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(Dix heures dix minutes)
Le Président: À l'ordre!
Nous allons nous recueillir quelques instants.
Veuillez prendre vos places.
Aux affaires courantes, aux déclarations ministérielles,
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
La date limite de l'ensemencement
exigée dans les régimes
d'assurance-récolte est
reportée au 10 juin
M. Jean Garon
M. Garon: La présente déclaration
ministérielle a pour but de rassurer les agriculteurs du Québec
qui, en raison du mauvais temps qui sévit depuis plusieurs semaines dans
la plupart de nos régions, n'ont pas encore pu compléter leurs
semences. Dans la plupart des productions protégées par un
régime d'assurance-récolte, il existe une date limite
au-delà de laquelle un producteur qui n'a pas effectué ses
semences ne peut plus s'assurer. Pour plusieurs productions importantes, comme
la betterave sucrière, le blé, l'avoine, etc., cette date limite
est déjà dépassée ou elle l'est à compter
d'aujourd'hui. Ces dispositions ont pour but d'éviter que des
agriculteurs, simplement par négligence, retardent indûment la
date de leurs semences et à cause des rendements diminués qui en
résultent se rendent admissibles à des indemnisations dans le
cadre de l'assurance-récolte.
Dans le cas présent, ce n'est pas cette situation que nous vivons
puisque, si on prend le cas des céréales, on estime que moins de
50% des superficies destinées à être ensemencées ce
printemps l'ont effectivement été au moment présent. Les
agriculteurs ne peuvent tout simplement pas avoir accès à leurs
champs qui sont trop gorgés d'eau pour pouvoir supporter le poids de la
machinerie.
Face à cette situation, la Régie des assurances agricoles
du Québec s'est prévalue, hier, de l'article 25 de la Loi sur
l'assurance-récolte qui lui permet de reporter la date limite
d'ensemencement exigée dans les différents régimes
d'assurance lorsque les conditions atmosphériques exceptionnelles
empêchent les agriculteurs de se livrer à ces travaux dans des
délais normaux. Une nouvelle date limite a été
fixée au 10 juin dans toutes les productions assurées où
la période limite était échue ou sur le point de
l'être. Les principales productions touchées sont la betterave
sucrière, dont la date limite était le 31 mai, le maïs-grain
et le blé, dont les ensemencements auraient dû être
terminés au plus tard aujourd'hui, et l'orge, pour qui la date limite
est le 5 juin.
Les producteurs pourront profiter d'une période de beau temps qui
ne saurait tarder, je l'espère, pour compléter leurs semences
tout en demeurant admissibles à la protection de
l'assurance-récolte. Je tiens à profiter de l'occasion pour
indiquer que si la situation créée par le mauvais temps est
très grave, elle n'est quand même pas encore
désespérée. La nature aidant, nous sommes encore confiants
que les agriculteurs pourront récupérer la majeure partie du
retard accumulé et, de toute façon, grâce à la
décision que vient de prendre la Régie des assurances agricoles
du Québec, les pertes des producteurs assurés pourront être
compensées.
Le Président: M. le député de
Maskinongé.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je me dois, à
ce stade-ci, de remercier le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation pour avoir accédé à la demande de
l'Opposition...
Des voix: Ah!
M. Picotte: ...toujours soucieuse, je dois le dire, M. le
Président, de défendre les intérêts des
agriculteurs. Le ministre a dit que ce n'était pas au
député de Maskinongé de décider de l'heure. C'est
certain, parce que, si le député de Maskinongé avait
décidé de l'heure, les agriculteurs auraient été
informés bien avant 10 heures, aujourd'hui, jour qui a même
dépassé la date limite.
Merci quand même au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation d'avoir eu cette compréhension en espérant
qu'il sera plus diligent la prochaine fois et qu'il sera plus rapide pour
annoncer ces nouvelles aux agriculteurs.
Il ne me reste qu'un souhait à formuler. C'est de souhaiter, pour
les consommateurs du Québec et surtout pour les agriculteurs, que le
temps soit clément afin qu'ils puissent procéder à leurs
semences dans les meilleurs délais. Merci, M. le Président.
Le Président: En réplique, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je dirai au
député de Maskinongé qu'hier la décision
était prise lorsqu'il a pris la parole, sauf que...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Garon: ...je ne voulais pas l'annoncer immédiatement au
moment où il y avait un grand nombre de projets de loi à
déposer. Je voulais saisir l'occasion, comme vous le disiez. Vous aviez
raison sur un point. Au moment où il y a des changements de date, il
peut toujours y avoir de la confusion et je voulais profiter, ce matin, d'un
moment tranquille, le mercredi matin, à 10 heures, pour faire une
déclaration tout seul, pour être sûr qu'il n'y aura pas
d'imbroglio et que les agriculteurs comprendront qu'ils ont maintenant jusqu'au
10 juin en espérant que le temps soit meilleur. Mais je suppose que le
bon Dieu a dit: Les gens ont voté non au référendum;
maintenant, comme ils ont voté comme les Anglais, donnons-leur la
température de l'Angleterre!
Des voix: Ah!
Le Président: M. le député de
Maskinongé.
M. Picotte: J'aimerais vous demander une directive, M. le
Président. Hier, à la période des questions, le ministre
m'a dit que la décision n'était pas prise. Maintenant,
Il me dit que la décision était prise. Est-ce que c'est,
ni de près ni de loin, mentir à cette Chambre, M. le
Président?
Des voix: Oh!
Le Président: M. le député - À
l'ordre! À l'ordre! - je vous laisse le soin d'apprécier le
tout.
Dépôt de documents.
M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme par M. le
leader parlementaire du gouvernement.
Rapport annuel de la SAQ
M. Bertrand: Ce ne sera point long, M. le Président. Au
nom du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, je voudrais
déposer le rapport d'activités 1982-1983 de la
Société des alcools du Québec.
Le Président: Rapport déposé. Il n'y a pas
de dépôt des rapports des commissions élues ni du greffier
en loi sur les projets de loi privés. Il n'y a pas de
présentation de projets de loi au nom du gouvernement ni au nom des
députés, ce qui nous amène à la période des
questions. M. le chef de l'Opposition.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Rumeur de démission du ministre du Commerce
extérieur
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ma question
s'adresse à l'honorable premier ministre. Je voudrais commencer, cela me
permettra peut-être d'avoir un préambule un peu plus long. Dans
une nouvelle de la Presse canadienne, nous apprenions, ce matin, dans le
journal Le Devoir, par exemple, on lit: "Le ministre du Commerce
extérieur, M. Bernard Landry, a menacé le premier ministre
Levesque de démissionner du Conseil des ministres s'il ne réglait
en sa faveur le conflit qui oppose son ministère à celui des
Affaires intergouvernementales". On ajoute: "Levesque - celui qui est en face -
est saisi du problème, a-t-on fait savoir, et même si cela ne
l'intéresse pas, il va falloir qu'il tranche parce que Landry a son
voyage". Parlant de voyages, M. Jacques-Yvan Morin se trouve maintenant
à Paris. Sa réaction au ministre des Affaires
intergouvernementales, entre autres, c'est qu'il ne pouvait y avoir qu'une
seule politique extérieure québécoise, et qu'il revenait
aux Affaires intergouvernementales de la coordonner.
Est-ce que le premier ministre pourrait nous renseigner sur les
événements qui ont provoqué une nouvelle de cette
nature?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je peux
difficilement donner beaucoup de renseignements au chef de l'Opposition
même si, temporairement - c'est peut-être que cela va avec le
retour du beau temps - il a retrouvé son humour, mais je dois souligner
très simplement que M. Landry lui-même, le ministre du Commerce
extérieur, a bien dit que ni de près ni de loin...
Des voix: Ah! Ah!
M. Lévesque (Taillon): ...il n'était
impliqué personnellement dans ces ragots. Si le chef de l'Opposition se
donne la peine de lire jusqu'au troisième paragraphe, je pense, des
comptes rendus de cette dépêche de la Presse canadienne, il
trouvera, je crois, le démenti très clair de M. Landry.
M. Landry: M. le Président...
Le Président: M. le ministre du
Commerce extérieur. (10 h 20)
M. Landry: ...en toute déférence, je pense qu'il y
avait largement, dans les propos du chef de l'Opposition, matière
à une question de privilège. Mais, comme le premier ministre
vient de le dire, je pourrais être une bonne source pour répondre
à sa question et je voudrais ajouter quelques détails.
D'abord, "Landry a son voyage". Je comprends. Il aurait fallu le dire au
pluriel. Je vis dans mes valises avec la position que j'ai et...
Des voix: Oh!
M. Landry: ...je surveille l'évolution scolaire de mes
enfants par téléphone interurbain.
Des voix: Oh! Oh!
M. Landry: Quant à toute rumeur de démission, je
l'ai bien dit à la presse, c'est purement fantaisiste. Je ne suis pas
assez sûr de mes talents littéraires pour remettre ma
démission du Conseil des ministres.
Des voix: Ah! Ah!
M. Landry: Quant au fond des choses, parce que même
posée sur le mode humoristique, la question du chef de l'Opposition
recouvre une réalité que nous avions abordée très
clairement en commission parlementaire, à la demande de l'Opposition qui
prévoyait qu'il y aurait une période d'adaptation - qu'il
dramatisait, d'ailleurs -entre le nouveau ministère du Commerce
extérieur et certains autres ministères, j'avais répondu
à cette époque - et ma réponse est la même à
une phase évolutive différente - qu'il y aurait une
période d'adaptation et de rodage. Vous allez trouver cela dans le
journal des Débats. C'est clair. J'avais répondu surtout au
député de Jean-Talon. Or, cette période d'adaptation et de
rodage est allée bon train. J'entendais mon collègue de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme se féliciter, il y a quelques
jours, des excellentes relations qui existent entre ses équipes et les
miennes. Il reste quelques zones grises avec le ministère des Affaires
intergouvernementales; comme le dit l'article, d'ailleurs, mes relations avec
mon collègue Jacques-Yvan Morin sont très bonnes. Nous nous
parlons régulièrement. Ces difficultés devraient
être résolues dans les semaines ou dans les mois qui viennent et
il n'y a pas...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Landry: ...à en faire un drame. Au contraire. L'action
extérieure du Québec se consolide.
Le Président: En complément de question, M. le chef
de l'Opposition.
M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président, une
courte question additionnelle à l'adresse de l'honorable premier
ministre. Les services du premier ministre auraient-ils été
requis de près ou de loin pour procéder à certains
arbitrages entre ces deux intervenants?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Oui, M. le Président, il y a
eu un règlement hors cour. Un homme qui a l'expérience du
gouvernement que possède le député de Bonaventure sait
très bien qu'il y a toujours des difficultés d'ajustement quand
des ministères s'ajoutent aux autres et qu'il faut forcément
régler des problèmes de bornage. Alors, à l'occasion, cela
fait partie du travail qu'il faut affronter. Comme vient de le dire le ministre
du Commerce extérieur, il y a une période de rodage et
quelquefois il y a des frictions. Et puis après?
Le Président: Question principale, Mme la
députée de L'Acadie.
M. Chevrette: Vous passez votre temps à vous chicaner,
vous autres, et on n'en parle pas.
Le financement des maisons d'hébergement pour
femmes battues
Mme Lavoie-Roux: Ma question s'adresse au ministre des Affaires
sociales. Le 11 avril dernier, le ministère des Affaires sociales
faisait parvenir des directives aux centres des services sociaux ainsi qu'aux
bureaux de l'aide sociale concernant le financement des maisons
d'hébergement pour femmes battues. Ces directives avaient pour but, dans
un premier temps, de réduire les montants quotidiens accordés aux
maisons pour les femmes hébergées et, dans un deuxième
temps, d'appliquer aux maisons d'hébergement pour femmes battues les
normes des familles d'accueil, de telle sorte qu'il ne restera à ces
femmes qu'un montant absolument dérisoire de 90 $ pour retrouver leur
autonomie et réintégrer la société.
Voici mes questions au ministre: Premièrement, le ministre
peut-il nous dire pourquoi de telles directives qui modifient les modes de
financement des maisons pour femmes battues ont été
envoyées le 11 avril, alors que le 17 il me disait, en commission
parlementaire, qu'il n'y avait pas de politique de financement officiel de ces
maisons, qu'elles n'étaient pas prêtes, et qu'on allait
en consultation à cet égard?
Deuxièmement, est-ce que le ministre a l'intention de rappeler
ses directives ou de les réviser afin de ne pas compromettre les
objectifs de réinsertion sociale des femmes qui doivent chercher refuge
dans ces maisons et de ne pas non plus rendre plus difficile la survie de ces
maisons qui ont été bâties en grande partie par le
bénévolat des femmes.
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, à la
première question, loin de moi l'intention de vouloir induire la
députée en erreur au moment de l'étude des crédits
le 17 avril. Ce que nous évoquions, c'était la politique
générale du ministère non seulement à
l'égard de la question du financement, mais également de
l'approche générale qu'il faut avoir quant aux relations entre
ces maisons de femmes victimes de violence, la plupart du temps, les CSS, les
CLSC, le ministère, etc.
Effectivement, le 11 mai une directive administrative émanait
d'un des services du ministère qui s'occupe de ces organismes. Cette
directive vise, pour l'ensemble des régions du Québec - il est
très clair que ça pose un problème à certains
endroits - à toutes fins utiles, à normaliser une situation
déjà existante dans la plupart de ces maisons, non seulement
à normaliser la situation, mais à améliorer, dans bien des
cas, la situation financière de beaucoup de ces maisons. Cette directive
pose un problème à Montréal dans la mesure où le
CSS du Montréal métropolitain versait des per diem beaucoup plus
élevés qu'ailleurs. Je ne sais pas en vertu de quel principe ou
de quel critère, mais il versait un per diem qui pouvait être de 8
$ de plus par jour que la plupart des autres CSS. À cet égard, il
est bien évident que la normalisation du versement des per diem est
perçue par certaines des maisons d'hébergement pour femmes en
difficulté à Montréal comme étant une diminution de
leurs moyens à l'égard des personnes qu'elles desservent.
Deuxièmement, quant à la contribution des personnes
bénéficiaires de l'aide sociale, je dirai que le principe que
nous tentons d'introduire à travers cela, c'est celui du financement que
l'on applique notamment dans le cas des familles d'accueil. Quelqu'un qui
bénéficie du financement de l'aide sociale et qui est
hébergé, à toutes fins utiles, a gîte et couvert et,
dans la mesure où certaines de ces familles ou de ces femmes arrivent
dans des situations où elles sont hébergées pendant dix,
quinze ou parfois vingt jours, nous croyons qu'il faut leur laisser une
allocation suffisante pour les frais, mais faire en sorte, cependant, que l'on
tienne compte de cet hébergement.
L'autre solution, il faut bien le voir, c'est de transformer les maisons
de femmes en difficulté en un réseau public au Québec. Or,
ce serait tout à fait contraire à ce qu'évoquait
elle-même la députée de L'Acadie tout à l'heure
quand elle disait que le travail de ces maisons est très largement
basé sur l'implication de bénévoles. Un groupe à
l'intérieur des maisons de femmes revendique depuis un certain nombre
d'années qu'on en fasse un réseau public d'hébergement, et
il n'en est pas question.
Le Président: Rapidement, M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Je pense que l'immense majorité de ces
maisons peut non seulement survivre, mais même vivre adéquatement.
La preuve, c'est que le ministère y a mis des ressources
considérables depuis trois ans où on a, à toutes fins
utiles, plus que doublé les budgets depuis deux ans, sans compter le
nombre de points. Il faut cependant s'assurer que l'implication du milieu dans
les organismes bénévoles est présente et dans la mesure
où on pose des gestes qui visent à en faire des réseaux
publics d'hébergement, je pense que cela deviendra incompatible avec les
objectifs initiaux.
Le Président: En complément, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre nous a
donné de longues explications mais je ne crois pas qu'il ait
touché au coeur du problème. Je lui ai demandé s'il est
prêt à réviser ses directives, parce que, d'une part, elles
compromettront la réinsertion sociale de ces femmes qui arrivent dans
ces maisons tout à fait démunies. Quand vous faites la
comparaison avec les personnes qui sont en famille d'accueil alors qu'il s'agit
de placements permanents et que dans le cas de ces femmes il s'agit de
placements temporaires, en moyenne treize jours, comment peut-on espérer
que ces femmes pourront trouver le dynamisme et même les moyens physiques
de reconstituer leur vie ou de faire les modifications nécessaires
à leur régime de vie avec un montant aussi dérisoire de 90
$?
Le ministre admettait lui-même, lors de l'étude des
crédits, que 90 $ pour les gens en famille d'accueil, ce n'était
pas suffisant.
Le Président: Nous ne sommes pas ici pour étudier
les crédits du ministère des Affaires sociales qui permettent un
débat prolongé, nous sommes à la période des
questions et tant les questions que les réponses devraient être
courtes.
M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je peux difficilement
répondre par oui ou non à la question de la députée
de L'Acadie. Cependant, je tenterai d'être quand même plus bref.
(10 h 30)
Je dirai simplement qu'il faut bien comprendre que cette directive
administrative n'oblige pas les maisons à percevoir le montant pour
l'hébergement. Absolument pas. Elle dit simplement que le financement
venant du CSS tiendra compte d'une contribution ou non venant de la
bénéficiaire. Dans bien des cas il y a une contribution
volontaire des femmes hébergées, mais elle n'est pas obligatoire
en vertu de la directive. C'est une chose qui a semé un peu de
confusion. Sauf qu'il est très clair que dans la mesure où il n'y
a pas de contribution des personnes quant aux per diem versés par les
centres de services sociaux, il est évident que cela pose certaines
difficultés financières à certaines des maisons, à
Montréal en particulier.
Mme Lavoie-Roux: ...vos directives, c'est cela ma question, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Ceci dit, dans la mesure où il y a des
difficultés particulières à l'égard de quatre ou
six maisons, je crois, nous envisagerons différentes façons de
les aider. Je dois dire que le débat, tel qu'il a été
lancé par un groupe d'entre elles, est un débat qui fait
absolument fausse route et où on donne l'impression, à toutes
fins utiles, qu'on réduit les moyens et les ressources de ces maisons
alors qu'on n'a pas cessé de les augmenter depuis trois ans.
Le Président: En complément, M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: M. le Président, il y a environ seulement 300
places dans les maisons d'hébergement et de transition à travers
le Québec. Et, aujourd'hui, les besoins sont plus grands que jamais,
mais les maisons...
Le Président: M. le député, la question,
s'il vous plaît! Vous êtes en deuxième question
complémentaire; il n'y a pas de préambule ni de commentaire.
Posez votre question, je vous en prie.
M. Marx: N'est-il pas vrai que les maisons de transition au
Québec peuvent accommoder seulement 12% des demandes? La ministre
déléguée à la Condition féminine
était à Ottawa hier et demandait plus de pouvoirs à
Ottawa. Ma question est la suivante: Que faites-vous avec le pouvoir que vous
avez, et qu'allez-vous faire pour prévoir plus de places dans les
maisons d'hébergement et de transition?
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, les données du
député me semblent erronées. Il n'y a pas 300, mais bel et
bien 659 places d'hébergement, en 1983-1984, au Québec. Je ne
sais pas où le député prend ses chiffres; probablement au
même endroit où il se renseigne avant de faire des discours.
Le Président: Question principale, M. le
député d'Outremont.
Les tarifs de l'électricité à
l'usine CIL de Bécancour
M. Fortier: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre de l'Énergie et des Ressources. Tout le monde sait que
l'électricité a toujours été un facteur de
développement économique très important au Québec,
surtout dans le passé. Malheureusement, les tarifs
d'électricité pour la grande industrie, surtout pour celles qui
sont grandes consommatrices d'électricité, sont de moins en moins
concurrentiels, à un tel point d'ailleurs que le gouvernement doit
accorder des tarifs spéciaux lorsqu'il veut attirer de nouvelles
industries comme Pechiney, par exemple. Ce que l'on sait moins, c'est que ces
mêmes tarifs d'électricité créent des
difficultés, même pour l'industrie qui est déjà
installée au Québec. Dernièrement, la Presse, dans son
édition du 25 mai, faisait allusion à l'avenir de l'usine CIL, de
Bécancour, qui a joui dans le passé d'un tarif spécial
d'électricité pendant cinq ou six ans et qui, cette année,
si elle devait rattraper le tarif normal d'Hydro-Québec, serait sujette
à une augmentation de 42%. La question que j'aimerais poser au ministre
de l'Industrie et du Commerce est celle-ci: A-t-il l'intention d'intervenir
dans le dossier de l'usine CIL de Bécancour pour assurer la survie des
200 emplois de cette industrie et pour assurer la survie de cet investissement
qui a coûté 500 000 000 $ en 1975?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, j'avais compris que, dans le
deuxième volet, la question s'adressait à mon collègue de
l'Industrie et du Commerce. Alors, je vais lui adresser cette question, parce
que j'étais préparé ce matin à répondre
à une question sur l'amiante puisque j'avais eu un préavis de la
question, M. le Président, dans le Soleil du 27 mai.
M. Fortier: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Question de règlement, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, j'ai posé clairement
ma question sur le problème des tarifs électriques en ce qui
concerne l'usine de CIL, de Bécancour. J'aimerais bien que le ministre
responsable d'Hydro-Québec me réponde sur cette question.
Le Président: La question, en effet, ne portait pas sur
l'amiante. M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je vais donc prendre un
rendez-vous. Cela m'aurait évité une question de privilège
pour demain. Je vais prendre avis de la question à propos de l'usine de
CIL.
Le Président: M. le député d'Outremont,
question complémentaire.
M. Fortier: Je crois qu'on doit déplorer qu'un sujet aussi
important... J'aimerais poser une question additionnelle. Si le ministre
désire la prendre en considération pour y répondre plus
tard, j'aimerais lui demander qu'en même temps, il nous dise s'il a
l'intention de créer un tarif spécial. L'exemple de CIL n'est pas
unique, il y a d'autres industries au Québec qui attendent du ministre
qu'il intervienne dans le dossier. D'ailleurs, j'aimerais lui demander s'il a
lu le mémoire de la Corporation de développement
économique du Sud-Ouest et celui de la Société du port de
Valleyfield qui font justement état du fait que les tarifs de
l'électricité au Québec sont de moins en moins
compétitifs et à moins que le gouvernement n'intervienne, il y
aura des fermetures d'usines. Tout le monde apprécie le fait que le
gouvernement cherche à attirer de nouvelles industries, mais il
commencerait à être temps que le ministre responsable
d'Hydro-Québec se préoccupe des industries qui sont
déjà installées ici même, au Québec.
Le Président: Je comprends que nous ne sommes pas encore
habitués à la période des questions à 10 heures le
matin et qu'on peut avoir de la difficulté à formuler des
questions ou à résumer les réponses, mais je vous en prie,
quand même... Les questions complémentaires, dans certains cas,
n'en sont pas, ce sont des extraits de discours et les réponses de
certains ont été beaucoup trop longues.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources
M. Duhaime: Je vais suivre votre invitation, M. le
Président. Ma réponse est:
Oui, j'ai lu cet article.
Le Président: Question principale, M. le
député de Shefford.
La différence entre les montants
versés en taxes aux
municipalités
par les deux gouvernements
M. Paré: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Affaires municipales. J'avais le plaisir, vendredi dernier,
d'assister à l'inauguration du Palais des congrès à
Montréal qui est un outil de développement économique
très important pour la métropole. Lors des discours
prononcés, j'ai eu le plaisir d'apprendre que le gouvernement du
Québec, comme bon citoyen, payait ses "en-lieu" de taxes à la
ville de Montréal. Seulement pour le Palais des congrès, le
gouvernement du Québec va payer, pour l'année 1983-1984, 2 500
000 $ en taxes. La surprise a été de voir M. Marc Lalonde, le
ministre fédéral, venir dire que le gouvernement
fédéral paierait 3 500 000 $ en "en-lieu" de taxes à la
ville de Montréal pour la même année. Ce que j'ai compris,
c'est 3 500 000 $ pour l'ensemble des édifices fédéraux
à Montréal donc, comme le disait le premier ministre, une goutte
d'eau comparativement à ce qu'on paie.
Le Président: Voulez-vous en arriver à la
question?
M. Paré: Ma question porte sur ce point. J'entendais un
poste de radio annoncer dans mon coin, en fin de semaine, que ce que M. Lalonde
avait dit, c'était 3 500 000 $ payés seulement pour le Palais des
congrès. Cela ne tient pas parce que c'est un édifice qui
n'appartient pas au gouvernement fédéral. J'aimerais savoir
quelle est la différence entre ce que le gouvernement du Québec
paie en taxes aux municipalités par rapport à ce que paie le
gouvernement fédéral.
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
Des voix: Excellente question, bravo!
Le Président: À l'ordre!
M. Léonard: Le Québec verse en "en-lieu" de taxes
sur ses édifices, les édifices des réseaux de
cégeps, d'universités, des affaires sociales, des écoles
primaires et secondaires et des réseaux de communications comme
Hydro-Québec, le gaz, l'électricité et le
téléphone, 375 000 000 $ par année.
Des voix: Combien?
M. Léonard: 375 000 000 $ par année aux
municipalités. J'ai eu le plaisir d'annoncer hier que
l'évaluation des écoles primaires et secondaires serait
portée à 50% pour l'année 1984. Donc, nous augmenterons
ces "en-lieu" de taxes au cours de l'année prochaine. C'est donc une
bonne nouvelle pour les municipalités.
Alors que des députés fédéraux se
promènent dans le décor pour faire des propositions discutables
aux municipalités à l'heure où on se parle, je
répète que le fédéral ne paie pas ses taxes; ce
qu'il paie, dans la mesure où il en paie, c'est ridicule. Il ne paie pas
la taxe d'affaires, par exemple, il refuse de la payer. Il n'accepte surtout
pas d'être évalué selon la loi de l'évaluation
foncière, ce qui fait qu'il a une foule d'équipements sur le
territoire du Québec qui ne paraissent même pas au rôle
d'évaluation et pour lesquels il ne paie même pas de taxe. Tous
les ministres des Affaires municipales de toutes les provinces s'en sont
plaints. Il y a eu la création d'un Comité Pollack qui a
siégé, qui n'a rien donné et la loi C-4 s'applique depuis
ce temps. Le fédéral ne respecte pas les lois lorsqu'il s'agit
d'institutions locales et pour les municipalités non plus. Je l'invite
donc à payer ses taxes correctement plutôt que de faire des
cadeaux dans le décor, qui n'en sont pas, d'ailleurs. Le résultat
de tout cela, par exemple, dans le cas de la ville de Longueuil, le
Québec verse plus de 6 000 000 $ en taxes par année; le
fédéral en verse 200 000 $.
Une voix: M. le Président, question
supplémentaire.
Le Président: Voilà un sujet qui soulève
beaucoup de questions complémentaires. Commençons par M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, j'écoutais les
propos du ministre des Affaires municipales et je voudrais lui poser une
question. N'est-il pas vrai, M. le ministre des Affaires municipales, que,
depuis l'adoption de la loi 57 sur la fiscalité municipale, les
municipalités subventionnent le gouvernement du Québec pour le
réseau des affaires sociales et de l'éducation dans un
pourcentage que vous reconnaissez de 40% et de 80% et que vous aviez des
engagements de pris envers les municipalités de reconnaître
à 100% pour ces réseaux les "en lieu" de taxes tels que vous
devez les payer? (10 h 40)
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: M. le Président, en 1981, le transfert
net de ressources vers les municipalités, tel que dit et attesté
dans un rapport du Comité des élus municipaux sur la
fiscalité qui a été déposé au mois de
novembre dernier, était de 360 000 000 $ par année. Il y a, en
plus, l'engagement, sur une période de cinq ans, de porter
l'évaluation foncière des édifices du gouvernement, des
réseaux des affaires sociales et de l'éducation à 100%. Au
moment où on se parle, le Québec paie 100% de ses taxes
foncières sur ses propres édifices. Il paie 80% des taxes
foncières sur les immeubles des réseaux des universités,
des cégeps et des affaires sociales. Maintenant, il paiera 50% sur le
réseau des écoles primaires et secondaires et, sur la
période, nous entendons respecter cet engagement.
Alors, je pense que, jusqu'ici, les municipalités ont largement
bénéficié de la réforme de la fiscalité.
C'est ce qui explique qu'elles soient passées correctement à
travers la crise économique, parce que les indicateurs
démontrent, là-dessus, que la dette des municipalités, de
1976 à 1981, est passée de 3 900 000 000 $ à 5 000 000 000
$ seulement - cela n'a même pas suivi l'inflation - que les surplus de
fonctionnement en particulier, qui étaient de 26 000 000 $ en 1976 avec
des subventions d'équilibre budgétaire, sont passés
à 180 000 000 $ en 1982. Ce sont des indicateurs significatifs, M. le
Président.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Est-ce que le
ministre pourrait nous indiquer combien, pour la seule ville de
Montréal, le gouvernement du Québec paie en taxes
foncières et à combien pouvons-nous estimer le manque à
gagner pour la seule ville de Montréal par rapport au fait que le
gouvernement fédéral ne paie pas ses taxes foncières
à Montréal?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: M. le Président, les taxes
foncières payées à la ville de Montréal, en "en
lieu" de taxes, sont d'environ 75 000 000 $ à 80 000 000 $. On pourra
préciser les chiffres; s'il y a une erreur significative, j'y reviendrai
à l'Assemblée nationale. Mais c'est de cet ordre.
En ce qui concerne le fédéral, il est très
difficile de dire quel est le manque à gagner, parce qu'il refuse
d'être évalué. C'est cela le problème.
Un autre aspect, par exemple, l'édifice de Radio-Canada, à
Montréal. Il y a une entente par laquelle les taxes
fédérales payées sur cet édifice, à la ville
de Montréal, sont ridiculement basses. Partout, ce sont des situations
comme celle-là, parce que, par la loi C-4, ils se sortent de
l'application du système fiscal au Québec. Je demanderais
à l'Opposition de nous appuyer pour qu'on aille chercher les taxes
municipales au fédéral. Qu'il nous les paie. Si elle ne veut pas
nous appuyer directement, M. le Président, au moins qu'elle appuie les
municipalités qui demandent la même chose.
Le Président: Dernière question
complémentaire, M. le député de Vachon.
Des voix: Ah!
Une voix: Ce n'est pas correct.
M. Payne: Merci, M. le Président. La question est
brûlante. Je pense que c'est dans l'intérêt de chaque membre
de cette Assemblée que le ministre dépose devant cette Chambre
une liste de tous les édifices fédéraux au Québec
pour qu'on puisse bien le savoir une fois pour toutes. Combien le
fédéral doit aux municipalités....
Le Président: Je n'ai pas saisi de questions.
M. Payne: Ma question est, est-ce que le ministre...
Le Président: Je m'excuse, M. le député, si
vous permettez. Autant le système d'amplification de son à la
télévision fait que les paroles des députés sont
facilement compréhensibles, autant le système ici est à ce
point déficient que je n'entends absolument rien lorsqu'il y a le
brouhaha qu'il y avait tantôt. Si on veut que je comprenne s'il y a ou
non question, j'aimerais au moins qu'on se taise pour laisser le
député prendre la parole.
M. Payne: Ma question était simple. Est-ce que le ministre
peut déposer devant cette Chambre une liste des édifices sur
lesquels le fédéral devrait payer ses impôts et où
dans l'intérêt de toutes les municipalités et de tous les
parlementaires, les libéraux peuvent voter et appuyer l'attitude et la
politique de Québec?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales,
brièvement.
M. Léonard: M. le Président, je vais
m'enquérir si je peux déposer une telle liste. Dans combien de
temps je pourrais la faire? Je pense qu'il y a des possibilités.
Remarquez que les rôles d'évaluation appartiennent aux
municipalités régionales de comté et nous en avons copie.
Maintenant, comme il s'agit d'instruments financiers qui sont quand même
du ressort public, je vais m'enquérir si je peux le faire. Cependant, je
dois dire que ce sera forcément limité parce que le
fédéral refusant de se faire évaluer, il y a une foule
d'équipements qui n'apparaîtront pas dans les rôles
d'évaluation. Exemple, on me dit que dès qu'il y a un aspect plus
ou moins militaire ou sécuritaire on refuse l'entrée des
évaluateurs dans toutes sortes d'édifices. Je ne sais pas, moi,
si les bureaux de la Gendarmerie royale, par exemple, sont exemptés,
s'ils ont été évalués et toutes sortes de choses
comme cela. Dans la mesure du possible, je le ferai.
Le Président: M. le député de Hull a encore
une question complémentaire à poser.
M. Rocheleau: M. le Président, je pense que c'est un sujet
important. Est-ce que le ministre serait d'accord pour que je lui dépose
la preuve de la ville de Hull, du secrétaire-trésorier, à
savoir que le fédéral reconnaît 100% des évaluations
foncières alors que le gouvernement du Québec crée un
manque à gagner de 1 800 000 $ pour la ville de Hull?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: Je vois que le député de Hull se
considère encore comme le maire de Hull puisqu'il parle du
secrétaire-trésorier.
Le Président: À l'ordre!
M. Léonard: Je pense qu'il appartient à la
municipalité de Hull de le faire et non pas au député. Si
à Hull on paie beaucoup de taxes et peut-être que le gouvernement
fédéral, à ce moment, se considérerait
peut-être comme chez lui. C'est curieux. Comment cela se fait-il? Parce
qu'ailleurs, ce n'est pas cela. Il y a un décalage considérable
entre les taxes qu'il paie et celles qu'il devrait payer. Peut-être
qu'à Hull c'est une façon de subventionner ce qu'il
considère être chez lui.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! Question
principale, M. le député de Richmond.
Subventions à la voirie municipale
dans les comtés non
représentés
à l'Assemblée
M. Vallières: M. le Président, ma question
s'adressera au ministre des Transports. J'ose espérer qu'aujourd'hui il
n'induira pas la Chambre en erreur contrairement à ce qu'il a fait hier
au sujet de l'autoroute 55 qu'il a qualifié d'autoroute à
spaghetti. Les comtés de Frontenac, Charlesbourg, Saguenay et
Saint-Jacques n'étant pas actuellement représentés
à l'Assemblée nationale, le ministre peut-il
nous indiquer si les municipalités de ces comtés se
verront quand même attribuer un budget afin de subventionner la voirie
municipale. Si oui, en l'absence de députés dans ces
comtés, le ministre peut-il nous informer à qui il a
demandé de lui faire des recommandations quant à la
répartition des subventions aux différentes municipalités
de ces comtés ou préférera-t-il attendre plus sagement les
résultats des élections partielles? (10 h 50)
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir de
répondre à la question. J'ai demandé à mon
sous-ministre de me préparer une lettre pour les maires de chacune des
municipalités de ces comtés afin qu'ils adressent leur demande de
subvention directement au ministre des Transports. S'ils répondent
suffisamment rapidement, je serai en mesure de rendre les décisions
aussi rapidement dans ces comtés que dans les autres comtés, et
je le ferai, comme ministre des Transports, avec l'éclairage de mon
ministère. Sinon, j'attendrai que les nouveaux députés
arrivent. Mais je ne voudrais pas pénaliser ces comtés et
retarder le début des travaux. Je dois donc agir avec autant de
célérité que les circonstances me le permettent.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Richmond.
M. Vallières: Le ministre peut-il nous indiquer si la
même procédure a été suivie dans le comté de
Frontenac?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, en ce qui concerne le
comté de Frontenac, je ne pourrais pas répondre à la
question. C'est traité par le bureau de mon sous-ministre. Je vais m'en
enquérir et répondre au député.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Vallières: M. le Président, vous me permettrez
d'insister afin que dans les meilleurs délais, le ministre...
Le Président: Je ne vous le permets pas. J'ai dit à
deux reprises ce matin - et je le réitère - que la période
des questions n'était pas une période de commentaires ou de
préambules interdits.
Question principale, M. le député de Mont-Royal.
M. Vallières: Merci, M. le Président.
Investissement dans Pechiney à
Bécancour
M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. La semaine
dernière, le ministre a déposé en cette Chambre un projet
de loi pour autoriser la SGF à investir une somme de 150 000 000 $ pour
la construction de l'aluminerie de Pechiney, à Bécancour. Sans
entrer dans tous les détails, le ministre pourrait-il nous donner les
grandes lignes du contrat avec Pechiney et, plus spécifiquement, les
associés seront-ils obligés d'acheter la production de l'usine de
Bécancour?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: M. le Président, les contrats ne sont pas encore
complètement négociés. On est en train, d'ailleurs,
à la suite de la demande du député de Mont-Royal - ou de
l'Opposition, en tout cas - de préparer le projet le plus explicite
possible avec la SGF. Le président de la SGF sera même en
commission parlementaire, avant la deuxième lecture, pour
répondre aux questions de l'Opposition là-dessus. Dans un
investissement de cette importance, il faut des garanties pour les partenaires
minoritaires. Dans ce sens, le Québec, en particulier, avec environ 35%
jusqu'à maintenant qui ont été négociés,
sera un partenaire minoritaire et il faut absolument s'assurer, dans les
contrats qu'on signera avec la société Pechiney, que le
partenaire minoritaire soit protégé à la fois à
l'achat des matières premières, c'est-à-dire l'alumine, et
à la fois aussi dans la vente des produits finis, c'est-à-dire
l'aluminium. Autrement, on serait pris avec le partenaire majoritaire qui
vendrait ses matières premières et qui serait le seul agent
vendeur de produits finis. Or, tout cela est en négociation
présentement, mais il n'y a rien encore de complété au
moment où on se parle.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le ministre pourrait-il nous dire quelles sortes de
garanties vous allez exiger pour la SGF? Par exemple, si les associés ne
sont pas obligés d'acheter le produit de l'usine, que va-t-il arriver
dans ce cas si Pechiney favorise... M. le Président, pourriez-vous dire
au ministre de l'Énergie et des Ressources de se taire afin que je
puisse poser ma question?
