que je fasse?

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ce que je demande au ministre c'est que, premièrement, il ne vienne pas nous assommer avec des communiqués de presse, des annonces et, lorsqu'il viendra, qu'il vienne donc avec quelque chose de concret et de vrai, qu'il n'attende pas la veille d'une élection pour venir nous annoncer encore un autre chantier maritime.

Deuxièmement, je ne voudrais pas qu'il fasse comme son collègue le ministre d'État au Développement social qui est venu dans le même comté avec les mêmes moyens modernes de communication, avec une pelle...

M. Garon: Je n'avais pas de pelle.

M. Levesque (Bonaventure): ... pour lever la première pelletée de terre...

M. Garon: J'aurais pu avoir une clé.

M. Levesque (Bonaventure): ... de l'agrandissement de l'hôpital de Maria pour personnes qui ont besoin de soins prolongés. J'ai trouvé cela curieux en 1978 ou 1979 lorsque le ministre est arrivé avec sa pelle parce que c'était la seule pelle qu'on voyait à l'horizon. Il n'y avait pas d'autre grue, ni d'autre pelle ni d'autre entrepreneur, il n'y avait même pas eu de demande de soumissions, les plans n'étaient même pas terminés et on faisait la levée de la première pelletée de terre. Évidemment, on n'a jamais entendu parler de cela depuis. Il n'y a jamais eu une autre pelletée de terre depuis ce temps-là, M. le Président, et on est rendu bientôt en 1982. Cela va faire trois ans. Il ne faudrait pas faire cela non plus, mais il y a une chose que le ministre peut faire. Ce chantier maritime a fonctionné, a fait travailler des ouvriers, a produit d'excellents bateaux, des bateaux

d'acier, il y avait une très bonne main-d'oeuvre et c'était exploité dans le temps par une succursale de Marine Industrie qui est indirectement la propriété du gouvernement par le truchement de la Société générale de financement.

La seule raison pour laquelle le chantier maritime de Paspébiac a fermé ses portes, je me la rappelle fort bien, c'est lorsque la SGF et Marine ont demandé au gouvernement une garantie sur le déficit qu'elles prévoyaient à cause d'un ralentissement dans l'industrie de la pêche. Je pense qu'elles demandaient 1 $ l'heure de garantie sur le salaire des ouvriers. Le gouvernement du temps, qui était un autre gouvernement que le mien ou que le vôtre, a refusé et, à partir de ce moment-là, la SGF et Marine ont décidé de partir. Personne n'est revenu depuis. Le ministre est très près des chantiers maritimes de par la situation géographique de son comté. Je ne veux pas lui enlever ce qui lui appartient de droit, je ne veux rien enlever au comté de Lévis pour l'apporter dans Bonaventure, je n'ai jamais fait cela, mais je n'aime pas non plus qu'on vienne dans Bonaventure chercher des choses pour les apporter dans un autre comté. C'est une autre histoire. Le ministre, de par son appartenance au gouvernement, de son poste dans le cabinet des ministres, est très près de la SGF, il est très près de Marine Industrie. De par son comté, il est près de l'autre grand chantier maritime. Donc, c'est un homme qui n'est pas loin de ce milieu-là et je lui demande de porter une attention particulière à ce problème-là. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Garon: C'est difficile sans promoteur. Je suis persuadé que le député de Bonaventure, qui a été au gouvernement de 1970 à 1976 et dans le Conseil des ministres, aurait aimé que le chantier de Paspébiac ouvre de 1970 à 1976. Je suis convaincu qu'il a fait des efforts pour qu'il ouvre mais ça prend des promoteurs pour faire fonctionner le chantier. Comme vous dites, dans mon comté...

M. Levesque (Bonaventure): Maintenant, M. le Président, je vois les bonnes intentions du ministre, mais il ne faudrait pas...

M. Garon: ... j'ai trois chantiers maritimes, j'en ai un très gros qui est Davie Brothers, qui est maintenant Dome. Il y en a un autre plus petit et il y en a un autre encore un peu plus petit. C'est un propriétaire unique qui fait de la construction lui-même. Je connais un peu le secteur des chantiers maritimes mais, cela prend à la base des promoteurs et c'est plus facile actuellement, parce que nous finançons la construction de nombreux bateaux au Québec: 19 en 1977; 24 en 1978; 35 en 1980; 39 en 1981. Il y a de la construction de bateaux, il y a des soumissions demandées pour la construction de bateaux. Le projet avait été accepté pour Paspébiac, avec location de la bâtisse, à un prix peu élevé, pour aider les gens qui démarrent. Quand on parle de 1 $ l'heure, ce n'est peut-être pas exactement cela, mais à un coût aussi bas pour la location du chantier avec tout ce qu'il y a dedans, c'était pratiquement un coût nominal.

S'il y a eu une division entre les propriétaires, l'entreprise était cependant sérieuse, il y avait des gens connaissants là-dedans; les fonctionnaires m'ont dit que le principal actionnaire était quelqu'un qui connaissait le domaine. Mais il y a eu une division entre les actionnaires de sorte que l'entreprise qui devait fonctionner n'a jamais fonctionné.

M. Levesque (Bonaventure): Maintenant, si on me le permet, il faudrait que j'aie la chance de poser au moins deux ou trois questions dans le peu de temps qu'on a laissé à ma disposition.

À quelques mètres de là, se trouve un autre édifice gouvernemental: l'usine de transformation des produits de la pêche. C'est un dossier très chaud, si on peut employer ce mot, dans la région. Il a réchauffé plus particulièrement au cours de la dernière campagne électorale et même avant la dernière campagne électorale. Même dans cette Chambre - j'ai le journal des Débats - j'ai des promesses du gouvernement que l'usine de transformation allait ouvrir ses portes dans les quelques mois qui suivaient l'annonce faite ici, en Chambre. C'était il y a deux ans. Les termes employés ne laissent aucun doute. Si on veut que je fasse les citations, elles sont toutes là, elles sont consignées au journal des Débats. Le gouvernement annonçait la réouverture l'adjoint parlementaire au ministre de l'Industrie et du Commerce qui, à ce moment-là, était le ministre responsable des pêches - le gouvernement promettait la réouverture de l'usine de transformation du poisson. La transformation du poisson se fait depuis 1766, cela fait au-delà de 200 ans que cela se fait à Paspébiac. Coïncidence: depuis que le Parti québécois est là, ça ne fonctionne plus. Coïncidence! Mais cela devrait marcher.

J'ai ici des coupures de journaux qui parlent des promesses: "L'usine de poisson de Paspébiac repart à neuf". Il ne s'est rien passé. "Mesures prochaines en vue de rouvrir l'usine de Paspébiac". Rien. "L'usine de Paspébiac rouvrira d'ici l'été", dit le député des Îles. Rien. "L'usine de transformation de Paspébiac ne rouvrira pas avant le printemps

1981, après les élections." Rien. "Deux obstacles à la réouverture de l'usine de poisson à Paspébiac." Là, on trouve des obstacles. Qu'est-ce qui se passe? C'est une usine qui est installée...

M. Garon: Spécialisée.

M. Levesque (Bonaventure): ... qui appartient au gouvernement, qui appartient au ministère, qui est entourée d'installations portuaires. Des millions et des millions ont été investis dans tout ce grand parc industriel de Paspébiac. Nous avons une main-d'oeuvre spécialisée et, encore là, le gouvernement, durant la dernière campagne, c'était beau de voir cela, M. le Président votre candidat, pas vous, M. le Président, son candidat, se promenait devant les caméras de télévision avec un industriel qui était tout prêt à commencer le lendemain des élections. Il se promenait avec son industriel, à part cela, vous savez!

Présentement, on peut rire, mais les gens de chez nous ne rient plus, ils savent qu'on est au mois de décembre 1981 et que rien ne s'annonce encore pour le printemps de 1982. Je le demande au ministre bien sérieusement. D'ailleurs, je ne suis pas le seul à le réclamer, ici, même la CSN est entrée dans le jeu parce que, après tout, le syndicat de la CSN à Paspébiac est réellement extrêmement inquiet. Si le ministre est intéressé et n'a pas reçu ce dépliant, je peux lui dire que la CSN n'est pas tendre pour le qouvernement ni pour le ministre. S'il veut lire cela, il verra les revendications des gens de Paspébiac, des travailleurs de l'usine qui est fermée maintenant depuis bientôt trois ans: 1979, 1980, 1981, trois saisons complètes. M. le Président, je demande au ministre bien brièvement... J'avais dit, au ministre au mois de juin: Mettez donc sur pied, je sais que ce n'est pas facile, mais mettez sur pied une équipe de travail qui n'aura que ça comme fonction, comme objectif, comme mission. Après cela, vous arriverez avec une réponse. Soit qu'on continue de penser que ça va ouvrir, et de l'ouvrir, ou bien dites-nous la vérité. (16 h 30)

M. Garon: M. le Président, on a un fonctionnaire dont c'est à peu près la principale activité d'essayer de trouver une vocation pour l'usine de Paspébiac, qui est en région à part ça. Le problème, c'est que l'usine a été bâtie pour traiter le sébaste. Or, pendant des années, les bateaux ont dilapidé totalement les fonds de sébaste autour de la Gaspésie. Aujourd'hui, il n'y a plus de sébaste. Les quotas sont à peu près inexistants dans le sébaste. Je peux vous dire qu'alors que les stocks sont en train de se reconstituer, j'ai appris, lundi - j'ai fait des représentations dans le sens contraire - que le qouvernement fédéral accepterait, alors que les stocks recommencent à se reconstituer et qu'il pourrait y avoir éventuellement un approvisionnement - c'est ce que j'ai appris dans le plan de gestion des pêches 1982 - que les bateaux de plus de 100 pieds de la Nouvelle-Écosse entrent de nouveau dans le golfe pour prendre le peu de sébaste qui pourrait y être revenu.

M. Levesque (Bonaventure): Le ministre sait, depuis deux ou trois ans qu'il annonce la réouverture de l'usine, que ce n'était pas avec du sébaste qu'on pensait la faire marcher. Dans le cas des Français, de la conserverie tout près de Montréal et de la coopérative de Carleton, ce n'était pas du sébaste. C'étaient des produits plus raffinés, plus sophistiqués. Lorsqu'on parlait des autres industriels qui se promenaient avant les élections, ce n'était pas le sébaste. Qu'est-ce que tout ce monde voulait faire? Il y avait bien du monde intéressé.

M. Garon: II y avait des gens qui avaient des projets, mais c'est une immense usine qui a été faite pour traiter des quantités considérables de sébaste. Des millions et des millions de livres. Aujourd'hui les stocks ont été épuisés et il s'agit d'une immense usine...

M. Levesque (Bonaventure): Une usine peut se convertir, voyons donc!

M. Garon: II n'y a personne, voyez-vous, qui fait la file à la porte pour occuper l'usine. Quand il y en a eu des promoteurs, on leur a mis des conditions très faciles pour s'implanter, mais les gens disaient: On regarde ça, on est intéressé. Mais, à un moment donné, ils ont peur parce que c'est un peu un éléphant blanc. C'est une immense usine. Ils regardent le projet. On en a amené plusieurs là pour voir l'usine et à la dernière minute ils disaient: Je vais repenser à ça. À un moment donné, ils ne reviennent plus.

M. Levesque (Bonaventure): Vous avez eu des offres, même des provinces maritimes, même d'Antigonish. Regardez dans vos dossiers, le ministre n'a pas la volonté politique. On le voit, il n'est pas au courant.

M. Garon: Ce ne sont pas des offres. Ce sont des approches. Ce sont des gens qui viennent...

M. Levesque (Bonaventure): Ce ne sont pas des offres, ce sont des approches, voyons donc!

M. Garon: Non. Je vous l'ai dit. Il y a des gens qui viennent et qui nous disent: Vous avez une bâtisse là. Est-ce qu'elle est à louer? On dit: Oui, elle est à louer et pas

cher à par cela. Elle est à vendre si vous aimez mieux. Mais les gens disent: Oui, et comment ça marcherait? On leur demande quel est leur projet et on parle de cela avec eux. Est-ce qu'on peut les aider? Après cela, ils repartent et ils ne reviennent plus, même si on a essayé de les rappeler: Bon, on va repenser à ça, et ils n'embarquent pas. C'est parce que...

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le ministre peut m'assurer...

M. Garon: C'est une usine qui est placée dans le fond d'une baie. Le coût de l'énergie aujourd'hui est très élevé. Il y a des gens qui se posent des questions.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le ministre peut m'assurer qu'il va demander un rapport le plus tôt possible sur la situation, qu'il va envoyer des gens sur les lieux et qu'il va faire une concertation avec les gens qui pourraient être intéressés, qui sont intéressés? J'ai demandé d'avoir une équipe de travail spéciale ...

M. Garon: Des gens intéressés...

M. Levesque (Bonaventure): II nous reste deux minutes. Je pense que ce serait complètement perdu de commencer à parler comme ça. Je demande au ministre, à ce moment-ci, de manifester une volonté politique de régler cette question, au moins s'il a la volonté, s'il a l'intérêt.

M. Garon: J'ai la volonté, mais je n'ai pas les promoteurs.

M. Levesque (Bonaventure): Mais, au moins, la volonté; cela s'exprime comment? Lorsque j'ai...

M. Garon: C'est aider à des promoteurs qui veulent partir l'entreprise dans cette bâtisse-là. On est prêt à cela, excepté qu'on n'a pas de promoteurs qui veulent le faire.

M. Levesque (Bonaventure): Lorsque l'usine des Robin a brûlé en 1964, les Robin ont décidé de ne pas reconstruire, mais d'investir ailleurs, dans des centres commerciaux. Je n'avais pas de promoteur, mais j'avais une vraie volonté politique de régler cela. C'est pour cela que nous avons construit l'usine et nous avons trouvé des promoteurs. Cela a duré combien de temps? Cela a duré de 1965 à 1979. Cela fait quatorze ans. On a eu au moins quatorze ans de travail pour les 125 à 200 personnes qui travaillaient autour de l'usine et dans l'usine. Mon Dieu! Essayez d'avoir de l'imagination. Vous avez une usine. Vous êtes sur la mer. Vous n'êtes pas dans la forêt. Vous êtes sur la mer, vous avez les meilleures installations portuaires de la région. Essayez d'utiliser de l'imagination, mais d'abord une volonté politique de régler cela. Merci.

Je voudrais maintenant, M. le Président, avant de terminer - parce que je vois que mon collègue de l'Agriculture s'impatiente un peu, malgré qu'il ait une patience angélique - je voudrais, à ce moment-ci, M. le Président, laissant...

M. Garon: Pas du tout, il vous regarde bouche bée.

M. Levesque (Bonaventure): ...ces questions ponctuelles... En qénéral, dans le domaine des pêches, j'ai l'impression cette année que, malgré que le volume puisse être intéressant, les difficultés des pêcheurs et des producteurs sont presque sans précédent présentement et je veux attirer l'attention du ministre. Probablement que d'autres l'ont fait. Probablement qu'il en est conscient, mais, étant également ministre de l'Agriculture - et ce n'est pas un ministère pour laisser quelqu'un, je pense bien, à ne rien faire, à ne pas avoir de problèmes - je voudrais que les problèmes des pêcheries retiennent autant son attention que tous les autres problèmes auxquels il a à faire face.

Pourquoi je dis cela? Ce n'est pas parce que... Cela ne me vient pas tout seul. D'abord, le ministre a suivi un peu les instructions qui semblent venir du Conseil du trésor, qui semblent venir du ministre des Finances et il est embarqué, lui aussi, dans toute cette taxation indirecte. Lorsque l'on voit les frais additionnels qui sont tombés sur le dos des pêcheurs cette année, on s'aperçoit que le ministère des Pêcheries n'a pas été épargné. On a eu l'augmentation dans les frais de glace. On a eu l'augmentation dans les frais de bouette. On a eu l'augmentation dans les assurances de bateaux. Cela n'a jamais arrêté, de sorte qu'on n'est pas surpris de voir à l'automne, au mois d'octobre 1981, on voit tout à coup: "Garon est contesté dans les pêches." On voit: "Des hauturiers veulent qu'Ottawa reprenne le contrôle des pêcheries." Une pétition, M. le Président...

M. Garon: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): "Excédés, dit le journal, - c'est dans le Soleil du 19 octobre, M. le Président - par les hausses des coûts des services gouvernementaux du Québec, les capitaines de bateaux de pêche en haute mer de la Gaspésie songent à se regrouper en association et envisagent de demander au fédéral de reprendre la juridiction complète de la pêche." Imaginez-vous où on est rendu! Il faut que ces gens-là soient réellement à bout de nerfs et convaincus qu'ils sont abandonnés par le gouvernement du Québec.

Je ne sais pas si le ministre est conscient de ce qui se passe, mais, personnellement, je n'ai jamais vu une situation aussi douloureuse pour un ministre des pêches que celle que nous connaissons présentement. Dire qu'au mois de janvier 1981 - il faut que je rie un peu, à ce moment-là, malgré que la situation soit loin d'être drôle - "Garon regrette de n'avoir pas mis la main sur les pêches maritimes un an plus tôt." M. le Président, c'est en janvier. La réponse, il l'a eue. Il vient de la recevoir, des pétitions qui demandent au ministre soit d'avoir un autre ministère... Si le ministre, probablement, avait seulement le ministère des Pêcheries, peut-être que ce serait différent. Je ne veux pas l'accuser personnellement de quoi que ce soit, mais, présentement, ou bien il n'est pas capable de s'occuper des trois, l'agriculture, les pêcheries et l'alimentation ou, s'il s'en occupe, il s'en occupe mal. (16 h 40)

M. Garon: Vous savez, quand j'ai eu à m'occuper des pêcheries, je ne les ai pas eues sous bénéfice d'inventaire. Je les ai eues parce qu'on voulait décentraliser les pêcheries et mettre les opérations du ministère dans le territoire. Suite à ça, à Québec, un grand nombre de fonctionnaires ont quitté parce qu'ils ne voulaient pas déménager sur le territoire. Quand j'ai eu à m'occuper des pêcheries, il y avait 80 postes vacants sur 300 au ministère. Le sous-ministre retournait à l'université, le directeur de la protection était malade, le poste de directeur des services aux usagers était vacant, le poste de directeur de la recherche était vacant, il y avait un architecte naval; j'avais un service à peu près défait avec des postes vacants un peu partout. Je pouvais peser sur dix boutons mais il n'y avait pas de lumière. Pourquoi? Parce que le monde était parti, les gens ne voulaient pas aller en Gaspésie. La première chose que j'ai faite, ç'a été de reconstituer le ministère en région. Je comprend bien les gens qui disent: Ce n'est pas décentralisé et tout ça. Je peux vous dire qu'aujourd'hui, sur 300 postes, il y en a 255 en région, il y en a 55 à Québec, là-dessus, 35 en recherche.

M. Levesque (Bonaventure): Comment est-ce qu'il y en avait en région avant?

M. Garon: On a déplacé tout ce qu'il y avait à déplacer en région et il reste peu de postes à Québec. Maintenant...

M. Levesque (Bonaventure): Voyons, voyons.

M. Garon: Attendez un peu, laissez-moi finir.

M. Levesque (Bonaventure): Le ministre sait fort bien que la grande partie des effectifs était en réqion avant. Voyons donc.

M. Garon: M. le Président, c'est rare que le député de Bonaventure perd son calme. Je vais vous dire ceci. On a réorganisé le secteur, et je peux vous dire que j'ai bien vu les déclarations faites par un employé d'un CLSC au nom des hauturiers et j'ai reçu une pétition. Maintenant, ils pensaient que les qens allaient à Ottawa. Là-dedans, je voyais, par exemple, certains noms. Il y en a un parmi les signataires qui venait d'avoir une offre - pour la construction d'un bateau. Il venait d'avoir une subvention de 210 000 $, plus un prêt de 351 000 $ sans intérêt sur lequel nous, nous payons 22% d'intérêt par année. S'il y a mieux à Ottawa pour les pêches, je vais vous dire une chose, qu'ils aillent donc emprunter à Ottawa, chercher leur subvention à Ottawa; ils n'auront pas une "tôle". S'il y a des gens qui sont malades dans le coin, je pense qu'ils ont raison d'aller au CLSC, c'est la place pour se faire soiqner, mais si c'est là qu'ils veulent avoir les subventions... Il n'y a pas un gouvernement au Canada actuellement qui maintient des prêts sans intérêt pour la construction de bateaux, pas un seul.

M. Levesque (Bonaventure): C'est comme ça au Québec, cela a toujours été comme ça.

M. Garon: Oui, mais les taux n'étaient pas à 22% dans le temps des libéraux. Quand le taux était à 3%, à 4% ou à 5%, des prêts sans intérêt, ce n'était pas compliqué, mais quand c'est à 20% et à 22%! Je peux vous dire une chose, quand un pêcheur a actuellement un prêt de 200 000 % ou 300 000 % sans intérêt, cela veut dire que ça nous coûte 40 000 $ à 60 000 $ de subventions d'intérêt. On lui a demandé de payer la moitié de sa prime d'assurance - cela a été une directive du Conseil du trésor - il peut peut-être payer une prime de 6000 $. On lui en subventionne la moitié, 3000 $. Les 3000 $, il peut entrer ça dans ses dépenses d'impôt de sorte qu'il va peut-être, avec l'autre montant de 3000 $, en payer véritablement de sa poche entre 1500 $ et 2000 $. Le reste...

M. Levesque (Bonaventure): Ils n'en payaient pas avant.

M. Garon: Oui, et vous allez remarquer une chose si on parle de fonds publics. Quand les assurances étaient payées entièrement par le gouvernement du Québec, le taux du gouvernement fédéral était 2,25%. Depuis qu'on dit que le pêcheur va en payer la moitié, drôle de hasard, le gouvernement fédéral a baissé son taux à 1,72%. Est-ce

que le gouvernement fédéral nous volait? Le taux a baissé de 2,25% à 1,72%. On paie 50%, c'était la condition que le Conseil du trésor nous demandait pour maintenir des prêts sans intérêt pour la construction des bateaux. Alors, j'ai pensé et je pense encore que le choix de payer la moitié de la prime qui peut entrer dans les dépenses déductibles d'impôt pour garder des prêts sans intérêt, c'est plus avantageux. Or, c'est ce que nous avons fait.

Concernant la bouette, le prix de la bouette n'a pas vraiment augmenté. Ce qui a augmenté, ce sont les frais d'entreposage dans les entrepôts frigorifiques des entreprises, et le prix de la glace. Mais le prix de la glace est encore bien plus bas que dans les provinces maritimes.

Au fond, c'est vrai que c'est une année difficile dans les pêches. Quand j'étais à la conférence fédérale-provinciale, lundi dernier, un des ministres mentionnait les difficultés des entreprises dans sa province. Je l'écoutais parler, c'étaient presque toutes des entreprises en faillite. Il s'agissait de grandes entreprises, pas de petites, avec des capitalisations de plusieurs dizaines de millions. J'étais estomaqué de voir les chiffres que je voyais là. Tout le secteur des pêches est actuellement en difficulté au Canada pour la raison très simple que le gouvernement fédéral a maintenu le dollar canadien artificiellement haut avec des taux d'intérêt élevés.

La principale raison pour laquelle c'est difficile pour les entreprises au Canada, c'est parce que le dollar canadien est élevé alors que les monnaies européennes sur les marchés du poisson ont été dépréciées. Ces monnaies étant dépréciées par rapport à la nôtre, ça veut dire que, pour le même prix de vente en Europe, ou un prix inférieur en Europe, on obtient, en termes de dollars canadiens, un montant beaucoup plus faible qu'auparavant. Cela, c'est la politique monétaire du gouvernement fédéral. Avec l'argent qui est là-bas, on a décoré le gouverneur de la Bangue du Canada de l'Ordre du mérite du Canada il y a deux semaines, pour faire des taux à 20% et maintenir un dollar canadien haut, qui a mis tout le secteur des pêches en difficulté.

M. Levesque (Bonaventure): Nous aurons peut-être le temps de revenir là-dessus à une autre occasion, M. le Président, vu que le temps est expiré, mais j'aurais cependant aimé pouvoir dire au ministre que les exportations de poisson se font également aux États-Unis, et cela en grande quantité. À ce moment-là, le taux dont il parle, je pense, est encore favorable au Canada pour les exportations.

M. Garon: Oui, mais le dollar américain est resté intéressant dans une certaine proportion par rapport au dollar canadien, ce qui est avantageux, lorsqu'on vend aux États-Unis. Mais, par rapport à l'Europe, où la monnaie a été dévaluée par rapport au dollar canadien, c'est moins payant. D'un autre côté, depuis la zone de 200 milles, les Américains sont beaucoup moins importateurs de poisson qu'auparavant, puisqu'ils importaient 75% du poisson qu'ils consommaient et que, maintenant, c'est seulement à 60%. Pourquoi? Parce que la zone de 200 milles, maintenant, ils l'ont eux aussi. Ils importent moins de poisson qu'auparavant et les prix payés sur le marché de Boston, entre autres, ont été meilleurs pour le poisson venant de l'Islande, du Danemark ou de la Norvège que pour le poisson venant de l'Est du Canada ou du Québec.

Dans le secteur des pêches, je peux vous dire qu'avec le dépôt de la Loi -j'espère que j'aurai toute la collaboration de l'Opposition pour adopter cette loi avant Noël - sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments, le Québec aura l'occasion de prendre le leadership, d'être le premier au Canada dans la modernisation du secteur des pêches au point de vue du contrôle de la qualité. C'est une loi extrêmement importante.

M. Levesque (Bonaventure): Nous aurons l'occasion, la semaine prochaine...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministrel M. le ministre!

M. Garon: Je finis avec cette phrase. Même les gens d'Ottawa m'ont dit: M. Garon, avec l'expérience que vous avez eue en agriculture au point de vue du contrôle de la qualité, le Québec, parce que les pêches et l'agriculture sont ensemble, pourra aider les autres provinces par ses connaissances technigues au point de vue du contrôle de la qualité pour améliorer les pêches dans le reste du Canada également.

M. Levesque (Bonaventure): Nous aurons l'occasion, la semaine prochaine, lors de l'étude du projet de loi, de poser des questions pertinentes là-dessus. Le ministre pourra peut-être arrêter de chanter trop tôt. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Nous allons tâcher, mes collègues et moi...

M. Garon: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Un instant, M. le député de Beauce-Sud.

M. Garon: Comme il s'agit d'un budget supplémentaire, il me semble que la coutume, c'est que le ministre responsable du budget du ministère impliqué donne un certain nombre d'explications concernant le budget supplémentaire.

Le Président (M. Jolivet): Excusez! Comme j'ai pris la relève, je pensais que cela avait été fait au début.

M. Garon: Non, on a parlé des pêches. Dans le cas des pêcheries, comme il n'y avait pas de budqet supplémentaire, je n'ai pas voulu parler le premier. J'ai demandé au député de Bonaventure de prendre la parole le premier.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Allez-y!

M. Garon: Mais, dans le domaine agricole, il y a un budqet supplémentaire et j'aimerais pouvoir donner des explications.

Le Président (M. Jolivet): Allez-y, M. le ministre!

M. Garon: Pourriez-vous me dire quelle est la répartition du temps?

Le Président (M. Jolivet): Nous avions jusqu'à 17 h 40; il reste près de 50 minutes actuellement pour le député de Beauce-Sud et vous-même.

M. Garon: Bon! Je suppose que je n'ai pas le droit de parler pendant les 50 minutes.

Le Président (M. Jolivet): C'est une bonne supposition.

M. Mathieu: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Une question de règlement, avant que nous commencions.

Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y!

M. Mathieu: Si je comprends bien, les 50 minutes qui restent, c'est chacun moitié-moitié.

Le Président (M. Jolivet): Non, ça peut être plus pour vous et moins pour le ministre, selon les questions et les réponses. Mais une chose est certaine, c'est que je me fie sur le juqement des deux pour que vous puissiez utiliser à bon escient les 50 minutes qui vont sont allouées. (16 h 50)

M. Mathieu: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril (Arthabaska): Vous avez parlé du ministre qui a le droit de parole ainsi que du député de Beauce-Sud. Nous, qu'est-ce qu'on fait là-dedans?

Le Président (M. Jolivet): Vous avez le droit de parole. Ce que j'ai voulu dire, c'est que, d'une façon ou d'une autre...

Une voix: C'est un aqriculteur.

Le Président (M. Jolivet): ...les députés en cette Chambre ont tous le droit de parole puisque nous sommes en commission plénière. Cependant, je me fie - j'en suis assuré - à l'ensemble des gens pour bien comprendre, comme on l'avait dit, ce matin, au moment où le représentant de l'Opposition a demandé au leader du gouvernement de bien tenir compte qu'il y avait une répartition du temps, qui donnait aux députés ministériels la valeur, dans l'ensemble, d'une heure.

M. Picotte: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: ... j'aimerais cependant vous souligner que, ce matin, selon une entente avec le leader du gouvernement, il a été question, qu'après avoir fait les remarques préliminaires que le ministre devait faire, l'Opposition allait poser toutes les questions nécessaires et que la répartition du temps serait, en bonne partie, accordée à l'Opposition puisque, pour l'étude de nos crédits, c'est de cette façon que cela fonctionne. On ne voudrait pas commencer à jouer un petit jeu, a savoir qu'on boycotte le droit de parole de l'Opposition, etc. On posera des questions et j'espère que cela sera respecté tel que mentionné ce matin. Cela a été entendu ce matin avec le leader.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

Une voix: Oui.

M. Picotte: Si vous voulez changer les ententes en cours de route...

Une voix: Non.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

II y a juste une chose que je voudrais bien situer. C'est de ne pas prendre tout le temps pour des questions de règlement, sinon vous n'aurez pas... Ce que j'ai dit, c'est qu'il est évident que je me fie à l'ensemble des gens ici présents. Comme j'en faisais mention tout à l'heure, ce que le leader a

dit, ce matin, c'est qu'il y avait une répartition de façon que l'Opposition puisse poser toutes ses questions. Ce qui n'empêche pas les députés ministériels de poser aussi des questions en sachant qu'il y a une heure de disponible pour les députés ministériels qui veulent poser des questions. M. le ministre.

M. Garon: M. le député de Maskinongé soulève trop de questions de règlement. Je vais l'inviter à notre congrès. Il pourrait se joindre aux autres.

