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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mercredi 1 juin 1983 - Vol. 27 N° 28

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président: À l'ordre!

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez prendre vos places.

Aux affaires courantes, aux déclarations ministérielles, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

La date limite de l'ensemencement

exigée dans les régimes

d'assurance-récolte est

reportée au 10 juin

M. Jean Garon

M. Garon: La présente déclaration ministérielle a pour but de rassurer les agriculteurs du Québec qui, en raison du mauvais temps qui sévit depuis plusieurs semaines dans la plupart de nos régions, n'ont pas encore pu compléter leurs semences. Dans la plupart des productions protégées par un régime d'assurance-récolte, il existe une date limite au-delà de laquelle un producteur qui n'a pas effectué ses semences ne peut plus s'assurer. Pour plusieurs productions importantes, comme la betterave sucrière, le blé, l'avoine, etc., cette date limite est déjà dépassée ou elle l'est à compter d'aujourd'hui. Ces dispositions ont pour but d'éviter que des agriculteurs, simplement par négligence, retardent indûment la date de leurs semences et à cause des rendements diminués qui en résultent se rendent admissibles à des indemnisations dans le cadre de l'assurance-récolte.

Dans le cas présent, ce n'est pas cette situation que nous vivons puisque, si on prend le cas des céréales, on estime que moins de 50% des superficies destinées à être ensemencées ce printemps l'ont effectivement été au moment présent. Les agriculteurs ne peuvent tout simplement pas avoir accès à leurs champs qui sont trop gorgés d'eau pour pouvoir supporter le poids de la machinerie.

Face à cette situation, la Régie des assurances agricoles du Québec s'est prévalue, hier, de l'article 25 de la Loi sur l'assurance-récolte qui lui permet de reporter la date limite d'ensemencement exigée dans les différents régimes d'assurance lorsque les conditions atmosphériques exceptionnelles empêchent les agriculteurs de se livrer à ces travaux dans des délais normaux. Une nouvelle date limite a été fixée au 10 juin dans toutes les productions assurées où la période limite était échue ou sur le point de l'être. Les principales productions touchées sont la betterave sucrière, dont la date limite était le 31 mai, le maïs-grain et le blé, dont les ensemencements auraient dû être terminés au plus tard aujourd'hui, et l'orge, pour qui la date limite est le 5 juin.

Les producteurs pourront profiter d'une période de beau temps qui ne saurait tarder, je l'espère, pour compléter leurs semences tout en demeurant admissibles à la protection de l'assurance-récolte. Je tiens à profiter de l'occasion pour indiquer que si la situation créée par le mauvais temps est très grave, elle n'est quand même pas encore désespérée. La nature aidant, nous sommes encore confiants que les agriculteurs pourront récupérer la majeure partie du retard accumulé et, de toute façon, grâce à la décision que vient de prendre la Régie des assurances agricoles du Québec, les pertes des producteurs assurés pourront être compensées.

Le Président: M. le député de Maskinongé.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je me dois, à ce stade-ci, de remercier le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour avoir accédé à la demande de l'Opposition...

Des voix: Ah!

M. Picotte: ...toujours soucieuse, je dois le dire, M. le Président, de défendre les intérêts des agriculteurs. Le ministre a dit que ce n'était pas au député de Maskinongé de décider de l'heure. C'est certain, parce que, si le député de Maskinongé avait décidé de l'heure, les agriculteurs auraient été informés bien avant 10 heures, aujourd'hui, jour qui a même dépassé la date limite.

Merci quand même au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation d'avoir eu cette compréhension en espérant qu'il sera plus diligent la prochaine fois et qu'il sera plus rapide pour annoncer ces nouvelles aux agriculteurs.

Il ne me reste qu'un souhait à formuler. C'est de souhaiter, pour les consommateurs du Québec et surtout pour les agriculteurs, que le temps soit clément afin qu'ils puissent procéder à leurs semences dans les meilleurs délais. Merci, M. le Président.

Le Président: En réplique, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je dirai au député de Maskinongé qu'hier la décision était prise lorsqu'il a pris la parole, sauf que...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Garon: ...je ne voulais pas l'annoncer immédiatement au moment où il y avait un grand nombre de projets de loi à déposer. Je voulais saisir l'occasion, comme vous le disiez. Vous aviez raison sur un point. Au moment où il y a des changements de date, il peut toujours y avoir de la confusion et je voulais profiter, ce matin, d'un moment tranquille, le mercredi matin, à 10 heures, pour faire une déclaration tout seul, pour être sûr qu'il n'y aura pas d'imbroglio et que les agriculteurs comprendront qu'ils ont maintenant jusqu'au 10 juin en espérant que le temps soit meilleur. Mais je suppose que le bon Dieu a dit: Les gens ont voté non au référendum; maintenant, comme ils ont voté comme les Anglais, donnons-leur la température de l'Angleterre!

Des voix: Ah!

Le Président: M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: J'aimerais vous demander une directive, M. le Président. Hier, à la période des questions, le ministre m'a dit que la décision n'était pas prise. Maintenant,

Il me dit que la décision était prise. Est-ce que c'est, ni de près ni de loin, mentir à cette Chambre, M. le Président?

Des voix: Oh!

Le Président: M. le député - À l'ordre! À l'ordre! - je vous laisse le soin d'apprécier le tout.

Dépôt de documents.

M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme par M. le leader parlementaire du gouvernement.

Rapport annuel de la SAQ

M. Bertrand: Ce ne sera point long, M. le Président. Au nom du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, je voudrais déposer le rapport d'activités 1982-1983 de la Société des alcools du Québec.

Le Président: Rapport déposé. Il n'y a pas de dépôt des rapports des commissions élues ni du greffier en loi sur les projets de loi privés. Il n'y a pas de présentation de projets de loi au nom du gouvernement ni au nom des députés, ce qui nous amène à la période des questions. M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Rumeur de démission du ministre du Commerce extérieur

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ma question s'adresse à l'honorable premier ministre. Je voudrais commencer, cela me permettra peut-être d'avoir un préambule un peu plus long. Dans une nouvelle de la Presse canadienne, nous apprenions, ce matin, dans le journal Le Devoir, par exemple, on lit: "Le ministre du Commerce extérieur, M. Bernard Landry, a menacé le premier ministre Levesque de démissionner du Conseil des ministres s'il ne réglait en sa faveur le conflit qui oppose son ministère à celui des Affaires intergouvernementales". On ajoute: "Levesque - celui qui est en face - est saisi du problème, a-t-on fait savoir, et même si cela ne l'intéresse pas, il va falloir qu'il tranche parce que Landry a son voyage". Parlant de voyages, M. Jacques-Yvan Morin se trouve maintenant à Paris. Sa réaction au ministre des Affaires intergouvernementales, entre autres, c'est qu'il ne pouvait y avoir qu'une seule politique extérieure québécoise, et qu'il revenait aux Affaires intergouvernementales de la coordonner.

Est-ce que le premier ministre pourrait nous renseigner sur les événements qui ont provoqué une nouvelle de cette nature?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je peux difficilement donner beaucoup de renseignements au chef de l'Opposition même si, temporairement - c'est peut-être que cela va avec le retour du beau temps - il a retrouvé son humour, mais je dois souligner très simplement que M. Landry lui-même, le ministre du Commerce extérieur, a bien dit que ni de près ni de loin...

Des voix: Ah! Ah!

M. Lévesque (Taillon): ...il n'était impliqué personnellement dans ces ragots. Si le chef de l'Opposition se donne la peine de lire jusqu'au troisième paragraphe, je pense, des comptes rendus de cette dépêche de la Presse canadienne, il trouvera, je crois, le démenti très clair de M. Landry.

M. Landry: M. le Président...

Le Président: M. le ministre du

Commerce extérieur. (10 h 20)

M. Landry: ...en toute déférence, je pense qu'il y avait largement, dans les propos du chef de l'Opposition, matière à une question de privilège. Mais, comme le premier ministre vient de le dire, je pourrais être une bonne source pour répondre à sa question et je voudrais ajouter quelques détails.

D'abord, "Landry a son voyage". Je comprends. Il aurait fallu le dire au pluriel. Je vis dans mes valises avec la position que j'ai et...

Des voix: Oh!

M. Landry: ...je surveille l'évolution scolaire de mes enfants par téléphone interurbain.

Des voix: Oh! Oh!

M. Landry: Quant à toute rumeur de démission, je l'ai bien dit à la presse, c'est purement fantaisiste. Je ne suis pas assez sûr de mes talents littéraires pour remettre ma démission du Conseil des ministres.

Des voix: Ah! Ah!

M. Landry: Quant au fond des choses, parce que même posée sur le mode humoristique, la question du chef de l'Opposition recouvre une réalité que nous avions abordée très clairement en commission parlementaire, à la demande de l'Opposition qui prévoyait qu'il y aurait une période d'adaptation - qu'il dramatisait, d'ailleurs -entre le nouveau ministère du Commerce extérieur et certains autres ministères, j'avais répondu à cette époque - et ma réponse est la même à une phase évolutive différente - qu'il y aurait une période d'adaptation et de rodage. Vous allez trouver cela dans le journal des Débats. C'est clair. J'avais répondu surtout au député de Jean-Talon. Or, cette période d'adaptation et de rodage est allée bon train. J'entendais mon collègue de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme se féliciter, il y a quelques jours, des excellentes relations qui existent entre ses équipes et les miennes. Il reste quelques zones grises avec le ministère des Affaires intergouvernementales; comme le dit l'article, d'ailleurs, mes relations avec mon collègue Jacques-Yvan Morin sont très bonnes. Nous nous parlons régulièrement. Ces difficultés devraient être résolues dans les semaines ou dans les mois qui viennent et il n'y a pas...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Landry: ...à en faire un drame. Au contraire. L'action extérieure du Québec se consolide.

Le Président: En complément de question, M. le chef de l'Opposition.

M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président, une courte question additionnelle à l'adresse de l'honorable premier ministre. Les services du premier ministre auraient-ils été requis de près ou de loin pour procéder à certains arbitrages entre ces deux intervenants?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Oui, M. le Président, il y a eu un règlement hors cour. Un homme qui a l'expérience du gouvernement que possède le député de Bonaventure sait très bien qu'il y a toujours des difficultés d'ajustement quand des ministères s'ajoutent aux autres et qu'il faut forcément régler des problèmes de bornage. Alors, à l'occasion, cela fait partie du travail qu'il faut affronter. Comme vient de le dire le ministre du Commerce extérieur, il y a une période de rodage et quelquefois il y a des frictions. Et puis après?

Le Président: Question principale, Mme la députée de L'Acadie.

M. Chevrette: Vous passez votre temps à vous chicaner, vous autres, et on n'en parle pas.

Le financement des maisons d'hébergement pour femmes battues

Mme Lavoie-Roux: Ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Le 11 avril dernier, le ministère des Affaires sociales faisait parvenir des directives aux centres des services sociaux ainsi qu'aux bureaux de l'aide sociale concernant le financement des maisons d'hébergement pour femmes battues. Ces directives avaient pour but, dans un premier temps, de réduire les montants quotidiens accordés aux maisons pour les femmes hébergées et, dans un deuxième temps, d'appliquer aux maisons d'hébergement pour femmes battues les normes des familles d'accueil, de telle sorte qu'il ne restera à ces femmes qu'un montant absolument dérisoire de 90 $ pour retrouver leur autonomie et réintégrer la société.

Voici mes questions au ministre: Premièrement, le ministre peut-il nous dire pourquoi de telles directives qui modifient les modes de financement des maisons pour femmes battues ont été envoyées le 11 avril, alors que le 17 il me disait, en commission parlementaire, qu'il n'y avait pas de politique de financement officiel de ces maisons, qu'elles n'étaient pas prêtes, et qu'on allait

en consultation à cet égard?

Deuxièmement, est-ce que le ministre a l'intention de rappeler ses directives ou de les réviser afin de ne pas compromettre les objectifs de réinsertion sociale des femmes qui doivent chercher refuge dans ces maisons et de ne pas non plus rendre plus difficile la survie de ces maisons qui ont été bâties en grande partie par le bénévolat des femmes.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, à la première question, loin de moi l'intention de vouloir induire la députée en erreur au moment de l'étude des crédits le 17 avril. Ce que nous évoquions, c'était la politique générale du ministère non seulement à l'égard de la question du financement, mais également de l'approche générale qu'il faut avoir quant aux relations entre ces maisons de femmes victimes de violence, la plupart du temps, les CSS, les CLSC, le ministère, etc.

Effectivement, le 11 mai une directive administrative émanait d'un des services du ministère qui s'occupe de ces organismes. Cette directive vise, pour l'ensemble des régions du Québec - il est très clair que ça pose un problème à certains endroits - à toutes fins utiles, à normaliser une situation déjà existante dans la plupart de ces maisons, non seulement à normaliser la situation, mais à améliorer, dans bien des cas, la situation financière de beaucoup de ces maisons. Cette directive pose un problème à Montréal dans la mesure où le CSS du Montréal métropolitain versait des per diem beaucoup plus élevés qu'ailleurs. Je ne sais pas en vertu de quel principe ou de quel critère, mais il versait un per diem qui pouvait être de 8 $ de plus par jour que la plupart des autres CSS. À cet égard, il est bien évident que la normalisation du versement des per diem est perçue par certaines des maisons d'hébergement pour femmes en difficulté à Montréal comme étant une diminution de leurs moyens à l'égard des personnes qu'elles desservent.

Deuxièmement, quant à la contribution des personnes bénéficiaires de l'aide sociale, je dirai que le principe que nous tentons d'introduire à travers cela, c'est celui du financement que l'on applique notamment dans le cas des familles d'accueil. Quelqu'un qui bénéficie du financement de l'aide sociale et qui est hébergé, à toutes fins utiles, a gîte et couvert et, dans la mesure où certaines de ces familles ou de ces femmes arrivent dans des situations où elles sont hébergées pendant dix, quinze ou parfois vingt jours, nous croyons qu'il faut leur laisser une allocation suffisante pour les frais, mais faire en sorte, cependant, que l'on tienne compte de cet hébergement.

L'autre solution, il faut bien le voir, c'est de transformer les maisons de femmes en difficulté en un réseau public au Québec. Or, ce serait tout à fait contraire à ce qu'évoquait elle-même la députée de L'Acadie tout à l'heure quand elle disait que le travail de ces maisons est très largement basé sur l'implication de bénévoles. Un groupe à l'intérieur des maisons de femmes revendique depuis un certain nombre d'années qu'on en fasse un réseau public d'hébergement, et il n'en est pas question.

Le Président: Rapidement, M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Je pense que l'immense majorité de ces maisons peut non seulement survivre, mais même vivre adéquatement. La preuve, c'est que le ministère y a mis des ressources considérables depuis trois ans où on a, à toutes fins utiles, plus que doublé les budgets depuis deux ans, sans compter le nombre de points. Il faut cependant s'assurer que l'implication du milieu dans les organismes bénévoles est présente et dans la mesure où on pose des gestes qui visent à en faire des réseaux publics d'hébergement, je pense que cela deviendra incompatible avec les objectifs initiaux.

Le Président: En complément, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre nous a donné de longues explications mais je ne crois pas qu'il ait touché au coeur du problème. Je lui ai demandé s'il est prêt à réviser ses directives, parce que, d'une part, elles compromettront la réinsertion sociale de ces femmes qui arrivent dans ces maisons tout à fait démunies. Quand vous faites la comparaison avec les personnes qui sont en famille d'accueil alors qu'il s'agit de placements permanents et que dans le cas de ces femmes il s'agit de placements temporaires, en moyenne treize jours, comment peut-on espérer que ces femmes pourront trouver le dynamisme et même les moyens physiques de reconstituer leur vie ou de faire les modifications nécessaires à leur régime de vie avec un montant aussi dérisoire de 90 $?

Le ministre admettait lui-même, lors de l'étude des crédits, que 90 $ pour les gens en famille d'accueil, ce n'était pas suffisant.

Le Président: Nous ne sommes pas ici pour étudier les crédits du ministère des Affaires sociales qui permettent un débat prolongé, nous sommes à la période des questions et tant les questions que les réponses devraient être courtes.

M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je peux difficilement répondre par oui ou non à la question de la députée de L'Acadie. Cependant, je tenterai d'être quand même plus bref. (10 h 30)

Je dirai simplement qu'il faut bien comprendre que cette directive administrative n'oblige pas les maisons à percevoir le montant pour l'hébergement. Absolument pas. Elle dit simplement que le financement venant du CSS tiendra compte d'une contribution ou non venant de la bénéficiaire. Dans bien des cas il y a une contribution volontaire des femmes hébergées, mais elle n'est pas obligatoire en vertu de la directive. C'est une chose qui a semé un peu de confusion. Sauf qu'il est très clair que dans la mesure où il n'y a pas de contribution des personnes quant aux per diem versés par les centres de services sociaux, il est évident que cela pose certaines difficultés financières à certaines des maisons, à Montréal en particulier.

Mme Lavoie-Roux: ...vos directives, c'est cela ma question, M. le Président.

Le Président: M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Ceci dit, dans la mesure où il y a des difficultés particulières à l'égard de quatre ou six maisons, je crois, nous envisagerons différentes façons de les aider. Je dois dire que le débat, tel qu'il a été lancé par un groupe d'entre elles, est un débat qui fait absolument fausse route et où on donne l'impression, à toutes fins utiles, qu'on réduit les moyens et les ressources de ces maisons alors qu'on n'a pas cessé de les augmenter depuis trois ans.

Le Président: En complément, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, il y a environ seulement 300 places dans les maisons d'hébergement et de transition à travers le Québec. Et, aujourd'hui, les besoins sont plus grands que jamais, mais les maisons...

Le Président: M. le député, la question, s'il vous plaît! Vous êtes en deuxième question complémentaire; il n'y a pas de préambule ni de commentaire. Posez votre question, je vous en prie.

M. Marx: N'est-il pas vrai que les maisons de transition au Québec peuvent accommoder seulement 12% des demandes? La ministre déléguée à la Condition féminine était à Ottawa hier et demandait plus de pouvoirs à Ottawa. Ma question est la suivante: Que faites-vous avec le pouvoir que vous avez, et qu'allez-vous faire pour prévoir plus de places dans les maisons d'hébergement et de transition?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, les données du député me semblent erronées. Il n'y a pas 300, mais bel et bien 659 places d'hébergement, en 1983-1984, au Québec. Je ne sais pas où le député prend ses chiffres; probablement au même endroit où il se renseigne avant de faire des discours.

Le Président: Question principale, M. le député d'Outremont.

Les tarifs de l'électricité à l'usine CIL de Bécancour

M. Fortier: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Énergie et des Ressources. Tout le monde sait que l'électricité a toujours été un facteur de développement économique très important au Québec, surtout dans le passé. Malheureusement, les tarifs d'électricité pour la grande industrie, surtout pour celles qui sont grandes consommatrices d'électricité, sont de moins en moins concurrentiels, à un tel point d'ailleurs que le gouvernement doit accorder des tarifs spéciaux lorsqu'il veut attirer de nouvelles industries comme Pechiney, par exemple. Ce que l'on sait moins, c'est que ces mêmes tarifs d'électricité créent des difficultés, même pour l'industrie qui est déjà installée au Québec. Dernièrement, la Presse, dans son édition du 25 mai, faisait allusion à l'avenir de l'usine CIL, de Bécancour, qui a joui dans le passé d'un tarif spécial d'électricité pendant cinq ou six ans et qui, cette année, si elle devait rattraper le tarif normal d'Hydro-Québec, serait sujette à une augmentation de 42%. La question que j'aimerais poser au ministre de l'Industrie et du Commerce est celle-ci: A-t-il l'intention d'intervenir dans le dossier de l'usine CIL de Bécancour pour assurer la survie des 200 emplois de cette industrie et pour assurer la survie de cet investissement qui a coûté 500 000 000 $ en 1975?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, j'avais compris que, dans le deuxième volet, la question s'adressait à mon collègue de l'Industrie et du Commerce. Alors, je vais lui adresser cette question, parce que j'étais préparé ce matin à répondre à une question sur l'amiante puisque j'avais eu un préavis de la question, M. le Président, dans le Soleil du 27 mai.

M. Fortier: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Question de règlement, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, j'ai posé clairement ma question sur le problème des tarifs électriques en ce qui concerne l'usine de CIL, de Bécancour. J'aimerais bien que le ministre responsable d'Hydro-Québec me réponde sur cette question.

Le Président: La question, en effet, ne portait pas sur l'amiante. M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je vais donc prendre un rendez-vous. Cela m'aurait évité une question de privilège pour demain. Je vais prendre avis de la question à propos de l'usine de CIL.

Le Président: M. le député d'Outremont, question complémentaire.

M. Fortier: Je crois qu'on doit déplorer qu'un sujet aussi important... J'aimerais poser une question additionnelle. Si le ministre désire la prendre en considération pour y répondre plus tard, j'aimerais lui demander qu'en même temps, il nous dise s'il a l'intention de créer un tarif spécial. L'exemple de CIL n'est pas unique, il y a d'autres industries au Québec qui attendent du ministre qu'il intervienne dans le dossier. D'ailleurs, j'aimerais lui demander s'il a lu le mémoire de la Corporation de développement économique du Sud-Ouest et celui de la Société du port de Valleyfield qui font justement état du fait que les tarifs de l'électricité au Québec sont de moins en moins compétitifs et à moins que le gouvernement n'intervienne, il y aura des fermetures d'usines. Tout le monde apprécie le fait que le gouvernement cherche à attirer de nouvelles industries, mais il commencerait à être temps que le ministre responsable d'Hydro-Québec se préoccupe des industries qui sont déjà installées ici même, au Québec.

Le Président: Je comprends que nous ne sommes pas encore habitués à la période des questions à 10 heures le matin et qu'on peut avoir de la difficulté à formuler des questions ou à résumer les réponses, mais je vous en prie, quand même... Les questions complémentaires, dans certains cas, n'en sont pas, ce sont des extraits de discours et les réponses de certains ont été beaucoup trop longues.

M. le ministre de l'Énergie et des Ressources

M. Duhaime: Je vais suivre votre invitation, M. le Président. Ma réponse est:

Oui, j'ai lu cet article.

Le Président: Question principale, M. le député de Shefford.

La différence entre les montants

versés en taxes aux municipalités

par les deux gouvernements

M. Paré: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales. J'avais le plaisir, vendredi dernier, d'assister à l'inauguration du Palais des congrès à Montréal qui est un outil de développement économique très important pour la métropole. Lors des discours prononcés, j'ai eu le plaisir d'apprendre que le gouvernement du Québec, comme bon citoyen, payait ses "en-lieu" de taxes à la ville de Montréal. Seulement pour le Palais des congrès, le gouvernement du Québec va payer, pour l'année 1983-1984, 2 500 000 $ en taxes. La surprise a été de voir M. Marc Lalonde, le ministre fédéral, venir dire que le gouvernement fédéral paierait 3 500 000 $ en "en-lieu" de taxes à la ville de Montréal pour la même année. Ce que j'ai compris, c'est 3 500 000 $ pour l'ensemble des édifices fédéraux à Montréal donc, comme le disait le premier ministre, une goutte d'eau comparativement à ce qu'on paie.

Le Président: Voulez-vous en arriver à la question?

M. Paré: Ma question porte sur ce point. J'entendais un poste de radio annoncer dans mon coin, en fin de semaine, que ce que M. Lalonde avait dit, c'était 3 500 000 $ payés seulement pour le Palais des congrès. Cela ne tient pas parce que c'est un édifice qui n'appartient pas au gouvernement fédéral. J'aimerais savoir quelle est la différence entre ce que le gouvernement du Québec paie en taxes aux municipalités par rapport à ce que paie le gouvernement fédéral.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

Des voix: Excellente question, bravo!

Le Président: À l'ordre!

M. Léonard: Le Québec verse en "en-lieu" de taxes sur ses édifices, les édifices des réseaux de cégeps, d'universités, des affaires sociales, des écoles primaires et secondaires et des réseaux de communications comme Hydro-Québec, le gaz, l'électricité et le téléphone, 375 000 000 $ par année.

Des voix: Combien?

M. Léonard: 375 000 000 $ par année aux municipalités. J'ai eu le plaisir d'annoncer hier que l'évaluation des écoles primaires et secondaires serait portée à 50% pour l'année 1984. Donc, nous augmenterons ces "en-lieu" de taxes au cours de l'année prochaine. C'est donc une bonne nouvelle pour les municipalités.

Alors que des députés fédéraux se promènent dans le décor pour faire des propositions discutables aux municipalités à l'heure où on se parle, je répète que le fédéral ne paie pas ses taxes; ce qu'il paie, dans la mesure où il en paie, c'est ridicule. Il ne paie pas la taxe d'affaires, par exemple, il refuse de la payer. Il n'accepte surtout pas d'être évalué selon la loi de l'évaluation foncière, ce qui fait qu'il a une foule d'équipements sur le territoire du Québec qui ne paraissent même pas au rôle d'évaluation et pour lesquels il ne paie même pas de taxe. Tous les ministres des Affaires municipales de toutes les provinces s'en sont plaints. Il y a eu la création d'un Comité Pollack qui a siégé, qui n'a rien donné et la loi C-4 s'applique depuis ce temps. Le fédéral ne respecte pas les lois lorsqu'il s'agit d'institutions locales et pour les municipalités non plus. Je l'invite donc à payer ses taxes correctement plutôt que de faire des cadeaux dans le décor, qui n'en sont pas, d'ailleurs. Le résultat de tout cela, par exemple, dans le cas de la ville de Longueuil, le Québec verse plus de 6 000 000 $ en taxes par année; le fédéral en verse 200 000 $.

Une voix: M. le Président, question supplémentaire.

Le Président: Voilà un sujet qui soulève beaucoup de questions complémentaires. Commençons par M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, j'écoutais les propos du ministre des Affaires municipales et je voudrais lui poser une question. N'est-il pas vrai, M. le ministre des Affaires municipales, que, depuis l'adoption de la loi 57 sur la fiscalité municipale, les municipalités subventionnent le gouvernement du Québec pour le réseau des affaires sociales et de l'éducation dans un pourcentage que vous reconnaissez de 40% et de 80% et que vous aviez des engagements de pris envers les municipalités de reconnaître à 100% pour ces réseaux les "en lieu" de taxes tels que vous devez les payer? (10 h 40)

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: M. le Président, en 1981, le transfert net de ressources vers les municipalités, tel que dit et attesté dans un rapport du Comité des élus municipaux sur la fiscalité qui a été déposé au mois de novembre dernier, était de 360 000 000 $ par année. Il y a, en plus, l'engagement, sur une période de cinq ans, de porter l'évaluation foncière des édifices du gouvernement, des réseaux des affaires sociales et de l'éducation à 100%. Au moment où on se parle, le Québec paie 100% de ses taxes foncières sur ses propres édifices. Il paie 80% des taxes foncières sur les immeubles des réseaux des universités, des cégeps et des affaires sociales. Maintenant, il paiera 50% sur le réseau des écoles primaires et secondaires et, sur la période, nous entendons respecter cet engagement.

Alors, je pense que, jusqu'ici, les municipalités ont largement bénéficié de la réforme de la fiscalité. C'est ce qui explique qu'elles soient passées correctement à travers la crise économique, parce que les indicateurs démontrent, là-dessus, que la dette des municipalités, de 1976 à 1981, est passée de 3 900 000 000 $ à 5 000 000 000 $ seulement - cela n'a même pas suivi l'inflation - que les surplus de fonctionnement en particulier, qui étaient de 26 000 000 $ en 1976 avec des subventions d'équilibre budgétaire, sont passés à 180 000 000 $ en 1982. Ce sont des indicateurs significatifs, M. le Président.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer combien, pour la seule ville de Montréal, le gouvernement du Québec paie en taxes foncières et à combien pouvons-nous estimer le manque à gagner pour la seule ville de Montréal par rapport au fait que le gouvernement fédéral ne paie pas ses taxes foncières à Montréal?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: M. le Président, les taxes foncières payées à la ville de Montréal, en "en lieu" de taxes, sont d'environ 75 000 000 $ à 80 000 000 $. On pourra préciser les chiffres; s'il y a une erreur significative, j'y reviendrai à l'Assemblée nationale. Mais c'est de cet ordre.

En ce qui concerne le fédéral, il est très difficile de dire quel est le manque à gagner, parce qu'il refuse d'être évalué. C'est cela le problème.

Un autre aspect, par exemple, l'édifice de Radio-Canada, à Montréal. Il y a une entente par laquelle les taxes fédérales payées sur cet édifice, à la ville de Montréal, sont ridiculement basses. Partout, ce sont des situations comme celle-là, parce que, par la loi C-4, ils se sortent de

l'application du système fiscal au Québec. Je demanderais à l'Opposition de nous appuyer pour qu'on aille chercher les taxes municipales au fédéral. Qu'il nous les paie. Si elle ne veut pas nous appuyer directement, M. le Président, au moins qu'elle appuie les municipalités qui demandent la même chose.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le député de Vachon.

Des voix: Ah!

Une voix: Ce n'est pas correct.

M. Payne: Merci, M. le Président. La question est brûlante. Je pense que c'est dans l'intérêt de chaque membre de cette Assemblée que le ministre dépose devant cette Chambre une liste de tous les édifices fédéraux au Québec pour qu'on puisse bien le savoir une fois pour toutes. Combien le fédéral doit aux municipalités....

Le Président: Je n'ai pas saisi de questions.

M. Payne: Ma question est, est-ce que le ministre...

Le Président: Je m'excuse, M. le député, si vous permettez. Autant le système d'amplification de son à la télévision fait que les paroles des députés sont facilement compréhensibles, autant le système ici est à ce point déficient que je n'entends absolument rien lorsqu'il y a le brouhaha qu'il y avait tantôt. Si on veut que je comprenne s'il y a ou non question, j'aimerais au moins qu'on se taise pour laisser le député prendre la parole.

M. Payne: Ma question était simple. Est-ce que le ministre peut déposer devant cette Chambre une liste des édifices sur lesquels le fédéral devrait payer ses impôts et où dans l'intérêt de toutes les municipalités et de tous les parlementaires, les libéraux peuvent voter et appuyer l'attitude et la politique de Québec?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales, brièvement.

M. Léonard: M. le Président, je vais m'enquérir si je peux déposer une telle liste. Dans combien de temps je pourrais la faire? Je pense qu'il y a des possibilités. Remarquez que les rôles d'évaluation appartiennent aux municipalités régionales de comté et nous en avons copie. Maintenant, comme il s'agit d'instruments financiers qui sont quand même du ressort public, je vais m'enquérir si je peux le faire. Cependant, je dois dire que ce sera forcément limité parce que le fédéral refusant de se faire évaluer, il y a une foule d'équipements qui n'apparaîtront pas dans les rôles d'évaluation. Exemple, on me dit que dès qu'il y a un aspect plus ou moins militaire ou sécuritaire on refuse l'entrée des évaluateurs dans toutes sortes d'édifices. Je ne sais pas, moi, si les bureaux de la Gendarmerie royale, par exemple, sont exemptés, s'ils ont été évalués et toutes sortes de choses comme cela. Dans la mesure du possible, je le ferai.

Le Président: M. le député de Hull a encore une question complémentaire à poser.

M. Rocheleau: M. le Président, je pense que c'est un sujet important. Est-ce que le ministre serait d'accord pour que je lui dépose la preuve de la ville de Hull, du secrétaire-trésorier, à savoir que le fédéral reconnaît 100% des évaluations foncières alors que le gouvernement du Québec crée un manque à gagner de 1 800 000 $ pour la ville de Hull?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: Je vois que le député de Hull se considère encore comme le maire de Hull puisqu'il parle du secrétaire-trésorier.

Le Président: À l'ordre!

M. Léonard: Je pense qu'il appartient à la municipalité de Hull de le faire et non pas au député. Si à Hull on paie beaucoup de taxes et peut-être que le gouvernement fédéral, à ce moment, se considérerait peut-être comme chez lui. C'est curieux. Comment cela se fait-il? Parce qu'ailleurs, ce n'est pas cela. Il y a un décalage considérable entre les taxes qu'il paie et celles qu'il devrait payer. Peut-être qu'à Hull c'est une façon de subventionner ce qu'il considère être chez lui.

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! Question principale, M. le député de Richmond.

Subventions à la voirie municipale

dans les comtés non représentés

à l'Assemblée

M. Vallières: M. le Président, ma question s'adressera au ministre des Transports. J'ose espérer qu'aujourd'hui il n'induira pas la Chambre en erreur contrairement à ce qu'il a fait hier au sujet de l'autoroute 55 qu'il a qualifié d'autoroute à spaghetti. Les comtés de Frontenac, Charlesbourg, Saguenay et Saint-Jacques n'étant pas actuellement représentés à l'Assemblée nationale, le ministre peut-il

nous indiquer si les municipalités de ces comtés se verront quand même attribuer un budget afin de subventionner la voirie municipale. Si oui, en l'absence de députés dans ces comtés, le ministre peut-il nous informer à qui il a demandé de lui faire des recommandations quant à la répartition des subventions aux différentes municipalités de ces comtés ou préférera-t-il attendre plus sagement les résultats des élections partielles? (10 h 50)

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir de répondre à la question. J'ai demandé à mon sous-ministre de me préparer une lettre pour les maires de chacune des municipalités de ces comtés afin qu'ils adressent leur demande de subvention directement au ministre des Transports. S'ils répondent suffisamment rapidement, je serai en mesure de rendre les décisions aussi rapidement dans ces comtés que dans les autres comtés, et je le ferai, comme ministre des Transports, avec l'éclairage de mon ministère. Sinon, j'attendrai que les nouveaux députés arrivent. Mais je ne voudrais pas pénaliser ces comtés et retarder le début des travaux. Je dois donc agir avec autant de célérité que les circonstances me le permettent.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Richmond.

M. Vallières: Le ministre peut-il nous indiquer si la même procédure a été suivie dans le comté de Frontenac?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, en ce qui concerne le comté de Frontenac, je ne pourrais pas répondre à la question. C'est traité par le bureau de mon sous-ministre. Je vais m'en enquérir et répondre au député.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Vallières: M. le Président, vous me permettrez d'insister afin que dans les meilleurs délais, le ministre...

Le Président: Je ne vous le permets pas. J'ai dit à deux reprises ce matin - et je le réitère - que la période des questions n'était pas une période de commentaires ou de préambules interdits.

Question principale, M. le député de Mont-Royal.

M. Vallières: Merci, M. le Président.

Investissement dans Pechiney à Bécancour

M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. La semaine dernière, le ministre a déposé en cette Chambre un projet de loi pour autoriser la SGF à investir une somme de 150 000 000 $ pour la construction de l'aluminerie de Pechiney, à Bécancour. Sans entrer dans tous les détails, le ministre pourrait-il nous donner les grandes lignes du contrat avec Pechiney et, plus spécifiquement, les associés seront-ils obligés d'acheter la production de l'usine de Bécancour?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: M. le Président, les contrats ne sont pas encore complètement négociés. On est en train, d'ailleurs, à la suite de la demande du député de Mont-Royal - ou de l'Opposition, en tout cas - de préparer le projet le plus explicite possible avec la SGF. Le président de la SGF sera même en commission parlementaire, avant la deuxième lecture, pour répondre aux questions de l'Opposition là-dessus. Dans un investissement de cette importance, il faut des garanties pour les partenaires minoritaires. Dans ce sens, le Québec, en particulier, avec environ 35% jusqu'à maintenant qui ont été négociés, sera un partenaire minoritaire et il faut absolument s'assurer, dans les contrats qu'on signera avec la société Pechiney, que le partenaire minoritaire soit protégé à la fois à l'achat des matières premières, c'est-à-dire l'alumine, et à la fois aussi dans la vente des produits finis, c'est-à-dire l'aluminium. Autrement, on serait pris avec le partenaire majoritaire qui vendrait ses matières premières et qui serait le seul agent vendeur de produits finis. Or, tout cela est en négociation présentement, mais il n'y a rien encore de complété au moment où on se parle.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le ministre pourrait-il nous dire quelles sortes de garanties vous allez exiger pour la SGF? Par exemple, si les associés ne sont pas obligés d'acheter le produit de l'usine, que va-t-il arriver dans ce cas si Pechiney favorise... M. le Président, pourriez-vous dire au ministre de l'Énergie et des Ressources de se taire afin que je puisse poser ma question?

Une voix: C'est une hypothèse.

M. Ciaccia: Certainement. C'est une hypothèse...

Le Président: Allez-y. Allez-y, M. le député.

M. Ciaccia: ...d'aujourd'hui parce que vous allez signer des contrats.

Le Président: À l'ordre, M. le ministre!

M. Ciaccia: C'est vous qui êtes hypothétique.

Le Président: M. le ministre, je vous en prie. M. le député.

M. Ciaccia: Je vais recommencer. Le ministre peut-il nous dire quelle garantie il va exiger pour la SGF? Si les associés n'achètent pas le produit de l'usine, que va-t-il arriver, advenant une baisse dans la demande du produit? Pechiney va-t-elle favoriser la vente de son produit dans d'autres usines, par exemple celles de l'Australie? Quelles garanties la SGF aura-t-elle?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: Ce que nous prévoyons - et c'est en cours de négociation présentement -c'est qu'on puisse avoir des garanties sur la vente de nos matériaux, parce qu'on n'est pas pour rester pris aussi avec une pile de lingots d'aluminium dans les cours, à Bécancour. D'autre part, il faut s'assurer que s'il y a des entreprises qui veulent transformer l'aluminium en aval pour en faire d'autres produits finis, il faut s'assurer de pouvoir avoir les quantités nécessaires par le partnership de la SGF dans cette aluminerie pour pouvoir aussi écouler sur le marché québécois une partie importante qui pourrait créer des emplois secondaires.

M. Ciaccia: M. le Président.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: La réponse du ministre n'a presque pas de sens. L'Alcan produit des lingots...

Le Président: Question, question.

M. Ciaccia: Il n'y a pas de problèmes quant au fait d'obtenir le produit...

Le Président: La question.

M. Ciaccia: ...pour faire la transformation.

Le Président: M. le député, votre question.

M. Ciaccia: Est-ce que le gouvernement obligera Pechiney à faire la transformation au Québec des produits ou d'une partie des produits qui seront manufacturés à Bécancour?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: M. le Président, pour faire de la transformation de matière première, je pense que cela prend des commandes, cela prend des marchés. Même si on oblige en quelque sorte, par des contrats, à transformer 35%, s'il n'y a pas de marché possible, je pense que les 35% n'iront nulle part. On veut s'assurer qu'au fur et à mesure qu'on puisse développer des entreprises dans le domaine de la transformation secondaire d'aluminium, c'est d'avoir l'aluminium nécessaire. Mais je peux assurer le député de Mont-Royal que les contrats seront mieux négociés, mieux signés et beaucoup mieux que les contrats que le Parti libéral avait signés sur SIDBEC-Normines.

Des voix: Bravo!

Le Président: Question principale, M. le député de Verdun.

Le fichier des locataires

M. Caron: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Il y a un an, les propriétaires décidaient de faire un fichier de locataires soi-disant indésirables. Dès les premiers mois de 1982, la Commission des droits de la personne déclarait tout à fait inacceptable ce fichier sur les locataires. Le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur disait qu'il ferait une étude selon l'article 260 de la Loi sur la protection du consommateur. Au ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur, on a dit, il y a environ un an, que tout dépend de l'utilisation qu'on pourrait faire de ce fichier. Je voudrais savoir du ministre où en est rendu ce dossier.

Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

M. Tardif: Oui, M. le Président. Depuis ce moment, il y a eu la commission parlementaire sur la réforme du Code civil, particulièrement, l'étude du projet de loi no 106 qui prévoit un certain nombre de dispositions visant aussi à protéger les personnes qui seraient victimes d'atteinte à leur réputation et leur vie privée. Ce sont les articles du projet de loi qui disent que toute personne peut consulter et faire

reproduire... je lis ici l'article 35 du projet de loi no 106. Je ne sais pas si cela a été le libellé définitif qui a été accepté en commission, mais: "Toute personne peut consulter et faire reproduire à ses frais un dossier qui la concerne et qu'une personne constitue ou détient sur elle dans le but d'informer un tiers, sous réserve des lois relatives à l'accès aux documents des organismes publics et la protection des renseignements personnels." L'article 35 continue: "Elle peut faire rectifier une information inexacte, incomplète ou équivoque et faire supprimer une information non pertinente qui lui est injustement préjudiciable."

Ces dispositions viennent compléter les articles 260 et suivants de la Loi sur la protection du consommateur. L'article mentionne: "Quiconque fait commerce de préparer et distribuer à d'autres personnes des rapports de crédit au sujet du caractère, de la réputation et de la solvabilité d'une personne est un agent d'information." On dit plus loin ce qui se produit lorsqu'on transige des informations. Donc, ces deux séries de dispositions, celle de la Loi sur la protection du consommateur, d'une part, et les amendements au Code civil par le projet de loi no 106 d'autre part, viennent circonscrire une partie du problème. Pour l'instant, cela nous apparaît être autant de garanties. Est-ce qu'à l'usage, cela se révélera suffisant? C'est ce que nous devrons constater.

M. Caron: Question supplémentaire.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Verdun.

M. Caron: Est-ce que l'Association des locataires semble satisfaite des démarches faites jusqu'à maintenant?

Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. (11 heures)

M. Tardif: M. le Président, je pense qu'il ne serait pas conforme à la vérité de dire que les groupements de locataires sont satisfaits de ces dispositions. Ce qu'ils veulent, c'est une loi qui interdit la confection comme telle de listes quelconques. Ceci est extrêmement difficile parce qu'il ne se fait pas à proprement parler de commerce de listes. À la limite, une association de propriétaires obtient de ses membres des renseignements qu'ils lui diront tout simplement de conserver de sorte que si un nouveau propriétaire veut louer un immeuble, avant de louer, il s'adresse à son association. Son association ne lui donnera pas de renseignement sur le locataire concerné, elle va lui dire: Appelez donc M. Untel qui l'a eu avant. Il n'y a donc pas de rôle d'intermédiaire par l'association, ce qui rend assez difficile le contrôle de ce type d'information.

Encore une fois, nous suivons la situation et, si tant est que ces mesures à la fois de la Loi sur la protection du consommateur et du Code civil ne sont pas suffisantes, il faudra aller plus loin.

Le Président: Question principale sans complémentaire, compte tenu du temps, M. le député de Champlain.

Le sommet économique régional de Trois-Rivières

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Dans le Devoir d'aujourd'hui, on traite du sommet économique régional de Trois-Rivières. On dit qu'un des participants, M. André Raiche, de l'Union des producteurs agricoles, a conclu en disant: "Nous avons brisé plusieurs mythes durant ces deux jours: en effet, nous avons construit un pont entre les deux rives, nous avons canalisé l'énergie régionale, nous avons ouvert les portes de l'université." Un peu plus loin, on dit: Le succès du sommet économique de la région Mauricie-Bois-Francs donnera un excellent élan aux autres sommets économiques qui devraient se tenir au Québec.

Je voudrais demander au ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional ce qu'il entend faire pour que ce succès apparent ait des suites et pour que les engagements qui ont été pris lors de ce sommet économique de la région Mauricie-Bois-Francs puissent avoir des suites aussi, surtout les engagements pris par la partie gouvernementale.

Le Président: Brièvement, M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: En effet, M. le Président, j'ai eu l'occasion de le rappeler lors d'une question en Chambre, le sommet de la région Mauricie-Bois-Francs-Drummond a été un succès remarquable. Il s'agit de prendre connaissance des coupures de presse pour se rendre compte que la plupart des intervenants y ont participé avec conviction, avec la volonté que cette formule puisse s'instaurer dans la plupart des régions du Québec, ce que, comme ministre de l'Aménagement et du Développement régional, je préconise depuis fort longtemps en permettant aux régions du Québec d'avoir une meilleure prise sur l'action gouvernementale. J'ai toujours prétendu qu'il n'y a qu'une façon d'avoir un Québec véritablement en bonne santé, un Québec fort, c'est par des régions qui pourront se renforcer, se développer davantage et avoir une meilleure prise sur leur développement régional.

Que va-t-on faire concrètement? Depuis au-delà d'un an, j'ai réfléchi avec d'autres, bien sûr, sur les éléments d'une politique de développement régional, et c'est un heureux hasard, puisqu'on ne s'était pas consultés, que le document soit au Conseil des ministres aujourd'hui pour décision. Je souhaite que la décision du Conseil des ministres soit d'autoriser celui qui vous parle à faire la consultation sur ce document de réflexion afin que l'ensemble des régions puissent voir comment on entend, comme gouvernement, les faire participer davantage à l'action gouvernementale. Pour ce qui est du suivi du sommet de la région 04, voici ce qui a été fait concrètement, contrairement au début de l'article qui disait: Même si, au lendemain, aucun emploi n'a été créé au sommet. Ce n'est pas tout à fait exact parce que dès le lendemain il y avait au moins un emploi puisqu'on avait décidé, à l'OPDQ, de confier à une personne la permanence pour s'assurer que toutes les résolutions, tous les projets qui ont été retenus aient vraiment un caractère plus formel de garantie de succès dans l'avenir.

Le Président: La période des questions est terminée.

M. Picotte: Je voudrais solliciter le consentement pour poser une question additionnelle au ministre.

Le Président: Il y a consentement, M. le whip.

Des voix: Non, pas de consentement.

Le Président: On me dit qu'il n'y a pas de consentement.

M. Picotte: Il n'y a pas de consentement. J'ai mon voyage!

Le Président: Cependant, il y a un complément de réponse de la part du ministre des Transports.

La construction du tronçon principal de l'autoroute 50

M. Clair: M. le Président, c'est simplement pour donner plus d'informations au député de Papineau qui me demandait hier s'il était exact que, initialement, un budget de 2 000 000 $ avait été prévu pour la construction de l'autoroute 50 de la Montée des Laurentides à la route 309. Ce que je peux lui expliquer là-dessus c'est que dans le plan de développement, le plan d'équipement 1982-1987 dont il a pris connaissance, j'imagine, un montant de 2 000 000 $ avait été effectivement prévu. Dans le budget de construction de cette année, c'est plutôt un montant de 500 000 $ qui apparaît pour entreprendre des travaux de l'ordre de 11 800 000 $ sur un tronçon de six kilomètres.

La principale explication à donner au député c'est que s'il regarde bien le plan d'équipement 1982-1987 sur la même autoroute 50 concernant le tronçon compris entre l'échangeur du Canadien Pacific à la Montée Paiement, on avait estimé sur un tronçon d'une longueur de 7,2 kilomètres qu'il en coûterait 18 800 000 $ pour le coût global de ce tronçon. Or, au plan d'équipement de cette année, on voit que c'est plutôt de 20 680 000 $ dont il s'agira, ce qui explique un certain retard consécutif dans les autres tronçons à suivre. Si des travaux sur un premier tronçon ont coûté plus cher que prévu ou coûteront plus cher que prévu sur le plan d'équipement 1982-1987, il est, à toutes fins utiles, inévitable que sur le plan d'équipement 1983-1988 il y ait un retard aussi important sur un autre projet qui devait suivre. C'est l'explication que je pouvais donner au député.

Le Président: M. le député de Papineau.

M. Assad: M. le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que la partie qui n'est pas complétée actuellement, donc vous avez mis seulement 500 000 $ au lieu de 2 000 00 $, est sans doute la partie principale de l'autoroute 50, pour desservir le bassin de population des villes de Masson et Buckingham qui sont les plus importantes à l'est de Hull. Si vous avez la chance de parler à votre divisionnaire régional, vous verrez qu'il y aurait peut-être possibilité de révision parce qu'on trouve que la construction de l'autoroute 50 pour 1986 est un peu tardive. Au début, quand l'accord a été signé en 1972, le parachèvement de l'autoroute était prévu pour 1977 et maintenant on parle de 1986.

Je prétends que comme 50% du coût de cette autoroute sont défrayés par le gouvernement fédéral, il y a toujours moyen de regarder de plus près la possibilité d'accélérer les travaux.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, pour plus de précisions encore une fois, je dirai que nous dépenserons plus de 10 000 000 $ en 1983-1984 sur l'autoroute 50. Ce que la région nous avait signifié comme volonté, c'était d'accélérer surtout les travaux compris entre Hull et l'aéroport de Gatineau-Angers. C'est ce que nous avons fait afin de permettre la desserte de l'aéroport de Gatineau dès le mois d'août ou septembre prochain par l'autoroute 50. C'était la priorité qui était accordée à ce tronçon et j'ai d'ailleurs indiqué hier au député de Gatineau qu'en ce

qui concerne le choix à faire entre l'autoroute 5 et l'autoroute 50 et 550 vers l'est, nous avons décidé de donner priorité à la construction de l'autoroute 50 en direction de Masson au cours des prochaines années. Cela va donc dans le sens que souhaite le député. Je comprends cependant que quant à lui c'est un peu normal. Tous les députés souhaiteraient voir leur projet accéléré plus rapidement que les autres, c'est certainement légitime mais nous devons le faire dans le cadre des priorités à l'intérieur d'une région et des budgets qui y sont alloués, et c'est ce que nous avons fait.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales m'indique qu'il a également un complément de réponse.

Sommes versées à la ville de Montréal,

par le gouvernement du Québec,

pour tenir lieu de taxes

M. Léonard: Oui, M. le Président. Entre temps j'ai obtenu des chiffres sur les "en lieu" de taxes versés à la ville de Montréal en réponse au député de Shefford et au député de Gouin. Les "en lieu" de taxes sur les immeubles du gouvernement des réseaux et autres compensations versés à la ville de Montréal pour l'année 1982, donc qui ont déjà été versés, 93 000 000 $. Au titre de la redistribution des taxes sur les réseaux d'électricité, de gaz et de télécommunication, 37 000 000 $...

M. Tardif: Hydro-Québec?

M. Léonard: Oui, pour Hydro-Québec. Et pour les subventions spécifiques, transport en commun, assainissement des eaux et autres choses, 98 000 000 $. Le total des sommes versées par le gouvernement du Québec à la ville de Montréal...

M. Tardif: Seulement pour la ville?

M. Léonard: ...en 1982, c'est 229 000 000 $...

M. Tardif: Hein?

M. Léonard: ...et le fédéral a versé en 1982 à Montréal, 6 287 000 $. Je considère que l'annonce qu'a faite M. Lalonde vendredi dernier, de donner un chèque de 3 500 000 $ doit représenter le premier versement de toutes les taxes fédérales sur tous les édifices sur tout le territoire de la ville de Montréal. (11 h 10)

Le Président: Aux avis à la Chambre...

M. Champagne: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Lorsqu'il y a complément de réponse, il peut y avoir question additionnelle de la part de la personne qui a posé la question, mais pas de la part d'une autre personne. En l'occurrence, si on veut vraiment poser une question additionnelle, il faudrait qu'elle vienne, dans ce cas-ci, soit du député de Shefford, qui a posé la question principale, ou du député de Gouin, qui a posé la question plus spécifique quant aux taxes à Montréal. M. le député de Shefford, si vous voulez poser une question additionnelle.

M. Paré: Oui. Merci, M. le Président. Une courte question au ministre des Affaires municipales, en complémentaire. J'aimerais savoir si, avec les chiffres qui viennent d'être donnés pour l'ensemble des municipalités du Québec - et toutes les municipalités du Québec, j'ai l'impression -on peut en conclure que le gouvernement du Québec est le plus grand payeur de taxes de chacune des municipalités?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: C'est sûr qu'au total, oui, c'est le plus grand contribuable pour les municipalités, mais pas nécessairement dans chacune des municipalités, c'est bien évident. Dans certaines municipalités, il n'y a pas d'installation. Il peut y avoir des industries, mais sur l'ensemble du territoire du Québec, en 1982, il y a 375 000 000 $ de compensation de taxes versés par le gouvernement.

Le Président: Il n'y a pas de motion non annoncée, que je sache. Il n'y a pas d'enregistrement des noms sur les votes en suspens, ce qui nous amène aux motions de M. le leader parlementaire du gouvernement.

Travaux des commissions

M. Bertrand: M. le Président, ce matin, de 11 h 15 à 13 heures, je demanderais le consentement pour que trois commissions parlementaires puissent siéger. D'abord, au salon rouge, la commission des affaires municipales pour l'étude des crédits de ce ministère. À la salle 81-A, la commission de la présidence du conseil pour l'étude des crédits du Secrétariat à la science et à la technologie - en attendant que cela devienne le ministère de la Science et de la Technologie. On me dit que, de part et d'autre, on se serait entendu pour qu'une période de quatre heures soit consacrée à l'étude des crédits de ce ministère. Et, dès que l'étude des crédits de ce ministère serait terminée, à la salle 81-A, ce serait ensuite le ministre délégué aux Relations avec les citoyens qui irait devant cette commission parlementaire, donc probablement au cours

de l'après-midi, pour défendre ses crédits. Et on me dit que pour ce dossier particulier, Relations avec les citoyens, une période de trois heures aurait été négociée de part et d'autre pour procéder à l'étude des crédits. Ensuite, à la salle 91-A, de 11 h 15 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, la commission des finances et des comptes publics se réunira d'abord pour procéder à l'étude des crédits du Conseil du trésor et, ensuite, pour continuer l'étude du projet de loi no 8, article par article. J'indique, en ce qui a trait à la commission de la présidence du conseil et de la constitution, que ses travaux, normalement, se dérouleraient aux heures régulières que nous connaissons pour la session intensive à compter du 1er juin, c'est-à-dire de 11 h 15 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures. Mais je crois qu'avec le menu qu'ils ont, ils pourraient probablement avoir terminé avant 24 heures ce soir.

Le Président: M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, est-ce que le leader du gouvernement pourrait répéter ce qu'il a dit au sujet de la commission des finances et des comptes publics?

Le Président: M. le leader parlementaire.

M. Bertrand: Pour les finances et comptes publics, M. le Président, d'abord on procédera à l'étude des crédits, à compter de maintenant, c'est-à-dire 11 h 15 et, par la suite, dès que cette étude sera terminée, on reprendra l'étude du projet de loi no 8, article par article. Il y a environ deux heures prévues pour l'étude des crédits du Conseil du trésor.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que le leader pourrait nous indiquer - comme dans le cas d'autres commissions - pour ce qui est de la conclusion de l'étude des crédits de la commission des finances et comptes publics, quel temps est prévu, afin que ceux qui sont intéressés uniquement à l'étude de la loi no 8 puissent savoir à quel moment se présenter en commission.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Environ deux ou trois heures, M. le député de Sainte-Marie.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, je constate que le leader du gouvernement demande le consentement pour faire siéger trois commissions en même temps que la Chambre siégera. Je demande au leader du gouvernement de m'indiquer en vertu de quel esprit de collaboration je devrais donner ce consentement, si c'est le même que lui-même a manifesté en refusant de consentir à une question additionnelle tout à l'heure?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vais donner deux réponses au député de Marguerite-Bourgeoys et leader parlementaire de l'Opposition. La première est que je pense que nous avons apporté le maximum de collaboration de ce côté-ci pour permettre que les députés de l'Opposition trouvent satisfaction au niveau d'un certain nombre de dossiers comme les questions qui sont inscrites au feuilleton. J'indique immédiatement au député de Sainte-Marie qu'il aura ce matin la réponse à sa question inscrite au feuilleton.

M. Bisaillon: Il serait temps.

M. Bertrand: Ainsi, le feuilleton sera complètement nettoyé de toute question posée par des députés et inscrite au feuilleton.

Deuxièmement, j'étais informé - je veux, là-dessus, que le député de Marguerite-Bourgeoys prenne ma parole - que le ministre des Transports et le ministre des Affaires municipales avaient des compléments de réponse à apporter. Dans ce contexte, comme déjà on sait qu'on va déborder la période des questions et qu'il peut arriver qu'un complément de réponse donne lieu à une question additionnelle - cela a été le cas du député de Papineau et du député de Shefford - dans mon esprit, cela allonge d'une certaine façon la période des questions, ce qui a été le cas. Je m'excuse auprès du député de Maskinongé, je lui aurais donné mon consentement si j'avais su qu'il n'y avait pas de complément de réponse. Dans un contexte de complément de réponse, je croyais, parce qu'il y avait questions additionnelles et que la période des questions pourrait être allongée de cinq, sept ou huit minutes, qu'il était préférable de fonctionner pour se rapprocher le plus des 45 minutes normalement dévolues aux périodes des questions.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: Si je me suis permis de poser la question au leader du gouvernement, c'est pour indiquer que nous entrons

aujourd'hui dans une période de fin de session où les travaux sont bousculés un peu et les heures longues. Nous aurons besoin, de part et d'autre, de toute la collaboration possible. J'ai offert ma collaboration au leader du gouvernement, hier soir, hors cette Chambre, mais j'aimerais que la pareille soit aussi reconnue à l'égard des autres députés. Malgré le refus de ce consentement et par respect pour les membres des commissions qui se sont préparés à travailler dans trois commissions en même temps immédiatement, nous allons donner notre consentement.

Le Président: La motion du leader parlementaire du gouvernement est donc adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté. M. Fortier: Article 34.

Recours à l'article 34

Le Président: Une question en vertu de l'article 34, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Le leader m'a donné l'assurance qu'il y aurait une commission parlementaire pour entendre Hydro-Québec à la suite du dépôt d'un projet de loi extrêmement important modifiant substantiellement la Loi d'Hydro-Québec. Je le remercie d'avoir accepté de tenir une commission parlementaire. Ce que je voudrais éviter, c'est que ce projet de loi très important soit traité en dernière minute, en fin de session. Le ministre, en dehors de cette Chambre, m'a indiqué qu'il serait prêt à procéder et à inviter, si le leader acquiesçait, Hydro-Québec dès que la commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James serait terminée.

