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(Dix heures treize minutes)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Moment de réflexion.
Veuillez prendre place.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
M. le ministre des Affaires culturelles.
Rapport annuel du Conseil consultatif de la lecture et
du livre
M. Richard: M. le Président, je voudrais déposer le
rapport d'activités pour l'exercice financier 1981-1982 du Conseil
consultatif de la lecture et du livre.
Rapport annuel de la Régie du Grand
Théâtre
Avec votre permission, je voudrais également déposer le
rapport annuel pour l'exercice 1980-1981 de la Régie du Grand
Théâtre de Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Rapport annuel de l'Office
de la sécurité du revenu des chasseurs
et piégeurs cris
M. Marois: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport 1980-1981 de l'Office de la sécurité du
revenu des chasseurs et piégeurs cris.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Maisonneuve.
Pétition réclamant la
révision
de la politique de subventions
à l'égard des parents en
chômage
pour la garde scolaire
Mme Harel: M. le Président, c'est une pétition que
j'ai à déposer au nom de tous les parents de la Halte scolaire de
l'école Maisonneuve dans le comté. Elle se lit comme ceci:
Considérant qu'un grand nombre d'enfants ont dû être
retirés de la Halte scolaire de l'école Maisonneuve, parce que
leurs parents, devenus chômeurs ou assistés sociaux, ont
été exclus de la subvention de l'Office de garde;
considérant que ces enfants sont fortement pénalisés
à cause de la situation de chômage de leurs parents qui doivent
eux-mêmes et de façon permanente, être à la recherche
et prouvés être à la recherche d'un emploi pour retirer de
l'assurance-chômage; considérant que l'Office de garde pratique
une politique de deux poids deux mesures, accordant pour les garderies une
subvention aux parents en chômage ou assistés sociaux et la
refusant aux parents dans la même situation qui ont des enfants en garde
scolaire; considérant de plus que la maigre subvention des parents qui
ont des enfants en garde scolaire est abusivement coupée de
moitié sous prétexte que les enfants sont à mi-temps en
classe quand, en réalité, leur présence est de plus de six
heures à la garde scolaire; considérant que la survie de notre
garderie est directement compromise par ces politiques, en conclusion, nous
demandons au ministère de l'Éducation et à l'Office de
garde de réviser leur politique de subventions à l'égard
des parents mis en chômage et à l'égard du mi-temps
décrété pour la garde scolaire.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Pétition
déposée.
Dépôt de rapports de commissions élues.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le député de Bellechasse.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Bellechasse.
Étude du projet de loi no 104
M. Lachance: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dipositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente des
transports, qui a siégé le 7 décembre 1982 aux fins
d'étudier article par article le projet de loi no 104, Loi modifiant la
Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions
législatives.
Ce projet de loi a été adopté tel
qu'amendé.
Une voix: Très bien!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Montmagny-L'Islet.
Étude du projet de loi no 98
M. LeBlanc: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de
la commission élue permanente du revenu qui a siégé
le mardi 7 décembre 1982 aux fins d'étudier article par article
le projet de loi no 98, Loi modifiant diverses dispositions législatives
d'ordre fiscal.
Le projet de loi a été adopté tel
qu'amendé.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Dépôt de
rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.
M. le leader du gouvernement.
Rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais d'abord remettre
un rapport du greffier relativement au projet de loi no 274, Loi concernant la
succession de Joseph-Albert Tardif.
Les avis ont été publiés. Cependant, le projet de
loi a été déposé au secrétariat des
commissions après l'ouverture de la session. Je fais donc motion pour
que nous suspendions les règles de procédure à cet
égard.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
est adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Relativement à un petit projet de loi
privé sur lequel nous avons pris la décision hier d'en reparler
aujourd'hui, projet de loi no 283 concernant la Coopérative
laitière du sud de Québec, il y a des avis qui ne sont pas parus
dans la Gazette officielle ainsi que dans certains quotidiens, mais les parties
sont consententes, étant donné la nature même du projet,
à faire en sorte que nous puissions le déposer à
l'Assemblée nationale, en faisant motion pour suspendre les
règles de pratique à cet égard.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: M. le Président, après la séance
d'hier, nous avons en effet appris qu'il s'agit d'un projet de loi qui
n'affecte les droits de personne. Il s'agit simplement de changer le nom de cet
organisme, je crois. Si nous avions eu cette explication hier - je pense qu'il
y a eu un court-circuit à un moment donné - nous aurions
accepté qu'il soit déposé hier. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de suspension des règles est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: L'article d) du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi no 283 Première lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le député
de Bellechasse propose la première lecture du projet de loi privé
no 283, Loi concernant la Coopérative laitière du sud de
Québec.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Est-ce que la première lecture est
adoptée?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse. Est-ce que
cette première lecture est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission des institutions
financières et coopératives
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion
pour que ce projet de loi no 283 sera déféré à la
commission des institutions financières et coopératives pour
étude probablement dès jeudi de cette semaine, le 9
décembre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: L'article c) du feuilleton.
Projet de loi no 274 Première lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Dorion propose la première lecture du projet de
loi privé no 274, Loi concernant la succession de Joseph-Albert
Tardif.
Est-ce que cette motion de première lecture est
adoptée?
Des voix: Discours.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: La première lecture est-elle
adoptée?
Le Vice-Président (M. Rancourt): C'est fait. (10 h 20)
Renvoi à la commission de la justice
M. Bertrand: Merci. Motion de déférence à la
commission permanente de la justice, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Lalonde: Adopté, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Questions orales des
députés.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
L'affaire d'une contribution du gouvernement
français au PQ
M. Lalonde: J'ai deux brèves questions à poser au
premier ministre et une au ministre de la Justice, selon les réponses du
premier ministre.
Est-ce que le premier ministre a, oui ou non, demandé au Dr Marc
Lavallée...
Des voix: Encore.
M. Lalonde:... d'explorer auprès du gouvernement
français la possibilité d'une contribution à la caisse
électorale du Parti québécois?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, la
réponse, pour la nième fois, c'est non et c'était exclu,
dès le départ, que toute contribution venant de
l'extérieur du Québec puisse être acceptée.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, question additionnelle.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que le premier
ministre maintient que le Dr Lavallée ne lui a jamais fait rapport de
quelque acceptation que ce soit du gouvernement français de contribuer
à la caisse électorale du Parti québécois?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour la
nième fois, je dis que je n'ai pas le moindre souvenir - c'est
très difficile de se souvenir de quelque chose qui n'est pas
arrivé - d'un rapport quelconque de M. Lavallée à ce
sujet. Je répète ce que j'ai déjà dit. S'il avait
eu l'idée de nous raconter une histoire pareille, on lui aurait dit
qu'il s'était mêlé de quelque chose qu'il n'avait pas le
droit de faire.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, question additionnelle.
M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais qu'un messager
vienne ici, s'il vous plaît!
Une voix: Des questions très brillantes. Une voix:
Ne parlez pas trop fort.
M. Lalonde: Allez porter cela au ministre de la Justice, s'il
vous plaît!
M. le Président, j'ai entre les mains un document qui
revêt, d'après les réponses du premier ministre, une telle
importance que j'en envoie l'original au ministre de la Justice. Il s'agit d'un
affidavit qui commence ainsi: "Je, soussigné, Marc Lavallée,
docteur en médecine...
Des voix: Ah!
M. Lalonde:... résidant - il donne l'adresse de sa
résidence - étant dûment assermenté, dépose
et dit... " Je ne le lirai pas au complet, M. le Président. Le premier
paragraphe dit ceci: "Au début de l'année 1969, M. René
Lévesque, président du Parti québécois, me demanda
d'explorer auprès du gouvernement français la possibilité
d'une contribution à la caisse électorale du Parti
québécois et, à cette fin, de rencontrer toute
personne jugée à propos. "
Étant donné l'existence de cet affidavit,
assermenté le 30e jour du mois de novembre 1982, et les réponses
contradictoires du premier ministre, je demande au ministre de la Justice ce
qu'il entend faire pour que la vérité éclate dans cette
affaire.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: Jusqu'à présent, ce qui frappe
surtout, ce sont les potins véhiculés par l'Opposition sans aucun
élément nouveau. On vient de me remettre ce qu'il est convenu
d'appeler un affidavit - que je n'ai pas lu - de la part de M. Lavallée.
Le député de Marguerite-Bourgeoys veut-il nous dire qu'il a
rencontré M. Lavallée et que M. Lavallée ajoute des choses
additionnelles concernant ce qui est déjà connu dans le livre
paru? On ne peut quand même pas commencer à faire des
enquêtes sur les potins de l'Opposition. On l'a déjà fait
et on a vu ce que cela a donné.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, question additionnelle.
M. Lalonde: Je demanderais au ministre de la Justice, de se
souvenir qu'il est le Procureur général du Québec
plutôt que le député de Chicoutimi quand il répond
aux questions.
M. Bédard: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre de la Justice, sur une
question de privilège.
M. Bédard: Je voudrais que le député de
Marguerite-Bourgeoys répète ce qu'il vient de dire et que je n'ai
malheureusement pas entendu.
M. Lalonde: Oui, je veux bien le faire. J'ai dit que j'aimerais
que le ministre de la Justice se souvienne qu'il est davantage le Procureur
général du Québec que le député de
Chicoutimi quand il répond aux questions.
M. Bédard: Question de privilège.
Le Président: M. le ministre de la Justice, sur une
question de privilège.
M. Bédard: J'aimerais que le leader de l'Opposition sorte
de son rôle d'avocat de causes perdues et se rappelle qu'il est membre de
l'Assemblée nationale. En tant que membre de l'Assemblée
nationale, son devoir n'est pas de véhiculer des potins sans autres
informations additionnelles, potins qui ont d'ailleurs déjà
été véhiculés dans d'autres domaines par des
membres de l'Assemblée nationale comme l'écoute
électronique, la pornographie à l'Assemblée
nationale...
M. Lalonde: M. le Président, ce n'est pas une question de
privilège.
M. Bédard:... qui ont obligé des enquêtes
importantes...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Comment peut-on s'attendre à une enquête
indépendante, à une enquête impartiale lorsque le ministre
de la Justice lui-même prend position publiquement sur une cause dont je
viens de lui fournir une preuve sous serment.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: Question de privilège, M. le
Président. Je n'ai pas pris partie dans une cause. Ce que j'ai
dit...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas pris partie
dans une cause. Ce que j'ai dit, c'est que l'Opposition n'avait apporté
aucune preuve additionnelle aux potins déjà
véhiculés par M. Lavallée. Soyez donc sérieux un
peu. Si vous avez des choses à dire, dites-le donc!
M. Lalonde: M. le Président, question additionnelle.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, en rappelant au ministre de
la Justice qu'il parlait de potins à l'égard du scandale de la
SHQ qui est devant les tribunaux maintenant. M. le Président...
M. Bédard: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: Je n'ai jamais parlé de potins dans
l'affaire de la SHQ, au contraire. Je n'ai jamais fait de déclarations
sauf celles en Chambre et, d'ailleurs, des journalistes ont fait justement la
remarque
de la manière dont je me suis conduit dans ce dossier.
M. Lalonde: M. le Président...
M. Bédard: Ce que j'ai appelé potins...
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de privilège.
M. Bédard:... ce sont les patentes de pornographie,
véhiculées par vos députés, la question de
l'écoute électronique, il n'y avait aucun...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: M.
le député de Portneuf, sur une question de privilège.
M. Pagé: Brièvement, M. le Président. Le
ministre de la Justice vient de faire référence à un
dossier qui a déjà été abordé ici à
l'Assemblée nationale du Québec, l'année dernière,
qui a fait l'objet d'une enquête policière dont les conclusions
ont été rendues publiques à l'Assemblée nationale
en décembre 1981. Je soulève une question de privilège
pour indiquer au ministre de la Justice que si le gouvernement, le Procureur
général et ministre de la Justice est disposé, sur les
deux dossiers, écoute électronique et pornographie, à
décréter une enquête publique, nous sommes prêts,
n'importe quand.
M. Bédard: M. le Président...
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je pense...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
M. Bédard: M. le Président, je pense...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:
M. Bédard: À l'ordre! M. le Président,
question de privilège.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je pense que ce que
vient de dire le député de Portneuf est la meilleure illustration
du côté non sérieux, par rapport à ce que certains
ont dit, des allégations de l'Opposition dans ces dossiers...
M. Lalonde: Question de règlement.
M. Bédard:... où il s'est avéré qu'il
n'y avait...
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
M. Bédard: M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bédard: M. le Président, ce n'est pas...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre
de la Justice, brièvement, s'il vous plaît!
M. Bédard: II y a sûrement une question de
privilège, M. le Président, parce que les remarques du
député de Portneuf laisseraient supposer que le ministère
de la Justice ou que le gouvernement n'était pas disposé à
aller au fond des choses concernant le dossier de l'écoute
électronique et le dossier de la pornographie, alors que les preuves
sont à l'effet contraire. Des enquêtes approfondies ont
été faites et il s'est avéré que les
allégations véhiculées par l'Opposition n'avaient aucun
fondement. M. le Président, on peut voir jusqu'à quel point
l'Opposition n'est pas sérieuse puisque, à la suite d'une
enquête policière approfondie où il s'avère qu'il
n'y a rien, on va jusqu'à demander une enquête publique. Cela
montre le non-sérieux des membres de l'Opposition.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, j'espère que le
ministre de la Justice me laissera poser ma question. À-t-il d'abord
l'intention de prendre connaissance de cette déclaration
assermentée? Deuxièmement, compte tenu du fait que cette
déclaration contredit carrément les réponses du premier
ministre, qu'entend-il faire? Entend-il faire une enquête publique,
indépendante et complète sur des allégations qui tendent
à prouver que le chef du Parti québécois, le premier
ministre actuel, avait accepté de faire financer son parti par une
puissance étrangère?
Le Président: M. le ministre de la Justice. (10 h 30)
M. Bédard: M. le Président, je pense que la
tactique employée par l'Opposition démontre jusqu'à quel
point c'est plus ou moins sérieux; mais ce qui compte, de la part de
l'Opposition, c'est de véhiculer... "Mentez, mentez, il en restera
toujours
quelque chose. " La meilleure preuve en est la manière de
procéder ce matin. On pose une question. On fait remettre dans un
délai de quelques minutes un document au ministre de la Justice. On lui
demande, quelques minutes après, s'il a eu l'occasion de le parcourir en
entier. Cela démontre à quel point, en fait, on essaie de jouer
aux fins finauds dans cette affaire. Pour ce que j'ai pu lire, M. le
Président...
Des voix: Oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, évidemment, je
parcourrai avec attention le document qui m'a été livré
par le député de Marguerite-Bourgeoys. Pour ce que j'ai pu y
lire, M. le Président, il ne me semble pas, outre le fait que M.
Lavallée semble réaffirmer des choses qu'il a déjà
affirmées dans un volume, y avoir aucun fait additionnel. Et je tiens
à dire d'avance... On dirait que l'Opposition a juste le droit de poser
des questions et qu'elle a peur des réponses, on n'a pas le droit de
répondre.
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, effectivement, je vais
prendre connaissance, je vais approfondir tout le contenu que peut receler ce
document, mais je tiens d'avance à dire que si ce document n'est que la
relation nouvelle des mêmes faits qui ont déjà
été rapportés dans le livre de M. Lavallée, sans
autre élément additionnel, l'Opposition devrait savoir qu'il n'y
a absolument rien pour ordonner une enquête policière.
Franchement, ce n'est pas sérieux de la part de l'Opposition. S'il
fallait qu'à toutes les fois que les gens sont contredits dans leurs
affirmations il y ait des enquêtes, il y aurait souvent des
enquêtes sur d'autres personnes que celles de ce
côté-ci.
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Question principale, M. le député de Jean-Talon,
Loi-cadre sur les conditions de travail dans les
secteurs public et parapublic
M. Rîvest: M. le Président, dans un geste tout
à fait exceptionnel et inédit, je pense, dans l'histoire des
relations du travail, le gouvernement du Québec s'apprête à
déposer vraisemblablement un projet de loi qui dira a peu près
ceci: Le gouvernement peut décréter les conditions de travail des
employés de l'État. Le Journal de Montréal et le Journal
de Québec nous informent ce matin de tout un ensemble de faits sur la
structure et sur le fonctionnement du Conseil des ministres, basés,
d'une part, sur une déclaration du député de Sainte-Marie
et, d'autre part...
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Rivest:... sur des déclarations du négociateur
en chef du gouvernement, M. Lucien Bouchard. Je voudrais demander au premier
ministre de nous indiquer s'il est exact que ses collègues du Conseil
des ministres ont été, à toutes fins utiles, selon
l'affirmation du journaliste - sur la base des affirmations du
député de Sainte-Marie et du négociateur en chef du
gouvernement - mis sur la voie d'évitement dans les négociations
et que, par exemple, le président du Conseil du trésor, comme
tout le monde a pu le constater ici en Chambre, se serait simplement
contenté de faire des graphiques pour la caméra.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, si on s'en
tient à l'article exceptionnel qui a paru ce matin dans le Journal de
Québec et signé par M. Girard sur la base de ce que le
député de Sainte-Marie lui aurait raconté, de ce que le
député de Sainte-Marie se serait fait raconter par les gens du
front commun, de ce que les gens du front commun auraient appris vaguement de
M. Bouchard, lequel en aurait discuté avec M. Boivin, cela me rappelle
vaguement une expression qui faisait fureur quand j'étais petit
garçon: l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours.
Cela continue le sérieux de l'information que... Si M. Bisaillon,
député indépendant de Sainte-Marie, a raconté des
trucs comme cela et connaissant le talent exceptionnel de M. Girard, je dirais
que c'est ce tandem-là et non pas celui de Mme Chaput-Rolland qu'on
aurait dû inviter pour fabriquer le feuilleton "Monsieur le ministre".
Cela ne serait pas plus près de la réalité mais cela
aurait une sorte de saveur du terroir!
Pour aller aux choses sérieuses, hier, en effet, l'Opposition a
été mise au courant -je pense que cela était normal -
à commencer par notre conseil des députés que des
décisions finales doivent être prises par le Conseil des
ministres. Conformément à ce qu'il a bien fallu dire il y a
quelques semaines, les dernières rencontres - il y en a eu encore
jusqu'à la dernière heure, même si
c'était informel - n'ayant pas donné de résultat,
les écarts demeurant infranchissables, il est sûr qu'avant la fin
de la semaine, la Chambre sera saisie d'une loi exceptionnelle.
Le Président: M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Une question additionnelle au premier ministre. Le
premier ministre a fait des commentaires sur l'article en question. Le
résultat n'est pas très brillant, je pense bien que le premier
ministre en conviendra. Nulle part dans le monde occidental un gouvernement
n'a-t-il agi ainsi, même à l'intérieur de la soi-disant
crise internationale qui est censée expliquer toutes, les
difficultés actuelles du gouvernement. Le premier ministre
connaît-il un gouvernement démocratique dans tout le monde
occidental qui a décidé, qui a été forcé de
procéder de la manière dont le premier ministre procédera
en mettant complètement de côté tout le régime des
relations du travail? Cela, pour simplement camoufler l'incohérence qui
a existé au niveau du Conseil des ministres, au niveau de la gestion
financière et que le premier ministre vient de ridiculiser...
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Sauf erreur -sans compter le
gouvernement fédéral du Canada - le gouvernement de l'Ontario, le
gouvernement de Belgique, celui de France ainsi que divers autres gouvernements
ont procédé de façon unilatérale, et dès le
départ, par des décrets sans aucune discussion. Le risque que
nous avons accepté de courir, au-delà d'une certaine masse
salariale qu'on n'a pas le droit de dépasser -à notre avis, en
conscience - a été de privilégier le jeu normal de la
négociation jusqu'à l'extrême limite du temps
disponible.
Le Président: M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Ma question était la suivante: Je demandais au
premier ministre de m'indiquer un pays démocratique qui a signé
une entente avec ses employés et qui, par une loi unilatérale,
injuste et tout à fait arbitraire, est allé renier sa signature
sur la place publique. Donnez-m'en un.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je crois que le
député de Jean-Talon n'a pas besoin d'anticiper sur ce qui sera
un débat très important et qui devrait commencer avant la fin de
cette semaine et où tout sera mis forcément sur la table, y
compris les allégations ou les prétentions de l'Opposition.
Le Président: Question principale, M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je me demande s'il n'y
aurait pas lieu de faire une place sur les banquettes avant pour M. Jean-Roch
Boivin, le bras droit du premier ministre, responsable des scandales de la SHQ,
responsable des tactiques minables...
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Picotte:... pour évincer le Conseil des ministres.
Le Président: Est-ce là le sujet de votre question,
M. le député? Question, s'il vous plaît!
Foyer clandestin pour personnes âgées
à Québec
M. Picotte: Ma question s'adresse au ministre responsable des
foyers clandestins qui semble plus préoccupé de son avenir
politique que du mieux-être des personnes âgées. À la
suite des révélations troublantes de M. Georges Tremblay,
concernant certaines personnes âgées dans un foyer clandestin de
Québec et certaines personnes handicapées, à savoir que
ces personnes étaient maltraitées, qu'en plus, elles vivaient
dans des chambres de six pieds sur huit pieds, où il n'y a aucune
fenêtre, j'aimerais savoir ce que le ministre des Affaires sociales a
fait jusqu'à maintenant relativement au 230, 3e avenue, à
Saint-Charles de Limoilou, pour corriger cette situation.
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je prends note de la
question et j'aurai une réponse détaillée pour le
député dès cette semaine.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Question additionnelle. Est-ce que le ministre me dit
par sa réponse qu'à la suite des révélations d'il y
a une quinzaine de jours de M. Georges Tremblay, il ne s'est pas
intéressé à la vingtaine de personnes qui demeurent
là, qui sont soi-disant maltraitées et qui vivent dans des
conditions inhumaines? Est-ce ce que le ministre me dit? Ne serait-il pas mieux
de s'occuper de son dossier, de s'occuper des affaires sociales?
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, c'est justement parce
que nous nous intéressons à ces questions et à la question
des foyers clandestins, que le député de Maskinongé semble
maintenant découvrir, que le ministère des Affaires sociales,
depuis deux ans, procède à des enquêtes
systématiques. C'est pourquoi, compte tenu de l'importance d'un tel
sujet, je préfère fournir une réponse
détaillée. J'aurai une réponse détaillée
d'ici la fin de la semaine.
M. Picotte: Dernière question additionnelle.
Le Président: M. le député de
Maskinongé.
M. Picotte: Si le ministre des Affaires sociales s'en occupe
depuis deux ans, peut-il me dire quelle est la raison pour laquelle,
après les révélations, on n'a pas immédiatement
pris les mesures nécessaires pour que cet établissement soit
fermé et que les personnes qui y vivent soient installées
ailleurs, puisqu'il y a des places ailleurs, j'en nommerai au ministre, s'il
n'en connaît pas? Le ministre pourrait-il me déposer en même
temps, demain, en réponse à mes questions, les dates d'inspection
où on a été justement au 230, 3e avenue à
Saint-Charles de Limoilou et quelles sont les recommandations qui ont
été faites pour démontrer vraiment qu'il s'en occupe
depuis deux ans, chose qui est bien loin d'être certaine?
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je répondrai
avec force détails d'ici la fin de la semaine.
Le Président: Merci. Question principale, M. le
député de Duplessis.
L'usine de Matane compromettra-t-elle la
réouverture de Rayonier à Port-Cartier?
M. Perron: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
au ministre de l'Énergie et des Ressources. Il y a plusieurs semaines,
l'organisation du Parti libéral dans le comté de Duplessis a fait
courir des rumeurs avec l'aide probablement des gens d'en face, à savoir
que l'usine de Matane, lors de l'ouverture, aurait des répercussions
très négatives relativement à la réouverture de
Rayonier Québec à Port-Cartier.
J'ai deux questions à poser. Concernant l'usine de Matane, est-il
exact que cette usine, lors de l'ouverture, pourrait faire en sorte de remettre
en cause la réouverture de ITT Rayonier Québec à
Port-Cartier, d'une part? D'autre part, est-il exact que lors de l'ouverture de
cette usine, l'approvisionnement en bois proviendrait de la Côte-Nord et
spécialement de l'île d'Anticosti?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, je ne sais pas si les rumeurs
qui circulent dans le comté de Duplessis sont aussi solides que ce que
je viens d'entendre ce matin, mais cela ne m'apparaît pas tellement
sérieux.
Je voudrais simplement dire au député de Duplessis que le
projet de papeterie de Matane, dont la question des garanties
d'approvisionnement est réglée, n'influence en aucune
manière les garanties d'approvisionnement que nous serions
appelés à donner pour le décollage de l'usine ITT Rayonier
de Port-Cartier.
Je dois ajouter que pour ce qui est du dossier de Matane, il s'agit d'un
investissement de 270 000 000 $. L'état du dossier, quant à son
financement, est très avancé et il est exclus et il n'a jamais,
à ma connaissance, été discuté, qu'on puisse
même songer à une seconde machine à ce moment-ci. Je dois
dire que si jamais on devait parler d'une deuxième machine à
papier, ce qui est très hypothétique, on pourrait envisager
à ce moment-là les garanties d'approvisionnement sur l'île
d'Anticosti et c'est à ce seul endroit du dossier qu'il a
été question des approvisionnements sur l'île
d'Anticosti.
Quant à ITT sur la Côte-Nord, nous espérons que ceux
qui ont manifesté jusqu'à présent des
intérêts pourront réunir suffisamment de capitaux et faire
en sorte que ce projet puisse démarrer rapidement. Mais d'ores et
déjà, nous avons donné les garanties d'approvisionnement
pour ce qui est de l'usine ITT Rayonier de Port-Cartier.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Puisque le ministre de l'Énergie et des
Ressources vient de dire où en est le dossier de la réouverture
de Rayonier Québec à Port-Cartier, est-ce qu'il pourrait nous
dire quels sont les intervenants jusqu'à maintenant dans ce dossier?
Sans nommer qui que ce soit, est-ce qu'il y a d'autres intervenants qui sont
arrivés par la suite, dernièrement ou il y a quelques
semaines?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Duhaime: II y a possiblement un troisième intervenant
qui pourrait s'intéresser très vivement à ce dossier, mais
dans l'état actuel de nos discussions, j'aime mieux garder son nom pour
moi. Il me fera peut-
être plaisir cependant de le communiquer au député
de Duplessis.
Le Président: Question additionnelle, M. le chef de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Merci, M. le Président.
Simplement une précision additionnelle sur le projet de Matane. Est-ce
que le ministre peut assurer cette Chambre que si ce projet devenait un jour
une réalité, il n'y aurait pas de retombées
négatives dans les autres industries de la région,
particulièrement en ce qui concerne l'industrie de Consolidated Bathurst
à New-Richmond? Le ministre ou son ministère a-t-il reçu
des représentations à cet effet?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Duhaime: Quant à des représentations sur la
question des approvisionnements ou ce qu'on appelle dans le jargon la rupture
des stocks, nous en entendons parler régulièrement et je pense
que cela se dit et se répète d'une année à
l'autre.
Quant à moi, je dois dire que ce que nous avions l'habitude de
couper, au Québec, à peu près 30 000 000 de mètres
cubes, avec le ralentissement que nous avons connu durant les dernières
années et avec l'effort additionnel au plan des objectifs de
reboisement, sur un plan de cinq ans, qui se déroule, il n'y a pas
d'inquiétude, pour l'ensemble du dossier, pour ce qui est des
approvisionnements.
Je n'ai pas reçu de représentations spécifiques de
la part de la compagnie Consol pour ce qui est du moulin de New-Richmond, mais,
comme je l'ai dit tout à l'heure, la question des approvisionnements
étant réglée pour l'implantation d'une papeterie à
Matane, il est évident qu'à ce moment-là mon
ministère tient compte des obligations et des engagements, des autres
contrats d'approvisionnement, envers les autres producteurs de papier journal
ou encore les propriétaires d'usines de sciage.
Je voudrais corriger un peu la manière dont la question du chef
de l'Opposition a été formulée, peut-être sans
aucune mauvaise intention de sa part. Je l'ai entendu dire: Et si le projet de
Matane devenait une réalité. C'était, dans sa bouche,
très conditionnel. Je voudrais dire que nous avons la ferme intention de
commencer les travaux dans les premiers mois de 1983 et je voudrais
préciser, M. le Président, que, d'ores et déjà, le
Conseil des ministres a pris la décision d'aller de l'avant dans ce
dossier en acceptant de verser 40% d'une subvention de 59 000 000 $. C'est mon
collègue, le ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional, qui pilote les
négociations avec le gouvernement fédéral pour qu'on
puisse donner suite à l'entente qui date déjà d'un peu
plus de deux ans et qui avait été signée par M. De
Bané et mon collègue, M. Bérubé.
M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision, M. le
Président.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que le ministre peut m'assurer
que ceci a franchi l'étape du Conseil du trésor?
Le Président: M. le ministre.
M. Duhaime: Je viens de répondre de façon
explicite, M. le chef de l'Opposition. J'ai dit que c'était une
décision du Conseil des ministres.
Le Président: Question principale, M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, ma question s'adresse
à l'honorable premier ministre.
M. Bertrand: Le premier ministre va revenir en Chambre.
M. Paradis: Est-ce qu'il est parti se rafraîchir la
mémoire pour consulter l'affidavit du Dr Lavallée?
M. Bertrand: Ce ne sera pas long. M. Paradis: II s'en
vient.
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, vous pouvez poser votre question.
Commission parlementaire sur Marine Industrie
M. Paradis: M. le premier ministre se souviendra certainement
qu'il y a trois semaines nous nous sommes entretenus de la question de la
région de Sorel-Tracy, plus spécifiquement du dossier de Marine
Industrie Ltée. C'était le 16 novembre. Vous vous rappelez le
taux de chômage. Vous vous rappelez les 2000 travailleurs mis à
pied. Vous vous rappelez les 800 travailleurs qui bénéficient de
l'aide sociale.
À ce moment-là, dans votre réponse, vous avez
compati au sort de ces gens-là. Vous avez sympathisé. Vous avez
promis aux travailleurs ainsi qu'aux parlementaires et vous vous êtes
engagé à la tenue d'une commission parlementaire sur le dossier
de Marine Industrie Ltée dans la région de Sorel-Tracy, dans les
meilleurs délais. Trois semaines plus tard, je vous demande, M. le
premier ministre, quand cette commission parlementaire aura lieu.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, cela n'est
jamais exclu. C'est sûr, cela fait partie des devoirs de
l'Assemblée nationale, quand elle s'occupe de choses sérieuses
comme ce matin, de suivre ces choses-là. Seulement, je ne sais pas si le
député est au courant, mais, à la mi-décembre,
c'est-à-dire dans les jours qui viennent, il doit y avoir une rencontre
entre le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et les
représentants du syndicat de Marine Industrie ainsi que la direction,
c'est normal, pour faire le point sur la situation. Il peut y avoir
éventuellement une commission parlementaire, ce n'est pas du tout exclu,
mais sûrement pas avant que ces rencontres aient donné quelque
résultat que ce soit. Commençons par ça. (10 h 50)
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, question additionnelle.
M. Paradis: M. le premier ministre, les travailleurs nous
informent - et je pense que vous en êtes également informé
- que des rencontres similaires ont déjà eu lieu dans le
passé et cela n'a rien donné. Les travailleurs prétendent
que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme tente de noyer le
poisson, qu'il ne connaît pas son dossier, qu'il ne veut pas se prononcer
sur l'avenir de Marine Industrie. Tout ce qu'ils réclament, c'est
d'avoir droit à un débat public. Le 16 novembre, vous vous
êtes engagé à tenir ce débat public et dans les
meilleurs délais...
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Paradis:... compte tenu des travaux de la Chambre. On sait
qu'il n'y a pas beaucoup de commissions parlementaires qui siègent
présentement; est-ce qu'on pourrait avoir une commission parlementaire
sur la région de Sorel-Tracy pour défendre et protéger les
emplois des travailleurs de cette région?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je crois qu'il appartient quand
même au gouvernement de décider quels sont les meilleurs
délais. Pour ce qui est des remarques quelque peu - c'est le moins que
je puisse dire - désobligeantes du député et, à mon
humble avis, très injustifiées en ce qui concerne les
résultats de rencontres qui se succèdent, n'importe qui qui a une
tête sur les épaules et qui a déjà vu la
complexité de n'importe quel problème industriel relié au
chômage, relié à l'avenir d'une industrie, sait à
quel point c'est complexe et que cela ne se règle pas en criant
ciseaux.
Tenant compte de la qualité des remarques du
député, je demanderai à mon collègue de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme de faire le point sur les rencontres
qu'il a eues et qu'il doit avoir encore avec Marine Industrie.
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: II est exact qu'au cours de la dernière
année j'ai déjà eu trois rencontres avec les
représentants des travailleurs et les représentants de Marine
Industrie. Ici, il est exclu que le ministre négocie directement avec le
syndicat ou les travailleurs en passant par-dessus la tête des
responsables, des dirigeants de Marine Industrie. Chaque fois que j'ai
rencontré les représentants des travailleurs, chaque fois les
dirigeants de Marine Industrie étaient là pour qu'ensemble on
puisse se parler un peu mieux.
Avant de prévoir une commission parlementaire, si je veux
rencontrer les représentants des travailleurs et de Marine Industrie,
c'est justement pour définir avec eux le contenu de la commission
parlementaire. Je suis d'accord avec le député de
Brome-Missisquoi lorsqu'il dit vouloir une commission parlementaire, mais on va
discuter de quoi? Je ne veux pas d'une commission parlementaire qui va faire le
procès des dirigeants de Marine Industrie ni même le procès
des dirigeants du syndicat de Marine Industrie. Ce que je veux, d'abord et
avant tout, c'est savoir ce qu'on va discuter à cette commission
parlementaire, quel sera le contenu dont les travailleurs veulent discuter
à cette occasion. Lorsque, ensemble, on aura décidé du
contenu, bien sûr, ce sera facile de convoquer une commission
parlementaire pour essayer d'éclairer le plus possible la population du
Québec là-dessus.
Je tiens à dire au député de Brome-Missisquoi qu'il
y a une volonté ferme, de la part des dirigeants de Marine Industrie, de
même que des dirigeants de la Société
générale de financement, de développer le secteur maritime
chez Marine Industrie. La seule chose est qu'il est difficile d'avoir des
contrats; je le lui ai expliqué l'autre jour. Je peux vous annoncer
aujourd'hui que la semaine dernière on a réussi à avoir un
contrat de réparation de navire pour un montant de 4 500 000 $. Je pense
que c'est important et que c'est un signe évident que les dirigeants de
Marine Industrie essaient de faire l'impossible pour conserver, d'une
façon forte, le secteur maritime chez Marine Industrie.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Je remercie le ministre de l'Industrie et du Commerce
de ses propos. Il nous promet, lui aussi, une commission parlementaire sur
l'avenir de Marine Industrie, sur la section navale, dans la région de
Sorel-Tracy dans les meilleurs délais. Ma question, M. le ministre - je
sais que vous avez un horaire chargé - je l'ai posée au nom des
travailleurs qui la réclamaient depuis longtemps, le 16 novembre. Trois
semaines après, peut-on compter sur une commission parlementaire avant
la fin de l'année?
Le Président: M. le ministre.
M. Biron: Je vais rencontrer, la semaine prochaine, les
dirigeants de Marine Industrie et les dirigeants des travailleurs. Avec eux,
nous allons décider du contenu de la discussion et il serait vraiment
trop tôt de convoquer une commission parlementaire sans avoir
donné le temps à tous les intervenants qui seront là, de
même qu'à l'Opposition officielle, de fouiller ses dossiers. Je
pense que vous auriez intérêt à prendre quelques jours
supplémentaires pour fouiller à fond les dossiers dont vous
parlez.
Le Président: Question principale...
M. Paradis: M. le Président, question de
privilège.
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: S'il y a quelqu'un qui a des dossiers à
fouiller, c'est le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
Le Président: Question principale, Mme la
députée de Jacques-Cartier.
M. Paradis: M. le Président...
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, je ne considère pas que les propos du ministre aient
donné lieu à une question de privilège de votre part.
M. Paradis: M. le Président, question de
privilège.
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, en quelques secondes.
M. Paradis: Le ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme a dit que l'Opposition n'avait pas fouillé ses dossiers dans le
cas de Marine Industrie. Je considère...
Le Président: Question principale, Mme la
députée de Jacques-Cartier.
230 000 000 $ par année en recherche et en
développement technologique
Mme Dougherty: Ma question s'adresse au ministre
délégué à la Science et à la Technologie. Il
n'est pas ici.
Des voix: Voilà.
M. Lalonde: Today, that is the day.
Mme Dougherty: Selon le Devoir du lundi 10 décembre, le
ministre a déclaré: Pour combler son retard scientifique et
prendre le virage technologique indispensable, le Québec devra augmenter
d'au moins 250 000 000 $ par année ses investissements en recherche et
en développement technologique. Pourriez-vous nous expliquer comment
vous êtes arrivé à ce chiffre de 250 000 000 $?
Voudriez-vous préciser les projets envisagés et d'où
viendra l'argent?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Science et à la Technologie.
M. Paquette: M. le Président, je répondais au
colloque organisé par le Parti québécois dans la
région Montréal-Centre samedi à une question - non, non,
d'accord, vous auriez dû venir, Mme la députée, cela a
été fort intéressant - me demandant d'évaluer en
quelque sorte l'effort financier qui serait requis. C'est par une
évaluation des diverses mesures impliquées dans le virage
technologique et par le constat que l'effort global de recherche et de
développement consenti par la société
québécoise est actuellement de 0, 9% du PIB. Sur un certain
nombre d'années, nous voudrions hausser ce pourcentage de façon
à en arriver, vers 1985, autour de 1, 5% du PIB. Ce sont des objectifs.
On est en train de travailler à l'élaboration de projets concrets
qui vont nous permettre de dire: Dans tel secteur de la
micro-électronique, on va faire tel ou tel développement, dans la
biotechnologie, on a déjà un certain nombre
d'éléments qui sont fixés dans le plan d'intervention et
dans les autres secteurs. Je vous rappelle que le virage technologique propose
aussi la mise sur pied de sept à huit nouveaux centres de recherche au
Québec.
Ces divers éléments me permettront, d'ici quelques mois,
de préciser davantage les secteurs où les fonds seront investis.
D'où viendront les fonds? Ce sont des investissements. On a des
investissements à faire au Québec. Ce n'est pas parce qu'il y a
une situation budgétaire serrée qu'on va arrêter, par
exemple, de faire des projets dans le domaine de l'épuration des eaux,
dans le domaine du transport en commun. S'il y a un domaine où il est
important de faire des investissements, c'est dans le domaine de nos
infrastructures de recherche
et de développement qui sont essentielles pour prendre le virage
technologique. Je pense que c'est principalement dans des moyens de
financement, qui seront annoncés en temps et lieu, qui nous permettront
de réaliser ces divers projets.
Le Président: Question additionnelle, Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: C'est évident, comme nous avons
constaté en mai, qu'il y a encore une absence quasi totale de
priorités claires et chiffrées. Comme il est évident que
votre programme éventuel n'aboutira à rien sans la concertation
d'autres ministères, par exemple, le ministère de
l'Éducation qui s'occupe ou devrait s'occuper de la formation de
main-d'oeuvre spécialisée, quelles sont les démarches que
vous avez entreprises auprès de votre collègue le ministre de
l'Éducation pour qu'il fasse un virage psychologique dans ses
priorités en éducation afin de faire face à la nouvelle
réalité?
Le Président: M. le ministre.
(11 heures)
M. Paquette: M. le Président, concernant d'abord la
concertation, nous sommes en train de compléter la répartition
des responsabilités des 192 mesures incluses dans le virage
technologique, lesquelles impliquent une quinzaine de ministères et
d'organismes. Remarquez qu'il y en a un certain nombre qui sont
déjà en voie d'implantation. Le ministre de l'Industrie et du
Commerce a déposé des nouveaux règlements à la SDI.
Les fonds du Centre de recherche industrielle du Québec ont
été augmentés. Le ministre de l'Éducation a
déposé sa politique de la formation professionnelle. Nous avons
déposé un programme d'investissements en biotechnologie qui a
été annoncé au cours du mois d'octobre de 63 000 000 $ sur
cinq ans. Il y a donc des choses en marche. Cependant, de façon à
pouvoir suivre à mon ministère l'ensemble des réalisations
qui devront être faites dans la foulée du virage technologique,
nous avons préparé ce projet de répartition qui est devant
le Conseil des ministres. Nous espérons et nous pensons bien avoir
complété ce partage des responsabilités avant
l'ajournement des fêtes.
En ce qui concerne le ministère de l'Éducation, en
particulier, nous avons déjà eu des conversations, mon
collègue et moi. Nous nous rencontrerons d'ici quelques jours pour
discuter de toutes ces questions et il y a une excellente collaboration de la
part du ministère de l'Éducation, qui nous a confirmé
qu'il entendait prendre toutes les responsabilités qui lui sont
dévolues dans l'application du virage technologique. D'ailleurs - c'est
peut-être symbolique - au même moment où le ministre du
Développement économique déposait Bâtir le
Québec II en juin dernier, le ministre de l'Éducation
déposait sa politique de la formation professionnelle. Je pense que
là-dessus, c'est par une concertation de tous les intervenants que nous
arriverons à réaliser ce virage technologique si important pour
l'avenir du Québec.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Laurier.
M. Sirros: M. le Président, ma question très courte
- s'adresserait plutôt au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu dans le domaine de ce virage technologique.
N'est-il pas exact, M. le ministre, que rien n'a été fait
jusqu'à maintenant pour que les industries québécoises
aient accès à une main-d'oeuvre spécialisée dans la
commande et l'entretien des robots industriels pour qu'ils puissent prendre ce
virage technologique, et n'est-il pas exact que le Québec ne s'est pas
prévalu jusqu'à maintenant des sommes importantes disponibles au
sein du gouvernement fédéral dans la Caisse d'accroissement des
compétences professionnelles afin de s'équiper
adéquatement dans ce domaine?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
M. Marois: M. le Président, je voudrais d'abord faire
remarquer une chose au député. Je pense qu'il y a
d'énormes nuances à faire à l'affirmation qu'il vient de
formuler et qui est passablement gratuite. Le député se
souviendra - et il y a là une espèce de première - que
dans le cadre de l'entente qui a été signée le 27 octobre
et qui permet au Québec, pour la première fois maintenant, non
seulement d'avoir un accès à la Caisse d'accroissement
industriel, mais aussi de participer directement, selon la nature des besoins
des hommes et des femmes qui auraient le droit de bénéficier de
formation professionnelle, de participer directement à la
définition des tâches et des fonctions dites d'envergure
nationale. C'est un acquis extrêmement important. J'espère, en
plus, partant de là - parce que c'est à ce moment-là, le
27 octobre, que j'avais également proposé au gouvernement
fédéral qu'au lieu de procéder de façon
unilatérale dans l'ensemble de ses politiques, notamment parce qu'il y a
un lien direct avec les programmes de création d'emplois, comme il l'a
fait dans le programme Relais - que le gouvernement fédéral
examine sérieusement la proposition que nous avons
déposée, contrairement à ce que le ministre
fédéral des Finances, M. Lalonde disait tout récemment,
que le gouvernement fédéral réponde favorablement à
la demande du gouvernement du Québec, dans le cadre des
programmes de création d'emplois en liaison avec la formation
professionnelle, à la proposition de mise au point d'un programme
conjoint. Et là-dessus, du côté du Québec, les liens
sont étroitement serrés et tricotés entre le
ministère de l'Éducation, le ministère de la Main-d'Oeuvre
et notre collègue qui s'occupe du domaine de la technologie.
M. Sirros: Une dernière question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: Une dernière question additionnelle,
M. le député de Laurier.
M. Sirros: M. le Président, n'est-il pas exact que
l'Ontario, pourtant, a déjà pu s'organiser pour offrir des cours
spécialisés dans la robotique industrielle et n'est-il pas exact
aussi que c'est le ministère de l'Éducation qui retarde, en
quelque sorte, la possibilité d'offrir ces mêmes cours ici au
Québec?
Le Président: M. le ministre.
M. Marois: Là-dessus, je vais laisser, M. le
Président, mon collègue, le ministre de l'Éducation,
répondre à...
Des voix: Ah! Ah!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, je vais laisser mon
collègue, le ministre de l'Éducation, répondre non pas
à cette question, mais à cette affirmation du
député de Laurier.
Le Président: Brièvement, M. le ministre de
l'Éducation.
M. Laurin: M. le Président, ce n'est sûrement pas
à l'école secondaire qu'on peut donner des cours en robotique
industrielle. Je pense que ce sont des cours qui conviennent beaucoup mieux
à des degrés supérieurs de l'enseignement. Il reste
cependant que l'école secondaire donne la base de ce qui pourra
constituer plus tard un enseignement en robotique industrielle en introduisant,
depuis un an maintenant, des cours d'informatique au secondaire IV et au
secondaire V. Ce sont des cours qui ont été soigneusement
préparés et qui ont fait l'objet de commentaires
extrêmement élogieux de la part de plusieurs autres provinces et
plusieurs autres pays, au point qu'on vient même nous demander des
informations sur le contenu du cours et sur la méthodologie. Je rappelle
également que 26 de nos collèges actuellement donnent
déjà un enseignement en informatique et que nous avons
l'intention d'accélérer cet enseignement et de le multiplier, de
façon que très bientôt...
M. Sirros: Question de règlement, M. le
Président.
M. Laurin:... presque tous les collèges du
Québec...
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Laurier, sur une question de règlement.
M. Sirros: Oui, j'aimerais simplement souligner au ministre de
l'Éducation qu'il y a une énorme différence entre
l'informatique et la robotique.
Le Président: M. le ministre, en concluant, s'il vous
plaît.
M. Laurin: Quant à l'université, M. le
Président, il y a des cours qui se multiplient dans tous les secteurs,
dans toutes les facultés et je n'ai pas encore parlé de la
formation en entreprise qui est en train de recevoir un stimulus et un
élan importants en collaboration avec l'enseignement collégial et
l'enseignement universitaire.
Le Président: Fin de la période des questions.
Motions non annoncées.
M. Dussault: M. le Président.
Le Président: M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: C'est une demande de directive que je voudrais vous
adresser immédiatement puisqu'elle est reliée à une motion
non annoncée possible. Sachant maintenant que les députés
ministériels ont droit à une question avec débat, je
voudrais savoir si je pourrais, en cherchant à faire le point concernant
les 750 000 $ olympiques de la caisse électorale du Parti
libéral...
Le Président: Quelle est votre demande de directive, M. le
député, s'il vous plaît?
M. Dussault: J'y viens, M. le Président. Je voudrais
savoir si je peux faire de ce que je viens de dire le point central,
c'est-à-dire l'objet d'une question avec débat que je pourrais
adresser - c'est le centre de ma question - à un député de
l'Opposition?
Le Président: La réponse est non. M. le
député, vous pouvez en faire votre point central, mais
adressé à un ministre du gouvernement. M. le député
de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, j'aimerais faire motion pour
que le gouvernement convoque sans délai la commission permanente des
transports pour analyser les investissements faits et les engagements pris par
le gouvernement du Québec à l'égard de la compagnie
Québecair et pour étudier les divers choix qui peuvent maintenant
s'offrir au gouvernement en vue, premièrement, de réparer les
coûteuses erreurs du passé, deuxièmement, de maintenir et
d'améliorer le service aux régions du Québec - surtout les
plus éloignées - et, troisièmement, de sauvegarder les
emplois des employés de Québecair.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix:...
Le Président: Défaut de consentement.
Enregistrement des noms sur les votes en suspens.
Avis à la Chambre. M. le leader du gouvernement.
Avis à la Chambre
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais donner avis
à cette Chambre que jeudi prochain, le 16 décembre, durant toute
la journée, c'est-à-dire aux heures normales auxquelles les
commissions parlementaires peuvent siéger, la commission parlementaire
des affaires municipales se réunira au salon rouge pour étudier
les projets de loi privés no 211, no 228, no 229, no 259, no 265, no
266, no 271, no 272, no 273 et no 281. Le même jour et aux mêmes
heures, c'est-à-dire durant les heures normales où les
commissions parlementaires peuvent siéger entre le 1er et le 21
décembre, la commission de la justice se réunira à la
salle 81-A pour étudier les projets de loi privés nos 221, 260,
254, 262, 269 et 278. (11 h 10)
Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion...
M. Lalonde: En vertu de l'article 34, est-ce maintenant?
M. Bertrand: Tout de suite après.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Non, il reste les
motions.
M. Lalonde: Après les motions.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Les motions, M. le leader
du gouvernement.
M. Bertrand: Oui, M. le Président, pour faire
siéger aujourd'hui une commission parlementaire au salon rouge. De 11 h
15 à 13 heures et de 15 heures à 16 heures, la commission des
institutions financières et coopératives va étudier le
projet de loi no 85 article par article. À compter de 16 heures
jusqu'à 18 heures, toujours au salon rouge, et ensuite, de 20 heures
à 24 heures, la même commission parlementaire étudiera le
projet de loi no 94 relatif à l'Inspecteur général des
institutions financières, ce projet de loi étant
étudié aussi article par article.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion
adoptée?
M. Lavigne: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Westmount.
M. French: Puis-je vous suggérer, avant que la motion soit
adoptée, que la Chambre ajoute le projet de loi privé qui a
été déposé aujourd'hui pour étude ce soir?
Est-ce possible, M. le leader du gouvernement?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, c'est celui de la
Coopérative laitière du sud de Québec? On va regarder cela
dans les prochaines minutes. Tenons pour acquis que s'il n'y a aucun
problème, effectivement, la commission pourrait étudier ce projet
de loi. S'il y avait problème, on reviendra avec cela un peu plus tard.
Disons qu'on l'inclut à la motion pour l'instant.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion
adoptée?
Recours à l'article 34
M. Lavigne: En vertu de l'article 34, s'il vous plaît, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion adoptée. En
vertu de l'article 34, M. le député de Beauharnois.
M. Lavigne: M. le Président, je voudrais vérifier
avec le leader du gouvernement, à savoir si dans la nomenclature des
projets de loi privés il a été fait mention du projet de
loi no 245 de la ville de Valleyfield.
M. Bertrand: Non, M. le député de Beauharnois.
M. Lavigne: Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: En vertu de l'article 34, tout d'abord est-il
possible que la commission
de la présidence du conseil siège immédiatement
après la fin du débat en deuxième lecture du projet de loi
no 96 sur l'intégration des institutions électorales? Est-ce
l'intention du gouvernement de commencer l'étude article par article
immédiatement après la fin du débat au cours de la
journée, comme il l'a fait pour certaines lois depuis quelques
jours?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, il faudrait d'abord que je
prenne des renseignements auprès du ministre parrain du projet de loi,
le ministre de la Justice et responsable de la réforme
électorale, pour savoir s'il sera disponible éventuellement,
après que nous aurons adopté son projet de loi. Dès que
j'aurai l'information, peut-être que ce que je pourrais faire, c'est de
la transmettre au leader de l'Opposition. Une fois le projet de loi
adopté en deuxième lecture, nous pourrons indiquer s'il peut
être étudié immédiatement en commission
parlementaire.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. J'ai une autre
question. Elle concerne la Charte des droits et libertés de la personne.
On sait qu'elle a été adoptée en deuxième lecture
vendredi dernier. On m'a informé que les parlementaires seraient
invités à faire l'étude article par article, une
étape extrêmement importante - on en conviendra - seulement au
milieu de la semaine prochaine, c'est-à-dire vers la fin du calendrier
de décembre. Le leader du gouvernement, avec le ministre de la Justice,
pourrait-il entrevoir ou organiser les travaux de l'étude article par
article de la charte pour que cela commence plus tôt? On nous a dit que
c'est parce que le ministre de la Justice a des amendements à
préparer. Nous n'aimerions pas que l'étude article par article de
la Charte des droits et libertés de la personne se fasse dans la
bousculade des derniers jours de la session. Est-il possible de commencer le
plus tôt possible? Nous sommes prêts.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, ce projet de loi sera
étudié en commission parlementaire article par article au
début de la semaine prochaine. On commencera l'étude de ce projet
de loi au début de la semaine prochaine.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Juste pour enchaîner avec la question qui a
été posée par le leader de l'Opposition, aura-t-on un
grand nombre d'amendements en ce qui concerne le projet de loi no 86 qui porte
sur la charte? Est-ce que ce sera deux ou trois amendements? Le ministre
prépare-t-il un grand nombre d'amendements importants?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, s'il devait y avoir des
amendements au projet de loi, et à partir de l'information que je viens
de donner à savoir que la commission parlementaire siégerait
quelque part au début de la semaine prochaine, je peux assurer le
député de D'Arcy McGee que tout le temps requis pour permettre
aux parlementaires de prendre connaissance des amendements, qui peuvent
être de nature différente, sera mis à la disposition de
ceux-ci afin qu'ils puissent les analyser, les évaluer et avoir un
débat qui leur permette de prendre des décisions en toute
connaissance de cause.
M. Marx: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx:... puis-je demander au leader s'il serait possible de
demander au ministre de la Justice de me faire communiquer les amendements
dès qu'ils seront prêts et de ne pas attendre jusqu'à une
heure avant le début de la commission, parce que les membres de
l'Opposition n'auront pas le temps nécessaire pour étudier ces
amendements. Je pense que ce serait plus utile pour tous les membres de la
commission si nous pouvions avoir les amendements au fur et à mesure
qu'ils sont prêts.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bédard: Autant que cela est possible, oui, M. le
Président. J'inviterais peut-être aussi les membres de
l'Opposition à nous faire connaître rapidement les amendements,
s'ils en ont à l'esprit, de manière que nous puissions
peut-être échanger avant que ne débutent les travaux de la
commission parlementaire. En commençant lundi, nous avons tout le temps
pour étudier avec tout le sérieux nécessaire la Charte des
droits et libertés de la personne.
M. Marx: M. le Président, le ministre m'invite à
lui faire connaître nos amendements. Il doit être au courant que
nous avons proposé des amendements lors
d'une conférence de presse le 25 octobre et aussi lors de nos
discours de deuxième lecture. De plus, le ministre a reçu des
mémoires de beaucoup d'organismes qui demandent des amendements.
M. Bédard: M. le Président...
M. Marx: Une autre question sur...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! En
vertu de l'article 34, l'Opposition doit s'adresser au leader du gouvernement
et il n'est pas question que cela se transforme en débat. Même les
questions additionnelles en vertu de l'article 34 doivent toujours s'adresser
au leader du gouvernement. En principe, s'il y a consentement...
peut-être que quelqu'un pourrait répondre, mais, au départ,
les questions en vertu de l'article 34 doivent s'adresser au leader du
gouvernement.
M. Marx: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Le leader de l'Opposition et moi-même avons
posé des questions au leader du gouvernement et vous avez permis au
ministre de la Justice de répondre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): En vertu de l'article 34,
les questions doivent évidemment être adressées au leader,
qui doit répondre. J'ai présumé qu'il y avait consentement
du leader pour donner la parole au ministre de la Justice. Il ne faudrait pas
que cela dégénère en un débat maintenant. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, pour être très
clair sur la réponse qu'il faut donner à ce stade-ci au
député de D'Arcy McGee, nous nous rappelons que lors du
débat en deuxième lecture, le député, entre autres,
a fait un certain nombre de suggestions et de propositions qui faisaient partie
de son discours. Entre une suggestion qui peut meubler un discours en
deuxième lecture et la rédaction d'un amendement qui s'ajoute
à un projet de loi au moment de son étude article par article, il
y a une différence, il y a une marge.
Ce que le ministre de la Justice indiquait au député de
D'Arcy McGee, je pense que c'était là son intention,
c'était qu'il était prêt à collaborer, mais dans la
mesure où l'Opposition, elle aussi, pourrait lui transmettre des
amendements qui seraient rédigés sous forme d'articles.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Westmount.
M. Marx: M. le Président, j'ai une autre question...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Posée en vertu de
l'article 34, au leader du gouvernement?
M. Marx: Oui. Pour répondre au leader du gouvernement, on
est même prêt à rédiger tout le projet de loi. Ma
question est la suivante: Est-ce exclu d'entendre des témoins qui ont
demandé de témoigner devant cette commission? Est-ce totalement
exclu ou est-ce que le leader du gouvernement voit la possibilité de
faire venir, par exemple, à la commission, la Commission des droits de
la personne qui a demandé à être entendue ainsi que
d'autres organismes?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, il faut savoir une chose. Le
député de D'Arcy McGee parle comme si tout ce projet de loi
n'avait pas été préparé à la suite de
consultations fort nombreuses. Je voudrais lui rappeler qu'il y a tout
près de 70 groupes qui ou bien ont été entendus ou bien
ont fait parvenir des mémoires, et que tout cela a fait partie de la
préparation du projet de loi qui a été
déposé par le ministre de la Justice. (11 h 20)
Dans ce contexte, M. le Président, je crois qu'à partir de
maintenant il nous appartient, membres de l'Assemblée nationale, de
prendre nos responsabilités et de faire valoir des points de vue sur la
base de représentations qui nous auraient été faites.
À ce stade-ci, il n'est évidemment pas question d'avoir de
nouvelles auditions sur le dossier.
M. Marx: M. le Président. M. Lalonde: Une
seconde.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: J'aimerais que le leader du gouvernement soit complet
s'il veut faire l'historique. Même s'il y a eu ces consultations,
d'autres groupes l'ont demandé après le dépôt du
projet de loi. C'est ce que le député de D'Arcy McGee demande.
Est-ce que vous êtes prêt à les entendre au début de
la commission parlementaire?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, une fois qu'une commission
parlementaire a siégé pour entendre des mémoires de
groupes et d'individus qui ont des représentations à faire
relativement à la bonification de la Charte des droits et
libertés de la personne, il se trouve encore des groupes et des
invididus qui, d'ailleurs, à juste titre, sentent le besoin d'acheminer
vers le ministre responsable de la loi ou le porte-parole de l'Opposition
différentes suggestions, recommandations ou des points de vue sur des
choses qui n'auraient pas été évoquées en
commission parlementaire et dont les parlementaires, semble-t-il, n'auraient
pas tenu compte. Cela se fait; c'est courant. Tous les ministres et les
députés reçoivent des représentations de cette
nature.
Je peux indiquer qu'il est évident que le ministre de la Justice,
d'abord dans la préparation de son projet de loi, et,
deuxièmement, dans la discussion en commission parlementaire, à
l'étude article par article du projet de loi, va faire état de
différentes représentations qu'il a reçues. S'il a des
amendements à apporter, il pourra indiquer que tel amendement ou tel
autre provient effectivement de représentations qui lui ont
été faites afin de bonifier le projet de loi.
M. Marx: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Je pense que le leader a mal compris ma question. Je
suis d'accord avec le leader du gouvernement qu'on a entendu des...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît: M.
le député de D'Arcy McGee, je crois qu'il y a abus en vertu de
l'article 34, de part et d'autre. En vertu de l'article 34, vous posez une
question et le leader du gouvernement répond.
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Rancourt): En vertu de l'article
34?
Une voix: Oui, en vertu de l'article 34.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Marx: Je conviens avec le leader du gouvernement qu'on a
entendu des personnes et des organismes avant que le ministre dépose son
projet de loi. Mais, maintenant, je demande qu'on entende ces personnes sur le
projet de loi. Ce n'est pas la même chose. Quand ces personnes sont
venues en...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de D'Arcy McGee, à mon entendement, vous avez
déjà posé cette question et le leader du gouvernement y a
répondu.
M. le député de Westmount, en vertu de l'article 34.
M. Fortier: D'Outremont, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): D'Outremont. Je
m'excuse.
M. Fortier: Grande distinction. J'aimerais que le leader du
gouvernement prenne avis d'une question. Je ne m'attends pas à la
réponse maintenant. Dans le dernier rapport intérimaire
d'Hydro-Québec, on fait état de changements substantiels dans la
gouverne des filiales qui autrefois dépendaient d'un conseil
d'administration et maintenant dépendent d'un vice-président
exécutif. On m'avait dit qu'un projet de loi serait
déposé. Je n'en ai pas entendu parler. J'aimerais que le leader
du gouvernement prenne avis de la question et qu'il me dise, dans les jours qui
viennent, quand ce projet de loi concernant la structure d'Hydro-Québec
ou la loi régissant Hydro-Québec sera déposé.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement, vous prenez avis de la question.
M. Bertrand: Je crois que la question contenait la
réponse, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: J'aimerais simplement avoir une confirmation, M. le
Président, en ce qui concerne le mode de scrutin. On nous avait
annoncé un projet de loi. Je sais que ce n'est pas l'intention du
gouvernement d'en faire adopter un avant la fin de la présente session.
Est-ce qu'il est exclu qu'un projet de loi sur le mode de scrutin ou ce qu'on
appelle la proportionnelle soit déposé à
l'Assemblée nationale avant le 21 décembre?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je ne peux pas dire que
c'est exclu. Je dois dire, par ailleurs, que le Conseil des ministres, à
ce moment-ci - je ne sache pas que ce soit à l'ordre du jour
d'aujourd'hui - n'a pas été saisi d'un mémoire sur cette
question.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Affaires du jour.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article 24 du feuilleton.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en
considération du rapport de la commission des finances et des comptes
publics qui a étudié le projet de loi no 79, Loi modifiant la Loi
sur la Curatelle publique.
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader, j'ai
entendu certaines remarques à savoir qu'on n'appelait pas cet
article-là.
M. Bertrand: M. le Président, je vais donc tirer les
choses au clair. Pourtant, je ne suis pas un bon chasseur...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Les prises en considération relativement aux
projets de loi sur la Curatelle publique, sur le ministère du Commerce
extérieur, sur le ministère du Travail, sur le transport scolaire
vont, pour quelques-uns d'entre eux, nécessiter probablement un
amendement, mais qui pourrait venir en troisième lecture. On m'a dit
tout à l'heure - et j'espère que la communication a
été transmise au leader de l'Opposition; je constate
effectivement que la communication ne s'est pas faite - que nous pourrions
adopter les prises en considération et prendre en considération
aussi - si vous me permettez l'expression - les amendements qui pourraient
être apportés au moment de la troisième lecture. C'est
l'entente à laquelle on me dit être parvenu tout à
l'heure.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Effectivement, c'est l'information que nous avons eue
quant à la prise en considération de ces rapports aujourd'hui.
Nous avions entendu parler d'un amendement en ce qui concerne la Loi sur la
Curatelle publique; qu'il soit proposé en troisième lecture, cela
n'a pas trop d'importance. Les informations que j'ai eues des porte-parole de
l'Opposition veulent qu'il n'y ait pas d'intervention à ce stade-ci de
nos procédures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: C'est la raison pour laquelle nous allons effectuer
ces prises en considération. D'abord, l'article 24 du feuilleton.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi no 79
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en
considération du rapport de la commission permanente des finances et des
comptes publics qui a étudié le projet de loi no 79, Loi
modifiant la Loi sur la Curatelle publique.
Est-ce que cette prise en considération est adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: Article 25, M. le Président.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi no 89
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en
considération du rapport de la commission permanente du commerce
extérieur qui a étudié le projet de loi no 89, Loi sur le
ministère du Commerce extérieur.
Est-ce que cette prise en considération est adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, vous étiez bien
parti. Article 26 du feuilleton.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi no 95
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en
considération du rapport de la commission permanente du travail qui a
étudié le projet de loi no 95, Loi sur le ministère du
Travail et modifiant d'autres dispositions législatives.
Est-ce que cette prise en considération du rapport est
adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Article 28, M. le Président.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi no 99
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise
en considération du rapport de la commission permanente des
transports qui a étudié le projet de loi no 99, Loi sur le
contrôle des coûts et des subsides en matière de transport
scolaire.
Est-ce que cette prise en considération est adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais
maintenant d'appeler l'article 23 du feuilleton.
M. Lalonde: Je m'excuse, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Je ne sache pas que le régime de fin de
session interdise au leader du gouvernement de répondre à des
questions inscrites au feuilleton le mercredi, avant qu'on entame le menu du
jour. Le leader aurait-il des réponses à quelques questions,
certaines assez vieilles?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Oui, j'ai effectivement regardé le feuilleton
ce matin pour me rendre compte que, dans les certaines vieilles, il n'y en a
qu'une, celle du 25 mars au nom du député de
Mégantic-Compton. Toutes les autres, entre autres celle inscrite
à l'article 2 du feuilleton, datent du 23 novembre, du 30 novembre et du
7 décembre. Dès que ces questions ont été inscrites
au feuilleton, j'ai avisé les différents ministres qu'ils
auraient à répondre à ces questions et j'attends d'avoir
les réponses. Vous admettrez avec moi que les toutes dernières,
sauf celle du 25 mars, je suis d'accord, sont très récentes.
M. Gratton: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gatineau et leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton:... dans la même veine, à l'article 13,
je conviens que la question ou l'ordre de l'Assemblée est daté du
30 novembre, mais le ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration avait indiqué, la semaine dernière, qu'il serait
prêt à déposer cette liste des organismes qui ont
reçu des subventions du ministère dès cette semaine. Je
conviens également que le ministre est absent présentement, mais
est- ce que le leader du gouvernement pourrait m'indiquer si, avec le
consentement de l'Opposition, bien sûr, au retour du ministre il pourra
procéder au dépôt de ce document, s'il est prêt,
comme l'avait promis le ministre?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement. (11 h 30)
M. Bertrand: Comme le dit effectivement le leader adjoint de
l'Opposition, le ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration avait pris une forme d'engagement, en réponse à une
question, de déposer la liste des subventions qui avaient
été accordées à différents organismes
relevant de programmes de subvention de son ministère. Dans ce contexte,
je vais, dès son retour, lui indiquer que vous souhaiteriez que cette
liste puisse être déposée le plus rapidement possible et,
à ce moment, je vous fournirai l'information sur les délais
nécessaires dont le ministre a besoin pour répondre à
votre question.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement, nous revenons...
M. Bertrand: Oui, je vous demanderais d'appeler l'article 23 du
feuilleton, M. le Président.
Projet de loi no 96 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture
du projet de loi no 96, Loi sur l'intégration de l'administration du
système électoral. M. le ministre de la Justice et
président du Comité de législation.
M. Marc-André Bédard
M. Bédard: M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en
recommande l'étude à la Chambre.
M. le Président, effectivement, nous procédons aujourd'hui
à l'étude en deuxième lecture du projet de loi no 96 qui
vise à l'intégration ou au regroupement de nos trois organismes
électoraux au Québec. On parle naturellement ici de la Direction
générale des élections, la Direction
générale de la représentation électorale et de la
Direction générale du financement des partis politiques. Ce sont
trois organismes que nous voulons regrouper par ce projet de loi. Pourquoi, M.
le Président, est-il nécessaire maintenant de procéder
à la fusion de ces trois organismes en un seul? Peut-être que,
pour bien le comprendre, vous me permettrez un court historique pour ceux et
celles qui suivent nos débats afin de situer le projet de loi et
l'a-
propos de ce projet de loi dans une perspective plus globale.
Il y a d'abord comme on le sait le poste de Directeur
général des élections qui existe depuis toujours au
Québec et cette personne s'occupe de l'ensemble du déroulement
des élections au Québec.
En 1977, le gouvernement du Parti québécois a
décidé de réglementer les contributions de personnes
morales comme les compagnies et de réglementer aussi les dépenses
électorales des candidats des partis politiques. Depuis longtemps, notre
vie politique était tissée de décisions politiques souvent
influencées par les fortes contributions de groupes
d'intérêt à des partis politiques. Tout cela pouvait
créer une atmosphère de manipulation, de mépris des
intérêts de la population et nuisait à la
crédibilité de l'État. Nous avons donc
décidé, comme gouvernement, de rendre les partis politiques
indépendants des caisses électorales occultes en
réglementant les contributions à ces partis, en
réglementant leurs dépenses et en rendant une partie des
contributions des électeurs à un parti politique
déductible d'impôt. Cette mesure fut mise de l'avant pour inciter
les gens à financer eux-mêmes leur système
démocratique.
Pour réaliser et surveiller tout cela, cette réforme qui
avait beaucoup d'ampleur, le poste de Directeur général du
financement des partis politiques fut créé avec deux adjoints.
Depuis cinq ans, tout cela est en place et fonctionne, je pense, à la
satisfaction générale et surtout à l'avantage de tous les
citoyens et citoyennes du Québec. On peut considérer que la
période de mise en place et de rodage est terminée. D'autre part,
M. le Président, le gouvernement avait aussi mis en place en 1979 une
Commission de la représentation composée de trois membres dont le
mandat est de refaire la délimitation des comtés du Québec
entre chaque élection. En effet, la population de chaque comté et
de chaque ville du Québec peut varier de façon importante durant
les quatre ou cinq ans qui se passent entre deux élections. Des
quartiers se vident, d'autres agglomérations augmentent rapidement de
population. Il faut donc ajuster les limites des comtés à ces
changements de population pour s'assurer que le vote de chaque électeur
ait le poids le plus égal possible. Tout le monde sait que dans un
comté de 20 000 électeurs, ceux-ci disposent de deux fois plus
d'influence électorale que les électeurs d'un comté voisin
où il y a 40 000 électeurs. C'est cette situation qui existait
auparavant et que nous avons voulu corriger. Quand nous avons
décidé de constituer cette commission de la représentation
électorale, ce fut donc un grand pas pour assurer un meilleur
système électoral au Québec. Je signale aussi que les
trois membres de la commission ont maintenant le pouvoir de délimiter
les frontières des comtés du Québec sans soumettre leurs
décisions aux députés, c'est-à-dire que les trois
membres de la commission de la représentation électorale peuvent
faire ce travail de délimitation des comtés d'une façon
non partisane. Ils peuvent le faire en pleine indépendance puisque
l'Assemblée nationale n'a pas à se prononcer, une fois que le
travail a été fait par eux et que les délimitations des
comtés sont arrêtées.
Comme on peut le constater, M. le Président, le Québec
s'est doté récemment de plusieurs organismes et de plusieurs lois
qui lui assurent un système électoral qui se situe parmi les plus
avancés au monde. Je pense qu'on peut le dire, sans se prendre pour
d'autres; on peut d'autant plus le dire, de ce côté-ci de la
Chambre, que la plupart des amendements, que la plupart des réformes
d'importance qui ont été menées à terme au niveau
de l'amélioration du système électoral l'ont
été, en fait, avec l'assentiment et, dans bien des cas, avec le
consensus unanime des membres de cette Assemblée.
Le pas que nous voulons franchir par le projet de loi qui est
présentement à l'étude consiste simplement à mettre
ensemble le personnel et les fonctions des trois organismes dont je viens de
parler, sous la gouverne du Directeur général des
élections. Les députés se souviendront qu'il s'agit
là du fruit d'une démarche qui a débuté il y a
plusieurs mois. En effet, lors des crédits de la réforme
électorale en juin dernier, j'avais déjà indiqué
mon intention de procéder à ce regroupement.
Conséquemment, j'avais mis sur pied un comité technique qui a
procédé à une exploration de la question, par exemple, les
ressources dont dispose chaque organisme, les tâches qu'ils remplissent
et ainsi de suite. J'avais aussi demandé aux trois directeurs
généraux de réfléchir sur la question et je leur
avais demandé leur avis. Ces avis ou ces réflexions qui m'ont
été communiqués sous le sceau confidentiel ont quand
même été déposés à l'Assemblée
nationale avec l'accord des personnes mentionnées. Tous ces rapports, M.
le Président, concluaient aux avantages de l'intégration ou du
regroupement de nos organismes électoraux. Voilà donc l'origine
du projet de loi 96 et je rappelle que la semaine dernière, une
commission parlementaire a tenu des audiences qui ont permis d'entendre les
témoignages des trois directeurs généraux actuels,
à savoir M. Pierre-F. Côté, M. Pierre-Olivier Boucher et M.
Jean-Luc Lemieux. Je pense que cette commission parlementaire et ces
témoignages qui ont été donnés devant les membres
de la commission parlementaire par les trois personnes que je viens de
mentionner ont éclairé beaucoup d'aspects du dossier et je
suis convaincu que cette commission parlementaire a été
très utile.
Que contient le projet de loi que nous étudions
présentement, M. le Président? Tout d'abord, comme je l'ai dit
tout à l'heure, il permet l'intégration administrative des
composantes du système électoral actuel, c'est-à-dire le
financement, les élections et la délimitation des
circonscriptions électorales. Il prévoit également des
dispositions pour le personnel et le reclassement des gens qui travaillent
actuellement à l'intérieur de ces organismes. (11 h 40)
Le projet de loi prévoit que ce regroupement se fait sous
l'autorité du Directeur général des élections, sous
l'autorité d'une personne désignée, c'est-à-dire
d'une personne désignée par l'Assemblée nationale
elle-même et non par le gouvernement. Juridiquement le statut de personne
désignée donne, à celui ou à celle qui en dispose,
des avantages importants, par exemple, une responsabilité claire en ce
qui concerne son champ d'action et une très grande autonomie dans les
prises de décisions. Cela vise à assurer plus d'efficacité
et aussi, parce que c'est fondamental, plus d'indépendance à la
personne qui occupe ce poste une fois que sa nomination est
entérinée par les deux tiers de l'Assemblée nationale.
Historiquement, M. le Président, le domaine électoral a
toujours été confié à une personne
désignée. Je reviendrai tantôt sur cet aspect de
l'autonomie.
Je pense qu'il était naturel - c'est la conclusion à
laquelle nous en sommes venus -d'articuler le regroupement à partir du
Directeur général des élections actuel qui possède
le statut de personne désignée. Plusieurs raisons militaient en
faveur de cette approche. Il s'agit d'abord de la plus vieille institution,
celle qui dispose du personnel le plus nombreux et de loin celle qui administre
déjà les lois fondamentales de notre processus électoral,
c'est-à-dire la Loi électorale elle-même. Également,
le Directeur général des élections, comme on le sait,
administre aussi la confection des listes électorales. Tout le monde
s'entend pour dire que le financement des partis politiques et la
délimitation des circonscriptions de la carte électorale sont des
activités parallèles aux élections elle-mêmes. C'est
ainsi que le projet de loi confie d'autres responsabilités
supplémentaires au Directeur général des
élections.
L'administration du financement des partis politiques sera donc
gérée par le Directeur général des
élections. Quant à elle, la Commission de la délimitation
des districts électoraux, avec ses trois membres indépendants,
demeure en place avec le projet de loi no 96 et celui-ci propose que son
personnel et son administration soient intégrés à celui de
la Direction générale des élections. Les trois organismes
qui sont ainsi regroupés ont toujours bénéficié, on
le sait, d'un statut assez particulier au sein des organismes gouvernementaux.
D'une part, leurs responsables sont nommés par l'Assemblée
nationale et non par le gouvernement; d'autre part, chacun
bénéficie, à divers degrés, d'une autonomie par
rapport aux contrôles habituels de l'administration publique. Par
exemple, envers les contrôles du Conseil du trésor. Ces organismes
avaient également, on le sait, une sorte de statut particulier par
rapport aux contrôles habituels de l'administration en ce qui concerne la
détermination des budgets. Ce statut spécial, à
l'intérieur du gouvernement, a été voulu par le
législateur depuis le début de nos lois électorales et a
pour but de protéger l'indépendance des responsables et de les
garder à l'abri de l'ingérence, qui est toujours possible, du
pouvoir exécutif. Quand on parle du processus électoral, on parle
de quelque chose de fondamental pour ce qui est de la marche de notre
système démocratique et il est clair que les organismes qui sont
là pour en assurer la bonne administration, la bonne marche doivent
d'être dotés d'une indépendance la plus grande possible de
façon que le processus électoral lui-même et son
fonctionnement soient à l'abri de tout soupçon.
Ces acquis du passé, cette indépendance, nous avons voulu
les conserver intacts dans le projet de loi no 96. Le regroupement des
organismes conserve l'essentiel des caractéristiques de protection de
leur indépendance dont je parlais tantôt. Par ailleurs, le respect
de ce principe d'indépendance n'enlève quand même pas la
pertinence et la nécessité d'un contrôle adéquat par
l'Assemblée nationale qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, a
toujours nommé ces personnes à l'unanimité jusqu'à
maintenant.
En effet, c'est une chose que de tenir à l'indépendance du
Directeur général des élections vis-à-vis du
Conseil des ministres, vis-à-vis de l'Exécutif, mais cela ne veut
pas dire nécessairement l'indépendance totale vis-à-vis de
l'Assemblée nationale elle-même. Il en va de la
responsabilité des députés de veiller au fonctionnement du
processus électoral, de surveiller l'emploi des fonds et de susciter un
débat public sur l'orientation générale de
l'administration du système électoral du Québec.
