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(Dix heures quatorze minutes)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Mise aux voix de la motion d'amendement
à la motion d'appui à la constitution
d'un fonds d'urgence pour aider les PME
Tel qu'entendu hier soir, il y a un vote au début de nos travaux
ce matin. Le vote porte sur un amendement. Je vais, pour les besoins de ceux
qui étaient absents hier soir, lire la motion d'amendement.
La proposition principale se lit comme suit: "Que l'Assemblée
nationale appuie la proposition faite par le Québec lors de la
dernière conférence des premiers ministres sur l'économie
concernant la constitution d'un fonds d'urgence destiné à aider
prioritairement nos PME québécoises et à soutenir la
création directe d'emplois; et demande au gouvernement
fédéral, d'une part, de modifier sa politique monétaire
pour donner priorité à la lutte contre le chômage et,
d'autre part, d'accepter de participer financièrement au fonds d'urgence
proposé par le Québec."
La motion d'amendement de M. Levesque (Bonaventure) se lit comme suit:
"Que la motion en discussion soit amendée en supprimant les
deuxième, troisième et quatrième lignes et en
remplaçant tous les mots après le mot "fédéral",
à la neuvième ligne, par les mots "d'accepter d'y participer". La
motion amendée se lirait donc comme suit: "Que l'Assemblée
nationale appuie la constitution d'un fonds d'urgence destiné à
aider prioritairement nos PME québécoises et à soutenir la
création directe d'emplois; et demande au gouvernement
fédéral d'accepter d'y participer."
Que ceux et celles qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien
se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure),
Scowen, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt (Orford),
Mme Bacon, MM. Marx, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières,
Lincoln, Paradis, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Picotte, Pagé, Gratton,
Rivest, Rocheleau, Polak, Maciocia, Cusano, Sirros, Saintonge, French, Mme
Dougherty, MM. Houde, Middlemiss.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Bertrand, Mme Marois, MM. Bédard, Laurin, Bérubé, Landry,
Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, de
Bellefeuille, Chevrette, Richard, Marois, Duhaime, Tardif, Léonard,
Baril (Arthabaska), Mme Harel, M. de Belleval, Mme Lachapelle, MM. Dean,
Paquette, Gagnon, Guay, Champagne, Mme Juneau, MM. Fallu, Grégoire,
Marquis, Lavigne, Beauséjour, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Blais, Gauthier, Gravel, Laplante,
Brassard, Brouillet, Rochefort, LeMay, Rodrigue, Payne, Beaumier, Tremblay,
LeBlanc, Lafrenière, Paré, Lachance, Dupré.
Le Secrétaire: Pour 33
Contre 54
Abstentions 0
Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion d'amendement est
rejetée. M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, nous allons pouvoir revenir,
en lui redonnant toute sa substance, à la motion présentée
au nom du ministre d'État au Développement économique. Je
vous demanderais de reconnaître Mme la ministre d'État à la
Condition féminine.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre
d'État...
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je voudrais rappeler à mon
collègue d'en face que, d'après les dispositions de notre
règlement, le rôle d'un leader parlementaire du gouvernement est
simplement de vous indiquer l'article, M. le Président. Il a voulu,
à ce moment-là, ajouter, en parlant sur le fond de la motion.
Des voix: Ah!
M. Levesque (Bonaventure): Si le leader parlementaire du
gouvernement veut se prévaloir de son droit de parole, eh bien, mon
Dieu, qu'il le fasse, mais qu'il le fasse selon les dispositions du
règlement parce que tout le monde sait que le gouvernement
vient présentement de voter contre la substance même
de...
Des voix: Ah!
M. Levesque (Bonaventure): ... la proposition, et je n'ai pas
l'intention, M. le Président, de pécher de la même
façon que le leader parlementaire du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, comme, maintenant, vous
pouvez constater que le leader de l'Opposition et moi-même sommes
associés dans le péché, pouvons-nous poursuivre
l'étude de la motion présentée par le ministre
d'État au Développement économique? (10 h 20)
Reprise du débat sur la motion
principale
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est la reprise du
débat sur la motion principale. Mme la ministre d'État à
la Condition féminine, vous avez la parole.
Mme Marois: Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Juste un instant, Mme la ministre. Il faut laisser aux gens le temps de se
rendre à leur commission, commission parlementaire bien entendu!
Une voix: II y a un Conseil des ministres.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Tous
ceux qui doivent quitter pour les commissions parlementaires ou pour le Conseil
des ministres, veuillez permettre... À l'ordre! S'il vous
plaît!
Une voix: M. le Président, les libéraux sont en
désordre.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît! Merci. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Ne soyez
pas indisciplinés ce matin. À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre! M. le whip adjoint. Mme la ministre, vous avez la parole.
Une voix: Bravo.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Cette motion que nous
débattons aujourd'hui vient souligner aux Québécois et aux
Québécoises qu'en période de crise, en période de
récession, aucun gouvernement provincial, dans le régime
fédéral canadien, ne détient assez de pouvoir sur le plan
économique à lui seul pour arriver à résoudre la
crise que nous traversons maintenant. Et cela, pas plus le gouvernement de
Terre-Neuve, pas plus celui de la Colombie britannique, pas plus celui du
Québec ne peuvent agir sur les problèmes fondamentaux qui
concernent leur vie économique.
C'est assez amusant, parce que justement on voulait ne pas aborder ces
problèmes fondamentaux puisqu'on ne voulait pas toucher, semble-t-il,
à la politique monétariste du gouvernement fédéral
qui a pour effet d'amener de l'inflation et du chômage.
Il faut cependant se dire qu'à la différence des provinces
anglophones, le Québec vit cette crise de façon
spécifique. En effet, on a souvent dit et on a prétendu que selon
notre spécificité culturelle, comme peuple, on n'avait pas
suffisamment conscience. On se disait: Culturellement, on a conscience de cette
réalité qu'on est, comme différence, mais sur le plan
économique, on ne l'a jamais analysée. On ne l'avait jamais
abordée de façon peut-être très claire.
C'est sans doute dans des moments de crise qu'on arrive effectivement
à faire des analyses un peu plus serrées des
réalités dans lesquelles on s'inscrit, de notre
réalité économique, entre autres. Or, là aussi, on
constate qu'on n'est pas une province comme les autres.
Dans quel sens n'est-on pas une province comme les autres? On sait
très bien que les PME, qui sont les assises mêmes de notre
économie, de notre production, de nos emplois, sont beaucoup plus
touchées par la politique monétariste d'Ottawa et par celle des
Etats-Unis que ne peuvent l'être les multinationales sur lesquelles,
entre autres, repose l'économie de l'Ontario et de plusieurs autres
provinces anglophones.
Ce qu'il faut sans doute très bien comprendre, ce n'est pas notre
capacité de production, ce n'est pas notre créativité qui
est reconnue qui sont atteintes par ces politiques, mais c'est effectivement la
capacité de nos petites et de nos moyennes entreprises à obtenir
le financement nécessaire, ce qui fait en sorte qu'elles sont
littéralement étranglées dans des situations comme celles
qu'on vit maintenant.
Qu'est-ce qui résulte de l'étranglement de nos petites et
moyennes entreprises? J'imagine qu'on n'est pas assez bête pour ne pas se
rendre compte qu'effectivement ça résulte en des fermetures
d'usines. Des fermetures d'usines, ça amène du chômage,
ça amène des mises à pied. À la demande du
Québec il y a eu, au début de la semaine, une rencontre avec
Ottawa dont ont parlé abondamment les journaux ces jours derniers. Le
Québec invitait Ottawa à participer à un plan de relance
conjoint mis sur pied par le
Québec, évidemment, et défini en fonction des
besoins de notre économie, de nos entreprises.
Qu'est-ce qu'a fait Ottawa? Il n'était pas très
enthousiaste, c'est le moins qu'on puisse dire. Peut-être,
évidemment, Ottawa préfère-t-il, selon ses habitudes,
définir seul comment il va intervenir chez nous, comment il va
intervenir au Québec, avec combien d'argent. C'est la façon
habituelle du gouvernement central, celle qui lui est coutumière,
d'encercler le Québec. On le disait au plan culturel, il le fera au plan
économique: créer des programmes de santé
parallèles aux nôtres, miroir aux alouettes, parce que souvent
généreux et facilement accessibles, mais qui, évidemment,
ne correspondent pas nécessairement à nos problèmes et aux
orientations que le Québec voudrait donner à une économie
qui lui est propre, qui est sienne.
Même si l'attitude d'Ottawa, lors de la rencontre du début
de la semaine, a été négative face au plan de relance
conjoint, on peut présumer qu'il aidera quand même le
Québec à traverser la crise. Comment va-t-il faire? Par un
saupoudrage de subventions qui vont durer le temps qu'Ottawa le voudra bien,
qui iront dans les secteurs qui conviendront au gouvernement central, au
fédéral, et quand Ottawa décidera d'y mettre fin,
d'arrêter d'intervenir, qu'est-ce que le Québec aura vraiment
retiré de cette intervention du fédéral sinon
l'obligation, comme d'habitude, de reprendre en main ses programmes, de les
reprendre à sa charge et ce, dans un contexte où, encore une
fois, les accords fiscaux vont continuer à nous désavantager? On
le sait, le fédéral l'a fait dans le secteur des affaires
sociales, il l'a fait dans le secteur de la santé, il l'a fait un peu
partout sur notre territoire. Il est intervenu chez nous en offrant,
évidemment, des choses absolument fantastiques et extraordinaires et,
après ça, progressivement, il s'est retiré. Il s'est dit:
Le Québec, prenez la place, mais on ne vous donnera pas l'argent pour le
faire, évidemment. La preuve, on est en train de la vivre
concrètement dans la négociation - si encore on peut l'appeler
négociation - sur les accords fiscaux. Mais ici, à
l'Assemblée nationale, il faudrait regretter d'avoir encore une fois
à démontrer qu'une collaboration avec le fédéral
est toujours difficile et coûte toujours cher au Québec. Je
demeure persuadée qu'Ottawa ne propose pas et ne proposera pas un vrai
remède à la crise actuelle.
Prenons les paroles de M. Bouey, gouverneur de la Banque du Canada.
Qu'est-ce qu'il dit et qu'est-ce qu'il pense? Il dit qu'il est
nécessaire de poursuivre plus durement encore la politique
monétariste, celle de l'inflation et des taux d'intérêt
élevés. C'est ça qu'il dit. Le gouvernement
fédéral dans cette situation ne peut pas plaider l'ignorance. Il
est très bien informé. J'imagine qu'il a aussi des gens qui sont
capables de faire des analyses économiques. Il est très bien
informé des conséquences des gestes qu'il pose comme gouvernement
central. Tous les agents économiques s'évertuent à
dénoncer la situation. Tous les organismes de prévision
s'entendent; ils sont d'avis qu'il faut prévoir pour 1982 un taux
d'inflation dans les deux chiffres, des taux d'intérêt plus
élevés encore, un accroissement, évidemment, du
chômage, une baisse réelle des investissements dans les
entreprises, un plus grand nombre de faillites, cela va de soi. Et où
retrouve-t-on ces faillites? Dans le domaine de la construction, dans le
domaine du commerce qui amène évidemment, au bout de la ligne,
une baisse générale du pouvoir d'achat.
Autrement dit, tout le monde prédit la catastrophe, mais rien
n'empêche les responsables de ces politiques d'aller jusqu'au bout pour
tenter de prouver qu'ils ont raison. On n'a pas encore pris pleinement
conscience des effets pervers de cette politique de hauts taux
d'intérêt. Ces politiques viennent anéantir d'un seul coup
ou viennent retarder des projets importants d'investissements. Ils accroissent,
évidemment, à des niveaux inégalés les besoins
financiers des entreprises et découragent les achats de consommation de
biens durables: maisons, automobiles, meubles, etc. Ce n'est sûrement pas
au gouvernement du Québec qu'on peut reprocher d'avoir, par ses
politiques, provoqué la fermeture de magasins de vente au détail
ou d'un grand nombre de nos PME québécoises. Pendant que nous
réussissons difficilement, péniblement, à créer dix
emplois, le gouvernement fédéral, par l'ensemble de ses
politiques monétaristes, nous en fait perdre des centaines. (10 h
30)
Si le gouvernement fédéral ne suit pas l'exemple des pays
européens qui, eux, tentent de se réaligner pour assainir leur
économie, si le fédéral ne procède pas rapidement
à des révisions en profondeur de ses politiques
économiques, il continuera et devra continuer de porter seul, quoi qu'en
dise M. Trudeau, le fardeau, la responsabilité du chaos
économique dans lequel on se trouve et dans lequel se trouvent nos
concitoyens et nos concitoyennes.
La motion qui est devant nous, M. le Président, parle d'un fonds
d'urgence, pas de n'importe quel fonds d'urgence, et urgence n'est pas un vain
mot puisqu'il y a effectivement urgence. Il y a urgence pour des milliers de
gens. Il y a urgence pour des milliers de travailleuses. Cela fait
déjà plusieurs années qu'avec les jeunes nous, les femmes,
les travailleuses, formons la plus grande partie du contingent des
chômeurs. Il faudra peut-être se le rappeler. La crise
économique, nous, les femmes, on a eu trop longtemps l'impression
que cela ne nous concernait pas. Nous en étions éloignées.
Nous pouvions nous en sortir facilement. Ce n'est pas le cas. Qu'arrive-t-il
actuellement en situation de chômage? Nous sommes en situation de
difficultés économiques. Nous sommes les premières
à tomber en chômage, parce qu'on travaille dans le secteur des
services. On y est concentrées majoritairement, parce qu'on est dans le
secteur du commerce, de la vente au détail, parce qu'on travaille dans
les secteurs mous. On est dans le textile. On est dans la chaussure. On est
dans des secteurs vulnérables au plan économique qui sont les
premiers à être touchés lors d'une crise. On le sait;
l'histoire nous le dit. Nous sommes celles qui, en fin de compte, lorsqu'elles
sont en chômage, reçoivent aussi les plus petits chèques
d'assurance-chômage, parce qu'on a les plus petits salaires. Finalement,
nous sommes celles qui, dans ces situations de crise, ne peuvent retourner sur
le marché du travail, faute d'emploi. Je ne veux pas nier, par cette
intervention, l'idée que les travailleurs, de façon
générale, vivent dramatiquement les conséquences du
chômage, mais je constate que, pour les promoteurs de la politique
monétaire actuelle, l'entrée et le maintien des femmes sur le
marché du travail ne sont pas encore un principe économique
acquis. Cela reste une sorte de privilège des beaux jours. Quand
reviendront-ils?
Il faut appuyer, comme Assemblée nationale, le plan
québécois déposé à Ottawa. C'est simple, il
est indispensable, pour sauver nos emplois, ceux des travailleuses et des
travailleurs, de donner la priorité à la lutte au chômage.
Voilà ce que dit la motion, ce que disent les sondages, ce que disent
les syndicats, ce que disent les entreprises, ce que disent les chefs
d'entreprises, ce que disent aussi nos concitoyens et nos concitoyennes. Nous
avons proposé au gouvernement fédéral des solutions pour
résoudre le problème qu'il a lui-même contribué
à créer.
Nos solutions sont sur la table. Déjà, un premier refus.
La collaboration possible avec Ottawa est toujours là. Qu'est-ce qu'on
nous répond? Non, nous savons comment, nous interviendrons à
notre façon. Dans ce régime fédéral, le droit des
Québécois et des Québécoises à un traitement
économique équitable existe-t-il vraiment? Je l'espère.
Cependant, j'ai des doutes.
Il reste que la motion est maintenant déposée à
l'Assemblée nationale, que je l'appuierai avec conviction, que je
voterai pour cette motion dont l'objectif essentiel vise à soulager
celles et ceux, qu'ils soient travailleurs, entrepreneurs, personnes
impliquées dans leur société, qui ne veulent et ne
souhaitent qu'une chose: produire dans le cadre d'une économie
québécoise forte et fière d'elle-même. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de D'Arcy McGee.
M. Herbert Marx
M. Marx: Thank you, Mr Speaker. I would like to speak against the
Government's motion that is on the floor, because we tried to improve this
motion. We have presented an amendment, the Government refused to accept our
amendment and, in fact, they just voted it down. Consequently, the motion that
is on the floor is really a meaningless motion, a motion that the Government
wants to pass only for its own pure propaganda purposes.
We have a Government before us that is leading us to economic
bankruptcy, a Government that is leading us to financial bankruptcy, a
Government that has let us almost all the way down to constitutional bankruptcy
and a Government that is leading us as well to moral bankruptcy. Think about
the "fête nationale", about the waste and doubtful spending - if I may
put it that way - that surrounds the whole "fête nationale", and the
Government has refused to have a committee hearing into the money spent for "la
fête nationale".
Think about the housing scandal that we have been talking about for over
a year now. The Government refuses to have a committee to investigate the
housing scandal and it is obvious why, because in today's paper I read that, I
believe, the new president of the Housing Corporation said that our criticisms
were founded. Now I tell you, Mr. Speaker, where there is smoke there is fire
and if there were be a committee hearing on the Housing Corporation, you would
see that there would be more proof that our allegations and our criticisms are
founded.
I do not want to allude to other scandals because if I had to talk about
Parti québécois scandals, this morning, I would be here all
morning talking about scandals.
This Government has obviously weakened Québec and I would like to
concentrate on the economic situation. Of course things are bad economically in
Canada, things are bad in North America, things are bad all over the world if
one wants to look at the world portrait, but things are worse in Québec,
much worse in Québec than in the rest of Canada. The Parti
québécois Government is the champion of high taxes, because in
Québec we have the highest taxes in Canada. It is the Government of high
unemployment, because we have the highest unemployment in Canada, and it is the
Government with the highest debt in Canada.
In my riding, Mr. Speaker, people are leaving everyday for Toronto, for
Calgary, for Edmonton, for Vancouver, for California, and these people do not
want to leave Québec, but they have no choice. For example, I met a
woman in my riding, the other day, who has four sons that have graduated from
university in Montréal and three have already left for points West. The
reason is obvious, Mr. Speaker, it is because there are no jobs here, there is
no work in Québec and, consequently, people have to go elsewhere to look
for jobs, to look for work, to build a future for themselves. Companies close,
companies leave Québec and many companies do not even come to
Québec because we have a Government which does not encourage companies
to establish themselves in Québec. We have a Government which is so
concerned about the constitutional question, it has not dealt with the economic
question for at least two years now.
I said that we have the highest rate of unemployment in Canada. Well, we
have 30% higher unemployment in Québec than the national average and,
since the Parti québécois has been in power, since 1976, 150 000
Quebeckers have left Québec. That is a lot of people who have left
Québec. Mr. Speaker, I just learnt last week that 1000 francophones per
month leave Québec for Alberta. So, one cannot say that this is, you
know, an issue that only touches anglophones, because thousands of francophones
are leaving Québec as well because of the dire economic situation in
Québec. (10 h 40)
When companies leave, when people leave, of course they do not
contribute anything to Québec. Once they are zone, they do not pay taxes
because they are not working in Québec. They do not pay taxes on
dividends earned because they are not living in Québec. Consequently,
what we have is a smaller tax base in Québec and those of us who remain
have more to pay.
So, people are leaving. There is an economic slowdown in Québec
which is worse than in the rest of Canada, which is worse than in the rest of
North America and, consequently, all of those who remain have to pay a greater
share of the tax burden.
Let us talk about new investments in Québec. Well, new
investments in Québec are considerably down since the Parti
québécois took power. Let me give you a number of statistics, Mr.
Speaker.
Between 1973 and 1976, 24,5% of new Canadian investments were made in
Québec. Between 1977 and 1980, under the Parti québécois
Government, new Canadian investments in Québec fell to 20%, from 24,5%
before the PQ came into power to 20% after the Parti québécois
came into power. And in 1981, these new investments in Québec fell to
18%, 18,3% to be exact. In other words, of all investments in Canada, we only
got 18,3% in Québec. So, our share has been falling steadily since the
Parti québécois took power.
As well, we pay the highest taxes in Canada. Our income tax in
Québec is higher than anywhere else in Canada. Many Quebeckers, you
know, jump at the opportunity to leave Québec, to go elsewhere in Canada
just to pay lower taxes. Many of us pay 2000 $ or 3000 $ more in income tax,
for example, when we live in Hull, Québec, than we would pay if we lived
in Ottawa, Ontario.
Never mind all the statistics. Just ask your friends. Many of us have
friends in Ontario, in Alberta, in British Columbia, friends, relatives. Ask
them what their tax bill is as compared to your tax bill. Ask them what they
are paying in municipal taxes, for example, as compared to what you are paying
in municipal taxes, and you will see that I am completely right.
The Parti québécois has also introduced hidden taxes. This
is a new invention of the Parti québécois. They have taxed us in
a fashion which we may not recognize at first glance. For example, we have
Hydro-Québec. Have you looked at your Hydro-Québec bill recently,
have you noticed how it has jumped? Well, the Parti québécois
Government has decided to siphon off HydroQuébec profits and this is
another way of taxing us. Everytime the Hydro rates go up, the Parti
québécois Government can siphon off profits from
Hydro-Québec by way of a hidden tax.
And look at how much it costs to fill your car these days. The Parti
québécois Government raised the tax on gasoline by 100%. We pay
more for gasoline and we pay more in provincial taxes on gasoline in
Québec than do Canadians anywhere else in Canada. It costs approximately
40 $ to 50 $ to fill up your automobile today and this is really a tax on the
small and average wage earner because the person who is a millionaire has no
trouble paying 40 $ ou 50 $, but it is people like ourselves, who are the
average wage earner, who have really a problem paying the extra 1000 $ or 2000
$ a year in gasoline prices.
And then, there is a hidden tax on car licences which have greatly
increased, and the Government Automobile Insurance Board has increased our
premiums, not because they need the money to cover insurance premiums, but
because the government needs the money to run the province of Québec in
the fashion that they are running it. And then, there is the hidden tax on
beer. Well, I can go on and on and on and next week I will go on and on and on
and make a long list of all these hidden taxes that we have had and that we are
paying since the Parti
québécois came into power.
In my riding, Mr. Speaker, there is a tax revolt that has been going on
during the past few weeks, a tax revolt against MUC taxes. In my riding, the
real estate taxes on individual dwellings have gone up as much as 40% and 50%.
Do you know what that means, Mr. Speaker? It means, for example, that somebody
who was paying 2000 $ in taxes three years ago is now paying 6000 $ in taxes
and many people just cannot afford to keep their homes because the taxes have
gone up so high that it is becoming uneconomical and impossible because
salaries, of course, have not increased three times in the past three years,
but taxes, in my riding, have increased to that extent and fuel has increased
to that extent and insurance costs have gone up and so forth and so on.
Therefore, people in my riding are fed up, they are fed up with how this
Government is managing the economy, they are fed up with paying hidden taxes
and paying higher income taxes, they are fed up with the whole situation.
Because they are fed up, they have organized this tax revolt in my riding and
there is a tax revolt going on right across the Island of Montréal from
Sainte-Anne-de-Bellevue to Rivière-des-Prairies. Everybody is revolting
against these high impossible taxes that we have as a result of the
mismanagement of the economy by the Parti québécois
Government.
What about our debt? Well, between 1867 and 1976, in over a hundred
years, Québec accumulated a total debt of 5 000 000 000 $. But from
1976, since the Parti québécois took power, until today, the
debt, this public debt has tripled; it is gone from 5 000 000 000 $ to 15 000
000 000 $. Now, you may say to me: Well, what does it matter if the debt goes
from 5 000 000 000 $ to 15 000 000 000 $ in five years? These are only figures;
that has nothing to do with me. Well, you are wrong, Mr. Speaker, that has a
lot to do with you, because your family has to pay a thousand dollars a year in
taxes just to service this debt, one thousand dollars a year. Every week, it
costs you 20 $ just to pay this debt. I think it is obvious that when you pay a
thousand dollars a year to cover this debt, the Government has not got that
money to provide social services, to provide health services and so on. So,
instead of paying for health and social services, the Government is taxing us
to pay increases on the Québec debt.
And what about mismanagement? Well, this Government has mismanaged the
province from top to bottom. It is unbelievable, the mismanagement this
Government has given us. Somebody just mentioned to me before that not one
person, not one MNA in the Government benches has ever had to meet a payroll,
not one knows what it is to cash a company cheque, nobody has had business
experience. This is all being reflected in how this province is being run. (17
h 50)
The Premier of Québec himself made a statement only last month
which is an unbelievable statement and shows how little he understands about
the economy. He said that the Federal Government should have the right to put
interest rates in Canada higher than those in the United States. He said: The
Federal Government should have the right to do that for two years. That is
completely unrealistic, because during this week and last week, the interest
rate in Canada and in the United States has been about equal. Why would he
suggest that the Government of Canada have a higher interest rate for two
years, that is the case in the United States? It is just an irresponsible
response to an economic problem. Then, of course, the Parti
québécois Government is always blaming the Federal Government:
"C'est toujours la faute du fédéral!"
Well, I can tel you, Mr. Speaker, if the Federal Government would follow
the advice of the Parti québécois, it would really be "la faute
du fédéral" because they would be taking such terrible advice. In
talking about mismanagement, we should not forget, Mr. Speaker, that this
government, this Parti québécois Government has lost 500 000 000
$ in the Education Department. They cannot find 500 000 000 $. It is not a lot
of money, only 500 000 000 $ lost in the Education Department And then, I have
made a number of studies on the administration of justice in Quebec, and what
did I find? I found that, in Metropolitan Montreal, we pay 23% more in taxes to
cover police costs than do the taxpayers in Metropolitan Toronto. Why does it
cost this 23% more in Montréal than it costs in Toronto? Are we richer
as Montrealers than are Torontonians? I doubt it. And, in my studies of
prisons, Mr. Speaker, I found that it costs 40% more to keep someone in a
Québec prison than it costs to keep somebody in an Ontario prison. Why
does it cost 40% more to keep somebody in prison in Hull than it costs to keep
somebody in prison in Ottawa? It does not make sense. It is bad administration
and often there is no administration.
And what about the millions of dollars wasted in the boards that the
government establishes? What about the toilets in the National Assembly? I tell
you, Mr. Speaker, we do not need toilets for 1 000 000 $ or 2 000 000 $ in the
National Assembly. The toilets we have now have been serving the members very
well for the last 50 or 100 years. This Government has no idea about
priorities. Its priorities, it seems, are more in toilets than they are in
health services and education services. But they always
blame the Federal Government. Why do they blame the Federal Government?
It is obvious why. It is to cover up their own incompetency. You blame somebody
else, supposedly, it is not your fault. And in ending, Mr. Speaker, I would
like to say that I have just learned that the government is probably going to
bring down a new budget which will cut into the Department of Education
expenditures, which will cut social services and which will provide for higher
taxes.
Mr. Speaker, this government has weakened Québec since 1976 and
this government is leading us to economic bankruptcy as well as to financial
bankruptcy. Our only hope, Mr. Speaker, is to kick this government out of power
and to put in a Liberal Government. Thank you, Mr. Speaker.
M. Paquette: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Rosemont.
M. Gilbert Paquette
M. Paquette: Merci, M. le Président. On vient d'entendre
une belle tentative de "cover-up" de la part du député de D'Arcy
McGee pour protéger la maison mère à Ottawa. Comme
à peu près dans toutes les interventions des
députés de l'Opposition, on essaie de capitaliser sur la
situation difficile que connaissent l'économie et l'emploi au
Québec actuellement et de faire remonter l'origine de cette situation
à 1976, c'est-à-dire au moment où ce parti, le Parti
québécois, est arrivé au gouvernement. Autrement dit,
c'est depuis 1976 et non pas depuis septembre dernier que les
difficultés économiques auraient commencé au
Québec. Le député de D'Arcy McGee part d'un paquet de
faits particuliers pour essayer de généraliser. M. le
Président, c'est comme si on prenait un exemple de quelqu'un qui a
fraudé le gouvernement dans ses impôts et qu'on disait: Tous les
Québécois fraudent l'impôt. C'est exactement la même
chose. C'est une technique bien connue quand on veut faire de la
démagogie et du "cover up" et qu'on veut cacher la
réalité; on prend des exemples de cas particuliers et on en fait
des cas généraux.
M. le Président, c'est bien évident que l'administration
de ce gouvernement n'est pas parfaite et qu'on peut indiquer des endroits
où les fonds publics auraient pu être mieux
dépensés. Cependant, M. le Président, le
député de D'Arcy McGee a oublié de nous dire qu'au niveau
du contrôle des dépenses gouvernementales, quand on regarde
l'administration précédente de 1971 à 1976, les
dépenses ont augmenté en moyenne de 17,3%, alors que, sous ce
gouvernement-ci, elles ont augmenté en moyenne de 13,8%. Donc, il y a eu
un resserrement des dépenses. Le député de D'Arcy McGee ne
nous a pas dit que les effectifs de la fonction publique croissaient à
un rythme de 13%, en moyenne, avant 1976 et que depuis 1976, ils augmentent
à un rythme d'environ 0% et ceci, malgré le fait que ce
gouvernement a mis en vigueur un paquet de nouveaux programmes qui ont
été essentiellement réalisés avec le même
personnel. C'est facile de prendre un exemple et de dire: À tel endroit,
vous n'auriez pas dû dépenser l'argent comme cela. Ce qu'il faut
regarder, c'est la situation d'ensemble, M. le Président.
Au sujet des taxes, je vais vous donner un exemple des taxes. Pourquoi
le Québec, en 1976, quand on est arrivé au gouvernement, avait-il
le championnat des taxes? C'est parce que le Parti libéral maintenait la
taxe de vente, maintenant l'augmentation de l'impôt foncier et laissait
l'impôt sur le revenu augmenter avec l'inflation. Automatiquement, quand
les salaires augmentaient, l'impôt augmentait et ces gens disaient: On
n'augmente pas l'impôt sur le revenu, mais l'impôt sur le revenu
augmentait tout seul. Quant aux transferts fédéraux, ils
augmentaient à ce moment-là de 18% et ils ont augmenté
depuis 1977 de 8%.
Je n'aurai pas le temps de rectifier en les reprenant une par une toutes
les folies que le député de D'Arcy McGee a dites dans son
intervention, M. le Président, mais il a donné l'exemple des
véhicules automobiles. De 1977-1978 à 1981-1982, en quatre ans,
l'augmentation des permis pour les véhicules automobiles a
été de 25%, 6% en moyenne par année, moins que
l'inflation, moins que le coût de la vie et moins que le coût des
salaires des gens qui travaillent à émettre ces permis au Bureau
des véhicules automobiles. C'est de la démagogie de dire que le
gouvernement se finance en augmentant démesurément des permis qui
n'avaient pas été augmentés depuis cinq ans. C'est la
même chose au niveau des tarifs d'Hydro-Québec, M. le
Président. Ces tarifs ont augmenté tous les ans en moyenne de
10%, moins que l'inflation. Pour le chauffage, bien sûr, c'est un peu
plus élevé, mais c'est moins élevé que les prix du
pétrole décrétés par Ottawa pour le chauffage.
C'est de la démagogie de dire qu'on se finance à même
Hydro-Québec. Savez-vous combien Hydro-Québec retourne cette
année, M. le Président, au gouvernement du Québec? 28 000
000 $. Ce sont les prévisions. Quant aux transferts des
sociétés d'État, incluant Hydro-Québec, la
Société des alcools et la Régie des loteries et courses,
ils ont augmenté en moyenne de 10% depuis 1977, moins que l'inflation,
encore une fois. La croissance de l'impôt sur
le revenu a été moins rapide que sous les libéraux,
M. le Président. C'est de la démagogie. (11 heures)
Si on passe au niveau du déficit, M. le Président, encore
là, le député de D'Arcy McGee nous dit que le
déficit a triplé, quadruplé ou quintuplé, mais le
prix du lait, le prix du pain, les salaires, les coûts de n'importe quoi,
eux, se sont multipliés par dix pendant cette période. Je vais
vous donner les derniers chiffres que j'ai ici pour 1980 concernant le
déficit. La dette per capita du Québec, en 1980, était la
septième en importance de toutes les provinces canadiennes. Elle
était de 1778 $ alors qu'en Ontario, elle était de 1816 $. En ce
qui concerne les besoins financiers nets du gouvernement, une fois qu'on tient
compte non seulement des dépenses moins les revenus du gouvernement,
mais qu'on tient également compte des autres activités du
gouvernement qui ne sont pas incluses dans les budgets, les
sociétés d'État, les régimes de retraite, si on
tient compte de toute l'activité gouvernementale, les besoins financiers
nets pour la dernière année du gouvernement libéral
représentaient 13,7% des revenus. En 1981-1982, dernier budget, en
incluant le budget supplémentaire, ces besoins financiers
représentent 12,5%.
L'habileté du député de D'Arcy McGee,
évidemment, c'est de ne pas parler en pourcentage. Quand on regarde les
chiffres, ça fait beaucoup de milliards mais, quand on tient compte que
tout augmente, il faut regarder le pourcentage. C'est la même chose que
quelqu'un qui, en 1970, devait 1000 $ et en gagnait 4000 $ et, cinq ans plus
tard, doit 2000 $ à la banque mais gagne 8000 $. Il n'est pas plus ni
moins endetté qu'avant. Mais un petit malin comme le
député de D'Arcy McGee pourrait dire: II est deux fois plus
endetté parce que sa dette est passée de 1000 $ à 2000 $.
Mais son salaire est passé de 4000 $ à 8000 $. Ce serait
malhonnête de reprocher à ce père de famille d'avoir
augmenté sa dette alors que ses biens, sa maison, son ameublement, son
auto ont aussi augmenté, ont doublé et certains biens ont
triplé de valeur. Même si sa dette a augmenté de 1000 $
à 2000 $, en réalité, il est moins endetté parce
que ses biens ont triplé au lieu de doubler.
Il faut regarder les pourcentages, ils sont là. Les besoins
financiers nets du gouvernement en 1976-1977, dernière année du
budget Garneau sous le gouvernement Bourassa, étaient de 13,7%. Ceux du
gouvernement du Québec dans la dernière année
étaient de 12,5%.
Là où les exemples, les chiffres tirés du chapeau
ne tiennent pas compte de l'évolution des prix et de l'inflation et
deviennent une tentative de "cover up", c'est quand on commence à
toucher à ceux que nos amis d'en face tiennent tellement à
protéger, c'est-à-dire ceux du gouvernement
fédéral. Vous avez remarqué que, dans la motion,
l'Opposition voulait supprimer le mot "fédéral". C'est assez
amusant de voir des fédéralistes qui ne veulent pas parler du
fédéral de ce temps-ci.