J'aimerais lui demander s'il pourrait prendre ma demande en considération pour entendre Hydro-Québec dès le début de la semaine prochaine si cela était possible.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Il est évident que, dans la mesure où le député d'Outremont et le député de Saint-Maurice se sont entendus sur une certaine forme de déroulement de cette commission parlementaire et une date qui pourrait satisfaire les deux parties, je me rendrai à leur désir.

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président: Oui, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: ...puis-je rappeler au leader du gouvernement qu'il s'est engagé hier à me donner une réponse en regard du dépôt éventuel d'un projet de loi sur la fonction publique et sur la tenue possible d'une commission parlementaire sur le même sujet?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Pour ceux qui auront pris connaissance des journaux ce matin, ils auront pu apprendre que Mme la ministre de la Fonction publique doit présenter au Conseil des ministres son mémoire là-dessus. Dans la mesure où la décision n'est pas encore prise au Conseil des ministres, je ne peux pas, à ce stade-ci, dire au député de Sainte-Marie ce qu'il adviendra dudit projet de loi, quand il sera déposé à l'Assemblée nationale et donc, à partir de là, quel est l'échéancier qu'on suivrait pour ce qui est de l'analyse en deuxième lecture ou même la tenue d'une commission parlementaire.

Le Président: M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, ma question s'adresse au leader du gouvernement. À la suite du dépôt du projet de loi no 28 concernant la Communauté régionale de l'Outaouais, on doit entendre les intervenants le 8 juin, c'est-à-dire les municipalités d'Aylmer, de Gatineau, de Hull et de Pontiac. L'Opposition, hier, avait demandé d'entendre le Conseil régional de développement de l'Outaouais ainsi que la Société d'aménagement de l'Outaouais. On nous a appris qu'on avait accepté d'entendre le Conseil régional de développement de l'Outaouais; par contre, la Société d'aménagement de l'Outaouais est un organisme créé par la loi 85 en 1969 et nous aurions souhaité lui poser des questions et l'entendre à cette commission. Y a-t-il possibilité, M. le leader, de reconsidérer cette demande ou de nous donner les raisons pour lesquelles on a refusé d'entendre les représentants de la SAO? (11 h 20)

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Effectivement, M. le Président, nous sommes allés aux renseignements auprès du ministre des Affaires municipales relativement à cette commission parlementaire et nous avons convenu qu'il serait approprié d'entendre le Conseil régional de développement de l'Outaouais, le CRDO. Dans le cas de la Société d'aménagement de l'Outaouais, puisqu'il s'agit d'une société d'aménagement qui relève d'une autre instance, dans le fond, et qui n'est pas directement concernée par

le projet de loi, nous n'avons pas jugé utile, dans les circonstances, d'inviter cet organisme à venir devant la commission.

Maintenant, si le député de Hull veut continuer ses discussions avec le ministre des Affaires municipales et peut-être tenter d'en arriver à une entente là-dessus... Je crois que, déjà, le fait d'inviter le Conseil régional de développement de l'Outaouais, c'est une bonne chose. Quant à la Société d'aménagement de l'Outaouais, le ministre m'indique que, dans les circonstances, il ne lui apparaît pas indiqué, étant donné la nature du projet de loi, que cet organisme vienne devant la commission parlementaire. Cela dit, je pense que vous pourriez peut-être en discuter en dehors de la Chambre.

Le Président: M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Nous aurions cru, M. le leader, qu'il y aurait possiblement eu des modifications d'apportées au projet de loi no 28 quant au rôle que joue actuellement la Société d'aménagement de l'Outaouais, ainsi que son appartenance à un ministère plutôt qu'à un autre. Dans cette optique, nous aurions souhaité que le leader du gouvernement reconsidère la demande d'inviter sa créature à moins que le gouvernement ne veuille pas l'entendre.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

Une voix: Cela touche les structures municipales.

M. Bertrand: M. le Président, le projet de loi touche essentiellement les structures municipales et je dois prendre la parole du ministre là-dessus. Je pense que le député de Hull, pour l'instant, en tout cas, doit prendre la parole du ministre. On verra, en commission parlementaire, lors de l'étude du projet de loi, lorsque les personnes et les groupes viendront se faire entendre et, par la suite, lors du débat en deuxième lecture. Mais il n'y a pas de dispositions contenues dans le projet de loi qui affectent d'une façon ou d'une autre la Société d'aménagement de l'Outaouais. Dans ce contexte, le ministre a cru qu'il n'était pas approprié, opportun, d'inviter la Société d'aménagement de l'Outaouais. Évidemment, au fil des discussions, s'il apparaissait qu'on se soit trompés là-dessus et que le député de Hull nous fasse part de certaines remarques qui nous amèneraient à modifier notre décision, on en tiendrait compte.

Le Président: Ce qui nous amène aux affaires du jour et à une réponse que M. le leader parlementaire du gouvernement désire fournir à M. le député de Sainte-Marie.

Réponses aux questions inscrites au feuilleton

M. Bertrand: Oui, M. le Président. C'est avec beaucoup de plaisir - j'aimerais, en même temps que je le fais, remercier mes collègues du Conseil des ministres pour la célérité avec laquelle ils ont procédé dans la préparation des réponses à des questions formulées par des députés et inscrites au feuilleton - que je réponds à la dernière question inscrite au feuilleton par le député de Sainte-Marie, M. Bisaillon, question posée au ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional. Je remets cette réponse, M. le Président, au nom du ministre.

Le Président: Document déposé. M. Bisaillon: M. le Président.

Le Président: M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je ne sais pas s'il serait opportun, M. le Président, de souligner qu'à ma connaissance, c'est la première fois, depuis 1970, pour autant que je sois bien informé, qu'effectivement il n'y aurait plus au feuilleton de questions qui attendent des réponses. Je pense que c'est quelque chose dont les parlementaires doivent se féliciter et reconnaître que, dans les circonstances, le gouvernement a répondu aux demandes des législateurs.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: J'ai déjà eu, je pense, la semaine dernière, l'occasion de féliciter le leader du gouvernement en ce qui concerne les réponses aux questions inscrites au feuilleton. Maintenant, si on voit que le feuilleton est vide de questions, c'est sûrement, en partie, à cause de l'efficacité tout à fait nouvelle et bienvenue du leader du gouvernement, mais ce n'est sûrement pas à cause du manque d'imagination et de questions des membres de l'Opposition. Ce qui est malheureusement arrivé, M. le Président, c'est que les réponses tardaient tellement à venir autrefois que cet instrument de travail était devenu presque désuet pour les membres de l'Opposition. Maintenant, nous allons réagir à cette nouvelle efficacité du gouvernement, sauf qu'étant donné que nous approchons de la fin de la session, je pourrais prévoir que le nombre de questions au feuilleton ne sera pas très élevé parce qu'on ne veut pas quand même demander au ministre de répondre le lendemain.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Je prends évidemment bonne note des engagements que le député de Marguerite-Bourgeoys, leader de l'Opposition, prend au nom de sa formation politique. Évidemment s'il y avait des questions nouvelles qui étaient inscrites au cours des prochains jours, dépendant bien sûr de la nature de la question, évaluer le temps qu'il faut pour recueillir les renseignements qui sont demandés, il y a certaines questions qui demandent une recherche très importante. Je veux simplement indiquer que je crois que si nous sommes parvenus à agir de cette façon, c'est que dans le fond nous avons reçu une excellente collaboration de l'ensemble des cabinets politiques de chacun des ministres, des ministres évidemment. Je dois aussi en rendre témoignage à mon équipe au bureau du leader qui n'a pas cessé de harceler littéralement les cabinets politiques, et les ministres très souvent pour obtenir les réponses à des questions.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, nous passons aux affaires du jour. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, nous commencerions nos travaux, ce matin, par l'adoption en deuxième et troisième lecture de deux projets de loi privés. D'abord, le projet de loi no 202 à l'article 28 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Y a-t-il consentement?

Des voix: Consentement.

Projet de loi no 202 Deuxième et troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Consentement. Donc, deuxième et troisième lecture du projet de loi no 202, Loi concernant la Coopérative agricole du Bas-Saint-Laurent. Ces deuxième et troisième lectures sont-elles adoptées?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième et troisième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je demanderais aussi le même consentement pour procéder aux deuxième et troisième lectures du projet de loi no 215 à l'article 29 du feuilleton d'aujourd'hui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Projet de loi no 215 Deuxième et troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Consentement. Est-ce que la deuxième et la troisième lecture du projet de loi no 215, Loi concernant Les Ressources Campbell Inc., Les Ressources Camchib Inc. et Mines d'Amiante United Inc. sont-elles adoptées?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième et troisième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Maintenant, nous pourrions amorcer l'étude du projet de loi no 13 en deuxième lecture à l'article 8.

Projet de loi no 13 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les grains. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, vous avez la parole.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, le projet de loi no 13 que nous étudions aujourd'hui en deuxième lecture a pour objet de préciser les pouvoirs de la Régie des grains du Québec quant au classement du grain. Ce projet de loi prévoit, d'une part, que sauf lorsqu'elle agit en révision d'un classement déjà fait, la régie ne peut procéder au classement initial du grain que si ses disponibilités le lui permettent. Il précise, d'autre part, que le classement du grain fait par la régie est sujet à des faits établis par règlement. Essentiellement, le régime que nous avons voulu adopter dans le domaine du grain est un régime volontaire. En même temps pour qu'il n'y ait pas trop d'abus, le régime consistera à l'entente de gré à gré pour la classification du grain entre le vendeur et l'acheteur de grain. Un agriculteur qui vend son grain et l'acheteur qui achète du grain s'entendent pour dire, après avoir analysé le

grain, il s'agit d'un grain de tel classement. Ce classement sera le classement retenu parce qu'il y a eu entente. C'est seulement lorsqu'il n'y aura pas eu entente et qu'on voudra faire réviser un classement du grain que la régie pourra procéder au classement du grain initial et si ses disponibilités le lui permettent moyennant certains frais. Pourquoi? Parce que nous ne voulons pas que chaque fois qu'il y a un classement, les parties, vendeur et acheteur, demandent un inspecteur de la régie pour venir classer le grain.

Autrement, cela coûterait une fortune de faire la classification du grain. Le régime de base essentiellement sera un régime volontaire de gré à gré où l'acheteur et le vendeur s'entendront sur la classification du grain. S'il y a mésentente ou si on veut confier la classification du grain à la régie, il faudra, à ce moment, en payer les frais réels et la régie le fera dans la mesure où ses disponibilités le lui permettront. De plus, le régime de projet modifie les pouvoirs réglementaires du gouvernement pour lui permettre d'établir des normes de classement du grain. (11 h 30)

Au fond, il s'agissait d'une précision juridique pour faire en sorte que certains critères soient déterminés pour le classement du grain. En gros, ce seront des critères qu'on retrouve dans la classification dans l'Ouest du Canada ou aux États-Unis, avec peu de variations afin qu'on ait un système un peu uniforme en Amérique du Nord. Mais la classification se fera par des gens d'ici sur tout le grain qui sera transité au Québec.

La régie a été constituée, il y a déjà un certain temps. Cela a pris presque un an à trouver les personnes qui composent son premier bureau de direction. Il y a eu énormément de travail au point de vue de la réglementation pour faire en sorte, lorsque ce projet de loi sera adopté, que nous puissions acheminer immédiatement le règlement de classification des grains, le règlement qui va avec le projet de loi, c'est-à-dire qui prévoit la classification ou le classement du grain, les différentes classes de grain, qui prévoit également des garanties de paiement. Vous savez que les agriculteurs nous demandent de prévoir de plus en plus des garanties de paiement. L'agriculteur va porter chez un acheteur sa récolte de grain à plein camion, et s'il arrive des difficultés financières de la part de l'acheteur, l'agriculteur peut voir passer le fruit du travail d'une année complète dans une faillite éventuelle d'un acheteur, de sorte que les agriculteurs nous ont demandé de prévoir des modalités qui pourraient faire en sorte que les paiements des acheteurs soient mieux garantis. Comme le permet la loi, la réglementation va instaurer un système qui va assurer non pas une garantie totale de paiement, mais une garantie beaucoup plus forte que ce qu'on connaît actuellement, parce qu'il n'y avait rien jusqu'à maintenant.

Actuellement, les consultations vont bon train. Vous savez que, dans le domaine agricole, la marque de commerce du présent gouvernement est de faire de longues consultations pour que les décisions qui sont prises reflètent vraiment le point de vue des différents intervenants impliqués dans les dossiers et un vaste consensus sur les décisions qui sont prises. L'adoption de cette loi et l'adoption, antérieurement, de la loi initiale vont nous permettre de présenter par la suite un règlement au Conseil des ministres et le Conseil des ministres, pourra accepter le règlement qui ira en prépublication. Au cours de la prépublication, les gens pourront, encore une fois, faire valoir des points de vue, faire valoir leurs idées s'ils pensent qu'il y a encore des points qui peuvent être améliorés en regard du règlement. Mais entre-temps, déjà, les consultations vont bon train et la Fédération des producteurs de cultures commerciales, c'est-à-dire les producteurs de grain spécialisés ou les producteurs spécialisés en grain ont été rencontrés par les gens du ministère et moi-même pour étudier le règlement. Récemment, nous rencontrions officiellement l'Association québécoise des meuniers qui faisait ses représentations, étudiait le règlement avec nous et manifestait, par la bouche de ceux qui étaient présents, sa satisfaction devant ce règlement que tous souhaitent voir adopter le plus rapidement possible. Je leur ai dit: Aussitôt que la loi sera adoptée ou que le règlement sera adopté, il pourra s'appliquer cette année. Il y a encore des consultations qui vont se tenir cette semaine avec les meuneries coopératives fédérées et également avec l'Association des centres régionaux de grain pour avoir véritablement une réglementation qui corresponde aux besoins de la population du Québec de sorte que le règlement que nous présenterons par la suite au Conseil des ministres aura connu toutes les étapes de la consultation comme on a rarement vu dans aucun autre domaine.

Vous savez d'ailleurs qu'avant d'adopter le projet de loi initial, il y avait déjà eu une conférence socio-économique à Saint-Hyacinthe les 8 et 9 novembre 1979 qui avait amené à la préparation du projet de loi créant la Régie des grains du Québec. C'était à la suite d'un consensus qui avait été obtenu que nous avions procédé à l'adoption d'un projet de loi selon les modalités qui avaient été déterminées lors de cette conférence socio-économique.

Cette Régie des grains aura principalement comme mandat de favoriser l'amélioration de la qualité des grains utilisés au Québec notamment par l'application d'un

système de classification et de normes de qualité, régime de qualité appliqué au Québec. On verra à quel point - je sais que des députés du Parti québécois doivent faire des discours et doivent l'indiquer - le gouvernement québécois crée une institution, développe une institution avec la Régie des grains qui est fondamentalement nécessaire au Québec parce que nous n'avons pas le service d'aide et de préoccupation des besoins des Québécois de la part des institutions fédérales. Les gens savent que lorsqu'il y a eu la fusariose au Québec, le gouvernement fédéral lui-même émettait des communiqués pour indiquer qu'il y avait de la fusariose au Québec et qu'il fallait faire en sorte d'être bien prudent dans l'utilisation du grain qui avait été produit pendant cette année au Québec. Quand, l'an dernier, la fusariose était en Ontario, cela devenait un secret d'État, il n'y avait plus de communiqué du gouvernement fédéral, mais on mettait des fonds et des équipes de chercheurs pour déterminer les seuils de tolérance pour la consommation humaine.

Alors qu'au Québec, on produisait essentiellement du grain pour les animaux, c'était devenu quasiment un grain difficile à utiliser et on avait toutes sortes de réserves du côté du fédéral. Lorsque le grain en Ontario a eu la même fusariose, l'an dernier, alors qu'il n'y en avait pas au Québec et que ce grain de l'Ontario allait à la consommation humaine, on était prêt à ouvrir à pleine perche les seuils de tolérance. Cela ne devenait plus dangereux. Pourtant des êtres humains devraient consommer ce grain, mais on pouvait écarter les seuils de tolérance, cela ne devenait plus dangereux, parce que c'était pour la simple province de l'Ontario.

Nos 74 députés du Québec à Ottawa regardaient passer la parade comme d'habitude, sûrement sans se rendre compte ou sans même être au courant de ce qui se passait.

La Régie des grains aura comme rôle essentiel de favoriser l'amélioration de la qualité des grains utilisés au Québec; de favoriser l'approvisionnement de grains de qualité; de protéger les producteurs en s'assurant de la solvabilité des acheteurs et de délivrer différentes catégories de permis aux marchands de grain: de centre régional, de centre de séchage et de meunier aux entreprises qui en font la demande. Cette régie jouera un rôle essentiel au moment où la production du grain québécois a augmenté d'une façon extraordinaire, exceptionnelle, au cours des dernières années. (11 h 40)

Si on regarde le document explicatif qui vient d'être publié par la Régie des grains du Québec, on voit que la production de céréales fourragères au Québec a beaucoup augmenté. En 1976, on avait 835 000 tonnes de production. En 1981, nous avions 1 845 000 tonnes; 1 010 000 tonnes de plus, c'est du monde, c'est pesant, c'est considérable. Quand on disait en 1977: Nous mettons en place un programme qui, au cours des cinq prochaines années, va faire en sorte que la production des grains au Québec va augmenter de 50%, l'Opposition faisait des gorges chaudes, comme elle le fait aujourd'hui pour le sucre. Hommes de peu de foil Vous avez les horizons trop bas. Ils disaient: Pour les céréales, c'est impossible, nous ne sommes pas une province céréalière, on devrait faire comme dans le passé, prendre nos grains dans l'Ouest.

On peut revoir les discours, non pas du député de Beauce-Sud parce qu'il n'était pas député à ce moment-là, il était coroner et il ne se faisait pas punir par son parti. J'ai remarqué que, depuis quelques semaines, il a été puni pour avoir appuyé le gouvernement concernant le rapport Gilson. Depuis ce temps, on lui a soutiré le dossier de l'Agriculture, et on a dit: On va le passer au député de Maskinongé et au député de Huntingdon, ils sont moins libres penseurs que le député de Beauce-Sud, quoi qu'on en pense. Le député de Beauce-Sud est un peu plus libre penseur. Je ne parlerai pas du député de Berthier parce que, pour être libre penseur, il faut penser un peu. Je ne voudrais pas aller plus loin dans cette voie; les gens qui nous entendent ne nous demandent pas que ce genre de débat aille trop loin.

J'ai remarqué aussi que les besoins en céréales fourragères au Québec sous le gouvernement actuel sont passés de 2 450 000 tonnes en 1976 à 3 656 000 tonnes en 1981. Cela, c'est indicatif, M. le Président. Nos besoins en grains ont augmenté de 50% au cours des dernières années. Sous le gouvernement actuel, nos besoins en grains ont augmenté de 50%. Pourquoi? Pas parce que les animaux mangent plus qu'avant, c'est parce qu'il y a plus d'animaux sur les terres des cultivateurs. On a augmenté nos besoins en céréales de 2 450 000 tonnes à 3 656 000 tonnes. On a besoin de 1 200 000 tonnes de plus.

Ce sont ces besoins qui indiquent que sur les fermes des agriculteurs, maintenant, il y a beaucoup plus d'animaux qu'au temps des libéraux. Ce n'est pas parce que les animaux mangent plus, au contraire, les diètes sont équilibrées, les animaux mangent uniquement ce qu'on leur donne. Ceux qui les nourrissent n'ont pas tendance à leur en donner plus qu'il en faut, juste ce qu'il faut; ils mangent mieux que nous, quasiment. Ils ont des diètes équilibrées, de sorte qu'ils ont exactement l'alimentation qu'il faut pour une croissance idéale. Les besoins ont augmenté de 1 200 000 tonnes parce qu'il y a beaucoup plus d'animaux qu'avant sur le

territoire québécois.

Cela indique que l'agriculture au Québec est en développement. Malgré cette augmentation considérable des besoins - 50% en cinq ans, ce sont des besoins considérables - la production céréalière a augmenté encore plus rapidement puisque notre degré d'autosuffisance était de 34% en 1976 et il restait environ à 30% ou 34% pendant toutes les années où le Parti libéral a été au pouvoir. Voyez ce qui se passe quand le gouvernement change. 34,1% en 1976, 34,4% en 1977 et nos politiques viennent d'être adoptées, elles n'ont pas eu le temps de faire effet. En 1978, cela commence, 35,6%; en 1979 le degré d'autosuffisance est de 38,1%; en 1980, 42,1%; en 1981, 50,4%. Augmentation à cause des politiques qui ont été adoptées par le gouvernement pour faire en sorte que notre production céréalière augmente.

C'est là qu'on a vu des investissements considérables pour permettre cette augmentation, ce n'est pas le fruit du hasard. Je peux vous donner des chiffres indicatifs. La production d'orge au Québec, de 1971 à 1982; l'orge est une denrée de base: en 1971, dans le temps des libéraux, 15 400 hectares; en 1972, 17 000 hectares; en 1973, 17 400; en 1974, 17 800; en 1975, 18 200; en 1976, 18 900. Là, le gouvernement change. Regardez ce qui arrive dans le secteur de l'orge, M. le Président. En 1977, 21 600; en 1978, 28 700; en 1979, 39 900; en 1980, 65 600; en 1981, 106 000; en 1982, 121 000. Alors que dans le temps des libéraux c'est resté de façon permanente entre 15 000 et 18 000 hectares, avec le gouvernement actuel c'est passé de 18 000 hectares à 121 000 hectares.

Une voix: C'est considérable!

M. Garon: En termes de tonnes, la production est passée de 38 700 tonnes dans le temps du Parti libéral à 350 000 tonnes sous le gouvernement actuel, soit dix fois plus. Seulement dans la production de l'orge.

Quant au blé, la production a augmenté de façon moins rapide pour passer de 59 000 tonnes à 120 000 tonnes. La production de blé a doublé à toutes fins utiles.

Si je regarde la production de maïs, sous le régime libéral elle avait diminué, les rendements baissaient. En 1971, 55 800 hectares; en 1976, 62 600. Cela avait augmenté un peu mais la production baissait. 331 000 tonnes en 1971 et cela a baissé à 303 000 tonnes dans le temps des libéraux. Sous le gouvernement actuel, 62 000 hectares en 1976 et cela passe à 175 600, soit trois fois plus. La production de 303 000 tonnes passe à 914 200 tonnes en 1982, soit trois fois plus encore là.

J'entends le député de Beauce-Sud marmonner parce qu'on parle vraiment de résultats exceptionnels.

La production d'avoine. En baissant la superficie de 225 000 hectares à 163 000 hectares, la production est restée la même avec 150 000 acres de moins. C'est quelque chose. 336 000 tonnes, 320 000 tonnes, à peu près la même entre 1976 et 1982 mais en épargnant 150 000 acres de terre avec des rendements accrus, avec des méthodes culturales, des vulgarisations des développements des productions.

On dira: Est-ce que cela rapporte? Je vous dirai que les rendements en tonne dans le temps des libéraux ne bougeaient pas. En 1971, 2,3; en 1976, 2,2 tonnes à l'hectare. C'était stationnaire. Avec le gouvernement actuel on a atteint des rendements de 3; 3,2; 3,4; 3,3 soit 50% plus élevés que dans le temps des libéraux.

La valeur de la production était de 88 000 $ en 1976; en 1981, 259 000 $, presque 260 000 $, soit trois fois plus encore là, M. le Président. Ces chiffres parlent par eux-mêmes et indiquent tout le chemin que nous avons parcouru au Québec au cours des cinq dernières années. (11 h 50)

Mais tout cela ne s'est pas fait sans des investissements considérables. Quand nous sommes arrivés au pouvoir, les centres régionaux de grain n'existaient pas au Québec. Les seuls élévateurs qu'on voyait, les seuls silos à grain étaient le long du fleuve Saint-Laurent pour recevoir les grains de l'Ouest du Canada à Montréal, Sorel, Trois-Rivières, Québec, Port-Cartier, Baie-Comeau. Le gouvernement actuel, avec 74 députés venant du Québec sur 75, veut faire transiter par Vancouver plutôt que par le fleuve Saint-Laurent, de sorte que des constructions sont en train de se faire à Prince-Rupert, dans le nord de la Colombie britannique, et à Vancouver, pour que le grain de l'Ouest passe par la côte du Pacifique plutôt que par le fleuve Saint-Laurent. Certains disent qu'avec le potinage qu'est en train de faire le ministre des Transports à Ottawa, M. Pépin, le grain pourrait, plutôt que passer vers l'Est, bifurquer de Thunder Bay, des Grands Lacs, directement vers le sud des États-Unis. J'ai vu des études qui indiquent qu'au fédéral on pense, au lieu d'acheminer le grain par le fleuve Saint-Laurent, l'acheminer par les États-Unis, par les ports du sud des États-Unis, par le golfe du Mexique. Encore là, on voit à quel point le Québec est peu défendu par ses députés à Ottawa.

Pendant ce temps, qu'est-ce que nous faisions au Québec? Nous avons bâti 19 centres régionaux dans les différentes régions du Québec: à Amqui, avec la Coopérative d'Amqui; à Mont-Joli, avec la meunerie Dionne, entreprise dynamique; au Bic, avec la Coopérative du Bas-Laurent; à Rivière-du-Loup, avec la Société coopérative agricole de

Rivière-du-Loup; sur la côte sud, avec la Coopérative de la côte sud, à Saint-Philippe-de-Néri; dans Charlevoix et à Clermont, La Malbaie, avec la coopérative qui a un centre de grain; à Saint-Apollinaire, avec Cérébec Inc. qui, à cause de difficultés fiscales des patrons, a dû vendre le centre; avec la Coopérative de Saint-Jacques-de-Parisville, dans Lotbinière; avec la Coopérative agricole de La Chaudière-Etchemin, à Sainte-Hénédine; avec la Société coopérative des Bois-Francs, à Victoriaville.

Ce ne sont pas des centres dans l'Ouest qu'on a bâtis, pas à Winnipeg, pas à Vancouver, mais chez nous. Je continue: Société coopérative du lac Saint-Pierre, à Baieville; Société coopérative agricole de Sainte-Rosalie, un très gros centre de 27 300 tonnes à Sainte-Rosalie, chez nous, dans les terres; les Silos Élévateurs Sainte-Brigide Inc. aussi, à Sainte-Brigide; Valcide Ltée, si ma mémoire est bonne, à Varennes. Je dis cela de mémoire, je me les rappelle tous parce que je les ai visités. On continue: les Séchages Bermic Inc., à Saint-Jean. Je me rappelle à quel point le député de Saint-Jean était fier d'avoir ce centre régional dans son comté; le Centre régional de grain Maurice Daoust Inc., à Saint-Louis-de-Gonzague, dans Beauharnois; la Coopérative des cultivateurs de Saint-Polycarpe, à Saint-Polycarpe, dans le comté de Vaudreuil-Soulanges, dans le temps où il y avait un député qui était présent; la Coopérative de Saint-Jacques de Montcalm; la Chaîne coopérative du Saguenay, au Lac-Saint-Jean, à Saint-Bruno, pour une capacité totale des centres de grain de 132 900 tonnes.

Nous avons dit: Ce n'est pas assez, il en faut d'autres. Dans le cadre du plan triennal que nous avons annoncé récemment et dont j'aurai l'occasion de parler dans quelques minutes, nous avons annoncé encore deux autres centres régionaux pour aider deux régions. Cela prendrait un centre régional pour aider la production céréalière de la région de l'Outaouais. On n'en a pas tenu compte dans l'Outaouais. Les gens auraient pu dire: Ils ont oublié l'Outaouais, parce qu'il n'y a pas de député du Parti québécois. Mais non. On a dit: Traitons équitablement les contribuables; nous sommes persuadés qu'ils regrettent leur dernier vote et nous allons quand même bâtir un centre régional dans l'Outaouais. Actuellement, dans le plan régional, nous avons réservé des sommes d'argent pour un centre régional dans l'Outaouais, parce que l'Outaouais est une belle région pour la production céréalière et il serait bon d'y développer davantage cette production à cause du micro-climat et d'une chaleur un peu exceptionnelle dans la vallée de l'Outaouais.

Aussi, on pense que, plus loin, plus avant, dans les Cantons de l'Est, ce pourrait être dans le comté de Johnson. Par exemple, il pourrait y avoir un centre de grain pour permettre l'approvisionnement, les services que rend un centre de grain. On a également réservé des montants d'argent pour un centre de grain dans les Cantons de l'Est.

C'est une politique comme celle-là qui va nous permettre de développer notre production et c'est sans compter les centres régionaux de grain. Pensez-y un instant, M. le Président! Une capacité de 132 900 tonnes. Nous sommes arrivés au pouvoir, en 1976, et je me rappelle les premières rencontres que j'ai eues en 1977. Au printemps et à l'été, les gens disaient: Qu'est-ce qu'on va faire avec nos céréales? Pourquoi? Ils ont dit: On n'a pas de capacité d'entreposage. Le gouvernement encourage la production des céréales, mais il n'y a pas de capacité d'entreposage. Il y a 132 900 tonnes de capacité d'entreposage maintenant au Québec. Cela s'ajoute à la capacité d'entreposage dans les meuneries du Québec qui totalise 198 325 tonnes. On peut donc parler de capacité d'entreposage de 330 000 tonnes au Québec, mais ce n'est pas suffisant. C'est pour cela qu'il faut développer encore davantage. J'ai ici tous les chiffres de la capacité d'entreposage dans les meuneries du Québec.

M. le Président, toute la capacité d'entreposage des céréales, c'est un des services qui étaient nécessaires pour développer cette production céréalière. La Régie des grains est aussi nécessaire pour que le classement du grain se fasse dans les centres régionaux ou dans les meuneries, pour que le producteur du Québec qui produit un grain de première qualité obtienne le prix d'un grain de première qualité et pour que l'agriculteur sache que son grain va être classé, qu'on ne lui donnera pas un prix de grain de troisième qualité quand il a un grain de première qualité. Il était nécessaire de mettre ce mécanisme en marche avec la Régie des grains pour que les gens puissent avoir un classement de leur grain et qu'ils obtiennent le véritable prix de la valeur de leur grain. C'est pourquoi nous avons mis en place cette régie avec une réglementation.

Je suis persuadé que, tantôt, ce sera l'un des principaux points que le député de Beauce-Sud va souligner. Il va dire: Comment se fait-il que votre réglementation n'est pas encore adoptée? D'un autre côté, le député de Huntingdon, dans un discours, un autre jour, dira: Encore des règlements et toujours des règlements. Je suis persuadé que le député de Beauce-Sud va nous dire à quel point ce règlement est nécessaire. Je suis persuadé que, dans son discours, il va me dire: Pourquoi n'avez-vous pas adopté ce règlement plus tôt? D'autre part, il y aura sûrement des députés libéraux qui, dans d'autres discours, diront: Encore un règlement. (12 heures)

M. le Président, il y a telle chose que des règlements utiles, des règlements nécessaires. Vous auriez dû voir la réunion magnifique que j'ai eue avec les meuniers du Québec, à mon bureau, il y a quelques jours. Ils me disaient: M. Garon, adoptez ce règlement; on le trouve bon votre règlement; c'est un beau règlement; c'est cela dont on a besoin comme règlement au Québec; on est d'accord avec le règlement que vous allez présenter avec l'adoption de la loi. C'est la même chose pour les producteurs de culture commerciale, les producteurs spécialisés dans la production de grain. Ils disaient: On a hâte de voir ce règlement adopté. Pourquoi? Parce qu'au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation notre façon de faire, c'est de préparer un règlement avec la population, avec les gens concernés pour avoir un règlement qui aide plutôt qu'un règlement qui nuit. Un règlement qui convient aux besoins plutôt qu'un règlement qui est un emmerdement. Un règlement qui éclaire les relations humaines plutôt que les embrouiller. Un règlement qui est un habit fait sur mesure plutôt qu'un habit acheté tout fait qui ne fait pas. C'est pourquoi je suis convaincu que le député de Beauce-Sud aura comme principale critique de dire: Pourquoi ne l'avez-vous pas adopté avant? Je vais vous dire que toute chose faite trop vite est souvent mal faite et qu'il faut prendre le temps, quand on forme un organisme, pour trouver les bons hommes.

Aujourd'hui, quand je parle de la Régie des grains, je parle d'une équipe dont je suis fier. Un président qui est une personne affable, un homme de bon sens. Un vice-président qui est un économiste réputé dans le domaine des grains. Une équipe qui représente les différents aspects du secteur des grains, des cultivateurs qui achètent, des cultivateurs qui vendent du grain ou des gens qui ont oeuvré dans le domaine des meuneries, qui ont été les fondateurs, je pense à M. Blanchard, par exemple, qui est un fondateur de l'Association des meuneries, M. Leblanc, M. Dagenais, M. Harbec, M. Beaudet, président. Belle équipe. Et pour trouver une équipe comme celle-là, je suis convaincu... Vous savez, quand vous formez un organisme, ce qui est bien important, ce n'est pas, quand vous votez le projet de loi, de dire: Il va y avoir cinq membres au bureau de direction. Il faut trouver les cinq bonnes personnes qui vont former le bureau de direction. Les gens disent: On travaille pour cet organisme, on sait qui le dirige, on a confiance en ce monde. C'est cela qui est important. On a pris le temps pour le faire. Pour avoir un bon règlement qui convienne aux besoins, il faut prendre le temps pour le faire.

C'est pour cela qu'à l'avance je peux vous dire que le député de Beauce-Sud, sachant que la régie est bien acceptée au monde du Québec, que les gens connaissent la réglementation parce qu'ils ont travaillé à son élaboration, que les gens ont hâte de la voir, va me reprocher de ne pas l'avoir adoptée plus tôt. Si elle avait été adoptée trop tôt, les gens n'auraient pas eu hâte de l'avoir. Ils en auraient eu peur. Tandis que là ils la désirent parce qu'ils ont eu le temps de mieux la connaître.

En même temps, je veux montrer le progrès qui a été fait au cours des dernières années, rapidement, parce que j'ai indiqué que nous avons mis en place des instruments qui ont fait en sorte que les agriculteurs se sont sentis en confiance et ont pu utiliser ces instruments. J'avais l'occasion hier de dire que l'année où il y avait eu le moins d'assurés au Québec dans l'assurance-récolte - on va parler des assurances un peu - ils étaient 6278 à la fin du régime Bourassa, le régime libéral. Aujourd'hui, avec le Parti québécois, avec le gouvernement actuel, on est rendu à 15 222 assurés.

Dans l'assurance-récolte, c'est deux fois et demie de plus. Dans l'assurance-stabilisation, il y en avait 1547, on est rendu à 13 030, M. le Président. Dix fois plus. Des contrats d'assurance dans le temps des libéraux, le plus gros chiffre, en 1976, 8399 contrats d'assurance. Le gouvernement actuel, 28 252. Le monde s'assure parce qu'il y a un gouvernement rassurant. Je regarde les programmes et régimes d'assurance des cultures assurées, il y avait onze cultures assurées en 1976, à l'assurance-récolte, on est rendu à seize. Il y avait un régime d'assurance-stabilisation, on est rendu à dix régimes qui assurent 20 productions différentes. Dans les cultures assurées pour l'assurance-récolte - je ne parle pas des programmes, mais des cultures maintenant -c'est passé de quinze, dans le temps des libéraux, à savez-vous combien? À 58 cultures assurées; de 15 à 58, ce qui fait que nous sommes le leader au Canada. Je vais vous dire combien il y a de cultures assurées dans chacune des provinces. À Terre-Neuve, 3. C'est vrai qu'il y a plutôt de la roche à Terre-Neuve. On ne comptera pas cela. Au Nouveau-Brunswick, 7; Île-du-Prince-Édouard, 16; Saskatchewan, 16; Nouvelle-Écosse, 17; Manitoba, 19; Alberta, 21; Colombie britannique, 24; Ontario, 37, Québec, 58 cultures assurées. C'est un programme de développement que nous avons établi en association avec les producteurs, pas en serre chaude, avec les producteurs. Je regarde après cela l'assurance. En regard des primes versées, il y a eu 2 000 000 $ en primes versées en 1976; en 1983, 16 000 000 $ en primes versées, huit fois plus. Les gens n'ont pas peur de payer, parce qu'ils savent que l'assurance paiera elle aussi quand ce sera le temps.

Dans le temps des libéraux, on disait: On a une assurance. Je ne la paie jamais.

C'est comme la loto. Il n'y a pas beaucoup de gagnants, mais ils disent maintenant: C'est une assurance qui paie quand il y a des problèmes. Et quand vous regardez l'assurance-stabilisation, il y a 1 475 000 $ de primes payées en 1976. Quand vous regardez en 1982, il y a 42 519 000 $ de primes payées et sur les 42 519 000 $, il y a les deux tiers qui sont payés par le gouvernement; en 1983, 57 000 000 $ en primes payées. Les deux tiers par le gouvernement, soit 20 000 000 $ par les producteurs, 40 000 000 $ par le gouvernement. Quand on regarde le total des compensations, qu'est-ce que cela fait? J'aurais pu prendre la pire année des libéraux. En 1975, ils avaient payé des indemnités de compensation, les deux, l'assurance-récolte et l'assurance-stabilisation ensemble. En 1975, savez-vous combien les libéraux ont payé? 622 000 $, dans toute la province de Québec. En 1982, savez-vous combien a payé le gouvernement du Parti québécois? 67 234 000 $, 100 fois plus. Pourquoi? Parce qu'il y a un régime d'assurance qui pourvoit aux difficultés.

D'abord, l'agriculture s'est beaucoup développée. Il faut dire que cela compte aussi. La production s'est beaucoup développée, mais je peux vous dire qu'en 1976, c'était une période difficile. Je peux vous dire qu'il y avait une période difficile en 1976. Vous rappelez-vous cette période difficile où les quotas étaient coupés, où les gens abattaient leurs veaux au bout des "pay-loaders" dans le chemin. Vous rappelez-vous en 1976? Les gens ne se rappellent pas le temps des libéraux. Ils faisaient des manifestations au parlement d'Ottawa. 1976, c'était une des pires années, une mauvaise année. Combien ont-ils payé? Cela a été leur plus grosse année de paiement, de 1968 à 1976, la plus grosse année de paiement de tout le régime, la plus grosse année que les libéraux ont payé, une mauvaise année agricole. On aurait dit: Cette année-là, ils vont payer beaucoup. La plus grosse année, 5 839 000 $, en 1976, leur plus grosse année de paiement, alors que sous le gouvernement actuel, en 1982, la plus grosse année de paiement, 67 000 000 $. Ce n'est pas la même chose. C'est parce qu'il y a un gouvernement, contrairement à ce qu'ont dit les députés dans le passé, qui a encouragé les producteurs à développer certaines productions et avec eux, ensemble, on a travaillé pour développer ces productions. Les producteurs agricoles, les représentants dans leurs syndicats, dans leurs coopératives ou dans l'entreprise privée, avec le gouvernement, les députés du Parti québécois, les fonctionnaires du ministère, tous ensemble, nous avons travaillé pour développer des productions, mais en même temps, en donnant certaines garanties pour s'assurer dans les périodes difficiles que les gens puissent passer à travers. (12 h 10)

L'évolution des valeurs assurées. Savez-vous combien il y avait de valeurs assurées en 1976? Je vais additionner les deux ensemble, l'assurance-récolte et l'assurance-stabilisation. Savez-vous combien il y avait de valeurs assurées en 1976? 39 000 000 $, dans le temps du Parti libéral. Cela veut dire que les gens ne s'assuraient pas. C'est clair qu'on ne s'assure pas quand l'assurance n'est pas bonne. 39 000 000 $. Cette année, en 1983 - ce n'est pas encore fini, à part cela - savez-vous à combien nous sommes rendus, en valeur assurée? 1 074 000 000 $. C'est passé, en 1976, de 39 000 000 $ à 1 074 000 000 $, en 1983, et ce n'est pas fini.

On a dit tantôt qu'on reculait la date à cause de la mauvaise année. En 1940, il n'y avait même pas d'assurance; on avait connu 20 ans de régime Taschereau où il n'y avait même pas d'assurance. Alors, l'assurance-récolte a commencé avec l'Union Nationale, avec le ministre Clément Vincent, en 1968. Je me rappelle avoir écouté le programme à la télévision ce soir-là et l'avoir entendu expliquer ce que serait l'assurance-récolte. Le Parti libéral, pas assez préoccupé des problèmes des agriculteurs, n'aurait pas pensé à cela. C'est l'Union Nationale du temps qui a créé l'assurance-récolte, en 1968, mais c'est le gouvernement actuel qui a instauré le régime d'assurance collective. Avant, il y avait seulement l'assurance individuelle et les gens ne s'assuraient pas beaucoup. Cela coûtait trop cher à administrer. Je n'ai pas parlé de cela, dans le temps des libéraux, en 1976, pour 1 $ qui allait à l'assurance-récolte, savez-vous combien cela coûtait d'administration?

Une voix: 5 $.

M. Garon: 1 $. Quand le cultivateur payait 1 $ de prime - cela peut être 100 $ ou 200 $, mettons cela sur la base de 1 $ -quand il payait 1 $ de prime, 0,70 $ servaient à payer ceux qui administraient le régime, et seulement 0,30 $ allaient à l'assurance.

Une voix: C'était épouvantable.

M. Garon: Cela coûtait 0,70 $ de fonctionnement. Ce n'était pas efficace, c'est pour cela que ça ne payait pas. Le cultivateur payait 1 $, il y avait 0,70 $ pour payer les employés d'une administration inefficace et 0,30 $ pour l'assurance. Ils ne pouvaient pas retirer plus que 0,30 $ et ils avaient payé 1 $. Ils disaient: Cela ne paie pas. La différence, avec le gouvernement actuel, c'est que pour 1 $ payé par le cultivateur, on est rendu à moins de 0,10 $ d'administration; sept fois moins. Au lieu

d'avoir 0,70 $ de frais administratifs sur 1 $, c'est baissé à moins de 0,10 $; cela, c'est de l'administration.

Ceux qui parlent du sucre actuellement ravaleront leurs paroles parce qu'ils se rendront compte à quel point, encore là, le gouvernement a été clairvoyant, il a développé une raffinerie de sucre qui est l'une des plus moderne en Amérique du Nord; pas une vieille raffinerie. Si je parle un peu de la betterave à sucre, c'est parce que cela va avec les céréales. C'est la production qui alterne avec les céréales. Vous savez qu'un producteur de céréales, dans la région de Saint-Hilaire, qui alterne avec la betterave à sucre a un meilleur rendement dans ses céréales parce que la betterave à sucre a pour propriété d'avoir une racine d'environ six à sept pieds de longueur. Quand vous passez dans des champs de céréales avec de la machinerie, cela a pour effet de taper le sol un peu. Alors quand les gens sèment de la betterave, ils ont la betterave, qui est la récolte la plus payante pour un cultivateur, mais en plus il y a une racine qui va à six pieds de profondeur dans le sol. Quand ils ramassent la betterave, ils n'arrachent pas la racine, ils coupent la betterave, la racine pourrit dans le sol et aère le sol, rend le sol plus léger. C'est pour cela que la production de la betterave est importante dans le développement de la production céréalière parce que, en même temps qu'elle donne ce qu'il y a de plus élevé comme revenu à l'acre, elle contribue à améliorer les rendements de l'année suivante des céréales qui seront semées à l'endroit où il y avait de la betterave l'année précédente.

Tout se tient; c'est cela de la planification. C'est pour cela que nous avons commencé à ensemencer de plus en plus d'acres dans la région de Québec, puisque j'aimerais qu'on puisse développer éventuellement la production de la betterave à sucre dans la région de Québec. Les gens font de la céréale; imaginez cela, c'est dans le comté de Lotbinière. À part cela, je ne dis pas une raffinerie, parce que la capacité de raffinage, avec la raffinerie de Saint-Hilaire et Sucre Saint-Laurent à Montréal, c'est considérable. Mais en termes de sucrerie, ce serait possible de faire de la betterave et de rendre la production jusqu'à un certain niveau.

Je peux vous dire une chose: Si les libéraux disent qu'ils n'aiment pas le sucre et qu'ils sont contre ces projets, ce ne sera pas dans un comté qui ne veut pas d'un tel projet. Je le dis d'avance, comme les libéraux ne veulent pas, je ne vais pas implanter cela dans Portneuf pour me faire critiquer par le député. Je serais très fier de l'avoir dans mon comté parce qu'une belle sucrerie, ça va rapporter. Je vois le député de Bellechasse et le député de Lotbinière qui ne haïraient pas ça avoir une sucrerie dans leur comté, dans la région de Québec.

Actuellement, nous avons ensemencé plusieurs acres de betterave dans la région de Québec pour voir les rendements, et ça fait plusieurs années qu'on le fait. Vous seriez surpris de voir à quel point on a de bons rendements dans la région de Québec. J'entends le député de Beauce-Sud qui parle du sexisme, on va le guérir tantôt parce qu'on aura deux autres députés de sexe féminin dans cette Chambre. Dans le comté de Saguenay, Mme Isabelle, que j'ai eu l'occasion de rencontrer il n'y a pas longtemps à Sacré-Coeur. C'est une excellente candidate qui, jusqu'à maintenant, travaillait pour les personnes handicapées, donc, elle s'occupait des problèmes des gens. Elle sera une excellente députée dans Saguenay. Il y aura aussi Mme Jeannine Chéron, dans le comté de Saint-Jacques, qui sera une excellente députée.

Je continue. En termes d'unités assurées, en 1976, à l'époque des libéraux, savez-vous combien il y avait d'hectares assurés par l'assurance-récolte? Je vais vous le dire: 130 000 hectares. Avec le Parti québécois, le gouvernement actuel, en 1983, on est rendu, et ce n'est pas fini, à 1 075 000 hectares, presque dix fois plus. Ce n'est pas 5% par année; de 130 000, on est passé à 1 075 000 hectares assurés. Pour les animaux, l'assurance-stabilisation, c'est encore pire. Il y avait 44 000 animaux assurés à l'époque des libéraux en 1976. Savez-vous à combien on est rendu? 2 263 000, 50 fois plus. Ce ne sont pas des chiffres à peu près quand on dit que l'agriculture s'est développée au Québec sous le gouvernement actuel. Pourquoi? Parce qu'on a travaillé ensemble.

Encore hier, il y avait le caucus des députés du Parti québécois qui travaillaient ensemble sur le nouveau volet du plan triennal de développement des assurances. Ce n'est pas seulement dans ce domaine. Le drainage souterrain est nécessaire. Entre 1977 et 1982, au Québec, on a drainé 665 000 acres. C'est deux fois plus que ce qu'on a drainé sous tous les gouvernements bleus et rouges auparavant. Tout ce qui était drainé en 1976, c'est deux fois moins que ce qu'on a drainé entre 1977 et 1982; 665 000 acres drainées et, auparavant, 361 000. Au total, aujourd'hui, on a 1 000 000 d'acres drainées.

Les résultats commencent à se faire sentir. Quels sont-ils les résultats? En 1982, la première province au Canada pour les revenus, c'est le Québec. Depuis trois ou quatre ans, on dépasse l'Ontario en termes de revenus pour les agriculteurs en gardant les prix les plus bas pour les consommateurs. Cette année, on bat tout le monde. Premier au Canada. Avez-vous déjà vu ça dans l'agriculture, le Québec premier au Canada? En 1982, vous venez de le voir. Je ne dis

pas que ç'a été la meilleure année, mais cela a été pire ailleurs. Pourquoi? Parce qu'on a donné des instruments pour faire du développement chez nous.

Je vais passer par-dessus les cours d'eau et les travaux mécanisés; cette année, nous ferons une année record. Nous avons eu une belle année l'année dernière, au-dessus de 8 000 0000 $, mais cette année, en 1983, j'espère que la pluie va arrêter pour que les machines puissent commencer à travailler, mais on pense mettre en chantier 15 000 000 $ de cours d'eau. Ce sera trois fois plus qu'il y a trois ans. Pourquoi? Parce qu'on a adopté un plan triennal pour qu'au cours des trois prochaines années... On a employé un terme qui a fatigué le député de Beauce-Sud, on a dit: Le plan triennal va propulser le Québec encore plus loin sur la voie de l'autosuffisance en céréales. Nous voulons passer de 50% à 70% d'autosuffisance, non pas atteindre 70% en 1990, mais au cours de la saison 1985. Pour cela, on a mis en place un programme de relance économique et de développement de la production céréalière qui comporte treize volets qui se regroupent sous six têtes. (12 h 20)

L'amélioration de la qualité des sols contribue à améliorer les grains que classera la Régie des grains. Voyez-vous, tout cela se tient.

L'intensification du processus de mise en valeur des terres non cultivées ou abandonnées. On mettra les terres en valeur.

L'accroissement de la capacité d'entreposage des céréales sur les fermes au niveau régional.

L'amélioration de la qualité des fourrages.

La possibilité, pour les agriculteurs, de transformer eux-mêmes les céréales en moulée pour l'alimentation de leurs animaux.

L'intensification de la recherche, de la mise au point et de la promotion de nouvelles variétés de céréales mieux adaptées au climat des différentes régions du Québec.

Nous avons aujourd'hui 1 650 000 acres en production céréalière. Il y a eu une augmentation considérable au cours des dernières années et nous avons l'intention de continuer dans la même direction.

La production, qui était de 800 000 tonnes en 1976, était de 1 800 000 tonnes en 1981 et nous voulons atteindre 2 500 000 tonnes avec les récoltes de 1985. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire 1 700 000 tonnes, soit trois fois plus qu'en 1976. Ce ne sont pas de petites augmentations.

Nous avons mis en place un programme d'ensemble. J'aurais aimé que le temps soit plus clément. À ce moment-ci on a un climat exceptionnel que personne ne pouvait imaginer mais les instruments sont en place et vous remarquerez que ceux dont les terres sont drainées souffrent beaucoup moins du mauvais temps qu'on vit actuellement. Nous espérons accentuer le développement céréalier mais avec des politiques qui mettront en place les instruments qu'il faut.

Ce ne sont pas de petites politiques, M. le Président. Notre premier programme du plan triennal 1983-1986 emploiera 12 000 personnes-année. On calcule que cela paiera au cours des trois prochaines années, 1983, 1984 et 1985, 290 000 000 $ en salaires et qu'il y aura une valeur ajoutée, sur cinq ans, de 500 000 000 $. C'est cela le développement économique. Cela passe par des milliers de petites entreprises agricoles qui se développeront grâce à ce programme-là.

J'aimerais vous donner immédiatement un bref aperçu au cours des dix ou quinze minutes qui me restent...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le ministre, si vous voulez avoir le temps bien exact, il vous reste actuellement cinq minutes.

M. Garon: Je voudrais donner rapidement nos treize points. Les députés qui les connaissent pourront parler davantage sur chacun.

La mise en place de la capacité d'entreposage de céréales de 900 000 mètres additionnels d'ici 1985-1986 au coût de 35 000 000 $, qui inclura une contribution gouvernementale de 16 400 000 $, qui comprendra trois programmes: reprise du programme d'aide à la construction de silos à grain sur les fermes mixtes, c'est-à-dire celles qui ne font pas seulement des céréales mais d'autre chose en plus. Ce programme a été un des éléments clés du plan quinquennal de développement de la culture céréalière avec l'établissement, entre 1972 et 1982, de 9576 silos au coût de 35 400 000 $.

L'aide prévue pourra comporter 50% des investissements avec un maximum de 5000 $ par entreprise. On prévoit l'installation d'environ 2480 silos sur les fermes mixtes pour un investissement de 13 800 000 $ dont 6 200 000 $ seront assumés par le gouvernement du Québec.

Introduction d'un nouveau programme d'aide à la construction de silos à grain sur les fermes spécialisées. Les producteurs ont besoin d'une aide plus élevée que ceux pour qui la culture céréalière est une activité complémentaire. Ce nouveau programme permettra 50% des coûts d'achat et d'installation de silos à grain jusqu'à un maximum de 20 000 $ par entreprise. Il devrait permettre la mise en place, au cours des trois prochaines années, de quelque 4640 silos sur environ 400 fermes spécialisées. Les investissements requis seront de 19 300 000 $ dont 8 700 000 $ proviendront du gouvernement du Québec.

Troisièmement, l'aide à la construction de deux nouveaux centres régionaux de traitement et d'entreposage des céréales, comme je vous le disais tout à l'heure, dans l'Outaouais et dans les Cantons de l'Est, la mise en place, d'ici 1986, de silos à fourrage d'une capacité de 900 000 mètres cubes au coût de 45 000 000 $ avec une contribution gouvernementale de 11 300 000 $. Il s'agit de la reprise d'un des volets du plan quinquennal de 1977-1982, mais avec des ajustements qui permettront de porter à 10 000 $ la subvention maximale lorsqu'il s'agit du premier silo installé sur la ferme. Lorsqu'il y a déjà un ou plusieurs silos, la subvention ne pourra dépasser 5000 $. On prévoit l'installation de 1800 nouveaux silos à fourrage verticaux ou horizontaux pendant la durée du plan triennal, 1800 nouveaux silos fourragers. Ces équipements vont permettre aux cultivateurs d'améliorer sensiblement la qualité de leur fourrage, élément de base de l'alimentation des vaches laitières et des bovins de boucherie. Ils sont le gage d'une meilleure efficacité et, par le fait même, améliorent la position concurrentielle de nos éleveurs particulièrement dans les régions herbagères qui produisent peu de céréales. Je pense, principalement, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, par exemple, aux endroits plus périphériques comme l'Abitibi-Témiscamingue, la Gaspésie.

Reprise de l'aide à l'achat de séchoirs à foin. L'aide consentie atteindra 75% du coût d'achat d'un séchoir jusqu'à concurrence de 750 $ par ferme. On prévoit l'installation de 3750 séchoirs à foin d'ici 1986 au coût de 8 400 000 $ dont 2 800 000 $ proviendront de subventions du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Nous avons l'intention d'accentuer l'effort de mise en valeur des terres en friche dans le cadre des programmes Sol-Plus. Ces programmes sont à la base des progrès enregistrés au niveau des superficies, des rendements et demeurent nos principaux outils d'intervention dans le cadre du nouveau plan triennal. Le gouvernement du Québec injectera 7 025 000 $ de plus que les budgets initialement prévus dans ce volet qui se subdivise en trois points: 1) les sommes consacrées à l'amélioration des cours d'eau municipaux seront accrues de 4 400 000 $. Cela est payé à 100% par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et nous avons l'intention de réaliser des travaux pour 12 000 000 $ cette année. Pour cela, il va falloir signer des mises en chantier pour 15 000 000 $. Ceux qui n'auront pas le temps de terminer pourront le faire l'an prochain pour réaliser les 12 000 000 $ cette année. S'il y en a qui se font, on fera des virements pour en faire plus. 2) augmentation de 2 200 000 $ des sommes prévues dans le budget 1983-1984 pour les travaux mécanisés. L'enveloppe de base passe de 9 800 000 $ à 12 000 000 $ pour les travaux mécanisés qui vont générer des investissements de 34 000 0000 $ cette année.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, en terminant, s'il vous plaît!

M. Garon: J'achève, M. le Président. Quand on a pensé à faire une réglementation des débats de la Chambre, on n'a sûrement pas pensé qu'un jour il y aurait un ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui fonctionne; on aurait dû penser à permettre plus de temps dans les règlements pour qu'on puisse dire tout ce qu'on a à dire. Mais non, on a pensé, dans le temps, à restreindre les débats parce que les ministres n'avaient rien à dire; ils n'avaient pas de programme de développement. Je ne suis rendu qu'à la moitié de mon discours, mais je vais terminer par coeur.

En plus, pour accentuer le développement des productions, nous allons avoir 200 parcelles de démonstration dans dix régions du Québec. Pourquoi 200 parcelles? Pour, dans 200 fermes différentes, faire des tests sur différentes variétés adaptées à chacune de nos régions plutôt que de les faire seulement à un endroit. 200 parcelles de démonstration. La recherche va passer de 1 100 000 $ pour les céréales à 2 000 000 $ par année.

En plus, nous allons mettre en application la banque des terres et avec de l'argent. Pourquoi? Pour enlever des friches et remettre en production les terres qui ont été sous spéculation. Nous avons l'intention de procéder autant que possible village par village, nous voulons défricher, abattre toutes les fiches village par village. On dira, dans le comté de l'Assomption, par exemple, quel village on prendra. Mascouche? Plus de friches dans Mascouche. L'an dernier, une municipalité, à Saint-Basile-le-Grand, on a enlevé les friches. La municipalité elle-même a décidé d'enlever les friches. Plus de friches, avec les travaux qui vont se faire cette année et ceux de l'an dernier, dans cette municipalité. On pourra mettre en valeur des dizaines et même des centaines de milliers d'acres qui entreront en production pour le développement économique du Québec.

Cette banque des terres arables - je termine là-dessus, M. le Président - sera le clou parce qu'elle aura de l'argent. Elle aura un budget de 20 000 000 $ par année pour l'achat et la mise en valeur de terres propices à la culture céréalière. Si le roulement se fait vite, si elle en achète, les met en valeur rapidement et les revend, les 20 000 000 $ vont faire des petits parce qu'ils vont tourner plusieurs fois.

(12 h 30)

Une voix: La caisse nationale...

M. Garon: C'est la banque des terres arables, pas pour garder les terres, mais pour les développer, les revendre et les louer aux agriculteurs avec option d'achat.

