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(Quatorze heures cinq minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un
moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
M. Jacques Brassard, whip du gouvernement
Mme Huguette Lachapelle, whip adjoint
Avant de céder la parole au leader du gouvernement, j'aimerais
déposer en deux exemplaires le nouveau diagramme de l'Assemblée
nationale du Québec. Je voudrais également déposer en
quatre exemplaires copies de lettres que j'ai reçues au cours des
dernières semaines. Premièrement, une lettre du 9 novembre
provenant du premier ministre et indiquant que le nouveau whip adjoint du
gouvernement sera Mme Huguette Lachapelle, députée de
Dorion...
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: ... et que le nouveau whip en chef du
gouvernement sera M. Jacques Brassard, député de
Lac-Saint-Jean.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Gérard D. Levesque, chef de l'Opposition
Le Président: J'aimerais également déposer
en deux copies une lettre qui m'est parvenue le 1er septembre 1982 du whip en
chef de l'Opposition, m'indiquant que le caucus a nommé M. Gérard
D. Levesque, député de Bonaventure, comme chef de
l'Opposition.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
M. Fernand Lalonde, leader de l'Opposition
Le Président: Également, une lettre du chef de
l'Opposition du 1er septembre 1982, m'indiquant et indiquant à cette
Assemblée que dorénavant M. Fernand Lalonde, député
de Marguerite-Bourgeoys, sera le leader de l'Opposition.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Michel Gratton, leader adjoint de
l'Opposition
Le Président: Enfin, datée du 5 octobre 1982 une
lettre du chef de l'Opposition nous indique que dorénavant, M. Michel
Gratton, député de Gatineau, sera leader adjoint de
l'Opposition.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Cela étant dit, je cède la
parole au leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, comme vous avez reçu
une lettre du premier ministre du Québec indiquant la volonté du
gouvernement de convoquer l'Assemblée nationale pour aujourd'hui, 14
heures, je devrais, à ce moment-ci, me prévalant de l'article 84
de notre règlement, expliquer les raisons qui ont motivé cette
convocation de l'Assemblée nationale et indiquer en vertu de quel motif
le gouvernement considère qu'il y a urgence à agir dans le
dossier du transport en commun dans la région de Québec. Mais,
comme c'est la coutume en de pareilles circonstances, j'attendrai que nous
ayons procédé à la période de questions pour me
prévaloir de l'article 84. Nous pourrons donc, à ce
moment-là, M. le Président, entreprendre le débat de deux
heures prévu sur cette question de la définition du
caractère d'urgence et c'est pourquoi l'Assemblée nationale a
été convoquée, aujourd'hui, à 14 heures.
Le Président: Merci. M. le ministre de la Justice.
Visite de Québécois honorés pour
leur civisme
M. Bédard: M. le Président, avec votre permission,
je voudrais souligner la présence, à l'Assemblée
nationale, de 22 citoyens et citoyennes du Québec qui ont
été honorés d'une façon particulière, ce
matin, dans le cadre de l'application de la loi sur le civisme. Ces personnes
ont été honorées pour des gestes qu'elles ont posés
et pour le courage qu'elles ont manifesté dans des circonstances
particulières. Je pense que ces personnes représentent
également des exemples de civisme pour l'ensemble de la population du
Québec.
Le Président: M. le député de Papineau.
M. Assad: M. le Président, avec la permission de la
Chambre, je voudrais me joindre au ministre de la Justice pour les
félicitations adressées à nos récipiendaires. Ce
sont nos premiers récipiendaires. J'ai eu l'honneur d'être
invité, ce matin, à assister à
cette cérémonie et au dîner. J'ai lancé
l'invitation à nos récipiendaires de venir à
l'Assemblée nationale vu qu'il y avait une session spéciale. De
ce côté-ci de la Chambre, on voudrait offrir à nos
récipiendaires - il y en a que je connais personnellement - nos plus
sincères félicitations pour les gestes extraordinaires qu'ils ont
posés et ainsi mériter cette mention d'honneur, à
Québec, aujourd'hui. (14 h 10)
Le Président: Merci.
Période des questions orales des députés.
M. le chef de l'Opposition.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, comme vous le
voyez, je me retrouve à un autre siège, mais j'ai toujours
l'honneur de m'adresser à vous qui avez une certaine permanence et je
vous félicite encore du poste que vous occupez. Je vous formule les
meilleurs voeux de la part de notre formation politique.
Cela dit, je me retourne vers la banquette du premier ministre et je
pense qu'il s'attendait à ce que nous lui posions une question
aujourd'hui. Est-ce que le leader parlementaire du gouvernement peut m'indiquer
si le premier ministre est absent momentanément ou pour un certain
temps?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, le premier ministre devrait
être revenu ici à l'Assemblée nationale, dans quelques
minutes. Alors, si le chef de l'Opposition veut reporter sa question à
un peu plus tard, il me fera plaisir, à ce moment, de revenir à
sa question.
Le Président: M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, ma question s'adresse aussi
au premier ministre ou au ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration, qui est également absent, je pense. J'attendrai mon tour
moi aussi.
Des voix: Suspension.
Le Président: Y a-t-il d'autres questions principales? M.
le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, compte tenu que plusieurs
de nos questions aujourd'hui étaient dirigées à l'adresse
du premier ministre qu'on n'a pas eu le privilège de voir ici, sur le
parquet de la Chambre, depuis plusieurs mois, je dois vous indiquer ou vous
demander une directive. Qu'est-ce qu'il est opportun de faire dans les
circonstances?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, j'aurais peut-être une
suggestion à faire à l'Opposition. Comme la situation
économique, qui est tout de même un sujet d'une importance
considérable... Peut-être qu'en accordant à cette
première séance toute la priorité qui doit revenir
à l'économie, l'Opposition accepterait-elle de poser des
questions au ministre des Finances, président du comité?
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, j'ai rarement
été témoin d'un aveu comme celui du leader parlementaire
du gouvernement, à savoir que le premier ministre n'a aucun
intérêt dans les questions économiques. J'aurais cru, M. le
Président, justement parce que nous, nous mettons réellement la
priorité sur l'économie, qu'on aurait pu s'attendre que celui qui
dit depuis des années qu'il met la priorité sur
l'économie, dans chacun des discours et messages inauguraux, aurait
été présent.
Le Président: S'il vous plaît, pas de débat
sur cette question. Je sais pertinemment que le député de
Gaspé aurait une question à poser. Je vous l'accorde
immédiatement. M. le député de Gaspé. S'il vous
plaît, à moins qu'un député de l'Opposition ne se
lève pour poser une question. M. le député de
Mégantic-Compton.
Le programme Corvée-habitation
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Étant
donné que je semble un des privilégiés - j'ai un ministre
à qui je peux adresser une question - ma question s'adressera, M. le
Président, au ministre de l'Habitation et de la Protection du
consommateur. J'aimerais qu'il nous fasse d'abord, d'une part, état, si
vous voulez, du bilan du programme Corvée-habitation jusqu'à ce
jour. On se souviendra qu'au moment où le programme
Corvée-habitation a été mis en place, il comblait un
écart de 6% entre le taux d'intérêt réel et le taux
d'intérêt de 13,5%. Étant donné le
fléchissement des taux, je voudrais savoir du ministre si le travailleur
contribue encore par ses 0,125 $ l'heure, si le patron continue
également encore de contribuer par ses 0,125 $ l'heure, de même
que les organismes professionnels, etc., etc. Si tel est le cas, je voudrais
qu'il m'explique pourquoi on n'abaisse pas davantage le taux
d'intérêt ou, advenant le cas où ils ne veulent pas
abaisser le taux d'intérêt, ce que va devenir
le fonds de 500 000 000 $ créé à cette fin.
Le Président: M. le ministre, avant de répondre
à cette question, j'aimerais indiquer aux gens qui sont dans les
galeries qu'il est absolument interdit de prendre des photographies à
l'intérieur de l'Assemblée nationale. Donc, je compte sur votre
collaboration afin que cette directive soit suivie.
M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, la question du
député de Mégantic-Compton me fait d'autant plus plaisir
que je viens tout juste d'avoir les chiffres préliminaires pour les
mises en chantier au cours du mois d'octobre. Pour les municipalités de
plus de 10 000 de population il y a des ajustements qui se font pour celles de
moins de 10 000 - on nous indique que le nombre de mises en chantier a
doublé par rapport au mois de septembre et qu'il a également
doublé par rapport au mois d'octobre de l'année dernière.
En effet, M. le Président, les renseignements préliminaires que
nous avons pour le mois d'octobre indiquent près de 2650 mises en
chantier pour ce mois, comparativement à 1266 pour le mois de septembre
qui a précédé et 1346 pour le même mois
l'année dernière. C'est donc dire, M. le Président, que la
construction a vraiment commencé à démarrer et que tout
laisse croire que Corvée-habitation va permettre de réaliser
d'ici la fin de l'année présente, au bas mot, au moins 6000
logements qui n'auraient pas été construits n'eût
été du programme.
M. le Président, le député de
Mégantic-Compton pose la question des taux d'intérêt. Je
l'ai dit et je le répète, dès le moment du discours sur le
budget, le 25 mai dernier, il a été dit que ce programme aurait
une durée de deux ans et ce que nous annoncions au cours de
l'été, ces 13,5% comportant une garantie de trois ans,
c'était les conditions qui s'appliquaient pour l'année 1982 et
que celles de 1983 seraient annoncées en temps et lieu. Or, M. le
Président, à l'heure actuelle, avec un taux de 13,5% garanti pour
trois ans, Corvée-habitation offre toujours le meilleur taux pour le
plus long temps. Ces avantages, si on les ajoute à ceux que donnent les
municipalités - plus de 100 municipalités du Québec
donnent en moyenne 1500 $ par logement - si on les ajoute aux avantages du
Régime d'épargne-logement, soit 2000 $ de bonification cette
année, et si on les ajoute aux 3000 $ du gouvernement
fédéral, je dis que les conditions pour se bâtir sont
toujours aussi bonnes et même meilleures que jamais.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Bélanger: M. le Président, je me demande si
c'est une question additionnelle, parce que le ministre a évité
de répondre à ma question.
Il y a un fonds qui est constitué en provenance des travailleurs,
des patrons et des institutions prêteuses. Étant donné que
vous n'avez plus à combler la différence de 6% puisque maintenant
les taux d'intérêt sont de 13,75% pour un an et de 14,5% pour
trois ans, il y a donc une différence d'environ 5% à 5,5%
d'intérêt. Que va-t-il advenir de ce fonds et pourquoi ne pas le
mettre immédiatement en application, c'est-à-dire réduire
davantage les taux d'intérêt pour s'assurer d'une deuxième
flambée dans le programme Corvée-habitation?
Le Président: M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, en réponse à
cette partie de la question du député de Mégantic-Compton,
les intervenants, tant les travailleurs de la construction que les employeurs,
contribuent à verser l'équivalent de 0,125 $ l'heure. Ce que le
député de Mégantic-Compton semble oublier, c'est que, pour
les maisons qui ont été mises en chantier à partir du 25
mai, en juin, juillet et août, les prêts ont été
consentis à 19%. Il faut donc bonifier les taux d'intérêt
en conséquence.
Si le député de Mégantic-Compton est prêt
à me dire que les taux d'intérêt ne fluctueront pas
au-delà d'environ 15%, qu'ils sont à présent, pour les
trois prochaines années, on pourra réviser la situation. Il tient
compte d'une baisse, mais, encore une fois, Corvée-habitation offre le
meilleur taux. Je lui dis que les conditions pour 1983 seront annoncées
en temps et lieu, mais ce moment n'est pas aujourd'hui.
Le Président: M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, j'avais une question à
poser, mais, malheureusement, le premier ministre n'est pas encore parmi nous,
alors...
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: ... on me dit que le premier ministre est
arrivé et devrait être ici dans quelques secondes à peine.
Je voudrais simplement indiquer - je pense que j'aurais dû le faire au
moment où le chef de l'Opposition s'est levé - que le premier
ministre était en réunion avec une délégation de la
Belgique. Justement, je pense qu'il y a intérêt à ce que,
pour les relations entre le Québec et la Belgique, nous puissions,
entre
autres, discuter de questions économiques. Effectivement c'est
peut-être un des dossiers qui méritaient cette rencontre avec nos
amis belges.
Le Président: M. le leader de l'Opposition. (14 h 20)
M. Lalonde: M. le Président, comme vous avez vu, plusieurs
questions s'adressent au premier ministre actuellement. La tradition, vous le
savez, veut que les membres de l'Opposition posent d'abord les premières
questions. Je vous demande, puisque le leader du gouvernement vient de nous
indiquer que le premier ministre s'en vient bientôt, de suspendre les
travaux quelques minutes. On pourra reprendre la période des questions
à ce moment.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys et leader de l'Opposition, la présidence, tout
d'abord, n'a pas à juger de la présence ou de l'absence des
députés ou des ministres. La présidence remarque qu'il y a
beaucoup de députés, des deux côtés de la Chambre,
qu'il y a plusieurs ministres présents; tant et aussi longtemps qu'un
député a une question à poser, mon devoir n'est pas de
suspendre, mais de reconnaître le député qui s'adresse
à la présidence.
M. le chef de l'Opposition.
La part de responsabilité du gouvernement dans
la crise économique
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je vais
laisser le premier ministre prendre son siège. Le premier ministre, qui
a maintenu muette l'Assemblée nationale depuis quatre mois et demi,
devait sans doute avoir hâte de venir annoncer à cette Chambre les
mesures législatives et administratives qu'il avait l'intention de
présenter à cette Assemblée. Bien qu'il nous ait
laissé entendre que le menu législatif serait relativement
maigre, il nous avait annoncé un débat de fond sur la situation
économique où nous nous attendions bien à des suggestions
très positives de la part du gouvernement et non pas cette motion de
félicitations que nous retrouvons ce matin en appendice au feuilleton,
ce qu'il y a de plus ridicule que j'ai vu dans mon expérience ici
à l'Assemblée nationale, une motion de félicitations que
s'adresse le gouvernement. Alors que nous avons le chômage que nous
connaissons, alors que nous avons les fermetures que nous connaissons, alors
que des régions entières sont menacées de fermeture, le
gouvernement veut que l'Assemblée nationale lui vote une motion de
félicitations.
M. le Président, ma question au premier ministre devant la
situation actuelle est la suivante: Le premier ministre est-il prêt
à accepter que lui et son gouvernement portent une part de
responsabilité dans la crise actuelle?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je voudrais
d'abord m'excuser en expliquant le retard qui fait que je suis arrivé en
Chambre quinze ou vingt minutes passé l'heure. C'est qu'il y avait ce
matin - et c'est la première manifestation, la première
représentation permanente à l'extérieur de la
communauté française de Belgique et de la Wallonie,
l'exécutif de la région wallonne de Belgique - la première
représentation extérieure qui était inaugurée,
c'est-à-dire leur délégation ici à Québec,
et cela a été suivi, comme c'est normal, d'une réception
qui vient de se terminer où j'espérais rencontrer le chef de
l'Opposition. Mais je comprends que les devoirs de sa charge l'ont
empêché d'être avec nous. Je voudrais en profiter pour
féliciter - c'est la première occasion que j'en ai - notre
éminent ami et collègue, le député de Bonaventure,
pour cette confiance que, pour la deuxième fois en quelques
brèves années, lui renouvellent ses partisans ou ses conjoints du
Parti libéral.
Maintenant, pour ce qui est de la motion qu'évoque le
député de Bonaventure et qui est inscrite au feuilleton, je ne
pense pas qu'il s'agisse d'une motion de félicitations. Je suis
sûr que cela ne prendra pas cette tournure en ce qui concerne les
réactions de l'Opposition. Ce que cela demande, c'est l'appui...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît;
M. Lévesque (Taillon): ... l'appui et je dirais même
la pression de nos amis d'en face, s'ils le veulent bien. Cette motion -puisque
le député de Bonaventure l'a évoquée, ce n'est pas
mauvais de l'évoquer un peu plus en détail - demande que
l'Assemblée nationale appuie les orientations, des moyens d'action; que
l'Opposition nous dise également la part qu'elle pense que nous avons
dans les effets de la crise. Il est sûr que tous les gouvernements ont
leur part de responsabilité. Je ne crois pas que la nôtre soit
primordiale, mais, si on veut laisser un peu de côté, pour
l'instant, les responsabilités, les accusations, etc., est-ce que nous
serions d'accord pour accentuer la rigueur de la gestion budgétaire?
Est-ce que nous serions d'accord pour favoriser la création
immédiate d'emplois, et davantage encore, et le maintien de tous ceux
qu'on peut sauver? Est-ce que nous serions d'accord pour mettre en place
dès maintenant les conditions de relance chaque fois qu'on le peut?
Est-ce qu'on en a les
moyens? Est-ce qu'on est d'accord pour maintenir les programmes sociaux
qui sont absolument essentiels pour les plus démunis dans notre
société? Est-ce qu'on est d'accord pour privilégier la
concertation chaque fois que c'est possible?
Ce n'est pas dans nos habitudes, mais on a fait des départs assez
extraordinaires depuis quelque temps. Est-ce qu'on doit accentuer cela? Au
fond, c'est la question qu'on pose à l'Opposition et qu'on posera, je
l'espère, tous ensemble, à l'ensemble de nos concitoyens. C'est
l'occasion, pour cette tribune particulièrement centrale de
l'Assemblée nationale, de donner le meilleur éclairage possible
à l'ensemble de nos concitoyens sur ce qui se passe, sur les contraintes
de la situation actuelle et la meilleure façon pour le Québec
d'en sortir.
C'est évident qu'à la question précise,
spécifique du député de Bonaventure, chef
intérimaire de l'Opposition, la réponse est facile. C'est
évident que le gouvernement du Québec a une part de
responsabilité, nous en avons tous, des parts de responsabilité.
C'est évident aussi que la part principale de responsabilité
n'est pas ici au Québec, nous sommes une province.
Quand on regarde ce qui se passe dans un autre secteur de gouvernement,
je pense qu'on sait à quel point le Québec, comme l'ensemble du
Canada, est quelque peu victime de politiques, c'est le moins qu'on puisse
dire, assez aberrantes, assez absurdes à beaucoup de points de vue,
catastrophiques à d'autres, qu'on nous a infligées. Enfin, il
s'agit d'en sortir et non pas de faire le procès de tout le monde.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je ne sais pas
quel scribe avait écrit cette motion, ce ne doit pas être le
premier ministre parce que, apparemment, il ne l'a pas lue. Il a lu certains
paragraphes sur lesquels nous sommes d'accord. Nous sommes d'accord pour
accentuer la rigueur de la gestion budgétaire...
M. Lalonde: On en a besoin.
M. Levesque (Bonaventure): ... pas seulement accentuer,
présentement nous avons la gestion budgétaire la pire que le
Québec ait jamais connu. C'est la gestion qui a donné...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): ... les déficits,
l'endettement. Enfin, M. le Président, je voulais simplement donner
quelques exemples, je vois qu'on n'aime pas cela, de l'autre
côté.
Cela fait quatre mois et demi qu'on est dans un silence voulu par le
gouvernement. Nous allons parler au moins pendant les quelques minutes que nous
avons à notre disposition.
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Nous voulons favoriser, M. le
Président, la création d'emplois, mais ce que je veux dire...
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Je vais être très bref.
Je vois que vous-même avez peut-être l'occasion de me rappeler
à l'ordre, mais je me rappelle que vous aviez indiqué qu'en
changeant de siège, vous alliez avoir la même tolérance
traditionnelle qu'on a envers...
Le Président: M. le chef de l'Opposition et tous les
députés, j'ai assisté à une période des
questions à la Chambre des communes, mardi dernier, et je dois vous dire
que ...
Des voix: Ah! Ah! Bravo!
Le Président: ... j'ai été
particulièrement impressionné...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président: ... parce que la moyenne...
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: ... des questions principales posées
à la Chambre des communes sur une période de temps identique,
c'est-à-dire 45 minutes, est de douze, alors qu'au Québec elle
est de 5,5.
Des voix: Et les réponses?
Le Président: Ce qui veut dire qu'en ce début de
session il serait bon que les questions des députés de
l'Opposition et de tous les députés soient les plus brèves
possible, comportent des préambules pour la première question
seulement, et que les réponses des ministres soient également les
plus brèves possible, il va de soi.
Ceci étant dit, M. le chef de l'Opposition, c'est simplement
dû à une expérience que j'ai vécue cette semaine et
qui m'a impressionné. J'aimerais que cette Chambre puisse permettre,
dans ces 45 minutes, de faire en sorte que la plupart des députés
puissent poser des questions.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je vous
félicite de cette nouvelle expérience. Je voudrais vous assurer
que notre formation politique souhaite depuis longtemps avoir des
réponses courtes mais précises de la part des ministres; non pas
qu'ils fassent le tour du pot, mais qu'ils répondent directement aux
questions pertinentes que nous posons. Pour notre part, nous nous engageons
à poser des questions évidemment les plus courtes, les plus
concises et les plus précises possible, à la condition que nous
puissions avoir des réponses précises et concises de la part des
ministres. Je vois que ceux qui approuvent sont ceux qui perdent le plus de
temps à répondre. (14 h 30)
Des voix: Ah!
M. Levesque (Bonaventure): Ceci dit, M. le Président -
comme vous venez de le dire - avant de poser la question additionnelle, je
voudrais simplement attirer l'attention du premier ministre sur le
préambule qui dit ceci: "Que l'Assemblée nationale appuie les
orientations et les moyens d'action retenus par le gouvernement..." Ce n'est
pas cela, M. le Président. Si le premier ministre nous avait
demandé de faire en sorte qu'on accentue la rigueur budgétaire,
qu'on favorise la création d'emplois, etc., évidemment, on est
pour la vertu, mais on n'est pas pour... On nous demande présentement de
féliciter le gouvernement pour les moyens qu'il a retenus, et je dis
non.
Ceci dit, je demande au premier ministre qui, lui-même, vient
d'admettre qu'il a une part de responsabilité dans la crise actuelle,
s'il peut nous dire, brièvement, quelles sont les erreurs qu'il regrette
dans les gestes qu'il a posés ou qu'il n'a pas posés.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais me
contenter de revenir, parce que c'est le chef de l'Opposition qui s'est permis
de le faire à deux reprises, sur ce premier paragraphe qui concerne la
rigueur de la gestion budgétaire. Je sais que cela l'a fait rigoler
parce qu'il a perdu la mémoire. Il faisait partie d'un gouvernement qui
nous a laissé 3,5% de croissance annuelle des effectifs. On est
maintenant à la croissance zéro et un peu en
deçà.
M. Levesque (Bonaventure): Vous êtes rendus à
zéro.
M. Lévesque (Taillon): C'est là de la rigueur
administrative. On nous a laissé - M. le Président, je pense que
cela vaut la peine de le rappeler - une croissance des dépenses,
établie depuis quelques années, quand nous sommes arrivés,
à 21% annuellement. Cela a été ramené à la
moitié. Malgré les contraintes actuelles, je crois que
normalement, cette année, c'est à peine si on dépassera ce
qui est à peu près l'inflation, c'est-à-dire 10% ou 11%.
C'est là de la rigueur administrative.
Des voix: Oh!
M. Levesque (Taillon): II faut l'accentuer, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
M. Bertrand: Le geste que vous regrettez le plus, c'est celui
qu'ils ont posé le 20 mai 1980.
M. Lévesque (Taillon): Oui. Je termine en disant
simplement ceci. On ne se donne pas un mérite historique; c'est la crise
elle-même qui nous force à accentuer ces choses-là. On
demande simplement à l'Opposition: Êtes-vous d'accord?
Maintenant, pour ce qui est de la question additionnelle quelque peu
académique du député de Bonaventure, à savoir
qu'est-ce que nous admettons ou que j'admettrais personnellement comme
étant la chose la plus grave que nous ayons...
Une voix: Les...
M. Levesque (Taillon): L'erreur ou...
Des voix: Les...
M. Lévesque (Taillon): ... les erreurs, je me fie à
l'Opposition, d'ici à quelques semaines, pour nous expliquer tout
cela.
Des voix: Ah!
Le Président: Question principale, M. le
député de Gatineau.
Le "who's who" des communautés
ethniques
M. Gratton: M. le Président, j'aimerais poser une question
au premier ministre. Je pense qu'il conviendra qu'il ne s'agira pas d'une
erreur purement académique puisque ma question portera sur le fameux
"who's who" des communautés ethniques, préparé par le
ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration.
Il y a deux jours, la première réaction du premier
ministre et du ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration
a été de dénoncer l'hypocrisie de ceux qui
s'inquiétaient de l'utilisation qui avait pu être faite et de
l'existence même de ce
document. À leur avis, M. le Président, il s'agissait tout
simplement d'une tempête dans un verre d'eau, d'un simple pointage que
tout parti politique sérieux se doit de posséder, comme si le
ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration devait
se mettre au service du Parti québécois.
Pourtant, hier, dans une entrevue à Radio-Canada, le premier
ministre se ravisait et qualifiait d'inacceptables, même de
méprisantes, certaines parties du même document.
Une voix: Répugnantes.
M. Gratton: Pardon! Répugnantes, M. le Président,
mais tout en tâchant de faire porter tout le blâme, toute la
responsabilité sur l'actuel chef de cabinet du ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration, M. Michel Beaubien.
Ma première question au premier ministre est simple. Quels sont
les faits nouveaux qui, en deux jours, l'ont amené à
reconnaître la gravité de la chose? Est-ce que ce fut une lecture
plus attentive du document qui lui en a fait réaliser le
caractère répugnant? Si oui, M. le Président, puis-je lui
suggérer, la prochaine fois, avant de réagir impulsivement, de
connaître tous les faits ou est-ce que ce furent les nombreux
commentaires unanimement défavorables et réprobateurs qui ont
suivi la première réponse du premier ministre qui lui ont fait,
finalement, confesser son erreur? Si tel est le cas, je lui demande comment il
peut espérer que la population, en général, et les groupes
ethniques, en particulier, lui fassent confiance quand il leur dit maintenant:
Soyez sans crainte, la liste n'a jamais servi dans le passé et ne
servira jamais dans l'avenir.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je vais être le plus bref
possible en disant d'abord que notre collègue, le ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration sera disponible dès
le début de la semaine prochaine quand il y aura la rentrée
normale régulière pour satisfaire, j'espère, en tout cas,
à toutes les curiosités de l'Opposition. Il m'a demandé de
l'excuser aujourd'hui parce qu'il était, depuis longtemps, prévu
qu'il soit à une tribune assez importante à New York. Cela
étant dit, quels sont les faits nouveaux qui ont changé, ou en
tout cas nuancé la première opinion que j'avais donnée?
C'est bien simple. Je n'ai jamais lu ce truc-là, je ne savais même
pas qu'il existait. Quelqu'un, un archéologue du Toronto Star, l'a
déterré là où il était, sur quelque tablette
que ce soit; il en a fait un plat, et avant même que j'aie le temps de
voir de quoi il s'agissait, avec, je pense, une réaction qui nous arrive
à tous à l'occasion, parce qu'on sait où se trouvent les
gens qui essaient le plus possible - oui...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lévesque (Taillon): ... d'écorcher la
réputation du Québec, de son gouvernement, chaque fois qu'ils le
peuvent...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lévesque (Taillon): J'ai eu une réaction
instinctive. Je n'avais pas lu le document. J'avoue que je n'ai pas fini de le
lire et je ne le lirai pas au complet. Mais j'en ai vu assez pour pouvoir dire
que dans un certain nombre...
M. Lévesque (Bonaventure): Question de
privilège.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît'. M.
le chef de l'Opposition, sur une question de privilège.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, à moins
que j'aie mal compris, le premier ministre vient de s'attaquer directement
à un membre de la Tribune de la presse. Est-ce qu'il veut, à ce
moment-ci, dire que c'est bien le cas, avec les mots qu'il vient d'utiliser
à son endroit?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je dirai simplement pour reprendre
une expression que j'ai lue dans les journaux, ce matin: II y a des gens qui
font beaucoup d'indignation publicitaire en sachant que ce n'est absolument pas
fondé. Tout ce que je veux dire, c'est ceci: Je me suis fait accrocher
dans l'entrée de l'édifice J au moment où je ne savais
même pas de quoi il s'agissait. Les gens sont toujours très
préoccupés, dans certains milieux des médias
d'information, d'avoir le plus vite possible la possibilité de voir s'il
n'y a pas des pelures de bananes quelque part. J'ai répondu ce qui me
paraissait instinctivement être la vérité. Quand j'ai lu le
truc - j'ai fini par en lire une bonne partie - j'ai été
obligé de constater que c'est vrai qu'il y avait des choses plutôt
inqualifiables là-dedans. Heureusement, il s'agit de cas assez peu
nombreux, mais c'est quand même inexcusable. Donc, c'est ce que j'ai dit
en précisant, puisque, l'ayant lu, je dois dire que je ne suis pas
particulièrement fier de ce travail; mais je répète ce qui
est vrai, quand même, et que le député de Gatineau semble
mettre en doute. Il a commencé son intervention en disant: le
ministère de l'Immigration... Je regrette. Il s'agit d'une personne qui
a mal fait un travail, au moins,
en grande partie, qui a mal rempli une commande qui lui avait
été donnée, laquelle pouvait être une chose
très normale, mais qui a assaisonné cela de jugements personnels
et même parfois de certaines choses qui sont absolument indécentes
et qui en porte la responsabilité puisque c'est vrai et je le
répète.
Non seulement, moi, je ne savais pas que cela existait. Le ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration l'a appris en même
temps que tout le monde. 11 l'a fait détruire. Cela aurait dû
être jeté au panier depuis longtemps au lieu d'être sur les
tablettes, mais enfin, tant pis. Le mal est fait, mais il est réparable
et ce que je sais personnellement, parce que de cela j'en aurais eu quelques
échos, c'est que cela n'a jamais servi d'aucune façon - non
-à marquer ou à pousser sur les relations qu'on pouvait avoir
avec les gens qui sont concernés là.
Une voix: Jamais il va dire le contraire.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Gatineau. (14 h 40)
M. Gratton: M. le Président, le premier ministre vient de
dire qu'il connaît maintenant la gravité du document, assez en
tout cas pour parler de la répugnance que certaines informations lui
inspirent. Forcément, il blâme une personne qui, si je ne m'abuse,
est encore en poste au ministère des Communautés culturelles et
de l'Immigration, et je ne lui poserai pas la question: Est-ce qu'on attend
qu'il ponde un deuxième document pour possiblement lui suggérer
de faire son travail autrement? M. le Président, que pense le premier
ministre du fait que certains organisateurs du Parti québécois
ont avoué avoir utilisé ces fiches au cours de la campagne
référendaire de mai 1980? Que pense-t-il du fait que ce document
ait été distribué, de l'aveu même de son auteur, M.
Michel Beaubien, dans plusieurs ministères du gouvernement? Alors
qu'hier, il ne connaissait même pas l'existence dudit document, comment
peut-il nous assurer, aujourd'hui, avec toute la certitude dont il est capable,
que cette liste n'a jamais servi à qui que ce soit? Ne croit-il pas
qu'il devrait au moins, encore une fois, éviter de réagir
impulsivement avant de connaître tous les faits - parce qu'on va lui en
faire connaître - et se rendre à la demande de tous les
éditorialistes des journaux de ce matin - Jean-Louis Roy du Devoir,
Marcel Pépin du Soleil, et j'en passe - qui réclament que le
gouvernement fasse toute la lumière autour de cette chose, que ce soit
par une enquête publique ou autrement?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Dieu sait que cela fait partie du
jeu. Chaque fois qu'il fait mauvais, c'est la faute du gouvernement. S'il fait
beau, c'est le bon Dieu qui l'a voulu. S'il y a quelque chose qui, si peu que
ce soit, donne l'impression qu'on peut faire, justement, de grandes crises
d'indignation publicitaire, on demande une commission.
Il y a quelqu'un qui a fait une erreur -une erreur grave - dans un
travail qui lui avait été commandé. Cela n'a jamais servi,
que je sache. Je n'en ai jamais connu l'existence. Au moment du
référendum, dont parle le député de Gatineau, je me
souviens avoir travaillé assez fort - Dieu sait - sur cette campagne,
comme nos amis d'en face ont travaillé dans l'autre sens pour la
préparer, pour essayer de la pousser le plus loin possible,
légitimement, et je n'ai jamais vu, en aucune façon,
évoquer le document en question. C'est sûr qu'on savait ce qui se
passait un peu dans les organismes des groupes ethniques des communautés
culturelles, mais jamais certaines des choses qu'on essaie maintenant de
répandre, surtout en anglais, partout à travers le pays, comme si
c'était...
Des voix: Oh!
M. Lévesque (Taillon): Non, non!... comme si
c'était une façon, encore une fois, de donner la pire image
possible, non seulement du gouvernement du Québec, mais aussi à
certaines tendances québécoises. C'est complètement
injuste et c'est complètement irresponsable de la part de nos amis d'en
face qui veulent en faire un plat pendant des jours et des semaines. Je veux
bien qu'on essaie de faire équivaloir une erreur personnelle comme
celle-là à l'espèce d'erreur collective que
représentait le CAD de l'ancien gouvernement...
Des voix: Oh!
M. Lévesque (Taillon): ... mais cela n'a pas de commune
mesure et cela n'en aura jamais.
Des voix: Bravo!
Le Président: Une dernière question additionnelle,
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Une dernière question additionnelle, M. le
Président, et en français, s'il vous plaît.
Le premier ministre ne se rend-il pas compte, en admettant qu'il ne
connaissait rien, même pas l'existence du document, il y a deux jours,
qu'il est difficile pour quiconque, député ou non, parmi la
population, d'accepter qu'il puisse maintenant nous dire avec certitude, avec
toutes les garanties que cela exige, que le document
n'a jamais servi à qui que ce soit? Ce n'est pas une accusation,
M. le Président, c'est une question que je pose. Et finalement, le
premier ministre est-il en mesure de nous donner, cet après-midi, de son
siège, l'assurance formelle que d'autres listes du même genre
n'existent pas ou n'ont pas existé dans d'autres ministères du
gouvernement?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je remercie
le député...
Une voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lévesque (Taillon): ... de Gatineau de m'avoir
souligné une chose qui, je crois, est valable. Si je dis que cela n'a
jamais servi à qui que ce soit, c'est évident que je suis
peut-être un peu téméraire. Je ne suis pas capable de
sonder les reins et les coeurs. Des individus peuvent faire des erreurs et on
ne peut pas les suivre tous à la trace. Je dis ceci, par exemple: non
seulement je n'ai jamais eu connaissance de cela, non seulement cela n'a jamais
été évoqué en aucune façon lors des
rencontres gouvernementales ou administratives que cela aurait pu affecter,
mais jamais, en aucune façon, des trucs semblables n'ont
été évoqués à l'occasion de décisions
que le gouvernement avait à prendre concernant les groupes ou les
personnes mentionnés là-dedans. C'est la première
chose.
La deuxième chose, pour ce qui est des garanties que voudrait
avoir l'Opposition, je lui fais remarquer qu'il y a une loi, la loi 65, qui a
été adoptée par le gouvernement actuel, la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels, qui va commencer à entrer en vigueur
très bientôt et qui prévoit des mesures très
sévères et concrètes pour la protection des renseignements
concernant la vie privée. Je pense que la meilleure des garanties se
trouve quand même dans cette loi que nous avons passée comme
gouvernement et qui aurait dû être passée il y a très
longtemps; cela aurait évité les abus qu'on a connus pendant des
années au Québec.
Le Président: Question principale, M. le
député de Gaspé.
M. LeMay: Merci, M. le Président.
M. Gratton: M. le Président, le premier ministre a
oublié de répondre à la question. Peut-on savoir quels
sont les moyens qu'il entend prendre pour s'assurer et nous rassurer, tous et
chacun, comme citoyens québécois, qu'il n'existe pas d'autres
listes semblables dans d'autres ministères ou dans d'autres organismes
gouvernementaux?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je peux donner au
député tout simplement l'assurance suivante. Qu'il y ait des gens
qui le fassent individuellement, comme c'est arrivé déjà,
ça, je n'y peux rien mais, chose certaine, en aucune façon des
instruments de ce genre, quels qu'ils soient, ne font partie de ce qu'on peut
appeler l'appareillage d'aucun des ministères du gouvernement. S'il en
traîne dans les coins, ceux qui pourraient en avoir sont avertis depuis
quelques jours que c'est mieux que ça disparaisse, et vite.
Le Président: Question principale, M. le
député de Gaspé.
Les effets du projet de loi fédéral
S-31
M. LeMay: Merci, M. le Président. Je suis très
heureux d'être le premier à poser une question importante, depuis
qu'on s'est quitté pour la période estivale. On voit que les
services publics et l'économie intéressent plus ou moins
l'Opposition, de par les questions qu'on vient d'entendre.
Ma question s'adresse au ministre des Transports. Je suis très
inquiet concernant tout l'Est du Québec. On sait qu'un projet de loi qui
s'appelle C-31 a été déposé...
Des voix: S-31.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. LeMay: S-31, oui, merci. La Presse l'appelle d'ailleurs ce
matin la loi Ouellette. On dit, dans ce même journal, que
Québecair sera en faillite avec cette loi.
M. le ministre, je voudrais savoir, d'abord, quel impact direct peut
avoir l'application de cette loi qui, d'ailleurs, est déposée de
façon rétroactive. Ensuite, qu'est-ce que le ministère des
Transports compte faire pour essayer de contrer cette loi qui pourrait
facilement faire disparaître tout transport aérien et tout service
à la population dans tout l'Est du Québec?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, d'abord, l'effet de cette loi
inique, injuste et absurde dépasse largement le cadre du transport
aérien, puisqu'elle couvre en fait l'ensemble du transport
interprovincial et également des activités en matière de
transport de pétrole et de gaz naturel.
En ce qui concerne le Québec, dans l'immédiat, les effets
de la loi S-31 sont
particulièrement dramatiques dans trois secteurs. Dans le domaine
du transport maritime, les caboteurs québécois, qui avaient
souffert pendant des années de l'incurie du gouvernement
fédéral en matière de politique maritime, étaient
sous-capitalisés et avaient besoin de l'aide du gouvernement du
Québec pour se réunir et mettre sur pied un transporteur maritime
important, Sonamar. Ils ont eu l'appui du gouvernement du Québec, qui
détient 25% des actions de cette compagnie de transport maritime.
L'effet de la loi S-31, c'est d'empêcher le gouvernement du Québec
de continuer à soutenir cette entreprise de transport maritime.
Un deuxième cas, c'est celui des entreprises Bussières,
l'entreprise de camionnage Rimouski-Bellechasse-Speedway, qui appartient
à 50% au gouvernement du Québec et à 50% au CN.
Imaginez-vous, M. le Président, que la loi Ouellette fait en sorte que
ce geste en soit un contre l'unité canadienne, alors qu'à ma
connaissance ça allait fort bien. C'est complètement aberrant de
penser qu'on puisse mettre en cause l'unité canadienne à partir
d'une compagnie de camionnage interprovincial appartenant au CN et au
gouvernement du Québec, alors que ça fonctionne bien. (14 h
50)
Mais là où les effets sont les plus immédiats et
les plus dramatiques, c'est en matière de transport aérien.
Pendant des années le gouvernement du Canada et Air Canada se sont
employés du mieux qu'ils ont pu à miner la rentabilité
financière de Québecair, pour tuer Québecair. Si vous
voulez des preuves, je pourrais en énumérer une vingtaine. La
meilleure preuve - le député de Marguerite-Bourgeoys ferait mieux
d'écouter avant de faire des farces plates -en 1980, Alfred Hamel,
après avoir acquis Québecair, décide de développer
un marché lucratif pour Québecair pour lui permettre de
procéder au renouvellement de sa flotte et en même temps, d'offrir
un bon service dans les régions du Québec. Il procèce
à l'achat de cinq Boeing 737 et il est le premier dans l'histoire de
l'aviation civile à développer le marché
Québec-Fort Lauderdale. En 1980, ce fut un succès
éclatant; taux d'occupation qui dépasse 90% sur ces avions.
Le Président: En concluant, M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Clair: En 1981, Air Canada décide d'embarquer avec des
avions gros porteurs sur le marché Québec-Fort Lauderdale, casse
les prix, casse les reins à Québecair, perd de l'argent et en
fait perdre à Québecair. En 1982...
Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît,
brièvement, en concluant!
M. Grégoire: Mais, c'est intéressant!
M. Clair: Je vais tâcher de terminer rapidement. En 1982,
Air Canada est encore là. Québecair a dû se retirer.
Savez-vous qui va remplacer Québecair sur le marché
Québec-Fort Lauderdale? Air Florida, une compagnie américaine.
Savez-vous avec quel type d'avions? Avec des Boeing 737, alors que le
député de Laporte, mon critique, qui est justement là, en
Floride, disait que c'était aberrant de penser pouvoir faire de
l'argent...
M. Bourbeau: M. le Président, une question de
privilège.
Le Président: M. le député de Laporte, une
question de privilège, brièvement, s'il vous plaît!
M. Bourbeau: M. le Président, le ministre des Transports
vient d'accuser le député de Laporte de ne pas être
présent en cette Chambre. Je vous dirai que, si je suis allé en
Floride, c'est justement pour voir comment se fait le transport en Floride. Je
peux lui dire que c'est beaucoup mieux organisé qu'au Québec,
surtout le transport aérien.
Le Président: M. le ministre, brièvement, s'il vous
plaît!
M. Clair: Effectivement, le député de Laporte
continue dans la même orientation. Il préfère qu'Air
Canada, en trois ans, ait réussi à casser les reins de
Québecair, à lui faire perdre de l'argent et qu'aujourd'hui ce
soit une compagnie américaine qui, avec des Boeing 737, vienne prendre
la place de Québecair à des tarifs augmentés,
ajustés à ceux d'Air Canada dans une proportion qui va
jusqu'à 67%.
Après avoir fait tout cela à Québecair, cela ne
surprendra personne que Québecair ait des difficultés
financières. Québecair aurait donc besoin d'une injection de
capitaux. Ce que le gouvernement du Canada vient de faire par sa loi S-31,
c'est interdire au gouvernement du Québec de venir en aide
financièrement à Québecair. C'est complètement
absurde, parce que, alors que le gouvernement du Québec pourrait
continuer demain à aller aider une entreprise aux États-Unis, en
Angleterre, n'importe où, cette loi inique nous empêche de venir
en aide à une entreprise dans notre propre pays!
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, le ministre des Transports
vient de nous dire
que la loi qui a été déposée au gouvernement
fédéral, la loi S-31, affecte les placements du gouvernement du
Québec non seulement dans Québecair, mais dans les entreprises
Bussières de camionnage et dans les entreprises maritimes. Le ministre
est-il au courant que le projet de loi qui est déposé n'affecte
pas les placements existants, n'a pas de rétroactivité et, en
conséquence...
Des voix: Ah!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Laporte.
M. Bourbeau: ... n'affecte aucunement les actifs actuels du
gouvernement du Québec dans le secteur maritime ou dans le camionnage?
En ce qui concerne Québecair, le ministre est-il au courant
qu'également il n'y a pas de rétroactivité et que le
ministre fédéral des Transports a déclaré,
semble-t-il, aujourd'hui même, à la Chambre des communes que le
bill S-31 n'affecte aucunement Québecair, ne vise pas Québecair
et qu'en conséquence...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, je termine ma question.
Puisqu'il n'y a aucune rétroactivité dans le bill et que le
gouvernement du Québec a englouti ses fonds il y a quinze mois dans
Québecair, le ministre est-il au courant qu'effectivement il ne peut pas
y avoir de rétraoctivité et, donc, que les placements du
gouvernement du Québec dans Québecair ne seront pas
annulés par la loi S-31?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, je suis complètement
estomaqué de voir l'attitude du député de Laporte. Je
comprends qu'il n'a probablement pas eu le temps de prendre connaissance de la
loi parce qu'une position comme celle qu'il vient de tenir est absolument
incohérente.
M. le Président, il dit que cela n'affecte pas les
investissements actuels dans Sonamar, par exemple. La loi, effectivement,
n'empêche pas le gouvernement du Québec de maintenir l'argent dans
Sonamar. Cependant, savez-vous ce que c'est Sonamar, M. le Président?
Actuellement, c'est un bateau, la Saunière. Ce que cela empêche,
ce que cela fait, c'est que cela condamne Sonamar à être pour le
reste de l'éternité, si cela ne change pas, une entreprise avec
un seul bateau, parce qu'on empêche le gouvernement du Québec
d'aller plus loin. Il me semble que cela se comprend.
Le député, je le comprends, veut soutenir la loi. Il dit
également: Dans le cas de Québecair, les gestes qui ont
été posés par le gouvernement, le ministre
fédéral des Transports a dit qu'il respectait la loi et il y a
toujours possibilité de demander une permission au gouvernement
fédéral.
Là-dessus, sans qualifier M. Pépin, ce qu'il a eu la
"gentillesse" de faire à mon endroit, je dirai simplement qu'il a menti
à la Chambre des communes en ce qui concerne l'autorisation de la
Commission canadienne des transports puisque l'investissement de 1981 du
gouvernement du Québec dans Québecair n'a pas encore
été effectivement accepté par la Commission canadienne des
transports. J'ai vérifié cela ce matin, cela n'a pas encore
été fait. Quant à l'avenir, M. le Président, le
député dit: Vous pourriez demander la permission. Or, depuis
1977, la Loi sur l'aéronautique interdisait un bon nombre de gestes que
pouvaient poser les gouvernements dans des entreprises interprovinciales de
transport aérien. Ce que le gouvernement fédéral fait, il
apporte une loi encore plus restrictive. Comment voulez-vous, M. le
Président, qu'on puisse croire avoir une seule chance que le
gouvernement fédéral nous accorde cette permission? On est dans
l'absurdité la plus totale. Il y avait déjà une loi
restrictive. On adopte une loi encore plus restrictive et on dit: Venez me
demander la permission. On est dans l'absurdité la plus totale et, si la
loi n'est pas restrictive, M. Pépin est encore dans l'absurdité
parce que pourquoi voter une deuxième loi qui dit la même chose
que la précédente? Le législateur n'est pas censé
parler pour ne rien dire au Québec. J'espère que c'est encore la
même chose à Ottawa.
Le Président: Fin de la période des questions.
M. le leader du gouvernement.
Motion d'urgence pour la suspension de certaines
règles
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: M. le Président, conformément à
l'article 84 de notre règlement, je voudrais présenter une motion
d'urgence. Je crois que, pour la bonne compréhension des gens qui nous
écoutent, il serait important de faire lecture de cet article 84. "1.
L'application d'une règle de procédure prévue aux
paragraphes 2, 3 et 4 de l'article 3 du règlement peut être
suspendue à la suite d'une motion annoncée du leader
parlementaire du gouvernement ou d'un ministre indiquant l'objet pour lequel
elle est suspendue. "2. Quand la motion de suspension de l'application d'une
règle a lieu pour raison
d'urgence, elle n'a pas à être annoncée et elle doit
contenir uniquement un exposé des motifs qui prouvent l'urgence et
justifient la suspension de l'application des règles. Lorsque cette
motion est faite en vue de l'adoption d'un projet de loi - ce qui est le cas
ici - il doit être distribué au moment où la motion est
présentée. Le débat sur cette motion est limité
à deux heures. "3. Cette motion ne peut être ni amendée ni
divisée".
M. le Président, me prévalant donc de cet article 84 de
notre règlement, je voudrais expliquer les motifs qui, du point de vue
gouvernemental, prouvent l'urgence de suspendre l'application d'un certain
nombre de règles de procédure prévues à notre
règlement et d'adopter le projet de loi no 84, Loi assurant la reprise
du service de transport en commun sur le territoire de la Communauté
urbaine de Québec et inscrit au nom du ministre
délégué au Travail. (15 heures)
II faut savoir, M. le Président, que le dossier dont nous parlons
et qui est relatif à une grève qui sévit en ce moment dans
la région de Québec, dans le secteur du transport en commun,
mérite, pour être bien compris, que nous en fassions un bref
historique.
Il faut savoir que la convention collective qui lie la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Québec au syndicat CSN
représentant les chauffeurs d'autobus de la Commission de transport de
la Communauté urbaine de Québec, est échue depuis le 25
décembre 1981. Donc, dans quelques semaines à peine, cela fera un
an et cela fait déjà tout près d'un an que cette
convention collective est échue.
Entre le 24 octobre 1981 et le 11 juin 1982, il y a eu, entre la partie
patronale, c'est-à-dire les dirigeants de la Commission de transport de
la Communauté urbaine de Québec, et la partie syndicale,
c'est-à-dire les représentants syndicaux des chauffeurs d'autobus
de la Communauté urbaine de Québec, 22 rencontres qu'on pourrait
qualifier de rencontres directes de négociations entre ces deux parties
qui étaient directement impliquées dans la renégociation
d'une nouvelle convention collective.
Par la suite, après que ces 22 rencontres directes de
négociations ont eu lieu, il y a eu huit séances de conciliation
auxquelles a donc participé un conciliateur du ministère du
Travail qui a tenté, dans le cadre des négociations qui avaient
cours entre la partie syndicale et la partie patronale, de rapprocher les
parties et de les amener à négocier un règlement qui
serait satisfaisant, juste et équitable.
Il faut savoir aussi que ce dossier a connu toutes sortes de
péripéties. D'abord, la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec a signé, avec deux autres
syndicats, une convention collective, pour une période de trois ans, sur
la base d'une offre qui était de 9% pour la première
année, 8% pour la deuxième année et 6,5% pour la
troisième année, avec, pour chacune de ces trois années,
une formule d'indexation qui y était rattachée.
Par ailleurs, après que deux syndicats eurent effectivement
accepté cette proposition qui était soumise par la partie
patronale, c'est-à-dire par les dirigeants de la Commission de transport
de la Communauté urbaine de Québec, il y a eu une offre du
même type qui a été faite au syndicat représentant
les chauffeurs d'autobus. C'est-à-dire qu'au mois de juillet dernier, il
y avait sur la table une offre de 9% pour l'année 1982, 8% pour
l'année 1983 et 6,5% pour l'année 1984, avec, pour chacune des
trois années, une formule d'indexation qui y était jointe.
Au mois de juillet dernier, les représentants du syndicat des
chauffeurs d'autobus de la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec ont décidé de ne pas accepter cette
offre de 9%, 8% et 6,5% avec formule d'indexation forfaitaire. Bien sûr
que le syndicat pouvait avoir un certain nombre de raisons de ne pas accepter
cette offre. Je crois que c'était sa responsabilité d'assumer
devant ses membres et devant l'ensemble de la population la décision
qu'il prenait de ne pas accepter une offre qui avait déjà
été acceptée par deux autres syndicats. Toujours est-il
qu'au delà de cette offre salariale, les représentants du
syndicat ont jugé qu'il y avait un certain nombre d'autres questions,
comme la question des maladies occupationnelles, qui méritaient aussi
d'être discutées, en plus de tout le dossier des salaires. Donc,
dans le contexte où les offres étaient présentées
au mois de juillet, ils n'étaient pas en mesure d'accepter, à ce
moment-là, un règlement négocié sur la base de ce
qui était sur la table, autant du côté salarial que du
côté normatif. C'était l'offre du mois de juillet.
Il y a, par ailleurs, une chose assez curieuse et je me
réfère plus particulièrement aux dirigeants de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec. Je
déposerai tout à l'heure, M. le Président, pour que
l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale en prennent
connaissance, une note qui a été préparée, hier, le
4 novembre, par M. Lucien Bouchard, le négociateur en chef du
gouvernement dans le cadre des négociations que nous menons avec
l'ensemble des employés des secteurs public et parapublic. Dans cette
note que je déposerai tout à l'heure, pour que nos
collègues en prennent connaissance, il est dit, à un certain
paragraphe: "... des considérations qui précèdent et de
l'examen des offres
antérieures déposées par la CTCUQ, notamment celles
du 12 juillet - voici les mots importants - qualifiées de globales et
finales..." En d'autres mots, ce que M. Bouchard dit - c'est le rapport que
nous avions du conciliateur à l'époque - c'est que l'offre qui
avait été soumise par la partie patronale au mois de juillet
dernier était considérée par la partie patronale,
c'est-à-dire les dirigeants de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, comme une offre globale et
finale.
Or, quelques semaines après, au mois de septembre, une nouvelle
offre a été présentée par les mêmes
dirigeants de la Commission de transport de la Communauté urbaine de
Québec, mais, cette fois, alors qu'ils avaient parlé d'une offre
globale et finale, c'est une offre à la baisse, une offre de 9% pour
1982, 6% pour 1983 et 5% pour 1984 sans aucune clause d'indexation même
forfaitaire. Évidemment, dans ce contexte, je n'ai pas besoin de vous
dire, M. le Président, qu'il y a eu une réaction très vive
de la partie syndicale, à qui on avait présenté une offre
de 9%, 8% et 6,5% au mois de juillet et qui, quelques semaines après,
recevait une autre offre nettement inférieure, soit 9%, 6% et 5% sans
aucune forme d'indexation. La réaction a été vive et on
peut dire que, d'une certaine façon, il y a eu braquage, blocage au
niveau de la négociation puisqu'il y avait, d'un côté, une
partie patronale avec une réduction de ses offres et, de l'autre
côté, un syndicat qui demandait nettement plus que ce qui avait
déjà été déposé à la table au
mois de juillet, c'est-à-dire quelques semaines auparavant.
À cela, il faut ajouter que la situation ne s'est pas
améliorée au mois d'octobre, au moment où le conciliateur
que le gouvernement avait affecté au dossier tentant de rapprocher les
parties, se rendait compte, à toutes fins utiles, que, comme
conciliateur mandaté par le ministre délégué au
Travail, il n'arrivait pas à rapprocher les deux parties. Il n'arrivait
pas à faire en sorte que des compromis suffisamment substantiels soient
apportés de part et d'autre pour que, finalement, nous aboutissions
à un règlement négocié. (15 h 10)
Voilà donc un peu, M. le Président, le contexte au niveau
de ce qui s'est développé du côté patronal, de ce
qui s'est développé du côté syndical, jusqu'à
ce que le 23 octobre dernier, le syndicat, les chauffeurs d'autobus
décident d'entrer en grève. Il faut vous dire, M. le
Président, qu'avant même que cette grève ne soit
déclenchée, avant le 23 octobre, les députés de la
région de Québec, en tout cas, je peux parler des
députés ministériels de la région de Québec,
les députés du caucus du Parti québécois de la
région de Québec, ont été très vites
sensibilisés par les citoyens et citoyennes de la région de
Québec à la nécessité de ne pas faire durer cette
grève si jamais elle devait être déclenchée.
Même, les gens nous disaient de prendre tous les moyens pour que la
grève ne puisse même pas être déclenchée. Dans
ce contexte, avec les pressions insistantes de bon nombre de citoyens et de
citoyennes qui appréhendaient une grève du type de celle que nous
avions vécue dans la région de Québec, en 1979, et qui
avait duré plus de huit mois, pas besoin de vous dire qu'effectivement,
les citoyens et citoyennes se retournaient vers les députés de la
région de Québec pour leur dire: Tentez tous les efforts pour que
non seulement cette grève ne dure pas longtemps si jamais elle devait
être déclenchée, mais si possible pour qu'elle ne soit
même pas déclenchée.
Or, la grève a été déclenchée le 23
octobre dernier. Je dois vous dire, M. le Président, que depuis le
premier jour de cette grève, c'est-à-dire depuis le samedi 23
octobre, dans nos bureaux de comté, je pourrais parler du
député de Limoilou, je pourrais parler du député de
Chauveau, je pourrais parler du député de Taschereau, je pourrais
parler de Mme la députée de La Peltrie, je pourrais parler,
probablement, enfin ils le feront mieux que moi, du député de
Louis-Hébert, du député, probablement aussi, de
Jean-Talon, du député de Charlesbourg et, évidemment, dans
ma propre circonscription électorale, je dois vous dire que les appels
des citoyens et citoyennes se sont faits très nombreux.
J'évoquerais un chiffre, M. le Président, comme une moyenne,
depuis à peu près deux semaines, du nombre d'appels qui sont
parvenus à nos bureaux de comté, et je pourrais facilement
avancer un chiffre qui irait autour d'environ 70 à 75 appels par jour de
citoyens et citoyennes qui, très souvent, non seulement nous demandaient
d'intervenir le plus rapidement possible pour faire cesser ce conflit, mais qui
au-delà de ces demandes qui étaient adressées aux
députés de la région de Québec, indiquaient leurs
sentiments face à cette grève.
Je n'ai pas besoin de vous dire que dans 90% ou 95% des cas, la
façon que les gens utilisaient pour exprimer leur mécontentement
avait finalement comme résultat de faire porter sur les chauffeurs
d'autobus et sur le syndicat qui représente les chauffeurs d'autobus de
la commission de transport, tout l'odieux de cette grève qui avait
été déclenchée le 23 octobre. Effectivement, on
pourrait dire que presqu'à l'unanimité, les gens qui nous
parlaient de ce conflit, de cette grève, appuyaient constamment sur les
députés pour dire: si, à la limite, il faut mettre
à la porte les 640 chauffeurs d'autobus et les remplacer par 640
personnes qui sont en ce moment en chômage, faites-le. C'était
à peu près ça le
sens des messages qui nous étaient passés dans nos bureaux
de comté. La population dans son ensemble disait aux
représentants à l'Assemblée nationale: C'est la faute du
syndicat. Le syndicat demande trop. Il faut remplacer les chauffeurs d'autobus;
il y a tellement de monde en chômage, vous n'aurez pas de
difficultés à trouver des gens. Donc, dans ce contexte, prenez
des mesures draconiennes, sévères, et le plus rapidement
possible.
Voilà à peu près l'état d'esprit qui
régnait. Oh, bien sûr, il y a des gens qui pourront dire: On ne
voit pas, dans la région de Québec, au moment d'une grève
du transport, des choses comme celles qui se déroulent à
Montréal lorsqu'il y a une grève du transport en commun. À
Montréal, quand il y a une grève du transport en commun, c'est
vrai qu'on assiste à une paralysie totale dans toute l'île de
Montréal. C'est vrai qu'économiquement parlant, cela a des
impacts extrêmement importants et très négatifs. C'est vrai
que, le métro et l'autobus mis ensemble, en sachant que des dizaines de
milliers de personnes utilisent ce moyen de transport à Montréal,
cela crée une situation qui force la plupart du temps les gouvernements
à intervenir très rapidement. Il y a des gens qui nous disaient
et qui nous disent encore: Ici, à Québec, on n'assiste pas au
même genre de paralysie. On n'assiste pas au même genre de chaos
social ou économique.
Dans un contexte semblable, pourquoi invoquer l'urgence? Il y a des
raisons, M. le Président, qui sont aussi très importantes. Tout
en admettant que la situation puisse être, à Montréal, en
termes de proportions, plus grave qu'à Québec, il y a ici, dans
la région de Québec, 70 000 usagers du transport en commun, 70
000 personnes pour qui le transport en commun est un service essentiel, pour
qui le transport en commun est la seule façon de faire un certain nombre
de choses: de se rendre à leur travail, de se rendre au magasin, d'aller
visiter des membres de leur famille et de vaquer à certaines occupations
de loisirs ou autres. Pour 70 000 usagers réguliers dans la
région de Québec, le service de transport en commun, les autobus,
c'est essentiel. C'est essentiel d'autant plus que la crise économique
que nous traversons à l'heure actuelle rend pénible une telle
grève dans le secteur du transport en commun.