M. Picotte: Ne trouvez-vous pas que c'est assez compliqué? Il y a assez de manipulateurs comme cela chez vous.

M. Garon: Au micro du centre... M. le Président, c'est simplement une note explicative, au début, très brève pour indiquer que le budget supplémentaire qu'on a sous les yeux indique 9 625 000 $, mais qu'en réalité le budget additionnel était plus élevé parce qu'il y a eu des recours au fonds de suppléance ou encore un mandat spécial. En réalité, il s'agit d'un montant de 22 705 000 $ puisqu'il y a eu également 11 242 200 $ sous forme de mandat spécial pour payer des remboursements d'intérêt aux agriculteurs pour le 1er novembre, alors que le budget supplémentaire arrivait au cours du mois de novembre. On est donc allé par mandat spécial au cours du mois d'octobre pour l'obtenir auprès du Conseil des ministres. Donc, c'est un montant additionnel au budget de 11 242 200 $. Il y a aussi un autre montant - on est allé au fonds de suppléance - pour 1 544 500 $ pour des remboursements de traitement pour certains travaux qui ont été faits par des fonctionnaires ou des gens qui ont été embauchés dans le cadre des opérations du ministère.

En réalité, le montant additionnel est de 22 705 500 $, mais ce qui apparaît ici, c'est 9 625 000 $ qui se répartissent entre le financement agricole pour un montant additionnel, en plus du mandat spécial de 11 242 200 $, de 291 800 $, et un montant pour les assurances agricoles de 4 500 000 $... Les assurances agricoles sont pour l'assurance-stabilisation, principalement, et les trois quarts de ce montant sont allés pour le porc parce que le nombre d'assurés dans le porc d'engraissement a été plus considérable que ce qu'on avait anticipé puisqu'il y a eu 790 producteurs assurés représentant 1 300 000 porcs. Pour la gestion du territoire agricole, il y a un crédit additionnel de 5 125 000 S, puisqu'il s'agit de remboursements des taxes à 70% sur les terres des agriculteurs qui exploitent leur terre et parce que les zones permanentes négociées avec les municipalités l'ont été à un rythme plus rapide que prévu, de sorte que le montant que nous avions prévu, lorsque nous avons préparé le budget au cours de l'automne 1980, n'était pas suffisant. Puisque les négociations avec les municipalités vont beaucoup plus rapidement qu'anticipé, cela nous prend un montant de 5 125 000 % pour faire le remboursement de taxes aux agriculteurs dans une proportion de 70%, plutôt que 40% comme auparavant, une fois que la terre est rendue dans la zone agricole.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Le député de Bonaventure, mon collègue, a terminé en disant que les pêches étaient abandonnées par le gouvernement du Québec. Je dois, sans redondance, commencer mon exposé avec les mêmes arquments: l'agriculture a été abandonnée par le gouvernement du Québec. D'abord, le ministre nous avait dit, le 12 novembre dernier, selon le journal des Débats: "Après avoir connu le budget supplémentaire, j'ai l'impression qu'après avoir vu le budget, ils vont avoir un peu le souffle coupé." En effet, nous avons le souffle coupé. On s'attendait à quelque chose de plus respectable, eu égard à l'état lamentable et désastreux de l'économie de l'agriculture.

M. le Président, je vais commencer par une brève citation du journal La Presse. Vous allez me dire que ce sont de vieilles rengaines. Le jeudi 10 décembre 1981, je crois que c'est ce matin, page C-4: "80% des producteurs de porc menacés de faillite. Pas moins de 80% des 7000 producteurs de porc du Québec devraient déclarer faillite immédiatement si les banques exiqeaient le respect du remboursement des emprunts qu'elles leur ont consentis." C'était une citation du vice-président de l'Union des producteurs agricoles.

Je cite un autre article brièvement, dans le Coopérateur agricole, novembre 1981. C'est l'article du mois présent: "Entre nous, producteurs, les temps sont durs. Nous n'apprendrons rien à nos lecteurs en soulignant que notre économie agricole accuse depuis déjà plusieurs mois, des signes évidents de faiblesse. En un mot, les temps sont durs. Le nombre de faillites aurait été plus important si le gouvernement fédéral n'était pas venu dernièrement à la rescousse des producteurs de porc, en vertu de sa politique de stabilisation des prix des produits agricoles. Nous attendons et nous espérons toujours que notre gouvernement provincial ajoutera du baume sur la plaie en acceptant lui aussi de soutenir financièrement une production aussi importante pour notre économie agricole que celle du porc."

Or, M. le Président, vous avez été

témoin qu'au cours des dernières sessions de mai et de juin, de même qu'à la session présente, j'ai dû intervenir à plusieurs reprises pour demander de l'aide en faveur des producteurs de porc. Qu'est-ce que le ministre a dit? Le 11 juillet 1981, le Soleil: " L'industrie du porc a passé la crise avec succès (Garon). 1. Enfin, M. Garon a rappelé, chiffres à l'appui, que le secteur de la production porcine est un des plus largement subventionnés de l'agriculture québécoise et que les producteurs de porc du Québec étaient ceux dont les revenus sont les mieux protégés au Canada."

M. le Président, je trouve ça indécent, je trouve ça outrageant de dire de telles choses à l'endroit des producteurs de porc qui n'en finissent plus de cette crise éternelle dans laquelle ils ont été empêtrés un peu malgré eux, dans laquelle le ministre les a lancés en leur offrant, en leur faisant miroiter les avantaqes de l'autosuffisance, qu'il fallait augmenter la production, qu'il fallait avoir recours à des prêts de 150 000 $, 200 000 $, 300 000 $ et aujourd'hui, ça fait seulement deux ou trois ans, tout le monde est sur le bord de la faillite.

Vous savez à quel point le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation était acclamé il y a quelques mois dans les milieux agricoles. Il leur racontait des histoires, ça riait, mais maintenant les cultivateurs s'aperçoivent que ce dont on a besoin à la tête du ministère, ce n'est pas tellement un comédien, mais un bon administrateur.

Je dois maintenant poser quelques questions bien précises et je vais les formuler l'une après l'autre pour ne pas perdre de temps. Le ministre pourra me répondre dans le même ordre. C'est également pour donner le bénéfice, donner l'avantage à mes collègues qui veulent également intervenir dans le domaine de l'agriculture cet après-midi. (17 heures)

La question que je lui pose est la suivante: Devant cette crise de l'industrie porcine qui n'en finit plus, le gouvernement fédéral - ne venez pas me dire que ça dépend du fédéral, ce n'est pas le fédéral qui a incité les producteurs à se lancer là-dedans - a fait sa part. Au mois de mai dernier, je posais des questions au ministre, je lui demandais entre autres: Allez-vous venir en aide aux producteurs? Il me disait: J'attends de voir ce que le fédéral va faire. Le fédéral a sorti 8,96 $ d'aide directe aux producteurs par tête de porc. Finalement, la semaine suivante, il a dit: Oui, le fédéral a sorti son aide, mais je ne connais pas les modalités d'application. Une fois que tout cela a été connu, le ministre nous est arrivé avec - excusez l'expression - des "patch" qui n'étaient pas suffisantes pour la grandeur du trou.

La crise a continué de perdurer et s'est empirée. Nous sommes le 10 décembre, un grand nombre de producteurs ont fait faillite, un plus grand nombre encore ont liquidé, pour éviter les tracasseries de la Loi sur la faillite, et sont partis en laissant tout leur butin dans l'aventure. Ceux qui ont pu rester, selon un article de la Presse de ce matin, à 80%, sont menacés de faillite. Le ministre semble se contenter de regarder passer le train, bien placidement. Il est nécessaire que le ministre s'engage concrètement, qu'il vienne en aide directement aux producteurs qui sont en péril non pas dans deux ou trois ans, mais immédiatement. Si on croit à la production animale au Québec, il ne suffit pas seulement de lancer des projets, d'embarquer des qens dans une aventure, il s'agit également, une fois que le bébé est au monde, de le nourrir. On ne peut pas abandonner un enfant à qui on a donné naissance.

Donc, je lui pose la question suivante: Y a-t-il une aide, quelque chose de direct, de concret? Qu'il ne m'arrive pas avec un mini-sommet, des études, un livre rouqe, arc-en-ciel et de toutes les couleurs! Y a-t-il une aide concrète, quelque chose de palpable, de bénéfique pour les producteures agricoles? Deuxièmement, s'il y a des producteurs qui désirent passer l'intégration à titre de producteurs indépendants, est-ce qu'il y a une possibilité pour eux d'avoir les crédits nécessaires et de bénéficier de l'assurance-stabilisation?

M. Garon: Et vous allez me reprocher, après cela, de prêter de l'arqent!

M. Mathieu: Troisièmement, l'intégration. Le ministre nous parlait de l'intégration. Ce n'était pas drôle, les grosses méchantes multinationales qui venaient ici... Par ailleurs, lorsqu'on faisait des prêts agricoles, on disait souvent: On vous prête, mais pour deux ans, on met comme condition que vous soyez intégré; cela va être plus commode, vous allez avoir moins de risques à cause de la maladie et de tout cela, vous allez prendre de l'expérience et, après, vous rachèterez vos parts.

Au sujet de l'intégration, est-ce qu'il est question que l'assurance-stabilisation soit étendue aux éleveurs de porc intégrés, qu'ils soient du secteur coopératif ou du secteur indépendant, naisseurs ou finisseurs? Je limite, pour le moment, mes questions au domaine de l'industrie porcine; j'en aurai quelques autres tout à l'heure, dans d'autres secteurs de l'économie. J'attends donc avec impatience les savantes et brillantes réponses que voudra sans doute me faire l'honorable ministre, n'est-ce pas, M. le ministre?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Garon: J'ai rencontré un grand nombre de producteurs de porc avec qui j'ai discuté lorsque je suis allé au congrès de l'Union des producteurs agricoles aujourd'hui. Je peux vous dire que c'est une discussion que j'ai aimée parce que j'ai appris des éléments dans cette discussion. Voici comment je vois la situation, à ce moment-ci: II y a une assurance-stabilisation qui s'applique aux producteurs de porcelets et l'immense majorité des producteurs est assurée. Le régime existe déjà depuis 1978, mais ils sont surtout assurés depuis deux ans, soit quand la crise du porc est arrivée. Avant ça, il y en avait à peu près 500 assurés, mais, maintenant, il y a plus de 1500 assurés.

Nous avons établi un régime d'assurance-stabilisation pour le porc dès le mois d'avril et il y avait eu une condition de posée. Si vous voulez avoir les chiffres exacts, je peux vous les donner immédiatement. Lorsque nous avons établi les régimes en 1978, il y a eu 256 producteurs qui se sont assurés avec 15 849 truies; en 1979, 774 avec 72 315 truies; en 1980, 1499 avec 163 582 truies et, en 1981-1982, 1667 producteurs avec 183 286 truies. Vous voyez que, lorsque nous avons établi le régime, en période où cela allait bien, peu de gens se sont assurés, mais, depuis deux ans, l'immense majorité de producteurs est assurée.

Nous avons versé des montants aussi pour faire des paiements d'avance. Au neuvième mois, lorsqu'on voit que la production va nécessiter des paiements, on fait des paiements d'avance et, après cela, on complète après la fin de l'année. Donc, en 1980, dans le porcelet, pour les éleveurs de porcelet, nous avons versé 7 553 528 $, soit 112 $ par truie et, en 1980, 7 397 178 $, soit 45,22 $ par truie. Là-dedans, il y avait des montants qui avaient été payés comme avance, de sorte qu'au cours des deux dernières années, dans le porcelet, pour les éleveurs de porcelet, il y a eu des paiements d'assurance-stabilisation de près de 15 000 000 $, soit 14 950 706 $.

Je vous ferai remarquer qu'il s'agit d'une production qui n'a pas été vraiment couverte par le régime fédéral. Je pense qu'il y a eu 1 $ de versé par truie l'an dernier, 1 $ par le gouvernement fédéral, alors que nous versions 112 $ par truie en 1980. Je pense que le député de Beauce-Sud - je ne le vois pas prendre de notes -devrait prendre des notes pour ne pas me reposer la même question parce que, là, c'est 112 fois plus que le gouvernement fédéral...

M. Mathieu: Cela vous fatigue! Il est heureux que je n'aie pas pris de notes!

M. Garon: ... en 1980. 1 $ par porcelet, j'ai dit 1 % par truie, par le gouvernement fédéral en 1980 alors que, nous, cela faisait 112 $ par truie. Il y a 16 à 17 naissances par truie, c'est ce qu'on prévoit dans les régimes modèles d'assurance-stabilisation. Ce qui veut dire, à ce moment, que le fédéral payait 17 $ par truie - c'est un peu moins moche - cela me fait un paquet de chiffres que je dois retenir, habituellement, je ne me trompe pas dans mes chiffres, mais c'est 17 $ en moyenne par truie alors qu'au Québec on payait 112 $. C'est une production qui n'était pas couverte par le gouvernement fédéral et que nous assurons depuis deux ans, pas depuis deux ans, mais depuis 1978, cela fait quatre années de production. La plupart des producteurs sont assurés depuis deux ans.

Au niveau du porc d'engraissement, la décision du Conseil des ministres qui a été annoncée au début de l'année 1981 a été qu'il pourrait y avoir un réqime d'assurance-stabilisation dans le porc d'engraissement à condition qu'il y ait un plan conjoint dans le porc. Évidemment, quand on disait qu'un plan conjoint dans le porc, c'est la décision du gouvernement, du Conseil des ministres, cela voulait dire que le gouvernement souhaitait qu'il y ait un plan conjoint. Nous avons d'ailleurs essayé de l'établir par arrêté en conseil auparavant, mais, cette fois, si les producteurs veulent se donner un plan conjoint, nous sommes d'accord pour établir un régime d'assurance-stabilisation dans le porc.

À la suite du vote sur le plan conjoint au mois de mars 1981, quinze jours plus tard, nous adoptions un régime d'assurance-stabilisation pour les producteurs indépendants de porc d'engraissement. Je peux vous dire qu'à la réunion spéciale du Conseil des ministres tenue pour adopter ce régime, parce que c'est à peu près la seule décision qu'il y avait à l'ordre du jour au Conseil des ministres cette journée-là, cela avait été un engagement et on savait qu'il y avait des difficultés dans le porc pour couvrir la situation immédiatement, à la suite de l'établissement d'un plan conjoint. (17 h 10)

II y a eu cet été la grève des postes, il y a eu des délais pour s'assurer, et on a accordé un délai supplémentaire le 15 septembre. Aujourd'hui, il y a 790 producteurs de porc qui sont couverts par le régime des porcs d'engraissement et environ 1 300 000 porcs. C'est évident que même pour ceux qui sont assurés, il y a des difficultés actuellement, et c'est dans ces cas-là que le régime paie. Au cours du mois de janvier - c'est ce que j'ai dit aux producteurs - qui sera le neuvième mois du

régime, nous pourrons déterminer s'il y aura un paiement, - pardon! c'est le dixième mois du régime, cela commence le 1er avril - s'il doit y avoir une avance pour les éleveurs assurés qui sont dans l'élevage du porc d'engraissement. À ce moment-là, s'il y a une avance, il pourrait y avoir une avance au cours du mois de janvier. Il semble, d'après les données qu'on a actuellement qu'il y ait de bonnes chances pour qu'il y ait une avance au cours du mois de janvier. Il s'agit ici de la production indépendante de porc d'engraissement.

Il y a aussi des productions intégrées. Il y a deux types d'intégration... Il y a plusieurs types d'intégration, mais disons, en gros, qu'on peut les classer sous forme d'intégration privée et d'intégration coopérative, si on peut appeler intégration la formule utilisée dans le système coopératif. J'ai demandé aux avocats du ministère de regarder cette question-là puisque des coopératives locales se sont regroupées dans une formule qu'elles appellent Cobec où des producteurs, selon un certain régime qui est une forme de péréquation, ont établi une forme de stabilisation entre les coopératives pour les producteurs. Il y en a qui disent que l'intégration privée et la formule coopérative, il n'y a pas de différence entre les deux. Il y en a d'autres qui disent qu'il y a une différence. Je fais actuellement étudier cela par les avocats du ministère depuis un bon bout de temps, d'ailleurs, parce que c'est une question apparemment très complexe, pour voir s'il y a une différence entre les deux. S'il y a une différence entre les deux, nous allons regarder s'il y a une possibilité d'assurer la production sous la formule particulière du système coopératif. S'il n'y a pas de différence entre les deux, il ne pourra pas y avoir d'assurance, parce que la décision du Conseil des ministres était de ne pas assurer les productions intégrées. Pourquoi? Parce que dans les productions intégrées, dans des périodes où les prix sont plus bas, c'est l'intégrateur, normalement, qui assume les pertes, de la même façon que c'est lui qui assume les gains dans les périodes où il y a un profit.

Maintenant, il y a une difficulté au point de vue du plan conjoint et là, le député de Beauce-Sud peut jouer un rôle. La principale difficulté du plan conjoint, je l'ai dit aux gens dans le domaine du porc est que quand le gouvernement disait que la condition pour établir un régime d'assurance-stabilisation était d'avoir un plan conjoint, il ne voulait pas dire: On te demande de voter un plan conjoint et de ne pas le faire marcher. Il voulait dire un plan conjoint qui marche. Maintenant, notre plan conjoint n'a véritablement jamais fonctionné. Une des difficultés, c'est que ceux qui sont dans l'intégration ne favorisent pas le fonctionnement du plan conjoint. J'ai dit aux producteurs aujourd'hui que je souhaitais qu'ils fassent au moins le règlement de cotisation. Il serait normal, si un plan conjoint est voté, que le règlement de cotisation, qui n'est pas un rèqlement compliqué - je comprends que la mise en marche complète d'un plan conjoint peut prendre un certain temps, cela peut prendre un certain nombre de mois, en tout cas - au moins indique que les gens sont dans le plan conjoint et qu'il y a un certain nombre de données.

Actuellement, le plan ne peut fonctionner d'aucune façon. Je vais vous dire bien franchement qu'ils m'ont dit que les abattoirs ne voulaient pas percevoir la cotisation, qu'il y avait des directives qui étaient données. Ils ont dit: Vous comprendrez, M. le ministre, que les gens qui sont dans l'intégration interdisent formellement la cotisation pour le plan conjoint aux abattoirs auxquels ils livrent des porcs. Si c'est cela, la situation, j'espère avoir la collaboration du député de Beauce-Sud, j'espère avoir la collaboration du Parti libéral et de tous les députés impliqués s'il faut faire des modifications à la loi. Car lorsqu'un rèqlement légalement adopté, approuvé par la Régie des marchés agricoles est par la suite torpillé, alors que c'est une réglementation légale et légitime, il faudra peut-être amender les lois pour permettre que cette cotisation soit exécutoire en vertu des pouvoirs légaux. Je peux vous dire que je vais faire étudier cette question et là, peut-être que certains masques tomberont puisqu'à ce moment-là nous faciliterons la perception des primes pour ceux qui ont voulu établir un plan. En tout cas, cette question va être à l'étude parce qu'il semble qu'il y a de grandes difficultés. C'est ce que j'ai appris du débat de ce matin, parce que pour un gouvernement responsable... Et vous seriez le premier à le dire, comme vous dites actuellement: II y a beaucoup de production parce que vous avez prêté; vous n'auriez pas dû prêter.

Il y a des entrepreneurs indépendants, il y a des gens qui viennent faire des emprunts et ce n'est pas à moi à déterminer si lui va l'avoir ou si lui ne l'aura pas. Si un projet est rentable, a un critère de rentabilité suffisant pour justifier le prêt, l'Office du crédit aqricole, la société fédérale de crédit agricole, les institutions financières prêtent à l'agriculteur. Ce n'est pas à moi à déterminer tous ceux qui vont avoir des prêts quand le projet est correct.

Maintenant, avant de créer des incitatifs dans le domaine du porc - et l'assurance-stabilisation est une forme d'incitatif - il faudrait peut-être établir des volumes de production ou établir jusqu'où va aller l'assurance-stabilisation. C'est ça, je pense, qu'il faut regarder et, pour ça, ça

prend l'établissement d'un plan conjoint. Les producteurs ont voté démocratiquement l'établissement du plan conjoint au cours du mois de mars. Maintenant, il faut que ce soit mis en oeuvre. J'ai l'intention de travailler avec les producteurs de porc pour qu'ils réussissent à mettre en oeuvre leur plan conjoint. En même temps, le gouvernement a fait son choix en disant que la production qui pourrait être stabilisée, c'est la production indépendante. La production intégrée ne sera pas stabilisée. J'ai demandé à l'Union des producteurs agricoles, dans son ensemble: Pourriez-vous me dire si vous faites une recommandation selon laquelle nous devrions assurer, stabiliser l'intégration de la même façon que la production indépendante? Je n'ai pas eu de réponse. Je lui demande à plusieurs reprises: Pourriez-vous me dire, par écrit - je le dis et, quand je le dis à la télévision, je pense bien qu'il y a plusieurs gens qui m'écoutent -souhaitez-vous que le gouvernement assure, par son assurance-stabilisation, l'intégration de la même façon que la production indépendante? Je n'ai pas eu de réponse là-dessus.

Je me rappelle que, dans des conversations, même les députés de l'Opposition me disaient - pas vous en particulier parce que vous êtes un peu nouveau là-dedans - Vous ne devriez pas assurer l'intégration. C'est là-dessus que le gouvernement a pris une décision.

Évidemment, si, à un moment donné, dans son ensemble, l'Union des producteurs agricoles dit: À l'avenir, changement de position, nous ne défendons plus nécessairement la ferme familiale, mais nous défendons l'intégration, même si cette intégration se fait avec de grandes corporations ou avec de grandes meuneries, nous sommes d'accord pour qu'il y ait un financement du prolongement de ces meuneries dans des fermes intégrées. Là, je dirai: C'est une nouvelle position de l'Union des producteurs agricoles et on va l'étudier. Je n'ai jamais eu, jusqu'ici, de demandes dans ce sens-là. J'ai dit: Si vous voulez qu'on le fasse, dites-nous-le. Jamais je n'ai eu de réponse dans ce sens-là. Je dois dire, à ce moment-là, que je considère qu'assurer des productions indépendantes, cela entre dans la philosophie du monde agricole et du gouvernement du Québec.

Maintenant, il y a d'autres problèmes au point de vue de l'organisation du plan conjoint et il va peut-être falloir prendre des moyens pour qu'au point de vue légal, si ces possibilités ne sont pas là, cela se fasse.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. Je ne voulais pas intervenir dans le dossier du porc, mais, à la suite des propos du ministre, je pense bien que ce serait intéressant d'aller un peu plus loin au sujet des plans conjoints.

Je pense que le ministre doit comprendre qu'un plan conjoint strictement provincial... Je ne suis pas contre les plans conjoints. D'ailleurs, j'ai déjà dit, M. le ministre, que j'étais contre les plans conjoints forcés, je ne suis absolument pas contre les plans conjoints qui sont votés d'une façon démocratique. Je pense qu'après voir parlé à plusieurs producteurs de porc, ils sont bien au fait qu'un plan conjoint strictement provincial ne règle pas leurs problèmes. Cela prend aussi un plan conjoint national et avec une forme de contingentement. Parce que je me dis que Québec seul, avec un plan conjoint, par exemple, ne réglera pas ces problèmes, je ne le pense pas, en tout cas, à moins que le ministre n'ait une nouvelle formule à proposer à ce niveau.

M. Garon: On ne peut pas avoir un plan conjoint national si on n'a pas un plan conjoint qui marche au niveau provincial.

M. Dubois: Je comprends, mais si seulement le Québec avait un plan conjoint provincial, il faudrait que les autres provinces l'aient aussi et qu'il y ait une entente nationale.

M. Garon: L'Ontario en a un. Les principaux producteurs des provinces productrices ont un plan conjoint.

M. Dubois: Je pense que c'est le voeu de la plupart des producteurs de porc d'avoir un plan conjoint national, à la suite d'un plan conjoint provincial, c'est sûr. J'espère que ça va se concrétiser dans les faits. Je sais que j'ai été visé, il n'y a pas tellement longtemps, par le ministre qui disait que j'étais contre les plans conjoints. Je pense que c'est à mon collègue de Beauce-Sud, lors de la question avec débat du vendredi, que vous avez fait un petit commentaire à ce sujet.

M. Garon: Oui. (17 h 20)

M. Dubois: Vous pouvez être sûr d'une chose. Vous n'avez qu'à relever le journal des Débats des années passées et vous allez voir que je n'ai jamais indiqué être contre les plans conjoints, mais contre les plans conjoints forcés comme celui que vous avez décrété, il y a deux ou trois ans, au Conseil des ministres, au sujet du porc. Je ne suis pas contre les plans conjoints. Je pense que le voeu des producteurs doit être respecté et, pour ma part, j'entends bien le respecter.

Je n'avais pas l'intention de parler du porc, mais des pommes, d'un petit peu de

pommes, non pas pour faire de la compote, mais... Mon collègue a fait état de problèmes dans le domaine du porc, mais il y a aussi d'autres secteurs d'activité où il y a des difficultés; par exemple, les pomiculteurs sont en difficulté. Je pense que le ministre est bien au fait et le sous-ministre également. Il y a eu beaucoup de représentations de la part de la Fédération des producteurs de pommes. Il n'y a jamais eu de promesse par le ministre qu'une certaine forme d'aide serait donnée aux producteurs de pommes.

Le ministre a indiqué que l'Office du crédit agricole serait prêt à fournir une aide. Mais quelle forme d'aide serait-ce? Un prêt avec intérêt ou un prêt sans intérêt? Un dégrèvement d'intérêt ou pas de dégrèvement d'intérêt? J'aimerais connaître la position du ministre là-dessus parce que rien de formel n'a été indiqué nulle part. Quel genre d'aide, via l'Office du crédit agricole, le ministre va-t-il apporter aux pomiculteurs? Est-ce que le ministre peut répondre à cette première question? J'en aurai d'autres après.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Garon: Disons d'abord que l'assurance-récolte devrait payer aux producteurs de pommes environ 2 000 000 $ de prestations cette année. Cela, c'est pour l'assurance-récolte, ce n'est pas pour le gel des pommiers, c'est plutôt pour le gel des bourgeons au moment de la nouaison, je pense, au printemps. Les pommiers ont gelé au cours du mois de février, l'inventaire est fait et nous en sommes très heureux. Cela a quand même coûté au-delà de 150 000 $ pour faire cet inventaire, et c'était un bon investissement. Tous ceux qui parlaient dans le domaine des pommes parlaient un peu par intuition, ils n'avaient pas vraiment de données sur les vergers québécois. Aujourd'hui, on a des données. On sait, par exemple, que la diversification des vergers est beaucoup plus grande que le disaient tous ceux qui en parlaient. Je peux vous dire que tous les experts dans le domaine des pommes étaient moins experts qu'ils le prétendaient puisque -je ne les blâme pas - ils n'avaient pas véritablement de données. La diversification est beaucoup plus grande.

De sorte que, à cause de l'absence de données, on aurait pu faire des incitatifs en renouvelant les vergers à la suite du gel, ce qui aurait été une erreur pour l'industrie pomicole. 15% des pommiers ont été détruits en 1981 il y en a un certain nombre dont la destruction peut se produire au cours de l'hiver puisqu'ils étaient trop faibles l'an passé; cela peut arriver. Ainsi, le nombre de 15% peut devenir plus élevé.

Nous aurons une rencontre, un colloque ou une conférence socio-économique sur l'industrie de la pomme au cours du mois de janvier pour déterminer quelle devrait être l'orientation de l'industrie pomicole. Notre aide, dans la perspective de renouveler ces vergers détruits et d'aider les producteurs, serait sous deux formes. Je l'ai répété, ce matin, lors du congrès de l'Union des producteurs agricoles: Une forme d'aide à la plantation des pommiers, les nouveaux pommiers qui remplaceront les pommiers détruits, une aide pour planter ces pommiers. Deuxièmement, comme ces pommiers, pendant un certain temps, ne produiront pas, il faut supporter financièrement le fait qu'on a des pommiers qui ont été plantés, mais qui ne produiront pas, dépendamment qu'il s'agisse de pommiers nains, de pommiers semi-nains ou de pommiers robustes, avant de cinq à neuf ans. Les axes d'aide du gouvernement du Québec seront faits autour de ces deux éléments.

Le gouvernement fédéral...

M. Dubois: Je comprends qu'à long terme, la politique sera établie bientôt, mais à court terme?

M. Garon: À court terme, nous avons rencontré la Fédération des producteurs de pommes et nous leur avons expliqué les différentes possibilités de financement qu'ils avaient à l'Office du crédit aqricole sous leurs différentes formes. Nous les avons rencontrés avant la saison de récolte puisqu'on nous disait que certains producteurs auraient de la difficulté à faire leur récolte parce qu'ils manquaient de financement, et nous avons discuté avec eux des différentes formes de crédit à la production disponibles à l'Office du crédit agricole.

Maintenant, au point de vue de l'aide du gouvernement fédéral, l'un des aspects c'est qu'il y a un manque à gagner. Comme les pommiers sont détruits et que ces pommiers pouvaient produire pendant encore plusieurs années, pendant ces années, il n'y aura pas de revenu pour ces producteurs de pommes puisgue les pommiers qu'ils auront plantés vont demander un certain nombre d'années avant de donner du rendement.

Le gouvernement fédéral est familier avec cette forme d'aide, puisque c'est la forme d'aide qu'il a appliquée dans l'Ouest, par exemple, lorsqu'il y a eu des désastres dans le domaine des céréales. Même chose lors des sécheresses ou encore dans le domaine des productions particulières, comme celle des poires - je me rappelle d'une année où d'autres types de production comme cela ont été affectés dans d'autres provinces. Le fédéral devrait intervenir, mais il n'est pas équipé comme nous pour intervenir au niveau de la plantation des verqers; c'est pour cela qu'on a fait des enquêtes. On a les instruments pour le faire, alors que le fédéral ne les a pas.

On a les instruments. Cela a pris de grosses équipes. Quand je parle de 150 000 % ou 160 000 $ pour faire des enquêtes, au point de vue de l'inventaire des vergers, cela prend du personnel, mais on est équipé pour faire ce genre de travail.