Il faut bien parler du fédéral parce qu'on lui envoie la
moitié de notre budget par année et, malheureusement, on est
obligé, au Québec, de subir les politiques insensées et
inhumaines d'un gouvernement étranger qui n'a pas demandé de
mandat, lors de la dernière élection, pour faire ce qu'il fait,
que ce soit sur la constitution, sur l'économie ou sur les transferts
budgétaires au gouvernement des provinces, qui n'a demandé aucun
mandat de la population et qui a décidé de mettre le
Québec à sa place pour prouver au Canada anglais que les
francophones qui étaient là servaient bien les
intérêts de l'Ontario et de la majorité
canadienne-anglaise.
M. le Président, tout le monde est d'accord que le chômage
est plus élevé au Québec - d'abord, il n'a pas
commencé en 1976 - depuis qu'on a des statistiques. Je vais vous donner
quelques chiffres. La proportion des chômeurs au Québec par
rapport au Canada, savez-vous combien elle était en 1968? 34,6%. En
1969, 37,8%. 37,8% des chômeurs canadiens, en 1968, en 1969, sous le
gouvernement de l'Union Nationale, étaient au Québec.
Après cela, l'économie s'est améliorée. Cela a
descendu un peu, 33%, 31%, 32%. En 1977, quand ce gouvernement est
arrivé, c'était 33%. Cela s'est maintenu à 33% en 1978,
à 33% en 1979, à 33% en 1980 et, en 1981, ça vient de
remonter à 34%.
Donc, ce n'est pas depuis 1976 qu'il y a plus de chômeurs au
Québec. Ce n'est pas mêlant, on a à peu près 33% ou
34% des chômeurs, ici, au Québec, alors qu'on a à peu
près 15% ou 17% des investissements fédéraux. C'est en
proportion exactement inverse et cela a toujours été comme
ça sous tous les gouvernements. Pourquoi? C'est une question de
constitution justement. C'est parce que les pouvoirs économiques sont
à Ottawa et il s'en sert pour défendre les intérêts
de l'Ontario plutôt que ceux du Québec. Vous savez que dans tous
les ministères à vocation économique, c'est 85% à
90% des fonctionnaires à Ottawa qui viennent d'Ontario. Alors, ne vous
demandez pas pour qui ils travaillent. Et les politiciens qui sont là
doivent leur élection à l'électorat de l'Ontario; quand
l'Ontario vote bleu, vous avez un gouvernement bleu à Ottawa; quand
l'Ontario vote rouge, vous avez un gouvernement rouge à Ottawa. Les
politiciens à Ottawa se le rappellent, même s'ils viennent du
Québec, ils savent qui ils doivent servir.
M. le Président, par contre, il y a une
chose qui est arrivée en 1980. Je vous disais que cela a
commencé à augmenter de nouveau en 1981. Est-ce qu'on peut dire
que, depuis 1976, c'est ce gouvernement qui a créé le taux de
chômage qu'on connaît au Québec? Il y a un démenti
éclatant qui se trouve dans les chiffres de Statistique Canada, qui
était repris dans cet éditorial du Financial Times, en pleine
campagne électorale, au mois d'avril dernier. On y disait que
l'économie du Québec a connu une croissance de 14,5% depuis 1976,
deux fois plus que l'Ontario. C'est donc dire que tous les efforts qu'on a
faits pour accroître l'économie ont seulement servi, de 1976
à jusqu'à tout récemment, à maintenir notre
proportion de chômeurs au Québec à 33%. Si non seulement le
gouvernement, mais l'ensemble des Québécois n'avaient pas fait
croître l'économie du Québec deux fois plus rapidement
qu'en Ontario, la proportion des chômeurs au Québec aurait
augmenté. Cela veut dire qu'il y a un vice fondamental dans le
système qui ne vient pas des Québécois. Ces derniers ont
fait leur part, ils ont fait augmenter l'économie deux fois plus vite
qu'en Ontario. Or, cela a seulement servi à maintenir le pourcentage de
chômage qu'on a et à le baisser un petit peu, de 1976 à
1981.
Qu'est-ce qui s'est passé en 1981, depuis cet article du
Financial Times d'avril dernier? C'est en septembre que ça s'est
passé. Vous avez ici un article de la revue Finance qui dit - il y a des
tonnes d'articles, il y a seulement nos amis d'en face qui ne les voient pas -
"l'économie québécoise, en 1981, minée par les taux
d'intérêt". Le Conseil économique du Canada dit la
même chose. Un économiste de Laval, Pierre Fortin, a
analysé plus à fond la politique des taux d'intérêt
d'Ottawa.
Parlons d'abord de ses effets. Le ministre de l'Habitation, dans son
intervention, a mentionné l'évolution inverse de la construction.
Plus les taux d'intérêt augmentent, plus la construction baisse.
M. le Président, vous savez l'importance de l'industrie de la
construction dans l'économie. On dit souvent: Quand le bâtiment
va, tout va. Le domaine de la construction a un effet d'entraînement sur
le reste de l'économie et crée énormément
d'emplois.
Regardez ce graphique, M. le Président, ce sont les taux
d'intérêt. En 1980, ça oscillait entre 13% et 16% et, en
août et septembre, les taux d'intérêt augmentent à
20% ou 21%. Ils ont baissé un peu depuis, mais on ne sait pas ce qu'il
va arriver, ça ne dépend pas de nous, ça dépend du
gouvernement fédéral, la constitution le veut ainsi.
Donc ces taux d'intérêt, en août et septembre,
étaient rendus à 20%. Regardez maintenant le graphique de la
construction, tant au Canada qu'au Québec. La construction suit en
proportion inverse.
Quand les taux d'intérêt sont élevés, la
construction est au plus bas. Cela s'est passé en août et en
septembre 1981, non pas en 1976, comme le disent les députés de
l'Opposition. Ce n'est pas autre chose qu'une tentative de "cover up". Les
petits frères de Québec se sentent coupables et ils veulent
protéger le voleur qui est à Ottawa.
Ce qui se passe dans la construction, ce n'est pas un cas unique. Vous
avez les ventes au détail qui suivent également la courbe. Quand
les taux d'intérêt augmentent, il y a moins de ventes au
détail, l'argent roule moins. Les gens consomment moins. Il y a moins
d'emplois. Il y a du chômage. (11 h 10)
Vous avez également le nombre de faillites, M. le
Président, qui a augmenté, qui a presque doublé dès
que les taux d'intérêt ont commencé à atteindre 15%
et 20%. Tout cela crée du chômage et la cause est là. Je ne
comprends pas comment les députés de l'Opposition peuvent dire le
contraire quand tous les partis d'Opposition à Ottawa, les premiers
ministres de toutes les provinces, les conseils fédéraux tels que
le Conseil économique du Canada, le gouverneur de la Banque du Canada
lui-même, le ministre des Finances à Ottawa disent que c'est
voulu, que c'est la politique d'Ottawa de créer du chômage pour
réduire l'inflation. C'est cela la politique monétariste. On
restreint la masse monétaire. On augmente les taux
d'intérêt. Le crédit est moins disponible, il coûte
plus cher. Les gens consomment moins. Il y a des pertes d'emplois et on
espère qu'avec cette médecine-là, après quelques
mois ou quelques années, quand les gens en auront assez mangé, le
taux d'inflation va baisser.
Je vous parlais de cet économiste de l'Université Laval,
Pierre Fortin, qui a évalué combien ce genre de politique
coûtait. Il en arrive à la conclusion suivante: pour
réduire l'inflation de 2%, il faut augmenter le chômage de 5%. Je
comprends que l'inflation doit être une préoccupation et, dans la
foulée des grands frères fédéraux, les
députés d'en face ne nous parlent que d'inflation. Mais demandez
aux citoyens québécois, si on leur offre le choix entre 5% de
plus de chômage et 2% de moins d'inflation, ce qu'ils vont choisir.
Les amis des députés d'en face font de gros salaires.
Leurs amis du Conseil du patronat, leurs amis de la Chambre de commerce, M.
Bronfman, M. Des Marais et compagnie, vont préférer qu'il y ait
plus de chômage peut-être pour payer leurs produits moins cher.
Ceux qui s'en tirent bien dans la vie en général vont
peut-être espérer que les prix soient moins élevés.
Cela va leur faire plus d'argent. Ils n'ont pas de problème. Ils ont de
l'argent pour vivre. Ils ont des emplois. Mais ceux qui sont fragiles dans la
société, ceux qui travaillent au salaire
minimum, dans les manufactures, ceux qui vont grossir, depuis septembre
et octobre, à cause des politiques du fédéral, les rangs
des chômeurs et des assistés sociaux, demandez-leur s'ils
préfèrent 2% d'inflation ou 5% de plus de chômage et ils
vont vous dire: On veut travailler, on veut de l'argent, on veut faire vivre
notre famille, on a droit à notre fierté, on a droit de
contribuer à la société, on a droit de contribuer à
notre propre entretien et à l'entretien de notre famille.
C'est ce genre de politique inhumaine qu'on est obligé de subir
à cause d'un certain 20 mai 1980 parce que, le 20 mai 1980 - les
députés d'en face et leurs amis s'en tirent bien dans la
société, ils n'ont pas de problème, ils aiment bien le
régime actuel, ils ne voudraient pas que cela change, ils s'arrangent
pour avoir de bonnes connexions avec Ottawa, ils sont en sécurité
avec Ottawa - vous vous rappelez qu'au fédéral, on avait promis
au Québec un fédéralisme renouvelé, que cela irait
bien au Québec. Si on disait non, cela voudrait dire oui et on aurait ce
dont on a besoin au Québec en termes d'égalité culturelle,
mais aussi en termes de développement économique. On aurait notre
place dans l'ensemble canadien. Mais, M. le Président, ils avaient
oublié de nous dire ce que c'était notre place. Notre place est
dans le trou. C'est assez ironique de voir les panneaux "J'ai de la chance
d'être Canadien", de beaux panneaux rouges. Vous vous rappelez les habits
rouges dans le temps des plaines d'Abraham, pour ceux qui ont lu leur petit
livre d'histoire. C'était la couleur des soldats anglais qui sont
venus...
Une voix: Leur couleur à eux autres.
M. Paquette: ... ici prendre le contrôle de la colonie en
1763. C'est la couleur du Parti libéral aussi et c'est la couleur des
affiches: "J'ai de la chance d'être Canadien". M. le Président,
oui, on a de la chance d'être Canadiens. On a la piastre à Trudeau
à 0,80 $. Ce n'est pas la piastre à Lévesque qui est
à 0,80 $, c'est la piastre à Trudeau qui est à 0,80 $. De
par la constitution, la monnaie, ça relève d'Ottawa. On a les
taux d'intérêt à 20%, M. le Président, ça,
ça relève d'Ottawa. On a de la chance d'être Canadiens. On
a un taux d'inflation record de 12%, des prix élevés à un
niveau record. On a de la chance d'avoir ça, M. le Président. Et
on a un taux de chômage de 12% au Québec. Cela s'est passé
depuis le 20 mai 1980. Il y a non seulement eu l'attaque sur la loi 101, le
gouvernement fédéral qui se mêle de donner des chartes
à une université grecque orthodoxe à Montréal, avec
permis de donner des diplômes universitaires, les lignes
d'électricité qui vont passer au travers du Québec. C'est
comme si le Québec n'existait plus. Non seulement ça, mais c'est
rendu qu'on empêche les Québécois et les
Québécoises de vivre.
Devant ça, je pense que c'est clair qu'on n'a rien à
attendre d'Ottawa. M. Trudeau nous l'a dit clairement: "C'est fini, le
fédéralisme coopératif." Il aurait pu enlever le mot
coopératif. C'est fini, le fédéralisme, tout va se faire
à Ottawa. Il nous l'a dit clairement: On crée le chômage
pour baisser l'inflation, vous n'aurez pas une "cenne" d'aide.
Par cette motion qui n'est qu'un début - en tout cas, je
l'espère - ce plan d'urgence est nécessaire. Il va falloir qu'il
soit complété par des investissements publics, des
investissements des sociétés d'État, des programmes
d'emploi. Il va falloir qu'on fasse un effort sans précédent,
qu'on s'en sorte tout seul. Même si Ottawa veut couper les vivres au
Québec, même si Ottawa veut créer des chômeurs au
Québec, même si Ottawa veut mettre le Québec dans le trou,
les Québécois vont s'en sortir par eux-mêmes et le
Québec, on va le faire tout seul. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, on a accusé mon
collègue de D'Arcy McGee de démagogie quand il a cité
quelques chiffres qui n'ont pas plu au député de Rosemont. On le
trouve démagogique de dire que les choses ne marchent pas bien au
Québec depuis cinq ans, depuis l'arrivée du Parti
québécois. Le Parti québécois voudrait aller en
arrière. On a cité 1968 et 1969 pour essayer de justifier les
politiques actuelles du gouvernement qui ont causé un chômage
record, des taux d'impôt records, des déficits records. On
blâme Ottawa.
Le monsieur qui parlait tout à l'heure de démagogie
revient même aux plaines d'Abraham, il revient même à la
couleur rouge des soldats anglais. Pour justifier l'incompétence du
Parti québécois, il faut revenir aux soldats anglais, maintenant.
On compare le gouvernement fédéral aux soldats anglais qui
venaient nous coloniser. Et il parle de démagogie.
Ce sont les faits qu'on nous avance pour dire aujourd'hui qu'au
Québec nous sommes dans une situation désastreuse où les
usines ferment leur porte, où les chômeurs augmentent de jour en
jour, où la moitié des chômeurs sont des jeunes qui vont
vers l'Alberta chercher du travail. Ce ne sont pas seulement des anglophones
avec des chemises et des vestons rouges sur les plaines d'Abraham; ce sont des
francophones, ce sont des anglophones, ce sont des Québécois de
toute langue qui s'en vont vers l'Ouest, qui s'en vont vers les
États-Unis chercher du
travail parce qu'il n'y en a pas ici.
À l'instar de gens qui savent toujours blâmer les autres
pour leurs propres fautes, on dit: Ce n'est pas nous. Si on vole quelque chose
dans un magasin, on dit: C'est Eaton, ce n'est pas moi. Si on fait quelque
chose qui ne va pas, c'est toujours la faute de l'autre. C'est la faute
d'Ottawa. Ottawa, c'est le mal entier, c'est le péché mortel de
tout ce qui se passe au Québec.
Je veux bien accepter que les politiques économiques d'Ottawa,
c'est sûr, demandent à être revues, mais nous, on n'est pas
au gouvernement fédéral, on est au Québec. Et le monsieur
dit: Au Québec, il faudra revenir à nos propres ressources et
faire ça par nous-mêmes. Mais qu'est-ce que vous avez fait durant
les cinq dernières années où vous étiez au
gouvernement? Qu'est-ce que vous avez fait? (11 h 20)
Je vais vous parler de quelques petits faits qui se passent aujourd'hui
au Québec, et ça ne se passe pas ailleurs. À l'usine de
General Motors au Québec, il y a eu 1400 mises à pied; chez Pratt
& Whitney, il y en a eu quelque chose comme 1160; on en a annoncé
encore plus ce matin; à Laura Secord 325; chez Dupont, à
Côteau-du-lac, 95 employés, une fermeture d'usine; à
Saint-Jérôme, Les poteries Laurentides, 100 employés mis
à pied; Tricofil, la célèbre incarnation du PQ, le grand
investissement des PME qui allait pouvoir les faire vivre par elles-mêmes
et cette fois sans personne avec des vestons rouges parce que Tricofil est
à nous-mêmes. Résultat: 90 employés mis à
pied et fermeture après avoir investi des millions.
On continue avec Vulcan métal et une réduction de 65
à 35 employés; York, réduction de 100 à 65
employés; Phillips, réduction de 70 à 25 employés;
Les papiers Rolland, réduction de 310 à 250 employés.
À Drummondville, il y a une liste de six à dix firmes. À
Montmagny, dans la région du Québec, on compte 5000 mises
à pied. Dans l'Amiante: Launer, Lynn-MacLeod, Visionic, Asbestos Carey,
Fournier Steel.
Une voix: À l'ordre!
Une voix: C'est la faute de qui?
M. Lincoln: C'est la faute de qui? Justement, c'est une bonne
question à poser: C'est la faute de qui? On nous dit: C'est la faute du
fédéral. C'est toujours la faute du fédéral.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo! Une voix: Enfin, il a
compris!
M. Pagé: M. le Président, voulez-vous lui demander
d'arrêter de crier et de s'asseoir?
Une voix: Enfin, il a compris!
M. Lincoln: C'est la faute du fédéral, c'est la
marque de commerce du Parti québécois. C'est formidable qu'on
appartienne au gouvernement fédéral, comme ça, on a
quelqu'un à blâmer pour tous les maux qu'on a causés
nous-mêmes. Depuis cinq ans d'administration du Parti
québécois, on a créé ici quelque chose comme 40
nouveaux ministères, institutions, régies, offices,
sociétés. C'est bien facile de dire que le taux d'augmentation
à la fonction publique est resté à zéro pendant
qu'on créait toutes sortes de régies, d'offices, de
ministères associés qui ne sont pas inclus dans les
statistiques.
En fait, au Québec, on a créé 30
sociétés additionnelles au moins et même plus de 40. Je
vais vous en énumérer quelques-unes qu'on a créées
en 1977: la Société de développement coopératif, la
Régie de l'assurance automobile, la Commission de surveillance de la
langue française, le Conseil de la langue française, l'Office de
la langue française, la Commission de refonte des lois, l'Office des
personnes handicapées, le Fonds d'assurance-prêts agricoles et
forestiers, l'Institut national de productivité, le Fonds d'aide aux
recours collectifs, le Conseil de la magistrature, etc., etc., la Régie
des loteries et courses du Québec, le Bureau d'audiences publiques sur
l'environnement, la Société nationale de l'amiante, la Commission
de protection du territoire agricole.
En 1979, la création de l'Institut québécois de
recherche sur la culture, la Régie du logement, la Commission nationale
de l'aménagement, la Commission permanente de la refonte des districts
électoraux, etc., etc., et ça continue en 1980 et en 1981. En
1982, on va créer un ministère du Commerce extérieur parce
qu'on n'a pas assez de tous ces offices, de toutes les
délégations que nous avons l'extérieur dans toutes les
parties du monde, qui nous coûtent 40 000 000 $ par an. Peut-être
qu'on devrait les faire travailler au commerce extérieur plutôt
que de travailler à la politique comme ils le font maintenant. C'est
peut-être cela qui nous ferait quelque peu renaître si on disait:
On va recommencer à zéro. On va faire du "zero base budgeting",
on va revoir tout notre appareil gouvernemental, on va revoir combien de
ministères sont vraiment nécessaires dans cette province, combien
de ministères, de régies, d'offices, de sociétés
d'État sont vraiment nécessaires pour le gouvernement d'une
population de 6 300 000 habitants seulement. Nous avons plus de
ministères que la Suède, le Danemark, la France, les
États-Unis, le Japon, l'Allemagne. Nous avons plus de ministères,
de régies et
de sociétés d'État que n'importe quelle autre
province canadienne, quelque chose comme 150 en tout. Si on ajoute à
l'appareil ministériel, qui est déjà beaucoup trop gros
-on crée des ministères tous les jours avec les limousines, avec
le cabinet ministériel et tous les fonctionnaires - toutes ces
régies, tous ces offices, toutes ces sociétés
d'État avec leur président et leur gros appareil, combien tout
cela nous coûte? Cela nous coûte quelque chose comme la
moitié de notre budget qui est déjà
déficitaire.
M. le député de Rosemont a cité beaucoup de
statistiques, depuis 1968 et 1969, et il disait: Pourquoi ne dit-on pas que la
crise a commencé en septembre 1981 ou 1980? Mais qu'est-ce qui se
passait avant? Les déficits continuent à grandir. Le
déficit de l'année dernière est quelque chose comme 3 000
000 000 $. Cette année-ci, ce sera 3 000 000 000 $ ou 4 000 000 000 $.
On a commencé, pour cacher encore une fois les choses, une nouvelle
petite innovation. Le ministère des Finances va faire des estimations
des dépenses deux mois avant les estimations des revenus, de sorte qu'on
ne sache pas pendant deux ou trois mois encore combien sera l'écart
budgétaire, combien sera le gros déficit auquel le Québec
aura à faire face en 1982-1983. Et ensuite on dira: Ce sont les taux
d'intérêt. Qu'est-ce que le gouvernement québécois
préconise pour la question des taux d'intérêt?
M. Lévesque, le 4 février, à Ottawa, disait: Notre
politique à nous, c'est de garder les taux d'intérêt
à une marge de 1% d'écart avec les taux américains. En
fait, la politique américaine des taux d'intérêt, c'est
justement de faire face à l'inflation et les taux d'intérêt
américains sont comparables maintenant, sans pourcentage d'écart,
avec ceux du Canada. Donc, si on ajoutait 1%, si on avait une marge de 1%, les
taux d'intérêt du Québec, le taux d'intérêt
que le Québec préconise serait plus fort que les taux
d'intérêt qu'on connaît actuellement. Est-ce que c'est
ça la politique constructive que le Québec offre au point de vue
des taux d'intérêt? Quelle est votre politique constructive? On ne
peut que s'attacher à ce que M. Lévesque a dit dans son discours
à Ottawa. Cela démontre clairement que le Québec n'a
aucune politique constructive à offrir dans ce domaine. Si c'est
ça sa politique de dire que les taux d'intérêt vont se
rattacher à ceux des taux américains, une marge de 1% de limite
de plus, c'est se berner de penser que les taux américains seront
moindres que les taux canadiens durant les deux prochaines années.
Je vous suggère que ce qu'il nous faut au Québec, c'est
"dégouverner" tout cet appareil gouvernemental, de le
démantibuler et de recommencer à zéro. On a trop
d'appareils gouvernementaux. On a trop de ministères, trop d'offices,
trop de régies. Il faudrait commencer par apporter ici la certitude
politique de savoir où nous allons. Le plus tôt qu'on arrivera aux
élections pour savoir si vraiment le peuple veut la souveraineté
ou une province canadienne avec un esprit de coopération et de
concertation, le mieux ce sera.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Dorion.
Mme Huguette Lachapelle
Mme Lachapelle: M. le Président, le débat que le
ministre d'État au Développement économique entreprenait
dans cette Chambre, la semaine passée, a eu une partie de la
réponse de la part des autorités fédérales. Le
responsable de la crise économique canadienne et
québécoise, le gouvernement central, ne juge pas utile de
réparer ce qu'il a cassé et ce qu'il continue de casser, nos
meilleures entreprises, celles qui, avec de bons produits et de bons
marchés, créent le plus d'emplois pour nos compatriotes. Les
Québécoises et les Québécois jugeront ce
gouvernement qui, par la voix de son premier ministre, nous annonce la fin du
fédéralisme coopératif. Nous, de ce côté-ci
de la Chambre, ne sommes pas surpris. Notre discours depuis longtemps porte sa
propre logique et le régime fédéral sa propre perte.
Cette motion qui est devant nous, M. le Président, que
vise-t-elle? Elle réclame du gouvernement central sa participation
à un vaste fonds d'urgence afin de maintenir et créer des emplois
au Québec. Elle réclame d'Ottawa, seul maître d'oeuvre de
la politique financière, la cessation de son fonctionnement absurde en
matière de taux d'intérêt. En un mot comme cent, M. le
Président, elle réclame justice.
Mes électeurs et mes électrices de Dorion sont aujourd'hui
confrontés à une crise économique qui les touche
personnellement. Les propriétaires de maison sont pris à la gorge
par des taux d'intérêt qui sont des taux d'usurier. Un
"shylocking" organisé par la Banque du Canada. Les travailleurs et les
travailleuses perdent leurs emplois sans que le fédéral ait la
moindre compassion pour ce véritable drame humain. (11 h 30)
M. le Président, je n'ai pas la prétention d'être
experte en économie, mais le simple bon sens m'enseigne que, lorsqu'il y
a une crise, il y a un devoir pour les gouvernements de réagir. Le
gouvernement du Québec - il est bon de s'en souvenir - est un simple
gouvernement provincial sans pouvoirs fondamentaux sur les grands leviers
économiques, mais il veut agir. En proposant de mettre en commun avec le
gouvernement central tous ses moyens d'action, il pense d'abord et avant tout
à soulager tous ceux
et celles qui vont se retrouver, si rien n'est fait, en chômage.
Ces gens, ce sont nos soeurs, nos beaux-frères, notre fils aussi et il
est inhumain de leur faire payer les erreurs commises par les grands
technocrates fédéraux aux salaires énormes. Le steak de M.
Bouey coûte-t-il plus cher que celui de l'ouvrier? Il le faudrait, pour
que le gouverneur de la Banque du Canada ait la chance de réaliser ce
qu'il a provoqué.
Le Parti libéral du Québec, quant à lui, M. le
Président, nous tient un discours au moins aussi cohérent en
économie qu'en matière constitutionnelle. On demande au
gouvernement du Québec de régler la crise monétaire, lui
qui n'a aucun pouvoir en ce domaine. Pourtant, il me semble bien, M. le
Président, que ces mêmes députés se faisaient les
gérants d'estrade il y a peu de temps en proclamant que le Québec
n'avait nul besoin de pouvoirs additionnels. Ils ajoutent que le plan
proposé par le Québec ne va pas assez loin. Qui veut
honnêtement le plus, M. le Président, veut aussi le moins. Au nom
de leur partisanerie maladive, ils préfèrent la mort de nos
petites et nos moyennes entreprises plutôt que l'essai d'en sauver un bon
nombre. La logique libérale est décidément la même
à Québec qu'à Ottawa. Le Parti libéral du
Québec a-t-il érigé en système politique le droit
à l'incohérence?
Le fonds d'urgence, M. le Président, est à ce point
nécessaire que l'ensemble du monde ouvrier et patronal a approuvé
cette initiative. Pendant quatre ans, notre gouvernement a réussi
à créer 250 000 emplois. Pendant quatre ans, la
productivité a augmenté de même que nos exportations et
l'entrepreneurship appuyé par nos politiques économiques. Il est
inadmissible aujourd'hui que des politiques décidées ailleurs
viennent étouffer nos entrepreneurs, jeter à la rue des centaines
de travailleurs et de travailleuses et mettre en danger la structure
économique du Québec. Pour faire face à ces
problèmes, les ministres fédéraux nous proposent un
comité d'étude. Le chef d'entreprise qui a des difficultés
de financement va être heureux d'apprendre qu'un comité est la
seule réponse qu'il puisse obtenir, le travailleur mis à pied
aussi. M. le Président, alors qu'il n'a pas fallu de comité pour
décider d'injecter 150 000 000 $ dans Consolidated Computers, entreprise
ontarienne en faillite, mais dirigée par un organisateur libéral
- je dis bien 150 000 000 $ - pour sauver 1000 entreprises
québécoises, on nous refuse 250 000 000 $. Quant à moi, M.
le Président, je demande à mes concitoyens et mes concitoyennes
de Dorion de se souvenir, au moment opportun, de l'attitude des
libéraux, ceux d'ici comme de ceux d'Ottawa, de se souvenir d'eux
lorsqu'ils devront renouveler leur hypothèque ou s'inscrire à
l'assurance-chômage.
Nous, du gouvernement, sans l'aide du fédéral, allons
procéder avec tous nos moyens et jusqu'au dernier dollar afin de lutter
de notre mieux contre les effets de cette crise, afin que le moins possible de
Québécois et de Québécoises soient jetés
dans la misère. C'est pourquoi, M. le Président, je voterai avec
empressement pour la motion actuellement débattue, consciente que, pour
sauver des emplois, il nous faut être solidaires. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre Paradis
M. Paradis: M. le Président, depuis plus de 18 mois que je
siège dans cette Chambre, à chacune des occasions que j'ai eue de
parler, j'invitais ce gouvernement à parler d'économie parce que,
dans nos régions du Québec, on était déjà
sensibilisé à la crise qui sévit présentement. Les
députés péquistes sont peut-être retournés
dans leur comté au cours de la période des fêtes et se sont
rendu compte que les appels à la sagesse, les appels à la
prudence, les appels à la relance économique qui venaient de ce
côté-ci de la Chambre n'étaient pas strictement des cris
d'alarme qui reposaient sur des théories alarmistes, mais des cris
d'alarme qui nous étaient véhiculés par l'ensemble des
citoyens de nos comtés, par l'ensemble des entrepreneurs et par
l'ensemble des travailleurs.
Je suis heureux qu'en ce début de session le menu de cette
Assemblée, qui a été pendant le premier mandat de ce
gouvernement et au début de son deuxième mandat un menu
strictement à saveur constitutionnelle, commence à changer de
couleur. Ce qui me déçoit dans ce changement de couleur, c'est
que ceux qui nous parlaient le 13 avril dernier de rester forts, ceux qui nous
parlaient d'une équipe capable de gouverner le Québec nous
parlent aujourd'hui, dans chacun de leurs discours, de l'impuissance du Parti
québécois face à la crise économique. Gouverner,
c'est prévoir. Cette crise était prévisible. Est-ce que
ces gens ont gouverné pendant les cinq dernières années au
Québec ou n'ont-ils pas simplement tenté de faire flotter un
bateau constitutionnel qui, aujourd'hui, coule à pic?
Tous les discours des ministériels visent à trouver un
responsable de cette crise économique. Jamais on ne se regarde
soi-même et on dit: Peut-être que moi aussi, comme
député péquiste, comme ministre péquiste, je suis
responsable de ce qui arrive à la population québécoise
présentement. Peut-être que je n'ai pas fait mon travail,
peut-être que mon hystérie constitutionnelle m'a fait oublier les
problèmes économiques
auxquels fait face la population. Si on avait cette prise de conscience
de l'autre côté, on pourrait croire que la motion qui nous est
présentée aujourd'hui repose sur un gouvernement qui a finalement
pris conscience de ses responsabilités et qui veut gouverner au
Québec. Mais non, c'est la faute à Ottawa, c'est la faute de
l'Opposition, c'est la faute des Américains, c'est la faute du contexte
économique mondial. Nous, qu'est-ce qu'on propose pour relancer cette
économie? Rien de précis.
Dans la Presse du mardi 2 mars 1982, on parle d'une entreprise de mon
comté, Daigle-Aqua, filiale d'une société ontarienne, une
PME québécoise, comme vous en parlez si bien de ce temps-ci, qui
est passée à des intérêts ontariens. Pourquoi? On va
revenir à l'article de la Presse: "Daigle-Aqua, suivant son
président, M. Rosaire Daigle, a recherché sans succès
l'aide de la Société de développement industriel, une
créature du ministère de l'Industrie et du Commerce, mais n'a pu
obtenir ce qu'elle cherchait auprès de la SDI à cause de sa
lenteur extrême." Est-ce que c'est la faute du fédéral?
Est-ce que c'est la SDI qui est lente ou le fédéral qui est lent?
De qui relève la Société de développement
industriel?
Une voix: C'est la Banque fédérale de
développement.
M. Paradis: M. le Président, il y a un "back-bencher",
maintenant "front-bencher" péquiste parce qu'il n'est pas à sa
place, qui nous crie: C'est la faute de la Banque fédérale de
développement. Il semble que M. Rosaire Daigle, lui, l'entrepreneur,
dit: C'est à cause de la lenteur extrême de la
Société de développement industriel, une institution
québécoise. C'est justement le genre de réaction qu'on
obtient de l'autre côté de la Chambre, c'est toujours la faute de
quelqu'un d'autre. (11 h 40)
On a des outils au Québec présentement, on a un
ministère de l'Industrie et du Commerce présentement, on a des
programmes dont les programmes de la SDI, on a des réductions, on a des
prises en charge d'une partie du taux d'intérêt lorsque des
Québécois se lancent en affaires, on a des programmes pour
avantager nos exportations lorsque des Québécois veulent aller
à l'attaque des marchés extérieurs. Mais qu'est-ce qu'on a
fait, au cours de l'année passée, avec ces programmes? Il n'y
avait pas de fonds, il n'y avait pas d'argent. Mais où est passé
cet argent, messieurs de l'autre côté? Pourquoi avez-vous
saigné à blanc ces programmes? Pourquoi faites-vous crever ce
genre de PME avec votre lenteur excessive?
M. le Président, le dynamisme - j'en prends à
témoin le député de Shefford, on a des comtés
voisins - des gens de la région s'est manifesté encore
dernièrement à l'occasion du lancement d'un projet important pour
toute la région. Il s'agit d'un projet de zone,
récréotouristique de Bromont, Waterloo et lac Brome. Les
fonctionnaires de l'OPDQ qui étaient sur place, du ministère de
l'Industrie et du Commerce, ont été emballés par la nature
de ce projet, ils attendent de passer à l'action, les projets sont
explicités, prêts, il y a des investissements incroyables qui se
feraient dans le monde touristique au Québec, mais ils n'ont pas
d'argent. Où est passé l'argent que vous récoltez à
même les impôts des Québécois et à même
les taxes indirectes? Où est passé cet argent?
M. le Président, ce projet est un projet auquel les gens de la
région ont confiance, mais cette confiance va-t-elle durer longtemps
s'ils analysent le contexte, s'ils réalisent ce qui est arrivé
à quelques milles de là, dans le comté d'Iberville,
à un développement touristique au lac Champlain, un lac
international situé à 40 ou 45 minutes de Montréal, et
où, dans une entente fédérale-provinciale, le
fédéral avait mis de côté 3 500 000 $, qui
représentaient 60% du coût de réalisation du projet, et le
provincial devait fournir 40%, dans le cadre de cette entente? Cela fait cinq
ans que le PQ est au pouvoir, ça fait cinq ans que les 3 500 000 $ sont
disponibles et ça fait cinq ans que le PQ ne fournit pas ses 40%. Est-ce
que c'est la faute du fédéral, ça?
M. le député qui grimacez, vous vérifierez avec le
député d'Iberville, il va vous confirmer ça; je suis
sûr qu'il a tout fait, mais encore une fois les coffres du Québec
étaient vides.
Où va l'argent qu'on vous donne comme contribuables?
M. le Président, lorsqu'on parle de zone
récréotouristique, lorsqu'on parle de développement
touristique, qui est une industrie de première importance dans plusieurs
régions du Québec, on se doit également de parler de
signalisation routière. M. le Président, vous représentez
un comté frontalier. Si vous allez dans l'État du Vermont - si
vous aviez l'habitude d'aller avant que vous ne cumuliez les importantes
fonctions que vous cumulez présentement -sur la côte du Maine,
vous avez de la signalisation bilingue. Pourquoi? Parce qu'on avait compris
dans ce coin-là que, pour attirer les touristes francophones du
Québec, il fallait savoir les recevoir et une petite attention
spéciale c'était de leur indiquer où ils allaient dans
leur langue.