M. le Président, le député aurait voulu que je parle de la caisse nationale; cela viendra. Je suis invité comme conférencier, samedi, justement, à un congrès d'institutions financières et coopératives, et j'aurai l'occasion d'expliquer davantage une caisse nationale dans laquelle, éventuellement, pourraient être impliqués les agriculteurs qui pourraient y déposer leur propre argent qui pourrait leur servir, au lieu de le placer dans des rentes viagères qui ne rapportent pas beaucoup d'argent.

M. le Président, je termine là-dessus, parce que je vois que vous vous dressez sur vos ergots et...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Garon: ...que vous êtes assis sur le bout du banc. Avant que vous ne m'arrêtiez de parler, je vais arrêter de moi-même et vous dire que je suis très fier de présenter ce projet de loi, en vue de son adoption: Loi modifiant la Loi sur les grains, pour permettre l'adoption du règlement. Encore là, ce sera une institution qui va aider au développement de l'agriculture au Québec. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vous remercie, M. le ministre, mais je n'ai pas voulu utiliser mes éperons pour vous arrêter, cependant.

M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Vous auriez sûrement eu à utiliser vos éperons, M. le Président, après tout ce qu'on vient d'entendre. Je pourrais intituler cela: L'art de déplacer beaucoup d'air pour ne rien dire. Je n'ai jamais vu déplacer autant d'air, faire autant de bruit. Cela me fait penser aux anciens "snowmobiles", les motoneiges, avec une hélice d'avion en arrière. M. le Président, je ne sais pas si vous êtes déjà embarqué là-dedans. Cela faisait peur aux chevaux quand ça passait. Cela faisait peur aux enfants. Cela faisait peur à tout le monde. Le ministre me fait penser à cela, M. le Président.

Nous sommes à étudier, en deuxième lecture, le projet de loi no 13. C'est vraiment un numéro prédestiné pour cette Régie des grains parce que, jusqu'à maintenant, c'est plutôt un chiffre de mauvais augure. C'est la Loi modifiant la Loi sur les grains.

Une voix: ...

Une voix: Taisez-vous! Vous ne connaissez pas cela.

M. Mathieu: M. le Président, il faudrait d'abord mentionner que cette Régie des grains fut créée en 1979. Le ministre a justement dit tantôt: Le député va nous reprocher de ne pas avoir adopté des règlements, etc. M. le Président, si c'était tellement urgent de créer la Régie des grains, j'ai ici les discours du ministre à l'occasion de l'adoption de la loi no 75, en 1979, lors de la création de la Régie des grains - je vous assure qu'il en a déplacé du vent, encore une fois, à cette occasion-là -pourquoi la régie n'est-elle pas encore opérante? C'est justement cela, le drame de la Régie des grains, le drame de l'agriculture. Il y a beaucoup d'air qui se déplace, beaucoup d'annonces, de conférences de presse et de discours. Je sens que toutes les cassettes sont préparées. On va entendre les petites tounes de tous les députés. Le ministre l'a annoncé. À chaque présentation de projet de loi à caractère agricole - il a fallu que le ministre se force les méninges pour le présenter - il veut que chacun prépare sa petite cassette, les députés des comtés ruraux. Il a dit: Cela me prendrait bien une loi. Il a présenté ce projet de loi sur lequel il n'a pas beaucoup parlé tout à l'heure. Je vais essayer de lui poser quelques questions, parce que c'est un projet de loi sur lequel nous voudrions avoir un peu plus d'explications.

Or, M. le Président, le ministre nous parlait tantôt de l'augmentation du drainage, de l'augmentation de l'autosuffisance, de l'augmentation des contrats de l'assurance-stabilisation, de l'assurance-récolte et de tout ce que vous voulez. J'ai ici un article du journal La Presse, du 28 octobre 1982: "Le Québec au même niveau que 1971. Baisse de 226 000 acres de terre en culture en cinq ans." C'est légèrement différent du discours que l'on vient d'entendre. À entendre le ministre, le Québec est en train de se propulser le premier du Canada, les agriculteurs du Québec ont les revenus les plus élevés au Canada. En commission parlementaire, la semaine dernière, j'ai demandé au ministre de nous dire sur quoi il appuyait cette étude, de nous faire la démonstration des revenus des agriculteurs s'ils sont si élevés que cela. Le ministre n'a fait aucune démonstration. Il a des chiffres qu'il possède à lui tout seul. Vous savez qu'avec des chiffres, on peut jongler. On peut faire dire à des chiffres tout ce que l'on veut. Il n'y a pas de problème. Le ministre est le seul à connaître ses sources et à les utiliser à sa manière évidemment.

Baisse de 226 000 acres de terre en culture en cinq ans; après le zonage agricole.

Comment se fait-il qu'on augmente l'autosuffisance en céréales et qu'il y ait une baisse des terres en culture? C'est parce qu'en agriculture, il y a un marasme. Cela ne va pas si bien que le ministre veut le laisser entendre. Il y a de nombreuses faillites. Il y a des fermes qui retournent à l'abandon. Qu'il suffise, pour vous convaincre, de prendre le journal La terre de chez nous. Prenez la dernière parution, je regardais cela ce matin. Deux pages complètes encore cette semaine de ventes à l'encan. Quand un agriculteur décide de vendre à l'encan, de fermer son entreprise agricole, de mettre fin à ses activités, est-ce que c'est parce que cela va tellement bien? Si cela va si bien, il va trouver à la vendre son entreprise. Si cela va si bien, il va sûrement la transférer à l'un ou l'autre de ses enfants. Lisez les revues agricoles, ce que vous voyez, des ventes à l'encan de fermes. Écoutez les postes de radio en région rurale, notez les annonces dans les hebdomadaires régionaux, dans chacune de nos régions, qu'est-ce que vous avez? Toutes les semaines, M. le Président, vente à l'encan; agriculteur qui ferme son entreprise. Je ne trouve pas que cela va aussi bien que le ministre veut bien le laisser entendre.

Je voudrais discuter aujourd'hui, à l'occasion de cette intervention, de quelques points sur les programmes d'assurance-stabilisation étant donné que c'est relié à l'étude du projet de loi. Également, quelques autres points. Je tâcherai d'être plus pertinent que le ministre l'a été. Je commence par cette Loi sur les grains qui nous est présentée, cette loi qui vient modifier la Loi sur les grains de 1979. Or, comme je le disais et à plusieurs reprises j'ai posé une question pertinente au ministre: Cette Régie des grains, qui était si urgente, qui était si impérative, qu'il était pressant de fonder, de créer de toutes pièces en 1979, comment se fait-il qu'elle ne soit pas encore en exploitation après quatre ans? Nous sommes rendus en 1983 et la Régie des grains n'est toujours pas en activité.

Si cela pressait tellement, comment se fait-il que cette régie ne soit pas encore en activité. J'ai relu, ce matin, le discours du ministre lors de la création de la régie. Le ministre nous disait à quel point il était important que la régie soit constituée. Il nous disait - d'après le journal des Débats du 19 décembre 1979, page 4733 - "Les acheteurs de céréales, soit les meuniers, les minoteries, les distilleries ou autres, sont habitués à recevoir un produit nettoyé, uniforme et de bonne qualité. Ils exigent les mêmes caractéristiques du produit québécois qu'ils sont habitués d'obtenir des grains qu'ils importent de l'Ouest. Pour atteindre ces standards, il faut que les céréales soient séchées et criblées en plus d'être regroupées en lots uniformes. Si vous les nettoyez, vous les criblez et vous les mélangez tous, ça ne fait pas la même catégorie de grain qui a la même valeur nutritive, la même valeur en protéines." (12 h 40)

Le ministre nous faisait l'apologie de l'urgence de créer cette régie. Il disait plus loin à la page 4735: "Le présent projet de loi prévoit la création d'une régie qui accordera des permis à un marchand de grain, un exploitant d'un centre régional ou un exploitant d'un centre de séchage qui veut utiliser, dans l'exercice de ses activités, une classification prescrite par règlement." Cette classification, on ne la connaît pas encore après quatre ans, M. le Président. Le règlement n'est pas encore adopté.

Le ministre disait tantôt: Le député de Beauce-Sud va me reprocher que le règlement n'est pas adopté. Justement! C'est là qu'on voit l'improvisation qui est à la source de toutes les orientations, les activités, les faits et gestes du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. C'est toujours de la petite politique de rapiéçage, de bouche-trou et d'improvisation, alors que les agriculteurs ont besoin, pour se développer, de politiques à long terme. On ne peut pas planifier une entreprise céréalière avec une politique de six mois ou d'un an. Cela prend des années et des années. Or, après quatre ans d'existence de la Régie des grains, nous sommes au même point où nous étions en 1979 et c'est bien cela le drame. Le drame de l'agriculture, c'est qu'on dirait que le ministre, lors de la création de la Régie des grains... Imaginez-vous, cela donne prétexte à de belles conférences de presse et à de beaux titres dans les journaux.

Justement, parlant de titres dans les journaux, journal Le Devoir, 10 novembre 1979: "La Régie des grains sera mise sur pied d'ici l'été prochain." En 1979, cela faisait des titres extraordinaires dans les journaux. Quand le ministre fait son déplacement d'air comme je le disais tantôt, quand le ministre excelle en conférences de presse en annonces de tous genres... Les gens ou les citadins qui ne sont pas reliés au monde agricole écoutent cela et se disent: On a un ministre de l'Agriculture extraordinaire. Avez-vous vu comme on a un bon ministre de l'Agriculture? Lui, il en fait des choses. Lui, il en règle, des affaires. Il fait une conférence de presse. Il peut en faire cinq ou six au cours de la même année sur le même sujet. Pas de différence. Cela me fait dire: Oui, on a le meilleur ministre de l'Agriculture que les gens de la ville aient jamais eu. Malheureusement, les gens de la campagne ne peuvent pas porter ce jugement, eux.

Ce qui nous étonne, à la lecture du projet de loi no 13, c'est de voir qu'il ne semble pas y avoir de normes. Il ne semble

pas y avoir de système ou de règle de classification de grain, mais comme je le disais tantôt, le règlement n'est pas encore adopté, semble-t-il. Or, quelle est la chose la plus importante lorsqu'on a une production? C'est de l'encadrer sur le plan technique et sur le plan de la recherche. Il faut commencer par mettre un encadrement pour savoir où l'on va avec cette production. Or, il n'y a pas de mécanisme obligatoire. Le ministre disait tantôt, si j'ai bien compris, qu'il y avait un classement par entente et que, même avec la loi no 13, on va encore faire un classement par entente, c'est-à-dire que le vendeur et l'acheteur vont examiner un échantillon du grain. Ils vont s'entendre et ils vont dire: C'est un grain de telle qualité. Mais qu'est-ce que cela a de scientifique, un classement semblable? C'est quelque chose d'artisanal. Si on veut vraiment faire une production céréalière, quelque chose d'exemplaire, de fort et de ferme, établissons des règles. Commençons par connaître les règles de classement. C'est le premier impératif dans toute production, sans quoi il y aura des victimes; c'est impossible de passer à côté de cela. Or, la production aurait besoin d'un classement obligatoire, pas un petit classement par entente qui n'a rien de scientifique et qui est basé sur à peu près rien. Le classement devrait être fait le plus près possible de l'utilisateur. Donc nous devrions avoir un classement de nature obligatoire, un classement régulier, précisément pour être en mesure de revendiquer des prix réguliers auprès des gens à qui les agriculteurs vendent leurs céréales. Si on a un produit no 1 à qualité égale, on pourra revendiquer un prix égal. Cela me semble quelque chose d'élémentaire, de fondamental.

D'après les renseignements que je possède, pourquoi les prix du maïs produit au Québec sont-ils inférieurs aux prix du maïs de l'Ontario ou aux prix du maïs sur le marché de Chicago? Parce que le maïs au Québec ou les céréales produites au Québec ne sont pas classés, ce qui occasionne un risque plus grand aux acheteurs et aux utilisateurs. Les experts que j'ai consultés me disaient ce matin qu'il pouvait y avoir de 0,09 $ à 0,10 $ le boisseau de différence entre le prix du maïs américain à Montréal et le prix payé pour les céréales du Québec. Un boisseau contient 56 livres; 0,10 $ de différence le boisseau à qualité égale. Mais je ne comprends pas que le ministre s'entête et ne voie pas clair au point de ne pas corriger cette situation en imposant un classement obligatoire. Or, tant que notre classement ne sera pas obligatoire, on aura affaire à une production artisanale, quelque chose qui n'est pas articulé, quelque chose qui n'est pas sérieux. Comment voulez-vous impressionner les acheteurs au Québec ou à l'extérieur si vous n'avez même pas de normes de classification?

De plus, si la loi de 1979 avait atteint son but, on ne serait pas ici aujourd'hui. Notre grain serait classé. On n'aurait pas besoin de ce rapiéçage ici aujourd'hui.

Le ministre nous dit à l'article 23: "En cas de différend - c'est-à-dire, j'imagine, que le vendeur de céréales et l'acheteur ne s'entendent pas sur la classe relative au classement du grain - la régie ou une personne qu'elle autorise peut, à la demande d'une personne intéressée et contre paiement des frais établis par règlement, procéder au classement du grain et délivrer un certificat de classement conformément aux normes et modalités prescrites par règlement." Le fameux règlement, quand l'aurons-nous? Le ministre pourrait-il s'engager à nous dire quand le règlement sera déposé, quand il sera en vigueur? Il y a toujours un bout, de s'en aller ainsi dans l'improvisation avec des mesures si importantes, avec des programmes d'autosuffisance de 50 000 000 $ à même les deniers publics. Il faut savoir où on s'en va avec cela.

Donc, on dit bien: contre paiement des frais établis par règlement. Qui va payer? Le gouvernement trouve une autre manière de faire assumer les coûts par d'autres sans que ça ne paraisse. C'est toujours la même romance, la même rengaine. Évidemment, c'est une loi que nous ne pouvions répudier parce que, si le ministre est sérieux, j'imagine qu'il n'a pas assez de pouvoirs pour aller chercher les sommes nécessaires auprès du ministre des Finances. Il a créé sa Régie des grains, il n'a pas mesuré les tenants et aboutissants, il n'a pas apprécié tout ce dont il avait besoin. Maintenant, il s'aperçoit que ça va amener des déboursés pour le classement de son grain. Le ministre s'arrange pour refiler cela, sans que ça paraisse, sur le dos de tierces personnes. C'est toujours cette même improvisation. On lance des programmes de 50 000 000 $ ou 60 000 000 $ dans la pure improvisation. (12 h 50)

Tout à l'heure, le ministre nous parlait des silos régionaux. Les fameux silos régionaux qui ont été bâtis, d'abord, il faudrait que le ministre nous dise qui les a payés. Le ministre n'a pas parlé souvent des 32 000 000 $ provenant du gouvernement fédéral dont le ministre s'est servi pour cette politique céréalière, pour les silos régionaux, pour les silos à la ferme, pour augmenter le drainage agricole, pour les travaux mécanisés, pour l'égouttement, le creusage des cours d'eau.

Le ministre admettra-t-il un jour que les fonds pour tous ces programmes provenaient du gouvernement fédéral, un montant de 32 000 000 $? Il s'agissait d'une compensation du gouvernement fédéral versée en dédommagement à la suite de la discontinuation de l'aide au transport. Le

ministre, à même ces fonds qui provenaient d'Ottawa, qui avaient été négociés par son prédécesseur... C'est le prédécesseur qui avait négocié, je ne dis pas qu'il a signé, il y a eu un changement de gouvernement entre les deux. Est-ce que le ministre aurait été capable de négocier avec Ottawa pour s'entendre, pour aller chercher les 32 000 000 $? De la manière qu'on le voit agir, c'est une provocation constante contre le fédéral. Est-ce qu'il aurait pu négocier avec Ottawa?

Son prédécesseur avait négocié, le ministre est entré en fonction et les 32 000 000 $ étaient disponibles, ils venaient d'Ottawa. Quand le ministre remettait ses chèques et qu'il inaugurait ses silos régionaux, on n'a pas vu la feuille d'érable du drapeau du Canada souvent là-dessus. On a vu la fleur de lis assez souvent, par contre. Je n'ai rien contre la fleur de lis, je n'y suis pas allergique du tout, j'aime la fleur de lis, et j'aime la feuille d'érable aussi. Une feuille d'érable, c'est un produit de chez nous, ça nous dit quelque chose; surtout si on vient du pays de l'érable, on ne peut pas renier les feuilles d'érable que nous connaissons si bien.

C'est cela que je voudrais bien éclaircir. Que le ministre nous parle donc de cela dans sa réplique. Il a un droit de réplique. Qu'il nous parle donc du montant de 32 000 000 $ qu'il a eu du fédéral. Qu'est-ce qu'il a fait avec cet argent? Le fédéral a eu la largeur d'esprit de dire au ministre de l'Agriculture: On vous laisse administrer à votre guise ces 32 000 000 $. C'est l'entente qui avait été conclue.

Quand le ministre de l'Agriculture dit que les silos régionaux poussent partout, c'est beau, mais ce n'est pas seulement lui qui en a le mérite. Je ne veux pas enlever le mérite du ministre de l'Agriculture mais, par exemple, je veux donner le mérite à qui de droit également. Ce matin, le ministre a été plus prudent, il ne donnait pas de dates. D'habitude il disait: de 1908 à 1976, il y a eu moins de drainage que de 1976 à 1982. Je comprends, s'il commençait en 1860, il y en aurait encore eu bien moins parce que ce n'était pas dans les moeurs de l'époque, tout simplement.

Quand le ministre nous dit que du drainage s'est fait sous son administration, je comprends. Même si cela avait été un gouvernement libéral, les 32 000 000 $ auraient été là, ils avaient été prévus et négociés pour cela, pour faire du développement en agriculture. Le ministre n'a pas à se tirer en l'air pour cela.

Cela me fait penser aux premiers temps qu'il était ministre. J'ai trouvé cette citation d'un discours du 25 avril 1977: M. Jean Garon, discours prononcé devant la Corporation des agronomes du Québec à l'Université Laval. Le ministre disait: "Je reconnais et j'en rends hommage à mes prédécesseurs immédiats, que l'on a enregistré des progrès au cours des quelques dernières années. L'adoption d'un programme de développement agroalimentaire intégré a tracé la voie et préparé le terrain pour une action massive dans ce secteur."

Je pense que c'est la citation à peut près la plus éloquente du ministre quand il cesse de jouer sur les mots et qu'il veut dire tout tel que c'est. Au cours d'une allocution à la faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université Laval, le ministre reconnaît bien que tout n'est pas né avec lui. Avant qu'il arrive au ministère, quelqu'un s'était préoccupé d'adopter des programmes de développement de l'agroalimentaire intégré, comme il le dit si bien. Ces programmes ont tracé la voie et préparé le terrain. Je disais l'autre jour que les libéraux avaient planté le pommier et que les pommes étaient poussées quand le ministre est arrivé. Faut-il s'étonner que l'agriculture ait connu un essor? Il faudrait s'étonner que l'essor ait été si fulgurant et si immédiat que le ministre l'a dit, par exemple. Si on compare 1976, 1977 et 1978, cela n'a pas progressé d'une manière verticale fulgurante, il a fallu que ce soit préparé quelque part. Qui a préparé les infrastructures nécessaires? C'est un gouvernement, dans les années soixante-quatorze et soixante-quinze, qui a cru à l'agriculture, un gouvernement qui a investi dans l'agriculture. La part de l'agriculture sous ce gouvernement, en 1974-1975, était de 2,5% du budget total du Québec alors qu'aujourd'hui la part de l'agriculture dans le budget total du Québec est de 1,7% seulement. C'est une baisse considérable du budget de l'agriculture par rapport au budget global du Québec.

Il y a des gens, dans les années soixante-dix, soixante-quatorze, soixante-quinze, qui se sont préoccupés de l'agriculture. Je voudrais leur rendre hommage. Le premier ministre s'appelait M. Bourassa; le ministre des Finances s'appelait M. Garneau; le ministre de l'Agriculture s'appelait M. Toupin. Il y a des gens qui ont cru à l'agriculture, qui ont investi dans l'agriculture à ce moment-là. Le ministre reconnaissait, le 25 avril 1977, quand il est arrivé, que le programme était tracé pour une action massive dans ce secteur. Je comprends, le plan était fait, les infrastructures étaient installées. Imaginez-vous, avant d'arriver dans un champ pour drainer, ça prend des infrastructure, ça prend des lois, ça prend de la mécanisation, ça prend des programmes, ça ne peut pas s'improviser du jour au lendemain, ces choses-là.

Quand le ministre est arrivé, les infrastructures étaient prêtes et l'argent était disponible, les 32 000 000 $ venant

d'Ottawa. Quand le ministre a-t-il contredit cela? Jamais. Il ne l'a jamais reconnu non plus, mais je lui demande de le reconnaître, là. Je lui demande de reconnaître les 32 000 000 $ venant d'Ottawa. Je défie n'importe qui de se lever de son siège pour me contredire. Avec l'argent du fédéral, on en fait des choses.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse mais, comme vous avez provoqué, il y a quelqu'un qui demande à intervenir, le député d'Arthabaska.

M. Baril (Arthabaska): C'est évident, M. le Président, je ne peux me priver d'entrer par une si grande porte quand le député de Beauce-Sud demande qu'on le contredise quand il dit que le ministre n'a jamais avoué que les 32 000 000 $ venaient d'Ottawa. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a dit, à maintes reprises, qu'il avait négocié ce que son prédécesseur, M. Toupin, n'avait pas réussi à faire. Il a même dit et convenu avec le ministre fédéral de l'Agriculture, M. Whelan, que le chèque serait fait au nom des deux et qu'il y aurait un drapeau du Canada sur le fameux chèque, relativement aux silos à la ferme. Tout à l'heure, en plus, le député de Beauce-Sud a dit que c'était de l'argent qui venait pour tous les silos régionaux. Je regrette, mais je suis certain qu'il n'a pas fait exprès parce que je sais son honnêteté. Les silos régionaux ont été payés entièrement par le gouvernement du Québec. Ce sont seulement les silos à la ferme. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation l'a toujours dit et répété à qui voulait l'entendre, c'est 32 000 000 $ qu'il est allé chercher à Ottawa, ce que les libéraux n'avaient pas pu négocier depuis 1974.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Compte tenu de l'heure, je voudrais simplement vous dire que le ministre de l'Agriculture, à l'époque, c'était Kevin Drummond, qui avait remplacé M. Toupin, pour les fins du journal des Débats.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vais suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise de la séance à 15 h 03)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît! Vous pouvez vous asseoir. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: Merci, M. le Président. Avant de vous demander de rappeler l'article 8 de notre feuilleton, je voudrais faire motion pour que la commission des finances et des comptes publics ainsi que la commission des affaires municipales puissent siéger à compter de 15 h 30.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Boucher: M. le Président, je vous demanderais de rappeler l'article 8 de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article 8, la deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les grains, et la parole, pour la demi-heure qui vient, était au député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Lorsque nous avons ajourné pour le lunch, nous étions à parler de cette loi. Je voudrais d'abord vous souligner, connaissant votre sens de l'hospitalité, que j'ai une magnifique délégation du Cercle des fermières de Saint-Prosper, dans le comté de Beauce-Sud. Il me fait plaisir de les recevoir. Elles ont bien choisi leur moment. Je vois des jaloux, de l'autre côté. Je m'excuse auprès d'eux.

J'étais en train de discuter, avant l'ajournement pour le lunch, du montant de 32 000 000 $ que le gouvernement du Québec, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation avait récupéré du gouvernement fédéral. C'est avec ce montant qu'il a fait ses programmes d'autosuffisance en céréales, de drainage souterrain, de silos à la ferme, de silos régionaux, tout ce que vous voudrez.

Pour montrer cette nouvelle collaboration plutôt surprenante du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation avec le gouvernement fédéral, je citerai le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Le 14 février 1978, en conférence de presse -cela ne vous étonne pas qu'il en fasse de temps en temps - il disait ceci, parlant du gouvernement fédéral: "Quand il met de l'argent là-dedans - dans l'agriculture - je suis bien content et j'aimerais cela qu'il en mette plus facilement. La Confédération lui donne pleinement juridiction de mettre de l'argent là-dedans. Ils ont le droit d'en mettre à mort. Tant qu'ils vont vouloir en mettre, on est prêt à signer pour dire qu'on accepte qu'ils en mettent. Je vais vous dire que je ne refuserai jamais de signer pour qu'ils mettent de l'argent dans la province de Québec."

M. le Président, ce n'est pas de valeur de réaliser l'autosuffisance alimentaire avec des fonds qui viennent du gouvernement fédéral, mais encore faut-il être assez honnête pour le reconnaître.

Ce matin, j'écoutais le ministre, encore dans ses sparages. Le ministre nous disait que son programme d'autosuffisance alimentaire était pour créer 12 000 emplois. Savez-vous que c'est un programme magnifique? C'est un programme qui augmente à mesure que les semaines passent. Le premier ministre a été le premier à annoncer ce projet dans le discours inaugural, le 23 mars 1983, il y a environ deux mois ou un peu plus. Il disait: Il s'agira d'investissements de 60 000 000 $, amenant la création de 2000 emplois. Le 23 mars, le premier ministre nous annonçait 2000 emplois. Aujourd'hui, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation annonce, à sa manière et selon son habitude, que ce n'est plus 2000 emplois. C'est bien trop modeste, 2000 emplois, pour le ministre. Cela lui prend une annonce à sa mesure. Il nous annonce que l'impact de ces vastes programmes sur l'emploi est évalué à 12 000 années-hommes. Cela passe de 2000, avec le premier ministre, à 12 000 avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il y a une sourdine. Oui, il y a une inflation, surtout verbale.

Le ministre dit: Soit 4000 emplois par année. Ce matin, quand il a annoncé cela, on aurait bien dit - les gens qui n'ont pas le temps de faire trop de déductions et d'analyses littéraires - on avait bien l'impression que c'étaient 12 000 emplois par année. En le décortiquant, on voit qu'il s'agit de 4000 emplois par année qui ne sont pas créés à cause des fonds investis par le ministre, parce que le ministre investit environ un tiers des fonds. Cela veut dire que, de ces 4000 emplois, il en reste peut-être 1200 créés à même les investissements du ministère. Donc, on part de 12 000 et on tombe à 1200. C'est le genre d'inflation verbale à laquelle nous a habitués ce gouvernement.

Quant à nous, il est sûr que nous sommes favorables à l'augmentation de l'autosuffisance en matière de production céréalière. Je pense qu'il ne faudrait pas douter de cela. Nous y sommes favorables pour autant que nous pouvons assumer que nous pouvons le réaliser économiquement. Si nous avons un programme d'autosuffisance qui fait que les céréales nous coûtent beaucoup plus cher que ce que nous pouvons acheter sur le libre marché de Chicago ou d'ailleurs, qu'est-ce qu'on fera? Est-ce que nos éleveurs seraient prêts à donner 7 $, 8 $ ou 10 $ la tonne de plus pour avoir un grain québécois? Il faut un grain québécois qui soit compétitif. Il faut également tenir compte des contingences climatiques.

Ce matin, le ministre a annoncé que la date limite pour les ensemencements du 1er juin était reportée au 10 juin, comme nous lui en avions fait la demande hier. Eh bien, cela nous prouve que nous avons ici au Québec des contingences climatiques. Ce n'est pas notre faute si notre climat et notre terre sont moins favorables que le climat et la terre dans les plaines fertiles de l'Ouest. Cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas rechercher l'autosuffisance et l'augmentation de la production céréalière. Mais il faut le faire dans un climat de réalisme.

Ce matin, le 1er juin, le ministre était content de nous dire qu'il retardait de dix jours. Cette annonce aurait bien dû venir avant ce matin. Depuis longtemps les agriculteurs savent que le date limite est le 1er juin; mais il y en a qui n'ont pas acheté ce qu'il fallait pour ensemencer. Ils n'ont pas acheté les engrais chimiques ni rien d'autre quand ils ont vu que la date limite était le 1er juin, qu'on était rendu au 20-25 mai et que la situation climatique était telle que celle que nous connaissons cette année. Or, il y a des gens qui se sont découragés. Je voudrais demander au ministre pourquoi il n'a pas songé à annoncer cela au moins quinze jours avant. Et qu'est-ce qui se passera en ce qui concerne les agriculteurs qui n'ensemenceront pas cette année? Est-ce qu'il y aura quelques compensations? Est-ce que le ministère pourra les aider, trouver une solution qui soit complémentaire? Selon nos indications, cela concerne plusieurs agriculteurs.

En ce qui concerne ce programme d'autosuffisance alimentaire, d'abord, je vous disais qu'il s'agit de la poursuite d'un programme qui a été élaboré avec les fonds fédéraux. Le ministre joue un peu à la magie parce que si on prend les crédits de 1983-1984, au programme 3, Aide à la production agricole, j'ai demandé au ministre en commission parlementaire, de nous faire le profil, l'étalement de ce budget pour les trois prochaines années, puisqu'il disait que les 50 000 000 $ étaient étalés sur trois ans. Je lui ai dit: Je veux connaître, en 1983-1984, la part qui va à ce budget et celles qui sont prévues en 1984-1985 et en 1985-1986. Le ministre m'a dit: Pour l'année en cours, 1983-1984, il y a 9 000 000 $ de prévus au budget. Un tiers de 50 000 000 $, je pensais que ça faisait à peu près 16 500 000 $. Je comprends que le ministre dit que cette année, le programme ne sera pas rodé, qu'on investira plus l'année prochaine. Or, si le ministre prévoit 9 000 000 $ cette année, on s'attend que les crédits de l'année en cours soient plus élevés que ceux de l'année dernière.

L'année dernière, au programme 3, Aide à la production agricole, on retrouvait

133 500 000 $. L'année dernière, on avait 133 500 000 $. Si on ajoute 9 000 000 $ cette année, on aura 144 000 000 $. Qu'en est-il cette année? On retrouve 128 000 000 $, une diminution de 5 500 000 $. Où est le programme que le ministre a annoncé? Je me demande s'il a annoncé quelque chose ou s'il n'a rien annoncé. Cela veut dire que si le ministre n'avait rien annoncé, au lieu d'avoir 5 500 000 $ de moins que l'année passée, on aurait 15 000 000 $ de moins que l'année passée.

Là-dessus, en commission parlementaire, le ministre me disait que ce sont des dépenses récurrentes, etc. C'est comme si, ce soir, j'arrive chez moi et je dis à mon épouse: J'ai gagné 3000 $ aujourd'hui. Comment cela? Je ne suis pas allé en Europe. C'est jouer avec des chiffres et pendant que la démonstration dure, les chiffres impressionnent, mais une fois que la démonstration est complétée, on s'aperçoit qu'il n'y a rien, que le ministre n'a rien annoncé. Il nous disait que ces 9 000 000 $ étaient des dépenses récurrentes, etc., il se morfondait en explications de toutes sortes.

Pour nous, ce qui doit primer avant toute chose, c'est bien d'augmenter la production céréalière et toutes les autres productions: de sucre d'érable, de boeuf, etc. On n'a rien contre, M. le Président, mais l'autosuffisance en soi est un mythe. On peut être autosuffisant en bananes, en cultivant des bananes dans des serres chaudes, mais combien cela coûtera-t-il? Il faut être réaliste un jour. Si on s'aperçoit que ce n'est pas rentable économiquement, je pense que cela coûte moins cher de faire venir des bananes des Antilles que de les produire ici au Québec.

Nous voulons que les agriculteurs aient un prix juste et raisonnable pour leur production. Que disaient les agriculteurs, il y a huit ou dix ans? Ils disaient au ministère de l'Agriculture: Gardez donc vos petites subventions et assurez-nous donc des prix convenables. C'est là que le gouvernement libéral a créé le régime d'assurance-stabilisation.

Ce matin, le ministre faisait dire aux statistiques que, depuis qu'il est là, l'assurance-stabilisation s'est multipliée par 10 ou par 100, je ne sais trop. Écoutez! si vous prenez la première ou la deuxième année du régime d'assurance-stabilisation, c'est bien sûr qu'il ne pouvait pas couvrir 25, 30 ou 40 productions. C'était un programme à ses premiers balbutiements. Je pense que c'est injuste de comparer un programme à ses débuts et un programme dix ans après le lancement. Mais pour nous, le Parti libéral du Québec, quand ce gouvernement a créé l'assurance-stabilisation, le but était d'assurer des revenus décents et raisonnables aux agriculteurs.

Qu'a fait le ministre avec son programme d'autosuffisance alimentaire? Il est en train de détourner le but du programme d'assurance-stabilisation et d'en faire un instrument pour promouvoir l'autosuffisance. Or, on ne peut pas détourner impunément un programme de ses fins comme le fait le ministre de l'Agriculture actuellement parce que la prime de l'assurance-stabilisation est payée entièrement par l'agriculteur. Si le fonds d'assurance-stabilisation devient trop déficitaire et qu'il faille augmenter la prime, il y a toujours le tiers payable par l'agriculteur qui augmentera, ce qui risque d'être très cher.

Ce matin, je vous ai parlé un peu des prix des céréales. Il faut être réaliste. Je vous ferai une projection des prix à venir des céréales et je parlerai aussi des prix de l'an passé pour voir l'orientation que va prendre la production céréalière, si les prix sont appelés à augmenter ou à diminuer au cours des prochains mois.

L'année dernière, à ce temps-ci, le 31 mai 1982, on pouvait acheter à 2,75 $ l'option des céréales. 2,75 $ le 1er juillet 1982; cette année, 3,04 $. L'année dernière, l'option de septembre sur le marché de Chicago, livré à Montréal, 2,76 $; cette année, 2,92 $. L'année dernière, option de décembre, 2,8125 $; cette année, option de décembre, 2,8175 $. L'année dernière, option mars, 2,9425 $; cette année, option mars 1984, 2,8950 $. Le prix de l'année dernière augmentait alors que le prix de 1983-1984 a tendance à diminuer. C'est une tendance qui nous indique que le maïs devrait être moins cher l'été prochain. Si la tendance du prix international, la tendance des marchés mondiaux décroît, les producteurs vont produire à perte. Cela veut dire qu'ils seront compensés par l'assurance-stabilisation. Cela va faire un temps, mais n'oublions pas, comme je le disais tantôt, que l'agriculteur fournit à l'assurance-stabilisation. Si on en vient à augmenter la prime de manière que le travail de l'agriculteur, malgré qu'il obtienne l'assurance-stabilisation, ne soit plus rentable, c'est toute notre production céréalière qui subira le coup. (15 h 20)

Je voyais des titres de journaux: Que cesse la méfiance du ministère de l'Agriculture! Les meuniers. Le Soleil, 15 novembre 1982. Les meuniers disaient ceci: D'accord pour le virage technologique, mais il faudrait peut-être qu'en même temps il y ait un virage philosophique au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et que l'on réfléchisse sur des orientations déjà prises et sur des lacunes qu'il faut corriger.

D'abord, l'on parlait de la recherche. Pour garantir le succès de cette initiative, disait-on, il faudrait consacrer davantage de

fonds dans la recherche de variétés mieux adaptées aux conditions climatiques des régions du Québec. Le ministre nous parle de ses nombreux projets de recherche, M. le Président. J'ai déjà eu l'occasion de démontrer ici qu'environ 40 projets de recherche, tous ensemble, coûtaient moins de 1000 $ au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il ne faut pas non plus essayer d'impressionner la galerie, mais plutôt avoir une recherche qui soit sérieuse.

M. le Président, sur la qualité, les meuniers s'inquiètent de l'uniformité de la qualité des grains utilisés au Québec dans l'alimentation animale. Une Régie des grains a été créée, mais les meuniers se demandent ce qu'elle attend pour mettre en place des règlements et des critères de qualité. Contrairement à ce qu'affirment mes collègues, ce n'est pas cela du tout qu'on est en train de faire. On est en train de faire...

Une voix: ...

M. Mathieu: Voyons donc! Vous n'avez rien compris au projet de loi. On est en train de faire... Ce matin, qu'est-ce que le ministre a...

Une voix: ...

M. Mathieu: Je vais vous le dire. Le ministre disait, ce matin: Un petit classement par entente. Il a dit: Le vendeur et l'acheteur, ils s'entendent sur la qualité et, s'ils ne s'entendent pas, le projet de loi no 13 qu'on est en train d'adopter intervient. La régie va faire un examen aux frais des contribuables et non pas aux frais de la régie. Mais est-ce que c'est cela que vous appelez un classement? Mais ce n'est pas sérieux. Ce que je trouve le moins sérieux de tout, c'est de vouloir créer l'autosuffisance, la commander, produire des céréales, mais sans avoir l'encadrement nécessaire. D'abord, on n'a pas de normes de qualité et pas de normes de classement pour les céréales. On n'a aucun critère. On est en train de dire: Un petit classement va se faire à l'amiable entre les parties et, à défaut d'entente... Je vais lire l'article 23: "En cas de différend - cela veut dire si on ne s'entend pas - relatif au classement du grain, la régie ou une personne qu'elle autorise peut, à la demande d'une personne intéressée - c'est malaisé à comprendre - et contre paiement - cela, le PQ ne l'oublie pas, contre paiement; vous n'oubliez pas de faire payer les gens; vous oubliez bien des choses, mais vous n'oubliez pas cela - des frais établis par règlement, procéder au classement du grain et délivrer un certificat."

Je vous le disais ce matin, ce n'est pas suffisant. Si vous êtes sérieux, appliquez donc un classement obligatoire à tous les grains qui sortiront. À qualité égale, notre producteur de grain aura un prix égal, que le grain vienne de l'Ontario ou des Etats-Unis, qu'il vienne de n'importe où, alors qu'aujourd'hui, je vous le disais ce matin, il y a une différence de 0,10 $ le boisseau. Un boisseau, c'est 56 livres. 0,10 $ de moins pour le grain produit au Québec par rapport au grain américain ou au grain de l'Ontario rendu à Montréal. Pourquoi 0,10 $ de moins? C'est simple, c'est parce que, comme notre grain n'est pas classé, on n'a pas de critères, on n'a pas de classement; il y a plus de risques pour l'acheteur et ce sont nos agriculteurs qui paient.

Si vous vouiez faire autre chose que de brasser du vent... Je sais que toutes les cassettes sont prêtes, de l'autre côté, pour un petit boniment aux agriculteurs; c'est toujours la même cassette, M. le Président. Je m'excuse de dire cela, mais c'est toujours la même cassette. C'est un petit vidéodisque, peu importe le sujet pourvu que c'est en agriculture.

Ce matin, le ministre était rendu dans vous savez quoi, M. le Président, vous l'avez même rappelé à l'ordre. Il était rendu dans les élections partielles du Saguenay. Je pense que dans le Saguenay, dans Charlesbourg et dans Saint-Jacques on a d'aussi beaux candidats que vous. Aussi bons! Vous allez voir, le soir de l'élection. Le ministre nous disait: Les libéraux, eux, ne s'occupaient que de produire; nous, on s'occupe des marchés. Il faut faire attention parce que, quand ils disent quelque chose, il faut toujours interpréter le contraire. Quand ils disent qu'ils améliorent considérablement, tenez-vous bien, parce que c'est une amélioration négative, c'est une dégradation.

Le ministre disait: Nous autres, on va s'occuper des marchés. C'est justement ce qu'il n'a pas fait. Dans la production de sirop d'érable, par exemple, cela lui prenait du sirop. En 1979, à l'élection partielle, il fallait entailler 600 000 érables dans le canton de Dorset. On disait: Vous n'avez pas peur qu'il y ait des surplus. Il n'y a rien là.

Il y a l'Allemagne, le Japon et tout ce que vous voudrez. Il y a tellement de quoi là que nous avons trois productions non payées, 1981, 1982, 1983. C'est comme cela quand on lance des productions sans trouver de marché au préalable. C'est justement ce que je prétends que le gouvernement est en train de faire avec sa politique céréalière qui, en esprit, est bonne, mais il ne faut pas arriver à l'improviste, il ne faut pas improviser là-dedans. Il faut préparer de longue main les marchés.

J'ai un article du Soleil ici, en date du 30 mars 1977: La proposition du PQ: investir dans la production agricole plutôt que de combler les pertes de revenus. C'est indicatif de votre politique. En 1974-1975, les

agriculteurs disaient: Investissez pour combler nos pertes de revenus. Donnez-nous une assurance-stabilisation. Arrêtez vos petites subventions. Donnez-nous des prix qui soient raisonnables pour nos produits. Le gouvernement est en train de faire le contraire. Je disais tantôt: Il détourne l'assurance-stabilisation de ses fins. Il en fait un instrument pour promouvoir l'auto-suffisance, mais à quel prix? Est-ce que cela va être au prix de la faillite de la moitié de ses producteurs? Si on prend les journaux, les revues agricoles, on voit la difficulté considérable qu'ont ces producteurs. Je reviens à mon article du Soleil, M. le Président. On dit là-dessus, sous la signature de M. Marc Lestage: "Le ministère de l'Agriculture espère assurer la relance de l'agriculture en investissant dans la production pour tirer un meilleur parti de chaque ferme plutôt que de garantir le remboursement des pertes auxquelles les producteurs s'exposent." On dirait que cela ne vous intéresse pas de garantir le remboursement des pertes. Il faut produire. N'oublions pas; le 30 mars 1977, on préparait le référendum. Il fallait un paquet de gens. Il fallait mettre de l'argent dans l'économie. Le référendum devait venir à tous les six mois. On dirait que cela ne vous intéresse pas de garantir le remboursement des pertes, et nous, c'est le contraire. On pense qu'avant de produire, il faut avoir des marchés et des prix garantis. Tantôt, je vous faisais la démonstration que, sur le plan international, les prix avaient tendance à baisser. Ce n'est pas parce que vous vous appelez le PQ que vous allez pouvoir agir contre cela. C'est bien malheureux, mais cela dépasse vos pouvoirs. Vous êtes en train de jouer avec l'assurance-stabilisation pour anéantir son rôle.

Je cite M. Lestage: "Ces améliorations doivent permettre de rendre chaque ferme québécoise plus efficace, donc, plus rentable. Dès lors, le ministère de l'Agriculture peut se permettre de réduire les crédits qu'il consacre à la stabilisation." Or, les crédits de la stabilisation sont-ils diminués? Je prends ici les renseignements supplémentaires concernant le budget, en date du 29 mars 1983, page 37, au programme d'assurance agricole. Je cite: "Il y a une croissance de 9 000 000 $ à ce poste. La croissance des crédits à ce programme s'explique presque exclusivement par l'augmentation des contributions au régime d'assurance-stabilisation. Le fait que les prix obtenus par certains producteurs - céréales, boeuf, agneau - soient inférieurs à leur coût de production entraîne une hausse du nombre d'adhérents. Le paiement de compensations importantes entraîne une révision des taux de cotisation qui se traduit par une augmentation des contributions gouvernementales."

(15 h 30)

Quand il y a une augmentation des contributions gouvernementales, il y a également une augmentation de la contribution du producteur, automatiquement. Or, quand les prix obtenus sont inférieurs au coût de production, peut-on dire que cela va bien dans les productions? Est-ce que c'est parce que cela va bien? Mais c'est le monde à l'envers! Le gouvernement semble se vanter de mettre beaucoup d'argent dans l'assurance-stabilisation et d'augmenter la production pour en mettre encore plus l'année prochaine. C'est presque une dilapidation des fonds publics. Il me semble que dans une saine administration, on investit où c'est rentable et, également, on investit selon des plans préétablis. On commence par s'assurer des marchés. On commence par s'assurer de la qualité de notre produit. C'est ce que vous ne faites pas, malgré les titres ronflants que vous donnez à toutes vos lois et malgré toutes les améliorations que vous maintenez.

En agriculture, il y a beaucoup de domaines qui sont reliés aux céréales, le domaine des petits abattoirs, par exemple, en voie d'extinction, que les gens ne peuvent pas transmettre à leurs enfants et qui sont ni plus ni moins en voie d'extinction. Est-ce que vous arriverez encore avec d'autres normes, d'autres politiques de salubrité encore plus poussées pour les éteindre le plus vite possible?

Je dis au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qu'il a un rôle à jouer relativement aux abattoirs. Cela fait partie de notre économie; c'est un service public.

Le Vice-Président (M. Rancourt): En conclusion, s'il vous plaît!

M. Mathieu: Je dois conclure, M. le Président. C'est dommage parce que j'en aurais eu encore beaucoup à dire. Je me contenterai de dire au ministre, en concluant j'ai sans doute quelques minutes pour conclure, le ministre a pris quatre à cinq minutes pour conclure.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il y a consentement, M. le député.

M. Mathieu: Nous connaissons la chaîne d'alimentation Provigo qui est la propriété, à 30%, de la Caisse de dépôt. Alors, le gouvernement peut orienter les politiques de la chaîne Provigo. On m'a fait justement remarquer que Provigo n'achète pas de viande au Québec depuis le 11 avril 1983. Elle interdit même à ses membres affiliés d'acheter du boeuf local; sinon, ils peuvent perdre leur affiliation. Je voudrais savoir ce que le ministre fera pour contrer cela, lui qui encourage la production de boeuf local.

En concluant, malgré les chiffres mirobolants que le ministre nous a lancés ce matin, démontrant que la production céréalière augmentera de 1000% et de 10 000%, de même que l'assurance-stabilisation depuis qu'il est là, je veux des explications sur un article du journal La Presse, en date du 28 octobre 1982 qui dit: "Le Québec au même niveau qu'en 1971. Baisse de 226 000 acres de terre en culture en cinq ans." Nous sommes en 1982. La loi sur le zonage agricole a eu le temps de démontrer ses conséquences.

Je conclus en vous disant que cette loi, malgré qu'elle nous déçoive parce qu'elle ne va pas assez loin, nous l'appuierons parce que c'est tout de même un chaînon important, malgré qu'elle n'aille pas assez loin. Mais, en attendant, nous continuerons de demander au ministre de se raviser et d'ordonner, d'imposer une classification obligatoire pour que nos producteurs aient le même prix que celui du marché international. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. J'entendais, au début de son intervention, le député de Beauce-Sud parler du chiffre 13, un chiffre malchanceux. Je comprends que le 13 lui rappelle un mauvais souvenir à cause du 13 avril 1981. Il a cela présent à l'esprit.

Il a aussi parlé de nos cassettes; c'est vrai que nos cassettes sont prêtes, mais le bout de la cassette que j'ai aimé le plus de lui, c'est quand il a dit qu'il voterait pour la loi. Il est négatif tout le long, comme toujours. Après cela, il dit: Ce n'est pas assez, mais on votera pour la loi. Je savais cela, c'était le bout que j'appréhendais. J'étais sûre qu'il était pour voter pour la loi parce que, étant lui-même un ancien producteur, il sait que cela a du sens. Il ne veut pas l'admettre publiquement, surtout pas devant les gens qui sont venus le visiter.

Qu'est-ce que c'est, la loi 13? C'est un projet de loi qui a pour objet de préciser les pouvoirs de la régie. Avant de préciser certains pouvoirs, j'aimerais qu'on parle un peu de ce qu'est la Régie des grains. La création de la régie pour le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a été un outil de travail indispensable pour l'amélioration des conditions de la commercialisation des grains au Québec. Cela veut dire aller beaucoup plus loin que la classification. Cela veut dire l'excellence. Dans un discours que j'ai prononcé à l'Assemblée nationale il y a quelque temps, j'ai parlé de l'excellence des produits du Québec. Dans le domaine des grains, la régie est en train de nous prouver l'excellence de la production et de l'utilisation de céréales de qualité.

Que faut-il faire pour obtenir l'excellence? Pour obtenir l'excellence, il faut faire un suivi très minutieux sur la manutention, sur le séchage, sur le criblage, l'entreposage et la conservation. Ce n'est qu'après toutes ces étapes que l'on peut imposer le sceau de l'excellence des grains classés du Québec. Cette classification aidera aussi à dépister les réels problèmes relatifs à la qualité et fournira les éléments de correction.

Cette loi 13 qui concerne la classification des grains est une évolution, une suite logique. Nous avons commencé en 1976 cette suite logique. Je lisais un article dans le journal La terre de chez nous, pas un vieux journal, celui du 26 mai, la semaine dernière. M. André Harbec disait: "Le Québec est maintenant sa principale source d'approvisionnement en céréales fourragères." Je vais lire juste un petit paragraphe, vous allez vous situer. M. Harbec disait, dans son exposé: "Historiquement, les conditions économiques n'ont pas été assez incitatives -je suppose qu'il parlait du gouvernement libéral de 1971 à 1976 - afin de stimuler le développement de la production céréalière du Québec pour accroître son degré d'autosuffisance. De plus, la structure de la mise en marché des céréales au Québec s'est développée jusqu'à récemment par et pour le commerce des céréales en provenance de l'extérieur du Québec. "Par contre, depuis 1976 - est-ce que ça vous dit quelque chose, 1976? C'est l'année de la prise du pouvoir par le Parti québécois - on peut constater un changement." Ce n'est pas moi qui le dis, c'est André Harbec qui parle des producteurs, de ce qui s'est passé depuis 1976. On en a fait du chemin. "On peut constater un changement majeur dans cette toile de fond de l'industrie céréalière québécoise. En effet, le degré d'autosuffisance fourragère atteignait jusqu'à 34% au cours de la campagne agricole 1976- 1977 et il a dépassé le cap de 50% au cours de 1981-1982, et cela malgré le fait que les besoins totaux ont augmenté de 2 500 000 tonnes à 3 700 000 tonnes durant cette période. De fait, la production céréalière variait aux environs de 800 000 tonnes de 1976 à 1977 tandis qu'elle a atteint un sommet de 1 800 000 tonnes en 1981-1982." Une augmentation de 120%. Ce ne sont pas des petites pinottes, 120%.

Puis, ayant toujours cette même suite dans les idées, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a établi la Protection du territoire agricole dont je voudrais vous parler un peu. Vous vous souvenez comment cela a fait la une des journaux, comment les libéraux ont dit toutes sortes d'âneries, je dirais. Ils disaient même:

Vous n'avez qu'à peinturer les cimetières. Je me souviens que le ministre répondait: Oui, mais c'est là que ça chiale le moins. On a peinturé en vert, c'est vrai. Pourquoi a-t-on peinturé en vert le Québec? Le 5 mai dernier j'accompagnais le ministre de l'Agriculture avec des producteurs, avec des journalistes. On s'est rendu au village des patriotes à Saint-Denis, dans le comté de mon collègue de Verchères, plus précisément dans un rang qui s'appelle le rang Amyot. Ce rang-là, c'étaient des terres en friche. Le foin haut comme ça! Je suis allée voir cela et je souhaite que ceux qui vont faire un tour en auto le dimanche, se rendent dans le rang Amyot pour voir ce qu'on a fait avec ces terres qui étaient perdues pour l'agriculture.

Grâce à la Protection du territoire agricole, on a donné à ces terres leur vraie vocation, celle de produire, de faire avec ces terres-là de belles terres à céréales. Grâce à qui? Grâce au Parti québécois. Grâce à quoi? Grâce à la Protection du territoire agricole et grâce à la confiance qu'on a en nos producteurs. Nos producteurs du Québec sont capables. On n'a pas besoin d'importer des céréales en grande quantité, on a les gens pour les faire ici et on a de bonnes terres. Il s'agit de mettre des outils importants, de vrais outils entre les mains de nos producteurs et ils feront le reste, vous verrez.

Je prends des statistiques qui m'ont été fournies: En 1971 - mon collègue de Saint-Jean qui est historien dirait: C'était le temps des libéraux - on avait 418 100 hectares de terre en superficie de céréales. On produisait 957 600 tonnes de céréales. En 1976 on a pris le pouvoir. Les libéraux n'avaient pas cru bon d'aider nos producteurs de céréales. Donc, on est parti de 418 100 hectares de terre et on était rendu à 382 000, une perte de banque de terres de 36 100 hectares de 1971 à 1976. Ce n'est pas une centaine d'années, ça, c'est cinq ans. Ensuite, on avait perdu 134 600 tonnes de moins de céréales produites. De 1976 à 1982, années du Parti québécois, on est rendu, en 1982, à 546 100 hectares en superficie de production de céréales pour 1 821 200 tonnes de céréales, ce qui veut dire plus 264 100 hectares de terre et plus 998 300 tonnes de céréales. C'est la suite logique dont je vous parlais.

Quand on est allé dans le rang Amyot, le ministre en a profité, et je pense que l'occasion était tout à fait rêvée, pour démontrer aux journalistes, aux gens qui nous accompagnaient - nous étions un plein autobus - et vérifier sur place à savoir si on n'avait pas adopté la Loi sur la protection des terres agricoles, ce qui serait arrivé partout au Québec. On a vu un petit coin seulement. Les belles terres qu'il y avait là, de belles terres productives qui étaient laissées à l'abandon où on voulait construire des maisons un peu partout. Le ministre en a profité, comme je vous le disais, pour présenter son programme triennal. Il a dit: On va investir 50 000 000 $ dans notre programme triennal, et notre programme va comporter treize points, répartis en six grands volets. Je vais vous faire l'énumération de ces points de relance: l'amélioration de la qualité du sol, bien sûr, avec un bon drainage. Combien de producteurs du Québec se sont prévalus des subventions pour le drainage agricole? Qu'est-ce qu'on a fait, après le drainage? On a creusé les cours d'eau. Cela fait plusieurs fois que je parle des cours d'eau parce que, dans mon comté, comme je vous l'ai dit antérieurement, j'ai eu 69 demandes l'année dernière, dont 54 ont été acceptées et sont en train de se terminer. Un bon montant d'argent a été alloué au creusage des cours d'eau pour rendre nos terres plus productives. Cela ne s'est pas fait seulement pour le Parti québécois, le ministre en a donné de l'autre côté aussi, afin que leurs terres soient mieux drainées.

Continuons: l'intensification du processus de la mise en valeur des terres non cultivées ou abandonnées, l'accroissement de la capacité d'entreposage des céréales, l'amélioration de la qualité du fourrage, la possibilité pour les agriculteurs de transformer eux-mêmes leurs céréales en moulée pour l'alimentation de leurs animaux, l'intensification de la recherche, de la mise au point, de la promotion de nouvelles variétés de céréales mieux adaptées au climat des différentes régions du Québec. C'est ce que le ministre a annoncé quand on a fait le tour des terres en friche qui vont redevenir des terres en culture, grâce à la confiance que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a en ses producteurs.

Quand on se sent compris et aidé, supporté, on devient confiant en notre travail, croyant en ce qu'on fait, et on met tout notre coeur pour faire de nos terres ce qu'il y a de mieux. C'est ce que le gouvernement a fait. Vous aurez remarqué que ce matin le ministre a dit: On fait des lois en collaboration avec les gens du milieu. Je peux vous dire que c'est vrai. Nous, du caucus agricole, sommes toujours informés. Le ministre nous demande: Qu'est-ce qui se passe? Comment vos producteurs voient-ils cela? On en parle à nos producteurs, on donne les idées de chez nous, de chacun de nos producteurs et c'est avec cela qu'on fait une loi. On ne fait pas une loi pour les faire choquer, comme le ministre le disait, mais une loi qui leur convient, une loi qu'ils nous ont aidés à préparer. Comme cela, la loi leur plaît et leur convient. C'est pour cela que les terres agricoles du Québec sont les plus belles. Je ne suis pas gênée de parler

des producteurs agricoles de mon comté. Je sais bien que je vais soulever des tollés de protestations, mais je peux vous dire que les meilleurs producteurs du Québec sont en grande partie dans Johnson.

Les personnes qui seront affectées à ce classement ne seront pas des bonshommes de paille; ce ne sont pas des cadeaux qu'on leur fait parce qu'ils ont rendu service au parti, non, non. C'était peut-être comme cela anciennement mais, aujourd'hui, les personnes qui vont faire le classement du grain devront avoir des qualités spéciales. Écoutez bien, les personnes affectées au classement du grain devront, premièrement, suivre un cours de classement d'une durée de trois jours, recevoir un entraînement pratique d'un mois sous la surveillance de la régie, réussir un examen préparé en collaboration avec l'Institut de technologie agricole et alimentaire, se perfectionner à l'aide d'un programme de formation supervisé par la régie, et être reconnues comme préposées au classement des grains par la régie. Cela va prendre quelqu'un qui doit connaître son travail pour l'effectuer le mieux possible. Ce ne seront pas des bonshommes de paille, ce seront des gens qui connaissent leur travail, des gens qui vont s'efforcer de donner l'excellence aux produits du Québec. Si on a de l'excellence dans nos produits, nos animaux vont faire une meilleure performance et notre grain va se vendre mieux aussi. C'est pour cela qu'on a choisi des gens qui connaissent leur travail, qui vont en choisir d'autres et leur préparer des cours pour être capables de donner l'excellence du produit. (15 h 50)

J'entendais aussi, ce matin, le ministre dire qu'il y aurait la construction de deux nouveaux centres régionaux de traitement d'entreposage des céréales. J'ai compris, entre autres, qu'il en construirait un dans l'Outaouais. Cela ne me dérange pas beaucoup, parce que c'est à l'autre bout. Vous n'étiez pas là, ce matin, M. le Président, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais il en a annoncé un dans les Cantons de l'Est. Vous et moi connaissons les Cantons de l'Est. Tout ce que je souhaite -je vais essayer - c'est que le centre qui sera construit dans les Cantons de l'Est le soit dans le comté de Johnson, parce qu'on a des belles terres et parce qu'on est capable. Ce serait peut-être le lieu idéal pour la construction d'un centre dans les Cantons de l'Est. Je pense qu'on est admissible à un centre comme celui-là et je ne laisserai pas la chance au ministre d'oublier ce qu'il a dit ce matin: Un centre pour les Cantons de l'Est. J'en discuterai peut-être avec les autres représentants des comtés de l'Estrie, mais je vais discuter pour mon comté également.

