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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le vendredi 18 juin 1982 - Vol. 26 N° 77

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes.

Déclarations ministérielles, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

L'effort du gouvernement pour aider la réalisation du projet CARMONT

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, j'ai adressé aujourd'hui à mon collègue fédéral, le ministre de l'Énergie, des Mines et des Ressources, un télex soulignant l'intérêt que porte le gouvernement du Québec au projet d'usine de valorisation proposé par le groupe CARMONT.

Les politiques énergétiques des gouvernements du Québec et du Canada et les moyens mis en place dans le cadre de ces politiques visant à assurer le remplacement du pétrole par d'autres formes d'énergie sur les marchés des produits énergétiques ont eu pour effet presque immédiat d'amener les raffineurs à remettre en question toutes leurs activités dans l'Est canadien. Dans un tel contexte, il devient extrêmement important d'assurer une consolidation des activités de raffinage à Montréal en plus d'améliorer la situation sur le plan de l'environnement.

Le projet comporte donc une série d'avantages énergétiques et économiques pour le Québec.

Au niveau énergétique d'abord, le projet CARMONT permet une plus grande souplesse au niveau des approvisionnements pétroliers. En effet, grâce à ce projet, les raffineurs montréalais seront en mesure d'importer un pétrole brut de moindre qualité et de plus forte teneur en soufre, tout en rencontrant les besoins prévus de produits pétroliers au Québec.

En second lieu, grâce au procédé retenu, à cause principalement de l'élimination d'importants volumes d'huile lourde résiduelle, le projet CARMONT va permettre d'assurer une meilleure pénétration de l'électricité et du gaz naturel au Québec. Cette initiative aura pour effet d'aider l'industrie québécoise du raffinage dans sa phase de consolidation déjà entreprise.

Troisièmement, une réduction importante des importations de pétrole étranger au Québec ainsi qu'une contribution substantielle à la balance commerciale canadienne.

Quatrièmement, une réduction des émissions sulfureuses au Québec. L'extraction d'environ 300 tonnes de soufre par jour des huiles résiduelles entraînerait une diminution équivalente de volume de soufre qui, autrement, se retrouverait dans l'atmosphère du Québec.

Cinquièmement, une meilleure garantie d'approvisionnement en bases pétrochimiques de Pétromont. L'approvisionnement de l'industrie prétrochimique montréalaise dépend totalement de l'industrie du raffinage au Québec. Dans la mesure où CARMONT permet d'assurer une plus grande stabilité à cette industrie, les secteurs qui s'y rattachent seront également mieux protégés.

Enfin, une diminution de la dépendance du Québec pour ses approvisionnements en coke de pétrole. L'addition prévue d'une unité de cokéfaction au projet CARMONT va permettre la production de plusieurs centaines de milliers de tonnes de coke d'anode annuellement. Il s'agirait là d'une diminution équivalente des importations québécoises dans le domaine. La compagnie Alcan, par exemple, est particulièrement intéressée à cet aspect du projet.

À ces nombreux avantages énergétiques du projet CARMONT viennent s'ajouter des bénéfices économiques pour le Québec. En effet, grâce à des investissements d'environ 1 000 000 000 $, en dollars 1982, dans la région de Montréal, le projet CARMONT permettra la création de nombreux emplois tant directs qu'indirects, tant durant la période de construction que durant la phase d'exploitation. Il s'agit, par exemple, durant la période de construction, d'effet direct de 7400 hommes-année et d'effets indirects de 23 600 hommes-année. Pour la période d'exploitation de l'usine, 580 emplois directs et 3120 emplois indirects découleront ainsi de cet investissement.

Tous comprendront que le gouvernement du Québec attache la plus haute importance à la réalisation de ce projet. C'est d'ailleurs en considération de ces aspects qu'il a déjà été décidé d'appliquer deux mesures fiscales qui viendront aider à la réalisation du projet. Ces deux mesures sont reliées à la taxe spéciale d'éducation prélevée sur le capital des raffineries.

En vertu de la première de ces mesures, le gouvernement a décidé de ne pas appliquer cette taxe sur l'usine de CARMONT. En ce faisant, le gouvernement renonce à des revenus anticipés évalués à environ 400 000 000 $ constants pour la durée de vie de l'usine, c'est-à-dire

20 000 000 $ par année pendant 20 ans. Cette mesure sera applicable dès l'entrée en service de l'usine et pour toute la période d'exploitation.

La seconde mesure adoptée, essentiellement effective au moment de la construction, c'est-à-dire à très court terme, permettra aux raffineurs membres du consortium de soustraire de la taxe à payer 1 $ pour chaque 2 $ investis dans le projet, jusqu'à concurrence de 50% de la taxe prélevée sur ces raffineurs. On évalue actuellement à 70 000 000 $ les crédits d'impôt qui seraient effectivement réclamés selon le nombre actuel de raffineurs participants au projet.

De tels investissements, grâce aux impôts sur les salaires et gages, à la parafiscalité et aux impôts indirects, entraîneront des augmentations de revenus pour les gouvernements du Québec et du Canada. Exprimés en dollars constants de 1982, ces revenus gouvernementaux s'établiront à un minimum de 220 000 000 $ pour chacun d'eux, tout ceci, bien sûr, sans tenir compte des autres revenus éventuels, notamment au niveau de l'impôt sur les profits des corporations.

D s'agit là d'un effort très important du gouvernement du Québec au niveau financier en vue d'aider à la réalisation du projet CARMONT, avec, comme objectif, la consolidation de l'industrie du raffinage au Québec et ses nombreux avantages pour notre industrie de la pétrochimie. Je demande donc au ministre fédéral de l'Énergie et des Ressources de consentir un effort au moins aussi important que celui du Québec.

J'aimerais, en terminant, rappeler que c'est justement mon collègue, M. Lalonde, qui, le 15 mai 1980, au coeur même de la campagne référendaire, avait annoncé aux Québécois la réalisation prochaine de ce projet dans le cadre de la politique énergétique canadienne.

La période actuelle est particulièrement cruciale pour le projet CARMONT et une absence de volonté ferme de nos gouvernements pour appuyer ce projet pourrait conduire à son abandon. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci.

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. En l'absence de mon collègue d'Outremont, qui ne peut malheureusement être ici au moment précis où le ministre fait sa déclaration, j'aimerais répondre au nom de l'Opposition. D'abord, un premier commentaire. Le ministre a évoqué l'existence d'un télégramme, je présume que l'Assemblée sera saisie du texte précis du télégramme que le ministre envoie à son homologue fédéral, afin que nous voyions comment s'exprime l'intérêt, comme il le souligne, que le gouvernement porte à ce projet. Le ministre a également décrit les avantages du projet CARMONT et il est entendu que nous souscrivons à ce moment-ci à sa description des différents avantages qu'il y a pour le Québec à favoriser le développement de ce programme qui a connu des difficultés récemment. Cela fonctionnait, cela ne fonctionnait plus, il y a de nouveaux participants et des anciens, qui reviennent et qui ne reviennent plus. Il y a beaucoup d'incertitude et c'est dans ce sens-là qu'on essaie de voir quelles seront les véritables retombées à venir.

On sait que, dans ces projets qui sont presque assimilables à des mégaprojets, par les temps qui courent, les prévisions quant à la fluctuation des taux d'intérêt à venir causent de grandes incertitudes, la politique pétrolière, la fluctuation des prix de l'énergie en général se combinent pour créer un facteur de risque qui fait hésiter beaucoup de gens à se lancer dans des projets comme ceux-là.

De toute façon, je crois qu'il est normal à ce moment-ci qu'un gouvernement qui se préoccupe du développement économique puisse se doter de mesures incitatives qui encourageront la mise en place de ce projet. Dans ce sens-là, on voit que, dans les faits, on assiste à une incitation de la part du gouvernement, à savoir que les premiers 140 000 000 $ ne coûteront pas très cher aux investisseurs, aux participants au consortium, ce qui est excellent. Vous me permettrez de faire remarquer que c'est la moindre des choses, dans la mesure où c'est un pas dans la bonne direction. Les compagnies et les sociétés pétrolières paient actuellement au Québec une taxe sur le capital, qui est cinq fois et demie plus élevée que pour les autres sociétés. On sait qu'au 0,45% de taxes sur le capital s'ajoute la taxe spéciale de 2%. Dans ce sens-là, c'est une taxe régressive qui ne tenait pas compte du rendement, de la profitabilité, de la rentabilité de ces sociétés. Comme je le disais, étant donné que le fardeau fiscal de ces entreprises, divulgué dans le discours sur le budget 1980-1981, en autant que je me souvienne, est devenu très lourd, c'est la moindre des choses, pour le ministre, de se servir de la fiscalité pour réduire ce fardeau afin de donner une mesure incitatrice pour que le projet puisse plus facilement débloquer.

C'est un appui - je conclurai là-dessus - qui est de beaucoup préférable dans ce genre d'activités économiques reliées à l'énergie, de beaucoup préférable aux espèces d'intentions plus ou moins arrivées à maturité du gouvernement de se doter d'un

Pétro-Québec.

Le Président: Merci. M. le ministre. M. Yves Duhaime

M. Duhaime: Oui, M. le Président, cela me fait plaisir. Je déposerai probablement au début de la semaine et même cet après-midi, si c'est possible, la copie du télex que j'envoie ce matin à M. Lalonde. Je dirai essentiellement que je suis content de la réaction de l'Opposition. C'est une réaction un peu mitigée, genre mi-figue mi-raisin, mais qui, au moins, appuie le projet. Je pense important de noter que le projet est appuyé par l'Assemblée nationale. Pour nous, c'est une étape très importante de la consolidation du raffinage à Montréal. Il s'agit de voir si on peut valoriser davantage tout près de 32 000 barils de pétrole sur une base quotidienne.

Ce projet - semble-t-il - en tout cas, s'il recevait l'appui clair et net aussi bien d'Ottawa que de Québec, aurait toutes les chances de convaincre les membres du consortium qui sont encore intéressés d'aller de l'avant avec le projet et le réaliser. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Merci beaucoup.

Dépôt de documents.

M. le ministre des Affaires culturelles.

États financiers de la Régie de la Place des Arts

M. Richard: Je voudrais tout d'abord déposer les états financiers de l'exercice financier terminé le 2 septembre 1981 de la Régie de la Place des Arts.

Rapports du ministère des Affaires culturelles et des SODICC

Je voudrais également déposer le rapport d'activité du ministère des Affaires culturelles pour l'année 1981-1982 et le rapport annuel de la Société québécoise de développement des industries de la culture et des communications pour l'année 1981. (10 h 20)

Le Président: Documents déposés.

M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Rapport de la Société de développement de la Baie-James

M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel de la Société de développement de la Baie-James.

Le Président: Merci.

Rapport de SOQUEM

M. Duhaime: Également, je voudrais déposer le rapport annuel 1981-1982 de la société SOQUEM.

Le Président: Documents déposés. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Rapport de la Régie des assurances agricoles

M. Garon: M. le Président, je dépose aujourd'hui le rapport annuel 1980-1981 de la Régie des assurances agricoles du Québec pour faire de la lecture à l'Opposition pendant l'été.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Robert Baldwin. À l'ordre, s'il vous plaît!

Pétition pour le maintien du système scolaire confessionnel

M. O'Gallagher: II s'agit d'une pétition, M. le Président. Cette pétition est adressée au premier ministre du Québec concernant la restructuration scolaire. Cela vient de 400 parents de l'école Sunnydale Park Elementary School de Dollard-des-Ormeaux, de plus de 400 parents de l'école élémentaire Greendale de Pierrefonds ainsi qu'au-delà de 400 parents de l'école Westpark School Committee de Dollard-des-Ormeaux. Elle se lit comme suit: "Je, soussigné, exige que le système scolaire confessionnel actuel avec représentation locale élue soit maintenu." En anglais: "I, the undersigned, demand that the present school system of education under the control of locally elected confessional school boards be retained." Merci, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Viger.

Pétition contre la réforme de la structure de l'éducation

M. Maciocia: Merci, M. le Président. J'ai une pétition qui est adressée au ministre de l'Éducation. C'est une pétition de quelque 300 personnes du comté de Viger. Elle se Ht comme suit: "Nous désirons protester contre toutes les propositions par lesquelles le gouvernement du Québec entend implanter des changements dans la structure éducationnelle où on l'a élu d'une façon démocratique." Merci, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée. M. le

député de Shefford.

Pétitions demandant le report des projets de lois nos 68 et 70

M. Paré: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer une pétition comprenant la signature de 241 fonctionnaires provinciaux de ma région. J'en profite pour les inviter à négocier le gel modulé proposé par le gouvernement. Merci, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): J'ai vu dans votre figure, M. le Président, je ne suis pas un psychiatre ni un psychanalyste, mais je n'ai pas pu m'empêcher de voir que vous avez un peu grimacé - mais dans le bon sens du terme - lorsque l'honorable député a ajouté quelques mots au dépôt de la pétition. M. le Président, j'insiste pour que le député non seulement retire ses dernières paroles qui n'étaient pas parlementaires dans le contexte d'un dépôt de document, mais nous dise ce que ce document contient et la portée de la pétition afin d'être complètement juste pour ceux qui ont utilisé cette pauvre courroie de transmission.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, j'ai déjà dit et je répète - et vous avez raison - que les députés n'ont pas le droit de faire des commentaires lorsqu'ils déposent des pétitions. Je réitère ce souhait encore aujourd'hui avant que notre règlement - M. le leader du gouvernement me regarde - ne soit modifié au cours de l'été. En ce qui concerne la lecture de la pétition, notre règlement actuel...

M. Levesque (Bonaventure): ... pourrait la lire, au moins.

Le Président: Un bref exposé. M. le député de Shefford, s'il vous plaît, un bref exposé du sujet de votre pétition.

M. Paré: M. le Président, à la demande des fonctionnaires provinciaux, j'ai déposé la pétition, que je n'ai plus en main. Donc, cela me fait plaisir de l'avoir déposée.

Des voix: Ah! Ah!

Le Président: Pétition déposée.

M. Levesque (Bonaventure): Non, M. le Président! En toute justice pour les pétitionnaires et en conformité avec notre règlement, qu'on prenne la peine de retourner la pétition à l'honorable député pour qu'il nous dise ce dont il s'agit, s'il ne le sait pas, lui, et si cela lui prend le texte pour le dire. J'ai le droit, M. le Président, en vertu du règlement - même si le règlement actuel est muet à ce sujet, notre règlement antérieur indique qu'un député a ce droit - d'exiger qu'un autre député qui dépose une pétition nous dise ce dont il s'agit et même la lise, si on voulait réellement être procédurier, mais au moins, M. le Président, en toute justice pour les pétitionnaires, j'exige, au nom de ma formation politique - je le fais formellement et solennellement - que le député nous dise ce dont il s'agit.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, vous avez déjà formellement et solennellement fait cette même demande au cours de la semaine. Je vous ai répondu qu'effectivement, au cours de cette semaine et la semaine dernière, plusieurs députés ont déposé ce genre de pétition sans avoir à la lire. J'ai également dit qu'au cours de l'été nous verrions à mettre des paramètres et des balises à l'article 180, afin que le phénomène des pétitions - c'est le moins qu'on puisse dire - change pour la session de l'automne 1982. Je maintiens cette décision devant l'absence du règlement qui demande un exposé succinct et clair et non pas la lecture de la pétition.

M. le député de Shefford, brièvement, s'il vous plaît, ce que contient la pétition, sans la lire.

M. Paré: M. le Président, à la demande des fonctionnaires provinciaux de ma région, qui comprennent aussi des fonctionnaires du comté de Brome-Missisquoi, il me fait plaisir de déposer une pétition concernant la politique salariale du gouvernement. Je maintiens ce que j'ai dit au début. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci.

M. le député de Richmond.

M. Vallières: M. le Président, le dépôt d'une pétition de fonctionnaires du comté de Richmond dont, pour le bénéfice des pétitionnaires, je veux vous lire l'en-tête: "Attendu que le régime de retraite fait partie intégrante de nos conditions de travail; "Attendu que le gouvernement envisage de modifier unilatéralement, sans accord de notre syndicat, ces mêmes régimes de retraite aux fins d'augmenter nos contributions; "Attendu que les autres régimes de retraite auxquels le gouvernement est partie ne sont pas modifiés en concordance; "Attendu que le gouvernement envisage par voie de législation de réduire nos salaires pour récupérer les augmentations prévues à

nos conventions collectives venant à échéance le 31 décembre 1982; "Attendu que la politique salariale actuelle nous a déjà été imposée par le gouvernement par sa loi exceptionnelle de 1979; "Attendu qu'une telle attitude équivaut pour le gouvernement au non-respect de sa signature; "Attendu que, selon l'esprit et la lettre du Code du travail, les parties à une négociation doivent négocier de bonne foi; "Nous demandons, par votre entremise, à titre de membre de l'Assemblée nationale, que l'adoption de ces projets de loi soit reportée sine die afin de permettre que les négociations pour le renouvellement de la convention collective se fassent de bonne foi et traitent de ces sujets. "Même si nous ne sommes pas considérés comme des citoyens à part entière, nous nous souviendrons en temps opportun que nous devrions avoir droit de parole sur ce que doivent être nos conditions de travail."

M. le Président, il me fait plaisir de déposer cette pétition et d'avoir dit ce que craignait de dire le député de Shefford.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une pétition probablement?

M. Bertrand: Oui, M. le Président. Comme il y a 200 personnes qui se sont donné la peine de venir à mon bureau de comté pour me présenter cette pétition, à titre de député du comté de Vanier, je me fais un devoir, au nom même du droit de ces personnes à exprimer leurs opinions, à déposer la pétition, même texte que le texte lu par le député de Richmond.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais déposer une pétition qui m'a été présentée par le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, sections ouvriers et fonctionnaires du comté de Portneuf. Voici le texte, brièvement: "Attendu que le gouvernement envisage de modifier unilatéralement, sans accord de notre syndicat, ces mêmes régimes de retraite aux fins d'augmenter nos contributions; "Attendu que le gouvernement envisage, par voie de législation, de réduire nos salaires pour récupérer les augmentations prévues à nos conventions collectives venant à échéance le 31 décembre 1982; "Attendu qu'une telle attitude équivaut, pour le gouvernement, au non-respect de sa signature et de ses engagements; et "Attendu que, selon l'esprit et la lettre du Code du travail, les parties à une négociation doivent négocier de bonne foi; (10 h 30) "Nous demandons que l'adoption de ces projets de loi soit reportée sine die afin de permettre que les négociations pour le renouvellement de la convention collective se fassent de bonne foi et traitent de ces sujets."

M. le Président, il me fait plaisir de déposer cette pétition et j'ose espérer qu'elle sera prise en bonne et valable considération...

Le Président: Pas de commentaire.

M. Pagé: ... par le premier ministre du Québec, qui est ici ce matin.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Qu'il me soit permis de déposer une pétition relative aux projets de loi nos 68 et 70. Cette pétition comporte 202 signatures de fonctionnaires oeuvrant dans Bellechasse. Je la dépose dans les mêmes termes que ceux utilisés par mon collègue de Shefford. Merci, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Papineau.

M. Assad: M. le Président, c'est une pétition dont le texte est le même que celui qui a été lu par mon collègue, le député de Richmond, concernant les fonctionnaires provinciaux du comté de Papineau. J'ai l'honneur de déposer cette pétition.

Le Président: Pétition déposée.

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, conformément au règlement, vous me permettrez de déposer une pétition signée par près d'une centaine de membres du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, section Vaudreuil-Soulanges: "Attendu que le gouvernement envisage de modifier unilatéralement et sans accord du syndicat les régimes de retraite; "Attendu que le gouvernement envisage également de réduire les salaires des fonctionnaires; "Attendu qu'une telle attitude équivaut pour le gouvernement au non-respect de sa signature; "Nous demandons - les fonctionnaires aux membres de l'Assemblée nationale - que l'adoption de ces projets de loi soit reportée sine die afin de permettre que les négociations pour le renouvellement de la convention collective se fassent de bonne foi et traitent de ces sujets."

Le Président: Pétition déposée.

M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Boucher: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer une pétition au nom de 275 fonctionnaires de mon comté qui s'opposent tout simplement aux projets de loi nos 68 et 70 et demandent un moratoire.

Le Président: Pétition déposée. M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, j'ai une deuxième série de signatures. Le comté de Bonaventure étant assez grand, c'est une section additionnelle du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, comté de Bonaventure, qui me demande de déposer une pétition. Je ne sais pas si je peux être dispensé de lire le texte.

Des voix: Non.

M. Levesque (Bonaventure): Je vois qu'on me force à le lire. Cependant, comme, je pense bien, on est au courant, ce matin, qu'il s'agit bien d'une demande répétée du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec qui touche le projet de loi no 68, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite, et le projet de loi no 70, Loi concernant la rémunération dans le secteur public.

Qu'il me soit permis simplement de lire deux paragraphes de cette pétition: "Nous demandons, par votre entremise, à titre de membre de l'Assemblée nationale, que l'adoption de ces projets de loi soit reportée sine die afin de permettre que les négociations pour le renouvellement de la convention collective se fassent de bonne foi et traitent de ces sujets. "Même si nous ne sommes pas considérés comme des citoyens à part entière, nous nous souviendrons, en temps opportun, que nous devrions avoir droit de parole sur ce que doivent être nos conditions de travail. Respectueusement soumis."

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président. Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaîtl

M. Paradis: II me fait plaisir de déposer, dans le tumulte...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): II faut que je satisfasse la curiosité du député de Lévis, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je voudrais simplement lui dire que c'est 80 signatures qui sont ajoutées à 135 signataires, faisant un total de 215. S'il n'y en a pas plus que cela, augmentez les services dans le comté de Bonaventure.

Des voix: Ah!

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, au nom de 289 employés du gouvernement du comté de Brome-Missisquoi et du comté de Shefford, il me fait plaisir de déposer une pétition à l'Assemblée nationale. Comme c'est la première fois que, pour cette région de la province, ils ont la chance de passer leur message d'une façon intégrale, vous me permettrez sans doute de lire le texte de la pétition. "Attendu que le régime de retraite fait partie intégrante de nos conditions de travail; attendu que le gouvernement envisage de modifier unilatéralement, sans l'accord de notre syndicat, ces mêmes régimes de retraite aux fins d'augmenter nos contributions; attendu que les autres régimes de retraite auxquels le gouvernement est partie ne sont pas modifiés en concordance; attendu que le gouvernement envisage, par voie de législation, de réduire nos salaires pour récupérer les augmentations prévues à nos conventions collectives venant à échéance le 31 décembre 1982; attendu que la politique salariale actuelle nous est déjà imposée par le gouvernement par sa loi d'exception, 1979, loi no 62; attendu qu'une telle attitude équivaut, pour le gouvernement, au non-respect de sa signature; attendu que, selon l'esprit et la lettre du Code du travail, les parties à une négociation doivent négocier de bonne foi; nous demandons, par votre entremise, à titre de membre de l'Assemblée nationale, que l'adoption de ces projets de loi soit reportée sine die afin de permettre que les négociations pour le renouvellement de la convention collective se fassent de bonne foi et traitent de ces sujets. Même si nous ne sommes pas considérés comme des citoyens à part entière, nous nous souviendrons" - dans Brome-Missisquoi, dans Shefford et ailleurs au Québec; c'est une citation du député -"en temps opportun, que nous devrions avoir droit de parole sur ce que doivent être nos conditions de travail." Merci, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée. Est-ce qu'il y a d'autres pétitions? Dépôt de rapports de commissions élues.

M. le député de Beauharnois.

Étude du projet de loi no 72

M. Lavigne: Contrairement à mes collègues, M. le Président, ce n'est pas une pétition, mais un rapport de commission que j'ai à déposer. Qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente du "revenu" qui a siégé les 10, 15 et 17 juin 1982 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été adopté avec amendements.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Shefford.

M. Bertrand: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: ... il y a peut-être eu une erreur au niveau de l'inscription de la commission parlementaire. Le député de Beauharnois a-t-il dit "le ministère du Revenu"? Il y aurait une correction à apporter sur la feuille. On devrait lire comme titre: La commission parlementaire permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu.

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Vous me permettrez de profiter de cet incident pour vous demander si c'est la procédure normale de correction d'un rapport d'une commission. Je vous pose la question de façon très objective et très sérieuse et vous savez ce que je veux dire parce que vous étiez sur le point de vous lever, probablement parce que vous savez où je veux en venir.

Nous avons toujours cru et nous avons insisté dans le passé pour que toute correction d'un rapport de commission puisse être faite par la commission elle-même. Le règlement précise que le président d'une commission peut autoriser le rapporteur de la commission à faire les corrections. Vous savez que nous avons déjà plaidé ici, dans une autre situation, que nous croyions que le règlement, lorsqu'il parle du président, parle du président de la commission et non du président de l'Assemblée nationale. (10 h 40)

J'en profite simplement pour vous demander non pas nécessairement de réagir à ce moment-ci, parce qu'après avoir pris connaissance d'un jugement que la présidence a déjà rendu et après avoir demandé 'l'avis de certains juristes, il semble y avoir un doute non pas sur la sagesse de votre décision, mais sur l'à-propos que toute correction d'un rapport de commission soit faite à la commission.

Je vous prierais de vous référer à l'article 161.3 de notre règlement; on y lit: "Toutefois, un membre d'une commission peut s'opposer au dépôt d'un rapport fait par cette commission en exposant brièvement les motifs de son opposition. Si le président juge que le rapport est entaché d'irrégularités -c'est toujours le président de la commission - il peut ordonner au rapporteur de la commission d'y apporter les corrections requises."

Ce n'est pas à cause du cas qui est devant nous présentement, c'est une erreur de frappe ou de je ne sais trop quoi, à mon sens, mais j'en profite simplement pour vous demander si vous n'auriez pas l'obligeance d'étudier de nouveau cet article 161.3 et de nous dire éventuellement comment vous pouvez interpréter cet article quant aux droits et obligations du président de la commission et du rapporteur. Je vous le demande sans urgence particulière. Mais, comme il s'agit d'un cas qui pourrait être amené dans le contexte du projet de loi no 37, vous savez ce qui est arrivé récemment, on a eu un ordre de la Chambre d'avoir à faire rapport. Or, M. le Président, je soumets que ce rapport, on n'a jamais eu l'occasion de l'étudier en commission.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, je suis sûr que vous ne vouliez pas, par vos propos, venir en appel d'une décision que j'ai rendue avant-hier soir, j'en suis convaincu. J'ai deux façons de rectifier la situation: premièrement, puisqu'une commission émane de cette Asssemblée nationale, je puis demander le consentement unanime de l'Assemblée pour corriger le dépôt qui a été fait; deuxièmement, à défaut de consentement unanime, je me servirai de l'article 65.2 et, dans sa forme, je corrigerai le mot "Revenu" par les mots "du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu".

Je demande donc, avant de me servir de l'article 65.2, s'il y a consentement unanime.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Levesque (Bonaventure): ... comme je l'ai déjà dit, le cas est réglé, quant à nous, le consentement est là.

Le Président: Consentement. M. le

leader du gouvernement.

M. Bertrand: Consentement, d'autant plus qu'effectivement il m'apparaît qu'il est préférable que ce soit nous qui prenions la décision plutôt que de vous forcer à utiliser l'article 65.2, ce qui est un cas exceptionnel. Consentement.

M. Levesque (Bonaventure): Cependant, M. le Président, je maintiens que j'aimerais...

Le Président: J'en ai pris note, M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): ... que vous revoyiez cette question, qui est un peu troublante.

Le Président: Du consentement unanime, le rapport est modifié en conséquence.

M. le député de Shefford.

Étude du projet de loi no 75

M. Paré: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme, qui a siégé le jeudi 17 juin 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 75, Loi modifiant la Loi sur l'aide au développement industriel. Le projet de loi a été adopté sans amendement.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Champlain. M. le député de Saint-Hyacinthe.

Étude du projet de loi no 63

M. Dupré: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui a siégé le 17 juin 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 63, Loi sur la Raffinerie de sucre du Québec. Le projet de loi a été adopté sans amendement, sur division.

Le Président: Rapport déposé. M. le député d'Iberville.

Étude du projet de loi no 64

M. Beauséjour: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui a siégé le 17 juin 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 64, Loi favorisant l'établissement de jeunes agriculteurs. Le projet de loi a été adopté avec amendements.

Le Président: Rapport déposé. Mme la députée de Dorion, au nom de M. le député de Champlain.

Étude du projet de loi no 76

Mme Lachapelle: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui a siégé le 17 juin 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole. Le projet de loi a été adopté sans amendement, sur division.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de lois privés. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, j'ai reçu une lettre du greffier en loi m'indiquant que le projet de loi no 221, Loi concernant certains recours en matière de responsabilité médicale ou hospitalière, lui a été soumis. Le projet est conforme à l'avis. Les avis ont été publiés mais comme le projet de loi a été présenté au secrétariat des commissions après l'ouverture de la session, il faudrait motion pour suspendre les règles de pratique à cet égard.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée? Adopté.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, au nom du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je voudrais vous demander d'appeler l'article b).

Projet de loi no 83

Première lecture

Le Président: Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche propose la première lecture du projet de loi no 83, Loi sur le programme d'aide aux Inuits bénéficiaires de la Convention de la Baie James et du Nord québécois pour leurs activités de chasse, de pêche et de piégeage. M. le ministre.

M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, ce projet de loi a pour objet l'établissement d'un programme d'aide aux Inuits bénéficiaires de

la Convention de la Baie James et du Nord québécois relativement à leurs activités de chasse, de pêche et de piégeage.

La section I du projet comporte les définitions nécessaires à son interprétation.

La section II établit le programme d'aide, énonce ses objectifs et indique les fins pour lesquelles les montants versés pourront être utilisés.

La section III concerne le financement du programme; elle prévoit le mode de calcul de la subvention, indique sa provenance et à qui elle sera versée, et en fixe les modalités de paiement et d'indexation.

La section IV établit les modalités relatives à l'administration du programme et, à cette fin, précise les pouvoirs conférés à l'Administration régionale Kativik et aux corporations de village nordique.

La section V traite du rapport que doit faire l'Administration régionale Kativik et de la vérification des livres et comptes de cet organisme ainsi que de ceux d'une corporation de village nordique.

Enfin, la section VI contient les dispositions finales et confie au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche la responsabilité de l'application de la loi.

Le Président: Est-ce que cette première lecture sera adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article g) du feuilleton.

Projet de loi no 221 Première lecture

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce propose la première lecture du projet de loi privé no 221, Loi concernant certains recours en matière de responsabilité médicale ou hospitalière. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de la justice

M. Bertrand: Je fais motion pour déférer ledit projet de loi à la commission parlementaire de la justice, M. le Président.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Période de questions orales des députés. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Lettre de M. Maurice Forget au ministre de l'Éducation

M. Lalonde: M. le Président, depuis quelque temps je pose des questions au ministre de l'Éducation et au premier ministre concernant le départ précipité de l'ancien président de la Commisson de surveillance de la langue française, M. Maurice Forget. Ainsi, le 19 décembre et le 12 mai, j'ai reçu des réponses du ministre. On a pu apprécier la qualité des réponses, mais il y a un intéressé, M. Maurice Forget, qui s'est manifesté dans une lettre qu'il a adressée au ministre, dont la Presse a publié le texte hier et qui contient des accusations extrêmement graves à l'égard du ministre. À quatre endroits dans cette lettre M. Forget accuse le ministre d'avoir trompé la Chambre, d'avoir dit des faussetés ici en réponse à des questions. Il l'accuse aussi d'ingérence politique dans l'administration de la commission de surveillance et dans l'administration des enquêtes. Je ne veux pas lire la lettre, ce serait trop long. À quelques endroits on lit ce qui suit: "Au cours de ces débats, vous avez déclaré que j'ai remis ma démission comme président de la commission, ce qui est absolument faux..." "Aucune de ces affirmations n'est conforme à la réalité." "...vous avez, à plusieurs reprises, induit l'Assemblée nationale en erreur..."

M. le Président, dans nos annales politiques modernes, je ne me souviens pas de cas où un haut fonctionnaire a été aussi sévère à l'égard d'un membre d'un gouvernement. Ma question s'adresse au premier ministre. Je veux lui demander quelles dispositions le premier ministre entend prendre devant cette affirmation de la part de M. Maurice Forget pour rétablir la crédibilité de son ministre et de son gouvernement.

Le Président: M. le premier ministre. (10 h 50)

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je n'ai pas eu l'occasion de lire la lettre en question. Je me contenterai de répéter ce que j'ai dit déjà. Il arrive des cas - et cela en était un - où il semble être de l'intérêt de la bonne administration, quand il y a vraiment des désaccords profonds et irréconciliables, de se priver des services de quelqu'un, ce qui a été fait - et c'est

toujours désagréable, bien sûr - dans le cas de M. Forget. Je lui laisse la responsabilité du témoignage qu'évoque le député de Marguerite-Bourgeoys, mais puisqu'il y a là quand même des allégations qui semblent assez sérieuses, je demanderais au ministre de l'Éducation ses propres réactions, parce que, après tout, cela s'est passé dans le coin qui est sous sa juridiction.

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: C'est à dessein que j'ai adressé ma question au chef du gouvernement, parce que ma question concerne la conduite d'un de ses ministres et je pense que, compte tenu de la qualité des réponses que nous avons eues jusqu'à maintenant, j'aimerais que ce soit le chef du gouvernement qui me réponde.

Le Président: Mais, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, étant donné que la lettre dont vous avez fait état parle du ministre de l'Éducation, je pense qu'il serait équitable qu'il ait la parole. M. le ministre de l'Éducation.

M. Laurin: M. le Président, il n'y a rien de nouveau dans cette lettre. Elle reprend une partie des nombreuses représentations que m'a soumises un président de la commission qui est un excellent polygraphe. J'ai eu l'occasion de répondre à plusieurs reprises à ces allégations, que ce soit ici, à l'Assemblée nationale, que ce soit aux diverses commissions parlementaires où la question m'a été posée. Je ne veux pas revenir sur toutes les réponses que j'ai déjà données, sinon pour dire qu'en l'occurrence, je n'ai fait qu'exercer les fonctions de chef de ministère que m'accordent la loi de l'administration de la Législature ainsi que la loi régissant les divers organismes de la langue française. Évidemment, on ne peut pas empêcher quelqu'un qui se croit lésé ou quelqu'un qui n'est pas d'accord avec certaines positions prises par son chef de protester et l'ex-président ne s'en est pas privé aussi bien dans son rapport annuel que dans les nombreuses lettres qu'il a adressées aux journaux depuis près d'un an déjà, mais, encore une fois, je ne vois là rien de nouveau et n'ayant exercé que les fonctions que m'attribuent les diverses lois, je suis convaincu que cette décision était opportune et que ce départ anticipé ou prématuré a été négocié par l'intéressé et le gouvernement à leur satisfaction réciproque.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, une question additionnelle.

M. Lalonde: ... si vous croyez que la lettre de M. Forget est l'expression d'une satisfaction, M. le ministre, vous devriez retourner aux classes. M. le Président, j'avais raison de craindre de recevoir une réponse du ministre. Je vais donc revenir au premier ministre. Quelles sont les raisons que le ministre de l'Éducation a invoquées à l'égard du premier ministre pour obtenir de sa part qu'il limoge M. Forget?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je me contenterai de dire ce que j'ai dit tout à l'heure et pour la nième fois. Il arrive - et c'est ce qui est arrivé dans le cas de M. Forget - qu'il y a des désaccords suffisamment profonds sur les orientations et sur les façons de procéder, vis-à-vis de politiques du gouvernement, pour qu'il soit indiqué qu'on se sépare, qu'on se prive des services de quelqu'un, ce qui a été négocié, comme l'a dit le ministre de l'Éducation, et finalement endossé - à la fois le résultat de la négociation et le départ anticipé - non seulement par votre serviteur, mais par le Conseil des ministres. On en garde la responsabilité. M. Forget a parfaitement le droit - c'est légitime - d'évoquer une foule de choses comme allégations, mais c'est quand même la responsabilité du gouvernement dans ce cas et on l'a assumée. C'est tout.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Si le premier ministre n'est pas plus intéressé que cela à nous informer, comment se fait-il que son chef de cabinet, M. Jean-Roch Boivin, a lui-même convoqué M. Forget, a pris connaissance des griefs que M. Forget avait à l'égard de l'ingérence politique du ministre et a tenté de régler cette question? N'était-ce pas assez important pour que le chef de cabinet du premier ministre s'y intéresse? Pourquoi, à ce moment-là, le premier ministre ne veut-il pas nous dire qu'il était au courant des ingérences politiques du ministre dans la commission de surveillance et pourquoi a-t-il choisi, au coût de 50 000 $ de fonds publics d'un gouvernement qui est déjà cassé, de se défaire d'un serviteur de l'État qui voulait simplement appliquer la loi qu'on avait fait adopter ici?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): D'abord, il n'y a rien de plus normal que le fait que mon chef

de cabinet s'intéresse et se préoccupe de cas comme cela parce que forcément cela finit par rebondir dans mon bureau. Il fallait qu'il étudie le cas et moi aussi. Deuxièmement, quand on parle d'ingérence politique, il ne faut pas oublier qu'il y a un rôle politique. Le gouvernement a été élu pour jouer un râle politique. Si M. Forget considérait que c'était une ingérence quant à lui, finalement, c'était devenu inextricable et aussi insoluble. Alors, on a pris la solution qui nous paraissait s'imposer.

Le Président: Question principale, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président...

Une voix: ... fait pas cela trop longtemps. Voulez-vous qu'on en pose d'autres?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de D'Arcy McGee.

Le retour de M. Jean-Paul Roger

M. Marx: J'ai une question pour le ministre de la Justice. Ma question porte sur les suites de l'enquête sur le directeur du service des faillites et des fraudes, M. Jean-Paul Roger. Le ministre nous a déjà dit qu'il était satisfait de l'enquête et du complément d'enquête dans cette affaire. Il va sans dire que le ministre est satisfait aussi du travail des policiers. De plus, sur la base des opinions qu'il a reçues, le ministre nous a déjà dit qu'aucune plainte criminelle ne serait portée contre M. Roger. Ma question est la suivante, en deux volets: Premièrement, est-ce que c'est le ministre qui a réinstallé M. Roger dans ses fonctions? Deuxièmement, le ministre a-t-il reçu une lettre de M. Roger, en date du 10 juin 1982, concernant cette affaire?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, effectivement, la décision a été prise de réintégrer M. Roger dans ses fonctions. Je crois que cela allait de soi, puisqu'il avait été suspendu étant donné l'enquête policière qui avait lieu. Une telle suspension était normale dans les circonstances. L'enquête étant terminée, les plaintes n'ayant pas lieu d'être portées, par la force des choses, il se devait d'être réintégré dans ses fonctions.

Concernant une lettre que j'aurais reçue de M. Roger, je prendrai avis de cette partie de la question, parce que je n'en ai pas souvenir. Je pourrais peut-être, avant même la fin de la période des questions, apporter une réponse à cette deuxième partie de la question du député de D'Arcy McGee.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx; M. le Président, puis-je demander au ministre de bien vouloir vérifier son courrier et de nous dire si cette lettre porte atteinte à la manière dont l'enquête était faite?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Avec plaisir.

Le Président: Question principale, M. le député de Westmount.

Soumissions pour des filtres-presses

M. French: M. le Président, je voudrais poser une question au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme ou à un autre ministre, si ce ministre n'est pas en mesure d'y répondre. On sait que la Communauté urbaine de Montréal est en train d'étudier quatre ou cinq soumissions afin d'acquérir des filtres-presses mobiles pour son usine d'épuration des eaux. Il s'agit d'un contrat de plusieurs millions de dollars. On sait également que la plus basse soumission est celle d'un consortium québécois-japonais. Également, il y a une autre soumission qui vient d'un consortium québécois-italien dont le partenaire québécois est une filiale de la SGF, c'est-à-dire d'une société d'État. N'est-il pas vrai que le gouvernement du Québec, par l'entremise d'un ou de plusieurs de ses ministres, a essayé de mettre la pression sur la Communauté urbaine de Montréal pour que la soumission venant de la société d'État soit acceptée, même si elle n'est pas la plus basse? N'est-il pas vrai que le gouvernement a demandé à la Communauté urbaine de Montréal de retarder sa décision afin de favoriser sa société d'État?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. (11 heures)

M. Biron: M. le Président, c'est exact qu'il y a deux demandes de soumissions provenant de la Communauté urbaine de Montréal, une demande pour des filtres-presses et une autre demande pour la construction d'un édifice, de même que des incinérateurs à boue. Les deux commandes, au total, représentent environ 60 000 000 $, subventionnées à environ 90% par le gouvernement du Québec. Lorsque les demandes sont arrivées de la part de la communauté urbaine, nous avons demandé que la principale place d'affaires de même que la production des équipements soient au Québec, en vue ou de protéger des emplois ou de créer des emplois chez nous.

Il semble que les ingénieurs-conseils du

projet, la firme ABBDL ont fait certaines spécifications. Finalement, lors des soumissions publiques, les deux plus bas soumissionnaires étaient des firmes de l'extérieur du Québec avec des produits de l'extérieur du Québec. Le gouvernement du Québec, c'est-à-dire le ministère de l'Environnement et le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme ont travaillé ensemble avec les gens de la Communauté urbaine de Montréal pour leur dire: II faut au moins, dans la politique d'achat, que le maximum de retombées économiques profitent à la fois à des entreprises québécoises et à des travailleurs et travailleuses de chez nous.

La Communauté urbaine de Montréal et M. Desmarais en particulier nous ont assurés de toute leur collaboration. C'est dans cette foulée de décisions qu'il a été décidé de retarder l'étude du projet ou la décision finale de quelques mois, de trois mois, je pense, afin de pouvoir étudier à leur mérite chacune des offres de soumissions, analyser les impacts de retombées économiques au Québec afin que le maximum de Québécois profitent de ces sommes dépensées par le gouvernement du Québec.

Je dois dire au député de Westmount qu'avec 60 000 000 $, dont 90% sont subventionnés par le gouvernement du Québec, il faut s'assurer - je pense bien que le député de Westmount sera d'accord avec moi - que le maximum de ces sommes soit dépensé au Québec. Il ne faut pas compter que ce soient des pays comme le Japon, l'Allemagne, la France ou l'Angleterre qui puissent protéger nécessairement des entreprises québécoises lorsqu'il y a une différence de prix assez minime.

Je dois dire aussi au député que, tout au long des négociations pour ces deux contrats, il semble qu'à cause de la technologie nouvelle qu'on peut développer au Québec, la différence de prix sera très minime, si on compte sur une période de quelques années, à cause des frais de fonctionnement, des économies importantes que pourra faire la Communauté urbaine de Montréal. Dans ce cas, j'assure le député de Westmount que notre préoccupation est de protéger d'abord et surtout des entreprises québécoises, quelles qu'elles soient, et des travailleurs et travailleuses de chez nous afin qu'ils puissent avoir le droit et la possibilité de travailler au Québec avec de l'argent dépensé par eux.

Des voix: Très bien!

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, effectivement, personne ne peut s'opposer à ce que le plus de retombées possible reviennent au Québec. Des voix: Bravo!

M. French: Mais je suis un peu perplexe. N'est-il pas vrai que tous les soumissionnaires ont des partenaires québécois? N'est-il pas vrai que la plus basse soumission, qui est de l'ordre de 10 000 000 $, a un partenaire, une PME québécoise, dans la ville de Québec, qui s'appelle Hydro Mécanique? N'est-il pas vrai que le contenu québécois de la plus basse soumission était sensiblement le même que la soumission de la filiale d'une société d'État, soit la SGF? N'est-il pas vrai que cette deuxième soumission est de quelque 10 000 000 $ plus élevée que la plus basse soumission? Ma question est très simple: Pourquoi le gouvernement du Québec ne veut-il pas que la Communauté urbaine de Montréal respecte les procédures normales en ce qui a trait aux soumissions des contrats internationaux?

Des voix: Très bien!

M. Biron: Je dirai au député de Westmount qu'il y a une différence énorme entre une production québécoise et un bureau de ventes au Québec. Ce que nous avons demandé à la Communauté urbaine de Montréal, c'est de s'assurer que les équipements, que les pièces nécessaires soient produits au Québec. Je ne sais pas si le député de Westmount voudra réaliser avec moi que, si on peut développer des entreprises dans cette technologie d'épuration des eaux au Québec, on pourra après ça permettre à ces entreprises de vendre leurs produits ailleurs partout à travers le monde parce qu'ici elles auront développé une technologie moderne, dynamique et efficace. Mais si on ne donne pas à ces entreprises la chance de partir, la chance de produire ces produits au Québec, on ne pourra jamais vendre nulle part ailleurs.

Notre préoccupation, c'est donc qu'on ait le maximum de retombées québécoises. Nous étudions chacun des devis, chacune des offres de services de la part des différentes entreprises. Si le plus bas soumissionnaire, c'est une technologie japonaise, mais produite au Québec, bien sûr, on va l'accepter. Mais ce qui est essentiel pour nous, ce n'est pas une société d'État ou une société privée. Aussi, parmi les sociétés privées qui soumissionnent sur les filtres-presses, il y a Ingersoll-Rand, de Sherbrooke, qui n'est pas une société d'État, mais on va lui donner la même chance qu'à Volcano, à Forano ou à d'autres entreprises québécoises.

Donc, nous visons à ce que la production - non pas la vente - des équipements soit faite au Québec.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, n'est-il pas vrai qu'il y a certaines firmes italiennes qui fournissent la technologie pour les soumissions de la société d'État? Deuxièmement, n'est-il pas vrai que, dans le cas de la soumission la plus basse, c'est une firme québécoise, Hydro Mécanique, qui a une entente avec Marutini, la firme japonaise en question et que, par la suite, c'est Hydro Mécanique, de la ville de Québec, qui bénéficierait de toutes les ventes que fait cette firme japonaise au Canada? N'est-il pas vrai, finalement, M. le Président, qu'en essayant de changer les règles du jeu d'un concours international de cette façon, le Québec risque de menacer la possibilité que les entreprises québécoises soient admises à participer dans les concours aux États-Unis, au Moyen-Orient, etc.? Le gouvernement du Québec se comporte un peu...

Le Président: S'il vous plaît!

M. French: ... en république de banane en voulant s'ingérer dans ce processus de soumissions international.

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: M. le Président, j'ai de la difficulté à suivre le député de Westmount, à savoir s'il veut vraiment prendre la défense des intérêts du Québec ou défendre les intérêts internationaux. Ce qui est essentiel -c'est ce que je veux dire au député de Westmount - c'est que la production soit québécoise, c'est qu'on puisse développer, au Québec, une technologie moderne, dynamique et efficace dans ces secteurs de pointe. C'est dans ce sens-là que nous ne permettrons pas qu'il n'y ait qu'un seul bureau de vente au Québec. Ce que nous voulons, peu importe l'entreprise, privée ou publique, c'est que les pièces d'équipement soient fabriquées au Québec par des travailleurs du Québec.

Le Président: Question principale, M. le député de Gouin.

La grève des médecins omnipraticiens

M. Rochefort: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales.

Des voix: Un autre...

M. Rochefort: Cela ne vous intéresse pas, la santé publique des Québécois, vous autres?

M. le Président, comme je le disais, ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales et porte sur la grève des médecins généralistes du Québec. Depuis l'annonce et le début effectif de cette grève, une certaine inquiétude, voire une inquiétude certaine, s'est installée chez nos concitoyens et concitoyennes, notamment devant les effets possibles de cette grève sur l'état de la santé publique au Québec.

Ma question est la suivante. Premièrement, est-ce que le ministre pourrait nous faire le point justement sur l'état de la santé publique au Québec, à l'heure actuelle? Deuxièmement, est-ce qu'il pourrait faire le point, pour l'information de l'ensemble des membres de cette Chambre, sur l'état des négociations à la fois avec les médecins généralistes du Québec et avec les médecins spécialistes?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, il y a trois objets importants dans nos préoccupations de ces jours-ci. D'abord et avant tout, la protection de la santé publique, le bien-être et l'assurance que les citoyens, sur une base continue, pourront avoir des prestations de services médicaux. Deuxièmement, la négociation qui est également un devoir de celui qui vous parle et du gouvernement à l'égard des médecins. Troisièmement, la possibilité, qu'il ne faut pas écarter, d'une intervention si la santé publique devait être mise en cause.

À l'égard de la santé publique, je dirai que j'ai eu trois rapports dont deux complets pour la journée d'hier, puisque nous en avons deux par jour. Ces rapports nous parviennent d'un contact régulier, deux fois par jour, avec l'ensemble des établissements de santé au Québec, également d'une évaluation au niveau des conseils régionaux, de contacts réguliers dorénavant avec la Corporation des médecins dans la mesure où elle peut collaborer, l'Association des hôpitaux du Québec ainsi que tous les départements de santé communautaire sur le territoire. J'ai eu les deux rapports d'hier et un rapport intérimaire de ce matin qui sera définitif en début d'après-midi. Il semble qu'effectivement la population ait dans l'ensemble, les services dits d'urgence.

Deuxièmement, il semble que, dans de nombreux établissements, les cliniques externes aient fonctionné normalement, c'est-à-dire que des médecins omnipraticiens n'ont pas participé au mouvement de débrayage et, en ce sens, ont permis une activité régulière dans plusieurs hôpitaux du Québec. (11 h 10)

Troisièmement, je voudrais dire qu'il ne faut quand même pas sous-estimer l'effet cumulatif de ces arrêts. Des patients qui voient leur rendez-vous remis de semaine en semaine depuis un mois et demi, dans le

cadre du suivi d'une maladie, d'une pathologie ou dans l'évaluation diagnostique d'un problème, pourraient être, à court terme, si nombreux que l'on pourrait considérer que la santé publique est effectivement en cause, malgré le maintien des services d'urgence. Encore une fois, je me refuse à la notion de services essentiels dans le cas des médecins.

Il ne faut donc pas banaliser la situation et s'y habituer, finalement, parce qu'à coups de communiqués on nous dit que ça va bien. Il faut regarder la réalité comme elle est. Comme elle est en ce moment, la réalité nous permet de constater qu'il n'y a pas de situation de catastrophe, qu'il y a des services d'urgence adéquats et qu'à de nombreux endroits, comme les médecins n'ont pas suivi le mouvement, surtout dans certains établissements, la population reçoit les services normaux. Le volume total des services, à cause de la fermeture des cabinets privés, diminue de façon considérable et l'effet cumulatif pourrait être là très rapidement.

Quatrièmement, quant à la négociation, il y a aujourd'hui même des rencontres, et non pas seulement des échanges téléphoniques, dans le cas de la Fédération des médecins omnipraticiens comme dans le cas de la Fédération des médecins spécialistes. Je réitère brièvement que nous demandons aux médecins du Québec, dans le contexte économique actuel, de faire également leur effort sur le plan financier. Nous croyons qu'à l'intérieur de la masse dégagée, à partir du principe des 14% auquel s'appliquent différentes règles que j'ai déjà exposées, il est possible de trouver des accommodements qui impliqueraient à la fois un ajustement dont je comprends qu'ils le demandent en partie, mais aussi qu'ils fournissent l'effort équivalent que nous demanderons, pour ne pas dire carrément imposerons, à des centaines de milliers de personnes au Québec.

Finalement, quant au projet de loi, je peux effectivement confirmer que nous sommes prêts en termes techniques. Si nous devions procéder par projet de loi, je pense qu'il est du devoir du gouvernement d'être prêt à toute situation. Si nous pouvons considérer qu'au plus tard au début de la semaine prochaine, à cause de l'effet cumulatif, nous pourrions être appelés à intervenir au nom de la santé publique, je pense qu'il ne faut pas écarter la possibilité que ce type d'intervention survienne peut-être même en fin de semaine, selon l'état de la situation.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témis- camîngue): Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Est-ce que l'honorable ministre des Affaires sociales pourrait nous dire, de la façon la plus exhaustive possible, quel est le suivi de l'ordre de grève de la fédération, de l'ensemble de ses membres, particulièrement dans la région d'Abitibi-Témiscamingue et dans le reste du Québec?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): Vous savez, M. le Président, tout en comprenant très bien la préoccupation du député de Rouyn-Noranda, je laisse le syndicat des omnipraticiens évaluer comment ça va chez ses membres et je pense que c'est son problème. Ce qui m'intéresse, moi, c'est l'état de la santé publique et de la population.

Ceci dit, cependant, je peux lui confirmer que, dans le cas de Rouyn et dans le cas de Ville-Marie en Abitibi, comme c'est le cas également de nombreuses régions de la Gaspésie et d'une partie de la Côte-Nord et du Saguenay-Lac-Saint-Jean, les omnipraticiens n'ont pas suivi le mouvement de débrayage.

Le Président: Question principale, M. le député de Brome-Missisquoi.

Projet industriel retardé à Granby

M. Paradis: M. le Président, mercredi dernier, le député de Notre-Dame-de-Grâce a servi au gouvernement péquiste, comme notre feuilleton l'indique, une motion de censure qui portait sur les responsabilités du PQ dans la crise économique.

Le ministre d'État au Développement économique ainsi que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme lui ont répliqué essentiellement en reprenant des pseudo batailles avec le gouvernement fédéral. Dans un dossier très concret, qui vise l'implantation possible d'une usine de fabrication de pièces forgées à Granby, comté de Shefford, un investissement de 5 000 000 $, une création de 50 nouveaux emplois par la compagnie Vélan, le président de cette compagnie a écrit à M. Horace Boivin, qui est le commissaire industriel de la ville de Granby, en date du 12 mai 1982. Je vous lis le paragraphe essentiel de la lettre: "C'est avec regret que nous avons décidé de retarder notre projet à Granby en raison de la présente conjoncture économique et, en grande partie, du climat socio-politique au Québec. Nous avons l'impression que le présent gouvernement n'est pas intéressé vraiment dans le développement industriel et donne préférence à ses batailles avec Ottawa. Le climat politique est

tellement décourageant que même des entrepreneurs enthousiastes comme moi n'ont pas confiance pour investir présentement."

Ma question au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme est la suivante: A-t-il l'intention, lui et son gouvernement, de maintenir sa préférence pour les batailles avec Ottawa au détriment des investissements? A-t-il l'intention, lui et son gouvernement, de continuer - j'utilise un langage qu'il utilisait lorsqu'il siégeait dans l'Opposition - à nous servir, à chaque réponse, à chaque question, des petites "tounes" séparatistes ou si, au contraire, ils vont finalement décider de s'occuper de donner préférence au développement industriel? Si la réponse est affirmative, si le gouvernement décide d'effectuer ce virage - non pas technologique, mais un virage de développement industriel, de création et de maintien d'emplois - quels gestes très concrets entend-il poser dans les jours à venir pour assurer la population de Granby et de toute la région que cette usine ne craindra plus ce climat de chicane et qu'elle ira s'installer dans le parc industriel de Granby?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: Le gouvernement du Québec, le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a travaillé avec l'entreprise Vittforge pour l'intéresser à venir à Granby, à y faire un investissement important. Je vais vérifier pour donner les chiffres exacts au député; peut-être que je pourrai répondre avant la fin de la période des questions.

Quant à la question de principe, je dois dire que le gouvernement du Québec va toujours et constamment privilégier d'abord la création d'emplois au Québec par tous les moyens possibles, la création d'emplois dans tous les domaines de l'activité économique. Je pense que mon collègue, le ministre d'État au Développement économique, en publiant, au nom du gouvernement du Québec, Le virage technologique, a indiqué la décision ferme, irrévocable et définie du gouvernement du Québec d'aider les entreprises à se développer dans des technologies modernes, des technologies de pointe.

Deuxièmement, le gouvernement du Québec seul est intervenu au cours des dernières années pour protéger les emplois et les entreprises dans les secteurs traditionnels, les secteurs qu'on appelle les secteurs mous, dans le meuble en particulier, où les chefs d'entreprises dans le domaine du meuble sont satisfaits. Encore ce matin, j'ai rencontré l'Association des manufacturiers de meubles du Québec qui, non seulement félicite le gouvernement du Québec de son action au cours des dernières années, mais veut que nous continuions dans le même sens puisque c'est le gouvernement du Québec qui a défini un programme tout à fait spécifique, très clair pour eux, sans trop de bureaucratie.

Même chose dans le domaine de la chaussure. Je n'ai pas besoin de rappeler au député de Brome-Missisquoi que c'est le gouvernement du Québec qui protège les emplois et les entreprises dans le domaine de la chaussure alors que le gouvernement fédéral essaie de les tuer.