M. Dubois: M. le Président.

M. Garon: Au point de vue de l'aide pour la plantation, on va avoir l'aide...

M. Dubois: Je voudrais m'excuser auprès du ministre...

M. Garon: ...et aussi au niveau du crédit. Maintenant, au niveau du manque à gagner...

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Garon: ...c'est une forme d'aide avec laquelle le fédéral...

Le Président (M. Boucher): Question de règlement.

M. Garon: ...est familier et cela devrait être sa participation.

M. Dubois: II reste seulement quinze minutes. Je m'excuse auprès du ministre.

Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Étant donné qu'il reste à peu près quinze minutes pour la période des questions, j'ai parlé de programmes ou d'aide à court terme. Je ne parle pas des productions et du manque à gagner pour les années qui s'en viennent, peut-être dix ans. Présentement, il y a des pomiculteurs qui sont vraiment presque au bord de la faillite. Vous avez déjà eu des interventions de l'Office du crédit agricole à l'effet de consentir des prêts sans intérêt ou à court terme, je pense. Cela s'est fait au niveau des producteurs de porc, l'an passé ou il y a deux ans. Dans des cas où les pomiculteurs seraient en grande difficulté, à court terme, pour pouvoir vivre jusqu'à l'an prochain, c'est dans ce sens-là que je vous demande si, par l'Office du crédit agricole, vous aurez des formes d'aide sans intérêt comme cela a déjà été fait pour les producteurs de porc, je crois, l'an passé, où environ 30% des producteurs de porc ont pu se prévaloir de cette forme d'aide. Est-ce qu'il y a une formule que vous pensez adopter pour les producteurs de pommes qui sont en difficulté présentement et qui ont à vivre jusqu'à l'an prochain, jusqu'à la prochaine récolte? Vous savez très bien que, dans le comté de Huntingdon, la récolte devrait être entre 8%, 12% et 15% de ce qu'elle était l'an passé. Il y a donc des gens qui sont vraiment sur le bord de la faillite. Si on leur met encore sur le dos des taux d'intérêt bancaires, ils ne pourront pas passer à travers. C'est pour cela que je vous demandais si vous avez l'intention de présenter une forme d'aide à court terme, en dehors du problème du gel des pommiers, etc. C'est ce que je vous demande actuellement et c'est ce qui intéresserait particulièrement les pomiculteurs qui sont au bord de la faillite. Il faut les sauver, à court terme, je pense.

M. Garon: Mais là, je pense vous avoir répondu.

M. Dubois: Vous avez répondu à long terme. Je parle...

M. Garon: Non, ce n'est pas à long terme. Quand je dis que notre aide va être axée sur la plantation des pommiers, les plantations ne se feront pas avant le printemps. Quand on parle d'aide à la plantation, vous savez que cela peut coûter plusieurs milliers de dollars l'acre pour la plantation des vergers. J'ai les chiffres, selon qu'il s'agit de pommiers robustes, nains ou semi-nains. Il s'agit de montants importants.

M. Dubois: Oui, mais cela est à long terme. Planter des pommiers, c'est à long terme.

M. Garon: Laissez-moi finir. J'ai parlé aussi du crédit agricole. Ceux qui avaient des problèmes au point de vue des récoltes à l'automne, je leur ai dit: Vous pouvez allez au crédit agricole; on a parlé à la fédération et elle a dit que c'était d'accord. Il y en a qui sont allés au crédit agricole. Maintenant, pour le manque à gagner, ce dont vous parlez, c'est justement du manque à gagner.

M. Dubois: De cette année.

M. Garon: Oui. J'ai dit que c'est la forme d'aide, habituellement, que fait le gouvernement fédéral, lorsqu'il y a un désastre. J'ai dit que cette aide devait être la part du gouvernement fédéral, tandis que la nôtre va être pour la plantation des pommiers et le financement des vergers.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député, une dernière question.

M. Dubois: M. le ministre, vous vous en êtes sauvé souvent en disant: C'est bien de valeur, mais il y a seulement quelque 2% des pomiculteurs qui sont assurés. Il y a environ 2% des pomiculteurs...

M. Garon: C'est une autre affaire, l'assurance.

M. Dubois: Bon! II y avait 2% des pomiculteurs ou 1,5% des pomiculteurs qui se sont assurés librement. Il y en a qui sont forcés de s'assurer, c'est sûr, ceux qui ont des prêts spécifiquement pour les vergers, ils sont forcés de s'assurer. Mais, librement, je pense qu'il y a de 1,5% à 2% des pomiculteurs qui sont assurés. Ce qui veut dire que le régime d'assurance-récolte pour les pomiculteurs, tout comme pour les horticulteurs, il va falloir le revoir parce qu'il n'est pas achetable. Personne n'en veut. Je ne sais pas si le ministre a l'intention d'arriver avec une nouvelle loi qui touche les régimes d'assurance-récolte particulièrement pour les pomiculteurs et les horticulteurs. Vous savez très bien que les pomiculteurs ne veulent pas acheter le régime de l'assurance-récolte qui existe actuellement. Puisqu'il y en a 1,5% ou 2% qui l'achètent, ça veut dire qu'il n'est pas rentable. (17 h 30)

M. Garon: Ce n'est pas exact.

M. Dubois: C'est un fait et on le constate.

M. Garon: Ce n'est pas exact. Il y a à peu près 25% de la production qui est assurée et il y a de 112 producteurs qui sont assurés sur 1108.

M. Dubois: J'ai dit forcés.

M. Garon: Mais c'est évident que ceux qui sont assurés sont principalement des producteurs commerciaux. Les 1108 vergers qu'on a inventoriés, ce sont tous les vergers qui ont plus de 25 pommiers.

M. Dubois: Librement...

M. Garon: Laissez-moi finir. Ceux qui ont 25 pommiers, c'est évident gu'ils ne s'assurent pas, et il y en a qui ont 50 pommiers et qui ne s'assurent pas parce que ce n'est pas leur production principale. Mais les 112 qui sont assurés ce sont des producteurs qui ont des centaines ou des milliers de pommiers. C'est la véritable production puisgue, à 112 producteurs sur 1108, on assure 25% de la production. Pourquoi? C'est parce que ce sont les producteurs professionnels qui sont assurés principalement. Quand vous dites gu'ils ne sont pas assurés, ce n'est pas vrai. On va payer 2 000 000 $ de prestations aux assurés; il faut qu'il y ait des assurés pour que l'on paie 2 000 000 $.

M. Dubois: M. le ministre, vous savez très bien que ceux qui s'assurent librement -je ne parle pas de ceux qui sont forcés via l'Office du crédit agricole, c'est un fait -ceux qui ne sont pas forcés de s'assurer c'est environ 1,5% à 2% des producteurs.

Je parle de ceux qui s'assurent librement. D'ailleurs je pense que les chiffres sont sortis publiquement. Dans ce sens-là, ça veut dire que l'assurance-récolte ne répond pas à l'aspiration des pomiculteurs s'il n'y en a que 2% qui librement vont dire: J'achète une police d'assurance. D'ailleurs j'ai rencontré tellement de producteurs qui m'ont dit: Cela ne sert à rien de l'acheter, on ne peut pas aller chercher plus que le montant de la prime si on n'a pas une base d'à peu près 80% d'une production réelle. Ceux qui ont subi la grêle deux ans de suite, par exemple, ne s'assurent pas, ça ne vaut pas la peine. Il y a tellement de cas comme ça. Le ministre est au courant parce que je pense qu'il y a eu beaucoup de revendications de la part de la fédération d'apporter des changements au régime de l'assurance-récolte dans la pomme, et la même chose existe chez les producteurs horticoles. Je pense que le ministre est au courant de cela. Les horticulteurs ne veulent pas s'assurer...

M. Garon: Un instant! J'ai une seule représentation au point de vue de l'assurance des pommiers, et ce n'est pas de changer le régime. C'est la seule représentation. C'est de ne pas tenir compte dans les rendements des assurés de l'année désastreuse parce qu'ils disent: Cela va faire baisser notre moyenne de rendement. La représentation que j'ai eue au sujet du régime de la part de la Fédération des producteurs de pommes, c'est de ne pas tenir compte de cette année dans l'assurance pour que lorsque des paiements sont faits par le gouvernement ou la Régie de l'assurance-récolte, on ne baisse pas le rendement des pommiers en incluant cette année désastreuse dans ce rendement.

M. Dubois: II est là le problème aussi. C'est le problème qui est identifié, mais il faut un changement.

M. Garon: Quand vous dites: C'est un mauvais régime, il ne fonctionne pas et il n'y a personne dedans, ce n'est pas exact. Quand vous me dites: J'ai un paquet de dossiers, de représentations pour chanqer l'assurance, ce n'est pas exact.

M. Dubois: Quand il y a 2% des pomiculteurs qui s'assurent librement, M. le ministre...

M. Garon: II y en a 25%.

M. Dubois: ... les autres sont forcés de s'assurer et vous le savez. Vous ne voulez pas l'avouer mais vous êtes très au courant de cela. Il y en a 2% qui s'assurent librement.

M. Garon: Quand je vous dis qu'il y a 112 producteurs d'assurés qui couvrent 25%

de la production de pomme...

M. Dubois: S'il y en a 100 qui sont forcés de le faire, voyons donc!

M. Garon: Que voulez-vous, c'est la réalité, ce sont les faits.

M. Dubois: Des faits, oui! Faites un reportage... Allez-y.

M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, étant donné qu'il reste à peine...

Le Président (M. Boucher): Sept minutes.

M. Vaillancourt (Orford): ... sept à huit minutes, je vais essayer de faire un préambule très court. J'ai été fort déçu, en voyant le budget supplémentaire, de ne voir aucun article qui accordait un budget pour le programme Sol-Plus. Le programme Sol-Plus a été épuisé le 28 juillet dernier, c'est donc dire que l'enveloppe budgétaire qui est accordée à cet article ne suffit pas pour les besoins des agriculteurs.

Je pense que le ministre devrait faire des représentations auprès du ministre des Finances pour faire augmenter son enveloppe budgétaire afin de permettre à tous les agriculteurs du Québec d'améliorer le rendement de leur ferme.

Lorsqu'on voit le ministre distribuer des livres comme ceux-ci concernant les perspectives de développement du secteur agricole, de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation pour les années 1980, je pense que le budget ne répond pas tellement à ces aspirations, étant donné qu'il n'est pas suffisant pour permettre aux agriculteurs d'améliorer leur ferme et d'augmenter leur production.

J'ai été fort déçu et je pense que les agriculteurs ont été aussi fort déçus de voir que les engagements qui ont été pris au cours de l'année 1981 seront réalisés à même le budget 1982-1983... J'aimerais demander au ministre s'il est possible de me donner les déboursés concernant le budget du drainage souterrain et des travaux mécanisés en 1980-1981 et les engagements à même le budget 1981-1982. Est-ce que le ministre est en mesure de me fournir ces renseignements?

M. Garon: Ce serait plutôt possible au moment de l'étude des crédits du ministère, le printemps prochain. En cours d'année, il y a des paiements, des virements qui se font. On aura des données véritablement complètes là-dessus à la fin de l'exercice financier, mais je peux vous dire que, quand on dit qu'il y a eu beaucoup moins de travaux que l'an dernier, il y en a eu un peu moins, mais ce n'est pas exact de dire qu'il y en a eu beaucoup moins.

Ne parlons pas de budget, de ceci ou de cela, parlons des travaux effectivement réalisés et subventionnés par le ministère. Il y en a eu pour environ 19 000 000 $ en 1980, pour le drainage souterrain, et il y en a eu pour environ 17 000 000 $ en 1981. Maintenant, on en avait autorisé pour plus de 19 000 000 $, mais il y avait des entrepreneurs qui étaient tellement chargés de contrats que, dans la période de deux mois qu'ils avaient pour les accomplir, ils n'ont pas pu le faire. Quand vous me demandez si je n'aurais pas dû revenir avec des allocations supplémentaires, après des consultations avec plusieurs personnes dans le secteur, on m'a dit: Vous seriez mieux de ne pas le faire parce que cela va créer plus de problèmes que cela va en résoudre, si on veut rouvrir le programme à l'automne.

C'est un peu pour cela - je le dis davance - qu'on est en train de travailler sur une mécanique qui va faire que ceux qui veulent faire des travaux mécanisés, qui veulent faire du drainage souterrain vont pouvoir le demander à l'avance car nous allons pouvoir accepter les projets à l'avance, possiblement même au cours de l'hiver, et nous allons pouvoir répartir l'enveloppe dans les différentes régions, de sorte que, quand les travaux vont commencer, tous les gens vont savoir d'avance où ils en sont.

M. Vaillancourt (Orford): Je pense que, tout à l'heure, le ministre n'a pas très bien compris ma question. Je lui ai demandé s'il pouvait me donner les déboursés des travaux exécutés en 1980, sur le budget 1980-1981. Je pense bien que les déboursés sont compilés, étant donné que c'est l'année précédente et non l'année 1981.

En même temps, j'aimerais qu'on me dise quels ont été les engagements sur le budget de 1981-1982 pour des travaux exécutés en 1980.

M. Garon: Les travaux de drainage...

M. Vaillancourt (Orford): Ce qu'il m'intéresserait de savoir concerne l'enveloppe budgétaire des travaux mécanisés. Quel a été le montant déboursé sur le budget 1980-1981 et enqagé sur le budget 1981-1982? Le ministre n'a pas la réponse?

M. Garon: Je n'ai pas les chiffres avec moi, à ce point de vue.

M. Vaillancourt (Orford): Si le ministre n'a pas ces chiffres, est-ce qu'il pourrait me les faire parvenir?

M. Garon: Ouais! Pourquoi n'inscrivez-vous pas une question au feuilleton? Je vous répondrai par écrit.

M. Vaillancourt (Orford): Disons que ça

prend un peu de temps. Si je pose ces guestions, c'est parce que j'ai été fort déçu de voir qu'il n'y avait rien dans le budget supplémentaire et c'est pour faire prendre conscience au ministre que, l'an prochain, étant donné qu'il est encore temps d'ajouter au budget 1982-1983, il serait important de le faire tout de suite pour permettre de payer tous les engagements qui ont été faits au cours de l'année 1981, pour qu'il n'y ait pas des sommes à débourser en 1983-1984. Étant donné que les montants sont engagés une année d'avance... Je ne connais pas le pourcentage. Est-ce 25%, 30% ou 50%? Le ministre devrait demander au ministère des Finances de lui accorder un budget supplémentaire ou lui demander d'augmenter son budget de 1982-1983 pour permettre aux agriculteurs de faire beaucoup plus de travaux mécanisés et de drainage agricole. Un autre suggestion que j'aimerais faire aussi, c'est qu'on a été très désavantagé cette année dans certaines réqions parce que l'enveloppe budgétaire qui a été donnée au ministère de l'Aqriculture n'a pas été divisée dans les douze régions équitablement. Les régions où les travaux se font le plus de bonne heure ont mangé tout le budget... (17 h 40)

Le Président (M. Boucher): M. le député d'Orford.

M. Vaillancourt (Orford): ... et les régions les plus éloignées ont été privées de travaux mécanisés au cours de l'année 1981 étant donné que les travaux se sont terminés le 28 juillet dernier.

Le Président (M. Boucher): M. le député d'Orford, il est 17 h 40; nous devions arrêter, étant donné l'entente qu'il y a eu, pour permettre l'étude des crédits du ministère des Communications.

M. Vaillancourt (Orford): C'est parce que le ministre est trop long dans ses réponses, c'est pour cette raison. Cela ne m'a pas permis d'avoir des réponses concernant...

Le Président (M. Boucher): Je pense qu'on a été long dans les questions et les réponses de la même façon. Est-ce que les crédits du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sont adoptés?

M. Mathieu: J'aurais une conclusion.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre, il est 17 h 40 et l'entente dit que ce serait terminé.

M. Mathieu: II n'y a pas de conclusion? Le Président (M. Boucher): Je regrette.

M. Vaillancourt (Orford): J'aimerais avoir une réponse du ministre. Est-ce qu'il va répondre à mes questions par écrit étant donné qu'il n'a pas le temps de répondre ici à l'Assemblée nationale?

M. Garon: II y a plusieurs moyens de répondre. Vous inscrivez une question au feuilleton et moi je vous réponds par écrit. C'est la règle. Pourquoi n'inscrivez-vous pas une question au feuilleton? Je vais vous répondre. Non seulement ça, ma réponse va être inscrite au feuilleton.

M. Vaillancourt (Orford): Les questions sont posées.

Le Président (M. Boucher): D'accord. Les crédits supplémentaires du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Boucher): Adopté.

Une voix: Bâillon.

Communications

Le Président (M. Boucher): Nous passons aux Communications. M. le ministre des Communications, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bertrand: On va donner le temps à nos amis de l'Agriculture de se remettre de leur long débat d'une heure et demie.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le ministre des Communications.

M. Bertrand: M. le Président, je ne ferai pas de préambule. Je voudrais simplement me réjouir de revoir celui qui au nom de l'Opposition assume la responsabilité du dossier des communications, le député de Jeanne-Mance, et, par contre, souligner gu'en son absence le député de Westmount, à la commission parlementaire qui a étudié au début du mois de septembre la proposition de loi contenue dans le rapport Paré sur l'accès à l'information gouvernementale et la protection des renseignements personnels, a fait un travail assez formidable et fort positif. Je tiens à l'en remercier, d'ailleurs. Je ne doute pas que le député de Jeanne-Mance va prendre la relève maintenant et s'intéresser lui aussi très activement à ce dossier.

M. Bissonnet: C'est M. le député de Westmount qui m'a remplacé durant le temps que j'étais absent pour cause de maladie. Toute la population du Québec a pu le constater également. Je tiens à assurer que

nous, du côté des communications, pour l'Opposition, nous travaillons en équipe dans ce dossier et nous essayons de nous partager les travaux.

J'aurai trois ou quatre questions très précises, M. le ministre, à titre d'information pour nous, d'une part, et pour la population également. Premièrement, en ce qui a trait à Radio-Québec, j'ai remarqué une émission télédiffusée à L'Événement, il y a à peu près un mois et demi. Le président de Radio-Québec y déclarait qu'il y avait un surplus d'employés, qu'il y avait trop d'employés à Radio-Québec. Du côté de votre ministère, je ne sais pas si vous avez pris connaissance de la conversation du président de Radio-Québec. Je lui ai demandé s'il pouvait m'en transmettre une copie. En fait, je suis convaincu qu'il avait un texte lors de cette émission de télévision. Je lui en ai parlé et il m'a dit qu'il était impossible pour lui de me le transmettre, mais je sais qu'on le verra l'année prochaine à l'étude des crédits et nous allons le confronter avec ses déclarations.

Au sujet du projet de téléjournal à Radio-Québec, M. le ministre, les membres du conseil d'administration de Radio-Québec ont adopté au début d'octobre un plan de développement triennal pour les années 1982-1985, à la demande du gouvernement et de votre ministère, et ils ont établi un ordre de priorités au nombre desquelles figure au quatrième rang, M. le ministre, l'intégration à la programmation d'un journal télévisé d'une demi-heure quotidienne au coût approximatif de 4 100 000 $ pour la première année. À la lumière du contexte général d'austérité qui entraîne d'importantes coupures dans des secteurs prioritaires tels que l'éducation et les affaires sociales, à la lumière des restrictions sévères auxquelles a été soumis le budget de Radio-Québec, ce qui a pour effet d'amputer sérieusement la programmation du réseau québécois, le ministre veut-il remettre en question la pertinence et surtout l'urgence pour le gouvernement du Québec de s'engager dans une telle aventure? Deuxième question, le ministre pourrait-il, avant de s'engaqer dans un tel projet, faire connaître publiquement sa proposition, programmes et chiffres à l'appui?

M. Bertrand: Je remercie le député de Jeanne-Mance de me poser cette question, parce que je pense qu'il est effectivement temps que j'indique à l'ensemble de la population un peu quelles orientations j'entends retenir pour le développement de Radio-Québec au cours des prochaines années et en particulier pour le prochain exercice financier 1982-1983.

Tout d'abord, je veux indiquer que le député de Jeanne-Mance a tout à fait raison de dire que nous traversons une période d'austérité budgétaire qui nous commande de faire des choix qui ne sont pas toujours faciles, surtout pour une société de radiotélévision qui est en plein développement et qui a vraiment besoin d'argent pour faire en sorte qu'au moment où elle est en train de prendre son envol, elle ne se mette pas à piquer du nez faute de revenus qui lui permettraient, justement, de poursuivre ses projets et d'aller de l'avant surtout avec cette politique de régionalisation que le député connaît. Je voudrais indiquer que nous avons, au ministère des Communications, pris la décision d'aider Radio-Québec de trois façons différentes pour la prochaine année financière 1982-1983. La première, c'est d'absorber à l'intérieur du ministère des Communications toute la compression budgétaire qui nous est imposée pour la prochaine année financière et d'en exempter Radio-Québec. En d'autres mots, j'ai décidé de placer en tête de liste de mes priorités le développement de Radio-Québec, la poursuite de la politique de régionalisation, et si j'avais demandé à Radio-Québec d'absorber sa part de compressions budgétaires pour la prochaine année, c'est un montant d'environ 1 700 000 $ qui aurait dû être absorbé en compressions budgétaires par Radio-Québec. Or, nous avons décidé au ministère de prendre ce montant de 1 700 000 $ et de l'absorber dans les autres services du ministère des Communications, ce qui fait que Radio-Québec se voit donc accorder une certaine marge de manoeuvre de 1 700 000 $ qui autrement n'aurait pas existé, première chose.

Deuxième chose - je l'ai déjà annoncé publiquement - j'ai l'intention de présenter au Conseil des ministres une proposition de modification à la loi constituant la Société de radio-télévision du Québec pour permettre à Radio-Québec d'aller chercher des revenus autonomes. C'est-à-dire qu'en plus des crédits qui sont alloués par l'Assemblée nationale à chaque année, Radio-Québec pourrait aller chercher des revenus, mais là, on peut imaginer plusieurs possibilités. Il y a évidemment la possibilité des souscriptions populaires - c'est pratiqué par le réseau PBS aux États-Unis, entre autres - on peut imaginer la création d'une fondation et on peut aussi, bien sûr, penser à la commandite de prestige. Ce n'est pas d'ailleurs très nouveau à Radio-Québec. Je donne l'exemple des films de la série Image par image où la société Alcan accepte de participer à cette programmation dans un contexte où, à mon avis, la mission éducative de Radio-Québec est tout à fait respectée: 7 secondes de publicité au début du film, 7 secondes à la fin et un long métrage toujours d'excellente gualité, enfin pour ceux qui suivent les émissions de Radio-Québec. Je crois que ce type de commandite peut être accepté dans

le mandat de cette télévision éducative. C'est un deuxième geste concret que j'entends poser. (17 h 50)

Le troisième, c'est de faire en sorte que lorsque les priorités gouvernementales seront débattues pour la prochaine année budgétaire, la seule priorité que j'achemine à ce qu'on appelle chez nous, vous le savez, le comité des priorités, s'il existe véritablement une marge de manoeuvre quelconque pour du développement nouveau l'an prochain, ce soit de l'argent qui puisse être affecté à la poursuite du développement de Radio-Québec.

Ce sont donc trois exemples très concrets pour tenter justement de manifester à la Société de radio-télévision du Québec mon intention très réelle de lui permettre de poursuivre son développement. Donc, pour en arriver maintenant à votre question très précise sur le bulletin d'information, j'indique que - comme vous l'avez souligné vous-même - le conseil d'administration de Radio-Québec a retenu six priorités pour la prochaine année budgétaire. Le bulletin d'information quotidien vient au quatrième rang. Il est précédé par, premièrement, les 800 000 $ qui vont à l'implantation et à l'exploitation d'antennes; deuxièmement, par l'injection d'un budget de 2 000 000 $ pour accroître la production régionale; troisièmement, par un budget de 900 000 $ pour la mise sur pied de trois centres de mise en ondes qui permettraient justement aux régions de se décrocher du réseau national et de diffuser uniquement dans leur région. Je n'ai pas besoin de vous dire que l'ensemble de ces demandes, incluant le bulletin d'information, incluant la série Passe-Partout et incluant aussi les stations réémettrices au Témiscamingue et dans la région de l'Outaouais, tout ça fait un montant, en développement nouveau, de 7 200 000 $. Au moment où on se parle, on n'a absolument aucune qarantie, ni vous ni moi, qu'il y a de l'argent disponible pour du développement nouveau. Je peux donc immédiatement vous annoncer que s'il y a une mince marge de manoeuvre qui peut être dégagée, elle ira d'abord et avant tout à la poursuite de la politique de régionalisation avant de servir à l'intégration d'un bulletin d'information guotidien à Radio-Québec. C'est une intention que j'ai déjà exprimée publiquement dans mes rencontres avec les comités régionaux de Radio-Québec, en faisant la traversée du Québec depuis quelques mois.

M. Bissonnet: Nous sommes d'accord aussi pour que vous développiez davantage ce que vous avez mentionné pour la régionalisation. Lors de la commission parlementaire sur l'étude des crédits au mois de juin dernier, nous, de l'Opposition, avions discuté avec vous de l'apport du gouvernement pour faciliter la pénétration des quotidiens dans les régions éloignées. C'est un problème très difficile pour les quotidiens de desservir les populations des réqions éloignées au Québec. Concrètement, à l'intérieur de ce ministère, est-ce que vous avez étudié ce problème pour tenter de solutionner cet état de fait? On a eu vent qu'un projet serait implanté au cours de l'année 1982 concernant une commission d'étude visant à élaborer une politique de pénétration des quotidiens dans les régions éloignées du Québec.

M. Bertrand: Une commission d'étude, M. le député de Jeanne-Mance? Non.

M. Bissonnet: C'est ce dont on a eu vent; nous, on voudrait plus que cela.

M. Bertrand: Ce que je peux vous dire, par contre, c'est qu'effectivement, nous avons préparé, au cours des dernières semaines, des derniers mois, ce qu'on pourrait appeler un projet d'expérience pilote dans les régions éloignées du Québec, pour tenter d'évaluer un certain nombre de phénomènes comme, par exemple, l'impact qu'aurait sur le taux de lecture de ces populations qui vivent en réqion éloignée le raccourcissement des délais de livraison des quotidiens ou la baisse du coût que les gens doivent payer pour un quotidien.

Je crois que c'est mon collègue, le député de Duplessis, qui me racontait que -je ne sais pas si c'était le Journal de Québec ou un autre; je le dis comme ça, de mémoire - à Fermont, dans les villes minières, on payait jusqu'à 1,15 % pour avoir le quotidien. Je n'ai pas besoin de vous dire que, dans certaines régions, on ne l'a que le lendemain et à un prix très élevé.

Je dois vous dire aussi que j'ai consulté des députés sur cette question. Ils ont fait apparaître un certain nombre d'éléments dont nous devrions tenir compte si nous décidions d'aller de l'avant avec cette expérience pilote. Ces éléments d'information qu'ils nous ont apportés m'ont amené à demander aux qens du ministère des Communications de revoir le projet et de tenter d'incorporer ces différentes informations qui nous ont été transmises pour améliorer le projet, si jamais nous décidons d'aller de l'avant avec ce projet.

Ce que je voudrais que le député de Jeanne-Mance sache, c'est ceci: J'ai, jusqu'à un certain point, une réserve avant de décider d'aller vraiment de l'avant avec cette expérience pilote. Pourquoi? Bien sûr, c'est toujours très agréable de savoir qu'on peut, par une expérience pilote, mesurer s'il y a un impact ou pas sur le taux de lecture de ces populations quand on diminue le prix de vente, quand on raccourcit les délais de livraison, etc. Mais il faut savoir une chose. C'est que, si l'expérience est concluante,

qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce que cela veut dire que le gouvernement introduit un proqramme de subventions aux distributeurs, un programme de subventions directes à l'acheteur ou un programme qui viendrait modifier les lois normales du marché? Donc, dans ce contexte d'austérité budgétaire que nous traversons, je ne vous cacherai pas que je me demande sérieusement si nous allons aller de l'avant avec l'expérience pilote si, au bout de la ligne, nous avons fait naître des espoirs que nous ne serions pas capables de respecter parce que, justement, nous n'aurions pas les réponses qui s'imposeraient dans les circonstances ou l'argent nécessaire pour y donner suite.

Vous allez me dire que ce n'est pas un montant énorme qui est impliqué dans cette expérience pilote. C'est environ 100 000 $. Cela étant dit, si c'est dans une expérience qui apporte des conclusions positives, mais auxquelles nous ne pouvons pas donner suite faute d'argent ou parce qu'il y aurait une forme d'intervention dans les lois normales du marché - il y a vraiment là des questions qu'on doit se poser très sérieusement - je me dis que peut-être ces 100 000 $ seraient mieux utilisés à d'autres fins qu'à cette fin particulière.

Là-dessus, je serai prêt à recevoir, quant à moi, les observations de mes collègues de l'Opposition.

M. Bissonnet: Le député de Westmount a une question additionnelle.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Westmount.

M. French: Justement, lorsque le ministre et moi-même avions vécu une expérience heureuse en commission parlementaire, il y a trois mois, son sous-ministre a partagé un certain nombre d'idées avec la presse nationale au sujet du rôle du gouvernement dans le marché de la presse quotidienne. Je pense que, dans la réponse que le ministre vient de donner, j'ai pu déceler une attitude de scepticisme ou d'interrogation au moins sur le rôle du gouvernement dans ce marché-là; je voudrais lui donner l'occasion maintenant de clarifier l'attitude du qouvernement du Québec sur toute cette série de questions qui découlent de l'enquête de la commission Kent et d'autres commissions d'enquête sur la presse.