Quand le projet de loi no 13 sera mis aux voix, M. le Président, je vais voter pour comme je vais voter pour tous les projets de loi qui vont permettre une meilleure production au Québec. Je ne parle pas contre pour ensuite voter pour. Je parle pour et je vote pour. Je vais voter pour les producteurs du comté de Johnson, pour les producteurs de l'Estrie et pour tous les producteurs du Québec. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. Après avoir écouté celle qui m'a précédé dans ce débat, Mme la députée de Johnson, j'ai l'impression que, n'eût été l'élection du Parti québécois en 1976, nous serions certainement tous morts de faim au Québec et le Québec aurait même disparu de la mappe. J'ai pu constater qu'aveuglément Mme la députée n'a pas cessé d'encenser son ministre, d'encenser ses bouffonneries de ce matin et le ridicule avec lequel il nous a livré son discours de deuxième lecture. Mme la députée de Johnson, je vous comprends bien, je vous excuse et je ne vous en tiens pas rancune. Je pense que vous ne voyez pas plus loin que l'étape partisane.

Mme Juneau: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Question de privilège, Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: M. le député de Huntingdon dit que je ne vois pas plus loin. Je m'excuse, mais je vois beaucoup plus loin que cela.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: M. le Président, nous sommes à cette étape de deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les grains. On dit que ce projet de loi précise les pouvoirs de la Régie des grains du Québec quant au classement du grain et qu'il modifie également les pouvoirs réglementaires du gouvernement, notamment, afin de lui permettre d'établir des normes de classement du grain.

Quant au contenu, il n'y a à peu près rien dans ce projet de loi, de toute façon. Sur le contenu, on est d'accord, parce que le ministre nous présente un projet de loi presque vide. On est habitué à cela de toute façon. Je me souviens qu'en décembre 1979 il y a eu la présentation d'un projet de loi qui est devenu la Loi sur les grains, une loi qui existe depuis trois ans et demi.

Finalement, cette loi n'a jamais été appliquée. Il n'y a jamais eu de réglementation soumise par le ministre. Finalement, cela a été une loi bidon, la première. Nous avons un deuxième projet de loi bidon.

Le ministre nous a livré, ce matin, dans son discours de deuxième lecture, un discours très partisan, naturellement, un discours de propagande sur ses politiques céréalières depuis 1976. C'est une habitude qui est devenue régulière chez le ministre parce qu'à tous les deux ou trois ans il nous présente un petit projet de loi ridicule pour pouvoir livrer aux Québécois tout ce qu'il a pu créer et faire depuis six ans. C'est à peu près le but de ses projets de loi, parce qu'ils sont vides de contenu, de toute façon.

Ce projet de loi no 13 m'amène à formuler quelques commentaires et je vais peut-être sortir, de temps à autre, du projet de loi lui-même, M. le Président, puisque vous avez constaté que le ministre a ouvert les portes toutes grandes, ce matin, dans son grand discours d'une heure et cinq minutes ou tout près. Je me suis aperçu que le ministre prend tous les moyens d'organiser une affaire de pétage de bretelles. C'est à peu près cela qu'il nous a livré ce matin, une affaire publicitaire, une affaire de propagande partisane. Son discours fut exactement cela. Quant à nous, les politiques de développement agricole, on a toujours été pour cela. Mais, pour un tel projet de loi, dans cinq minutes, le ministre aurait pu nous livrer cela, ce matin, nous faire part du contenu, nous indiquer les raisons particulières justifiant son dépôt. Il n'avait pas besoin de prendre une heure pour se péter les bretelles sur l'accroissement d'acres de la production céréalière ou l'accroissement de drainage souterrain, l'accroissement de ceci ou de cela. Je pense qu'il y a des occasions partout à l'extérieur de cette Chambre pour livrer ce message partisan. Nous sommes ici pour parler de projets de loi et non de propagande ou de publicité ou d'affaire de pétage de bretelles.

Les politiques de développement furent commencées il y a très longtemps par les partis politiques qui ont précédé le Parti québécois. Il y a eu un progrès constant qui s'est échelonné année après année. On peut dire que, dans les années cinquante, il y avait du progrès sur les années quarante et cela s'est continué graduellement. C'est sûr que tout ne se crée pas en un jour. C'est certain qu'actuellement nous avons plus de production agricole qu'on en avait en 1976. Il y en avait plus en 1976 qu'en 1970. Il y en avait plus en 1970 qu'en 1965. C'est un progrès constant dans notre société et je pense que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ne comprend pas cet aspect. Il ne comprend pas qu'un jour il y avait des chevaux et qu'aujourd'hui il y a des tracteurs. Cela fait de l'équipement plus sophistiqué. Le ministre ne comprend pas cela. Lui, pour autant qu'il se pète les bretelles et se gonfle de publicité, je pense que c'est tout ce qu'il vise en politique.

C'est malheureux parce que la population réagit autrement. La population n'a pas besoin de pétage de bretelles et de publicité partisane. Elle a besoin de faits. Elle a besoin de vivre. Elle a besoin de se nourrir. En ce qui concerne les approvisionnements, nous sommes d'accord, et très bientôt le Parti libéral prendra le pouvoir et c'est certain que tout le monde va continuer à vivre au Québec, que nous allons continuer à aider les agriculteurs comme le parti l'a fait antérieurement en 1976.

Il y a d'autres aspects aussi dans cette mesure et dans le discours du ministre ce matin. Le ministre nous a expliqué qu'il a créé une banque de terres. C'est sûr qu'il l'a créée. J'étais ici présent dans cette Chambre quand le ministre a présenté son projet de loi sur la banque de terres. À ce moment, je me souviens bien lui avoir dit: Vous allez finalement peut-être acheter des terres au Québec. Vous allez engager un personnel pour travailler sur ces fermes. Nous allons devenir un État possesseur de fermes. Cela vient d'être annoncé ce matin. J'avais averti le ministre, il y a deux ou trois ans, que cette procédure et cette politique pouvaient amener l'État à devenir propriétaire des terres au Québec. Je lui rappelais les procédures russes où l'État possède les fermes, engage les employés pour cultiver les fermes et il n'y a pas de rentabilité. Mais le Québec s'en va dans le sens de la Russie d'hier. C'est joli à voir. De toute façon, le ministre nous annonce qu'il va mettre 20 000 000 $ par année pour acheter des terres. Je comprends très bien que, dans l'état actuel des choses en agriculture, c'est sûr que certaines terres vont retourner à l'État parce qu'il y a des centaines et des milliers d'agriculteurs qui ont un taux de financement plus élevé que la valeur de leur ferme.

S'il y a quelques années difficiles à traverser, certains ne pourront pas passer au travers. Ils devront remettre leurs terres à l'office ou se voir saisis par l'office. À ce moment, ces terres vont retourner à la banque de terres. Mais, en plus, le ministre est en train de faire une évaluation dans toutes les paroisses du Québec, les paroisses où l'agriculture se fait, pour vérifier quelles terres sont à vendre, quelles terres sont en friche actuellement, quelles terres ne sont pas en production. Tout à l'heure, il va falloir trouver des employés. Je comprends qu'on a 400 000 bénéficiaires de l'aide sociale au Québec. On pourrait peut-être placer nos bénéficiaires de l'aide sociale sur

les fermes. On pourrait peut-être aussi placer nos conspirateurs de l'an 2000 sur les fermes. Ce pourrait être cela toute la théorie en arrière de cet achat de terres que le ministre prévoit à 20 000 000 $ par année.

De toute façon, je comprends mal qu'actuellement l'État veuille acheter des terres quand on pourrait arriver avec un programme pour sensibiliser les producteurs actuels à acheter leurs voisins et faire en sorte que les terres demeurent aux producteurs et non à l'État. C'est une politique qu'on ne voit pas en Amérique du Nord, M. le Président. C'est une politique peu commune sur le continent nord-américain. On voit bien que la politique que le ministre met de l'avant va bien de pair avec son faible raisonnement dans plusieurs matières agricoles. (16 heures)

Il y a un autre facteur qui entre aussi en ligne de compte quand on parle de production agricole. Le ministre a poussé vers une production massive de denrées agricoles, particulièrement dans les céréales et dans la viande rouge de boucherie, mais le ministre n'a pas pensé à la mise en marché et aux débouchés qu'auraient les producteurs pour ces productions accrues. Je suis d'accord à 100% pour qu'on accroisse nos productions, mais il faudrait aussi s'assurer que de pair, on puisse vendre nos productions, que l'agriculture puisse vivre de la vente de la production. Il faut aussi s'assurer d'une qualité de produits. Il faut s'assurer d'une classification en tout temps. Il faut maintenir une qualité constante si on veut avoir un débouché. Ce sont tous des éléments que le ministre a totalement oubliés depuis 1976. Il a poussé l'agriculteur à produire davantage. Il l'a poussé à exploiter des fermes plus grandes, à exploiter davantage d'acres, mais il n'a jamais assuré un agriculteur au Québec d'un débouché constant pour ses produits, et c'est là la grande erreur du ministre.

Aujourd'hui, il nous annonce une petite politique que je qualifierais même de ridicule; il y a deux petits articles. On veut une classification dans le domaine des grains. Point final. C'est à peu près cela, la grosse politique du ministre. Je pense que ce n'est pas ce qui va faire progresser davantage l'agriculture au Québec. Il va falloir avoir une mise en marché rationnelle, une mise en marché qui assure les producteurs de pouvoir vivre sur leur ferme, qui assure les producteurs d'un revenu constant, d'un revenu comme voulait l'affirmer le Parti québécois en 1976: Le revenu d'un agriculteur devrait être comparable à celui d'un travailleur dans l'industrie, d'un employé ou d'un spécialiste en travaux mécanisés ou d'un spécialiste en tout domaine. On voulait s'assurer que l'agriculteur ait un salaire équivalent à la classe moyenne au Québec.

Je pense que le ministre n'a pas accompli sa tâche, parce que les agriculteurs sont plus pauvres actuellement qu'ils ne l'ont jamais été au Québec. En 1965, en 1970 ou en 1976, les agriculteurs vivaient mieux qu'ils ne vivent actuellement. Ils sont plus endettés qu'ils ne l'ont jamais été. Ils sont plus inquiets qu'ils ne l'ont jamais été. Je suis d'accord avec une politique d'augmentation de production, mais il faut s'assurer à tout prix que les producteurs puissent vivre. Il faut s'assurer que les producteurs puissent devenir plus prospères sur leur ferme. Il faut s'assurer qu'ils aient des perspectives d'avenir, parce qu'il y a aussi la relève agricole. Quand le fils d'un producteur voit son père en difficulté, il n'est pas tellement attiré vers cette profession. Si on veut poursuivre dans l'agriculture, il va falloir s'assurer d'un revenu net constant, équitable et aussi d'un bien-être certain chez les producteurs agricoles.

Ce qu'on a aussi remarqué depuis 1976, c'est que le ministre a voulu mettre beaucoup de bébés au monde, mais il ne s'est pas occupé de les faire vivre par la suite. C'est bien beau. On met un bébé au monde, mais on ne s'occupe plus de ce bébé. On le laisse crever. C'est exactement ce qu'il a fait avec nos producteurs agricoles. Il a aidé beaucoup de producteurs à se placer sur une ferme. Il les a assurés d'un prêt agricole, mais après, il leur a coupé les vivres. On l'a vu dans le porc, il y a deux ans. C'est exactement ce qui s'est passé. Il en a fait crever combien? Des centaines encore.

C'est très malheureux le temps que nous avons cette année. Je pense que tous les producteurs sont très angoissés actuellement. Encore là, il va falloir assurer nos producteurs, s'ils ont une année malencontreuse, des fonds nécessaires pour passer à travers les périodes difficiles. Je pense que le ministre devrait les rassurer ces temps-ci, parce qu'ils sont très inquiets. C'est très inquiétant de mettre dans le sol 100 000 $, 150 000 $ et même 200 000 $ chez certains producteurs - et cela pourrait être plus - sans savoir ce qu'on va récolter cet automne. Je vous assure que je rencontre des producteurs dans ma région dans tous les domaines d'activités. Le comté de Huntingdon produit de tout au Québec. Tout ce qui se produit au Québec se produit chez nous. Cela part des céréales, des fruits, des légumes, des arbres fruitiers. On a tout au Québec. Je connais l'inquiétude de ces producteurs et j'aimerais que le ministre puisse les assurer que si l'année est difficile, ils pourront être assurés de reporter leurs paiements à l'autre année. Des remboursements ou des rabais d'intérêt seraient peut-être à prévoir aussi, parce que

l'année s'annonce vraiment difficile.

Le ministre s'est pété les bretelles ce matin comme si l'agriculture n'existait pas avant 1976. Le Parti québécois semble avoir tout inventé. Le ministre est le seul brillant, le seul intelligent, j'imagine, le seul qui connaît tout. C'était vraiment... Il n'y a pas de qualificatif pour son discours de ce matin. Je n'en revenais pas et je pense que les agriculteurs qui l'ont écouté n'en reviennent pas non plus. Ce n'est pas croyable d'entendre de tels propos d'un ministre. Les qualificatifs que je pourrais attribuer au ministre seraient antiparlementaires. Alors, j'éviterai de poser ces gestes et je me contenterai d'indiquer que le ministre n'a aucun respect pour la classe agricole. C'est malheureux. Les agriculteurs du Québec méritent pas mal mieux que ce qu'ils ont actuellement.

On s'est aperçu aussi, selon les propos du ministre, que le seul rêve que le ministre a en tête, la seule chose à laquelle il aspire, c'est toujours l'indépendance du Québec. Le ministre rêve constamment d'indépendance. Le ministre a présenté constamment des politiques qui peuvent l'amener à l'indépendance; c'est ce qu'on a entendu ce matin; c'est ce que le ministre nous a laissé savoir. L'indépendance est le seul but visé par ce gouvernement, peu importent les politiques qu'on nous amène. Le ministre créera une autre nouvelle société, par le ricochet de SOQUIA, le ministre des Transports nous amène une nouvelle société nationale des transports; on a trois sociétés nouvelles qui s'en viennent. On marche sur des sociétés, des régies, des commissions; on a la Régie de la banque des terres. Alors, finalement, qu'est-ce que sera l'État? Le rôle de l'État sera rendu à 80%-90% de l'économie du Québec. C'est un régime étatique qu'on aura; c'est à peu près cela qui s'en vient. C'est très malheureux. Je pense que les résidents du Québec ont très hâte de s'en débarrasser - j'en suis convaincu - parce qu'ils le disent ouvertement. Vous le verrez dans les trois élections partielles qui s'en viennent; ils ont très hâte de se débarrasser de ce gouvernement; ils sont écoeurés des politiques gouvernementales actuelles.

Tout ce qu'on fait dans ce gouvernement et dans ce parti politique, c'est de cracher sur le fédéral, cracher sur les Anglais, cracher sur les Canadiens, cracher sur les libéraux provinciaux, cracher sur les libéraux fédéraux. On ne fait que cela, constamment et sans arrêt. On s'attend après cela de recevoir des retombées fédérales dans tous les domaines, mais on crache sur eux constamment. Alors, qu'est-ce que ce genre de politique?

Oui, M. le Président, j'ai déjà employé le terme "cracher" et c'est parlementaire, à part cela, je peux vous l'assurer.

Je termine sur ces propos et j'invite le ministre à être plus respectueux de nos agriculteurs. Au lieu d'apporter des projets de loi bidons dans lesquels il peut se péter les bretelles et énoncer toutes sortes de niaiseries, il devrait plutôt rassurer aux producteurs que si l'année est difficile, il sera là derrière eux, il pourra les aider et les faire vivre décemment et convenablement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Bellechasse.

M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. À en juger par le discours de celui qui vient de parler, j'ai l'impression qu'il y a certaines mesures de ce gouvernement qui ne plaisent pas à l'Opposition. Je les comprends très bien parce que ce n'est pas facile de jouer le rôle d'Opposition de façon constructive et positive lorsque le gouvernement présente des mesures aussi intéressantes. Au rythme où le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a présenté des mesures très intéressantes pour les producteurs agricoles depuis 1976, c'est sûr que c'est un domaine où il n'est guère intéressant d'être critique de l'Opposition.

Tantôt, le député de Huntingdon parlait de - j'utilise ses qualificatifs - "projet de loi ridicule, creux, bidon". Les personnes qui l'ont entendu tantôt peuvent certainement penser que ces qualificatifs peuvent très bien s'appliquer au genre de discours qu'il vient de nous tenir. Il n'y avait pas grand-chose là-dedans et on peut dire qu'il ne raisonnait pas comme un homme, mais résonnait comme une tonne.

Nous avons un projet de loi qui, certes, n'est pas très volumineux. Il comporte exactement quatre articles. Ce n'est certainement pas parce qu'il y a peu d'articles que le projet de loi n'est pas important. En 1979, le gouvernement créait la Régie des grains du Québec. Bien sûr, graduellement - c'est ce qu'on fait - on améliore les moyens pour faire en sorte que la régie ait les instruments nécessaires pour se développer pour le plus grand bénéfice des producteurs agricoles. Bien sûr, cela ne pouvait pas se faire tout de suite, sur-le-champ. À l'usage, on s'est rendu compte qu'il serait nécessaire d'apporter des modifications et des amendements susceptibles d'améliorer la situation. C'est ce qu'on fait avec le projet de loi no 13 qui vise à préciser les pouvoirs de la Régie des grains du Québec, surtout quant au classement du grain. Le député de Beauce-Sud parlait tantôt de l'absence de réglementation reliée à la Régie des grains. Nous aurons, avec le projet de loi 13, un règlement qui contiendra les dispositions pour

faire en sorte que les producteurs puissent compter sur des produits de qualité à l'avenir. (16 h 10)

Je pense qu'il est important de créer, pour les produits québécois, pour les céréales produites au Québec, un climat de confiance à établir pour les produits entreposés dans les centres régionaux de grain. Nous sommes capables - on l'a prouvé depuis quelques années - de produire des céréales de bonne qualité au Québec. Il y a des gens que ça dérange parce qu'ils ne s'attendaient pas qu'on puisse en arriver aussi rapidement à des résultats aussi significatifs. En particulier, je pense qu'on pourrait citer des exagérations de la part de Santé, Bien-Être et Agriculture Canada qui sont très sévères en ce qui concerne les produits qui viennent du Québec par rapport aux produits qui viennent d'ailleurs au Canada. Je pense que ce qui s'est produit concernant certains problèmes de maladie dans le domaine des céréales, au cours des années passées, illustre bien cette situation qui dérange le gouvernement canadien.

M. le Président, le projet de loi no 13 va donner des outils aux producteurs, aux transformateurs et aux meuniers. Il sera possible de vérifier la qualité du produit d'ici et aussi la qualité des produits qui nous viennent d'ailleurs. Actuellement, il ne faut pas se cacher qu'il arrive très régulièrement que les gens d'ici se fassent passer des sapins en ce qui concerne les marchés d'exportation, en ce qui concerne les céréales produites au Canada et vendues à l'extérieur du Canada. Je pense qu'on met beaucoup de soin à ne pas perdre les marchés de l'extérieur. Qu'on pense aux marchés de l'Union Soviétique, de la Chine ou d'autres pays dans le monde.

En ce qui concerne les produits qui sont vendus au Québec ou dans l'Est du Canada, il semble qu'on soit beaucoup moins sévères et il faudrait être en mesure de tester, de vérifier quelle sorte de produits nos producteurs ont entre les mains afin de nourrir leur bétail en particulier. Le marché canadien intérieur a subi un relâchement que le projet de loi no 13 va corriger au niveau des moyens à mettre en place.

La Régie des grains, depuis qu'elle existe - elle a commencé à s'acquitter de son mandat avec de plus en plus de résultats concrets - a comme premier mandat de promouvoir la production et l'utilisation de céréales de qualité au Québec. Pour s'acquitter de son mandat, bien sûr, ça ne se fait pas par l'effet du hasard, il y a une stratégie, un plan détaillé qui comporte une suite ordonnée de moyens. Ces moyens, bien sûr, comportent deux aspects: la commercialisation et la production.

En ce qui concerne la commercialisation, on doit s'attacher aux normes de classification; on doit regarder la protection financière des producteurs qui doivent s'assurer d'obtenir les sommes d'argent en compensation du travail qu'ils ont fait pour la vente de leurs produits. On doit s'assurer aussi qu'il y ait des normes en ce qui concerne les centres régionaux, des normes assez précises, assez sévères également pour les centres de séchage et les marchands de grain.

Je pense que les producteurs du Québec qui veulent se lancer dans la production céréalière doivent avoir l'assurance que ce sera rentable. Ils doivent avoir l'assurance qu'il est possible de vivre convenablement, donc ils doivent avoir le meilleur prix possible pour leur produit. Jusqu'à maintenant, je pense qu'on pouvait dire que ce n'était guère la situation par rapport aux produits qu'on importait de l'extérieur. (16 h 15)

Il y a également l'aspect production qu'on doit essayer d'améliorer. La Régie des grains, par son implication lors du classement des céréales, aidera à identifier les problèmes relatifs à la qualité, comme le manque de maturité, la faiblesse du poids spécifique ou encore le pourcentage des déchets qui sont contenus. Ce sont là des éléments qui méritent d'être analysés, d'être précisés et c'est précisément ce que la loi 13 permettra de faire en utilisant la Régie des grains du Québec.

Actuellement les grains produits au Québec ne sont pas classifiés et, malgré les apparences, l'utilisateur ne peut pas être assuré de la qualité des céréales provenant de l'extérieur puisque la surveillance du système de classification pour le marché intérieur est inadéquat.

Encore une fois, M. le Président, je pense qu'on doit relier l'adoption de la loi 13 à tout ce qui a été fait dans le domaine de l'agriculture depuis quelques années et en particulier on doit l'associer de très près aux mesures qui ont été annoncées par le ministre de l'Agriculture, le 5 mai dernier, alors qu'il annonçait qu'une somme de 50 000 000 $ serait consacrée par le gouvernement du Québec, au cours des trois prochaines années, à l'amélioration, à l'accélération de l'autosuffisance du Québec en matière de céréales. Cela se fera sur une période de trois ans.

Il y a plusieurs raisons qui nous permettent de dire que ce plan triennal atteindra ses objectifs. Je pense que, si le passé est garant de l'avenir, on peut certes utiliser les résultats atteints au cours des dernières années dans le secteur des céréales. Par exemple, nous avons eu, de 1977 à 1982, un plan quinquennal qui a donné des résultats très significatifs, très intéressants. Par exemple, l'augmentation du nombre de tonnes de céréales au Québec, entre 1977 et 1982, sur une période de cinq

ans, a été de 3 500 000 tonnes, pour une valeur approximative de 500 000 000 $, ce qui a contribué à une valeur ajoutée supplémentaire d'environ 1 000 000 000 $.

Si on jette un coup d'oeil sur la superficie et la production de céréales au Québec de 1971 à 1982, je n'ai pas l'intention de vous énumérer tous les chiffres, mais permettez-moi de vous citer quelques repères, par exemple. En ce qui concerne les céréales d'une façon globale, selon des chiffres fournis par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et qui datent d'avril 1983, en 1971 on avait un total de 957 000 tonnes de production; en 1976 nous étions rendus à 822 000 tonnes, donc, au lieu d'augmenter, la production diminuait. En 1982 nous étions passés de 822 000 tonnes à 1 822 000 tonnes, donc une augmentation de 1 000 000 de tonnes. Cela est de façon globale.

Concernant une production dont plusieurs personnes ont toujours prétendu qu'elle n'était pas adaptée au Québec, la production de blé, j'ai également des chiffres. En 1976 nous avions une production de 59 900 tonnes de blé produit au Québec; en 1980 c'était monté à 124 000 tonnes, donc une augmentation significative; en 1982, ah bon! on reste surpris, une diminution parce qu'on est rendu à 95 000 tonnes. On peut se demander comment cela se fait. Bien sûr, il peut y avoir des conditions climatiques mais l'une des raisons, je l'ai expliqué tantôt, c'est qu'à ce moment, l'attitude d'Agriculture Canada a fait en sorte qu'on a commencé à peut-être avoir des doutes sur la qualité du blé du Québec alors qu'en réalité c'est un blé de bonne qualité. Cela concerne la production de blé. (16 h 20)

Pour la production de l'orge pour les mêmes périodes, en 1971 nous avions une production totale de 33 400 tonnes seulement. En 1976, une augmentation guère significative; nous sommes passés de 33 400 à 38 700 tonnes. En 1982, dans la production totale d'orge au Québec, nous étions rendus à 350 000 tonnes, donc une augmentation de neuf fois plus importante. Si le gouvernement du Québec, le premier ministre dans son discours inaugural et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation nous arrivent maintenant avec cette décision d'un objectif d'autosuffisance de l'ordre de 70% en matière de production de céréales fourragères pour 1985-1986, c'est que cela générera des retombées extrêmement importantes.

Plusieurs raisons font que le plan triennal annoncé, c'est la mesure de l'heure, la mesure agricole importante pour le moment. Premièrement, on peut dire qu'il s'agit d'un secteur vital de la fabrication d'aliments pour les animaux. Cela représente une industrie de l'ordre de 1 100 000 000 $ en 1982. Deuxièmement, pourquoi cela est-il important actuellement? C'est qu'on peut s'appuyer, comme j'y ai fait référence tantôt, sur l'expérience d'un premier plan d'une durée de cinq ans, de 1977 à 1982, dont les objectifs ont été largement dépassés et qui a créé un impact sur l'économie du Québec de l'ordre de 1 000 000 000 $. Troisièmement, en favorisant l'accroissement de notre production céréalière, cela va permettre de réduire la dépendance des producteurs de viande face aux fournisseurs de l'extérieur. Quatrièmement, cette mesure fera en sorte qu'il sera possible de s'appuyer sur le crédit agricole à court et à moyen terme pour aider les céréaliculteurs avec les projets de loi nos 112 et 113 pour se lancer plus avant dans ce domaine.

Enfin, les investissements dans le secteur de la céréale, si la température peut enfin aider les producteurs, auront un impact d'ensemble sur l'économie du Québec à cause de toutes les retombées indirectes que cela peut avoir. On peut maintenant se demander quels moyens seront utilisés pour en arriver aux résultats que nous espérons au cours des trois prochaines années, je voudrais vous en énumérer quelques-uns qui me paraissent les plus importants, les plus fondamentaux: d'abord, la mise en place de capacités d'entreposage de céréales. Si on veut un produit de bonne qualité, il faut pouvoir le conserver dans un endroit prévu à cette fin. Cela va se faire par la construction accélérée de silos à grain sur les fermes mixtes.

Déjà, entre 1977 et 1982, on avait eu la construction de plus de 9000 silos au coût de 35 000 000 $. De plus, on introduira un nouveau programme d'aide à la construction de silos à grain sur les fermes spécialisées. Enfin, une autre mesure pour compléter l'ensemble, c'est l'ouverture de deux nouveaux centres régionaux de traitement et d'entreposage des céréales, précisément dans l'Outaouais et dans les Cantons de l'Est. Il existe dans ma région un centre régional de grain situé à Sainte-Hénédine, dans le comté de Beauce-Nord, l'ancien chef-lieu du comté de Dorchester, géré par la Coopérative agricole La Chaudière-Etchemin pour une capacité de 8200 mètres cubes.

Toutes ces mesures annoncées présentement font que de plus en plus nous nous acheminons vers une autosuffisance. Vous savez jusqu'à quel point il est important d'être davantage autosuffisant de façon à ne pas être dépendant des problèmes qui peuvent survenir dans d'autres régions du pays ou encore de l'extérieur du Canada qui nous approvisionnent. C'est une façon de mettre nos consommateurs, nos producteurs et nos transformateurs à l'abri des problèmes qui peuvent survenir au gré des événements. Je suis extrêmement heureux de cette mesure qui a été annoncée par le ministre

de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et qui fera que de plus en plus au Québec, on va avoir une nourriture produite par des Québécois, transformée par des Québécois, pour des Québécois.

C'est bien certain, M. le Président, que cette mesure est très positive. Comme le disait ma collègue de Johnson, on ne se contente pas de critiquer certains points quand cela ne fait pas notre affaire, mais quand on critique quelque chose, on agit en conséquence. On est pour cette mesure et on va voter pour, contrairement à d'autres qui chialent constamment et qui, lorsque vient le temps de voter, votent pour également. Les professionnels du chialage, je pense que les citoyens commencent à en avoir marre et j'ai hâte d'avoir une Opposition qui soit constructive, qui dise les choses telles qu'elles sont: quand c'est bien, c'est bien; quand c'est moins bien, on le dit, et cela finit là; pas de taponnage pour rien. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Berthier.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. Nous parlons aujourd'hui du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les grains. J'entendais, ce matin, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et j'aimerais soulever un point en particulier. Lorsqu'il parlait du député de Berthier, à savoir qu'il n'était pas un gros penseur, il parlait probablement de lui, comme gros penseur. C'est peut-être cela qu'il voulait dire. Je le regardais et il voulait se comparer à d'autres. Je regrette, mais j'aime mieux moi que lui dans sa stature - d'accord? - dans sa forme.

Tantôt, le député de Bellechasse nous a traités de "chialeux", de critiqueux. Lorsqu'on étudie un projet de loi, qu'on parle d'abord d'agriculture et qu'il y a des choses qui ne sont pas correctes, je pense que c'est bon et que c'est un devoir de la part de l'Opposition de le faire valoir auprès du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour que le projet de loi soit le plus efficace et le plus près possible des cultivateurs.

Une voix: C'est vrai.

M. Houde: Quand c'est correct, on dit que c'est correct. Mais quand ce n'est pas correct, il faut être capable de le dire aussi. Quand on parle du fédéral, nous sommes capables de reconnaître les bonnes choses et les mauvaises choses. Mais, de votre côté, que je sache - je ne veux pas parler du député de Bellechasse en particulier; je parle de tous les députés ministériels de l'autre côté - vous êtes tous pareils. Je n'ai jamais entendu un député ministériel, un ministre, incluant le premier ministre, dire un bon mot du fédéral. Jamais. Quand ils font des discours, les trois quarts, c'est pour déblatérer sur le fédéral et ce n'est pas bon. Il me semble que si vous êtes encore aujourd'hui dans la province de Québec, à l'intérieur du Canada, vous pouvez dire merci, parce que vous seriez peut-être beaucoup plus pauvres que vous ne l'êtes actuellement, malheureusement, avec l'actuel gouvernement péquiste.

J'entendais le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, hier matin, à l'étude des crédits, à la salle 81-A, et ce matin. Je pense qu'il a manqué sa vocation. Il a manqué sa profession. Il aurait dû entrer dans une autre vocation parce qu'avec tout ce qu'il faisait... Je n'en dirai pas plus long, je pense qu'il sait ce que je veux dire et vous autres, vous le savez aussi, ce que je veux dire. Il aurait peut-être gagné un meilleur salaire que celui qu'il gagne actuellement, malgré qu'il en gagne un bon.

Il a annoncé, ce matin, à l'ouverture de la Chambre, que la date pour l'ensemencement était reportée du 1er juin au 10 juin. Il me semble qu'il aurait pu nous le dire hier, même quelques jours avant. Comme le député de Beauce-Sud le disait, il aurait pu l'annoncer avant. D'abord, depuis quasiment un mois, il pleut presque tous les jours et ce n'est pas facile d'aller sur la majorité des terres du Québec, même si elles sont drainées. Pourquoi ne l'a-t-il pas annoncé? Non. On l'a tourmenté, on a tout fait hier pour le savoir - les députés libéraux, les députés de l'Opposition - pour que nos cultivateurs puissent dormir en paix ce soir, en parlant d'hier soir. Il ne nous l'a pas dit. Il a dit: Ce n'est pas grave; on est capable de les faire languir encore. Bien plus souvent qu'autrement, c'est pour essayer de nous ridiculiser. Quand le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation essaie de nous ridiculiser, je ne sais pas s'il se rend compte, s'il est conscient qu'il ridiculise les cultivateurs, dans le champ. Je pense qu'il y en a qui commencent à s'en rendre compte. On fait des visites, de temps à autre, dans nos comtés. Heureusement que je représente un comté rural. Il y en a qui disent: On commence à en avoir assez du - je ne dirai pas les qualificatifs qu'ils emploient, pour être poli - ministre Garon. De toute façon, il a fait comme il a voulu, il l'a annoncé seulement ce matin. (16 h 30)

Encore ce matin, le ministre a parlé du député de Beauce-Sud. Il a dit que les questions ne venaient pas toujours du député de Beauce-Sud, mais qu'elles venaient d'autres députés aussi. Je pense que c'est de

bonne guerre, parce que en agriculture il n'y a pas seulement un gars, un député qui participe à cette activité. Il y en a d'autres qui sont capables de participer, de prendre intérêt pour l'agriculteur. Le ministre disait que depuis que mon collègue a paradé lors des rencontres qu'il y avait eues pour le rapport Gilson... Je peux lui dire quelque chose au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation; j'étais là présent à la réunion dans la région de Lanaudière à Joliette à laquelle il y avait environ 250 personnes. Il est le seul, de tous les personnages qui étaient sur l'estrade, qui a voulu faire de la petite politique comme d'habitude. Il était temps qu'il arrête, parce que s'il n'avait pas arrêté je pense que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation se serait fait chahuter. Vous ne savez pas cela, mais moi j'étais présent. C'était quasiment gênant d'avoir un ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour nous représenter de la façon qu'il nous a représentés.

Il a fait de même dans d'autres localités. On a entendu Hermann Mathieu, député de Beauce-Sud, brosser un portrait de la situation, mais apolitique, comme l'UPA et les autres. Il y en a plusieurs qui l'ont fait. Ils ont été à la hauteur de la situation, mais pas le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, par exemple. Si on a gagné la cause aujourd'hui, je pense qu'il n'a pas grand mérite parce que pour moi, il aurait aimé autant qu'on ne la gagne pas pour dire après cela: Cela dépend du fédéral si on a perdu, cela dépend encore du fédéral, des gars d'Ottawa, des 74 députés libéraux fédéraux. Heureusement, on s'est impliqué nous les députés provinciaux, Hermann Mathieu en tête; et je dois une fière chandelle à Hermann Mathieu parce qu'il a su se tenir à la hauteur de la situation pour le bien des agriculteurs du Québec. Je peux vous dire cela. On l'a gagné et je pense qu'Ottawa nous a écoutés. Je ne dis pas qu'il écoute tout le temps, mais il nous a écoutés en ce qui nous concerne parce que je fais partie de l'agriculture.

On parlait de priorités. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation peut en parler des priorités. Comment peut-il faire croire à la population du Québec que le dossier des céréales était une priorité du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation alors que la Régie des grains aura dû attendre près de quatre années avant d'être enfin dotée d'une réglementation, seul instrument capable de la rendre opérationnelle? Si on fait référence au discours qu'a prononcé le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le 19 décembre 1979, lors de la deuxième lecture de la Loi sur les grains, on voit bien, encore une fois, ce que valent ces déclarations: "Nous avons démontré une volonté ferme d'agir pour développer la production céréalière au Québec, au lieu de nous contenter d'en parler", disait-il. C'est toujours le ministre Garon qui parlait. "Nous avons retenu pour la régie québécoise l'émission de permis. Nous avons l'établissement des différentes classes de grains, le contrôle de l'inspection et la classification des grains, la protection financière des différents intervenants par l'exigence de cautionnement financier pour les agriculteurs et la collecte d'information sur les prix et les qualités de céréales transigées."

Le ministre aime bien parler de "bull shit" quand il émet une opinion sur ce avec quoi il n'est pas d'accord, faire des déclarations et des communiqués de presse quand on adopte une loi et quand on nomme treize mois plus tard le président de la régie ainsi créée sur papier, recommencer le même cirque au bout de 28 mois parce qu'on modifie deux articles du projet de loi original et espérer encore pouvoir un jour lire les premières lignes de la réglementation concernée, je laisse aux personnes impliquées dans le domaine des céréales le soin de juger l'odeur que peut dégager un tel scandale de lenteur administrative. Je laisse surtout ce soin aux premiers concernés, ces agriculteurs qui attendent toujours que la régie soit en mesure de leur fournir une protection financière adéquate par l'exigence du cautionnement financier lorsqu'ils entreposent leurs récoltes dans les silos régionaux. J'aurais honte à la place du ministre de me présenter en cette Chambre aujourd'hui avec un tel projet de loi, alors que lui-même évoquait en 1979 l'urgence d'adopter la fameuse Loi sur les grains, en pleine nuit, dans les heures précédant le congé de Noël.

Maintenant que les centres régionaux sont rodés, que les producteurs savent quels sont ceux qui sont fiables et quels sont ceux qui le sont moins, que les intervenants du milieu ont du profiter de la conférence sur la politique céréalière en décembre dernier pour réitérer leur mécontentement, il semble que le ministre va enfin se décider à agir parce qu'il a déjà trop parlé. Comble du ridicule, nous sommes le 1er juin et il y a un très grand nombre de céréaliers qui ne savent toujours pas s'ils vont pouvoir semer ce printemps. Sans doute, le projet de loi no 13 se situe tout à fait dans la déchéance de l'actuel ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, à l'image d'un bilan législatif qui n'a plus rien d'impressionnant. Au contraire, cela fait pitié.

M. le Président, ce matin encore, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Jean Garon, se vantait, avec des documents en main, en disant: Vous, les libéraux, de 1970 à 1976, lorsqu'il

y avait des réclamations, vous ne les payiez pas. Nous payons les agriculteurs et nous réglons lorsqu'il y a des problèmes. J'ai de petites nouvelles pour lui. Il doit m'écouter quelque part et j'espère qu'il va en prendre bonne note. La Fédération de l'UPA de Lanaudière m'écrivait de Joliette le 29 novembre 1982: "M. Albert Houde, veuillez prendre connaissance d'un télégramme envoyé à M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec concernant le dossier d'assurance-récolte 1982. Signé, le président, Bernard Duval, UPA de Joliette."

Le télégramme se lit comme suit: "Le 29 novembre 1982. M. Jean Garon. Monsieur, "Le système collectif d'assurance-récolte est en opération dans la région de Lanaudière depuis 1979. La région a été victime en 1982 d'une importante sécheresse qui a laissé les producteurs avec d'importants déficits fourragers. Nous avons appris officiellement que la Régie des assurances agricoles du Québec n'interviendra que dans trois des sept zones de notre territoire. Si un tel système n'intervient pas dans une année comme 1982, nous nous interrogeons fortement sur sa valeur. Nous avons fait part de nos commentaires au responsable régional de la RAAQ - Régie des assurances agricoles du Québec - qui nous a répondu qu'il n'y avait rien à faire dans le dossier 1982." Je poursuis: "Il nous semble tout à fait inacceptable que des correctifs ne soient pas apportés dans le règlement des dossiers de 1982. Ainsi, nous voulons vous rencontrer dans la semaine du 6 décembre. Attendons confirmation avant vendredi, le 3 décembre 1982." Et c'est signé, toujours, par Bernard Duval, président, Fédération de l'UPA de Lanaudière.

Voici une autre lettre de la Fédération de l'UPA de Lanaudière. "Joliette, le 17 mars 1983. M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, 200A, Chemin Sainte-Foy, Québec. Objet: Producteurs en difficulté." Il dit tout le temps qu'il règle, que son gouvernement règle. "Monsieur, "Réuni le 15 mars 1983, notre conseil d'administration prenait connaissance de votre réponse à la "lettre de nuit expédiée le 2 février 1983" par M. Jacques Proulx, président de l'UPA." Jacques Proulx est le président provincial. "Nous avons été extrêmement déçus de constater que votre réponse ne répond que partiellement aux demandes formulées pour les producteurs de céréales et ne répond en aucun point aux demandes formulées pour les autres producteurs. Par la présente, nous réitérons et appuyons les demandes formulées dans "la lettre de nuit" et vous prions de réviser la réponse que vous y avez apportée. "Bien à vous, la Fédération de l'UPA de Lanaudière, Gilbert Nicole, secrétaire."

Il y a une autre lettre, adressée non seulement au député Albert Houde, mais à René Blouin, député de Rousseau; un communiqué adressé aussi à Jacques Parizeau, député de L'Assomption; une autre à Guy Chevrette, député de Montcalm; une autre est adressée à mon nom personnel. Voici la "lettre de nuit" expédiée le 2 février 1983; je vais la lire: "M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, 200A, Chemin Sainte-Foy, 2e étage, Québec? "De nombreux producteurs ont investi dans la production de céréales au cours des dernières années. Ces nouveaux producteurs ont des dettes importantes et ont, par conséquent, un coût de production plus élevé que le producteur type sur lequel les paiements de stabilisation sont basés. "Il n'y avait que 267 producteurs de céréales assurés à l'assurance-stabilisation en 1981. Les autres n'ont pu bénéficier du paiement de stabilisation de 1981. Le nombre d'assurés est monté à 2123 en 1982. Pour tous les producteurs ayant un coût de production semblable au modèle, cela veut dire un déficit en 1981 égal aux paiements de stabilisation reçus par le petit nombre d'assurés. (16 h 40) "Dans certains secteurs, la récolte de 1982 a été désastreuse à cause d'une sécheresse d'une gravité exceptionnelle. L'assurance-récolte réduit l'ampleur de la perte, mais il demeure que l'assurance-récolte ne couvre que 80% des pertes. "Le marché des céréales est moins susceptible d'un redressement brusque et d'une importance aussi grande que certaines autres productions. "Dans le climat économique général dans l'agriculture, il y a une diminution de la valeur des actifs agricoles et cela affecte encore davantage la capacité d'emprunt de ceux qui sont en difficulté. "Étant donné tous ces facteurs, un nombre important de producteurs de céréales sont, malgré les paiements de stabilisation à prévoir pour 1982, dans une situation financière précaire telle qu'ils risquent de ne pouvoir semer au printemps. "Nous croyons qu'un certain nombre de producteurs de boeuf sont également dans une situation difficile. "Nous croyons que la conjoncture actuelle est très difficile dans la production maraîchère et dans la production du tabac. "Par conséquent, nous vous demandons de mettre sur pied immédiatement un programme spécial d'assistance financière pour les producteurs en difficulté dans les productions nommées ci-haut." Le ministre sait de quoi je parle. Je lui ai parlé de la

production du tabac, hier je ne sais pas s'il se le rappellera. Peut-être qu'il pourra me répondre un jour; il ne m'a pas répondu encore parce qu'il faut croire que la production du tabac n'est pas importante dans notre région de Joliette-Berthier. On aura l'occasion de lui en reparler. Sinon, on lui fera savoir par les médias d'information écrits et parlés, si cela ne fait pas. "Ce programme devrait prendre la forme suivante: "1) Un crédit spécial aux producteurs en difficulté pour couvrir les pertes monétaires subies en 1981 et en 1982. "Ce crédit spécial devrait être sans intérêt pour assainir vraiment la situation financière des entreprises. Un crédit spécial qui ne fait que reporter les pertes et qui fait porter par les producteurs une partie importante des intérêts ne fait que repousser le problème sans vraiment le régler. Cela est particulièrement vrai dans les céréales où on ne peut attendre un redressement de marché de l'ampleur de celui auquel on a assisté dans la production du porc. "Ce crédit spécial pourrait être remboursable en cinq ans. "2) Nous croyons aussi que l'on doit offrir aux producteurs un crédit à la production ajusté aux besoins de chaque individu, mais sans dépasser les besoins de financement d'une ferme familiale dans chaque production et à un taux d'intérêt ne dépassant pas les taux sur les prêts à long terme faits par l'Office du crédit agricole. "3) La Société du crédit agricole devrait avoir une politique semblable. Nous souhaitons vous rencontrer le plus rapidement possible pour discuter de la situation des producteurs en difficulté et des moyens à mettre en oeuvre pour redresser leur situation."

C'est signé Jacques Proulx, président général de l'Union des producteurs agricoles. La lettre était adressée à MM. Ferdinand Ouellet, Jacques Brulotte, Camille Moreau, aux directeurs régionaux.

Ce n'est pas tout. Oui, M. le Président, je terminerai sous peu, si vous me donnez deux minutes.

J'ai communiqué pas plus tard que ce midi avec le bureau régional de l'UPA de Lanaudière à Joliette qui regroupe plusieurs comtés dont la région 10, l'une des plus importantes de la province de Québec, disons la deuxième en importance. Lors d'une rencontre - ce sont les renseignements que j'ai eus ce midi à Joliette - de M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation avec les dirigeants de l'UPA ici, à Québec, les 5 et 6 avril, étaient présents: M. Réjean Brulotte, président de la Régie des assurances agricoles. Par la même occasion, M. Brulotte devait produire un rapport de l'état des choses, dont je parlais tantôt, qui s'étaient passées dans la région.

Vous, M. le ministre, vous vous étiez engagé vis-à-vis de la Fédération de l'UPA de Lanaudière à étudier le dossier et à y donner suite dans les plus brefs délais pour le plus grand bien des producteurs concernés. Et ceci, toujours à la suite de la rencontre des 5 et 6 avril 1983. Nous sommes aujourd'hui le 1er juin 1983, cela fait tout près de deux mois, à 13 h 30 cet après-midi, elle n'avait pas encore eu de nouvelles du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Quand on entendait le ministre cet après-midi: "Vous, les libéraux, vous ne payiez pas, nous payons. Nous nous occupons de nos affaires." Ce que je dis, je le dis avec les preuves à l'appui, avec des lettres signées par des présidents locaux et par le président général. Je ne sais pas ce que le ministre entend faire, je ne sais pas s'il restera sourd comme d'habitude. Cela fait plusieurs fois que je lui pose des questions et la seule fois que j'ai eu une réponse, depuis le mois de décembre 1982, c'est lorsque je lui ai demandé la liste des cours d'eau de la province de Québec. Je l'ai reçue avant-hier à mon bureau. Cela fait pas mal de temps, je l'ai eue avant-hier. Je remercie le ministre, en passant, pour celle-là, mais pour le reste il ne m'a jamais répondu, il ne me répond pas.

Quand il rit du député de Berthier qui n'est peut-être pas un gros penseur, peut-être qu'il est plus gros penseur que moi, mais il ne s'occupe pas des cultivateurs. S'il ne s'occupe pas du député de Berthier, il ne s'occupe pas des cultivateurs de la région Laurentides-Lanaudière. Je peux vous dire cela, M. le Président.

En terminant, nous pensons que le ministre doit aller plus loin dans le projet de loi no 13, d'abord, en rendant obligatoire l'inspection des grains pour que les cultivateurs qui produisent du grain dans la province de Québec, d'une qualité égale à celle du grain des autres provinces, puissent être payés le même prix que les autres. À ce moment-là, j'en serai fier, et c'est pour cette raison que je voterai pour le projet de loi no 13. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Champlain.

M. Marcel Gagnon

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Le député de Berthier, lorsqu'il a commencé son discours, a dit: C'est normal pour l'Opposition de critiquer et de vouloir améliorer les lois qu'on adopte. Je pense qu'on convient tous que c'est le rôle de l'Opposition et, dans ce sens, l'Opposition a un rôle très positif à jouer. De la loi 13, la seule note qu'il a donnée, à mon point de vue, d'après ce que j'ai pu comprendre, c'est

la note finale de son discours en disant qu'il était d'accord, qu'on n'allait peut-être pas tout à fait assez loin à son goût, mais qu'il allait voter pour la loi. Tout le reste du discours a été pour critiquer le ministre, critiquer les positions du ministre dans le domaine agricole, absolument pas pour parler de la loi 13.

On sait que c'est une loi qui est importante, on sait que c'est une loi qui est tout de même assez facile à expliquer - on n'a pas à en parler pendant 20 minutes - et on profite de l'occasion, d'un côté comme de l'autre de cette Chambre, pour faire un peu une rétrospective des difficultés, en ce qui concerne l'Opposition, qu'on éprouve dans l'agriculture et, de notre côté, des avantages dont on a pu faire profiter la classe agricole depuis 1976.

Je sais que je pourrais rappeler des souvenirs au député de Berthier. Tantôt, il mentionnait qu'il était scandalisé du fait que - je n'ai pas pu le vérifier, mais je présume qu'il disait la vérité - un groupe d'agriculteurs de l'UPA de Laurentides-Lanaudière attendait une lettre du ministre depuis deux mois. C'est peut-être long, deux mois, lorsqu'on attend une réponse, je suis d'accord avec le député dans ce sens. Je voudrais rappeler à ses souvenirs qu'avant 1976, lorsque nous avons eu l'occasion de travailler ensemble - nous avons même eu l'occasion de faire du syndicalisme agricole ensemble - non seulement on attendait deux mois, mais on attendait deux ans, quatre ans. On a attendu deux termes avant qu'on se décide à faire des choses pour l'agriculture et on ne l'a jamais fait.

Dans le passé, le gouvernement a agi de cette façon. Vous vous souviendrez, M. le Président, de la colère verte. Cela a nécessité des efforts de la part du député de Berthier, de moi-même et de l'UPA. Avec l'ensemble des producteurs agricoles, nous avons barré les routes, nous avons fait à peu près tout ce qu'il était possible de faire pour sensibiliser le gouvernement de l'époque à s'occuper de l'agriculture. Je me souviendrai qu'à un moment donné le premier ministre du Québec, après quelques mois de difficultés que nous avons vécues au Québec, après des manifestations de toutes sortes, était venu à bout de s'apercevoir que l'agriculture existait au Québec.

Je pense que depuis qu'on a pris le pouvoir, depuis 1976, on a prouvé aux agriculteurs qu'on savait que l'agriculture existait, qu'on savait que l'agriculture était l'industrie la plus importante du Québec, qu'on savait aussi qu'on devait faire des efforts, améliorer tout le domaine de l'agriculture non seulement pour développer cette industrie, mais pour créer de l'emploi et améliorer le rendement des agriculteurs.

J'aimerais faire une petite rétrospective de ce qui a été fait. D'abord, vous vous souviendrez qu'on parlait beaucoup des industries agricoles - évidemment, c'était rentable en campagne électorale - mais quand il s'agissait d'adopter des lois, souvent, on adoptait des lois non pas pour plaire aux agriculteurs, mais pour ne pas déplaire aux fournisseurs des caisses électorales; on laissait les lois sur les tablettes. (16 h 50)

On a fait combien de campagnes électorales avec la protection du territoire agricole? On parlait de l'agriculture en termes d'industrie importante mais jamais on n'a pensé mettre cette industrie importante dans un parc industriel où elle serait protégée de tous ceux qui écorchaient l'agriculture de toutes sortes de façons. Cela a pris l'avènement au pouvoir du Parti québécois en 1976 pour former enfin ce parc industriel agricole. On l'a fait, nous en sommes très fiers, et je pense que pas un seul agriculteur au Québec ne voudrait revenir - pour cette loi-là entre autres - à l'ancien régime.

On s'est dit ensuite: C'est beau d'avoir un parc industriel, mais il faut mettre des industries à l'intérieur, qu'elles vivent bien. Et on a commencé à améliorer le rendement de l'agriculture. Je ne ferai pas l'énumération de la quantité de programmes qui ont été améliorés ou mis sur pied. Pensons de Sol-Plus, au drainage souterrain. Regardons les statistiques de ce qui s'est fait avant 1976 et de 1976 à 1982. Seulement dans le domaine du Sol-Plus, des travaux mécanisés, du drainage souterrain on a fait plus - et le ministre de l'Agriculture a eu l'occasion de le dire à quelques reprises - dans ce domaine-là qu'il s'en est fait de Duplessis à 1976.

Avant, entre autres dans le domaine de Sol-Plus et aussi pour le drainage souterrain, on avait fait beaucoup de patronage. On avait nos firmes, nos organisateurs, les propriétaires de "bull" qui étaient propriétaires des heures de "bull" pour les agriculteurs. Il fallait être absolument du bon côté pour être capable de profiter de quelques heures de "bull".

Aujourd'hui, un des plus grands avantages qu'on a dans le domaine de ces programmes-là, c'est qu'on a enlevé complètement le patronage. C'est maintenant l'agriculteur qui choisit son ingénieur, qui fait faire son plan, qui fait travailler qui il veut pour autant que le contremaître, que l'employé qu'on engage a l'équipement nécessaire. On a enlevé le patronage dans ce domaine-là et seulement par ce moyen-là on a multiplié énormément - je n'oserais pas dire le chiffre - le rendement du même budget. Il ne s'agit pas nécessairement d'augmenter le budget, il s'agit de savoir administrer, d'enlever le patronage.

On parlait aussi de l'assurance-récolte, l'assurance-stabilisation des revenus. Je suis

persuadé que le député de Berthier sera d'accord avec moi là-dessus. Je me souviens jusqu'à quel point on s'est battu pour demander une politique d'assurance-stabilisation des revenus. On l'a obtenue en 1975 mais elle est restée sur la tablette au ministère de l'Agriculture. Ce n'était pas rentable pour les fournisseurs de caisses électorales de protéger l'agriculture. On a obtenu la loi mais elle est restée sur la tablette.

Depuis que nous avons pris le pouvoir en 1976, dix productions sont maintenant assurées, dans le domaine de l'élevage, par l'assurance-stabilisation.

Oh! des statistiques on pourrait vous en donner comme cela. C'est incroyable de voir le changement dans le domaine agricole. Pensons donc un peu au crédit agricole; à l'intérieur de l'UPA, combien de démarches a-t-on faites, combien de représentations pour demander au gouvernement du temps de voir à moderniser le crédit agricole, à court terme, à moyen terme et à long terme. On avait même suggéré la création d'une banque de sols. On a amélioré le crédit agricole à deux ou trois reprises depuis 1976. Aujourd'hui, justement, le député de Berthier disait qu'il n'avait pas reçu de réponse de l'UPA de son comté, de sa région, concernant une demande de crédit à la production ajusté aux besoins. Probablement qu'ils ne sont pas en retard dans leurs nouvelles mais le député de Berthier est en retard parce qu'on a adopté ici même une loi qui permet maintenant un crédit à court terme pour le producteur de céréales justement, pour le producteur de boeuf, qui va jusqu'à 500 000 $. C'est quelque chose de nouveau, cela n'existait pas avant.

Voyez tout ce qu'on a fait dans le domaine agricole qui fait que lorsque les gens d'en face parlent de l'agriculture et du ministre de l'Agriculture ils deviennent rouges maintenant. Vous me direz que c'est naturel pour eux d'être rouges, mais là, on dirait que c'est rouges de rage ou rouges de honte. Ils ont honte de ne pas avoir fait plus dans leur temps. Nous, nous sommes fiers de nos programmes agricoles et nous sommes fiers de continuer d'ajouter pour l'agriculture et pour l'agriculteur québécois des programmes agricoles de plus en plus modernes, de plus en plus ajustés à nos besoins.

Tantôt, un député disait des choses incroyables; on a vraiment entendu toutes sortes de choses. On peut faire des gorges chaudes et se contredire du même souffle. Le député de Beauce-Sud prévoit que la température étant inclémente, il n'y aura à peu près pas de semences et les gens vont perdre de l'argent. Du même souffle, il prévoit que les céréales vont baisser. Je ne sais pas, j'ai passé une partie de ma vie dans ce milieu et normalement, quand on prévoit une récolte à la baisse, au moins, on peut prévoir aussi que les prix vont augmenter. Mais le député de Beauce-Sud prévoit les deux en même temps. Je vous ferai remarquer, M. le député de Beauce-Sud, que la situation du marché extérieur n'est pas tellement meilleure qu'ici. Par exemple, le climat des États-Unis n'est pas tellement meilleur qu'ici. Qu'on prévoie les mauvais côtés en même temps, une récolte à la baisse, si on peut semer, et en même temps des prix à la baisse, c'est la première fois que j'entends quelqu'un dire des choses semblables.

Le député de Huntingdon, lui, dit qu'on est même en train d'acheter des terres. C'est incroyable! On a entendu ces gens parler de faillites dans le secteur agricole, c'est incroyable! Ils ont sûrement entendu parler de faillites de temps à autres car ils ne pourraient pas, je pense, inventer des choses semblables. Je voudrais ne faire qu'une petite vérification. Les faillites dans le secteur agricole, de 1979 à 1981, sur quelque 21 000 ou 23 000 clients à l'Office du crédit agricole, en abandon et faillite, vous avez environ 169 cas; sur une période de trois ans, si vous faites le pourcentage, vous arrivez bien au-dessous de 0,5 %. C'est une situation qu'il faut corriger. C'est bien certain que lorsqu'on veut faire de l'agriculture une industrie, il y a des risques, il peut y avoir des faillites, c'est certain, mais ce n'est pas seulement à cause de la situation économique; souvent, une faillite se produira même si la situation économique est bonne. Si sur 21 000 ou 23 000 clients de l'Office du crédit agricole 169 faillites ont lieu en trois ans et qu'on crie au scandale, je pense qu'on exagère un peu.

Contrairement à ce que dit le député de Huntingdon, qu'on est en train d'acheter des terres, que cela va mal, etc., le revenu net des agriculteurs québécois depuis 1976 a doublé ou presque. En 1976, vous aviez un revenu net de 382 988 000 $ au Québec; en 1982, les agriculteurs québécois ont maintenant un revenu net de 663 010 000 $. Seulement pour l'année 1982, l'augmentation en revenu net de l'agriculteur au Québec est de 8,4 %, l'augmentation la plus forte au pays. Pourquoi tenter de faire peur aux gens en disant que ça va mal en agriculture? Cela ne veut pas dire qu'il n'y a rien à corriger, cela ne veut pas dire qu'on n'est pas prêt à entendre les critiques de l'Opposition, quand ce sont des critiques fondées, on est prêt à continuer de travailler pour améliorer la situation de l'agriculture et de l'agriculteur, mais il faudrait arrêter de croire au Bonhomme Sept Heures et surtout de tenter de faire croire au Bonhomme Sept Heures.