Dans la zone touristique des Cantons de l'Est, il n'est pas question de
permettre une signalisation touristique bilingue et la clientèle
visée, les fonds qu'on veut amener ici, dans notre économie,
viennent des États-Unis et de l'Ontario; c'est du tourisme qu'on
recherche aussi. Mais non, on va réglementer.
M. le Président, dans les régions frontalières du
Québec, savez-vous quel a été l'impact de la taxe
ascenseur Parizeau sur le prix de l'essence? Vous devez le savoir, en votre
qualité de député, lorsque vous n'occupez pas des
fonctions aussi neutres que celles que vous occupez présentement; vos
concitoyens doivent vous le dire. Des diminutions de 50% à 75% du
volume. Est-ce que la taxe ascenseur Parizeau sur l'essence c'est la faute du
fédéral?
Hier, l'ensemble des Canadiens ont subi une augmentation du prix du
pétrole, mais le Québec, lui, encore plus que les autres, 0,02 $;
ça, c'était hier.
M. le Président, si on veut rebâtir et relancer
l'économie au Québec, il va falloir commencer à faire
confiance - je pense qu'on ne peut plus faire confiance à ce
gouvernement-là - aux Québécois dans nos régions,
aux entrepreneurs comme aux travailleurs. Pour faire confiance à ces
gens-là, si le PQ n'est pas capable de les aider, au moins qu'il
arrête de les étrangler par toute la réglementation qu'il
leur impose et les taxes indirectes avec lesquelles il les assomme. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Maurice Dupré
M. Dupré: Merci, M. le Président. À l'heure
où la situation économique mondiale devient des plus tendues,
à l'heure où le Québec est de plus en plus ballotté
au gré des remous dont l'origine, bien qu'elle nous soit bien connue,
échappe la plupart du temps à notre contrôle, il
m'apparaissait des plus urgents que notre gouvernement du Québec
redouble d'imagination afin de trouver pour notre société
québécoise des avenues originales qui exploitent notre potentiel
propre.
À cet égard, M. le Président, le programme de fonds
d'urgence afin d'aider les entreprises manufacturières mentionné
dans la motion du ministre d'État au Développement
économique était tout désigné, et je me permets de
la relire pour les concitoyens. "Que l'Assemblée nationale appuie la
proposition faite par le Québec lors de la dernière
conférence des premiers ministres sur l'économie concernant la
constitution d'un fonds d'urgence destiné à aider prioritairement
nos PME québécoises et à soutenir la création
directe d'emplois; et demande au gouvernement fédéral, d'une
part, de modifier sa politique monétaire pour donner priorité
à la lutte contre le chômage et, d'autre part, d'accepter de
participer financièrement au fonds d'urgence proposé par le
Québec."
Il est très important que la population sache que le cheminement
de ce projet fut appuyé par la Chambre de commerce. Je vais citer
quelques passages: Innovateur et bien adapté aux problèmes
rencontrés actuellement par de nombreuses petites et moyennes
entreprises, le fonds d'urgence réclamé par le gouvernement du
Québec devrait être mis sur pied avec l'aide du gouvernement
fédéral. Telle est l'opinion de M. Serge Saucier,
président de la Chambre de commerce de Montréal. Ottawa devrait
accéder à la demande raisonnable du Québec car ce fonds
d'urgence est très intéressant, imaginatif, pour aider les
entreprises saines à traverser la dure crise économique.
Comme ce n'est pas tous les jours que divers organismes de ce genre
appuient les motions du gouvernement, je m'empresse de citer le Conseil du
patronat. Le Conseil du patronat du Québec a dit aujourd'hui, ce 22
février, souscrire pleinement à l'idée du gouvernement du
Québec de mettre sur pied un programme visant à minimiser les
effets de la politique fédérale actuelle de taux
d'intérêt élevés sur les petites et moyennes
entreprises. Le Conseil du patronat appuie également le gouvernement du
Québec dans ses démarches auprès d'Ottawa pour que le
gouvernement fédéral participe au financement de ce programme.
Selon encore le Conseil du patronat, il y a lieu d'aider les petites et
moyennes entreprises à passer à travers la période
difficile actuelle et le gouvernement fédéral, maître
d'oeuvre de la politique monétariste, va faire sa part à cet
égard.
Même la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante approuve le plan d'urgence du gouvernement du Québec
et va encore plus loin. Elle demande que le gouvernement fédéral
participe à 100% dans un volet concernant les PME manufacturières
au Québec.
Lorsque, la semaine dernière, j'ai entendu le
député de Notre-Dame-de-Grâce, dans son discours, lui, la
voix du Parti libéral en la matière, affirmer certaines choses,
je me suis dit: Dupré, tu es un peu loin du député de
Notre-Dame-de-Grâce; tu as peut-être mal compris. Mais après
avoir obtenu copie de son discours, voici ce que le député de
Notre-Dame-de-Grâce disait: "Ce sont les deux plans d'urgence de relance.
Le premier, c'est le financement à taux réduit de certaines
industries dans le domaine de la PME. Premièrement, je veux que tout le
monde sache que les deux propositions faites par le gouvernement aujourd'hui
touchent uniquement les PME manufacturières. Les PME
manufacturières comptent à peu près 10% des travailleurs
au Québec."
Un peu plus loin, il dit ceci: "Deuxièmement, quant à moi,
les bénéfices seront minimaux. Je répète que cela
va toucher 2%, 3% ou peut-être 10% des
employés québécois. Finalement, M. le
Président, je dois vous dire que c'est un programme qui ne nous
impressionne pas beaucoup, continuait le député de
Notre-Dame-de-Grâce. Je ne pense pas que cela va impressionner
énormément le gouvernement fédéral et la population
du Québec. Ce sont des "peanuts". (11 h 50)
Je ne crois pas que les travailleurs et les travailleuses des
manufactures Casavant, Le Bahutier, de Volcano, à Saint-Hyacinthe, et
des frères Gingras, à Saint-Damase, dans mon comté,
considèrent que 10% des travailleurs du Québec, ce sont des
"peanuts". 10%, ce sont des milliers d'emplois que ce plan
récupérerait.
Lorsqu'il s'agissait de verser des centaines de millions à
Chrysler, Massey-Ferguson, à Ford, à Consolidated Computers, on
ne parlait guère de lourdeur administrative. Il est vrai que
c'était pour l'Ontario. On ne parlait guère de la lourdeur
administrative qu'on évoque présentement pour éluder la
question et opposer une fin de non-recevoir au plan d'urgence du Québec,
mais, sans cette aide financière appropriée, beaucoup de ces
entreprises devront procéder, si ce n'est déjà fait,
à des licenciements collectifs pour fermer leurs portes.
Je me fais fort de tous ces appuis et fort aussi de l'appui de tous les
travailleurs, les chômeurs et les chômeurs en devenir, et
particulièrement ceux de mon comté, en sachant qu'au
Québec, de 1976 à la mi-1981, la création d'emplois allait
très bien, mais, depuis septembre 1981, la situation se
détériore à un rythme accéléré. La
principale raison: les hauts taux d'intérêt. La
répercussion des taux d'intérêt a été et
continue d'être désastreuse pour les PME, sans oublier la
majorité des fermiers du Québec.
Regardons de plus près certaines déclarations
fédérales comme celle de M. MacEachen dans la Presse du 6
février 1982: "On ne m'a pas encore convaincu que ma politique
était un échec..." Mais 1 000 000 de chômeurs au Canada, M.
MacEachen, ça ne vous suffit pas? Est-ce que ça vous en prend 2
000 000 ou 2 500 000 pour vous convaincre, vous et votre boss, que vous
êtes en train de ruiner le pays et en particulier le Québec?
On n'est pas à l'heure de créer des emplois à coups
de millions, on est à l'heure de fouiller jusqu'au plus profond de
nous-mêmes pour sauver des jobs. En refusant l'appui à cette
motion du gouvernement, laquelle a reçu l'appui de tout le Québec
-les quatre organismes que j'ai cités tantôt représentent
la plus grande partie des petites et des moyennes entreprises - les rouges d'en
face demeurent liés aux 74 Midas du Québec à Ottawa, les
silencieux à vie, et ceux-ci contribuent, au nom de théories
irresponsables et de petites politiques, à abattre froidement des
centaines d'entreprises et des milliers de jobs.
Mesdames et messieurs de l'Opposition, comment pouvez-vous être si
près physiquement et si loin mentalement et psychologiquement de ce
peuple du Québec qui ne vous demande, par cette motion, que du pain et
du beurre? Certaines entreprises sont encore debout, mais les chômeurs
déjà à genoux. Le spectacle est triste à voir.
Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si j'ai choisi
d'intervenir sur la motion du gouvernement qui est présentement devant
nous, c'est pour tenter de rétablir certains faits. Avant d'aborder la
motion elle-même, je voudrais quand même dire à mes
concitoyens du Québec devant quelle manoeuvre nous nous trouvons, et je
le dis très sincèrement, M. le Président. Nous sommes
devant une manipulation de l'opinion publique par le gouvernement, manipulation
qui dure depuis trop longtemps et je suis convaincue que la population s'en
rend de plus en plus compte. C'est une manipulation de l'opinion publique qui
tente d'associer l'Opposition aux querelles et aux conflits du gouvernement du
Parti québécois avec le gouvernement du Canada.
On essaie, en nous invitant à nous associer à des votes,
de convaincre la population - ce que le gouvernement seul ne parvient pas
à faire - que, de toute façon, le Québec ne peut plus
rester à l'intérieur du Canada parce que le gouvernement
fédéral, le gouvernement d'Ottawa n'a que des mauvaises
intentions, ne veut jamais aider le Québec, est toujours contre le
Québec. Le gouvernement du Parti québécois,
quotidiennement, presque d'heure en heure, s'il le pouvait, à la
télévision, par les journaux, par les motions qu'il nous
présente et auxquelles il nous demande de nous associer, s'est rendu
compte qu'il n'est pas capable, seul, de convaincre la population du fait que
le gouvernement fédéral, à ses yeux, est un ennemi du
Québec dans tous les domaines.
Parce que c'est toujours l'objectif du Parti québécois de
faire l'indépendance et la souveraineté; ce n'est pas ressusciter
de vieux cadavres puisque, il n'y a même pas un mois, le Parti
québécois lui-même, en congrès, revenait avec cette
motion qui sera désormais le sujet de la prochaine élection au
Québec: la souveraineté ou l'indépendance du
Québec. Sentant que, dans tous les sondages, la population est encore
très majoritairement contre cette option du Parti
québécois, il se dit: Quels sont les moyens qui restent
à ma portée pour convaincre la population du Québec que
nous avons raison? Dans une manoeuvre fort habile, mais dont les gens sont de
moins en moins dupes, il nous arrive avec des motions qui - je le
démontrerai tout à l'heure - n'ont même pas leur raison
d'être. Il nous arrive avec des motions dans lesquelles il dit: Vous, de
l'Opposition, venez nous appuyer sur la vertu et là peut-être
qu'on parviendra à convaincre nos concitoyens que le pays ne peut plus
fonctionner tel qu'il est. Nous refusons de participer à ce jeu qui est
un jeu de manipulation de l'opinion publique, pour ne pas parler d'un jeu qui
manque de transparence et d'honnêteté.
M. le Président, voulez-vous une autre démonstration? On
assiste, de l'autre côté, à un autre type de manipulation.
Vous savez que ce gouvernement a présenté le projet de loi no 46
pour changer les structures actuelles de la Communauté urbaine de
Montréal. C'est présentement en discussion, nous avons des
auditions parlementaires et je les ai quittées pour venir ici. Nous
avons devant nous à l'heure actuelle le maire Drapeau. Ce gouvernement,
j'imagine, quand il a préparé ce projet de loi, a dû le
soumettre à son caucus. Le projet de loi prévoit la parité
entre les banlieues et la ville de Montréal quant aux pouvoirs à
l'intérieur de la Communauté urbaine de Montréal sans
ajouter qu'en plus le gouvernement se donne le pouvoir de nommer lui-même
le président. Là, on va tout contrôler. Ceci dit, il me
semble que le caucus devait être d'accord avec ce projet du gouvernement.
Je suis sûre qu'on ne l'a pas improvisé en une nuit, qu'on l'a
mijoté depuis longtemps, ce qui est normal. Tout à coup, hier, on
a une déclaration des députés qui habitent la ville de
Montréal contre le projet de loi qui est présenté par leur
gouvernement. Là, on est présent partout. On est présent
avec ce que le gouvernement veut faire adopter et on se réserve une
petite marge de manoeuvre pour être aussi du côté de
l'opposition aux projets du gouvernement. Mais on demeure toujours à
l'intérieur de ce gouvernement, on est membre du parti
ministériel et personne ne songe à démissionner quand
arrivent ces questions de principe. (12 heures)
On a eu la même chose avec les coupures budgétaires. Vous
savez - et nous aurons l'occasion d'y revenir - comment les coupures
budgétaires affectent la population en dépit de ce que le
gouvernement a dit et, là encore, du côté
ministériel, on a trouvé neuf ou onze députés qui
ont dit: C'est très mauvais les coupures budgétaires. Ils avaient
tous voté pour le budget. J'ai fait le relevé, il n'y avait
peut-être un ou deux sur les onze qui n'étaient pas ici au moment
du vote. Mais les autres étaient tous ici. Là, on veut faire
croire à la population qu'on est parfait sur toute la ligne. M. le
Président, on ne peut pas continuellement jouer deux rôles sans,
à un moment donné, que la population s'aperçoive qu'on la
trompe, qu'on la manipule. La population du Québec commence à en
avoir marre de cette manipulation de l'opinion publique qui se fait sur son dos
et au détriment des intérêts des
Québécois.
M. le Président, venons-en à la motion. On a devant nous
une motion qui réclame, vu qu'il y a une situation d'urgence, que le
gouvernement fédéral intervienne pour aider le Québec
à résoudre les problèmes économiques auxquels la
population fait face présentement. Écoutez bien, qu'il y ait
urgence dans la situation économique au Québec, c'est une
vérité fort évidente. Pas plus tard qu'avant-hier,
j'étais dans un cégep, et même pas dans un de ces
cégeps que l'on retrouve dans des milieux défavorisés de
la ville de Montréal, j'étais au cégep Bois-de-Boulogne.
J'ai parlé et causé avec quelque 300 étudiants, sinon
plus. Je leur ai demandé, comme il est normal, quelles options ils
avaient prises au cégep, ce qu'ils prévoyaient faire. Le
découragement de ces jeunes, je vais vous en donner un exemple. Il y a
au-delà de 200 étudiants en technique infirmière
qu'autrefois on appelait le cours d'infirmière, pour devenir
infirmières ou infirmiers. Ces jeunes savent fort bien qu'à leur
sortie, ceux qui sortiront cette année et l'an prochain, il n'y aura pas
un seul emploi disponible dans les hôpitaux ou dans les centres d'accueil
parce qu'il faudra d'abord replacer tous ceux que les coupures
budgétaires ont mis en disponibilité et ce sont des jeunes qui
ont du dynamisme, ce sont des jeunes qui sont fort éveillés, qui
ont de l'initiative. Des jeunes, des fois on dit: Ils ont tel ou tel
défaut, mais il ne faut pas oublier que les jeunes d'aujourd'hui sont
encore plus dynamiques, à cause des chances qu'ils ont eues, que les
générations qui les ont précédés.
Ils ont dit: II nous reste une seule chance, maintenant. C'est de nous
en aller aux États-Unis ou vers l'Ouest. C'est notre seul espoir de
gagner notre vie. M. le Président, qu'on ait devant nous une motion du
gouvernement pour nous dire qu'il y a une situation d'urgence au plan
économique au Québec, il n'y a rien de très nouveau
là-dessus. Mais, cette autre manipulation du gouvernement, c'est de
faire croire - vous avez entendu les discours, je viens d'entendre celui qui
vient de terminer - à la population que tout ça, c'est uniquement
la faute des hauts taux d'intérêt. Cela se répète
à satiété de l'autre côté. D'accord, les taux
d'intérêt y sont pour beaucoup. M. le Président, vous savez
fort bien que les taux d'intérêt, qui ont été
à leur plus haut, je pense, au mois
de septembre, c'est quand même une réalité de la
dernière année, mais la situation dépressive de
l'économie au Québec a commencé avec la prise du pouvoir
par le gouvernement du Parti québécois.
M. le Président, je sais qu'ils n'aiment pas beaucoup ça
de l'autre côté. J'entendais hier le ministre de
l'Éducation, à qui mon collègue de Marguerite-Bourgeoys
posait une question sur la situation des universités, la reliant aux
difficultés qu'éprouve l'Université du Québec
à Montréal. Le ministre de l'Éducation se lève pour
nous dire que c'était la faute du fédéral. Des fois la
population doit nous entendre reprendre en arrière-scène - et je
m'en excuse si des fois cela l'ennuie - ce refrain: "C'est la faute au
fédéral." M. le Président, si on dit ces paroles, c'est
que constamment les seules réponses qu'on a de l'autre côté
de la Chambre, c'est toujours concernant la responsabilité du
fédéral. Le ministre de l'Éducation se lève et nous
dit: Écoutez, c'est la faute du fédéral, du renouvellement
des accords fiscaux entre Ottawa et le Québec qui fait que
l'Université du Québec a des difficultés. Mais c'est la
plus grande fausseté, M. le Président. Depuis 1977, 1978, 1979,
on a coupé les vivres aux universités et il n'était pas
question de taux d'intérêt. Quand ce gouvernement est
arrivé au pouvoir, les accords fiscaux
fédéraux-provinciaux étaient déjà conclus.
Ils ont vécu avec ces accords jusqu'à cette année ou
enfin, ils vivront avec de nouveaux accords à partir de l'année
budgétaire qui s'en vient. Ce sont là des choses absolument
inexactes. Mais pourquoi a-t-on commencé à couper dans les
universités à partir de 1977, 1978, 1979 et que cela va en
augmentant? C'est que ce gouvernement n'a pas été capable de
faire la distinction entre ses objectifs électoralistes et ses objectifs
sociaux. Trop souvent, ses objectifs électoralistes ont primé,
ont eu la priorité sur les véritables objectifs
socio-économiques du Québec.
M. le Président, nous sommes encore devant une motion qui ne rime
à rien, pour autant que je suis touchée. Nous avons les
intérêts du Québec à coeur tout autant que les gens
de l'autre côté. J'ai eu l'occasion à l'automne - je pense
qu'une partie de la population a mal compris notre geste et, s'il était
à répéter, je poserais le même geste -d'appuyer le
gouvernement sur une motion touchant la constitution où vraiment nous
croyions que les intérêts ou enfin, que les prérogatives de
l'Assemblée nationale étaient touchées par le projet de la
constitution canadienne. À ce moment-là, nous avons pris nos
responsabilités. Aujourd'hui, par cette manoeuvre, alors que le
gouvernement a toute la latitude voulue pour aller négocier avec Ottawa,
on me rétorquera: Hier, Ottawa a refusé. Mais Ottawa a
donné les raisons pour lesquelles il n'a pas répondu à la
demande du Québec. Le gouvernement continue de nous faire croire que
toutes les difficultés économiques sont reliées aux
difficultés des petites et moyennes entreprises, alors que l'on sait
fort bien que déjà, le fédéral intervient fortement
dans ce domaine. Pourrait-il intervenir davantage? C'est une autre
question.
De notre côté, nous avons proposé, hier, en
amendement à la motion du gouvernement, d'élargir cette motion
qui est devant nous de façon telle qu'elle ne se limite pas uniquement
à venir à la rescousse des petites et moyennes entreprises, mais
qu'elle touche tous les secteurs de l'activité économique au
Québec; non pas la rétrécir à une seule chose que
le gouvernement d'en face, dans sa sagesse, semble voir comme la seule chose
urgente, alors que même si on recevait des millions de plus demain pour
les petites et les moyennes entreprises, on serait encore loin de
résoudre le problème des 335 000 chômeurs que nous avons au
Québec, un taux de chômage beaucoup plus élevé que
la moyenne canadienne. Soit dit en passant, le taux de chômage au
Québec, depuis l'avènement du Parti québécois, a
été continuellement supérieur à la moyenne.
Une voix: C'est faux!
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas faux, M. le Président.
L'écart de chômage, d'ailleurs, entre le Québec et
l'Ontario a toujours été plus grand depuis l'avènement du
Parti québécois au pouvoir qu'il ne l'était auparavant.
Non, il était inférieur autrefois à celui de l'Ontario
avant que vous arriviez au pouvoir.
M. le Président, je veux revenir sur cette question des taux
d'intérêt, parce que c'est un des résultats de l'amendement
que le député de Bonaventure, le leader de l'Opposition avait
proposé hier en ce qui touche la politique des taux
d'intérêt qui est incluse dans la résolution du
gouvernement. Il y a encore ici une incohérence. Alors que de l'autre
côté, on crie, on tient responsables les taux
d'intérêt pour toute la crise économique du Québec,
en même temps, le premier ministre va demander - et je l'ai quelque part
ici - que l'on ne maintienne pas les taux d'intérêt à plus
de 1% des taux d'intérêt américains, alors qu'à ce
moment-là, comme plusieurs de mes collègues l'ont fait remarquer,
on donne carte blanche au gouvernement du Canada. D'une part, on dénonce
ces taux d'intérêt et, d'autre part, on lui donne un chèque
en blanc pour lui dire: Écoutez, pas plus que 1%. On lui dit même
de quelle façon il devrait fixer ses taux d'intérêt, on lui
dit: Pas plus que 1% de plus que les taux d'intérêt
américains. (12 h 10)
Une des raisons pour lesquelles je ne puis appuyer cette motion du
gouvernement,
c'est, premièrement, parce qu'il fait preuve de mauvaise foi.
Faudrait-il relire la motion du député de Bonaventure, hier, et
contre laquelle, ce matin, le gouvernement a voté: "Que
l'Assemblée nationale appuie la constitution d'un fonds d'urgence
destiné à aider prioritairement nos PME québécoises
et à soutenir la création d'emplois directs et demande au
gouvernement fédéral d'accepter d'y participer." Les gens du
gouvernement ont voté contre cela ce matin.
Maintenant, on revient avec une motion dans laquelle on dit: II faut que
le gouvernement fédéral change sa politique monétaire et
on l'encourage, d'une part, à diminuer ses taux d'intérêt
et, d'autre part, on lui dit: Quand vous fixez les taux d'intérêt
au pays, ne les fixez pas à plus de 1% que les taux américains.
Devant cette incohérence du gouvernement, je ne veux pas être dupe
d'une manipulation.
Deuxièmement, je vais voter contre cette motion parce que je
pense que, continuellement, on assiste à cette autre forme de
manipulation qui est de toujours rejeter sur les autres la
responsabilité des difficultés économiques du
Québec. Je vais vous donner seulement quelques exemples. Combien
d'études le gouvernement fait-il refaire et refaire encore par des
firmes extérieures, alors qu'il a déjà les données
en main? Est-ce que c'est pour occuper une fonction publique quand on le fait
à l'intérieur des ressources du gouvernement, qu'on ne sait pas
quoi faire, que le gouvernement ne sait pas comment utiliser l'argent?
Je vais vous donner un exemple. J'écoutais à la radio,
l'autre jour, une information concernant la fameuse question des casinos. On
dit que le ministre des Finances, M. Parizeau, à un moment ou un autre,
avait fait faire des études de rentabilité des casinos comme une
possibilité au Québec. Il en est venu à la conclusion,
selon les études qu'il avait obtenues, qu'il fallait y regarder de
très près avant de s'engager dans un tel type d'entreprise.
À la radio, pas plus tard qu'il y a trois semaines, on nous disait que
le ministre du Revenu, le député de Sherbrooke, qui n'est pas
content des conclusions auxquelles en sont arrivées les études
commandées à l'époque par le ministre Parizeau, avait
engagé une autre firme pour refaire des études qui pourraient
arriver à une conclusion qui satisfasse les promesses électorales
du ministre du Revenu.
J'ignore comment ces études coûtent, mais je pourrais vous
dire à satiété que ce gouvernement a dépensé
énormément d'argent pour des études dans ses livres. Le
rapport Jean vient de nous coûter 3 000 000 $, mais le gouvernement ne
pourra pas l'exécuter parce qu'il ne nous reste plus d'argent en caisse
et, au même moment où il finançait cette étude, il
coupait à tort et à travers dans les services à
l'éducation des adultes.
Je ne veux pas être dupe d'un gouvernement qui essaie
continuellement de justifier ses carences et son manque de
responsabilité en en rejetant la faute sur les autres. Que le
gouvernement prenne d'abord ses responsabilités et qu'il agisse. Cela
fait assez longtemps que, dans cette Chambre, on discute des difficultés
économiques du Québec, qu'on passe maintenant à l'oeuvre.
Qu'on essaie de faire le lien direct uniquement entre les taux
d'intérêt et les difficultés économiques du
Québec, c'est de la supercherie. Les difficultés
économiques auxquelles nous faisons face... Je me souviens du temps
où mon ancien collègue d'Outremont, André Raynauld,
était ici; il répondait au discours sur le budget du ministre
Parizeau et on en faisait des gorges chaudes de l'autre côté. Tout
ce que le député d'Outremont, à ce moment-là notre
critique financier, disait de l'administration du gouvernement, c'était
fort drôle. Il était un prophète de malheur, on essayait de
confondre ses chiffres. Je pense qu'on a aujourd'hui la démonstration
que lui et les critiques de l'Opposition au plan économique, qui se sont
succédé, ont eu raison durant ces quatre ou cinq dernières
années et on en recueille aujourd'hui les résultats.
M. le Président, mon conseil au gouvernement: qu'il regarde donc
en face là où il a manqué et qu'il prenne ses
responsabilités. Il a suffisamment de fonctionnaires, de conseillers et
il se dit suffisamment compétent; alors, qu'il trouve les solutions.
Nous sommes prêts à l'appuyer; nous l'avons démontré
hier en présentant un amendement qui justement voulait, entre autres
choses, voir si le gouvernement était sincère dans la motion
qu'il nous avait présentée. Ce matin, il a voté contre
notre amendement qui était vraiment l'essence d'une motion d'urgence au
plan économique.
M. le Président, nous ne pouvons pas être dupes de cette
manoeuvre du gouvernement. Je peux vous assurer que la population du
Québec attend que le gouvernement prenne des mesures et ça ne
sera pas long avant qu'il soit jugé pour son incompétence, son
manque de responsabilité et surtout le tort immense qu'il fait aux
Québécois non seulement aujourd'hui, mais à moyen et
à long termes.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur.
M. Guy Tardif
M. Tardif: M. le Président, j'ai quitté la salle
des commissions parlementaires où M. le maire venait faire sa
présentation sur le projet de loi de la Communauté urbaine de
Montréal pour attraper un petit bout du
discours de ma voisine, la députée de L'Acadie, que je
regrette de voir quitter à l'instant même, puisque j'aurais voulu
lui dire qu'elle a raison - si elle veut attendre deux minutes - que c'est vrai
que les taux de chômage sont plus élevés au Québec.
Là où elle a tort, cependant - elle le sait, c'est sans doute
pour ça qu'elle s'en va - c'est que ce n'est pas depuis 1976 que c'est
de même; c'est depuis 112 ans que c'est de même. C'est
congénital au système, M. le Président. C'était
ainsi du temps où les libéraux gouvernaient le Québec,
c'était de même du temps de l'Union Nationale et c'est de
même de notre temps. Ce n'est pas un phénomène
conjoncturel, c'est structurel. Quand Ottawa va donner des subventions à
l'Ontario, a Ford, à Chrysler, à Massey-Ferguson; quand la
Corporation de développement Canada bâtit une usine d'affinage de
cuivre à Timmins, à 90 milles par vol d'avion de Rouyn, tout
ça en Ontario; pourquoi se surprendre aujourd'hui que le taux de
chômage soit plus élevé au Québec. M. le
Président, des 40 000 000 $ que le fédéral a donnés
à Ford, 10 000 000 $ venaient des contribuables québécois.
C'est ce que la députée de L'Acadie semble avoir
oublié.
C'est à titre de ministre de l'Habitation et de la Protection du
consommateur que j'interviens dans ce débat sur l'économie, parce
que, en effet, si la relation entre l'économie et la construction est
bien connue - le dicton que tout le monde connaît "quand le
bâtiment va, tout va" - il y peut-être une autre relation qui est
moins connue de nos amis d'en face, mais du monde ordinaire, elle est bien
connue et qui dit que, si tu veux arriver dans ton budget, tu ne devrais pas
consacrer plus que le quart de ton revenu à te loger. Or, M. le
Président, je maintiens que, dans la situation actuelle, non seulement
on se trouve devant un problème économique grave d'une industrie
importante pour le Québec, celle de la construction, mais
également face à un problème social né de la
rareté de logements et, évidemment, de l'effet que ceci ne pourra
manquer d'avoir sur le prix des logements.
M. le Président, je vais essayer de prendre le ton le plus
neutre, celui qu'on pouvait avoir lorsqu'on enseignait, parce que j'ai
l'impression que c'est ça que ça prend aux gens d'en face pour
leur faire voir la lumière. On peut poser la question: Y a-t-il, oui ou
non, crise de la construction? La semaine dernière et hier encore,
j'entendais le député de Mont-Royal déclarer qu'en effet
il y avait crise. C'est déjà ça, il l'admet.
Deuxièmement, cependant, il disait que cette crise était
limitée au Québec; en tout cas, si elle n'était pas
limitée au Québec, elle était bien pire au Québec
qu'ailleurs et, troisièmement, évidemment, le Québec
était responsable de cette situation. (12 h 20)
Enfin, M. le Président, cette analyse à courte vue
partisane n'est pas de nature à rétablir la
crédibilité du député de Mont-Royal qui se
spécialise, comme on le sait, qui se repaît de
demi-vérités, d'insinuations, de relations non fondées, ce
qui est non seulement dans son cas de l'irresponsabilité, mais ce qui
est carrément, je pense, de la malhonnêteté intellectuelle.
Il suffit, M. le Président, d'ouvrir les journaux pour se rendre compte
que la crise est mondiale, internationale, que les États-Unis
connaissent un problème, au niveau des mises en chantier de la
construction, aussi grave, aussi sérieux qu'ici, et que la situation
décrite est uniforme, j'allais dire, dans tout le Canada, et que de
singulariser, comme il l'a fait, le Québec est carrément,
sinon...
Une voix: Malhonnête.
M. Tardif: Enfin, de l'aveuglement partisan, du moins de la
malhonnêteté.
À preuve, M. le Président, la Presse du 23 février
1982 qui cite une dépêche de la Presse canadienne. La source, ce
n'est pas le gouvernement du Québec, ce n'est pas la
Société d'habitation du Québec, c'est une source
fédérale, la SCHL. Écoutez bien, les gens d'en face, je
lis: "Le loyer élevé de l'argent causera une diminution de 9% des
mises en chantier de logements et fera de 1982 une autre mauvaise année
pour l'industrie de la construction, note la Société canadienne
d'hypothèques et de logement." Un peu plus loin, on continue: "Les
récentes prévisions de mises en chantier - pour tout le Canada,
pas le Québec, contrairement à ce que disait le
député de Mont-Royal hier -de logements menées par divers
experts vont d'un bas de 140 000 à un haut de 185 000 logements." Par
rapport aux mises en chantier de logements, par exemple, en 1976, qui
étaient de l'ordre de 273 000 pour tout le Canada et de 158 000 pour
l'année dernière, en 1980-1981, il s'agit là d'une baisse
généralisée et, encore une fois, c'est tout à fait
malhonnête de prétendre que la situation est pire au
Québec.
Cela va plus loin. L'exposé de la Presse canadienne nous apprend
que lorsqu'on examine les prévisions par province, les prévisions
de la SCHL, ce que n'a pas fait le député de Mont-Royal, on
constate que le Québec se situe parmi les cinq provinces, avec
Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick et le
Manitoba, où non seulement on ne prévoit pas une diminution de
9%, mais une augmentation. En fait, on prévoit 31 000 logements par
rapport à 29 000 l'an dernier, alors que la Nouvelle-Écosse,
l'Ontario, l'Alberta, la toute puissante Alberta, et la Colombie britannique
connaîtront de substantielles diminutions de
mises en chantier. Encore une fois, M. le Président, la source,
la Presse du 23 février, dépêche de la SCHL.
Je suis tout à fait d'accord qu'il ne faut pas se satisfaire de
cette situation, que 31 000 logements pour le Québec, ce n'est pas
suffisant. Je suis d'accord qu'il ne s'agit que d'une prévision pour une
année, mais je pense qu'il faut avoir l'honnêteté de dire
que la situation au Québec n'est pas pire qu'ailleurs et que la cause du
malaise, comme le déclare la SCHL, ne relève pas du gouvernement
du Québec ni des autres provinces, mais du fédéral qui
fixe le loyer de l'argent, qui fixe les taux d'intérêt.
Cependant, à supposer que nous parvenions à corriger la
myopie et le daltonisme du député de Mont-Royal, il nous
resterait à lui apprendre à ne pas conduire le nez collé
sur le pare-brise et à essayer de prendre un peu de recul de
façon à élargir son champ de vision. Je vais essayer de le
faire avec lui.
Pour la décennie 1970, il s'est construit, durant la pire
année au Québec dans cette décennie, 41 700 logements.
C'était la plus basse. La plus haute, 68 700. Donc, entre 41 000 et 68
000. En fait, ce sont les années 1975, 1976 et 1977 qui ont
été les meilleures dans cette décennie avec, par
année, 54 700 logements, 68 700 et 57 700. Puis, une diminution
dramatique, en 1980, 29 186; en 1981, 29 645, et j'ai parlé de la
prévision faite pour l'année 1982 qui avait d'abord
été fixée - toujours par la SCHL, et c'est important -
à moins de 29 000 logements, et qui a été rajustée
à la hausse à la suite de la publication du programme d'accession
à la propriété.
Or, qu'a été l'étude des causes - parce que c'est
important - pour savoir ce qui a amené un tel phénomène?
D'abord, durant la décennie 1970, on a eu une forte demande de
logements. En fait, le nombre des ménages au Québec est
passé de 1 600 000 à 2 100 000, une augmentation de 500 000
ménages au cours de la décennie. Donc, demande très forte.
En fait, le rythme de formation des ménages au cours de cette
décennie a été de 52 000 par année, chiffre qui a
été gonflé par l'apport de ce qu'on appelle les
ménages non familiaux.