Le projet de loi no 96 règle directement cette question de la
responsabilité des membres de l'Assemblée nationale et du pouvoir
législatif en prévoyant que, de façon statutaire, le
Directeur général des élections remettra un rapport annuel
au président de l'Assemblée nationale, comprenant aussi un
rapport
financier. Dans le même sens, les prévisions
budgétaires du directeur général seront donc
étudiées publiquement par une commission de l'Assemblée
nationale qui aura à les approuver.
De cette façon, nous croyons que la population et ses
députés pourront suivre l'administration de nos lois
électorales de façon ouverte, dans un cadre permettant la
discussion sur les objectifs et sur l'emploi des fonds engagés, ce qui
permettra de concilier, comme je l'ai dit tout à l'heure, l'importance
de l'indépendance de nos organismes électoraux et des personnes
qui en ont la responsabilité et la nécessité qu'il y a
aussi d'une surveillance par un organisme adéquat à
l'Assemblée nationale en ce qui a trait à l'utilisation des fonds
publics. Cela ne signifie pas que le gouvernement pourra s'ingérer plus
facilement dans les gestes du directeur général, puisque le
mécanisme retenu assure un contrôle réel par le pouvoir
législatif sur l'administration du système électoral dans
le respect de la nécessaire indépendance de l'institution
vis-à-vis du gouvernement.
En plus de protéger l'autonomie de notre système
électoral, le gouvernement veut, par ce projet de loi, assurer une plus
grande efficacité dans l'utilisation de l'argent des contribuables.
Quand nous parlons de notre système électoral qui est un des plus
avancés - je pense que nous pouvons le dire et qui a aussi ses
complexités, nous sommes en face de cinq lois distinctes, de trois
institutions et donc d'une répartition de responsabilités de
chaque directeur général dans plusieurs lois et même une
incursion de chacun des directeurs dans le domaine municipal. On admettra que
cela ne présente pas une unité d'action très forte; en
tout cas, les possibilités d'unité d'action risquent d'être
diminuées. Les citoyens ordinaires ont souvent de la difficulté
à savoir qui fait quoi et cherchent souvent la porte d'entrée
pour acheminer leurs problèmes et faire en sorte qu'on réponde
à leurs questions très légitimes. (11 h 50)
Voilà donc, je pense, M. le Président, de bonnes raisons
pour procéder à ce regroupement, essayer d'assurer une
unité d'action, s'assurer que l'ensemble de notre système
électoral travaille dans la même direction et en harmonie. Cela
veut dire aussi, nous l'espérons, que le service à
l'électeur, qui est le premier concerné par cette loi, sera
amélioré et cela est très important parce que les
principes de base qui découlent de notre système électoral
ont toujours été orientés en fonction des besoins de
l'électeur et non des besoins des candidats.
On l'évoquera sans doute tout à l'heure du
côté de l'Opposition, certains se demanderont pourquoi
l'intégration ou le regroupement de ces organismes n'a pas
été fait dès le début, même si l'Opposition
l'avait suggéré dans le temps. Comme je l'ai dit
déjà, une institution date de 1979, l'autre de 1977, ce n'est pas
très éloigné dans le temps. Nous sommes en mesure de
constater après coup que le fait de créer des organismes
autonomes les uns des autres leur a permis, dans un premier temps, de bien
asseoir les réformes concernées et de sensibiliser les
électeurs et les partis aux dispositions qui étaient contenues
dans ces lois.
Les nouveaux venus en matière électorale, les deux
organismes dont je parlais, soit la représentation électorale et
le financement des partis politiques, se sont taillés une place et leur
action est bien connue maintenant des citoyens et des partis, y compris au plan
municipal. De plus, les administrations nouvelles sont apparues parce que
apparaissaient aussi de nouvelles fonctions.
Jamais on n'avait réglementé le financement des partis
politiques et jamais on n'avait mis en place une commission pour confectionner
la carte électorale avec ses caractéristiques,
indépendamment des influences politiques, ce qui était le cas
auparavant. Je pense qu'il ne s'agissait pas là d'un luxe superflu.
Après cinq ans d'existence pour l'une et l'autre de ces
institutions, je suis convaincu que l'Assemblée nationale a pris une
bonne décision en jugeant que le première étape exigeait
des organismes spécifiques au départ. Je crois que, étant
donné l'ampleur des réformes qui ont été
proposées et adoptées, ces organismes ont eu un travail
énorme à faire de sensibilisation au niveau de l'ensemble de la
population.
Je pense que leur action a permis que les réformes atteignent un
rythme de croisière et que les citoyens soient sensibilisés
à ces nouvelles réalités électorales. Cet objectif
a d'ailleurs été atteint également, et je rappelle que
depuis 1979 les citoyens du Québec ont versé, de leur propre
chef, plus de 20 000 000 $ aux partis politiques reconnus à
l'intérieur de la réforme que nous avions fait adopter concernant
le financement des partis politiques.
Je ne suis pas sûr que ce résultat remarquable aurait
été atteint sans la création d'un organisme
spécialisé qui était voué exclusivement à
cette tâche. Je sais qu'en cela les membres de l'Opposition ne partagent
pas notre opinion, et je pense que c'est leur droit. Les convictions
très légitimes de l'Opposition étaient - tel qu'elle l'a
exprimé lorsque le projet de loi du financement des partis politiques a
été adopté - de proposer que tout cela se fasse dans un
seul organisme sous la direction du Directeur général des
élections.
Je crois qu'avec les éléments que nous apportons, et c'est
ma conviction, la bonne décision a été prise, dans un
premier temps, ce qui ne veut pas dire qu'on doit nécessairement, en
termes d'efficacité administrative et d'efficacité pour les
services aux électeurs, continuer à fonctionner avec trois
organismes indépendants. Au contraire, je crois qu'il est maintenant
temps de procéder au regroupement. Autrement dit, maintenant que les
nouvelles lois sont entrées dans les moeurs, y compris au plan
municipal, il est simplement temps de procéder à une nouvelle
étape et, pour des motifs d'efficacité accrue et
d'économie, de les intégrer. Même si nous différons
d'opinions avec l'Opposition là-dessus, je crois qu'avoir
procédé à une telle intégration, auparavant, aurait
été trop tôt. Il fallait que chaque organisme prenne sa
place et que la sensibilisation de la population aux nouvelles réformes
soit faite.
M. le Président, il est évident qu'un des objectifs
poursuivis par le regroupement consiste en la réduction des coûts
du système électoral actuel. L'élimination des
dédoublements au niveau de la recherche, des communications, des
contentieux, des locaux et l'efficacité accrue découlant de
l'unification des responsabilités permettent d'envisager une
appréciable diminution des coûts. Je crois que, dans la
période économique que nous vivons à l'heure actuelle,
toute disposition qui contribue à diminuer les coûts de
fonctionnement d'organismes gouvernementaux ne peut qu'être de mise
pourvu - c'est notre conviction - qu'on n'en diminue d'aucune façon
l'efficacité.
D'ailleurs, une évaluation préliminaire du Directeur
général des élections, à la lumière des
informations disponibles, établit qu'on peut envisager
déjà, à première vue, une économie possible
de près de 2 000 000 $ par année au niveau des effectifs et une
économie de 400 000 $ au niveau des ressources matérielles et
financières. Quand on sait que le budget de fonctionnement de nos
organismes électoraux se situe entre 10 000 000 $ et 13 000 000 $, je
crois qu'on est en mesure d'affirmer qu'une économie représentant
2 500 000 $, à première vue, représente une
économie substantielle, puisque cela représente près de
20% d'économie sur ce que coûte, à l'heure actuelle,
l'ensemble de l'administration de nos organismes électoraux. D'ailleurs,
simplement au plan des effectifs, on peuj: prévoir qu'ils pourront
diminuer d'une centaine de personnes, ce qui est très significatif en
termes d'économie, et l'efficaqité n'en souffrira pas.
En plus de ce genre d'économies importantes qu'on peut appeler
des économies d'échelle provenant de la réduction du
dédoublement et de l'encadrement, le projet de loi no 96 ouvre la porte
à des réductions futures de coûts en ce qui concerne notre
gestion de l'ensemble du système électoral. Ces
préoccupations m'ont semblé partagées par l'ensemble des
membres de la commission parlementaire qui a entendu les trois directeurs
généraux, la semaine dernière.
Une fois l'étape législative franchie, une fois l'adoption
de ce projet de loi faite, je pense qu'il sera pertinent de poursuivre, selon
des modalités à déterminer, la réflexion sur
d'autres types d'économie afin de réduire davantage les
coûts de notre système électoral tout en n'en diminuant pas
l'efficacité. Dans cet esprit, je crois qu'il faudra s'interroger
à moyen terme sur la possibilité de réaliser des
économies de gestion, c'est-à-dire qu'on devra
réfléchir sur la possibilité de faire certaines choses
différemment de la manière qu'on le fait présentement. Par
exemple, je l'ai dit tout à l'heure, des sommes importantes ont
été dépensées en matière d'information du
public par des brochures et de la publicité payée. C'était
nécessaire puisque, dans le cas du financement des partis politiques, il
s'agissait d'une réforme nouvelle; il y avait donc une obligation de
sensibilisation de la population. (12 heures)
La question qui se poserait dans ce cas est de savoir s'il ne serait pas
souhaitable de diminuer un peu le niveau de cette publicité sans
pénaliser les citoyens et sans les priver d'information essentielle. Il
ne faut pas s'étonner que dans un passé récent des
dépenses substantielles aient été consacrées
à la publicité puisqu'il était essentiel d'informer des
électeurs adéquatement sur des dispositions nouvelles, relatives,
par exemple, à l'exercice de leur droit de vote, dispositions qui
étaient contenues dans des lois récentes, telle la loi
électorale qui date du 1979 et qui contenait un grand nombre de
dispositions originales, nouvelles, orientées en fonction d'un meilleur
service aux électeurs. Afin que ces nouvelles dispositions donnent un
résultat pratique, il est important que la population en soit
informée, ce qui est fait au moment où on se parle.
Lorsque la commission de l'Assemblée nationale se réunira
statutairement, je crois que ce sera le genre d'interrogations qui pourraient
être abordées. Ce n'est qu'un exemple que je donne. Il pourrait
être bon aussi de se demander si des avenues plus économiques ne
pourraient pas provenir de certaines modifications à nos lois
électorales ou à nos manières de faire en matière
de carte électorale, par exemple, en matière de recensement. On
sait que cela représente un coût énorme de faire le
recensement chaque année. En d'autres mots, est-ce que des exigences
inscrites dans nos lois électorales pourraient être
atténuées si on s'aperçoit que cela entraînerait des
économies
substantielles? C'est le genre d'interrogation qu'on pourrait se poser.
Il serait intéressant d'envisager, dans ce sens-là, la
constitution d'un groupe de travail de députés des deux
côtés de la Chambre, comme cela a été fait dans le
passé sur des sujets semblables. Je crois que nous pourrons revenir sur
cette question à un autre moment.
Dans notre évaluation des coûts actuels, il ne faudra
jamais perdre de vue les caractéristiques propres à notre
système électoral. Il est évident, avec tous les articles
de journaux qui sont parus et avec les chiffres qui sont connus, que le
fonctionnement - tous les membres de l'Assemblée nationale s'en sont
rendu compte, de même que la population - de notre système
électoral coûte cher et qu'il y a lieu non seulement de
procéder à des économies par l'adoption d'une loi telle
que celle que je présente, mais à d'autres économies en
s'interrogeant sur d'autres avenues avec les membres de l'Opposition. Dans
notre évaluation des coûts actuels de notre système
électoral, il ne faudra quand même jamais perdre de vue les
caractéristiques propres à notre processus électoral qui
font que c'est l'un des plus avancés du point de vue
démocratique.
Les mécanismes électoraux prévus dans nos lois
électorales, de même que les mandats confiés aux
différentes institutions chargées d'administrer ces lois sont
différents de ce qui existe plus particulièrement au niveau
fédéral et même ce qui existe aussi dans d'autres
provinces. Il serait peut-être possible d'économiser davantage; il
s'agit d'évaluer jusqu'à quel point la révision des
mécanismes électoraux spécifiques au Québec
constituerait un recul par rapport à l'objectif premier d'un processus
électoral basé sur la primauté de l'électeur,
c'est-à-dire l'objectif premier de favoriser l'exercice du droit de vote
et la qualité de la vie démocratique. Il faudra donc garder
constamment à l'esprit les propos qu'a tenus le directeur
général des élections, M. Pierre-F. Côté,
lors de la commission parlementaire de la semaine dernière. M.
Côté disait ceci: "Cependant, tout en procédant
résolument à des économies, faisons-le de façon
prudente pour que, d'une part, on ne se retrouve pas dans des situations
antérieures désuètes et que, d'autre part, on n'agisse
plus en fonction de l'électeur, le premier et le dernier rempart de la
démocratie". M. le Président, on peut donc dire que le projet de
loi no 96, par les épargnes immédiates et à moyen terme
qu'il fera faire aux fonds publics, s'inscrit dans la voie directe de
l'ensemble des mesures de compressions budgétaires et d'effectifs que le
gouvernement a mis en branle depuis trois ans. Pour résumer la
portée de ce projet de loi, le gouvernement veut intégrer les
trois organismes électoraux existants pour engendrer des
économies tout en préservant l'indépendance
vis-à-vis du Directeur général des élections, mais
en s'assurant que les députés pourront à chaque
année examiner les performances de l'institution et s'interroger sur les
directions qui sont prises pour l'année à venir en fonction des
dépenses qui seront contenues dans les prévisions
budgétaires déposées par le Directeur
général des élections. J'insiste beaucoup sur ce
contrôle de l'Assemblée nationale que nous avons inscrit dans la
future loi. Je pense que c'est une garantie essentielle qui constitue un des
aspects les plus originaux du projet de loi no 96.
Également, M. le Président, il faut signaler qu'en plus de
la commission parlementaire annuelle et statutaire la loi élargit et
précise le rôle de l'actuel conseil consultatif. Il sera
dorénavant composé du Directeur général des
élections et de trois représentants de chacun des partis
politiques représentés à l'Assemblée nationale. Son
rôle sera de donner des avis sur toute question relative aux lois dont le
directeur des élections a la charge. Il n'a donc pas de rôle
décisionnel; il est clair que ce conseil consultatif n'a pas de
rôle décisionnel. Il reste que l'expérience passée
démontre que son influence peut être très importante. II
s'agit de se rappeler le rôle joué par le conseil consultatif qui
était en place dans la Loi sur le financement des partis politiques.
D'ailleurs, lors de nos audiences de la semaine dernière, le
Directeur général du financement des partis politiques, qui a
travaillé pendant cinq ans avec un tel conseil consultatif, nous
déclarait ceci: "L'expérience a démontré que ce fut
sans doute, parmi les leviers mis à la disposition du directeur
général, un des plus importants. Le conseil consultatif,
continuait le Directeur général du financement des partis
politiques, constitue un forum permanent et de premier choix non seulement pour
être tenu informé, mais aussi et surtout pour s'assurer de la
cohérence et du réalisme de la démarche suivie dans
l'application de la loi. "
Je pense que ce commentaire garde toute son actualité lorsqu'il
s'agit de parler du rôle du conseil consultatif qui est prévu dans
le projet de loi no 96. Je voudrais signaler un autre article du projet en ce
qui concerne la nomination des directeurs de scrutin. Pour la première
fois dans notre histoire électorale, avec l'adoption de la Loi
électorale en 1979, notre gouvernement a basé leur
sélection sur un concours public qui assure leur compétence. Il
s'est agi d'une réforme majeure qui nous permet aujourd'hui, avec le
projet de loi no 96, de raffiner ou de pousser plus loin le processus de
nomination des directeurs de scrutin. En effet, le projet de loi prévoit
que maintenant, ce qui n'était pas le cas auparavant, tout en continuant
à baser sa
sélection sur un concours, c'est le Directeur
général des élections qui nommera lui-même celui des
candidats qui s'est classé premier au concours dans chaque
circonscription électorale lorsqu'il s'agit de directeurs de scrutin. Le
pas franchi en 1979 nous permet de procéder à une bonification de
ce processus de nomination. Je sais que cela rejoint la suggestion qui avait
été faite dans ce sens par le député de Gatineau et
ce, depuis plusieurs mois. (12 h 10)
Voilà, M. le Président, ce que décrit l'essentiel
du projet de loi que nous avons devant nous pour son étude en
deuxième lecture. On pourrait résumer. Une intégration des
trois organismes existants en matière électorale sous
l'autorité d'une seule personne désignée,
c'est-à-dire le Directeur général des élections;
une indépendance complète du poste de cette personne
désignée vis-à-vis du pouvoir exécutif mais un
contrôle précis par une commission de l'Assemblée
nationale. Également, en résumant, ce projet de loi propose la
création d'un conseil consultatif pour fournir des avis au Directeur
général des élections.
M. le Président, je me réjouis - à moins que j'aie
mal interprété les réflexions faites déjà
par les membres de l'Opposition -que les points centraux de ce projet de loi
font un quasi-consensus tant au sein de l'Opposition que chez les trois
directeurs généraux que nous avons entendus. Sans préjuger
des ajustements qui interviendront sans doute au stade de l'étude du
projet de loi article par article, il est important de noter cette convergence
des points de vue sur le principe de l'intégration. En effet, il est
d'usage que des modifications importantes à nos lois électorales
se fassent à l'intérieur d'un climat d'entente
générale. Lorsqu'il est question des règles du jeu qui
font élire les députés de l'Assemblée nationale,
c'est-à-dire la base de notre système démocratique, il me
semble important de viser à des consensus sur les principes.
En terminant, M. le Président, je voudrais replacer le projet de
loi 96 dans une perspective de tout ce que le gouvernement du Parti
québécois a réalisé en matière
d'amélioration de nos lois électorales. Si quelqu'un regarde
l'ensemble des gestes législatifs que nous avons posés depuis
1976 dans ce secteur, il ne pourra faire autrement que de conclure que la
démocratisation et l'efficacité de nos lois électorales
ont toujours été une des préoccupations majeures de ce
gouvernement. Je pense que, dans le passé, on ne retrouve aucun autre
gouvernement qui ait poussé aussi loin le souci de redonner le
contrôle du processus électoral aux citoyens. Je rappelle
simplement, M. le Président, ce que nous avons fait depuis six ans. Nous
avons réglementé le financement des partis politiques en
assainissant les caisses électorales. Nous avons fait
téléviser les débats de l'Assemblée nationale pour
informer au maximum la population sur ce qui se faisait dans son
Assemblée nationale. Nous avons dépolitisé le
découpage de la carte électorale en la mettant entre les mains de
gens indépendants au lieu de la laisser entre les mains du gouvernement.
Nous avons adopté la Loi sur la consultation populaire permettant ainsi
une forme de participation de la population aux décisions. Nous avons
également adopté une nouvelle Loi électorale qui accorde
la place centrale à l'électeur et qui est maintenant en vigueur.
Je pense que nous pouvons dire que nous avons complètement
transformé les lois électorales municipales pour contrôler,
là aussi, l'influence des caisses électorales et pour assurer une
meilleure justice dans le découpage des quartiers municipaux.
Finalement, nous avons adopté une loi favorisant l'accès à
l'information gouvernementale puisque nous savons bien que le fait que les
citoyens soient mieux informés contribue à améliorer la
qualité de la vie démocratique. En adoptant le projet de loi 96,
je pense que nous ajouterons à ces réalisations dont nous avons
raison d'être fiers, pas seulement de la part du gouvernement, mais,
comme je l'ai dit à plusieurs reprises, souvent ces lois ont fait
l'objet d'un consensus et cela rejoint dans bien des cas la fierté de
tous les membres de cette Assemblée nationale.
M. le Président, je sais que c'est peut-être une
énumération un peu longue de tout ce que nous avons
réalisé, mais cela mérite quand même d'être
dit. Cela ne veut pas dire qu'on doive s'asseoir sur nos lauriers. Comme
ministre responsable de la réforme électorale, je tiens à
souligner que le gouvernement a l'intention de continuer à
améliorer la qualité de notre vie démocratique. À
cette fin, plusieurs projets font encore l'objet de réflexions: celui
des listes électorales permanentes, qui pourraient servir lors des
élections municipales; il est également pertinent d'envisager la
confection d'un code électoral qui intégrera et simplifiera
toutes les dispositions que nous connaissons en les rendant plus
compréhensibles pour l'ensemble des citoyens et citoyennes du
Québec. M. le Président, voici ce que contient le projet de loi
no 96. J'espère qu'il sera adopté à l'unanimité.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Charlevoix.
M. Raymond Mailloux
M. Mailloux: M. le Président, quoique je sois pour
l'Opposition celui qui doit prendre la parole quant à la réforme
électorale, je
voudrais vous prévenir maintenant que, comme mon collègue
de Gatineau, lui, n'a pas la grippe, je me limiterai à 20 minutes,
laissant à ce dernier le soin de prendre la plus importante partie du
temps accordé au Parti libéral.
Je voudrais simplement, dans les 20 minutes qui me sont allouées,
faire quelques observations sur le projet de loi no 96 qui est devant nous.
Nous avons entendu, il y a quelques jours, les trois directeurs
généraux qui sont venus à la commission donner des
informations supplémentaires que nous avions demandées,
informations qui ont pu éclairer une partie du dossier qui est devant
nous.
J'écoutais tantôt le ministre de la réforme
parlementaire dire qu'il espérait que l'Opposition serait unanime
à accepter le contenu du projet de loi no 96 dans ses points principaux.
Je pense qu'il n'a pas fait erreur puisque, en 1977, c'est en fait tous les
intervenants de l'Opposition, soit du Parti libéral, de l'Union
Nationale et du Crédit social, qui insistaient avec
véhémence pour que la loi 2, dont il était question alors
et qui devait mettre en place le Directeur du financement des partis
politiques, regroupe le tout sous la tutelle du Directeur général
des élections. Il est indiscutable que si, à cette époque,
les partis de l'Opposition avaient conseillé au gouvernement de ne pas
mettre en place d'autres structures dont les coûts paraîtraient
sûrement dans les années ultérieures, nous avons
aujourd'hui raison de dire que ce que nous préconisions alors, nous
l'avions prévu assez valablement.
Avant de parler du projet de loi no 96, je voudrais dire deux mots en
aparté. Nous vivons actuellement une crise économique qui est une
des plus graves qu'ait connues l'Amérique du Nord. C'est la
deuxième dont j'ai connaissance, mais je pense qu'elle frappe
actuellement la jeunesse et tous nos concitoyens, qui ont quand même
été gavés depuis 20 ans. Nous vivons actuellement une
crise économique assez extraordinaire. Comme citoyen canadien, hier
soir, j'écoutais des commentaires à la suite du rapport du
Vérificateur général du Canada. Quand on parle de crise
économique et qu'on constate le laisser-aller qu'il y a dans
l'administration des fonds publics, je pense que chaque citoyen qui vit cette
crise a des raisons d'insister davantage auprès de tous ses
gouvernements, qu'ils soient canadien ou québécois, pour que
chaque dépense de fonds public soit faite pour la meilleure utilisation
possible. Ici-même, dans le Québec, nous avons des
problèmes financiers que chacun connaît. Il va de soi que le
gouvernement, comme l'Opposition, s'interroge sur chacune des dépenses
que nous sommes en mesure d'effectuer en allant chercher des taxes dans les
poches des contribuables. (12 h 20)
M. le Président, je voudrais que les paroles qui seront
prononcées par les membres de l'Opposition, aujourd'hui, soient bien
perçues comme faisant partie de ce que nous acceptons de la part du
Directeur général du financement des partis politiques et des
autres directeurs qui ont une indépendance complète face au
pouvoir exécutif et face au pouvoir judiciaire.
Nous voulons que l'ensemble de nos paroles n'atténue en rien
l'indépendance qu'on doit conserver principalement au Directeur
général des élections. Dans le projet de loi no 96 qui est
devant nous, si l'Assemblée nationale avait dans l'avenir la
possibilité de scruter annuellement le budget de fonctionnement du
Directeur général des élections dans le Québec, ce
serait une amélioration sûrement sensible par rapport à ce
qui existait auparavant, alors qu'étant indépendant et du
judiciaire et de l'exécutif, il émargeait directement au fonds
consolidé, et souvent avec certaines surprises que le Conseil du
trésor et le ministre des Finances pouvait avoir au moment de payer la
note.
M. le Président, je voudrais que nos paroles soient
perçues comme étant le reflet de l'indépendance qu'on doit
conserver au Directeur général des élections. Dans les
notes préliminaires, lors de la commission parlementaire, le ministre de
la Réforme parlementaire qui n'était pas là dans le temps,
qui était membre du Parti québécois et du gouvernement,
mais qui n'était pas celui qui avait à défendre la loi 2 -
c'était l'ancien député de Maisonneuve - n'a pas voulu
tenir compte en fait de l'ensemble des observations qui ont été
faites dans le temps par la plupart des parlementaires qui ont participé
au débat. Il y avait le député de Gatineau, il y avait le
député de Marguerite-Bourgeoys, il y avait le chef
intérimaire du Parti libéral, il y avait le député
de Rouyn-Noranda, créditiste dans le temps. Le seul qui avait,
semble-t-il, appuyé mollement le gouvernement, était le
député de Beauce-Sud du temps, M. Fabien Roy; mais on sait
pertinement que, comme son statut était mal défini devant la Loi
électorale, il cherchait un appui gouvernemental pour des raisons qui
sont assez faciles à comprendre. On faisait fi alors de tous les
conseils que les partis d'Opposition donnaient en ajoutant des structures dont
on disait qu'elles coûteraient trop cher.
M. le Président, dans tous les secteurs d'activité depuis
quelques années, on a dit qu'on s'était payé des
autoroutes chromées, des institutions chromées. On s'est
payé également, dans le domaine des lois électorales dont
parlait le ministre de la Justice tantôt, des lois très
très chromées. Devant la crise actuelle que subissent l'ensemble
des Québécois, malgré qu'on veuille garder la
démocratisation de toutes les instances électorales, qu'on
veuille la meilleure participation de l'électorat au
scrutin, qu'on veuille lui donner la meilleure information possible...
C'est cet argument qu'invoquait en 1977 le Parti québécois: une
meilleure information à donner à l'ensemble de l'électorat
québécois.
M. le Président, on a voulu se donner tout cela par des lois.
Tantôt, le ministre de la Justice disait que c'étaient
probablement les lois les plus avancées qu'il y avait dans les
systèmes électoraux. La question qu'on doit se poser aujourd'hui
- tantôt, le ministre y a fait référence - est la suivante:
Est-ce que dans un avenir prochain, il ne faudra pas, ensemble et avec les
personnes concernées qui sont indépendantes, tenir compte de
l'expérience vécue et face aux nouvelles contraintes auxquelles
chaque citoyen doit faire face actuellement dans la crise économique,
voir si on ne devrait pas aller très loin à l'intérieur de
ces cinq lois électorales et faire en sorte qu'on puisse garder le
meilleur système électoral possible, mais qu'il soit un peu moins
complexe que celui qu'on connaît maintenant?
M. le Président, il n'est pas facile quand même,
malgré les renseignements qui nous ont été donnés,
d'accepter que cela coûte tellement cher pour un système qui
devait davantage démocratiser. Quand on regarde les dépenses
qu'on a effectuées et les résultats qu'on a obtenus, cela n'a
aucune commune mesure avec d'autres Parlements. Je mentionnerai simplement
certains points dont je parlais lors de l'audition devant les directeurs
généraux. Quand on constate qu'en publicité dans le
Québec, pour la Loi électorale, les impératifs qui
découlaient des lois et qui permettaient au Directeur
général des élections et aux autres d'informer valablement
le public, quand on constate qu'au référendum de 1980, le
Directeur général des élections a dépensé 1
570 000 $, que lors du recensement de 1980, encore pour la publicité, il
a dépensé 1 300 000 $... Pourquoi dépenser 1 600 000 $
pour 4 400 000 électeurs alors que sur une autre scène, au
gouvernement fédéral, pour 15 300 000 électeurs, pour une
loi dont on n'entend pas dire pourtant qu'elle est tellement violée
partout au Canada, au lieu de 1 300 000 $ et 1 700 000 $ pour 4 000 000
d'électeurs, il n'en coûtait, en 1980 au gouvernement
fédéral, qu'une somme de 1 132 000 $? Pourquoi est-on tellement
différent des autres dans le Québec et doit-on faire de telles
dépenses? Quand on pense également qu'en 1980, pour le
recensement et l'élection fédérale, il en a
coûté 2 762 000 $ alors qu'on constate de tels coûts dans le
Québec.
En 1977, quand on demandait au gouvernement de ne pas mettre une autre
structure qui apporterait des coûts supplémentaires très
élevés, ce que le député de Sainte-Marie et ce que
d'autres ont dit à ce moment-là: Les gens manquent d'information;
on voudrait que le plus grand nombre possible d'électeurs puissent se
prononcer sur la gouverne de leurs biens.
Quand je regarde certaines émissions de télévision
et qu'on nous parle, je ne dirais pas de la folie, mais de ce que les
Québécois ont toujours suivi de près chaque période
électorale... Probablement qu'il y a 15 ou 20 ans, ne
bénéficiant peut-être pas du système
d'éducation qui a été mis en place, les gens moins
informés auraient eu besoin davantage d'information. Aujourd'hui, ils
peuvent capter davantage un message. Il y a quand même un drôle de
phénomène. Si on nous disait que c'était surtout pour
l'information de l'électeur... Quand on regarde les résultats que
cela a pu donner, la loi a été votée en 1977 et nous
constatons que le 29 avril 1970 l'électorat s'était quand
même prononcé à 84, 23% au Québec. En 1973, il
s'était prononcé à 80, 58%. Les gens étaient quand
même assez bien informés.
Le 15 novembre 1976, avant cette loi qui a coûté tellement
cher en publicité, les Québécois se sont prononcés
à 85, 27%. En 1977, on vote cette loi et le 13 avril 1981 on se prononce
à 82, 52% et, au référendum de mai 1980, à 85, 61%.
C'est donc dire qu'en avril 1970, c'était 84, 23% et qu'au
référendum de mai 1981, c'était 82% et 85%. Quand on a
participé à cinq ou six élections comme moi, on sait que
la différence de 1%, 2% ou 3% c'est principalement à cause du
temps qu'il fait au moment où les gens doivent se présenter aux
urnes.
Je dis sans malice qu'on s'est payé des lois tellement
chromées qu'aujourd'hui on est obligé de subir la note à
payer et elle dépasse de beaucoup nos capacités. Je pense qu'on
pourrait dire, comme le disait tantôt le ministre de la Justice, que bien
oui, la Loi sur le financement des partis politiques a fait en sorte que
disparaissent les souscriptions occultes de personnes morales qui pouvaient
tendre à placer les partis politiques dans une situation où ils
n'avaient pas la plus grande liberté possible. J'admets que le
gouvernement a fait un effort très valable dans ce sens-là, mais
quand on constate l'ensemble des coûts inhérents au fonctionnement
des systèmes mis en place depuis quelques années, il est
impossible de penser qu'on ne doive pas agir immédiatement. La loi no 96
permettra la fusion des trois services, tant mieux. C'est ce que nous avons
suggéré en 1977. Elle permettra à l'Assemblée
nationale, une fois ou deux par année, de scruter le budget qui sera
présenté par le Directeur général des
élections. (12 h 30)
M. le Président, il ressort que, comme son indépendance
doit être conservée, l'Assemblée nationale pourra faire
des
suggestions, mais elle devra accepter. Ce n'est pas à
réduire. Elle devra accepter. Si le Directeur général des
élections garde une complète indépendance, si les lois
qu'on dit trop chromées ne sont pas changées en profondeur, il
est indiscutable que les mêmes impératifs découlant de
l'ensemble de ces lois l'obligeront... Il est dit, dans certains articles,
qu'il pourra faire toute publicité jugée nécessaire, faire
tout achat jugé nécessaire. Il y a quand même des
ouvertures qui font que l'Assemblée nationale pourra faire des
observations et je pense que chacun des législateurs espère que,
par la suite, les suggestions qui seront faites par les membres de
l'Assemblée pourront être retenues.
Le ministre de la Justice a mentionné tantôt que, dans la
première étape franchie par le projet de loi no 96, c'est
déjà une économie de 2 000 000 $, 4 000 000 $ ou 5 000 000
$ qui peut être réalisée par une réforme des
structures qui disparaîtront pour une meilleure sélection de
fonctionnaires. M. le Président, je constate que, dans l'ensemble des
provinces canadiennes et au gouvernement canadien, il n'y a que 107 personnes
qui travaillent à temps plein pour le système électoral de
l'ensemble de ces provinces et au Canada. Actuellement, ici, il y en a 253 et
même si ce nombre était réduit à 150 ou 160, comme
on nous l'a dit récemment, cela dépasse encore et de beaucoup
tout ce qu'on peut constater ailleurs.
M. le Président, ne devrons-nous pas revoir en profondeur une
autre loi électorale relativement au recensement? Le gouvernement actuel
a été obligé, depuis 1980...
Une voix: Les deux derniers recensements.
M. Mailloux: Les deux derniers recensements ont été
annulés par le gouvernement. Je sais qu'il a comme prérogative la
possibilité d'annuler un recensement par un projet de loi qu'il
dépose en cette Chambre. Quand on pense qu'à chaque recensement
cela coûte 17 000 000 $ et 18 000 000 $, on ne peut pas vivre une crise
économique comme celle que nous vivons actuellement et continuer
à faire des recensements, surtout quand on est à une année
d'une élection qui vient d'avoir lieu au Québec. C'est un des
points qu'il faudra regarder dans un avenir immédiat.
Je m'aperçois que le temps qui m'était imparti est
terminé. Les lois actuelles qu'on a peut-être voulu les plus
sévères sont quand même, actuellement, les plus
coûteuses en Amérique du Nord. Si le gouvernement n'a pas voulu
prendre les conseils que les oppositions de l'époque lui prodiguaient de
ne pas placer des structures en parallèle, nous sommes quand même
heureux de constater, après cinq années et après une
expérience qui lui a profité, qu'il accepte les conseils que nous
donnions dans ce temps-là. Contrairement à ce que disait le
ministre de la Justice, l'autre jour, ce n'est pas parce que nous voulons nous
vanter, nous de l'Opposition, que c'est nous qui présentons le projet de
loi. Je sais qu'il a lui-même demandé un rapport aux trois
directeurs, au mois de mai, lui permettant d'avoir une meilleure
évaluation de la situation et une meilleure évaluation des
correctifs qui pourraient être apportés dans un avenir prochain.
Je sais que c'est le ministre de la Justice qui a demandé ces rapports
qui lui ont été soumis récemment et dont la commission a
fait état il y a quelques jours. Tant mieux, M. le Président, si
cela peut permettre au ministre responsable de la réforme
électorale, en collaboration avec l'Opposition et le Directeur
général des élections, de faire en sorte que, tout en
gardant la meilleure démocratisation possible, la meilleure
intégrité du système électoral que nous
connaissons, que nous puissions, dans un avenir prévisible, permettre
que d'autres économies plus importantes soient faites dans un
système électoral qui a fait ses preuves, mais qui peut
être amélioré.
En terminant, je dirai ceci. J'ai parlé des articles 52 et 53 il
y a quelques jours et le ministre en a parlé tantôt. Ils
permettent au Directeur général des élections, seul, de
nommer des directeurs de scrutin dans chacune des circonscriptions
électorales. J'aurais préféré, et de beaucoup, que
ces articles apparaissent dans les lois précédentes parce que
cela aurait permis au directeur général et non pas au
gouvernement de mettre en place, dans les 122 circonscriptions
électorales, la personne qu'il voulait nommer comme directeur du
scrutin.
C'étaient les quelques observations que je voulais faire à
la suite de celles que j'ai faites à la commission parlementaire et qui
étaient, dans ce temps-là, plus abondantes. Je laisserai à
mon collègue de Gatineau et à d'autres le soin de parfaire ces
observations.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Groulx.
M. Élie Fallu
M. Fallu: M. le Président, j'aimerais que nous nous
rapportions d'abord au message inaugural du début de cette session
à l'occasion duquel le premier ministre énonçait
l'intention du gouvernement d'apporter des simplifications administratives et
de la rationalisation dans les organismes gouvernementaux, vous vous en
souvenez. D'ailleurs, plusieurs mesures ont été prises. Ainsi, la
semaine dernière, ici même, à l'Assemblée nationale,
par le projet de loi no 88, que nous avons adopté à
l'unanimité en
cette Chambre, nous démantelions l'Office des autoroutes pour une
économie de quelque 10 000 000 $ annuellement.
Aujourd'hui, après avoir mis sur pied un certain nombre
d'organismes électoraux, nous considérons - et je reviendrai sur
leur mise en place - qu'il est maintenant temps d'en faire le regroupement. Ce
regroupement, c'est essentiellement pour des raisons de nature
économique que nous le faisons. Donc, rappelons-nous au départ
que les gestes législatifs que nous posons s'inscrivent dans une
continuité législative en cette Assemblée nationale depuis
le message inaugural.
Quant à ces organismes électoraux, il faut rappeler que,
s'ils avaient été créés distincts, c'est qu'ils
devaient l'être au départ pour, notamment, trouver leur
personnalité, pour se faire connaître, pour faire leur propre
lancée, pour que des administrations indépendantes l'une de
l'autre puissent jouer un rôle de mise en place. La mise en place
étant faite, notamment pour certains organismes, depuis cinq ans, on
peut maintenant penser à un regroupement compte tenu, notamment, de
l'évolution des problématiques au Québec, compte tenu du
fait qu'au départ on pensait à un office alors que maintenant on
pense plutôt à une personne désignée qui
chapeauterait l'ensemble des organismes.
Ce cheminement, nous l'avons fait ensemble comme société,
nous l'avons fait ensemble comme parlementaires. Nous sommes arrivés en
bout de course et ce n'est pas un office qu'il nous faut créer, mais
bien confier à une personne désignée par
l'Assemblée nationale l'ensemble des organismes électoraux.
Cette réforme s'inscrit également dans un vaste mouvement
de réforme électorale et parlementaire entrepris par
l'Assemblée nationale depuis quelques années. Je rappellerai, par
exemple, que la réforme électorale au Québec a
commencé déjà à la fin des années soixante,
au moment de la disparition des comtés protégés. Cette
réforme s'est faite à nouveau en 1972 par deux lois importantes:
la première est la redistribution des districts électoraux et la
deuxième, la réforme de la liste des électeurs, ce qu'on a
appelé la liste permanente. On a dû reprendre l'une des deux
réformes, mais comme phénomène d'évolution dans une
société. La seconde, les listes électorales dites
permanentes à l'époque; on sait qu'au fond c'est une
réforme imparfaite. Il faudra sans doute ensemble songer à un
fichier des électeurs, peut-être jouxtant la réforme du
mode de scrutin. La réflexion est en cours et, comme parlementaires,
nous nous devons de la continuer. (12 h 40)
Je dis bien que cette réforme électorale qu'on fait
aujourd'hui, comme celles qui ont été mises en vigueur depuis
cinq ans, s'inscrit également dans la réforme de
l'Assemblée nationale, réforme qui elle aussi est
commencée depuis un certain nombre d'années. Je crois que la
première réforme majeure récente de l'Assemblée
nationale a été, et de loin, la réforme du
règlement de l'Assemblée nationale, qui a permis à notre
institution de fonctionner d'une façon un peu plus rationnelle, un peu
plus souple, qui a permis d'élaguer, notamment dans l'immense tradition
parlementaire britannique, qui a permis une réflexion en profondeur qui
nous a donné un règlement, dirai-je, à la française
dans la tradition britannique, c'est-à-dire un règlement qui a
une approche plus rationnelle, mais qui ne fait en somme que reprendre les
fondements du parlementarisme britannique.
Cette réforme doit se poursuivre dans quelques jours par la
création notamment du bureau, c'est-à-dire par la proclamation de
l'indépendance du législatif sur l'exécutif. Cette
indépendance est vraiment théorique. Elle sera réelle
lorsque nous aurons ensemble réfléchi et voté à
l'unanimité une loi qui est en discussion, comme chacun le sait, dans
des comités multipartites. Pourquoi je jouxte la réforme
électorale à la réforme parlementaire? C'est que c'est
déterminant en l'occurrence, puisque la personne désignée,
la mécanique électorale a de tout temps relevé de
l'Assemblée nationale d'une façon un peu théorique,
puisque nous avions en parallèle un ministre d'État à la
Réforme électorale, puis par la suite un ministre
délégué à la Réforme électorale, sans
avoir pour autant la main-mise de l'exécutif sur le budget, ni sur le
contrôle des effectifs, ni des activités des personnes
désignées à l'époque. Il s'ensuivra qu'avec
l'indépendance de l'Assemblée nationale, nous pourrons, par le
biais d'une commission parlementaire de l'Assemblée nationale, exercer,
comme parlementaires, comme Assemblée nationale, comme
législateurs, le contrôle que nous voudrons bien exercer sur la
personne désignée et ses activités.
Cette réforme parlementaire est d'ailleurs annoncée dans
la réforme électorale. M. le Président, cette
réforme vient à point nommé également pour des
mesures d'économie. On a dit que c'était en grande partie le sens
profond que nous donnions à la réforme au moment précis
où nous l'apportons. J'entendais tout à l'heure notre
collègue de Charlevoix faire certaines simplifications, je dirais
même réductions intellectuelles des budgets, du coût de
l'opération électorale au Québec par rapport à ceux
du Canada. Il est manifeste que le député de Charlevoix compare
des pommes et des patates puisqu'il compare deux institutions fondamentalement
différentes. À la limite, je serais prêt à lui
demander, à
l'exemple de Vincent Prince dans la Presse du 17 novembre 1982, s'il
serait prêt à revenir à ce que nous avions auparavant, ce
que Vincent Prince qualifie de crime, et je cite: "Ce serait un crime de
vouloir retourner en arrière. " Et je dois également citer Marcel
Pépin qui, dans le Soleil, il y a quelques jours, le 22 novembre,
pouvait écrire que... Pardon! Ce n'est pas Marcel Pépin, mais
bien le journaliste Louis Falardeau, dans la Presse du 2 décembre, donc,
il y a à peine quelques jours, qui disait: "Mais il reste - et les
députés ne pourront qu'en convenir - qu'il en coûtera
toujours plus cher pour le système électoral au Québec
qu'ailleurs au Canada, pour la bonne raison que nulle part ailleurs au monde on
a fait un effort semblable pour garantir la qualité du processus
démocratique. - II y aura encore sûrement du gras à couper,
je préciserai tantôt. - II est heureux que le projet de loi
permette à l'Assemblée nationale de contrôler, etc. "
Donc, il y a une différence structurelle qui fait que les
coûts ne peuvent pas être les mêmes. Toutefois, je dirai que
ce projet de loi amène précisément des réductions
de coûts. Mais je vais d'abord dire que si, au Québec, pour la
dernière année notamment, 1981-1982, cela a coûté
cher, il faudrait se rappeler qu'il y a eu un certain nombre
d'événements électoraux et d'activités qui ont
coûté ce qu'ils devaient coûter selon nos institutions, des
institutions pour lesquelles on a voté ici à l'Assemblée
nationale, de part et d'autre de la Chambre: les rencensements, les partielles,
les opérations de sections de vote, les concours de recrutement des
directeurs locaux de scrutin et l'élection générale de
1981.
Jamais, nous disait la semaine dernière, en commission
parlementaire, le directeur des élections n'a-t-on eu, en si peu de
temps au Québec, autant d'événements électoraux et
d'activités depuis la Confédération. Cela a
coûté 29 900 000 $, M. le Président, mais 29 900 000 $ dont
19 200 000 $ sont relatifs, précisément, aux
événements électoraux. Il reste donc 10 700 000 $
très exactement, contre 29 900 000 $ pour le fonctionnement de
l'appareil ou des appareils que l'Assemblée nationale a mis sur pied.
Or, la proposition qui est avancée permettra une économie, pour
la première année déjà, de quelque 2 400 000 $,
c'est-à-dire plus de 20% du budget de fonctionnement. D'autre part, il
faut se souvenir que le directeur général nous disait que pour sa
propre gouverne, il avait, depuis cinq ans, effectué des
réductions et des aménagements qui lui avait fait faire des
économies d'environ 37% en quatre ans. Donc l'appareil n'est pas si
grippé que cela, bien au contraire.
Quant au coût de la démocratie, je demande au Parti
libéral si oui ou non il est encore prêt à le payer ou si
on veut revenir à ce qu'on a connu dans le passé? Des
économies, on peut encore en faire et, si vous me le permettez, je vais
faire une série de suggestions sur lesquelles, de part et d'autre, nous
pourrons réfléchir d'ici un an, deux ans, trois ans, bref dans
une perspective à long terme.
Ce fameux recensement annuel, instauré en 1972, recensement qui
devait nous donner des listes dites permanentes et qui sont quoi? Des monceaux
de papiers inutilisables pour qui que ce soit au Québec; inutilisables
pour les municipalités, inutilisables, à toutes fins utiles, pour
les commissions scolaires et inutilisables pour l'Assemblée nationale
elle-même, parce qu'il y a des vices de forme dans l'établissement
de ces listes électorales. On recense les électeurs au
Québec toujours de la même façon qu'on le faisait au XVIIe
siècle en Angleterre; il n'y a rien de changé. Au moment
où l'informatique est là. Pensez donc, M. le Président,
vous imaginez-vous un moment que Bell Canada puisse ignorer le nom de ses
clients, vous imaginez-vous qu'Hydro-Québec puisse ignorer le nom de ses
abonnés? Qu'est-ce qui en est des abonnés du Québec,
c'est-à-dire des électeurs, ceux dont nous dépendons, ceux
que nous représentons? Il arrive que cette liste électorale est
tellement invraisemblablement incomplète que nous n'avons pas la liste
de nos abonnés à l'heure de l'informatique. Il faut vraiment
repenser le recensement, comme il faut repenser le mode de scrutin. Je suis
sûr qu'il y a des économies d'échelle à faire
là-dedans. (12 h 50)
Les coûts reliés à la confection des listes,
à l'entreprosage du papier, à l'entreposage des bulletins,
à l'entreposage des boîtes de scrutin... M. le directeur
général nous a d'ailleurs mis sur certaines pistes, lors de la
commission parlementaire, il nous donnait un exemple, la boîte de scrutin
jetable, la simple boîte en carton qu'on ramasserait dans les
épiceries et qui serait largement suffisante, il y a des pays qui ont un
tel modèle. Et ce bulletin de vote qu'on fait imprimer à grands
frais; savez-vous qu'en France les bulletins vous les apportez dans votre poche
pour aller voter? On a une sorte de "mythisme" alentour du bulletin de vote. Il
y a donc des économies à faire là, à mon avis.
Les coûts de publicité, on en a parlé
également en commission parlementaire. Il faudrait peut-être
ajuster certaines des directives qui sont inscrites dans nos lois
électorales, maintenant que les mentalités sont changées,
maintenant que les lois ont été appliquées depuis un
certain temps, notamment la Loi sur le financement des partis politiques.
On peut donc continuer à gratter et à trouver des
économies à réaliser. Mais là, il s'agit d'une
économie d'échelle par le
regroupement et la simplification administrative de trois organismes
électoraux.
M. le Président, vous me permettrez -parce que je ne peux pas
terminer sans parler au monde municipal - de dire au monde municipal, puisque,
malheureusement, on n'en a parlé ni en Chambre, ni en commission
parlementaire, l'influence ou les changements que cette loi apporte à la
vie municipale. C'est ainsi qu'en ce qui concerne la Loi sur les
élections dans certaines municipalités le projet de loi que nous
étudions va confier ou confierait à la Commission de la
représentation électorale les responsabilités
dévolues actuellement au directeur général de la
représentation relativement à la division des circonscriptions
électorales municipales; donc, le directeur général
plutôt que la commission elle-même.
Le projet de loi précise que le président de la commission
a la responsabilité de coordonner et de répartir le travail des
membres de la commission et, notamment, qu'il peut former des bancs d'un ou de
plusieurs commissaires, selon l'importance des municipalités ou des
circonstances particulières.
La loi permettra à la commission de déléguer
l'exercice de ses responsabilités à une personne qu'elle
désigne, dans le cas des municipalités de 1000 à 20 000
habitants qui auront adopté un règlement leur permettant de se
diviser en circonscriptions électorales. La loi confiera au Directeur
général des élections la responsabilité
dévolue actuellement au Directeur général du financement
des partis politiques, relativement au financement des partis politiques
municipaux.
Enfin, la loi permettra au Directeur général des
élections de déléguer l'exercice de pouvoirs que lui
confère la loi à une personne qu'il désigne, l'acte de
délégation devant être publié à la Gazette
officielle du Québec, sauf lorsque la délégation n'a pour
effet que de déléguer l'exercice des pouvoirs prévus aux
articles 43, 46 et 47 de cette loi au greffier d'une municipalité.
M. le Président, d'une façon nominative, ce projet de loi
n'était pas annoncé dans le message inaugural. Néanmoins,
il s'inscrit dans la simplification administrative du gouvernement de
l'État du Québec. C'est une réforme qui s'inscrit
également de pair avec la réforme parlementaire que nous
apportons. Nous la faisons essentiellement par mesure d'économie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau et leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, étant donné
l'heure, je voudrais proposer la suspension du débat.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Guay: M. le Président, je propose la suspension de nos
débats jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'accorder cette
suspension des débats jusqu'à 15 heures, je dois rappeler aux
membres de cette Assemblée que le député de Gatineau aura
droit, comme critique de l'Opposition, à un temps maximum d'une
heure.
Suspension de nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 56)
(Reprise de la séance à 15 h 05)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
II y a consentement pour que nos travaux soient suspendus jusqu'à
15 h 30.
M. Lalonde: Un instant!
Le Vice-Président (M. Rancourt): Veuillez vous
asseoir.
M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Est-ce que c'est ce que le leader adjoint du
gouvernement nous demande de faire?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: M. le Président, je veux d'abord vous demander
une directive. Vous avez suspendu nos travaux. Je me demande en vertu de quoi
le leader de l'Opposition... En principe, on ne siège pas lorsqu'il y a
suspension. Effectivement, sous réserve de cette question, j'ai
signalé au leader de l'Opposition et à la présidence que
nous souhaiterions, de ce côté-ci de la Chambre, si l'Opposition y
consent, retarder le début de nos travaux, cet après-midi,
à 15 h 30, étant donné que nous sommes actuellement, comme
tout le monde le sait, en conseil des députés. Comme je crois que
c'est le cas, comme je pense que vous pensez que c'est le cas également,
M. le Président, nous avons le consentement de l'Opposition et, à
ce moment-là, nous suspendrions nos travaux jusqu'à 15 h 30.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: M. le Président, en effet, je viens
d'apprendre que le gouvernement n'est pas prêt à commencer les
travaux à 15 heures, comme d'habitude. Je m'en étonne.
Naturellement, ce serait être désagréable, ce que je ne
veux pas être, que de refuser; d'autant plus que je désire que le
discours du député de Gatineau, qui aura la parole à la
reprise de nos travaux, soit écouté par les interlocuteurs de
l'autre côté.
Mais j'aimerais attirer l'attention du leader adjoint du gouvernement et
des autres députés qui sont ici sur ce qui va nous arriver d'ici
quelques jours et sur les soirs où l'on siège jusqu'à 11 h
30 ou minuit. Comment se fait-il que le gouvernement ne soit pas prêt
à siéger en plein jour, à 15 heures? Il s'agit là
d'un fouillis qui ressemble bien au gouvernement qu'on a devant nous, M. le
Président. Mais nous allons consentir de toute façon.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: M. le Président, effectivement, comme je l'ai
signalé au leader de l'Opposition, puisque le leader adjoint de
l'Opposition et député de Gatineau doit prendre la parole sur le
projet de loi qui est devant nous, je regretterais que nous ne soyions pas plus
nombreux à entendre ses propos. D'autre part, ce n'est pas du tout que
le gouvernement n'est pas prêt à procéder à 15
heures. Si le leader de l'Opposition souhaite que nous procédions
immédiatement, nous allons le faire; je n'y suis pas opposé. Tout
ce que je disais, c'est que si l'Opposition n'y voit pas d'objection,
malgré le fait qu'on soit prêt à commencer
immédiatement, nous préférerions commencer à 15 h
30.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: J'interprète les paroles du leader adjoint du
gouvernement comme étant un aveu que le Parti québécois ne
peut pas assurer le quorum ici, parce que les députés sont
ailleurs. C'est ce que je comprends.
M. Guay: Je viens de signaler au leader de l'Opposition
qu'effectivement les députés ministériels sont
réunis en conseil des députés un étage au-dessous.
Si on nous dit, du côté de l'Opposition, qu'on souhaite
procéder dans les meilleurs délais, nous allons former le quorum
comme il se doit. Ce que j'ai indiqué au leader de l'Opposition, comme
à vous, M. le Président, c'est que s'il donne son consentement -
il a manifesté son intention de ne pas être
désagréable et je l'en remercie - s'il est d'accord, nous
suspendrions pour encore vingt minutes. Nous pourrions reprendre nos travaux
par la suite sur le même projet de loi, celui proposé par le
gouvernement et qui fait l'objet de discussions depuis ce matin.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Nous allons donc consentir, comme je l'ai dit, pour
permettre aux députés ministériels péquistes de
s'entendre entre eux à ce qu'ils appellent leur conseil des
députés, au caucus, en prenant note de leur incapacité
à s'organiser pour qu'on puisse siéger ici à temps et sous
réserve de rappeler ce qui vient de se passer ici, M. le
Président. Nous consentons.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: Je m'excuse. Le leader de l'Opposition ne veut pas
être désagréable, mais plus il parle et plus je commence
à le trouver désagréable. Je réitère au
leader de l'Opposition que ce n'est pas du tout une question d'entente ou de
quoi que ce soit. Nous avons un conseil des députés et nous
pouvons le reporter à 18 heures ce soir, si besoin est. Il nous a
semblé préférable de le terminer immédiatement et
c'est pourquoi nous aurions besoin de quinze à vingt minutes maintenant.
C'est uniquement pour cette raison. Il n'est pas question d'organisation des
travaux de la Chambre. On est prêt à procéder, il n'y a pas
de problème de ce côté-là. Je demande simplement au
leader de l'Opposition s'il a des objections à reporter le début
de la séance à 15 h 30; s'il a des objections, s'il y voit quoi
que ce soit autre, ma foi, nous allons procéder et je n'y vois aucune
objection.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: On va réussir à siéger toute
cette demi-heure sans quorum, si ça continue. Je ne comprends pas
facilement le député: ou il demande la suspension ou il ne la
demande pas. D'un côté, il demande une suspension jusqu'à
15 h 30 et là, il me dit être prêt à siéger.
Veut-il une suspension? Si oui, nous allons l'accorder, pour être
agréable au député, mais en rappelant cette
incapacité du Parti québécois d'organiser comme il le faut
nos travaux.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: Jusqu'au dernier bout de phrase du leader de
l'Opposition, nous nous entendions à merveille. Nous demandons, si
l'Opposition est d'accord, de suspendre nos travaux, non pas parce qu'il y a
incapacité de les organiser car, si c'est ainsi que le
leader de l'Opposition veut l'interpréter, je lui dis que nous
pouvons fort bien procéder maintenant. Mais nous souhaiterions
effectivement suspendre nos travaux jusqu'à 15 h 30.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Consentement de
suspension.
Pour bien comprendre, c'est qu'au départ la présidence
avait eu l'acquiescement des deux côtés pour suspendre une
demi-heure et, par la suite, nous sommes revenus et cela a été
débattu ici. Il y a eu acquiescement maintenant.
M. Lalonde: M. le Président, je me sens obligé de
vous demander une directive.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Demande de directive.
M. Lalonde: Quand on donne notre consentement sous
réserve, à notre corps défendant - c'est ce que j'ai dit
au président - cela veut dire que nous avons des réserves
à exprimer ici, mais que nous allons donner notre consentement.
M. Doyon: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, j'aimerais demander au leader
adjoint ministériel: qu'est-ce qui se passe dans le cas des commissions
parlementaires qui ont des horaires à respecter? Nous sommes très
serrés dans le temps, M. le Président, et moi-même j'avais
l'intention et j'ai toujours l'intention d'intervenir sur le projet de loi qui
est devant la Chambre actuellement. Cependant, je suis attendu à une
heure précise en commission parlementaire. Est-ce qu'on peut comprendre
que le décalage d'une demi-heure que nous demande le gouvernement
actuellement pourra aussi s'appliquer pour les commissions parlementaires, le
cas échéant, où cela peut être utile ou
nécessaire? J'aimerais avoir un éclaircissement de la part du
leader adjoint.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: M. le Président, vous savez jusqu'à quel
point je suis désireux d'être agréable à
l'Opposition. Si le député de Louis-Hébert souhaite que la
commission siège maintenant, nous allons prendre les dispositions
nécessaires. S'il préfère attendre et que la commission
siège à 15 h 30, à ce moment, je consentirai bien
volontiers à ce que la commission siège à 15 h 30. Je n'ai
pas très bien compris son intervention, s'il préférait
qu'elle siège maintenant ou à 15 h 30.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, le problème, c'est que
l'intervention que j'avais l'intention de faire ici en Chambre était
prévue entre 15 heures et 16 heures, ce qui me permettait d'être
à la commission parlementaire à 16 heures pour étudier le
projet de loi no 94. Compte tenu du décalage qui nous est demandé
actuellement, je ne vois pas comment je pourrai m'acquitter du devoir que j'ai
d'intervenir sur le projet de loi qui est actuellement devant la Chambre et en
même temps de l'obligation que j'ai contractée d'être en
commission parlementaire pour étudier le projet de loi no 94 à 16
heures. Les deux sont incompatibles, M. le Président, et c'est le
dilemme dans lequel je me trouve.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: Dans ce cas, M. le Président, je comprends
effectivement le dilemme du député de Louis-Hébert. Pour
lui être agréable, je lui dis tout de suite que je suis d'accord
que la commission des finances commence à 15 h 30 tout comme
l'Assemblée ici.
M. Doyon: Bien qu'on s'entende là-dessus, M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon:... la commission parlementaire qui étudie
actuellement le projet de loi sur les valeurs mobilières cessera ses
travaux à 16 heures pour commencer l'étude du projet de loi no
94. À ce moment, je me suis engagé à être en
commission parlementaire à 16 heures, pensant que je pourrais faire mon
intervention entre 15 heures et 16 heures ici. Cependant, si la chose est
impossible, je demanderais que le projet de loi no 94 ne soit
étudié qu'à 16 h 30 en commission parlementaire, donc, un
décalage d'une demi-heure pour ce qui est de cette commission
parlementaire sur le projet de loi no 94.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: C'est exactement le sens de mon intervention, même
si ce n'était pas très clair. La commission siégeant
à 15 h 30, forcément, cela retarde son deuxième mandat
à 16 h 30.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc,
nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 h 30. (Suspension de la
séance à 15 h 15)
(Reprise de la séance à 15 h 30)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Veuillez prendre place.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Correction au feuilleton
M. Guay: M. le Président, c'est une question technique. Il
semble que, ce matin, cette Assemblée a adoptée à
l'unanimité une motion pour faire siéger la commission qui
étudie le projet de loi no 94, soit la commission des institutions
financières. Or, le projet de loi ayant été
déféré à la commission des finances et comptes
publics, il y aurait lieu de corriger le feuilleton de manière à
ce que le feuilleton indique que la motion de ce matin était pour faire
siéger la commission des finances et comptes publics. J'en fais motion,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
est adoptée.
Des voix: Adopté.
M. Lalonde: Vous voyez comme c'est agréable!
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Guay: Sur ce, M. le Président, nous reprenons le
débat sur le projet de loi inscrit au nom du ministre de la Justice
concernant la réforme électorale.
Projet de loi no 96
Reprise du débat sur la deuxième
lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat
sur le projet de loi no 96, Loi sur l'intégration de l'administration du
système électoral. La parole était au député
de Gatineau, leader adjoint de l'Opposition.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, c'est avec plaisir que je
m'exprimerai au nom de l'Opposition sur ce projet de loi no 96, Loi sur
l'intégration de l'administration du système
électoral.
Depuis dix ans que je suis député à
l'Assemblée nationale, j'ai toujours été parmi les
députés de l'Opposition qui se sont intéressés aux
lois touchant l'exercice du droit de vote au Québec. Je ne sais si c'est
parce que, à ma première tentative en 1972, j'ai eu relativement
beaucoup plus de difficultés que d'autres à me faire
élire. On se rappellera qu'à la première élection
où j'ai été candidat, soit le 10 octobre 1972,
malgré une majorité de plus de 9600 votes, j'avais dû
recommencer à peine un mois plus tard, à cause de vices dans
l'impression des bulletins de vote, ce qui avait amené la reprise de
l'élection le 15 novembre suivant. Date fatidique, M. le
Président, puisqu'on le sait, le 15 novembre de chaque année
où le Parti québécois célèbre l'anniversaire
de son accession au pouvoir, je peux me vanter de célébrer, moi,
quatre ans de plus qu'eux comme membre à l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, on se rappellera qu'il y avait eu une élection
générale en octobre ou novembre suivant, en 1973, ce qui avait
fait dire à certains que trois élections en un an, cela aurait pu
être presque suffisant pour relancer l'économie du comté de
Gatineau.
M. le Président, chaque fois que moi, comme député
de Gatineau, que mes collègues de l'Opposition, sommes
intéressés à des lois portant sur l'exercice du droit de
vote, nous l'avons toujours fait - j'en prends à témoin le
ministre de la Justice, le ministre responsable de la réforme
électorale aujourd'hui - avec objectivité, dans la plus grande
collaboration, pour tenter d'atteindre les deux objectifs principaux qui ont
toujours été les nôtres, soit de faciliter le plus possible
l'exercice du droit de vote de tous les citoyens du Québec et ce, de la
façon la plus efficace, la plus économique possible. C'est ainsi
que lors de l'adoption de la Loi sur le financement des partis politiques, la
loi 2, nous avons appuyé le gouvernement, malgré qu'à
l'époque, sur les modalités, nous avions des réserves. J'y
reviendrai tantôt. C'est ainsi que nous avons souscrit à
l'ensemble de la refonte de la Loi électorale il y a à peine deux
ans; nous avons non seulement souscrit à certaines propositions du
gouvernement, mais nous avons même formulé des amendements, des
propositions concrètes qui ont été incluses dans le projet
de loi no 9 d'alors qui est devenu la nouvelle Loi électorale.
Bien sûr, à l'occasion, il nous est arrivé de
différer de points de vue avec le gouvernement. Cela a été
le cas, par exemple, au moment de l'étude du projet de loi no 10 qui
visait à créer la Commission de la représentation
électorale. Nous avons voté contre cette mesure, non pas que nous
ne souscrivions pas au principe, à l'objectif de rendre tout ce
processus de la révision de la carte électorale aussi
indépendant que possible des élus, c'est-à-dire de
l'intervention des élus, mais bien uniquement parce que nous
considérions qu'il n'était pas nécessaire de
procéder à la formation d'une
nouvelle commission, qu'il aurait été suffisant de
continuer ce qui existait avant, c'est-à-dire une commission autonome
sous la présidence du Directeur général des
élections qui avait en fait procédé à la
révision de la carte électorale en 1972. Nous avons donc
voté contre le projet de loi, je le répète, non pas parce
que nous étions contre l'objectif, mais uniquement parce que nous
considérions qu'il s'agirait là de créer des doublages,
des occasions de dépense de fonds publics qui ne seraient pas
justifiées.
La présentation du projet de loi no 96 nous donne raison
là-dessus puisque dorénavant, après son adoption, ce sera
effectivement une commission autonome dont le président sera le
Directeur général des élections, exactement comme
c'était le cas avant l'adoption du projet de loi no 10.
Le ministre le disait ce matin, il a pris les devants un peu dans son
intervention en disant: L'Opposition nous dira sûrement: On vous l'avait
dit en 1977, on vous l'a répété en 1979, on l'a redit et
dit combien de fois au cours des cinq dernières années, on
n'aurait pas dû procéder comme on l'a fait lorsqu'on a
adopté ces diverses lois; on n'aurait pas dû créer des
organismes séparés, indépendants l'un de l'autre. Les
raisons qu'on évoquait à ce moment-là, M. le
Président, ce sont exactement les mêmes qui, aujourd'hui,
amènent le gouvernement à se rendre à ces souhaits.
C'étaient plus que des souhaits, il s'agissait de propositions
concrètes. On a fait des motions d'amendement à l'effet de voir
le Directeur général des élections présider
à l'ensemble de l'application des lois qui touchent le droit de vote au
Québec.
Le projet de loi no 96 qu'on étudie aujourd'hui porte, à
mon avis, sur au moins trois principes différents. Il y a d'abord, bien
sûr, l'intégration du bureau du Directeur général
des élections, du bureau du Directeur général du
financement des partis politiques et de la Commission de la
représentation électorale en un seul organisme chapeauté
par le Directeur général des élections. Il y a
également un autre élément très important, soit une
méthode d'assurer non pas un contrôle - j'y reviendrai en
détail tantôt, il ne s'agit pas de contrôler et la
méthode proposée par le projet de loi n'assurera pas le
contrôle des dépenses du Directeur général des
élections. Il nous donnera à peine une possibilité de
surveiller, un droit de surveillance à l'égard des intentions du
Directeur général des élections et, un sujet qui m'est
particulièrement cher, une nouvelle méthode de procéder
à la nomination de ce qu'on appelait jadis les présidents
d'élection dans les comtés et que le projet de loi nomme
maintenant les directeurs de scrutin dans les 122 circonscriptions
électorales. Je tâcherai, M. le Président, de traiter de
chacun de ces trois principes, l'un après l'autre.
D'abord, j'insiste là-dessus, M. le Président. Il n'est
pas question pour l'Opposition de tenter de s'arroger des mérites
quelconques en rappelant au gouvernement que ce qu'il fait aujourd'hui, nous
lui avions suggéré de le faire dès 1977. Ce ne sont pas
des mérites ou des éloges qu'on veut de la part du gouvernement
à l'endroit de l'Opposition. Tout ce qu'on veut faire ressortir, c'est
le fait que, contrairement à ce que les députés du Parti
québécois nous disent souvent, à savoir que les
députés de l'Opposition ne font jamais de propositions
concrètes, qu'ils se limitent strictement à faire la critique
négative des projets du gouvernement, voilà là un exemple
d'une critique que le gouvernement a qualifiée de négative,
à l'époque, mais qui se voulait constructive. (15 h 40)
Quand, en 1977, on disait au gouvernement: Vous allez mettre le bordel
dans l'administration des lois électorales au Québec si vous y
allez avec des structures séparées, différentes,
indépendantes, quand nous disions: Vous allez doubler les tâches;
vous allez créer des problèmes de juridiction; vous allez surtout
multiplier les coûts, les deniers publics qui devront être
consacrés à cela, M. le Président, on faisait des gorges
chaudes en 1977 du côté du Parti québécois. On
disait: Ah! Les libéraux, tout ce qu'ils pensent faire, c'est critiquer;
jamais ils nous font des propositions concrètes. En voilà une qui
était concrète et elle était si concrète et
à point que, malgré nos interventions
répétées, cela a pris cinq ans au gouvernement du Parti
québécois pour se rendre à l'évidence
qu'effectivement c'est cela qu'il fallait faire.
Le ministre l'a dit ce matin. Le député de Groulx l'a
répété aussi. La seule raison pour laquelle on
procède à l'adoption du projet de loi no 96 présentement,
à l'intégration des trois organismes électoraux, c'est une
question de piastres et de cents. C'est une question d'exagération, un
laxisme complètement inexplicable, qui a vu des dépenses de fonds
publics de l'ordre de 89 000 000 $, pour deux ans, au sein de ces trois
organismes.
C'est sûr, on nous dira qu'il y a eu des élections, qu'il y
a eu un référendum, qu'il y a eu des nouveautés qui ont
coûté cher. On admet tout cela. Mais un fait demeure, on
dépense plus d'argent au Québec que dans l'ensemble des neuf
autres provinces du Canada, plus le gouvernement fédéral, qui
compte quand même 15 600 000 électeurs comparativement à
nos 4 400 000, qui oeuvre sur un territoire qui est quand même plus grand
que celui du Québec puisqu'il englobe celui du Québec; on fait
tout cela avec un effectif de quelque 100 ou 110 personnes, alors qu'au
Québec on en a, dans
le moment, 253, permanents et temporaires; le budget du
fédéral est de l'ordre de 2 000 000 $ - j'admets que cela
n'inclut pas la partie qui couvre la redistribution de la carte
électorale; on y procède tous les dix ans, après chaque
recensement décennal, à Ottawa. Quand même, cela
équivaut à 2 000 000 $. Même pour le recensement et pour la
redistribution de la carte électorale, c'est un montant de 5 000 000 $
tous les deux ans.
Ici, on a eu des budgets qui sont partis de 8 700 000 $, il y a trois
ans, qui ont décru à quelque 7 000 000 $ et on est rendu à
6 200 000 $ par année, dont plus de 50% vont en salaires, pour
administrer nos lois électorales. C'est un non-sens et les interventions
de l'Opposition méritaient mieux que l'espèce de fin de
non-recevoir que le ministre responsable d'alors, M. Burns, nous a servie. Au
cas où on douterait de la nature des interventions - je ne les
reprendrai pas toutes, peut-être que quelques-uns de mes collègues
le feront après moi - j'en reprendrai quelques-unes.
Notamment, lorsqu'on discutait de la loi 2, ici, à
l'Assemblée nationale, la loi sur le financement des partis politiques,
M. Lavoie, député de Laval d'alors, disait et je cite: "Pourquoi
ne pas centraliser tout ce qui regarde les élections, tout ce qui
regarde la présidence des élections, le remboursement des
dépenses aux candidats, qui a une affinité très proche
avec le contrôle des dépenses des partis politiques en dehors des
périodes électorales, l'administration de ces lois et même,
j'irai plus loin, une autre commission, la commission permanente de la
réforme des districts électoraux. "
Il disait plus loin: "Je verrais, qu'au lieu d'organiser une multitude
de branches et de diviser les forces, on crée un organisme qui
s'appellerait: Les surveillants de la démocratie au Québec. "
C'était lors d'un discours. Les péquistes pourront dire: Ah! oui,
des discours. Mais on est allé plus loin que cela. En commission
parlementaire, le 24 août 1977, il y a de cela plus de cinq ans, le
député de Laval avait proposé un amendement à
l'article 4 qui se lisait comme suit: "Que l'article 4 soit modifié en
ajoutant, après le premier alinéa, l'alinéa suivant: le
directeur général exerce ses fonctions sous l'autorité du
président général des élections. " Le
député de Laval disait: "Je lui donne un patron". C'est clair,
cela, M. le Président.
Pas tellement plus tard, c'est-à-dire en décembre 1977,
toujours le même député de Laval - et je lui rends un
hommage particulier, parce qu'au moins on peut dire de lui et de ses
collègues de l'Opposition d'alors qu'ils ont été et qu'ils
continuent d'être constants dans leurs revendications -disait: "Je
reviens à la charge pour demander au ministre s'il n'y aurait pas lieu,
dans sa grande réforme, d'avoir un grand organisme, un organisme
centralisé de qui relèveraient les élections telles
quelles, les consultations populaires, les référendums, parce que
c'est dans le processus démocratique, le contrôle des
dépenses électorales, une autre commission qu'on pourrait
intégrer, de la refonte permanente de la carte électorale, en
somme, tout ce qui concerne les moyens d'expression démocratiques de la
population. Il y aurait un grand directeur général et des
directeurs adjoints, comme nous en créons actuellement, mais uniquement
à l'occasion du financement des partis politiques. C'est une suggestion
que je fais et je demanderais au ministre de la prendre en
considération. "
Voulez-vous savoir ce que le ministre d'alors répondait, M. le
Président? Je vais vous surprendre, j'en suis sûr. M. Burns
disait, le 19 décembre 1977: "Quant à la remarque très
intéressante, à mon avis, du député de Laval sur
cette espèce de grand organisme ou de supercommission en matières
électorale et para-électorale, je lui dis d'avance que c'est non
seulement une suggestion que je considère intéressante, mais
c'est une suggestion que nous avons à l'étude actuellement -
décembre 1977 - Dans ce sens, je vous dis tout de suite, M. le
député de Laval, que ce n'est pas incompatible avec notre
façon de voir les choses, la suggestion que vous venez de faire, bien au
contraire. Nous sommes actuellement à examiner cette possibilité
dans le cadre d'une grande réforme électorale qui pourrait
permettre cette transparence que tout le monde désire et que le
gouvernement actuel désire plus particulièrement mettre en
vigueur assez rapidement. "
M. le Président, le 19 décembre 1977, le ministre
responsable de la Réforme électorale disait: On va y
procéder assez rapidement. Or, nous voici le 8 décembre 1982,
cinq ans plus tard, et c'est seulement maintenant, après avoir englouti
des millions et des millions de dollars de fonds publics dans l'administration
de nos lois, qu'on vient nous dire: II aurait été
prématuré de procéder avant. Il fallait roder le
système. Il fallait que cela se fasse de façon autonome pour voir
où on se retrouverait dans tout cela. Il fallait surtout plaire à
certains amis du parti et il fallait surtout dépenser à gogo. De
l'imprévoyance constante de la part du gouvernement. Et c'est là
un seul exemple.
Des voix: C'est vrai.
M. Gratton: Quand le député de Laval s'exprima
ainsi, M. le Président, il n'était pas le seul à le faire.
Le 9 octobre 1979, le député de Marguerite-Bourgeoys, leader
actuel de l'Opposition, le député de Roberval, qui était
whip alors, M. Robert Lamontagne, le député de Saint-Louis qui
nous en parlera tantôt, le chef du Parti
libéral, le député de Bonaventure, moi-même
avions fait exactement le même de genre de représentations
à combien d'occasions, toujours pour nous faire répondre, et je
cite M. Burns: La démocratie coûtera n'importe quel prix, cela n'a
pas d'importance. Ce qui compte, c'est, pour l'électeur, de pouvoir
exercer son droit de vote. Nous en sommes toujours à ce principe, comme
nous souscrivons également au principe du français dans l'air,
mais on dit: Pas à n'importe quel prix, pas si cela doit coûter 67
000 000 $ dans le cas de Québecair, ou si cela doit coûter 89 000
000 $ dans le cas de l'administration de nos lois électorales, pas
à n'importe quel prix, surtout que cinq ans en retard, le gouvernement
vient d'admettre avec le projet de loi no 96 que l'Opposition avait raison, il
y a cinq ans.
M. le Président, est-ce qu'on nous fera les mêmes amendes
honorables au sujet de Québecair? Je pose la question et je passe
à autre chose.
En 1977, au moment où on discutait de ces projets de loi, il y
avait un président général des élections, qui
était le juge Drouin. Il était là depuis 32 ans; son
bureau administrait la Loi électorale, je l'ai dit tantôt, il
était également président de la Commission de la refonte
de la carte électorale. Le député de Groulx l'a dit
tantôt. Ce n'est pas hier. Ce n'est pas avec l'arrivée du Parti
québécois qu'on a commencé à se soucier, au
gouvernement du Québec, de la réforme électorale. Le
gouvernement libéral d'avant, et j'en remercie le député
de Groulx qui l'a souligné ce matin, avait commencé d'abord par
l'abolition des comtés protégés, ensuite par la refonte de
la carte électorale en 1972 et, ensuite, par la liste, le recensement
annuel des électeurs. (15 h 50)
En 1977, on avait un président général des
élections qui s'occupait de tout cela. J'admets, il n'y avait pas le
contrôle du financement des partis politiques, il y avait quand
même les remboursements des dépenses électorales. Cela
aussi, c'est une réalisation du gouvernement libéral. Le juge
Drouin faisait tout cela, savez-vous avec combien de personnes? Une trentaine
de personnes, selon son témoignage du 14 juin 1977, avec un budget de 4
200 000 $. Allez donc comparer cela, M. le Président, avec les 251
employés qui sont présentement répartis dans les trois
organismes dont on parle. On sait que, depuis l'élection de 1981, on a
suspendu les travaux de la Commission de la représentation
électorale quant à la refonte de la carte. On a également
suspendu le recensement annuel. Il n'y en a pas eu depuis la dernière
élection et je suis sûr qu'en commission parlementaire d'ailleurs,
j'en ai reçu avis du ministre de la réforme électorale -
on va suspendre également cette année le recensement annuel et
dire à la commission: Ne procédez pas aux travaux de refonte de
la carte.