Il faut savoir que les gens qui utilisent le transport en commun, pour
un certain nombre, pourraient probablement utiliser une automobile. Ils
pourraient probablement prendre un taxi. Ils pourraient probablement pratiquer
l'auto-stop: mais ces gens, dans le contexte économique que nous
traversons, vivent en même temps que tout le monde des problèmes
économiques très graves qui les affectent directement. La
privation d'un service de transport en commun, pour des personnes
âgées, pour des jeunes, pour des travailleurs et des
travailleuses, c'est quelque chose de dramatique. On nous a rapporté que
certains avaient tenté d'organiser une manifestation à
Québec pour protester contre l'absence du service de transport en commun
et cette manifestation n'a finalement amené, tout près d'ici, sur
le boulevard Saint-Cyrille, près d'un hôtel, que deux
manifestants, deux personnes. À la blague, certains ont répondu:
C'est évident, avec l'absence d'autobus, les gens n'ont pas pu se
rendre. Mais il n'en demeure pas moins que ce sont des personnes ces 70 000
usagers du transport en commun - qui ne sont pas en mesure de s'organiser
convenablement pour faire une manifestation et indiquer aux dirigeants de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec, comme
aux représentants syndicaux des chauffeurs d'autobus, comme aux
élus de l'Assemblée nationale, leur volonté de voir le
service de transport en commun rétabli. (15 h 20)
C'est par la voie des journaux - parce qu'on a lu beaucoup de lettres
dans les journaux - c'est par la voie des appels téléphoniques
qui sont parvenus dans nos bureaux de comté, c'est par la voie des
lignes ouvertes aux stations de radio que les citoyens et citoyennes de la
région de Québec pouvaient finalement faire connaître leur
ressentiment face à cette grève et face à cette privation
qui, pour eux, particulièrement dans un contexte de crise
économique, est pénible, et je les comprends.
Dans tout cela il y a eu à un certain moment aussi des arguments
qui nous sont venus et qui vont nous être servis tout à l'heure
par l'Opposition, je le devine. Des arguments du type: Oui, mais comment se
fait-il qu'après à peine moins de deux semaines du
déclenchement d'une grève du transport en commun dans la
région de Québec, là, tout à coup, le gouvernement
ait besoin d'une loi spéciale pour forcer le retour au travail, et non
seulement forcer le retour au travail des chauffeurs d'autobus et redonner
à la population son service de transport en commun, mais en même
temps introduire dans ce projet de loi les conditions de travail, les
conditions salariales qui vont prévaloir pour l'année 1982 et
l'année 1983? Comment se fait-il que tout à coup, en 1982, le
gouvernement sente le besoin d'agir aussi rapidement, après moins de
deux semaines, alors qu'en 1979 la grève a duré plus de huit
mois? Comment cela se fait-il?
Une voix: C'est la communauté urbaine...
M. Bertrand: Comme je sais que l'Opposition va probablement nous
servir cet argument, évidemment que c'était la moindre
des choses de se préparer à y répondre
immédiatement.
Des voix: ...
M. Bertrand: En 1979, M. le Président, lorsque la
grève du transport en commun a été
déclenchée dans la région de Québec, il faut savoir
que nous venions tout juste d'adopter, ici-même à
l'Assemblée nationale du Québec - quelques semaines avant le
déclenchement de la grève - une loi, la loi 38, qui était
pilotée par celui qui est aujourd'hui ministre de l'Habitation, qui
était à l'époque ministre des Affaires municipales et qui,
à la demande des députés du Parti québécois
de la région de Québec, qui eux-mêmes se l'étaient
fait demander par les maires et conseillers municipaux des municipalités
de la région de Québec, de la Communauté urbaine de
Québec...
M. Rivest: Et par le député de
Louis-Hébert.
M. Bertrand: ... et probablement par le député de
Louis-Hébert, qui était d'accord avec un tel projet, et celui de
Jean-Talon aussi à l'époque, mais qui n'était pas encore
député... L'était-il?
M. Rivest: Non.
M. Bertrand: II l'est devenu pendant la grève,
justement.
M. Tardif: Le député de Louis-Hébert
était secrétaire de la Communauté urbaine de
Québec.
M. Bertrand: Mais à l'époque le
député de Louis-Hébert, on s'en rappellera, était
secrétaire de la Communauté urbaine de Québec.
À l'époque, les conseillers municipaux et les maires de la
Communauté urbaine de Québec nous disaient: On veut avoir la
juridiction sur la Commission de transport de la Communauté urbaine de
Québec. On ne veut plus que le gouvernement nomme le directeur
général. À l'époque, il y avait un directeur
général qui était nommé par le gouvernement et qui
assumait finalement la responsabilité de la gestion et de
l'administration de la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec. Les élus municipaux, qu'on avait rencontrés en
1977, nous avaient dit: On voudrait une nouvelle loi de la Communauté
urbaine de Québec à l'intérieur de laquelle il y aurait
des dispositions qui nous donneraient la responsabilité totale et
entière de la gestion et de l'administration de la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Québec.
Cela fut adopté quelques semaines avant le déclenchement
de la grève en 1979. Je crois que la loi a été
adoptée vers la toute fin de l'année 1978; je pense que l'ancien
secrétaire de la Communauté urbaine de Québec pourrait
peut-être même me souffler la date exacte où la loi a
été adoptée vers la fin de 1978.
Donc, l'attitude des députés de la région à
ce moment et l'attitude du gouvernement a été de dire aux maires
et aux conseillers municipaux: Vous avez demandé à gérer
et à administrer la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec, occupez-vous-en. S'il y a une grève du
transport en commun quelques semaines à peine après que vous avez
obtenu la responsabilité de gérer et d'administrer le transport
en commun dans la région de Québec, prenez vos
responsabilités. Administrez la Commission de transport, gérez la
Commission de transport et réglez le conflit vous opposant aux
chauffeurs d'autobus de la Commission de transport, réglez votre
conflit. Vous avez demandé la responsabilité, vous allez la
prendre entièrement, vous allez régler le conflit, vous allez
vous asseoir à la table et vous allez négocier. On disait la
même chose à la partie syndicale. Asseyez-vous à la table
et négociez.
Il faut se rappeler qu'à l'époque, effectivement, il n'y
avait même pas de négociation. Quand la grève avait
été déclenchée, après les premières
semaines de grève, il n'y avait même pas de négociation en
cours. Les efforts des premiers mois ont tous été mis à
entreprendre une négociation.
Après un certain temps, le ministère du Travail est
intervenu dans le dossier. Tous les mécanismes prévus au Code du
travail ont été utilisés pour tenter de rapprocher les
parties, pour en arriver à un règlement négocié.
Les mois passaient et, finalement, on se rappelle qu'effectivement la
grève a duré plus de huit mois. C'était la situation en
1979. Tantôt, à bon droit, l'Opposition fera probablement
état du fait qu'en 1979 le gouvernement n'avait pas pris la
décision d'intervenir par voie législative pour résoudre
ce conflit, surtout pas après deux semaines de grève dans le
transport en commun.
Donc, en 1979, pour nous, il était très clair que ceux qui
avaient demandé d'assumer la responsabilité de l'administration
de la commission de transport devaient aussi assumer la responsabilité
du conflit qui prévalait et qui les opposait aux chauffeurs d'autobus.
Nous avons décidé solidairement de laisser les deux parties
régler ce conflit. Ce sont finalement les deux parties qui en sont
venues, après plusieurs mois de grève, à régler ce
conflit.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le leader
de l'Opposition.
M. Lalonde: Je déteste interrompre le leader du
gouvernement mais, comme j'aimerais qu'il reste quelque chose à dire au
ministre du Travail en deuxième lecture, pouvez-vous inviter le leader
du gouvernement à parler de la question d'urgence et non pas à
aller trop loin sur le fond.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement, vous avez la parole.
M. Bertrand: Je sais, M. le Président, et je pense que
c'est à bon droit que le leader de l'Opposition me ramène
à l'idée d'urgence comme telle parce que, effectivement, c'est
sur l'article 84 qu'il faut insister. J'aurai tout à l'heure, face au
leader de l'Opposition, lorsqu'il prendra la parole, la même
compréhension s'il devait dépasser un peu la lettre de l'article
84; j'aurai une attitude d'ouverture et de compréhension. Je voudrais
qu'il comprenne qu'effectivement il pourrait arriver que certains paragraphes
de mon exposé ne soient pas tout à fait en conformité avec
l'article 84. C'est tout à fait normal qu'il puisse vous demander de me
ramener à l'ordre. (15 h 30)
M. le Président, en ajoutant aux propos que j'ai tenus
jusqu'à maintenant, en 1979, il y avait ce contexte de l'adoption d'une
loi qui avait donné la responsabilité du transport en commun aux
dirigeants de la Communauté urbaine de Québec. Il n'y avait pas
non plus la crise économique que nous traversons en ce moment, non pas,
loin de là, que les gens qui ont été privés de
transport en commun en 1979 n'étaient pas des gens qui pouvaient
revendiquer d'avoir ce transport en commun et qui pouvaient juger comme
essentiel d'avoir ce transport en commun, mais il est évident que la
situation de 1982 sur le plan économique n'est pas comparable à
celle qui prévalait en 1979. Donc, nous avons comme caucus
régional, dès les premières heures du déclenchement
de la grève, pris un certain nombre d'attitudes. Nous avons
indiqué à l'ensemble de la population que, quant à nous,
comme députés représentant la population dans la
région de Québec, nous ne saurions tolérer une
grève du transport en commun qui ressemblerait de quelque façon
que ce soit à celle que nous avions connue en 1979; que nous ne saurions
tolérer qu'une grève du transport en commun dure plus que
quelques heures ou quelques jours. Cela avait été dit et nous
avons, dans les premiers jours qui ont suivi le déclenchement de la
grève, tenu quelques réunions parce que nous voulions que le
Conseil des ministres, à la première séance qui suivrait
le déclenchement de la grève, soit saisi du dossier.
Effectivement, après, entre autres, la déclaration du
député de Charlesbourg qui disait: Deux ou trois jours, tout au
plus, après la réunion du caucus des députés de la
région de Québec...
Le Président: Un instant, M. le leader du gouvernement. Le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je ne veux pas interrompre
les explications que donne le leader du gouvernement actuellement, mais, en
vertu du règlement, est-ce qu'à ce moment-ci il me permettrait
une courte question qui pourrait peut-être...
M. Bertrand: À la fin.
Le Président: M. le député de Sainte-Marie,
le leader fait mention qu'il faudrait la poser à la fin cette
question.
Une voix: Peureux!
M. Bertrand: Alors, dans les heures qui ont suivi, dans les jours
qui ont suivi, M. le Président, le caucus a donc fait un certain nombre
de pressions pour que le Conseil des ministres, à la séance qui
suivait le déclenchement de cette grève, c'est-à-dire,
finalement, mercredi de la semaine dernière, puisse être saisi du
dossier. Effectivement, mercredi de la semaine dernière, quelques jours
après le déclenchement de la grève, en fait, quatre jours
après le déclenchement de la grève, le Conseil des
ministres a étudié la question. Et, sur la base des informations
que le caucus des députés de la région lui avait fait
parvenir, sur la base des informations que le ministre du Travail avait
communiquées au Conseil des ministres, sur la base des informations que
le conciliateur, M. Thellend, avait transmises au ministre du Travail, le
Conseil des ministres a pris la décision de mandater deux personnes,
deux émissaires spéciaux, deux médiateurs spéciaux
et pas n'importe qui, le négociateur en chef du gouvernement, M. Lucien
Bouchard, et le directeur de cabinet du premier ministre, M. Jean-Roch Boivin,
deux personnes qui avaient effectué un certain nombre de
démarches dans le cas de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal, démarches qui avaient
finalement donné des résultats heureux. Le mandat du Conseil des
ministres était très clair: Vous avez jusqu'à mardi de la
semaine prochaine pour remettre un rapport et nous faire le bilan des
discussions que vous aurez eues avec la partie patronale et la partie
syndicale.
Messieurs Boivin et Bouchard ont rencontré à cinq reprises
la partie patronale et à huit reprises la partie syndicale. Donc, il y a
eu en moins d'une semaine, treize rencontres entre ces médiateurs
spéciaux et l'une ou l'autre des deux parties, c'est-à-dire la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec et le
syndicat représentant les chauffeurs
d'autobus.
M. le Président, on est passé à un cheveu -
même pas - d'avoir une entente, un règlement accepté par la
partie syndicale et par la partie patronale. C'était il y a quelques
jours à peine, mardi soir, dans les dernières heures du mandat
qui avait été confié à MM. Boivin et Bouchard; il y
a eu une possibilité réelle et sérieuse d'entente.
Effectivement, sur la base d'une proposition syndicale d'avoir une augmentation
de 11% pour 1982 et de 6% pour 1983, sans aucune forme d'indexation, MM.
Jean-Roch Boivin et Lucien Bouchard sont allés rencontrer les
autorités de la commission de transport et de la Communauté
urbaine de Québec vers 9 heures mardi soir. Pas n'importe qui, le
président de la commission de transport, M. Léonce Bouchard, et
le président de la Communauté urbaine de Québec, M. Marcel
Pageau. À ce moment-là, ils ont présenté la
proposition syndicale de 11% et 6% sans indexation.
Dans le rapport que j'ai remis à l'Opposition, qui a
été rédigé par MM. Boivin et Bouchard pour le
Conseil des ministres, il est dit à la page 8: "Nous avons même eu
l'espoir de voir les parties conclure ce règlement lorsque le
président de la Communauté urbaine de Québec, M. Marcel
Pageau, et le président de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, M. Léonce Bouchard, nous ont
déclaré hier soir, à l'issue de notre dernière
rencontre, qu'ils recommanderaient à leurs 29 collègues du
conseil de la Communauté urbaine de Québec l'acceptation de la
dernière proposition syndicale."
MM. Jean-Roch Boivin et Lucien Bouchard avaient, à toutes fins
utiles, presque en main une forme de certitude que la proposition syndicale de
11% et 6% allait être acceptée, était acceptée par
la commission de transport et la Communauté urbaine de Québec
puisque les deux présidents de l'un et l'autre organisme leur avaient
déclaré qu'ils recommanderaient à leurs 29
collègues du conseil de la Communauté urbaine de Québec
l'acceptation de la dernière proposition syndicale que M. Donatien
Corriveau lui-même, président de la CSN, leur avait transmise.
On connaît la suite des événements, M. le
Président. Le lendemain matin, mercredi matin, le jour même
où le Conseil des ministres se réunissait pour prendre
connaissance du rapport de MM. Boivin et Bouchard, vers 7 h 30, le conseil de
la Communauté urbaine de Québec se réunissait et, à
l'unanimité, finalement, décidait de rejeter la proposition
syndicale de 11% et 6% qui, la veille, pourtant, semblait faire l'objet d'une
entente puisque le président de la commission de transport et le
président de la communauté urbaine avaient dit qu'ils
recommanderaient à leurs collègues l'acceptation de la
dernière proposition syndicale, c'est-à-dire 11% pour 1982 et 6%
pour 1983. (15 h 40)
Quand MM. Boivin et Bouchard ont appris que le conseil de la
Communauté urbaine de Québec rejetait la proposition syndicale de
11% et 6%, ils ont rédigé le rapport, tel que demandé par
le Conseil des ministres, et ce rapport a été soumis au Conseil
des ministres à sa séance régulière de mercredi
dernier. Dans ce rapport, à la page 8, ils en venaient - c'est le
paragraphe 3.9 du rapport - à la conclusion suivante: "Nous concluons
qu'il n'y a pas lieu d'espérer que ce conflit puisse se résoudre
sans l'intervention de l'Assemblée nationale, étant donné
l'incapacité dans laquelle se trouvent les parties d'y mettre fin."
Nous aurons l'occasion, M. le Président, tout à l'heure,
lors de l'étude en deuxième lecture du projet de loi no 84, de
débattre, sur le fond, de tout cela, entre autres, de ce qui s'est
passé dans les dernières heures et de certaines choses qui ont
été dites hier, en conférence de presse, par le
président de la Communauté urbaine de Québec et par le
président de la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec, relativement à des engagements qu'ils n'auraient pas
pris face à M. Jean-Roch Boivin et face à M. Lucien Bouchard.
Nous reviendrons là-dessus lors de l'étude en deuxième
lecture du projet de loi.
À ce moment-ci, ce qu'il est important de constater, M. le
Président, c'est qu'après presque un an d'une convention
collective échue, après 22 rencontres directes de
négociations, après huit séances de conciliation,
après une tentative de dernière heure du conciliateur avant que
la grève ne soit déclenchée, après la
décision du Conseil des ministres de mandater deux médiateurs
spéciaux pour tenter de rapprocher les parties, de les amener à
s'entendre et à conclure un règlement acceptable pour l'une et
l'autre de ces parties, après avoir espéré, dans les
dernières heures, qu'il y aurait effectivement un règlement
négocié, c'est-à-dire une entente sur la base d'une
proposition syndicale acceptée, à toutes fins utiles, par le
président de la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec et par le président de la Communauté urbaine de
Québec, eh bien, mercredi matin, on a réalisé qu'il n'y
avait aucune possibilité d'entente. Le conseil de la Communauté
urbaine de Québec disait formellement: C'est trois ans à 11%, 6%
et 5% ou c'est deux ans à 9% et 6%, mais nous n'acceptons pas la
proposition syndicale de 11% et 6% pour deux ans sans aucune forme
d'indexation.
C'est pourquoi, retenant la recommandation qui nous a été
faite par des gens qui ont tenté un effort ultime;
considérant les dommages que cause cette grève sur le plan
économique dans la région de Québec; considérant
les dommages graves qu'elle occasionne pour 70 000 usagers réguliers du
transport en commun, particulièrement des personnes âgées,
des jeunes, des travailleurs et des travailleuses dont c'est le moyen
essentiel, le service essentiel qui est à leur disposition pour faire un
certain nombre de choses; considérant la crise économique que
nous traversons, qui rend encore plus dramatique l'absence de ce service de
transport en commun; considérant qu'on ne veut pas revivre, dans la
région de Québec, ce qu'on a connu en 1979 et que, d'aucune
façon, nous n'aurions accepté, nous les députés de
la région, de laisser durer un tel conflit plusieurs semaines ou
plusieurs mois; considérant l'incapacité chronique des dirigeants
de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec
de prendre, dans le vrai sens du terme, leurs responsabilités dans ce
dossier, et on le verra tantôt sur le fond, lors de l'étude en
deuxième lecture, considérant tout cela et considérant que
ce n'est pas quelques jours de plus ou quelques semaines de plus qui pourraient
nous permettre d'en arriver à un règlement négocié,
maintenant que nous savons très bien où se situe la partie
patronale dans ce dossier et de quelle façon, finalement, par toutes
sortes de moyens que nous verrons tout à l'heure à qualifier,
elle a presque fait en sorte que le dossier se retrouve dans les mains du
gouvernement, eh bien, le gouvernement, effectivement, va prendre ses
responsabilités, M. le Président. Le gouvernement, se
prévalant de l'article 84 du règlement, convoquant aujourd'hui,
exceptionnellement, les députés à l'Assemblée
nationale, va leur demander d'adopter le projet de loi no 84, Loi assurant la
reprise du service de transport en commun sur le territoire de la
Communauté urbaine de Québec.
Donc, en raison de tout ce contexte, de cette situation dont je vous ai
parlé, M. le Président, qui quant à moi, exprime l'urgence
qu'il y a d'agir pour redonner à la population son service de transport
en commun, je fais motion pour que, d'abord, soit adopté le projet de
loi no 84, Loi assurant la reprise du service de transport en commun sur le
territoire de la Communauté urbaine de Québec; que,
conformément à l'article 84, paragraphe 2, du règlement,
on suspende l'application des articles 30, 31, 33, 77, 87, 88, 115, 116, 134,
157; que, nonobstant les dispositions de l'article 47, paragraphe 1, du
règlement, toutes les séances de l'Assemblée soient
publiques; que, nonobstant les dispositions de l'article 121 du
règlement, il ne peut y avoir d'amendement en deuxième lecture;
que, de plus, la commission plénière fasse rapport au plus tard
deux heures après le début de ses travaux; que, dix minutes avant
l'expiration de ce délai, le président de la commission mette
immédiatement aux voix, sans débat, les articles du projet de loi
et les amendements dont la commission n'a pas disposé; que le
débat portant sur la troisième lecture soit limité
à 20 minutes par parti reconnu; que l'application des règles
ci-dessus énumérées soit suspendue et que
l'Assemblée puisse siéger dès maintenant jusqu'à
l'adoption du projet de loi no 84, avec une suspension d'une durée d'une
heure, laquelle prendra effet au moment de l'adoption de la présente
motion.
Le Président: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, tantôt je suis
intervenu pour demander au leader du gouvernement s'il me permettait une
question pendant son intervention. Il m'avait dit qu'il m'autoriserait à
poser ma question après l'intervention. Je voudrais invoquer le
règlement, ou en tout cas, demander une directive. Je vais d'abord
commencer par ça.
Le leader a mentionné un temps d'intervention de 20 minutes, en
troisième lecture, par parti reconnu. Il me semblait, M. le
Président, qu'il y avait aussi dans cette Chambre une pratique, une
coutume établie qui voulait que lorsqu'il y a des députés
indépendants, on leur réserve un temps de parole et que ce soit
établi dans les règles du jeu dès le départ. Je
n'ai pas nécessairement l'intention d'utiliser ce temps de parole en
troisième lecture, mais je dis tout de suite au leader du gouvernement
que si c'était le cas, j'aimerais bien que sa motion prévoie
cette possibilité que du temps me soit réservé en
troisième lecture.
Pour ce qui est de ma question au leader, il nous a
présenté une motion de suspension des règles de
procédure et comme il l'a expliqué lui-même, cela suppose
un débat de deux heures. Il a pris 45 minutes pour dire ce qui, dans le
fond, se serait expliqué en cinq minutes. Est-ce que le leader du
gouvernement envisagerait la possibilité, puisqu'on connaît
l'issue du débat de deux heures... Le gouvernement, par sa
majorité parlementaire, va fatalement en arriver à adopter la
suspension des règles de procédure. Donc, on aura fait, pendant
deux heures, un débat pour savoir s'il y a urgence ou non, pour
finalement faire la discussion dans le cadre qui nous est proposé par le
leader du gouvernement. (15 h 50)
Le leader du gouvernement serait-il prêt à proposer qu'on
utilise plutôt le temps qui est réservé au débat
d'urgence - dont on connaît l'issue - à recevoir les travailleurs
concernés en commission parlementaire? Il me semble que ce serait du
temps beaucoup mieux utilisé, qui permettrait à l'ensemble
des membres de l'Assemblée nationale de percevoir de quelle
façon les travailleurs perçoivent la loi qui est devant nous, et
cela n'allongerait pas les débats puisque ce serait à
l'intérieur des deux heures prévues à la question de
procédure. On pourrait finalement déboucher sur le vote que
propose le leader du gouvernement sans allonger ultimement les débats,
mais au moins, on aurait permis aux travailleurs concernés, plutôt
que de faire de la procédure entre nous, de venir expliquer à
ceux qui vont voter la loi tantôt comment ils perçoivent ce projet
de loi.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: ... je ne veux pas me lever pour empêcher le
leader du gouvernement de répondre immédiatement au
député de Sainte-Marie, s'il veut le faire, mais j'aimerais avoir
l'occasion d'appuyer, s'il ne veut pas donner une réponse maintenant, la
demande que le député de Sainte-Marie a faite. J'avais
l'intention de la faire dans mon intervention. S'il m'indique qu'il veut
répondre maintenant, je vais lui laisser la parole. Sinon, s'il veut
attendre après mon intervention...
M. Bertrand: Après.
M. Lalonde: Après mon intervention? Bon! Voilà!
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Bertrand: Une seule chose.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Le député de Sainte-Marie m'a
demandé si, dans le cadre du débat en deuxième
lecture-Une voix: En troisième lecture.
M. Bertrand: En troisième lecture? J'avais cru entendre le
député de Sainte-Marie me dire qu'il n'avait pas l'intention
d'intervenir en troisième lecture.
M. Bisaillon: Non. J'ai expliqué, M. le Président,
qu'à ma connaissance, en deuxième lecture, le débat
était ouvert à l'ensemble des députés. Je n'ai
aucune autorisation à demander. Le règlement est là pour
me permettre une intervention. Ce que j'ai souligné au leader du
gouvernement, c'est qu'en troisième lecture, sa motion limite le
débat à 20 minutes par parti reconnu. Je lui dis dès
maintenant que je n'ai pas nécessairement l'intention d'intervenir en
troisième lecture, mais si tel était le cas, ne pourrait-on pas
déjà prévoir un temps pour le député de
Sainte-Marie?
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: ... je suis tout à fait disposé,
pendant la période de suspension qui est prévue dans ma motion
entre l'adoption de la motion et l'étude du projet de loi, à
envisager avec mon collègue, le leader de l'Opposition, de même
qu'avec le député de Sainte-Marie, une formule qui permettrait au
député de Sainte-Marie, s'il voulait s'en prévaloir,
d'avoir un droit de parole pour la troisième lecture.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, comme le disait le
député de Sainte-Marie qui m'a enlevé les mots de la
bouche, j'ai rarement vu un discours aussi long pour dire si peu. Est-ce si
difficile que cela d'expliquer que c'est urgent? Ou bien peut-être que
vous n'y croyez pas. Nous, nous prenons cela au sérieux; nous prenons
cela au sérieux une loi spéciale.
M. le Président, le leader du gouvernement a fait un lapsus au
tout début de cette séance, quand il a dit que la coutume voulait
que dans des cas semblables, il y ait un consentement pour qu'on puisse avoir
la période des questions avant de procéder à la motion en
vertu de l'article 84. En effet, M. le Président, on est rendu, avec ce
gouvernement et avec le leader actuel, à en avoir fait une coutume. On
est rendu avec une tradition de lois spéciales. Cela lui a
échappé. C'est vrai. C'est devenu une coutume, à cause de
vous. Savez-vous ce qu'on fête dans quelques jours, M. le
Président? Si les règles de la bienséance le permettaient,
vous pourriez vous lever et entonner la chanson de Gilles Vigneault, "Mon cher
René". C'est sa fête, le 12 novembre. Ce sera le troisième
anniversaire de la première loi spéciale péquiste. Vous
dites: Oui, mais trois ans, ce n'est pas très important. Je vais vous
donner le deuxième élément. La loi qui est proposée
par le leader du gouvernement est la septième.
Des voix: Oh!
M. Lalonde: C'est la septième loi spéciale
péquiste et si on inclut la loi matraque, la loi 70, cela fait huit. Le
leader
lui-même, qui a quand même une carrière relativement
jeune dans la fonction qu'il occupe, en est rendu à sa deuxième -
il le sait, parce qu'il m'a fait un signe - plus une motion de guillotine. Vous
vous souvenez, il prend des habitudes de passer sur le corps de tout le monde,
M. le Président.
On peut faire des blagues, M. le Président, mais il reste que
c'est un record. C'est le record du nombre de lois spéciales, en si peu
de temps, de toute l'histoire parlementaire du Québec. Jamais, avant, ce
gouvernement, en trois ans, un gouvernement n'avait demandé à
l'Assemblée nationale d'adopter un si grand nombre de lois
spéciales dans le domaine des relations du travail. Qu'est-ce que cela
veut dire, M. le Président? Cela signifie la faillite de la politique
des relations du travail de ce gouvernement. Et pourtant, souvenons-nous des
promesses que ce parti nous a faites: avec eux la paix sociale la plus grande
régnerait. Mais c'est faux, M. le Président, jamais le Parlement,
en temps de session, n'a été assiégé si souvent et
par un si grand nombre de citoyens mécontents de ce gouvernement. Encore
ce midi... C'est une session spéciale. Depuis le 23 juin ce parlement
est désert, nous sommes rendus au 5 novembre, depuis quatre mois et demi
ce parlement est fermé, notre Assemblée nationale est
fermée parce que le gouvernement n'a absolument rien à faire,
rien à nous offrir et déjà, à la première
occasion, il y avait des travailleurs, devant le parlement, qui manifestaient,
ce midi, contre ce gouvernement.
Souvenez-vous aussi, M. le Président, de leurs promesses de ne
pas recourir à des mesures d'exception. Si on retourne en arrière
et on retourne à l'Opposition péquiste, au Parti
québécois dans l'Opposition avant 1976; nous avons eu droit,
alors, à une attitude irresponsable de la part de députés,
une attitude démagogique, une attitude opportuniste à chaque fois
- et ce n'était pas aussi souvent que maintenant - qu'on devait, comme
gouvernement, demander à l'Assemblée nationale d'adopter une
mesure d'exception. Les péquistes de l'Opposition c'étaient
l'inimitable député de Sauvé, l'ancien
député de Maisonneuve, l'ancien député de
Saint-Jacques, l'ancien ou presque député de Saguenay, l'ancien
ministre de l'Environnement et futur ex-candidat défait à la
prochaine élection fédérale et l'immuable ministre de la
couverture, c'est-à-dire de la Justice. M. le Président,
qu'est-ce qu'ils nous ont donné? De la démagogie sur le dos des
travailleurs et des usagers des services essentiels.
C'est ce qui distingue de la façon la plus claire, la plus
évidente, le Parti libéral du Québec, qui a toujours agi
de façon responsable, du Parti québécois, qui a toujours
fait de la démagogie, qui a toujours fait preuve
d'irresponsabilité dans des situations semblables. Il est important de
le rappeler, parce que ça peut nous aider à comprendre comment il
se fait qu'on retrouve tant d'irresponsabilité chez ce gouvernement.
Irresponsabilité dans l'administration des finances publiques,
irresponsabilité, par exemple, chez le ministre de la Protection du
consommateur qui a vu un scandale de 100 000 000 $ de ristournes dans le
commerce du lait - que les consommateurs ont payées - et qui n'a rien
dit, irresponsabilité du ministre de l'Agriculture, qui connaissait ce
scandale et qui n'a rien dit. Et, M. le Président, surtout
irresponsabilité du premier ministre qui, entre deux pirouettes, trois
déclarations incohérentes et quatre grimaces, s'arrange toujours
pour faire semblant que c'est la faute des autres. Il est temps qu'on
dénonce cette irresponsabilité. Nous voyons comment l'attitude
irresponsable de ces députés de l'Opposition dans le passé
explique, d'une certaine façon, le genre de gouvernement que nous avons
actuellement. (16 heures)
J'en viens à l'urgence. Je pense qu'on doit le rappeler, parce
qu'on est rendu tellement habitués avec ce gouvernement, cette
septième loi spéciale en moins de trois ans, que le risque est
d'en prendre l'habitude, comme le leader du gouvernement l'a fait cet
après-midi. Or, il faut traiter de façon très
exceptionnelle une telle mesure. Il demande au Parlement de s'imposer des
règles de fonctionnement très rigides qu'on n'accepterait jamais
en temps normal, qui ne sont pas susceptibles de nous aider à
travailler. Comprenons-le bien, on nous demande d'étudier article par
article un projet de loi qui va affecter des centaines de travailleurs, toute
une population, 60 000 usagers du service de transport en commun, qui peut
affecter aussi la fiscalité de la Communauté urbaine de
Québec, le fonctionnement de la CTCUQ, donc un projet de loi qui n'est
pas mineur et un projet de loi qui aussi, dans une dimension importante,
intervient pour changer le processus normal des choses, un projet de loi qui
dit à des grévistes: Vous allez cesser de faire la grève,
vous allez retourner au travail, qui dit à la CTCUQ: Vous allez
reprendre le service à telle heure.
C'est un projet de loi extrêmement grave et qui dit en plus
à la Communauté urbaine de Québec: Vous allez payer tant,
donc vous allez peut-être être obligés de taxer davantage.
En même temps, on nous dit, à nous les députés: Vous
allez avoir seulement deux heures pour étudier cela article par article,
et en troisième lecture, seulement vingt minutes chacun, de sorte - il
est 16 heures, ce vendredi - qu'avant minuit, on peut s'attendre que tout ce
processus soit terminé ou peut-être même dans la nuit,
parce que les articles dont on vient de suspendre l'application vont
permettre au gouvernement de nous faire siéger ici en Chambre
jusqu'à ce que le projet de loi soit adopté, que ce soit durant
la nuit ou demain matin.
Il est bon que les gens comprennent que c'est une situation grave,
exceptionnelle et qui doit être traitée de façon grave
aussi. Il est donc important, essentiel, que le parrain, celui qui propose
cette mesure d'exception fasse la preuve de son urgence. Or, c'est
peut-être la partie la plus faible de la démonstration du leader
du gouvernement, parce que le leader du gouvernement a un mauvais
précédent, pas seulement lui, le député de Vanier,
mais son gouvernement. En 1979 - cela ne fait pas vingt ans, cela ne fait pas
dix ans, - il y a à peine trois ans, une grève du même
service de transport en commun a paralysé le service, a pris en otage
les 50 000 ou 60 000 usagers pendant dix jours, quatorze jours, comme ici? Non.
Un mois? Non. Huit mois et demi, presque neuf mois.
Le leader nous a expliqué - j'aimerais qu'il réponde
à cela dans sa réplique - qu'en 1979, il venait d'adopter une loi
qui donnait la responsabilité à l'organisme responsable de
prendre ses décisions. Fort bien. Avez-vous enlevé cette loi?
N'existe-t-elle pas encore? N'avons-nous pas encore le même cadre
législatif, le cadre légal qui dit que la responsabilité
de régler ces affaires, y compris la grève, appartient à
l'organisme lui-même et non pas au gouvernement? Le leader du
gouvernement pourrait-il répondre à cette question? Qu'est-ce qui
a changé? On a la même loi, le même service, le même
monde, à trois ans de différence; on endure, malgré les
nombreuses questions des députés de l'Opposition et je me
souviens du whip, du député de Portneuf qui a harcelé le
gouvernement. Qu'est-ce que vous faites? Un mois, deux mois, six mois,
c'était incroyable. Imaginez-vous cela, un service de transport en
commun qui est littéralement fermé pendant neuf mois et,
malgré nos questions, le gouvernement n'a absolument rien fait. Nous
avons la même situation et là, le gouvernement bouge. Qu'est-ce
qui a changé? Les sondages?
Une voix: Les lignes ouvertes.
M. Lalonde: Les lignes ouvertes, peut-être. Mais enfin, en
ce qui nous concerne, j'aimerais que le député, le ministre
s'explique là-dessus. En ce qui nous concerne, cela nous impressionne
peu et je vais vous dire pourquoi. C'est que le Parti libéral du
Québec a depuis longtemps établi sa position. Il l'a
établie ici, devant la population, dans les débats, et c'est
clair, c'est défini. Le Parti libéral, sa position, c'est qu'on
doit d'abord assurer le service aux usagers en ce qui concerne le service
essentiel. Donc, les tergiversations d'autrefois du gouvernement ne nous
inspirent pas et les arguments faiblards du ministre actuellement, on n'en a
pas besoin.
L'urgence dans cette grève, nos députés
libéraux de la région, le député de
Louis-Hébert, le député de Jean-Talon, l'ont reconnue. Ils
ont demandé au gouvernement d'agir, ils l'ont demandé au
gouvernement parce qu'ils ont craint, eux aussi, que le gouvernement fasse
preuve d'autant d'irresponsabilité qu'il y a trois ans devant cette
situation.
Qu'est-ce qui est arrivé? Comment se fait-il que cela n'a pas
marché? Le gouvernement a nommé deux médiateurs. C'est un
échec. Mais pas n'importe qui, comme disait le ministre. Le chef de
cabinet du premier ministre, s'il vous plaît. C'est un mandat
spécial. Généralement, c'est lui qui donne les mandats. Ce
n'est pas lui qui les prend. Mais cela veut dire que le premier ministre, le
bras droit du premier ministre... Je ne veux pas diminuer l'importance d'un
ministre, d'aucun ministre, mais le chef de cabinet du premier ministre,
écoutez, c'est le bras droit, c'est l'ombre du premier ministre. L'ombre
du premier ministre était là dans les négociations, dans
la médiation. Le premier ministre a engagé son prestige et
pourtant c'est un échec. Tout ce qu'on a comme rapport de
l'échec, c'est le rapport de ces messieurs dont un, au moins, est un
personnage ultra-politique, le chef de cabinet du premier ministre, dont un, au
moins, doit donc rendre des comptes politiques. Tout ce qu'on a, c'est un
rapport qui dit: Bon, ce serait peut-être le temps d'adopter une loi.
Mais les autres, les travailleurs, la CTCUQ, où est-il leur
rapport? Pourquoi, nous autres, on ne saurait pas ce qui est arrivé
exactement avant de prendre des décisions? Et la participation du caucus
péquiste, surtout du député de Vanier là-dedans,
qui s'est pointé rapidement et qui a très rapidement
assuré les parties en cause que cela se réglerait. Imaginez-vous
l'incitation des parties à régler elles-mêmes quand le
gouvernement dit d'avance: Cela va se régler, on va le prendre, le
bébé. Je ne sais pas si c'est inexpérience
carabinée, naïveté de jeunesse ou même attrait
irrésistible de la lentille, mais le député de Vanier
était dans le dossier... (16 h 10)
Une voix: Ce doit être les trois en même temps.
M. Lalonde: ... je dirais même, devant le ministre du
Travail. C'est assez symptomatique qu'on les voie l'un derrière l'autre
ici, en Chambre.
Comme député, qu'il s'en soit préoccupé,
d'accord, mais est-ce que le leader du gouvernement, dont les
interventions publiques ont changé tout le processus, toutes les
règles du jeu, se rend compte qu'il est en partie responsable de cet
échec? Nous, nous le savons, mais j'aimerais aussi entendre les autres
et je vais enchaîner avec la proposition de tout à l'heure du
député de Sainte-Marie, avec une suggestion - une proposition, si
je pouvais le faire d'une façon formelle - de la tenue d'une commission
parlementaire dans les minutes qui vont suivre.
Ce que nous savons jusqu'à maintenant, c'est que le premier
ministre a engagé son prestige et c'est un échec. Le ministre qui
propose la suspension des règles, le leader du gouvernement, s'est
pointé là-dedans, a changé toutes les règles du jeu
et est responsable en grande partie du fait que les parties n'étaient
plus capables, pour simplement citer le rapport de MM. Boivin et Bouchard, de
s'entendre.
C'est bien facile à comprendre. Quel intérêt a la
partie patronale à faire des efforts à tous points de vue, au
plan des ressources humaines, des efforts politiques et financiers pour
régler une question, sachant que le gouvernement viendra lui enlever le
problème parce que le ministre, son leader, a dit: On va le
régler? Quel intérêt a la partie syndicale aussi à
faire de même? Le ministre sait très bien que la décision
de faire une grève est une décision importante, très
exceptionnelle pour un groupe de travailleurs, très engageante sur le
plan individuel, sur le plan des familles, sur le plan du travail. Et la
décision de régler la grève est aussi extrêmement
difficile. Si on n'a plus à régler la grève parce que le
gouvernement nous a dit qu'il mettra fin à tout cela, cela change toute
la chimie qui serait susceptible d'amener les parties à régler un
conflit. Pourquoi cela? Parce que le ministre est allé se pointer
là-dedans.
M. le Président, j'aimerais faire une demande, mais très
formelle, au ministre, au leader de tenir, dans les minutes qui viennent, une
commission parlementaire pour entendre rapidement toutes les parties
là-dessus, y compris les médiateurs, parce qu'il y a, dans ce qui
nous a été raconté, des petits coins sombres. À un
moment donné, on nous dit que les représentants de la partie
patronale quittent une réunion en disant: Nous allons la recommander au
conseil de la CUQ. Et tout à coup, on voit que ce n'est pas ce qui est
arrivé.
Des conversations ont été rapportées sur les ondes
par le ministre lui-même, qui concernent des personnes importantes aussi:
le maire de Québec, les membres de la CUQ, les travailleurs. J'aimerais
entendre ce que les travailleurs ont à dire sur la proposition de 10% et
de 6% alors qu'on leur aurait proposé 11% la première
année, celle qui se termine, et 6% l'an prochain. J'aimerais entendre
les travailleurs nous expliquer l'impact de ce changement et le gouvernement
nous dire pourquoi on a changé cela, pourquoi on a baissé de 11%
à 10%, parce que c'est vrai que les 11%, à un moment
donné, ont été offerts.
J'aimerais que le ministre, lorsque nous allons suspendre nos travaux,
après l'adoption de cette motion pour laquelle nous allons voter,
organise immédiatement... Les travailleurs sont là et ils ont
demandé une commission parlementaire. Le syndicat des employés en
a fait une demande officielle, hier, à laquelle ils n'avaient pas encore
reçu de réponse vers 13 heures, cet après-midi, une
demande officielle de la tenue d'une commission parlementaire au cours de
laquelle ils pourront s'expliquer et au cours de laquelle ils pourront, eux
aussi, recevoir des explications. Je fais la demande formellement.
Je sais que, parfois, on considère que ces demandes de tenue de
commission parlementaire de la part de l'Opposition sont
considérées comme frivoles. Je vois le ministre de la Justice,
qui était de ce côté-ci en 1975 ou 1976 et qui avait
appuyé une motion de son collègue de Maisonneuve, je pense,
justement pour tenir une commission parlementaire pendant ce genre de
débat. Alors, il peut se rappeler tous les arguments qu'il a
invoqués et peut-être les répéter à
l'égard de son collègue, le leader du gouvernement. C'est
très important de vider la question.
M. Bédard: M. le Président, c'est exact.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Bédard: Je me rappelle la réponse que m'avait
faite le gouvernement avec tous les arguments qu'il avait invoqués.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Dans ce cas-là, on avait passé quatre
jours en commission parlementaire avant même la demande.
Des voix: Oh!
M. Lalonde: Même avant la demande d'autres commissions
parlementaires de la part de l'Opposition. Autres temps, autres moeurs.
M. le Président, j'en fais la demande formelle. Cela pourrait
s'organiser très rapidement. Il est 16 h 15. À 16 h 30, 16 h 45
ou 17 heures, on pourrait être en commission parlementaire et passer les
deux heures qu'il faudra et la loi va être adoptée dans des
délais quand même assez restreints.
M. le Président, cette commission parlementaire permettrait donc
d'examiner
les faits, d'examiner l'exécution du mandat des
médiateurs, y compris du médiateur politique. Nous sommes
très intéressés à savoir ce que le
représentant, l'ombre du premier ministre, est allé faire dans ce
dossier. C'est assez exceptionnel. Je ne pense pas que le chef de cabinet du
premier ministre se promène de conflit de travail en conflit de travail.
Il y en a tellement, de toute façon, qu'il n'en aurait pas le temps.
M. le Président, ce n'est pas la première fois que nous
devons réparer les dégâts d'un ministre ou du gouvernement
et ce ne sera pas la dernière sans doute, mais nous le ferons toujours
si l'intérêt commun nous le commande. Pourquoi? Parce que nous ne
sommes pas péquistes, parce que nous ne sommes pas opportunistes, parce
que nous ne sommes pas démagogues, parce que, au contraire, le Parti
libéral du Québec, à l'égard de ces conflits, a
toujours une attitude responsable qui tient compte, en premier lieu, de
l'intérêt des citoyens affectés par un tel conflit.
C'est dans cet esprit que nous allons appuyer la motion, mais avec
toutes les réserves que nous avons apportées et dont nous voulons
que le gouvernement tienne compte à l'avenir. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, j'espère que ce ne
sera pas simplement dans la phrase et que concrètement les choses se
dérouleront. Pour satisfaire le leader de l'Opposition et, probablement
aussi, pour que nous puissions avancer plus rapidement dans l'étude de
ce projet de loi, je vais être bref dans ma réplique aux propos
qui ont été tenus par le leader de l'Opposition. Il
m'apparaît...
M. Bisaillon: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je remarque que le leader du gouvernement nous
indique que c'est un peu sa réplique, mais il m'avait pourtant promis
une réponse à la question que je lui avais posée et il
avait promis qu'il me répondrait immédiatement après
l'intervention du leader de l'Opposition. Alors, j'attends toujours la
réponse à la question que je vous ai posée, que vous
m'aviez autorisée à poser. (16 h 20)
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Jean-François Bertrand
(réplique)
M. Bertrand: M. le Président, tout à l'heure, le
député - je ne sais pas si je dois l'appeler le
député de sainte Marguerite-Bourgeoys ou le saint
député de Marguerite-Bourgeoys - et leader de l'Opposition
officielle a tenu une argumentation en disant: II y a trois ans, le
gouvernement n'a pas bougé. Le gouvernement n'a pas pris ses
responsabilités. Le gouvernement a laissé traîner une
grève qui pourrissait. Cette fois-ci, par ailleurs, il utilise
exactement l'argumentation inverse, et là, tu te demandes exactement
où tu dois te placer entre, d'une part, la critique qu'il fait des
attitudes qu'on a eues en 1979 et celles qu'on a maintenant en 1982. Quand on
parle de 1979, c'est pour dire un certain nombre de choses avec un certain
nombre d'arguments. C'est exactement l'inverse quand il s'agit de
décrire la situation de 1982. Là on reproche aux
députés de s'en être occupés trop rapidement. On
reproche aux députés d'être intervenus trop rapidement. On
reproche aux députés, finalement, d'avoir répondu trop
rapidement aux pressions qu'on recevait de la population qui nous disait: Si
les choses sont ce qu'elles sont, d'après ce qu'on peut en lire dans les
journaux, entendre à la radio, voir à la
télévision, il est bien évident qu'on s'en va vers un
conflit qui pourrait durer des semaines et des mois.
Prenant conscience de cette situation, les députés,
effectivement, ont décidé de réagir rapidement parce que,
comme l'a dit le député de Marguerite-Bourgeoys, le leader de
l'Opposition, de toute façon, effectivement, le comportement que la
partie patronale particulièrement adoptait dans ce dossier nous amenait
à croire que ces gens avaient fait leur lit et qu'ils avaient
décidé de remettre le bébé au gouvernement, de
remettre le dossier au gouvernement et de se laver les mains de cette
négociation parce que, de toute façon, leur position était
coulée dans le ciment. C'était un contrat de trois ans et il
fallait absolument que l'année 1983-1984 donne des augmentations de 6%
et de 5%.
Dans ce contexte, le député de Marguerite-Bourgeoys
comprendra que je me pose des questions sur le fait que tenant une forme
d'argumentation pour 1979, il fait exactement l'inverse quand il s'agit de
parler de la situation de 1982. Puisqu'il dit que, de toute façon, son
propre parti et ses propres députés lui ont dit que
c'était urgent, lui ont dit qu'il fallait, effectivement, adopter une
loi permettant aux citoyens et aux citoyennes de la région de
Québec de retrouver leur service de transport en commun, si ce qu'il dit
est vrai, que c'est urgent d'adopter une loi, il reconnaît donc
implicitement que la situation qui prévaut à l'heure
actuelle entre les deux parties, la partie syndicale et la partie patronale,
est une situation qui ne permet pas d'espérer un règlement
négocié et que même si, après tous les efforts qui
ont été déployés par nos médiateurs
spéciaux, on est arrivé à un cheveu d'une entente, dans le
fond, il donne raison à nos médiateurs spéciaux qui
recommandent dans leur rapport que nous adoptions une loi spéciale, une
loi-décret et ça dans des délais relativement rapides. Je
crois que la réplique n'a pas besoin d'être très longue, M.
le Président, puisque le député de Marguerite-Bourgeoys,
à toutes fins utiles, nous dit: Prenez vos responsabilités, comme
gouvernement. Faites votre lit, comme gouvernement. Présentez-nous votre
projet de loi. On va discuter votre projet de loi, on va le débattre et
on va l'adopter.
Donc, dans un contexte comme celui-là, le moins qu'on puisse
dire, c'est que le député de Marguerite-Bourgeoys est
certainement malvenu de s'en prendre aux députés de la
région de Québec qui, sensibles aux préoccupations de la
population, ont manifesté le désir de voir ce conflit se terminer
le plus rapidement possible. Cela voulait donc dire qu'après, d'une
part, les efforts manifestés par les fonctionnaires du ministère
du Travail mandatés par le ministre délégué au
Travail pour tenter un dernier rapprochement et après les efforts qui
ont même été vantés par le président de la
commission de transport et le président de la Communauté urbaine
de Québec qui ont dit, de MM. Boivin et Bouchard, qu'ils avaient fait un
excellent travail, si tout cela est vrai, le rapport que nous avons devant nous
dit tout. Il dit tout sur les positions syndicales. Il dit tout sur les
positions patronales. C'est un rapport qui, de la première à la
dernière page, contient l'essentiel de ce que les parlementaires de
l'Assemblée nationale doivent connaître pour être en mesure
de prendre une décision éclairée autant sur le fond, lors
de l'étude en deuxième lecture, que sur chacun des articles, lors
de l'étude en commission plénière. Parce que c'est la
volonté de l'Opposition, parce que c'est surtout la volonté de la
population de faire en sorte que ce dossier soit rapidement réglé
et parce que, de toute façon, on sait très bien maintenant,
depuis quelques jours, que la partie patronale se lave les mains dans ce
dossier et renvoie le tout au gouvernement, le gouvernement a pris la
décision qu'il devait prendre et l'Opposition est d'accord avec la
décision qu'il a prise.
Dans ce contexte, nous allons étudier le projet de loi no 84 en
deuxième lecture. Nous allons prendre nos responsabilités de
parlementaires, de représentants de la population et d'élus. Nous
savons tous quelles sont les positions que la partie patronale et la partie
syndicale ont eues dans ce dossier. Nous les connaissons très bien. Dans
les circonstances, c'est maintenant ici, à l'Assemblée nationale,
entre parlementaires représentant l'ensemble de la population, que l'on
doit prendre la décision qui s'impose, c'est-à-dire l'adoption du
projet de loi no 84. Nous devons faire en sorte qu'au moment de l'étude
article par article de ce projet de loi en commission plénière
nous puissions, sur chacun des points, sur chacun des aspects, répondre
à toutes les questions qui viendront autant, d'ailleurs, des
députés ministériels que des députés de
l'Opposition, sur les conditions décrétées dans ce projet
de loi no 84.
Dans ce contexte, M. le Président, je soumets donc que nous
adoptions à ce moment-ci la motion que j'ai présentée.
M. Lalonde: En vertu de l'article 96, M. le
Président...
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: II ne faut pas trop en dire au leader du
gouvernement. Il est tout mêlé. Ce que j'ai dit, c'est que je suis
d'accord avec l'urgence et que nous allons voter pour la motion parce que
l'urgence, en ce qui nous concerne, est là. Le leader du gouvernement a
interprété mes propos comme étant un appui de tout ce que
le gouvernement a fait. Pas du tout! Quant à la loi, on verra. Je
n'avais pas l'intention de faire comme vous un discours de deuxième
lecture. On laissera le porte-parole annoncer les couleurs en ce qui concerne
la loi et, si l'article 96 me le permet, M. le Président, j'aimerais
exprimer un regret très sérieux à la suite du refus du
gouvernement d'entendre la population. Parlez-en, de la population. Vous dites
qu'on la représente ici, mais la commission parlementaire, c'est aussi
l'Assemblée nationale.
Le Président: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je voudrais rappeler un peu
les faits. Pendant l'intervention du leader du gouvernement, je me suis
levé en vertu du règlement pour lui demander s'il m'autorisait
à lui poser une question. Il m'a répondu: Non, à la fin de
mon intervention. À la fin de son intervention, je me suis levé
et lui ai adressé une question. Il m'a signifié à ce
moment-là qu'il me répondrait après l'intervention du
leader de l'Opposition.
Je ne juge pas, M. le Président, que le leader du gouvernement
m'a répondu. Il a répondu au leader de l'Opposition, mais il n'a
pas répondu à ma question. Ma question était
tout à fait différente. Elle débouchait sur une
commission parlementaire, mais elle disait: À l'intérieur du
temps qui est prévu pour la discussion spéciale. Il nous reste
une heure. Quand le leader du gouvernement dit qu'on connaît tous les
aspects, je connais ce qui est écrit dans le document, ce qui nous est
fourni dans le rapport, mais je n'ai pas la perception du syndicat à ce
moment-là. Il nous reste une heure. Dans le fond, M. le
Président, on aurait pu continuer ce débat jusqu'à un
maximum de deux heures. Le leader du gouvernement a utilisé la
procédure pour éviter de répondre à ma question qui
est: Dans l'heure qui nous reste, ou qui nous resterait si on menait le
débat d'urgence jusqu'au bout, est-ce qu'il est d'accord pour que les
parlementaires puissent rencontrer les travailleurs? Ce n'est pas
compliqué, ils sont ici. Alors on pourrait au moins les rencontrer, il
reste une heure. Cela n'allongera pas le temps par rapport à ce que le
leader du gouvernement avait déjà prévu comme horaire. (16
h 30)
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, tout à l'heure, quand
le député de Sainte-Marie s'est levé pour poser sa
question, tout de suite après, le leader de l'Opposition s'est
levé pour dire: J'appuie le sens de la proposition qui est contenue dans
la question du député de Sainte-Marie et le député
de Marguerite-Bourgeoys l'a reprise ensuite dans son exposé. J'ai
donné la réplique au député de
Marguerite-Bourgeoys, qui avait repris la proposition du député
de Sainte-Marie. À ce moment-ci, M. le Président, je vous demande
d'appeler l'adoption de la motion, mais je voudrais d'abord, avant de le faire,
déposer, tel que je me suis engagé à le faire tout
à l'heure, un document qui est une note écrite par M. Lucien
Bouchard relativement au télégramme qui a été
envoyé au premier ministre du Québec, hier, par le comité
exécutif de la Communauté urbaine de Québec et le conseil
d'administration de la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec. C'est une note en réponse à certaines des
affirmations qui sont faites par les dirigeants de la Communauté urbaine
de Québec et de la commission de transport. Je crois que cette note
pourrait être utile pour la poursuite de l'étude de ce dossier.
J'en fais donc le dépôt, M. le Président.
Le Président: Document déposé.
M. Lalonde: J'aurais une question de règlement, M. le
Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition sur une
question de règlement.
M. Lalonde: Étant donné que c'est un débat
limité, normalement, lorsqu'on a un débat limité, on
s'attend à avoir plus d'un intervenant de chaque côté; il y
a une conférence des leaders avec la présidence pour
déterminer le temps qui sera distribué de part et d'autre. Si on
avait tenu cette conférence - en fait, personne ne l'a
suggéré - sans doute que le député de Sainte-Marie
aurait obtenu quelques minutes pour adresser la parole à cette
Assemblée. Si un consentement unanime pouvait remplacer ce
défaut, si le député de Sainte-Marie le désire,
nous serions prêts à consentir.
Le Président: S'il n'y a pas eu de conférence des
leaders convoquée par le président, c'est simplement que le
président avait été informé qu'une entente
était intervenue entre les deux partis politiques
représentés à l'Assemblée nationale, à
savoir qu'un membre de chaque côté interviendrait. Je pense,
à ce stade-ci, qu'on n'a pas besoin de consentement unanime pour
permettre à un député indépendant de s'exprimer sur
la motion qui est présentement débattue.
Une voix: II y a eu la réplique-Le Président:
D'accord qu'il y a eu la réplique. Est-ce que le
député de Sainte-Marie veut intervenir?
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Président: À ce stade-ci, ça prendrait un
consentement unanime, vu que la réplique a été tenue.
Mais, je tenais à dire qu'avant la réplique, n'importe quel
député de l'Assemblée pouvait intervenir sur la
motion.
M. Bisaillon: M. le Président, j'étais fort
conscient de ce que vous venez d'expliquer, j'étais fort conscient aussi
puisque je me suis levé dès les premières minutes de son
intervention - que le leader du gouvernement faisait sa réplique, alors
que j'attendais sa réponse. Si j'ai décidé de ne pas
intervenir sur la motion d'urgence, c'est que je veux démontrer ce que
j'ai prêché. Je dis qu'on a perdu du temps, une heure de
débat qu'on aurait pu utiliser avec les travailleurs. Alors je ne vais
pas l'allonger.
Le Président: Merci. Est-ce que la motion du leader du
gouvernement sera adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Conformément à
la motion, surtout, je me dois de suspendre les travaux jusqu'à 17 h 05
exactement.
Une voix: Article 34...
Le Président: Article 34? L'article 34 n'est pas suspendu,
mais il y a quand même un autre article du règlement qui
m'empêche d'appeler l'article 34. Vous remarquerez que je n'ai pas
appelé les déclarations ministérielles, les
dépôts de documents, etc. Mes dépôts, je les ai
même faits par consentement unanime. C'est vendredi, et en temps normal,
ce n'est pas une journée de session. S'il y a eu période de
questions aujourd'hui - parce que normalement, il ne devrait pas y avoir une
période des questions - c'est qu'il y a une coutume voulant que lors de
ces sessions spéciales ou de ces séances spéciales, une
période de questions soit accordée. S'il y avait un consentement
unanime, l'Assemblée étant souveraine, vous pourriez poser votre
question. Y a-t-il consentement pour une question en vertu de l'artilce 34? Une
seule?
M. le député d'Outremont.
Recours à l'article 34
M. Fortier: M. le Président, j'aimerais demander au leader
du gouvernement, compte tenu qu'il y a une commission parlementaire la semaine
prochaine qui est limitée à la question de SIDBEC, mais que toute
la question de la Côte-Nord semble être d'un très grand
intérêt pour toute cette population, s'il y aura bientôt une
commission parlementaire traitant du sujet de la condition économique de
la Côte-Nord?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je peux indiquer
formellement au député qu'il y aura, comme l'a indiqué le
ministre de l'Énergie et des Ressources, une commission parlementaire
sur le dossier Schefferville. C'est un engagement qui a été pris
par le ministre aujourd'hui même relativement à la
Côte-Nord. Donc, dans ce contexte, avec la commission parlementaire sur
SIDBEC et celle sur l'Iron Ore, je crois que vous avez votre
réponse.
Le Président: Pour être très précis,
même si dans la motion, il est indiqué que la suspension est d'une
heure, je tiens pour acquis qu'il y a consentement unanime pour que cette
suspension ne soit que de trente minutes. Est-ce bien cela, M. le leader?
M. Bertrand: On va modifier la motion en conséquence, M.
le Président.
Le Président: On va modifier la motion en
conséquence, de consentement. Les travaux de l'Assemblée sont
suspendus jusqu'à 17 h 05.
(Suspension de la séance à 16 h 37)
(Reprise de la séance à 17 h 30)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler le projet de loi no 84.
Projet de loi no 84 Première lecture
Le Président: J'appelle la première lecture du
projet de loi no 84, Loi assurant la reprise du service de transport en commun
sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec.
Peut-être y a-t-il des notes explicatives, M. le ministre?
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, ce projet a pour
objet d'assurer la reprise du service de transport en commun sur le territoire
de la Communauté urbaine de
Québec et de déterminer les conditions de travail des
employés représentés par le
Syndicat des employés du transport public du
Québec Métropolitain Inc., jusqu'au 25 décembre
1983.
Le Président: Est-ce que cette motion de première
lecture sera adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Président: J'appelle maintenant la deuxième
lecture du même projet de loi.
M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre...
Deuxième lecture M. Raynald
Fréchette
M. Fréchette: Pas tout à fait, M. le
Président.
Le Président: Excusez-moi, M. le ministre.
Une voix: Pas tout à fait...
M. Fréchette: On va voir cela dans le bout qui s'en
vient.
En guise de remarques strictement préliminaires, je pense que je
dois, dès maintenant, vous informer que par la force des choses, il y
aura très certainement, à la fois sur le plan de l'argumentation
et des renseignements d'ordre réel, des choses qui vont se recouper par
rapport à ce qui a déjà
été dit par les intervenants qui m'ont
précédé et, également, j'en suis convaincu, par
rapport à ce qui va également se dire tout au cours du
débat. Je pense que l'essence même de ce débat nous
amène vers cette conclusion.
Je vous dirai également, M. le Président, et en toute
franchise, que j'aurais souhaité, quant à moi, que la
première loi que je devais piloter à l'Assemblée
nationale, à titre de ministre délégué au Travail
ait été de nature différente de celle qui est actuellement
devant nous. Par ailleurs, il faut bien nous rendre à l'évidence
d'un certain état de choses et évaluer ces choses comme elles
sont. Et c'est pour les motifs sur lesquels j'argumenterai dans quelques
minutes, que le gouvernement a choisi de convoquer les membres de cette
Assemblée pour, malheureusement - j'insiste sur ce terme - imposer une
convention collective et, par voie de conséquence, assurer la reprise du
service du transport en commun dans la Communauté urbaine de
Québec.