Nous sommes en train d'étudier une loi qui non seulement permettra de boucler la boucle, mais qui confirmera ou complétera le programme des céréales au Québec. On s'est

engagé à devenir autosuffisant dans le secteur de la culture céréalière à 70% et on y arrivera. La loi présentée pour améliorer la Régie des grains du Québec a précisément pour but de donner aux producteurs québécois la pleine mesure de leur rendement, elle a pour but de permettre aux producteurs québécois de pouvoir faire classifier leurs grains et obtenir le prix pour leur produit. C'est aussi dans le but de permettre au producteur, à celui qui consomme les céréales québécoises, à celui qui consomme les céréales qui sont cultivées par les producteurs de céréales d'obtenir la meilleure qualité possible. (17 heures)

Cela va également nous permettre de vérifier la qualité des produits qu'on achète et qui viennent de l'étranger, c'est-à-dire du reste du Canada. On a l'habitude, au Canada, de classifier les céréales de façon extraordinaire. On n'a rien à nous reprocher quand ce sont des céréales pour vendre à l'étranger, en France, en URSS, aux États-Unis. Les céréales sont bien classifiées. Quand il s'agit de céréales pour consommation locale - je le sais par expérience, pour avoir été dans le métier assez longtemps - on peut se contenter d'une qualité de beaucoup inférieure.

Donc, le projet de loi qu'on étudie aujourd'hui va donner aux producteurs de céréales, aux consommateurs de céréales, aux éleveurs du Québec, d'abord, l'assurance que, dorénavant, le produit fabriqué au Québec et le produit qu'on fait venir de l'extérieur du Québec est d'une qualité supérieure. Je vous remercie beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fabien Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Nous sommes réunis pour étudier le projet de loi no 13, loi qui vient modifier la loi no 75 qui a été adoptée en décembre 1979. C'est un projet de loi, selon les ténors de l'autre côté, extrêmement important, tellement important que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation n'a même pas été capable d'être pertinent tout au long de son allocution. Il n'a absolument pas parlé du projet de loi. Il a parlé du tonnage. Il a parlé de l'acrage. Dans le tonnage, il s'y connaît. Il a parlé de toutes sortes de choses, mais il n'a absolument pas parlé du projet de loi no 13.

M. le Président, il faut avoir un certain culot, comme gouvernement, pour se servir du Parlement, pour se servir de notre Assemblée nationale pour ne faire que mousser une politique péquiste. Ça, M. le Président, c'est de la politique péquiste. On va discuter toute la journée de ce projet de loi qui vient modifier une loi qui n'a jamais été mise en application. Cela, c'est très urgent. C'est l'urgence péquiste. Mais qu'est-ce que cela va changer à un agriculteur de mon comté dont la ferme est en train d'être saisie par le Crédit agricole? Qu'est-ce que cela va changer à un travailleur de la construction de mon comté qui est en prison parce qu'il a osé aller travailler? Qu'est-ce que cela va changer à un chômeur de mon comté qui n'a pas d'emploi? Non. Il fallait faire un spectacle et, du côté spectacle, le ministre a du talent; on l'admet, on le reconnaît. Si jamais il est défait, pas si jamais, à la prochaine élection, il sera sûrement défait et il y a sûrement des cirques qui seraient intéressés à l'engager, parce qu'il est fantastique. Il faut l'admettre.

Mais qu'est-ce que cela change de mobiliser 122 députés, l'Assemblée nationale au service des péquistes, pour parler d'agriculture? J'écoutais les intervenants de l'autre côté et pas un seul, d'ailleurs, n'a été pertinent au projet de loi. On n'a fait que vanter les mérites du ministre et on a vu très bien que, dans certains cas, on ne savait même pas de quoi on parlait. Mais on parlait pour les agriculteurs. On parlait de nos belles terres. On parlait de tonnage, d'acrage et de tout ce que vous voulez, mais on n'a pas parlé du projet de loi no 13 qui vient amender une loi - je le répète - qui n'est même pas en vigueur. Cette Régie des grains qui a été créée, en décembre 1979, par une loi, qu'est-ce qu'elle a fait depuis cette date? Absolument rien. On est déjà en train de la modifier même avant de s'en servir. Imaginez le jour où on tentera de la mettre en application. On arrivera avec d'autres projets et cela donnera l'occasion de faire croire à nos agriculteurs que le Parti québécois s'occupe d'eux, que le Parti québécois a inventé l'agriculture au Québec. Mais qu'est-ce que cela change? Je le répète. Pour l'agriculteur de mon comté qui est pris, qui n'a pas le droit de laisser son fils se construire chez lui à cause de la loi no 90, à cause de l'autre loi no 12 qui s'en vient et qui va restreindre encore davantage ce droit, qu'est-ce que cela va changer? Est-ce que c'est cela l'urgence au Québec?

C'est évident, M. le Président, qu'on va voter pour ce projet de loi, parce que c'est un projet de loi inoffensif. Il n'y a absolument rien là-dedans. On ne peut pas voter contre ce projet de loi, il n'y a absolument rien. Mais je dis que ce ne sont pas les préoccupations des agriculteurs en ce moment. En ce moment, les agriculteurs ont besoin d'autre chose. Ils ont besoin d'être rassurés. Il y a des cas, chaque semaine; des gens viennent me rencontrer; ils ne sont pas capables de faire les paiements sur leurs fermes, tout simplement parce qu'ils ont eu des taux d'intérêt élevés et que l'Office du

crédit agricole semble assez intransigeant. On n'hésite pas à saisir la ferme d'un agriculteur. Ce n'est pas la faute du ministre, c'est la régie qui a fait cela. Ce n'est pas ce qu'on demande au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. On lui demande de s'occuper de tous les problèmes des agriculteurs. J'écoutais le ministre, le peu que j'ai pu comprendre de son discours parce qu'il a parlé de toutes sortes de choses, il faut reconnaître chez les agriculteurs un fiasco financier. Ce n'est pas un secret de polichinelle que nos producteurs de sirop d'érable qui ont eu des subventions pour faire des installations extrêmement dispendieuses sont pris à ne pouvoir vendre leur sirop parce que le ministre n'avait pas pensé d'ouvrir un marché. Il n'avait pensé qu'à subventionner, qu'à envoyer un chèque avec la fleur de lis pour tenter de s'assurer la sympathie de ces producteurs, s'assurer de la reprise du pouvoir en 1981.

Je me demande pourquoi on parle de planification, je me demande si de l'autre côté ils savent ce que cela veut dire la planification. Ce n'est pas la première fois qu'on modifie des lois qui n'ont jamais été mises en application. On a voté une loi disant qu'il n'y a plus de retraite à 65 ans. Quelques mois après, on vote une loi et on dit ce n'est plus 65 ans, mais à 60 ans. On ne sait pas, peut-être qu'à l'automne on aura une loi pour porter la retraite à 55 ans et s'il pouvait baisser plus, peut-être que j'aurai la chance de prendre la mienne.

M. le Président, c'est dommage que ce parti politique, que cette formation politique qui forme le gouvernement n'ait aucune espèce de respect de notre institution parlementaire. Je vois la députée de Johnson qui admire son ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Moi, je l'admire bien moins que vous, Mme la députée de Johnson, votre ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et j'ai des agriculteurs dans le comté de Mégantic-Compton qui ne l'adorent pas non plus. Je peux vous assurer cela.

C'est dommage que cette formation politique n'hésite pas à mobiliser, comme je l'ai dit, 122 députés de l'Assemblée nationale pour faire du spectacle, pour faire de la publicité péquiste. Ils vont faire les manchettes encore. On a parlé d'agriculture. Cela veut dire quoi pour l'agriculteur? J'aimerais cela, oui, qu'on parle d'agriculture et qu'on dise qu'à compter de la sanction de cette loi, les agriculteurs pourront faire cela. Mais là, ils vont faire quoi? Cela modifie la Régie des grains qui a été constituée, formée en 1979, mais qui n'a jamais été mise en application. Allo l'urgence! Nous sommes en session intensive, probablement qu'on nous fera siéger jour et nuit pour pouvoir encore une fois lancer des mots, des paroles, des slogans qui vont donner quoi? Absolument rien.

Puisque les autres n'ont pas été pertinents, vous me permettrez de ne pas l'être davantage et d'en parler un peu de ce ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, qui est censé être au service des agriculteurs. Je vous dirai que depuis deux ans - on a parlé tout à l'heure d'un délai de deux mois, moi ce n'est pas deux mois - j'adresse continuellement des lettres à ce ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et je ne reçois que des accusés de réception. Je téléphone, il n'est pas présent. Son chef de cabinet n'est pas là. Il est en réunion. On est censé me rappeler le lendemain. On ne rappelle pas. Et pourquoi je veux rejoindre le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation? Tout simplement parce qu'il est venu faire des promesses dans mon comté. Il est venu promettre des subventions à des expositions agricoles. Je voudrais qu'il respecte ces engagements. Là, le ministre ne répond plus. Il n'est plus là. Il est là parce qu'on le voit de temps à autre. J'aimerais qu'il donne suite à mes revendications pour que je puisse dire quelque chose aux gens qui m'ont référé leurs problèmes. Que je puisse dire oui, cela marche ou non cela ne marche pas. Mais non, il est probablement à pondre ou concevoir d'autres projets de loi du genre du projet de loi no 13, qui fait une belle publicité à la télévision, qui risque de faire les manchettes - cela se peut parce qu'on a parlé d'agriculture - mais qui donne quoi à nos agriculteurs? Absolument rien.

C'est cela que je déplore de la part du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je ne le déplore pas seulement de ce ministre, c'est la même chose pour tout le gouvernement au complet. On annonce quatre fois le même projet. On fait conférence de presse sur conférence de presse pour finalement en arriver avec absolument rien. Tout récemment, on promettait - dans mon comté, encore une fois - des investissements sensationnels à East Angus. Savez-vous depuis combien de temps on le promet? Ce n'est absolument pas fait. Ce n'est pas le projet de loi...

J'écoutais la députée de Johnson qui avait le projet de loi no 13, qui vibrait avec cela, dire: mon Dieu que cela va donc changer et qu'on va donc améliorer nos céréales au Québec et notre production va toute être changée! Je regrette, mais cela ne va changer absolument rien si on ne commence pas à la base, par la mise en application d'abord de la loi 75 créant la Régie des grains. (17 h 10)

M. le Président, je serai bref, parce que - je l'ai mentionné - cela ne sert à rien de parler 25 minutes sur un projet de loi semblable qui ne veut absolument rien dire -

à mon avis, il n'est pas mauvais - parce qu'il va amender une loi qui n'a jamais été mise en vigueur. Au nom des agriculteurs du Québec, ce n'est pas ce que je réclame de la part du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je réclame de vraies mesures favorisant l'agriculture au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Pour ne pas induire qui que ce soit en erreur, actuellement, le temps d'intervention est de 20 minutes simplement. M. le député de Beauharnois.

M. Laurent Lavigne

M. Lavigne: Merci, M. le Président. Comme vous avez pu le constater, je ne suis pas un gars qui intervient souvent en Chambre, parce que je trouve que les travaux de la Chambre sont précieux et je voudrais que plus souvent on intervienne seulement quand c'est vraiment nécessaire. Je trouve que pour ce qui est de l'agriculture, quand on considère ce qu'elle était quand on est arrivé en 1976 par rapport à ce qu'elle est maintenant, cela vaut la peine de prendre la parole en cette Chambre et d'en dire quelques mots. On a évidemment à discuter aujourd'hui du projet de loi no 13 qui va permettre à la Régie des grains de classifier les grains et de voir à leur qualité au Québec. Je pense que c'est là un projet de loi qui est nécessaire. Ce n'est pas tout de voir à produire différentes denrées, mais il faut voir à ce que ces denrées soient de la meilleure qualité. Donc, c'est un projet de loi qui s'inscrit dans la poursuite de notre travail en ce qui a trait à la promotion de l'agriculture et je pense que ce projet de loi a sa place.

Si on fait une brève rétrospective de ce qu'était l'agriculture au Québec quand nous sommes arrivés en 1976, il y avait un projet de loi qui, à mon avis, était fondamental et que nous devions adopter, sans quoi tout le reste n'aurait été que fumisterie et incohérence. C'est un projet de loi qui était sur les tablettes au temps du Parti libéral. Je veux parler ici de la loi 90 sur la protection du territoire agricole. Je pense que c'est une loi qui est fondamentale; elle est l'assise de toute l'agriculture. Cela ne sert à rien de donner de l'aide aux agriculteurs et de promouvoir l'agriculture si on n'est pas sûr de notre banque agricole et de ce que doivent devenir nos terres agricoles. La Loi sur la protection du territoire agricole était devenue une nécessité. Elle donnait à tous les gens du Québec, finalement, l'obligation de respecter le territoire agricole. Cela aurait été incohérent de poursuivre nos démarches et de continuer à faire bénéficier les agriculteurs de subventions pour faire du drainage agricole, construire des silos sur leur ferme ou tous autres travaux d'investissement si le fonds de terre n'avait pas été assuré pour le maintien de l'agriculture. Autrement, qu'est-ce que cela aurait donné de mettre des drains agricoles dans les terres pour qu'elles produisent davantage si un constructeur achète ces terres, y met les "bulls", les pelles mécaniques et les divise en lots, ce qui veut dire que les silos sont ni plus ni moins gaspillés que les drains sont gaspillés que les heures de "bull" qu'on a mises sur le défrichage ou sur le creusage des fossés sont gaspillées. Donc, cela ne servait à rien de promouvoir des programmes ou de faire en sorte qu'il y en ait de plus en plus pour aider les agriculteurs si on ne pouvait pas garantir notre sol agricole. Il y avait aussi un éparpillement qui était illogique. On construisait un peu partout sur le territoire du Québec et, souvent, on construisait aussi sur nos terres agricoles. Cela nécessitait une infrastructure qui demandait de l'éclairage, des trottoirs, des égouts et des aqueducs. On se répandait un peu partout sur le territoire. Donc, la loi 90 vient, en harmonie avec la loi 125, faire en sorte que le territoire du Québec soit mieux contrôlé. La partie agricole doit demeurer agricole, parce que je pense qu'un pays doit voir d'abord à se nourrir. L'agriculture est un domaine fondamental.

Si on regarde la promotion qu'on a faite de cette agriculture en collaboration avec les meuniers, avec les agriculteurs eux-mêmes, que ce soit dans l'élevage, que ce soit dans la production des grains, le ministre Garon a donné ce matin des chiffres mirobolants, quand on compare ce qui existait en 1976 et ce qui existe maintenant.

Je me souviens que l'une des premières démarches que j'avais faites, un des premiers dossiers que j'ai eus, c'est en 1976. Dans mon comté, à Valleyfield plus particulièrement, on a une distillerie qui s'appelle la Distillerie Schenley, qui utilise énormément de maïs tous les ans pour faire des boissons. J'étais allé rencontrer les directeurs de la Distillerie Schenley pour leur demander où ils s'approvisionnaient en maïs-grain. On me disait qu'ils s'approvisionnaient presque à 100% en Ontario ou aux États-Unis. Je leur ai demandé, étant donné qu'on avait des producteurs de maïs dans la région, pour quelle raison la compagnie n'achetait pas du maïs-grain local. On m'a répondu à ce moment que c'était parce que les producteurs ne pouvaient pas lui assurer un approvisionnement régulier pendant les douze mois de l'année. Les agriculteurs, quand arrivait l'automne, le temps de la récolte, avaient énormément de maïs, mais vu qu'il n'y avait pas de moyens d'entreposage, qu'il n'y avait pas de silos pour entreposer leur grain, voyaient à s'en défaire, à le vendre le plus rapidement

possible. Il arrivait donc que la Distillerie Schenley pouvait s'approvisionner chez nous pendant la période de la récolte, mais en janvier, février, mars et les autres mois de l'année, on manquait de maïs. C'est donc la raison pour laquelle ils devaient s'approvisionner à l'extérieur.

Depuis que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a instauré le fameux programme d'aide à la construction des silos d'entreposage de maïs, j'ai revu la situation. Tout d'abord, les agriculteurs ont profité de ce programme. Quand on se promène dans le comté de Beauharnois, on voit que la plupart des agriculteurs, se sont dotés de silos d'entreposage pour le maïs et les grains de provende. Aujourd'hui, j'ai revu la compagnie Schenley et le pourcentage est complètement renversé. Elle achetait en 1976 environ 10% de maïs local et 90% de maïs à l'étranger. Aujourd'hui, le chiffre est complètement à l'inverse. Elle achète présentement environ 90% du maïs local et 10% à l'extérieur. La raison pour laquelle elle peut faire cela maintenant, c'est grâce à une plus grande production de maïs, d'une part, et à la capacité qu'ont aujourd'hui les cultivateurs d'entreposer leur maïs et de fournir à leurs clients du maïs douze mois par année.

Je pense que c'est le résultat d'une politique pensée, d'une bonne aide aux agriculteurs en ce qui a trait à la mise en place du programme de silos d'entreposage.

Cela a été un peu la même chose au niveau de tous les programmes Sol-Plus. On sait - et la preuve a été faite à maintes reprises - qu'une terre qui est drainée donnera un bien meilleur rendement. On peut commencer la saison plus tôt le printemps et poursuivre nos travaux un peu plus tard l'automne et, en plus de cela, le rendement est nettement supérieur. Ce qui fait que l'aide qu'on a apportée aux agriculteurs par le programme de drainage des terres a été très efficace, ce qui fait aussi que, dans le comté de Beauharnois, il n'y a presque plus de terres à drainer parce que tous les cultivateurs ont pu bénéficier du programme d'aide du gouvernement. C'est un peu la même chose pour le drainage souterrain et les cours d'eau.

Quand on regarde le paysage agricole du Québec dans l'ensemble - en plus de mon comté, je voyage de Valleyfield à Québec chaque semaine - on a vu se métamorphoser tout le paysage agricole. C'est aussi un peu à cause du fameux programme de défrichage et du programme d'heures de bulldozer, comme on l'appelle, pour permettre aux agriculteurs de couper les coteaux, de couper les arbres et de faire en sorte qu'aujourd'hui, on n'ait plus que des petites pièces, mais de grands champs bien aménagés, bien cultivés. C'est là un paysage complètement différent. Si c'était si pénible, comme le disent les libéraux, d'être agriculteurs aujourd'hui...

Quand les libéraux ont parlé tout à l'heure du projet de loi, ils disaient que les agriculteurs sont voués à la faillite, que le Crédit agricole les égorge, que ce n'est pas payant d'être agriculteur, qu'en tout cas, c'est le marasme dans l'agriculture, qu'il n'y a rien de pire que d'être agriculteur au Québec. Pourtant, s'ils avaient raison, on ne verrait pas le paysage agricole se métamorphoser du pire au mieux, on verrait les agriculteurs péricliter, les agriculteurs produire moins, avoir moins de vaches, moins de lait, moins de porcs, moins de grain. Mais quand on regarde les chiffres, ce ne sont pas des chiffres que nous inventons, chaque année, depuis 1976, grâce à tous les programmes que nous avons mis de l'avant pour aider les agriculteurs à voir à la promotion de l'agriculture et de leurs productions, on constate des augmentations partout. On a un plus grand acrage en culture; les terres sont mieux drainées, sont mieux égouttées; il y a des silos pour entreposer les grains. Il y a une foule de programmes qui ont permis aux agriculteurs de se sortir du pétrin. (17 h 20)

Anciennement, il n'y a pas si longtemps, on appelait le Québec "la terre de Caïn". Aujourd'hui, je pense que la terre de Caïn est en train de devenir la terre d'Abel, parce que les gens sont heureux de cultiver au Québec. À cause de toutes les mesures qui ont été mises de l'avant, on voit la différence entre ce qu'il y avait et ce qu'il y a maintenant.

C'est un premier pas que nous avons fait dans l'agriculture. Bien sûr, il y a encore d'autres mesures à apporter, on ne peut pas tout faire en même temps, mais on a posé les premiers jalons d'une saine agriculture, d'une saine gestion agricole. Avec la coopération de tous les agriculteurs, je pense qu'on s'en va dans le bon chemin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Maskinongé et whip de l'Opposition.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je pense qu'il n'est pas donné à tout le monde de connaître les us et coutumes de l'Assemblée nationale, pas plus qu'il n'est donné à tout le monde de voir de quelle façon les députés sont appelés à travailler, ici à l'Assemblée nationale. Je pense que le corridor est assez large, le ministre de l'Agriculture nous l'a ouvert ce matin avec le discours qu'il a prononcé, où il a parlé de tout, sauf des grains. Quelqu'un qui connaît le moindrement les travaux de la Chambre se rend compte que ce que nous faisons

présentement, c'est du marketing, de la publicité non seulement de la part du ministre de l'Agriculture, mais de la part du gouvernement.

Nous avons devant nous un projet de loi, comme d'autres, d'ailleurs, que nous avons étudiés en agriculture - rappelons-nous les projets de loi nos 112 et 133, je pense, que nous avons étudiés dernièrement - qui fait l'unanimité de cette Chambre. C'est l'unanimité de cette Chambre au point de vue du projet de loi. Les modalités, les règlements, la façon de procéder, c'est sûr que ça vient apporter des divergences d'opinions de part et d'autre de cette Chambre. Comme projet de loi, ça fait l'unanimité de la Chambre.

J'entendrai le leader parlementaire du gouvernement nous dire, dans une semaine et demie: M. le Président, nous avons encore 15, 17 ou 19 lois à étudier. On sait qu'hier on en a déposé une vingtaine, vingt lois, trois lectures chacune, commissions parlementaires pour l'étude article par article, et il reste à peine quinze jours de session, si on considère que le règlement sessionnel stipule qu'on doit terminer le 21; moins les samedis et les dimanches, il reste une quinzaine de jours de session. On nous dira bientôt: Il reste encore 15, 17 ou 19 lois à adopter, et le Parti libéral du Québec fait en sorte, dans certaines lois, de retarder les travaux de la Chambre, il fait de l'obstruction dans certains cas.

Drôle de coïncidence, pour encenser le ministre de l'Agriculture, on choisit exactement le bon temps, on choisit le jour, on choisit une période où on va parler beaucoup. De plus, la stratégie de ce gouvernement, entendue derrière les rideaux, derrière le fauteuil du président, c'est qu'il faut parler beaucoup, de sorte que, si les libéraux, parce qu'ils sont d'accord, ne parlent pas beaucoup, on dira que les libéraux n'ont rien à dire du côté agricole. Cela, c'est de la stratégie.

Quand il sera 22 heures, ce soir, on va apporter des projets de loi controversés, contestés tels que le contrôle intérimaire qui fait en sorte que de nombreux citoyens du Québec ne peuvent pas se construire à cause des lois dans le domaine municipal adoptées par ce gouvernement. Mais on pourra parler de cela après 22 heures, ce soir. Je me rappelle avoir parlé avec quelqu'un qui occupe un poste dans ce gouvernement, qui me demandait aujourd'hui: Avez-vous l'intention d'avoir beaucoup d'intervenants, ce soir, sur la loi? On a dit: On a six ou sept intervenants. Tant que cela? Il me semble que ça devrait être adopté rapidement. C'est sûr, la stratégie de ce gouvernement est la suivante: quand ce n'est pas controversé et qu'on veut faire du marketing, quand on veut encenser un gars qui a besoin d'être encensé tout le tour, on fait cela de jour et on fait parler beaucoup de monde. Mais quand arrive un projet de loi controversé, on dit à l'Opposition: Vous ne devriez pas parler autant, on devrait s'entendre pour parler seulement un de chaque côté et passer cela rapidement parce qu'il y a des citoyens qui sont lésés par ce projet de loi. C'est la stratégie de ce gouvernement-là.

J'écoutais tantôt le député de Champlain, mon bon ami et collègue, voisin de comté ou à peu près, qui mentionnait que les libéraux avaient honte et rougissaient de honte en certaines occasions concernant les lois agricoles. Il ne sera jamais possible de venir aussi honteux et aussi rouge de honte que lorsque le ministre de l'Agriculture a fait une apparition à Trois-Rivières au sommet économique où non seulement le député de Maskinongé, libéral par surcroit, a eu honte, a rougi mais où trois ministres -je le dis et je les nomme à part de cela. Ils soulèveront une question de privilège si ce n'est pas vrai et je prendrai à témoin tous ceux qui assistaient à ce sommet économique - le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional le ministre de l'Énergie et des Ressources par surcroit ministre responsable de la région et le ministre des Transports. Tous les gens qui étaient là étaient tout simplement déboussolés de voir jusqu'à quel point le ministre de l'Agriculture des Pêcheries et de l'Alimentation est arrivé là Gros-Jean comme devant, sans aucune notion de ce qu'était un sommet économique et dans le but de rire à peu près de tout le monde et essayer de bouffonner sur de la politicaillerie alors que tout le monde s'était entendu pour ne faire aucune politique, aucune politicaillerie et tenir ce sommet à un niveau élevé.

Rouges de honte comme ces trois ministres-là, il n'y aura jamais un libéral assez rouge et assez honteux pour faire voir ce qu'est la honte et ce que c'est que d'être rouge de honte. Rouges de honte comme certains députés qui sont assis en cette Chambre présentement, qui font partie de la région de la Mauricie où ils ont dit: C'est épouvantable de voir la façon dont il est arrivé. Assez qu'à la fin du sommet on a senti le besoin, du côté du gouvernement, de demander au ministre de l'Énergie et des Ressources de prendre la parole, même si cela avait débuté une journée et demie avant, afin de corriger certains faits. Il a dit: Le Conseil des députés du Parti québécois, et ce, géographiquement, c'est sept comtés sur huit, M. le Président...

M. Baril (Arthabaska): Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril (Arthabaska): Je pense que

mes privilèges en cette Chambre sont atteints parce que le député de Maskinongé a parlé des députés de la région qui étaient présents au sommet économique de la région 04 et qui avaient eu honte de notre ministre de l'Agriculture.

J'aimerais rectifier certains faits très rapidement. Nous n'avons pas eu honte comme tel du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation loin de là. Ce qui nous a déçus c'est que le ministre ne nous ait pas semblé prêt à prendre une décision positive dans le dossier des ventes par enchères spécialisées à Drummondville. C'est de là que vient surtout la déception des ministres et des députés et non sur la façon d'agir du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Je pense que je n'ai pas besoin de démontrer à la population jusqu'à quel point ces gens-là ont eu honte. Le député d'Arthabaska vient de le démontrer.

M. Baril (Arthabaska): Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Question de privilège, M. le député d'Arthabaska.

M. Baril (Arthabaska): J'ai bel et bien dit que je n'ai pas eu honte de mon ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. J'ai tout simplement été déçu comme d'autres de mes collègues et d'autres participants du sommet, de constater que le ministre n'était pas prêt à prendre une décision positive sur un dossier précis. D'être déçu et d'avoir honte d'une personne, il me semble qu'il y a toute une différence et je demanderais au député de Maskinongé de ne pas...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Votre question de privilège étant acceptée, M. le député de Maskinongé, vous savez qu'il n'y a pas de débat sur une question de privilège...

M. Picotte: Je n'en ai pas fait, moi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Non, je le sais, jusqu'à présent je ne vous dis pas qu'il y a eu un débat, mais vous avez maintenant la parole, en ne revenant pas sur ce qui pourrait être la même chose.

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que je n'ai pas soulevé de question de privilège, j'ai eu honte. Je prends la parole du député d'Arthabaska qui dit ne pas avoir eu honte comme tel, comme il l'a dit tantôt: Je n'ai pas eu honte comme tel.

(17 h 30)

M. Baril (Arthabaska): Je n'ai pas eu honte...

M. Picotte: Mais j'ai été déçu honteusement par le ministre de l'Agriculture. Il a fait honte à tout le monde. Ce n'est pas compliqué, je vous le dis. Il ne s'agira que de vérifier. Demandez-le, informez-vous dans toute la région. Je peux même vous nommer des journalistes qui vont vous le mentionner. Mais, de toute façon, ça n'a pas d'importance, il fait honte à tout le monde, le ministre de l'Agriculture. On lui a demandé de s'en retourner rapidement, et cela a été heureux pour le sommet économique. On a eu des résultats positifs aussitôt que sa sainte personne eut disparu de la place.

C'est ce genre de stratégie qu'on nous présente. On fait ce qu'on appelle l'opération marketing. J'ai honte et je suis déçu pour les agriculteurs du Québec qu'on les traite ainsi. Je suis déçu pour les agriculteurs du Québec qu'on organise ici, à l'Assemblée nationale, une stratégie. Si on fait tous ces beaux discours à l'Assemblée nationale, c'est seulement au nom de la stratégie péquiste. Tout le monde est d'accord sur ce projet de loi. On aurait donc pu dire: première, deuxième, troisième lecture, adopté, prendre quelques minutes pour faire l'étude article par article et tout le monde aurait été heureux. Mais on fait de la stratégie sur le dos des agriculteurs. On se dit: Cela va faire bien d'en parler. Ils croient que c'est doux aux oreilles des agriculteurs d'entendre, de temps en temps, parler de politique agricole à l'Assemblée nationale, politique qui, à toutes fins utiles, n'avance à rien et ne veut rien dire.

Rappelons-nous qu'en 1979 on a étudié une loi ici, à l'Assemblée nationale, traitant des grains. Le ministre de l'Agriculture s'était littéralement garroché en l'air pour nous vanter la Régie des grains du Québec, pour nous dire que ça allait être bon, être beau, être grand pour les agriculteurs du Québec, en 1979. Le ministre de l'Agriculture est à l'image du ministre de l'Éducation, en plus "slow", il se hâte lentement. En 1979, ça pressait de faire des discours pour voter une loi sur les grains. Voici ce qu'on peut lire, en 1981-1982, dans le rapport annuel de la Régie des grains du Québec pour laquelle on a voté, alors que le ministre se dépêchait et qu'il avait jeté beaucoup de poudre aux yeux des agriculteurs du Québec. En plus de cela, c'était dans le temps des fêtes, cela s'est fait rapidement, à la fin de la session. Enfin, le drame de la Régie des grains du Québec, et, par extension, ce que vivent de plus en plus consciemment les agriculteurs du Québec, est décrit à la page 5 du rapport mentionné, le

rapport de la Régie des grains 1981-1982.

Je vous lis ce qui est dit dans le rapport: "Notons que le président fut nommé et entra en fonction au début de février 1981, alors que la loi avait été sanctionnée le 21 décembre 1979." Deux années de pétage de bretelles inutile. Cela a été voté le 21 décembre 1979 en vitesse, rapidement; un déluge de mots dans un désert d'idées, à l'image de la tête du ministre de l'Agriculture. En 1981, on a nommé le président. Il est entré en poste le 1er février 1981. Comme si ce n'était pas suffisant, on nous dit, en page 21 du même rapport, que "la réglementation permettant l'application de la loi sur les grains étant en élaboration, la Régie des grains du Québec n'a eu, pour l'exercice financier 1981-1982, que des activités administratives".

On a ainsi nommé des amis péquistes à des postes pour leur donner un salaire, on a dépensé de l'argent en location de bureaux et rien d'autre que cela. Pas de réglementation de prête. Ce qui était vrai le 31 mars 1982 l'est encore le 1er juin 1983. De 1979 à 1983, on nomme des amis péquistes à des postes, on leur donne des jobs, on ne leur donne pas de budget, on n'a pas de réglementation, rien dans le champ, rien ne se passe pour l'agriculteur du Québec.

J'ai entendu les divines brailleuses et les divins braillards, nos amis d'en face, qui sont passés avant nous, ces grands sauveurs des agriculteurs qui font tout en leur pouvoir pour que cela fonctionne en agriculture. Du tape-à-l'oeil, M. le Président, du trompe-consommateur, du piège-agriculteur. C'est cela qu'on donne aux agriculteurs. À part cela, absolument rien. Cela permet au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de revenir se péter les bretelles, quatre ans après, pour nous dire qu'il faut que, dans le projet de loi, il change deux petits articles, une couple d'articles, oui, deux articles dans la loi. On fait toute une opération de marketing. On va être une quinzaine à parler là-dessus, à l'Assemblée nationale, pour changer deux articles de la loi, quand cela a pris des années à nommer le président de la régie. Et on travaille pour les agriculteurs. Quelle farce monumentale!

Quel genre de ministre de l'Agriculture! À quel discours a-t-on eu droit! Je prends à témoin tous ceux qui ont pu écouter son discours, ce matin. Non seulement le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est vide de sens, non seulement il n'a rien à dire, mais il n'est même pas professionnel comme député. J'entendais dire par le ministre, à propos de rien, ce matin: Dans Vaudreuil-Soulanges, M. le Président, on a dépensé tant d'argent et, dans tel coin, on a dépensé tant d'argent. En parlant de Vaudreuil-Soulanges, je me souviens de l'époque où il y avait un député présent dans le comté de Vaudreuil-Soulanges, c'était celle qui vous a précédé. Je l'ai connue, M. le Président. Je ne la changerais pas pour celui qu'on a aujourd'hui, et loin de là. Les électeurs de Vaudreuil-Soulanges ne la changeront pas non plus. Elle ne reviendra plus jamais ici de sa vie.

Une voix: Barrez les portes!

M. Picotte: C'est parce qu'elle n'était jamais là, M. le Président, dans le comté de Vaudreuil-Soulanges. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en professionnel, en politicien qu'il est, se permet de garrocher cela à gauche et à droite, sous prétexte que son genre de bouffonnerie, ses farces monumentales à l'Assemblée nationale font rire des gens. C'est juste cela. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. le Président, vous le savez, parce que vous êtes un agriculteur, aurait pu, en cinq minutes, ce matin, s'il avait été professionnel, s'il avait été "fair play", comme on dit, s'il n'avait pas eu la tête vide au moment où il a fait son discours, s'il avait eu quelques idées - s'il avait fait cela, vous savez très bien qu'en cinq minutes, M. le Président, il aurait pu le faire - nous dire tout simplement ce qu'était son projet de loi pour corriger ces deux articles. Rien que cela. Juste cela, et tout ce beau monde aurait été d'accord. Savez-vous qu'on serait rendu pas mal loin dans nos travaux de la journée? On aurait probablement une couple de projets de loi d'entamés et on aurait fait avancer passablement les travaux de la Chambre. C'est lui, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Ce n'est personne d'autre. Je n'ai plus aucune sympathie pour ce ministre. Je n'ai plus aucun respect - je m'excuse - pour ce ministre. Tant et aussi longtemps qu'il va se comporter en gamin, en bouffon, je ne peux pas avoir de respect pour un homme semblable.

Ce qui m'inquiète le plus, M. le Président, c'est qu'on ne réalise pas, par cette opération de marketing, que le ministre se moque et rit des gens de l'Assemblée nationale, à toutes fins utiles. Quand je regarde tous les députés en cette Chambre, tous ceux qui, depuis que la loi a été amendée, ont eu des postes d'adjoint, de whip et de whip adjoint, etc., on peut se permettre de faire rire de nous autres par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. On est payé un bon salaire pour tâcher d'endurer un peu les risées du ministre. Mais ce que j'accepte moins -j'imagine que tous mes collègues vont souscrire à cela - c'est quand on procède de la façon dont agit le ministre de

l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. À toutes fins utiles, on rit des agriculteurs qui ne sont pas ici pour réaliser que le ministre rit d'eux tout simplement par son plan de marketing. C'est cela qui me déçoit le plus. Quant à moi, le ministre peut rire de moi tant qu'il voudra; cela ne me fait pas un pli sur la différence et cela ne me dérange pas du tout. Plus le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation va rire des députés en Chambre et plus il va faire ce qu'il voudra. (17 h 40)

Cet homme-là n'a aucune valeur à mes yeux, cela ne me dérange aucunement. Mais, au nom des agriculteurs du comté de Maskinongé, par respect pour mes agriculteurs à moi, si les autres ne veulent pas en faire, autant par respect pour les agriculteurs de la Mauricie, par respect pour les agriculteurs des gens de l'Opposition, si les autres ne veulent pas s'associer à nous, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, arrêtez donc de rire des gens. Vous avez un petit projet d'amendement qui touche à deux points précis. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, vous pouviez faire cela en deux minutes, vous auriez eu notre consentement. À l'avenir, M. le ministre, continuez à rire de tous les députés en cette Chambre, on est payé pour endurer cela, ne riez plus des agriculteurs, adoptez cela rapidement, c'est dans le champ qu'il faut que cela fonctionne et, s'il y a un gars qui peut comprendre cela, c'est vous-même, M. le Président. Pour autant que cela marche dans le champ, laissons le ministre "bouffonner" à sa guise. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, votre droit de réplique.

M. Jean Garon (réplique)

M. Garon: M. le Président, mes propos seront brefs. C'est pour cela que, même s'il reste une quinzaine de minutes avant la suspension, ce sera suffisant pour répondre aux propos de l'Opposition, puisque beaucoup de ces propos ont été un peu incohérents, et je prends à témoin, avec ses derniers propos, le député de Maskinongé. Je n'ai pas beaucoup à répondre à ce genre d'arguments dont le député de Maskinongé s'est fait le spécialiste. Que voulez-vous? Il y avait autrefois dans les cours royales ce qu'on appelait le fou du roi. On peut bien, sur 122 députés, avoir un député qui joue ce rôle ici, en cette Chambre. Je prendrai simplement la peine de répondre à certains arguments qui ont été apportés et qui pourraient induire la population en erreur.

Tout d'abord, le député de Berthier a mentionné qu'il y avait eu des représentations des producteurs agricoles de Lanaudière concernant des modifications à l'assurance-récolte. Je dois dire que, contrairement à ce qu'il pense, les modifications ont été faites, le décret a été adopté récemment et, bientôt, 77 producteurs de Lanaudière recevront 126 117 $ et 89 producteurs de la rive sud recevront 73 661 $. Encore une fois, le frappeur de relève qu'est le député de Berthier a frappé dans l'air, il a été passé dans la mitaine.

Les agriculteurs qui nous avaient fait des représentations pour ces régions avaient de bons arguments. Il y avait des modifications à apporter pour tenir compte davantage des années les plus représentatives plutôt que d'années exceptionnelles. Nous avons tenu compte de ces moyennes et nous avons trouvé que l'argumentation se défendait. C'est pourquoi nous avons acquiescé aux demandes qui nous ont été faites par l'Union des producteurs agricoles de Lanaudière et les représentants des agriculteurs qui nous ont rencontrés, parce que c'était une demande qui était pleine de bon sens. Les modifications ont été faites et cela a été approuvé par le Conseil du trésor et le Conseil des ministres récemment. Les chèques devront être expédiés incessamment. J'avais pris cet engagement lors d'une rencontre avec l'Union des producteurs agricoles au mois d'avril. Donc, les choses n'ont pas traîné. Cela s'est fait rapidement et tout cela s'est fait correctement.

Le député de Beauce-Sud ne suit pas suffisamment les Débats ou ne suit pas beaucoup la production céréalière quand il dit que les prix sont à la baisse. Il devrait savoir - et tout le monde le sait - que les prix sont à la hausse. Je suis persuadé que les gens qui ont écouté le discours du député de Beauce-Sud, quand il a parlé des grains, savent qu'actuellement, depuis quelques semaines, les prix sont à la hausse dans le secteur des céréales. Pour l'ensemble des céréales, on peut dire que les prix sont à la hausse depuis un certain temps et non pas à la baisse. Quand le député de Beauce-Sud dit aussi qu'il faudrait que tous les grains soient classés au Québec, c'est-à-dire classés par un inspecteur, etc., il veut le gros "kit". Mais, après cela, si on avait adopté une telle position, il aurait dit: La bureaucratie, la réglementation, cela va coûter cher, etc.

Nous avons choisi, par ce projet de loi, M. le Président, de faire en sorte que ce qui va être adopté est le système le moins onéreux possible, celui qui va susciter davantage la confiance entre les acheteurs et les vendeurs pour qu'il y ait un classement à l'amiable. Pourquoi un classement à l'amiable ou de gré à gré? Parce que l'acheteur, normalement, a intérêt à classer le grain pas mieux qu'il vaut, c'est-à-dire plutôt à la baisse, tandis que le vendeur, pour avoir un

meilleur prix, a intérêt à classer le grain le plus haut possible, de sorte que si les deux s'entendent sur un classement, il y a de grosses chances que ce soit le bon classement. Ainsi viendront à l'arbitrage à la régie seulement ceux qui n'auront pu s'entendre et nous espérons que ce sera le moins souvent possible, parce que sur le plan administratif, si on veut avoir une régie qui fonctionne bien ou un système de classement qui fonctionne bien, il faut qu'il soit basé sur la confiance des gens.

Le député de Beauce-Sud a également mentionné que l'argent pour les centres régionaux venait du gouvernement fédéral. C'est faux. L'argent pour les centres régionaux, essentiellement, a été payé à 100% par le gouvernement du Québec. Quand le député de Beauce-Sud dit que ceci avait été négocié par mon prédécesseur, M. Toupin, il ne sait même pas qui m'a précédé comme ministre de l'Agriculture. Ce n'était pas M. Toupin. Celui auquel j'ai succédé était M. Kevin Drummond. M. Toupin n'a pas négocié quoi que ce soit au point de vue des centres régionaux de grain puisque dans les centres régionaux de grain, tout cela a été payé à 100% par le gouvernement du Québec. C'est une autre erreur de faits qui me fait penser à l'erreur du temps des élections des libéraux qui voulaient enlever la taxe de vente sur la machinerie agricole quand il n'y avait pas de taxe de vente.

Des voix: Ah! Ah!

M. Garon: C'est le genre d'erreur de faits qui faisait un bel engagement du Parti libéral. Il disait, en 1981: "On s'est engagé à enlever la taxe de vente sur la machinerie", alors que les cultivateurs étaient exemptés de la taxe de vente sur la machinerie. Cela faisait une promesse qui ne coûtait pas cher, comme on dit. Mais l'électorat québécois n'est plus l'électorat du temps de Taschereau où, dans le temps, on pouvait toujours, alors que les gens étaient moins renseignés qu'aujourd'hui... Les moyens de communications n'étaient pas ceux d'aujourd'hui et ils pouvaient toujours, quand ils venaient faire leurs discours une fois tous les quatre ans, induire la population en erreur, mais, aujourd'hui, avec les moyens de communication actuels, lorsque quelqu'un ment à telle place, il se fait rabrouer immédiatement parce que les gens le savent et ils peuvent répondre. C'est pour cela que les principaux arguments apportés par les députés de l'Opposition ont révélé, encore une fois, le manque de préparation dans ce dossier qu'ils n'ont pas étudié et dont ils n'ont pas approfondi le sujet.

Je pense que l'ensemble du monde agricole et les députés du Parti québécois qui ont eu l'occasion de prendre la parole, depuis ce matin, sur ce projet de loi modifiant la Loi sur la Régie des grains, ont prouvé à quel point ce projet serait bénéfique pour la production céréalière au Québec et surtout pour trois points principaux, comme je l'ai dit ce matin. D'abord, pour favoriser une meilleure qualité du grain parce que le cultivateur, étant maintenant assuré d'un classement ou pouvant exiger un classement, pourra obtenir le prix que vaut son grain et pourra, de cette façon, faire un effort pour toujours produire du grain de première qualité et se faire payer le prix du grain de première qualité. C'est parce que cette régie existe que le règlement sur le classement du grain sera adopté incessamment. Avec l'adoption de cette loi, les cultivateurs sauront et savent déjà, qu'ils pourront obtenir le vrai prix pour leur grain, c'est-à-dire le prix du classement de leur grain. Nous avons la certitude que les gens du Québec tenteront de produire du grain de première qualité. (17 h 50)

Je serais curieux de connaître, après une première ou une deuxième année d'exploitation, le pourcentage du grain du Québec qui sera de première qualité. Je suis persuadé que nous concurrencerons avantageusement le grain de l'Ouest qui vient en wagon, qui se fait brasser en cours de route. La poussière se retrouve dans le fond du wagon, tandis qu'avec nos centres régionaux, le grain peut être nettoyé; on peut avoir encore une meilleure qualité avec tous les équipements qu'on a mis en place au point de vue de nos centres régionaux.

Deuxièmement, ce projet de loi permettra de garantir des paiements puisque la solvabilité des acheteurs ou des marchands de grain est prévue par la loi et ils devront garantir une certaine solvabilité pour pouvoir obtenir un permis de la régie. C'est aussi un des principaux buts de la loi, de faire en sorte que la régie surveille les permis qui seront émis par elle afin que les détenteurs des permis puissent vraiment maintenir leur degré de solvabilité au niveau prévu dans le règlement, pour faire en sorte qu'il y ait une sorte de garantie de paiement pour les agriculteurs qui vendent leur récolte aux différents marchands de grain.

Maintenant, on n'est pas obligé d'obtenir un permis de la régie, mais, par ailleurs, si on veut procéder au classement des grains au Québec, il faudra un permis de la régie et il faudra se soumettre ou accepter les différentes conditions ou modalités prévues dans la loi et dans les règlements, en plus de la loi, pour ceux qui exploiteront un permis.

Nous sommes persuadés qu'un grand nombre de producteurs demanderont un permis de la régie parce qu'il permettra d'assurer des conditions exigées des agriculteurs. Déjà, des organismes me demandent de rendre le permis obligatoire le

plus rapidement possible. Nous n'avons pas voulu le faire. Nous avons voulu établir un système tellement bon que les gens s'en prévaudraient. Nous avons voulu adopter une réglementation qui répondrait aux besoins pour que les agriculteurs exigent des marchands de grain qu'ils détiennent un permis de la régie avant de vendre leur grain. C'est ce système volontaire qui n'est pas courant, qu'on ne rencontre pas souvent dans nos centres d'administration; on le dit volontaire parce que nous avons dit: Rendons-le tellement bon, tellement désirable que, sans même être obligatoire, tous ceux qui font le commerce du grain voudront recevoir un permis de la régie et respecter les normes de la régie parce que ça leur donnera toute la crédibilité voulue dans le secteur du commerce céréalier au Québec. On aura ainsi un système volontaire, mais auquel tous auront adhéré. Cela a été notre préoccupation, et c'est pour cela, comme je l'ai dit ce matin, que nous avons consulté et consulté.

J'ai hâte que ce projet de loi soit adopté parce que nous commencerons immédiatement à faire la même chose au niveau des encans d'animaux pour la protection phytosanitaire, pour la solvabilité des gens qui y font affaires, pour la sécurité quant au poids des animaux et la qualité du bétail qui y passe. Nous devrons aussi adopter une réglementation incessamment à ce sujet. C'est pour ça que j'ai hâte que cette loi et ce règlement soient adoptés pour que nous puissions immédiatement faire cette étude des encans et étudier, en même temps, un encan qui a été discuté récemment au sommet de Trois-Rivières, dont parlait le député de Maskinongé. Je dois dire que, dès ce matin, le député de Nicolet, M. Beaumier, me parlait de l'encan de Drummondville, de même que le député de Drummond, ministre des Transports, et le député de Saint-Maurice; j'ai dit que nous allions hâter l'étude du règlement sur les encans afin de pouvoir donner une réponse le plus rapidement possible à l'encan qui a été préconisé sur le plan régional à Drummondville.

En même temps, demain, je rencontrerai des gens qui préconisent un système d'encan par référence, un nouveau système qui permettrait d'améliorer la mise en marché des animaux en économisant le maximum de transport. Ces questions sont actuellement étudiées par les producteurs de boeuf. C'est pourquoi ce projet de loi sur les grains et éventuellement la réglementation sur les encans contribueront, comme le demandent les agriculteurs, à mettre en place des garanties de paiement ou des mesures qui assurent une plus grande sécurité aux agriculteurs lorsqu'ils vendent leurs produits. Quand un agriculteur vend toute sa récolte à l'automne, son travail d'une année, et qu'il peut vendre à un acheteur non solvable, il a des inquiétudes et c'est pourquoi les mesures qui ont déjà été réalisées dans la production laitière sont en train d'être réalisées dans la production céréalière. Elles le seront aussi dans d'autres commerces de produits agricoles pour assurer une plus grande sécurité à nos agriculteurs.

Nous avions pensé un instant à regarder une loi ontarienne. Je rencontrais récemment le ministre de l'Ontario et je lui disais: Comment votre loi fonctionne-t-elle? La garantie des paiements, votre loi-cadre? Il m'a dit: Vous savez, c'est difficile de fonctionner dans une loi-cadre parce que nous l'avons appliquée seulement une fois, et faire un modèle pour tout le monde c'est difficile. Nous avons donc décidé de procéder différemment et de mettre dans chacun des instruments que nous mettons en place pour la commercialisation des produits agricoles, graduellement des instruments de garantie de paiement qui feront en sorte que les agriculteurs ne prendront pas tous les risques qu'ils ont pris jusqu'à maintenant, pour qu'il y ait moins de risques dans le commerce des produits agricoles.

Je suis convaincu qu'en faisant ces choses, nous faisons un travail qui correspond exactement à ce que demandent les agriculteurs par leurs représentants syndicaux, par l'Union des producteurs agricoles ou leurs fédérations spécialisées. En travaillant avec eux et avec d'autres organismes comme les meuniers, les coopératives agricoles, les centres régionaux de grains, les marchands de grains, les négociants en grains, tous ceux qui, de près ou de loin, sont attachés à la production céréalière et au commerce des céréales, nous allons développer la production céréalière au Québec. Tout ce que nous pouvons souhaiter, c'est de pouvoir accélérer la production au Québec au même rythme que nous l'avons fait au cours des dernières années.

Je demande aux agriculteurs, qui voient cette saison un peu exceptionnelle en termes de pluie, de ne pas se décourager puisqu'on dit qu'une année comme celle-là n'arrive pas souvent. Espérons que le soleil va se mettre de la partie; le gouvernement peut mettre en vigueur un certain nombre de mesures mais il n'a pas de contrôle sur le soleil. Espérons que, dans les jours qui viennent et à partir de maintenant, parce qu'on me dit que le temps s'améliore, on connaîtra du soleil au cours des dix prochains jours; on pourra donc faire tous les ensemencements au Québec. Après, on connaîtra une bonne saison si la température le permet et si Dieu le veut. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les grains est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation

M. Boucher: M. le Président, je demande que ce projet de loi no 13 soit déféré à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: M. le Président, je fais motion pour que nous suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de suspension de nos travaux est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

(Reprise de la séance à 20 h 05)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: Merci, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article 7) du feuilleton d'aujourd'hui.

Projet de loi no 12 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le projet de loi no 12 dont nous entamons l'étude aujourd'hui propose de modifier certains articles de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui a été sanctionnée en novembre 1979. Avant d'entrer dans des considérations essentiellement techniques, il est sans doute utile de rappeler les objectifs et les principes qui animent, depuis maintenant plus de trois ans, la démarche du gouvernement et de ses partenaires du monde municipal.

Soulignons, d'abord, que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme avait pour objet de doter le Québec d'un cadre législatif en matière d'aménagement et d'urbanisme et d'établir les règles du jeu en cette matière pour tous les intervenants concernés. Cette loi importante confiait aux municipalités régionales de comté et aux municipalités qui les composent la responsabilité, l'élaboration et la mise en oeuvre des régies relatives à l'aménagement et à l'urbanisme.

Qu'on se rappelle que cette loi est arrivée après 20 ans de discussions au Québec et qu'on aurait dû normalement l'adopter beaucoup plus tôt auparavant, mais que, finalement, compte tenu de l'imperfection des projets qui sont venus sur la table, tous les gouvernements antérieurs avaient hésité avant d'adopter une telle loi. Mais, aujourd'hui, nous l'avons, nous l'utilisons et les municipalités en bénéficient.

Dans le projet de loi que nous avons adopté, quatre grands principes constituent les fondements de cette loi et continuent à guider toute modification qu'il s'avère ici utile et, je pense, nécessaire, d'apporter. Permettez-moi, M. le Président, d'énumérer ces quatre règles qui me semblent fondamentales.

Premièrement, l'aménagement est d'abord une responsabilité politique et non exclusivement technique, je dirais avant tout politique, c'est-à-dire qu'il appartient d'abord aux élus, en relation avec les citoyens, d'effectuer les choix, de prendre des décisions et de procéder aux arbitrages qui s'imposent.

Deuxième règle, le citoyen participe aux diverses étapes du processus d'élaboration et de révision des instruments d'aménagement. J'ai souvent eu l'occasion d'expliquer que parfois des citoyens ne connaissaient pas le bien-fondé de certains règlements, de certaines décisions du conseil municipal; et ce n'est qu'en participant à des réunions du conseil municipal, qu'en participant aux discussions qui menaient à des décisions, que finalement ils comprenaient pourquoi un conseil municipal prenait une décision et que finalement, alors qu'ils étaient entrés dans l'opposition, qu'ils

étaient contre tel ou tel projet de règlement avant que la réunion ne commence, lorsqu'ils sortaient ils en étaient les plus ardents défenseurs. La participation des citoyens a souvent mené à cela.

Troisièmement, l'aménagement est une fonction partagée entre trois paliers de décision: la municipalité, la municipalité régionale de comté et le gouvernement. Chaque palier a son domaine de responsabilité propre.

Quatrièmement, l'aménagement fait appel à la coordination et à la conciliation des choix et des actions de ces trois instances décisionnelles, ce qui se traduit par un échange d'information et par la concordance des objectifs et projets respectifs de ces instances. Il m'apparaît que le projet de loi no 12 que nous discutons aujourd'hui respecte les principes que je viens d'énumérer. Ces règles nous ont guidés adéquatement jusqu'à maintenant et il me semble donc primordial qu'elles continuent à s'appliquer dans l'avenir. Je pense d'ailleurs que c'est cela qui a amené un large consensus autour de la loi 125. On peut déjà évaluer très positivement le travail accompli depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. En effet, il m'a été possible de constater à maintes reprises que les différents intervenants oeuvraient avec sérieux et beaucoup d'enthousiasme à l'application de cette loi, qu'il s'agisse du monde municipal, des ministères ou des mandataires du gouvernement. (20 h 10)

Après quelques années de fonctionnement, le bilan des efforts consentis au niveau municipal me semble impressionnant. Depuis plus de trois ans, les municipalités ont utilisé abondamment les dispositions de la loi, que ce soit pour l'élaboration ou l'adoption de plans d'urbanisme, de règlements de contrôle intérimaires, de modifications à des règlements d'urbanisme ou encore pour la constitution d'un comité consultatif d'urbanisme. Les réalisations furent également très nombreuses au niveau intermunicipal. À ce propos, on me permettra de rappeler que les municipalités régionales de comté sont bien les instances intermunicipales, et non pas supramunicipales. Il semble qu'il y a une distinction de taille à faire. Ce sont des instances intermunicipales, et non supramunicipales.

Au niveau intermunicipal, il a été possible de constituer 94 municipalités régionales de comté à la suite d'une vaste consultation à laquelle ont été associés des représentants de l'Union des conseils de comté, qui est devenue depuis l'Union des municipalités régionales de comté, et de l'Union des municipalités du Québec. La bonne collaboration apportée par les élus municipaux et nos autres partenaires dans cette démarche a permis de répondre favorablement à 95% des attentes formulées. Vous conviendrez avec moi que l'on ne peut guère demander mieux: 95% des attentes formulées.

Donc, 94 municipalités régionales de comté ont été mises en place. De ce nombre, 61 ont adopté la résolution pour entreprendre l'élaboration du schéma d'aménagement. À ce jour, 59 de ces 61 municipalités régionales de comté ont un règlement de contrôle intérimaire en vigueur sur leur territoire. On peut préciser, en ce qui concerne les programmes de travail relatifs à l'élaboration du schéma d'aménagement, que 30 d'entre eux ont déjà été soumis en vue de la signature d'un protocole d'entente en vertu duquel le gouvernement s'engage à verser une aide financière. Quelques protocoles, d'ailleurs, ont déjà été signés à cet effet.

Je pense, M. le Président, que, graduellement, tous les conseils municipaux se sont intéressés à l'aménagement, se sont intéressés à l'urbanisme, et que maintenant, en arrivant au règlement de contrôle intérimaire et à l'élaboration du schéma d'aménagement, lorsque les citoyens vont comprendre de quoi il en retourne au juste, à savoir qu'il s'agit de bien planifier leur territoire, de bien planifier leur ville, leur municipalité, leur municipalité rurale ou leur paroisse, ils vont s'y intéresser davantage et s'impliquer eux-mêmes davantage. Ce sera pour le mieux de la municipalité.

En ce qui concerne ce qui a pu être fait au niveau gouvernemental depuis que fut sanctionnée la loi à la fin de 1979, cette Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il y a d'abord eu, comme je le soulignais il y a quelques instants, l'établissement d'une consultation sans pareille dans l'histoire du monde municipal pour la mise en place du territoire des municipalités régionales de comté, pour la mise en place aussi de la structure elle-même. Nous avons ensuite fait en sorte que ces municipalités régionales de comté puissent bénéficier d'une assistance financière gouvernementale pour leur fonctionnement, pour la rémunération des élus, pour l'élaboration du schéma d'aménagement. Trois programmes ont été mis en place. Et, par ailleurs, le ministère des Affaires municipales a tout mis en oeuvre afin que les municipalités régionales de comté profitent d'une bonne assistance technique.

Je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas profiter de l'occasion qui nous est offerte ici ce soir pour souligner ma satisfaction face aux efforts remarquables qui ont été consentis dans ce domaine par un très grand nombre de fonctionnaires et de professionnels de mon ministère. Ils ont parfois eu à travailler dans des situations

difficiles et c'est pourquoi j'apprécie d'autant plus le sens des responsabilités dont ils ont fait preuve.