Savez-vous combien il y a d'employés permanents à la
Commission de la représentation électorale qui n'a eu, à
toutes fins utiles, aucun mandat à remplir, en tout cas, en ce qui
touche la refonte de la carte au cours de la dernière année et
demie, depuis la dernière élection? 28 personnes, M. le
Président, 28 personnes permanentes, mais il y a eu 43 employés
temporaires pour un total de 71.
Au financement des partis politiques, il y a 30 employés en
permanence et 6 temporaires, un total de 36, et il y a 76 permanents et 68
temporaires chez le DGE, pour un total de 144. Cela nous donne, en tout, 251
employés. On est parti d'une trentaine d'employés en 1977, on est
rendu à 251 personnes. Les budgets sont passés de 4 200 000 $
à 8 100 000 $ en 1979-1980, 7 300 000 et en 1980-1981 et 6 200 000 $ en
1981-1982.
La seule adoption du projet de loi no 96, aujourd'hui, faire dire au
Directeur général des élections qu'on épargnera,
seulement en salaires, la modique somme de 2 000 000 $. On peut se poser la
question suivante: Cela nous a-t-il coûté 10 000 000 $ de trop au
cours des cinq dernières années? Est-ce que c'est ce que voulait
dire M. Burns quand il disait: La démocratie, cela coûtera ce que
ça voudra?
Il n'est pas surprenant qu'on en soit rendu, du côté du
gouvernement, à devoir suspendre les travaux de la Chambre pour
permettre aux députés péquistes de s'interroger à
savoir si le gouvernement fait bien les choses en reniant sa signature, comme
il l'a fait avec le projet de loi no 70, et en présentant des
décrets comme il le fera demain. C'est de l'imprévoyance. C'est
de l'incurie. C'est de la mauvaise administration des fonds publics et en voici
seulement un exemple, M. le Président.
Des voix: Bravo!
M. Gratton: M. le Président, le Directeur
général des élections en commission parlementaire - que
nous avons obtenue, grâce à notre demande, soit dit en passant -
est venu expliquer que plusieurs des dépenses qu'il a dû faire au
cours des dernières années sont attribuables aux
nouveautés que les nouvelles lois ont occasionnées. J'en
conviens. Je l'accepte. Il a également fait valoir que, quand on
regroupera le tout, on pourra effectuer des épargnes. Nous en sommes, M.
le Président, mais ce que je dis, c'est ceci, quand je compare le
Québec à la Californie. Ce n'est quand même pas le
Pérou, la Californie. Ce n'est quand même pas non plus le tiers
monde, que je sache, mais on a beau avoir
la loi la plus avancée au monde ici au Québec, comme le
disait le ministre ce matin, au plan électoral, la Californie n'est pas
loin en arrière. C'est le moins qu'on puisse dire. Quand on pense qu'en
Californie ce n'est pas seulement le gouvernement qui peut tenir des
référendums, c'est également à l'initiative
populaire. On n'a qu'à recueillir 250 000 noms sur une pétition -
et la députée de Johnson qui m'accompagnait là-bas, il n'y
a pas si longtemps, peut en témoigner - et, automatiquement, on place
une question référendaire sur le bulletin de vote. On se rappelle
la proposition 13 en Californie, la Californie n'est pas la dernière
venue en matière électorale. Savez-vous combien on dépense
là-bas pour 26 000 000 de population, comparé à nos 6 000
000? Pour 11 500 000 électeurs inscrits - parce que là-bas il
faut s'inscrire, on les inscrits par la poste - savez-vous combien il y a de
personnes permanentes au bureau du Secrétaire d'État? Quinze, M.
le Président. Et on réussit malgré tout - malheureusement
je ne l'ai pas avec moi, mais j'inviterais la députée de Johnson
à fouiller dans ses dossiers, elle pourra peut-être nous montrer
ce qu'on appelle là-bas le "ballot pamphlet", qui remplace notre manuel
de l'électeur ici -à le distribuer à 11 500 000
exemplaires là-bas à un coût moindre que celui qu'on a
distribué à nos 4 400 000 ici. Un timbre coûte 0, 37 $
là-bas, nous, il nous coûte 0, 30 $ ici. Ce n'est sûrement
pas là qu'on a épargné de l'argent en Californie.
M. le Président, je dis qu'il y a eu des exagérations, des
exagérations très concrètes dans l'administration de nos
lois électorales. Qui blâmer?
J'en viens au deuxième point, celui non pas de contrôle, je
le répète, mais de ce rôle de surveillance qu'on veut
donner aux élus, à l'Assemblée nationale, sur les
activités du Directeur général des élections. Ce
qu'on propose dans le projet de loi c'est que le Directeur
général des élections prépare un rapport, au 1er
septembre de chaque année, qui inclue un rapport financier de
l'année précédente et dépose avant le 1er avril des
prévisions budgétaires, lesquelles sont étudiées
par une commission parlementaire qui, elle, les étudie et les adopte.
Point, à la ligne. Il n'est pas question de le réviser, il n'est
pas question pour la commission de pouvoir le modifier ou modifier les
prévisions budgétaires; on les étudie, on les adopte. Il
n'y a donc aucun élément de contrôle, sauf peut-être
celui que nous assure l'information que la population pourra obtenir de ces
travaux de la commission. En d'autres mots, M. le Président, le
Directeur général des élections nous fournira ses
prévisions budgétaires, à un moment donné il pourra
y être inclus 1 000 000 $, 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ pour des
dépenses qu'il prévoit faire, par exemple, pour une recherche,
une étude spécifique - prenons le cas du registre des
électeurs - et, dans le débat de la commission parlementaire,
possiblement que, les journalistes étant à l'affût, on fera
des reportages là-dessus, la population pourra s'interroger et
éventuellement pourra dire: C'est épouvantable ou c'est
acceptable que le Directeur général des élections
prévoie faire telle ou telle dépense.
Je dis, M. le Président, que nous sommes loin d'être
satisfaits du mécanisme prévu dans le projet de loi no 96. Si on
veut effectivement assurer la surveillance de l'Assemblée nationale sur
les activités du Directeur général des élections,
on peut bien le faire par le biais d'une commission parlementaire, mais, au
minimum, il me semble qu'on devrait également prévoir dans la loi
un débat ici, à l'Assemblée nationale, débat qui
pourrait être limité dans le temps - cela, on pourra en discuter -
mais un débat ici, devant les caméras de la
télévision, de façon que la population sache quelles sont
les intentions du Directeur général des élections par
rapport à telle ou telle dépense prévue. On ne veut plus
que des sommes d'environ 4 500 000 $ en fonds publics soient
littéralement lancées par les fenêtres comme cela a
été le cas dans le projet du registre des électeurs au
cours des trois dernières années. Ce sont 4 500 000 $ qui ont
été jetés par la fenêtre pour faire des
études, pour engager des professionnels, pour étudier le projet
de registre permanent des électeurs, à partir, dans un premier
temps, d'un simple arrêté en conseil et, dans un deuxième
temps, d'une loi adoptée à la vapeur en fin de session, en
décembre 1979. On a dépensé 4 500 000 $ et pas toujours de
la façon la plus catholique; on en a eu un exemple quand on a
posé des questions au Directeur général des
élections, à la commission parlementaire, la semaine
dernière. On lui a demandé, par exemple: Aviez-vous engagé
des fonds, aviez-vous fait l'engagement de firmes professionnelles - soit dit
en passant, il s'agit de la firme Drouin et Paquin, je ne sais pas si cela dit
quelque chose au député de Taschereau - avant que la loi 123 soit
adoptée par l'Assemblée nationale. On sait que la loi 123
était la seule mesure législative qui autorisait le gouvernement
et le Directeur général des élections à
procéder à des dépenses importantes de fonds publics.
Pourtant, la firme Drouin et Paquin, de l'aveu même du Directeur
général des élections la semaine dernière, avait
été engagée pour faire des travaux préliminaires.
(16 heures)
En juin 1979 - je vous dirai exactement quand: il s'agissait du 7 juin
1979 - le député de Laval, toujours soucieux de la façon
de dépenser les fonds publics, surtout dans un projet que nous
condamnions pour
des raisons qui n'avaient rien à voir avec les cents et les
piastres. Pour nous, c'était une question de principe... On ne doit pas
ficher les individus avec le strict motif de dire qu'on veut une carte
permanente, parce que cela sera plus efficace. L'efficacité ne justifie
pas de ficher les citoyens québécois de leur naissance à
leur décès en sachant exactement tous leurs
déménagements, tous leurs déplacements, peut-être
même, à force de gratter, de pouvoir y greffer les contributions
à un parti politique. Pourquoi? On s'est opposé au principe
même d'un registre informatisé. D'ailleurs, la Commission des
droits de la personne nous avait donné raison dans un avis qu'elle avait
fait parvenir au ministre à l'époque. Le 7 juin 1979, on avait
posé la question au ministre d'alors, M. Burns, qui nous avait
déclaré qu'aucun contrat, aucune entente n'avait
été signée avec aucune firme depuis l'adoption du projet
de loi 123, en décembre 1978.
Pourtant, nous avons constaté - c'est le Directeur
général des élections lui-même qui nous l'a dit la
semaine dernière - qu'au moment où ici, à
l'Assemblée nationale, M. Burns nous disait: "Aucune entente, aucun
contrat n'a été signé", il y avait huit contrats de
signés avec huit firmes différentes, pour un total de 1 477 255
$. Encore là, comment la population peut-elle faire confiance à
son gouvernement quand ici même, en Chambre, on se fait dire: "II n'y a
pas de fonds engagés, il n'y a rien là, vous vous
inquiétez, vous faites des flagorneries dans l'Opposition", et qu'en
fait, on découvre deux ou trois ans plus tard qu'il y avait 1 500 000 $.
Cela fait partie des 4 500 000 $ qui ont été jetés par les
fenêtres.
La raison principale pour vouloir se doter d'un registre des
électeurs nous disait-on à l'époque, du côté
du gouvernement, c'était que cela pourrait se faire à meilleur
marché, que cela coûterait moins cher que la méthode alors
utilisée, c'est-à-dire le recensement conventionnel.
M. le Président, on s'est opposé à cela, non pas
à cause des coûts, mais à cause du principe du droit
à la vie privée des citoyens. Notre obstruction
systématique, j'en conviens, a fait en sorte qu'au bout de la ligne, les
4 500 000 $ que le gouvernement a dépensés ont fini par amener le
gouvernement à reconnaître que le registre des électeurs
aurait coûté plus cher que la méthode conventionnelle de
confectionner les listes électorales. Est-ce assez fort? Prendre 4 500
000 $, en plus des dépenses qui ont été faites pour
débattre la question ici à l'Assemblée nationale, faire
présenter des mémoires par les gens, demander des avis à
la Commission des droits de la personne, tout cela pour se rendre compte que la
principale raison qui motivait le gouvernement à présenter le
projet de loi, c'est-à-dire faire des épargnes de dollars,
n'était plus du tout justifiable. Au contraire, cela coûterait
plus cher.
On a en commission parlementaire la semaine dernière fait valoir
- le Directeur général des élections a admis - que si,
à compter de l'adoption du projet de loi no 96, on soumettait les
prévisions budgétaires du directeur général
à l'étude d'une commission parlementaire... on consacrerait ainsi
le principe - le ministre de la Justice l'a dit ce matin - de la
délégation de l'Assemblée nationale à une personne
désignée qui est le Directeur général des
élections.
M. le Président, selon moi et selon le Directeur
général du financement des partis politiques M. Olivier Boucher,
qui l'a affirmé aussi en commission parlementaire, qui l'a écrit
dans son rapport, cela implique que la tradition qui veut qu'il puisse y avoir
des communications privilégiées entre l'exécutif,
c'est-à-dire le Conseil des ministres, le gouvernement du Parti
québécois présentement, et le Directeur
général des élections, cela doit cesser à compter
du projet de loi no 96.
On ne peut pas avoir deux façons de procéder. Soit qu'on
donne réellement le pouvoir à l'Assemblée nationale de
surveiller les opérations du Directeur général des
élections et, à ce moment-là, le Conseil des ministres
s'en retire totalement, ou bien on continue à avoir deux poids deux
mesures. Quand cela fait l'affaire du gouvernement du parti au pouvoir, on
passe des arrêtés en conseil que personne ne voit, on lui donne
des mandats de faire des études, de faire des recherches et le Directeur
général des élections, fort de son indépendance, et
ça, personne de ce côté-ci ne contestera la
nécessité d'assurer la plus grande indépendance possible
au Directeur général des élections dans ses
opérations, mais si on permet à l'exécutif, de quelque
façon que ce soit, que ce soit par le biais d'un arrêté en
conseil, par le biais d'une demande du ministre à la réforme
électorale ou du ministre des Finances, si on permet qu'il puisse y
avoir des demandes acheminées au Directeur général des
élections et que celui-ci puisse considérer dans son
indépendance qu'il doive y répondre, je dis: On perd notre temps
avec le projet de loi no 96. Oublions tout, arrêtons de faire de la
frime, arrêtons de faire semblant qu'on veut donner un rôle de
surveillance à l'Assemblée nationale, disons clairement: Non, on
veut faire semblant de donner une surveillance, mais on veut continuer nos
petites habitudes, la tradition qui n'est pas née avec l'accession du
Parti québécois au pouvoir, qui existait avant.
Mais autres temps, autres moeurs. Si on veut que la population nous
croie lorsqu'on lui dit: Dorénavant, l'Assemblée nationale
aura une personne désignée par elle, soit le Directeur
général des élections, qui sera responsable de l'ensemble
des lois électorales, qu'on ne laisse plus le ministre des Finances, le
ministre de la réforme électorale, le Conseil des ministres avoir
des communications privilégiées avec lui.
Je me fais fort d'insister là-dessus au moment de l'étude
article par article. Je suis sûr que le ministre de la Justice ne devrait
pas être réfractaire à cela. Il faudra que cette
volonté d'assurer l'indépendance du Directeur
général des élections vis-à-vis de
l'Exécutif soit inscrite dans les textes de loi et non seulement dans
les beaux discours qu'on peut nous servir de l'autre côté, parce
que des beaux discours, il y a longtemps que j'y ai moins confiance.
À ce propos, le Directeur général du financeraient
des partis politiques, dans la recommandation 8 de son mémoire qu'il a
présenté à la commission la semaine dernière, dit:
"Que l'Assemblée nationale soit la seule instance pouvant exercer des
contrôles sur le bureau des électeurs et qu'à cette fin,
tous les contrôles directs ou indirects de l'Exécutif sur
l'institution responsable soient abolis. " Pour une fois que je suis d'accord
avec M. Boucher, j'espère que le gouvernement le sera aussi.
Donc, quant à ce deuxième principe, celui de la
surveillance, je dis et je répète que je ne suis pas sûr
que la méthode qui est inscrite dans le projet de loi no 96 soit la
meilleure. Quant à nous, nous y souscrirons parce qu'il me semble que
c'est là une nette amélioration sur ce qu'on a connu avant. C'est
le ministre des Finances lui-même qui le déplorait je ne sais trop
à quelle date, je vous ferai grâce de la citation, à moins
que je puisse mettre la main dessus assez rapidement, mais il disait qu'il y
avait un paradoxe. J'y suis justement. Il disait, le 21 juin 1979, je vous
ferai remarquer que c'est il y a deux ans et demi, ce n'est pas avant-hier. Le
ministre des Finances de ce même gouvernement disait ce qui suit, et on a
attendu jusqu'à aujourd'hui pour faire quelque chose: "En tout cas, en
tant que président du Conseil du trésor ou ministre des Finances,
je n'ai pas les pouvoirs d'empêcher certains types de dépenses. "
Il est très clair que dans ce cas-là, pour préserver
l'indépendance du Directeur général des élections,
on a voulu que son budget soit statutaire, mais on arrive à ce
résultat paradoxal qu'il est nommé par l'Assemblée
nationale, mais que l'Assemblée nationale ne surveille pas son budget.
(16 h 10)
D'autre part, il tire des fonds sur le fonds consolidé, mais
l'Exécutif n'a pas non plus de pouvoir là-dessus. Au fond, on a
l'impression que c'est un poste qui n'est pas contrôlé par
l'exécutif et qui n'est pas contrôlé par le
législatif. Je suggère simplement que, peut-être, à
un moment donné, l'exécutif et le législatif auront
à se consulter pour savoir quoi faire parce que, du trapèze sans
filet, parfois, c'est dangereux. Le ministre des Finances a l'image facile, lui
aussi. Pour une fois que je suis d'accord avec ce qu'il disait il y a deux ans
et demi, pas hier, M. le Président, je dis bravo.
Enfin, le gouvernement commence à réaliser
qu'effectivement on ne peut pas laisser le Directeur général des
élections dans les limbes. On lui donne un cadre qui, à mon avis,
n'est pas suffisamment complet. Je répète que la commission
parlementaire sera utile - il n'y a pas de doute - mais, à mon avis, il
faudra ajouter tout au moins, dans la loi, la prévision d'un
débat à l'Assemblée nationale sur le rapport de la
commission, débat limité dans le temps s'il le faut, pour que la
population... Ce sera là le seul élément de contrôle
qu'on aura. Ce sera l'opinion publique qui, bien informée des intentions
du Directeur général des élections, bien informée
des deux points de vue qui s'affronteront à l'Assemblée
nationale, celui des ministériels et celui de l'Opposition, pourra juger
s'il y a exagération ou non dans les projets du Directeur
général des élections. C'est seulement à ce
moment-là qu'on aura une certaine forme de contrôle. Tout le
reste, M. le Président, si on ne se rend pas à ce minimum, ce
sera, malheureusement, uniquement de la frime pour faire croire aux gens qu'on
a fait quelque chose, mais, dans les faits, il sera toujours possible au
Directeur général des élections et à ses adjoints
de dépenser, comme ce fut le cas concernant le registre des
électeurs, 4 500 000 $, d'envoyer promener cela par les
fenêtres...
Une voix: Scandale!
M. Gratton:... sans qu'il en résulte quoi que ce soit.
J'en viens au troisième point. La nomination des
présidents d'élection
Une voix: Une belle "gang".
Une voix: Patronage.
M. Gratton: Cela aussi, M. le Président, ça fait
cinq ans qu'on en parle à l'Assemblée nationale. Je me rappelle
que le premier ministre avait dit: Sous le gouvernement libéral,
c'était une espèce de poutine libérale où le
gouvernement libéral nommait des amis du Parti libéral comme
présidents d'élection. Je présume que s'il s'était
laissé aller complètement, il aurait dit: Sous l'ancien
gouvernement de l'Union Nationale, on nommait les partisans de l'Union
Nationale. Je vais faire l'aveu suivant. C'est
probablement, c'est même sûrement ce qui se passait.
Une voix: Ah bon!
M. Gratton: Mais que s'est-il passé depuis 1976, depuis
que le Parti québécois est au pouvoir? Est-ce que, tout à
coup, on a commencé à nommer des libéraux, des
créditistes ou des unionistes comme présidents
d'élection?
Une voix: Oh non!
M. Gratton: Non. On a nommé des bons péquistes,
comme me fait signe le député de Terrebonne. Lui, il
connaît cela, M. le Président. C'est évident, M. le
Président, et on ne l'aurait pas reproché aussi souvent au
gouvernement s'il n'avait pas tenté de faire croire qu'il n'était
pas comme cela. Le premier ministre, lui, n'est pas comme les autres. C'est un
homme candide qui n'aurait jamais osé croire à la
possibilité de faire du favoritisme quelconque. Voyons donc! Allons
donc! comme dirait le député de Sauvé.
M. le Président, dans les faits, qu'est-ce qui est arrivé?
Je serais prêt à gager que, parmi les 122 présidents
d'élection - il y en avait peut-être seulement 108, peu importe,
en 1976 - il n'en reste pas 10%. Pourtant, ils ne pouvaient pas tous être
des incompétents.
Une voix: Ils étaient trop vieux.
M. Gratton: Je me rappelle qu'en réponse à des
questions que j'avais posées au premier ministre il m'avait dit: Les
critères pour nommer les nouveaux présidents d'élection
c'est, d'abord, la disponibilité et, ensuite, la compétence.
Une voix: La carte de membre du PQ.
M. Gratton: On s'est aperçu, à un moment
donné, que ces critères de disponibilité et de
compétence l'avaient amené à nommer, dans le comté
de Hull, un résident de la province de l'Ontario, un nommé
Côté, un notaire, qui était probablement fort
compétent, mais en regard de la loi il n'était pas
compétent pour exercer le poste de président d'élection
puisqu'il n'était même pas électeur. Il n'était
même pas résident de la province de Québec. Il n'avait
même pas le droit de vote. Mais, apparemment, il était plus
disponible. Je comprends qu'il était disponible. Il n'avait probablement
que cela à faire parce qu'il n'y avait pas d'élections, à
ce moment-là. Il avait donné tout son dû au Parti
québécois. D'ailleurs, cela m'a valu des excuses de la part du
premier ministre. Il m'avait traité de salaud, à un moment
donné, parce que j'avais fait allusion au fait que le bonhomme ne
restait pas au Québec. Il avait dû revenir, le lundi suivant,
s'excuser pour reconnaître que les faits que j'avais
allégués ici étaient fondés. La
députée qui avait recommandé M. Côté, elle,
ne s'en est jamais excusée, mais Jocelyne Ouellette a été
battue et cela a été encore mieux.
On a fait cela de façon systématique, on les a
remplacés. À force de poser des questions au premier ministre et
de le mettre en contradiction avec ses beaux discours de transparence, il a
fini par suggérer une modification à la loi. Il a dit:
Dorénavant, on va régler cela. On va confier au Directeur
général des élections le soin de faire des concours
publics. À la suite des concours publics, il pourra nous fournir une
liste de trois candidats qui auront subi les examens avec succès et le
premier ministre en choisira un. On s'est dit: C'est mieux que pas de concours.
S'il y a des critères objectifs à partir desquels on fait passer
ces examens, peut-être que ce ne sera pas seulement les amis du parti qui
seront nommés, mais ce sera surtout ceux qui sont les plus
compétents.
Mais, chassez le naturel et il revient au galop. On a eu des
concours...
M. Bélanger: Oui, des concours de circonstances!
M. Gratton:... des listes de trois noms qui ont été
soumises au premier ministre mais...
M. Blais: Pas une liste noire?
M. Gratton:... comme par hasard, on s'est aperçu que
lorsque le Directeur général des élections envoyait les
résultats au premier ministre, on ne donnait pas le résultat des
concours, mais nous avons mis la main sur quelques exemples.
Mme Juneau: Encore des fuites!
M. Gratton: On s'est aperçu, que dans le comté de
L'Acadie, le président d'élection qui était là
avant et qui, au concours du Directeur général des
élections, avait réussi un total de 238 aux examens oraux et
écrits, a quand même été remplacé par un
autre bonhomme qui, lui, avait réussi avec 237. Ce n'était pas
beaucoup moins, mais ce n'était sûrement pas plus. Mais le
monsieur en question avait eu la bonne idée de faire une contribution de
150 $ au Parti québécois.
Des voix: Ah!
Une voix: Y a rien là!
M. Gratton: Dans le comté d'Arthabaska, un autre monsieur
- dont je vous fais grâce du nom - qui, aux examens,
n'était peut-être pas très fort, lui aussi avait
fait une contribution à la caisse électorale du Parti
québécois.
Des voix: Ah!
M. Gratton: Et ainsi de suite dans le cas du comté de
Viau, dans le cas du comté de Marguerite-Bourgeoys. Je vous en fais
grâce, M. le Président, mais je pourrais vous donner la liste des
antécédents politiques partisans des présidents
d'élection seulement pour les comtés de l'Est du Québec.
Vous constateriez qu'à côté de chaque nom on retrouve des
mentions comme celles-ci: trésorier de l'Association du Parti
québécois en 1975, membre actif du Parti québécois,
ancien président de l'association de comté, organisateur en chef
du Oui en mai 1980, président de l'association, candidat du Parti
québécois... M. le Président, je vous fais grâce du
reste. Je suis prêt à affirmer que, dans 80% ou 90% des cas, ce
sont les critères principaux.
D'ailleurs, le premier ministre l'avait dit. À un moment
donné, on lui a demandé: Comment pouvez-vous nous assurer que
vous vous fiez à des critères objectifs pour choisir celui des
trois qui est le plus compétent quand on ne vous donne pas les notes au
concours? Il nous avait dit très candidement - parce que c'est un homme
candide, le premier ministre - que dans ce temps-là il consulte.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Gratton: On lui avait même demandé:
Consultez-vous le curé, le maire, les édiles, les marguilliers?
On a eu l'impression que celui qu'il consultait, c'était surtout...
M. Bélanger: Jean-Roch.
M. Gratton:... soit le député péquiste, s'il
y en avait un, soit le candidat défait, s'il était encore
là, et, plus souvent qu'autrement, cette éminence grise au
cabinet du premier ministre, M. Jean-Roch Boivin, que, j'en suis sûr,
vous aimez tant de l'autre côté, surtout de ce temps-ci,
après votre dernier Conseil des députés.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Gratton: Oui, on me fait signe que c'est un peu comme
ça. J'avais déposé... Encore là, ce n'est pas un
mérite qu'on veut se faire reconnaître, mais quand un parti
politique, quand un premier ministre nous dit "nous, on va faire les choses
différemment", on dit "prenez les moyens, arrêtez de faire de la
frime avec des discours ou avec des pseudo-réformes et prenez les vrais
moyens". (16 h 20)
Le 4 avril 1979, j'avais proposé l'adoption du projet de loi no
195 qui disait tout simplement: Le Directeur général des
élections... Il a été nommé par le gouvernement du
Parti québécois, il n'a pas été nommé par
nous, mais on lui fait confiance. Il est nommé ici par les deux tiers
des députés de l'Assemblée nationale. Une fois qu'il est
nommé, nous on n'a pas à nous interroger sur son
impartialité ou son objectivité. On disait: Qu'il soit le seul
à nommer le directeur de scrutin dans chaque circonscription
électorale. Là le projet de loi no 96 vient dire: Oui, c'est cela
qu'on va faire. Comme on dit, maintenant qu'ils sont tous nommés, les
petits amis du parti, c'est facile de pratiquer la vertu, M. le
Président. Je dis et c'est important qu'on le sache, cela s'appliquera
pour le prochain gouvernement en supposant qu'il soit libéral. On le
savait, quand on préconisait cela, qu'il n'y aurait plus d'intervention
de l'exécutif dans ces nominations et on va s'y plier avec joie parce
que si on est pour démocratiser, qu'on arrête de faire simplement
des discours et qu'on passe aux actes.
Cela m'amène à dire, M. le Président, qu'il n'y a
rien de répréhensible à ce que des membres du Parti
québécois soient présidents d'élection ou que des
membres d'un autre parti politique soient présidents d'élection.
Vous-même, M. le vice-président, vous êtes un membre du
Parti québécois et cela ne vous empêche pas de faire un
travail objectif et impartial. C'est vrai du Président de
l'Assemblée, c'est vrai des présidents des commissions dans la
plupart des cas. J'en ai été un et à l'occasion, je ne
suis pas le moins partisan des députés ici à
l'Assemblée nationale, mais j'invite les députés
ministériels à consulter leurs collègues qui
étaient ici avant 1976 et ils vous diront que lorsque je
présidais les commissions parlementaires, je laissais la partisanerie de
côté, je faisais mon job avec objectivité. Il y a des gens
qui sont capables de le faire et je dis, la plupart des membres de cette
Assemblée sont capables de le faire.
Je dis donc, M. le Président, qu'on ne doit pas disqualifier
quelqu'un à cause de son allégeance politique. Ce n'est pas
nécessairement vrai de toutes nos nominations. Là, je regrette de
devoir le dire, mais dans le cas du Directeur général du
financement des partis politiques, nous du Parti libéral on se pose de
sérieuses questions sur l'espèce de méthode de deux poids
deux mesures qu'on a appliquée depuis la création de cette
direction générale. J'ai fait valoir en commission parlementaire
la semaine dernière le fait qu'on avait sûrement pris les devants
à la direction générale du financement des partis
politiques quand en date du 22 novembre 1982, à partir d'un simple
article de journal paru dans la Presse du 19 novembre 1982, où on
faisait état de
l'intention des membres du Syndicat des enseignants de la Commission
scolaire de Saint-Jérôme de faire des contributions de 100 $ au
Parti libéral du Québec en guise de protestation contre la
méthode qu'employait le gouvernement dans les négociations du
secteur public.
On disait bien dans l'article, M. le Président, qu'il s'agirait
des chèques personnels de ces enseignants faits à l'ordre du
Parti libéral du Québec. Donc, aucune irrégularité
à appréhender là-dedans, sauf qu'on y mentionnait que
possiblement on pourrait les déposer en fiducie à un moment
donné, comme si le Parti libéral du Québec n'était
pas assez soucieux de respecter la loi pour, lui-même, faire en sorte que
toute contribution qui pourrait nous être adressée rencontre les
critères de la loi. Moi-même, M. le Président, chacun de
mes collègues ici à l'Assemblée nationale avons eu
l'occasion, je suis sûr que c'est le cas de l'autre côté
aussi, de recevoir des chèques de personnes morales, de compagnies si
vous voulez, qui ne sachant pas qu'il était illégal pour eux de
faire des contributions à un parti politique, nous les envoyaient de
bonne foi. Qu'est-ce qu'on a fait? Moi je sais ce que j'ai fait. Je les ai
retournés en leur soulignant qu'il n'était pas question de
pouvoir les accepter, de faire des chèques personnels.
C'est ce qu'on aurait pu nous laisser faire au niveau de la direction
générale du financement des partis politiques. Mais non. En date
du 22 novembre 1982, le Directeur général du financement des
partis politiques demandait à son contentieux d'envoyer une lettre aux
syndicats en question pour les mettre en garde, les prévenir qu'il
pourrait y avoir une infraction à la loi si, éventuellement, on
venait à faire un dépôt en fiducie pour ensuite le remettre
au Parti libéral du Québec. M. le Président, on a beau
prendre les devants, mais quand, d'une part, on s'en va prévenir des
gens qui veulent faire des contributions de la façon dont ils doivent
les faire et que, d'autre part, on a un livre qui est vendu publiquement dans
les librairies présentement, le livre du Dr Marc Lavallée, qui
contient des...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse.
M. Guay: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du
gouvernement, sur une question de règlement.
M. Guay: Je m'excuse auprès de mon collègue de
Gatineau, mais nous sommes en train normalement de discuter du principe du
projet de loi visant à regrouper les organismes électoraux et je
me demande -j'écoute depuis tantôt le député de
Gatineau, aussi religieusement que possible - ce que vient faire un cas ad hoc
qui a pu être évoqué en commission parlementaire en
présence du Directeur général du financement des partis
politiques. Qu'est-ce que cela vient faire dans le principe de regroupement qui
est la pertinence du débat? C'est là-dessus que doit porter le
débat. Que vient faire le cas du syndicat de Saint-Jérôme
ou la publication d'un livre dans ce débat sur le principe du projet de
loi? C'est ce que je me demande. Ce que je vous demande, M. le
Président, c'est de rappeler le député de Gatineau
à l'ordre.
M. Gratton: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Sur la question de
règlement ou...
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je pourrai
répondre en même temps au député de Taschereau.
C'est tout simple. Je suis en train d'expliquer que l'intégration des
services fera en sorte que le responsable, dorénavant, de la direction
générale du financement des partis politiques, sera le Directeur
général des élections et non plus M. Boucher. Et je vous
dis: Bravo, il était temps. C'est tout. Parce que ce genre de
comportement, M. le Président, on ne peut pas l'accepter quand, d'autre
part, on a un livre du Dr Marc Lavallée dans lequel il fait des
accusations graves qui pourraient constituer des violations à la Loi sur
le financement des partis politiques et que...
M. Guay: J'invoque le règlement de nouveau.
M. Gratton: Voyons donc!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Question de règlement de la part du leader adjoint
du gouvernement.
Des voix: Oh!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Une voix: Qu'avez-vous fait des 300 000 $?
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Guay: M. le Président, j'interviens de nouveau sur la
pertinence du débat. Le député de Gatineau se dit d'accord
avec le fait que tout cela relève dorénavant du Directeur
général des élections, ce qui est pertinent au
débat. Ce qui ne m'apparaît pas
l'être, c'est un cas particulier par lequel il vise à
blâmer une personne qui n'est même pas le Directeur
général des élections, ce qui n'a aucun rapport avec les
principes en cause et qui plus est, il évoque à l'appui de son
argumentation une affirmation parfaitement gratuite d'un
événement qui se serait produit il y a douze ans, alors que la
Loi sur le financement des partis politiques n'existait même pas et alors
que cet incident n'avait même pas eu lieu.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela devient difficile de
trancher dans un débat sur la pertinence quand on utilise une
argumentation qui fait partie de ce qu'on veut donner comme exemple. Tout en
demandant au député de Gatineau de rester le plus près
possible de la pertinence, je lui demande de continuer son intervention.
M. Gratton: Merci, M. le Président. D'ailleurs, je vais
corriger quelque chose que vient d'affirmer le député de
Taschereau. Il a dit que c'étaient des allusions à des choses qui
se sont produites avant l'adoption de la loi 2. Qu'en sait-il? Quand le Dr
Lavallée parle de paiements au comptant à de supposés
bénévoles au référendum, ce n'était pas
avant l'adoption de la loi, c'était après. C'est ce que je
reproche au Directeur général du financement des partis
politiques. Il a admis ne pas avoir même lu le livre pour s'assurer qu'il
n'y avait pas eu de violation, dans un cas où il pourrait y avoir une
infraction à la loi. On ne fait rien. On dit: Ce sont probablement des
choses qui se sont produites avant l'adoption de la loi. Dans l'autre cas, on
n'a même pas raison d'appréhender qu'il pourrait y avoir une
infraction à la loi et on envoie tout de suite une lettre du
contentieux. Je dis: C'est deux poids, deux mesures et c'est inacceptable. Je
le dis ici et je l'ai dit à M. Boucher.
Des voix: Bravo! (16 h 30)
M. Gratton: En terminant, M. le Président, puisque je dois
le faire, je dirai qu'il y a un autre aspect du projet de loi qui me
préoccupe, c'est celui de l'article 183 qui élargit la
possibilité qu'avait le Directeur général des
élections de procéder à des études, à des
recherches et à engager des fonds publics. On élargit cette
possibilité pour le Directeur général des
élections, puisqu'il sera dorénavant responsable également
de l'administration de la Loi sur le financement des partis politiques.
Je dis, M. le Président, nonobstant le fait qu'on pourra scruter
ses prévisions budgétaires à l'Assemblée nationale,
qu'il n'y a pas lieu d'élargir les pouvoirs déjà
très considérables que le Directeur général des
élections possède déjà. Je dirai également
que nous aurons un certain nombre de propositions très concrètes
à faire lors de l'étude article par article, non pas pour mettre
les bois dans les roues, non pas pour compliquer, loin de là, on
demeurera constant. Depuis 1977, on souhaite qu'un projet de loi, comme celui
qui nous est présenté sous la forme du projet de loi no 96, soit
déposé à l'Assemblée nationale; on n'est
sûrement pas pour déroger, à des fins strictement
partisanes, à notre règle de conduite qui a toujours
été de collaborer objectivement à améliorer nos
lois électorales. C'est seulement dans cette optique que nous aurons non
seulement des propositions, mais des amendements concrets à proposer au
ministre au moment de l'étude article par article.
En terminant, je dirai que si, dans l'Opposition, nous sommes contraints
aujourd'hui de critiquer le gouvernement, c'est uniquement parce que c'est
là notre rôle. Il ne s'agit pas d'essayer de dénigrer qui
que ce soit; notre rôle, à la suite de l'élection de 1981,
n'est pas d'encenser le gouvernement, il y en a suffisamment de ce
côté-là qui non seulement encensent le gouvernement, mais
qui demain voteront pour des choses auxquelles ils ne croient pas du tout,
aveuglément, M. le Président. Je dis que ceux-là peuvent
encenser le gouvernement, peuvent dire: C'est donc beau, c'est donc fin ce
qu'on fait dans le projet de loi no 96. Nous, on a le devoir de faire en sorte
que la population sache que tout n'est pas si rose que cela. Ce n'est pas de
gaieté de coeur qu'on le fait, mais on le fait avec
énormément de satisfaction aujourd'hui, parce que cela fait cinq
ans qu'on le dit et que, finalement, le gouvernement nous donne raison.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Bellechasse.
M. Claude Lachance
M. Lachance: Merci, M. le Président. J'ai
écouté avec beaucoup d'attention le député de
Gatineau et je me suis rendu compte, pour avoir déjà
été dans le monde de l'enseignement, qu'il ne connaissait pas les
règles élémentaires, à savoir que le meilleur
discours, c'est un discours cohérent et court pour être bien
perçu par les personnes qui ont à l'entendre. Cela me rassure
parce qu'il est certain qu'il possède certaines qualités comme
orateur, mais c'est si dommage de voir ses qualités utilisées de
si piètre façon.
Il a fait allusion, au début de son intervention, au fait qu'il
était là de 1972 à 1976, donc quatre ans avant
l'arrivée au pouvoir du Parti québécois. Je réalise
que ses idées et son imagination semblent, par le fait de la
génération spontanée, être apparues après
l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois. Il a des questions à se poser. Alors
qu'ils étaient, de ce côté-ci, 102 députés de
1973 à 1976, comment se fait-il que les bonnes intentions ne se soient
pas concrétisées avant l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois? Je pense que c'est la question qu'on doit se poser. Ce
qu'on vient de voir, le côté "showman" du député, on
prend cela avec un grain de sel.
Je voudrais revenir à l'objet du projet de loi no 96, qui porte
sur l'intégration du système électoral. Il y a, dans ce
projet de loi, 57 articles, des articles qui modifient sept lois
adoptées antérieurement. Ce projet de loi no 96, qui nous arrive,
n'est pas le fruit d'une réflexion d'une nuit, c'est le fruit de longues
réflexions qui ont abouti à la suite d'un processus qu'on a connu
au cours des mois et même des années. Déjà, au cours
du mois de juin dernier, le ministre de la réforme électorale
avait indiqué qu'il était dans ses intentions d'agir dans ce
sens. Le projet de loi no 96 vise essentiellement trois choses:
premièrement, l'intégration administrative des différents
éléments du système électoral actuel au
Québec, soit, d'une part, ce qui a trait au financement des partis
politiques, ce qui existe depuis 1977. À entendre parler le
député de Gatineau, je commençais à penser que
c'étaient eux, les libéraux, qui avaient adopté cette loi
qu'ils semblent trouver si merveilleuse maintenant... Il y a aussi la
Commission de la représentation, organisme absolument non partisan, qui
n'existait pas auparavant, et, finalement, la direction des élections
comme telle qui serait regroupée sous un seul chapeau dorénavant
par la loi 96.
Deuxièmement, dans cette loi, on assiste à
l'établissement d'un mécanisme de contrôle par
l'Assemblée nationale des dépenses qui sont reliées
à l'administration du système électoral. Enfin, on vise
par le projet de loi no 96 à assurer une cohérence et une
efficacité accrue qui va permettre de donner un service
amélioré aux électeurs du Québec et, surtout, la
réduction des coûts occasionnés par ces mécanismes
qui nous guident en période électorale.
M. le Président, vous me permettrez sûrement de dire
quelques mots sur la Commission de la représentation. Elle va continuer
d'exister, même s'il est prévu dans le projet de loi que le
Directeur général des élections va être d'office le
président de la Commission de la représentation. Le projet de loi
indique également qu'il sera assisté d'un adjoint dans
l'exécution de ses fonctions. Ce qui est important, c'est le fait que la
commission conserve ses pouvoirs et qu'elle soit intégrée sur le
plan administratif à l'institution regroupée. Personne ne
conteste l'importance de conserver cette institution qu'est la Commission de la
représentation à cause des services immenses qu'elle a rendus; je
voudrais le signaler notamment au niveau municipal, lors de
l'établissement du mécanisme dans certaines municipalités
populeuses du Québec. Je pense également que la commission doit
avoir été consultée lorsqu'on a établi la carte des
MRC au Québec.
L'un des éléments essentiels de ce projet de loi consiste
dans le contrôle réel, quoi qu'en dise le député de
Gatineau, de l'Assemblée nationale des dépenses reliées au
système électoral. Que je sache, l'Assemblée nationale est
composée des porte-parole des différents partis politiques.
Actuellement, il y en a deux, mais à l'avenir il pourra en avoir
davantage. Le fait que ce soit l'Assemblée nationale, par le biais d'une
commission parlementaire, qui puisse être habilitée à
exercer ce contrôle est rassurant en ce qui concerne l'aspect
démocratique de nos institutions électorales.
Le projet de loi établit que le directeur général
va préparer chaque année des prévisions
budgétaires, ce qui est tout à fait normal, et, lorsqu'il y aura
lieu, des prévisions budgétaires supplémentaires seront
étudiées par une commission parlementaire de l'Assemblée
nationale, et qu'à la suite de ce processus la commission, après
discussion, approuvera les crédits et déposera son rapport
à l'Assemblée nationale. À ce moment, si les
députés de l'Opposition ne sont pas satisfaits des
prévisions budgétaires, l'occasion leur sera donnée de
manifester leur opposition ou encore leurs commentaires. Pour moi, c'est un
gage de non-partisanerie en ce qui concerne cette institution très
importante qu'est tout le domaine électoral au Québec.
M. le Président, on l'a dit, je le répète, l'un des
éléments essentiels du projet de loi no 96, c'est la
réduction des coûts du système électoral.
Là-dessus, je pense qu'il y a eu du charriage. Si on en juge par ce qui
a été publié récemment dans les journaux, ce ne
seront certes pas des économies de bouts de chandelles qui seront
réalisées à la suite du projet de loi no 96. (16 h 40)
Je voudrais vous donner un aperçu ici de ce que cela peut
représenter. On estime, à la lumière des informations qui
nous sont disponibles, que le regroupement des différents organismes et
institutions au niveau électoral, produira une économie
potentielle de près de 2 000 000 $ au niveau des effectifs,
c'est-à-dire au niveau du nombre de personnes qui travailleront dans ces
secteurs-là dorénavant. Également, 400 000 $ additionnels
au niveau des ressources matérielles et financières. Donc, une
économie de 2 400 000 $. J'estime, encore une fois, que ce sont des
économies substantielles qu'on ne peut d'aucune façon qualifier
d'économies de bouts de chandelles.
Lors des discussions en commission parlementaire la semaine
dernière, nous
avons entendu - j'étais présent avec mon collègue
de Gouin, mon collègue de Groulx -le Directeur général des
élections nous donner des informations concernant les différences
qui existent entre les dépenses au plan fédéral et les
dépenses qui existent ici avec les lois électorales en vigueur au
Québec.
Vous me permettrez certainement de vous donner un aperçu de ce
que le Directeur général des élections nous a donné
comme information, comme économie possible, dépendant de la
décision qui pourrait être prise éventuellement. Je croyais
pouvoir entendre dans l'allocution du député de Gatineau qu'il
nous précise des endroits où il devrait y avoir des coupures. Je
n'ai rien entendu de tel, je n'ai même pas entendu sa décision
à savoir s'il votera pour ou contre le projet de loi. Jusqu'à
maintenant c'est une information que je ne possède pas.
La critique est facile: on y va et on se targue d'être
démocrate et tout le "kit"; mais quand vient le temps de voter on se
dit: On a voté parce qu'on était d'accord avec l'essentiel du
projet de loi. C'est encore le côté "showman" qu'on retrouve assez
souvent chez nos amis d'en face.
Je reviens à quatre points que le Directeur général
des élections nous a identifiés comme étant des montants
qui ne sont pas versés au niveau fédéral et qui le sont
avec la loi en vigueur actuellement au Québec. Le premier point concerne
les sommes qui sont attribuées aux représentants des candidats
lors d'élections au niveau du Québec. D'après M.
Côté, si on décidait d'abolir cela, il en
résulterait une économie de 2 400 000 $ à ce chapitre. On
fait référence à l'élection du 13 avril 1981.
Un deuxième élément: Le mécanisme est
très différent de ce qui existe au niveau fédéral
en ce qui concerne la révision des listes électorales. Selon M.
Côté, la différence serait de l'ordre de 2 600 000 $, ce
qui est assez substantiel. Mais j'aimerais bien savoir si les gens d'en face
sont d'accord avec ces réductions parce qu'il s'agit de deux
systèmes très différents et je crois que le système
qui est en vigueur au Québec a été accepté comme
une nécessité au niveau du resserrement des contrôles et
des possibilités accrues pour les électeurs d'exercer leur droit
de vote.
Un autre élément identifié par le Directeur
général des élections la semaine dernière en
commission parlementaire, c'est la distribution des listes électorales.
À ce chapitre, on peut dire qu'au Québec, lors du dernier
scrutin, il en a coûté 512 000 $ pour distribuer à chaque
électeur du Québec une copie de la liste électorale de son
bureau de scrutin. Cette dépense n'existait pas au niveau canadien dans
les comparaisons qui sont fournies pour la bonne et simple raison qu'au niveau
fédéral, avant l'arrivée de la Société
canadienne des postes, ce que le fédéral envoyait par la poste
n'était pas comptabilisé. C'est gratuit pour eux. En tout cas,
cela l'était, mais semble-t-il que dorénavant ce ne sera plus la
même chose. 512 000 $ donc à ce sujet-là.
Le dernier élément - et j'aimerais bien savoir ce que nos
amis d'en face en pensent c'est le nombre de circonscriptions
électorales au Québec, c'est 122, et, au Canada, pour le
Québec, c'est 75. Est-ce que les députés d'en face sont
d'accord pour qu'on réduise à 75 le nombre des
députés de cette Assemblée nationale?
Une voix: Oui.
M. Lachance: En tout cas, j'aimerais savoir ce qu'ils en pensent,
parce que même les électeurs ne seraient certainement pas d'accord
pour augmenter, de façon considérable, le nombre de
députés à l'Assemblée nationale. Quand on voit de
quelle façon mon collègue fédéral de Bellechasse
parcourt le comté qu'il représente, je vous assure que ce n'est
pas facile de le rejoindre parce que c'est immense. Ce n'est pas le pire
comté à ce chapitre.
Tout cela - quatre éléments et il y en a peut-être
d'autres - pourrait concourir à économiser des sommes d'argent
très appéciables, mais à quel prix? Je pense qu'on doit
nécessairement faire des efforts financiers additionnels parce qu'on a
des conditions particulières. Mais cela ne veut pas dire qu'on
fonctionne tous azimuts, les yeux fermés. Je pense qu'on doit
rechercher, dans des périodes économiques comme celle que nous
traversons, des moyens d'atténuer les coûts tout en maintenant la
qualité qui est offerte aux citoyens qui ont exprimé leur
suffrage lors d'une élection ou d'un référendum.
Je voudrais, M. le Président, ouvrir une parenthèse
concernant la nomination des directeurs de scrutin par le Directeur
général des élections. Là-dessus, le
député de Gatineau, tantôt, s'est bien bidonné. Si
on en croit ses paroles, on en arrive maintenant, dans le projet de loi no 96,
à quelque chose qu'il a lui-même suggéré. Mais,
encore là, comment se fait-il que, de 1970 à 1976, on n'a pas cru
opportun d'agir tel que le prévoit maintenant le projet de loi no
96?
M. le Président, vous savez comment cela fonctionnait auparavant.
Cela fonctionnait comme cela fonctionne encore au niveau fédéral,
au niveau canadien. Comment cela fonctionne-t-il présentement? Il y a
une autonomie absolument complète du gouvernement fédéral
en place de choisir qui il veut. On a décidé, par une loi qui a
été adoptée en 1979, de faire un concours qui assure au
moins une qualité des directeurs de
scrutin dans chacune des circonscriptions. Je pense que c'était
une étape essentielle à franchir en vue d'en arriver, finalement
-c'est l'objet du projet de loi no 96 - à permettre la nomination des
directeurs de scrutin par le Directeur général des
élections. Je pense qu'à l'avenir, on n'aura plus à se
poser des questions relativement à l'allégeance politique de
telle dame ou de tel monsieur qui agit comme directeur de scrutin. Il n'y a
certainement pas lieu pour le député de Gatineau et les autres
d'en face de se bidonner à ce sujet. J'estime que cette mesure, si elle
est si bien vue maintenant, aurait tout aussi bien pu être adoptée
par eux qui formaient le gouvernement de 1970 à 1976.
En conclusion, M. le Président, je voudrais dire que le
système dans lequel nous avons à évoluer, personnellement,
comme député, j'en suis extrêmement fier.
Évidemment, c'est un système qui a son coût, mais j'en suis
très fier parce que c'est un modèle dans le monde occidental. Je
pense que, comme tout ce qui est humain est perfectible, il y a certainement
des améliorations qui pourront être apportées dans
l'avenir. Personnellement, je concourrai à toute mesure susceptible
d'améliorer la situation - en particulier, je pense à un domaine
qui me préoccupe beaucoup, le domaine municipal - afin de diminuer au
maximum les coûts. Je rêve au jour où on pourra utiliser
intégralement ou presque la liste électorale confectionnée
au Québec pour les fins de scrutin au niveau municipal. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Brome-Missisquoi.
Une voix: Lui, il est bon. (16 h 50)
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: Merci, M. le Président. Intervenir en
deuxième lecture sur le projet de loi no 96 sur l'intégration de
l'administration du système électoral, c'est un peu un devoir
pour chacun des élus en cette Chambre. Ce projet de loi nous affecte
principalement comme députés et affecte également chacun
de nos électeurs. Le but, l'objet de ce présent projet de loi est
de regrouper trois directions générales, finalement: la Direction
générale des élections, la Direction
générale du financement des partis politiques et la Direction
générale de la représentation électorale.
On nous dit, de l'autre côté, que c'est par mesure
d'économie que l'on nous présente ce projet de loi. Si
c'était le cas, le député de Brome-Missisquoi, l'ensemble
des députés de l'Opposition, le député de
Gatineau, qui était le porte-parole du parti sur ce projet de
loi, l'ensemble des députés ministériels et
vous-même, M. le Président, nous nous serions tous
empressés d'adopter ce projet de loi, nous nous serions empressés
de féliciter le gouvernement qui adopte des mesures d'économie en
période de crise.
M. Rodrigue: II n'est jamais trop tard pour bien faire!
M. Paradis: Mais qu'en est-il dans les faits? Le Devoir, qui
n'est pas le journal le moins crédible et le moins sérieux de la
province de Québec, le mardi 16 novembre, titrait ce qui suit: "En deux
ans, selon un rapport inédit transmis à Bédard - vous
savez à qui on se réfère, à l'honorable ministre de
la Justice - les institutions électorales ont coûté 86 000
000 $". En deux ans, cela a coûté 86 000 000 $ au Québec,
cela veut dire aux contribuables de la province de Québec, aux
travailleurs du Québec. 86 000 000 $ en deux ans! C'est 43 000 000 $ par
année! C'est quasiment 22 000 000 $ par année par parti
politique.
Là, on peut faire une petite comparaison. Tout le monde suit la
publicité des campagnes de financement de chacun des partis politiques.
C'est 2 000 000 $ ou 2 500 000 $ par année par parti politique qu'on
recueille. Qu'est-ce que le gouvernement dépense, lui? 43 000 000 $ par
année, alors que les deux formations politiques ensemble recueillent 5
000 000 $. Cela a-t-il un sacré bon sens? C'est une proportion qui ne
tient pas debout. Si on nous présente un projet de loi aujourd'hui qui
vise à regrouper ces institutions, le Directeur général
des élections, le Directeur général du financement des
partis politiques, le Directeur général de la
représentation, c'est parce qu'on s'est aperçu que le monstre
administratif qu'on a créé n'a plus de sens.
Ce monstre, ce n'est pas aujourd'hui que le Parti libéral du
Québec le dénonce, cela a été dénoncé
à partir du tout début, cela a été
dénoncé dans le projet de loi no 2, le projet de loi sur le
financement des partis politiques. Cela a été
dénoncé par le député de Laval, Jean-Noël
Lavoie qui, malheureusement, ne siège plus avec nous aujourd'hui et qui
disait, le 11 juillet 1977, ce qui suit. Écoutez cela, ceux d'en face
qui avez voté contre les suggestions du député de Laval,
écoutez ce qu'il disait. M. Lavoie disait et je le cite: "Je me demande
pourquoi dédoubler et créer un autre poste de directeur
général alors que, tout simplement, cela aurait été
tellement plus facile, au lieu d'avoir une prolifération des organismes,
des bureaux et des systèmes de contrôle, de confier au
président général des élections la surveillance et
l'administration de cette loi. " Cela date de 1977.
Le leader de l'Opposition, député de
Marguerite-Bourgeoys, disait à cette époque: "On retrouve
comme résultat une dualité de responsabilités entre le
directeur général, dont la fonction est créée par
ce projet de loi, et le président des élections. Je ne sais pas
dans quelle mesure le gouvernement est conscient - parce qu'il était
inconscient à cette époque-là comme il l'est aujourd'hui
au niveau des dépenses - des problèmes pratiques que cette
dualité de responsabilités peut créer. C'est tellement
évident, disait le député de Marguerite-Bourgeoys, que
cette dualité ne peut créer que des problèmes. "
Michel Gratton, député de Gatineau, à cette
époque disait ce qui suit: "On demande maintenant à un directeur
général du financement, avec des responsabilités qui
s'apparentent de très près à celles du Directeur
général des élections, en fin de compte, de mettre sur
pied toute une structure administrative très semblable à celle
qui existe déjà chez le président-directeur
général des élections. Il serait préférable,
disait le député de Gatineau, de laisser au président
général des élections le soin, l'autorité
d'administrer avec les dispositions de la loi 2 que celles de la Loi
électorale actuelle. "
Le député de Gatineau, le député de
Marguerite-Bourgeoys et le député de Laval, tous ces
députés libéraux, en administrateurs conscients,
responsables des deniers publics, ont dit: Cela va coûter une fortune
pour rien sinon instituer un petit système de patronage politique du PQ.
On a un rapport. C'est le Devoir qui nous le rappelle. 86 000 000 $ dans les
deux dernières années. 43 000 000 $ par année. Le PQ n'a
pas écouté.
Cela a continué, M. le Président, en 1979 avec la Loi sur
la représentation électorale. Là encore, on a eu des
interventions des députés libéraux de ce
côté-ci de la Chambre qui vous ont fait des suggestions
constructives dans le but d'enrayer une hémorragie de fond pour faire
aboutir des trips et des rêves péquistes. Le député
de Laval, M. Lavoie, qui, malheureusement, ne siège plus aujourd'hui
avec nous, disait en 1979: Ce n'est pas parce qu'il - c'est-à-dire le
ministre - va multiplier les structures, qu'il va bâtir de grosses
cabanes au Directeur général des élections, au Directeur
général du financement des partis politiques et au
représentant de la Commission de la représentation, ce n'est pas
parce qu'on va dépenser au maximum avec des budgets énormes et du
personnel énorme que, si on ne contrôle pas les dépenses,
cela donnera une meilleure garantie de la démocratie.
Vous avez connu l'ex-président de l'Assemblée nationale,
le député de Laval, M. Lavoie. Il croyait à la
démocratie, mais il ne croyait pas aux cabanes chromées
péquistes qui n'ont rien ajouté à la démocratie
au
Québec. Le député de Roberval, ex-whip en chef de
l'Opposition officielle, M. le Président, vous vous en souvenez, un bon
administrateur, vous vous souvenez de ce qu'il a dit, à ce moment, en
1979 avant qu'on s'embarque dans les 43 000 000 $ par année de
dépenses de chrome du PQ; il disait ce qui suit: II faut prévoir
en fait un mécanisme souple, efficace qui ne verse pas dans des
dépenses somptuaires, messieurs de l'autre côté. Toilettes
de marbre, etc. Lorsqu'on parle des dépenses somptuaires, on parle
d'abord d'une commission formée de trois membres dont deux seraient
payés à temps plein, un secrétaire général,
l'engagement de toute autre personne dont on aurait besoin.
Le député de Saint-Louis, sur le même projet de loi,
en bon administrateur libéral, en député conscient de
l'utilisation des fonds publics, des fonds de ses électeurs, vous savez
ce qu'il déclarait en Chambre le 9 octobre 1979, M. le Président,
je le cite au texte: "What is even more terrible, M. le Président, in
this Bill, one of the basic element of Parliamentary democracy is that we the
representatives of the people control the spending of money". Est-ce qu'on a
contrôlé, nous autres à l'Assemblée nationale, ces
86 000 000 $ de dépenses dans les deux dernières années?
Est-ce que vous avez suivi les sages conseils du député de
Saint-Louis? Celui-ci continuait, le 9 octobre 1979: "Every dollar that is
spent must come under scrutiny of the elected members". Ils ne croient pas
à cela de l'autre bord. Cela se passe au cabinet, en cachette, vite
fait. "What do you find in this Bill? This independent commission can spend
millions and millions of dollars each year... ". 43 000 000 $ par année,
M. le Président, est-ce que c'est de l'argent? C'est ce que cela prend
pour maintenir SIDBEC-Normines ouverte pendant un an pour garantir des milliers
d'emplois aux travailleurs de la Côte-Nord. "... out of the Consolidated
fund and we, the elected members, cannot stop them from spending one penny. "
Les machines à voter, de l'autre côté, ont toutes
endossé cela parce que l'honorable premier ministre leur a dit: Faites
confiance. C'est beau le chrome. Il faut rester fort. On est capable.
Aujourd'hui, on est capable de voler les employés du secteur public.
Aujourd'hui, on est capable de faire perdre des milliers d'emplois au
Québec parce que les investisseurs n'ont plus confiance dans votre
administration. "We have given them a "carte blanche" to do what they want" et
la carte blanche, c'est 43 000 000 $ par année, M. le Président,
que cela a coûté durant les deux dernières années.
Ces coûts sont endossés par vos électeurs dans votre
comté. Ils sont endossés par mes électeurs dans mon
comté. Je suis content aujourd'hui de me
retrouver à l'Assemblée nationale dans un Parti
libéral qui a vu, qui a prévu ce qui arriverait, parce que
gouverner, c'est prévoir. De l'autre côté, on ne sait pas
ce que c'est gouverner, et on ne sait pas ce que c'est prévoir. (17
heures)
Si on écoutait les paroles du député de
Bellechasse, on se prend encore pour un parti d'Opposition à Ottawa de
l'autre côté de la Chambre. Le chef qu'on a de ce
côté-ci vous disait en 1979 ce qui suit, concernant les 43 000 000
$ par année que vous avez fait dépenser à vos
électeurs et dont vous êtes responsables, parce que vous
êtes des machines à voter; Gérard D. Levesque, le 24
octobre 1979 déclarait dans cette Chambre, M. le Président, et je
cite à partir du journal des Débats: "On est fort sur le
vocabulaire, de l'autre côté; mais qu'est-ce que l'on veut faire
de nouveau avec cette commission? Pourquoi changer cette commission? Est-ce
parce qu'on veut continuer cette structurite dispendieuse -43 000 000 $ par
année - onéreuse, qui caractérise le gouvernement
actuel?"
C'est ce que vous disait le chef du Parti libéral en 1979. Vous
ne l'avez pas écouté. Vous n'avez pas écouté le
député de Saint-Louis. Vous n'avez pas écouté le
député de Gatineau. Vous n'avez pas écouté la
députée de Chomedey. Vous n'avez écouté personne,
parce que vous avez le monopole de la vérité, même si elle
coûte à vos électeurs 43 000 000 $ par année, vous
avez le monopole de la vérité. Et aujourd'hui, vous vous ramassez
avec le monopole des déficits du chrome.
M. le Président, si on prenait comté par comté pour
se situer dans des chiffres où on peut se comprendre... parce que 43 000
000 $ par année, j'ai de la difficulté à comprendre cela,
M. le Président. Je suis comme vous. Je viens d'un comté rural et
on n'a jamais vu cela sur la même table en même temps. On va
essayer de comprendre ce que cela coûte dans un comté.
On va parler de l'élection de 1981, ce que cela a
coûté en moyenne dans chaque comté de la province de
Québec. La location des bureaux et l'ameublement pour l'organisation de
l'élection, pas pour les candidats. Je ne parle pas des candidats
péquistes. Je ne parle pas des candidats libéraux. Je ne parle
pas des candidats indépendants et unionistes. Je parle de la bebelle
péquiste d'administration d'élections chromées. Pour la
location de bureaux et l'ameublement, cela a coûté 15 006 $ par
comté, pour louer le bureau et mettre des meubles dedans. L'impression
des listes électorales et des bulletins de vote, par comté - dans
votre comté, M. le Président -cela a coûté 19 135 $.
L'information publique, la propagande, combien cela a-t-il coûté?
14 000 $ dans votre comté, dans mon comté et dans vos
comtés, MM. les députés d'en face, 14 000 $ de propagande.
Le matériel électoral - n'oubliez pas qu'on a déjà
parlé des listes et tout cela - d'autre matériel
électoral, cela a coûté 11 623 $ par comté, M. le
Président. Cela a-t-il du bon sens? Le transport du matériel
électoral, les téléphones et les frais
généraux, cela a coûté 17 188 $ par comté.
Cela fait un sous-total de 76 931 $ par comté. Et c'est au niveau de
l'opération du comté. Si on départage la bebelle au niveau
de la province, le bureau à Montréal, le bureau à
Québec, le chrome, le téléphone à pitons, le
"outfit" au complet, les repas, toute la bebelle, cela a coûté 185
490 $ pour votre comté aux dernières élections, M. le
Président. 185 490 $ par comté.
M. Bissonnet: Cela n'a pas de bon sens! C'est
épouvantable!
M. Paradis: Ceux qui sont chez eux et qui nous écoutent,
prenez votre crayon et divisez cela par 33 000 électeurs par
comté. La bebelle péquiste a coûté aux
dernières élections de 1981 - pas les candidats péquistes,
pas les candidats libéraux, pas les candidats unionistes, pas les
candidats indépendants, pas ceux qui faisaient de la politique - la
bebelle administrative péquiste a coûté 185 490 $ par
comté. Pour 33 000 électeurs, on va s'entendre là-dessus?
C'est la moyenne. Cela fait 6 $ par électeur pour la bebelle
administrative. Savez-vous combien les candidats pouvaient dépenser? 0,
50 $ par électeur...
M. Bissonnet: Vous êtes en dessous, là!
M. Paradis:... douze fois moins. Douze fois plus dans le chrome,
dans l'administration, dans toutes ces bebelles que ce que les candidats, vous,
de l'autre côté de la Chambre et nous, de ce côté-ci,
on pouvait dépenser. Douze fois moins que la bebelle de
l'administration: pour faire de la politique, pour passer le message. Cela
a-t-il du bon sens, M. le Président? Je sais que dans votre
comté, si vous aviez eu à contrôler ces coûts, cela
ne se serait pas passé comme cela.
M. Bissonnet: Certainement pas. On trouve cela cher 6 $ par
électeur, mais il y en a qui ont eu un traitement
privilégié. On va vous parler - parce que le PQ, c'est un parti
qui veut donner le droit de vote à tout le monde, quel que soit le
coût - des détenus dans les prisons. Savez-vous combien cela a
coûté par vote de détenu aux dernières
élections générales au Québec? Tenez-vous bien,
accrochez-vous à vos fauteuils. Pour les gens ordinaires, cela a
coûté 6 $ pour l'administration; pour les détenus, cela a
coûté 204 $ par vote. Ce ne
sont pas les coûts impliqués par le ministère de la
Justice, les gardiens de prison, etc. Les trois organismes électoraux de
la bebelle administrative chromée péquiste, cela a
coûté 204 $ par vote dans les prisons...
Une voix: C'est presque un voyage à Miami.
M. Paradis: Aller et retour, oui. Il y a un collègue qui
me mentionne que c'est le prix d'un voyage à Miami aller et retour, M.
le Président.
Mais où s'en va-t-on avec un gouvernement qui a perdu le sens de
la réalité, qui est prêt à investir 204 $ pour
permettre à un détenu de voter? Bien sûr qu'on veut que les
détenus votent, mais est-ce qu'on doit dépenser 204 $ pour les
faire voter? Y a-t-il du laxisme quelque part? Pendant que les gens
bénéficient de l'aide sociale, pendant que les gens perdent leur
emploi et deviennent prestataires d'assurance-chômage, pendant qu'on n'a
pas d'argent pour la relance économique, pendant que dans
l'éducation on n'est même pas capable d'implanter des
systèmes qui vont garantir à nos jeunes des positions dans la
haute technologie, pendant tout ce temps on dépense, au Parti
québécois, au nom de la pseudo-démocratie, 204 $ par vote
de détenu. Est-ce que cela a du bon sens?
Là-dessus, on peut peut-être citer un des
députés péquistes de l'époque, qui est aujourd'hui
ministre - parce que c'est comme cela qu'on a enrichi le Conseil des ministres,
en nommant des gens, en pleine crise économique, qui ont un sens de la
responsabilité administrative - soit le député de
Rosemont, ministre délégué à la Science et à
la Technologie, qui nous a fait un beau discours ce matin sur ce qu'il se
préparait à faire et aux milliards de dollars qu'il
s'apprêtait à dépenser. En 1979, dans cette Chambre, il a
fait une déclaration suave. Il disait que lorsqu'il constate les
coûts appréhendés par les Oppositions - il nous parlait
alors de locaux disponibles et ce dans tous les ministères - on n'aurait
pas besoin de louer de locaux additionnels. Il nous disait qu'il s'agirait
d'ajouter une ou deux personnes - ce brillant administrateur - il
prétend que le personnel est déjà sur place et qu'il y
aura économie. Je lui souhaite bonne chance avec ses prochains
crédits. Parce que s'il a lu le Devoir, deux ou trois ans plus tard,
c'est 43 000 000 $ que cela nous coûte comme contribuables, que cela
coûte à vos électeurs à vous les gens d'en face.
Cela coûte 6 $ par électeur la bebelle administrative que vous
avez mise sur pied, pendant que politiquement vous avez le droit de
dépenser 0, 50 $ par électeur et que nous, on a le droit de
dépenser 0, 50 $ par électeur. C'est de toute beauté, M.
le Président.
Mais pourquoi avoir investi 6 $ par électeur dans cet appareil?
On nous dit: C'est pour créer une situation d'indépendance, pour
que l'appareil électoral ne soit pas dépendant du Parti
québécois ou du Parti libéral. Je demande aux gens qui
nous écoutent, dans chacune de vos circonscriptions électorales -
je reviens sur une partie du discours du député de Gatineau en
connaissez beaucoup? Le président d'élection de votre
comté, est-ce un péquiste connu? Si vous répondez oui,
vous savez qu'il contrôle 6 $ par électeur. Est-ce que cela a du
bon sens? Y en a-t-il beaucoup des présidents d'élection au
Québec qui sont des libéraux connus? Ce gouvernement s'est
créé, sous prétexte de démocratiser l'appareil, un
paquet d'administrateurs à 6 $ du vote, pas à 6 $ du vote,
à 6 $ de l'électeur, c'est plus cher que cela au vote, M. le
Président -je sais qu'il me reste une minute - et il a placé des
péquistes pour contrôler les 6 $ pour chacun des électeurs.
Ils ont laissé aux candidats des partis politiques 0, 50 $, dans le but
de démocratiser, de mettre cela dans une atmosphère de
neutralité. Pensez-vous que l'Opposition peut sérieusement
prétendre, au plan financier, avoir des chances dans un tel contexte? 6
$ par vote. (17 h 10)
Le gouvernement a fait un "window dressing" et c'est encore ce qu'il
nous fait aujourd'hui, parce que s'il nous faut le féliciter - c'est
là-dessus que je conclus -d'avoir regroupé trois services
ensemble, ce qui va nous épargner quelques dollars à tout le
monde, il nous faut également vous prévenir, comme on l'a fait en
1977, comme on l'a fait en 1979, que ce n'est pas suffisant. Tant qu'il n'y
aura pas un contrôle par l'Assemblée nationale du Québec,
de votre côté et de notre côté, des deniers qui sont
dépensés, des montants de nos contribuables, on va encore
flotter, on ne sera peut-être plus à 43 000 000 $ par
année. On va peut-être flotter à 40 000 000 $ par
année.
M. le Président, je voulais les féliciter, en terminant,
pour avoir épargné ces quarts de trente sous. Je vous dis encore
qu'à 6 $ le vote, comparé à 0, 50 $ qu'on a comme
politicien, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans votre chrome. Il y
a quelque chose qui ne fonctionne pas dans votre parade. Il y a quelque chose
qui ne fonctionne pas dans votre "window dressing". Si on veut revenir à
de la véritable transparence, si on veut revenir à un
système électoral qui fait en sorte que les citoyens sont
éclairés au moment des élections, sont informés
d'une façon rationnelle, d'une façon efficace, d'une façon
peu dispendieuse, il n'y a qu'une façon d'économiser ces
montants, il n'y a qu'une façon de placer cet argent dans
l'économie, c'est aux prochaines élections, en se
rappelant qu'il y a 6 $ par vote qui sont contrôlés par le
PQ pour les faire voter péquiste et de voter contre ce gouvernement.
Merci beaucoup, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gouin.
M. Rodrigue:...
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Merci, mon cher collègue de Vimont. Merci,
M. le Président, de m'accorder la parole sur ce projet de loi. Comme on
le sait, le projet de loi no 96 qui vise à intégrer dans une
seule direction la Direction générale des élections, celle
du financement des partis politiques et celle de la carte électorale
s'inscrit dans un débat qui commence à prendre de plus en plus
d'ampleur concernant les dépenses publiques qui sont nécessaires
pour gérer nos différentes lois électorales. Lorsque nous
écoutons, par exemple, le discours de celui qui vient de me
précéder, le député de Brome-Missisquoi, on a droit
à une parade de chiffres laissant les citoyens dans une totale confusion
quant aux sommes réelles qui sont dépensées pour
l'administration des différentes lois électorales qui existent au
Québec.
On a dit que nos lois électorales nous coûtaient 43 000 000
$ par année, 86 000 000 $ par deux ans, 6 $ par électeur et tout
cela. Je crois qu'il est essentiel, pour que nos citoyens sachent très
bien de quoi il est question, de repréciser un certain nombre de choses
par rapport aux affirmations qui ont été faites
précédemment. Lorsqu'on dit que les lois électorales du
Québec coûtent 86 000 000 $ par deux ans, c'est inexact. Ces lois
ne coûtent pas, pour chaque deux années qui s'écoulent, 86
000 000 $. Elles ont effectivement coûté 86 000 000 $ pour les
deux dernières années. Voici comment cela s'explique.
Dans un premier temps, le référendum qui a
été tenu le 20 mai 1980 a coûté 18 300 000 $. Je
sais très bien que nos amis du Parti libéral du Québec ne
voulaient absolument pas que les Québécois soient
consultés sur leur avenir constitutionnel. Or, cette dépense, le
Parti québécois l'assume entièrement. C'est une
dépense causée par une décision du Parti
québécois à l'Assemblée nationale du Québec,
qui a coûté 18 000 000 $, d'aller consulter pour la
première fois de notre histoire l'ensemble des Québécois
sur leur avenir constitutionnel. 18 000 000 $ pour se poser la question une
fois, non pas dans dix ans, non pas dans vingt ans, mais dans l'histoire d'un
peuple, ce n'est peut-être pas quelque chose de si cher que cela,
d'autant plus que vous n'étiez pas totalement absents de cette campagne
référendaire et que votre participation a engendré des
coûts, ce qui était normal.
Dans un deuxième temps, prenons une autre dépense
importante: le recensement des électeurs, qui a été tenu
à l'automne 1980, a coûté 16 200 000 $. Depuis quand y
a-t-il un recensement annuel des électeurs au Québec? Est-ce une
loi qui a été présentée par un gouvernement du
Parti québécois ou n'est-ce pas plutôt une loi qui l'a
été par un gouvernement du Parti libéral du Québec
qui souhaitait qu'une fois par année, élection, pas
élection, il y ait recensement annuel des électeurs de toutes les
circonscriptions électorales du Québec?
M, Rodrigue: C'est comme ça qu'ils payaient leur...
M. Rochefort: C'est une hypothèse. Par exemple, personne
n'a dit de l'autre côté que le gouvernement du Parti
québécois - pas à la suite de demandes du Parti
libéral du Québec, mais de sa propre initiative - a
retiré, les deux dernières années que nous venons de
vivre, le recensement annuel des électeurs, puisqu'il n'y avait pas
d'élection prévue, pour économiser des sommes d'environ 20
000 000 $ par année.
Il y a eu des élections partielles en novembre 1980 et en avril
1982 qui ont amené des dépenses de plus de 1 000 000 $. Est-ce
que nos amis du Parti libéral sont rendus opposés à la
tenue d'élections partielles? Pourtant, ils les gagnent toutes, ils
doivent être contents qu'on tienne des élections partielles. Cela
doit faire votre affaire qu'on tienne des élections partielles. Ben!
ça aussi ça se paye, des élections partielles. Il n'y a
que dans les pays non démocratiques qu'on ne tient pas
d'élections et ce n'est pas le genre de société que nous
voulons bâtir.
Les élections générales du 13 avril 1981 ont
coûté 22 600 000 $. On pourrait se poser des questions,
peut-être, là. Comment se fait-il qu'une élection
générale, pour élire 122 membres de notre Assemblée
nationale, qu'on tient une fois par quatre ou cinq ans, ait coûté
22 600 000 $? Ce qu'il faut savoir, c'est que ces élections ont
été tenues à la suite d'une nouvelle Loi
électorale. Ces élections se déroulaient pour la
première fois sous le joug d'une nouvelle Loi électorale qui,
comme par hasard, avait été adoptée à
l'unanimité des membres de l'Assemblée nationale du
Québec. Sauf erreur, M. le Président, jusqu'à nouvel
ordre, lorsqu'il y a unanimité des membres de l'Assemblée
nationale du Québec, cela implique à 100% la deputation
libérale en cette Chambre. Qu'ils soient 2 ou 40, cela les implique
tous. Ils ont voté pour cette Loi électorale. Et,
effectivement, cette Loi électorale apportait un certain nombre
de nouveautés qui visaient à démocratiser encore plus les
élections que cela n'était le cas sous le joug des anciennes lois
électorales qui avaient été adoptées sous
l'initiative d'autres gouvernements que le nôtre.
Par exemple, il en a coûté 500 000 $ par cette nouvelle Loi
électorale pour que le directeur du scrutin de chaque comté
distribue une carte de rappel à chaque électeur pour lui dire:
N'oubliez pas, il y a élection le 13 avril prochain. Vous avez droit de
vote. Le vote se déroule de 10 heures à 19 heures ou 20 heures le
soir et, là où vous avez le droit d'aller exprimer votre droit de
vote, c'est à telle école ou à telle église et vous
êtes dans telle section de vote. Est-ce que c'est une dépense
superflue que de dire aux gens où ils peuvent aller voter? Nos amis d'en
face pourraient nous dire que, finalement, les partis politiques faisaient cela
dans le passé.
Je suis beaucoup plus secure, au plan de la démocratie, si cette
carte de rappel est distribuée par le directeur du scrutin plutôt
que par les partis politiques parce que j'ai déjà assisté
à des manoeuvres frauduleuses au plan électoral, où des
partis politiques, et, pour ne pas les nommer, les partis qu'on connaît
et qui sont toujours représentés dans cette Chambre, avaient
distribué de fausses cartes de rappel à des électeurs,
dans des sections de vote où ils savaient que le vote ne serait pas
très favorable à leur parti. Ils leur disaient: Tu voteras
à telle école ou à telle église, et c'était
inexact. La personne qui s'était déplacée une
première fois pour aller voter, se faisant refuser le droit de vote
parce que ce n'était pas là qu'elle devait l'exprimer,
plutôt que d'essayer de trouver le deuxième endroit où elle
devait aller voter, s'en allait chez elle et n'exprimait pas son droit de
vote.
Je pourrais vous donner une liste importante de modifications, de
nouveautés, d'originalités qui ont été
apportées au cours du dernier scrutin et, ne l'oublions jamais,
apportées à la suite d'une nouvelle Loi électorale qui
avait été adoptée par l'unanimité, donc l'ensemble
des membres de l'Assemblée nationale du Québec. Quand on se met
à tirer des chiffres en l'air pour grossir ce que cela coûte, il
faut peut-être regarder concrètement, spécifiquement,
dépense par dépense, pourquoi une dépense s'est faite.