Le deuxième facteur après la demande très forte, ce
sont les faibles taux hypothécaires réels. Encore là,
j'aimerais que le député de Mont-Royal et celui de
Marguerite-Bourgeoys qui faisaient les gorges chaudes, hier, soient là
pour se rendre compte de l'impact des taux d'intérêt. Est-ce qu'on
sait très bien que les économistes distinguent toujours entre le
taux d'intérêt réel et le taux d'intérêt
nominal? Or, le taux d'intérêt nominal, c'est celui que l'on paie
actuellement, par exemple 18%, alors que le taux d'intérêt
réel, c'est ce taux d'intérêt moins l'inflation.
Or, pour la décennie 1970, les taux d'intérêt
réels ont fluctué de trois dizièmes pour cent. En 1974,
alors que le taux d'intérêt nominal était de 11,25%, le
taux d'intérêt réel, parce que l'inflation se situait
à presque 11%, était à un tiers pour cent. Cela s'est
maintenu en 1973, 1974 et 1975. C'est important de se le rappeler, lorsqu'on
sait qu'à l'heure actuelle, parce que les taux d'intérêt
sont très élevés, des propriétaires sont
portés à demander des augmentations très fortes, trop
fortes. C'est important de savoir qu'en période de baisse des taux
d'intérêt, de taux d'intérêt très bas, comme
cela a été le cas en 1973, 1974 et 1975, il n'y a pas eu de
diminution de loyer.
C'est un phénomène qu'il faut prendre sur une
période de temps ainsi que le fait la méthode de fixation de la
régie, et ces augmentations dont on parle de 30%, 40% et 50%, sont
totalement inacceptables.
Troisièmement, il y a eu des mesures fiscales pour inciter les
gens à bâtir en 1974 ces abris connus sous le nom de MUR ça
venait d'Ottawa, c'est le Multiple Unit Residential Program, qui ont
été reconduites d'année en année, de 1974 jusqu'en
1979, réintroduites en 1980-1981 et que le budget MacEachen du mois de
novembre dernier a abolies pour l'année en cours. D'accord, il a fait
son discours sur le budget au mois de novembre, il l'a laissé se
continuer jusqu'au 31 décembre, mais en 1982 on ne pourra plus produire
de logements en vertu de ce programme.
Quatrièmement, il y a eu les PALL et PAAP qui étaient des
programmes d'aide à l'accession aux logements locatifs et aux logements
résidentiels.
Les conséquences de cette forte production de logements pour la
décennie 1970, ont été le fait que nous avons produit au
cours de cette décennie près de 500 000 logements au
Québec. 485 000 logements ont été produits en dix ans. Au
cours de cette même décennie, on a vu apparaître 481 000
ménages au Québec. Si bien que le solde a été
positif, on a réussi à faire en sorte que les taux d'inoccupation
de logements qui étaient inférieurs à l'unité, qui
étaient inférieurs à 1% en 1976, ont remonté en
1977 graduellement à 1,4%, en 1978 à 3,4% dans la région
de Montréal, en 1979 de 4,5%, en 1980, déjà, une baisse,
3,5%, en 1981, au printemps, 2,1% et, au moment où nous nous parlons,
des taux de non-occupation qui ont chuté à moins de 2%, en fait,
1,9% dans la région de Montréal. (12 h 30)
Évidemment, je pense que ce serait normal - et je vais le faire -
d'ailleurs, de dire que la diminution du nombre des logements qu'on a connue en
1977, 1978 et 1979 n'est pas attribuable aux taux d'intérêt, c'est
évident, c'était la nécessaire période d'ajustement
entre l'offre et la demande. En
1976, on avait produit presque 70 000 logements. C'était normal
que ça prenne un certain temps à se résorber dans le
marché. Mais, lorsqu'on arrive en 1980-1981 à 29 000 logements,
à ce moment-là, il n'y a qu'une seule explication, celle des taux
d'intérêt. Pour m'en assurer, je n'ai pas pris les chiffres sur
une base annuelle, j'ai fait tracer un graphique de la progression des taux
d'intérêt sur une base mensuelle. Chaque fois que les taux
variaient dans le mois, on a tracé un graphique indiquant en
parallèle, les mises en chantier.
Or, ce graphique - je ne sais même pas si la
télévision peut en saisir une partie -nous indique une relation
directe, étroite entre toute fluctuation des taux
d'intérêt, surtout lorsqu'elle atteint 1,5% à 2%, et le
nombre de mises en chantier le mois suivant. Cela est vérifié
depuis les 24 derniers mois. Donc, qu'on vienne nous dire ici qu'on s'en prend
au fédéral n'est pas exact; on ne s'en prend pas au
fédéral, on s'en prend aux taux d'intérêt qui sont
dans le domaine. Le député de Mégantic-Compton n'est pas
là, je ne suis pas sûr qu'il était d'accord avec les propos
du député de Mont-Royal, qui plane au-dessus de tout cela; il
était plus intéressé quand il se faisait des
développements de centres commerciaux, d'ailleurs. Le
député de Mégantic-Compton sait pertinemment que c'est
actuellement le problème dans l'industrie de la construction; la preuve
est que, pendant le discours de son collègue hier, il est venu me voir
ici pour me dire: Tardif, penses-tu que tu peux faire quelque chose sur les
taux d'intérêt? Es-tu prêt à aller à Ottawa
pour négocier quelque chose avec eux? Pendant que son collègue
disait que ce n'était pas le problème, le député de
Mégantic-Compton me disait: Tardif, le projet que l'APCHQ, l'Association
provinciale des constructeurs d'habitation, vous a soumis sur les taux
d'intérêt, penses-tu que tu pourrais faire quelque chose?
Penses-tu que tu pourrais convaincre Ottawa de l'appliquer?
C'est un peu cela l'attitude des gens d'en face. Évidemment, ils
ont fait leur "show" pour la galerie. Officiellement, ils ne peuvent pas nous
appuyer. Ils ne le peuvent pas, parce qu'il ne faut jamais appuyer le
gouvernement, ils vont plutôt se rallier aux gens d'Ottawa. Dans le fond,
ils savent pertinemment, du moins ceux qui connaissent la construction un peu,
que c'est ça, le problème, celui des taux d'intérêt
sur les mises en chantier.
M. le Président, on m'a dit que j'avais vingt minutes. Comme j'ai
commencé à 12 h 15, il me reste donc trois minutes pour
conclure.
M. Landry: Oui, mais vas-y mollo, parce qu'il doit rester du
temps pour les deux.
M. Tardif: Pour les deux?
M. Landry: II y en a encore un à parler de l'autre
côté.
M. Tardif: Ah! Je m'excuse. On m'avait informé que j'avais
vingt minutes.
M. Landry: C'est passionnant!
M. Tardif: J'aurais pu continuer assez longtemps pour indiquer
l'impact. Si, à l'heure actuelle, il se forme entre 40 000 et 45 000
ménages par année au Québec et qu'on produit 29 000
logements, cela veut dire qu'annuellement, depuis deux ans, et ce sera la
troisième année, il y a une demande frustrée de 15 000
logements par année, depuis trois ans. Les taux d'intérêt
sont responsables de cela. À l'heure actuelle, le programme d'aide
à l'accession à la propriété vient aider des
ménages. J'entendais le député de Mont-Royal dire: Cela
n'aide personne. J'aimerais bien qu'il vienne dire cela aux gens qui en
bénéficient présentement.
Je sens le député de Bonaventure qui manifeste beaucoup
d'impatience. Je m'excuse, M. le Président, je vais essayer de tirer une
conclusion à toutes ces notes que j'espère avoir l'occasion de
présenter de façon plus détaillée à un
moment donné.
Avec ses impôts, le Québec paie l'éducation, les
soins de santé, la voirie, le transport en commun et ces
matières, et canalise une partie de ses revenus par des revenus de
transfert aux municipalités. Ottawa,' c'est vrai qu'il paie les pensions
de vieillesse, M. le Président. Il paie aussi pour soutenir un dollar
qui vaut 0,81 $ américains et 0,40 $ par rapport au dollar de 1971 pour
acheter, au coût de 1 500 000 000 $, Petrocan et pour subventionner les
entreprises en Ontario. Nous disons à Ottawa, M. le Président,
c'est que si les taux d'intérêt qui mettent nos entreprises en
faillite ne suffisent pas, que si les taux d'intérêt qui font
fermer nos entreprises de construction, cela ne leur suffit plus, si les taux
d'intérêt qui font diminuer la construction de leurs logements,
cela ne leur suffit pas, je demande aux gens d'Ottawa et à nos amis d'en
face - j'excuse leur impatience, mais j'ai entendu sans broncher hier les
propos irresponsables du député de Mont-Royal; j'aurais bien
aimé qu'il soit là pour les entendre - s'ils partagent, les gens
d'Ottawa et les gens d'en face, le point de vue de M. Cosgrove. M. Cosgrove,
c'est le ministre fédéral responsable de l'habitation qui
disait...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Tardif: Oui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Votre
temps est écoulé.
M. Tardif: Je termine sur cette parole inoubliable de M. Cosgrove
qui disait: Well, Mr. Minister - je parlais toujours des problèmes de
l'habitation - I am not there so much to solve housing problems as to promote
Canadian unity. Voilà les paroles du ministre responsable de
l'habitation.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, si quelques-uns pouvaient
douter des raisons véritables de la présentation de cette motion
par le ministre d'État au Développement économique,
maintenant que le débat s'achève, point n'est besoin de chercher
plus loin. Le Parti québécois continue de faire de la diversion,
de présenter des motions de façon à faire oublier aux
Québécois ou tout au moins de tenter de leur faire oublier que
les vrais responsables de la majorité des problèmes d'ordre
économique que nous connaissons au Québec, c'est le gouvernement
du Québec, le gouvernement du Parti québécois.
M. le Président, dans le peu de temps dont je dispose, je ne vous
mentionnerai que deux exemples. D'abord, la taxe de 40% sur l'essence. Cela ne
provient pas d'Ottawa. Ce n'est ni Cosgrove, ni Trudeau, ni Lalonde qui ont
imposé une surtaxe de 40% sur l'essence. C'est le ministre des Finances
du Québec Jacques Parizeau. M. le Président, on peut se demander
à juste titre ce qu'aura comme résultat cette surtaxe au cours de
la prochaine saison touristique. M. le Président, vous qui, probablement
ou peut-être, prendrez deux semaines de vacances au cours de
l'été pour voyager en automobile avec votre famille, est-ce que
vous serez tenté de voyager au Québec, l'endroit où l'on
paie l'essence la plus chère que n'importe où au Canada et aux
États-Unis, ou si vous ne serez pas tenté d'aller justement du
côté des autres provinces canadiennes? Les économies
d'essence que vous pourrez faire au cours d'une journée seront presque
suffisantes pour acquitter la facture de votre chambre d'hôtel le soir,
M. le Président. C'est de ça qu'il s'agit au Québec.
Quand l'Association des pourvoyeurs de l'Outaouais Inc. s'adressait au
premier ministre et au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, M.
Biron, dans une lettre qu'elle lui faisait parvenir en date du 14
février, M. le Président, ces gens, avec leurs propres deniers,
sont allés participer à des expositions à Harrisburg, en
Pennsylvanie. Forcément, de ce côté, on pourrait dire:
Qu'est-ce qu'ils faisaient là? Justement, la clientèle, M. le
Président, en grande partie, vient de là. Ils ne disposaient
d'aucune publicité, d'aucune documentation de la part du gouvernement et
ils ne disposent même pas des dates des saisons de chasse et de
pêche pour l'an prochain. Ils ne disposent d'absolument aucun
détail sur les prix qu'on exigera pour les permis de chasse et de
pêche pour les personnes venant de l'extérieur. Ces gens,
justement, nous font valoir que leur carnet de réservations pour la
prochaine saison est bien en deçà de celui des années
dernières et, justement, une des raisons en particulier, c'est le manque
de renseignements qui ne relèvent pas du gouvernement
fédéral, mais c'est aussi le fait que la plupart de ces gens se
déplacent en voiture et qu'effectivement ils savent qu'au Québec
l'essence coûte plus cher que n'importe où ailleurs. Donc, ils
vont ailleurs, notamment, en Ontario. (12 h 40)
D'ailleurs, M. le Président, j'ai ici un dépliant bilingue
- c'est déjà beaucoup dire de la part de l'Ontario - qui donne la
possibilité aux touristes, à ceux qui visitent l'Ontario de
réclamer le remboursement de la taxe de vente. C'est une petite
différence avec ce que fait le gouvernement actuel chez nous, notamment,
où les policiers du ministère des Transports s'acharnent à
arrêter les gens qui ont le malheur d'aller acheter leur essence ou leur
propane en Ontario, parce que là aussi, en Ontario, on a enlevé,
il y a un an, la taxe sur le propane qui sert de carburant avec le
résultat qu'on le paie 0,17 $ le litre en Ontario et 0,39 $ au
Québec. Comme le disait le ministre d'État au
Développement économique: Les bons Québécois
n'iront pas acheter en Ontario. Mais non, les bons Québécois sont
des imbéciles, M. le Président!
M. Landry: Question de privilège, M. le Président.
Je n'ai jamais dit des sottises...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! Un instant! Un
instant, M. le ministre! Un instant, M. le ministre! M. le
député.
M. Gratton: M. le Président, si on veut parler de
sottises, je vais en citer une du ministre qui vient de se lever. Vous voyez,
c'est bien sa photographie dans un article de journal du 25 janvier 1982 qui
s'intitule: "La petite nation devra d'abord compter sur ses propres moyens,
Landry". C'est la vieille ritournelle. On l'entend dans l'Outaouais, nous
autres, à toutes les visites de ce fameux ministre responsable de la
région, M. le Président. Il disait: "Quant à la
possibilité que le gouvernement exempte la petite nation de la surtaxe
sur l'essence, M. Landry l'a écartée et a précisé
que dans un an les prix canadiens auraient rejoint les prix
québécois." J'ai hâte de voir s'il va
confirmer cela tantôt, que dans un an les prix canadiens auront
rejoint les prix québécois de l'essence, alors qu'on sait que
c'est une surtaxe de 40% qui s'ajoute au prix canadien de l'essence. Oh non! Il
fait signe que non, M. le Président. Je le mets au défi de dire
non publiquement tantôt. Je le cite, M. le Président: "II n'y aura
donc qu'une seule saison touristique qui sera affectée par cette mesure
dans votre région." C'est faux, M. le Président, et même si
c'était vrai, ce serait déjà suffisant pour mettre un bon
nombre d'industries et de petites entreprises en faillite dans notre
région et partout dans le Québec.
Je m'arrête là, M. le Président, parce que je sais
fort bien que le ministre responsable de l'Outaouais va régler cela du
revers de la main. Les bons Québécois restent au Québec.
Payez plus cher. Allons donc voir ce que l'Association des manufacturiers de
bois de sciage du Québec disait dans une lettre qu'elle adressait
à l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale.
C'est daté du 25 février 1982. C'est tout récent. On y
lit: "II y a quinze jours, l'Association des manufacturiers de bois de sciage
du Québec était mise au courant d'une nouvelle politique de
tarification des bois provenant des forêts publiques. Le ministère
de l'Énergie et des Ressources - du Québec, pas du
fédéral -veut imposer cette nouvelle tarification à partir
du 1er avril 1982." Or, M. le Président, pour couper au plus court,
citons seulement une partie de la résolution de l'association. "Attendu
que les droits de coupe ont déjà connu une hausse de 30% en 1981,
à laquelle l'association a réagi vivement, mais sans
succès: 30% en 1981, ce n'est pas le fédéral, c'est le
gouvernement du Québec. "Attendu que, toujours en 1981, le prix du
carburant a subi des hausses répétées compliquant
grandement la rentabilité des opérations des scieries;" La
surtaxe de 40%, ce n'est pas le fédéral, c'est Parizeau qui l'a
imposée. "Attendu que la Commission des transports du Québec -
pas du Canada, du Québec - a décrété une hausse de
15% à 20% des taux et tarifs du transport des matières
forestières alors que cette activité constitue un article
très important, près de 200 000 000 $ des opérations des
scieries; "Attendu que la hausse appliquée par Hydro-Québec - pas
Hydro-Canada, Hydro-Québec - est un coût additionnel important
dans les activités de l'industrie du sciage; "Attendu que la Commission
de la santé et de la sécurité du travail du Québec
- pas du Canada - exige des redevances toujours plus importantes pour chaque
tranche de 100 $ de la masse salariale affectée à ses
revendications; "Attendu qu'une taxe spéciale sur le carburant -
imposée par Parizeau, pas par MacEachen - a été
imposée de façon unilatérale par le ministère des
Finances; "Attendu que les augmentations de taxes, de redevance sont aussi
imposées à tout vent par d'autres ministères et une
quantité de commissions; "Pour toutes ces raisons, l'association, qui
représente 150 usines de sciage au Québec - il s'agit de PME dont
on se gargarise de l'autre côté - dont la production
équivaut à 75% de la production totale dans la province de
Québec, exige du gouvernement du Québec, pas du Canada, de
répondre dans les meilleurs délais a ses sollicitations
répétées de la demande de report sans intérêt
du paiement des droits de coupe. Tout ce que l'association demande, c'est de
payer plus tard ce que le gouvernement essaie de lui arracher par tous les
moyens, comme le ministre du Revenu fait présentement en saisissant les
salaires des pauvres salariés. Eux aussi subissent les contrecoups de la
crise économique.
Est-ce que le ministère du Revenu du Québec se soucie de
cette crise économique lorsqu'il va saisir les salaires des
travailleurs? Il le fait, nos bureaux de comté sont remplis de ces gens,
de ces individus qui viennent nous dire: Ils ont saisi mon salaire parce que je
leur dois 1200 $ ou 1300 $ d'impôt provincial. Les entreprises qu'on
affiche pour vendre aux enchères, dont on saisit les équipements
pour défaut de paiement des taxes au gouvernement du Québec,
est-ce que c'est la motion du brillant ministre d'État au
Développement économique qui va régler leurs
problèmes? Mais non, c'est du tape-à-l'oeil, cette motion du
ministre. C'est simplement pour pouvoir continuer à crier: C'est la
faute du fédéral, en espérant que les
Québécois vont se laisser berner, alors qu'ils le savent fort
bien puisqu'ils ont vécu l'expérience en mai 1980.
Avec tous vos mensonges, toutes vos demi-vérités, toute
votre stratégie étapiste... Vous avez vu le père de
l'étapisme? Il est parti. Ce sera votre tour, M. le ministre
d'État au Développement économique, de partir
bientôt - en tout cas, nous, dans l'Outaouais, on le souhaite quelque
chose de rare - pour qu'enfin on pense à régler les
problèmes du vrai monde et qu'on cesse d'essayer de faire croire aux
Québécois, sans trop jamais le dire, que la solution de tous nos
problèmes passe - j'allais dire par l'indépendance, mais on sait
que c'est un mot qu'on n'emploie pas - par la souveraineté-association
avec ou sans trait d'union, on ne le sait plus trop. Ils sont rendus à
faire des référendums dans leur propre parti pour essayer de se
convaincre qu'ils ont raison d'offrir quelque chose à la population.
M. le Président, je dis que cette motion du ministre est tout
à fait superflue,
elle ne mène nulle autre part qu'à permettre aux nombreux
députés péquistes, qui veulent se justifier... Ils ont de
la visite eux aussi dans leur bureau de comté, le lundi matin, et ils se
font dire par leurs commettants: Faites quelque chose, ça n'a plus de
sens de nous laisser aux prises avec une crise semblable. Pour se donner bonne
conscience, on envoie le brillant ministre d'État au
Développement économique et on lui dit: Fais-nous une petite
motion et arrange-toi pour qu'on puisse blâmer les autres, qu'on puisse
blâmer le fédéral, qu'on puisse blâmer les
anglophones, qu'on puisse blâmer les libéraux, forcément!
C'est sûrement à cause de l'Opposition puisqu'on a le malheur, de
temps en temps, de se faire l'écho de gens comme l'Association des
manufacturiers . de bois de sciage du Québec. Que je sache, ce n'est pas
une succursale du Parti libéral ni du Québec ni du Canada, c'est
un regroupement des usines de sciage, 75% de la production totale. Quand
l'Association des pourvoyeurs de l'Outaouais fait des demandes aussi
sérieuses que celles qu'elle a adressées au ministre de
l'Industrie et du Commerce, ce n'est pas le Parti libéral qui parle.
M. le Président, je dis et je répète que la motion
est une motion inutile. C'est un trompe-l'oeil, ce qui est bien
caractéristique du gouvernement du Parti québécois. Mais
je souhaite que la population du Québec ne s'y laisse pas prendre. Chose
certaine, en tout cas, l'Opposition libérale, jamais!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, avant de
vous accorder la parole, j'aimerais vérifier s'il y a consentement pour
qu'on puisse dépasser de quelques minutes l'heure prévue pour
l'ajournement. M. le ministre d'État au Développement
économique.
M. Bernard Landry (réplique)
M. Landry: M. le Président, je voudrais brièvement
remercier l'Opposition pour deux choses. Premièrement, pour son
consentement à ce que je dépasse de quelques minutes - je n'ai
pas l'intention d'en abuser - et, deuxièmement, pour nous avoir
aligné comme dernier orateur le député de Gatineau. C'est
de lui dont nous avions besoin pour démontrer le vide et l'ineptie de la
pensée économique du Parti libéral du Québec. Nous
avions besoin de lui en terminant ce débat pour réaffirmer une
servilité que jamais le Parti libéral du Québec n'a eue,
probablement même sous Adélard Godbout, vis-à-vis du Parti
libéral du Canada et des institutions fédérales en
général.
J'en donne une première preuve, ça s'appelle un
anachronisme; c'est une erreur dans le temps. Il a parlé
essentiellement, dans son intervention, de la taxe sur l'essence. Or,
l'effondrement économique est arrivé au mois d'août - des
mois et des mois avant que la taxe sur l'essence ne se produise - et,
secondement, entre-temps un effet de marché et une guerre de prix en ont
annulé complètement les effets.
Alors, je suis heureux que la population du Québec ait pu
constater, par cette simple erreur, la mauvaise foi évidente ou
l'incompétence - le député a le choix d'ailleurs et je
pense qu'il pourrait très bien réunir les deux choses en sa
même personne... Encore une fois, pour nous avoir illustré le vide
de votre pensée. Personnellement au député de Gatineau et
à l'Opposition, reconnaissance éternelle!
Maintenant, parlons de choses sérieuses. Je vais vous donner une
comparaison. Vous venez d'entendre parler un député
libéral du Québec, celui de Gatineau. Je vais vous citer un homme
que je ne connais ni d'Ève ni d'Adam, qui n'a été
élu ni dans la Petite Nation, ni dans l'Outaouais
québécois, un député du Nouveau parti
démocratique, M. Bill Blaikie, député de Winnipeg-Birds.
Winnipeg, je sais ce que c'est; Birds, c'est dans ce coin-là.
Une voix: Au Canada.
M. Landry: Voici ce qu'il dit: "L'arrogance et le manque de
coopération démontrés par les trois ministres
fédéraux face au plan d'urgence du Québec doivent
être dénoncés." Il ajoute: "Considérant le
désastre des politiques économiques du gouvernement
libéral au Québec, il faudrait condamner son attitude
cavalière et son refus de coopérer avec les provinces en
matière de développement économique." Un
député élu à Winnipeg parle plus pour le
Québec et va plus au coeur des problèmes qu'un
député québécois, soi-disant élu pour
représenter des Québécois à l'Assemblée
nationale, le député de Gatineau. J'espère que la
population fera son profit du contraste entre la députation servile
à Ottawa, celle que nous avons en face et même des observateurs
neutres du bout du Canada ou du milieu du Canada qui sont plus
québécois que le député de Gatineau
lui-même.
Le député de Gatineau a dit que notre motion était
sans but, qu'elle était inutile. Si elle était inutile, pourquoi
son leader s'est-il levé pour l'amender et défendre avec tant de
vigueur un amendement? Depuis quand, quand on n'est pas totalement absurde,
amende-t-on des choses que l'on croit inutiles? C'est une chose que le
député de Gatineau aurait pu nous expliquer.
Le but de cette motion était, premièrement, de mobiliser
l'Assemblée nationale du Québec pour inciter les vrais
responsables de la crise à agir, c'est-à-dire ceux qui
possèdent en ce pays le pouvoir économique véritable.
À moins d'être aveuglé
ou incompétent, tout le monde sait que les autorités
financières, d'Halifax à Vancouver, sont localisées
à Ottawa. Tout le monde sait qu'il n'y a pas de banque du Québec,
ni de dollar québécois. Tout le monde sait que ce n'est pas un
fonctionnaire québécois, mais M. Gerald Bouey qui décide
des taux d'intérêt. L'analyse, à la conférence des
premiers ministres, était unanime, sauf, évidemment, la voix des
fédéraux, à dire que la politique monétaire
était responsable de grands dommages causés à
l'économie d'un certain nombre de provinces dont le Manitoba et le
Québec.
L'Opposition a essayé de nier cela durant le présent
débat. Je pense - cela explique un peu leurs mécomptes et leurs
malheurs électoraux - qu'ils sont les seuls au Québec à
penser cela. C'est ce qui nous console. Quand on a eu avec nous le Conseil du
patronat, la Chambre de commerce, les dirigeants d'entreprises, les syndicats
du Québec, tous les syndicats du Québec qui sont allés
manifester à Ottawa... La plus grosse manifestation de l'histoire du
Canada! Le député de Gatineau n'a pas vu ça, lui. Ils
continuent à prétendre, les seuls de Hull à Gaspé,
que les problèmes économiques relèvent de
l'Assemblée nationale du Québec et non pas du vrai gouvernement
économique. Tant qu'ils penseront ça, nous serons en
sécurité électorale. Remarquez que ce n'est pas tout dans
la vie de se faire élire, mais c'est commode. Ils ont essayé, eux
autres, il y a moins d'un an et la population leur a dit ce qu'elle pensait
d'eux.
Donc, agir. L'attitude des fédéraux en cette
matière a été extrêmement décevante. Comptant
sur leur filiale, ils ont dit: Je suppose qu'au Québec ça va
passer, on va avoir quelques gars qui vont se lever à l'Assemblée
pour défendre notre arrogance et notre ineptie, ce qui ne manqua pas de
se faire par la bouche des porte-parole de l'Opposition. Qu'est-ce que les
fédéraux ont répondu à la demande bien
fondée du Québec sur le fonds d'urgence? Ils ont répondu
-écoutez ça, j'espère que tous les chômeurs nous
entendent : On a déjà des programmes. Ce qu'on fait est
très bien. On n'a pas besoin d'en faire plus. Tout ce qui devait
être fait est en place. Mais on a perdu 54 000 emplois industriels au
cours des dix derniers mois. Si ce n'est pas l'affirmation que les programmes
en place ne sont pas suffisants et qu'il en faut d'autres, je ne sais pas ce
qu'il faut au gouvernement fédéral pour se rendre compte de la
situation.
Nous avons des programmes, ont-ils dit, cela a été leur
premier argument. Parlons-en un peu de leurs programmes. Un des fers de lance
de l'aide fédérale aux PME était un programme qui
n'était pas dépourvu de bon sens, d'ailleurs, qui consistait,
pour les institutions financières, à acheter des obligations des
PME. Ce programme a induit des dépenses, d'Halifax à Vancouver,
de 1 500 000 000 $. C'est un énorme paquet d'argent, ça.
Savez-vous combien il y a eu au Québec? Il y a eu 113 000 000 $, et
c'est le fer de lance de l'action fédérale en matière
d'aide aux PME.
Le Québec n'a pas eu 10%, avec peut-être 35%, 40% et plus
des PME du Canada. Leur fameux programme a dépensé ici 113 000
000 $. L'argumentation qu'il y a déjà des programmes,
j'espère que les chômeurs québécois et les chefs
d'entreprises en prennent acte. Il y a des programmes fédéraux,
personne ne le nie. Ils sont insuffisants. Ils nous ont mis 54 000 personnes en
chômage au cours des dix derniers mois et, en plus, quand la performance
est bonne, cela se passe en Ontario, à Vancouver ou n'importe où,
sauf à Saint-Georges-de-Beauce, à Chicoutimi et à
Rimouski, qui sont les places qui nous intéressent, nous, vraiment, du
gouvernement du Québec.
Deuxième réponse du fédéral, qui
était à faire rire ou pleurer. M. Lalonde, le ministre
fédéral, a insisté lourdement pour nous dire que s'il ne
se joignait pas à nous dans notre fonds d'urgence, c'est que les
procédures législatives et réglementaires à Ottawa
étaient trop lourdes, trop lentes, que cela prendrait un an à
mobiliser cela. Évidemment, avant même que notre réponse ne
sorte, dans l'esprit de tous ceux et celles qui suivent l'économie,
était surgie une énorme question: Comment se fait-il que pour
Chrysler les réflexes du gouvernement du Canada soient à la
vitesse de l'éclair? Comment se fait-il que pour Massey-Ferguson on
règle cela en deux coups de cuiller à pot? Comment se fait-il que
dans les lois fédérales, on soit capable d'injecter 150 000 000 $
dans une seule entreprise, la Consolidated Computers, située en Ontario
et qu'on les perde les 150 000 000 $ et qu'il reste à peine de quoi
payer le syndic de faillite quand l'aventure est terminée? Comment se
fait-il que M. Herb Gray lui-même a remis 25 000 000 $ à cette
seule entreprise, alors qu'il savait pertinemment qu'elle était
vouée à la faillite? La machine fédérale a des
réflexes fantastiques de coureur olympique quand il s'agit de courir
à la défense des éventuels chômeurs ontariens, mais
elle se transforme en tortue et en tocard quand il faut agir pour les
chômeurs québécois. Comme si chômer à
Sept-Îles n'était pas aussi grave que chômer à
Mississauga ou à Sarnia.
Ils nous ont fait la preuve de ce que l'on démontre depuis des
années, ainsi que tous les économistes québécois
nationalistes et même non nationalistes, puisque j'ai cité MM.
Rabeau et Lacroix, qui ont consacré un ouvrage entier à dire que
la politique fédérale n'était pas en mesure d'agir
équitablement vis-à-vis de l'économie du
Québec et d'un certain nombre d'autres provinces d'ailleurs. Nous
n'avons jamais cherché à le nier. Alors, la première
partie de la résolution sur laquelle, de façon bien illusoire, on
demandait l'appui de l'Opposition officielle, elle consistait à
déterminer l'action avec les responsables de la crise et avec leur
argent, en grande partie, avec le gouvernement fédéral. (13
heures)
La seconde partie c'était pour non pas déterminer une
action québécoise, mais amener les fédéraux
à faire une chose plus importante encore que le fonds d'urgence,
probablement, et qu'un amendement de l'Opposition a tenté de faire
sauter, c'est-à-dire modifier cette politique monétaire devenue
diabolique. Cette politique monétaire pour les propriétaires de
maisons, les chefs d'entreprises, les gens des commerces et des services, est
devenue une véritable torture. La Banque du Canada et le gouvernement du
Canada depuis 10, 12, 15, 18 mois, sont les tortionnaires et les bourreaux de
l'économie québécoise. C'est aussi simple que ça.
Ils sont en train de nous tuer à petit feu par une obsession
monétaire de défense de la monnaie à tout prix
prêchée dans de vieux auteurs de la fin du XXIXe siècle et,
en plus, pour celui qui l'applique, avec une cruauté inlassable, ils ont
trouvé moyen de lui donner en pleine crise l'Ordre du Canada, ce qui est
un autre symbole de la désorganisation économique qui sera le
bilan du régime Trudeau. Quand ce régime est arrivé au
pouvoir, le Canada était au deuxième ou au troisième rang
du niveau de vie chez les nations occidentales. On est à peu près
au 15e rang et si Trudeau passe encore quinze mois là, on va se
retrouver au trentième, j'en ai l'impression.
Donc, nous avons supplié, encore une fois. Certains journalistes
ont dit que c'était humiliant pour nous de le faire et je ne le nie pas.
Pour sauver des emplois, pour relancer l'économie, le devoir d'un membre
du gouvernement n'est pas de se demander si la chose est humiliante ou pas,
c'est de se demander si elle est efficace ou non et si elle peut aider des
hommes ou des femmes à gagner leur vie, et c'est ça qui a
été notre obsession en cette affaire. Par conséquent, nous
avons demandé qu'une politique des taux d'intérêt plus
raisonnable soit appliquée. L'Opposition en a fait des gorges chaudes.
Elle a fait un amendement pour qu'on enlève tout ça, le coeur
même de la crise, parce que ça dépend d'Ottawa et qu'elle
se fait le défenseur inconditionnel d'Ottawa, elle a essayé de le
voiler. C'est une manoeuvre que vous avez ratée totalement. Il n'y a pas
50 personnes au Québec, toutes membres en règle de votre
formation, il n'en reste pas beaucoup de membres en règle de votre
formation, qui croient aux sottises que vous avez répétées
depuis deux ou trois jours. Vous avez beaucoup rigolé, par exemple,
parce qu'on demandait au gouvernement du Canada de ne pas dépasser de
plus de 1% le taux américain. On n'a jamais dit à Ottawa de
pratiquer 1% de plus que le taux américain. On leur a dit: Quand,
à cause de vos politiques monétaires obsessionnelles, vous sentez
le besoin de dépasser le taux américain parce qu'en particulier,
comme vous l'avez fait dans le cas de Pétrofina, vous exportez les
capitaux à milliards de dollars, si vous vous êtes
coïncés vous-mêmes comme vous le faites souvent, n'allez pas
à plus de 1%, si vous pouvez aller à 2% de moins et à 3%
de moins, tant mieux, c'est ça qu'on souhaiterait, mais, comme on sait
que vous vous êtes mis dans une situation impossible en exportant des
capitaux par portes et fenêtres pour mettre des drapeaux rouges et blancs
sur les stations d'essence, si jamais le fait que vous vous êtes
coincés vous porte à dépasser le taux américain, ne
le faites pas de plus de 1%. Surtout que vous savez qu'ils sont allés
à plus 4%. Au plus fort de la crise, le taux canadien a
été de plus 4%. On a eu le taux le plus élevé du
monde occidental.
C'était notre tentative, M. le Président, auprès
des libéraux d'Ottawa qui sont au pouvoir, auprès des
libéraux du Québec qui sont dans l'Opposition pour longtemps, de
les amener à réaliser le sérieux de la crise et à
nous appuyer. Jusqu'à maintenant, avec ceux d'en face, cela a l'air d'un
échec irrémédiable. Leur méconnaissance de
l'économie fera qu'ils ne pourront jamais analyser les choses
froidement. Avec ceux d'Ottawa, on va encore continuer, on a un comité
de fonctionnaires pendant un mois.