Les autres ministères et organismes ont également apporté leur contribution. Sous la direction de mon collègue, le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, les orientations gouvernementales prévues aux articles 11 et 16 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme sont en préparation. Certains de ces documents d'orientation gouvernementale ont déjà été livrés aux municipalités régionales de comté, d'autres le seront très prochainement.

M. le Président, c'est pour accentuer, pour accélérer cet effort considérable en vue de faciliter l'application de certaines dispositions de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme que j'ai présenté, en tant que ministre responsable de cette loi, le projet de loi no 12. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est une loi jeune et comme toute nouvelle loi, à mesure que se généralise son application, des ajustements sont requis, comme d'autres dans l'avenir seront requis. Il nous faut tenir compte d'une réalité sans cesse changeante. Et, à mon avis, cette loi peut être considérée comme un code de l'aménagement qui devra faire l'objet de modifications. Il nous faudra, au fur et à mesure que se développera l'expertise, en revoir certains points. Ces changements devront toutefois toujours tenir compte des quatre principes de base ou des quatre règles de base que je rappelais au début de mon intervention. Ces principes sont d'ailleurs issus d'un consensus avec le monde municipal qui, en ce qui concerne le projet de loi no 12, nous fera connaître officiellement ses positions par l'intermédiaire des deux unions, au moment de la commission parlementaire qui se réunira sous peu.

Le projet de loi no 12 ne viendra modifier aucun élément essentiel de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Ce projet de loi apportera des ajustements techniques qui visent à simplifier la procédure et à réduire les délais pendant la période de contrôle intérimaire. Cette période est déjà commencée dans les 61 municipalités régionales de comté qui ont entrepris l'élaboration de leur schéma d'aménagement et elle se terminera lorsque les règlements d'urbanisme seront en vigueur en conformité avec le schéma d'aménagement.

Les modifications proposées concernent la procédure relativement 1°, aux opérations cadastrales et au morcellement d'un lot pour fins de construction de voie de circulation; 2 , à la conformité des interventions gouvernementales, en particulier pendant la période de contrôle intérimaire et 3 , à l'entrée en vigueur d'un règlement modifiant le contrôle intérimaire.

Le premier point en ce qui concerne la question des opérations cadastrales est le morcellement d'un lot pour fins de construction de voie de circulation; c'est une modification qui trouvera une application limitée mais néanmoins importante et qui est proposée à l'article 61 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Elle concerne le contrôle intérimaire automatique qui s'applique dès le début de l'élaboration du schéma d'aménagement mais qui se termine avec l'entrée en vigueur d'un règlement de contrôle intérimaire, à moins que celui-ci ne maintienne les interdictions prévues à la loi sur certaines parties du territoire.

L'article 2 du présent projet de loi a pour objet de modifier l'article 61 de la loi en vue de prévoir une exception à l'interdiction des nouvelles opérations cadastrales pendant la période de contrôle intérimaire automatique. Cette exception ne vaut que dans le cas où une opération cadastrale ou un morcellement d'un lot par aliénation est effectué aux fins de la construction d'une voie de circulation par le gouvernement ou par un de ses ministères ou mandataires.

Lorsqu'ils font l'acquisition de terrains en vue de la construction de routes, les ministères, en particulier celui des Transports, procèdent de gré à gré plutôt que par expropriation. Ce n'est qu'exceptionnellement que l'on a recours aux procédures d'expropriation.

Le libellé actuel de la loi 61 empêche de conclure ces ententes de gré à gré parce que le propriétaire du terrain se voit interdire de morceler son terrain ou de procéder à une opération cadastrale durant la période de contrôle intérimaire automatique. (20 h 20)

Il est donc à noter qu'une municipalité régionale de comté peut, elle, prolonger cette interdiction en la maintenant expressément dans son règlement de contrôle intérimaire.

Il existe, actuellement, en regard des réseaux d'électricité, de gaz, de télécommunication et de câblodistribution, une exception à cette interdiction de procéder de gré à gré à de nouvelles opérations cadastrales pendant la période de contrôle intérimaire. À plusieurs égards, le réseau routier peut être assimilé à des réseaux d'utilités publiques. Comme pour ces réseaux d'utilités publiques, son implantation implique un développement linéaire exigeant l'acquisition de minces bandes de terrains appartenant à plusieurs personnes différentes et situées dans diverses municipalités.

Il était alors impossible de planifier et d'entreprendre l'implantation d'un tel réseau si l'acquisition des terrains nécessaires est rendue difficile dans certaines municipalités par une prohibition de lotir, par une prohibition qui s'applique, même si les propriétaires sont consentants évidemment,

dans le cas où on négocie de gré à gré. L'article 2 vise précisément cette situation.

Aussi, pour permettre à ces citoyens de compléter leur dossier, de recevoir leur paiement et pour éviter d'entraver la bonne marche des projets de travaux publics générateurs de retombées intéressantes, comme la construction de routes, il est proposé de soustraire, pendant la période de contrôle intérimaire, toute opération cadastrale ou tout morcellement d'un lot fait par aliénation, reguis pour la construction de voies de circulation par le gouvernement ou par ses ministères ou mandataires.

En permettant aux propriétaires de terrains en bordure d'une telle route d'effectuer une opération cadastrale ou tout simplement de morceler un lot, l'amendement proposé vise uniquement à faciliter la phase acquisition des terrains pour des projets de construction de voies de circulation du gouvernement, de ses ministères ou mandataires déjà en cours de réalisation et sur des territoires où les interdictions de l'article 61 s'appliqueraient.

Deuxièmement, en ce qui concerne la conformité des interventions gouvernementales pendant la période de contrôle intérimaire, nous proposons des modifications qui n'affectent pas du tout l'esprit de la loi. En vertu de l'article 2 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, le gouvernement, ses ministères et mandataires, lorsqu'ils veulent intervenir sur le territoire sont liés par un règlement de contrôle intérimaire d'une municipalité régionale de comté et, éventuellement, seront aussi liés par le schéma d'aménagement lorsqu'on l'aura terminé.

Précisons donc dans quels cas ils sont liés. Dès qu'il s'agit de l'implantation d'un équipement ou d'une infrastructure, de la réalisation de travaux ou de l'utilisation d'un immeuble, ils sont liés. Pendant l'élaboration du schéma d'aménagement, l'application d'une telle disposition implique que ces interventions gouvernementales soient confrontées au contenu d'un règlement de contrôle intérimaire en vigueur sur le territoire concerné. Les mécanismes actuellement en place pour vérifier la conformité d'une intervention gouvernementale aux dispositions d'un règlement de contrôle intérimaire sont de deux ordres: premièrement, l'adresse d'un avis d'intention au conseil de la municipalité régionale de comté qui fait connaître son opinion sur la conformité et, deuxièmement, l'obtention des permis et certificats prévus au règlement de contrôle intérimaire.

Il s'agit là d'une double procédure qui risque d'alourdir considérablement la gestion des règlements de contrôle intérimaire et de ralentir sérieusement la réalisation de projets gouvernementaux. En effet, qu'apporte de plus l'émission d'un permis une fois la conformité d'une intervention établie? Déjà, on commence à se rendre compte de l'importance de la tâche administrative pour le personnel des municipalités régionales de comté qui veut assumer pleinement sa responsabilité dans l'application d'un règlement de contrôle intérimaire.

Ces formalités supplémentaires risquent de gonfler la paperasserie et les délais. C'est pourquoi je propose de modifier l'article 2 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme de manière à en conserver l'esprit, à savoir: le gouvernement demeure lié par un règlement de contrôle intérimaire ou un schéma d'aménagement, la vérification et l'établissement, s'il y a lieu, d'une obligatoire conformité entre une intervention gouvernementale et les dispositions d'un règlement de contrôle intérimaire. Donc, ces deux points demeurent. Il est à remarquer que la même procédure s'appliquera lorsqu'il s'agira de vérifier la conformité d'un projet gouvernemental aux objectifs d'un schéma d'aménagement lorsque celui-ci sera en vigueur.

Voyons maintenant un aspect de la procédure relativement au processus de réalisation d'une intervention gouvernementale. Lorsqu'un avis d'intervention, qui concerne un projet gouvernemental, est adressé par le ministre au conseil de la municipalité régionale de comté, celui-ci fait connaître par écrit son opinion sur la conformité du projet en question dans les 90 jours de la réception de l'avis d'intention. Dans le cas où le conseil est d'opinion que le projet est conforme, la réalisation du projet peut aller de l'avant. Dans le cas où le conseil est d'opinion contraire, le ministre peut demander à la Commission nationale de l'aménagement son avis. S'il ne le fait pas, le texte législatif actuel ne nous donne pas d'autre choix que d'attendre la fin d'une période de 90 jours avant de pouvoir passer à l'étape suivante, c'est-à-dire la modification du projet, des dispositions d'un règlement de contrôle intérimaire ou des objectifs d'un schéma d'aménagement, s'il y a lieu, de façon à aboutir à une concordance qui permette d'assurer la conformité.

Je propose donc d'ajouter à l'article 151 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme la possibilité pour le ministre de faire connaître sa décision à la municipalité régionale de comté de ne pas s'adresser à la Commission nationale de l'aménagement dès que l'opinion du conseil de la municipalité régionale de comté lui sera parvenue.

Il ne sera donc plus toujours nécessaire d'attendre 90 jours avant de passer à l'étape suivante dans le processus de réalisation d'une intervention gouvernementale, mais la possibilité pour le ministre de s'adresser à la Commission nationale de l'aménagement existe toujours.

De plus, toujours dans un souci de réduire des délais et de simplifier des formalités, si le conseil de la municipalité régionale de comté a modifié son règlement de contrôle intérimaire ou son schéma d'aménagement pour rendre conforme une intervention gouvernementale, il ne sera plus obligatoire pour le ministre d'adresser un nouvel avis, une fois la modification en vigueur. Voilà l'essentiel des articles 1, 4, 5 et 6 du présent projet de loi.

Je suis convaincu, M. le Président, que ces améliorations à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme répondront adéquatement aux besoins des instances concernées. Qu'il s'agisse des municipalités, des municipalités régionales de comté ou du gouvernement, tous pourront en tirer avantage.

Avant de conclure, M. le Président, vous me permettrez de faire connaître quelques brefs commentaires sur le troisième point visé par le projet de loi. Il concerne l'entrée en vigueur d'un règlement modifiant un règlement de contrôle intérimaire. Les règlements de contrôle intérimaire déjà en vigueur dans 59 municipalités régionales de comté et ceux qui entreront en vigueur dans les mois prochains connaîtront nécessairement, c'est normal, plusieurs modifications tout au cours de l'élaboration du schéma d'aménagement. Ces règlements de contrôle intérimaire sont des instruments de transition en attendant que les règlements d'urbanisme conformes à un schéma d'aménagement soient en vigueur dans chacune des municipalités. Ils sont donc des instruments essentiellement évolutifs qui devront s'adapter rapidement, notamment, à l'avancement des travaux en cours pour l'élaboration du schéma d'aménagement. À l'heure actuelle, d'ailleurs, plusieurs modifications au règlement de contrôle intérimaire sont à l'étude dans les municipalités régionales de comté.

La procédure prévoit que ces modifications sont soumises à mon examen. Afin de pouvoir réagir plus rapidement, je propose donc de modifier l'article 72 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme en y ajoutant la possibilité de transmettre l'avis indiquant mon intention de ne pas désavouer un règlement dans les plus brefs délais, c'est-à-dire sans qu'un premier 45 jours ne se soit écoulé. Je ne compte utiliser cette possibilité de raccourcir les délais d'entrée en vigueur d'une modification au règlement de contrôle intérimaire qu'à la condition d'obtenir un large consensus des municipalités concernées, faute de quoi les 45 jours prévus pour permettre à une municipalité de s'opposer à une modification au règlement de contrôle intérimaire devront être respectés. (20 h 30)

Cette possibilité supplémentaire devrait nous permettre de raccourcir les délais d'entrée en vigueur pour toute modification, et ceci, pour le plus grand bénéfice de tous, car l'application de ces règlements de contrôle intérimaire concerne une grande partie de la population. Cette modification fait d'ailleurs suite à des représentations qui m'ont été faites par le milieu municipal. Comme ce fut le cas avec toutes les modifications déjà effectuées à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, le projet de loi no 12 respecte les fondements de cette loi importante que nous adoptions en 1979. Ce que nous proposons aujourd'hui, c'est des ajustements techniques qui se révèlent utiles, nécessaires même, en vue de favoriser l'application de la loi.

Ces changements permettront de simplifier les procédures administratives. Je crois bien qu'il s'agit là d'une préoccupation que le monde municipal partage avec le gouvernement, avec tous mes collègues d'ici. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. Jean-Pierre Saintonge

M. Saintonge: Merci, M. le Président. Dans ce discours de deuxième lecture du projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, je ferai un tour d'horizon, au tout départ, de ce qu'est la loi 125, ce qu'on appelle les MRC, pour en arriver aux modifications que le ministre nous présente dans son projet de loi no 12. Nous pourrons voir que les modifications qu'on veut apporter par le projet de loi no 12, aux yeux du ministre, ne répondent pas tout à fait aux vues et aux opinions de l'Opposition.

En 1979, par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la loi 125, le gouvernement du Québec cherchait à généraliser la pratique de l'aménagement du territoire. La pierre d'assise de cette loi était la création des municipalités régionales de comté en regroupant les diverses municipalités du Québec suivant leur appartenance.

Comme le ministre l'a mentionné tantôt, le gouvernement avait énoncé les principes sous-jacents à cette loi. Je répète les quatre principaux principes que le ministre a dégagés tantôt. Premièrement, l'aménagement est d'abord une responsabilité politique et non exclusivement technique. Deuxièmement, le citoyen participe aux diverses étapes du processus d'élaboration et de révision des instruments d'aménagement. Troisièmement, l'aménagement est une fonction partagée entre trois paliers de décisions: la municipalité, la municipalité régionale de comté et le gouvernement. J'insiste là-dessus: l'aménagement est une fonction partagée entre trois paliers de décisions. Quatrièmement, l'aménagement fait appel à la coordination et à la conciliation

des choix et des actions des trois instances décisionnelles.

Le gouvernement entreprenait donc, en 1979, son processus de restructuration du territoire qui, en plus d'affecter l'utilisation du sol, engendrera un profond bouleversement de l'ensemble de la société. En adoptant cette loi, le gouvernement créait des municipalités régionales de comté et, pour la création de cette nouvelle structure, il mettait en place les bases de sa nouvelle société soi-disant décentralisée. Lors de la création des MRC, celles-ci devaient avoir une vocation unifonctionnelle. Lors de l'étude de cette loi, l'Opposition n'approuvait pas la proposition de créer de toute pièce une structure d'une telle envergure ayant pour unique fonction l'aménagement du territoire. Il proposait plutôt la formation d'un conseil intermunicipal d'aménagement. Cependant, nous notons ici que l'Opposition était d'accord à une certaine forme de contrôle pour l'aménagement du territoire.

Quoique les intentions gouvernementales ne soient pas encore officiellement dévoilées à ce jour, il est facile de déceler, chez les intervenants péquistes, que leurs intentions outrepassent la question d'aménagement, car, au hasard des interventions et déclarations ministérielles, on s'aperçoit que des responsabilités dans des domaines aussi diversifiés que la voirie, le loisir, l'éducation, la culture, la santé et les services sociaux pourraient être attribués aux MRC, ou, tout au moins, à dépendre de l'étendue des territoires des MRC, c'est-à-dire se rattacher au territoire des MRC. L'aménagement du territoire revêt donc une importance très grande, compte tenu des projets de réforme du gouvernement, telles la restructuration scolaire ou la réforme électorale, qui se révèlent conçues en étroite relation avec les MRC, avec les territoires définis pour les MRC.

De l'avis même du ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, bien peu de gens, y compris des ministres, ont soupçonné les implications profondes de la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. C'était dans le Devoir du samedi 7 août 1982. Le gouvernement parle d'une loi qui rapproche les citoyens des instances décisionnelles et implique ceux-ci dans le projet. Peut-être y voit-on une implication de la part de la population, mais cet exercice est factice, le ministre titulaire ayant un droit de décision exceptionnel. Le gouvernement s'attribue ainsi le pouvoir de redessiner la carte municipale du Québec à sa façon.

En fait, c'est en décembre 1982 que les dernières municipalités régionales de comté furent constituées. Le territoire du Québec est maintenant divisé en 94 MRC, comme le ministre le soulignait tantôt. La division du Québec en 94 municipalités régionales de comté devait se faire à la suite d'une consultation. On définissait alors le genre d'activité que ça devait être en disant: "L'implantation des MRC, une opération valable de consultation". On retrouve cela dans la revue Municipalité, publication du ministère des Affaires municipales, où on énonce en fait l'activité d'envergure qu'on doit effectuer pour créer ces MRC, et on insiste grandement sur les étapes de la consultation. Comment la consultation va-t-elle se faire pour créer ces MRC? Trois principales étapes, selon la grande théorie: l'information aux élus, aux organismes du milieu, aux médias et à la population. Donc, on informe les gens et on suscite une discussion dans la population. Nous n'avons rien contre cela, c'est très bien.

Deuxièmement, la délimitation de territoires provisoires. Mise sur pied du Conseil des maires. On regroupe les gens pour tenter d'obtenir un consensus de la population, un consensus du Conseil des maires pour tenter de créer véritablement la MRC, regrouper les diverses municipalités dans un territoire dans lequel celles-ci pourront sentir réellement une appartenance. Je cite un extrait du texte qui définissait les souhaits ou la procédure à adopter, selon le Secrétariat à l'aménagement et à la décentralisation.

On y dit: "La troisième étape constitue la phase la plus importante de la consultation puisqu'elle doit mener à la rédaction des lettres patentes et à la constitution officielle de la municipalité régionale de comté. Elle vise essentiellement à obtenir du Conseil des maires un consensus clairement exprimé, non seulement au sujet du territoire définitif de la municipalité régionale de comté et le mode de représentation de chaque municipalité locale au sein du futur conseil, mais aussi de la succession aux conseils de comté, du sort des éventuelles ententes intermunicipales, de la date de la première réunion de la municipalité régionale de comté, etc. D'ailleurs, le gouvernement refusera d'entériner les propositions qui ne reposeront pas sur un consensus et renverra au conseil provisoire les projets jugés insatisfaisants afin que ce dernier poursuive sa réflexion et parvienne à l'unanimité."

C'est la théorie, mais la pratique s'est révélée pas mal différente dans les faits. Il semble que l'harmonie ne règne guère autant qu'on l'aurait souhaité ou autant que le ministre tente de le dire et de le faire croire à la population en général. Plusieurs des populations concernées sont mécontentes des délimitations qui ont été décrétées et qui ne respectent pas les régions d'appartenance. Il nous apparaît que les propos tenus par les représentants municipaux et ceux du ministre à l'égard des MRC sont fort différents.

En ce qui concerne l'opération de la consultation, nous avons de la difficulté à concilier l'insatisfaction et le mécontentement des populations avec les propos du ministre, notamment ceux qu'il tenait lors des crédits de l'an dernier concernant le fait que le gouvernement ait ou non imposé ses volontés aux municipalités. Le ministre a dit: "Absolument pas, là-dessus, cela a été un succès. Les comités ont très bien fonctionné et la suite de l'émission des lettres patentes a été plutôt un accord généralisé. Les gens disaient après coup que les décisions qui ont été prises ont été les meilleures." C'est au journal des Débats, page 3927. (20 h 40)

En fait, la réalité de la consultation, ce n'est pas cela. À plusieurs endroits au Québec, les municipalités qui se sont vu intégrer dans les MRC et ont fait transmettre au ministre et au ministère leur mécontentement vis-à-vis de cette situation. Et je peux citer des exemples au ministre; je lui en ai d'ailleurs cités, ces jours-ci, lors de l'étude des crédits de cette année. Qu'on pense à la MRC de Champlain, qu'on pense à l'Outaouais où quatre MRC dans la région sont prises avec des problèmes: Pontiac, Gatineau, entre autres. Qu'on pense à la MRC d'Acton où certaines municipalités ont manifesté clairement leur désaccord à être intégrées dans la municipalité d'Acton et veulent carrément aller dans celle des Mascoutains. Cependant, le ministre fait la sourde oreille quoiqu'une résolution de la MRC des Mascoutains se montre favorable à l'accueil de ces municipalités dans leur propre MRC. Nous avons des problèmes semblables en Beauce-Sartigan, à Lac-Etchemin et à quelques autres endroits au Québec.

Mais, la consultation, le ministre n'en tient plus compte. Les décrets sont passés et les municipalités doivent se soumettre à la décision du ministère, à la décision unilatérale du ministre, peu importe ce qu'il peut advenir. De plus, le ministre vient maintenant dire qu'il y aura un moratoire. Il confirmait hier qu'il n'est pas question de modifier les territoires des MRC d'ici les prochaines années, d'ici à ce que le schéma d'aménagement soit presque en vigueur, donc, d'ici les trois prochaines années. Au moment de la consultation pour la création de ces MRC, il reste que chacune des municipalités concernées n'avait pas vraiment toutes les règles du jeu dans les mains, ne savait pas exactement vers quoi on s'orientait, à quelles fins les MRC étaient créées. Est-ce que c'était vraiment uniquement l'aménagement ou si on sortait réellement de l'aménagement pour aller dans d'autres domaines, comme je l'ai mentionné tantôt: voirie, loisirs, affaires sociales, etc.?

Quelles solutions reste-t-il maintenant à ces municipalités qui, en fait, ont vu le ministre ne pas respecter leur autonomie quant à la délimitation du territoire d'appartenance? Quelles solutions restent donc à ces municipalités? Il n'en reste aucune. Elles doivent se maintenir dans le territoire décrété par le ministre, contre leur propre gré. Dans certains cas, la volonté exprimée clairement par ces municipalités s'est traduite par des pétitions, des lettres signées par plus de 90% de la population. Mais, le ministre n'en fait aucun cas.

Outre le problème de la création des MRC, il y a également à prendre en considération l'aide financière. Le ministre a parlé tantôt de l'aide financière qui a été accordée aux MRC, aux municipalités régionales de comté, par le gouvernement. Au moment de l'étude du projet de loi no 125, le ministre avait pris l'engagement, au nom de son gouvernement, que les ressources financières nécessaires seraient allouées aux MRC pour les dépenses inhérentes au fonctionnement, à la rémunération du préfet et des membres et à l'élaboration du schéma d'aménagement. À la suite de cet engagement, on a donc, à maintes reprises, entendu dire que le gouvernement subventionnait les MRC. Or, ce n'est pas entièrement subventionné. On se rappellera qu'au début de décembre dernier, alors que les budgets étaient adoptés, le ministre des Affaires municipales, M. Léonard, informait les MRC d'une diminution de l'assistance financière qui leur était autorisée après que celles-ci eurent fait parvenir leurs prévisions budgétaires. Pourtant, le ministre a effectué une coupure de 1 500 000 $ dans l'aide financière qu'il s'était engagé à verser. La coupure en question, pour une partie, représentait une économie appréciable d'une certaine façon par le ministère, une coupure au niveau des fonds alloués pour la rémunération des préfets. C'était une bonne chose dans le sens que la rémunération précédente accordée aux MRC prévoyait un nombre de réunions peut-être beaucoup trop considérable. On a coupé du tiers ou du quart ces réunions, de 20 à 15, et l'aide financière a été diminuée en conséquence. Ceci peut fort bien aller. Mais quand même il reste que sur le solde du montant, il y a 800 000 $ qui ont été enlevés au financement des MRC pour leur fonctionnement même.

Ce financement des MRC, un autre problème qui apporte une interrogation sérieuse chez toutes les municipalités qu'il concerne: Le montant alloué au fonctionnement des MRC pour la rémunération des préfets et des membres durera combien de temps? Lors d'une certaine conférence de presse, tout récemment, le ministre annonçait que les MRC devaient possiblement trouver à brève échéance des moyens de financement en

faisant preuve d'ouverture d'esprit et d'imagination. C'étaient les paroles du ministre qu'on rapportait lors d'une conférence de presse dans l'Estrie. Donc, on commençait déjà à souligner un danger pour les MRC quant à leur financement éventuel. Est-ce que le financement sera maintenu de façon intégrale ou pas? C'est la question que le monde municipal se pose. À ce point de vue également, dans les prochaines années, pour l'élaboration du schéma d'aménagement, un montant est prévu, mais il reste que cette structure implantée par le ministère pourra être modifiée. Sur quelle base de financement cela sera-t-il fait? Le monde municipal s'interroge encore aujourd'hui pour l'avenir, à savoir quelle sorte de financement leur sera réservé dans les prochaines années.

Cette chose-là est importante pour la raison suivante. Les MRC ne sont pas seulement fonction de l'aménagement du territoire. J'ai parlé tantôt du fait qu'on tende à décentraliser vers les MRC certains pouvoirs. Évidemment, les municipalités sont assez sceptiques là-dessus et ont demandé au ministre une conférence Québec-municipalités sur la décentralisation ou, à tout le moins, une rencontre là-dessus. Le ministre a accepté les vues soumises par les représentants du monde municipal et a promis une conférence devant être tenue l'automne prochain. Depuis deux ans, les municipalités réclament cette conférence car depuis que la loi 125 a été adoptée bien peu d'entre elles savent où elles vont.

Dernièrement, le premier ministre affirmait que les MRC ne se verraient pas déléguer d'autres responsabilités sans les ressources financières adéquates, mais l'incertitude plane encore malgré cette déclaration du premier ministre. De part et d'autre, on nous fait part d'intentions diverses. C'est ainsi que, dans le dernier avis du Conseil de planification et de développement du Québec, les auteurs dressent une liste des intentions possibles de décentralisation: conseils régionaux de la santé et des services sociaux, loisirs, transport scolaire, réforme scolaire, réforme électorale, taxi.

Dans le rapport d'étape du comité ministériel sur la décentralisation des activités gouvernementales, en juin 1982, il était proposé que les limites territoriales des régions administratives s'ajustent à celles des MRC et que soit encouragée l'harmonisation des territoires des CLSC avec ceux des MRC. Le rapport identifie certaines fonctions à décentraliser vers les MRC: voirie municipale, promotion économique et touristique, équipements de loisir et de récréation. À cet égard, le ministre confirmait justement aujourd'hui la signature de deux ententes, par la voirie municipale, il y a quelque temps.

Dans une déclaration récente, le ministre Biron a exprimé l'intention de favoriser l'adaptation des périmètres des corporations de développement économique à ceux des territoires des MRC. On est bien loin du débat sur le projet de loi no 125, où le ministre parlait de la MRC comme d'une structure unifonctionnelle destinée uniquement à l'aménagement. Considérant que la MRC est une création du ministre et qu'elle n'était pas réclamée de la population, nous vous soumettons cette déclaration du Conseil de planification et de développement du Québec faite au début de 1983: "Le conseil ne souscrit pas à cette orientation gouvernementale qui vise à faire un gouvernement régional de la MRC. C'est une orientation qui ne lui apparaît fondée ni sur les besoins ni sur les aspirations des collectivités locales, mais plutôt tenir des positions technocratiques relevant davantage des données théoriques."

L'implantation des MRC étant commencée, les MRC étant créées - il y a 94 MRC - nous allons examiner un point important, la question du contrôle intérimaire. Le ministre y a fait allusion tantôt. À la suite de la loi, une résolution concernant l'élaboration du schéma d'aménagement devait être adoptée pour le mois de décembre et, dès lors, on arrivait au système du contrôle intérimaire. La planification éventuelle de l'adoption d'un règlement de contrôle intérimaire devait se faire dans une étape qui prenait environ deux à trois mois au minimum. Entre le temps où la fameuse résolution, concernant l'élaboration du schéma d'aménagement, était donnée, qui devait se faire au début de décembre et l'adoption du règlement de contrôle intérimaire, il y avait ce qu'on appelle une période de gel, c'est-à-dire une période où certaines fonctions dans la municipalité pouvaient être gelées, où on pouvait empêcher le développement du territoire. (20 h 50)

Le ministre se souviendra sans doute des mises en garde que lui ont fournies à maintes reprises les députés de l'Opposition -notamment lors de l'étude du projet de loi no 92 en décembre dernier - en demandant un moratoire d'un an afin de limiter au maximum les effets économiques négatifs du contrôle intérimaire ou du gel créé par le fait de la résolution pour l'élaboration du schéma d'aménagement, qui amenait un gel automatique jusqu'au moment de l'entrée en vigueur du règlement de contrôle intérimaire.

Nous avions souligné les conséquences du contrôle intérimaire relatives entre autres à l'obtention de subventions fédérales de 3000 $ pour les mises en chantier faites avant avril 1983. Le ministre n'a pas cru bon de s'arrêter à ces représentations de l'Opposition. Pourtant, plusieurs personnes, plusieurs instances dans le monde municipal

réclamaient que le ministre fasse preuve d'une certaine souplesse à l'égard de cette demande du monde municipal. Cette demande de souplesse était aussi valable, considérant le fait que ce ne sont pas toutes les MRC qui, à l'époque, étaient dans la même situation, c'est-à-dire étaient rendues au point de l'adoption de la résolution pour l'élaboration du schéma d'aménagement. De telle sorte qu'on créait au Québec deux sortes de territoires: des territoires où on commençait à être gelé, si vous voulez, à être pris dans le processus du contrôle intérimaire et certains autres où ce processus était retardé, allant même jusqu'à la fin de décembre 1983, puisque certaines MRC n'ont été créées qu'en décembre dernier.

Cette demande de moratoire pendant une année aurait eu pour but de permettre aux municipalités régionales de comté de reporter l'adoption de la résolution pour l'élaboration du schéma d'aménagement, et de là, le processus pour l'adoption du contrôle intérimaire pour un an. Ce faisant, il aurait été possible, vu un amendement que le ministre avait apporté à la loi, en décembre dernier, de faire en sorte que le règlement de contrôle intérimaire eût pu être préparé et être adopté à tous égards pratiquement en même temps que la résolution et l'élaboration du schéma d'aménagement et donc éliminer d'une façon certaine le gel de trois à quatre mois que certaines MRC ont du subir.

Cette chose est importante puisque dans l'adoption du règlement de contrôle intérimaire, dans la soumission d'un projet de règlement de contrôle intérimaire au bureau du ministère des Affaires municipales, les municipalités régionales de comté, de façon majoritaire, se sont butées à certaines difficultés concernant les intransigeances du ministère à cet égard.

Je peux citer à cet effet un article de M. Robert Langlois, urbaniste, qui paraissait dans le Soleil du jeudi 7 avril 1983: "Depuis plus d'un an, maintenant que les MRC fonctionnent, il apparaît intéressant de faire un premier bilan qui, quoique sommaire, révèle une réalité différente des intentions originales. On peut analyser la situation à partir de deux éléments concrets: les règlements d'un contrôle intérimaire et les plans de travail."

L'important dans ce que M. Langlois rapporte c'est: "Le fait qu'au niveau du contrôle intérimaire, on arrive en fait, pour les MRC, à une responsabilité contrôlée dans le sens que pour juger de la valeur des règlements, le ministère des Affaires municipales a donc mis de l'avant des critères de désaveu relatifs aux dimensions des terrains sans services et avec un seul service, en fonction de la proximité ou non du cours d'eau ou d'un lac et de la présence d'un talus. Ces critères sont les mêmes à travers toutes les MRC du Québec quelles que soient les caractéristiques du territoire. Les responsables du ministère ont affirmé, et ce, clairement que ces critères étaient les seuls points de désaveu officiel."

Je continue la citation: "Par contre, on s'est aperçu au niveau de l'approche du ministère que ces critères ne seraient pas les seuls et que le jugement des fonctionnaires sur les règlements de contrôle intérimaire seraient prépondérants. Déjà donc une première entrave à la responsabilité politique, mais ce n'est pas la seule, loin de là."

Donc, les règlements sont analysés par les fonctionnaires et des modifications sont suggérées pour en assurer la conformité à la loi. Ces modifications sont toujours suggérées oralement et non par écrit, pour éviter ainsi d'engager quelque responsabilité. Ce qui importe, c'est que, en résumé, le ministère, par l'entremise de ses fonctionnaires, oriente directement le contenu des règlements de contrôle intérimaire des MRC sous peine de voir ceux-ci désavoués, ce qui aurait pour conséquence de continuer le gel du développement sur le territoire. Il aurait été plus simple d'imposer directement un règlement de contrôle intérimaire standard à toutes les MRC du Québec mais, évidemment, cela aurait nui à l'image qu'on veut donner de la liberté des élus de contrôler le développement de leur territoire.

Les plaintes fusaient de plusieurs endroits au Québec au sujet de l'élaboration du règlement de contrôle intérimaire, de la soumission au ministère du règlement de contrôle intérimaire pour son approbation. On demandait aux municipalités de discuter avec leurs citoyens, de faire des propositions au gouvernement en suivant une certaine base. Ultérieurement, quand on arrivait au ministère, on imposait certaines modifications pour lesquelles les municipalités n'avaient pas le choix d'accepter, sinon, c'était le gel automatique, le désaveu du règlement et la possibilité de se le faire imposer par le ministère. Donc, l'autonomie municipale en prenait pour son rhume.

On en arrive maintenant au projet de loi no 12 qui modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et qui vise essentiellement à permettre au gouvernement, ses ministères ou mandataires, de se soustraire aux multiples contraintes imposées par le contrôle intérimaire. Par l'adoption de cette loi, nous adopterons des dispositions privilégiées pour les interventions du gouvernement en matière d'aménagement. Le ministre parlait tantôt de l'article 2. On dit que le schéma d'aménagement et le règlement de contrôle intérimaire lient le gouvernement dans la seule mesure prévue au chapitre 6, titre 1, soit les articles 149 à 157.

Les articles 149 à 157 lient le gouvernement au niveau des interventions, mais en se rappelant que, au niveau des interventions, dans le cadre du contrôle intérimaire ou du schéma d'aménagement, le gouvernement possède toujours le pouvoir de modifier le schéma ou le règlement. Le gouvernement se trouve donc lié, mais d'une façon assez accessoire. L'important dans l'article 2 - ce qui donne toute la lumière aux modifications qu'on veut faire ici à la loi 125 - c'est ceci: je cite le paragraphe 2: "Notamment, le gouvernement, ses ministères et ses mandataires ne sont pas tenus d'obtenir un permis ou un certificat exigé en vertu d'un règlement de contrôle intérimaire." Donc, immédiatement, le gouvernement se sort des dispositions usuelles des formalités de la loi.

Or un des objectifs fondamentaux de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est de permettre aux municipalités de contrôler l'ensemble des interventions sur le territoire, effectuées tant par les citoyens que par le gouvernement afin d'éviter un développement anarchique et un gaspillage du territoire. À ce propos, le ministre des Affaires municipales disait devant les représentants municipaux réunis au congrès de l'Union des municipalités du Québec, le 28 avril dernier, et je cite ses paroles: "L'autre grand défi municipal des dernières années était d'enrayer le gaspillage du territoire. Ma démarche dans ce domaine a été très simple. Pour moi, le gouvernement du Québec devait travailler obligatoirement avec ceux qui administraient de façon plus quotidienne la chaîne des terrains, c'est-à-dire vous, les élus municipaux. Ce n'est pas qu'un défi d'aménagement, c'est aussi un défi économique dont vous sentez l'intensité. Il est vrai qu'un équipement mal situé, bon an mal an, entraîne des coûts supplémentaires aux ressources publiques, tout aussi importantes, sinon plus, qu'un équipement mal géré. En ce sens, vous êtes devenus des artisans de la texture économique du pays. Vous l'êtes devenus dans le cadre d'une loi qui vous octroie cette liberté de choix et d'action avant tous les autres intervenants dans le cadre d'une loi qui contraint le gouvernement à s'astreindre à vos schémas d'aménagement sous peine de débats publiques où les citoyens vont devoir juger au mérite." (21 heures)

Or, le 5 mai, quelques jours après cette déclaration et après que le ministre eut entendu les revendications des municipalités qui, unanimement, déploraient les contraintes, la lourdeur administrative et les difficultés qu'engendrait le contrôle intérimaire, le ministre dépose le projet de loi no 12. Ainsi, au lieu d'assouplir le processus pour l'ensemble des municipalités en établissant des normes et une réglementation précise et officielle, et non pas sous forme verbale ou de directive, le gouvernement, incapable de se soumettre à la lourde procédure administrative qu'il a lui-même créée, nous demande d'adopter des dispositions qui le soustrairont à toute cette confusion, sans toutefois répondre aux demandes des premiers concernés de cette démarche. Encore une fois, le gouvernement fait preuve d'incohérence et de confusion entre les lois qu'il adopte et le discours politique qu'il tient. Prônant l'autonomie locale, il adopte des lois et une réglementation qui viennent interférer dans ce principe.

Ce projet de loi illustre bien le manque de planification dont fait preuve le ministre. En décembre dernier, l'article 61 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme était modifié par la loi omnibus. Moins de six mois plus tard, cet article fait l'objet d'une autre modification. Donc, moins de six mois plus tard, on se rend compte que la planification du gouvernement n'avait pas eu lieu. On se rend compte qu'au moment de l'adoption du règlement de contrôle intérimaire, dans tout ce processus, les désirs d'implantation de structures du gouvernement n'étaient pas planifiés, n'étaient pas prévus.

En plus de dénoncer l'attitude du gouvernement qui outrepasse sa loi et qui ne respecte pas ses propres intentions, principalement celle d'être un citoyen à part entière - comme on le sait, le citoyen ne peut déroger aux dispositions de la loi no 125 et ce, même si cela lui crée certains préjudices - nous devons également dénoncer le fait que ce gouvernement, qui prône la consultation, n'a pas consulté avant de rédiger et de déposer ce projet de loi. En fait, c'est l'Opposition qui a contacté l'Union des municipalités du Québec et l'Union des municipalités régionales de comté et les municipalités locales pour leur faire part de ce nouveau projet de loi, pour leur faire part du dépôt d'un tel projet de loi, quelques jours après le congrès de l'Union des municipalités du Québec. Nous avons obtenu certains commentaires de l'Union des municipalités du Québec relativement à ce projet de loi.

Premièrement, on s'étonnait, évidemment, qu'on n'ait pas été consultés, qu'on n'ait pas appris l'existence d'un tel projet de loi. Les commentaires portent sur les points suivants. Fondamentalement - on réfère aux articles 1 et 2 - ces deux articles traduisent une volonté, de la part du gouvernement, de se soustraire aux contraintes des contrôles intérimaires adoptés par les municipalités. Or, un tel comportement est contraire à l'esprit de la loi no 125 qui visait justement à permettre aux élus municipaux de contrôler les interventions sur leur territoire, tant des particuliers que des instances gouvernementales. De façon spécifique au

projet de loi, l'article 1 apparaît non souhaitable dans la mesure où l'émission d'un permis constitue un moyen de contrôle et d'analyse des projets. En outre, un tel permis n'enlève pas les avantages reliés à la procédure relative aux interventions gouvernementales. On réfère aux articles 149 à 157.

Quant à l'article 2, cette nouvelle modification à l'article 61 de la loi no 125 semble devenir une habitude malsaine. En décembre dernier, l'article 76 de la loi 92 a introduit une modification au même article, de façon à alléger les contraintes pour le gouvernement, ses ministères et ses mandataires. En somme, le projet de loi no 12, c'est une simplification à l'avantage du gouvernement, de ses ministères et de ses mandataires, et cela remet en cause l'équité de tels amendements face aux autres contribuables. Il peut être sain de revoir l"'opérationalisation" de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, mais cette révision devait être également élargie aux problèmes affrontés par les municipalités. Le ministre, étant au courant des problèmes que les municipalités éprouvent relativement au contrôle intérimaire, ne s'en soucie guère. Cependant, par le projet de loi no 12, il vient apporter des modifications pour justement enlever certaines contraintes qui lui causent des problèmes.

Quant à l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté, ses commentaires portaient d'abord sur la surprise de voir le dépôt d'un tel projet de loi, parce que le monde municipal ne trouve aucune réponse aux problèmes auxquels il est confronté, d'une part, et, deuxièmement, ce projet de loi ne satisfait aucune demande des municipalités. On n'a jamais consulté ces municipalités pour connaître leur point de vue à ce sujet. C'est la consultation, évidemment.

De plus, ce projet de loi, aux yeux de l'UMRCQ, semble une loi qu'on veut adopter à la sauvette, sans avoir au préalable consulté les intéressés. Le ministre a bien mentionné tantôt, lors de la deuxième lecture, qu'il consulterait les représentants des unions. Ma réponse à cela est que la consultation aurait pu fort bien se faire avant le dépôt du projet de loi d'une façon beaucoup plus valable. Avant, pour savoir exactement au niveau des unions, au niveau des municipalités touchées par les modifications ou par la loi 125, si des modifications accessoires ne pouvaient pas être amenées, qui auraient pu faciliter également la mise en marche du processus à l'égard des MRC. Maintenant, concernant l'article 1, avec toute la publicité que le gouvernement a faite comme bon citoyen -le gouvernement se dit un citoyen à part entière - maintenant par l'article 1 il vient s'exclure des permis et des certificats exigés par la loi. Donc, on arrive à une étape suivante. Le gouvernement n'est plus le citoyen ordinaire, il s'exclut en fait du processus.

De fait, on se rend compte de quoi dans le projet de loi no 125? En quelques mots, au lieu d'arriver avec des points tellement techniques, on se rend compte que si l'intention du gouvernement, si l'intervention du gouvernement n'est pas conforme au schéma, qu'est-ce qui arrive? La municipalité régionale de comté devra revoir le schéma. Concernant le contrôle intérimaire, le gouvernement n'est pas obligé d'obtenir un certificat. Durant le contrôle intérimaire, le gouvernement se soustrait de l'application des articles de la loi. Il s'exclut du processus lui-même. Il soumet tout le monde à l'obtention d'un permis, sauf lui-même. Donc, cela dénote quoi? Cela dénote que le gouvernement n'était pas prêt à faire face à la musique, dans le sens que la planification qu'on exige, la planification que le ministre trouvait importante d'exiger auprès des municipalités, auprès des constructeurs, auprès des divers organismes privés, le gouvernement n'est pas obligé de s'y soumettre parce que s'il n'est pas aligné pour participer au processus, ce n'est pas grave, il s'en sort.

C'est donc le schéma qui va se soumettre à l'avenir au processus, au désir du gouvernement. Le gouvernement se sort du processus et s'enlève des contraintes. C'est cela le point fondamental de la loi. Cette chose fait en sorte que le principe tellement valable de l'autonomie municipale, du respect de l'autonomie municipale se trouve piétiné à mon point de vue. Et c'est un recul important au niveau des municipalités, des structures municipales, au niveau même de la nouvelle structure créée, c'est-à-dire de la municipalité régionale de comté.

Lors de l'étude de ce projet de loi, nous nous y opposerons, compte tenu qu'il ne respecte pas les objectifs de la loi 125 et le principe de l'autonomie municipale, compte tenu qu'il donne au gouvernement des privilèges et un pouvoir d'intervention direct en matière d'aménagement, compte tenu qu'il ne répond pas aux revendications des élus municipaux - donc, il n'apporte aucune solution aux problèmes réels auxquels ils étaient confrontés ces derniers temps - et compte tenu qu'il a été déposé à l'Assemblée nationale sans faire l'objet de consultation auprès des milieux concernés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, président du Comité de l'aménagement, député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, cela me fait plaisir, comme ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, d'intervenir sur le projet de loi no 12. J'essaierai de ne pas faire comme le député de Laprairie. Après une demi-heure il a dit: Maintenant, je vais vous parler du sujet de ce soir qui comporte des modifications à la loi 12. Je vais revenir tantôt sur certaines dispositions pour lesquelles, je pense, il parlait beaucoup plus du passé que de l'actualité.

Je voudrais profiter de cette occasion quand même, comme mon collègue des Affaires municipales, responsable de la loi 125 sur l'aménagement du territoire, non pas pour rappeler les principes parce qu'il l'a très bien fait, mais pour, à partir de cela, dire que la loi 125 consacrait certains principes auxquels le gouvernement du Québec tenait. Un de ces principes: je ne fais qu'une phrase pour vous dire que c'était justement d'échanger des informations, des niveaux de collaboration et permettre que l'ensemble des MRC puissent connaître les éléments qu'il faut pour travailler sur leur mission première qui n'a pas changé. (21 h 10)

Contrairement à ce que j'ai entendu dans les 40, 45 minutes du député de Laprairie, la mission première, fondamentale des MRC du Québec est toujours l'aménagement de leur territoire dans la préparation d'un schéma d'aménagement. Pour ce faire - d'ailleurs, je pense que c'est ma responsabilité - je compte prochainement transmettre à chaque MRC, dès le mois de juin prochain, un document global intitulé Aménager l'avenir, traitant des orientations générales d'aménagement poursuivies par le gouvernement, ses ministères, ses organismes et la plupart de ses mandataires. Ce document constitue une première contribution gouvernementale à l'élaboration des schémas d'aménagement qui ont commencé à s'amorcer, et certaines sont déjà rendues à des étapes assez avancées.

Je voudrais profiter également de cette occasion pour vous rappeler que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme prévoit que le gouvernement contribue à l'élaboration de ces schémas en transmettant à chacune des MRC des informations sur nos orientations comme gouvernement, sur les différents projets que la plupart des ministères et organismes entendent poursuivre sur le territoire du Québec. C'est dans ce cadre, d'ailleurs, que le document Aménager l'avenir a été préparé, puisque bon nombre d'orientations de ces aménagements sont de caractère général et sont donc valables pour l'ensemble du territoire québécois. Il nous apparaissait important, comme gouvernement, de profiter de l'occasion pour colliger à l'intérieur d'un même document une série d'informations pertinentes qui sont communiquées aux MRC pour qu'elles se mettent au travail, toujours sur leur mission fondamentale, qui est le schéma d'aménagement.

L'originalité du document Aménager l'avenir, qui sera rendu public prochainement, tient au fait qu'il dégage et regroupe dans un même document les objectifs et les orientations qui caractérisent les multiples interventions gouvernementales en matière d'aménagement du territoire. Il traduit tout aussi bien la volonté du gouvernement de mieux informer et de faire preuve d'une plus grande transparence en ce qui concerne ces orientations. C'est à ce sujet que je voudrais reprendre le commentaire qu'on me faisait tantôt en disant que j'ai déjà déclaré - oui, c'est vrai, et je le referais - que mes collègues du Conseil des ministres avaient été surpris de l'ampleur non pas des conséquences, mais des suites à donner à la loi 125. J'ai dit à chacun des collègues ministériels: Dorénavant, on veut que le gouvernement du Québec se lie, on veut que le gouvernement du Québec fasse connaître ses orientations; ça s'appelle de la planification et c'est important dans le monde de l'avenir de permettre que les MRC puissent avoir des schémas d'aménagement qui tiennent compte des orientations gouvernementales, des projets gouvernementaux qui ont des références directes à la façon de concevoir un schéma d'aménagement.

Comme c'est nouveau, l'aménagement du territoire, comme on n'avait peut-être pas mesuré l'ampleur de cette obligation que nous nous sommes donnée comme gouvernement, il y a eu une réaction de surprise en disant: Oui, c'est imposant, il y a passablement d'éléments qui vont conditionner une meilleure planification à l'intérieur de la machine gouvernementale au sens global, les ministères et les organismes. D'ailleurs, à la suite de la transmission de ces informations, les MRC entreprennent ce que j'appelle la démarche soutenue qui les conduira directement à leur schéma d'aménagement.

On doit faire cela avec un dialogue constant entre les instances et l'appareil gouvernemental parce que la démarche même de la loi 125 était basée sur des principes de cette nature. Certes, la transmission de documents d'orientation et de projets est importante, mais l'élément majeur se situe plutôt dans le fait que chaque ministère ou mandataire discute, transige avec les MRC une à une. C'est le résultat de ces discussions entre les paliers de décision qui ont des fonctions partagées et des responsabilités propres qui, en fin de compte, constituera le schéma d'aménagement.

Un schéma, ça ne peut pas se faire

uniquement par une juxtaposition de textes. Un schéma, ça se fait dans l'action, en consultation, en évolution, et c'est comme ça qu'on entend convier l'ensemble des MRC du Québec à faire chacune son schéma d'aménagement. Pour ma part, j'entends faire en sorte que toutes les informations pertinentes, les orientations soient transmises aux MRC pour qu'elles puissent enclencher rapidement le processus de confectionner leur schéma d'aménagement par les mécanismes qui sont prévus dans la loi 125.

Comme le gouvernement, ses ministères et organismes sont liés par le règlement de contrôle intérimaire. Que le ministre des Affaires municipales ait le pouvoir de modifier ou de désavouer en totalité ou en partie le règlement de contrôle intérimaire de chaque MRC, cela a été examiné par le ministre responsable de la loi avant son entrée en vigueur et l'attitude du ministre des Affaires municipales qui a prévalu sur ce plan en a été une de souplesse, de pragmatisme pour permettre leur entrée en vigueur le plus tôt possible et ainsi éliminer certains inconvénients du gel automatique.

Le processus d'examen des règlements de contrôle intérimaire par les divers ministères a permis de déceler certaines lacunes et ambiguïtés de la loi dont certaines ont trait à mes responsabilités comme ministre désigné responsable de l'application de la procédure spécifique aux interventions gouvernementales. Ce sont ces lacunes, ces ambiguïtés que le projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme a pour objet de corriger, sans altérer les principes de la loi 125, sans modifier l'esprit et sans nous délier des obligations pour lesquelles on voulait demeurer liés.

Avant de toucher uniquement pour quelques minutes les modifications particulières de la loi 12, j'aimerais quand même... Je mentionnais tantôt que le député de Laprairie nous a parlé durant une demi-heure du découpage des territoires. Il alléguait que dans le découpage des territoires... En passant, cela s'est fait il y a un an ou un an et demi, je ne sais pas s'il aime toujours vivre dans le passé. On va en avoir des preuves prochainement s'ils nous font réapparaître celui qui était disparu pendant un certain temps. Il n'en demeure pas moins que le découpage du territoire du Québec était une responsabilité du ministre des Affaires municipales parce que c'est lui qui était responsable de la loi. Et ce découpage, dans l'ensemble, s'est fait avec énormément de consultations. Je me souviens, seulement dans ma région, d'une façon bien concrète, où les comités de consultation ont siégé pendant huit à douze mois. Quand un comité de consultation, M. le Président, siège pendant huit à douze mois, il a sûrement vu quelqu'un quelque part. Il y en a eu des rencontres. Il y en a eu des échanges, pour expliquer le processus, expliquer les objectifs de la loi 125, expliquer pourquoi le gouvernement du Québec voulait choisir cette nouvelle orientation d'un palier intermédiaire entre la localité et la grande région de concertation qui s'appelle la région administrative.

Écoutez, quand on connaît le territoire du Québec, quand on finit cette démarche avec 94 MRC, oui, il est normal - il faut être honnête - qu'il y ait eu certaines frictions. Il y a eu, à certains égards, des territoires pour lesquels le ministre responsable a dû statuer, comme à peu près dans n'importe quelle évolution de chose normale. À un moment donné, il arrive un temps où on se doit de trancher, où on se doit de prendre des décisions. On peut bien reconsidérer à gauche et à droite, mais pour certains territoires, il a dû exercer sa responsabilité. Mais, nous entretenir pendant 25 minutes comme si cette démarche-là avait été une démarche qu'on avait menée seuls, en catimini, c'est complètement en dehors de toute réalité objective, M. le Président, parce que ce n'est pas cela, la réalité. Alors, je tenais à revenir à des proportions plus réalistes.

Pendant l'autre moitié de demi-heure de sa demi-heure en dehors du sujet, le député de Laprairie nous a parlé des responsabilités différentes que le gouvernement s'apprête à confier aux MRC. Je peux vous dire, M. le Président, que cela fait plusieurs fois que j'ai l'occasion de rectifier cela et de mettre au défi des collègues, particulièrement de l'autre côté de cette Chambre, de dire: Donnez-moi donc des exemples de mesures qu'on a décentralisées au palier de la MRC, nommez-m'en. J'ai entendu tantôt: Ils sont en train de décentraliser la voirie tertiaire. Ce n'est pas cela du tout. Il faut vraiment être malhonnête. Mais, ce n'est pas la première fois. C'est le genre de discours qu'ils ont, ces gens-là.

Les MRC nous ont dit: Est-ce que ce serait possible de tester une, deux ou trois expériences pilotes dans le domaine de la voirie tertiaire? On va regarder ce que cela donne, on va les tester, on va les analyser et après cela, on va vous dire: Oui, dans le domaine de la voirie tertiaire, cela nous intéresserait d'exercer des responsabilités additionnelles après qu'on se sera acquitté de notre responsabilité première qui est celle de confectionner un schéma d'aménagement pour l'avenir. Ce n'est pas de la décentralisation. Il me semble qu'on a le droit, comme gouvernement, à partir du moment où on a mis des heures et des heures, des semaines, des mois, d'arriver avec une loi importante au Québec pour cadrer le développement du Québec d'une façon organisée, d'une façon structurée. Cela s'appelle la loi 125 sur

l'aménagement du territoire. Après avoir mis un an et demi, deux ans en commission parlementaire - je n'étais même pas ministre quand on a discuté de cela en commission parlementaire - après avoir fait deux ou trois tournées du Québec pour expliquer tout cela, cela ne peut pas être une structure pour quinze jours; cela ne peut pas être une structure pour quelques mois. Ce sera une structure qui effectivement va demeurer avec une responsabilité première au schéma d'aménagement et, par la suite, on verra. (21 h 20)

Pour ce qui est du contenu des matières qu'on va décentraliser éventuellement, on a pris des engagements et on va les respecter. Mais, on leur a dit: On ne décentralisera rien d'autre que ce que vous prétendrez être capables d'exercer comme responsabilités. On organisera un colloque, on se parlera entre nous et vous, faites vos devoirs; c'est ce qu'ils nous ont dit qu'ils feraient pendant une année. Nous avons commencé à réfléchir, il me semble que cela devrait être encore permis, je ne sais pas s'ils ont oublié cela de l'autre bord. Oui, on a réfléchi à des orientations. Oui, on a réfléchi que possiblement, dans l'avenir, il pourrait être intéressant de confier des responsabilités additionnelles, dans la mesure où elles le veulent, dans la mesure où elles sont capables de les exercer. C'est bien différent de l'épouvantail à moineaux que le député de Laprairie a essayé de nous mettre dans la face.

Un dernier commentaire avant de faire quelques remarques sur la loi même. Quand il nous a dit tantôt que le règlement de contrôle intérimaire avait empêché les contribuables québécois de bénéficier des 3000 $ pour le programme d'aide au logement, ce n'est pas cela le problème. Le problème fondamental, c'est simplement que Lalonde le savait qu'il n'en avait plus. C'est bien plus cela qui est grave, c'est bien plus le fait de mettre fin au programme qui était valable pour les Québécois et les Québécoises qui voulaient se construire. C'est bien plus dramatique que les quelques cas qui, effectivement, d'une façon temporaire, ont pu éprouver quelques difficultés avant que ces choses-là s'ajustent, comme c'est normal dans une nouvelle loi. C'est bien différent de ce qui a été mentionné tantôt.

Je disais que nous avons pensé que, sans modifier l'esprit de la loi, sans altérer les grands principes de la loi 125, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il était normal d'établir peut-être une procédure qui simplifiera certaines démarches sans se soustraire au principe et c'est dans ce sens-là que le ministre des Affaires municipales, toujours responsable de l'application de la loi 125, a expliqué qu'effectivement il fallait apporter des correctifs à une nouvelle loi qui, à l'exercice, nous avait permis de constater qu'il y avait certaines choses qu'on devait simplifier.

À cet effet, la loi a prévu une procédure spécifique qui établit de quelle façon le gouvernement, ses ministères, ses mandataires, doivent procéder lorsqu'ils envisagent d'intervenir sur le territoire. Les articles 149 à 157 de la loi prévoient en effet qu'avant que les interventions gouvernementales concernant l'implantation d'un équipement, d'une infrastructure ou de tous autres travaux d'utilisation ou d'immeubles, un avis de l'intervention projetée doit être donné au préalable au conseil de la MRC et que cette intervention doit être jugée conforme aux objectifs du schéma ou aux dispositions du règlement de contrôle intérimaire en vigueur.

D'autre part, les règlements de contrôle intérimaire ont fait ressortir que l'obtention de permis - parce que c'est ce à quoi on touche - ou certificat du fonctionnaire de la MRC était obligatoire pour tout intervenant sur le territoire. Une ambiguïté est alors apparue quand on a regardé cela. La procédure que je viens de décrire et qui nécessite l'opinion du conseil de la MRC est-elle suffisante ou faut-il en plus obtenir un permis du fonctionnaire de la MRC en vertu du règlement du contrôle intérimaire? On a regardé cela et on a fait un choix. On a dit que, pour éviter un dédoublement manifeste de procédures qui risque de perturber sérieusement les interventions gouvernementales dans le territoire des MRC, en accord avec le ministre des Affaires municipales, il fallait rendre claire l'obligation du gouvernement - pas se soustraire - des ministères et des mandataires et déterminer, en termes d'amendements à la loi 125, une clarification et dire que dorénavant on exigera aussi un permis de l'officier administratif de la MRC.

Il faut rappeler que, selon l'interprétation de l'article 2 de la loi qui avait été donnée jusqu'à maintenant tant par le Secrétariat à l'aménagement que par le ministre des Affaires municipales, il apparaissait clair que le gouvernement n'était lié par un règlement de contrôle intérimaire que selon et dans la mesure des articles 149 et suivants. Cette procédure avait d'ailleurs été justement insérée dans la loi en lieu et place du régime des permis auquel il était apparu non souhaitable d'assujettir le gouvernement.