M. Bertrand: Je voudrais indiquer au député de Westmount qu'effectivement, et vous l'avez noté au cours des dix ou douze dernières années, il y a eu des réactions chaque fois qu'il y a eu des problèmes qui se sont manifestés dans le domaine de l'information et que les gouvernements, par la voie de commissions parlementaires par la voie de groupes d'étude, ont affiché leur intérêt. Je me rappelle par exemple que l'ancien député de Saint-Jean, M. Veilleux, avait participé à un qroupe d'étude. Il y a eu aussi des projets de législation. Il y en a un qui avait été amorcé vers la fin de 1975 environ, sous le gouvernement libéral, et un autre sous notre gouvernement, à l'époque où M. O'Neill était ministre des

Communications. Vous vous le rappellerez sans doute, c'était un projet très global où on touchait à tout dans le domaine de l'information. Il avait été très mal accueilli à l'époque. On se rappellera la réaction. C'est qu'à chaque fois que l'État a voulu intervenir dans le domaine de l'information, même avec la meilleure foi du monde, il y a eu manifestation d'une forme de sensibilité qui existe dans le milieu de l'information, d'une espèce de scepticisme aussi, face à toute intervention de l'État. (18 heures)

Je vous avoue que moi-même, avant de me risquer dans des projets de cet ordre, je prends en considération ces différents facteurs. Je ne vous cacherai pas cependant qu'à la suite du dépôt du rapport de la commission Kent, il y a un élément qui me trotte dans l'esprit et qui est celui de l'affirmation de la compétence du Québec en matière de presse écrite. J'ai bien indiqué là-dessus, un peu en réponse à ce rapport de la commission Kent, que l'analyse qui était faite, au nom du Québec en tout cas, était très partielle et fragmentaire, puisque, si on veut étudier le phénomène de la concentration des entreprises de presse, il ne-faut pas seulement tenir compte des quotidiens, mais il faut aussi tenir compte de la presse hebdomadaire, de la radio, de la télévision, en d'autres mots des possibilités de contrôle vertical et donc, dans ce contexte, il faut assumer ici chez nous nos responsabilités dans ce secteur.

Pour l'instant, je ne suis pas en mesure d'indiquer si oui ou non le qouvernement décidera de poser un geste précis pour donner suite, en partie, aux recommandations contenues dans le rapport Kent, mais je peux indiquer immédiatement au député de Westmount que si jamais il y avait un qeste posé du côté du gouvernement, ce ne serait pas du même' type que ce projet qui avait été soumis à l'attention du public il y a quelques années; par contre, ce serait peut-être un projet de nature à affirmer la compétence du Québec en cette matière.

Le Président (M. Boucher): Messieurs, étant donné que nous avons dépassé l'heure de la suspension, y a-t-il consentement pour poursuivre?

M. Bertrand: Oui, il y a consentement, M. le Président.

M. Bissonnet: II y a un consentement

jusgu'à 18 h 10 au maximum.

M. Bertrand: Pas de problème.

Le Président (M. Boucher): 18 h 10, d'accord.

M. le député de Westmount.

M. French: Je voudrais tout simplement recommander au ministre, face à ses revendications de droits et de pouvoirs - je ne prendrai jamais position là-dessus, je ne suis pas avocat constitutionnel, je ne parle pas pour mon parti dans ce contexte - la même attitude que celle qu'il a adoptée face au projet pilote précédent, c'est-à-dire que s'il n'a pas l'intention d'utiliser de quelque façon que ce soit ces pouvoirs, qu'il ne les revendique pas parce que cela va créer le même genre d'inquiétudes et de problèmes. Lorsqu'il y aura une cause, lorsqu'il y aura un acte tangible et concret qui affecterait, d'une façon très directe, le champ de juridiction en question, ce sera le temps de se chicaner sur la juridiction. Mais en attendant, le ministre a déjà trouvé d'autres champs dans lesquels il veut foncer et ce serait peut-être mieux. Ce serait peut-être susceptible de développer un peu plus de consensus ici que ce champ particulier des médias écrits, quotidiens et hebdomadaires.

M. Bissonnet: Oui, d'accord. Disons que ce sera notre dernière question.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: On a annoncé dernièrement la création d'un comité ministériel permanent des communications dont la mission serait de coordonner l'information gouvernementale au niveau politique. En tant que responsable de l'Opposition en matière de communications, je surveille cela de façon très étroite pour qu'il n'y ait pas des choses politiques à l'intérieur du gouvernement qui se fassent avec les communications de la politique.

Vous agissez comme ministre à titre de président de ce comité. Pourriez-vous nous faire connaître les objectifs ou les priorités dans le domaine de la coordination - comme c'est votre râle - et de l'information gouvernementale vis-à-vis de ce comité ministériel?

De plus, reconnaissez-vous que la création d'un tel comité politique des communications gouvernementales maximise le danger que l'information gouvernementale prenne la tengente de la propagande? Nous, en fait, on a constaté que ce comité a été formé par la voie des journaux. Cela a été annoncé dans les journaux et on se pose des questions sur ce comité, face à la propagande politique qui pourrait survenir à la suite de cela.

M. Bertrand: Pour vous répondre, M. le député de Jeanne-Mance, d'abord, j'aimerais indiquer que la création de ce comité ministériel permanent des communications me tenait à coeur depuis que le premier ministre m'a demandé d'assumer la responsabilité du ministère des Communications. Il s'effectuait... Écoutez, je vais résumer très rapidement.

On a connu, vers la fin des années soixante, une période de centralisation presque absolue de l'information et de la communication gouvernementales. C'était l'époque, vous vous en souviendrez, de l'Office d'information et de publicité du Québec. À ce moment, c'était la centralisation presque totale. A suivi une période de décentralisation presque aussi absolue où chacun des ministères ou chaque orqanisme gouvernemental avait sa direction des communications et fonctionnait avec ses budgets sans aucune coordination. Quand nous sommes arrivés au pouvoir, en 1976, nous avons réalisé qu'il était nécessaire, pour que nous ayons une politique plus cohérente en matière d'information et de communication gouvernementales et pour viser aussi à une utilisation plus rationnelle des ressources humaines, techniques et financières en matière d'information et de communication, de trouver le moyen de coordonner tout ça.

Cela a donné lieu, en 1978, à la création de ce qu'on appelle depuis le conseil des directeurs des communications qui réunit à peu près 35 directeurs et directrices des communications qui sont des représentants et des ministères et d'organismes gouvernementaux relevant de ces ministères. C'est un travail qui a donné des résultats intéressants, mais, quand je suis arrivé au ministère, j'ai constaté qu'il y avait un chaînon manquant et que c'était la coordination au niveau politique.

Là-dessus, M. le député de Jeanne-Mance, je vais vous le dire en toute franchise, moi, dans le domaine des communications, je ne me mettrai pas sur la défensive. Je pense que la mission d'informer les citoyens, c'est un devoir d'état et que les élus doivent assumer cette responsabilité. Bien sûr, nous sommes appuyés par des équipes de fonctionnaires. Nous ne devons pas nous cacher ou nous dissimuler derrière des équipes de fonctionnaires pour faire faire le travail de coordination qui doit être fait par les élus. Ce sont les fonctionnaires eux-mêmes, les directeurs des communications qui nous l'ont dit, il nous manque cette espèce de portrait général qui nous permettrait de savoir ceci: Nous, notre travail, à partir de quelles grandes orientations, de quelles qrandes priorités et de quels grands objectifs devons-nous l'effectuer? Le conseil de directeurs des

communications - qui est formé de fonctionnaires - à un moment donné, a fait sentir aux élus qu'il y avait quelque part une responsabilité qui n'était pas assumée. Cette responsabilité, elle est essentiellement politique.

Je pense qu'il y a une qrosse différence, d'ailleurs, entre assumer la responsabilité politique et faire de l'information partisane, ce que le député pourrait appeler de la propagande partisane, et là-dessus je suis bien d'accord avec lui. Mais exercer une responsabilité politique, c'est-à-dire être capable de dégager de grandes orientations, de grandes priorités et de grands objectifs en termes de communications et d'information, cela m'apparaît devoir être une responsabilité qui est prise en charge par les hommes et les femmes politiques et on ne doit pas se dérober. On doit assumer nos responsabilités dans ce domaine et nous allons le faire en toute transparence. Je peux indiquer au député de Jeanne-Mance que ce comité ministériel permanent des communications qui a tenu jusqu'à maintenant deux réunions - il tiendra sa prochaine réunion jeudi prochain, si ma mémoire est bonne - va effectivement faire ce travail, mais on ne s'occupera pas de prendre la place de ceux qui ont l'expertise et la connaissance en matière de stratégies, si vous voulez, d'interventions du côté de l'information et de la communication gouvernementales. On ne va pas de substituer à ces gens. On ne va pas faire leur travail à leur place, mais on va faire le travail que nous devons faire et qu'ils ne peuvent pas faire à notre place. Je crois que c'était un des éléments qui manquaient et qui, à mon avis, va nous permettre - et c'est ce qui est important - d'utiliser de façon beaucoup plus rationnelle les ressources humaines, techniques et financières, ce qui pourrait vouloir dire en fin de compte peut-être dépenser moins d'argent, mais avoir le sentiment qu'on le dépense sur la base d'orientations, de priorités et d'objectifs sur lesquels on s'est entendus. Je vous donnerai un exemple, quant à moi, en tout cas, de campagnes qui, à l'occasion, m'apparaissent arriver de je ne sais pas où et qui n'ont pas de justifications véritables quant à moi. (18 h 10)

Durant tout l'été, je me suis promené -je pense que je l'ai raconté au député de Westmount - un peu comme vous à travers le Québec et je voyais partout ces panneaux publicitaires où c'était écrit "Venez jouer dehors". C'était la fameuse campagne de Venez jouer dehors, à une période de l'année où, à mon avis, vous n'avez pas besoin d'une campagne de publicité pour dire aux jeunes: Venez jouer dehors. Durant l'été, je pense que le problème des parents, c'est plutôt de leur demander de rentrer se coucher. Dans un tel contexte, je pense qu'il y a une utilisation plus rationnelle des médias qui doit être faite et c'est le rôle, à mon avis, des élus d'assumer leur responsabilité au niveau de la définition des orientations et des priorités.

Le Président (M. Rancourt): Messieurs, est-ce que...

M. Bissonnet: Juste une petite question pour terminer. Je suis content de la réponse du ministre et j'en prends acte. Au sujet du projet de loi d'accessibilité à l'information gouvernementale, est-ce qu'on peut compter qu'il sera présenté à la prochaine session? En fait, lorsqu'on s'est rencontré en commission parlementaire, vous aviez acquiescé à ce que ce projet de loi soit absolument présenté à cette session-ci mais, ce n'est actuellement pas le cas. Je vous demande, M. le ministre, si on peut compter que le gouvernement, grâce à votre ministère et au Conseil des ministres, soumettra à la prochaine session ce projet de loi qui est très important pour tous les Québécois.

M. Bertrand: M. le député de Jeanne-Mance, là-dessus, je sais que je peux compter sur l'appui de l'Opposition. Cet appui m'a été d'ailleurs très utile en commission parlementaire lorsque le député de Westmount a travaillé avec nous à écouter les représentations des différents organismes. Je peux vous dire où cela en est. Effectivement, on a vécu l'automne qu'on a connu avec les reports de début de session et, disons-le franchement comment ça se passe, la loi 16 a eu ses étapes et la loi 39 aussi, mais laissons ça de côté. Je dois vous dire que...

M. French: C'est faible comme excuse.

M. Bertrand: ... tout le dossier a été étudié très en profondeur. Nous avons consacré plus de quatre séances et probablement quelque chose comme autour de douze ou quinze heures sinon plus, à notre travail au niveau du comité ministériel permanent du développement culturel, le CMPDC. La proposition que je fais a donc franchi cette étape. La prochaine étape, c'est le Conseil des ministres. Je souhaiterais que cela puisse se faire avant la période des fêtes, mais je n'en ai pas la certitude, puisqu'il reste à peu près deux ou trois séances du Conseil des ministres. De toute façon, il sera impossible de l'adopter avant Noël à cause du calendrier que vous connaissez, mais il est très clair que le débat là-dessus sera fait à la reprise des travaux en 1982.

Je peux vous dire que le travail que nous avons fait jusqu'à maintenant est un travail que j'ai hautement apprécié, surtout au niveau du comité ministériel permanent

du développement culturel où nous avons, je crois, fait un certain nombre d'arbitrages entre différentes hypothèses à tous les niveaux. Il nous reste maintenant à nous rendre devant le Conseil des ministres pour prendre la décision finale. J'espère être en mesure, quelgue part en 1982, quand les travaux reprendront, d'annoncer le dépôt en première lecture de ce projet de loi sur l'accès à l'information gouvernementale et la protection des renseignements personnels.

M. Bissonnet: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Boucher): Les crédits supplémentaires du ministère des

Communications sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.

M. Bissonnet: Vous proposez la suspension...

M. Bertrand: Jusqu'à 20 heures.

Le Président (M. Boucher): La commission plénière suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 14)

(Reprise de la séance à 20 h 15)

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission plénière de l'Assemblée nationale reprend ses travaux sur l'étude des crédits supplémentaires.

Affaires sociales

Passons à l'étude des crédits des Affaires sociales. M. le ministre des Finances, pour le ministre des Affaires sociales, est-ce que vous avez un message?

M. Parizeau: Non, M. le Président, je n'ai pas de commentaires préliminaires à faire. Je pense qu'on pourrait passer tout de suite aux questions de l'Opposition.

Le Président (M. Desbiens): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Comme dirait le ministre des Affaires sociales, on a des problèmes d'arrimage. Je m'excuse parce que j'ai été appelée à la course. Apparemment, notre ministre de l'Éducation est dans les airs quelque part. Je voudrais vous demander...

M. Parizeau: M. le Président, sur une question de privilège. Il est dans les airs, mais on sait où.

Mme Lavoie-Roux: ... cela ne se voulait pas méchant du tout, M. le ministre. Je vais poser la première question, même si c'était peut-être la dernière par ordre de priorité, pas nécessairement la dernière par ordre de priorité. Au programme 20 de l'office de garde, je vois qu'il y a une augmentation de 2 500 000 $. Est-ce qu'on pourrait me dire à quelles fins, parce que le budqet avait été gelé, à la présentation du budget, au mois de mai? Il y avait eu une augmentation d'à peu près 500 000 $ qui allait à l'administration de l'office de garde. Est-ce que quelqu'un peut me dire à quoi vont servir ces 2 500 000 $?

M. Parizeau: II s'agit, M. le Président, d'une révision globale de l'enveloppe, compte tenu à la fois des charges des garderies existantes et des besoins qui sont exprimés, c'est-à-dire qu'on prend l'enveloppe budqétaire telle qu'elle avait été exprimée dans les crédits qénéraux du printemps et on y ajoute 2 500 000 $. Alors, il n'y a pas de poste spécifique auquel c'est affecté. On considère simplement que, pour faire fonctionner les garderies, c'est cela que ça va prendre de plus.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'on peut me dire si c'est causé par l'augmentation du nombre de places en qarderie, par des prévisions de compensation pour les locations des qarderies? Il ne s'agit évidemment pas d'une correction ou d'une augmentation des barèmes prévus!

M. Parizeau: Non, il s'agit essentiellement de ceci. Il semble que tout à fait à la fin de l'année 1980-1981, dans les dernières semaines, on a ouvert beaucoup plus de places qu'il n'était prévu et que les ajustements n'ont pas été faits dans le budqet de 1981-1982 quant au coût pour une année entière de toutes ces places qui ont été ouvertes dans les dernières semaines de 1981.

Mme Lavoie-Roux: En fait, il n'y a pas de développement par rapport à l'année budgétaire 1981-1982. C'est une reconduction annualisée pour l'année 1981-1982.

M. Parizeau: C'est de la traduction mécanique. On avait prévu 21 451 places et, en fait, il y en aura 23 670. C'est un ajustement mécanique pour tenir compte de cette augmentation, j'allais dire naturelle, des places disponibles.

Mme Lavoie-Roux: Au programme 6... Je m'excuse auprès du ministre, M. le Président, si je vais d'un programme à l'autre. Comme je vous ai dit tout à l'heure je suis venue assez rapidement. Au moment de l'étude des crédits le printemps dernier, il

y avait eu une légère baisse des crédits prévus pour les organismes bénévoles, qui était de 3,2%. À ce moment-là le ministre nous avait dit qu'il avait reconduit pour six mois le budget de l'année précédente et, comme il était devenu le nouveau titulaire des Affaires sociales, il s'apprêtait à faire une réévaluation entre-temps. Il nous avait dit qu'on reviendrait possiblement avec de nouveaux crédits pour au moins conserver le statu quo par rapport à l'année antérieure 1980-1981. (20 h 20)

M. Parizeau: Effectivement, M. le Président, nous avons réduit... C'est un des programmes avec lesquels nous avons eu le plus de difficultés dans le passé en ce sens qu'une partie - je ne veux pas exagérer la portée de ce que je vais dire - de ce qui a été transféré comme soutien aux organismes bénévoles s'est finalement retrouvée dans des frais d'administration qui ne correspondaient pas toujours aux intentions de fournir dans le champ aux organismes bénévoles l'argent que l'on voulait. Il y a eu des augmentations assez spectaculaires à ce poste dans les deux ou trois années passées. Cela n'est pas toujours allé vraiment là où le gouvernement voulait que ça aille; il y a donc eu une sorte de réorientation et de reprise en main de ces sommes et de leur orientation.

Même si, en pratique, cela a voulu dire, en 1981-1982, dans les crédits du printemps, une réduction d'ailleurs légère des montants, même si l'accent a été placé sur davantage de services directs à la population, jusgu'à maintenant, on a l'impression que cette espèce de serrage de vis, à l'égard de l'appui administratif, pour dégager davantage d'argent à l'égard du public n'a pas trop mal réussi, mais, advenant - ce qui n'est pas encore le cas, cependant - que la demande pour du service au public soit plus forte, des augmentations pourraient venir au fonds de suppléance d'ici la fin de l'année. Il s'agit d'une différence dans le dosage.

Je me souviens qu'il y a trois ans une bonne partie de l'augmentation qui avait été votée ici pour des services de soutien aux organismes bénévoles s'est retrouvée finalement pas du tout là où on voulait que ce soit et davantage dans les services permanents de l'administration. C'est un peu le virage qui a été préparé. J'en conviens, la députée de L'Acadie a parfaitement raison, cela représente une réduction légère en termes de dollars courants, mais c'est aussi une réorientation que nous suivons d'assez près. Encore une fois, si, d'ici à la fin de l'année, on avait besoin d'un peu d'avantages pour assurer le soutien aux organismes bénévoles que nous croyons utiles, à ce moment-là, ils pourraient venir en fonds de suppléance.

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec le ministre des Finances. Il faut, non seulement dans ce domaine, mais dans les autres domaines aussi, s'assurer que l'argent donné se traduise par des services directs à la population. Maintenant, est-ce que le ministre des Finances est bien certain qu'on a en main les outils administratifs de telle sorte que la réduction qu'on a faite - je ne veux quand même pas la dramatiser, c'est de l'ordre de 3,2%, ce qui, d'un autre côté, n'impliquait pas non plus d'indexation alors...

M. Parizeau: C'est important.

Mme Lavoie-Roux: ... ça commence à être assez important - ce soit appliqué là où vous souhaitiez que cela s'applique? Est-ce que vous avez les instruments administratifs pour vraiment vous assurer de ceci?

M. Parizeau: Dans l'ensemble, on en a l'impression. Dans le particulier, pas nécessairement. À cet égard, il est évident que le budget de 1982-1983, là aussi, va porter une certaine réorientation. Je veux dire que quand il s'agit d'organismes bénévoles, c'est très difficile de généraliser. Le virage qu'il était utile de faire, je crois, a été pris. Il n'a pas été pris, disons, également et de façon aussi judicieuse partout. Mais comme disaient les vieux Grecs: Le mouvement se démontre en marchant. Il faut apprendre.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, tous les crédits supplémentaires qui ont été accordés, que ce soit dans les centres d'hébergement... On va commencer par les centres hospitaliers de courte durée. Est-ce que c'est simplement dû à une habitude presque annuelle et qui, je pense, n'est pas le propre du gouvernement actuel, de faire certains réajustements compte tenu des clientèles, s'il y a là-dedans des femmes qui doivent être affectées à du développement ou si c'est simplement pour finir l'année, comme on dit, compte tenu des clientèles qui ont été servies? Par exemple, vous avez dans les hôpitaux de courte durée 35 000 000 $. Là c'est décortiqué selon les services ou les programmes. Vous retrouvez, dans les soins prolongés, 7 230 000 $.

M. Parizeau: M. le Président, non, je pense que là il est assez facile de voir ce que l'on fait par ces crédits supplémentaires. D'abord, sur les 35 900 000 $ dont nous parlons, presque 14 000 000 $ sont dus à des ajustements dus eux-mêmes aux coûts des conventions collectives de travail pour 1980-1981 et pour les années antérieures. Je ne sais pas si j'ose commenter ce phénomène, mais une des raisons pour lesquelles nous devons auqmenter les évaluations du coût des conventions collectives, ce sont les congés de maternité.

Mme Lavoie-Roux: J'allais vous poser la question.

M. Parizeau: Tout à coup, dans les hôpitaux, le taux de natalité a augmenté presque au triple du taux que l'on retrouve dans la population. Cela s'explique, bien sûr, par l'âge des femmes que l'on retrouve employées par les hôpitaux. Cela s'explique de bien des façons. Je ne veux pas dire que le gouvernement soit mécontent de constater qu'effectivement, les clauses de congés de maternité coûtent plus cher que nous ne pensions qu'elles coûteraient et ont changé, sans doute temporairement, des habitudes du personnel féminin du secteur public. Remarquez que je suis étonné moi-même que, finalement, un peu plus d'argent pour les congés de maternité payés et des congés sans solde pour deux ans, mais avec l'assurance de l'emploi au bout, aient provoqué un nombre de naissances plus grand qu'on ne le pensait. Tant mieux!

Mme Lavoie-Roux: II faudrait que vous alliez voir vos statistiques démographiques à l'autre bout.

M. Parizeau: Oui, mais enfin, tant mieux! J'allais dire qu'au moment où nous avons négocié tout cela, je n'en attendais pas tant, mais, dans la mesure où les conventions collectives peuvent parfois avoir un impact sur la fertilité du peuple québécois, c'est au moins un avantage majeur des conventions collectives. Ce n'est pas le seul, mais je dois exprimer ma surprise à cet égard. Effectivement, cela a eu passablement plus d'impact. Je cesse de faire de l'ironie là-dessus. On sait très bien que cela ne se poursuivra pas indéfiniment dans l'avenir, mais, effectivement, l'impact sur le nombre de naissances dans le personnel hospitalier a été beaucoup plus élevé que celui que, dans comment dire? - nos rêves les plus exubérants, on aurait imaginé.

Mme Lavoie-Roux: Sauf que vous avez signé vos conventions, ces choses-là ont été terminées en 1980.

M. Parizeau: Au début de 1980.

Mme Lavoie-Roux: Au début de 1980 et là, ce sont des rajustements pour les conventions collectives 1980-1981. Cela a été rapide.

M. Parizeau: Eh bien, ça prend le temps que ça prend! Je dois dire que l'effet de surprise au gouvernement, la rapidité de l'impact nous a énormément surpris. La deuxième cause, pour 18 600 000 $... Ce dont nous venons de discuter, c'est 13 000 000 $, 14 000 000 $, à toutes fins utiles, et la seconde cause, c'est 18 600 000 $; il s'agit essentiellement des contributions...

Mme Lavoie-Roux: Ah! du RREGOP.

M. Parizeau: ... additionnelles au RREGOP.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. (20 h 30)

M. Parizeau: Là, c'est un ajustement mécanique. Je ne peux pas ne pas signaler à cet égard que cela m'embête toujours un peu de voir les fonds de retraite ajuster leur contribution à certains moments assez longtemps avant que les conventions collectives soient signées. Nous avons régulièrement, comme on le remarquera, un certain nombre de surprises de ce genre depuis quelques années.

Mme Lavoie-Roux: Alors, finalement, il n'y a pas vraiment de développement. Ce sont tout simplement des choses qui étaient prévues mais non calculées à ce moment-là.

M. Parizeau: Je n'ai pas fini. Il y a des choses comme...

Mme Lavoie-Roux: Bien, cela vous en fait déjà pas loin...

M. Parizeau: ... l'indexation du coût des combustibles.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais ce n'est pas beaucoup ça.

M. Parizeau: C'est peu de choses, c'est 200 000 $ mais c'est un ajustement mécanique. D'ailleurs, cela confirme ce que la députée de L'Acadie vient de le dire. Là, c'est un ajustement mécanique en fonction de ce qu'on avait dit que devrait être l'indexation du coût des combustibles. Le transport ambulancier, bien sûr, cela correspond aux ententes qui ont été négociées. Il y a eu une négociation avec les établissements privés pour un montant encore assez faible par rapport à tout le reste. Je pense que, comme programme nouveau dont on doit tenir compte ici, il y a le centre de coordination des urgences à Montréal. Cela, il y en a pour 900 000 $ mais c'est le résultat d'une politique très précise du ministère des Affaires sociales quant à la coordination des urgences dans Montréal. Cela correspond vraiment à une politique du ministère, ce n'est pas un ajustement mécanique, c'est quelque chose qui vaut la peine.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais justement, à ce sujet, demander au ministre s'il a évalué le coût de la mise sur pied de cette centrale de coordination pour les urgences. À

ce moment-ci, je vois qu'il y a 900 000 $ ou près de 1 000 000 $ d'impliqués. Est-ce qu'avant de bâtir la maison qui est - le ministre en conviendra - assez complexe on a estimé, au moins dans des limites assez précises, le coût de cette opération?

M. Parizeau: II semble que, sur une base annuelle, ce service pourrait coûter autour de 4 000 000 $ par année.

Mme Lavoie-Roux: Cela m'étonne un peu. Pourquoi ai-je posé la question au ministre? C'est que je me suis informée du coût de ce service à des gens qui ont la responsabilité de le coordonner et de le mettre sur pied et on ne pouvait même pas me fournir une estimation. Alors, cela m'a un peu inquiétée. Vous comprendrez, comme je le disais tout à l'heure, que c'est un édifice respectable et qu'on soit un peu... Je ne sais pas dans quelle mesure le chiffre de 4 000 000 $ qu'on vient de me donner est précis. Il ne semble pas que, de l'autre côté, on ait vraiment une idée très précise - du moins, on n'a pas voulu m'en donner - du coût de cette centrale ou de cette coordination des services d'urgence. Je pense que c'est important.

M. Parizeau: M. le Président, c'est la raison pour laquelle, comme j'ai reçu, de ma gauche et de ma droite, deux chiffres différents, j'ai plutôt signalé le chiffre dans le registre supérieur, étant d'un naturel conservateur.

Mme Lavoie-Roux: Dans ce domaine-là.

M. Parizeau: Conservateur dans le sens d'aller plutôt vers le plus haut que vers le plus bas.

Mme Lavoie-Roux: Pour ne pas avoir de déception à votre prochain budget.

M. Parizeau: Exactement.

Mme Lavoie-Roux: Du côté des soins prolongés, les 7 000 000 $, est-ce dû à l'alourdissement de la clientèle, à une plus grande clientèle?

M. Parizeau: M. le Président, nous avons, au titre des soins prolongés, une augmentation des dépenses prévues de 7 200 000 $. Enfin, ce n'est pas pour les mêmes raisons, ce n'est pas le taux de natalité qui affecte le résultat. Ce montant se décompose comme suit: des ajustements de convention collective de travail pour 2 200 000 $; les contributions additionnelles au RREGOP, 3 600 000 $; l'indexation du coût des combustibles, 110 000 $ et les négociations avec les établissements privés, 1 200 000 $.

En fait, l'essentiel de cette somme vient des causes que je viens d'indiquer. Il s'agit d'ajustements mécaniques...

Mme Lavoie-Roux: Un peu identiques.

M. Parizeau: ... liés dans ce cas-là essentiellement à l'augmentation du coût de la vie au-delà de ce qui avait été prévu.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre des Affaires sociales, lorsqu'il s'est adressé à l'Association des hôpitaux du Québec il y a environ trois semaines, si ma mémoire est bonne, avait annoncé qu'on allouerait 16 000 000 $ supplémentaires pour le respect des conventions collectives. Je pense que ça coïncide avec les 16 000 000 $ dans un cas et les 13 000 000 $, plus les 2 000 000 $, je pense qu'on arrive à peu près à 16 000 000 $. Est-ce que c'est de ces 16 000 000 $ que le ministre des Affaires sociales a parlé ou s'il s'agit d'un autre montant de 16 000 000 $ à venir?

M. Parizeau: M. le Président, ce sera un peu difficile de répondre, puisque je ne sais pas exactement à quelle déclaration de mon collègue on fait allusion. Effectivement, si on tient compte du coût des conventions collectives de travail de 1980-1981 et des années antérieures pour les services de courte durée dans les hôpitaux et pour les soins prolongés, cela fait effectivement 16 200 000 $.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Parizeau: Là, je ne peux pas dire, par rapport à la déclaration de mon collègue, si c'est une coïncidence ou si c'est bien de cela dont il voulait parler. Mais cela fait à peu près 16 200 000 $.

Mme Lavoie-Roux: Je peux poser la question au ministre d'une autre façon. N'y-a-t-il pas un autre montant de 16 000 000 $ dans ses poches dont il va disposer cette année?

M. Parizeau: À cette époque de l'année et dans les circonstances présentes, je puis assurer Mme la député de L'Acadie qu'il n'y a pas 16 000 000 $ qui se trouvent en l'air quelque part.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, je vais reposer ma question pour la nième fois au ministre des Finances; il va s'en souvenir. Vous m'aviez assurée, à maintes reprises, que c'était entendu que vous assumeriez les obligations découlant des conventions collectives. Je réalise qu'on ajoute un montant de 16 000 000 $ pour les arrérages de 1980-1981 ou même antérieurs à cela.

Mais l'Association des hôpitaux du Québec -c'est public - dans un document qu'elle a rendu public au mois d'octobre, si ma mémoire est bonne - oui, c'est le 9 - dit que les obligations découlant des conventions collectives sont de l'ordre de 90 000 000 $. Les 16 000 000 $ vont en combler une partie, mais est-ce qu'on peut m'expliquer comment il se fait qu'on ne puisse pas s'entendre sur l'évaluation des frais découlant de ces conventions collectives?