Je ne reviendrai pas longuement sur les dépenses que notre
système coûte au Québec par rapport à celui que nous
connaissons au plan fédéral. Mon collègue de Bellechasse
l'a fait avec beaucoup d'éloquence et je crois qu'encore là on
s'est aperçu que nos lois sont beaucoup plus démocratiques,
beaucoup plus complètes que celles qu'il y a au plan
fédéral. C'est pour cette raison-là que cela coûte
un peu plus cher qu'au fédéral, sauf que, M. le Président,
je crois que les Québécois ont une députation beaucoup
plus forte, beaucoup plus intéressante, à l'Assemblée
nationale du Québec, des deux côtés de la Chambre, que
celle qu'ils ont actuellement à Ottawa. Cela vaut peut-être la
peine d'investir un peu pour être assurés d'une bonne deputation
à l'Assemblée nationale du Québec. (17 h 20)
Autour du débat sur l'ensemble des dépenses
électorales, quelqu'un a exprimé un point de vue
récemment. C'est M. Vincent Prince, éditorialiste au journal La
Presse. Je citerai une partie de l'éditorial de M. Prince, daté
du 17 novembre 1982, à la page À-6. Il écrivait ce qui
suit, toujours autour du débat des 86 000 000 $ pour deux ans, 43 000
000 $ par année, etc. Je cite: "II n'est pas question ici de critiquer
la législation qui a permis de démocratiser, en somme, l'exercice
du droit de vote dans la province et d'assurer du même coup une chance
à peu près égale pour toutes les formations politiques de
faire tenir leurs messages à la population. Au contraire, il faut
reconnaître que nos institutions ne peuvent que s'en porter mieux et que
ce serait un crime de vouloir retourner en arrière. S'il faut apporter
des modifications à ces législations, ce doit être
plutôt dans le but d'assurer davantage l'intégrité du
processus électoral et l'égalité des parties devant la
loi. " M. le Président, c'est exactement cette orientation, cette
direction qui a guidé le gouvernement dans la décision qu'il a
prise d'apporter un certain nombre de modifications par le projet de loi no 96
à la façon de gérer l'ensemble des lois électorales
du Québec.
On l'a expliqué. Déjà, d'intégrer les trois
directions générales que nous connaissons actuellement, cela va
impliquer des économies importantes de sommes qui viennent effectivement
de l'ensemble des contribuables du Québec. Cela va aussi permettre aux
membres de l'Assemblée nationale d'exercer un pouvoir qu'ils n'avaient
jamais exercé: celui de convoquer, une fois par année, le
Directeur général des élections, qui sera responsable de
nos trois directions générales actuelles, et de discuter avec lui
de l'ensemble de son bilan financier pour l'année qui
précède et de l'ensemble de ses prévisions
budgétaires pour l'année qui vient. Ce qui aura comme
conséquence un débat public sur ces questions; ensemble, de
façon responsable, l'Assemblée nationale sera appelée
à approuver ou à rejeter les prévisions de dépenses
du Directeur général des élections.
Il est important que cette réforme voie le jour, mais il est
important que cette réforme voie le jour tout en maintenant
l'ensemble des réformes que le gouvernement du Parti
québécois a apportées depuis le 15 novembre 1976 pour
démocratiser nos institutions politiques. Par exemple, la Loi sur le
financement des partis politiques a donné des résultats assez
extraordinaires. En 1979, 235 000 citoyens ont versé des dons à
des partis politiques; en 1980, 266 000; en 1981, 190 000. C'est un
succès de participation et, en plus, un succès de participation
qui exclut totalement la participation d'entreprises aux caisses
électorales des différents partis politiques, ce qui
n'était pas le cas lorsque le Parti libéral du Québec
administrait les destinées du Québec. C'est ce qui explique
qu'aujourd'hui encore, on retrouve, dans la caisse électorale du Parti
libéral du Québec, ce qu'on appelle du vieux gagné, un
petit 750 000 $, auquel on doit ajouter un certain nombre
d'intérêts très précis depuis des années,
dont le juge Malouf nous a fait part dans le rapport qu'il a
présenté sur la tenue des derniers Jeux olympiques du
Québec. Ce n'est pas un affidavit de Pierre, Jean, Jacques qui laisse
sous-entendre qu'il y a peut-être de l'argent qui traîne quelque
part. C'est un juge et trois commissaires qui ont tenu une commission
d'enquête sur une question précise et qui affirment
qu'effectivement, il y a 750 000 $ dans la caisse électorale du Parti
libéral du Québec qui traînent toujours parce qu'une loi,
adoptée depuis par l'Assemblée nationale, à la suite d'une
suggestion du Parti québécois, n'existait pas à ce
moment-là.
M. le Président, nous allons maintenir cette loi parce que nous y
tenons toujours plus que jamais.
Une voix: Quelle moralité publique!
M. Rochefort: Quant à la carte électorale, M. le
Président, nous allons aussi maintenir ce que le gouvernement du Parti
québécois avait soumis à l'Assemblée nationale du
Québec, à l'époque, soit de dépolitiser
entièrement la question de la définition de la carte
électorale du Québec.
Rappelons-nous, M. le Président, comment cela fonctionnait avant
la présentation de cette loi par le Parti québécoisl Ce
sont des commissaires, effectivement, qui avaient été
nommés par l'Assemblée nationale du Québec...
Des voix:...
M. Rochefort: M. le Président, est-il possible de
continuer mon intervention sans être dérangé par nos amis
du Parti libéral? S'ils veulent tenir un caucus sur les 750 000 $, on
est d'accord, on va suspendre les travaux le temps qu'ils voudront.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Allez,
M. le député.
M. Rochefort: Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Rochefort: La carte électorale, cela fonctionnait
comment? Effectivement, ils avaient créé une commission qui
devait regarder les différentes délimitations des
circonscriptions électorales de l'ensemble du Québec, sauf que,
incapables de faire confiance à des commissaires qu'ils avaient
eux-mêmes nommés, ces gens devaient ramener leurs propositions sur
le parquet de l'Assemblée nationale et c'est le gouvernement qui
déposait un projet de loi proposant la délimitation des
circonscriptions électorales du Québec. Cela donnait donc droit
à un découpage partisan politique parce que la majorité
des membres de l'Assemblée nationale qui était du
côté du parti ministériel, qui était alors le Parti
libéral du Québec, décidait par un vote, circonscription
par circonscription, quelles étaient les délimitations qu'elle
choisirait. Donc, tel petit pâté de maisons qui étaient
plutôt libérales, on le mettait dans un comté où il
y avait eu un gros vote péquiste à la dernière
élection pour essayer de contrebalancer cette force-là. Avec la
loi que nous avons soumis et que nous maintenons par le projet de loi no 96, il
n'y a plus aucune intervention partisane possible quand vient le temps de
décider de la délimitation des sections de vote. Ce sont
là un certain nombre de réformes que nous avons apportées,
que nous maintenons et que nous croyons essentiel de maintenir pour l'avenir du
Québec.
Le député de Charlevoix, cet après-midi, dans son
intervention, disait: Oui, mais toutes ces lois, qui sont de belles lois
chromées, cela a donné quoi, comme résultats? Cela a
changé quoi, finalement? Posons-nous donc cette question. Par exemple,
entre l'élection de 1976 et l'élection de 1981, il y a 10% plus
de noms sur les listes électorales. Ne faut-il pas se demander s'il
n'est pas plus facile de s'inscrire sur une liste électorale du
Québec? Je pense que c'est le résultat concret d'une meilleure
démocratie.
Parlons du vote par anticipation qui nous permet d'aller voter quelques
jours avant le jour officiel du scrutin au cas où on serait
empêché de le faire cette journée-là. Alors qu'en
1976, 0, 042% des électeurs se prévalaient de ce droit, en 1981,
près de 4% des électeurs, donc environ dix fois plus
d'électeurs, ont eu l'occasion de se rendre dans un bureau de scrutin
par anticipation. N'est-ce pas un succès pour notre
démocratie?
Les bulletins rejetés. Alors qu'en 1976
il y avait 2, 05% de bulletins rejetés, on a réussi
à rabaisser cela à 1% des bulletins rejetés à
l'élection du 13 avril 1981. Est-ce que ce ne sont pas là un
certain nombre de réformes concrètes? tilles ont leur prix, j'en
conviens. C'est pour cela que nous déposons un projet de loi,
aujourd'hui, qui vise à diminuer encore un peu les dépenses
qu'engendre l'administration de nos lois électorales, qui vise à
nous donner un moyen de contrôler éventuellement les
dépenses qui se feront au cours des années. Comme le ministre le
déclarait dans son discours, cela nous donne la possibilité de
maintenir des comités de députés et de demander au
directeur général de poursuivre ses réflexions pour voir
s'il n'y aurait pas d'autres moyens de diminuer les dépenses
d'administration électorale, mais des réformes qui, tout en
étant un peu coûteuses, maintiennent et augmentent le taux de
participation des électeurs et, donc, la confiance qu'ils ont dans les
institutions politiques qu'ils se sont données.
Quand je parle de confiance dans nos institutions, c'est essentiel.
Rappelons-nous que lorsque le Parti québécois est arrivé
au pouvoir, le 15 novembre 1976, il y avait au Québec, et
particulièrement chez la jeunesse du Québec, une
désaffection complète envers nos institutions politiques.
Pourquoi? Parce qu'ils étaient conscients que la carte électorale
était de la frime, que cela avait été fait en coulisse par
deux ou trois bons organisateurs d'élection. Ils étaient
conscients que c'étaient les compagnies qui menaient le Parti
libéral du Québec, à cause de l'absence d'une loi de
contrôle du financement des partis politiques; ils étaient
conscients que c'était difficile d'exprimer son vote, que c'était
difficile de se retrouver dans cette vieille loi électorale qu'on
n'avait pas voulu actualiser, qu'on n'avait pas voulu moderniser.
Finalement, ce qu'on souhaitait, c'était peut-être qu'il y
ait le moins de personnes possible qui se présentent aux urnes, sachant
que ceux qui s'y présenteraient étaient plutôt ceux qui
étaient satisfaits du système en place. Le refus d'apporter des
modifications était peut-être une façon de
décourager les éléments neufs de la société,
ceux qui étaient progressistes et ceux qui souhaitaient des changements
à plusieurs points de vue, y compris à l'Assemblée
nationale du Québec. (17 h 30)
M. le Président, ces réformes on les a apportées de
bonne foi et on les maintient aujourd'hui de bonne foi, parce qu'on juge
essentiel que le Québec soit un pays démocratique, pas à
demi, pas au tiers, pas aux trois-quarts, mais totalement démocratique
tout en étant conscients que la démocratie coûte quelque
chose, M. le Président. Chaque soir au téléjournal, on
peut écouter des nouvelles sur des pays où la démocratie
ne coûte rien. Les élections, cela ne coûte rien, parce
qu'il n'y en a pas. Et on voit quel genre de système cela donne. Jamais
je ne souhaiterai me retrouver dans un pays où on n'a pas le droit de
vote et où nos institutions ne sont pas entièrement
démocratiques. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: M. le Président, la loi sur laquelle
l'Assemblée nationale est appelée à se pencher aujourd'hui
est une loi extrêmement importante. C'est une loi qui est le fondement
même de la légitimité des sièges que nous occupons
aujourd'hui à l'Assemblée nationale. Sans une loi parfaitement
crédible au niveau du fonctionnement du processus électoral, M.
le Président, toute l'action que nous tentons de mener ici à
l'Assemblée nationale ne pourrait avoir aucun effet de nature à
améliorer le sort de la population. M. le Président, si nous
sommes aujourd'hui en train de discuter d'une chose qui, il y a plus de cinq
ans, était proposée par les libéraux, avec des
propositions concrètes de nature à améliorer une situation
qui déjà à l'évidence ne donnait pas satisfaction,
on était convaincu, M. le Président, qu'il faudrait en venir
là. Nous avons eu droit, à la suite de ces suggestions faites de
bonne foi, aux quolibets, à des affirmations que nous étions des
critiques négatifs, que nous n'avions absolument rien à
proposer.
Que se passe-t-il, M. le Président, cinq ans après? Le
gouvernement qui se moquait de ce qu'on lui proposait revient avec des
suggestions à peu près semblables, analogues. C'est quelque chose
dont nous devons nous rendre compte. On est en train de faire un pas important
de façon à épargner aux contribuables
québécois des dépenses inutiles de nature somptuaire, qui
ont été rendues possibles par l'entêtement du gouvernement
péquiste à ne pas accepter de suggestions pour la seule raison
qu'elles émanaient de ce côté-ci de la Chambre. Est-ce que
c'est une façon sérieuse d'administrer la chose publique que de
refuser des propositions constructives qui doivent être, par la force des
choses, acceptées éventuellement. On se voit dans l'obligation de
souligner cela parce qu'il est important d'analyser les projets de loi qui nous
viennent du gouvernement sous cet angle, projets de loi qui sont souvent sujets
à la critique de l'Opposition, mais dont la critique est reçue
d'une façon absolument négative, sans même écouter
ce qu'on a à dire.
Il est important, M. le Président, que le gouvernement se rende
compte qu'on est prêt à pardonner une fois, deux fois; la
population surtout est prête, mais elle demande qu'on ne
répète pas indéfiniment les mêmes erreurs. M. le
Président, le projet de loi que nous avons devant nous vise à
chapeauter sous l'autorité d'une seule et même personne tout notre
système électoral, de façon qu'il y ait unité de
direction, unité de pensée et surtout unité de
responsabilité. Il faut, M. le Président, éviter des
situations qui font en sorte que des fonds publics peuvent être
dépensés sans contrôle, sans surveillance adéquate.
C'est une situation absolument inadmissible, qui doit être
corrigée.
M. le Président, nous devons prendre les mesures
nécessaires ici pour que nous ne nous retrouvions pas de nouveau dans
l'aventure de la liste électorale. On a connu une situation où le
gouvernement s'est engagé dans la poursuite d'un objectif qui n'avait
pas l'accord de l'Assemblée nationale. Il a été
obligé de faire machine arrière, alors que des fonds
considérables de l'ordre de 4 500 000 $ avaient été
dépensés. Le but poursuivi était de prouver qu'il
était souhaitable, désirable et démocratique que chacun et
chacune des électeurs et électrices de la province de
Québec soit muni d'une carte d'électeur ou d'une carte
d'électrice. Cela devait normalement assurer les élections contre
la fraude électorale, assurer qu'il n'y avait pas de substitution de
personne et assurer qu'on pouvait contrôler adéquatement le vote
le jour du scrutin. Il a été prouvé que c'était
là une dépense parfaitement inutile, qu'on pouvait très
bien atteindre ces fins au moyen d'une liste électorale permanente et
qu'il n'était pas nécessaire de ficher d'une façon
permanente les citoyens et les citoyennes de la province de Québec.
M. le Président, nous avons une tradition de liberté chez
nous. Nous avons une tradition de liberté dans le déplacement des
personnes, dans l'occupation des emplois. Cette liberté, nous tenons
à la préserver. Tout ce qui pourrait permettre à un
gouvernement, quel qu'il soit, de contrôler la mobilité des
personnes, de savoir comment elles se déplacent, où elles vont et
quels emplois elles occupent, je soutiens que c'est là l'embryon d'un
contrôle étatique qui, très rapidement, permettrait
d'imposer aux personnes la demande d'une permission pour aller à un
endroit plutôt qu'à un autre. On sait que chez le gouvernement,
déjà, cette tentation existe. Il existe une tentation de la part
du gouvernement de contrôler - parce que, censément, il
connaît mieux que personne ce qui est bon pour tout le monde - où
les gens devraient aller travailler, ce qu'ils devraient faire et dans quelles
conditions.
On sait ce qui se passe actuellement avec la répartition des
effectifs de médecins dans la province de Québec. On voit que le
gouvernement, par des moyens qu'il s'arroge, tente de décider, sous des
couverts absolument valables, comment et où les gens doivent travailler.
Imaginons-nous un instant, M. le Président, ce que nous aurions
accordé au gouvernement comme possibilité, par la voie d'une
carte électorale! On sait quelle utilisation on peut en faire maintenant
avec l'informatique. Il faut se rendre compte qu'on dispose maintenant
d'appareils qui pourraient très facilement s'organiser pour que le
gouvernement soit au courant, d'une façon permanente et
régulière, sans aucune difficulté technique, des
déplacements des citoyens et des citoyennes du Québec.
M. le Président, nous avons, nous de l'Opposition, joué
notre rôle de vigilance dans cette affaire. Nous n'avons pas voulu
permettre l'établissement d'un système, d'une fiche noire, d'une
fiche discriminatoire, de quelque nature qu'elle soit. On a vu, de la part du
gouvernement, comment il pouvait tenter d'identifier les personnes, soit selon
leur nom, soit selon leur affiliation politique. Peut-on, dans les
circonstances, faire confiance à un gouvernement qui a cette tentation
permanente, lui faire confiance et lui mettre entre les mains un outil qui
pourrait étendre dans toute la province ce qu'on a tenté de faire
au sein des communautés ethniques d'un milieu particulier, celui de
Montréal? M. le Président, poser la question, je pense qu'en
grande partie, c'est y répondre. Les citoyens et les citoyennes du
Québec sont libres d'aller où ils veulent. Ils n'ont de comptes
à rendre ni au gouvernement ni à l'administration publique, et
pour ne pas être dans l'obligation de rendre ces comptes, il faut qu'ils
conservent intégralement cette liberté en n'ayant aucune
obligation d'être fichés, numérotés,
étiquetés, catalogués. Tout ce qui pourrait amener un tel
résultat doit être dénoncé avec vigueur de
façon que le gouvernement ne tente même plus une telle chose. (17
h 40)
M. le Président, le système proposé de personne
désignée par l'Assemblée nationale, avec le projet de loi
sur l'intégration de l'administration du système
électoral, veut assurer l'indépendance totale et entière
de la personne que l'Assemblée nationale désigne comme
étant celle en qui elle met sa confiance, pour permettre aux gens qui
siégeront ici d'être élus et d'être élus
démocratiquement avec toute la légitimité
nécessaire.
Dans les circonstances, M. le Président, il est absolument
essentiel que le Directeur général des élections n'ait
qu'un patron, n'ait qu'un maître, n'ait à rendre compte
qu'à un seul groupe, c'est-à-dire à nous, les
députés de l'Assemblée nationale. Tout ce qui pourrait
ressembler à des relations privilégiées, de quelque nature
qu'elles
soient, avec le pouvoir exécutif doit être
dénoncé. C'est pour cela que nous avons des réserves
considérables à ce que l'exécutif soit en mesure de
demander au Directeur général des élections des
suggestions, des analyses et des études, parce qu'il n'est pas
désirable que, pour conserver son indépendance, il y ait une
relation directe entre le pouvoir exécutif et le Directeur
général des élections.
Il faut se méfier de cela, M. le Président. Non pas qu'en
soi cette chose soit absolument condamnable, mais elle met en danger le
principe même de l'indépendance totale et entière du
Directeur général des élections. Tout ce qui peut porter
atteinte au principe peut éventuellement servir de
précédent pour une atteinte plus réelle, une atteinte qui
endommagera véritablement cette indépendance du Directeur
général des élections. Il nous faut être
extrêmement prudents là-dessus et c'est pour cela que je
suggère au ministre de regarder particulièrement ce
côté et de s'assurer de ne pas institutionnaliser d'aucune
façon, ni dans les faits, ni dans la loi, une relation soi-disant
privilégiée qui existerait entre le Directeur
général des élections et le pouvoir exécutif.
M. le Président, dernièrement, j'avais l'occasion
d'assister à une commission parlementaire où comparaissaient les
trois directeurs généraux, c'est-à-dire le Directeur
général des élections, le Directeur général
du financement des partis politiques et le Directeur général de
la représentation électorale. Nous avons eu l'occasion d'avoir
des rapports considérables, des rapports fouillés de la part de
ces personnes. Nous avons été saisis, en tant que parlementaires,
de points de vue qui étaient, à bien des égards,
diamétralement opposés et où nous étions, nous les
parlementaires, mis dans une situation de juges par des experts qui nous
saisissaient de but en blanc de rapports, à bien des égards
totalement contradictoires, où, d'un côté, le Directeur
général des élections nous disait: Pour faire le travail
que m'a confié l'Assemblée nationale, j'ai besoin d'à peu
près - si ma mémoire est bonne - 160 à 165 personnes. Il
nous affirmait cela, il nous faisait des graphiques, nous expliquait les
tâches et nous faisait une estimation des coûts. Cela montait
à 5 000 000 $ ou 6 000 000 $ par année, ou quelque chose
d'approchant.
D'un autre côté, dans la demi-heure qui a suivi, le
Directeur général du financement des partis politiques nous
affirmait que pour faire le même travail, j'aurais besoin de 51
personnes, si je me souviens bien, et que cela coûterait aux
contribuables québécois la somme de 1 500 000 $ ou 1 600 000
$.
Dans quelle situation sommes-nous pour porter un jugement
là-dessus? Notre réflexe est un réflexe de prudence, un
réflexe qui veut que nous mettions toutes les chances de notre
côté, en nous disant: Nous ne pouvons pas prendre le risque que la
personne à qui nous allons confier la responsabilité
énorme de s'assurer que la démocratie au Québec peut
s'exercer le fasse avec des moyens qui ne sont pas suffisants.
Nous sommes portés à accepter une estimation des
coûts, une estimation des moyens qui favorise ce qui nous coûte le
plus cher, sans cependant, d'aucune façon, avoir l'assurance que les
contribuables québécois, qui sont actuellement suffisamment
taxés, qui paient suffisamment de taxes à tous les niveaux, qui
en paient beaucoup trop, n'auraient pas pu profiter d'une économie
considérable. Ce n'est pas une économie de quelques dollars ou de
10% ou de 20%; nous allons du simple au triple ou à peu près.
La situation est quand même bizarre. Nous sommes les personnes qui
décidons du système électoral et des moyens d'appliquer ce
système électoral. Nous sommes saisis par une batterie d'experts
qui disposent de toutes sortes de calculs, d'exposés, de toutes sortes
de moyens qu'ils nous proposent. Ces mêmes experts ne s'entendent pas.
Que faisons-nous? Nous tentons de prendre le pari qui est le plus favorable
à la démocratie. Nous risquons, en prenant ce pari,
malheureusement, de faire payer aux contribuables québécois des
millions et des millions de dollars en trop. Pourquoi? Parce que le
gouvernement a mis en place un système électoral trop
coûteux qui nous a égorgés, en disant, toujours sous le
couvert -ils sont champions là-dedans - des bonnes intentions: Voici,
messieurs de l'Opposition, voici, chers citoyens et citoyennes du
Québec, ce que coûte la démocratie. Évidemment, tout
le monde est pour la démocratie. Peut-on décemment oser compter
les sous, les cents, les piastres quand on parle de démocratie? Cela
devient pratiquement indécent vis-à-vis de ces messieurs qui se
font pratiquement les inventeurs de la démocratie. On a entendu des
députés tout à l'heure. À les croire, la
démocratie date du 15 novembre 1976.
Il y a des députés qui ont siégé ici avant
le 15 novembre 1976 et ils l'ont fait légitimement. Ils ont
représenté la population du Québec aussi
légitimement que le parti qui occupe actuellement le pouvoir - je veux
que ce soit compris - et cela n'a pas coûté les millions que cela
coûte actuellement. Pourquoi? Parce qu'on était conscients de la
limite de nos moyens.
M. le Président, il faut réaliser une chose, c'est qu'on
n'est pas une société dont les ressources sont illimitées.
Il faut partir de là. On a beau considérer qu'un certain nombre
de choses sont souhaitables, si on n'a pas les moyens de se les payer, que
voulez-
vous qu'on fasse? On n'a pas les moyens, on n'a pas les moyens. On a
déjà réussi à vivre avec des moyens beaucoup plus
modestes. C'est donc faisable, la preuve a été faite. Il nous
faut revenir à cette approche qui tient compte de la modestie de nos
moyens, de la limite de nos ressources et cela a été
oublié par les gens qui prétendent actuellement gouverner le
Québec. Cela a été oublié par un bon gouvernement
qui, à toutes fins utiles, est devenu un non-gouvernement. C'est bien
dommage. Il faut qu'on revienne à une juste mesure des choses. Il faut
qu'on trouve des moyens qui sont à notre portée, qui ne sont pas
coûteux, qui puissent nous permettre d'épargner au contribuable
québécois des sommes qu'il n'a pas les moyens de payer
actuellement.
M. le Président, j'aimerais, par exemple, que le Directeur
général des élections - et je pense que cela est faisable
et le ministre pourrait considérer cette possibilité, au lieu de
nous arriver en commission parlementaire avec un rapport de plusieurs dizaines
de pages, avec des annexes, des graphiques, des colonnes et tout ce que vous
voudrez - le grand patron puisse soumettre à cette Assemblée
régulièrement un état des dépenses qu'il effectue
ou qu'il a l'intention d'effectuer au-delà d'un certain niveau. Est-ce
que cela ne serait pas faisable? Au lieu d'être saisi de but en blanc
d'un montant absolument énorme des dépenses qui seraient
encourues tout au long de l'année, est-ce que le Directeur
général des élections ne pourrait pas saisir cette
Assemblée de ses intentions au fur et à mesure que les
dépenses sont envisagées et dire: Voici, j'ai l'intention de
dépenser 3 500 000 $ pour acheter un édifice à Sainte-Foy.
J'en avertis les membres de l'Assemblée nationale. Pour qu'on le sache,
cela vaut la peine de nous écrire une note. À ce
moment-là, on pourra se préparer, on pourra déjà se
faire une idée là-dessus. (17 h 50)
Je vois que mon temps est terminé, je veux cependant qu'on
s'aperçoive qu'il y a des moyens qui ne sont pas coûteux pour
qu'on exerce notre contrôle ici. Pour cela, on a besoin d'imagination. En
face de nous, nous avons un gouvernement qui, manifestement, est
sclérosé, mais je fais appel à un sursaut de vie chez lui
pour qu'il fasse preuve de cette imagination et, s'il n'est pas capable, nous
sommes à sa disposition, comme nous l'avons fait en 1977, 1978, et 1979
sur le sujet précis, pour répondre à son appel et lui
faire certaines suggestions. Merci, M. le Président.
Des voix: Très bien! Très bien!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay et adjoint parlementaire au ministre
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
M. Roland Dussault
M. Dussault: M. le Président, à moins d'avoir le
consentement pour dépasser 18 heures...
Des voix: Non! Non!
M. Dussauit: J'espère que j'aurai le consentement, si je
dois dépasser l'heure de deux ou trois minutes, parce que je pense
pouvoir y arriver dans 10, 12 ou 13 minutes.
Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce débat. J'ai
même eu de la difficulté à suivre le débat à
cause de mes occupations, mais certains propos m'ont amené à
intervenir. Je trouve assez pénibles et tristes certains propos qui ont
été tenus tout à l'heure, particulièrement sur les
prisonniers. Je pense que cela a été de la démagogie assez
facile de la part du député de Brome-Missisquoi et
particulièrement d'autres députés aussi qui l'ont suivi,
sauf le député de Louis-Hébert, qui s'en est quand
même tenu au cadre de la loi. D'autres députés ont aussi
fait de la démagogie facile sur les institutions démocratiques
que nos réalisations ont permis de mettre en place.
De toute façon, je voudrais m'en tenir plus
particulièrement à la question des directeurs de scrutin. On doit
dire que, depuis quelque temps, l'Opposition fait montre d'un
intérêt plutôt surprenant pour les questions
démocratiques. Cela nous surprend d'autant plus qu'avant que nous
prenions le pouvoir en 1976, elle avait été très timide
quant à la mise en place de réformes à la carte
électorale. Certaines promesses n'ont même jamais vu le jour.
Avant de parler de ce sujet, celui des directeurs de scrutin, M. le
Président, je voudrais signaler que notre gouvernement n'a pas de
leçon à recevoir de l'Opposition relativement aux mesures
démocratiques à mettre en place. Depuis 1976, d'ailleurs, les
réformes présentées par notre gouvernement ont
été nombreuses et substantielles. Je voudrais rappeler le
financement des partis politiques, la télédiffusion des
débats, la dépolitisation du découpage de la carte
électorale, la consultation populaire, la nouvelle loi électorale
basée sur la primauté de l'électeur, pour laquelle,
d'ailleurs, j'ai eu le plaisir de faire un travail considérable avec
d'autres collègues de mon parti, qui a résulté en un
rapport appelé le rapport Dussault, la nomination des directeurs de
scrutin, dont je vais parler tout à l'heure, et l'accès à
l'information gouvernementale.
M. le Président, ce bilan que je viens de faire ne souffre pas de
comparaison quand on regarde les gestes très parsemés qu'ont
posés auparavant ceux qui sont maintenant dans l'Opposition. D'ailleurs,
tout ce que
nous avons trouvé, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir
en 1976, c'est un projet de réforme électorale plein de trous
qui, en fait, était la dix-huitième priorité du
gouvernement de l'époque. Si nous n'avions pas été
élus, nous ne serions pas ici aujourd'hui en train de parler de
détails, de raffinement des lois électorales que nous avons
adoptées. C'est donc dire qu'il y a beaucoup de chemin qui a
été fait jusqu'à maintenant.
Nous avons, au chapitre des directeurs de scrutin, effectué un
changement majeur. Pour la première fois de notre histoire
électorale, avec l'adoption de la Loi électorale en 1979, la loi
no 9, notre gouvernement a basé la sélection des personnes
choisies sur un concours public qui assure la compétence des directeurs
de scrutin. Il s'agit là d'une étape majeure, il faut le
souligner, qui tranche radicalement avec le système pratiqué par
nos amis d'en face lorsqu'ils étaient au pouvoir, que le premier
ministre a d'ailleurs décrit de la façon suivante: le seul
critère qui était utilisé, c'était le patronage
à l'état pur, et le seul mode de décision, c'était
l'arbitraire total pour les nominations ou les destitutions. C'était
cela, M. le Président.
Nous avons choisi le concours. D'ailleurs, le comité Dussault,
qui s'est penché sur cette question, a préconisé la mise
en place de concours et la nomination par le Directeur général
des élections. Il y a eu un petit changement face à cette
politique dans la loi no 9. D'ailleurs, je l'ai regretté lorsque la loi
no 9 a été adoptée, mais je considérais quand
même que c'était une nette amélioration sur ce que nous
connaissions.
Le mode de nomination actuel est caractérisé par
l'accessibilité et la compétence. En effet, le Directeur
général des élections fait sa recommandation au
gouvernement après avoir recruté, par voie de concours public,
trois personnes. La loi dit que ce concours doit être conçu de
façon à permettre de juger impartialement la valeur des personnes
recommandées.
Alors que sous le régime de nos amis d'en face, un seul petit
nombre d'organisateurs de la bonne couleur était informé de
l'imminence d'une révocation ou d'un changement de président
d'élection, comme on le disait à ce moment-là, le mode
actuel de nomination, lui, prévoit qu'un avis de concours doit
être publié par le directeur général de façon
à fournir à toute personne admissible une occasion raisonnable de
soumettre sa candidature. Par exemple, le premier avis pour la nomination des
122 directeurs de scrutin fut publié le 31 janvier 1981 dans douze
quotidiens et republié le 7 février 1981 dans les mêmes
quotidiens. Cet avis a été publié le 2 février 1981
dans 98 hebdos. C'est bien différent de ce qui se passait avant notre
élection, en 1976, alors que tout se faisait à la cachette de
façon à pouvoir concentrer tout cela dans une forme de patronage
dont tout le monde connaît l'existence.
Les conditions d'admissibilité au concours telles que
définies par le Directeur général des élections
sont plutôt générales afin, justement, de rendre accessible
le poste au plus grand nombre de citoyens possible. On est bien loin du fichier
d'organisateurs du Parti libéral comme bassin de recrutement. Le centre
de renseignements du Directeur général des élections est
chargé d'acheminer aux candidats, sur demande, le formulaire
d'inscription auquel est adjoint une documentation sur la Loi
électorale, la Loi sur les listes électorales, le manuel de
l'électeur, une description des principales attributions d'un directeur
de scrutin et des extraits des membres du personnel électoral. Tout ce
monde avait donc en main le nécessaire pour savoir à quoi s'en
tenir à propos du concours.
C'est la compétence des trois personnes recommandées par
le Directeur général des élections au gouvernement, qui
était garantie par les deux étapes par lesquelles un candidat
doit passer pour être recommandé, qui a fait le succès de
cette politique. En fait, c'étaient l'examen oral et l'examen
écrit. Pour ce qui est de l'examen écrit, afin de ne pas
être accusé de travestir la réalité, je reprendrai
ici textuellement le processus de l'examen écrit tel que l'a
décrit le Directeur général des élections dans un
document qui a été adressé également au chef de
l'Opposition. Ils sont donc au courant de cela, les gens d'en face, M. le
Président.
On y disait ceci: "Avec l'aide de spécialistes de l'Office du
recrutement et de la sélection du personnel, mais sous le contrôle
et l'autorité du Directeur général des élections,
un examen écrit a été élaboré dans le but de
mesurer les connaissances des candidats à l'endroit de la Loi
électorale et de la Loi sur les listes électorales de même
que leurs habiletés. Des examens écrits se sont tenus
simultanément dans une dizaine d'endroits de la province sous la
surveillance de psychotechniciens relevant de l'Office du recrutement et de la
sélection du personnel. Les réponses aux examens écrits
ont été traitées sous le sceau de la
confidentialité, un numéro de matricule ayant été
attribué à chaque candidat. Tout cela, M. le Président,
c'était le Directeur général des élections qui le
disait et c'était un processus extrêmement sûr pour assurer
la compétence et la qualité. Quant à l'examen oral, par la
suite, pour chacune des circonscriptions visées, le Directeur
général des élections a décidé de mettre
à l'examen oral les quatre candidats ayant obtenu les meilleurs
résultats à l'examen écrit et c'est à partir d'une
grille de sélection, un guide d'entrevue commun
que ces candidats ont été rencontrés par quatre
comités de sélection constitués et mandatés
formellement par le Directeur général des élections.
Chacun d'eux était présidé par l'un de ses deux
adjoints et de leurs assistants respectifs. Chaque comité était
secondé par un secrétaire choisi par le personnel administratif
du Directeur général des élections et ces personnes et les
membres des commissions ont tous bénéficié d'une session
de formation spéciale au sujet de leur rôle, de la conduite des
entrevues et de leurs obligations. En suivant les rapports des comités
de sélection, le directeur général a transmis au
gouvernement pour chacune des circonscriptions électorales les noms des
trois candidats jugés les plus aptes à occuper la fonction de
directeur de scrutin. C'est donc parmi des personnes déjà
jugées compétentes, M. le Président, que le Conseil des
ministres faisait le choix. Nous sommes donc ici bien loin du système de
patronage que l'on connaissait sous les libéraux. C'était
effectivement la couleur uniforme qui comptait quand les libéraux et
même les gens de l'Union Nationale étaient au pouvoir.
Le mode de nomination que nous avons mis en place nous assure que les
directeurs de scrutin actuellement en place proviennent de tous les horizons
politiques, sont de toutes les couleurs pour utiliser un langage populaire.
Aujourd'hui, par la loi... (18 heures)
Mme Lavoie-Roux: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que le député de
Châteauguay a induit la Chambre en erreur. J'ai devant moi - il vient de
faire une longue description, il vient de dire que les mécanismes qu'ils
ont mis en place assurent l'honnêteté, l'objectivité - dans
le comté de L'Acadie trois personnes...
M. Guay: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement, en vous faisant
remarquer qu'il est 18 heures.
M. Guay: Je pense, M. le Président, que vous conviendrez
qu'il s'agit d'un cas classique de divergence d'opinions qui ne fait pas
l'objet d'une question de privilège et que si la députée
de L'Acadie désire intervenir sur le débat, c'est son droit le
plus strict, mais ce n'est pas une question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M.
le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: Je vois mal comment le leader adjoint du gouvernement
peut déterminer, avant même d'avoir entendu l'objet de la question
de privilège de ma collègue, que cela n'en est pas une. Il
faudrait au moins lui donner la chance d'exprimer quelle est la question de
privilège qu'elle veut soulever.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît:
Avant de continuer, j'aimerais au minimum demander le consentement pour
dépasser 18 heures, parce qu'il est passé 18 heures actuellement
et la question de privilège de Mme...
M. Dussault: M. le Président, je demande la suspension du
débat.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de
suspension est-elle adoptée?
M. Gratton: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, nos travaux sont
suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 02)
(Reprise de la séance à 20 h 09)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Veuillez prendre place.
M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît!
M. Bertrand: On continue, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat
sur le projet de loi no 96, Loi sur l'intégration de l'administration du
système électoral. À la suspension, la parole était
au député de Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, je ne sais pas s'il y a eu
une fête à l'heure du souper, je cherche, je vais sans doute
trouver.
Je disais donc, avant que nous allions souper, au moment où les
libéraux, nos amis d'en face, m'ont refusé très
aimablement leur consentement pour que je finisse après 18 heures - je
les soupçonne de craindre ce que j'avais à ajouter...
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le député de Gatineau et leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: Je voudrais simplement dire que la seule crainte que
l'Opposition avait c'était qu'en dépassant l'heure prévue
de 18 heures, nous nous exposions à dépenser les quelque 1500 $
que coûte...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: Merci, M. le Président. Je constate que de
toute façon la générosité dont ils font preuve
habituellement, ils sont assez incapables d'en faire preuve à mon
égard. Je pense que c'est pour des raisons qu'on va peut-être
comprendre dans les prochaines minutes.
Je parlais donc du projet de loi no 96 et plus spécifiquement de
la nomination des directeurs de scrutin, qu'on appelait anciennement les
présidents d'élection. Je disais que le mode de nomination
actuel, tel qu'il apparaît dans la loi 9 qui a été
présentée par notre gouvernement et votée par cette
Assemblée nationale, permet que les directeurs de scrutin, dans tout le
Québec, proviennent de tous les partis politiques, quels qu'ils soient,
tout en assurant qu'ils soient tous compétents. Je pense que c'est cela
qu'il est surtout important de retenir, M. le Président.
Je voudrais ajouter que le nouveau mode de nomination, tel qu'il
apparaît maintenant dans le projet de loi no 96, constitue une
amélioration sensible, puisqu'il va éliminer, mais d'une
façon définitive maintenant, toute intervention politique, de
quelque niveau que ce soit, dans la nomination des directeurs de scrutin, tel
que le préconisait le comité Dussault, dont un rapport a
été produit et qui a inspiré la réforme
électorale, comité dont faisaient d'ailleurs partie le
député de Groulx, le député de Laviolette,
maintenant vice-président de l'Assemblée nationale, l'ancien
député de Viger, le député de Joliette, maintenant
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche; j'en oublie
peut-être et je m'excuse auprès de ceux que j'oublierais. Cette
amélioration va faire en sorte qu'on éliminera dorénavant
toute occasion, inutile d'ailleurs, de suspicion à l'égard de
ceux et celles qui doivent assurer l'application objective de la Loi
électorale dans chacune des circonscriptions électorales. J'ai
entendu avant le souper le député de Gatineau revendiquer la
paternité de cette nouveauté. Je dois dire - cela manque
d'imagination, sans doute, de ce côté - que l'idée de ce
mode de nomination vient du comité Dussault, vient de ce groupe de
travail dont je parlais tout à l'heure. Je pense qu'on a tous raison
d'être fiers aujourd'hui de constater qu'après une période
transitoire, une phase transitoire, qu'on n'a pas à renier en aucune
façon, on applique maintenant intégralement la recommandation du
rapport
Dussault.
Je voudrais réitérer, puisque j'en ai parlé au
début de mon discours, que nous n'avons, nous, du gouvernement, du parti
ministériel, aucune leçon à recevoir de quelque
façon que de soit du Parti libéral, de nos amis d'en face. Du
moins, jamais on n'en aura à recevoir tant et aussi longtemps qu'ils
garderont dans leur caisse électorale les 750 000 $ qu'ils ont
reçus en cadeau olympique, qu'ils ont encore dans leur caisse
électorale, auxquels se sont ajoutés 800 000 $ à peu
près d'intérêt composé depuis ce temps. Vous savez,
les taux d'intérêt ont été élevés.
M. le Président, je dois vous dire qu'on ne nous reprochera
jamais de faire des ballounes avec cela parce que, on sait avec clarté
que cet argent a été recueilli par le Parti libéral
à l'occasion des Jeux olympiques, à l'occasion de plantureux
contrats. C'est avec cet argent que ces gens essaient de gagner des
élections. On peut penser que le jour, malheureusement, où ils
reviendront au pouvoir - parce que cela peut arriver dans vingt ans - ils
recevront des représentations qui seront, elles, contraires à
l'esprit du financement des partis politiques. C'est pour cela que je me
permets régulièrement de le rappeler et de revenir ici à
l'Assemblée nationale pour demander que ces 750 000 $ auxquels se sont
ajoutés 800 000 $ d'intérêt composé soient remis au
trésor public. C'est justement pour empêcher que, maintenant que
la loi 2 existe, maintenant que cet esprit démocratique existe, qu'il ne
soit plus possible que la démocratie soit faussée par l'existence
de tels fonds dans une caisse électorale, comme cela se passe
présentement au Parti libéral.
Des voix: Bravo!
M. Dussault: Certains de nos amis d'en face ne se gênent
pas pour nous dire en privé que c'est vrai que c'est là, mais
qu'ils l'ont dépensé.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Dussault: Je dis que cet argent a une odeur et que, s'il est
maintenant dépensé, il sera remplacé par de l'argent
qu'ils recevront dans des campagnes de financement et c'est cet
argent-là qu'ils devront prendre dorénavant, 1 500 000 $, pour le
remettre au trésor public, pour faire en sorte que la loi no 2 soit
respectée dans son esprit.
Des voix: Bravo!
M. Dussault: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gatineau et leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: Est-ce que le député de
Châteauguay me permettrait une question?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay, acceptez-vous une question en vertu
de l'article 100?
M. Dussault: Vous savez que ces gens-là ne sont pas
très généreux pour me donner du temps de parole à
l'Assemblée nationale. S'il en reste, à la fin, je consentirai
très généreusement à répondre.
Le Vice-Président (M., Rancourt): M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: J'allais donc conclure en disant que nous avions
voté une loi électorale, que nous avions une mesure prévue
pour nommer les directeurs de scrutin. Elle était perfectible, nous
l'avons perfectionnée, elle est maintenant dans le projet de loi no 96
et il me fera d'abord énormément plaisir de voter pour cette
correction. Je répète à nos amis d'en face que, quoi
qu'ils nous raconteront dorénavant sur les mesures démocratiques
que nous avons, nous n'arriverons jamais à les prendre au sérieux
tant qu'ils auront dans cette caisse électorale libérale les 750
000 $, plus les 800 000 $ d'intérêts composés reçus
en échange de plantureux contrats à l'occasion des Jeux
olympiques.
Tout à l'heure, le député de
Mégantic-Compton aura beau nous raconter encore des histoires, comme ils
l'ont tous fait cet après-midi, ils auront beau, chacun leur tour,
essayer de discréditer les institutions démocratiques qui
découlent de nos réalisations depuis 1976, ils n'arriveront
jamais à être pris au sérieux tant qu'ils ne remettront pas
au trésor public les 1 500 000 $ qui leur serviront un jour à
agir d'une façon incorrecte. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Gatineau et leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, j'aimerais demander
simplement au député de Châteauguay, s'il me le permet de
nous dire, combien cela fait, en francs nouveaux ou anciens, 750 000 $ ou 300
000 $?
Des voix: Oh! Oh! Oh!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay, vous avez accepté de
répondre à la question.
M. Dussault: Je ne sais à quoi fait allusion le
député de Gatineau. Il fait des allusions à quelque chose
qui n'a aucun fondement alors que, pour ma part, je dis des choses sur quelque
chose qui a un fondement puisque c'est dans le rapport Malouf, où il est
dit très clairement: 750 000 $. On dit: D'où viennent-ils? De
plus, je dis que ce n'est que ce qu'on a découvert.
Des voix: Ah!
M. Dussault: Mais cela ne dit pas ce qu'on n'a pas
découvert, M. le Président. Eux le savent combien ils ont
à remettre au trésor public.
Une voix: Combien?
M. Dussault: Ils ont peur d'en parler. Quand j'ai
présenté des motions à l'Assemblée nationale pour
en parler, ils ont toujours refusé, M. le Président. Alors, vous
savez, on n'est pas une machine à calculer et les francs, cela change
d'une journée à l'autre. Mais cela n'a aucun rapport dans la
discussion. Ces gens-là essaient, de cette manière, de camoufler
la réalité qui est la leur, ces 750 000 $ plus 800 000 $ en
intérêt composé qu'ils devront, tôt ou tard, remettre
au trésor public.
Des voix: Bravo! Une voix: C'est faux.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le député de Rousseau.
M. Blouin: Merci, M. le Président. Je soulève une
question de règlement en vertu de l'article 100. Le député
vient de me rappeler des souvenirs assez troublants et j'aimerais lui poser une
question à cet égard. J'ai lu dans les journaux il y a
environ...
M. Gratton: Question de règlement. Des voix:
Ah!
Le Vice-Président (M. Rancourt): J'ai déjà
une question de règlement. S'il vous plaît! M. le
député de Rousseau, vous voulez, en vertu de l'article 100, poser
une question au député de Châteauguay?
Une voix:...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Dussault: D'accord, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je constate que le
député de Châteauguay
accepte cette question.
M. Gratton: M. le Président, sur la question de
règlement. On sait...
Une voix: Des enfants d'école. M. Blouîn:
Non.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Blouin: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Sur cette même question de règlement, M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, je veux bien qu'on s'amuse,
de ce côté-là, en attendant les événements de
demain et peut-être qu'on rira un peu moins. Je vous prie de lire
l'article 100, qui ne permet pas au député de Rousseau, lorsque
le député de Châteauguay a terminé son intervention,
de lui adresser quelque question que ce soit, même si le
député de Châteauguay acceptait. (20 h 20)
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous allons lire ensemble
l'article 100. "Tant qu'un député a la parole, aucun
député ne doit l'interrompre, si ce n'est pour lui demander la
permission de poser une question ou de donner des explications, pour soulever
une question de règlement ou une question de privilège ou pour
signaler un défaut de quorum. "
Si ce n'est pour lui demander la permission de poser une question ou de
donner des explications sur un discours qui a déjà eu lieu...
M. Guay: Sur la question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Guay: II est d'usage, en cette Chambre, M. le
Président, que les députés qui veulent poser une question
à celui qui a la parole et qui ont la politesse d'attendre qu'il ait
terminé puissent ensuite poser la question plutôt que de
l'interrompre en plein milieu d'un discours. C'est un usage consacré, M.
le Président, qu'il serait regrettable de modifier aujourd'hui, ce qui
obligerait dorénavant tout député qui veut poser une
question à un orateur de devoir l'interrompre en plein milieu de son
discours pour lui signifier qu'il aurait une question à lui poser.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, je pense qu'on risque de
créer un précédent fort dangereux. Je veux bien qu'on
laisse à n'importe quel député le loisir de poser une
question à n'importe quel autre député qui aurait
terminé son intervention, mais cela vaudra pour les deux
côtés. La lettre même de l'article 100 indique bien qu'il
faut demander, pendant que le député a la parole, la permission
de lui poser une question. C'est ce que j'ai fait tantôt pour pouvoir
revenir après. Si on ne l'a pas fait pendant qu'il avait la parole, il
n'y a aucune façon possible pour un député de poser une
question après qu'un député a terminé son
intervention.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: Sur cette question, je réitère - et le
député de Gatineau, je pense, le reconnaîtra - que l'usage
veut que cet article soit interprété librement. Il arrive souvent
que des députés de l'Opposition, après une intervention
ministérielle, se lèvent pour demander s'ils peuvent poser une
question à la personne qui, de ce côté-ci de la Chambre,
vient de terminer une intervention. C'est fréquent. Si le
député de Gatineau insiste pour qu'on interprète de
manière stricte et restrictive l'article 100, je pense qu'il fait un
mauvais calcul parce que, finalement, c'est l'Opposition qui risque d'en
souffrir.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Évidemment, par le passé, j'ai souvent vu des
députés se lever et interrompre un orateur en vertu de l'article
100 pour lui demander la permission de lui poser une question. L'orateur
répondait parfois qu'on aurait l'occasion de la lui poser après
qu'il aurait terminé son discours. J'ai aussi vu des
députés, depuis que j'occupe la présidence, poser des
questions à la fin du discours, en se levant et en invoquant l'article
100. Les deux méthodes ont été employées, à
ma connaissance.
M. le député de Rousseau, rapidement, s'il vous
plaît!
M. Blouin: D'abord, pour vous rassurer, M. le Président,
je dois vous dire qu'il n'y a même pas de problème parce que je me
suis levé au moment où le député de
Châteauguay prononçait le dernier mot de son allocution. C'est le
député de Gatineau qui m'a interrompu, qui n'a pas
été poli à mon égard. Ce que je voudrais demander
au député de Châteauguay c'est, s'il fait un lien entre les
1 500 000 $ qui restent dans la cagnote du Parti libéral, comme nous
l'avons
vu dans les journaux, et les 1 500 000 $ d'argent malodorant qui
provient des Jeux olympiques...
M. Gratton: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, je pense que vous venez de
constater vous-même qu'on fait abus du règlement. Si on veut jouer
à ce jeu, je pourrai moi aussi profiter de l'intervention de chacun des
députés de ce côté-ci pour demander s'ils ont
entendu parler d'une contribution possible de 300 000 $ du gouvernement
français à la caisse du Parti québécois. Je ne
pense pas qu'on veuille jouer à cela ce soir. Je pense qu'on veut
étudier le projet de loi no 96.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M.
le député de Châteauguay, vous avez accepté de
répondre à la question. Rapidement, s'il vous plaît!
M. Dussault: Avant de répondre, M. le Président,
est-ce que je pourrais savoir combien il me restait de temps avant d'avoir
été interrompu par toutes ces questions de procédure?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay, vous aviez terminé votre
discours. C'est tout simplement en réponse à une demande que vous
avez...
M. Dussault: Merci, M. le Président. Je vais
répondre à la question. Bien sûr, M. le Président,
que tout esprit lucide dans cette Assemblée fera un lien très
direct entre le 1 000 000 $ maintenant accumulé à cause des
contrats olympiques, donc, de la caisse électorale du Parti
libéral, et le 1 500 000 $ qu'il reste présentement. De toute
façon, M. le Président, cela semble fluctuer...
M. Gratton: Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: Les députés de Rousseau et de
Châteauguay non seulement induisent la Chambre en erreur, mais sont
ignorants ou mentent délibérément. Il n'y a aucune
allusion qui a été faite ici, au cours de ce débat,
à 1 500 000 $ ou à quelque somme qui pourrait se retrouver dans
une caisse électorale quelconque. Si on veut jouer à ce jeu, je
le répète, M. le Président, cela va à l'encontre de
la lettre même du règlement. Libre à ceux qui veulent
s'amuser ce soir de le faire, mais je vous préviens que cela va
être très long à un moment donné si on laisse poser
ce genre de question et surtout si des réponses aussi enfantines sont
données.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: M. le Président, il y a deux arguments qui ont
été soulevés par le député de Gatineau
à deux reprises distinctes pour soutenir son interprétation de
l'article 100. L'un est à savoir s'il faut, oui ou non, interrompre le
député pendant qu'il parle. Cela est une chose que j'ai
plaidée tantôt, à savoir que l'usage était
différent. Il n'y a rien dans le règlement qui dit que la
question doit être adressée d'un côté de la Chambre
à un autre. Je reconnais cependant que l'usage veut que d'ordinaire cela
se fasse comme cela et qu'en six ans, en cette Chambre, je pense que c'est la
deuxième fois que je vois cette façon de faire, qui n'est pas
interdite peut-être, mais qui est, disons-le, quelque peu
inusitée.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Châteauguay, très rapidement, s'il vous
plaît!
M. Dussault: Très brièvement, M. le
Président...
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: Le leader adjoint du gouvernement vient de
reconnaître que ce qui se passe présentement n'est pas
régulier. Pourriez-vous, d'autorité, mettre fin à cette
bouffonnerie? Autrement, devra-t-on répéter le même genre
de bouffonnerie pour qu'on se rende compte que le règlement de
l'Assemblée nationale n'est pas là pour faire perdre le temps de
personne et est là pour faire des débats sérieux?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition, j'ai dit tout à l'heure qu'il y avait une
possibilité de poser des questions en vertu de l'article 100 de deux
façons, en interrompant l'intervenant ou après son discours et
que, pour l'instant, il y avait une question posée par le
député de Rousseau et une réponse qui devait être
donnée par le député de Châteauguay. Je demande au
député de Châteauguay, en conclusion, de venir rapidement
à sa réponse.
M. Dussault: Merci, M. le Président. J'allais le dire
brièvement. Les chiffres ont tellement fluctué dans ce domaine
qu'il est difficile de donner une réponse très précise
là-dessus. On aura sans doute l'occasion d'y
revenir. On a beaucoup de temps devant nous pour cela. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Fabien Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Vous savez que
c'est toujours avec beaucoup d'intérêt que j'interviens en cette
Chambre, mais, ce soir, c'est également avec beaucoup de plaisir, et je
vais vous dire pourquoi. Premièrement, j'interviens immédiatement
après le député de Châteauguay. Pour moi, c'est
vraiment un plaisir et je suis persuadé que, pour les auditeurs, ceux
qui nous regardent, c'est également un plaisir. Après avoir
entendu autant de conneries, on va tenter de revenir sur terre et discuter
vraiment du projet de loi.
Des voix: Oh!
M. Bélanger: Deuxièmement, M. le Président,
le projet de loi que nous...
M. Dussault: Question de privilège, M. le
Président.
Une voix: II n'y a pas de privilège. M. Guay: Question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît;
M. Guay: M. le Président, vous savez qu'il y a un article
du règlement sur les termes antiparlementaires et je vous soumets
respectueusement que le terme que vient d'utiliser le
député...
Une voix: Des conneries!
M. Guay:... qui dépassait sans doute sa pensée -
j'en suis convaincu - est néanmoins un terme antiparlementaire.
J'imagine bien, M. le Président, que vous voudrez bien donner des
directives pour qu'il ne soit pas utilisé de nouveau.
M. Gratton: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: Je ne sais réellement pas ce qu'a mangé
le leader adjoint pour souper,
M. le Président, mais il y a quand même une limite. Si vous
voulez, on va aller chercher l'ancien règlement qui, effectivement,
indiquait tous les mots qui sont antiparlementaires. On n'y a jamais
retrouvé le mot "connerie". Je comprends que le leader adjoint veuille
empêcher que des gens veuillent traiter ou qualifier le
député de Châteauguay de con. Ce n'est pas ce que mon
collègue de Mégantic-Compton a fait. Il a simplement dit que le
député de Châteauguay avait dit des conneries et je vous
avoue franchement que je lui donne raison là-dessus. (20 h 30)
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît! Pour pouvoir savoir s'il y a vraiment question de
privilège, je suis au moins obligé d'entendre M. le
député de Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, je pense que ce n'est pas
très gentil ce qu'a dit le député et, quand ils sont
à court d'idées, ils insultent le monde; c'est ce qu'il vient de
faire.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Ce
n'est pas une question de privilège, M. le député de
Châteauguay. M. le député de Mégantic-Compton, vous
avez la parole.
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Ces paroles
n'ont certainement pas dépassé ma pensée, parce que, si
j'avais dit ce que je pensais, ce serait pire que cela. Après le langage
du premier ministre lui-même en cette Chambre, je n'ai rien dit
d'antiparlementaire en disant que nous avons entendu des conneries et je laisse
le peuple du Québec juger si ce sont des conneries, oui ou non, qu'ils
ont entendues de la part du député de Châteauguay.
M. le Président, j'interviens également avec beaucoup de
plaisir parce que ce projet de loi no 96 vient justement, encore une fois,
donner raison au Parti libéral; en 1977, c'est exactement ce que nous
avons dit, vous êtes en train de bâtir un organisme qui ne
fonctionnera pas, qui va coûter une fortune aux Québécois,
et aujourd'hui le gouvernement avoue s'être trompé en 1977 -la, M.
le Président, vous le savez - ce gouvernement du Parti
québécois qui possède le monopole de la
vérité, qui a toujours raison, dont ce n'est jamais la faute.
Cette fois-ci ce n'est certainement pas la faute du fédéral, ce
sont des lois qui ont été votées ici, à
l'Assemblée nationale. Les députés de ma formation
politique avaient mis en garde le gouvernement sur exactement ce qui se
produit. Alors, vous comprendrez que c'est avec beaucoup de plaisir que
j'interviens ce
soir.
Si vous voulez bien, M. le Président, nous allons parler du
coût de ce monstre administratif. Je voudrais dire aux
Québécois combien cela leur a coûté
l'élection du 13 avril 1981. Je suis convaincu que les libéraux
vont trouver que c'est extrêmement cher, mais également les
péquistes, ceux qui ont voté péquiste, les 49% qui ont
appuyé ce gouvernement, les pères de famille dont, à
partir de demain, on ira fouiller dans les poches par un décret, par une
loi 70, parce qu'on n'a pas assez d'argent pour respecter son contrat, je suis
persuadé qu'eux vont trouver que cela a coûté beaucoup trop
cher. Cela a coûté 86 000 000 $ en deux ans pour faire voter nos
Québécois. Ce n'est pas magnifique avec un gouvernement qui a le
monopole de la vérité?
On va revenir un peu sur ces chiffres. Je n'aime pas en citer, c'est
toujours ennuyeux d'entendre des chiffres, mais, lorsqu'il s'agit de chiffres
aussi évidents que ceux que nous avons devant nous, je pense que cela
vaut la peine de s'arrêter un peu. Cela a coûté aux
Québécois et aux Québécoises, aux syndiqués
qui devront rembourser 500 000 000 $ au gouvernement, pour les directeurs de
scrutin, pour une journée, 1 167 000 $; pour les secrétaires de
scrutin, 505 959 $. Finalement le total de la journée du 11 avril, pour
avoir connu le désastre qu'on a connu - parce qu'on le voit le vrai
désastre - cela a coûté aux Québécois, pour
se faire avoir, pour tenter soi-disant de rester fort, 22 000 629 $. Je me
demande s'il reste un péquiste au Québec qui est fier de ce vote,
qui est fier de ces 22 000 000 $. Je ne pense pas qu'il en reste un. Dans les
semaines qui vont venir, j'ai l'impression qu'il va en rester de moins en
moins. Je comprends très bien que les députés
d'arrière-ban veulent s'amuser un peu ce soir, parce que je pense que le
party est fini. Demain, nous allons commencer à discuter de lois
spéciales. Nous allons déposer ici, probablement avec un
bélier mécanique, des décrets pour renvoyer au travail,
non seulement renvoyer au travail, mais aller fouiller dans les poches des
contribuables. C'est cet organisme que nous avons dénoncé en
1977. Que disaient les députés péquistes du temps? M.
Robert Burns, un ancien ministre du Parti québécois, disait ceci,
dans le journal des Débats, le 30 mars 1979: "Que cela coûte
n'importe quoi, n'importe quel prix, nous voulons de la démocratie. " On
a agi là de la façon du PQ. On a fait la même chose
d'ailleurs en juillet 1981, lorsque Air Canada-Nordair voulait fusionner avec
Québecair. On a dit: Que cela coûte n'importe quel prix. 50 000
000 $? 35 000 000 $? On est prêts à aller à 67 000 000 $,
mais il ne faut pas que les avions d'Air Canada survolent le ciel du
Québec. Cela nous prend la fleur de lys et non la feuille
d'érable. C'est contre des choses comme celles-là que nous les
avions prévenus et c'est exactement ce qui est arrivé.
C'est épouvantable ce qu'on a dépensé en
publicité. Uniquement pour l'impression des listes électorales, 2
334 000 $. En information pour le public, 1 705 000 $. On a
dépensé en publicité, pour dire au public qu'il y avait
des élections - l'endroit où aller voter, de quelle façon
faire son X, son crochet - plus que ce que les deux formations politiques
réunies ensemble ont pu dépenser pour faire de la
publicité. Si ce n'est pas un gouvernement de publicité, je me
demande ce que c'est. Je vous jure que je n'ai pas inclus les 2 000 000 $ de
"Il ne faut pas se faire avoir", "II faut rester fort". Je ne l'ai pas inclus
dans ce montant, parce que cela ne faisait pas partie des dépenses
électorales. On avait trouvé au Parti québécois une
façon de dire aux Québécois qu'il ne fallait pas se faire
avoir, qu'il fallait rester fort aux dépens des contribuables. Donc, ce
n'est pas inclus dans le montant.
Cet organisme qui comptait 30 employés en 1977 pour faire le
même travail, sensiblement le même travail, en est rendu à
251 employés pour faire des cartes électorales, pour faire des
révisions de cartes et des révisions de révisions de
cartes, pour mélanger à peu près tout le monde. Ce n'est
certainement pas la population qui augmente au Québec qui fait en sorte
que cela nous coûte tellement cher aujourd'hui. Au contraire, vous le
savez, on a perdu 150 000 travailleurs qui sont partis travailler dans l'Ouest
et en Ontario parce qu'il n'y avait plus de travail ici au Québec. Qu'on
ne vienne pas me dire que la population a augmenté, que c'est cela qui a
fait en sorte... Est-ce que ce sont les fameuses listes qu'on a
retrouvées dans les mains du ministre de l'Immigration? Je ne sais pas
ce qui a coûté si cher, mais tout ce que je peux vous dire, c'est
que c'est inacceptable de dépenser autant d'argent au Québec pour
faire des élections. On n'en a tout simplement pas les moyens.
On peut comprendre qu'on en soit rendu à passer des
décrets, à adopter la loi 70. C'est tout simplement que la cote
de crédit - je vais vous expliquer ce qu'est une cote de crédit,
surtout pour vous, messieurs - de la province de Québec qui était
de AA lorsqu'on vous a laissé le pouvoir est rendue à À.
Si cela continue comme ainsi, avec des dépenses de 86 000 000 $ pour
faire des élections, 67 000 000 $ pour laisser voler les avions de
Québecair, la cote de crédit n'aura plus aucun A. Qu'est-ce que
cela veut dire? Cela veut dire que le gouvernement du Québec devra payer
davantage d'intérêt pour venir à bout de financer ses
dépenses d'épicerie, comme on le dit souvent ici en
cette Chambre. C'est tout simplement des dépenses comme
celles-ci, comme les 2 700 000 $ que nous avons dénoncées pour
les toilettes de l'Assemblée nationale, les primes de séparation,
qui font en sorte que nous nous retrouvons aujourd'hui avec un déficit
qui dépasse les 3 000 000 000 $ et les impôts les plus
élevés au Canada. Lorsqu'on vous dit: Cela coûtera trop
cher, ce n'est pas la façon de faire, on passe pour des
démagogues, on n'est pas de bons Québécois, on ne veut pas
de la démocratie. C'est faux, M. le Président, nous en voulons de
cette démocratie.
Certains députés ont ajouté dans leur allocution
qu'ils ont facilité le vote et que cela va très bien depuis cette
fameuse loi 2 qu'on tente d'amender par le projet de loi no 96. Pourtant, j'ai
ici les chiffres de la participation au vote du 29 avril 1970 -votre projet de
loi n'était pas là, messieurs -84, 23%; le 29 octobre 1973, 80,
58%; le 15 novembre 1976, le jour dont le Québec se souviendra pendant
des siècles, peut-être pas de la façon dont vous
l'entendez, messieurs...
Des voix: Bravo!
M. Bélanger: Le parti politique qui se disait favorable
aux travailleurs a été le pire gouvernement que le Québec
n'a jamais eu au pouvoir. Ce jour-là, 85% des Québécois
sont allés voter. En 1977, on a voté cette fameuse loi et,
censément, selon le député de je ne sais plus quel
comté qui le disait ici en cette Chambre: Cela a facilité
l'accès au vote. Dès le 13 avril 1981, on est redescendu à
82%, 3% de moins de participation et, au lieu d'avoir coûté
quelques millions, on était rendu dans les 86 000 000 $.
Le référendum de 1980. Il y a eu évidemment une
participation un peu plus grande à cause du vif intérêt des
Québécois pour s'assurer qu'on conserverait notre province
à l'intérieur de notre pays, le Canada. On s'est
déplacé à 85%. Au cas où vous ne vous en
souviendriez pas, messieurs, c'est nous qui l'avons gagné le
référendum.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Dupré: C'est Trudeau qui l'a gagné, ce n'est pas
vous autres!
Une voix: Trudeau! Trudeau!
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Bélanger: M. le Président, on en a assez de ces
folles dépenses, c'est pourquoi nous les dénonçons et nous
continuerons de les dénoncer.
Je dirai quelques mots maintenant des directeurs de scrutin. Ah! on
avait fait disparaître totalement le patronage. Cela n'existait plus.
Là, c'était nommé par concours. Je présume qu'il y
avait certains concours de circonstance. Il y a un cas que je voudrais citer
ici, qui m'a été remis par ma collègue de L'Acadie, et qui
démontre le résultat des examens. C'est un fait qu'il y a eu des
examens et trois se sont présentés. Les notes sont les suivantes
- je vais vous poser une petite devinette en même temps, vous me direz
qui a été choisi - il y a un certain monsieur qui a eu 238. Ce
sont de belles notes. Un autre monsieur a eu 252. Oh! Oh! ça monte un
peu. On en a un autre à 237. M. le Président, je ne le dirai pas
publiquement, mais je vous le dirai à vous parce que vous m'êtes
très sympathique. C'est celui qui a eu 237, celui qui a eu le plus bas
qui a été choisi.
Une voix: Cela ne se peut pas!
M. Bélanger: C'est un concours de circonstance! On s'est
dit: II y a quelque chose qui ne va pas. On a fait une simple
vérification et on a retrouvé qu'en 1980, il avait souscrit
à la caisse du PQ...
Une voix: 150 $.
M. Bélanger:... 150 $. Je vois que tous mes
collègues d'en face étaient au courant, parce qu'on m'a
soufflé d'avance "150 $".
Une voix: II le connaît!
M. Bélanger: Vous les surveillez, vos souscripteurs.
Pourquoi nous faire tout ce tralala, nous dire qu'il n'y a plus de
patronage, qu'il n'y a plus rien, alors qu'on a une preuve, M. le
Président, hors de tout doute? Ce n'est qu'un seul cas.
Je vais vous parler du cas de Mégantic-Compton qui est magnifique
et qui est formidable. Là aussi, il y avait un directeur de scrutin
depuis de nombreuses années. On l'appelait auparavant le
président d'élection, je pense. Cela fonctionnait à
merveille. Là encore, le Parti québécois devait faire des
concours pour aller chercher les personnes les plus compétentes. Donc,
il y a eu six participants. Le député de Sherbrooke et ministre
délégué au Travail, qui est en face, sait que chez nous,
le taux de chômage est très élevé. (Si jamais vous
avez une chance de faire quelque chose pour améliorer la situation, vous
êtes le bienvenu). Il y en a six qui ont participé au concours. Un
pur hasard, encore là, il y avait, parmi ces participants, trois
libéraux et trois péquistes. Plusieurs sont venus me voir et me
demander ce qui se passait, parce que les résultats tardaient. Donc, en
bon député qui doit renseigner ses électeurs, je me suis
informé de ce qui s'était passé et on m'a
répondu
que trois noms avaient été retenus et qu'une
décision serait prise incessamment. J'ai demandé les noms. Ce
n'est pas croyable. Les trois qui avaient de l'expérience - l'un d'eux
l'avait été pendant quinze ans, le deuxième avait
été son adjoint lors du référendum et le
troisième était le directeur d'une commission scolaire - avaient
échoué à l'examen. Par contre, les trois péquistes
avaient réussi l'examen. Malheureusement, je n'ai pas les notes, mais
ils ont sûrement eu des notes extraordinaires, parce que, finalement,
c'est un péquiste qui a eu la "job".
M. le Président, qu'on ne vienne pas nous raconter que c'est le
Parti québécois qui a mis la démocratie dans les
élections au Québec. Non, M. le Président. Vous avez
institué tout simplement le patronage le plus sophistiqué qui
n'ait jamais existé au Québec. Cela, on vous le concède;
il n'y a pas d'erreur.
Une voix: Hypocrites!
M. Bélanger: Et cela ne me scandalise pas non plus, M. le
Président, qu'on favorise un péquiste, parce que vous êtes
un gouvernement péquiste, mais qu'on ne vienne pas nous dire que ce sont
des concours, qu'on ne vienne pas faire croire à tout le monde qu'on
peut y participer honnêtement, sincèrement, alors qu'on sait
pertinemment, à la suite d'une réponse du premier ministre qui a
dit: Vous savez, on consulte. On consulte Jean-Roch Boivin, on consulte le
président d'une association péquiste et on décide qui a la
"job".
M. le Président, j'avais une autre raison d'être fier parce
que, pour une fois, nous allons voter pour le projet de loi. Vous savez que je
n'ai pas été chanceux au cours des derniers jours. J'ai
constamment voté contre les projets de loi. Cette fois-ci, nous allons
voter pour, parce que, comme je l'ai mentionné au début, avec ce
projet de loi, le gouvernement admet s'être trompé royalement en
1977. Il admet que mes collègues libéraux avaient vu juste,
qu'ils avaient prédit exactement ce qui arriverait. C'est pour cette
raison que cela me fait plaisir de vous dire que nous allons voter pour ce
projet de loi.
Une voix: Vous parlez contre et vous allez voter pour.
M. Bélanger: II n'est pas question, M. le
Président, de parler contre le projet de loi. Nous parlons tout
simplement de ce qui n'a pas fonctionné, de ce qu'il faut corriger et
c'est justement pour aider le gouvernement à en finir une fois pour
toutes, parce que les Québécois en ont assez de ces folles
dépenses, de ces scandales: 86 000 000 $ pour faire voter des
Québécois pendant deux ans, si cela n'est pas un scandale, pour
moi, c'est un scandale. Je ne sais pas de quelle façon vous le prenez.
Je ne sais pas comment vous allez expliquer à vos électeurs, qui
iront vous voir à vos bureaux à la suite des coupures qu'on aura
bientôt, alors qu'on ira fouiller dans la poche de vos contribuables,
durant les pires mois de l'hiver: janvier, février et mars. Alors qu'ils
auront de la difficulté à payer leur chauffage, vous irez
chercher 500 000 000 $. Comment allez-vous justifier de telles dépenses?
Je me le demande.
Je suis fier de faire partie de l'Opposition, du Parti libéral.
Je suis fier parce que nous avions prévenu le gouvernement et nous
aurions pu éviter... Je ne dis pas qu'on aurait économisé
les 22 000 000 $, les 86 000 000 $ non plus, il faut dépenser de
l'argent pour s'assurer que les Québécois ont le droit de voter
et de le faire démocratiquement, mais je peux vous dire une chose: En
tant qu'homme d'affaires, je suis persuadé qu'on aurait pu faire le
même job avec de 8 000 000 $ à 10 000 000 $, soit une
économie suffisante pour injecter les 67 000 000 $ de Québecair.
Merci, M. le Président.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Dupré: Question de règlement, M. le
Président.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gratton: Si on voulait jouer le jeu auquel se sont
prêtés le député de Rousseau et le
député de Châteauguay tantôt, et que vous avez
malheureusement permis dans une certaine mesure, M. le Président, je
pourrais maintenant, en vertu de l'article 100, demander à mon
collègue de Mégantic-Compton, qui vient de terminer son discours,
s'il me permet de lui poser une question. Je suis sûr qu'il me dirait
oui, n'est-ce pas?
M. Bélanger: Oui, avec plaisir.
M. Gratton: Je pourrais lui adresser la question suivante: Que
pense le député de Mégantic-Compton de cet affidavit qui a
été déposé à cette Assemblée
nationale aujourd'hui dans lequel le Dr Marc Lavallée affirme sous
serment que le premier ministre actuel lui a demandé, en 1970, d'aller
solliciter une contribution de 300 000 $ du gouvernement français
à la caisse électorale
du Parti québécois? Le député de
Mégantic-Compton pourrait me déballer tout ce qu'il pense de
cela. Je ne le ferai pas, M. le Président...
Des voix: Ah!
M. Gratton:... parce que je respecte trop le règlement de
l'Assemblée nationale. Il me semble qu'il serait bon - c'est une demande
de directive que je fais présentement - M. le Président, que vous
indiquiez à cette Chambre que l'article 100 n'a rien à voir avec
le genre de question qui a été posée par le
député de Rousseau.
Sur une autre question de règlement, pourriez-vous demander au
député de Châteauguay de s'asseoir pendant que j'ai la
parole, M. le Président?
M. Dussault: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Actuellement, la parole est au député de Gatineau, le leader
adjoint de l'Opposition.
M. Dussault: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Dussault: Ah! Il n'a pas fini, excusez-moi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M.
le député de Gatineau.
M. Gratton: Je disais donc, M. le Président, que si vous
pouviez indiquer à l'Assemblée que l'article 100 n'a rien
à voir avec le spectacle qu'on a vu tantôt mais n'est là
que pour indiquer dans quelle circonstance un député peut en
interrompre un autre qui a le droit de parole et non pas pour poser des
questions comme celle que le député de Rousseau a adressée
au député de Châteauguay tantôt.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Guay: Sur la question de règlement, M. le
Président, et tout en sachant gré au député de
Gatineau de ne pas avoir posé la question qu'il aurait posée s'il
l'avait posée, je voudrais, à mon tour, vous demander, tout en
prenant la question en délibéré, de bien vouloir
transmettre à cette Chambre les directives nécessaires quant au
fonctionnement de l'article 100.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je
prends effectivement en délibéré ce que le leader adjoint
de l'Opposition a demandé, ainsi que le leader adjoint du gouvernement
afin justement que l'article 100 ne prête pas à des abus. (20 h
50)
M. Dupré: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dupré: Selon l'article 100, j'ai écouté
les propos du député de Mégantic-Compton...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vais prendre en
délibéré cette même demande d'un côté
ou de l'autre de cette Assemblée et je donnerai ma directive un peu plus
tard. S'il vous plaît! Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre... M. le
leader...
M. Guay: Cela va.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la
deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de la présidence
du conseil et de la constitution
M. Guay: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission
parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
est adoptée? Adopté.
M. Guay: M. le Président, nous allons, si vous le voulez
bien, étudier le projet de loi no 92, inscrit au nom du ministre des
Affaires municipales.
Projet de loi no 92 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture
du projet de loi no 92, Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les municipalités.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, j'ai
déjà dit au cours des années précédentes
toute l'importance qu'un projet de loi comme celui que nous proposons
aujourd'hui à l'étude de l'Assemblée nationale pouvait
revêtir pour les 12 000 élus, hommes et femmes, choisis par les
Québécois pour administrer leur ville ou leur village. Le projet
de loi no 92 que nous soumettons, M. le Président, a été
élaboré tout au cours de l'année avec la collaboration
intense et le plus souvent à la demande même des élus
municipaux de l'ensemble du Québec. Il s'agit d'un projet de loi dit
omnibus, en ce sens qu'il doit rendre plus efficaces les articles d'une
vingtaine de lois qui régissent ou influencent la façon
d'administrer nos municipalités. Je dois convenir, comme les élus
municipaux, qu'il faut au moins une fois l'an faire un certain ménage,
une certaine harmonisation des 150 lois et règlements du domaine
municipal, même si seulement 45 environ sont administrées par mon
ministère.
Cette situation illustre bien que la proposition d'un projet de loi
comme celui-ci à l'Assemblée nationale à cette
époque de l'année soit devenue traditionnelle. Le cadre municipal
regroupe la plupart des aspects de la vie des citoyens, de la qualité de
l'eau qu'ils boivent jusqu'à la qualité des loisirs qu'ils
s'offrent. Aussi, tous les ans, les élus municipaux ont une somme de
demandes que nous devons juger au mérite pour leur faciliter
l'administration de plus en plus autonome de leurs budgets. Tous les articles
ont leur importance relative pour l'une ou l'autre région, pour 2 ou 20
villes, pour 500 villages ou pour 1600 municipalités du Québec.
Il y a toujours un maire quelque part au Québec qui attend que
l'Assemblée nationale puisse accepter le changement qu'il a
demandé avec ses collègues de façon que sa
municipalité puisse mieux fonctionner. Il faut donc se méfier, M.
le Président, du caractère technique et administratif du
présent projet de loi.