De plus, cette procédure traduit bien l'un des principes que j'évoquais au début de mon allocution, que l'aménagement est un acte politique. C'est le conseil de la MRC et non pas le secrétaire de la MRC qui doit donner son opinion sur la conformité de l'intervention projetée. Il pourra le faire en même temps en termes administratifs et en termes d'opportunité de l'intervention. Donc, c'est tout à fait contraire à ce que le

député de Laprairie mentionnait. Il n'est pas question de se sortir d'un mécanisme auquel on souhaite être assujetti mais on ne veut pas le faire à trois ou quatre niveaux différents, on veut le faire à un niveau qui s'appelle les articles 147, 149 et suivants ou en même temps qu'on demandera l'avis au conseil de la MRC, il y aura une occasion d'expression d'opportunité sur le fond.

C'est dans cet esprit, M. le Président, que la plupart - je ne veux pas tous les reprendre - des amendements s'inscrivent: perspectives d'assouplissement, procédures pour clarifier des niveaux d'interventions, sans en altérer l'objectif fondamental qu'elles visent. Tant les MRC que les ministères pourront profiter de ces modifications. Il y a au moins une chose qui est claire: elles faciliteront certainement la réalisation des interventions gouvernementales, ce qui, d'après nos amis d'en face, devrait convenir en cette période où, heureusement, on commence à s'en sortir, mais où on a connu toutes sortes de difficultés. Plus vite on sera sur le champ, plus vite on fera des interventions, plus vite cela va permettre à l'économie de progresser.

C'est l'essentiel du message que je voulais livrer en mentionnant tout simplement qu'il faut se rappeler que nos amis d'en face ont voté contre la loi 125...

Une voix: Très juste.

M. Gendron: Si, suivant leur logique, les modifications au projet de loi no 12 vont à l'en- contre de la loi 125, comme ils ont voté contre la loi 125, ils devraient tous être d'accord sur les modifications apportées au projet de loi no 12.

J'espère qu'ils se retrouveront dans une logique que tout le monde peut comprendre. Je suis convaincu que ces modifications étaient nécessaires et elles permettront au gouvernement du Québec, non pas de se soustraire à ce à quoi il ne désire pas se soustraire, mais de faciliter la compréhension des dispositions imprécises de la loi 125; elles permettront aussi que des interventions sur le territoire québécois puissent se faire dans les meilleurs délais. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Il est difficile d'endosser l'hypocrisie et le mensonge de ténors ministériels dans...

Des voix: Bravo!

M. Mathieu: ...l'approche du monstre que constituent les MRC. À les entendre, tout va bien. Il n'y a pas de problème. Il y a eu des comités de consultation très démocratiques, très élaborés. Vous pouvez rigoler tant que vous voudrez, je vais vous faire une démonstration et on s'en reparlera après pour voir si la rigolade va durer. On écoute leurs paroles doucereuses, comme ils ont l'habitude de le faire. Les paroles sont doucereuses, mais les gestes et la matraque sont au bout. C'est ce qui s'est passé dans ma région, dans mon comté de Beauce-Sud. Je pense que cela s'est aussi passé ailleurs dans la province.

La marque de commerce de ce gouvernement, c'est l'autoritarisme, c'est l'arbitraire, c'est, en quelque sorte, un appel à la violence, non pas la violence physique, ils sont trop subtils pour cela, la violence morale est encore plus subtile, encore plus efficace, encore plus révoltante que la violence physique.

Qu'est-ce que la violence? Le dictionnaire Larousse nous dit: brutalité, fougue, véhémence, abus de force, contrainte exercée sur une personne pour obtenir son acquiescement à un acte juridique.

Ce qui s'est passé dans ma région est pire encore. Quand je vois l'arrogance de ce gouvernement... Cela me fait penser précisément à la remarque de leur leader parlementaire: "Le gouvernement va vous passer sur le corps". C'est ce qu'ils font chez nous dans Beauce-Sud. C'est ce que le ministre des Affaires municipales fait dans le comté de Beauce-Sud, il passe sur le corps de cette municipalité. Sept sur 37. Il nous dit: Cela va bien dans la province, 95% ont accepté. Chez nous, j'en ai 7 sur 37. Je prends à témoin la signature des gens de ces municipalités pour lesquels j'ai déposé des pétitions en leur nom, pétitions qui contenaient de 75% à 100% des signatures des contribuables de ces municipalités. Seulement 90%, seulement 100%, cela ne vaut pas la peine d'en tenir compte. Ce gouvernement consulte, j'en conviens, mais tout est décidé à l'avance. C'est une consultation pour la forme, c'est un simulacre de démocratie. Tout a été décidé à l'avance par des petits patroneux du comté ou de je ne sais où. Chez nous, je sais où ils sont. (21 h 30)

Révisons brièvement ce qui a été dit. Quand je vous dis qu'ils emploient des paroles doucereuses, écoutez bien ceci. J'ai ici un discours prononcé par M. Jacques Léonard, ministre d'État à l'Aménagement, à l'hôtel Châteauneuf de Saint-Joseph-de-Beauce, le 28 août 1980. C'est son allocution d'inauguration - cela partait sur un bon ton -de la consultation pour la constitution des municipalités régionales de comté. Allons voir ce qu'il disait à la page 4 et je cite: "J'ai aussi un large sentiment de confiance parce que tout ce processus avec lequel vous êtes en train de vous familiariser, nous

l'avons voulu très intimement démocratique." Que de belles paroles!

Page 6: "Je l'ai toujours dit, on ne change pas la société par décret." Il a changé d'idée, depuis ce temps. "Notre philosophie, dans l'approche d'une grande concertation entre tous ces agents, c'est ce que j'oserais appeler le jeu démocratique dans la continuité." Que de belles paroles! Plus loin, page 8: "Ces choix de collaboration que vous allez faire durant les mois qui viennent sont hautement démocratiques et donc exigeants et contraignants en regard des gouvernements et des grandes entreprises. Ces grands dictateurs du territoire devront collaborer aux projets de lettres patentes et se soumettre aux mots mêmes de ces lettres qui deviendraient en quelque sorte la charte d'aménagement de votre région d'appartenance."

Plus loin: "Ce seront vos choix à vous". Que de belles paroles! Page 11: "Cette perspective qui se concrétise aujourd'hui dans le domaine de l'aménagement pourrait, si vous le jugiez un jour à propos, toucher d'autres fonctions, etc."

Ensuite, on a pris le soin de préparer un guide. On l'a très bien préparé. Je vous le dis, en fait de paperasserie, ils sont imbattables: Guide pour vous aider à préciser votre zone d'appartenance et les raisons pour lesquelles vous engloberez chaque municipalité à l'intérieur de ce territoire; le territoire doit être un lieu de première appartenance. Je ne reviendrai pas là-dessus, mon collègue, tout à l'heure, en a fait mention. Belle littérature pour leurrer la population!

Autres documents. Je vous dis qu'ils ne ménagent pas le papier. L'aménagement du territoire au Québec, un projet collectif. On trouve de belles choses. Le citoyen, page 12. "Ainsi, la population d'une municipalité régionale de comté sera informée - chez nous, elle ne l'a pas été - sera consultée tout au long du processus - chez nous, elle ne l'a pas été - depuis la mise en place de la municipalité régionale de comté jusqu'à l'élaboration de la modification du schéma d'aménagement." Dans le comté de Beauce-Sud, il n'y a pas eu de consultation. Il y a eu un comité de consultation, un comité de patroneux, un comité d'arbitraires, un comité nommé pour satisfaire des fins et des objectifs tracés à l'avance. Le comité, qu'est-ce qu'il avait à faire? C'était de faire semblant de consulter. C'était un simulacre de démocratie. Les fins, les zones étaient déterminées à l'avance. Et il faut vivre avec cela maintenant.

Je vous citerai brièvement le cas de Saint-Prosper. Saint-Prosper a fait des démarches. Je ne relèverai pas tout le dossier, j'ai à peu près six pouces d'épais de documents: demandes de rencontre avec le ministre, rencontres avec des membres du cabinet, des fonctionnaires, des membres du cabinet du premier ministre, etc. Finalement, arrive la signification d'une action. Municipalité régionale de comté Les Etchemins, partie demanderesse, contre municipalité Saint-Prosper, partie défenderesse, en date du 15 décembre 1982. On demande au tribunal de condamner la défenderesse à payer à la demanderesse 3614,22 $ avec intérêts à 24% l'an sur 1807,11 $ à compter du 1er juin 1982 au taux de 24% - ce n'est pas cher! - sur 1807,11 $ à compter du 1er octobre 1982 et les dépens en entier. C'est la méthode péquiste de réaliser une nouvelle association: une action en Cour provinciale.

Le maire avait écrit au premier ministre et, en désespoir de cause, le conseil municipal. Le 2 mars 1983, réponse du Conseil exécutif, cabinet du premier ministre, document signé par M. Jean-Roch Boivin. Je lis un paragraphe: "C'est ainsi que le premier ministre s'est rendu à l'argumentation de son collègue des Affaires municipales en faveur du maintien de la décision que vous contestez et qu'il a demandé à M. Jacques Léonard de vous exposer, dans les meilleurs délais, les conclusions de sa mûre réflexion." Ce qui a fait adopter une résolution en date du 29 mars 1983 à une séance régulière du conseil. Je lis simplement la conclusion: "Proposé par M. Loyola Laflamme, secondé par M. Nelson Paré, il est résolu que le conseil municipal de Saint-Prosper demande au premier ministre du Québec la démission du ministre des Affaires municipales, M. Jacques Léonard, étant donné...

Des voix: Ah!

M. Mathieu: ... - vous pouvez rire; c'est drôle - le peu de respect qu'il a démontré pour les conseils municipaux dans le découpage des municipalités régionales de comté."

M. le Président, voici des articles de journaux: "Les MRC, le bélier mécanique est passé à plusieurs endroits." Un autre article: "Saint-Prosper devra se soumettre." M. le Président, les Beaucerons n'ont pas l'habitude de marcher à genoux. Ils ont l'habitude de marcher debout.

Une autre municipalité, Saint-Zacharie. Un jugement en date du 16 février 1983 de la part de la municipalité régionale de comté Les Etchemins à la municipalité Saint-Zacharie village, 801,09 $, et procès-verbal de saisie par un huissier. Quel bien fut saisi, M. le Président? La municipalité n'avait pas d'immeubles. Or, on a saisi un camion à incendie qui appartenait à la municipalité. Belle manière de réaliser une nouvelle association! Je lis, sur la photo, la légende: "Camion à incendie, Saint-Zacharie, saisi par MRC Etchemins." Cela va bien. Nous voyons,

sur la photographie, le conseil municipal au complet ainsi que le corps de pompiers et les dirigeants du corps de pompiers. Cela va bien dans le découpage.

Je dis au ministre des Affaires municipales que c'est le temps de modifier sa décision. Le ministre s'est toujours montré d'une imperméabilité à toute épreuve et je dirais d'une arrogance inacceptable. Je lui dis: C'est le temps de modifier votre décision. Je fais appel pour que les sept municipalités du comté de Beauce-Sud, qui sont Saint-Prosper, Saint-Zacharie village, Saint-Zacharie paroisse, qui sont intégrées malgré elles à la MRC Etchemins - elles veulent adhérer à la MRC Beauce-Sartigan -de même que quatre autres municipalités rattachées à la MRC du Granit, qui sont Saint-Robert et les trois municipalités de Saint-Ludger... Je fais appel, je dis au ministre: Vous ne mettrez pas les Beaucerons à genoux, M. le ministre; vous n'êtes pas assez gros pour cela. Je ne sais pas s'il va me comprendre. Je ne sais pas si le premier ministre va me comprendre. Je ne sais pas si les ministres vont me comprendre. Vous vous engagez dans une déclaration de guerre contre les Beaucerons. Vous apprendrez que vous ne les soumettrez pas par la force.

Vous nous faites toute une démonstration de l'importance du comité de consultation. Nous avons cru à votre romance des liens d'appartenance. C'est pourquoi les Beaucerons veulent que les liens d'appartenance qu'ils ressentent eux-mêmes, non pas les fonctionnaires, à Québec, ou les patroneux, mais eux-mêmes, les Beaucerons de Saint-Prosper, de Saint-Zacharie, de Saint-Robert, de Saint-Ludger... Eux ont décidé que leur appartenance était la Beauce. Le ministre, pour le cas de Saint-Prosper, nous dit: Ah! Saint-Prosper, mais c'est rattaché à la même commission scolaire que Lac-Etchemin. M. le Président, nous avons justement affaire à des institutions vieilles de plusieurs années. Saint-Prosper était autrefois dans le comté de Dorchester. Ce comté n'existe plus au fédéral. Ce comté n'existe plus au provincial depuis 1972 et le ministre vient d'une manière suave nous dire: Oui, mais c'est le comité de consultation qui a décidé cela. Petit comité. (21 h 40)

Je n'ai pas de mots assez forts pour vous dire tout le mépris que je ressens pour ce petit comité biaisé, petit comité de patroneux, comité injuste. Les mots me manquent pour rendre ma pensée et c'est peut-être préférable parce que je crois qu'ils seraient certainement antiparlementaires. Quand je vois que le ministre a besoin d'un paravent aussi méprisable, aussi puant, il faut dire le mot, je trouve cela indigne d'un ministre de se servir d'un paravent aussi inacceptable. M. le Président, même si le ministre passe pour être un dictateur, je pense qu'il n'a pas avec lui une Gestapo assez forte pour mettre les Beaucerons à genoux. C'est debout que les Beaucerons vont négocier.

Une voix: J'ai honte de mon gouvernement.

M. Mathieu: Cela me fait penser à l'URSS qui va protéger l'Afghanistan. C'est cela. L'URSS est allée protéger l'Afghanistan et le ministre fait pareil. ' Imaginez-vous si ces municipalités avaient besoin de protection. Je dis au ministre: Il peut bien rire tant qu'il voudra, c'est une déclaration de guerre. Je dis au ministre: Votre patente ne marchera pas. Vous allez vous ramasser avec des procédures devant les tribunaux. Des saisies, mettez-en tant que vous voudrez, jusqu'à la Cour suprême et au Conseil privé si cela existait encore! Je vous le dis, vous ne mettrez pas les Beaucerons à genoux, certainement pas. Vous avez beau rigoler tant que vous voudrez.

Je fais un appel et c'est le temps de le faire, avant que le schéma d'aménagement ne soit enclenché. C'est le temps ou jamais parce que dans un an, dans deux ans, ils vont dire: Maintenant que le schéma d'aménagement est enclenché on ne peut plus. Moi je dis, M. le Président, et je prends l'engagement solennel, si le gouvernement a le courage, un jour, de faire des élections et que le Parti libéral du Québec prend le pouvoir, de rapatrier ces municipalités selon leur volonté.

Je voudrais démontrer la contradiction entre la loi 90 et la loi 125. Lorsque le gouvernement a adopté la loi 90 sur la protection du territoire agricole... Avec ce gouvernement, on a des protecteurs, c'est effrayant: protecteur de la jeunesse, protecteur du citoyen, protecteur du malade mental, protecteur du territoire agricole; on a tellement de protecteurs que cela va nous prendre un protecteur pour nous protéger de nos protecteurs! Quand il a adopté la Loi sur la protection du territoire agricole, pour calmer les craintes des gens, il disait: Vous avez un droit acquis d'un demi-hectare sur votre propriété, sur votre maison résidentielle, il n'y a rien là. Qu'est-ce qu'on fait avec le droit acquis par l'intermédiaire de la loi 125? On vient le neutraliser. On vient l'annuler parce que le droit acquis existe sur une superficie d'un demi-hectare, c'est-à-dire 53 818 pieds carrés. On vient par l'imposition des règlements... Le ministre va me dire: Les règlements, ce n'est pas moi qui ai fait cela. Ce sont les MRC. Ce sont les municipalités locales qui ont fait les règlements. Oui, mais le ministre va-t-il nous dire également qu'il faut que le règlement soit soumis à son bureau, qu'il y mette sa griffe personnelle et si le règlement ne fait pas son affaire, il le désavoue?

Si le fédéral désavouait une loi du Québec, qu'est-ce que le gouvernement ferait à juste titre? Ce serait une catastrophe épouvantable. Qu'est-ce que fait le ministre là? Par son règlement qui fait qu'il désavoue, si la municipalité ne fait pas ce qu'il veut? Le ministre dit: Il faut, pour donner un permis de construction, que le terrain ait 32 000 pieds carrés. Donc, sur le demi-hectare, il entre juste 32 000 pieds carrés. Donc, on vient de neutraliser. J'ai des cas, M. le Président - je peux vous en sortir dix en file - de gens qui avaient un terrain avant le zonage agricole avec le droit acquis, etc., qui ne peuvent plus s'en servir à cause justement de la mise en application de ce règlement.

Pour conclure, dans la Presse du 29 avril 1983, on dit: "Léonard aux maires: Aidez-nous à faire l'indépendance du Québec." Le pot aux roses se découvre: les MRC, c'est un casse-tête. Si les gens avaient vu tous les morceaux avant, ils n'auraient jamais voulu de ce casse-tête. On fait un casse-tête, on met l'autre morceau, l'autre morceau et on commence à voir quel est le but du gouvernement. Il le dit: Il a besoin de cela pour faire l'indépendance. Moi, je vous dis non. Si le ministre m'avait demandé: Aidez-nous à faire l'indépendance, j'aurais dit: Commencez par nous donner notre propre indépendance chez nous. J'espère que le ministre, aujourd'hui même, prendra l'engagement de respecter le voeu de la population.

Je fais un appel au ministre. Je sais qu'il passe pour un dictateur et tout ce que vous voudrez, mais, je vous le répète, M. le ministre, vous ne réussirez pas à mettre les Beaucerons à genoux. Vous êtes aussi bien d'en faire votre deuil immédiatement et votre petit comité, votre petit paravent patroneux que vous avez nommé pour faire votre pseudo-consultation, c'est un vrai déshonneur quand vous prenez la parole des gens qui formaient ce comité. Il me semble qu'en tant que ministre d'un gouvernement qui se respecte vous devriez faire une vraie consultation. Dans la plupart des municipalités, les gens n'ont jamais su qu'il y avait une consultation - je conclus - qui devait les lier pour aussi longtemps et pour autant de choses. On ne lie pas les générations futures sans leur permission et, quand on dit qu'on les consulte, qu'on les consulte vraiment.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Jacques LeBlanc

M. LeBlanc: Merci, M. le Président. Je me devais d'intervenir sur ce projet de loi pour des raisons bien évidentes que je vous mentionnerai tout au cours de mon intervention. Nous venons d'entendre le député de Beauce-Sud, qui nous a énoncé tous les malheurs qui semblent frapper la région de la Beauce qu'il représente. Je ne relèverai pas toutes les interventions qu'il a faites sur des cas précis de découpage des territoires, etc., mais il y a un point sur lequel je ne peux me taire: il s'agit de l'accusation de patronage dans la composition des comités de consultation.

Le gouvernement du Québec, le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, ne désignait qu'un membre parmi les trois qui formaient le comité de consultation. Deux membres étaient nommés, désignés, d'une part, par l'Union des municipalités du Québec et le troisième membre était désigné par l'Union des conseils de comté du Québec. Si le député ne fait pas confiance à ces deux organismes qui représentent le monde municipal et qu'il les accuse de patronage dans la composition majoritaire de ce comité, je pense que, lorsqu'il relira ses propos, il sera étonné de ce qu'il a prononcé.

J'ai appartenu au monde municipal, j'ai été maire et j'ai également assumé la responsabilité de la présidence d'un de ces 19 comités de consultation qui ont procédé à la mise en place des municipalités régionales de comté. J'ai donc été en contact avec plus de 100 maires sur le territoire qui m'était dévolu pour procéder à cette tâche avec des élus municipaux. Je dois rendre témoignage à ces gens qui m'ont accompagné et je pense que tous les présidents des 19 comités de consultation peuvent en faire autant: l'Union des municipalités du Québec et l'Union des conseils de comté du Québec, je pense, ont désigné des gens qu'ils considéraient valables pour accomplir la besogne et je pense que leur choix a été très bon, qu'ils ont accompli une tâche magnifique. Je félicite les deux adjoints que j'avais dans mon comté qui, soit dit en passant, n'étaient pas des péquistes, pour l'information du député de Beauce-Sud. (21 h 50)

Pour revenir au sujet qui nous préoccupe, la modification qui est apportée à la loi no 125 par la loi no 12, je dois vous avouer, M. le Président, que j'ai eu, personnellement, un premier réflexe lors du dépôt du projet de loi. Je me suis spontanément posé la question: Est-ce qu'un ministère, entre autres, voudrait se soustraire aux obligations et aux engagements pris lors de la confection d'un schéma d'aménagement, en se dispensant d'une demande de permis, entre autres, pour la réalisation - si je prends l'exemple du ministère des Transports - de travaux sur les réseaux routiers? Mais la lecture sérieuse du projet de loi no 12 m'a rassuré pleinement, parce que la loi no 12 ne vise essentiellement qu'à réduire ou à comprimer les délais existants pour permettre une exécution plus rapide des

projets mis de l'avant et déjà soumis au conseil des maires, à la MRC, pour la confection de son schéma d'aménagement. L'application du contrôle intérimaire, tel qu'il existe, ne prévoyait aucun morcellement et on constate la complication qui surgit lorsque le ministère des Transports, par exemple, doit procéder à la réfection ou à la construction d'une route où plusieurs propriétaires étaient concernés dans l'aliénation des parcelles de terrain nécessaires à la mise en chantier des travaux de ladite route.

J'ai fait référence tantôt à l'Union des municipalités du Québec. Je pense que les deux organismes qui ont réagi à l'annonce du projet de loi, soit l'Union des municipalités du Québec tout autant que l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales, ont fait preuve de vigilance et je ne pense pas qu'on doive l'interpréter comme un geste de méfiance. Les élus municipaux et, en particulier, les maires qui siègent aux conseils des MRC sont des personnes averties et responsables et il est normal qu'elles expriment des interrogations et même des inquiétudes. C'est la marque primordiale d'une prise de responsabilité qui les honore.

J'ai cheminé - je l'ai dit tantôt - avec près de 100 maires sur un territoire donné lors de la mise en place des municipalités régionales de comté. Je suis en contact constant avec les 29 maires de mon comté. Je ne suis pas coupé du monde municipal où j'ai moi-même assumé des responsabilités. C'est un monde qui m'intéresse au plus haut point et cet intérêt s'explique, ne serait-ce que pour un point, mais il est de taille: Je considère que le monde municipal est le gouvernement le plus près des citoyens. Donc, ses élus sont la voix la plus autorisée pour exprimer les besoins de leur population auprès du seul autre palier de gouvernement, celui du Québec, qui a la responsabilité de bâtir, de moderniser ou de modifier la législation qui régit les municipalités du Québec. Le projet de loi no 12 ne modifie pas en profondeur, ne modifie en rien le fond de la loi no 125 et la responsabilité, l'obligation qu'auront toujours le gouvernement du Québec et ses différents ministères de soumettre au conseil de la MRC, à ceux qui ont la responsabilité de préparer le schéma d'aménagement, leurs projets pour la confection du schéma. Je ne crois aucunement qu'il y a matière à protestation dans la discussion qui peut s'articuler autour du projet de loi no 12, car la règle fondamentale du respect de l'obligation à la conformité demeure. Si on élimine l'une des procédures par la loi no 12, soit l'élimination de la demande du permis, l'obligation de conformité demeure toujours. Je pense que c'est là l'essentiel de la loi no 125 et de cette particularité qui lie le gouvernement du Québec aux schémas d'aménagement des municipalités régionales de comté.

Tout en gardant le ton le plus positif possible dans ce débat, je ne peux souscrire à tout ce qui a été dit du règlement de contrôle intérimaire et aux prétextes évoqués du côté de l'Opposition, par certains de ses membres en particulier, notamment à cette fausseté: des milliers de constructions, prétendent-ils, n'ont pu être réalisées à cause des exigences du règlement de contrôle intérimaire des MRC au cours de l'hiver 1983 et de l'automne 1982. La vérité est tout autre et la raison majeure qu'ils se gardent bien de dire, la cause principale qui a empêché ou retardé la construction de logements, la véritable raison, c'est un niveau scandaleux des taux d'intérêt décidé par cet autre palier de gouvernement, celui d'Ottawa, celui qu'ils défendent sans égard aux intérêts du Québec.

Je ne puis que faire allusion également à tout ce décor, à toute cette dimension dans le paysage du monde municipal québécois, soit cette intervention insidieuse du gouvernement fédéral d'Ottawa auprès des municipalités du Québec. Quel but poursuit le fédéral dans ses tentatives d'intervention? Est-ce que les bonnes relations qui existent entre le monde municipal, le gouvernement du Québec et le ministère des Affaires municipales, en particulier, leur portent ombrage? Après tout le bouleversement qui, depuis quelques années, est survenu dans le monde municipal, les élus municipaux auraient amplement raison d'être aigris, d'être complètement braqués contre le gouvernement du Québec et contre le ministère des Affaires municipales, mais c'est le contraire qui se produit.

J'ai vécu l'expérience d'un premier contact avec des maires pour la mise en place, la création des municipalités régionales de comté. Au départ, il y avait ce sentiment de scepticisme qui se lisait sur la figure de plusieurs intervenants. Les allégeances politiques aidant, c'était assez visible, mais à mesure que la loi 125 a été expliquée, que l'information a été transmise, on a heureusement constaté que cette méfiance du départ a fondu pour devenir une participation franche et entière à cette réforme en profondeur du monde municipal et à la création de cette structure administrative et politique qui était offerte aux maires à cette table de concertation qu'était la municipalité régionale de comté.

Je vous dis, d'après l'expérience que j'ai avec les maires que je contacte dans ma région, qu'ils savent drôlement bien utiliser cette table de concertation. Cette intervention fédérale et cette recherche d'infiltration et d'ingérence dans le monde municipal, est-elle due à la compétence des municipalités, à leur acceptation d'un

dialogue constant avec le gouvernement du Québec, à l'instauration d'un régime fiscal qui les place aujourd'hui dans une situation très avantageuse? On n'a qu'à constater les surplus, les excédents budgétaires des municipalités du Québec; certaines ont des surplus absolument extraordinaires. Les municipalités du Québec n'ont pas subi les effets désastreux de la crise de l'année 1982 de laquelle nous sortons lentement. Est-ce que cette compétence des municipalités, ces bonnes relations avec le gouvernement du Québec les fatiguent assez pour vouloir substituer à cela l'incompétence fédérale? (22 heures)

On n'a qu'à se remémorer l'existence d'un ministère fédéral des Affaires urbaines qui n'était qu'un prétexte d'infiltration également et que, par décence, finalement, on a décidé d'abolir. Veut-on faire au niveau fédéral, par la bande, ce qu'on ne peut pas faire directement? Je comprends que cela les prive d'un contact avec les élus municipaux. Cela les empêche d'organiser une distribution de fonds fédéraux de façon discrétionnaire et d'ériger en système une distribution discrétionnaire. Bien sûr, cela va les priver aussi des parades du Père Noël pour annoncer dans une prochaine rencontre qu'ils annonceront quelque chose, comme cela s'est fait dans mon comté.

Le projet de loi no 12 s'inscrit dans une prise de responsabilité du gouvernement du Québec de doter la législation municipale, et non pas de les laisser traîner, de modifications qui s'avèrent nécessaires et qu'on doit faire quand c'est le temps de les faire. Ceci pour un bon fonctionnement du ministère des Transports entre autres, précisément pour ne pas pénaliser la voirie rurale en retardant la réalisation d'améliorations au réseau routier rural. Les besoins dans ce domaine sont tellement urgents que je souscris d'emblée à toute démarche qui vise à accélérer la réalisation et la concrétisation des projets d'amélioration du réseau routier rural.

Le projet de loi no 12 est une modification qui s'inscrit aussi dans ce que j'ai moi-même proposé aux élus municipaux, à savoir que la loi 125, au moment où on mettait en place les municipalités régionales de comté, n'était pas coulée dans le ciment pour des années à venir et que, lorsqu'il s'avérerait nécessaire - à l'usage, c'était une structure nouvelle, nous impliquions dans ce procédé des maires de municipalités dans tout le Québec - d'apporter des modifications pour son bon fonctionnement, nous le ferions immédiatement. Je ne croyais pas, à ce moment, avoir la tâche d'intervenir sur une de ces modifications, mais aujourd'hui je suis heureux de le faire pour que la législation municipale soit adaptée, soit modernisée pour convenir au Québec d'aujourd'hui. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Laurent.

M. Germain Leduc

M. Leduc (Saint-Laurent): Avec le projet de loi no 12, le ministre des Affaires municipales demande à l'Assemblée nationale de voter un projet de loi qui va permettre au gouvernement, à son propre ministère, à tous les autres ministères et à tous ses mandataires de déroger à sa propre loi et aux règles qu'il avait lui-même imposées par l'adoption en 1979 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, soit la loi 125. En effet, en vertu de ce projet de loi no 12, le gouvernement, ses ministères ou mandataires pourront effectuer des opérations cadastrales et des morcellements de terrains durant la période de contrôle intérimaire. Ainsi, ils pourront se soustraire à leurs propres exigences, soit celles établies par la loi 125.

Par le présent projet de loi, ainsi que par le projet de loi omnibus de décembre dernier, qui modifiait l'article 61 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, le gouvernement reconnaît expressément qu'il ne peut se soumettre à sa propre loi, à ses propres règles du jeu. Il reconnaît expressément que les règles qu'il a établies dans la loi 125 sont nettement trop contraignantes et exigeantes. Il reconnaît expressément qu'il ne peut se soumettre à la lourdeur administrative et aux nombreuses difficultés créées par le schéma d'aménagement et le contrôle intérimaire.

Par le présent projet de loi, le ministre décrète que le gouvernement est au-dessus de sa propre loi. Au lieu d'assouplir le processus conduisant à l'aménagement du territoire, comme l'ont souvent demandé les intervenants du monde municipal et particulièrement les municipalités, le gouvernement, se sentant incapable de se soumettre à la lourde procédure administrative qu'il a lui-même créée, nous demande d'adopter une loi lui permettant de se soustraire à toute confusion sans toutefois répondre aux nombreuses demandes des intervenants dans ce dossier et, particulièrement, bien sûr, des municipalités.

Il faut bien le dire: Le gouvernement fait encore preuve ici d'incohérence et de confusion entre les discours qu'il tient à la population et la législation qu'il fait adopter à l'Assemblée nationale. Tout en prônant l'autonomie locale des municipalités du Québec et le droit pour ces dernières de faire respecter sur leur territoire les lois et règlements les régissant, le gouvernement vient, par son projet de loi no 12, renier ce principe en statuant que le gouvernement est au-dessus des lois et au-dessus de l'autorité des municipalités. Le gouvernement veut bien que les municipalités soient autonomes, mais

à la condition que cette autonomie ne lui crée aucune contrainte et aucun préjudice. Le gouvernement veut bien que l'on procède à l'aménagement du territoire, mais à la condition que les lois et les règlements qui doivent y présider ne le dérangent pas et, surtout, ne l'obligent pas à obtenir des permis et des certificats exigés en vertu d'un règlement de contrôle intérimaire.

Il ne faut pas, non plus, que ces lois et règlements l'empêchent de construire une voie de circulation. Le gouvernement, en fait, se refuse à respecter les lois et règlements qu'il a lui-même édictés. La question qu'on doit se poser ici, c'est celle-ci: Est-ce que le gouvernement ou un juge est au-dessus des lois? Comme dans le cas d'un juge, à mon avis, le gouvernement doit respecter les lois et voir à ce qu'elles soient appliquées. Le gouvernement, pas plus qu'un juge, n'a le droit de se soustraire ou de soustraire qui que ce soit aux lois existantes et, surtout, il n'a pas le droit de se soustraire lui-même à ses lois.

Si le gouvernement entend se soustraire aux lois et règlements qu'il a édictés, c'est donc que ces lois et règlements lui causent des préjudices. Or, il est évident que, dans le dossier de l'aménagement, plusieurs intervenants subissent, comme le gouvernement, des préjudices. Qu'il suffise de mentionner ici les municipalités, les constructeurs et les contribuables en général, qui subissent sûrement des contraintes et des préjudices à cause de ces lois et règlements sur l'aménagement du territoire. Les délais occasionnés par la préparation du schéma d'aménagement, ainsi que par la préparation et l'adoption des règlements de contrôle intérimaire sont sûrement des causes de retard dans les projets de développements domiciliaires, commerciaux et industriels. Mais si tous reconnaissent que c'est le prix à payer pour éviter un développement anarchique et un gaspillage du territoire québécois, il faudrait, il me semble, que l'État, au même titre que les citoyens, participe à la réalisation de l'objectif visé et ne tente pas de se soustraire par des dispositions privilégiées aux lois qu'il a lui-même édictées à cette fin.

Qu'advient-il des garanties que le ministre des Affaires municipales donnait aux représentants municipaux réunis au congrès de l'Union des municipalités le 28 août dernier, alors qu'il affirmait: "En ce sens, vous êtes devenus des artisans de la texture économique du pays. Vous l'êtes devenus dans le cadre d'une loi, soit la loi 125, qui vous octroie cette liberté de choix et d'action avant tous les autres intervenants, dans le cadre d'une loi qui contraint le gouvernement à s'astreindre à vos schémas d'aménagement sous peine de débats publics où les citoyens vont devoir juger au mérite"?

Je dois vous dire, M. le ministre, qu'avec le dépôt du projet de loi no 12 vous avez décidé de ne pas vous astreindre aux schémas d'aménagement et les citoyens du Québec vont vous juger au mérite. J'ai grand peur que le verdict en soit un de culpabilité. Même l'Union des municipalités et l'Union des municipalités régionales de comté se montrent très sévères à l'endroit du gouvernement. Les deux unions trouvent tout à fait inacceptable qu'un gouvernement qui prétend prôner la consultation auprès des parties concernées n'ait nullement consulté ces deux instances. Bien plus, c'est l'Opposition qui a informé l'Union des municipalités et l'Union des municipalités régionales de comté du dépôt de cette fameuse loi 12. (22 h 10)

Dans leurs commentaires sur ce projet de loi, les deux unions déplorent le comportement du gouvernement face aux contraintes imposées par le contrôle intérimaire et ne peuvent s'empêcher de mettre en cause, face aux autres contribuables québécois, l'équité des amendements proposés par le projet de loi no 12 qui favorise le gouvernement, ses ministères et ses mandataires. Tout en constatant qu'il peut être sain de revoir les mécanismes de fonctionnement de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, les deux organismes ne peuvent s'empêcher de proposer que cette révision soit également élargie aux problèmes éprouvés par les municipalités.

Les deux organismes concluent leurs commentaires en soulignant qu'ils ne peuvent s'empêcher de ressentir certaines frustrations après toute la publicité faite autour de la loi no 125 et de l'avenir de l'aménagement au Québec, alors que l'on constate un retour en arrière, soit le rétablissement des anciennes procédures à quelques nuances près. Ces municipalités et ces unions terminent ainsi: "Enfin, on en arrive toujours au vieil axiome: un gouvernement est fait pour gouverner et ce, envers et contre tous."

Je pense, M. le Président, que ces commentaires traduisent assez bien l'état d'esprit qui règne dans le monde des municipalités locales et des municipalités régionales de comté. Tous les intervenants municipaux sont d'accord pour reconnaître que la protection du territoire et son aménagement rationnel sont essentiels pour éviter le développement anarchique et un gaspillage de ce territoire québécois. Mais tous sont également d'accord pour condamner les modalités d'application de la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme.

Après avoir, dans bien des cas, imposé à des municipalités une appartenance à une MRC qui n'était pas toujours souhaitable et souhaitée, le ministre des Affaires municipales a décrété qu'il n'était absolument pas question pour les

municipalités régionales de comté de modifier leur territoire au cours des quatre ou cinq prochaines années. Il semble donc que les territoires sont coulés dans le béton pour les quatre ou cinq prochaines années. Impossible pour les municipalités d'en sortir.

Bien plus, le ministre a indiqué que, même si la loi a prévu des mécanismes pour le cas où ces municipalités voudraient se détacher de la MRC dont elles font partie, elles ne pourront utiliser ces mécanismes pour cette période de quatre ou cinq ans. Imaginez, par le projet de loi no 12, le ministre entend se soustraire à des exigences de la loi no 125, alors qu'il ne permet pas aux municipalités d'utiliser des dérogations qui sont prévues et permises par cette même loi no 125.

Pourquoi, dans le cas particulier de Brome-Missisquoi, le ministre n'a-t-il pas respecté la volonté de la population qui désirait avoir une MRC à la mesure de sa véritable région d'appartenance? Que penser maintenant de la situation qui prévaut à la MRC Pontiac? Il est très difficile, il me semble, de concilier, d'une part, l'affirmation du ministre, à savoir que toutes les consultations ont été faites dans les démarches pour déterminer les territoires des MRC et, d'autre part, l'insatisfaction et le mécontentement général des populations touchées par la formation des MRC.

Comment concilier également le fait que, chaque jour, les journaux régionaux font état des problèmes qui existent au sein des MRC et la déclaration du ministre qui affirmait que le gouvernement n'avait nullement imposé ses volontés aux municipalités, que les comités de consultation avaient très bien fonctionné, que l'émission des lettres patentes avait été plutôt un accord généralisé et que les gens disaient, après coup, que les décisions qui avaient été prises avaient été les meilleures?

En plus de geler les territoires des MRC pour une période de quatre ou cinq ans, le ministre annonce aux MRC, comme si une mauvaise nouvelle devait nécessairement en amener une deuxième, qu'elles devront trouver, et ce à très court terme, des sources autonomes de revenus pour assurer leur bon fonctionnement. Maintenant que le réseau des MRC est créé, le ministre annonce gentiment aux contribuables de ces MRC que le financement par le gouvernement tire à sa fin et que les MRC devront faire preuve d'imagination pour trouver leurs propres sources de revenus. Il faut que le ministre ait drôlement de l'imagination et, je dirais, surtout du culot pour demander aux MRC de faire preuve d'imagination pour trouver leurs propres sources de revenus. Je suppose que, parmi les dirigeants des 1600 municipalités locales du Québec, il s'en trouve certains qui ne manquent pas d'imagination. Pourtant, je ne sache pas qu'ils aient, encore jusqu'à maintenant, trouvé d'autres moyens d'obtenir des sources de revenus qu'en taxant leurs contribuables.

Il ne faudrait pas, il me semble, prendre les Québécois pour des imbéciles. Ils ont compris, eux, depuis longtemps qu'avec ce gouvernement, tout se paie et que la facture est toujours très élevée. Il aurait fallu, il me semble, dès le début, être très clair et aviser la population et les contribuables concernés que l'aménagement du territoire, cela a un coût et qu'il faut le payer et ce, même en temps de crise économique. Il est évident qu'un nouvel organisme créant un nouveau palier de gouvernement va nécessairement entraîner des coûts aux contribuables. Ces coûts seront d'autant plus importants que les champs d'activité des MRC seront très étendus.

Quant à savoir justement quels champs d'activité seront dévolus aux MRC, le ministre, il faut bien le dire, se fait discret et vague à souhait. Il ne faudrait surtout pas, M. le Président, que le gouvernement soit tenté de régler ses graves problèmes financiers et budgétaires par l'entremise des MRC. Il ne faudrait surtout pas que le gouvernement refile aux MRC les responsabilités qui se veulent gouvernementales, comme celles de la voirie, de la gestion des déchets, de l'évaluation, des équipements physiques, des services d'éducation et de santé. La tentation peut être grande, mais il ne faudrait pas - je pense que les municipalités, leurs dirigeants et leurs contribuables sont d'accord là-dessus - que le gouvernement impose aux MRC un rôle qui déborderait celui de l'aménagement du territoire. Personne au Québec ne pourrait accepter que les MRC leur imposent un autre régime de taxation. Je pense qu'au Québec, nous avons notre quota en ce qui concerne les taxes et les impôts.

En ce qui concerne la décentralisation, le ministre nous annonce que le débat n'a pas encore eu lieu. Il indique que, tant que le Québec fera partie de la Confédération canadienne, la décentralisation sera fort limitée alors que, dans l'optique d'un Québec indépendant, des pouvoirs beaucoup plus larges seraient en cause. Imaginez, le ministre voudrait nous faire croire, je ne sais trop par quelle recette magique, qu'un Québec indépendant pourrait donner davantage de pouvoirs aux contribuables et aux municipalités, bien sûr. On n'est pourtant pas encore en régime indépendantiste. Rien n'empêche, cependant, le ministre actuel de l'Éducation de vouloir réduire considérablement les pouvoirs des commissions scolaires. Mais que peut signifier, M. le ministre, un transfert des pouvoirs aux municipalités si elles n'ont pas les revenus pour exercer ces pouvoirs?

Je terminerai en disant que, si le

gouvernement veut confier véritablement l'aménagement du territoire aux élus, aux municipalités, il devra, je pense, respecter d'abord lui-même les règles qu'il a mises en place. Ce n'est sûrement pas en se soustrayant ainsi et en soustrayant ses ministères et ses mandataires aux contraintes de la loi 125 que les MRC auront l'impression de contrôler l'aménagement du territoire. Les MRC n'auront pas plus l'impression de contrôler cet aménagement si les fonctionnaires, comme cela semble se produire actuellement, orientent directement le contenu des règlements de contrôle intérimaire sous peine, bien sûr, si ces règlements ne sont pas acceptés, de les désavouer, ce qui aurait pour conséquence immédiate de maintenir le gel du développement sur le territoire. (22 h 20)

Comme les règlements de contrôle intérimaire, pour être acceptés, doivent nécessairement se conformer aux exigences préétablies par le ministère des Affaires municipales, il aurait été, je pense, beaucoup plus expéditif et beaucoup plus honnête d'imposer directement un règlement de contrôle intérimaire standard à toutes les MRC du Québec. Ce processus aurait peut-être nui à l'image que le gouvernement veut projeter de la liberté pour les MRC de contrôler le développement de leur territoire, mais il aurait eu l'avantage de représenter la réalité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Groulx.

M. Élie Fallu

M. Fallu: M. le Président, il est manifeste que les libéraux, du moins ceux que nous avons ici en cette Chambre, ont passablement de difficulté à vivre dans la société moderne du Québec. Souvenez-vous de leurs ministres, il y a à peine sept ans, ces ministres qui laissaient aller le territoire agricole, ces ministres qui ont massacré littéralement l'environnement, ces ministres qui ont agi à leur guise, sur le territoire faisant passer les routes en plein milieu des terres.

La société moderne du Québec a changé, mesdames et messieurs. Elle est faite d'économie des sols en vue de la survivance de la nation. Elle est faite de la conservation de la qualité de la vie. Elle est faite de la participation des citoyens, des citoyennes et des élus à la gestion collective. Les libéraux n'admettent pas les valeurs nouvelles qui sont apparues dans la société: l'écologie, la décentralisation, la prise en main par les citoyens. Ils sont actuellement déconnectés de la société, débranchés de ses aspirations. Ils ne savent pas avec quel enthousiasme les élus municipaux se sont mis à l'aménagement avec leurs concitoyens et leurs concitoyennes. Ils ne connaissent pas l'ampleur des espoirs nés de la recherche d'un nouvel aménagement des pouvoirs dans notre société.

Vous avez écouté tantôt ces cris et ces hurlements. Ce sont les libéraux, ces centralisateurs et ces dictateurs des années 1970 à 1976 qui, en trois lois, ont fusionné de force pas moins de 70 municipalités. On a entendu déjà trois discours, le froissement du même papier qui se tournait sur les bureaux, la même récitation apprise, les mêmes vieux discours répétés. Même si, en Chambre, en commission parlementaire, dans tous nos débats, ils ont reçu réponse à leurs questions et soulagement à leur état d'âme, ils répètent inlassablement les mêmes rengaines. C'est croire qu'ils ont fini par y croire eux-mêmes, à moins que ce soir ils ne profitent de la télévision pour essayer de faire passer leur message, puisque plus aucun média ne rapporte leurs paroles ou leurs dires.

M. le Président, ces gens cherchent des poux. Je voudrais vous signaler que les poux sont rouges. Qu'ils se grattent tout seuls.

De quoi s'agit-il? De la création des MRC? Du découpage du territoire? De la loi 125? Laissez-moi simplement vous rappeler que, sur 1510 municipalités qui ont pris part à la consultation, les attentes formulées ont été satisfaites à 99%. J'aimerais simplement reprendre ce que, en cette Chambre, en 1964, rappelait fort justement - mais je pense qu'il a été le dernier à le rappeler -Jean Lesage à propos d'un aménagement à l'une des lois municipales. Le premier ministre rappelait avec force, avec toute l'autorité du gouvernement libéral de l'époque, que c'était à l'Assemblée nationale que revenait l'autorité suprême de délimiter les territoires municipaux et de donner les pouvoirs aux municipalités.

L'esprit a changé, M. le Président, par la consultation. C'est en tout une douzaine de cas de demandes de modifications et souvent a posteriori, après un changement dans une élection municipale, après qu'un groupe de citoyens aient - je dirais, entre nous - désavoué, pour ainsi dire, leurs élus, que certains "problèmes", surtout certaines charges de cavalerie comme celle à laquelle nous avons assisté tout à l'heure... On croyait plutôt voir un jarret noir embourbé.

Pendant que ces libéraux, ici en Chambre, ronchonnent éternellement des choses qui n'existent pas, qu'en est-il sur le territoire? Laissez-moi simplement vous lire ce qu'un préfet raconte: La loi 125, c'est la plus belle mesure dont ait jamais hérité le monde municipal. Il existe enfin une loi permettant aux citoyens d'agir directement sur les élus et de travailler avec eux à l'aménagement du territoire sur lequel ils vivent. C'est sans doute la meilleure loi qui

n'ait jamais été votée, pour autant que les municipalités sont concernées. Voilà quelqu'un qui n'est pas venu à l'Assemblée nationale, qui est resté près de son monde, chez lui. Pourtant, il était candidat à la dernière élection pour le Parti libéral: le préfet de la Matawinie.

Après ces drames, ces cris, je vois les gens maintenant de la région de Pontiac ou de Gatineau confondre encore une fois le territoire municipal et leurs propres anciennes circonscriptions électorales, dans cette Chambre, comme ils le font régulièrement. On va les entendre tout à l'heure. Je vous préviens, M. le Président, vous avez déjà assisté à ce spectacle, par des questions en Chambre notamment.

De quoi s'agit-il ce soir en cette Chambre? D'un projet de loi qui a à peine quelques articles, neuf, dont le dernier: La présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction. Un projet de loi qui vise à "dépaperasser", qui vise la simplification administrative. Mais Dieu! est-ce qu'ils sont contre la simplification administrative, ces gens-là? Certainement pas. Est-ce qu'ils sont contre la paperasse? Certainement pas. Je peux, puisqu'ils sont terminés, faire allusion aux travaux de la commission des affaires municipales. J'ai entendu de mes oreilles, depuis deux jours, des affirmations absolument invraisemblables de la part de ces députés libéraux, membres de la commission parlementaire des affaires municipales, qui sont venus nous dire qu'il ne fallait pas trop instruire les élus municipaux. Il y en a un qui se reconnaît dans cette Chambre.

Une voix: Qui ça?

M. Fallu: Ah, il rit jaune dans son coin. Il y en a un autre - il a quitté tout à l'heure - qui a dit qu'il fallait réglementer l'affichage dans les journaux, au mépris de la liberté de presse. Ah non, c'est le même. Il est toujours là. Un autre nous a proposé une commission municipale itinérante afin de réprimer les abus des élus municipaux.

Une voix: Est-il en Chambre?

M. Fallu: C'est un maire. Il n'y a pas beaucoup de maires...

Une voix: Est-il en Chambre ce soir? M. Fallu: ...dans cette Assemblée, Une voix:Est-ce qu'il est là ce soir?

M. Fallu: Il n'est pas là ce soir. Évidemment, ce sont les affaires municipales. Donc...

Une voix: Il est en congé, le maire. (22 h 30)

M. Fallu: Il y en a un autre qui réclamait des contrôles fréquents des élus et lui, c'est un ex-maire.

Une voix: Pas le député de Hull?

M. Fallu: Ce sont ces gens-là qui veulent nous proposer une très jolie société. Vont-ils s'opposer à la "dépaperasserie", à la simplification administrative? M. le Président, vous n'avez pas pu suivre le débat depuis le début, peut-être sans doute de vos appartements mais, au cas...

Une voix: Ses bureaux.

M. Fallu: Pardon, de vos bureaux, maintenant. En quelques mots et d'une façon la plus simple possible, je présenterai l'objet de la loi.

Une voix: Il serait quasiment temps.

M. Fallu: Par la loi 125, le gouvernement lui-même, ses ministères, ses mandataires et ses organismes, se sont obligés à se soumettre à la loi sur l'aménagement fabriquée par les citoyens et les citoyennes, avec leurs élus locaux, en collaboration avec les élus municipaux. Le gouvernement s'est obligé à se soumettre à ses propres lois comme il l'a fait dans le domaine agricole et dans le domaine de l'environnement. Or, un mécanisme ad hoc a été prévu, de l'article 149 à l'article 157, qui oblige un ministère à présenter à la municipalité régionale de comté...

M. Dubois: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Groulx.

M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Je pense que le député vient d'induire cette Chambre en erreur. Il vient d'indiquer que le gouvernement prend l'application de la loi à son compte, c'est-à-dire qu'il respecte la loi. Le gouvernement ne respecte pas la loi 90 puisqu'un article indique que le gouvernement...

Le Président: L'un n'exclut pas nécessairement l'autre, M. le député. De toute façon, il ne s'agit pas là d'une question de règlement, mais d'une question d'opinion.

M. le député de Groulx.

M. Fallu: Je vous remercie d'avoir protégé mes droits de parlementaire, M. le Président.

Le gouvernement s'oblige à donner à la MRC un avis d'intention. Le ministère des Transports, le MLCP ou le ministère de

l'Énergie et des Ressources qui veut construire une route doit donc donner un avis d'intention à la MRC. Cette MRC, c'est-à-dire des élus, réunit ses membres et donne ou non un avis de conformité. Si oui, on procède; sinon, en dedans de 90 jours, on avise des changements. Passons sur les détails parce qu'il ne s'agit pas de cela.

Que fait un citoyen qui veut intervenir sur le territoire, se construire, creuser, etc.? Il va à sa municipalité et demande un permis. Si sa demande est conforme au règlement de contrôle intérimaire, au schéma d'aménagement, au règlement d'urbanisme, on le lui délivre. Sinon, par le biais de ses voisins, de ses concitoyens et concitoyennes, il fera les représentations adéquates pour ajuster éventuellement les règlements ou le schéma d'aménagement.

Qu'en est-il de cette loi maintenant? Le gouvernement s'était soumis à la fois à cet avis d'intention et à la demande de permis dans la municipalité. Je vous "scénarise" cela, M. le Président. Une route doit être élargie cet été, on doit corriger quelques courbes, on doit faire quelques élargissements à certains endroits pour un dépassement. Il fallait, pour chaque lot, pour chaque division, subdivision, demander un permis comme s'il s'était agi de construire une polyvalente, une église ou une maison de huit logements. Il fallait un permis pour chacun de ces lots, pour deux pieds de large, devant une maison, pour deux pieds de large le long d'une ferme. Qu'est-ce que le gouvernement fera dorénavant? Il va simplement, tel que le prévoit la loi, déjà depuis 1979, s'adresser à la MRC et faire vérifier par des élus la conformité de ces travaux au schéma d'aménagement.

Simplification administrative "dépape- rasserie". Vous essayez d'imaginer au Québec le monceau de permis que le gouvernement aurait dû demander à chacune des municipalités pour chaque lot sur lequel il serait intervenu.

Évidemment, on a oublié de nous parler de cela de l'autre côté, parce qu'il semble qu'ils n'ont pas lu le projet de loi. Ces gens ne semblent pas savoir comment cela fonctionne. Entre-temps, ils racontent que le gouvernement ne se soumet plus à ses propres lois. Ils ont mal lu les amendements. Il s'agit simplement de ceci. À l'article premier qui amende l'article 2 de la loi 125, il y a deux mots qui sont importants: "Dans la seule mesure prévue au." C'est-à-dire que le gouvernement n'aura plus à demander les permis dans les municipalités, mais néanmoins il reste obligé d'aller se chercher un avis de conformité auprès de la MRC, auprès des élus. C'est cela le projet de loi.

On ne se dédit pas comme gouvernement. À l'usage - on l'avait dit en 1979 - un tel monument n'avait jamais existé dans notre société dans laquelle les citoyens et les citoyennes participaient dans leur municipalité, en recréant les anciens conseils de comté sous forme de MRC pour y placer des relations intermunicipales et un pôle de décision, en obligeant gouvernement, MRC, municipalités enfin à faire l'aménagement. On ne se dédit pas par rapport à ce qu'on a dit en 1979. Mais on avait dit, en 1979, qu'il faudra constamment ajuster; ce qu'on ne manque pas de faire d'ailleurs. Souvenez-vous de la loi 92, avant les fêtes.

Vous avez saisi que le Parti libéral a choisi, ce soir, non pas de parler de l'objet du projet de loi no 12, non pas de la simplification administrative, non pas de l'efficacité dans notre société, mais il a simplement voulu tâcher, encore une fois... J'imagine qu'avec tous ces discours qu'ils ont relus et relus, ils vont finir par les mettre dans des archives. Peut-être maintenant qu'avec la Loi sur les archives cela va bien être classé, mais pensez maintenant à l'avenir. Il y a encore des députés qui font des rengaines sur les comités de consultation d'il y a trois ans.

Je pensais à mon collègue, tout à l'heure, le député de Montmagny-L'Islet, qui a présidé un comité de consultation, mais il est député ici à l'Assemblée nationale depuis deux ans maintenant. C'est de l'histoire ancienne. Cessez de raboter cela. Mettez vos discours dans les archives et pensez à l'avenir. C'est ce que nous voulons faire; faire en sorte qu'au cours de l'été, le ministère des Transports puisse procéder rapidement, dans le respect des élus municipaux, dans le respect des juridictions des MRC, au versement des 1300 chèques d'expropriation qui attendent chez les notaires actuellement, qui n'ont pas pu être versés, parce que, pour avoir pu être versés, il aurait fallu que le ministre ne s'entende pas avec les riverains. Il aurait fallu qu'il leur envoie des avis d'expropriation et que cela aille jusqu'au Tribunal de l'expropriation. C'est tout simplement ce que nous voulons faire dans le respect des élus municipaux et des pouvoirs des MRC. (22 h 40)

Des voix: Très bien.

Le Président: M. le député de Gatineau. M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, il me semble que c'est manifeste que le député de Groulx avait mandat de remplir un trou, il l'a fait avec plus ou moins de brio, je dois l'avouer, en passant les trois quarts de son intervention à attaquer les libéraux, comme si les libéraux étaient responsables du fouillis qui résulte de la politique du gouvernement en matière d'aménagement. Finalement, il a réussi à nous donner quelques cas d'espèce de ce qu'il considère être les effets

bénéfiques du projet de loi no 12. Je reviendrai d'ailleurs sur certains des points soulevés par le député de Groulx qui témoignent de son ignorance complète de ce qui se passe dans la réalité de certaines circonscriptions électorales du Québec sinon possiblement dans la sienne.

On sait que ce gouvernement, qui se voulait si transparent, après sa première élection, en 1976, est maintenant passé maître dans l'art de camoufler ses vraies intentions derrière les beaux discours, empreints d'un soi-disant désir de respecter la volonté des citoyens, alors qu'il continue toujours de tenter d'imposer ses propres volontés. C'est le cas de son option séparatiste qu'il continue de tenter d'imposer malgré la volonté clairement exprimée par 60% de la population, le 20 mai 1980, lors du référendum. La loi 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, s'inscrivait d'ailleurs parfaitement dans cette stratégie étapiste du gouvernement péquiste.

Vous vous rappellerez, M. le Président, qu'on a commencé par parler de décentralisation. On a publié une série de fascicules, il y en avait sept ou huit, tous inspirés par ce grand bonhomme, ex-ministre des Affaires municipales du gouvernement de l'Union Nationale, le Dr Lussier, tous inspirés de sa philosophie qui voulait que, dans un Québec indépendant, il fallait avoir nous aussi, comme la France, nos préfectures, nos départements. La loi 125 est venue confirmer dans les faits, sans que jamais le gouvernement ne l'admette, cette intention de créer un niveau de gouvernement intermédiaire en prévision de l'accession du Québec à l'indépendance.

On a publié des fascicules, mais, fait assez curieux, celui qui devait traiter des pouvoirs des municipalités régionales de comté, on l'a attendu pendant des années et on l'attend toujours. Ce ministre des Affaires municipales, qui était alors ministre d'État à l'Aménagement, est devenu l'un des principaux artisans de ce discours mielleux, sourire en coin, selon lequel le gouvernement veut décentraliser, veut confier plus de pouvoirs aux élus locaux, veut respecter la volonté locale. Dans les faits, c'est le rouleau compresseur; on y va à tour de bras. On pose des questions au ministre des Affaires municipales à l'Assemblée nationale, on lui pose des questions lors de l'étude des crédits - mon collègue de Pontiac l'a fait pendant près d'une heure et demie au cours de la journée d'hier. Tout ce que le ministre des Affaires municipales se contente de faire, c'est de sourire béatement et de ne jamais répondre directement aux questions. C'est comme s'il se disait: On peut continuer de mentir par omission; on peut continuer de colporter n'importe quelle sornette, n'importe quel mensonge, n'importe quelle fausseté; la population en sera dupe puisque, de toute façon, c'est nous qui avons le monopole de la vérité. Ce ministre des Affaires municipales, lorsqu'il daigne nous fournir des bribes de réponses, nous abreuve de commentaires qui, en ce qui concerne la région de l'Outaouais, sont inspirés soit par l'ignorance, ou par la malhonnêteté.