Ma conclusion de ce débat, qui est en même temps une
annonce: avec les moyens que nous avons qui sont ceux d'un gouvernement
provincial, un gros, mais provincial, comme ces gens d'en face ont voulu que
nous le soyons à jamais, des provinciaux - on ne le sera pas à
jamais, d'ailleurs, je vous en avertis - mais avec les moyens d'un gouvernement
provincial, nous allons nous-mêmes mettre sur pied dans les meilleurs
délais un fonds d'urgence qui ne fera pas de miracles. Nous ne sommes
pas les responsables de la crise. Nous n'avons pas les pouvoirs
économiques majeurs, mais avec ceux qu'on a, on fera ce qu'on peut et je
pense que c'est pour cela que la population du Québec nous a
réélus dans des temps difficiles, parce qu'on ne fait pas de
miracles, mais on fait ce qu'on peut, modestement.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau, en vertu de l'article 96?
Une voix: Très bien, Michel.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.
Ce n'est pas en vertu de l'article 96 ou peut-être bien que oui; vous
m'indiquerez si oui ou non. Le ministre, dans sa réplique, a
escamoté la question que je lui avais posée, à savoir si
la surtaxe sur l'essence s'appliquera pour plus d'un an.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, vous savez très bien que le ministre, dans son
droit de réplique... M. le député! M. le
député, vous savez très bien que le ministre, dans son
droit de réplique, réplique à ce qu'il veut bien. C'est
son choix le premier. Ce n'est ni à moi ni à vous de lui indiquer
quelle réponse donner. Avant de vous poser la question... Sur la motion?
Oui.
M. Chevrette: M. le Président, je demande le report du
vote après la période des questions et je vous propose, dans un
même souffle, la suspension de nos travaux jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, le vote sera pris
avant les affaires du jour, tel que prévu par le règlement.
Les travaux de la Chambre sont suspendus jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 07) (Reprise de la
séance à 15 h 12)
Le Président: Veuillez vous asseoir. Affaires courantes.
Déclarations ministérielles. Dépôt de documents. M.
le ministre des Institutions financières et Coopératives.
Rapport annuel du Surintendant des assurances
M. Parizeau: M. le Président, conformément au
règlement, j'ai l'honneur de déposer, en deux copies, le rapport
annuel du Surintendant des assurances sur la tarification en assurance
automobile au Québec en 1981.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
Rapport de l'Institut national de
productivité
M. Biron: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer, en deux copies, le rapport d'activité 1980-1981 de
l'Institut national de productivité.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
des Communautés culturelles et de l'Immigration, par le leader du
gouvernement.
Rapport annuel du ministère de
l'Immigration
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais déposer
le rapport annuel 1980-1981 du ministère de l'Immigration.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés. M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, j'ai reçu un rapport
du greffier en loi sur les projets de loi privés adressé aux
membres de l'Assemblée nationale du Québec qui se lit ainsi:
"J'ai examiné, suivant les règles de pratique, le projet de loi
no 225, Loi concernant Max Dubois. Le projet de loi est conforme à
l'avis et les avis ont été publiés."
Le Président: Rapport déposé.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Projet de loi no 225 Première lecture
Mme la députée de Dorion propose la première
lecture du projet de loi privé no 225, Loi concernant Max Dubois. Est-ce
que cette motion de première lecture sera adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Président: Adopté. Période de questions
orales des députés. M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président: Excusez-moi, VI. le leader, vous devriez
faire une motion de déférence, s'il vous plaît.
Renvoi à la commission de la justice
M. Bertrand: Très bien, excusez-moi, M.
le Président. Effectivement, je ferais motion pour que le projet
de loi privé no 225 soit déféré à la
commission parlementaire permanente de la justice.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Période de questions.
M. le député de Mont-Royal.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Demande d'enquête publique sur la SHQ
M. Ciaccia: M. le Président, hier, le ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur a déposé
à l'Assemblée nationale le rapport de M. Angers, le nouveau
président de la Société d'habitation du Québec. Le
rapport démontre que l'Opposition avait raison de ne pas lâcher et
de persister dans sa démarche et ses questions sur l'administration de
la Société d'habitation du Québec.
Par contre, le rapport ne fait référence ni à la
responsabilité gouvernementale ni au rôle de certains individus,
soit dans des ministères, au cabinet des ministres ou à la
fonction publique, dans le dossier. Les réponses aux questions que nous
avons posées au ministre de la Justice n'ont pas fait la lumière
non plus sur ces questions.
Ma question, je la pose donc au ministre de la Justice. Est-ce que le
rapport du procureur de la couronne fait référence à
l'admission par Jean Foisy d'avoir demandé à quelqu'un de payer
50 000 $? M. le Président, je veux que le ministre me comprenne bien. Je
ne demande pas si vous avez des preuves de la commission d'actes criminels. Je
demande au ministre s'il peut nous dire si le rapport fait
référence au fait que ce geste a été
posé.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, le député
de Mont-Royal sait très bien que, ni directement ou indirectement, je ne
parlerai du rapport du procureur de la couronne ni du rapport de police et du
contenu puisque je crois qu'en termes de responsabilité comme Procureur
général, je ne peux le faire.
Ce que je peux dire au député de Mont-Royal, il le sait
très bien, c'est que, quand on parle de cette enquête, c'est une
enquête qui a duré plusieurs mois. C'est une enquête de la
Sûreté du Québec qui a été faite d'une
façon très sérieuse. D'ailleurs, le député
de Mont-Royal lui-même a dit qu'il ne mettait en aucune façon en
doute le travail fait par la Sûreté du Québec,
enquête qui a donné comme conclusion qu'aucun acte criminel
n'avait été commis dans les trois volets auxquels je me suis
référé devant cette Chambre.
Concernant le quatrième volet, en ce qui a trait aux
présumées malversations concernant la Société
d'habitation du Québec, je puis dire au député de
Mont-Royal que le rapport des policiers est maintenant depuis vendredi dernier
entre les mains du procureur de la couronne et que l'analyse en est faite. Si
des plaintes doivent être portées, elles le seront.
Concernant toutes les déclarations auxquelles se
réfère le député de Mont-Royal et dont il a
été fait mention, d'ailleurs, dans les journaux, ici en cette
Chambre, de même que toutes les déclarations qui ont
été faites en cette Chambre concernant ce dossier, je puis dire
au député de Mont-Royal que la Sûreté du
Québec, ayant fait une enquête sérieuse, a
considéré, a pris connaissance, a analysé l'ensemble de ce
qui a été dit tant à l'Assemblée nationale que de
ce qui a été écrit dans les journaux. Le
député de Mont-Royal connaît les conclusions.
Le Président: M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, c'est vrai que je n'ai pas
contesté l'enquête de la Sûreté du Québec,
mais le ministre doit avouer que la Sûreté du Québec a des
moyens très limités comme pouvoirs d'enquête dans ce
dossier. Le ministre n'a pas répondu à ma question. On peut
qualifier les réponses du ministre de la Justice, depuis le mois de
décembre, de patinage artistique. Il refuse de répondre
clairement à certaines questions.
M. Bédard: M. le Président, question de
privilège.
Le Président: M. le ministre, sur une question de
privilège.
M. Bédard: Le député de Mont-Royal peut
faire la politique qu'il voudra avec ce dossier, en ce qui a trait au
ministère de la Justice, j'ai assumé la responsabilité que
doit assumer un Procureur général, à savoir qu'une
enquête complète soit faite, ce qui a été le cas, ce
que je suis en mesure de dire. À ce moment-là, le ministre de la
Justice a à se prononcer sur les incidences criminelles d'un dossier,
s'il y a lieu, lorsqu'une enquête a été faite. Or, cette
enquête est complète.
Je l'ai dit et je le redis au député de Mont-Royal qui
persiste à ne pas vouloir comprendre: Tout ce qui a été
dit, tant en cette Chambre qu'à l'extérieur, par les
députés, tout ce qui a été écrit - il peut
se
rappeler que M. Foisy a déjà fait l'objet d'un reportage,
je pense, dans le journal Le Devoir, entre autres - il est évident que
tous ces éléments-là ont été analysés
par la Sûreté du Québec. (15 h 20)
Le Président: M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: En continuant ma question au premier ministre, je
comprends très bien, M. le Président, le dossier. Je comprends
très bien que le ministre de la Justice refuse de rendre public le
rapport du procureur de la couronne malgré le fait que nous lui ayons
donné trois précédents où ces rapports avaient
été rendus publics.
Une voix: Cela ne fait pas son affaire.
M. Ciaccia: Cela ne fait pas votre affaire, vous ne voulez pas
faire la lumière, vous ne le rendez pas public.
M. Bédard: M. le Président...
M. Ciaccia: M. le Président, je n'ai pas
complété ma question au premier ministre.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bédard: J'ai une question de privilège, M. le
Président.
Le Président: Sur une question de privilège, M. le
ministre de la Justice.
M. Bédard: Contrairement à ce qu'affirme le
député de Mont-Royal, je n'ai jamais refusé de rendre
publics les rapports de police ou les études des procureurs de la
couronne sous prétexte que ça faisait ou que ça ne faisait
pas l'affaire du gouvernement. J'ai refusé - et ma position est la
même -de rendre publics les rapports de police et également les
études faites par les procureurs de la couronne parce que c'est ma
responsabilité, comme procureur de la couronne, d'agir ainsi. S'il
fallait rendre publics les rapports de police dans toutes les enquêtes,
vous commettriez des injustices incroyables...
Des voix: Oh! Oh! Oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît,
à l'ordre!
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je demanderais au ministre de ne pas cacher ses
intentions de refuser de rendre public un rapport qui devrait l'être en
faisant de la démagogie.
Je pose ma question au premier ministre. Le premier ministre n'avait pas
écarté la possibilité d'une enquête publique.
Nous avons épuisé toutes les étapes que le premier
ministre avait imposées...
M. Lalonde: On a même épuisé un ministre:
M. Ciaccia: ... sur la possibilité d'une enquête
publique. La question que je lui pose est celle-ci. Vu que le rapport Angers se
limite strictement aux aspects administratifs, qu'il ne touche pas une
série d'autres questions, puisque les réponses sont encore
vagues, M. le premier ministre, je vous demande: Quand allez-vous
décréter cette enquête publique pour enfin faire la
lumière sur tout ce dossier?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Contrairement à ce que dit
le député de Mont-Royal - ce n'est pas la première fois
qu'on ne s'entend pas sur les faits - le rapport de M. Angers sur la partie
administrative, les dossiers concernés, a été
déposé hier. Tout le monde est libre de l'étudier. On voit
l'ampleur des irrégularités. Il ne faudrait pas l'hyperdramatiser
non plus, mais c'est là.
Pour ce qui est de l'enquête policière, le ministre de la
Justice, à titre de Procureur général, vient de dire ce
qu'en conscience il devait dire, c'est-à-dire que c'est rendu chez un
procureur de la couronne et, s'il y a action à prendre, elle sera prise.
À ce moment-là, on aura tous les éléments et on
verra s'il y a lieu d'aller plus loin dans des enquêtes, mais non pas
pour faire plaisir au député de Mont-Royal ou pour continuer
à fabriquer des potins ou des rumeurs. Si cela paraît
indiqué, oui.
M. Lalonde: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Si on comprend bien, ils jouent à la balle, de
l'autre côté. Le premier ministre envoie des rapports au ministre
de la Justice et ce dernier dit qu'il ne peut les rendre publics. Comment
saura-t-on si les éléments des rapports qui sont remis au
ministre justifient une enquête publique puisqu'on n'en connaîtra
jamais ni le a, ni le b, ni le c? Est-ce que le ministre de la Justice croit -
je fais appel à son jugement, c'est très périlleux de ma
part - à la lumière des éléments insuffisants pour
poursuivre devant les tribunaux criminels peut-être, mais quand
même qui sont contenus dans les rapports que lui seul connaît,
est-ce qu'il ne croit pas, dis-je, qu'une enquête publique, avec les
moyens beaucoup plus considérables que ceux que les policiers ont,
à savoir, de faire témoigner
des gens, serait de nature à compléter la preuve
insuffisante, d'après ce qu'il dit?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, le député
de Marguerite-Bourgeoys est très habile. Il sait très bien que,
comme Procureur général, à la suite de faits qui sont
contenus dans des rapports, d'enquêtes qui sont poursuivies, j'ai
à me prononcer s'il y a lieu que des plaintes criminelles soient
portées ou non. Je n'ai pas à me prononcer sur d'autres aspects.
Je pense qu'il y a d'autres personnes qui sont indiquées, en termes de
responsabilité.
M. Lalonde: Si vous êtes le seul à connaître
ces rapports, comment voulez-vous que d'autres se prononcent sur
l'à-propos d'une enquête publique?
M. Bédard: M. le Président, justement, le
député de Marguerite-Bourgeoys a parlé de dossiers ou
d'information qui sont référés par le premier ministre au
ministre de la Justice. Ce n'est pas le cas du tout. À l'heure actuelle,
il y a un Vérificateur général, tout le monde le sait, qui
a fait enquête là-dedans. Il y a le président de la
Société d'habitation du Québec qui a également fait
un rapport, une étude. Tout cela a été
déposé, du point de vue administratif, à la connaissance
des membres de cette Chambre. Concernant des aspects qui pourraient être
présumés criminels, qui doivent faire l'objet d'enquête,
ces éléments ont été acheminés au
ministère de la Justice ont fait l'objet d'enquête par la
Sûreté du Québec, une enquête très
sérieuse que même l'Opposition ne met pas en doute. De plus, il y
a eu une étude sérieuse du dossier faite par un procureur de la
couronne chargé de ce dossier et, également, par la Direction
générale des affaires criminelles du ministère de la
Justice. Or, toutes ces personnes, y compris policiers, procureur de la
couronne et sous-ministre aux affaires criminelles concluent dans le même
sens, à savoir qu'aucun acte criminel n'a été commis. Je
pense que l'Opposition devrait être logique et accepter la conclusion,
puisqu'elle a reconnu en cette Chambre que l'enquête de la
Sûreté du Québec avait été faite très
sérieusement. Soyez logiques.
Une voix: Répondez à la question.
M. Bissonnet: M. le Président, une question
principale.
Le Président (M. Vaillancourt): Une question principale,
M. le député de Jeanne-Mance.
Stratégie gouvernementale de
communications?
M. Bissonnet: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Communications. Le ministre peut-il confirmer l'existence d'un
document se voulant une esquisse de stratégie de communications
destinée au comité ministériel permanent des
communications dont a fait mention, dans un article le 27 février
dernier, le journaliste Normand Girard dans le Journal de Québec.
Le Président (M. Vaillancourt): M. le ministre des
Communications.
Une voix: Un de vos employés?
M. Bertrand: M. le Président, je ne vous surprendrai
certainement pas en vous disant que je m'attendais à une telle
question...
Une voix: Nous, on s'attend à une réponse.
M. Lévesque (Taillon): II vous prépare vos
questions.
M. Bertrand: Je tiens aussi à remercier le
député de Jeanne-Mance de me poser la question. J'aurais
même été déçu si la question n'avait pas
été posée...
Le Président (M. Vaillancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Bertrand: ... parce que cela me permettra, M. le
Président, à la condition, bien sûr, que l'Opposition me
donne la possibilité de donner les informations que le
député de Jeanne-Mance demande, de donner toutes les
réponses relatives à ce que le journaliste Normand Girard, du
Journal de Montréal et du Journal de Québec, a
révélé à l'ensemble de la population dans une
série d'articles que j'ai moi-même lus, bien sûr, avec
beaucoup d'intérêt.
M. le Président, en 1978, il y a un conseil des directeurs des
communications qui a été créé, qui réunit
environ 35 directeurs d'autant de ministères et organismes et qui
s'occupent de communications. Ce sont des fonctionnaires du gouvernement du
Québec. Ces personnes se sont regroupées à
l'intérieur du Conseil des directeurs de communications pour en arriver
à une meilleure coordination de leurs actions sur le plan administratif.
Cela a donné certains résultats positifs, mais tous les
résultats n'étaient pas positifs.
Le gouvernement du Québec, l'automne dernier, par une
décision du Conseil des ministres, a procédé à la
création d'un comité ministériel permanent des
communications, et ce comité ministériel permanent des
communications, comme je l'ai dit en conférence de presse quelques jours
après que la décision eut été prise au Conseil des
ministres, a comme responsabilité de définir les grandes
orientations, les grandes priorités, les grands objectifs du
gouvernement en matière de communications et d'information. (15 h
30)
Les documents dont il a été fait état dans
l'article du journaliste ont été produits - ils existent donc -
par des sous-comités du Conseil des directeurs de communications. Ces
sous-comités ont fait un travail où, pour une bonne part, on
découvre des éléments fort intéressants; pour
d'autres, des éléments très personnels et, dans certains
cas, des analyses fort subjectives.
Mais une chose mérite d'être dite pour replacer ce document
dans son contexte précis. Premièrement, ce document qui origine
de sous-comités du Conseil des directeurs de communications n'a pas
été sanctionné, donc, n'a même pas été
discuté, ni approuvé par le comité exécutif du
Conseil des directeurs de communications. Deuxièmement, il n'a
été ni discuté, ni approuvé par l'assemblée
générale du Conseil des directeurs de communications; il n'a
été ni discuté, ni approuvé par le Comité
ministériel permanent des communications et, je n'ai pas besoin de vous
le dire, il n'a même pas été transmis - donc, bien
sûr, ni discuté, ni approuvé par le Conseil des ministres
du gouvernement du Québec.
Il s'agit donc, à toutes fins utiles, de dossiers, documents,
esquisses, brouillons de travail qui n'ont rien à voir avec ce qui, par
contre, à mes yeux, apparaît être une opération de
propagande et de manipulation, quand on dit: "Le gouvernement Lévesque
compte"; "Cette stratégie consiste à"; "Pour atteindre cet
objectif, on utilisera un budget annuel de 2 000 000 $"; "La stratégie
économique du gouvernement Lévesque pour les prochaines
années"; "Le gouvernement Lévesque entend opposer comme
stratégie"; "C'est le fameux document secret du PQ"; "Le plan de
propagande imaginé au gouvernement"; "Le fameux document secret de la
stratégie péquiste".
Ce qui doit être dit, M. le Président, c'est que,
même si le ministère des Communications a procédé,
au cours de la dernière année, à des compressions
budgétaires d'environ 4 000 000 $ dans le compte
téléphonique au gouvernement du Québec, que je sache je ne
pense pas que nous ayons enlevé son téléphone au
journaliste en question. Il aurait pu s'en servir...
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
En concluant, M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Bertrand: ... et téléphoner et, s'il ne voulait
pas accorder de crédibilité à une réponse que lui
aurait donnée le ministre des Communications, il pouvait
téléphoner au sous-ministre des Communications, au
président du comité exécutif du Conseil des directeurs des
communications ou à quelque autre personne pour vérifier. Mais
non, ce qu'on a tenté, c'est d'associer ces documents à une
décision du gouvernement. Il n'y a aucune décision du
gouvernement, il n'y a eu aucune discussion de ces documents au comité
ministériel permanent des communications. Donc, ces documents ne sont
pas ce que le journaliste dit qu'ils sont, c'est-à-dire des
décisions gouvernementales en matière de communication.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Le ministre a mis tellement d'effort à tenter
de noyer le poisson qu'il semble que le poisson soit plus vigoureux qu'on ne le
croyait.
La question était: Est-ce que ce document existe? La
réponse c'est oui, mais c'est la faute des fonctionnaires.
J'aimerais profiter de la volubilité du ministre pour que,
au-delà de toutes les déclarations, il s'engage, devant cette
Chambre, à qu'aucune partie des fonds qui ont été
coupés - les services sociaux, l'éducation - ne serve à
une campagne de propagande ou de publicité pour tenter de convaincre les
Québécois qu'ils sont bien chez eux malgré le gouvernement
péquiste.
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: M. le Président, je suis très heureux
aussi de recevoir cette question, parce qu'elle va même me permettre de
déposer un document qui, lui aussi, est un document de pure
manipulation, un tissu de mensonges et je vais le faire avec preuves à
l'appui.
Le Parti libéral du Québec mène une campagne de
financement ces temps-ci et il y a un document qui est envoyé aux
gens...
Une voix: Une réponse à propos de propagande.
M. Bertrand: C'est simplement pour répondre à la
question sur les budgets de publicité.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre.
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bertrand: M. le Président, on a parlé de
propagande, je vais vous lire très brièvement un texte de
propagande...
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de
règlement.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, sur une
question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): Seulement une petite précision,
M. le Président. Je suis d'ailleurs très heureux que le ministre
coopère, nous n'avons pas tous les moyens au Parti libéral, que
semble avoir le gouvernement dans le domaine de l'information, mais une
précision, parce qu'on a exhibé un texte ou un document, ce qui
amène présentement le leader parlementaire du gouvernement
à intervenir là-dessus. Ce document provient-il de fonds publics?
Est-ce qu'il est financé par des fonds publics?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: M. le Président, je vois bien que le leader
de l'Opposition...
Une voix: Veut noyer le poisson.
M. Bertrand: ... en tentant de m'amener à répondre
à sa question, voudrait que je ne réponde pas à la
question du député de Marguerite-Bourgeoys. Je dis simplement que
le document que j'ai ici, qui est un document, bien sûr, produit par le
Parti libéral du Québec à même ses fonds, fait
état - je vous lis ici...
Une voix: C'est un paquet de menteries.
M. Bertrand: ... la note C - des budgets de publicité
gouvernementale. Voilà pourquoi c'est relié à la question
du député de Marguerite-Bourgeoys. En 1979 probablement
l'année 1979-1980 puisqu'on n'en tient pas compte, on n'a pas beaucoup
de précision ici - on parle d'une dépense globale en
publicité gouvernementale, c'est-à-dire, finalement, cette
publicité qui est autorisée par le Conseil du trésor
après que le ministère des Communications lui ait remis, des avis
préalables, 14 300 000 $ en 1979-1980.
M. le Président, je voudrais remercier le Parti libéral du
Québec pour cela: en 1979-1980, ils ont tout à fait raison. Il y
a eu 14 300 000 $ de publicité gouvernementale. Mais, M. le
Président - là je réponds à la question du
député de Marguerite-Bourgeoys - pour l'année 1980-1981,
on indique ici 17 000 000 $.
Une voix: Ce sont des menteries.
M. Bertrand: Je le dis, c'est un tissu de mensonges. La
vérité, c'est qu'en 1979-1980, la dépense a
été de 14 300 000 $ et, en 1980-1981, elle a été de
11 000 000 $.
Des voix: Ah!
M. Bertrand: En 1981-1982, quand nous fermerons les livres au 31
mars, elle aura été de 7 500 000 $ et les prévisions pour
l'an prochain, à l'heure actuelle, sont de 5 500 000 $. Voilà la
vérité.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. le Président. Il
s'agirait, à ce moment-ci... Qu'est-ce qu'on a là-bas? On a l'air
bien drôle, hein!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Des voix: Des ballounes.
M. Levesque (Bonaventure): C'est la seule façon qu'on a de
communiquer par l'Assemblée nationale à ses électeurs, de
ce côté-là. Je remercie d'abord immédiatement, avant
de poser ma question additionnelle, le ministre des Communications d'avoir
souligné ces dépenses et d'avoir, évidemment, fait
état qu'elles étaient plus importantes au moment du
référendum. (15 h 40)
Cela dit, M. le Président, je poserai la question suivante, parce
que je pense qu'il est important de savoir ce qu'il est arrivé de ce
document. Après tout, on a fait état d'un document. Comme le
disait le député de Marguerite-Bourgeoys, le ministre a admis
qu'il existait. Le ministre nous a dit exactement où il était,
d'où il provenait et les étapes qu'il devait suivre. Est-ce que
le ministre peut nous dire s'il est toujours à l'endroit où on
l'a trouvé, s'il est toujours à la même étape, s'il
a continué le cheminement qu'a évoqué le ministre, ou
est-ce que le ministre est intervenu pour diminuer ou accélérer
le processus qu'il nous a décrit? Autrement dit, dites-nous donc ce
qu'il arrive de ce document-là.
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: Très bien, M. le Président. Ce
document, qui a été préparé par des
sous-comités du conseil des directeurs des communications, a
été transmis au comité ministériel permanent des
communications qui, à sa dernière réunion, le 27 janvier
dernier, a tout simplement reçu les documents et les a
considérés comme
déposés au comité ministériel permanent des
communications. Je peux dire au leader de l'Opposition qu'aucune
décision n'a été prise au comité ministériel
permanent des communications relativement à ces documents.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.
M. Bertrand: Je conclurai sur une chose, M. le
Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bertrand: Quels que soient les traitements qui aient
été faits et les relations qu'on ait faites entre ces brouillons
et des décisions gouvernementales qui n'ont pas été
prises, je dis une chose à l'Opposition: Dans le domaine des
communications gouvernementales, ne craignez pas, on ne se mettra certainement
pas sur la défensive quand on voit que, par exemple...
M. Rivest: Vous êtes à l'attaque.
M. Bertrand: ... pour détruire le Québec, pour
annihiler à toutes fins utiles ses droits et ses intérêts,
le gouvernement fédéral ne s'est pas gêné...
Des voix: Ah! Ah!
M. Bertrand: M. le Président, en trois mois, au cours de
la dernière année, le gouvernement fédéral a
dépensé 450% plus d'argent que le gouvernement du Québec
en matière de publicité constitutionnelle, et ce en trois mois
seulement. Pour défendre le Québec, ses droits et ses
intérêts, on ne reculera pas quand il s'agira de prendre des
initiatives en matière de communications.
Le Président: Question principale, Mme la
députée de Chomedey.
Grève d'un groupe d'employés
d'Hydro-Québec
Mme Bacon: Merci, M. le Président. J'aimerais bien qu'on
revienne à la période des questions et non des discours pour
poser ma question. En l'absence du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre
et avec votre permission, M. le Président, je demanderais au
député de Prévost ou au premier ministre de bien vouloir
répondre à ma question.
Une voix: C'est la même chose!
Mme Bacon: On sait que, depuis le 10 août 1981 il y a une
grève de 1000 employés d'Hydro-Québec. Le Parti
libéral est intervenu à au moins quatre ou cinq reprises pour
demander quelles sont les mesures que le gouvernement entend prendre pour
régler cette grève. Par le passé, quand un
médiateur a favorisé Hydro-Québec, le gouvernement a agi
très rapidement pour imposer le rapport du médiateur aux
travailleurs.
Les employés d'Hydro-Québec qui sont en grève ont
l'impression d'être peut-être les premières victimes des
déclarations du premier ministre qui disait que l'indexation des
salaires dans le secteur public était à reconsidérer. Ces
travailleurs attendent un geste concret du gouvernement pour régler le
conflit et je sais que le député de Prévost sera d'accord
avec moi en trouvant que ce conflit a trop longtemps duré.
Une voix: Ils ne savent pas quoi faire.
Mme Bacon: Même si on a attendu longtemps pour nommer un
PDG à HydroQuébec, il a sûrement eu suffisamment de temps
pour répondre.
Des voix: Bravo! Bravo!
Mme Bacon: Est-ce que je pourrais poser ma question? Ma question
est à deux volets, écoutez-la.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Mme Bacon: Y a-t-il eu rencontres entre les dirigeants
d'Hydro-Québec et le Conseil du trésor? Deuxièmement,
est-ce que le Conseil du trésor a des pouvoirs décisionnels en ce
qui concerne l'indexation salariale des employés de l'État? S'il
a des pouvoirs décisionnels, quel est le rôle que doit jouer
Hydro-Québec en ce moment pour régler le conflit?
Une voix: Bravo!
Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du
Travail.
M. Dean: II y a effectivement eu des rencontres la semaine
dernière entre les autorités du ministère du Travail, les
représentants d'Hydro-Québec et les représentants des
travailleurs en grève. Une nouvelle proposition a été
formulée par les autorités d'Hydro-Québec et cela a
été rejeté par le comité de négociation
syndical à ce moment-là. Je ne sais pas, au moment où je
vous parle, si le rejet a été confirmé par les instances
syndicales, mais cela a été rejeté.
Une nouvelle réunion a eu lieu vendredi dernier entre les
autorités d'Hydro-Québec et le ministère du Travail
où d'autres discussions ont eu lieu. Nous attendons présentement
des suites à cette rencontre. Je ne peux pas parler pour d'autres que
moi-
même ou au nom des autorités du ministère. Quand, du
haut de la montagne, tomberont des éclairs de bon sens ou de bons
dollars, peut-être, mais je ne peux pas dire à quel moment
Hydro-Québec va répondre ou va poser de nouveaux gestes, mais ce
sera dans les prochaines heures, sinon dans les prochains jours.
Le Président: Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: Je n'ai pas l'impression que le député
de Prévost a répondu à mes deux questions, mais je reviens
à la première: Est-ce qu'il y a eu rencontres entre le Conseil du
trésor et la direction d'Hydro-Québec?
Le Président: M. l'adjoint parlementaire.
M. Dean: II faut comprendre un peu le rôle du
ministère du Travail. Il y a eu rencontres entre les autorités
d'Hydro-Québec et le Conseil du trésor, sauf que les
représentants du ministère du Travail n'assistent pas à
ces rencontres; alors, je ne peux pas vous parler du contenu.
Le Président: Question principale, M. le
député de Charlesbourg.
Contestation étudiante dans la région de
Québec
M. de Belleval: Ma question s'adresse au ministre de
l'Éducation. Depuis quelques jours, nous assistons à une
contestation, dans la région de Québec, de la part de certains
étudiants du niveau secondaire, d'écoles polyvalentes, qui ont eu
pour effet d'entraîner la fermeture de plusieurs écoles
polyvalentes dans la région de Québec, en particulier à
Lévis et, aujourd'hui, à la Commission des écoles
catholiques de Québec et aussi à la commission scolaire
Jean-Talon dans la ville de Charlesbourg. Cette contestation a trait à
l'établissement d'une nouvelle grille horaire, au mois de septembre
prochain, pour ces étudiants des écoles secondaires et a aussi
trait à l'élévation de la note de passage aux examens de
50% qu'elle est actuellement à 60%. La question est la suivante:
J'aimerais savoir du ministre de l'Éducation sur quelle substance
exactement porte cette contestation étudiante actuellement?
Une voix: Vous ne le savez pas?
M. de Belleval: Deuxièmement, est-ce qu'il
considère que cette question relève exclusivement des rapports
entre les commissions scolaires concernées et les étudiants de
ces polyvalentes ou s'il entend lui-même et son ministère
intervenir pour faciliter le retour en classe de ces étudiants?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation. (15 h
50)
M. Laurin: Je remercie le député de Charlesbourg
pour sa question. Il est vrai que certaines commissions scolaires ont
décidé d'implanter, dès septembre 1982, certains des
articles, des règlements du nouveau régime pédagogique. Je
les félicite d'ailleurs, car cela correspond au désir des
parents, tel qu'il s'est manifesté lors de la consultation menée
lors du lancement du livre vert et ensuite du livre blanc.
Les parents du Québec veulent qu'on mette plus d'accent sur la
formation générale et, en particulier, à
l'intérieur de cette formation générale, sur
l'enseignement du français, langue maternelle, et sur l'enseignement des
mathématiques, tout en ne négligeant pas les autres
matières qui forment le coeur d'une formation générale,
c'est-à-dire l'histoire, l'éducation économique, la
technologie. Les parents du Québec veulent également que la
spécialisation de l'élève au secondaire soit
reportée au moins d'une année et même que la
surspécialisation ne survienne qu'à la sixième
année du secondaire.
Les parents ont demandé, d'une façon quasi unanime, ces
changements lors de la consultation. Le règlement pédagogique ne
fait que traduire en clair ces aspirations, ces souhaits et ces demandes des
parents. Les commissions scolaires qui veulent appliquer ce règlement,
dès 1982, sont parfaitement justifiées de le faire.
Il est faux de dire, comme on l'entend dire actuellement, que cela va
conduire à une augmentation du nombre de groupes assignés
à chaque professeur. En effet, si l'on consacre plus de temps à
l'enseignement du français et des mathématiques, il est bien
entendu qu'il y aura moins d'élèves, donc moins de groupes dont
le professeur aura à s'occuper. Il y aura peut-être moins de temps
pour les autres matières qui font partie de l'enseignement
général. Mais là aussi, nous recommandons de plus en plus
que les professeurs au secondaire, au lieu de se limiter à une
surspécialisation, c'est-à-dire à l'enseignement d'une
seule matière, se dirigent vers une polyvalence où ils pourront
enseigner deux matières, ce qui irait aussi dans le sens d'une demande
des parents qui demandent un meilleur encadrement pour les élèves
au niveau du secondaire.
Tout cela, M. le Président, peut et doit se faire à
l'intérieur des conventions collectives actuelles où les
enseignants doivent consacrer 1100 minutes par semaine sur une semaine de cinq
jours. Quant à la grille horaire et la grille temps, cela doit
être aménagé par entente entre la commission
scolaire et les professeurs. 3e sais que dans une période de transition,
il y est facile de mousser les appréhensions et même d'entretenir
une certaine confusion. Mais je demande, au nom de l'intérêt
public, surtout pour le plus grand bénéfice des enfants, que
cette entente au sujet de l'aménagement de la grille temps et de la
grille matières puisse se faire dans les délais voulus entre les
commissions scolaires concernées et les enseignants.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, je regrette de revenir
à la charge, mais ma question comprenait deux volets. Je pense que le
ministre a répondu au premier volet de ma question. Je regrette pour
l'Opposition, mais ce sont des élèves, entre autres, du
comté de Charlesbourg qui sont en cause. C'est donc normal, comme
député de ce comté, que je pose une question.
Je voudrais que le ministre réponde au deuxième volet de
ma question. Est-ce qu'il entend laisser les choses évoluer directement
entre les commissions scolaires en cause et les élèves
concernés, ou s'il entend intervenir personnellement, ou par le biais de
ses fonctionnaires, pour tenter d'amener les élèves à
comprendre d'abord le problème et à accepter de retourner en
classe le plus tôt possible?
Le Président: Brièvement, M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, j'ai appris qu'une bonne
partie des élèves sont déjà retournés en
classe. J'espère qu'il en sera de même pour les autres
élèves au cours des jours qui viennent. Mais je peux assurer le
député de Charlesbourg que je suis déjà intervenu
et que j'interviendrai encore auprès des commissions scolaires pour que
la situation, non seulement redevienne normale le plus tôt possible, mais
pour que l'application de ce nouveau régime pédagogique puisse se
faire harmonieusement et, encore une fois, pour le meilleur bien des
enfants.
Le Président: Question principale, M. le
député de Richmond.
La fixation des prix de l'amiante sur les
marchés internationaux
M. Vallières: Ma question s'adresse au ministre de
l'Énergie et des Ressources. Ma question a trait à la gestion de
la Société nationale de l'amiante et, en particulier, à la
concurrence que se livrent les entreprises d'État et le secteur
privé dans le secteur de l'amiante. Le ministre sait que nous vivons une
période où le marché de l'amiante est plutôt
restreint. Il va de soi que cela vient activer la concurrence.