Une voix: C'est une hypothèse.
M. Ciaccia: Certainement. C'est une hypothèse...
Le Président: Allez-y. Allez-y, M. le
député.
M. Ciaccia: ...d'aujourd'hui parce que vous allez signer des
contrats.
Le Président: À l'ordre, M. le ministre!
M. Ciaccia: C'est vous qui êtes hypothétique.
Le Président: M. le ministre, je vous en prie. M. le
député.
M. Ciaccia: Je vais recommencer. Le ministre peut-il nous dire
quelle garantie il va exiger pour la SGF? Si les associés
n'achètent pas le produit de l'usine, que va-t-il arriver, advenant une
baisse dans la demande du produit? Pechiney va-t-elle favoriser la vente de son
produit dans d'autres usines, par exemple celles de l'Australie? Quelles
garanties la SGF aura-t-elle?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: Ce que nous prévoyons - et c'est en cours de
négociation présentement -c'est qu'on puisse avoir des garanties
sur la vente de nos matériaux, parce qu'on n'est pas pour rester pris
aussi avec une pile de lingots d'aluminium dans les cours, à
Bécancour. D'autre part, il faut s'assurer que s'il y a des entreprises
qui veulent transformer l'aluminium en aval pour en faire d'autres produits
finis, il faut s'assurer de pouvoir avoir les quantités
nécessaires par le partnership de la SGF dans cette aluminerie pour
pouvoir aussi écouler sur le marché québécois une
partie importante qui pourrait créer des emplois secondaires.
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: La réponse du ministre n'a presque pas de
sens. L'Alcan produit des lingots...
Le Président: Question, question.
M. Ciaccia: Il n'y a pas de problèmes quant au fait
d'obtenir le produit...
Le Président: La question.
M. Ciaccia: ...pour faire la transformation.
Le Président: M. le député, votre
question.
M. Ciaccia: Est-ce que le gouvernement obligera Pechiney à
faire la transformation au Québec des produits ou d'une partie des
produits qui seront manufacturés à Bécancour?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: M. le Président, pour faire de la transformation
de matière première, je pense que cela prend des commandes, cela
prend des marchés. Même si on oblige en quelque sorte, par des
contrats, à transformer 35%, s'il n'y a pas de marché possible,
je pense que les 35% n'iront nulle part. On veut s'assurer qu'au fur et
à mesure qu'on puisse développer des entreprises dans le domaine
de la transformation secondaire d'aluminium, c'est d'avoir l'aluminium
nécessaire. Mais je peux assurer le député de Mont-Royal
que les contrats seront mieux négociés, mieux signés et
beaucoup mieux que les contrats que le Parti libéral avait signés
sur SIDBEC-Normines.
Des voix: Bravo!
Le Président: Question principale, M. le
député de Verdun.
Le fichier des locataires
M. Caron: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Il y a un an, les
propriétaires décidaient de faire un fichier de locataires
soi-disant indésirables. Dès les premiers mois de 1982, la
Commission des droits de la personne déclarait tout à fait
inacceptable ce fichier sur les locataires. Le ministre de l'Habitation et de
la Protection du consommateur disait qu'il ferait une étude selon
l'article 260 de la Loi sur la protection du consommateur. Au ministère
de l'Habitation et de la Protection du consommateur, on a dit, il y a environ
un an, que tout dépend de l'utilisation qu'on pourrait faire de ce
fichier. Je voudrais savoir du ministre où en est rendu ce dossier.
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur.
M. Tardif: Oui, M. le Président. Depuis ce moment, il y a
eu la commission parlementaire sur la réforme du Code civil,
particulièrement, l'étude du projet de loi no 106 qui
prévoit un certain nombre de dispositions visant aussi à
protéger les personnes qui seraient victimes d'atteinte à leur
réputation et leur vie privée. Ce sont les articles du projet de
loi qui disent que toute personne peut consulter et faire
reproduire... je lis ici l'article 35 du projet de loi no 106. Je ne
sais pas si cela a été le libellé définitif qui a
été accepté en commission, mais: "Toute personne peut
consulter et faire reproduire à ses frais un dossier qui la concerne et
qu'une personne constitue ou détient sur elle dans le but d'informer un
tiers, sous réserve des lois relatives à l'accès aux
documents des organismes publics et la protection des renseignements
personnels." L'article 35 continue: "Elle peut faire rectifier une information
inexacte, incomplète ou équivoque et faire supprimer une
information non pertinente qui lui est injustement préjudiciable."
Ces dispositions viennent compléter les articles 260 et suivants
de la Loi sur la protection du consommateur. L'article mentionne: "Quiconque
fait commerce de préparer et distribuer à d'autres personnes des
rapports de crédit au sujet du caractère, de la réputation
et de la solvabilité d'une personne est un agent d'information." On dit
plus loin ce qui se produit lorsqu'on transige des informations. Donc, ces deux
séries de dispositions, celle de la Loi sur la protection du
consommateur, d'une part, et les amendements au Code civil par le projet de loi
no 106 d'autre part, viennent circonscrire une partie du problème. Pour
l'instant, cela nous apparaît être autant de garanties. Est-ce
qu'à l'usage, cela se révélera suffisant? C'est ce que
nous devrons constater.
M. Caron: Question supplémentaire.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Verdun.
M. Caron: Est-ce que l'Association des locataires semble
satisfaite des démarches faites jusqu'à maintenant?
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur. (11 heures)
M. Tardif: M. le Président, je pense qu'il ne serait pas
conforme à la vérité de dire que les groupements de
locataires sont satisfaits de ces dispositions. Ce qu'ils veulent, c'est une
loi qui interdit la confection comme telle de listes quelconques. Ceci est
extrêmement difficile parce qu'il ne se fait pas à proprement
parler de commerce de listes. À la limite, une association de
propriétaires obtient de ses membres des renseignements qu'ils lui
diront tout simplement de conserver de sorte que si un nouveau
propriétaire veut louer un immeuble, avant de louer, il s'adresse
à son association. Son association ne lui donnera pas de renseignement
sur le locataire concerné, elle va lui dire: Appelez donc M. Untel qui
l'a eu avant. Il n'y a donc pas de rôle d'intermédiaire par
l'association, ce qui rend assez difficile le contrôle de ce type
d'information.
Encore une fois, nous suivons la situation et, si tant est que ces
mesures à la fois de la Loi sur la protection du consommateur et du Code
civil ne sont pas suffisantes, il faudra aller plus loin.
Le Président: Question principale sans
complémentaire, compte tenu du temps, M. le député de
Champlain.
Le sommet économique régional de
Trois-Rivières
M. Gagnon: Merci, M. le Président. Dans le Devoir
d'aujourd'hui, on traite du sommet économique régional de
Trois-Rivières. On dit qu'un des participants, M. André Raiche,
de l'Union des producteurs agricoles, a conclu en disant: "Nous avons
brisé plusieurs mythes durant ces deux jours: en effet, nous avons
construit un pont entre les deux rives, nous avons canalisé
l'énergie régionale, nous avons ouvert les portes de
l'université." Un peu plus loin, on dit: Le succès du sommet
économique de la région Mauricie-Bois-Francs donnera un excellent
élan aux autres sommets économiques qui devraient se tenir au
Québec.
Je voudrais demander au ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional ce qu'il entend
faire pour que ce succès apparent ait des suites et pour que les
engagements qui ont été pris lors de ce sommet économique
de la région Mauricie-Bois-Francs puissent avoir des suites aussi,
surtout les engagements pris par la partie gouvernementale.
Le Président: Brièvement, M. le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional.
M. Gendron: En effet, M. le Président, j'ai eu l'occasion
de le rappeler lors d'une question en Chambre, le sommet de la région
Mauricie-Bois-Francs-Drummond a été un succès remarquable.
Il s'agit de prendre connaissance des coupures de presse pour se rendre compte
que la plupart des intervenants y ont participé avec conviction, avec la
volonté que cette formule puisse s'instaurer dans la plupart des
régions du Québec, ce que, comme ministre de l'Aménagement
et du Développement régional, je préconise depuis fort
longtemps en permettant aux régions du Québec d'avoir une
meilleure prise sur l'action gouvernementale. J'ai toujours prétendu
qu'il n'y a qu'une façon d'avoir un Québec véritablement
en bonne santé, un Québec fort, c'est par des régions qui
pourront se renforcer, se développer davantage et avoir une meilleure
prise sur leur développement régional.
Que va-t-on faire concrètement? Depuis au-delà d'un an,
j'ai réfléchi avec d'autres, bien sûr, sur les
éléments d'une politique de développement régional,
et c'est un heureux hasard, puisqu'on ne s'était pas consultés,
que le document soit au Conseil des ministres aujourd'hui pour décision.
Je souhaite que la décision du Conseil des ministres soit d'autoriser
celui qui vous parle à faire la consultation sur ce document de
réflexion afin que l'ensemble des régions puissent voir comment
on entend, comme gouvernement, les faire participer davantage à l'action
gouvernementale. Pour ce qui est du suivi du sommet de la région 04,
voici ce qui a été fait concrètement, contrairement au
début de l'article qui disait: Même si, au lendemain, aucun emploi
n'a été créé au sommet. Ce n'est pas tout à
fait exact parce que dès le lendemain il y avait au moins un emploi
puisqu'on avait décidé, à l'OPDQ, de confier à une
personne la permanence pour s'assurer que toutes les résolutions, tous
les projets qui ont été retenus aient vraiment un
caractère plus formel de garantie de succès dans l'avenir.
Le Président: La période des questions est
terminée.
M. Picotte: Je voudrais solliciter le consentement pour poser une
question additionnelle au ministre.
Le Président: Il y a consentement, M. le whip.
Des voix: Non, pas de consentement.
Le Président: On me dit qu'il n'y a pas de
consentement.
M. Picotte: Il n'y a pas de consentement. J'ai mon voyage!
Le Président: Cependant, il y a un complément de
réponse de la part du ministre des Transports.
La construction du tronçon principal de
l'autoroute 50
M. Clair: M. le Président, c'est simplement pour donner
plus d'informations au député de Papineau qui me demandait hier
s'il était exact que, initialement, un budget de 2 000 000 $ avait
été prévu pour la construction de l'autoroute 50 de la
Montée des Laurentides à la route 309. Ce que je peux lui
expliquer là-dessus c'est que dans le plan de développement, le
plan d'équipement 1982-1987 dont il a pris connaissance, j'imagine, un
montant de 2 000 000 $ avait été effectivement prévu. Dans
le budget de construction de cette année, c'est plutôt un montant
de 500 000 $ qui apparaît pour entreprendre des travaux de l'ordre de 11
800 000 $ sur un tronçon de six kilomètres.
La principale explication à donner au député c'est
que s'il regarde bien le plan d'équipement 1982-1987 sur la même
autoroute 50 concernant le tronçon compris entre l'échangeur du
Canadien Pacific à la Montée Paiement, on avait estimé sur
un tronçon d'une longueur de 7,2 kilomètres qu'il en
coûterait 18 800 000 $ pour le coût global de ce tronçon.
Or, au plan d'équipement de cette année, on voit que c'est
plutôt de 20 680 000 $ dont il s'agira, ce qui explique un certain retard
consécutif dans les autres tronçons à suivre. Si des
travaux sur un premier tronçon ont coûté plus cher que
prévu ou coûteront plus cher que prévu sur le plan
d'équipement 1982-1987, il est, à toutes fins utiles,
inévitable que sur le plan d'équipement 1983-1988 il y ait un
retard aussi important sur un autre projet qui devait suivre. C'est
l'explication que je pouvais donner au député.
Le Président: M. le député de Papineau.
M. Assad: M. le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que
la partie qui n'est pas complétée actuellement, donc vous avez
mis seulement 500 000 $ au lieu de 2 000 00 $, est sans doute la partie
principale de l'autoroute 50, pour desservir le bassin de population des villes
de Masson et Buckingham qui sont les plus importantes à l'est de Hull.
Si vous avez la chance de parler à votre divisionnaire régional,
vous verrez qu'il y aurait peut-être possibilité de
révision parce qu'on trouve que la construction de l'autoroute 50 pour
1986 est un peu tardive. Au début, quand l'accord a été
signé en 1972, le parachèvement de l'autoroute était
prévu pour 1977 et maintenant on parle de 1986.
Je prétends que comme 50% du coût de cette autoroute sont
défrayés par le gouvernement fédéral, il y a
toujours moyen de regarder de plus près la possibilité
d'accélérer les travaux.
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, pour plus de précisions
encore une fois, je dirai que nous dépenserons plus de 10 000 000 $ en
1983-1984 sur l'autoroute 50. Ce que la région nous avait
signifié comme volonté, c'était d'accélérer
surtout les travaux compris entre Hull et l'aéroport de Gatineau-Angers.
C'est ce que nous avons fait afin de permettre la desserte de l'aéroport
de Gatineau dès le mois d'août ou septembre prochain par
l'autoroute 50. C'était la priorité qui était
accordée à ce tronçon et j'ai d'ailleurs indiqué
hier au député de Gatineau qu'en ce
qui concerne le choix à faire entre l'autoroute 5 et l'autoroute
50 et 550 vers l'est, nous avons décidé de donner priorité
à la construction de l'autoroute 50 en direction de Masson au cours des
prochaines années. Cela va donc dans le sens que souhaite le
député. Je comprends cependant que quant à lui c'est un
peu normal. Tous les députés souhaiteraient voir leur projet
accéléré plus rapidement que les autres, c'est
certainement légitime mais nous devons le faire dans le cadre des
priorités à l'intérieur d'une région et des budgets
qui y sont alloués, et c'est ce que nous avons fait.
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales
m'indique qu'il a également un complément de réponse.
Sommes versées à la ville de
Montréal,
par le gouvernement du Québec,
pour tenir lieu de taxes
M. Léonard: Oui, M. le Président. Entre temps j'ai
obtenu des chiffres sur les "en lieu" de taxes versés à la ville
de Montréal en réponse au député de Shefford et au
député de Gouin. Les "en lieu" de taxes sur les immeubles du
gouvernement des réseaux et autres compensations versés à
la ville de Montréal pour l'année 1982, donc qui ont
déjà été versés, 93 000 000 $. Au titre de
la redistribution des taxes sur les réseaux d'électricité,
de gaz et de télécommunication, 37 000 000 $...
M. Tardif: Hydro-Québec?
M. Léonard: Oui, pour Hydro-Québec. Et pour les
subventions spécifiques, transport en commun, assainissement des eaux et
autres choses, 98 000 000 $. Le total des sommes versées par le
gouvernement du Québec à la ville de Montréal...
M. Tardif: Seulement pour la ville?
M. Léonard: ...en 1982, c'est 229 000 000 $...
M. Tardif: Hein?
M. Léonard: ...et le fédéral a versé
en 1982 à Montréal, 6 287 000 $. Je considère que
l'annonce qu'a faite M. Lalonde vendredi dernier, de donner un chèque de
3 500 000 $ doit représenter le premier versement de toutes les taxes
fédérales sur tous les édifices sur tout le territoire de
la ville de Montréal. (11 h 10)
Le Président: Aux avis à la Chambre...
M. Champagne: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: Lorsqu'il y a complément de
réponse, il peut y avoir question additionnelle de la part de la
personne qui a posé la question, mais pas de la part d'une autre
personne. En l'occurrence, si on veut vraiment poser une question
additionnelle, il faudrait qu'elle vienne, dans ce cas-ci, soit du
député de Shefford, qui a posé la question principale, ou
du député de Gouin, qui a posé la question plus
spécifique quant aux taxes à Montréal. M. le
député de Shefford, si vous voulez poser une question
additionnelle.
M. Paré: Oui. Merci, M. le Président. Une courte
question au ministre des Affaires municipales, en complémentaire.
J'aimerais savoir si, avec les chiffres qui viennent d'être donnés
pour l'ensemble des municipalités du Québec - et toutes les
municipalités du Québec, j'ai l'impression -on peut en conclure
que le gouvernement du Québec est le plus grand payeur de taxes de
chacune des municipalités?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: C'est sûr qu'au total, oui, c'est le
plus grand contribuable pour les municipalités, mais pas
nécessairement dans chacune des municipalités, c'est bien
évident. Dans certaines municipalités, il n'y a pas
d'installation. Il peut y avoir des industries, mais sur l'ensemble du
territoire du Québec, en 1982, il y a 375 000 000 $ de compensation de
taxes versés par le gouvernement.
Le Président: Il n'y a pas de motion non annoncée,
que je sache. Il n'y a pas d'enregistrement des noms sur les votes en suspens,
ce qui nous amène aux motions de M. le leader parlementaire du
gouvernement.
Travaux des commissions
M. Bertrand: M. le Président, ce matin, de 11 h 15
à 13 heures, je demanderais le consentement pour que trois commissions
parlementaires puissent siéger. D'abord, au salon rouge, la commission
des affaires municipales pour l'étude des crédits de ce
ministère. À la salle 81-A, la commission de la présidence
du conseil pour l'étude des crédits du Secrétariat
à la science et à la technologie - en attendant que cela devienne
le ministère de la Science et de la Technologie. On me dit que, de part
et d'autre, on se serait entendu pour qu'une période de quatre heures
soit consacrée à l'étude des crédits de ce
ministère. Et, dès que l'étude des crédits de ce
ministère serait terminée, à la salle 81-A, ce serait
ensuite le ministre délégué aux Relations avec les
citoyens qui irait devant cette commission parlementaire, donc probablement au
cours
de l'après-midi, pour défendre ses crédits. Et on
me dit que pour ce dossier particulier, Relations avec les citoyens, une
période de trois heures aurait été négociée
de part et d'autre pour procéder à l'étude des
crédits. Ensuite, à la salle 91-A, de 11 h 15 à 13 heures,
de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, la
commission des finances et des comptes publics se réunira d'abord pour
procéder à l'étude des crédits du Conseil du
trésor et, ensuite, pour continuer l'étude du projet de loi no 8,
article par article. J'indique, en ce qui a trait à la commission de la
présidence du conseil et de la constitution, que ses travaux,
normalement, se dérouleraient aux heures régulières que
nous connaissons pour la session intensive à compter du 1er juin,
c'est-à-dire de 11 h 15 à 13 heures, de 15 heures à 18
heures et de 20 heures à 24 heures. Mais je crois qu'avec le menu qu'ils
ont, ils pourraient probablement avoir terminé avant 24 heures ce
soir.
Le Président: M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, est-ce que le leader du
gouvernement pourrait répéter ce qu'il a dit au sujet de la
commission des finances et des comptes publics?
Le Président: M. le leader parlementaire.
M. Bertrand: Pour les finances et comptes publics, M. le
Président, d'abord on procédera à l'étude des
crédits, à compter de maintenant, c'est-à-dire 11 h 15 et,
par la suite, dès que cette étude sera terminée, on
reprendra l'étude du projet de loi no 8, article par article. Il y a
environ deux heures prévues pour l'étude des crédits du
Conseil du trésor.
Le Président: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que le leader
pourrait nous indiquer - comme dans le cas d'autres commissions - pour ce qui
est de la conclusion de l'étude des crédits de la commission des
finances et comptes publics, quel temps est prévu, afin que ceux qui
sont intéressés uniquement à l'étude de la loi no 8
puissent savoir à quel moment se présenter en commission.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Environ deux ou trois heures, M. le
député de Sainte-Marie.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Lalonde: M. le Président, je constate que le leader du
gouvernement demande le consentement pour faire siéger trois commissions
en même temps que la Chambre siégera. Je demande au leader du
gouvernement de m'indiquer en vertu de quel esprit de collaboration je devrais
donner ce consentement, si c'est le même que lui-même a
manifesté en refusant de consentir à une question additionnelle
tout à l'heure?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vais donner deux
réponses au député de Marguerite-Bourgeoys et leader
parlementaire de l'Opposition. La première est que je pense que nous
avons apporté le maximum de collaboration de ce côté-ci
pour permettre que les députés de l'Opposition trouvent
satisfaction au niveau d'un certain nombre de dossiers comme les questions qui
sont inscrites au feuilleton. J'indique immédiatement au
député de Sainte-Marie qu'il aura ce matin la réponse
à sa question inscrite au feuilleton.
M. Bisaillon: Il serait temps.
M. Bertrand: Ainsi, le feuilleton sera complètement
nettoyé de toute question posée par des députés et
inscrite au feuilleton.
Deuxièmement, j'étais informé - je veux,
là-dessus, que le député de Marguerite-Bourgeoys prenne ma
parole - que le ministre des Transports et le ministre des Affaires municipales
avaient des compléments de réponse à apporter. Dans ce
contexte, comme déjà on sait qu'on va déborder la
période des questions et qu'il peut arriver qu'un complément de
réponse donne lieu à une question additionnelle - cela a
été le cas du député de Papineau et du
député de Shefford - dans mon esprit, cela allonge d'une certaine
façon la période des questions, ce qui a été le
cas. Je m'excuse auprès du député de Maskinongé, je
lui aurais donné mon consentement si j'avais su qu'il n'y avait pas de
complément de réponse. Dans un contexte de complément de
réponse, je croyais, parce qu'il y avait questions additionnelles et que
la période des questions pourrait être allongée de cinq,
sept ou huit minutes, qu'il était préférable de
fonctionner pour se rapprocher le plus des 45 minutes normalement
dévolues aux périodes des questions.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Lalonde: Si je me suis permis de poser la question au leader
du gouvernement, c'est pour indiquer que nous entrons
aujourd'hui dans une période de fin de session où les
travaux sont bousculés un peu et les heures longues. Nous aurons besoin,
de part et d'autre, de toute la collaboration possible. J'ai offert ma
collaboration au leader du gouvernement, hier soir, hors cette Chambre, mais
j'aimerais que la pareille soit aussi reconnue à l'égard des
autres députés. Malgré le refus de ce consentement et par
respect pour les membres des commissions qui se sont préparés
à travailler dans trois commissions en même temps
immédiatement, nous allons donner notre consentement.
Le Président: La motion du leader parlementaire du
gouvernement est donc adoptée?
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté. M. Fortier: Article 34.
Recours à l'article 34
Le Président: Une question en vertu de l'article 34, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: Le leader m'a donné l'assurance qu'il y aurait
une commission parlementaire pour entendre Hydro-Québec à la
suite du dépôt d'un projet de loi extrêmement important
modifiant substantiellement la Loi d'Hydro-Québec. Je le remercie
d'avoir accepté de tenir une commission parlementaire. Ce que je
voudrais éviter, c'est que ce projet de loi très important soit
traité en dernière minute, en fin de session. Le ministre, en
dehors de cette Chambre, m'a indiqué qu'il serait prêt à
procéder et à inviter, si le leader acquiesçait,
Hydro-Québec dès que la commission parlementaire sur le saccage
de la Baie-James serait terminée.
J'aimerais lui demander s'il pourrait prendre ma demande en
considération pour entendre Hydro-Québec dès le
début de la semaine prochaine si cela était possible.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Il est évident que, dans la mesure où
le député d'Outremont et le député de Saint-Maurice
se sont entendus sur une certaine forme de déroulement de cette
commission parlementaire et une date qui pourrait satisfaire les deux parties,
je me rendrai à leur désir.
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Président: Oui, M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: ...puis-je rappeler au leader du gouvernement qu'il
s'est engagé hier à me donner une réponse en regard du
dépôt éventuel d'un projet de loi sur la fonction publique
et sur la tenue possible d'une commission parlementaire sur le même
sujet?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Pour ceux qui auront pris connaissance des journaux
ce matin, ils auront pu apprendre que Mme la ministre de la Fonction publique
doit présenter au Conseil des ministres son mémoire
là-dessus. Dans la mesure où la décision n'est pas encore
prise au Conseil des ministres, je ne peux pas, à ce stade-ci, dire au
député de Sainte-Marie ce qu'il adviendra dudit projet de loi,
quand il sera déposé à l'Assemblée nationale et
donc, à partir de là, quel est l'échéancier qu'on
suivrait pour ce qui est de l'analyse en deuxième lecture ou même
la tenue d'une commission parlementaire.
Le Président: M. le député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, ma question s'adresse au
leader du gouvernement. À la suite du dépôt du projet de
loi no 28 concernant la Communauté régionale de l'Outaouais, on
doit entendre les intervenants le 8 juin, c'est-à-dire les
municipalités d'Aylmer, de Gatineau, de Hull et de Pontiac.
L'Opposition, hier, avait demandé d'entendre le Conseil régional
de développement de l'Outaouais ainsi que la Société
d'aménagement de l'Outaouais. On nous a appris qu'on avait
accepté d'entendre le Conseil régional de développement de
l'Outaouais; par contre, la Société d'aménagement de
l'Outaouais est un organisme créé par la loi 85 en 1969 et nous
aurions souhaité lui poser des questions et l'entendre à cette
commission. Y a-t-il possibilité, M. le leader, de reconsidérer
cette demande ou de nous donner les raisons pour lesquelles on a refusé
d'entendre les représentants de la SAO? (11 h 20)
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Effectivement, M. le Président, nous sommes
allés aux renseignements auprès du ministre des Affaires
municipales relativement à cette commission parlementaire et nous avons
convenu qu'il serait approprié d'entendre le Conseil régional de
développement de l'Outaouais, le CRDO. Dans le cas de la
Société d'aménagement de l'Outaouais, puisqu'il s'agit
d'une société d'aménagement qui relève d'une autre
instance, dans le fond, et qui n'est pas directement concernée par
le projet de loi, nous n'avons pas jugé utile, dans les
circonstances, d'inviter cet organisme à venir devant la commission.
Maintenant, si le député de Hull veut continuer ses
discussions avec le ministre des Affaires municipales et peut-être tenter
d'en arriver à une entente là-dessus... Je crois que,
déjà, le fait d'inviter le Conseil régional de
développement de l'Outaouais, c'est une bonne chose. Quant à la
Société d'aménagement de l'Outaouais, le ministre
m'indique que, dans les circonstances, il ne lui apparaît pas
indiqué, étant donné la nature du projet de loi, que cet
organisme vienne devant la commission parlementaire. Cela dit, je pense que
vous pourriez peut-être en discuter en dehors de la Chambre.
Le Président: M. le député de Hull.
M. Rocheleau: Nous aurions cru, M. le leader, qu'il y aurait
possiblement eu des modifications d'apportées au projet de loi no 28
quant au rôle que joue actuellement la Société
d'aménagement de l'Outaouais, ainsi que son appartenance à un
ministère plutôt qu'à un autre. Dans cette optique, nous
aurions souhaité que le leader du gouvernement reconsidère la
demande d'inviter sa créature à moins que le gouvernement ne
veuille pas l'entendre.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
Une voix: Cela touche les structures municipales.
M. Bertrand: M. le Président, le projet de loi touche
essentiellement les structures municipales et je dois prendre la parole du
ministre là-dessus. Je pense que le député de Hull, pour
l'instant, en tout cas, doit prendre la parole du ministre. On verra, en
commission parlementaire, lors de l'étude du projet de loi, lorsque les
personnes et les groupes viendront se faire entendre et, par la suite, lors du
débat en deuxième lecture. Mais il n'y a pas de dispositions
contenues dans le projet de loi qui affectent d'une façon ou d'une autre
la Société d'aménagement de l'Outaouais. Dans ce contexte,
le ministre a cru qu'il n'était pas approprié, opportun,
d'inviter la Société d'aménagement de l'Outaouais.
Évidemment, au fil des discussions, s'il apparaissait qu'on se soit
trompés là-dessus et que le député de Hull nous
fasse part de certaines remarques qui nous amèneraient à modifier
notre décision, on en tiendrait compte.
Le Président: Ce qui nous amène aux affaires du
jour et à une réponse que M. le leader parlementaire du
gouvernement désire fournir à M. le député de
Sainte-Marie.
Réponses aux questions inscrites au
feuilleton
M. Bertrand: Oui, M. le Président. C'est avec beaucoup de
plaisir - j'aimerais, en même temps que je le fais, remercier mes
collègues du Conseil des ministres pour la célérité
avec laquelle ils ont procédé dans la préparation des
réponses à des questions formulées par des
députés et inscrites au feuilleton - que je réponds
à la dernière question inscrite au feuilleton par le
député de Sainte-Marie, M. Bisaillon, question posée au
ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional. Je remets cette réponse, M. le
Président, au nom du ministre.
Le Président: Document déposé. M. Bisaillon:
M. le Président.
Le Président: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je ne sais pas s'il serait opportun, M. le
Président, de souligner qu'à ma connaissance, c'est la
première fois, depuis 1970, pour autant que je sois bien informé,
qu'effectivement il n'y aurait plus au feuilleton de questions qui attendent
des réponses. Je pense que c'est quelque chose dont les parlementaires
doivent se féliciter et reconnaître que, dans les circonstances,
le gouvernement a répondu aux demandes des législateurs.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Lalonde: J'ai déjà eu, je pense, la semaine
dernière, l'occasion de féliciter le leader du gouvernement en ce
qui concerne les réponses aux questions inscrites au feuilleton.
Maintenant, si on voit que le feuilleton est vide de questions, c'est
sûrement, en partie, à cause de l'efficacité tout à
fait nouvelle et bienvenue du leader du gouvernement, mais ce n'est
sûrement pas à cause du manque d'imagination et de questions des
membres de l'Opposition. Ce qui est malheureusement arrivé, M. le
Président, c'est que les réponses tardaient tellement à
venir autrefois que cet instrument de travail était devenu presque
désuet pour les membres de l'Opposition. Maintenant, nous allons
réagir à cette nouvelle efficacité du gouvernement, sauf
qu'étant donné que nous approchons de la fin de la session, je
pourrais prévoir que le nombre de questions au feuilleton ne sera pas
très élevé parce qu'on ne veut pas quand même
demander au ministre de répondre le lendemain.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire
du gouvernement.
M. Bertrand: Je prends évidemment bonne note des
engagements que le député de Marguerite-Bourgeoys, leader de
l'Opposition, prend au nom de sa formation politique. Évidemment s'il y
avait des questions nouvelles qui étaient inscrites au cours des
prochains jours, dépendant bien sûr de la nature de la question,
évaluer le temps qu'il faut pour recueillir les renseignements qui sont
demandés, il y a certaines questions qui demandent une recherche
très importante. Je veux simplement indiquer que je crois que si nous
sommes parvenus à agir de cette façon, c'est que dans le fond
nous avons reçu une excellente collaboration de l'ensemble des cabinets
politiques de chacun des ministres, des ministres évidemment. Je dois
aussi en rendre témoignage à mon équipe au bureau du
leader qui n'a pas cessé de harceler littéralement les cabinets
politiques, et les ministres très souvent pour obtenir les
réponses à des questions.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Ceci étant dit,
nous passons aux affaires du jour. M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, nous commencerions nos
travaux, ce matin, par l'adoption en deuxième et troisième
lecture de deux projets de loi privés. D'abord, le projet de loi no 202
à l'article 28 du feuilleton.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Y a-t-il consentement?
Des voix: Consentement.
Projet de loi no 202 Deuxième et
troisième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Consentement. Donc, deuxième et troisième lecture du
projet de loi no 202, Loi concernant la Coopérative agricole du
Bas-Saint-Laurent. Ces deuxième et troisième lectures sont-elles
adoptées?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième et troisième
lecture de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire
du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je demanderais aussi le
même consentement pour procéder aux deuxième et
troisième lectures du projet de loi no 215 à l'article 29 du
feuilleton d'aujourd'hui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a
consentement?
Des voix: Consentement.
Projet de loi no 215 Deuxième et
troisième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Consentement. Est-ce que la deuxième et la troisième
lecture du projet de loi no 215, Loi concernant Les Ressources Campbell Inc.,
Les Ressources Camchib Inc. et Mines d'Amiante United Inc. sont-elles
adoptées?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième et troisième
lecture de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire
du gouvernement.
M. Bertrand: Maintenant, nous pourrions amorcer l'étude du
projet de loi no 13 en deuxième lecture à l'article 8.
Projet de loi no 13 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur
les grains. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, vous avez la parole.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, le projet de loi no 13 que nous
étudions aujourd'hui en deuxième lecture a pour objet de
préciser les pouvoirs de la Régie des grains du Québec
quant au classement du grain. Ce projet de loi prévoit, d'une part, que
sauf lorsqu'elle agit en révision d'un classement déjà
fait, la régie ne peut procéder au classement initial du grain
que si ses disponibilités le lui permettent. Il précise, d'autre
part, que le classement du grain fait par la régie est sujet à
des faits établis par règlement. Essentiellement, le
régime que nous avons voulu adopter dans le domaine du grain est un
régime volontaire. En même temps pour qu'il n'y ait pas trop
d'abus, le régime consistera à l'entente de gré à
gré pour la classification du grain entre le vendeur et l'acheteur de
grain. Un agriculteur qui vend son grain et l'acheteur qui achète du
grain s'entendent pour dire, après avoir analysé le
grain, il s'agit d'un grain de tel classement. Ce classement sera le
classement retenu parce qu'il y a eu entente. C'est seulement lorsqu'il n'y
aura pas eu entente et qu'on voudra faire réviser un classement du grain
que la régie pourra procéder au classement du grain initial et si
ses disponibilités le lui permettent moyennant certains frais. Pourquoi?
Parce que nous ne voulons pas que chaque fois qu'il y a un classement, les
parties, vendeur et acheteur, demandent un inspecteur de la régie pour
venir classer le grain.
Autrement, cela coûterait une fortune de faire la classification
du grain. Le régime de base essentiellement sera un régime
volontaire de gré à gré où l'acheteur et le vendeur
s'entendront sur la classification du grain. S'il y a mésentente ou si
on veut confier la classification du grain à la régie, il faudra,
à ce moment, en payer les frais réels et la régie le fera
dans la mesure où ses disponibilités le lui permettront. De plus,
le régime de projet modifie les pouvoirs réglementaires du
gouvernement pour lui permettre d'établir des normes de classement du
grain. (11 h 30)
Au fond, il s'agissait d'une précision juridique pour faire en
sorte que certains critères soient déterminés pour le
classement du grain. En gros, ce seront des critères qu'on retrouve dans
la classification dans l'Ouest du Canada ou aux États-Unis, avec peu de
variations afin qu'on ait un système un peu uniforme en Amérique
du Nord. Mais la classification se fera par des gens d'ici sur tout le grain
qui sera transité au Québec.
La régie a été constituée, il y a
déjà un certain temps. Cela a pris presque un an à trouver
les personnes qui composent son premier bureau de direction. Il y a eu
énormément de travail au point de vue de la réglementation
pour faire en sorte, lorsque ce projet de loi sera adopté, que nous
puissions acheminer immédiatement le règlement de classification
des grains, le règlement qui va avec le projet de loi,
c'est-à-dire qui prévoit la classification ou le classement du
grain, les différentes classes de grain, qui prévoit
également des garanties de paiement. Vous savez que les agriculteurs
nous demandent de prévoir de plus en plus des garanties de paiement.
L'agriculteur va porter chez un acheteur sa récolte de grain à
plein camion, et s'il arrive des difficultés financières de la
part de l'acheteur, l'agriculteur peut voir passer le fruit du travail d'une
année complète dans une faillite éventuelle d'un acheteur,
de sorte que les agriculteurs nous ont demandé de prévoir des
modalités qui pourraient faire en sorte que les paiements des acheteurs
soient mieux garantis. Comme le permet la loi, la réglementation va
instaurer un système qui va assurer non pas une garantie totale de
paiement, mais une garantie beaucoup plus forte que ce qu'on connaît
actuellement, parce qu'il n'y avait rien jusqu'à maintenant.
Actuellement, les consultations vont bon train. Vous savez que, dans le
domaine agricole, la marque de commerce du présent gouvernement est de
faire de longues consultations pour que les décisions qui sont prises
reflètent vraiment le point de vue des différents intervenants
impliqués dans les dossiers et un vaste consensus sur les
décisions qui sont prises. L'adoption de cette loi et l'adoption,
antérieurement, de la loi initiale vont nous permettre de
présenter par la suite un règlement au Conseil des ministres et
le Conseil des ministres, pourra accepter le règlement qui ira en
prépublication. Au cours de la prépublication, les gens pourront,
encore une fois, faire valoir des points de vue, faire valoir leurs
idées s'ils pensent qu'il y a encore des points qui peuvent être
améliorés en regard du règlement. Mais entre-temps,
déjà, les consultations vont bon train et la
Fédération des producteurs de cultures commerciales,
c'est-à-dire les producteurs de grain spécialisés ou les
producteurs spécialisés en grain ont été
rencontrés par les gens du ministère et moi-même pour
étudier le règlement. Récemment, nous rencontrions
officiellement l'Association québécoise des meuniers qui faisait
ses représentations, étudiait le règlement avec nous et
manifestait, par la bouche de ceux qui étaient présents, sa
satisfaction devant ce règlement que tous souhaitent voir adopter le
plus rapidement possible. Je leur ai dit: Aussitôt que la loi sera
adoptée ou que le règlement sera adopté, il pourra
s'appliquer cette année. Il y a encore des consultations qui vont se
tenir cette semaine avec les meuneries coopératives
fédérées et également avec l'Association des
centres régionaux de grain pour avoir véritablement une
réglementation qui corresponde aux besoins de la population du
Québec de sorte que le règlement que nous présenterons par
la suite au Conseil des ministres aura connu toutes les étapes de la
consultation comme on a rarement vu dans aucun autre domaine.