M. Parizeau: Pour une raison, M. le Président, que je pense pouvoir non pas seulement expliquer, mais réexpliquer. Nous avons eu déjà, Mme la députée de L'Acadie et moi-même, plusieurs échanges à ce sujet. Une convention collective, c'est une liste de prix ou de salaires, comme on voudra, ou de conditions de travail. Mais ce n'est pas, sauf dans le cas de la convention collective des enseignants, un jugement porté ou des clauses astreignantes sur le plan des effectifs. Dire que le gouvernement respectera les conventions collectives, cela ne veut, en aucun cas, dire que le gouvernement respectera des effectifs qui ne sont pas protégés par la convention collective. Ils le sont pour les enseignants. La seule convention collective que nous ayons, à ma connaissance, dans le secteur public ou parapublic, qui prévoit à la fois des taux, des conditions de rémunération et des effectifs, c'est la convention collective des enseignants qui dit que la tâche de travail sera, pour chaque enseignant, de tel type. Partout ailleurs, on dit qu'il y aura des taux de salaires payés, qu'il y aura des congés de maternité payés, qu'il y aura des primes d'éloignement payées, mais nulle part on ne dit à combien. J'admets, cependant, que dans le cas des établissements hospitaliers, on reconnaît, comment dire? des clauses de protection pour éviter ce qu'on pourrait appeler une surcharge de travail dans certains départements. Ce à quoi le gouvernement s'est engagé, à l'égard des hôpitaux, c'est à payer les taux, les avantages sociaux, et à respecter les clauses dont je viens de parler. Cela, il l'a fait. Il l'a tellement fait, M. le Président, que chaque fois que l'on me dit, à l'occasion des compressions budgétaires que tout le monde connaît: Vous ne respectez pas les conventions collectives, je réponds: II y a un mécanisme clair quand le gouvernement, comme tout employeur d'ailleurs, ne respecte pas les clauses de convention collective, c'est de faire des griefs. Là-dessus, et je pose la question, M. le Président, où sont-ils ces griefs? Si vraiment l'on considère que le gouvernement ne respecte pas sa signature, ça devrait se voir. Or, ça ne se voit pas. Je me souviens d'une époque, il y a trois ans, quatre ans, cinq ans, où il y avait deux fois, trois fois, quatre fois plus de griefs qu'il n'y en a à l'heure actuelle. (20 h 40)

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Parizeau: Oui. La clause de la convention collective de 1976 a créé bien plus de griefs sur le plan des applications, à cet égard, que celle que nous avons signée.

Mme Lavoie-Roux: Je ne mettrai pas cela en doute du tout et, même s'il y en avait eu dix fois plus, le résultat concret, c'est que, dans les centres hospitaliers, et je pense que c'est aussi la même chose dans d'autres types d'établissement, mais prenons les centres hospitaliers, parce qu'eux ont rendu leurs chiffres publics, vous n'avez pas de griefs parce qu'ils respectent, au niveau de l'établissement, les conventions collectives. Mais cela devient partie du déficit de l'institution, si vous, vous ne les reconnaissez pas comme des obliqations découlant des conventions collectives. Vous les respectez totalement, selon votre compréhension à vous et l'estimation que vous en faites, mais dans les établissements, on ne semble pas faire le même calcul. Si bien qu'en fin de compte, à toutes fins utiles, on restera, dans le cas présent - si les 90 000 000 $ sont bien évalués, on a enlevé 16 000 000 $ - avec 74 000 000 $ de déficit causé, selon l'interprétation des établissements, par un manque à gagner à cause des obligations découlant des conventions collectives.

Il semble y avoir une ambiguïté qui n'est pas entre le ministre des Finances et la députée de L'Acadie, mais entre le ministre des Finances et le ministère des Affaires sociales.

M. Parizeau: Mais je comprends au contraire que le Conseil du trésor et le ministère des Affaires sociales se sont entendus pour reconnaître qu'il y a, à cet égard, 36 000 000 $ qui doivent être reconnus. Cela ne rejoint pas le montant ...

Mme Lavoie-Roux: De 74 000 000 $.

M. Parizeau: Mais bien sûr. Je reconnais aussi que, dans n'importe quel établissement, on aime mieux avoir plus de personnel que moins, que les compressions sont toujours désagréables, mais enfin, il faut qu'elles se fassent et, dans ce sens, ça ne m'étonne pas qu'il y ait des débats de cet ordre.

Que le gouvernement, par le Conseil du trésor, par le ministère des Affaires sociales, reconnaisse 36 000 000 % et que les hôpitaux demandent 74 000 000 $, mais nous avons cela tous les jours. N'importe quel gouvernement au pouvoir sait très bien, quand il discute avec des réseaux, que la demande sera toujours plus forte que l'offre.

À un moment donné, il faut trancher. Il est évident qu'au moment où ces conventions collectives s'appliquent et où, d'autre part, des compressions budgétaires doivent s'appliquer aussi, on va arriver à des écarts comme ceux-là, mais je peux simplement assurer la députée de L'Acadie, à cet égard, que cela a été retourné, vérifié, décortiqué autant que faire se peut.

Je voudrais aller plus loin encore. La grande tentation dans nos réseaux, lorsqu'on ne s'entend pas tout à fait avec le gouvernement sur le sens des compressions budgétaires, c'est de se dire: Puisqu'on ne s'entend pas avec le gouvernement, il y a une solution, c'est d'accepter les crédits que l'Assemblée nationale nous vote et, pour ce sur quoi on ne s'entend pas, d'aller emprunter à la banque. C'est arrivé très souvent dans le passé, très très souvent dans un passé très très long et cela ne peut pas durer. Il faut maintenant faire en sorte que, dans les réseaux, et je ne parle pas ici seulement des Affaires sociales, d'ailleurs, je parle des réseaux dans leur ensemble, il y ait une adéquation beaucoup plus précise entre les emprunts bancaires, d'une part, et les montants votés par l'Assemblée nationale, d'autre part. Et cela vient. C'est long, c'est compliqué, parce que cela représente des changements d'habitudes, de coutumes qui ne sont pas faciles. Là, je dois dire que le ministère des Finances intervient beaucoup plus directement dans ces transactions. On ne peut pas imaginer un instant que l'Assemblée nationale vote des crédits qui n'auraient guère de signification parce qu'on pourrait trouver à la banque les montants additionnels. On transformerait notre rôle ici, de part et d'autre, en une sorte de farce où 900 établissements d'affaires sociales, 250 commissions scolaires diraient: Que l'Assemblée nationale nous vote les montants que nous voulons; nous pouvons, d'autre part, aller emprunter à la banque les montants que nous pensons qu'il nous manque.

Il y a un resserrement qui est en train de se produire depuis déjà plusieurs mois. Vous voyez à quel point on arrive à des choses aberrantes.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Parizeau: Des centaines et des centaines d'institutions s'adresseraient à huit banques et les huit banques viendraient voir le ministre des Finances en disant: Remboursez-nous.

Il y a un resserrement qui est en train de se faire à l'égard de ces marges de crédit qui sont générales dans le réseau et qui, évidemment, font mal parce que quand on a l'habitude d'aller chercher de l'argent par marge bancaire, au-delà des crédits votés par la Législature, et que, tout à coup, ça commence à se refermer, là, on recourt à l'opinion publique pour dire: Les conventions collectives, ça ne nous coûte pas 36 000 000 $, ça nous en coûte 74 000 000 $. On voudrait avoir de l'argent de plus. Tout cela relève de la nature humaine, c'est parfaitement compréhensible mais, néanmoins, ça doit être corrigé.

Mme Lavoie-Roux: Mais...

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, Mme la députée de L'Acadie, je dois vous interrompre pour souligner qu'il y a une entente qui détermine une période de 30 minutes pour l'étude des crédits des Affaires sociales.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le whip en chef du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Chevrette: ... on va permettre à Mme la députée de L'Acadie de poser sa question puisque le ministre du Loisir arrivera à l'instant. Cela permettrait son déplacement de la commission parlementaire des engagements financiers.

Le Président (M. Boucher): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je dois quitter, il faut que j'aille à une autre commission; mon collègue pourra continuer.

À tout événement, ce que je veux dire au ministre c'est que, présentement, les établissements fonctionnent par autorisation ou lettres d'emprunt aux banques. Je pense que le ministre est bien plus au courant que moi qu'il y aura à la fin de l'année un déficit global, pour le réseau hospitalier, de l'ordre de 400 000 000 $. Je pense que cela a été confirmé par le ministre des Affaires sociales lui-même. Ceci ne se résorbera pas. Vous avez beau serrer la vis, M. le ministre, les établissements continuent d'emprunter, les gens attendent leur paie, il faut qu'ils soient payés, etc.

Théoriquement, tout ce que vous me dites, cela peut être très bien mais qu'en est-il dans la pratique? Vous leur avez d'abord imposé un plan de redressement depuis cinq ans, vous leur avez imposé des coupures budgétaires, cette année, et ont-ils fait les bons efforts ou pas suffisamment? Ce n'est pas à moi de juger. Le Québec se retrouve avec un déficit d'au moins 400 000 000 $ à la fin de l'année; est-ce que ce sont des déficits que vous allez arrêter? Sans cela, le ballon va grossir.

Je n'aurai pas d'autres questions. J'aimerais cependant demander au ministre -je le lui avais demandé la dernière fois qu'on a parlé de crédits en commission plénière -

s'il y aurait possibilité d'avoir, pour l'année 1980-1981, une liste des établissements avec les déficits accumulés à ce jour. Vous ne les avez peut-être pas à ce jour, mais les plus récents.

M. Parizeau: Commençons par la fin. On me dit que, pour 1980-1981, cela ne pose pas de difficultés particulières; on pourra donc fournir à la députée de L'Acadie cette liste. Le problème que la députée de L'Acadie soulève est important: les compressions budgétaires. Nous sommes toujours un peu latins. On en a parlé longuement, on en a parlé beaucoup, et elles commencent maintenant, depuis quelque temps, à mordre effectivement. (20 h 50)

Ces compressions budgétaires devraient nous amener à la correction de la situation dont la députée de L'Acadie parlait. Il faut être cependant très conscient que c'est vraiment depuis cinq ou six semaines que les correctifs sont en train d'être mis en place concrètement. Je dois à cet égard rendre hommage à mon collègue des Affaires sociales qui, dans une situation extraordinairement difficile que tout le monde connaît, avec le genre de protestations qu'il peut y avoir un peu partout dans certains secteurs...

Mme Lavoie-Roux: Un grand nombre sont fondées, M. le ministre. Je m'excuse de vous interrompre.

M. Parizeau: Je reviendrai pendant 30 secondes là-dessus. Néanmoins, ces compressions sont en train de se faire. Elles se font avec ordre, avec une certaine sérénité sur le plan des techniques, mais elles doivent se faire, pour corriger la situation actuelle.

J'entendais la députée de L'Acadie parler de coupures ou de compressions qui provoquent des réactions dont un grand nombre sont fondées. Entendons-nous bien sur une chose. Il y a beaucoup d'hôpitaux au Québec - prenons le cas spécifique des hôpitaux - qui sont depuis des années très bien administrés à l'intérieur d'effectifs et de conditions générales d'administration qui sont tout à fait conformes aux normes que l'on connaît habituellement en Amérique du Nord. Il y en a aussi un certain nombre qui ne le sont pas. Il y a un certain nombre d'hôpitaux - et je pense ici en particulier aux villes de Montréal et de Québec - qui sont de très grande taille, qui, quand on les compare à des hôpitaux de même taille qui, ailleurs en Amérique du Nord, jouent le même rôle dans de grandes agglomérations urbaines, fonctionnent ici au Québec dans des conditions que, pudiquement, dans le langage technocratique, on appelle l'excédent de ressources. L'excédent de ressources, cela veut dire essentiellement une chose, c'est qu'ils fonctionnent avec bien plus de personnel qu'ils ne devraient en avoir.

Je ne sais plus exactement, parce que ce n'est pas mon champ d'action, où nous en sommes, mais je me souviens fort bien qu'il y a deux ans, par exemple, quatorze hôpitaux au Québec étaient responsables de 60% de tous les déficits de tous les hôpitaux au Québec. Or, il y en a au-delà de 250. C'est-à-dire qu'il faut établir des règles, des compressions qui établissent une distinction entre l'hôpital bien géré, l'hôpital qui l'est moins, celui qui utilise les ressources qu'il doit utiliser, celui qui a trop de ressources. C'est toute la tâche des compressions à l'heure actuelle. Je suis parfaitement d'accord avec la députée de L'Acadie que l'on ne peut pas laisser les emprunts bancaires monter comme ils ont monté depuis quelque temps, qu'il faut corriqer cela; il faut le corriger de façon sélective, il faut le corriger avec énergie et, à tous égards, c'est ce que mon collègue des Affaires sociales cherche à faire à l'heure actuelle.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, voulez-vous me permettre de finir?

Le Président (M. Desbiens): Mme

Lavoie-Roux.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier le ministre des Finances, mais je voudrais quand même reprendre juste un petit bout qu'il a dit. Il a dit: II y a des hôpitaux, parce qu'il a pris l'exemple des hôpitaux qui, au Québec, fonctionnent très bien et selon les normes raisonnables de l'ensemble de l'Amérique du Nord, enfin, ce qu'on considère des normes raisonnables. Mais je lui ferai remarquer que, même ces hôpitaux, les hôpitaux qu'on dit très "performants", dans le langage, dans le jargon, à qui on impose des coupures budgétaires vont se retrouver avec des déficits. Je voudrais juste demander au ministre de bien examiner dans tous les cas si les coupures qu'on impose à ces hôpitaux ou établissements bien "performants", n'ont pas un inconvénient sérieux sur la clientèle qu'on sert dans ces établissements de santé. Je vous remercie, M. le ministre.

M. Parizeau: M. le Président, je remercie la députée de L'Acadie de sa suggestion. Je pense qu'effectivement c'est comme ça que nous procédons, mais, dans la mesure où elle doit périodiquement nous rappeler à des examens de conscience, je lui en sais gré.

Le Président (M. Desbiens): Je remercie les participants. Les crédits du ministère des Affaires sociales sont adoptés. Nous allons

maintenant procéder à l'étude des crédits du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Scowen: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, sur une question de règlement.

M. Scowen: Quant à moi, M. le Président, il y avait entente qu'après l'étude des crédits des Finances, il y aurait l'étude des crédits de l'Industrie et du Commerce. Je pense que c'était entendu entre les deux partis que cela aurait lieu à 21 heures. On est ici et on aimerait adopter ou discuter ces crédits.

Le Président (M. Desbiens): M. le whip en chef du gouvernement, sur la question de règlement.

M. Chevrette: Effectivement, le député de Notre-Dame-de-Grâce a raison par rapport au premier horaire annoncé. Il a entièrement raison. On a eu deux problèmes. Un ministre devrait arriver vers 21 heures, c'est celui de l'Éducation, et puis le ministre Biron est en route vers Québec en automobile. Il devrait arriver ici vers 21 h 20 ou 21 h 25. On s'excuse, mais c'est ça.

M. Scowen: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): On pourrait peut-être ajouter que...

M. Chevrette: II n'a pas pu prendre l'avion.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Tout ce que je veux vous dire, M. le Président, c'est que l'entente qui a été faite entre les deux partis politiques, c'est que le ministre de l'Industrie et du Commerce serait ici à 21 heures.

M. Chevrette: C'est vrai.

M. Scowen: Je pense que cela a été conclu il y a seulement quelques heures, cette convention. On est ici. On veut discuter comme convenu les crédits de l'Industrie et du Commerce.

M. Chevrette: L'entente a eu lieu hier, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, mais dans certains ministères, les déplacements, vous savez comment cela peut arriver. Aujourd'hui, en plus de cela, vous savez qu'il y a présentement de la neige sur la route et que c'est plus lent que prévu en automobile.

Mais en guise de contestation, vous pourriez faire comme ce matin, retirer votre guestion.

M. Scowen: M. le Président, M. le Président:

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est une entente qui est intervenue entre les partis, mais qui ne lie aucunement les travaux de cette Assemblée. À la suite des modifications qui ont été apportées dans le processus...

M. Scowen: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): ...et à la durée des travaux précédents, je crois qu'on devrait passer immédiatement à l'étude des crédits du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. M. le ministre du Loisir, de la Chasse...

M. Scowen: M. le Président, s'il vous plaît! Question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, sur une question de règlement.

M. Scowen: Oui, je veux simplement vous dire, M le Président, que c'est évident que le gouvernement est en train de se moquer de nous. On avait convenu que les crédits de l'Industrie et du Commerce seraient étudiés à 21 heures et maintenant ils disent que le ministre est pris dans une voiture quelque part. Le ministre savait très bien avant qu'il y avait un accord, une entente entre les deux partis pour qu'il soit ici à 21 heures. Je demande...

M. Chevrette: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaîtl M. le whip en chef du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je le répète, quand bien même je vous dirais trois fois que l'entente n'a pas changé, cela ne changera rien. Ce que je veux vous dire, c'est qu'on a essayé depuis 19 h 30, au moment où on a... Pour le Dr Camille Laurin, ministre de l'Éducation, c'est l'avion qui n'a pas décollé à temps; pour le ministre de l'Industrie et du Commerce, on le sait depuis 19 h 30 et on a essayé de remodeler l'agenda. Je comprends que vous pouvez être insulté, mais j'ai travaillé très honnêtement avec le whip adjoint et on a essayé de réagencer l'horaire pour qu'au moins la soirée se déroule sans qu'il y ait de vide au sein de notre Assemblée. Si vous prenez

autant de temps à discuter du fait qu'on n'a pas été correct, vous allez devenir incorrect par rapport à ceux qui sont ici.

Loisir, Chasse et Pêche

Le Président (M. Desbiens): L'étude des crédits du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. M. le ministre, avez-vous des commentaires généraux?

M. Lessard: M. le Président, mes commentaires... J'aimerais peut-être y aller plutôt par questions, parce que... Je pourrais donner l'explication, en tout cas, concernant la gestion des ressources fauniques, les 285 000 $. Ces 285 000 $ se divisent en deux parties, soit d'abord une somme de 110 000 $ qui provient du fait que le ministère des Transports s'est départi de deux avions Beaver qui servaient en exclusivité au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour la protection de la faune. À ce moment-là, le ministère a dû avoir recours à l'entreprise privée sans pour autant augmenter nécessairement ses services. En conséquence, il a dû absorber un coût de remplacement de 100 000 $ que le ministère des Transports s'est déclaré prêt à lui virer, mais comme il ne peut y avoir de virement entre deux ministères, nous utilisons le budqet supplémentaire pour obtenir ces 110 000 $ et, en même temps, le ministère des Transports a gelé à l'intérieur de son budget la même somme, soit 110 000 $. (21 heures)

En ce qui concerne les 175 000 $, il s'agit de deux opérations, soit ce qu'on a appelé Bécassine 1 et Bécassine 2, c'est-à-dire que le ministère a la responsabilité de surveiller la pêche illégale du saumon. La péché au saumon est illégale lorsgue le saumon est pêche avec l'aide de filets maillants. Nous avions réussi à obtenir une entente avec Maria; malheureusement, nous n'avons pas réussi à obtenir une entente avec Restigouche. Ceci nous a amenés à des opérations qui ont exigé du temps supplémentaire pour 63 200 $; des frais de déplacement et de séjour pour 30 800 $; des locations de bateaux et moteurs pour 53 300 $; du matériel et autres frais pour 27 700 $. Voilà pour les 285 000 $. Si on a des questions sur ça, je suis prêt à y répondre.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président, je remercie le ministre de ses explications, mais je pense bien que vous conviendrez avec moi que, dans l'espace de 45 minutes, on n'aura pas le temps de regarder toute la ventilation des budgets qu'il vient de mentionner. On voudrait tout simplement s'attaquer à deux problèmes particuliers et je prendrai peut-être environ quinze minutes au début, même pas les quinze minutes en entier, pour questionner le ministre sur ce que j'appelle le problème des ZEC. Aussi, je céderai un certain temps à mon collègue de Laprairie concernant le côté des loisirs.

J'aimerais rappeler au ministre - et je pense que c'est important qu'on le fasse -une déclaration du 22 décembre 1977 qu'il reconnaîtra sans doute et il doit être heureux de ne pas avoir la paternité de cette déclaration. Le député de Saint-Maurice disait ceci: "Depuis 1883, des privilèges exclusifs de chasse et de pêche ont été accordés et maintenus à des groupes d'individus de notre société ou encore à des étrangers, privant le plus grand nombre du libre accès à tout territoire du Québec." M. le Président, il y a quelques caucus.

Le Président (M. Desbiens): S'il vous plaît! Je demanderais à tous les membres qui sont présents à l'assemblée de laisser les intervenants faire leur travail.

M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: C'était, à ce moment-là, le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Le député de Saint-Maurice disait: "Je vous annonce aujourd'hui la fin d'une situation anachronique et unique en Amérique du Nord. Cette décision répond aux objectifs que notre parti s'était fixés. Québécois, tel que promis, nous vous remettons ces nouveaux territoires." C'était l'opération ZEC décrétée le 22 décembre 1977, ici même, en cette Assemblée nationale, par une déclaration ministérielle.

Mon collègue de Portneuf avait, à ce moment-là, avec beaucoup d'acuité et avec beaucoup d'à-propos, mentionné que c'était une politique hâtive, évidemment. C'était une politique improvisée de toute part. D'ailleurs, depuis ce temps, je dois rappeler au ministre que les nombreux chroniqueurs de chasse et de pêche ont tout simplement répété, en des termes quasi semblables, ce que mon collègue de Portneuf et ce que moi-même aussi avions critiqué. J'avais fait une conférence de presse, j'avais justement dénoncé les ZEC dans leur application et leur façon de procéder, en mentionnant moi aussi que c'était une politique hâtive. Nous en sommes rendus - et je prendrai quelques minutes pour rafraîchir encore la mémoire du ministre - surtout depuis un an... N'allons pas trop loin en arrière parce que le cinquième anniversaire des ZEC va se fêter bientôt, le député de Saint-Maurice, ce grand fossoyeur de la faune québécoise, avait annoncé cette opération.

De nombreuses personnes se posent des questions. D'abord, il y a eu les ZEC en période de crise financière, tout le monde

sait que... Je lis tout simplement des titres de journaux pour démontrer jusgu'à quel point tout le monde fait l'unanimité là-dessus: Ultimatum au ministre Lessard concernant les déficits des ZEC, des ZAC. À la réunion pour mettre carte sur table sur les ZEC, entre autres dans la Mauricie, Jean-Paul Arsenault, un chroniqueur de chasse et pêche, a mentionné qu'il n'y avait pas un président qui était présent, mais c'est quand même assez révélateur. Les présidents des ZEC ne se sont même pas rendus aux discussions pour tâcher d'améliorer la situation parce qu'eux autres sentaient que c'était une situation qui était de plus en plus pourrie, intenable et qui menait absolument à rien. Il y a eu aussi un titre "Une pêche à l'argent pour l'autofinancement des ZEC". C'est une partie.

Dernièrement, M. André Croteau, de Québec Chasse et Pêche, parlait de retour aux clubs privés. Lorsque le ministre est entré en fonction dans ce ministère, il s'est rendu compte du marasme - évidemment, je ne lui demande pas de faire une déclaration à cet effet, je comprends qu'il doit protéger son collègue de Saint-Maurice - et jusqu'à quel point la situation était intenable et alarmante dans les ZEC du Québec. Il a alors essayé d'établir un soi-disant changement de politique.

Depuis ce temps, sans trop savoir de quel côté s'orienter, on regarde les coupures de presse et c'est révélateur. André Croteau disait: "Retour aux clubs privés", et il disait que l'autofinancement des ZEC était une dangereuse aberration. On annonçait des changements à prévoir: "Les ZEC édition 1982 ressembleraient aux ex-clubs privés." Là, on posait des questions. Il y avait même - le ministre me corrigera - dans le Journal de Montréal du 29 novembre 1981, un article de Guy Pagé où on disait: "Une carte à 200 $." Il y a quelque temps, ça devait être gratuit, c'était l'accessibilité en forêt, ça revenait aux Québécois, les Québécois étaient assez grands pour protéger leur faune. On s'est rendu compte qu'il y a plus ou moins de protection, les administrateurs de ZEC n'ont pas suffisamment d'argent pour protéger la faune, et c'est un va-et-vient.

Le ministre a eu des exemples, je lui en ai rapporté moi-même alors que j'occupais la fonction de critique. D'ailleurs, il en connaît plus que moi à ce sujet, il pourrait me révéler certaines choses, j'en suis certain. On se demande: Est-ce que ça va coûter 200 $, cette soi-disant opération ZEC ou si ce sera accessible à tous les Québécois, à bon prix, évidemment? Cela appartient aux Québécois, c'est une richesse naturelle; donc, il faut que le commun des mortels s'y rende assez facilement. Mais on en est rendu à se poser des questions à savoir si ça va coûter 200 $ ou 300 $. Encore: "Les ZEC, un retour aux clubs privés". Tout le monde est unanime. On se pose des questions à savoir, en 1982, que seront les ZEC.

Avant de céder la parole au ministre, j'aimerais citer un passage d'un article: "Le ministre Lucien Lessard désire un retour vers le bon sens en ce qui a trait aux ZEC. Improvisées lorsque Me Duhaime était titulaire du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche en 1978, ces zones d'exploitation contrôlée répondaient surtout à des promesses de tribune." Dans tout ce qui est dit, évidemment, il y a peut-être des choses qui sont exagérées. Pour montrer jusqu'à quel point c'est confus, personne ne sait exactement comment ça va se passer et de quelle façon ça fonctionne. Même les gens qui administrent ces ZEC n'assistent pas aux réunions et ne savent pas exactement comment ça va se dérouler.

Pour rassurer le public québécois, ces chasseurs, ces sportifs de la chasse et de la pêche, j'aimerais que le ministre brosse un tableau de ce que seront les ZEC le printemps prochain. Est-ce que ce seront des clubs privés, de petits ou de gros clubs privés? Est-ce que ce sera la même formule? Combien cela va-t-il coûter aux citoyens? Quels changements majeurs seront effectués? Tout cela pourra éclairer la lanterne de tout le monde.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Lessard: Merci. D'abord, M. le Président, je tiens à remercier...

M. Assad: Excusez-moi, M. le ministre.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Papineau.

M. Assad: Avant que le ministre ne brosse un tableau, est-ce que vous pourriez me donner juste deux minutes?

M. Lessard: Je brosserai un tableau plus large.

Le Président (M. Rancourt): D'accord, M. le député de Papineau.

M. Assad: Dans la région de l'Outaouais, j'ai eu l'occasion de rencontrer plusieurs associations de chasse et de pêche. Évidemment, sans exagérer, il n'y en avait pas un dans le groupe qui était en accord avec les ZEC, loin de là. Pourtant, vous dites que vous êtes toujours en consultation avec la population. Je me demande quelles démarches votre ministère a faites pour consulter ces différentes associations de chasse et de pêche. Je suis certain qu'elles ont des points et des lacunes à soulever, surtout dans les ZEC.

(21 h 10)

Je ne pense pas exagérer en disant que si vous aviez pris le temps de consulter les différentes associations de chasse et pêche... Cela me ferait plaisir et je pourrais vous donner les noms des gens qui font partie de ces associations. Ils ont une pléiade de plaintes portées contre les ZEC. D'année en année, ils me font des rapports disant que la situation empire et ils voient... Tantôt, vous avez fait allusion à l'autofinancement des ZEC, mais on voit les prix augmenter d'année en année. Vous avez préconisé, cette année, quoi, 15 $ pour une journée sur une ZEC, pour votre carte? De toute façon, on sait que cela augmente pour autofinancer les ZEC.

J'aimerais que le ministre nous dise que guelque chose va se passer et dans un avenir rapproché, car on entend toutes sortes d'histoires, à savoir que les ZEC sont une faillite monumentale. Ce n'est pas nécessaire que vous preniez notre parole, mais si vous prenez le temps de consulter les différentes associations, je pense qu'il y aura des surprises, qu'elles vous réservent des surprises. La parole est à vous, M. le ministre.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Lessard: M. le Président, je remercie les députés de l'Opposition d'avoir soulevé le problème des zones d'exploitation contrôlée. Je vais d'abord répondre concernant le fait que le député de Maskinongé...

Une voix: ...

M. Lessard: C'est cela. Un très beau poisson. Le député de Maskinongé parlait, en ce qui concerne la déclaration de mon prédécesseur en 1977, d'une politique hâtive concernant la libération de ce qu'on a appelé les clubs privés. Je suis quand même surpris de voir que le député de Maskinongé parle de politique hâtive. Je n'ai pas besoin de vous rappeler, M. le Président, que les Québécois et les Québécoises avaient voté, depuis près de 20 ans, soit depuis 1960, pour des partis politiques qui proposaient d'année en année l'abolition des clubs privés. J'ai déjà été libéral - on a toujours le droit de faire des péchés mortels, M. le Président, pour autant qu'on s'en confesse - en 1960 j'étais libéral et je participais...

M. Picotte: II peut bien avoir de la misère à s'en remonter.

M. Lessard: ... à la campagne électorale. J'étais, à l'âge de 20 ans, un orateur du Parti libéral. L'un des thèmes les plus souvent utilisés, c'était: Enfin, l'abolition des clubs privés. C'était donc en 1960. Il y a eu six ans de gouvernement libéral et les clubs privés n'ont pas disparu. De 1966 à 1970, quatre ans d'Union Nationale, après l'enqagement pris par l'Union Nationale, sous Gabriel Loubier en particulier, les clubs privés n'avaient pas encore disparu. Puis Mme Claire Kirkland-Casgrain s'était engagée, en 1970, à abolir, sur une période de quatre ans, tous les clubs privés et de remettre son territoire à la population du Québec. En 1976, pas encore d'abolition des clubs privés. Les clubs privés existaient encore. Le Parti québécois s'était engagé par contre à remettre à l'ensemble des citoyens des territoires qui étaient les plus accessibles. On sait, M. le Président, que 99% des territoires les plus accessibles au Québec étaient contrôlés par 26 000 membres de clubs privés.

M. Duhaime, mon prédécesseur, a non seulement eu le courage de réaliser une politique qu'aucun gouvernement antérieur n'avait réalisée, c'étaient des promesses électorales, des engagements électoraux: lui, il a eu le courage d'abolir les clubs privés, malgré les pressions intensives qui venaient de toutes parts. Il est certain qu'il y a toujours plus de gens qui se battent pour maintenir un système qui les avantage que de gens qui profitent du système qui est aboli, mais qui, en fait, ne sont pas prêts à se battre aussi fortement que ceux qui perdent des privilèges. Ceux qui reçoivent des privilèges sont moins encouragés à se battre que ceux qui en perdent.