Le gouvernement du Québec ayant acquis la mine Bell Asbestos et
l'Asbestos Corporation, le ministre peut-il nous indiquer quelles sont les
règles qui vont prévaloir pour la fixation des prix de l'amiante
dans le cas d'expéditions hors Canada? Sur quelle marge de profit entend
se baser la Société nationale de l'amiante? Entend-on, par
exemple, respecter les prix du marché ou couper de façon
très importante dans les prix? Je veux indiquer au ministre que j'ai ici
une soumission qui a été faite, entre autres, par Bell Asbestos
datant du 10 septembre 1981, destination Bangkok, en Thaïlande, pour des
catégories de fibres 5R et 6D, donc qui sont fabriquées aussi par
Johns-Manville Canada. Les chiffres qu'on y retrouve indiquent, pour ces deux
catégories de fibre, que cette entreprise d'État vend son amiante
dans un cas à un prix correspondant à 37% et dans l'autre cas
à 42% de moins que le prix du marché.
Ma question au ministre est la suivante: Peut-il m'indiquer s'il ne voit
pas dans cette attitude une grande menace pour d'autres entreprises, et
celles-là du secteur privé comme Johns-Manville Canada, de se
faire littéralement voler leurs clients? En d'autres mots, sous le
prétexte de vouloir maintenir l'emploi dans une région comme
Thetford-Mines, le ministre acceptera-t-il que Bell et Asbestos Corporation
vendent leur amiante bien en dessous du prix du marché et provoquent des
mises à pied dans une autre région de l'amiante, celle
d'Asbestos, là où les travailleurs sont négligés
par ce gouvernement? Y a-t-il, M. le Président, deux catégories
de travailleurs dans l'amiante, ceux qu'on veut protéger et ceux qu'on
veut punir?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais dire d'abord que
les décisions quant à la fixation des prix sur les marchés
internationaux relèvent, bien sûr, des conseils d'administration
respectifs tant de la compagnie Bell que de la compagnie Asbestos Corporation.
Ce que je veux simplement ajouter, c'est qu'il n'y a aucune directive du
gouvernement ni aucune directive de la Société nationale de
l'amiante pour exercer dans l'avenir quelque piraterie que ce soit sur les
prix. Il est vrai que l'addition mathématique de la capacité de
production de Bell et d'Asbestos pourrait placer la SNA dans une situation de
"price leader", comme on dit, dans le marché, mais nous n'avons pas
l'intention de pratiquer pareille stratégie pour nous maintenir sur des
marchés.
M. Vallières: Question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Richmond.
M. Vallières: Si je comprends bien, si je fournissais le
document au ministre, il pourrait noir sur blanc nous indiquer qu'il mettra fin
à ce genre de concurrence qu'on pourrait qualifier de déloyale,
dans ce cas-ci à tout le moins. Je voudrais, M. le ministre, que vous
compreniez nos appréhensions et nos craintes dans ce secteur.
Je voudrais également, puisque nous parlons de la SNA, que vous
répondiez à cette question. Votre adjoint parlementaire
parlait-il récemment en votre nom, au nom du gouvernement quand il a dit
qu'il ne laissera pas passer de projet de la SNA pour la région
d'Asbestos? Est-il vrai qu'il a tenté de tout amener dans son
comté? Cela commence à ressembler à la
société thetfordoise de l'amiante. La Société
nationale de l'amiante a-t-elle l'intention de ne jamais lancer de projets
à Asbestos? M. le Président, cette question est très
pertinente et importante. Le député était-il
autorisé à tenir ces propos et sont-ils partagés par le
ministre? Face à des propos aussi partisans, aussi irresponsables et
choquants pour une autre catégorie de la population, les travailleurs
dont je vous parlais tantôt, le ministre entend-il prendre des mesures
à l'endroit de son adjoint parlementaire, confirmer ou infirmer ses
propos? S'il a véritablement tenu ces propos au nom du gouvernement,
nous saurons hors de tout doute que vous avez décidé de
créer deux catégories de travailleurs.
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Grégoire: Sur une question de privilège, M. le
Président. Je pense bien que c'est d'abord le privilège du
ministre de répondre sur les vraies déclarations que j'ai faites
et non pas sur le titre d'un article de journal. Deuxièmement, cela me
permet de rectifier l'article de journal et les propos que le
député de Richmond me met dans la bouche. Jamais je n'ai
déclaré - avant que la réponse du ministre soit
donnée, puisqu'il doit répondre sur les vrais propos que j'ai
tenus - que rien n'irait à Asbestos. J'ai plutôt
déclaré...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il
vous plaît! J'aimerais dire qu'effectivement il s'agit d'une
réelle question de privilège puisque, dans la question du
député de Richmond, il a été question de l'adjoint
parlementaire du ministre de l'Énergie et des Ressources qui est, en
l'occurrence, le député de Frontenac. En conséquence,
très brièvement, M. l'adjoint parlementaire. (16 heures)
M. Grégoire: M. le Président, je n'ai jamais
déclaré que rien n'irait à Asbestos, j'ai tout simplement
dit que rien dans les projets immédiats de la Société
nationale de l'amiante ne prévoyait d'installations à Asbestos,
à moins que des ententes ne soient conclues entre la SNA et la compagnie
Johns-Manville d'Asbestos.
J'ai également ajouté que, s'il y avait des installations
à Thetford-Mines, c'est parce que le député de Frontenac
s'en occupait et se torturait les méninges pour trouver des projets qui
peuvent être implantés là. J'ai également
ajouté que, s'il n'y avait rien à Asbestos, c'est parce que le
député de Richmond passait son temps à critiquer la
politique de l'amiante plutôt que de se torturer les méninges lui
aussi pour attirer des industries dans son comté.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Frontenac, à l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, très
brièvement, la période des questions étant finie.
M. Duhaime: Ai-je besoin d'ajouter, M. le Président, que
mon collègue, le député de Frontenac, est sans doute un
des meilleurs adjoints parlementaires que m'ait confié le premier
ministre et qu'il parlait en mon nom? Je voudrais revenir à la question
qui m'a été posée et j'aimerais, peut-être
après la période des questions, avoir un peu de détails.
Quand on fait des comparaisons de prix, il faut parler de la même
qualité de fibre. Je n'arrive pas à saisir exactement là
où vous voulez en venir.
J'ajouterai, M. le Président, que je suis très
intéressé à associer la population d'Asbestos à
l'application de la politique de l'amiante et aux progrès que fera, dans
les années qui viennent, la Société nationale de
l'amiante, à un point tel que nous avons annoncé, il y
au-delà d'une dizaine de jours, la nomination du maire d'Asbestos au
conseil d'administration de la Société nationale de l'amiante,
avec l'appui d'à peu près tous les intervenants dans la
région, en y incluant des députés libéraux.
Enfin, je dirai, comme tout le monde le sait, sauf peut-être le
député de Richmond, qu'il y a seulement une exploitation à
Asbestos, c'est celle de la Johns-Manville. J'ai eu l'occasion de rencontrer M.
Power, président du conseil d'administration de Johns-Manville, et nous
avons discuté, bien sûr, de choses et d'autres, mais en
particulier de projets en aval pour la région d'Asbestos. La conjoncture
du marché
international étant ce qu'elle est actuellement, je pense que ce
serait vous raconter des histoires que de vous dire que des investissements
s'en viennent dans la région d'Asbestos dans l'immédiat.
Je voudrais cependant donner l'assurance au député de
Richmond que, s'il voulait nous appuyer dans nos démarches plutôt
que de déblatérer sur les produits de l'amiante et la
Société nationale de l'amiante, nous aurions meilleure presse au
Québec et à l'étranger.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député de Richmond.
M. Vallières: Le ministre n'a pas répondu à
ma dernière question, qui est importante. Quand le député
de Frontenac parle, est-ce qu'il parle en tant qu'adjoint parlementaire, pour
lui, au nom du gouvernement, au nom du ministre? Il parle au nom de qui? M. le
Président, je tiens à ce qu'on y réponde. Je veux
également souligner que, lorsqu'on a applaudi de l'autre
côté, on a tout simplement applaudi une écoeuranterie qui
est en train de se produire, purement et simplement. On retourne au pire temps
du duplessisme.
Le Président: M. le ministre, très
brièvement, s'il vous plaît!
M. Duhaime: À moins qu'on ne m'ait mal compris, je ne
serais pas prêt à signer le chèque en blanc, mais, pour
cette fois, j'ai dit de façon très claire que mon adjoint
parlementaire parlait en mon nom.
Le Président: Fin de la période des questions.
On m'indique que le ministre de la Justice aurait un complément
de réponse pour le député de Laprairie.
M. le ministre.
Vol au bureau du comité organisateur de la
fête nationale
M. Bédard: M. le Président, à la suite des
questions posées hier par le député de Laprairie, je
voudrais faire part aux membres de cette Chambre des informations que nous
avons obtenues du service de police de la Communauté urbaine de
Montréal.
Premièrement, pour ce qui est d'un événement qui se
serait produit à la fin du mois de janvier 1982 aux locaux de la...
Excusez, M. le Président. Soyez sérieux de l'autre
côté! Pour ce qui est d'un événement qui se serait
produit à la fin du mois de janvier 1982 aux locaux de la Corporation de
la fête nationale, 339 rue Saint-Paul, à Montréal, une
plainte a effectivement été portée au service de police de
la Communauté urbaine de Montréal, le 1er février 1982,
par Mme Noëlla Giroux, de la corporation, pour une entrée par
effraction qui se serait produite entre le 29 janvier et le 1er février.
Aucun objet, argent ou document n'aurait disparu et l'enquête sur cet
incident n'a pu permettre au service de police de la Communauté urbaine
de Montréal de découvrir des indices qui lui auraient permis
d'aller plus loin. Mais ce dossier a été gardé pour
référence future au besoin.
Pour ce qui est d'un vol dont a été victime le
Comité de la fête nationale de Maisonneuve, 5795 rue Lafond, il
s'agit d'une somme de 2000 $ qui a été subtilisée lors
d'un spectacle organisé pour la soirée du 24 juin, dans un parc.
Cette somme d'argent représentait une partie des recettes de la
soirée. Une plainte a été portée le 26 juin 1981
par M. Claude David et Mme Lorraine Clermont, au nom du comité
organisateur, ce qui est normal. Une enquête a été ouverte,
mais elle n'est pas terminée.
Pour ce qui est du vol dont a également été victime
le comité organisateur de la fête dans Saint-Jacques, il s'agit de
matériel d'une valeur approximative de 1800 $ qui a disparu d'une remise
située au 1184 rue Dorion. Les informations qui m'ont été
transmises sont qu'aucune plainte comme l'a dit, d'ailleurs, le
député de Laprairie hier - n'a été logée
auprès du service de police de la Communauté urbaine de
Montréal par le comité organisateur local, mais que les policiers
ont été mis au courant de ce fait le 27 octobre dernier par une
lettre de l'administrateur délégué à la corporation
régionale de la région de Montréal, M. Yvon Dufour.
M. le Président, à l'autre question qui était
posée par le député de Laprairie pour savoir quand ces
enquêtes seraient terminées, le député de Laprairie
comprendra que, comme ministre de la Justice, je ne peux dire quand une
enquête se terminera lorsqu'elle est en cours, parce qu'en principe,
toute enquête se termine lorsque les coupables sont trouvés.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Laprairie.
M. Saintonge: Le ministre pourrait-il, quand même, nous
informer de ce qui explique le délai entre la commission de
l'infraction, le 24 ou le 25 juin, au comité de Saint-Jacques et la
plainte qui a été portée plus de quatre mois après?
Y a-t-il une explication quelconque qu'on peut dégager de ce
délai?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, comme le
député de Laprairie doit s'en douter, le
service de police de la Communauté urbaine de Montréal ne
nous a pas donné d'explications sur ce point, mais je crois que ce sujet
a été soulevé, lors de la commission parlementaire, devant
le ministre responsable qui - je ne le sais pas - a pu donner les explications
nécessaires.
Le Président: On m'informe également que l'adjoint
parlementaire au ministre du Travail aurait un complément de
réponse pour Mme la députée de Chomedey. M. l'adjoint
parlementaire.
Grève d'un groupe d'employés
d'Hydro-Québec (suite)
M. Dean: M. le Président, juste après avoir
terminé mes remarques en réponse à la question de la
députée de Chomedey, on m'a informé que le nouveau PDG
d'Hydro-Québec, M. Coulombe, réunit son conseil d'administration
mercredi prochain et qu'il doit y être question de la formulation de
nouvelles offres pour tenter de régler le conflit.
Le Président: Merci.
M. Pagé: Là-dessus, en l'absence de la
députée de Chomedey...
Le Président: M. le député de Portneuf.
M. Pagé: ... l'adjoint parlementaire pourrait-il nous
indiquer en quoi la réunion du conseil d'administration de la semaine
prochaine peut changer quelque chose, puisqu'il nous a déjà
confirmé, dans une réponse précédente, que le tout
était au Conseil du trésor? Le problème, ce n'est pas
Hydro-Québec; le problème, c'est le gouvernement du Québec
dans ce dossier. Alors, qu'est-ce que la réunion du conseil
d'administration d'Hydro-Québec - qui est probablement prête
à régler, mais qui n'a pas l'accord du gouvernement du Parti
québécois - va changer? (16 h 10)
Des voix: Ah!
M. Duhaime: Je peux peut-être ajouter à
l'information que donnait mon collègue, puisque j'ai eu l'occasion de
parler, hier soir, avec M. Coulombe, et dire que le conseil d'administration
d'Hydro-Québec administre Hydro-Québec et que le conseil sera
saisi de ce dossier pour une discussion. Nous espérons qu'une
proposition acceptable vers un règlement pourra être
formulée.
Le Président: Merci. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je pense que vous avez une directive à
demander à la présidence.
Demande de directive
Corrections dans une intervention en Chambre
M. Scowen: Oui, M. le Président. Hier soir, dans son
discours, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a cité
M. Norman Moyer - il l'appelait ainsi -propriétaire d'une compagnie de
textile, qui attaquait un programme du gouvernement fédéral dans
le domaine du textile. À la fin de son discours, avec votre permission
et la sienne, je lui ai demandé de préciser un peu l'origine de
cette déclaration. Il m'a dit et je cite: "Je vous donnerai la coupure
de presse que j'ai là-dessus, M. le Président."
Ce matin, il m'a envoyé une coupure de presse dans laquelle il
n'y a aucune mention ni de M. Norman Moyer ni de la citation. J'ai
téléphoné, par la suite, au bureau du ministre et un
membre de son cabinet m'a dit que c'était un lapsus de sa part et qu'il
avait demandé au journal des Débats d'effacer cette partie de son
discours.
Des voix: Ah!
M. Scowen: La directive que je vous demande - c'est un mensonge
de cinq lignes dans un discours - c'est: Est-ce qu'un ministre du gouvernement
a le droit d'exiger du journal des Débats d'effacer un tel mensonge
parce qu'il regrette de l'avoir dit et parce que cela a été
porté à son attention? Quel est mon recours dans un tel cas, M.
le Président?
Une voix: II n'a pas le droit de faire cela.
Le Président: C'est la première fois que...
Une voix: II veut qu'on efface le mensonge.
Le Président: ... j'entends parler de cette affaire. Je
prends avis de ce que vous avez dit et je vais faire les vérifications
nécessaires. Mais inutile de vous dire qu'aucune personne, même
pas le président de l'Assemblée nationale, n'a l'autorité
nécessaire pour demander d'effacer ce que les députés
disent, tout cela en tenant pour acquis qu'une enquête sera faite et que
ce qui a été dit n'est pas nécessairement la
vérité. Si ce que vous dites s'avère la
vérité, en temps et lieu, la présidence avertira les
membres de l'Assemblée.
M. Biron: M. le Président.
Le Président: Motions non annoncées.
Une voix: Question de privilège.
M. Biron: M. le Président, question de
privilège.
Le Président: Question de privilège, M. le ministre
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
M. Biron: M. le Président, je n'ai jamais demandé
d'effacer quoi que ce soit. C'est tout simplement qu'hier j'ai cru prononcer
"Moyer" ou quelque chose comme cela. Je ne me souviens pas du nom, mais
c'était un nom qui ressemble beaucoup à "Moyer". Alors, tout
simplement, ce matin, j'ai demandé de corriger pour inscrire le vrai nom
comme je l'avais sur mon texte.
Le Président: S'il vous plaît! L'incident est clos.
En ce qui me concerne, je réitère que je vais faire les
vérifications nécessaires sur la version fournie par le ministre
et celle fournie par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je
dois dire que je n'étais pas présent en l'enceinte même de
l'Assemblée au moment où ces choses se sont passées.
À la première occasion raisonnable, je vous en ferai part.
Motions non annoncées. M. le député...
M. Scowen: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, question de privilège.
M. Scowen: Je veux simplement souligner, à la suite de la
déclaration du ministre, que le document qu'il m'a remis ce matin ne
fait aucune mention ni de M. Norman Moyer, ce qu'il a très clairement
exprimé hier soir, ni de la citation...
Le Président: S'il vous plaît! M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, ce qui intéresse la
présidence, ce ne sont pas les documents qu'un ministre a pu vous
remettre, mais le journal des Débats qui relève de la juridiction
du président de l'Assemblée nationale. C'est ce que je vais
vérifier.
M. le député de Laprairie.
Félicitations à l'Orchestre symphonique
de Montréal
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Je voudrais faire
motion afin que cette Assemblée adresse des voeux de
félicitations à l'Orchestre symphonique de Montréal et
à son directeur artistique, M. Dutoit, pour le prix prestigieux qu'il
vient de remporter, soit le grand prix du disque symphonique de
l'Académie Charles-Cros 1982 pour son enregistrement de Daphnis et
Chloé.
Des voix: Bravo!
M. Saintonge: Est-ce que j'ai le consentement de la Chambre?
Des voix: Oui.
Le Président: Consentement. (16 h 15)
M. Saintonge: Brièvement, M. le Président, je
voudrais souligner que l'attribution de ce prix est certes un encouragement et
une reconnaissance élogieuse pour l'Orchestre symphonique de
Montréal qui est une institution dont le développement et
même la survie dépendent de l'appui de la population et même
des gouvernements. C'est un honneur qui rejaillit sur Montréal et
même sur tout le Québec, qui est une preuve du dynamisme culturel
de notre société, qui devrait même inciter la population
à continuer à participer a l'essor de l'Orchestre symphonique de
Montréal. Ce prix, qui s'ajoute aux critiques élogieuses du monde
musical pour l'Orchestre symphonique de Montréal pour ce disque, est
certes une inspiration profonde pour tous les Québécois qui
oeuvrent dans le domaine de la musique et particulièrement des jeunes
Québécois qui se dirigent vers ce domaine.
Il me fait donc plaisir de souligner encore une fois le travail
admirable de l'Orchestre symphonique de Montréal et de M. Dutoit, et de
leur adresser nos plus sincères félicitations.
Des voix: Bravo. Bravo.
Le Président: M. le ministre des Affaires culturelles.
M. Richard: M. le Président, c'est avec beaucoup de
plaisir que je vais appuyer cette motion de mon collègue, le
député de Laprairie. Tout le monde sait que l'Orchestre
symphonique de Montréal est en train de devenir l'un des meilleurs
orchestres du genre à travers le monde. Je me réjouis aujourd'hui
de voir que cette motion émane de l'Opposition libérale qui,
depuis le début de cette session, a demandé à trois
reprises, par ses représentants, que le budget des Affaires culturelles
soit coupé, et en particulier le budget du Grand Théâtre de
Québec et le budget de Place des Arts. Si on devait couper le budget des
Affaires culturelles, on empêcherait l'Orchestre symphonique de
Montréal de se produire.
Des voix: On veut Vaugeois! On veut Vaugeois!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.
M. Richard: Je vais inviter mon
collègue, le député de Laprairie, à parler
en particulier à son collègue, le député de
Sainte-Anne qui, à chaque fois qu'il en a l'occasion, demande qu'on
coupe le budget du ministère des Affaires culturelles, celui du Grand
Théâtre de Québec et celui de Place des Arts, ce qui
empêcherait l'Orchestre symphonique de Montréal de se produire.
Mon Dieu! que ça fait du bien d'entendre l'Orchestre symphonique de
Montréal en période de crise économique.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
M. Léonard: M. le Président... Le
Président: Sur la même motion? M. Léonard: Sur
la motion, oui. Le Président: M. le ministre.
M. Léonard: II me fait plaisir de m'associer à mes
deux collègues pour féliciter l'Orchestre symphonique de
Montréal. Cela arrive à une bonne occasion pour démontrer
justement que c'est l'oeuvre de gens qui habitent un peu partout autour de
Montréal, parce que ce disque a été enregistré
à Saint-Eustache, et financé par la Communauté urbaine de
Montréal, par son conseil des arts. C'est là une
réalisation de toute la région de Montréal. Merci.
Une voix: Bravo!
Le Président: Est-ce que la motion sera
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Motion adoptée. Enregistrement des
noms sur les votes en suspens.
Qu'on appelle les députés.
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: ... une demande de directive, s'il vous plaît.
Est-ce à dire que vous appellerez la question de privilège du
ministre des Transports après le vote?
Le Président: Oui, en vertu de notre règlement, les
questions de privilège sont appelées immédiatement avant
les affaires du jour.
Qu'on appelle les députés.
(Suspension de la séance à 16 h 18)
(Reprise de la séance à 16 h 24)
Mise aux voix de la motion
d'appui à la constitution
d'un fonds d'urgence pour
aider les PME
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Veuillez
prendre vos sièges, s'il vous plaît!
Le vote sera pris sur la motion du ministre d'État au
Développement économique qui se lit comme suit: Que
l'Assemblée nationale appuie la proposition faite par le Québec
lors de la dernière conférence des premiers ministres sur
l'économie concernant la constitution d'un fonds d'urgence
destiné à aider prioritairement nos PME québécoises
et à soutenir la création directe d'emplois; et demande au
gouvernement fédéral, d'une part, de modifier sa politique
monétaire pour donner priorité à la lutte contre le
chômage et, d'autre part, d'accepter de participer financièrement
au fonds d'urgence proposé par le Québec.
Que ceux et celles qui sont pour cette proposition veuillent bien se
lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), M.
Bertrand, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Laurin,
Bérubé, Landry, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard,
Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, Martel, de Bellefeuille, Léger, Clair,
Chevrette, Richard, Marois, Duhaime, Caron, Tardif, Léonard,
Fréchette, Baril (Arthabaska), Mme Harel, MM. Proulx, de Belleval, Mme
Lachapelle, MM. Paquette, Gagnon, Guay, Dussault, Champagne, Mme Juneau, MM.
Fallu, Grégoire, Marquis, Charbonneau, Lavigne, Boucher,
Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens,
Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort,
LeMay, Rodrigue, Payne, Beaumier, Tremblay, LeBlanc, Paré, Lachance,
Dupré.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque
(Bonaventure)...
Des voix: Oh! Oh! Oh!
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre!
Le Secrétaire adjoint: ... O'Gallagher, Scowen, Ciaccia,
Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt, Mme Bacon, MM. Marx,
Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Lincoln, Paradis,
Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Rocheleau,
Bissonnet, Polak, Cusano, Dubois, Saintonge, Dauphin, French, Mme Dougherty,
MM. Houde, Middlemiss.
Le Secrétaire: Pour: 64. Contre: 35.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion adoptée.
Motions ou avis, M. le leader?
Avis à la Chambre
M. Bertrand: M. le Président, j'ai un avis. Le jeudi 4
mars, soit demain, de 10 heures à 13 heures, la commission parlementaire
permanente des affaires municipales siégera au salon rouge pour
étudier le projet de loi no 46. Et, à la salle 81-A, la
commission parlementaire du revenu, si c'est nécessaire puisqu'elle
pourrait terminer ses travaux aujourd'hui, étudiera le projet de loi no
39 article par article.
Au niveau des motions, M. le Président, aujourd'hui, à
compter de 16 h 30, au salon rouge, la commission des affaires municipales va
continuer de tenir des auditions sur le projet de loi no 46 et, à la
salle 81-A, la commission parlementaire permanente du revenu va continuer
d'étudier le projet de loi no 39 article par article.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que ces motions
sont adoptées? Adopté.
Questions de privilège
Article de journal
sur la directive régissant
l'utilisation des avions
gouvernementaux
Avant de passer à d'autres affaires, la présidence a
reçu une lettre, avant 14 heures, qui se lit comme suit: "M. le
Président, veuillez prendre avis que je désire soulever une
question de privilège avant l'appel des affaires du jour tel que
prévu à l'article 49 de notre règlement. Ma question de
privilège est relative à l'article publié ce matin dans le
Journal de Québec et de Montréal sous la signature de M. Normand
Girard. Veuillez accepter, M. le Président, l'expression de mes
sentiments les meilleurs. Le ministre des Transports, M. Michel Clair."
M. le ministre.
M. Michel Clair
M. Clair: M. le Président, avec des titres aussi gros que
spectaculaires, le Journal de Montréal et le Journal de Québec,
sous la signature de M. Normand Girard, interprètent aujourd'hui de
nouvelles directives régissant l'utilisation des avions gouvernementaux.
Comme le règlement de notre Assemblée me le permet, je veux
protester vigoureusement contre les interprétations abusives et
malicieuses qu'a faites M. Girard de cette directive et rétablir les
faits. Tant par son titre que par son contenu, le véritable pamphlet de
M. Girard laisse entendre qu'après qu'il y aurait eu une utilisation
abusive des avions du gouvernement, on ouvre maintenant la porte à ce
qui n'était pas encore permis et qu'il s'agit, en fait, d'un
élargissement de la directive de 1975. Cela est faux, archifaux.
Premièrement, rien dans l'article de M. Girard ne soutient
l'allégation d'utilisation abusive. Deuxièmement, n'importe quel
esprit honnête, qui prend connaissance de l'ancienne et de la nouvelle
directive, qui ont été toutes deux déposées ici,
constatera que la nouvelle directive est beaucoup plus précise et
restrictive que l'ancienne qui datait de 1975. Il serait trop long de faire ici
une comparaison complète de l'ancienne directive de 1975, que M. Girard
a bien pris soin de ne pas publier, et de la nouvelle, mais je me permettrai
quand même de donner quelques exemples de resserrement. L'ancienne
directive...
M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je ne me suis
pas levé avant pour soulever cette question de règlement, parce
que je voulais permettre au ministre de vous faire savoir quel était le
sujet ou l'objet de sa question de privilège. Or, M. le
Président, vous n'avez - je vois que vous le faites présentement
- qu'à vous référer aux dispositions de notre
règlement et vous verrez qu'il s'agit là plutôt d'un
plaidoyer du ministre qui, normalement, engendrerait un débat. Libre
à lui de ne pas être d'accord avec l'article en question, mais il
n'y a rien dans cet article, du moins dans ce que dit le ministre
jusqu'à maintenant, qui touche aux privilèges ou aux droits du
député ou du ministre. Il y a là, M. le Président,
quant au ministre... Il a peut-être emprunté la mauvaise voie. Il
aura sans doute l'occasion au cours de cette session qui va sans doute se
poursuivre jusqu'au mois de juin de faire état de ce qu'il croit ne pas
correspondre à la réalité telle qu'il la voit, mais je ne
crois pas qu'il y ait ici matière à une question de
privilège, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, sur la question de
règlement que vient de soulever
le leader de l'Opposition. Si vous vous référez à
toute la jurisprudence accumulée au niveau des questions de
privilège qui ont été soulevées dans le
passé à la suite d'articles parus dans les journaux ou à
des interprétations données par des journalistes à des
gestes posés par des députés, à des
décisions prises par des ministres ou à quelque geste ou action
qui se soient déroulés en cette enceinte, il y a toujours eu, M.
le Président - et je pense que, si vous référiez à
la jurisprudence, vous retrouveriez beaucoup de cas - possibilité pour
un ministre de se prévaloir de l'article 49 qui dit: "Lorsqu'un
député désire soulever une question de privilège,
il doit, avant l'appel des affaires du jour - c'est le cas - à la suite
d'un avis écrit donné au président au moins une heure
avant l'ouverture de la séance - c'est le cas - et exposant
brièvement la question - c'est le cas -signaler la violation dont il
veut se plaindre, protester et rétablir les faits." Et, un peu plus
loin, il est dit: "Un député qui soulève une question de
privilège doit se borner à protester et à rétablir
les faits." Je pense que ce que le ministre est en train de faire, M. le
Président, est exactement de se prévaloir de ce règlement.
Sinon, à quoi servirait-il, surtout dans une situation aussi
évidente que celle que le ministre est en train de soulever?
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, vous me
permettrez simplement...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): ... d'ajouter ceci. Je vous
réfère respectueusement aux dispositions de l'article 48, parce
que ce que nous dit le leader parlementaire du gouvernement...
Évidemment, c'est ce qui arrive lorsqu'on soulève une question de
privilège, la procédure, mais qu'est-ce que c'est, une question
de privilège? On voit la définition à l'article 48: "Une
violation des droits de l'Assemblée ou d'un de ses membres constitue une
question de privilège." Or, je soumets respectueusement, M. le
Président, qu'il n'y a rien dans cet article, du moins dans ce que nous
avons entendu du ministre - et nous l'avons laissé parler suffisamment
pour que ce soit clair dans notre esprit - qui ait été une
violation des droits du ministre des Transports comme membre de cette
Assemblée. D'ailleurs, la directive est publiée
intrinsèquement, intégralement, complètement dans le
même article du journal. Il s'agit simplement de commentaires qui sont la
responsabilité du journaliste, mais qui n'attaquent en aucune
façon le député de Drummond. Il n'y a rien là qui
attaque d'une façon ou d'une autre la réputation du ministre et
député de
Drummond.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je me prévaux
exactement du même article du règlement qui dit: "Une violation
des droits de l'Assemblée ou d'un de ses membres constitue une question
de privilège." Le membre en question, en l'occurrence le ministre des
Transports, justement pour répondre à une demande faite par
l'Opposition, plus précisément par le député de
Gatineau, a déposé la directive relative aux voyages. Le droit du
ministre des Transports, c'est de s'assurer, lorsque ce document est par la
suite transmis par la voie des médias d'information et donc accessible
à la population, que ce qui est la vérité soit la
vérité. Lorsqu'il y a une injustice, il faut que cette injustice
soit réparée. C'est ce qui est en train d'être fait par le
ministre des Transports. Le journaliste a violé le droit du ministre de
s'assurer que la vérité soit respectée.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je comprends que le leader
parlementaire du gouvernement veuille bien défendre son collègue,
le ministre des Transports, c'est de bonne guerre. Mais vous vous rendez compte
du précédent que cela créerait si chaque fois que dans un
article de journal - Dieu sait s'il y en a, on n'a qu'à prendre
n'importe quel éditorial depuis quelque temps relativement aux gestes de
l'un ou l'autre des ministres que nous avons devant nous -chacun de ces
ministres avait le droit de donner un avis et de dire: J'ai une question de
privilège, voici ce que dit tel éditorialiste, voici tel
commentaire dans tel journal, je ne suis pas d'accord, il se trompe. Ce n'est
pas une question de privilège.
Si jamais on laissait aller cette chose comme étant l'exemple
d'une question de privilège, une violation des droits des membres de
cette Assemblée, nous aurions des problèmes. C'est pour la
protection même de la présidence que j'inscris les propos que je
tiens présentement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Je pense que vous êtes prêt à
rendre votre décision. Je ferai simplement valoir une chose. Lorsque,
après avoir posé un geste tout à fait correct
demandé par l'Opposition, on se met à dire,
à toutes fins utiles, que le ministre n'a fait qu'élargir
des choses, donner libre cours à l'excès et permettre le
tripotage dans les voyages, les droits du ministre sont violés et
doivent être rétablis.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Ce n'est pas la première occasion que nous avons dans cette
Assemblée de déterminer s'il s'agit d'une question de
privilège ou non. Il faut regarder l'article 49 qui a été
de part et d'autre bien écrit. Il faut demander aussi à la
personne qui veut se plaindre, protester ou rétablir les faits, de le
faire le plus brièvement possible. L'expérience en cette
Assemblée a souvent permis à des gens d'aller un peu plus loin.
La présidence a été assez large sur
l'interprétation de ce que pourrait être une question de
privilège, en sachant qu'une personne qui se croit lésée,
ordinairement, utilise, en vertu du règlement, l'article 49.
Je tiens aussi à vous faire remarquer qu'il y a également
le troisième paragraphe de l'article 34 qui a une autorité en
termes de jurisprudence et d'habitude en cette Assemblée. En vertu de
cet article, le député, avec la permission du président,
peut s'expliquer sur un fait qui, bien que ne constituant pas une violation de
privilège, le concerne en tant que député ou concerne en
tant que député un de ses collègues absents. En fait,
l'utilisation de la rectification qui a été souventefois
exprimée ici par quelqu'un sur une question de privilège a
été faite assez largement de la part de la présidence,
tout en demandant à la personne qui pose sa question de privilège
de le faire le plus brièvement possible.
Je vous demande, M. le ministre, de conclure en ce sens.
M. Clair: Merci, M. le Président. J'étais justement
en train d'expliquer que l'interprétation que faisait M. Girard de la
directive m'apparaissait abusive en ce qu'elle fausse la réalité
même de cette directive. Il disait qu'il s'agissait d'un
élargissement alors qu'en fait il s'agit d'un resserrement et je
m'apprêtais à en donner des exemples, M. le Président. (16
h 40)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Clair: C'est ainsi que l'ancienne directive ne restreignait
nullement l'utilisation de l'avion du gouvernement entre Québec et
Montréal, alors que la nouvelle directive prévoit que, sauf
permission expresse du ministre des Transports, l'avion gouvernemental ne peut
voler entre Québec et Montréal, sans qu'on s'assure qu'au moins
cinq personnes se trouvent à bord. On y limite également les cas
dans lesquels...
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition sur une question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, il me semble
que vous avez voulu interpréter le règlement à la
lumière de la jurisprudence, avec beaucoup de latitude, avec une grande
largeur d'esprit, qui m'inquiète même jusqu'à un certain
point pour l'avenir mais, tout de même, je respecte votre
décision. Cependant, à écouter le ministre, il n'a pas
compris.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, j'aimerais
vous faire remarquer aussi - parce que je veux qu'on se comprenne très
bien - que vous devez, le plus brièvement possible, exposer le grief que
vous avez. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, essentiellement, mon grief
était qu'alors même que la directive qui a été
rendue publique hier restreint l'utilisation de l'avion du gouvernement, le
journaliste en question l'a interprétée comme un
élargissement.