Vous savez d'ailleurs qu'avant d'adopter le projet de loi initial, il y
avait déjà eu une conférence socio-économique
à Saint-Hyacinthe les 8 et 9 novembre 1979 qui avait amené
à la préparation du projet de loi créant la Régie
des grains du Québec. C'était à la suite d'un consensus
qui avait été obtenu que nous avions procédé
à l'adoption d'un projet de loi selon les modalités qui avaient
été déterminées lors de cette conférence
socio-économique.
Cette Régie des grains aura principalement comme mandat de
favoriser l'amélioration de la qualité des grains utilisés
au Québec notamment par l'application d'un
système de classification et de normes de qualité,
régime de qualité appliqué au Québec. On verra
à quel point - je sais que des députés du Parti
québécois doivent faire des discours et doivent l'indiquer - le
gouvernement québécois crée une institution,
développe une institution avec la Régie des grains qui est
fondamentalement nécessaire au Québec parce que nous n'avons pas
le service d'aide et de préoccupation des besoins des
Québécois de la part des institutions fédérales.
Les gens savent que lorsqu'il y a eu la fusariose au Québec, le
gouvernement fédéral lui-même émettait des
communiqués pour indiquer qu'il y avait de la fusariose au Québec
et qu'il fallait faire en sorte d'être bien prudent dans l'utilisation du
grain qui avait été produit pendant cette année au
Québec. Quand, l'an dernier, la fusariose était en Ontario, cela
devenait un secret d'État, il n'y avait plus de communiqué du
gouvernement fédéral, mais on mettait des fonds et des
équipes de chercheurs pour déterminer les seuils de
tolérance pour la consommation humaine.
Alors qu'au Québec, on produisait essentiellement du grain pour
les animaux, c'était devenu quasiment un grain difficile à
utiliser et on avait toutes sortes de réserves du côté du
fédéral. Lorsque le grain en Ontario a eu la même
fusariose, l'an dernier, alors qu'il n'y en avait pas au Québec et que
ce grain de l'Ontario allait à la consommation humaine, on était
prêt à ouvrir à pleine perche les seuils de
tolérance. Cela ne devenait plus dangereux. Pourtant des êtres
humains devraient consommer ce grain, mais on pouvait écarter les seuils
de tolérance, cela ne devenait plus dangereux, parce que c'était
pour la simple province de l'Ontario.
Nos 74 députés du Québec à Ottawa
regardaient passer la parade comme d'habitude, sûrement sans se rendre
compte ou sans même être au courant de ce qui se passait.
La Régie des grains aura comme rôle essentiel de favoriser
l'amélioration de la qualité des grains utilisés au
Québec; de favoriser l'approvisionnement de grains de qualité; de
protéger les producteurs en s'assurant de la solvabilité des
acheteurs et de délivrer différentes catégories de permis
aux marchands de grain: de centre régional, de centre de séchage
et de meunier aux entreprises qui en font la demande. Cette régie jouera
un rôle essentiel au moment où la production du grain
québécois a augmenté d'une façon extraordinaire,
exceptionnelle, au cours des dernières années. (11 h 40)
Si on regarde le document explicatif qui vient d'être
publié par la Régie des grains du Québec, on voit que la
production de céréales fourragères au Québec a
beaucoup augmenté. En 1976, on avait 835 000 tonnes de production. En
1981, nous avions 1 845 000 tonnes; 1 010 000 tonnes de plus, c'est du monde,
c'est pesant, c'est considérable. Quand on disait en 1977: Nous mettons
en place un programme qui, au cours des cinq prochaines années, va faire
en sorte que la production des grains au Québec va augmenter de 50%,
l'Opposition faisait des gorges chaudes, comme elle le fait aujourd'hui pour le
sucre. Hommes de peu de foil Vous avez les horizons trop bas. Ils disaient:
Pour les céréales, c'est impossible, nous ne sommes pas une
province céréalière, on devrait faire comme dans le
passé, prendre nos grains dans l'Ouest.
On peut revoir les discours, non pas du député de
Beauce-Sud parce qu'il n'était pas député à ce
moment-là, il était coroner et il ne se faisait pas punir par son
parti. J'ai remarqué que, depuis quelques semaines, il a
été puni pour avoir appuyé le gouvernement concernant le
rapport Gilson. Depuis ce temps, on lui a soutiré le dossier de
l'Agriculture, et on a dit: On va le passer au député de
Maskinongé et au député de Huntingdon, ils sont moins
libres penseurs que le député de Beauce-Sud, quoi qu'on en pense.
Le député de Beauce-Sud est un peu plus libre penseur. Je ne
parlerai pas du député de Berthier parce que, pour être
libre penseur, il faut penser un peu. Je ne voudrais pas aller plus loin dans
cette voie; les gens qui nous entendent ne nous demandent pas que ce genre de
débat aille trop loin.
J'ai remarqué aussi que les besoins en céréales
fourragères au Québec sous le gouvernement actuel sont
passés de 2 450 000 tonnes en 1976 à 3 656 000 tonnes en 1981.
Cela, c'est indicatif, M. le Président. Nos besoins en grains ont
augmenté de 50% au cours des dernières années. Sous le
gouvernement actuel, nos besoins en grains ont augmenté de 50%.
Pourquoi? Pas parce que les animaux mangent plus qu'avant, c'est parce qu'il y
a plus d'animaux sur les terres des cultivateurs. On a augmenté nos
besoins en céréales de 2 450 000 tonnes à 3 656 000
tonnes. On a besoin de 1 200 000 tonnes de plus.
Ce sont ces besoins qui indiquent que sur les fermes des agriculteurs,
maintenant, il y a beaucoup plus d'animaux qu'au temps des libéraux. Ce
n'est pas parce que les animaux mangent plus, au contraire, les diètes
sont équilibrées, les animaux mangent uniquement ce qu'on leur
donne. Ceux qui les nourrissent n'ont pas tendance à leur en donner plus
qu'il en faut, juste ce qu'il faut; ils mangent mieux que nous, quasiment. Ils
ont des diètes équilibrées, de sorte qu'ils ont exactement
l'alimentation qu'il faut pour une croissance idéale. Les besoins ont
augmenté de 1 200 000 tonnes parce qu'il y a beaucoup plus d'animaux
qu'avant sur le
territoire québécois.
Cela indique que l'agriculture au Québec est en
développement. Malgré cette augmentation considérable des
besoins - 50% en cinq ans, ce sont des besoins considérables - la
production céréalière a augmenté encore plus
rapidement puisque notre degré d'autosuffisance était de 34% en
1976 et il restait environ à 30% ou 34% pendant toutes les années
où le Parti libéral a été au pouvoir. Voyez ce qui
se passe quand le gouvernement change. 34,1% en 1976, 34,4% en 1977 et nos
politiques viennent d'être adoptées, elles n'ont pas eu le temps
de faire effet. En 1978, cela commence, 35,6%; en 1979 le degré
d'autosuffisance est de 38,1%; en 1980, 42,1%; en 1981, 50,4%. Augmentation
à cause des politiques qui ont été adoptées par le
gouvernement pour faire en sorte que notre production
céréalière augmente.
C'est là qu'on a vu des investissements considérables pour
permettre cette augmentation, ce n'est pas le fruit du hasard. Je peux vous
donner des chiffres indicatifs. La production d'orge au Québec, de 1971
à 1982; l'orge est une denrée de base: en 1971, dans le temps des
libéraux, 15 400 hectares; en 1972, 17 000 hectares; en 1973, 17 400; en
1974, 17 800; en 1975, 18 200; en 1976, 18 900. Là, le gouvernement
change. Regardez ce qui arrive dans le secteur de l'orge, M. le
Président. En 1977, 21 600; en 1978, 28 700; en 1979, 39 900; en 1980,
65 600; en 1981, 106 000; en 1982, 121 000. Alors que dans le temps des
libéraux c'est resté de façon permanente entre 15 000 et
18 000 hectares, avec le gouvernement actuel c'est passé de 18 000
hectares à 121 000 hectares.
Une voix: C'est considérable!
M. Garon: En termes de tonnes, la production est passée de
38 700 tonnes dans le temps du Parti libéral à 350 000 tonnes
sous le gouvernement actuel, soit dix fois plus. Seulement dans la production
de l'orge.
Quant au blé, la production a augmenté de façon
moins rapide pour passer de 59 000 tonnes à 120 000 tonnes. La
production de blé a doublé à toutes fins utiles.
Si je regarde la production de maïs, sous le régime
libéral elle avait diminué, les rendements baissaient. En 1971,
55 800 hectares; en 1976, 62 600. Cela avait augmenté un peu mais la
production baissait. 331 000 tonnes en 1971 et cela a baissé à
303 000 tonnes dans le temps des libéraux. Sous le gouvernement actuel,
62 000 hectares en 1976 et cela passe à 175 600, soit trois fois plus.
La production de 303 000 tonnes passe à 914 200 tonnes en 1982, soit
trois fois plus encore là.
J'entends le député de Beauce-Sud marmonner parce qu'on
parle vraiment de résultats exceptionnels.
La production d'avoine. En baissant la superficie de 225 000 hectares
à 163 000 hectares, la production est restée la même avec
150 000 acres de moins. C'est quelque chose. 336 000 tonnes, 320 000 tonnes,
à peu près la même entre 1976 et 1982 mais en
épargnant 150 000 acres de terre avec des rendements accrus, avec des
méthodes culturales, des vulgarisations des développements des
productions.
On dira: Est-ce que cela rapporte? Je vous dirai que les rendements en
tonne dans le temps des libéraux ne bougeaient pas. En 1971, 2,3; en
1976, 2,2 tonnes à l'hectare. C'était stationnaire. Avec le
gouvernement actuel on a atteint des rendements de 3; 3,2; 3,4; 3,3 soit 50%
plus élevés que dans le temps des libéraux.
La valeur de la production était de 88 000 $ en 1976; en 1981,
259 000 $, presque 260 000 $, soit trois fois plus encore là, M. le
Président. Ces chiffres parlent par eux-mêmes et indiquent tout le
chemin que nous avons parcouru au Québec au cours des cinq
dernières années. (11 h 50)
Mais tout cela ne s'est pas fait sans des investissements
considérables. Quand nous sommes arrivés au pouvoir, les centres
régionaux de grain n'existaient pas au Québec. Les seuls
élévateurs qu'on voyait, les seuls silos à grain
étaient le long du fleuve Saint-Laurent pour recevoir les grains de
l'Ouest du Canada à Montréal, Sorel, Trois-Rivières,
Québec, Port-Cartier, Baie-Comeau. Le gouvernement actuel, avec 74
députés venant du Québec sur 75, veut faire transiter par
Vancouver plutôt que par le fleuve Saint-Laurent, de sorte que des
constructions sont en train de se faire à Prince-Rupert, dans le nord de
la Colombie britannique, et à Vancouver, pour que le grain de l'Ouest
passe par la côte du Pacifique plutôt que par le fleuve
Saint-Laurent. Certains disent qu'avec le potinage qu'est en train de faire le
ministre des Transports à Ottawa, M. Pépin, le grain pourrait,
plutôt que passer vers l'Est, bifurquer de Thunder Bay, des Grands Lacs,
directement vers le sud des États-Unis. J'ai vu des études qui
indiquent qu'au fédéral on pense, au lieu d'acheminer le grain
par le fleuve Saint-Laurent, l'acheminer par les États-Unis, par les
ports du sud des États-Unis, par le golfe du Mexique. Encore là,
on voit à quel point le Québec est peu défendu par ses
députés à Ottawa.
Pendant ce temps, qu'est-ce que nous faisions au Québec? Nous
avons bâti 19 centres régionaux dans les différentes
régions du Québec: à Amqui, avec la Coopérative
d'Amqui; à Mont-Joli, avec la meunerie Dionne, entreprise dynamique; au
Bic, avec la Coopérative du Bas-Laurent; à
Rivière-du-Loup, avec la Société coopérative
agricole de
Rivière-du-Loup; sur la côte sud, avec la
Coopérative de la côte sud, à
Saint-Philippe-de-Néri; dans Charlevoix et à Clermont, La
Malbaie, avec la coopérative qui a un centre de grain; à
Saint-Apollinaire, avec Cérébec Inc. qui, à cause de
difficultés fiscales des patrons, a dû vendre le centre; avec la
Coopérative de Saint-Jacques-de-Parisville, dans Lotbinière; avec
la Coopérative agricole de La Chaudière-Etchemin, à
Sainte-Hénédine; avec la Société coopérative
des Bois-Francs, à Victoriaville.
Ce ne sont pas des centres dans l'Ouest qu'on a bâtis, pas
à Winnipeg, pas à Vancouver, mais chez nous. Je continue:
Société coopérative du lac Saint-Pierre, à
Baieville; Société coopérative agricole de Sainte-Rosalie,
un très gros centre de 27 300 tonnes à Sainte-Rosalie, chez nous,
dans les terres; les Silos Élévateurs Sainte-Brigide Inc. aussi,
à Sainte-Brigide; Valcide Ltée, si ma mémoire est bonne,
à Varennes. Je dis cela de mémoire, je me les rappelle tous parce
que je les ai visités. On continue: les Séchages Bermic Inc.,
à Saint-Jean. Je me rappelle à quel point le député
de Saint-Jean était fier d'avoir ce centre régional dans son
comté; le Centre régional de grain Maurice Daoust Inc., à
Saint-Louis-de-Gonzague, dans Beauharnois; la Coopérative des
cultivateurs de Saint-Polycarpe, à Saint-Polycarpe, dans le comté
de Vaudreuil-Soulanges, dans le temps où il y avait un
député qui était présent; la Coopérative de
Saint-Jacques de Montcalm; la Chaîne coopérative du Saguenay, au
Lac-Saint-Jean, à Saint-Bruno, pour une capacité totale des
centres de grain de 132 900 tonnes.
Nous avons dit: Ce n'est pas assez, il en faut d'autres. Dans le cadre
du plan triennal que nous avons annoncé récemment et dont j'aurai
l'occasion de parler dans quelques minutes, nous avons annoncé encore
deux autres centres régionaux pour aider deux régions. Cela
prendrait un centre régional pour aider la production
céréalière de la région de l'Outaouais. On n'en a
pas tenu compte dans l'Outaouais. Les gens auraient pu dire: Ils ont
oublié l'Outaouais, parce qu'il n'y a pas de député du
Parti québécois. Mais non. On a dit: Traitons
équitablement les contribuables; nous sommes persuadés qu'ils
regrettent leur dernier vote et nous allons quand même bâtir un
centre régional dans l'Outaouais. Actuellement, dans le plan
régional, nous avons réservé des sommes d'argent pour un
centre régional dans l'Outaouais, parce que l'Outaouais est une belle
région pour la production céréalière et il serait
bon d'y développer davantage cette production à cause du
micro-climat et d'une chaleur un peu exceptionnelle dans la vallée de
l'Outaouais.
Aussi, on pense que, plus loin, plus avant, dans les Cantons de l'Est,
ce pourrait être dans le comté de Johnson. Par exemple, il
pourrait y avoir un centre de grain pour permettre l'approvisionnement, les
services que rend un centre de grain. On a également
réservé des montants d'argent pour un centre de grain dans les
Cantons de l'Est.
C'est une politique comme celle-là qui va nous permettre de
développer notre production et c'est sans compter les centres
régionaux de grain. Pensez-y un instant, M. le Président! Une
capacité de 132 900 tonnes. Nous sommes arrivés au pouvoir, en
1976, et je me rappelle les premières rencontres que j'ai eues en 1977.
Au printemps et à l'été, les gens disaient: Qu'est-ce
qu'on va faire avec nos céréales? Pourquoi? Ils ont dit: On n'a
pas de capacité d'entreposage. Le gouvernement encourage la production
des céréales, mais il n'y a pas de capacité d'entreposage.
Il y a 132 900 tonnes de capacité d'entreposage maintenant au
Québec. Cela s'ajoute à la capacité d'entreposage dans les
meuneries du Québec qui totalise 198 325 tonnes. On peut donc parler de
capacité d'entreposage de 330 000 tonnes au Québec, mais ce n'est
pas suffisant. C'est pour cela qu'il faut développer encore davantage.
J'ai ici tous les chiffres de la capacité d'entreposage dans les
meuneries du Québec.
M. le Président, toute la capacité d'entreposage des
céréales, c'est un des services qui étaient
nécessaires pour développer cette production
céréalière. La Régie des grains est aussi
nécessaire pour que le classement du grain se fasse dans les centres
régionaux ou dans les meuneries, pour que le producteur du Québec
qui produit un grain de première qualité obtienne le prix d'un
grain de première qualité et pour que l'agriculteur sache que son
grain va être classé, qu'on ne lui donnera pas un prix de grain de
troisième qualité quand il a un grain de première
qualité. Il était nécessaire de mettre ce mécanisme
en marche avec la Régie des grains pour que les gens puissent avoir un
classement de leur grain et qu'ils obtiennent le véritable prix de la
valeur de leur grain. C'est pourquoi nous avons mis en place cette régie
avec une réglementation.
Je suis persuadé que, tantôt, ce sera l'un des principaux
points que le député de Beauce-Sud va souligner. Il va dire:
Comment se fait-il que votre réglementation n'est pas encore
adoptée? D'un autre côté, le député de
Huntingdon, dans un discours, un autre jour, dira: Encore des règlements
et toujours des règlements. Je suis persuadé que le
député de Beauce-Sud va nous dire à quel point ce
règlement est nécessaire. Je suis persuadé que, dans son
discours, il va me dire: Pourquoi n'avez-vous pas adopté ce
règlement plus tôt? D'autre part, il y aura sûrement des
députés libéraux qui, dans d'autres discours, diront:
Encore un règlement. (12 heures)
M. le Président, il y a telle chose que des règlements
utiles, des règlements nécessaires. Vous auriez dû voir la
réunion magnifique que j'ai eue avec les meuniers du Québec,
à mon bureau, il y a quelques jours. Ils me disaient: M. Garon, adoptez
ce règlement; on le trouve bon votre règlement; c'est un beau
règlement; c'est cela dont on a besoin comme règlement au
Québec; on est d'accord avec le règlement que vous allez
présenter avec l'adoption de la loi. C'est la même chose pour les
producteurs de culture commerciale, les producteurs spécialisés
dans la production de grain. Ils disaient: On a hâte de voir ce
règlement adopté. Pourquoi? Parce qu'au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation notre façon de
faire, c'est de préparer un règlement avec la population, avec
les gens concernés pour avoir un règlement qui aide plutôt
qu'un règlement qui nuit. Un règlement qui convient aux besoins
plutôt qu'un règlement qui est un emmerdement. Un règlement
qui éclaire les relations humaines plutôt que les embrouiller. Un
règlement qui est un habit fait sur mesure plutôt qu'un habit
acheté tout fait qui ne fait pas. C'est pourquoi je suis convaincu que
le député de Beauce-Sud aura comme principale critique de dire:
Pourquoi ne l'avez-vous pas adopté avant? Je vais vous dire que toute
chose faite trop vite est souvent mal faite et qu'il faut prendre le temps,
quand on forme un organisme, pour trouver les bons hommes.
Aujourd'hui, quand je parle de la Régie des grains, je parle
d'une équipe dont je suis fier. Un président qui est une personne
affable, un homme de bon sens. Un vice-président qui est un
économiste réputé dans le domaine des grains. Une
équipe qui représente les différents aspects du secteur
des grains, des cultivateurs qui achètent, des cultivateurs qui vendent
du grain ou des gens qui ont oeuvré dans le domaine des meuneries, qui
ont été les fondateurs, je pense à M. Blanchard, par
exemple, qui est un fondateur de l'Association des meuneries, M. Leblanc, M.
Dagenais, M. Harbec, M. Beaudet, président. Belle équipe. Et pour
trouver une équipe comme celle-là, je suis convaincu... Vous
savez, quand vous formez un organisme, ce qui est bien important, ce n'est pas,
quand vous votez le projet de loi, de dire: Il va y avoir cinq membres au
bureau de direction. Il faut trouver les cinq bonnes personnes qui vont former
le bureau de direction. Les gens disent: On travaille pour cet organisme, on
sait qui le dirige, on a confiance en ce monde. C'est cela qui est important.
On a pris le temps pour le faire. Pour avoir un bon règlement qui
convienne aux besoins, il faut prendre le temps pour le faire.
C'est pour cela qu'à l'avance je peux vous dire que le
député de Beauce-Sud, sachant que la régie est bien
acceptée au monde du Québec, que les gens connaissent la
réglementation parce qu'ils ont travaillé à son
élaboration, que les gens ont hâte de la voir, va me reprocher de
ne pas l'avoir adoptée plus tôt. Si elle avait été
adoptée trop tôt, les gens n'auraient pas eu hâte de
l'avoir. Ils en auraient eu peur. Tandis que là ils la désirent
parce qu'ils ont eu le temps de mieux la connaître.
En même temps, je veux montrer le progrès qui a
été fait au cours des dernières années, rapidement,
parce que j'ai indiqué que nous avons mis en place des instruments qui
ont fait en sorte que les agriculteurs se sont sentis en confiance et ont pu
utiliser ces instruments. J'avais l'occasion hier de dire que l'année
où il y avait eu le moins d'assurés au Québec dans
l'assurance-récolte - on va parler des assurances un peu - ils
étaient 6278 à la fin du régime Bourassa, le régime
libéral. Aujourd'hui, avec le Parti québécois, avec le
gouvernement actuel, on est rendu à 15 222 assurés.
Dans l'assurance-récolte, c'est deux fois et demie de plus. Dans
l'assurance-stabilisation, il y en avait 1547, on est rendu à 13 030, M.
le Président. Dix fois plus. Des contrats d'assurance dans le temps des
libéraux, le plus gros chiffre, en 1976, 8399 contrats d'assurance. Le
gouvernement actuel, 28 252. Le monde s'assure parce qu'il y a un gouvernement
rassurant. Je regarde les programmes et régimes d'assurance des cultures
assurées, il y avait onze cultures assurées en 1976, à
l'assurance-récolte, on est rendu à seize. Il y avait un
régime d'assurance-stabilisation, on est rendu à dix
régimes qui assurent 20 productions différentes. Dans les
cultures assurées pour l'assurance-récolte - je ne parle pas des
programmes, mais des cultures maintenant -c'est passé de quinze, dans le
temps des libéraux, à savez-vous combien? À 58 cultures
assurées; de 15 à 58, ce qui fait que nous sommes le leader au
Canada. Je vais vous dire combien il y a de cultures assurées dans
chacune des provinces. À Terre-Neuve, 3. C'est vrai qu'il y a
plutôt de la roche à Terre-Neuve. On ne comptera pas cela. Au
Nouveau-Brunswick, 7; Île-du-Prince-Édouard, 16; Saskatchewan, 16;
Nouvelle-Écosse, 17; Manitoba, 19; Alberta, 21; Colombie britannique,
24; Ontario, 37, Québec, 58 cultures assurées. C'est un programme
de développement que nous avons établi en association avec les
producteurs, pas en serre chaude, avec les producteurs. Je regarde après
cela l'assurance. En regard des primes versées, il y a eu 2 000 000 $ en
primes versées en 1976; en 1983, 16 000 000 $ en primes versées,
huit fois plus. Les gens n'ont pas peur de payer, parce qu'ils savent que
l'assurance paiera elle aussi quand ce sera le temps.
Dans le temps des libéraux, on disait: On a une assurance. Je ne
la paie jamais.
C'est comme la loto. Il n'y a pas beaucoup de gagnants, mais ils disent
maintenant: C'est une assurance qui paie quand il y a des problèmes. Et
quand vous regardez l'assurance-stabilisation, il y a 1 475 000 $ de primes
payées en 1976. Quand vous regardez en 1982, il y a 42 519 000 $ de
primes payées et sur les 42 519 000 $, il y a les deux tiers qui sont
payés par le gouvernement; en 1983, 57 000 000 $ en primes
payées. Les deux tiers par le gouvernement, soit 20 000 000 $ par les
producteurs, 40 000 000 $ par le gouvernement. Quand on regarde le total des
compensations, qu'est-ce que cela fait? J'aurais pu prendre la pire
année des libéraux. En 1975, ils avaient payé des
indemnités de compensation, les deux, l'assurance-récolte et
l'assurance-stabilisation ensemble. En 1975, savez-vous combien les
libéraux ont payé? 622 000 $, dans toute la province de
Québec. En 1982, savez-vous combien a payé le gouvernement du
Parti québécois? 67 234 000 $, 100 fois plus. Pourquoi? Parce
qu'il y a un régime d'assurance qui pourvoit aux difficultés.
D'abord, l'agriculture s'est beaucoup développée. Il faut
dire que cela compte aussi. La production s'est beaucoup
développée, mais je peux vous dire qu'en 1976, c'était une
période difficile. Je peux vous dire qu'il y avait une période
difficile en 1976. Vous rappelez-vous cette période difficile où
les quotas étaient coupés, où les gens abattaient leurs
veaux au bout des "pay-loaders" dans le chemin. Vous rappelez-vous en 1976? Les
gens ne se rappellent pas le temps des libéraux. Ils faisaient des
manifestations au parlement d'Ottawa. 1976, c'était une des pires
années, une mauvaise année. Combien ont-ils payé? Cela a
été leur plus grosse année de paiement, de 1968 à
1976, la plus grosse année de paiement de tout le régime, la plus
grosse année que les libéraux ont payé, une mauvaise
année agricole. On aurait dit: Cette année-là, ils vont
payer beaucoup. La plus grosse année, 5 839 000 $, en 1976, leur plus
grosse année de paiement, alors que sous le gouvernement actuel, en
1982, la plus grosse année de paiement, 67 000 000 $. Ce n'est pas la
même chose. C'est parce qu'il y a un gouvernement, contrairement à
ce qu'ont dit les députés dans le passé, qui a
encouragé les producteurs à développer certaines
productions et avec eux, ensemble, on a travaillé pour développer
ces productions. Les producteurs agricoles, les représentants dans leurs
syndicats, dans leurs coopératives ou dans l'entreprise privée,
avec le gouvernement, les députés du Parti
québécois, les fonctionnaires du ministère, tous ensemble,
nous avons travaillé pour développer des productions, mais en
même temps, en donnant certaines garanties pour s'assurer dans les
périodes difficiles que les gens puissent passer à travers. (12 h
10)
L'évolution des valeurs assurées. Savez-vous combien il y
avait de valeurs assurées en 1976? Je vais additionner les deux
ensemble, l'assurance-récolte et l'assurance-stabilisation. Savez-vous
combien il y avait de valeurs assurées en 1976? 39 000 000 $, dans le
temps du Parti libéral. Cela veut dire que les gens ne s'assuraient pas.
C'est clair qu'on ne s'assure pas quand l'assurance n'est pas bonne. 39 000 000
$. Cette année, en 1983 - ce n'est pas encore fini, à part cela -
savez-vous à combien nous sommes rendus, en valeur assurée? 1 074
000 000 $. C'est passé, en 1976, de 39 000 000 $ à 1 074 000 000
$, en 1983, et ce n'est pas fini.
On a dit tantôt qu'on reculait la date à cause de la
mauvaise année. En 1940, il n'y avait même pas d'assurance; on
avait connu 20 ans de régime Taschereau où il n'y avait
même pas d'assurance. Alors, l'assurance-récolte a commencé
avec l'Union Nationale, avec le ministre Clément Vincent, en 1968. Je me
rappelle avoir écouté le programme à la
télévision ce soir-là et l'avoir entendu expliquer ce que
serait l'assurance-récolte. Le Parti libéral, pas assez
préoccupé des problèmes des agriculteurs, n'aurait pas
pensé à cela. C'est l'Union Nationale du temps qui a
créé l'assurance-récolte, en 1968, mais c'est le
gouvernement actuel qui a instauré le régime d'assurance
collective. Avant, il y avait seulement l'assurance individuelle et les gens ne
s'assuraient pas beaucoup. Cela coûtait trop cher à administrer.
Je n'ai pas parlé de cela, dans le temps des libéraux, en 1976,
pour 1 $ qui allait à l'assurance-récolte, savez-vous combien
cela coûtait d'administration?
Une voix: 5 $.
M. Garon: 1 $. Quand le cultivateur payait 1 $ de prime - cela
peut être 100 $ ou 200 $, mettons cela sur la base de 1 $ -quand il
payait 1 $ de prime, 0,70 $ servaient à payer ceux qui administraient le
régime, et seulement 0,30 $ allaient à l'assurance.
Une voix: C'était épouvantable.
M. Garon: Cela coûtait 0,70 $ de fonctionnement. Ce
n'était pas efficace, c'est pour cela que ça ne payait pas. Le
cultivateur payait 1 $, il y avait 0,70 $ pour payer les employés d'une
administration inefficace et 0,30 $ pour l'assurance. Ils ne pouvaient pas
retirer plus que 0,30 $ et ils avaient payé 1 $. Ils disaient: Cela ne
paie pas. La différence, avec le gouvernement actuel, c'est que pour 1 $
payé par le cultivateur, on est rendu à moins de 0,10 $
d'administration; sept fois moins. Au lieu
d'avoir 0,70 $ de frais administratifs sur 1 $, c'est baissé
à moins de 0,10 $; cela, c'est de l'administration.
Ceux qui parlent du sucre actuellement ravaleront leurs paroles parce
qu'ils se rendront compte à quel point, encore là, le
gouvernement a été clairvoyant, il a développé une
raffinerie de sucre qui est l'une des plus moderne en Amérique du Nord;
pas une vieille raffinerie. Si je parle un peu de la betterave à sucre,
c'est parce que cela va avec les céréales. C'est la production
qui alterne avec les céréales. Vous savez qu'un producteur de
céréales, dans la région de Saint-Hilaire, qui alterne
avec la betterave à sucre a un meilleur rendement dans ses
céréales parce que la betterave à sucre a pour
propriété d'avoir une racine d'environ six à sept pieds de
longueur. Quand vous passez dans des champs de céréales avec de
la machinerie, cela a pour effet de taper le sol un peu. Alors quand les gens
sèment de la betterave, ils ont la betterave, qui est la récolte
la plus payante pour un cultivateur, mais en plus il y a une racine qui va
à six pieds de profondeur dans le sol. Quand ils ramassent la betterave,
ils n'arrachent pas la racine, ils coupent la betterave, la racine pourrit dans
le sol et aère le sol, rend le sol plus léger. C'est pour cela
que la production de la betterave est importante dans le développement
de la production céréalière parce que, en même temps
qu'elle donne ce qu'il y a de plus élevé comme revenu à
l'acre, elle contribue à améliorer les rendements de
l'année suivante des céréales qui seront semées
à l'endroit où il y avait de la betterave l'année
précédente.
Tout se tient; c'est cela de la planification. C'est pour cela que nous
avons commencé à ensemencer de plus en plus d'acres dans la
région de Québec, puisque j'aimerais qu'on puisse
développer éventuellement la production de la betterave à
sucre dans la région de Québec. Les gens font de la
céréale; imaginez cela, c'est dans le comté de
Lotbinière. À part cela, je ne dis pas une raffinerie, parce que
la capacité de raffinage, avec la raffinerie de Saint-Hilaire et Sucre
Saint-Laurent à Montréal, c'est considérable. Mais en
termes de sucrerie, ce serait possible de faire de la betterave et de rendre la
production jusqu'à un certain niveau.
Je peux vous dire une chose: Si les libéraux disent qu'ils
n'aiment pas le sucre et qu'ils sont contre ces projets, ce ne sera pas dans un
comté qui ne veut pas d'un tel projet. Je le dis d'avance, comme les
libéraux ne veulent pas, je ne vais pas implanter cela dans Portneuf
pour me faire critiquer par le député. Je serais très fier
de l'avoir dans mon comté parce qu'une belle sucrerie, ça va
rapporter. Je vois le député de Bellechasse et le
député de Lotbinière qui ne haïraient pas ça
avoir une sucrerie dans leur comté, dans la région de
Québec.
Actuellement, nous avons ensemencé plusieurs acres de betterave
dans la région de Québec pour voir les rendements, et ça
fait plusieurs années qu'on le fait. Vous seriez surpris de voir
à quel point on a de bons rendements dans la région de
Québec. J'entends le député de Beauce-Sud qui parle du
sexisme, on va le guérir tantôt parce qu'on aura deux autres
députés de sexe féminin dans cette Chambre. Dans le
comté de Saguenay, Mme Isabelle, que j'ai eu l'occasion de rencontrer il
n'y a pas longtemps à Sacré-Coeur. C'est une excellente candidate
qui, jusqu'à maintenant, travaillait pour les personnes
handicapées, donc, elle s'occupait des problèmes des gens. Elle
sera une excellente députée dans Saguenay. Il y aura aussi Mme
Jeannine Chéron, dans le comté de Saint-Jacques, qui sera une
excellente députée.
Je continue. En termes d'unités assurées, en 1976,
à l'époque des libéraux, savez-vous combien il y avait
d'hectares assurés par l'assurance-récolte? Je vais vous le dire:
130 000 hectares. Avec le Parti québécois, le gouvernement
actuel, en 1983, on est rendu, et ce n'est pas fini, à 1 075 000
hectares, presque dix fois plus. Ce n'est pas 5% par année; de 130 000,
on est passé à 1 075 000 hectares assurés. Pour les
animaux, l'assurance-stabilisation, c'est encore pire. Il y avait 44 000
animaux assurés à l'époque des libéraux en 1976.
Savez-vous à combien on est rendu? 2 263 000, 50 fois plus. Ce ne sont
pas des chiffres à peu près quand on dit que l'agriculture s'est
développée au Québec sous le gouvernement actuel.
Pourquoi? Parce qu'on a travaillé ensemble.
Encore hier, il y avait le caucus des députés du Parti
québécois qui travaillaient ensemble sur le nouveau volet du plan
triennal de développement des assurances. Ce n'est pas seulement dans ce
domaine. Le drainage souterrain est nécessaire. Entre 1977 et 1982, au
Québec, on a drainé 665 000 acres. C'est deux fois plus que ce
qu'on a drainé sous tous les gouvernements bleus et rouges auparavant.
Tout ce qui était drainé en 1976, c'est deux fois moins que ce
qu'on a drainé entre 1977 et 1982; 665 000 acres drainées et,
auparavant, 361 000. Au total, aujourd'hui, on a 1 000 000 d'acres
drainées.
Les résultats commencent à se faire sentir. Quels sont-ils
les résultats? En 1982, la première province au Canada pour les
revenus, c'est le Québec. Depuis trois ou quatre ans, on dépasse
l'Ontario en termes de revenus pour les agriculteurs en gardant les prix les
plus bas pour les consommateurs. Cette année, on bat tout le monde.
Premier au Canada. Avez-vous déjà vu ça dans
l'agriculture, le Québec premier au Canada? En 1982, vous venez de le
voir. Je ne dis
pas que ç'a été la meilleure année, mais
cela a été pire ailleurs. Pourquoi? Parce qu'on a donné
des instruments pour faire du développement chez nous.
Je vais passer par-dessus les cours d'eau et les travaux
mécanisés; cette année, nous ferons une année
record. Nous avons eu une belle année l'année dernière,
au-dessus de 8 000 0000 $, mais cette année, en 1983, j'espère
que la pluie va arrêter pour que les machines puissent commencer à
travailler, mais on pense mettre en chantier 15 000 000 $ de cours d'eau. Ce
sera trois fois plus qu'il y a trois ans. Pourquoi? Parce qu'on a adopté
un plan triennal pour qu'au cours des trois prochaines années... On a
employé un terme qui a fatigué le député de
Beauce-Sud, on a dit: Le plan triennal va propulser le Québec encore
plus loin sur la voie de l'autosuffisance en céréales. Nous
voulons passer de 50% à 70% d'autosuffisance, non pas atteindre 70% en
1990, mais au cours de la saison 1985. Pour cela, on a mis en place un
programme de relance économique et de développement de la
production céréalière qui comporte treize volets qui se
regroupent sous six têtes. (12 h 20)
L'amélioration de la qualité des sols contribue à
améliorer les grains que classera la Régie des grains.
Voyez-vous, tout cela se tient.
L'intensification du processus de mise en valeur des terres non
cultivées ou abandonnées. On mettra les terres en valeur.
L'accroissement de la capacité d'entreposage des
céréales sur les fermes au niveau régional.
L'amélioration de la qualité des fourrages.
La possibilité, pour les agriculteurs, de transformer
eux-mêmes les céréales en moulée pour l'alimentation
de leurs animaux.
L'intensification de la recherche, de la mise au point et de la
promotion de nouvelles variétés de céréales mieux
adaptées au climat des différentes régions du
Québec.
Nous avons aujourd'hui 1 650 000 acres en production
céréalière. Il y a eu une augmentation considérable
au cours des dernières années et nous avons l'intention de
continuer dans la même direction.
La production, qui était de 800 000 tonnes en 1976, était
de 1 800 000 tonnes en 1981 et nous voulons atteindre 2 500 000 tonnes avec les
récoltes de 1985. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire 1 700 000
tonnes, soit trois fois plus qu'en 1976. Ce ne sont pas de petites
augmentations.
Nous avons mis en place un programme d'ensemble. J'aurais aimé
que le temps soit plus clément. À ce moment-ci on a un climat
exceptionnel que personne ne pouvait imaginer mais les instruments sont en
place et vous remarquerez que ceux dont les terres sont drainées
souffrent beaucoup moins du mauvais temps qu'on vit actuellement. Nous
espérons accentuer le développement céréalier mais
avec des politiques qui mettront en place les instruments qu'il faut.