Donc, M. le Président, on se rappellera que, lorsqu'on a présenté la loi no 125 sur l'aménagement et l'urbanisme, ce devait être, pour les municipalités régionales de comté, uniquement une question de faire de l'aménagement. Or, on ne sait trop quel projet pilote nous attend. On a parlé de confier, à titre de projet pilote, la responsabilité à certaines MRC de l'entretien du réseau routier. On a évoqué toutes sortes d'hypothèses sur les possibilités de donner des pouvoirs aux municipalités régionales de comté. Mais, en 1977, il y a six ans, on nous avait promis de fournir - je pense que c'était le fascicule no 5 - les indications précises de ce que seraient les pouvoirs éventuels des municipalités régionales de comté. Six ans plus tard, on n'est toujours pas plus avancé. C'est ce qui a fait qu'au Parti libéral du Québec, lors du dernier conseil général tenu ici, dans la ville de Québec, il y a deux ou trois semaines, des militants de la base provenant de l'ensemble du territoire du Québec...

Je comprends que, de l'autre côté, on va dire: Ce sont des libéraux. Comme le disait le député de Groulx, tantôt: Les libéraux, cela compte pour rien. Ce que disent les libéraux, cela ne vaut rien. Imaginez qu'ils ont le malheur, de temps à autre, d'écouter ce que la population dit. Vous le faisiez, messieurs du gouvernement, avant d'être au pouvoir. Vous étiez à l'écoute des citoyens du Québec. Dieu sait que vous étiez partout dans le paysage, y compris sur les lignes de piquetage, aux manifestations contre le gouvernement. Vous étiez animés par ce préjugé favorable aux travailleurs, par ce préjugé favorable à la consultation et à la participation des citoyens. Beau résultat depuis que vous êtes au pouvoir! On continue à tenir exactement les mêmes discours que quand on était dans l'Opposition, mais en disant: Voyez comment nous avons changé la façon de procéder. Voyez comment nous agissons de façon transparente en cachant nos vraies intentions et en faisant croire qu'on respecte la volonté populaire. Le projet de loi no 12, M. le Président, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, s'inscrit exactement dans la foulée de ce que je viens de décrire, une façon tortueuse, hypocrite pour le gouvernement d'en arriver à ses fins en prêchant la décentralisation, en prêchant le respect de la volonté populaire.

D'ailleurs, l'Union des municipalités du Québec le dit clairement dans ses commentaires sur le projet de loi no 12: "Ce

projet de loi traduit une volonté de la part du gouvernement de se soustraire aux contraintes des contrôles intérimaires adoptés par les municipalités." C'est cela que le projet de loi no 12 tente de faire. On peut bien nous faire tous les discours qu'on voudra, de la part du député de Groulx, à savoir qu'on est donc fin, qu'on est donc beau, qu'on est donc gentil au Parti québécois, qu'on respecte la volonté des municipalités, ce n'est pas le Parti libéral, c'est l'Union des municipalités du Québec qui dit que le projet de loi no 12 "traduit une volonté de la part du gouvernement de se soustraire aux contraintes des contrôles intérimaires adoptés par les municipalités." Or, un tel comportement, continue l'union, est "contraire à l'esprit de la loi 125 - que ce même ministre a parrainée et a fait adopter ici à l'Assemblée nationale - qui visait, justement, à permettre aux élus municipaux de contrôler les interventions sur leur territoire, tant des particuliers que des instances gouvernementales. (22 h 50)

Le gouvernement est toujours prêt à voter des lois, à adopter des règlements pour empêcher des particuliers d'agir ou pour leur imposer des contrôles. Dans un premier temps, dans la loi 125, il a prétendu vouloir s'assujettir lui-même aux contrôles qu'il imposait aux particuliers. Dans un deuxième temps, il vient maintenant, par le biais du projet de loi no 12, dire: Les contrôles qui s'appliquent aux particuliers demeurent toujours, mais nous du gouvernement, on veut s'en soustraire.

C'est cela, le but du projet de loi no 12. Ce n'est pas moi qui le dis, M. le Président; c'est l'Union des municipalités du Québec. Quand on vient me parler de respecter la volonté locale, la volonté des maires, des élus locaux, la volonté des populations locales, s'il y en a un qui est bien placé pour parler de l'hypocrisie, de la fausseté de tels propos, c'est bien le député de Gatineau qui vous parle. Et, s'il y a une municipalité régionale de comté où on n'a pas respecté la volonté populaire, où on n'a même pas respecté les critères inscrits dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme qu'a fait voter le même ministre, c'est bien la municipalité régionale de comté de Gatineau et, par voie de conséquence, les autres municipalités régionales de l'Outaouais.

Le ministre qu'on a interrogé ici à l'Assemblée nationale nous a dit: On a respecté le voeu des municipalités quant aux territoires municipalisés. C'est vrai qu'il n'y a pas une seule municipalité du comté de Gatineau qui a été incluse dans le territoire de la municipalité de Pontiac, par exemple, ou de la municipalité d'Antoine-Labelle. Ce serait bien le comble! On n'est, quand même, pas pour envoyer Hull-Ouest qui est tout près de Hull dans la municipalité d'Antoine-

Labelle avec Mont-Laurier. Même ces gens ne le feraient pas. Ils ne sont pas cinglés à ce point. Mais ce dont il s'agit dans la MRC de la vallée de la Gatineau, ce n'est pas de territoires municipalisés; c'est de territoires non municipalisés, de territoires non organisés. Mon collègue de Beauce-Sud disait ce soir que, chez lui, il ne sait pas trop qui on a pu consulter pour en arriver à tracer les limites du territoire de sa municipalité régionale de comté. Chez nous, M. le Président, nous on le sait qui on a consulté. On sait aussi qui on n'a pas consulté et on sait qui on a consulté et bafoué ensuite.

C'est simple chez nous. On a le comté de Gatineau ici, on a, à l'est, le comté de Laurentides-Labelle représenté par le valeureux ministre des Affaires municipales et on a au nord un ministre régional, le ministre délégué à l'Aménagement et député d'Abitibi-Ouest. Regardez bien comment on s'est coupé la tarte au sein du cabinet de M. le premier ministre. On avait, d'abord, le territoire du lac des Trente et un Milles. Je vous le dis tout de suite, le lac des Trente et un Milles est sur la limite de la circonscription électorale de Gatineau et de celle de Laurentides-Labelle. Mais, justement, il y a des chemins seulement d'un côté. Devinez lequel. Du côté du comté de Gatineau. Il n'y a aucun contribuable qui habite sur la rive est du lac des Trente et un Milles; il n'y a aucun accès par le comté de Labelle. Ceux qui possiblement voudraient s'installer du côté est du lac des Trente et un Milles devraient prendre le chemin du côté de Gatineau qui y mène et, ensuite, traverser en chaloupe. C'est assez clair. Il n'y a pas d'accès. Vous allez me dire: Ils ont sûrement inclus le territoire du lac des Trente et un Milles dans le comté de Gatineau. Ce serait tout à fait logique et vous êtes un homme logique, mais le ministre des Affaires municipales, non. Lui a amené ça chez lui...

Une voix: J'ai mon voyage!

M. Gratton: ...dans la municipalité régionale de comté d'Antoine-Labelle. Il me fait signe que non. Il viendra me le dire tantôt. Qu'est-ce qu'on a fait du territoire dans le parc de La Vérendrye? C'était l'autre ministre régional. Le comté de Pontiac, à qui le conseil de comté a toujours appartenu, avait agréé avec le comté de Gatineau de céder ce territoire au comté de Gatineau. On se dit: Ils l'ont mis soit dans le comté de Gatineau, soit dans le comté de Pontiac. En fait, les deux ont négocié et se sont entendus, on ne pouvait pas ne pas respecter cela. Savez-vous comment ils ont tranché le litige qui, d'ailleurs, n'existait pas puisque les deux étaient d'accord? Ils ont envoyé cela dans la Vallée-de-l'Or pour satisfaire les aspirations du ministre régional,

le député d'Abitibi-Ouest. C'est assez ridicule, en effet.

On a fait la même chose avec des territoires sur le Baskatong qui n'ont jamais appartenu, où il n'y a pas d'accès par le comté de Laurentides-Labelle. Il y en a peut-être quelques-uns. À partir de l'aéroport de La Macaza, on peut y en aller en avion, M. le Président; c'est à peu près à ça que cela se limite. Si vous ne connaissez pas le territoire, je le connais pas mal mieux que vous. Qu'a-t-on fait? On l'a envoyé dans le comté du ministre parrain.

Vous allez me dire: Oui, mais les libéraux, ça chiale tout le temps, c'est toujours en train de se plaindre des décisions du gouvernement. Je vais vous lire un éditorial du journal La Gazette; ce n'est pas The Montreal Gazette, c'est la Gazette de Maniwaki. Je vais vous lire cela, ça s'intitule Une démission significative. "Le président du Parti québécois du comté de Gatineau, François Mathieu, vient d'annoncer sa démission aux fonctions qu'il occupait au sein de ce ralliement politique (ralliement du rire, trois cloches). Ce geste s'avère très significatif. Lorsqu'on analyse les raisons qui ont motivé le président à agir de la sorte, on constate amèrement que le premier porte-parole favorable politiquement au gouvernement actuellement en place à Québec, pour la région de la Haute-Gatineau plus particulièrement, doit lui-même se résigner devant les portes qui, pendant un moment ouvertes pour laisser cette aile militantiste exprimer ses revendications, se sont par la suite refermées sans jamais donner espoir d'une réponse favorable. "Le dossier du découpage de la MRC de la vallée de Gatineau n'aura, en fait, été qu'une des nombreuses déceptions du PQ de la région, et particulièrement sa partie nord. Le complexe forestier qui ne vient pas, la route Maniwaki-Témiscamingue qui n'en finit plus de voir ses budgets coupés, les interventions du parti dans maints dossiers qui aboutissent dans les fonds de tiroirs ou rencontrent les oreilles de sourds et cette fameuse question du découpage territorial, où Mathieu et ses militants ont eu beau présenter des documents étoffés pour justifier le rattachement du territoire au nord et du lac des Trente et un Milles avec Gatineau, n'ont fait que donner les résultats que l'on connaît aujourd'hui. "Sur ce dernier point, le PQ Gatineau aura joué son atout politique au même titre que Labelle, à cette différence près que les résidents de la vallée de la Lièvre auront eu avec eux un député-ministre." Plus loin, on dit: "L'an dernier, à pareille date, au cours de la campagne de financement du PQ, Mathieu avait alors décidé, au moment de remettre les argents recueillis à un ministre qui s'était fait l'obligeance de ne pas se rendre à Maniwaki, qu'il sentait que son secteur était négligé et oublié. L'ex-président n'a fait que confirmer par sa décision ses premières présomptions. Devant l'indifférence qu'on lui a signifiée, à lui et ses militants, Mathieu a posé le geste qui se devait, non pas en signe de faiblesse et d'incapacité à affronter les défis, il a plutôt prouvé le contraire, mais pour faire comprendre au Parti québécois qu'à force de bafouer et de rejeter ses militants de la base, il se saborde de lui-même." (23 heures)

C'est le président du Parti québécois de l'association du comté de Gatineau qui a dit cela, ce n'est pas le président de l'association libérale. Quand on fait l'unanimité, quand on va jusqu'à la démission du président du parti au pouvoir pour contester une décision, quand le Conseil régional de développement de l'Outaouais, quand les maires, les 24 maires du comté, à l'unanimité, quand tout ce monde-là, M. le Président, dit: On n'est pas satisfait du découpage du territoire de la MRC de la vallée de la Gatineau, qu'on n'ait pas le culot, au moins, de l'autre côté, de venir nous dire qu'on respecte la volonté locale. Qu'on nous dise: On s'en fout, des gens du comté de Gatineau, on s'en fout, des gens de l'Outaouais. Cela au moins aura l'avantage d'être franc, honnête et transparent. Mais, ne venez pas nous écoeurer avec vos discours de respecter la volonté populaire. Et, M. le ministre des Affaires municipales, si vous n'êtes pas capable de dire la vérité, ne dites rien. Vous êtes capable. Vous avez apparemment passé près de dix heures à l'étude des crédits à ne rien dire. Continuez comme cela. Mais, ne venez pas nous dire que vous êtes respectueux de la volonté populaire. Vous faites rire de vous chez nous, pas seulement dans la Gatineau, mais dans l'ensemble des quatre MRC de la région de l'Outaouais.

M. le Président, je terminerai en disant tout simplement ceci: Comme mon collègue de Beauce-Sud l'a dit pour sa région, quand on impose et qu'on nous dit: On impose un moratoire de trois ou quatre ans sur les modifications qu'il pourrait y avoir aux territoires des MRC... On l'a entendue, cette sornette-là, et on l'a entendue d'un gouvernement qui n'était même pas péquiste - j'irai aussi loin que cela - quand on a découpé les régions administratives. On a dit: On impose un moratoire de trois ou quatre ans. Cela fait au-delà de 25 ans que le ministre des Affaires municipales est aussi au courant que moi que Mont-Laurier est dans la région administrative de l'Outaouais. Est-ce qu'il va me dire pour un seul instant que c'est logique et que cela a du bon sens? Est-ce qu'il va me dire que ce n'est pas exactement le même genre de mauvaises décisions qui a présidé à l'inclusion de Mont-Laurier dans la région 07 de l'Outaouais, il y

a 20 ou 25 ans? C'est le même genre de décision qu'il prend lui-même en envoyant le lac des Trente et un Milles à Antoine-Labelle, les régions du Baskatong à Antoine-Labelle et le parc de La Vérendrye dans la municipalité régionale de la Vallée-de-l'Or.

Je supplie le ministre de cesser cet entêtement. Ce sont les péquistes qui vous le disent que vous êtes sur la mauvaise "track". Pour l'amour du bon Dieu, "switchez de track". Voyez à vous diriger dans la bonne direction. Même si c'était pour une seule fois, c'est peut-être votre dernière chance, M. le ministre. Pensez-y donc. Pensez-y donc, non pas pour me plaire à moi, à titre de député. Je vais vous encenser, je vais vous faire une grosse réception là-bas, à Maniwaki, et on va vous dire combien vous êtes fin, vous êtes bon. Mais, je dis, M. le Président, que, si le ministre actuel des Affaires municipales ne le fait pas, un gouvernement libéral éventuel va le faire, lui. Effectivement, les territoires... Oui, je termine là-dessus, M. le Président - on a donc de la difficulté à nous entendre, vous et moi, sur le moment où je dois finir - en disant que, pour nous, pour moi, pour les gens qui ont le moindrement de bon sens, le sens du fair-play, les territoires qui ont appartenu depuis toujours à une région ne doivent pas en être détachés au profit des intérêts partisans ou personnels d'un député, d'un ministre ou de qui que ce soit. Je pense que l'aménagement du territoire, c'est trop important pour qu'on laisse cela à ces aléas. Et j'invite le ministre à y réfléchir et à nous dire qu'il entend, au moins, réétudier la question avant de vouer ces territoires à un sort qu'ils ne méritent réellement pas.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole à M. le ministre des Transports, je veux simplement dire au député de Gatineau que, malheureusement, le temps n'est pas illimité ici, comme à la commission à laquelle il participe avec moi.

M. le ministre des Transports.

M. Michel Clair

M. Clair: M. le Président, si vous n'aviez interrompu le député de Gatineau, comme c'était parfaitement votre droit de le faire, le député de Gatineau allait indiquer, je pense, qu'un gouvernement du Parti libéral corrigerait, lui, un certain nombre d'erreurs, semble-t-il, que le gouvernement actuel aurait commises. Et, il vient d'affirmer que c'est un fait.

M. le Président, le député de Gatineau est amnésique, il n'a pas de mémoire. Heureusement pour lui, d'ailleurs.

Heureusement pour lui, parce qu'il aurait honte. Et, après le discours qu'il vient de prononcer, je me demande comment il fait, non pas pour se regarder lui-même dans le miroir le matin, mais comment il fait, cependant, pour regarder dans le miroir le parti auquel il appartient, en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire au Québec.

Le député de Gatineau était là avant 1976. Quel a été le résultat de l'administration du Parti libéral du Québec, puisque c'est de cela qu'il voulait parler en parlant d'avenir? Quel a été le résultat des politiques du Parti libéral du Québec en matière d'aménagement du territoire de 1970 à 1976? Le record, comme on dit dans mon milieu, est éloquent. Je voudrais dresser un bref bilan de l'action des libéraux provinciaux de 1970 à 1976. Qu'ont-ils fait, M. le Président - je vois le député de Huntingdon qui s'intéresse aux questions d'agriculture - en matière de protection du territoire agricole au Québec...

Une voix: Rien.

M. Clair: ...de 1970 à 1976? Ils n'ont rien fait si ce n'est de laisser mourir sur la table du Conseil des ministres de l'autre côté un projet de loi visant à la protection des terres agricoles au Québec. Leur courage s'est arrêté sur la table du Conseil des ministres de l'autre côté de la rue, de l'autre côté de Grande-Allée. C'est connu à travers tout le Québec que M. Kevin Drummond, ministre de l'Agriculture de l'époque, a déposé un projet de loi au Conseil des ministres du temps visant essentiellement aux mêmes objectifs que ceux qu'a poursuivis le député de Lévis et ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Les libéraux ont manqué juste d'une affaire, M. le Président. Ils ont manqué de courage en matière d'aménagement.

Aujourd'hui, je mets le député de Gatineau au défi d'aller dans toutes nos campagnes, dans tous nos villages, chez les maires des villes, pour les consulter sur les effets positifs de la Loi sur la protection du territoire agricole, eux qui n'ont pas eu le courage de déposer, ici même à l'Assemblée nationale, un projet de loi. Le mémoire est mort au feuilleton du gouvernement Bourassa en matière d'aménagement.

Qu'ont-ils fait en matière d'aménagement routier, les libéraux, de 1970 à 1976?

Une voix: Rien.

M. Clair: Il n'y a pas une région au Québec - Nicolet pour l'autoroute 30, la région de Boucherville pour la 430, la région de Saint-Jean, Farnham pour l'autoroute 25 -prenez n'importe quelle région du Québec, ils ont littéralement massacré le territoire québécois. Il n'y a pas une région qui n'a pas goûté au bulldozer du Parti libéral du

Québec de 1970 à 1976, même la fameuse autoroute Ville-Marie, à Montréal. Ils ne se contentaient pas de détruire nos campagnes en matière d'aménagement, ils sont allés détruire des milliers de logements sur l'île de Montréal et, comble de l'ironie, ils ont commencé à construire une autoroute en sens inverse des logements qu'ils avaient détruits sur l'île de Montréal. C'est le "score" des libéraux en matière d'aménagement de 1970 à 1976.

Qu'est-ce qu'ils ont fait maintenant en matière d'expropriation? Les libéraux qui accusent aujourd'hui le ministre des Affaires municipales d'agir à la sauvette alors qu'il dépose un projet de loi, d'imposer ses volontés en matière d'aménagement et d'urbanisme, qu'est-ce qu'ils ont fait en matière d'expropriation? Nous savons tous que nous avions une vieille loi de l'expropriation aux alentours de 1974-1975, qu'elle était contestée par tous les avocats, par tous les expropriés, par tout le monde qui a un peu de bon sens, un peu de tête sur les épaules. Qu'est-ce qui est arrivé en 1975? Les libéraux ont décidé d'amender la loi de l'expropriation et de la rendre un peu plus civilisée, loi d'ailleurs qu'on s'apprête à perfectionner au cours des prochaines semaines à la suite du dépôt, hier, d'un projet de loi. (23 h 10)

Qu'est-ce qu'ils ont fait en 1975? Je vois que cela intéresse le député de Laprairie, M. le Président. Ils ont fait deux opérations simultanées. Ils ont préparé le projet de loi, ils l'ont fait étudier au Conseil des ministres, au Conseil du trésor. Ils ont suivi toutes les étapes et, en même temps, ils ont demandé au ministère des Transports et au ministère des Travaux publics de sortir à peu près tout ce qu'ils avaient comme projets d'expropriation pour les 20 prochaines années et peut-être même les 50 prochaines années. Et juste avant de faire adopter le projet de loi sur l'expropriation, ils ont fait des expropriations massives dans tout le Québec, pour lesquelles, encore aujourd'hui, en 1983, huit ans plus tard, comme ministre des Transports, je dois vous dire que j'ai au moins quelques millions de dollars qui ne servent qu'à payer des expropriations pour des autoroutes qui ne seront jamais construites, des expropriations inutiles qui nous ont entraînés dans des poursuites devant les tribunaux à un point tel que, jusqu'à l'année dernière, de 1975 à 1982, on peut évaluer à au moins 20 000 000 $ par année, l'argent qui a été inutilement dépensé dans des expropriations pour des projets de construction de toute espèce qui n'avaient aucun sens.

J'en donne juste deux exemples: une autoroute à quatre voies entre Farnham, Saint-Jean-sur-Richelieu et Iberville. Une autoroute à quatre voies sur une distance d'à peu près 20 kilomètres pour une municipalité, Farnham, qui ne compte pas 10 000 habitants, Saint-Jean-sur-Richelieu, et une autre, qui en compte un peu plus de 10 000. Pas plus tard que la semaine dernière, le maire de Boucherville vient me voir et me dit: En 1975, on a exproprié un immense terrain pour l'autoroute 430; on a enlevé les droits d'un propriétaire qui voulait développer ce terrain. On l'a exproprié pour des raisons de construction d'autoroute. Aujourd'hui, il n'y a plus personne qui la réclame. Ceci va intéresser les collègues. On a une difficulté aujourd'hui pour rétrocéder à la municipalité ou à l'exproprié le terrain, parce qu'on doit prouver que la raison pour laquelle on a exproprié, c'était pour la construction d'une autoroute; en vertu de la Loi sur la voirie, je ne peux céder l'emprise à la municipalité que dans la mesure où je peux faire la preuve qu'il y avait une raison valable d'exproprier.

Des cas comme cela, il y en a dans tout le Québec. Cela a coûté environ 20 000 000 $ par année. C'est un bel exemple de ce que les libéraux ont fait et feraient en matière d'aménagement du territoire.

M. le Président, il y a plus beau que cela. Le hasard fait parfois curieusement les choses. Je pourrais parler du parrain de l'Outaouais, M. Parent, et de son rôle à la Commission de la capitale nationale pour concéder du territoire québécois au gouvernement fédéral. Je pourrais parler de l'abandon des chemins municipaux à la charge des municipalités de 1970 à 1976, qu'aujourd'hui on doit reprendre à notre entretien dans bien des cas.

Le temps me manque. Comme je le disais, le hasard fait parfois bien les choses. Aujourd'hui, ce que nous faisons, nous reconnaissons que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme n'était pas parfaite; nous ne croyons pas détenir le monopole de la vérité. À l'usage, il s'est révélé qu'il y avait un certain nombre de faiblesses dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, des technicités plus qu'autre chose, si on veut parler du contenu du projet de loi. Or, le ministre des Affaires municipales y propose des amendements. Par un curieux hasard, c'est le projet de loi no 12. En voyant le numéro du projet de loi, cela m'a rappelé qu'en 1975 -imaginez-vous ce qui nous tenait lieu de gouvernement - le gouvernement avait lui aussi déposé un projet de loi no 12, "Bill No. 12", selon la tradition de l'époque, intitulé Loi sur l'urbanisme et l'aménagement du territoire municipal.

Aujourd'hui, ce qu'on fait avec le projet de loi du ministre des Affaires municipales, on améliore essentiellement deux points. On diminue des formalités pour le contrôle, la soumission des instances gouvernementales au règlement de contrôle

intérimaire et on permet à un propriétaire qui s'entend avec le ministère des Transports au moment d'une expropriation, de pouvoir morceler de gré à gré plutôt que de forcer le gouvernement à recourir à une expropriation. C'est très simple. Mais on taxe le ministre des Affaires municipales de dictateur, de rouleau compresseur, comme disait le député de Gatineau tantôt.

Voyons donc quel était le contenu de ce projet de loi déposé par le ministre des Affaires municipales libéral du temps, le 18 mars 1976. Voyons un certain nombre d'articles. L'article 9 prévoit le conseil d'agglomération, ce qu'on appelle le conseil des MRC maintenant: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, sur la recommandation du ministre des Affaires municipales, décréter que le territoire des municipalités que désigne le décret est régi par un conseil d'agglomération pour les fins de la présente loi."

Des voix: Ah!

M. Clair: Ce qu'on a fait, c'est un exercice démocratique harassant, difficile, qui allait certainement susciter des insatisfactions à gauche et à droite, mais qui était la responsabilité de personnes régionales, élues dans la plupart des cas ou nommées sur recommandation du ministre des Affaires municipales. Eux, qu'est-ce qu'ils faisaient, les sépulcres blanchis, comme on les appelait? Que faisaient-ils, eux qui accusent le ministre de dictature? Ils prévoyaient que, pour la désignation du territoire d'une MRC, cela se ferait par décret. Vous repasserez, comme on dit aussi chez nous. C'est ce que j'indique aux libéraux en matière de démocratie par rapport au bill 12, qui a été jeté à la poubelle par l'ensemble du monde municipal en 1976.

Un autre exemple, l'article 30 du projet de loi no 12 déposé par le Parti libéral, toujours: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut en tout temps, par décret, modifier une agglomération par l'augmentation du nombre des municipalités qui en font partie."

Une voix: C'est effrayant!

M. Clair: Encore une fois, nous avons mené une consultation. Cela demandait un certain courage politique pour la respecter: 19 comités ont siégé à travers le Québec et ils se disaient que le moyen expéditif...

Une voix: C'est effrayant!

M. Clair: ...était, en tout temps, de modifier une agglomération par décret. Pis que cela, l'article 31: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut en tout temps, par décret, dissoudre un conseil d'administration d'une municipalité régionale de comté...

Des voix: Non, non!

M. Clair: ...ou réduire le nombre de municipalités qui en font partie." Et ces gens-là ont le front de venir nous accuser de dictature et d'être des rouleaux compresseurs!

Mieux que cela! On prévoyait pouvoir exclure une municipalité d'un conseil d'agglomération d'une MRC. Écoutez bien: "La municipalité exclue de l'agglomération demeure tenue au paiement de sa quote-part des dépenses encourues au moment de son exclusion de l'agglomération et au paiement de toute dette contractée par elle comme municipalité agglomérée".

Une voix: Le principe "no taxation without representation".

M. Clair: On étendait à tout le Québec le principe du "no taxation without représentation", c'est-à-dire, au contraire, le principe du "taxation" légal, sans représentation. Et ces gens-là ont le front de venir nous parler de démocratie!

Maintenant, en matière de schéma d'aménagement. On en parlait dans le projet de loi no 12, article 32: "Dans le délai prescrit par le ministre, le conseil d'agglomération doit énoncer, au moyen d'un schéma, ses objectifs quant aux modalités et aux phases d'aménagement du territoire soumis à sa juridiction et adopter cet énoncé par règlement comme schéma d'aménagement". Voyons maintenant quels auraient été les pouvoirs du ministre à l'égard de ce schéma d'aménagement. L'article 42 dit: "Le règlement d'adoption du schéma d'aménagement est soumis à l'approbation du ministre, qui peut l'approuver avec ou sans modification". Et on fait reproche au ministre des Affaires municipales d'avoir éclairé les MRC sur le contenu de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme! Il y en a d'autres, toujours sur le pouvoir des ministres.

Une voix: C'est incroyable!

M. Clair: L'article 48 de ce projet qui a entraîné en grande partie la perte des libéraux dans le monde municipal en 1976 dit écoutez bien cela, M. le Président - "Le conseil d'agglomération peut en tout temps modifier son schéma d'aménagement en suivant les procédures requises pour son adoption". Écoutez bien la suite: "Il doit le faire - le conseil, la MRC - de la même manière si le ministre le lui ordonne par avis écrit."

Une voix: C'est écoeurant!

M. Clair: Et on a quand même fait preuve d'une certaine gentillesse, car l'avis indique le délai dans lequel la modification doit être effectuée. On s'engageait, au moins, au moment de la proposition de projet de loi no 12, à dire à la MRC: Le ministre peut vous imposer une modification de votre schéma d'aménagement, vous devez le faire aux dates et délais prescrits, mais on va vous aviser un peu d'avance du temps qui vous sera accordé pour faire cette modification à votre schéma d'aménagement. (23 h 20)

Je ne pense pas que l'on pouvait faire une réforme aussi importante en matière d'aménagement du territoire sans deux données fondamentales: d'abord, une volonté politique de procéder à l'aménagement de notre territoire avec les élus municipaux et les MRC, les conseils de comté, comme on les appelait auparavant. Deuxièmement, je ne pense pas non plus qu'on pouvait procéder à une réforme aussi en profondeur des règles qui régissent l'aménagement de notre territoire et nous donner une politique moderne dans ce secteur sans que... Cela aurait pu être dans mon comté, M. le Président. C'est à Saint-Prosper. C'est au lac des Trente et un Milles. C'est évident qu'on ne pouvait pas procéder à une réforme aussi importante sans qu'il y ait un certain nombre d'accrochages à gauche ou à droite.

Mais, pour ce qui nous concerne, nous avons procédé de la manière la plus transparente, la plus démocratique, la plus ouverte, la plus exigeante pour les municipalités et pour le gouvernement qu'on pouvait utiliser. Mais, au moins, le leader du gouvernement et le ministre des Affaires municipales n'ont pas été obligés de poser le geste humiliant qu'a dû poser le chef de l'Opposition, qui était le leader du gouvernement, à l'époque - je vais vous donner la date exacte, je l'ai relevée tantôt - le 28 juin 1976, à peine trois mois après le dépôt du projet de loi no 12 de 1976, après la loi sur l'expropriation, après le massacre des terres agricoles et de milliers de logements dans nos villes. Le leader du gouvernement et le ministre des Affaires municipales, même s'il y a eu des difficultés, n'ont pas été obligés de poser le geste humiliant de retirer, de révoquer l'ordre de première lecture du projet de loi et de le reléguer aux oubliettes purement et simplement. Nous avons assumé nos responsabilités.

Le ministre des Affaires municipales qui, à l'époque, était ministre d'État à l'Aménagement, a fait face à des responsabilités difficiles à assumer. Il est parvenu, grâce à sa diplomatie et à un exercice démocratique très difficile à mener, à se faire des alliés dans l'ensemble du monde municipal et à dire: C'est vrai qu'il va falloir faire des compromis et des concessions. Mais c'est fini le règne des libéraux où on laisse aller le bulldozer dans le paysage, n'importe où, n'importe quand, n'importe comment.

M. le Président, le député de Gatineau, tantôt, nous parlait de l'avenir du Parti libéral. Si les gens avaient eu l'occasion de l'entendre sur les vraies intentions du Parti libéral, je suis convaincu que le député de Gatineau serait leader adjoint de l'Opposition avec toute sa "gang", pendant encore bien des années, en matière d'aménagement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. Je n'aurais pu m'abstenir de participer à ce débat tant les élus municipaux sont indignés et désabusés du comportement antidémocratique du ministre des Affaires municipales.

Par ce projet de loi, le ministre empire une loi déjà condamnable dans plusieurs de ses éléments, et aussi et surtout dans l'interprétation qu'en fait le ministre lui-même. Le ministre et ses mandataires se soustraient à l'application des règlements de contrôle intérimaire et je pourrais qualifier le ministre d'être un "Indian giver" puisqu'il avait déjà accepté que le gouvernement soit contraint aux exigences de la loi, ainsi que ses ministères et ses mandataires. Maintenant, après avoir dit tout cela aux élus municipaux, il leur enlève ce qu'il avait donné. Il se soustrait à l'application de la loi. Je suis d'avis, avec les maires de ma région, que c'est un geste condamnable de la part du ministre et c'est un geste antidémocratique. C'est pour cela que je l'ai spécifié au début de mon intervention.

Également, par ce projet de loi no 12, le ministre écrase davantage, le ministre piétine davantage les élus municipaux, les maires du Québec, les préfets du Québec et également les citoyens du Québec. Je pourrai vous dire que les 26 maires des 26 paroisses du comté de Huntingdon et plusieurs autres maires de la région du sud-ouest du Québec sont tous dégoûtés du régime péquiste, sont tous désabusés du régime dictatorial imposé par le ministre des Affaires municipales. Ils qualifient tous le projet de loi no 12 de loi hypocrite, préparée à l'insu des élus municipaux, sans aucune consultation préalable, sans que le ministre accepte la tenue d'une commission parlementaire pour entendre les principaux organismes, les MRC, les préfets et les maires, qui auraient voulu se faire entendre ici, en commission parlementaire. Le ministre a déposé ce projet de loi à leur insu, sans que les élus municipaux en aient connaissance. C'est une

autre raison pour qu'ils soient désabusés du comportement du ministre des Affaires municipales. Je pourrais qualifier l'attitude du ministre de très dangereuse. C'est du despotisme total que le ministre nous amène présentement par son comportement. Le ministre n'a aucun respect pour l'autonomie municipale. Il ne connaît pas ce qu'est le respect. Il ne connaît ce qu'est la consultation. Il ne connaît pas la franche discussion honnête et la discussion avec les maires et avec les préfets. Actuellement, les maires et les préfets du Québec sont dégoûtés du système qui leur est imposé par le ministre des Affaires municipales. Plusieurs maires spécifient actuellement ne pas vouloir se représenter à leurs postes. Plusieurs le spécifient. Ils accusent régulièrement - et je l'entends fréquemment, M. le Président; c'est peut-être antiparlementaire, mais ils le font tout de même - le ministre d'être hypocrite dans son comportement. Ils qualifient le ministre de cette façon.

Ce n'est pas peu dire quand les maires en sont rendus à affubler un ministre de ce qualificatif. L'hypocrisie est devenue encore plus apparente. Les élus municipaux furent poussés à accepter les directives du ministre alors qu'ils préparaient les règlements de contrôle intérimaire. Ils étaient poussés à les accepter parce qu'ils auraient été désavoués s'ils n'avaient pas accepté les demandes du ministre sur la réglementation des contrôles intérimaires. Le ministre s'est servi de son pouvoir, d'un pouvoir abusif, pour forcer les préfets des MRC à accepter la réglementation, non pas celle qu'ils avaient soumise, mais celle que le ministre leur a imposée. Les raisons particulières pour lesquelles les MRC ont du accepter les directives du ministre, c'est que les MRC ne voulaient pas pénaliser les citoyens. Il y avait, à ce moment, des subventions disponibles du gouvernement fédéral pour la construction de résidences. Cette subvention s'élevait à 3000 $ et, juste au moment ou au temps où cette subvention devenait disponible, le ministre en a profité pour imposer sa réglementation.

Les maires se sont vus dans une position de pression de la part de leurs concitoyens. Les préfets des MRC se sont vu également presser par leurs maires. Ils ont du finalement accepter, sous la pression du ministre des Affaires municipales, les règlements tels qu'ils leur furent imposés par le ministère des Affaires municipales et par le ministre. Je crois que c'est une attitude très abusive de la part du ministre des Affaires municipales. Il y avait tellement de résidents qui voulaient profiter de ces 3000 $ que, sous la pression, les MRC ont plié, mais elles n'étaient pas heureuses de plier. Elles ont promis de revenir à la charge et j'espère qu'elles vont le faire. En plus, il faut dire que la construction était gelée. Il y avait un moratoire qui avait été décrété par le ministre sur la construction partout au Québec et, afin de dégeler le territoire, de mettre fin à ce moratoire, encore sous la pression du ministre, les maires ont du plier et les préfets également.

Il y a un autre exemple frappant de l'attitude despotique du ministre. Quand on regarde la loi 90, la Loi sur la protection du territoire agricole, où le ministre de l'Agriculture avait concédé aux propriétaires de ferme 53 000 pieds carrés sur leur ferme pour leur résidence et aussi pour pouvoir se construire une deuxième maison, c'était déjà quelque chose d'acquis. Pour les agriculteurs du Québec, c'était un droit acquis d'avoir 53 000 pieds carrés disponibles sur leur ferme. C'était la seule chose qui leur restait où ils pouvaient disposer librement d'un espace de terrain, 53 000 pieds carrés, ce qui était un demi-hectare.

Ce qui fut concédé dans la loi 90 par le ministre de l'Agriculture est maintenant arraché, enlevé, par le ministre des Affaires municipales. L'exigence de quelque 32 500 pieds carrés pour un terrain en territoire agricole rend impossible la construction d'une deuxième résidence sur un lot de 53 000 pieds carrés. L'attitude du ministre des Affaires municipales dans ce dossier est inqualifiable. Je crois que tout ce qu'a concédé le ministre de l'Agriculture, le peu qu'il a concédé, 53 000 pieds carrés, est déjà enlevé par le ministre des Affaires municipales. Je pense qu'il devrait y avoir plus de cohérence au niveau des ministres de ce gouvernement pour qu'au moins ce qui est concédé par un ministre ne soit pas enlevé par un autre.

De toute façon, quand un gouvernement peut déchirer des contrats dûment signés avec les employés des secteurs public et parapublic, quand il peut, de son propre pouvoir, ne pas respecter ses écrits, je pense bien qu'un ministre des Affaires municipales ou un ministre de l'Agriculture peut enlever tout ce qu'il avait donné. C'est exactement ce que fait aujourd'hui le ministre des Affaires municipales. Il avait concédé dans sa loi, originalement, qu'il se soumettrait aux impératifs de la loi 125. Il dit: À présent que les contrôles intérimaires ont été, forcément, acceptés par les préfets et les MRC, on va leur enlever graduellement ce qu'on leur a donné antérieurement. C'est exactement ce qui existe actuellement. Cela veut dire, finalement, que les écrits et les paroles de ce gouvernement, du gouvernement du Parti québécois, n'ont aucune valeur. Ce n'est pas respectable parce que ça n'a aucune valeur. Vous enlevez des droits acquis, vous déchirez des écrits, vous faites ce que vous voulez, vous êtes au pouvoir. Vous n'y êtes plus pour longtemps, mais, pendant que vous êtes là, vous

pénalisez la population entière du Québec.

En plus, actuellement, le ministre des Affaires municipales, n'ayant pas voulu consulter les 1600 maires du Québec, les met tous au défi. Les 1600 maires sont défiés par le ministre des Affaires municipales parce qu'il n'y a pas un maire au Québec qui est heureux des impositions que vous lui faites, qui est heureux de la réglementation de contrôle intérimaire forcé. Il n'y a pas un maire qui est heureux de cela au Québec; ils sont tous mécontents. Peu importe qu'ils soient du Parti québécois ou du Parti libéral, ils font connaître à leur député respectif qu'ils sont mécontents du ministre. Le ministre ne semble pas être au courant de cela. Je ne sais pas s'il vit dans une tour d'ivoire, mais il semble totalement décroché de la réalité. Pour lui, tout va bien, tout le monde est heureux. Mais c'est faux: il y a 1600 maires malheureux au Québec. C'est la vérité que je vous dis.

L'autonomie locale étant maintenant battue en brèche, bafouée, on peut dire que c'est une tutelle présentement. Les maires et les préfets des MRC sont en tutelle. On leur impose un règlement et on leur dit: Vous allez par là, vous faites ça, c'est nous qui avons le pouvoir. Le ministre a le pouvoir, il décrète ce qu'il veut, il change des lois et des modalités qu'il avait antérieurement acceptées. Il dit aux maires: C'est moi qui mène, je vous contrôle, allez par ici, allez par là. Il n'y a pas un maire qui a conservé un certain contrôle dans sa municipalité. Il n'y a pas un préfet de MRC qui peut dire: Moi, je peux, sur mon territoire, amener des aménagements qui font l'affaire de mes contribuables. Non, il faut que le ministre impose ses points de vue. On a bafoué les élus municipaux, on leur enlève tout pouvoir et, présentement, le ministre pense que le monde municipal est content, que les contribuables sont contents, que les électeurs du Québec sont contents. Tant mieux s'il le pense, parce qu'il ne sera pas longtemps ministre des Affaires municipales, je peux vous dire cela.

Enfin, la cerise sur le gâteau, c'est quand le ministre des Affaires municipales est allé dire aux préfets que, s'ils ne devenaient pas indépendantistes, ils n'auraient pas de budget pour des pouvoirs additionnels. Le ministre leur a dit: Devenez indépendantistes, devenez souverainistes, on vous donnera, à ce moment-là, des pouvoirs additionnels, on vous donnera l'argent nécessaire pour administrer ces pouvoirs qu'on va vous donner. Cela, c'est l'attitude du ministre. Est-ce que vous pensez que c'est de la démocratie municipale? Devenez indépendants, devenez séparatistes, on vous donnera des pouvoirs. C'est du joli, M. le Président; c'est ça, la belle démocratie que veut appliquer ce gouvernement. N'est-ce pas dérisoire, M. le Président? Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais je pense que vous pensez comme moi: C'est vraiment dérisoire, n'est-ce pas?

M. le Président, je vous soumettrai un autre cas. Un mandataire du ministre, il y a quelques jours, a déjà tenu pour acquis que la loi 12 était sanctionnée. Il s'agit, entre autres, d'Hydro-Québec, dans la MRC du Haut-Saint-Laurent. Ce mandataire du gouvernement, qui est Hydro-Québec - je pense bien que c'est un mandataire du gouvernement - s'est prévalu, hier ou avant-hier, des dispositions du projet de loi no 12, malgré qu'il ne soit pas encore sanctionné, que l'étape de la deuxième lecture ne soit pas terminée et qu'on ne soit pas rendu à la troisième lecture. Il arrive qu'Hydro-Québec s'est prévalue du projet de loi qui est à l'étude présentement pour passer outre à l'article 149 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et, sans l'avis préalable - si M. le ministre veut bien, je vais le lui confirmer - du ministre ou de ses mandataires, on a procédé à la démolition d'un poste de transmission d'Hydro-Québec dans la MRC du Haut-Saint-Laurent. La construction ou la démolition, je pense que cela fait partie des mêmes restrictions apportées à l'article 149, selon la description ou l'évaluation de l'article 149 faite par les principaux élus de la région, en tout cas. Je ne suis pas ici pour discuter de l'application de l'article 149 de la loi 125. Je n'ai pas de formation juridique pour dire si vraiment elle était obligée d'envoyer un avis préalable, mais les responsables de la MRC du Haut-Saint-Laurent m'ont avisé que l'obligation existait selon l'article 149. Alors, si le gouvernement, ses mandataires ou le ministre peut se prévaloir d'une loi qui n'est pas sanctionnée, je me demande quel respect on donne aux autres lois du Québec. On a pu s'en apercevoir dans les décrets du gouvernement, dans les contrats signés ils déchirent ce qu'ils veulent, ils font ce qu'ils veulent. Ils ont le pouvoir. Alors, s'ils ont le pouvoir, ils procèdent à la démolition du poste d'Hydro-Québec.

Avant de terminer, je dois dire qu'il existe une guerre constante interne entre le ministère des Affaires municipales et les autres ministères. Actuellement, aucun ministère en dehors du ministère des Affaires municipales, n'accepte que ses officiers en région participent au processus de consultation en matière d'aménagement. Les ministères ont avisé leurs officiers en région de ne pas participer au processus de consultation en matière d'aménagement. On voit bien le genre de guerre interne qui existe entre le ministère des Affaires municipales et les autres ministères. Un autre exemple: il ne s'est jamais dégagé de consensus d'une façon transparente entre les élus municipaux et le ministre. Jamais il n'y a eu de consensus transparent entre vous, M.

le ministre, et les préfets des MRC ou les maires. Jamais il n'y en a eu. En plus, le ministre rétracte tout ce qui a été dit ou tout ce qui a été écrit, toutes les ententes officieuses conclues entre les MRC et ses fonctionnaires. Parce que, finalement, on arrive dans un entonnoir, tout ce que les fonctionnaires ont pu faire, ont pu dire, ont pu écrire d'une façon non officielle, le ministre se retire de cela et dit: C'est moi le patron et c'est moi qui dicte. Alors, il l'a dicté tout le long.

De plus, les communications entre les officiers du ministère, les préfets et les fonctionnaires des MRC sont inexistantes. Il n'existe aucun genre de communication entre ces gens-là. C'est impossible de communiquer entre les MRC et les fonctionnaires du ministère des Affaires municipales en ce qui a trait à l'aménagement et au développement. Il n'y a, non plus, aucune continuité dans les propos que tiennent les officiers du ministère des Affaires municipales. Il n'y a jamais une ligne de conduite constante. Il n'y a pas un officier du ministère qui dit la même chose deux jours d'affilée. C'est un fait que toutes les MRC réalisent depuis plusieurs mois.

Alors, je crois que le ministre aurait intérêt à expliquer également aux MRC, par exemple, ce qu'il entend, lui, le ministre, par délimitation des périmètres d'urbanisation. C'est un terme qui est écrit dans la loi 125 et après cinq évaluations de ce terme-là, il n'y a pas un fonctionnaire qui est arrivé avec la même évaluation et la même description de ce qu'était une délimitation des périmètres d'urbanisation. Personne ne le comprend. Les officiers du ministère ne le comprennent pas. Le ministre ne le comprend pas plus. Comment peut-il l'expliquer aux préfets des MRC ou aux maires? Je dois vous dire, pour préciser, que c'est l'article 5, alinéa 3 de la loi 125. (23 h 40)

En terminant, je veux dire que le ministre devra, une fois pour toutes, définir deux termes simples: aménagement et développement. Si le ministre ne sait pas ce qu'est l'aménagement et le développement, il va falloir qu'un bon jour quelqu'un du ministère des Affaires municipales dise aux préfets de comté où commence l'aménagement et où il finit et où commence le développement et où cela finit, parce que personne ne se comprend dans ce domaine-là, M. le Président. Pas un maire ne se comprend et pas un préfet ne se comprend. Le ministre ne se comprend pas, les officiers du ministère ne le comprennent pas et il faudra qu'un bon jour quelqu'un comprenne quelque chose dans ce ministère qui semble complètement abasourdi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Bellechasse.

M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. Le hasard, aujourd'hui, a fait en sorte que, pour la deuxième fois, j'ai à intervenir après le député de Huntingdon. Je suis un peu estomaqué des propos que le député de Huntingdon vient de tenir, surtout que je viens de prendre connaissance des notes biographiques qui sont contenues dans cette brochure publiée par l'Assemblée nationale et que j'ai découvert, à ma grande surprise, que le député de Huntingdon a été maire d'une municipalité, celle de Saint-Rémi, de 1972 à 1976.

M. Dubois: M. le Président, une demande de directive.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Huntingdon, une demande de directive.

M. Dubois: Comment pourrais-je faire savoir au député que mes propos reflètent ce que les maires pensent au Québec? Le fait que j'ai été maire, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. le député de Bellechasse, vous pouvez continuer.

M. Lachance: Merci, M. le Président. J'ai des petites nouvelles pour le député de Huntingdon. Je rencontre des maires, moi aussi; il y en a 34 dans le comté que je représente et, pas plus tard que vendredi soir dernier, j'étais encore avec 24 des 34 maires. Vous pouvez être certain que le langage que j'ai entendu ce soir ne reflète absolument pas la réalité qu'on entend quand on se promène parmi les maires. Je prierais le député d'aller voir plus souvent ses maires; peut-être qu'il constaterait que ce qu'il pense n'est pas conforme à la réalité québécoise.

Celui qui vous parle, M. le Président, ne parle pas à travers son chapeau. Celui qui vous parle a été maire de 1973 à avril 1981. Au moment où je suis arrivé à la mairie en 1973, si on fait une brève rétrospective, on se souviendra qu'on avait à cette époque un nouveau ministre des Affaires municipales qui a été cité tantôt, M. Goldbloom, qui arrivait à la suite de la disparition rapide d'un certain M. Maurice Tessier, député de Rimouski, qui avait osé essayer de s'attaquer aux conseils de comté à l'époque, qui avait essayé de les faire sauter.

Vous le savez vous-même, M. le Président, puisque vous avez été maire de votre municipalité; vous avez vu ce qui est arrivé à cet individu. M. Goldbloom était un

bon bonhomme, quelqu'un de qui on peut dire qu'il était un bon garçon, mais il était patineur de fantaisie. Il a donc su faire assez de slalom pour ne pas avoir trop de problèmes. Cependant, c'est drôle, durant son exposé, je m'attendais que le député de Huntingdon fasse référence à son expérience municipale, qu'il nous parle un peu de ce qu'il avait vécu pendant qu'il était maire. Pas un mot de cette période probablement creuse ou noire, je ne le sais pas, de 1972 à 1976.

J'étais maire à cette époque et je peux vous dire que le monde municipal à cette époque-là attendait des choses qui sont venues depuis 1976. Oui, la réforme de la fiscalité, la loi 57 était attendue depuis 20 ans - pas 10 ans, pas 5 ans, mais 20 ans -et elle est venue grâce au gouvernement actuel. La loi 105 sur la démocratie municipale et toute une série de lois sont venues moderniser le Code municipal qui en avait tant besoin.

Quand j'entends les propos de mes amis d'en face - comme dirait l'un de mes concitoyens, ils ne sont pas nécessairement ses amis - je suis un peu surpris, parce que c'est tellement déconnecté de la situation qu'on connaît, qu'on vit, qu'on côtoie chaque jour, qu'il me semble que ce sont des propos qu'on ne devrait pas entendre de la part de gens responsables. Il ne faut pas prendre les citoyens pour des imbéciles. Dans tout le Québec, il y a - on l'a dit tantôt - peut-être 1600 municipalités et ces gens qui nous écoutent et qui nous entendent doivent avoir de la difficulté à se reconnaître et se dire: Est-ce bien de nous qu'on parle à cette Assemblée nationale? Je peux vous dire que, comme partout dans le monde, c'est bien sûr que tout n'est pas parfait. On est humain, c'est perfectible, mais ce n'est vraiment pas une vision apocalyptique, une vision aussi tronquée qu'on rencontre lorsqu'on côtoie les gens du monde municipal.

J'écoutais tout à l'heure le député de Huntingdon parler du projet de loi no 12 et nous dire que le gouvernement prenait la liberté de se soustraire à l'application de la loi 125. C'est faux. Le gouvernement va continuer, par les articles 149 et suivants, à se lier aux interventions qu'il doit faire sur des équipements dans le milieu. Ce que le projet de loi no 12 fait, c'est spécifiquement lors d'opérations cadastrales et dans les cas de morcellement pour la construction de routes par le gouvernement. Je pense bien que le député de Huntingdon, comme d'autres députés des comtés ruraux, ne doit pas être contre la construction du réseau routier municipal ou du réseau routier régional ou rural. Cela a été demandé tellement souvent à notre ami, le ministre des Transports. Maintenant qu'on veut essayer d'accélérer les travaux qui sont nécessaires, qui sont demandés par la population des comtés ruraux, on vient nous le reprocher, on vient dire qu'on met de côté les dispositions de la loi 125. C'est une fausseté de laisser croire aux gens qu'avec le projet de loi no 12 on la met de côté parce que cela fait notre affaire. Tout simplement, on veut permettre l'exécution de travaux qui, autrement, ne pourraient pas être réalisés rapidement. C'est pour une période limitée.

On a entendu, ce soir, énormément de propos intempestifs, je dirais même incendiaires, de la part de plusieurs députés concernant les MRC. C'est drôle comme on n'a pas la même vision des choses. J'ai vécu - je vous l'ai dit tantôt - de très près tout le processus qui a amené l'implantation des municipalités régionales de comté au Québec. Je l'ai vécu de près parce qu'à partir de 1977, j'étais préfet suppléant du comté de Dorchester, en 1979, préfet jusqu'à mon élection le 13 avril 1981. Nous avions eu, à l'époque, des rencontres fréquentes avec les personnes chargées de la consultation - parce qu'il y a eu une consultation, quoi qu'on en dise - et, s'il y a eu certains problèmes d'ajustement à certains endroits - je peux dire que, dans la MRC de Bellechasse qui compte 24 municipalités, il y a eu quelques problèmes d'ajustement entre les maires, parce qu'il y avait eu des changements de territoire - c'est normal, c'est humain. Mais, aujourd'hui, après un an et demi de fonctionnement, les maires, que je rencontre très fréquemment, ont appris à vivre en harmonie et à s'ajuster, et l'entité de la MRC devient un lieu de rassemblement non seulement sur la scène municipale, mais c'est aussi un lieu, au niveau du territoire du CLSC, qui est considéré comme étant tout à fait homogène, qui doit fonctionner en harmonie avec le niveau municipal.

Plus que cela, je vais vous raconter une petite anecdote. Dernièrement, il y a eu un projet provenant de certains fonctionnaires du ministère de l'Éducation qui visait, dans la perspective de la restructuration scolaire, à placer une commission scolaire pour la MRC de Bellechasse plus la MRC Desjardins dans le secteur de Lévis-Lauzon. Aussitôt que j'ai pris connaissance de cette hypothèse, je me suis empressé d'aller consulter non pas les maires et les conseillers municipaux, parce que je connaissais leur avis, mais les commissaires d'écoles. Personne ne peut dire que les commissaires d'écoles sont des péquistes ou des gens dévoués aux intérêts du Parti québécois. Je suis allé les voir et je leur ai demandé ce qu'ils en pensaient. De façon unanime, ils ont dit ceci: On veut avoir le même territoire que la municipalité régionale de comté de Bellechasse. Donc, pour le niveau municipal, c'est acquis. Pour le niveau du CLSC, ce sera chose faite bientôt et, pour la commission scolaire qu'on souhaite, on veut avoir le même territoire. Ceci prouve que, lorsqu'on a fait de la

consultation dans ce coin, il y avait quelque chose de solide. Ce n'était pas que des impressions; c'était vraiment la volonté des gens du milieu de travailler sur un territoire unique. (23 h 50)

On raconte toutes sortes de sornettes, on fait peur au monde en disant que les MRC, ce sera épouvantable, que cela donnera des pouvoirs que les gens ne veulent pas. Qu'est-ce qu'il y a de nouveau avec l'arrivée de la municipalité régionale de comté depuis l'adoption de la loi 125? Un pouvoir supplémentaire. Pas dix, pas cinq, un: le pouvoir d'aménager le territoire. Les municipalités régionales de comté conservent les mêmes pouvoirs que les conseils de comté détenaient: s'occuper des cours d'eau qui franchissent deux ou trois municipalités, s'occuper des routes intermunicipalités également, un pouvoir qui avait été acquis au moment où le député de Huntingdon était maire de sa municipalité, en 1974. Le pouvoir de l'évaluation foncière, vous savez que c'était un pouvoir dévolu à chacune des municipalités locales. À partir du 1er janvier 1974, le conseil de comté a pris comme responsabilité, qui lui a été confié par le gouvernement de l'époque, l'évaluation foncière. Personnellement, j'ai travaillé à l'élaboration de la stratégie pour respecter la Loi sur l'évaluation foncière. On a mis, dans notre coin, notre propre bureau d'évaluation sur pied et on n'a eu qu'à s'en féliciter puisque ça fonctionnait bien.

Il ne faut pas toujours attendre de se laisser tirer la manche; il faut pouvoir dire: On fonctionne, on s'adapte, on dialogue. Le monde municipal, je vous l'assure, a fait des pas de géant depuis quelques années. Ce sont des gens ouverts, ils ne sont pas malheureux. Les personnes que je rencontre régulièrement - encore une fois, j'ai de fréquents contacts, je communique régulièrement avec des maires par téléphone; je les rencontre et on communique aussi par écrit - je vous l'assure, ne sont pas des faces de mi-carême ou des gens qui passent leur temps à chialer contre le gouvernement. Au contraire, ils commencent à se rendre compte qu'il y a une cohérence, une unité de fonctionnement. Évidemment, il y a encore place à amélioration à l'avenir.

Je pense que c'est dans cette perspective qu'il faut envisager l'amélioration des pouvoirs confiés aux municipalités. Vous savez que le pouvoir municipal, ce n'est pas un pouvoir qui est en régression, mais bien un pouvoir qui, actuellement, est respecté et en évolution. On regarde, lors d'élections municipales, la progression du taux de participation. Ce n'est pas un hasard si, aujourd'hui, tant de gens s'intéressent aux élections municipales et également à l'arrivée des femmes dans les conseils municipaux. C'est par des mesures qui ont été mises en place graduellement, par l'intérêt manifesté par le gouvernement du Québec, qui est le maître, qui a mis au monde les municipalités, pour s'occuper d'elles.

En terminant, je voudrais vous dire, M. le Président, que les personnes qui, aujourd'hui, décrient les modifications à la loi no 125, ce sont ces mêmes personnes -vous vous en souvenez - qui ont voté, à deux mains, contre la loi no 90 sur la protection du territoire agricole. Vous vous souvenez de ce qui est arrivé durant la campagne électorale. Ils ont tenté, en panique, en catastrophe, de récupérer la loi concernant le zonage agricole, parce qu'ils se sont rendu compte que, dans la population, c'était quelque chose d'intéressant. Ces mêmes personnes ont voté contre la loi no 67 sur l'assurance automobile. Qui veut revenir en arrière? Ils ne nous parlent plus de cela. La loi no 125, je suis convaincu que c'est une loi que l'histoire retiendra au Québec comme étant une des plus importantes adoptées par le gouvernement du Parti québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Berthier.

M. Houde: M. le Président, je demanderais l'ajournement du débat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à demain, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont ajournés à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 55)

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