Même chose dans le domaine du textile, du vêtement, et de la bonneterie. Le gouvernement du Québec, au cours des dernières années, a institué un programme pour protéger et innover ces entreprises, pour protéger les emplois qui existent, alors que le gouvernement fédéral n'a absolument rien fait avant quelques mois, sauf mettre en marche un programme qui ne fonctionne pas. Dans ce sens, les batailles avec Ottawa, ce n'est pas ce qui nous intéresse. Ce qui nous intéresse, c'est de créer de l'emploi. Ce que nous voulons, c'est que le gouvernement fédéral se mêle de ses affaires et qu'il n'essaie pas de tuer les entreprises et les emplois qui sont au Québec. Tant et aussi longtemps que le gouvernement du Québec sera le gouvernement du Parti québécois, on va protéger les entreprises québécoises et les emplois chez nous.

Le Président: Question additionnelle, sans préambule, s'il vous plaît, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: "On ne pouvait tenir de discours sans avoir une petite "toune" séparatiste contre le gouvernement fédéral; ça, on l'a toujours." Citation de Rodrigue Biron, 1979.

Le Président: Question, s'il vous plaît!

M. Paradis: M. le Président, ma question est concrète. Si, à partir de la nouvelle réponse que vous allez me donner, vous avez décidé d'abandonner comme priorité les chicanes avec Ottawa pour vous occuper de développement industriel, dans le cas de l'usine Vélan - vous n'en avez pas traité - quelle action concrète allez-vous poser au cours des jours qui suivent pour assurer les députés de cette Chambre et assurer la population de toute cette région que c'est vraiment votre préoccupation? De quelle façon allez-vous vous y prendre pour convaincre le président de la compagnie, qui a la même impression que vous aviez lorsque vous siégiez dans l'Opposition, qui a la même impression que les députés de l'Opposition et qui a la même impression que la population du Québec? Qu'est-ce que vous allez faire pour changer cette impression et amener de façon concrète cet investissement et cette création d'emplois dans la région de Granby?

Le Président: M. le ministre. (11 h 20)

M. Biron: J'aurai tous les détails pour le député de Brome-Missisquoi, je l'espère, avant la fin de la période des questions ou, au moins, au début de la semaine prochaine. Ce que je vais faire immédiatement, aujourd'hui, c'est parler avec le président de cette entreprise Vittforge. Je vais l'inviter à venir me rencontrer à Québec au début de la semaine prochaine, parce que je suis en négociation lundi à la conférence fédérale-provinciale des ministres du Commerce pour justement essayer de faire en sorte que le fédéral aide davantage les entreprises québécoises dans ce sens.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Biron: Mardi, le député de Brome-Missisquoi aura sa réponse au complet. Je vais essayer, s'il est possible pour le président de Vittforge de venir à Québec, de le rencontrer, au début de la semaine prochaine pour discuter avec lui. Je ferai remarquer au député de Brome-Missisquoi que ce n'est pas avec le genre de langage qu'il tient pour essayer de détruire l'intérêt et la confiance des entreprises québécoises dans le gouvernement du Québec et dans la capacité des Québécois et des Québécoises de faire les choses qu'on va réussir à intéresser davantage les entreprises. Au contraire, c'est avec un langage de confiance en nous-mêmes, de capacité de réussir des choses et de foi dans l'avenir à la fois du Québec et des travailleurs et des travailleuses du Québec. J'invite le député de Brome-Missisquoi à changer un peu son approche. Au lieu d'essayer de détruire l'économie, qu'il essaie de nous aider à construire une meilleure économie au Québec.

M. Paradis: Question additionnelle.

Le Président: Dernière question additionnelle, sans préambule. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: C'est ma question au ministre, justement: Est-ce que vous pensez que les interventions que vous faisiez en 1978 correspondaient à la vérité, ou si ce sont celles que vous faites maintenant qui correspondent à la vérité? Est-ce que, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, ce n'est pas le devoir justement d'un parlementaire de vous inviter à donner priorité au développement économique du Québec - c'est ça le sens de la question du député de Brome-Missisquoi - au lieu de donner priorité à vos chicanes avec le fédéral? Ce n'est pas avec vos chicanes avec le fédéral que vous allez régler le problème de l'économie du Québec. C'est en donnant priorité aux investissements au Québec.

Le Président: Question, s'il vous plaît.

M. Paradis: Est-ce que vous avez l'intention de donner priorité aux investissements au Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: M. le Président, le député de Brome-Missisquoi devrait savoir que le gouvernement du Québec donne priorité au développement économique. C'est notre priorité, c'est notre raison de vivre, c'est notre raison d'être, présentement. Je peux assurer le député de Brome-Missisquoi qu'au moins de ce côté-ci de la Chambre, du côté du gouvernement du Québec, ce qui nous intéresse, ce n'est pas les chicanes avec Ottawa. On est obligé de critiquer quand ils font des mauvaises choses et qu'ils détruisent notre économie, nos entreprises et nos emplois. Ils ne font pas souvent de bonnes choses. Ils font surtout de mauvaises choses. Lorsqu'ils font de bonnes choses, on sait le reconnaître. Je cite par exemple le cas de Bombardier, où le gouvernement fédéral a voulu collaborer avec le gouvernement du Québec; on a réussi à faire des choses.

Quand on le veut, de l'autre câté, on réussit à faire des choses. Mais, règle générale, il y a une volonté là-bas, du côté du gouvernement fédéral... C'est d'ailleurs votre grand chef, M. Trudeau, qui l'a dit: le fédéralisme coopératif, c'est fini, c'est mort, on ne s'occupe pas de cela. Nous, pendant ce temps, on s'occupe du développement économique. J'ai cité cette semaine pour le député de Brome-Missisquoi une entreprise qui est de sa région, la Générale Électrique, qui n'est pas une petite entreprise, qui disait: Nous voulons rendre hommage au gouvernement du Québec et aux travailleurs du Québec pour la façon dont on a été reçu et la collaboration qu'on reçoit. J'assure, M. le Président, en terminant, le député de Brome-Missisquoi que le gouvernement du Québec continuera de donner priorité au développement économique.

Le Président: Question principale, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le vrai responsable du dossier de la fête nationale. Il vient de sortir voilà deux secondes.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche est à communiquer avec certaines personnes en ce moment. Peut-être que le député de Deux-Montagnes pourrait poser sa

question.

Le Président: M. le député de Papineau.

M. Assad: Merci, M. le Président. Ma question s'adressait plutôt au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre... Ou le ministre de l'Industrie et du Commerce, s'il est absent.

Le Président: M. le député de Laprairie.

M. Assad: M. le Président, est-ce qu'on peut laiser le député...

Le Président: Oui, je vais lui donner la parole, M. le député de Papineau. M. le député de Laprairie.

La fête nationale et la Société des festivals populaires

M. Saintonge: Ma question s'adresse au ministre responsable de la fête nationale. À la question que je lui adressais hier, le ministre n'a pas répondu, suivant sa fidèle habitude. M. le Président, je ferai remarquer au ministre, au départ, que la fête nationale ça nous intéresse, c'est notre fête, c'est la fête de tous les Québécois, et nous avons à coeur non seulement son succès, mais également sa crédibilité. Je me pose comme question si c'est bien le cas de l'autre côté de la Chambre pour tout le monde. Ma question, M. le ministre, a trois volets: Avez-vous reçu et exigé de la Société des festivals populaires les rapports financiers et mensuels prévus selon le protocole d'entente que vous avez signé avec la Société des festivals populaires? Vous êtes-vous assuré du réalisme des prévisions de revenus et de l'absence de déficit éventuel? Finalement, la rumeur d'un déficit actuel de l'ordre de 300 000 $ est-elle fondée ou non?

Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lessard: M. le Président, il est exact que j'ai exigé des rapports mensuels. Il est exact que j'ai vérifié ces rapports mensuels, mais il n'est pas exact que la Société des festivals populaires se dirigerait vers un déficit de 300 000 $ pour la fête nationale.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: M. le ministre, j'aurais deux questions concernant les projets locaux. Le ministre peut-il nous dire s'il est exact que les organismes locaux dans les régions de Montréal, des Laurentides et de l'Estrie n'ont pas encore reçu du ministère les subventions prévues pour les projets de fête acceptés? Ces gens sont des bénévoles qui méritent notre considération et ils sont bien mal pris, à moins d'une semaine de la fête. Le ministre nous demande toujours des exemples précis, des faits. Je vais vous donner un fait bien précis dans le même cas des programmes locaux.

Le Président: Question, s'il vous plaît!

M. Saintonge: Qu'arrive-t-il du projet soumis par le Mouvement des fêtes populaires de Hochelaga-Maisonneuve, projet qui a été accepté par Loisir-ville, qui est un organisme régional de la région de Montréal et recommandé par la Société des fêtes populaires au ministère? Ce projet est bloqué au bureau du ministre. Vous avez reçu un télégramme à cet effet il y a une semaine. Il n'y a pas de réponse. Ce blocage serait-il la conséquence du rôle joué par le Mouvement des fêtes populaires de Hochelaga-Maisonneuve dans le regroupement des organismes locaux de la région de Montréal qui ont dénoncé la mauvaise administration de l'an dernier?

Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lessard: M. le Président, le gouvernement du Québec a confié à la Société des festivals populaires un mandat, à savoir l'organisation de la fête nationale des Québécois. Il évite à ce titre d'intervenir de façon journalière dans les décisions de la société. Cependant, en vue justement d'avoir toujours un meilleur contrôle sur la fête nationale et d'éviter certains cas qui se sont produits l'an dernier, il arrive que le ministre ait à vérifier certains dossiers particuliers. Dans le cas de Hochelaga-Maisonneuve, à la suite d'une demande d'organismes du quartier Hochelaga-Maisonneuve, en particulier le Centre culturel et sportif de l'Est Inc. et le CLSC Hochelaga-Maisonneuve, de même qu'à la suite d'une lettre - je dis bien d'une lettre -du vice-président du comité exécutif de la ville de Montréal, M. Pierre Lorange, nous avons demandé à la Société des festivals populaires un complément d'information sur le dossier et nous attendons cette réponse.

M. Saintonge: Un instant, M. le Président!

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Je demanderais au ministre s'il peut confirmer quand même le premier volet de ma question. Les chèques aux organismes locaux, les organismes de Montréal, des Laurentides et de l'Estrie, ont-

ils été envoyés ou non, à moins de cinq jours des fêtes qui vont commencer? C'est le 23, M. le ministre.

Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lessard: M. le Président, j'ai répondu dans le cas de Hochelaga-Maisonneuve. Je prends avis de cette question. Je répondrai en ce qui concerne les autres cas, mais, dans l'ensemble, dans la grande majorité des cas, j'ai signé les lettres qui couvrent des subventions pour environ 800 comités locaux dans l'ensemble du Québec. Certains cas peuvent être étudiés. Je pense que les députés de l'Opposition ne peuvent pas m'en blâmer, étant donné qu'on a laissé entendre, l'an dernier, différentes rumeurs concernant l'administration de la fête nationale. Dans les circonstances, il peut arriver, et je comprends qu'il y ait des délais. C'est malheureux. Étant donné justement une situation qui a existé l'an dernier, la décision de confier l'organisation de la fête nationale à la Société des fêtes populaires a été prise assez tardivement, mais cependant, M. le Président, nous prenons toutes les mesures nécessaires pour compléter, toutes les mesures. Je vérifierai les dossiers immédiatement - tout à l'heure, si on me le permet - mais nous prenons toutes les mesures nécessaires pour que les chèques soient transmis aux organismes dans les plus brefs délais.

M. le Président, j'en profite pour exprimer mon regret que la Société Radio-Canada, qui est un organisme payé aussi par les deniers des contribuables québécois, ait refusé de transmettre une manifestation nationale organisée par la Société des festivals populaires et qui s'intitulait "Heureux qui, comme au Québec". Probablement que la Société Radio-Canada aurait transmis cette manifestation si on l'avait intitulée "Peureux comme au Québec".

M. Saintonge: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le député de Laprairie, sur une question de règlement.

M. Saintonge: Je voudrais noter, M. le Président, que le ministre impose ici des termes de réponse à Radio-Canada. Radio-Canada a mentionné expressément que la raison pour laquelle c'était refusé, c'était pour une question...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: Question principale. (11 h 30)

Le Président: Je vais accorder les deux questions principales parce que mon coeur balance entre les deux. Sans additionnelle, à tous les deux, en premier lieu, M. le député de Papineau, et en deuxième lieu... Il reste trois minutes à la période des questions. Si cela continue, personne ne pourra poser sa question.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je comprends que votre coeur balance, mais les ministériels ont déjà eu une question. C'est devenu presque une habitude de donner une question par jour, par séance aux ministériels, mais je pense qu'une deuxième question, alors qu'on arrive à la fin de la session et qu'il y a plusieurs questions de l'Opposition qui sont en attente, je pense que je dois au moins élever ma voix et vous demander de simplement tenir compte, autant que possible, des besoins de l'Opposition, la période des questions étant réservée à l'Opposition pour qu'on puisse faire notre devoir de bien critiquer l'administration.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, c'est le whip de l'Opposition qui m'a demandé de ne point accorder de questions additionnelles au député de Papineau.

M. Pagé: Je m'excuse, M. le Président. Je vous ai effectivement fait signe, compte tenu que la période des questions doit se terminer à 11 h 33, que j'apprécierais que le député de Papineau, qui attend depuis une semaine, puisse avoir la possibilité de poser une question, quitte à ce que ce soit seulement une question principale. S'il peut avoir une additionnelle, tant mieux, c'est ce qu'on demande. Allez-y, M. le député.

Le Président: M. le député de Papineau.

Demande des employés de Vilas

M. Assad: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail. M. le ministre, elle concerne une demande des employés de la compagnie Vilas, dans la ville de Thurso, dans le comté de Papineau, faite lors d'une réunion à laquelle j'étais présent, il y a un peu moins de deux semaines. Il y a deux ans, ces employés ont perdu leur paie de vacances parce que la compagnie a eu des difficultés et qu'elle a été obligée de fermer ses portes. Une nouvelle compagnie a pris les affaires en main et les employés, lors de la réunion dont j'ai fait mention plus tât, ont demandé de vous transmettre ceci: Ils voudraient que des fonctionnaires viennent étudier le dossier. Il y a des difficultés dans l'industrie, dans la manufacture des meubles. Ils ont peur que la même situation se présente de nouveau et que leur paie de vacances leur soit refusée. Donc, sans discréditer la compagnie actuelle, ils m'ont

demandé si, en collaboration avec votre collègue, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, il n'y aurait pas moyen d'étudier la possibilité d'obtenir de l'aide financière pour soutenir les travailleurs dans ce domaine qui est très important pour notre région et pour les travailleurs qui ont plusieurs années de services dans cette manufacture.

Le Président: M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Marois: M. le Président, je prends bonne note des commentaires formulés par le député et je vais m'assurer d'un suivi sur cette affaire, le cas échéant, en concertation avec mon collègue.

Le Président: Aucune question additionnelle. Fin de la période des questions. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Deux-Montagnes.

L'inauguration de LG 3

M. de Belle feuille: Est-ce que j'aurais le consentement de la Chambre pour poser une question rapide sans additionnelle?

Des voix: Oui.

M. de Bellefeuille: Une question au sujet de l'inauguration de LG 3, qui a lieu après-demain, dimanche.

Le Président: II y a consentement. Question additionnelle, M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Dans la Presse d'aujourd'hui, le chroniqueur politique Jacques Bouchard affirme que, dimanche, les cérémonies d'inauguration de LG 3 vont coûter 500 000 $. Le journaliste Bouchard affirme que c'est une somme colossale, je ne vais pas me chicaner sur le mot "colossal", mais je voudrais quand même demander au ministre de l'Énergie et des Ressources si c'est exact que cette cérémonie, cette fête, ce party, comme dit M. Bouchard, doit coûter 500 000 $, et si c'est le cas, ne pourrait-il pas prendre des mesures, s'il est encore temps, pour réduire l'ampleur de cette cérémonie?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, j'ai pris connaissance de l'article de la Presse de ce matin. Pour être bien franc, je dois vous dire que cette nouvelle est complètement fausse.

Des voix: Ah!

M. Duhaime: Je n'arrive pas, non plus, à comprendre que l'on signe de pareils articles, à la une, dans les journaux, sans vérifier quoi que ce soit. Je n'ai pas les chiffres définitifs devant moi. J'ai demandé un rapport rapide à la Société d'énergie de la Baie James. Les fêtes qui vont inaugurer LG 3 auront lieu dimanche. Ce qu'on me dit, c'est que le coût global, transport aérien, réception d'invités américains, européens et d'un peu partout à travers le monde avec Hydro-Québec internationale, devrait coûter à peu près 250 000 $. Ce que je veux dire, c'est que nous investissons sur les chantiers de la rivière La Grande des dizaines de millions, des centaines de millions et des milliards. Il m'apparaît important de profiter de cette occasion pour mettre en lumière la capacité des Québécois et leur génie de maîtriser l'eau. Cette technologie que nous pouvons maintenant exporter à travers le monde sera mise en lumière dimanche prochain.

Je rappelle, pour nos amis d'en face, qui m'écoutent avec un sourire en coin, que l'inauguration de Churchill Falls, le contrat dont on parle tant et le contrat que vous voudriez que l'on ignore, en bons Terre-Neuviens, a coûté, en 1971, 1 000 000 $ en dollars de 1971.

Le Président: On m'indique que le ministre de la Justice aurait un complément de réponse à une question du député de D'Arcy McGee.

M. le ministre de la Justice.

Le retour de M. Jean-Paul Roger (suite)

M. Bédard: M. le Président, après vérification auprès des membres de mon cabinet, je suis en mesure d'apporter une réponse à un des volets de la question du député de D'Arcy McGee concernant une lettre que j'aurais reçue. Après vérification, je suis en mesure de dire qu'aucune lettre de M. Jean-Paul Roger n'a été acheminée ou reçue à mon cabinet. Donc, elle n'a jamais été portée à mon attention et elle n'a pas été reçue non plus par le sous-ministre en titre du ministère de la Justice. Je ne sais pas si la poste est plus rapide pour l'Opposition que pour le gouvernement. De toute façon, si le député de D'Arcy McGee veut le faire, c'est toujours possible d'en faire état par des questions.

Je voudrais simplement, au cas où j'aurais pu donner cette impression, rappeler que, dans cette enquête et dans les conclusions que j'ai fait connaître, je n'ai jamais porté de jugement de valeur sur le travail des policiers qui ont fait cette enquête demandée, d'ailleurs, par le sous-

ministre en titre de la Justice, comme je n'ai jamais porté de jugement de valeur sur l'individu lui-même, M. Jean-Paul Roger.

Le Président: Courte question additionnelle, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: En l'absence du député de D'Arcy McGee qui avait des obligations à l'extérieur de la Chambre, je sais que le ministre de la Justice n'est pas le genre à jouer sur les mots, mais pour être bien sûr qu'on parle de la même chose, lorsqu'il dit qu'il n'a eu aucune lettre, est-ce que ça comprend toutes les sortes de communications écrites, notes de service, communications intraministérielles, à savoir entre le directeur des services et le sous-ministre?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Le député de Marguerite-Bourgeoys veut savoir si je parle avec les gens dont j'ai la responsabilité, c'est évident. Le député de D'Arcy McGee a fait référence à une lettre en bonne et due forme. Je m'en tiens à la question posée. Ce que je veux dire, c'est que je n'ai pas de mémo non plus. Est-ce que vous allez jusqu'à des bouts de papier qui ont pu être déposés sur mon bureau, où il y avait des écritures dont j'aurais pris connaissance; concernant M. Jean-Paul Roger, et évoquant essentiellement des choses dont a parlé le député de D'Arcy McGee? Non, c'est aussi simple que cela. Je n'ai reçu aucune lettre, tel que l'a dit le député de D'Arcy McGee.

Connaissant le député de Marguerite-Bourgeoys, j'aime mieux être clair. On se fait mutuellement confiance, je crois. Aucune lettre évoquée par le député de D'Arcy McGee n'a été portée ni à la connaissance du ministre de la Justice, ni à la connaissance du sous-ministre en titre du ministère de la Justice, ni à la connaissance des membres de mon cabinet. Merci, M. le Président.

Le Président: Motions non annoncées. Enregistrement des noms sur les votes en suspens. Qu'on appelle les députés.

Mise aux voix des motions de censure

et de la motion approuvant la politique

budgétaire du gouvernement

(11 h 43)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous avons quatre votes.

Je vais lire les motions. La première, c'est la motion du député de Vaudreuil-Soulanges qui se lit comme suit: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement d'avoir présenté pour 1982-1983 un budget injuste et à courte vue qui ajoute un fardeau accru aux charges fiscales déjà démesurément lourdes des contribuables, qui frappe avec une brutalité extrême les travailleurs des secteurs public et parapublic et qui n'apporte aucun remède efficace à la crise des finances publiques et de l'économie."

La deuxième, c'est la motion du député de Nelligan: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement d'avoir ajouté encore une fois dans le budget 1982-1983 au fardeau fiscal déjà trop lourd et inéquitable des contribuables tout en continuant son gaspillage inacceptable dans des investissements inutiles."

La troisième, c'est la motion du député de Gatineau: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement d'agir de façon irresponsable en refusant de participer de bonne foi à toutes les conférences fédérales-provinciales, préférant plutôt servir les intérêts du Parti québécois au détriment des intérêts des citoyens québécois."

Enfin, la quatrième motion, c'est la motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement.

J'appelle donc le vote sur la première motion, celle du député de Vaudreuil-Soulanges. Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Scowen, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Bélanger, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Picotte, Pagé, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Dauphin, French, Doyon, Kehoe, Houde, Middlemiss, Hains, Leduc (Saint-Laurent).

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire ajoint: MM. Lévesque (Taillon), Bertrand, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Laurin, Johnson (Anjou), Bérubé, Landry, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, de Bellefeuille, Léger, Fréchette, Marois, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard, Martel, Baril (Arthabaska), Charron, Proulx, de Belleval, Ouellette, Mme Lachapelle, MM. Brassard, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, Desbiens, Fallu, Bordeleau, Leduc (Fabre), Marquis, Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Champagne, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Laplante, Lavigne, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Payne, Beaumier, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Paré,

Lachance, Dupré.

Le Secrétaire: Pour: 33

Contre: 63

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion est rejetée.

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le deuxième vote.

M. Bertrand: Même vote, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même vote.

Troisième vote. Même vote?

M. Bertrand: Attendez pour être bien sûr que ce n'est pas la motion du ministre des Finances. Même vote.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même vote.

Le quatrième vote concerne la motion du ministre des Finances. Inversé?

Une voix: Même vote.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Inversé. La motion proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement est adoptée.

Des voix: Bravo! Bravol Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À l'ordre!

Avis à la Chambre.

M. le leader du gouvernement.

À l'ordre! Juste un instant pour qu'on entende bien les avis pour lundi et les motions pour aujourd'hui.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Avant que tout le monde ne sorte pour aller travailler en commission parlementaire, je voudrais les aviser qu'il y aura un vote vers 12 h 45 sur la motion du député d'Argenteuil, chef de l'Opposition.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les avis.

Avis à la Chambre

M. Bertrand: Avant de donner trois avis pour lundi, je voudrais d'abord indiquer à tous les parlementaires des deux côtés de la Chambre qu'il n'est pas impossible que nous ayons à revenir durant le week-end si jamais la situation, en ce qui a trait au dossier des négociations en cours et de la perturbation que cela occasionne dans le milieu de la santé, s'aggravait. Donc, il n'est pas impossible que nous ayons à nous réunir ou demain, samedi, M. le Président, ou même dimanche si les circonstances le commandaient. Pour l'instant, nous ne pouvons pas indiquer que ce sera effectivement ce qui se passera. Nous souhaitons d'ailleurs que la négociation puisse mener à des résultats fructueux, mais si nous avons à le faire, je veux prévenir nos collègues qu'ils pourraient être invités à revenir demain ou dimanche. (11 h 50)

Ceci dit, lundi matin, de 10 heures à 12 h 30, trois commissions parlementaires seraient appelées à siéger, dont celle des finances, au salon rouge, pour poursuivre l'étude du projet de loi no 70 article par article. Cette commission n'aurait pas à se réunir lundi matin si ses travaux étaient terminés ce soir. Donc, la réunion est conditionnelle à la fin des travaux de cette commission ce soir. Deuxièmement, la commission des institutions financières se réunira à la salle 91-A ou au salon rouge, si la commission des finances a fini ses travaux, pour étudier le projet de loi no 56, Loi sur les coopératives, article par article. À la salle 81-A, la commission des communications se réunira pour étudier le projet de loi no 65, avec espoir que ce soit suite et fin, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les motions, M. le leader.

Travaux des commissions

M. Bertrand: Quant aux motions, aujourd'hui le vendredi 18 juin, de 11 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, au salon rouge, la commission des finances et des comptes publics poursuivra l'étude du projet de loi no 70, article par article. De 11 heures à 13 heures à la salle 81-A, la commission de l'habitation et de la protection du consommateur étudiera le projet de loi no 82, article par article. Cet après-midi, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle 81-A, successivement, d'abord, la commission de la justice pour étudier le projet de loi no 190, article par article, et le projet de loi no 67, article par article. Par la suite, une autre commission, celle de la présidence du conseil et de la constitution pour étudier le projet de loi no 66, article par article.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ces motions seront-elles adoptées? Adopté. En vertu de l'article 34, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Recours à l'article 34

M. Lalonde: Je présume - je n'ai pas entendu, il y avait un peu de brouhaha - que la Chambre se réunit à 14 heures, lundi. Le ministre de l'Éducation a annoncé qu'il rendrait public son livre blanc sur la réforme scolaire, est-ce qu'on peut être assuré qu'il sera rendu public ici, à l'Assemblée nationale, avant la conférence de presse ou la réception, un peu plus tard en après-midi?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Le document en question sera déposé à l'Assemblée nationale, à 14 heures, lundi, lorsque nous reprendrons nos travaux, ici même, à l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les affaires du jour, M. le leader.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 1 du feuilleton en indiquant l'entente à laquelle nous en sommes venus.

Motion de censure blâmant le ministre

des Finances d'avoir conduit le Québec

à l'impasse financière

Le Vice-Président (M. Jolivet): L'entente a pour but de donner dix minutes de réplique au chef de l'Opposition sur la motion et le partage équitable, égal, de part et d'autre, 25-25.

Donc, la motion du chef de l'Opposition se lit comme suit: Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement, et plus particulièrement le ministre des Finances qui, après avoir conduit le Québec à l'impasse financière, se révèle maintenant incapable de rétablir l'équilibre des finances publiques et la santé de l'économie.

M. le chef de l'Opposition.

M. Tremblay: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse...

M. Tremblay: Pourriez-vous demander...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, pour que je vous entende bien. M. le député de Chambly.

M. Tremblay: M. le Président, vous avez accordé la parole au chef de l'Opposition et il y a cinq ou six personnes debout. Pourriez-vous leur demander de s'asseoir?

Des voix: Oh!

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaîti Que ceux qui doivent quitter le fasse pour qu'on puisse bien entendre le discours du chef de l'Opposition.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ... je n'aime pas l'insinuation que vient de faire le député. Il y a beaucoup de députés qui doivent aller en commission parlementaire...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, juste un instant. Je veux que tout le monde entende bien votre question, car il y a du brouhaha. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je vous remercie bien, M. le Président. Je n'accepte pas les insinuations du député qui vient de se lever selon lesquelles le chef de l'Opposition va commencer son intervention et qu'il y a cinq ou six députés debout. Comme vous le savez, M. le Président, il y a deux commissions parlementaires qui vont siéger et les députés doivent quitter le salon bleu pour aller en commission parlementaire. C'est ce que nous faisions et nous n'acceptons pas cette insinuation du député de je ne sais quel comté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Chambly, à moins que ce ne soit une question de privilège autre, je n'accepterai pas d'autres interventions sur le sujet. Une entente est intervenue, compte tenu du vote à 12 h 45, pour permettre au chef de l'Opposition de prendre la parole. Comme souvent, la présidence demande que les gens puissent quitter le plus rapidement possible le salon bleu pour aller en commission parlementaire afin de permettre au chef de l'Opposition de faire son discours dès maintenant. M. le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, la session approche de la fin. Nous avons eu l'occasion depuis la fin de février d'observer les mouvements du gouvernement, d'attendre ses déclarations d'intention et surtout de mesurer son aptitude à agir sur les problèmes très graves qui se posent dans le secteur de l'économie et des finances publiques. Après avoir pris connaissance de tous les projets du gouvernement, nous sommes obligés de conclure en cette fin de session que l'impasse que nous entrevoyions dès le début de nos travaux a connu des solutions dont le moins qu'on puisse dire, est qu'elles sont infiniment discutables. Il m'apparaft tout à fait justifié qu'au point de clore nos travaux,

nous concluions ensemble qu'il y a lieu de blâmer sévèrement le gouvernement, et plus particulièrement le ministre des Finances, qui, après avoir conduit le Québec à l'impasse financière, se révèle maintenant incapable de rétablir l'équilibre des finances publiques et la santé de l'économie.

J'entendais tout à l'heure les députés du côté ministériel applaudir chaleureusement le vote qu'ils venaient de donner au sujet du budget présenté le 26 mai dernier par le ministre des Finances. Ce sont des applaudissements qui m'ont étonné, qui sonnaient étrangement faux et dont nous allons voir ensemble la signification véritable. C'est un fait maintenant admis de tout le monde, les Québécois sont redevenus, sous le gouvernement actuel, les citoyens les plus lourdement taxés de tout le Canada. Il a pu y avoir des doutes pendant une couple d'années. Le gouvernement avait pris des mesures qui semblaient devoir réduire l'écart qui nous sépare de la moyenne canadienne en ces matières. Mais, depuis que le ministre des Finances a rendu publics les résultats des études qu'il a fait faire ces derniers mois sur l'écart fiscal entre l'Ontario et le Québec, en particulier, il n'y a plus de doute possible.

Si on prend seulement le fardeau fiscal des contribuables des particuliers, l'écart est de 14%, de l'aveu même du ministre des Finances, et si l'on tient compte de la ponction de plus en plus importante que le ministre des Finances fait sur les organismes d'État qui produisent des revenus, l'écart entre les deux provinces est de 18%. Comme les redevances qu'Hydro-Québec, Loto-Québec ou la Société des alcools du Québec doivent payer au gouvernement proviennent, tout compte fait, de revenus accrus qui émanent des goussets des contribuables, je pense que c'est du même au pareil, et si nous considérons que l'écart est de 18% entre l'Ontario et le Québec, nous ne sommes pas dans l'erreur, nous disons la stricte vérité, comme l'a d'ailleurs reconnu lui-même le ministre des Finances dans les études qu'il a rendues publiques en annexe à son budget du 26 mai.

Deuxième caractéristique des finances publiques du Québec sous la gestion du Parti québécois, notre dette collective a monté de manière spectaculaire, extrêmement inquiétante. Elle était à 5 000 000 000 $ le 31 mars 1977, elle sera à 18 000 000 000 $ le 31 mars 1983, c'est-à-dire trois fois et demie plus que ce qu'elle était, M. le Président. Ce qui veut dire qu'on a multiplié évidemment les emprunts dans toutes les directions.

En troisième lieu, nous assistons depuis un an à des coupures dans la qualité des services qui deviennent de plus en plus inquiétantes surtout quand ces coupures interviennent dans le domaine de la santé, de l'éducation et des services sociaux. Malgré l'impact conjugué de ces trois facteurs, le gouvernement se trouvait aux prises, il y a deux mois, avec une situation dont on n'a jamais vu l'équivalent. Après toutes les hausses de taxes que nous avons eues cette année, qui s'établissent à un minimum de 1 200 000 000 $, en tenant compte des taxes qui nous avaient été annoncées par anticipation dans le budget supplémentaire de novembre dernier, en tenant compte d'un déficit de 3 000 000 000 $ qui nous a été imposé pour la troisième année consécutive, le gouvernement était en présence d'un trou d'au moins 700 000 000 $, un autre trou de 700 000 000 $ qu'il ne pouvait plus aller chercher sous forme d'impôts, nous dit-il, parce qu'il reconnaît lui-même que les Québécois sont taxés au maximum de leur capacité. Il ne pouvait plus aller le chercher sous forme d'emprunt, parce que, selon toute apparence - nous n'avons jamais réussi à en obtenir l'aveu clair et explicite, mais cela se dégage de tout ce que nous avons vécu et discuté ensemble depuis quelques semaines -les prêteurs avaient dit au gouvernement: C'est assez, la marge maximale est atteinte; trouvez-vous du financement par d'autres moyens. (12 heures)

On se trouve devant une situation où le gouvernement doit décider d'aller chercher les sommes dont il a besoin - c'est 700 000 000 $ - dans la poche de ses employés syndiqués des secteurs public et parapublic, à même des sommes qu'il leur a déjà promises, qu'il leur a déjà données sous sa signature, sous la forme de l'un des engagements les plus solennels qu'on puisse prendre, c'est-à-dire l'engagement qu'un employeur appose au bas d'une convention collective. On ira chercher 700 000 000 $ de ce côté-là. Malgré tout cela, aucune solution à long terme au problème des finances publiques du Québec.

Tout ce que nous savons, avec le budget qui nous a été présenté et le projet de loi 70, c'est que le gouvernement ira chercher de la liquidité jusqu'au 31 mars prochain. Il va sauver la face d'ici la fin du présent exercice et, à compter du 1er avril, tous les problèmes recommencent. J'avais moi-même compris, M. le Président - et je me trompais là-dessus - qu'à compter du 1er avril les salaires des employés des secteurs public et parapublic seraient fixés d'autorité pour un an. On nous a fait comprendre que ce n'est pas le cas. Par conséquent, tout recommence à compter du 1er avril. Les négociations vont reprendre. Cela aurait été mieux qu'elles se déroulent dès ce semestre. On remet le problème, encore une fois, à six mois. On n'a pas le moindre indice de ce que pourra être la politique salariale du gouvernement à ce moment-là. On ne sait pas sur quelle base on va être appelé à

orienter les finances publiques du Québec à compter de ce moment-là.

Par conséquent, du point de vue des finances publiques, nous sommes devant une situation qu'il n'est pas exagéré de qualifier de désastreuse. Je pense que nous avons eu seulement un exemple d'une situation semblable. Il s'est produit en 1939. Le gouvernement s'était lancé dans l'emprunt, s'était lancé dans les travaux publics pour faire face à une crise du chômage encore plus grave que celle d'aujourd'hui et, au milieu de 1939, il s'est trouvé aux prises avec un problème de liquidités. Les prêteurs ne voulaient plus lui avancer de sommes d'argent et, comme il ne voulait pas mettre la faute sur les autres, contrairement au gouvernement actuel, il s'est présenté devant l'électorat et s'est fait battre. On n'a pas connu d'autres exemples d'un gouvernement qui se serait mis dans un carcan financier aussi serré, aussi criant et aussi grave que le gouvernement actuel.

Au plan de l'économie - je vais être très bref parce que le temps qu'il nous reste est court - nous avons pu nourrir l'impression pendant quelques années que le gouvernement réussissait à maintenir tant bien que mal l'évolution du Québec à un niveau comparable à celui des autres provinces. On pourrait discuter longtemps des quatre années qui ont pu s'écouler de 1976 à 1980, M. le Président, mais le temps ne me le permet pas. Ce qui est clair et que personne ne peut nier, c'est que, dès qu'on analyse les données de cette période, on constate que, pour tous les indices vraiment importants en matière de développement économique, le Québec prenait de l'arrière. Cela ne paraissait pas toujours au grand jour, mais le Québec prenait de l'arrière. Regardez le critère de la création d'emplois, surtout d'emplois à temps plein. Regardez l'évolution des investissements, la courbe des investissements sous l'angle de la place comparative du Québec dans l'ensemble canadien. Examinez les mouvements de population qui sont extrêmement importants, combien de gens quittent le Québec chaque année, combien de gens viennent vivre au Québec. Nous avons enregistré pendant ces années les déficits qui ont été les plus importants de toute l'histoire politique du Québec, M. le Président.

Je pense qu'aujourd'hui, depuis que la dépression économique qui remonte à l'été dernier a multiplié ses effets dans les sociétés industrialisées, nous avons pu constater que le Québec était dans une situation extrêmement vulnérable. Nous avons encaissé plus durement que les autres les chocs de cette dépression, parce que nous étions devenus plus vulnérables, plus fragiles et plus exposés. On le constate par les pertes d'emplois que nous avons eues. Le gouvernement lui-même l'admet. D'ailleurs, nous avons perdu au bas mot 150 000 emplois depuis un an, surtout dans le secteur manufacturier qui est tellement important pour le développement de notre richesse collective. Les faillites au Québec ont pris une ampleur sans précédent. Elle ont augmenté beaucoup plus vite que partout ailleurs. La construction de l'habitation a chuté de manière lamentable, mais ce n'est que sur le tard que le gouvernement a conçu un programme qui n'est d'ailleurs pas encore en application.

J'entendais les porte-parole du gouvernement nous parler de virage technologique. Ils nous disent: Cela est très important. Il faut prendre le virage technologique. Depuis six ans, avec certains aspects de la loi 101, en particulier, qui sont discriminatoires à leur face même, avec le refus obstiné du gouvernement de mettre en application au Québec la clause Canada en matière d'accès à l'école anglaise, nous avons perdu des centaines de chercheurs, des centaines de chances de développer nos laboratoires de recherche, nos industries à la fine pointe de la technologie. Je les entends, de l'autre côté, qui nous disent: II faut prendre le virage technologique, c'est très important. Nous avons raté, de ce point de vue, des chances très importantes au cours des six dernières années. Tant que la politique du gouvernement ne sera pas modifiée, nous raterons encore de nombreuses autres chances.

Inutile de vous dire que le climat politique incertain, chargé d'hésitations que crée la politique ambiguë du gouvernement est très nuisible pour le développement des entreprises. Le gouvernement veut nous faire croire que, d'un côté, il joue loyalement le jeu du fédéralisme, tandis que, de l'autre côté, il cherche toutes les occasions possibles de promouvoir son option souverainiste, de promouvoir la séparation politique du Québec. On ne peut pas, c'est impossible en logique stricte, pratiquer en même temps, de manière ouverte et loyale, le jeu du fédéralisme et rechercher toutes les occasions de promouvoir la souveraineté politique du Québec. Pratiquer le jeu du fédéralisme, cela veut dire s'engager loyalement, s'engager à fond, s'engager de manière durable, accepter de prendre certains paris qui vont avec le jeu du fédéralisme et qui ne sont pas du tout de la même nature que les paris qu'on prend quand on veut aller dans la voie de l'indépendance.

Je ne voudrais laisser percer aucun soupçon de mépris ou de dédain à l'endroit de l'option politique que représente le Parti québécois. Je respecte cette option. Je ne l'accepte pas personnellement. Je préfère de beaucoup l'option fédérale canadienne. Ce que je dis au gouvernement, c'est qu'à jouer sur les deux tableaux, comme il le fait

maintenant depuis six ans, il nuit terriblement au développement économique du Québec. On lisait, plus tôt dans cette Chambre, ce matin, cette lettre d'un employeur qui avait conçu un projet d'implantation industrielle dans la ville de Granby. C'est bien vrai, parce que j'ai la lettre moi-même, et je vous le dis: Pour un qui l'écrit, il y en a dix qui le font sans l'écrire. Voici ce qu'il dit: "C'est avec regret que nous avons décidé de retarder notre projet à Granby en raison de la présente conjoncture économique et, en grande partie, en raison du climat sociopolitique au Québec. Nous avons l'impression que le présent gouvernement n'est pas vraiment intéressé dans le développement industriel et donne préférence à ses batailles avec Ottawa. Le climat politique est tellement décourageant que même des entrepreneurs enthousiastes comme moi n'ont pas confiance pour investir présentement."

Des propos comme ceux-là, nous en avons entendu très souvent ces dernières années, excepté que les responsables d'entreprises, en hommes pratiques qu'ils sont, ne vont pas les crier sur la place publique; ils prennent leurs décisions, ils s'en vont tranquillement et ils regarderont si jamais les conditions sont plus propices. Le climat fiscal qu'a créé le gouvernement est évidemment très peu propice au développement économique. En particulier, en ce qui regarde les cadres d'entreprises que nous aurions besoin d'attirer chez nous, ils ne sont pas intéressés à venir quand on leur dit: Vous paierez 10%, 15% ou 20% de plus d'impôt sur le revenu que si vous étiez en Ontario, en Alberta ou en Colombie britannique. Cela fait des années maintenant que nous le disons au gouvernement. Il n'y a pas eu de changement là-dessus.

Il y a eu des mesures très particulières, de portée très limitée, mais qui n'attaquaient pas vraiment la racine du problème. Le gouvernement, pendant longtemps, s'est vanté: Nous autres, on va les taxer, les gros, comptez sur nous autres pour cela, on protège les petits. On s'aperçoit aujourd'hui que la protection des petits, il n'en reste pas beaucoup; et les gros, il y en a un bon nombre qui sont partis et, dans bien des cas, c'étaient des producteurs d'emplois, c'étaient des créateurs d'activités économiques, c'étaient des gens possédant une expertise, tantôt technologique ou scientifique, tantôt professionnelle, tantôt "managériale", dont nous avons absolument besoin pour développer notre économie. (12 h 10)

De ce point de vue, je pense que la performance générale du gouvernement justifie une motion de blâme comme celle que nous avons soumise à l'attention de cette Assemblée. Le gouvernement s'était vanté d'améliorer le climat social qui est très important pour le développement de la vie économique. C'est même, à certains points de vue, un facteur aussi important, sinon plus, que le facteur constitutionnel et politique au sens large du terme. On se disait qu'avec les bonnes relations que le gouvernement prétendait avoir avec le mouvement syndical, au moins de ce côté, nous aurions des améliorations sensibles et que ce serait autant de pris.

Nous avons constaté, lors de la dernière ronde de négociations, que les jours perdus pour des arrêts de travail ont été plus nombreux qu'ils ne l'avaient été au cours des deux rondes de négociations précédentes dans les secteurs de l'éducation, de la santé et des affaires sociales. Par conséquent, il n'y a aucune amélioration de ce côté-là. Le gouvernement s'était engagé à soumettre un projet de loi qui verrait à assurer de manière efficace la primauté du droit des malades aux services dont ils ont besoin sur l'exercice concret du droit de grève. Nous nous sommes retrouvés avec un projet mi-figue mi-raisin dont tous les observateurs sérieux nous avertissent qu'il n'apporte pas de solution véritable au problème de la protection prioritaire des malades et des personnes qui ont besoin de soins en matière de santé.

En matière de transport en commun, nous étions convoqués d'urgence en janvier dernier pour mettre un terme à une grève qui avait surgi à la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal. Nous avons appuyé la loi adoptée à ce moment-là, nous l'avons fait adopter en une journée. Nous nous retrouvons six mois plus tard, à la fin de juin, et il n'y a absolument rien de réglé; le problème est exactement au même point qu'en janvier dernier. Depuis déjà plusieurs jours, les usagers du métro et de l'autobus à Montréal sont très sérieusement incommodés par des arrêts de travail partiels et on nous annonce pour la semaine prochaine une grève générale, une interruption générale du transport en commun à Montréal.

Qu'est-ce que le gouvernement fait? Nous lui avons demandé, plus tôt cette semaine, s'il voudrait au moins désigner un médiateur. Apparemment, le moment n'est pas venu encore de désigner un médiateur. Tout le monde souffre des inconvénients de ce conflit, mais le gouvernement est encore à observer. Il avait nommé lui-même un enquêteur qui lui a soumis des recommandations. Ces recommandations sont restées lettre morte et nous sommes plongés dans le conflit. Peut-être à une session ultérieure entendrons-nous parler de nouveau de ces recommandations du commissaire Jutras.

Il y a le problème des médecins qui se pose. On est bien bon, de l'autre côté, on dit: Ah! on va vous arriver avec une loi

spéciale, la semaine prochaine, si ce conflit continue. C'est très bien, mais c'est une manière un peu facile de se laver les mains. Les médecins spécialistes et les médecins omnipraticiens travaillent tous sous l'empire de conventions collectives expirées depuis plus d'un an, depuis le mois de mai 1981. Depuis ce temps, que s'est-il produit? À peu près pas de négociations véritables. Nous sommes rendus 13 mois plus tard, les médecins omnipraticiens sont en grève générale, les médecins spécialistes menacent de faire la grève générale à compter de mardi prochain. Qu'est-ce qu'on entend du côté du gouvernement? Peut-être que s'ils continuent on vous arrivera avec une autre loi spéciale. Est-ce que c'est une manière d'instaurer la paix sociale?

Les médecins les plus qualifiés sont l'objet de demandes insistantes de la part de sources extérieures au Québec qui voudraient requérir leurs services. Un grand nombre d'entre eux sont déjà partis depuis un an ou deux et d'autres veulent partir encore. Moi-même, j'entrais dans une pharmacie mercredi soir, cette semaine, à Montréal. Quand je suis arrivé, le pharmacien m'a dit: Je voudrais que vous parliez à M. Untel qui est en train de me dire qu'il est chef d'un service très important dans un grand hôpital de Montréal. Ce médecin m'a dit: M. Ryan, je suis très heureux de vous parler. Je suis l'objet de demandes insistantes d'hôpitaux américains qui voudraient que j'aille travailler là-bas, mais je suis natif de Québec et je voudrais rester ici. Or, c'est intolérable le régime que nous impose le gouvernement avec toutes ces contraintes, avec toutes ces incertitudes qui planent sur l'exercice de notre profession. J'ai essayé de l'encourager à rester jusqu'à la prochaine élection, mais c'est le maximum qu'il pourra attendre.

Vous riez de l'autre côté, mais nous sommes en train d'assister à une détérioration de la qualité de notre médecine. Le ministre d'État au Développement social, qui fait semblant de se moquer de ces propos, est un des grands responsables du glissement qui s'est produit.

Il y avait les secteurs public et parapublic. Le gouvernement se moque encore. Ils applaudissaient tantôt avec allégresse le budget du ministre des Finances, mais ils auraient dû être plus nombreux à la commission des finances et des comptes publics, vendredi dernier, quand nous avons discuté avec Jes représentants de centrales syndicales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le chef de l'Opposition. J'ai une question de privilège de la part du ministre d'État au Développement social.

M. Lazure: Question de privilège, M. le Président. Puisque le chef de l'Opposition m'a mis en cause il y a un instant, je voudrais rétablir les faits. Premièrement, je ne me suis pas moqué de l'essentiel des propos du chef de l'Opposition. J'ai simplement laissé entendre au chef de l'Opposition que, lorsqu'il invoque les arguments qu'il a invoqués tantôt pour prétendre que la politique en matière de santé nuit à la pratique de la médecine, il caricature une situation.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, je pense que la première partie était correcte en termes de rectification des faits, mais la deuxième était une argumentation. Vous n'avez pas, pour le moment, le droit de parole à ce sujet. M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Merci, M. le Président. Alors, j'étais en train de rappeler que, dans les secteurs public et parapublic, le gouvernement vient de faire approuver par cette Chambre, c'est-à-dire par la majorité péquiste et non pas par les députés de l'Opposition, un budget qui comporte l'une des entorses les plus graves qu'on ait jamais vues dans toute l'histoire du Québec aux principes les plus élémentaires, les relations qui doivent exister entre employeurs et employés. Ce principe qu'on a fait adopter à l'occasion du budget et qu'on fera adopter à l'occasion du projet de loi no 70 est une semence d'incertitude au plan social, une semence de frustration profonde. Vous l'avez vu depuis une semaine, on ne cesse d'être témoin, en cette Chambre, du dépôt de pétitions en provenance de toutes les parties du Québec. Les députés ministériels sont tellement gênés de ces pétitions qu'ils les déposent en essayant d'éviter d'évoquer leur contenu. Le contenu est bien simple. Les fonctionnaires syndiqués nous disent, en toute franchise, de manière claire et facilement compréhensible, qu'ils ne peuvent pas accepter ce genre de comportement de la part du gouvernement.

Nous avions commencé à espérer qu'un nouveau consensus social s'établirait au Québec. Il y avait eu des années très difficiles, surtout dans tout le champ des relations de travail dans le secteur public. Mais, franchement, avec les mesures que nous avons vues depuis quelque temps, les exemples qui se multiplient de conflits non résolus, je pense que le gouvernement fait la preuve de son inaptitude à faire face aux défis qui se présentent à lui.

Le Parti québécois s'était fait élire, M. le Président, une première fois sous le signe de la fierté nationale, de la fierté collective, de la prise en charge par les Québécois de leur destin en impliquant, évidemment, que cela irait beaucoup mieux dans la mesure même où nous nous prendrions totalement en

charge nous-mêmes. Le peuple du Québec avait fait confiance au Parti québécois. En 1981, il s'est fait réélire en disant: Faut garder le Québec fort. Or, aujourd'hui, qu'est-ce que nous observons? C'est un Québec terriblement affaibli au plan politique, au plan économique, et maintenant au plan social, que nous observons dans des secteurs de plus en plus nombreux de l'activité collective.

La première condition de l'indépendance que recherche le Parti québécois, c'est celle qui consiste à être et à se sentir libre, d'abord au plan économique et financier. On le voit dans n'importe quel domaine, ceux qui se pavanent en invoquant le thème de la liberté et de l'indépendance, mais qui n'ont pas les bases sur lesquelles asseoir cette liberté, ils sont rapidement démasqués. On se dit: Ils ne sont pas sérieux; ils parlent de choses et ils ne sont pas capables de les vivre. Je pense que c'est le cas pathétique du gouvernement actuel. Il nous parle d'indépendance. Il poursuit le rêve légitime, d'un certain point de vue, de l'indépendance. Je ne veux pas, encore une fois, projeter la moindre ombre de mépris sur ce projet qui est noble en soi et généreux, mais, en même temps qu'il parle d'indépendance, il s'est lui-même placé de plus en plus et il nous a placés nous-mêmes, tous les citoyens du Québec, dans une situation de dépendance plus prononcée et plus grave que jamais, dépendance envers les créanciers et les prêteurs, dépendance envers les subventions en provenance du gouvernement fédéral, dépendance à l'endroit d'une conjoncture qui a exercé des ravages d'autant plus forts que nous étions mal préparés. Le vrai thème dont devrait parler le gouvernement, c'est celui qui devrait nous inviter à sortir de la dépendance dans laquelle il nous a plongés. La façon la plus sûre de sortir de cette dépendance, ce n'est pas de continuer à poursuivre le projet politique du gouvernement, mais de blâmer sévèrement ce gouvernement et d'inviter les électeurs à nous en débarrasser dans les meilleurs délais. (12 h 20)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Finances.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, j'aurai tout à l'heure à utiliser un graphique qui me semble assez important pour comprendre la situation actuelle. J'ai donc pensé le déposer en deux exemplaires et à en demander la distribution aux députés. Je le dépose.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Document déposé.

M. Parizeau: J'entendais le chef de l'Opposition faire allusion tout à l'heure, à des thèmes que lui, comme d'autres dans son parti, ressassent copieusement depuis déjà fort longtemps d'ailleurs, qui comportent souvent des inexactitudes et un diagnostic qui n'est pas exact sur la situation. J'ai eu l'occasion, comme certains de mes collègues, de relever ça à plusieurs reprises.

Quand j'entends, par exemple, le chef de l'Opposition nous dire que nous avons eu une mauvaise performance économique pendant toutes les années où nous étions au pouvoir, je dois dire que les chiffres sont là et qu'on ne peut pas les nier. De 1977 à 1980, la croissance réelle de la production nationale au Québec a été au total de 9%. Quelle a-t-elle été en Ontario? 6%. Ils sont vrais ou pas vrais, ces chiffres-là? S'ils venaient encore de nous, si nous les avions fabriqués, on pourrait toujours nous dire: Vous les avez tripotés. Mais, enfin, ils viennent du Conference Board qui n'est pas exactement péquiste comme organisme.

On revient encore sur la question de l'ampleur du déficit ou des besoins financiers nets au Québec. Effectivement, pour la troisième année, nous aurons un déficit de l'ordre d'environ 3 000 000 000 $. Dans l'intervalle, les prix ont augmenté de 25%. C'est donc que le poids relatif de ce déficit a passablement baissé. Cette année, nos besoins financiers nets seront un peu inférieurs à ce qu'ils étaient il y a déjà deux ans. Donc, si on tient compte, là encore, de l'augmentation des prix, il y a eu une amélioration correcte. Peut-être pas autant qu'on voudrait dans certains milieux ou dans l'Opposition, mais enfin, les circonstances économiques actuelles, comme je le dirai tout à l'heure, doivent nous empêcher d'amener une réduction trop forte dans ce déficit. On irait simplement dans le sens de la récession.

Quand, dans quelques jours j'imagine, le chef de l'Opposition entendra parler de la révision du déficit du gouvernement fédéral, il verra à quel point certaines de ses observations à l'égard du Québec apparaîtront presque risibles. À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral s'en va vers un déficit pour cette année non pas de 10 600 000 000 $ tel qu'annoncé encore en novembre dernier, mais vers un déficit variant entre 16 000 000 000 $ et 20 000 000 000 $, probablement aux alentours de 18 000 000 000 $. Qu'on imagine le chahut s'il avait fallu, selon l'expression consacrée de l'Opposition, que le ministre des Finances du Québec se trompe de 80% sur son déficit en six mois. Ces thèmes-là, nous les avons entendus souvent, nous avons eu l'occasion de les dénoncer souvent aussi.

Je souhaiterais davantage essayer aujourd'hui de montrer que le chef de l'Opposition adresse sa motion de blâme au mauvais endroit. Je pense que cette

démonstration m'amènera à mettre l'accent sur la situation économique très sérieuse, très très difficile par laquelle nous passons tous. À ce sujet, je voudrais commenter ce graphique pendant un certain temps. Voici en quoi il consiste. Cela indique la création d'emplois au cours de l'année 1981 et les premiers mois de 1982, par rapport à l'année précédente. Tant qu'on est au-dessus de la ligne de zéro ici, c'est que des emplois se créent. Comme on le voit, dans toute la première partie de 1981, il se crée des emplois au Québec et il s'en crée dans les autres provinces. La ligne rouge, c'est toutes les autres provinces du Canada; la ligne bleue, c'est le Québec tout seul.

Bien sûr, jusqu'en septembre dernier, il se crée des emplois. La situation économique n'est peut-être pas brillante; il est évident qu'il y a eu des années où on en a créé pas mal plus que cela mais, enfin, il s'en crée. Ce sont aussi les mois où le gouvernement canadien décide, à partir du mois de mai, d'avoir des taux d'intérêt beaucoup plus élevés qu'aux États-Unis, nettement plus élevés. À cause de ces taux déjà très élevés aux États-Unis, plus l'espèce de surcharge qu'on ajoute au Canada pour pouvoir maintenir le dollar canadien au-dessus de 0,80 $, l'économie va casser. Elle casse en septembre. En septembre, pour la première fois au Québec, on ne crée aucun emploi. On voit, dans les mois suivants, ce qui se produit, ce sont des pertes d'emplois très rapides. On tombe en bas de la ligne noire; donc, on perd énormément d'emplois, on en perd 150 000.

On voit, cependant, que dans les autres provinces canadiennes, même passé le mois de septembre, les emplois continuent de se créer. Ils se créent plus lentement, mais il s'en crée toujours. Il est évident, dans ces conditions, qu'il faut constater que le Québec a été touché plus durement et plus vite que les autres provinces. Il y a à cela un certain nombre d'explications. Bien sûr, le râle particulièrement important joué par les petites et les moyennes entreprises au Québec fait qu'elles sont infiniment plus sensibles à des restrictions monétaires que les grandes entreprises et, en particulier, les multinationales qui fonctionnent dans plusieurs pays.

D'autre part, beaucoup de petites et moyennes entreprises québécoises avaient beaucoup augmenté leurs affaires depuis quelques années et, en particulier, avaient pris sur les marchés d'exportation une place tout à fait nouvelle, c'est-à-dire que, pour ce qui a trait à leur ligne de crédit, en particulier, elles avaient tendu la corde jusqu'au bout. Le jour où les restrictions monétaires deviennent très sérieuses, évidemment, elles cassent, elles libèrent de la main-d'oeuvre pour liquider leurs inventaires et rembourser la banque. Il est clair que dans ces conditions la récession commence beaucoup plus vite au Québec et va beaucoup plus creux rapidement.