Ce ne sont pas de petites politiques, M. le Président. Notre
premier programme du plan triennal 1983-1986 emploiera 12 000
personnes-année. On calcule que cela paiera au cours des trois
prochaines années, 1983, 1984 et 1985, 290 000 000 $ en salaires et
qu'il y aura une valeur ajoutée, sur cinq ans, de 500 000 000 $. C'est
cela le développement économique. Cela passe par des milliers de
petites entreprises agricoles qui se développeront grâce à
ce programme-là.
J'aimerais vous donner immédiatement un bref aperçu au
cours des dix ou quinze minutes qui me restent...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
ministre, si vous voulez avoir le temps bien exact, il vous reste actuellement
cinq minutes.
M. Garon: Je voudrais donner rapidement nos treize points. Les
députés qui les connaissent pourront parler davantage sur
chacun.
La mise en place de la capacité d'entreposage de
céréales de 900 000 mètres additionnels d'ici 1985-1986 au
coût de 35 000 000 $, qui inclura une contribution gouvernementale de 16
400 000 $, qui comprendra trois programmes: reprise du programme d'aide
à la construction de silos à grain sur les fermes mixtes,
c'est-à-dire celles qui ne font pas seulement des céréales
mais d'autre chose en plus. Ce programme a été un des
éléments clés du plan quinquennal de développement
de la culture céréalière avec l'établissement,
entre 1972 et 1982, de 9576 silos au coût de 35 400 000 $.
L'aide prévue pourra comporter 50% des investissements avec un
maximum de 5000 $ par entreprise. On prévoit l'installation d'environ
2480 silos sur les fermes mixtes pour un investissement de 13 800 000 $ dont 6
200 000 $ seront assumés par le gouvernement du Québec.
Introduction d'un nouveau programme d'aide à la construction de
silos à grain sur les fermes spécialisées. Les producteurs
ont besoin d'une aide plus élevée que ceux pour qui la culture
céréalière est une activité complémentaire.
Ce nouveau programme permettra 50% des coûts d'achat et d'installation de
silos à grain jusqu'à un maximum de 20 000 $ par entreprise. Il
devrait permettre la mise en place, au cours des trois prochaines
années, de quelque 4640 silos sur environ 400 fermes
spécialisées. Les investissements requis seront de 19 300 000 $
dont 8 700 000 $ proviendront du gouvernement du Québec.
Troisièmement, l'aide à la construction de deux nouveaux
centres régionaux de traitement et d'entreposage des
céréales, comme je vous le disais tout à l'heure, dans
l'Outaouais et dans les Cantons de l'Est, la mise en place, d'ici 1986, de
silos à fourrage d'une capacité de 900 000 mètres cubes au
coût de 45 000 000 $ avec une contribution gouvernementale de 11 300 000
$. Il s'agit de la reprise d'un des volets du plan quinquennal de 1977-1982,
mais avec des ajustements qui permettront de porter à 10 000 $ la
subvention maximale lorsqu'il s'agit du premier silo installé sur la
ferme. Lorsqu'il y a déjà un ou plusieurs silos, la subvention ne
pourra dépasser 5000 $. On prévoit l'installation de 1800
nouveaux silos à fourrage verticaux ou horizontaux pendant la
durée du plan triennal, 1800 nouveaux silos fourragers. Ces
équipements vont permettre aux cultivateurs d'améliorer
sensiblement la qualité de leur fourrage, élément de base
de l'alimentation des vaches laitières et des bovins de boucherie. Ils
sont le gage d'une meilleure efficacité et, par le fait même,
améliorent la position concurrentielle de nos éleveurs
particulièrement dans les régions herbagères qui
produisent peu de céréales. Je pense, principalement, au
Saguenay-Lac-Saint-Jean, par exemple, aux endroits plus
périphériques comme l'Abitibi-Témiscamingue, la
Gaspésie.
Reprise de l'aide à l'achat de séchoirs à foin.
L'aide consentie atteindra 75% du coût d'achat d'un séchoir
jusqu'à concurrence de 750 $ par ferme. On prévoit l'installation
de 3750 séchoirs à foin d'ici 1986 au coût de 8 400 000 $
dont 2 800 000 $ proviendront de subventions du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Nous avons l'intention d'accentuer l'effort de mise en valeur des terres
en friche dans le cadre des programmes Sol-Plus. Ces programmes sont à
la base des progrès enregistrés au niveau des superficies, des
rendements et demeurent nos principaux outils d'intervention dans le cadre du
nouveau plan triennal. Le gouvernement du Québec injectera 7 025 000 $
de plus que les budgets initialement prévus dans ce volet qui se
subdivise en trois points: 1) les sommes consacrées à
l'amélioration des cours d'eau municipaux seront accrues de 4 400 000 $.
Cela est payé à 100% par le ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation et nous avons l'intention de
réaliser des travaux pour 12 000 000 $ cette année. Pour cela, il
va falloir signer des mises en chantier pour 15 000 000 $. Ceux qui n'auront
pas le temps de terminer pourront le faire l'an prochain pour réaliser
les 12 000 000 $ cette année. S'il y en a qui se font, on fera des
virements pour en faire plus. 2) augmentation de 2 200 000 $ des sommes
prévues dans le budget 1983-1984 pour les travaux
mécanisés. L'enveloppe de base passe de 9 800 000 $ à 12
000 000 $ pour les travaux mécanisés qui vont
générer des investissements de 34 000 0000 $ cette
année.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, en
terminant, s'il vous plaît!
M. Garon: J'achève, M. le Président. Quand on a
pensé à faire une réglementation des débats de la
Chambre, on n'a sûrement pas pensé qu'un jour il y aurait un
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui
fonctionne; on aurait dû penser à permettre plus de temps dans les
règlements pour qu'on puisse dire tout ce qu'on a à dire. Mais
non, on a pensé, dans le temps, à restreindre les débats
parce que les ministres n'avaient rien à dire; ils n'avaient pas de
programme de développement. Je ne suis rendu qu'à la
moitié de mon discours, mais je vais terminer par coeur.
En plus, pour accentuer le développement des productions, nous
allons avoir 200 parcelles de démonstration dans dix régions du
Québec. Pourquoi 200 parcelles? Pour, dans 200 fermes
différentes, faire des tests sur différentes
variétés adaptées à chacune de nos régions
plutôt que de les faire seulement à un endroit. 200 parcelles de
démonstration. La recherche va passer de 1 100 000 $ pour les
céréales à 2 000 000 $ par année.
En plus, nous allons mettre en application la banque des terres et avec
de l'argent. Pourquoi? Pour enlever des friches et remettre en production les
terres qui ont été sous spéculation. Nous avons
l'intention de procéder autant que possible village par village, nous
voulons défricher, abattre toutes les fiches village par village. On
dira, dans le comté de l'Assomption, par exemple, quel village on
prendra. Mascouche? Plus de friches dans Mascouche. L'an dernier, une
municipalité, à Saint-Basile-le-Grand, on a enlevé les
friches. La municipalité elle-même a décidé
d'enlever les friches. Plus de friches, avec les travaux qui vont se faire
cette année et ceux de l'an dernier, dans cette municipalité. On
pourra mettre en valeur des dizaines et même des centaines de milliers
d'acres qui entreront en production pour le développement
économique du Québec.
Cette banque des terres arables - je termine là-dessus, M. le
Président - sera le clou parce qu'elle aura de l'argent. Elle aura un
budget de 20 000 000 $ par année pour l'achat et la mise en valeur de
terres propices à la culture céréalière. Si le
roulement se fait vite, si elle en achète, les met en valeur rapidement
et les revend, les 20 000 000 $ vont faire des petits parce qu'ils vont tourner
plusieurs fois.
(12 h 30)
Une voix: La caisse nationale...
M. Garon: C'est la banque des terres arables, pas pour garder les
terres, mais pour les développer, les revendre et les louer aux
agriculteurs avec option d'achat.
M. le Président, le député aurait voulu que je
parle de la caisse nationale; cela viendra. Je suis invité comme
conférencier, samedi, justement, à un congrès
d'institutions financières et coopératives, et j'aurai l'occasion
d'expliquer davantage une caisse nationale dans laquelle,
éventuellement, pourraient être impliqués les agriculteurs
qui pourraient y déposer leur propre argent qui pourrait leur servir, au
lieu de le placer dans des rentes viagères qui ne rapportent pas
beaucoup d'argent.
M. le Président, je termine là-dessus, parce que je vois
que vous vous dressez sur vos ergots et...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Garon: ...que vous êtes assis sur le bout du banc. Avant
que vous ne m'arrêtiez de parler, je vais arrêter de moi-même
et vous dire que je suis très fier de présenter ce projet de loi,
en vue de son adoption: Loi modifiant la Loi sur les grains, pour permettre
l'adoption du règlement. Encore là, ce sera une institution qui
va aider au développement de l'agriculture au Québec. Je vous
remercie.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vous remercie, M. le
ministre, mais je n'ai pas voulu utiliser mes éperons pour vous
arrêter, cependant.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Vous auriez
sûrement eu à utiliser vos éperons, M. le Président,
après tout ce qu'on vient d'entendre. Je pourrais intituler cela: L'art
de déplacer beaucoup d'air pour ne rien dire. Je n'ai jamais vu
déplacer autant d'air, faire autant de bruit. Cela me fait penser aux
anciens "snowmobiles", les motoneiges, avec une hélice d'avion en
arrière. M. le Président, je ne sais pas si vous êtes
déjà embarqué là-dedans. Cela faisait peur aux
chevaux quand ça passait. Cela faisait peur aux enfants. Cela faisait
peur à tout le monde. Le ministre me fait penser à cela, M. le
Président.
Nous sommes à étudier, en deuxième lecture, le
projet de loi no 13. C'est vraiment un numéro prédestiné
pour cette Régie des grains parce que, jusqu'à maintenant, c'est
plutôt un chiffre de mauvais augure. C'est la Loi modifiant la Loi sur
les grains.
Une voix: ...
Une voix: Taisez-vous! Vous ne connaissez pas cela.
M. Mathieu: M. le Président, il faudrait d'abord
mentionner que cette Régie des grains fut créée en 1979.
Le ministre a justement dit tantôt: Le député va nous
reprocher de ne pas avoir adopté des règlements, etc. M. le
Président, si c'était tellement urgent de créer la
Régie des grains, j'ai ici les discours du ministre à l'occasion
de l'adoption de la loi no 75, en 1979, lors de la création de la
Régie des grains - je vous assure qu'il en a déplacé du
vent, encore une fois, à cette occasion-là -pourquoi la
régie n'est-elle pas encore opérante? C'est justement cela, le
drame de la Régie des grains, le drame de l'agriculture. Il y a beaucoup
d'air qui se déplace, beaucoup d'annonces, de conférences de
presse et de discours. Je sens que toutes les cassettes sont
préparées. On va entendre les petites tounes de tous les
députés. Le ministre l'a annoncé. À chaque
présentation de projet de loi à caractère agricole - il a
fallu que le ministre se force les méninges pour le présenter -
il veut que chacun prépare sa petite cassette, les députés
des comtés ruraux. Il a dit: Cela me prendrait bien une loi. Il a
présenté ce projet de loi sur lequel il n'a pas beaucoup
parlé tout à l'heure. Je vais essayer de lui poser quelques
questions, parce que c'est un projet de loi sur lequel nous voudrions avoir un
peu plus d'explications.
Or, M. le Président, le ministre nous parlait tantôt de
l'augmentation du drainage, de l'augmentation de l'autosuffisance, de
l'augmentation des contrats de l'assurance-stabilisation, de
l'assurance-récolte et de tout ce que vous voulez. J'ai ici un article
du journal La Presse, du 28 octobre 1982: "Le Québec au même
niveau que 1971. Baisse de 226 000 acres de terre en culture en cinq ans."
C'est légèrement différent du discours que l'on vient
d'entendre. À entendre le ministre, le Québec est en train de se
propulser le premier du Canada, les agriculteurs du Québec ont les
revenus les plus élevés au Canada. En commission parlementaire,
la semaine dernière, j'ai demandé au ministre de nous dire sur
quoi il appuyait cette étude, de nous faire la démonstration des
revenus des agriculteurs s'ils sont si élevés que cela. Le
ministre n'a fait aucune démonstration. Il a des chiffres qu'il
possède à lui tout seul. Vous savez qu'avec des chiffres, on peut
jongler. On peut faire dire à des chiffres tout ce que l'on veut. Il n'y
a pas de problème. Le ministre est le seul à connaître ses
sources et à les utiliser à sa manière
évidemment.
Baisse de 226 000 acres de terre en culture en cinq ans; après le
zonage agricole.
Comment se fait-il qu'on augmente l'autosuffisance en
céréales et qu'il y ait une baisse des terres en culture? C'est
parce qu'en agriculture, il y a un marasme. Cela ne va pas si bien que le
ministre veut le laisser entendre. Il y a de nombreuses faillites. Il y a des
fermes qui retournent à l'abandon. Qu'il suffise, pour vous convaincre,
de prendre le journal La terre de chez nous. Prenez la dernière
parution, je regardais cela ce matin. Deux pages complètes encore cette
semaine de ventes à l'encan. Quand un agriculteur décide de
vendre à l'encan, de fermer son entreprise agricole, de mettre fin
à ses activités, est-ce que c'est parce que cela va tellement
bien? Si cela va si bien, il va trouver à la vendre son entreprise. Si
cela va si bien, il va sûrement la transférer à l'un ou
l'autre de ses enfants. Lisez les revues agricoles, ce que vous voyez, des
ventes à l'encan de fermes. Écoutez les postes de radio en
région rurale, notez les annonces dans les hebdomadaires
régionaux, dans chacune de nos régions, qu'est-ce que vous avez?
Toutes les semaines, M. le Président, vente à l'encan;
agriculteur qui ferme son entreprise. Je ne trouve pas que cela va aussi bien
que le ministre veut bien le laisser entendre.
Je voudrais discuter aujourd'hui, à l'occasion de cette
intervention, de quelques points sur les programmes d'assurance-stabilisation
étant donné que c'est relié à l'étude du
projet de loi. Également, quelques autres points. Je tâcherai
d'être plus pertinent que le ministre l'a été. Je commence
par cette Loi sur les grains qui nous est présentée, cette loi
qui vient modifier la Loi sur les grains de 1979. Or, comme je le disais et
à plusieurs reprises j'ai posé une question pertinente au
ministre: Cette Régie des grains, qui était si urgente, qui
était si impérative, qu'il était pressant de fonder, de
créer de toutes pièces en 1979, comment se fait-il qu'elle ne
soit pas encore en exploitation après quatre ans? Nous sommes rendus en
1983 et la Régie des grains n'est toujours pas en activité.
Si cela pressait tellement, comment se fait-il que cette régie ne
soit pas encore en activité. J'ai relu, ce matin, le discours du
ministre lors de la création de la régie. Le ministre nous disait
à quel point il était important que la régie soit
constituée. Il nous disait - d'après le journal des Débats
du 19 décembre 1979, page 4733 - "Les acheteurs de
céréales, soit les meuniers, les minoteries, les distilleries ou
autres, sont habitués à recevoir un produit nettoyé,
uniforme et de bonne qualité. Ils exigent les mêmes
caractéristiques du produit québécois qu'ils sont
habitués d'obtenir des grains qu'ils importent de l'Ouest. Pour
atteindre ces standards, il faut que les céréales soient
séchées et criblées en plus d'être regroupées
en lots uniformes. Si vous les nettoyez, vous les criblez et vous les
mélangez tous, ça ne fait pas la même catégorie de
grain qui a la même valeur nutritive, la même valeur en
protéines." (12 h 40)
Le ministre nous faisait l'apologie de l'urgence de créer cette
régie. Il disait plus loin à la page 4735: "Le présent
projet de loi prévoit la création d'une régie qui
accordera des permis à un marchand de grain, un exploitant d'un centre
régional ou un exploitant d'un centre de séchage qui veut
utiliser, dans l'exercice de ses activités, une classification prescrite
par règlement." Cette classification, on ne la connaît pas encore
après quatre ans, M. le Président. Le règlement n'est pas
encore adopté.
Le ministre disait tantôt: Le député de Beauce-Sud
va me reprocher que le règlement n'est pas adopté. Justement!
C'est là qu'on voit l'improvisation qui est à la source de toutes
les orientations, les activités, les faits et gestes du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. C'est toujours de la
petite politique de rapiéçage, de bouche-trou et d'improvisation,
alors que les agriculteurs ont besoin, pour se développer, de politiques
à long terme. On ne peut pas planifier une entreprise
céréalière avec une politique de six mois ou d'un an. Cela
prend des années et des années. Or, après quatre ans
d'existence de la Régie des grains, nous sommes au même point
où nous étions en 1979 et c'est bien cela le drame. Le drame de
l'agriculture, c'est qu'on dirait que le ministre, lors de la création
de la Régie des grains... Imaginez-vous, cela donne prétexte
à de belles conférences de presse et à de beaux titres
dans les journaux.
Justement, parlant de titres dans les journaux, journal Le Devoir, 10
novembre 1979: "La Régie des grains sera mise sur pied d'ici
l'été prochain." En 1979, cela faisait des titres extraordinaires
dans les journaux. Quand le ministre fait son déplacement d'air comme je
le disais tantôt, quand le ministre excelle en conférences de
presse en annonces de tous genres... Les gens ou les citadins qui ne sont pas
reliés au monde agricole écoutent cela et se disent: On a un
ministre de l'Agriculture extraordinaire. Avez-vous vu comme on a un bon
ministre de l'Agriculture? Lui, il en fait des choses. Lui, il en règle,
des affaires. Il fait une conférence de presse. Il peut en faire cinq ou
six au cours de la même année sur le même sujet. Pas de
différence. Cela me fait dire: Oui, on a le meilleur ministre de
l'Agriculture que les gens de la ville aient jamais eu. Malheureusement, les
gens de la campagne ne peuvent pas porter ce jugement, eux.
Ce qui nous étonne, à la lecture du projet de loi no 13,
c'est de voir qu'il ne semble pas y avoir de normes. Il ne semble
pas y avoir de système ou de règle de classification de
grain, mais comme je le disais tantôt, le règlement n'est pas
encore adopté, semble-t-il. Or, quelle est la chose la plus importante
lorsqu'on a une production? C'est de l'encadrer sur le plan technique et sur le
plan de la recherche. Il faut commencer par mettre un encadrement pour savoir
où l'on va avec cette production. Or, il n'y a pas de mécanisme
obligatoire. Le ministre disait tantôt, si j'ai bien compris, qu'il y
avait un classement par entente et que, même avec la loi no 13, on va
encore faire un classement par entente, c'est-à-dire que le vendeur et
l'acheteur vont examiner un échantillon du grain. Ils vont s'entendre et
ils vont dire: C'est un grain de telle qualité. Mais qu'est-ce que cela
a de scientifique, un classement semblable? C'est quelque chose d'artisanal. Si
on veut vraiment faire une production céréalière, quelque
chose d'exemplaire, de fort et de ferme, établissons des règles.
Commençons par connaître les règles de classement. C'est le
premier impératif dans toute production, sans quoi il y aura des
victimes; c'est impossible de passer à côté de cela. Or, la
production aurait besoin d'un classement obligatoire, pas un petit classement
par entente qui n'a rien de scientifique et qui est basé sur à
peu près rien. Le classement devrait être fait le plus près
possible de l'utilisateur. Donc nous devrions avoir un classement de nature
obligatoire, un classement régulier, précisément pour
être en mesure de revendiquer des prix réguliers auprès des
gens à qui les agriculteurs vendent leurs céréales. Si on
a un produit no 1 à qualité égale, on pourra revendiquer
un prix égal. Cela me semble quelque chose d'élémentaire,
de fondamental.
D'après les renseignements que je possède, pourquoi les
prix du maïs produit au Québec sont-ils inférieurs aux prix
du maïs de l'Ontario ou aux prix du maïs sur le marché de
Chicago? Parce que le maïs au Québec ou les céréales
produites au Québec ne sont pas classés, ce qui occasionne un
risque plus grand aux acheteurs et aux utilisateurs. Les experts que j'ai
consultés me disaient ce matin qu'il pouvait y avoir de 0,09 $ à
0,10 $ le boisseau de différence entre le prix du maïs
américain à Montréal et le prix payé pour les
céréales du Québec. Un boisseau contient 56 livres; 0,10 $
de différence le boisseau à qualité égale. Mais je
ne comprends pas que le ministre s'entête et ne voie pas clair au point
de ne pas corriger cette situation en imposant un classement obligatoire. Or,
tant que notre classement ne sera pas obligatoire, on aura affaire à une
production artisanale, quelque chose qui n'est pas articulé, quelque
chose qui n'est pas sérieux. Comment voulez-vous impressionner les
acheteurs au Québec ou à l'extérieur si vous n'avez
même pas de normes de classification?
De plus, si la loi de 1979 avait atteint son but, on ne serait pas ici
aujourd'hui. Notre grain serait classé. On n'aurait pas besoin de ce
rapiéçage ici aujourd'hui.
Le ministre nous dit à l'article 23: "En cas de différend
- c'est-à-dire, j'imagine, que le vendeur de céréales et
l'acheteur ne s'entendent pas sur la classe relative au classement du grain -
la régie ou une personne qu'elle autorise peut, à la demande
d'une personne intéressée et contre paiement des frais
établis par règlement, procéder au classement du grain et
délivrer un certificat de classement conformément aux normes et
modalités prescrites par règlement." Le fameux règlement,
quand l'aurons-nous? Le ministre pourrait-il s'engager à nous dire quand
le règlement sera déposé, quand il sera en vigueur? Il y a
toujours un bout, de s'en aller ainsi dans l'improvisation avec des mesures si
importantes, avec des programmes d'autosuffisance de 50 000 000 $ à
même les deniers publics. Il faut savoir où on s'en va avec
cela.
Donc, on dit bien: contre paiement des frais établis par
règlement. Qui va payer? Le gouvernement trouve une autre manière
de faire assumer les coûts par d'autres sans que ça ne paraisse.
C'est toujours la même romance, la même rengaine.
Évidemment, c'est une loi que nous ne pouvions répudier parce
que, si le ministre est sérieux, j'imagine qu'il n'a pas assez de
pouvoirs pour aller chercher les sommes nécessaires auprès du
ministre des Finances. Il a créé sa Régie des grains, il
n'a pas mesuré les tenants et aboutissants, il n'a pas
apprécié tout ce dont il avait besoin. Maintenant, il
s'aperçoit que ça va amener des déboursés pour le
classement de son grain. Le ministre s'arrange pour refiler cela, sans que
ça paraisse, sur le dos de tierces personnes. C'est toujours cette
même improvisation. On lance des programmes de 50 000 000 $ ou 60 000 000
$ dans la pure improvisation. (12 h 50)
Tout à l'heure, le ministre nous parlait des silos
régionaux. Les fameux silos régionaux qui ont été
bâtis, d'abord, il faudrait que le ministre nous dise qui les a
payés. Le ministre n'a pas parlé souvent des 32 000 000 $
provenant du gouvernement fédéral dont le ministre s'est servi
pour cette politique céréalière, pour les silos
régionaux, pour les silos à la ferme, pour augmenter le drainage
agricole, pour les travaux mécanisés, pour l'égouttement,
le creusage des cours d'eau.
Le ministre admettra-t-il un jour que les fonds pour tous ces programmes
provenaient du gouvernement fédéral, un montant de 32 000 000 $?
Il s'agissait d'une compensation du gouvernement fédéral
versée en dédommagement à la suite de la discontinuation
de l'aide au transport. Le
ministre, à même ces fonds qui provenaient d'Ottawa, qui
avaient été négociés par son
prédécesseur... C'est le prédécesseur qui avait
négocié, je ne dis pas qu'il a signé, il y a eu un
changement de gouvernement entre les deux. Est-ce que le ministre aurait
été capable de négocier avec Ottawa pour s'entendre, pour
aller chercher les 32 000 000 $? De la manière qu'on le voit agir, c'est
une provocation constante contre le fédéral. Est-ce qu'il aurait
pu négocier avec Ottawa?
Son prédécesseur avait négocié, le ministre
est entré en fonction et les 32 000 000 $ étaient disponibles,
ils venaient d'Ottawa. Quand le ministre remettait ses chèques et qu'il
inaugurait ses silos régionaux, on n'a pas vu la feuille d'érable
du drapeau du Canada souvent là-dessus. On a vu la fleur de lis assez
souvent, par contre. Je n'ai rien contre la fleur de lis, je n'y suis pas
allergique du tout, j'aime la fleur de lis, et j'aime la feuille
d'érable aussi. Une feuille d'érable, c'est un produit de chez
nous, ça nous dit quelque chose; surtout si on vient du pays de
l'érable, on ne peut pas renier les feuilles d'érable que nous
connaissons si bien.
C'est cela que je voudrais bien éclaircir. Que le ministre nous
parle donc de cela dans sa réplique. Il a un droit de réplique.
Qu'il nous parle donc du montant de 32 000 000 $ qu'il a eu du
fédéral. Qu'est-ce qu'il a fait avec cet argent? Le
fédéral a eu la largeur d'esprit de dire au ministre de
l'Agriculture: On vous laisse administrer à votre guise ces 32 000 000
$. C'est l'entente qui avait été conclue.
Quand le ministre de l'Agriculture dit que les silos régionaux
poussent partout, c'est beau, mais ce n'est pas seulement lui qui en a le
mérite. Je ne veux pas enlever le mérite du ministre de
l'Agriculture mais, par exemple, je veux donner le mérite à qui
de droit également. Ce matin, le ministre a été plus
prudent, il ne donnait pas de dates. D'habitude il disait: de 1908 à
1976, il y a eu moins de drainage que de 1976 à 1982. Je comprends, s'il
commençait en 1860, il y en aurait encore eu bien moins parce que ce
n'était pas dans les moeurs de l'époque, tout simplement.
Quand le ministre nous dit que du drainage s'est fait sous son
administration, je comprends. Même si cela avait été un
gouvernement libéral, les 32 000 000 $ auraient été
là, ils avaient été prévus et
négociés pour cela, pour faire du développement en
agriculture. Le ministre n'a pas à se tirer en l'air pour cela.
Cela me fait penser aux premiers temps qu'il était ministre. J'ai
trouvé cette citation d'un discours du 25 avril 1977: M. Jean Garon,
discours prononcé devant la Corporation des agronomes du Québec
à l'Université Laval. Le ministre disait: "Je reconnais et j'en
rends hommage à mes prédécesseurs immédiats, que
l'on a enregistré des progrès au cours des quelques
dernières années. L'adoption d'un programme de
développement agroalimentaire intégré a tracé la
voie et préparé le terrain pour une action massive dans ce
secteur."
Je pense que c'est la citation à peut près la plus
éloquente du ministre quand il cesse de jouer sur les mots et qu'il veut
dire tout tel que c'est. Au cours d'une allocution à la faculté
des sciences de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université
Laval, le ministre reconnaît bien que tout n'est pas né avec lui.
Avant qu'il arrive au ministère, quelqu'un s'était
préoccupé d'adopter des programmes de développement de
l'agroalimentaire intégré, comme il le dit si bien. Ces
programmes ont tracé la voie et préparé le terrain. Je
disais l'autre jour que les libéraux avaient planté le pommier et
que les pommes étaient poussées quand le ministre est
arrivé. Faut-il s'étonner que l'agriculture ait connu un essor?
Il faudrait s'étonner que l'essor ait été si fulgurant et
si immédiat que le ministre l'a dit, par exemple. Si on compare 1976,
1977 et 1978, cela n'a pas progressé d'une manière verticale
fulgurante, il a fallu que ce soit préparé quelque part. Qui a
préparé les infrastructures nécessaires? C'est un
gouvernement, dans les années soixante-quatorze et soixante-quinze, qui
a cru à l'agriculture, un gouvernement qui a investi dans l'agriculture.
La part de l'agriculture sous ce gouvernement, en 1974-1975, était de
2,5% du budget total du Québec alors qu'aujourd'hui la part de
l'agriculture dans le budget total du Québec est de 1,7% seulement.
C'est une baisse considérable du budget de l'agriculture par rapport au
budget global du Québec.
Il y a des gens, dans les années soixante-dix, soixante-quatorze,
soixante-quinze, qui se sont préoccupés de l'agriculture. Je
voudrais leur rendre hommage. Le premier ministre s'appelait M. Bourassa; le
ministre des Finances s'appelait M. Garneau; le ministre de l'Agriculture
s'appelait M. Toupin. Il y a des gens qui ont cru à l'agriculture, qui
ont investi dans l'agriculture à ce moment-là. Le ministre
reconnaissait, le 25 avril 1977, quand il est arrivé, que le programme
était tracé pour une action massive dans ce secteur. Je
comprends, le plan était fait, les infrastructures étaient
installées. Imaginez-vous, avant d'arriver dans un champ pour drainer,
ça prend des infrastructure, ça prend des lois, ça prend
de la mécanisation, ça prend des programmes, ça ne peut
pas s'improviser du jour au lendemain, ces choses-là.
Quand le ministre est arrivé, les infrastructures étaient
prêtes et l'argent était disponible, les 32 000 000 $ venant
d'Ottawa. Quand le ministre a-t-il contredit cela? Jamais. Il ne l'a
jamais reconnu non plus, mais je lui demande de le reconnaître,
là. Je lui demande de reconnaître les 32 000 000 $ venant
d'Ottawa. Je défie n'importe qui de se lever de son siège pour me
contredire. Avec l'argent du fédéral, on en fait des choses.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse mais, comme
vous avez provoqué, il y a quelqu'un qui demande à intervenir, le
député d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): C'est évident, M. le
Président, je ne peux me priver d'entrer par une si grande porte quand
le député de Beauce-Sud demande qu'on le contredise quand il dit
que le ministre n'a jamais avoué que les 32 000 000 $ venaient d'Ottawa.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a
dit, à maintes reprises, qu'il avait négocié ce que son
prédécesseur, M. Toupin, n'avait pas réussi à
faire. Il a même dit et convenu avec le ministre fédéral de
l'Agriculture, M. Whelan, que le chèque serait fait au nom des deux et
qu'il y aurait un drapeau du Canada sur le fameux chèque, relativement
aux silos à la ferme. Tout à l'heure, en plus, le
député de Beauce-Sud a dit que c'était de l'argent qui
venait pour tous les silos régionaux. Je regrette, mais je suis certain
qu'il n'a pas fait exprès parce que je sais son honnêteté.
Les silos régionaux ont été payés
entièrement par le gouvernement du Québec. Ce sont seulement les
silos à la ferme. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation l'a toujours dit et répété à qui
voulait l'entendre, c'est 32 000 000 $ qu'il est allé chercher à
Ottawa, ce que les libéraux n'avaient pas pu négocier depuis
1974.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Compte tenu de l'heure, je
voudrais simplement vous dire que le ministre de l'Agriculture, à
l'époque, c'était Kevin Drummond, qui avait remplacé M.
Toupin, pour les fins du journal des Débats.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vais suspendre les
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise de la séance à 15 h 03)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaît! Vous pouvez vous asseoir. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Boucher: Merci, M. le Président. Avant de vous demander
de rappeler l'article 8 de notre feuilleton, je voudrais faire motion pour que
la commission des finances et des comptes publics ainsi que la commission des
affaires municipales puissent siéger à compter de 15 h 30.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Boucher: M. le Président, je vous demanderais de
rappeler l'article 8 de notre feuilleton.
Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article 8, la
deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les
grains, et la parole, pour la demi-heure qui vient, était au
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Lorsque nous avons
ajourné pour le lunch, nous étions à parler de cette loi.
Je voudrais d'abord vous souligner, connaissant votre sens de
l'hospitalité, que j'ai une magnifique délégation du
Cercle des fermières de Saint-Prosper, dans le comté de
Beauce-Sud. Il me fait plaisir de les recevoir. Elles ont bien choisi leur
moment. Je vois des jaloux, de l'autre côté. Je m'excuse
auprès d'eux.
J'étais en train de discuter, avant l'ajournement pour le lunch,
du montant de 32 000 000 $ que le gouvernement du Québec, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation avait
récupéré du gouvernement fédéral. C'est avec
ce montant qu'il a fait ses programmes d'autosuffisance en
céréales, de drainage souterrain, de silos à la ferme, de
silos régionaux, tout ce que vous voudrez.
Pour montrer cette nouvelle collaboration plutôt surprenante du
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation avec le
gouvernement fédéral, je citerai le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Le 14 février
1978, en conférence de presse -cela ne vous étonne pas qu'il en
fasse de temps en temps - il disait ceci, parlant du gouvernement
fédéral: "Quand il met de l'argent là-dedans - dans
l'agriculture - je suis bien content et j'aimerais cela qu'il en mette plus
facilement. La Confédération lui donne pleinement juridiction de
mettre de l'argent là-dedans. Ils ont le droit d'en mettre à
mort. Tant qu'ils vont vouloir en mettre, on est prêt à signer
pour dire qu'on accepte qu'ils en mettent. Je vais vous dire que je ne
refuserai jamais de signer pour qu'ils mettent de l'argent dans la province de
Québec."
M. le Président, ce n'est pas de valeur de réaliser
l'autosuffisance alimentaire avec des fonds qui viennent du gouvernement
fédéral, mais encore faut-il être assez honnête pour
le reconnaître.
Ce matin, j'écoutais le ministre, encore dans ses sparages. Le
ministre nous disait que son programme d'autosuffisance alimentaire
était pour créer 12 000 emplois. Savez-vous que c'est un
programme magnifique? C'est un programme qui augmente à mesure que les
semaines passent. Le premier ministre a été le premier à
annoncer ce projet dans le discours inaugural, le 23 mars 1983, il y a environ
deux mois ou un peu plus. Il disait: Il s'agira d'investissements de 60 000 000
$, amenant la création de 2000 emplois. Le 23 mars, le premier ministre
nous annonçait 2000 emplois. Aujourd'hui, le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation annonce, à sa manière et
selon son habitude, que ce n'est plus 2000 emplois. C'est bien trop modeste,
2000 emplois, pour le ministre. Cela lui prend une annonce à sa mesure.
Il nous annonce que l'impact de ces vastes programmes sur l'emploi est
évalué à 12 000 années-hommes. Cela passe de 2000,
avec le premier ministre, à 12 000 avec le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation. Il y a une sourdine. Oui, il y a une
inflation, surtout verbale.
Le ministre dit: Soit 4000 emplois par année. Ce matin, quand il
a annoncé cela, on aurait bien dit - les gens qui n'ont pas le temps de
faire trop de déductions et d'analyses littéraires - on avait
bien l'impression que c'étaient 12 000 emplois par année. En le
décortiquant, on voit qu'il s'agit de 4000 emplois par année qui
ne sont pas créés à cause des fonds investis par le
ministre, parce que le ministre investit environ un tiers des fonds. Cela veut
dire que, de ces 4000 emplois, il en reste peut-être 1200
créés à même les investissements du
ministère. Donc, on part de 12 000 et on tombe à 1200. C'est le
genre d'inflation verbale à laquelle nous a habitués ce
gouvernement.
Quant à nous, il est sûr que nous sommes favorables
à l'augmentation de l'autosuffisance en matière de production
céréalière. Je pense qu'il ne faudrait pas douter de cela.
Nous y sommes favorables pour autant que nous pouvons assumer que nous pouvons
le réaliser économiquement. Si nous avons un programme
d'autosuffisance qui fait que les céréales nous coûtent
beaucoup plus cher que ce que nous pouvons acheter sur le libre marché
de Chicago ou d'ailleurs, qu'est-ce qu'on fera? Est-ce que nos éleveurs
seraient prêts à donner 7 $, 8 $ ou 10 $ la tonne de plus pour
avoir un grain québécois? Il faut un grain
québécois qui soit compétitif. Il faut également
tenir compte des contingences climatiques.
Ce matin, le ministre a annoncé que la date limite pour les
ensemencements du 1er juin était reportée au 10 juin, comme nous
lui en avions fait la demande hier. Eh bien, cela nous prouve que nous avons
ici au Québec des contingences climatiques. Ce n'est pas notre faute si
notre climat et notre terre sont moins favorables que le climat et la terre
dans les plaines fertiles de l'Ouest. Cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas
rechercher l'autosuffisance et l'augmentation de la production
céréalière. Mais il faut le faire dans un climat de
réalisme.
Ce matin, le 1er juin, le ministre était content de nous dire
qu'il retardait de dix jours. Cette annonce aurait bien dû venir avant ce
matin. Depuis longtemps les agriculteurs savent que le date limite est le 1er
juin; mais il y en a qui n'ont pas acheté ce qu'il fallait pour
ensemencer. Ils n'ont pas acheté les engrais chimiques ni rien d'autre
quand ils ont vu que la date limite était le 1er juin, qu'on
était rendu au 20-25 mai et que la situation climatique était
telle que celle que nous connaissons cette année. Or, il y a des gens
qui se sont découragés. Je voudrais demander au ministre pourquoi
il n'a pas songé à annoncer cela au moins quinze jours avant. Et
qu'est-ce qui se passera en ce qui concerne les agriculteurs qui
n'ensemenceront pas cette année? Est-ce qu'il y aura quelques
compensations? Est-ce que le ministère pourra les aider, trouver une
solution qui soit complémentaire? Selon nos indications, cela concerne
plusieurs agriculteurs.
En ce qui concerne ce programme d'autosuffisance alimentaire, d'abord,
je vous disais qu'il s'agit de la poursuite d'un programme qui a
été élaboré avec les fonds fédéraux.