M. le Président, même si je n'ai pas l'habitude de me
prononcer sur la façon dont les journalistes s'acquittent de leurs
fonctions, il me semble que, dans ce cas, les préjugés, voire une
espèce de hargne que reflètent les interprétations de M.
Girard, m'apparaissent purement inexplicables, à moins qu'il ne s'agisse
simplement d'un beau cas de partisanerie politique, surtout quand les autres
médias donnent une interprétation exactement contraire à
celle que M. Girard a donnée lui-même.
Si tel est le cas, s'il s'agit d'un cas évident de partisanerie
politique, je voudrais simplement dire que je me sens en droit de prier M.
Girard de descendre de sa loge et de s'embarquer franchement en politique,
plutôt que de profiter de sa position privilégiée de
journaliste dans un grand quotidien du Québec pour faire un travail qui
n'a rien à voir avec le travail d'un journaliste.
M. le Président, je sais que je suis vulnérable en tenant
les propos que je viens de tenir, que M. Girard ne me manquera probablement pas
dès demain ou la semaine prochaine, mais je voulais que tout le
Québec sache que, pour ce qui me concerne, je considère qu'il
nous a donné encore aujourd'hui une preuve de son manque flagrant
d'éthique professionnelle. D'ailleurs,
j'ai l'intention de prendre conseil, afin de décider s'il y a
lieu de porter plainte devant le Conseil de presse.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Affaires du jour. M. le
leader.
M. Bertrand: M. le Président, aux affaires du jour, je
vous demanderais d'appeler l'article 2 du feuilleton.
Des voix: ...
Motion exigeant que le gouvernement
assume ses responsabilités face
à
la situation qui prévaut dans
l'industrie de la construction
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Motion présentée par le député de
Mégantic-Compton: "Que cette Assemblée exige du gouvernement
qu'il assume ses responsabilités, face à la situation dramatique
qui prévaut actuellement dans l'industrie de la construction au
Québec, tant au plan économique qu'au plan de la paix sociale."
M. le député de Mégantic-Compton, vous avez droit de
parole.
M. Fabien Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Il serait bon
d'abord, je crois, de relire à nouveau la motion.
Corrections dans une intervention en Chambre
(suite)
Le Président: M. le député de
Mégantic-Compton, excusez-moi, mais j'avais promis tout à l'heure
de faire des vérifications - qui sont déjà faites - sur
"l'incident" qu'a soulevé tout à l'heure le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
Ce qui est arrivé, c'est qu'une employée du journal des
Débats, ne pouvant savoir comment s'écrivait le mot "Moyer", a
téléphoné d'elle-même au cabinet du ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, pour s'enquérir de la
façon d'écrire le mot "Moyer" et, à ce moment-là,
on lui aurait répondu qu'une erreur avait été faite sur le
nom et que ce n'était pas M. Moyer, mais M. Lazar. Sachant cela, le
journal des Débats a écrit quand même, de la façon
qu'il le pouvait, le mot "Moyer". Il n'y a donc eu aucun changement au journal
des Débats et la démarche a été faite non pas par
le ministre, mais par une employée du journal des Débats qui
voulait écrire de façon exacte le mot qui avait été
prononcé par le ministre.
M. le député de Mégantic-Compton.
Une voix: Des "ballounes."
Reprise du débat sur la motion M. Fabien
Bélanger (suite)
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je crois
qu'avant de commencer le débat il serait bon de relire la motion: "Que
cette Assemblée exige du gouvernement qu'il assume ses
responsabilités face à la situation dramatique qui prévaut
actuellement dans l'industrie de la construction au Québec, tant au plan
économique qu'au plan social."
Pourquoi avons-nous inscrit cette motion? Tout le monde est d'accord que
le Québec vit, en ce moment, le pire marasme connu, tout au moins,
jusqu'à ce jour dans l'industrie de la construction. Ce qui est le plus
alarmant, c'est que le gouvernement ne semble absolument pas soucieux de tenter
de trouver des solutions pour remédier à la situation. Si nous
regardons les effectifs, depuis 1975, c'est à la chute constante et
accentuée des effectifs que nous assistons au Québec. De 150 000
travailleurs dans l'industrie de la construction, on se retrouve aujourd'hui
avec moins de 100 000, 96 582 travailleurs dans l'industrie de la
construction.
Je suis persuadé que le gouvernement va arriver avec des
arguments comme les taux d'intérêt et c'est la faute du
fédéral, comme on est habitué de l'entendre. Si nous
regardons la situation dans l'ensemble du Canada, malgré qu'en 1977 on
ait connu une baisse dans le nombre d'heures travaillées au Canada,
depuis ce temps, on connaît une remontée, une croissance
continuelle. Donc, M. le Président, on peut en déduire que,
vraiment, le Québec est dans un marasme dans le domaine de la
construction. Comment penser à une relance économique sans penser
d'abord à rétablir ce climat malsain autant du point de vue des
investisseurs que des travailleurs de la construction?
Si nous regardons les mises en chantier, là encore les chiffres
sont extrêmement révélateurs. On peut les comparer à
partir de 1971. En 1971, au Québec, 51 782 mises en chantier; en 1972,
sensiblement la même chose, pour atteindre un sommet record en 1976 de 68
748 mises en chantier. Dès 1977, pure coïncidence, dès
l'arrivée au pouvoir du gouvernement péquiste, nous notons une
diminution assez prononcée, soit 57 580, pour finalement se retrouver,
en 1981, avec seulement 29 000 mises en chantier. On peut déjà
présumer qu'en 1982 ce chiffre sera encore inférieur. Si ce n'est
pas le marasme, c'est vraiment la catastrophe.
Qu'arrive-t-il à nos entreprises en construction? Pour
l'année 1980 seulement, c'est au nombre de 2922 que les entreprises ont
quitté le secteur de la construction. En tenant compte des 574 nouvelles
qui se sont installées, c'est une perte nette de 2348 entreprises qui
ont laissé ce secteur. Ce ne
sont pas des multinationales. Ce ne sont pas de grosses compagnies. Ce
sont, majoritairement, de petites compagnies québécoises, de
petites compagnies canadiennes-françaises, en plus. Cela devrait faire
plaisir au gouvernement. J'ai oeuvré dans ce domaine pendant quinze ans.
Je connais à peu près tous les intervenants dans le domaine de la
construction au Québec et je peux vous assurer qu'ils sont à peu
près à 90% dirigés par des petites entreprises familiales
québécoises, canadiennes-françaises.
Les problèmes dans l'industrie de la construction, on pourrait
les résumer à peu près à ceci. Nous avons, d'abord,
l'Office de la construction qui est sans président-directeur
général. Cette situation laisse donc l'office sans leadership.
(16 h 50)
En date du 15 janvier 1982 j'ai adressé une lettre au ministre
responsable pour lui signaler cet état de faits et tout ceci ne m'a valu
qu'un simple accusé de réception et à ce jour absolument
rien n'a été fait, que je sache tout au moins.
Il y a aussi évidemment la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, qui, à la suite de la loi 17, a
amené de nouveaux inspecteurs de sécurité sur les
chantiers. On sait qu'auparavant c'était l'OCQ, l'Office de la
construction du Québec, qui s'occupait de la sécurité.
Là, on a de nouveaux inspecteurs, donc, on double les inspecteurs, on
double également les dépenses pour en arriver même pas aux
mêmes résultats, mais à des résultats beaucoup plus
décevants puisque ces inspecteurs de l'OCQ avaient acquis quand
même une certaine expérience. Il faut avoir vécu
l'expérience du chantier de construction pour savoir de quelle
façon c'est quasi impossible, pour des inspecteurs qui ne sont pas
compétents dans le domaine, de venir faire des inspections, puisque le
stade des travaux change tellement vite qu'on ne peut pas attendre d'avoir un
inspecteur qui va venir d'un CLSC à 25, 50 ou 75 milles pour
vérifier si l'échafaudage est adéquat ou non.
On avait là des hommes compétents de l'Office de la
construction du Québec qui doivent quand même se rendre encore sur
les chantiers pour faire respecter le décret, pour vérifier les
cartes de qualification et également, depuis l'arrivée au pouvoir
de ce gouvernement, les cartes de classification. Donc, nous avons là un
dédoublement d'inspecteurs qui ne fait qu'entraver les travaux du
chantier et qui n'apporte, comme je l'ai mentionné, absolument rien de
concret.
Il y a également le problème que connaît le chantier
de gazoduc dont je vous parlerai un peu plus brièvement tout à
l'heure. Il y a également le renouvellement du décret. Nous
sommes à moins de 60 jours du renouvellement du décret dans le
domaine de la construction et, jusqu'à maintenant, ce renouvellement de
décret semble vraiment compromis. De toute façon, M. le
Président, mon collègue de Jean-Talon vous entretiendra tout
à l'heure plus longuement des problèmes que cause ce
renouvellement du décret.
Comment ne pas profiter d'un débat sur la construction pour dire
un mot du fameux règlement de classification que nous avons d'ailleurs
dénoncé à plusieurs reprises et que nous trouvons toujours
inacceptable? Comment concevoir qu'avec l'argent des Québécois,
avec notre argent, nous formions, dans le cadre de l'enseignement
professionnel, des jeunes travailleurs de divers métiers de la
construction, qui, après avoir terminé leur cours, se voient tout
simplement refuser l'accès aux chantiers de construction parce qu'ils
n'ont pas travaillé X nombre d'heures? C'est donc dire que nous
investissons inutilement dans notre jeunesse. D'autres de mes collègues
traiteront aussi de ce règlement de placement que nous continuerons de
dénoncer tant et aussi longtemps que nous serons dans cette Chambre.
Tout le monde connaît les problèmes du chantier du gazoduc.
Je ne me suis pas fié à des racontars, je ne me suis pas
fié à la correspondance qui m'était acheminée, je
ne me suis pas fié au ministre non plus, je me suis
déplacé; j'ai quitté lundi matin, il y a deux jours, ma
résidence pour me rendre à Joliette voir sur place l'importance
du projet et les difficultés qu'on y rencontrait.
Je peux vous dire que cela m'a coûté une dizaine de cartes
de visite à distribuer aux agents de la Sûreté du
Québec pour leur dire que j'étais un député de
l'Assemblée nationale qui voulait aller se rendre compte des
problèmes réels du chantier du gazoduc.
Après avoir distribué ces cartes à une dizaine
d'agents de la Sûreté du Québec, j'ai dû faire face
encore à deux agents privés de sécurité. Cela,
c'est avant d'avoir accès non pas au bureau de la compagnie, non pas
à la maison mère de cette même compagnie, mais simplement
à un petit bureau de chantier, une roulotte, un "shack", comme on le dit
dans le métier. J'ai dû distribuer, comme je vous le disais, une
dizaine de cartes pour venir à bout de discuter avec des
ingénieurs-cadres responsables du projet de gazoduc.
Là, ce n'est pas rassurant non plus. On m'a d'abord montré
des photographies des dommages qui avaient été causés, des
camions totalement détruits, des camions incendiés. J'ai
également été en mesure de voir de quelle façon on
surveillait ce chantier: on patrouille le ciel avec des
hélicoptères de la Sûreté du Québec. Chaque
travailleur a un "body guard". Je me serais pensé en Sibérie,
sauf qu'en Sibérie, ce sont des travaux forcés alors que
là, c'est plutôt pour permettre aux travailleurs de pouvoir enfin
travailler.
Là encore, l'importance des retombées économiques
de ce gazoduc est considérable. Je peux vous dire sincèrement que
si un tel climat avait toujours existé au Québec, les grands
projets que nous avons connus, tels le métro de Montréal, Expo
1967 et même les Jeux olympiques, avec tous les ennuis qu'on a connus,
n'auraient jamais pu se réaliser. L'importance de cela? Il y va tout
simplement de la crédibilité du Québec. Ces mêmes
ingénieurs dirigeants de la compagnie - ce ne sont pas des patrons, ce
sont des ingénieurs, du personnel-cadre - m'ont admis que
dorénavant, plus jamais ils ne soumissionneraient pour un contrat de
construction quelconque au Québec. Ils m'ont également fait
comprendre qu'un gazoduc, ce n'est pas une construction ordinaire, ce n'est pas
la construction d'un édifice à bureaux, ce n'est pas la
construction d'un édifice à logements où, par exemple, on
peut terminer la construction d'un édifice à bureaux à
90%, louer les étages du bas pour, finalement, avoir certains revenus
pour compenser l'argent investi.
Un gazoduc, même s'il est complété à 99,9%,
s'il manque dix pieds d'un tronçon de Saint-Sulpice à
Trois-Rivières, on ne peut l'utiliser. C'est donc dire que la compagnie
a investi des millions et des millions qui sont là, qui ne servent
à rien. Si l'échéancier n'est pas respecté, cela
coûtera, selon ces ingénieurs, environ 50 000 000 $
supplémentaires uniquement parce que le gouvernement actuel ne prend pas
ses responsabilités. Il y a des voeux pieux, d'accord, le ministre dit
que s'il le faut, il va légiférer, mais qu'est-ce qu'on a eu
jusqu'à présent? Absolument rien de concret. C'est ce que ces
dirigeants d'entreprise demandent, c'est ce que ma formation politique demande,
des gestes concrets pour s'assurer qu'au Québec comme ailleurs on est
encore capable de réaliser de grands projets, surtout dans une
période aussi difficile que celle que nous connaissons actuellement.
Il y a également le local 144 qui est sous tutelle depuis sept
ans. Dans mon esprit, une tutelle est un moyen que doit prendre un gouvernement
pour remédier à une situation temporaire dans le plus bref
délai possible. Est-ce qu'on peut conclure que c'est normal, sept
longues années de tutelle? Il serait temps, tout au moins, que le tuteur
fasse rapport à cette Assemblée lors d'une commission
parlementaire des progrès de cette tutelle et de ce qu'il a accompli
depuis sept ans de tutelle. Ce n'est pas normal que des travailleurs, qui ont
un local, un syndicat sous tutelle depuis sept ans, ne réclament pas un
jour ou l'autre un assouplissement ou une lueur d'espoir de s'en sortir. On ne
peut pas les blâmer. Je vois l'adjoint parlementaire au ministre du
Travail qui est un fervent syndicaliste. Je me demande s'il trouve normal qu'un
syndicat soit sous tutelle pendant sept ans. Je ne crois pas. (17 heures)
II y a aussi, comme je l'ai mentionné, le renouvellement du
décret. Dès le 16 novembre dernier, j'ai porté cela
à l'attention du ministre et, comme je l'ai mentionné, nous nous
retrouvons à moins de 60 jours du renouvellement du décret et
absolument rien, aucun geste concret, encore une fois, ne semble avoir
été accompli. L'Association des constructeurs demande à
coups de télégrammes, de lettres, de communiqués de presse
que le ministre prenne ses responsabilités, qu'il trouve une
façon de négocier. Imaginez-vous, M. le Président, si nous
devions connaître un lockout ou une grève dans le domaine de la
construction, avec la situation économique qui sévit
présentement au Québec! Le vieil adage, M. le Président,
qui dit que lorsque le bâtiment va, tout va, moi, j'y crois. Les
travailleurs de la construction eux aussi y croient. Ma formation politique y
croit. Vous me permettrez, M. le Président, de remercier mes
collègues qui ont ressenti beaucoup d'enthousiasme à l'annonce de
cette motion et qui, comme vous pourrez le constater, sont là pour me
soutenir et apporter d'autres arguments qui sont valables et toujours dans le
même but, M. le Président, non pas dans le but de faire de la
politique, il y a un temps pour faire de la politique, il y a un temps pour
regarder en face les vrais problèmes du Québec.
C'est ce que je veux faire, M. le Président. Lorsque je suis
parti de chez moi, j'ai fait 450 milles pour aller voir le chantier du gazoduc.
Il n'y a pas un électeur de Joliette qui va voter pour moi, ce sont les
électeurs de Mégantic-Compton, M. le Président, qui votent
pour moi. Je suis allé là dans l'intérêt public,
dans l'intérêt de tous les Québécois. Nous avons
là un chantier qui a un échéancier à respecter. Il
y a des travaux qui sont impossibles à effectuer à d'autres
périodes qu'en hiver. C'est donc dire que si on ne réagit pas et
si on ne prend pas les moyens pour que ces travaux se complètent, il
faudra attendre un an avant de pouvoir compléter un tronçon entre
Saint-Sulpice et Trois-Rivières.
M. le Président, pour conclure, je crois que, devant tous les
faits que je viens de mentionner et devant une situation économique
aussi précaire, il serait temps que le ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pose un geste concret,
qu'il accepte, tel que nous le lui avons demandé à maintes et
maintes reprises, la convocation d'une commission parlementaire où on
pourra entendre tous les intervenants et, à la suite de cette
commission, pour que le gouvernement, le ministre, enrichi des
témoignages qu'il aura entendus, que nous aurons pu recueillir,
puisse légiférer, s'il le faut, afin de s'assurer que
l'industrie de la construction retrouve dans le plus bref délai possible
le dynamisme qu'elle avait auparavant, c'est-à-dire avant
l'arrivée au pouvoir du gouvernement péquiste. C'est d'une
extrême importance, M. le Président, qu'on réagisse
immédiatement. Comme je l'ai mentionné, ce n'est pas une question
de faire de la politique, c'est une question d'intérêt public, je
le dis: elle est d'intérêt public et je vais le
répéter, M. le Président, que c'est d'une extrême
importance. Il n'y a pas d'autre industrie que l'industrie de la construction
pour relancer l'économie. Ce ne sont pas des motions comme on s'en est
fait présenter en cette Chambre blâmant la politique
monétariste, blâmant tout le monde qui vont régler la
situation. La solution, c'est tout simplement de convoquer tous ces gens en
commission parlementaire. Nous y serons, le ministre y sera. On écoutera
chacun des intervenants et, à la suite de cela, on pourra passer
à des gestes concrets pour s'assurer qu'au Québec comme ailleurs,
on peut encore, sans lancer de grands slogans, faire des choses
concrètes, on peut encore relancer notre économie. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre du
Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
M. Pierre Marois
M. Marois: M. le Président, j'ai lu très
attentivement le texte de la motion présentée par l'Opposition
libérale. Je l'ai lu, je l'ai relu." Que cette Assemblée exige du
gouvernement qu'il assume ses responsabilités face à la situation
dramatique qui prévaut actuellement dans l'industrie de la construction
au Québec - et notez bien le texte - tant au plan économique
qu'au plan de la paix sociale." Très bien.
Je suis absolument estomaqué. Je suis estomaqué par
l'attitude de l'Opposition libérale. Je suis frappé par
l'incohérence, l'inconsistance et ce que j'appellerais
l'irresponsabilité de l'Opposition libérale. Je vais m'expliquer.
Essayez de comprendre, M. le Président. Si vous comprenez cela, vous me
l'expliquerez. Hier, notre collègue, le ministre d'État au
Développement économique, plaidait sur une motion qui touche
précisément la situation économique du Québec, la
nécessité de lancer un plan d'urgence au Québec, compte
tenu de la situation du chômage. Jusqu'à nouvel ordre -ils nous
ont tellement dit, de l'autre côté de la Chambre, qu'il fallait
dire non au projet québécois, qu'il fallait rester dans le
régime fédéral - on est dans le régime
fédéral. Dans cette perspective, je n'arrive plus à
réconcilier les choses. Dans la motion de notre collègue, le
ministre d'État au
Développement économique, bien sûr, on demande
à cette Chambre d'appuyer le plan d'urgence. On demande à cette
Chambre de demander avec nous au gouvernement fédéral de modifier
sa politique monétaire pour donner une priorité à la lutte
au chômage au Québec, pour que les jeunes travaillent au
Québec. Ce n'est pas une perspective d'assurance-chômage qu'on
veut au Québec; c'est une perspective d'assurance-travail. Il est temps
que les choses soient dites clairement.
L'Opposition libérale, M. le Président -vous avez
noté cela - nous présente un amendement à la motion de mon
collègue. Il faudrait biffer, nous suggéraient-ils, la partie
demandant au gouvernement fédéral de modifier sa politique
monétaire, enlever cela. Donc, ne parlons pas de la question des taux
d'intérêt. D'ailleurs, le député de
Mégantic-Compton vient de dire lui-même: Le gouvernement va
certainement nous parler encore des taux d'intérêt du gouvernement
fédéral. Il ne faut pas parler des taux d'intérêt du
gouvernement fédéral. Cela n'existe pas. Ceux qui,
précisément, nous disaient qu'il fallait dire non au projet
québécois nous disent aujourd'hui: II faut faire comme si cela
n'existait pas, le fédéral. On n'est plus dans le régime
fédéral. Il ne faut pas tenir compte de cela. Il ne faut pas
tenir compte du fait que le grand patron, le grand "boss" de la maison
principale du Parti libéral, M. Trudeau, durant la campagne - on n'aime
pas cela quand on rappelle ces choses, mais ce sont des faits - était
venu nous dire qu'un non voudrait dire un oui. On se souvient tous de cela, les
Québécois et les Québécoises. Aujourd'hui, on l'a
sur le nez, le non qui voulait dire un oui.
Non seulement c'est le coup de force constitutionnel qui s'attaque
à nos droits, mais c'est maintenant le coup de force sur le plan de la
politique monétaire qui fait mal. Non seulement le Québec, mais
l'ensemble des provinces ont demandé au gouvernement
fédéral... Tous les Québécois et toutes les
Québécoises ont vu cela et on voit l'attitude de l'Opposition
libérale. Il ne faut pas parler de cela. Il faudrait faire comme si cela
n'existait pas. Mais cela existe. On nous a dit de rester là-dedans, que
c'était là la voie de l'avenir pour le Québec. Les taux
d'intérêt, c'est le gouvernement fédéral.
Tous les citoyens et toutes les citoyennes qui nous écoutent
comprennent une chose qui est bien élémentaire. C'est un calcul
bien simple à faire. Une maison de 50 000 $, si vous avez à la
financer sur une période de 25 ans à un taux
d'intérêt de 10% et que vous avez une hypothèque, vous
coûte au bout de 25 ans 133 000 $. La même maison de 50 000 $
financée sur 25 ans à un taux d'intérêt
d'hypothèque de 18%
vous coûte 320 000 $. Et on nous parle d'une situation
économique dramatique dans le secteur de la construction. Mais il ne
faut pas parler des taux d'intérêt du fédéral. Oh
non! Faisons comme si cela n'existait pas. Réunissons-nous en commission
parlementaire avec les associations syndicales, les associations patronales et
l'Opposition libérale. Faisons comme si le reste n'existait pas.
Ignorons cela. Non, non, non, ne touchons pas à cela et on va
régler cela, les taux d'intérêt qui sont
déterminés par le fédéral. Oh oui! J'appelle cela,
M. le Président, faire l'autruche. Il n'y a pas deux poids, deux
mesures. Il n'y a pas le fédéral quand cela fait l'affaire et
l'absence du fédéral quand cela ne fait pas l'affaire. J'aurais
aimé qu'on soit à tout le moins un peu rigoureux, M. le
Président, qu'on mette l'ensemble des faits sur la table et qu'on tienne
compte de l'ensemble du portrait. Tout le monde sait qu'on vit une situation
économique difficile, particulièrement dans le secteur de la
construction. C'est vrai. Cependant, regardons les chiffres. (17 h 10)
Mon collègue, le ministre de l'Habitation, aura l'occasion
d'intervenir sur cette motion pour rappeler l'ensemble des programmes que le
gouvernement du Québec s'est arraché le coeur à mettre en
marche pour relancer la construction au Québec. Dans le secteur
résidentiel, durant la dernière campagne électorale, on a
pris des engagements qu'on a commencé à réaliser par le
programme d'accession à la propriété, le programme
d'allocation-logement pour aider les familles à plus faible revenu, en
commençant avec les personnes les plus âgées. On a un
coffre à outils provincial, on vit avec ça et c'est avec
ça qu'on peut travailler.
On fait des erreurs, c'est sûr, on n'est pas le département
des miracles. Tant qu'il y aura des humains qui gouverneront dans quelque
gouvernement que ce soit, provincial ou national, il y aura des erreurs, c'est
vrai. Il faut avoir l'honnêteté de les admettre et de les
corriger. Il ne faut tout de même pas balancer du revers de la main tout
un pan de la réalité qui est celui qui nous crucifie
littéralement. L'Ô Canada se termine, comme je le disais, par
"protégera nos foyers et nos droits". Après nous avoir
littéralement brimés sur le plan de nos droits fondamentaux, il
est en train de nous arracher nos foyers. Cela, c'est la
réalité.
Sur le plan des résidences, il y a des citoyens qui perdent leur
maison actuellement, et on me dit: Réunissons une commission
parlementaire, ça va régler le problème. Faisons comme si
le fédéral n'existait pas. Je dis non, c'est un peu trop court et
un peu trop simple. Il viendra un jour, plus vite qu'on le pense, où il
faudra que les Québécois fassent le choix. C'est à partir
d'illustrations concrètes comme celle-là qu'on va évaluer
de part et d'autre les perspectives d'un projet québécois dans un
sens ou dans l'autre.
Malgré la situation économique qui n'est pas facile dans
le secteur de la construction, regardons maintenant les chiffres.
M. Rivest: ...
M. Marois: On est dans la construction. Je vois le
député de Jean-Talon faire des sparages, il ne faut pas parler du
fédéral. Les taux d'intérêt, ça ne touche pas
la construction quand on les écoute. Je regrette, oui, ça touche
la construction. Cela touche le secteur résidentiel.
Mon collègue citera des chiffres en temps et lieu. Il y a une
demande de gens, présentement, il y a des projets que des entreprises de
construction ont en réserve, mais qu'elles n'osent pas lancer sur le
marché parce que les taux d'intérêt sont trop
élevés. Tout le monde comprend cela. Il y a des usines qui
ferment, il y a des projets de mise en chantier, d'agrandissement dans le
secteur manufacturier et industriel au Québec qui ne démarrent
pas parce qu'on est une économie dont un pan essentiel est fondé
sur la petite et moyenne entreprise, et ces gens ne sont pas capables de tenir
le coup devant une situation de taux d'intérêt aussi
élevés.
Regardons cependant les chiffres. Le gouvernement du Québec
prend-il ses responsabilités ou non dans une situation qui est
difficile, avec un coffre à outils provincial limité? Je vais
prendre la région de Montréal, je vais comparer les deux
dernières années. Malgré une situation difficile, alors
que de janvier à novembre 1980 la moyenne des heures travaillées
était de 1023, de janvier à novembre 1981 - ce sont les chiffres
qui me sont communiqués par l'Office de la construction du Québec
-la moyenne était de 1095. Le nombre de salariés, quand on
compare les mêmes périodes, de janvier à novembre 1980 et
de janvier à novembre 1981, pour la première année, 48 573
et, cette année, 49 045.
La moyenne des salaires - là, on touche une question qui est
celle des règlements de placement - qui était, pour la
première période, de 13 358,77 $, pour la même
période cette année, est de 15 353,48 $. La masse salariale a
augmenté. C'est vrai que le nombre de travailleurs qui ont une chance de
travailler a diminué à l'échelle du Québec, pour
des raisons évidentes pour toute personne qui se donne la peine de
regarder. Cependant, il est vrai aussi... Là, on arrive à l'autre
volet, l'autre pan, celui de la paix sociale, celui de la chance au travailleur
de se trouver un emploi et de pouvoir gagner un peu plus honorablement sa
vie que par le passé.
Il ne serait pas mauvais de faire un peu d'histoire. Il y a eu une
période qui a donné lieu - comme on dit dans le jargon, nos amis
d'en face s'en souviennent très bien - à la commission
Cliche.
La commission Cliche a fait un rapport. Il y avait à
l'époque, on s'en souviendra, des problèmes énormes de
violence, d'intimidation, de menaces, d'extorsions, et j'en passe. La
commission Cliche a soumis son rapport; il y avait un certain nombre de
recommandations dans le rapport de la commission Cliche, notamment une
idée, celle de la mise en place d'un règlement relatif au
placement dans la construction, c'est-à-dire forcément
d'établir des critères pour l'embauche, pour faire en sorte que,
fondamentalement, les vrais travailleurs de la construction puissent avoir la
chance de faire leur métier, que d'autres ne viennent pas par la bande
prendre une partie de leur temps de travail.
Avec la mise en place du règlement de placement, on est
passé de quelque chose qui était de l'ordre de 250 000 personnes
qui entraient et qui sortaient des chantiers de construction, à un
bassin de base de 150 000, qui étaient les vrais travailleurs de la
construction.
Ce règlement de placement a été
présenté et adopté par qui? Il a été
adopté par arrêté en conseil le 28 septembre 1977, par le
gouvernement actuel, mis en vigueur en juillet 1978.
Il y a eu des effets positifs, j'admets qu'il y a des angles qui doivent
être révisés, non pas l'économie
générale du règlement. On a eu des recommandations d'une
équipe de députés, le comité mixte de la
construction regarde ça; je devrais avoir des recommandations avant
longtemps. On regardera ça et s'il y a moyen de le bonifier, de
l'améliorer, tout le monde est d'accord. Mais, fondamentalement, ce
règlement a atteint ses objectifs, c'est-à-dire la reconnaissance
des vrais travailleurs et leur permettre d'avoir un salaire moyen
décent. Les chiffres sont là pour le démontrer. Alors que
la moyenne d'heures travaillées par les salariés de la
construction en 1976 était de 931, c'est passé à 1008 en
1978 et, sur la base des chiffres disponibles sur les onze premiers mois de
l'année 1981, c'est passé à 1026 et ça augmente.
Pas au rythme qu'on voudrait; il y a une possibilité plus grande, c'est
la gamme des projets dans le domaine résidentiel. Il y a une demande,
parce qu'il y a des gens qui veulent et qui pourraient, mais pas dans une
situation économique avec des taux d'intérêt pareils... il
y a des projets manufacturiers aussi et il y a des coins où on peut
intervenir et donner un coup de main.
Je reviens à la question de la paix sociale. On parle du gazoduc,
on en a parlé à plusieurs reprises depuis une semaine ou quinze
jours, il y a eu plusieurs questions. Le gazoduc, c'est un gros chantier, c'est
vrai que c'est un chantier d'un type tout à fait particulier. J'ai
déjà eu l'occasion de dire que quand il y a un projet comme
celui-là, il est normal qu'on fasse tout ce qui est humainement possible
pour qu'il roule, pour qu'il marche. C'est vrai qu'il y a des périodes
où on peut faire des bouts, selon le climat, etc. Seulement, j'ai
toujours dit aussi que s'il fallait le gazoduc au Québec, ce n'est pas
à n'importe quel prix et pas au prix de droits de travailleurs de la
construction, pas au prix de la violence, de l'intimidation ou de menaces de
discrimination; ce n'est pas vrai, pas au prix de violations flagrantes de la
loi et des règlements actuels.
Il y a eu des violences là aussi, de l'intimidation, des menaces.
Qu'est-ce que le gouvernement du Québec a fait? Le gouvernement du
Québec d'abord a pris des mesures concernant cette dimension.
Le député me sert le fait qu'il est allé visiter;
c'est son droit le plus légitime et je pense que c'est une excellente
chose que d'aller voir, il n'y a rien comme ça. Mais il me dit: J'ai
dû - je ne me souviens plus de son expression - distribuer une dizaine de
cartes à des agents de sécurité. Est-ce que le
député est en train de nous reprocher de prendre les mesures
normales, élémentaires pour assurer la protection de ceux qui
veulent travailler, qui ont le droit de pouvoir travailler en paix, dans la
dignité, sur les chantiers de construction? Est-ce que le
député est en train de reprocher au gouvernement de prendre les
mesures qui s'imposaient sur le plan des mesures élémentaires
policières pour faire en sorte que les installations et les
équipements soient protégés?
Le gouvernement a pris ses responsabilités. On a tricoté
des liens très serrés avec le ministère de la Justice, les
corps de police. Effectivement, il y a eu des arrestations, des plaintes ont
été portées, des accusations ont été
portées et le travail va se continuer si tant est que quelqu'un se
permet de passer à côté de la "track" et des règles
de base qui sont prévues.
En ce qui concerne la discrimination, il est normal que chaque
travailleur trouve son compte normal sur le chantier de construction. Je ne
vois pas pourquoi on accepterait, quelle que soit la centrale syndicale, je le
répète, quel que soit le local syndical, quelle que soit la
compagnie, qu'il y ait des pratiques discriminatoires, donc qui ne soient pas
conformes à nos lois et à nos règlements. Je pense que
cela n'est pas acceptable.
On me parle d'une commission parlementaire là-dessus. J'ai
déjà eu l'occasion de répondre, M. le Président. Je
n'écarte pas définitivement ce moyen-là,
mais je ne pense pas que, dans la situation actuelle, telle que je
l'évalue, telle que je la mesure, ce soit la mesure appropriée
dans les circonstances, bien qu'il ne faille jamais écarter des moyens
comme ceux-là en ce qui concerne cette dimension. Mais qu'on n'essaie
pas de noyer tout le morceau et de faire comme s'il n'y avait pas tout l'autre
pan de la réalité, le pan de la réalité d'un
gouvernement fédéral dirigé par M. Trudeau, qui nous
impose une politique monétaire avec des taux d'intérêt qui
s'en vont vers le ciel, mais qui sont littéralement en train de
crucifier les gens qui voudraient accéder à la
propriété, de briser carrément, de casser les reins de
projets québécois de mises en chantier dans le secteur
résidentiel, de casser les reins de projets industriels d'investissement
et de développement.
On va continuer à faire notre travail du mieux qu'on peut sans
prétendre qu'on est parfait - ce n'est pas vrai - en ayant aussi
l'humilité d'admettre nos erreurs en cours de route et de les corriger.
On a pris nos responsabilités jusqu'à maintenant et on va
continuer à les prendre, mais je demanderais une chose, c'est que les
citoyens et les citoyennes du Québec notent l'incohérence,
l'irresponsabilité, l'inconsistance des gens qui sont en face, qui
refusent de parler d'un pan, d'une dimension fondamentale dans la construction.
Quand le bâtiment va, tout va, c'est vrai, mais cela aiderait en maudit
si les taux d'intérêt baissaient, par exemple. Or, actuellement,
ils s'en vont vers le ciel, ils se dirigent vers le haut. Le gouvernement
fédéral, M. Trudeau en tête, dit: Non, fini le
fédéralisme coopératif; je mène ma barque tout
seul; cela n'a pas d'importance, ce que les provinces disent. Or, la
réalité est là. Tous les citoyens, toutes les citoyennes
comprennent cela, ceux et celles qui ont à vivre tous les jours avec des
renouvellements de taux d'intérêt hypothécaire. Il me
semble que c'est clair.