On l'a dit tout à l'heure, mais je crois utile d'y revenir, je
regrette d'autant plus cette situation à laquelle je
réfère que je n'ai ni l'impression, ni davantage la conviction
que tous ont fait l'effort maximum dans le dossier qui nous préoccupe
pour conclure une entente souhaitée. Je n'insisterai pas, sauf pour le
souligner peut-être, sur les absences de certains, mais tous en cette
Assemblée auraient souhaité une plus grande collaboration de la
part de certains intéressés, pour en venir à un
règlement négocié. Pour ma part, je peux vous dire avec
certitude que les fonctionnaires du ministère du Travail ont fait tout
ce qu'il était humainement possible pour rapprocher les parties. Il
m'apparaît important, à cet égard, de faire un bref rappel
des différentes étapes qui ont été franchies pour
tenter, pendant toutes ces étapes, d'éviter l'impasse devant
laquelle nous nous retrouvons aujourd'hui.
Mentionnons en tout premier lieu, pour bien circonscrire le
débat, que la convention collective qui existait entre les parties est
maintenant expirée depuis le 25 décembre 1981. Dans quelques
semaines, il y aura donc une année complète qui se sera
écoulée depuis la date de l'expiration de cette convention.
Avant son expiration, dans les jours et les semaines qui ont suivi, les
parties ont engagé le processus normal de la négociation, celui
qui est prévu au Code du travail. Elles ont effectivement tenu 22
séances de négociation, qui se sont échelonnées
entre le 24 septembre 1981, donc quelque deux mois et demi à trois mois
avant l'expiration de la convention, et le 11 juin 1982. C'est à partir
de cette date du 11 juin 1982 que la commission de transport, l'employeur, a
demandé la conciliation.
Le 5 juillet se tenait la première séance de conciliation
dirigée par M. Paul-Émile Thellend, conciliateur
d'expérience au ministère du Travail. Le processus a
continué de jouer, suivant la normalité des choses, et une
deuxième séance de conciliation, toujours dirigée par le
même conciliateur, devait avoir lieu sept jours plus tard, donc le 12
juillet précisément.
C'est à cette occasion, le 12 juillet, que l'employeur
déposait aux tables une offre qu'il disait être globale et finale
sur l'ensemble des points qui étaient en litige et, bien sûr, sur
tout l'aspect ou le chapitre salarial du dossier. Je réitère, M.
le Président, que l'offre qui a été faite a
été qualifiée par l'employeur lui-même de globale et
finale.
De plus, toujours à cette même occasion dont je viens de
parler, soit le 12 juillet, la partie patronale informait le syndicat que cette
offre n'était valable que jusqu'au 2 août 1985, 15 heures. Cette
offre - il ne faut pas l'oublier, je pense qu'il est important de garder ce
renseignement à l'esprit - qui avait été qualifiée
de globale et finale a été soumise à la partie syndicale
qui, après l'avoir analysée, après en avoir soupesé
les tenants et aboutissants, décidait de la rejeter dans une proportion
non équivoque de 94,4% des votants. À ce stade, dans
l'état où se trouvaient les choses, le 13 août, le
conciliateur communiquait avec les parties et celles-ci s'entendaient sur une
prochaine rencontre qu'on échelonnait sur une période de deux
jours, à savoir, plus précisément, les 19 et 20 août
1982. Lors de ces rencontres des 19 et 20 août 1982, la partie syndicale,
à partir de l'offre qu'elle avait, déposait une
contre-proposition sur l'ensemble des points qui étaient en suspens dans
le but évident - nous semble-t-il, en tout cas - d'en arriver à
une convention négociée, agréée et signée
par les parties. Le tableau ayant donc changé quant à son
contenu, l'employeur convenait alors de communiquer avec le conciliateur, M.
Thellend, et ce avant le 27 août 1982, après analyse de la
contre-proposition que le syndicat avait déposée les 19 et 20
août, soit une semaine auparavant. Toute cette chronologie, ces
péripéties nous amènent au 27 août. C'est à
cette date que se tenait la quatrième séance de conciliation au
cours de laquelle l'employeur a exposé ses conclusions de l'analyse
qu'il avait faite de la contre-proposition syndicale du 19 août. À
toutes fins utiles, l'employeur qualifiait tout simplement d'irréalistes
les demandes syndicales et refusait d'y répondre. (17 h 40)
Après que tous ces processus eurent joué, M. le
Président, après que la situation eut été rendue
à l'étape que je viens de décrire et après ce refus
de la partie patronale, le syndicat, dans un nouveau
processus d'exploration, dans une nouvelle tentative de
débroussailler le dossier, communiquait à l'employeur une
nouvelle hypothèse de règlement. Nous étions donc, M. le
Président, le 27 août dernier. À la suite de cette
communication de l'employeur, dont je viens de parler, il y eut une
cinquième séance de conciliation afin de permettre au syndicat de
répondre à des demandes de précision formulées par
l'employeur sur la position syndicale quant à un éventuel
règlement. Une sixième séance de conciliation se tenait le
28 septembre au cours de laquelle l'employeur déposait une nouvelle
offre que le syndicat, à ce moment, M. le Président, pour des
motifs que tout le monde connaît, a rejetée et ce sans aucune
hésitation puisque, au chapitre salarial, du moins à ce chapitre,
cette nouvelle offre était inférieure à celle qui avait
été mise sur la table quelques mois, quelques semaines
auparavant, plus précisément le 12 juillet.
C'est donc précisément le 28 septembre que nous nous
retrouvons, dans les faits, dans la pratique, dans le processus normal de la
négociation, c'est donc à cette date que nous nous retrouvons
devant l'impasse. Au-delà de cela, M. le Président, et
malgré cela, le 5 octobre, la partie syndicale faisait une
contre-proposition sur l'ensemble des points en suspens. Dans cette
proposition, le syndicat maintenait le principe d'une pleine indexation
intégrée ainsi que ses demandes sur les problèmes des
maladies occupationnelles et des courses à un bout. De plus, le syndicat
indiquait son intention d'exercer son droit de grève le 23 octobre si
l'employeur ne répondait pas d'une façon positive à cette
dernière contre-proposition que je viens brièvement de vous
décrire, M. le Président.
Finalement, en dernière instance, en ultime tentative, dans la
semaine du 18 octobre, il y eut un autre exercice tenté par le
conciliateur, M. Thellend; c'était précisément dans la
semaine du 18 octobre. Malheureusement, les efforts tant de M. Thellend que des
autres officiers du ministère qui, quotidiennement, pour ne pas dire
d'heure en heure, suivaient les développements dans le dossier, se sont
avérés sans succès. C'est à la suite de tout ce
processus que le 23 octobre, le syndicat entreprenait une grève
générale illimitée.
Le 27 octobre, une huitième séance de conciliation a
été tenue au cours de laquelle l'employeur proposait un montant
forfaitaire de 300 $ par année. Par contre, les montants forfaitaires
pour 1983 et 1984 étaient récupérés par des
coupures dans des avantages déjà acquis. Je n'ai pas besoin
d'insister pour vous dire que là également, cette ultime
tentative a échoué. Finalement, un autre effort d'un autre ordre
a été entrepris. C'est le 28 octobre que le premier ministre
déléguait MM. Jean-Roch Boivin et
Lucien Bouchard pour tenter un rapprochement entre les parties.
J'ai brossé, fort rapidement j'en conviens, la situation
factuelle quant aux différents événements qui se sont
produits depuis le début de la négociation, au mois de septembre
1981 jusqu'au 28 octobre dernier. Il ne m'appartient pas de porter des
jugements sur des attitudes d'une partie ou de l'autre. Mais voici un dossier
dans lequel il me semble que la population en général, celle de
Québec et de la région en particulier pourra exercer son jugement
par rapport à certaines attitudes des parties impliquées dans ce
dossier. Je n'ai pas d'hésitation à ajouter que cette même
population saura apprécier la pertinence de la position de la partie
patronale qui, en cours de négociation, dépose une offre à
la baisse par rapport à la proposition initiale. Je ne pourrais
évidemment donner aucune garantie qu'un semblable processus ne
connaît pas de précédent, mais, à l'analyse,
à l'étude d'un processus de cette nature, on peut au moins sans
exagération le qualifier d'inusité dans le processus normal d'une
négociation.
Évidemment, M. le Président, l'on sait pourquoi ce
changement d'attitude s'est produit à l'époque que je viens de
décrire. À ce moment-là, on a invoqué la politique
suggérée par le gouvernement fédéral de s'en tenir
aux 6% et 5%, quant à la politique salariale. La partie patronale a
également invoqué l'attitude adoptée par le gouvernement
du Québec quant à sa politique salariale. Mais, à ma
connaissance en tout cas - on me reprendra si je faisais erreur -ni dans les
directives du gouvernement fédéral, ni non plus dans les
énoncés de politique du gouvernement du Québec n'a-ton
jamais décrété ou suggéré, dans les cas
où la capacité de payer existe et où le rattrapage est
nécessaire, qu'il ne fallait pas, dans de tels cas, faire les efforts
qui devaient être faits.
M. le Président, c'est l'essentiel des faits contenus au dossier
qui nous amène, je le réitère, à l'obligation
pénible de décréter, par voie de législation, des
conditions de travail.
Je voudrais vous résumer rapidement l'essentiel du contenu du
projet de loi qui est devant nous. Ce projet de loi vise à assurer,
entre autres choses, la reprise du transport en commun sur le territoire de la
Communauté urbaine de Québec à compter de 0 h 01, le 7
novembre 1982, tout en reconduisant certaines clauses de l'ancienne convention
collective. La même loi rend applicables, rend exécutoires entre
les parties les ententes intervenues entre elles en cours de
négociation, ainsi que les stipulations qui sont prévues à
l'annexe de la présente loi.
La loi tient lieu de convention collective, lie les parties jusqu'au
25
décembre 1983, donc pour une période de deux
années, si l'on tient pour acquis - ce sont les faits effectivement -
que la convention qui existait est expirée le 21 décembre
1981.
Quant au contenu de la loi à un autre égard, je voudrais
mentionner que les taux de salaire qui seront prévus à ce
décret, à cette convention collective qui liera les parties, les
taux de salaire applicables à l'expiration de la dernière
convention collective, seront redressés par les ajustements dont je vous
donne le détail: une augmentation de 10% pour la période du 26
décembre 1981 au 25 décembre 1982, une augmentation de 6% pour la
période du 26 décembre 1982 au 25 décembre 1983. Si, par
ailleurs, l'augmentation de l'indice des prix à la consommation pour le
Canada, établi par Statistique Canada, du mois de janvier 1983 par
rapport au mois de janvier 1982 excède 6,5%, la commission accorde
à l'employé ayant été à son emploi au cours
de toute cette période... Je vous signale tout de suite que lorsque nous
nous retrouverons en comité plénier, je proposerai par rapport au
texte que je suis en train de vous lire un amendement - je le signale tout de
suite à mon collègue de Brome-Missisquoi, peut-être qu'il
voudra procéder à l'analyse de la nature de l'amendement - qui
aura comme objectif d'enlever le mot "toute" dans le texte de l'indexation. On
va très facilement comprendre pourquoi simplement en sachant la nature
de l'amendement qui sera déposé.
La commission accorde donc à l'employé ayant
été à son emploi au cours de cette période un
montant forfaitaire de 116,15 $ pour chaque demi-pourcent complet
d'augmentation de l'indice en plus de 6,5%. Ce montant d'indexation est
payable, s'il y a lieu, dans les trente jours suivant la publication officielle
de Statistique Canada concernant l'indice de janvier 1983.
D'autre part, M. le Président, et là je me
réfère plus précisément à certaines clauses
normatives, dans le but de régler la deuxième question
litigieuse, un employé qui bénéficie du régime de
l'incapacité occupationnelle à l'expiration de la dernière
convention collective, continue de bénéficier du régime
qui est prévu. Par ailleurs, dans le cas de l'employé qui
bénéficiait du régime d'incapacité occupationnelle
depuis 36 mois, le 15 octobre, la période pendant laquelle il a droit
à l'allocation d'incapacité occupationnelle est étendue
jusqu'à l'expiration de la convention collective. La commission peut
toutefois affecter cet employé à un autre emploi à la
condition de lui verser un salaire au moins égal à celui d'un
pointeur.
Finalement, M. le Président, la commission doit, dès qu'un
poste d'inspecteur-répartiteur devient vacant, y affecter
l'employé qui bénéficiait du régime
d'incapacité occupationnelle depuis un an le 24 octobre 1982.
Voilà donc, M. le Président, très brièvement, j'en
conviens, mais nous aurons sans doute l'occasion de revenir plus à fond
sur l'étude du projet de loi, est l'essentiel de son contenu.
Tel que l'ont mentionné, M. le Président, les
médiateurs spéciaux, MM. Bouchard et Boivin, il nous est apparu,
il est devenu évident, il est devenu clair à un moment
donné, qu'aucune solution négociée à ce conflit,
n'était envisageable. Il ne faut pas oublier, je le
répète, je le sais, mais c'est important dans l'ensemble du
dossier, il ne faut pas oublier que la convention collective entre les parties,
est expirée depuis le 25 décembre 1981 et que les
négociations avaient débuté le 24 septembre 1981, donc
elles se sont échelonnées sur une période
supérieure à une année.
Effectivement, nous en étions donc là, M. le
Président, après quatorze mois de discussions. Malgré une
intervention exceptionnelle des médiateurs spéciaux, nous en
sommes venus à la conclusion, à l'obligation de constater qu'il
n'y avait pas d'autre solution que de recourir à cette loi
spéciale.
La crise économique, nous semble-t-il, nous prouve plus que
jamais que le transport en commun est un service essentiel,
particulièrement pour les plus démunis. Pensons, par exemple,
à ceux qui l'utilisent chaque jour pour se rendre au travail ou
ailleurs: ceux qui sont à la recherche d'un emploi, les étudiants
de plusieurs niveaux, secondaire, collégial et universitaire, tous ces
concitoyens et concitoyennes dont les revenus sont limités et qui sont
durement frappés par le conflit.
Dans les circonstances, je le réitère, il nous est apparu
juste et équitable de prendre nos responsabilités et de mettre
fin au conflit.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: M. le Président, le gouvernement convoque une
session spéciale de l'Assemblée nationale, quelques jours
à peine avant la reprise prévue, dans le but de présenter
une loi matraque parrainée par le député de Sherbrooke,
ex-ministre du Revenu. À ce titre, vous vous en souviendrez
certainement, la population s'en souvient, il agissait un peu comme adjoint au
ministre des Finances. Il était le parrain de la loi concernant la taxe
sur l'essence, il était le parrain de la loi concernant la taxe sur
l'électricité, il était le parrain de la loi concernant la
taxe sur la bière...
M. Fréchette: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre.
M. Frechette: II me semble qu'il y a un certain nombre de choses
qu'il faut replacer dans leur vrai contexte. Quand le député de
Brome-Missisquoi réfère à la taxe sur
l'électricité et qu'il indique que c'est le ministre du Revenu
qui l'aurait parrainée, je voudrais bien qu'il m'en donne le
numéro, la date...
Une voix: Vous ne vous en souvenez pas?
M. Fréchette: Non. Peut-être que le
député de Brome-Missisquoi aurait ce renseignement à nous
fournir.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Le ministre ne nous a pas dit qu'il a voté
contre, M. le Président, il a au moins voté pour, il a au moins
parrainé, comme homme de main, celle sur l'essence, tout le monde s'en
souvient à chaque fois qu'il passe à la station-service; celle
sur la bière, les travailleurs s'en souviennent quand ils vont prendre
leur petite bière à la taverne; enfin, il a également
piloté un autre dossier de son propre chef, celui des casinos. (18
heures)
Aujourd'hui, M. le Président, pour avoir été
l'homme de main, pour avoir accepté le sacrifice de renoncer à un
projet auquel il tenait, le dossier du casino, on lui a donné une
promotion. Sa promotion, il s'en est vite rendu compte, c'était de
devenir un autre homme de main.
Dans son premier dossier, il est devenu l'homme de main du leader du
gouvernement et député de Vanier. Alors que son poste, son titre
commande qu'il soit, en cette Chambre, qu'il soit, au sein du cabinet, le
défenseur des droits des travailleurs, il accepte, comme premier mandat,
comme homme de main du gouvernement, de piloter une loi matraque qui abolit le
droit à la négociation pour les travailleurs du Québec et
qui abolit le droit à la négociation pour les employeurs du
Québec. Il me dira: C'est strictement dans un secteur bien
précis; je ne le ferai plus. Il reprendra des paroles de son chef,
l'honorable premier ministre: Je ne le ferai plus. Mais, M. le
Président, quelle est la feuille de route de ce gouvernement soi-disant
ami des travailleurs? En l'espace de trois ans, 36 mois, on a eu droit, en
cette Chambre, à sept lois spéciales.
M. le Président, la première loi spéciale
s'intitulait Loi sur les propositions aux salariés des secteurs de
l'éducation, des affaires sociales et de la fonction publique. Elle a
été sanctionnée le 12 novembre 1979.
La deuxième loi spéciale du gouvernement ami des
travailleurs, c'est la Loi assurant le maintien des services
d'électricité et prévoyant les conditions de travail des
salariés d'Hydro-Québec, sanctionnée le 18 décembre
1979. La troisième loi, M. le Président, vous vous en
souviendrez, le 24 mars 1980, c'est la Loi assurant la reprise de certains
services de la ville de Montréal et de la Communauté urbaine de
Montréal, concernant le transport en commun. La quatrième loi
spéciale, c'est la Loi sur certains différends entre des
enseignants et des commissions scolaires, le 24 octobre 1980. La
cinquième loi, M. le Président -tout cela, toujours, en trois
années - c'est la Loi concernant les services de transport de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal, le
15 janvier 1982.
Je m'excuse si cela semble long, M. le Président, mais ils ont
adopté tellement de lois spéciales! La sixième loi, Loi
sur la reprise de la prestation des soins médicaux au Québec, a
été sanctionnée le 21 juin 1982. J'espérerais dire,
finalement, mais avec ce gouvernement et au rythme où il adopte des lois
spéciales, on ne pourra jamais dire finalement, tant qu'ils seront
là: la Loi assurant la reprise du service de transport en commun sur le
territoire de la Communauté urbaine de Québec, qui n'est pas
encore sanctionnée. J'oublie les projets de loi nos 68 et 70 qui, en
définitive, enlèveront tout droit de négocier aux
travailleurs des secteurs public et parapublic.
Pourquoi en est-on venu, avec ce gouvernement, à tant de lois
spéciales? Pourquoi en est-on venu à nier continuellement et
régulièrement aux employeurs et aux travailleurs du Québec
le droit à la négociation de conventions collectives? C'est
peut-être parce que, depuis leur élection en 1976, les ministres
titulaires de ce portefeuille avaient d'autres préoccupations que le
bien-être des travailleurs et des employeurs du Québec. Ils
avaient d'autres préoccupations que de s'assurer qu'il y aurait une
réforme du Code du travail qui ferait en sorte que cela s'applique aux
problèmes qu'on vit dans la société contemporaine
québécoise. On se souvient que le portefeuille a
été détenu, en premier lieu, par le député
d'Anjou, aujourd'hui ministre des Affaires sociales. On se souvient que, par la
suite, il fut détenu par le député de Marie-Victorin. On
voit aujourd'hui qu'il est détenu par le député de
Sherbrooke. Mais qu'ont fait ces gens au lieu de s'occuper du ministère
du Travail? Qu'ont fait ces gens au lieu de s'occuper des travailleurs au cours
de leur mandat? Ils se sont occupés d'indépendance et de
séparation du Québec. C'est un des coups cachés de cette
action dont ils n'ont pas encore accepté le résultat.
M. le Président, si le député de Brome-Missisquoi
vous dit que les lois en matière de relations du travail ne
répondent pas aux aspirations des travailleurs et des employeurs, vous
diriez: C'est une opinion. Mais si Me Germain Jutras, qui était le
commissaire-enquêteur dans le dernier conflit à la CTCUM, vous
disait: "Le Code du travail tel que nous le connaissons, d'application
universelle, sans égard à la nature ou à la taille de
l'entreprise, ne conviendrait-il plus à la société
québécoise dans l'état où elle se trouve
aujourd'hui? La question - estime-t-il - mérite réflexion et doit
être posée. Une loi doit être adaptée à la
réalité et les réalités sont
différentes"...
Si ce n'est pas suffisant de vous donner l'opinion de Me Jutras, on
pourrait vous donner l'opinion du premier ministre de la province de
Québec sur l'état de cette législation. Après six
ans d'exercice d'un pouvoir qui promettait toujours des solutions, le premier
ministre s'exprime comme suit: "En tout cas, une chose est certaine, est en
train de devenir très claire: le processus actuel de négociations
dans le secteur public, qui dure depuis 15 ou 20 ans, avec cette espèce
de fatalité d'affrontement qui le caractérise, constitue un
obstacle de taille dans la poursuite des objectifs, quels qu'ils soient, de
progrès public ou social." C'est le premier ministre qui parle. "On ne
peut pas s'empêcher de constater, et il va falloir en tenir compte
sitôt après la fin de cette ronde, que ce type de processus, dans
le contexte actuel et probablement aussi dans tout contexte à venir,
paraît complètement désuet, inadapté,
inapproprié, lourd, mangeur d'énergie, dévoreur
d'énergie de façon excessive et pour des résultats qui, en
général, ont autant de chances d'être négatifs,
à cause, justement, de cette concentration excessive et trop longue."
Cela est le jugement que le premier ministre du Québec porte sur ceux
qui ont occupé ce portefeuille auparavant.
Il y avait autre chose à faire que de s'occuper de cette loi. M.
le Président, en arrière de cette loi matraque qui touche plus de
600 travailleurs, quels étaient les objectifs qui se dessinent dans le
firmament péquiste et qu'on visait de l'autre côté de la
Chambre? Il y en avait plusieurs, mais on a tenté de les chapeauter et
de vous en donner quatre, M. le Président, pour tenter de
démasquer l'hypocrisie de ce gouvernement dans ce dossier.
Le premier objectif, et tous en conviendront, c'était de donner
une leçon aux travailleurs des secteurs public et parapublic. Il
fallait, avant que la grosse ronde arrive à sa fin, montrer qu'on
était capable de se servir de la matraque et on l'a mise dans les mains
du ministre du Travail, avec la "swing du manche", comme Maurice Bellemare
aurait dit, avec l'élan du leader du gouvernement. On a tenté de
leur créer un exemple dont ils auraient peur.
Le deuxième objectif, M. le Président, c'est de tout
centraliser au niveau des conventions collectives. On a entendu parler de
négociations sectorielles dans le secteur public. On a également
entendu parler, même dans nos comtés plus éloignés
du Québec, de négociations sectorielles dans le secteur
privé. Et lorsqu'on suit la démarche de ce gouvernement dans ce
dossier, on voit qu'on tente, au niveau des délais, d'amener la fin de
la convention collective des chauffeurs d'autobus de Québec avec celle
des chauffeurs d'autobus de Montréal. On s'en va dans le sectoriel, dans
l'uniformisation alors que le premier ministre dit qu'il ne faut pas
uniformiser, etc. Dans ce dossier, c'est ce qu'on tente de faire. (18 h 10)
Le troisième objectif, et là je suis content que le
ministre des Affaires municipales soit présent dans cette Chambre, c'est
la mise en tutelle des administrations locales, de nos élus locaux. On
décide de leurs conventions collectives. On l'a fait, à certaines
occasions, à Montréal. On le fait présentement à la
Communauté urbaine de Québec, et ceux qui ont des MRC,
surveillez-vous: on va mettre cela en tutelle et c'est le gouvernement du
Québec qui va décider quelles vont être vos conventions
collectives au nom de la pseudo-autonomie municipale. Tantôt, le ministre
des Affaires municipales va voter pour que les gens de Québec ne
décident pas, ne puissent pas négocier leur convention collective
avec leurs travailleurs.
Quant au quatrième objectif, M. le Président, il y a un
peu de petite vengeance politique en dessous de tout cela. Ceux qui ont eu
l'occasion au cours des dernières années de suivre de plus
près les ébats et les débats sur la scène politique
du Québec, municipale, provinciale, vont sans doute reconnaître
dans cette loi une petite tentative de régler un cas entre le leader du
gouvernement et le maire de Québec. Le syndrome du Colisée, M. le
Président, refait surface.
Des voix: Oh!
M. Paradis: Tantôt, on va voir qui va payer pour le
syndrome du Colisée, mais pour arriver à ces fins, pour arriver
à ces quatre objectifs, M. le Président, il fallait un
scénario. Ce scénario a démarré et a
été enclenché par le premier ministre lui-même,
lorsqu'il a déclaré, le 1er septembre, ce qui suit, en faisant
allusion au règlement intervenu avec les cols bleus à
Montréal, et je cite le premier ministre: "II n'est donc pas question de
permettre à d'autres municipalités ou organismes publics de
suivre cet exemple", l'exemple du règlement des
cols bleus à Montréal. Selon le premier ministre, ils
avaient été trop payés. "Si des négociations sont
en cours et sur le point d'aboutir avant que Québec n'ait
dévoilé sa politique, les administrateurs qui pourraient
être en cause - les gens de la Communauté urbaine de Québec
- sont priés de consulter le gouvernement." Le premier ministre
annonçait qu'il n'y aurait pas de négociations sur les
matières salariales: "consulter le gouvernement". C'était le 1er
septembre 1982.
M. le Président, dès que la grève a
été déclenchée, on a eu l'occasion d'entendre
à la radio et de lire dans les journaux les propos du leader du
gouvernement: C'est une question d'heures, de jours, de semaines, tout au plus;
j'en fais un dossier personnel, avec tout le capital politique que c'est
possible de rapporter. M. le Président, lorsqu'il a posé ce
geste, le leader du gouvernement emboîtait le pas à son premier
ministre qui disait: II n'y aura pas de négociation; j'enlève le
droit de négocier aux travailleurs et aux employeurs de la région
de Québec. De plus, le député de Charlesbourg, dans la
même veine, s'apprêtait, sans doute après avoir
consulté le leader du gouvernement, à évincer du dossier
et à mettre sur la voie de la retraite le nouveau ministre du Travail.
Il s'exprimait en ces termes lors d'une entrevue donnée au journaliste
Pierre-Paul Noreau et que l'on retrouve dans le Soleil du 25 octobre 1982: "Si
le ministre du Travail veut adopter le rythme du caucus des
députés de la région de Québec, il devra chausser
ses souliers de course."
M. le Président, je vous soumettrai respectueusement qu'il a
préféré ne pas les chausser et qu'il a compris le message.
Il s'est simplement contenté d'être sur la voie d'évitement
et de regarder aller ses coureurs. Et dans quelle direction ces coureurs
sont-ils allés, M. le Président? Ils ne sont pas allés au
ministère du Travail. Ils venaient d'écarter le ministre. Ils
sont allés au bureau du premier ministre qui avait dit qu'il n'y aurait
pas de négociation. Cela n'existait plus, le droit de
négociation, ni pour les travailleurs, ni pour les employeurs.
Une voix: C'est cela.
M. Paradis: Là, au bureau du premier ministre, on a
trouvé une oreille très attentive, le chef de cabinet
lui-même, M. Jean-Roch Boivin. Donc, comme médiateur au dossier,
on retrouve le bureau du premier ministre. Cela prenait un deuxième
médiateur au dossier, parce qu'il n'était pas question de
négociation sur les clauses salariales. Le deuxième
médiateur au dossier est Me Lucien Bouchard, coordonnateur des
négociations des secteurs public et parapublic. On prétendra
qu'il n'y a pas de relation entre les deux dossiers. C'est tout à fait
ordinaire.
On vous fait remarquer respectueusement que même les gens de
Montréal n'ont pas eu droit aux services de Me Lucien Bouchard. Il
s'agissait d'une représentation directe du cabinet du premier ministre
et du Conseil du trésor sur le plan de la médiation. Quel pouvait
être le mandat de ces deux médiateurs? Lorsqu'on prend
connaissance du rapport des médiateurs qu'ils ont soumis au premier
ministre du Québec, le 3 novembre 1982, il est facile de constater, pour
la partie syndicale, pour la partie patronale, pour la population qui aura
l'avantage de le lire, qu'on a complètement oublié de faire
rapport de la dimension politique de ce dossier. On n'a pas tenu compte des
propos...
M. Bertrand: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Je voudrais tout simplement demander au
député de Brome-Missisquoi s'il a bien dit tout à l'heure
que dans le dossier de la CTCUM, M. Boivin était allé rencontrer
et que M. Bouchard n'était pas allé... Avez-vous dit que M.
Bouchard n'était pas allé dans le dossier de la CTCUM?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Ce que j'ai dit, M. le leader du gouvernement, c'est
que dans le dossier de la CTCUQ, on retrouve le bureau du premier ministre, le
bureau du Conseil du trésor et que le gouvernement du Québec
prétend - c'est votre position - qu'il n'y a pas de relation entre le
règlement dans cette affaire et le règlement en vertu de la loi
70.
M. Bertrand: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis: M. le Président, mon droit de parole...
M. Bertrand: Non, c'est une question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît;
Question de règlement.
M. Bertrand: M. le Président, j'ai posé la
question, parce qu'on veut bien suivre le député de
Brome-Missisquoi...
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
M. Bertrand: On ne peut pas avoir deux questions de
règlement en même temps, M. le Président.
M. Lalonde: II n'y a aucun règlement...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je
vais écouter la première question de règlement et je
pourrai aller à vous, M. le leader de l'Opposition.
M. Bertrand: Le député de Brome-Missisquoi a dit
que, dans le cas de la CTCUM, M. Bouchard n'avait pas...
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: J'aurais certainement acquiescé à la
demande du leader du gouvernement, s'il avait acquiescé à la
demande de leader de l'Opposition et à celle du député de
Sainte-Marie de tenir une commission parlementaire au cours de laquelle on
aurait pu faire toute la lumière sur ce dossier. Dans les circonstances,
étant donné qu'il a opposé aux travailleurs, aux
employeurs et aux médiateurs une fin de non-recevoir, je lui demande,
s'il veut me poser des questions, de se prévaloir du règlement et
de ne pas m'interrompre au milieu de mon discours.
M. le Président, quel était le mandat de ces deux
médiateurs extraordinaires, le bureau du premier ministre et le Conseil
du trésor? À la lecture du rapport qu'ils ont fourni, on constate
qu'ils ont oublié tout l'élément politique et qu'ils se
sont attachés essentiellement, à la fin, à trouver un
coupable. Ils ne pouvaient pas blâmer le fédéral pour le
conflit à Québec, ils ne pouvaient pas blâmer les taux
d'intérêt. Ils ont tenté de rédiger un rapport par
lequel on pourrait essayer de trouver un peu de culpabilité de l'une des
parties impliquées. Mais le rapport ne mentionne pas les
déclarations du premier ministre, le rapport ne parle pas du rôle
qu'a joué le député de Vanier et leader du gouvernement,
dans ce dossier; aucune allusion n'y est faite, c'est comme s'il n'avait rien
dit. Pourtant, on l'a vu à la télévision, on l'a
écouté à la radio, on l'a lu dans les journaux, tout le
monde s'est rendu compte de ce rôle, sauf les deux médiateurs,
celui du bureau du premier ministre et celui du Conseil du trésor. (18 h
20)
M. le Président, après avoir établi ce
scénario, on nous dépose aujourd'hui un projet de loi
spécial qui est plus spécial encore que les autres, parce que, en
plus du contexte dans lequel il se situe, toutes les négociations dans
les secteurs public et parapublic, il reprend dans une grande partie les
éléments sur lesquels les parties à la pseudo-table des
négociations se sont entendues, sauf un article: la clause salariale.
Alors que les parties étaient près d'une entente, alors que dans
certains milieux on nous dit même qu'un certain mardi soir de cette
semaine il y aurait eu entente, que les autobus rouleraient et que cela se
serait fait par voie de négociation, il y a quelque chose qui a
accroché quelque part. Mais on ne veut pas nous dire exactement quoi et
on cherche un coupable à l'extérieur du cabinet, hors des
politiciens. On refuse la commission parlementaire pour faire la lumière
là-dessus.
M. le Président, c'était tellement près que je vous
lis deux paragraphes du rapport des médiateurs. Je cite: "Sur le plan
salarial, les positions syndicales se sont considérablement assouplies
pendant notre intervention. Le syndicat, qui avait toujours maintenu sa demande
de parité avec les chauffeurs de Montréal, a graduellement
réduit ses exigences salariales pour la première année de
15,5% à 11% en vue d'en arriver à un règlement. Il a aussi
renoncé à la formule d'indexation en deuxième
année. Ces concessions ont été faites dans la perspective
d'une convention collective d'une durée de deux ans au lieu de trois
ans, dont les paramètres acceptés par le syndicat seraient les
suivants: 11% pour 1982, 6% pour 1983 sans indexation."
On continue dans le rapport un peu plus loin. Je cite: "II s'en est
fallu de peu qu'un règlement n'intervienne dans les derniers instants de
notre intervention puisque le syndicat, pour une convention de deux ans,
accepte des paramètres de 11% et 6% sans indexation. Nous avons
même eu l'espoir de voir les parties conclure ce règlement lorsque
le président de la Communauté urbaine de Québec, M. Marcel
Pageau, et le président de la CTCUQ, M. Léonce Bouchard, nous ont
déclaré, hier soir, à l'issue de notre dernière
rencontre, qu'ils recommanderaient à leurs 29 collègues du
conseil de la Communauté urbaine de Québec l'acceptation de la
dernière proposition syndicale que nous a transmise M. Donatien
Corriveau lui-même."
Le lendemain, on nous dit que cela a achoppé. Peut-on s'imaginer
dans quelle position se trouvait l'employeur? Il avait dès le
début des négociations l'assurance du premier ministre, il avait
dès le début de la grève l'assurance du leader du
gouvernement que ce n'est pas la CTCUQ, mais cette Assemblée nationale
du Québec qui réglerait le problème. On n'a jamais, dans
ce dossier, fait face à de véritables négociations
à cause des agissements politiques du premier ministre du Québec
et de son leader du gouvernement.
M. le Président, quelles sont les victimes de cette
stratégie péquiste? Quelles sont les victimes de cette faillite
péquiste en matière de relations du travail? Les premières
victimes sont les usagers, les étudiants de Québec. Ce sont les
travailleurs, les chauffeurs d'autobus, qui n'ont pas eu droit à une
négociation libre, pas une négociation où la matraque est
déjà donnée à quelqu'un avant que cela commence.
C'est la Communauté urbaine de Québec qui n'a pas eu le droit
comme représentant de sa population, de négocier librement, sans
avoir cette matraque qu'elle n'a pas demandée, dans les mains. C'est
finalement l'Assemblée nationale du Québec qui, dès le
début, a été condamnée à jouer le rôle
qu'un gouvernement devrait jouer, qui, depuis tout le début, a
été condamnée à se prononcer sur ce litige, parce
qu'on a préféré faire de la petite politique locale
plutôt que des relations du travail à Québec. On ne
demandera pas au leader du gouvernement à quel coût pour les
contribuables. Déplacer les députés deux jours avant la
rentrée prévue, pour une loi spéciale, pour sauver la
face, mettons 200 $ par député, une centaine de
députés, M. le Président. Les gens qui sont en temps
supplémentaire, ici, partout. Pourquoi? Pour sauver la face du leader du
gouvernement.
Une voix: Du député de Charlesbourg.
M. Paradis: Pour que le gouvernement du Parti
québécois se tire de ce dossier en héros.
Une voix: C'est cela.
M. Paradis: Pour ne pas dire en zéro. Ce qu'il vise, c'est
encore de mettre le blâme sur une des parties, d'empêcher les
travailleurs d'avoir droit à ce qu'ils ont négocié
sérieusement. Ils ont laissé les gens dans la rue et ils disent:
On est des héros, au bout de tout cela. On n'a rien à se
reprocher, nous-autres. On a fait tout ce qu'on avait à faire dans ce
dossier.
M. le Président, j'espère que le député de
Vanier aura autant de rentabilité politique dans ce dossier qu'il en
prévoit. Mais lorsqu'on parle de relations du travail - et c'est
peut-être en guise de conclusion - il est important de s'inspirer de gens
qui n'ont jamais accepté dans la vie, ou du moins s'ils l'ont
accepté ils s'en sont repentis, de consentir à écraser des
principes, à troquer des principes pour des postes de ministres. Sur ce
point, j'aimerais vous lire une citation que l'on retrouve au journal des
Débats du 31 mars 1977 et qui émane du député de
Sainte-Marie qui, lui, a préféré aller siéger
ailleurs plutôt que de renoncer à des principes auxquels il
croyait. Je cite le député de Sainte-Marie: "Adoptons ensemble -
il est à mi-chemin - des mesures qui permettront aux citoyens et aux
travailleurs et aux syndiqués de voir qu'ils peuvent être
traités justement, et là on n'aura même plus besoin
d'adopter une loi spéciale. Les membres de l'Opposition qui craignent la
récidive peuvent se rassurer, lorsque les syndiqués et les
travailleurs auront compris qu'ils ont un gouvernement qui travaille pour
l'ensemble des travailleurs, il n'y aura pas de récidive parce qu'il n'y
aura plus nécessité jamais d'adopter de loi spéciale.
Merci."
C'est ce même député qui a reçu le 29 juillet
1982 une lettre du syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec,
signée par le président général, M. Jean-Louis
Harguindeguy: "M. le député, - c'est adressé à Guy
Bisaillon - les 210 délégués officiels présents au
conseil syndical du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec,
qui se sont réunis à Québec les 8 et 9 juillet courant,
ont adopté une proposition à l'effet de vous féliciter
pour avoir eu le courage de démissionner comme député du
Parti québécois et de siéger à titre de
député indépendant, afin de démontrer votre
désaccord avec les propositions adoptées par le gouvernement,
notamment par l'adoption des lois 68 et 70, qui touchent de façon
particulière les fonctionnaires et ouvriers représentés
par notre syndicat. Nous aurions souhaité que d'autres de vos
confrères ayant des origines syndicales aient également
posé le même geste, considérant que, de plus en plus, le
gouvernement du Parti québécois adopte des lois
répressives qui remettent en question les acquis des travailleurs et
travailleuses du Québec. Je vous prie d'agréer, M. le
député, etc." (18 h 30)
II est bon aussi, lorsqu'on parle de relations du travail,
d'écouter notre premier ministre. Le 31 mars 1977 - il ne le fera plus -
il nous disait - il ne nous le dira sans doute plus: "Autrement dit, si la loi,
au lieu d'être apaisante, arrive au moment où on fait, on dirait,
un effort provocateur dans le climat, pour littéralement le corrompre,
ce climat, au maximum, pour donner des raisons justifiées à un
ensemble de citoyens de se sentir brimés, de se sentir traités
comme ce n'est pas permis de traiter le monde et qu'on prétend ensuite,
avec un gros bâton, que la loi va régler ça, à ce
moment-là le législateur lui-même est responsable."
M. le Président, après avoir entendu le premier ministre,
on va entendre le vice-premier ministre - Oh! la la! - qui nous disait...
Une voix: Qui?
M. Paradis: Le vice-premier ministre, l'honorable Jacques-Yvan
Morin, ministre des Affaires intergouvernementales...
Une voix: Cela se détériore.
M. Paradis: ... qui nous disait, le 27 septembre 1975, lorsqu'il
parlait aux libéraux: "Faudra-t-il se réunir de la sorte, en
catastrophe, sur convocation spéciale au cours des mois qui viennent,
chaque fois qu'un conflit de travail important ne pourra faire l'objet de
négociation de bonne foi entre les parties? Va-t-il falloir que nous
prenions l'habitude, dans cette Assemblée, de manier le marteau-pilon de
la loi chaque fois que des conflits dans les services publics causent des
embêtements à la population? Je reconnais les inconvénients
que cette grève cause à la population de Montréal. Cela
crève les yeux. Il n'y a personne qui soit en désaccord
là-dessus. Mais de là à utiliser, chaque fois que le cas
se présente, la loi, le Parlement, il y a une marge. J'estime que le
précédent que nous posons à l'heure actuelle nous pendra
au bout du nez au cours des mois qui viennent." Il ne savait pas ce qui
l'attendait, lui.
M. le Président, lorsqu'on écoute le premier ministre,
lorsqu'on écoute le vice-premier ministre, on se demande dans quelle
direction ce gouvernement s'en va dans les dossiers économiques. Dans
quelle direction ce gouvernement s'en va dans les relations du travail? En
matière économique, c'est le chef du Parti libéral qui
disait aujourd'hui: "Ils ont perdu le nord, avec tout ce qui se ferme." En
matière de relations du travail, ils n'ont pas une bien meilleure
boussole, M. le Président.
Les travailleurs ne sont pas contents, les employeurs ne sont pas
contents et les utilisateurs de services ne sont pas contents. On
espère...
M. Mathieu: Eux autres sont contents.
M. Paradis: On espère que le député de
Vanier est content de ce qu'il est en train de faire. On espère que le
député de Vanier réussira à appliquer sa
philosophie à ce gouvernement-là parce que plus vite il
l'appliquera, plus vite la population se débarrassera de ce
gouvernement-là. Plus vite le député de Vanier passera sur
le corps de tout le monde en autobus, à Québec et ailleurs, plus
vite les gens auront compris que ce qui intéresse ce
gouvernement-là, que ce qui intéresse le député de
Vanier, ce ne sont pas les droits des travailleurs, ce ne sont pas les droits
des employeurs à négocier librement des conventions collectives,
ce ne sont pas les intérêts des usagers, c'est d'avoir l'occasion
de se promener devant le petit écran, M. le Président et...
Une voix: Ti-Kid Kodak!
M. Paradis: ... on pourrait même le soupçonner
d'avoir eu une influence pour limiter à deux ans le contrat de travail,
parce qu'il souhaite sans doute une autre grève pour pouvoir se parader
devant les écrans de télévision s'il est encore au pouvoir
dans deux ans d'ici. Ce n'est pas avec ce genre de responsabilité, ce
genre d'attitude, qu'on en viendra à de saines relations du travail au
Québec.
J'ai - et je le souligne - apprécié le ton avec lequel le
ministre du Travail, dans le dernier virage, au dernier moment, a
récupéré le dossier. Et lui, au lieu de dire qu'il
était content, au lieu de dire que cela lui permettait de l'"exposure",
il nous a dit que c'était pénible. Si cette attitude se
maintient, M. le présent ministre délégué au
Travail, il y a peut-être moyen d'espérer. Mais, à bonne
attitude, il faudra ajouter de la détermination et du poids. Je suis
certain que lorsqu'il était ministre du Revenu, il avait une bonne
attitude. Il ne voulait pas imposer la taxe sur l'essence. Il ne voulait pas
imposer la taxe sur la bière. Il ne voulait pas voter la taxe sur
l'électricité. Mais, comme il était adjoint au ministre du
Revenu, il ne faisait pas le poids.
Une voix: Au ministre des Finances.
M. Paradis: Adjoint au ministre des Finances, il ne faisait pas
le poids.
Une voix: Je comprends.
M. Paradis: Aujourd'hui, il est ministre
délégué au Travail et, dans son premier dossier, il est
encore une fois - je l'apprécie - bien intentionné. Il nous dit
que c'est difficile d'adopter une telle loi, qu'il ne veut plus en
présenter, qu'il ne le fera plus, qu'il regrette que ce soit sa
première loi. Mais est-ce qu'il fait le poids comme adjoint au leader du
gouvernement?
M. le Président, les travailleurs et les employeurs du
Québec, dans le domaine des relations du travail, ont besoin de
quelqu'un de bien intentionné, oui, mais également de quelqu'un
qui fait le poids et qui n'accepte pas d'adopter n'importe quelle loi parce que
les ordres lui viennent du bureau du premier ministre. Ils ont besoin de
quelqu'un qui prend à coeur les intérêts des travailleurs,
des employeurs et des usagers. C'est ce dont on a besoin. Je souhaite quasiment
au nouveau ministre délégué au Travail et exministre du
Revenu, pour le bien-être de la population, de prendre du poids et cela
presse parce que si vous ne vous pressez pas, ce projet de loi sera
adopté et vous aurez, dans votre premier dossier, écopé
d'une réputation qui aurait pu être tout autre si vous aviez pris
ce poids-là.
M. le Président, le Parti libéral du Québec dit oui
à la reprise des services essentiels. Mais le Parti libéral du
Québec, avec le maigre poids de l'Opposition, parce
que c'est tout ce qu'on est en cette Chambre, dit non à
l'abolition du droit à la libre négociation. Merci, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Chauveau.
M. Raymond BrouiIlet
M. Brouillet: M. le Président, lorsqu'on écoute le
député de Brome-Missisquoi, on est en droit de se demander s'il
sait vraiment pourquoi nous sommes réunis en cette Chambre. Il a
parlé durant une bonne demi-heure et c'est à peine s'il a
trouvé quelques secondes pour parler de la population de la
région de Québec qui, depuis déjà quinze jours,
connaît un arrêt du service de transport en commun. La population
de Québec sait pourquoi nous sommes réunis ici aujourd'hui. Elle
le sait parce qu'elle subit de graves inconvénients que
représente, pour elle, cet arrêt d'un service essentiel. Il est
essentiel pour un nombre considérable de travailleurs qui ne peuvent pas
se payer une voiture. Il est essentiel aussi pour les personnes
handicapées. Il est également essentiel pour un bon nombre de
personnes âgées. Enfin, il est essentiel pour un grand nombre
d'étudiants qui, pour se rendre à leur institution scolaire,
doivent utiliser le transport en commun.
M. le Président, ce n'est pas la première fois que les
citoyens et les citoyennes de la région de Québec subissent les
effets néfastes d'une grève du transport en commun. Depuis la
création de la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec, en 1969, la présente grève est la
sixième que subissent les citoyens de la région. Six
grèves en treize ans, cela représente, si nous faisons la somme
des jours perdus, presque une année d'arrêt du service du
transport en commun. Cela, vous en conviendrez, n'a aucun sens dans une
société civilisée. Chacun se souvient, entre autres, du
dernier conflit qui a duré presque neuf mois. Du moins, M. le
Président, vous pouvez être certain que la population de la
région de Québec, elle, s'en souvient. (18 h 40)
Revenons-en au présent conflit. Devant la lenteur des
négociations, surtout devant le peu de progrès dans les
négociations qui ont commencé il y a déjà
au-delà d'un an, et ayant encore présent à l'esprit le
temps considérable que la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec a mis avant d'en arriver à un
accord avec ses employés lors du dernier conflit qui a duré neuf
mois, la population de la région de Québec, avant même le
déclenchement de la présente grève, a vivement
réagi et a demandé au gouvernement du Québec, par
l'intermédiaire de ses députés de la région,
d'intervenir sans tarder dès le déclenchement de la grève
pour y mettre fin.
M. le Président, d'aucuns auraient souhaité que le
gouvernement mette fin à la grève dès son
déclenchement, mais je tiens ici à signaler que la population ne
doit pas oublier qu'en 1978, à la demande même des élus de
la Communauté urbaine de Québec, l'autonomie administrative
pleine et entière du transport en commun dans la région fut
accordée à la commission de transport et qu'il en revient
à elle, la commission, de par la loi, de négocier avec ses
employés leurs conditions de travail. En 1979, le gouvernement a voulu
respecter cette autonomie et on a vu ce que cela a donné: neuf mois de
grève. Cette fois-ci, les députés de la région de
Québec et le gouvernement, prenant en considération les besoins
de l'ensemble de la population, étaient bien décidés
à ne pas laisser traîner en longueur cet arrêt de
travail.
Avant d'intervenir par une loi, les députés de la
région et le gouvernement ont voulu déployer tous les efforts
pour tenter qu'une entente soit conclue entre les parties, soit la commission
de transport et le syndicat des chauffeurs. Juste avant le début de la
grève, le 23 octobre, le conciliateur dans le dossier, à la
demande même du ministre délégué au Travail, M.
Raynald Fréchette, a convoqué les parties à une même
table pour tenter un rapprochement. On connaît les résultats. Ce
fut peine perdue.
Un ultime effort fut tenté. Le 27 octobre, le gouvernement
mandatait deux médiateurs spéciaux, M. Jean-Roch Boivin, chef de
cabinet du premier ministre, et M. Lucien Bouchard, coordonnateur des
négociations dans les secteurs public et parapublic. Leur mandat
était de rencontrer chacune des parties et de tout mettre en oeuvre pour
conclure une entente. Treize rencontres eurent lieu. Les résultats sont
connus. Ce fut encore peine perdue.
Le 3 novembre, mercredi de cette semaine, les médiateurs
remettaient leur rapport au premier ministre. Dans ce rapport, les
représentants syndicaux, de l'avis des médiateurs, "ont
déployé durant notre intervention - disent les médiateurs
- des efforts sérieux pour se rapprocher d'une zone de règlement
avec la commission." Nous savons qu'au point de départ des
négociations, le syndicat des chauffeurs revendiquait la parité
des salaires avec les chauffeurs de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal. Ceci représentait une
augmentation, pour l'année 1982, d'environ 15,5%, mais à la suite
de la médiation spéciale, les chauffeurs étaient
prêts à accepter 11% pour l'année 1982 et 6% pour
l'année 1983, ceci sans clause
d'indexation. La commission de transport, quant à elle, a
refusé cette proposition. Elle exigeait un contrat de trois ans, de 11%,
6% et 5% respectivement pour les années 1982, 1983 et 1984. Il ne faut
pas oublier que la commission de transport avait offert à ses
employés, en juillet dernier, pour les années 1982 et 1983, des
augmentations de 9% et 8% avec une clause d'indexation forfaitaire, offre
qu'à cette époque les chauffeurs refusèrent. Donc, pour
les deux années, 1982 et 1983, l'offre de juin de la commission de
transport, qui se voulait alors une offre finale, était en
réalité plus avantageuse que la dernière proposition de
11% et 6% sans indexation, acceptée par le syndicat, mais, cette
fois-ci, rejetée par la commission de transport. M. le Président,
devant cette situation, les médiateurs conclurent à l'impasse et
recommandèrent au gouvernement, mercredi de cette semaine, de
légiférer comme seul moyen de mettre fin au conflit.
Je voudrais m'attarder quelques instants sur la critique qu'on entend
souvent et qui laisse entendre que l'intervention du gouvernement a nui aux
négociations. Ce discours fut tenu à la fois par des
représentants du syndicat et par des représentants de la
Communauté urbaine de Québec. Il est intéressant de
savoir, M. le Président, que les raisons alléguées, dans
un cas comme dans l'autre, pour expliquer que l'intervention du gouvernement et
de quelques députés de la région aurait nui aux
négociations, sont des arguments qui s'annulent et qui sont aux
antipodes les uns des autres. Certains représentants syndicaux disent,
je ne parle pas de l'ensemble: Si vous n'aviez pas laissé entendre que
vous étiez pour intervenir par une loi, la commission de transport
aurait cédé, plutôt que de vous laisser
légiférer. Et la commission de transport nous dit: Si vous
n'aviez pas laissé entendre que vous étiez pour intervenir, les
syndicats n'auraient pas déclenché la grève. C'est ce
qu'on nous dit de part et d'autre. Mais je vous demande: Que s'est-il
passé en 1979? Le gouvernement s'est tout à fait abstenu, parce
qu'il venait de donner à la commission de transport l'entière
autorité dans le domaine de la gestion de la CTCUQ. Le gouvernement
s'est abstenu à l'époque et que s'est-il passé? Il y a eu
une grève. Il y a eu, de la part des représentants de la
commission de transport un braquage dans leurs positions. Cela a pris neuf mois
avant que cela soit réglé. Qui en a souffert? Pas uniquement la
population. Je pense que les syndiqués eux-mêmes ont souffert de
cette grève qui a duré si longtemps à l'époque. Il
faut être conscient de cela. (18 h 50)
Maintenant, imaginez quelques instants ce qui s'ensuivrait si le
gouvernement, actuellement, n'intervenait pas et quelles seraient les
conséquences pour l'ensemble de la population, pour ceux qui ont besoin
de ce service essentiel. Ils pourraient encore continuer à en être
privés durant des semaines et des mois - on a eu l'expérience de
1979, neuf mois - mais qu'est-ce qui s'ensuivrait aussi pour les travailleurs,
chauffeurs d'autobus syndiqués qui se trouvent actuellement
coïncés entre le refus de l'offre patronale du mois de juillet et
l'entêtement actuel de la Commission de transport qui ne veut pas
démordre d'une offre à la baisse? C'est cela la
réalité et c'est dans cette réalité que se trouvent
coïncés actuellement la population de Québec et les
travailleurs syndiqués qui sont les chauffeurs d'autobus. Si le
gouvernement intervient, c'est à cause de cette situation. Nous sommes
conscients que ce conflit va perdurer des semaines et des mois, si nous
n'intervenons pas. C'est pour éviter les conséquences de cette
grève qui pourrait durer indéfiniment, que les
députés de la région de Québec on pris leurs
responsabilités en faisant en sorte que, par leurs interventions
répétées auprès du gouvernement, le conflit ne
traîne pas en longueur. Et le gouvernement du Québec a pris, lui
aussi, ses responsabilités en déployant tous les efforts pour
parvenir à un règlement négocié.
Aujourd'hui, devant l'impasse et pour le bien-être de l'ensemble
de la population, il est de notre devoir de légiférer pour
redonner aux usagers de la région de Québec, un service qui leur
est essentiel: le transport en commun sur leur territoire. Merci.
Le Président: M. le député de
Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. La région de
Québec est dans une situation rendue extrêmement difficile par une
suite d'événements dont elle est la victime actuellement.
L'idée est de faire avaler une pilule extrêmement
amère à la population de Québec en laissant croire, par
des interventions intempestives, des interventions précipitées
qui ont été provoquées par des actions gouvernementales,
que nos amis d'en face, que les gens du Parti québécois ont
à coeur l'avenir, le bien-être, la santé économique
de la région de Québec.
M. le Président, rien n'est plus faux. C'est prendre les gens
pour plus naïfs qu'ils ne sont que de faire croire qu'après avoir
provoqué un désir artificiel d'une intervention extrêmement
rapide, parce qu'on savait qu'en prononçant certaines paroles, qu'en
posant certains gestes, il était certain que les deux parties devaient
éventuellement accepter de s'en remettre à une action
gouvernementale
pour le règlement du conflit...
Il existe en droit un principe qui dit qu'on ne peut invoquer sa propre
turpitude dans sa propre défense. Le gouvernement actuel se montre comme
le héros du jour, comme la personne qui vient sauver la région de
Québec qui est au désespoir et en désarroi. Le
gouvernement essaie, de cette façon, de se refaire une virginité,
de faire croire aux gens qu'il est nécessaire de procéder
inévitablement, par une loi spéciale, dans un cas comme celui qui
nous touche actuellement, soit la grève du transport en commun à
Québec.
Dans tous les exposés qui ont été faits
jusqu'à maintenant, on fait grand cas de l'évolution des offres
patronales, de l'évolution des demandes syndicales, sauf qu'on oublie
une date charnière extrêmement importante, c'est l'intervention du
premier ministre Lévesque qui a qualifié un règlement
à Montréal comme étant un règlement qui
n'était pas conforme aux politiques gouvernementales qui était
excessif, et qui conseillait aux dirigeants municipaux d'aller voir le grand
frère, sur la Grande-Allée, dans l'édifice J, avant d'agir
dans un domaine comme celui des négociations collectives. Le premier
ministre est à la source même de l'impossibilité reconnue
dans laquelle il a mis les parties d'en venir à une entente. Il y a du
machiavélisme politique dans cette façon d'agir. Comment
qualifier autrement une façon de faire qui consiste à s'arranger
au moyen de gestes savamment calculés, savamment synchronisés
pour que, d'une façon absolument inéluctable, le gouvernement
doive intervenir pour soi-disant sauver une région qui est plus durement
touchée actuellement que n'importe quelle autre probablement de la
province. Ce n'est pas peu dire. C'est du machiavélisme politique, c'est
du calcul politique, c'est de l'hypocrisie politique et c'est une façon
de gérer la chose publique qui n'est pas du tout transparente, pour ne
pas dire malhonnête.
M. le Président, on ne peut reprocher aux syndiqués, au
syndicat, on ne peut reprocher aux élus municipaux de ne pouvoir se
rencontrer quand les gens mêmes qui voudraient prétendre qu'ils se
rencontrent sont ceux qui ont érigé des murs au lieu de faire des
ponts. Agir comme cela et dire le contraire des gestes qu'on a posés,
c'est de l'hypocrisie.
M. le Président, la région de Québec est le
microcosme de ce qui se passe dans toute la province. Nous avons vu le
député de Vanier, leader parlementaire du gouvernement, qui y est
allé de déclarations extrêmement rapides sur son soi-disant
désir de voir intervenir le gouvernement dans des délais
extrêmement courts. Il a, dès ce moment, invoqué l'urgence
de la situation, le besoin pour la population dans une crise économique
- le reconnaissait-il lui-même -plus importante que celles qu'on n'ait
jamais connues auparavant, que ce genre de grève, que ce genre de
difficulté supplémentaire qu'on connaissait actuellement, rendait
la situation absolument intolérable.
Agissant de la sorte, il a très habilement rappelé
à la population le traumatisme terrible qu'elle avait subi pendant neuf
mois lors de la dernière grève du transport en commun à
Québec. Ce faisant, encore très habilement, il a provoqué
une avalanche d'appels téléphoniques de personnes qui ont dit:
Cette fois, nous allons faire connaître notre idée et notre besoin
d'un transport en commun tellement rapidement pour qu'on ne soit pas mis dans
une situation où le gouvernement pourra prétendre ne pas avoir
connu le besoin qu'on avait, ce désir d'avoir, nous, les usagers du
transport en commun, le transport qui nous est dû et auquel on a droit.
C'est de la provocation. Cela a donné les résultats
espérés. Plus habilement encore - quand il le dit ici en Chambre,
il s'adresse aux chauffeurs d'autobus ou aux syndiqués - il dit: Les
appels téléphoniques que j'ai reçus, les appels
téléphoniques que mes collègues ont reçus
étaient - il ne s'adressait pas à nous, de l'Opposition - pour
vous remplacer, MM. les chauffeurs d'autobus, pour vous mettre à la
porte et vous "sacrer dehors". C'était cela la teneur des appels
téléphoniques qu'on recevait. Ce faisant, encore très
habilement, le député de Vanier, leader parlementaire du parti
ministériel, avertissait les chauffeurs d'autobus que malgré tout
le mal qu'il leur faisait, finalement, il les sauvait d'un mal plus grand qui
était celui qui était désiré par la population.
C'est très habile. C'est en même temps machiavélique, mais
la population ne sera pas dupe de ces façons de faire.
Il dit aussi aux élus municipaux: Vous autres, vous ne savez pas
administrer. Vous ne savez pas calculer votre capacité de payer. On ne
vous fait pas confiance. Vous n'êtes pas capables, vous ne connaissez pas
vos contribuables, vous ne connaissez pas la base de votre évaluation
foncière, vous ne savez pas ce que vous pouvez aller chercher en taxes,
vous ne savez pas les sacrifices que font déjà les contribuables.