Le ministre joue un peu à la magie parce que si on prend les
crédits de 1983-1984, au programme 3, Aide à la production
agricole, j'ai demandé au ministre en commission parlementaire, de nous
faire le profil, l'étalement de ce budget pour les trois prochaines
années, puisqu'il disait que les 50 000 000 $ étaient
étalés sur trois ans. Je lui ai dit: Je veux connaître, en
1983-1984, la part qui va à ce budget et celles qui sont prévues
en 1984-1985 et en 1985-1986. Le ministre m'a dit: Pour l'année en
cours, 1983-1984, il y a 9 000 000 $ de prévus au budget. Un tiers de 50
000 000 $, je pensais que ça faisait à peu près 16 500 000
$. Je comprends que le ministre dit que cette année, le programme ne
sera pas rodé, qu'on investira plus l'année prochaine. Or, si le
ministre prévoit 9 000 000 $ cette année, on s'attend que les
crédits de l'année en cours soient plus élevés que
ceux de l'année dernière.
L'année dernière, au programme 3, Aide à la
production agricole, on retrouvait
133 500 000 $. L'année dernière, on avait 133 500 000 $.
Si on ajoute 9 000 000 $ cette année, on aura 144 000 000 $. Qu'en
est-il cette année? On retrouve 128 000 000 $, une diminution de 5 500
000 $. Où est le programme que le ministre a annoncé? Je me
demande s'il a annoncé quelque chose ou s'il n'a rien annoncé.
Cela veut dire que si le ministre n'avait rien annoncé, au lieu d'avoir
5 500 000 $ de moins que l'année passée, on aurait 15 000 000 $
de moins que l'année passée.
Là-dessus, en commission parlementaire, le ministre me disait que
ce sont des dépenses récurrentes, etc. C'est comme si, ce soir,
j'arrive chez moi et je dis à mon épouse: J'ai gagné 3000
$ aujourd'hui. Comment cela? Je ne suis pas allé en Europe. C'est jouer
avec des chiffres et pendant que la démonstration dure, les chiffres
impressionnent, mais une fois que la démonstration est
complétée, on s'aperçoit qu'il n'y a rien, que le ministre
n'a rien annoncé. Il nous disait que ces 9 000 000 $ étaient des
dépenses récurrentes, etc., il se morfondait en explications de
toutes sortes.
Pour nous, ce qui doit primer avant toute chose, c'est bien d'augmenter
la production céréalière et toutes les autres productions:
de sucre d'érable, de boeuf, etc. On n'a rien contre, M. le
Président, mais l'autosuffisance en soi est un mythe. On peut être
autosuffisant en bananes, en cultivant des bananes dans des serres chaudes,
mais combien cela coûtera-t-il? Il faut être réaliste un
jour. Si on s'aperçoit que ce n'est pas rentable économiquement,
je pense que cela coûte moins cher de faire venir des bananes des
Antilles que de les produire ici au Québec.
Nous voulons que les agriculteurs aient un prix juste et raisonnable
pour leur production. Que disaient les agriculteurs, il y a huit ou dix ans?
Ils disaient au ministère de l'Agriculture: Gardez donc vos petites
subventions et assurez-nous donc des prix convenables. C'est là que le
gouvernement libéral a créé le régime
d'assurance-stabilisation.
Ce matin, le ministre faisait dire aux statistiques que, depuis qu'il
est là, l'assurance-stabilisation s'est multipliée par 10 ou par
100, je ne sais trop. Écoutez! si vous prenez la première ou la
deuxième année du régime d'assurance-stabilisation, c'est
bien sûr qu'il ne pouvait pas couvrir 25, 30 ou 40 productions.
C'était un programme à ses premiers balbutiements. Je pense que
c'est injuste de comparer un programme à ses débuts et un
programme dix ans après le lancement. Mais pour nous, le Parti
libéral du Québec, quand ce gouvernement a créé
l'assurance-stabilisation, le but était d'assurer des revenus
décents et raisonnables aux agriculteurs.
Qu'a fait le ministre avec son programme d'autosuffisance alimentaire?
Il est en train de détourner le but du programme
d'assurance-stabilisation et d'en faire un instrument pour promouvoir
l'autosuffisance. Or, on ne peut pas détourner impunément un
programme de ses fins comme le fait le ministre de l'Agriculture actuellement
parce que la prime de l'assurance-stabilisation est payée
entièrement par l'agriculteur. Si le fonds d'assurance-stabilisation
devient trop déficitaire et qu'il faille augmenter la prime, il y a
toujours le tiers payable par l'agriculteur qui augmentera, ce qui risque
d'être très cher.
Ce matin, je vous ai parlé un peu des prix des
céréales. Il faut être réaliste. Je vous ferai une
projection des prix à venir des céréales et je parlerai
aussi des prix de l'an passé pour voir l'orientation que va prendre la
production céréalière, si les prix sont appelés
à augmenter ou à diminuer au cours des prochains mois.
L'année dernière, à ce temps-ci, le 31 mai 1982, on
pouvait acheter à 2,75 $ l'option des céréales. 2,75 $ le
1er juillet 1982; cette année, 3,04 $. L'année dernière,
l'option de septembre sur le marché de Chicago, livré à
Montréal, 2,76 $; cette année, 2,92 $. L'année
dernière, option de décembre, 2,8125 $; cette année,
option de décembre, 2,8175 $. L'année dernière, option
mars, 2,9425 $; cette année, option mars 1984, 2,8950 $. Le prix de
l'année dernière augmentait alors que le prix de 1983-1984 a
tendance à diminuer. C'est une tendance qui nous indique que le
maïs devrait être moins cher l'été prochain. Si la
tendance du prix international, la tendance des marchés mondiaux
décroît, les producteurs vont produire à perte. Cela veut
dire qu'ils seront compensés par l'assurance-stabilisation. Cela va
faire un temps, mais n'oublions pas, comme je le disais tantôt, que
l'agriculteur fournit à l'assurance-stabilisation. Si on en vient
à augmenter la prime de manière que le travail de l'agriculteur,
malgré qu'il obtienne l'assurance-stabilisation, ne soit plus rentable,
c'est toute notre production céréalière qui subira le
coup. (15 h 20)
Je voyais des titres de journaux: Que cesse la méfiance du
ministère de l'Agriculture! Les meuniers. Le Soleil, 15 novembre 1982.
Les meuniers disaient ceci: D'accord pour le virage technologique, mais il
faudrait peut-être qu'en même temps il y ait un virage
philosophique au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation et que l'on réfléchisse sur des orientations
déjà prises et sur des lacunes qu'il faut corriger.
D'abord, l'on parlait de la recherche. Pour garantir le succès de
cette initiative, disait-on, il faudrait consacrer davantage de
fonds dans la recherche de variétés mieux adaptées
aux conditions climatiques des régions du Québec. Le ministre
nous parle de ses nombreux projets de recherche, M. le Président. J'ai
déjà eu l'occasion de démontrer ici qu'environ 40 projets
de recherche, tous ensemble, coûtaient moins de 1000 $ au
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il
ne faut pas non plus essayer d'impressionner la galerie, mais plutôt
avoir une recherche qui soit sérieuse.
M. le Président, sur la qualité, les meuniers
s'inquiètent de l'uniformité de la qualité des grains
utilisés au Québec dans l'alimentation animale. Une Régie
des grains a été créée, mais les meuniers se
demandent ce qu'elle attend pour mettre en place des règlements et des
critères de qualité. Contrairement à ce qu'affirment mes
collègues, ce n'est pas cela du tout qu'on est en train de faire. On est
en train de faire...
Une voix: ...
M. Mathieu: Voyons donc! Vous n'avez rien compris au projet de
loi. On est en train de faire... Ce matin, qu'est-ce que le ministre a...
Une voix: ...
M. Mathieu: Je vais vous le dire. Le ministre disait, ce matin:
Un petit classement par entente. Il a dit: Le vendeur et l'acheteur, ils
s'entendent sur la qualité et, s'ils ne s'entendent pas, le projet de
loi no 13 qu'on est en train d'adopter intervient. La régie va faire un
examen aux frais des contribuables et non pas aux frais de la régie.
Mais est-ce que c'est cela que vous appelez un classement? Mais ce n'est pas
sérieux. Ce que je trouve le moins sérieux de tout, c'est de
vouloir créer l'autosuffisance, la commander, produire des
céréales, mais sans avoir l'encadrement nécessaire.
D'abord, on n'a pas de normes de qualité et pas de normes de classement
pour les céréales. On n'a aucun critère. On est en train
de dire: Un petit classement va se faire à l'amiable entre les parties
et, à défaut d'entente... Je vais lire l'article 23: "En cas de
différend - cela veut dire si on ne s'entend pas - relatif au classement
du grain, la régie ou une personne qu'elle autorise peut, à la
demande d'une personne intéressée - c'est malaisé à
comprendre - et contre paiement - cela, le PQ ne l'oublie pas, contre paiement;
vous n'oubliez pas de faire payer les gens; vous oubliez bien des choses, mais
vous n'oubliez pas cela - des frais établis par règlement,
procéder au classement du grain et délivrer un certificat."
Je vous le disais ce matin, ce n'est pas suffisant. Si vous êtes
sérieux, appliquez donc un classement obligatoire à tous les
grains qui sortiront. À qualité égale, notre producteur de
grain aura un prix égal, que le grain vienne de l'Ontario ou des
Etats-Unis, qu'il vienne de n'importe où, alors qu'aujourd'hui, je vous
le disais ce matin, il y a une différence de 0,10 $ le boisseau. Un
boisseau, c'est 56 livres. 0,10 $ de moins pour le grain produit au
Québec par rapport au grain américain ou au grain de l'Ontario
rendu à Montréal. Pourquoi 0,10 $ de moins? C'est simple, c'est
parce que, comme notre grain n'est pas classé, on n'a pas de
critères, on n'a pas de classement; il y a plus de risques pour
l'acheteur et ce sont nos agriculteurs qui paient.
Si vous vouiez faire autre chose que de brasser du vent... Je sais que
toutes les cassettes sont prêtes, de l'autre côté, pour un
petit boniment aux agriculteurs; c'est toujours la même cassette, M. le
Président. Je m'excuse de dire cela, mais c'est toujours la même
cassette. C'est un petit vidéodisque, peu importe le sujet pourvu que
c'est en agriculture.
Ce matin, le ministre était rendu dans vous savez quoi, M. le
Président, vous l'avez même rappelé à l'ordre. Il
était rendu dans les élections partielles du Saguenay. Je pense
que dans le Saguenay, dans Charlesbourg et dans Saint-Jacques on a d'aussi
beaux candidats que vous. Aussi bons! Vous allez voir, le soir de
l'élection. Le ministre nous disait: Les libéraux, eux, ne
s'occupaient que de produire; nous, on s'occupe des marchés. Il faut
faire attention parce que, quand ils disent quelque chose, il faut toujours
interpréter le contraire. Quand ils disent qu'ils améliorent
considérablement, tenez-vous bien, parce que c'est une
amélioration négative, c'est une dégradation.
Le ministre disait: Nous autres, on va s'occuper des marchés.
C'est justement ce qu'il n'a pas fait. Dans la production de sirop
d'érable, par exemple, cela lui prenait du sirop. En 1979, à
l'élection partielle, il fallait entailler 600 000 érables dans
le canton de Dorset. On disait: Vous n'avez pas peur qu'il y ait des surplus.
Il n'y a rien là.
Il y a l'Allemagne, le Japon et tout ce que vous voudrez. Il y a
tellement de quoi là que nous avons trois productions non payées,
1981, 1982, 1983. C'est comme cela quand on lance des productions sans trouver
de marché au préalable. C'est justement ce que je prétends
que le gouvernement est en train de faire avec sa politique
céréalière qui, en esprit, est bonne, mais il ne faut pas
arriver à l'improviste, il ne faut pas improviser là-dedans. Il
faut préparer de longue main les marchés.
J'ai un article du Soleil ici, en date du 30 mars 1977: La proposition
du PQ: investir dans la production agricole plutôt que de combler les
pertes de revenus. C'est indicatif de votre politique. En 1974-1975, les
agriculteurs disaient: Investissez pour combler nos pertes de revenus.
Donnez-nous une assurance-stabilisation. Arrêtez vos petites subventions.
Donnez-nous des prix qui soient raisonnables pour nos produits. Le gouvernement
est en train de faire le contraire. Je disais tantôt: Il détourne
l'assurance-stabilisation de ses fins. Il en fait un instrument pour promouvoir
l'auto-suffisance, mais à quel prix? Est-ce que cela va être au
prix de la faillite de la moitié de ses producteurs? Si on prend les
journaux, les revues agricoles, on voit la difficulté
considérable qu'ont ces producteurs. Je reviens à mon article du
Soleil, M. le Président. On dit là-dessus, sous la signature de
M. Marc Lestage: "Le ministère de l'Agriculture espère assurer la
relance de l'agriculture en investissant dans la production pour tirer un
meilleur parti de chaque ferme plutôt que de garantir le remboursement
des pertes auxquelles les producteurs s'exposent." On dirait que cela ne vous
intéresse pas de garantir le remboursement des pertes. Il faut produire.
N'oublions pas; le 30 mars 1977, on préparait le
référendum. Il fallait un paquet de gens. Il fallait mettre de
l'argent dans l'économie. Le référendum devait venir
à tous les six mois. On dirait que cela ne vous intéresse pas de
garantir le remboursement des pertes, et nous, c'est le contraire. On pense
qu'avant de produire, il faut avoir des marchés et des prix garantis.
Tantôt, je vous faisais la démonstration que, sur le plan
international, les prix avaient tendance à baisser. Ce n'est pas parce
que vous vous appelez le PQ que vous allez pouvoir agir contre cela. C'est bien
malheureux, mais cela dépasse vos pouvoirs. Vous êtes en train de
jouer avec l'assurance-stabilisation pour anéantir son rôle.
Je cite M. Lestage: "Ces améliorations doivent permettre de
rendre chaque ferme québécoise plus efficace, donc, plus
rentable. Dès lors, le ministère de l'Agriculture peut se
permettre de réduire les crédits qu'il consacre à la
stabilisation." Or, les crédits de la stabilisation sont-ils
diminués? Je prends ici les renseignements supplémentaires
concernant le budget, en date du 29 mars 1983, page 37, au programme
d'assurance agricole. Je cite: "Il y a une croissance de 9 000 000 $ à
ce poste. La croissance des crédits à ce programme s'explique
presque exclusivement par l'augmentation des contributions au régime
d'assurance-stabilisation. Le fait que les prix obtenus par certains
producteurs - céréales, boeuf, agneau - soient inférieurs
à leur coût de production entraîne une hausse du nombre
d'adhérents. Le paiement de compensations importantes entraîne une
révision des taux de cotisation qui se traduit par une augmentation des
contributions gouvernementales."
(15 h 30)
Quand il y a une augmentation des contributions gouvernementales, il y a
également une augmentation de la contribution du producteur,
automatiquement. Or, quand les prix obtenus sont inférieurs au
coût de production, peut-on dire que cela va bien dans les productions?
Est-ce que c'est parce que cela va bien? Mais c'est le monde à l'envers!
Le gouvernement semble se vanter de mettre beaucoup d'argent dans
l'assurance-stabilisation et d'augmenter la production pour en mettre encore
plus l'année prochaine. C'est presque une dilapidation des fonds
publics. Il me semble que dans une saine administration, on investit où
c'est rentable et, également, on investit selon des plans
préétablis. On commence par s'assurer des marchés. On
commence par s'assurer de la qualité de notre produit. C'est ce que vous
ne faites pas, malgré les titres ronflants que vous donnez à
toutes vos lois et malgré toutes les améliorations que vous
maintenez.
En agriculture, il y a beaucoup de domaines qui sont reliés aux
céréales, le domaine des petits abattoirs, par exemple, en voie
d'extinction, que les gens ne peuvent pas transmettre à leurs enfants et
qui sont ni plus ni moins en voie d'extinction. Est-ce que vous arriverez
encore avec d'autres normes, d'autres politiques de salubrité encore
plus poussées pour les éteindre le plus vite possible?
Je dis au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation qu'il a un rôle à jouer relativement aux abattoirs.
Cela fait partie de notre économie; c'est un service public.
Le Vice-Président (M. Rancourt): En conclusion, s'il vous
plaît!
M. Mathieu: Je dois conclure, M. le Président. C'est
dommage parce que j'en aurais eu encore beaucoup à dire. Je me
contenterai de dire au ministre, en concluant j'ai sans doute quelques minutes
pour conclure, le ministre a pris quatre à cinq minutes pour
conclure.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il y a consentement, M.
le député.
M. Mathieu: Nous connaissons la chaîne d'alimentation
Provigo qui est la propriété, à 30%, de la Caisse de
dépôt. Alors, le gouvernement peut orienter les politiques de la
chaîne Provigo. On m'a fait justement remarquer que Provigo
n'achète pas de viande au Québec depuis le 11 avril 1983. Elle
interdit même à ses membres affiliés d'acheter du boeuf
local; sinon, ils peuvent perdre leur affiliation. Je voudrais savoir ce que le
ministre fera pour contrer cela, lui qui encourage la production de boeuf
local.
En concluant, malgré les chiffres mirobolants que le ministre
nous a lancés ce matin, démontrant que la production
céréalière augmentera de 1000% et de 10 000%, de
même que l'assurance-stabilisation depuis qu'il est là, je veux
des explications sur un article du journal La Presse, en date du 28 octobre
1982 qui dit: "Le Québec au même niveau qu'en 1971. Baisse de 226
000 acres de terre en culture en cinq ans." Nous sommes en 1982. La loi sur le
zonage agricole a eu le temps de démontrer ses conséquences.
Je conclus en vous disant que cette loi, malgré qu'elle nous
déçoive parce qu'elle ne va pas assez loin, nous l'appuierons
parce que c'est tout de même un chaînon important, malgré
qu'elle n'aille pas assez loin. Mais, en attendant, nous continuerons de
demander au ministre de se raviser et d'ordonner, d'imposer une classification
obligatoire pour que nos producteurs aient le même prix que celui du
marché international. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. J'entendais, au
début de son intervention, le député de Beauce-Sud parler
du chiffre 13, un chiffre malchanceux. Je comprends que le 13 lui rappelle un
mauvais souvenir à cause du 13 avril 1981. Il a cela présent
à l'esprit.
Il a aussi parlé de nos cassettes; c'est vrai que nos cassettes
sont prêtes, mais le bout de la cassette que j'ai aimé le plus de
lui, c'est quand il a dit qu'il voterait pour la loi. Il est négatif
tout le long, comme toujours. Après cela, il dit: Ce n'est pas assez,
mais on votera pour la loi. Je savais cela, c'était le bout que
j'appréhendais. J'étais sûre qu'il était pour voter
pour la loi parce que, étant lui-même un ancien producteur, il
sait que cela a du sens. Il ne veut pas l'admettre publiquement, surtout pas
devant les gens qui sont venus le visiter.
Qu'est-ce que c'est, la loi 13? C'est un projet de loi qui a pour objet
de préciser les pouvoirs de la régie. Avant de préciser
certains pouvoirs, j'aimerais qu'on parle un peu de ce qu'est la Régie
des grains. La création de la régie pour le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a été un
outil de travail indispensable pour l'amélioration des conditions de la
commercialisation des grains au Québec. Cela veut dire aller beaucoup
plus loin que la classification. Cela veut dire l'excellence. Dans un discours
que j'ai prononcé à l'Assemblée nationale il y a quelque
temps, j'ai parlé de l'excellence des produits du Québec. Dans le
domaine des grains, la régie est en train de nous prouver l'excellence
de la production et de l'utilisation de céréales de
qualité.
Que faut-il faire pour obtenir l'excellence? Pour obtenir l'excellence,
il faut faire un suivi très minutieux sur la manutention, sur le
séchage, sur le criblage, l'entreposage et la conservation. Ce n'est
qu'après toutes ces étapes que l'on peut imposer le sceau de
l'excellence des grains classés du Québec. Cette classification
aidera aussi à dépister les réels problèmes
relatifs à la qualité et fournira les éléments de
correction.
Cette loi 13 qui concerne la classification des grains est une
évolution, une suite logique. Nous avons commencé en 1976 cette
suite logique. Je lisais un article dans le journal La terre de chez nous, pas
un vieux journal, celui du 26 mai, la semaine dernière. M. André
Harbec disait: "Le Québec est maintenant sa principale source
d'approvisionnement en céréales fourragères." Je vais lire
juste un petit paragraphe, vous allez vous situer. M. Harbec disait, dans son
exposé: "Historiquement, les conditions économiques n'ont pas
été assez incitatives -je suppose qu'il parlait du gouvernement
libéral de 1971 à 1976 - afin de stimuler le développement
de la production céréalière du Québec pour
accroître son degré d'autosuffisance. De plus, la structure de la
mise en marché des céréales au Québec s'est
développée jusqu'à récemment par et pour le
commerce des céréales en provenance de l'extérieur du
Québec. "Par contre, depuis 1976 - est-ce que ça vous dit quelque
chose, 1976? C'est l'année de la prise du pouvoir par le Parti
québécois - on peut constater un changement." Ce n'est pas moi
qui le dis, c'est André Harbec qui parle des producteurs, de ce qui
s'est passé depuis 1976. On en a fait du chemin. "On peut constater un
changement majeur dans cette toile de fond de l'industrie
céréalière québécoise. En effet, le
degré d'autosuffisance fourragère atteignait jusqu'à 34%
au cours de la campagne agricole 1976- 1977 et il a dépassé le
cap de 50% au cours de 1981-1982, et cela malgré le fait que les besoins
totaux ont augmenté de 2 500 000 tonnes à 3 700 000 tonnes durant
cette période. De fait, la production céréalière
variait aux environs de 800 000 tonnes de 1976 à 1977 tandis qu'elle a
atteint un sommet de 1 800 000 tonnes en 1981-1982." Une augmentation de 120%.
Ce ne sont pas des petites pinottes, 120%.
Puis, ayant toujours cette même suite dans les idées, le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a
établi la Protection du territoire agricole dont je voudrais vous parler
un peu. Vous vous souvenez comment cela a fait la une des journaux, comment les
libéraux ont dit toutes sortes d'âneries, je dirais. Ils disaient
même:
Vous n'avez qu'à peinturer les cimetières. Je me souviens
que le ministre répondait: Oui, mais c'est là que ça
chiale le moins. On a peinturé en vert, c'est vrai. Pourquoi a-t-on
peinturé en vert le Québec? Le 5 mai dernier j'accompagnais le
ministre de l'Agriculture avec des producteurs, avec des journalistes. On s'est
rendu au village des patriotes à Saint-Denis, dans le comté de
mon collègue de Verchères, plus précisément dans un
rang qui s'appelle le rang Amyot. Ce rang-là, c'étaient des
terres en friche. Le foin haut comme ça! Je suis allée voir cela
et je souhaite que ceux qui vont faire un tour en auto le dimanche, se rendent
dans le rang Amyot pour voir ce qu'on a fait avec ces terres qui étaient
perdues pour l'agriculture.
Grâce à la Protection du territoire agricole, on a
donné à ces terres leur vraie vocation, celle de produire, de
faire avec ces terres-là de belles terres à
céréales. Grâce à qui? Grâce au Parti
québécois. Grâce à quoi? Grâce à la
Protection du territoire agricole et grâce à la confiance qu'on a
en nos producteurs. Nos producteurs du Québec sont capables. On n'a pas
besoin d'importer des céréales en grande quantité, on a
les gens pour les faire ici et on a de bonnes terres. Il s'agit de mettre des
outils importants, de vrais outils entre les mains de nos producteurs et ils
feront le reste, vous verrez.
Je prends des statistiques qui m'ont été fournies: En 1971
- mon collègue de Saint-Jean qui est historien dirait: C'était le
temps des libéraux - on avait 418 100 hectares de terre en superficie de
céréales. On produisait 957 600 tonnes de céréales.
En 1976 on a pris le pouvoir. Les libéraux n'avaient pas cru bon d'aider
nos producteurs de céréales. Donc, on est parti de 418 100
hectares de terre et on était rendu à 382 000, une perte de
banque de terres de 36 100 hectares de 1971 à 1976. Ce n'est pas une
centaine d'années, ça, c'est cinq ans. Ensuite, on avait perdu
134 600 tonnes de moins de céréales produites. De 1976 à
1982, années du Parti québécois, on est rendu, en 1982,
à 546 100 hectares en superficie de production de céréales
pour 1 821 200 tonnes de céréales, ce qui veut dire plus 264 100
hectares de terre et plus 998 300 tonnes de céréales. C'est la
suite logique dont je vous parlais.
Quand on est allé dans le rang Amyot, le ministre en a
profité, et je pense que l'occasion était tout à fait
rêvée, pour démontrer aux journalistes, aux gens qui nous
accompagnaient - nous étions un plein autobus - et vérifier sur
place à savoir si on n'avait pas adopté la Loi sur la protection
des terres agricoles, ce qui serait arrivé partout au Québec. On
a vu un petit coin seulement. Les belles terres qu'il y avait là, de
belles terres productives qui étaient laissées à l'abandon
où on voulait construire des maisons un peu partout. Le ministre en a
profité, comme je vous le disais, pour présenter son programme
triennal. Il a dit: On va investir 50 000 000 $ dans notre programme triennal,
et notre programme va comporter treize points, répartis en six grands
volets. Je vais vous faire l'énumération de ces points de
relance: l'amélioration de la qualité du sol, bien sûr,
avec un bon drainage. Combien de producteurs du Québec se sont
prévalus des subventions pour le drainage agricole? Qu'est-ce qu'on a
fait, après le drainage? On a creusé les cours d'eau. Cela fait
plusieurs fois que je parle des cours d'eau parce que, dans mon comté,
comme je vous l'ai dit antérieurement, j'ai eu 69 demandes
l'année dernière, dont 54 ont été acceptées
et sont en train de se terminer. Un bon montant d'argent a été
alloué au creusage des cours d'eau pour rendre nos terres plus
productives. Cela ne s'est pas fait seulement pour le Parti
québécois, le ministre en a donné de l'autre
côté aussi, afin que leurs terres soient mieux
drainées.
Continuons: l'intensification du processus de la mise en valeur des
terres non cultivées ou abandonnées, l'accroissement de la
capacité d'entreposage des céréales, l'amélioration
de la qualité du fourrage, la possibilité pour les agriculteurs
de transformer eux-mêmes leurs céréales en moulée
pour l'alimentation de leurs animaux, l'intensification de la recherche, de la
mise au point, de la promotion de nouvelles variétés de
céréales mieux adaptées au climat des différentes
régions du Québec. C'est ce que le ministre a annoncé
quand on a fait le tour des terres en friche qui vont redevenir des terres en
culture, grâce à la confiance que le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a en ses
producteurs.
Quand on se sent compris et aidé, supporté, on devient
confiant en notre travail, croyant en ce qu'on fait, et on met tout notre coeur
pour faire de nos terres ce qu'il y a de mieux. C'est ce que le gouvernement a
fait. Vous aurez remarqué que ce matin le ministre a dit: On fait des
lois en collaboration avec les gens du milieu. Je peux vous dire que c'est
vrai. Nous, du caucus agricole, sommes toujours informés. Le ministre
nous demande: Qu'est-ce qui se passe? Comment vos producteurs voient-ils cela?
On en parle à nos producteurs, on donne les idées de chez nous,
de chacun de nos producteurs et c'est avec cela qu'on fait une loi. On ne fait
pas une loi pour les faire choquer, comme le ministre le disait, mais une loi
qui leur convient, une loi qu'ils nous ont aidés à
préparer. Comme cela, la loi leur plaît et leur convient. C'est
pour cela que les terres agricoles du Québec sont les plus belles. Je ne
suis pas gênée de parler
des producteurs agricoles de mon comté. Je sais bien que je vais
soulever des tollés de protestations, mais je peux vous dire que les
meilleurs producteurs du Québec sont en grande partie dans Johnson.
Les personnes qui seront affectées à ce classement ne
seront pas des bonshommes de paille; ce ne sont pas des cadeaux qu'on leur fait
parce qu'ils ont rendu service au parti, non, non. C'était
peut-être comme cela anciennement mais, aujourd'hui, les personnes qui
vont faire le classement du grain devront avoir des qualités
spéciales. Écoutez bien, les personnes affectées au
classement du grain devront, premièrement, suivre un cours de classement
d'une durée de trois jours, recevoir un entraînement pratique d'un
mois sous la surveillance de la régie, réussir un examen
préparé en collaboration avec l'Institut de technologie agricole
et alimentaire, se perfectionner à l'aide d'un programme de formation
supervisé par la régie, et être reconnues comme
préposées au classement des grains par la régie. Cela va
prendre quelqu'un qui doit connaître son travail pour l'effectuer le
mieux possible. Ce ne seront pas des bonshommes de paille, ce seront des gens
qui connaissent leur travail, des gens qui vont s'efforcer de donner
l'excellence aux produits du Québec. Si on a de l'excellence dans nos
produits, nos animaux vont faire une meilleure performance et notre grain va se
vendre mieux aussi. C'est pour cela qu'on a choisi des gens qui connaissent
leur travail, qui vont en choisir d'autres et leur préparer des cours
pour être capables de donner l'excellence du produit. (15 h 50)
J'entendais aussi, ce matin, le ministre dire qu'il y aurait la
construction de deux nouveaux centres régionaux de traitement
d'entreposage des céréales. J'ai compris, entre autres, qu'il en
construirait un dans l'Outaouais. Cela ne me dérange pas beaucoup, parce
que c'est à l'autre bout. Vous n'étiez pas là, ce matin,
M. le Président, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais il
en a annoncé un dans les Cantons de l'Est. Vous et moi connaissons les
Cantons de l'Est. Tout ce que je souhaite -je vais essayer - c'est que le
centre qui sera construit dans les Cantons de l'Est le soit dans le
comté de Johnson, parce qu'on a des belles terres et parce qu'on est
capable. Ce serait peut-être le lieu idéal pour la construction
d'un centre dans les Cantons de l'Est. Je pense qu'on est admissible à
un centre comme celui-là et je ne laisserai pas la chance au ministre
d'oublier ce qu'il a dit ce matin: Un centre pour les Cantons de l'Est. J'en
discuterai peut-être avec les autres représentants des
comtés de l'Estrie, mais je vais discuter pour mon comté
également.
Quand le projet de loi no 13 sera mis aux voix, M. le Président,
je vais voter pour comme je vais voter pour tous les projets de loi qui vont
permettre une meilleure production au Québec. Je ne parle pas contre
pour ensuite voter pour. Je parle pour et je vote pour. Je vais voter pour les
producteurs du comté de Johnson, pour les producteurs de l'Estrie et
pour tous les producteurs du Québec. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: Merci, M. le Président. Après avoir
écouté celle qui m'a précédé dans ce
débat, Mme la députée de Johnson, j'ai l'impression que,
n'eût été l'élection du Parti
québécois en 1976, nous serions certainement tous morts de faim
au Québec et le Québec aurait même disparu de la mappe.
J'ai pu constater qu'aveuglément Mme la députée n'a pas
cessé d'encenser son ministre, d'encenser ses bouffonneries de ce matin
et le ridicule avec lequel il nous a livré son discours de
deuxième lecture. Mme la députée de Johnson, je vous
comprends bien, je vous excuse et je ne vous en tiens pas rancune. Je pense que
vous ne voyez pas plus loin que l'étape partisane.
Mme Juneau: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Question de privilège, Mme la députée de
Johnson.
Mme Juneau: M. le député de Huntingdon dit que je
ne vois pas plus loin. Je m'excuse, mais je vois beaucoup plus loin que
cela.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Huntingdon.
M. Dubois: M. le Président, nous sommes à cette
étape de deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant
la Loi sur les grains. On dit que ce projet de loi précise les pouvoirs
de la Régie des grains du Québec quant au classement du grain et
qu'il modifie également les pouvoirs réglementaires du
gouvernement, notamment, afin de lui permettre d'établir des normes de
classement du grain.
Quant au contenu, il n'y a à peu près rien dans ce projet
de loi, de toute façon. Sur le contenu, on est d'accord, parce que le
ministre nous présente un projet de loi presque vide. On est
habitué à cela de toute façon. Je me souviens qu'en
décembre 1979 il y a eu la présentation d'un projet de loi qui
est devenu la Loi sur les grains, une loi qui existe depuis trois ans et
demi.
Finalement, cette loi n'a jamais été appliquée. Il
n'y a jamais eu de réglementation soumise par le ministre. Finalement,
cela a été une loi bidon, la première. Nous avons un
deuxième projet de loi bidon.
Le ministre nous a livré, ce matin, dans son discours de
deuxième lecture, un discours très partisan, naturellement, un
discours de propagande sur ses politiques céréalières
depuis 1976. C'est une habitude qui est devenue régulière chez le
ministre parce qu'à tous les deux ou trois ans il nous présente
un petit projet de loi ridicule pour pouvoir livrer aux Québécois
tout ce qu'il a pu créer et faire depuis six ans. C'est à peu
près le but de ses projets de loi, parce qu'ils sont vides de contenu,
de toute façon.
Ce projet de loi no 13 m'amène à formuler quelques
commentaires et je vais peut-être sortir, de temps à autre, du
projet de loi lui-même, M. le Président, puisque vous avez
constaté que le ministre a ouvert les portes toutes grandes, ce matin,
dans son grand discours d'une heure et cinq minutes ou tout près. Je me
suis aperçu que le ministre prend tous les moyens d'organiser une
affaire de pétage de bretelles. C'est à peu près cela
qu'il nous a livré ce matin, une affaire publicitaire, une affaire de
propagande partisane. Son discours fut exactement cela. Quant à nous,
les politiques de développement agricole, on a toujours
été pour cela. Mais, pour un tel projet de loi, dans cinq
minutes, le ministre aurait pu nous livrer cela, ce matin, nous faire part du
contenu, nous indiquer les raisons particulières justifiant son
dépôt. Il n'avait pas besoin de prendre une heure pour se
péter les bretelles sur l'accroissement d'acres de la production
céréalière ou l'accroissement de drainage souterrain,
l'accroissement de ceci ou de cela. Je pense qu'il y a des occasions partout
à l'extérieur de cette Chambre pour livrer ce message partisan.
Nous sommes ici pour parler de projets de loi et non de propagande ou de
publicité ou d'affaire de pétage de bretelles.
Les politiques de développement furent commencées il y a
très longtemps par les partis politiques qui ont
précédé le Parti québécois. Il y a eu un
progrès constant qui s'est échelonné année
après année. On peut dire que, dans les années cinquante,
il y avait du progrès sur les années quarante et cela s'est
continué graduellement. C'est sûr que tout ne se crée pas
en un jour. C'est certain qu'actuellement nous avons plus de production
agricole qu'on en avait en 1976. Il y en avait plus en 1976 qu'en 1970. Il y en
avait plus en 1970 qu'en 1965. C'est un progrès constant dans notre
société et je pense que le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation ne comprend pas cet aspect. Il ne comprend
pas qu'un jour il y avait des chevaux et qu'aujourd'hui il y a des tracteurs.
Cela fait de l'équipement plus sophistiqué. Le ministre ne
comprend pas cela. Lui, pour autant qu'il se pète les bretelles et se
gonfle de publicité, je pense que c'est tout ce qu'il vise en
politique.
C'est malheureux parce que la population réagit autrement. La
population n'a pas besoin de pétage de bretelles et de publicité
partisane. Elle a besoin de faits. Elle a besoin de vivre. Elle a besoin de se
nourrir. En ce qui concerne les approvisionnements, nous sommes d'accord, et
très bientôt le Parti libéral prendra le pouvoir et c'est
certain que tout le monde va continuer à vivre au Québec, que
nous allons continuer à aider les agriculteurs comme le parti l'a fait
antérieurement en 1976.
Il y a d'autres aspects aussi dans cette mesure et dans le discours du
ministre ce matin. Le ministre nous a expliqué qu'il a
créé une banque de terres. C'est sûr qu'il l'a
créée. J'étais ici présent dans cette Chambre quand
le ministre a présenté son projet de loi sur la banque de terres.
À ce moment, je me souviens bien lui avoir dit: Vous allez finalement
peut-être acheter des terres au Québec. Vous allez engager un
personnel pour travailler sur ces fermes. Nous allons devenir un État
possesseur de fermes. Cela vient d'être annoncé ce matin. J'avais
averti le ministre, il y a deux ou trois ans, que cette procédure et
cette politique pouvaient amener l'État à devenir
propriétaire des terres au Québec. Je lui rappelais les
procédures russes où l'État possède les fermes,
engage les employés pour cultiver les fermes et il n'y a pas de
rentabilité. Mais le Québec s'en va dans le sens de la Russie
d'hier. C'est joli à voir. De toute façon, le ministre nous
annonce qu'il va mettre 20 000 000 $ par année pour acheter des terres.
Je comprends très bien que, dans l'état actuel des choses en
agriculture, c'est sûr que certaines terres vont retourner à
l'État parce qu'il y a des centaines et des milliers d'agriculteurs qui
ont un taux de financement plus élevé que la valeur de leur
ferme.
S'il y a quelques années difficiles à traverser, certains
ne pourront pas passer au travers. Ils devront remettre leurs terres à
l'office ou se voir saisis par l'office. À ce moment, ces terres vont
retourner à la banque de terres. Mais, en plus, le ministre est en train
de faire une évaluation dans toutes les paroisses du Québec, les
paroisses où l'agriculture se fait, pour vérifier quelles terres
sont à vendre, quelles terres sont en friche actuellement, quelles
terres ne sont pas en production. Tout à l'heure, il va falloir trouver
des employés. Je comprends qu'on a 400 000 bénéficiaires
de l'aide sociale au Québec. On pourrait peut-être placer nos
bénéficiaires de l'aide sociale sur
les fermes. On pourrait peut-être aussi placer nos conspirateurs
de l'an 2000 sur les fermes. Ce pourrait être cela toute la
théorie en arrière de cet achat de terres que le ministre
prévoit à 20 000 000 $ par année.