Nous sommes pris, comme gouvernement, dans la situation où l'inflation et les taux d'intérêt élevés ont débalancé, notre budget. D'autre part, nous savons déjà que le gouvernement fédéral, pour l'année 1982-1983, cherche à nous enlever au-delà de 700 000 000 $. Il faut donc, si on veut pouvoir réagir à cette récession, comme gouvernement, avoir un certain nombre d'instruments. Le principal instrument est un budget qui n'est pas trop débalancé d'où, en novembre, les augmentations de taxes importantes imposées par le budget supplémentaire. Seulement, des taxes de cet ordre ne sont pas une politique économique de relèvement, cela va de soi. Il faut donc essayer de préparer un plan de relance, un programme non pas d'expansion, on n'en demande pas tant mais, au moins, qui évite à l'emploi de tomber trop bas, qui permet au moins de maintenir un certain nombre d'emplois dans la société. On le prépare et d'autant plus activement que, justement, la situation au Québec est sérieuse.

On se présente à l'endroit où, normalement, il faut se présenter pour aboutir dans ces domaines, lorsque tout le monde essaie de comprendre que la situation est sérieuse, c'est-à-dire à cette conférence des premiers ministres sur l'économie tenue à Ottawa le 2 février, au début de ce mois. À peu près le même jour, une dizaine de députés fédéraux qui, après tout, sont élus au Québec, dans l'Est de Montréal, se rendant très bien compte de ce qui se passe au Québec par opposition à ce qui se passe au Canada, écrivent une lettre à M. Trudeau lui disant: II faut préparer de toute urgence un programme de relèvement ou de relance de l'économie et mettre l'accent essentiellement sur deux choses - il faut se souvenir de cela - le relèvement de la construction domiciliaire et les emplois pour les jeunes. (12 h 30)

Ces dix députés du Québec se présentent à la Chambre des communes avec des observations de cet ordre et une lettre qu'ils ont envoyée au premier ministre du Canada qui lutte contre l'inflation à tour de bras, pendant ce temps, dit-il. En fait, il essaie de maintenir le dollar au-dessus de 0,80 $. Ce n'est pas dramatique dans les autres provinces. Il y a encore de la création d'emplois dans les autres provinces. C'est chez nous que c'est sérieux. Qu'est-ce qui va arriver à ces dix députés? On leur dira que ce n'est vraiment pas sérieux, que ce n'est pas distingué de se moucher dans les rideaux et qu'ils devraient, s'il vous plaît, se tenir tranquilles. Ils annoncent donc qu'ils ont le ferme propos et que dorénavant ils resteront tranquilles.

En février, à cette conférence des premiers ministres, le gouvernement fédéral nous annonce, à nous comme aux autres provinces, qu'il n'est pas question de changer ses priorités et, quant au programme de relance présenté par le gouvernement du Québec dans cette conférence, il nous envoie paître. C'est très gênant pour nous. Nous n'avons après tout, comme gouvernement, que la moitié des ressources de nos concitoyens. On n'en a pas plus. C'est le fédéral qui a le reste. Si le fédéral est capable de comprendre ce qui se passe au Québec, il doit normalement être capable de donner un coup de main. À la conférence des premiers ministres, il refuse de donner un coup de main. On va lui demander, en tout cas, s'il n'y aurait pas moyen d'avoir une rencontre avec un certain nombre de ministres fédéraux pour voir comment on pourrait - si vous me passez l'expression, M. le Président - "pooler" nos ressources, de façon à être capable de sortir l'économie québécoise du trou où elle est tombée.

Cela donnera lieu, dans certains journaux, aux commentaires suivants, et ce n'est pas mauvais de s'en souvenir. Le 18 février, Normand Girard, dans le Journal de Québec, titre son article: "Le Québec va s'humilier." Le même jour, dans la Presse, Gilles Gauthier titre: "Le Québec est prêt à s'humilier devant Ottawa." Et c'est vrai. La situation est tellement sérieuse au Québec qu'on est prêt à avoir une rencontre avec trois ministres fédéraux pour voir comment on pourrait mettre nos ressources ensemble. Après tout, nous sommes tous les représentants de ces Québécois qui en arrachent. Il y aura donc une réunion le 1er mars. Vous voyez où nous sommes? Ici. On commence à perdre un peu d'emplois dans les autres provinces, mais, au Québec, c'est devenu épidémique. Il n'est pas certain, dans les autres provinces, que la situation va se détériorer. C'est le moment où on commence à dire que, peut-être, il y a un relèvement qui s'en vient.

Donc, il n'est pas certain que ce soit si dramatique dans les autres provinces, même si ce l'est au Québec. La réunion avec M. Lalonde, M. Lapointe et M. Gray, le 1er mars, va donner le résultat suivant: Allez vous faire cuire un oeuf dur. Le gouvernement d'Ottawa refuse absolument toute espèce de collaboration. Alors, après, dans les mois qui suivent, regardez les pertes d'emplois dans les autres provinces. Là, ça tombe, l'emploi dans les autres provinces. Là, elles en perdent. En fait, au mois de mai, elles en ont maintenant perdu plus que nous. Je comprends que c'est pas mal plus gros. En pourcentage, cela ne veut pas dire la même chose. Mais là, enfin, dans les autres provinces, la situation qui était apparue au Québec apparaît et soudainement le dialogue change à Ottawa. Là, tout à coup, on se rend compte que la récession dans les autres provinces est plus forte que l'on pensait. On commence à parler de virage dans la politique fédérale. Depuis quelques semaines, on commence à dire qu'il faudrait peut-être faire quelque chose pour lutter contre le chômage.

Nous, bien sûr, depuis le 1er mars, qu'est-ce qu'on a fait? On savait que le fédéral - les chiffres étaient à peu près définitifs - allait nous enlever un peu plus de 500 000 000 $ pour 1982-1983. En dépit de cela, on a essayé de monter un budget et de présenter des crédits qui reflétaient un programme de relance, celui après tout qu'on pouvait se payer. Là, très rapidement, un geste après l'autre, on a annoncé ce programme d'aide aux entreprises manufacturières sur le plan financier, le plan dit Biron. On a annoncé le bon d'emploi. On a annoncé un programme de relèvement de la construction domiciliaire. On a annoncé toute une série de programmes pour embaucher des assistés sociaux. Une fois qu'il a été clair que l'autre gouvernement ne voulait pas participer avec nous, on aura, aussi rapidement qu'on pouvait, ficelé un programme qui permette au moins de sauver un certain nombre d'emplois et d'en créer avec les moyens dont nous disposons.

Ottawa a attendu. Le problème au Québec n'était pas son problème, puisque ce n'était pas le problème des autres provinces. Mais maintenant, oui. Maintenant que les autres provinces commencent à perdre beaucoup d'emplois, cela devenait tout à coup une raison pour le fédéral de se demander s'il ne devrait pas changer ses priorités et, alors, on revient de Versailles en disant: Si les Américains ne changent pas leur politique, nous aurons à changer la nôtre d'ici six semaines. Cela a à peu près l'allure - et je reviens encore au Marius de Pagnol que je citais hier - de Marius qui dit: Retenez-moi ou je fais un malheur! sauf que le malheur, on ne le voit toujours pas venir. Le caucus récent du Parti libéral indique qu'ils vont sans doute faire quelque chose pour la construction, certains investissements, et l'exportation. Comment? On ne le sait pas. Ils commencent à s'agiter lorsque cela devient sérieux chez les autres.

Et ce gouvernement d'Ottawa, il repose sur qui? Il repose sur 74 Québécois, parce que, si 74 Québécois n'étaient pas dans ce gouvernement, ce ne serait pas le gouvernement du Canada. Nos 74 zigotos à Ottawa se sont placés dans la situation de dire: Tant que la situation économique au Québec va mal, et au Québec seulement, ce n'est pas grave, ce n'est pas sérieux. Laissons le gouvernement s'occuper - notre gouvernement, disent-ils - des autres provinces. On verra bien. Mais lorsque cela commence à aller mal dans les autres provinces, alors nos représentants élus par

nous se réveillent et se disent: Peut-être qu'effectivement pour le Canada tout entier, ce beau, ce grand Canada tout entier, on devrait faire quelque chose rapidement. Du point de vue de nos 74, on voit bien - on en a la preuve visible cette année - que représenter les problèmes économiques de leurs commettants, de leurs citoyens n'est pas une priorité, ne l'a pas été. On le soupçonnait bien quand on voyait des choses comme le contrat du F-18. On s'en doutait bien quand on voyait l'affaire Volkswagen, mais jamais, M. le Président, on n'en aura eu une démonstration comme celle qu'on vient d'avoir depuis quelques mois.

Et alors nous, qu'est-ce qu'on fait? On a au moins annoncé et mis en place un certain nombre de choses. On a ramassé ce qu'on pouvait sur le plan de nos ressources. On a eu à prendre cette décision majeure quant à la rémunération dans le secteur public. On a aussi, bien sûr, été obligés de pratiquer une certaine prudence à l'égard de l'endettement. On est parfaitement conscient qu'il faut faire attention de ne pas surtaxer nos concitoyens. On a eu des arbitrages durs à faire. On a mis un certain nombre de politiques en place. On nous dira: Ces politiques n'arriveront pas à tout régler. Mais on le sait bien qu'elles n'arriveront pas à tout régler. La moitié de nos ressources sont à Ottawa et sont utilisées dans le sens que je viens de dire.

Dans ce sens, M. le Président, je pense que la motion de blâme du chef de l'Opposition ne va pas au bon endroit. C'est à Ottawa qu'il devrait l'envoyer en espérant que les 74 zigotos qui appartiennent à sa formation politique puissent l'entendre; bien sûr, ne pas l'adopter - on les accuserait à nouveau de se moucher dans les rideaux -mais au moins accorder une certaine importance aux voeux de tous les Québécois qui voudraient que, quand une récession importante frappe autant de travailleurs, leurs deux niveaux de gouvernement élu pour lequel ils paient en arrivent rapidement à des politiques d'aide à l'emploi, à une certaine commisération pour les gens qui n'ont pas de travail, à une certaine compassion pour nos citoyens dont on ne se pose pas la question à l'heure actuelle de savoir s'ils auront des augmentations de salaire ou pas. Ils n'en ont plus!

On aurait pu imaginer un tel scénario. On nous a dit, quand on a cherché à faire apparaître un tel scénario: Le gouvernement du Parti québécois s'humilie devant Ottawa. Si, pour faire travailler des gens, il faut s'humilier, je n'ai pas d'objection à m'humilier, mais il est effrayant de penser que la moitié de nos ressources entre les mains de 74 de nos représentants à Ottawa vont peut-être commencer à bouger dans nos intérêts seulement dans la mesure où il se confirme dans les autres provinces une récession sérieuse et des pertes d'emplois massives. M. le Président, je dois dire d'une façon tout à fait nette dans mon esprit au chef de l'Opposition qu'il se trompe de porte. Merci, M. le Président. (12 h 40)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan (réplique)

M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord rectifier certains chiffres qui ont été évoqués par le ministre des Finances parce que des chiffres exacts sont la base d'un bon dialogue, d'un débat fructueux. Le ministre des Finances a dit - il me corrigera si je l'ai mal entendu tantôt - que le produit intérieur brut aurait augmenté au Québec de 9% par année, en moyenne, entre 1977 et 1981, contre 6% en Ontario.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Parizeau: Si le chef de l'Opposition me permet de corriger, ce que je disais, c'est qu'au total, si on prend la croissance totale de 1977 à 1980, cela donne 9% au Québec et 6% en Ontario. Ce n'est pas un taux annuel, c'est la somme des taux annuels pendant quatre ans.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Nous avons fait des calculs de notre côté aussi. À l'aide de la publication qui s'intitule Comptes économiques provinciaux, que connaît bien le ministre des Finances, la moyenne pour chacune des quatre années, de 1977 à 1980, c'est à peu près 10% dans chacune des deux provinces. Je ne sais pas comment on peut arriver avec un total de 9% contre 6%. La moyenne pour chacune des années, c'est de 10% dans chacune des deux provinces. De même, le ministre nous dit qu'il y a la moitié de nos ressources qui sont à Ottawa. Il sait très bien que ce n'est pas vrai. Si on fait le partage - je l'ai fait l'autre jour dans cette Chambre; le ministre n'était pas présent, malheureusement, mais les calculs ont été faits à partir des comptes économiques provinciaux encore une fois -avant les paiements de transfert, c'est à peu près 40%-60%. Sur les dollars de taxes que perçoivent les deux ordres du gouvernement, il y en a à peu près 60% qui vont au niveau provincial et local, et 40% au niveau fédéral. Après les paiements de transfert, c'est 75% contre 25%. La part qui s'en va à Ottawa, qui reste à Ottawa pour fins de dépenses directes, c'est à peu près 25% de l'ensemble des taxes payées par les Québécois. Par conséquent, ce ne sont pas des proportions

comme celles qui ont été évoquées tantôt par le ministre des Finances, j'espère qu'il va en convenir avec moi. C'est formidable. Les chiffres sont là. Je les ai pris à des sources absolument indiscutables.

Tout le discours du ministre des Finances, sauf ces quelques précisions qu'il nous apportait au début, a consisté à mettre la faute sur le gouvernement fédéral. Ce n'est pas nouveau, nous entendons ce refrain continuellement dans cette Chambre. Le ministre des Finances le fait avec plus de distinction que certains de ses collègues, il le fait avec un certain raffinement que nous apprécions, mais, quand vous analysez le contenu du discours - en écoutant le ministre des Finances, je prenais des notes à côté, parce que j'aime l'écouter et j'aime me faire le critique un peu objectif de ce qu'il a dit finalement, les neuf dixièmes de son discours ont consisté à déposer le paquet à la porte du gouvernement fédéral.

Je voudrais rappeler au ministre des Finances - d'ailleurs, il l'a admis par implication dans son discours - qu'il a dit, à un moment donné: C'est évident que, dans une période de dépression comme celle que nous vivons actuellement, si le gouvernement peut injecter de l'argent dans l'économie, c'est une bonne chose. Il disait lui-même que ce n'est pas le moment d'aller chercher des sommes additionnelles en taxes dans les goussets des contribuables ou dans la caisse des entreprises. Nous sommes d'accord là-dessus pour des raisons évidentes.

Que s'est-il produit? Je pense que la grande erreur du gouvernement a été d'être cinq ans en retard sur les autres gouvernements provinciaux du Canada. Les autres gouvernements se sont rendu compte, il y a déjà cinq ou six ans, qu'il fallait ralentir le rythme d'accroissement des dépenses publiques de manière que les finances publiques de chaque province soient plus saines pour faire face à une période économique nouvelle dont les premiers signes sont apparus dès 1974 et n'ont cessé de se multiplier depuis. Tandis que dans les autres provinces on réduisait le rythme d'augmentation des dépenses publiques, le gouvernement du Québec a continué de les augmenter à un rythme qui nous a conduits aux déficits spectaculaires des trois dernières années et à l'augmentation de la dette collective à partir d'un seuil de 5 000 000 000 $, au 31 mars 1977, à un seuil qui voisinera les 18 000 000 000 $ au 31 mars 1983.

J'ajoute une précision qui nous vient de l'économiste Marcel Bélanger. Nous payons, pour cette dette qui s'est immensément accrue, des frais d'intérêt de plus en plus élevés. C'était de 500 000 000 $ il y a à peine six ans et, cette année, ce sera au bas mot 2 000 000 000 $. Le ministre des Finances nous dit: C'est l'augmentation des taux d'intérêt. D'après les calculs qu'a faits M. Marcel Bélanger, il y a seulement 10% de l'augmentation qui vient de la hausse des taux d'intérêt. Tout le reste relève directement de l'augmentation du volume de la dette. Toutes ces sommes que nous sommes obligés d'engloutir pour le paiement de la dette contractée surtout par le gouvernement actuel, nous n'en disposons point pour des fins de développement économique.

Imaginez la différence si la dette était demeurée dans la même proportion, par rapport aux dépenses du gouvernement, que ce qu'elle était il y a à peu près sept ans; le gouvernement aurait une marge liquide additionnelle d'au moins 1 000 000 000 $. Je ne dis pas, si les frais étaient demeurés à 500 000 000 $, ils auraient pu augmenter jusqu'à 800 000 000 $, 900 000 000 $, même 1 000 000 000 $ mais, en tenant compte de l'augmentation des dépenses et des revenus, il serait resté une marge de liquidités d'au moins 1 000 000 000 $ qu'on aurait pu utiliser à des fins de développement économique.

Le ministre nous dit que, dans l'état actuel des finances du Québec, le gouvernement dispose de très peu. Il nous a énuméré des programmes: le programme de construction de logements, le programme du bon d'emploi pour les étudiants, le programme de garantie de crédit aux petites et moyennes entreprises à des fins de prêt auprès des institutions bancaires, le programme de travaux à caractère temporaire pour les assistés sociaux. Ce ne sont pas des programmes de relance économique. Ce n'est pas mauvais qu'on ait un programme de relance dans la construction d'habitations, mais je déplore profondément qu'on ne l'ait pas mis au point plus vite. On va manquer presque toute la saison 1982 à cause de toutes ces hésitations qu'on a connues.

Une voix: C'est le gouvernement fédéral.

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ryan: Un programme de crédit à l'entreprise à taux d'intérêt réduits, comme le plan Biron, cela existe depuis un an et demi au fédéral et ils ont aidé beaucoup plus d'entreprises que vous n'en aiderez jamais avec votre plan. Vous avez aidé à peu près 40 entreprises. Cela fait trois ou quatre mois qu'on parle de cela et 40 entreprises ont eu accès à des prêts garantis en vertu de ce programme en l'espace de quatre mois.

En matière d'habitation, je vous garantis une chose, il n'y aura aucune maison mise en chantier avant peut-être la mi-juillet ou la fin de juillet au rythme où vous allez.

Ce n'est pas le moment. On conçoit des plans pour construire des maisons au printemps et, ensuite, on donne un bon coup pendant toute la saison. Alors, c'est manqué.

Les emplois à caractère temporaire pour les assistés sociaux, tout le monde sait que c'est un schéma ingénieux qui a été conçu par le gouvernement pour trouver le moyen de transférer des milliers de personnes des listes d'assistance sociale aux listes d'assurance-chômage. Ce n'est pas un programme de relance économique. Mais je comprends que le gouvernement, dans la situation financière extrêmement serrée où il s'est placé, n'est pas capable de mettre plus d'argent pour la relance de l'économie. C'est nous tous qui en souffrons ensemble.

C'est pour cette raison, M. le Président, que nous vous disons que, comme ce gouvernement s'était enlevé le principal levier dont il pouvait disposer, c'est-à-dire une certaine marge de manoeuvre financière, d'abord, il nous met tous dans une situation impossible en nous taxant de manière déraisonnable, en nous endettant d'une manière qui va grever nos enfants pendant très longtemps, en nous dépréciant sur les marchés de l'emprunt et en se rendant incapable de prendre les mesures vigoureuses qui seraient nécessaires pour stimuler l'économie à ce moment-ci où elle en a particulièrement besoin.

Je trouve que, s'il était un moment où l'on devrait faire montre d'une infinie prudence dans le déclenchement de querelles inutiles ou stériles avec le gouvernement fédéral, c'est bien le moment actuel. Le ministre des Finances disait - là-dessus, je suis d'accord avec lui - que, s'il y a un moment où l'on doit rechercher, par tous les moyens possibles, la collaboration, les échanges de procédés qui permettront de mieux servir les besoins de nos concitoyens, c'est bien celui-ci. On constate que le désir de collaboration est infiniment limité. On a fait cette rencontre, il y a quelques mois. On l'a faite pour la galerie, pour la pose. Depuis ce temps-là, les rencontres ont été limitées au strict minimum. (12 h 50)

On a malheureusement dû constater, en comparant les projets qu'avait conçus le gouvernement québécois et bien des programmes qui étaient déjà en marche du côté fédéral, que, si le gouvernement fédéral avait cédé aveuglément à toutes les propositions qui avaient été faites en février, il y aurait eu un immense dédoublement, une immense duplication de services. C'est un des griefs que le gouvernement actuel adresse le plus souvent à notre régime fédéral.

M. le Président, je pense qu'il est très facile de faire la preuve que c'est en augmentant inconsidérément ses dépenses... Quand il s'agissait autrefois de donner les médicaments gratuits à tout le monde, toutes les personnes âgées sans exception, on y allait à fond de train. Quand il s'agissait d'augmenter l'âge pour la dispensation de soins dentaires gratuits et quand il s'est agi d'introduire un programme universel d'exemption d'impôt pour la garde d'enfants, on y allait à fond. On achetait les votes. On disait aux gens: C'est nous autres qui vous aidons; nous sommes vos amis. Là, il n'était pas question de la santé des finances publiques. Mais, maintenant, on coupe dans tous ces programmes, un après l'autre. Il aurait été mieux d'être plus prudent quand on a instauré ces programmes. Cela aurait été moins odieux pour le public aujourd'hui, parce qu'il n'aurait pas pris des habitudes dont il ne comprend pas qu'on veuille le libérer de manière aussi arbitraire et capricieuse.

Je dis au gouvernement: Vous avez augmenté vos dépenses à un rythme infiniment supérieur aux autres provinces. Je l'ai démontré l'autre jour. Augmentation des dépenses du gouvernement provincial, à Québec, au cours des six dernières années, 95%, et augmentation des dépenses provinciales, en Ontario, 55%. Vous l'avez, la différence qui vous a conduits au déficit de 3 000 000 000 $ par année, trois fois de suite, qui vous a obligés, l'an dernier, tout de suite après l'élection... On parle beaucoup de la crise économique, mais on ne parle pas beaucoup de l'élection. Avant l'élection, tout était beau, tout était intéressant, tout était stimulant et attrayant. Six mois plus tard, on nous arrive avec un deuxième budget, des augmentations de taxes d'au moins 350 000 000 $ et, cette année, des augmentations de taxes de 1 200 000 000 $.

Je dis que si le gouvernement avait été plus discipliné quand c'était le temps, c'est-à-dire avant le référendum et avant la dernière élection générale, il disposerait aujourd'hui d'une marge de manoeuvre plus grande pour faire face et à ses problèmes financiers et aux problèmes de l'économie du Québec. S'il n'a pas cette marge-là, c'est parce qu'il s'en est privé par ses actions passées et des décisions qu'il a été le seul à prendre. C'est pour ça que nous sommes obligés de lui adresser aujourd'hui un vote de blâme sévère pour l'incapacité où il se trouve de faire face à des problèmes qui nous affectent tous.

Une voix: Très bien!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion du chef de l'Opposition est adoptée?

Une voix: Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Vote enregistré. Qu'on appelle les députés.

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez prendre vos places. À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons mettre aux voix la motion privilégiée du chef de l'Opposition en vertu de l'article 24. Cette motion se lit comme suit: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement et plus particulièrement le ministre des Finances qui, après avoir conduit le Québec à l'impasse financière, se révèle maintenant incapable de rétablir l'équilibre des finances publiques et la santé de l'économie."

Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Scowen, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Mathieu, Assad, Vallières, Paradis, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Picotte, Pagé, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Dauphin, French, Doyon, Kehoe, Houde, Middlemiss, Hains, Leduc (Saint-Laurent).

Le Vice-Président (M. Rancourt): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire ajoint: MM. Lévesque (Taillon), Bertrand, Jolivet, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin, Laurin, Bérubé, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Marcoux, Richard, Léger, Fréchette, Marois, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard, Martel, Baril (Arthabaska), Charron, Proulx, de Belleval, Ouellette, Mme Lachapelle, MM. Brassard, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, Desbiens, Fallu, Bordeleau, Leduc (Fabre), Marquis, Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Champagne, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Laplante, Lavigne, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Payne, Beaumier, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Paré, Lachance, Dupré.

Le Secrétaire: Pour: 31 Contre: 60

Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion rejetée.

M. le leader du gouvernement.

Travaux de la Chambre

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais modifier une motion qui a été faite ce matin et modifier aussi un avis, mais à plus long terme, puisque, de toute façon, les députés sont déjà au courant. La première motion, c'est pour faire en sorte que cet après-midi, à compter de 15 heures, trois commissions parlementaires puissent siéger en même temps. Celle qui s'ajoute, c'est celle de l'habitation et de la protection du consommateur pour terminer l'étude du projet de loi no 82. Il y a entente. Cette commission se réunirait à la salle 91-A. En retour, en échange, M. le Président, comme "give and take", nous accepterions que le projet de loi no 66, inscrit au nom du ministre de la Justice et ministre d'État à la Réforme électorale, soit étudié non pas ce soir, mais uniquement lundi, vers 15 h 30. Il y en aurait pour une heure, une heure et demie environ. C'est le député de Portneuf qui nous l'a demandé. Cela nous fait plaisir d'agréer à sa demande.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion sera-t-elle adoptée? M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je fais motion pour suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension à 13 h 05)

(Reprise de la séance à 15 h 08)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

Vous pouvez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

Prise en considération du rapport

de l'étude des crédits des ministères (suite)

M. Brassard: M. le Président, nous reprenons, pour le terminer, le débat sur la prise en considération du rapport regroupant les rapports des commissions qui ont étudié les crédits avec la même entente qu'hier soir. Il reste trois sujets à discuter.

Les coupures dans le réseau des affaires sociales

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord, et conformément aux dispositions de l'article 130, paragraphe 2, Mme la députée de L'Acadie demande d'interpeller le ministre des Affaires sociales et son intervention concerne les coupures dans le réseau des affaires sociales. Selon l'entente intervenue, c'est quinze minutes de la part de Mme la députée de L'Acadie et quinze minutes de la part du ministre des Affaires sociales.

Mme la députée.

Mme Thérèse Lavoie-Roux Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je

vais tenter, dans les quinze minutes qui me sont allouées, de faire le bilan des activités gouvernementales dans le domaine des affaires sociales. Il est presque inutile de rappeler que le gouvernement a créé une situation financière lamentable pour la province et dont les effets se font sentir d'une façon toute particulière dans le domaine de la santé et des affaires sociales. Tant l'an dernier que cette année, de tous les ministères, le réseau des affaires sociales ou le domaine des affaires sociales a écopé plus que sa part des compressions budgétaires avec toutes les conséquences qui en résultent. Le gouvernement fait valoir que ces compressions n'ont pas eu de conséquence sur la qualité et l'accessibilité des services, faisant valoir qu'au contraire ceci a donné lieu à une rationalisation fort souhaitable de nos ressources dans ce domaine. M. le Président, il faut s'élever en faux contre une telle affirmation. S'il est exact que, dans une administration publique ou parapublique, il y a toujours de la place pour de la rationalisation des dépenses, il reste évident que, hors de tout doute, la qualité et l'accessibilité des soins à la population ont diminué et ont été affectées.

M. le Président, je voudrais d'abord à cet égard vous dire tout simplement qu'on constate également les mêmes problèmes que l'on constatait il y a deux ou trois ans et même davantage, soit l'engorgement de nos salles d'urgence, la longueur de nos listes d'attente, c'est-à-dire les listes d'attente qui vont en augmentant et qui font que la population est obligée d'attendre de plus en plus longtemps pour être admise et recevoir des soins qui ne sont pas des soins sélectifs à ce moment, mais des soins semi-urgents ou même urgents, avec tous les risques que ceci comporte au plan de la santé, et même avec des répercussions au plan social et économique.

Pour témoigner de ceci, je voudrais simplement vous faire part de certains témoignages qui, je pense, seront plus éloquents que ceux que je pourrais donner. Je voudrais citer ici - ce sont d'ailleurs des témoignages récents; j'en ai accumulés depuis maintenant au-delà de deux ans - les plus récents pour montrer que même encore aujourd'hui la situation n'a pas changé. Vous avez ici ce témoignage du directeur du département de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire de l'Hôpital Notre-Dame, dont la réputation n'est pas à faire - le ministre des Affaires sociales en conviendra - qui disait assez récemment, en parlant des coupures budgétaires, que la situation dans les hôpitaux s'était aggravée. Avant, ce n'était pas trop sensible, mais depuis deux ans, les listes d'attente se sont sans cesse allongées. Des gens ont dû attendre six mois, neuf mois ou même un an pour être opérés. On les admet à l'urgence où ils sont traités immédiatement ou dans les deux jours, mais pour bon nombre d'entre eux, il est trop tard. Évidemment, le ministre a eu cette réflexion que ce médecin, au lieu de faire des représentations publiques, aurait peut-être dû le contacter ou contacter le ministère pour lui faire part de ses doléances.

M. le Président, je pense qu'il faut féliciter les quelques-uns qui ont le courage de sortir sur la place publique parce qu'il ne faut pas oublier que dans le réseau des affaires sociales, il y a aussi certaines formes d'intimidation qui se traduisent, par exemple, par un resserrement au plan des ressources ou des allocations. Je pense qu'il faut féliciter ceux qui sortent publiquement de la façon dont le Dr Beaudet l'a fait.

Un autre témoignage vient, celui-là, du pneumologue et président du Conseil des médecins et dentistes de l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal qui signalait un cas possible de cancer du poumon qui attend quatre mois son hospitalisation pour subir les examens nécessaires. Cela commence à être de l'accessibilité sérieusement diminuée. Un autre médecin de la même institution ajoutait: Nous ne sommes plus en mesure de fournir les services adéquats au moment voulu. C'est sûrement une baisse de la qualité des soins.

Voici un dernier témoignage, parce que la liste pourrait être longue et je ne veux pas prendre les quinze minutes sur ces témoignages. Cette fois-ci, c'est le témoignage d'un ophtalmologiste de grande réputation qui disait: "Faute de disponibilité dans les hôpitaux et en raison des coupures budgétaires répétées, les malades doivent attendre de longs mois avant d'être hospitalisés et, pendant ce temps, leur état général se détériore à un point tel que le risque opératoire devient plus grand lorsque enfin ils sont admis." Il parlait de cas qui devaient attendre d'un an et demi à deux ans. "Je puis vous affirmer, disai-il, dans un document à l'appui, que certains patients attendent tellement longtemps que, lorsqu'ils sont admis, ils sont devenus inopérables ou parfois le pronostic s'est tellement assombri que l'organe est, à toutes fins utiles, perdu."

M. le Président, quand on entend des témoignages de la sorte, je pense que le gouvernement ne peut plus dire sérieusement que la qualité et l'accessibilité des soins ne sont pas affectées. Sans doute dira-t-on, à ce moment-ci: Ce sont des médecins qui ont des doléances inopportunes, non fondées, etc. Je pense que ce n'est plus possible de se retrancher derrière des excuses aussi faibles. Il faut se rappeler que ce sont non seulement les médecins, mais également les personnels infirmiers, les malades eux-mêmes. À cet égard, je pense que tout le monde se souviendra du témoignage de la Coalition pour les droits des malades qui, il n'y pas

tellement longtemps, faisait valoir également qu'à l'intérieur des centres d'accueil et des hôpitaux pour soins prolongés, c'est même la nourriture, la qualité des soins personnels qui sont diminuées, sans compter que, de plus en plus, dans ces centres d'accueil - c'est l'Ordre des infirmiers et infirmières qui le disait, ce n'est pas une association syndicale - le personnel mis à la disposition des malades en centres d'accueil, qui maintenant accueillent des cas tellement lourds, de plus en plus lourds, qu'ils se rapprochent des cas qu'on retrouve en centres hospitaliers de soins prolongés, est nettement insuffisant, que la norme ou le ratio de personnel n'a pas été corrigé faute de ressources financières, si bien que c'est encore une fois la qualité des soins qui en souffre, M. le Président.

M. le Président, la liste pourrait être fort longue de tous ces témoignagnes et de toutes ces observations qu'on a entendus et qui démontrent hors de tout doute que le gouvernement ne peut plus se cacher strictement derrière ce qu'on appellerait une bonne rationalisation de nos ressources.

Le gouvernement doit revoir ses priorités. Je pense que le ministre sera probablement d'accord avec moi que le réseau des affaires sociales a écopé très largement de la part des compressions budgétaires et qu'on met la population, à certains égards, devant des risques auxquels elle ne doit pas être soumise.

M. le Président, je pourrais ajouter, dans le domaine des services sociaux, des exemples tout aussi importants: les ressources mises à la disposition des enfants en difficulté, des adultes en difficulté, même du côté de la protection de la jeunesse et du côté de la réinsertion sociale des personnes handicapées. On sait fort bien que, là aussi, des ressources affectant directement la clientèle ont été diminuées.

C'est un tour bien rapide de l'effet des coupures budgétaires. Si j'avais une heure... Je pourrais même en parler pendant cinq heures, je puis vous le dire franchement. Ce qu'il faut rappeler, c'est que dans le domaine des affaires sociales - je mets de côté la sécurité du revenu - uniquement au cours des deux dernières années, il y a eu des coupures de l'ordre de 360 000 000 $, soit 200 000 000 $, en 1981-1982, et 160 000 000 $ cette année. Ce sont les données officielles. Ceci ne tient pas compte de toutes les autres compressions des années antérieures, à cause du plan de redressement qu'on a imposé aux hôpitaux, avec une certaine justesse à bien des égards, mais qui déjà, avant les coupures officielles qui ont été faites l'an dernier et cette année, était allé chercher dans les centres hospitaliers 300 000 000 $.

On peut parler de coupures d'au-delà de 500 000 $ uniquement dans les centres hospitaliers, au cours des quatre ou cinq dernières années. Ceci se reflète par les coupures de lits et, comme je le disais tout à l'heure, la quantité et la qualité des services offerts dans tous les domaines d'activité des établissements du réseau. Au-delà de ces choses que l'on peut quantifier d'une certaine façon, dans la mesure où les données nous sont disponibles... À cet égard, je voudrais dire qu'au moment de l'étude des crédits, j'ai été très insatisfaite du bilan que le gouvernement nous a donné. (15 h 20)

Évidemment, il nous a donné des chiffres quant aux coupures de personnel pour l'année 1980-1981. Ceci ne tient pas compte des coupures qui avaient été effectuées avant à cause du plan de redressement budgétaire, mais nous n'avons pas su, dans l'ensemble de ces postes coupés, parce qu'on parle beaucoup de postes vacants, depuis combien de temps ces postes étaient vacants. Également, on n'a pas pu nous fournir des informations, à savoir si c'étaient des postes directement affectés aux services à la clientèle ou non et, à plusieurs reprises, on nous a dit qu'il est trop tôt pour faire, sur différents points que je soulevais, un bilan adéquat, les données nous manquant encore.

Le dernier point que je veux souligner, M. le Président, et qui m'apparaît au-delà de ces effets quantifiables dont je viens de parler, c'est l'effet démoralisateur et démobilisateur créé par ces compressions budgétaires qui se répercutent sur les changements de personnel, ce qu'on appelle le fameux "bumping" du personnel, dans l'ensemble du réseau, cet effet démoralisateur qui a un effet extrêmement important sur le climat social et le climat psychologique à l'intérieur de notre réseau des affaires sociales.

Ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, dans le réseau des affaires sociales, ce sont les personnes prises individuellement qui souffrent d'une telle démoralisation beaucoup plus que dans n'importe quel autre domaine. Les dommages causés sont plus difficiles à évaluer et à réparer. C'est sans doute la raison pour laquelle la population, lorsqu'elle est sondée ou lorsqu'on la questionne sur le domaine des affaires sociales, place en tête de liste les soins de santé et les services sociaux dans l'échelle de ses priorités. Je pense qu'on ne protestera jamais avec assez de vigueur contre une mauvaise planification de la rationalisation dans le domaine de la santé ou contre les gestes d'autorité que le gouvernement, le ministre des Affaires sociales en particulier, multiplie au moyen de sa législation. On se rappellera la loi no 27 qui a passablement chambardé le réseau des affaires sociales. Qu'on se rappelle les lois -ce ne sont pas les lois du ministre des Affaires sociales, mais du gouvernement - les

projets de loi nos 68, 70 et 72 qui touchent tous, d'une façon considérable, le réseau des affaires sociales.

On pourrait également parler du fameux décret des médecins qui devront aller travailler dans les régions éloignées. On peut encore parler de la loi spéciale qui, probablement, attend les médecins d'ici a quelques heures. Sans me prononcer sur le bien-fondé, à ce moment-ci, de la grève ou pas - d'ailleurs, je l'ai fait hier, à l'Assemblée nationale - il reste que toutes ces mesures d'extrême recours vers lesquelles la situation financière du gouvernement le pousse ont des effets extrêmement importants sur le climat social et créent des malaises importants dans nos établissements.

M. le Président, si le gouvernement ne s'ouvre pas les yeux, si le gouvernement ne révise pas ses priorités, nous sommes rendus au point où c'est vraiment le droit fondamental de tous les individus, qu'ils soient jeunes ou vieux, riches ou pauvres, à l'égalité quant à l'accès aux services de santé et aux services sociaux qui est remis en question. Cette question devient encore plus aiguë au Québec au moment où nous occupons le deuxième rang de toutes les provinces canadiennes quant à la rapidité du rythme d'accroissement de nos personnes âgées, avec ce que ceci exige de ressources et de services. Au même moment, un peu sans vergogne, je n'oserais pas dire sans vergogne complètement parce que je ne peux pas croire que le gouvernement serait aussi irresponsable, mais à bien des égards sans discernement, on continue de sabrer et de mettre en danger ces services. Ce ne sont pas vraiment des services eux-mêmes dont je me préoccupe, mais de la qualité de ce qu'on sera en mesure de continuer d'offrir à la population dans ces services qu'elle considère comme les plus importants dans toute l'échelle des priorités qu'elle accorde aux dépenses gouvernementales. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Affaires sociales, vous avez quinze minutes.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): M. le Président, vous me permettrez d'abord de reprendre quelques affirmations de la députée de L'Acadie, notamment en ce qui concerne les déclarations d'un médecin en chirurgie cardio-vasculaire de Montréal. Je n'ai jamais, d'aucune façon, prétendu qu'il fallait intimider les professionnels qui voulaient s'exprimer. Bien au contraire, j'ai simplement évoqué le fait que le Dr Beaudet avait tenté de communiquer avec moi et que j'avais été incapable de recommuniquer avec lui parce qu'il était parti à l'étranger. Dans ce sens, loin de moi de penser que dans le climat que nous connaissons, que ce soit dans le réseau des affaires sociales ou ailleurs au Québec, on est en train de confondre la notion de prendre des décisions et celle d'être autoritaire.

On vit dans une période économique dans notre société qui nous oblige à certaines remises en cause, qui nous oblige à faire face à la réalité comme elle se présente et qui amène, au niveau du gouvernement comme au niveau des différents établissements du réseau des affaires sociales ou de l'éducation, à prendre des décisions. Ces décisions doivent s'exprimer en termes de choix.

Je reprendrai d'abord certains commentaires, notamment en ce qui concerne le secteur hospitalier. On parle de listes d'attente. Je ferai remarquer qu'aucune analyse précise ne permet d'affirmer qu'il y a détérioration, sinon qu'on peut reconnaître qu'effectivement la présence de malades chroniques de plus en plus nombreux en termes de proportion dans les hôpitaux de courte durée amène des problèmes à certains endroits.

Deuxièmement, je ferai remarquer aussi qu'il y a des politiques d'admission qui sont décidées par les différents établissements, auxquelles doivent participer, et c'est normal, les professionnels de la santé et qui peuvent expliquer certaines choses qu'on pourra toujours évoquer comme l'a fait la députée de L'Acadie.

Troisièmement, nous avons constaté que, malgré l'effort de compression de cette année qui a été fait, notamment, dans le secteur hospitalier et qui s'inscrivait, on le sait, dans une troisième année d'efforts dans ce domaine, à l'exception d'une année qui a été une espèce de feu d'artifice incroyable sur le plan des déficits en 1980-1981, malgré tout ça, les études, les chiffres disponibles nous permettent de constater qu'effectivement il y a eu la même quantité de jours-présences de patients dans les hôpitaux du Québec à quelque dizaines près. Donc, on peut dire que le système, en termes de capacité de répondre à un niveau de besoins qui était celui d'avant, de façon générale, a répondu, en faisant la différence entre la dimension aigus et chroniques. C'est clair que les besoins sont peut-être accentués dans certains domaines de la société pour toutes sortes de raisons et, d'autre part, qu'il y a également un problème d'accorder la capacité qu'ont nos ressources de répondre à ces besoins avec les impératifs en termes de priorités qu'il faut y mettre.

Je m'explique. Certains grands hôpitaux, notamment certains grands hôpitaux universitaires, en ce moment, doivent faire face, et c'est probablement un très bon exemple que celui de la chirurgie cardio-vasculaire, à des décisions en termes de

politiques d'admission. Ces décisions impliquent que des groupes de professionnels doivent trancher entre eux quant à certaines priorités. Ces choses, encore une fois, je le répète, sont rendues plus difficiles par le fait qu'il y a des endroits où il faudra trouver des solutions, notamment dans les grands hôpitaux universitaires, pour amener l'hébergement des patients chroniques à d'autres endroits que dans des établissements destinés à des soins aigus. Quant aux postes vacants et à la catastrophe de 6000 mises à pied - on l'a bien démontré en commission parlementaire - au contraire, c'est quelque chose de plus près de 2000 au total, dont beaucoup étaient des postes non occupés, des postes vacants, des gens qui avait la sécurité d'emploi et qui ont été replacés ailleurs. (15 h 30)

Quant à l'effet démobilisateur qui m'apparaît une remarque importante, je pense qu'il est vrai que le réseau de la santé connaît des difficultés au niveau des professionnels de la santé, ceux qui y oeuvrent, et au niveau de certaines administrations, d'où la nécessité de prendre de ces décisions qui seront difficiles en termes d'octroi de ressources à l'égard des patients chroniques et à l'égard de la spécialisation de certains hôpitaux par rapport à d'autres, dans certains secteurs. Mais je ne suis pas prêt à dire qu'il y a démobilisation dans la mesure où, si on regarde les employés salariés du réseau des affaires sociales dans cette période de contraintes budgétaires que nous vivons, le taux d'absentéisme a diminué. C'est donc significatif que les travailleurs du secteur hospitalier, notamment, sont conscients des effets de la crise. Effectivement, il y a une augmentation réelle, objective de la productivité, ce qui fait que le Québec a encore des progrès à faire si on le compare à d'autres endroits. Je pense que l'effet démobilisateur est celui de ne pas voir la lumière au bout du tunnel et je pense qu'il y en a une au bout du tunnel dans le réseau.

Si le réseau des affaires sociales parvient, en 1982-1983, à atteindre les objectifs qui lui ont été assignés, il pourra respirer à compter de 1983-1984. Je pense que ce sera nécessaire, sinon, notre société sera obligée de faire un choix, en termes de priorités, qui impliquerait possiblement la remise en cause de principes fondamentaux qu'on retrouve dans nos lois à l'égard de l'accessibilité, de l'universalité et de la gratuité. Je pense que l'effort fait par le réseau actuellement peut être complété d'ici à la fin de l'exercice budgétaire en cours et, si c'est un succès, je pense qu'il aura fait ce qu'il peut faire pour le Québec.

M. le Président, nous avons bâti ce système, d'universalité, de gratuité et d'accessibilité dans l'abondance. Nous avons créé des habitudes à la fois chez les administrateurs, chez ceux qui y oeuvrent et aussi dans la population, mais la période que nous vivons, non pas à cause des difficultés budgétaires de l'État, mais à cause des difficultés intrinsèques à la période économique que nous connaissons, nous oblige effectivement à faire des choix. Ces choix doivent se faire, d'une part, à l'intérieur du réseau des affaires sociales et, d'autre part, dans de grands arbitrages entre les missions gouvernementales et le rôle des attributs secondaires de l'État dans certains secteurs où on est susceptible de concurrencer des services pouvant exister à d'autres niveaux ou encore, carrément, l'on pourrait considérer la remise en question de certains programmes, dans l'ensemble du gouvernement, j'entends.

Ces arbitrages à l'intérieur du réseau des affaires sociales, il faudra les faire en valorisant certaines orientations, notamment, en tenant compte qu'il y aura toujours une dimension curative extrêmement importante dans le réseau hospitalier et que la dimension préventive devra être valorisée dans la mesure où une société qui vit le genre de crise que nous connaissons peut faire appel de plus en plus au fait que les gens tentent de régler leurs problèmes eux-mêmes. Cela se traduit, notamment - et cela s'est traduit cette année - par le fait que nous avons continué de développer le réseau des CLSC, malgré les difficultés financières qui peuvent se poser dans le cadre budgétaire, que nous avons continué de développer des centres d'accueil parce qu'il y a des besoins - une quinzaine - et que nous continuerons, dans le secteur hospitalier, à répondre aux besoins de façon moderne. Je pense à la région de Montréal, où près de 1000 lits ouvriront dans des hôpitaux de soins aigus, à Valleyfield, ouvert il y a à peine un mois, à LeGardeur et Pierre-Boucher, sur la rive sud, qui ouvriront bientôt. Il y a aussi les organismes bénévoles, sans compter le Centre de coordination des urgences de santé de Montréal qui, malgré les difficultés qu'il a pu avoir au départ, est globalement un service qui offre une meilleure rationalisation et une accessibilité plus grande, de fait, à l'ensemble des citoyens, à la qualité et à la quantité des services dont nous disposons.

M. le Président, je terminerai, puisque nous avons peu de temps lors de ces débats, et effectivement, moi aussi, je pourrais en parler des heures. On l'a déjà fait un peu en commission parlementaire en disant que cet effort de cette année est, aux yeux du ministre des Affaires sociales, celui qui, une fois réussi, devra justifier le fait que les Affaires sociales devrait rester, à moins qu'on ne remette en cause certains principes fondamentaux de notre régime de santé et de services sociaux, à l'abri de contraintes de la nature de celles qui lui sont imposées depuis trois ans et que je compte sur la

collaboration et sur une vision élargie de l'ensemble du gouvernement et des députés de cette Chambre pour faire prévaloir la nécessité pour le Québec de conserver l'essentiel de ce qu'il a tant mis comme effort depuis vingt ans à mettre sur pied.

L'administration de la CSST

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le deuxième intervenant, selon l'entente, est le député de Sainte-Anne, au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. L'objet de son intervention est l'administration de la Commission de la santé et de la sécurité au travail.

M. le député, vos quinze minutes.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, M. le Président. La raison pour laquelle nous avons choisi comme sujet la Commission de la santé et de la sécurité du travail, la CSST, c'est parce que, dans notre opinion, il y a beaucoup de questions qui méritent une réponse. On a l'impression claire et nette qu'il s'agit d'un appareil lourd et où il y a peut-être des problèmes d'administration. On veut obtenir le plus de renseignements possible. Évidemment, quinze minutes, ce n'est pas beaucoup, parce qu'on aurait des questions pour un jour ou deux. C'est pour cela qu'on avait suggérée - on a demandé, parce qu'on ne suggère jamais rien aux péquistes poliment d'avoir une commission parlementaire cet été. Le ministre nous avait dit qu'il serait prêt à organiser une rencontre entre les députés de l'Opposition, les députés ministériels avec le président et les administrateurs peut-être de la commission, mais on n'a jamais reçu encore la confirmation qu'on voulait vraiment avoir une commission parlementaire, de peut-être une journée ou deux jours, pour justement faire la lumière sur ce problème, sur ce que le ministre appelle des insinuations. Je suis d'accord avec lui. Je ne crois pas non plus en ces insinuations. Aussi longtemps qu'il y a des insinuations qui circulent, on ne peut pas éviter les questions. Donc, peut-être que ce serait avantageux de faire la lumière là-dessus devant la presse, les journalistes qui peuvent prendre note de ce qui se passe.

M. le Président, on vient de recevoir le rapport annuel 1981 de la CSST. Je voulais poser quelques questions au ministre. À la page 5 du rapport, on parle de frais d'administration, sous la rubrique "Revenus globaux de la commission." Je note que ces frais d'administration sont augmentés de 52 000 000 $ - je parle seulement en chiffres ronds pour sauver du temps - à 86 000 000 $, en 1981, ce qui veut dire qu'il y a une augmentation de 64%. On voudrait avoir une explication concernant une hausse si élevée.

À la page 38 du même rapport, on donne la ventilation de ces frais d'administration. Je voudrais seulement attirer l'attention du ministre sur quelques catégories. On trouve, par exemple, à la troisième catégorie, Frais de déplacement, 1 800 000 $, en 1980 et, à 3 900 000 $, en 1981. Il s'agit ici d'une augmentation de 112%. On aimerait en connaître la raison.

Je ne vais pas revenir sur la question que j'ai posée, je pense, cette semaine, sur le voyage de quelques administrateurs en Autralie et en Nouvelle-Zélande, parce qu'on parle de frais de déplacement de 3 900 000 $, tandis que ce voyage, cela semble coûter 20 000 $ ou 22 000 $ de frais de billets d'avion. On n'a pas eu de réponse. On aimerait obtenir une réponse et un peu plus de détail là-dessus.

L'autre élément dans les frais d'administration, ce sont les frais d'informatique. Il y a une augmentation de 1 600 000 $ à 4 200 000 $. Cela veut dire une augmentation de 160%. Je pense que le ministre va nous répondre qu'au début, la commission commençait à fonctionner et que cela prenait un peu de temps pour faire tourner le moteur à pleine capacité. Peut-être qu'il va nous expliquer l'augmentation de cette manière, mais cela nous inquiète tout de même, au moment où tout le monde doit couper les dépenses, se serrer la ceinture, de voir vraiment un appareil administratif devenir de plus en plus cher et lourd.

Dans une autre catégorie, Location d'espaces, il y a une augmentation de 3 400 000 $ à 6 000 000 $, c'est-à-dire une augmentation de 75%. Je comprends qu'on va probablement dire qu'il s'agit d'avoir maintenant l'appareil administratif installé dans différentes régions, que cela prend des locaux, mais, tout de même, il faut que quelqu'un paie pour cela. Qui paie pour tout cela? Ce sont les employeurs. On peut dire: Ce sont les employeurs, ce n'est pas le gouvernement, il ne faut donc pas trop s'exciter. Mais quand un employeur paie sa cotisation et qu'elle augmente de façon draconienne cela a une influence directe sur les prix de ce manufacturier, parce qu'il est obligé de compter cette cotisation quelque part dans le prix de son produit. (15 h 40)

La prochaine catégorie, M. le Président, se retrouve à la page 36. On donne les détails des revenus, à la catégorie Cotisation des employeurs. Cela veut dire que ce qui a été reçu par la commission de tous les employeurs qui doivent y contribuer a été augmenté de 536 000 000 $, en 1980, à 664 000 000 $, en 1981. C'est une augmentation de 24%. Je comprends que ce n'est pas directement une augmentation du

taux, parce qu'il y a peut-être plus d'employeurs qui participent et la masse salariale a peut-être quelque chose à y faire aussi, mais on est tout de même en face d'une augmentation de 24% au point de vue des chiffres.

Je note également, à la même page 36, M. le Président, que tandis qu'en 1980, la commission finissait tout de même avec un surplus de 43 000 000 $, en 1981, on a un déficit, ce qui veut dire un excédent des dépenses sur le revenu - de 10 000 000 $. Quelque chose est arrivé cette année-là parce qu'on avait déjà un bon fonds d'opération. J'aime ça quand on exploite un commerce et qu'à la fin de l'année, il reste quelque chose. C'est pour moi une preuve qu'on contrôle nos dépenses, il reste toujours quelque chose. Mais au lieu d'avoir un profit de 43 000 000 $, on a maintenant une perte de 10 000 000 $. C'est une autre indication qu'on commence à perdre le contrôle dans cet organisme.

Autres points importants sur lesquels je n'entrerai pas trop dans les détails. À la page 45, il y a une note intitulée: Éventualité. La note nous dit qu'il y a une requête en recours collectif devant la Cour supérieure, ici à Québec, etc. Je ne parlerai pas de la requête parce que l'affaire est devant les tribunaux et quoique ce soit une affaire civile, comme avocat, je n'ai pas l'habitude de parler d'une cause qui est devant les tribunaux. Tout de même» dans les états financiers, j'ai cherché si on a une réserve pour cette éventualité. Vous savez, une compagnie d'assurances, par exemple, qui doit faire face à une réclamation doit montrer une réserve quelque part sur ses états financiers. Je n'en ai pas trouvé, mais peut-être le ministre pourrait-il me donner des renseignements là-dessus.

M. le Président, quelques questions générales en dehors du rapport annuel de l'année 1981. Apparemment, la commission a décidé de procéder à l'épuration d'une somme d'au-delà de 20 000 000 $ de comptes à recevoir en 1981. Si ce sont des comptes à recevoir qui, au point de vue technique, n'ont aucune valeur, s'il s'agit de courir après des compagnies qui sont en faillite, je le comprends. Mais j'ai entendu des rumeurs - ce sont des rumeurs, mais je suis tout de même obligé de poser des questions - à savoir que ce n'était pas pour cela, mais plutôt pour faciliter l'entrée des données dans . le nouveau système informatique. Je ne sais pas, je n'ai aucune connaissance concernant cette allégation, mais j'aimerais le savoir parce que, s'il s'agit de comptes recevables qui étaient bons comme comptes, on devrait les percevoir et non les radier. J'ai entendu dire que ç'a plutôt été fait pour faciliter l'implantation du système informatique. Je ne sais pas, je pose la question; je n'accuse personne, je voudrais seulement avoir une réponse satisfaisante. J'ai entendu dire qu'il s'agit de comptes qui sont vraiment recouvrables.

On a entendu dire que la commission, à quelques reprises, apparemment, a donné des allocations à des employés, des hauts fonctionnaires qui sont obligés, par exemple, de déménager à Montréal pour travailler, que la commission les aurait aidés par une sorte de subvention pour acheter une maison. Je n'ai pas de preuve, mais j'aimerais le savoir. Je peux même comprendre que ça peut exister. Je connais des cas où quelqu'un qui demeure à Montréal obtient un emploi à Toronto. La compagnie dit: À Toronto, une maison coûte le double d'une maison à Montréal. Donc, vendez votre maison à Montréal et on vous aidera pour l'achat d'une nouvelle maison à Toronto. Si c'est le cas, on aimerait connaître les détails. Est-ce que c'est arrivé? Dans combien de cas cela est-il arrivé? De quel montant s'agit-il? Quand on parle de rumeurs, il y a des gens qui disent: La société achète les maisons gratuitement pour les hauts fonctionnaires. J'ai dit: Je ne pose jamais de question comme celle-là parce qu'on n'a aucune preuve; ce n'est pas correct. Mais s'il y a une rumeur qui circule quelque part, à savoir s'il s'agit d'une allocation de dépenses d'hébergement qui est normale, on aimerait le savoir et cela va faire taire la rumeur. S'il s'agit de quelque chose de plus libéral -non, pas libéral parce que nous sommes libéraux - disons, des libéralités non permises, on aimerait le savoir également.

Il y a un autre sujet qu'on n'a pas trouvé, du moins je ne l'ai pas trouvé dans le rapport annuel. Ce sont les services de firmes de consultants, autres que les cadres de la CSST. Pour l'année 1981, on aimerait savoir combien de firmes ont été consultées et pour quel montant. S'agit-il d'une liste de dix consultants et quels sont les coûts? Combien cela a-t-il coûté, en 1981, à la commission, justement pour engager des experts ou des personnes qui ne sont pas directement des employés de la commission pour faire des analyses, des rapports de travail ou quoi que ce soit? Quel est le montant total?

M. le Président, on a parlé ici, en Chambre, il y a une semaine ou deux, de ce que les journaux ont appelé un autre trou de 200 000 000 $ dans le programme des réparations. Je ne veux' pas faire une bataille avec le ministre concernant les chiffres. Semble-t-il que, dans l'année 1980, il y avait un déficit, à ce poste, de 28 000 000 $. Cela semble être rétabli. Pour l'année 1981, semble-t-il, je ne l'ai pas trouvé non plus dans les états financiers, on a parlé d'un montant de 63 000 000 $, mais ce chiffre peut être moindre ou même plus élevé. Je n'ai aucune idée, mais il s'agit de sommes

assez importantes. On aimerait avoir des détails. J'ai entendu dire qu'en se basant sur ce qui est arrivé dans les trois premiers mois, cela pourrait atteindre une somme de 100 000 000 $ en 1982. On parle d'un déficit total de 200 000 000 $ sur une période de trois ans. Si tel est le cas, on aimerait savoir si, d'abord, le ministre a les chiffres pour confirmer ou nier ces dires et si le montant que je mentionne n'est pas correct, qu'il nous donne le vrai montant dont il s'agit. Deuxièmement, est-ce qu'on a apporté des corrections les première, deuxième et troisième années et, si on ne l'a pas fait, est-ce qu'on va apporter des corrections dès maintenant? Par exemple, si c'est vrai qu'il y a un trou de 200 000 000 $ ou même de 100 000 000 $, est-ce que cela va nécessiter une augmentation de la cotisation que les employeurs seront obligés de payer? Les employeurs se posent ces questions et ils veulent savoir. Le ministre n'a pas besoin de donner des raisons pour justifier l'augmentation du déficit parce que j'imagine qu'un des éléments très importants là-dedans, c'est justement l'interprétation de certains articles de la loi et on est peut-être allé un peu plus loin dans le paiement des indemnités. Existe-t-il un système de contrôle de gestion concernant justement ce poste: programme de réparations?