Nous, nous vous dirons ce que vous allez payer, nous vous dirons ce que vous
allez chercher dans les poches des contribuables, parce que nous, nous sommes
plus fins et plus habiles que vous et nous avons surtout la loi spéciale
que nous pouvons faire adopter. C'est ce qui nous arrive. On réussit
à faire d'une seule pierre deux coups, à sauver les chauffeurs
d'autobus, les syndiqués d'une espèce de menace vague,
nébuleuse, soi-disant voulue par la population. (19 heures) Le
député de Vanier a sondé les reins et les
coeurs de la population. Il peut dire aux chauffeurs qui étaient
ici tout à l'heure - il en reste encore - Messieurs, remerciez le bon
Dieu que je sois là, moi, le député de Vanier, parce que
moi, je vous assure vos jobs. Les gens m'ont dit qu'ils voulaient vous
ôter vos jobs; heureusement, je suis là pour mettre un "stop"
à cela et, grâce à moi, vous allez pouvoir continuer
à exercer votre métier. Il n'y a personne qui vous croit, M. le
député. Il n'y a personne qui vous croit, M. le ministre...
Une voix: Moi, je ne le crois pas.
M. Doyon: ... parce qu'on est habitué à ce genre de
sparages.
En même temps, vous dites aux élus municipaux, vous dites
aux contribuables dont ils sont les représentants: MM. les
contribuables, vous n'avez pas su exercer votre droit démocratique de
vote en choisissant des dirigeants municipaux qui ne pouvaient évaluer
correctement une situation financière qui est la vôtre, la
situation financière de votre ville mais nous, du gouvernement, du haut
de nos capacités et de nos connaissances, nous allons dire aux
contribuables ce qu'ils peuvent payer. Ils ont réussi un coup de
maître, M. le Président, il faut le faire, en disant aux
chauffeurs: On vous protège d'un chômage certain. En même
temps, ils disent aux contribuables: On met en tutelle les administrateurs
municipaux qui ne sont pas assez bons, malgré que vous les ayez choisis.
Cela, il faut le faire, M. le Président.
Derrière toute cette démarche, je pense que cela vaut la
peine de regarder comment les choses se sont déroulées
aujourd'hui à l'Assemblée nationale. On a vu le ministre des
Communications, leader parlementaire, député de Vanier, grande
vedette de télévision, grande vedette de communications, venir
nous expliquer pendant 45 minutes pourquoi il y avait urgence, alors que nous,
de ce côté de la Chambre, nous étions prêts à
nous laisser convaincre par une démonstration qui aurait pu durer quatre
ou cinq minutes. Il a pris 45 minutes, M. le Président!
Une voix: C'est épouvantable!
M. Doyon: Cela, c'est un corollaire, l'urgence de la situation.
Ce n'est pas le but de notre réunion ici. Ce n'est pas de décider
si la situation est urgente ou pas, c'est d'adopter une loi dont on veut
connaître la teneur. Que voit-on? Pendant 45 minutes, il nous explique
pourquoi c'est urgent.
En contrepartie, le ministre délégué au Travail -
qu'on n'a pas vu, en passant, dans la région de Québec, dont on
n'a pas entendu parler - qui est le parrain du projet de loi, qui est le
ministre responsable, celui à qui incombe la responsabilité
ministérielle de nous présenter la loi elle-même, nous fait
un laïus d'une dizaine de minutes. On voit ici la contradiction, M. le
Président. Finalement, on permet au député de Vanier,
ministre des Communications, leader parlementaire, d'être encore la
grande vedette du show politique qu'on a ici aujourd'hui. Il est la grande
vedette, au compte de 45 minutes contre 1Q, M. le Président.
Cela, c'est symptomatique de ce qui se passe ici à
l'Assemblée nationale. On est en train de dire à la population de
prendre des vessies pour des lanternes et à telle enseigne que dans la
loi qu'on a ici, le projet de loi no 84, on rétablit le service à
la population dimanche matin à 0 h 01, alors que n'importe qui ayant eu
l'occasion de se promener, de déambuler dans les rues de Québec -
les dirigeants de la CTCUQ l'ont affirmé à maintes reprises -
sait que le dimanche, les autobus de la CTCUQ se promènent à peu
près vides. C'est tellement vrai que, n'eût été
l'obligation dans laquelle est la CTCUQ de faire rouler les autobus le
dimanche, il n'y en aurait possiblement pas le dimanche. Pendant cette
journée, le service est purement déficitaire. On se
précipite tellement, on s'active, on donne l'impression de l'urgence en
rétablissant le service une journée où, finalement, la
preuve est loin d'être faite qu'on en a besoin, si on regarde qui est
dans les autobus, à quel rythme ils circulent et combien il y en a.
M. le Président, cela, c'est de l'improvisation. C'est tout
simplement pour que cela aille bien avec le show politique qu'on est en train
de nous monter. Il faut que tout cela se tienne. Peu importent les besoins
réels de la population, peu importe que cela coûte de l'argent
à la population. Cela, c'est une chose. On s'aperçoit que cela ne
va pas ensemble, qu'il y a contradiction.
M. le Président, de deux choses l'une. Ou c'était une
urgence terrible et, à ce moment-là, tout comme une porte doit
être ouverte ou fermée, il n'y a pas de degré dans
l'urgence. Il est de la nature d'une chose urgente qu'elle ne puisse attendre,
autrement elle cesse d'être urgente. C'est ça la définition
de l'urgence.
S'il y avait urgence aujourd'hui, l'urgence existait de la même
façon dès le début de la grève. Et si l'urgence
n'était pas de telle nature qu'elle puisse provoquer une action
immédiate de la part du gouvernement qui a nommé des
émissaires, des gens qui sont allés faire les matamores, qui sont
allés faire de l'intimidation politique, je vous souligne que convoquer
l'Assemblée nationale un vendredi et la faire siéger alors que
normalement, pendant la session, l'Assemblée nationale ne siège
même pas le vendredi, il y a là encore contradiction.
Si on pouvait attendre jusqu'à maintenant, je vous dis qu'il
aurait été
possible, pour des raisons qui sautent aux yeux, mais qui n'auraient pas
servi les fins politiques du gouvernement, de faire en sorte que lundi on
puisse réunir les membres de l'Assemblée nationale et commencer
par cela, de façon à éviter ce déplacement de 122
parlementaires, toute cette mise en oeuvre de l'appareil de l'Assemblée
nationale. On aurait pu tenir compte des coûts que cela implique pour que
nous puissions avoir l'assurance qu'on avait, de la part du gouvernement, une
preuve de sérieux et de continuité dans l'action en même
temps que dans la réflexion. Cela a manqué, M. le
Président.
Ce qu'il faut déplorer aussi dans ce dossier, c'est le fait que
le ministre du Travail n'ait pas affirmé avec plus d'autorité sa
présence. Il est possible qu'il y ait eu une décision
gouvernementale politique à prendre, à savoir est-ce qu'on
donnait priorité, prédominance à des enjeux politiques
immédiats de la nature de ceux qui pouvaient sauver la face du
député de Vanier, leader parlementaire, et qu'il puisse se
targuer, après, d'une intervention rapide grâce à sa
supposée intervention, ou, encore, devait-on s'en remettre aux
responsabilités ministérielles confiées par le premier
ministre au nouveau ministre du Travail?
On avait une décision à prendre. Personnellement j'aurais
été - et je pense que la population l'aurait été
beaucoup plus aussi - impressionné si le ministre du Travail avait
été le ministre responsable de mener ce dossier. Dans la
région de Québec on ne l'a pas vu, on n'en a pas entendu parler;
c'était à se demander s'il était encore là, mais on
a entendu beaucoup parler du député de Vanier, par exemple. Il y
avait sûrement une décision à prendre, à savoir si
on privilégiait le député de Vanier pour qu'il puisse
tirer un supposé capital politique de son action, ou si on laissait les
choses se passer dans le sens que le prévoit la formation d'un cabinet
responsable. La décision politique qui a été prise a
été de privilégier avant tout un capital politique
immédiat, même si, dans l'ensemble, cela devait laisser aussi bien
les travailleurs que la population de Québec, que les employeurs, les
villes, les maires et les conseillers, avec la certitude que le gouvernement
agissait purement et simplement par opportunisme politique.
Parce que je suis extrêmement conscient, étant
député de la région de Québec, de la
nécessité de rétablir ce service essentiel pour les 60 000
ou 70 000 usagers du transport en commun, et parce que le gouvernement nous
présente une loi qui est indissociablement liée à un
décret de retour au travail, je devrai donc, en considération du
besoin qu'ont les gens de se servir du transport en commun, voter pour cette
loi.
Je le ferai en soulignant cependant que cette action du gouvernement ne
dupe personne.
Une voix: C'est ça.
M. Doyon: Elle tente de cacher son ineptie totale en
matière de relations du travail et le gouvernement est en contradiction
avec lui-même. (17 h 10)
M. le Président, je vais terminer là-dessus. Quand le
député de Vanier, la personne qu'on a vue le plus dans ce
dossier, nous dit textuellement, dans sa présentation, que les services
de transport en commun sont des services essentiels, c'est une reconnaissance
de la part du député de Vanier et ministre des Communications.
À ce moment-là, s'il s'agit de services essentiels, que fait-on
de la loi no 72 qui vise essentiellement à permettre la protection de
ces services essentiels, qui vise justement à ce que, dans les domaines
public ou parapublic, les personnes qui ont besoin de certains services qui
doivent être déterminés comme étant essentiels,
puissent continuer d'en profiter? Le député de Vanier nous dit
qu'il s'agit là de services essentiels. Alors, où est la loi
qu'on a adoptée au mois de juin? Quelle en est l'utilité?
Il faut regretter cette attitude du gouvernement et il faut
espérer que ce que le leader parlementaire a qualifié de coutume,
tout à l'heure, cesse d'en être une, parce que si vous voulez mon
avis sincère, c'est une très triste coutume.
Une voix: Très bien.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: M. le Président, si c'est une loi d'urgence,
il semble que ce ne soit pas tellement une loi d'importance, puisque le nombre
de parlementaires qui assistent à nos débats ne nous indique pas
qu'il y a urgence et importance de la question.
Une voix: Ce sont les députés de votre parti.
M. Bisaillon: Nous sommes tous présents, M. le leader du
gouvernement.
J'écoutais, M. le Président, le député-de
Louis-Hébert et je me disais: Que de beau monde! Le leader du
gouvernement, depuis un certain temps, nous explique jusqu'à quel point
les maires de la région de Québec sont tous ses amis et, de
l'autre côté, les gens essaient de nous expliquer que ce ne sont
pas leurs amis. Le député de Louis-Hébert essaie de nous
expliquer que
c'est un peu vite, lui qui a laissé la grève durer neuf
mois la dernière fois; il connaît cela un peu, hein!
Des voix: Ah!
M. Bisaillon: Je me disais, M. le Président: Si on mettait
cela de côté, maintenant que les jeux ont été faits
des deux côtés de la Chambre, le débat politique qui se
fait sur cette négociation! Effectivement, quelqu'un passait la
réflexion tantôt: C'est une négociation qui est
peut-être plus politique encore que celle du front commun qui elle,
pourtant, devrait l'être davantage. À la lumière de cela,
peut-être qu'on pourrait s'en tirer avec une loi ou avec une
méthode d'aborder le problème qui rendrait justice aux
intérêts qui sont en cause.
J'ai trois remarques préalables à faire, M. le
Président, avant d'entrer sur le fond de la loi qui est devant nous. Une
première remarque, c'est pour expliquer que, depuis quatre ans, en cette
Chambre, j'ai toujours défendu la nécessité, quand on
parle de transport en commun, de maintenir des services essentiels. J'ai
toujours expliqué que, quant à moi, ces services étaient
tout aussi importants pour les moins bien nantis de notre
société, pour les travailleurs à bas salaire, pour les
personnes âgées, pour les étudiants, pour plusieurs
catégories de la population, et que le transport en commun était
un service essentiel qu'on devait assumer. J'ai toujours prétendu aussi
que l'action des syndicats ne visait pas à pénaliser ces
gens-là, mais les moyens qui sont pris souvent ne rejoignent pas - on en
est de plus en plus conscients - les vrais responsables. Les vrais responsables
dans le dossier - je vais essayer de le démontrer tantôt - ce ne
sont sûrement pas ceux qui sont pénalisés par l'arrêt
de travail, et au-delà du fait qu'ils soient pénalisés par
l'arrêt de travail, ceux qui sont pénalisés par au moins
l'absence de services essentiels.
Dans les circonstances, en fonction des positions que j'ai
déjà tenues en cette Chambre et malgré que je n'aie jamais
voté de loi spéciale, sauf celle sur le transport en commun pour
la région de Montréal parce qu'il n'y avait pas de services
essentiels, ma position sur ce projet de loi sera identique à celle que
j'ai déjà tenue.
Par ailleurs, je trouve qu'il est odieux de nous demander à nous,
parlementaires, de nous prononcer sur une question globale, de tenir compte de
la reprise des services, donc, d'assumer au moins des services essentiels et,
d'autre part, du contenu du projet de loi, parce que c'est une
loi-décret. Il me semble qu'on devrait scinder au moment du vote ces
deux questions. J'annonce dès maintenant que j'aurai une motion pour
scinder ces deux questions parce que c'est pour moi deux questions tout
à fait différentes.
Deuxième remarque. Je viens de parler de services essentiels. Il
faut cependant se rendre compte que s'il n'y a pas eu de services essentiels de
maintenus pendant cette grève du transport en commun dans la
région de Québec, cela n'est pas du ressort du syndicat
concerné. Le syndicat concerné a respecté totalement et
intégralement la loi qui s'appliquait à lui. Il faut donc
blâmer le gouvernement de ne pas avoir inclus cette possibilité
lorsqu'il a voté la loi sur les services essentiels, parce que dans la
rédaction même de la loi sur les services essentiels, on excluait
la grève de la CTCUQ en sachant fort bien pourtant, tous les
députés de la région de Québec étaient
présents quand on a adopté cette loi, que c'était une
possibilité et que le dossier de la CTCUQ n'était pas meilleur
que celui de la CTCUM. On aurait donc pu prévoir au moins le maintien de
services essentiels, ce qui nous aurait permis, aujourd'hui, de tenir un
discours fort différent.
Troisième remarque, M. le Président, je ne voudrais pas
tourner le fer dans la plaie inutilement, mais il me semble que les attitudes
en cours de négociations de la part de personnes politiques, peu importe
où elles se situent, ont certainement nui au déroulement ou
à un bon déroulement des négociations. Dans les
circonstances, cela a amené un désintéressement, ou, en
tout cas, une espèce d'assurance à la partie patronale qu'elle
pouvait y aller de gaieté de coeur, qu'elle pouvait retourner en
arrière sur des propositions déjà faites, ce qui en
négociation - ceux de l'autre côté qui ont
l'expérience des négociations savent ce que je veux dire, quand
on parle de "backtracker" en négociations - consiste à faire des
retours en arrière, de revenir sur des offres déjà faites.
On sait ce que cela a produit en négociation. Cela s'est produit dans ce
dossier.
Ces remarques préliminaires étant faites, M. le
Président, je voudrais traiter le sujet en trois temps.
Premièrement, revenir rapidement sur le déroulement de
l'espèce de négociation spéciale, sur le contenu de la loi
et, finalement, et surtout, parler des implications de ce projet de loi non
seulement pour les travailleurs concernés, mais peut-être bien
pour le gouvernement comme tel, pour le Parlement aussi, dans ce qui s'en
vient, et pour le programme du parti que représentent les membres du
gouvernement qui siègent à cette Assemblée. Le
déroulement est assez rapide. Au mois de juin, la partie patronale fait
une offre salariale qui était de l'ordre - on nous l'a expliqué
tantôt - de 9% pour la première année, 8% pour la
deuxième, 6,5% pour la troisième année et une indexation.
Je ne sais pas si cela peut aider, mais j'ai fait comme
le leader du gouvernement - on apprend à le regarder parfois - je
me suis préparé un petit tableau. Vous m'excuserez, mon petit
tableau n'a pas la qualité de celui du leader. Je n'ai pas les
ressources qu'il peut avoir à sa disposition. Voyez-vous? Vous ne le
voyez pas à la TV, mais vous autres, j'espère que vous le voyez.
Peut-être que le leader pourrait venir se placer en arrière. Je
suis sûr que les caméras le suivraient. D'un côté,
c'est la démarche du "boss". De l'autre côté, c'est la
démarche du syndicat. Cela part du mois de juin.
Au mois de juin, le "boss" offre 9%, 8%, 6,5% et indexation. De l'autre
côté, le syndicat, pour sa part, demande 15,5%, 8,5%, 6,5% et
indexation. On voit qu'il y a comme un écart. 9%, 8%, 6,5% et
indexation, cela permet un règlement au moins dans le cas d'un syndicat,
parce que son normatif est réglé et il règle à ces
conditions-là. Donc, la partie patronale a les moyens, au mois de juin,
de payer 9%, 8%, 6,5% et de donner l'indexation en plus. On est au mois de
juin. On continue, M. le Président. On va voir la démarche du
boss. (19 h 20)
Avec 9%, 8%, 6,5% et l'indexation, il règle une convention
collective, sinon deux, mais certainement une. Par la suite, il se tourne du
côté de l'autre syndicat et dit: C'est 9%, 6%, 5% et pas
d'indexation. Vous comprendrez tous que cela négocie très bien.
Cela va plus loin. Après, ils maintiennent des positions en disant
toujours trois ans et, finalement, dans un télégramme que le
premier ministre a reçu dernièrement et dont j'ai copie, leur
dernière position est 11%, 6%, 5% pour la troisième année
et pas d'indexation. Cela doit être vrai, leur dernière position,
parce que dans le télégramme il est dit que cela a
été accepté à l'unanimité et que le grand
"boss" qui était à Paris a dit: D'accord. Pour nous montrer que
c'est vrai, ils nous disent: On lui a téléphoné. N'ayez
pas peur. C'est vrai, cette fois. On l'a rejoint et il nous dit que c'est cela.
Leur dernière position, c'est 11%, 10% et 5%.
Savez-vous, M. le Président, ce que cela représente, la
différence entre les 11% et 6% - prenons seulement les deux
premières années - et entre les 9% et 8% qui ont
déjà été accordés au mois de juin? 9% et 8%,
cela donne, sur deux ans, 17,72% d'augmentation et 11% et 6% sur deux ans, ce
qui était proposé, ce qui était discuté, cela
représente 17,66%, soit 0,06% de moins que ce qu'ils donnaient
déjà au mois de juin. À 11,6%, ils donnent
déjà moins que ce qu'ils donnaient au mois de juin.
Regardons maintenant du côté du syndicat de quelle
manière cela a évolué. La première étape est
la suivante: 15,5%, 8,5%, 6,5% et l'indexation. À la deuxième
étape, ils disent: D'accord, 11,5%, 6%, pas de troisième
année et toujours l'indexation. À la troisième
étape, ils disent: 11%, 6%, pas de troisième année et
l'indexation. À la quatrième étape, ils disent: 11%, 6%,
pas d'indexation et on règle.
M. le Président, c'est une démarche de négociation.
C'est une démarche d'affrontement. Mon petit tableau n'est
peut-être pas clair, mais en tout cas, quand je vois le portrait, c'est
clair. Ce n'est pas clair seulement pour moi, M. le Président, c'est
clair pour les deux personnes que le Conseil des ministres... Aïe! On ne
rit plus! On se réunit à l'Assemblée nationale, mais,
avant, le Conseil des ministres s'était penché là-dessus.
Le Conseil des ministres a trouvé cela suffisamment important pour dire:
On va envoyer deux personnes. Engueulons-nous sur les mots. Appelons cela des
négociateurs particuliers. Appelons cela des médiateurs. Appelons
cela au moins comme cela a été dit dans le temps:
C'étaient des émissaires. Vous savez ce que cela veut dire, M. le
Président? Je suis allé emprunter un des huit dictionnaires du
député de Louis-Hébert et j'ai regardé ce que le
mot "émissaire" voulait dire.
Des voix: Ah! Ah!
M. Bisaillon: J'ai compris que le mot "émissaire" voulait
dire: Tu as un job à aller faire. Va le faire et va dire aux parties qui
sont là qu'il est préférable de régler. C'est ce
que cela veut dire pour moi, un émissaire. Or, les émissaires
disent dans leur rapport: Le syndicat a collaboré. Le syndicat a tout
fait pour en arriver à un règlement et, à deux endroits
dans leur rapport, ils disent: La partie patronale n'a pas fait cela. Elle n'a
tellement pas fait cela que, le 31 octobre, elle a reculé encore sur des
choses qu'elle avait déjà offertes. C'est la situation. C'est le
déroulement.
Quel est le contenu maintenant, M. le Président? Le contenu,
c'est que dans la démarche - et ceux qui ont fait une négociation
savent ce que c'est - on envoie des émissaires. Ils ont des rencontres
avec les parties. Ils font descendre une partie à 11,6% - je vous en ai
démontré le déroulement - et après ils disent
à l'autre: 11,6%, pas d'indexation, attends un peu, on va aller voir le
"boss". Dans leur rapport, ils disent que les deux personnes, M. Bouchard et M.
Hains, je pense, s'étaient engagées à aller vendre 11,6%.
M. Mageau...
Une voix: M. Pageau.
M. Bisaillon: Pageau, Mageau, cela a l'air que cela revient tout
au même, M. le Président. Ce monsieur, en tout cas, qui a dit
qu'il était pour aller vendre, qui a voté contre ce qu'il avait
dit en premier, ce monsieur avait dit aux émissaires: Je vais
aller vendre 11,6%. Il disait même - et c'est mentionné
dans le rapport - qu'au moment où il les a rencontrés il
préparait déjà ses arguments de vente. En tout cas, comme
vendeur, M. le Président, il repassera, parce que comme vendeur il s'est
plutôt laissé acheter. C'est la conclusion que j'en tire, sauf que
cela donne comme résultat - c'est ce qu'il faut qu'on regarde - qu'ils
refusent. Us ont le droit de refuser. Et là, nos émissaires
reviennent.
M. le Président, je pense que c'est la chose la plus importante
de tout ce qu'on discute aujourd'hui, la chose la plus grave. Le Conseil des
ministres a envoyé, a délégué deux personnes pour
régler un conflit. Ces deux personnes sont mandatées, au fond,
directement par le Conseil des ministres pour observer et pour rapprocher les
parties. Ce n'est pas n'importe qui, M. le Président. C'est le
négociateur en chef du gouvernement et c'est le bras droit du premier
ministre. Là, on ne rit plus, ce n'est plus juste des passeux de papiers
qu'on a envoyés, on a envoyé deux personnes responsables, deux
personnes qui ont la confiance du premier ministre.
Cela me fait penser, M. le Président, il faut que je prenne deux
minutes pour vous conter une petite histoire, ça ne sera pas long,
ça concerne... La scène se passe en l'an 2005... C'est une
histoire qui m'a d'ailleurs été contée par un
député ministériel, que je pourrai vous identifier par la
suite, si vous le désirez. Je l'ai cependant aménagée,
évidemment. C'est la République du Québec et le
président de la République, Pierre-Marc Johnson, reçoit un
appel téléphonique de son premier ministre, Daniel Johnson, qui
lui dit: Écoute, ça ne marche plus, tout va mal, le métro
à Québec, ça ne marche pas depuis trois jours et le maire
de Québec, Jean-François Bertrand, ne veut rien savoir.
Là, le président de la République dit: Des
problèmes comme ça, ça fait un bout de temps qu'on n'en a
pas eu; pas encore! Il dit: Une minute. Jean-Roch!
M. le Président, extérieurement, quand on conte ça,
c'est drôle, mais cette petite histoire veut dire quelque chose;
ça veut dire que quand un premier ministre ou un président de la
République se tourne vers quelqu'un, c'est parce que c'est le temps que
ça se règle et que c'est la personne de confiance. Or, la
personne de confiance a rencontré le syndicat, elle l'a fait baisser,
elle a dit: 11%, 6%, pas d'indexation, ne pensez plus à l'indexation;
à 11,6% est-ce qu'on règle? Le syndicat dit: On donne notre
parole qu'on va régler. Et, M. le Président, pour ceux qui ont
déjà fait de la négociation, ceux qui ont
déjà été ministres du Travail, celui qui vient
d'arriver, en négociation, la parole donnée c'est l'affaire la
plus importante, et quand on passe à côté de ça, on
est sûr qu'on va tout manquer par la suite. Ne pensez plus à
espérer - pour le député de Louis-Hébert - de
meilleurs lendemains. Il n'y en aura plus si on n'est pas capable de faire
respecter la parole donnée.
Or, je vais prendre mon deuxième tableau...
Des voix: ...
M. Bisaillon: Écoutez si vous ne voyez rien. Mais c'est
juste pour montrer que moi aussi je suis capable de faire des tableaux!
Quelle est la situation? Le syndicat dit: 11%, 6%, pas d'indexation, je
règle. La partie patronale, dans un télégramme
envoyé au premier ministre, dit: 11%, 6%, pas d'indexation et 5% pour
une troisième année. Et nous, nos porte-parole qui reviennent
disent: II n'y a pas de règlement possible parce qu'il y en a un qui n'a
pas respecté les règles du jeu. Ils disent aussi ça et ils
nous mettent dans le projet de loi: 10%, 6% et indexation. D'après moi,
il y avait un gros bloc où tout le monde aurait pu s'entendre: 11%, 6%,
pas d'indexation, tout le monde s'entendait là-dessus. Il n'y avait
qu'une chose pour laquelle les "boss" n'auraient pas été de bonne
humeur, c'est qu'on leur enlevait la troisième année de
convention collective. De toute façon, on la leur enlève
là-dedans. Alors, quant à la leur enlever, pourquoi les mettre en
maudit deux fois? Si ce sont de grands amis, au moins organisons-nous pour
qu'ils soient contents sur trois points et, quand ils vont être contents
sur trois points, on va être sûr que le syndicat ne sera pas
content, mais il va dire: Au moins la parole donnée a été
respectée. Au moins les démarches entre nous deux auront
été respectées. Le jeu aura été
tronqué parce que l'employeur aura mal fait son travail, mais au moins
on aura respecté ce qu'on a dit à nos membres.
M. le Président, cela ne coûte rien de plus; ça
coûte 0,6% de moins que ce qui était déjà offert en
juin et que ce qui est déjà payé par la CTCUQ à
deux autres syndicats. (19 h 30)
Devant ça, il me semble que le gouvernement doit
réfléchir et dire: II y a des négociations fort
importantes qui s'en viennent aussi. D'accord, nous allons régler le
conflit. D'accord, nous allons nous assurer que le transport en commun se fasse
dans la région de Québec, mais on ne compromettra pas tous les
efforts de négociation et toute la bonne volonté qui a
été manifestée par le syndicat et par les travailleurs
pour en arriver à un règlement. En faisant cela, on ne
compromettra pas non plus ce qui s'en vient comme autre démarche, parce
que si c'est cela que cela annonce, ce qu'on fait aujourd'hui, si cela annonce
demain, cela veut juste dire une chose: cela veut dire que
jamais plus MM. Bouchard et Jean-Roch Boivin ne pourront aller
rencontrer les présidents des centrales pour essayer de dénouer
un conflit à la dernière minute; jamais plus ce ne sera possible.
Peut-être que c'est ce qu'on veut, mais si c'est ce qu'on veut, on se
prépare d'autres affrontements.
Je pense qu'on devrait lucidement, quand on sera rendu à
l'étape de l'étude article par article, revenir à ce qui a
été convenu entre les parties, donc aux 11% et 6%. Savez-vous ce
que cela représente? Cela représente 0,10 $ de plus la
première année et 0,10 $ de plus la deuxième année.
Cela représente moins que ce que cela nous coûte aujourd'hui pour
adopter la loi. En plus de cela, nous sommes à faire le job des autres!
Cela nous a été expliqué clairement par le leader du
gouvernement. Nous sommes à faire leur job parce que, dès 1979,
c'était leur responsabilité et ils ne l'ont pas prise. Donc,
aujourd'hui, tout le Québec paie pour faire "la job" des maires et des
autorités de la CTCUQ. Quand on fait "la job" de quelqu'un, cela
s'appelle un sous-contrat. Un sous-contrat, tu ne fais pas cela gratuitement.
Il me semble qu'à un moment donné, quelque part, il va falloir
que quelqu'un paie, sans cela tous les employeurs vont attendre le gouvernement
pour qu'il règle les problèmes à leur place. Quand ils
attendent le gouvernement, ils forcent le Parlement à poser les
mêmes gestes.
M. le Président, je suis d'accord pour qu'on assure des services
essentiels, mais je dis que vous êtes à embarquer non seulement le
gouvernement, mais le Parlement, dans toute une démarche qui rendra
impossibles, demain, des relations du travail correctes. Malgré tous les
voeux et toutes les analyses que le premier ministre voudrait qu'on fasse sur
les relations du travail, cela ne sera plus jamais possible si on n'assure pas
un minimum essentiel. Ce minimum, pour moi, c'est: premièrement, qu'on
scinde le vote au moment du vote des deuxième et troisième
lectures, et deuxièmement, qu'on apporte un amendement à ce qui
est proposé pour revenir à ce qui était convenu entre les
parties au moment de la dernière séance de négociation.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît,
avant de vous donner la parole, M. le président du Conseil du
trésor, j'aimerais faire remarquer à ceux qui sont dans les
galeries qu'aucune manifestation n'est permise.
M. Le président du Conseil du trésor.
S'il vous plaît, je demande la collaboration de cette
Assemblée pour permettre à M. le président du Conseil du
trésor d'utiliser son droit de parole.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Merci, M. le Président. Dans les
propos que vient de tenir le député de Sainte-Marie, il y a
beaucoup de vérité et une certaine exagération. Dans la
mesure où, effectivement, un des deux représentants qui sont
intervenus à la fois auprès du syndicat et de la Commission de
transport de Québec était le porte-parole gouvernemental en
matière de négociation et qu'il était lié de
très près au Conseil du trésor, je me devais d'intervenir
dans le débat.
Ce que le député de Sainte-Marie a décrit comme ce
climat des négociations est exact. Il a peut-être eu tendance
cependant à ne pas chercher à faire porter le moindre blâme
sur les chauffeurs ou moindre... Il a peut-être davantage cherché
à le faire porter sur l'employeur. Là-dessus, je pourrais
partager passablement son point de vue. Mais il faut dire aussi certaines
choses qui sont également vraies. Il y avait une proposition, en juin,
sur la table, de 9% et de 8% pour un total de 17,6% ou 17,7% - enfin, cela a
peu d'importance quand on en vient à ces fines fractions -
soulignons-le, après que le gouvernement ait demandé en avril la
réouverture de ses propres conventions pour modifier certaines
augmentations de salaire prévues et les réduire. Pourquoi? Parce
que nous vivons une crise économique sévère et il nous
apparaissait nécessaire de demander aux employés du secteur
public de partager l'effort qui est finalement exigé de l'ensemble de
nos concitoyens dans cette crise.
Dans ce contexte où le gouvernement du Québec demande
à ses ouvriers, ses employés, ses professionnels, de rouvrir les
conventions collectives et de réajuster à la baisse les
augmentations de salaire, la commission de transport choisit de déposer
9% pour 1982 et 8% pour 1983. C'est effectivement raisonnable, si on veut faire
la même comparaison avec ce que nous demandions à nos
employés et probablement un peu généreux, compte tenu du
contexte. Suffisamment généreux pour que deux syndicats, les
employés de bureau et les employés de garage, sautent sur
l'occasion et acceptent ces propositions raisonnables.
Les chauffeurs, par contre, choisissent une voie différente,
espèrent aller chercher un peu plus, choisissent un certain harassement
de la population. Sans déclencher initialement véritablement de
grève ils tentent d'aller chercher plus d'argent qu'il n'y en avait sur
la table et plus d'argent que leurs collègues, consoeurs de la
commission de transport avaient pu obtenir. Ils menacent de faire la
grève, s'en prennent finalement à une population qui a
traversé huit mois, huit longs mois de grève et qui ne veut plus
entendre parler de grève; ils s'en prennent souvent à des
personnes
âgées qui n'ont pas d'autres moyens de transport; ils s'en
prennent aussi finalement à une classe de la société qui,
malheureusement, parce qu'elle prend le transport en commun, c'est justement
parce qu'elle n'a pas les moyens de prendre autre chose. Je pense qu'il y a eu
une erreur stratégique. On aurait pu accepter les propositions qui
étaient sur la table. Elles étaient raisonnables, d'autres les
avaient acceptées. Je pense qu'elles illustrent cependant une
difficulté que nous avons tous à nous ajuster à un
changement de situation économique, à modifier nos attitudes au
sein de cette société et en pensant qu'on peut toujours tirer un
peu plus sur la couverture jusqu'à ce qu'elle déchire.
Ils ont un blâme à prendre. Mais l'employeur aussi, avec
cette espèce de valse hésitation. On dépose quelque chose,
on le retire, on leur propose un forfaitaire de 300 $, on le retire,
continuellement en cherchant à provoquer les chauffeurs, se disant sans
doute dans le contexte général: Le gouvernement interviendra et
décrétera, et, par conséquent, nous n'avons pas, nous,
à jouer un jeu correct de négociation, nous n'avons qu'à
nous réfugier derrière le gouvernement. On l'a fait sans
vergogne.
Devant ces comportements que je qualifierais d'irrationnels, à un
moment donné, l'Assemblée nationale doit se porter à la
défense de ceux qui sont pris au milieu de ce conflit, qui n'y sont pour
rien, et qui finalement sont les otages. Dans la mesure où ni les
autorités de la communauté, ni les dirigeants syndicaux ne
manifestent assez de sympathie pour les victimes de ce conflit,
forcément, il faudra que l'Assemblée nationale prenne ses
responsabilités. Mais si l'État doit intervenir, il devra le
faire suivant une politique cohérente, universelle, qui s'applique
à tous. Si l'Assemblée nationale est forcée d'intervenir
dans la solution de conflits, il ne faut pas que ce soit des grèves
payantes. Sinon, demain, tout le monde enverra à l'Assemblée
nationale la solution des grèves. Personne ne prendra ses
responsabilités, pas plus du côté patronal que du
côté syndical. On dira toujours: Le gouvernement tranchera. Bien
non, ce n'est pas ainsi qu'on bâtit une société. On
bâtit une société en prenant ses responsabilités
soi-même, quand c'est le temps et, si on nous envoie, à nous,
à l'Assemblée nationale le problème de la solution des
grèves, nous les réglerons suivant une logique qui sera la
même pour tous. Tous les citoyens seront traités de la même
façon. (19 h 40)
Or, ce que le député de Sainte-Marie n'a pas dit, c'est
que ces deux mêmes personnes, le représentant du premier ministre
et le porte-parole gouvernemental en matière de négociations,
sont déjà intervenues dans un conflit semblable à
Montréal, à la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal. Elles ont déjà
effectué des démarches pour amener des travailleurs à
accepter certaines conditions de travail. Les employés de bureau
viennent d'ailleurs de les accepter. Les chauffeurs aussi, à
Montréal.
Par conséquent, quelle crédibilité auraient des
représentants du premier ministre - on a tantôt signalé
l'extrême importance de leur mandat - si, convainquant des travailleurs,
une commission à accepter un règlement, subséquemment,
dans exactement la même démarche à Québec,
n'arrivant pas à un accord, ils faisaient en sorte que le Parlement en
accorde plus que ce qu'eux-mêmes avaient réussi, par voie de
compromis, à obtenir dans un conflit précédent? Ils
n'auraient plus aucune crédibilité. Les gens les verraient venir
et diraient: Bah! Il n'y a rien là! Ils essaient de trouver des
compromis, mais, de toute façon, l'Assemblée nationale en
ajoutera. Alors, quel intérêt avons-nous à nous asseoir et
à les écouter? C'est de cela dont le député de
Sainte-Marie n'a pas parlé.
Je pense qu'il faut protéger la crédibilité de ces
émissaires et faire en sorte qu'effectivement on puisse comparer les
deux propositions. Et c'est ce que je vais faire maintenant. Il est clair qu'en
pleine crise économique comme celle que nous traversons, avec 435 000
chômeurs, 200 000 travailleurs à l'aide sociale, 200 000 jeunes
qui sont complètement rejetés par le circuit économique,
comme société, nous devons, pour traverser la crise, nous imposer
une certaine rigueur, énoncer un certain nombre de principes auxquels il
faut adhérer ensemble. C'est le premier principe.
Pour effectuer une même tâche qu'ailleurs, il faut que les
services publics québécois ne consentent plus des
rémunérations plus avantageuses qu'ailleurs. En d'autres termes,
pour faire un travail donné, par exemple, dans le secteur privé
et le secteur public, s'il s'agit fondamentalement du même travail, on
devrait donner la même rémunération. Pourquoi irait-on
taxer des citoyens qui gagnent moins pour pouvoir enrichir des gens qui font le
même travail? Cela n'a pas de logique, cela n'a pas de sens. Donc,
premier principe, il faut s'assurer que les employés du secteur public
soient payés sur une base comparable à celle du reste de nos
concitoyens.
Deuxième principe: Les salaires et les autres avantages marginaux
ne doivent pas augmenter plus vite que l'inflation. En effet, si les salaires
payés par l'État augmentent plus vite que l'inflation, il faut
nécessairement qu'il y ait une richesse à partager. Cela veut
dire qu'il faut aller piger dans cette richesse additionnelle de quoi
simplement maintenir les services existants.
Or, si nous nous enrichissons, nous avons aussi des besoins nouveaux et
il faut que cette nouvelle richesse que nous pouvons réussir à
accumuler tant bien que mal puisse servir à répondre à ces
nouveaux besoins. Donc, il est normal que nos masses salariales, que nos
dépenses existantes n'augmentent pas significativement plus vite que
l'inflation. C'est le deuxième principe.
Examinons maintenant ce que nos porte-parole ont pu, en rencontrant les
travailleurs de la commission de transport de Montréal et la commission
elle-même... Examinons comment ces principes se sont appliqués. Il
était clair, en examinant les salaires qui étaient payés
à Montréal, que si on les comparait avec ceux de Toronto,
d'Ottawa, de Hamilton, de Winnipeg, de London, d'Edmonton, de Calgary, de
Québec et de la rive sud de Montréal, que les chauffeurs de
Montréal recevaient, uniquement pour le salaire, 6% de plus que la
moyenne des salaires payés dans les autres commissions de transport au
Canada. De fait, en rémunération totale, lorsqu'on tient compte
des avantages sociaux, ils sont les mieux rémunérés,
à Montréal, de toutes les compagnies de transport au Canada,
mieux qu'à Toronto. Ils étaient donc en avance par rapport
à leur marché pour faire une tâche comparable.
Or, les Québécois ne sont pas plus riches que le reste des
Canadiens et on voit mal comment les Montréalais seraient amenés
à payer plus cher pour avoir un service équivalant à ce
qui se donne ailleurs. C'est la première question. C'est ce qui nous a
amenés à suggérer que l'on accepte à
Montréal la proposition qui était essentiellement la suivantel
Accordons 10% pour 1982, mais parce que vous êtes en avance par rapport
au marché, retenons 3% de ces 10%; nous donnons 7%, exactement comme
nous faisons avec les employés du secteur public à Québec
où nous protégeons contre l'inflation après avoir soutrait
1,5% pour tenir compte du fait qu'ils sont en avance, qu'ils sont payés
plus cher par rapport au marché comparable. Donc, dans le cas de
Montréal, effectivement, l'entente repose sur 10% d'augmentation avec
une indexation à l'inflation, mais on soustrait 3% pour tenir compte du
fait qu'il faut ralentir la croissance des salaires des employés du
transport à Montréal et faire en sorte que, tranquillement, le
marché comparable les rejoigne. Voici la logique sur laquelle repose la
proposition qui a fait l'accord entre les parties à Montréal.
À Québec, la situation n'est pas la même. Les
chauffeurs d'autobus ne sont pas payés plus cher que les chauffeurs d'un
marché comparable, les villes dont je parlais tantôt. Par
conséquent, nous ne sommes pas justifiés de baisser de 3%
l'augmentation de 10% prévue à Montréal. C'est la
différence. À Québec, ils obtiennent 10%, ce qui maintient
l'alignement avec le marché canadien. À Montréal, ils
obtiennent 7% parce qu'il faut permettre au marché de rejoindre
Montréal. Voici la base de l'accord. Voici ce que les porte-parole ont
expliqué aux employés du transport à Montréal et
voici ce qui a fait la base de l'accord entre les chauffeurs, les
employés de bureau et la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Montréal. On comprend maintenant pourquoi, dans le projet de
loi qui est déposé devant nous, ce que nous fixons comme
paramètre, c'est 10%. Non pas 11%, non pas 9%; c'est 10%. C'est plus que
ce que la commission voulait donner. C'est moins que ce que les chauffeurs
auraient peut-être pu obtenir s'ils avaient accepté la
proposition. Les deux parties, à mon avis, ne sont pas allées
jusqu'au bout du processus normal de négociation. Le gouvernement devant
intervenir, il doit intervenir en traitant les gens à Québec de
la même façon que ce qu'il aurait fait à Montréal
s'il n'y avait pas eu d'entente. Pour la deuxième année, il en va
exactement de la même logique. Essentiellement, c'est 6% avec une formule
d'indexation. C'est sensiblement la même chose que Montréal, la
formule est légèrement différente. Nous avons retenu la
formule de la Commission de transport de la Communauté urbaine de
Québec et si on comparait cela avec ce que l'on donne à nos
propres employés, si on le ramenait sur la même base annuelle,
cela donnerait également sensiblement le même taux de 6%. En
d'autres termes, tout le monde est sensiblement traité de la même
façon. Si le projet de loi est différent, dans son contenu, de ce
que les chauffeurs pensaient pouvoir aller chercher et également
différent de ce que la commission pensait pouvoir donner, c'est qu'il
s'agit de traiter, lorsque le gouvernement a à intervenir, l'ensemble de
nos concitoyens de la même façon sur une base équitable et
juste. C'est ce que nous avons fait.
C'est moins que les 9% et 8%, c'est-à-dire, en gros, les quelque
17% que l'on aurait dû accepter en juin. C'est plus que les 9% et 6% que
la commission avait remis sur la table dans un geste que je pourrais qualifier
pratiquement de provocateur. On pourrait dire que c'est couper la poire en
deux. Je dirai non; c'est surtout essentiellement respecter deux principes:
l'alignement par rapport au marché et le contrôle des masses
salariales en-deça de l'inflation en cette période difficile. (19
h 50)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, ce projet de loi no 84 tente
de répondre à un problème très vivement ressenti
par l'ensemble de la population de la région de Québec, et en
particulier, les usagers du transport en commun. Il traite également,
bien sûr, des conditions de travail qu'il impose dans le projet de loi en
mettant de côté, et je pense bien que la dernière
intervention du président du Conseil du trésor ne l'a pas
nié, ne voulait pas le nier, l'un ou l'autre des résultats du
processus de négociation. Mes collègues ont fait valoir les deux
grands aspects majeurs, je pense, de ce projet de loi. Je voudrais, à
l'occasion du projet de loi no 84, dire au gouvernement: l'une des très
grandes préoccupations que les gens qui s'intéressent au domaine
des relations du travail dans les secteurs public et parapublic, c'est la
préoccupation qu'ils ont d'essayer de voir où les gestes qui sont
actuellement posés par le gouvernement mènent l'ensemble du
processus de négociation dans les secteurs public et parapublic.
Ce n'est toujours pas clair - et j'ai écouté le discours
du président du Conseil du trésor - à savoir si la
politique ou la démarche retenue actuellement par le gouvernement du
Québec est une démarche d'avenir, c'est-à-dire une
démarche que le gouvernement entend maintenir, ou si cette
démarche se situe expressément dans le contexte de la crise
financière et de la crise économique que l'on connaît
actuellement. Car le président du Conseil du trésor, en disant
que le gouvernement, lorsqu'il interviendrait dans le domaine des relations du
travail des secteurs public et parapublic essaierait de maintenir, plus que de
maintenir, d'imposer une cohérence avec le marché du travail,
est-ce que clairement cela est la politique et l'attitude que le gouvernement
entend imposer pour l'avenir? Ou bien cette attitude, est-ce qu'elle est
purement d'ordre conjoncturel, c'est-à-dire liée aux
difficultés présentes de la situation économique et
sociale que l'on connaît?
Cela, il faudra un jour ou l'autre que le gouvernement dissipe cette
équivoque et qu'il n'utilise pas les conditions économiques,
sociales et budgétaires qui prévalent actuellement au
Québec comme paravent à l'inaction qu'il a manifestée au
cours des quatre ou cinq dernières années, pour justement
regarder l'ensemble de l'évolution des négociations dans les
secteurs public et parapublic et dégager des programmes ou des
politiques qui soient cohérentes. Le président du Conseil du
trésor, en réponse aux remarques de notre collègue de
Sainte-Marie, a fait très largement état de la comparaison,
enfin, de toute la notion, de la comparabilité des
rémunérations, c'est-à-dire salaires et avantages sociaux
du secteur public avec le secteur privé.
M. le Président, cette notion de comparabilité entre les
deux secteurs n'est arrivée d'une façon claire et
décisive, dans la bouche du gouvernement que le 21 septembre 1982,
c'est-à-dire le 21 septembre dernier. Or, dès le départ,
cette notion de comparaison entre le secteur public et le secteur privé
s'est située dans le cadre d'une loi très précise et
très particulière, parce qu'une telle loi n'existe nulle part
dans toute l'histoire des relations du travail au Québec, non plus
qu'elle n'existe nulle part dans toute l'histoire des relations du travail au
Canada et même aux États-Unis. Elle se situe dans le cadre de la
loi 70, une loi qui a pour but de récupérer des travailleurs des
secteurs public et parapublic une somme de quelque 521 000 000 $ pour une fin
précise qui est celle d'assurer l'équilibre budgétaire des
finances du gouvernement péquiste au 31 mars 1982. Or,
précisément, quand le président du Conseil du
trésor dit que la politique du gouvernement est maintenant d'assurer une
juste comparaison entre les salaires du secteur public et ceux du secteur
privé, il n'y a strictement aucun objectif précis qui illustre
cette politique, sauf le pourcentage avancé par le président du
Conseil du trésor, soit 4,8%. C'est le pourcentage qu'il situe à
l'intérieur de la loi 70.
Or, ce pourcentage de 4,8% n'est pas et ne peut pas être
l'expression sérieuse, réfléchie et consciente d'un
gouvernement qui veut ajuster les salaires du secteur public à ceux du
secteur privé, parce que ce pourcentage de 4,8% n'est que le
résultat comptable et mathématique des dispositions de la loi 70
qui met en marche cette récupération. S'il y avait une
réelle volonté de la part du gouvernement d'en arriver à
un plus juste équilibre entre les salaires du secteur public et du
secteur privé, cette politique serait fondée sur des chiffres
sérieux et raisonnables. Deuxièmement, elle serait l'objet, si
cet écart est aussi important que le prétend le gouvernement,
d'une application graduée, c'est-à-dire d'un
échéancier. Or, on n'a rien, absolument rien de ces
éléments de politique devant nous. Tout ce que l'on a, dans le
contexte des relations du travail dans le secteur public -et j'oserais
même dire dans le contexte de la loi 84 pour les chauffeurs d'autobus
-c'est purement un geste d'opportunisme politique de la part du gouvernement
qui essaie d'en arriver à camoufler les vices -que tout le monde
reconnaît - de sa gestion financière et profiter justement de la
crise économique et sociale que l'on connaît pour ne pas dire
pourquoi les dépenses dans les secteurs public et parapublic sont
rendues au niveau où elles sont en ce moment. Cela m'apparaît, M.
le Président, un élément
extrêmement important.
J'entendais tantôt le président du Conseil du trésor
affirmer - en parlant de la façon de calculer le règlement que le
gouvernement impose aux chauffeurs d'autobus comme à ceux, d'ailleurs,
qu'il va sans doute imposer dans quelque temps aux employés du secteur
public - comme il l'a dit, d'ailleurs, le 21 septembre dernier, que la raison
principale était que les dépenses budgétaires du
gouvernement excédaient le taux d'inflation. Or, M. le Président,
cette raison qui est la raison raisonnante de la démarche actuelle du
gouvernement, le motif qu'il invoque, n'est qu'un prétexte, parce que ce
n'est pas depuis 1982-1983 que le taux de croissance des dépenses
budgétaires du gouvernement péquiste excède le taux
d'inflation. C'est depuis 1977-1978 que le taux de croissance moyen des
dépenses budgétaires du gouvernement excède de 4% sous le
régime péquiste, alors que la croissance du produit
intérieur brut, c'est-à-dire l'ensemble, la dynamique de la
richesse économique a été constamment à la baisse.
Il est vrai que le problème du taux de croissance des dépenses
budgétaires existait avant et qu'il était au-dessus du taux
d'inflation avant 1976, mais à ce moment-là, le produit
intérieur brut du Québec suivait une courbe qui justifiait
l'augmentation des dépenses budgétaires. (20 heures)
Donc, dans toutes ces justifications qui viennent d'être
invoquées à nouveau par le président du Conseil du
trésor, il y a au fond, comme dans le contexte de la loi 70, qu'on va
imposer à 300 000 travailleurs, la mauvaise administration
financière du gouvernement du Parti québécois. Il me
semble que ces choses doivent également être établies.
Ce projet de loi no 84 a ceci d'inquiétant, M. le
Président. À quoi assistons-nous dans le domaine des relations du
travail dans les secteurs public et parapublic? On assiste à un
effritement graduel, comme l'a si bien démontré notre
collègue de Sainte-Marie, de toute espèce de négociation
digne de ce nom dans les secteurs public et parapublic. Les gestes que le
gouvernement a posés sont publics, comme quand le gouvernement
gèle les effectifs, quand le gouvernement effectue des coupures, quand
le gouvernement annonce de nouvelles coupures. Le gouvernement prétend
qu'il ne diminue pas les services, ça fait partie également du
discours politique, mais les conditions de travail, de facto, par ces
décisions ministérielles, sont modifiées.
Quel est, alors, le sens de la négociation ou du droit à
la négociation des conditions de travail, qu'on dit encore
reconnaître aux employés des secteurs public et parapublic? Cette
loi spéciale et les lois spéciales qui ont
précédé sous ce gouvernement et sous l'ancien
gouvernement, tout le régime des injonctions, toutes ces choses
auxquelles on s'était engagé du côté du Parti
québécois, il faut que les gens s'en rappellent également.
Des promesses ont été faites, en 1976, de corriger et de modifier
substantiellement le régime des négociations dans le secteur
public. Toutes ces choses n'ont pas été faites et voilà
qu'à la faveur d'un conflit ou d'une échéance dans le
domaine du secteur public, c'est la loi 70. Est-ce que la loi 70 peut tenir
lieu de politique cohérente, réfléchie et responsable dans
les secteurs public et parapublic sur le plan des principes? Elle est injuste
sur le plan pratique, jamais cette politique ne peut tenir compte...
Ce projet de loi no 84 impose des conditions de travail qui d'ailleurs,
comme le député de Sainte-Marie l'a très bien dit, nient
complètement tout le processus de négociation, tous les efforts
qui ont pu être faits, si tant est qu'il y en a eu de faits par le
ministère du Travail, tous les efforts des émissaires, M. Boivin
ainsi que M. Bouchard. On ne retrouve même pas, comme le
député de Sainte-Marie l'a signalé, les efforts faits par
les parties en cause. C'est facile pour le président du Conseil du
trésor, à l'ouverture de son discours, de distribuer un
blâme à la partie patronale, un blâme à la partie
syndicale et poser en homme juste, raisonnable et responsable.
Il y a eu le ministère du Travail, ça fait partie de la
responsabilité du gouvernement. Il faudrait peut-être que le
ministre nous dise les efforts qui ont été faits par le
ministère du Travail. Dans la négociation d'une convention
collective, c'est difficile, surtout dans les services publics, surtout dans un
dossier comme celui du transport en commun, que ce soit à
Montréal ou à Québec. Des difficultés constantes et
répétées se présentent à chacune des
négociations de conventions collectives. Quelles précautions
additionnelles le ministère du Travail a-t-il prises? Quelle attention
a-t-il mis à surveiller l'évolution de ce dossier pour qu'on ne
soit pas obligé d'en arriver là ou on en est, c'est-à-dire
à une loi spéciale, une loi qui ordonne le retour au travail pour
redonner le service aux usagers et une loi qui détermine
unilatéralement -acte de gouvernement - les conditions de travail des
chauffeurs d'autobus, en termes de salaires? Cela aussi contribue - ces lois
spéciales, ces fausses manoeuvres de la part du gouvernement - à
élaguer de tout son contenu la réalité des
négociations et de la libre négociation dans les secteurs public
et parapublic.
C'est la même chose pour les notions qui sont avancées par
le président du Conseil du trésor concernant la masse salariale
globale non négociable. Quand c'est invoqué dans les secteurs
public et parapublic, est-ce
qu'il faut y lire la volonté politique définitive du
gouvernement que, désormais, dans le secteur public, la masse salariale
globale ne sera pas touchable et que tout ce qui deviendra négociable,
ce seront des ajustements ou des réaménagements? Pourquoi
introduire cette notion? Cela pose le problème de la centralisation des
négociations par la porte d'en arrière, à l'occasion,
à la faveur d'une conjoncture.
Ce sont là des questions de fond qui doivent être
négociées. On se trouve toujours devant le même
problème. Ce même problème, qu'il s'agisse des
problèmes de la Commission de transport de Montréal, c'est bien
beau le gentil discours que le président du Conseil du trésor
vient de nous faire pour nous expliquer que Montréal, c'était
10%, la notion de marché de travail... C'est la première fois
qu'un ministre vient définir une telle notion a posteriori des
événements et des gestes qu'il pose. C'est toujours facile de
trouver une rationnelle a posteriori. Où étaient en temps de
non-conflit les indications, les perspectives, les règles du jeu? Ce
discours, si le ministre l'avait fait avant qu'on commence les
négociations de Montréal et de Québec et avait dit: Voici,
dans le domaine du transport, le gouvernement croirait donner ce
paramètre? Le gouvernement aurait dû le faire. Pourquoi le faire
juste après, simplement pour avoir l'air du bon joueur qui est au-dessus
de la mêlée, qui n'est pas concerné par ce genre de
problème, qui dit: Voici, le blâme, monsieur, vous n'avez pas bien
fait ceci; quant à vous, monsieur, vous auriez dû faire cela?
C'est facile de dire dire cela, mais ce n'est pas la responsabilité d'un
gouvernement. De deux choses l'une: ou bien le gouvernement - c'est cela qu'il
va avoir à décider dans le domaine du transport comme dans le
domaine du secteur public - continue de reconnaître le droit fondamental
des travailleurs et de la partie patronale de négocier librement entre
eux les conditions de travail avec le droit de grève et le droit de
lock-out, ou bien le gouvernement dit: non, ce ne sera plus cela, les
règles du jeu, parce qu'il y a une question de cohérence avec le
marché du travail. Il y a des critères de comparaison objectifs
que nous, le gouvernement, assumant nos responsabilités, voulons mettre
et encadrer l'ensemble de l'évolution des négociations dans le
secteur public. On n'a encore jamais entendu cela d'un gouvernement. C'est
très important. Les représentants syndicaux qui ont
négocié les conditions de travail des chauffeurs d'autobus, les
mesures de pression que les chauffeurs ont faites, tous les problèmes
que cela a occasionnés à la population, si les règles
avaient été établies avant... Est-ce que le gouvernement a
l'intention de le faire? C'est une question qu'il faut se poser
également. Est-ce opportun qu'il le fasse s'il veut maintenir un
régime libre de négociation. Qu'on ne vienne pas, comme le
président du Conseil du trésor vient de le faire, poser les
règles a posteriori après que tout le monde a essayé de
négocier et dire: Voici ce que la raison dit. C'est exactement ce que le
président du Conseil du trésor vient de faire. Qu'on ait le
courage de le dire. Après cela, le premier ministre va venir parler de
la concertation, de la solidarité. Depuis quand ce type de relations du
travail très dangereux, évoqué par le président du
Conseil du trésor, a-t-il été discuté sereinement
avec le représentant des travailleurs dans le secteur public? Jamais,
à ma connaissance, sauf erreur, ce genre de propos a été
discuté ou même évoqué. Là, on arrive
après coup pour dire: Voici, c'est cela la rationnelle. C'est cela la
politique du gouvernement du Québec. Je vous dis très
franchement, j'ai été très près du gouvernement, de
1970 à 1976, alors que les relations du travail dans les secteurs public
et parapublic ont été drôlement difficiles. On a
vécu des situations extrêmement pénibles de part et
d'autre. Il y a eu des erreurs et des excès de commis, mais il y avait
un cheminement social qui se faisait à ce moment. Il y avait une
maturation et une meilleure préparation, autant de la partie patronale
que de la partie syndicale, autant des employeurs que des employés dans
les secteurs public et parapublic. Ce cheminement, cet acquis difficile,
coûteux, pénible à certains égards menait vers une
réévaluation de l'ensemble des rapports, mais une
réévaluation sereine, une réévaluation des
relations du travail dans les secteurs public et parapublic qui a de la
perspective et aussi qui a le sens de la justice, non pas le type de
réévaluation, à la faveur de la crise économique et
financière que l'on connaît actuellement, à la pièce
que le gouvernement fait en ce moment avec les coupures budgétaires,
avec les lois spéciales, avec les injonctions, avec sa condamnation
verbale ou verbeuse du caractère illégal de certaines
grèves, avec toute la question, le cafouillis de la loi sur les services
essentiels, avec cette loi dans le domaine du transport en commun, avec
l'ignoble loi 70 qui constitue la négation de l'article 59 du Code du
travail qui dit que les conditions de travail des travailleurs doivent rester
en vigueur tant qu'elles n'ont pas été modifiées par la
négociation libre des parties. (20 h 10)
Le gouvernement - il y a des syndicalistes, il y a des gens qui ont une
pratique syndicale de l'autre côté - pose des gestes qui
mènent inéluctablement à l'effritement graduel du
processus de négociation. Le pire, c'est que cet effritement du
processus de négociation dans les secteurs public et parapublic, il est
causé
et il est mené d'une manière unilatérale par le
gouvernement et jamais, au grand jamais, on n'a vu le premier ministre, le
ministre du Travail ou le président du Conseil du trésor se lever
et donner la signification des gestes réels qu'ils posent. S'il faut
revoir l'ensemble des relations du travail dans les secteurs public et
parapublic au Québec, fort bien, nous en sommes. Mais cette
réévaluation de l'ensemble des techniques de négociation,
de l'ensemble du droit du travail, autrement dit, dans les secteurs public et
parapublic, je dis qu'elle ne peut se faire à la petite semaine, au fil
des gestes et des pressions que le gouvernement subit. Elle ne peut se faire
que par la tenue d'un débat public vaste, large, serein, impliquant
autant le secteur public que le gouvernement, que l'Assemblée nationale
et également le secteur privé.
C'est bien beau de lancer le thème qui actuellement est purement
politique. D'ailleurs, c'est tellement politique que cela a fait l'objet
d'annonces. Quand il y a des questions politiques avec le gouvernement, on fait
des placards publicitaires pour essayer de soulever les travailleurs du secteur
privé contre ceux du secteur public dans une crise sociale qui
s'annonce; il y a des grèves illégales annoncées dans le
domaine des affaires sociales. Si cette politique existe, vous auriez dû
établir les paramètres et les écarts de façon
beaucoup plus sérieuse que vous ne l'avez fait. Tous les observateurs,
les universitaires contestent vos chiffres. J'avais plusieurs citations
à vous indiquer comme quoi vos 16% ou vos 11% et les 4,8% dans le
secteur public, ce n'est absolument pas justifié. Votre méthode
de calcul est contestée, l'échantillonnage, la
méthodologie. Pas d'échéancier, pas de volonté
politique, simplement le résultat bête d'un exercice comptable
imposé comme conséquence purement mathématique d'une loi
tout à fait inadmissible dont nous avons demandé le retrait, qui
est la loi 70 et la loi 68.
Le Vice-Président (M. Jolivet): En terminant, M. le
député.