Parfois nous devons donner le coup de plumeau nécessaire pour
faire disparaître quelques dispositions qui étaient devenues
superflues ou désuètes ou très peu économes de
temps ou d'argent. Par exemple, avec l'aide de ce projet de loi, nous
prévoyons abolir la nécessité qui était faite aux
municipalités de publier à la Gazette officielle leurs avis de
vente d'immeubles pour défaut de paiement. Par exemple, aussi, nous
entendons faire disparaître pour les cités et villes l'obligation
d'envoyer à mon ministère copie de tout le règlement. Si
de tels changements peuvent sembler anodins, c'est que la vie municipale ne
vous a pas encore révélé tous ses secrets. Comme greffier,
vous seriez heureux, ou comme maire, vous seriez aussi joyeux. Ce sont des
mesures d'économie. Ce sont aussi des solutions qui, tous les jours,
réassurent la marge de latitude des corporations municipales par rapport
au gouvernement, par rapport aux questions qu'elles ont à
résoudre. En effet, ce projet de loi doit aussi permettre qu'on trouve
des solutions à des problèmes utiles ou à des
problèmes inutiles qui se posent aux élus municipaux dans
l'application de mesures qui s'adaptent mal au cadre de la vie locale ou
régionale. À titre d'exemple, ce projet accordera aux
administrations des villages nordiques le pouvoir de tenir les élections
municipales au mois de novembre, une période plus propice à la
présence des chasseurs au village. C'est vous dire, M. le
Président, le caractère à la fois polyvalent, utile et
nécessaire et, pourtant, sans panache d'un tel projet de loi municipal.
Il accorde au moins la garantie de travailler vraiment pour le mieux-être
de tous les Québécois.
Le projet de loi 92 contient, de fait, environ 80 propositions de
changement dont la source, dans la très grande majorité des cas,
provient des représentations et des suggestions des hommes politiques
municipaux de l'Outaouais comme de Sept-Îles, de l'Estrie comme des
territoires nordiques. Par le projet de loi 92, nous amorçons une
politique de revitalisation des centre-ville en accordant plus de latitude
fiscale aux conseils municipaux. Par le projet de loi 92, nous facilitons les
regroupements et les annexions volontaires en simplifiant les mécanismes
trop lents. Par le projet de loi 92, nous réduisons le régime
accaparant des approbations gouvernementales en conformité avec la
nouvelle mission que j'ai donnée au ministère des Affaires
municipales aujourd'hui plutôt orientée vers le soutien technique
et l'information.
M. le Président, le chapelet de cette énumération
est impossible à réciter ici. Je voudrais plutôt
décrire la mentalité de ce projet de loi à l'aide de
quelques groupes de mesures situées par rapport aux grands mouvements de
la vie municipale québécoise. En définitive, nous voulons
introduire, encore une fois, une plus grande liberté de manoeuvre dans
tout domaine aux conseils municipaux qui en feront le choix. Il s'agissait,
comme je l'ai dit, dans certains détails inspirés par
l'expérience, d'encore mieux équilibrer cette autonomie
relativement à celle des autres municipalités comme à
celle du gouvernement du Québec. Ce projet de loi est issu d'une
mentalité qui veut faire disparaître les toiles d'araignée,
mais aussi d'une vision qui veut surtout garder les prises de décision
le plus près possible des citoyens et les plus autonomes possible.
Ce projet de loi vient techniquement nous prouver que nous avions
raison. Il n'est pas un pari sur une démocratie forcée ou
faiblarde. Il est une autre assurance que nous accordons à la
volonté des communautés municipales qui veulent s'organiser. Le
projet de loi 92 en matière de démocratie municipale ne vient que
poursuivre la tendance à la hausse de l'intérêt des
Québécois envers la conduite des affaires municipales. Je
voudrais rappeler à cette Assemblée que lors des dernières
élections municipales, en novembre, plus de 53% des
Québécois - 6% de plus qu'en 1981 - sont allés inscrire
leur vote à leur municipalité. Je voudrais aussi noter que les
élections par acclamation à la mairie sont en chute libre: 75% en
1979, 67% en 1981, 46, 8% en 1982. En parallèle, la présence
féminine parmi les élus municipaux est passée d'un maigre
1, 5% en 1979 à 7% en 1981 et, cette année, les femmes ont
présenté 13, 6% des mises en candidature aux élections
municipales. De mieux en mieux.
Jamais de tels pourcentages, M. le Président, n'étaient
apparus de façon aussi généralisée dans tout le
Québec. Le phénomène est plus qu'encourageant. Il est
stable et vivace. Cependant, il s'explique par toute une série
d'initiatives de ce gouvernement qui a répondu à la demande. Nous
avons amorcé la présence de partis politiques municipaux qui ont
été actifs cette année dans 19 villes du Québec.
Nous avons rendu obligatoires les discours du maire sur le budget tout en
portant le degré d'autonomie financière des municipalités
de 76% à 95%, selon les constats des élus municipaux qui ont
dressé le rapport du comité sur la fiscalité. Si nous
avons ainsi débloqué l'intérêt des
Québécois, c'est que nous avons continuellement renforcé
les pouvoirs autonomes des élus municipaux. (21 heures)
Le projet de loi 92 que nous présentons aujourd'hui est de la
même lignée et j'aimerais citer quelques cas précis qui
illustrent bien ce que nous voulons démontrer. Comme exemple
d'amélioration au processus, nous proposons de moderniser la Loi sur les
référendums commandés par les municipalités
lorsqu'elles ont des projets d'annexion ou de fusion. Beaucoup de citoyens et
d'élus nous en ont fait la demande et nous croyons qu'il est temps que
tous les électeurs d'une municipalité, et non pas seulement les
propriétaires et les locataires signataires d'un bail, puissent se
prononcer sur de tels projets d'annexion ou de fusion de leur ville ou de leur
village.
Un autre exemple qui vient à l'appui de notre volonté
d'augmenter la responsabilisation des personnes que choisissent les
Québécois au niveau municipal, ce sont les articles de ce projet
de loi qui ajouteront encore à la vitalité démocratique de
la Communauté urbaine de Québec. Déjà, cette
année, les élus des villes qui forment cette communauté
avaient commencé à moderniser, à adapter certains
dispositifs et, par ce projet de loi, nous voulons les aider à prolonger
jusqu'aux citoyens la présence de la communauté qui administre
beaucoup de services utilisés, sans souvent qu'on sache d'où ils
sont orientés, calculés et administrés.
Comme la Communauté urbaine de Montréal, les citoyens de
la grande agglomération qui s'est bâtie autour de la capitale
nationale et avec elle pourraient disposer de certains droits de regard plus
publics - si vous permettez - comme d'une période de questions, un
exercice auquel ils se sont déjà habitués à leur
propre hôtel de ville. En parallèle, il faut que le contrôle
des élus de la communauté soit plus permanent et que la
transparence des décisions rapproche les citoyens de paliers
intermunicipaux forcément techniques, puisqu'ils décident
d'égouts collecteurs ou d'arrêts d'autobus.
Ce projet de loi abolira notamment l'adoption automatique des budgets
à la CUQ, disposition que toutes les communautés urbaines
connaissaient auparavant. Il introduira aussi le discours sur le budget du
président et l'apparition de commissions permanentes où se
discutera l'orientation de chaque service public majeur, ce qui va susciter une
meilleure articulation démocratique. Les dépenses d'exploitation
de la seule CTCUQ - la Commission de transport de la Communauté urbaine
de Québec - se sont montées à environ 40 000 000 $ en
1981. Cette somme équivaut au double du budget d'une ville comme Granby
ou Saint-Hyacinthe. Je crois que ces chiffres sont suffisants pour que la
communauté forme des équipes d'élus
intéressés qui pourront siéger aussi souvent qu'il le
faudra devant les contribuables et recommander publiquement des orientations
choisies auprès de l'ensemble des élus du conseil.
Les citoyens verront aussi très vite la même
nécessité en matière d'aménagement et d'utilisation
du sol. C'est pourquoi les dispositions de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme s'appliqueront désormais aux ressources territoriales de la
CUQ, surtout lors de la révision de leur schéma
d'aménagement. De toute façon, l'importance des budgets de la
communauté et l'effort financier puissant qu'y mettent les
municipalités et leurs citoyens depuis ces dernières
années exigent aujourd'hui que le contribuable puisse décrire
lui-même ce qu'il considère l'adéquation la plus juste
entre un service dont il a besoin et l'argent qu'il est prêt à y
investir pour augmenter sa qualité de vie.
Cependant, M. le Président, la collaboration et la concertation
qui se sont bâties entre le monde municipal, enfin autonome
financièrement - ce qu'il réclamait
d'ailleurs depuis 1945 - et le gouvernement du Québec nous ont
permis de déceler une foule d'archaïsmes administratifs. Depuis
deux ans, nous avons beaucoup dépoussiéré et
simplifié les relations administratives entre le gouvernement et les
municipalités. Ce projet de loi le continuera de façon
très ferme. Nous voulons abroger plusieurs règles lourdes et
"paperassières" qui occasionnent des pertes d'argent et de temps aussi
bien au gouvernement qu'à ceux qui avaient à s'y soumettre.
Permettez-moi, M. le Président, de faire la description de
quelques-unes de ces obligations que j'appellerais du temps de la prohibition.
Par exemple, en vertu de la Loi sur les cités et villes, les
municipalités doivent actuellement transmettre au ministre des Affaires
municipales un exemplaire de chacun de leurs règlements et le ministre
peut, dans les trois mois, les désavouer. Ce droit de désaveu
gouvernemental n'a pas été exercé depuis plusieurs
décennies et ce n'est pas moi qui ai mis tant d'énergie à
accroître l'autonomie des élus municipaux, qui vais raviver cette
procédure désuète. Je crois que le temps a prouvé
l'inutilité de telles obligations pour les municipalités, ainsi
que pour les communautés urbaines et régionales.
Le présent projet de loi prévoit donc d'éliminer
l'obligation générale faite à divers organismes municipaux
de transmettre leurs règlements au ministère. Ceci est un autre
indicateur de notre intention de préserver l'autonomie locale.
Toujours dans le même sens, nous proposons d'éliminer la
nécessité de faire approuver par la Commission municipale du
Québec les règlements de fermeture de rues dans les cités
et villes. C'est une démarche qui ne nous paraît plus essentielle.
D'ailleurs, le fait qu'elle ne s'applique pas aux municipalités
régies par le Code municipal est là pour le prouver. Nous voulons
par ce projet de loi une déréglementation à ce chapitre.
Ce seront autant d'économies. Ce qui est encore plus déterminant
dans notre volonté d'abolir cette procédure, c'est le fait
surtout qu'elle va à l'encontre du principe introduit par la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, voulant que les questions
d'aménagement, comme l'établissement du réseau routier
municipal, soient la responsabilité première des élus
locaux et des citoyens et citoyennes.
À côté de ce type de démarches, nous avons
été sensibles aux demandes de plusieurs maires et de nombreux
conseillers municipaux qui ont demandé des pouvoirs administratifs mieux
cernés et plus détaillés, comme en matière de
réglementation des détecteurs de fumée, des appareils qui
aujourd'hui ont déjà prouvé leur efficacité dans la
réduction des pertes de vie dues aux incendies. Ce projet de loi
accordera à cet égard plus de pouvoirs.
Un autre domaine où semblable uniformisation est carrément
recommandable, c'est celui du pouvoir de réglementer ou de prohiber les
jeux de boules, les jeux de billard, les jeux électroniques sur le
territoire municipal. Le gouvernement accorde ce pouvoir présentement
aux villes qui le demandent par des lois privées. Compte tenu de la
généralisation du besoin de réglementation dont nous ont
fait part plusieurs maires et pour éviter aux municipalités, au
gouvernement et à l'Assemblée nationale des pertes de temps dans
ce domaine, nous voulons faire en sorte que ce projet de loi permette à
toutes les municipalités locales de réglementer ces domaines si
elles en perçoivent le besoin.
Ceux qui traiteraient de balivernes ces portraits de la vie quotidienne
municipale méconnaissent la lourde tâche d'un conseil municipal.
Des changements comme ceux que nous suggérons dénotent une
mentalité qui va beaucoup plus loin.
Les citoyens et les contribuables québécois, nous en avons
maintenant la preuve électorale, s'intéressent de beaucoup plus
près au cadre de vie municipale, au stock d'habitations, au mobilier
urbain, aux terrains vagues, au transport en commun. Ils commencent à
s'occuper de leur rue comme s'ils en étaient les propriétaires,
de leur quartier comme s'ils venaient de l'acheter. Le règne de
l'automobile et du stationnement éternel s'efface doucement. Les
élus municipaux se rendent compte, avec la même vitesse que
s'accroît l'intérêt des citoyens, que les centre-ville ont
souffert un peu partout au Québec quand il a fallu mettre, depuis les
années soixante, tant d'argent pour équiper les nouvelles
banlieues.
Ce projet de loi accordera dans les villes du Québec beaucoup
plus de latitude aux conseils municipaux qui veulent redonner des moyens
équitables de concurrence, de commodité et d'attraction à
leur centre-ville. Il s'agira encore une fois de mesures de promotion
plutôt que de correction. Il s'agit de solutions dynamiques,
encourageantes et intégrantes pour les habitants des villes parce que
nous croyons qu'il faut d'abord créer le plus possible de conditions
favorables à l'investissement volontaire et à la localisation
d'équipements publics de qualité au centre des villes du
Québec quelle qu'en soit la grandeur et la population. Même si un
gouvernement seul installe tous ces services au coeur des villes, il n'aura pas
réussi à revitaliser ces secteurs de façon
véritable.
Il faut avant tout rendre attrayante la décision de choisir,
comme travailleurs ou comme résidents, le centre-ville. Le projet de loi
no 103, que nous avons déposé la semaine dernière en
même temps que celui que nous défendons aujourd'hui, qui
favorise
la création de SIDAC, de sociétés d'initiatives et
de développement des artères commerciales, appellera au
même mouvement du milieu que nous jugeons prioritaire et
préalable. D'ailleurs, il répond aux demandes d'une trentaine de
villes et d'une cinquantaine d'associations de marchands établis dans
l'ensemble du territoire du Québec. Encore faut-il que les lois de ce
Parlement le permettent et l'encouragent, ce à quoi nous avons
décidé de nous occuper. (21 h 10)
Ce projet de loi lance les débuts d'un programme de
revitalisation du quartier. Nous sommes fiers d'appuyer l'ensemble du mouvement
de réveil des Québécois vis-à-vis du bâti, du
charme et des ressources oubliées de leur centre-ville.
Parmi d'autres mesures dans ce projet, vous trouverez la
possibilité qui serait désormais dévolue aux villes
d'accorder des subventions aux propriétaires qui feront rénover
ou transformer leurs bâtiments pour compenser la hausse de taxe due
à ces améliorations. Il pourra s'agir de réparations tout
comme de transformations de bâtiments industriels en édifices
d'habitation. Ce n'est là qu'une illustration des libertés et des
latitudes dont a besoin le monde municipal pour prendre lui-même son
devenir en main.
On dit souvent du législateur qu'il retarde de plusieurs
années sur les véritables tendances et les vraies
définitions d'une société. C'est parfois commode, comme
dans le cas de la courte histoire du veto du Québec, mais, à
l'intérieur du Québec, si vous voulez travailler avec 1600
municipalités, je considère que vous devez, au contraire, tenter
de toujours devancer les désirs et les ambitions.
En matière d'aménagement, nous avons guidé la
réflexion sans la bousculer. Les traditions n'existaient que très
peu entre les villes et les municipalités rurales. Aujourd'hui elles
travaillent ensemble dans plus de 87 municipalités régionales de
comté et, dans quelques semaines, nous octroierons leurs lettres
patentes à plusieurs autres. En janvier 1983, 93 ou 94
municipalités régionales de comté commenceront à
travailler sur la meilleure utilisation possible de leur espace régional
selon leurs objectifs et selon leurs goûts.
En matière de démocratie, nous avons amorcé les
premières marches. En matière de fiscalité, ce
gouvernement a, du moins, le mérite de ne pas avoir eu peur de
répondre en 1979 à des demandes que les municipalités
répétaient depuis 1945.
Ces diverses manières de prendre des décisions de
façon autonome autant qu'en fonction des voisins municipaux ont
amené d'autres besoins. Aujourd'hui, à la fois pour des objectifs
de rationalisation, pour contrer les temps économiques difficiles et
à cause de nouvelles habitudes acquises, le monde municipal entend qu'on
l'aide à négocier tout genre de rapprochements, d'ententes ou de
contrats intermunicipaux.
Le législateur doit répondre aux besoins du milieu, sinon
les devancer. Ce projet de loi, encore une fois, M. le Président,
s'inscrit dans la tendance des alliances intermunicipales.
Avec la venue des municipalités régionales de
comté, il est en train de s'établir, d'une frontière
municipale à une autre, une nouvelle tradition de partage et de
concertation. Nous entendons aider ces expériences volontaires qui
respectent et même enrichissent l'autonomie administrative des
entités municipales. Ces volontés de collaboration se butent
toutefois à des obstacles juridiques que nous voulons éliminer et
qui compliquent la vie à plusieurs corporations municipales qui
voudraient, en ce moment, conclure des ententes relatives à des services
de soutien d'ordre administratif.
Ce projet de loi viendra corriger cette lacune et permettra
dorénavant aux municipalités de conclure des ententes, non
seulement sur des travaux ou des biens, mais aussi sur des services
administratifs comme l'inspection et le contrôle.
Nous voulons profiter aussi de ce projet de loi pour colmater une
brèche oubliée par le législateur et qui obligeait
à un interminable procédé juridique les villes qui
décidaient de s'adjoindre de nouveaux associés à une
entente intermunicipale. À l'aide de ce projet de loi, les
municipalités qui signeront une entente intermunicipale pourront donc
prévoir qu'une ou plusieurs autres se groupent à elles par simple
résolution sans qu'il soit nécessaire, pour toutes les
municipalités, de recommencer les procédures d'un nouveau pacte
de collaboration. Nous entrevoyons de grandes économies administratives
potentielles grâce à ces amendements.
Un autre chapitre où nous voulons faciliter les alliances
municipales, c'est le domaine des regroupements volontaires. Il existe,
à l'heure actuelle, selon le témoignage de plusieurs maires que
j'ai rencontrés, un obstacle aux municipalités qui ambitionnent
d'augmenter leur degré d'autonomie financière et administrative
par le moyen d'une fusion. Il s'agit d'une barrière très
contraignante et, pourtant, les faits sont simples.
Les municipalités ne sont pas tenues d'avoir des rôles
d'évaluation où le degré de fidélité des
valeurs inscrites par rapport à la valeur réelle est identique.
Souvent, les valeurs inscrites au rôle d'une municipalité peuvent
représenter une proportion des valeurs réelles différente
de celle constatée dans le rôle de la municipalité voisine.
En conséquence, lorsque deux municipalités dotées de
rôles de niveaux différents se regroupent, une iniquité
prend naissance si
les rôles ne sont pas uniformisés. Un immeuble est
évalué à une plus forte proportion de sa valeur
réelle. Ce projet de loi, M. le Président, permettra
l'uniformisation automatique des rôles d'évaluation sur les
territoires affectés par une annexion du une fusion.
De plus, la règle prévoyait que la majorité des
annexions devait prendre effet le 1er janvier, soit le début de
l'année financière. Mon ministère était
débordé par les échéances. L'Éditeur
officiel, qui devait publier les avis publics, était inondé et
les requérants malchanceux devaient attendre, souvent pour des raisons
techniques, une autre année avant d'obtenir l'annexion
désirée. Désormais, les annexions pourront, par ce projet
de loi, entrer en vigueur dès la date de la publication officielle ou
à une autre date qui pourra être spécifiée. Nous
croyons ces mesures compatibles avec le désir des élus municipaux
et très respectueuses des exigences démocratiques.
Ces détails, M. le Président, ont leur importance et, je
tiens à le répéter, Ils règlent souvent des
situations qui semblaient auparavant complexes en soulevant le grain de sable
nuisible. Il s'agit de solutions techniques qui ne feront pas longtemps parler
d'elles. Elles seront appliquées par les municipalités au moment
où elles en auront besoin sans soulever de vague mais avec
efficacité. Nous avons voulu faire reculer la limite de l'impossible et
c'est parfois un tour de force.
En matière de fiscalité, en 1975, un ministre des Finances
du Québec, M. Garneau, avait répondu à l'Union des
municipalités du Québec: "Je vous dis clairement et très
franchement qu'un partage additionnel des recettes fiscales et des champs de
taxation entre le gouvernement et les municipalités n'est pas possible.
" L'histoire ne dit pas si cette impossibilité était technique ou
politique. De toute façon, aujourd'hui, nous avons refait ce partage en
toute équité et avec la collaboration du monde municipal qui a
obtenu la quasi-totalité de l'assiette foncière. Le verdict qu'a
fait le comité des élus des plus grandes villes du Québec
- Montréal, Québec, Laval et Sherbrooke - et des deux unions de
municipalités est catégorique quant aux progrès de
l'autonomie financière des municipalités, qui est passée
de 76% qu'elle était en 1979 à 95% en 1981, comme je le disais
tout à l'heure. Je cite le rapport lui-même du comité
Québec-municipalités: "II s'agit, à notre avis, de la
modification la plus significative qui a été apportée
à la structure des revenus municipaux par la réforme de la
fiscalité. "
Les trois premières années de la nouvelle fiscalité
sont tout à fait à l'avantage des contribuables et des
municipalités. Les chiffres parlent d'eux- mêmes, M. le
Président. Le gouvernement du Québec a vu augmenter, au cours de
ces trois ans, de 234% le montant de ses compensations tenant lieu de taxes sur
ses immeubles et ceux des réseaux de santé et d'éducation.
Cette contribution est passée de 63 000 000 $ en 1979 à 212 000
000 $ en 1981. Pendant ce temps, le total du fardeau fiscal des contribuables
financiers de tout le Québec n'a augmenté que de 11, 3%, ce qui
représente une baisse réelle si on le compare au taux d'inflation
des deux dernières années et plus particulièrement au taux
d'augmentation de 28, 3% des dépenses municipales. C'est un gain
différentiel de 17%. (21 h 20)
Le rapport du comité sur la fiscalité confirme ce bilan et
ne suggère que très peu d'avenues nouvelles qui fassent
l'unanimité du milieu municipal. Il est aussi passablement muet dans le
dossier de l'évaluation foncière qui est, au Québec, de la
responsabilité directe des municipalités. En ce domaine,
notamment, nous avons voulu, par ce projet de loi no 92, mieux cerner les
conditions d'accès des contribuables au Bureau de l'évaluation
foncière, qui s'occupe de juger des plaintes des citoyens concernant
leurs terrains ou leurs immeubles.
Nous proposons que les citoyens utilisent un formulaire qui serait
largement disponible pour exposer la situation contestée et qu'ils le
déposent au greffe de la division des petites créances de la Cour
provinciale. Les fonctionnaires de la cour pourraient ainsi aider le plaignant
à décrire correctement chacun des litiges et mieux discerner
entre le montant de l'évaluation et le taux de la taxe qui, lui, est
directement lié au niveau de dépenses de la municipalité.
Nous croyons que cette façon de faire accélérera le
mécanisme de révision et devrait abolir les tracasseries
administratives toujours trop fréquentes dans ce genre de relations pour
les citoyens.
Somme toute, les décisions que nous avons prises au lendemain de
la publication du rapport du comité des élus municipaux, et qui
sont d'ordre administratif plutôt que législatif en matière
de fiscalité, sont en totalité compatibles avec les voeux de
l'ensemble des 1600 municipalités du Québec qu'on nous a fait
connaître dans ce rapport. Par exemple, cinq villes jouissaient d'une
porte d'entrée spéciale au programme de péréquation
à 75% plutôt qu'à 66 2/3% de la moyenne de la richesse
foncière au Québec. Depuis la venue de la nouvelle
fiscalité, ces villes ont globalement augmenté de quelque 7 000
000 $ à 21 000 000 $ leur surplus de fonctionnement. Elles avaient,
entre-temps, toutes conservé un taux d'augmentation de leurs
dépenses supérieur à celui de leurs revenus de taxes.
Nous avons donc décidé de maintenir un
seuil d'entrée unique et universel de 66 2/3%. Dans
l'administration de régimes par lesquels s'effectue une redistribution
de la richesse, il faut privilégier les critères les plus
communs, sinon uniques, et bannir les exceptions. Le monde municipal nous a
demandé une telle attitude dans un domaine similaire en matière
d'évaluation et nous sommes bien d'accord.
Un autre programme temporaire, celui du transfert minimal, a lui aussi
été l'objet de nos décisions et nous l'avons
prolongé de deux autres années, ce qui coûtera au
gouvernement près de 14 000 000 $ qu'il versera à quelque 500
municipalités au Québec.
J'ai voulu décrire, par ces exemples qui ont peut-être eu
des allures arides et mécaniques la mentalité et surtout les
volontés qui nous animent chaque fois que nous présentons un
projet de loi à l'étude de cette Assemblée. Je crois que
les constats sur la santé municipale sont très heureux. Les
finances vont bien dans le monde municipal. La démocratie a
progressé dans le monde municipal. Les nouvelles expériences ne
font plus craindre les élus municipaux; au contraire, ils tiennent
à toute la marge de manoeuvre qu'ils ont gagnée et nous entendons
toujours la renforcer comme nous le prouvons en présentant ce projet de
loi.
Ce type de projet de loi augmente de fait leur autonomie; il leur donne
d'autres outils pour faire les choix les plus judicieux, les plus
expéditifs et les moins onéreux. Ce projet de loi n'implique non
plus aucune ingérence supplémentaire de la part du gouvernement
ni auprès des contribuables municipaux ni auprès des
administrateurs municipaux. Nous n'aurions pas envisagé ce projet de loi
de la même manière et il y manquerait de grands morceaux si nous
n'avions pas confiance dans l'imagination, la force et les ressources du monde
municipal. La participation et l'intérêt plus grand des
Québécois à leur municipalité le prouvent
aisément. Ce gouvernement a eu raison de laisser les 1600 villes,
villages, paroisses et cantons du Québec, les uns plus verts, les autres
plus industriels, les uns plus au nord, les autres plus à l'est, grandir
de façon autonome, chacun à sa vitesse de croisière. Ce
projet de loi est dans le bon sillage. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laprairie. Je m'excuse, M. le député, mais dans l'assistance
on n'a à donner ou non à aucun moment son assentiment. C'est
réservé aux membres de l'Assemblée nationale.
Des voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laprairie.
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Dans un geste
maintenant traditionnel, le ministre des Affaires municipales a
déposé encore une fois cette année à la date ultime
prévue à l'échéancier des travaux de la Chambre,
soit le 30 novembre, un projet de loi omnibus composé de 297 articles,
le projet de loi no 92 qui vient modifier quelque 25 lois municipales. Le
ministre ne cesse quand même de répéter souvent que sa
démarche et celle de son gouvernement est faite afin d'amender et
surtout d'améliorer et d'équilibrer le bloc des lois qui
régissent et harmonisent l'ensemble du monde municipal. C'est en cette
fin de session, je dois le souligner encore une fois, en cette période
de bousculade législative, de cohue rituelle accentuée cette
année, par le problème des négociations du secteur public,
de possibilités de décrets très bientôt à
l'Assemblée. Alors que la session n'a repris que le 9 novembre dernier,
que le menu législatif faisait preuve d'une pauvreté qui
ressemble étrangement à celle des finances du gouvernement, le
ministre vient nous présenter sa loi omnibus à la toute
dernière minute.
Pourtant, M. le Président, il aurait certes été
dans l'intérêt des contribuables de toutes les
municipalités et du monde municipal en général que le
ministre dépose son projet de loi beaucoup plus tôt afin que nous
puissions l'étudier en toute quiétude pour le perfectionner et ne
pas être pris dans une bousculade de fin de session. Le ministre et ses
collègues font souvent état de la consultation, de la
concertation et des bonnes relations qu'ils entretiennent avec le monde
municipal. Mais est-ce que le ministre n'a pas pensé que les deux
principaux intervenants dans le milieu municipal, à savoir l'Union des
municipalités du Québec de même que l'Union des
municipalités régionales de comté et des
municipalités locales, auraient certes apprécié venir se
faire entendre sur ce projet de loi? Ils auraient eu certes des choses à
nous dire afin justement de bonifier le projet de loi. Est-ce que le ministre
n'aurait pas eu aussi un peu de son temps précieux à consacrer
à ces organismes afin de les écouter?
Je comprends que le ministre a souvent mentionné que le monde
municipal était au courant. Dans son discours, il nous a
mentionné qu'il avait eu des contacts avec certaines
municipalités, l'Union des municipalités entre autres, l'Union
des municipalités régionales de comté. Le discours n'est
quand même pas le même suivant les interventions que j'ai eues et
que mes collègues ont eues à la suite du dépôt de ce
projet de loi, le 30 novembre. Apprenant que ce projet de loi était
maintenant en deuxième lecture cette
semaine en commission parlementaire pour être adopté avant
la fin de la session, le monde municipal est bouleversé quelque peu et
fortement étonné de la façon de procéder du
ministre.
Le 10 novembre dernier, le premier ministre répondait au
député de Portneuf et parlait de la concertation, et cela voulait
dire quoi? Je cite les paroles du premier ministre: "Cela veut dire qu'on se
parle, cela veut dire qu'à l'occasion on discute, mais cela ne veut pas
dire qu'on est toujours d'accord. La concertation, pour qu'il s'agisse de
concertation entre adultes, exige, je pense, d'abord et avant tout, qu'on soit
franc, avec la courtoisie normale des relations entre les gens, mais cela ne
veut pas dire qu'on doive nécessairement être d'accord, surtout
quand forcément il y a des intérêts en jeu. "
C'était le 10 novembre 1982. C'est cela que désirent les
représentants municipaux, une saine discussion avec leurs
interlocuteurs, c'est-à-dire le ministère et le ministre des
Affaires municipales. C'est ce qu'on semble refuser actuellement. On le refuse
d'une façon assez cavalière. J'ai demandé cette semaine au
leader du gouvernement que les intervenants principaux, à savoir l'Union
des municipalités, l'Union des conseils de comté de même
que possiblement la Communauté urbaine de Québec, qui est
touchée d'une façon importante par ce projet de loi, puissent se
faire entendre. La réponse est arrivée d'une façon claire,
absolue, sans détour: Non, merci.
Est-ce bien le genre de consultations que le ministre doit entretenir
avec le monde municipal? Par le projet de loi no 92, il y a en fait 25 lois qui
sont touchées. Je pense que les principales qui sont touchées
sont le Code municipal, la Loi sur les cités et villes, la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, de même que la Loi sur la
fiscalité municipale et la Loi sur la Communauté urbaine de
Québec. (21 h 30)
Je voudrais m'attarder ici dans mon discours sur la question de
l'autonomie municipale. Le ministre nous en a glissé un mot, mais je
pense que le discours des deux côtés de la Chambre n'est pas le
même, et voici pourquoi. Quand le ministre parle d'autonomie municipale,
voyons un peu ce qu'on entend par autonomie municipale dans la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. Il y a certaines dispositions dans le
projet de loi 92 pour amender cette loi. La loi créant les
municipalités régionales de comté, la loi 125, connue dans
le milieu municipal sous le nom de Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
amène-t-elle bien l'autonomie aux municipalités? Je dirais que
non, M. le Président. Cette loi fait plutôt preuve d'un dirigisme
totalitaire et unilatéral inacceptable pour les municipalités. Il
n'y a pas de véritable décentralisation dans cette loi. Il n'y a
pas de gain, d'économie pour les municipalités. Je m'explique. Si
je prends la loi 125, qui prévoit la création d'un schéma
d'aménagement, qui prévoit également la mise en place d'un
règlement de contrôle intérimaire, qui prévoit des
modifications possibles au schéma d'aménagement, des
modifications possibles aux règlement de contrôle
intérimaire, à tout moment, dans chacun de ces processus, toutes
les fois qu'on met en branle ces processus, le gouvernement a toujours le
dernier mot. Le ministre peut toujours modifier, par décret, la
décision qui a été prise par la municipalité
régionale de comté. Je me réfère, par exemple,
à l'article 27 de la loi: "Si le ministre est d'avis que le
schéma d'aménagement ne respecte pas les orientations ou les
projets du gouvernement, de ses ministères et mandataires ainsi que les
organismes publics, il peut demander au conseil de la municipalité
régionale de comté de le modifier. " À l'article 28, il
est quand même prévu que le ministre peut également
modifier, proprio motu, en suivant les procédures prévues par la
loi, de son propre chef, ce schéma d'aménagement, et la
même chose pour le règlement de contrôle intérimaire
et toute modification qu'on veut y apporter.
Est-ce vraiment là l'autonomie municipale? Je maintiens que non.
Au niveau de l'autonomie municipale, dans la loi même de
l'aménagement du territoire, outre les actions du gouvernement qui sont
contraignantes pour les municipalités, je dois rappeler ici, au niveau
de la municipalité régionale de comté elle-même par
rapport aux municipalités locales, que les municipalités locales,
sont toujours contraintes par la municipalité régionale, en ce
sens qu'à plusieurs occasions, les approbations sont requises de la
municipalité régionale de comté afin d'établir
certains gestes courants ou usuels, jusqu'à maintenant, pour les
municipalités locales. Je cite, par exemple, la question du plan
d'urbanisme. Je cite, par exemple, la question du règlement de zonage,
du règlement de construction, du règlement de lotissement. Ce
sont tous des règlements qui doivent obtenir l'approbation de la
municipalité régionale de comté, qui doivent recevoir les
approbations de la municipalité régionale de comté. En ce
sens, je dis que pour les autorités municipales, pour les instances
municipales locales, c'est une perte d'autonomie importante qui est
créée par la loi 125. Cette perte d'autonomie ne se retrouve pas
nécessairement uniquement au niveau de la loi 125.
Le ministre a parlé tantôt du rapport du comité
conjoint Québec-municipalités, déposé au mois de
novembre, sur la fiscalité municipale. Un constat au dépôt
de ce
rapport a quand même été établi et a reconnu
que si les municipalités du Québec ont atteint une certaine
autonomie financière, elles sont bien loin d'avoir atteint l'autonomie
administrative en contrepartie de cette autonomie financière. Cette
même autonomie municipale fait défaut non seulement au niveau de
la fiscalité, mais elle fait également défaut au niveau de
beaucoup d'autres lois où les municipalités sont soumises
à plusieurs contrôles. Elles doivent faire parvenir des
résolutions. Elles doivent recevoir les approbations des
différents services gouvernementaux avant d'agir.
Regardons un peu, M. le Président, la question de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. Selon le parrain du projet de loi 125
à l'époque, aujourd'hui ministre des Affaires municipales, ce
projet de loi avait pour but d'établir un règlement
d'aménagement du territoire. On faisait une obligation de créer
des municipalités régionales de comté afin
d'établir un règlement d'aménagement. Ce doit être
la vocation unifonctionnelle de la municipalité régionale de
comté, l'élaboration du schéma d'aménagement.
L'Opposition a dénoncé à l'époque la
création de cette superstructure. Nous reconnaissions comme inutile une
telle structure et l'ex-député de D'Arcy McGee, M. Goldbloom,
ancien ministre des Affaires municipales, proposait plutôt un conseil
intermunicipal d'aménagement qui aurait pu être responsable du
schéma d'aménagement, sans avoir besoin de transférer les
limites et les structures administratives des municipalités rurales et
des municipalités de comté, mais ce geste a été
refusé par le gouvernement de l'époque. On a plutôt
continué à vouloir implanter les municipalités
régionales de comté, et ce fut fait. Pourtant, la création
d'une commission intermunicipale d'aménagement aurait fort bien pu se
faire suivant les lois municipales; le Code municipal ou la Loi sur les
cités et villes pouvaient permettre la création de certains
comités intermunicipaux. Le gouvernement tenait à implanter sa
nouvelle structure, une structure plutôt politique. Pourquoi? Pour faire
valoir des intentions ou pour amener certaines intentions que son discours
cachait certainement à l'époque. C'étaient les bases d'une
société nouvelle, je pense, que le gouvernement pouvait vouloir
établir.
L'aménagement du territoire revêtait donc une importance
très grande, compte tenu que divers projets de réforme du
gouvernement, qu'il s'agisse - aujourd'hui, on s'en rend compte - de la
restructuration scolaire, de la réforme électorale et même,
dans certains cas, de l'établissement des corps policiers dans les
municipalités qui s'avèrent conçus en relation très
étroite avec les municipalités régionales de
comté.
De l'avis du ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional, lors d'une
entrevue accordée au journal Le Devoir le 7 août dernier, et je
cite: "Bien peu de gens, y compris des ministres, ont soupçonné
les implications profondes de la loi 125 sur l'aménagement et
l'urbanisme. " Quoique les intentions gouvernementales ne soient pas encore
dévoilées maintenant, il est facile de déceler, chez les
intervenants péquistes, que ces intentions outrepassent les questions
d'aménagement, car, au hasard d'interventions et de déclarations
ministérielles, on s'aperçoit que seraient possiblement
attribuées aux MRC des responsabilités aussi diversifiées
que la voirie, le loisir, l'éducation, les services sociaux et bien
d'autres encore.
Pour le ministre des Affaires municipales, même si la juridiction
se limite au schéma d'aménagement, et je cite le ministre: II
n'est aucunement exclu dans les vues du gouvernement d'étendre les
pouvoirs de ces municipalités régionales au cours des prochaines
années. Ainsi, les MRC pourraient bien, dans un avenir rapproché,
regrouper toutes les formes de gouvernement local, y compris les commissions
scolaires. Cela a paru dans la Presse du 20 février 1982.
Il me paraît que, selon les vues du ministre, l'accroissement des
juridictions des MRC pourrait être tel qu'on assisterait, tout compte
fait, à l'application du fameux fascicule no 5 qui, selon les dires du
premier ministre, n'était qu'un brouillon de travail, un document sans
valeur, absolument pas conforme à aucune évolution qu'on peut
prévoir. Aujourd'hui même, M. le Président, on peut
remarquer par ce projet que les pouvoirs des municipalités sont
dilués encore un peu au profit de la MRC, de la municipalité
régionale de comté, même si les représentants du
gouvernement ont tenté de rassurer récemment le monde municipal
en indiquant qu'aucune mesure de décentralisation ne serait prise avant
la tenue d'une conférence sur le sujet à l'automne 1981.
Certaines modifications apportées à la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme par le projet de loi 92 rendent plus
précises les dispositions de la loi 125, amènent de plus grandes
contraintes pour les municipalités locales. Donc, la situation
étant plus précise, j'ai parlé tantôt de la question
des règlements de zonage, des règlements de la construction, des
règlements de lotissement, de la question des règlements
d'emprunt, sur laquelle on doit maintenant avoir l'avis de la
municipalité régionale de comté dans certains cas, et des
permis d'occupation.
Je voudrais donner un exemple d'intervention des municipalités
régionales de comté dans des pouvoirs municipaux. Je veux
maintenant en venir à l'article 80 du projet
de loi no 92, qui modifie l'article 65 par l'addition d'un alinéa
à la fin: "Peur les fins de la délivrance d'un permis ou
certificat visé au paragraphe 3° ou 4° du premier alinéa,
le conseil de la municipalité régionale de comté peut
désigner, pour le territoire d'une municipalité, un fonctionnaire
de celle-ci. " Donc, la MRC, la municipalité régionale de
comté vient désigner un fonctionnaire de la municipalité
pour l'émission de permis. "Pour que la désignation soit valide,
le conseil de la municipalité régionale de comté doit
obtenir le consentement du conseil de la municipalité. " On revient
quand même, d'une certaine façon, à la municipalité
locale. (21 h 40)
Ce qu'il est important de noter, c'est que la municipalité
régionale désigne le fonctionnaire d'une municipalité pour
l'émission d'un permis fait par ledit fonctionnaire. Mais quel sera le
statut de ce fonctionnaire? Sera-t-il rattaché à la MRC ou
sera-t-il rattaché à la municipalité? Qui paiera son
salaire? Qui aura la responsabilité des actes de ce fonctionnaire s'il
arrive certains problèmes au niveau de l'émission de certains
permis, par exemple? La poursuite sera-t-elle contre la MRC ou contre la
municipalité en cas de conflit? Qu'arrivera-t-il avec les
problèmes syndicaux, s'il en est, avec ce fonctionnaire qui est
engagé d'une part par les municipalités régionales, mais
qui demeure un fonctionnaire de la municipalité? C'est un
problème d'interrelation entre les deux et d'ingérence, je crois,
au niveau de la municipalité régionale de comté envers les
municipalités.
À l'heure actuelle, la loi 125, la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme, représente un fouillis pour le monde municipal. C'est
une situation catastrophique dans le milieu. Je vois l'étonnement du
ministre à ce sujet. J'inviterais le ministre à faire le tour des
municipalités. C'est rendu aujourd'hui qu'au niveau du monde municipal,
on dit que la loi 125, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, est
aussi compliquée que les lois fiscales. C'est un beau rapport qu'on fait
à une telle loi.
Que le ministre consulte les administrations municipales, que le
ministre se donne la peine de consulter et d'écouter les urbanistes des
municipalités, les avocats qui travaillent avec ces lois, les
arpenteurs-géomètres, les notaires qui ont travaillé avec
les dispositions de cette loi également, et tous ceux qui sont
influencés par les dispositions de cette loi, les développeurs,
les constructeurs et même les citoyens ordinaires doivent se rendre
compte facilement d'une confusion actuellement qui est créée dans
le milieu par les dispositions de la loi no 125 et même par les nouveaux
amendements qui sont apportés par la loi no 92 à la loi no
125.
Tout ce brouhaha est créé de quelle façon? Il est
créé par le fait qu'actuellement, en vertu des articles 3 et 4 de
la loi no 125, le conseil des municipalités régionales de
comté doit voter une résolution afin d'entreprendre la
préparation d'un schéma d'aménagement. À l'article
3, cette fameuse résolution devait être adoptée dans les
trois ans de l'entrée en vigueur de la loi. Les trois ans de
l'entrée en vigueur de la loi arrivent justement le 12 décembre
prochain, c'est-à-dire cette fin de semaine.
Au niveau de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il reste
quand même, outre cette résolution, avec l'adoption de cette
résolution pour la création du schéma d'aménagement
et l'élaboration du schéma d'aménagement, que la
municipalité régionale de comté a l'obligation d'adopter
un règlement de contrôle intérimaire. C'est justement
là que nous arrivons au noeud du problème. Regardons, au niveau
de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, les articles 61 et 62.
À compter de l'adoption de la résolution prévue à
l'article 4 de la loi, c'est-à-dire la résolution pour la mise en
place du schéma d'aménagement, il se produit en fait une
espèce de gel au niveau du territoire, c'est-à-dire et je cite la
loi "à compter de l'adoption d'une résolution prévue
à l'article 4 jusqu'à l'entrée en vigueur du
règlement de contrôle intérimaire, est interdite dans le
territoire de cette municipalité, sauf pour des fins agricoles, sur des
terres en culture, toute nouvelle utilisation du sol ou nouvelle construction -
à certaines exceptions près - et toute nouvelle opération
cadastrale, ainsi que le morcellement d'un lot fait par aliénation.
"
L'article 81 dit que cette interdiction peut être levée
dans certains cas précis. Il reste quand même que nous avons, avec
l'article 81, un gel des permis. Je comprends qu'au niveau de la loi no 92, le
ministre ait apporté certaines dispositions correctives pour tenter de
faire en sorte que le gel qui se trouvait à affecter les
municipalités dans leur territoire, au niveau principalement de la
construction et de l'utilisation du sol, va être d'une certaine
façon réprimé, mais non pas totalement.
Ce qu'on doit constater, c'est que le gel en question peut être
quand même, d'une période minimale de deux mois et demi à
quatre mois, à cause de délais impartis par différents
autres articles de la loi. Ce gel des permis s'avère néfaste, non
seulement pour la municipalité, mais il s'avère également
néfaste pour les contribuables, pour les constructeurs, pour les
notaires et arpenteurs-géomètres à cause de
l'impossibilité de subdiviser des terrains, par exemple, à cause
de l'impossibilité d'obtenir des permis de construction pour continuer
les programmes déjà en place.
Même si ces modifications au niveau de la loi 92 viennent lever le
gel d'une certaine
façon, elles ont créé une certaine situation pour
le moins gênante pour les municipalités. Je m'explique. Le monde
municipal devait composer avec l'adoption d'une résolution pour la mise
en oeuvre du schéma d'aménagement et ce, pour le 12
décembre. Il était également soumis à
l'entrée en vigueur ou la préparation du schéma
d'aménagement en adopotant les résolutions effectives à
cette fin. Tout ce processus a été mis en branle par les
municipalités régionales de comté et les
municipalités avec la loi telle qu'elle était en vigueur
jusqu'à tout récemment. Le monde municipal a été
informé de ces changements aux articles 61 et suivants et à
certains articles de la loi sur l'aménagement et le territoire à
la toute dernière minute, après que le travail eut
déjà été effectué pour la mise en place du
schéma d'aménagement, de la résolution à cette
fin-là, et la mise en place du règlement de contrôle
intérimaire.
Les modifications de la loi amènent un changement important
à certains niveaux qui devront être corrigés dans ce projet
de règlement intérimaire qui était déjà
préparé, ce qui incitera les municipalités
régionales de comté à devoir réexaminer à
nouveau toute la situation. Donc, à ce moment-ci, cela constitue non
seulement une perte de temps, mais une perte d'argent pour les
municipalités et une situation confuse est créée dans le
domaine municipal.
Outre cette confusion actuellement dans le domaine des
municipalités en voie d'élaboration de leur schéma
d'aménagement et du projet de règlement de contrôle
intérimaire, je dois souligner ici qu'il reste encore un certain nombre
de municipalités régionales de comté qui n'ont pas encore
été constituées. Le ministre faisait allusion tantôt
au fait que nous avons présentement 87 municipalités
régionales de comté au Québec et d'ici janvier 1983 il y
en aura 93 ou 94 qui auront été créées.
Qu'adviendra-t-il des municipalités nouvellement
créées? À quel délai seront-elles soumises puisque
ces nouvelles municipalités auront déjà
dépassé le délai accordé pour la résolution
mettant en marche le schéma d'aménagement? La question du
règlement de contrôle intérimaire deviendra donc de forte
acuité pour ces municipalités. Ces nouvelles municipalités
régionales de comté et toutes les municipalités locales y
incluses seront soumises à un gel partiel important au niveau du
développement de leur territoire. Cela affectera l'économie des
municipalités en question et créera des situations
délicates pour les individus, les constructeurs et créera
certaines difficultés, encore une fois, aux
arpenteurs-géomètres, aux notaires, etc., à l'ensemble du
milieu.
À ce moment-ci, je pense, M. le Président, qu'il y aurait
lieu de voir à une solution pratique pour un tel problème. Quelle
serait la solution pratique qui pourrait être envisagée pour
régler un tel problème? Je soumettrai respectueusement que lors
de l'étude, en commission parlementaire, il pourrait y avoir lieu, pour
le ministre, d'être d'accord pour adopter un certain moratoire pour
l'établissement du schéma d'aménagement et pour
l'implantation du règlement de contrôle intérimaire.
C'est-à-dire que le ministre pourrait accepter de geler les effets des
articles 3 et 4 de la loi pour une période d'un an, jusqu'à ce
que toutes les municipalités régionales de comté auront
été créées et seront dans une situation analogue.
Nous ne serions pas en présence de situations distinctes par rapport
à des municipalités régionales de comté
déjà en train d'élaborer leur schéma
d'aménagement et d'autres qui devront le faire incessamment dans une
courte période. Cette période de temps, pour les nouvelles
municipalités régionales, posera des contraintes absolues. Quel
délai ces nouvelles municipalités régionales auront-elles
pour se conformer aux exigences de la loi de déposer une
résolution pour la mise en place d'un schéma
d'aménagement? Aucune disposition de la loi n'est claire à cet
effet-là, aucune disposition ne le prévoit.
Je suggérerai respectueusement ici que les nouvelles
municipalités régionales de comté auraient besoin d'un
minimum d'une année avant qu'on puisse leur imposer l'obligation
d'entreprendre l'adoption d'un schéma d'aménagement par la
résolution prévue à l'article 4 et d'entreprendre
également les préparatifs d'adoption d'un règlement de
contrôle intérimaire puisque ces municipalités devront
quand même être créées, établir certains
contacts, fonctionner d'une certaine façon autonome afin de
préparer ces documents. Donc, un tel gel, un tel moratoire permettrait
non seulement de mettre toutes les municipalités et toutes les
régions du Québec au même niveau, mais, d'une autre
façon, cela irait également contre le gel qui pourrait affecter
ces nouvelles municipalités régionales, le gel de l'utilisation
du sol, comme je l'ai mentionné tantôt. Cela mettrait toutes les
municipalités sur le même pied d'égalité.
À moment-là, il y aurait, dans la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, la possibilité que toutes ces
municipalités régionales de comté préparent leur
règlement de contrôle intérimaire afin de s'assurer, au
moment où le règlement de contrôle intérimaire
pourrait être adopté et entrer véritablement en vigueur...
C'est à ce moment précis que la résolution
prévoyant la mise en place du schéma d'aménagement
pourrait effectivement être adoptée de sorte que la période
de confusion, la période de gel partiel, d'une certaine façon, le
gel très important au niveau de l'utilisation des sols,
au niveau de la subdivision territoriale, serait totalement
évitée, à l'avantage du monde municipal.
C'est vraiment une façon de démontrer cette
possibilité, cet intérêt à agir de cette
façon. Qu'on se rappelle que le programme fédéral d'aide
à la construction domiciliaire nouvelle, qui permet d'obtenir une
subvention maximale de 3000 $ pour une nouvelle maison, a été
prolongé jusqu'au mois d'avril prochain. Qu'on se rappelle
également le programme Corvée-habitation du Québec qui
peut être affecté par un gel des permis ou par un gel de
l'utilisation des sols actuel. Cela pourrait éviter les obstacles
à la mise en place d'un tel programme, le programme
Corvée-habitation du gouvernement du Québec. Cela satisferait
hautement, je pense, non seulement les contribuables, mais également les
constructeurs et le monde municipal en général.
Si le ministre ne retenait pas l'idée d'un tel moratoire,
j'espère tout au moins que, lors de la discussion en commission
parlementaire, on pourra retenir la nécessité d'amender la loi,
d'apporter un amendement utile, afin de prévoir que les nouvelles
municipalités régionales de comté qui seront
créées incessamment - le ministre a mentionné qu'il y en
avait sept ou huit à créer d'ici janvier - pourront
bénéficier d'un délai supplémentaire suffisant
avant de devoir mettre en oeuvre l'implantation du schéma
d'aménagement au sens de l'article 4 de la loi.
M. le Président, je voudrais aussi examiner certaines
dispositions de la loi no 92 qui affectent d'autres lois. Je m'en tiendrai
à quelques remarques. Je veux tout d'abord souligner que, par
l'intermédiaire de la loi no 92, le gouvernement vient modifier la Loi
sur la Communauté urbaine de Québec en l'adaptant, grosso modo,
à celle de la CUM. Une question se pose: Pourquoi le ministre n'a-t-il
pas procédé de la même façon qu'il l'a fait le
printemps dernier lorsqu'il a modifié la loi de la CUM par la loi no 46,
en convoquant une commission parlementaire pour entendre les personnes
intéressées? Le ministre devrait pourtant savoir, lui dont le
gouvernement et le parti parlent tant du respect de la
spécificité et des collectivités locales, que les citoyens
de la Communauté urbaine de Québec et ses dirigeants pourraient
avoir des intérêts et des revendications différentes
à formuler que celles faites par les représentants de la CUM. Il
m'apparaît important de noter que c'est une mesure de courtoisie à
tout le moins élémentaire vis-à-vis des
représentants de la Communauté urbaine de Québec que le
ministre aurait dû respecter, en les invitant à donner leur point
de vue sur de telles modifications à apporter à la loi de la
CUQ.
Également, dans son projet de loi, le ministre des Affaires
municipales a tenté d'adoucir la situation que vivent les
administrateurs municipaux. Je veux parler ici des modifications dans la Loi
sur les cités et villes et au Code municipal. Ainsi, les modifications
qu'il a apportées au Code municipal et à la Loi sur les
cités et villes accordent aux municipalités et aux corporations
locales des pouvoirs de réglementation que certaines pouvaient obtenir
antérieurement par le biais de lois privées, notamment, les
articles 28 et 129 du projet de loi qui permettent la réglementation des
jeux de boules et de billards. C'est une modification souhaitable et
souhaitée par les municipalités et une modification qui a l'heur
de plaire aux municipalités.
Le projet de loi vient également assouplir
légèrement le fardeau administratif des municipalités. Il
facilite, d'une certaine façon, les ententes intermunicipales en
permettant que toute municipalité ou corporation municipale puisse
adhérer à une entente déjà existante par la voie
d'une résolution sans devoir être obligée de reprendre tout
le processus. C'est donc un exemple de modification souhaitable pour le monde
municipal que le ministre a pu intégrer dans son projet de loi. Le monde
municipal lui en sait certainement gré.
Toutefois, aux articles 57 et 138 du projet de loi, on s'aperçoit
que la corporation locale ou la municipalité pourra imposer une taxe
générale ou une taxe spéciale sur des points particuliers.
Mais, cela va à l'encontre des principes du comité conjoint qui
favorise plutôt la tarification des services, suivant ce que j'ai pu
comprendre du rapport de la fiscalité municipale et suivant les
représentations qu'ont daigné nous faire certains
représentants du monde municipal, puisqu'il semble que leurs
représentations ne sont pas tellement entendues du côté
ministériel. Est-ce que, par une telle voie, par une telle modification,
le gouvernement essaie de refiler aux élus municipaux l'odieux d'une
taxe supplémentaire qu'il ne peut lui-même assumer?
En terminant, si on jette un coup d'oeil sur les modifications
apportées à la Loi sur la fiscalité municipale, il me
paraît évident que le ministre n'a pas vraiment tenu compte de
l'ensemble des recommandations que lui a faites le comité conjoint
Québec-municipalités sur la fiscalité, rapport du 5
novembre dernier. Qu'il me soit permis de lui rappeler qu'en mai dernier, lors
d'un débat sur une motion présentée par le
député de Mont-Royal, concernant la hausse importante du compte
de taxes que subissaient de nombreux contribuables à Montréal,
propriétaires de résidence unifamiliale, le ministre pensait - et
je cite les paroles du ministre - "qu'il faut de toute urgence apporter un
certain nombre de
solutions pour l'an prochain, au cas où les effets que nous avons
connus cette année se poursuivraient". C'est dans le journal des
Débats du 5 mai 1982, à la page 3315.
L'Opposition a soumis un certain nombre de solutions au ministre
à cette époque. Le comité conjoint a recommandé,
lui, de plafonner l'augmentation annuelle du compte de taxes de tous les
contribuables résidentiels. Le ministre prévoit-il appliquer une
proposition de ce genre pour alléger le fardeau fiscal des
contribuables? Pourtant, si la situation était urgente en mai dernier,
le projet de loi no 92, déposé à la fin de novembre,
aurait fort bien pu tenir compte de cette situation et corriger une situation
importante pour les nombreux contribuables du Québec puisque le
même problème se répercutera quand viendront les comptes de
taxes de l'année 1983 qui seront envoyés incessamment aux
contribuables.
En terminant, je voudrais aussi souligner un point particulier au niveau
de la loi. On se rend compte aussi que la Loi constituant la Commission de
transport de la Rive Sud de Montréal est modifiée par le projet
de loi. Encore une fois, je peux m'étonner d'une telle modification que
nous retrouvons à la suite du projet de réforme du transport
urbain; à ce moment-ci, le ministre des Transports prévoyait
donner plus d'autonomie aux municipalités, plus de pouvoirs, plus de
responsabilités au niveau du transport urbain. Dans le projet de loi, je
m'en tiens uniquement à la nomination du président-directeur
général. En modifiant l'article, ce sont deux commissaires qui
devront soumettre une liste commune de candidats pour la nomination du
président-directeur général. Cette nomination sera faite
par le gouvernement du Québec, par le ministre.
Il me paraît étrange, alors que nous parlons de
transférer des pouvoirs aux municipalités, de donner plus
d'autonomie aux municipalités au niveau du transport, une plus grande
responsabilité, qu'on arrive avec une modification à la loi dans
le but de nommer le P. -D. G. de la commission de transport par la voie du
gouvernement et sur recommandation de deux commissaires. Je ne peux que
souhaiter que les modifications apportées à différentes
lois de ce genre feront qu'à l'avenir nous aurons des lois qui auront un
peu plus de rigueur. Le gouvernement pourrait présenter des projets de
loi particuliers pour modifier certaines lois municipales. Par exemple,
j'aimerais souligner au ministre, s'il doit modifier la loi 125, la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, qu'il nous présente un projet de
loi pour ce faire, mais un projet de loi particulier, à cette fin. Qu'on
ait aussi des projets de loi particuliers pour modifier la Loi sur les
cités et villes et le Code municipal. Qu'on nous présente des
projets de loi précis, avec des modifications utiles, sur la CTRSM, sur
la ville de Laval, sur la CUQ, par exemple, comme nous l'avons fait pour la
CTCUM. (22 heures)
Comme le ministre l'a mentionné dans son discours tantôt,
afin de créer des SIDAC, il a cru bon proposer un projet de loi autonome
à cette fin, même si le projet de loi créant les SIDAC
vient modifier des dispositions du Code municipal et de la Loi sur les
cités et villes. Donc, cela demanderait quand même plus de
rigueur, mais ce serait plus apte à répondre, à mon point
de vue, aux besoins du monde municipal et aux intérêts des
citoyens du monde municipal.
En terminant, je veux mentionner au ministre que nous voulons lui
accorder comme Opposition toute notre collaboration pour l'étude de ce
projet de loi et je réitère à nouveau en terminant la
disponibilité du monde municipal telle qu'elle nous a été
transmise à l'Opposition, par exemple, par les principaux intervenants
au niveau municipal, et je me réfère toujours à l'Union
des municipalités de comté, à l'Union des
municipalités régionales et des municipalités locales du
Québec, à la Communauté urbaine de Québec, qui
apprécieraient énormément de pouvoir se faire entendre. La
commission parlementaire devant étudier ce projet de loi article par
article devant être convoquée seulement la semaine prochaine, je
réitère ma demande au ministre et au leader du gouvernement de
convoquer les intervenants municipaux non seulement à assister mais
à faire entendre leur voix à cette commission parlementaire afin
de pouvoir bonifier d'une façon plus grande le projet de loi no 92 du
ministre des Affaires municipales. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Groulx et adjoint parlementaire au ministre des Affaires municipales.
M. Élie Fallu
M. Fallu: M. le Président, 297 articles très
précisément forment le projet de loi no 92, un projet de loi qui,
comme on dit dans le jargon parlementaire, est un projet de loi omnibus,
c'est-à-dire dans lequel nous amendons toute une série de lois
municipales entre autres, très exactement, cette fois, 25 lois. Deux
petites remarques très courtes avant de tomber dans le vif du sujet.
D'abord, je voudrais remercier notre collègue de Laprairie de l'offre de
coopération qu'il nous fait en seconde lecture, à l'étude
article par article, en commission. J'espère en effet qu'un tel projet
de loi ne saura guère nous prendre trop de temps grâce à la
coopération de l'Opposition et que nous n'aurons pas cette année
l'obstacle que nous
avions connu à peu près à la même
époque l'an dernier. Entre nous, on se comprend bien parce que le monde
municipal attend le projet de loi no 92 pour le 1er janvier.
Deuxième remarque, M. le Président, elle est
peut-être moins gentille celle-là, mais j'ai constaté au
cours de l'allocution du député de Laprairie que nous aurons
peut-être au moment de la commission parlementaire quelques débats
qui déborderont un peu le cadre des articles précis que nous
aurons à étudier, car il faudra peut-être faire un peu de
formation permanente, de formation récurrente, revenir sur les
principes, les articulations de la loi no 125, rappeler notamment que le
ministre des Affaires municipales n'a pas besoin ce soir dans son projet de loi
no 92 d'un article spécifique pour exempter un certain nombre de
municipalités régionales de comté qui viennent
d'être constituées de l'écueil du 12 décembre pour
la résolution du contrôle intérimaire, puisque la loi no
125 prévoit précisément dans toute sa sagesse que le
ministre peut, de sa seule autorité, donc sans revenir par un projet de
loi à l'Assemblée nationale, déterminer de concert avec la
MRC si oui ou non elle doit entreprendre le 12 décembre son
schéma d'aménagement.
Ceci dit sans trop de méchanceté, M. le Président,
ce projet de loi, malgré sa complexité, malgré sa
diversité, a quand même une économie interne dont il faut
faire état et dont il faut donner des exemples. Une loi municipale
omnibus que nous présentons traditionnellement à la fin de
l'année, comme ministère dorénavant de service aux
municipalités, au monde municipal, doit nécessairement enlever du
surplus, du superflu, enlever des articles devenus désuets, adapter les
lois municipales à des solutions, à des problèmes
rencontrés en cours d'année dans l'application de lois
récentes ou dans l'application de lois plus anciennes. Chaque fois que
nous faisons, comme cela, une loi omnibus, que ce soit le printemps ou
l'automne, puisque, M. le Président, le pouvoir municipal émane
directement de l'Assemblée nationale, il faut donc préciser,
déterminer et écrire mot à mot dans la loi les pouvoirs
qui sont confiés à ceux à qui on les confie. Il est donc
nécessaire, quelquefois deux fois par année, de prévoir
des modifications au pouvoir municipal, au pouvoir local ou au pouvoir
régional.
Ces modifications, M. le Président, viennent à la suite de
demandes très précises du monde municipal. Le
député de Laprairie demandait encore - c'est la troisième
fois que je l'entendais en cette Chambre depuis une semaine - qu'il y ait une
parade en deuxième lecture de toutes les unions, de toutes les
municipalités et de toutes les communautés urbaines. À ce
compte-là, M. le Président, il faudrait aussi demander sans doute
aux titulaires de la charte de la ville de Montréal, de la charte de la
ville de Laval, de la Société d'habitation du Québec,
etc., de venir parader devant la commission parlementaire. M. le
Président, ce n'est pas ainsi que le monde municipal fonctionne. Le
monde municipal est un monde avec lequel le ministère des Affaires
municipales est en contact quotidien par des rencontres multiples, par des
visites dans les municipalités, par des coups de
téléphone, par une correspondance abondante et par des
réunions organiques. C'est à travers tous ces mécanismes
de contacts presque quotidiens que les municipalités ou leurs
représentants nous font connaître leurs demandes d'ajustements.
C'est un maire par une lettre, c'est une résolution d'un conseil, c'est
un rapport très officiel de l'Union des conseils de comté ou de
l'Union des municipalités régionales, c'est à l'occasion
d'un congrès, d'un colloque régional ou national que le monde
municipal fait connaître au ministre ses besoins et ses intentions.
M. le Président, s'il avait fallu répondre à toutes
les demandes des municipalités à cette date de l'année,
dans cette loi omnibus, nous n'aurions pas 297 articles, et cela, je peux vous
l'affirmer; nous aurions eu quelque 500 articles et même davantage. Les
demandes sont là. Compte tenu des priorités de la Chambre, compte
tenu du temps dont nous disposions, du temps dont les parlementaires disposent,
compte tenu des urgences aussi des municipalités, nous avons dû
faire un choix. Donc, que le député de Laprairie ne se scandalise
pas, non pas qu'on évite la parade, mais qu'on ne soutienne pas sa
demande.
M. le Président, ce projet de loi s'inscrit dans une
économie générale qui est de trois ordres. D'abord, il
s'agit de simplifier certaines procédures administratives dans les
municipalités ou au gouvernement, ce qui entraîne, notamment, dans
plusieurs cas, des économies - j'ai bien dit des économies -
appréciables. Dans un deuxième temps, ce projet de loi
élimine des obstacles juridiques à la poursuite des objectifs
soit gouvernementaux, soit municipaux. Et, enfin, le projet de loi
établit une certaine forme d'harmonisation des lois municipales.
Permettez-moi, pour chacun de ces thèmes, de vous citer des
exemples sans les débattre trop longuement. Économies et
simplification administrative; c'est ainsi que dorénavant les
municipalités seront exemptées de transmettre au ministre des
Affaires municipales chacun de leurs règlements. Vous imaginez-vous, M.
le Président, ce que c'est, au ministère? Il faut ouvrir le
courrier - cela prend du personnel -estampiller la date et l'heure
d'arrivée, il faut quelqu'un qui analyse, qui classe, il faut donc des
classeurs. Nous nous sommes
demandé combien de fois par année les gens venaient au
ministère chercher ou vérifier les règlements. Le
résultat c'est zéro, un zéro absolu. Il y a pour nous une
économie, économie de personnel, économie de temps,
économie de locaux et il y a, pour les municipalités,
économie de papier, économie de frais de poste, économie
de salaires pour tous ceux et celles qui ont à faire ce boulot. (22 h
10)
Quant au désaveu, le ministre des Affaires municipales l'a dit
tantôt, il n'a jamais, de même que ses prédécesseurs
depuis des décennies, exercé de désaveu et il n'a pas,
pour sa part, l'intention - et surtout ce gouvernement, un gouvernement de
décentralisation, de responsabilisation - il n'a jamais eu l'ombre d'un
soupçon de contrôle ou de désaveu de ces
règlements.
Deuxième exemple, phénomène étrange qui
apparaît quelquefois et qui enfin va être réglé ici.
Imaginez que dans la Loi sur les cités et villes il est prévu que
la ville doit faire approuver par la Commission municipale son règlement
de fermeture de rues. Ce qui est étrange, c'est qu'au Code municipal on
ne trouve pas la même obligation. Pourquoi diantre! les villes
seraient-elles tenues à une telle autorisation, alors que les
municipalités rurales - comme on les appelle quelquefois -les paroisses
ne sont pas tenues à de telles confrontations avec le ministre? Il
découle donc des économies en l'occurrence.
On pourrait également parler du Bureau de révision de
l'évaluation foncière. Sans doute, M. le Président,
avez-vous vu et avez-vous même conseillé à des concitoyens
et à des concitoyennes chez vous de faire appel au bureau. Mais comment
faire appel, où faire appel, dans quel délai, etc. ?
Déjà le compte de taxes donne quelques indications, mais sur quel
formulaire? Le bureau reçoit près de la moitié des
demandes qui ne devraient pas lui être adressées, puisqu'elles
portent sur le taux de taxation et non sur l'évaluation. Il s'agit donc
ici de rendre un service aux citoyens, de faire en sorte qu'il y ait un
formulaire simple sur lequel le citoyen ou la citoyenne puisse
reconnaître le droit dont il peut se prévaloir devant un tel
bureau.
Élimination d'obstacles juridiques. C'est ainsi que le projet de
loi va favoriser le regroupement municipal volontaire, faire en sorte que dans
les municipalités, municipalités de paroisse notamment, on puisse
fusionner avec les municipalités de ville, avec le village, avec la
ville, à une date qu'on déterminera et non plus seulement au 1er
janvier. On connaît l'obstacle, il est majeur, car, sur une centaine de
dossiers qui arrivent au ministère, il n'y en a que trois qui
aboutissent finalement. Pourquoi? Le délai du 1er janvier fait que,
avant les élections de novembre par rotation, on hésite à
entreprendre des démarches et, si les démarches sont entreprises,
on risque, après les élections de novembre, qu'elles soient
à nouveau bousculées avant le 1er janvier. Donc une simple
rectification administrative - car il semble que ce soit un obstacle majeur -
favorisera le regroupement municipal volontaire.
De la même façon les ententes intermunicipales, qui doivent
s'étendre à une autre municipalité, supposent actuellement
qu'on ouvre la première entente et qu'on recommence tout le processus
d'ententes intermunicipales. Le projet de loi permettra à une
municipalité qui veut s'ajouter à une entente intermunicipale
existante de le faire sans -complications.
De la même façon, on pourra créer des ententes
intermunicipales sur des services administratifs et non pas seulement sur la
gestion de biens, mettre en commun les services administratifs qu'on voudra
bien.
La troisième dimension de la loi, c'est d'harmoniser des
dispositions législatives de plusieurs lois municipales. Rapidement,
voici quelques exemples: Lors d'un référendum, ce n'est pas tout
le monde qui a droit de vote dans une municipalité. Ce ne sont pas tous
les citoyens et les citoyennes majeurs qualifiés comme électeurs
qui ont le droit de vote. Il y a très précisément un
certain nombre axé d'ailleurs sur un certain archaïsme: le
sens.
Dorénavant, comme pour l'élection, le conjoint du
propriétaire ou du locataire ou ses enfants de plus de 18 ans,
c'est-à-dire tous ceux qui sont légalement qualifiés sur
le plan électoral, auront droit de vote. Harmonisation également
avec la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal et la Loi sur
la Communauté urbaine de Québec pour faire en sorte qu'il y ait -
je pense que personne ne peut redire sur un supplément de
démocratie - une période de questions lors des assemblées
du conseil. Troisième exemple: la loi permettra aux municipalités
régionales de comté d'obtenir une prolongation de délai
pour la transmission des estimations de dépenses et de revenus, ainsi
que pour les prévisions et l'envoi des quotes-parts aux
municipalités locales de leur territoire. Vous savez, une
municipalité peut demander au ministre un délai pour le
dépôt de son budget.
Je me résume. Nous avons donc un projet de loi un peu lourd comme
contenu, 297 articles, mais qui est fait à la demande du monde
municipal. Nous voulons répondre à la demande en permettant la
simplification des procédures administratives, en éliminant des
obstacles juridiques et en harmonisant des lois municipales.
M. le Président, je souhaite que le débat, puisque je
pense qu'il ne peut y avoir grand débat, soit le plus court possible
pour que, dès la semaine prochaine, ensemble, à
la commission et sans doute à l'unanimité, nous puissions
rapidement passer à travers la loi. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Hull.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Il faut dire, en
commençant, que cela ne va pas dans le meilleur des mondes au sein des
municipalités du Québec. Ce n'est pas parce qu'à
l'approche des fêtes que le ministre des Affaires municipales
dépose son projet de loi omnibus en guise de cadeau de Noël aux
municipalités du Québec, que nous allons passer outre à
des problèmes qui sont tout à fait percutants au monde municipal.
297 articles, comme le soulignait le député de Groulx, un projet
de loi relativement lourd de par le nombre d'articles: 65 articles qui touchent
au Code municipal, 37 articles qui touchent à la loi 125, 37 articles
qui touchent à la Loi sur les cités et villes, 26 articles qui
touchent à la Communauté urbaine de Québec, quelque 32
articles qui touchent à la fiscalité municipale, un article qui
touche à la Communauté régionale de l'Outaouais entre
autres et d'autres articles de concordance qui apportent certaines corrections
demandées par le monde municipal depuis nombre d'années.
Quand le ministre des Affaires municipales et le député de
Groulx, son adjoint, nous disent que ces demandes sont faites par le monde
municipal, c'est vrai. Par contre, pourquoi est-ce que le ministre des Affaires
municipales n'a pas consulté le monde municipal, au moment du
dépôt de ce projet de loi, à une heure aussi tardive?
Pourquoi est-ce qu'aujourd'hui, l'Union des municipalités se retrouve
avec un projet de loi de 297 articles qui touche le monde municipal et qu'on
vient à peine de lui faire parvenir copie du projet de loi sur lequel,
en commission parlementaire, elle n'aura pas l'occasion d'être entendue?
Ce que nous demandons immédiatement, c'est que ce projet de loi soit
entendu vers la fin de la semaine prochaine en commission parlementaire afin de
permettre au monde municipal de venir se faire entendre sur certains des
articles.
M. le Président, tenant compte de la loi 92, on aurait
pensé que le ministre des Affaires municipales aurait tenu promesse dans
le sens qu'à la dernière session qui s'est terminée le 23
juin 1982 il nous avait dit qu'à la suite du projet de loi no 46 sur la
restructuration de la Communauté urbaine de Montréal, nous
aurions un projet de loi traitant de la Communauté régionale de
l'Outaouais, de ses structures.
À l'intérieur du projet de loi no 92 on retrouve un
article. Un bonbon de Noël. La Communauté régionale de
l'Outaouais, une région importante au Québec, une
communauté importante, qui, en 1975, demandait au ministre des Affaires
municipales du temps, le Dr Victor Goldbloom, qui avait accepté entre
autres la formation d'un comité dans le but d'étudier une
restructuration et surtout à la suite du regroupement de 32
municipalités en 8...
En 1977, la communauté, les municipalités à
l'intérieur de cette communauté produisaient des rapports. 1978,
dégroupement d'une partie du grand Buckingham pour recréer trois
nouvelles municipalités. L'ex-ministre des Affaires municipales, nouveau
ministre de l'Habitation mentionnait que la CRO, sa structure, son territoire,
c'était de la folie furieuse.
En 1980, le même ministre des Affaires municipales du temps, le
député de Crémazie, dans une lettre qu'il faisait parvenir
à la Communauté régionale de l'Outaouais, mentionnait
qu'à la suite des nombreuses demandes des municipalités et de la
communauté, il s'apprêtait à déposer un projet de
loi.
En 1982, le ministre des Affaires municipales demande à la
Communauté régionale de l'Outaouais de ressasser l'ensemble des
études qui avaient été faites afin de lui soumettre les
recommandations émanant des municipalités.
Il y a à peine un mois, alors que le projet de loi initial
créant la Communauté régionale de l'Outaouais, au mois de
décembre 1969, aux articles 17 et 47, le gouvernement se permettait de
nommer, de parachuter un président pour présider les
assemblées ou les destinées de la Communauté
régionale de l'Outaouais. Nous devions avoir un parachuté
téléguider de Québec, toute décision qui pouvait
satisfaire le ministre des Affaires municipales.
Au mois de novembre, il y a un mois, M. le Président, on
apprenait par les journaux, bien entendu, que le ministre des Affaires
municipales venait de reconfirmer dans son poste le président de la CRO,
M. Pierre Ménard, pour un mandat de cinq ans, alors qu'on s'attendait
à avoir un projet de loi tenant compte d'une restructuration, du voeu
exprimé par les maires et les conseillers des municipalités de
nommer eux-mêmes, parmi les élus, un président pour diriger
leurs destinées. Le ministre des Affaires municipales l'a nommé
pour un mandat de cinq ans, alors que, jamais, dans la loi créant la
communauté, un président n'a été nommé pour
plus de quatre ans. Des deux présidents, l'un est devenu
président de la Commission nationale d'aménagement, à la
suite du référendum de 1980, et M. Pierre Ménard, un bon
sympathisant péquiste, a pris sa place; son mandat se terminait au
mois
de novembre cette année. Alors qu'on s'attendait à une
restructuration, on a eu un renouvellement de mandat pour cinq ans.
M. le Président, c'est du mépris pour les citoyens d'une
région, de toute une région. C'est du mépris pour les
élus. C'est du mépris pour les organismes, telle la
Société d'aménagement de l'Outaouais qui revendique,
depuis de nombreuses années, d'être sous la direction d'un
ministère à caractère économique plutôt que
de relever du ministère des Affaires municipales qui ne connaît
absolument rien au domaine du commerce, de l'industrie et du tourisme. M. le
Président, je conçois mal que l'actuel ministre des Affaires
municipales en veuille à une région. Je comprends mal que ce
même ministre, député d'un comté qui est sur la
frise de l'Outaouais québécois, puisse en vouloir autant à
une population.
M. le Président, nous laissons aller nos organismes dans
l'Outaouais, alors que ce même gouvernement nous parle de relance
économique. Si on traite du seul article du projet de loi no 92, le
bonbon, le "candy" de Noël, l'article 46, on dit ceci: "Les
règlements sont exécutoires et restent en vigueur jusqu'à
ce qu'ils soient remplacés, abrogés ou cassés par une
autorité compétente. " M. le Président, la
Communauté régionale de l'Outaouais, depuis l'adoption de son
schéma d'aménagement en 1978, demande justement que l'on respecte
son autonomie, que l'on respecte les valeurs du milieu. On nous sert, cette
année, dans ce projet de loi, ce bonbon, un nanan de Noël.
Il est bien évident qu'à l'égard de ce projet de
loi, nous devrons offrir une certaine collaboration puisqu'il y a des articles
que les municipalités attendent depuis de nombreuses années.
C'est son projet de loi "autobus". Il met tous les ramassis là-dedans et
il livre cela aux municipalités à la veille des fêtes,
chaque année. C'est une coutume, dit-on. Il aurait beaucoup mieux valu
consulter. C'est bien beau se faire chanter, par le ministre des Affaires
municipales et par le premier ministre du Québec, qu'il doit y avoir
concertation au Québec, qu'il doit y avoir un dialogue, qu'il doit y
avoir de la consultation, qu'il faut respecter la démocratie, qu'il faut
respecter l'autonomie, mais ce ne sont que des paroles qui ne se traduisent
jamais par des gestes concrets. Si le ministre des Affaires municipales a
l'impression que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes dans les
affaires municipales, il fait totalement erreur. Les téléphones,
cela existe encore, même si les prix augmentent. On parle au monde
municipal, nous aussi.