M. le Président, ce sont simplement quelques questions que je pose au ministre. Je n'ai même pas eu le temps de faire un bon petit débat de base sur la CSST et on aurait du le faire. On pourrait continuer. On a beaucoup d'autres questions. Encore une fois, M. le ministre, on ne cherche pas à être sensationnel. On aimerait bien, avec la tenue d'une commission parlementaire, une fois pour toutes, régler cela. Nous avons nettement l'impression quand il s'agit de la Régie de l'assurance automobile, que c'est très bien administré, que cela va très bien. On n'entend jamais poser de questions. En ce qui concerne la CSST, l'impression est totalement différente. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Pierre Marois

M. Marois: M. le Président, je vous remercie. Je vais tenter, dans le quart d'heure que j'ai à ma disposition, de répondre à une partie des - c'est un peu caricatural, mais le député me comprendra -"quarante-douze" questions qui m'ont été posées en commission parlementaire auxquelles s'ajoutent les "trente-quatorze" d'aujourd'hui. (15 h 50)

Je dois tout de suite dire, en toute honnêteté, au député, que la loi est très précise. Le député le sait, le ministre est responsable de l'application de la loi comme telle. Le ministre peut obtenir tous les renseignements qu'il juge pertinents de la commission. Je n'ai pas en main la réponse cet après-midi, je vais donc prendre avis, premièrement, de la question portant sur la mise à contribution de certaines firmes et, deuxièmement, de la question des créances recevables, quoiqu'il y ait déjà des indications très précises dans le rapport annuel, je pense que le député l'a mentionné. Pour 1982, je n'ai pas les détails en main sur les perspectives budgétaires. Je peux cependant dire tout de suite au député que, d'après les informations que j'ai, sous réserve d'en voir le parachèvement, il n'y aurait pas de hausse de la cotisation pour 1982, ce qui est un excellent signe.

Quant à des allocations pour aider, je voudrais tout de suite mettre un terme à cette rumeur. Il n'est absolument pas question, dans la pratique des choses, que la CSST achète, dans le genre achat gratuit, des maisons. Pas du tout! Pas du tout! Il est vrai, cependant, que dans le cadre de la politique de régionalisation, de déplacement, de mise à contribution des ressources humaines actuelles, pour éviter de gonfler mais pour favoriser, plutôt, la présence d'antennes régionales et être de plus en plus accessible aux besoins des employeurs, des hommes et des femmes qui sont au travail en région, dans les localités, la commission a effectivement favorisé une politique de régionalisation, donc d'incitation à se déplacer.

Pour les gens qui sont propriétaires d'une maison, on connaît le contexte économique, il n'est pas toujours facile de la vendre. Il est vrai que la commission a mis au point - il y a là un conseil d'administration, un comité administratif -des politiques pour favoriser ce secteur, dans certains cas. Je le donne sous réserve; quant aux détails, je pourrai fournir ça par écrit au député de façon très précise. Cela peut prendre la forme d'allocations d'hébergement pour une certaine période, d'une aide à quelqu'un qui a une maison en vente pendant une certaine période et qui se porte acquéreur d'une autre maison dans une autre région, l'aider pendant une certaine période dans ses frais hypothécaires, aider les gens et favoriser leur déplacement. Je pourrais être plus précis, mais je donne l'indication. Quant à des achats gratuits ou des choses comme ça, il n'en est pas question.

Ceci étant dit, revenons aux autres questions: l'informatique, les espaces en région, les contributions, la question de l'éventualité du recours collectif. Comme c'est devant les tribunaux, comme c'est une éventualité et qu'on n'a même pas le jugement à savoir si, oui ou non, la requête

est autorisée, forcément, ça viendra dans les prévisions budgétaires si tant est que ça s'impose à la lumière du jugement qui sera adopté dans les prévisions de budget pour 1982.

Je suis quand même heureux qu'il me reste, malgré tout ça, douze à treize minutes pour reprendre un certain nombre de choses qui ont été mentionnées. D'abord, je me permettrai une remarque d'ordre général qui est fondamentale, quand on parle de cette commission. En 1979, le gouvernement du Québec a fait adopter la loi 17 qui a apporté des changements fondamentaux permettant de s'attaquer, de viser à éliminer à la source les causes mêmes d'accidents et de maladie et, pour ce faire, de mettre à contribution les premiers concernés, c'est-à-dire les hommes et les femmes au travail, les travailleurs, les travailleuses et les employeurs qui sont cotisés pour l'essentiel du budget de la commission. Environ 800 000 000 $, on le sait, proviennent des cotisations des employeurs, le gouvernement du Québec contribuant environ 20 000 000 $ - je donne les chiffres ronds - pour payer les frais d'inspection et assumer une partie des frais de formation, d'information et de recherche.

Ce faisant, par voie de conséquence, on a modifié complètement le mode même d'administration de l'ancienne Commission des accidents du travail. Un conseil d'administration a été établi et les responsables des politiques d'administration de la commission sont, sur une base paritaire, des représentants des employeurs et des représentants des travailleurs organisés syndiqués. Au-dessus de ce conseil d'administration, il y a un comité administratif où siègent un représentant des employeurs, M. Dufour, un représentant des travailleurs, M. Laberge, et le président-directeur général de la commission, M. Robert Sauvé. M. Robert Sauvé avait été nommé - on s'en souvient - en 1977, sous l'ancien régime.

Cela étant dit, un règlement de régie interne a été adopté, sur la recommandation du conseil d'administration et comme le prévoit la loi. Je l'ai ici et je vais le déposer. Il a été recommandé, prépublié par le gouvernement et adopté. Il prévoit les quorums et le reste et prévoit notamment que le président-directeur général a le pouvoir d'autoriser des dépenses jusqu'à concurrence de 75 000 $, que les vice-présidents ont le pouvoir d'autoriser des dépenses jusqu'à concurrence de 5000 $ et que le comité administratif a le pouvoir d'autoriser des dépenses variant de 75 000 $ jusqu'à 300 000 $. Je voudrais déposer le document qui est public.

M. le Président, je comprends que le document est déposé. Je sais que vous êtes très occupé présentement, M. le Président, je le dépose sur le banc d'à côté.

Ceci étant dit, c'est fondamental de comprendre ça pour être juste, correct, et ce que je voudrais surtout éviter, parce qu'il y a eu des ambiguïtés, c'est de laisser blesser des réputations tranquillement par des ambiguïtés. Je ne dis pas que c'est l'intention du député de Sainte-Anne, je connais sa bonne foi, je sais que ce n'est absolument pas ce qu'il recherche. Mais cela peut laisser flotter dans l'air toutes sortes de choses.

Je voudrais aborder tout de suite ce qui a été évoqué l'autre jour, lors de la période des questions. On y revient à ce moment-ci, parce que ça touche l'ensemble de l'administration. On a dit: Cela commence à donner des signes d'une mauvaise administration. Il a été fait mention de cadeaux versés à des cadres. C'est le député de Portneuf qui a soulevé le sujet.

Il a dit: Est-ce que c'est un usage, est-ce que c'est une coutume que, chaque année, des cadeaux soient donnés aux cadres? La réponse, c'est non. Ce n'est ni un usage ni une coutume. Cela a été fait, effectivement, en 1980 et en 1981. En 1981, le coût a été de 5221,80 $. En 1980, cela avait été de 7000,30 $. On voit donc la diminution. Ces deux années-là, il s'est agi de pièces achetées chez des artisans du Québec, pour les cadres donc en encourageant les nôtres. Cela a remplacé la vieille politique d'organiser, comme on dit dans le jargon, un "party" de Noël pour tout le monde et qui avait coûté 9500 $ en 1979. Plus on remonte, plus on voit que les prix étaient hauts. Les coûts antérieurs étaient encore plus élevés. Donc, la politique présente de la commission est d'aller vers ce qu'on appelle un "phasing out." On voit que, sur trois ans, de 9500 $, c'est tombé à 7000 $, puis à 5200 $ et ça s'en va vers une réduction graduelle des coûts, jusqu'à disparition complète.

Passons à la question des voyages. On a parlé des voyages et notamment du voyage en Nouvelle-Zélande. Il y a eu effectivement une autorisation de donnée pour ce voyage par le comité de direction. On m'a parlé ailleurs du voyage. Le voyage a impliqué trois personnes: le président-directeur-général, le vice-président à la réparation, M. Bernier et Mme Nicole Kerjean. Je voudrais faire ici une mise au point. Un journal a dit: ... "et une certaine dame Kerjean." Je trouve cela non seulement inqualifiable, mais terriblement injuste. Les femmes, dans notre société, demandent de plus en plus de prendre leur place normale, et elles ont la compétence pour assumer des postes de commande. Il ne s'agit pas d'"une certaine dame Kerjean", je ne trouve pas cela correct, il s'agit de Mme Nicole Kerjean, qui est l'adjointe au président-directeur-général et qui assume des responsabilités.

Le voyage s'est déroulé sur une période allant du 12 novembre 1981 au 6 décembre 1981. Le but en était, au moment où nous préparons un nouveau régime de réparations pour remplacer le vieux régime actuel, d'aller voir sur place comment cela fonctionne en Nouvelle-Zélande, le seul pays au monde où il y a un régime intégrant les accidents du travail, les accidents d'automobiles et les accidents de loisirs. On a voulu voir comment ça marche sur place et faire rapport. Effectivement, le député a dit: Est-ce qu'il y a eu des "stopovers", je reprends son expression, dans de belles villes agréables? Il n'y a pas eu de "stopover", il y a eu forcément des étapes. Regardez la carte. Pour partir du Québec, qui est là, s'en aller en Nouvelle-Zélande, c'est là, à l'autre bout de la boule, c'est un voyage dispendieux. Juste le billet d'avion, pour trois personnes, a coûté 19 624 50 $. L'ensemble du coût du voyage, en y incluant le prix du billet, a été de 29 351 58 $. Cela comprend tout. On voit donc que les frais de séjour, à 8700 $ pour 25 jours, pour trois personnes, faites le calcul, cela donne une moyenne assez minime, merci, l'objectif étant quand même important.

Pourquoi les arrêts en Allemagne? Pour aller vérifier les expériences allemandes de participation. On expérimente depuis deux ans un modèle de participation. Pourquoi un arrêt en Californie, qui est sur la ligne, comme on le voit? Pour vérifier le fonctionnement d'un système d'informatique dans ce domaine en Californie. Pourquoi un arrêt en Suisse? Pour aller au Bureau international du travail, où est forcément la Banque mondiale de l'état des législations dans ce domaine à travers le monde et pour cueillir l'essentiel des renseignements pertinents. Pourquoi un arrêt en France? Pour aller visiter l'institut qui a le plus d'ancienneté dans le domaine de la recherche en santé du travail, l'Institut national de recherche en santé. Finalement, c'est la Nouvelle-Zélande. Mais il y a eu, cependant, et je vais le déposer, un rapport de 118 pages sur ce voyage, rapport accompagné de presque 80 pages techniques, extrêmement intéressantes à lire. Je voudrais déposer le document, M. le Président. (16 heures)

Il faut faire attention, vous savez. On a parlé des petits oiseaux et des cadeaux. Quand on fait des allusions qui risquent d'être ambiguës, il faut faire attention, parce que quand on fajt voler des petits oiseaux, comme quelqu'un qui crache en l'air, il faut ménager ses arrières. Quand les petits oiseaux te passent en haut du nez et qu'ils décident de faire ce qu'ils font à l'occasion ou quand tu craches en l'air et que tu n'as pas ménagé tes arrières, tout le monde sait sur qui cela va tomber. Il faudrait quand même faire attention aux allusions.

Justement, parlant de cela, si on veut remonter le temps, en 1974 ou 1975 - et là, c'est difficile de relever, parce qu'il y a des documents qui n'existent plus, ce n'était pas sous notre régime - il y a eu un voyage, pas de trois, mais de six personnes de l'ancienne CAT en Nouvelle-Zélande. Le résultat net, savez-vous ce que c'est, aujourd'hui? Pas une feuille, pas un bout de papier, forcément, surtout pas un rapport. Rien! On peut quand même dire qu'il y a une amélioration de ce côté-là aussi.

Y a-t-il eu d'autres voyages? Oui, il y en a eu d'autres. En Italie - j'ai eu l'occasion de l'expliquer aux députés en commission parlementaire - dans le cadre de l'entente Québec-Italie qui permet aux citoyens des deux pays de pouvoir échanger et protéger leurs citoyens sur une base de réciprocité. Faisons attention encore une fois. Chaque année, il y a une réunion des commissions des accidents du travail. On veut remonter? On va remonter. En 1981, cela a impliqué treize personnes au Yukon. En 1980, cela a impliqué sept personnes, en Colombie britannique; en 1978, quatorze personnes, à Terre-Neuve; en 1977, neuf personnes, en Saskatchewan; en 1976, dix personnes, à Charlottetown. Et on arrive en 1975. Cela, ce n'est pas nous. En 1975, à Winnipeg, Manitoba, 26 personnes. En 1974, Nouvelle-Écosse, sept personnes. En 1973, à Jasper, Alberta, 19 personnes. On va remonter. En 1972, à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, 19 personnes. En 1971, en Ontario, 25 personnes. Il faudrait faire attention, parce que quand on remonte, on s'aperçoit... En d'autres termes, on peut quand même admettre tous, en toute honnêteté pour ceux et celles qui ont administré non seulement le régime de réparation, mais en plus les modifications fondamentales apportées par la loi 17... C'est vrai, c'est colossal. C'est gros, c'est considérable comme implications, comme objectifs, comme personnel et tout, mais il me semble qu'il y a eu un effort qui est là et qui est indiqué.

Je voudrais ajouter autre chose. On parle des coûts d'administration et le député a cité un chiffre, mais comparons, par exemple. Le chiffre est là. Il est dans le budget. Cela représente, les frais d'administration à la CSST, 9,9% du budget.

Cela se compare comment? Quand je me regarde, je me désole, comme disait l'autre, et quand je me compare, je me console. Cela ne veut pas dire, qu'il n'y a pas place à amélioration. Donc, 9,9% au Québec. En Ontario, 14% et, de façon générale au Canada, les frais d'administration varient entre 10% et 15%. 9,9%, c'est vraisemblablement le taux le plus bas partout dans tout le Québec.

Je voudrais revenir sur une chose. Une fois pour toutes, j'espère que je vais être

clair et précis sur la base des chiffres que j'ai. On a parlé d'un trou fiscal de 200 000 000 $. Je le nie. C'est faux, parce que c'est impossible. Il ne peut pas y avoir de trou fiscal, parce qu'un surplus chaque année - il y a un surplus ou un déficit à la fin de l'année - ou un déficit est étalé sur les années subséquentes. Cela se fait ainsi depuis 1975 pour une raison. C'est pour éviter des fluctuations trop brusques des taux qui sont imposés aux employeurs. D'autres ont dit que c'est financé par des emprunts. Ce ne sont pas des emprunts, parce que la commission de la santé et de la sécurité s'autofinance et doit percevoir ce dont elle a besoin chaque année à même ses fonds. Tout le monde pourra lire dans le rapport que la commission québécoise de la santé et de la sécurité a 1 440 648 000 $ en réserve à la Caisse de dépôt et placement du Québec. C'est la commission qui a le plus haut fonds de réserve, de beaucoup supérieur à celui de l'Ontario et de la Colombie britannique. Quelqu'un a dit: Des déficits, c'est un signe de mauvaise administration. Encore là, faisons attention quand on crache en l'air. Les surplus et les déficits, cela donne au bout de la ligne un déficit ou un surplus accumulé. En 1974, l'année où on partait, d'après les chiffres qu'on me communique, il y avait un déficit accumulé de 37 800 000 $. En 1975, ce déficit était de 17 100 000 $. On est rendu à un déficit accumulé de 54 900 000 $. En 1976, surplus à la fin de l'année de 19 200 000 $, ce qui diminue le déficit accumulé à 35 100 000 $. En 1977, un surplus de 1 000 000 $, on diminue encore le déficit. En 1978, un surplus de 1 500 000 $, on diminue le déficit. En 1979, un surplus de 18 500 000 $, on diminue le déficit à 14 700 000 $. En 1980, un surplus de 43 900 000 $. On est rendu, non plus à un déficit accumulé, mais à un surplus de 29 200 000 $ accumulé. En 1981, un déficit de 11 000 000 $ qui, évidemment, réduit le surplus accumulé, le ramène à 18 300 000 $, avec la réserve, cependant, que se sont ajoutés des déboursés supplémentaires en vertu des problèmes concernant l'article 38.4 et qui, là, se trouvent imputés sur la réserve actuarielle qui a été établie sur une période de trente ans à partir de 1975. Donc, à partir d'aujourd'hui, en 1982, cela s'échelonne toujours jusqu'en l'an 2005, sur une période de 23 ans. Là aussi, il faut faire attention,

Tout cela pour dire une chose - je l'ai déjà évoquée, et je vais terminer là-dessus -Je suis ouvert à une rencontre. J'ai eu l'occasion de dire, d'ailleurs, que le président et les vice-présidents seraient d'accord pour rencontrer les députés de ce côté et de l'autre côté de la Chambre. Est-ce suffisant? J'ai déjà dit oui quant à une commission parlementaire - l'occasion va se présenter bientôt - cependant, en faisant attention - le député l'a évoqué avec justesse - car il y a des recours devant les tribunaux. Il faut faire attention si on veut vraiment que tous les livres soient sur la table. Mais, quand même, on a déjà une indication que les choses se sont grandement améliorées. Est-ce suffisant? Est-ce satisfaisant? Est-ce qu'il y a moyen de faire plus et mieux? Oui, il y a toujours moyen de faire plus et mieux.

C'est ce à quoi s'appliquent les hommes et les femmes qui travaillent à la commission. Je tiens à leur rendre hommage, parce que ce n'est pas une tâche facile. Après deux années d'expérience d'un nouveau mode d'administration qui implique la participation des employeurs, ceux qui paient, et des travailleurs, ceux qui ont à vivre avec le régime et qui sont impliqués maintenant dans les décisions administratives, il me paraîtrait normal que, dans la perspective où, en plus, on envoie au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre un projet de réforme du régime de lésion professionnelle pour l'harmoniser avec le régime d'assurance automobile basé sur une philosophie de remplacement de revenus et régler les fameux problèmes de l'article 38.4, qu'on puisse, en commission parlementaire, avec tous les chiffres pertinents, ouvrir et regarder cela ensemble, à la condition de ne pas prendre un chiffre ici et un autre chiffre là, de l'isoler et d'extrapoler à partir de là, mais de regarder les perspectives. Il faudrait qu'on puisse aussi se comparer aux autres, à nos voisins de l'Ontario, aux États américains avoisinants pour voir quelle sorte d'implications administratives cela a. Qu'on ait un tableau global, je suis prêt à cela. Non seulement je suis prêt à cela, mais c'est ce que je vais faire pour véritablement faire en sorte que soient levées toutes les formes d'ambiguïtés possibles et imaginables et qu'on arrête les rumeurs. Je veux bien qu'il y en ait, mais à la condition qu'on les étoffe, qu'on les étaye. On peut bien faire voler les petits oiseaux tant qu'on voudra, cela peut être rigolo pour un bout de temps, mais je ne veux pas qu'on entache des réputations avec cela. S'il y a des problèmes réels, je pense qu'il ne faut pas faire comme s'il n'y en avait pas. Je suis entièrement d'accord qu'il faut prendre les mesures pour les corriger. C'est pourquoi j'ai pensé et j'ai même décidé, durant la période qui s'en vient, trois mois, juillet, août et septembre, de profiter de l'occasion que justement s'en vient une réforme - sous réserve de voir quelles seront les recommandations du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre et les décisions éventuelles du Conseil des ministres - pour demander à quelqu'un, peut-être une petite équipe, peut-être juste une personne de l'extérieur, de justement regarder cela pour évaluer sur une base comparative et regarder comment cela procède et nous faire un rapport, par voie de

conséquence, qui pourrait être utile à tout le monde.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal, selon l'article 130, vous avez encore quelques minutes pour l'intervention concernant la Régie du logement.

Problèmes à la Régie du logement M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais soulever quelques problèmes sérieux qui existent à la Régie du logement. Je voudrais demander au ministre de prendre les mesures nécessaires pour apporter les correctifs qui s'imposent. (16 h 10)

Premièrement, il y a la question des délais. L'automne dernier, il y avait 40 000 causes en suspens devant la Régie du logement. Le ministre nous avait assuré qu'avec la nomination de 34 régisseurs additionnels temporaires, on disposerait de ces 40 000 causes et que la régie pourrait fonctionner d'une façon plus efficace. Mais, aujourd'hui, M. le Président, selon les chiffres du mois de mai de cette année, les causes en suspens à la régie se chiffrent par 82 000. Au lieu de s'améliorer, la situation semble empirer. Je trouve difficile de comprendre pourquoi on a 82 000 causes en suspens devant la régie.

Je sais que le ministre nous a déjà expliqué qu'une partie de ces causes proviennent de la loi 57 qui a réduit les surtaxes sur certains immeubles et, par conséquent, il y a eu des demandes à la régie, demandes qui ne se répéteront pas, parce que, selon l'application de l'article 573 de la loi 57, cela arrivera seulement une fois. Mais le fait demeure, M. le Président, que, même avec cette explication, le nombre de causes augmente constamment, nous nous trouvons maintenant devant le fait qu'il y a 82 000 causes en suspens et les délais sont inacceptables.

M. le Président, nous n'avons pas accepté que le ministre impose un ticket modérateur à la Régie du logement. S'il y a trop de causes devant la régie, la façon de régler le problème, ce n'est pas d'imposer un ticket modérateur pour décourager ceux qui veulent se prévaloir de ce service. La réponse n'est pas de procéder de cette façon, mais c'est de faire des changements soit administratifs, soit législatifs au fonctionnement de la régie.

Troisièmement, M. le Président, il y a la question des avis d'audition pour non-paiement de loyer. Les délais affectent non seulement les locataires, les propriétaires, mais ils affectent toutes les parties concernées. Pour l'avis d'audition pour non- paiement de loyer, des exemples ont été donnés en commission parlementaire, en ce sens que cela prenait huit, neuf, dix mois pour un propriétaire, qui voulait obtenir l'éviction d'un locataire qui ne payait pas son loyer, et qu'à la veille, même à l'avant-veille de l'audition, le locataire quittait les lieux et le propriétaire se retrouvait avec huit, neuf, dix mois qui étaient impayés.

Il y a deux problèmes, M. le Président. Premièrement, ce ne sont pas tous les propriétaires qui sont en mesure de subir de telles pertes. Il y a des petits propriétaires, des propriétaires de duplex, de triplex qui ne sont pas capables d'assumer ce genre de cas.

Deuxièmement, et ce qui est encore plus important, c'est que, quand ces choses arrivent, cela affecte les locataires, cela cause un préjudice aux locataires, parce que - ce sont des représentations qui ont été faites au ministre, non pas seulement par l'Opposition, mais même par des membres de son gouvernement, par des députés du Parti québécois - cela devient plus difficile pour un locataire à faible revenu ou même celui qui perçoit de l'assistance sociale de pouvoir louer, parce que le propriétaire, sachant qu'il a huit, neuf, dix mois de délai, craignant de se trouver dans une position où il ne pourra par récupérer son loyer, va soit refuser de louer à un locataire qui n'a pas les revenus nécessaires ou bien, comme cela a été porté à l'attention du ministre, demander qu'il y ait un endosseur. Nous savons qu'aujourd'hui, il y a une pénurie de logements dans certains niveaux de location. On n'a pas construit assez de logements locatifs. Cela cause des difficultés à une certaine catégorie de locataires, difficultés qui sont causées par les délais extrêmes qui sont à la base même du fonctionnement actuel de la Régie du logement.

Je suis certain que le ministre a vu dans les journaux d'aujourd'hui un exemple du genre de délais qui existent quand cela a pris une quinzaine de mois avant de pouvoir obtenir justice devant la Régie du logement. Comme le signalait ce journaliste, M. Guy Pinard, dans la Presse: "Tout d'abord, la régie a mis dix mois à ouvrir le dossier." Il parle d'un dossier en particulier, mais il démontre que ça s'applique non seulement à ce dossier, mais qu'il est généralisé, le genre de délai auquel il réfère. Il cite la personne qui a été victime de ce délai. Il dit: "Je m'étonne de ce délai stupéfiant de 15 mois pour un tribunal qui, justement, a été créé pour accélérer le processus de règlement." Nous voyons la situation dans laquelle ces gens se trouvent. C'est un problème, je le répète, non seulement pour les propriétaires, mais pour les locataires également.

À la suite des délais de la régie, à la suite des avis d'audition pour les cas de gens qui ne paient pas leur loyer - il faut l'admettre, il y a des gens qui prennent

avantage des lois, quand elles leur permettent - il s'est créé, d'après certaines déclarations, une liste noire de locataires. C'est la première fois qu'on voit une liste noire. Pourquoi? Parce que les propriétaires se voyant dans une situation où ils n'obtenaient pas le recours auquel ils avaient droit, se sont constitué une liste noire. C'est malheureux, c'est inacceptable parce que ça pose des problèmes. Je blâme les propriétaires de l'avoir fait, mais je blâme aussi le gouvernement et la Régie du logement qui ouvrent la porte à la création d'une telle liste.

Il ne faut pas se surprendre, quand une loi n'atteint pas ses objectifs, quand arrive une injustice soit pour une catégorie de citoyens ou une autre, que les citoyens trouvent des moyens, d'autres solutions. La solution qu'ils ont trouvée, c'est de créer une liste noire pour un petit nombre de locataires qui, peut-être, prennent avantage de la loi. Naturellement, c'est toute une catégorie de locataires qui en souffrent.

Je suis certain que le ministre a reçu des représentations du comité régional contre les hausses de loyer, en date du 9 juin. Ce comité, justement, fait référence à cette liste noire, il fait état des problèmes que ça pose pour les locataires, il fait état du préjudice que ça leur cause et il fait certaines suggestions au gouvernement pour qu'il prenne les mesures nécessaires afin d'éviter cette pratique. C'est inacceptable, on pourrait même dire que c'est illégal, mais ce sera difficile de prendre des recours judiciaires contre l'existence d'une telle liste qui n'est pas publique. La seule façon d'éviter cet abus, c'est de faire une réforme de la Régie du logement.

L'automne dernier, le gouvernement a annoncé qu'il y aurait une réforme, des changements substantiels à la Régie du logement. Nous attendions ces changements ce printemps et nous ne les avons pas reçus. Nous demandons au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour effectuer, soit sur le plan administratif ou législatif, les changements qui s'imposent à la Régie du logement. Je pourrais peut-être faire quelques suggestions au ministre de l'Habitation. (16 h 20)

Premièrement, sur le plan administratif, il faudrait que vous connaissiez les raisons pour lesquelles il y a 82 000 causes en suspens. Cela n'a pas de bon sens qu'une telle situation existe. Vous avez ouvert six bureaux pour faciliter justement l'accès à ce service par les personnes qui veulent s'en prévaloir, mais en ouvrant ces bureaux, si vous ne pouvez pas garantir un service adéquat, vous causez un tort énorme aux gens qui veulent se prévaloir des services de la régie.

D'abord, il va falloir que le ministre prenne les mesures nécessaires à l'intérieur de l'administration de cette régie pour que les délais soient raisonnables et non comme ils existent aujourd'hui. Ensuite, il faudrait constituer un vrai tribunal du logement. Le ministre sait qu'il y a eu des contestations, que certains aspects de la loi ont été déclarés inconstitutionnels. Sans s'embarquer sur des querelles constitutionnelles... Ce n'est pas cela qu'on veut. Les querelles constitutionnelles, on va les laisser au domaine politique du ministre des Affaires intergouvernementales et aux autres qui veulent s'occuper de cela. Aujourd'hui, on est préoccupé par les locataires et les propriétaires qui doivent utiliser les services de la régie. Alors, il serait possible de s'entendre avec le gouvernement fédéral pour changer les structures et avoir les pouvoirs nécessaires jusqu'à ce qu'il y ait d'autres changements à la constitution. En attendant, ce n'est pas une raison pour faire souffrir les locataires et les propriétaires parce qu'on n'a pas un tribunal du logement, qui serait inconstitutionnel, strictement de juridiction provinciale. Alors, entendez-vous avec le gouvernement fédéral pour constituer un tribunal du logement sous la juridiction des lois provinciales, quitte, si nécessaire, à déléguer des pouvoirs ou adopter d'autres mesures pour en assurer la constitutionnalité.

De plus, vous devriez accorder la priorité aux cas d'éviction. Si un propriétaire se présente devant la régie parce qu'un locataire ne paie pas son loyer, il me semble qu'en toute justice, pour tout le monde, pour l'ensemble des locataires, pour éviter les listes noires, pour éviter la demande d'endosseur, pour ne pas que les propriétaires se trouvent dans la situation où ils vont faire très attention à qui ils vont louer, dans un cas d'éviction, il devrait y avoir une section spéciale à la régie pour minimiser les délais et pour qu'on procède le plus tôt possible.

Deuxièmement, il devrait y avoir une section spéciale pour s'occuper des cas d'augmentation de loyer. Tous les mois de juillet, les baux sont renouvelés. Pour les cas d'éviction et d'augmentation de loyer, il devrait y avoir une section spéciale pour rendre des décisions dans les délais les plus brefs. Il devrait y avoir une autre section pour s'occuper des autres relations locataire-locateur qui, avant, étaient sous la juridiction de la Cour supérieure ou de la Cour provinciale et que vous avez maintenant placées sous la juridiction de la régie.

M. le Président, il me semble qu'il est possible, avec de la bonne volonté, d'effectuer des changements à la Régie du logement pour le bénéfice de tous les intéressés. Réduisez les délais, faites les changements afin que ceux qui veulent utiliser ce service puissent le faire et

obtenir le service nécessaire sans tous ces délais et créez des sections spéciales pour aider et contribuer à la bonne administration de la régie.

M. le Président, je suis persuadé que si le gouvernement a de la bonne volonté et veut vraiment s'assurer que la Régie du logement donne le service qu'elle doit donner aux locataires et aux propriétaires, il pourrait déposer, à l'Assemblée nationale, une loi qui apporterait ces changements et assurerait aussi que les mesures administratives seront prises pour garantir une meilleure efficacité de la Régie du logement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

M. Guy Tardif

M. Tardif: M. le Président, il y a une donnée fondamentale, bien avant les querelles constitutionnelles qu'évoquait le député de Mont-Royal, qui doit être connue de tous avant d'aborder cette question, et c'est le fait qu'il y a au Québec 1 000 000 de familles locataires, M. le Président, et que ces familles locataires se sont entendues, dans 90% ou 92% des cas, avec leurs 200 000 propriétaires. Le député de Mont-Royal n'en parle pas. Il nous dit: 80 000 causes, mais 80 000 causes sur 1 000 000 de baux par année, c'est 8,2%. C'est une donnée fondamentale que nous devons avoir en mémoire lorsque nous abordons ce problème.

Deuxièmement, face à ce problème, à cette situation de 1 000 000 de familles locataires et de 200 000 propriétaires, on retrouve évidemment aux deux extrêmes ces cas dont on entend parler; on n'entend pas parler des 92% qui s'entendent à l'amiable; les gens qui s'entendent à l'amiable ne font pas la manchette. On entend parler des 8% qui ne s'entendent pas et à cause de ces gens-là, surtout pour ceux qui se polarisent j'allais dire aux deux extrêmes, on oppose, on brandit comme deux droits qui s'affrontent, le droit au logement chez les locataires et le droit de propriété chez les autres.

Je pense que le rôle de l'État n'est pas de dire: Nous allons prendre parti pour ceux qui affirment la primauté du droit au logement ou prendre parti pour ceux qui affirment la primauté du droit à la propriété, mais le tout est d'essayer de faire que le plus grand nombre de propriétaires et de locataires s'entendent à l'amiable et qu'à défaut de pouvoir le faire, il puisse y avoir un arbitre, un tribunal, puisqu'on ne vit plus dans une société où on règle ses comptes soi-même, qu'on puisse s'en référer à un tiers pour arbitrer.

Il y a un autre point. Il faut que ce tribunal soit facile d'accès. On a donc ouvert une certaine quantité de bureaux. Au lieu d'aller se ramasser au palais de justice, rue Notre-Dame, il y a cinq bureaux sur l'île de Montréal, un à Laval, un sur la rive sud à Longueuil et d'autres ailleurs au Québec.

C'est vrai que, de façon exceptionnelle, la régie a été embourbée par suite d'un nouveau recours, un recours spécial qui a été donné pour une fois aux locataires à la suite de l'abolition des surtaxes. Je voudrais préciser que cela explique 45 000 causes en soi. Mais est-ce que le député de Mont-Royal voudrait insinuer que ces gens-là n'auraient pas dû avoir de recours? Je pense que ce n'est pas son intention. Ces gens-là ont un recours et c'est un fait...

M. Ciaccia: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, sur une question de privilège.

M. Ciaccia: Je n'ai pas insinué que ces gens-là ne devraient pas avoir de recours. Ne commencez pas à porter de telles accusations. Je vous ai demandé de prendre les mesures nécessaires pour qu'il n'y ait pas 82 000 causes en suspens quand il n'y en avait que 40 000 l'année dernière.

Le Président: M. le ministre.

M. Tardif: Je pense que le député de Mont-Royal prend la mouche inutilement. J'ai dit: Je pense que cela n'a pas été son intention d'insinuer que ces gens-là ne devaient pas avoir de recours. Effectivement, ils en ont un, puisque la Loi sur la réforme de la fiscalité municipale a aboli des surtaxes de 2,25 $ les 100 $ d'évaluation. Sur un immeuble évalué à 1 000 000 $, cela représentait 22 000 $ d'abolition de taxes. Ce que la Loi sur la réforme de la fiscalité municipale disait, c'est que les locataires pourront demander une réouverture du bail pour ajuster cela.

Or, cela a donné lieu à des demandes qui se produisent une fois dans le temps, qui sont dans la machine et qui sont venues retarder une partie du processus.

Deuxième élément, le député de Mont-Royal dit: Vous avez engagé des régisseurs, ils sont néanmoins en retard. Or, sur les 82 000 causes évoquées par le député de Mont-Royal, si j'enlève les quelque 40 000 causes se référant à l'article 573 de la Loi sur la réforme de la fiscalité municipale, il en reste à peu près 40 000. Or, les régisseurs entendent à peu près 10 000 causes par mois présentement, c'est donc tout un volume de travail pour quatre mois, et il ne m'apparaît pas que ce soient des délais indus. Évidemment, il y a toujours une espèce d'arrérages dus à l'article...

M. le Président, je n'ai pas interrompu le député de Mont-Royal durant son exposé...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! (16 h 30)

M. Tardif: Ce que je dis, c'est que n'eût été de ce recours exceptionnel non récurrent dans le temps, le volume de travail présentement à la régie est de près de quatre mois qui, encore une fois, sont des délais tout à fait à l'intérieur des limites du raisonnable.

M. le Président, le député de Mont-Royal nous dit qu'on conçoit qu'il y a des causes, par exemple, de non-paiement de loyer où les auditions sont trop longues et, évidemment, qui résultent dans des pertes pour les propriétaires. Là-dessus, je lui donne totalement raison. Je constate que lorsque je lui donne raison, il ne m'écoute pas. Sur le non-paiement du loyer, il a tout à fait raison. J'ai demandé à la régie, au nouveau président, qu'une procédure expéditive avec un rôle spécial soit instaurée à la régie précisément pour ces cas. Donc, là-dessus, dans les cas de non-paiement, on comprendra que, contrairement à l'exemple qui nous a été cité dans le journal et qu'a évoqué le député de Mont-Royal où pour un écart de 1,23 $ sur le quantum du loyer, on s'en est référé à un arbitre, il eut peut-être mieux valu pour les deux parties de s'entendre et de couper la poire en deux pour 0,75 $ de plus ou de moins. Néanmoins, M. le Président, ce que je veux souligner ici, c'est que dans les cas de non-paiement de loyer, je suis tout à fait d'accord avec le député qu'il nous faut viser à écourter ces délais, introduire une procédure accélérée pour ces cas.

Quant à l'autre point, le député parle de listes noires qui surgissent. Je pense qu'en effet, il s'agit là de pratiques pour lesquelles j'ai demandé aussi bien à la Régie du logement qu'à l'Office de la protection du consommateur de surveiller de près ces opérations. La constitution de fichiers comme tels, je voudrais là-dessus être très clair, nous apparaît être quelque chose qui est à la limite présentement de ce qui peut être acceptable. À partir du moment où il sera démontré qu'il s'agit de mesures discriminatoires, nous devrons prendre action. Ce que je peux dire, cependant, pour le moment, c'est que la constitution d'un fichier sur le crédit plus ou moins acceptable d'un locataire, selon les normes qu'on voudra mettre dans ce fichier, tombe sous le coup de l'article 240 de la Loi sur la protection du consommateur, selon les conseillers juridiques de cet organisme, c'est-à-dire que tout citoyen a le droit d'obtenir accès à ce fichier, de la même manière qu'il peut obtenir accès à sa fiche de crédit auprès des compagnies de crédit. Pour l'instant, c'est ce que les avocats de l'Office de la protection du consommateur nous disent à propos de ce fichier, si tant est qu'il en existe un touchable, palpable.

Deuxième élément, M. le Président, c'est le fait que le député de Mont-Royal nous dit: Vous devriez constituer un vrai tribunal du logement. Or, je maintiens que la Régie du logement est, à toutes fins utiles, ce tribunal du logement. Je comprends qu'en 1867, lorsque l'Acte de l'Amérique du Nord britannique a été adopté par le Parlement de Londres, il n'y avait pas un million de locataires au Québec et il n'y en avait pas 1 200 000 en Ontario, M. le Président. On a donc jugé que ces matières civiles étaient de la compétence absolue des tribunaux dits supérieurs, à savoir soit la Cour provinciale, soit la Cour supérieure. De façon très pratique, si le député de Mont-Royal se plaint de délais de quatre mois qui peuvent survenir à la régie, je lui laisse le soin d'apprécier ce qu'il penserait des délais qui frapperaient les causes entendues devant les tribunaux réguliers.

Je pense qu'il nous faut convenir d'une procédure ou d'un lieu spécial pour l'audition de ces volumes de causes. Je vois mal soumettre à ces savants juges de la Cour supérieure des querelles de voisinage, des querelles de cordes à linge ou des querelles autour d'une augmentation de loyer de 1,50 $, comme celle qui est évoquée dans l'article du journal de ce matin.

Troisième élément, le député nous dit de viser à réduire les délais. L'introduction de la fonction de greffier spécial, l'équivalent du protonotaire dans les palais de justice, avait précisément ce but. Nous espérons que dans tous les cas où l'une ou l'autre des parties ne se présente pas, où il sera possible de procéder à une audition ex parte, ceci aura un effet d'accélération sur l'ensemble du processus. M. le Président, il faut quand même constater une chose. C'est que le volume des plaintes de fixation de loyers présentement est relativement stable nonobstant le fait qu'il y a eu des amendements à la loi. Je cite des chiffres: En 1977, il y avait eu 35 200 causes de fixation de loyers à la régie. En 1978, 25 700. En 1979, 23 500; en 1980, 23 600 et, en 1981, 26 800. Je pense qu'il y a un léger accroissement par rapport à 1980 mais, si on regarde par rapport à 1977, c'est une diminution de presque 9000 causes par année. Je pense que c'est important dans la conjoncture actuelle. Les taux d'intérêt sont élevés, des propriétaires aux prises avec un problème de renégociation des hypothèques doivent évidemment refléter ces augmentations d'hypothèques dans une structure de loyer. On conçoit que dans cas-là, alors qu'auparavant il aurait peut-être été facile d'en venir à une augmentation acceptable aux parties, on préfère s'en remettre à un arbitre, histoire de faire

jauger, apprécier et valider par un tiers, par un tribunal ces différents facteurs d'augmentation qui touchent les primes d'assurance, les coûts de l'énergie, du chauffage, des travaux d'entretien, d'amélioration et, évidemment, le loyer de l'argent. Dans le contexte actuel, ce qui est surprenant, c'est qu'il n'y ait pas plus de causes à la régie présentement et que, somme toute, les gens réussissent néanmoins, dans une très forte proportion, à s'entendre sur ces matières. Je n'excuse pas, en présentant cette argumentation, les délais, mais j'essaie de les expliquer au député de Mont-Royal. Cela ne dégage pas la régie de l'obligation de chercher par tous les moyens possibles d'essayer de rendre une justice qui soit inspirée des principes du droit, de l'équité et, évidemment, que cela se fasse de la façon la plus accélérée possible.

M. le Président, au moment où précisément ces efforts se font, je voudrais tout simplement que nous essayions, une fois liquidées les causes qui ont résulté de l'abolition des surtaxes sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal et avec l'addition de mesures aussi bien sur le plan des nouveaux types de personnel qui sont utilisés dans ces matières et aussi de nouvelles procédures administratives, de regarder d'un oeil serein les amendements qui pourraient être requis. Je ne suis pas réfractaire, M. le Président, à l'idée d'apporter des correctifs qui pourraient faire en sorte d'améliorer cet équilibre fragile, cet équilibre précaire entre les parties en présence, entre ce que d'aucuns préfèrent appeler le droit absolu au logement et ce que d'autres appellent le droit absolu à la propriété. Il faut essayer de trouver un meilleur équilibre. Si le député de Mont-Royal, comme tout autre membre de cette Chambre ou toute autre personne au Québec, avait des suggestions à nous faire sur cette façon, elles seront les bienvenues. Merci, M. le Président.

Le Président: Le rapport groupant les rapports des commissions permanentes qui ont procédé à l'étude des crédits du budget principal de l'année financière 1982-1983 pour chacun des ministères du gouvernement du Québec sera-t-il adopté?

Une voix: Adopté sur division. Le Président: Adopté sur division. M. Brassard: M. le Président...

Projet de loi no 81

Première, deuxième et troisième lecture

Le Président: Conformément à l'article 131 du règlement de l'Assemblée nationale du Québec, M. le ministre des Finances propose la première, deuxième et troisième lecture du projet de loi no 81, Loi octroyant à Sa Majesté les deniers requis pour les dépenses du gouvernement pour l'année financière se terminant le 31 mars 1983 et pour d'autres fins du service public. Cette motion de première, deuxième et troisième lecture du projet de loi 81 sera-t-elle adoptée?

Des voix: Adopté sur division. Le Président: Adopté sur division.

Le Secrétaire adjoint: Première, deuxième et troisième lecture de ce projet de loi.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous prierais d'appeler maintenant l'article 20 de notre feuilleton.

Le Président: J'appelle... M. Lalonde: Excusez-moi.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Avant qu'on aborde l'article 20, M. le Président, j'aurais une directive à vous demander. Il s'agit de l'application de l'article 161, troisième paragraphe. On en a entendu parler ici ce matin. Cet article 161, qui se trouve dans le chapitre des commissions dans notre règlement, dit au troisième paragraphe: "Toutefois, un membre d'une commission peut s'opposer au dépôt d'un rapport fait par cette commission en exposant brièvement les motifs de son opposition. Si le président juge que le rapport est entaché d'irrégularités, il peut ordonner au rapporteur de la commission d'y apporter les corrections requises." (16 h 40)

M. le Président, ma question est bien simple: Dans le cas que nous allons aborder à l'article 20 et avant que nous l'abordions, concernant le projet de loi no 37, comment un membre de la commission des affaires municipales qui a étudié article par article le projet de loi no 37 dont le rapport a été déposé ici, peut-il exercer les droits prévus à l'article 161.3 à l'égard de ce rapport, c'est-à-dire le droit de corriger, d'étudier, d'examiner le contenu du rapport et d'en corriger les irrégularités ou de demander au président de la commission de corriger les irrégularités? Par exemple, à la page 13 du rapport... Si je le mentionne, je ne veux pas

en tenir responsable la personne ici qui a signé le rapport. On sait que le rapporteur se rend l'auteur de notes qui sont prises par d'autres personnes. Alors, que personne ne se sente visé ici. On voit, à la page 13, la mention suivante: La discussion se poursuit sur la motion du député de Hull. Or, il n'y a jamais eu de discussion sur la motion du député de Hull. Nous référer au rapport? On ne l'a pas vu avant qu'il soit déposé. Une fois qu'il a été déposé, on a pu l'examiner. Pour quelle raison n'y a-t-il pas eu de discussion sur la motion de député de Hull? Parce que la motion du député de Hull a été déclarée irrecevable. Donc, il y a une irrégularité ici, il y a une erreur. Ce n'est pas une erreur de frappe, comme celle de ce matin, ou une erreur tellement évidente, comme ce n'est pas la commission du travail, mais c'est la commission du revenu; de toute évidence, vous l'avez, en vertu de l'article 65, corrigée. Il n'y a pas eu de discussion sur la motion du député de Hull, parce que la motion du député de Hull...

Le Président: Que je n'ai pas corrigé, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il y a eu consentement ce matin.

M. Lalonde: II y a eu consentement. Je pense que vous avez convenu que vous pourriez le corriger en vertu de l'article 65.2. Un membre de la commission aurait pu, si on avait examiné le rapport à la commission, demander au président de la commission de dire au rapporteur: Corrigez cette irrégularité. Comment pouvons-nous la corriger actuellement? Vous avez dit ce matin: II y a eu un consentement pour corriger le titre de la commission qui était erroné. Vous avez dit que vous auriez pu le faire. Il y a eu un consentement, je vous remercie de m'avoir rappelé ce détail, mais vous aviez quand même dit, si je me souviens bien - vous pouvez me corriger -que l'article 65.2 vous donnerait peut-être le pouvoir de le faire, de corriger un rapport comme la correction qui a été faite ce matin.

Or, en lisant l'article 65.2, on voit que: "Le président peut également modifier dans sa forme une motion pour la rendre recevable." Ici, il ne s'agit pas de savoir si la motion qui est devant nous, parce que nous étudions toujours une motion, est recevable. Il s'agit de savoir comment je peux faire survivre, faire exercer le droit d'un membre d'une commission à corriger un rapport. Je pense respectueusement que l'article 65.2 ne pourrait pas vous permettre de corriger cette irrégularité qui apparaît au rapport. Je nomme celle-là, mais on pourrait en avoir d'autres. C'est pour vous montrer que ce n'est pas une correction que le président de l'Assemblée nationale peut faire de son propre chef en vertu de l'article 65.2.

Une fois qu'on est rendu ici, on ne peut plus exercer le droit de l'article 161.3, parce que la commission ne s'est plus réunie après minuit. On pourra rétorquer: La commission avait le loisir d'étudier le rapport. Si elle ne l'a pas fait, elle a renoncé, en fait, à l'examiner et à le corriger. Il est quand même de notoriété publique - cela fait partie de nos procès-verbaux - que la dernière réunion de la commission s'est terminée le 16 juin à minuit. À ce moment, la commission ne savait pas, de connaissance formelle, ou ne pouvait pas présumer qu'elle ne se réunirait plus, parce que la motion de clôture a été votée le lendemain matin. C'est tellement vrai qu'elle ne savait pas que, lors d'une intervention que j'ai faite à la commission ce soir-là, ayant participé ici aux débats sur la motion de clôture, j'ai tenté d'informer les membres de la commission de ce qui se passait, qu'il y avait une clôture qui se préparait, que la guillotine allait tomber sur notre tête à minuit. On me l'a refusé. Le président m'a dit, à la page 19 du rapport: "Le président rappelle au député de Marguerite-Bourgeoys qu'un député ne peut aborder en commission un sujet présentement débattu à l'Assemblée nationale." La commission ne pouvait pas savoir, ne savait pas que c'était sa dernière séance et ne pouvait pas dire: À 23 h 30, on va étudier le rapport, on va l'examiner et on va le corriger.

M. le Président, ma question est celle-ci: Si on ne donne pas le loisir à la commission de se réunir une autre fois pour examiner le rapport, en corriger les irrégularités, comment un membre de cette commission peut-il se prévaloir de l'article 161, troisième paragraphe, qui, de toute évidence, s'applique à une commission et non pas à l'Assemblée nationale, puisqu'on parle d'un membre, qu'on ne parle pas d'un député et que cet article se trouve au chapitre des commissions? Merci, M. le Président.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous quelque chose à dire? Sinon, je serais prêt à rendre ma décision.

M. Brassard: J'ai peu de choses à dire sur ce sujet. Évidemment, je suis très angoissé du fait que le rapport pourrait comporter certaines irrégularités. Cela m'inquiète profondément, M. le Président, parce que je suis sûr que cela risque de traumatiser gravement la population du Québec.

Je vous signalerais simplement que je ne vois pas pourquoi, cependant, il y aurait de nouveau une convocation de la commission puisque le troisième paragraphe dit justement que, "si le président juge que le rapport est entaché d'irrégularités, il peut ordonner au

rapporteur de la commission d'y apporter les corrections requises." Donc, cela ne me semble pas utile de convoquer à nouveau la commission puisqu'on parle, dans le troisième paragraphe, du rapporteur.

De toute façon, si le rapport de cette commission comportait certaines petites irrégularités, comme le leader adjoint de l'Opposition en a donné quelques exemples, je ne pense pas que cela puisse empêcher les Québécois de dormir ce soir, M. le Président.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Simplement pour répondre, si vous permettez. On peut ironiser sur l'application du règlement si on veut, surtout si on n'en connaît pas véritablement l'application, d'autant plus que le leader adjoint du gouvernement semble ne pas avoir situé l'article 161, troisième paragraphe, dans son contexte. On ne parle pas du président de l'Assemblée nationale, on parle du président de la commission. Si on lit bien le troisième paragraphe, on dit: "Toutefois, un membre d'une commission - on ne dit pas "un député" et on n'est membre d'une commission que lorsque la commission siège -peut s'opposer au dépôt." Si la commission ne siège pas, comment un membre de la commission peut-il s'opposer au dépôt d'un rapport, parce qu'il y a une irrégularité, et demander au président de la corriger? M. le Président, je pense qu'il est bien clair que cela s'applique seulement aux commissions.

Le Président: En dernier lieu, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Je ferais simplement remarquer au leader de l'Opposition que, dans le cas qui nous intéresse, c'est à la suite d'un ordre de la Chambre que la commission a été tenue de faire rapport. C'est un ordre de la Chambre en vertu de l'article 156, c'est très différent.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Deux points sont discutés, deux points ont été soulevés. Tout d'abord, est-il possible de convoquer à nouveau la commission des affaires municipales? Je dirai que non, puisque cette Assemblée a ordonné justement à cette commission de mettre fin à ses travaux, ce qu'elle a fait d'ailleurs, et qu'elle a ordonné à cette commission de déposer son rapport avant la séance du jeudi matin, 17 juin 1982, ce qui d'ailleurs aussi a été fait.

L'autre argument - je pense que c'est le plus important - c'est celui de la correction d'une irrégularité soulevée par le député de Marguerite-Bourgeoys. À l'article 1, il est dit qu'à moins que le contexte ne l'indique autrement, le mot "président" désigne le président de l'Assemblée. J'estime, en accord avec le député de Marguerite-Bourgeoys, que le mot "président" dont il est fait état à l'article 161, paragraphe 3, désigne le président de la commission parlementaire, parce que, effectivement, le contexte en indique autrement. Mais ce qu'il faut surtout comprendre, c'est que l'article 156 est un article de nature exceptionnelle, que certaines personnes appellent communément motion de guillotine. Cet article, qu'on le veuille ou non, a comme conséquence de faire en sorte que certains droits qui appartiennent aux députés et que certains articles de notre règlement sont suspendus, en l'occurrence, les articles 140 et 161.3.

Il est donc normal qu'après l'adoption d'une motion en vertu de l'article 156 certains députés se sentent brimés dans l'exercice de certains droits, puisqu'il est justement de l'essence de l'article 156 de mettre fin à un débat et de brimer la commission parlementaire et ses membres dans l'exercice de leur droit de parole. Cela s'applique également à la confection du rapport, au contenu du rapport et à d'autres droits.

En conséquence, tout en admettant que le président de l'Assemblée nationale ne peut d'office corriger une irrégularité dans le rapport de la commission des affaires municipales qui a été déposé hier, en raison même de la nature et de l'essence exceptionnelle de la motion prévue à l'article 156, cette motion a comme conséquence de suspendre les règles, de suspendre les droits. Il est normal, justement, que des députés se plaignent, à tort ou à raison, du fait que certains droits aient été brimés puisque c'est l'essence même, c'est le but même de l'article 156. Je fais de cet argument dernier l'argument fondamental non pas pour rejeter la question de règlement, mais pour répondre - puisque c'était une demande de directive -au député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie de votre directive et de me l'avoir donnée si rapidement. Une autre question, très rapidement, à laquelle je suis sûr que vous avez la réponse: Est-ce qu'il y a un article du règlement qui interdirait à l'Assemblée nationale d'adopter une motion qui serait présentée par le leader du gouvernement, par hypothèse, après l'adoption d'une motion en vertu de l'article 156, et qui interdirait au leader du gouvernement de reconvoquer cette commission pour étudier le rapport seulement?

Le Président: Absolument rien n'empêche cette Assemblée nationale, à la condition que le leader du gouvernement veuille bien présenter une motion de convocation de la commission parlementaire

des affaires municipales, d'adopter une motion pour convoquer à nouveau la commission des affaires municipales. Au moment où on se parle, le leader du gouvernement ne m'a point manifesté cette intention et l'Assemblée pourrait changer d'idée. Au moment où on se parle, je n'ai pas de motion dans ce sens et je ne peux donc en juger.

M. Brassard: M. le Président, à nouveau, je vous demande d'appeler l'article 20 du feuilleton.

Prise en considération du rapport

de la commission qui a étudié

le projet de loi no 37

Le Président: J'appelle donc la prise en considération du rapport de la commission des affaires municipales qui a étudié le projet de loi no 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive.

J'ai rencontré, il y a quelques minutes, le leader adjoint du gouvernement et celui de l'Opposition et les règles de procédure seront les suivantes:

Le ministre des Affaires municipales aura droit de parler à plusieurs reprises, mais il a un droit de parole de 30 minutes. Le critique officiel de l'Opposition aura également droit à 30 minutes. Tous les députés de cette Assemblée nationale, conformément au règlement, auront un droit de parole de dix minutes. Cela, c'est en ce qui concerne les droits de parole.

En ce qui concerne les votes, trois votes auront lieu. En premier lieu, après discussion des amendements, ceux-ci seront votés en bloc. Ils seront adoptés ou rejetés, mais il y aura un seul vote sur les amendements. En deuxième lieu, il y aura un vote sur les articles du projet de loi, sur le préambule du projet de loi, sur le titre du projet de loi et sur les annexes du projet de loi. En troisième lieu, il y aura le vote sur le rapport lui-même, amendé ou non, on le verra plus tard.

Ceci étant dit, je donne la parole au ministre des Affaires municipales.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, nous en sommes maintenant à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission élue permanente des affaires municipales et des amendements que nous avons déposés hier à ce projet de loi. Si je comprends bien, j'ai 30 minutes, au total, pour toutes mes interventions au cours de l'étude du projet de loi.

Le Président: M. le ministre, vous pouvez parler à plusieurs reprises mais le total de vos interventions ne doit pas excéder 30 minutes. En ce qui concerne les autres députés, ils ne peuvent parler qu'une fois et leur seule intervention est de dix minutes. En ce qui concerne le critique de l'Opposition, il n'a droit qu'à une seule intervention de 30 minutes. C'est le règlement qui décide. Ce n'est pas la présidence. La présidence ne fait qu'interpréter le règlement.

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: M. le Président, je me contenterai donc, dans l'introduction de cette prise en considération, de présenter les amendements et de rappeler simplement qu'une commission parlementaire a siégé durant 18 heures et 48 minutes sur ce projet de loi et qu'après tout ce temps, nous en sommes arrivés au paragraphe 4 de l'article 1.