Quant à nous, nous sommes prêts à continuer à
discuter avec le gouvernement fédéral. J'ai moi-même
reçu ce matin du Conseil des ministres un mandat pour aller discuter
avec mon homologue fédéral, M. Axworthy, sur le plan de
l'ouverture qu'il nous fait. On va aller discuter pour mettre au point, le
mieux possible, un certain nombre de projets québécois, parce
qu'il faut débloquer sur ce plan-là. Tout ce qui peut contribuer
à relancer l'économie, on est prêt à y faire notre
effort de guerre avec la limite des outils qu'on a, d'un coffre à outils
provincial, dont certains outils, d'ailleurs, étaient drôlement
rouillés quand on a pris le pouvoir, et on n'a pas encore fini de faire
le nettoyage de certains de ces outils. Mais qu'on admette cette
réalité.
En ce qui me concerne, M. le Président, je pense que,
jusqu'à maintenant, dans ce secteur de la construction, le gouvernement
du Québec a assumé ses responsabilités et il va continuer
à les assumer dans l'avenir. Mais j'aimerais bien qu'une fois pour
toutes, les gens d'en face se branchent quelque part. S'ils se branchent du
côté de la réalité canadienne, qu'ils admettent donc
parfois... Ils peuvent bien exiger tout ce qu'ils veulent - c'est
légitime, c'est le rôle de l'Opposition - du gouvernement actuel,
mais qu'ils soient consistants dans leur position et qu'ils exigent en
même temps du gouvernement fédéral qu'il arrête de
nous crucifier, les Québécois et les Québécoises,
en particulier dans le secteur de la construction, et cela va aller
drôlement mieux parce que nous, les Québécois et les
Québécoises, on en a des projets. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, en présentant cette
motion, les gens d'en face, comme le ministre nous a si aimablement
appelés, ne l'ont pas fait simplement d'une façon
improvisée. Nous avons rencontré depuis près d'un mois et
demi de multiples représentants et porte-parole des travailleurs des
différents syndicats qui oeuvrent dans l'industrie de la construction et
qui représentent les travailleurs de l'industrie de la construction,
ainsi que les associations patronales. Tous nous ont dit qu'il y avait
actuellement - cela crève les yeux et, d'une certaine manière, le
ministre, l'a signalé dans son intervention - un problème
extrêmement sérieux dans l'industrie de la construction au
Québec. Il a évoqué la question des taux
d'intérêt et tout cela, la constitution; il a même
évoqué, à un moment donné, la possibilité
que le Québec, accédant - c'est probablement ce à quoi il
se référait - à l'indépendance ou à la
souveraineté, pourrait mieux faire face que le Canada, que sans doute
les autres pays souverains, à la conjoncture économique
internationale qui explique en très grande partie la hausse des taux
d'intérêt.
Tout cela, sans doute, est probablement légitime dans la bouche
d'un ministre péquiste, sauf que le sens de la motion qu'on a
présentée, je pense, à la demande des gens qui sont dans
le secteur, ce n'était pas pour entendre, malgré que cela pouvait
avoir son intérêt, Pierre Marois, membre du Parti
québécois. Les gens voulaient entendre Pierre Marois, ministre du
Travail et de la Main-d'Oeuvre en dehors des questions de taux
d'intérêt, en dehors du contexte constitutionnel, en dehors des
outils que le gouvernement du Québec a et de ceux que le
gouvernement fédéral a. Tout cela, c'est un débat,
on ne le réglera pas par une petite motion du mercredi, mais il avait
des responsabilités très précises, le ministre du Travail
et de la Main-d'Oeuvre, qu'il a d'ailleurs esquissées d'une façon
que je trouve inexplicable.
Mon collègue, le député de Mégantic-Compton,
lui a rappelé le règlement de placement. Par exemple, est-ce que
ça dépend de la conjoncture internationale, du
fédéral, du Parti libéral du Québec, l'Opposition?
Vous avez, depuis longtemps, une décision à prendre au niveau du
règlement de placement et les gens que nous avons rencontrés,
avec qui on a pratiquement convenu de présenter une telle motion,
d'intervenir, d'exercer des pressions sur le ministre du Travail et de la
Main-d'oeuvre pour qu'il en arrive a une solution, le savent.
Le ministre a été complètement évasif. Quand
va-t-il régler et répondre aux préoccupations des
collègues, ici, en cette Chambre - d'ailleurs, des deux
côtés de la Chambre - au sujet du problème de la
classification? C'est un problème concret. Pas question de
fédéral là-dedans, ni de conjoncture internationale, ni de
taux d'intérêt. Il y a 32 000 travailleurs qui vont être
déclassifiés, qui vont perdre leur classification actuellement,
ce qui a été annoncé par l'OCQ. Est-ce que cela
préoccupe le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre du
Québec? Qu'est-ce qu'il a à dire là-dessus? C'est
ça le sens de la motion qu'on lui a présentée. Est-ce
qu'il est d'accord que cette chose-là se produise, est-ce
inévitable? C'est ça que les travailleurs veulent savoir, bien
modestement, par les moyens parlementaires que l'on a. On a voulu poser cette
question-là au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
Deuxièmement, question concrète, on ne réglera pas
la question de la constitution et de la souveraineté avec association ou
sans association, on ne le sait plus, ici cet après-midi. Il y avait la
loi 52, il y a eu la loi 109. On dirait que ces choses-là n'existent
pas. Il y a eu une période de maraudage dans les syndicats. Aucune
centrale syndicale n'a obtenu une majorité des voix. Cela pose un
problème pour la renégociation du décret de la
construction.
Et l'échéance, le ministre la connaît aussi bien que
moi, c'est le 30 avril. Or, le ministre sait le temps que les travailleurs et
les entreprises dans le domaine de la construction ont mis dans le passé
pour en arriver à un accord ou même, éventuellement
à un décret.
Pour être très réaliste et pour être pratique
- je ne sais pas si c'est un mot que les gens d'en face connaissent - quelle
est l'attitude du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre actuellement face
à cette impossibilité que les entreprises ont d'avoir un
interlocuteur valable, en vertu de nos lois, pour entreprendre les
négociations du renouvellement du décret de la construction?
Quelle est la solution du ministre? Il y a une urgence et si on se
ramasse - il n'y a pas eu de négociations, il y a eu très peu de
négociations - avec une grève le 1er mai ou un débrayage
le 1er mai dans le domaine de la construction, est-ce que Pierre Marois
connaît ou sait qu'il existe un ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre au Québec et que ce ministre doit répondre à
cette question?
Ce ne sont pas les gens d'en face en parlant de nous, le Parti
libéral, M. Trudeau, la constitution... Tout ça, on comprend tout
ça, les taux d'intérêt, etc. La question bien
précise, c'est celle qu'on pose au ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre et on lui demande: Qu'est-ce que vous allez faire? Il y a des
négociations entre les différentes parties syndicales, il y a des
possibilités, ça fait des semaines et des semaines que le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et son adjoint parlementaire nous
disent ça. Ils nous disent qu'ils consultent les gens. On voudrait bien
s'assurer qu'aucune des centrales syndicales, qu'aucun des syndicats ne jouit,
sur le plan de la consultation, de certains privilèges que d'autres
n'ont pas, parce qu'il y a des représentants des travailleurs qui n'ont
même pas encore réussi à parler au ministre du Travail. Il
me semble que c'est une chose importante.
Troisièmement, il y a la question très concrète,
très pratique des bureaux de placement syndicaux. Cette question existe,
c'est une question réelle que la commission Cliche avait
évoquée. Que l'ancien gouvernement n'ait pas agi et que
l'Opposition actuelle soit de mauvaise foi, etc., peu importe, il reste qu'il y
a un gouvernement, depuis 1976, qui a hérité de ce
problème et qui, lui non plus, ne l'a pas réglé. En ce
moment, tout le système de violence, d'intimidation, de favoritisme qui
existait continue d'exister et cela aboutit sur les chantiers, comme celui du
gazoduc, à une situation de violence. Quand le ministre dit: Est-ce que
vous nous reprochez d'envoyer des agents de sécurité sur le
chantier du gazoduc pour permettre aux travailleurs de travailler, est-ce
là le problème? Est-ce là la solution pour que ces
situations de violence ne se reproduisent pas? Est-ce la solution d'envoyer la
Sûreté du Québec et de prendre des procédures ou si
le problème réel que vous, ministre du Travail, devez
régler, n'est pas le problème du placement? Il y a des conflits
actuellement là-dedans. Ce n'est pas vous qui les avez
créés, ces conflits, j'en conviens, ce n'est pas vous qui les
alimentez, je veux bien en convenir, mais il y a un problème et il
existe un personnage au Québec qui s'appelle le ministre du Travail. Or,
le ministre du Travail doit régler un
certain nombre de dossiers.
C'est tout ce qu'on vous demande. On ne fera pas de drame
constitutionnel. Vous avez mal interprété le sens de la motion,
à mon avis; le débat sur les taux d'intérêt, on
pourra le faire ailleurs. La motion s'adresse au ministre du Travail et elle
parle des relations du travail dans le domaine de la construction. C'est aussi
simple que cela. Bien sûr, dans la motion - et mon collègue de
Mégantic-Compton l'a fait - on a évoqué le contexte
économique. On a parlé du taux d'intérêt; comment se
fait-il - c'est une question bien concrète sur le taux
d'intérêt -que des travailleurs de la construction ne trouvent pas
d'emploi ici, au Québec, alors que le taux d'intérêt,
à mon avis, est le même qu'en Ontario ou dans l'Ouest, et qu'ils
vont travailler dans les autres provinces canadiennes où le taux
d'intérêt, la constitution et le premier ministre du Canada, M.
Trudeau, ont autant de présence qu'ils en ont au Québec? Comment
explique-t-il cette situation?
Deuxièmement, sur la situation économique, puisque le
ministre a référé tantôt à la question des
taux d'intérêt, je ne suis pas un spécialiste des taux
d'intérêt et je ne vous donnerai pas de conseils sur la politique
monétaire canadienne ou internationale, mais je me demande une chose. On
a actuellement un gouvernement au Québec et je pense que la pression des
taux d'intérêt, la hausse des taux d'intérêt, ce
n'est pas une affaire qui est arrivée comme par hasard dans les trois ou
quatre dernières semaines alors qu'il a fallu partir en catastrophe du
côté d'Ottawa pour aller chercher de l'aide.
Les taux d'intérêt et les problèmes, entre autres,
de l'industrie de la construction, en termes économiques, ne datent pas
de trois semaines, d'un mois ou de six mois; cela fait un an, deux ans et
peut-être deux ans et demi que les difficultés existent, que ces
pressions existent. Comment se fait-il que notre gouvernement du Québec
semble réaliser, depuis quinze jours, qu'il y a un problème dans
le secteur alors que ça remonte à un an, deux ans et deux ans et
demi? Il me semble que c'est ce à quoi s'attendent les travailleurs de
la construction, les entrepreneurs et le public en général. Ils
se surprennent d'avoir un gouvernement qui semble ne pas du tout avoir
prévu la situation qui était pour exister afin de mettre en
place, à ce moment, les mécanismes, les programmes, les
politiques de relance ou de consolidation de l'industrie de la construction. M.
le Président, c'est le sens de la motion. Le débat sur les taux
d'intérêt, chacun peut avoir son affaire. Comment se fait-il que
vous venez de découvrir que les taux d'intérêt peuvent
causer des problèmes aux entreprises dans le domaine de la construction
et que par là des travailleurs de la construction ne peuvent travailler
puisqu'il n'y a pas de chantier? Comment se fait-il que le gouvernement du
Québec, le gouvernement péquiste, vient de découvrir cela?
Première question. Question de base sur le plan économique.
Deuxième question. Existe-t-il au Québec, et c'est
ça que les gens se demandent, un ministre du Travail? Est-ce qu'un
ministre du Travail, cela existe? Si ça existe, est-ce que ça
parle? Est-ce que ça prend des décisions? Est-ce que ça
communique des décisions? Ma question est bien simple. J'ai deux
éléments. Premièrement, le règlement de placement
et le problème de la classification. Quelle est la position du
gouvernement à ce sujet alors que les gens décrient le
problème de la question de la classification? Les 32 000 travailleurs
qui vont être déclassifiés qui ne pourront plus travailler
- je conclus, M. le Président - est-ce que vous savez que ça
existe? Est-ce que le ministre du Travail sait ce qu'il va faire pour
débloquer l'impasse de la loi 109 qui était censée
régler toutes les questions pour tâcher que ce soit juridiquement
possible qu'une partie patronale et une partie syndicale s'asseoient à
la table des négociations et puissent négocier? En ce moment, ce
n'est pas possible parce que votre loi a fait qu'il n'y a pas eu de
majorité dans les centrales syndicales pour arriver à
établir qui est le porte-parole des travailleurs. M. le ministre du
Travail peut-il nous dire ce qu'il va faire à ce sujet?
Troisièmement, M. le Président, je termine là-dessus, sur
la question des bureaux de placement, est-ce que vous maintenez le statu quo?
Est-ce que le ministre du Travail, s'il existe, est satisfait de la situation
qui existe actuellement? S'il n'est pas satisfait au niveau du placement dans
l'industrie de la construction, qu'est-ce qu'il entend faire? Ce sont des
questions simples, des questions que le monde du travail vous pose. Il le fait
par notre intermédiaire, puisque je pense que l'Opposition est ici pour
faire ce genre de travail, exercer des pressions sur le ministre du Travail
pour qu'il prenne ses responsabilités. Pour ma part, je pense que c'est
bien légitime qu'on s'attende à des réponses
concrètes.
Quant aux questions constitutionnelles, aux taux d'intérêt
et à M. Trudeau, on en reparlera à d'autres occasions.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Joliette.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, tout d'abord, le ministre
du Travail se nomme Pierre Marois, évidemment, et ce n'est pas lui qui
écrit les motions de l'Opposition. Je
suis heureux d'apprendre par le deuxième intervenant, M. le
Président, quelles sont les questions précises que se pose
l'Opposition. C'est intéressant de voir que celui-là même
qui a proposé la motion n'en est pas venu à la conclusion de
poser des questions précises au ministre, qui se devait de
répondre par la suite. Ce n'est que le deuxième intervenant, dans
un second souffle, un vétéran, un conseiller d'un ex-premier
ministre, qui s'est dit: C'est vrai qu'on a l'air fou avec notre motion. Je
suis aussi bien de lui donner un sens, sinon ça va shirer, comme on dit
en bon québécois. Là, le député de
Jean-Talon, avec l'expérience qui le caractérise, a su essayer de
donner un sens à sa motion. Si on avait vraiment su, au départ,
quelle était votre motion, vous auriez eu des réponses
précises à chacune de vos questions, et je vais essayer de vous
en donner, M. le député de Jean-Talon, du moins
quelques-unes.
Que voulez-vous, vous avez libellé votre question de la
façon suivante. Vous voulez absolument que nos responsabilités
portent à la fois sur le plan économique et sur le plan social.
Sur le plan économique, à partir du proverbe qui dit: Ainsi va le
bâtiment, ainsi va l'économie, on est bien obligé de se
poser la question: Qu'est-ce qui étouffe présentement l'industrie
de la construction si ce ne sont les taux d'intérêt? Je comprends
que vous n'aimiez pas qu'on vous en parle. Je comprends que vous n'aimez pas
qu'on vous dise: Écoutez une minute, les taux d'intérêt
relèvent de la Banque du Canada. C'est déplaisant de vous le
faire dire, vous les ardents défenseurs de vos grands frères
fédéraux d'Ottawa, mais on est bien obligé de vous dire
que ça dépend d'eux autres. Si vraiment, comme petits
frères, vous avez le moindrement d'influence, dites-leur que cela urge:
Baissez ces taux d'intérêt pour tâcher de contribuer
à la relance de l'industrie de la construction. Si jamais cela repart,
tant mieux. Sur le plan économique, nous serons moins affectés.
(17 h 40)
Mais je vais vous parler un peu du plan social. Je vous avoue que je
m'attendais que l'Opposition, supposément éclairée du
Parti libéral, qui dit consulter tous les groupes sociaux, n'en arrive
pas à toucher des problèmes beaucoup plus aigus que celui du
gazoduc. Dans le domaine de la construction, il y a environ 70 000 travailleurs
qui oeuvrent présentement. Parce qu'il y a des problèmes parmi
300 à 400 travailleurs au gazoduc, c'est une montagne. Vous partez d'un
petit cas d'exception pour essayer de généraliser à tout
le Québec les problèmes de l'industrie de la construction. Je
jasais, je ne vous dirai pas avec quel député de votre
côté qui me confiait hier tout bonnement: Tu as bien raison, mon
cher député de Joliette, on a déjà eu des
situations de beaucoup supérieures en termes négatifs à ce
qui existe présentement dans l'industrie de la construction.
C'est vrai que cela va mal au gazoduc. C'est vrai qu'il n'y a pas de
priorité régionale. C'est vrai que les travailleurs de la
région même ont de la difficulté à se faire
embaucher. C'est vrai. C'est vrai qu'il y a une centrale qui tire en faveur du
monopole. C'est vrai. C'est tout à fait vrai, mais il faut dire que les
lois et les règlements qui ont été adoptés dans le
domaine de l'industrie de la construction l'ont été par vous
autres, mes chers amis. Vous n'avez pas voulu, à l'époque, au
moment où la conjoncture était la plus propice pour n'importe
quel gouvernement, centraliser à un seul endroit avec des gens
responsables et neutres, le soin de faire le placement dans l'industrie de la
construction. Vous avez décrété, à l'époque,
que l'employeur pourrait continuer d'embaucher à la barrière,
pourrait continuer d'embaucher à la taverne même, parce que vous
savez que cela se faisait à Sept-Îles dans votre temps. Vous avez
également accepté le fait qu'on continue à passer par les
bureaux de placement syndicaux et vous avez ajouté que ce soit l'OCQ
aussi.
Vous avez ouvert toute cette gamme de possibilités d'embauche et
vous êtes surpris, aujourd'hui, que des employeurs se fassent les
complices d'une centrale syndicale et qu'ils embauchent exclusivement des
travailleurs. C'est tout à fait légal, les gestes qu'ils ont
posés. Ce qui n'est pas légal dans la conjoncture actuelle du
gazoduc, c'est qu'on ne respecte pas la priorité régionale.
Personnellement, j'en ai contre cela, parce que les travailleurs de mon
milieu ont le droit de bénéficier dans un contexte X des emplois
qui s'ouvrent à eux. Je l'avoue bien honnêtement, il faudrait
prendre des moyens... Je trouve l'OCQ complètement inefficace à
cet égard, et je n'ai pas honte de le dire. Je trouve l'OCQ tout
à fait inefficace de ne pas contrôler les adresses des
travailleurs. Je trouve l'OCQ tout à fait inefficace de ne pas
surveiller l'embauche et le respect du règlement de la construction qui
vise l'embauche régionale d'abord, la priorité d'emploi
régionale.
Là-dessus, je suis tout à fait d'accord avec l'Opposition.
Vous n'avez qu'à aller à l'Auberge des Gouverneurs, à
Joliette, pour vous rendre compte qu'il y a des travailleurs qui sont en dehors
de la région - c'est un fait - et qui ont déclaré fort
probablement de fausses adresses. Dieu merci, j'espère que l'OCQ au
moins, qui m'entend, nous prouvera un peu son efficacité et nous fera
connaître les noms de ces gens pour qu'on puisse faire respecter un tant
soit peu le règlement de placement dans l'industrie de la construction.
Mais les vrais problèmes de l'industrie de la construction ne
résident pas exclusivement
dans le fait qu'il y a un règlement de placement. Imaginez-vous
qu'avec un très petit bassin d'employés, on a des
problèmes sur un chantier, qui est le gazoduc! Imaginez-vous, si
ça continuait d'exister comme ça existait dans votre temps, alors
qu'on avait 250 000 inscrits à l'OCQ, quel problème on aurait
présentement! Pensez-y trente secondes, comme Opposition, et vous allez
vous rendre compte que le problème serait doublé, triplé.
C'est quand on vit dans un état de chômage comme
présentement, dans un état de crise comme celle qu'on vit
présentement, que les travailleurs de l'industrie de la construction
veulent sauter sur les ouvertures. Cela, c'est tout à fait normal.
Pourquoi en particulier sur le gazoduc? C'est parce que ce sont les
emplois les plus rémunérateurs dans le domaine de la construction
à court terme. Les travailleurs peuvent gagner 18 $ l'heure et
travailler à temps double le samedi et le dimanche. Cela s'explique,
ça n'a pas changé, on ne change pas le cours des choses. Je suis
sérieux et je suis surpris dans mon interrogation en disant ceci:
Comment se fait-il que vous ne vous préoccupiez pas plutôt des
jeunes? Cela m'inquiète beaucoup plus. Si vous vous étiez
engagés dans ce secteur, je vous aurais suivis, messieurs de
l'Opposition. Moi aussi, j'ai hâte que le ministère du Travail et
le ministère de l'Éducation s'entendent sur le contingentement de
la main-d'oeuvre dans le domaine des options professionnelles. Cela, c'est
beaucoup plus important qu'une simple chicane, entre vous et moi.
Vous ne vous interrogez pas sur le fait qu'on forme annuellement des
travailleurs en électricité de construction, des plombiers.
Comment se fait-il que vous ne vous interrogiez pas là-dessus, vous les
gardiens de la grosse paix sociale? Vous faites de la basse partisanerie
là-dessus. Vous ne vous interrogez même pas sur le fait, par
exemple, qu'annuellement, des jeunes n'ont même pas le pouvoir de
s'inscrire comme apprentis. Vous ne vous informez même pas de la
qualité de l'enseignement ou de la formation professionnelle, si bien
que les employeurs et même les centrales syndicales rêvent de
revenir aux vieux centres d'apprentissage, parce que la main-d'oeuvre
était mieux formée, mieux préparée et mieux
qualifiée pour faire face aux travaux immédiats de l'industrie de
la construction. Vous n'en parlez pas. Peut-être que vous auriez des
alliés même de ce côté-ci, bien sûr.
Le député de Beauce-Sud dit: On a tout dit ça.
Imaginez-vous! II peut bien continuer à faire ses conférences de
presse dans les porcheries. Je voudrais carrément vous dire que le
problème qui se vit à Joliette présentement, ou dans la
région avoisinante de Joliette, c'est un problème très
passager et que la motion de l'Opposition, telle que libellée, avec une
tentative de lui donner un sens par le député de Jean-Talon, est
très maladroitement formulée.
L'industrie de la construction au Québec ne connaîtra une
relance que le jour où les taux d'intérêt connaîtront
une baisse et quand il y aura de l'emploi dans le domaine de la construction,
M. le député de Jean-Talon et M. le député de
Mégantic-Compton, vous savez pertinemment qu'il n'y a jamais de
problème sur les chantiers tant que les emplois pullulent. C'est le jour
où les emplois diminuent que les travailleurs cherchent à se les
approprier. De grâce, si vous voulez qu'on ne parle pas des taux
d'intérêt, formulez votre question autrement, ne parlez plus du
plan économique.
Sur le plan économique, vous irez demander à ceux qui ont
dû payer leur renouvellement d'hypothèque, vous irez demander aux
jeunes couples qui ont voulu se construire une maison et qui se sont
retrouvés dans les caisses ou les banques, se sont vu offrir des
contrats à 22% et 23% d'intérêt. Vous vous demanderez
ensuite pourquoi le nombre de domiciles qui devaient normalement se construire,
dans une conjoncture économique normale, a été
étouffé et vous comprendrez ça. Mais, de grâce, il
ne faut pas dire que c'est à cause de vos petits frères
fédéraux libéraux. Disons que c'est la faute d'un autre
gouvernement, qui a sa banque, qui a le pouvoir de faire ce qu'il veut pour
ça, mais que ce n'est pas la faute du Québec. Est-ce qu'on peut
dire au moins ça, que ce n'est pas la faute du Québec?
Si jamais, M. le député de Jean-Talon, vous avez des
recettes miracles là-dessus, ayez au moins le courage de dire quelles
seraient les hypothèses de solution et on vous suivra, plutôt que
de déblatérer. Merci.
M. Bélanger: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mégantic-Compton, en vertu de l'article 96, j'imagine.
M. Bélanger: C'est ça, M. le Président. Le
député de Joliette vient de nous dire qu'on ne s'est pas
préoccupé des jeunes et que, dans notre motion, on n'a pas
parlé des jeunes.
Très brièvement, je voudrais vous citer un petit passage
de mon allocution. J'ai dit...
M. Chevrette: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Joliette, M. le député de Mégantic-Compton est
intervenu en vertu de l'article 96; il veut rectifier ce que vous avez compris
de son discours et il a raison. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Merci, M. le Président, vous avez
rendu là une sage décision.
Je veux donc dire, particulièrement à l'intention du
député de Joliette, que j'ai cité ceci: "Comment
concevoir, M. le Président, qu'avec l'argent des
Québécois, nous formions des travailleurs dans le cadre de
l'enseignement professionnel et qu'après, à la suite de votre
règlement de placement, ils n'ont plus accès aux chantiers de
construction?" (17 h 50)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Pierre Paradis
M. Paradis: M. le Président, finalement, il est question
de construction en cette Chambre. Je veux remercier, au nom des travailleurs
qui oeuvrent dans ce secteur et des travailleurs qui aimeraient y oeuvrer
aussi, le député de Mégantic-Compton d'avoir mis cette
question à l'ordre du jour, au menu de l'Assemblée nationale du
Québec.
Depuis le début de ce débat, j'ai entendu deux
interventions, du côté ministériel: le ministre et le whip.
Tous les deux ont mis la faute, encore une fois, sur le gouvernement
fédéral et ont dit: Nous, on ne peut rien faire.
Mais j'ai retenu des passages importants des interventions du
député de Joliette qui s'est fait un peu un député
de l'Opposition, pour une fois, et qui a souligné au ministre et
à son adjoint parlementaire les problèmes dans la construction,
les problèmes qu'on soulève, nous, de ce côté-ci,
mais on en soulève peut-être un peu plus que le
député de Joliette ne le fait.
M. le Président, le premier problème -il suffit de faire
du bureau de comté tous les lundis pour s'en rendre compte, dans nos
régions - c'est le fameux certificat de classification; c'est ça
le premier problème, M. le ministre; c'est ça le premier
problème, M. l'adjoint parlementaire. Je vous ai adressé des
lettres pour des travailleurs de mon comté, concernant ce certificat de
classification, des gens qui sont compétents, qui ont des certificats de
compétence et qui se voient refuser le droit de travailler dans leur
région à cause de votre intervention, de votre
réglementation et des lois dont vous êtes responsables.
Votre respect pour le travailleur de la construction a eu une chance de
se manifester lorsque la Cour supérieure du Québec a rendu un
jugement qui reconnaissait des droits acquis aux travailleurs de la
construction. Un jugement a été rendu et il dit que celui qui
oeuvrait avant 1978 avait des droits acquis. Qu'est-ce que vous avez fait comme
gouvernement"? Qu'est-ce que vous avez fait comme députés? Vous
avez dit à votre Procureur général: Va en appel; ne
respecte pas les droits acquis des travailleurs de la construction, les droits
qu'ils possédaient avant 1978 et que la cour, le système de droit
commun leur a reconnus. Vous allez vous faire renverser en appel, je vous le
souhaite et je le souhaite aux travailleurs de la construction du
Québec.
M. le Président, les travailleurs de la construction du
Québec veulent travailler paisiblement. Ils n'ont pas d'objection
à subir des tests de compétence. Ce sont des travailleurs
honnêtes. Ce sont des travailleurs compétents. Ils veulent avoir
accès au marché. Ils veulent également travailler à
des taux qui leur permettent d'avoir un revenu annuel satisfaisant, mais qui,
en même temps, permettent au consommateur du service, à celui qui
fait faire de la rénovation chez lui, à celui qui veut
entreprendre un chantier de construction, à le faire à un taux
qui fasse en sorte que, après le taux horaire qu'on exige, 18 $, 20 $ ou
22 $, indépendamment des spécialisations, il en retourne
très peu aux travailleurs et que cela coûte cela au consommateur.
Où va l'argent entre les deux? Avez-vous étudié cela
attentivement? Avez-vous déjà regardé un chèque de
paie d'un travailleur? L'avez-vous déjà fait? Ce sont des
coûts que les consommateurs paient et que les travailleurs paient, et il
y a peut-être quelqu'un entre les deux qui en prend un peu trop. Regardez
donc cela de près. C'est une question précise de l'Opposition du
Québec. C'est au niveau de celui qui travaille.
Maintenant, au niveau de l'entrepreneur, allez dans les régions
du Québec et regardez les examens que les entrepreneurs en construction,
propriétaires d'une pépine, d'un petit bulldozer, d'un petit
camion, ont à passer pour pouvoir travailler. Ce sont les examens de
votre Régie des entreprises de construction du Québec. Dans nos
régions, on demande à ces gens-là, qui sont des
entrepreneurs honnêtes, de passer des tests comme s'ils allaient
soumissionner pour le Palais des congrès à Montréal. C'est
absolument aberrant. Vous défendez à ces PME le droit d'oeuvrer,
le droit de créer de l'emploi. Vous leur enlevez l'oxygène
nécessaire à l'"entrepreneurship" au Québec.
M. l'adjoint parlementaire, en vertu de quelle logique,
présentement, forcez-vous les travailleurs de la construction à
prendre deux semaines de vacances l'été, en plein milieu de la
plus grosse période de construction? Ceux qui veulent en prendre auront
le droit d'en prendre, mais en vertu de quelle logique économique
forcez-vous, dans les deux semaines les plus intenses d'activités en
construction au Québec, les obligez-vous à prendre des vacances
et vous assurez-vous que tous les chantiers de construction du Québec
sont fermés? On a une courte saison de construction au Québec et
vous obligez
ces gens-là à prendre des vacances alors qu'ils veulent
travailler, alors qu'ils ont le droit de travailler.
Qu'est-ce qui vous autorise à faire ça? Est-ce la relance
économique du Québec qui vous autorise à faire ça?
Je suis obligé de répondre, M. le Président, à
l'argumentation de la partie adverse qui, dans sa recherche perpétuelle
de bouc émissaire, a blâmé encore une fois le
fédéral. À tous les malaises dénoncés par le
député de Mégantic-Compton, les malaises
dénoncés par le député de Jean-Talon, les malaises
dénoncés par un ministériel qui est whip du parti, mais
qui ne fait rien à l'intérieur de son parti, les malaises qu'il a
dénoncés, les malaises que j'ai dénoncés, on dit:
On ne peut rien faire pour ça.
Tout le problème de la construction, si je me fie aux paroles du
whip du parti ministériel, ça relève du taux
d'intérêt. Quelle est la position du Parti québécois
sur les taux d'intérêt? Est-ce la position du député
Grégoire? Est-ce la théorie monétaire créditiste?
Est-ce la position du dauphin Bernard Landry ou si c'est la position du premier
ministre René Lévesque qui disait, récemment, à
Ottawa que le taux d'intérêt au Canada devrait être de 1%
supérieur à celui des États-Unis? Est-ce qu'il va falloir
un "renérendum" dans le PQ pour avoir une politique
monétaire?
Je m'en voudrais de conclure mon bref exposé sans parler des
centaines et des centaines de travailleurs québécois qui sont
traduits devant les tribunaux, chaque année, en vertu d'une
réglementation qui leur défend de travailler, même s'ils
sont compétents et qualifiés, et que les juges doivent condamner
à des amendes importantes ou à des peines d'emprisonnement
importantes, à leur grand dédain, parce que le rôle du
juge, c'est d'appliquer la loi.
Je vous demande de ne plus enfermer des travailleurs
québécois qui n'ont commis que le crime de travailler pour
bâtir le Québec. Ne les mettez pas en prison, s'il vous
plaît, on en a besoin pour continuer. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): M. le Président, si vous me
permettez, je demanderai l'ajournement de nos travaux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Du débat? Est-ce
que l'ajournement du débat est adopté? M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je fais motion pour que nous
ajournions nos travaux à demain, 14 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): Un instant, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
Travaux de la Chambre
M. Levesque (Bonaventure): II serait peut-être bon,
à ce moment-ci, de nous donner une indication de l'ordre des travaux
demain.
M. Bertrand: Oui. Demain, lorsque nous aurons
procédé, comme d'habitude, aux affaires courantes, nous
appellerons le projet de loi no 15, sur l'abolition de l'âge de la
retraite, sans débat. C'est celui sur lequel on s'est entendu pour qu'il
n'y ait aucun débat.
Ensuite, les projets de loi no 24, 25 et 35 inscrits au nom du ministre
de l'Énergie et des Ressources.
M. Levesque (Bonaventure): Le projet de loi no 23 aussi? 23, 24,
25?
M. Bertrand: Le projet de loi no 23 est celui sur...
M. Levesque (Bonaventure): Le port méthanier.
M. Bertrand: ... Cacouna.
M. Levesque (Bonaventure): Le port méthanier.
M. Bertrand: Celui-là, je crois, sera retiré du
menu de demain pour être remplacé par le projet de loi no 35. Il y
a eu entente avec le député de Richmond pour qu'ensuite, une fois
la deuxième lecture faite, il y ait des auditions de groupes en
commission parlementaire. Et le projet de loi no 42 sur les impôts, au
nom du ministre du Revenu. Ce serait, en gros, le programme de demain.
D'accord?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lévesque (Bonaventure): Si je comprends bien le
ministre, une fois que la Chambre aura disposé - évidemment, si
la Chambre décide d'en disposer - de ces projets de loi, il y aurait
ajournement à mardi prochain; est-ce que ce sera le cas?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Bertrand: À moins que j'aie oublié un projet en
cours de route. Je pense en
avoir énuméré cinq: 15, 24, 25, 35, 42. Cela fait
cinq.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bertrand: Après cela, il y aura ajournement de nos
travaux jusqu'à la semaine prochaine, c'est-à-dire jusqu'à
mardi, 14 heures, avec, évidemment - j'en ferai l'annonce demain - des
commissions parlementaires pour mardi matin de la semaine prochaine.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure):
Évidemment, sans oublier la question avec débat,
posée par le député de Marguerite-Bourgeoys au ministre de
l'Éducation, sur le sujet suivant: la restructuration scolaire. Ceci
aura lieu vendredi matin, n'est-ce pas?
M. Bertrand: C'est tout à fait cela. Le ministre de
l'Éducation sera là pour participer au débat avec le
député de Marguerite-Bourgeoys. Sur ce, je refais motion pour que
nous ajournions nos travaux à demain, 14 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Ajournement de nos travaux à demain, 14 heures.
(Fin de la séance à 18 h 01)