C'est certain que M. Duhaime, malgré les pressions intenses qu'aucun qouvernement antérieur n'avait réussi à casser... C'était quand même fort, c'était à peu près comme la loi sur le zonage agricole, les spéculateurs s'opposaient à la loi sur le zonage agricole et le Parti québécois a réussi à casser cela. M. Duhaime a donc réussi à casser cela, et casser cela ça voulait dire quoi? Cela voulait dire - parce que nous, nous avons confiance aux Québécois - remettre aux citoyens québécois la gestion de leur territoire. Pas créer une immense structure étatigue contrôlée par des fonctionnaires et des bureaucrates? Non, pour dire aux citoyens du Québec: Vous étiez contre les clubs privés, vous vouliez avoir l'accessibilité du territoire? D'accord, on va vous remettre ce territoire-là.

C'est ainsi que se sont constituées 55 zones d'exploitation contrôlées constituées de citoyens qui se sont regroupés pour gérer ces territoires. D'ailleurs, M. le Président, ce n'était quand même pas les premières ZEC qui étaient constituées au Québec. Il y avait eu une exception en 1965, à Forestville, où j'étais enseignant. Il y avait ce qu'on appelait le Forestville Fishing Club - parce que les clubs privés ne parlaient pas français - qui appartenait à l'Anglo Canadian Pulp.

On s'est battu et on a réussi justement à libérer et à obtenir ce territoire. Après l'accès au pouvoir de l'Union Nationale, c'est Gabriel Loubier qui nous a cédé le territoire et qui nous a dit: Vous voulez avoir le territoire, vous allez le gérer, formez-vous en association de chasse et pêche. Et on s'est formé en association de chasse et pêche. En fait, la première ZEC au Québec a été constituée justement à Forestville et c'est un peu sur cette image que se sont formés par la suite des groupements pour gérer des territoires.

Maintenant, est-ce qu'on pouvait avoir la perfection dès le début? Si on avait tout le temps la perfection, on n'aurait plus besoin de gouvernement, ça irait bien. Je n'aurais plus besoin d'être à mon ministère. Non, je pense bien que l'important, d'abord c'est du courage. Deuxièmement, il fallait faire l'expérience d'une formule. Il y en a qui ont dit: Oui, mais il aurait fallu libérer des parties de territoire, des régions. Je sais bien que sur la Côte-Nord il n'y avait pas tellement de clubs privés, c'est-à-dire que la pression n'était pas aussi forte que, par exemple, dans la zone de Laurentides-Lanaudière où littéralement plus aucun citoyen ordinaire qui n'avait le droit d'avoir accès à des ressources. C'était tout couvert de clubs privés dans certaines régions du Québec.

Certains disent: Vous auriez dû libérer, comme Claire Kirkland-Casgrain l'avait fait, des parties de territoire et ensuite présenter un échéancier sur deux ans et sur trois ans. On ne pouvait pas faire ça. Il fallait justement abolir le principe, parce que figurez-vous que si on avait dit, par exemple, dans la région du Lac-Saint-Jean: Dans trois ans les clubs privés seront abolis, il n'y aurait plus eu beaucoup de poissons dans les lacs, les clubs privés en auraient profité.

Donc, quand on applique un principe comme ça, il faut le faire "at large". C'est certain que le premier système a été basé essentiellement d'abord sur l'accessibilité et l'universalité de la carte, qui permettait justement à quelqu'un qui était membre d'une ZEC d'avoir accès à l'ensemble des ZEC. À ma connaissance, et c'est cela justement la fonction du perfectionnement, c'est certain que c'est à la suite d'expériences qu'on peut corriger des systèmes, après aussi avoir écouté la population; ceci a amené justement cette accessibilité universelle. Quand je me battais contre les clubs privés, je ne me battais pas contre le principe que des citoyens gèrent un territoire; je me battais contre le fait que c'étaient des clubs privés fermés, c'est-à-dire qu'à l'exception de quelques amis, personne ne pouvait y entrer. C'est ce qu'il fallait casser.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Question de règlement, mais bien amicalement. Maintenant qu'il a brossé ce tableau et qu'il a démontré le courage du député de Saint-Maurice d'avoir enterré la faune québécoise, tout le monde le sait. Je voudrais demander au ministre, bien précisément, et pour renseigner la population, à partir du printemps qui s'en vient, quel est l'avenir des ZEC? On a droit à trois quart d'heure et il y a déjà douze minutes que le ministre parle et il n'a rien dit.

M. Lessard: Vous avez fait votre préambule, je vais faire le mien.

M. Picotte: Je lui dis cela bien amicalement.

M. Lessard: J'arrive à votre question.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Lessard: Je pense qu'il est important de montrer l'évolution pour savoir où on va en arriver prochainement. Je pense que c'est important.

M. Picotte: L'évolution, il y en a plein les journaux.

M. Lessard: Le problème de l'universalité de la carte. Par exemple, le fait que quelqu'un qui est membre d'une ZEC avait accès à l'ensemble des ZEC avait comme conséquence négative deux choses: d'abord, les gens achetaient leur carte de membre non pas d'une ZEC où ils devaient nécessairement aller, d'une ZEC dont ils voulaient profiter, ils achetaient leur carte de membre de n'importe quelle ZEC parce qu'ils avaient accès à toutes les ZEC, de telle façon qu'il y a eu des zones d'exploitation contrôlées particulièrement autour du secteur de Montréal, à cause du Salon du camping et d'activités assez importantes au début du printemps, qui faisaient une pression intensive auprès des individus et vendaient massivement des cartes de membre. Comme, pour ces gens-là, qu'ils achètent leur carte de membre d'une ZEC ou de l'autre, ça n'avait aucune conséquence, vous aviez donc un certain nombre de ZEC qui, à cause d'une commercialisation, si vous voulez, vendaient énormément de cartes de membre alors que d'autres ZEC, qui étaient dans les régions périphériques, ne pouvaient pas faire la même chose. C'était donc une des premières conséquences négatives.

Une deuxième conséquence négative est que les ZEC, bien souvent, sans avoir obtenu

les ressources, à cause du fait que les gens achetaient une carte de membre de cette ZEC, devaient recevoir gratuitement les membres de toutes les autres ZEC, de telle façon qu'il n'y avait pas véritablement de sentiment d'appartenance aux ZEC, d'appartenance au territoire. Sans le sentiment d'appartenance, vous ne pouvez pas véritablement amener des qens à s'intéresser à leur territoire. C'est donc pourquoi, l'an dernier, j'ai corrigé un certain nombre de choses. J'ai indiqué que, maintenant, l'universalité était un peu diminuée, dans le sens suivant: lorsque vous preniez une carte d'une ZEC pour aller dans une autre ZEC, vous deviez payer un droit de passage et un tarif journalier, pour permettre que ces gens soient intéressés à acheter leur carte de membre de la ZEC où ils vont aller pêcher. Mais il y avait toujours la carte de membre obligatoire, c'est-à-dire que quelqu'un, par exemple, qui voulait aller pêcher une fois dans l'année, le 24 juin ou le 1er juillet, je ne sais pas, était obligé de payer sa carte de membre de 50 $, ce qui me paraissait quand même assez élevé.

Qu'est-ce qui va arriver l'an prochain? À la suite de cette évolution et de ces corrections de parcours, après avoir pensé qu'une des conséquences néqatives était aussi le fait que c'était le gouvernement qui fixait le prix de la carte de membre - cela a été confirmé par plusieurs chroniqueurs - nous avons constaté que les membres n'étaient pas intéressés à participer à leurs assemblées générales, parce qu'une des raisons qui amènent les membres à participer aux assemblées générales est bien souvent la fixation du prix de la carte de membre. Comme c'était fixé par le gouvernement, vous aviez à peu près 10% des membres qui participaient aux assemblées générales des ZEC.

J'ai déposé et soumis aux ZEC un document de discussion. Il sera discuté dans l'ensemble des régions, région par région, et on va me faire un certain nombre de commentaires. Par la suite, à partir de ces commentaires, je vais préparer un cahier qui va être discuté lors d'un congrès des ZEC qui aura lieu au cours du mois de janvier ou février. La proposition que je leur fais, c'est d'abord l'autofinancement en ce qui concerne l'administration. En ce qui concerne les immobilisations sur l'aménagement, ça on peut l'envisager pour autant que c'est de l'aménagement de la faune. Le gouvernement est prêt encore à participer sur l'aménagement de la faune. En ce qui concerne le fonctionnement, j'indique aux ZEC, tel que l'avait d'ailleurs indiqué mon prédécesseur, que les trois années - et même c'est quatre ans parce que j'ai prolongé d'une année - les quatre années où le gouvernement finançait l'administration comme expérience sont terminées.

Maintenant il appartient aux ZEC de s'autofinancer en ce qui concerne leur administration.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. Lessard: Un instant.

Le Président (M. Rancourt): Vous n'avez pas terminé?

M. Lessard: Non, je n'ai pas terminé. C'est en ce qui concerne leur administration. Maintenant, est-ce que ça veut dire que ça va coûter 200 $ ou 500 $ comme certains chroniqueurs le disent ou est-ce que, encore une fois, cela veut dire que c'est un retour aux clubs privés? Je vais commencer par la dernière question. Il y a certains chroniqueurs qui voudraient tellement prouver que M. Duhaime a eu tort et que dans le fond le système privé c'est encore le meilleur système qu'ils cherchent toujours un moyen pour utiliser les mêmes termes: Retour aux clubs privés. J'ai dit tout à l'heure que ce qui distinguait fondamentalement le club privé d'une ZEC, c'est que le club privé est un territoire réservé à quelques individus, à quelques privilégiés alors qu'une ZEC est un territoire qui est ouvert à tout le monde pour autant que vous payez votre carte. Donc, ce n'est pas un retour aux clubs privés, M. le Président, les ZEC continuent d'être des territoires publics.

Mais l'inquiétude qu'on a, c'est: Est-ce que ça va être des prix de 200 $ ou 500 $? M. le Président...

M. Polak: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Rancourt): Oui, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, vous savez qu'il y a trois autres députés qui veulent poser des questions. J'ai vraiment l'impression que le ministre est en train de manger le temps et que peut-être il a peur de se faire poser des questions par les trois députés qui sont ici. Je pense qu'on a assez parlé de ZEC et qu'on va parler d'autre chose qui intéresse la population.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne, je crois que M. le ministre répondait aux questions de M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Le problème, c'est que le ministre s'est mis à parler des ZEC et à répondre à mes questions uniquement depuis les deux dernières minutes des dix-sept où il a eu la parole. On va le laisser errer.

Continuez d'errer.

M. Lessard: Vous avez parlé combien de minutes, vous? Quinze?

M. Picotte: J'ai parlé neuf minutes pour savoir ce qu'on ne saura pas encore une fois.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Lessard: La question suivante...

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Lessard: Le député de Maskinongé a raison de poser la question. La question suivante, M. le Président, c'est: Est-ce que ça va coûter 200 $ ou 500 $? M. le Président, je sais de quoi je parle, je suis capable d'en parler parce que j'ai géré une ZEC; je sais ce que c'est. J'ai les deux pieds sur terre sur ça.

M. Polak: Nous autres aussi.

M. Lessard: M. le Président, c'est que moi j'ai géré une association de chasse et pêche pendant quelques années. L'important -et il faut avoir confiance en la population -c'est qu'il appartiendra aux membres, selon le projet que je leur ai soumis, de fixer eux-mêmes leurs tarifs. Admettons la possibilité qu'un conseil d'administration, avec des besoins d'investissement de tel montant, soumette aux membres un tarif de 200 $. Il est certain que les membres vont être présents à l'assemblée générale. C'est une des premières améliorations du système. Mais les membres ne sont pas obligés d'accepter 200 $. Les membres peuvent bien dire: On regrette, mais tel investissement on ne le fera pas ou tel investissement on va le faire de façon bénévole. Ce sont les membres qui vont fixer eux-mêmes leurs tarifs. Je présume que les membres ne sont pas intéressés à payer 150 $, 200 $. (21 h 30)

De plus, il y a un autre contrôle à l'intérieur du système que je propose. Si, par exemple, certaines ZEC en arrivaient à fixer des tarifs tellement élevés que les gens ne soient plus capables de payer leur carte de membre, à ce moment, il n'est pas sûr que la ZEC va pouvoir se maintenir, puisqu'il y a une norme que j'indique pour maintenir une ZEC, à savoir deux membres par kilomètre carré. Si donc les prix deviennent tellement astronomiques - et cela, j'ai confiance aux citoyens - de telle façon que les citoyens ne soient plus capables de prendre leur carte de membre, M. le Président, les membres ne prendront plus leur carte de membre. Alors, si cela devient une zone d'exploitation contrôlée où il n'y a pas deux membres par kilomètre carré, le gouvernement du Québec pourra enlever ce territoire et le rendre à nouveau public, mais je suis convaincu, en terminant, M. le Président, que de la façon, que j'ai vu fonctionner une association de chasse et de pêche, les membres vont se déterminer, se définir des tarifs qui correspondent à leurs besoins, qui correspondent, à un moment donné, à leur richesse individuelle ou collective. C'est dans ce sens M. le Président, que je dis que les ZEC vont véritablement devenir une coopérative de gestion des ressources alieutiques et cinégétiques, et cela pour le meilleur intérêt de l'ensemble des citoyens.

M. Picotte: M. le Président, je demande...

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie...

M. Picotte: Oui, mon collègue de Laprairie.

M. Saintonge: M. le ministre, lors de l'étude des crédits antérieurs au budget supplémentaire, j'avais posé une question concernant l'allocation ou le transfert de fonds qui a été effectué pour les fêtes nationales, ou un montant de 3 325 000 $, transfert de fonds effectué par le ministère au comité organisateur. Ce comité organisateur devait rendre compte de son administration en déposant un rapport, suivant ce que le ministre nous avait mentionné. Le contrôle était effectué a posteriori. En recevant le rapport, le ministre pouvait contrôler ce qui advenait. Le 11 juin, lors de l'étude des crédits, M. le ministre, on faisait allusion à certaines plaintes qui avaient pu être effectuées concernant des irrégularités qui auraient pu se commettre pour la région de Montréal au comité organisateur relativement aux fêtes nationales. Le ministre nous répondait à ce moment-là comme suit: "Ne me demandez pas de discuter du projet à venir, - c'est-à-dire des fêtes de 1981 - je ne le sais pas, je n'ai pas reçu de rapport."

Je ne voudrais pas dire que le ministre nous a menti, mais je dois quand même reconnaître que le ministre n'a peut-être pas donné toute la vérité à ce moment, parce qu'on était le 11 juin. Le ministre a quand même reconnu lors d'une commission parlementaire subséquente, en date du 30 octobre 1981, qu'il avait bien reçu un rapport du Comité organisateur de la fête nationale du Québec en date du 5 juin 1981, rapport qui faisait état d'un déficit anticipé de 506 988 $. Dans ce rapport préliminaire adressé au ministre avec un mémoire, il était pourtant fait allusion à ce qui suit: Le conseil d'administration de la fête nationale

se retrouve à cette date avec une décision fort délicate à prendre et il ressent le besoin de consulter le ministre responsable avant de la prendre. Effectivement, la question soulevée était le déficit anticipé que je viens de mentionner, de 506 988 $.

Ma question, M. le ministre, est la suivante: Comment expliquez-vous que vous refusiez d'intervenir le 11 juin devant un déficit anticipé de 506 988 $, alors que vous étiez au courant, en date du 5 ou du 6 juin au plus tard? Le 11 juin, vous nous mentionnez ne pas avoir reçu de rapport, ne rien avoir reçu qui vous permettait d'intervenir dans le dossier. Que je sache, à ce moment-là - je n'ai pas terminé, M. le ministre - vous avez quand même reconnu que vous étiez le ministre responsable devant l'Assemblée nationale de la dépense de ce montant de 3 325 000 $. Je constate aujourd'hui qu'au niveau du budget supplémentaire, au programme 4, élément 2, il y a quand même un montant de 175 000 $ de prévu et on fait allusion aux subventions au Comité organisateur de la fête nationale du Québec Inc.

M. Lessard: M. le Président, j'ai un peu envie de dire que je trouve l'intervention du député de Sainte-Anne tout à l'heure, un peu scandaleuse lorsqu'il m'a indiqué que...

M. Polak: M. le Président, question de règlement! Mes interventions ne sont jamais scandaleuses.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Lessard: ...lorsque, M. le Président...

M. Polak: J'aime bien que le ministre se serve d'un langage parlementaire. Je sais qu'il est capable de le faire de temps en temps.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaîtî M. le ministre.

M. Lessard: M. le Président, l'intervention du député de Sainte-Anne m'apparaissait un peu scandaleuse tout à l'heure lorsqu'il disait que cela faisait déjà assez longtemps qu'on parlait des zones d'exploitation contrôlée, alors que cela ne faisait que quelques minutes, soit à peu près 20 ou 25 minutes, qu'on parlait des zones d'exploitation contrôlée, alors que cela touche des centaines de milliers de chasseurs, de pêcheurs, de Québécois et de Québécoises. La question que le député de Laprairie vient de me poser est une question sur laquelle j'ai répondu à la commission des engagements financiers, cet après-midi, et à laquelle j'ai répondu à la commission des engagements financiers, il y a un mois, le 30 octobre. Cela fait plus, je pense, de 15 heures que je suis à la commission des engagements financiers pour répondre...

M. Saintonge: Question de règlement, M. le Président.

M. Lessard: ... aux questions des députés de l'Opposition.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le ministre!

M. Saintonge: M. le Président, ma question porte sur un point bien précis. Je lui demande un rapport concernant des déclarations faites dans un rapport qu'il avait en main et il a mentionné qu'il n'avait pas de rapport. Je ne lui demande pas ce qu'il nous a dit en commission parlementaire, je lui repose la question ici parce que je n'étais pas satisfait de la réponse.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Lessard: M. le Président, s'il n'était pas satisfait de la réponse, la population du Québec va probablement être satisfaite de la réponse et va très bien comprendre.

J'ai eu l'occasion à plusieurs reprises d'essayer d'expliquer ceci au député de Laprairie, mais il ne comprend pas. Il est exact qu'à l'occasion de la discussion des crédits, le 11 juin, les députés libéraux m'ont posé essentiellement deux questions. Ils m'ont d'abord posé la question suivante, avec une joie rayonnante dans les yeux...

M. Saintonge: Question de règlement, M. le Président.

M. Lessard: ... à savoir si les chars allégoriques étaient vendus.

Le Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Saintonge: Question de règlement. Je ne veux pas une réponse sur les chars. On a posé combien de questions? Vous dites: Deux. Il y en a eu plus de deux, on ne fait pas le détail. Donnez une réponse à la question que je vous ai posée.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

S'il vous plaît!

M. Chevrette: Vous n'imposerez tout de même pas les réponses.

M. Saintonge: Qui est dans...

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Picotte: Est-ce que c'est possible que le ministre réponde en cinq minutes aux questions?

M. Lessard: Mêlez-vous des ZEC et après ça, nous autres, on...

M. Picotte: On peut se mêler des scandales aussi, vous êtes remplis de scandales, pas seulement dans les ZEC.

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

M. Picotte: Vous n'êtes même pas capable de répondre comme du monde. Si vous ne pouvez pas répondre, donnez donc votre place à un autre.

M. Chevrette: M. le Président, j'aimerais ça que le ministre contribue à dégonfler leur troisième balloune.

M. Lessard: Alors, M. le Président, voici la question qui a été posée: Est-ce que les chars allégoriques sont vendus? On sait qu'à ce moment-là...

M. Saintonge: Non, M. le Président, question de règlement.

M. Lessard: Un instant! Je vais répondre sur son rapport. Je vais répondre parce qu'il m'accuse de ne pas avoir donné tous les faits à l'occasion de cette commission parlementaire. Je pense que j'ai le droit de répondre à ces questions. J'ai répondu aux questions qui m'ont été posées par les libéraux à ce moment-là. Donc, on me pose la question: Est-ce que les chars allégoriques... avec joie, parce que la rumeur circulait selon laquelle les chars allégoriques n'étaient pas vendus.

M. Saintonge: M. le Président, j'insiste, question de règlement.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Question de règlement.

M. Saintonge: M. le Président, j'ai posé une question relativement au fait qu'en commission parlementaire, au mois de juin, j'ai posé au ministre des questions précises sur un montant d'argent qui était dépensé, sur des allégations relativement à des faits précis, et le ministre nous a répondu qu'il n'avait pas de rapport en main là-dessus. Je ne parle pas des chars allégoriques, je parle d'un rapport financier. Ma question est la suivante: Est-ce que, oui ou non, vous aviez à ce moment-là le rapport du 5 juin en main et pourquoi vous n'avez-pas répondu comme il faut? Pourquoi avez-vous caché ce rapport?

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Lessard: M. le Président, lorsque j'ai répondu, avec joie d'ailleurs parce que j'étais bien heureux, en fait, ça faisait au moins une situation financière...

M. Saintonge: Ramenez-le à l'ordre!

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Lessard: ... - parce que lorsque j'ai reçu le rapport, le 5 juin, cela m'avait inquiété - moins difficile. Lorsque j'ai répondu que les chars allégoriques étaient vendus, on aurait dit que les libéraux étaient déçus parce qu'ils auraient voulu faire un scandale du fait que les chars allégoriques n'étaient pas vendus. Ils auraient véritablement voulu briser la fête nationale.

Deuxième question qu'ils m'ont posée, concernant le comité de Maisonneuve. J'ai reçu une pétition de 1500 personnes me demandant justement de mettre en tutelle le comité régional de Montréal, à quelques jours justement de la fête nationale. Je leur ai dit que mon...

M. Saintonge: Une enquête publique.

M. Lessard: ... chef de cabinet avait vérifié les faits, avait discuté avec les personnes concernées et que je n'avais aucune raison, à quelques jours des fêtes, de suspendre le Comité organisateur de la fête nationale. Le député disait tout à l'heure que je n'avais pas répondu à toutes leurs questions. Je regrette, si on m'avait posé une question, à savoir si j'avais reçu un rapport selon lequel on prévoit des déficits, etc., j'aurais pu répondre. Ce n'est quand même pas le ministre qui va préparer les questions à la place de l'Opposition. (21 h 40)

II est exact que, le 5 juin, j'ai reçu un rapport du Comité organisateur de la fête nationale, rapport qui m'avait fortement inquiété. Je dis bien qu'il s'agissait du 5 juin, soit 19 jours avant la fête nationale. Le 5 juin, dans ce rapport tel qu'on l'a lu, le Comité organisateur de la fête nationale me demandait une directive. On parle d'une décision politique; certainement, c'est une décision politique, je suis un homme politique. On me demandait si, étant donné le déficit prévu de 500 000 $, on devait mettre fin à un certain nombre d'activités. Je les ai rencontrés et j'ai discuté avec eux.

Il y avait essentiellement deux activités importantes sur lesquelles on pouvait envisager de faire des coupures. C'était d'abord la fête du vieux port, un budget estimé à 350 000 $ dont 175 000 $ étaient prévus comme revenus à la suite, justement,

de la diffusion qui devait être faite par Radio-Canada. Or, Radio-Canada était en grève; on ne pouvait pas le prévoir, je pense bien que ça ne se prévoit pas. Donc, ces 175 000 $ représentaient un manque de revenu et entraient dans le déficit dont on me parlait. On m'a dit: C'est un manque à gagner. On me disait: Si la grève de Radio-Canada est réglée, ça va être autant d'argent de moins.

J'ai dit, à ce moment-là: Quelles sont les sommes... Figurez-vous que nous sommes le 5 juin. La fête du vieux port avait lieu, je pense, le soir du 23, et 250 000 personnes y ont assisté; ça ne se prépare pas deux jours à l'avance. Je leur ai dit: Combien d'argent avez-vous d'engagé pour la fête du vieux port? On m'a dit: 270 000 $. Si Lucien Lessard, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche décide de mettre fin à cet immense spectacle, il est exact qu'il épargne 80 000 $, mais il est dans l'obligation de payer 270 000 $ pour des engagements de contrats.

Est-ce que les citoyens et les citoyennes du Québec auraient accepté que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en date du 5 juin, décide, alors qu'il y avait déjà 290 000 $ d'investis, de mettre fin à cette grande fête populaire? Si je l'avais fait, le scandale aurait été d'autant plus grand que non seulement la fête du vieux port n'aurait pas eu lieu, mais on aurait dépensé, pour une fête qui n'a pas eu lieu, 280 000 $. J'ai pris la décision de dire: En ce qui concerne la fête du vieux port, on continue, il reste 80 000 $ à investir, on va les investir pour permettre... Il y a une autre question qu'on m'a posée...

Le Président (M. Rancourt): Je m'excuse, le temps est écoulé pour l'étude du budget du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lessard: Ah! cela m'aurait permis de dégonfler une autre balloune, M. le Président.

Des voix: Ah oui!

Le Président (M. Rancourt): Je m'excuse, les 45 minutes allouées... Je m'excuse.

M. Picotte: Passons à autre chose... D'accord, M. le ministre. Bonsoir, bonne nuit, amusez-vous bien.

Une voix: Joyeux Noël.

Le Président (M. Rancourt): Nous allons passer à l'Éducation.

M. Picotte: M. le Président, est-ce que je pourrais vous souligner un point? Selon une entente avec le whip du gouvernement, étant donné que le ministre de l'Éducation est en retard, évidemment, il vient d'arriver...

M. Laurin: À 20 h 30, j'arrivais. Je vous ai entendu.

M. Picotte: Cela fait combien de temps?

M. Laurin: Une heure et demie. Cela fait longtemps en tout cas.

M. Picotte: Cela fait une heure et demie que vous êtes arrivé? Alors, le whip m'a conté des menteries.

Des voix: Ah! M. Laurin: Non.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Picotte: Entendez-vous! Il y a des menteurs ou vous étiez...

M. Laurin: Le temps m'a paru long sans vous voir.

M. Picotte: De toute façon, M. le Président, je voulais tout simplement vous souligner ceci.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Picotte: Notre horaire a été chambardé face à tous ces dérangements, et je dois dire que c'est bien malheureux. Mais comme on avait des choses de prévues de ce côté-ci et que notre représentant en matière d'industrie, de commerce et de tourisme a dû quitter, on annule tout simplement l'étude des crédits du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. On va passer immédiatement au ministère de l'Éducation. Remarquez bien que ce n'est pas de gaieté de coeur, M. le Président. C'est parce que l'horaire n'a pas été respecté.

M. Laurin: Moi, il faut que je m'en retourne ce soir.

Le Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais remercier le whip adjoint de l'Opposition pour sa collaboration.

Effectivement, nous avons appris que le représentant de l'Opposition devait partir pour des raisons majeures. À ce sujet, nous avons indiqué au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme que l'heure prévue

normalement pour ce ministère... On se reprendra. On en parlera à une autre occasion. Nous allons donc passer à l'Éducation et il nous restera, ensuite, le ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Picotte: On regardera cela au fur et à mesure.

M. Bertrand: II y a 60 minutes consacrées, M. le Président, au ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Rancourt): Avant de commencer, j'aimerais faire remarquer que, dans le brouhaha de la fin, on a omis de dire que les crédits du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ont été adoptés.

M. Bertrand: Adopté.

Éducation

Le Président (M. Rancourt): Adopté. M. le ministre de l'Éducation.

M. Laurin: Je pense que ce qui est inscrit au livre des crédits parle de soi et je préférerais répondre aux questions qui me seront adressées afin d'apporter tous les éclairages ou éclaircissements nécessaires.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. French: Je remercie le ministre d'être prêt à répondre aux questions. De ma part au moins, je voudrais lui souligner que je vais adopter une attitude très objective ce soir et que je vais poser des questions avec un minimum de détails préalables parce qu'on parle de dossiers qui ont déjà fait partie de l'actualité et sur lesquels on a échangé déjà. Cela dit, j'espère avoir des réponses aussi précises et aussi concrètes que possible.

Une voix: ...

M. French: Oui, comme d'habitude. Nous pouvons achever aussi efficacement que possible le programme.

Je voudrais commencer avec le cas du Collège Dawson, et je ne répéterai pas l'histoire. Le développement le plus récent, je crois, c'est que le ministre s'est prononcé en faveur du site de la maison mère de la Congrégation des soeurs de Notre-Dame et il a dit, à ce moment-là, qu'il ferait une recommandation en ce sens à ses collègues au Conseil du trésor. Ma question est, évidemment, la suivante: Quand peut-on attendre une décision dans le dossier et, s'il y a d'autres options en train d'être considérées dans le moment, quelles sont ces options?

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Laurin: En fait, la demande a été acheminée au Conseil du trésor, elle a été discutée au Conseil du trésor en ma présence. Comme il y avait une dépense considérable dans l'option que je recommande, qui est celle de la maison mère de la Congrégation Notre-Dame, le Conseil du trésor, étant donné la très haute dépense impliquée, a tenté de regarder d'autres options, par exemple une option qui consisterait à localiser le cégep dans un autre endroit, particulièrement au cégep André-Laurendeau, ce qui, théoriquement, coûterait beaucoup moins cher. Par contre, cela causerait des difficultés considérables du fait qu'il faudrait relocaliser dans la partie ouest de Montréal une clientèle qui, pour la majeure partie, réside dans le centre de Montréal et ça consisterait aussi à priver une population francophone de l'ouest de la ville de son cégep.

Évidemment, il y a pour moi à cette solution des objections d'ordre culturel aussi bien que pédagogique. Finalement, la décision qui a été prise au Conseil du trésor, qui a pour mission uniquement d'examiner l'aspect technique et l'aspect financier, c'est de transmettre les deux options au Conseil des ministres en demandant au Conseil des ministres en somme de choisir entre les deux options.

Cette demande sera étudiée incessamment, très bientôt, par le Conseil des ministres. Comme je l'ai déjà dit, je défendrai personnellement l'option de la maison mère de la Congrégation Notre-Dame et j'espère pouvoir réussir à convaincre mes collègues que c'est la meilleure option, malgré son coût élevé.