Je rappellerai que l'Opposition s'est déclarée en accord avec ce projet de loi quant au fond, quant à la fusion des deux villes, quant au regroupement des villes de Baie-Comeau et de Hauterive, et qu'elle nous a dit qu'elle n'était pas d'accord avec la consultation que nous avions faite par rapport à tout cela.

Je vous rappellerai, M. le Président, que ce dossier est en discussion dans la région depuis 20 ans, 25 ans, comme nous l'avons établi au cours du débat de deuxième lecture; que nous avons tenu une commission parlementaire le 15 décembre, qui a siégé durant 8 heures et 30 minutes pour entendre les gens de Baie-Comeau et de Hauterive; qu'au cours de cette commission, six intervenants sur huit se sont déclarés en accord avec le projet de loi et le principe du projet de loi du gouvernement; qu'il y a eu aussi, par la suite, la formation d'un comité conjoint des deux municipalités qui a travaillé avec l'assistance technique de la Commission municipale du Québec et qui a remis un rapport que nous avons eu l'occasion de discuter justement à la commission dont les travaux viennent de prendre fin.

Nous avons posé des questions aux gens de Baie-Comeau et de Hauterive, à trois participants de la ville de Hauterive et à trois participants de la ville de Baie-Comeau, et la commission a pu tirer des conclusions de ce qu'elle a entendu.

Nous avons donc siégé durant 18 heures et 48 minutes. Nous avons entendu le comité conjoint durant 2 heures et 30 minutes. Nous avons, ensuite, discuté de toutes sortes de choses, et je dois dire de presque toutes sortes de choses sauf du projet de loi et des articles, à la suite de mesures dilatoires tout le long de cette commission.

Des voix: Oh!

M. Léonard: Nous avons donc déposé nos amendements hier, en grande partie, et nous allons les étudier au cours de cette prise en considération.

Je pense qu'il est temps de procéder et j'apporte donc, dans la foulée du projet de loi lui-même, des amendements et des modifications au projet de loi. Je vous les lis brièvement. Il s'agit des modifications que nous apportons aux articles 1, 2 et 3 du projet de loi, parce que le projet de loi comporte trois articles. Vous me direz que dans le premier article, il y a 25 paragraphes, mais le projet de loi lui-même comporte trois articles.

À l'article 1, les amendements visent à préciser la date de la première élection, la composition du conseil pour la première élection, la nomination du président d'élection par le conseil des anciennes villes, les modalités de la procédure d'élection. Les amendements précisent que la préparation et l'adoption du budget peuvent avoir lieu avant le 15 novembre 1982, que les membres actuels du conseil des deux villes sont éligibles à cette élection, qu'aucune rémunération additionnelle n'est versée s'il y a cumul. Ils précisent également la date de la première séance du conseil après le 31 décembre 1982. Ils précisent que le greffier de Hauterive agit comme greffier de la nouvelle ville jusqu'à la fin de la première séance tenue après le 31 décembre 1982 et que le trésorier de Baie-Comeau agit comme trésorier de la nouvelle ville jusqu'à la fin de la première séance tenue après le 31 décembre 1982.

Un autre amendement a pour but de permettre l'intégration des valeurs inscrites au rôle d'évaluation foncière ou des valeurs locatives des anciennes villes. (17 heures)

Un amendement prévoit aussi l'imposition d'une taxe spéciale pour le secteur de Hauterive de 1983 à 1987. Il précise le rendement de la taxe d'affaires pour 1983, prévoit le mode de calcul servant à établir le montant payable à la nouvelle ville en ce qui a trait aux immeubles des réseaux électriques autres qu'à Hydro-Québec et précise les montants de subventions spéciales à verser à la nouvelle ville pour les exercices de 1983 à 1987 qui seront appliquées en réduction des taxes foncières à imposer au secteur de Baie-Comeau. Enfin un autre amendement ajoute aux sommes que nous avons prévues les mêmes montants de subventions pour les exercices 1983 à 1987 qui seront versées à la nouvelle ville en considération d'une fusion qui eût pu être volontaire.

À l'article 2 du projet de loi, nous apportons des amendements qui prévoient ce qu'il advient s'il y a vacance au poste de maire ou de conseiller de l'une des anciennes villes. Élection du maire par le conseil de ville dans le premier cas et poste de conseiller demeurant vacant dans le second cas. Cet amendement prévoit ce qu'il advient s'il n'y a pas de quorum au conseil de l'une des anciennes villes, par exemple la nomination d'un administrateur qui peut être faite par le ministre. Il prévoit que, jusqu'à la nomination de l'administrateur ou lorsqu'un des deux conseils ne peut plus siéger valablement, la Commission municipale est substituée au conseil et au maire de la ville. Il permet au gouvernement, par décret, de substituer au conseil, au maire ainsi qu'aux fonctionnaires cadres la Commission municipale, s'il juge qu'il y a refus ou négligence par l'une des villes de respecter la loi.

Cette disposition entraîne la fin du mandat des membres du conseil et suspend les fonctionnaires cadres sans traitement.

Un autre amendement établit des règles particulières concernant les engagements de crédit des deux anciennes villes.

Enfin, à l'article 3, un article traite de la clause standard mettant de côté certains articles de la Loi constitutionnelle du fédéral. Un article transitoire permet que se déroule en 1982 la première élection de la nouvelle ville, ainsi que la préparation et l'adoption de son budget malgré qu'elle ne sera juridiquement créée qu'à compter du 1er janvier 1983. Enfin, un article prévoit qu'ont effet à compter du 1er janvier 1983 certains articles de la charte de la nouvelle ville ainsi que l'article 2 et des annexes de la loi.

Il y a un article transitoire qui précise que, pour les fins des articles 2.1, 2.2, 2.3, les anciennes villes sont celles qui existent le jour de l'entrée en vigueur et un article transitoire précise que les articles 2.1, 2.2 et 2.3 ont effet jusqu'au 31 décembre 1982. Enfin, il y a l'article qu'on retrouve partout, qui précise l'entrée en vigueur du projet de loi 37.

Je pense que nous sommes disposés à entendre les commentaires des membres de la commission et de chacun des membres de cette Assemblée nationale. Je suis sûr qu'au bout de nos travaux nous aurons un projet de loi qui répondra aux principes du projet de loi tel qu'il a été présenté et qui atteindra le but que nous visons, qui est celui de créer une ville dynamique, moderne, bien intégrée, bien articulée sur la Côte-Nord.

M. le Président, je suis sûr qu'au bout de ces travaux naîtra une ville concurrentielle, en excellente santé, sur la Côte-Nord. C'est ce que nous visons, et je suis sûr que c'est ce que le projet de loi nous permettra d'atteindre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, nous assistons aujourd'hui à un exemple de comment ce gouvernement représente la démocratie parlementaire dans cette Assemblée nationale. Nous assistons aujourd'hui à un abus de cette démocratie parlementaire, comme les citoyens de Baie-Comeau assistent à un abus de la démocratie populaire quand ils se voient refuser le droit d'être consultés par référendum sur une fusion forcée entre la ville de Baie-Comeau et de Hauterive. C'est ce à quoi nous assistons aujourd'hui, c'est-à-dire à l'abus de pouvoir de ce gouvernement.

La députée de Dorion a déposé en cette Chambre le rapport de la commission parlementaire qui devait étudier le projet de loi. Elle a déclaré que le projet de loi n'avait pas été adopté en commission. Pourquoi? Parce qu'on ne nous a pas donné l'occasion d'étudier à fond et complètement, article par article, le projet de loi no 37. C'est ce gouvernement qui nous a refusé ce droit. Quand le ministre des Affaires municipales nous dit: On a étudié pendant 18 heures et 48 minutes, il a enlevé deux heures et demie pendant lesquelles nous avons entendu les parties. Il a oublié d'enlever la demi-heure pendant laquelle le président avait suspendu les travaux de la commission parlementaire à la suite de représentations valables que nous voulions faire. Même si on prend ces 18 heures, c'est quoi, 18 heures, pour étudier un projet de loi qui va forcer 14 000 personnes à Hauterive de fusionner avec 11 000 personnes à Baie-Comeau, qui va avoir des répercussions considérables pour les contribuables, qui va avoir des conséquences de taxes, des conséquences foncières et des conséquences au niveau de la paix sociale?

Nous avons assisté à des démonstrations très pénibles à cette commission parlementaire. M. le Président, sans appuyer ces démonstrations que je déplore, je dois dire que le gouvernement a récolté ce qu'il a semé, parce que, quand vous essayez d'obliger des catégories, des citoyens, que vous voulez les forcer absolument, contre leur gré, contre les consultations, à faire une fusion qui va avoir des conséquences très lourdes... Ce projet de loi et les propos du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ont provoqué ces incidents et c'est malheureux qu'ils soient survenus, mais je blâme autant le gouvernement pour ces incidents que les pauvres personnes qui y ont assisté. C'est malheureux que ce genre de manifestation se soit produit, M. le Président.

M. le Président, le ministre s'est référé à un comité conjoint qui a été nommé pour étudier les conséquences, l'aspect financier et les autres aspects de la fusion. Ce que le gouvernement et ce que le ministre n'ont pas dit en cette Chambre, c'est qu'après que ce comité conjoint a produit son rapport, le gouvernement l'a ignoré totalement. Il a complètement ignoré les conséquences, les recommandations du comité conjoint. Alors, où est la bonne foi du gouvernement dans le bâillon qu'il nous a imposé?

Le fait qu'il y ait trois articles dans le projet de loi avec 25 sous-articles, ce n'est pas le nombre d'articles qui est important, mais le contenu. Ce sont les conséquences sur la population. On pourrait demander au gouvernement pourquoi il a consenti à créer un comité conjoint et a complètement ignoré les résultats que ce comité a présentés au gouvernement. Le gouvernement démontre une mauvaise foi totale par la façon avec laquelle il procède dans ce projet de loi. J'ai assisté, je faisais partie de cette commission parlementaire. Je dois vous dire que les suggestions, les recommandations, les amendements que nous avons apportés...

Premièrement, nous voulions qu'il y ait un référendum, que ce soit une des modalités du projet de loi et nous nous sommes vu refuser cet amendement. Le gouvernement a même refusé de discuter, il ne voulait même pas discuter en commission parlementaire de la possibilité, des conséquences d'inclure dans le projet de loi un référendum pour consulter les populations. On a dit au gouvernement: Cela ne vous liera pas nécessairement, mais prenez les mesures nécessaires pour vous informer auprès de la population. C'était une des modalités du projet de loi. Nous avons même demandé que la fusion se fasse au mois de janvier 1986. Cet amendement nous a aussi été refusé, M. le Président. Ils l'ont jugé irrecevable, même si le député qui avait fait cet amendement a donné comme précédents d'autres cas particuliers où un tel amendement avait été déclaré recevable.

Il y a une injustice grave dans la façon de procéder du gouvernement en regard de ce projet de loi - c'est vrai qu'il a la majorité - premièrement, dans son refus de tenir un référendum et, deuxièmement, dans le refus d'étudier le projet de loi article par article. On nous dit: Cela fait 20 ans que ces deux villes auraient dû fusionner. Si cela fait 20 ans qu'elles auraient dû le faire, pourquoi imposer le bâillon à la fin de juin 1982 et refuser d'étudier tous les différents aspects? On aurait pu étudier ce projet de loi et le compléter à l'automne. On aurait pu continuer l'étude de ce projet de loi, continuer l'étude du rapport du comité conjoint que le gouvernement veut complètement ignorer. Le comité conjoint est venu à la conclusion que cela coûterait 4 000 000 $ par année - le résultat de la fusion - aux contribuables de Baie-Comeau. Ce sont des considérations dont le gouvernement aurait dû tenir compte et il ne devrait pas procéder de la façon dont il le

fait.

M. le Président, le leader parlementaire du gouvernement, pour vous démontrer un peu la mentalité de ce gouvernement, pour vous démontrer sa mauvaise foi et son interprétation de la démocratie parlementaire, le leader du gouvernement, député de Vanier, a dit: Le gouvernement va vous passer sur le corps. C'est cela, la démocratie pour ce gouvernement? C'est cela, les travaux de cette Chambre? C'est cela, les règlements qui devraient permettre une étude du projet de loi, une étude des sujets qui viennent devant cette Chambre? M. le Président, je vais dire ceci au leader parlementaire. Quand il dit à l'Opposition que le gouvernement va lui passer sur le corps, il vient de dire à une grande partie de la population: Le gouvernement va vous passer sur le corps. Nous représentons la population et nous le faisons d'une façon responsable. Si c'est cela, l'attitude du gouvernement, non seulement pour les contribuables de Baie-Comeau, mais pour l'ensemble de la population du Québec, je vais dire ceci, M. le Président, à ce gouvernement: Vous aurez à répondre de votre attitude, de votre arrogance et de votre manque de respect des droits fondamentaux, non seulement des membres de cette Chambre, mais des droits de la population et spécialement des contribuables de Baie-Comeau. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fabien Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je prends la parole pour la nième fois dans le cadre du débat sur le projet de loi no 37, une loi qui a pour but principal de fusionner sans leur consentement les deux municipalités de Baie-Comeau et dé Hauterive, une loi qui n'a pas sa raison d'être, qui n'est pas justifiée, une loi qui brime également tous les principes de la démocratie pourtant bien établis dans nos moeurs québécoises. Certains de mes collègues ont qualifié cette loi de loi matraque. Permettez-moi de vous dire, M. le Président, que le qualificatif n'est certainement pas exagéré. L'adoption de ce projet de loi aura provoqué des remous épouvantables. Les citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive sont divisés. Les conseils municipaux des 1600 municipalités du Québec sont inquiets et à juste titre, d'ailleurs, de voir de quelle façon ce gouvernement péquiste s'est acharné à voter coûte que coûte ce projet de loi. Il y a eu également des événements malheureux en commission parlementaire, notamment vendredi dernier. Ces événements, je ne veux pas les excuser, mais on peut tout au moins comprendre pourquoi ils sont survenus. Le geste le plus malheureux qu'il nous a été donné de voir est sans doute celui du leader du gouvernement, le député de Vanier, qui nous a imposé le bâillon par une motion de clôture avec, semble-t-il, un certain plaisir. Il a déclaré effectivement, avec des sentiments de vengeance, que le gouvernement allait nous passer sur le corps, que le gouvernement allait nous couper la tête, nous, de l'Opposition. Comme l'a dit mon collègue de Mont-Royal, ce n'est pas seulement à l'Opposition qu'il coupe la tête et qu'il passe sur le corps. C'était à 46% de la population au mois d'avril 1981, et s'il y avait des élections demain matin, ce serait probablement à 60% de la population qu'il passerait sur le corps.

Pourtant, l'Opposition libérale n'a fait que remplir son mandat, n'a fait qu'exécuter le plus honnêtement possible, le plus objectivement possible son travail. Ici, vous me permettrez de remercier mon collègue, le député de Hull, qui a fait un travail non seulement remarquable, mais exceptionnel. Ce fut pour moi un immense plaisir que de l'appuyer dans cette tâche.

Je ne voudrais pas passer sous silence la participation du député de Saguenay, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aidé, bien entendu, par son collègue, que nous pouvons appeler maintenant son complice, le ministre des Affaires municipales. Pourtant, ce député de Saguenay, qui défendait les grands principes de la démocratie, du temps qu'il était de ce côté de cette Chambre, j'aimerais lui rappeler un extrait du journal des Débats de l'Assemblée nationale, en date du 17 novembre 1970. Vous me direz que 1970, cela fait déjà quelques années. Cette démocratie au Québec est-elle en voie d'extinction? Si cette démocratie était justifiée en 1970, elle doit être encore justifiable en 1982. Je vous cite donc les propos mêmes du député de Saguenay tenus en cette Chambre lors du débat sur une motion concernant les troubles sociaux que nous avons connus en 1970. Nous retrouvons ces propos aux pages 1572 et 1573 du journal des Débats, que je cite: "Que l'État puisse utiliser des moyens légitimes pour combattre des mouvements subversifs, nous en convenons, mais encore faut-il, pour le respect des institutions démocratiques, que l'État puisse justifier ces mesures qui s'attaquent au fondement même de toutes les libertés démocratiques des citoyens du Québec. Encore faut-il, M. le Président, qu'on conserve du moins une certaine mesure entre les maux et les remèdes."

Ce grand défenseur de la démocratie, en 1970, trouvait épouvantable l'imposition des mesures de guerre, après, vous vous souviendrez, qu'on eut enlevé un diplomate, gardé en otage un diplomate et même commis un meurtre sur la personne du

ministre du Travail. À ce moment, on brimait la liberté des citoyens et c'était épouvantable1. Ce sont les paroles du député de Saguenay. Malheureusement, il ne peut pas les nier, puisque ces paroles sont inscrites, comme je l'ai mentionné, au journal des Débats. Je ferai donc lecture également d'un autre passage. Vous allez voir si c'est intéressant. "Il deviendra maintenant, semble-t-il, dangereux de penser au Québec si on ne pense pas comme ceux qui sont au pouvoir." C'est exactement ce qui arrive aux citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive. Si on ne pense pas comme le gouvernement au pouvoir, nous sommes, d'une part, de mauvais Québécois, de second ordre et le gouvernement, dans sa grande sagesse, se charge de rappeler à l'ordre, même si, pour ce faire, on doit écraser l'Opposition, on doit couper la tête à l'Opposition et aux citoyens de Hauterive et de Baie-Comeau.

Comment se fait-il, M. le Président, que le député de Saguenay se soit impliqué aussi profondément dans un projet de loi qui ne devrait normalement concerner que les deux municipalités en cause? Que le député de Saguenay ait des divergences de vues avec l'un ou l'autre des maires des municipalités, ce n'est pas une raison pour entraîner de force des milliers de personnes dans une fusion non souhaitée!

Autre fait qui me scandalise également, M. le Président, et le terme n'est pas exagéré. Au début de la présente session de nos travaux parlementaires, le moins qu'on puisse dire, c'est que nous n'étions pas surchargés de travail. Nous avons, bien souvent, meublé nos heures de travail avec des motions. Je ne veux pas dire que toutes ces motions n'étaient pas justifiées. Certainement que quelques-unes d'entre elles auraient pu céder la place au projet de loi no 37, mais il semblerait que, par une pure stratégie, on ait attendu à la fin des travaux, quand nous sommes surchargés de travail, à un point tel que les débats sur le projet de loi no 37 seront faits à des heures tardives de la nuit, alors que les Québécois seront au repos, alors que les Québécois ne seront pas en mesure de nous entrendre. Je comprends, M. le Président, et cela s'explique. Si j'avais, moi aussi, à poser un geste aussi honteux, je le ferais de nuit, je ne le ferais certainement pas en plein jour. Mais, comme me le mentionnent mes collègues, je ne le ferais certainement pas. J'ai seulement dit: Si j'avais à poser un geste aussi honteux; je ne le ferai jamais, M. le Président.

Il n'est pas surprenant que le gouvernement tente de nous faire discuter d'un projet de loi aussi répugnant en pleine nuit. Dans quelques heures, de toute façon, pour nous de l'Opposition, les moyens que nous avions à notre disposition pour tenter de ramener le gouvernement à la raison auront tous été épuisés.

Nous devons donc, avec regret, baisser pavillon, mettre le drapeau en berne. La seule chose qui me console, c'est que nous aurons quand même le sentiment du devoir accompli et, avec un projet de loi aussi répugnant, les deux municipalités de Baie-Comeau et de Hauterive seront connues dans tout le Québec pour ne pas dire dans tout le Canada. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Germain Leduc

M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président, en imposant la motion de clôture sur le projet de loi no 37 proposant la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive, ce gouvernement ne bâillonne pas seulement les députés de l'Opposition, mais surtout les citoyens de Baie-Comeau. Comme disaient tantôt mes confrères, ce n'est pas sur le corps des députés de l'Opposition que ce gouvernement va passer, M. le Président, sûrement pas, mais bien plus sur le corps des citoyens de Baie-Comeau et sur le corps de tous les Québécois, car c'est la démocratie que ce gouvernement guillotine.

Dès le départ, ce gouvernement avait décidé de ne pas consulter la population. Il craignait le verdict de la population. Le parrain de ce projet de loi, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, poussait l'imposture jusqu'à déclarer "qu'il n'était pas question de tenir un référendum sur ce projet de loi, parce qu'il le perdrait".

Ce gouvernement craignait également que ce projet de loi soit soumis aux critiques des députés de l'Opposition. Il a mis près de dix mois pour amener ce projet de loi à la commission parlementaire. Comme on le mentionnait tantôt, il a mis à notre disposition à peine quinze heures pour l'étudier article par article et, dès ce moment, imposer la clôture. Il était évident pour nous, les membres de l'Opposition, et également pour les citoyens concernés, surtout ceux de Baie-Comeau, que la tenue de cette commission parlementaire était un exercice absolument inutile et une véritable farce.

Les Québécois, et plus particulièrement les citoyens de Baie-Comeau, étaient sûrement en droit de croire que l'époque des fusions ou annexions - c'est ainsi qu'on les appelait avant - forcées était révolue depuis la mise en vigueur de la loi de 1971 qui favorisait le regroupement des municipalités. Non, M. le Président, ça continue, et même avec ce gouvernement qui se dit social-démocrate et qui, par la voix de ses membres, a dit et répété à maintes occasions que jamais une fusion ne se ferait au Québec, sauf si elle était volontaire,

c'est-à-dire qu'elle devait nécessairement se faire suivant la loi de 1971 et non pas être imposée par le gouvernement en place.

Face au projet de loi no 37 sur la fusion, les citoyens de Baie-Comeau sont sûrement en droit d'exiger de ce gouvernement, qui prétend ne fonctionner que par consensus, qu'on les consulte, qu'on leur demande s'ils sont d'accord ou non avec cette fusion. Autrement, à mon avis, c'est de la dictature. Si je dis que ce droit d'être consultés est un droit fondamental pour les citoyens de Baie-Comeau, je dis également que tous les Québécois sont concernés par ce projet de loi. Il s'agit d'une façon unilatérale de procéder et, éventuellement, ce procédé pourrait les frapper également. Je pense que ce principe de la fusion volontaire ne doit souffrir aucune exception. Autrement, on retrouvera toujours un ministre des Affaires municipales, et peut-être également un ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, pour prétendre qu'il y a une raison absolument particulière, dans un cas donné, pour ne pas consulter les citoyens et procéder à la fusion forcée.

J'avise tous les Québécois que les citoyens de Baie-Comeau ont été trompés par ce gouvernement et que la même chose pourrait éventuellement leur arriver. Qu'on se rappelle seulement les déclarations du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui répétait, lors de l'élection de 1981, que jamais il ne chercherait à imposer par la force la fusion de deux villes. Il ajoutait d'ailleurs que cette ligne de conduite lui était imposée par le programme du Parti québécois qui interdit toute fusion forcée. Le programme du Parti québécois, il est clair: II faut obligatoirement consulter la population pour tout projet de restructuration, regroupement ou fusion. Eh bien, M. le Président, il lui a fallu à peine six mois après les élections pour renier la parole donnée aux citoyens de Baie-Comeau et renier également le programme du Parti québécois.

Je pense que les citoyens de Baie-Comeau étaient en droit de s'attendre qu'on les respecte et qu'on les écoute. La façon d'y arriver, ce n'est absolument pas en imposant le bâillon sur ce projet de loi, mais plutôt en les consultant au moyen d'un processus démocratique qui est le référendum. Baie-Comeau n'est pas un cas différent de Pointe-aux-Trembles. Les citoyens de Pointe-aux-Trembles, eux, ont eu le droit de se prononcer par référendum sur la fusion de leur ville avec la ville de Montréal. Ce même droit, à mon avis, doit être donné aux citoyens de Baie-Comeau. Autrement, on traite les citoyens de Baie-Comeau comme des citoyens de seconde classe qui ne sont pas en mesure de se prononcer sur l'avenir de leur ville. Je pense que c'est leur faire insulte.

Si la fusion était une bonne chose, comme le prétend le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, pourquoi alors ne pas respecter le processus démocratique qu'est le référendum? La population aurait sûrement donné raison à ce ministre. Si, au contraire, la population refuse la fusion -c'est ce qui semble probable - à la suite de la déclaration du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, il y a sûrement lieu de s'interroger sur cette fusion.

Il faudrait que les deux villes au départ trouvent leur avantage à cette fusion, sinon il s'agira d'une fusion forcée qui aura toutes les chances de déboucher sur la confrontation et sur le malheur des adhérents. Vu l'impossibilité qu'il y aura de défaire cette fusion par la suite, il faudrait donc être d'autant plus prudent et, dans le doute, je pense qu'il faudrait s'abstenir. Il serait préférable alors qu'on retire carrément le projet de loi no 37. Je pense que ce retrait est le premier geste à poser. Le deuxième geste qui s'impose, c'est que le ministre des Affaires municipales demande immédiatement au parrain de ce projet de loi, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, de se retirer de ce dossier. (17 h 30)

Tous les intéressés, jusqu'à présent, sont parfaitement d'accord pour reconnaître que ce ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a fait trop de dommages dans ce dossier. Par sa partialité, il a provoqué directement les citoyens de Baie-Comeau. En assumant ses responsabilités, le ministre des Affaires municipales pourrait, je pense, rétablir un climat de confiance dans les populations concernées. Il devrait, par la suite, aller rencontrer les citoyens des deux villes, les écouter, leur expliquer que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche les a trompés et essayer, avec eux, de trouver des solutions aux problèmes soulevés dans les mémoires qui ont été produits. Il devrait, enfin, soumettre cette fusion à l'approbation des populations par un référendum qui serait tenu dans les meilleurs délais.

Les Québécois sont très inquiets face à l'attitude de ce gouvernement et je pense que le ministre des Affaires municipales pourrait les rassurer en leur garantissant que, contrairement au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, il n'a qu'une parole et que ce qu'il affirmait en février 1979, à savoir que jamais il n'y aurait de fusion involontaire décrétée par une loi, cela tient toujours en ce qui le concerne.

Quant au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je pense qu'il aurait avantage à ne plus rien dire dans ce dossier. Je pense qu'il a assez parlé. Les citoyens des villes de Baie-Comeau et de Hauterive pensent qu'il s'est suffisamment contredit depuis dix mois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Nelligan.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, depuis que le monde est monde, le plus fort a toujours essayé d'avoir raison du plus faible. De temps immémoriaux. Du temps des grands seigneurs, c'étaient les grands seigneurs qui disaient au reste de la population: Nous allons vous faire vivre comme nous déciderons que vous devrez vivre parce que c'est mieux pour vous. Du temps des grands princes de l'Église, c'était la même chose. Du temps des grands rois, des grands empereurs, c'était toujours le tiers État qui souffrait parce que les autres disaient: On va faire les politiques qui seront les meilleures pour vous; c'est nous qui allons décider et c'est vous qui allez accepter; on ne va pas vous consulter; on va décider pour vous parce qu'on a décidé que nous, les plus forts, qui sommes au pouvoir, savons ce qui est le mieux pour vous sans vous demander ce que vous pensez qui soit bon pour vous.

Cela a toujours été ainsi, dans le monde le plus moderne, dans le monde moderne d'aujourd'hui. Je suis sûr que certains d'entre nous se rappellent le temps des colonies. Il n'en reste pas beaucoup maintenant; il n'en reste même plus une. Mais il y en avait, hier ou avant-hier. Là aussi, quand les Hollandais, les Anglais ou les Français allaient conquérir une colonie, on disait toujours aux Asiatiques, aux Africains: On va conquérir votre pays; ce n'est pas parce que c'est mieux pour nous, c'est parce que c'est mieux pour vous; on va vous civiliser; on va vous apporter des lois; on va vous apporter du bien-être, sans vous demander ce que vous en pensez; on va venir occuper votre pays.

Ainsi, si vous demandiez à une puissance colonisatrice si elle était dans un pays ou un autre pour son bien-être personnel, elle vous répondrait sûrement: Mais non, c'était pour le bien des Indigènes, le bien des habitants. Moi qui ai vécu un peu comme un Blanc privilégié en Afrique pendant ma jeunesse, je me souviens qu'en Afrique du Sud, quand je faisais des études, je demandais à certains de mes amis qui croyaient toujours dans le système de l'apartheid: Mais ce système-là, pensez-vous que c'est bon? Ils le défendaient et me disaient: Mais c'est un système qui est tout à fait logique. C'est un système qui fonctionne parce que c'est le meilleur système pour toute la population. La seule chose qui manquait à l'échiquier, c'est qu'ils ne voulaient jamais admettre que la population la plus concernée, les Noirs qui représentaient la grande majorité, on ne lui demandait pas ce qu'elle pensait du système. On faisait le système et on embarquait dans le système. On disait: C'est un système formidable; on va avoir un gouvernement; on va instituer le système de l'apartheid et c'est très bon pour vous, mais on ne veut pas vous demander si vous pensez que c'est bon pour vous.

Alors, depuis que le monde est monde, on continue toujours à faire des systèmes où le plus fort décide de ce qui est bon pour le plus faible sans demander au plus faible ce qu'il en pense. Si le plus faible a le tort d'oser demander un peu de consultation, un peu voix au chapitre, s'il demande de se faire entendre, on lui dit: Non, non, on ne va pas vous laisser faire ça, parce que nous avons décidé, dans notre sagesse du plus fort, que c'est mieux pour vous de ne pas avoir ce droit de consultation, de ne pas avoir ce droit de vous exprimer.

Nous-mêmes qui, en principe, sommes contre le principe même de l'imposition des droits à d'autres, à des peuples, par exemple, qui vivent dans les colonies, nous disons: On ne veut plus ce système. On est contre le principe du racisme, parce qu'on dit: On ne veut pas qu'une race impose quelque chose à une autre. Mais là, en principe, comme exemple, qu'est-ce qu'il y a de différence, quand vous imposez une fusion à une ville qui ne veut pas se laisser imposer cette fusion? Tout ce qu'on vous demande dans ce dossier, et ce n'est pas tellement compliqué, c'est de donner à ces gens les mêmes droits que vous, comme parti politique, demandez tous les jours: le droit d'avoir voix au chapitre au sein du Canada, d'avoir droit au chapitre, de décider vous-mêmes si vous deviendrez souverains, souverains avec association ou si vous allez rester au sein du Canada. C'est cela même que vous avez demandé, réclamé, fait et pratiqué en 1980. Peut-être que vous le ferez encore un de ces jours, dans toute la légitimité possible.

L'autre jour, le gouvernement fédéral vous a dit: On va implanter là un corridor. Cela a été un tollé du diable à droite et à gauche. Cela a été la même chose pour la charte des droits. Mais là, que faites-vous dans ce cas-là? Ces pauvres gens n'ont même pas eu la moindre voix au chapitre. Tout ce qu'ils demandent, c'est le droit, pour eux, de dire que ce que vous pensez qui est bon pour eux est aussi bon pour eux qu'ils le pensent eux-mêmes. C'est l'élémentaire justice.

Dans votre loi du plus fort, vous avez 79 ou 80 sièges, vous savez très très bien que les votes sont tellement prépondérants que vous pouvez adopter n'importe quelle loi que vous voulez.

Vous y allez selon le rituel habituel de la première lecture, de la deuxième lecture et de la troisième lecture, et si cela ne marche pas, et si vous voyez qu'il y a trop d'opposition de la part des citoyens de telle ville, de la part de l'Opposition qui

représente la population, si vous voyez qu'il y a trop d'opposition, que faites-vous à ce moment-là? Vous vous servez encore une fois de votre loi du plus fort et vous imposez la loi de la clôture.

Cette motion de clôture que vous imposez aujourd'hui, c'était quelque chose d'exceptionnel dans l'ancien temps. Vous-mêmes, quand vous formiez l'Opposition, vous vous rebelliez contre cela. Maintenant, pour vous, les motions de clôture, les lois spéciales, c'est devenu de la petite bière. Vous qui vous disiez un gouvernement social-démocrate, vous devenez de plus en plus un gouvernement de l'extrême-droite. Vous passez ces motions et vous trouvez cela formidable.

Le leader du gouvernement vous dit: II faut faire cela parce qu'on va nous montrer qu'on va se servir de cette motion de clôture et on va l'utiliser pour vous écraser.

De gouvernement social-démocrate que vous étiez en 1976, vous êtes devenu un gouvernement de la droite. Vous avez oublié votre propre programme électoral qui disait que vous ne deviez faire aucune fusion sans consulter les populations concernées.

Vous en êtes arrivés maintenant à imposer vos propres vues sur ce que vous jugez bon pour la population avant même que la population ne décide elle-même. Ce n'est pas étonnant que, dans les derniers sondages, seulement 29% de la population vous appuie. Cela n'est pas une coïncidence.

M. Dauphin: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Je crois que vous connaissez un peu le but de ma question de règlement. Pourriez-vous constater le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui, j'ai remarqué que vous prépariez une question de règlement. S'il vous plaît! (17 h 40)

M. Biron: Est-ce que je peux vous faire remarquer qu'il y a sept ou huit députés libéraux tout à l'heure qui sont sortis en groupe pour se cacher probablement? Il n'en reste que trois ici dans cette salle.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous avons maintenant quorum. Question de règlement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: On sait que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme est expert dans les grosses farces, mais il reste que le gouvernement n'avait que quatre ou cinq députés lorsque vous avez appelé le quorum et que les députés libéraux, quand même, ce n'est pas leur devoir de fournir le quorum ici.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous avons maintenant quorum. S'il vous plaît, M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Nous demandons au gouvernement pour la centième fois, comme nous l'avons demandé dans chacune des lectures du projet de loi, à plusieurs occasions, à des occasions répétées, de revoir toute cette question, de donner une chance aux citoyens de Baie-Comeau de se faire entendre. C'est tout ce que nous demandons. Cela ne veut pas dire que ce projet de loi ne se ferait pas en fin de compte, mais que la consultation populaire, qui est un principe fondamental de notre démocratie, se ferait. Nous demandons au gouvernement de retirer ce projet de loi et de le reporter a plus tard en attendant qu'une consultation populaire se fasse.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Marquette.

M. Claude Dauphin

M. Dauphin: M. le Président, il me fait plaisir encore une fois d'intervenir sur le projet de loi no 37 et plus spécifiquement sur la prise en considération du rapport que ma collègue, la députée de Dorion, a eu l'occasion de déposer hier. Comme elle le disait si bien, ledit rapport n'a pas été adopté. Un peu comme certains de mes collègues l'ont mentionné antérieurement, nous avons eu, sur le plan temporel, seulement 18 heures pour débattre ce projet de loi qui est, vous l'admettrez, d'une importance capitale pour la démocratie au Québec. Nous n'avons eu, je le répète, que 18 heures pour débattre ce projet de loi. Comme vous le savez sûrement, le leader du gouvernement, sur un ton enflammé - c'est-à-dire le gouvernement - a décidé d'imposer le bâillon, la guillotine, la motion de clôture à l'Opposition officielle, ce qui a eu pour effet d'arrêter les travaux en commission parlementaire. Ce qui est outrageant, M. le Président, c'est que non seulement on a imposé le bâillon à l'Opposition officielle, à des parlementaires dûment élus par la population, mais que l'on a également imposé le bâillon aux populations concernées, c'est-à-dire aux citoyens et citoyennes de Baie-Comeau et de Hauterive.

Nous avons proposé des amendements sérieux en commission parlementaire et plusieurs de mes collègues, de ce côté-ci de cette Chambre, sont ici pour en témoigner, collègues qui étaient des témoins oculaires à cette commission parlementaire. Ces

amendements avaient pour but, M. le Président, particulièrement, de demander au gouvernement de consulter, justement - on ne le répétera jamais assez en cette Chambre - la population avant de lui imposer quoi que ce soit. Mon collègue de Nelligan, tantôt, faisait état de grands principes de la part de certains théoriciens du parti ministériel, à savoir qu'il faut toujours être démocratique, qu'il faut toujours consulter la population avant de lui imposer quoi que ce soit, par exemple la question nationale ou, dans d'autres cas, la liberté de choix de certains membres. Je me souviens de la caisse d'entraide, à savoir s'ils allaient se diriger vers un projet plutôt qu'un autre. On se souvient également de Pointe-aux-Trembles, à Montréal, où il y a eu un référendum. Plusieurs de nos amendements avaient pour but que les populations de Baie-Comeau et de Hauterive soient consultées.

Nous avons eu l'occasion également -et ce, grâce aux talents oratoires du député de Hull, qui a brillamment défendu tout ce dossier au nom de l'Opposition - de tenter de faire adopter en cette Chambre une motion de report qui aurait eu pour effet de retarder l'adoption de ce projet de loi pour une période de six mois. Ladite période de six mois aurait été employée à une consultation des citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive. M. le Président, vous connaissez le sort de notre motion de report, le gouvernement, par sa majorité, par la "pool room", par la machine à voter, a refusé notre motion de report. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, dans des déclarations antérieures, nous avait dit à maintes reprises qu'à Baie-Comeau et à Hauterive - il l'a même dit à la radio à maintes reprises - il ne serait jamais question de fusion forcée. Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner hier en commission parlementaire, dans le programme du Parti québécois, on fait également mention de façon claire, nette et précise qu'il n'est pas question non plus - c'est une déclaration de principe - de faire des fusions forcées entre diverses municipalités à moins que ce soit assorti au préalable d'un référendum, c'est-à-dire que la population y soit consentante.

Comme je le disais, M. le Président, ces gens ne respectent non seulement pas la parole donnée dans l'immédiat, mais ne respectent pas non plus le programme qui, en principe, est adopté de façon démocratique, que l'on sache, par ce parti, même si on a vu le chef de suprême et président désavouer ses propres militants il n'y a pas tellement longtemps. Ensuite, nous avons également été témoins avant-hier - malheureusement, j'ai dû me référer au journal des Débats pour le savoir - de ce que le jeune leader du gouvernement a dit à la population du Québec, a dit aux populations de Baie-

Comeau et de Hauterive et ce que lui et son gouvernement pensent du projet de loi no 37. Il a tellement de respect pour la démocratie, et plusieurs de mes collègues - le masculin comprend le féminin - ont eu l'occasion de le dire, qu'il a dit qu'il passerait sur le corps non seulement du député de Hull, qui a fait un travail de parlementaire honnête, de façon officielle, mais qu'il passerait sur le corps de l'Opposition et par le fait même, de façon indirecte, de la population de Baie-Comeau. J'ai eu l'occasion de le dire hier, mais je pense que cela vaut la peine de le répéter. Le même jeune leader du gouvernement, il y a moins d'un mois, déclarait ici même en cette Chambre, M. le Président, qu'il fallait - page 3383 du journal des Débats, mardi 11 mai 1982 - "redonner à notre institution - et je suis certain que vous allez être d'accord avec moi - l'Assemblée nationale du Québec, son caractère de noblesse, de solennité et de dignité". À ce moment-là, de ce côté-ci de cette Chambre, nous étions en parfait accord avec cette déclaration du jeune leader du gouvernement. Cependant, avant-hier, dans une envolée - je ne sais pas s'il y avait une gageure, M. le Président, pour s'attaquer de cette façon à d'autres parlementaires et à une population -il fallait nous piler sur le corps.

Il continuait le 11 mai 1982: "... que nous puissions redonner à cette institution son caractère de dignité et que la population du Québec puisse trouver à travers les débats de l'Assemblée nationale véritablement un reflet des valeurs qui, normalement, doivent ici être véhiculées: le respect mutuel - je le répète - le respect de la présidence, le respect de la démocratie." En terminant, il disait également: "Nous allons déployer tous les efforts pour faire en sorte que nous puissions démontrer à l'ensemble de nos concitoyens que nous voulons faire un travail sérieux dans le respect les uns des autres".

Également, nous avons été témoins de façon unanime ici, en cette Assemblée nationale, de situations malheureuses à cause dudit projet de loi no 37. Si on se réfère aux médias d'information d'hier, la situation était nettement explosive à Baie-Comeau, on faisait des appels au calme, les sangs étaient réchauffés. Il est très malheureux qu'un gouvernement qui, en principe, doit tenter d'améliorer de par ses lois des situations au Québec, procède, contrairement à ce qui est clairement indiqué, à ce qui conventionnellement et constitutionnellement a toujours été le principe de notre système démocratique - je fais référence à la Loi d'interprétation du Québec, il faut toujours améliorer des choses en légiférant - en sens contraire. C'est, au contraire, de régresser, c'est effectivement d'empirer les choses au lieu de les améliorer. (17 h 50)

Comme je le disais tantôt, en parlant de nos amendements en commission parlementaire, ladite commission - je le répète - a dû arrêter ses travaux à cause d'une motion de clôture. Ces gens, alors qu'ils étaient dans l'Opposition, promettaient à tout le monde qu'ils n'auraient jamais l'occasion de présenter des motions de clôture, c'était pour que la démocratie soit respectée, qu'on consulte les populations en question.

Si vous me permettez un aparté, dans mon propre comté, le comté de Marquette, qui comprend Lachine et LaSalle, le gouvernement fonctionne de la même façon. Il leur impose une prison en plein centre-ville, en plein quartier résidentiel. Je n'ai rien contre les prisons, il en faut. Cependant, avant de l'imposer dans un quartier résidentiel, on aurait dû consulter, utiliser le processus de consultation. C'est pour cela que j'en fais un peu une comparaison. Il faut consulter avant d'imposer quoi que ce soit. C'est un mariage forcé entre les deux villes. On force deux individus à se marier, même s'il n'y a pas de consentement, et, en plus de cela, sous le régime légal de la communauté de biens, encore une fois, sans aucun consentement.

En conclusion, ce que je peux dire, c'est que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche que je connais, en arrière, au fumoir, c'est un bon gars. J'ai l'impression qu'il veut laisser sa marque avant de se retirer de la politique. Il y a eu toutes sortes de rumeurs ici à cette Assemblée nationale. Lorsqu'on veut se retirer de la politique, lorsqu'on veut laisser sa marque, il faut faire un peu comme Maurice Richard, on se retire dans la gloire et on fait des bons coups avant de se retirer, et non pas des mauvais coups pour se faire hai'r et se retirer par après. Les gens de Baie-Comeau et les gens du comté de Saguenay auront l'occasion, à la prochaine élection générale, non seulement de démontrer au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le député de Saguenay, qu'effectivement il a laissé sa marque de façon négative, qu'il est allé à l'encontre des principes démocratiques, mais, en plus de cela, de faire en sorte - on ne le dira jamais assez de ce côté-ci de la Chambre - de changer le parti au pouvoir, changer de gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Lalonde: J'ai une question de règlement, M. le Président, à soulever. Cela concerne les travaux de la Chambre. Peu de députés savent que, lorsque nous dépassons l'heure de suspension, 18 heures, par exemple, cela coûte de gros sous à l'Assemblée nationale. Le président nous a même dit que pour une minute, cela coûte 1500 $, je crois.

Nous avons l'intention de nous restreindre le plus possible, mais, comme le droit de parole du prochain intervenant est de dix minutes et qu'il reste sept minutes, pourrait-on suspendre maintenant, quitte à reprendre, pour sauver... Dans cette période de restrictions budgétaires très sévères, M. le Président, il me semble qu'on devrait avoir le consentement pour suspendre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, c'est exact que, lorqu'on dépasse l'heure normale, cela entraîne des coûts assez élevés. Cependant, on ne veut pas restreindre le droit de parole des membres de l'Opposition. Il reste sept minutes? Que le prochain intervenant utilise ses sept minutes et le président suspendra les travaux ensuite.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: ... je fais appel à la gentilhommerie du leader adjoint et des collègues. On sait que, lorsqu'on commence un discours, on aime bien pouvoir le terminer sans interruption.

Or, il reste que nous sommes en face de deux droits, le droit de l'Assemblée nationale de ne pas dépasser ses coûts et de suspendre ses travaux à 18 heures, pour que cela ne nous coûte pas collectivement 1500 $ seulement pour une minute, et le droit du député à son droit de parole ininterrompu. Il me semble que c'est dans ce moment de fin de session où on a besoin mutuellement de consentements - le leader adjoint le comprend peut-être plus facilement que d'autres députés qui me font des signes négatifs - il me semble, dis-je, que ce serait à bon droit et que ce serait un geste tout à fait raisonnable, parce qu'il ne reste maintenant que cinq minutes, M. le Président, un geste d'élémentaire justice que de consentir à ce que le prochain intervenant puisse faire son intervention à la reprise des travaux à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je prends acte de l'extraordinaire souci du leader adjoint de l'Opposition de comprimer les dépenses publiques et j'espère - je suis convaincu que ce sera le cas - qu'à la reprise de nos travaux, à 20 heures, il aura exactement la même préoccupation et le même souci. Donc, je vous demande de

suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de suspension est adoptée?

Une voix: Adopté.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce que vous me donnez la parole?

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît'. M. le député de

Marguerite-Bourgeoys et leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Avant cette suspension, pour épargner encore plus d'argent au gouvernement qui est si cassé, le leader pourrait peut-être ajourner jusqu'à lundi. On ne le force pas à étudier ce projet de loi matraque.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: M. le Président, je demande la suspension du débat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise de la séance à 20 h 02)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

Nous allons poursuivre le débat sur la prise en considération du rapport de la commission élue permanente des affaires municipales qui a étudié le projet de loi no 37. La parole est au député de Jeanne-Mance.

M. Rocheleau: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Hull, question de règlement.

M. Rocheleau: J'invoque l'article 28 pour que nous ayons le quorum afin que nos collègues puissent nous entendre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous allons donc vérifier. Nous avons quorum. M. le député de Jeanne-Mance.

Des voix: Ah!

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, nous prenons en considération le rapport de la commission parlementaire des affaires municipales. Que contient ce rapport, M. le Président? C'est seulement pour dire que ce projet de loi n'a pas été adopté.

Vous vous rappelez tous, mes chers concitoyens, de ce slogan, Faut rester fort, mais vous ne parlez pas fort, MM. les députés du Parti québécois, sur un projet de loi qui touche la démocratie de tous les Québécois, au Québec. On a siégé, selon le ministre des Affaires municipales, durant 18 heures et 44 minutes seulement concernant un projet de loi qui touche la démocratie, qui touche tous les citoyens des municipalités de Hauterive et de Baie-Comeau. 18 heures 44 minutes pour brimer la démocratie de ces citoyens.

Le ministre des Affaires municipales nous a dit que nous avions présenté beaucoup de mesures dilatoires. Ce n'est pas exact, M. le Président. Nous avons dit, dès le début de la commission parlementaire, que ce projet de loi contient des dispositions semblables au projet de loi no 53 et que les citoyens des municipalités de Hauterive et de Baie-Comeau devaient être consultés comme ils l'ont demandé à de nombreuses reprises.

À la commission parlementaire, j'ai vu assez régulièrement le ministère des Affaires municipales lire un livre, Avoir 20 ans en Chine. Je pense que, lorsqu'on brime des citoyens, il faut prendre l'intérêt de la communauté québécoise. Le comité conjoint qui a été formé a soumis un rapport unanime informant tous les membres de cette Assemblée qu'il fallait un montant de 4 000 000 $ pour que les citoyens de ces deux villes soient traités de façon égale. C'est un projet de loi qui n'est pas justifié. Il brime la démocratie de tous les concitoyens. C'est une loi matraque, M. le Président. Pour que deux municipalités vivent ensemble, il faut les respecter, il faut que ce gouvernement respecte le désir des concitoyens de ces deux municipalités.

Je suis très déçu du rapport. Premièrement, parce qu'on nous a brimés dans nos droits par l'adoption d'une motion de clôture, le bâillon, la guillotine, et on brime le droit de tous les citoyens du Québec.

Le leader parlementaire, qui est ministre des Communications au Québec... Nous avons connu les slogans du Parti québécois: II ne faut pas se faire avoir. Gens de Baie-Comeau-Hauterive, il ne faut pas se faire avoir. J'espère qu'au nom de la démocratie, on vous entendra parler de la démocratie, parler de votre programme électoral où vous annoncez qu'il n'y aura jamais de fusion forcée au Québec.

Le leader parlementaire, dans son

exposé à l'emporte-pièce d'hier, nous disait: II va vous couper, en utilisant la motion de clôture. Il était tout excité de nous dire ça, M. le Président. Gens de Baie-Comeau, gens de Hauterive, le leader parlementaire est tout excité de nous annoncer qu'il y a une motion de clôture et que le gouvernement nous passera sur le corps. Est-ce assez fort, ça?

Une voix: II faut rester fort!

M. Bissonnet: II faut rester fort! Je cite les paroles du leader parlementaire: "II s'agit d'un modèle produit de guillotine déjà utilisée dans le passé; la même qualité de bois, bonne armature, lame bien aiguisée et nous avons l'intention de procéder - avec ses gestes habituels - de la même façon que nous l'avons fait avec le projet de loi no 16."

M. le leader parlementaire, en voulant passer sur le corps de l'Opposition, vous voulez passer sur le corps de tous les Québécois. La démocratie avant tout. On n'a pas pris en considération, dans ce projet de loi, le rapport du comité conjoint qui était assisté de trois membres de la Commission municipale du Québec. Des promesses ont été faites par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche: Jamais de fusion forcée. Tous les citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive se sont fait dire ça au mois de février 1981, avant les élections.

Le voeu exprimé par les gens des deux villes par un sondage, c'est qu'ils veulent être consultés par voie de référendum. Pas de fusion sans référendum. L'Union des municipalités du Québec, qu'est-ce que c'est, ça? C'est l'union de toutes les municipalités: "La loi 53 doit s'appliquer pour que les citoyens de Hauterive et de Baie-Comeau puissent se prononcer sur la fusion volontaire de ces deux villes."

Le gouvernement n'a jamais eu l'intention de consulter les citoyens, mais dites-le. Dites-le que vous n'avez pas l'intention de consulter les citoyens face à un projet de loi comme celui-là.

On parle de démocratie. Je me rappelle très bien les déclarations de tous les ministres en cette Chambre vers les années soixante-quatorze, où on ne voulait jamais qu'il y ait des fusions forcées, M. le Président. Le programme politique le mentionne. À titre d'exemple, lorsque des citoyens de l'île-Bizard veulent à 90% se séparer de la communauté urbaine, pas bon, selon le ministre des Affaires municipales. On ne le fait pas. 6000 pétitionnaires veulent un référendum, non, démocratie, M. le Président. 60% de la population de Hauterive désire être consultée sur un projet de référendum. 3500 citoyens se réunissaient cette semaine, mardi passé, et invitaient les ministres des Affaires municipales et du

Loisir, de la Chasse et de la Pêche: absents. Qu'on les rencontre, les gens de Baie-Comeau et de Hauterive. Vous étiez ici, vous auriez dû voir vos concitoyens.

M. le Président, ce parti politique, le Parti québécois a de grands slogans politiques. La personne avant toute chose! Gens de Baie-Comeau, la personne avant toute chose! Comment est-ce qu'on vous considère, vous, les citoyens du Québec? On peut vous passer le même sapin très régulièrement parce qu'on commence aujourd'hui avec un projet de loi matraque. Il ne faut pas se faire avoir! Un autre slogan. Ces slogans ont été faits par le ministre des Communications, la propagande électoraliste gouvernementale payée par tous les Québécois. Il ne faut pas se faire avoir! Ne vous ont-ils pas eus, gens de Baie-Comeau et de Hauterive? Il faut se prendre en main! C'est quelque chose. Gens de Baie-Comeau, gens de Hauterive, prenez-vous en main! Des grands slogans. Minute, Ottawa! On pourrait dire à la place: Minute Lessard, M. le Président. Pseudo-démocrates! On vous voit vraiment sous votre vrai visage, vous qui promulguez la démocratie. C'est beau! (20 h 10)

Je regarde le ministre d'État au Développement économique, c'est fort. Respectez donc la population. Respectez les gens qui veulent eux-mêmes se prononcer sur leur avenir. M. le député de Laval-des-Rapides, vous ne m'impressionnez guère. Quand on considère qu'il y a à peine un mois... M. le Président, est-ce que je peux avoir un peu d'ordre, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, nous avons quatre heures de travail, normalement. Il faudrait les commencer dans l'ordre. M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: M. le Président, il y a à peu près un mois - je vais terminer mon exposé en posant directement une question au ministre des Affaires municipales - il y a eu un projet d'annexion dans la région métropolitaine que tous les députés de cette Chambre connaissent. Les gens de la municipalité de la ville de Pointe-aux-Trembles se sont prononcés après que les deux conseils eurent adopté une résolution pour faire annexer leur municipalité à la ville de Montréal, ce qu'on ne retrouve pas pour les villes de Baie-Comeau et Hauterive, et les citoyens de la ville de Pointe-aux-Trembles, dans un référendum, ont décidé de s'annexer à la ville de Montréal. Depuis ce temps, - parce que c'est en vertu de la loi 53 en particulier et en vertu de la charte de la ville de Montréal dont les dispositions le permettent - le ministre des Affaires municipales est muet. Pourquoi les gens de Pointe-aux-Trembles peuvent-ils se fusionner, avec une loi démocratique où, d'eux-mêmes,

ils posent le geste - et c'étaient les mots du ministre l'autre jour - à Montréal? Pourquoi les gens de Pointe-aux-Trembles peuvent-ils le faire et pourquoi les gens de Baie-Comeau et Hauterive ne peuvent-ils pas le faire?

M. le ministre, première question: Est-ce que ce sont des gens différents? Est-ce que ce sont des personnes comme tous les citoyens du Québec dans ces deux municipalités et pourquoi, M. le ministre? On ne connaît pas encore vos commentaires relativement à ce projet d'annexion qui a été adopté par une majorité de citoyens de Pointe-aux-Trembles qui avaient le droit de vote et pourquoi les citoyens de Baie-Comeau et Hauterive n'ont-ils pas le même pouvoir démocratique de choisir d'eux-mêmes s'ils veulent se fusionner de façon démocratique? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Nous sommes rendus ce soir à la prise en considération du rapport de la commission parlementaire des affaires municipales. Je comprends mal pourquoi on a convoqué cette commission parlementaire qui devait étudier article par article le projet de loi no 37, qui impose de force la fusion de deux villes, celles de Baie-Comeau et de Hauterive. En deuxième lieu, cette même commission a été empêchée de poursuivre normalement ses travaux. M. le Président, je me demande pourquoi, en premier lieu, on l'a convoquée, quand on savait fort bien que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche menaçait depuis longtemps d'imposer ce projet de loi à la population de Hauterive. Si les gens de l'autre côté de la Chambre avaient voulu être honnêtes avec la population, ils auraient mieux fait de ne pas convoquer la commission parlementaire. Cela aurait épargné du temps et de l'argent à la population québécoise.

Ces travaux de la commission parlementaire ont été terminés par le Dr Jekyll and Mr. Hyde de l'Assemblée nationale du Québec. Le député de Vanier, ministre des Communications et leader parlementaire du gouvernement, est le Dr Jekyll and Mr. Hyde de cette Assemblée. Le jour, ce leader parlementaire du gouvernement professe vouloir redonner à cette institution son caractère de dignité pour que la population du Québec, qu'il nous dit, puisse trouver à travers les débats de l'Assemblée véritablement un reflet de valeur, à savoir le respect mutuel, le respect de la présidence, le respect de la démocratie, le respect des uns et des autres. C'est le jour, cela. Le soir, son comportement change. Ce leader du gouvernement, obnubilé par le pouvoir, se réjouit follement de ses paroles et de son geste totalitaire. Je me demande pour qui il se prend lorsqu'il crie comme un déchaîné dans cette Chambre en nous disant qu'il va nous passer sur le corps. C'est cela la démocratie, c'est cela le bulldozer des gens d'en face. Il va nous passer sur le corps. En passant sur le corps de l'Opposition, il passe aussi sur le corps de tous les Québécois. Je me demande combien de temps ces gens vont rester à terre et se laisser passer sur le corps par le leader du gouvernement.

Je crois qu'il avait peut-être oublié qu'il était dans l'Assemblée nationale du Québec, une institution démocratique. Si on analyse bien son discours, il ressemble beaucoup à des discours qu'on entend dans des républiques de bananes. Oui, il va manger des oranges, de l'autre côté, il n'est même pas à son siège. Peut-être qu'il serait mieux de manger des bananes. Le leader du gouvernement se pense dans une république de bananes lorsqu'il fait des discours où il nous dit qu'il peut passer sur notre corps. Cela ne m'aurait pas surpris si j'avais entendu ces discours dans un autre pays, une autre province, là où ces Assemblées, ces Chambres des communes sont remplies de pseudo-parlementaires et de pseudo-démocrates, M. le Président.