M. Rivest: Cette loi - M. le Président, je termine
là-dessus - va, encore une fois, à la pièce,
répondre à un problème social, assurer aux usagers le
service du transport en commun mais elle se situe dans un ensemble de lois dont
le gouvernement n'a jamais et au grand jamais mesuré toutes les
conséquences d'avenir qu'elles ont dans le domaine des relations du
travail dans les secteurs public et parapublic. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Taschereau.
M. Richard Guay
M. Guay: M. le Président, voilà de longues minutes
que nous entendons le député de Jean-Talon. J'ai conclu,
peut-être de façon erronée, qu'il allait voter contre le
projet de loi 84. Peut-être de façon erronée parce que,
à vrai dire, le député de Jean-Talon, pendant 20 minutes,
n'a pas parlé du projet de loi 84.
Il a dit, cependant, qu'il fallait absolument laisser libre cours
à la négociation. Laisser libre cours à la
négociation, cela veut dire que le gouvernement devrait retirer son
projet de loi, qu'on devrait dire à la communauté urbaine et au
syndicat des chauffeurs d'autobus: Retournez négocier, quand on sait
où on en est rendu de part et d'autre, et que la population de
Québec serait donc privée du service de transport en commun
encore pendant une semaine, deux semaines, trois semaines, alouette! C'est,
semble-t-il, ce que j'ai, en tout cas, moi, pour ma part, conclu, de
l'allocution du député de Jean-Talon, parce que le moins qu'on
puisse dire, c'est que ce n'est pas très clair. Heureusement pour le
député de Jean-Talon qu'il a donné une conférence
de presse hier ou avant-hier sur la loi 70, préparée par des
recherchistes du Parti libéral, parce que c'est de toute évidence
le texte de cette conférence de presse qui lui a fourni la substance de
son discours.
Avoir voulu, M. le Président, faire respecter le règlement
de cette Chambre sur la pertinence du débat, c'est à toutes les
trente secondes que nous serions intervenus pour vous demander de rappeler le
député de Jean-Talon à l'ordre, c'est-à-dire
à l'étude en deuxième lecture du projet de loi no 84, loi
qui permettra à la Communauté urbaine de Québec de
retrouver son service de transport en commun à compter de dimanche.
Visiblement, le Parti libéral est dans l'embarras. On nous sert toutes
sortes de salades qui n'ont rien à voir avec le projet de loi que nous
étudions actuellement. On nous dit qu'il faut donner libre cours
à la négociation. On nous parle de la loi 70. On nous parle de
politique salariale. On nous parle d'augmentation des dépenses. Il y a
certains arguments, je ne veux pas m'attarder là-dessus, mais il y a
quand même certaines choses que le député de Jean-Talon a
énumérées et qui méritent d'être
relevées, parce qu'on a un peu l'impression d'entendre un
sépulcre blanchi.
Quand on reproche les augmentations de dépenses de ce
gouvernement, il faut quand même savoir qu'elles sont la moitié de
l'augmentation annuelle des dépenses du gouvernement Bourassa. 21%
à cette époque-là. On nous dit que les augmentations de
dépenses du gouvernement ont pu être plus élevées
que l'inflation, mais l'inflation n'a
encore jamais atteint au Canada et au Québec 21%. Quand on
reproche une telle chose au gouvernement du Parti québécois, on
devrait d'abord se regarder dans le miroir parce que le Parti libéral,
de ce côté-là, ne fera pas une très belle
performance.
Quand on nous reproche les relations du travail, rappelons-nous ce que
cela a été pendant les années Bourassa et rappelons-nous
comment ce gouvernement a littéralement tenté d'acheter
l'élection de 1976 en jetant le bébé avec le bain, en
accordant des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic
démesurément élevées pour lesquelles nous payons
encore aujourd'hui le prix parce que tout cela fait maintenant partie du budget
du Québec et nous n'y pouvons rien. Mais, à l'époque, ce
qu'on a accordé sans même presque de négociations à
la veille des élections de 1976, constitue, encore aujourd'hui - le
député de Jean-Talon le sait - un scandale
particulièrement honteux qui continue à entacher la
réputation du Parti libéral comme administrateur public.
Il est vrai que le Parti libéral n'est plus au pouvoir depuis six
ans, sept ans bientôt, M. le Président, mais il est ailleurs. Il
faut voir aussi comment le Parti libéral continue à administrer
la chose publique de la plus mauvaise façon, de la façon la plus
incroyable. Là où le Parti libéral est au pouvoir, il a vu
le déficit, en un an, à l'intérieur de la même
année, passer de 10 000 000 000 $, c'est beaucoup, à 20 000 000
000 $, c'est énorme, et maintenant, on nous dit à Ottawa que non,
c'est maintenant 25 000 000 000 $. De 10 000 000 000 $ à 20 000 000 000
$ à 25 000 000 000 $ dans la même année: 25 000 000 000 $
c'est plus que le budget du gouvernement du Québec et ils ont ça
en déficit à Ottawa, le Parti libéral. Et ces
gens-là du Parti libéral voudraient nous donner des leçons
de rigueur administrative sur la façon d'administrer un budget
gouvernemental? Tout de même, soyons sérieux! Il y a du monde
là-dedans qui a besoin d'aller suivre quelques cours de
comptabilité parce que de toute évidence, dans ce
parti-là, c'est un peu comme les Bourbon, on n'a rien appris et rien
retenu.
Cela étant, M. le Président, vous me permettrez, quant
à moi...
Une voix: Regardez dans le dictionnaire.
M. Guay: Oui, effectivement, le dictionnaire, ils en ont beaucoup
maintenant de ce côté-là. Vous me permettrez quant à
moi de revenir à ce que le député de Jean-Talon a
escamoté pendant 20 minutes: le fond de la question, le projet de loi no
84 sur le transport en commun dans la région de Québec.
Le 12 octobre dernier, il n'y a pas si longtemps, le maire de
Québec, dans l'exposé sur la situation financière de la
ville de Québec qu'il est tenu de faire à chaque année,
disait à l'hôtel de ville de Québec: "II faut en effet bien
comprendre que la ville de Québec ne peut pas avoir une politique
salariale différente chez elle, à la communauté urbaine et
à la CTCUQ. En effet - notez bien les propos, M. le Président -
les employés de ces organismes régionaux - on parle de la CTCUQ
et de la CUQ - sont, à toutes fins utiles, des employés
municipaux." C'est le maire de Québec qui dit ça. Comment se
fait-il que des employés qui sont, à toutes fins utiles, des
employés municipaux, qui sont en grève, qui paralysent la ville
de Québec et la région de Québec de transport en commun,
cela ne constitue pas une situation suffisante pour motiver le maire de
Québec à rester chez lui et essayer de régler le
problème? Il admet lui-même, puisque ce sont des employés
municipaux, que c'est une responsabilité municipale. C'est une
responsabilité de la ville de Québec et des villes de banlieue.
Ce en quoi, d'ailleurs, il dit exactement ce que dit la loi constitutive de la
Communauté urbaine de Québec, telle qu'amendée par notre
gouvernement. (20 h 20)
C'est à la demande du maire de Québec et des maires de
banlieue que, nous avons modifié il y a quelques années, la Loi
sur la Communauté urbaine de Québec, pour leur donner le
contrôle complet, total et absolu sur la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec. On protestait, à
l'époque, du statut ambigu de la CTCUQ, fort bien. On voulait s'en
occuper, très bien. Le gouvernement a acquiescé et a donné
aux élus locaux de la Communauté urbaine de Québec la
responsabilité du transport en commun dans la région de
Québec. Ils la voulaient, ils l'ont eue.
Comment se sont-ils débrouillés? Eh bien! on a d'abord eu
droit à une grève de huit à neuf mois. Ces mêmes
élus, qui réclamaient le transport en commun et qui allaient
pouvoir régler le problème du transport en commun, l'ont d'abord
laissé pourrir pendant huit à neuf mois. Le gouvernement,
à cette époque, malgré la tentation qu'il pouvait avoir
d'intervenir, s'est dit: On vient de donner le contrôle du transport en
commun aux élus locaux; laissons-les au moins régler le
problème; ils ont demandé de pouvoir régler le
problème; laissons-les le régler. Cela a pris huit mois. Ils
n'ont pas le règlement rapide, M. le Président.
Cette fois-ci, en 1982, les choses se sont passées un peu
différemment. On a fait état précédemment - je
pense qu'il faut y revenir - que la Commission de transport de
la Communauté urbaine de Québec a déposé, au
mois de juillet, une offre, qui, somme toute, n'était pas
inintéressante, à ses employés de bureau et d'entretien et
aux chauffeurs d'autobus, soit 9%, 8% et 6,5%, le tout indexé sur trois
ans. Dans le contexte d'austérité économique, dans le
contexte de crise économique dans laquelle nous vivons, c'est une offre
qu'en tout cas les deux autres syndicats ont trouvée suffisante pour
sauter dessus et signer tout de suite.
Le syndicat des chauffeurs d'autobus a décidé, quant
à lui, qu'il ne signait pas, qu'il rejetait ces offres-là. C'est
son droit. On peut, par contre, se demander s'il n'y a pas eu là une
erreur de jugement, parce que dans le contexte économique dans lequel
nous nous trouvons, en pleine crise économique, compte tenu du nombre de
chômeurs, compte tenu de l'inflation, compte tenu des difficultés
que nous connaissons tous, comme société, 9%, 8% et 6,5%, le tout
indexé, c'est quand même fort alléchant. On ne trouve pas
cela partout. Si on ajoute, en plus, la sécurité d'emploi, M. le
Président, on se demande un peu dans quelle société le
syndicat vivait à ce moment-là. Il ne semblait pas beaucoup
regarder autour de lui le climat économique général de la
société dans laquelle nous nous trouvons. Il a refusé.
Cela a, évidemment, ouvert la porte à la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Québec et à la
Communauté urbaine de Québec elle-même pour faire un petit
coup de passe-passe en se pensant bien fin-fin. C'était un peu grossier.
On a retiré les offres et on a fait de nouvelles offres nettement en
deçà des premières. Évidemment, si le syndicat des
chauffeurs avait refusé les premières offres, il n'allait pas
sauter sur les deuxièmes qui étaient nettement
inférieures. En d'autres mots, la Communauté urbaine de
Québec a sciemment décidé, volontairement
décidé de provoquer la grève, parce que c'est
évident qu'avec ces deuxièmes offres, on s'en allait tout droit,
en droite ligne, vers une grève.
Donc, là aussi, était-ce une erreur de jugement de la
Communauté urbaine de Québec ou tout simplement une façon
de se laver les mains de ses responsabilités qu'elle a pourtant
réclamées? Je vous le rappelle, M. le Président, ce sont
ces maires-là qui, en 1978, voulaient avoir le contrôle de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec, qui
l'ont obtenu et qui, maintenant, en 1982, par une espèce de passe-passe
d'offres retirées et d'offres plus conservatrices, se lavent les mains
de leurs responsabilités d'administrateurs publics et d'administrateurs
du transport en commun dans la région de Québec. Ils provoquent
la grève qui a effectivement lieu.
Je ne reviendrai pas sur les efforts qui ont été
déployés par le gouvernement pour tenter de rapprocher les
parties. Je constate tout simplement que, de part et d'autre, on n'a pas
réussi à avoir ce règlement qui aurait quand même pu
arriver, notamment -il faut bien le dire - si la Communauté urbaine de
Québec s'était montrée plus souple. Mais dès lundi
soir, paraît-il, selon les versions, M. Pageau et M. Bouchard de la
communauté urbaine, avaient communiqué avec le maire Pelletier
quelque part en Europe, au cours de sa visite des Europes, et celui-ci disait:
C'est trois ans ou ce n'est rien. Si c'est effectivement lundi soir que ces
gens ont communiqué avec le maire Pelletier, qu'ils ont reçu des
directives très précises du premier magistrat de Québec,
comment pouvaient-ils, à ce moment, s'engager à aller vendre une
convention sur deux ans contre laquelle le lendemain matin de toute
façon ils votaient au conseil de la communauté urbaine. Il y a
là une incohérence de la part des administrateurs publics de la
communauté urbaine qui est à tout le moins désolante
à voir.
Il y a donc une grande partie de la responsabilité de la
grève actuelle qui repose très certainement sur la
Communauté urbaine de Québec, le maire de Québec et les
maires de banlieue. Mais s'il y a grève, il ne faut quand même pas
oublier non plus que c'est parce qu'au départ des offres somme toute
acceptables ont été refusées par le syndicat des
chauffeurs d'autobus. S'ils les avaient acceptées à cette
époque, il n'y aurait pas eu grève aujourd'hui.
L'Assemblée nationale ne serait pas convoquée pour régler
ce problème qui ne relève pas, à proprement parler, de son
ressort puisqu'il relève, de par la loi, du ressort local. Si bien qu'au
moment où l'Assemblée est appelée par une loi
spéciale à faire ce que de part et d'autre on n'a pas
réussi à faire et surtout à redonner aux gens de la
région de Québec le transport en commun auquel ils ont droit, il
serait illusoire de s'imaginer qu'une loi spéciale doit faire en sorte
qu'une grève va être payante, que par la grève, on va
retrouver ce qu'on a refusé de signer au mois de juillet.
On a raté le bateau à ce moment, c'était une erreur
de jugement; il faut vivre avec et en subir les conséquences. Je dis
cependant que la mission de MM. Boivin et Bouchard a au moins été
intéressante - elle a été intéressante à
plusieurs égards - elle aura permis de jeter un éclairage plus
précis sur la façon de négocier de la Communauté
urbaine de Québec. À vrai dire, ce que la loi prévoit ce
soir comme règlement, je pense qu'on peut dire qu'il est plus
généreux que ce qu'une loi analogue aurait fait au tout
début de la grève si nous étions intervenus
immédiatement par loi. Il est fort heureux que le gouvernement ait
choisi d'abord d'intervenir par une médiation exceptionnelle, parce que,
en ayant cet éclairage sur la
façon de fonctionner de la communauté urbaine, sa
façon de négocier, cela nous a permis de faire une loi plus
équitable qui tient compte des responsabilités des deux
parties.
Aucune des deux parties n'y trouve tout à fait son compte, c'est
certain. La commission de transport et la communauté urbaine voulaient
trois ans de convention collective. Ce sera deux ans. Le syndicat voulait 11%
et 6%. Cela va être 10% et 6%. Je pense qu'en ce sens, le message devrait
clairement passer que dans le secteur public, une grève qui amène
l'Assemblée nationale à devoir trancher ne sera - ni celle-ci, ni
une autre - jamais une grève payante.
M. le Président, cette intervention de l'Assemblée
nationale arrive à point nommé. La commission de transport ne
pouvait pas régler son problème. Les maires ne voulaient pas le
régler. Le Parlement devait donc accepter le bébé qu'on
nous envoie. Cela n'empêche pas qu'on doit se poser de sérieuses
questions sur la capacité de la Communauté urbaine de
Québec, du maire de Québec et des maires de banlieue, de
gérer le transport en commun, d'administrer le transport en commun dans
la région de Québec. Ils ont réclamé ce pouvoir,
ils l'ont eu, et on a vu ce que cela a donné jusqu'à
maintenant.
Les résultats ne sont pas brillants. C'est à se demander
si le transport en commun à Québec n'est pas une chose trop
importante pour la laisser dans les mains des maires de Québec et des
villes de banlieue, c'est-à-dire dans les mains de la Communauté
urbaine de Québec. C'est là un autre débat qu'il faudrait
faire peut-être une autre fois. Pour l'instant, ce qu'il est important de
retenir, c'est que cette fois-ci la population ne sera pas tenue en otage.
Cette fois-ci, les gens qui ont besoin de l'autobus, les gens qui partent de
Beauport, de Charlesbourg, de Loretteville, de Cap-Rouge pour venir travailler
dans le centre-ville de Québec, les gens qui partent du centre-ville de
Québec pour aller travailler à Sainte-Foy ou ailleurs, les
étudiants qui vont à l'Université Laval, les personnes
âgées qui ont besoin des autobus pour se déplacer, au
moment justement où les temps froids commencent à nous affliger
comme, hélas! cela arrive à chaque année, tous vont
trouver, lundi matin, les autobus qui vont fonctionner normalement. Je pense
qu'en ce sens, le Parlement, hélasi parce que ce n'est pas d'abord sa
responsabilité, joue néanmoins son rôle et il le joue de
manière positive. (20 h 30)
J'ajoute peut-être une dimension qui n'a pas été
évoquée jusqu'à maintenant. Nous savons tous que nous
vivons une crise économique. Cette crise économique a des
conséquences extrêmement graves sur l'industrie, mais aussi sur le
commerce au détail. On sait qu'une grève du transport en commun a
de sérieuses répercussions sur le commerce au détail. Les
maires de la communauté urbaine qui devraient avoir comme
préoccupation le bien-être économique de leur milieu,
semblent s'être moqués comme de l'an quarante des
répercussions que la grève qu'ils provoquaient pouvait avoir sur
les commerces qui sont déjà au bord de la faillite dans bien des
cas. Le retour du service aura, sur la région, un impact
économique qui, dans le contexte actuel, sera particulièrement
bienvenu étant donné les difficultés.
Donc, M. le Président, ne sachant pas trop si le
député de Jean-Talon vote pour ou contre - j'ai cru comprendre
que le député de Louis-Hébert votait pour, mais ce n'est
jamais très clair dans leurs interventions, parce qu'ils parlent
généralement d'autre chose - je vous dis très clairement
que je vais appuyer la loi 84. Je vais l'appuyer article par article. Je
voterai en faveur de la loi 84, assuré qu'indépendamment des
torts des deux parties les citoyens et les citoyennes de Québec et de la
région retrouveront, à compter de lundi, un service qui est
essentiel, effectivement, le service du transport en commun. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Anne.
M. Maximilien Polak
M. Polak: Merci, M. le Président. Je suis partagé,
ce soir, entre des sentiments contradictoires. Je suis fier, triste et heureux
tout à la fois, et je m'explique. Je suis fier parce que, comme
député de la région de Montréal, on parle non pas
d'un problème de la ville de Québec, mais d'un problème
national qui touche toute la population. Je m'expliquerai plus tard. Je suis
triste, parce qu'on nous présente, encore une fois, une loi matraque qui
nous force à écarter le principe de la libre négociation.
Je suis heureux parce que j'ai la chance, l'occasion de parler ce soir pour
essayer de démasquer devant la population la mauvaise gestion de ce
gouvernement péquiste, qui est un scandale.
M. le Président, on a reçu un avis. J'étais chez
moi, à Montréal, mardi soir. J'écoutais la radio qui
disait: M. Bertrand va convoquer les députés à
Québec en vertu de l'article 84. J'étais prêt. M. Bertrand
parlait, ce grand "boss" de la région de Québec. Je suis venu ce
matin. J'ai pris l'avion et j'espère être de retour chez moi ce
soir, sinon, demain matin. M. Bertrand, le ministre des Communications ou de je
ne sais pas quoi, des transports de la ville de Québec, nous dit: MM.
les députés, c'est important. Vous êtes ici cet
après-midi et ce soir en
vertu de l'article 84. C'est grave, M. le Président. L'article 84
est un article qui écarte toutes les règles de procédure.
On passe en même temps la première lecture, la deuxième
lecture et la troisième lecture, l'assentiment, tout. C'est ce qu'on
appelle une loi matraque. On a tous le droit de parler. Merci beaucoup, on peut
encore parler une vingtaine de minutes.
Une voix: Pas longtemps, 20 minutes.
M. Polak: Ce n'est pas la première fois qu'on invoque
l'article 84. Cet été, j'ai rencontré des
députés d'autres provinces, d'autres pays. Ils nous ont
demandé: Y a-t-il une disposition du règlement dans la province
de Québec qui donne l'autorisation au gouvernement de procéder en
suspendant toutes les règles? J'ai dit: Certainement, l'article 84. On
l'applique souvent. Je le connaissais par coeur. Ils m'ont dit: Chez nous, on
s'en sert une fois tous les cinq ans ou une fois tous les dix ans. Il y a
même des endroits où ils ne s'en sont jamais servi, quoique cet
article existe. Pas ici. Avec le PQ, l'article 84 est devenu la règle.
Depuis que je suis ici, M. le Président, depuis un an, on a
déjà invoqué cet article trois fois. Il y a quelques mois,
ce fut l'affaire des médecins. Je suis venu ici pour la grève
à Montréal. C'est vrai. La toute dernière fois, je me le
rappelle, on est venu au mois de janvier 1982, tous prêts. Article 84,
grand débat. C'est le prédécesseur du ministre qui
était là pour dire, les larmes aux yeux, pourquoi c'était
nécessaire, que c'était triste de le faire, mais qu'il fallait le
faire. À la toute dernière minute, heureusement, un
règlement est intervenu.
Le député de Brome-Missisquoi a évoqué le
fait qu'au cours des deux ou trois dernières années on a
passé sept lois semblables - c'est incroyable - contre les enseignants,
les employés de la ville de Montréal, les gens
d'Hydro-Québec, les médecins. C'est presque devenu la
règle. C'est devenu tellement une règle, M. le Président,
cet article 84 de notre règlement, qu'on nous présente un projet
de loi numéroté 84; on a pris le même numéro. Ce
n'est peut-être même pas une coïncidence, on a un
règlement 84 et on a un projet de loi 84; ça, c'est le projet de
loi qui est devant nous maintenant.
M. le Président, je me rappelle très bien que, en
septembre 1981, nous avons eu une commission parlementaire qui a duré
cinq jours et à laquelle on a entendu les mémoires d'au moins 50
organismes de tout le Québec, qui nous ont parlé, d'un
côté, du principe du droit de grève et, de l'autre
côté, de la garantie des services essentiels pour la population.
Je me rappelle très bien que dans le temps c'était le ministre du
Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu - ça s'est divisé dans le
dernier jeu de chaise musicale, parce qu'il y a maintenant un ministre en
charge de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité et un autre ministre
est en charge du Revenu. Je ne sais plus, mais en tout cas. Même les
fonctionnaires du gouvernement ne savent plus de quel ministre ils
relèvent. Dans le temps, c'était le ministre Marois, et
qu'avait-il dit?: "La question fondamentale demeure les services essentiels
à assurer lorsque la grève est inévitable. Il nous faut ne
ménager aucun effort, ni refuser d'explorer aucune piste qui permettent
de garantir véritablement davantage le droit des citoyens aux services
essentiels et qui permettent d'assurer leur santé et leur
sécurité - beau principe; j'étais d'accord avec ça,
principe que les services essentiels vont être garantis - La
volonté du gouvernement est de résoudre ce problème une
fois pour toutes, confiant que, tous ensemble, nous pourrons travailler dans le
sens d'une amélioration des mécanismes visant à garantir
ces droits individuels fondamentaux." On appelle ça, en langage
péquiste, la solidarité. Tous ensemble on va régler, une
fois pour toutes, il n'y aura plus de grèves, on va voir à
ça, je vais vous présenter un projet de loi et tout va être
réglé.
En même temps, il disait: "Par ailleurs, je crois qu'il est
important de dire, à ce moment-ci, que le gouvernement n'a pas
l'intention de retirer le droit de grève." Je me rappelle lui avoir
demandé: Comment allez-vous résoudre ce problème? Il y a
contradiction entre, d'un côté, le droit de grève et, de
l'autre côté, la garantie de services essentiels. Il a dit: "Watch
me", je vais vous présenter un beau projet de loi. Cela a pris neuf mois
et finalement il a donné naissance à ce que j'appelle toujours
une souris morte. Et, savez-vous? la souris morte c'est la fameuse loi 72.
Là, le ministre Marois - je me rappelle très bien, c'était
juste avant l'été, au mois de mai 1982 - a dit: Voici mon projet
de loi no 72. "Ce projet de loi a pour objet de consacrer la primauté du
droit des citoyens de continuer à bénéficier des services
jugés essentiels lorsque les travailleurs exercent leur droit de
grève dans les services de santé, les services sociaux et
certains services publics, y inclus le transport." Il a bien expliqué
cela, il a dit: On n'aura plus ce problème, on ne veut plus avoir ces
lois odieuses qui forcent les travailleurs à retourner au travail et
imposer les conditions. On ne veut plus rien savoir de ça, on a la
solution secrète des péquistes, le projet de loi no 72;
ça, c'est la formule secrète. Parce que vous, MM. les
syndiqués, vous allez continuer à faire la grève.
D'accord, on n'a rien contre ça, mais on va garantir les services
essentiels à la
population.
Comment se fait-il qu'on n'a pas appliqué ça? Le projet de
loi no 72 a été adopté et la loi est en vigueur. Pourquoi
est-il nécessaire maintenant de venir avec le projet de loi no 84
où, non seulement vous forcez les gens à reprendre leur travail,
mais pire que ça, vous imposez même des conditions de travail -
c'est la toute première fois - tout dans un paquet?
Évidemment, dans une grève d'autobus, il y a le
problème des heures de pointe, du transport des handicapés, de
ceux qui veulent voir leur médecin, des écoliers, des personnes
âgées. Mais c'était tout prévu dans le projet de loi
no 72. On aurait dû invoquer ça au lieu d'imposer une loi
matraque. Savez-vous pourquoi on ne l'a pas fait? Parce qu'on a
réalisé que ce projet de loi no 72 - qui est maintenant une loi -
ne vaut rien. Cela a été critiqué dans le temps; c'est un
beau projet de loi péquiste, c'était ridicule, c'était
stupide, ça n'amenait jamais aucune solution positive; ce projet de loi
était impraticable. C'est pour ça que vous l'avez mis à
l'écart et que vous êtes arrivés avec le projet de loi no
84 pour régler le problème de la ville de Québec. C'est
votre manière d'agir. (20 h 40)
Cet après-midi, le leader du gouvernement a dit, je cite: "On est
passé à deux cheveux d'avoir une entente." Il a dit "un cheveu".
J'ai tiré deux cheveux de ma tête parce que j'ai beaucoup de
cheveux. Voici, la population: deux cheveux. J'en laisse tomber un, parce qu'il
a dit "un cheveu", même pas un cheveu. Je laisse tomber un
demi-cheveu.
M. le ministre, si on était à un demi-cheveu de la
solution du problème, pourquoi ne pas encore donner une chance et
laisser quelques heures de plus? Pourquoi ne pas dire à ces gens: Voici
la formule. Vous avez 11% et 6%, sans indexation. La communauté urbaine
n'a pas voulu accepter cela. Le même missionnaire qui a été
envoyé, le bras droit du premier ministre qui a été
envoyé là a perdu maintenant sa crédibilité. Je
suis content de savoir que le député de Sainte-Marie a
parlé ouvertement. Savez-vous où se trouvent tous ces
syndicalistes péquistes? Où sont tous ceux qui avaient toujours
de bons contacts avec la CSN? Je vous assure que la CSN commence à
perdre confiance en vous. Il y a trois ou quatre semaines, il y avait un
problème à Montréal, la fermeture des
élévateurs. J'ai pris position pour eux, pour la CSN et j'en suis
fier, parce que cela prenait cela dans leur situation, cela prenait une
intervention objective. Aujourd'hui, on ne les a pas vus, le
député de Rosemont, le député de Maisonneuve. Comme
des petites souris, ils sont absents. Ils ne veulent pas parler, ils sont des
syndicalistes.
Le seul syndicaliste chez vous qui a parlé, c'est un ancien
membre péquiste, c'est le député de Sainte-Marie. C'est le
seul, mais il n'est plus avec vous autres, il est devenu indépendant,
parce qu'il était écoeuré. Il ne pouvait plus prendre
cette attitude du gouvernement. Il est parti. Il siège ici comme
indépendant. Il prend vraiment la cause des travailleurs. Il ose parler.
Il a demandé tout à l'heure, appuyé par nous, presque
à genoux: S'il vous plaît, M. le ministre, laissez donc parler ces
gens, on va écouter ce qu'ils ont à dire, le syndicalisme et le
patronat et ceux qui sont impliqués dans le dossier. On va suspendre, on
a encore 45 minutes pour les écouter. Savez-vous ce que le ministre a
répondu? Il n'a même pas répondu à la question, il
n'osait pas. Il a dit: Maintenant, on va procéder à la lecture du
projet de loi. La population n'est pas folle. Vous avez même
refusé d'écouter ces gens qui étaient ici cet
après-midi, ces gens qui sont affectés directement, qui ont
quelque chose à dire là-dedans, parce qu'ils sont directement
impliqués. Vous avez refusé la demande du député de
Sainte-Marie et la demande de notre députation libérale. Ne venez
plus jamais dire que vous représentez les intérêts des
travailleurs, parce que les travailleurs commencent à s'ouvrir les yeux.
Ils sont tannés de cela.
M. le Président, en regardant le projet de loi 84, on voit, c'est
vrai, un petit cheveu, 11% et 6%, donc on impose le règlement. C'est
dangereux ce que vous avez fait, parce que vous imposez un règlement de
10% et de 6%, avec l'indexation. Aujourd'hui, j'étais au bureau - de
temps en temps, je peux m'échapper et je vais à mon bureau - et
j'ai reçu des appels de fonctionnaires. Savez-vous ce qu'ils m'ont dit?
Comment se fait-il que les péquistes veulent adopter cela et que nous
autres, on va avoir des coupures de salaire? Nous sommes syndiqués nous
aussi. C'est dangereux ce que vous avez fait, parce qu'ils vont vous rappeler
cela bientôt. Ils vont vous le rappeler parce que vous avez posé
une condition. Vous avez dit: Voici, l'augmentation sera de tant et tant, au
lieu de laisser cela au libre jeu des négociations. Si vous aviez la
moindre intelligence - vous avez commencé à en avoir de moins en
moins - vous auriez dû dire: Un cheveu, je les laisse négocier
encore une soirée, quelques heures de plus. S'il vous plaît, M. le
mandataire, allez voir ces gars, parce que le public va tirer des conclusions.
Le public va dire: Les péquistes ont accordé tant dans le dossier
des chauffeurs.
Qu'allez-vous faire maintenant dans le secteur public dans les
négociations qui commencent? C'est dangereux, un
précédent. Vous allez payer le prix pour cela, parce que vous
n'avez pas pensé. Je crois vraiment que le leader parlementaire voulait
être le grand héros. C'est lui qui n'accepte pas. Je n'ai
aucune objection. Cela coûte au gouvernement 250 $ pour me faire
venir ici aujourd'hui. Quelqu'un a mentionné tout à l'heure, le
député de Sainte-Marie, ce que cela coûte au gouvernement
pour nous faire venir ici aujourd'hui: l'Assemblée, la
télévision, le personnel, les voyages et tout cela. C'est triste,
ce n'était qu'à un cheveu de se régler. C'est pour cela
que je suis triste. Mais je suis fier, parce que j'ai le droit de parler, de
vous démasquer, et de dire à la population une fois pour toutes:
Comprenez-vous le message finalement? Et je dis aux gens de la CSN qui sont
là, je les vois: Ayez confiance, il y a encore des gens qui sont
impartiaux, qui sont prêts à examiner le dossier à sa vraie
valeur, comme j'ai fait dans le temps des élévateurs, comme
d'autres députés de notre groupe le font, une fois pour toutes.
L'histoire de vous faire dire: "On comprend le point de vue des ouvriers", ce
n'est pas vrai, c'est faux, c'est un mensonge. Je suis content d'avoir
l'occasion de vous démasquer à ce point de vue. Mais je suis
triste parce qu'on nous force à adopter une loi matraque qui va forcer
les gens à rentrer au travail, à briser la libre
négociation. Vous autres, vous savez toujours mieux que les autres. Vous
avez toujours la réponse. Non seulement cela, si on n'est pas d'accord
avec vous, nous sommes des vendus, des traîtres, des Pandore, des pas
Québécois. La population vient de dire: On est tanné, une
fois pour toutes. Je suis heureux parce qu'elle commence à le constater
et cela va changer l'histoire bientôt.
M. le Président, j'appuie entièrement ce que le
député de Brome-Missisquoi a dit cet après-midi. Il a
étudié le dossier. Les autres députés qui ont
parlé, qui connaissent le dossier, nous avons l'esprit ouvert, on
comprend les difficultés. La manière dont le gouvernement agit,
c'est une manière scandaleuse. C'est encore une autre loi d'exception
qui écarte le processus de la libre négociation. On est là
avec le grand sourire, on est à un cheveu à part. Tout cela,
c'est pour une couple de télévisions et de radios, tous ces
grands discours; l'enjeu est beaucoup plus sérieux. Bientôt, d'ici
à un mois ou deux, vous allez payer cela un prix très
sévère et vous serez responsable. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt) M. le
député de Portneuf.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord remercier mes collègues libéraux, le président du
caucus, de leur présence ici à Québec, aujourd'hui, pour
étudier le projet de loi no 84. Ces députés, ces
collègues ont reçu leur avis de convocation hier. Ils auraient
pu, comme on va le voir un peu plus tard dans mon intervention, être ici
hier pour étudier ce projet de loi. Messieurs, Mesdames, merci
beaucoup.
M. le Président, nous avons le projet de loi 84, loi
spéciale ordonnant le retour au travail des chauffeurs d'autobus de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec et
prévoyant, en plus, décrétant les dispositions salariales
d'une convention collective qui s'appliquera rétroactivement au 1er
janvier 1982 jusqu'au 31 décembre 1983. C'est donc dire que la
convention collective qui sera adoptée par ce projet de loi aura douze,
treize ou quatorze mois d'application.
Je dois tout d'abord faire part au ministre du Travail,
député de Sherbrooke, que je sympathise beaucoup avec lui, de
voir qu'il est obligé, à sa première intervention à
l'Assemblée nationale, comme ministre du Travail, de se lever pour
présenter un projet de loi qui ne lui fait certainement pas plaisir lui
qui a été nommé il y a quelques semaines seulement. Son
premier acte législatif, comme titulaire de ce ministère, c'est
de présenter un projet de loi spécial, une loi d'urgence, qui
vient mettre de côté la libre négociation entre les parties
et qui vient par surcroît non seulement imposer un retour au travail,
mais dicter, écrire, rédiger une convention collective.
M. le Président, ceux et celles qui sont un peu familiers avec
les relations du travail conviennent que le rôle d'un ministre du Travail
est avant tout d'être un peu au-dessus des parties, c'est de savoir
conserver sa crédibilité qui est combien importante, tant du
côté des employés que du côté des employeurs.
C'est tenter de favoriser la conciliation le plus possible comme titulaire et
comme responsable de l'application des lois ouvrières au
Québec.
La crédibilité du ministre du Travail et
député de Sherbrooke est d'ores et déjà
entachée. Cela va le suivre pendant de nombreux mois, sinon des
années. Elle est entachée par le fait qu'il se soit levé
à l'Assemblée nationale, la première fois pour venir
passer une loi spéciale. La crédibilité du ministre du
Travail est aussi affectée parce que dans ce dossier, on constate que le
gouvernement du Parti québécois, que le premier ministre du
Québec, que le leader du gouvernement n'ont pas eu confiance dans la
conciliation du ministère du Travail. On se rappellera, M. le
Président, que la conciliation du ministère du Travail est un
échec qui n'a pas été reconnu, mais qui a
été dicté ou constaté par le premier ministre et le
ministre des Communications, leader du gouvernement. (20 h 50)
On sait que la conciliation a été intensifiée
à compter du 15 octobre 1982. On
sait qu'immédiatement après la grève on a
procédé à une conciliation spéciale, urgente. On a
mis le paquet au ministère du Travail et, à un moment
donné, il y a quelqu'un, quelque part dans ce gouvernement-là et
probablement très près du premier ministre, qui a dit: Messieurs
du ministère du Travail, vous retournez chez vous, ce sont les gros
canons, M. Bouchard et M. Jean-Roch Boivin qui arrivent. Eux, ils vont
régler ça, ils connaissent ça.
Cela n'est pas de nature, non plus, à ajouter à la
crédibilité du ministre du Travail, tout au moins, auprès
de ses propres fonctionnaires, des gens avec qui il a à travailler. Ce
n'est certainement pas de nature à le rendre plus crédible de
l'obliger... Parce que je suis persuadé qu'il a été
obligé de le faire; il ne le dira jamais, il n'en conviendra jamais,
mais je suis persuadé que tout ministre du Travail qui se respecte
n'accepterait pas de présenter, comme premier geste législatif,
une loi spéciale comme celle qu'on l'a obligé à
présenter aujourd'hui dans ce gouvernement.
Pour toutes ces considérations, je sympathise beaucoup avec lui
et je lui souhaite, malgré tout, bonne chance dans son mandat de
ministre du Travail. Il a un rôle important à jouer au
Québec dans les relations du travail, dans les relations
patronales-ouvrières. On sait que la situation n'est pas facile, on sait
que les enjeux sont nombreux, mais il ne part pas du bon pied.
En 1979, on a eu une grève de neuf mois à Québec.
Pendant neuf mois, les usagers, les citoyens, les citoyennes, les personnes
âgées, les étudiants ont eu à souffrir
l'inconvénient d'une grève dans le transport en commun,
grève légale en vertu des lois ouvrières du Québec.
C'est ainsi que la grève qui a duré pendant tout l'hiver pour se
régler au mois d'août, si ma mémoire est fidèle, a
fait mal au public, à ces travailleurs qui ont perdu un revenu pendant
une période très importante.
On se rappellera que, dans ce temps-là, le gouvernement
s'était fait reprocher de ne pas être intervenu. On se rappellera
que certains citoyens, à juste titre, dans la région de
Québec, ont exigé, comme moi, comme député ici,
à l'époque, je l'avais exigé du ministre du Travail du
temps, qu'il prenne davantage de responsabilités et qu'il s'implique
plus dans ce dossier. Dans ce temps-là, vous savez, le PQ disait qu'il
possédait un préjugé favorable envers les travailleurs et
il n'est pas intervenu. Cela faisait l'affaire du PQ aussi, dans le sens que
cette grève de neuf mois a contribué à épargner au
gouvernement du Parti québécois, pour la même
période, une participation importante dans les déficits de la
commission de transport. On a eu cette expérience en 1979. Entre-temps,
des grèves dans le transport sont intervenues ailleurs et, à
certaines occasions, le gouvernement a dû intervenir par loi
spéciale.
Or, depuis l'échéance de la convention entre les
chauffeurs d'autobus de la Commission de transport de la Communauté
urbaine et la commission, depuis que les moyens de pression ont
été amorcés, en août dernier, si ma mémoire
est fidèle, les citoyens de la région de Québec
appréhendaient cette grève, appréhendaient un conflit et
se posaient la grande question: Que va-t-il arriver si une grève est
déclenchée dans le transport en commun à
Québec?
La grève appréhendée était plus
précise depuis la fin de septembre et on se demandait si cela allait se
régler, si on allait négocier. On s'interrogeait sur la
négociation. On sait qu'il y a eu plusieurs séances de
négociation. On sait qu'il y a eu des changements dans les offres qui
ont été proposées par la partie patronale. On sait qu'il y
a eu des moyens de pression, des affrontements. Mais comment s'expliquer qu'il
y ait eu une grève? Le gouvernement, le député de Vanier,
certains collègues, certains ténors de la région,
députés du Parti québécois, nous diront
aujourd'hui: S'il y a eu grève, c'est en raison de l'incohérence
de la commission de transport de la communauté urbaine. C'est en raison
de cette volonté de s'affronter à nouveau. C'est en raison, dans
certains cas - ils ne le diront peut-être pas ici, mais ils nous le
diront ailleurs - de la ténacité du syndicat. M. le
Président, si nous avons une grève du transport en commun,
à Québec, qui perdure depuis le 23 octobre dernier, le seul
responsable, selon moi, c'est le gouvernement du Parti québécois
et c'est plus particulièrement certains députés de la
région de Québec et je vais vous dire pourquoi.
Des voix: Oui.
M. Pagé: M. le Président, dès que les moyens
de pression ont été amorcés, le PQ a commencé
à s'inquiéter, à s'agiter, à grouiller. Il y a deux
déclarations importantes dans ce dossier qui ont été
faites et qui, qu'on le veuille ou non, que les péquistes le
reconnaissent ou non, ont "positionné" le dossier en direction d'une
grève qui était prévisible et inévitable. Le
premier ministre du Québec - je réfère au journal Le
Devoir du 2 septembre dernier - a dit: "II n'est pas question de permettre
à d'autres municipalités ou organismes publics de suivre cet
exemple." Il fait référence au règlement des cols bleus
à Montréal. "Si des négociations sont en cours - la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec - et
sur le point d'aboutir, avant que Québec n'ait dévoilé sa
politique, les administrateurs qui pourraient être en cause sont
priés de consulter le gouvernement."
Une voix: Dieu le maire!
M. Pagé: M. le Président, si vous êtes
responsable, si vous êtes le porte-parole, si vous êtes un maire,
si vous êtes à la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec et que vous entendez le premier ministre dire, au
lendemain du règlement des cols bleus: Messieurs des autres
municipalités, si vous êtes en négociation, venez nous voir
avant de signer, qu'est-ce que vous faites? Vous dites: On est appuyé
par le gouvernement; on va aller le rencontrer; on va aller au Conseil du
trésor; on va aller leur demander ce qu'ils feraient parce qu'ils
veulent s'impliquer au niveau des municipalités. C'est une
première déclaration qui a "positionné" la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Québec -c'était
logique, c'était explicable - un peu plus loin de la négociation.
C'était le 2 septembre.
Les moyens de pression ont continué. Un peu plus tard, on a eu
des déclarations dont une déclaration qui, selon moi, est venue
fermer les livres de la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec, et c'est explicable. Quand le président du caucus
régional du Parti québécois - c'est le gouvernement - de
la région de Québec...
Des voix: Qui?
M. Pagé: M. de Belleval.
Des voix: Ah!
M. Pagé: Le député de Charlesbourg, celui
qu'on a désigné comme président du caucus régional,
après que le premier ministre l'eut invité à retourner sur
les banquettes, comme simple député. Lorsqu'il parle, je
présume qu'il parle au nom de ses collègues de la région.
Le député de Charlesbourg parle au nom du député de
Vanier. Vous êtes député et je présume que, comme
député, vous êtes membre du caucus régional. Il
parle au nom de ses collègues de la région, soit le
député de Vanier, le député de Chauveau qui,
tantôt, est intervenu. J'aurais aimé que ce dernier intervienne
sur la grève qui touche Transport Chauveau et les 3000
élèves dans son comté qui n'ont pas de transport scolaire.
J'aimerais qu'il s'occupe de cela, soit dit en passant. Il parle
également au nom de Mme la ministre et députée de La
Peltrie et au nom du député de Taschereau. Il déclare: II
y a des moyens de pression; il y a un droit de grève qui est acquis; il
y a des avis de grève qui ont été envoyés; mesdames
et messieurs de la région de Québec, le conflit ne durera pas
plus que quelques heures. C'est cela, selon moi, qui a fait que la Commission
de transport de la Communauté urbaine de Québec a fermé
son dossier et c'est explicable.
Je voudrais bien voir les députés négocier du
côté patronal. Tu négocies du côté patronal.
Un avis de grève a été envoyé et un membre du
gouvernement dit: Cela ne durera pas plus que quelques heures. S'il le faut, le
Parlement adoptera une loi spéciale. Qu'est-ce que tu fais comme patron?
C'est explicable. C'est justifiable. Ces gens-là étaient
accotés par le gouvernement, accotés par le PQ et accotés
par Jean-François Bertrand, le petit leader régional, et par le
porte-parole, le président du caucus, M. le député de
Charlesbourg. On a dit: On ne négocie plus. Il y a eu une grève.
La grève a été déclenchée. Le gouvernement
accentue la conciliation avec des fonctionnaires du ministère du
Travail. Quelques jours après, cela ne saurait durer plus longtemps: On
envoie les gros canons. Les gros canons: M. Bouchard, négociateur en
chef du gouvernement, M. Boivin, le chef de cabinet, l'alter ego, le
vis-à-vis, l'ombrage du premier ministre; on les envoie dans une
médiation spéciale comme émissaires avec certains
objectifs... (21 heures)
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! Je considérerais qu'au moins on puisse entendre
le député de Portneuf, et j'espère que ses propres
collègues le laisseront parler.
M. Pagé: M. le Président, j'en étais
à dire que cette grève a été, de façon
factuelle, de façon tactique, provoquée par les
déclarations irréfléchies, non fondées et
téméraires du caucus régional du Parti
québécois et de tous les députés qui sont
intervenus ce soir, les ténors du droit du public, les ténors qui
sont là et qui termineront probablement là-dessus pour jeter le
blâme, comme d'habitude, sur les autres, c'est-à-dire la
Communauté urbaine de Québec et les maires des
municipalités de la région. M. le Président, à
quelques jours de la grève, on a sorti les gros canons. L'objectif,
c'était de sauver la face, c'était de tenter de faire en sorte
qu'il n'y ait pas de loi spéciale et de sauver la face du Parti
québécois dans la région.
La Commission de transport de la Communauté urbaine de
Québec, dans ce contexte, s'appuyait, premièrement, sur un public
qui n'a pas de services, un public qui veut des services et un public qui ne
peut qu'être réceptif à une position, à des
déclarations de la commission de transport. La communauté urbaine
s'appuyait aussi sur des contribuables dans la communauté qui paient des
taxes de façon assez appréciable auxquelles on doit ajouter,
évidemment, les nombreuses taxes imposées par le gouvernement du
Parti québécois, donc, un autre groupe, une autre
clientèle qui est susceptible de les appuyer dans leur
démarche. Cette Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec s'appuyait sur les énoncés du
gouvernement, sur la déclaration du premier ministre quand il a dit, au
lendemain du règlement des cols bleus à Montréal: Les
autres municipalités, vous êtes en négociations, venez nous
voir. Cette commission de transport s'appuyait sur la déclaration du
président du caucus régional de la région de Québec
représentant ainsi la voix de deux députés de la
région de Québec qui sont membres du Conseil des ministres, le
député de Vanier et Mme la députée de La Peltrie et
aussi du ministre des Affaires culturelles, député de
Montmorency. Dans ce caucus...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Pagé: ... régional, il y a trois ministres,
trois membres du gouvernement qui se réunissent avec d'autres
collègues. Le porte-parole, lui, sort de la réunion et dit aux
journalistes, tout téméraire qu'il est: Quelques heures. C'est
ça, dites-vous bien que quand un patron se fait dire cela, quand un
patron, quel qu'il soit, se sait "accoté", comme on dit, par un
gouvernement, par des députés, des membres de cabinets qui
disent: Une grève, il n'y en aura pas, on va adopter une loi
spéciale, il ferme son dossier de négociation. C'est ce qu'il a
fait. Le coupable, mesdames, messieurs, c'est le PQ. C'est la
responsabilité du gouvernement du Parti québécois, la
responsabilité du caucus régional du Parti
québécois et c'est la responsabilité du rôle
ténébreux, du rôle inquiétant, du rôle
téméraire du député de Vanier et leader du
gouvernement, M. le Président, qui vient aujourd'hui brailler sur notre
épaule en nous disant: Vous savez, une loi spéciale et le service
aux usagers. C'est la faute de ces gens là si, depuis le 23 octobre
dernier, il n'y a pas de transport en commun dans la ville de Québec, et
ces gens vont venir blâmer, parce que c'est toujours la faute des autres,
le maire Pageau et le maire Pelletier. Qu'on se rappelle, M. le
Président, les remarques, les suppositions, les hypothèses
insidieuses de la part de ces gens lorsqu'ils disaient, l'autre matin: II y a
eu des propositions, mais elles se sont probablement perdues dans l'Atlantique
où est M. le maire de Québec. C'est vrai que M. Pelletier
était à Paris, ces jours derniers. C'était dans le cadre
de son mandat. À part cela, avec vos groupes qui sont à Paris
régulièrement, vous n'avez pas de roches à lancer à
personne, et surtout pas au maire de la ville de Québec à cet
égard.
Pendant ce temps, M. le Président, le syndicat, lui, a fait sa
part. Je ne veux pas tout reprendre ici, parce qu'il me reste peu de temps,
mais le député de Sainte-Marie a bien exposé l'effort
qu'ont déployé les travailleurs dans cette démarche de
négociations parce que partir de 15% et en arriver à 11%, c'est
un effort demandé aux travailleurs. Renoncer à l'indexation la
deuxième année, c'est un autre effort qui a été
demandé et qui a été accepté par les travailleurs.
Il y a eu des problèmes de rencontres, des problèmes de versions,
des problèmes d'interprétation. Qui a dit quoi? qui a
recommandé quoi? quel était l'engagement?
M. le Président, ma position, quant à moi et quant
à nous, c'est qu'une commission parlementaire nous aurait permis de
réunir tout ce beau monde pour savoir qui disait vrai. Il y a une chose
qui est certaine: la loi prévoit 10% et 6%. Le syndicat sera
certainement mécontent, parce que le syndicat avait donné sa
parole qu'il acceptait 11% et 6%. La Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec sera probablement mécontente,
parce que, avec le jugement sévère dont elle a été
l'objet de la part du gouvernement, il y a de quoi être
mécontente. Malgré qu'il y avait une entente, selon ce qui est
reproduit dans le rapport, à 11% et 6%, le gouvernement prévoit
10% et 6%. Nous croyons, que le gouvernement aurait dû, d'une part,
scinder le projet de loi pour que les députés aient ce soir, dans
un premier temps, à voter sur le retour au travail des chauffeurs de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec. Tous
les membres de cette Assemblée veulent que le transport reprenne dans
les plus brefs délais. D'un autre côté, il aurait fallu
faire voter les députés sur l'à-propos ou non de
décréter la convention collective, d'écrire la convention
collective à la place des parties dans le projet de loi ou encore qu'on
se prononce sur les 10% et les 6%.
Quant à nous, nous croyons que le gouvernement aurait dû
écrire dans son projet de loi 11% et 6%. C'est dans ce sens, M. le
Président... Oui, écrivez-le. Je vois le député de
Vanier qui sort son crayon. Écrivez-le. C'est dans ce sens que, lors de
l'étude du projet de loi article par article, nous présenterons
un amendement qui visera à faire en sorte qu'à défaut de
laisser, au lendemain de l'application de ce projet de loi et du retour au
travail des chauffeurs, les parties négocier leur convention, si le
gouvernement tient à l'écrire, il devra l'écrire dans ce
sens, dans le sens de l'entente qui a flotté quelque part entre les
parties où tout le monde, à un moment donné, des deux
côtés, aurait convenu que c'était 11% et 6%.
M. le Président, demain, le projet de loi sera adopté,
mais le problème fondamental des relations entre les employés et
l'employeur, la Commission de transport de la Communauté urbaine de
Québec, ne sera pas réglé. Est-il normal que les
citoyens
de la région de Québec aient vécu cinq
grèves? Est-il normal que depuis 1969, les citoyens de la région
de Québec aient été privés pendant 328 jours,
presque un an, de transport en commun, depuis une douzaine d'années?
Non. Le problème ne sera pas réglé. La loi spéciale
va être adoptée. Chacun des députés s'en retournera
chez lui. Le Parlement va arrêter de siéger pour la
journée, malgré que cela a coûté plusieurs dizaines
de milliers de dollars et le PQ - et plus particulièrement les
porte-parole du Parti québécois de la région de
Québec -aura peut-être sauvé son image.
M. le Président, je m'imagine le député de Vanier,
parce que les péquistes, comme disait M. Truman lorsqu'il parlait d'un
autre politicien à Washington disait: "He lies both sides of his mouth".
Les péquistes mentent bien souvent des deux côtés de la
bouche. Je m'imagine, M. le député de Vanier qui entre faire son
marché le samedi après-midi - son chauffeur l'attend à la
porte - et qui rencontre une dame, une citoyenne, usager du transport en
commun, lui disant: On vous a réglé cela. C'est nous, du Parti
québécois et du gouvernement qui avons imposé la loi
spéciale. J'imagine le même député de Vanier qui
rencontre la Commission de transport de la Communauté urbaine de
Québec, MM. les maires, leur disant: Vous nous avez causé des
problèmes, mais ils n'ont pas eu leurs 11%. Et je m'imagine le
même député de Vanier qui rencontre les syndiqués et
qui leur dit: Ils n'ont pas eu leurs trois ans à la communauté
urbaine. C'est vous autres ça, des gens qui mentent de chaque
côté de la bouche. Je suis persuadé que ce sera ainsi,
parce que bien souvent, M. le Président, leurs gestes, leurs politiques
sont le résultat de tactiques et de stratégies. Par exemple,
mercredi, le Conseil des ministres a reçu le rapport. Mercredi, vous
aviez une recommandation pour que le Parlement soit convoqué. (21 h
10)
Dans le passé, vous avez convoqué le Parlement, parfois,
une nuit. Je me rappelle que, d'un dimanche à un lundi quelconque, vous
avez convoqué la Chambre pour lundi, quatorze heures. Vous auriez pu
mercredi convoquer la Chambre pour hier, s'il le fallait. Mais non, vendredi,
M. le Président, pour que la nouvelle soit dans les journaux le samedi,
pour que ça fasse la nouvelle toute la fin de semaine, pour que le
député de Vanier et le ministre du Travail passent auprès
du public comme étant ceux qui ont réglé la grève.
C'est leur politique de marketing et de communications.
Des voix: Zorro!
M. Pagé: C'est ce que j'avais à vous dire. Encore
une fois, je sympathise avec le ministre du Travail - je termine
là-dessus, c'est la dernière intervention de notre
côté -qui a comme tremplin de carrière comme ministre du
Travail de servir d'homme de main du caucus régional du Parti
québécois de la région de Québec.
M. Rivest: Un bon départ!
M. Pagé: Je retiens de l'ensemble de cette
démarche, de ce problème, de ce gâchis de
négociation qu'on a connu, entre autres, pour les citoyens, depuis le 23
octobre, que ce qui a provoqué la grève de la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Québec, ce ne sont pas les
travailleurs et ce n'est pas nécessairement la commission de transport;
ce sont les déclarations de René Lévesque, premier
ministre, à l'égard des municipalités et la
déclaration, combien téméraire, du caucus du Parti
québécois de la région de Québec. La commission de
transport a pu s'appuyer sur cette déclaration pour fermer son dossier
et ne pas négocier, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: M. le Président, on savait, depuis un certain
nombre de jours déjà - à la suite surtout du rapport qui a
été déposé par les médiateurs
spéciaux du gouvernement, MM. Boivin et Bouchard - que l'ensemble des
attitudes adoptées par les dirigeants de la Commission de transport de
la Communauté urbaine de Québec et de la Communauté
urbaine de Québec était marqué au coin de la
rigidité et de l'incohérence. C'est écrit en toutes
lettres dans le rapport.
Des voix: Jean-Rock.
M. Bertrand: Ce qu'on vient d'apprendre aujourd'hui, en
écoutant les porte-parole du Parti libéral, c'est
qu'effectivement la même incohérence règne dans leurs
rangs. On fait des discours, on attaque à gauche, on attaque à
droite et, dans toute la mesure du possible, on essaie évidemment de
dire au gouvernement: C'est vous qui êtes les responsables de la
grève, c'est vous qui, à toutes fins utiles, l'avez
déclenchée. C'est comme si, dans le fond, c'est nous qui
conduisions les autobus à la Communauté urbaine de Québec
et qui avions pris la décision de ne plus conduire les autobus de la
Communauté urbaine de Québec. Le plus drôle de la chose,
c'est qu'après avoir dit toutes ces choses-là, ils vont voter
pour.
Le ministre du Travail aura la chance de parler tout à l'heure de
ces fameuses lois spéciales qu'on a adoptées depuis 1976 pour
montrer à quel point le Parti libéral du
Québec tient un discours tout à fait incohérent.
Ils passent des heures et des heures à nous dire un paquet de choses
pour, finalement, ne pas avoir à se prononcer sur le fond. Mais regardez
bien, M. le Président, tantôt, quand vous appellerez le vote,
quand vous demanderez aux députés de l'Assemblée nationale
du Québec: Êtes-vous pour ou contre le projet de loi no 84 avec
tout ce qu'il contient, c'est-à-dire les principes, le fond,
êtes-vous, oui ou non, d'accord avec ce projet de loi, ils vont voter
oui.
Il y a le député de Louis-Hébert qui fait un
discours. On l'écoute et on se dit, à la fin de son discours:
Même s'il a été à la Communauté urbaine de
Québec pendant un certain nombre de mois en 1979 et qu'il était
du côté patronal, forcément, puisqu'il en était le
secrétaire, même s'il a vécu ce que c'était à
l'époque, aujourd'hui, il faisait un discours dans lequel il n'osait pas
trop s'avancer sur le fond du dossier. Des attaques personnelles, ça va
toujours, mais parler du fond de la question, parler de ce problème de
l'absence de transport en commun en ce moment dans la région de
Québec, ça, non. Parce que son discours aurait donné
l'impression qu'il appuyait le gouvernement. Mais, quand va venir le temps du
vote, tantôt, quand va venir le temps de dire si on est pour ou contre,
tous vont dire qu'ils sont pour.
Le député de Sainte-Anne, tantôt, je l'ai entendu
dire: On nous force à voter pour votre loi. Il n'est pas forcé,
M. le Président. Est-il un homme libre? Se considère-t-il comme
un citoyen responsable? Est-il ici, dans ce Parlement, dans cette
Assemblée nationale?
M. Polak: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le député, je veux vous permettre de bien intervenir pour que
tout le monde comprenne. C'est pour cela que je restais debout.
M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je ne veux pas prolonger le
débat, mais je pense vraiment que les paroles dont se sert le ministre
sont une insulte. D'abord, il n'a pas besoin de me traiter d'irresponsable. Je
voterai pour parce que je suis responsable. Qu'il pose la même question
qu'il nous pose à tous ces syndicalistes, à son parti comment il
va voter...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Bertrand: Vous l'avez remarqué, M. le Président,
et je crois que ceux qui nous écoutent ont remarqué que je posais
des questions. Je disais: Est-ce que le député de
Sainte-Anne se considère comme un député libre?
Probablement que sa réponse est oui. Il me fait signe que oui. Se
considère-t-il comme un député responsable? Il me fait
signe que oui. Considère-t-il qu'étant ici aujourd'hui à
Québec, ayant dû quitter Montréal pour venir à
Québec, il a toute la latitude voulue pour poser un jugement sur le
projet de loi no 84? Il répond que oui. Donc, quand tout à
l'heure le député de Sainte-Anne disait: On nous force à
voter pour votre loi, je me demande exactement de quoi il parle. Il peut voter
contre.
M. le Président, je pense que ce serait important que vous
rappeliez au député de Sainte-Anne qu'il a des droits dans cette
Assemblée nationale et qu'il peut voter contre un projet de loi qui est
présenté par le gouvernement.
Pour parler d'incohérence, il y a le député de
Portneuf qui vient de nous dire, parlant des gens de la Commission de transport
et de la Communauté urbaine de Québec, qu'il ne voulait surtout
pas un peu trop tapocher, qu'il recommandait 11% et 6%. Il sait par ailleurs
que ces mêmes gens qu'il connaît bien, qu'il doit à
l'occasion lui aussi fréquenter - j'espère qu'il n'y a pas que le
député de Vanier qui fréquente ces gens... Tant mieux pour
eux s'ils ont le bonheur de rencontrer à l'occasion le
député de Portneuf. Le député de Portneuf sait-il
que ces gens qu'il rencontre à l'occasion ne sont pas pour cela, les 11%
et 6%? Vous savez cela?
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Bertrand: II a dit, à un moment donné: Les
contribuables sont importants là-dedans, il faut en tenir compte. La
Commission de transport et la Communauté urbaine de Québec, dans
un télégramme envoyé au premier ministre, fait part de
cela, de ses inquiétudes de voir les contribuables de la région
de Québec payer trop, dans le cadre de ce renouvellement de convention
collective. Le député de Portneuf ne se rend pas compte qu'en
prenant cette attitude il va effectivement exactement à l'inverse de la
position que ces gens qu'il fréquente très souvent lui aussi ont
prise, voulant qu'une position de 11% et 6% serait pour les gens de la
Communauté urbaine de Québec et de la Commission de transport
inacceptable pour les contribuables de la région de Québec.