J'irai même plus loin, je parlerai de l'indécence qu'a
commise le ministre des Affaires municipales, le 2 novembre, en nommant pour un
nouveau mandat de cinq ans, le président actuel de la CRO. Ici, je ne
conteste pas la personne comme telle, je conteste la façon, le geste qui
a été posé, un geste de mépris envers tous les
citoyens de l'Outaouais. Sommes-nous punis parce qu'on a cinq comtés
libéraux dans le coin? Le ministre nous en veut-il parce que la
population, en 1981, n'a pas accepté d'être endormie par les
belles promesses du parti ministériel? Veut-on se venger d'une
région en plein essor et qui veut prendre de l'expansion?
Comme on pourrait dire que le député de Hull est reparti
dans son trémolo, qu'il s'est mis à nous raconter des histoires,
que sa voix tremble, etc., je voudrais simplement, pour le
bénéfice du ministre des Affaires municipales qui ne lit
sûrement pas les journaux locaux, lui lire un éditorial de
Johannes Martin Godbout paru dans le Droit du 4 novembre 1982. (22 h 30)
Une voix: Écoutez cela, ça va vous
intéresser.
M. Rocheleau: Je sais que le parti ministériel a une
énorme confiance aux éditorialistes qu'il lit tous les matins
dans les journaux; cela semble le guider dans sa gestion actuelle du
ministère. Cela va très bien, en passant. "Pierre Ménard,
bouc émissaire. " Je vais vous citer textuellement l'écrit de Mme
Johannes Martin Godbout. Elle me surprend un peu, car elle est fort sympathique
à votre égard. "Le premier ministre René Lévesque
doit, au plus tôt, affecter Jacques Léonard à une banquette
arrière. " Il est déjà pas mal loin en arrière,
mais il pourrait reculer encore d'un siège.
Une voix: Bye! Bye!
M. Rocheleau: "Si cet individu agit dans les autres dossiers
comme il agit à l'endroit de l'Outaouais, il est plus que temps qu'on
mette fin à ses caprices et à son autoritarisme. Derrière
un certain sourire angélique, il n'a absolument rien à voir avec
la démocratie de participation que le PQ a tant promise et tant
chérie. "Comme Jean-Marc Rivest avant lui, Pierre Ménard a
gagné ses galons à titre de président de la
Communauté régionale de l'Outaouais. Sans esclandre, il a fait du
bon travail aussi. Il n'est pas faux de prétendre qu'il pourrait
effectivement assurer une transition harmonieuse entre la CRO d'aujourd'hui et
la CRO restructurée. Cette justification d'appoint peut même tenir
lieu de consolation inoffensive. Ce, malgré le voeu si souvent
répété par le conseil de l'organisme d'élire
lui-même son président. "Toutefois, cette fameuse restructuration
devrait déjà être chose du passé et rien ne garantit
qu'elle se réalisera dans un proche
avenir. La repousser une fois de plus dans le temps ne fatiguerait
certainement pas le ministre Jacques Léonard. Bien au contraire, M.
Léonard retardera la restructuration tant et aussi longtemps qu'à
force d'usure la situation ne sera pas mûre pour l'imposition de SA
solution, laquelle gît quelque part entre les municipalités
régionales de comté et la déconcentration administrative
de son gouvernement. En attendant, il manoeuvre et manipule. Du moins, est-ce
le sentiment qu'on a en le regardant aller et c'est la vraie raison pour
laquelle la reconduction du mandat de Pierre Ménard apparaît
maladroite, odieuse et outrancière. Après le coup de la SAO (la
Société d'aménagement de l'Outaouais) et l'histoire de la
route Maniwaki-Témiscamingue, cela suffit. Qu'on envoie ce ministre en
retraite fermée sur une banquette arrière. " Je n'ai jamais
autant partagé l'opinion de l'éditorialiste du Droit, M. le
Président. Nous allons sûrement la recommander fortement au
premier ministre du Québec. Lui qui a actuellement des problèmes
tout à fait particuliers, il s'en fait créer actuellement
d'autres par le ministre des Affaires municipales.
J'aimerais à l'intérieur du projet de loi no 92 parler
quelque peu de l'ensemble de cette région qui connaît actuellement
une imposition unilatérale du ministre des Affaires municipales en ce
qui concerne les municipalités régionales de comté. Qu'on
ne vienne pas nous dire, M. le Président, qu'il n'y a pas conflit
d'intérêts quand on sait que le ministre des Affaires municipales
grignote sur la vallée de la Haute-Gatineau pour s'approprier certaines
parties de terrains. Les maires des municipalités, le CRDO, l'ATO,
Association touristique de l'Outaouais, l'ensemble des organismes et même
le PQ, votre gang à vous autres, disent: Le découpage de la MRC
Papineau, et cela inclut les autres, pas question d'accepter cela. Vous ne
consultez même plus votre monde à vous autres. Est-ce assez fort?
Et on veut nous imposer les MRC et on nous dit que cela fonctionne bien au
Québec. Mon oeil! Cela ne fonctionnera pas tant et aussi longtemps que
les gens du milieu n'auront pas à décider de leur propre
environnement, de leur appartenance. Le ministre des Affaires municipales
devrait le comprendre, M. le Président.
Malheureusement, je dois terminer, mais j'aurais pu continuer pendant
des heures, M. le ministre des Affaires municipales. Simplement en terminant,
M. le Président, je suis d'accord avec l'article 221 qui, entre autres,
modifie la Loi favorisant le regroupement des municipalités. M. le
Président, ils ont fait quoi avec la loi 37 imposant une fusion
forcée à Baie-Comeau et Hauterive? Ils se retrouvent en cour
actuellement. Là, on nous donne un petit cadeau. On va maintenant
consulter les gens.
De la bouillie, M. le Président: C'est effrayant de rire des gens
du Québec de cette façon! C'est absolument épouvantable!
En terminant, nous allons nous retrouver en commission parlementaire où
nous allons scruter à fond cette loi et nous allons sûrement
inviter le ministre à collaborer davantage non seulement avec
l'Opposition, mais avec l'ensemble des municipalités du
Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Montmagny-L'Islet.
M. Jacques LeBlanc
M. LeBlanc: Merci, M. le Président. Je suis
particulièrement heureux de participer à ce débat qui
traite du projet de loi no 92 qui porte sur diverses lois municipales, mais
particulièrement sur les deux grandes lois qui balisent l'administration
municipale, soit la Loi sur les cités et villes et le Code municipal. En
juin 1978, les élus municipaux entreprenaient avec le gouvernement du
Québec un dialogue qui, au cours des mois et des années qui ont
suivi, s'est avéré constructif et positif. À ce moment, je
participais à cette conférence comme maire de ma ville.
J'étais, comme tous les maires des municipalités du
Québec, conscient de la responsabilité que chaque élu
municipal devait assumer au niveau de certains changements qui s'imposaient
dans le monde municipal. (22 h 40)
Le projet de loi no 92 a pour effet d'accroître la
démocratie municipale et de renforcer, si c'est encore possible,
l'autonomie des municipalités du Québec. Un simple exemple
d'augmentation ou d'accroissement de la démocratie municipale, on le
retrouve lorsqu'on accorde, par ce projet de loi, le droit de vote à
tous les électeurs, non seulement les propriétaires, mais tous
les électeurs, la possibilité de se prononcer sur les projets de
fusion ou d'annexion de municipalités. Plusieurs modifications sont
également apportées dans ce projet de loi, modifications devenues
nécessaires pour épurer les lois municipales de certaines
dispositions devenues désuètes ou superflues, mais
également pour apporter des solutions et des correctifs à des
lois toutes récentes, comme, entre autres, la loi 125. Ces changements -
et c'est ce qui est important dans la loi 92 - sont pour la plupart
réclamés par le monde municipal. Ils sont demandés par les
intervenants locaux. C'est pourquoi ce projet de loi traduit la
préoccupation constante d'un gouvernement et d'un ministre des Affaires
municipales à l'écoute des demandes ou des suggestions du monde
municipal, des hommes et des femmes qui travaillent tous les jours avec ces
lois. J'ai été un peu étonné tantôt
d'entendre le
député de Hull faire l'énumération et la
compilation des modifications qui sont incluses dans le projet de loi 92 et
faire état du fait qu'une seule modification était prévue
pour la Loi de la Communauté régionale de l'Outaouais. Comme le
gouvernement du Québec est à l'écoute des élus
municipaux autant de l'Outaouais que d'ailleurs, on en conclurait assez
facilement que cette loi est presque parfaite, parce qu'une seule modification
y est apportée.
L'autonomie locale des municipalités a été, je
pense, la préoccupation du ministre des Affaires municipales depuis
1978, en particulier au moment de cette grande rencontre avec les
municipalités. Au niveau de l'autonomie municipale, je pense que le
ministre l'a mentionné tantôt, il y a certains articles, le droit
de désaveu par exemple, qui était présent dans la Loi des
cités et villes. C'est une intrusion absolument inutile qui s'est
avérée, à l'usage, absolument inutile, parce que les
municipalités devaient transmettre - et doivent encore le faire, parce
que c'est encore la loi - au ministre des Affaires municipales un exemplaire de
chacun de leurs règlements. Le gouvernement peut, dans les trois mois
suivants, sur réception de tels règlements, les désavouer.
Ce droit de désaveu gouvernemental n'a pas été
exercé depuis plusieurs décennies et ce n'est pas ce gouvernement
qui a mis tant d'énergie à accroître l'autonomie des
municipalités et des élus municipaux qui va raviver cette
procédure désuète. Le projet de loi 92 veut plutôt
la faire disparaître. Le temps a donc prouvé l'inutilité
d'obliger les municipalités, ainsi que les communautés urbaines
ou régionales à transmettre leurs règlements. Le
présent projet de loi a donc pour but d'éliminer l'obligation
générale faite à divers organismes municipaux de
transmettre leurs règlements. Donc, il y a un accroissement de
l'autonomie locale.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député.
M. Doyon: Question de règlement, M. le Président,
et une directive en même temps...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Seulement un instant!
Question de règlement de la part du député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Simplement une question
de directive en même temps.
J'aimerais savoir si un député a le droit de relire un
discours qui vient d'être fait par un ministre. Est-ce que c'est dans
l'habitude de cette Assemblée, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'était pas une
question de règlement. M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. LeBlanc: M. le Président, j'ai eu l'avantage, à
la suite d'une expérience acquise, comme plusieurs maires du
Québec, dans le domaine municipal et dans l'aménagement et
l'urbanisme, de présider un comité de consultation pour la mise
en place des municipalités régionales de comté. J'ai
été en contact avec 94 maires d'une région du
Québec. À ce moment, nous mettions en application la loi 125 et
la première étape était la délimitation des
territoires des futures municipalités régionales de comté.
Devant le scepticisme d'une grande majorité des maires au début
de la mise en application, scepticisme qui a fondu graduellement à
mesure que la mise en place avançait, on avait donné l'assurance
à toutes les municipalités et à tous les maires que des
changements seraient apportés à la loi 125 dès que des
corrections s'avéreraient nécessaires. Après quelques mois
de mise en vigueur de cette loi, je pense que le gouvernement tient parole et
c'est pourquoi des amendements, des corrections sont apportés à
la loi 125 par ce projet de loi no 92.
J'entendais tout à l'heure le député de Laprairie
parler des désavantages et des entraves qu'a pu créer la loi 125
pour les municipalités locales, parce qu'elles devaient, dit-il, faire
approuver leurs règlements, leurs plans d'urbanisme par la
municipalité régionale de comté. Je pense que cela ne
crée pas une entrave à l'exercice de l'autonomie locale d'une
municipalité, au contraire, si l'on compare au profit d'une vision
régionale qui s'est installée déjà dans nos
municipalités, après quelques mois de mise en vigueur, à
la suite à cette réunion de maires autour d'une même table.
J'avais dit aux maires que je rencontrais, lors de la mise en place des
municipalités régionales de comté, que rapidement la
municipalité régionale de comté deviendrait pour les
élus municipaux une véritable table de concertation
régionale qui aurait un pouvoir extraordinaire auprès du
gouvernement pour toutes les demandes, tous les projets que les
municipalités, sur une base régionale, pouvaient mettre de
l'avant. J'ai été à même de constater, encore tout
dernièrement - je dois vous dire que je suis en contact très
fréquent avec les maires de mon comté et les deux
municipalités régionales de comté qui le composent - au
cours de rencontres, que les maires faisaient déjà usage de cette
table de concertation pour des motifs autres que l'aménagement de leur
territoire. Pour ne vous citer qu'un exemple, à un moment donné
il a couru dans mon comté une rumeur de fermeture d'un bureau
d'enregistrement. Immédiatement, les maires se sont réunis, m'ont
invité à cette réunion et m'ont rappelé que lors de
la formation des
municipalités régionales de comté, je leur avais
justement dit que la municipalité régionale de comté
serait une table de concertation idéale. Ils s'en servaient. Je dois
vous dire que le résultat aussi a été positif et que le
bureau d'enregistrement a été concervé. C'est pour vous
dire que les maires qui craignaient au départ d'assumer plus de
pouvoirs, d'assumer plus de responsabilités au sein d'une
municipalité régionale de comté, je parie qu'aujourd'hui,
si l'on voulait abolir les municipalités régionales de
comté, les maires de toutes les municipalités du Québec
réclameraient la continuité de ce palier administratif
régional au sein du monde municipal.
Un autre point important aussi à souligner, c'est le contact qui
existe entre le gouvernement du Québec et les municipalités du
Québec, ce respect des juridictions que l'on ne trouve pas à tous
les paliers de gouvernement. Ceci a été rapporté au
dernier congrès de l'UCCQ. Plusieurs municipalités du
Québec se sont vu offrir -cela a été le cas dans mon
comté - une subvention de la part du gouvernement fédéral
par l'entremise de leur député fédéral. (22 h
50)
J'ai reçu certaines lettres de municipalités, à
savoir que le gouvernement du Québec devrait enlever son veto -
voilà un grand mot qui revient - qui empêchait les
municipalités du Québec de recevoir des subventions directement
du gouvernement fédéral. Je prends à témoin le
président de l'Union des conseils de comté du Québec, le
président, M. Jean-Marie Moreau qui, lors du congrès, a dit de
façon très claire: Les municipalités du Québec
doivent respecter les juridictions, le gouvernement du Québec est
responsable des municipalités et c'est de juridiction exclusivement
provinciale. Surtout quand l'on considère que les ententes
antérieures qui existaient justement pour participer aux
équipements communautaires des municipalités; l'honorable M. Paul
Cosgrove, en 1978, avait dit: On se retire et on met fin à ces ententes
pour deux raisons principales et primordiales: Premièrement, nous
n'avons pas d'argent; deuxièmement, c'est de juridiction provinciale.
Pourquoi, en 1982, quatre ans plus tard, le gouvernement fédéral
peut-il se permettre d'offrir des subventions aux municipalités en ne
respectant pas les juridictions provinciales? Je pense aussi que la loi 92 se
veut une harmonisation nécessaire, de concordance entre les deux grandes
lois qui balisent le monde municipal, la Loi sur les cités et villes et
le Code municipal. La nouvelle structure administrative et politique qu'est la
municipalité régionale de comté est régie par le
Code municipal. Il faut nécessairement adapter certaines dispositions de
la Loi sur les cités et villes pour qu'il y ait concordance entre toutes
ces lois.
Il y a un fait à signaler très important, c'est que depuis
quelques années, il y a eu de nombreuses transformations, il y a eu de
nombreuses lois qui, avouons-le, ont bousculé le monde municipal. Mais
l'ensemble de toutes ces lois s'inscrivait dans la grande réforme de
l'administration municipale au Québec. Je suis heureux de constater
aujourd'hui que, malgré tout cela, un climat de dialogue constant s'est
établi entre les municipalités, les élus municipaux et le
gouvernement du Québec. Ce climat est empreint d'une
compréhension mutuelle, compréhension qui résulte des
échanges fréquents entre tous les partenaires impliqués.
On se parle et on se comprend.
Je veux particulièrement rendre hommage à tous les maires
du Québec, hommes et femmes, responsables dans leur milieu, citoyens et
citoyennes au service de leur communauté. Ces gens ont fait preuve d'un
véritable esprit de collaboration et je pense que la façon dont
le ministre des Affaires municipales et le gouvernement du Québec ont
traité les municipalités a justement inspiré cette
confiance qui s'est manifestée et qui s'est installée en
permanence entre les élus municipaux et le gouvernement du
Québec. Je pense qu'on peut dire sans se tromper que c'est un bon
exemple de fonctionnement harmonieux quand un palier de gouvernement respecte
l'autre palier au lieu de chercher à l'écraser, à le
détruire et à le déposséder de ses pouvoirs. Quand
un gouvernement prêche la décentralisation, il ne peut pas, par
ses lois, faire exactement le contraire et centraliser les pouvoirs. L'action
du gouvernement du Québec vis-à-vis des municipalités en
est une de décentralisation et les modifications qui sont
apportées par le projet de loi no 92 s'inscrivent justement dans cette
ligne de pensée.
J'appuierai ce projet de loi no 92. Je voterai en faveur pour contribuer
à améliorer la démocratie municipale, à
accroître son autonomie également et à accroître
aussi la vitalité de nos municipalités au Québec.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Verdun.
M. Lucien Caron
M. Caron: M. le Président, quelques mots seulement sur le
projet de loi no 92, Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les municipalités.
M. le Président, il est déjà 22 h 55 et je n'ai pas
l'intention d'être long, mais je voudrais rappeler à l'actuel
ministre des Affaires municipales et à l'ex-ministre des Affaires
municipales qui est ici ce soir que,
quand je suis arrivé ici, dans les années soixante-dix,
l'Opposition du temps - il y avait l'Union Nationale et quelques
collègues du Parti québécois - déplorait le fait
qu'on dépose des projets de loi à la dernière minute. M.
le Président, on est rendu au 8 décembre et on nous dépose
un projet de loi qui est assez volumineux et qui représente environ 300
articles. Quand on va aller en commission parlementaire, probablement qu'on
aura des amendements. On a connu cela à l'étude de la loi no 57.
L'ex-ministre des Affaires municipales se le rappelle. Des amendements, on en
avait eu un bon paquet. Je reviendrai sur la loi no 57. Vous savez, quand une
municipalité perd 1 600 000 $ à la dernière minute, cela
fait mal. La loi no 57 qui était si bonne dans le temps aurait dû
continuer à l'être.
Ceci dit, c'est normal, on a besoin de ces amendements pour pouvoir
continuer à administrer. Nous sommes au mois de décembre et il
nous reste environ deux semaines de session. Nous allons peut-être
étudier ce projet de loi à des heures tardives. Si le
gouvernement avait été sérieux et sincère, au lieu
d'arriver ici... On est arrivé le 9 novembre. On aurait pu arriver au
mois de septembre. On aurait pu se pencher sur ce projet de loi et
l'étudier en profondeur. Oui, M. le ministre de l'Agriculture. On aurait
peut-être pu sauver quelques mois de ristourne de lait. On a passé
à travers cela parce qu'on ne siégeait pas, mais enfin.
J'espère, et je suis confiant que le ministre des Affaires
municipales, à un certain moment, va nous donner la chance de faire
valoir notre point de vue en commission parlementaire ainsi qu'aux gens qui s'y
connaissent dans le domaine municipal. Le ministre des Affaires municipales,
à ma connaissance, n'a jamais été maire d'une
municipalité. Le député de Montmagny-L'Islet vient de
féliciter, avec raison, tous les maires et toutes les mairesses du
Québec. Actuellement, ce n'est pas facile d'administrer une
municipalité parce que cela coûte toujours de plus en plus cher et
le gouvernement, par sa loi 57... Dans le temps, c'était bien bon, mais
je me demande si, avec l'inflation, nous n'aurions pas été mieux
de garder...
Des voix: Oh! Oh!
M. Caron: Oui, on pourra en discuter. J'aimerais que le ministre
des Finances viennent passer une quinzaine de jours dans la municipalité
de Verdun, peut-être qu'il pourrait ramener de bonnes idées au
Conseil des ministres. Je ne sais pas s'ils sont toujours tous ensemble, ils se
rencontrent peut-être par petits groupes.
Je voudrais être bref ce soir tout en demandant au ministre des
Affaires municipales, si c'est possible, que ce soit la dernière
année qu'on nous présente des projets de loi de dernière
heure. On aurait aimé pouvoir consulter davantage, on aurait aimé
avoir une commission parlementaire pour recevoir les maires et les conseillers
des municipalités afin qu'ils viennent nous dire ce dont ils ont besoin.
Chaque région du Québec a sa manière d'agir. Mais non, on
nous arrive avec des choses de dernière minute.
Nous allons essayer de faire de notre mieux en commission parlementaire,
mais rien ne nous dit qu'on ne reviendra pas... Le ministre, dans son
intervention, parlait de regroupement volontaire et de fusion. Si cela
continue, les municipalités, qu'elles le veuillent ou pas, seront
obligées de se regrouper pour essayer de sauver de l'argent aux petits
"payeurs de taxes". Ils se font manger de tous bords et de tous
côtés. Le gouvernement, les gens d'en face nous avaient promis, en
1976, qu'il y aurait des miracles, que ce serait le paradis. Je pense que plus
ça va, plus on est loin du paradis. (23 heures)
J'espère, M. le Président, qu'on ne fera pas comme on a
fait aux cinq municipalités du Québec nous couper. Voilà
quinze jours comme demain, le budget de la municipalité de Verdun
était tout prêt, était livré aux conseillers. On
reçoit un télégramme. J'avais vu le ministre la veille.
J'aurais aimé cela qu'il me fasse un petit signe d'aller en
arrière du "trône", parce que, vous savez, des fois, il se
règle des choses en arrière du "trône". Cela a toujous
existé. Cela continuera à exister. J'aurais aimé cela que
le ministre des Affaires municipales dise: Cette année, je suis
obligé de faire la génuflexion devant le président du
Conseil du trésor et le ministre, M. Parizeau. Alors, comprenez-vous,
pour garder l'harmonie au Conseil des ministres, le ministre des Affaires
municipales, bon garçon comme il est, dit oui et il écoute. Mais
il nous pénalise, M. le Président. Cela va coûter 0, 30 $
de plus aux contribuables de Verdun par la faute du gouvernement.
M. le Président, ils disent que c'est la faute d'Ottawa.
Pensez-vous que moi, quand je vais envoyer mon compte de taxes, je ne le dirai
pas à mes contribuables? Ce sera la faute du gouvernement du Parti
québécois, à moins que le ministre, dans les quelques
heures qui suivent, n'essaie de réajuster son tir. On est prêt
à la discussion. On est prêt à essayer de s'entendre. S'ils
ne s'entendent pas avec Ottawa, moi, je suis prêt à traverser de
l'autre côté. Je suis prêt à rencontrer le ministre
des Affaires municipales en arrière du "trône". M. le
Président, je vous dis bien que, si on reste dans le statu quo et qu'on
nous enlève 1 600 000 $, cela va coûter 0, 30 $ de plus de taxes
aux contribuables de Verdun. Je
pense que le ministre des Affaires municipales va filer bien mal.
J'espère, M. le ministre, que vous aurez l'occasion, dans les quelques
jours qui suivent, d'essayer de rendre justice et de ne pas nous couper l'herbe
sous le pied comme on l'a fait à la dernière minute. On
continuera à étudier le projet de loi dans le plus grand
sérieux, dans l'intérêt de tous les maires et conseillers
de toute la province de Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Bellechasse.
M. Claude Lachance
M. Lachance: Merci, M. le Président. Si on fait une
brève rétrospective, les années soixante, en particulier
avec le rapport Parent et la création du ministère de
l'Éducation, on peut dire, après coup, que cela a
été la décennie de l'éducation. Les années
soixante-dix, on peut sans l'ombre d'un doute affirmer que cela a
été la décennie des affaires sociales, avec la
création du Régime d'assurance-maladie, ainsi que la mise sur
pied du réseau des CLSC, des Centres locaux de services communautaires.
Ainsi, les années soixante pour l'éducation, les années
soixante-dix pour les affaires sociales et, maintenant, les années
quatre-vingt pour le domaine municipal. Je pense, M. le Président, que
c'est un signe de l'importance que le gouvernement actuel attache à tout
ce secteur qui est en contact quotidien avec la base, soit la population du
Québec.
Si nous regardons, maintenant, le nombre de lois ou la nature des lois
qui ont été adoptées au cours des récentes
années -je peux l'attester parce que je l'ai vécu, je participais
comme délégué du comté de Dorchester à la
conférence Québec-municipalités de 1975, également
à celle de juin 1978, à Québec et, même, je peux
vous dire que j'étais présent lors du dernier congrès de
l'Union des conseils de comté, ici au Centre municipal des
congrès où j'ai passé deux jours avec les maires de
Bellechasse en octobre dernier - il y a eu la loi sur la démocratie
municipale, la loi 105, la loi 125 qui a créé les MRC. Je profite
de l'occasion, encore une fois, pour rendre hommage au ministre actuel des
Affaires municipales, qui à l'époque était ministre
responsable de l'Aménagement, d'avoir été capable de
convaincre les élus municipaux, le monde municipal et la population en
général de l'opportunité de donner cet instrument
d'aménagement et d'urbanisme en fonction de l'avenir.
Tout ce que je peux déplorer, M. le Président, c'est que
cette loi ne soit pas venue auparavant, parce que c'est un peu mettre la
charrue devant les boeufs d'avoir planifié des territoires pour les
écoles et pour le réseau des affaires sociales sans s'être
attaqué au fond du problème qui était l'aménagement
du territoire. En tout cas, M. le Président, mieux vaut tard que jamais
et je rends hommage à l'actuel ministre d'avoir eu le courage de pousser
son idée jusqu'au bout et je pense que l'histoire du Québec
retiendra le nom de l'actuel ministre des Affaires municipales pour
l'importance de la réforme qu'il a su donner aux citoyens du
Québec.
M. le Président, quand on parle de la loi 92, on parle d'une loi
- on l'a dit -volumineuse. Elle comporte 92 pages. Elle touche à 25 lois
adoptées antérieurement. Elle contient ' 297 articles. Je ne
commencerai pas à faire la nomenclature de chacun de ces 297 articles,
mais je vais m'attarder - comme dirait le ministre de l'Éducation, je
vais aller rapidement et peut-être lentement aussi - sur certains points
-me hâter lentement, comme disait le ministre de l'Éducation. Le
monde municipal, M. le Président, est un monde vivant. C'est un monde
aussi - je le connais - de plus en plus dynamique. Il a besoin de vivre au
diapason des années quatre-vingt. Cela me fait penser un peu, en voyant
le projet de loi no 92, à un édifice. Chacun d'entre nous habite
un édifice. Dans un édifice, on a besoin de faire du
ménage régulièrement. Il arrive parfois, même
souvent, qu'on ait besoin de faire des réparations. Ainsi, les lois
municipales, c'est exactement la même chose. On se rend compte qu'il y a
parfois des dispositions qui ont besoin d'être aménagées,
d'être améliorées et également, un édifice a
besoin, de temps en temps, d'avoir des ajouts, c'est-à-dire de la
construction. C'est ce qu'on fait avec des dispositions nouvelles qui en
viennent à bonifier l'administration du monde municipal.
M. le Président, quand je vois des dispositions qui ont
été adoptées - et je pense, en particulier, à la
réforme sur la fiscalité municipale, la loi 57 adoptée il
y a environ trois ans - je ne peux que constater les bienfaits de l'adoption de
cette mesure lorsqu'on voit les résultats du rapport du comité
Québec-municipalités qui nous donne, à la page 20 - et ce
n'est pas gouvernemental, c'est complètement en dehors du gouvernement -
les résultats du transfert net positif pour l'année 1980 au
montant de 360 000 000 $. C'est autant d'argent que les municipalités
ont reçu, qu'elles n'ont pas besoin d'aller chercher directement par
l'entremise des taxes dans la poche des contribuables au niveau de chacune des
municipalités du Québec.
Dernièrement, M. le Président, je peux vous dire que le
ministre des Affaires municipales a fait bien plaisir aux élus
municipaux qui sont en train de préparer les prévisions
budgétaires pour 1983. J'ai eu,
dernièrement, à rencontrer des élus municipaux et,
en particulier, dans une des municipalités de Bellechasse qui s'appelle
Saint-Anselme Paroisse qui, depuis trois ans, bénéficiait de
paiements de transfert minimum de l'ordre de 69 000 $ - c'est un cas assez
particulier - et je vous assure que ces gens étaient très
préoccupés par la perspective de perdre complètement cette
somme d'argent en 1983. Ils pensaient devoir mettre zéro à la
rubrique du transfert minimum. Le ministre nous a annoncé tout
récemment que plus de 500 municipalités du Québec, soit
à peu près le tiers, vont pouvoir continuer, sur une
période additionnelle de deux ans, à bénéficier des
paiements de transfert minimal. Dans le comté que je représente,
cela signifie pas moins d'une somme de 187 000 $ pour l'année 1983 et
environ 100 000 $ pour 1984. Donc, on peut dire que c'est absolument non
négligeable et je me réjouis beaucoup avec les élus
municipaux de l'ensemble du Québec et ceux de ma circonscription, en
particulier, de l'adoption de la décision du Conseil des ministres de
continuer encore dans ce sens pour une période de deux ans. (23 h
10)
M. le Président, dans le projet de loi no 92, il y a un effort de
rationalisation qui mérite d'être souligné. Je pense
à quelque chose qu'il m'a été donné de vivre de
très près. Ce sont les plaintes concernant l'évaluation
foncière. J'ai constaté, à l'usage, que très
souvent l'individu qui recevait son compte de taxes, lorsqu'il ouvrait
l'enveloppe, il regardait le compte de taxes et restait parfois surpris. Alors,
il regardait au verso et voyait la procédure à suivre pour porter
plainte. À ce moment, il disait: Je n'ai rien à perdre, je vais
loger une plainte. Ce n'était pas la valeur au rôle
d'évaluation qui était contestée, c'était
plutôt le taux de taxation. Lorsqu'il y avait une plainte, vous savez
tout le cheminement qu'elle devait suivre, selon la loi; cela supposait qu'on
réétudie le dossier du plaignant, cela supposait qu'on
investissait beaucoup d'heures et forcément beaucoup d'argent dans
l'étude de ces plaintes, pour finalement se rendre compte que - dans les
cas que j'ai connus -moins de la moitié des personnes qui se plaignaient
de leur évaluation foncière se rendaient effectivement sur place
lors de l'audition des plaintes. L'une des dispositions du projet de loi no 92
est d'éviter que cela devienne trop facile, même que cela devienne
quelque chose de trop fréquent de se plaindre, non pas de la valeur de
l'évaluation, mais du taux de taxation. Cela va exiger de la personne
qui se plaint un sérieux. De quelle façon cela va-t-il se faire,
M. le Président? Cela va se faire en rédigeant la plainte sur un
formulaire qui sera facile à obtenir, un formulaire uniforme, non pas
sur n'importe quel bout de papier, et la plainte devra, dans des délais
précis, être déposée au greffe de la division des
petites créances de la Cour provinciale. Ensuite, les fonctionnaires de
la cour vont pouvoir aider le plaignant à remplir correctement son
formulaire et ainsi le processus va se continuer. Je suis persuadé
qu'une telle mesure va diminuer le nombre de plaintes plus ou moins
sérieuses.
Un autre élément que je veux souligner, parmi ce grand
nombre d'articles du projet de loi no 92, c'est la disposition concernant les
détecteurs de fumée. Cela peut paraître un peu banal comme
mesure, mais je pense que cela dénote la préoccupation que les
municipalités doivent avoir en ce qui concerne la sécurité
et la protection de la vie des citoyens et citoyennes du Québec.
Actuellement, les municipalités rurales et les municipalités des
cités et villes - cela ne date pas de plusieurs années - ont le
pouvoir, par règlement, d'obliger un propriétaire d'un logement
à installer un détecteur de fumée. Lorsque que
j'étais maire, quelque temps avant de devenir député,
précisément, dans ma municipalité, nous avions
adopté ce règlement. Par contre, le projet de loi no 92 vient
préciser quel genre de détecteur on peut exiger en ce qui
concerne les normes d'approbation. Cette disposition du projet de loi indique
également qu'on peut exiger l'endroit où le détecteur de
fumée sera installé pour une sécurité accrue, elle
va donc permettre d'aller beaucoup plus loin dans ce sens et ainsi probablement
sauver la vie d'un certain nombre de personnes.
Il y a aussi une disposition que j'aime beaucoup dans le projet de loi
no 92, parce qu'elle accroît la démocratie municipale. C'est celle
qui consiste à permettre, en gros, à tous ceux qui ont le droit
de vote, lorsque arrivent des élections municipales, de pouvoir se
prononcer lorsqu'il y a une annexion d'une municipalité à une
autre. Je pense que cette mesure n'a pas à être débattue
très longtemps. Elle s'imposait et elle fait suite, probablement, aussi
à de nombreuses représentations du monde municipal qui demandait
qu'on procède dans ce sens-là.
M. le Président, il y a aussi une autre mesure qui, je pense,
était essentielle, même si elle touche déjà la
très grande majorité des municipalités du Québec,
et c'est celle qui a rapport, toujours, au processus démocratique
concernant la Communauté urbaine de Québec. Vous savez qu'on
prévoit une période de questions maintenant à chacune des
assemblées du conseil municipal. On prévoit également le
discours sur le budget du président. Cela se fait au niveau des maires
au moins une fois par année. Alors, il n'est que normal, à mon
avis, que cette disposition s'applique également à la
Communauté urbaine de Québec.
M. le Président, en terminant, je formule le souhait qu'un jour,
qui sera je l'espère le plus rapproché possible, on en arrive
à avoir au Québec un code unique des municipalités du
Québec, qu'une codification unique des lois municipales, facilitant la
cohérence et facilitant aussi la compréhension des dispositions
qui intéressent les élus municipaux, soit faite. Cela
découlerait normalement des recommandations d'une commission qui avait
été mise sur pied dans les années soixante-dix et dont, je
pense, le député de Louis-Hébert faisait partie, la
Commission de refonte des lois municipales, qui a publié un certain
nombre de volumes dont j'ai pris connaissance avec énormément
d'intérêt et dont, aussi, plusieurs dispositions ont
déjà été adoptées par le
député de Crémazie, l'actuel ministre de l'Habitation et
de la Protection du consommateur, au moment où il était ministre
des Affaires municipales et, évidemment, l'actuel ministre des Affaires
municipales, qui a continué dans la même veine.
Alors, M. le Président, je suis très heureux de l'ensemble
des dispositions contenues dans le projet de loi no 92 et c'est avec grand
plaisir que j'accorderai mon appui à ce dernier. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Robert Baldwin.
Une voix: Bravo!
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Le projet de loi
no 92 comprend la modification de quelque 25 lois existantes. C'est vraiment
une loi omnibus présentée à la onzième heure car il
est déjà 23 h 18 environ. C'est une loi qui est vraiment
présentée à la dernière minute. Je ne voudrais pas,
cependant, essayer de faire des commentaires sur les 297 articles de cette loi.
Je voudrais restreindre mes commentaires à la deuxième section,
la partie qui concerne la loi 125, Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme.
Vous avez remarqué, M. le Président, que c'est la
sixième ou septième fois qu'on révise cette loi 125. Cela
démontre tout simplement que les municipalités affectées
par cette loi sont incapables de respecter les échéances. Depuis
trois ans elles essaient de respecter les échéances et elles en
sont incapables. Cela démontre aussi que la loi elle-même a
été imposée impulsivement et, de cette façon, elle
est contre la vraie démocratie locale, contre l'autonomie municipale,
car elle a été imposée sans une consultation suffisante
des populations concernées.
Il est vrai, M. le Président, que la participation de la
population est là en théorie dans la loi. En pratique, cependant,
c'est tout autre chose à cause de la complexité et de
l'ambiguïté de la loi. Pour participer à quelque chose, il
faut en effet le comprendre. La population ne comprend pas. Pas seulement la
population, mais tous les experts. Le ministre pourrait nous dire combien de
colloques il y a eu partout dans la province, réunissant toutes sortes
d'experts: des élus municipaux et des administrateurs municipaux, bien
sûr, des arpenteurs-géomètres, des urbanistes, des notaires
et des avocats qui sont chargés de l'application de cette loi. Personne
ne la comprend. C'est pour cela que nous dénonçons un manque
d'autonomie et de démocratie locales. (20 h 20)
On a eu l'impression, en lisant cette loi et en l'étudiant, il y
a trois ans, que c'était conçu par des urbanistes et mis en
application par des avocats. Là, il y avait un manque de communication.
C'est pour cela que personne ne comprend la loi. Nous, de ce
côté-ci de la Chambre, sommes favorables aux amendements à
la loi 125 car, au moins, cela enlève le gel sur la construction
imposé par la loi. À partir de lundi prochain, toutes les
municipalités affectées vont voir tous leurs projets de cadastre
et de construction gelés. Les amendements apportés à ce
projet de loi no 92 enlèvent ce gel et nous sommes très heureux
de cela. Nous sommes très favorables à cette mesure.
Cependant, ce n'est qu'un dégel temporaire. Ce dégel
affectera les projets de cadastre qui sont déjà en marche dans
les municipalités. Ils peuvent maintenant être
déposés au cadastre du ministère de l'Énergie et
des Ressources; s'ils reçoivent la bénédiction d'un
fonctionnaire municipal, très bien. Cela, c'est pour les projets de
cadastre déjà commencés au niveau municipal. Cela
n'enlève quand même pas le gel sur les projets de cadastre
prévus pour le printemps et pour l'été prochains. Il va
sans doute devoir y avoir une autre modification à la loi dans quelques
mois. C'est une autre preuve que cette loi a été imposée
impulsivement. Cela veut dire qu'au printemps et à l'été
prochains les municipalités qui n'auront pas toutes adopté les
règlements imposés par la loi 125 vont voir leurs projets de
cadastre arrêtés encore une fois en pleine saison de la
construction. C'est bien beau d'enlever le gel en période de gel, mais
l'été prochain, pendant la période de pointe de la
construction, on va se retrouver avec un autre gel sur la construction et les
projets de cadastre.
Ces règlements, apportés à la onzième heure,
vont aussi causer une confusion totale chez les avocats qui préparent
les règlements des municipalités affectées par la loi 125.
À
ce moment-ci, ces avocats, ces consultants des municipalités ont
préparé des règlements, en particulier, le
règlement de contrôle intérimaire. Il devait être
déposé la semaine prochaine. Maintenant, cette loi amène
un bouleversement complet dans les règlements préparés
pour la semaine prochaine par ces municipalités. Encore des
délais et des coûts, des frais additionnels aux
municipalités.
Depuis les trois dernières années, les expériences
des avocats experts ont été démontrées par les
rapports des colloques sur la loi 125 et sur la Loi sur la protection du
territoire agricole. Tous les experts juridiques en la matière ont une
opinion très défavorable à la loi 125, la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. Premièrement, le ministre se
mêle de façon directe des politiques de l'aménagement, en
utilisant son pouvoir de désaveu du règlement de contrôle
intérimaire pour imposer aux corporations muncipales et aux MRC des
normes fixes. Nonobstant les voeux pieux que le ministre a exposés lors
de l'adoption de la loi, il y a trois ans, en ce sens que cette loi
était décentralisatrice, encore là, tous les experts en
lois municipales sont d'avis que la loi est très centralisatrice. M. le
Président, après avoir vécu avec cette loi pendant les
trois dernières années, après avoir assisté
à cinq ou six modifications, et tout le monde sait qu'il va y avoir
d'autres modifications à la loi, le monde municipal est vraiment
bouleversé. Il est d'avis qu'on devrait réviser
complètement cette loi avec la Loi sur la protection du territoire
agricole afin de rendre ces deux lois plus simples et pratiques et à la
mesure de la population. Pour le moment, M. le Président, je voudrais
suggérer au ministre de songer à imposer un moratoire sur
l'application de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour encore
douze mois afin de permettre aux municipalités de se conformer
adéquatement et à leur rythme à la loi et surtout pour
lever le gel sur la construction du printemps et de l'été
prochain. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. À cette fin de
session, le rituel, au moins, aura été encore une fois
respecté. Nous nous trouvons devant une situation où, à
près de minuit, nous sommes en train d'étudier un projet de loi
dans le domaine des affaires municipales, c'est-à-dire le domaine qui
touche le plus près les citoyens, les citoyennes du Québec, les
contribuables en générai. M. le Président, la loi qui nous
est présentée, le projet de loi no 92, affecte, comme le disait
mon collègue de Robert Baldwin tout à l'heure, 25 lois. Il y a
donc une multitude de lois, une multitude de municipalités, une
multitude de dispositions qui vont, dès son adoption par
l'Assemblée nationale, affecter la vie des citoyens du Québec. M.
le Président, on se trouve dans une situation qui est rendue
pratiquement inextricable. La législation municipale au Québec
est rendue d'une complexité telle qu'on ne peut plus savoir
l'état existant de la législation.
J'ai eu l'occasion pendant plusieurs années d'être
secrétaire de la Commission de refonte des lois municipales, à
laquelle faisait allusion le député de Bellechasse qui, pendant
cinq ans, a travaillé à refondre en une seule loi le Code
municipal et la Loi sur les cités et villes. L'Assemblée me
permettra, M. le Président, de rendre un hommage tout particulier aux
commissaires avec lesquels j'ai eu l'occasion de travailler pendant plusieurs
années, c'est-à-dire le président de la Commission de
refonte, Me Gilles Hébert; deux des commissaires, Me Louis
Rémillard, ainsi que Me Bernard Dorais, qui a remplacé M. le juge
Dugas, maintenant juge à la Cour supérieure. Ces personnes, avec
une équipe que j'avais le privilège de diriger, ont fait un
travail de bénédictin pendant cinq ou six ans pour
démêler et proposer, comme outil aux législateurs, un cadre
qui permettrait de mettre de l'ordre dans ce qui est devenu
indémêlable. Donc, il y a eu cinq ans de travail qui ont
été consacrés à ce mandat spécifique. La
Commission de refonte des lois municipales avait un mandat. Le mandat
consistait à réunir sous un seul code, qui se serait
appelé le code des municipalités du Québec, tout ce qui
était compris dans les deux grandes lois maîtresses qui gouvernent
le monde municipal, c'est-à-dire le Code municipal et la Loi sur les
cités et villes, et en plus 330 lois, 330 chartes ont été
accordées au cours des ans sous forme de lettres patentes ou de lois
particulières. Il y en a eu 330. (23 h 30)
Simplement pour vous montrer la complexité des lois municipales
au Québec, l'inventaire des dispositions dérogatoires, soit
à la Loi sur les cités et villes, soit au Code municipal, se
retrouvent dans deux volumes, M. le Président, que j'ai ici en main, qui
ne font que reprendre et indiquer quelles sont les dispositions
dérogatoires au Code municipal et à la Loi sur les cités
et villes. Il y a deux volumes de 500 pages chacun qui sont remplis et qui ne
font qu'indiquer non pas les dispositions qui seraient reprises
là-dedans, mais simplement la référence à ces
dispositions pour qu'on puisse les retrouver, c'est-à-dire de quelle
ville, de quelle municipalité il s'agit et quel est l'article de la loi
qui est dérogatoire à tel article du Code municipal ou de la Loi
sur les cités et villes.
Ceci donne une idée de la complexité de la tâche et,
pendant cinq ans, les commissaires et un secrétariat dont j'avais la
charge ont travaillé là-dessus. On a fait un inventaire
sérieux et, pendant le temps où on travaillait, on a
proposé au fur et à mesure du déroulement de nos travaux
des rapports qui se sont accumulés au fil des ans. Il y en a eu cinq ou
six et ces rapports ont été présentés sous forme de
loi, de projet de loi, de façon que le législateur puisse s'en
servir.
Et je me souviens très bien que, pendant qu'on travaillait
à faire ces rapports, il y avait le porte-parole des Affaires
municipales de l'Opposition dans le temps, qui est le ministre actuel de la
Justice, le député de Chicoutimi, qui disait dans un discours -
je m'en souviens parce que j'avais eu le texte entre les mains à ce
moment -: Que fait la Commission de refonte des lois municipales? Qu'est-ce
qu'elle attend pour remettre son rapport? Quel est ce temps épouvantable
qu'elle prend pour terminer ses travaux? La Commission de refonte des lois
municipales a remis son rapport au mois de janvier 1977, ou peut-être au
mois de mars 1977, à l'actuel ministre de l'Habitation, qui s'en est dit
très heureux. Il a dit qu'il en ferait un usage adéquat et qu'il
trouvait que l'idée qu'on proposait de l'unicité d'un code des
municipalités pour le Québec était une idée
absolument nécessaire et que le temps était venu d'y donner
suite, mais qu'il verrait à le faire en temps et lieu, après
étude évidemment. Et cela rejoignait le désir du
porte-parole des Affaires municipales de l'Opposition péquiste à
l'époque qui réclamait ces rapports.
Nous avons donc fait ce travail et nous l'avons fait consciemment. Nous
avons remis le fruit de nos travaux au gouvernement et depuis ce temps on
continue de légiférer à la pièce, non seulement
à la pièce, mais à la dernière minute, en fin de
session, avec des projets de loi de 260, 275 articles qui nous arrivent comme
cela sans préparation, sans information, sans consultation, tellement
que nous, les membres de l'Assemblée nationale, qui en sommes
nécessairement les premiers informés, eh bien, nous avons ces
projets de loi à la toute dernière minute.
Se rend-on compte quelle est la situation des maires, des conseillers,
des administrations municipales qui ne sont pas ici à l'Assemblée
nationale et qui doivent tenter de s'imaginer quelle sorte de loi va leur
tomber comme d'habitude sur le nez, au mois de décembre, alors que
nous-mêmes, nous, les députés, nous, les membres de
l'Assemblée nationale, nous-mêmes sommes pris au dépourvu
là-dessus? Est-ce que c'est cela la consultation du monde municipal?
Est-ce que c'est cela la disponibilité envers le monde municipal? Est-ce
que, purement et simplement, c'est du respect envers le monde municipal?
Je pense, quand on respecte un partenaire, quand on prend en
considération les représentations qu'il peut avoir à nous
faire, étant donné qu'il devra vivre avec les dispositions
législatives qui émaneront de l'Assemblée nationale, qu'il
importe, qu'il est élémentaire que ces gens, que nous qualifions
de partenaires, faussement d'après moi, doivent être
consultés, informés et être présents dans le
processus de préparation des lois.
On sait qu'une loi ne peut s'improviser. Une loi doit venir d'un besoin
du milieu. Comment ce besoin peut-il être analysé, comment ce
besoin peut-il être reflété dans les lois, si on n'a pas
pris la peine d'aller à la source des gens qui connaissent le mieux ces
besoins?
On est dans une situation où on se gargarise d'autonomie
municipale. On dit, à propos de tout et de rien, que les articles ont
finalement, à peu près toujours, dans le raisonnement
ministériel, le même fondement, c'est-à-dire une
augmentation de l'autonomie municipale. Se rend-on compte, quand on parle
d'autonomie municipale, que l'inventaire des contrôles de l'État
sur les actes des municipalités remplit un volume de 468 pages? Pages
où sont indiqués, avec des références, quels sont
les contrôles de l'État sur les actes des munipalités.
Est-ce qu'on sait qu'il existe, dans la législation municipale,
43 contrôles différents des actes des élus municipaux?
Quarante-trois types de contrôles. Cela va du contrôle
exercé par le lieutenant-gouverneur en conseil, passe par le
contrôle exercé par le bureau des inspecteurs
vérificateurs, par la Société d'habitation, par la
Société d'aménagement de l'Outaouais, dans un cas
spécifique, par le directeur des services de protection de
l'environnement, par le ministre de la Justice, par la Commission de police,
par le bureau d'enregistrement, par le commissaire enquêteur sur les
incendies, par le ministre des Terres et Forêts, maintenant devenu le
ministre de l'Énergie et des Ressources, par le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, par l'office du
drainage, etc. Il y en a 43 comme ceux-là. C'est ça l'autonomie
municipale?
On a passé des mois et des mois à faire le relevé
de cela. À telle enseigne que, actuellement, les gens qui oeuvrent dans
le domaine de la législation municipale et qui font du droit municipal
ont toutes les difficultés du monde à connaître
l'état présent de la législation municipale. On ne sait
pas où on en est. On avait rempli des classeurs de ce qu'était
l'état, à ce moment-là, je parle des années 1976 et
1977, de la législation municipale. C'est allé en empirant, alors
que, dans les discours du porte-parole de l'Opposition péquiste au
gouvernement libéral du temps, il réclamait
une législation codifiée, unifiée, c'est ce qui a
été présenté en temps et lieu, depuis maintenant
cinq ans.
Malgré tout cela, malgré les discours, malgré les
discours de l'Opposition péquiste d'alors, par la voix de son
porte-parole, on continue de légiférer de la même
façon et on empire une situation déjà difficile. On
continue de légiférer à la pièce. On continue d'y
aller avec des morceaux de lois, à l'intérieur d'une loi omnibus.
Ceci est encore pire que de continuer de légiférer, au moins en
se référant à des lois spécifiques qui amenderaient
soit le Code municipal, soit la Loi sur les cités et villes, soit la
charte d'une autre ville. Là, on nous met tout cela dans une loi
omnibus. Comment voulez-vous qu'on s'y retrouve?
Pour employer une expression chère au premier ministre: Une
chatte n'y retrouverait pas ses petits chats. C'est impossible. Il faut que
l'ordre soit mis là-dedans. Cela prend une volonté politique de
le faire. Cela prend aussi des instruments. Maintenant, ces instruments sont
là. Je les ai apportés avec moi, parce que j'ai passé
tellement d'années à les préparer que je voulais les
apporter. Au moins, ils auront servi à les mettre sur mon bureau et
à dire: Ils sont là, qu'on s'en serve. Ce n'est pas
nécessaire de réinventer la roue là-dedans. C'est
évident qu'il y a encore des aménagements, des
améliorations, des ajustements à faire. Mais, au moins, on a
quelque chose pour partir. Il y a un départ là-dedans. C'est mis
de côté. On continue avec des lois omnibus qui amendent une foule
de lois, qui vont faire finalement qu'on va se retrouver, dans deux ans, dans
trois ans, alors que la législation municipale québécoise
aura continué de proliférer, on aura fait fi du principe
essentiel selon lequel une législation doit être
compréhensible, qu'il doit y avoir une ligne directrice à
l'intérieur d'une législation. (23 h 40)
Peut-on se demander, entre vous et moi, s'il y a une véritable
raison fondamentale qui fait qu'il y a des municipalités qui sont
régies par la Loi sur les cités et villes et d'autres par le Code
municipal?
Pourquoi, dans certains cas, le pouvoir est-il accordé si on est
régi par la Loi sur les cités et villes et qu'on n'a pas ce
pouvoir-là, qu'on est obligé de venir le quêter à
Québec, si on est régi par le Code municipal? Cela n'a pas sa
raison d'être.
Une municipalité régie par le Code municipal a autant le
droit sans demander la permission, à titre d'exemple, possiblement
d'aménager un aéroport sur son territoire. Pourquoi aurait-elle
besoin d'un accord particulier du gouvernement par voie de lois
particulières, alors qu'une ville régie par la Loi sur les
cités et villes n'a pas besoin de cet accord?
Il me semble qu'on peut s'entendre sur un certain nombre de principes.
Arrêtons de compliquer les choses qui peuvent être
simplifiées. On peut faire cela sans dépenses et, à ce
moment, la vie de tous nos concitoyens en sera améliorée. Je
voudrais que le gouvernement se penche là-dessus, fasse un effort de
réflexion et qu'on voie s'il n'y aurait pas moyen de remettre en oeuvre
un processus qui avait déjà été amorcé et
qui a donné les rapports dont j'ai parlé et que vous exhibez. Il
faudrait qu'on reprenne tout cela et qu'on tente de sauver ce qui peut
être encore sauvé, de façon que l'on ne soit pas
obligé, quand on va reprendre le pouvoir, de tout refaire ce qui avait
été fait. C'est un devoir que le gouvernement a de faire preuve
d'une certaine continuité sur les choses qui ne sont pas litigieuses. On
s'entendait là-dessus. L'Opposition péquiste de l'époque
le réclamait. On est encore d'accord avec cela.
Que s'est-il passé entre-temps? Le gouvernement libéral
avait mis en place des structures, des moyens pour faire cela et ces moyens
sont relégués aux oubliettes. C'est un gaspillage
épouvantable, c'est un gaspillage d'effort, d'argent et
d'énergie. Je ne peux pas permettre cela. Alors je suggère que le
ministre fasse une réflexion sérieuse là-dessus et je me
déclare à son entière disposition, M. le Président,
pour tenter de remettre en marche ce grand processus de la réforme
municipale dont l'heure a sonné au Québec.
Il y a un domaine, dans le projet de loi 92, qui nous est soumis, qui
m'intéresse particulièrement, il s'agit de tout ce qui concerne
la Communauté urbaine de Québec. Je ne suis pas le premier
à le déplorer, cela a été fait et il faut le dire
de nouveau. La consultation, en ce qui concerne la Communauté urbaine de
Québec, est affectée d'une façon très
sérieuse. Il y a des dispositions qui la touchent de très
près là-dedans. Ses dirigeants n'ont pas été
consultés là-dessus. On procède par diktats
législatifs. On décide ce qui est le mieux pour la région
de Québec. Pourtant, la région de Québec a droit à
une autre considération que celle-là. Elle pourrait avoir
l'équivalent de ce qui a été accordé à la
région de Montréal, quand est venu le temps de modifier la Loi
sur la Communauté urbaine de Montréal. Pourquoi en serait-il
autrement? On n'a pas entendu le ministre s'expliquer là-dessus.
J'aimerais qu'il nous donne des explications qui soient de nature à nous
convaincre. On n'a rien entendu de sa part.
Est-ce que c'est dans la suite des gestes posés par le
député de Vanier, leader parlementaire, dans la question de la
grève des autobus de la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec où il a agit de telle façon que les
maires de la Communauté urbaine de Québec n'ont eu
d'autre choix que de réclamer sa démission?
Le ministre des Affaires municipales avait une bonne occasion de
racheter, jusqu'à un certain point, le leader parlementaire, et
peut-être de tenter de lui redonner un second souffle de
crédibilité. Il ne l'a pas fait
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
privilège de la part du leader adjoint.
M. Guay: Conformément à ce que le règlement
permet, j'invoque une question de privilège au nom de mon
collègue de Vanier, M. le Président, dont le nom vient
d'être mis en cause par l'ancien secrétaire général
de la communauté urbaine.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse. En vertu du
règlement, le leader adjoint du gouvernement a le droit de soulever, en
l'absence d'un de ses collègues, une question de privilège. M. le
député.
M. Guay: L'ex-secrétaire général de la
communauté urbaine, devenu député de Louis-Hébert,
a porté une accusation à l'endroit du député de
Vanier. Je veux vous dire, en son nom, que le député de Vanier,
dans le dossier du transport en commun, a bien agi et a agi de façon que
les autobus roulent. Si les maires de la communauté urbaine ne sont pas
d'accord, ils n'avaient qu'à règler le problème
eux-mêmes.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du
gouvernement, ce n'était pas une question de privilège de la
façon que vous l'avez exprimée.
M. Bissonnet: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
règlement de la part du député de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Quand on parle de l'ex-secrétaire
général de la CUQ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse. M. le
député de Louis-Hébert, en terminant, s'il vous
plaît!
M. Doyon: Je porte à votre attention qu'il me restait deux
minutes et que j'en ai perdu deux. Mes deux minutes sont donc encore
là.
Pour revenir à ce que je disais, le jugement qui a
été porté sur les agissements du député de
Vanier, leader du gouvernement, l'a été par les maires de la
Communauté urbaine de Québec qui ont fait connaître
publiquement leur opinion là-dessus. Cette opinion était que le
député de Vanier, leader du gouvernement, ministre des
Communications, n'était plus acceptable par les maires de la
Communauté urbaine de Québec comme porte-parole
ministériel pour la région de Québec. C'était cela,
leur jugement. Les citoyens ont la même opinion. Si on insiste, cela peut
être vérifié n'importe quand. Je pense que je ne fais que
rapporter des faits lorsque je dis cela.
La question de l'ajustement des dispositions législatives de la
Communauté urbaine de Québec méritait sûrement une
autre attention que celle qui lui a été accordée par le
ministre des Affaires municipales. Si je disposais de plus de temps, j'aimerais
vous parler de toute la question de l'élection du président de la
Communauté urbaine de Québec et de ce qu'il en est du suffrage
universel par rapport au collège électoral. Ce débat n'a
pas été fait et pourquoi n'a-t-il pas été fait?
Parce que le ministre des Affaires municipales ne veut pas faire de
débat, là-dessus alors que le débat est nécessaire.
Je comprends votre signe, j'ai terminé.
M. Guay: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse encore une
fois, M. le leader adjoint.
M. Guay:... je m'excuse d'interrompre le député de
Louis-Hébert. C'est en vertu de l'article 100.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant. Si c'est
en vertu de l'article 100, je vais attendre qu'il ait terminé, M. le
leader.
M. Guay: Justement, c'est que je veux inscrire ma
possibilité de poser une question au député de
Louis-Hébert, selon l'interprétation stricte de l'article
100.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert, en terminant.
M. Doyon: Merci, M. le Président. J'aurais aimé que
l'on fasse ce débat. J'aurais aimé qu'on parle de la
période des questions, qu'on parle de l'avenir du tourisme dans la
Communauté urbaine de Québec, qu'on parle de ce qui est
arrivé à l'Association touristique régionale de
Québec. J'aurais aimé qu'on discute de cela: on n'a pas pu le
faire. J'aurais aimé qu'on discute des structures administratives de la
Communauté urbaine de Québec. Quel est le statut qui devrait
être donné au directeur général de la
Communauté urbaine de Québec, au secrétaire
général par rapport aux commissaires de l'évaluation?
Toutes ces choses-là ont une importance considérable, mais, pour
avoir une vue de l'intérieur, il faut accepter d'écouter les gens
et les inviter à s'exprimer, ce qui nous est refusé.
Je veux terminer en disant que je le
regrette profondément et que j'espère que l'occasion nous
en sera accordée. En commission parlementaire, j'ai l'intention d'avoir
du ministre un certain nombre de réponses. La chose sera difficile parce
que peut-être des articles de la loi ne portent pas sur les choses dont
on voudrait discuter, mais j'ai l'intention d'insister pour qu'on sache
à quoi s'en tenir même si le ministre ne nous accorde pas sa
collaboration, ce que je regrette infiniment.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint,
avant de vous donner la parole en vertu de l'article 100 - j'ai bien compris,
M. le leader adjoint - je veux quand même lire ce que dit l'article 100.
Je pense que je l'ai déjà dit, mais je veux le
répéter. L'article 100 dit: "Tant qu'un député a la
parole, aucun député ne doit l'interrompre, si ce n'est pour lui
demander la permission de poser une question ou de donner des explications,
pour soulever une question de règlement ou une question de
privilège ou pour signaler un défaut de quorum. "
Souvent, l'interprétation qu'on lui donne est large. Lorsque la
question est posée à celui qui a fait le discours et dont le
temps est écoulé, je pense qu'il faut bien faire attention
à ne pas vouloir rallonger - et je l'ai déjà dit - le
temps de l'individu qui avait la parole et qui a terminé son discours et
son temps en même temps. À ce moment-là, la question que je
dois poser au député de Louis-Hébert, c'est s'il accepte
qu'une question lui soit posée, même si son temps est
écoulé. Deuxièmement, si on a l'accord, je permettrai la
question, mais, si je n'ai pas l'accord, je ne le permettrai pas parce qu'il
n'est pas question de faire d'abord un débat de part et d'autre, en
termes de dialogue dans bien des cas, et d'allonger le temps du
député puisqu'il a écoulé son temps de parole.
Est-ce que vous acceptez? (23 h 50)
M. Doyon: Je ne m'y oppose pas, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Pas d'opposition. M. le
leader adjoint?
M. Guay: M. le Président, ma question est très
simple. Le député de Louis-Hébert a fait état du
jugement que les maires de la communauté urbaine ont porté
à l'endroit du ministre responsable de la région de Québec
et député de Vanier dans le dossier du transport en commun.
N'est-il pas vrai - et j'adresse ma question au député de
Louis-Hébert - que ce sont les mêmes maires de la
communauté urbaine qui n'ont pas voulu retenir ses services à
lui? Est-ce que le jugement que ces maires ont porté dans son cas
à lui est aussi bon que celui qu'ils ont porté dans le cas du
député de Vanier?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Le député
de Taschereau devrait savoir une chose. C'est que le fondement du droit que
j'ai fait valoir a été reconnu par la Commission des droits de la
personne dans un jugement de plusieurs pages, dont je lui ferai parvenir copie,
où, s'il peut le comprendre, l'utilisation d'un droit d'association a
été considérée par la Commission des droits de la
personne comme étant la seule raison qui faisait que j'étais mis
en difficulté à titre de secrétaire de la
communauté urbaine. Il ne faudrait pas confondre, comme tente de le
faire le député de Taschereau, avec le devoir que j'ai
aujourd'hui de représenter toute la région de Québec et de
faire preuve d'une générosité dont il n'est
peut-être pas capable envers des gens qui ont été
élus par la population. Tant qu'ils ne sont pas battus, ils ont encore
la confiance de cette population.
Une voix: C'est cela. C'est cela.
M. Guay: J'invoque le règlement, M. le
Président.
M. Doyon: M. le Président...
M. Guay: J'invoque le règlement, M. le
Président.
M. Doyon: Ma réponse n'est pas encore terminée, M.
le Président.
Une voix: Assoyez-vous!
M. Guay: J'ai posé une question...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint, je
ne voudrais pas... S'il vous plaît! S'il vous plaît! À
l'ordre: Ce que je ne voudrais pas, M. le leader adjoint, c'est que cela
devienne un dialogue. Vous avez le droit de poser une question de
règlement. Je vais vous la permettre, mais je voudrais éviter
qu'un dialogue débute. M. le leader adjoint.
M. Guay: M. le Président, ma question de règlement
est très simple. Elle porte sur la pertinence. Loin de moi l'idée
de blâmer le député de Louis-Hébert d'avoir fait
valoir ses droits. J'en suis heureux pour lui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je m'excuse, mais c'est une question d'opinion et,
à moins que le député de Louis-Hébert n'ait
terminé, je donnerai la parole au député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Je vais terminer, M. le Président.
M. Guay: Une demande de directive.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Une demande de directive
de la part du leader adjoint.
M. Guay: M. le Président, par quel moyen dois-je
m'adresser à vous pour que le député de
Louis-Hébert, à qui j'ai posé une question, réponde
à la question sur l'attitude des maires de la communauté urbaine
à son endroit, peu importent ses droits?
M. Pagé: M. le Président, j'ai une question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip de
l'Opposition.
M. Pagé: Je comprends que le député de
Taschereau n'a pas souvent eu l'occasion de poser des questions à
l'Assemblée nationale. Il vient de le faire à mon honorable
collègue le député de Louis-Hébert, mais qu'il
fasse comme nous, qu'il attende les réponses et la réponse va
être longue. Vous allez constater que, pour une fois, la réponse
va être complète, intégrale, longue et explicative. Si vous
avez des questions additionnelles, vous les poserez.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! En
terminant, M. le député Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. M. Guay: Dois-je
comprendre...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je pense qu'on commence
quelque chose qui, à cette heure-ci, ne devrait pas se faire. M. le
leader adjoint.
M. Guay: Je voudrais tout simplement savoir, M. le
Président, si je puis déduire des propos du whip en chef de
l'Opposition officielle que j'ai obtenu le consentement de poser des questions
additionnelles au député de Louis-Hébert.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: M. le Président, il faut qu'une chose soit
claire. Quand j'ai été élu député de
Louis-Hébert le 5 avril - c'était le 5 avril, M. le
Président, je pense que les gens d'en face s'en souviennent - à
ce moment-là, j'ai pris un engagement envers moi-même et envers la
population qui m'a élu, c'est-à-dire d'être le
représentant de tout le monde et de tenir compte du choix qu'ils avaient
fait à tous les niveaux de gouvernement. Ce n'est pas parce que le
député de Vanier n'est pas reconnu par les maires de la
région de Québec qu'il cesse de siéger légitimement
ici à l'Assemblée nationale. Le droit et l'obligation que j'ai de
tenir compte de l'opinion des maires démocratiquement élus dans
toute la région de Québec exigent de faire passer les
intérêts supérieurs de la collectivité que je
représente avant certaines récriminations personnelles que je
pourrais avoir et ce n'est pas toujours facile. Au lieu de m'en faire le
reproche, les députés d'en face devraient être heureux que
je m'élève jusqu'à ce niveau, parce que ce n'est pas
facile. Mon intention est de continuer d'agir de cette façon parce que
c'est la seule façon qui puisse être acceptable dans notre
régime démocratique. Si on veut m'en faire reproche, c'est le
genre de reproche que je suis prêt à prendre n'importe quand.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Une voix: Une autre question, M. le Président.
M. Guay: Ai-je droit à une question additionnelle?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, vous avez droit
à une question additionnelle, mais c'est juste pour garder le calme et,
deuxièmement...
M. Bissonnet: On est calme.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jeanne-Mance...
M. Bissonnet: Oui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Une fois. Je veux
simplement dire à cette Assemblée que le dialogue qu'on semble
établir n'est pas pertinent à ce débat et,
d'autorité, je pourrais l'arrêter, à moins que... Il me
semble qu'il y a d'autres moments pour poser ces questions. Justement, ce que
j'ai voulu faire tout à l'heure en vertu de l'article 100,
c'était d'en arriver à faire en sorte qu'on débatte la
deuxième lecture du projet. Je pense que, dans ces circonstances, je
donnerai la parole au député de Brome-Missisquoi.
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: C'est trop de générosité, M. le
Président, merci. J'interviens en deuxième lecture dans le cadre
du projet de loi no 92, Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les municipalités.
Comme ce projet de loi traite des ententes qui peuvent être prises
entre les municipalités, comme ce projet de loi traite de la loi sur
l'aménagement, j'y consacrerai l'essentiel de mon discours. On a
entendu, dans son discours d'introduction, l'honorable ministre des Affaires
municipales nous parler de la cordialité qui règne entre lui et
les édiles municipaux du Québec. On a entendu l'honorable
ministre des Affaires municipales nous parler des suggestions qu'il recevait de
la part des édiles municipaux et qu'il s'empressait de codifier, de
mettre en loi et de présenter à l'Assemblée nationale du
Québec. Ce serait antiparlementaire - je vous le concède - de
dire que le ministre des Affaires municipales a honteusement menti en cette
Chambre. Je vais strictement, pour demeurer dans des termes parlementaires, me
contenter de vous faire la preuve que ce n'est pas ce qui se passe dans toute
la province de Québec. Ce n'est pas ce qui se passe, comme vous l'a
souligné le député de Hull dans son allocution, dans la
MRC de sa région. Ce n'est pas ce qui se passe dans la MRC de
Vaudreuil-Soulanges; ce n'est pas ce. qui se passe dans la MRC d'Acton; ce
n'est pas ce qui se passe dans la MRC de l'Amiante; ce n'est pas ce qui se
passe dans la MRC du Haut-Saint-François. Votre collègue, s'il
n'occupait pas les fonctions de président de cette Chambre, pourrait
dénoncer le ministre des Affaires municipales également. Ce n'est
pas ce qui se passe dans la MRC du Témiscouata; ce n'est pas ce qui se
passe dans la MRC de l'Or-Blanc; ce n'est pas ce qui se passe, comme on l'a vu
par le dépôt d'une pétition récemment, dans la MRC
de la Beauce; ce n'est pas ce qui se passe non plus dans la MRC de
Brome-Missisquoi. On tentera rapidement de faire le tour du
problème.
Pour les citoyens qui n'ont pas encore eu à subir les effets de
cette loi, on regardera un peu de quelle façon une MRC se forme, de
quelle façon le ministre veut que nous, comme citoyens dans chacune de
nos régions, par nous-mêmes, par la voie de nos associations, par
la voie de nos représentants municipaux, nous définissions une
région d'appartenance. Le ministre, en bon communicateur qu'il est, en
bon propogandiste, a publié un dépliant à cet
égard. Il vous dit: Chez vous, votre MRC, votre région
d'appartenance, voici comment vous la définirez. Ce n'est pas
compliqué. Prenez une carte, mettez-là sur le mur et reliez les
points suivants: Où allez-vous pour faire vos emplettes? Vous pourriez
faire cela, M. le Président. Où allez-vous pour rencontrer votre
médecin? Suivez le point et vous aurez délimité votre
carte. Où allez-vous pour vos affaires: banques, commerces, palais de
justice, bureaux d'enregistrement? Où allez-vous pour vos loisirs? Vous
continuez à suivre la ligne sur la carte. Où se situe la
polyvalente et le cégep le plus près de chez vous?
L'hôpital? À quelle ville ou village, à partir de quelle
rivière, de quelle montagne considérez-vous que ce n'est plus
chez vous? (Minuit)
Là, ce que vous avez, c'est une région d'appartenance,
c'est une zone d'appartenance. De façon à les délimiter,
de façon à avoir un rapport dans chacune des régions du
Québec, le ministre a établi des comités de consultation.
Ces comités étaient composés d'une personne de
Brome-Missiquoi nommée par le ministre, un de ses amis. Un autre a
été suggéré par l'Union des municipalités du
Québec; cela a été le maire de Cowansville chez nous. Un
autre a été suggéré par l'Union des conseils de
comté; cela a été le préfet du comté de
Brome chez nous, maire de la municipalité d'Austin. Ces gens ont fait
des consultations, ont rencontré des municipalités et ont fait le
petit jeu de la carte. Avec le petit jeu de la carte, cela a donné,
unanimement, dans la région, deux MRC, une pour le coin de Brome,
l'autre pour le coin de Missisquoi. Qu'est-ce qui est arrivé? Les deux
élus municipaux, les deux maires qui avaient fait de la véritable
consultation ont soumis un rapport au ministre qui disait: Voici ce que les
gens veulent après les avoir consultés. L'autre, l'homme de main,
l'homme de paille du ministre...
M. Pagé: M. le Président, c'est une question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur une question de
règlement, M. le whip.
M. Pagé: Je m'excuse. Il est minuit deux minutes. Comme
vous le savez, les commissions parlementaires ne peuvent siéger
après minuit. Les règlements de cette Chambre indiquent que le
quorum des députés doit être d'au moins trente
députés présents. Vous remarquerez qu'il y a une bonne
vingtaine de députés libéraux, ou à peu
près, et deux ou trois députés péquistes seulement
pour venir appuyer le ministre des Affaires municipales qui est blotti et
caché dans le fond de la salle là-bas. M. le Président,
j'appelle le quorum et on apprécierait avoir la présence des
députés péquistes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Guay: M. le Président, il est peut-être exact que
nous n'avons pas quorum, vous allez avoir à le constater tantôt.
Je voudrais seulement faire remarquer que le député de Portneuf a
compté une vingtaine de députés libéraux, ils sont
à peine dix.
C'est la façon de compter les finances libérales à
Ottawa: dix équivaut à vingt. Ils ne sont même pas dix
à l'heure actuelle en Chambre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous allons constater le
quorum. Nous allons appeler les députés.
(Suspension de la séance à 0 h 03)
(Reprise de la séance à 0 h 08)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Nous avons maintenant quorum. M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, maintenant que vous avez
constaté le quorum, nous serons en mesure d'établir de quelle
façon le Parti québécois se comporte au niveau de la
consultation des maires, au niveau de la consultation des édiles
municipaux, au niveau de la consultation de la population. J'en étais
donc à vous raconter l'histoire de la formation de la MRC dans le
comté de Brome-Missisquoi.
Le comité consultatif était donc composé de l'homme
de main du ministre, du maire de la ville de Cowansville, du maire de la
municipalité d'Austin, préfet du comté de Brome. Ces trois
personnes du comité consultatif ont produit deux rapports, un fait par
les élus municipaux qui avaient procédé à une
véritable consultation du milieu, l'autre probablement dicté par
le ministre des Affaires municipales ou par les fonctionnaires, des cartes
géographiques dessinées dans les grands bureaux de
Québec.
À la suite du dépôt de ce rapport, l'ensemble des
maires des deux parties du comté de Brome-Missisquoi, ceux de Brome et
ceux de Missisquoi ont présenté des requêtes pour
l'obtention de lettres patentes au ministre des Affaires municipales. Ils
attendent toujours la réponse du ministre. Le ministre ignore cette
demande des édiles municipaux, le ministre ignore cette demande de la
population et c'est de cette façon qu'il traite cette région du
Québec. Le ministre par la suite a procédé à une
opération de déchiquetage du comté. Le ministre a pris la
municipalité de Bromont, l'a envoyée avec la MRC de la
Haute-Yamaska, a pris des municipalités à l'est du comté
et les a envoyées de l'autre bord du lac Memphrémagog. Il a pris
des municipalités à l'ouest du comté et là, il les
a divisées en plein milieu du lac Champlain. (0 h 10)
Lorsque j'ai rencontré le ministre pour lui demander quel
était son raisonnement -et là, il faut situer le comté de
Brome-Missisquoi, le lac Champlain, un lac international à un bout, le
lac Memphrémagog, un lac international à l'autre bout, la
frontière du Vermont, l'autoroute des Cantons de l'Est - il m'a
expliqué son raisonnement en disant: Oui, mais lorsqu'on parle
d'aménagement, il faut garder les communautés des deux rives du
lac ensemble, quelle que soit la dimension du lac. J'ai dit: Oui mais, M. le
ministre, à un bout du comté, vous les gardez ensemble et
à l'autre bout, vous divisez en plein milieu du lac. J'ai conclu, la
population a conclu que c'était de la logique péquiste, de la
logique de ministre péquiste.
Qu'est-ce que les maires ont fait? Les maires, dans le but de
défendre les intérêts de la population qu'ils
représentaient, la population qui les avait élus, la population
qu'ils avaient consultée, se sont réunis et ont tout simplement
renié l'homme de main du ministre des Affaires municipales. Je vous
exhibe, ici, un article du journal La Voix de l'Est, qui s'intitule: Les maires
renient Bonin, l'homme de main du ministre des Affaires municipales.
Par la suite, le maire de la ville de Lac-Brome, M. Homer Blackwood, m'a
écrit pour me donner son opinion sur la façon de procéder
du ministre des Affaires municipales. Voici ce que disait, le 13 novembre 1981,
le maire de la ville de Lac-Brome: "On behalf of the people I represent in the
Ville de Lac Brome, and also I believe to be of the same opinion of all the
municipalities in Brome-Missisquoi County, I would like to protest against the
unethical manner in which we are being treated with regard to Bill 125, la Loi
sur l'aménagement et l'urbanisme. "At the meeting held on November 12th
1981, in Cowansville, which was originated by the Comité de consultation
Missisquoi, I made the following motion, which was seconded and unanimously
approved by 24 mayors present. "
Voici la motion, M. le Président. "We, the Mayors of this
meeting, deplore the fact that, in a democratic society, in the year 1981, that
the meeting chaired by a single person, called the committee, for the purpose
of dividing the two counties as one would dissect an animal, no invitation has
been extended to both prefects of the two counties. The committee had no
representative of the Union des municipalités du Québec. The
Mayor of Bromont, who represents an important part of the county, was not
invited. The President of the Comité de consultation Missisquoi was,
according to him, authorized verbally to proceed with the dissection of the
counties by a "fonctionnaire" in Mr. Leonard's office in Quebec. "
Le maire de la ville de Lac-Brome continue: "It would also seem
deplorable that Mr. Leonard, who headed the government on
bill 125, has found it convenient to be unavailable for comments or
direct consultation. "Needless to say, when the Comité de consultation
Missisquoi indicated that he had only a single authority, which was unilateral,
the meeting ended with a unanimous vote of non-confidence in the committee. "I
shall be in touch with you, upon your return from Europe. Hopefully, by this
time, you will be able to get some clarification on this subject before we are
railroaded out of the province. How would you like to be president of the
Republic of Brome-Missisquoi? "Best regards. "Homer Blackwood, Mayor".