La motion de clôture dans une démocratie n'est employée qu'en cas d'urgence. Où est l'urgence dans la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive? À ce jour, il n'y a personne de l'autre côté qui a pu répondre à cette question. Où est l'urgence, M. le ministre? Où est l'urgence?

Les privilèges de tous les membres de cette Assemblée sont brimés par une telle motion. Ils sont brimés parce que ces gens ont pris le goût du pouvoir, le pouvoir absolu. Ils savent fort bien que, du côté de l'Opposition, on peut dire n'importe quoi, mais, le jour du vote, ils vont gagner. Les machines à voter du poulailler vont sortir, M. le Président, et, même si elles ne sont pas d'accord avec la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive, elles vont être ici et seront solidaires du gouvernement. C'est cela la démocratie, M. le Président.

Même si ces procédures sont légales, elles sont dictatoriales et totalitaires. En abusant de ce pouvoir - oui, M. le député de Vachon - vous insultez autant les parlementaires, vos propres confrères, que l'ensemble de la population du Québec. Ces décisions unilatérales ne sont pas quelque chose de nouveau de la part de ces gens.

Je me rappelle qu'à un certain moment, on avait placé la CECM, la Commission des écoles catholiques de Montréal, en tutelle pour qu'une entente collective soit signée. C'était un bel ouvrage, incontestablement. Ces mêmes gens, trois ou quatre ans après, étaient prêts à renier la signature qu'ils avaient apposée.

Une voix: Laquelle?

M. Cusano: Ce contrat. Là, ils ont menacé les syndicats. Ils ont dit: On va renier notre signature. On déchire le contrat. De grandes menaces! C'est cela les gens forts, M. le Président. Leur campagne, c'était: Rester fort. "It is what we call, in English, bowlies", M. le Président. Ils se servent de leur pouvoir pour intimider les gens. Ils sont prêts à renier leur propre signature, on l'a vu et, en plus, ils reculent. Qu'est-ce qu'ils font par l'entremise du projet de loi no 70? Ils font exactement la même chose, ils rendent tous leurs gestes légaux. (20 h 20)

M. le Président, en regardant le rapport qui nous est présenté, on voit que ce projet de loi no 37 n'a pas été adopté en commission parlementaire. On devrait se poser la question à savoir pourquoi il n'y a pas été adopté. C'est simple, le leader du gouvernement n'a pas permis que la commission parlementaire finisse son travail. Vous riez, M. le député de Vachon, c'est bien drâle. C'est ça, la démocratie, c'est rire comme un fou.

Une voix: Faut pas se faire avoir!

M. Cusano: C'est simple, c'est parce qu'on ne nous a pas permis de faire le travail que la commission parlementaire devait faire. À la fin, il y a eu seulement 18 heures de travail; même si je n'ai pas les statistiques devant moi, je suis sûr que si on faisait la moyenne des heures passées en commission parlementaire pour discuter de projets de loi aussi importants, 18 heures, ce n'est rien, ce n'est même pas une journée, ce n'est même pas 24 heures. Ces gens se disent responsables.

Qu'a fait l'Opposition? Elle a proposé des amendements. Ils ont été arbitrairement refusés. L'Opposition a proposé un amendement qui avait pour effet de permettre une consultation des propriétaires et des locataires non seulement de la ville de Baie-Comeau, mais de la ville de Hauterive. Cela a été refusé. On sait fort bien que le sondage qui avait été fait dans la région démontrait que la population de ces deux municipalités était intéressée à être consultée, à avoir un référendum. Pourtant, ces gens ne veulent rien entendre.

M. Lessard: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de règlement de la part du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lessard: J'ai aussi ce sondage qui démontre que 59% de la population de Baie-Comeau-Hauterive veut la fusion.

Des voix: Ah!

M. Lalonde: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Si le député-parrain du projet de loi veut s'exprimer, il aura le loisir de le faire, mais qu'il accepte ce que le député de Viau vient de dire à savoir qu'une grande majorité, 89% des gens de Baie-Comeau et 68%...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, de toute façon, rien n'a été enregistré pour la simple raison que vous n'aviez, ni l'un ni l'autre, une question de règlement.

M. le député de Viau, il vous reste une minute.

M. Cusano: M. le Président, j'espère que vous allez soustraire de mon temps l'intervention du député de Saguenay.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vous ai dit qu'il vous restait une minute.

M. Cusano: Merci, M. le Président. Ce qui est important dans tous nos exercices ici, à l'Assemblée nationale, c'est qu'il faut comprendre qu'un gouvernement doit être au service de la population, et non le contraire. Le projet de loi no 37, cela veut dire que la population de Baie-Comeau et de Hauterive, que même la population du Québec doit être au service de ce gouvernement, M. le Président, et cela je ne l'accepte pas.

En proposant l'amendement que j'ai mentionné, l'Opposition n'avait aucun autre désir que de s'assurer que ce gouvernement joue bien son rôle, mais il n'est pas intéressé à jouer son râle.

Je termine, M. le Président. On m'interrompt de l'autre côté. Un autre amendement a été proposé pour demander la permission que tous les députés de cette Assemblée nationale participent à la commission parlementaire, mais on a refusé. C'était peut-être parce que les péquistes craignaient l'ex-leader parlementaire, le député de Saint-Jacques, parce que, lui, il y eut un temps, il disait: "Nous, du Parti québécois, disons qu'aucune municipalité, aucune ville - en terminant, M. le Président, s'il vous plaît! - aucune agglomération urbaine ne devrait subir de changements majeurs profonds qui vont, même à l'occasion, jusqu'à la fusion d'autres municipalités."

M. le Président, c'est peut-être pour cette raison...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député, vous exagérez un peu sur la...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'est pas vrai, M. le député. En terminant, rapidement.

M. Cusano: En terminant, M. le Président, ce projet de loi et les gestes dictatoriaux du député de Vanier et leader parlementaire briment les droits des parlementaires et les droits et privilèges de tous les Québécois. C'est pour cette raison que je n'accepterai pas ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le député de Viau vient de poser une bonne question. Il a demandé: Où est l'urgence de faire la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive? Je voudrais simplement faire une citation parce que, à mon avis, elle est importante. Elle vient de quelqu'un du milieu et je dirai, ensuite, l'année où cet éditorial a été écrit. Je le lis, M. le Président.

Cela s'intitule "Urgence de la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive". Je cite: "Ceux qui sont au courant de la chose municipale des deux villes soeurs de Baie-Comeau et de Hauterive peuvent comprendre comment la fusion de ces deux municipalités est urgente. Plus cette solution retardera, plus elle deviendra difficile à réaliser alors que l'esprit de clocher implantera plus profondément ses racines dans la terre des préjugés. Présentement, le progrès des deux villes est retardé parce qu'elles forment deux entités distinctes. Il n'est point nécessaire de mettre ici les points sur les "i" pour se faire comprendre. Pourquoi n'avons-nous pas, aujourd'hui, un aéroport convenable à Pointe-Lebel? Pourquoi le palais de justice a-t-il été une cause de dissension entre les deux villes? Pourquoi Hydro-Québec retarde-t-elle à construire son atelier mécanique? L'urgence de cette fusion est évidente si l'on veut empêcher la duplication des services dans les loisirs, la prévention des incendies et autres. Le service d'autobus deviendrait peut-être rentable s'il couvrait les deux villes. Pourquoi un autre hâtel de ville? Nous en avons un présentement qui peut servir les deux villes. Le ministre des Affaires municipales et le gouvernement font campagne en faveur du regroupement municipal. M. Laporte vient de s'inscrire en faux contre la tendance que nous avons d'identifier les notions d'autonomie municipale et de fractionnement municipal. "Il n'y a aucun rapport, dit-il entre la notion d'autonomie municipale et celle de regroupement municipal. L'autonomie municipale ne dépend ni du nombre des municipalités ni de leur grandeur. C'est essentiellement la liberté que leur laisse le gouvernement de s'administrer sans ingérence de l'autorité supérieure. Quant au regroupement municipal, ajoute-t-il, c'est bien autre chose, c'est purement une question de géographie, de services, d'efficacité." Une municipalité, a déclaré M. Laporte, n'est pas libre de battre en brèche la notion primordiale de bien commun. C'est donc en faveur du bien commun des deux municipalités que nous déclarons qu'elles devraient se fusionner et qu'il y a urgence à le faire. "Et, quand nous parlons du bien commun, prenons par exemple le cas des loisirs. À Baie-Comeau nous avons une aréna, mais elle devra bientôt être reconstruite ailleurs, la pauvre. Elle commence à se faire vieille. Nous n'avons pas d'aréna à Hauterive. Pourquoi ne pas unir les efforts et ne construire qu'une seule aréna qui servirait aux deux villes et serait édifiée au centre dans la région de la rivière Amédée, par exemple? Dans bien d'autres domaines nous pourrions unir nos efforts pour donner de meilleurs services aux deux populations tout en évitant le coût inutile de la duplication. "La fusion des deux villes est urgente, il ne faut pas attendre que la duplication s'établisse dans tous les services. Il ne faut pas attendre que l'esprit de clocher s'implante trop profondément dans les esprits et les coeurs. Les chambres de commerce et tous ceux qui travaillent en vue de cette fusion méritent nos félicitations. Ce sont des citoyens qui voient grand et beau et qui planent au-dessus des mesquineries et des rivalités indignes de gens adultes qui ont l'esprit et le coeur ouverts au bien commun." C'est signé par M. Gérard Lefrançois, que tout le monde de Baie-Comeau et de Hauterive connaît.

Une voix: En quelle année?

M. Léonard: Cet éditorial a été écrit en 1965, il y a 17 ans.

Nous n'avons pas agi jusqu'ici parce que nous avons eu l'espoir que la fusion se ferait volontairement, mais nous devons agir maintenant parce que depuis un an ou un an et demi la compagnie Reynolds, en plus, a annoncé un investissement de 750 000 000 $, ce qui fait que les déséquilibres qui étaient déjà là vont doubler lorsque cet investissement aura été concrétisé. (20 h 30)

Je pense qu'il est urgent qu'on fasse cette fusion, absolument urgent, et je crois que, quoi que disent les gens d'en face, ils ne pourront pas contredire une réalité qui existe déjà et un futur qui s'annonce.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, j'entendais le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous dire tout à l'heure qu'il avait les résultats d'un sondage et que, d'après les chiffres qu'il avait, on devait conclure que les débats devaient arrêter parce que tout est terminé. Si je comprends bien l'interprétation du ministre, à l'avenir le gouvernement légiférera, fera des sondages et il pourrait se dispenser de l'Assemblée nationale, il pourrait même se dispenser d'un référendum et, à l'aide de sondages, prendre des décisions importantes et forcer une fusion comme celle dont nous discutons maintenant. J'entendais le ministre nous dire que c'était très urgent en 1965, si j'ai bien compris. Et nous voilà quinze ou dix-sept ans plus tard et, que je sache, les gens ont vécu dans les deux villes et, bien sûr, tout le monde souhaite la fusion, mais ce dont nous discutons, M. le Président, c'est: Est-ce qu'il y a urgence pour faire une fusion forcée? Il semblerait que ces gens du gouvernement n'ont pas compris et, s'il faut le répéter, nous allons le répéter ce soir. Je crois que, pour la compréhension de ceux qui nous écoutent, il serait peut-être opportun d'expliquer où nous en sommes maintenant dans le débat puisque cela fait plusieurs fois que, des deux côtés de la Chambre, nous parlons sur ce projet de loi.

Ce soir, nous prenons en considération le rapport qui provient de ce qui a été fait, de ce qui a été si peu fait en commission parlementaire. Bien sûr, les gens qui nous écoutent assidûment savent que, dans un premier temps, il y a une première lecture qui n'est qu'un geste tout à fait nominal de la part du gouvernement pour nous dire qu'il a l'intention de faire adopter un projet de loi. À ce moment, il n'y a aucun débat. À la suite, il y a une deuxième lecture où on discute du principe même du projet de loi et, normalement, il y a une commission parlementaire où on discute de chacun des articles et cela prend normalement le temps que ça peut prendre. Cela peut prendre 10 heures, cela peut prendre 20 heures, cela peut prendre 60 heures. Cela dépend de l'importance du projet de loi, de l'importance que les citoyens y attachent et de l'importance que les parlementaires y attachent. Par la suite, il y a réception d'un rapport à l'Assemblée nationale et c'est là que nous en sommes, M. le Président, ce soir. Plus tard, il y aura la troisième lecture et il peut y avoir des discours ou non. Mais l'étape importante, et c'est ce que je veux souligner, M. le Président, c'est l'étude en deuxième lecture et l'étude article par article en commission parlementaire.

Mais que s'est-il passé, M. le Président, pour ce projet de loi ci? Ce qui s'est passé, c'est que nous avons eu la première lecture, nous avons eu la deuxième lecture, mais, avant que nous passions en commission parlementaire, les deux ministres qui sont concernés par ce projet de loi se sont aperçus, comme par hasard, que les données qu'ils avaient n'étaient pas aussi complètes que celles qu'ils croyaient avoir. Alors, ils ont mandaté un comité d'experts pour faire l'évaluation de l'impact financier d'une fusion.

Si ce travail avait été fait avant, M. le Président, nous aurions pu discuter de ce projet de loi à loisir et nous ne serions pas maintenant dans une urgence que le gouvernement nous impose. Nous aurions pu, il y a un mois, deux mois ou trois mois, si le ministre responsable avait fait son travail honnêtement, si le ministre avait eu les données, s'il avait pu informer cette Chambre d'une façon normale, nous aurions pu faire l'étude article par article et prendre tout le temps nécessaire, compte tenu de l'importance de ce projet de loi. Mais ce qui est arrivé, après seulement quelques heures, après 18 heures, c'est que le gouvernement a décidé qu'il y avait urgence puisqu'on doit aller en vacances prochainement; maintenant, on nous met le bâillon.

M. le Président, qu'est-ce qui arrive exactement? Nous avons un gouvernement autoritaire, mon collègue l'a dit, un gouvernement pressé, mais pourquoi? Qu'est-ce qu'il y a de si pressé? Le ministre a essayé de nous expliquer qu'un journaliste en 1965 avait dit qu'il y avait urgence à ce moment-là d'effectuer cette fusion. 17 ans plus tard, tout le monde a survécu, les gens ont survécu et, quoique les gens admettent la nécessité de faire une fusion, je ne crois pas qu'il y ait urgence d'approuver ce projet de loi maintenant, plutôt qu'au mois de septembre. Il n'y a pas urgence assez pour bloquer le travail en commission parlementaire. Il n'y a pas urgence assez pour qu'on ne procède pas d'une façon démocratique. Il n'y a pas urgence. Même si on doit partir en vacances prochainement, M. le Président, je crois que les contribuables s'attendent que les parlementaires ne mettent pas de date fixe à leurs vacances et, s'il fallait revenir, nous donnerions notre consentement au gouvernement pour revenir au mois de juillet ou plus tard et faire le travail qui s'impose.

M. le Président, pourquoi finir les travaux immédiatement? C'est probablement l'urgence du ministre ou des ministres concernés de partir en vacances, alors qu'il n'y a pas d'urgence dans les faits. Il n'y a pas urgence pour faire cette fusion. C'est un abus de pouvoir et, en ce qui concerne ce projet de loi, je crois que le gouvernement ne nous a nullement convaincus qu'il y avait

urgence de procéder.

Le leader parlementaire a fait allusion au fait qu'il y avait une similitude entre ce projet de loi et le projet de loi no 16. Ceci est fort amusant, M. le Président. Ayant été étroitement mêlé à ce débat, en décembre dernier, et ayant pu débattre de ce projet de loi en commission parlementaire pendant quelque 40 heures, ce qui est deux fois et quart plus de temps que celui alloué pour le projet de loi no 37, je me suis mis à réfléchir dernièrement sur la question à savoir s'il y avait eu, au mois de décembre, autant d'urgence que le ministre de l'Énergie et des Ressources nous l'avait dit. C'est assez curieux qu'à ce moment-là, alors que plusieurs associations, plusieurs syndicats avaient demandé de se faire entendre avant que ce projet de loi soit adopté d'une façon très pressée et avant que le gouvernement nous mette le bâillon, le gouvernement a décidé de procéder rapidement puisqu'il disait qu'il y avait urgence. Mais quelle urgence y avait-il au mois de décembre dernier?

Avec le recul du temps, sept mois plus tard, on s'aperçoit bien qu'il n'y avait pas d'urgence au mois de décembre. On a procédé d'une façon unilatérale, d'une façon autoritaire pour changer de fond en comble une société d'État extrêmement importante. Bien sûr, les répercussions de ce projet de loi no 16 se feront sentir dans les années qui viennent et c'est la raison pour laquelle les syndicats et les associations avaient demandé de se faire entendre puisqu'il n'y avait pas urgence de changer substantiellement Hydro-Québec. Nous aurions pu évaluer l'impact économique et financier d'un tel changement. La seule urgence dont le ministre nous ait fait part à ce moment-là, c'est que les finances publiques étaient en difficulté et qu'il fallait justement adopter le projet de loi pour que le gouvernement puisse compter sur des revenus additionnels cette année.

Depuis lors, on sait - et le ministre l'a dit lui-même - que les revenus qui se sont accrus au gouvernement et qui sont allés dans les poches du ministre des Finances n'ont été que de 4 000 000 $ à 5 000 000 $, alors que le ministre croyait obtenir un dividende de 150 000 000 $. On voit bien - et je ne voudrais pas en dire plus sur le sujet - que le gouvernement s'est trompé substantiellement sur l'urgence qu'il y avait, au mois de décembre dernier, de mettre le bâillon à l'Opposition, d'arrêter la discussion, d'arrêter la discussion avec les syndicats et avec les associations qui voulaient discuter de l'impact du projet de loi no 16 sur l'avenir énergétique et économique du Québec.

M. le Président, nous sommes en face du projet de loi no 37. Le gouvernement nous dit qu'il y a urgence. Il ne nous l'a pas prouvé et nous avons des questions, nous avons plusieurs questions et plusieurs de mes collègues ont fait allusion à de nombreuses questions, des questions fondamentales. Quelle est l'urgence de faire approuver ce projet de loi immédiatement, maintenant, et quelle était l'urgence, de mettre le bâillon à l'Opposition pour empêcher les parlementaires de faire leur travail d'une façon raisonnable? Le gouvernement ne prend pas de chances, M. le Président, parce qu'il sait bien - et je conclus là-dessus - qu'en procédant de cette façon, il va créer un climat social difficile. Parmi les amendements que le gouvernement propose, il en est un qui va donner par décret le pouvoir au gouvernement de se substituer au conseil et au maire, au cas où il y aurait des difficultés. (20 h 40)

Non content de procéder d'une façon unilatérale, non content de procéder d'une façon autoritaire, non content d'avoir un mauvais jugement sur l'urgence de la situation, il s'arrange même pour prévoir les difficultés et il s'arrange même pour, dès maintenant, se donner les pouvoirs de se substituer au maire et au conseil si jamais il y avait des difficultés.

Je conclus là-dessus, je crois que le rapport qui est devant nous pour considération n'est pas complet, que les parlementaires n'ont pas fait le travail qu'ils devaient faire. Dans les circonstances nous devons malheureusement rejeter et nous allons rejeter ce rapport.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Dans des circonstances habituelles, je ne serais pas intervenue sur ce projet de loi. Normalement, il relève de mes collègues qui sont responsables de la commission des affaires municipales. Si je le fais à ce moment-ci, c'est que je veux protester avec mes collègues contre le comportement antidémocratique de ce gouvernement dans ce dossier particulier.

Il faut bien réaliser qu'il s'agit d'un projet de loi qui ordonne ou oblige la fusion de deux municipalités, celles de Baie-Comeau et de Hauterive. Normalement, nos lois municipales prévoient que, dans ces cas, si les citoyens le désirent - évidemment, s'ils ne le désirent pas, c'est une autre chose -on peut procéder par référendum. Pourtant, le gouvernement s'obstine à refuser ce référendum. C'est un simulacre de démocratie auquel il a recours. De l'autre côté de la Chambre, le ministre fait état de sondages. Le référendum a été remplacé par un sondage.

M. le Président, je vois que le parrain de ce projet de loi, qui veut envers et contre tous procéder à la fusion obligatoire

de ces deux municipalités, me répond: Ils ne l'ont pas voulu. Je ne sais pas, mais il me semble que si je sais bien lire, quand on regarde le sondage CROP et qu'on le regarde dans ses détails, il ressort de ce sondage qu'une très forte majorité des répondants de Baie-Comeau, soit 93%, et une majorité moins importante de ceux de Hauterive, 68%, estiment que le gouvernement devrait consulter les citoyens avant de procéder à la fusion. Je cite l'interprétation du sondage qui a paru dans le journal Plein Jour, qui est une interprétation rigoureuse du sondage qui a eu lieu. Le ministre me dit: Ils ne l'ont pas voulu.

Évidemment, ce que le ministre ne veut pas entendre ou ne veut pas voir, c'est la vérité. C'est assez inquiétant et même troublant de voir qu'en dépit des difficultés auxquelles le gouvernement est confronté, on procède de toute façon et je m'interroge sérieusement sur les motifs du député de Saguenay, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

On est rendu à ce point dans ce gouvernement que le fait de poser un geste autoritaire de plus ou de moins, cela n'a aucune espèce d'importance. On est devant un gouvernement qui est tellement au bord de la faillite que, pour s'affirmer, il ne trouve d'autres moyens que d'agir par des gestes d'autorité. On l'a vu, et un de mes collègues, le député de Viger, parlait de la loi 70 par laquelle on bafoue les règles habituelles de nos conventions collectives. Le gouvernement, soi-disant au nom de l'intérêt commun, agit d'une façon unilatérale et rejette du revers de la main toutes les suggestions qui lui sont faites, même par les syndicats, de procéder autrement. Ils lui ont fait des ouvertures, mais le gouvernement dit: C'est moi qui mène, c'est moi qui décide, les citoyens je ne veux pas les entendre.

D'ailleurs, M. le Président, il ne faut pas se méprendre sur ce désir si souvent exprimé par le gouvernement de toujours consulter la population. On a eu souvent ici dans cette Chambre l'occasion de parler, par exemple, de la fausse transparence du gouvernement. On pourrait également parler de ses fausses consultations de la population, quand cela n'a pas été de la manipulation de l'opinion publique.

Évidemment, le gouvernement ou les membres du Conseil exécutif, avec l'autorité morale qu'ils ont, peuvent bien tenter aussi souvent qu'ils veulent de manipuler l'opinion publique, mais, à un moment donné, la population refuse, et c'est ce qui se produit dans le cas de Hauterive et de Baie-Comeau. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a beau triturer le sondage, l'interpréter à sa façon, la population ne marche pas. La population dit: Nous voulons être consultés par un référendum et nous n'accepterons pas cette fusion tant et aussi longtemps que vous ne nous aurez pas consultés d'une façon démocratique.

D'ailleurs, le mode de consultation de ce gouvernement a toujours été d'aller voir surtout ceux qui pensaient comme lui. Je pourrais vous citer à cet égard la fameuse consultation qui a eu lieu sur le livre vert en éducation où toutes les séances qui étaient tenues pour cette soi-disant consultation étaient imposées à des gens. On obligeait dans les écoles les professeurs à rester là, parce que le ministre de l'Éducation venait. Et il fallait que les questions qui seraient posées au ministre de l'Éducation lui soient soumises à l'avance, comme s'il avait eu peur de ne pouvoir répondre aux questions; cela est fort connu. D'ailleurs, on limitait le temps: cinq minutes de présentation, dix minutes au mieux, chaque question préparée, lue et toutes les réponses, évidemment, concoctées par les conseillers du ministre. Après cela, on est revenu avec les résultats de cette grande consultation.

M. le Président, une espèce d'obligation morale que j'ai à l'endroit d'une commission à laquelle je siège m'empêche d'apporter plus d'exemples concrets, mais ce gouvernement, quand il est allé consulter la population, il l'a toujours fait selon ses propres règles du jeu, mais sans jamais respecter celles de la population en général.

M. Lalonde: C'est vrai.

Mme Lavoie-Roux: Nous avons à ce moment-ci une autre preuve de la façon dont se comporte le gouvernement, mais, dans les cas où il ne peut pas contrôler la population, là on agit d'autorité. C'est ce qui arrive dans le cas de Baie-Comeau et Hauterive.

M. le Président, un gouvernement, quand il panique, quand il sent que le pouvoir lui échappe - c'est la caractéristique de certains types de gouvernement, et je n'hésite pas à le dire - qu'il ne peut plus contrôler les choses - ce gouvernement a toujours voulu contrôler, manipuler l'opinion publique - il agit d'autorité. Autrement, j'aimerais que le ministre se lève, s'il est aussi transparent qu'il le dit, et qu'il m'explique pourquoi il refuse d'aller consulter cette population de Hauterive et de Baie-Comeau par référendum.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît: S'il vous plaît!

M. Lalonde: Vous avez encore dix minutes.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Lessard: Elle me pose une question. Si je peux y répondre, je vais répondre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît; Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Sans aucun doute, on peut faire valoir - j'entendais quelqu'un, je pense que c'était le ministre des Affaires municipales -que peut-être, au lieu de deux hôtels de ville, on en aurait un seul, au lieu de deux types de services, on en aurait un seul, on ferait des économies. Enfin, il a développé un certain nombre d'arguments qu'il a cités de quelqu'un d'autre.

M. Lalonde: D'un éditorialiste.

Mme Lavoie-Roux: D'un éditorialiste. Mais, M. le Président, que vaut le tissu humain d'une communauté? Pourtant, si on s'est fait entretenir de la vie des communautés!

M. Lalonde: Du milieu!

Des voix: Ah!

(20 h 50)

Mme Lavoie-Roux: Du milieu, le vécu des milieux. Le vocabulaire que ce gouvernement a développé autour de la notion de collectivité, d'appartenance au milieu, d'appartenance à la collectivité! On a d'ailleurs pu ajouter beaucoup à notre vocabulaire là-dessus. Qu'en fait-il en ce moment? On va mettre de l'avant des arguments de raisons économiques, de justifications économiques, mais il y a des choses qui sont plus importantes que celles-là. Ce qui est encore le plus important, c'est de ne pas piétiner les gens, c'est de ne pas bafouer la volonté des gens, et ce gouvernement ne semble pas le comprendre. Si je me suis levée aujourd'hui, c'est parce que je pense que c'est le temps qu'on donne l'alarme et qu'on dise au gouvernement: Trop, c'est trop!

En terminant, je voudrais rendre hommage à mon collègue du comté de Hull pour la persévérance qu'il a montrée dans un dossier qui n'était pas facile, dans lequel il s'opposait à un gouvernement qui, de son côté, avait tous les outils, tous les instruments, toutes les ficelles qu'il sait si bien manipuler pour convaincre ou soi-disant convaincre une population. En dépit de tous ces obstacles, il n'a arrêté, depuis des semaines, sinon des mois, de défendre ce que la population voulait, de défendre notre système démocratique qui doit s'exercer non seulement au niveau de nos élections provinciales, mais également au niveau des municipalités et de tous nos autres types de gouvernement.

Je suis heureuse, ce soir, d'une certaine façon, de pouvoir apporter ce petit appui à mes collègues qui, eux, ont travaillé depuis des semaines et des mois. Je suis surtout heureuse de pouvoir être encore dans un Parlement où on a le droit, au nom de la démocratie, d'une véritable démocratie, dedemander qu'on respecte l'opinion de la population. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Westmount.

M. Richard French

M. French: M. le Président, nous débattons ce soir un des projets de loi les plus répugnants, les plus injustes que j'aie eu le privilège de commenter depuis maintenant quelque treize ou quatorze mois que je suis député. Il s'agit du projet de loi no 37, au nom du ministre des Affaires municipales, mais dont le vrai parrain - c'est un secret de polichinelle - est le député de Saguenay, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Il s'agit de la fusion forcée de deux municipalités. Le principe de la fusion est largement accepté. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche va sans doute nous entretenir sur l'appui qu'attire ce principe de la fusion parmi la population de ce qu'il aime appeler un peu prématurément l'agglomération de Baie-Comeau. On espère toujours que son interprétation de cette entité, et surtout son interprétation de l'opinion publique de cette entité, sera un peu plus forte et un peu plus précise qu'elle ne l'a été le jour où il a déposé devant l'Assemblée nationale une pétition avec quelques milliers de signatures, nous disait-il, de la population de l'agglomération de Baie-Comeau appuyant le projet de loi no 37.

Or, après examen, il y avait combien de signatures de Baie-Comeau? 69 signatures, sur quelques milliers, venaient de la ville de Baie-Comeau. Lorsqu'il arrive et nous présente ce sondage, on espère qu'on peut s'attendre à un minimum de précisions, à un minimum de franchise, à un minimum d'honnêteté dans son interprétation des chiffres, à un peu plus, au moins, que la franchise, l'honnêteté et la précision dont l'Assemblée nationale et la population du Québec ont bénéficié lors du dépôt de la fameuse pétition.

M. le Président, il faut dire qu'on n'avait jamais imaginé qu'un gouvernement qui s'attribuait toutes les vertus de la démocratie et de la consultation, qui était à l'écoute des milieux populaires, serait capable de venir devant nous, à l'encontre des principes de son propre programme politique, avec une fusion forcée, une fusion qui va à l'encontre des voeux d'une des deux villes constituantes. On n'aurait jamais pu imaginer que ce faisant, il aurait recours à la guillotine. Mais ce qui est plus alarmant

encore, M. le Président, c'est que la tache qui a commencé par le grenouillage politique du député s'est étendue pour couvrir d'autres ministres, pour couvrir le ministre des Affaires municipales et, hier soir, le député de Vanier, ministre des Communications et leader parlementaire du gouvernement.

Nous avons, de notre côté, travaillé avec grand intérêt, avec une grande participation, avec toute la liberté d'expression qui nous est possible de par nos traditions parlementaires, de par nos règlements, en commission parlementaire. Nous avons passé environ 18 heures à essayer d'étudier le projet de loi. Je pense, M. le Président, que le député de Bourassa est en mesure de confirmer l'attitude constructive de l'Opposition. Je crois qu'il est en mesure de nous dire - il va peut-être le faire plus tard, ce soir; on l'espère bien - combien nous avons proposé des amendements qui ont fait réfléchir les gens de l'autre côté.

Malheureusement, pour des raisons qu'on ne comprend pas très bien, nos tentatives de médiation, les efforts que nous avons déployés afin de bâtir un projet de loi qui aille chercher l'appui des deux villes, qui fasse en sorte qu'il y ait une fusion volontaire, qui crée une vraie paix sociale dans ce que le député de Saguenay appelle le Grand Baie-Comeau, n'ont pas réussi. Nous n'avons pu convaincre, par exemple, le gouvernement de la valeur d'un référendum, d'une consultation populaire.

Comment expliquer que ces spécialistes de la consultation aient rejeté le principe d'un référendum? Ils ont été - je pense, personnellement, que c'est à leur crédit - les pionniers, en quelque sorte, du référendum dans le contexte québécois. On en a eu un en mai 1980 et tout le monde en connaît le résultat. Il y en a eu un au sein du parti gouvernemental, il y a quelques mois, et on en connaît le résultat. On ne peut pas dire qu'il était aussi démocratique que le premier référendum, mais quand même. Il y en a eu un dans un cas semblable à celui que nous examinons ce soir, c'est-à-dire il y a quelques semaines, à Pointe-aux-Trembles, lorsqu'il a été question de la fusion de Pointe-aux-Trembles avec la ville de Montréal. (21 heures)

M. le Président, le leader parlementaire s'est livré à quelques réflexions désagréables et non parlementaires, à l'occasion de son effusion si édifiante sur la procédure parlementaire que nous avons utilisée, en utilisant les règlements que nous avons tous comme outil de travail. Il a fait certaines réflexions à l'endroit du député de Hull et sur l'Opposition et il s'est servi de la menace que le gouvernement va nous passer sur le corps. Je pense qu'il parlait à ce moment-là plus spécifiquement du député de Hull. Mais j'ai des nouvelles pour le leader parlementaire du gouvernement, parce qu'avant qu'il passe sur le corps du député de Hull, il faudra qu'il passe sur le corps des 42 autres députés qui seront là pour protéger le député de Hull, qui s'est prévalu...

M. le Président, si je suis ici ce soir, c'est parce que j'ai appris à apprécier le travail de mon collègue, le député de Hull. C'est parce que je me suis rendu compte que ça prend un homme qui croit en lui, qui a confiance en lui, qui a le courage de ne pas se laisser intimider, comme le gouvernement essaie d'intimider les citoyens de Baie-Comeau, et le député de Hull est cet homme.

Chaque fois que la démocratie est bousculée, l'Opposition est là. Chaque fois qu'on essaie de négocier, de truquer les principes qui devraient gouverner notre vie commune, l'Opposition est là. Justement, la commission parlementaire n'a pu finir ses travaux parce que le gouvernement a décidé d'invoquer la guillotine. La commission parlementaire n'a donc pas adopté le projet de loi comme tel et nous avons devant nous toute une série d'amendements déposés un peu discrètement devant l'Assemblée nationale, qui prendraient un intérêt dans la mesure où ils n'ont jamais été exposés au grand jour.

Je voudrais indiquer à la population du Québec ce qui l'attend dans les amendements et indiquer plus particulièrement aux citoyens de Baie-Comeau cette clause de toute beauté qui nous fait penser à la Loi sur les mesures de guerre.

Je cite spécifiquement des amendements: "S'il juge - on parle du gouvernement - que l'une des villes visées au premier alinéa - c'est-à-dire Baie-Comeau et Hauterive - refuse ou néglige de respecter la loi, le gouvernement peut adopter un décret par lequel la Commission municipale du Québec est substituée au conseil - c'est-à-dire le conseil de Baie-Comeau - au maire -c'est-à-dire M. Leonard - de cette ville, ainsi qu'à tous les fonctionnaires ou employés de celle-ci qui ne sont pas des salariés au sens du Code du travail; ce décret met fin au mandat du maire et des conseillers, suspend sans traitement ces fonctionnaires ou employés et prend effet à compter de la date de son adoption ou de toute date ultérieure qui y est fixée." C'est la recette de la mise en tutelle de la ville de Baie-Comeau. Le ministre a tout le loisir nécessaire, lors de ce débat, d'expliquer cette clause néfaste pour la démocratie au Québec.

S'il n'est pas capable de justifier démocratiquement son projet de loi, qu'il vienne devant nous expliquer pourquoi. Merci.

Une voix: Très bien!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le

député de Notre-Dame-de-Grâce. M. Reed Scowen

M. Scowen: Je vais commencer mon discours en parlant de la Raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, M. le Président, et j'espère que vous ne me rappellerez pas à la pertinence du débat parce que je vais vous expliquer très brièvement comment cela est très pertinent à ce débat.

Il y a à peine un mois, le ministre d'État au Développement économique a écrit à la plus grande sucrerie du Québec, qui a exprimé ses inquiétudes devant un projet de loi pour nationaliser, augmenter le rôle d'une société d'État dans ce domaine. Il a donné sa parole qu'avant que le projet de loi soit adopté la compagnie et l'association des manufacturiers de sucre auraient l'occasion de s'exprimer publiquement. Quand le moment fut arrivé de présenter ce projet de loi, on a soulevé cet engagement, et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a dit: Je leur ai téléphoné et je leur ai offert une réunion dans mon bureau qui durera une heure. Ils ont refusé. C'est un exemple, M. le Président, d'un engagement de ce gouvernement qui ne fut pas respecté.

En 1976, ce gouvernement était élu avec l'engagement de faire l'indépendance du Québec. Maintenant, il n'en parle plus. C'est un engagement de ce gouvernement qui n'a pas été respecté. Il a été élu avec l'engagement de nous donner un gouvernement transparent dans lequel toute la population pourrait se reconnaître, ce qui aurait pour effet de donner à la population une participation dans les activités gouvernementales. Devant le scandale - il y en a eu plusieurs, mais j'en cite un - de la Société d'habitation du Québec, ils ont fait le "cover up" classique. Un engagement de transparence non respecté par ce gouvernement.

Ils ont exprimé à maintes reprises, et plus récemment par la voix du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme actuel, qu'ils voulaient travailler avec le gouvernement fédéral dans les domaines qui touchent les Québécois. Nous sommes fondamentalement fédéralistes, on paie les taxes aux deux gouvernements, on veut retirer des bénéfices des deux gouvernements. Mais, continuellement, devant le défi de travailler avec le gouvernement fédéral, ils ont refusé de le faire. Un engagement de ce gouvernement, M. le Président, qui n'a pas été respecté. Dans un document que le ministre d'État au Développement économique a rendu public il y a à peine quelques mois, ils ont parlé de la nécessité de développer notre économie sur la base est-ouest, selon l'économie canadienne. Depuis deux, trois semaines, le ministre ne parle que du développement nord-sud avec les États-Unis. C'est fini. On ne peut pas développer notre économie canadienne, il faut penser en termes de développement de liens approfondis avec les États-Unis. Hypocrisie, des engagements qui n'ont pas été respectés.

Ils ont promis aux syndicats qu'ils auraient un préjugé favorable à ce secteur de notre vie collective. Ce soir, au salon rouge, on étudie un projet de loi qui a pour effet de rompre brutalement un contrat signé par le gouvernement, il y a à peine deux ans, de la façon la plus cynique. Un engagement de ce gouvernement qui n'a pas été respecté.

Ils ont exprimé à plusieurs reprises leur préoccupation pour les gens les plus démunis de notre société. Depuis maintenant quelques mois, on est devant une série de projets de loi - maintenant adoptés - qui ont pour effet d'imposer des taxes directes aux personnes les plus démunies. Je vous en mentionne seulement deux: une taxe directe sur l'accès à l'aide juridique, un programme qui a pour effet de donner accès à des services juridiques gratuits aux personnes les plus démunies de notre société. Ils ont imposé une taxe directe de 20 $ pour chaque personne qui veut avoir accès à ce service.

Ils sont en train d'imposer une taxe semblable aux gens qui veulent avoir accès à une de nos sociétés les plus importantes du secteur public, la Régie du logement, qui a comme objectif de régler les conflits entre locataires et propriétaires. Maintenant, les propriétaires qui veulent avoir accès à ce service public vont payer un prix direct. Ils parlent même, maintenant, d'obliger les citoyens à payer une taxe directe pour avoir accès à nos services de santé; un engagement de penser à avoir un souci sincère et profond pour les personnes les plus démunies, un engagement qui n'a pas été respecté. (21 h 10)

Ils ont dit à leurs militants, dans leur programme, qu'ils voyaient dans l'économie des possibilités intéressantes à développer, surtout par la voie du secteur public. Ils ont pris un engagement formel. C'est écrit dans le programme que l'économie serait développée par la participation accrue de ce gouvernement dans le secteur public. Et maintenant, de la façon la plus hypocrite, ils disent: Ah! c'est le secteur privé qu'il faut favoriser et les gens qui ont fait confiance à ce gouvernement dans leur désir de développer notre société, notre économie par la voie du secteur public se trouvent devant un virage, pas un virage technologique, mais un virage hypocrite qui va dans le sens contraire.

Je suis content que quelqu'un de l'autre côté ait posé des questions pertinentes et je vais vous expliquer la pertinence, parce que

j'ai l'impression que vous ne comprenez pas. Le Parti québécois est un parti d'engagements formels qui ne sont pas respectés.

Je veux, en terminant, parler de l'engagement du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche envers la population de Baie-Comeau et de Hauterive, à savoir qu'il n'y aurait jamais de fusion forcée entre Baie-Comeau et Hauterive; un engagement d'un ministre, un engagement d'un gouvernement, un engagement qui, dans le projet de loi no 37, une fois de plus, n'est pas respecté. Le ministre fait maintenant partie intégrante du Conseil des ministres, parce qu'il est parmi des gens qui ont tous fait la même chose, et c'est ainsi depuis maintenant cinq ans. Ils ont pris des engagements envers la population qu'ils n'ont pas respectés. Le projet de loi 37 touche pour le moment uniquement quelques milliers de personnes dans la région de Baie-Comeau-Hauterive, mais les engagements non respectés du gouvernement touchent toute la population du Québec. Ils sont hypocrites et ils ont amené la société québécoise - je ne pense pas exagérer - au bord de la faillite. Le ministre nous a dit: Une fusion forcée est maintenant nécessaire, parce que, sans fusion forcée, on n'aura pas de développement économique. C'est encore de l'hypocrisie. Cela n'a jamais été prouvé. La seule chose qu'on sait avec certitude, M. le Président, c'est que ce projet de loi ne va bénéficier à personne et c'est une autre démonstration claire de l'hypocrisie et des engagements non respectés par ce gouvernement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: M. le Président, nous sommes ici ce soir, tard vendredi soir, pour discuter du projet de loi no 37 qui porte sur la fusion forcée des villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Depuis des semaines, nous avons vu, dans cette Assemblée nationale, dans les corridors, partout à Québec, des citoyens qui sont contre cette fusion forcée. Ils sont venus pour s'exprimer et manifester devant l'Assemblée nationale. Ils ont fait une campagne contre cette fusion forcée. J'ai eu l'occasion de voir quelques citoyens de Baie-Comeau qui m'ont donné des macarons qui font le point sur tout ce débat. On parle, par exemple, du ministre Lessard comme de l'ayatollah. C'est peut-être un peu vrai.

Une voix: Ce n'est pas vrai. Je ne vous crois pas.

M. Marx: On voit le projet de loi no 37 dans une toilette et quelqu'un tire la chaîne. Quand j'ai vu cela, je me suis dit: Ils font deux remarques en même temps sur ce macaron, c'est-à-dire qu'ils parlent des toilettes à l'Assemblée nationale, des toilettes à 1 000 000 $ dont on n'a pas besoin et ils parlent aussi de la loi 37 dont on n'a pas besoin.

En dépit de tout cela, en dépit de toute cette campagne des citoyens, qu'est-ce que le gouvernement fait? Le gouvernement est en train de forcer cette fusion. Il n'écoute pas. C'est un gouvernement qui n'écoute pas le peuple. C'est un gouvernement qui est un peu dans une tour d'ivoire ici à l'Assemblée nationale. Il ne sait même pas ce qui se passe à l'extérieur de l'Assemblée nationale. C'est ça, le problème. Normalement, qu'est-ce qu'on a? Normalement, pour faire une fusion de deux villes, on a un référendum. Les citoyens donnent ou ne donnent pas leur consentement à cette fusion. Avoir un référendum, c'est assez normal pour ce gouvernement. Nous avons eu le référendum de 1980. Cela a été un référendum où tous se sont exprimés, à savoir si on était pour ou contre l'accession du Québec à la souveraineté-association. En 1982, nous n'avons pas eu de référendum, mais un "renérendum". C'était pour voir si le premier ministre du Québec, ou plutôt le chef du Parti québécois, était en mesure de forcer le parti à accepter ce qu'il a voulu que le parti accepte. Donc, c'est plutôt normal pour ce gouvernement de tenir des référendums.

Ici, nous avons une question de principe, une question de démocratie au Québec, surtout dans le domaine municipal. Avez-vous remarqué, ce soir, que les péquistes ne parlent pas? Voici de grands démocrates, le député de Prévost n'a pas parlé, le député de Terrebonne n'a pas parlé, le député de Gouin n'a pas parlé, le député-ministre de Lotbinière n'a pas parlé ce soir. Sur une question de principe, sur une question de démocratie, ils ne parlent pas. Même les députés de la région de Québec, comme le député de Taschereau, n'ont pas parlé. J'invite ces députés à nous livrer leurs idées sur cette question d'une fusion forcée.

Pourquoi n'y a-t-il pas de référendum? Pourquoi n'y a-t-il pas de consultation populaire dans ces villes? C'est évident, pourquoi on n'a pas de consultation populaire. C'est parce que le ministre qui est en face de moi, le ministre Lessard a dit sur les ondes de Radio-Canada, en réponse à la question de savoir pourquoi il n'organisait pas un référendum sur le projet de loi no 37, et je cite: "Parce que je le perdrais." Le ministre est...

M. Lessard: Est-ce que le député me permettrait une question?

M. Marx: Oui, je permets une question.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant. Vous permettez une question. M. le ministre.

M. Lessard: M. le Président, est-ce que le député est informé qu'ici, à cette Assemblée nationale même, j'ai offert aux députés de l'Opposition, comme aux deux villes concernées, un référendum pour autant que ce soit un référendum s'adressant aux deux villes et où le résultat des deux villes serait compris? Est-ce que le député est informé que j'ai offert à plusieurs reprises ce référendum et que jamais je n'ai dit que ce référendum, je le perdrais s'il y avait un référendum englobant les deux villes? La preuve que le député ne connaît rien de ce qu'il dit, c'est qu'il y a des sondages qui prouvent justement que ce référendum, nous l'aurions gagné à 59% ou 60%. Le député parle pour parler et ne connaît rien.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Lessard: II consulte son confrère en arrière parce qu'il ne savait même pas sur quoi...

M. Marx: M. le Président, si le ministre a une autre question à me poser, ou une autre déclaration à faire pour rétablir les faits, comme il l'a dit, je suis prêt à céder ma place. Est-ce qu'il a d'autres questions, parce qu'il lit un journal et parle en même temps?

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lessard: Vous parliez de choses que vous ne connaissez pas... (21 h 20)

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaîti S'il vous plaît! M. le ministre! M. le ministre! M. le ministre, c'est simplement, parce que je veux préserver le droit de parole du député de D'Arcy McGee, mais il doit savoir que l'article 100 permet des questions à l'intérieur de son temps de parole. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Mais cela me fait plaisir, M. le Président, de laisser le ministre me poser des questions, parce que cela va me donner la possibilité de répondre.

Il a parlé d'un référendum des deux villes. J'aimerais lui dire - le ministre des Affaires municipales est juste en arrière de lui, il peut le consulter de temps en temps et j'espère qu'ils se parlent encore - que, par exemple, à Montréal, pour la fusion de Pointe-aux-Trembles et de la ville de Montréal, il y a eu un référendum à Pointe-aux-Trembles, il n'y a pas eu de référendum à Montréal, il n'y a pas eu un référendum dans les deux villes en même temps. Le ministre est un peu perdu dans tout cela. Je sais qu'il a souffert d'un peu de stress dans son comté.

M. Léonard: Est-ce qu'on me permet une question?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de D'Arcy McGee, permettez-vous au ministre des Affaires municipales de vous poser une question?

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. JoUvet): Je m'excuse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Je m'excuse, la question, je la pose au député de D'Arcy McGee. C'est au député de D'arcy McGee à répondre. Est-ce que vous acceptez?

M. Marx: Si c'est sur mon temps, non, M. le Président, mais s'il y a consentement...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Allez-y!

M. Marx: M. le Président, j'invite le ministre des Affaires municipales à me poser des questions à la fin de mes dix minutes et j'espère qu'on va avoir le consentement de tout le monde pour que le ministre me pose cette question. Voilà.

Nous protestons ici contre l'attitude du gouvernement, sa façon de gouverner. Le gouvernement se veut un bon gouvernement, mais j'ai des nouvelles pour le ministre Lessard, c'est un mauvais gouvernement. Ce n'est pas un gouvernement transparent, c'est un gouvernement opaque. C'est bien connu de la population.

Durant le référendum de 1980, savez-vous ce que le ministre péquiste a dit? Il a dit: Parce que le peuple a voté non à notre option, ce n'est pas le PQ qui doit changer d'option, il faut changer le peuple. C'est cela l'attitude de ce gouvernement.

Cette année, qu'est-ce que ce gouvernement fait? Cette année, ce gouvernement est en train d'annuler unilatéralement son contrat avec ses fonctionnaires. Cela ne s'est jamais fait. C'est un gouvernement qui se plaint quand un autre gouvernement veut prendre une action unilatérale pour brimer, comme il dit, les droits du Québec, mais, pour lui, c'est bon, il peut agir d'une façon unilatérale pour brimer les droits des fonctionnaires du Québec.

Cette année aussi, qu'est-ce que nous avons? Nous avons le refus de ce gouvernement d'écouter les personnes qui voulaient être entendues en ce qui concerne le projet sur l'aide juridique, parce que le

gouvernement prévoit un ticket modérateur pour l'aide juridique. Il y a des gens qui ont voulu se faire entendre, le gouvernement a refusé d'entendre des gens. J'ai ici à peu près cinquante télégrammes de gens qui ont voulu se faire entendre. Le gouvernement a refusé. Je n'ai pas le temps de lire tout cela maintenant, mais je lirai tous ces télégrammes, j'expliquerai à ce gouvernement, quand j'en aurai l'occasion à la troisième lecture de la Loi sur l'aide juridique, comment il refuse d'écouter les gens.

En terminant, M. le Président, je dis qu'il y a un désordre au gouvernement. À la tête du Québec, il y a un désordre et, à cause de ce désordre à la tête du gouvernement, c'est un désordre qu'on voit partout dans la société. On n'a jamais eu tant de grèves, tant de manifestations devant l'Assemblée nationale, tant de grèves d'étudiants, de fermiers, etc., parce que c'est un gouvernement qui sème le désordre. La fusion forcée de Baie-Comeau et de Hauterive est un autre exemple.

En terminant, j'aimerais seulement féliciter mon collègue, le député de Hull, pour le travail qu'il a fait dans ce dossier, pas seulement pour les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, mais aussi pour toutes les municipalités du Québec, parce que, si cela peut arriver à Baie-Comeau et à Hauterive, cela peut arriver à n'importe quelle municipalité du Québec. En faisant cette lutte aujourd'hui, cette semaine, on fait la lutte pas seulement pour ces deux villes, mais pour toutes les municipalités québécoises. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier.

M. Sirros: Merci, M. le Président.

M. Marx: M. le Président, il y a une question...

Le Vice-Président (M. Jolivet): II n'y a aucune question, M. le député, vous n'avez pas à déterminer si le ministre doit poser des questions ou non. Le ministre ne s'est pas levé et, le député de Laurier s'étant levé, c'est lui qui a la parole.

M. le député de Laurier.

M. Sirros: M. le Président...

M. Rocheleau: Question de directive, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de directive de la part du député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais que vous puissiez m'indiquer, pour les prochaines heures, si, lorsqu'un ministre s'adresse à un de nos députés, c'est déduit de son temps de parole ou si on peut lui permettre de répondre sans pour autant prendre le temps de nos députés.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, vous devriez savoir ce que l'article 100 du règlement indique. Je vais vous le lire, dans les circonstances, puisque vous me demandez une directive. Cependant, cette directive sera claire: "Tant qu'un député a la parole, aucun député ne doit l'interrompre, si ce n'est pour lui demander la permission de poser une question". C'est la question que vous posez à la présidence. Il peut donc l'interrompre à une condition, si le député qui a la parole lui permet de poser une question. En vertu de l'article qui donne le droit de parole à un député, qui dit que le droit de parole, dans les circonstances, est de dix minutes, si le député accepte qu'une question lui soit posée, c'est évident que, si c'est en vertu de l'article 100, c'est à l'intérieur de son temps.

M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Je serais tout à fait disposé à permettre au ministre des Affaires municipales de poser des questions à mon collègue de D'Arcy McGee, comme il l'avait souhaité, mais, semble-t-il, le ministre a choisi de ne pas le faire.

Je constate que de l'autre côté de la Chambre c'est une Assemblée quelque peu tendue. Je vois que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche tente d'éviter autant qu'il peut de suivre le débat parce que j'imagine que ce doit être un débat assez gênant pour lui. J'ai devant moi un article qui a paru dans le Soleil du 15 juin et qui disait: "Mais respectant scrupuleusement le programme du Parti québécois, M. Lucien Lessard répétait jusqu'à sa réélection d'avril 1981 que jamais il ne chercherait à imposer par la force la fusion des deux villes." Pourtant, six mois plus tard, c'est lui qui parrainait le projet de loi no 37 qui propose la fusion forcée des villes de Baie-Comeau et de Hauterive, reniant ainsi le programme de son parti et sa parole dont les stations de radio locales ont conservé la mémoire sur leurs bandes magnétiques." La source, c'est le Soleil du 15 juin 1982, sous la signature de Jean-Didier Fessou.

J'aimerais savoir si le ministre veut démentir les propos inscrits dans le journal. Si oui, il a toute la liberté de se lever et de les démentir. Je m'assoirai pendant quelques minutes en l'écoutant. Mais il me semble qu'un rire, simplement en restant assis, sans que la caméra puisse capter cette réaction, en dit long en soi. Au fond, il s'agit effectivement d'un principe bafoué. C'est le principe de la démocratie qui veut qu'un

gouvernement soit le serviteur du peuple, et non pas l'inverse. Ce n'est pas parce que le gouvernement ou un ministre du gouvernement a décidé qu'il en serait ainsi que les choses devraient se passer selon le voeu d'une personne dans ce gouvernement.

Je suis originaire d'un pays qui a peut-être donné naissance à la notion de démocratie et qui a aussi connu, à travers sa longue histoire, plusieurs périodes où, effectivement, les choses se passaient comme le voulait une personne. On a connu la même situation en Grèce il n'y a pas très longtemps, où il y avait une dictature. Un dénommé Papadopoulos se levait tous les matins et disait: Dorénavant, à partir d'aujourd'hui, les choses vont se passer en Grèce comme je le veux. (21 h 30)

Sous le couvert du pouvoir exercé de manière démocratique, à la suite d'une victoire électorale, le gouvernement que nous avons devant nous et le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ont utilisé ce couvert de la démocratie, pas le couvert, mais le fait que nous avons un régime démocratique et qu'on sait qu'il faut attendre quatre ans pour se prononcer de nouveau pour renier leurs propres paroles, ainsi que le programme de leur propre parti. Il y a une époque où les membres de ce gouvernement se vantaient d'être un parti transparent, un parti démocratique, un parti à l'écoute du peuple, un parti qui était au service de la population. Cela n'a pris que six ans - même avant, on a vu le commencement de l'effritement complet et total de ces déclarations - pour avoir devant nous un gouvernement qui a renié un paquet de ses promesses, un gouvernement qui agit tout à fait à rencontre de tout ce qu'il a vendu à la population.

Je pense que mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, tout à l'heure, a parlé éloquemment de plusieurs domaines où le gouvernement, le Parti québécois et ses ministres ont agi d'une manière complètement irrespectueuse envers la population parce qu'ils ont décidé, étant donné qu'ils venaient d'être élus, qu'ils pouvaient dorénavant faire ce qu'ils voulaient. Ils savent que cela dépend d'eux pendant quatre ou cinq ans, jusqu'à la prochaine échéance électorale. Nous avons vu ainsi le reniement d'un engagement qu'ils avaient pris avec la population de défendre les plus démunis. Comme vient de le souligner mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, à cette session-ci, ces jours-ci, on a étudié un projet de loi qui, effectivement, imposera des restrictions à l'accès aux services juridiques pour les plus démunis. On a connu des coupures et des compressions budgétaires tellement aveugles que le président du Conseil du trésor les a lui-même qualifiées d'aveugles.

J'assistais, hier, avec Mme la ministre d'État à la Condition féminine, à une rencontre du regroupement des garderies qui réclamait que le Parti québécois tienne ses promesses concernant l'implantation d'un réseau de garderies. Je sympathisais énormément avec Mme la ministre parce qu'elle se trouvait dans l'impossibilité d'offrir quoi que ce soit d'autre, que des paroles comme: Voyonsl On essaie. Mais, dans les faits, les garderies sont face à des possibilités de fermeture dans les semaines qui vont venir parce qu'elles n'ont pas les moyens de faire quoi que ce soit par rapport à leurs dépenses.

Alors, le projet de loi no 37 est un autre exemple du reniement de l'engagement que le gouvernement avait pris et cela démontre clairement que ce n'est que pour tromper et manipuler l'opinion publique qu'on a dit plusieurs choses ces dernières années. L'étude du projet de loi no 70, à l'heure actuelle, qui, encore une fois, va complètement à l'encontre de ce qu'on était habitué d'entendre de l'autre côté de la Chambre en est un autre exemple flagrant.