Autre incohérence, on nous dit: Les députés
péquistes de la région de Québec ont réagi trop
vite. Ils se sont avancés. S'étant avancés, ils ont
à toutes fins utiles empêché qu'il y ait une
négociation. Ils ont à toutes fins utiles empêché M.
Pageau, président de la Communauté urbaine de Québec, et
M. Bouchard, président de la Commission de
transport, de véritablement discuter, négocier avec d'une
part le conciliateur nommé par le ministre du Travail pour aller les
rencontrer, et d'autre part avec les deux médiateurs spéciaux
nommés par le Conseil des ministres, MM. Boivin et Bouchard. Or, assez
curieusement, lorsque les médiateurs ont été
nommés, le président de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, M. Léonce Bouchard,
accordait une entrevue au Soleil du vendredi, 29 octobre 1982. On y lit: La
CTCUQ espérait une solution plus rapide. Et puis, il dit: Nous sommes
prêts à travailler avec les deux médiateurs envoyés
par le gouvernement. Nous sommes prêts à travailler. Le
député de Portneuf dit: Ces gens n'accepteront jamais, puisque
maintenant le caucus des députés du Parti québécois
de la région de Québec a dit que, quant à lui, il ne
saurait tolérer qu'on fasse revivre à la population le même
cauchemar que celui qu'elle a vécu en 1979, qu'on ne saurait
tolérer une grève qui durerait des mois ou des semaines et que
c'était une question de jours et d'heures, quant à nous. Cela a
été dit, effectivement. Dans ce contexte, le député
de Portneuf dit: C'est évident, la commission de transport n'acceptera
pas de négocier. Or, le président de la commission de transport
dément ce que dit le député de Portneuf, lorsqu'il dit:
Nous sommes prêts à travailler...
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Bertrand: ... avec les deux médiateurs envoyés
par le gouvernement. Il ajoute: Nous avons d'ailleurs déjà
commencé les rencontres et la commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec va continuer à donner son
entière collaboration.
Le député de Portneuf, encore une fois, fait preuve
d'incohérence au moment où il dit qu'il n'y aura pas
possibilité de faire en sorte que les médiateurs spéciaux
puissent travailler avec l'une ou l'autre partie. Il se fait dire finalement,
aux propos qu'il vient d'émettre, par le président de la
commission de transport, qu'effectivement, cette question était pour
eux, valable, c'est-à-dire de rencontrer des médiateurs
spéciaux et de négocier avec ces médiateurs
spéciaux. C'était après les déclarations qui
avaient été faites par l'un ou l'autre des représentants
du caucus des députés du Parti québécois de la
région de Québec.
Autre incohérence, on nous dit: Vous auriez dû attendre,
vous auriez dû laisser aller la libre négociation, vous auriez
dû laisser la commission de transport se débrouiller avec la
partie syndicale et les laisser toutes les deux s'assurer qu'elles pourraient
se rapprocher d'elles-mêmes ou avec l'aide, si nécessaire, si
besoin est, à leur demande ou sans leur demande, d'un conciliateur
nommé par le ministre du Travail.
Il faut savoir une chose, M. le député de Portneuf, c'est
qu'en 1979 - j'ai relu effectivement les questions que vous aviez posées
au premier ministre, au ministre du Travail, pour que le ministère du
Travail s'engage dans le dossier - Je me rappelle très bien que vous
disiez qu'il fallait que le gouvernement fasse quelque chose, qu'il fallait que
le gouvernement bouge. Maintenant, le gouvernement bouge et on se fait
reprocher de bouger. Le gouvernement prend ses responsabilités et on
nous dit: Vous auriez dû attendre, vous auriez dû laisser passer le
temps. La preuve en est une déclaration qui a été faite
par deux de vos collègues, M. le député de Portneuf. Et
à peu près à la même période que les
déclarations dont vous avez parlé et qui ont été
faites effectivement par des députés du Parti
québécois de la région de Québec. Vos deux
collègues, ce sont le député de Louis-Hébert et le
député de Jean-Talon, qui sont tous deux députés
dans des circonscriptions électorales où, normalement, il y a un
service de transport en commun.
Et tous les deux, qu'est-ce qu'ils disaient, pas hier, pas avant-hier,
le lundi 25 octobre? Savez-vous quand cette déclaration a
été faite, M. le député de Portneuf? Deux jours
après le déclenchement de la grève, deux jours. Avant
même que le député de Charlesbourg, dont on parlait
tantôt, ait fait sa déclaration en disant que cela ne saurait
durer plus de quelques jours.
Une voix: Quelques heures, pas quelques jours.
M. Bertrand: Mettez le titre du Soleil que vous avez devant vous,
deux ou trois jours, selon le député de Charlesbourg. Deux ou
trois jours, disait-il. Vous avez le titre du Soleil, vous me l'avez
montré tout à l'heure.
Deux jours après le déclenchement de la grève, le
député de Jean-Talon et le député de
Louis-Hébert étaient interrogés par un journaliste,
n'échappant pas eux aussi, cela va de soi...
Une voix: ... un communiqué.
M. Bertrand: Ah! par un communiqué? Eh! mes aïeux,
c'est encore plus officiel. Ils n'ont même pas attendu que les
journalistes les appellent. De leur propre chef, de leur propre
initiative...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, je m'excuse.
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. le leader.
M. Bertrand: ... ils émettent un communiqué et
celui-ci est repris par les
journalistes. Qu'est-ce que ça donne?: "De leur
côté, les deux députés libéraux, Jean-Claude
Rivest et Réjean Doyon sont intervenus dans le dossier."
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Bertrand: Tout à l'heure, le député de
Brome-Missisquoi, le député de Sainte-Anne, le
député de Louis-Hébert, le député de
Portneuf m'ont fait beaucoup de publicité en disant: Le
député de Vanier pourra se promener et dire que, par ses
interventions, par ses déclarations, l'Assemblée nationale a
finalement été convoquée, on a passé une loi
spéciale et les gens vont retrouver leurs autobus dimanche. On m'a fait
beaucoup de publicité et pas mal trop, à part cela.
M. Lalonde: Ah non! M. Bertrand: Ah oui! Une voix:
Vous en méritez.
M. Bertrand: S'ils étaient vraiment honnêtes, ils
devraient rendre au moins témoignage aux autres députés du
caucus du Parti québécois de la région de Québec
qui, eux aussi, en équipe, ont pris leurs responsabilités. Ils
devraient rendre témoignage au Conseil des ministres qui, en
équipe, par solidarité, a pris la décision de
présenter une loi spéciale.
Comment se fait-il que le député de Brome-Missisquoi n'ait
pas rendu hommage à son collègue le député de
Jean-Talon, comment se fait-il qu'il n'ait pas rendu hommage à son
collègue le député de Louis-Hébert, qui sont
intervenus dans le dossier, deux jours après le déclenchement de
la grève?
Une voix: Pour dire quoi?
M. Bertrand: Pour dire quoi? Selon eux, le gouvernement doit agir
rapidement. Oh!
Des voix: Ah! Ah! M. Guay: La libre négociation.
M. Bertrand: La libre négociation. Une voix: Qu'est-ce
qu'on en fait? M. Rivest: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le
député! S'il vous plaît!
Une voix: Quel privilège?
Une voix: Le privilège de député.
Une voix: Bouf!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. le député de Jean-Talon, sur une question de
privilège.
M. Rivest: M. le Président, il est tout à fait
exact que mon collègue de Louis-Hébert et moi-même avons
émis un communiqué qui demandait au gouvernement d'agir sans
délai. Le communiqué disait bien: "par les voies de la
médiation - c'est-à-dire par les services du ministère du
Travail - ou par les voies de l'Assemblée nationale, si le
ministère du Travail manifestait le signe d'incompétence qu'il
manifeste depuis quelque temps dans le domaine des conflits."
Une voix: Très bien!
M. Bertrand: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: ... vous voyez l'incohérence de ces
gens-là. On s'est fait dire par le député de
Brome-Missisquoi et par d'autres ensuite que parce que nous avions réagi
rapidement, nous avions probablement nui à toute la négociation
qui, par la suite, a eu lieu ou avec le conciliateur ou avec les
médiateurs spéciaux.
Or, les deux députés libéraux de
Louis-Hébert et de Jean-Talon ont dit que selon eux, le gouvernement
doit agir rapidement, par le biais du ministre du Travail. Et effectivement, le
ministre du Travail a mandaté son conciliateur pour s'assurer qu'une
dernière tentative serait faite. Le ministre du Travail a fait rapport
au Conseil des ministres que le conciliateur lui faisait rapport à
savoir qu'il n'était pas possible d'en arriver à un
rapprochement. Les deux députés libéraux ajoutaient: "Le
gouvernement doit agir rapidement soit par le ministère du Travail ou,
encore, par l'Assemblée nationale pour rétablir le service et
assainir les relations du travail à la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec." (21 h 30)
Vous avez là, M. le Président, de beaux exemples
d'incohérence...
Une voix: Un trou de mémoire.
M. Bertrand: ... dont nous ont fait la démonstration, cet
après-midi, des députés libéraux qui tiennent un
langage... Quand il faut faire le petit discours pour meubler les quelques
heures parce qu'ils sont ici, à l'Assemblée nationale, et qu'il
faut bien qu'ils disent quelque chose sur le projet de loi no 84, ils tiennent
un petit discours et on dit: Avec un discours comme celui-là, c'est
évident qu'ils vont voter contre le projet de
loi. Remarquez bien cela, M. le Président. Tantôt, vous
allez appeler le vote, vous les verrez se lever et ils vont voter oui.
Une voix: Attention!
M. Bertrand: C'est vrai, on ne sait plus. Depuis que oui veut
dire non et que non veut dire oui, on ne sait pas exactement.
Une voix: Ils vont s'abstenir.
Une voix: C'est dans le dictionnaire, oui.
M. Bertrand: Puis, ils ont fait la preuve de leur
incohérence en prenant des attitudes. Tantôt, on crie au
gouvernement: Vous nous forcez et, après, on dit, en faisant signe que
oui: Non, je suis un député libre, vous ne me forcerez pas; je
voterai comme je voudrai. Ensuite, on tient des discours qu'on a tenus, comme
celui du député de Portneuf, mais on ne réalise pas du
tout qu'en faisant ce genre de proposition, on va exactement à l'inverse
de toute une série d'attitudes et de commentaires qui ont
été faits par des gens dont il dit que, nous les
députés du Parti québécois, on se serait
amusés, au cours des derniers jours, à les talocher.
Or, qu'avons-nous fait effectivement? Nous avons reçu, mercredi,
un rapport qui a été écrit par M. Jean-Roch Boivin et par
M. Lucien Bouchard.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Bertrand: Ce rapport dit, à la page 8: "Nous avons
même eu l'espoir de voir les parties conclure ce règlement lorsque
le président de la Communauté urbaine de Québec, M.
Pageau, et le président de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, M. Bouchard, nous ont
déclaré, hier soir, à l'issue de notre dernière
rencontre, qu'ils recommanderaient - les mots sont importants, M. le
Président - à leurs 29 collègues du conseil de la
Communauté urbaine de Québec, l'acceptation de la dernière
proposition syndicale que leur avait transmise M. Donatien Corriveau
lui-même." Dans les heures qui ont suivi, on a appris... J'en sais
quelque chose parce que, mercredi matin, vers 10 heures, j'ai reçu
à mon bureau le président de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, le président de la
Communauté urbaine de Québec et quelques maires de certaines
municipalités.
Une voix: Pourquoi pas en commission parlementaire?
M. Bertrand: Et ces gens-là, entre autres, MM. Pageau et
Bouchard, m'ont dit que, non, ils n'avaient pas pris d'engagement...
Une voix: Ah!
M. Bertrand: ... devant MM. Boivin et Bouchard, à savoir
qu'ils allaient recommander l'acceptation de la proposition syndicale de 11% et
6% pour 1982 et 1983. De temps en temps, on l'a dit de l'autre
côté: c'est vrai qu'il m'arrive très souvent d'être
au petit écran...
Des voix: Ah!
M. Bertrand: Mais, heureusement, je me garde quand même
quelques heures pour regarder le petit écran.
Une voix: ... fort.
Des voix: Ah!
M. Bertrand: Un à zéro.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le leader.
M. Bertrand: Un à zéro pour le député
de Jean-Talon, M. le Président.
Hier, le président de la Communauté urbaine de
Québec, M. Pageau, a dit exactement ceci, parlant de la fameuse
soirée du mardi et de la rencontre avec MM. Bouchard et Boivin: Ce qu'on
s'était engagé à faire, c'est ceci - je cite textuellement
M. Pageau: "On va transmettre les informations que vous nous avez
données." C'est pas mal différent de ce qui est écrit dans
le rapport des médiateurs spéciaux qui disent que MM. Bouchard et
Pageau s'étaient engagés à recommander à leurs 29
collègues l'acceptation de la dernière proposition syndicale. M.
Pageau, en conférence de presse, dit: On s'était engagé
à transmettre les informations. Aujourd'hui, j'ai remis aux membres de
l'Assemblée nationale un texte de M. Lucien Bouchard, qui a
été écrit hier à la suite de la conférence
de presse qui a été tenue par M. Pageau et ses collègues
et aussi à la suite du télégramme envoyé au premier
ministre par la Communauté urbaine de Québec et la commission de
transport. À la page 2 de ce document, M. Lucien. Bouchard écrit
ceci: "Une autre contradiction constatée dans le comportement de la
commission de transport se manifeste dans l'annonce faite aujourd'hui -
c'était hier -que le rejet patronal de la proposition syndicale à
11% et 6% pour les années 1982 et 1983 avait été
voté unanimement. Il est certain, écrit M. Lucien Bouchard, que
MM.
Pageau et Bouchard, interrogés séparément et
spécifiquement sur la question mardi soir, ont expressément
déclaré qu'ils recommanderaient le règlement du litige sur
cette base de 11% et 6%, M. Pageau précisant lui-même qu'il
était en train de préparer ses arguments de vente."
En effet, nos médiateurs étaient là et leurs
vis-à-vis, M. Marcel Pageau et M. Léonce Bouchard étaient
assis. À un moment donné, M. Marcel Pageau était en train
de griffonner des notes et notre médiateur spécial lui demande:
Qu'est-ce que vous êtes en train de faire? 11 dit: Je suis en train de
préparer mes arguments de vente.
Le lendemain, à 7 h 30, lors de la réunion du conseil de
la Communauté urbaine de Québec, vous avez deux personnes qui
avaient pris des engagements, dont l'une était même en train
d'écrire ses arguments de vente, qui arrivent devant le conseil de la
Communauté urbaine de Québec avec le résultat final que
l'on connaît: c'est qu'ils ont voté unanimement contre la
proposition syndicale de 11% et 6%. Cela, je n'ai pas besoin de vous dire, M.
le Président, que c'est une attitude qui méritait d'être
dénoncée, comme elle l'a été, par les deux
médiateurs spéciaux qui ont écrit, et je pense que cela
mérite d'être rappelé: "Nous devons conclure que les
représentants syndicaux ont déployé durant notre
intervention des efforts sérieux pour se rapprocher d'une zone de
règlement avec la commission. Nous aimerions pouvoir en dire autant de
la CTCUQ qui, dans l'ensemble, a adopté une position très rigide
et, à certains égards, plus ou moins cohérente."
Pas besoin de vous dire, M. le Président, que, dans un contexte
comme ça, au-delà du projet de loi qui est devant
l'Assemblée nationale, au-delà de cette proposition qui est
contenue dans le projet de loi no 84, c'est-à-dire 10% pour 1982, 6%
pour 1983 avec une formule d'indexation par montant forfaitaire, s'il y a une
chose qui est claire, c'est que le rapport qui a été écrit
par MM. Boivin et Bouchard et qui, effectivement, engage leur
crédibilité est lourd de conséquences pour des gens qui
probablement, aux yeux de l'opinion publique, passaient toujours pour
être de bonne foi au niveau de la négociation, alors que d'autres,
finalement, quand on écoutait les lignes ouvertes, qu'on lisait les
lettres dans les journaux ou qu'on recevait des appels dans nos bureaux de
comté, se faisaient matraquer continuellement dans l'opinion publique.
S'il y a quelque chose qui est révélateur dans ce rapport, c'est
que deux personnes qui en ont vécu, des relations du travail, pendant
une bonne partie de leur vie, qui ont connu des conflits bien plus difficiles
à régler, très souvent, que celui auquel ils ont
été confrontés au cours de la dernière semaine, ces
gens qui en ont vu d'autres ont écrit des choses qui vont très
directement dans le sens de noter ou de faire noter à la population que,
s'il y a eu de la bonne foi manifestée, cela a été par la
partie syndicale et, s'il y a eu de la rigidité et de
l'incohérence, cela a été du câté patronal.
(21 h 40)
On sait les prochaines négociations qui viendront pour la
troisième année de la convention collective. À
Montréal, finalement, la convention est pour deux ans. Elle va se
terminer à la fin de 1983 et à Québec, sur la base de
notre projet de loi, elle est aussi pour deux ans. Elle va finir à la
fin de 1983. Finalement, il y aura là un document qui aura
démontré à l'évidence à la population qu'il
y a des gens qui avaient manifesté certainement beaucoup plus de
souplesse que certaines autres personnes. Dans ce contexte, je ne peux que
réitérer qu'évidemment la meilleure façon de
régler toute cette question était d'en arriver à un
règlement négocié. C'est clair. Tout le monde - la partie
syndicale, la partie patronale, la population, les élus, les
députés, les ministres, peu importe - aurait souhaité un
règlement négocié. Mais, quand on sent que ce
règlement ne peut plus être négocié, parce qu'il y
a, d'un côté, un braquage et qu'en fin de compte on est pris dans
une situation de blocage complet, c'est le rôle du gouvernement, des
députés du Parti québécois de la région de
Québec et du Conseil des ministres de faire en sorte que
l'Assemblée nationale soit convoquée aujourd'hui et
qu'effectivement on permette à la population de retrouver son service de
transport en commun.
On aurait préféré, M. le Président, que les
deux parties en viennent à une entente. Je réitère,
malgré les facéties du député de Sainte-Anne tout
à l'heure, qu'effectivement, on est passé tout près d'une
entente, mais que, comme l'ont dit nos médiateurs spéciaux, cette
entente n'a pas été possible à cause de l'attitude rigide
et incohérente adoptée par les dirigeants de la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Québec. C'est pourquoi,
même si ce n'est pas nécessairement la meilleure façon de
procéder, nous allons adopter le projet de loi 84. Malgré tous
les discours que vous avez tenus, malgré toutes les attaques que vous
avez pu faire à l'endroit d'un bon nombre de députés de ce
côté-ci de la Chambre, malgré - comment dirais-je? - la
confusion ou l'incohérence qui ont pu régner dans l'ensemble des
propos que vous avez tenus de l'autre côté de la Chambre, vous
allez, tout à l'heure, comme vous l'avez fait dans bien d'autres
situations, voter en faveur de cette loi spéciale, parce que,
finalement, vous vous rendez bien compte que la population de Québec et
de la région de Québec n'attend rien de moins de ses élus
à l'Assemblée nationale, qu'ils prennent leurs
responsabilités
quand il y a un blocage ou un braquage au niveau de la
négociation à la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, après ces quelques
heures de débat, il me reste seulement un certain nombre de
réflexions à faire. La première serait que la faiblesse de
l'argumentation du gouvernement vient du fait qu'elle s'appuie sur un rapport
des médiateurs spéciaux dont l'un est le chef de cabinet du
premier ministre, un homme éminemment politique.
Généralement, lorsqu'on invoque un rapport pour justifier un
geste politique, on s'empresse d'abord de souligner la compétence de
ceux ou de celles qui ont préparé le rapport, qui ont fait
l'étude et le caractère d'indépendance des auteurs
à l'égard du gouvernement. Deuxièmement, je dois
reconnaître, dans l'espèce de dialogue de sourds que nous avons
entendu, que le refus de la part du leader du gouvernement de tenir une
commission parlementaire qui aurait pu entendre les travailleurs, les
représentants de la CUQ, de la commission de transport et aussi les
fameux médiateurs spéciaux. Ce refus est un écueil
énorme dans nos débats et dont les conséquences ne seront
mesurées que plus tard.
Troisièmement, ce que je retiens de ce débat - et je
remercie surtout les députés libéraux qui ont su faire
ressortir cet élément extrêmement important - c'est que le
gouvernement est responsable de la crise dans les négociations que nous
devons régler ce soir.
Quatrièmement, ce que le leader du gouvernement ne comprend pas -
entre autres - c'est que, quand deux députés de l'Opposition
demandent au gouvernement d'agir, même par le Parlement, c'est une
demande, c'est une pression, c'est une expression, c'est une façon de
faire avancer les choses. Mais quand trois ministres, membres d'un caucus
régional, s'engagent à mettre fin à une grève
après quelques heures, c'est un engagement gouvernemental. C'est ce que
le leader du gouvernement n'a pas encore compris, M. le Président.
Cinquièmement, pour le Parti libéral du Québec, le
service de transport en commun à Québec doit être
rétabli sans délai.
Sixièmement, nous sommes contre l'intervention de la loi dans les
conditions de travail et de salaire. Or, M. le Président, les deux
principes sont contenus dans la même loi. Cette loi devrait être
divisée pour nous permettre de voter exactement suivant notre intention.
Si le gouvernement respectait les députés de cette Chambre, il le
ferait de son propre chef. Il ferait une loi, en faveur de laquelle nous
voterions, pour rétablir sans délai le service de transport en
commun à Québec, et une autre loi, contre laquelle nous
voterions, qui impose les conditions de travail et de salaire et qui brime la
liberté des négociations.
M. le Président, la question de la division du projet de loi est
posée. Je sais que la motion d'urgence qui a été
adoptée enlève l'application des articles 87 et suivants, qui
touchent la division d'un projet de loi. De toute façon, même si
ces articles s'appliquaient, nous ne pourrions pas, ici, demander la division
du projet de loi en deuxième lecture. La seule façon de le faire
- je sais que le député de Sainte-Marie, qui m'écoute
actuellement, a des préoccupations semblables, parce qu'on en a
discuté - ce serait d'invoquer l'article 152, qui nous permettrait de
dire à une commission élue, qui étudierait le projet de
loi article par article: Divisez-le. Or, il y a deux écueils.
Premièrement, ça prend une motion annoncée - ce que nous
n'avons pas le loisir de faire, vu l'urgence - deuxièmement, il n'y aura
pas de commission élue, ce sera en comité plénier -
d'après la motion du leader du gouvernement - que l'étude article
par article se fera dans quelques minutes.
(21 h 50)
Je ne sais pas si le leader du gouvernement comprend le problème.
Je m'excuse, je ne veux pas être arrogant à son égard, mais
l'accueil hautain que ma demande de commission parlementaire a reçu dans
sa tête m'inspire un certain doute quant à sa capacité de
comprendre un peu le problème. Ici, nous avons une loi spéciale
-toutes les lois sont spéciales, mais celle-là l'est un peu plus.
Vous avez considéré l'importance, l'urgence de réunir 122
députés. J'espère que vous allez considérer la
possibilité de leur permettre de voter honnêtement, suivant leur
conscience. En divisant votre projet de loi, cela nous permettrait de voter
pour le principe du rétablissement du service et contre l'imposition des
conditions de travail et de salaire. Si vous ne le faites pas, si vous ne
divisez pas le projet de loi, je vous dis d'avance que nous allons quand
même voter pour le projet de loi. Je vous mets en garde contre une
interprétation démagogique comme celle que vous avez faite tout
à l'heure de notre vote. Ce n'est pas un appui au gouvernement qui s'est
conduit comme un enfant en culottes courtes là-dedans, comme le leader
du gouvernement d'ailleurs. Notre vote n'est pas un appui au gouvernement.
Notre vote est un appui à la population de la ville de Québec, de
la Communauté urbaine de Québec simplement. C'est cela notre
vote.
M. le Président, il y a un individu qui
vient de s'ajouter au décor qui se présente devant moi et
qui fait du bruit. Je demande ceci au leader du gouvernement: Va-t-il accepter
- il peut le faire immédiatement, sans difficulté de
formalité - de diviser le vote en deux? Je l'invite à le faire.
S'il ne le fait pas, je le mets en garde contre les déclarations comme
celles qu'il vient de faire. C'est de la démagogie qui ne fait pas
avancer le débat. Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je comprends que le
ministre du Travail s'apprêtait à utiliser son droit de
réplique, mais j'aurais une demande de directive à vous adresser.
Cela pourrait, dans le fond, être transformé en question au leader
du gouvernement, s'il me le permet. Dans mon intervention - le leader de
l'Opposition vient de le rappeler - j'avais annoncé que je ferais une
motion pour que le vote se prenne en deux parties. Je constate effectivement
que la jurisprudence et l'application des articles 87 et 88 ne me permet pas de
faire une motion comme telle. Je pourrais cependant lors de l'étude en
comité plénier ou si on allait en commission, je pourrais, si
j'ai bien compris, faire la discussion article par article, avant d'aller en
commission faire une motion pour demander que la commission étudie cela
de façon scindée. Comme on va se transformer en
plénière, je n'ai donc plus la possibilité de faire ce
genre de motion que les articles 87 et 88 du règlement m'auraient permis
de faire. Par ailleurs, je pourrais, lors de l'étude article par
article, à partir du moment où il y aurait eu trop de
rigidité, prendre beaucoup plus de temps pour essayer de voir sur quels
articles je pourrais introduire ma motion de scinder. Je préfère
beaucoup plus m'adresser au leader du gouvernement et lui demander ce qu'il a
à perdre à me permettre d'indiquer, comme député,
quelle est mon intention quant à la reprise du service de transport
à la population et d'indiquer dans un deuxième temps mon
désaccord éventuel - parce qu'on ne sait pas comment cela va
tourner - sur le contenu. Cela ne changerait rien à la position finale.
Le gouvernement aurait sa loi, le député de Vanier aurait sa loi,
mais j'aurais eu au moins, moi, la possibilité comme parlementaire de
faire la distinction quant à mes orientations. Cela ne change rien quant
au résultat final pour le leader du gouvernement. Pourquoi
n'accepterait-il pas de faire preuve de moins de rigidité? La
rigidité qu'il dénonçait tantôt, ne pourrait-il pas
pour nous, les parlementaires, nous permettre de faire un vote scindé,
donc de prendre deux votes sur cette question? Je lui adresse la question avant
que le ministre du Travail ne fasse son intervention de réplique.
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Bisaillon: M. le Président, c'est du
mépris...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le leader du gouvernement...
M. Bertrand: M. le Président, vous savez de quelle
façon les débats doivent se dérouler à
l'Assemblée nationale. Il y a un débat en ce moment en
deuxième lecture. S'il devait y avoir quelque annonce que ce soit ou
quelque décision que ce soit, je pense qu'on peut très bien la
rendre après que le débat en deuxième lecture soit
terminé, c'est la moindre des choses, avant le vote.
Le Président: M. le ministre du Travail. M. Raynald
Fréchette (réplique)
M. Fréchette: M. le Président, vous allez me
permettre, à la fin de ce débat en deuxième lecture, de
remercier les collègues qui d'un côté et de l'autre de la
Chambre, y ont participé. Bien sûr, nous avons entendu des
interventions qui, à bien des égards, sont très
éloignées les unes des autres; mais ce qui étonne,
d'après ce qu'on a entendu au cours de l'après-midi, c'est que
malgré ces divergences d'opinions à bien des égards, sous
bien des chapitres, il semble que nous nous apprêtions à voter
à l'unanimité, sinon à une très forte
majorité, en faveur du projet de loi.
Et à cet égard, j'ai un peu de difficulté à
m'expliquer le rationnel qui est suivi par les députés de
l'Opposition. Ils ont plaidé avec véhémence quant au fond
de la loi pour dire - je retiens les propos, en particulier, du
député de Sainte-Anne et de quelques autres - qu'il s'agissait
d'un projet de loi inique, un projet de loi barbare, absurde et, malgré
tout cela, à la fin du compte, on arrivait avec une conclusion dans
laquelle on disait: Nous allons voter pour le projet de loi.
M. le Président, cela ressemble étrangement à une
situation que j'imagine et qui pourrait être de la nature suivante. Je
suppose que deux parties, un demandeur et un défendeur, se
présentent devant un tribunal. Le demandeur ayant une cause à
plaider, il la défend au meilleur de ses connaissances, avec
l'argumentation qu'il a et il s'attend évidemment que l'adversaire qui
est près de lui, qui est devant le tribunal pour soumettre de
l'argumentation... le demandeur, dis-je, s'attend évidemment que le
défendeur, de façon aussi énergique que nos
collègues d'en face l'ont fait, de façon aussi convaincante,
maintienne devant le tribunal que l'action doit être rejetée. Et
le président du tribunal ne s'attend pas à autre chose que cela.
Mais dans le cas qui nous
préoccupe, M. le Président, c'est exactement la situation
inverse à laquelle on fait face. Des gens qui, devant un tribunal,
plaideraient avec conviction dans un sens mais qui, arrivés à la
conclusion diraient: Malgré toute l'argumentation que l'on vient de
développer, malgré ce que l'on vous a dit, malgré le fait
qu'on ne puisse pas accepter les principes mis de l'avant par la demanderesse,
on vous demande quand même de maintenir l'action. On vous demande quand
même de donner gain de cause à la partie demanderesse devant le
tribunal. Or, M. le Président, c'est ce rationnel que j'ai un peu de
difficulté à m'expliquer et qui crée les mêmes
embêtements à plusieurs membres de cette Chambre.
Vous savez, ce n'est pas la première fois qu'on se retrouve
devant une situation semblable. Chaque fois qu'une occasion comme
celle-là s'est présentée, on a fonctionné un peu en
vertu du même processus. Pourtant, M. le Président, quand vous
relevez les votes qui ont été pris dans des occasions de
même nature, vous retrouvez les résultats suivants: 21 juin 1982,
81 députés pour la loi, un contre: 15 janvier 1982, pour 73,
contre 0; 24 mars 1980, pour 52, contre 0; 12 novembre 1979, pour 81, contre 1
(le député de Sainte-Marie) et une abstention; 18 décembre
1979, pour 88, contre 0. C'est ce rationnel, encore une fois, que j'ai un peu
de difficulté à m'expliquer par rapport à l'argumentation
que l'on développe et à la conclusion à laquelle on
arrive. Quoi qu'il en soit, c'est comme ça et il faut accepter la
situation telle qu'elle est. (22 heures)
M. le Président, à la fois le député de
Brome-Missisquoi et le député de Louis-Hébert se sont
interrogés sur le rôle du ministre du Travail dans le
présent conflit. Je n'irai pas jusqu'à ironiser et à vous
dire que c'est dans un ou plusieurs dictionnaires qu'on peut découvrir
la description de tâches d'un ministre du Travail. Ce n'est pas là
que cela se retrouve. Le rôle du ministre du Travail peut varier suivant
la conception de celui qui occupe la fonction, mais il y a, par ailleurs, des
principes, me semble-t-il, fondamentaux qui doivent être retenus par
tous.
En première instance, il me semble que le rôle du ministre
du Travail est, d'abord, de s'assurer que les lois qui sont sous sa juridiction
soient appliquées. Il doit aussi -et dans le cas qui nous occupe, je
l'ai dit dans mon intervention principale, cela a été fait -
mettre à la disposition des parties à la fois les expertises
humaines et les expertises de toute autre nature qui peuvent exister à
l'intérieur d'un service comme celui-là, mettre à la
disposition des parties les mécanismes qui sont prévus par la
loi. Mais il me semble, M. le Président - et le député de
Louis-Hébert peut avoir une conception différente, le
député de Brome-Missisquoi également - qu'il n'appartient
pas au ministre du Travail de négocier en lieu et place des parties. Il
n'appartient pas au ministre du Travail, personnellement, en tout cas,
d'intervenir à l'intérieur d'un mécanisme de
négociation qui suit son cours normal. Dans le présent conflit,
au meilleur de ma connaissance, c'est le rôle que j'ai tenté de
jouer.
Le député de Jean-Talon s'est interrogé sur ce
rôle qu'avait effectivement joué le ministère du Travail
dans le présent cas. Peut-être n'était-il pas là
lorsque nous avons amorcé l'étude du projet de loi, mais il me
semblait que j'avais donné dans le détail, avec autant de
précisions que c'était possible, les activités auxquelles
s'était livré le ministère du Travail dans ce cas-ci.
Je vous dirai, M. le Président, que depuis le 11 juin 1982, date
à laquelle la commission de transport a demandé la conciliation,
le ministère du Travail, à tous égards et à tout
moment, a été à la disposition des deux parties. Il y a eu
de nombreuses séances de conciliation, on le sait, je ne reviendrai pas
sur le détail. Des efforts ont été tentés par ceux
qui étaient affectés au dossier pour arriver à une
conclusion négociée. Dans l'exécution de leur mandat, eux
comme d'autres, par la suite, ont constaté que c'était, à
toutes fins utiles, une impasse quasi totale.
C'est sans aucune espèce d'hésitation -je pense que les
deux parties pourraient le corroborer - que je vous dis que la
disponibilité des experts du ministère du Travail a
été totale depuis le début du conflit et ils ont, à
tous égards, encore une fois, accompli leur mandat.
M. le Président, le député de Jean-Talon a aussi
amorcé une réflexion qui a retenu mon attention. Il est
allé exploiter certaines choses sur lesquelles, me semble-t-il, il nous
faut, de toute évidence, nous pencher, non seulement comme gouvernement,
mais comme société en général. Plusieurs
évaluent, à tort ou à raison, mais ils l'évaluent
dans ce sens-là, qu'après que nous aurons traversé cette
période qu'il est convenu d'appeler une crise la situation de la
société québécoise dans son ensemble ne sera plus
jamais la même. La situation ne sera plus jamais comparable à
celle que nous avons connue depuis 20, 30 et plus de 40 ans. Si, effectivement,
ce doit être cela, si ce que nous sommes en train de vivre maintenant
doit déboucher sur une situation qui ne sera plus socialement jamais la
même, il me semble - dans ce sens-là, je rejoins l'opinion du
député de Jean-Talon -que cela va nous obliger comme
gouvernement, bien sûr, mais comme société aussi, à
repenser ce qu'on pourrait qualifier de "notre contrat social" et, par voie de
conséquence, bien sûr, la philosophie qui doit
prévaloir dans nos relations du travail.
M. le Président, il me semble que le jour où la population
du Québec n'aura plus confiance ni dans ses gouvernements, quels qu'ils
soient, municipal, provincial, fédéral, ni dans les syndicats, ni
dans le patronat, ni dans les autres structures conventionnelles de la
société, il n'y aura pas beaucoup de distance à franchir
pour nous demander, si ce jour devait arriver, si nous n'allons pas vers
l'éclatement de cette société.
M. le Président, c'est très sommaire comme
réflexion, mais il me semble que la circonstance est appropriée
pour soulever un aspect de cette nature. En quelque sorte, je suis l'un de ceux
qui pensent qu'à tous égards, dans la société, il
va falloir penser à nous rajuster à un moment donné. C'est
un défi, bien sûr. C'est un défi qui, par surcroît,
n'est pas simple, mais si on réussit à le relever - je pense
qu'on est capable de le faire - nous aurons, comme société,
réalisé de grands progrès.
Je vous donne un seul exemple de ce à quoi je peux penser dans le
champ d'application stricte des relations du travail. Ceux d'entre nous qui ont
quelque expérience du processus de la négociation des conventions
collectives, ceux qui ont quelque expérience - il y en a beaucoup - de
la philosophie des relations du travail, ceux-là savent très bien
- c'est un exemple que je donne - qu'il peut arriver que des conflits de
travail procèdent strictement d'une atmosphère qui existait en
cours de convention. On a souvent vécu des situations qui ont fait que,
si en cours de convention les parties entre elles avaient réussi
à mettre en place des relations humaines, des relations de
communications, des "relations sociales" - entre guillemets - qui auraient
été dans la limite de la normale, plusieurs conflits de travail
ne se seraient jamais produits, M. le Président, plusieurs
difficultés dans le domaine des relations du travail ne se seraient pas
présentées, du moins de la façon que cela a
été fait et qu'on a connue à plusieurs occasions. (22 h
10)
M. le Président, à cet égard - et je
réitère qu'il s'agit purement et simplement d'un exemple qui
pourrait peut-être nous permettre d'amorcer plus en profondeur cette
réflexion - si, par exemple, les parties impliquées dans les
relations du travail - le ministère du Travail, le gouvernement
-faisaient ensemble cette réflexion et tentaient ensemble de mettre sur
pied un mécanisme qui serait à la disposition des parties pour
voir ponctuellement, à la demande des parties dans bien des cas, s'il
n'y a pas lieu d'améliorer les conditions de vie, s'il n'y a pas lieu
d'améliorer l'application d'un contrat collectif de travail par une
espèce de consultation entre les parties, par une espèce de
demande auprès de ceux qui ont l'expérience des relations du
travail, je suis l'un de ceux qui pensent, M. le Président, qu'un
semblable mécanisme pourrait, entre autres choses, et peut-être
parmi plusieurs autres auxquelles il faudrait penser, un semblable
mécanisme pourrait sans doute nous permettre d'éviter beaucoup de
situations malheureuses comme celle à laquelle nous faisons face
maintenant.
L'expérience démontre, effectivement, que c'est pendant
l'exercice d'une convention collective que souvent des relations se
détériorent, relations entre patrons et salariés d'un
même service, d'une même direction, et c'est vrai autant dans le
secteur privé que dans le secteur public. Si alors il y avait cette
possibilité que pendant l'exercice de la convention, on puisse, par ce
consensus de tous les impliqués, arriver à réaliser ce
dont je parle, peut-être bien, M. le Président, qu'il s'agirait
d'un premier pas de franchi vers une réévaluation de notre
philosophie globale, autant au niveau de l'ensemble de la société
qu'au niveau des relations du travail.
M. le Président, l'exercice auquel nous sommes en train de nous
livrer - je l'ai dit tout à l'heure, je le réitère,
quelques-uns me l'ont rappelé - n'est pas simple, pour personne. Il
n'est pas simple pour le gouvernement. Il n'est pas simple pour le patron. Il
n'est pas simple pour les travailleurs non plus. Je pense que toutes les
parties impliquées dans le litige conviennent de cela. Mais pour les
motifs qui ont été évoqués tout au cours du
débat, tout au cours de l'après-midi, le gouvernement a
jugé - c'est une décision politique qui a été prise
- qu'il n'y avait pas d'autre choix que celui de procéder de la
façon qu'on le fait. Je vous réitère, M. le
Président, que le processus n'est pas simple. Il n'est agréable
pour personne, mais encore fallait-il, à un moment donné, arriver
à une solution, fût-elle celle que l'on connaît.
M. le Président, je vous dirai tout simplement, en terminant le
débat, que j'ai confiance en la responsabilité des parties
impliquées dans ce dossier. J'ai confiance qu'au-delà de ce qui
peut rester comme amertume dans un exercice comme celui-là, on va
maintenant, de part et d'autre, tenter de mettre en application ces
responsabilités dont je viens de vous parler. Et pour le faire, me
semble-t-il, nous ne devons jamais perdre de vue que l'objectif fondamental qui
a guidé le gouvernement dans la décision qu'il a prise a
été de considérer qu'il était devenu
nécessaire de redonner à la population de Québec et de la
région ce service de transport en commun auquel elle a droit.
Le Président: La motion de deuxième lecture du
projet de loi no 84 sera-t-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bisaillon: Le leader m'avait promis une réponse.
Le Président: Adopté.
M. Bisaillon: Non, non, non!
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Avant qu'on engage un très long débat
- parce que le député de Sainte-Marie, comme vous l'avez senti,
allait se lever et il s'est même levé, de même que le
député de Marguerite-Bourgeoys - je voudrais simplement indiquer,
M. le Président, que tout à l'heure, à l'unanimité,
nous avons adopté une motion suspendant un certain nombre de
règles de procédure dont les articles 87 et 88 auxquels faisaient
allusion tout à l'heure le député de Sainte-Marie et le
député de Marguerite-Bourgeoys. Nous avons adopté cette
motion tout à l'heure à l'unanimité, et à moins que
je ne me trompe, cela veut dire que, pratiquement parlant, sur la base d'une
motion adoptée et qui est maintenant - comment dirais-je?
-réglementée sous votre autorité, cela empêche les
parlementaires de faire un certain nombre de choses qui étaient
prévues aux articles 30, 31, 33, 77, 87, 88, 115, 116, 134 et 157. Dans
ce contexte, je crois que le rôle de l'Assemblée nationale,
sachant très bien ce qu'on adoptait tantôt, quand on a
adopté la motion qui contenait les articles 87 et 88... S'il y avait eu
un vote à prendre, il me semble que l'Opposition se serait levée
et aurait dit: M. le Président, on voudrait avoir un vote; on n'est pas
d'accord pour adopter cette motion, parce qu'il y a deux articles
là-dedans qu'on ne pourra pas invoquer et qui nous permettraient de
demander un vote scindé. Il n'y a personne qui s'est levé. Il n'y
a personne qui a fait de remarque à ce sujet. Il n'y a personne qui a
dit: On refuse d'adopter cette motion d'urgence. Tout le monde savait à
ce moment-là que les articles 87 et 88 y étaient.
Au-delà de tout cela, le député de
Marguerite-Bourgeoys l'a dit et là-dessus, je veux effectivement et
très sincèrement reconnaître que si, de son point de vue,
en donnant son vote tout à l'heure, il le donne dans le sens qu'il a
exprimé... Il s'est levé et a dit dans quel sens ce vote allait
être donné. Il sait aussi que tout à l'heure, en commission
plénière, lors de l'étude article par article, chacun des
articles sera étudié et qu'à chacun des articles, il y a
des questions qui sont en cause et que tous les parlementaires peuvent, pour
chacun de ces articles, faire connaître leur point de vue, en disant
qu'ils sont pour ou qu'ils sont contre.
Prenant en considération tous ces éléments, prenant
en considération la motion adoptée à l'unanimité
sans que qui que ce soit ait passé de remarque sur les articles 87 et 88
qui sont suspendus, prenant en considération les propos du leader de
l'Opposition qui a bien indiqué le sens du vote, de la décision
qu'ils allaient prendre quant à eux et prenant en considération
l'étude article par article qui s'en vient, je dis, M. le
Président, que nous avons adopté une motion à
l'unanimité et qu'il s'agit maintenant de vivre tous ensemble sous
l'autorité de cette motion adoptée à l'unanimité et
que vous avez l'autorité de faire respecter.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président: M. le leader de l'Opposition, très
brièvement.
M. Lalonde: ... très brièvement, le leader du
gouvernement n'a pas étudié, je pense, la portée des
articles 87 et 88. C'est vrai qu'ils ont été suspendus par la
motion d'urgence qu'il a fait adopter, mais même si les articles 87 et 88
étaient en vigueur, ils ne pourraient pas servir à scinder le
projet de loi en deuxième lecture et ceci, conformément à
des décisions adoptées le 10 décembre 1974, le 14 mars
1978 et le 4 décembre 1978. La suspension des articles 87 et 88 que le
leader du gouvernement a évoquée quatorze mille fois depuis
quelques minutes n'a rien à voir - j'espérerais que le leader du
gouvernement m'écoute comme je l'ai écouté - parce que
quand j'ai fait la suggestion, j'ai bien indiqué que cela prenait le
concours du gouvernement. Cela prend le concours de tous les
députés ici pour permettre à chacun des
députés de voter suivant sa conscience sur les deux principes. Je
ne veux pas m'étendre là-dessus, M. le Président, vous
connaissez le problème. Les articles 87 et 88 ne nous permettent pas de
scinder l'étude d'un projet de loi en deuxième lecture. Il
faudrait avoir recours à l'article 152, qui permettrait à cette
Chambre de donner un ordre à la commission élue, qui
étudierait article par article un projet de loi, et de lui dire:
Scindez-le. (22 h 20)
Or, il n'y aura pas de commission élue, donc l'article 152 ne
peut s'appliquer. En deux mots; voulez-vous permettre aux députés
de voter sur un principe et ensuite, sur l'autre? Si vous ne le voulez pas,
vous
n'êtes pas obligé de faire la petite pirouette que vous
avez faite tout à l'heure. Dites-le simplement: On ne le veut pas. A ce
moment, on prendra nos responsabilités, on y est habitués, mais
on vous jugera.
Le Président: Est-ce que la motion de deuxième
lecture du projet de loi no 84 sera adoptée?
M. Bisaillon: ...
Le Président: Le vote est commandé, M. le
député de Sainte-Marie.
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
M. Bisaillon: M. le Président, comme je ne suis pas cinq
et que je n'ai pas pu demander un vote enregistré, le règlement
me permet cependant, à ce stade-ci, d'indiquer ma dissidence sur la
question qui vient d'être votée et d'indiquer à
l'Assemblée que je ne partage pas le vote qui vient d'être
pris.
Le Président: Adopté sur division.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je fais maintenant motion
pour que vous quittiez votre fauteuil et que nous puissions nous transformer en
commission plénière pour étudier le projet de loi article
par article.
Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Commission plénière
M. Rancourt (président de la commission
plénière): À l'ordre, s'il vous plaît!
Je vais suspendre les travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 23)
(Reprise de la séance à 0 h 28)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous commençons les travaux de la commission
plénière. Je fais l'appel de l'article 1.
M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: M. le Président, avant qu'on aborde
l'étude spécifique de l'article 1 du projet de loi no 84 - mon
collègue de Brome-Missisquoi est le porte-parole des relations du
travail et du ministère du Travail, du côté de l'Opposition
officielle -vous comprendrez que je sois dans l'obligation, à ce
moment-ci de nos travaux, à 0 h 30, de vous demander et de demander plus
particulièrement au ministre du Travail... Probablement que le leader du
gouvernement est concerné par la question que je veux formuler. J'ai
compris qu'après l'étude en deuxième lecture, avant qu'on
revienne en commission plénière, le gouvernement a senti,
à la lumière des propositions qu'on a formulées,
l'obligation et l'opportunité qu'il avait de se recueillir, d'avoir une
rencontre et de voir les possibilités de modifier certaines dispositions
du projet de loi ou encore d'ajouter d'autres dispositions au projet de loi. Le
but de mon intervention à ce moment-ci n'est, évidemment, pas
dans une perspective de retarder les travaux, mais, compte tenu de l'urgence
d'intervenir, comment expliquer que nous eussions été, pendant
deux heures trente, à attendre les délibérations du
ministre du Travail, du leader du gouvernement, des députés
péquistes en présence, évidemment, du président du
Conseil du trésor.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement ou
M. le ministre délégué au Travail.
M. Fréchette: M. le Président, je ne sache pas
qu'il y ait quoi que ce soit dans nos règlements qui m'oblige à
répondre à une question de cette nature. Je dirai simplement,
cependant, au député de Portneuf que nous avions un certain
nombre de choses à discuter, un certain nombre de choses à voir.
C'est ce que nous avons fait pendant la période à laquelle il
réfère.
Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition. (0
h 30)
M. Pagé: M. le Président, je m'excuse, c'est la
première fois - on s'est consulté, plusieurs collègues -
que nous assistons à une suspension de la commission
plénière pendant deux heures trente et surtout dans le contexte
de l'étude d'un projet de loi urgent qui a nécessité une
convocation spéciale de l'Assemblée nationale du Québec et
qui a impliqué une suspension des règles. On finit la
deuxième lecture, tout ce beau monde s'en va, on revient et on nous dit:
On est prêt pour l'étude article par article. Je m'excuse, M. le
Président, mais j'ai cru comprendre, à la fin du débat en
deuxième lecture, que le gouvernement était probablement
disposé à étudier, à prendre en
considération et, éventuellement, à donner suite
aux recommandations formulées tant par le député de
Sainte-Marie que par l'Opposition, mais je voudrais bien savoir à quoi
on doit s'en tenir à ce moment-ci.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre
délégué au Travail.
M. Fréchette: Oui, M. le Président, ce n'est pas
parce qu'il n'y a pas de précédent en semblable matière
dans l'évaluation du député de Portneuf que cela veuille
dire nécessairement que cela ne peut pas se faire. J'ai indiqué,
en réponse à la première question qu'il m'a posée,
les motifs pour lesquels nous nous étions retirés pour une
période de temps qui, j'en conviens, a été un peu longue.
Je suis tout à fait d'accord avec lui, je lui réitère tout
simplement que nous avions un certain nombre de choses à voir et c'est
ce que nous avons fait. Je ne sache pas que je doive sur le parquet de
l'Assemblée...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Fréchette: ... nationale, M. le Président, faire
état de la nature des discussions que nous avons pu avoir ensemble, des
collègues.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, je pense que les demandes du
député de Portneuf sont très simples. Le gouvernement
demande aux parlementaires d'adopter en deuxième lecture un projet de
loi. Alors, les députés parlent, font leur intervention sur la
base du projet de loi qu'ils ont devant eux et tout à coup, une fois le
projet de loi adopté, il y a toutes sortes de conciliabules, on suspend
les travaux. Est-ce que le résultat des discussions que le ministre dit
avoir eues peut remettre en cause d'une quelconque façon les principes
qu'il a invité l'Assemblée nationale à discuter?
Deuxièmement, il y a quand même des gens ici qui sont directement
intéressés, que ce soit les autorités de la commission de
transport ou les représentants des travailleurs. Est-ce que, dans les
discussions, il y a quelque élément que ce soit qui serait de
nature à intéresser ces gens? Est-ce que ce sont ces gens que
vous avez consultés? Je pense que l'Assemblée nationale doit en
être informée avant de poursuivre d'une façon utile la
discussion. Autrement, si le ministre a des amendements ou des modifications
à proposer, il faut considérer l'article 1 du projet de loi en
regard de possibilités d'amendements. Le ministre a parfaitement le
droit de mener les consultations qu'il veut bien mener, on en convient, mais
admettez à tout le moins que ce genre de discussion doit avoir lieu
avant de présenter un projet de loi et non pas en cours de route de
l'adoption d'un projet de loi.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, à moins que
vous ne m'indiquiez le contraire, je ne répondrai qu'à la
première partie de la question du député de Jean-Talon. De
toute façon, si on entreprenait l'étude du projet de loi article
par article, il aurait éventuellement dans le cours de la discussion la
réponse à cette première question. A cette question par
laquelle il me demande s'il y aurait des principes qui seraient remis en cause,
je dois lui dire non, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le ministre pourrait nous
dire s'il y a des amendements qui n'étaient pas prévus et qu'il a
l'intention de déposer?
M. Fréchette: Non, M. le Président. M.
Pagé: Bérubé a gagné.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: ... est-ce que le ministre pourrait quand
même...
M. Fréchette: Je m'excuse. Si le député de
Marguerite-Bourgeoys me permettait...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: ... j'ai annoncé en deuxième
lecture un amendement d'ordre mineur. Il n'y a pas d'autres amendements
prévus, sauf celui qui a déjà été
annoncé.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre pourrait quand même nous
expliquer ce délai de deux heures et demie pendant lequel les
députés étaient ici, disposés à continuer
l'étude de ce projet de loi tel que le gouvernement nous avait
invités à le faire? Pourrait-il nous expliquer pourquoi le
gouvernement n'était pas prêt à continuer
l'étude?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, sous une autre
forme, je pense que c'est la quatrième ou la cinquième fois que
cette question revient, ce sera nécessairement la même
réponse. Je vous ai dit que nous en étions venus à la
conclusion, après la deuxième lecture, qu'il nous fallait nous
consulter, quelques-uns d'entre nous...
Une voix: ...
M. Fréchette: Pardon?
Une voix: ...
M. Pagé: Qu'est-ce que vous avez fait?
M. Fréchette: Je ne sache pas, M. le Président, que
je doive être obligé de...
M. Pagé: Vous n'êtes pas au caucus du PQ ici, vous
êtes à l'Assemblée.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
ministre.
M. Fréchette: À moins que vous ne m'indiquiez que
je suis obligé de faire part ici de la nature des conversations et des
discussions qui ont pu avoir lieu, quant à moi, en tout cas, je n'y
répondrai pas, sauf si vous m'indiquez que je dois le faire.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, j'aimerais savoir du ministre
si les deux heures et demie pendant lesquelles il nous a fait poireauter sans
qu'on sache ce qui se passait dans les coulisses ont été
consacrées à tenir en catimini la commission parlementaire qu'il
nous a, d'une façon aussi désinvolte, refusée. Si c'est le
cas, je pense que c'est un bris de privilège de cette Assemblée
nationale.
Le mépris dans lequel le gouvernement tient cette
Assemblée est insupportable. Si c'est le cas et si le ministre - et je
veux le savoir de sa part - a pris deux heures et demie à consulter,
sans lui donner le nom, les parties, tenant, de cette façon
détournée, une commission parlementaire que le
député de Vanier nous refusait du revers de la main tout à
l'heure en disant: On sait tout ce qu'on a à savoir, on a tous les
renseignements nécessaires pour agir, on n'a pas besoin de consulter qui
que ce soit de plus, sauf qu'on est obligé - cela nous suffit et on est
tanné de faire cela - de vous écouter, vous, messieurs de
l'Opposition, mais on ne fera pas plus que cela.
Est-ce que vous avez rencontré des gens qu'on vous a
suggéré de rencontrer en commission parlementaire, publiquement,
d'une façon enregistrée, pour que la population de Québec,
la population de toute la province sache ce qui se passe en cette
Assemblée nationale où se débattent des choses publiques,
des choses importantes, des questions de principe? Je pense que c'est
important, M. le Président, et je vous demanderais de demander une
réponse parce que le ministre a été assez gentleman pour
nous dire que si vous demandiez une réponse, il allait la donner. M. le
Président, je vous suggère d'user de votre autorité et de
demander au ministre s'il a tenu, d'une façon détournée,
une commission parlementaire qui nous a été refusée tout
à l'heure.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je vais
détailler la réponse que j'ai donnée il y a un instant et
on jugera si c'est suffisant ou pas et, si on décide d'aller plus loin
dans la discussion, on le fera.
On est ici depuis 14 heures, cet après-midi, et, d'un
côté comme de l'autre de la Chambre, des arguments ont
été soumis, des suggestions ont été faites en
regard du projet de loi qui est devant nous. Si je devais suivre le
raisonnement du député de Louis-Hébert, cela
m'amènerait à la conclusion que le contenu de son argumentation
et celle de plusieurs de ses collègues ne devait pas être
appréciée d'aucune espèce de façon pas plus que les
arguments de ce côté-ci.
Une voix: Répondez donc!
M. Fréchette: Ce que je dis, M. le Président, c'est
qu'il y a, devant nous, un projet de loi qui est discuté depuis 14
heures.
M. Lalonde: Répondez à la question.
Une voix: Cela ne se passera pas comme cela.
Une voix: Non.
M. Fréchette: Des gens ont fait des suggestions, ce dont
nous avons discuté...
Une voix: Lesquelles?
M. Fréchette: ... et nous en sommes venus à la
conclusion qu'il n'y avait pas lieu d'apporter d'amendement à la
loi.
Une voix: Lesquels?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Pagé: M. le Président.
M. Rivest: Avez-vous appelé à Paris?
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Pagé: Avez-vous appelé à Paris? Non?
M. Paradis: M. le Président, l'honorable ministre
délégué au Travail vient de dire à cette commission
qu'il avait discuté, pendant l'intervention de deux heures et demie, des
suggestions qui lui ont été faites par des gens. Dans un premier
temps, est-ce qu'on peut savoir s'il s'agit de gens qui siègent en cette
Assemblée nationale et si ce sont des suggestions que l'on retrouve au
journal des Débats ou s'agit-il de suggestions qui ne se retrouvent pas
au journal des Débats? (0 h 40)
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je dois vous dire
qu'il y a des choses qui se discutent ici et il y a des choses qui se discutent
à l'extérieur de l'enceinte. À moins, encore une fois je
vous le réitère, que vous m'imposiez d'abord de donner le contenu
des conversations qu'on a pu avoir, que vous m'imposiez de dire qui y a
participé, que vous m'imposiez de dire quelle était la position
de celui-ci ou de celui-là, je ne vois pas que je doive répondre
à ce genre de question. Je le demande au président.
M. Lalonde: Vous vous cachez derrière le président.
Il est derrière Pierre-Marc Johnson, d'ailleurs.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaîti Simplement, puisqu'on m'a posé une question, je dois,
en vertu du règlement, donner une réponse. Je dois vous dire que
le mandat de la commission plénière, si on se le rappelle, est
d'étudier, au cours des deux heures depuis l'ouverture de la commission
plénière, l'ensemble du projet de loi qui comporte les articles
que vous connaissez. En conséquence, tout ce que je peux dire comme
président, et ce que le règlement m'impose quant à la
décision que j'ai à rendre sur la question qui est posée
et la discussion qui a été amorcée: Nous allons à
l'article 1 et nous procédons. J'ai compris qu'il y avait de la part du
whip de l'Opposition, quand même, compte tenu de ce qui s'était
passé, des questions qui pouvaient être posées. C'est pour
cela que j'ai laissé aller cette discussion entre les gens du
gouvernement et ceux de l'Opposition, mais je ne peux, en aucune façon,
imposer à qui que ce soit de répondre à des questions. Le
règlement ne m'y oblige en aucune façon. Je pense que le ministre
doit juger s'il doit répondre ou non. Je n'ai pas à imposer
à qui que ce soit ni la question ni la réponse. M. le chef de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Dans ce cas, M. le Président,
on peut demander à M. le ministre, parce que évidemment le
règlement est assez clair là-dessus, s'il refuse tout simplement
de répondre et de faire la lumière sur ce qui préoccupe
ceux qui attendent depuis deux heures et demie.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: Est-ce que le chef de l'Opposition voudrait
préciser ou détailler ce sur quoi il voudrait une
réponse?
M. Lalonde: Toutes les questions.
Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Ce que nous demandons, c'est qu'une
fois la deuxième lecture adoptée, il est normal que nous passions
à l'étude article par article du projet de loi. Est-ce que le
ministre a été impressionné par les arguments de
l'Opposition?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'il a été
impressionné par des arguments venant d'ailleurs ou est-ce qu'il a
été impressionné par les deux? Est-ce qu'il a
essayé de modifier la position gouvernementale, la position officielle?
Est-ce qu'il a échoué? Ce sont toutes des choses qui nous
préoccupent avant de commencer à étudier le projet de
loi.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, écoutez, je
ne ferai que réitérer ce que j'ai dit. Nous avons effectivement
discuté à partir du débat qui s'est tenu ici aujourd'hui
et en analysant certains éléments de ce débat, des
interventions des deux côtés de la Chambre. C'est l'exercice que
nous avons mené et je vous signale que...
M. Levesque (Bonaventure): "Des deux côtés", cela
inclut-il le député de Sainte-Marie?
M. Fréchette: Des deux côtés de la
Chambre.
M. Bertrand: Des trois côtés de la Chambre.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Rivest: M. Bertrand a l'air abattu.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: Non, j'ai complété, M. le
Président. Je ne crois pas utile d'aller plus loin.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Peut-on savoir du ministre s'il a consulté un
des médiateurs, au cours des nombreuses consultations qu'il a eu
amplement le temps de mener dans les deux heures et demie qu'il a eues à
sa disposition? Dans l'affirmative, a-t-il consulté Jean-Roch Boivin, le
chef de cabinet du premier ministre?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je ne pense pas
qu'il soit d'intérêt public de répondre à une
question de cette nature.
Des voix: Ah! Ah! Le bâillon!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! S'il vous plaît!
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Avant d'aller à qui que
ce soit, le ministre a-t-il terminé? Il y a le député de
Jean-Talon et vous, après.
M. Rivest: Oui, M. le Président. Vous tournez
allègrement autour du pot. Je vais vous poser la question directement.
L'argument qui vous a impressionné, est-ce la formule des 11% et 6% que
vous avez réexaminée parce que vous n'étiez plus
sûrs de vos calculs dans le projet de loi? Est-ce cela, oui ou non?