De toute façon, je comprends mal qu'actuellement l'État
veuille acheter des terres quand on pourrait arriver avec un programme pour
sensibiliser les producteurs actuels à acheter leurs voisins et faire en
sorte que les terres demeurent aux producteurs et non à l'État.
C'est une politique qu'on ne voit pas en Amérique du Nord, M. le
Président. C'est une politique peu commune sur le continent
nord-américain. On voit bien que la politique que le ministre met de
l'avant va bien de pair avec son faible raisonnement dans plusieurs
matières agricoles. (16 heures)
Il y a un autre facteur qui entre aussi en ligne de compte quand on
parle de production agricole. Le ministre a poussé vers une production
massive de denrées agricoles, particulièrement dans les
céréales et dans la viande rouge de boucherie, mais le ministre
n'a pas pensé à la mise en marché et aux
débouchés qu'auraient les producteurs pour ces productions
accrues. Je suis d'accord à 100% pour qu'on accroisse nos productions,
mais il faudrait aussi s'assurer que de pair, on puisse vendre nos productions,
que l'agriculture puisse vivre de la vente de la production. Il faut aussi
s'assurer d'une qualité de produits. Il faut s'assurer d'une
classification en tout temps. Il faut maintenir une qualité constante si
on veut avoir un débouché. Ce sont tous des
éléments que le ministre a totalement oubliés depuis 1976.
Il a poussé l'agriculteur à produire davantage. Il l'a
poussé à exploiter des fermes plus grandes, à exploiter
davantage d'acres, mais il n'a jamais assuré un agriculteur au
Québec d'un débouché constant pour ses produits, et c'est
là la grande erreur du ministre.
Aujourd'hui, il nous annonce une petite politique que je qualifierais
même de ridicule; il y a deux petits articles. On veut une classification
dans le domaine des grains. Point final. C'est à peu près cela,
la grosse politique du ministre. Je pense que ce n'est pas ce qui va faire
progresser davantage l'agriculture au Québec. Il va falloir avoir une
mise en marché rationnelle, une mise en marché qui assure les
producteurs de pouvoir vivre sur leur ferme, qui assure les producteurs d'un
revenu constant, d'un revenu comme voulait l'affirmer le Parti
québécois en 1976: Le revenu d'un agriculteur devrait être
comparable à celui d'un travailleur dans l'industrie, d'un
employé ou d'un spécialiste en travaux mécanisés ou
d'un spécialiste en tout domaine. On voulait s'assurer que l'agriculteur
ait un salaire équivalent à la classe moyenne au
Québec.
Je pense que le ministre n'a pas accompli sa tâche, parce que les
agriculteurs sont plus pauvres actuellement qu'ils ne l'ont jamais
été au Québec. En 1965, en 1970 ou en 1976, les
agriculteurs vivaient mieux qu'ils ne vivent actuellement. Ils sont plus
endettés qu'ils ne l'ont jamais été. Ils sont plus
inquiets qu'ils ne l'ont jamais été. Je suis d'accord avec une
politique d'augmentation de production, mais il faut s'assurer à tout
prix que les producteurs puissent vivre. Il faut s'assurer que les producteurs
puissent devenir plus prospères sur leur ferme. Il faut s'assurer qu'ils
aient des perspectives d'avenir, parce qu'il y a aussi la relève
agricole. Quand le fils d'un producteur voit son père en
difficulté, il n'est pas tellement attiré vers cette profession.
Si on veut poursuivre dans l'agriculture, il va falloir s'assurer d'un revenu
net constant, équitable et aussi d'un bien-être certain chez les
producteurs agricoles.
Ce qu'on a aussi remarqué depuis 1976, c'est que le ministre a
voulu mettre beaucoup de bébés au monde, mais il ne s'est pas
occupé de les faire vivre par la suite. C'est bien beau. On met un
bébé au monde, mais on ne s'occupe plus de ce bébé.
On le laisse crever. C'est exactement ce qu'il a fait avec nos producteurs
agricoles. Il a aidé beaucoup de producteurs à se placer sur une
ferme. Il les a assurés d'un prêt agricole, mais après, il
leur a coupé les vivres. On l'a vu dans le porc, il y a deux ans. C'est
exactement ce qui s'est passé. Il en a fait crever combien? Des
centaines encore.
C'est très malheureux le temps que nous avons cette année.
Je pense que tous les producteurs sont très angoissés
actuellement. Encore là, il va falloir assurer nos producteurs, s'ils
ont une année malencontreuse, des fonds nécessaires pour passer
à travers les périodes difficiles. Je pense que le ministre
devrait les rassurer ces temps-ci, parce qu'ils sont très inquiets.
C'est très inquiétant de mettre dans le sol 100 000 $, 150 000 $
et même 200 000 $ chez certains producteurs - et cela pourrait être
plus - sans savoir ce qu'on va récolter cet automne. Je vous assure que
je rencontre des producteurs dans ma région dans tous les domaines
d'activités. Le comté de Huntingdon produit de tout au
Québec. Tout ce qui se produit au Québec se produit chez nous.
Cela part des céréales, des fruits, des légumes, des
arbres fruitiers. On a tout au Québec. Je connais l'inquiétude de
ces producteurs et j'aimerais que le ministre puisse les assurer que si
l'année est difficile, ils pourront être assurés de
reporter leurs paiements à l'autre année. Des remboursements ou
des rabais d'intérêt seraient peut-être à
prévoir aussi, parce que
l'année s'annonce vraiment difficile.
Le ministre s'est pété les bretelles ce matin comme si
l'agriculture n'existait pas avant 1976. Le Parti québécois
semble avoir tout inventé. Le ministre est le seul brillant, le seul
intelligent, j'imagine, le seul qui connaît tout. C'était
vraiment... Il n'y a pas de qualificatif pour son discours de ce matin. Je n'en
revenais pas et je pense que les agriculteurs qui l'ont écouté
n'en reviennent pas non plus. Ce n'est pas croyable d'entendre de tels propos
d'un ministre. Les qualificatifs que je pourrais attribuer au ministre seraient
antiparlementaires. Alors, j'éviterai de poser ces gestes et je me
contenterai d'indiquer que le ministre n'a aucun respect pour la classe
agricole. C'est malheureux. Les agriculteurs du Québec méritent
pas mal mieux que ce qu'ils ont actuellement.
On s'est aperçu aussi, selon les propos du ministre, que le seul
rêve que le ministre a en tête, la seule chose à laquelle il
aspire, c'est toujours l'indépendance du Québec. Le ministre
rêve constamment d'indépendance. Le ministre a
présenté constamment des politiques qui peuvent l'amener à
l'indépendance; c'est ce qu'on a entendu ce matin; c'est ce que le
ministre nous a laissé savoir. L'indépendance est le seul but
visé par ce gouvernement, peu importent les politiques qu'on nous
amène. Le ministre créera une autre nouvelle
société, par le ricochet de SOQUIA, le ministre des Transports
nous amène une nouvelle société nationale des transports;
on a trois sociétés nouvelles qui s'en viennent. On marche sur
des sociétés, des régies, des commissions; on a la
Régie de la banque des terres. Alors, finalement, qu'est-ce que sera
l'État? Le rôle de l'État sera rendu à 80%-90% de
l'économie du Québec. C'est un régime étatique
qu'on aura; c'est à peu près cela qui s'en vient. C'est
très malheureux. Je pense que les résidents du Québec ont
très hâte de s'en débarrasser - j'en suis convaincu - parce
qu'ils le disent ouvertement. Vous le verrez dans les trois élections
partielles qui s'en viennent; ils ont très hâte de se
débarrasser de ce gouvernement; ils sont écoeurés des
politiques gouvernementales actuelles.
Tout ce qu'on fait dans ce gouvernement et dans ce parti politique,
c'est de cracher sur le fédéral, cracher sur les Anglais, cracher
sur les Canadiens, cracher sur les libéraux provinciaux, cracher sur les
libéraux fédéraux. On ne fait que cela, constamment et
sans arrêt. On s'attend après cela de recevoir des
retombées fédérales dans tous les domaines, mais on crache
sur eux constamment. Alors, qu'est-ce que ce genre de politique?
Oui, M. le Président, j'ai déjà employé le
terme "cracher" et c'est parlementaire, à part cela, je peux vous
l'assurer.
Je termine sur ces propos et j'invite le ministre à être
plus respectueux de nos agriculteurs. Au lieu d'apporter des projets de loi
bidons dans lesquels il peut se péter les bretelles et énoncer
toutes sortes de niaiseries, il devrait plutôt rassurer aux producteurs
que si l'année est difficile, il sera là derrière eux, il
pourra les aider et les faire vivre décemment et convenablement. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Bellechasse.
M. Claude Lachance
M. Lachance: Merci, M. le Président. À en juger par
le discours de celui qui vient de parler, j'ai l'impression qu'il y a certaines
mesures de ce gouvernement qui ne plaisent pas à l'Opposition. Je les
comprends très bien parce que ce n'est pas facile de jouer le rôle
d'Opposition de façon constructive et positive lorsque le gouvernement
présente des mesures aussi intéressantes. Au rythme où le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a
présenté des mesures très intéressantes pour les
producteurs agricoles depuis 1976, c'est sûr que c'est un domaine
où il n'est guère intéressant d'être critique de
l'Opposition.
Tantôt, le député de Huntingdon parlait de -
j'utilise ses qualificatifs - "projet de loi ridicule, creux, bidon". Les
personnes qui l'ont entendu tantôt peuvent certainement penser que ces
qualificatifs peuvent très bien s'appliquer au genre de discours qu'il
vient de nous tenir. Il n'y avait pas grand-chose là-dedans et on peut
dire qu'il ne raisonnait pas comme un homme, mais résonnait comme une
tonne.
Nous avons un projet de loi qui, certes, n'est pas très
volumineux. Il comporte exactement quatre articles. Ce n'est certainement pas
parce qu'il y a peu d'articles que le projet de loi n'est pas important. En
1979, le gouvernement créait la Régie des grains du
Québec. Bien sûr, graduellement - c'est ce qu'on fait - on
améliore les moyens pour faire en sorte que la régie ait les
instruments nécessaires pour se développer pour le plus grand
bénéfice des producteurs agricoles. Bien sûr, cela ne
pouvait pas se faire tout de suite, sur-le-champ. À l'usage, on s'est
rendu compte qu'il serait nécessaire d'apporter des modifications et des
amendements susceptibles d'améliorer la situation. C'est ce qu'on fait
avec le projet de loi no 13 qui vise à préciser les pouvoirs de
la Régie des grains du Québec, surtout quant au classement du
grain. Le député de Beauce-Sud parlait tantôt de l'absence
de réglementation reliée à la Régie des grains.
Nous aurons, avec le projet de loi 13, un règlement qui contiendra les
dispositions pour
faire en sorte que les producteurs puissent compter sur des produits de
qualité à l'avenir. (16 h 10)
Je pense qu'il est important de créer, pour les produits
québécois, pour les céréales produites au
Québec, un climat de confiance à établir pour les produits
entreposés dans les centres régionaux de grain. Nous sommes
capables - on l'a prouvé depuis quelques années - de produire des
céréales de bonne qualité au Québec. Il y a des
gens que ça dérange parce qu'ils ne s'attendaient pas qu'on
puisse en arriver aussi rapidement à des résultats aussi
significatifs. En particulier, je pense qu'on pourrait citer des
exagérations de la part de Santé, Bien-Être et Agriculture
Canada qui sont très sévères en ce qui concerne les
produits qui viennent du Québec par rapport aux produits qui viennent
d'ailleurs au Canada. Je pense que ce qui s'est produit concernant certains
problèmes de maladie dans le domaine des céréales, au
cours des années passées, illustre bien cette situation qui
dérange le gouvernement canadien.
M. le Président, le projet de loi no 13 va donner des outils aux
producteurs, aux transformateurs et aux meuniers. Il sera possible de
vérifier la qualité du produit d'ici et aussi la qualité
des produits qui nous viennent d'ailleurs. Actuellement, il ne faut pas se
cacher qu'il arrive très régulièrement que les gens d'ici
se fassent passer des sapins en ce qui concerne les marchés
d'exportation, en ce qui concerne les céréales produites au
Canada et vendues à l'extérieur du Canada. Je pense qu'on met
beaucoup de soin à ne pas perdre les marchés de
l'extérieur. Qu'on pense aux marchés de l'Union
Soviétique, de la Chine ou d'autres pays dans le monde.
En ce qui concerne les produits qui sont vendus au Québec ou dans
l'Est du Canada, il semble qu'on soit beaucoup moins sévères et
il faudrait être en mesure de tester, de vérifier quelle sorte de
produits nos producteurs ont entre les mains afin de nourrir leur bétail
en particulier. Le marché canadien intérieur a subi un
relâchement que le projet de loi no 13 va corriger au niveau des moyens
à mettre en place.
La Régie des grains, depuis qu'elle existe - elle a
commencé à s'acquitter de son mandat avec de plus en plus de
résultats concrets - a comme premier mandat de promouvoir la production
et l'utilisation de céréales de qualité au Québec.
Pour s'acquitter de son mandat, bien sûr, ça ne se fait pas par
l'effet du hasard, il y a une stratégie, un plan détaillé
qui comporte une suite ordonnée de moyens. Ces moyens, bien sûr,
comportent deux aspects: la commercialisation et la production.
En ce qui concerne la commercialisation, on doit s'attacher aux normes
de classification; on doit regarder la protection financière des
producteurs qui doivent s'assurer d'obtenir les sommes d'argent en compensation
du travail qu'ils ont fait pour la vente de leurs produits. On doit s'assurer
aussi qu'il y ait des normes en ce qui concerne les centres régionaux,
des normes assez précises, assez sévères également
pour les centres de séchage et les marchands de grain.
Je pense que les producteurs du Québec qui veulent se lancer dans
la production céréalière doivent avoir l'assurance que ce
sera rentable. Ils doivent avoir l'assurance qu'il est possible de vivre
convenablement, donc ils doivent avoir le meilleur prix possible pour leur
produit. Jusqu'à maintenant, je pense qu'on pouvait dire que ce
n'était guère la situation par rapport aux produits qu'on
importait de l'extérieur. (16 h 15)
Il y a également l'aspect production qu'on doit essayer
d'améliorer. La Régie des grains, par son implication lors du
classement des céréales, aidera à identifier les
problèmes relatifs à la qualité, comme le manque de
maturité, la faiblesse du poids spécifique ou encore le
pourcentage des déchets qui sont contenus. Ce sont là des
éléments qui méritent d'être analysés,
d'être précisés et c'est précisément ce que
la loi 13 permettra de faire en utilisant la Régie des grains du
Québec.
Actuellement les grains produits au Québec ne sont pas
classifiés et, malgré les apparences, l'utilisateur ne peut pas
être assuré de la qualité des céréales
provenant de l'extérieur puisque la surveillance du système de
classification pour le marché intérieur est inadéquat.
Encore une fois, M. le Président, je pense qu'on doit relier
l'adoption de la loi 13 à tout ce qui a été fait dans le
domaine de l'agriculture depuis quelques années et en particulier on
doit l'associer de très près aux mesures qui ont
été annoncées par le ministre de l'Agriculture, le 5 mai
dernier, alors qu'il annonçait qu'une somme de 50 000 000 $ serait
consacrée par le gouvernement du Québec, au cours des trois
prochaines années, à l'amélioration, à
l'accélération de l'autosuffisance du Québec en
matière de céréales. Cela se fera sur une période
de trois ans.
Il y a plusieurs raisons qui nous permettent de dire que ce plan
triennal atteindra ses objectifs. Je pense que, si le passé est garant
de l'avenir, on peut certes utiliser les résultats atteints au cours des
dernières années dans le secteur des céréales. Par
exemple, nous avons eu, de 1977 à 1982, un plan quinquennal qui a
donné des résultats très significatifs, très
intéressants. Par exemple, l'augmentation du nombre de tonnes de
céréales au Québec, entre 1977 et 1982, sur une
période de cinq
ans, a été de 3 500 000 tonnes, pour une valeur
approximative de 500 000 000 $, ce qui a contribué à une valeur
ajoutée supplémentaire d'environ 1 000 000 000 $.
Si on jette un coup d'oeil sur la superficie et la production de
céréales au Québec de 1971 à 1982, je n'ai pas
l'intention de vous énumérer tous les chiffres, mais
permettez-moi de vous citer quelques repères, par exemple. En ce qui
concerne les céréales d'une façon globale, selon des
chiffres fournis par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation et qui datent d'avril 1983, en 1971 on avait un total de
957 000 tonnes de production; en 1976 nous étions rendus à 822
000 tonnes, donc, au lieu d'augmenter, la production diminuait. En 1982 nous
étions passés de 822 000 tonnes à 1 822 000 tonnes, donc
une augmentation de 1 000 000 de tonnes. Cela est de façon globale.
Concernant une production dont plusieurs personnes ont toujours
prétendu qu'elle n'était pas adaptée au Québec, la
production de blé, j'ai également des chiffres. En 1976 nous
avions une production de 59 900 tonnes de blé produit au Québec;
en 1980 c'était monté à 124 000 tonnes, donc une
augmentation significative; en 1982, ah bon! on reste surpris, une diminution
parce qu'on est rendu à 95 000 tonnes. On peut se demander comment cela
se fait. Bien sûr, il peut y avoir des conditions climatiques mais l'une
des raisons, je l'ai expliqué tantôt, c'est qu'à ce moment,
l'attitude d'Agriculture Canada a fait en sorte qu'on a commencé
à peut-être avoir des doutes sur la qualité du blé
du Québec alors qu'en réalité c'est un blé de bonne
qualité. Cela concerne la production de blé. (16 h 20)
Pour la production de l'orge pour les mêmes périodes, en
1971 nous avions une production totale de 33 400 tonnes seulement. En 1976, une
augmentation guère significative; nous sommes passés de 33 400
à 38 700 tonnes. En 1982, dans la production totale d'orge au
Québec, nous étions rendus à 350 000 tonnes, donc une
augmentation de neuf fois plus importante. Si le gouvernement du Québec,
le premier ministre dans son discours inaugural et le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation nous arrivent
maintenant avec cette décision d'un objectif d'autosuffisance de l'ordre
de 70% en matière de production de céréales
fourragères pour 1985-1986, c'est que cela générera des
retombées extrêmement importantes.
Plusieurs raisons font que le plan triennal annoncé, c'est la
mesure de l'heure, la mesure agricole importante pour le moment.
Premièrement, on peut dire qu'il s'agit d'un secteur vital de la
fabrication d'aliments pour les animaux. Cela représente une industrie
de l'ordre de 1 100 000 000 $ en 1982. Deuxièmement, pourquoi cela
est-il important actuellement? C'est qu'on peut s'appuyer, comme j'y ai fait
référence tantôt, sur l'expérience d'un premier plan
d'une durée de cinq ans, de 1977 à 1982, dont les objectifs ont
été largement dépassés et qui a créé
un impact sur l'économie du Québec de l'ordre de 1 000 000 000 $.
Troisièmement, en favorisant l'accroissement de notre production
céréalière, cela va permettre de réduire la
dépendance des producteurs de viande face aux fournisseurs de
l'extérieur. Quatrièmement, cette mesure fera en sorte qu'il sera
possible de s'appuyer sur le crédit agricole à court et à
moyen terme pour aider les céréaliculteurs avec les projets de
loi nos 112 et 113 pour se lancer plus avant dans ce domaine.
Enfin, les investissements dans le secteur de la céréale,
si la température peut enfin aider les producteurs, auront un impact
d'ensemble sur l'économie du Québec à cause de toutes les
retombées indirectes que cela peut avoir. On peut maintenant se demander
quels moyens seront utilisés pour en arriver aux résultats que
nous espérons au cours des trois prochaines années, je voudrais
vous en énumérer quelques-uns qui me paraissent les plus
importants, les plus fondamentaux: d'abord, la mise en place de
capacités d'entreposage de céréales. Si on veut un produit
de bonne qualité, il faut pouvoir le conserver dans un endroit
prévu à cette fin. Cela va se faire par la construction
accélérée de silos à grain sur les fermes
mixtes.
Déjà, entre 1977 et 1982, on avait eu la construction de
plus de 9000 silos au coût de 35 000 000 $. De plus, on introduira un
nouveau programme d'aide à la construction de silos à grain sur
les fermes spécialisées. Enfin, une autre mesure pour
compléter l'ensemble, c'est l'ouverture de deux nouveaux centres
régionaux de traitement et d'entreposage des céréales,
précisément dans l'Outaouais et dans les Cantons de l'Est. Il
existe dans ma région un centre régional de grain situé
à Sainte-Hénédine, dans le comté de Beauce-Nord,
l'ancien chef-lieu du comté de Dorchester, géré par la
Coopérative agricole La Chaudière-Etchemin pour une
capacité de 8200 mètres cubes.
Toutes ces mesures annoncées présentement font que de plus
en plus nous nous acheminons vers une autosuffisance. Vous savez jusqu'à
quel point il est important d'être davantage autosuffisant de
façon à ne pas être dépendant des problèmes
qui peuvent survenir dans d'autres régions du pays ou encore de
l'extérieur du Canada qui nous approvisionnent. C'est une façon
de mettre nos consommateurs, nos producteurs et nos transformateurs à
l'abri des problèmes qui peuvent survenir au gré des
événements. Je suis extrêmement heureux de cette mesure qui
a été annoncée par le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et qui fera
que de plus en plus au Québec, on va avoir une nourriture produite par
des Québécois, transformée par des
Québécois, pour des Québécois.
C'est bien certain, M. le Président, que cette mesure est
très positive. Comme le disait ma collègue de Johnson, on ne se
contente pas de critiquer certains points quand cela ne fait pas notre affaire,
mais quand on critique quelque chose, on agit en conséquence. On est
pour cette mesure et on va voter pour, contrairement à d'autres qui
chialent constamment et qui, lorsque vient le temps de voter, votent pour
également. Les professionnels du chialage, je pense que les citoyens
commencent à en avoir marre et j'ai hâte d'avoir une Opposition
qui soit constructive, qui dise les choses telles qu'elles sont: quand c'est
bien, c'est bien; quand c'est moins bien, on le dit, et cela finit là;
pas de taponnage pour rien. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Berthier.
M. Albert Houde
M. Houde: Merci, M. le Président. Nous parlons aujourd'hui
du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les grains. J'entendais, ce
matin, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
et j'aimerais soulever un point en particulier. Lorsqu'il parlait du
député de Berthier, à savoir qu'il n'était pas un
gros penseur, il parlait probablement de lui, comme gros penseur. C'est
peut-être cela qu'il voulait dire. Je le regardais et il voulait se
comparer à d'autres. Je regrette, mais j'aime mieux moi que lui dans sa
stature - d'accord? - dans sa forme.
Tantôt, le député de Bellechasse nous a
traités de "chialeux", de critiqueux. Lorsqu'on étudie un projet
de loi, qu'on parle d'abord d'agriculture et qu'il y a des choses qui ne sont
pas correctes, je pense que c'est bon et que c'est un devoir de la part de
l'Opposition de le faire valoir auprès du ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation pour que le projet de loi soit le plus
efficace et le plus près possible des cultivateurs.
Une voix: C'est vrai.
M. Houde: Quand c'est correct, on dit que c'est correct. Mais
quand ce n'est pas correct, il faut être capable de le dire aussi. Quand
on parle du fédéral, nous sommes capables de reconnaître
les bonnes choses et les mauvaises choses. Mais, de votre côté,
que je sache - je ne veux pas parler du député de Bellechasse en
particulier; je parle de tous les députés ministériels de
l'autre côté - vous êtes tous pareils. Je n'ai jamais
entendu un député ministériel, un ministre, incluant le
premier ministre, dire un bon mot du fédéral. Jamais. Quand ils
font des discours, les trois quarts, c'est pour déblatérer sur le
fédéral et ce n'est pas bon. Il me semble que si vous êtes
encore aujourd'hui dans la province de Québec, à
l'intérieur du Canada, vous pouvez dire merci, parce que vous seriez
peut-être beaucoup plus pauvres que vous ne l'êtes actuellement,
malheureusement, avec l'actuel gouvernement péquiste.
J'entendais le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, hier matin, à l'étude des crédits,
à la salle 81-A, et ce matin. Je pense qu'il a manqué sa
vocation. Il a manqué sa profession. Il aurait dû entrer dans une
autre vocation parce qu'avec tout ce qu'il faisait... Je n'en dirai pas plus
long, je pense qu'il sait ce que je veux dire et vous autres, vous le savez
aussi, ce que je veux dire. Il aurait peut-être gagné un meilleur
salaire que celui qu'il gagne actuellement, malgré qu'il en gagne un
bon.
Il a annoncé, ce matin, à l'ouverture de la Chambre, que
la date pour l'ensemencement était reportée du 1er juin au 10
juin. Il me semble qu'il aurait pu nous le dire hier, même quelques jours
avant. Comme le député de Beauce-Sud le disait, il aurait pu
l'annoncer avant. D'abord, depuis quasiment un mois, il pleut presque tous les
jours et ce n'est pas facile d'aller sur la majorité des terres du
Québec, même si elles sont drainées. Pourquoi ne l'a-t-il
pas annoncé? Non. On l'a tourmenté, on a tout fait hier pour le
savoir - les députés libéraux, les députés
de l'Opposition - pour que nos cultivateurs puissent dormir en paix ce soir, en
parlant d'hier soir. Il ne nous l'a pas dit. Il a dit: Ce n'est pas grave; on
est capable de les faire languir encore. Bien plus souvent qu'autrement, c'est
pour essayer de nous ridiculiser. Quand le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation essaie de nous ridiculiser, je ne sais pas
s'il se rend compte, s'il est conscient qu'il ridiculise les cultivateurs, dans
le champ. Je pense qu'il y en a qui commencent à s'en rendre compte. On
fait des visites, de temps à autre, dans nos comtés. Heureusement
que je représente un comté rural. Il y en a qui disent: On
commence à en avoir assez du - je ne dirai pas les qualificatifs qu'ils
emploient, pour être poli - ministre Garon. De toute façon, il a
fait comme il a voulu, il l'a annoncé seulement ce matin. (16 h 30)
Encore ce matin, le ministre a parlé du député de
Beauce-Sud. Il a dit que les questions ne venaient pas toujours du
député de Beauce-Sud, mais qu'elles venaient d'autres
députés aussi. Je pense que c'est de
bonne guerre, parce que en agriculture il n'y a pas seulement un gars,
un député qui participe à cette activité. Il y en a
d'autres qui sont capables de participer, de prendre intérêt pour
l'agriculteur. Le ministre disait que depuis que mon collègue a
paradé lors des rencontres qu'il y avait eues pour le rapport Gilson...
Je peux lui dire quelque chose au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation; j'étais là présent
à la réunion dans la région de Lanaudière à
Joliette à laquelle il y avait environ 250 personnes. Il est le seul, de
tous les personnages qui étaient sur l'estrade, qui a voulu faire de la
petite politique comme d'habitude. Il était temps qu'il arrête,
parce que s'il n'avait pas arrêté je pense que le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation se serait fait
chahuter. Vous ne savez pas cela, mais moi j'étais présent.
C'était quasiment gênant d'avoir un ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation pour nous représenter de la
façon qu'il nous a représentés.
Il a fait de même dans d'autres localités. On a entendu
Hermann Mathieu, député de Beauce-Sud, brosser un portrait de la
situation, mais apolitique, comme l'UPA et les autres. Il y en a plusieurs qui
l'ont fait. Ils ont été à la hauteur de la situation, mais
pas le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, par
exemple. Si on a gagné la cause aujourd'hui, je pense qu'il n'a pas
grand mérite parce que pour moi, il aurait aimé autant qu'on ne
la gagne pas pour dire après cela: Cela dépend du
fédéral si on a perdu, cela dépend encore du
fédéral, des gars d'Ottawa, des 74 députés
libéraux fédéraux. Heureusement, on s'est impliqué
nous les députés provinciaux, Hermann Mathieu en tête; et
je dois une fière chandelle à Hermann Mathieu parce qu'il a su se
tenir à la hauteur de la situation pour le bien des agriculteurs du
Québec. Je peux vous dire cela. On l'a gagné et je pense
qu'Ottawa nous a écoutés. Je ne dis pas qu'il écoute tout
le temps, mais il nous a écoutés en ce qui nous concerne parce
que je fais partie de l'agriculture.
On parlait de priorités. Le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation peut en parler des priorités.
Comment peut-il faire croire à la population du Québec que le
dossier des céréales était une priorité du ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation alors que la
Régie des grains aura dû attendre près de quatre
années avant d'être enfin dotée d'une
réglementation, seul instrument capable de la rendre
opérationnelle? Si on fait référence au discours qu'a
prononcé le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, le 19 décembre 1979, lors de la deuxième lecture
de la Loi sur les grains, on voit bien, encore une fois, ce que valent ces
déclarations: "Nous avons démontré une volonté
ferme d'agir pour développer la production
céréalière au Québec, au lieu de nous contenter
d'en parler", disait-il. C'est toujours le ministre Garon qui parlait. "Nous
avons retenu pour la régie québécoise l'émission de
permis. Nous avons l'établissement des différentes classes de
grains, le contrôle de l'inspection et la classification des grains, la
protection financière des différents intervenants par l'exigence
de cautionnement financier pour les agriculteurs et la collecte d'information
sur les prix et les qualités de céréales
transigées."
Le ministre aime bien parler de "bull shit" quand il émet une
opinion sur ce avec quoi il n'est pas d'accord, faire des déclarations
et des communiqués de presse quand on adopte une loi et quand on nomme
treize mois plus tard le président de la régie ainsi
créée sur papier, recommencer le même cirque au bout de 28
mois parce qu'on modifie deux articles du projet de loi original et
espérer encore pouvoir un jour lire les premières lignes de la
réglementation concernée, je laisse aux personnes
impliquées dans le domaine des céréales le soin de juger
l'odeur que peut dégager un tel scandale de lenteur administrative. Je
laisse surtout ce soin aux premiers concernés, ces agriculteurs qui
attendent toujours que la régie soit en mesure de leur fournir une
protection financière adéquate par l'exigence du cautionnement
financier lorsqu'ils entreposent leurs récoltes dans les silos
régionaux. J'aurais honte à la place du ministre de me
présenter en cette Chambre aujourd'hui avec un tel projet de loi, alors
que lui-même évoquait en 1979 l'urgence d'adopter la fameuse Loi
sur les grains, en pleine nuit, dans les heures précédant le
congé de Noël.
Maintenant que les centres régionaux sont rodés, que les
producteurs savent quels sont ceux qui sont fiables et quels sont ceux qui le
sont moins, que les intervenants du milieu ont du profiter de la
conférence sur la politique céréalière en
décembre dernier pour réitérer leur mécontentement,
il semble que le ministre va enfin se décider à agir parce qu'il
a déjà trop parlé. Comble du ridicule, nous sommes le 1er
juin et il y a un très grand nombre de céréaliers qui ne
savent toujours pas s'ils vont pouvoir semer ce printemps. Sans doute, le
projet de loi no 13 se situe tout à fait dans la déchéance
de l'actuel ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, à l'image d'un bilan législatif qui n'a plus rien
d'impressionnant. Au contraire, cela fait pitié.
M. le Président, ce matin encore, le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Jean Garon, se vantait, avec des
documents en main, en disant: Vous, les libéraux, de 1970 à 1976,
lorsqu'il
y avait des réclamations, vous ne les payiez pas. Nous payons les
agriculteurs et nous réglons lorsqu'il y a des problèmes. J'ai de
petites nouvelles pour lui. Il doit m'écouter quelque part et
j'espère qu'il va en prendre bonne note. La Fédération de
l'UPA de Lanaudière m'écrivait de Joliette le 29 novembre 1982:
"M. Albert Houde, veuillez prendre connaissance d'un télégramme
envoyé à M. Jean Garon, ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation du Québec concernant le dossier
d'assurance-récolte 1982. Signé, le président, Bernard
Duval, UPA de Joliette."
Le télégramme se lit comme suit: "Le 29 novembre 1982. M.
Jean Garon. Monsieur, "Le système collectif d'assurance-récolte
est en opération dans la région de Lanaudière depuis 1979.
La région a été victime en 1982 d'une importante
sécheresse qui a laissé les producteurs avec d'importants
déficits fourragers. Nous avons appris officiellement que la
Régie des assurances agricoles du Québec n'interviendra que dans
trois des sept zones de notre territoire. Si un tel système n'intervient
pas dans une année comme 1982, nous nous interrogeons fortement sur sa
valeur. Nous avons fait part de nos commentaires au responsable régional
de la RAAQ - Régie des assurances agricoles du Québec - qui nous
a répondu qu'il n'y avait rien à faire dans le dossier 1982." Je
poursuis: "Il nous semble tout à fait inacceptable que des correctifs ne
soient pas apportés dans le règlement des dossiers de 1982.
Ainsi, nous voulons vous rencontrer dans la semaine du 6 décembre.
Attendons confirmation avant vendredi, le 3 décembre 1982." Et c'est
signé, toujours, par Bernard Duval, président,
Fédération de l'UPA de Lanaudière.
Voici une autre lettre de la Fédération de l'UPA de
Lanaudière. "Joliette, le 17 mars 1983. M. Jean Garon, ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, 200A,
Chemin Sainte-Foy, Québec. Objet: Producteurs en difficulté." Il
dit tout le temps qu'il règle, que son gouvernement règle.
"Monsieur, "Réuni le 15 mars 1983, notre conseil d'administration
prenait connaissance de votre réponse à la "lettre de nuit
expédiée le 2 février 1983" par M. Jacques Proulx,
président de l'UPA." Jacques Proulx est le président provincial.
"Nous avons été extrêmement déçus de
constater que votre réponse ne répond que partiellement aux
demandes formulées pour les producteurs de céréales et ne
répond en aucun point aux demandes formulées pour les autres
producteurs. Par la présente, nous réitérons et appuyons
les demandes formulées dans "la lettre de nuit" et vous prions de
réviser la réponse que vous y avez apportée. "Bien
à vous, la Fédération de l'UPA de Lanaudière,
Gilbert Nicole, secrétaire."
Il y a une autre lettre, adressée non seulement au
député Albert Houde, mais à René Blouin,
député de Rousseau; un communiqué adressé aussi
à Jacques Parizeau, député de L'Assomption; une autre
à Guy Chevrette, député de Montcalm; une autre est
adressée à mon nom personnel. Voici la "lettre de nuit"
expédiée le 2 février 1983; je vais la lire: "M. Jean
Garon, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec, 200A, Chemin Sainte-Foy, 2e étage, Québec? "De
nombreux producteurs ont investi dans la production de céréales
au cours des dernières années. Ces nouveaux producteurs ont des
dettes importantes et ont, par conséquent, un coût de production
plus élevé que le producteur type sur lequel les paiements de
stabilisation sont basés. "Il n'y avait que 267 producteurs de
céréales assurés à l'assurance-stabilisation en
1981. Les autres n'ont pu bénéficier du paiement de stabilisation
de 1981. Le nombre d'assurés est monté à 2123 en 1982.
Pour tous les producteurs ayant un coût de production semblable au
modèle, cela veut dire un déficit en 1981 égal aux
paiements de stabilisation reçus par le petit nombre d'assurés.
(16 h 40) "Dans certains secteurs, la récolte de 1982 a
été désastreuse à cause d'une sécheresse
d'une gravité exceptionnelle. L'assurance-récolte réduit
l'ampleur de la perte, mais il demeure que l'assurance-récolte ne couvre
que 80% des pertes. "Le marché des céréales est moins
susceptible d'un redressement brusque et d'une importance aussi grande que
certaines autres productions. "Dans le climat économique
général dans l'agriculture, il y a une diminution de la valeur
des actifs agricoles et cela affecte encore davantage la capacité
d'emprunt de ceux qui sont en difficulté. "Étant donné
tous ces facteurs, un nombre important de producteurs de céréales
sont, malgré les paiements de stabilisation à prévoir pour
1982, dans une situation financière précaire telle qu'ils
risquent de ne pouvoir semer au printemps. "Nous croyons qu'un certain nombre
de producteurs de boeuf sont également dans une situation difficile.
"Nous croyons que la conjoncture actuelle est très difficile dans la
production maraîchère et dans la production du tabac. "Par
conséquent, nous vous demandons de mettre sur pied immédiatement
un programme spécial d'assistance financière pour les producteurs
en difficulté dans les productions nommées ci-haut." Le ministre
sait de quoi je parle. Je lui ai parlé de la
production du tabac, hier je ne sais pas s'il se le rappellera.
Peut-être qu'il pourra me répondre un jour; il ne m'a pas
répondu encore parce qu'il faut croire que la production du tabac n'est
pas importante dans notre région de Joliette-Berthier. On aura
l'occasion de lui en reparler. Sinon, on lui fera savoir par les médias
d'information écrits et parlés, si cela ne fait pas. "Ce
programme devrait prendre la forme suivante: "1) Un crédit
spécial aux producteurs en difficulté pour couvrir les pertes
monétaires subies en 1981 et en 1982. "Ce crédit spécial
devrait être sans intérêt pour assainir vraiment la
situation financière des entreprises. Un crédit spécial
qui ne fait que reporter les pertes et qui fait porter par les producteurs une
partie importante des intérêts ne fait que repousser le
problème sans vraiment le régler. Cela est
particulièrement vrai dans les céréales où on ne
peut attendre un redressement de marché de l'ampleur de celui auquel on
a assisté dans la production du porc. "Ce crédit spécial
pourrait être remboursable en cinq ans. "2) Nous croyons aussi que l'on
doit offrir aux producteurs un crédit à la production
ajusté aux besoins de chaque individu, mais sans dépasser les
besoins de financement d'une ferme familiale dans chaque production et à
un taux d'intérêt ne dépassant pas les taux sur les
prêts à long terme faits par l'Office du crédit agricole.