The letter was addressed to the Brome-Missisquoi MNA. "
M. le Président, c'est la façon dont on a traité le
maire de la ville de Lac-Brome. C'est la façon dont le maire de la
municipalité d'Abercorn, M. Tremblay, a été traité.
Il écrivait au ministre, disant: "M. le ministre, le sujet qui me
désappointe le plus, c'est de voir que vous nous avez fait courir
pendant six à huit mois à des consultations pour nous aider
à déterminer, à nos frais, la MRC avec laquelle on
pourrait le mieux s'entendre et qui serait de notre appartenance commune.
Après toutes ces démarches, vous ne prenez même pas la
décision majoritaire du comité de consultation, mais bien la
décision de celui qui s'est fait connaître pour le
président du comité, qui était un de vos employés
et qui n'avait même pas le choix d'une décision à vous
donner. "Est-ce cela votre démocratie municipale? Bien, M.
Léonard, je vous souhaite bonne chance, sans ma participation ni celle
des maires Bélisle, Groulx, Messier, Blackwood, etc. Si vous ne me
croyez pas, faites donc un petit sondage dans le milieu, ou encore mieux,
référez-vous à la correspondance de la commission scolaire
Davignon des années 64 et vous verrez que ce que vous voulez
réaliser ne se fera jamais dans la bonne entente et la
coopération nécessaire pour conduire votre projet à bon
port. "
Le maire de la ville de Bedford, en date du 20 septembre 1982, a
écrit au ministre et tenu les mêmes propos. "Le ou vers le 16
septembre 1982, nous recevions votre missive du 7 septembre 1982 nous indiquant
encore votre volonté de former la MRC selon les prévisions
ministérielles. De plus, en autant que nous interprétions bien
votre lettre, on nous forcerait à former ladite MRC et ceci,
malgré la volonté contraire de onze maires qui tiennent toujours
à une petite MRC parce qu'ils respectent le sentiment de leurs
contribuables, tout en respectant les exigences, surtout le principe
d'appartenance, énoncées à la loi 125. " C'est
signé par le maire Bernard Bélisle de
Saint-Pierre-de-Véronne, Jules Bélisle de Farnham, Jean-Julien
Caron de Philipsburg, Zéphirin Fortin du canton de Bedford, Jules Groulx
de Bedford, Maxime Hamond de Saint-Armand-Ouest, Thomas Lebeau de Rainville,
Albert Melaven de Notre-Dame-de-Stanbridge,
Lucien Messier de Stanbridge-Station, Maurice Ouellette de
Saint-Ignace-de-Stanbridge. Il manque la signature du maire de Sainte-Sabine,
M. Wilfrid Laroche qui était candidat à la convention
péquiste et qui a préféré marcher suivant la
volonté du ministre, plutôt que suivant la volonté de sa
population.
M. le Président, tous ces maires ont été
appuyés par l'ensemble des intervenants du milieu. Qu'il s'agisse de
commissions scolaires, de CLSC, de clubs de fermières, de chambres de
commerce, le ministre a complètement ignoré les demandes du
milieu et c'est ce qu'il appelle de la consultation. Oui, M. le
Président, de la consultation péquiste et de la
négociation péquiste! Vous savez comment cela fonctionne, la
négociation péquiste? Il y a un ministre ou un de ses
fonctionnaires qui s'assoit à une table. Il réunit les maires et
leur dit: Vous avez une soirée pour vous décider et, si vous ne
vous décidez pas comme je vous l'ai dit au début de la
réunion, le ministre vous passera un décret. C'est cela qu'il a
fait avec un grand nombre de MRC et c'est cela qu'ils vont faire demain avec
leurs employés. C'est un gouvernement qui n'a plus la confiance de la
population, qui n'a plus la confiance de ses employés, qui n'a plus la
confiance des maires, qui n'a plus la confiance des chambres de commerce, qui
n'a plus la confiance des travailleurs. C'est un gouvernement qui est
obligé de fonctionner par décrets, parce qu'il pense qu'il a le
monopole de la vérité. C'est cela, les négociations
péquistes, M. le Président.
Pourquoi les maires de toutes ces MRC que je vous ai
énumérés et toute cette population s'inquiètent? On
l'a vu cet après-midi, c'est parce qu'on est encore en train de monter
de la structure péquiste. Un gouvernement qui souffre de structurite. On
a vu, cet après-midi, dans le cadre d'un autre projet de loi, ce
qu'avait coûté le système électoral: 86 000 000 $ en
deux ans. Combien vont coûter les MRC? Le ministre n'a jamais
donné de chiffres aux élus municipaux, n'a jamais donné de
chiffres à la population. Quelles vont être les véritables
responsabilités? Un schéma d'aménagement? Voyons donc, M.
le ministre, le comté de Brome-Missisquoi, c'est zoné agricole
d'un bout à l'autre, même dans les Appalaches! Les villes qui sont
dans ce comté ont des règlements de zonage. Il reste à peu
près 0, 5% du territoire qui n'est pas zoné. Vous voulez faire
accroire à ces
maires-là, à la population, que la loi 125, c'est pour
faire des plans d'aménagement. Mais ils n'ont plus rien à
aménager. C'est peinturé vert d'un bout à l'autre et,
à l'intérieur des villes, ils ont déjà des
règlements d'aménagement.
Quelles sont vos véritables intentions? Les maires dans
Brome-Missisquoi et ailleurs dans la province s'inquiètent, parce que
vous n'avez jamais apporté d'éclaircissements, M. le ministre,
sur un mémoire qui a été présenté au Conseil
des ministres le 11 novembre 1981, qui a été reçu le 15
décembre 1981 au Conseil des ministres. Un mémoire de M.
François Gendron, ministre d'État à l'Aménagement,
qui dit que les MRC, c'est juste la pointe de l'iceberg et qu'après cela
il va y avoir des conseils régionaux d'intervention où va
siéger, pour régler les problèmes des régions, un
fonctionnaire, qui va mener le bateau, délégué à
l'action régionale, où vont siéger non plus les
conseillers municipaux qui travaillaient bénévolement, non plus
nos maires de municipalités, mais strictement les préfets de
comté et les députés. Vous voyez cela pour mener l'action
municipale dans les régions du Québec, un fonctionnaire pilote
d'une autre "bebelle-crash", des préfets et des députés?
Ils vont s'occuper des chicanes de clôture, des routes, des cours d'eau,
de tout cela. (0 h 20)
On va se priver d'un paquet de ressources humaines qu'on a. Ce sont nos
conseillers municipaux présentement. On est en train de leur enlever
tous les pouvoirs. On va se priver d'un paquet de ressources humaines chez nos
maires qui ne seront pas tous préfets de MRC, c'est officiel, et tous
ces gens-là seront mis au rancart et seront remplacés par un
fonctionnaire délégué à l'action régionale.
Qu'arrivera-t-il avec cela? Savez-vous pourquoi? Parce que tout cela se place
dans la petite opération "Ottawa-Crash". Cela se trouve dans le dernier
paragraphe de ce petit papier qui a circulé au Conseil des ministres, je
vois le ministre sourire, mais il n'a jamais expliqué ce qui
était arrivé et quelles étaient les véritables
intentions. Va-t-il nier que le ministre Gendron a déposé ce
papier-là? Va-t-il nier que c'est la structure qu'il propose et qui s'en
vient? Va-t-il nier que le dernier paragraphe s'intitule Relations
fédérales-provinciales? Ecoutez bien cela, M. le
Président. "Le ministre de l'Expansion économique
régionale du gouvernement fédéral est en train de revoir
sa politique. Au cours des derniers mois, un comité de la Chambre des
communes a tenu des audiences au Québec en vue de rajuster les actions
de ce ministère. Certains organismes ont présenté des
mémoires. Une campagne de publicité est d'ailleurs en cours qui
présente le MEER comme l'organisme qui oeuvre avec les gens des
régions. Les risques - écoutez bien cela - de voir s'abattre une
aide directe à des organismes régionaux ne sont pas à
négliger. Il y a des risques qu'Ottawa aide les régions. Les
municipalités régionales de comté, qui amorcent leur
schéma d'aménagement et auront besoin de financement pour le
mettre oeuvre, seront des proies attrayantes. Aussi devrons-nous rapidement
mettre en place des mécanismes en vue de canaliser ces relations
directes. "
Quand Ottawa n'aide pas, on crie contre Ottawa. Quand Ottawa veut aider,
on fait tout pour le bloquer. Quelle est votre politique dans ce domaine?
Pourquoi voulez-vous contrer l'aide d'Ottawa aux régions? Si les
régions ont besoin de l'aide d'Ottawa, ce n'est pas compliqué,
c'est parce que vous n'en apportez pas. Tout ce que vous faites c'est leur
nuire. Vous ne les écoutez pas, vous ne les consultez pas, vous leur
imposez des décrets, vous les taxez à outrance et vous voulez
contrer Ottawa qui veut les aider. Quel genre de politique régionale
avez-vous?
Je m'excuse de parler aussi fort au ministre. Je m'excuse de parler si
violemment au ministre. Mais cela fait deux ans que les maires des
municipalités de Brome-Missisquoi, que d'autres maires d'autres
régions du Québec tentent de lui expliquer ce qu'est la
consultation, tentent de lui expliquer ce qu'est de la négociation,
tentent de le convaincre de présenter un projet de loi qui tienne compte
des réalités du milieu, un projet de loi qui tienne compte des
régions d'appartenance, un projet de loi qui tienne compte et qui
respecte les gens des régions, leurs édiles municipaux, leurs
groupes intermédiaires, et leur commission scolaire. Ils vous demandent
d'avoir du respect. Ils s'aperçoivent que vous n'avez pas de respect
pour les autres autorités de gouvernement, pour le système
judiciaire, et pour vos fonctionnaires. Ils s'aperçoivent maintenant que
vous n'avez même pas de respect pour votre parole et votre signature.
Savez-vous ce qu'ils feront aux prochaines élections avec des gens qui
ont perdu le respect complet de la société? Ils vont vous sacrer
dehors et ils s'équiperont comme il faut en région, avec des
plans de développement suivant leur région d'appartenance et ils
travailleront avec les deux niveaux de gouvernement de façon à
bâtir des régions qui seront à l'avant-garde du
progrès économique dans la province de Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre
délégué à l'Habitation.
M. Gauthier: M. le Président, juste une question de
privilège. Cela prendra deux secondes. On a induit cette Chambre en
erreur. Le député de Brome-Missisquoi a induit la Chambre
en erreur. Je voudrais rectifier les faits. Je pense qu'il est dans l'ordre des
choses de le faire. Lorsque le député de Brome-Missisquoi dit que
le Parti québécois et le gouvernement du Parti
québécois ont nui aux régions et font tout pour
détruire les régions...
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: II sera loisible au député de Roberval
d'intervenir, s'il le veut; il a son droit de parole - je ne suis pas sûr
s'il l'ait exercé - mais ce n'est certainement pas une question de
privilège s'il n'est pas du même avis que le député
de Brome-Missisquoi.
M. Gauthier: Ce n'est pas cela, M. le Président. Je veux
rétablir les faits.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît;
Rapidement.
M. Gauthier: M. le Président, je voulais simplement
signaler - et c'est là l'erreur dans laquelle le député de
Brome-Missisquoi a tenté d'induire cette Chambre - qu'il y a cinq
régions du Québec où les députés
péquistes forment la totalité de la députation. Alors, je
trouve que le Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, la Gaspésie, le
Bas-du-Fleuve...
M. Lalonde: Écoutez là...
M. Gauthier:... l'Abitibi-Témiscamingue...
M. Lalonde: II y a quand même une limite, M. le
Président.
M. Gauthier: C'est l'évidence... M. Lalonde: M. le
Président.
M. Gauthier:... que le Parti québécois aide les
régions.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Je vois le leader du gouvernement qui applaudit
à tout rompre l'intervention du député de Roberval. Je ne
sais pas, M. le Président, si vous pouvez lui rappeler qu'est-ce que
c'est qu'une question de privilège. Cela pourrait peut-être
accélérer les débats dans les jours qui viennent.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Guy Tardif
M. Tardif: M. le Président, je n'ai pas pu
m'empêcher, après avoir entendu le député de
Brome-Missisquoi et certaines autres interventions avant, de relever un certain
nombre d'affirmations et particulièrement, lorsque le visage tout rouge,
il disait: Comment se fait-il que l'on empêche Ottawa d'aider les
municipalités du Québec alors que nous ne faisons rien,
soi-disant, pour aider ces municipalités? Alors, j'inviterais le
député de Brome-Missisquoi à faire un petit exercice
élémentaire qui consiste à prendre le livre des
crédits, des sommes qui sont versées par l'État
québécois aux municipalités et de faire la même
chose à partir des subventions qui sont versées comme "en lieu"
de taxes sur les immeubles fédéraux. Il se rendra compte, M. le
Président, que le gouvernement du Québec verse aux
municipalités des taxes qui s'élèvent à près
de 400 000 000 $ par année alors qu'Ottawa, ne payant pas ses taxes,
verse des gratifications qui ne s'élèvent même pas à
un dixième de cela, même pas 30 000 000 $ par année. Et
c'est lui qui vient nous dire qu'Ottawa veut aider les municipalités du
Québec. Mais, M. le Président, on n'en veut pas de leur
charité! Les maires n'en veulent pas de la charité d'Ottawa! Ils
disent à Ottawa: Payez donc vos taxes sur vos immeubles! C'est cela
qu'ils disent, M. le Président, et c'est cela qu'on fait, nous.
M. le Président, j'ai entendu l'Opposition parler, notamment le
député de Verdun et d'autres, d'un projet de loi omnibus
extrêmement lourd, disent-ils, déposé si tard dans la
session. Bien, M. le Président, il y a quand même un certain
nombre de choses que le député-maire de Verdun et le
député de Hull, ex-maire de la même municipalité,
devraient savoir. C'est que les municipalités, aussi bien au
Québec que n'importe où ailleurs dans les autres provinces, n'ont
de pouvoirs que ceux que leur délègue l'Assemblée
nationale. C'est toute l'économie du droit municipal qui veut que l'on
confère aux municipalités le droit de faire des règlements
dans tel domaine ou dans tel autre. Or, M. le Président, le monde
municipal, n'en déplaise aux gens d'en face, n'est pas un monde
statique. C'est un monde dynamique et, par définition, un monde
dynamique ça bouge. Cela change et la preuve est que bon nombre
des députés d'en face ont déposé, pour certaines de
leurs municipalités, des projets de loi privés. À toutes
les sessions, à ce moment-ci, c'est la même chose parce que c'est
là une autre des façons de faire évoluer le droit
municipal que de déposer des projets de loi privés, des chartes
privées, de façon à conférer à certaines
municipalités des pouvoirs que parfois le législateur va
décider à dessein, avant de les étendre à
l'ensemble du monde municipal, de les "tester" dans une, deux ou trois
municipalités afin de voir comment ceci va fonctionner. (0 h 30)
Une autre des façons, évidemment, c'est, par un projet de
loi semblable, de conférer aux municipalités des pouvoirs ou des
amendements à la Loi sur les cités et villes ou au Code
municipal. Qu'on vienne se surprendre qu'il y a au-delà de 300 articles;
ce n'est pas sérieux, quand on sait qu'il y en a au moins 150 qui sont
répétés, puisqu'on retrouve à peu près 150
articles qui traitent de la Loi sur les cités et villes et l'autre
moitié, du Code municipal. Il y a donc une répétition et
la longueur comme telle n'est pas un argument sérieux dans ce cas.
Le député de Louis-Hébert, particulièrement,
a fait état d'une contribution de la Commission de refonte du droit
municipal à laquelle il a travaillé et qui est une contribution
indéniable à un travail de codification du droit municipal.
Cependant, je dois lui dire, puisque j'ai reçu cet ensemble assez
volumineux à l'époque, qu'il y a toute la différence au
monde entre une commission de refonte et une commission de réforme du
droit municipal.
Ce n'est pas faire injure ni au député de
Louis-Hébert, ni aux membres de la commission que de dire que dans cette
refonte, on aurait cherché en vain l'ombre d'une trace de réforme
de la chose municipale. Vous me direz que ce n'était pas là leur
mandat, on s'était borné à prendre l'ensemble des chartes
privées du Code municipal et de la Loi sur les cités et villes et
d'en proposer une nouvelle codification. Mais, c'est un processus relativement
statique; c'est un processus qui pouvait être utile aux avocats, aux gens
qui travaillent dans le monde municipal comme tel, mais certainement pas pour
faire évoluer le droit municipal. Or, au lieu de nous livrer à
cet exercice qui aurait consisté à répéter en
d'autres mots les vieilles lois, nous avons préféré en
faire de nouvelles, notamment dans un domaine que les municipalités
revendiquaient depuis longtemps, cette fameuse réforme sur la
fiscalité municipale que le ministre des Finances de l'ancien
gouvernement avait dit qu'il ne pouvait pas réaliser. Mais nous avons
choisi de réaliser cette réforme sur la fiscalité
municipale.
N'en déplaise, encore une fois, au député de Verdun
qui disait: Oui, la loi no 57 a été bonne à ses
débuts, mais maintenant, elle l'est moins, je maintiens et je mets au
défi la plupart des représentants du monde municipal qui, comme
le député de Verdun, laisseraient entendre semblable chose, que
l'ancien régime aurait pu être plus payant. Il n'y a rien de moins
vrai quand on sait que les revenus provenant de la taxe de vente -cela se
vérifie dans les livres des crédits du gouvernement - ont
baissé à partir du moment où une partie des revenus des
municipalités était accrochée à la taxe de vente.
Eh bien, je leur dis une chose: les municipalités n'ont qu'à
remercier le Ciel que cette réforme ait eu lieu avant que ce
phénomène de la baisse de la taxe de vente se manifeste comme il
l'a fait.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Tardif: La municipalité de Verdun, pour les deux
premières années de la réforme de la fiscalité,
1980 et 1981, a réussi à accumuler des surplus de 6 000 000 $. Je
me souviens que dès la première année, pour 1980, la ville
de Montréal a payé comptant 42 000 000 $ à la
Communauté urbaine de Montréal, comme étant sa quote-part
au transport en commun. Comptant! Effet net de la réforme sur la
fiscalité.
Sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal,
notamment, les surtaxes qui frappaient les immeubles évalués
à plus 100 000 $, et il y en avait trois: 1, 12 $ au scolaire, 0, 60 $
pour la Communauté urbaine de Montréal et 0, 435 $ pour la ville
de Montréal; en tout, 2, 25 $ des 100 $ d'évaluation de surtaxe
qui ont été abolis du jour au lendemain grâce à la
réforme de la fiscalité.
Sur le territoire de la ville de Montréal, le gouvernement du
Québec paie en taxes 60 000 000 $, alors que les "en lieu" pour le
fédéral, encore une fois, sont à peine le dixième
de cela. Je faisais préparer un rapport ces jours derniers pour savoir
quel était le montant des taxes foncières que nous payons aux
municipalités sur nos HLM. Ce montant, à lui seul,
représente 37 000 000 $, c'est-à-dire plus du double du fameux
10% que les municipalités contribuent au déficit d'exploitation
des HLM. C'est cela que vaut le régime sur la fiscalité
municipale. Évidemment, je pense qu'il n'y a aucun maire, y compris
celui de Verdun ou celui de Hull, qui voudrait revenir à l'ancien
régime paternaliste de subventions qu'on allait quêter à la
porte du ministre des Affaires municipales. Aucun maire que je connais ne
voudrait revenir à cet ancien régime. On a acquis une autonomie
de financement et je pense que sur ce plan les réformes dans le monde
municipal sont des
plus appréciées. Ce que je dis au député de
Brome-Missisquoi, lorsqu'il parle d'aide, si tant est qu'on a en face de nous
une succursale du Parti libéral fédéral à Ottawa,
c'est tout simplement de dire à vos petits amis à Ottawa qu'ils
paient leurs taxes au Québec, tout simplement.
Un autre domaine où il y a eu...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Tardif: Un autre domaine où des mesures ont
été apportées au cours des années, qui me
paraissent, encore une fois, beaucoup plus importantes que les travaux de cette
commission de refonte, c'est dans le domaine de la démocratie
municipale. On sait, M. le Président, que dans toutes les petites
municipalités au Québec, il y a un maire et six conseillers. Or,
on était rendu sur le territoire, notamment, de la Communauté
urbaine de Montréal, que les municipalités qui dépassaient
les 100 000 habitants avaient toujours un seul maire et six conseillers. Aucune
corrélation entre la taille d'une municipalité et la taille du
conseil! Le financement des partis politiques, on sait comment cela se passait.
On a introduit des mesures correctrices à ce sujet. Même chose en
ce qui concerne la publicité à donner aux faits et gestes de la
municipalité en termes d'amendements aux règlements de zonage;
sur le plan de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
énormément de mesures ont été prises
également. La plus originale... J'entendais le député de
Brome-Missisquoi qui faisait état de différentes lettres qu'il
avait reçues. Est-ce qu'on sait bien que dans ce cas le gouvernement du
Québec a été éminemment respectueux des
municipalités? Pourquoi l'a-t-il été? Comment l'a-t-il
été? De deux manières. D'abord, il n'a pas
découpé le territoire lui-même, il a laissé aux
élus locaux le soin de le faire et, deuxièmement, on n'a
même pas prévu de structure d'organisation pour les
municipalités, les laissant libres de choisir leur mode de
représentation. S'il y a quinze municipalités qui décident
d'avoir une voix par municipalité ou qu'elles décident d'avoir un
vote pondéré, totalement ou partiellement, liberté totale
a été donnée aux municipalités sur ce plan.
Le dernier point, M. le Président, que je voudrais souligner,
c'est un des passages de cette loi no 92 qui dit, à l'article 58: "Une
corporation locale peut, par règlement, aux conditions et dans les
secteurs de la municipalité qu'elle détermine,
décréter que la corporation accorde, à l'égard de
bâtiments ou de parties de bâtiments reconstruits,
rénovés, restaurés, agrandis ou transformés
conformément à un programme de revitalisation, des subventions
ayant pour objet de compenser l'augmentation des taxes foncières pouvant
résulter de la réévaluation de tels bâtiments
après la fin des travaux. "
Si on continue plus loin, on constate que les municipalités
pourront, conformément au pouvoir général qui leur a
été accordé par la loi no 82 sur Corvée-habitation,
donner des subventions à la contruction neuve et, là-dessus, je
tiens à féliciter les municipalités. Au-delà d'une
centaine d'entre elles ont décidé d'embarquer dans le programme
Corvée-habitation et d'en faire véritablement un
succès.
M. le Président, au mois d'août dernier, la construction
était littéralement paralysée à la suite des taux
d'intérêt exorbitants qu'on avait connus et qui nous ont
été imposés par la Banque du Canada. Or, M. le
Président, au mois d'août dernier, c'est à peine 800
logements qui ont été mis en chantier au Québec; au mois
de septembre, c'était 1300 logements et, au mois d'octobre, 2600
logements ont été mis en chantier. C'est une augmentation de 76%
par rapport à l'année précédente. Cela s'est fait
de façon relativement plus rapide que dans les autres provinces, de
même que dans la région de l'Outaouais, parce que la part du
Québec au mois d'août était de 12%, alors qu'au mois
d'octobre elle était rendue à 26, 2% de la construction totale au
Canada. C'est donc dire qu'il y a eu un effort particulier qui a
été fait sur ce plan. (0 h 40)
Donc, voici maintenant que les municipalités pourront, en plus de
l'aide qu'elles pourront apporter à la construction neuve, y aller d'une
aide à la restauration qui pourra leur permettre d'accorder des
subventions équivalant à la totalité des taxes
foncières, augmentées la première année à
cause de la restauration, et, la deuxième année, une subvention
équivalant à 50% de cet accroissement des taxes foncières.
Voilà ce que, par des mesures semblables, il nous est permis de faire
dans un projet de loi omnibus. Encore une fois, ces projets de loi omnibus ont
précisément comme but de donner aux municipalités les
outils dont elles ont besoin, ont pour but de créer les conditions qui
leur permettront d'accomplir à l'endroit de leurs citoyens toutes les
charges et tous les services que ces derniers attendent d'elles. On a dit: II
s'agit d'un projet de loi lourd, il s'agit d'un projet de loi qui, encore une
fois, ne refond pas entièrement le droit municipal. Je pense que ce
n'était pas là le but de cet outil de travail. Si, au lieu
d'improviser cette réplique en quelque sorte à certaines des
énormités que j'ai entendues, j'avais eu le temps de reculer dix
ans, quinze ans, en arrière, je suis convaincu qu'à toutes les
sessions, peu importent les gouvernements, on aurait trouvé un bill
omnibus pour répondre aux besoins des municipalités du
Québec.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, j'aimerais profiter de ce
débat de deuxième lecture du projet de loi no 92 pour très
brièvement, je l'espère, à moins qu'on ne me provoque de
l'autre côté, parler des MRC dans la région de l'Outaouais.
Et, de façon qu'on ne nous accuse pas, comme on le fait couramment et
comme cela a été le cas ce soir, de tenir des discours partisans
libéraux, je me limiterai simplement à énumérer les
doléances des associations du Parti québécois de
l'Outaouais à l'égard du découpage des territoires des MRC
de la région, soit celles de Gatineau, Papineau, Labelle,
Vallée-de-l'Or et Pontiac. Je souhaite ardemment que le ministre des
Affaires municipales, pour la première fois depuis qu'il a
décrété sa décision sur le découpage des
territoires, nous dise, dans sa réplique, ce qu'il entend faire pour
tâcher de donner satisfaction non seulement aux édiles municipaux,
mais à l'ensemble des citoyens de la région de l'Outaouais
vis-à-vis de ce problème aigu qu'il a, malheureusement,
lui-même créé.
J'ai ici un article du journal Le Droit, du mardi 30 novembre, et dont
le titre se lit comme suit: "Le PQ et le découpage de la MRC Papineau,
pas question d'accepter cela. Le Parti québécois de la
circonscription de Papineau multipliera les pressions politiques au cours des
jours qui viennent afin que les lacs Gagnon, Preston, du Sourd, La Minerve,
ainsi que les cantons de Gagnon et de Rocheblave soient donnés à
la future municipalité régionale de comté de Papineau.
Soulignant que, de tout temps, ces territoires avaient appartenu à la
Petite-Nation, Mme Constance Mainville, présidente de l'association
péquiste, a en effet indiqué qu'il n'était pas question
qu'on laisse d'autres MRC s'en emparer et que de nombreuses démarches
seraient faites dans les jours qui viennent afin d'inciter le ministre des
Affaires municipales, M. Jacques Léonard, à revenir sur sa
décision de céder ces territoires à d'autres
municipalités régionales de comté, dont celle
d'Antoine-Labelle. " Par pur hasard, c'est celle que représente le
ministre des Affaires municipales comme député du comté de
Labelle.
Je poursuis la lecture: "Un front commun régional regroupant les
cinq comtés de l'Outaouais a même été formé
sur cette question - c'est un front commun régional des associations
péquistes des cinq comtés de l'Outaouais qui a été
formé sur cette question - et une deuxième rencontre devrait
avoir lieu cette semaine avec un représentant du premier ministre et
l'un des membres du cabinet de M. Léonard, M. Guy Bertrand. " Cela,
c'est pour l'association péquiste du comté de Papineau.
Allons voir ce que l'association péquiste du comté de
Gatineau dit. On titre dans le journal La Gazette de Maniwaki, lundi, 15
novembre 1982, "Léonard et Gendron en conflit d'intérêts,
dixit le PQ de Gatineau. " "L'exécutif du Parti québécois
du comté de Gatineau s'oppose fermement à la décision
prise par le Conseil des ministres sur le découpage de la MRC,
Vallée de la Gatineau, accusant les ministres Jacques Léonard et
François Gendron d'être en conflit d'intérêts. "
Je le répète, mais je ne le répéterai pas
assez souvent, ce ne sont pas des libéraux, ce ne sont pas des
adversaires du Parti québécois qui s'expriment ainsi. Ce sont les
membres de l'association péquiste du comté de Gatineau. Je vous
fais grâce de l'ensemble des revendications. Cependant, je cite: "Pour
François Mathieu, président, il faut que Québec accorde
justice à la Haute-Gatineau. Questionné à savoir quels
seront les moyens que prendra ce parti pour faire amener des changements dans
le dossier, il a répondu que son exécutif les déciderait
au fur et à mesure de l'évolution de cette affaire?
Ce que je demande au ministre de nous dire, au moment de sa
réplique, c'est quelle suite il entend, lui, donner aux revendications
unanimes de la région et unanimes aussi, des cinq associations
péquistes des cinq comtés provinciaux de l'Outaouais qui lui
demandent de revenir sur la décision prise.
La dernière citation, M. le Président. Est-elle sur le
CRDO, le Conseil régional de développement de l'Outaouais. Le
vendredi 19 novembre 1982, on peut lire dans le journal Le Droit:
"Découpage de cinq nouvelles MRC. Le CRDO demande un délai. Le
Conseil régional de développement de l'Outaouais demande au
gouvernement du Québec de suspendre l'application du décret
concernant le découpage des municipalités régionales de
l'Outaouais et prie les ministres Jacques Léonard et François
Gendron, respectivement des Affaires municipales et de l'Aménagement de
fournir les raisons pour lesquelles le consensus régional qui avait
été atteint à ce sujet n'a pas été
respecté. "
Selon lui, le Conseil des ministres n'a pas respecté le consensus
établi entre les différents conseils de comté le 28
juillet dernier quant à la part du territoire de chacune des MRC. Il
s'agit là du CRDO. Ce n'est pas un organisme, une officine du Parti
libéral du Québec. C'est le Conseil régional de
développement de l'Outaouais, qui est censé être
l'interlocuteur privilégié du gouvernement dans la région
de l'Outaouais en ce qui touche la consultation du milieu. Le CRDO demande de
surseoir à l'application
du décret.
Non seulement les péquistes font l'unanimité, non
seulement les maires des conseils de comté des cinq comtés font
l'unanimité, non seulement les organismes à caractère
socio-économique de l'ensemble du territoire font l'unanimité,
mon collègue de Hull l'a souligné tantôt, mais les
éditorialistes font également l'unanimité. Et il n'y a
personne qui soit heureux, satisfait de la décision du ministre, dans le
découpage du territoire des MRC de l'Outaouais.
On parle et on n'a jamais tant parlé, du côté du
gouvernement, de la concertation nécessaire pour faire face à la
crise qui sévit présentement au Québec. Eh bien! M. le
ministre des Affaires municipales, je vous prie de constater qu'il y a une
crise dans l'Outaouais. D'autres députés ont indiqué qu'il
y a des crises un peu partout au Québec concernant les territoires des
MRC, mais je vous parle de celle de l'Outaouais. Il y a une crise. La
concertation est acquise. Tout le monde, de quelque allégeance politique
que ce soit, quel que soit le milieu où oeuvrent les gens, que ce soit
scolaire, municipal, provincial, fédéral, tout le monde est
unanime à dire qu'il y a eu une méprise extraordinaire. Certains
l'attribuent à des conflits d'intérêts. Je n'irai
même pas aussi loin que cela, pour ne pas être
désagréable au ministre.
Je voudrais tellement que, ce soir, dans sa réplique, il me dise
ce qu'il va faire. Va-t-il les rencontrer? Va-t-il tout simplement rester
là, assis, à sourire béatement, et à ne même
pas répondre à nos lettres? Est-ce qu'on va continuer de devoir
s'adresser au premier ministre pour lui demander d'arbitrer les pseudo-conflits
d'intérêts qui peuvent exister? C'est tout ce qu'on demande. La
concertation est acquise dans l'Outaouais. Il n'est pas question pour
l'Opposition ou pour quiconque de vouloir s'arroger des mérites
quelconques. Tout ce qu'on veut, c'est que le simple bon sens soit
respecté dans le découpage du territoire des MRC. (0 h 50)
Si on n'en avait que des adversaires du gouvernement - et Dieu sait
qu'ils sont légion, le nombre augmente de jour en jour! Vous ne voulez
sûrement pas considérer vos associations du Parti
québécois dans chacun des cinq comtés comme des
adversaires du gouvernement. Je supplie le ministre de se pencher sur la
question, de ne pas se limiter à demander à des conseillers de
son cabinet de faire une espèce de déclaration comme celle qu'on
a retrouvée dans le journal Le Droit du mardi 30 novembre où les
raisons invoquées sont tellement insignifiantes - je m'excuse de devoir
employer le terme - que cela ne résiste absolument pas à une
analyse sérieuse.
Quand on nous dit que découper un territoire, tracer une ligne
entre deux MRC n'empêchera pas les gens de traverser cette ligne du point
de vue touristique, c'est bien sûr. Je donne l'exemple du lac des Trente
et un Milles dans le comté de Gatineau qu'on a laissé dans le
territoire de la MRC Antoine-Labelle - toujours celle du ministre des Affaires
municipales - et on sait qu'il n'y a aucune route d'accès au lac des
Trente et un Milles. C'est bien sûr que ce n'est pas parce qu'on a
tracé la ligne du côté ouest du lac des Trente et un Milles
que les gens vont cesser d'y aller. Mais le fait demeure que c'est la MRC
Antoine-Labelle qui sera responsable de l'aménagement du lac des Trente
et un Milles, qui sera responsable - je suppose - éventuellement de...
Il y a quelque chose à dire de l'autre côté? S'il vous
plaît, écoutez parce que je vous parle de ce que vos amis
péquistes disent dans la région de l'Outaouais. À la MRC
qui sera responsable de l'aménagement, je me demande comment ils se
motiveront à prendre les bonnes décisions, à affecter des
budgets pour l'aménagement d'un territoire duquel ils ne retireront
aucun bénéfice sur le plan économique.
Je répète, M. le Président, je demande au ministre
de nous dire au moment de sa réplique ce qu'il fera. S'il ne veut rien
faire, s'il veut tout simplement se cantonner dans sa suffisance et nous dire
que le tout a été fait conformément aux critères de
la loi 125, en consultation avec tous les gens qui, aujourd'hui, unanimement
s'opposent au découpage, libre à lui. Il sera jugé par les
gens de la région. Il me semble que le ministre doit être plus
sérieux que cela et je lui demande de nous indiquer - ce n'est
peut-être pas nécessaire qu'il nous dise exactement comment il
procédera, quel sera l'échéancier de ses interventions -
au moins que la porte n'est pas fermée. S'il préfère que
je ne m'occupe pas du dossier, je suis prêt à le faire. Je sais
comment les gens du Parti québécois travaillent. Souvent ils
aiment mieux travailler ensemble sans qu'il y ait d'oreilles
étrangères. Je n'y toucherai pas. Il n'est pas question d'essayer
de se faire du capital politique. Il s'agit de l'avenir de la région. Je
demanderais au ministre de prendre cela en considération.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jeanne-Mance.
M. Michel Bissonnet
M. Bissonnet: II me fait plaisir d'intervenir dans ce
débat sur ce projet de loi. Nous recevons toujours à la fin de
chaque session un projet de loi omnibus; dans ce cas-ci, il modifie 25 lois qui
touchent le domaine municipal. On dit aux citoyens: Nul ne peut ignorer la loi.
Vous vous imaginez, même les élus municipaux ne s'y retrouvent
pas. Alors, imaginez nos concitoyens qui sont pris avec des modifications de 25
lois. On
parle du gouvernement qui ne rend pas explicite ces lois que tout le
monde doit connaître.
Les seuls articles dans ce projet de loi qu'il me fait très
plaisir de voir approuver par cette Assemblée sont les articles 28 et
129 où dans les grandes régions métropolitaines, en
particulier la région de Montréal... Je vais parler de cette
phobie qu'ont les citoyens de se lancer dans les salles d'amusement. On a
adopté à l'intérieur de plusieurs projets de loi
privés... Je pense que ce gouvernement devra à l'avenir adopter
des projets de loi publics pour que toutes les municipalités puissent
être régies par les mêmes lois à l'intérieur
du cadre législatif qui les concerne. En vertu de l'article 28, il est
maintenant accordé à toutes les municipalités qui optent
de légiférer dans ce domaine la possibilité d'adopter des
règlements municipaux pour autoriser moyennant l'obtention d'un permis,
réglementer ou prohiber les jeux de boules, ("pin bail machines"), de
billard, de pool, de trou-madame, s'il vous plaît, messieurs! s'il vous
plaît!...
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Bissonnet:... de quilles ou de bagatelle, les salles de tir,
les jeux électroniques ou les salles de jeux électroniques.
M. le Président, dans la région métropolitaine,
depuis plus de cinq ans... M. le Président, est-ce que je peux avoir un
peu d'ordre?
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Je
vais vous l'accorder, mais on va devoir me l'accorder aussi. S'il vous
plaît, laissez parler le député. M. le député
de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Depuis plus de cinq ans, les autorités
policières ne le peuvent. On n'a qu'à se fier à l'action
en Cour supérieure intentée par la ville de Saint-Laurent et la
ville de Saint-Léonard pour réglementer les salles d'amusement,
que seules les personnes de 18 ans et plus puissent y jouer aux jeux de hasard.
À ce moment-là, seule la ville de Montréal avait la
possibilité de réglementer ces salles d'amusement. On a
rapporté que, dans toutes les villes, sauf la ville de Montréal,
un réseau de vols par effraction s'était introduit dans ces
salles d'amusement et, évidemment, à tous les niveaux scolaires,
des difficultés ont surgi.
Je pense que ce projet de loi permettra à toutes les
municipalités de légiférer à l'intérieur de
ce projet de loi, et c'est un avantage, tel qu'il nous est
présenté.
J'entendais tantôt l'ancien ministre des Affaires municipales se
vanter que ce gouvernement avait obligé des municipalités
à augmenter le nombre d'élus sur leur territoire. Je prends
l'exemple de la ville de Montréal-Nord. En 1978, par la loi no 44, on a
permis aux municipalités de plus de 20 000 habitants d'opter pour
augmenter le nombre d'élus à l'intérieur d'un territoire
donné. À titre d'exemple, lorsque la loi no 44 a
été adoptée, seules la ville de Longueuil et la ville de
Saint-Léonard, où j'ai été candidat à la
mairie à l'époque, ont opté, celle-ci évidemment
à cause de sa tutelle, pour augmenter le nombre de leurs conseillers
municipaux. À Saint-Léonard, c'est de 6 à 12.
Montréal-Nord avait le droit d'opter d'augmenter son corps municipal de
6 à 12 conseillers également. (1 heure)
Par suite de l'adoption d'une loi postérieure, la
municipalité de Montréal-Nord a été obligée
de porter le nombre de ses conseillers municipaux de 6 à 12. Un
conseiller municipal de la ville de Montréal-Nord a des
émoluments de 15 000 $ par année. Cette ville a une population de
92 000 habitants. Elle avait 6 conseillers avant les élections de 1982,
ce qui faisait un conseiller municipal pour chaque district ayant en moyenne
9000 électeurs. On a obligé cette municipalité, comme on a
obligé d'autres municipalités, pendant une crise
économique, à porter le nombre de ses conseillers de 6 à
12. Si bien qu'à Montréal-Nord, depuis le 7 novembre dernier, qui
a douze conseillers et chaque conseiller représente 5000
électeurs, à 15 000 $. Cela veut dire qu'un député
qui représente 35 000 électeurs, si on compare les chiffres,
d'après la pensée de ce gouvernement péquiste, devrait
gagner, si on compare les travaux d'un député provincial et d'un
conseiller municipal représentant les mêmes électeurs, avec
un nombre sept fois plus élevé, 105 000 $ par année. Donc,
avec cette idée de démocratie qu'on veut rendre à son
maximum, on se dit: Écoutez, chaque municipalité a des services
à la population; chaque municipalité a des bulletins municipaux.
Et aujourd'hui, on dit aux conseils de ville: Écoutez, vous n'avez pas
assez de conseillers, vous êtes obligés de vous doubler. À
titre d'exemple: Saint-Léonard, Montréal-Nord, Longueuil et Laval
ont augmenté.
Donc, on est rendu qu'on augmente le fardeau fiscal et on dit aux
municipalités: On vous donne plus de démocratie, vous
décidez vous-mêmes; ce qui n'est pas le cas. L'Assemblée
nationale du Québec, par le gouvernement péquiste, a
obligé des municipalités à augmenter le fardeau fiscal de
chacun de ses concitoyens. À titre d'exemple: Dans des
municipalités, et je fais référence à la ville de
Sherbrooke, à l'époque, il y avait une loi qui disait qu'un
conseil de ville qui veut augmenter les
salaires de son maire et de ses conseillers, doit soumettre un projet de
règlement et que 500 personnes, évidemment, selon les
prescriptions de la charte de la ville ou de la Loi sur les cités et
villes, peuvent s'opposer à une telle augmentation de salaires. Or, il
est arrivé que dans la ville de Sherbrooke, le maire de l'époque
- et je vois le député de Duplessis qui me regarde en me faisant
signe que non, mais ce n'est pas le cas - a soumis au conseil de ville un
règlement augmentant le salaire du maire à 50 000 $ et plus, sous
réserve du montant; c'était entre 50 000 $ et 55 000 $. Les
citoyens de Sherbrooke se sont opposés formellement - vous savez
très bien, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation de qui je parle - à l'adoption de ce règlement et
ont exigé un référendum. Qu'est-ce qui est arrivé,
M. le Président? Il n'y a pas eu de référendum et,
évidemment, à la suite de cette demande, le gouvernement
péquiste a modifié cela encore une fois, par une loi, et a permis
au conseil de ville de chaque municipalité du Québec d'adopter un
règlement pour augmenter les salaires des conseillers et du maire sans
être répondant devant l'électorat qui pouvait avant, par
voie de référendum, s'opposer à de telles mesures. Ce qui
arrivé dans la ville de Sherbrooke, évidemment à la suite
de cette modification du règlement, c'est que le maire de Sherbrooke,
ancien président de l'Union des municipalités du Québec, a
connu, comme d'autres, une défaite électorale.
M. le Président, je pense que nous arrivons à la
période de la fin de cette session et que, comme à chaque
année, on nous présente toujours un projet de loi qui compte 42
pages...
Une voix: Combien?
M. Bissonnet:... 42 pages. On modifie 25 lois du Québec.
Comment voulez-vous que les citoyens du Québec puissent connaître
leurs droits, à l'intérieur d'un tel projet de loi?
L'année dernière, lors de l'adoption de la loi no 33 qui devait
être adoptée avant les fêtes et qui a été
adoptée le 24 février 1982, j'avais inscrit ma dissidence.
J'étais le seul député dans cette Chambre à avoir
inscrit une dissidence quant au projet de loi no 33. Je voudrais revenir, cette
année, pour faire les mêmes revendications que j'ai faites
l'année dernière.
Par l'article 100 de ce projet de loi, l'an passé, on traitait
les citoyens de la Communauté urbaine de Montréal de façon
privilégiée. On permettait au conseil de ville de donner un
crédit d'impôt foncier de 10% à Montréal et dans
d'autres communautés urbaines. On permettait à toute
municipalité du Québec de donner un crédit d'impôt
foncier de l'ordre de 5%. Cette année, en vertu de la loi no 33 de
l'année dernière, on permet à toutes les
municipalités du Québec... Voici le truc, je vais vous lire
l'article, parce que je pense que toutes les villes du Québec, tous les
propriétaires de maison unifamiliale, de duplex, de triplex, qui
s'attendent, cette année, comme ils l'ont eu dans le passé,
à un crédit d'impôt foncier, cette année, en 1983,
par le projet de loi no 33, ils ne retrouveront aucune indication dans le
projet de loi no 92.
Tous les propriétaires de maison unifamiliale, duplex et triplex,
sauf dans la Communauté urbaine de Montréal, n'auront aucune
possibilité que leur conseil de ville puisse, à la suite d'une
augmentation d'évalution importante pour les propriétaires de
maison unifamiliale, duplex et triplex, cette année, à
Repentigny, à Laval et dans d'autres villes importantes du
Québec, accorder un crédit d'impôt foncier ayant trait
à une augmentation d'évaluation municipale importante pour les
propriétaire de maison unifamiliale. L'année dernière, je
lis l'article, pour l'exercice de 1982, le premier alinéa s'applique:
"... Toutefois, une corporation municipale qui a accordé le
crédit pour l'exercice de 1981 peut le faire pour celui de 1982 sans
avoir à imposer une taxe d'affaires au maximum permis par l'article 233;
cependant, dans un tel cas, le crédit maximum est de 5%. "
Pour l'exercice de 1983, le premier alinéa s'applique, sauf que
le crédit ne peut excéder 5% et ne peut être accordé
que par une corporation municipale qui, en 1982, pouvait accorder le
crédit maximum de 10%. Ce qui veut dire que, l'année
dernière, les seules municipalités qui pouvaient accorder
jusqu'à un maximum de 10% étaient les municipalités de la
Communauté urbaine de Montréal et de la Communauté urbaine
de Québec. Cette année, les municipalités du Québec
ne peuvent pas accorder aux contribuables un crédit d'impôt
foncier si l'évaluation municipale est trop élevée. Dans
la région métropolitaine, on force les conseils de ville d'Anjou,
de Saint-Léonard, Montréal-Nord, Kirkland, Westmount,
Outremont, Sainte-Anne-de-Bellevue, à obliger leurs
propriétaires fonciers à une réduction maximale de l'ordre
de 5%. (1 h 10)
J'ai fait valoir devant cette Chambre, l'année dernière,
que dans des municipalités comme Anjou, Saint-Léonard et
Montréal-Nord il y avait des propriétaires d'unifamiliales qui
ont eu des augmentations importantes de duplex, de triplex, mais dans ces
municipalités, on a conçu depuis plus de quinze ans des
propriétés quadruplex et quintuplex à cause de la valeur
du terrain qui y est très élevée. À
l'intérieur de la communauté urbaine, lorsque j'étais
maire de Saint-Léonard, moi-même et le maire de
Dollard-des-Ormeaux, que vous connaissez
bien, l'ancien ministre du Travail, Jean Cournoyer, nous avons, à
l'intérieur d'un débat sur l'évaluation municipale, fait
valoir que lorsqu'il y a transfert de compagnie, vente d'immeubles de
compagnie, il est impossible pour le directeur de l'évaluation de la
Communauté urbaine de Montréal d'évaluer la vente de ces
propriétés puisqu'on le fait via un transfert d'actions.
Nous avons fait valoir que dans les municipalités, en particulier
de l'Est de Montréal, où la valeur du terrain est tellement
élevée, les propriétaires de quadruplex et de quintuplex
ne sont pas favorisés par les dispositions de la loi 33 et du projet de
loi no 92. Nous avons assisté, dans les municipalités de
Montréal-Nord et de Saint-Léonard, cet été,
à des primes d'embellissement. Dans la municipalité de
Montréal-Nord, à au moins trois reprises, la municipalité
par ses conseillers et son maire, en particulier dans la ville de
Montréal-Nord, à cause des disponibilités de cette loi,
les autorités ont allégé le fardeau fiscal des
concitoyens, propriétaires de maisons unifamiliales, duplex et triplex
en leur donnant un crédit à l'embellissement. Vous vous
pétez les bretelles depuis plusieurs années pour dire aux maires
de municipalités... J'écoutais tantôt le
député de Brome-Missisquoi quand il parlait de MRC, je ne sais
pas, je ne viens pas du comté de Brome-Missisquoi, mais j'ai
écouté tous les intervenants de Brome-Missisquoi et je comprends
très bien qu'il a des difficultés dans sa région au niveau
des MRC. Et également - je termine dans quelques instants - j'ai entendu
mon collègue, le député de Gatineau, qui a fait valoir ces
mêmes difficultés à l'intérieur de sa région.
Voici ce que je veux dire au ministre des Affaires municipales: Donnez donc des
pouvoirs, M. le ministre, aux municipalités du Québec en
général, toutes les municipalités qui veulent et qui
connaissent leur situation financière, donnez un crédit
d'impôt foncier aux petits propriétaires sans équivoque. Je
vous le demande de façon formelle. Il est temps que vous donniez
véritablement aux conseils municipaux, locaux, eux qui sont plus
près du peuple que nous, la façon de distribuer les deniers
qu'ils reçoivent des taxes municipales.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: M. le Président, vous me permettrez
d'intervenir brièvement pour ne pas prolonger le débat. Mais je
veux profiter de l'étude en deuxième lecture de la loi 92 pour
rafraîchir un peu la mémoire du ministre relativement à un
problème de MRC qui déchire actuellement plusieurs
municipalités du comté de Beauce-Sud.
Bien sûr, comme l'a dit, tout à l'heure, mon
collègue de Brome-Missisquoi, il y a eu un comité de
consultation. Il y a eu des démarches. Il y a eu plusieurs mois de
consultation. Je voudrais simplement mentionner le cas des municipalités
de Saint-Prosper et de Saint-Zacharie Village qui avaient indiqué, au
comité de consultation, à l'unanimité, qu'elles
désiraient être rattachées à la MRC
Beauce-Sartigan.
Malgré cela, on l'a dit, vous irez à la MRC Les Etchemins,
pour éviter de faire des dents de scie dans la carte. C'est un motif
ridicule, inacceptable. J'ai également d'autres municipalités qui
vivent actuellement un problème. Seul, le ministre peut rendre justice
à ces populations. J'ai déposé des pétitions en
cette Chambre; pétition de Saint-Prosper, 100%; Saint-Zacharie Village,
98%; Saint-Zacharie Paroisse, 83%; Saint-Robert, 92%; Saint-Ludger, 82%;
Risborough et partie Marlow de Saint-Ludger, 83%; Gayhurst, 85%.
Peut-on intégrer, pour des générations, des
populations à des MRC, où elles ne veulent pas aller? Je dis au
ministre, ça ne marchera pas. Le ministre peut se faire à
l'idée que les populations concernées résisteront avec la
dernière énergie, qu'elles iront au bout. S'il ne connaît
pas la ténacité des Beaucerons, il va apprendre à la
connaître. Le sentiment d'appartenance d'une population est quelque chose
de sacré, fondamental. En plus de le mettre sur papier, comme vous
l'avez mis, je veux que vous le fassiez passer aux actes.
Les citoyens de ces municipalités ont droit à leur
dignité et méritent le respect. Je demande au ministre, d'une
manière ultime, de se rendre au voeu de ces populations et d'annoncer,
ce soir si possible, qu'il fera les changements exigés. Sinon, dans
plusieurs cas, elles boycottent déjà, de façon
systématique, les réunions de la MRC, auquelle elles ont
été rattachées de force. Dois-je vous dire les
conséquences considérables et inévitables, alors que,
présentement, des procès sont intentés devant les
tribunaux?
M. le Président, je demande au gouvernement de revenir au bon
sens, à la souplesse. Si le Parti québécois refuse de se
rendre au voeu de ces populations, eh bien, moi, je les assure, ces
populations, que, dès la prise du pouvoir par le Parti libéral du
Québec, elles peuvent s'attendre à obtenir justice, chose
à laquelle je m'engage solennellement.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Affaires municipales, votre droit
de réplique.
M. Jacques Léonard (réplique)
M. Léonard: M. le Président, nous en sommes, au
terme de ce débat de deuxième lecture, à parler d'un
projet de loi tout à fait traditionnel, évidemment projet de loi
omnibus, sur les affaires municipales.
C'est un projet de loi qui se construit au cours d'une année, ce
projet de loi omnibus pour les affaires municipales. Puisqu'il se construit
après consultation d'une foule de gens et en particulier, des
élus de chacune des municipalités que nous avons l'occasion de
rencontrer, notamment dans les congrès des deux unions. L'un au
printemps, celui de l'Union des municipalités du Québec et
l'autre, à l'automne, que nous venons de connaître, l'Union des
conseils de comté du Québec.
J'ai eu l'occasion aussi de rencontrer les élus, qui
siègent au conseils des unions, de discuter avec eux d'un certain nombre
de mesures qu'on retrouve encore dans ce projet de loi. J'ai eu l'occasion
aussi de ramasser une foule d'autres mesures, qui ne sont pas dans ce projet de
loi, parce que nous n'avons pas encore mis dans ce projet de loi toutes les
demandes. Même s'il compte presque 300 articles, il reste que les
demandes sont beaucoup plus nombreuses, beaucoup plus considérables. En
fin de compte, il faut faire un tri et il faut continuer à examiner un
certain nombre d'autres mesures qu'on nous demande. (1 h 20)
Pourquoi ce projet de loi est-il présenté à ce
moment de l'année, traditionnellement, à la fin du mois de
novembre et au début du mois de décembre? Simplement parce que
l'année financière des municipalités commence le 1er
janvier et se termine le 31 décembre. On profite de l'expérience
de toute l'année pour cumuler les besoins, pour
dépoussiérer - comme on l'a dit au cours de ce projet - pour
cumuler les demandes et les présenter avant le début de
l'année qui va commencer bientôt. C'est la justification. Ce
projet de loi a été présenté dans le temps du
gouvernement qui nous a précédés et nous nous rendons aux
exigences de la réalité qui veut qu'on l'adopte avant le 31
décembre. Je pense bien qu'on va réaliser que toutes les mesures
qui s'y trouvent représentent des besoins - comme je l'ai dit au
début - des voeux des municipalités, des résolutions
adoptées ici et là, un peu partout, constituent, en fait, le
fruit de l'expérience.
Je voudrais relever un point qu'il m'apparaît important de traiter
parce que je pensais, avant le débat de ce soir, que la question
était quand même close, même si on en parle encore.
J'entendais parler de cette structure des municipalités
régionales de comté, en particulier par le député
de
Brome-Missisquoi, comme d'une structure inutile, comme d'une structure
qui n'avait pas sa raison d'être. Je lui rappellerai qu'il y a
déjà un ministre de son gouvernement qui avait annoncé, en
1971, qu'on n'avait plus besoin des conseils de comté. Pourtant, les
conseils de comté sont restés bien en vie. Non seulement sont-ils
restés en vie, mais ils se sont transformés en
municipalités régionales de comté et le ministre est
disparu.
Je pense qu'il faut revenir sur ce qu'est l'aménagement du
territoire. Il faut revenir au début des années soixante
où, dès ce moment, on était conscient qu'il fallait une
loi de l'aménagement. Mais on n'a pas réussi à l'adopter,
même après de longues études, même après des
rapports, même après des conciliabules et des congrès. On
n'est pas arrivé à le faire. Cela a eu des conséquences
terribles pour le Québec, parce qu'au fond tous les découpages
qu'on connaît aujourd'hui - celui de l'Education, celui des Affaires
sociales, celui d'une foule d'autres ministères, des Transports, en
particulier -ont été faits sectoriellement, individuellement,
avant même qu'on touche à ce problème du découpage
des conseils de comté ou à la revue du découpage des
conseils de comté. Aujourd'hui, on le fait après avoir fait une
foule d'autres découpages. On est obligé d'en arriver à
des compromis, à des discussions sur cette question. Plus que cela, sur
le fond même des choses, parce qu'on n'a pas eu le courage de faire une
loi de l'aménagement, on a été obligés, depuis que
nous sommes au pouvoir, d'adopter une foule de lois qui traitent du
territoire.
Qu'on se rappelle l'état du territoire lorsque nous sommes
arrivés en 1976. C'était le développement - vous me
permettrez l'expression - "all out", partout, anarchique, complètement
anarchique. Nous avons été obligés d'adopter la Loi sur la
protection du territoire agricole qui est une pièce législative
très importante. Nous avons dû définir une option
préférable d'aménagement pour Montréal. Nous avons
adopté la Loi sur la fiscalité municipale qui a des impacts
très importants sur l'aménagement. Nous avons, évidemment,
adopté la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Les
conséquences, en 1976, étaient l'étalement urbain sous
toutes ses formes et sous ses pires formes que toutes les lois que je viens
d'énumérer visent à corriger.
Hier, nous avons discuté d'une loi sur les SIDAC qui vise
à renouveler les centre-ville du Québec, une mesure positive.
Nous allons discuter, dans lé projet de loi no 92, de mesures qui
permettront aux municipalités de donner des subventions pour la
rénovation. Nous avons adopté, au mois de juin dans la loi no 82,
la permission pour les municipalités de se créer des
réserves de
terrain pour fins de construction domiciliaire. Nous avons
adopté, évidemment, toutes les mesures concernant
Corvée-habitation. Toutes ces mesures visent à améliorer
le paysage du Québec. Je pense que cela est drôlement
important.
Dans le territoire rural, en particulier, ou semi-rural, la structure,
c'est celle des municipalités régionales de comté. Si elle
n'existait pas, il faudrait nécessairement la créer parce qu'il
faut créer cette table de concertation où on va discuter des
enjeux du développement qui déborde le territoire d'une seule
municipalité. Je pense que la preuve n'en est pas à faire, les
élus municipaux le savent et ceux qui se posent la question retardent de
plusieurs années sur le développement du Québec.
On a parlé aussi d'autonomie municipale. Je pense qu'une table,
où ce sont les élus municipaux qui siègent, une table de
concertation où ce sont les élus municipaux qui siègent,
n'est pas une table où est le gouvernement. C'est une table où
sont les élus municipaux et le gouvernement n'y est pas présent.
C'est là que se fait la concertation, c'est là que les
décisions se prennent. Quand on n'avait pas cela, qu'on regarde ce qui
se passait. Dans le cas de SATRA, le gouvernement était obligé
d'approuver le schéma d'aménagement. Dans le cas du schéma
de la CRO, le gouvernement approuve le schéma d'aménagement, ce
qui n'est pas le cas des municipalités régionales de comté
à l'heure actuelle.
Nous voulons assouplir, simplifier l'administration municipale et je
pense qu'il y a une foule de mesures dans la loi no 92 qui le permettent. On a
parlé de ce découpage du territoire des municipalités
régionales de comté. Qu'il me suffise de dire ce soir que les
résolutions des municipalités ont été retenues dans
95% des cas. Par exemple, dans les cas qu'on nous a cités de
l'Outaouais, dans le cas de la Gatineau en particulier, toutes les
résolutions des municipalités ont été retenues.
Dans le cas des territoires municipalisés, c'est vrai à 100%. Et
c'est vrai dans l'ensemble du Québec. Je pense qu'il est important de
constater ce fait et il ne faut pas mêler des réalités
qu'on connaît très bien dans le monde municipal. Il faut faire la
distinction entre le district électoral et le conseil de comté ou
la municipalité régionale de comté. Il y a une très
forte différence.
M. le Président, quant au délai qu'on nous demande, sur le
moratoire, nous avons déjà communiqué avec les
municipalités régionales de comté. Il est bien sûr
qu'il y en a qui ont été constituées avant les autres et
qui sont prêtes à commencer leur schéma
d'aménagement. Il y en a d'autres qui viennent d'être
créées, qui ne sont pas prêtes et dans ces cas-là
nous avons déjà accordé un délai, ce qui nous est
permis déjà par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Ceci est déjà fait. Je pense bien qu'il était
évident que pour des municipalités régionales de
comté qui commencent à fonctionner à partir du 1er janvier
1983, il fallait un délai. Ce qui a été
accordé.
En ce qui concerne la fiscalité, j'entendais M. le
député de Jeanne-Mance, tout à l'heure, demander qu'on
donne des crédits d'impôt foncier. Je vais lui demander de me
montrer où cela se trouve dans le rapport du comité sur la
fiscalité. Cela n'y est pas, justement. Alors, je pense que c'est une
question qui a été largement débattue et qui est
réglée. Par ailleurs, en ce qui concerne la
péréquation, nous maintenons le programme avec un seuil
d'admissibilité à 66 2/3% plutôt qu'à 75%. Je pense
que, dans le cas des cinq villes qui avaient un seuil d'admissibilité
à 75%, cela était un statut particulier qui a été
discuté, mais, à mon avis, je pense qu'il y avait lieu de se
poser des questions. Leurs surplus accumulés sont passés, en
l'espace de deux ans, de 7 000 000 $ à 21 000 000 $. Ces sommes sont
allées assez directement dans la caisse, merci. Dans le cas de Verdun,
vous me permettrez d'en parler devant le trône et non pas derrière
le trône. Le surplus de cette ville - M. le maire en a parlé tout
à l'heure, il est absent maintenant, mais je pense bien qu'il faut
relever ce qu'il a dit -en 1979 était de 1 600 000 $ et il est
passé à 6 000 000 $, deux ans après. (1 h 30)
De plus, il faut relever une chose intéressante: les taxes,
à Verdun, n'ont pas été augmentées de 1979 à
1982. En fait, elles ont été augmentées de 0, 4%. Mais les
dépenses ont augmenté de 38, 4%. Alors, je vous demande qui
aurait payé la différence -je peux vous poser la question - si le
gouvernement n'y avait pas contribué de façon significative. Quoi
qu'il en soit, je pense que réduire ce seuil d'admissibilité au
seuil d'admissibilité de toutes les municipalités du
Québec m'apparaît tout à fait conforme et dans la
lignée de ce que propose le comité sur la fiscalité, qui
dit que les mesures fiscales doivent être les plus universelles possible
et qui tend à évacuer toute mesure d'exception dans le
système fiscal, ce qui se comprend très bien.
Par ailleurs, je pense qu'il y a aussi une bonne nouvelle pour les
municipalités parce que, dans le cas du transfert minimal qui
était vraiment conçu comme un programme temporaire de trois ans
pour permettre la transition entre les deux systèmes, nous avons
considéré le cas de certaines municipalités plus pauvres,
effectivement, même si, dans certains cas, il y avait des riches qui en
bénéficiaient, nous avons donc considéré toute la
situation et nous avons continué le programme sur deux
ans en le diminuant progressivement. Je pense que c'est une mesure qui
permettra aux municipalités de s'ajuster graduellement à la
situtation.
Nous entreprendrons l'étude de ce projet de loi en commission
parlementaire, nous le ferons de la façon la plus productive possible,
j'en suis convaincu, des deux côtés de cette Chambre, pour arriver
à adopter ce projet avant Noël, avant le 31 décembre,
puisque les municipalités en ont besoin; elles l'ont
réclamé et je suis convaincu que nous aurons la collaboration de
tout le monde ici, en cette Chambre, pour le faire et arriver à temps.
Je vous remercie beaucoup.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton: Est-ce que le ministre me permettrait une courte
question.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre,
acceptez-vous?
M. Léonard: Oui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II accepte.
M. Gratton: C'est simplement pour lui demander de fournir une
réponse plus complète aux questions que je lui ai posées
et surtout au voeu que je lui ai exprimé. Je lui ai demandé ce
qu'il entend faire sur les territoires. Il m'a répondu qu'on a
accepté les résolutions de toutes les municipalités. Je
n'ai pas l'intention d'aller vérifier cela, mais je voudrais savoir ce
qu'il fera à l'égard de l'unanimité et de la concertation
qui se font là où personne n'est satisfait du
découpage.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Léonard: Je pense que le député de
Gatineau veut dire que personne n'est satisfait du découpage quant
à certains aspects. Quant au territoire municipalisé, il doit
convenir que les gens sont satisfaits et c'est cela l'essentiel parce que c'est
là que les gens habitent, dans le territoire municipalisé.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que le...
M. Gratton: M. le Président, est-ce que vous permettez une
question additionnelle? Sur une question de règlement, M. le
Président?
Une voix: Tu as eu ta réponse.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant la question de
règlement, je voudrais quand même... S'il vous plaît! S'il
vous plaît! À l'ordre! À l'ordre!
C'est simplement pour dire que je ne voudrais pas qu'on recommence ce
qu'on a vécu dans le courant de la soirée. M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je suis resté ici
jusqu'à 1 h 30...
Une voix: 1 h 34.
M. Gratton:... du matin, pour essayer d'avoir une réponse
à des questions qui sont posées non seulement par nous, mais
même, comme je l'ai souligné, par les péquistes de la
région de l'Outaouais. Le ministre peut sûrement me donner une
meilleure réponse que celle qu'il vient de me fournir. Je lui donne une
autre occasion de le faire.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je dis encore une fois
qu'en ce concerne le territoire municipalisé, les résolutions des
municipalités ont été respectées, à ma
connaissance en tout cas, à 100%. Par ailleurs, je dois dire que je suis
en contact avec des élus municipaux de la région de l'Outaouais,
comme des autres régions du Québec, que je vais continuer
à discuter avec eux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le projet de loi no 92,
Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
municipalités, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission des affaires
municipales
M. Guay: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission
parlementaire des affaires municipales.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Guay: M. le Président, pour clore en beauté
cette journée ou pour souhaiter la bienvenue à cette nouvelle
journée, nous allons étudier, si vous le voulez bien, le projet
de loi no 102 au nom du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Projet de loi no 102 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture du
projet de loi no 102, Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant l'inspection des aliments. La parole est au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, on me dit que le
lieutenant-gouverneur en conseil a pris connaissance du projet de loi et qu'il
en recommande la lecture par l'Assemblée nationale.
Le projet de loi qui se trouve devant nous aujourd'hui comporte deux
objets extrêmement importants. Premièrement, la simplification,
l'uniformisation et l'harmonisation des différents systèmes
d'inspection des aliments en place au Québec, tant au plan du
gouvernement du Québec qu'à celui des municipalités qui
s'occupent des inspections des aliments. Deuxièmement, les moyens
d'assurer le respect de la législation fondamentale pour la protection
des consommateurs au double point de vue de la qualité des aliments
qu'ils consomment et du prix qu'ils doivent payer pour se procurer un des
aliments les plus essentiels qui soient, le lait. Le premier aspect nous
amène à modifier un grand nombre de lois municipales et constitue
l'objet de la majorité des articles que comprend ce projet de loi no
102.
Le deuxième aspect est traité par cet article qui
constitue les amendements à la Loi sur les produits agricoles et les
aliments et à la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés, lesquelles sont les deux plus importants textes
législatifs québécois dont nous disposons au point de vue
de la qualité des aliments chez nous. J'aimerais aborder chacun de ces
aspects à tour de rôle, à partir du cheminement qui a
conduit à leur rédaction jusqu'aux effets souhaités de
cette loi.
Le cheminement qui nous a conduit à la préparation et au
dépôt de ce projet de loi remonte à 1978, dans le cadre de
la conférence sectorielle sur l'agro-alimentaire tenue à
Québec, les 10, 11 et 12 avril 1978. Les participants du secteur
agro-alimentaire nous ont décrit différents redoublements
réglementaires et tiraillements administratifs qui créent des
problèmes à l'industrie alimentaire. Ainsi, il y aurait des
frontières invisibles que les aliments de qualité égale ne
peuvent franchir entre certaines municipalités. Les usines
laitières sont soumises à des normes de qualités
différentes, selon que leurs produits sont expédiés dans
telle ou telle ville à l'intérieur du Québec. Certaines
municipalités tolèrent des pratiques commerciales et des
conditions d'activités d'usines alimentaires, notamment, dans le secteur
des viandes qui sont interdites ailleurs. Les contribuables municipaux doivent
payer des coûts administratifs trop onéreux parce que
redoublés sans pour autant assurer une meilleure protection aux
citoyens. Un large consensus s'est dégagé lors de cette rencontre
parmi les principaux intervenants du monde agro-alimentaire
québécois sur la nécessité de mettre de l'ordre
dans tout cela.
C'est en souhaitant l'amélioration des contrôles de
qualité dans une perspective de la protection des consommateurs et aussi
de la conquête des nouveaux marchés, les participants ont
qualifié d'inacceptable et d'entrave à la libre circulation des
denrées à l'intérieur du Québec, l'existence de
doubles et, même, de triples systèmes d'inspection sur les
mêmes territoires. Lors d'une conférence en mai 1978, le
président de la conférence s'exprimait comme suit: "Dans le
contrôle de la qualité, on parle de l'amélioration des
contrôles de la qualité tout en rationalisant les systèmes
d'inspection, pour éviter les doubles et les triples inspections. On a
donné l'exemple de ces communautés urbaines de Montréal en
particulier, dont les ramifications s'étendent en territoires de
production loin de son propre territoire. Que le gouvernement considère
sérieusement tout cela, de faire des changements de juridiction qui
s'imposent de façon à faciliter la tâche des agents dans le
secteur agro-alimentaire. " C'est rapporté dans le rapport publié
par le secrétariat des conférences socio-économiques
à la page 97. (1 h 40)
Aussi, à la page 207 du même rapport, on peut lire dans le
domaine de l'inspection: Le gouvernement considère de façon
très sérieuse des changements dans les pouvoirs actuellement
accordés aux municipalités et communautés urbaines pour
éviter certaines duplications au système québécois
actuel d'inspection.
Il est important ici, M. le Président, de bien faire la
distinction entre une juridiction multiple en matière d'inspection et
une inspection multiple. Il y a juridiction multiple, lorsqu'il y a plusieurs
intervenants. Dans le cas qui nous occupe, le gouvernement du Québec, le
gouvernement fédéral et certains gouvernements municipaux
partagent le pouvoir juidique, notamment le pouvoir de réglementation
sur un sujet donné. Il y a inspection multiple lorsque ces intervenants
appliquent de façon différente dans un même
établissement, des normes et règlements qui peuvent ou non
être
identiques. Les juridictions multiples ne posent pas en soi de
problème, dans la mesure où elles sont exercées de
façon compatible les unes avec les autres.
Ainsi, en matière d'inspection des aliments, le gouvernement
fédéral a juridiction sur les produits destinés au
commerce interprovincial et international, parce que le Québec est
responsable de l'inspection des aliments destinés à être
consommés sur son territoire.
Celui-ci a délégué une partie de ses
responsabilités aux organismes municipaux ou supramunicipaux pour des
raisons historiques. Certains d'entre eux les ont effectivement assumés
et se sont dotés de service d'inspection. D'abord, la ville de
Montréal, qui a été remplacée par la
Communauté urbaine de Montréal, Québec,
Trois-Rivières et Sherbrooke.
Dans la plupart des produits, nos normes de qualité, nos
méthodes d'inspection rencontrent les critères
fédéraux et souvent même les dépassent. Les
problèmes surviennent lorsque deux organismes qui ont juridiction sur
l'inspection des aliments utilisent des normes et des méthodes
d'inspection différentes sur les mêmes produits à
l'intérieur d'un même territoire. La situation devient rapidement
intenable pour les agents économiques qui produisent, transforment et
distribuent ces aliments sans pour autant que le public soit mieux
protégé.
Dans le cas des inspections multiples, c'est-à-dire la visite
d'un même établissement par plusieurs inspecteurs, il est
évident qu'elles doivent être éliminées le plus
possible.
Pour en revenir à mon exemple des abattoirs, lorsqu'une
entreprise est sous inspection fédérale, nous n'envoyons pas un
de nos inspecteurs examiner la partie de la production destinée à
être consommée au Québec. Nous connaissons leurs normes et
leurs méthodes d'inspection qui sont ajustées aux nôtres.
Alors pourquoi faire deux fois le même travail?
Ce qui est inacceptable, c'est qu'actuellement, au Québec,
certains aliments doivent être inspectés deux fois et selon deux
systèmes d'inspection, et ce, parfois, à chacune des
étapes que sont la ferme, l'usine de transformation et la
distribution.
Ainsi, la communauté urbaine de Montréal envoie ses
propres inspecteurs en moyenne quatre fois par année visiter chacune des
3600 fermes laitières qui approvisionnent les usines de pasteurisation
et d'embouteillage de notre consommation autorisées à vendre sur
son territoire. Il va de soi qu'elle inspecte aussi ses usines, qu'elles soient
situées ou non sur son territoire. Je ne veux pas blâmer la
Communauté urbaine de Montréal ou quelque autre
municipalité de se soucier de la sécurité de ses citoyens.
Il y a des raisons historiques qui ont conduit à cette situation. Mais
je crois que le moment est venu de faire un grand ménage dans les
juridictions et les méthodes de travail à ce niveau.
Le moment est venu de définir un nouveau partage des tâches
entre le gouvernement du Québec et les municipalités qui voudront
continuer à s'occuper de l'inspection des aliments.
J'ai parlé de raisons historiques qui expliquent la
présence de certaines municipalités dans le champ de l'inspection
des aliments. Il faut se rappeler, qu'au siècle dernier, et même
au début du 20e siècle, les moyens de transport et de
conservation des aliments étaient moins sophistiqués
qu'aujourd'hui. Les produits se déplaçaient moins rapidement
d'une agglomération à l'autre et pouvaient se
détériorer en cours de route. Les organismes municipaux ont alors
reçu des pouvoirs leur permettant de fonctionner de façon
suffisamment autonome dans le domaine d'inspection des aliments, entre autres,
grâce au chapitre 68 des lois de 1870 qui amendait le Code municipal et
au chapitre 29 des lois de 1876, 38 des lois de 1903, 65 des lois de 1922 qui
amendaient la loi sur les cités et villes.
Dans le cas des chartes des villes dotées d'un service
d'inspection alimentaire, on retrouve les premières mentions de ces
pouvoirs dans les lois de 1866 pour ce qui est de Québec, de 1899 pour
Montréal, de 1915 pour Trois-Rivières.
Comme vous pouvez le constater, le projet de loi 102 touche à de
vieilles structures qui ont été mises en place alors que les
conditions de production, de transport, de transformation et de distribution
des aliments étaient fort diférentes de ce qu'elles sont
aujourd'hui.
Le cas de la Communauté urbaine de Montréal est un peu
particulier. La communauté urbaine étant une création
relativement récente - une quinzaine d'années - comment se
fait-il qu'elle ait conservé des pouvoirs qu'exerçait la ville de
Montréal en matière d'inspection des aliments, pouvoirs
basés sur des besoins de la société du 19e siècle?
Il y a encore plus surprenant. Les articles de la loi créant la
Communauté urbaine de Montréal qui l'obligeaient - je dis bien
qui l'obligeaient et non pas seulement lui permettaient - d'agir en
matière d'inspection des aliments, ont été amendés
en 1971, 1972 et 1974. Chaque fois, c'était dans le sens de
l'augmentation des pouvoirs de la communauté urbaine dans ce domaine de
juridiction provinciale.
Ce n'est pourtant pas d'hier. Cela se comprenait, autrefois, qu'on
commence par la grande ville parce que c'est là qu'on avait besoin
d'inspection alors que dans les campagnes les gens connaissaient les produits
qu'ils achetaient, qui venaient de leur localité alors qu'aujourd'hui,
les produits ne
viennent pas vraiment de leur localité. Ce n'est pas d'hier
pourtant que les producteurs laitiers et les industriels qui alimentent les
territoires de la Communauté urbaine de Montréal se plaignent des
problèmes que leur occasionne cette double inspection avec des normes
différentes. Il faut comprendre que même l'usine n'expédie
pas nécessairement tout son lait de consommation vers la
Communauté urbaine de Montréal. Il faut alors toujours faire la
distinction entre le lait qu'elle peut diriger vers la Communauté
urbaine de Montréal parce qu'il provient de fermes inspectées par
la Communauté urbaine de Montréal et celui qu'elle peut faire
boire aux autres citoyens du Québec.
M. le Président, ce sont des problèmes importants
auxquels, semble-t-il, le gouvernement d'alors était insensible. Il faut
dire qu'à l'époque, le système d'inspection n'était
pas ce qu'il est aujourd'hui. Quand on pense à ce qui était
toléré au cours de ces années, notamment dans le secteur
des viandes, on comprendra plus facilement que le gouvernement d'alors n'ait
pas cherché à se mettre d'autres responsabilités sur le
dos dans ce domaine.
Quant au financement des activités d'inspection des aliments
exercées par les municipalités, j'aimerais rappeler que depuis la
réforme de la fiscalité municipale en novembre 1979, il est
assumé en entier par le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation sur la base du principe qu'il s'agit d'une
responsabilité à caractère national. Ces dépenses
sont passées de 4 073 000 $ en 1980 à 4 656 000 $ en 1981 et
devraient atteindre cette année 5 400 000 $, soit une hausse de 35% en
deux ans. Ces sommes ont été versées à la
Communauté urbaine de Montréal et à la ville de
Québec dans le cadre d'ententes que j'ai signées avec elles en
mai et en juin 1981. Ces ententes comportaient des clauses sur les
modalités d'inspection en vue de mettre fin aux inspections multiples et
assurer une certaine coordination avec les activités d'inspection du
gouvernement du Québec. En raison de problèmes juridiques, de
l'impossibilité d'en arriver à une véritable harmonisation
des systèmes d'inspection et de la croissance désordonnée
des coûts liés à ces activités du côté
de la Communauté urbaine de Montréal, coûts que le
gouvernement du Québec doit assumer sans avoir véritablement le
moyen d'en contrôler la progression, j'ai dû mettre fin à
l'entente signée avec la Communauté urbaine de Montréal en
juin 1981.