M. Fréchette: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: ... je vous réitère - et on
passera le temps qu'il faudra sur cette question - que nous avons pris le temps
- et il me semble que c'est faire preuve d'une certaine responsabilité -
de...
M. Rivest: Au Conseil des ministres, pas devant
l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon!
M. Fréchette: ... procéder à l'analyse de
plusieurs éléments du débat qui a été
mené cet après-midi et nous en sommes venus à la
conclusion de ne procéder à aucun amendement.
M. Rivest: M. le Président, j'ai posé une
question.
Le Président (M. Jolivet): Un instant! Oui, un instant, M.
le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): J'ai dit que je ne pouvais, en
aucune façon, imposer ni la question ni la réponse. Je dois,
comme vous, constater les décisions qui sont prises par des personnes.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, simplement la remarque
suivante. Je ne sais pas exactement quel député de l'Opposition a
dit tout à l'heure: On a suspendu pendant deux heures et demie, alors
qu'on avait le mandat d'étudier article par article le projet de loi no
84.
Une voix: Pour faire quoi, pendant deux heures et demie?
M. Bertrand: Oui, avec une des clauses qui est à l'article
3 qui dit que la reprise du transport en commun doit se faire à 0 h 1 le
7 novembre 1982. En d'autres mots...
M. Lalonde: On peut siéger jusqu'à demain si vous
voulez.
M. Bertrand: M. le Président, est-ce que j'ai la
parole?
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le leader, vous avez la
parole.
M. Bertrand: Alors, en d'autres mots, quand nous nous sommes
réunis cet après-midi, à quatorze heures, personne ici,
pas plus vous que moi, ne savait à quelle heure se termineraient les
travaux sur ce projet de loi no 84.
Cela étant dit, je crois que sur la base de l'ensemble des
discussions qui ont eu lieu ici, aujourd'hui, entre autres les exposés
qui ont été faits de part et d'autre - et, quand je dis de part
et d'autre, évidemment que ça veut dire tout le monde, incluant
les trois
côtés de la Chambre - que, dans un contexte comme
celui-là, il y a eu des précédents où
effectivement, une deuxième lecture ayant été
effectuée, les ministériels ont cru nécessaire de se
rencontrer et de discuter entre eux d'un certain nombre
d'éléments. Je crois que cela est un droit qui leur revient. Nous
avons le droit, nous avons la possibilité de faire en sorte que si nous
considérons que des discussions doivent avoir lieu entre
collègues, sur la base d'un débat qui est en cours...
M. Pagé: On peut faire ça nous autres aussi,
jusqu'à demain soir!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: On pourrait peut-être rester pour discuter!
M. Pagé: On peut faire ça nous autres aussi!
M. Bertrand: ... comme à la limite, comme je l'avais dit
dans mon propre discours, n'importe qui, que ce soit de votre côté
ou du nôtre, souhaiterait, dans n'importe quelle situation, qu'un
règlement négocié puisse être une chose finalement
plus intéressante que l'adoption d'une loi. On a le droit, nous, de
parler d'un certain nombre de choses et on ne va pas demander à
l'Opposition, si elle décide de tenir en son sein des discussions sur
tel ou tel élément, de nous révéler le caucus
qu'elle a eu.
Or, dans un contexte comme celui-là, M. le Président, nous
avons simplement fait notre travail et, à ce moment-ci, c'est notre
responsabilité de poursuivre puisque vous avez vous-même, comme
président de l'Assemblée nationale, demandé que les
députés reviennent en Chambre pour aborder l'étude du
projet de loi article par article.
M. Bisaillon: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: J'ai écouté attentivement tout ce qui
se déroule depuis le moment où on a repris les travaux de
l'Assemblée. J'ai compris, par les réponses qu'a faites le
ministre du Travail, qu'il n'y avait pas à ce moment-ci, malgré
les discussions qui ont eu lieu, d'amendement à apporter sur les deux
principes qui ont été votés en deuxième lecture. Je
comprends que les principes, c'est, premièrement, l'aspect retour au
travail et reprise des opérations, et deuxième principe, la
partie décret. Tout ce qui est contenu à l'intérieur du
premier principe et du deuxième, donc au moment de l'étude
article par article, est amendable. Le ministre du Travail a dit qu'il n'avait
pas d'amendements à apporter sur les principes qui ont été
votés en deuxième lecture. Est-ce qu'il y a eu des discussions
sur des suggestions qui ont été faites au moment du débat
en deuxième lecture quant à des modifications contenues à
l'intérieur de chacun de ces deux principes, par exemple, le quantum
dont on a parlé? Si oui, est-ce qu'à ce moment-ci le ministre a
des annonces à nous faire? C'est la première partie de ma
question. (0 h 50)
Deuxième partie de mon intervention: le débat a
été fixé à deux heures. Il y a un certain nombre
d'autres amendements qui auraient pu être souhaités par des
intervenants dans le débat, qui n'ont pas été
mentionnés au moment du discours de deuxième lecture et qu'on
aurait peut-être avantage à discuter. Doit-on comprendre qu'une
fois qu'on se sera entendus sur la façon de procéder, on aura
deux heures pour discuter des amendements à apporter au projet de loi
à partir du moment où on abordera le premier article? Si on
continue à jouer au chat et à la souris, il faudrait penser qu'il
y a des travailleurs qui sont impliqués là-dedans et qu'il y a
peut-être des amendements importants à discuter entre nous.
Je comprends que cette discussion est importante. Je ne voudrais pas
qu'on perde du temps à passer les amendements qui doivent être
apportés.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
pour répondre à votre question, je dois vous dire qu'en vertu du
règlement, dès le départ, j'ai appelé l'article 1.
Au moment où j'appelle l'article 1, le débat est
déjà commencé. Le whip de l'Opposition m'a demandé
la parole avant que le ministre puisse intervenir. Dans ce contexte, je dois
vous dire que les deux heures sont déjà commencées.
M. Bisaillon: A moins que le ministre se déclare
prêt...
Le Président (M. Jolivet): Je suis obligé
d'appliquer le règlement à ce niveau.
M. Bisaillon: La première partie de ma question, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: Essentiellement, le député de
Sainte-Marie m'a demandé si j'avais des annonces à faire. La
réponse, c'est non.
Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): II n'y a aucun intérêt
pour nous à poursuivre ceci avec un dialogue unilatéral, si je
peux dire, mais j'aimerais tout de même demander au ministre si j'ai
raison de croire qu'il n'y a aucun amendement que nous pouvons attendre du
côté du gouvernement, d'une part.
M. Fréchette: À part celui qui est annoncé,
le chef de l'Opposition a raison.
M. Levesque (Bonaventure): Oui. Deuxièmement, tout
amendement significatif qui serait proposé ou qui pourrait être
proposé par tout membre de cette Assemblée pourrait être
nécessairement refusé.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je pourrais
difficilement m'engager à l'avance à rejeter toute espèce
d'amendement qui pourrait être suggéré. Vous allez
comprendre avec moi qu'on doive attendre le contenu d'un éventuel
amendement avant d'en disposer. Je ne peux certainement pas dire au chef de
l'Opposition qu'a priori, sans aucune espèce de discussion et sans
étude de ce qui pourrait être soumis, ce sera rejeté.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, compte tenu de ce que le chef
de l'Opposition vient de dire, je n'insisterai pas sur ce qui se passe
actuellement. On va laisser aller les choses de façon à voir ce
que contient le projet de loi. Je voulais tout simplement signaler très
rapidement que notre insistance à savoir ce qui s'était
passé, c'était dans la poursuite de ce que le gouvernement
lui-même avait décidé de faire, en nous remettant
lui-même deux rapports qui, soi-disant, contenait le fruit des
discussions, d'enquêtes, de vérifications, etc. Le ministre ainsi
que le leader parlementaire vont comprendre que, dans les circonstances,
étant donné qu'il nous a soumis que le projet de loi dont nous
étions saisis était basé, à toutes fins utiles, sur
ces rapports qui étaient des pièces importantes pour
étayer le projet de loi dont il est question ici, il y avait lieu pour
nous de savoir s'il y avait eu des communications de quelque nature que ce
soit, avec des personnes qui ont ou n'ont pas rédigé le rapport,
qui étaient de nature à modifier les rapports qu'on nous a soumis
comme étant à la base du projet de loi qu'on est appelés
à adopter, cette nuit.
C'était l'argumentation et cette argumentation ce n'est pas nous
qui avons décidé de la faire valoir, c'est le ministre qui nous a
remis des rapports, qui nous a dit que c'étaient des rapports
véridiques, qui représentaient les faits, qui tenaient compte
d'un certain nombre de facteurs. Dans les circonstances, on se demande: Est-ce
que ces rapports n'auraient pas lieu à la suite des deux heures et demie
où nous avons attendu patiemment que vous veuillez bien nous faire
signe, ne sont pas de quelque façon que ce soit modifiés pour que
nous puissions savoir à quelle enseigne vous logez et nous que nous
puissions connaître ce qu'est votre version, compte tenu des
vérifications... Si vous avez perdu votre temps pendant deux heures et
demie, c'est une autre affaire.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Non, M. le Président, je peux rassurer le
député de Louis-Hébert, ce n'était pas pour aller
souper qu'on a demandé, à un moment donné, d'avoir la
possibilité de discuter entre nous, mais pour être positifs dans
le débat. Nous avons sept articles à étudier. Au premier
article, lorsque le président l'appellera...
Des voix: II est appelé.
M. Bertrand: II est appelé. Le premier article est
appelé, il s'agit de savoir ce que le ministre
délégué au Travail a à dire sur ce premier article
et si un député de cette enceinte a l'intention de proposer un
amendement à l'article 1. Si quelqu'un a un amendement à
proposer, on va faire ce qu'on fait normalement en commission
plénière. On va débattre de cet amendement et on va devoir
répondre à des questions, s'expliquer et, finalement, prendre une
décision sur chacun des articles. Cela signifie que le
député de Louis-Hébert, par exemple, à l'article 1
ou 2 ou 3 ou 4 ou tout autre, pourra proposer des amendements et demander au
gouvernement de répondre à des questions sur la base des
amendements qu'il propose. Dans ce contexte, il me paraît que toutes les
questions que l'Opposition voudra poser en fonction des amendements qu'elle
soumet, on aura, nous, la responsabilité de donner les réponses
qu'on doit donner pour dire si oui ou non on est pour tel ou tel
amendement.
Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Nous n'avons pas besoin de
leçon ou d'un professeur à ce moment-ci pour nous dire ce qu'on
peut faire ou ne pas faire, on connaît assez bien le règlement
pour savoir exactement quelles sont les façons de procéder. Ce
que l'on trouve un peu inquiétant, c'est que pendant deux heures et
demie ces gens se réfugient quelque part alors qu'une commission
parlementaire où
tous les intervenants auraient pu se faire entendre, a été
refusée. Cela est inacceptable. Il y a des travailleurs qui sont encore
ici à des heures tardives, qui auraient bien aimé s'exprimer, qui
avaient quelque chose à dire. Il y avait les gens du côté
patronal et du côté syndical qui auraient pu se faire entendre.
Nous aurions pu les interroger, mais on a préféré une
séance intime de deux heures et demie en faisant attendre tous les
parlementaires jusqu'à minuit trente. À ce moment-ci, on pose une
question tout simplement: Qu'est-ce que vous avez "bretté" pendant ce
temps-là? On nous répond: Cela, c'est nos affaires.
Voilà la transparence que nous avons du Parti
québécois, ce gouvernement qui nous promettait de pouvoir
répondre aux interrogations.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Levesque (Bonaventure): C'est la consultation, la
concertation, la solidarité québécoise, etc. On ne
laissera évidemment pas passer ça de cette façon.
M. le Président, je demande encore une fois au ministre du
Travail...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Je ne demande pas qu'il nous mette au
courant des secrets du cabinet, mais qu'est-ce qui a provoqué cette
pause de deux heures et demie? Il y a une raison. Est-ce que le ministre
responsable du Conseil du trésor est intervenu? Qu'est-ce qui est
arrivé?
Des voix: Ah! Ah!
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, j'ai
déjà répondu à ces questions-là.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le ministre.
M. Fréchette: J'ai répondu à la question que
me pose le chef de l'Opposition. Je suis convaincu que si j'allais entreprendre
de donner de nouvelles explications, je ne ferais que me répéter.
Je vous dirai tout simplement qu'on n'a pas perdu notre temps. Point.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. le ministre, sur l'article 1.
M. Rivest: M. le Président...
Une voix: Article 1.
M. Rivest: ... je suis sur l'article 1.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Un instant: On va
se calmer un peu. S'il vous plaît, M. le député:
Sur l'article 1, je pense qu'en vertu du règlement, je
pourrais... Comme je l'ai dit, j'ai été large parce que je pense
que le whip de l'Opposition a demandé...
M. Levesque (Bonaventure): Permettez-moi simplement une remarque
à ce moment-ci. Je ne veux pas vous interrompre, mais il s'agit... (1
heure)
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant! M. le chef de
l'Opposition, je vais d'abord terminer ce que j'ai à dire, si vous me le
permettez.
M. Levesque (Bonaventure): Avant que vous ne terminiez, je
voudrais simplement, en toute gentillesse...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Un mot simplement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le
député.
M. Levesque (Bonaventure): Juste un mot.
Le Président (M. Jolivet): Je vais vous le permettre.
M. Levesque (Bonaventure): Merci, M. le Président. Je
voulais rappeler à la présidence qu'il s'agit d'un débat
restreint de deux heures. Vous-même avez dit que c'était
déjà entamé. M. le Président, je pense que cela a
été assez traditionnel de permettre de pouvoir utiliser les deux
heures un peu comme nous le jugions à propos. Autrement dit, si on veut
passer les deux heures sur l'article 1, à moins qu'il n'y ait des
amendements, et comme le gouvernement a dit qu'il n'y en avait pas, sauf celui
qui avait été annoncé... je pense qu'on peut être
assez large. C'est tout ce que je voulais dire, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): En vertu du mandat qui m'est
donné comme président, je dois relire la résolution qui a
été adoptée relativement au débat, à savoir
que, pendant deux heures, nous allons discuter du projet de loi article par
article. J'ai donc comme mandat de faire en sorte qu'on épuise au moins
l'ensemble des sept articles qui s'y trouvent avec l'annexe qui indique
l'ensemble
de ce que doit être le projet de loi et, ensuite, de le proposer
à l'Assemblée nationale pour adoption en troisième
lecture, avec rapport.
Je sais très bien que, d'habitude, nous commençons par
l'article 1, ce que j'ai fait. À l'article 1, il peut se poser
énormément de questions sur la généralité du
projet de loi avant de commencer l'étude article par article. C'est ce
que j'avais compris, au départ, au moment où le whip de
l'Opposition m'a demandé de parler avant que j'accorde le droit de
parole à M. le ministre délégué au Travail. Dans ce
contexte, le ministre a même ajouté: On prendra le temps qu'il
faut pour vider la question. Je l'ai donc pris en note également. C'est
dans ce contexte que j'aimerais qu'on en arrive à l'article 1 et qu'on
puisse l'étudier, mais je ne veux pas, cependant, que quiconque soit
brimé. S'il reste une ou deux questions, je permettrai qu'on les pose.
J'ai cru comprendre que le député de Jean-Talon en avait une.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): ... si on me le permet, à moins
que je ne m'abuse, nous avons vu qu'il était prévu qu'il y avait
une interruption dix minutes avant la fin des deux heures. Cela veut dire que
tous les articles pourront être adoptés si vous suivez exactement
les prescriptions de la motion qui a été adoptée par cette
Chambre. Dans les circonstances, vous n'avez pas à craindre qu'un
article ait été oublié. Je voulais simplement vous faire
part de cela.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.
Effectivement, dans les dix minutes qui précèdent l'expiration du
délai de deux heures, il faut, à ce moment-là, adopter,
sans débat, les amendements et les articles qui n'auraient pas
été vus.
Une voix: Pas de problème.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, dans son mutisme, le ministre
délégué au Travail a oublié un
élément très important de ma question et, au fond, je
pense que c'est ce que le député de Sainte-Marie avait
également en tête. Sans prêter d'intention ou m'immiscer
dans les caucus ministériels, est-ce que le retard qui a
été occasionné - j'ai posé la question
tantôt, mais, malheureusement, le ministre a oublié cet
élément de réponse - n'a pas consisté
essentiellement pour le gouvernement à revoir ses calculs, malgré
l'exposé brillant du président du Conseil du trésor qui
nous a justifié magistralement, comme d'habitude, que c'était
10%? Un doute serait né dans l'esprit de l'équipe
ministérielle très unie et, effectivement, vous auriez
envisagé très sérieusement de vous rendre à la
demande faite par les intervenants de ce côté-ci de la Chambre de
mettre dans votre projet de loi l'augmentation de 11% pour la première
année et l'augmentation de 6% sans indexation? Est-ce cela? Oui ou
non?
M. Pagé: C'est clair.
M. Bélanger: Cela ne prend pas de temps. C'est ce qu'on
veut savoir.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Bélanger: C'est moins long que votre question
référendaire.
M. Fréchette: M. le Président, on en a
discuté.
M. Rivest: Ah! Ils en ont discuté. Une voix:
Demandez-le à Pierre-Marc.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Fréchette: Et de bien d'autres choses.
Le Président (M. Jolivet): Un instant! M. Rivest:
M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais avant j'avais une
demande du whip de l'Opposition. Alors, je vais lui accorder d'abord la
parole.
M. Pagé: II n'a pas fini. M. Rivest: Je n'ai pas
fini.
M. Pagé: M. le Président, je m'excuse, mais le
député de Jean-Talon n'a pas terminé sa question.
Le Président (M. Jolivet): J'ai assez bien suivi le
débat et j'ai compris qu'il l'avait terminée. Vous avez d'autres
questions additionnelles?
M. Rivest: J'ai progressé énormément dans la
première phase. C'est que le ministre a admis que c'était ce dont
ils avaient discuté. Cela a pris à peu près trois quarts
d'heure pour savoir cela. Si c'est cela - c'est dans le sens de notre reproche
- quelle
crédibilité devons-nous accorder à des gens qui
sont directement intéressés, que ce soit la partie patronale ou
la partie syndicale, quelle crédibilité devons-nous accorder aux
explications que le président du Conseil du trésor a
données pour expliquer pourquoi, dans le projet de loi, le gouvernement
n'avait pas donné suite aux constatations des émissaires et ne
pouvait pas se rendre à l'essentiel des demandes des chauffeurs
d'autobus? Si tel est le cas, toute sa belle phraséologie sur les
alignements, sur les marchés du travail comparables ne vaut rien si, au
moment où il parlait, il n'avait pas fait les vérifications
nécessaires qu'il a dû faire, comme vient de l'admettre le
ministre délégué au Travail, depuis deux heures et demie.
C'est du cafouillage législatif qu'a présenté le
gouvernement dans un dossier drôlement important, un dossier qui est un
des premiers dossiers cet automne dans les secteurs public et parapublic.
Franchement, compte tenu de l'importance de l'intervention du
président du Conseil du trésor, qui a justifié les
attitudes, compte tenu du caractère tout à fait inexpliqué
que les représentants des travailleurs ont dénoncé depuis
qu'ils sont en face du projet de loi à savoir pourquoi le gouvernement,
alors que Jean-Roch Boivin, que Lucien Bouchard, qui sont des personnages
extrêmement importants dans le gouvernement, ont produit des documents
qui ont laissé croire à nombre de gens, y compris les
travailleurs, y compris nous-mêmes, que le gouvernement avait plus ou
moins endossé les 11% et 6%... Comment se fait-il qu'après la
deuxième lecture le gouvernement arrive avec une espèce
d'incohérence interne tout à fait inexpliquée, mais
combien apparente et qui a coûté deux heures de travaux? Le
ministre délégué au Travail vient de me dire
qu'effectivement c'est de cela qu'ils ont parlé. En admettant qu'on a
remis en question les affirmations du président du Conseil du
trésor, dans quelle position le gouvernement se trouve-t-il, sinon dans
la position d'un gouvernement qui ne savait pas, au moment où il a
présenté le projet de loi, là où il allait? Le
gouvernement a été obligé de faire un arbitrage de
coulisse. C'est le genre de gouvernement qu'on a dans les secteurs public et
parapublic alors qu'est en cause tout l'équilibre budgétaire du
gouvernement et c'est le cafouillage auquel on va avoir à faire face.
Cela, M. le Président, c'est totalement inadmissible. Aucun travailleur
du secteur public, ni les chauffeurs d'autobus ne seront capables d'accepter
une pareille incohérence gouvernementale. C'est incroyable comme
attitude.
Le Président (M. Jolivet): Juste avant de demander au
ministre des Affaires sociales de répondre, je crois comprendre - s'il
vous plaît - que votre question est posée, M. le
député de Jean-Talon? Je n'aurai pas besoin de revenir.
M. Rivest: M. le Président, j'avoue que j'aimerais
entendre davantage le président du Conseil du trésor parce que le
ministre des Affaires sociales devrait s'occuper de ses grèves
illégales.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon. M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je ne
prétendrais pas répondre aux affirmations un peu grosses et un
peu travesties que j'ai entendues ici depuis cet après-midi venant du
député de Jean-Talon, je sais que mon collègue, le
président du Conseil du trésor, prendra la parole. Je voudrais
simplement dire que, comme membre de cette Assemblée, j'ai eu l'occasion
d'assister depuis la fin de l'après-midi à ce débat. J'ai
remarqué que le député de Sainte-Marie, le
député de Portneuf et quelques autres dans l'Opposition ont
soulevé, à l'occasion de ce débat, des choses qui leur
apparaissaient fondamentales et, ma foi, si nous sommes élus et si nous
sommes réunis ici, c'est apparemment pour discuter de choses
fondamentales à l'occasion, malgré des exceptions remarquables de
l'autre côté. Dans sa question, le député de
Jean-Talon affirmait que le ministre délégué au Travail -
ce qu'il n'a pas fait - avait mis en cause la validité des chiffres du
président du Conseil du trésor. Absolument pas, M. le
Président! Je l'inviterais et je pense que c'est important... (1 h
10)
Le député de Jean-Talon a demandé au ministre
délégué au Travail si, lors de ces rencontres tout
à fait normales entre les membres de l'équipe
ministérielle à la suite d'un débat, on avait remis en
cause les démonstrations chiffrées du président du Conseil
du trésor. Il a en même temps demandé, dans la même
question, si, oui ou non, il avait été question des amendements
qu'avait laissé entendre l'Opposition, notamment le député
de Portneuf, au sujet des 11% et 6% non indexés. Le ministre du Travail
a répondu: II en a été question. Que je sache, il a
répondu à cette question précise si, oui ou non, il avait
été question, entre les membres de l'équipe
ministérielle, de cette question des 11% et 6%, oui, mais non pas sur la
valeur de la démonstration-faite par le président du Conseil du
trésor qui m'apparaît probante.
Une voix: Cela a pris deux heures et demie?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous
plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! À
l'ordre: M. le ministre délégué au Travail, sur l'article
1.
M. Rivest: M. le Président, question de
règlement.
Une voix: ... d'invoquer une question de règlement. Vous
ne le respectez pas.
Le Président (M. Jolivet): En vertu de quel article?
M. Rivest: Je ne sais pas le numéro, M. le
Président.
Une voix: N'importe lequel.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: II s'agit de l'article qui nous autorise à
corriger une affirmation à la suite d'une intervention que l'on a
faite.
Le Président (M. Jolivet): C'est l'article 96.
M. Rivest: L'article 96. Ce que j'ai affirmé, c'est que le
ministre délégué au Travail, après bien des
hésitations, a admis qu'ils s'étaient interrogés ou,
à tout le moins, qu'ils avaient discuté pendant une
période de deux heures et demie d'une question très
précise, c'est-à-dire la question salariale, l'offre ou les
propositions qui sont dans le projet de loi, les 11% et 6%. Or, M. le
Président, pendant deux heures et demie, vous remarquerez que ce n'est
pas seulement une petite discussion comme cela, en passant, en se donnant une
tape dans le dos. Ce que j'ai affirmé dans mon intervention, c'est le
simple fait que des ministres se remettent à discuter d'une telle chose.
Le président du Conseil du trésor, lui, avait défendu
mordicus, avec une grande argumentation qu'il voulait solide, l'offre qui est
faite et qui est en-deça de l'offre qui a été convenue,
à toutes fins utiles, par la partie patronale et par la partie
syndicale, c'est-à-dire les 11% et 6%. Or, le gouvernement, par la
bouche du président du Conseil du trésor, a justifié les
10% au moyen du critère des comparaisons avec le marché du
travail - remarquez ce qu'il disait à l'époque, M. le
Président - et sur l'obligation et la détermination de la
cohérence de la politique gouvernementale. Il a dit cela aux environs de
22 heures. À 22 h 30 ou 23 heures, ils ont pris deux heures et demie
pour savoir si c'était vrai, si effectivement, c'était
cohérent, la position gouvernementale. C'est une farce gigantesque,
votre affaire!
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre
délégué à l'Administration et responsable du
Conseil du trésor.
M. Bérubé: Merci, M. le Président. Il est
toujours intéressant d'entendre les gens commenter vos interventions. M.
le Président. À aucun moment il n'y a eu une remise en question
des données. Il reste que...
Une voix: ...
M. Bérubé: Des données qui ont
été présentées cet après-midi. Il reste que
- et c'est indéniable - le contenu de la loi est différent,
autant des propositions venant de la commission que des demandes syndicales.
Par conséquent, il est normal que des collègues veuillent faire
le tour de l'ensemble des tractations qui ont pu avoir cours de manière
à pouvoir répondre essentiellement aux questions qui ont
été soulevées par l'Opposition. La meilleure façon
de voir la cohérence de nos réponses, c'est finalement de
s'engager dans l'étude article par article, ce qui va nous permettre,
effectivement, de répondre à toutes les questions que
l'Opposition aura à poser.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: ... y aurait-il eu une offre, plus
élevée que celle qui est contenue dans la loi, qui aurait
été faite pendant cette période?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre
délégué au Travail.
M. Fréchette: J'avoue honnêtement, M. le
Président, que j'ai un peu de difficulté à comprendre la
question du député de Marguerite-Bourgeoys. Une offre par qui et
à qui?
M. Lalonde: Le gouvernement aurait-il fait à quiconque une
offre plus élevée que celle contenue dans l'annexe, pendant cette
période de deux heures et demie?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je veux bien qu'on
essaie d'aller au fond des choses, mais je vous signale que le gouvernement a
déposé une loi. Sa position est contenue dans cette loi et il n'a
pas fait d'offres nulle part. Il n'était pas partie aux
négociations. Je n'ai pas...
M. Lalonde: Vous faites cette affirmation de votre
siège?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaîtl M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Vous faites cette affirmation de votre
siège?
M. Fréchette: Que le gouvernement n'a pas fait
d'offres?
M. Lalonde: Oui.
M. Fréchette: Oui, oui, bien sûr.
M. Lalonde: Boni Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: M. le Président, est-ce à dire que
le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre nie, dément, met de
côté toute possibilité, toute information voulant que,
pendant la suspension de nos travaux, le gouvernement ait non seulement
analysé, mais formulé la possibilité que le chiffre de 10%
prévu dans le projet de loi soit majoré?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, le gouvernement n'a
fait aucune offre, le président du Conseil du trésor vient
d'expliquer ce qui s'est passé, le ministre des Affaires sociales l'a
fait également. On a discuté de ce chapitre en même temps
que du reste du contenu de la loi. On l'a fait entre nous, on n'avait pas
à faire d'offre aux parties, on n'est pas partie négociante.
M. Pagé: Avant d'aborder l'article 1.
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. M. le whip de
l'Opposition.
M. Pagé: On a des commentaires à apporter à
l'article 1 et plusieurs de mes collègues auront des questions dans les
deux heures qui nous sont allouées, aux articles 1, 2, 3, 4
jusqu'à 6; à 7 nous n'aurons probablement pas de question. Mais
je voudrais bien savoir, M. le Président - et je ne veux pas être
malicieux à l'endroit des collègues d'en face - le plus
objectivement, le plus sereinement possible...
Une voix: Sans rire?
M. Pagé: Sans rire, sérieusement, j'aimerais savoir
qui est le vrai ministre-parrain. Est-ce le ministre des Affaires sociales, qui
est venu à la rescousse du député de Sherbrooke, tout
à l'heure - et ça s'explique - est-ce que c'est le gros canon, le
gros ténor, l'homme fort, l'homme puissant, député de
Matane et président du Conseil du trésor? Est-ce que, par
ricochet, il se pourrait que le porte-parole, l'interlocuteur à nos
questions ce soit le député de Vanier, ministre des
Communications et ministre régional? Ou encore le ministre
délégué au Travail? Je voudrais le savoir, parce que, aux
questions qu'on a posées tout à l'heure le ministre du Travail,
réservé comme il est, timide au début de ses fonctions
comme il est, a passé la "poque", comme on dit, à l'ex-ministre
du Travail pour qu'il vienne à sa rescousse ou au ministre responsable
du Conseil du trésor. On a un temps limité, on a sept articles et
on a plusieurs questions, on ne veut pas perdre de temps de gauche à
droite. Qui est le boss? Qui est le porte-parole?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Pagé: Que le vrai ministre se lève;
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Pagé: II y avait une émission de TV
là-dessus: Que le vrai ministre se lève!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
whip de l'Opposition, je pense que la réponse pourrait être faite
en regardant le texte.
M. Lalonde: Non, M. le Président, la question est
posée au ministre, ne vous aventurez pas dans ce marécage.
Le Président (M. Jolivet): Non, c'est pour ça que
je dis: II faut regarder. Cependant, comme la question est posée... S'il
vous plaît! Comme la question est posée au ministre, je lui
demande de répondre.
M. Fréchette: M. le Président, je comprends mal que
ces gens se plaignent du fait qu'ils pourraient être privés de
temps et qu'ils s'enlisent dans ce genre de questions. Je vais simplement
demander au député de Portneuf de prendre devant lui le document
qu'il a sans doute, c'est marqué: projet de loi no 84 et le parrain du
projet est indiqué sur le projet.
M. Pagé: M. le Président, amendement à
l'article 1.
M. Bisaillon: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je veux qu'on commence
à étudier les amendements qu'on a, parce que de toute
façon c'est la
chose la plus ridicule que j'aie jamais vue ici. Ce qu'on vient de
comprendre c'est que dans le fond, s'il n'y a pas eu d'étude pour aller
plus loin que ce qu'il y a dans le projet de loi, on a fait un caucus pour
s'entendre sur le genre de réponses qu'on était pour nous donner.
Parce qu'on ne comprenait pas ce qu'il y avait dedans ou qu'on a vu des
éléments additionnels. C'est ça que je comprends. Or, le
temps est limité et il y a des amendements. On va voir, en
présentant les amendements, s'il y a des réponses et, s'il y en
a, on va espérer qu'elles soient favorables pour une fois.
Convention renouvelée avec
modifications
Le Président (M. Jolivet): Le ministre a-t-il quelque
chose à dire sur l'article 1.
M. Fréchette: M. le Président, le texte est fort
clair en lui-même. Il y a deux volets dans l'article 1. (1 h 20)
Le premier volet de l'article 1 renouvelle la convention existant entre
les parties. Le deuxième rend applicables les clauses sur lesquelles
pendant la négociation ou alors à l'intérieur de la
conciliation, les parties se sont entendues.
Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: M. le Président, à l'article 1, on
constate que c'est la disposition en vertu de laquelle le législateur,
l'Assemblée nationale décrète que la convention collective
qui est conclue entre la Commission de transport de la communauté
urbaine et le syndicat des employés du transport public est
renouvelée à compter de demain ou ce soir, à 0 h 1,
c'est-à-dire le 7 novembre. Elle est modifiée afin de rendre
applicables certaines dispositions d'ententes paraphées par les parties
et elle prévoit des conditions de rémunération, des
conditions salariales, le taux horaire qui sont prévus à l'annexe
de la présente loi.
Or, compte tenu que le temps est utile, que le temps fuit, je vous
reporte immédiatement à l'article 564 de notre ancien
règlement, le règlement Goeffrion, qui stipulait ceci: "En
comité plénier, les différentes parties d'un bill public
sont examinées dans l'ordre suivant: les articles imprimés; les
articles imprimés qui ont été différés; - ce
n'est pas le cas - les articles nouveaux; - ce ne semble pas être le cas
d'après ce que le ministre délégué au Travail a
annoncé - les annexes imprimées, mais seulement s'il y a lieu de
les amender."
Je présente immédiatement un amendement à l'annexe
du projet de loi: Que la sous-section intitulée "Taux" de la section
I de l'annexe du projet de loi no 84 soit modifiée en
remplaçant à la troisième ligne le chiffre 10,59 $ par le
chiffre 10,69 $ et en remplaçant dans la quatrième ligne le
chiffre 11,23 $ par le chiffre 11,33 $. Les troisième et
quatrième lignes amendées se liraient comme suit: 26
décembre 1981, 10,69 $; 25 décembre 1982, 11,33 $.
M. le Président, je présume que vous acquiescez
immédiatement à la recevabilité de l'amendement. J'ai
l'intention d'intervenir brièvement, parce que d'autres collègues
voudront certainement intervenir.
Pourquoi présentons-nous cet amendement? J'ai eu l'occasion dans
mon intervention d'indiquer qu'il paraissait, à nous de l'Opposition,
que dans le cadre des échanges, dans le cadre de la négociation
qui...
Le Président (M. Jolivet): On me demande une directive. M.
le leader.
M. Bertrand: M. le Président, je ne veux pas interrompre
longuement le député de Portneuf. Celui-ci, après avoir
cité une partie du document de M. Geoffrion, l'ancien règlement,
est passé tout de suite à la formulation d'un amendement. Je veux
simplement que vous puissiez dire au député de Portneuf si, sur
la base de votre interprétation du règlement que nous avons ici
à l'Assemblée nationale du Québec, l'amendement vient
à ce moment-ci ou à un autre moment. En d'autres mots, je pense
qu'il est important pour l'ensemble des parlementaires - là-dessus,
c'est votre décision, on y va - que vous indiquiez comment la
procédure doit être suivie pour ce qui est de la
présentation des amendements selon la séquence des articles qui
sont présentés.
Le Président (M. Jolivet): Pour répondre à
votre demande de directive par rapport justement à l'article 564 dont
faisait mention le whip de l'Opposition, je vais pour les besoins de la cause
le relire. On dit: "En comité plénier, les différentes
parties d'un bill public sont examinées dans l'ordre suivant: les
articles imprimés, c'est-à-dire les sept articles qui sont
actuellement imprimés; les articles imprimés qui ont
été différés, puisqu'il peut y avoir, en termes
d'addition, des articles qui sont reportés à plus tard; les
articles nouveaux - qui pourraient s'ajouter sous forme d'amendement - les
annexes imprimées, mais seulement s'il y a lieu de les amender, les
annexes nouvelles, le préambule, le titre, mais seulement s'il y a lieu
de l'amender."
Or, si je lis ce que dit le règlement dont on fait mention, le
règlement Goeffrion: ils sont dans l'ordre suivant, le, 2e, 3e, 4e... Je
crois comprendre que le whip voudrait,
avant que je ne donne ma décision, faire une intervention.
Allez.
M. Pagé: M. le Président, j'ai fait, dans un
premier temps, la même lecture que vous de cet article. Cependant, vous
constaterez que dès l'article 1 - l'essentiel de l'article 1, c'est de
prévoir les conditions de la convention collective - on
réfère à l'annexe, c'est-à-dire que ne sont pas
spécifiés le quantum, les montants auxquels le travailleur a
droit par l'écriture du législateur de sa convention collective
qu'il n'a pas pu signer. Compte tenu qu'on réfère à
l'annexe dès l'article 1, je crois être tout à fait
habilité à présenter mon amendement à ce
moment-ci.
Le Président (M. Jolivet): Que vous puissiez, en vertu
même de l'article 564, faire mention dès l'article 1 que vous avez
l'intention d'amender l'annexe, je pense que ce serait acceptable comme annonce
d'un amendement que vous voulez apporter à l'annexe, puisque l'essence
même de l'annexe dans un article de loi, c'est de reporter la discussion;
même l'article 564 le prévoit comme tel. Autrement dit, il n'y
aurait pas d'amendement à l'annexe qu'il serait adopté.
Or, l'amendement que vous voulez apporter à l'annexe indique
donc, si on suit l'article 564, qu'il doit être étudié en
quatrième position, même dans le règlement Geoffrion. En
conséquence, ce que vous pouvez faire au moment où on se parle,
c'est annoncer que vous avez un amendement à l'annexe et on
l'étudiera en quatrième position, c'est-à-dire lorsqu'on
aura étudié tous les articles imprimés qui ont
été différés, tous les articles nouveaux et ainsi
de suite.
Donc, je dois comprendre que vous avez une annonce que je prends et
qu'on étudiera lorsqu'on arrivera à l'annexe.
M. Pagé: Je n'ai pas fini. Je veux vous indiquer - et
c'est peut-être opportun qu'on puisse l'annoncer à ce moment-ci,
parce qu'on sait que le gouvernement a besoin de temps pour
réfléchir, on l'a vu tout à l'heure - que le but de cet
amendement, l'objet de cet amendement, c'est de prévoir que la
convention collective imposée aux deux parties reflète le plus
fidèlement possible, dans sa teneur, le consensus qui se
dégageait par la voix des négociateurs et des gens qui ont
été mandatés pour négocier, tant de la part de la
partie syndicale que de la partie patronale, en la personne de M. Pageau, de M.
Bouchard et des autres qui occupaient pour et au nom du syndicat. Cet
amendement vise à ce que les paroles données soient
respectées et il sera accompagné, évidemment, compte tenu
qu'il prévoit 11% en 1982 et 6% en 1983, d'un autre amendement qui, lui,
visera à enlever l'indexation pour la deuxième année qui
était prévue dans le projet de loi no 84 tel que
rédigé originalement.
En ce qui concerne le bien-fondé, la justification de
présenter cet amendement, je suis persuadé et j'ose
espérer que je n'aurai pas besoin de plaider longtemps et que les
députés du côté de la majorité voteront en
toute liberté, selon leur conscience et sans se soucier des diktats
improvisés du député de Matane et président du
Conseil du trésor, le petit Napoléon du PQ.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Pagé: Votez librement sur l'article 1.
Le Président (M. Jolivet): Y a-t-il d'autres interventions
sur l'article 1? M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: L'article 1 a pour objet de mettre les parties
signataires de la dernière convention collective dans une situation
telle que la convention collective qui existait auparavant soit reconduite et
soit maintenant la loi des parties. (1 h 30)
Peut-être que vous aurez à donner une directive, M. le
Président, sur la question que je me pose. Pour savoir la
véritable teneur de l'article 1, ne devrait-on pas disposer de ce qui,
finalement, est le coeur de l'article 1, c'est-à-dire la convention
collective en question? Je considère que des amendements à
l'article 1 pourraient prendre la forme d'amendements à la convention
collective. Étant donné que l'article 1 réfère
à la convention collective, M. le Président, il serait possible,
à titre d'exemple, que nous, de l'Opposition, en admettant qu'il y ait
un chapitre là-dessus, voulions proposer un amendement dont nous
pourrions discuter et que même le ministre du Travail pourrait accepter,
en ce qui concerne la permanence d'emploi, la mobilité, etc. Ce sont
là des éléments essentiels dans la convention collective
et des éléments de base de l'article 1.
Comment peut-on discuter intelligemment de l'article 1 si on n'a pas la
convention collective, qui est l'essence même de l'article 1? Le ministre
du Travail a l'air de l'apprendre, de regarder de quelle couleur c'est; il ne
l'a peut-être pas vue, il la voit peut-être pour la première
fois, mais ce n'est pas ce projet de loi qu'on étudie, c'est la
convention collective dont vient de prendre possession, avec surprise, le
ministre du Travail.
On pourrait peut-être suspendre de nouveau pour permettre au
ministre du Travail de prendre connaissance de ce dont on va discuter et de ce
qu'il nous propose.
Comment peut-on avoir une discussion intelligente? Je n'ai pas la
convention collective en main et on me demande de me prononcer, à
l'article 1, sur cette convention collective.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: Ce n'est pas aussi volumineux qu'un
dictionnaire, M. le Président, mais je crois comprendre que le
député de Louis-Hébert voudrait avoir l'occasion de
prendre la convention collective qui a existé entre les parties, en
examiner le contenu article par article, avoir le loisir de suggérer des
amendements à l'un ou l'autre des articles de ladite convention. Je lui
signalerai tout simplement que dès lors que cette convention a
été adoptée, de par la loi, elle doit être
déposée au bureau du Commissaire général du
travail. Elle devient donc un document public dont toute personne peut avoir
copie, dont toute personne peut prendre connaissance.
Si c'est ce à quoi réfère le député
de Louis-Hébert, il peut, en tout état de cause, mettre la main
sur la convention et, s'il a le goût de la parcourir et de
suggérer des amendements aux clauses qui sont là, c'est son
entière faculté de le faire. C'est un document public, je vous le
réitère, qui, en vertu du Code du travail, doit être
déposé au bureau du Commissaire général du travail
dans les cinq jours de sa signature. Qu'il dispose donc d'une copie, qu'il
l'étudie et qu'il nous propose les amendements auxquels il pourrait
songer.
M. Doyon: M. le Président, là-dessus... M.
Bisaillon: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant! C'est sur le
même sujet?
M. Doyon: Oui.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Le ministre du Travail
fait grand état qu'il s'agit là d'un document public auquel je
pourrais avoir accès, etc. Cependant, je pense qu'il importe de signaler
au ministre du Travail que nous avons été saisis de ce projet de
loi à 14 heures hier, que nous avons siégé sans
interruption depuis 14 heures, que nous avons été ici pour
remplir notre devoir de représentants de la population à
l'Assemblée nationale depuis 14 heures, qu'il est maintenant samedi
matin 1 h 30. Que le ministre du Travail ait l'outrecuidance de me dire: Si
vous voulez une convention collective, allez vous la procurer! je suis à
proprement parler scandalisé de cette façon de répondre.
Ce n'est pas sérieux. C'est une solution de facilité, c'est tout
simplement un faux-fuyant parce que sa solution et sa réponse ne sont
pas pratiques. C'est tout simplement insultant qu'on nous dise à 1 h 30
du matin, un samedi, en plein milieu de la nuit: Si vous voulez la convention
collective, allez la chercher, c'est un document public.
Si c'est le genre de réponse qu'on a d'un ministre du Travail
devant un sujet aussi sérieux que ça, je suis tout simplement
désemparé, je ne sais pas quoi dire.
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, avez-vous autre
chose à dire?
M. Fréchette: J'ai un commentaire, M. le Président.
Je suis prêt à remettre au député de
Louis-Hébert, s'il veut se livrer à l'exercice auquel il
réfère, une copie de la convention collective. Il prendra le
temps qu'il faut pour l'examiner, la regarder article par article et ce qu'il
aurait le goût de suggérer au chapitre des amendements, il pourra
le faire. Mais je suis étonné, M. le Président, que le
député de Louis-Hébert se dise ignorant du contenu de la
convention collective qui nous occupe quand il était, à
l'époque où elle a été signée, un des hauts
fonctionnaires de la Communauté urbaine de Québec. Qu'il ne me
fasse pas le reproche de ne pas avoir regardé la convention quand il a
dû l'avoir sous sa main en 1979 quand elle a été
signée.
M. Bisaillon: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: J'ai compris, des directives que vous aviez
données relativement aux premiers amendements qui avaient
été déposés, qu'on pouvait, à ce stade-ci,
au moment où on étudie l'article 1, faire l'annonce des
amendements à l'annexe. Puisqu'on doit voter l'article 1, on doit donc
faire l'annonce des amendements à l'annexe. Pour éviter qu'on
s'installe dans des débats de procédure, pour éviter aussi
que la population, qui nous regarde, peut-être moins au moment où
on se parle, et qui nous a déjà regardés, pense que, par
la procédure, les députés de l'Opposition ou ceux du
gouvernement ont voulu éviter le débat de fond sur des
amendements à proposer, est-ce que le ministre serait d'accord pour que,
une fois les amendements à l'annexe annoncés, on puisse commencer
la discussion de ces amendements immédiatement? C'est un consentement,
M. le Président, mais cela nous permettrait au moins d'aller tout de
suite aux amendements et, avec le consentement de tout le monde, on
discuterait au moins du fond et on éviterait le débat de
procédure. Si le ministre acquiesçait à cette demande de
consentement, je dis tout de suite que j'aurai, pour ma part, deux autres
amendements à l'annexe à annoncer et quand on aura le portrait
des amendements annoncés, on pourra les prendre un par un et les
discuter.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, en
vertu même du règlement actuel, il y a toujours possibilité
de diférer l'étude des sept premiers articles pour en arriver
à l'annexe immédiatement. S'il y a consentement, comme
président, je n'aurai pas d'autre choix que d'accepter votre
consentement et de dire qu'il y a consentement, et aller directement à
l'annexe. S'il y a consentement, je suis prêt à le faire. S'il n'y
a pas consentement, je continuerai l'article 1. Est-ce qu'il y a
consentement?
Une voix: Non.
M. Bertrand: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le député de Sainte-Marie, je
comprends très bien le bien-fondé qui se trouve sur le plan du
travail. La façon d'y arriver aussi vite, sinon plus vite que ce qu'il
vient de proposer, c'est qu'on suive le règlement. On a un
règlement. Écoutez!
M. Bisaillon: Parfait!
M. Bertrand: Et qu'on adopte...
M. Bisaillon: L'article 1, à reporter.
M. Bertrand: ... les sept articles.
M. Bisaillon: Ou les reporter.
M. Bertrand: Mais qu'on les adopte et qu'on aille à
l'annexe.
Le Président (M. Jolivet): Je crois comprendre qu'il n'y a
pas consentement.
Donc, je reste à l'article 1. M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: J'ai un autre amendement, M. le Président.
L'article 1 vise à produire une convention collective,
c'est-à-dire à partir de la convention collective existante,
à partir des clauses négociées et paraphées entre
les parties et à partir de l'annexe qu'on ajoute. Tout le monde sait
qu'une convention collective, quand elle est signée, c'est aussi
accompagné d'un protocole de retour au travail, quand il y a eu
grève. Il y a donc un certain nombre de conditions qu'on ne retrouve pas
nécessairement dans des conventions collectives, mais qui font partie du
processus de signature de convention collective. Comme le gouvernement demande
au Parlement de se substituer aux parties pour en arriver à produire une
convention collective, ne devrait-on pas prévoir en même temps des
mécanismes pour en arriver à la signature d'un protocole de
retour au travail? Dans ce sens-là, comme, évidemment, on ne peut
pas le faire ici, mais qu'il y a au moins trois problèmes, à ma
connaissance, qui devraient être discutés, on pourrait
peut-être proposer un amendement à l'annexe - un mandat à
confier au ministre délégué au Travail - de voir à
régler avec les parties un protocole de retour au travail selon la
procédure habituelle, la justice, l'équité et la tradition
aussi qui est déjà implantée dans le milieu de travail
particulier.
C'est un aspect très important et cela fait habituellement partie
de la discussion et de la signature d'une convention collective. Alors, si on
veut se substituer aux parties, faisons-le au moins jusqu'au bout en
accomplissant chacune des tâches qui accompagnent la signature d'une
convention collective. Ce serait donc un premier amendement. (1 h 40)
J'ai un deuxième amendement, M. le Président, toujours
à l'annexe. Dans l'éventualité - ce que je ne souhaite pas
-où l'amendement déjà annoncé par le whip de
l'Opposition ne serait pas retenu, il y aurait, à ce moment-là,
un article dans l'annexe qui s'appellerait indexation. Or, à l'article
indexation, on dit: Première année, il n'y a pas de formule
d'indexation des salaires la première année. M. le
Président, je trouve que le législateur, c'est supposé ne
jamais parler pour ne rien dire. Or, cela me semble parler pour ne rien dire.
De dire qu'il n'y aura pas telle chose dans une loi, si on est muet, il n'y en
a pas de chose. Moi, je proposerais tout simplement un amendement, soit de
biffer les termes dans l'annexe première année et il n'y a pas de
formule d'indexation des salaires la première année. Biffer cela
tout simplement. Cela n'ajoute strictement rien. On n'a pas cette formule,
c'est qu'il n'y a pas, tout simplement, une formule d'indexation. On n'a pas
besoin de le dire. Un dernier amendement, M. le Président, qui devrait
d'abord être adressé au ministre sous forme de question, c'est
à la page 6 du projet de loi à l'article
rétroactivité. On lit: "Les montants de
rétroactivité seront établis en tenant compte de la
durée ininterrompue du service de l'employé." Je voudrais savoir
ce qu'on vise
par cela et souligner qu'il y a un danger à cette formulation.
Si, par exemple, quelqu'un est malade, c'est une interruption.
Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas que vous
entriez dans la discussion. Vous l'annoncez.
M. Bisaillon: Je l'annonce là. Une question et
éventuellement un amendement sous cet aspect.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Pour être capable
tout à l'heure de pouvoir bien situer les amendements, dans le cas de
votre premier amendement, j'aimerais que vous me l'écriviez pour que je
puisse l'avoir. Quant au deuxième amendement, l'indexation elle est
claire, votre proposition. Quant au troisième, la
rétroactivité, il y aura d'abord une question et ensuite
dépendant de la réponse une possibilité d'amendement.
Donc, j'attendrai vos suggestions écrites. M. le député de
Brome-Missisquoi, sur l'article 1.
M. Paradis: M. le Président, c'était concernant le
protocole de retour au travail.
Le Président (M. Jolivet): Parfait, donc, l'article 1.
M. Paradis: Qui permet le protocole de retour au travail. Vous ne
pensiez peut-être pas qu'ils étaient pour retourner au
travail.
M. Fréchette: C'est une question que vous me posez?
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le ministre,
simplement, c'est qu'il y a eu un amendement, je crois. C'est ce que j'ai
compris.
M. Pagé: On va continuer seuls, M. le Président.
Cela va aller plus vite. Qu'il ne réponde pas.
Le Président (M. Jolivet): Ce que j'ai cru comprendre, M.
le ministre, c'est que compte tenu que le député de Sainte-Marie
a proposé un amendement possible. Donc, l'article 1 est
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Jolivet): Sur division. L'article 2. M.
le ministre a-t-il quelque chose à dire?
M. Fréchette: Non, M. le Président. Me semble-t-il,
encore ici, le texte parle de lui-même. Il est très clair.
M. Bisaillon: M. le Président, le leader du gouvernement
nous avait dit que cela avait été un sujet de discussion compte
tenu du fait qu'au moment où on est entré en discussion sur le
projet de loi, on ne savait pas nécessairement à quelle heure ce
serait terminé. J'avais cru comprendre que l'article 2 avait
été... Pas 2, mais 3, excusez-moi. Cela va.
Le Président (M. Jolivet): L'article 2 est-il
adopté? Donc, adopté celui-là, pas de division sur
l'article 2? Adopté. L'article 3, M. le ministre.
Retour au travail
M. Fréchette: L'article 3, M. le Président, c'est
d'abord une ordonnance de retour au travail à 0 h 01 minute, le 7
novembre 1982. C'est donc dimanche matin à une minute. En même
temps, il est fait obligation de demander aux employés
surnuméraires de communiquer avec les autorités de l'employeur
pour connaître leur horaire de travail parce que, semble-t-il, plusieurs
d'entre eux ne sont pas fixés quant à leur horaire précis
de travail.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Concernant le deuxième paragraphe qui se lit:
"S'il fait partie de la catégorie des employés
surnuméraires, il doit en outre s'informer de son horaire de travail
auprès du service compétent de la commission entre 9 heures et 18
heures le 6 novembre 1982." Étant donné l'heure avancée de
nos travaux... Le ministre va être tenté de me répondre
qu'il peut le faire à 17 h 55, c'est avant 18 heures. Est-ce qu'il
considère raisonnable ce délai pour les employés
surnuméraires?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: La loi prévoit un délai de 9
heures du matin à 18 heures. Ce à quoi elle oblige
l'employé surnuméraire c'est à un simple appel
téléphonique au bureau du personnel de la commission ou au bureau
concerné pour savoir quel peut être son horaire de travail. C'est
parce que, par définition, comme surnuméraire, il ne peut pas
être fixé quant à ses heures. Il n'a pas d'heures fixes de
travail. Pour savoir s'il doit se présenter au travail le 7 novembre
1982 à 0 h 01, il faut qu'il le sache et la façon pour lui de le
savoir, c'est de faire demain, entre 9 heures et 18 heures, l'exercice d'un
appel téléphonique pour savoir si, effectivement, il doit se
présenter au travail et, si oui, à quelle heure.
Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: Je ne veux pas me faire l'avocat du diable, mais
il doit en outre s'informer. S'il ne s'informe pas, qu'arrive-t-il?
M. Fréchette: S'il ne s'informait pas, il faudra se
reporter aux dispositions de la convention collective pour voir ce qu'elle dit
dans semblable matière.
M. Pagé: Quels sont les moyens... Vous obligez ce
travailleur à s'informer. Dans la loi, il doit téléphoner,
comme vous dites.
M. Fréchette: Enfin! S'informer.
M. Pagé: Quels sont les moyens que vous avez pris pour
qu'il y ait une réponse?
M. Fréchette: Pardon?
M. Pagé: Quels sont les moyens que vous prenez dans la loi
pour être certain qu'il y ait une réponse à l'autre bout?
Vous dites au travailleur...
M. Fréchette: Oui.
M. Pagé: ... pour être plus clair auprès du
ministre: Cette catégorie d'employés surnuméraires doit
s'informer demain, entre 9 heures et 18 heures. C'est l'obligation qui est
impartie au travailleur. Quelles garanties donnez-vous à ce travailleur
qu'il y aura quelqu'un qui va répondre au bout?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: À l'article 4, M. le
Président, - il n'est pas encore adopté - il est clairement
indiqué que la commission doit prendre les moyens appropriés pour
que soient dispensés ces services habituels à compter du 7
novembre 1982. Si donc la commission a cette obligation, il faut qu'elle prenne
les moyens de permettre au salarié surnuméraire de savoir s'il
doit, oui ou non, se présenter. Par voie de conséquence, cela
implique nécessairement qu'il y aura là demain ou ce matin,
à compter de 9 heures, quelqu'un qui pourra répondre au
téléphone, ou au bureau, si le salarié prend la
décision d'aller au bureau, pour lui indiquer quel est son horaire de
travail.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, le ministre du Travail vient de
dire, en réponse à une question du whip de l'Opposition, ce qui
se passe si une personne ne s'informe pas. Le ministre du Travail répond
à cela que c'est la convention collective qui s'applique. Je voudrais
savoir ce qu'elle dit là-dessus...
M. Pagé: Quel article?
M. Doyon: ... à quel article et....
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, excusez-moi, M.
le député de Louis-Hébert n'a pas terminé.
M. Doyon: ... une fois que j'aurai eu cette réponse, M. le
Président, je voudrais quand même signaler au ministre du Travail
qu'il serait peut-être surprenant qu'on trouve une disposition à
cet égard, une convention collective qui aurait prévu, dans son
corps même, une loi spéciale future que le gouvernement ne
connaissait pas à ce moment-là... Comment peut-il me
répondre ou répondre au whip de l'Opposition qu'advenant le cas
où une personne ne s'informe pas, c'est la convention collective qui
s'applique? Je pense que poser la question et voir dans quel contexte il
devrait y avoir une clause dans la convention collective, c'est donner une
idée du genre de réponses qu'on a obtenues du ministre du
Travail, non pas que cette chose soit extrêmement importante, mais cela
montre dans quel esprit de précipitation et d'improvisation le projet de
loi a été préparé. Cela témoigne aussi du
genre de réponses qui sont données pour remplir le vide,
réponses que nous sert le ministre du Travail depuis tout à
l'heure. On peut se poser des questions sur les réponses qu'on a
obtenues sur des points plus importants, si on nous répond comme cela
sur une chose qui, à sa face même, devrait nous faire constater
que la réponse n'est clairement pas que la convention collective dit
quoi faire en cas de loi spéciale. Quand même!
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, il y a à la
fois, me semble-t-il, une question et un commentaire. La question très
précise... Je m'excuse.
M. Doyon: M. le Président, avec votre permission...
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Doyon: ... je vais répéter la question
précise. Quel est l'article de la convention collective...
Une voix: On est en train de le chercher.
M. Doyon: Ils sont en train de le chercher?
M. Fréchette: Oui.
M. Doyon: ... qui prévoit ce qui se passe en cas de loi
spéciale et du retour au travail à la suite de cette loi
spéciale. Que dit la convention collective sur les lois
spéciales?
M. Fréchette: On va faire la recherche et on donnera la
réponse au député.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
Une voix: ...
M. Fréchette: Oui, c'est ce que j'allais dire, M. le
Président.
M. Paradis: Va-t-on suspendre pour deux heures et demie ou
suspendre l'étude de l'article? (1 h 50)
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je pense
que la meilleure façon, compte tenu que les articles 3 et 4 sont joints
avec la question posée, c'est de suspendre temporairement les articles 3
et 4 et de passer à l'article 5. Article 5, M. le ministre.
Poursuite de la grève
M. Fréchette: C'est strictement technique, M. le
Président. Pour le cas où il y aurait grève
illégale, c'est pour rendre applicables les dispositions du Code du
travail en matière de pénalités.
Le Président (M. Rancourt): L'article 5 est-il
adopté?
M. Pagé: Une question, M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): M. le whip de
l'Opposition.
M. Pagé: Le ministre titulaire de la loi écrit
ceci: "Si la grève actuellement en cours se poursuit après le 6
novembre 1982, elle est réputée, aux fins de l'application de
l'article 142 du Code du travail, avoir été
déclarée ou provoquée à compter du 7 novembre."
C'est donc dire que si jamais il y avait un problème particulier sur des
questions relatives au protocole de retour au travail... L'information que j'ai
- je peux me tromper et le ministre pourra me corriger -c'est qu'il y a des
questions particulières concernant le protocole de retour au travail qui
ne sont pas réglées. Le gouvernement et le ministre du Travail
ont omis d'en faire état dans le présent projet de loi. Supposons
qu'il y aurait une grève, elle serait jugée illégale non
pas à cette date, mais à compter du 7 novembre. Est-ce qu'il y a
des dispositions dans le projet de loi pour un "lock-out" illégal?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: Effectivement, M. le Président, il
n'y a pas de telles dispositions, sauf que l'on tient pour acquis, à ce
moment, que l'usager, le contribuable, celui qui voudrait le faire pourrait en
tout temps, par voie d'injonction, obtenir ce qu'il voudrait,
c'est-à-dire le rétablissement du service.
M. Paradis: Est-ce qu'il y a un recours collectif?
M. Bisaillon: M. le Président, ce n'est pas
sérieux. On fait une loi pour forcer la reprise du travail. Le ministre
du Travail dit: Savez-vous, on a pensé qu'effectivement il pourrait y
avoir une poursuite de la grève, mais on n'a jamais pensé que les
autres pourraient peut-être fermer la "business". Supposons que, comme
ils n'ont pas obtenu la troisième année de convention collective,
ils ne seraient pas contents et ne reprendraient pas le service. De toute
façon, avec la "job" qu'on vient de faire au syndicat nous-mêmes,
peut-être seraient-ils en bien meilleure position. Tout à coup
qu'ils ne reprennent pas le service.
Notre premier objectif en venant ici, c'était supposé
être - c'était supposé être ça l'urgence - la
reprise du service pour l'usager. Dans le texte de la loi, tout ce dont on
parle c'est si le syndicat poursuit la grève. Mais, s'il y a un
"lock-out", ce n'est pas prévu. Admettez, M. le Président, que ce
n'est pas sérieux. Normalement, dans tous les autres projets de loi, il
y avait au moins un contrepoids.