"3) La Société du crédit agricole devrait avoir une
politique semblable. Nous souhaitons vous rencontrer le plus rapidement
possible pour discuter de la situation des producteurs en difficulté et
des moyens à mettre en oeuvre pour redresser leur situation."
C'est signé Jacques Proulx, président
général de l'Union des producteurs agricoles. La lettre
était adressée à MM. Ferdinand Ouellet, Jacques Brulotte,
Camille Moreau, aux directeurs régionaux.
Ce n'est pas tout. Oui, M. le Président, je terminerai sous peu,
si vous me donnez deux minutes.
J'ai communiqué pas plus tard que ce midi avec le bureau
régional de l'UPA de Lanaudière à Joliette qui regroupe
plusieurs comtés dont la région 10, l'une des plus importantes de
la province de Québec, disons la deuxième en importance. Lors
d'une rencontre - ce sont les renseignements que j'ai eus ce midi à
Joliette - de M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation avec les dirigeants de l'UPA ici, à Québec, les 5
et 6 avril, étaient présents: M. Réjean Brulotte,
président de la Régie des assurances agricoles. Par la même
occasion, M. Brulotte devait produire un rapport de l'état des choses,
dont je parlais tantôt, qui s'étaient passées dans la
région.
Vous, M. le ministre, vous vous étiez engagé
vis-à-vis de la Fédération de l'UPA de Lanaudière
à étudier le dossier et à y donner suite dans les plus
brefs délais pour le plus grand bien des producteurs concernés.
Et ceci, toujours à la suite de la rencontre des 5 et 6 avril 1983. Nous
sommes aujourd'hui le 1er juin 1983, cela fait tout près de deux mois,
à 13 h 30 cet après-midi, elle n'avait pas encore eu de nouvelles
du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Quand on entendait le ministre cet après-midi: "Vous, les
libéraux, vous ne payiez pas, nous payons. Nous nous occupons de nos
affaires." Ce que je dis, je le dis avec les preuves à l'appui, avec des
lettres signées par des présidents locaux et par le
président général. Je ne sais pas ce que le ministre
entend faire, je ne sais pas s'il restera sourd comme d'habitude. Cela fait
plusieurs fois que je lui pose des questions et la seule fois que j'ai eu une
réponse, depuis le mois de décembre 1982, c'est lorsque je lui ai
demandé la liste des cours d'eau de la province de Québec. Je
l'ai reçue avant-hier à mon bureau. Cela fait pas mal de temps,
je l'ai eue avant-hier. Je remercie le ministre, en passant, pour
celle-là, mais pour le reste il ne m'a jamais répondu, il ne me
répond pas.
Quand il rit du député de Berthier qui n'est
peut-être pas un gros penseur, peut-être qu'il est plus gros
penseur que moi, mais il ne s'occupe pas des cultivateurs. S'il ne s'occupe pas
du député de Berthier, il ne s'occupe pas des cultivateurs de la
région Laurentides-Lanaudière. Je peux vous dire cela, M. le
Président.
En terminant, nous pensons que le ministre doit aller plus loin dans le
projet de loi no 13, d'abord, en rendant obligatoire l'inspection des grains
pour que les cultivateurs qui produisent du grain dans la province de
Québec, d'une qualité égale à celle du grain des
autres provinces, puissent être payés le même prix que les
autres. À ce moment-là, j'en serai fier, et c'est pour cette
raison que je voterai pour le projet de loi no 13. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Champlain.
M. Marcel Gagnon
M. Gagnon: Merci, M. le Président. Le député
de Berthier, lorsqu'il a commencé son discours, a dit: C'est normal pour
l'Opposition de critiquer et de vouloir améliorer les lois qu'on adopte.
Je pense qu'on convient tous que c'est le rôle de l'Opposition et, dans
ce sens, l'Opposition a un rôle très positif à jouer. De la
loi 13, la seule note qu'il a donnée, à mon point de vue,
d'après ce que j'ai pu comprendre, c'est
la note finale de son discours en disant qu'il était d'accord,
qu'on n'allait peut-être pas tout à fait assez loin à son
goût, mais qu'il allait voter pour la loi. Tout le reste du discours a
été pour critiquer le ministre, critiquer les positions du
ministre dans le domaine agricole, absolument pas pour parler de la loi 13.
On sait que c'est une loi qui est importante, on sait que c'est une loi
qui est tout de même assez facile à expliquer - on n'a pas
à en parler pendant 20 minutes - et on profite de l'occasion, d'un
côté comme de l'autre de cette Chambre, pour faire un peu une
rétrospective des difficultés, en ce qui concerne l'Opposition,
qu'on éprouve dans l'agriculture et, de notre côté, des
avantages dont on a pu faire profiter la classe agricole depuis 1976.
Je sais que je pourrais rappeler des souvenirs au député
de Berthier. Tantôt, il mentionnait qu'il était scandalisé
du fait que - je n'ai pas pu le vérifier, mais je présume qu'il
disait la vérité - un groupe d'agriculteurs de l'UPA de
Laurentides-Lanaudière attendait une lettre du ministre depuis deux
mois. C'est peut-être long, deux mois, lorsqu'on attend une
réponse, je suis d'accord avec le député dans ce sens. Je
voudrais rappeler à ses souvenirs qu'avant 1976, lorsque nous avons eu
l'occasion de travailler ensemble - nous avons même eu l'occasion de
faire du syndicalisme agricole ensemble - non seulement on attendait deux mois,
mais on attendait deux ans, quatre ans. On a attendu deux termes avant qu'on se
décide à faire des choses pour l'agriculture et on ne l'a jamais
fait.
Dans le passé, le gouvernement a agi de cette façon. Vous
vous souviendrez, M. le Président, de la colère verte. Cela a
nécessité des efforts de la part du député de
Berthier, de moi-même et de l'UPA. Avec l'ensemble des producteurs
agricoles, nous avons barré les routes, nous avons fait à peu
près tout ce qu'il était possible de faire pour sensibiliser le
gouvernement de l'époque à s'occuper de l'agriculture. Je me
souviendrai qu'à un moment donné le premier ministre du
Québec, après quelques mois de difficultés que nous avons
vécues au Québec, après des manifestations de toutes
sortes, était venu à bout de s'apercevoir que l'agriculture
existait au Québec.
Je pense que depuis qu'on a pris le pouvoir, depuis 1976, on a
prouvé aux agriculteurs qu'on savait que l'agriculture existait, qu'on
savait que l'agriculture était l'industrie la plus importante du
Québec, qu'on savait aussi qu'on devait faire des efforts,
améliorer tout le domaine de l'agriculture non seulement pour
développer cette industrie, mais pour créer de l'emploi et
améliorer le rendement des agriculteurs.
J'aimerais faire une petite rétrospective de ce qui a
été fait. D'abord, vous vous souviendrez qu'on parlait beaucoup
des industries agricoles - évidemment, c'était rentable en
campagne électorale - mais quand il s'agissait d'adopter des lois,
souvent, on adoptait des lois non pas pour plaire aux agriculteurs, mais pour
ne pas déplaire aux fournisseurs des caisses électorales; on
laissait les lois sur les tablettes. (16 h 50)
On a fait combien de campagnes électorales avec la protection du
territoire agricole? On parlait de l'agriculture en termes d'industrie
importante mais jamais on n'a pensé mettre cette industrie importante
dans un parc industriel où elle serait protégée de tous
ceux qui écorchaient l'agriculture de toutes sortes de façons.
Cela a pris l'avènement au pouvoir du Parti québécois en
1976 pour former enfin ce parc industriel agricole. On l'a fait, nous en sommes
très fiers, et je pense que pas un seul agriculteur au Québec ne
voudrait revenir - pour cette loi-là entre autres - à l'ancien
régime.
On s'est dit ensuite: C'est beau d'avoir un parc industriel, mais il
faut mettre des industries à l'intérieur, qu'elles vivent bien.
Et on a commencé à améliorer le rendement de
l'agriculture. Je ne ferai pas l'énumération de la
quantité de programmes qui ont été améliorés
ou mis sur pied. Pensons de Sol-Plus, au drainage souterrain. Regardons les
statistiques de ce qui s'est fait avant 1976 et de 1976 à 1982.
Seulement dans le domaine du Sol-Plus, des travaux mécanisés, du
drainage souterrain on a fait plus - et le ministre de l'Agriculture a eu
l'occasion de le dire à quelques reprises - dans ce domaine-là
qu'il s'en est fait de Duplessis à 1976.
Avant, entre autres dans le domaine de Sol-Plus et aussi pour le
drainage souterrain, on avait fait beaucoup de patronage. On avait nos firmes,
nos organisateurs, les propriétaires de "bull" qui étaient
propriétaires des heures de "bull" pour les agriculteurs. Il fallait
être absolument du bon côté pour être capable de
profiter de quelques heures de "bull".
Aujourd'hui, un des plus grands avantages qu'on a dans le domaine de ces
programmes-là, c'est qu'on a enlevé complètement le
patronage. C'est maintenant l'agriculteur qui choisit son ingénieur, qui
fait faire son plan, qui fait travailler qui il veut pour autant que le
contremaître, que l'employé qu'on engage a l'équipement
nécessaire. On a enlevé le patronage dans ce domaine-là et
seulement par ce moyen-là on a multiplié énormément
- je n'oserais pas dire le chiffre - le rendement du même budget. Il ne
s'agit pas nécessairement d'augmenter le budget, il s'agit de savoir
administrer, d'enlever le patronage.
On parlait aussi de l'assurance-récolte,
l'assurance-stabilisation des revenus. Je suis
persuadé que le député de Berthier sera d'accord
avec moi là-dessus. Je me souviens jusqu'à quel point on s'est
battu pour demander une politique d'assurance-stabilisation des revenus. On l'a
obtenue en 1975 mais elle est restée sur la tablette au ministère
de l'Agriculture. Ce n'était pas rentable pour les fournisseurs de
caisses électorales de protéger l'agriculture. On a obtenu la loi
mais elle est restée sur la tablette.
Depuis que nous avons pris le pouvoir en 1976, dix productions sont
maintenant assurées, dans le domaine de l'élevage, par
l'assurance-stabilisation.
Oh! des statistiques on pourrait vous en donner comme cela. C'est
incroyable de voir le changement dans le domaine agricole. Pensons donc un peu
au crédit agricole; à l'intérieur de l'UPA, combien de
démarches a-t-on faites, combien de représentations pour demander
au gouvernement du temps de voir à moderniser le crédit agricole,
à court terme, à moyen terme et à long terme. On avait
même suggéré la création d'une banque de sols. On a
amélioré le crédit agricole à deux ou trois
reprises depuis 1976. Aujourd'hui, justement, le député de
Berthier disait qu'il n'avait pas reçu de réponse de l'UPA de son
comté, de sa région, concernant une demande de crédit
à la production ajusté aux besoins. Probablement qu'ils ne sont
pas en retard dans leurs nouvelles mais le député de Berthier est
en retard parce qu'on a adopté ici même une loi qui permet
maintenant un crédit à court terme pour le producteur de
céréales justement, pour le producteur de boeuf, qui va
jusqu'à 500 000 $. C'est quelque chose de nouveau, cela n'existait pas
avant.
Voyez tout ce qu'on a fait dans le domaine agricole qui fait que lorsque
les gens d'en face parlent de l'agriculture et du ministre de l'Agriculture ils
deviennent rouges maintenant. Vous me direz que c'est naturel pour eux
d'être rouges, mais là, on dirait que c'est rouges de rage ou
rouges de honte. Ils ont honte de ne pas avoir fait plus dans leur temps. Nous,
nous sommes fiers de nos programmes agricoles et nous sommes fiers de continuer
d'ajouter pour l'agriculture et pour l'agriculteur québécois des
programmes agricoles de plus en plus modernes, de plus en plus ajustés
à nos besoins.
Tantôt, un député disait des choses incroyables; on
a vraiment entendu toutes sortes de choses. On peut faire des gorges chaudes et
se contredire du même souffle. Le député de Beauce-Sud
prévoit que la température étant inclémente, il n'y
aura à peu près pas de semences et les gens vont perdre de
l'argent. Du même souffle, il prévoit que les
céréales vont baisser. Je ne sais pas, j'ai passé une
partie de ma vie dans ce milieu et normalement, quand on prévoit une
récolte à la baisse, au moins, on peut prévoir aussi que
les prix vont augmenter. Mais le député de Beauce-Sud
prévoit les deux en même temps. Je vous ferai remarquer, M. le
député de Beauce-Sud, que la situation du marché
extérieur n'est pas tellement meilleure qu'ici. Par exemple, le climat
des États-Unis n'est pas tellement meilleur qu'ici. Qu'on prévoie
les mauvais côtés en même temps, une récolte à
la baisse, si on peut semer, et en même temps des prix à la
baisse, c'est la première fois que j'entends quelqu'un dire des choses
semblables.
Le député de Huntingdon, lui, dit qu'on est même en
train d'acheter des terres. C'est incroyable! On a entendu ces gens parler de
faillites dans le secteur agricole, c'est incroyable! Ils ont sûrement
entendu parler de faillites de temps à autres car ils ne pourraient pas,
je pense, inventer des choses semblables. Je voudrais ne faire qu'une petite
vérification. Les faillites dans le secteur agricole, de 1979 à
1981, sur quelque 21 000 ou 23 000 clients à l'Office du crédit
agricole, en abandon et faillite, vous avez environ 169 cas; sur une
période de trois ans, si vous faites le pourcentage, vous arrivez bien
au-dessous de 0,5 %. C'est une situation qu'il faut corriger. C'est bien
certain que lorsqu'on veut faire de l'agriculture une industrie, il y a des
risques, il peut y avoir des faillites, c'est certain, mais ce n'est pas
seulement à cause de la situation économique; souvent, une
faillite se produira même si la situation économique est bonne. Si
sur 21 000 ou 23 000 clients de l'Office du crédit agricole 169
faillites ont lieu en trois ans et qu'on crie au scandale, je pense qu'on
exagère un peu.
Contrairement à ce que dit le député de Huntingdon,
qu'on est en train d'acheter des terres, que cela va mal, etc., le revenu net
des agriculteurs québécois depuis 1976 a doublé ou
presque. En 1976, vous aviez un revenu net de 382 988 000 $ au Québec;
en 1982, les agriculteurs québécois ont maintenant un revenu net
de 663 010 000 $. Seulement pour l'année 1982, l'augmentation en revenu
net de l'agriculteur au Québec est de 8,4 %, l'augmentation la plus
forte au pays. Pourquoi tenter de faire peur aux gens en disant que ça
va mal en agriculture? Cela ne veut pas dire qu'il n'y a rien à
corriger, cela ne veut pas dire qu'on n'est pas prêt à entendre
les critiques de l'Opposition, quand ce sont des critiques fondées, on
est prêt à continuer de travailler pour améliorer la
situation de l'agriculture et de l'agriculteur, mais il faudrait arrêter
de croire au Bonhomme Sept Heures et surtout de tenter de faire croire au
Bonhomme Sept Heures.
Nous sommes en train d'étudier une loi qui non seulement
permettra de boucler la boucle, mais qui confirmera ou complétera le
programme des céréales au Québec. On s'est
engagé à devenir autosuffisant dans le secteur de la
culture céréalière à 70% et on y arrivera. La loi
présentée pour améliorer la Régie des grains du
Québec a précisément pour but de donner aux producteurs
québécois la pleine mesure de leur rendement, elle a pour but de
permettre aux producteurs québécois de pouvoir faire classifier
leurs grains et obtenir le prix pour leur produit. C'est aussi dans le but de
permettre au producteur, à celui qui consomme les céréales
québécoises, à celui qui consomme les
céréales qui sont cultivées par les producteurs de
céréales d'obtenir la meilleure qualité possible. (17
heures)
Cela va également nous permettre de vérifier la
qualité des produits qu'on achète et qui viennent de
l'étranger, c'est-à-dire du reste du Canada. On a l'habitude, au
Canada, de classifier les céréales de façon
extraordinaire. On n'a rien à nous reprocher quand ce sont des
céréales pour vendre à l'étranger, en France, en
URSS, aux États-Unis. Les céréales sont bien
classifiées. Quand il s'agit de céréales pour consommation
locale - je le sais par expérience, pour avoir été dans le
métier assez longtemps - on peut se contenter d'une qualité de
beaucoup inférieure.
Donc, le projet de loi qu'on étudie aujourd'hui va donner aux
producteurs de céréales, aux consommateurs de
céréales, aux éleveurs du Québec, d'abord,
l'assurance que, dorénavant, le produit fabriqué au Québec
et le produit qu'on fait venir de l'extérieur du Québec est d'une
qualité supérieure. Je vous remercie beaucoup.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mégantic-Compton.
M. Fabien Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Nous sommes
réunis pour étudier le projet de loi no 13, loi qui vient
modifier la loi no 75 qui a été adoptée en décembre
1979. C'est un projet de loi, selon les ténors de l'autre
côté, extrêmement important, tellement important que le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation n'a
même pas été capable d'être pertinent tout au long de
son allocution. Il n'a absolument pas parlé du projet de loi. Il a
parlé du tonnage. Il a parlé de l'acrage. Dans le tonnage, il s'y
connaît. Il a parlé de toutes sortes de choses, mais il n'a
absolument pas parlé du projet de loi no 13.
M. le Président, il faut avoir un certain culot, comme
gouvernement, pour se servir du Parlement, pour se servir de notre
Assemblée nationale pour ne faire que mousser une politique
péquiste. Ça, M. le Président, c'est de la politique
péquiste. On va discuter toute la journée de ce projet de loi qui
vient modifier une loi qui n'a jamais été mise en application.
Cela, c'est très urgent. C'est l'urgence péquiste. Mais qu'est-ce
que cela va changer à un agriculteur de mon comté dont la ferme
est en train d'être saisie par le Crédit agricole? Qu'est-ce que
cela va changer à un travailleur de la construction de mon comté
qui est en prison parce qu'il a osé aller travailler? Qu'est-ce que cela
va changer à un chômeur de mon comté qui n'a pas d'emploi?
Non. Il fallait faire un spectacle et, du côté spectacle, le
ministre a du talent; on l'admet, on le reconnaît. Si jamais il est
défait, pas si jamais, à la prochaine élection, il sera
sûrement défait et il y a sûrement des cirques qui seraient
intéressés à l'engager, parce qu'il est fantastique. Il
faut l'admettre.
Mais qu'est-ce que cela change de mobiliser 122 députés,
l'Assemblée nationale au service des péquistes, pour parler
d'agriculture? J'écoutais les intervenants de l'autre côté
et pas un seul, d'ailleurs, n'a été pertinent au projet de loi.
On n'a fait que vanter les mérites du ministre et on a vu très
bien que, dans certains cas, on ne savait même pas de quoi on parlait.
Mais on parlait pour les agriculteurs. On parlait de nos belles terres. On
parlait de tonnage, d'acrage et de tout ce que vous voulez, mais on n'a pas
parlé du projet de loi no 13 qui vient amender une loi - je le
répète - qui n'est même pas en vigueur. Cette Régie
des grains qui a été créée, en décembre
1979, par une loi, qu'est-ce qu'elle a fait depuis cette date? Absolument rien.
On est déjà en train de la modifier même avant de s'en
servir. Imaginez le jour où on tentera de la mettre en application. On
arrivera avec d'autres projets et cela donnera l'occasion de faire croire
à nos agriculteurs que le Parti québécois s'occupe d'eux,
que le Parti québécois a inventé l'agriculture au
Québec. Mais qu'est-ce que cela change? Je le répète. Pour
l'agriculteur de mon comté qui est pris, qui n'a pas le droit de laisser
son fils se construire chez lui à cause de la loi no 90, à cause
de l'autre loi no 12 qui s'en vient et qui va restreindre encore davantage ce
droit, qu'est-ce que cela va changer? Est-ce que c'est cela l'urgence au
Québec?
C'est évident, M. le Président, qu'on va voter pour ce
projet de loi, parce que c'est un projet de loi inoffensif. Il n'y a absolument
rien là-dedans. On ne peut pas voter contre ce projet de loi, il n'y a
absolument rien. Mais je dis que ce ne sont pas les préoccupations des
agriculteurs en ce moment. En ce moment, les agriculteurs ont besoin d'autre
chose. Ils ont besoin d'être rassurés. Il y a des cas, chaque
semaine; des gens viennent me rencontrer; ils ne sont pas capables de faire les
paiements sur leurs fermes, tout simplement parce qu'ils ont eu des taux
d'intérêt élevés et que l'Office du
crédit agricole semble assez intransigeant. On n'hésite
pas à saisir la ferme d'un agriculteur. Ce n'est pas la faute du
ministre, c'est la régie qui a fait cela. Ce n'est pas ce qu'on demande
au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. On lui
demande de s'occuper de tous les problèmes des agriculteurs.
J'écoutais le ministre, le peu que j'ai pu comprendre de son discours
parce qu'il a parlé de toutes sortes de choses, il faut
reconnaître chez les agriculteurs un fiasco financier. Ce n'est pas un
secret de polichinelle que nos producteurs de sirop d'érable qui ont eu
des subventions pour faire des installations extrêmement dispendieuses
sont pris à ne pouvoir vendre leur sirop parce que le ministre n'avait
pas pensé d'ouvrir un marché. Il n'avait pensé qu'à
subventionner, qu'à envoyer un chèque avec la fleur de lis pour
tenter de s'assurer la sympathie de ces producteurs, s'assurer de la reprise du
pouvoir en 1981.
Je me demande pourquoi on parle de planification, je me demande si de
l'autre côté ils savent ce que cela veut dire la planification. Ce
n'est pas la première fois qu'on modifie des lois qui n'ont jamais
été mises en application. On a voté une loi disant qu'il
n'y a plus de retraite à 65 ans. Quelques mois après, on vote une
loi et on dit ce n'est plus 65 ans, mais à 60 ans. On ne sait pas,
peut-être qu'à l'automne on aura une loi pour porter la retraite
à 55 ans et s'il pouvait baisser plus, peut-être que j'aurai la
chance de prendre la mienne.
M. le Président, c'est dommage que ce parti politique, que cette
formation politique qui forme le gouvernement n'ait aucune espèce de
respect de notre institution parlementaire. Je vois la députée de
Johnson qui admire son ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. Moi, je l'admire bien moins que vous, Mme la
députée de Johnson, votre ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et j'ai des agriculteurs dans le
comté de Mégantic-Compton qui ne l'adorent pas non plus. Je peux
vous assurer cela.
C'est dommage que cette formation politique n'hésite pas à
mobiliser, comme je l'ai dit, 122 députés de l'Assemblée
nationale pour faire du spectacle, pour faire de la publicité
péquiste. Ils vont faire les manchettes encore. On a parlé
d'agriculture. Cela veut dire quoi pour l'agriculteur? J'aimerais cela, oui,
qu'on parle d'agriculture et qu'on dise qu'à compter de la sanction de
cette loi, les agriculteurs pourront faire cela. Mais là, ils vont faire
quoi? Cela modifie la Régie des grains qui a été
constituée, formée en 1979, mais qui n'a jamais été
mise en application. Allo l'urgence! Nous sommes en session intensive,
probablement qu'on nous fera siéger jour et nuit pour pouvoir encore une
fois lancer des mots, des paroles, des slogans qui vont donner quoi? Absolument
rien.
Puisque les autres n'ont pas été pertinents, vous me
permettrez de ne pas l'être davantage et d'en parler un peu de ce
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, qui est
censé être au service des agriculteurs. Je vous dirai que depuis
deux ans - on a parlé tout à l'heure d'un délai de deux
mois, moi ce n'est pas deux mois - j'adresse continuellement des lettres
à ce ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
et je ne reçois que des accusés de réception. Je
téléphone, il n'est pas présent. Son chef de cabinet n'est
pas là. Il est en réunion. On est censé me rappeler le
lendemain. On ne rappelle pas. Et pourquoi je veux rejoindre le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation? Tout simplement parce
qu'il est venu faire des promesses dans mon comté. Il est venu promettre
des subventions à des expositions agricoles. Je voudrais qu'il respecte
ces engagements. Là, le ministre ne répond plus. Il n'est plus
là. Il est là parce qu'on le voit de temps à autre.
J'aimerais qu'il donne suite à mes revendications pour que je puisse
dire quelque chose aux gens qui m'ont référé leurs
problèmes. Que je puisse dire oui, cela marche ou non cela ne marche
pas. Mais non, il est probablement à pondre ou concevoir d'autres
projets de loi du genre du projet de loi no 13, qui fait une belle
publicité à la télévision, qui risque de faire les
manchettes - cela se peut parce qu'on a parlé d'agriculture - mais qui
donne quoi à nos agriculteurs? Absolument rien.
C'est cela que je déplore de la part du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je ne le
déplore pas seulement de ce ministre, c'est la même chose pour
tout le gouvernement au complet. On annonce quatre fois le même projet.
On fait conférence de presse sur conférence de presse pour
finalement en arriver avec absolument rien. Tout récemment, on
promettait - dans mon comté, encore une fois - des investissements
sensationnels à East Angus. Savez-vous depuis combien de temps on le
promet? Ce n'est absolument pas fait. Ce n'est pas le projet de loi...
J'écoutais la députée de Johnson qui avait le
projet de loi no 13, qui vibrait avec cela, dire: mon Dieu que cela va donc
changer et qu'on va donc améliorer nos céréales au
Québec et notre production va toute être changée! Je
regrette, mais cela ne va changer absolument rien si on ne commence pas
à la base, par la mise en application d'abord de la loi 75 créant
la Régie des grains. (17 h 10)
M. le Président, je serai bref, parce que - je l'ai
mentionné - cela ne sert à rien de parler 25 minutes sur un
projet de loi semblable qui ne veut absolument rien dire -
à mon avis, il n'est pas mauvais - parce qu'il va amender une loi
qui n'a jamais été mise en vigueur. Au nom des agriculteurs du
Québec, ce n'est pas ce que je réclame de la part du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je réclame de
vraies mesures favorisant l'agriculture au Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Pour ne pas induire qui
que ce soit en erreur, actuellement, le temps d'intervention est de 20 minutes
simplement. M. le député de Beauharnois.
M. Laurent Lavigne
M. Lavigne: Merci, M. le Président. Comme vous avez pu le
constater, je ne suis pas un gars qui intervient souvent en Chambre, parce que
je trouve que les travaux de la Chambre sont précieux et je voudrais que
plus souvent on intervienne seulement quand c'est vraiment nécessaire.
Je trouve que pour ce qui est de l'agriculture, quand on considère ce
qu'elle était quand on est arrivé en 1976 par rapport à ce
qu'elle est maintenant, cela vaut la peine de prendre la parole en cette
Chambre et d'en dire quelques mots. On a évidemment à discuter
aujourd'hui du projet de loi no 13 qui va permettre à la Régie
des grains de classifier les grains et de voir à leur qualité au
Québec. Je pense que c'est là un projet de loi qui est
nécessaire. Ce n'est pas tout de voir à produire
différentes denrées, mais il faut voir à ce que ces
denrées soient de la meilleure qualité. Donc, c'est un projet de
loi qui s'inscrit dans la poursuite de notre travail en ce qui a trait à
la promotion de l'agriculture et je pense que ce projet de loi a sa place.
Si on fait une brève rétrospective de ce qu'était
l'agriculture au Québec quand nous sommes arrivés en 1976, il y
avait un projet de loi qui, à mon avis, était fondamental et que
nous devions adopter, sans quoi tout le reste n'aurait été que
fumisterie et incohérence. C'est un projet de loi qui était sur
les tablettes au temps du Parti libéral. Je veux parler ici de la loi 90
sur la protection du territoire agricole. Je pense que c'est une loi qui est
fondamentale; elle est l'assise de toute l'agriculture. Cela ne sert à
rien de donner de l'aide aux agriculteurs et de promouvoir l'agriculture si on
n'est pas sûr de notre banque agricole et de ce que doivent devenir nos
terres agricoles. La Loi sur la protection du territoire agricole était
devenue une nécessité. Elle donnait à tous les gens du
Québec, finalement, l'obligation de respecter le territoire agricole.
Cela aurait été incohérent de poursuivre nos
démarches et de continuer à faire bénéficier les
agriculteurs de subventions pour faire du drainage agricole, construire des
silos sur leur ferme ou tous autres travaux d'investissement si le fonds de
terre n'avait pas été assuré pour le maintien de
l'agriculture. Autrement, qu'est-ce que cela aurait donné de mettre des
drains agricoles dans les terres pour qu'elles produisent davantage si un
constructeur achète ces terres, y met les "bulls", les pelles
mécaniques et les divise en lots, ce qui veut dire que les silos sont ni
plus ni moins gaspillés que les drains sont gaspillés que les
heures de "bull" qu'on a mises sur le défrichage ou sur le creusage des
fossés sont gaspillées. Donc, cela ne servait à rien de
promouvoir des programmes ou de faire en sorte qu'il y en ait de plus en plus
pour aider les agriculteurs si on ne pouvait pas garantir notre sol agricole.
Il y avait aussi un éparpillement qui était illogique. On
construisait un peu partout sur le territoire du Québec et, souvent, on
construisait aussi sur nos terres agricoles. Cela nécessitait une
infrastructure qui demandait de l'éclairage, des trottoirs, des
égouts et des aqueducs. On se répandait un peu partout sur le
territoire. Donc, la loi 90 vient, en harmonie avec la loi 125, faire en sorte
que le territoire du Québec soit mieux contrôlé. La partie
agricole doit demeurer agricole, parce que je pense qu'un pays doit voir
d'abord à se nourrir. L'agriculture est un domaine fondamental.
Si on regarde la promotion qu'on a faite de cette agriculture en
collaboration avec les meuniers, avec les agriculteurs eux-mêmes, que ce
soit dans l'élevage, que ce soit dans la production des grains, le
ministre Garon a donné ce matin des chiffres mirobolants, quand on
compare ce qui existait en 1976 et ce qui existe maintenant.
Je me souviens que l'une des premières démarches que
j'avais faites, un des premiers dossiers que j'ai eus, c'est en 1976. Dans mon
comté, à Valleyfield plus particulièrement, on a une
distillerie qui s'appelle la Distillerie Schenley, qui utilise
énormément de maïs tous les ans pour faire des boissons.
J'étais allé rencontrer les directeurs de la Distillerie Schenley
pour leur demander où ils s'approvisionnaient en maïs-grain. On me
disait qu'ils s'approvisionnaient presque à 100% en Ontario ou aux
États-Unis. Je leur ai demandé, étant donné qu'on
avait des producteurs de maïs dans la région, pour quelle raison la
compagnie n'achetait pas du maïs-grain local. On m'a répondu
à ce moment que c'était parce que les producteurs ne pouvaient
pas lui assurer un approvisionnement régulier pendant les douze mois de
l'année. Les agriculteurs, quand arrivait l'automne, le temps de la
récolte, avaient énormément de maïs, mais vu qu'il
n'y avait pas de moyens d'entreposage, qu'il n'y avait pas de silos pour
entreposer leur grain, voyaient à s'en défaire, à le
vendre le plus rapidement
possible. Il arrivait donc que la Distillerie Schenley pouvait
s'approvisionner chez nous pendant la période de la récolte, mais
en janvier, février, mars et les autres mois de l'année, on
manquait de maïs. C'est donc la raison pour laquelle ils devaient
s'approvisionner à l'extérieur.
Depuis que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation a instauré le fameux programme d'aide à la
construction des silos d'entreposage de maïs, j'ai revu la situation. Tout
d'abord, les agriculteurs ont profité de ce programme. Quand on se
promène dans le comté de Beauharnois, on voit que la plupart des
agriculteurs, se sont dotés de silos d'entreposage pour le maïs et
les grains de provende. Aujourd'hui, j'ai revu la compagnie Schenley et le
pourcentage est complètement renversé. Elle achetait en 1976
environ 10% de maïs local et 90% de maïs à l'étranger.
Aujourd'hui, le chiffre est complètement à l'inverse. Elle
achète présentement environ 90% du maïs local et 10%
à l'extérieur. La raison pour laquelle elle peut faire cela
maintenant, c'est grâce à une plus grande production de maïs,
d'une part, et à la capacité qu'ont aujourd'hui les cultivateurs
d'entreposer leur maïs et de fournir à leurs clients du maïs
douze mois par année.
Je pense que c'est le résultat d'une politique pensée,
d'une bonne aide aux agriculteurs en ce qui a trait à la mise en place
du programme de silos d'entreposage.
Cela a été un peu la même chose au niveau de tous
les programmes Sol-Plus. On sait - et la preuve a été faite
à maintes reprises - qu'une terre qui est drainée donnera un bien
meilleur rendement. On peut commencer la saison plus tôt le printemps et
poursuivre nos travaux un peu plus tard l'automne et, en plus de cela, le
rendement est nettement supérieur. Ce qui fait que l'aide qu'on a
apportée aux agriculteurs par le programme de drainage des terres a
été très efficace, ce qui fait aussi que, dans le
comté de Beauharnois, il n'y a presque plus de terres à drainer
parce que tous les cultivateurs ont pu bénéficier du programme
d'aide du gouvernement. C'est un peu la même chose pour le drainage
souterrain et les cours d'eau.
Quand on regarde le paysage agricole du Québec dans l'ensemble -
en plus de mon comté, je voyage de Valleyfield à Québec
chaque semaine - on a vu se métamorphoser tout le paysage agricole.
C'est aussi un peu à cause du fameux programme de défrichage et
du programme d'heures de bulldozer, comme on l'appelle, pour permettre aux
agriculteurs de couper les coteaux, de couper les arbres et de faire en sorte
qu'aujourd'hui, on n'ait plus que des petites pièces, mais de grands
champs bien aménagés, bien cultivés. C'est là un
paysage complètement différent. Si c'était si
pénible, comme le disent les libéraux, d'être agriculteurs
aujourd'hui...
Quand les libéraux ont parlé tout à l'heure du
projet de loi, ils disaient que les agriculteurs sont voués à la
faillite, que le Crédit agricole les égorge, que ce n'est pas
payant d'être agriculteur, qu'en tout cas, c'est le marasme dans
l'agriculture, qu'il n'y a rien de pire que d'être agriculteur au
Québec. Pourtant, s'ils avaient raison, on ne verrait pas le paysage
agricole se métamorphoser du pire au mieux, on verrait les agriculteurs
péricliter, les agriculteurs produire moins, avoir moins de vaches,
moins de lait, moins de porcs, moins de grain. Mais quand on regarde les
chiffres, ce ne sont pas des chiffres que nous inventons, chaque année,
depuis 1976, grâce à tous les programmes que nous avons mis de
l'avant pour aider les agriculteurs à voir à la promotion de
l'agriculture et de leurs productions, on constate des augmentations partout.
On a un plus grand acrage en culture; les terres sont mieux drainées,
sont mieux égouttées; il y a des silos pour entreposer les
grains. Il y a une foule de programmes qui ont permis aux agriculteurs de se
sortir du pétrin. (17 h 20)
Anciennement, il n'y a pas si longtemps, on appelait le Québec
"la terre de Caïn". Aujourd'hui, je pense que la terre de Caïn est en
train de devenir la terre d'Abel, parce que les gens sont heureux de cultiver
au Québec. À cause de toutes les mesures qui ont
été mises de l'avant, on voit la différence entre ce qu'il
y avait et ce qu'il y a maintenant.
C'est un premier pas que nous avons fait dans l'agriculture. Bien
sûr, il y a encore d'autres mesures à apporter, on ne peut pas
tout faire en même temps, mais on a posé les premiers jalons d'une
saine agriculture, d'une saine gestion agricole. Avec la coopération de
tous les agriculteurs, je pense qu'on s'en va dans le bon chemin. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Maskinongé et whip de l'Opposition.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je pense qu'il n'est
pas donné à tout le monde de connaître les us et coutumes
de l'Assemblée nationale, pas plus qu'il n'est donné à
tout le monde de voir de quelle façon les députés sont
appelés à travailler, ici à l'Assemblée nationale.
Je pense que le corridor est assez large, le ministre de l'Agriculture nous l'a
ouvert ce matin avec le discours qu'il a prononcé, où il a
parlé de tout, sauf des grains. Quelqu'un qui connaît le
moindrement les travaux de la Chambre se rend compte que ce que nous
faisons
présentement, c'est du marketing, de la publicité non
seulement de la part du ministre de l'Agriculture, mais de la part du
gouvernement.
Nous avons devant nous un projet de loi, comme d'autres, d'ailleurs, que
nous avons étudiés en agriculture - rappelons-nous les projets de
loi nos 112 et 133, je pense, que nous avons étudiés
dernièrement - qui fait l'unanimité de cette Chambre. C'est
l'unanimité de cette Chambre au point de vue du projet de loi. Les
modalités, les règlements, la façon de procéder,
c'est sûr que ça vient apporter des divergences d'opinions de part
et d'autre de cette Chambre. Comme projet de loi, ça fait
l'unanimité de la Chambre.