M. French: Je voudrais souligner au ministre dans ce dossier, afin de l'aider dans ses discussions, qu'il y a au moins deux aspects dans le dossier qui sont extrêmement importants à cause du choix en question. C'est d'abord le fait qu'un engagement d'une somme d'à peu près 25 000 000 $ a déjà été pris auprès du collège, donc une bonne proportion du coût afférent à la maison mère. Deuxièmement, le choix d'André-Laurendeau impliquerait à mon sens un transfert des coûts réels de l'État du Québec aux étudiants, les étudiants actuels d'André-Laurendeau ainsi que les étudiants actuels de Dawson. Cela peut avoir un certain attrait, un attrait superficiel, pour un ministre membre d'un quelconque Conseil du trésor, avec toutes les pressions qu'il subit; par contre, en réalité, on transfère le coût directement sur le dos des étudiants en question, ceux d'André-Laurendeau et ceux du collège Dawson.

Attendez-vous bientôt la décision, M. le

ministre? Je voudrais que vous me le disiez.

M. Laurin: Comme vous le savez, nous sommes actuellement dans une période sessionnelle extrêmement active. Le Conseil des ministres a été saisi de plusieurs projets de loi qui ont requis une attention immédiate ainsi que, bien souvent, des projets de réglementation ancillaire qu'appelle même l'adoption des projets de loi, ainsi que quelques autres problèmes à incidence politique qui ont requis son attention. Donc, jusqu'ici, le Conseil des ministres n'a pas été capable d'accorder toute son attention à ce problème, mais j'imagine qu'une fois la frénésie sessionnelle terminée ou quasi terminée, il sera possible au Conseil des ministres de s'attaquer à ce sujet avec toute l'attention qu'il mérite. Donc, ce devrait être bientôt.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. French: Deuxième dossier, le dossier de l'Université du Québec à Montréal. Sans grand préalable, nous connaissons tous la situation qui risque, une deuxième fois, d'entraîner des implications telles que le contingentement des admissions et d'autres choses avec lesquelles tous ceux qui s'y intéressent sont pas mal familiers. Je sais que des pourparlers intensifs ont lieu, je me demande si le ministre est en mesure de faire le point sur la situation actuelle.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Laurin: Oui, M. le Président, les officiers supérieurs du ministère de l'Éducation ont déjà eu un bon nombre de conversations aussi bien avec les autorités de l'Université du Québec, du siège social, qu'avec des représentants de l'UQAM. Nous avons demandé à l'Université du Québec et à l'UQAM de nous faire parvenir un plan d'équilibre et de redressement pour les trois prochaines années. Nous nous sommes entretenus avec elles des bases sur lesquelles ces plans devraient être présentés et on a déjà, à cette occasion, débrouillé passablement les données, les dimensions du problème. On nous a promis de nous présenter ces plans d'équilibre et de redressement au début de janvier. Dès que nous les aurons, nous les analyserons avec le plus de célérité possible. Je pense être en mesure de faire alors une proposition au siège social de l'Université du Québec et à l'UQAM, par voie d'implication, qui satisfera - je ne sais pas encore jusqu'à quel point -sûrement certaines des demandes de l'Université du Québec et qui permettra, je l'espère - je pourrais dire que j'en suis presque certain - d'éviter les mesures draconiennes dont il a été question au cours des dernières semaines.

Donc, je pense bien être en mesure d'assurer et l'Université du Québec et l'UQAM que leur mission sera préservée, que l'Université du Québec à Montréal pourra continuer son développement et satisfaire les besoins de sa clientèle.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. French: Quels seront les éléments de l'offre? Est-ce que cela implique un fonds de dépannage et un ajustement de la formule?

M. Laurin: Oui, cela impliquerait une allocation supplémentaire.

M. French: De combien?

M. Laurin: C'est le montant qu'il reste...

M. French: C'est ce qui est en cause.

M. Laurin: ... maintenant à déterminer, mais comme je l'ai déjà indiqué ici, en Chambre, d'après nos estimations provisoires, ce serait entre 2 000 000 $ et 3 000 000 $.

M. French: Donc, la somme dont il avait été question?

M. Laurin: Oui.

M. French: Maintenant, une autre université qui vient se greffer immédiatement au cas de l'UQAM, c'est évidemment l'Université Concordia dont la mission est sensiblement pareille, dont l'efficacité, en termes de coût par étudiant, est extrêmement bonne, la meilleure de toutes les institutions universitaires québécoises, dont les restrictions, au point de vue budgétaire, depuis quatre ou cinq ans, sont probablement plus serrées que dans n'importe quelle autre institution québécoise. Je pense qu'il faut demander au ministre s'il peut préciser, dans le contexte de son intérêt actuel et nécessaire à l'UQAM, ce qu'il prévoit faire pour Concordia, qui se trouve à quelques semaines de la même situation. Est-ce qu'on doit prendre au sérieux le plan de redressement et la nécessité de résorption des déficits, etc.?

M. Laurin: M. le Président, je reconnais la bonne gestion effectuée à l'Université Concordia. Je reconnais aussi la nature ainsi que l'intensité des problèmes qui affectent cette université. Je signale cependant que la base de calcul des subventions versées à l'Université Concordia a été élevée deux fois

au cours de l'année dernière. Je reconnais cependant que, malgré cette hausse successive, les problèmes n'ont pas encore été résolus à la satisfaction de l'université. Nous suivons, pour cette université, le même processus. Nous avons demandé également un plan d'équilibre, un plan de redressement qui doit nous être présenté à peu près à la même époque. Nous avons déjà une bonne idée des problèmes qui confrontent, des problèmes de croissance qui confrontent cette université. Selon la nature des conclusions que nous révélera l'analyse, s'il est nécessaire là aussi de verser une subvention d'appoint, nous le ferons. Pour la même raison d'ailleurs que pour l'UQAM, parce que nous reconnaissons le caractère différent de l'Université Concordia, au sens de l'accession aux études universitaires de clientèles qui normalement trouvent difficilement accès aux universités traditionnelles, en l'occurrence McGill.

Pour reconnaître cette caractéristique aussi bien que ce bénéfice à la communauté, nous sommes prêts, à la suite de notre analyse, à apporter, si nécessaire, l'aide appropriée.

M. French: Vous avez maintenant le plan de redressement. C'est à l'étude. Est-ce que c'est...

M. Laurin: Oui. M. French: Mais...

M. Laurin: Nous ne l'avons pas encore actuellement, mais très prochainement.

M. French: ...vous l'attendez?

M. Laurin: Oui, très prochainement.

M. French: D'accord.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. French: Est-ce que vous prévoyez entrer en négociation avec l'Université Concordia dans un avenir plus ou moins proche?

M. Laurin: Oui, comme je vous le soulignais tout à l'heure, M. le Président, les négociations devant conduire à des résultats commenceront dès que nous aurons en main les plans et que nous les aurons analysés. Les décisions ne tarderont pas, elles seront prises dans les plus brefs délais par la suite.

M. French: M. le Président, pour le bénéfice du ministre - je pense qu'il le sait, mais cela vaut peut-être la peine de le souligner - il y a un problème de moral extrêmement sérieux à Concordia, entre autres, par rapport à l'UQAM. Le personnel enseignant et non enseignant n'aura pas les mêmes hausses de salaire que les universités syndiquées et cela, combiné avec le fait qu'il y a de la frustration quant à la situation et une certaine incertitude - il faut le dire -face au ministère et au ministre. Je pense que c'est important que le ministre fasse les démarches nécessaires pour encourager ce qui a été jusqu'ici - je pense qu'il est d'accord avec moi - un effort de gestion qui est pas mal extraordinaire.

M. Laurin: C'est une dimension qui nous est connue et nous en tiendrons compte.

M. French: Le dossier de l'Université de Sherbrooke, un autre dossier qui n'est pas pareil aux deux autres, une université régionale qui ne fait pas partie du réseau de l'UQ, qui porte un fardeau de dettes extrêmement élevé. Encore une fois, un problème d'incertitude, peut-être pour d'autres raisons. Je ne voudrais pas développer ma question plus que cela, mais demander au ministre quelles sont ses pensées sur cette institution qui est peut-être la troisième des trois vulnérables dans le moment. (22 heures)

M. Laurin: Je dirais, M. le Président, qu'elle est la plus vulnérable de toutes...

M. French: D'accord.

M. Laurin: ...même si les journaux en parlent moins.

M. French: Oui.

M. Laurin: Elle est la plus vulnérable, parce qu'elle a été créée avant les universités, entre guillemets, "populaires" dont nous venons de parler. Elle a été conçue sur le modèle des universités traditionnelles. C'est une université qui compte des facultés ou des départements qui ressemblent à ceux des universités traditionnelles. Je pense, par exemple, à la faculté de médecine. C'est une université qui s'est bâtie à une époque où nous vivions en période d'affluence, de croissance rapide des revenus, une université qui a dispersé ses campus sur un espace assez grand et dont, par exemple, les normes actuellement, en ce qui concerne les locaux, dépassent de 40% les normes actuellement reconnues au ministère.

Pour toutes ces raisons, dispersion des pavillons, création de facultés ou de départements dont le coût de fonctionnement est très élevé, dettes considérables qui exigent donc des paiements d'intérêt très élevés dans la période que nous connaissons, pourcentage d'étudiants inférieur par département ou faculté à celui que

connaissent les universités des grands centres urbains, pour toutes ces raisons le coût per capita est donc plus élevé à Sherbrooke, actuellement, que partout ailleurs au Québec, ce qui amène le gouvernement, le ministère de l'Éducation à lui verser des subventions per capita sensiblement plus élevées que celles qu'il verse aux autres universités.

Pourtant, cette université doit continuer son développement, doit continuer à dispenser un enseignement de qualité. C'est là sa responsabilité. Elle connaît donc des difficultés plus considérables que les autres. Nous lui avons quand même demandé à elle aussi un plan d'équilibre et un plan de redressement, tout en reconnaissant à l'avance que la tâche sera plus ardue qu'ailleurs. Mais, nous voulions cependant que l'université ne se dérobât point à son devoir d'ajustement aux conditions actuelles d'austérité et qu'elle fît un effort plus marqué de rigueur et d'examen rationnel de toutes ses opérations. C'est ce qu'elle est en train de faire actuellement.

L'effort est plus considérable qu'ailleurs, je viens de le dire. Le gouvernement, le ministère sont prêts à reconnaître cette situation particulière.

Il n'est pas question, évidemment, de faire disparaître l'Université de Sherbrooke en raison de ses difficultés. Il n'est pas question non plus de priver la région, une des plus importantes au Québec, des ressources dont elle a besoin en matière d'enseignement supérieur. Mais il reste cependant qu'il faut faire l'impossible non pas pour uniformiser ou standardiser, mais pour se rapprocher des normes de financement, des normes budgétaires établies pour le financement des universités.

Je sais que l'université, actuellement, accomplit cet effort avec courage et avec ingéniosité et avec efficience aussi. Nous sommes en discussion avec l'Université de Sherbrooke. Nous aurons bientôt en main, là aussi, ce plan d'équilibre et de redressement. Je soupçonne et je reconnais d'ailleurs que le ministère devra faire un effort marqué pour maintenir la qualité des services dispensés par tous les départements et facultés. Mais si l'université fait de son côté son possible et fait tous les efforts nécessaires, le ministère fera les siens également.

Le Président (M. Rancourt): Une autre question, M. le député de Westmount?

M. French: Deux autres questions.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. French: Dans le contexte de Sherbrooke, est-ce qu'on parle d'une chirurgie sur l'institution?

M. Laurin: Non.

M. French: On ne parle pas de fermeture de programmes majeurs?

M. Laurin: II faut s'entendre sur ce qu'on peut appeler programme majeur. On peut qualifier, nuancer. Je ne voudrais pas m'engager ce soir à définir ce qu'est un programme majeur. Si j'ai bien compris la question du député, il s'inquiétait de la disparition éventuelle d'un gros morceau de l'université, comme un département, une faculté. En ce sens, non, il n'est pas question de fermeture de département ou de faculté.

M. French: M. le Président, le ministre achève une série de quatre ateliers de consultation universitaire qui ont été vivement discutés, qui ont amené certaines déceptions quant à certains participants, y compris peut-être le ministre. Je voudrais encore une fois, dans un esprit extrêmement objectif, avec tout ce que je suis capable de montrer en ce sens, lui poser la question suivante. Il l'a souvent mentionné, c'était son pari qu'il n'y aurait pas de loi nécessaire sur les universités et que ce serait possible de faire la consultation avec les intervenants du milieu. Il y a eu une certaine hésitation quant à certains participants. Est-ce qu'il a changé d'avis sur une loi sur les universités? Quelle est sa réaction au déroulement des séances des ateliers de consultation jusqu'ici?

M. Laurin: Les ateliers ne sont pas terminés, donc je ne peux pas encore avoir changé d'avis sur l'opinion que j'émettais au début des ateliers. Je ne pense pas que le retrait des professeurs du dernier atelier soit suffisant pour m'amener à changer d'avis. D'autant plus que les professeurs ont quand même fait entendre une voix très forte, et lors du premier atelier et lors du deuxième atelier, avant de se retirer. Donc, malgré ce retrait, je me crois bien informé des vues et opinions des associations de professeurs d'universités. Je suis, bien sûr, resté sur mon appétit. J'aurais préféré en entendre davantage de la part des associations de professeurs, surtout sur les aménagements internes, par exemple, sur la modulation des tâches entre enseignement et recherche, sur les relations entre départements et autorités, soit académiques ou administratives, de l'université. Je pense que nous aurions tous, public et gouvernement, bénéficié de ces échanges. Même s'ils n'ont pas eu lieu, même s'ils n'ont pas été aussi fouillés que je l'aurais souhaité, je ne crois pas, cependant, qu'il faille en conclure qu'une loi sur les universités serait nécessaire. Je tenterai par d'autres moyens d'obtenir les renseignements ou les avis ou opinions que j'aurais aimé avoir à l'occasion des ateliers. D'autant plus

que les associations de professeurs ont elles-mêmes annoncé qu'elles tiendraient leurs propres ateliers. Je ne sais pas si elles m'inviteront, mais je suis sûr en tout cas que ces ateliers seront productifs, que ces sujets, ces thèmes sur lesquels j'aurais aimé échanger avec eux seront à l'ordre du jour, qu'ils donneront lieu, sûrement, à une pléthore d'avis, opinions, recommandations. Je sais aussi que je peux compter... (22 h 10)

J'ai déjà en ma possession, d'ailleurs, les résultats de certains colloques qui ont été tenus à l'intérieur des universités sur la mission éducative, l'enseignement, la recherche, le rayonnement interne et externe des professeurs. Donc, même si les renseignements, les avis obtenus sont insuffisants, je dois dire malgré tout que notre connaissance du problème a augmenté, car nous avons maintenant plus de renseignements que nous n'en avions il y a quelques mois et, avec les autres sources de renseignements dont je viens de parler, j'espère être en mesure, peu de temps après le début de 1982, de proposer aux universités une nouvelle formule de financement et de nouveaux modes d'aménagement interne et de concertation à l'intérieur du réseau.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le Président, j'ai appris cette semaine qu'il se faisait dans certaines écoles du Québec la distribution d'un document intitulé: Jeunes, égaux et responsables. Je crois que c'est un document de la Commission des droits de la personne. Il n'y a pas très longtemps, on a vu une autre distribution dans les écoles. C'était le document Minute, Ottawa! On sait que les commissions scolaires ont le pouvoir décisionnel d'autoriser ou de ne pas autoriser la distribution de documents aux élèves dans leurs écoles. Pourtant, il semble que certains ministères contournent les commissions scolaires en envoyant de la documentation directement aux professeurs. Ma question est la suivante: Y a-t-il, au ministère de l'Éducation, une espèce de tamisage des documents qui sont envoyés aux écoles par les différents ministères?

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Laurin: En réalité, aucun document ne devrait être distribué dans les écoles sans l'autorisation du ministre de l'Éducation. Dans le cas que vous avez soulevé au tout début, cette autorisation n'a pas été obtenue et, si elle avait été demandée, évidemment, le document aurait été analysé. De toute façon, cette autorisation n'a pas été obtenue et j'ai déploré moi-même qu'elle ne fût pas obtenue, qu'on n'ait pas cherché à l'obtenir. Cet incident a fait l'objet de conversations entre mon collègue des Affaires intergouvernementales et moi-même et il a concouru dans mon jugement qu'une autorisation aurait dû être obtenue. On apprend par expérience et je pense que cet incident nous permettra d'élaborer de meilleures méthodes de consultation entre les divers ministères et le ministère de l'Éducation, afin de prévenir toute répétition de ce genre.

M. Cusano: Si je comprends bien...

M. Laurin: Quant au deuxième document, là, la situation est bien différente. Comme vous l'avez dit, c'est un document préparé conjointement par la Commission des droits de la personne et le ministère de l'Éducation, mais dont l'origine revient à la Commission des droits de la personne. Je suis très heureux, en tant que ministre, d'avoir participé à cette campagne de diffusion et d'implantation car je crois que la question des droits de la personne doit s'appliquer à toutes les catégories de citoyens, aux étudiants y compris.

M. Cusano: Ce n'est pas le contenu du document que je mets en question présentement.

M. Laurin: Pour compléter ma réponse, je sais que certaines commissions scolaires n'ont pas accepté de participer à la diffusion de ces documents et nous avons respecté leurs opinions. Celles qui se sont refusées à participer à cette campagne de diffusion ont droit à leurs opinions, malgré que je ne les partage pas, mais leurs décisions ont été respectées. Par exemple, à Montréal, cette campagne n'a lieu que dans les commissions scolaires autres que celle qui a refusé sa permission.

M. Cusano: Alors, vous pouvez nous assurer qu'il n'y aura pas de documents envoyés directement aux professeurs.

M. Laurin: Non.

M. Cusano: Vous ne pouvez pas nous l'assurer?

M. Laurin: Non, non. Je dis: II n'y en aura pas.

M. Cusano: II n'y en aura pas. Avez-vous l'intention de...

M. Laurin: Dans l'avenir, on devra se conformer aux règles actuelles.

M. Cusano: Les règles actuelles. Existe-t-il une politique chez vous sur ce qui entre

dans une école, sur ce qui est envoyé dans une école?

M. Laurin: Comme je le disais, les règles actuelles qui ont été élaborées à la suite d'expériences et de discussions seront mieux suivies à l'avenir, seront respectées d'une façon plus intégrale. Cette politique est très simple, dans le fond, c'est qu'aucun document ne doit circuler à l'intérieur des écoles sans l'autorisation préalable du ministère de l'Éducation avec, bien sûr, le consentement des commissions scolaires.

M. Cusano: Sur les écoles privées, M. le Président, la semaine dernière j'ai reçu les représentations de ce qu'on appelle le groupe des onze, les écoles spécialisées en enfance inadaptée. Ils ont mentionné qu'au moment où ils me rencontraient ils n'avaient pas encore reçu les subventions qui leur sont dues par votre ministère. Est-ce le cas? Si c'est le cas, quand vont-ils recevoir leurs subventions?

M. Laurin: Incessamment, M. le Président, parce qu'il y a quelques jours à peine, trois jours, je crois, le Conseil du trésor s'est rendu à ma demande et versera une somme additionnelle de 1 200 000 $ à ces onze institutions privées pour leur permettre de subvenir normalement à l'accroissement de leurs dépenses de fonctionnement conformément à la promesse que j'avais faite lors de la discussion des crédits en mai dernier.

M. Cusano: Ce qui prouve qu'ils avaient raison.

M. Laurin: Ce qui prouve que le ministre a pris au sérieux la promesse qu'il leur avait faite et les demandes qu'elles avaient faites au ministre.

M. Cusano: J'espère que vous allez être aussi sérieux dans l'éducation des adultes, M. le ministre. Depuis les coupures budgétaires à l'éducation des adultes, on apprend par des moyens un peu indirects qu'il y aura une baisse d'usagers d'environ 50% comparativement à l'année dernière. Y a-t-il eu un comité de sous-ministres ou de personnes mandatées par vous pour faire le tour de la province pour faire ces constatations depuis le mois de septembre?

M. Laurin: Nous le faisons constamment. Nous sommes en contacts constants et étroits avec tous les organismes, soit commissions scolaires, collèges ou universités, qui dispensent des cours en éducation des adultes, en éducation populaire ou en éducation permanente. Nous nous tenons donc constamment informés sur la situation. Je ne suis pas en mesure à l'heure actuelle de confirmer la statistique de 50% dont vous faites état parce que les résultats ne sont pas encore tous connus. Ce que je sais, cependant, c'est que les compressions que nous avons connues avec les correctifs administratifs que nous avons proposés aux commissions scolaires, aux collèges et aux universités ont amené des modifications assez importantes à plusieurs égards, soit dans le nombre de cours offerts, soit dans la nature des options qui sont offertes, soit dans la localisation ou relocalisation où ces cours sont dispensés, soit dans la répartition des frais de gestion par rapport aux frais proprement "académiques". Ce réaménagement qui est en train de s'effectuer a produit des résultats qui nous parviennent d'une façon régulière et que nous tentons d'analyser au fur et à mesure qu'ils nous parviennent, mais nous ne sommes pas encore en mesure de tirer des conclusions finales. Par ailleurs, je puis vous dire que nous attendons avec intérêt et impatience les résultats de la commission d'étude sur l'éducation des adultes. Nous attendons ces recommandations pour pouvoir enfin élaborer une politique cohérente, globale, sur l'éducation des adultes. À ce moment, il sera justifié, je crois, de faire les efforts financiers qu'appelle la réalisation d'une telle politique.

M. Cusano: M. le ministre, ma question - je comprends qu'il y a une commission qui fait une étude - était plus précise. Est-il vrai qu'il y a des gens de votre ministère qui ont été mandatés pour faire l'état de la situation de l'éducation des adultes à travers la province?

M. Laurin: Effectivement, le sous-ministre adjoint responsable des réseaux, M. André Beaudoin, a été directement mandaté pour suivre de très près la situation, effectuer les analyses nécessaires à la suite soit d'informations qu'il reçoit ou de rencontres qu'il a avec divers groupes et de me faire parvenir le résultat de ces analyses au fur et à mesure qu'elles se font.

M. Cusano: II va vous remettre un rapport. J'espère que ce rapport sera déposé, sinon disponible pour les membres de l'Opposition.

M. Laurin: Comme je viens de vous le dire, je suis personnellement très intéressé à l'évolution de la situation, puisque j'étais ministre d'État au Développement culturel lorsque cette commission d'étude a été constituée.

M. Cusano: Ce n'est pas de la commission d'étude que je parle, M. le Président, c'est du groupe qui a été mandaté pour aller voir la situation.

M. Laurin: Je le mentionne simplement pour vous signaler que je partage on ne peut plus votre intérêt pour l'éducation des adultes et l'éducation permanente. Je souhaite autant que vous l'accélération des efforts que notre gouvernement peut faire en ce domaine.

M. Cusano: Une dernière question, M. le Président. On a entendu parler d'un chiffre qui touche les 3743. C'est un chiffre qui se réfère au nombre de professeurs en disponibilité. Je suppose que ce chiffre est en date du 1er octobre, lorsque les statistiques nous parviennent. Pouvez-vous nous dire présentement combien il y a de professeurs en disponibilité dans l'ensemble du domaine de l'éducation?

M. Laurin: Selon les derniers chiffres qui ont été portés à mon attention il y a une dizaine de jours, le nombre total des enseignants en disponibilité s'élevait aux alentours de 2000, 2200 ou 2500. Je pense qu'on peut dire qu'une bonne partie, près de 60% de ces enseignants, sont au travail actuellement, 65%, surtout pour effectuer des travaux de suppléance ou un très grand nombre d'autres travaux qui bénéficient directement aux étudiants, qu'il s'agisse de l'implantation de programmes, qu'il s'agisse d'animation, qu'il s'agisse de commandites effectuées par le ministère de l'Éducation pour des projets d'innovation pédagogique, qu'il s'agisse d'encadrement, d'activités parascolaires. On peut donc dire que, malgré les mises en disponibilité, les enseignants continuent de dispenser des services, en grande majorité en tout cas, qui bénéficient directement aux étudiants.

M. Cusano: M. le Président, si on prend un chiffre comme 2200 professeurs en disponibilité et si on nous dit qu'environ 60% font de la suppléance, cela voudrait dire qu'il y aurait un minimum de 1200 absences par jour dans le système.

M. Laurin: 1000...

M. Cusano: 1200 absences par jour ou même plus. Si tous ces professeurs font de la suppléance, à 60%, cela veut dire...

M. Laurin: Évidemment...

M. Cusano: ... qu'il y a 1200 ou même 1300 absences par jour. C'est un taux un peu élevé.

M. Laurin: Je ne veux pas m'engager dans une discussion de l'absentéisme au niveau des écoles, mais je rappelle quand même qu'il y a près de 67 000 professeurs dans le réseau et je ne crois pas que ce pourcentage soit tellement exagéré, surtout si l'on tient compte de certaines raisons d'absence, qu'il s'agisse de cours de perfectionnement, qu'il s'agisse d'absences pour maternité, qu'il s'agisse de congés sabbatiques parfois, qu'il s'agisse de maladie pure et simple. Je ne crois donc pas que le phénomène soit à ce point catastrophique qu'il mérite des qualificatifs trop négatifs.

M. Cusano: M. le Président, acceptons le fait qu'une portion de ces gens sont impliqués dans la suppléance ou la préparation de cours, il y a pourtant une autre tranche de 40% qui sont quasiment à ne rien faire. En même temps, vous savez que la dernière entente collective permet un boni pour un professeur qui dépasse le nombre d'élèves dans sa classe. Vous avez dans plusieurs écoles la situation où vous payez un boni à un professeur qui a un surplus d'élèves dans sa classe et, en même temps, vous avez le professeur qui est dans la salle de repos et qui est payé à ne rien faire. Où ces chiffres se situeraient-ils exactement?

M. Laurin: En fait, je vous ai donné le chiffre de 65%. C'est un chiffre très provisoire. En réalité, j'attends une autre occasion. Quand seront compilés tous les résultats, région par région, que nous les aurons additionnés, c'est seulement à ce moment que je pourrai vous donner véritablement les résultats définitifs.

M. Cusano: À quel moment allez-vous nous donner cette information précise?

M. Laurin: II faut quand même que...

M. Cusano: On ne peut pas attendre au mois de juin 1982.

M. Laurin: Non, mais il reste que nous devons compter sur la collaboration d'une multitude d'intervenants pour avoir ces chiffres. Qu'il s'agisse des commissions scolaires, qu'il s'agisse des syndicats d'enseignants aussi, c'est une situation quand même cumulative, en ce sens que les événements et la conjoncture amènent des fluctuations dans ces chiffres. Quand même, je suis de très près la situation, je m'en suis même entretenu à quelques reprises avec les chefs syndicaux et je me suis assuré leur collaboration. Il reste qu'un problème demeure quant à l'affectation possible de ces enseignants en disponibilité. Actuellement, nous devons respecter les conventions collectives et, à l'intérieur des conventions collectives, il y a des contraintes que nous devons respecter et qui sont tout à fait normales.

On ne peut pas demander à un professeur spécialisé, par exemple, dans l'enseignement de la biologie d'accepter un

mandat qui l'éloignerait trop de son champ. Nous ne pouvons pas demander non plus à un professeur en disponibilité de dépasser la limite des 50 kilomètres, comme vous le savez. Ces contraintes à l'intérieur des conventions collectives doivent donc être respectées. Ma rencontre avec les chefs syndicaux avait justement pour but de demander qu'au-delà de la lettre des conventions collectives, des accords puissent s'effectuer avec les commissions scolaires ou avec d'autres intervenants dans le champ social, par exemple, ou des intervenants gouvernementaux, pour qu'on puisse trouver des tâches que pourraient effectuer les enseignants de façon utile, soit au bénéfice direct des élèves ou pour la mission éducative.

M. Cusano: Une dernière question, M. le Président, de ma part. L'entente syndicale, l'entente collective que vous avez signée expire en décembre 1982?

M. Laurin: En décembre 1982.

M. Cusano: J'aimerais avoir une estimation pour donner la chance à mes collègues de poser des questions, combien de professeurs pensez-vous avoir en disponibilité au mois de septembre prochain?

M. Laurin: Au mois de septembre?

M. Cusano: Au mois de septembre 1982.

M. Laurin: II faut tenir compte de la décroissance naturelle de la clientèle étudiante, qui est habituellement fixée à 3%. Il faut faire une règle de trois, évidemment, une multiplication. Je pense que le nombre de mises en disponibilité est destiné à s'accroître, puisque, dans les mises en disponibilité, il faut compter également les surplus des années précédentes. Il y a une accumulation progressive.

M. Cusano: M. le ministre, j'aimerais seulement avoir un nombre, je connais les mécanismes, seulement une approximation.

M. Laurin: Voyez-vous, au mois de mai, plusieurs disaient que nous aurions 5000 ou 6000 mises en disponibilité. Finalement, à la fin d'octobre, au début de novembre, il y en avait 2300 et c'est maintenant rendu à 2200. Je pense que le même phénomène va jouer au cours de l'année prochaine et on devrait probablement avoir une augmentation dans les mêmes proportions que celles que nous avons connues en 1981 par rapport à 1980. (22 h 30)

M. Cusano: J'aimerais seulement avoir un chiffre, M. le ministre. Il me semble que, dans votre ministère...

M. Laurin: Je pense que vous pouvez faire le calcul aussi bien que moi.

M. Cusano: ...on a certainement envisagé... Il va vous en rester quasiment 2000 d'ici le mois de juin et vous allez en ajouter un autre...

M. Laurin: Non, ce n'est pas sûr, parce qu'il y a l'attrition naturelle. Il y a les changements de vocation, des gens qui quittent le domaine de l'enseignement pour aller faire autre chose.

M. Cusano: J'ai la réponse, M. le Président. Je passe à...

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci. Je n'ai qu'une question, M. le ministre, mais c'est une question assez importante. Cela porte sur les services des conseillers en orientation. À cause des coupures budgétaires de cette année, les commissions scolaires ont aboli 60 postes de conseillers en orientation. Les commissions scolaires sont très conscientes de la gravité de leur décision. Cependant, lorsgue 80% de leur budget est consacré aux dépenses obligatoires, elles ont très peu de marge de manoeuvre. Il a donc été nécessaire de couper dans les domaines essentiels et spécifiquement dans le domaine des conseillers en orientation. C'est un domaine où nous sommes déjà un peu dans un état de sous-développement par rapport à l'Ontario et aux États-Unis. Je crois qu'aux États-Unis, par exemple, - ce sont des chiffres de la corporation - il y a un conseiller d'orientation par 300 élèves et, en Ontario, il y a un conseiller par 365 élèves. Au Québec, avant les coupures, c'était un conseiller par 1000 élèves.