Dans la lettre que j'adressais alors au président de la
Communauté urbaine de Montréal, M. Pierre Des Marais, j'indiquais
que toute nouvelle entente devrait s'inscrire dans le cadre d'un nouveau
partage des pouvoirs. La définition de ce nouveau partage des
responsabilités est justement la raison d'être première de
notre projet de loi. J'aimerais maintenant vous expliquer comment nous
entendons atteindre cet objectif. Le projet de loi prévoit que la
juridiction des gouvernements municipaux en matière d'inspection des
aliments s'exercera au niveau tertiaire, c'est-à-dire au niveau de la
restauration, de l'hôtellerie, de la distribution au détail, des
institutions offrant des services alimentaires, etc. Les municipalités
pourront inspecter ces établissements pour vérifier leur
salubrité et s'assurer que les aliments qu'ils manipulent ou
conditionnent sont conformes aux normes de qualité du Québec. Les
réglementations actuelles de ces villes et de ces communautés
seront maintenues en vigueur jusqu'au 31 décembre 1983. Par la suite,
ces réglementations devront être approuvées par le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec. Le ministre pourra conclure avec ces municipalités des
ententes de services portant sur leurs programmes d'inspection, sur leur
implication, sur leur financement ainsi que sur l'application par ces villes
d'une disposition législative et réglementaire dont le ministre
est responsable.
La responsabilité de conclure des ententes avec le ministre sur
l'inspection des aliments n'est pas réservée aux quelques villes
qui possèdent déjà des services d'inspection, puisque le
projet de loi prévoit que les municipalités de plus de 100 000
habitants pourront entrer dans ce champ d'activité si elles le
désirent, en demeurant toutefois dans les cadres définis par
notre projet de loi.
En clair, cela signifie que la Communauté urbaine de
Montréal devra se retirer de l'inspection des aliments sur les fermes et
dans les usines de transformation au plus tard le 31 décembre 1983.
D'ici là, la Communauté urbaine de Montréal, les villes de
Québec, Sherbrooke et Trois-Rivières devront faire approuver leur
réglementation applicable au niveau tertiaire par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Elles pourront, si
elles le désirent, conclure une entente avec le ministre portant sur le
fonctionnement et le financement de leurs services d'inspection. (1 h 50)
Beaucoup de choses seront possibles dans le cadre de ces ententes, y
compris la délégation de certaines responsabilités au
niveau de l'inspection des aliments aux niveaux primaire et secondaire. Il
s'agit d'un partage des tâches beaucoup plus rationnel. Une
municipalité est mieux placée pour connaître et visiter
régulièrement les restaurants, épiceries, hôtels et
institutions de son territoire. Dans le seul cas de la Communauté
urbaine de Montréal, ces points de vente de produits alimentaires sont
au
nombre d'environ 9000. Ces entreprises vivent dans le même
environnement commercial et n'ont pas, sauf exception, à expédier
des produits en dehors du territoire municipal. L'exercice par la
municipalité d'un pouvoir d'inspection à leur endroit ne
représente donc pas un risque de discrimination ou d'entrave commerciale
par rapport à des concurrents qui n'y seraient pas soumis.
Au niveau de la production primaire, c'est-à-dire sur les fermes
ou à bord des bateaux de pêche, et à celui de la
transformation, l'approche doit être différente. Ces unités
de production ne sont pas nécessairement situées sur le
territoire de la municipalité qui exerce les pouvoirs d'inspection. Dans
le cas de la Communauté urbaine de Montréal, il n'y a, par
exemple, aucune ferme laitière inspectée par elle qui soit sur
son territoire, parce qu'il n'y a plus de fermes laitières sur le
territoire de la communauté urbaine. Ces agriculteurs et ces usines de
transformation n'expédient pas leur produits uniquement dans telle ou
telle municipalité. De plus, l'inspection à ces endroits doit
faire appel à des expertises techniques spécialisées,
agronomie et médecine vétérinaire qui ne sont pas
habituellement du ressort des municipalités. Enfin, le gouvernement du
Québec doit être présent dans l'inspection des aliments
à ces niveaux parce qu'il lui faut protéger
l'intérêt de l'ensemble de ses citoyens et s'assurer de la libre
circulation des denrées à l'intérieur de son
territoire.
Nos producteurs savent qu'ils sont susceptibles de recevoir n'importe
quand la visite de l'inspecteur du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Les quelque 16 400 fermes
laitières sous notre juridiction reçoivent en moyenne une visite
tous les deux ans, qui permet de s'assurer de la salubrité des lieux.
S'il ne fallait se fier qu'à cette inspection, il est bien
évident qu'il y a bien des choses qui pourraient changer en dedans de
deux ans sur une ferme laitière. Mais tel n'est pas le cas. Chaque fois
qu'un camion-citerne se rend chez un producteur pour y cueillir son lait, un
échantillon est prélevé qui servira à
déterminer la teneur en gras du lait sur laquelle est basée la
valeur du produit. Une fois par mois, en plus de prélever
l'échantillon habituel, le camionneur recueille dans la citerne du
producteur, à l'aide d'une seringue aseptique qui ne sert qu'une fois,
un deuxième échantillon qui sera expédié au
complexe scientifique du gouvernement du Québec à Sainte-Foy. Il
servira à dénombrer le nombre de bactéries dans le lait
à l'état nature, c'est-à-dire avant sa pasteurisation
à la laiterie. La norme maximale pour que le lait soit
considéré propre à la consommation humaine est de 100 000
bactéries par centimètre cube. À tous les deux mois, en
plus du test de bactéries, l'échantillon sert également
à dénombrer le nombre de leucocytes dans le lait, un indice de
l'état de santé du troupeau, et aussi à détecter la
présence de médicaments, indice qu'un producteur n'a pas
respecté les délais d'attente prescrits entre l'administration
d'un médicament à son animal et la reprise de la cueillette du
lait.
Ces résultats sont utilisés par les laiteries pour
surveiller la qualité de leur approvisionnement et par l'Office des
producteurs de lait pour déterminer si un producteur se qualifie
toujours pour diriger son lait vers la consommation à l'état
frais. Un premier manquement amène un avertissement, tandis qu'une
récidive entraîne une pénalité qui prend la forme
d'une diminution du prix payé à l'agriculteur ou d'un refus pur
et simple de son lait jusqu'à ce que des correctifs soient
apportés. C'est un système très efficace qui couvre tous
les producteurs laitiers du Québec, ceux qui approvisionnent la
Communauté urbaine de Montréal comme les autres. Ce
système a permis de déterminer qu'il n'y a pas de
différence appréciable entre les deux groupes au point de vue de
la qualité, même si l'inspection à la ferme
pratiquée par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation est beaucoup plus légère et
économique que celle de la Communauté urbaine de Montréal
qui a onze médecins vétérinaires pour 3 600 fermes, contre
17 techniciens pour 16 400 fermes pour le ministère. Les
résultats, en termes de qualité, ont indiqué que le lait
dans les deux territoires était identique ou le pourcentage en faveur du
lait en dehors de la communauté urbaine était tellement faible
qu'il ne vaut pas la peine d'en parler.
Au niveau de la transformation, le principal problème
découlant de l'exercice de pouvoirs d'inspection par une
municipalité ou une communauté urbaine réside dans le fait
que les règlements peuvent être appliqués
différemment selon que les usines qui approvisionnent le marché
sont situées sur le territoire municipal ou en dehors. C'est dû en
fait à une forme de protectionnisme déguisé qui permet
à une municipalité d'avantager des entreprises situées sur
son territoire et qui lui paient des taxes. Nous considérons que la
seule façon de remédier aux distorsions, aux problèmes
administratifs et aux coûts inutiles reliés à la double
inspection dans les domaines de la production primaire et de la transformation
est l'affirmation de l'exclusivité de la compétence du
Québec sur ce domaine, après avoir tenu compte de la
compétence fédérale en matière de commerce
interprovincial et international.
Au niveau de la distribution du détail
et de la restauration, le système idéal est le maintien de
la juridiction municipale pour les villes qui l'exercent déjà,
tout en uniformisant les normes et les méthodes d'inspection. C'est
pourquoi le projet de loi prévoit que les municipalités pourront
inspecter ces établissements au point de vue de la salubrité et
pour vérifier si les aliments qu'ils manipulent, transforment et vendent
à leurs clients sont conformes aux normes de qualité du
Québec. En arrimant dans un tout cohérent et sans chevauchement
administratif les systèmes d'inspection des aliments qui existent dans
certaines municipalités et au ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, le projet de loi permettra une meilleure
utilisation des ressources et une protection plus efficace des consommateurs,
en plus d'éliminer les risques d'entraves inutiles à la libre
circulation des denrées à l'intérieur du
Québec.
M. le Président, dans le cadre de ce projet de loi, nous avons
ajouté quelques articles de circonstance et en avons profité pour
améliorer certains articles de lois existantes, soit la Loi sur les
produits agricoles et les aliments et la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés, pour changer le niveau des amendes; celui-ci n'ayant
pas été changé depuis plusieurs années, il ne
réflétait plus les niveaux d'amendes qui correspondent aux prix
actuels de sorte que les niveaux des amendes ont été
changés pour les infractions. Nous en avons également
profité pour avoir des amendes particulières pour ceux qui
laissent des ristournes sur le prix du lait. Les montants maximaux des amendes
deviendront obligatoires dans ces cas. Pour un individu, la première
amende sera de 1000 $ et la deuxième, pour une récidive, de 3000
$. Pour une compagnie, la première amende sera de 3000 $ et la
deuxième de 6000 $. Mais le principal point est que l'article 52 de la
loi veut rendre les ristournes non payantes, au contraire, puisque, dans ce
cas, ceux qui auront versé des ristournes et ceux qui les auront
reçues pourront avoir tous deux à payer le montant de la
ristourne. Celui qui l'a reçue aura à payer le montant qu'il a
reçu et celui qui l'a versée aura à payer le montant qu'il
a versé. Je pense que ce sera une bonne façon de corriger ou de
rendre moins intéressant le versement de ristournes.
M. le Président, je vous ferai remarquer que si on regarde
l'histoire des ristournes, les amendes prévues à cette loi n'ont
pas été changées depuis 1969. Vers la fin des
années 1960, la question des ristournes avait été d'une
grande actualité. La Régie des marchés agricoles est
allée à ce moment-là jusqu'à abandonner la fixation
des prix de gros et de détail devant les difficultés
rencontrées à les faire respecter. Cet abandon n'a duré
que quatre mois à cause du désordre qui en est
résulté. À ce moment, le Québec comptait beaucoup
plus de laiteries qu'aujourd'hui et des laiteries de petite taille qui
pouvaient difficilement survivre à la guerre des prix
déclenchée à la suite de l'abandon des ordonnances de la
régie. Peu de temps après le rétablissement des prix
fixés par la régie, cette dernière a entrepris des
procédures contre différents contrevenants, mais cela n'a eu que
peu de résultats en raison de la faiblesse des amendes. En 1972, la
régie a terminé une vaste enquête sur le
phénomène des ristournes et, depuis ce temps, il n'y a pas eu
d'autres poursuites pour ristournes avec celles qui viennent d'être
intentées.
M. le Président, je pense que le principal vice concernant la
question des ristournes, qui a toujours été un problème
dans l'administration des prix du lait, c'est que les amendes ont toujours
été beaucoup trop faibles et que les gouvernements
antérieurs n'ont jamais voulu véritablement corriger la
situation. C'est la raison de l'amendement qu'on retrouve dans le projet de loi
ici. Si les gens versent des ristournes et que les enquêtes le
démontrent, ils seront passibles de poursuite et auront à payer,
en plus des amendes qui ont été augmentées
considérablement, le montant reçu en ristournes pour celui qui
l'a reçu et le montant qu'il a payé pour celui qui l'a
payé, de sorte que si on a versé 100 000 $ de ristournes, si un
marchand a versé à un grossiste 100 000 $, il pourra, en plus
d'avoir à payer une amende, devoir payer les 100 000 $, et celui qui les
a reçus devoir payer aussi les 100 000 $. De sorte que, comme l'ont
indiqué, cette semaine, depuis le dépôt du projet de loi,
les entreprises qui semblent avoir été impliquées dans ce
système, la loi qui est présentée devant
l'Assemblée nationale va contribuer à empêcher le versement
de ristournes, parce qu'il n'y aura plus d'intérêt à les
verser puisque les amendes couvriront les montants des ristournes qui auront
constitués un avantage pour celui qui les aura reçues. Je vous
remercie, M. le Président. (2 heures)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
mentionner que le ministre, selon son habitude, dépose en fin de session
ce projet de loi no 102 et, surtout, avec un délai très court.
Nous aurions bien aimé avoir une couple de semaines pour nous
familiariser avec le projet, pour l'étudier, pour prendre les contacts,
les renseignements nécessaires avec les gens concernés.
Malheureusement, il a fallu faire vite, parce que c'est arrivé à
la fin de la session. Nous
l'étudions, il est deux heures du matin, les gens qui nous
regardent vont peut-être croire que c'est en différé, mais
c'est bien en direct.
Cette loi a pour but de "réaménager les pouvoirs
juridiques concernant les régimes de normalisation et d'inspection en
matière alimentaire. Sous une apparence plutôt anodine, cette loi
contient 40 articles et modifie 10 lois ou chartes de cités ou villes.
Ce projet amène également une modification au régime
d'amendes et de sanctions afin de juguler, semble-t-il, le système de
ristournes en matière de distribution de produits laitiers. M. le
Président, mes propos seront brefs. Le Parti libéral du
Québec est favorable au maintien de normes d'inspection satisfaisantes
en matière alimentaire. Cela dans l'optique de la protection du
consommateur et, également, des producteurs et des transformateurs.
Cependant, comme l'a dit le ministre, il existe présentement un
mode d'inspection qui, à certains égards, pouvait sembler
satisfaisant un peu partout au Québec. Mais le ministre a
décidé de prendre en main ce secteur. Il pourra donc, selon les
termes de la loi, prescrire, approuver, édicter, bref, s'imposer dans ce
domaine. On sait que quand le ministre de l'Agriculture s'impose, il prend
beaucoup d'espace, normalement. Cette loi consacre la mainmise du
ministère de l'Agriculture en matière d'inspection alimentaire.
Je ne veux pas dire que c'est mal en soi. C'est sûr qu'il y avait des
choses à corriger. Il y avait une rationalisation à apporter dans
les doubles juridictions pour cesser de tracasser ou tracasser le moins
possible les gens qui sont toujours victimes de ces inspections. Une question
que j'aimerais poser au ministre, il pourra me répondre tout à
l'heure dans sa réplique, est la suivante: Est-ce que les
autorités municipales, les unions, l'Union des conseils de comté,
l'Union des cités et villes et les villes concernées ont
été consultées et qu'en pensent-elles? Il semble que, pour
les villes de Québec, Trois-Rivières et Sherbrooke, la loi no 102
ne confirmera, en réalité, qu'un protocole d'entente
déjà existant entre ces villes et le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Le
projet de loi no 102 leur permet de conserver leur juridiction sur la vente au
détail - restaurants, boucheries, épiceries, tabagies,
supermarchés, hôpitaux, garderies -et elles sont, semble-t-il,
heureuses qu'une loi vienne harmoniser les systèmes d'inspection des
aliments. Mais en ce qui concerne la Communauté urbaine de
Montréal, fut-elle consultée? Il semble que celle-ci ait toujours
voulu garder son propre système d'inspection, qu'elle juge, d'ailleurs,
bien supérieur à celui du gouvernement du Québec. Selon
nos informations, une entente avait été conclue en 1981 entre le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimention et la
Communauté urbaine de Montréal. Et tout à l'heure, le
ministre l'a même confirmé. Selon cette entente, la
communauté conservait son système d'inspection des aliments et
les frais de service étaient remboursés par le gouvernement.
Le ministre voudrait-il donner les définitions précises
des termes salubrité, activités de préparation et de
transformation? Ces notions inquiètent les gens qui sont
concernés et à qui cette loi s'appliquera. Est-ce que
établissement de vente au détail d'aliments, de restauration ou
d'hôtellerie englobe une garderie, un hôpital? Est-ce qu'un
véhicule servant à livrer des aliments au consommateur comprend
le camion de la manufacture qui vient livrer des aliments à
l'épicier, c'est-à-dire à ceux qui approvisionnent
l'épicier? Ce sont des questions auxquelles nous aimerions que le
ministre apporte une réponse, mais, avant d'adopter ce projet de loi, la
question que nous nous posons est celle-ci: N'y aurait-il pas eu lieu d'en
arriver à une entente par voie de négociation avec la
Communauté urbaine de Montréal, considérant l'excellence
de ses services en ce domaine et considérant également sa longue
expertise puisque la ville de Montréal, qui a commencé le
système, le pratique depuis environ 1925?
De plus, la question que nous pouvons nous poser, c'est: Est-ce qu'il y
aura de nouveaux postes d'ouverts, de requis pour combler cette inspection?
Est-ce qu'il y a des fonctionnaires de la CUM dans le moment qui seront
remerciés ou qui seront réaffectés à d'autres
postes de par l'application de cette loi? Quel sort attend ces fonctionnaires
et est-ce qu'il y aura de nouveaux postes d'ouverts au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec?
Est-ce à dire que les services d'inspection des aliments
relèveront du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation dans tout le Québec?
Tout à l'heure, j'ai cru comprendre, d'après la
réponse que le ministre a donnée à une question qui lui
était posée, que la juridiction gouvernementale se limitera au
secteur tertiaire. C'est ce que j'ai cru comprendre. J'ai peut-être mal
compris. Peut-être que le ministre pourra tout à l'heure nous le
réexpliquer parce que j'aimerais bien savoir ce qu'il arrivera des
secteurs primaires, de la production et de la transformation. Est-ce qu'ils
vont toujours relever du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation ou relèveront-ils d'autres instances? Si oui,
lesquelles? Il y a une question importante aussi: Est-ce que le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec est équipé pour assumer les fonctions qui lui
seront
dévolues par la loi no 102? Est-ce que l'adoption de ce projet de
loi engendrera des coûts supplémentaires au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec et, si
oui, de quel ordre seront-ils?
Concernant les articles du projet de loi qui ont trait au système
de ristourne dont le ministre a parlé tout à l'heure, le ministre
croit-il sincèrement que cette loi pourra enrayer les manoeuvres au
moyen de l'augmentation des sanctions? Il ne faudrait pas que ce ne soit qu'un
leurre et seulement pour sauver la face, parce que le ministre a
déjà soutenu l'impossibilité de prouver ces
supposées pratiques qui peuvent prendre diverses formes parfois
très sophistiquées et impossibles à dépister. (2 h
10)
Bien que cette loi ait son importance, le monde rural aurait bien
aimé avoir l'étude de lois plus urgentes et plus
désirées, tel qu'en font foi les délibérations du
congrès de l'UPA, actuellement en cours.
En concluant, en pleine crise économique durement ressentie par
le monde agricole, je crois que celui-ci aurait mérité plus que
la loi 102. Le ministre veut sa loi, probablement pour augmenter son
palmarès, nous y concourrons. Mais je dois dire au monde agricole:
À défaut de pain, on vous donne de la galette. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que
je suis fort désappointée. Non parce que j'interviens sur la loi
102, mais regardez l'heure. Deux heures dix du matin. J'avais promis aux gens
de mon comté que je parlerais assez tôt, ce soir. Vous savez,
quand je dois intervenir sur une loi, surtout quand elle concerne les
producteurs agricoles, les consommateurs ou les industriels, enfin n'importe
quoi, quand j'interviens sur une loi, je les tiens au courant. Je leur ai dit
que je parlais sur la loi 102, ce soir. Ils demandent ce qu'est la loi 102. Je
leur ai raconté ce que c'était, d'après les notes
explicatives.
Ils ont dit qu'ils aimeraient bien m'entendre. J'ai dit, je fais faire
mon possible, mais ce n'est pas moi qui dirige. Parfois, l'Opposition nous
retarde passablement, comme cela s'est fait, ce soir, sur la loi 92. Mais je
leur ai promis, même s'ils ne pouvaient pas m'entendre, que je ferais mon
possible pour leur envoyer mon discours. À la suite de cela, ils m'ont
dit, est-ce qu'on pourrait te demander une faveur? Je leur ai dit, allez-y, je
ne peux rien vous refuser.
Une voix:... ?
Mme Juneau: Non, ce n'est pas tout à fait cela. Ils m'ont
dit, Carmen, pourrais-tu parler sur le lait? J'ai même eu un appel
téléphonique, à l'heure du souper, du maire d'une de mes
municipalités, de Brompton Canton, qui est lui-même un producteur.
Il m'a dit, cela nous ferait tellement plaisir, parce que nous avons des
problèmes sur le lait et que cela serait bien intéressant de
t'entendre parler seulement sur ce sujet. Vous savez, pour eux, c'est du
chinois, toutes ces histoires. Elles l'étaient pour moi, il n'y a pas
tellement longtemps. Je commence à me démêler un petit
peu.
Pour faire suite à leur demande -comme je ne peux rien leur
refuser, comme vous le voyez - j'ai dit à mes producteurs de Johnson, je
vais parler du lait. Je me suis rappelé, en avril 1981, qu'il y a eu un
sommet sur l'industrie laitière à Rimouski. Il y avait là
200 personnes. On a dénoncé les ristournes sur le lait, lors de
ce sommet.
M. Garon a demandé au président de la Régie du
marché agricole s'il était au courant de ces allégations
et de ces problèmes et si quelque chose était à faire dans
cela. M. Lavigne, le président, lui a répondu, à notre
ministre de l'Agriculture, que la régie était au courant, qu'elle
allait faire une enquête. N'est-il pas vrai, M. le ministre, que, lorsque
la régie décide de faire une enquête, elle n'a pas besoin
que vous lui disiez d'en faire une? Elle a le droit de le faire. Elle a le
droit d'enquêter, de blâmer des gens qui font des choses
incorrectes. Elle peut agir sans que vous soyez obligé de lui donner des
ordres. C'est ce qu'elle a fait.
Lors de ce même sommet, à Rimouski, le problème des
dépanneurs a également été soulevé. Ils
vendaient le lait trop cher, plus cher que le prix maximum fixé par la
régie. À cette occasion, la régie est intervenue
immédiatement et des poursuites ont été entreprises. Dans
plusieurs cas - en tout cas, je l'ai ici dans mon communiqué - il y a au
moins seize détaillants qui ont été punis, parce qu'ils
ont chargé trop cher pour le lait au détail.
Vous savez, les amendes n'étaient pas tellement
élevées, mais c'est gênant, par exemple, de voir ton nom
écrit sur un communiqué. N'importe qui peut l'avoir ce
communiqué et savoir qui a vendu son lait trop cher. Les consommateurs
iront à cet endroit et diront: Tu m'as vendu ton lait trop cher, j'ai
ton nom ici. Ce n'est pas drôle de jouer comme cela le consommateur,
parce qu'on finit toujours par se faire attrapper.
Il faut savoir aussi que c'est très facile de contrôler ce
genre d'infraction. On a juste à aller à l'épicerie et le
prix y est affiché. Il suffit d'aller vérifier. À ce
moment-là, on peut voir si oui ou non les dépanneurs ou
les épiceries vendent le lait trop cher. Il est facile de faire un
rapport à la régie et de les faire arrêter pour leur faire
payer une amende.
Par contre, quand des ristournes auraient été
versées par des laiteries à des grossistes, c'est beaucoup plus
difficile à établir et à trouver l'infraction. Les gens
peuvent très bien payer le prix minimum fixé par la régie
dans le lait et couper les prix dans un autre domaine. Des poursuites ont
été entreprises contre plusieurs fautifs qui auraient contrevenu
à la loi. Par contre, s'il y avait eu des amendes efficaces, on n'aurait
peut-être même pas eu besoin d'entreprendre des poursuites. Les
amendes prévues dans la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés n'ont pas été modifiées, comme M.
le ministre disait tout à l'heure, depuis 1969. Il est temps qu'on
commence à regarder cela de plus près. Les montants prévus
sont les maximums. Donc, le juge peut fixer des amendes aussi bas que 10 $.
Dans le contexte actuel, 10 $ ne va pas chercher loin, et cela ne punit pas
tellement le gars qui a fait une infraction. Si, par contre, il paie 1000 $
pour une infraction, il va y penser. Il ne se fera pas marcher sur les doigts
deux fois de suite, c'est bien sûr. Pourtant, ce n'est pas la
première fois qu'on parle de ristourne illégale sur le prix du
lait.
Vers la fin des années soixante, le Parti québécois
n'était pas au pouvoir. C'était une autre sorte de gouvernement
et il y a eu une enquête par la régie et cela a conduit jusqu'en
1972 à des poursuites contre des entreprises qui auraient versé
des ristournes illégales. Ces poursuites n'ont pas eu grand effet. Les
amendes n'étaient pas assez élevées. Les amendes de 10 $,
cela s'est perdu dans le décor et personne n'en a entendu parler.
Aujourd'hui, ce n'est plus la même chose. Quand ils paieront le
gros prix, ils s'en souviendront. Les libéraux avaient beau jeu pour
régler le problème à l'époque, mais ils ne
voulaient pas le faire, ni chair, ni poisson, on ne prend pas de
décision, parce que cela ne fait pas de mal à personne. Si on ne
prend pas de décision, on n'avance plus en rien. Nous, on n'a pas
attendu, on n'a pas laissé cela traîner une minute. On dit que les
amendes prévues dans le projet de loi sont rendues plus conformes
à la réalité économique d'aujourd'hui et on va les
appliquer.
Quand on fait une offense grave, c'est important que tout de suite le
gouvernement du Québec vienne à la rescousse pour protéger
le consommateur. Le consommateur, c'est tout le monde, M. le Président,
c'est vous, c'est moi, ce sont toutes les familles du Québec. C'est nous
qui payons et si on laisse aller tout le monde à qui mieux mieux, ce qui
va arriver, c'est que les familles du Québec vont se ramasser avec des
prix exorbitants et vont payer la peau et les os des produits et ça va
donner quoi? Ça va donner qu'une race de monde va s'enrichir aux
dépens des autres. (2 h 20)
Dans le cas précis des ristournes, le projet de loi 102 parle de
monter... -excusez-moi, je suis fatiguée -... d'élever les
montants obligatoires au montant maximum des amendes. De plus, les
contrevenants devront payer une amende correspondant au montant prouvé
du montant des ristournes illégales reçues. Je vais m'expliquer
parce que c'est un peu confus, mon affaire. Cela veut dire que, si un gars a
une amende de 5000 $ à payer et qu'il a eu des ristournes pour 10 000 $,
il va avoir 5000 $ à payer, plus les 10 000 $ qu'il a faits en
ristournes, ce qui équivaudra à un montant de 15 000 $. Cela les
fera réfléchir, ils vont y penser comme il faut la prochaine
fois.
Une voix: Ils vont être punis par où ils ont
péché.
Mme Juneau: II y a eu d'autres amendes payées par
différents groupes. Là, je vous parle du lait. Il y a eu des
amendes pour la détention en vue de la vente d'un
succédané illégalement étiqueté. Il y a des
gens qui, sur les emballages, indiquent un poids qui n'est pas le poids
réel. Ils ont payé l'amende. Pour une présence trop
élevée de micro-organismes vivants dans les produits, ils ont
payé l'amende. L'addition d'eau dans les produits laitiers, est-ce que
cela a du bon sens? Ils mettent jusque de l'eau dans les produits laitiers. Ils
ont été punis. Détention en vue de la vente d'aliments
congelés sans les maintenir constamment à une température
inférieure à leur point de congélation, ils ont
payé l'amende. Si on calcule tout cela - vous savez que, cette
année, pour l'ensemble de la province de Québec, il y a eu 32
types d'infractions - les infractions ont suscité 73 condamnations, pour
un montant total de 24 190 $.
La qualité des produits, c'est extrêmement important pour
le consommateur. La qualité des produits, c'est important aussi pour la
conquête des nouveaux marchés. Saviez-vous, M. le
Président, que le Québec a exporté en 1981 là, je
ne parle pas d'exportations au Canada, je parle des exportations à
l'extérieur du Canada - pour 1 180 000 000 $? Je me le suis fait
répéter parce que je ne suis pas habituée à autant
de zéros. J'ai dit: Pas un 1 000 000 000 $? Ils m'ont répondu:
Bien oui, 1 180 000 000 $ de produits alimentaires, soit le triple des
exportations de 1976. Le triple. 1976, ça vous rappelle quelque chose?
C'est l'année où le Parti québécois a pris le
pouvoir. Depuis 1976, on est rendu à
1 180 000 000 $ pour les produits agroalimentaires exportés en
dehors du Canada. N'a-t-on pas une belle performance?
Pensez-vous qu'on se serait développé à un tel
point si on n'avait pas eu l'excellence de nos produits? Pensez-vous cela? Je
ne le pense pas. Si tu offres au consommateur un produit de moins bonne
qualité, un produit qui n'est pas vendable, autrement dit, tu
n'exporteras pas pour 1 180 000 000 $, ce n'est pas vrai. Il faut un produit
excellent, des producteurs excellents et un ministre de l'Agriculture qui "voit
aux toasts". Pour avoir un produit excellent, il faut avoir un système
d'inspection excellent. C'est pour cela que le ministre a décidé
cette année de présenter le projet de loi no 102. Par ce projet
de loi, on va surveiller de plus près tout ce qui sera mis sur le
marché par les producteurs, tout ce que les transformateurs mettront sur
le marché, tout ce qu'on pourra exporter. En 1982, on en a eu pour 1 180
000 000 $; imaginez-vous, dans quelques années, quand on aura
appliqué à fond la loi 102, ce sera -je n'oserai pas le dire - le
bordel partout dans le monde. Tous les consommateurs vont rechercher les
produits fabriqués au Québec à cause de leur
excellence.
C'est pour cela que le ministre a dit: Cela n'a plus de bon sens, on ne
niaisera pas avec cela, on adopte le projet de loi 102. J'espère que
l'Opposition sera de notre avis et nous donnera un coup de main quand c'est
pour prouver au monde entier qu'au Québec on est capable de fabriquer ce
qu'il y a de mieux au monde. M. le Président, quand le ministre essaie
de trouver toujours l'excellence dans les produits je le suis parce que chez
moi, comme je vous l'ai dit la semaine dernière, j'ai un grand nombre de
producteurs. J'ai un grand nombre de gens qui travaillent très fort pour
produire leurs denrées alimentaires. J'ai le goût de les aider et
ils savent que quand je me lève ici c'est soit pour les renseigner, soit
pour les aider ou pour démontrer que, dans Johnson, nous avons les
meilleurs producteurs qui sont capables de tirer leur épingle du
jeu.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, je vais voter pour la
loi no 102 et j'espère que tous ceux qui sont ici vont faire la
même chose. Merci.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député Berthier.
M. Albert Houde
M. Houde: Merci, M. le Président. Je voudrais simplement
dire un mot à la députée de Johnson. C'est pour vous dire
que c'est bon d'avoir des gens pour négocier afin de vendre notre
produit. Donc, quand on sera séparé, ce sera un autre
problème. Mais restons unis dans le Canada pour faire affaires avec les
provinces voisines et l'étranger.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Houde: M. le Président, encore une fois il faudrait
bien que je lui parle de mon cours d'eau au ministre avant de terminer. Ne
partez pas, M. le ministre, parce que je veux terminer avec mon cours d'eau
tranchemontagne. Il est déjà 2 h 27, M. le Président. Nous
allons adopter encore un autre projet de loi, qui portera le no 102. Ce projet
de loi concernant le réaménagement des pouvoirs juridiques quant
aux régimes de normalisation et d'inspection en matière
alimentaire comporte le double désavantage d'être à la fois
prématuré et tardif. Je ne dis pas M. Tardif, là. Dans
cette courte intervention, il me sera possible de traiter de l'épineux
dossier des ristournes illégales dans le secteur laitier, d'une part, et
de la juridiction de la Communauté urbaine de Montréal, d'autre
part.
Ce projet de loi m'apparaît donc prématuré. En
effet, en se référant au dossier du lait, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation n'ignore pas que des
causes sont toujours pendantes devant les instances judiciaires. En principe,
nous ne pouvons nous opposer à une hausse substantielle des amendes
générales visées, entre autres, à la Loi sur les
produits laitiers et leurs succédanés. Toutefois, est-ce bien une
action aussi limitée en ce domaine que souhaitent les agents du monde
agricole? Le ministre espère-t-il de cette façon éliminer
les causes des irrégularités commises dans la triste histoire des
ristournes? En d'autres termes, nous disons que ce projet de loi
n'améliore en rien la qualité de la preuve des
irrégularités parce qu'il s'attarde, non pas au contenu du
problème mais davantage au contenant.
M. le Président, j'estime, par conséquent, qu'il eût
mieux valu s'abstenir de légiférer en cette matière avant
d'avoir pris connaissance des véritables raisons des agissements dont le
quotidien La Presse faisait état il y a quelque temps. À cette
fin, les jugements rendus prochainement instruiront davantage que les discours
du ministre. En deuxième lieu, M. le Président, il est connu
qu'au début de la prochaine année des audiences publiques seront
tenues par la Régie des marchés agricoles en vue de recueillir
les perceptions et recommandations des groupes et individus
concernés.
Voilà que le ministre nous arrive, sans doute par hasard, avec ce
projet de loi qui ne tient peut-être pas compte du milieu
concerné. Pourquoi ne pas avoir attendu le rapport devant être
rédigé à la suite de ces audiences, rapport pouvant alors
servir de
plaidoyer sûrement plus valable que les notes explicatives du
projet de loi 102? En ce sens, M. le Président, le ministre chercherait
donc à sauver les meubles à la suite des blâmes
sévères qui lui ont été servis après
l'apparition des articles du quotidien montréalais. Ce geste que je
qualifierai de politique m'amène à conclure également que
le présent projet de loi nous est présenté tardivement. (2
h 30)
Rappelez-vous les événements entourant le fameux
congrès des producteurs laitiers tenu à Québec, où
le ministre de l'Agriculture a dû expliquer les raisons de son inaction
dans ce dossier. À cette occasion, le ministre n'a pu nier les
allégations reliées au problème des ristournes
illégales, mais il a bien pris soin de ne pas aborder la
responsabilité qu'il avait à titre de ministre de l'Agriculture
de manière à empêcher de telles irrégularités
qui se produisent depuis au moins deux ans.
Bien plus, le ministre de l'Agriculture avait déjà
déclaré qu'il ne pouvait, en toute décence, intervenir
là où la Régie des marchés agricoles avait
juridiction. Or, dans un décret daté du 1er décembre 1982,
portant le numéro 2780-81, le gouvernement a abrogé une
ordonnance de la régie sur les prix du lait de consommation sur les
marchés du gros et du détail. Non, j'ai parlé du gros et
du détail. À toutes fins utiles, ce décret a pour effet de
rendre inopérante une décision de la régie. Voilà
la logique du gouvernement péquiste en matière agricole. D'autre
part, le consommateur québécois a appris la bonne nouvelle
récemment qu'il aurait à assumer une augmentation de prix du
litre de lait de l'ordre de 0, 02 $. Au nom des consommateurs, il y a eu tout
lieu de se réjouir d'une telle nouvelle. Cependant, dans le monde
agricole, on se pose de sérieuses questions sur cette façon
d'administrer en expédiant sur le dos des intermédiaires le
fardeau d'un coût supplémentaire du litre de lait devant
être versé aux producteurs laitiers.
Pour leur part, les consommateurs savent très bien qu'en fin de
compte, ils devront absorber les effets de n'importe quel facteur
d'augmentation, du coût de la production d'un produit. Pour leur part,
les laitiers et distributeurs ne resteront pas longtemps silencieux à la
suite d'une telle décision les obligeant à verser un
supplément à même leurs revenus.
Je reviens un instant sur les audiences devant être tenues le 25
janvier prochain. À cette occasion, on discutera du système de
fixation des prix dans le secteur du lait de consommation. Le ministre a
déjà invité les consommateurs à se prononcer sur le
sujet. Qu'arrivera-t-il dans l'éventualité où la
régie en arriverait à la conclusion que l'imposition d'amendes ne
serait plus nécessaire? Est-ce que le ministre peut présumer des
résultats avant même la tenue d'audiences sur le sujet?
L'Opposition ne le peut davantage et ceci nous amène à conclure
qu'une telle loi est prématurée dans les circonstances.
En terminant, permettez-moi de dire quelques mots sur le dossier des
petits abattoirs. Dans ce domaine également, j'invite le gouvernement
à demeurer vigilant et surtout cohérent. Pas moins de 8900
Québécois travaillaient dans 165 établissements d'abattage
et de conditionnement en 1980; des salaires de l'ordre de 134 000 000 $
étaient versés cette année-là, produisant une part
importante de notre activité économique, entre autres dans les
petites PME. De plus, je rappelle qu'entre 1970 et 1976, le gouvernement
libéral subissait les foudres de l'Opposition d'alors, parce que,
disait-on, l'action des inspecteurs contribuait à la fermeture des
petits abattoirs. En 1972, le Parti québécois prenait la
défense de ces abattoirs et promettait de leur accorder une aide
substantielle s'il était élu. Les petits abattoirs ont
effectivement bénéficié de l'aide gouvernementale, mais en
sens inverse.
M. le Président, en effet, le gouvernement instaurait en 1976 un
programme visant les dirigeants des petits abattoirs pour qu'ils se retirent du
circuit moyennant un soutien financier dans le cadre de ce qu'on appelait la
modernisation des usines d'abattage. Oui, on encourage les agents du milieu en
les invitant à se retirer. Nous ne nous opposons pas à un
resserrement des règles du jeu en cette matière dans le cas
où les activités sont contraires aux normes de
sécurité, mais nous demandons au gouvernement de faire preuve de
discernement en cette période économique difficile de
façon à ne pas décourager ceux qui ont encore les moyens
de tenir leur établissement ouvert. Sinon, je demande au gouvernement ce
qui l'avait motivé à prendre position en faveur des petits
abattoirs, sinon qu'il ne connaissait pas l'état de la situation avant
la tenue d'une élection générale. M. le Président,
les agriculteurs québécois attendent une meilleure
cohérence et de l'honnêteté de leurs gouvernants.
En ce qui a trait au protocole d'entente entre la Communauté
urbaine de Montréal et le gouvernement, j'aimerais une uniformisation
parmi les grandes villes du Québec. Au cours des
délibérations du Parti libéral en matière agricole
comme dans d'autres secteurs, il a été établi que le
rôle de l'État devait un jour ou l'autre se limiter à celui
de superviseur, de coordinateur de grandes politiques. Le seuil de
l'intervention de l'État devrait faire l'objet d'un débat
national. Pour l'instant, nous nous contenterons d'exprimer l'opinion que le
gouvernement ne doit pas chercher à prendre le contrôle mais,
plutôt, à améliorer le
système en place. En fait, le présent gouvernement devrait
s'efforcer de mettre en pratique ses propres discours. Il ne se passe pas une
semaine sans qu'il veuille rapatrier une juridiction fédérale.
Pourquoi ne pas agir de même avec nos municipalités? Une
concertation s'impose donc avec les autorités concernées de
manière à établir le plus correctement possible la ligne
à suivre.
M. le Président, c'est pour cela que nous voterons en tant que
parti de l'Opposition pour le projet de loi no 102 en deuxième
lecture.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mille-Îles.
M. Jean-Paul Champagne
M. Champagne: M. le Président, cela me fait doublement
plaisir de traiter du projet de loi no 102 parce que c'est la première
fois dans cette Assemblée nationale que nous avons comme
président un agriculteur, un producteur laitier, et c'est tout en votre
honneur.
M. le Président, voici le contenu de la loi no 102. Avant de
l'expliquer, on va traiter de la situation actuelle. Comment le système
d'inspection est-il établi? Premièrement, il se divise en trois
catégories. Une inspection qu'on appelle une inspection primaire,
à savoir l'inspection des fermes, des produits laitiers et de leurs
succédanés. Le deuxième élément, c'est la
transformation, à savoir les abattoirs et les charcuteries. Le
troisième élément, c'est celui de la restauration, de
l'hôtellerie et de la distribution au détail. (2 h 40)
M. le Président, actuellement, le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a établi les
normes et les règlements sur tout le territoire du Québec. Mais
il y a, par exemple, quatre exceptions; il y a quatre villes qui ont des
exceptions à ces normes et à cette réglementation sur le
territoire du Québec. Ce sont les villes qui ont des exceptions à
ces normes et à cette réglementation sur le territoire du
Québec. Ce sont les villes de Québec, Trois-Rivières,
Sherbrooke et la Communauté urbaine de Montréal. La
Communauté urbaine de Montréal a ses propres normes et, aussi, a
un grand territoire à inspecter. En effet, la Communauté urbaine
de Montréal a 11 inspecteurs vétérinaires qui font la
visite de 3600 fermes laitières autour de Montréal. Cela veut
dire en pratique qu'un producteur laitier de Sherbrooke, de Saint-Hyacinthe, de
Granby ou de Sainte-Agathe-des-Monts doit faire inspecter son lait par des
inspecteurs de Montréal. Qu'est-ce qui arrive? C'est qu'il y a des
divergences de vues entre les inspecteurs du ministère, qui ont leurs
normes et leurs règlements, et les inspecteurs de la Communauté
urbaine de Montréal, qui ont aussi leurs normes et leurs exigences.
En effet, comme divergences, la Communauté urbaine de
Montréal a des qualifications chez les inspecteurs qui ne sont les
mêmes qu'au ministère de l'Agriculture. Deuxièmement, au
sujet de la fréquence des visites, en effet, les inspecteurs de la
Communauté urbaine de Montréal ont une moyenne de quatre visites
par année chez les laitiers. Troisièmement, il y a la
méthodologie d'inspection qui arrive parfois en contradiction avec celle
du ministère. Un autre élément: le permis pour livrer le
produit n'est pas le même. En plus de cela, le coût de l'inspection
pour la Communauté urbaine de Montréal est assez
élevé, considérant qu'ils ont 11 inspecteurs
vétérinaires pour environ 3600 fermes, tandis qu'au gouvernement
provincial on a 17 inspecteurs agricoles pour 16 400 fermes. Enfin, la
philosophie d'inspection de la Communauté urbaine de Montréal est
une philosophie qui privilégie ses seuls intérêts, tandis
que la philosophie du ministère a comme objectif l'intérêt
de tous les gens du milieu.
M. le Président, devant cette divergence, il y a distorsion entre
les producteurs laitiers. Cela complique l'administration des usines
laitières. Sans améliorer, sans avoir une meilleure
qualité de lait, on a de ces distorsions et la loi no 102 va corriger
ces distorsions. Comme résultat, les coûts seront moins
élevés, les coûts seront justifiés. L'objectif de la
loi no 102, c'est d'harmoniser le système d'inspection des aliments au
niveau municipal et au niveau provincial. Donnons-nous un partage des
tâches. Le ministère aura des normes qui vont s'étendre sur
tout le territoire du Québec avec la loi no 102. Les mêmes
règlements, les mêmes normes pour tous les Québécois
dans toutes les municipalités. Il y aura quand même des exceptions
pour l'élément tertiaire, à savoir l'inspection pour la
restauration, l'inspection des épiceries, l'inspection de
l'hôtellerie, l'inspection pour la distribution au détail. Quatre
villes auront des exemptions, encore, soit les villes de Québec, de
Trois-Rivières, de Sherbrooke et la Communauté urbaine de
Montréal.
Il y a un élément qui est ajouté dans ce projet de
loi: les villes de 100 000 habitants et plus vont pouvoir avoir leurs propres
inspecteurs. En effet, si le ministère de l'Agriculture a une entente de
services avec la municipalité qui a 100 000 habitants et plus,
automatiquement, on acceptera le programme d'inspection du ministère
dans cette municipalité, on verra aux mêmes applications
réglementaires et, enfin, le ministère et les cités qui
accepteront cela, accepteront aussi le financement.
Ce projet de loi no 102 aura comme résultat une centralisation
des règlements; aussi une uniformisation administrative des normes et
des règlements. Un autre élément: la
décentralisation de l'inspection au niveau des villes de 100 000
habitants et plus. Je suis particulièrement réjoui de voir que la
ville de Laval aura son autonomie au point de vue de l'inspection. Je connais
la fierté des Lavallois et des Lavalloises au sujet de l'autonomie... Ce
ne seront plus les inspecteurs de la Communauté urbaine de
Montréal qui viendront inspecter les fermes ou les restaurants sur le
territoire de la ville de Laval, mais ce seront des inspecteurs lavallois qui
vont inspecter les produits qui seront sur leur territoire. C'est bien
sûr que je vais espérer ici dans cette Assemblée que la
ville de Laval et le ministère de l'Agriculture signeront ces ententes
de service pour le plus grand bien des Lavallois.
Le projet de loi 102 augmente les amendes. Je vais vous donner quelques
exemples ici d'infractions de contrevenants qui, sur certains sujets, n'ont
payé que des amendes ridicules. Ici, à Chicoutimi, dans le
comté de Chicoutimi, un intervenant a payé 50 $ pour avoir eu un
prix supérieur à celui qui était fixé par
ordonnance; une amende simplement de 50 $. À Arvida, comté de
Jonquière, une personne a eu une amende de 50 $ pour cette même
infraction. Un autre genre d'infraction, c'est la présence
d'antibiotiques dans le produit. Quelqu'un de Notre-Dame-du-Bon-Conseil, dans
le comté de Drummond, a eu une amende de seulement 50 $. À
Saint-Timothée, comté de Beauharnois, quelqu'un a eu une amende
de 100 $ pour la même infraction. Ici, vous avez un autre genre
d'infraction, c'est la présence d'un nombre trop élevé de
bactéries de type coliforme dans le produit. Pour cela quelqu'un de
Shawinigan, dans le comté de Saint-Maurice, n'a eu qu'une amende de 100
$. On s'aperçoit que les. anciennes lois n'avaient pas assez de vigueur
au point de vue des amendes. Il y aura de nouvelles amendes qui seront beaucoup
plus sévères, qui feront en sorte que les gens vont faire
attention dorénavant.
La loi no 102 veut dire harmonie, salubrité, qualité de
vie. Je vais souhaiter que les ministériels et les gens de l'Opposition
fassent en sorte qu'il y aura unanimité au sujet de la loi no 102 pour
le plus grand bien-être des Québécois et des
Québécoises. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Même en pleine nuit, à une heure tardive
et avant de commencer à intervenir sur un important projet en
agriculture, j'aimerais vous demander, M. le Président, de
vérifier le quorum.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Qu'on appelle les
députés. (2 h 49 - 2 h 50)
Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous avons maintenant
quorum. Vous pouvez commencer, M. le député. Une question de
règlement de la part du leader adjoint du gouvernement.
M. Guay: M. le Président, je pense qu'il est important,
pour les fins de la postérité, de noter qu'il y a exactement
quatre députés libéraux en Chambre, à l'heure
actuelle.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip de
l'Opposition.
M. Pagé: M. le Président, sur la question de
règlement, vous aurez compris, le leader adjoint du gouvernement et les
collègues de la majorité auront compris que nous sommes quatre
députés sur 43. Déjà, on s'inscrit, comme dirait le
ministre de la Main-d'Oeuvre, dans la foulée de la nouvelle Loi sur la
législature, avec 10% du quorum prévu. Vous avez la
responsabilité d'assumer ce quorum. En tout temps, pendant
l'intervention du député de Brome-Missisquoi, on attendra...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! Parce que je pourrai prendre, de mon siège, la décision
de suspendre à loisir.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Guay: M. le Président, je ne veux pas lancer de
débat. D'ailleurs, le règlement nous l'interdit. Je veux
simplement indiquer que, avec quatre députés sur 43, les
électeurs des 39 autres comtés qui élisent des
libéraux pourront se poser des questions et se demander pourquoi ils
leur paient des salaires...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Les messages étant
faits, de part et d'autre, M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: M. le Président, si j'ai insisté pour
qu'il y ait quorum, c'est qu'au moment des derniers discours, en
deuxième lecture, sur le projet de loi no 102, qui traite de la Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant l'inspection des
aliments, il est important d'avoir du côté ministériel des
députés qui, dans leur comté, disent se préoccuper
du sort des propriétaires des petits abattoirs, mais, en Chambre,
à trois heures moins cinq du matin, n'interviennent pas pour prendre la
défense de ces gens.
Je vois que le député d'Iberville en est un qui est
arrivé, à la suite de la demande
de quorum. Je suis certain que le député d'Iberville,
immédiatement après mon exposé, va se lever et prendre la
défense entre autres d'un propriétaire de petit abattoir de son
comté, M. Campbell, de Saint-Sébastien. Vous le connaissez, M. le
député d'Iberville? Je suis certain que vous allez prendre sa
défense. Vous allez prendre sa défense parce que vous êtes
conscient, comme l'ensemble des députés libéraux le sont.
Le député de Richmond, M. Vallières, est dans son
comté, ce soir, pour s'occuper des problèmes de création
d'emplois. Les autres députés sont tous conscients de
l'importance du maintien des petits abattoirs dans chacun de nos comtés,
et vous autres, vous ne l'êtes pas. C'est pourquoi nous avons
demandé le quorum.
Vous ne l'êtes pas, même si vous savez quel est le
rôle primordial, important...
M. le Président, est-ce que vous me faites signe?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Non, je ne vous fais pas
signe. Mais je fais signe à deux personnes qui se parlent, de part en
part, et je leur demande de se taire.
M. Paradis: Merci, M. le Président. Le rôle de ces
petits abattoirs est important, ils sont créateurs d'emplois. Ce sont
des PME québécoises, ce sont des entreprises familiales qui
oeuvrent dans nos paroisses rurales, qui rendent des services inestimables aux
agriculteurs de leur région, qui mettent en marché un produit
d'une qualité exceptionnelle mais qui, malheureusement, sont aux prises
avec des problèmes d'ordre juridique.
De ce côté-ci de la Chambre, à la suite de
pétitions qui ont été déposées dans cette
Chambre, entre autres, par le député de Beauce-Sud, je m'en
souviens, on aurait cru que le ministre aurait profité de l'occasion
pour introduire des amendements et donner suite à des pétitions
qui ont déjà été déposées,
pétitions qui ne demandaient pas des choses extraordinaires,
compliquées, extrêmement dispendieuses, mais qui demandaient
strictement pour ces propriétaires d'avoir le droit de vendre leur
commerce lorsqu'ils décéderont, d'avoir le droit de le
céder à leurs enfants. On sait que cela se passe dans nos milieux
ruraux de génération en génération ces
commerces-là et que la loi, dans son état actuel, ne permet pas
à ce propriétaire de petite entreprise familiale de céder
son bien à ses enfants.
Ces gens réclament l'inspection de leurs aliments. Ils veulent
que le gouvernement du Québec reconnaisse la qualité du produit
qu'ils transforment et qu'ils vendent. Ils le demandent pour élargir
leur marché, parce que cette inspection - le ministre le sait -leur
permettrait d'avoir accès à des marchés qu'on leur
défend présentement. J'écoutais la députée
de Johnson tout à l'heure parler d'aller à l'assaut des
marchés. Ces gens-là veulent prendre de l'expansion, ils veulent
y aller dans les marchés. Ils veulent aller dans nos régions,
dans les restaurants, dans les épiceries, dans les institutions, mais
pour cela il faut que leurs produits de qualité soient inspectés
par le ministère de l'Agriculture du Québec.
Il y en a dans mon comté également de ces petits
abattoirs. Je vais vous citer le cas d'un petit abattoir qui est similaire
à plusieurs autres. Le ministre pourra aller le visiter. Il est venu
lors de la campagne électorale dans Brome-Missisquoi. Je l'invite en
dehors de la campagne électorale à venir se rendre compte quels
sont les effets de cette loi sur un petit abattoir situé à
Bonsecours, propriété de la famille Tessier. Il y a douze
personnes qui travaillent dans ce petit abattoir du matin au soir et tout ce
qu'ils réclament, c'est le droit de pouvoir travailler, de pouvoir
exercer leur métier au Québec. Ils réclament ce
droit-là. Ils réclament la permission de pouvoir passer cette
petite entreprise à leurs enfants. Savez-vous qui travaillent dans
l'abattoir Tessier? Il y a Ronald Tessier, Marguerite Tessier, Denis Tessier,
Rolland Tessier, Yvonne Tessier, Marcel Tessier, France Tessier Caron - une des
filles qui s'est mariée - il y a François Tessier, Roger Tessier,
Michel Tessier, Sylvain Tessier, Martha Tessier, etc. Ils ont une
pétition eux aussi à remettre au ministre de l'Agriculture lui
demandant le droit de travailler. Il y a le maire du village qui a une
responsabilité face à sa communauté locale et qui est
témoin que ce sont des produits de bonne qualité qui sortent de
cet établissement. Le maire du village se joint à la famille
Tessier, à l'ensemble de la collectivité et il signe. Il
s'appelle Gérard David, le maire de Bonsecours.
De l'autre côté de la Chambre, on a des
députés péquistes qui disent non. Cela n'a pas le droit
d'exister. Il faut que ce genre d'entreprise disparaisse et, pour s'en assurer,
on ne modifiera pas la loi, on ne modifiera pas une loi qui est injuste
à l'égard de ces gens-là, une loi sur laquelle le Parti
québécois avait fait campagne électorale en 1976, sur
laquelle il avait fait des promesses en 1976 mais qu'il n'a pas modifiée
après son arrivée au pouvoir.
Ce qu'on dit, M. le Président, c'est que ces 170 petits abattoirs
sont là pour rester, pour travailler, pour servir leur
communauté, pour rendre service aux cultivateurs. On n'a pas le droit
comme parlementaires, même s'il est trois heures du matin, de se taire et
de dire qu'en pleine nuit on va laisser tout cela sous silence, qu'on ne
parlera pas du sort de ces gens-là. (3 heures)
Je sais qu'à titre de député d'une région
rurale, M. le Président, vous êtes sensible vous aussi à
ces propos-là. Le député d'Iberville a
préféré fuir en pleine nuit plutôt que prendre la
défense de Claude Campbell de Saint-Sébastien. De l'autre
côté, dès que le quorum a été
constaté, ils ont tous fui. Ils ne veulent pas entendre parler des
problèmes que vivent les Québécois qui veulent travailler.
Il y en a assez qui reçoivent des prestations d'assurance-chômage.
Il y en a assez qui reçoivent des prestations d'aide sociale. Il y a
assez de jeunes qui n'ont pas de perspectives d'avenir au Québec. Ce
qu'on vous demande de faire, M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation - dans le cadre de ce projet de loi -
c'est de donner à ces jeunes-là la chance de continuer
l'entreprise du père, de travailler sept jours par semaine, de
travailler du matin au soir, d'être productifs, de produire quelque chose
pour le Québec, de produire quelque chose de qualité. Et ce qu'on
vous demande - nous sommes tellement convaincus que sur le plan des
propriétaires de petits abattoirs que c'est de qualité - de venir
l'inspecter, de mettre votre sceau Approuvé Québec dessus.
Ce n'est peut-être pas aussi important à vos yeux que de
dépenser 43 000 000 $ par année pour une structure
électorale, ce n'est peut-être pas aussi important. Mais qui
restera-t-il pour voter si on ne permet pas à ces gens-là de se
passer les entreprises de père en fils, si on ne permet pas à ces
gens-là de travailler, si on ne permet pas à ces gens-là
de faire des profits et de nous payer des impôts pour faire vivre vos
structures. Je suis déçu comme député de
Brome-Missisquoi. Mes collègues du Parti libéral sont
déçus. Le député de Portneuf a un petit abattoir
dans son comté. Nous sommes tous déçus de voir le ministre
nous présenter un projet de loi et ne pas tenir compte, ignorer
complètement ces propriétaires de petits abattoirs, ces
entreprises familiales qui sont des actifs importants pour le Québec.
Depuis 1975 ces gens se battent pour conserver leur entreprise.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Il y a une question de règlement.
M. Guay: Simplement sur la pertinence du débat. Nous
sommes à étudier une loi qui ne porte pas sur le sujet dont parle
le député de Brome-Missisquoi. Je vous demande si un
député peut se plaindre que dans un projet de loi ne se trouve
pas quelque chose qui n'a rien à voir avec le projet de loi directement
et qu'il voudrait voir se trouver dans le projet de loi. Parce qu'à ce
moment-là n'importe qui...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, j'ai suivi l'ensemble du débat. Je dois dire que
j'ai même regardé la loi pendant qu'on faisait ce débat et
je dois vous dire - si j'ai bien compris - qu'il s'agit d'inspection
d'aliments. Je pense que le député était dans l'ordre en
prenant une argumentation qui se rapproche de l'inspection des aliments. Je ne
peux pas faire autrement que de lui redonner la parole.
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Pour le leader adjoint du gouvernement, pour la
majorité ministérielle qui ne comprend pas le problème des
petits abattoirs au Québec, ce que ces gens-là réclament
c'est l'inspection des aliments. Ils veulent avoir une inspection des aliments
pour pouvoir être capables de vendre dans les restaurants, dans les
épiceries et aux institutions québécoises. C'est cela
qu'ils réclament. Lorsque vous m'avez interrompu vous avez
confirmé qu'au caucus du Parti québécois, il n'y avait pas
un député rural qui avait fait son travail. Il n'y avait personne
qui avait expliqué ni au leader adjoint - et on sait qu'il s'agit d'un
poste important - ni au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation... Tout le monde préfère ignorer ces 170
propriétaires de petits abattoirs, leur famille, leur communauté,
les services qu'ils rendent aux cultivateurs de leur région.
Ce que je vous demande ce soir c'est d'ouvrir vos oreilles, de faire des
représentations au ministre de l'Agriculture, des représentations
positives. Ces gens-là ne sont pas des voleurs. Ce ne sont pas des
bandits. Ce ne sont pas des gens qu'on poursuit avec les amendes. Ce sont des
gens qui produisent de la qualité. Ils se battent depuis sept ans pour
pouvoir continuer. Je vois des députés de l'autre
côté qui en ont dans leur comté. Ils n'interviendront pas.
Le député de Bellechasse en a dans son comté. Il
n'interviendra pas parce qu'il va voter comme d'habitude, comme une machine
à voter, avec la servile majorité du gouvernement. Il va voter
contre les petits abattoirs, il va voter pour les décrets. Ce sont des
machines à voter.
On essaie, dans le cadre de ce débat, de vous faire
réaliser que le sort économique, le sort social de travailleurs
qui veulent travailler est entre vos mains, en tant que gouvernement. Vous avez
le choix. Vous pouvez vous entêter à vouloir fermer tous les
petits abattoirs du Québec qui produisent des aliments de qualité
ou vous pouvez leur permettre de travailler. Le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation vient de revenir en Chambre. Je sais qu'il
n'est pas tellement sensible à ces arguments-là. Mais, qu'il
vérifie donc auprès des agriculteurs des régions. Qu'il
aille donc visiter les petits abattoirs. Qu'il
vienne donc nous dire en Chambre de quelle façon ils sont tenus.
Qu'il demande donc aux communautés qui vivent tout près de ces
petits abattoirs et aux individus qui s'y approvisionnent quel genre de
qualité on y retrouve. On a un service personnalisé dans ces
petits abattoirs. Tout ce que ces gens demandent: S'il vous plaît, venez
le constater sur place qu'on a de la qualité. S'il vous plaît,
laissez-nous céder notre entreprise à nos enfants lorsqu'on aura
atteint l'âge de la retraite. C'est de la relève cela. Est-ce que
c'est trop demander à ce gouvernement un service d'inspection des petits
abattoirs et le droit à la survie?
Si j'ai prêché dans le désert, M. le
Président, c'est parce que de l'autre côté on choisit de se
boucher les oreilles. Parce qu'on se dit: Ce n'est pas important, ce n'est
qu'une petite minorité. Bien, chacun de ces travailleurs est un
élément important dans sa communauté. Chacun de ces
travailleurs fait circuler des pétitions présentement.
J'espère que de l'autre côté de la Chambre, ceux qui en
recevront, vous aurez le courage de les déposer. Je ne sais pas quelle
épaisseur cela prend pour convaincre le ministre de l'existence d'un
problème, mais je peux vous assurer que, de notre part, les
députés de l'Opposition, les députés
libéraux, nous allons déposer toutes celles qui nous seront
remises par ces propriétaires-là...
M. Garon: Envoyez fort.
M. Paradis: Le ministre dit d'envoyez fort. Il a l'air de vouloir
dire: Je ne m'en occuperai même pas. Mais, qu'il aille donc voir le
dossier de plus près. Qu'il aille donc les visiter ces petits abattoirs.
Qu'il aille donc voir quel genre de familles rurales s'occupent de ces petits
abattoirs. Qu'il aille donc sur place. À ce moment-là, il va nous
dire: Envoyez fort, je vais vous écouter et je vais accéder
à la demande. Le ministre a un droit de réplique. Je lui demande
bien humblement de considérer la demande de tous ces
propriétaires de petits abattoirs.
En leur nom, au nom de la population qui va bénéficier de
leurs services, au nom des cultivateurs qui font affaire et qui aiment faire
affaire avec ces gens, vouloir fermer tous les petits abattoirs au
Québec qui font un produit de qualité, c'est vouloir fermer,
vouloir ignorer, vouloir abolir une partie de notre patrimoine rural, M. le
Président. Merci.
Une voix: Bravo!
Le Vice-président (M. Rancourt): M. le
député de Berthier.
M. Houde: Question de directive, M. le Président.
Tantôt, lorsque j'ai fait mon allocution, j'ai oublié de demander
au ministre de l'Agriculture: Mon cours d'eau Tranchemontagne, à quelle
date je vais l'avoir?
Le Vice-président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Vous aurez l'occasion... S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le
député de Berthier, il y a toujours les périodes de
question.
M. Pagé: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le whip.
M. Pagé: Merci, M. le Président.
M. Garon: J'aimerais avoir le droit de réplique normal,
s'il vous plaît.
M. Pagé: Très brièvement. On peut
ajourner.
M. Garon: J'ai le droit de réplique.
Le Vice-président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! M. le député de Portneuf.
M. Michel Pagé
M. Pagé: M. le Président, je vais être
très bref. Je conviens qu'il est 3 h 10. On doit comprendre que
malheureusement, le gouvernement, par la voix du leader adjoint a jugé
opportun d'amener à cette heure très tardive, au milieu de la
nuit, l'étude d'un projet de loi fort important en matière
agricole et plus particulièrement pour tout cet aspect de l'inspection
et de la qualité de l'alimentation. M. le Président, compte tenu
que l'essentiel des commentaires que j'avais à formuler l'ont
été...
M. Guay: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint.
M. Guay: Contrairement à la parole qu'il a donnée
pour la deuxième fois ce soir, le député de Portneuf
est-il en train d'intervenir sur le fond ou alors, soulève-t-il une
question de règlement, auquel cas, quelle est-elle? Mais si c'est une
intervention sur le fond... (3 h 10)
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Portneuf s'est levé, il m'a demandé la
parole et la présidence l'a reconnu.
M. Pagé: J'en étais à dire, avant que le
leader adjoint n'intervienne, que je voulais
épuiser mon droit de parole en demandant au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, au nom de mon
collègue de Berthier, à quel moment, dans quel délai il a
l'intention d'accorder le cours d'eau Tranchemontagne dans le comté de
Berthier, lequel a été demandé. C'est là
l'essentiel de mon droit de parole avant la réplique. Dans quel
délai le cours d'eau, qui a été demandé à
plusieurs reprises...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui. S'il vous
plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît:
M. le député de Portneuf avait, comme le règlement
l'indique, son droit de parole bien sûr; mais en même temps qu'il
utilisait ce droit de parole, tel que prévu dans le règlement, il
devait aussi s'en tenir à la pertinence...
Une voix: Ce qu'il n'a pas fait.
Une voix: Ce qu'il a fait.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, M. le ministre,
votre droit de réplique.
M. Pagé: Avant de terminer, vous convenez donc, qu'en plus
de souscrire aux propos de l'honorable député de
Brome-Missisquoi, vous acceptez le fait que j'ai pu, par mon intervention,
demander au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, dans quel délai il accordera le cours d'eau de mon
collègue. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît: II
est évident que sur la pertinence, je me pose de bonnes questions...
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sûrement pas, parce
que nous sommes déjà demain.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, votre droit de réplique.
M. Jean Garon (réplique)
M. Garon: M. le Président, le député de
Brome-Missisquoi, comme d'habitude, a induit la Chambre en erreur puisqu'il a
dit que le gouvernement n'avait pas changé la loi sur les produits
agricoles et les aliments pour permettre aux petits abattoirs de subsister. Si
le gouvernement du Parti québécois n'avait pas pris le pouvoir au
mois de novembre 1976, tous les petits abattoirs qui étaient
classés B seraient disparus morts le 1er janvier 1977 puisque telle
était la loi. Le premier geste que j'ai posé comme ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a été
justement de donner une période transitoire aux petits abattoirs.
D'ailleurs, alors qu'on modifiait la loi et les règlements, les
propriétaires qui ne pouvaient pas se moderniser ou qui ne voulaient pas
se moderniser pour différentes raisons, parce qu'ils étaient
âgés ou tout simplement parce qu'ils ne voulaient pas le faire,
parce qu'ils n'avaient pas les volumes suffisants, demandaient au gouvernement
de ne pas les pénaliser, de leur permettre de continuer à gagner
leur vie dans ce secteur, mais sans pouvoir transmettre leur commerce à
quelqu'un d'autre. C'était l'objet de leur demande. J'aimerais cela
qu'on demande à M. Drapeau, qui était président de
l'Association pour les petits abattoirs et qui a modernisé son abattoir
à Saint-Pascal de Kamouraska, ce que cette association voulait.
C'était l'objet de leur demande, et c'est ce que nous avons fait,
contrairement à ce que voulait faire le Parti libéral qui avait
décidé de les fermer au 1er janvier 1977.
Si les propriétaires de petits abattoirs veulent confier leur
cause au député de Brome-Missisquoi, il peuvent bien le faire.
Mais je leur suggérerais d'aller voir les producteurs d'oeufs et les
producteurs de porcs pour qu'ils sachent le nombre de causes que le
député de Brome-Missisquoi a gagnées en leur nom. Ils
pourront en même temps leur demander le coût des honoraires.
Je préfère la formule que nous avons adoptée,
formule la plus équitable possible dans les circonstances. Il y a encore
des gens qui peuvent moderniser leur entreprise, rencontrer les normes d'un
service d'inspection... Parce que faire croire aux gens qu'un petit abattoir
qui n'a pas le service d'inspection, qui pourrait se classifier sans rencontrer
les normes de construction, de congélation et de refroidissement que
rencontre un abattoir conforme à la Loi sur les produits agricoles, sur
les aliments et sur les produits marins, pouvaient vendre dans les magasins
à succursales, ce serait tromper la population.
Non seulement cela, mais il y a encore des magasins d'alimentation qui
n'acceptent pas de s'alimenter auprès d'abattoirs qui ont
été modernisés en raison de problèmes qui ont
été causés à ces abattoirs en 1975 et en 1976.
Quand on vend à des marchés d'exportation, M. le
Président, souvent, quand ce n'est pas la plupart du temps, les
importateurs viennent examiner les abattoirs pour voir s'ils correspondent
vraiment aux normes de construction, aux normes d'équipement qu'ils
demandent dans leur propre pays. De sorte que faire croire que dans le domaine
des viandes c'est le "free for all", c'est faux. La preuve, c'est que nous
allons bientôt faire une conférence sur ce qui s'est passé
dans le secteur économique. On verra que dans le secteur des viandes,
encore cette année, malgré une période difficile, les
exportations dans le
secteur des viandes ont augmenté de 25% au cours des sept
premiers mois de l'année. Pourquoi? Parce qu'on a modernisé le
secteur des viandes. Dans le domaine des charcuteries, on a vu récemment
que les charcutiers se sont regroupés et représentent un chiffre
d'affaires de 455 000 000 $ au Québec. Depuis quand est-ce possible?
Depuis la modernisation du secteur des viandes qui s'est faite à partir
de 1977. De sorte qu'il y a eu des milliers d'emplois de créés
dans le secteur des viandes avec la modernisation des abattoirs et des
charcuteries.
Quand le député Berthier a parlé de 8900
employés dans 165 petits abattoirs, je ne sais pas où il a pris
ses chiffres. Je ne sais pas qui lui a donné ces chiffres. Cela voudrait
dire 50 employés par petit abattoir qui vend seulement au comptoir
à celui qui achète de la viande pour sa propre consommation. J'ai
l'impression qu'il y a des gens qui disent n'importe quoi, parce que ce n'est
pas cela la réalité, M. le Président. C'est vrai que le
député de Berthier, ce n'est pas la cohérence qui est son
fort, puisque tout à l'heure il disait que la loi 102 sur l'inspection
des aliments était prématurée; un peu plus loin dans son
discours il dit qu'elle est tardive et, à la fin, il dit qu'il votera
pour.
M. le Président, j'ai de la difficulté à concilier
les contradictions du député de Berthier. Après la
première contradiction, j'ai eu de la difficulté à
comprendre sa façon de raisonner. Je suis habitué à plus
de logique. Je ne lui en veux pas, c'est un personnage sympathique - il ne
ferait pas de mal à une mouche - mais j'ai l'impression qu'il n'a pas
très bien compris le projet de loi dont il est question et qu'il n'a pas
compris le fonctionnement de ce projet de loi. Je voulais lui dire aussi que
tout à l'heure il a fait dans son discours, comme un reproche au Conseil
des ministres disant que ce dernier avait renversé la décision de
la Régie des marchés agricoles. Je suis un peu
étonné qu'il fasse ce reproche, puisque le député
de Verdun, qui est de son parti, m'avait posé une question sur le sujet,
à savoir s'il y aurait changement dans la décision du Conseil des
ministres concernant la Régie des marchés agricoles. Comme le
Conseil des ministres avait renversé la décision, il s'en
attribuait quasiment le mérite tellement il disait qu'il était
content. Le député de Berthier, lui, semble malheureux et
reproche cette décision au Conseil des ministres. Encore là, je
ne comprends pas trop la cohérence du propos.
Je vous dirai, M. le Président, tout simplement que, quand la
Régie des marchés agricoles rend une décision, les
citoyens qui ont intérêt dans la décision peuvent faire
appel au Conseil des ministres pour demander une révision en vertu de la
loi. Il y a même deux articles différents selon qu'on est dans la
Loi sur la mise en marché des produits agricoles - c'est l'article 13
qui le permet -ou dans la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés; si ma mémoire est bonne, c'est l'article 40
qui permet d'avoir une révision de la décision. De sorte que nous
avons simplement appliqué la loi en exerçant tout simplement
comme Conseil des ministres ce que la loi permet - la loi prévoit ces
mécanismes-là - sans non plus que ce soit une décision
rétroactive. C'est une décision qui s'applique pour l'avenir. (3
h 20)
Quand le député de Berthier laisse entendre que ce projet
de loi va influencer le passé, il faut voir que ce n'est pas un projet
de loi rétroactif. C'est un projet de loi qui s'appliquera lorsqu'il
aura été adopté, sanctionné et mis en vigueur, de
sorte que ceux qui auront péché contre le projet de loi, qui
auront commis des infractions dans le passé ne seront pas
pénalisés par le projet de loi. Le projet de loi vise l'avenir.
J'ai mal compris le propos; j'ai l'impression que le député de
Berthier n'a pas consulté qui que ce soit dans son analyse du projet de
loi et qu'il a erré tant dans les faits que dans le droit.
Le député de Beauce-Sud a posé un certain nombre de
questions qui, je pense, étaient pour la plupart pertinentes. Je
voudrais lui répondre sans entrer dans tous les détails. Je lui
dirai tout simplement ceci: Essentiellement, il s'agit d'arrêter les
redoublements dans le système d'inspection. Quand il s'agit
d'exportations, c'est le gouvernement fédéral qui inspecte quel
que soit le secteur. Quand il s'agit du commerce à l'intérieur du
Québec, c'est le gouvernement du Québec ou les
municipalités qui inspectent. Ce n'est pas écrit souvent dans le
journal, mais je dois dire que, dans le système d'inspection, les gens
du gouvernement fédéral et les gens du gouvernement du
Québec se parlent régulièrement pour voir ce qui se passe,
pour faire des ajustements. Au niveau des pouvoirs réglementaires, dans
le passé, pour des raisons historiques, le gouvernement du Québec
a donné des pouvoirs réglementaires aux municipalités
parce que, à cause des villes qui se développaient, les besoins
d'inspection se sont fait ressentir d'abord dans les villes avant qu'ils
commencent à s'appliquer dans les campagnes ou dans les milieux
mi-ruraux, mi-urbains. Comme c'était important, depuis un certain nombre
d'années, on a un système d'inspection dans l'ensemble du
Québec, mais les lois n'ont pas été changées
concernant l'inspection municipale, de sorte qu'on se retrouve à
certains endroits avec deux ou trois systèmes d'inspection.
Qu'est-ce qui va être changé avec la loi qu'on vient de
présenter? Au niveau primaire, ce sera essentiellement le
gouvernement du Québec qui inspectera, avec le même
système d'inspection dans l'ensemble du Québec. Au niveau
secondaire, c'est-à-dire la transformation des produits primaires, la
transformation en produits alimentaires des produits agricoles ou des produits
marins, ce sera, encore là, le gouvernement du Québec qui
inspectera dans son ensemble, à moins d'ententes. Mais au niveau
tertiaire, qui représente le plus grand nombre d'établissements
et où se retrouvent davantage les caractéristiques locales
prenons, par exemple, la ville de Montréal où on trouve des
restaurants italiens, portugais et de différentes nationalités,
avec des coutumes différentes - à ce moment-là, des
réglementations, qui devront être approuvées par le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
pour garder une cohérence dans l'ensemble du territoire
québécois, pourront être faites par la Communauté
urbaine de Montréal pour tenir compte de particularités de la
ville de Montréal, mais sans que tout cela devienne incohérent et
sans qu'il y ait deux ou trois systèmes d'inspection.
Entre le gouvernement du Québec, par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et les
municipalités qui ont plus de 100 000 habitants et, en plus, pour les
villes de Sherbrooke et de Trois-Rivières qui ont moins de 100 000
habitants, si elles le désirent, il sera également possible de
faire des ententes pour l'inspection qui pourra se faire par ces
municipalités. Ainsi, ce que fera le gouvernement fédéral,
ce que fera le gouvernement du Québec, ce que fera la
municipalité qui veut faire l'inspection alimentaire sera
véritablement réparti de sorte qu'il n'y aura pas deux ou trois
inspections avec deux ou trois règlements à suivre. Ce n'est pas
facile pour l'industrie du fromage, par exemple, qui a deux
réglementations ou trois réglementations à suivre. Ce
n'est pas facile pour différents types d'établissements. C'est
pour cela que les représentants de l'industrie alimentaire nous ont
déjà demandé de faire, autant que possible,
l'uniformisation de la réglementation. Comme toute uniformisation de
réglementation se heurte à des conflits, souvent, entre les
bureaucrates, même si les élus souhaitent faire cette
uniformisation, il peut y avoir un peu de discussions entre le gouvernement du
Québec et la Communauté urbaine de Montréal.
Dans l'ensemble, il ne s'agit pas de perte de postes ou de perte
d'emplois; il s'agit de réaffectations. Comme il y a une période
d'un an, puisque la réglementation ne sera pas changée pendant la
première année, à moins qu'on ne s'entende avant, il y un
an de discussions possibles, jusqu'au 31 décembre 1983, pour faire tous
les ajustements. C'est le but de la réglementation, qu'on en arrive
à avoir un système efficace et le plus facile possible à
suivre pour les industriels ou les agriculteurs. D'abord, c'est un ensemble de
normes pour l'ensemble du territoire québécois. Je pense que cela
répond au voeu de la population et je pense, aussi, que c'est ce qui
sera le mieux pour la plus grande sécurité des consommateurs, aux
coûts les moins élevés possible pour les contribuables. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Berthier, en vertu...
M. Houde:... de l'article 100, s'il vous plaît!
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur une question...
M. Houde: Est-ce qu'il peut me répondre?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, est-ce
que vous acceptez une question en vertu de l'article 100?
M. Garon: Je répondrai à la question demain.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! M. le ministre a refusé. Donc, vous pourrez le
faire à l'occasion d'une période de questions à venir.
S'il vous plaît! S'il vous plaît! Est-ce que la deuxième
lecture du projet de loi no 102, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant l'inspection des aliments, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation
M. Guay: M. le Président, je fais motion pour
déférer ce projet de loi à la commission parlementaire de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de renvoi est adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Guay: Sur ce, M. le Président, et en remerciant mes
collègues de leur patience et de leur ténacité, je propose
l'ajournement de nos débats à ce matin, 10 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
d'ajournement est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette Assemblée
est ajournée à ce matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 3 h 27)