Revenons à la fusion forcée de Baie-Comeau et de Hauterive, M. le Président. Ce sont peut-être deux villes peu connues par l'ensemble de la population du Québec et je dois vous avouer que je n'ai pas eu, jusqu'à maintenant, le plaisir de visiter cet endroit. Il faut admettre aussi que cela m'a donné un certain intérêt à m'y rendre et à y voir de près. Même si ce sont deux villes qui ne sont peut-être pas connues par l'ensemble de la population, il s'agit d'un principe qui est en jeu, à savoir qu'un gouvernement décide sans tenir compte de la volonté populaire ce qui est bon pour la population. On sait, M. le Président, que toutes les personnes qui ont étudié le problème grâce au comité qui avait été mis sur pied, composé de trois représentants de la Commission municipale du Québec, de trois représentants de la ville de Hauterive et de trois représentants de la ville de Baie-Comeau, ont validé tous les arguments de Baie-Comeau pour ne pas procéder à la fusion et que, par exemple, le ministre lui-même disait: "Je ne voulais pas, en imposant la fusion, imposer une augmentation de taxes aux citoyens de Baie-Comeau." Or, le comité qui a étudié le problème démontre clairement que la ville de Baie-Comeau et ses citoyens verront leurs taxes augmenter d'une façon spectaculaire, quand nous lisons qu'il n'est pas question d'écraser une population vis-à-vis l'autre et: "j'ai fait en sorte, par la voie de subventions, que les citoyens de Baie-Comeau ne soient pas pénalisés sur une période de six ans", quand on voit que dans l'étude qui a été faite c'est l'inverse, quand on dit que "si le maire de Baie-Comeau - celle-là est bonne - nous prouve que le coût de la fusion serait de 4 000 000 $", je vous avoue que je

suis prêt à m'interroger. Je me demande si le ministre qui a proféré ces paroles s'est interrogé parce que effectivement le comité qui a étudié la fusion forcée déclare que le coût annuel de la fusion sera de 4 303 700 $; la ville de Baie-Comeau avait prédit que la fusion coûterait 4 252 550 $; donc, c'est très près, et le comité trouve qu'il y en aura encore un petit peu plus.

Vous me faites signe qu'il ne me reste qu'une minute, M. le Président, je vois que le ministre ne veut vraiment plus entendre ce débat, il sort de la Chambre présentement. Je me demande si ce n'est là l'exemple d'une certaine arrogance, d'une certaine intolérance, d'un certain mépris. C'est peut-être le mot qui correspond à l'attitude que démontre le ministre en question. Effectivement le projet de loi no 37 est un mépris flagrant de la volonté populaire, de la démocratie. Je veux simplement souligner, en terminant, que la prise en considération du rapport de la commission parlementaire des affaires municipales fait suite à une motion de clôture qu'a invoquée le gouvernement lorsque le leader du gouvernement criait à haute voix que le gouvernement nous passerait sur le corps. Du jamais vu!

Quand un leader du gouvernement peut se permettre...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Sirros: Vous voulez que je termine? Je termine en disant simplement que c'est très inquiétant pour la démocratie de notre province, pour la démocratie tout court d'entendre des paroles de ce genre de la bouche d'un leader du gouvernement qui essaie de terroriser l'Opposition pour ne pas qu'elle fasse entendre sa voix. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Berthier.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. Nous voilà malheureusement ce soir à parler du projet de loi no 37, qui forcera la fusion des deux municipalités. Qui est le vrai coupable? Le vrai coupable c'est nul autre que le premier ministre René Lévesque. Pourquoi, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse...

M. Houde: Excusez-moi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): ... ce n'est pas pour vous, c'est pour permettre qu'on entende bien votre discours. Je demanderais qu'on le laisse parler; on a laissé parler les autres, qu'on le laisse parler.

M. le député de Berthier.

M. Houde: Merci, M. le Président. J'espère qu'ils vont m'écouter religieusement. D'abord je ne parlerai pas une heure, je parlerai seulement dix minutes comme tous les autres, je n'ai pas droit à plus de dix minutes.

Une voix: Passez-nous pas dessus, là!

M. Houde: Laissez-nous quelques minutes pour respirer. Quand un problème ne dure pas trop longtemps, il y a de grandes chances que cela ne se rende pas trop trop loin, même pas au patron. Mais, quand un problème dure depuis plus de six à sept mois intensivement, je dirais même quelques années, quand on sait que c'est le premier ministre qui traîne son parti, et on en a eu la preuve lors du congrès tenu l'automne dernier à Montréal, alors qu'il a décidé de faire un "renérendum" pour montrer que c'était lui le patron ou encore le boss, si vous voulez, ou le chef. Qu'est-ce qu'il a fait depuis pour le problème qui persiste? Il se cache derrière ses ministres. Il les laisse se chicaner entre eux pour laisser traîner en longueur le problème de Baie-Comeau-Hauterive, comme vous le savez. (21 h 40)

J'entendais, avant-hier soir, en cette Chambre le leader du gouvernement nous parler de paix sociale; je vais vous citer quelques-unes de ses paroles. Quand c'est le leader du gouvernement lui-même qui nous parle de paix sociale, il faudrait qu'il commence d'abord par se regarder: Le gouvernement va vous passer sur le corps. Je cite le leader parlementaire du gouvernement, Jean-François Bertrand, qui a sans doute compromis à jamais ses chances d'obtenir la collaboration de l'Opposition, mercredi soir, en déclarant: le gouvernement va vous passer sur le corps.

Mercredi soir, non seulement le ministre des Communications semblait-il prendre plaisir à présenter cette loi, mais il s'amusait en décrivant la guillotine. Je vais vous parler de quelqu'un qui a de l'expérience en Chambre, un vieux routier de la politique, un député qui s'est toujours fait respecter et qui a toujours respecté les autres, qui disait ceci: "En 26 ans de parlementarisme, pourtant nous avons conu toutes sortes de régimes, le régime Duplessis, notamment, à partir des années cinquante, jamais, jamais, je n'ai entendu un représentant du gouvernement, quel qu'il soit, proférer de telles paroles à l'Assemblée nationale. Jamais, a-t-il dit, je n'ai assisté à un tel déploiement de fureur, à une telle satisfaction de voir brimés ceux qui

s'opposent à la vérité de ce gouvernement. C'est comme ça que les régimes totalitaires commencent. C'est la semence même, le début de ce genre de gouvernement qui est de plus en plus inquiétant et troublant."

Quand j'entendais en cette Chambre, avant-hier, le leader du gouvernement nous parler de paix sociale, je ne sais pas ce qui se passe à Baie-Comeau et à Hauterive, j'aimerais suggérer au leader du gouvernement d'aller y faire un tour parce que selon les nouvelles que j'en ai, cela ne semble pas tourner rond. Nous ne sommes pas contre le projet de fusion, au contraire. Nous sommes d'accord, mais pas par n'importe quelle voie comme le leader veut nous le passer. Les libéraux ont fait deux motions de clôture, entre 1970 et 1976. Le PQ en a fait cinq en cinq ans. En quatorze mois, ça fait deux que je vois ici, en cette Chambre. Ce n'est peut-être pas un record, mais c'est une bonne moyenne. La liberté des individus, il faut toujours en tenir compte parce que le jour où l'on perdra le sens de nos responsabilités et de nos libertés, nous serons peut-être sur le bord du précipice. M. le Président, si on s'en tient aux paroles du leader du gouvernement, lorsqu'il disait en cette Chambre: Les libéraux ont fusionné quelque 40 municipalités pour un total de 267 000 personnes, cela n'avait pas de bon sens, c'était antidémocratique mais nous, - je parle toujours au nom du leader - les sociaux-démocrates, nous pouvons nous permettre de faire des fusions forcées avec Baie-Comeau et Hauterive avec des populations d'environ 25 000 habitants... À écouter le leader du gouvernement, lui et son équipe pouvaient se permettre de les bâillonner en leur imposant cette fusion forcée, en ne leur donnant pas la chance de se prononcer librement. Lorsqu'on parle avec la population et lorsque les commissions scolaires du Québec - ces gens nous suivent de près, nous, du Parti libéral et le gouvernement en face - voient de quelle façon va se dérouler la fusion forcée faite par le gouvernement et demandée par le gouvernement d'en face lorsque ce projet de loi 37 sera adopté, ils se posent la question suivante: Que nous arrivera-t-il, à nous, après?

Lorsqu'ils étaient dans l'Opposition, les six, les sept, pendant trois ans et demi, ils nous disaient: Nous sommes contre les fusions, contre les fusions forcées. Aujourd'hui, en 1982, si je sais bien compter, j'en ai entendu deux de l'autre côté parler de la fusion Baie-Comeau-Hauterive. Où sont-ils, les ténors d'en face? M. le Président, ces derniers jours à Baie-Comeau il y avait une réunion d'environ 3500 personnes - c'est quelque chose, dans une municipalité comme celle-là - qui ont voté et quel fut le résultat de ce vote? D'abord, la question posée était la suivante: Êtes-vous pour la fusion Baie-Comeau-Hauterive ou non? 98% se sont prononcés contre la fusion forcée, bien entendu. Je comprends pourquoi les députés du gouvernement péquiste ne veulent pas de référendum. Ils vont le perdre, d'abord, et ils feront comme ils ont fait lors du référendum de 1980. Cela ne les dérange pas, de perdre à 60% contre 40%. Cela ne leur fait encore rien, parce que aussitôt le référendum passé, ils reprennent de plus belle et prônent encore leur option no 1 qui est la séparation du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): ...

M. Houde: Oui, M. le Président. Lorsqu'on parle de démocratie, on entend ces têtes d'affiche comme le ministre de l'Environnement, M. Marcel Léger. Qu'a-t-il dit lors du référendum qui s'est tenu à Pointe-aux-Trembles au mois de décembre . dernier? Cela ne fait pas 20 ans. Cela ne fait même pas un an. Il disait: Ils veulent avoir un référendum. Il faut les écouter. La démocratie, c'est cela. On ne l'a pas entendu ce soir. Il est parti à part cela. Je ne l'ai pas vu de la soirée du tout. Qu'est-ce qu'il va faire lorsqu'on votera? J'ai bien hâte de le voir. Je vous assure que je vais l'observer de près.

M. le Président, je vois que mon temps est terminé. Je voudrais, en terminant, féliciter mon collègue, le député de Hull, d'avoir été présent depuis le tout début. Pour cette raison, je voterai contre le projet de loi no 37. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. Je pense qu'il est pertinent de se demander, un peu comme le ministre des Affaires municipales et le ministre du Loisir, de la Chasse et Pêche, ce que nous faisons tous ici ce soir et ce qui nous réunit. Vous devez tous vous demander, comme le veut la vieille formule, pourquoi je vous ai convoqués ici ce soir. Dans le sens où ce qui a été l'occasion d'un débat additionnel, à coups de dix minutes de la part de l'Opposition. Cela a été de mettre sur la place publique un des éléments absolument fondamentaux du dossier de la loi 37, de la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive, qui tourne encore une fois - dans ce sens, les ministériels sont habitués - autour d'un référendum. Ce n'est pas une pratique bien nouvelle pour le parti ministériel que de convoquer des débats où on discutera de référendum. C'est devenu dans le cas de la loi qui nous préoccupe en ce moment une mauvaise habitude que de ne pas écouter la

population qui, à cor et à cri, réclame la tenue d'un référendum non seulement par l'initiative des gens les plus directement impliqués... Si, implicitement, on regarde la nature des rapports qui ont été soumis, on peut voir en filigrane qu'il est manifestement besoin qu'un référendum se déroule dans cette région ou qu'à tout le moins une volonté populaire très large ait l'occasion de s'exprimer, si on veut véritablement bâtir, sur une base solide, le développement économique de la région de Baie-Comeau et Hauterive, et donc procéder à une fusion qui tienne compte de ses aspirations pour un meilleur développement économique. (21 h 50)

Donc, au niveau des référendums, il y en a quand même deux ou trois sortes. Il y a d'abord ceux qui sont désignés comme les référendums d'initiative populaire. On en a vu des exemples chez nos voisins du Sud, aux États-Unis, notamment au Massachusetts et en Californie. Sous la pression d'un groupe de citoyens organisé, on doit, en vertu des lois qui existent là-bas, inscrire sur des bulletins de vote une proposition qui émane des citoyens eux-mêmes pour ou contre laquelle les citoyens sont appelés à se prononcer à l'occasion d'une autre élection ou d'une autre consultation populaire, par exemple, pour choisir les élus du peuple.

Nous ne sommes probablement pas prêts, dans notre système, à adopter ce genre de gouvernement parce qu'à mon sens, dans le système parlementaire, on remplace à ce moment la volonté des législateurs, on déplace, devrais-je dire, la responsabilité des législateurs qui doivent assumer leurs responsabilités. Dans ce sens, il est également pertinent de faire remarquer que la grandeur de l'État, la grandeur du gouvernement qui est sujet à cette initiative populaire devient extrêmement pertinente. Il faut voir que dans un grand État, chose certaine, le territoire du Québec, avec les pouvoirs dont il dispose, même si les ministériels aimeraient voir plus de pouvoirs, encore s'agit-il de se servir de façon intelligente de ceux qu'on a déjà... Le gouvernement du Québec est un État d'une taille telle que je ne vois pas personnellement comment on peut remplacer l'exercice du pouvoir par un référendum d'initiative populaire.

Cependant - et la distinction appelle évidemment la contrepartie - dans un plus petit milieu, il est intéressant de voir qu'à certains égards, la volonté populaire qui s'exprime par voie référendaire pourrait avoir, dans certains cas, force de loi. On retrouve cela d'ailleurs dans nos lois qui régissent les municipalités. Mais, au-delà du référendum qui remplace ou déplace le pouvoir de gouverner et de décider des élus, il y a également les référendums indicatifs des aspirations des gens qui sont appelés à se prononcer. On a vu, ici au Québec, à titre indicatif, le référendum de 1980 qui était, en vertu de la législation qui existait ici, une occasion pour les Québécois de se prononcer sur une question que le gouvernement leur avait posée. Mais j'aimerais - c'est cela qui est pertinent -diviser les référendums de cette nature en référendums qui unissent les populations et ceux qui les divisent.

Nous avons, et c'est extrêmement malheureux, connu ici au Québec un exercice démocratique, le référendum de mai 1980, qui a eu pour seule conséquence mesurable de diviser les Québécois entre eux. Il me semble que le gouvernement aurait pu s'exempter, s'il avait exercé le pouvoir de la façon qu'il s'était réclamé de vouloir l'exercer, il me semble qu'il y aurait eu des occasions d'éviter les divisions parmi les Québécois à des moments où tous les Québécois souhaitaient un réaménagement du système politique dans lequel ils vivent. Il y a des choix qui se font. On peut choisir de réaménager le système de telle sorte que le Québec devienne un État séparé ou on peut choisir de réaménager le système politique dans lequel on vit de sorte qu'un fédéralisme, quel qu'il soit, renouvelé ou autrement, pourrait voir le jour.

M. le Président, c'est ce référendum qui a divisé les Québécois, qui est une illustration des mauvais usages qu'on peut faire, compte tenu des circonstances politiques, de cet outil qu'est le référendum, mais il y a également, heureusement, des occasions de consultation populaire qui, pour l'avenir, bâtissent beaucoup plus solidement les assises sur lesquelles une société, de quelque grandeur qu'elle soit, peut reposer. C'est de cette façon que nous avons, nous de l'Opposition, continué à mettre de l'avant une proposition, à l'adresse du ministre des Affaires municipales et du ministre-député de Saguenay, qui, à notre sens, devrait véritablement marquer un progrès dans la solidité que pourrait connaftre une fusion de Baie-Comeau et de Hauterive, un progrès dans la qualité du développement économique qui pourrait s'ensuivre à la suite d'une jonction des efforts des gens qui habitent dans cette région, pour autant qu'on leur donnerait l'occasion, lorsque le moment serait propice, de se prononcer majoritairement, librement, de façon démocratique sur le choix qu'ils veulent faire pour leur région. C'est à cette fin que nous continuons à parler ici à l'Assemblée nationale pour que demeure sur la place publique le genre de suggestion que nous faisons, parce qu'il me semble qu'il est important, si jamais il y avait fusion de Baie-Comeau et Hauterive, que celle-ci se fasse dans une sérénité qui manque beaucoup trop, avec une solidité qu'on ne voit pas venir par les temps qui courent, dans un

esprit, un climat et des attitudes qui manifesteraient beaucoup plus de coopération de la part de tous les citoyens impliqués.

Malheureusement, les actes du gouvernement n'ont pas tendu à créer ce climat de sérénité qui devra être le seul gage du succès d'une fusion éventuelle des villes de Baie-Comeau et Hauterive. C'est à ce titre que nous continuons ici, à l'Assemblée nationale, à proposer au gouvernement qu'enfin il ouvre les yeux et qu'il ouvre les oreilles pour comprendre - ça crève les yeux et ça crève les timpans, je dirais même - pour voir que les populations impliquées à Baie-Comeau et Hauterive pourraient, il me semble, bâtir ensemble une unité de développement économique, un milieu de vie qui serait tellement plus propice à leur développement, au premier chef, économique, et deuxièmement, financier, en ce qui a trait aux services et à la façon dont les services pourraient être rendus aux citoyens, qui seraient tellement plus solides que ce que les ministériels essaient d'imposer à coups de bâillon, à coups de clôture. L'image peut frapper, mais c'est exactement ce qui se passe et ce à quoi nous sommes assujettis.

Les ministériels ont tenté de limiter le droit de parole des députés de l'Opposition, qui n'ont qu'un seul mandat, celui de faire remarquer au gouvernement qu'il n'a pas toujours raison, celui de faire remarquer sur la place publique qu'il y a des éléments du dossier qui n'ont pas été discutés complètement, de telle sorte qu'en mettant sur la place publique tous ces arguments, on pourrait en arriver à une meilleure compréhension du dossier, donc, de jeter les bases d'une fusion éventuelle de Baie-Comeau et de Hauterive qui, en reposant sur la volonté des gens qui y habitent, pourrait être un gage de solidité pour l'avenir et, dans le fond, un exemple à suivre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Henri.

M. Roma Hains

M. Hains: M. le Président, rarement aura-t-on vu un projet de loi aussi contesté, aussi décrié que le projet de loi no 37 sur la fusion des villes de Hauterive et de Baie-Comeau. Rarement aura-t-on vu une loi violer et mépriser autant le droit sacré de la démocratie. Jamais n'aura-t-on vu une loi porteuse de tant de troubles et de violence au coeur de ces deux villes et même jusque dans l'enceinte du Parlement. Rarement aura-t-on vu deux ministres aussi entêtés, MM. Lessard et Léonard, se bander les yeux et se boucher les oreilles pour ne pas voir et pour ne pas entendre une population révoltée de leur attitude de suffisance et de mépris. Jamais, enfin, n'aura-t-on vu un leader parlementaire en proie à une telle crise de fureur et de joie sadique en proclamant la motion de clôture du débat. Bref, ce projet de loi sera l'un des moins populaires et des plus coercitifs que la présente Législature aura enregistrés. (22 heures)

C'est inconcevable qu'un gouvernement ait pu, en si peu de temps, passer d'un idéal de social-démocratie à un mépris de cette même démocratie. Comment en est-il venu jusque-là? Voici un raccourci de cette triste aventure. En 1976, le Parti québécois remportait sa première élection. Quel triomphe et comme des torses se sont gonflés en ce soir de la victoire presque inespérée. Ils héritaient d'une bonne administration, malgré leurs insinuations et leurs récriminations. Dans l'euphorie de leur succès, ils se sont mis à gouverner et à surgouverner, à dépenser et à surdépenser comme un enfant prodigue qui gaspille un héritage paternel. Dans cette foulée de gloire, ils se sont crus déjà invincibles. Confiants dans leur étoile séparatiste, ces héros d'un jour et chevaliers de leurs promesses ont procédé au référendum sur la souveraineté à laquelle ils ont accolé le terme "association".

La lutte fut dure entre deux formations bien rangées, les oui et les non. Le gouvernement péquiste a mordu la poussière et a connu les affres de la défaite. C'est ici que commence une amertume qui aura des vagues d'aigreur de plus en plus fortes et de plus en plus fréquentes. Ces gens ne savent pas encaisser une défaite. Ils se croient des fois des dieux devant qui on doit se prosterner. Toute contradiction leur devient un affront et toute supériorité leur semble intolérable. Et, à l'élection qui s'ensuivit, tout en rapportant une victoire, le PQ a diminué ses effectifs, a perdu des plumes et des lauriers. L'aigreur et l'amertume s'installent encore de plus en plus et se teintent maintenant de dépit et de mécontentement.

Arrive la crise constitutionnelle où le Québec perd son droit de veto, ses alliances précaires, et, oh suprême humiliation! assiste au triomphe de son adversaire fédéral. Le gouvernement s'installe alors dans la solitude, dans la hargne et la colère. Le dragon péquiste crache le feu et la vapeur. Mais les troubles et les orages s'accumulent dans le ciel ministériel. Une crise économique s'abat sur la province. Le vent souffle et fouette les flancs du bateau de l'État qui commence à craquer du bord et à prendre l'eau dangereusement.

On colmate le mieux possible et on bouche les fissures et les avaries avec des taxes et des surtaxes. Et on accable tous les passagers qui sont épuisés et vexés tout à la fois. Le capitaine perd le contrôle de lui-même et du bateau aussi. Il n'en peut plus.

L'amertume du référendum, l'aigreur des échecs, la rancune constitutionnelle, la crise économique se fondent dans une rancoeur maintenant incontrôlable.

On veut terrasser tous ceux qui résistent pour se prouver à soi-même qu'on est encore maître à bord. Et c'est là qu'on devient antidémocratique. On veut gouverner et imposer au peuple les décisions les plus odieuses comme la loi 37, la loi 46 et les autres, 68, 70, 72, etc.

L'Opposition devient alors la machine à neutraliser et à abattre et ça, par tous les moyens. Le dernier argument, l'arme fatale, c'est la motion de clôture, la motion du bâillon, la motion de la matraque dont nous sommes actuellement les victimes avec les populations de Hauterive et de Baie-Comeau. Ne pouvant détruire la résistance indestructible de notre député de Hull ainsi que de l'équipe libérale et des citoyens des deux villes, on décrète l'exécution à mort par la motion de la guillotine. La fusion aura lieu. Alea jacta est. Le sort en est jeté, mais maintenant, bientôt, le sort sera rejeté.

Ce qui a été le plus troublant dans ce triste cérémonial, M. le Président, c'est la proclamation elle-même de la peine de mort du projet de loi par notre leader parlementaire.

Normand Girard nous décrivait ainsi la scène dans l'édition de ce matin du Journal de Québec: Grandiloquent, le verbe haut, les yeux comme des pistolets et les intonations méprisantes et menaçantes à la fois, le leader parlementaire du gouvernement s'est exclamé: Le gouvernement va vous passer sur le corps. Il va vous couper la tête en utilisant la motion de clôture.

Notre leader parlementaire, notre député de Bonaventure, prenant la parole en réplique s'est exclamé: "En 26 ans de parlementarisme, jamais, je n'ai entendu un représentant de gouvernement, quel qu'il soit, proférer de telles paroles à l'Assemblée nationale. Et, ajoutera-t-il plus loin, jamais je n'ai assisté à un tel déploiement de fureur, à une telle satisfaction de pouvoir brimer ceux qui s'opposent à la vérité de ce gouvernement. Nous venons d'assister à quelque chose de troublant surtout lorsque ces gens ont dans leur programme un engagement à consulter les citoyens en matière de réorganisation municipale."

C'est vrai que ce soir-là, dans la harangue du député de Vanier, il y avait des lueurs de sadisme inquiétantes allant à décrire avec jouissance le modèle de guillotine qui serait imposé: "Même qualité de bois, bonne armature, lame bien aiguisée, etc." Sans méchanceté, on aurait dit le cannibale qui se pourlèche les babines en faisant cuire sa victime dans la marmite, ou encore l'Indien qui a abattu son ennemi et qui se prépare à le scalper pour mettre la chevelure à sa ceinture, ou bien encore l'oiseau rapace qui décrit des cercles dans les airs avant de fondre cruellement sur sa victime. C'est le vae victis, le malheur au vaincu. Comme disait le député de Mercier, nos collègues d'en face semblent avoir le plaisir facile, surtout quand il s'agit de confondre, de fondre et de briser l'Opposition, mais aussi indirectement, en l'occurrence, les citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive.

Cette motion à la force exorbitante, comme la qualifie Normand Girard, devient une mesure barbare tant elle est appliquée avec rage et ostentation. Je termine. Le peuple, M. le Président, et surtout les gens de Baie-Comeau et de Hauterive garderont de ce "filibuster", le triste souvenir d'une méchante embardée du gouvernement, d'une exécution inutile et sadique et d'une violation flagrante du principe de la démocratie. Vixit, elle a vécu, elle est morte, la démocratie, avec le Parti québécois. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, ce soir, je suis triste et suis en même temps heureux et fier. Je vais vous expliquer cette contradiction. Je suis triste parce qu'on est en face d'un gouvernement qui a agi d'une manière brutale, d'une manière unilatérale, qui a coupé le débat, qui a voulu avoir sa loi, qui a voulu plaire à ce qu'on appelle l'empereur du Saguenay pour lui donner un cadeau de la Saint-Jean-Baptiste, la fusion. Il est triste de voir comment on abuse d'un pouvoir parlementaire. Je ne me laisse plus déranger par le ministre de l'Agriculture, comme il l'a fait l'autre soir. Je n'ai aucunement peur de lui, mais il essaie d'être intelligent, il essaie de me couper la parole et d'enlever un peu de mon temps de sorte que la population ne puisse pas entendre ce que je veux dire. Il peut crier, il peut dire ce qu'il veut, moi je continue à parler.

Je suis encore triste, M. le Président, parce que par leur manière unilatérale d'agir, quand on a vu le leader parlementaire récemment nommé à cause d'un incident malheureux, quand on a vu que ce leader parlementaire jeune, sans expérience, non seulement applique la guillotine, il est pire que Robespierre parce que c'était bien connu que Robespierre, avant d'imposer la guillotine, disait à sa femme: Je vais faire "la job", mais ne me parle pas des victimes, tandis que lui, le parlementaire, il est là, après avoir guillotiné, pour chercher la tête sanglante.

M. le Président, en même temps, j'ai le sentiment en moi... Je suis heureux et fier. Je suis heureux que notre député, le

député de Hull, ait fait la bataille depuis l'automne 1981. La première fois, j'étais ici quand le projet de loi fut déposé, ce projet de loi qui était seulement un moyen de forcer une fusion dont personne ne voulait. C'était clair. J'étais là à la démonstration. J'ai vu les gens de Baie-Comeau et de Hauterive qui sont venus en commission parlementaire et les rapports conjoints. Nous, M. le Président, de l'équipe libérale avons réussi à avoir finalement un comité conjoint après des pressions. Nous avons eu le rapport du comité conjoint ici. C'est clair, c'est très clair que ce que Baie-Comeau avait dit était vrai et ce que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche avait dit était faux. C'est établi, mais tout de même, il poursuit sa route et agit unilatéralement. Je suis fier, M. le Président, d'avoir l'occasion de parler de ce projet de loi. On est ici depuis deux semaines. Soudainement, durant les deux dernières semaines de la session, les péquistes viennent avec seize projets de loi. Il faut être prêt partout, tandis que trois mois auparavant, on n'a rien fait, sauf de parler du fédéral, du fédéral et du fédéral. M. le Président, notre équipe est restée ici volontairement. J'aurais préféré être à Montréal ce soir avec ma femme et mes enfants. Je suis resté ici, parce qu'il s'agit pour nous d'une question de principe et avant d'appliquer la guillotine, on va batailler jusqu'à la dernière seconde. On n'a pas peur, parce que la population nous écoute, pas seulement la population de Baie-Comeau et de Hauterive, mais toutes les autres municipalités. J'ai vu les télégrammes qui sont parvenus au bureau du député de Hull. Vous devriez les voir. Vous auriez peur, parce que les gens ont dit: S'ils sont capables de faire cela à Baie-Comeau et à Hauterive, ils vont le faire ailleurs. Ils sont capables de le faire.

M. le Président, imposer la guillotine est une mesure extraordinaire. Le fait d'arriver avec un projet de loi spécial est aussi une mesure extraordinaire. Quand fait-on cela? On fait cela dans le cas d'un conflit dans le secteur du travail, par exemple, une grève qui affecte la santé et la sécurité publique. C'est déjà arrivé. On était ici au mois de janvier pour adopter un projet de loi spécial pour défendre au secteur privé la grève à la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal. Rien n'a été réglé, parce qu'on a encore exactement le même problème. On a adopté un projet de loi spécial. Au moins, cela s'explique. On peut le comprendre. Si le gouvernement nous rappelle demain, dimanche ou lundi pour régler le problème de la grève des médecins, on peut comprendre cela, mais jamais pour imposer une loi qui, vraiment, M. le Président, est une loi de nature privée. Soyons très honnêtes. C'est vrai que le projet de loi a été présenté par le ministre des Affaires municipales, mais vraiment, la loi ne vise que deux municipalités, Baie-Comeau et Hauterive. On veut forcer un mariage, imposer un mariage à ces deux communautés.

C'est drôle, parce que le même ministre des Affaires municipales, cette semaine... J'étais à la commission des affaires municipales de 15 heures à 18 heures, de 21 heures à minuit, et il y avait beaucoup de projets de loi privés des cités et villes, de Montréal, par exemple, de toutes sortes d'autres villes qui demandaient de changer leur constitution et leur régie interne. Je me rappelle que la ville de Montréal, par exemple, avait un article qui disait qu'on voulait exproprier une partie, par exemple, de la ville de Verdun. Un autre article de la charte de Montréal demandait d'exproprier une partie de la ville de LaSalle. Cela a été discuté. Le ministre a fait comme cela: Non, non, non, cela ne marche pas, parce que cela ne se fait pas. On n'exproprie pas. Cela ne tient pas debout. Pour avoir une expropriation, il faut au moins avoir une convention, une entente entre les parties. C'est ce qui a été dit. Et le résultat pour le ministre, c'est que, quand il fait un signe, tout le monde est là. On ne conteste pas. On sait que lors du vote, les péquistes sont là et on perd toujours la bataille à six contre quatre. On ne peut rien faire, parce que c'est ainsi que les commissions sont formées, mais le gouvernement a retiré cette demande d'exproprier une partie de Verdun. Le gouvernement a retiré la demande d'exproprier une partie de la ville de LaSalle. Il a accepté, par exemple - et je l'ai appuyé - une demande de la ville de Montréal d'exproprier une partie de la ville de Côte-Saint-Luc. Pourquoi? Parce qu'il y avait une entente entre ces deux villes. Les deux villes se sont dit: Nous sommes d'accord pour que Côte-Saint-Luc vende un morceau de terrain à la ville de Montréal pour telle et telle considération sans que ce soit approuvé. Mais, ici, dans le cas de Baie-Comeau et Hauterive, il n'y a aucune entente, il n'y a rien. C'est exactement le même principe qui a été refusé il y a deux jours par le ministre lorsqu'il s'est agi de la ville de Montréal et de deux autres villes de banlieue.

Pourquoi donc agir de manière aussi tyrannique, aussi unilatérale et être ainsi obsédé par je ne sais quoi? C'est quelque chose qu'on n'a jamais vu. La raison est très claire: II y a un ministre, ce n'est pas le projet du ministre des Affaires municipales, parce que, profondément, dans son coeur, il n'aime pas non plus ce qu'il doit faire. Il n'est pas fier, j'en suis sûr, que ce projet de loi soit inscrit à son nom. Vraiment, le projet de loi devrait être inscrit au nom du ministre du Loisir, de la Chasse et de la

Pêche qu'on appelle le roi du Saguenay. C'est lui qui veut faire adopter ce projet de loi, c'est lui qui dit: Avant la Saint-Jean-Baptiste, parce que c'est moi qui organise les fêtes, je veux avoir mon cadeau de la Saint-Jean-Baptiste. La semaine prochaine, nous arrêterons de siéger mardi, et je veux l'avoir dans ma poche. Je veux avoir ma petite fête de la Saint-Jean-Baptiste seul, et ma fête, c'est la fusion forcée de Baie-Comeau et Hauterive. Comme ça, on traite en empereur.

Quand on a parlé de ce projet de loi, de ce fameux mariage forcé, on a dit: Si les deux veulent se marier, on n'a rien contre ça, qu'on les consulte, qu'ils aillent voir un notaire pour parler des conditions du contrat de mariage, de quelle manière ils vont vivre ensemble. Là, ils ont joué le jeu parce qu'il y avait des pressions, il y avait des milliers de personne dehors, je m'en souviens, avec des bols de toilette, avec toutes sortes de choses. Lessard au poteau, toutes sortes de choses, ce n'était pas possible, la pression. Us étaient là, dehors.

Finalement, à la suite de ces pressions, ils ont fait de petites concessions, ils ont créé un comité conjoint. On pensait: Bon, peut-être sont-ils encore "parlables", peut-être que même les péquistes sont "parlables" de temps en temps. On est toujours déçus, parce qu'ils ne sont pas "parlables". C'était un petit truc. Ils ont créé ce comité conjoint, ils ont vu le rapport. C'étaient des gens neutres représentant Baie-Comeau, Hauterive et le ministère des Affaires municipales. Ils sont arrivés avec le rapport, le gouvernement n'a rien voulu savoir. Le ministre n'a même jamais fait de commentaire là-dessus parce que tout était déjà conçu d'avance. Il faut donner à Lucien son petit cadeau de la Saint-Jean-Baptiste parce que, l'année dernière, Saint-Jean-Baptiste a eu des problèmes. Il faut que cette année soit une année de gloire pour lui. C'est ça qui est arrivé.

Ce soir, nous en sommes au triste point où, sur un projet de loi, qui est presque un projet de loi de nature privée... Ce n'est pas une loi qui concerne l'intérêt public puisqu'il s'agit de deux villes, ça ne touche pas le reste de la province, mais ils l'ont voulu et ils vont l'imposer. Sauf, M. le Président, qu'ils ont fait une erreur très grave. Le reste de la province l'a vu, grâce au travail fait par le député de Hull, celui qui a suscité l'intérêt dans le groupe, qui a agi d'une manière responsable, qui a essayé de convaincre le gouvernement de faire un référendum pour que ces gens, localement, à Baie-Comeau et Hauterive, puissent s'exprimer librement sur cette formule et dire: Oui, voilà ce qu'on veut. Quelles sont les conditions?

Mais vous allez payer cela très cher parce que les autres municipalités - il y en a des milliers dans la province de Québec -écoutent, voient comment on met la guillotine, comment, pour plaire à l'orgueil personnel d'un homme, on écarte tout principe démocratique. Vous allez payer cela cher parce que les autres municipalités regardent ça et se disent: Nous, il peut nous arriver exactement la même chose avec peut-être un autre ministre, un autre député de tel comté qui voudra devenir un autre petit roi. C'est ça le prix que vous allez payer.

M. le Président, je suis resté à Québec jusqu'à la dernière minute juste pour parler dix minutes là-dessus, non pas pour vous convaincre, parce qu'on ne sera jamais capable de vous convaincre, mais au moins pour dire à la population, à ceux qui nous regardent: Méfiez-vous d'eux. Même ceux qui ont voté pour eux ont vu et, la prochaine fois, ils vont changer parce que ce n'est plus un gouvernement, c'est devenu une dictature. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Marc Assad

M. Assad: Merci, M. le Président. C'est peut-être la dernière occasion que nous avons ici en Chambre de discuter de cette question du regroupement de Baie-Comeau et Hauterive. Encore une fois, il faut reconnaître le travail du député de Hull qui s'est déplacé à quelques reprises pour aller rencontrer les citoyens en question. Je crois que nous sommes tous fiers de notre collègue, le député de Hull, qui a mis beaucoup de coeur au travail. Les preuves sont qu'on a pu au moins savoir qu'il y avait un problème dans le coin. (22 h 20)

Quand les citoyens s'intéressent à prendre en main les problèmes de leur milieu, on trouve des gens qui sont motivés et surtout qui veulent se renseigner. C'est comme le document que j'ai pu trouver ici concernant les citoyens de Baie-Comeau. M. le Président, il y a des sondages à ce sujet. Les gens voulaient être consultés. On sait que c'est très difficile pour les deux municipalités en question parce qu'elles veulent être assurées qu'il y aura un partage équitable. Mais il y a trois points que j'ai trouvés très intéressants. J'ai été de près un témoin lors du regroupement qu'il y a eu des villes de Buckingham, Angers, Masson, etc., vers la fin de 1974. Il faut avouer que le regroupement dans la région a été très bénéfique. Évidemment, ces villes ne sont plus regroupées. Cela a été changé par le gouvernement actuel. Mais il faut admettre qu'à l'époque, le gouvernement avait commis une erreur. Je vois les trois mêmes erreurs que ce gouvernement est en train de

commettre.

Premièrement, les gens ont demandé le droit à l'information. Dans notre temps, c'était un problème majeur. On n'avait pas, pour les citoyens des villes de Buckingham, Angers et Masson, l'information nécessaire qu'ils pouvaient examiner pour ensuite se prononcer. Les choses se sont faites vite. On était un peu pressé. Après-coup, on s'est rendu compte qu'effectivement, l'accès à l'information était fort difficile. Il y avait toutes sortes de statistiques et personne ne pouvait avoir un portrait très clair de la situation. Je vais vous expliquer ce qui est arrivé par la suite.

La deuxième chose que je vois sur cette feuille, c'est que les gens ont demandé le droit à la consultation. C'est une autre erreur qu'on avait faite à l'époque. Ce n'était pas de façon délibérée de notre part, mais on était tellement convaincu et on trouvait que cela était tellement justifiable, le regroupement dans notre région, qu'on a passé par-dessus cela. Quand vous êtes pris, quand on sent que c'est quasiment un instinct... On voyait que c'était nécessaire pour le regroupement dans notre région, on a pensé que l'accès à l'information... C'était très évident. Les gens, évidemment, avaient besoin de renseignements plus approfondis. Ils ont demandé, à cette époque, le droit d'être consultés par référendum ou par une consultation, un vote, en d'autres mots. Mais, à l'époque, on avait dit: Oui, ce serait une idée. On y avait songé et le ministre des Affaires municipales avait même dit: On va consulter la population. Mais on a vu que les municipalités en question ne voulaient pas avoir un regroupement forcé. Tous les conseils municipaux - il faut dire à l'exception d'un seul - étaient d'accord pour signer une entente. Donc, on trouvait que la consultation n'était pas nécessaire vu que tous les conseils municipaux de la région étaient d'accord. Mais cela n'empêche pas que, même avec cette entente, on aurait dû aller à la consultation que ce même gouvernement est en train d'éviter.

La troisième chose, c'est que les gens ont demandé le droit à l'autonomie municipale dans la prise de décisions. C'est évident parce que ce sont eux qui vont en subir les conséquences. À cette époque, ils ont demandé ce même droit.

Donc, vous voyez les trois choses tellement élémentaires: le droit à l'information, le droit à la consultation et le droit à l'autonomie municipale. Ce sont trois choses qu'à l'époque, on aurait pu faire, mais qu'on a évitées parce qu'on pensait que cela n'était pas nécessaire. Je ne doute pas que le ministre de la région soit pris dans la même situation que la nôtre. Vous savez, M. le Président, je l'ai vécue et j'en ai été témoin de très près. J'avais rencontré tous les conseils municipaux et c'est curieux de voir comment l'histoire se répète. Je vois que le ministre de la région est en train de faire la même erreur que celle qu'on a faite. Pourtant, on vient ici de bonne foi. De toute façon, j'ai vécu de très près cette question et les gens ont trouvé, par la suite... Regardez ce qui est arrivé par la suite. Le fait qu'on n'avait pas donné tous les renseignements, qu'ils n'ont pas été consultés et que, finalement, on a passé par-dessus le droit à l'autonomie municipale, cela a donné un regroupement qui était extrêmement fragile, tellement fragile qu'à peine deux ans après il y avait dans le regroupement des dangers; on avait fait des erreurs fondamentales et cela ne pouvait pas rester regroupé. Évidement, ceux qui étaient contre le regroupement, comme il y en a beaucoup dans la région de Hauterive et Baie-Comeau, se sont mis à l'oeuvre pour prouver au gouvernement actuel - cela s'est passé en 1978 - qu'il faudrait regarder le regroupement dans leur région. Pourtant, cela n'avait pas de sens. De toute façon, finalement le gouvernement actuel a accepté de faire une consultation, c'est-à-dire un genre de référendum, ce qu'on ne veut pas faire pour Hauterive et Baie-Comeau. Cela a donné un dégroupement. Il y avait un très faible pourcentage de gens qui ont voté, mais ils ont voté pour le dégroupement. C'est ce qui s'est produit.

Quand on voit que l'histoire se répète dans ces choses et quand on voit que c'est quasiment un problème viscéral, je me demande si, après un ou deux ans, les problèmes qui existent dans le moment dans la région de Baie-Comeau et Hauterive ne se reproduiront pas, comme cela s'est fait lors du regroupement dans la région de Buckingham. Pourtant, on pourrait éviter cela, en suivant les trois choses. Cela peut prendre peut-être six mois de plus ou un an de plus. Le ministre avait dit que cela avait pris quasiment quinze ans, mais ce n'est pas six mois ou un an qui pourraient faire changer la situation. Donc, en gros, c'est cela le danger à l'horizon pour une fusion où il y a tellement de gens de pris.

De toute façon, je n'ai pas beaucoup de temps. Je me rappelle, il y a deux ou trois ans, aux États-Unis, un phénomène s'est passé en Californie, ce qu'on a appelé "proposition thirteen", la proposition treize. Les citoyens de Californie ont décidé d'avoir un référendum pour contrôler les taxes municipales. C'était un précédent aux États-Unis. On a vu la population d'un État comme la Californie - ce n'était pas des populations de quelques milliers comme Baie-Comeau et Hauterive, mais plutôt des millions - qui a décidé qu'elle allait prendre des décisions dans ses différentes municipalités concernant les taxes et pour maintenir le bilan financier dans ses municipalités. Pourtant, c'était un précédent dans un État où il y avait

énormément de population, où c'était très difficile de mettre cela en marche, mais ils ont réussi malgré cela. On aurait dû suivre ce courant. Il faut admettre qu'en Californie ils ont beaucoup de choses avant-gardistes. On aurait pu mettre sur pied un genre de processus où on aurait pu consulter des gens d'une façon où il n'y aurait aucun problème, pour éviter des problèmes à venir. C'est ce que je crains pour Baie-Comeau et Hauterive, ce qu'on a vécu dans notre région.

Finalement, en terminant, sur la même question, vu qu'on traite des affaires municipales, je vois la préoccupation que le ministère des Affaires municipales a eue pour la région de Baie-Comeau et Hauterive. J'espère que d'ici à quelques mois on va voir ici dans cette Chambre - j'espère que je vais le voir dans ce gouvernement - un projet de loi qui sera présenté pour que les Affaires municipales sauvegardent dans chaque municipalité, quand les municipalités seront prêtes à signer une convention collective avec leurs employés...

Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant, M. le député.

M. Assad: Oui, je vais terminer, M. le Président. Je veux juste exprimer quelque chose, cela va prendre 30 secondes. J'aimerais voir le même intérêt des Affaires municipales pour chacune de nos petites municipalités dans le Québec. Quand une convention collective sera échue, on va voir...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse, le leader du gouvernement...

M. Assad: Est-ce que je pourrais avoir le consentement pour 30 secondes?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, voudriez-vous me dire combien cela fait de temps?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je n'ai jamais été très sévère quant au temps. J'essaie de vous permettre quand même, mais vous exagérez en ne terminant pas, M. le député. Je vais devoir vous couper votre droit de parole, puisque actuellement vous avez dépassé de deux minutes votre temps.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement. On sait que l'usage veut qu'on permette, lorsque le temps est écoulé, une petite conclusion rapide. Le député demande seulement 30 secondes. De toute façon, on termine à minuit.

(22 h 30)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député et leader adjoint de l'Opposition, je dois vous dire que j'ai fait signe à trois occasions au député que son temps était terminé et je trouve qu'il exagère. Je vous permets cependant de terminer rapidement.

M. Assad: Rapidement, M. le Président, avec toutes les choses que j'ai mentionnées ici, j'espère de toute façon que le regroupement des villes de Baie-Comeau et Hauterive sera un succès. Je l'espère, parce que les gens le méritent dans ce coin. De toute façon, le ministre de la région sera responsable de l'échec fort possible de ce regroupement. J'ai vécu cela dans mon coin, M. le ministre, et il aurait été très facile de l'éviter en se donnant la peine d'écouter ce que les gens ont demandé dans votre région. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Sur une question de directive, M. le Président. J'en étais à terminer la rédaction de mes notes pour l'allocution que je prononcerai dans quelques minutes et à vérifier l'application de l'article 123 de notre règlement que vous connaissez parfaitement bien et qui, à son paragraphe 4\, stipule ce qui suit: "Le président - en l'occurrence, c'est vous qui occupez ce fauteuil - décide de la recevabilité des amendements et les choisit pour en éviter la répétition. Ils sont ensuite ajoutés en annexe au rapport, suivant l'ordre fixé par le président et le secrétaire en transmet sans délai une copie à chacun des leaders parlementaires des partis reconnus."

J'ai reçu lesdits amendements et, comme on en est à l'étude du rapport de la commission, je voudrais savoir - parce que je n'étais pas en Chambre cet après-midi lorsque le débat a débuté et que je n'ai pu prendre connaissance de la transcription - si vous avez décidé de la recevabilité...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Effectivement, il y a eu une réunion des leaders adjoints des deux partis politiques représentés en cette Chambre et, conformément à l'article 123, j'ai dit aux deux leaders que j'avais examiné tous les projets d'amendement et qu'aucun des amendements qui étaient proposés par le ministre n'allait à ['encontre du principe du projet de loi, qui est la fusion, parce qu'il y a un principe dans ce projet de loi, celui de la fusion de Hauterive et de Baie-Comeau.

Je l'ai dit aux deux leaders et je vous demanderais donc de parler sur les amendements et non sur la recevabilité, parce que je n'étais pas obligé, en vertu du règlement, de convoquer cette conférence,

car l'article 123 dit: "Le président peut convoquer." Il a convoqué, les leaders, la rencontre a eu lieu et, en conséquence, je vous demanderais, s'il vous plaît, de parler des amendements.

M. Paradis: Je vous remercie beaucoup, M. le Président de m'avoir avisé que vous aviez décidé de la recevabilité et je continuerai à rédiger mes notes en fonction de la décision que vous avez si sagement rendue et sans vouloir porter appel de quelque façon que ce soit. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président: M. le député de Pontiac. M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Nous sommes rendus au stade de la prise en considération du rapport sur le projet de loi no 37. C'était un projet dont on savait, dès son dépôt, que la conclusion ou la fin aurait un dénouement comme celui qu'on voit ce soir.

Étant un nouveau membre dans cette Assemblée nationale depuis un an, je dois vous dire qu'en lisant le règlement de l'Assemblée nationale, je constate que, lorsqu'on a écrit ce règlement, on ne l'a pas fait dans un contexte où on voyait la prise en considération d'un rapport à la suite d'une motion de clôture.

Il semblerait que c'est quelque chose de bien normal, après avoir suivi les étapes normales de la première lecture, de la deuxième lecture, et de l'étude article par article en commission. À la suite d'une étude assez sérieuse et d'amendements proposés pour reconnaître la démocratie, on est revenu en cette Chambre pour que tous les membres, puissent y prendre la parole. Peut-être que le grand public n'est pas au courant que, dans une commission parlementaire, ce ne sont pas tous les membres de l'Assemblée nationale qui siègent, c'est un groupe qui siège à la commission et, dans ce cas-ci, c'était la commission des affaires municipales. Je ne doute pas que les collègues de l'Opposition ont dû, à un certain moment, en commission, demander que chaque membre de l'Assemblée nationale ait le droit d'aller à la commission et d'expliquer pourquoi il trouvait que le projet de loi no 37 était antidémocratique et ne respectait pas les voeux des gens de Baie-Comeau et, certainement, de Hauterive. Parce qu'on se souvient bien qu'en cette Chambre, le ministre des Affaires municipales avait soumis une pétition en affirmant qu'elle venait de l'agglomération de Baie-Comeau et, à la suite d'une vérification du côté de l'Opposition, on s'est aperçu qu'il y en avait seulement un petit groupe de Baie-Comeau, il y en avait 69, si je ne me trompe pas, c'est ça. Donc, avec toutes ces choses en vue... Je vois que le député de Saguenay et ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche me fait des signes voulant dire que lui a la vérité, que lui peut nous dire que les gens de Baie-Comeau et de Hauterive sont en faveur d'un regroupement. Oui, vous pouvez montrer des documents. Étiez-vous là l'autre soir lorsqu'on vous a invité, où il y avait 3500 personnes à l'aréna de Baie-Comeau et où ils ont voté, M. le ministre, à 98% contre un regroupement forcé?

Je ne crois pas, M. le ministre, que les gens soient contre un regroupement. Ils sont contre un regroupement forcé. C'est ça. J'ai parlé à deux ou trois occasions sur le projet de loi no 37 et j'ai eu une tendance dans le passé à blâmer le ministre des Affaires municipales. Je m'aperçois que ce n'est pas lui qui est à blâmer. C'est une personne qui est prise entre l'arbre et l'écorce. Je vous dis cela, pourquoi? Parce que dans la région de l'Outaouais on vit des moments difficiles. Pourquoi? Non pas à cause du ministre des Affaires municipales, je vous l'ai dit déjà, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je vous remercie vous et vos collègues des années soixante-quatorze lorsque le projet de loi no 98 a été adopté dans cette Chambre. Chez nous, la ville d'Aylmer, l'agglomération d'Aylmer, qui comprend Aylmer, Lucerne et Deschênes, on a obtenu un regroupement qu'on voulait, qu'on désirait depuis 1968. Si on l'a eu, c'est grâce à une Opposition comme vous autres; à cette époque, vous étiez de grands démocrates, il semblerait que depuis que vous avez changé de bord, vous avez oublié ce que veut dire la démocratie.

De plus, heureusement pous nous, du Parti libéral, on avait un député, le député de Gatineau, Michel Gratton, qui représentait le comté de Gatineau dont la ville d'Aylmer faisait partie à ce moment. Même contre le côté ministériel, il a donné son opinion, il a représenté le voeu de la population et il est venu ici et il a défendu la cause de la ville d'Aylmer. En outre, ils avaient... Pardon? M. le Président, question de règlement. Est-ce que les membres de l'Assemblée nationale peuvent faire des commentaires sans être à leur place?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous avez raison, M. le député, mais vous n'avez pas l'obligation de leur répondre, cependant. Vous avez tout à fait raison et je les rappelle à l'ordre, en conséquence, pour permettre que votre droit de parole, en vertu de l'article 100, soit protégé. M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: M. le Président...

M. Lalonde: M. le Président, si vous

permettez. Avec votre permission.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Pendant cette intermission, est-ce que vous auriez l'obligeance d'appliquer l'article 28 relatif au quorum? On devrait être une vingtaine, et on est à peu près une dizaine.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vais vérifier. Qu'on appelle les députés. Nous avons maintenant quorum. M. le député.

M. Middlemiss: M. le Président, j'aurais une suggestion à faire aux membres du côté ministériel. Il semblerait qu'il y en a plusieurs d'entre eux qui aimeraient parler. Pourquoi ne pas prendre le droit que vous avez tous et chacun de parler pendant dix minutes pour justifier le projet de loi que vous êtes en train d'imposer?

Une voix: II va manquer des joueurs.

M. Middlemiss: Non, non, il ne manquera pas de joueurs de ce côté-ci. Lorsqu'on avait des motions ici pour critiquer...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Middlemiss: M. le Président, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme semble vouloir parler lui aussi. Non, non, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, j'ai averti, je tiens à avertir de nouveau... M. le député, s'il vous plaît! Vous retardez le débat. M. le député, la parole est à vous, mais, s'il vous plaît, votre droit de parole.

M. Middlemiss: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux seulement faire une suggestion au côté ministériel. On dirait qu'il y en a qui veulent parler. Ils ont le droit de le faire eux aussi comme nous. Si on regarde l'article du règlement, il est dit que tous les membres de cette Assemblée nationale ont le droit de parler chacun pendant dix minutes et que le ministre, le proposeur, lui, a le droit de parler pendant une demi-heure. Donc, s'ils veulent parler, qu'ils exercent leur droit. S'ils ont quelque chose à dire pour justifier les démarches que le gouvernement est en train de faire dans le projet de loi no 37, qu'ils se lèvent et qu'ils le disent à la population. Qu'ils disent à la population que, dans leur programme, ce sont eux qui ont dit, ce sont eux qui ont promis...

Et le député de Prévost s'en va, lui, le grand défenseur des syndicats, oui. En tout cas, M. le Président, c'est ce parti politique, le Parti québécois qui, dans son programme, disait aux gens: On ne fera pas les erreurs que le Parti libéral - des gens qui n'avaient pas un esprit démocratique - a faites avec le projet de loi 98. Nous, on n'aura pas de fusion forcée. Qu'ont-ils fait six mois après leur élection en 1981? M. le Président, seulement une chose. Si on regarde tous les projets de loi qu'ils ont adoptés depuis la dernière élection, ils ont totalement manqué à leurs promesses. En plus, ils ont le record d'être le seul gouvernement du Québec qui ait eu deux budgets dans la même année.

M. le Président, j'avais commencé à dire tout à l'heure que j'avais de la sympathie pour le ministre des Affaires municipales. Pourquoi? Je vais vous dire pourquoi. Dans la région de l'Outaouais, il y a à peine neuf mois, on a eu la visite du ministre des Affaires culturelles... M. le Président, si le ministre de l'Agriculture...

Une voix: ...

(22 h 40)

M. Middlemiss: Non, non, regardez...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, j'ai demandé et je continue à demander que vous utilisiez votre droit de parole, s'il vous plaît. Si le ministre veut parler, il parlera. J'ai demandé à d'autres aussi de ne pas parler pendant que vous utilisiez votre droit de parole, mais, de grâce, continuez votre intervention.

M. Middlemiss: M. le Président, c'est tout ce que je vous demande, qu'il me laisse parler. S'il veut parler, il parlera après. C'est lui qui veut nourrir le Québec et, lorsqu'on a des problèmes dans le domaine agricole... Je le sais, j'en ai chez nous. On dit qu'on veut nourrir le Québec. On embarque les gens dans des parcs d'engraissement et, lorsque les temps deviennent difficiles et que le prix du boeuf est bas et que les taux d'intérêt sont élevés, qu'arrive-t-il? On n'est plus là pour les aider. C'est lui, c'est ce ministre, lai Oui, il sait certainement ce qui est bon pour l'agriculture.

M. le Président, en tout cas, je pense qu'il faut que vous me laissiez terminer...

Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant, s'il vous plaît!

M. Middlemiss: ... pour rendre hommage au ministre des Affaires municipales, parce que ce n'est pas sa faute. Il est pris entre l'arbre et l'écorce. Je vais vous donner deux cas concrets chez nous. Le ministre des Affaires culturelles veut avoir une salle de spectacles dans notre région. La salle de

spectacles se trouve dans un cégep situé dans les limites de la ville d'Aylmer. Donc, on dit: On offre la gérance, le ministre offre de concéder à la ville de Hull la gérance de cette salle.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député! Je ne veux pas être désagréable, mais j'ai déjà dit au député de Papineau qu'on exagérait. Vous avez dix minutes. Au moment où je vous parle, j'ai tenu compte des interruptions. J'en fais mention, parce que j'ai mon calcul ici. J'ai donné une minute et demie, mais je pense que vous devriez arrêter, sinon, je donnerai la parole à un autre. M. le député, en terminant.

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Je n'ai pas le choix. Je crois que vous me forcez à aller m'asseoir avec le ministre des Affaires municipales pour lui dire ce que je voulais lui dire publiquement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Une seule chose, M. le député. J'ai fait mention hier à cette Assemblée ou plutôt avant-hier... J'aimerais que vous m'écoutiez, M. le député, parce que j'ai eu à ma gauche une autre intervention qui n'est pas inscrite au journal des Débats, mais, comme président, je dois être respecté. Je ne vous force en aucune façon. C'est le règlement qui vous y oblige. J'aimerais bien qu'on soit conscient de cela.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Qui veut parler maintenant?

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président. Je suis convaincu que...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je ne sais pas sur quelle question de règlement vous vous levez. Je vous dis simplement, à vous et à celui qui est à ma gauche, qui a dit que je mettais le bâillon et, dans votre cas, vous avez dit que je vous forçais... Je m'excuse, c'est le règlement qui vous y force et j'aimerais que la présidence soit respectée.

M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais soulever une question de règlement. Je suis convaincu que vous appliquez le règlement avec beaucoup de sagesse et d'à-propos et je ne voyais dans les propos du député aucune allusion à savoir que vous le forciez dans le sens où vous le faisiez de façon irrégulière. Il était forcé par l'application du règlement et j'espère que vous n'y voyez aucune intention, surtout de la part d'un député aussi respectueux du règlement que celui qui vient de parler.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, je souligne qu'il y a eu une intervention à ma gauche qui n'est pas inscrite au journal des Débats et que, dans ma neutralité, j'avais le droit et le devoir de faire respecter cela aussi.