Dans le contexte social actuel, où les problèmes sociaux augmentent tous les jours, les problèmes de délinquance, les problèmes de chômage et aussi les problèmes de la carence entre le milieu scolaire et le milieu de travail, qui s'élargit tous les jours, à cause de tous ces problèmes, je crois que la pénurie des conseillers en orientation est un problème assez grave et j'aimerais vous demander quelles sont vos intentions afin d'améliorer la situation.

M. Laurin: M. le Président, je partage entièrement les appréhensions, les préoccupations et les souhaits de la députée de Jacques-Cartier et, ne serait-ce que par la profession que j'occupais antérieurement, je ne peux que la comprendre et partager ses sentiments. Il reste cependant que la situation varie d'une commission scolaire à l'autre en ce sens que les enveloppes budqétaires que nous consentons aux

commissions scolaires, comme la députée le sait, sont basées sur de grands chiffres, de grands ensembles, des ratios que nous dictent les conventions collectives et qu'à même cette enveloppe, les commissions scolaires possèdent quand même une marqe de manoeuvre qu'elles utilisent différemment selon les régions. Bien sûr, on peut dire que la marge de manoeuvre n'est pas très grande, mais il y a quand même une marge de manoeuvre et il revient aux commissions scolaires de répartir ce qui reste de la subvention après que les traitements prévus aux conventions collectives ont été payés de la façon qui convient le mieux à l'analyse que font les commissaires. On sait que les décisions des commissaires varient d'une région à l'autre. Certains préféreront garder intouchée la structure administrative. D'autres préféreront plutôt sacrifier une partie du personnel appartenant à la catégorie des professionnels non enseignants. D'autres préféreront toucher aux services, qu'il s'agisse des bibliothèques ou des cafétérias. Et sur ce point nous n'avons pas le pouvoir d'infléchir d'une façon significative les décisions des commissions scolaires. Donc, il y a une marge de manoeuvre qui appartient aux commissions scolaires en vertu de l'autonomie et de la marge de manoeuvre à laquelle elles tiennent beaucoup.

Il reste cependant que je ne récuse pas les statistiques générales que vient de nous citer la députée de Jacques-Cartier. S'il est vrai que notre ratio conseiller en orientation-élève est beaucoup plus élevé au Québec qu'ailleurs, je pense que c'est là nous indiquer qu'il faudrait faire un effort spécial, mais les moyens que nous avons à notre disposition sont quand même limités. Le premier est une augmentation des enveloppes budgétaires, en essayant de protéger la partie du budget qui toucherait les conseillers en orientation, comme nous allons peut-être le faire et comme nous le faisons en partie déjà pour l'intégration des enfants handicapés. L'autre moyen, c'est de faire pression sur les commissions scolaires pour qu'elles privilégient dans leurs décisions ce choix que vous venez d'indiquer. Il resterait peut-être une autre solution, c'est-à-dire tenter d'en arriver à une politique mieux concertée avec le réseau des affaires sociales, pour qu'on puisse avoir recours davantage aux services qui sont présents dans ce réseau en vertu d'ententes, qui sont d'ailleurs à l'étude actuellement entre le ministère de l'Education et le ministère des Affaires sociales, et qu'on prévoie une meilleure utilisation du personnel.

Mme Dougherty: M. le ministre, je sais très bien, vous parlez d'une marge de manoeuvre. Cela n'existe pas maintenant dans les commissions scolaires. Ce n'est pas parce que les conseillers en orientation, ont moins de priorité pour les commissions scolaires... parce qu'on a coupé presque chaque catéqorie de professionnel. Les bibliothécaires, les psychologues, tous les domaines les plus vulnérables ont été touchés par les coupures budgétaires. Je crois que les budgets transférables, la transférabilité, c'est une bonne idée, lorsque les fonds sont suffisants. Mais, quand les fonds ne suffisent pas, la transférabilité ne vaut rien. On peut parler de l'autonomie, mais qu'est-ce que c'est l'autonomie, quand on n'a pas de décision à prendre? Je crois qu'il y a certaines catégories de professionnels qui doivent être protégées par des normes garanties du point de vue budgétaire. On parle, par exemple, de l'importance des bibliothèques. Même les commissions scolaires qui, depuis des années, avaient des bibliothécaires ont décidé de couper les services. On a des bibliothèques, on a des livres, mais pas d'humains pour donner des services. Je crois que, pour être honnête, il faut examiner la situation, parce que les coûts sociaux de ne pas faire, de ne pas aider les jeunes... on risque gros. Le coût social de l'enfant en centre d'accueil est de plus de 30 000 $ par année; c'est le coût d'un conseiller en orientation pour 1000 enfants et je crois que c'est une situation très grave. Il faut examiner la situation, pas uniquement au point de vue des coûts, c'est important, mais des coûts sociaux. (22 h 401

M. Laurin: Si on n'avait pas de marge de manoeuvre dans les commissions scolaires, la situation de chacune ne serait pas aussi différente ou variable. Donc, je continue à penser qu'il y a une marge de manoeuvre. Mais est-elle suffisante pour régler le problème très réel que vous soulevez? Je suis d'accord avec vous pour dire que non. Il faut donc penser à d'autres types de solutions, en tenant compte quand même des moyens que nous avons. Encore une fois, nous n'avons pas le choix, il faut d'abord payer les traitements prévus aux conventions collectives, d'une part et, d'autre part, on ne peut pas augmenter d'une façon trop marquée le déficit de la société québécoise.

Il faut donc trouver des solutions qui— vont nous permettre de régler, du moins à moyen terme, le problème que vous soulevez en utilisant les moyens à notre disposition. Peut-être sera-t-il possible, parmi ces ressources ou ces moyens, d'identifier des moyens financiers, mais je pense qu'il faudra utiliser aussi d'autres moyens. Je suis très sensible au plaidoyer que vous faites et soyez sûre qu'il fera l'objet d'un examen attentif au ministère, afin que, dans la limite des contraintes qui sont les nôtres actuellement, on puisse quand même progresser dans l'examen et la correction des problèmes que vous soulevez.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: M. le ministre, les directeurs d'école se plaignent actuellement de l'étalement de la rétroactivité qui leur a été consentie et qui leur est due depuis le 1er juillet dernier. L'augmentation est de l'ordre de 13,5%, je crois. Mais voici, m'a-t-on dit, le mode étrange de ce remboursement. En effet, ces 13,5% seraient donnés en deux phases: on donnera 10,5%, du 1er juillet 1981 au 1er juillet 1982 et les 3% ne seraient en vigueur que pour la période du 1er avril au 30 juin 1982.

Je pense qu'on doit s'avouer que c'est vraiment une première dans ce domaine. Les principaux et les directeurs d'école, se trouvent drôlement lésés financièrement, mais surtout profondément offensés par l'attitude du gouvernement à leur égard. N'étant point syndiqués, mais membres d'une association qui est quand même plus qu'honorable, ils n'ont aucun recours contre ces décisions qui ne respectent pas tellement leur statut professionnel. Je vous demande s'il y a une explication plausible à cette situation, quant à la rétroactivité pour les directeurs d'écoles.

M. Laurin: Vous devinez bien que ce problème a fait l'objet de discussions répétées et intenses entre le ministère et les directeurs d'écoles. Jusqu'ici, il n'a pas été possible de parvenir à une entente, mais il reste cependant que le mode de répartition de cette augmentation dont vous venez de parler, même si elle s'effectue par étapes, aboutira au résultat que l'augmentation versée aux directeurs d'école correspondra quand même au taux de 13,5% par année qui a fait l'objet de notre engagement auprès d'eux, engagement qu'ils ont accepté.

Évidemment, nous pourrons continuer nos discussions quant aux modalités et j'espère que nous pourrons parvenir à un accord, mais il reste que la marge de différence n'est pas au fond si énorme qu'on veut bien parfois le souligner. Nous sommes prêts, de notre côté, à essayer d'envisager d'autres modalités, mais il faudra que le résultat soit le même, c'est-à-dire un montant total d'augmentation pour les directeurs d'écoles de 13,5%, avec les autres aménagements dont vous n'avez pas parlé, mais qui correspondent quand même en grande partie aux demandes qu'ils nous ont faites, particulièrement pour respecter ce caractère professionnel, hautement professionnel, dont vous avez parlé.

M. Hains: Encore à propos des directeurs d'école...

Le Président (M. Boucher): Je regrette, M. le député.

M. Hains: Juste une petite dernière.

Le Président (M. Boucher): Une petite dernière.

M. Hains: Malgré que j'en aurais d'autres, mais je vais me limiter.

Le Président (M. Boucher): Allez-y.

M. Hains: À propos des directeurs d'école, vous savez sans doute, M. le ministre, que plusieurs professeurs, parmi les plus hauts gradés, ont un salaire plus fort que certains directeurs d'école. On se demande si c'est vraiment logique et si on se permettait ici, en Chambre, d'avoir un député qui serait mieux payé qu'un ministre. Je vous demande ce qui peut justifier cette anomalie dans le domaine de l'éducation. Est-ce qu'on pense y remédier un jour d'une faqon ou d'une autre?

M. Laurin: C'est là évidemment un autre problème dont nous avons longuement discuté avec les directeurs d'école. En ce qui concerne la rémunération des directeurs d'école, encore une fois, il ne faudrait pas cacher que nous nous sommes entendus sur la plupart des points. Les directeurs d'école ont accepté qu'à l'intérieur de cette augmentation générale de 13,5%, le plus fort taux d'augmentation aille aux directeurs d'école qui étaient les moins bien payés et que les directeurs d'école les mieux rémunérés n'aient qu'une augmentation plus minime, c'est-à-dire inférieure à celle de 13,5%. Dans le cas que vous soulevez maintenant, il faut quand même tenir compte de la tradition et de l'histoire, d'une part, et de l'impossibilité de dépasser des échelons une fois qu'on a atteint le maximum d'autre part. Il faut peut-être tenir compte également du fait qu'un professionnel joue quand même un rôle extrêmement important, lui aussi, au sein d'une école. On ne peut pas comparer, pour l'évaluer au mérite, une fonction ou l'autre. Par exemple, je pourrais vous dire qu'un député ou un ministre sont moins bien payés que plusieurs autres personnes qui, en apparence, ne remplissent pas des fonctions aussi astreignantes.

Il faut tenir compte, comme je viens de vous le dire, de ce qui a précédé, de l'histoire, de la tradition et de certaines contraintes aussi qu'il serait trop long d'énumérer, mais nous tentons, malgré tout -je l'ai dit à plusieurs reprises à la Fédération des directeurs d'école - de conserver l'écart qui convient entre les administrés et les administrateurs.

M. Hains: Est-ce qu'on peut vous demander, M. le ministre, quand nous allons avoir des nouvelles précises sur le projet de restructuration scolaire?

M. Laurin: Nous y travaillons intensément. Je pense bien que nous pourrons compléter notre premier projet d'ici à la fin de l'année. Il devra ensuite être soumis à la considération du comité permanent du développement culturel, et ensuite, au Conseil des ministres. Selon l'accueil qu'il recevra, il sera rendu public plus ou moins rapidement.

M. Hains: Le dépôt lui-même du livre blanc, est-ce que c'est pour bientôt?

Le Président (M. Boucher): M. le député, je regrette, vous avez terminé.

M. Laurin: D'ici à quelques mois.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que les crédits supplémentaires du ministère de l'Éducation seront adoptés?

Une voix: Adopté.

Travail, Main-d'Oeuvre et Sécurité du revenu

Le Président (M. Boucher): Adopté. Nous allons passer maintenant à l'étude des crédits supplémentaires du ministère du Travail.

M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, est-ce que vous avez des commentaires préliminaires?

M. Dean: Non, M. le Président. Je pense que le budget supplémentaire est assez simple et clair. J'inviterais le député de Sainte-Anne à poser les questions qu'il voudra bien poser. (22 h 50)

Le Président (M. Boucher): Si vous voulez poser vos questions.

M. Polak: M. le Président, j'espère que le dernier, comme le bon vin, ou les deux derniers, comme le bon vin, sont toujours les meilleurs. Je dois d'abord vous dire qu'en l'absence du ministre du Travail qui a pris un repos, qui semble malade, je sais que c'est l'adjoint au ministre qui est ici pour répondre aux questions. Ce n'est pas mon intention de tirer avantage du fait que la personne qui est ici et qui, je le sais, est très capable, n'a peut-être pas encore l'expérience du ministre. Ma question n'est pas difficile, mais il y a tout de même quelques points que je voudrais soulever avant d'avoir la réponse de l'adjoint du ministre.

À la page 179, c'est le programme 7, c'est-à-dire l'aide financière à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. On voit sur cette page qu'il y a des crédits à adopter de 10 577 600 $. Je dois vous expliquer qu'au mois de juin 1981, il y a à peine quatre ou cinq mois, les prévisions budqétaires étaient estimées à un montant de 13 450 000 $ et on voit, dans l'espace de quatre ou cinq mois, une augmentation de 78,6%. Je pense que, dans l'étude des programmes de tous les ministères, c'est le chiffre le plus élevé au point de vue de l'augmentation en pourcentage.

J'aimerais avoir la ventilation par catégories en ce qui concerne ces crédits supplémentaires de 10 000 000 $. Où vont-ils? Est-ce que c'est pour des fins administratives, parce que tout le monde sait que la Commission de la santé et de la sécurité du travail est très souvent vue comme un appareil lourd sur le plan administratif, avec énormément de fonctionnaires, ou est-ce qu'une partie de ce montant sera payée directement comme prestations aux victimes? Est-ce que l'adjoint au ministre pourrait donner la ventilation de ce montant de 10 000 000 $?

M. Dean: Avec plaisir. M. le Président, sur les remarques préliminaires du député de Sainte-Anne, même si je remplace le ministre, je dois dire que je suis très bien entouré et qu'on est équipé pour répondre en détail à toutes les questions qu'il voudra bien poser.

Pour commencer, concernant la Commission de la santé et de la sécurité du travail, il faut d'abord comprendre que la Commission de la santé et de la sécurité du travail est en phase d'implantation. La législation de base a été adoptée il y a à peu près un an et demi et le développement de la commission n'est pas encore terminé.

Je peux cependant vous dire que 6 500 000 $ sur les 10 500 000 $ sont des frais strictement d'implantation, en vertu de l'article 335 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Le gouvernement s'engage à assumer les frais d'implantation et le montant de 6 500 000 $ est ce qu'il reste de ce que le gouvernement doit à la commission pour acquitter ses frais d'implantation dans l'année 1980, c'est-à-dire que ce sont des frais d'implantation qui se terminent le 31 décembre 1980. Avec pièces justificatives et tout cela, on rembourse la dernière tranche, c'est-à-dire que ce montant ne se répétera pas l'année prochaine, c'est un montant une fois pour toutes.

Les 4 000 000 $ qui restent sont ventilés à peu près comme ceci: 2 256 000 $ pour le service d'inspection - je vais revenir là-dessus - 750 000 $ pour la recherche en santé et sécurité du travail et 1 000 000 $ de plus pour la formation et l'information en santé et sécurité du travail.

Pour donner davantage d'informations, pour ce qui est de l'inspection, l'inspection de sécurité dans l'industrie de la construction appartenait auparavant à l'Office de la construction. Tout récemment, on a transféré

à la Commission de la santé et de la sécurité du travail d'anciens inspecteurs de l'Office de la construction. On a donc créé trente postes additionnels au coût de 500 000 $. Il y a un ajustement de la masse salariale en fonction des taux réels de salaire, principalement à la suite du transfert des 46 employés de l'Office de la construction, qui représente 1 398 000 $ et un ajustement aux dépenses de fonctionnement pour les loyers, la formation, la Baie-James, etc., de 350 000 $.

Pour ce qui est de la recherche, comme j'ai dit tantôt, c'est l'Institut de la recherche sur la santé et la sécurité du travail, qui est en devenir, et les 750 000 $ représentent les frais additionnels de ce centre de recherche.

Finalement, pour voir à subventionner la formation et l'information sur la santé et la sécurité du travail, en vertu de l'article 205 de la loi, au début de l'année, le budqet prévoyait un montant pour l'année. Or, le montant demandé pour subventions a été dépassé. On y prévoit 1 000 000 $ de plus mais surtout pour les associations sectorielles paritaires, pour la formation des secouristes, des représentants à la prévention et pour les cours de sécurité dans la construction.

M. Polak: Maintenant, M. le Président, quand l'adjoint du ministre du Travail explique que, de cette somme additionnelle de 10 000 000 $, il y avait 6 500 000 * qui étaient pour des frais d'implantation, comment se fait-il que, dans le mois de juin, il y a cinq ou six mois, on n'avait pas prévu ce montant dans le budget? Comment se fait-il que ça prend des crédits supplémentaires? On aurait dû savoir à ce moment-là que ça prenait 6 500 000 $.

M. Dean: C'est parce que les dernières négociations pour déterminer le montant exact des frais d'implantation étaient toujours en cours et ne se sont terminées que le 31 décembre 1980. En fait, elles ne se sont terminées qu'il y a à peu près deux mois.

M. Polak: On voit tout de même une augmentation de 78,6%. Maintenant que j'ai reçu la réponse en ce qui concerne la ventilation, je note, un peu à mon regret, que, dans ce montant additionnel de 10 500 000 $, il n'y a aueun montant pour des paiements additionnels ou pour quelque chose qui va directement aux victimes. Tout est sur le plan des organisations, de l'implantation du service d'inspection, de la recherche, de la formation, de l'information. D'ailleurs, j'ai encore reçu un paquet gros comme ça de brochures, par exemple sur les droits connexes, etc. Je suis tout à fait en faveur du travail de cette commission mais, vu les coupures budgétaires et les temps très difficiles qu'on vit, a-t-on pris toutes les mesures pour passer tous ces programmes et ces services de formation et d'information avec le strict minimum de frais? Existait-il des directives dans les ministères, de la part du président du Conseil du trésor, pour dire: On ne veut plus que vous déboursiez tel et tel montant, il faut couper là-dedans? Le service est important, il faut donner l'essentiel, mais non pas le tralala et le luxe dans le service.

M. Dean: Premièrement, pour la question des prestations, il faut que le député de Sainte-Anne se rappelle que la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à compter d'aujourd'hui, s'autofinance à même les contributions de la partie patronale. Le budqet des prestations est financé à même les primes, les cotisations payées par les employeurs. Le gouvernement encourt un certain nombre d'engagements directs en fonction de la loi et ces postes-ci sont du nombre; il y a la formation et l'information en santé et sécurité. (23 heures)

Dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail, il y a un énorme travail de formation et d'information à faire auprès des travailleurs, afin qu'ils connaissent leurs droits en vertu de cette nouvelle loi qui représente une refonte complète. La loi a créé des associations paritaires sectorielles, patronales et syndicales, ou employeurs et travailleurs, pour voir à la formation et à l'éducation. Il faut former les inspecteurs, il faut former les représentants à la prévention qui sont crées en vertu de la loi, et l'information est un préalable nécessaire à la véritable mise en place de cette loi. (23 heures)

M. Polak: Dans cette somme additionnelle de 10 500 000 $, est-ce qu'il y a des frais sur le plan purement administratif, je veux dire, par exemple, changement de bureau, de fonctionnaires? J'ai entendu dire que les bureaux du président et du vice-président - je ne les ai pas encore visités - sont vraiment d'un luxe fantastique. Je ne sais pas si c'est vrai. Si c'est vrai, est-ce que, dans cette somme, de tels frais sont inclus ou est-ce que cela relève directement des fonds perçus par la cotisation de la part des employeurs?

M. Dean: Les frais d'administration en règle générale sont prévus au poste des cotisations des employeurs.

M. Polak: Cela ne relève pas de ces 10 000 000 $.

M. Dean: Non. Le budqet supplémentaire, c'est strictement de l'inspection, des postes additionnels crées suite au transport des inspecteurs de la

construction, la mise en place graduelle de l'institut de recherche en santé et sécurité du travail, qui est une fonction du gouvernement en vertu de la loi, et la formation et l'information qui sont aussi une fonction du gouvernement en vertu de la loi.

M. Polak: Maintenant, un autre sujet, ayant terminé cette rubrique du programme no 7, il y a presque trois mois, le 5 du mois de septembre, je me rappelle qu'on a été ici durant cinq jours à une commission spécialement convoquée par le ministre du Travail pour entendre des mémoires sur le fameux droit de grève et les services essentiels dans les secteurs public et parapublic. Sans doute que l'adjoint au ministre se rappelle très bien cet événement, ces cinq jours, parce qu'il était là tout le temps, comme moi d'ailleurs aussi et à ce moment-là on a reçu pendant cinq jours les mémoires, les témoins qui sont venus.

D'abord, ceux qui sont dans le public, parce qu'il y en a qui nous regardent maintenant, ne sont peut-être pas au courant - c'est bon de se le rappeler - que la position des syndicats était que toute tentative de changer le statu quo, y inclus la fameuse liste syndicale, serait considérée comme une restriction du droit de grève, donc inacceptable. Il y a même des syndicats qui ont déclaré que n'importe quelle initiative même pour réduire ce droit de grève de quelque manière que ce soit, y inclus de toucher à cette liste syndicale, aurait la même conséquence que l'abolition de ce droit de grève, c'est-à-dire le désordre social. Cela a été mentionné carrément par quelques témoins.

Du côté patronal, la grande majorité voudrait retenir le droit de grève, mais réduire ce droit dans son exercice pour ne pas toucher aux droits essentiels auxquels la population a droit dans certains cas exceptionnels. La plupart de ces mémoires du côté patronal avaient suggéré de remplacer, par exemple, la liste syndicale par un organisme indépendant, permanent, et avec des dents.

On a eu aussi, à ce moment-là, des mémoires de la part des usagers ou de la part de personnes qui ont vécu soit comme victimes ou tierces parties pendant une grève ou qui ont vécu la période d'anxiété qui précède une grève. Je me rappelle, par exemple, le témoignage de M. Brunet, et du Dr Jutras qui n'ont pas parlé du tout comme démagogues, mais qui ont bien décrit le facteur anxiété qui ne peut être mesuré par les statistiques ou les chiffres.

Le ministre, évidemment, à ce moment-là, à la fin il dit: On respecte le droit de grève, mais on respecte également le droit de la population aux services essentiels. Évidemment, il y a un conflit entre ces deux principes parce que tout le monde sait - cela a été dit pendant les enquêtes - qu'une grève, pour être efficace, doit faire mal. On ne peut pas avoir une grève douce, autrement la grève n'est pas efficace, n'aura pas de résultat.

Donc, cette commission a siégé pendant cinq jours durant le mois de septembre, si je me rappelle bien, et vu qu'en 1982, bientôt, on commence encore des négociations dans les secteurs public et parapublic, est-ce que l'adjoint du ministre pourrait nous informer si un projet de loi est en préparation, si des discussions ont eu lieu au ministère avec les fonctionnaires ou peut-être parmi les ministres; à quel stade en est-on? Parce que, vraiment, je pense qu'on a le droit de critiquer le ministère - je ne critique pas le ministre adjoint - pour le fait qu'après trois mois, on n'a pas encore vu un projet de loi. Si un tel projet est en préparation, j'aimerais savoir quelle sera la teneur d'un tel projet? Est-ce qu'on va réduire carrément le droit de grève? Est-ce qu'on va le défendre dans certains secteurs, par exemple les hôpitaux psychiatriques, les hôpitaux pour malades chroniques, les hôpitaux pour soins intensifs, les hôpitaux pour enfants? Enfin, il y a des catégories qui méritent une attention toute spéciale. Ou est-ce qu'on ne touche pas à ça? Est-ce qu'on va toucher à la liste syndicale? Quelles sont les intentions? Parce que je pense que la population s'inquiète. On craint que, si rien n'est présenté, on va entamer la nouvelle ronde de négociations sans avoir une solution à ce problème très grave.

M. Dean: M. le Président, à la fin de la commission parlementaire, le gouvernement a exprimé son espoir de présenter le projet de loi avant les fêtes, afin que la population et l'Opposition puissent l'étudier et l'adopter au tout début de la reprise, après la reprise de la session. Malheureusement, il y a eu une série de maladies, le ministre lui-même a été victime. La personne qui était affectée particulièrement à ce dossier a eu une maladie subite qui l'a immobilisée pendant quelques semaines. Cependant, le travail d'étude s'est effectué régulièrement et nous pensons pouvoir présenter un mémoire au Conseil des ministres la semaine prochaine pour fixer, par décision du Conseil des ministres, les principes de base des modifications au Code du travail dans le domaine des services essentiels.

Malheureusement, on ne peut pas présenter le projet de loi avant les fêtes. Mais nous espérons pouvoir, dans la période après le jour de l'An, avant la reprise de la session, une fois que les principes de base seront fixés - un projet de loi est en préparation -nous espérons pouvoir donner, tant au parti de l'Opposition qu'aux partenaires du secteur patronal, syndical etc., des idées précises de

nos intentions, de façon que leur réflexion sur les mérites du projet de loi puissent s'effectuer. Il va être déposé au tout début de la reprise de la session et une commission parlementaire brève, disons de moins de 51 mémoires des groupes directement impliqués, sera tenue. L'Opposition aura l'occasion d'éplucher en détail le projet de loi, mais l'intention, c'est de l'adopter très rapidement, après la reprise. Il est vrai que les négociations se font en 1982, sauf que le processus de négociation démarre au milieu de l'année. Nous espérons pouvoir adopter la loi au tout début de la reprise.

M. Polak: Maintenant, M. le Président, je suis content d'entendre dire, de la part de l'adjoint au ministre, qu'un tel projet sera déposé. J'ai une suggestion à faire. Quand on va en commission pour étudier ça, au lieu de recevoir les mémoires le matin même où les témoins arrivent, on devrait reprendre un peu l'idée qu'on avait eu en septembre et qui était très bonne. Pendant l'été, on a reçu les mémoires, on a eu l'occasion et la possibilité de les étudier, de sorte qu'on s'est présenté en connaissance de cause. Tandis que, par exemple, à la commission qui a lieu maintenant sur le problème des médecins, on entend tout le monde se plaindre du fait qu'on arrive le matin, et il y a dix ou quinze mémoires qui sont sur le bureau. Les témoins arrivent et ça ne facilite pas le travail. Donc, j'espère qu'une note sera prise à ma suggestion pour qu'au moment où les mémoires entrent, on en ait une copie, pour qu'on puisse se préparer quelques jours, une semaine avant, pour poser des questions intelligentes. (23 h 10)

Maintenant, M. le Président, je ne sais pas combien il reste de temps dans notre bloc...

Le Président (M. Jolivet): Cela dépend de vous pour le moment, vous avez encore 10 ou 15 minutes.

M. Polak: Je sais que le député à ma droite voudrait poser une question.

Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de problème, cela fait partie de la banque.

M. Vallières: Très bien. Alors, M. le Président, j'aimerais qu'on m'indique si... Je sais que les inspecteurs de mines ont été transférés à un autre service et je me demande si c'est au ministère du Travail que la responsabilité incombe, compte tenu qu'on parle d'hygiène, de salubrité au travail.

M. Dean: M. le Président, j'oublie le comté du...

Le Président (M. Jolivet): Richmond.

M. Dean: ... Richmond. Oui, M. le Président, les inspecteurs de mines sont transférés à la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

M. Vallières: Est-ce qu'une partie du budget supplémentaire qui est demandé là est affectée à ces travailleurs?

M. Dean: Non. Ils sont couverts par le budget de l'année, le budqet régulier.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, d'autres questions?

M. Polak: Non, je n'ai pas d'autres questions pour le moment.

Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres questions, nous adopterions donc l'ensemble des programmes du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Donc, adopté.

Nous allons donc faire les rapports qui s'imposent.

(Suspension de la séance à 23 h 12)

(Reprise de la séance à 23 h 14)

M. Rancourt (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que la commission plénière dont le mandat était d'étudier tous les crédits supplémentaires pour l'année 1981-1982 n'a pas fini de délibérer et vous demande la permission de siéger à nouveau.

Le Président: Or, M. le leader adjoint, quand siéqera-t-elle?

M. Bertrand: Prochaine séance, M. le Président; mais sur ce, je voudrais s'il vous plaît par simple prudence, vous demander de suspendre, si vous le voulez bien, notre séance pendant quelques minutes, pour que nous puissions aviser exactement de la procédure à suivre en pareille circonstance, étant donné que nous sommes dans un contexte assez particulier, où nous avons à toutes fins utiles, conformément à l'article 131, fait rapport sur l'étude des crédits du budget supplémentaire, mais il y a tout de même un discours sur le budget qui est en cours et je préférerais, M. le Président, plutôt que de se tromper sur la procédure à suivre, que nous suspendions, pendant quelques minutes, quittes à revenir ensuite pour préciser, pour l'ensemble de nos concitoyens, surtout nos collègues de l'Assemblée nationale, la procédure à suivre.

Le Président: M. le leader adjoint, je suis disposé à suspendre quelques minutes,

même si la présidence pense et est convaincue que la procédure qui a été suivie est celle qui devait être suivie en vertu de notre règlement, je suspends tout de même, pour plus de précaution, la séance pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 15)

(Reprise de la séance à 23 h 45)

M. Bertrand: Alors, M. le Président, je pense que ces quelques minutes de suspension nous auront permis d'apprendre beaucoup de choses sur un précédent qui, effectivement, nous oblige à regarder notre règlement de plus près et comme vous avez reçu rapport du vice-président à l'effet que nous n'avions pas complété l'étude des crédits supplémentaires sur la base des huit heures normalement prévues par le règlement, que vous recevriez un rapport final lors d'une prochaine séance. Et dans ces conditions, M. le Président, tout ce que je peux vous demander, c'est que nous suspendions nos travaux et que nous ajournions notre débat à demain, 10 heures.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adoptél

Le Président: Les travaux de l'Assemblée sont ajournés à demain, 10 heures.

(Ein de la séance à 23 h 46)

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