Le Président (M. Rancourt): M. le whip de
l'Opposition.
M. Pagé: Je vais donner seulement un exemple au ministre.
Supposons, M. le Président, que l'employeur, au lendemain de cette loi -
peu importe pour quel motif; il n'a pas eu sa troisième année ou
encore il se sent dans une position de force, il a le gros bout du bâton,
appuyé par les députés péquistes et par le
gouvernement - décide que, sur X circuits de transport en commun, il en
ouvre seulement Y, disant à des travailleurs: Messieurs, "just too bad"
pour un bout de temps, et décrète le "lock-out" partiel, il n'y a
rien dans la loi. Le ministre nous dit: Ils demanderont une injonction, ils
feront un recours collectif. Je n'ai jamais vu ça, ça ne marche
pas de même.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je voudrais rappeler
à mes collègues les
dispositions de l'article 4 du projet de loi qui n'est pas encore
adopté, ça, j'en conviens, de même que l'article 5 dont on
parle actuellement.
D'abord, quant à l'article 4, il y a une obligation qui est faite
à la commission de donner le service à compter du 7 novembre 1982
- service de transport en commun, me semble-t-il. À supposer, pour
n'importe quel motif, comme l'indique le député de Portneuf, que
la commission de transport décidait de ne pas prendre les dispositions
nécessaires pour que le transport en commun reprenne, je vous signale
qu'à ce moment elle se retrouve en pleine illégalité. En
conséquence, n'importe qui peut prendre les dispositions
nécessaires pour se présenter devant un tribunal de juridiction
civile, obtenir par requête en injonction une ordonnance obligeant la
commission à donner le transport en commun aux usagers. Dans le cas de
l'article 5, s'il y avait grève après l'adoption de la loi, c'est
tout simplement pour prévoir que l'article 142 du Code du travail
s'appliquera, c'est-à-dire qu'il y aura une pénalité.
M. Bisaillon: M. le Président, pour qu'on se comprenne
bien...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le
ministre, avez-vous terminé?
M. Fréchette: Oui, cela va.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Pour qu'on se comprenne bien, l'article 142
prévoit des pénalités, il prévoit des sanctions.
C'est ce qu'il prévoit. Quelles sont les sanctions prévues dans
la loi? L'article 4, comme le ministre l'a souligné, ordonne à la
commission, puisqu'on y dit: Elle doit prendre les moyens appropriés
pour que soient dispensés ses services habituels. Tout ce qu'on fait,
c'est qu'on lui donne une directive. Dans son cas, on ne prévoit pas de
sanction. On dit: Les gens prendront des injonctions. Dans le cas du syndicat,
on a prévu un mécanisme qui est l'application de l'article 142 du
code, pour qu'il y ait une sanction. Où est la sanction pour
l'employeur? Où est la correspondance qu'on retrouve toujours dans le
Code du travail?
Le Président (M. Rancourt): M. le whip de
l'Opposition.
M. Pagé: On ne veut pas faire de chichi et tout un plat
avec cela. On a des commentaires qui seront importants et qu'on devra appuyer
d'une argumentation sur les amendements qu'on propose. À ma
connaissance, dans les sept lois précédentes que le gouvernement
du Parti québécois a fait adopter par la Chambre, dans les lois
spéciales que j'ai vues, qui avaient comme objectif un retour au travail
pour dispenser les services, il y avait toujours ce pendant de l'obligation qui
est impartie aux travailleurs de retourner au travail, de ne pas
déclencher de grève illégale. Il y avait toujours
l'obligation pour l'employeur de se conformer au projet de loi et de ne pas
décréter de lock-out illégal, parce qu'on sait que bien
souvent le lock-out et la grève, c'est une question
d'interprétation. J'ai souvent entendu des employeurs dire: Ah, ce n'est
pas un lock-out, c'est une grève, et entendre les travailleurs dire: Ce
n'est pas une grève, c'est un lock-out. Ce n'est pas compliqué de
prévoir le pendant dans le projet de loi. On ne fera pas de chichi, on
n'en fera pas un plat. Surtout venant du ministre du Travail, vous devriez
prévoir les deux choix et on passerait à d'autre chose, on
passerait au substantiel.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, si on prenait le
temps, ne serait-ce qu'une minute, de lire l'article 142 du Code du travail; on
prévoit très clairement que c'est pour les deux parties.
Laissez-moi l'occasion de ne lire que les deux premières lignes de
l'article 142 du Code du travail: Quiconque déclare ou provoque une
grève ou un lock-out contrairement aux dispositions du présent
code, ou y participe, est passible, pour chaque jour ou partie de jour pendant
lequel cette grève ou ce lock-out existe, d'une amende de...
Cela donne la réponse à la question que le
député de Sainte-Marie, à très juste titre, a
formulée. Que l'une ou l'autre des deux parties se retrouve dans
l'illégalité, d'une part, l'employeur parce qu'il ne fournit pas
les services, d'autre part, les salariés parce qu'ils n'iraient pas au
travail, c'est dans l'un et l'autre cas l'article 142 du Code du travail qui
s'applique.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche a demandé la parole.
M. Bisaillon: Je suis d'accord. M. le Président, c'est sur
le même sujet.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Chevrette: Moi aussi, M. le Président...
M. Bisaillon: Comme c'était une réponse à ma
question.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Sainte-Marie, sur le même sujet.
M. Bisaillon: Je suis d'accord avec ce que le ministre vient de
dire. La seule chose, c'est que, dans l'article tel qu'il est
rédigé, on aurait peut-être dû ajouter: ou qu'un
lock-out est décrété. Autrement dit, si la grève
actuellement en cours se poursuit ou qu'un lock-out est
décrété, là l'article 142 du code s'applique. C'est
juste cela qu'on souligne. (2 heures)
M. Fréchette: M. le Président, je n'ai pas le
goût de donner une leçon de droit au député de
Sainte-Marie, mais il me paraît évident que dès lors que la
commission transgresserait les dispositions de l'article 4, elle se placerait
dans la plus stricte des illégalités. Il n'est pas
nécessaire d'écrire dans la loi qu'on doive procéder.
C'est implicite en soi. Par interprétation, on se réfère
directement à l'article 142 du Code du travail.
Le Président (M. Rancourt): Sur le même sujet, M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: Ce qu'on demande au ministre c'est de lire son article
5. L'article dit: "Si la grève actuellement en cours se poursuit
après le 6 novembre 1982, elle est réputée, aux fins
de..." Tout l'article ne concerne que la dimension grève et ignore
complètement la dimension lock-out. C'est tout ce que l'on dit. Lisez-le
votre article.
M. Fréchette: II n'y a pas de lock-out en cours, c'est une
grève en cours.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Joliette, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Chevrette: Je voudrais tout simplement rappeler une chose.
Dès que la loi est sanctionnée, ce sont les droits normaux du
Code du travail qui s'appliquent. Je trouve cela très drôle qu'on
s'interroge, actuellement, sur ce qui va se passer après. Après
la loi, on a une convention réputée en vigueur tout comme s'il y
avait une signature. C'est l'effet normal.
Que le député de Sainte-Marie s'interroge sur les effets,
et que le député de Jean-Talon, tout en venant faire son petit
boniment, se retire tout de suite après, dès que
l'Assemblée nationale se sera prononcée sur un contenu de
convention collective, cela devient, immédiatement après,
l'application normale d'une convention collective, pas plus, pas moins.
Donc, la commission doit prendre les moyens appropriés - c'est
bien dit - pour que soient dispensés les services conformément
dévolus en vertu du Code du travail, en vertu des normes prévues
dans les contrats collectifs de travail également, parce que cela
devient force de loi normalement, les normes prévues au contrat de
travail lui-même. Je suis surpris qu'on s'interroge sur les moyens. Ce
sont les moyens prévus. Y a-t-il des prises de position par rapport
à des individus? Y a-t-il des dossiers disciplinaires? C'est tout
à fait normal, c'est l'application normale d'un contrat collectif de
travail. Je ne comprends pas pourquoi on s'obstine sur cela.
Je comprends que le député de Sainte-Marie puisse
s'interroger et dire: Qu'est-ce qui s'applique après? Après,
c'est l'application d'un contrat qui, normalement, est signé, qui est
normalement imposé par rapport à l'Assemblée nationale,
mais qui, après, a exactement force de loi comme si c'était
signé. C'est cela que cela dit.
Il y a des processus de règlement de griefs dans cela. Il y a des
processus d'évaluation. Il y a des fiches de notation. C'est ce que dit
l'article 4. La commission prend les moyens en fonction du contrat qui lui est,
dans les circonstances, imposé, mais qui pourrait être,
négocié, si jamais on n'avait pas fait un appel
téléphonique outremer, et on aurait pu signer. C'est ce que cela
veut dire. Pas plus que cela, pas moins que cela non plus.
Je suis convaincu - et je voudrais le préciser - que ce sont les
mécanismes du contrat qui jouent dès que la loi est
sanctionnée, pas plus, mais pas moins.
M. Bisaillon: M. le Président, j'aurais un
commentaire.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Paradis: J'ai demandé la parole. M.
Fréchette: Je n'insiste pas.
M. Paradis: Rapidement, M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: II paraît, à la face même du
projet de loi, si on s'en tient aux propos du cinquième ministre du
Travail qui nous parle ce soir, que c'est la convention collective qui devrait
s'appliquer et que cet article 5 crée un déséquilibre dans
la loi qui pèse lourd sur les travailleurs strictement. Est-ce que le
ministre consentirait à le retirer?
M. Fréchette: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: ... il faut bien nous placer dans la
perspective du projet de loi qu'on est en train d'étudier.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Fréchette: Ce projet de loi fait suite à un
conflit de travail de la nature d'une grève. Ce n'est pas adopté
à la suite d'un conflit de travail de la nature d'un lock-out. En
conséquence, il nous apparaît qu'il faille référer
strictement au conflit devant lequel on se trouve, donc, la grève. Quant
à l'autre aspect, l'autre possibilité d'un lock-out, on n'est pas
devant cette éventualité-là actuellement. On n'est pas
devant un lock-out.
En vertu de l'article 4 du projet de loi et en concordance avec
l'article 142 du Code du travail, si l'employeur, qui, au moment où l'on
se parle, n'a pas décrété de lock-out, après
l'adoption de la loi décidait de décréter un lock-out, il
devra, au même titre que le salarié, qui, par exemple, ne
respecterait pas les dispositions de la loi, faire face à
d'éventuelles et possibles accusations portées en vertu de
l'article 142 du Code du travail.
M. Paradis: M. le Président, brièvement.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Vous conviendrez avec moi, M. le ministre, que les
articles non encore adoptés, soit 3 et 4, sont le pendant l'un de
l'autre pour la partie patronale et pour la partie syndicale. On en convient?
On retrouve un article 5 qui, lui, ne trouve pas de pendant nulle part dans le
projet de loi. Ce que vous nous dites, finalement, c'est que si on se retrouve
devant une situation de lock-out, ce sera parce que, suivant les propos qu'on a
entendus de la part des députés ministériels, le syndicat
ne sera pas content et le patronat ne sera pas content. Vous avez
tranché la poire en deux, dites-vous, mais si vous avez tranché
la poire en deux, en vertu de quelle théorie pouvez-vous dire qu'il y a
plus de risque de grève illégale que de lock-out illégal?
Où est-ce que vous prenez ça?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, si la situation qui
nous avait amenés ici en avait été une suscitée par
un lock-out décrété par l'employeur, prenons cela comme
exemple, inversons la situation dans laquelle on se trouve et à supposer
qu'on soit ici, l'article 5 de l'actuel projet de loi parlerait du lock- out au
lieu de parler de la grève purement et simplement et l'on dirait
à l'article 4: Les travailleurs doivent fournir le travail. S'ils ne le
font pas c'est l'article 142 du Code du travail qui s'appliquerait. C'est
exactement le mécanisme à l'inverse.
M. Paradis: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Une question bien brève, M. le ministre.
Pouvez-vous m'indiquer en vertu de quel article du Code du travail peut
être sanctionné l'article 4 du projet de loi? L'article 4 qui dit
que la commission doit prendre les moyens appropriés pour que soient
dispensés ses services habituels. Quel article du Code du travail
sanctionne...
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: Ce n'est pas le Code du travail. Ce n'est
pas ce genre de situation qui est prévue par le Code du travail. C'est
l'injonction devant le tribunal civil.
M. Paradis: Ah!
M. Rivest: Vous avez toujours dit que vous étiez contre
toute espèce de recours à l'injonction et vous n'avez pas encore
corrigé ça après six ans?
M. Fréchette: Vous me demandez quel est le recours.
M. Lalonde: C'est avant que le député de Sherbrooke
soit ministre du Travail.
M. Paradis: M. le Président...
M. Fréchette: Je saisis mal le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Paradis: M. le Président.
M. Fréchette: Je saisis très mal les propos du
député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, une
question à la fois. M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Sur l'injonction... M. Fréchette:
Oui.
M. Paradis: ... à minuit ou à une minute dimanche
matin, si la CTCUQ ne reprend pas le travail, vous dites aux
citoyens de Québec de se présenter devant les tribunaux
lundi matin et de réclamer des injonctions. C'est ce que vous leur
dites.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Frechette: Je ne leur dis pas...
M. Paradis: Vous nous convoquez ici dans un débat
d'urgence et vous nous dites:
Si une des parties ne reprend pas le travail, des gens de Québec,
vous continuerez à marcher, mais marchez en direction du tribunal.
M. Fréchette: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: ... je ne leur dis pas de le faire.
M. Lalonde: Ah! Vous êtes bien bon! Une voix: Ah!
M. Fréchette: Vous avez autre chose, M. le
député?
M. Lalonde: Non, merci. (2 h 10)
M. Fréchette: Je peux vous écouter, si vous
voulez.
M. Lalonde: Non, je vous entends. M. Fréchette: Oui.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Fréchette: Je ne leur dis pas de le faire, M. le
Président. Je leur dis qu'ils ont à leur disposition les moyens
de le faire. Je suis conscient que je me répète, mais je pense
que je dois le faire. Les motifs pour lesquels nous sommes ici procèdent
d'un conflit de travail de la nature d'une grève et non pas d'un
lock-out. En conséquence de ce que je viens de dire, il nous faut donc
prendre les dispositions pour faire cesser la grève. C'est la
décision que nous avons prise. Par voie de conséquence
également, nous devons aussi prévoir quelles sanctions pourraient
s'appliquer au cas où la loi ne serait pas respectée, si la
grève devait continuer. La réponse à cette question -c'est
la deuxième, troisième ou cinquième fois que je le dis -
nous la retrouvons à l'article 142 du Code du travail. Ce n'est pas
actuellement un lock-out qui existe comme situation de travail à la
CTCUQ.
Une voix: Merci.
Une voix: On ne peut rien vous cacher.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Fréchette: Vous le savez, vous.
M. Paradis: On peut donc conclure que vous avez convoqué
l'Assemblée nationale du Québec non pas pour garantir aux
citoyens de Québec un service essentiel qu'est le transport en commun,
mais strictement pour régler une grève. Cela ne vous
intéressait pas de garantir la continuité du service.
Une voix: Voyons donc!
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, on va prendre le
temps qu'il faut. Je suis tout à fait disposé à cela. Mais
je vous réitère qu'on est en face d'un conflit de la nature d'une
grève et non pas d'un lock-out. C'est une grève. Vous avez
compris? Je n'insiste pas.
M. Paradis: On a compris ce que vous vouliez faire.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Louis-Hébert a demandé la parole.
M. Doyon: M. le Président, simplement pour m'informer si
le ministre a trouvé la réponse à ma question.
M. Fréchette: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: Je ne sais pas si le député de
Louis-Hébert souhaite que je lui fasse lecture...
M. Doyon: Non.
M. Fréchette: ... des dispositions de la convention
collective. Cela lui donnerait très certainement la possibilité
de voir pourquoi il y a ce deuxième paragraphe à l'article 3 du
projet de loi, à moins qu'il me dise qu'il serait satisfait que je ne
fasse que le reporter aux clauses...
M. Doyon: Je vous crois sur parole, M. le ministre, si vous avez
trouvé un article qui se rapporte à une situation de loi
spéciale... C'est cela que vous me dites?
M. Fréchette: Je vous ai trouvé un article qui
traite des heures de travail, des agendas, des horaires de travail des
employés surnuméraires. C'est ce que je vous ai
trouvé. C'est ce que vous m'avez demandé.
Une voix: Et qui impose l'obligation à ces gens-là
de s'informer.
M. Doyon: Ce n'était pas cela, mais je n'insiste pas, M.
le Président. Je laisse aller.
Une voix: II n'est même pas sûr de ce qu'il a
demandé.
M. Fréchette: Mais je peux vous donner les articles, si
cela vous intéresse.
M. Doyon: Je laisse aller, M. le Président.
M. Fréchette: Les articles 34.05, 34.06 et 34.07; vous
avez la réponse à toutes vos questions.
M. Ooyon: Dont la suivante, si je comprends bien, M. le
Président. Je vais prendre la parole du ministre là-dessus. S'il
me dit oui, j'ai la réponse à la question suivante: Que se
passe-t-il dans le cas où un employé ne s'informe pas de son
horaire de travail...
Une voix: II n'aura pas de job le lendemain.
M. Doyon: ... qui lui est imposé par l'article 4 du projet
de loi no 84? S'il me dit qu'un article répond à cette question
spécifique, je considère sa réponse satisfaisante.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, encore là,
nous allons retrouver dans la convention collective la réponse à
la question du député de Louis-Hébert. Dès lors que
nous aurons mis le doigt dessus, je lui donnerai l'information. Mais il y a
quelque chose dans la convention collective de travail, comme dans n'importe
quelle convention collective de travail, qui prévoit des
mécanismes face à telle ou telle situation. On va vous le dire
dans quelques minutes.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je voudrais simplement signifier, M. le
Président, que j'étais disposé, afin qu'on puisse passer
aux amendements qu'on a déjà annoncés, à adopter
l'article 5 sur division.
Le Président (M. Rancourt): Est-ce que l'article 5 est
adopté?
Une voix: Sur division.
M. Fréchette: M. le Président, je voudrais
m'assurer que l'article 4 est également adopté. Est-ce que
l'article 4 est adopté?
M. Paradis: L'article 4 est suspendu.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre, les articles 3
et 4 sont suspendus.
M. Fréchette: L'article 5 est alors adopté.
M. Paradis: Sur division. M. Fréchette: Sur
division.
Le Président (M. Rancourt): L'article 5 est adopté
sur division.
Une voix: Ce n'est pas fort.
Dispositions ayant effet indépendamment de la
Loi constitutionnelle de 1982
Le Président (M. Rancourt): L'article 6? Une voix:
Adopté.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, l'article 6 se lit comme
suit: "La présente loi a effet indépendamment des dispositions
des articles 2 et 7 à 15 de la Loi constitutionnelle de 1982." On voit
qu'on réfère à la charte des droits et libertés
individuels. Quels sont les effets que le ministre visait à
éviter de cette charte qui garantit des droits aux travailleurs?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je serais un peu
embêté pour préciser vers quelle époque
l'Assemblée nationale a procédé à l'adoption d'une
loi. C'est au printemps dernier, me semble-t-il, ou quelque part au mois de
juin.
M. Paradis: M. le Président, ce n'est pas la question.
Quels sont les articles? Vous écrivez les "articles 2 et 7 à 15".
Quels sont les droits que vous voulez brimer?
Une voix: Pas brimer, mais protéger contre.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît; M. le
ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je répondrai
simplement au député de Brome-Missisquoi que trop fort ne casse
pas, voyez-
vous.
M. Paradis: Om va vous passer sur le corps.
M. Fréchette: Pardon?
M. Paradis: On va vous passer sur le corps.
M. Fréchette: Vous le ferez si vous voulez.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre, vous avez la
parole. M. le député de Brome-Missisquoi, vous avez une
question?
M. Paradis: Est-ce que le ministre délégué
au Travail peut nous dire quels droits des travailleurs il voulait soustraire
à la Charte canadienne des droits et libertés lorsqu'il a mis
l'article 6 dans cette loi, si c'est lui qui la parraine?
M. Chevrette: C'est pour cela que je voulais vous faire
répéter.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Fréchette: Vous êtes habile.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît; M. le
ministre.
M. Fréchette: M. le Président, cette loi à
laquelle je vous référais il y a un instant qui a
été adoptée par l'Assemblée nationale au cours du
printemps ou de l'été dernier, au début de
l'été, nous oblige maintenant à inscrire dans chacune de
nos lois cet article que vous retrouvez à 6 de l'actuel projet.
M. Paradis: Vous voulez dire...
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: ... M. le ministre délégué au
Travail, que vous avez une obligation d'inscrire cela dans ce projet de loi
sans savoir pourquoi?
M. Fréchette: On se conforme, M. le Président,
à une obligation qui nous est imposée par une loi qui a
été adoptée ici au printemps ou au début de
l'été dernier.
M. Paradis: Quels sont les droits maintenant,
spécifiquement dans ce projet de loi? Si on se souvient, il y a une loi
d'application générale à laquelle vous
référez. On ne savait pas trop pourquoi à l'époque.
On nous a dit: Lorsque chacun des projets de loi arrivera, on vous expliquera
pourquoi et on n'aura peut-être pas besoin de mettre cela. Vous, vous
avez choisi, vous étiez obligé de le faire, mais quels droits
visez-vous lorsque vous mettez cela dans ce projet de loi? Est-ce qu'il y a des
droits qui sont visés ou est-ce un article inutile?
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: ... on se rappellera que, lors de la dernière
session, de la deuxième partie de la session qu'on a eue le printemps
dernier, il y a un projet de loi qui a été soumis à
l'attention de l'Assemblée nationale, projet de loi qui a
été adopté à l'Assemblée nationale du
Québec, projet de loi qui, maintenant, fait en sorte que, dans chacun
des projets de loi que nous adoptons à l'Assemblée nationale,
nous introduisons cette disposition. La question...
M. Paradis: Question de règlement.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Bertrand: ... est très simple, M. le
Président.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Question de règlement, M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: J'ai adressé une question au ministre
délégué au Travail. Il apparaît clairement par la
réponse qu'il m'a donnée qu'il ne sait pas pourquoi il l'a mis
dedans. Je retire donc la question. On vote contre. Adopté sur
division.
Le Président (M. Rancourt): Est-ce que l'article...
M. Fréchette: J'avais un renseignement, M. le
Président, à donner au député de
Louis-Hébert à propos d'un article de la convention collective.
Sa question, me semble-t-il, était la suivante: Qu'est-ce qui pourrait
arriver aux travailleurs surnuméraires qui ne s'informeraient pas et,
par voie de conséquence, ne se présenteraient pas au travail par
la suite?
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, le ministre
délégué au Travail est en train de me donner la
réponse. Je ne veux pas allonger le discours là-dessus, sauf
qu'il ajoute un bout de phrase que je n'ai pas dit. Il dit: Le
député de Louis-Hébert m'a demandé: Qu'est-ce qui
se passe si un travailleur ne s'informe pas et, par voie de conséquence
ne se
présente pas?
M. Fréchette: 34.16, M. le Président.
M. Doyon: 34.16, c'est la réponse à la
question?
M. Fréchette: Voilà.
M. Doyon: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Rancourt): L'article 6 est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Rancourt): L'article 6 est adopté
sur division. L'article 7 est-il adopté? Adopté. Donc, nous
revenons à l'article 3 qui a été suspendu. (2 h 20)
M. Paradis: C'est suspendu, nous allons à l'annexe et on y
revient après.
M. Bertrand: Non, non, on est...
M. Fréchette: Articles 3 et 4. Non, je pense...
M. Bertrand: On nous avait posé des questions. On a eu les
réponses. Articles 3 et 4.
M. Paradis: C'est quoi, les réponses aux questions?
Retour au travail (suite)
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre, article 3.
M. Fréchette: Les réponses... On a donné les
réponses, M. le Président, aux questions qui ont
été posées.
M. Bertrand: Adopté? M. Fréchette:
Adopté. Une voix: Adopté.
Le Président (M. Rancourt): L'article 4 est-il
adopté?
M. Pagé: Adopté.
Annexe
Le Président (M. Rancourt): L'article 4 est adopté.
Annexe. À ce que j'entends, il y a une proposition d'amendement à
l'annexe présentée par le député de Portneuf, le
whip de l'Opposition.
M. Pagé: C'est bien cela, M. le Président. Je vous
avais donné préavis, dès l'amorce de l'étude de
l'article 1 du projet de loi, de notre intention de présenter
l'amendement suivant. Je le relis. Je vais commenter brièvement pour
laisser le temps à mes collègues d'intervenir. Que la
sous-section intitulée Taux de la section I de l'annexe du projet de loi
no 84 soit modifiée en remplaçant dans la troisième ligne
le chiffre 10,59 $ par le chiffre 10,69 $; et en remplaçant dans la
quatrième ligne le chiffre 11,23 $ par le chiffre 11,33 $. Les
troisième et quatrième lignes amendées se liraient comme
suit: Le 26 décembre 1981, 10,69 $, le 26 décembre 1982, 11,33
$.
Que la sous-section intitulée Indexation de la section I
intitulée Salaires de l'annexe du projet de loi no 84 soit
modifiée en remplaçant les deux derniers alinéas de la
sous-section par le suivant: "II n'y a pas de formule d'indexation des salaires
la deuxième année." La sous-section amendée se lirait
comme suit: Indexation, Ire année: II n'y a pas de formule d'indexation
des salaires la première année. 2e année: II n'y a pas de
formule d'indexation des salaires la deuxième année.
M. le Président, tel que j'avais eu l'occasion de
l'évoquer, les motifs pour lesquels nous présentons cet
amendement, quoi qu'en ait dit le leader du gouvernement, sont les suivants. Il
nous apparaît, quant à nous...
Le Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais simplement vous
demander, comme président, une directive pour la bonne gouverne de nos
travaux et pour être sûrs que nous sommes respectueux du
règlement, autant du code Lavoie, c'est-à-dire celui qui a
été adopté il y a quelques années, que du
règlement au nom de M. Geoffrion. Je voudrais connaître, M. le
Président, votre interprétation de l'article 64 du
règlement de l'Assemblée nationale qui dit: "Une motion ne peut
être présentée que par un représentant du
gouvernement, après recommandation du lieutenant-gouverneur en conseil,
lorsqu'elle a pour objet direct l'exécution de travaux publics,
l'allocation de subventions - et c'est sur le point 3 que j'attire votre
attention - l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou
sur les contribuables." Je vous réfère aussi à l'article
155 du règlement que nous avions avant le code Lavoie. L'article 155 dit
aussi: "Nulle motion ayant pour objet direct ou devant entraîner
directement l'allocation ou l'affectation de deniers publics, l'imposition ou
l'augmentation de quelque charge sur le peuple - et j'attire votre attention,
M. le Président, sur l'expression "l'imposition ou l'augmentation de
quelque charge sur le peuple"... Dans
l'article 64, tel que libellé, on mentionne "l'imposition d'une
charge additionnelle sur les contribuables." Or, M. le Président, je
vous fais valoir que toute motion d'amendement qui aurait pour effet de
modifier - c'est là-dessus que je vous demande une directive - par
exemple, 10,59 $ ou 11,23 $, toute motion qui aurait pour effet de modifier
cela à la hausse impose une charge additionnelle aux contribuables
puisque, en effet, il y a trois possibilités qui existent: Ou bien c'est
le gouvernement du Québec qui doit, par ses subventions...
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président
M. Bertrand: M. le Président, je n'ai pas terminé.
Qui doit, par ses subventions...
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Rancourt): Question de règlement,
M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: Très brièvement, M. le
Président. Je comprends que le temps fuit. Il nous reste seulement
quinze minutes. Le député qui préside actuellement la
commission plénière est vice-président de
l'Assemblée nationale. Grâce à l'expérience qui vous
caractérise, je suis persuadé que vous êtes en mesure de
rendre votre décision immédiatement.
Une voix: On ne plaidera même pas.
M. Pagé: On ne plaide pas. J'en suis persuadé. Je
connais votre haut savoir, comparativement à l'expérience du
leader.
Une voix: On va gager. On gage. M. Pagé: J'attends
votre décision.
M. Bertrand: C'est une demande de directive que je vous fais, M.
le Président, faisant valoir que l'imposition d'une charge additionnelle
sur les contribuables...
M. Lalonde: Merci, ça va bien...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Pagé: M. le Président, êtes-vous
prêt à rendre votre décision?
M. Bertrand: ... c'est refusé par l'article 64, ce n'est
pas présenté par un représentant du gouvernement.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le
whip du gouvernement.
M. Pagé: Le leader.
Le Président (M. Rancourt): C'est exact, le leader du
gouvernement. Cette motion d'amendement est recevable...
M. Pagé: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): ... parce qu'elle n'a pas pour
objet un objet direct.
M. Lalonde: C'est ça.
M. Pagé: Merci, M. le Président, et j'espère
que le leader du gouvernement pourra le noter dans sa jurisprudence pour
l'avenir.
M. le Président, les motifs pour lesquels on présente cet
amendement, c'est qu'il nous est apparu qu'à un moment précis de
la négociation entre la commission de transport, la Communauté
urbaine de Québec et le syndicat représentant les chauffeurs
d'autobus de la Communauté urbaine de Québec, en présence
ou en contact avec les médiateurs spéciaux, la partie syndicale a
accepté de ramener ses demandes de 15% à 11% pour 1982, 6% pour
1983. Les informations au dossier nous indiquent confirmées d'ailleurs
par M. Bouchard, président de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec - que comme représentant de
la partie patronale, il s'est engagé envers les médiateurs
à faire accepter par le groupe de maires de la communauté
urbaine, les 11% et les 6%.
Dans mon intervention, ce soir, je me suis déclaré surpris
de constater que le rapport des médiateurs ne prévoyait pas des
dispositions de 11% et 6%, mais plutôt de 10% et 6%. Je demande
aujourd'hui, compte tenu de l'obligation qu'ont le gouvernement et le ministre
délégué au Travail de respecter le principe voulant que
lorsqu'une entente, un engagement entre deux parties est formulé, vous
devez obligatoirement le respecter. C'était l'expression de la
volonté des parties, les 11%, 6% - M. le Président, je termine
là-dessus - vous devez la respecter.
J'ai cru comprendre que, pendant les deux heures trente pendant
lesquelles vous avez délibéré et suspendu nos travaux,
vous êtes passé proche. Je suis persuadé - comme le disait
le leader du gouvernement ce soir, à la suite de l'intervention du
député de Sainte-Anne - que le député de
Taschereau, que le député de Limoilou, que les
députés de la région de Québec vont voter
librement, dans leur âme et conscience, sur cette question.
M. Lalonde: C'est beaucoup demander.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Pagé: Et je demande le vote.
Le Président (M. Rancourt): Je crois que, selon la motion
d'urgence, il y avait une demande et qu'il était exigé que dix
minutes avant l'expiration du délai, on doive mettre aux voix
immédiatement, sans débat, les articles.
J'aimerais savoir si le ministre, tel qu'annoncé, a un
amendement?
M. Fréchette: Oui, M. le Président, c'est
également à l'annexe 5. Un amendement qui a été
annoncé en deuxième lecture.
L'amendement serait le suivant: L'annexe est modifiée par
l'insertion, avant le dernier alinéa de la page 5, de l'alinéa
suivant: "Dans le cas d'un employé qui n'a pas été
à l'emploi de la commission au cours de toute cette période, le
montant forfaitaire accordé par la commission est établi au
prorata de la période d'emploi." Cet après-midi, j'avais
annoncé que c'était le mot "toute" qui disparaissait purement et
simplement comme amendement possible. Mais on rejoint exactement le même
effet en ajoutant le texte dont je viens de parler, c'est-à-dire que les
avantages prévus par cette partie de l'annexe vont aussi être
accordés au travailleur qui n'aura pas complété toute la
période de référence, c'est-à-dire une
année. S'il a fait six mois, s'il a fait huit mois, il aura droit au
montant au prorata du temps pendant lequel il aura travaillé. (2 h
30)
Je ne sais pas si mes collègues de l'Opposition me permettraient
de procéder à un amendement strictement, me semble-t-il, de
typographie. C'est "26 décembre 1982", au lieu de "25". Je ne sais pas
si à cet égard...
M. Pagé: II n'y a pas de problème, c'est votre
cadeau de Noël.
M. Fréchette: Pardon?
M. Pagé: II n'y a pas de problème, c'est votre
cadeau de Noël.
M. Fréchette: Bon.
Le Président (M. Rancourt): Donc, vote.
M. Fréchette: À la deuxième ligne, vous avez
"26 décembre 1981", "25 décembre 1982" devient "26
décembre 1982".
Le Président (M. Rancourt): Cet amendement est-il
adopté? Adopté.
M. Bisaillon: M. le Président, je n'ai pas eu
l'amendement. Comment peut-on voter sur des choses qu'on n'a pas vues?
Le Président (M. Rancourt): Donc, nous prenons le vote sur
l'amendement? L'annexe est modifiée par l'insertion avant le dernier
alinéa de la page 5 de l'alinéa suivant: "Dans le cas d'un
employé qui n'a pas été à l'emploi de la commission
au cours de toute cette période, le montant forfaitaire accordé
par la commission est établi au prorata de la période d'emploi."
Il n'y a pas de discussion. Est-ce que le vote...
M. Rivest: II y a eu un amendement antérieur qui a
été proposé par le député de Portneuf. Qu'en
est-il arrivé? Il faut le voter.
Le Président (M. Rancourt): Nous débutons
par...
M. Rivest: Très bien, par courtoisie pour le ministre.
Le Président (M. Rancourt): ... le vote sur l'amendement
du ministre tel qu'annoncé.
M. Rivest: Oui, par courtoisie pour le ministre, nous sommes
d'accord.
Le Président (M. Rancourt): L'annexe telle
qu'amendée est-elle adoptée? S'il vous plaît! L'annexe
telle que modifiée est-elle adoptée?
M. Bisaillon: À l'annexe telle que modifiée, il y a
eu d'autres propositions d'amendements. Après?
Le Président (M. Rancourt): Oui. M. Bisaillon: Cela
va.
Le Président (M. Rancourt): Adopté. Donc, je fais
la lecture de l'amendement du député de Portneuf: "Que la
sous-section intitulée "Taux" de la section I de l'annexe du projet de
loi no 84 soit modifiée en remplaçant dans la troisième
ligne le chiffre 10,59 $ par le chiffre 10,69 $ et en remplaçant
à la quatrième ligne le chiffre 11,23 $ par le chiffre 11,33 $.
Les troisième et quatrième lignes amendées se liraient
comme suit: Le 26 décembre 1981, 10,69 $, le 26 décembre 1982,
11,33 $." Cet amendement est-il adopté?
M. Fréchette: Rejeté sur division.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce qu'on a le droit de
poser une question?
Le Président (M. Rancourt): C'est sans débat
à cette période-ci.
M. Fréchette: Adopté sur division. M. Bertrand:
Sans débat.
M. Chevrette: Est-ce à dire que... M. Fréchette:
Rejeté sur division.
Le Président (M. Rancourt): Rejeté sur
division.
M. Lalonde: Vote à main levée, M. le
Président.
Le Président (M. Rancourt): Vote à main
levée.
M. Bertrand: Cela prend combien de personnes.
M. Lalonde: Vote à main levée, s'il vous
plaît, M. le Président.
M. Chevrette: II n'y a pas...
M. Lalonde: On a le droit de le demander.
Le Président (M. Rancourt): Que ceux qui sont pour cet
amendement veuillent bien lever la main.
Une voix: II n'y en a pas d'autres là-bas?
Le Président (M. Rancourt): Que ceux qui sont contre
veuillent bien lever la main? Motion rejetée.
À l'ordre, s'il vous plaît! Le député de
Sainte-Marie a présenté l'amendement suivant: Ajouter
après le deuxième sous-titre de l'annexe un troisième
sous-titre: "3. Protocole de retour au travail. L'Assemblée nationale
confie au ministre du Travail le mandat de régler un protocole de retour
au travail, en tenant compte de la justice, l'équité et la
tradition de la CTCUQ." Cet amendement est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Rancourt): Adopté?
M. Bertrand: Rejeté
Le Président (M. Rancourt): Rejeté.
Une voix: Lequel ça?
Le Président (M. Rancourt): Celui du député
de Sainte-Marie.
M. Bertrand: Voulez-vous le relire. On ne l'a pas
reçu.
Le Président (M. Rancourt): Je vais relire l'amendement du
député de Sainte-Marie.
Ajouter après le deuxième sous-titre de l'annexe, un
troisième sous-titre: "3.
Protocole de retour au travail. L'Assemblée nationale confie au
ministre du Travail le mandat de régler un protocole de retour au
travail en tenant compte de la justice, l'équité et la tradition
de la CTCUQ." Cet amendement est-il adopté?
M. Fréchette: Rejeté.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Bertrand: Rejeté.
M. Rivest: Vote à main levée.
Le Président (M. Rancourt): Vote à main
levée.
Quels sont ceux qui sont pour l'amendement? Quels sont ceux qui sont
contre?
Rejeté.
À l'ordre, s'il vous plaît!
II y a un autre amendement du député de Sainte-Marie qui
dit de biffer le paragraphe indexation et qui commence après "1re
année". Il n'y a pas de formule d'indexation des salaires la
première année.
Cet amendement est-il adopté?
M. Bisaillon: M. le Président, c'est biffer les mots "1re
année: II n'y a pas de formule d'indexation des salaires la
première année." Parce que c'est inutile, il n'y en aura pas.
Le Président (M. Rancourt): L'amendement est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
M. Fréchette: Rejeté.
Le Président (M. Rancourt): Même vote? Vote à
main levée.
M. Bertrand: M. le Président, on ne les a pas les
amendements du député de Sainte-Marie.
Le Président (M. Rancourt): Quels sont ceux qui sont pour
l'amendement?
M. Bertrand: On n'a pas les documents. Est-ce que le
secrétariat du député de Sainte-Marie pourrait nous
envoyer des amendements photocopiés?
M. Bisaillon: M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, j'ai formulé,
à la demande du gouvernement, mes motions d'amendement et je les ai
acheminées, celles que je devais faire par écrit, en
avant. Il me semble que depuis le temps qu'on discute, je pensais que tout le
monde les aurait eues.
De toute façon, je veux juste dire que de la façon dont on
fait cela, on a une phrase inutile, pourquoi ne la coupe-t-on pas?
M. Fréchette: Voulez-vous simplement, M. le
Président, répéter, pour la bonne compréhension,
l'amendement suggéré par le député de
Sainte-Marie.
Le Président (M. Rancourt): Je vais relire. Sous le titre
"indexation", biffer "Ire année: II n'y a pas de formule d'indexation
des salaires durant la première année."
Quels sont ceux qui sont pour cet amendement?
M. Rivest: Vote à main levée.
Le Président (M. Rancourt): Vote à main
levée.
Quels sont ceux qui sont contre cet amendement?
Amendement rejeté.
À l'ordre, s'il vous plaît!
Il y avait aussi du député de Sainte-Marie un amendement
concernant la rétroactivité, mais nous n'avons pas reçu le
texte.
M. Bisaillon: C'est-à-dire, M. le Président,
j'avais...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Bisaillon: On ne dirait pas qu'on vote une loi
spéciale.
J'avais juste annoncé que je ne comprenais pas la portée
de ce que voulait dire la durée ininterrompue. Selon mon
interprétation, cela pouvait comprendre une période de maladie,
cela pourrait être inclus là-dedans. Je voulais juste savoir
quelle était la portée pour voir s'il y avait utilité
d'apporter un amendement si c'était trop large. Quelle est la
portée de cette formulation, en tenant compte de la durée
ininterrompue du service? S'il y a eu une maladie, par exemple, il y a eu
interruption. Est-ce qu'on coupera la rétroactivité pendant cette
période-là? C'est ça que je veux savoir. (2 h 40)
Le Président (M. Rancourt): S'il y a consentement unanime,
le ministre peut répondre; sinon, nous allons passer directement.
M. Fréchette: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): Est-ce qu'il y a consentement
unanime?
M. le ministre.
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Fréchette: Quand on réfère à la
durée ininterrompue du service, il est bien clair que l'on veut
strictement dire que, si le salarié était absent, par exemple,
pour des congés prévus à l'intérieur de la
convention, que ce soit maladie, vacances ou libération syndicale, enfin
les situations prévues par les conventions collectives, le service n'est
pas interrompu. D'ailleurs, le député de Sainte-Marie, avec
l'expérience qu'il a de l'arbitrage, sait très bien à quoi
on réfère quand on parle de service pour l'employeur. Il est
clair que l'interruption du service, généralement parlant, ne
pourrait référer, me semble-t-il, qu'à l'interruption du
contrat de services entre les deux parties.
M. Bisaillon: Est-ce que ce ne serait pas plus clair, à ce
moment-là, si on disait autres que? Si ce que vous venez de m'expliquer
était contenu dans le texte, est-ce que ce ne serait pas plus clair?
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Sainte-Marie, sans débat.
M. Fréchette: Autres que quoi?
M. Bisaillon: Autres que les interruptions prévues
à la convention collective.
M. Fréchette: Je comprends que c'est une argumentation
juridique qui pourrait durer longuement, mais j'ai l'impression que ce à
quoi réfère le député de Sainte-Marie est couvert
par le texte tel qu'on le trouve actuellement.
Des voix: Vous êtes sûr?
M. Fréchette: Oui, je suis sûr.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
Est-ce que l'annexe telle qu'amendée est adoptée?
M. Bisaillon: Sur division.
Le Président (M. Rancourt): Adopté sur
division.
Est-ce que le projet de loi tel qu'amendé est adopté?
M. Bisaillon: Sur division.
M. Rancourt (président de la commission
plénière): Sur division.
M. le Président, il me fait plaisir de vous faire rapport que la
commission plénière a adopté le projet de loi no 84 avec
des amendements.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que le
rapport de cette commission plénière est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Troisième lecture
Troisième lecture de ce projet de loi. M. le ministre
délégué au Travail.
Une voix: Pas beaucoup d'applaudissements.
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, si le
député de Portneuf a le goût de manifester, par des
applaudissements ou autrement, je vous signalerai que, quant à moi, ce
n'est pas tout à fait les sentiments que j'ai au moment où on se
parle, à cette heure-ci de la nuit.
Je l'ai dit, M. le Président, à l'occasion de mon
intervention en deuxième lecture, l'exercice auquel nous nous sommes
livrés depuis 14 heures, cet après-midi, n'est agréable
pour personne. Il n'est pas agréable pour les parties - je suis
conscient que je redis des choses sur lesquelles on a déjà
insisté - qui sont impliquées dans ce projet de loi. Il n'est pas
agréable non plus pour le gouvernement, mais pour tous les motifs qu'on
a plaidés depuis 14 heures, cet après-midi, il apparaissait
très clairement que c'était la seule avenue qu'il fallait
maintenant emprunter, sur laquelle il fallait s'engager.
Vous savez, M. le Président, les gens de l'Opposition ont beau
s'amuser, ont beau rire, à 2 h 45 dans la nuit. Ils ont beau essayer de
trouver toute espèce de faux-fuyants pour trouver cela drôle, mais
il reste que ce n'est pas de cette façon que nous voyons les choses.
Je reviens à un commentaire que je faisais en deuxième
lecture. Dans ce cas-ci, comme dans tous les autres cas auxquels j'ai
référé en deuxième lecture, ces gens-là ont
pris une attitude telle qu'à bien des égards et à bien des
moments on ne savait trop quelle orientation cela allait prendre. C'est
tellement vrai que, de temps en temps, on se disait: En voici un qui va se
prononcer pour la loi; en voici un autre qui va se prononcer contre. On ne
savait trop. Mais, à tous égards, dans chacun des cas,
indépendamment de l'argumentation qu'on invoquait, indépendamment
du fait qu'on alléguait qu'il s'agissait là d'une loi inique,
injuste, absurde, épouvantable, on finissait toujours par dire: On va
voter pour la loi.
M. le Président, je n'ai pas le goût d'aller plus loin que
les quelques commentaires que je viens de faire, sauf peut-être pour vous
dire, en terminant, que la population de Québec et de la région
pourra compter sur un transport en commun dans les heures qui viennent.
C'était essentiellement l'objectif qui était visé.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: M. le Président, il est 2 h 45 de la nuit. On
comprend que le ministre délégué au Travail, qui en est
à ses premières armes, n'ait pas envie d'en dire plus long. On a
surtout compris quelle utilisation le parti ministériel avait faite de
l'Assemblée nationale du Québec dans l'adoption d'une telle
loi.
M. le Président, pendant deux heures et demie - vous en avez
été témoin - ce qu'ils avaient à dire, ils ne l'ont
pas dit à la population de Québec. Ils ne l'ont pas dit aux
travailleurs de Québec. Ils ne l'ont pas dit aux élus municipaux.
Ils ne l'ont pas dit aux parlementaires. Ils se le sont cacassé entre
eux, entre minuit et 2 h 30. C'est à ce moment que le gouvernement a
commencé à chambranler. M. le Président, ce gouvernement a
besoin d'être psychanalisé. Se retrouve dans les rangs de ce
gouvernement, M. le Président, un psychiatre qui est présentement
ministre de l'Éducation et qui les a psychanalisés, en 1972, de
la façon suivante: "Plus un gouvernement présente des lois
d'exception, pour quelque motif que ce soit, plus il signe sa faiblesse -les
fous restaient forts - plus il signe son impéritie - on va vous
expliquer cela: manque d'aptitude, manque d'habileté, notamment dans
l'exercice de sa profession, ignorance, incapacité - plus il signe son
imprévoyance... (2 h 50)
Une voix: Qui est-ce qui disait cela?
M. Paradis: Dr Laurin qui parle... son incapacité à
saisir, à cerner les véritables problèmes d'une
collectivité et à lui appliquer en temps opportun les
remèdes qui pourraient non seulement guérir les problèmes
mais, encore mieux, les prévenir." La succession des ministres du
Travail, de 1976 à nos jours, qui, plutôt que de s'occuper des
relations du travail, se sont occupés de séparatisme au
Québec, fait en sorte qu'on a un Code du travail qui est
mésadapté. Ces lois spéciales sur lois spéciales
qu'on nous présente à l'Assemblée nationale du
Québec font que, sous le prétexte de faire semblant de tenter de
régler des conflits syndicaux, M. le Président, on procède
par voie de législation matraque, on procède avec des objectifs.
Si on n'a pas eu de commission parlementaire
et si on s'est vu confinés, comme membres de l'Opposition,
à des quasi-réponses, à des pseudo-réponses,
à des réponses évasives de la part de celui qui,
officiellement, a parrainé le projet de loi de la part du ministre du
Travail, on a pu se rendre compte, nous de l'Assemblée nationale, comme
représentants de la population, et vous avez pu vous rendre compte, ceux
qui ont eu la patience de suivre ces débats, que tout cela était
piloté, que tout cela était guidé par le président
du Conseil du trésor que le député de Portneuf, whip en
chef de l'Opposition, a comparé tantôt à Napoléon.
Mais il y a une différence bien nette entre le président du
Conseil du trésor et Napoléon: Napoléon avait une main
dans la poche, M. le Président, et le président du Conseil du
trésor a les deux mains dans nos poches. C'est ça la
différence.
M. le Président, on a voulu, avec cette loi, servir un
avertissement aux travailleurs des secteurs public et parapublic. On a voulu,
par cette loi, en réduisant la durée de la convention collective
à deux ans, l'amener, en même temps que celle de Montréal,
à faire de la négociation sectorielle. On a peut-être voulu
aussi dire aux gens du secteur privé: Cela s'en vient, votre tour dans
le sectoriel. On a mis en tutelle des administrations locales. On a
exercé la petite vengeance politique que le député de
Vanier avait sur le coeur contre le maire de Québec depuis son
problème du Colisée. Le député de Vanier a voulu
parler du syndrome du Colisée de Québec. M. le Président,
il y a pire. On avait vu dans la loi 70 que le gouvernement ne respecte pas une
signature, ne respecte pas sa signature. Ce dont on vient d'être
témoins, aujourd'hui; c'est que le gouvernement n'a pas plus de respect
pour une parole donnée que pour une signature ou vice versa. On
était dans le conflit que le gouvernement prétend régler
par une entente scellée par une poignée de main entre des
représentants syndicaux et une partie patronale, 11% et 6% sans
indexation. Pas plus le gouvernement ne respecte sa signature dans le cadre de
la loi 70 et dans le cadre des conventions de travail des secteurs public et
parapublic, pas plus il ne respecte la poignée de main que se sont
donnée un employeur et un représentant syndical dans le cadre
d'une négociation collective. Ce gouvernement a perdu toute notion de
l'honneur qu'on doit posséder lorsqu'on veut prétendre
gouverner.
M. le Président, lorsqu'on est arrivé à
l'étude article par article du projet de loi, on ne s'est pas seulement
rendu compte que le gouvernement avait perdu le sens de l'honneur, mais on
s'est également rendu compte que le gouvernement ne sait pas comment
travailler. On s'est rendu compte que ce gouvernement, qui était
supposé avoir fait tous ses devoirs, suivant les dires du
député de Vanier, le leader du gouvernement, qui était
supposé avoir tout analysé, tout vu, a été
obligé de prendre deux heures et demie pour rediscuter de certains
éléments. On s'est également aperçu, à la
lecture des articles du projet de loi, que celui-ci ne vise pas, comme on nous
l'avait dit, à rétablir et à assurer le service aux
citoyens de Québec, aux étudiants et aux personnes
âgées qui ont besoin du service de transport en commun. Cela ne
vise pas à leur garantir un service. Cela vise à mettre fin
à une grève et c'est le ministre du Travail qui, pour une fois, a
pris une position dans le dossier, lorsqu'on lui a demandé:
Qu'arrive-t-il si l'employeur, suivant les dispositions de l'article 4, ne
dispense pas les services habituels à partir de 0 h 01 dimanche matin?
Et le ministre de nous répondre tout bonnement: Le citoyen de
Québec, celui qui en est privé, n'aura qu'à prendre une
injonction ou un recours collectif. On nous a rappelés de nos
comtés, on a dépensé plusieurs dizaines de milliers de
dollars aujourd'hui ici. Pourquoi? Pas pour garantir le service. Pour sauver la
face du député de Vanier qui avait dit que ce conflit durerait
quelques heures, tout au plus. Les citoyens de Québec, si la Commission
de transport de la Communauté urbaine de Québec décide de
ne pas assurer de service à partir de 0 h 01 dimanche matin, se
dirigeront tout bonnement vers le palais de justice de Québec et
tenteront d'obtenir une injonction. C'est la réponse qu'on a eue. M. le
député de Jean-Talon, qui est conscient des inconvénients
que cela cause aux gens qu'il représente à l'Assemblée
nationale me souffle à l'oreille et me dit: C'est à pied qu'ils
devront se rendre au palais de justice pour quémander une injonction,
alors que le gouvernement nous avait dit qu'il n'y aurait pas d'interruption du
service.
M. le Président, dès le début du conflit, le
premier ministre du Québec a averti les représentants de la
Communauté urbaine de Québec que s'ils étaient en train de
négocier, ils devaient contacter le gouvernement. Cela veut dire quoi,
en pratique? De contacter le président du Conseil du trésor pour
qu'il leur dise à quel taux négocier et à quelles
conditions. Le premier ministre a demandé à son chef de cabinet,
à son alter ego, Jean-Roch Boivin, d'agir comme médiateur. Vous
savez ce que cela faisait, en pratique? Cela plaçait la partie
patronale, la commission de transport, dans une situation où elle
pouvait, dès le début, fermer les livres, oublier de
négocier, où elle pouvait même dire: Le gouvernement s'est
tellement ingéré dans ce dossier, nous a tellement promis par la
voie de son caucus des députés de la région de
Québec, nous a tellement promis, par la voix de ses ministres, qu'il
s'en occuperait, qu'une des parties importantes, le maire de Québec, a
dit: Ils m'ont évincé du dossier, je m'en vais
à Paris, j'ai d'autres affaires à voir.
Mais oui, si on n'a pas de situation négociée aujourd'hui,
vous rendez-vous compte que c'est parce que vous autres, les
députés péquistes d'en face qui votez machinalement, comme
des robots, vous avez enlevé aux travailleurs le droit de
négocier, que vous avez enlevé à la partie patronale ce
droit-là aussi? Vous rendez-vous compte de ça? Vous rendez-vous
compte que n'eût été de l'intervention du
député de Vanier, si on se fie aux pseudo-négociations qui
ont eu lieu, si ces négociations avaient eu lieu dans un autre contexte,
les autobus rouleraient présentement à Québec? Que vous
autres, vous pourriez être dans vos comtés à vous faire
raconter combien la taxe sur l'essence fait mal, combien la taxe sur
l'électricité fait mal, combien il y a de chômage chez les
jeunes au Québec, combien il y a de sans emploi, d'assistés
sociaux? Je comprends que vous aimez mieux venir vous installer à
Québec, même en pleine nuit. Parce que vos électeurs vous
le disent: On en a soupé de votre gouvernement, on en a assez.
M. le Président, le rapport des médiateurs est basé
sur l'opinion du chef de cabinet du premier ministre du Québec,
Jean-Roch Boivin. Ce rapport ne fait aucunement mention des interventions
publiques - devant les caméras le plus souvent possible - du
député de Vanier. De deux choses l'une, ou bien le chef de
cabinet du premier ministre considère que le député de
Vanier n'est pas important, qu'il n'a pas besoin de son opinion ou que, s'il a
reçu son opinion, il préfère l'ignorer, ou bien le
député de Vanier a demandé au chef de cabinet de ne pas
parler de ses interventions, qu'il préférait les raconter
lui-même pour se garder l'exclusivité.
M. le Président, il y a des victimes dans ce conflit. On a
procédé à l'adoption ou à l'étude d'une loi
spéciale, d'une loi matraque qui va faire en sorte que dans les jours et
les semaines qui vont venir, la partie patronale ne sera pas satisfaite, la
partie syndicale ne sera pas satisfaite et la population, les usagers du
transport en commun de la ville de Québec vont subir ces
insatisfactions.
M. le Président, est-ce que c'est ça maintenir un service
essentiel? Est-ce que c'est ça assurer la garantie d'un service
essentiel?
M. le Président, à trois heures du matin, samedi matin, si
on veut laisser le temps aux employés de se présenter au travail,
d'effectuer un bon travail, un travail courtois, un travail de service envers
la population, si on peut compter sur leur collaboration, si on peut demander
aux représentants de la CTCUQ d'oublier qu'on leur a enlevé
à eux, les élus locaux, plus proches du peuple que le
député de Vanier, ce droit à la libre négociation,
si on peut se permettre de demander aux employés de reprendre un service
essentiel et de mettre de côté cette amertume pour l'instant, on
peut espérer une bonne reprise des services. Mais cette amertume, on va
leur demander de sommeiller dessus et de la conserver jusqu'au moment où
il y aura des prochaines élections générales au
Québec et de la déverser sur le député de Vanier,
sur les autres membres du caucus péquiste de la région de
Québec, sur le ministre du Travail, sur le président du Conseil
du trésor et sur l'ensemble de la députation péquiste qui,
après avoir fait vivre au Québec une faillite économique,
une faillite de chômage, nous fait vivre une faillite dans le domaine des
relations du travail. Merci beaucoup, M. le Président. (3 heures)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: M. le Président, je sors de ce débat
de près de douze heures convaincu que des gens ont été
trahis, que des travailleurs sincères ont été trahis,
convaincu aussi qu'on a frappé trop fort et sûrement au mauvais
endroit.
Tout ce débat s'est tenu sous le règne de la
rigidité, d'une rigidité qu'on avait dénoncée de la
part de l'employeur dès le départ. Mais, de la part du
gouvernement, on doit reconnaître à la fin de ce débat que,
tout au long, la rigidité a été présente.
Rigidité au moment où on nous refuse de diviser le vote.
Rigidité au moment où on nous refuse la possibilité,
pendant le temps où on devait discuter de la motion d'urgence, alors que
nous étions prêts à ne pas faire ce débat de
procédure, de rencontrer les personnes concernées pour que les
parlementaires soient informés. Rigidité aussi dans l'accueil
fait aux quelques amendements présentés par des membres de
l'Assemblée nationale. Rigidité du début jusqu'à la
fin.
Je ne parlerai pas de l'improvisation qui a été manifeste
non seulement dans la rédaction du projet de loi, mais dans les
objectifs qu'on poursuivait. 11% et 6%, parce que cela correspondait à
une offre qui avait déjà été faite par l'employeur.
11% et 6%, parce que cela correspondait à une entente prise avec le
syndicat. 11% et 6%, parce que cela correspondait à la parole
donnée. 11% et 6%, parce que c'était moins élevé
que les 9% et 8% déjà conclus dans une convention collective et
acceptés par le Conseil du trésor. 11% et 6% voilà ce
qu'on aurait dû retrouver dans la loi, ce qui n'est pas le cas.
Je veux juste qu'on soit tous conscients que, ce soir, on n'a pas
seulement voté une loi de reprise du transport en commun pour la
Communauté urbaine de Québec; on a peut-être sonné
le glas d'un certain nombre
d'activités importantes qui s'en viennent. Espérons que le
président de la CSN, qui a été jusqu'à la fin dans
les galeries, mais qui est sorti en se tenant la tête à deux
mains, soit présent lorsqu'on va l'appeler à la concertation.
Souhaitons que les travailleurs des secteurs public et parapublic, qui ont
suivi nos débats, ne tiennent pas compte de ces douze heures de
discussions. Souhaitons que, quand on enverra des porte-parole à
l'avenir, ils aient autant de crédibilité qu'ils en ont eu dans
le passé. Souhaitons que, par les gestes qu'on a posés
aujourd'hui, on n'ait pas détruit à jamais la
crédibilité essentielle à la conduite de
négociations sérieuses. Surtout, quand les autobus vont rouler
à Québec et qu'on aura l'impression non seulement d'avoir fait
rouler les autobus, mais d'avoir réglé une convention collective,
souhaitons que les travailleurs concernés ne nous reprochent jamais de
n'avoir pas réglé toute la convention collective. (3 h 10)
Souhaitons, M. le Président, que le protocole de retour au
travail, qu'on ne voulait pas régler dans le détail mais sur
lequel on voulait mettre des mécanismes pour assurer au moins ce minimum
essentiel, n'entraîne pas des conséquences graves ni des gestes
démesurés. Souhaitons que les gestes qu'on a posés ce soir
soient sans conséquence, mais j'en doute fort, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la
troisième lecture du projet de loi no 84, Loi assurant la reprise du
service de transport en commun sur le territoire de la Communauté
urbaine de Québec, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: ... selon l'article 111 du règlement, je
voudrais enregistrer ma dissidence et je demanderai qu'elle soit inscrite au
procès-verbal.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté sur
division.
Je tiens à faire remarquer, avant que l'on ne termine nos
travaux, qu'il y aura sanction au bureau 103-A et que chacun des membres de
cette Assemblée représentant l'Opposition et le gouvernement est
averti d'être présent à cette sanction.
M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: J'aimerais que le leader du gouvernement nous indique
quel sera le menu de nos travaux lors de la reprise, mardi prochain.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, probablement le choix entre
quatre projets de loi. L'un relatif aux producteurs agricoles; un autre relatif
à la curatelle; un autre relatif aux valeurs mobilières et un
autre, au port méthanier et aussi la motion inscrite au nom du premier
ministre qui est en appendice au feuilleton.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Je sais que tout cela est au feuilleton, mais est-ce
que le leader du gouvernement pourrait nous dire quoi, de la motion encensoir
ou des lois, sera appelé? Il faudrait quand même se
préparer.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: On parlera d'économie, mardi à 15
heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement, sur une motion d'ajournement.
M. Bertrand: Oui, M. le Président, à mardi 14
heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Les travaux
de l'Assemblée sont ajournés à mardi 14 heures.
(Fin de la séance à 3 h 13)