M. le député de Brome-Missisquoi, votre droit de parole.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: Je suis situé à votre gauche, M. le Président, même si vous avez eu la délicatesse de ne pas le mentionner. Je tiens à m'excuser, le bâillon nous est appliqué par le gouvernement et non pas par la présidence. Tout ce que vous faites, c'est d'appliquer ledit règlement. Donc, je m'excuse des paroles que j'ai prononcées à votre égard, M. le Président.

Maintenant, à la suite de la directive que vous avez rendue par personne interposée il y a quelques instants, je suis en mesure de commencer mon intervention qui traite du rapport de la commission municipale, qui traite du projet de loi no 37, Loi regroupant - cela va, c'est un strict changement de président, j'étais pour m'asseoir dans le respect du règlement - et on a négligé d'inclure dans le titre "de force", les villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Qu'est-ce qui se cache derrière ce projet de loi pour que, en fin de session, à 10 h 45 un vendredi soir, nous soyons ici alors que, habituellement, les députés sont dans leur comté pour rencontrer, dans certains cas, leur famille et, dans d'autres cas, leurs électeurs? Qu'est-ce qui se passe pour qu'on soit retenu ici?

Je vais essayer de résumer cela le plus brièvement possible, compte tenu du règlement qui s'applique et du droit de parole limité à dix minutes. Ce qui se passe, c'est que le député de Saguenay, le grand député de Saguenay, a parrainé par en arrière, avec toute la conviction qu'on lui connaît, le projet de loi no 37. Il a fait tout en son possible, il a déployé tous ses talents, toutes ses connaissances pour convaincre le gouvernement d'en face, le Conseil des ministres, d'imposer une fusion forcée, sans la tenue d'un référendum, sans consulter les populations, des villes de Baie-Comeau et de Hauterive.

C'est ce même député qu'on a cité en Chambre à maintes reprises qui avait promis de ne jamais faire ça. Ce même député, selon le journal des Débats, avait déjà déclaré en cette Chambre: "Malheureusement, on n'a pas consulté la population au sujet de la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive." Écoutez ça, M. le ministre des Affaires municipales, c'est le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui a déclaré en cette Chambre: "Malheureusement, on n'a pas consulté la population au sujet de

la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive." Il me regarde tout stupéfait, c'est sorti du journal des Débats. Il ne se souvient même plus de ce qu'il a déclaré en cette Chambre.

M. Lessard: ...

M. Paradis: Dans le journal des Débats.

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je cite, dans le journal des Débats, de mon siège, les paroles du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui dit: "Malheureusement, on n'a pas consulté la population au sujet de la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive." Un malheur n'attend pas l'autre.

M. Pagé: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: M. le Président, brièvement, je m'excuse, malgré que nous soyons plusieurs députés libéraux, nous n'avons pas le quorum à notre Assemblée, et je vous demanderais d'appeler les députés. (22 h 50)

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous avons quorum. M. le député de Brome-Missisquoi. S'il vous plaît!

M. Paradis: Si nous avons maintenant quorum, M. le Président, je vais parler du ministre des Affaires municipales. Il se peut, étant donné que ce n'est pas lui le vrai parrain, le vrai père de ce projet de loi, qu'il ne comprenne pas ce que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche lui a fait comme représentations aujourd'hui et les représentations qu'il a faites dans le temps. Quand on ne sait pas où on va, quand on est tout mélangé face à une attitude à prendre dans un projet de loi, M. le ministre des Affaires municipales, au lieu de lire "20 ans en Chine", on va passer 20 minutes à Baie-Comeau et on revient avec une idée sur le projet de loi qu'on présente. Mais vous ne l'avez pas fait et cela ne me surprend pas parce que c'est le même genre de consultation que vous avez menée pour des MRC dans certaines régions du Québec, c'est-à-dire pas de consultation, malheureusement.

M. le Président, dans ce débat, on a également découvert le vrai visage du député de Bourassa. J'ai, non pas à titre de membre, mais à titre d'observateur, observé le travail de la commission parlementaire des affaires municipales sur ce projet de loi.

M. Laplante: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Bourassa.

M. Paradis: J'étais pour le féliciter de son travail.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Laplante: À ce moment-ci, M. le Président, je vais être très calme. Il s'est passé, hier soir, des choses étranges en mon absence comme président de la commission des affaires municipales qui étudiait le projet de loi no 37. Il y a eu un défi à la présidence de cette Assemblée. Ce soir, le député de Brome-Missisquoi semble vouloir récidiver. Tout en vous demandant une directive, M. le Président, je voudrais, à la suite de ce qui s'est passé hier soir, lancer un défi au député de Marguerite-Bourgeoys, au député de Portneuf et au député de Brome-Missisquoi, au nom de la justice de cette Assemblée, de se servir de l'article 68 pour que je puisse, à titre de président d'une commission parlementaire, venir me défendre face aux caméras de la télévision, tout comme ils ont fait les accusations hier soir. M. le Président, je vous demande une directive dans ce sens-là et je voudrais que mes droits soient rétablis en cette Assemblée nationale, mais pas de la façon dont on le fait actuellement. Vous savez que, comme président, je n'ai aucun article dans notre règlement qui puisse me défendre là-dessus, sauf l'article 68. S'ils ont l'honneur, M. le Président, de soutenir ce qu'ils ont avancé, je veux qu'ils se servent de l'article 68 pour qu'on démasque, qu'on dise la vérité face à la télévision en cette Chambre, M. le Président.

M. Pagé: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de règlement, M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Très brièvement, sur la question de règlement, nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission et j'ai cru comprendre, parce que j'étais au téléphone à l'extérieur, que le député de Bourassa avait soulevé une question de privilège, à ce moment-ci, ou une question de règlement faisant référence à des propos qui auraient été tenus hier par le député de Marguerite-Bourgeoys dont je me serais montré solidaire.

Le député de Bourassa aura certainement voulu dire que ces propos auraient été tenus mercredi soir, avant-hier. À cet égard, j'invite le député de Bourassa à prendre connaissance du journal des Débats, à la séance de mercredi soir, où le leader du gouvernement et le leader de l'Opposition sont intervenus sur des questions de règlement soulevées de part et d'autre. Le vice-président occupant le fauteuil, l'honorable député de Laviolette, s'est prononcé. Le whip en chef du gouvernement, son whip, a formulé des commentaires qui, je pense, engageaient le caucus ministériel. Peut-être que, une fois qu'il aura pris connaissance de ces données bien inscrites au journal des Débats, il jugera qu'il n'est probablement plus opportun ni nécessaire de soulever cette question ici.

M. Laplante: Sur la même question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la même question de règlement, M. le député de Bourassa.

M. Laplante: J'ai très bien entendu; j'ai visionné, M. le Président, le débat de mercredi soir ce soir, dans le bureau du vice-président de l'Assemblée nationale, pour m'enquérir très bien de ce qui s'est dit. Je dois dire que, sur l'insistance du président, une très grande insistance à la gentilhommerie, je leur ai demandé de se rétracter ou même de faire une allusion de rétractation de ce qu'ils ont dit et cela a été un refus complet. Je ne voudrais pas que ce même spectacle recommence ici ce soir. Je veux que mes droits soient protégés comme président, monsieur, parce que c'est moi qui ai présidé cette commission et que je suis fier du travail que j'ai fait. C'est le troisième "filibuster" aux cinq commissions que je préside et jamais on n'a eu à me réprimander sur ma conduite. Mais s'ils ont voulu se servir du président, par exemple, pour sortir de la commission en jouant aux martyrs, cela ne me regarde pas comme président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Comme la présidence l'a fait à une séance ultérieure, quand elle a fait appel à la gentilhommerie... S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous le savez fort bien, quand je suis debout, aucune parole n'est enregistrée. Question de privilège, M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: M. le Président, au mois de mai dernier, le leader du gouvernement, à juste titre, je pense, a convié l'ensemble des parlementaires à être beaucoup plus judicieux dans leurs propos et à un respect mutuel mieux identifié de part et d'autre.

M. le Président, vous venez d'entendre des propos...

M. Bertrand: Question de règlement, M. le Président.

M. Pagé: Question de privilège. C'est mon privilège de député, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, vous avez dit tout à l'heure que vous vous êtes levé et que, pendant que vous êtes debout, c'est vous qui avez la parole et les mots qui sont enregistrés au journal des Débats sont les mots que vous prononcez, puisque, pendant que vous êtes debout, aucune autre parole n'est enregistrée sauf celles que vous prononcez. Le député de Portneuf s'apprête à parler de choses qui n'ont rien à voir avec ce à quoi vous étiez en train de faire allusion.

M. Pagé: Question de privilège, M. le Président, à laquelle je joins une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: J'ai entendu des propos qui, j'en conviens, n'ont pas été enregistrés, de la part de députés, de la part de ministres, à mon endroit, à l'endroit du député de Brome-Missisquoi et à l'endroit de la députation libérale en général. Ma demande de directive est la suivante...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui, question de directive.

M. Pagé: On convient tous qu'il y a des termes antiparlementaires et qu'il y a des choses qui ne peuvent pas se dire ici, à l'Assemblée nationale du Québec. Est-ce à dire que, parce que les propos d'un député ne sont pas enregistrés et que la caméra n'est pas sur lui, ce député peut dire n'importe quoi et utiliser des termes antiparlementaires, comme le ministre...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Comme je commençais à vous le dire, quand le président est debout, il n'y a aucune parole d'enregistrée, vous le savez fort bien. S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous savez fort bien que, malheureusement, de chaque côté de cette Assemblée, il se dit parfois, volontairement ou involontairement, un peu trop fort des paroles que vous dites avoir entendues, mais

que je n'ai personnellement pas pu entendre. J'étais debout, il n'y avait aucune parole d'enregistrée et, pour moi, cet incident - je demande la collaboration de cette Assemblée - est terminé.

Sur la décision, je faisais allusion au fait qu'un président avait demandé d'avoir une gentilhommerie tout à fait normale dans cette Assemblée. J'aimerais rappeler au député de Brome-Missisquoi la pertinence du débat, sans aucune allusion à des individus ou à des personnes, ou à quelqu'un qui représentait la présidence. Vous pouvez parler du rapport, mais sans faire aucune allusion. M. le député de Brome-Missisquoi. (23 heures)

M. Paradis: Avec votre permission, une question de privilège avant de retourner sur le fond.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je n'ai mentionné aucun propos, avant que le député de Bourassa ne se lève, qui attaquait le travail qu'il a accompli comme président de la commission des affaires municipales. Je demande au député de Bourassa de retirer les accusations qu'il a faites à l'égard du député de Portneuf, du député de Marguerite-Bourgeoys et du député de Brome-Missisquoi. Je n'ai prononcé aucune parole qui portait atteinte, qui affectait de quelque façon que ce soit le travail qu'il a accompli à cet endroit. Je pense que c'est mon privilège de député de demander que les accusations qu'il a portées à notre endroit soient retirées.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, sur cette question, la moindre chose - parce que le député de Bourassa a son honneur et il entend le faire respecter - c'est que le député de Brome-Missisquoi n'ait pas l'odieux ce soir de demander au député de Bourassa de retirer ses paroles à l'endroit du député de Marguerite-Bourgeoys et du député de Portneuf, eux qui, à l'encontre du règlement, à l'encontre de l'article 99, à l'encontre des articles qui stipulent qu'on ne peut pas attaquer la conduite d'un membre de l'Assemblée et lui imputer des motifs indignes sans se prévaloir de l'article 68, n'ont pas accepté mercredi soir de retirer leurs paroles.

M. Lalonde: Question de règlement.

M. Bertrand: Dans un contexte comme celui-là, jamais le député de Bourassa ne va retirer...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bertrand: ... ce qu'il a dit tout à l'heure. Au contraire, c'est son honneur qui est en cause. Il est en droit de le défendre à l'Assemblée nationale contre des paroles qui ont été prononcées par le député de Marguerite-Bourgeoys et celui de Portneuf, à l'endroit du député de Bourassa, en son absence à l'Assemblée nationale mercredi soir.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je n'ai pas été témoin et je n'ai pas lu la transcription du journal des Débats en ce qui concerne les paroles qui ont été prononcées en commission parlementaire et qu'impute le leader du gouvernement au député de Marguerite-Bourgeoys et au député de Portneuf.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît;

M. Paradis: Si c'était en Chambre, je n'en ai pas été témoin. Ce dont j'ai été témoin ce soir, ce sont des paroles qui ont été prononcées à mon endroit par le député de Bourassa, alors que je n'ai jamais fait autre chose que mentionner son comté. Je n'ai fait autre chose que mentionner son comté et le fait qu'il avait occupé la présidence. Je n'ai jamais qualifié le genre de travail qu'il a accompli à cet endroit. Je lui demande, dans ces circonstances, de retirer les accusations qu'il a portées à mon égard. C'est une question de privilège.

Le Président: Si ma mémoire est fidèle, nous sommes ici pour discuter des amendements proposés par le ministre des Affaires municipales. Je tiens à rappeler à tous les membres de cette Assemblée que les présidents de commission parlementaire sont le prolongement du président de l'Assemblée nationale. En conséquence, je demanderais aux députés qui prennent la parole de s'en tenir à la pertinence du débat. Je dis que toute attaque contre un président de commission est une attaque contre la présidence, non pas la personne du président, mais contre l'institution qu'est l'Assemblée nationale du Québec et sa présidence. Si un député a des motifs raisonnables et probables de croire qu'un président a mal rempli ses fonctions, l'article 68 du règlement est là. Il est à la disposition de tous les députés de cette Chambre. Je demande donc, M. le député de Brome-Missisquoi, s'il vous plaît, de revenir à la pertinence du débat.

M. Paradis: M. le Président, vous me permettrez quand même de revenir sur ma

question de privilège. Je sais que vous étiez à l'écoute des débats. Je n'ai jamais - je veux que ce soit clair - attaqué le député de Bourassa dans le rôle qu'il a joué à la présidence de la commission des affaires municipales. À la suite de cette absence d'attaque, strictement à la suite du fait que j'ai mentionné le nom de son comté et que j'ai indiqué qu'il avait présidé cette commission, il s'est levé sur une question de privilège et il m'a attaqué personnellement. Je m'en remets à la transcription. À ce moment, ce que je vous demande de faire, autant j'ai de respect pour la présidence et que je ne veux pas l'attaquer, autant je ne veux pas non plus qu'un député en cette Chambre m'attaque en m'imputant des motifs, en m'imputant toutes sortes de considérations, alors que je n'ai jamais attaqué ni la présidence de la commission, ni la présidence en cette Chambre. C'est une question de droit d'un parlementaire.

Le Président: En fait, je pense que le député de Bourassa, comme président de commission, s'est senti attaqué, non pas comme député de Bourassa, mais comme président de commission parlementaire. J'estime qu'il avait à bon droit raison d'invoquer, si on veut attaquer sa conduite, comme président de commission, l'article 68 du règlement, comme d'ailleurs n'importe quel autre député, parce que cet article n'est pas réservé au président ou aux vice-présidents, mais à tout député de cette Chambre. L'article 68 est à la disposition de tout député à qui on prête des motifs indignes. En ce qui me concerne, je considère l'incident clos et je vous donne à nouveau la parole, M. le député, sur les amendements du ministre des Affaires municipales.

M. Paradis: Sur les amendements, M. le Président, et en tenant pour acquis que la transcription du journal des Débats sera là pour en faire preuve et les gens qui nous ont écoutés également seront là pour dire que je n'ai attaqué ni la présidence de la commission, ni votre présidence.

J'en étais donc à vous parler du rôle qu'ont joué divers intervenants gouvernementaux dans ce dossier. J'avais des félicitations à offrir au député de Bourassa, président de la commission parlementaire, mais, étant donné que, ce soir, comme simple député et n'étant plus président, il a l'épiderme très sensible, je vais immédiatement parler du leader du gouvernement et de son attitude dans ce dossier, en souhaitant qu'il n'ait pas l'épiderme aussi sensible.

M. le Président, il s'est passé des choses en cette Chambre qui nous sont rapportées aujourd'hui dans un article du Journal de Québec paru ce matin et qui s'intitule - on attribue ces paroles au leader du gouvernement - "Le gouvernement va vous passer sur le corps." On ne sais pas s'il parlait à l'Opposition, s'il parlait à la population de Baie-Comeau-Hauterive ou s'il parlait à l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

M. Bertrand: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement, sur une question de privilège.

M. Bertrand: Comme on me pose la question, M. le Président, je parlais du député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Seulement un instant. Je ne voudrais pas qu'il y en ait trop qui me posent des questions de privilège ou des questions de règlement.

Il est évident que le député de Brome-Missisquoi a posé une question, mais, en aucune façon, il n'était obligatoire d'y répondre. J'ai cru comprendre que le député de Hull avait une question à poser.

M. Rocheleau: M. le Président, c'est une question de privilège. Le leader du gouvernement vient de prononcer mon nom en disant qu'il avait dirigé des paroles à mon endroit l'autre soir. J'aimerais qu'il les répète, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'est manifestement pas une question de privilège. M. le député de Brome-Missisquoi, simplement avant de vous donner la parole, j'aimerais vérifier combien de temps il vous resterait.

M. Paradis: Cinq minutes...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi, je ne sais pas combien de temps vous avez été interrompu, mais je pense qu'il vous reste au moins cinq minutes.

M. Paradis: Merci, M. le Président. M. Richard: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! Un instant! M. le ministre des Affaires culturelles.

M. Richard: ... très respectueusement et en toute déférence, en donnant cinq minutes de plus au député de Brome-Missisquoi, j'ai le sentiment que vous nous

prenez un peu pour des masochistes.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Lorsque vous avez, dans votre bon jugement, dit qu'à cause de toutes les interruptions, le député de Brome-Missisquoi avait encore cinq minutes, j'ai entendu un rire un peu nerveux, excité, hystérique du leader du gouvernement. L'ancien président vient contester votre décision, M. le Président, qu'il ait un peu de respect pour la présidence, s'il vous plaît!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui. Ceci étant dit, en ayant vérifié cependant le temps, parce que je pense qu'il y a eu passablement d'interruptions, j'espère qu'à partir de ce moment-ci, on va pouvoir terminer... S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vais laisser à tout le monde le temps de se calmer. M. le ministre, vous retardez d'autant le débat puisque je vais rester debout. Merci. (23 h 10)

M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. J'avais calculé moi-même le temps et il me restait effectivement sept minutes. Je ne contesterai pas votre décision, avec tout le respect que j'ai pour la présidence.

Lorsque le leader du gouvernement déclarait: "Le gouvernement va vous passer sur le corps", ce qu'il fait pratiquement, c'est qu'il passe sur le corps de l'Opposition, il passe sur le corps des citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive, il passe sur le corps de tous les citoyens et citoyennes du Québec qui croient encore en la démocratie municipale, qui croient encore que les institutions auxquelles ils appartiennent, auxquelles ils croient, ont le droit de décider de leur avenir. C'est sur le corps de ces gens-là que vous voulez passer.

C'est d'une façon très bien décrite - et j'invite les gens qui ne sont pas procuré le journal de Québec de ce matin à le faire, s'il y a encore des copies disponibles - que vous l'avez faite.

Le prince des parlementaires, le député de Bonaventure, a dit en cette Chambre, à la suite des propos du leader du gouvernement...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Paradis: ... "En 26 ans de parlementarisme, et pourtant nous en avons connu toutes sortes de régimes, le régime duplessiste notamment, à partir des années cinquante, jamais je n'ai entendu un représentant du gouvernement, quel qu'il soit, proférer de telles paroles à l'Assemblée nationale." M. Levesque a rappelé que le prédécesseur de M. Bertrand, le député de Saint-Jacques, M. Claude Charron, devant poser...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, j'en suis malheureux, mais, à moins que je n'utilise l'article 45 qui me permettrait de permettre à quelques députés d'aller à l'extérieur, je risquerais de manquer de quorum... En conséquence, je vous demanderais, s'il vous plaît, de permettre au député de parler, parce que, même avec les haut-parleurs, j'ai de la difficulté à l'entendre. S'il vous plaît! M. le député.

M. Paradis: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Donc, le prince des parlementaires, député de Bonaventure, leader de l'Opposition, a rappelé que: "le prédécesseur de M. Bertrand, le député de Saint-Jacques, M. Claude Charron, devant poser ce geste d'enlever le droit de parole aux députés, l'a posé avec humilité, discernement, en s'excusant presque d'avoir à le faire. Jamais - c'est le prince des parlementaires que je reprends - je n'ai assisté à un tel déploiement de fureur, à une telle satisfaction de pouvoir brimer ceux qui s'opposent à la vérité de ce gouvernement. Nous venons d'assister à quelque chose de troublant, surtout lorsque ces gens-là ont dans leur programme un engagement à consulter les citoyens en matière de réorganisation municipale."

Relevant le fait que les députés ministériels présents avaient applaudi et crié "Bravo!" à la suite du propos de leur leader, le député de Bonaventure a ajouté: "C'est comme ça que les régimes totalitaires commencent. C'est la semence même, le début de ce genre de gouvernement qui est de plus en plus inquiétant et troublant. C'est l'attitude d'un gouvernement en faillite qui ne sait plus quoi faire pour gouverner le Québec, sauf créer des injustices à l'égard de tous les citoyens."

Le premier ministre est également impliqué dans ce dossier, comme le grand absent du débat. Il n'est pas ici lorsqu'on en parle, il n'est pas allé en commission parlementaire, il n'est pas allé voir si le député de Saguenay, si son ministre des Affaires municipales, si ses troupes appliquaient le programme du parti. Il n'est pas venu parce que ça va lui permettre de dire, comme à l'habitude: Je m'excuse, on ne le fera plus, on ne recommencera plus. Je n'étais pas là, cela s'est fait à mon insu.

C'est le genre de leadership responsable qu'on a présentement au Québec. Mais les

gens qui ont orchestré cette fusion forcée étaient tellement convaincus qu'elle ne correspondait, qu'elle ne répondait pas au voeu de la population de Baie-Comeau et de Hauterive, qu'ils ont, en commission parlementaire, ajouté un article qui révèle l'impuissance de ces gens à amener des relations cordiales entre deux municipalités. Lorsqu'on est totalement impuissant, on met dans un projet de loi l'article qui suit, je vous en fais une brève citation, M. le Président: Le ministre, s'il juge que l'une des villes visée au premier alinéa refuse ou néglige de respecter la loi - il prévoit déjà cela - le gouvernement peut adopter un décret par lequel la commission municipale du Québec est substituée au conseil et au maire de cette ville ainsi qu'à tous les fonctionnaires ou employés de celle-ci qui ne sont pas des salariés au sens du Code du travail. M. le Président, c'est la tutelle d'une ville. Vous ne passerez pas sur le corps - je conclus là-dessus, M. le Président - de la population du Québec, vous ne passerez pas sur le corps de la population de Baie-Comeau-Hauterive, parce que votre masque d'hypocrisie est en train de tomber et c'est l'ensemble des citoyens qui croient à leur institution locale qui vont se révolter contre vous.

Vous avez eu la révolte de Baie-Comeau, vous aurez la révolte de tous les autres citoyens concernés par leur institution locale dans leur milieu. C'est peut-être ce qui vous fera perdre le comté de Saguenay et peut-être un bon nombre d'autres aux prochaines élections. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de Chomedey.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, j'espère que l'attitude malsaine de certains de nos amis d'en face ne m'empêchera pas de vous présenter mes propos, ce soir.

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, À l'ordre!

Mme Bacon: M. le Président, est-ce que vous pouvez rappeler à l'ordre...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît.

Mme Bacon: Si tu es fatigué, sors donc.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît. La seule chose... S'il vous plaît. S'il faut prendre quelques instants de repos, je vais suspendre. M. le ministre. Madame, veuillez continuer.

Mme Bacon: Merci, M. le Président. Un membre de cette Chambre qui a déjà aussi été membre de l'Opposition a déjà dit: II deviendra dangereux de penser, au Québec, si on ne pense pas comme le gouvernement. Ce soir, je serais tentée de répéter la même chose et même d'y ajouter qu'elle était belle la République au temps de l'Empire. Ce soir, nous sommes à étudier la prise en considération du rapport de la commission parlementaire des affaires municipales et je crois que, de ce côté-ci de la Chambre, on a tenté d'expliquer la position du Parti libéral, la position d'une Opposition à un projet de loi qui est nécessaire dans les circonstances. Je regrette certains propos que nous avons entendus, ce soir, de la bouche du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, même s'ils ne sont pas enregistrés, nous les avons entendus. Je les regrette profondément parce que je croyais que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pouvait agir en gentleman même s'il entendait des propos qui lui déplaisaient.

Nous sommes ici pour représenter 46% de la population qui nous a élus, M. le Président. Nous l'avons fait et nous continuerons à le faire, que ça plaise ou non aux gens d'en face. La fusion proposée a été présentée aux citoyens de Hauterive et de Baie-Comeau comme une opération sans douleur, qui permettrait de rétablir la paix sociale sans aucune augmentation du niveau de taxation pour les citoyens de Baie-Comeau. Il est tout à fait évident, ce soir, par les remarques que nous entendons, que ce gouvernement agit constamment avec intolérance, avec arrogance, avec mesquinerie, avec aussi une autorité écrasante face à une Opposition qui fait son travail, M. le Président. Cette attitude même a été vraiment représentée par les paroles prononcées par le leader de la Chambre, paroles inacceptables dans la bouche de quelqu'un qui détient un poste important et aussi paroles déplorables. (23 h 20)

Je répéterai encore une fois ce soir ce que j'ai dit: Les électeurs de Vanier ne doivent sûrement pas être fiers de leur représentant. Jamais je ne permettrai qu'on continue à insulter les membres de l'Opposition comme l'a fait tout à l'heure le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Il est de toute évidence nécessaire de ne pas engager l'avenir de toute une région les yeux fermés et sans aucune préoccupation quant à la viabilité de cette nouvelle ville que certains semblent vouloir créer à tout prix et à n'importe quelles conditions.

Il y aussi un autre point important que nous ne pouvons ignorer dans le présent dossier. C'est la négation totale des droits démocratiques, des droits qu'ont défendus avec acharnement les députés du Parti québécois en 1974 lorsqu'un projet de loi leur

a été soumis pour forcer la fusion de certaines municipalités. J'aimerais citer quelques propos que nous entendions, lorsque nous étions de l'autre côté de cette Chambre, de la bouche même de ces députés qui, aujourd'hui, nous refusent la possibilité de nous exprimer librement. Le ministre de la Justice actuel disait alors: "Le Parti québécois au niveau national est d'accord avec les regroupements. Cependant - ceci a été confirmé lors de son dernier congrès - il est contre la fusion forcée." Et c'est le ministre de la Justice d'aujourd'hui qui disait cela, M. le Président. "La condition que nous posons, c'est de trouver par la voie d'un référendum l'accord des populations qui sont concernées. La fusion doit être le fruit du consentement des populations qui ont eu l'occasion de s'exprimer majoritairement. Il faut que nous ayons la conviction que la population accepte ce sur quoi nous légiférons et pas seulement les dirigeants. Encore une fois, si c'est si clair que cela, un référendum peut se tenir très vite et à ce moment-là permettre une loi qui ne soit pas coercitive. On ne peut pas jouer avec des populations comme cela dans un temps aussi restreint." Et c'est toujours le ministre de la Justice actuel qui parlait à ce moment-là. "Nous sommes contre le principe de ce projet de loi parce qu'il force la fusion, qu'il rend la fusion obligatoire sans consultation populaire. Je dis bien "populaire". Je ne dis pas consultation des maires, des ministres, des députés, mais une véritable consultation par voie de référendum."

Comme cela change, M. le Président, quand on change de côté de la Chambre! Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de procéder à une consultation populaire pour que les citoyens puissent se prononcer sur la fusion, alors que ce sont eux qui en vivront les lendemains? Pourquoi ce refus et cette entrave à la démocratie? Que le gouvernement péquiste respecte ses engagements et qu'il soit fidèle à ses principes et à son programme politique. Que le gouvernement permette aux représentants de Baie-Comeau et de Hauterive d'élaborer une étude sur la fusion. Qu'une campagne d'information au-dessus de toute partisanerie soit mise en branle auprès de la population afin de l'informer de la situation et de discuter d'hypothèses de solution. Que le gouvernement, à la suite de l'étude menée par les deux villes et à la suite d'une campagne d'information, décrète un référendum afin que les citoyens puissent, en toute connaissance de cause, se prononcer sur leur avenir, M. le Président.

Je sais que les femmes de Baie-Comeau et de Hauterive ont pris une part active aux différentes délibérations et aux différents regroupements qui ont eu lieu à l'occasion de ce projet de loi no 37. Elles ont été présentes aussi ici à Québec au moment où les groupes se sont réunis pour faire valoir des opinions, faire connaître aussi des espoirs. Elles ont accepté leurs responsabilités de citoyennes à part entière. Elles se sont impliquées dans le milieu et elles continueront à le faire, et je crois, M. le Président, que nous devons les en féliciter. Elles ont joué pleinement leur râle et elles ont compris qu'ensemble ce serait sûrement une force de plus pour essayer de convaincre soit le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui en fait son projet de loi, soit le ministre des Affaires municipales, qui doit continuer à faire son travail. J'espère, M. le Président, que ces femmes de Baie-Comeau et de Hauterive continueront avec acharnement, comme elles l'ont fait depuis le début, à jouer un rôle important dans cette possibilité pour ces populations de se faire entendre, cette possibilité pour ces populations, surtout, de faire accepter à ce gouvernement un référendum, une consultation populaire afin de faire comprendre au gouvernement, comme il le disait au moment où il était dans l'Opposition, qu'il sera toujours dangereux de penser, au Québec, si on ne pense pas comme le gouvernement. Cela ne devrait jamais exister.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. J'aurais préféré ne pas avoir à parler sur le projet de loi qui est devant nous ce soir. Si mon devoir aujourd'hui est de m'adresser à l'Assemblée nationale, c'est que des principes très importants sont en jeu et que je n'ai pas le choix.

Une voix: C'est vrai.

M. Doyon: Je n'ai pas le choix parce que c'est une question de principe, de démocratie que nous, de l'Opposition libérale, avons le devoir de défendre dans des circonstances qui sont difficiles, dans des circonstances qui font de nous les seuls champions d'une cause qui est fondamentalement juste et qu'on ne devrait pas avoir le devoir de défendre. Il y a des choses qui, dans la vie, doivent aller de soi. On ne doit pas mettre la population du Québec dans une camisole de force. On doit respecter des paroles qu'on a prononcées et qui ont été enregistrées. Ici à l'Assemblée nationale, quelles que soient les paroles qu'on prononce, elles demeurent. Scripta manent. Ici, on parle pour que ça demeure. Ce qui a été prononcé par des ministres importants du côté du gouvernement sont des paroles qui ont été dites et, en même temps, qui ont été enregistrées, qui sont écrites pour

oujours et qui vont dévoiler à la face de la rovince de Québec de quel bois ce ouvernement se chauffe.

Qu'est-ce qu'il prépare à la population du Québec s'il conserve le pouvoir? S'il a la main haute sur les affaires du Québec, quel est le sort qui est réservé à la population? Le même que le mariage forcé de Baie-Comeau et de Hauterive est imposé, de la même façon, et aussi paradoxalement, ce sera la séparation forcée du Québec. Il est dans les intentions du gouvernement de forcer la main de la population. Il est dans la manière de ce gouvernement de cacher la réalité des choses. Il est de l'essence de ce gouvernement de tromper la population et de dire des choses qui sont contraires à la vérité et qui sont néfastes pour toutes les populations concernées.

Autant la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive n'est pas désirée par ces lopulations, autant la séparation du Québec l'est pas désirée pour la population du Québec.

Des voix: C'est vrai.

M. Doyon: De la même façon que ce louvernement prétend connaître ce qui est ians les meilleurs intérêts de la population le Hauterive et de Baie-Comeau, de même doit-on s'attendre que, demain, après-demain, dans un an, dans deux ans, si le gouvernement conserve le pouvoir, il prétendra qu'il connaît lui-même mieux ce qui est à l'avantage de la population du Québec et que la séparation est la solution aux maux qui nous assaillent. Ces maux s'appellent chômage, fermetures d'usine, non-respect de la démocratie. Cela, c'est fondamental. Si on ne fait pas cela, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Je sais qu'il y a des mots qui font mal, mais il y a des mots qui doivent être prononcés. Ce ne sont pas les députés en arrière du siège des journalistes, qui n'ont pas le droit de s'adresser aux membres de l'Assemblée nationale, qui vont m'empêcher de les dire ici ce soir. Ce ne sont surtout pas ceux-là Parce que le respect de la démocratie, c'est pour ça qu'on est ici. Si on ne voit pas à cela, M. le Président, on n'a aucun droit d'être ici. Je vois l'hypocrisie des gens qui applaudissent, et c'est ce qui m'inquiète. Ce qui m'inquiète, c'est la différence entre les gestes, les paroles; tout cela fait ce dans quoi le marasme, l'espèce de non-consistance, qui est dangereuse au plus haut point. Si l'Opposition n'était pas là, imaginez-vous ce qu'il serait advenu du projet de loi qui, d'une façon non équivoque, soulève chez les populations concernées, de vives inquiétudes. (23 h 30)

M. le Président, si on a des arguments à faire valoir en faveur de la fusion de ces deux villes, qu'on les fasse valoir et qu'on en appelle à la raison et au bon sens, et non à la force. Si je manifeste ces inquiétudes aujourd'hui, c'est parce que je me dis que si on réussit à emberlificoter, de telle façon, les populations et leur faire accroire que leur bien est un bien qui nous est plus connu, à nous, le gouvernement, en parlant des péquistes, je crois que ce même raisonnement vaudra, tôt ou tard, quand on nous fera valoir que la séparation du Québec est aussi bénéfique pour les Québécois que, supposément, la fusion - c'est paradoxal, M. le Président - de Baie-Comeau et de Hauterive est bénéfique pour les habitants. On se retrouve dans la contradiction interne dans laquelle on a un gouvernement qui est le porte-parole, le champion de la fusion, alors que sa marque de commerce, son "trade mark", s'appelle séparation, séparatisme. Comment peut-on concilier le raisonnement d'un gouvernement qui s'est fait élire et dont le premier article de son programme, l'essence même de son existence, sa raison d'être fondamentale, s'appelle séparation, division, séparatisme...

M. Dupré: Indépendance.

M. Doyon: Ce gouvernement vient nous vendre, aujourd'hui, ce qui s'appelle fusion forcée, ce qui. s'appelle mariage forcé, ce qui s'appelle mariage de raison, ce qui s'appelle mariage à force de bras, au bout du fusil. Comment peut-on concilier ces deux attitudes? Poser la question, M. le Président, c'est y répondre. C'est tout simplement parce que ce gouvernement se fout éperdument de ce que la population pense. En d'autres mots, la démocratie, ce n'est pas pour lui. La démocratie, c'est un vain mot, c'est une manière de se faire élire, de ressortir les paravents de la démocratie juste à temps pour tenter de leurrer la population, pour tenter de faire accroire à l'électorat que ce qui est proposé est conforme à ses intérêts, alors que, fondamentalement, on s'en fout totalement, que c'est le cadet de son souci. Tout ce qui importe, c'est l'exercice du pouvoir en mal et en bien pour la population. Le pouvoir dans les mains de certaines gens, c'est comme une carabine chargée. Il y a des chasseurs qui ne sont pas capables d'avoir une carabine chargée sans viser sur quelque chose pour voir si cela va éclater, si cela va péter quelque part.

M. Dupré: On ne t'en mettra pas une dans les mains.

M. Doyon: Ce gouvernement a le pouvoir. Ce qu'il fait, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse, mais je ne veux pas vous être... M. le député, je vais utiliser l'article 45 et vous demander de respecter, en vertu de l'article 100, le droit de parole du député.

M. Oupré: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je ne vois pas, jusqu'à maintenant, en quoi vous avez été lésé, mais je vais vous écouter quand même.

M. Dupré: J'espère que vous allez m'écouter quelques instants. M. le député de Louis-Hébert a tenu des propos incendiaires en disant que nous avions des carabines chargées dans les mains.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, en espérant qu'on ne vous interrompra pas.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Le pouvoir est une arme dangereuse qu'il faut utiliser avec discernement parce que le pouvoir entre les mains de certaines gens, c'est une carabine chargée avec une cartouche dedans. On n'a pas besoin de tirer sur des fusibles pour savoir si cela fonctionne. Quand on se sent obligé de le faire, c'est parce qu'on n'est pas sûr de l'exercice qu'on peut faire du pouvoir.

J'invite les gens du gouvernement à se comporter en personnes responsables. Je ne demande pas leur accord là-dessus. Je ne demande pas leur approbation. J'ai simplement à voir la façon dont ils me regardent actuellement pour n'avoir aucune hésitation sur la conviction que j'ai qu'ils ne sont pas satisfaits de mon intervention. Mais cela démontre, M. le Président, que je fais mon travail comme il le faut.

Des voix: Bravo!

M. Doyon: Les applaudissements qu'ils m'adressent est le plus...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Doyon: Leur réaction est le meilleur signe que le mandat que j'ai ici à remplir est rempli correctement, parce que, si je faisais leur affaire, je m'inquiéterais. S'ils sont contre moi, c'est parce que je fais quelque chose comme il faut. Comme cela, je suis sûr de remplir le mandat qui m'a été confié. Le mandat que j'ai est aussi simple que cela: c'est de défendre les principes fondamentaux qui nous tiennent ici, la démocratie, c'est-à-dire le droit des gens de disposer d'eux-mêmes, avec eux-mêmes et pour eux-mêmes, parce que c'est cela la démocratie. Tout ce qui est autre que cela n'est pas la démocratie. C'est un paravent, c'est un semblant de démocratie. Le gouvernement qui est là nous sert une salade qui est devenue infecte parce qu'elle a moisi dans le mensonge, elle a moisi dans l'hypocrisie et elle a moisi dans l'arrogance. Cela ne pardonne pas parce que la population aura toujours le dernier mot, quoi qu'on en dise. Ce ne sont pas des menaces de guillotine, ce ne sont pas des menaces que la lame est bien aiguisée, ce n'est pas avec des menaces qu'on va nous passer sur le corps. Ce n'est pas cela qui va impressionner la population, parce que celle-ci a le corps pas mal plus raide que cela. Avant de nous passer sur le corps, on va s'organiser pour que le char d'assaut péquiste verse dans le fossé et qu'il y reste!

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je voudrais apporter certains correctifs à certaines déclarations qui ont été faites à cette Assemblée nationale au cours des derniers jours, et plus particulièrement corriger une erreur du député de Montmorency et ministre des Affaires culturelles, alors qu'il disait: J'étais ici tout à l'heure quand j'ai entendu le député de Hull utiliser des termes on ne peut plus antiparlementaires en qualifiant le député de Saguenay de menteur, d'infâme et d'hypocrite.

M. le Président, je voudrais rappeler au député de Montmorency que, s'il était ici dans cette Chambre, il n'a sûrement pas écouté parce que les propos que je tenais sont ceux-ci - je vous les cite - "On n'a pas voulu dépasser minuit parce qu'après minuit, on ne travaille pas aussi bien. Quand on a à surveiller un gouvernement de la sorte, "ratoureux", hypocrite, menteur et infâme, on doit travailler en deçà. Cela s'adressait au gouvernement et cela vous comprend tous.

M. le Président, je voudrais premièrement féliciter mes collègues de l'Assemblée nationale du côté de l'Opposition, bien entendu, pour le magnifique travail qu'ils ont fait ce soir, un travail de solidarité. Je dois vous dire, en passant, que c'est un travail qui n'est pas terminé. Ce que nous avons commencé, nous allons le poursuivre jusqu'à la fin. Je voudrais tout particulièrement féliciter mon collègue de Louis-Hébert qui, ce soir, avait une consultation avec ses militants de Louis-Hébert. Il a accepté de revenir à l'Assemblée nationale afin justement de

protéger la démocratie pour laquelle le côté de l'Opposition se bat actuellement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rocheleau: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Je pense que tout le monde est intéressé, en vertu de l'article 100, à bien entendre le discours du député de Hull. Vous allez certainement me permettre de l'entendre moi-même convenablement.

M. le député de Hull. (23 h 40)

M. Rocheleau: M. le Président, je trouve très regrettable l'attitude du côté ministériel ce soir, l'attitude de ces séparatistes. Au lieu d'unir les gens, on est en train de les séparer. C'est exactement ce dont nous tentons de faire la preuve.

Une voix: On est uni.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! À moins que le député de Portneuf et whip de l'Opposition me demande d'appliquer l'article 45, je vais être dans l'obligation de le faire moi-même avant qu'il me le demande. Je pense que le député de Hull a droit à sa pleine possibilité de faire son discours. C'est ce que j'essaie de protéger, mais je vous demanderais de m'aider à protéger son droit de parole. S'il vous plaît! M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: Je comprends, M. le Président, que la semaine a été chargée. Je comprends que la semaine a peut-être été longue et fatigante pour plusieurs des collègues. Je vous demanderais, M. le Président, d'être rigoureux dans l'application de notre règlement et de protéger le droit de parole du député de Hull, quitte à ce que certains députés, à votre droite, quittent pour le petit salon d'en arrière.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je suis réellement déçu de l'attitude de cette Chambre, ce soir, et, je le répète, du parti ministériel, alors que nous traitons d'un projet de loi matraque, d'un projet de loi qui oblige deux municipalités à s'unir sans consultation, sans référendum. On semble, du côté ministériel, bafouer cette démocratie, en rire, M. le Président. Je trouve cela honteux.

Ce soir, il y a sûrement des gens qui nous écoutent, des gens qui sont concernés, non seulement les gens de Baie-Comeau et Hauterive, mais cette loi matraque menace toutes les municipalités du Québec qui, peuvent se retrouver demain dans une situation semblable. On devrait peut-être, du côté ministériel, se rappeler les années 1974 et 1975. La loi no 98 a peut-être occasionné d'une certaine façon la défaite du gouvernement Bourassa, quand il a imposé plusieurs fusions qui étaient beaucoup plus démocratiques que celle que vous tentez de faire actuellement. La loi no 98 décrétait des unités de regroupement et on demandait en nombre les municipalités dans une unité ainsi que la population en majorité, alors que ce projet de loi impose d'une façon radicale un regroupement et que ces mêmes citoyens ont demandé à plusieurs occasions, particulièrement à leur député et ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, d'être consultés, d'être entendus. On a invité le ministre des Affaires municipales à combien de reprises à rencontrer les gens de Baie-Comeau, qui se sentaient brimés dans leur droit le plus légitime, c'est-à-dire celui de la liberté d'exercer cette liberté fondamentale de décider de son choix?

M. le Président, nous avons, le 30 novembre dernier, eu le dépôt de ce projet de loi à l'Assemblée nationale. Depuis le 15 décembre dernier que nous en traitons, nous avons reçu démocratiquement en commission parlementaire les intervenants ou les principaux intervenants de Baie-Comeau et de Hauterive, les municipalités concernées, les organismes concernés qui tous souhaitaient une fusion, mais pas à n'importe quel prix.

Je me souviens de cette soirée, alors que l'on bafouait le maire de Baie-Comeau, qui avait fait une étude de coûts, qui défendait sa population avec son conseil municipal et avec le Comité de citoyens de Baie-Comeau, qui démontrait que cette fusion forcée allait engendrer des coûts importants pour la ville de Baie-Comeau. On l'a bafoué, M. le Président.

L'Opposition a fait des recommandations lors de cette commission parlementaire. Entre autres, nous avons demandé un rapport concernant les états financiers de chacune des municipalités, avec un plan quinquennal démontrant les coûts que cette fusion pourrait occasionner et à l'une et à l'autre des municipalités. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et député de Saguenay nous a dit plusieurs fois: Jamais nous ne ferons une nouvelle étude. Des études ont été faites en 1965, en 1967, en 1970. M. le Président, on parle là pratiquement du temps où le ministre était en culotte courte, et il l'est encore parce qu'il ne semble pas avoir appris à vivre cette démocratie.

Pour ma part, j'ai appris cette démocratie alors que j'étais maire de Hull, alors que nous étions beaucoup plus près de nos citoyens. On sent l'éloignement de ce gouvernement de ce qu'il disait être "son"

peuple, les Québécois et les Québécoises. On sent cet éloignement parce qu'on ne consulte plus la base aujourd'hui. On ne va plus à la source voir ce que les citoyens attendent de leurs représentants à cette Assemblée nationale. Ce sont pourtant les citoyens qui élisent leurs représentants en cette Assemblée et ceux-ci ont un mandat clair, net et précis de représenter leur population. On ne peut pas permettre à un député d'un comté d'imposer ses volontés à une population entière alors que lui dit que c'est pour le mieux-être de ces deux municipalités. Si c'est pour le mieux-être de cette collectivité, qu'on ait la décence de consulter les gens, de leur laisser le libre choix. Le gouvernement est mal pris dans sa gestion actuelle des fonds publics. On est au courant des gaspillages que ce gouvernement fait actuellement et on dirait justement que, parce qu'il y a une petite municipalité de la Côte-Nord qui se débrouille bien, on veut la pénaliser. Ce n'est pas comme ça que ça se fait, un regroupement.

Depuis que le rapport du comité conjoint a été déposé le 18 mai dernier, - comité composé de trois représentants de la ville de Hauterive, de trois représentants de la ville de Baie-Comeau, de trois représentants de la Commission municipale du Québec, des employés du ministre des Affaires municipales à qui nous avions demandé de faire partie de ce comité conjoint pour agir comme médiateurs, comme conseillers, comme consultants - on n'a pas eu la décence d'aller expliquer à ces gens là-bas le contenu de ce rapport qui faisait la preuve hors de tout doute que Baie-Comeau avait raison.

Encore ce soir, si nous intervenons auprès du gouvernement ce n'est pas parce qu'on est contre la fusion, on sait qu'une fusion pourrait sûrement apporter des avantages. Mais on s'est moqué de nous, on s'est moqué de l'Opposition au cours de toutes ces délibérations. On s'est servi de nous autres en deuxième lecture, sur la motion de report quand on voulait boucher les trous, quand on n'avait pas le temps de discuter de finance, d'économie ou de trouver des jobs pour ceux qui ne travaillent pas au Québec, quand on avait simplement le temps de blâmer toujours quelqu'un d'autre, en l'occurrence le fédéral. Non! On est à passer une loi matraque.

Ce matin, alors que l'on votait sur la clôture, on nous mettait le bâillon parce qu'on ne voulait plus que les parlementaires puissent discuter en vertu du règlement de l'Assemblée nationale qui nous donne tous les outils pour défendre les droits les plus élémentaires des citoyens du Québec. On nous a bâillonnés nous aussi. Après la population, on bâillonne les membres de cette Assemblée nationale qui tentent de faire honnêtement leur travail.

(23 h 50)

Ce matin, M. le Président, le ministn de l'Environnement n'était pas ici, alors qu'on sait qu'il connaît bien la situation de Pointe-aux-Trembles, alors qu'on sait qu'il y a eu un référendum tenu par les citoyens de Pointe-aux-Trembles où majoritairement ce citoyens ont dit: On veut fusionner avec Montréal. Le ministre des Affaires municipales n'a même pas rendu sa décision encore. Où était, ce matin, quand on a pris le vote, le ministre de la Justice? Il n'était pas ici en Chambre. Le député de Chicoutimi. On sait ce que cette fusion a fait entre Kénogami, Jonquière et Alma. Pas Alma, excusez, Arvida. Je vous remercie pour une fois, du côté minstériel. Merci pour la correction. M. le Président, or accuse les membres de l'Opposition d'avoir retardé les travaux alors que dans quelque; minutes je vais simplement dire à la population du Québec qui nous écoute ce soir, alors que nous défendons les droits les plus élémentaires de la démocratie: On nous a pelleté ça à l'Assemblée nationale.

Le 14 juin, avant l'ajournement de la séance, le ministre dépose une page et demie d'amendements. Article 1, les paragraphes 4 à 8. Le 16 juin, avant-hier, avant l'ajournement de la séance, à l'heure limite du bâillon, le ministre dépose deux pages et demie d'amendements, articles 9 à 25. Le 18 juin, ce matin, vers 11 heures, le secrétaire général transmet copie des amendements proposés au projet de loi no 37. En plus des quatre pages d'amendements déjà transmises, tout près de quatre pages de nouveaux amendements sont transmises. M. le Président, je n'ai jamais vu un projet de loi aussi mal structuré, avec autant de trous. Si les gens avaient l'occasion de le voir -malheureusement, ils n'ont pas cette occasion - ils verraient, à toutes fins utiles, une ordure. C'est ça qu'on appelle un projet de loi alors que c'est rempli de trous. On a enlevé des articles, on a changé des mots et on n'est même pas capable de déposer un projet de loi qui se tient. Je vais simplement vous en citer un paragraphe à l'article 5: Pour la première élection générale, le conseil de la ville se compose de neuf membres dont un maire et un conseiller par district électoral. Depuis quand a-t-on vu un maire et un conseiller dans chacun des districts électoraux, M. le Président? Est-ce que cela a du bon sens de nous faire des amendements de la sorte avec des erreurs de la sorte?

On va se retrouver avec neuf maires et neuf conseillers municipaux, M. le Président. À l'article 1, paragraphe 5. Ce qui est encore plus odieux - nous aurons l'occasion d'y revenir parce que la semaine prochaine on va vous revoir sur le projet de loi no 37 et vous allez nous revoir encore longtemps. Il ne faut pas s'en faire. Ici, il y a un

article qui est absolument aberrant. On vient de traiter du projet de loi no 70 qui brime les travailleurs de la fonction publique d'un droit le plus élémentaire, soit la négociation. On vient de retirer de leurs poches 521 000 000 $ et on leur dit: Allez négocier. Mais les 521 000 000 $ "pètent au fret", ils ne sont plus là. C'est ça la démocratie du gouvernement actuel? M. le Président, dans le projet de loi déposé par le ministre des Affaires municipales, je vais vous lire un article qui était assez démocratique: "S'il juge que l'une des villes visées au premier alinéa refuse ou néglige de respecter la loi, le gouvernement peut adopter un décret par lequel la Commission municipale du Québec est substituée au conseil et au maire de cette ville ainsi qu'à tous les fonctionnaires ou employés de celle-ci qui ne sont pas des salariés au sens du Code du travail. Ce décret met fin au mandat du maire et des conseillers, suspend sans traitement ses fonctionnaires ou employés et prend effet à compter de la date de son adoption ou de toute date ultérieure qui y est fixée." Peut-on penser qu'un tel article puisse faire partie d'une loi? Jamais on n'a vu imposer à une des municipalités un article semblable, alors que le ministre des Affaires municipales nous parle de démocratie et d'autonomie municipale. De quelle façon est-on en train de bafouer les municipalités du Québec? Pour vous en faire la preuve, nous recevons des télégrammes de municipalités du Québec qui s'opposent fortement au projet de loi no 37. Je vais vous en lire quelques-uns. La ville de Lachute: "Le conseil de la ville de Lachute vous demande en son nom et au nom de ses contribuables de soumettre au gouvernement...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Rocheleau: ... son opposition au projet de loi no 37. Tout regroupement de municipalités par la force est inacceptable."

Des voix: ...

M. Rocheleau: M. le Président, s'il vous plaît, je demanderais...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît;

M. Rocheleau: ... à mes collègues du côté ministériel de me permettre de poursuivre, pour leur gouverne, je pense. Je sais que cela vous fait mal...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaîtl M. le député de Hull, s'il vous plaît! M. le député de Hull! La collaboration de cette Assemblée a toujours été acquise et je crois qu'elle doit continuer de l'être. M. le député de Hull, vous pouvez continuer.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Marieville: "En opposition au projet de loi no 37 visant à regrouper par la force les villes de Baie-Comeau et de Hauterive pour motifs invoqués par l'Opposition."

Waterloo, Rock-Forest, Sainte-Anne-de-Bellevue, Le Gardeur: "Nous tenons à vous confirmer que Le Gardeur s'oppose fermement à toute action qui viole le grand principe de base de la démocratie telle qu'une fusion forcée du genre du projet de loi no 37 du gouvernement du Québec. Richard Therrien, maire."

Saint-Pierre-de-Sorel, on se rapproche de Québec: "Monsieur, le conseil municipal de la paroisse Saint-Pierre-de-Sorel vous informe qu'il est absolument contre le projet de loi no 37 visant à regrouper par la force les villes de Baie-Comeau et de Hauterive."

La ville d'Aylmer, qui a connu des problèmes semblables en 1974 et où le gouvernement du Québec, à ce moment-là un gouvernement libéral, a respecté la ville d'Aylmer. Saint-Félix-de-Valois: "Je, soussigné, maire de la municipalité de la paroisse de Saint-Félix-de-Valois, m'oppose à l'adoption du projet de loi no 37 visant à regrouper par la force les villes de Baie-Comeau et de Hauterive et ce, pour les mêmes motifs que ceux évoqués par l'Opposition face à cette loi matraque."

La ville de LaSalle: "Fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive, nous sommes d'avis que celle-ci est inacceptable si un des deux principes suivants n'est pas appliqué, soit que les deux conseils des villes impliquées soient d'accord ou de consulter la population par voie de référendum."

Verdun - notre collègue de Verdun est maire de cette ville - s'oppose aussi à cette forme et tous ses conseillers s'y opposent. À Terrasse-Vaudreuil, le conseil s'oppose à cette fusion forcée.

Je pourrais continuer, M. le Président, et je continuerai la semaine prochaine si le gouvernement ramène sur cette table le projet de loi no 37.

Le Président: M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: II s'agit d'une demande de directive, M. le Président. Vous aurez compris que le député de Hull qui a un droit de parole de 30 minutes et dont l'intervention a commencé à 23 h 30...

Le Président: M. le whip de l'Opposition, j'ai déjà rendu ma décision. Je l'ai dit d'ailleurs au leader adjoint de l'Opposition. Le député de Hull et critique

de l'Opposition en cette matière n'a qu'un seul droit de parole. Comme il est intervenu, je pense, à 23 h 35, il a malheureusement perdu cinq minutes; un autre député de l'Opposition devra demander l'ajournement du débat, (minuit)

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je demande le vote sur...

M. Pagé: Je m'excuse, M. le Président, question de règlement. Je demande l'ajournement du débat. C'est explicable et c'est normal, il reste 19 députés...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que cette motion d'ajournement du débat sera adoptée?

Une voix: II n'est pas minuit.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît; II est minuit et, en vertu de notre règlement, nous devons terminer nos travaux. J'ai dit et je redis que le député de Hull ne pourra pas revenir pour reprendre ses sept minutes sur les amendements du rapport parce qu'il n'a qu'un seul droit de parole. Par contre, un député de l'Opposition peut maintenant demander l'ajournement du débat.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, de consentement, nous serions prêts à poursuivre le débat au-delà de minuit et à permettre ainsi aux parlementaires d'exercer démocratiquement leur droit de parole, de s'exprimer. Nous sommes tout à fait ouverts à la poursuite du débat immédiatement.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

M. Lalonde: Non, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Je pense que vous avez dit tout à l'heure que le député de Hull n'avait qu'un seul droit de parole et vous avez dit que les sept minutes qui lui auraient normalement été données pour terminer son intervention ne lui seraient pas remises si jamais le débat devait se poursuivre lundi prochain. Dans ce contexte, je pense que ce ne serait que normal, à cause de l'importance du rôle qu'a joué le député de Hull dans ce débat au nom de sa formation politique, que nous puissions poursuivre au-delà de minuit, jusque vers 1 heure ou 1 h 30. Nous y serions tout à fait disposés. Le député de Hull...

Le Président: M. le leader du gouvernement, le règlement est très clair; le vendredi, c'est minuit. Il y a défaut de consentement et l'ajournement du débat a été demandé par le whip de l'Opposition et député de Portneuf. D'office, je déclare ajournés les... M. le leader du gouvernement, je pense que vous avez une motion à faire en ce qui concerne les travaux de lundi.

M. Bertrand: La motion est la suivante. Je fais motion pour que nous ajournions nos travaux jusqu'à lundi, 14 heures.

Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Les travaux de la Chambre sont ajournés jusqu'à lundi, 14 heures.

(Fin de la séance à 0 h 03)

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