J'entendrai le leader parlementaire du gouvernement nous dire, dans une
semaine et demie: M. le Président, nous avons encore 15, 17 ou 19 lois
à étudier. On sait qu'hier on en a déposé une
vingtaine, vingt lois, trois lectures chacune, commissions parlementaires pour
l'étude article par article, et il reste à peine quinze jours de
session, si on considère que le règlement sessionnel stipule
qu'on doit terminer le 21; moins les samedis et les dimanches, il reste une
quinzaine de jours de session. On nous dira bientôt: Il reste encore 15,
17 ou 19 lois à adopter, et le Parti libéral du Québec
fait en sorte, dans certaines lois, de retarder les travaux de la Chambre, il
fait de l'obstruction dans certains cas.
Drôle de coïncidence, pour encenser le ministre de
l'Agriculture, on choisit exactement le bon temps, on choisit le jour, on
choisit une période où on va parler beaucoup. De plus, la
stratégie de ce gouvernement, entendue derrière les rideaux,
derrière le fauteuil du président, c'est qu'il faut parler
beaucoup, de sorte que, si les libéraux, parce qu'ils sont d'accord, ne
parlent pas beaucoup, on dira que les libéraux n'ont rien à dire
du côté agricole. Cela, c'est de la stratégie.
Quand il sera 22 heures, ce soir, on va apporter des projets de loi
controversés, contestés tels que le contrôle
intérimaire qui fait en sorte que de nombreux citoyens du Québec
ne peuvent pas se construire à cause des lois dans le domaine municipal
adoptées par ce gouvernement. Mais on pourra parler de cela après
22 heures, ce soir. Je me rappelle avoir parlé avec quelqu'un qui occupe
un poste dans ce gouvernement, qui me demandait aujourd'hui: Avez-vous
l'intention d'avoir beaucoup d'intervenants, ce soir, sur la loi? On a dit: On
a six ou sept intervenants. Tant que cela? Il me semble que ça devrait
être adopté rapidement. C'est sûr, la stratégie de ce
gouvernement est la suivante: quand ce n'est pas controversé et qu'on
veut faire du marketing, quand on veut encenser un gars qui a besoin
d'être encensé tout le tour, on fait cela de jour et on fait
parler beaucoup de monde. Mais quand arrive un projet de loi
controversé, on dit à l'Opposition: Vous ne devriez pas parler
autant, on devrait s'entendre pour parler seulement un de chaque
côté et passer cela rapidement parce qu'il y a des citoyens qui
sont lésés par ce projet de loi. C'est la stratégie de ce
gouvernement-là.
J'écoutais tantôt le député de Champlain, mon
bon ami et collègue, voisin de comté ou à peu près,
qui mentionnait que les libéraux avaient honte et rougissaient de honte
en certaines occasions concernant les lois agricoles. Il ne sera jamais
possible de venir aussi honteux et aussi rouge de honte que lorsque le ministre
de l'Agriculture a fait une apparition à Trois-Rivières au sommet
économique où non seulement le député de
Maskinongé, libéral par surcroit, a eu honte, a rougi mais
où trois ministres -je le dis et je les nomme à part de cela. Ils
soulèveront une question de privilège si ce n'est pas vrai et je
prendrai à témoin tous ceux qui assistaient à ce sommet
économique - le ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional le ministre de
l'Énergie et des Ressources par surcroit ministre responsable de la
région et le ministre des Transports. Tous les gens qui étaient
là étaient tout simplement déboussolés de voir
jusqu'à quel point le ministre de l'Agriculture des Pêcheries et
de l'Alimentation est arrivé là Gros-Jean comme devant, sans
aucune notion de ce qu'était un sommet économique et dans le but
de rire à peu près de tout le monde et essayer de bouffonner sur
de la politicaillerie alors que tout le monde s'était entendu pour ne
faire aucune politique, aucune politicaillerie et tenir ce sommet à un
niveau élevé.
Rouges de honte comme ces trois ministres-là, il n'y aura jamais
un libéral assez rouge et assez honteux pour faire voir ce qu'est la
honte et ce que c'est que d'être rouge de honte. Rouges de honte comme
certains députés qui sont assis en cette Chambre
présentement, qui font partie de la région de la Mauricie
où ils ont dit: C'est épouvantable de voir la façon dont
il est arrivé. Assez qu'à la fin du sommet on a senti le besoin,
du côté du gouvernement, de demander au ministre de
l'Énergie et des Ressources de prendre la parole, même si cela
avait débuté une journée et demie avant, afin de corriger
certains faits. Il a dit: Le Conseil des députés du Parti
québécois, et ce, géographiquement, c'est sept
comtés sur huit, M. le Président...
M. Baril (Arthabaska): Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): Je pense que
mes privilèges en cette Chambre sont atteints parce que le
député de Maskinongé a parlé des
députés de la région qui étaient présents au
sommet économique de la région 04 et qui avaient eu honte de
notre ministre de l'Agriculture.
J'aimerais rectifier certains faits très rapidement. Nous n'avons
pas eu honte comme tel du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation loin de là. Ce qui nous a déçus c'est que
le ministre ne nous ait pas semblé prêt à prendre une
décision positive dans le dossier des ventes par enchères
spécialisées à Drummondville. C'est de là que vient
surtout la déception des ministres et des députés et non
sur la façon d'agir du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Je pense que je n'ai pas besoin de démontrer
à la population jusqu'à quel point ces gens-là ont eu
honte. Le député d'Arthabaska vient de le démontrer.
M. Baril (Arthabaska): Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Question de privilège, M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril (Arthabaska): J'ai bel et bien dit que je n'ai pas eu
honte de mon ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. J'ai tout simplement été déçu comme
d'autres de mes collègues et d'autres participants du sommet, de
constater que le ministre n'était pas prêt à prendre une
décision positive sur un dossier précis. D'être
déçu et d'avoir honte d'une personne, il me semble qu'il y a
toute une différence et je demanderais au député de
Maskinongé de ne pas...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Votre question de
privilège étant acceptée, M. le député de
Maskinongé, vous savez qu'il n'y a pas de débat sur une question
de privilège...
M. Picotte: Je n'en ai pas fait, moi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Non, je le sais,
jusqu'à présent je ne vous dis pas qu'il y a eu un débat,
mais vous avez maintenant la parole, en ne revenant pas sur ce qui pourrait
être la même chose.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que
je n'ai pas soulevé de question de privilège, j'ai eu honte. Je
prends la parole du député d'Arthabaska qui dit ne pas avoir eu
honte comme tel, comme il l'a dit tantôt: Je n'ai pas eu honte comme
tel.
(17 h 30)
M. Baril (Arthabaska): Je n'ai pas eu honte...
M. Picotte: Mais j'ai été déçu
honteusement par le ministre de l'Agriculture. Il a fait honte à tout le
monde. Ce n'est pas compliqué, je vous le dis. Il ne s'agira que de
vérifier. Demandez-le, informez-vous dans toute la région. Je
peux même vous nommer des journalistes qui vont vous le mentionner. Mais,
de toute façon, ça n'a pas d'importance, il fait honte à
tout le monde, le ministre de l'Agriculture. On lui a demandé de s'en
retourner rapidement, et cela a été heureux pour le sommet
économique. On a eu des résultats positifs aussitôt que sa
sainte personne eut disparu de la place.
C'est ce genre de stratégie qu'on nous présente. On fait
ce qu'on appelle l'opération marketing. J'ai honte et je suis
déçu pour les agriculteurs du Québec qu'on les traite
ainsi. Je suis déçu pour les agriculteurs du Québec qu'on
organise ici, à l'Assemblée nationale, une stratégie. Si
on fait tous ces beaux discours à l'Assemblée nationale, c'est
seulement au nom de la stratégie péquiste. Tout le monde est
d'accord sur ce projet de loi. On aurait donc pu dire: première,
deuxième, troisième lecture, adopté, prendre quelques
minutes pour faire l'étude article par article et tout le monde aurait
été heureux. Mais on fait de la stratégie sur le dos des
agriculteurs. On se dit: Cela va faire bien d'en parler. Ils croient que c'est
doux aux oreilles des agriculteurs d'entendre, de temps en temps, parler de
politique agricole à l'Assemblée nationale, politique qui,
à toutes fins utiles, n'avance à rien et ne veut rien dire.
Rappelons-nous qu'en 1979 on a étudié une loi ici,
à l'Assemblée nationale, traitant des grains. Le ministre de
l'Agriculture s'était littéralement garroché en l'air pour
nous vanter la Régie des grains du Québec, pour nous dire que
ça allait être bon, être beau, être grand pour les
agriculteurs du Québec, en 1979. Le ministre de l'Agriculture est
à l'image du ministre de l'Éducation, en plus "slow", il se
hâte lentement. En 1979, ça pressait de faire des discours pour
voter une loi sur les grains. Voici ce qu'on peut lire, en 1981-1982, dans le
rapport annuel de la Régie des grains du Québec pour laquelle on
a voté, alors que le ministre se dépêchait et qu'il avait
jeté beaucoup de poudre aux yeux des agriculteurs du Québec. En
plus de cela, c'était dans le temps des fêtes, cela s'est fait
rapidement, à la fin de la session. Enfin, le drame de la Régie
des grains du Québec, et, par extension, ce que vivent de plus en plus
consciemment les agriculteurs du Québec, est décrit à la
page 5 du rapport mentionné, le
rapport de la Régie des grains 1981-1982.
Je vous lis ce qui est dit dans le rapport: "Notons que le
président fut nommé et entra en fonction au début de
février 1981, alors que la loi avait été
sanctionnée le 21 décembre 1979." Deux années de
pétage de bretelles inutile. Cela a été voté le 21
décembre 1979 en vitesse, rapidement; un déluge de mots dans un
désert d'idées, à l'image de la tête du ministre de
l'Agriculture. En 1981, on a nommé le président. Il est
entré en poste le 1er février 1981. Comme si ce n'était
pas suffisant, on nous dit, en page 21 du même rapport, que "la
réglementation permettant l'application de la loi sur les grains
étant en élaboration, la Régie des grains du Québec
n'a eu, pour l'exercice financier 1981-1982, que des activités
administratives".
On a ainsi nommé des amis péquistes à des postes
pour leur donner un salaire, on a dépensé de l'argent en location
de bureaux et rien d'autre que cela. Pas de réglementation de
prête. Ce qui était vrai le 31 mars 1982 l'est encore le 1er juin
1983. De 1979 à 1983, on nomme des amis péquistes à des
postes, on leur donne des jobs, on ne leur donne pas de budget, on n'a pas de
réglementation, rien dans le champ, rien ne se passe pour l'agriculteur
du Québec.
J'ai entendu les divines brailleuses et les divins braillards, nos amis
d'en face, qui sont passés avant nous, ces grands sauveurs des
agriculteurs qui font tout en leur pouvoir pour que cela fonctionne en
agriculture. Du tape-à-l'oeil, M. le Président, du
trompe-consommateur, du piège-agriculteur. C'est cela qu'on donne aux
agriculteurs. À part cela, absolument rien. Cela permet au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de revenir se
péter les bretelles, quatre ans après, pour nous dire qu'il faut
que, dans le projet de loi, il change deux petits articles, une couple
d'articles, oui, deux articles dans la loi. On fait toute une opération
de marketing. On va être une quinzaine à parler là-dessus,
à l'Assemblée nationale, pour changer deux articles de la loi,
quand cela a pris des années à nommer le président de la
régie. Et on travaille pour les agriculteurs. Quelle farce
monumentale!
Quel genre de ministre de l'Agriculture! À quel discours a-t-on
eu droit! Je prends à témoin tous ceux qui ont pu écouter
son discours, ce matin. Non seulement le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation est vide de sens, non seulement il n'a
rien à dire, mais il n'est même pas professionnel comme
député. J'entendais dire par le ministre, à propos de
rien, ce matin: Dans Vaudreuil-Soulanges, M. le Président, on a
dépensé tant d'argent et, dans tel coin, on a
dépensé tant d'argent. En parlant de Vaudreuil-Soulanges, je me
souviens de l'époque où il y avait un député
présent dans le comté de Vaudreuil-Soulanges, c'était
celle qui vous a précédé. Je l'ai connue, M. le
Président. Je ne la changerais pas pour celui qu'on a aujourd'hui, et
loin de là. Les électeurs de Vaudreuil-Soulanges ne la changeront
pas non plus. Elle ne reviendra plus jamais ici de sa vie.
Une voix: Barrez les portes!
M. Picotte: C'est parce qu'elle n'était jamais là,
M. le Président, dans le comté de Vaudreuil-Soulanges. Le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en
professionnel, en politicien qu'il est, se permet de garrocher cela à
gauche et à droite, sous prétexte que son genre de bouffonnerie,
ses farces monumentales à l'Assemblée nationale font rire des
gens. C'est juste cela. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, M. le Président, vous le savez, parce que vous
êtes un agriculteur, aurait pu, en cinq minutes, ce matin, s'il avait
été professionnel, s'il avait été "fair play",
comme on dit, s'il n'avait pas eu la tête vide au moment où il a
fait son discours, s'il avait eu quelques idées - s'il avait fait cela,
vous savez très bien qu'en cinq minutes, M. le Président, il
aurait pu le faire - nous dire tout simplement ce qu'était son projet de
loi pour corriger ces deux articles. Rien que cela. Juste cela, et tout ce beau
monde aurait été d'accord. Savez-vous qu'on serait rendu pas mal
loin dans nos travaux de la journée? On aurait probablement une couple
de projets de loi d'entamés et on aurait fait avancer passablement les
travaux de la Chambre. C'est lui, le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Ce n'est personne d'autre. Je n'ai plus
aucune sympathie pour ce ministre. Je n'ai plus aucun respect - je m'excuse -
pour ce ministre. Tant et aussi longtemps qu'il va se comporter en gamin, en
bouffon, je ne peux pas avoir de respect pour un homme semblable.
Ce qui m'inquiète le plus, M. le Président, c'est qu'on ne
réalise pas, par cette opération de marketing, que le ministre se
moque et rit des gens de l'Assemblée nationale, à toutes fins
utiles. Quand je regarde tous les députés en cette Chambre, tous
ceux qui, depuis que la loi a été amendée, ont eu des
postes d'adjoint, de whip et de whip adjoint, etc., on peut se permettre de
faire rire de nous autres par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation. On est payé un bon salaire pour tâcher
d'endurer un peu les risées du ministre. Mais ce que j'accepte moins
-j'imagine que tous mes collègues vont souscrire à cela - c'est
quand on procède de la façon dont agit le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. À toutes
fins utiles, on rit des agriculteurs qui ne sont pas ici pour réaliser
que le ministre rit d'eux tout simplement par son plan de marketing. C'est cela
qui me déçoit le plus. Quant à moi, le ministre peut rire
de moi tant qu'il voudra; cela ne me fait pas un pli sur la différence
et cela ne me dérange pas du tout. Plus le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation va rire des députés en
Chambre et plus il va faire ce qu'il voudra. (17 h 40)
Cet homme-là n'a aucune valeur à mes yeux, cela ne me
dérange aucunement. Mais, au nom des agriculteurs du comté de
Maskinongé, par respect pour mes agriculteurs à moi, si les
autres ne veulent pas en faire, autant par respect pour les agriculteurs de la
Mauricie, par respect pour les agriculteurs des gens de l'Opposition, si les
autres ne veulent pas s'associer à nous, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, arrêtez donc de
rire des gens. Vous avez un petit projet d'amendement qui touche à deux
points précis. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, vous pouviez faire cela en deux minutes, vous auriez eu
notre consentement. À l'avenir, M. le ministre, continuez à rire
de tous les députés en cette Chambre, on est payé pour
endurer cela, ne riez plus des agriculteurs, adoptez cela rapidement, c'est
dans le champ qu'il faut que cela fonctionne et, s'il y a un gars qui peut
comprendre cela, c'est vous-même, M. le Président. Pour autant que
cela marche dans le champ, laissons le ministre "bouffonner" à sa guise.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, votre droit de
réplique.
M. Jean Garon (réplique)
M. Garon: M. le Président, mes propos seront brefs. C'est
pour cela que, même s'il reste une quinzaine de minutes avant la
suspension, ce sera suffisant pour répondre aux propos de l'Opposition,
puisque beaucoup de ces propos ont été un peu incohérents,
et je prends à témoin, avec ses derniers propos, le
député de Maskinongé. Je n'ai pas beaucoup à
répondre à ce genre d'arguments dont le député de
Maskinongé s'est fait le spécialiste. Que voulez-vous? Il y avait
autrefois dans les cours royales ce qu'on appelait le fou du roi. On peut bien,
sur 122 députés, avoir un député qui joue ce
rôle ici, en cette Chambre. Je prendrai simplement la peine de
répondre à certains arguments qui ont été
apportés et qui pourraient induire la population en erreur.
Tout d'abord, le député de Berthier a mentionné
qu'il y avait eu des représentations des producteurs agricoles de
Lanaudière concernant des modifications à
l'assurance-récolte. Je dois dire que, contrairement à ce qu'il
pense, les modifications ont été faites, le décret a
été adopté récemment et, bientôt, 77
producteurs de Lanaudière recevront 126 117 $ et 89 producteurs de la
rive sud recevront 73 661 $. Encore une fois, le frappeur de relève
qu'est le député de Berthier a frappé dans l'air, il a
été passé dans la mitaine.
Les agriculteurs qui nous avaient fait des représentations pour
ces régions avaient de bons arguments. Il y avait des modifications
à apporter pour tenir compte davantage des années les plus
représentatives plutôt que d'années exceptionnelles. Nous
avons tenu compte de ces moyennes et nous avons trouvé que
l'argumentation se défendait. C'est pourquoi nous avons acquiescé
aux demandes qui nous ont été faites par l'Union des producteurs
agricoles de Lanaudière et les représentants des agriculteurs qui
nous ont rencontrés, parce que c'était une demande qui
était pleine de bon sens. Les modifications ont été faites
et cela a été approuvé par le Conseil du trésor et
le Conseil des ministres récemment. Les chèques devront
être expédiés incessamment. J'avais pris cet engagement
lors d'une rencontre avec l'Union des producteurs agricoles au mois d'avril.
Donc, les choses n'ont pas traîné. Cela s'est fait rapidement et
tout cela s'est fait correctement.
Le député de Beauce-Sud ne suit pas suffisamment les
Débats ou ne suit pas beaucoup la production
céréalière quand il dit que les prix sont à la
baisse. Il devrait savoir - et tout le monde le sait - que les prix sont
à la hausse. Je suis persuadé que les gens qui ont
écouté le discours du député de Beauce-Sud, quand
il a parlé des grains, savent qu'actuellement, depuis quelques semaines,
les prix sont à la hausse dans le secteur des céréales.
Pour l'ensemble des céréales, on peut dire que les prix sont
à la hausse depuis un certain temps et non pas à la baisse. Quand
le député de Beauce-Sud dit aussi qu'il faudrait que tous les
grains soient classés au Québec, c'est-à-dire
classés par un inspecteur, etc., il veut le gros "kit". Mais,
après cela, si on avait adopté une telle position, il aurait dit:
La bureaucratie, la réglementation, cela va coûter cher, etc.
Nous avons choisi, par ce projet de loi, M. le Président, de
faire en sorte que ce qui va être adopté est le système le
moins onéreux possible, celui qui va susciter davantage la confiance
entre les acheteurs et les vendeurs pour qu'il y ait un classement à
l'amiable. Pourquoi un classement à l'amiable ou de gré à
gré? Parce que l'acheteur, normalement, a intérêt à
classer le grain pas mieux qu'il vaut, c'est-à-dire plutôt
à la baisse, tandis que le vendeur, pour avoir un
meilleur prix, a intérêt à classer le grain le plus
haut possible, de sorte que si les deux s'entendent sur un classement, il y a
de grosses chances que ce soit le bon classement. Ainsi viendront à
l'arbitrage à la régie seulement ceux qui n'auront pu s'entendre
et nous espérons que ce sera le moins souvent possible, parce que sur le
plan administratif, si on veut avoir une régie qui fonctionne bien ou un
système de classement qui fonctionne bien, il faut qu'il soit
basé sur la confiance des gens.
Le député de Beauce-Sud a également
mentionné que l'argent pour les centres régionaux venait du
gouvernement fédéral. C'est faux. L'argent pour les centres
régionaux, essentiellement, a été payé à
100% par le gouvernement du Québec. Quand le député de
Beauce-Sud dit que ceci avait été négocié par mon
prédécesseur, M. Toupin, il ne sait même pas qui m'a
précédé comme ministre de l'Agriculture. Ce n'était
pas M. Toupin. Celui auquel j'ai succédé était M. Kevin
Drummond. M. Toupin n'a pas négocié quoi que ce soit au point de
vue des centres régionaux de grain puisque dans les centres
régionaux de grain, tout cela a été payé à
100% par le gouvernement du Québec. C'est une autre erreur de faits qui
me fait penser à l'erreur du temps des élections des
libéraux qui voulaient enlever la taxe de vente sur la machinerie
agricole quand il n'y avait pas de taxe de vente.
Des voix: Ah! Ah!
M. Garon: C'est le genre d'erreur de faits qui faisait un bel
engagement du Parti libéral. Il disait, en 1981: "On s'est engagé
à enlever la taxe de vente sur la machinerie", alors que les
cultivateurs étaient exemptés de la taxe de vente sur la
machinerie. Cela faisait une promesse qui ne coûtait pas cher, comme on
dit. Mais l'électorat québécois n'est plus
l'électorat du temps de Taschereau où, dans le temps, on pouvait
toujours, alors que les gens étaient moins renseignés
qu'aujourd'hui... Les moyens de communications n'étaient pas ceux
d'aujourd'hui et ils pouvaient toujours, quand ils venaient faire leurs
discours une fois tous les quatre ans, induire la population en erreur, mais,
aujourd'hui, avec les moyens de communication actuels, lorsque quelqu'un ment
à telle place, il se fait rabrouer immédiatement parce que les
gens le savent et ils peuvent répondre. C'est pour cela que les
principaux arguments apportés par les députés de
l'Opposition ont révélé, encore une fois, le manque de
préparation dans ce dossier qu'ils n'ont pas étudié et
dont ils n'ont pas approfondi le sujet.
Je pense que l'ensemble du monde agricole et les députés
du Parti québécois qui ont eu l'occasion de prendre la parole,
depuis ce matin, sur ce projet de loi modifiant la Loi sur la Régie des
grains, ont prouvé à quel point ce projet serait
bénéfique pour la production céréalière au
Québec et surtout pour trois points principaux, comme je l'ai dit ce
matin. D'abord, pour favoriser une meilleure qualité du grain parce que
le cultivateur, étant maintenant assuré d'un classement ou
pouvant exiger un classement, pourra obtenir le prix que vaut son grain et
pourra, de cette façon, faire un effort pour toujours produire du grain
de première qualité et se faire payer le prix du grain de
première qualité. C'est parce que cette régie existe que
le règlement sur le classement du grain sera adopté incessamment.
Avec l'adoption de cette loi, les cultivateurs sauront et savent
déjà, qu'ils pourront obtenir le vrai prix pour leur grain,
c'est-à-dire le prix du classement de leur grain. Nous avons la
certitude que les gens du Québec tenteront de produire du grain de
première qualité. (17 h 50)
Je serais curieux de connaître, après une première
ou une deuxième année d'exploitation, le pourcentage du grain du
Québec qui sera de première qualité. Je suis
persuadé que nous concurrencerons avantageusement le grain de l'Ouest
qui vient en wagon, qui se fait brasser en cours de route. La poussière
se retrouve dans le fond du wagon, tandis qu'avec nos centres régionaux,
le grain peut être nettoyé; on peut avoir encore une meilleure
qualité avec tous les équipements qu'on a mis en place au point
de vue de nos centres régionaux.
Deuxièmement, ce projet de loi permettra de garantir des
paiements puisque la solvabilité des acheteurs ou des marchands de grain
est prévue par la loi et ils devront garantir une certaine
solvabilité pour pouvoir obtenir un permis de la régie. C'est
aussi un des principaux buts de la loi, de faire en sorte que la régie
surveille les permis qui seront émis par elle afin que les
détenteurs des permis puissent vraiment maintenir leur degré de
solvabilité au niveau prévu dans le règlement, pour faire
en sorte qu'il y ait une sorte de garantie de paiement pour les agriculteurs
qui vendent leur récolte aux différents marchands de grain.
Maintenant, on n'est pas obligé d'obtenir un permis de la
régie, mais, par ailleurs, si on veut procéder au classement des
grains au Québec, il faudra un permis de la régie et il faudra se
soumettre ou accepter les différentes conditions ou modalités
prévues dans la loi et dans les règlements, en plus de la loi,
pour ceux qui exploiteront un permis.
Nous sommes persuadés qu'un grand nombre de producteurs
demanderont un permis de la régie parce qu'il permettra d'assurer des
conditions exigées des agriculteurs. Déjà, des organismes
me demandent de rendre le permis obligatoire le
plus rapidement possible. Nous n'avons pas voulu le faire. Nous avons
voulu établir un système tellement bon que les gens s'en
prévaudraient. Nous avons voulu adopter une réglementation qui
répondrait aux besoins pour que les agriculteurs exigent des marchands
de grain qu'ils détiennent un permis de la régie avant de vendre
leur grain. C'est ce système volontaire qui n'est pas courant, qu'on ne
rencontre pas souvent dans nos centres d'administration; on le dit volontaire
parce que nous avons dit: Rendons-le tellement bon, tellement désirable
que, sans même être obligatoire, tous ceux qui font le commerce du
grain voudront recevoir un permis de la régie et respecter les normes de
la régie parce que ça leur donnera toute la
crédibilité voulue dans le secteur du commerce
céréalier au Québec. On aura ainsi un système
volontaire, mais auquel tous auront adhéré. Cela a
été notre préoccupation, et c'est pour cela, comme je l'ai
dit ce matin, que nous avons consulté et consulté.
J'ai hâte que ce projet de loi soit adopté parce que nous
commencerons immédiatement à faire la même chose au niveau
des encans d'animaux pour la protection phytosanitaire, pour la
solvabilité des gens qui y font affaires, pour la sécurité
quant au poids des animaux et la qualité du bétail qui y passe.
Nous devrons aussi adopter une réglementation incessamment à ce
sujet. C'est pour ça que j'ai hâte que cette loi et ce
règlement soient adoptés pour que nous puissions
immédiatement faire cette étude des encans et étudier, en
même temps, un encan qui a été discuté
récemment au sommet de Trois-Rivières, dont parlait le
député de Maskinongé. Je dois dire que, dès ce
matin, le député de Nicolet, M. Beaumier, me parlait de l'encan
de Drummondville, de même que le député de Drummond,
ministre des Transports, et le député de Saint-Maurice; j'ai dit
que nous allions hâter l'étude du règlement sur les encans
afin de pouvoir donner une réponse le plus rapidement possible à
l'encan qui a été préconisé sur le plan
régional à Drummondville.
En même temps, demain, je rencontrerai des gens qui
préconisent un système d'encan par référence, un
nouveau système qui permettrait d'améliorer la mise en
marché des animaux en économisant le maximum de transport. Ces
questions sont actuellement étudiées par les producteurs de
boeuf. C'est pourquoi ce projet de loi sur les grains et éventuellement
la réglementation sur les encans contribueront, comme le demandent les
agriculteurs, à mettre en place des garanties de paiement ou des mesures
qui assurent une plus grande sécurité aux agriculteurs lorsqu'ils
vendent leurs produits. Quand un agriculteur vend toute sa récolte
à l'automne, son travail d'une année, et qu'il peut vendre
à un acheteur non solvable, il a des inquiétudes et c'est
pourquoi les mesures qui ont déjà été
réalisées dans la production laitière sont en train
d'être réalisées dans la production
céréalière. Elles le seront aussi dans d'autres commerces
de produits agricoles pour assurer une plus grande sécurité
à nos agriculteurs.
Nous avions pensé un instant à regarder une loi
ontarienne. Je rencontrais récemment le ministre de l'Ontario et je lui
disais: Comment votre loi fonctionne-t-elle? La garantie des paiements, votre
loi-cadre? Il m'a dit: Vous savez, c'est difficile de fonctionner dans une
loi-cadre parce que nous l'avons appliquée seulement une fois, et faire
un modèle pour tout le monde c'est difficile. Nous avons donc
décidé de procéder différemment et de mettre dans
chacun des instruments que nous mettons en place pour la commercialisation des
produits agricoles, graduellement des instruments de garantie de paiement qui
feront en sorte que les agriculteurs ne prendront pas tous les risques qu'ils
ont pris jusqu'à maintenant, pour qu'il y ait moins de risques dans le
commerce des produits agricoles.
Je suis convaincu qu'en faisant ces choses, nous faisons un travail qui
correspond exactement à ce que demandent les agriculteurs par leurs
représentants syndicaux, par l'Union des producteurs agricoles ou leurs
fédérations spécialisées. En travaillant avec eux
et avec d'autres organismes comme les meuniers, les coopératives
agricoles, les centres régionaux de grains, les marchands de grains, les
négociants en grains, tous ceux qui, de près ou de loin, sont
attachés à la production céréalière et au
commerce des céréales, nous allons développer la
production céréalière au Québec. Tout ce que nous
pouvons souhaiter, c'est de pouvoir accélérer la production au
Québec au même rythme que nous l'avons fait au cours des
dernières années.
Je demande aux agriculteurs, qui voient cette saison un peu
exceptionnelle en termes de pluie, de ne pas se décourager puisqu'on dit
qu'une année comme celle-là n'arrive pas souvent. Espérons
que le soleil va se mettre de la partie; le gouvernement peut mettre en vigueur
un certain nombre de mesures mais il n'a pas de contrôle sur le soleil.
Espérons que, dans les jours qui viennent et à partir de
maintenant, parce qu'on me dit que le temps s'améliore, on
connaîtra du soleil au cours des dix prochains jours; on pourra donc
faire tous les ensemencements au Québec. Après, on
connaîtra une bonne saison si la température le permet et si Dieu
le veut. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la
deuxième lecture du projet de loi no 13, Loi modifiant la Loi sur les
grains est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
Renvoi à la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation
M. Boucher: M. le Président, je demande que ce projet de
loi no 13 soit déféré à la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Boucher: M. le Président, je fais motion pour que nous
suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de
suspension de nos travaux est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont
suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 58)
(Reprise de la séance à 20 h 05)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Veuillez vous asseoir.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Boucher: Merci, M. le Président. Je vous demanderais
d'appeler l'article 7) du feuilleton d'aujourd'hui.
Projet de loi no 12 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture
du projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, le projet de loi no 12
dont nous entamons l'étude aujourd'hui propose de modifier certains
articles de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui a
été sanctionnée en novembre 1979. Avant d'entrer dans des
considérations essentiellement techniques, il est sans doute utile de
rappeler les objectifs et les principes qui animent, depuis maintenant plus de
trois ans, la démarche du gouvernement et de ses partenaires du monde
municipal.
Soulignons, d'abord, que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme
avait pour objet de doter le Québec d'un cadre législatif en
matière d'aménagement et d'urbanisme et d'établir les
règles du jeu en cette matière pour tous les intervenants
concernés. Cette loi importante confiait aux municipalités
régionales de comté et aux municipalités qui les composent
la responsabilité, l'élaboration et la mise en oeuvre des
régies relatives à l'aménagement et à
l'urbanisme.
Qu'on se rappelle que cette loi est arrivée après 20 ans
de discussions au Québec et qu'on aurait dû normalement l'adopter
beaucoup plus tôt auparavant, mais que, finalement, compte tenu de
l'imperfection des projets qui sont venus sur la table, tous les gouvernements
antérieurs avaient hésité avant d'adopter une telle loi.
Mais, aujourd'hui, nous l'avons, nous l'utilisons et les municipalités
en bénéficient.
Dans le projet de loi que nous avons adopté, quatre grands
principes constituent les fondements de cette loi et continuent à guider
toute modification qu'il s'avère ici utile et, je pense,
nécessaire, d'apporter. Permettez-moi, M. le Président,
d'énumérer ces quatre règles qui me semblent
fondamentales.
Premièrement, l'aménagement est d'abord une
responsabilité politique et non exclusivement technique, je dirais avant
tout politique, c'est-à-dire qu'il appartient d'abord aux élus,
en relation avec les citoyens, d'effectuer les choix, de prendre des
décisions et de procéder aux arbitrages qui s'imposent.
Deuxième règle, le citoyen participe aux diverses
étapes du processus d'élaboration et de révision des
instruments d'aménagement. J'ai souvent eu l'occasion d'expliquer que
parfois des citoyens ne connaissaient pas le bien-fondé de certains
règlements, de certaines décisions du conseil municipal; et ce
n'est qu'en participant à des réunions du conseil municipal,
qu'en participant aux discussions qui menaient à des décisions,
que finalement ils comprenaient pourquoi un conseil municipal prenait une
décision et que finalement, alors qu'ils étaient entrés
dans l'opposition, qu'ils
étaient contre tel ou tel projet de règlement avant que la
réunion ne commence, lorsqu'ils sortaient ils en étaient les plus
ardents défenseurs. La participation des citoyens a souvent mené
à cela.
Troisièmement, l'aménagement est une fonction
partagée entre trois paliers de décision: la municipalité,
la municipalité régionale de comté et le gouvernement.
Chaque palier a son domaine de responsabilité propre.
Quatrièmement, l'aménagement fait appel à la
coordination et à la conciliation des choix et des actions de ces trois
instances décisionnelles, ce qui se traduit par un échange
d'information et par la concordance des objectifs et projets respectifs de ces
instances. Il m'apparaît que le projet de loi no 12 que nous discutons
aujourd'hui respecte les principes que je viens d'énumérer. Ces
règles nous ont guidés adéquatement jusqu'à
maintenant et il me semble donc primordial qu'elles continuent à
s'appliquer dans l'avenir. Je pense d'ailleurs que c'est cela qui a
amené un large consensus autour de la loi 125. On peut
déjà évaluer très positivement le travail accompli
depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme. En effet, il m'a été possible de constater à
maintes reprises que les différents intervenants oeuvraient avec
sérieux et beaucoup d'enthousiasme à l'application de cette loi,
qu'il s'agisse du monde municipal, des ministères ou des mandataires du
gouvernement. (20 h 10)
Après quelques années de fonctionnement, le bilan des
efforts consentis au niveau municipal me semble impressionnant. Depuis plus de
trois ans, les municipalités ont utilisé abondamment les
dispositions de la loi, que ce soit pour l'élaboration ou l'adoption de
plans d'urbanisme, de règlements de contrôle intérimaires,
de modifications à des règlements d'urbanisme ou encore pour la
constitution d'un comité consultatif d'urbanisme. Les
réalisations furent également très nombreuses au niveau
intermunicipal. À ce propos, on me permettra de rappeler que les
municipalités régionales de comté sont bien les instances
intermunicipales, et non pas supramunicipales. Il semble qu'il y a une
distinction de taille à faire. Ce sont des instances intermunicipales,
et non supramunicipales.
Au niveau intermunicipal, il a été possible de constituer
94 municipalités régionales de comté à la suite
d'une vaste consultation à laquelle ont été
associés des représentants de l'Union des conseils de
comté, qui est devenue depuis l'Union des municipalités
régionales de comté, et de l'Union des municipalités du
Québec. La bonne collaboration apportée par les élus
municipaux et nos autres partenaires dans cette démarche a permis de
répondre favorablement à 95% des attentes formulées. Vous
conviendrez avec moi que l'on ne peut guère demander mieux: 95% des
attentes formulées.
Donc, 94 municipalités régionales de comté ont
été mises en place. De ce nombre, 61 ont adopté la
résolution pour entreprendre l'élaboration du schéma
d'aménagement. À ce jour, 59 de ces 61 municipalités
régionales de comté ont un règlement de contrôle
intérimaire en vigueur sur leur territoire. On peut préciser, en
ce qui concerne les programmes de travail relatifs à
l'élaboration du schéma d'aménagement, que 30 d'entre eux
ont déjà été soumis en vue de la signature d'un
protocole d'entente en vertu duquel le gouvernement s'engage à verser
une aide financière. Quelques protocoles, d'ailleurs, ont
déjà été signés à cet effet.
Je pense, M. le Président, que, graduellement, tous les conseils
municipaux se sont intéressés à l'aménagement, se
sont intéressés à l'urbanisme, et que maintenant, en
arrivant au règlement de contrôle intérimaire et à
l'élaboration du schéma d'aménagement, lorsque les
citoyens vont comprendre de quoi il en retourne au juste, à savoir qu'il
s'agit de bien planifier leur territoire, de bien planifier leur ville, leur
municipalité, leur municipalité rurale ou leur paroisse, ils vont
s'y intéresser davantage et s'impliquer eux-mêmes davantage. Ce
sera pour le mieux de la municipalité.
En ce qui concerne ce qui a pu être fait au niveau gouvernemental
depuis que fut sanctionnée la loi à la fin de 1979, cette Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, il y a d'abord eu, comme je le soulignais
il y a quelques instants, l'établissement d'une consultation sans
pareille dans l'histoire du monde municipal pour la mise en place du territoire
des municipalités régionales de comté, pour la mise en
place aussi de la structure elle-même. Nous avons ensuite fait en sorte
que ces municipalités régionales de comté puissent
bénéficier d'une assistance financière gouvernementale
pour leur fonctionnement, pour la rémunération des élus,
pour l'élaboration du schéma d'aménagement. Trois
programmes ont été mis en place. Et, par ailleurs, le
ministère des Affaires municipales a tout mis en oeuvre afin que les
municipalités régionales de comté profitent d'une bonne
assistance technique.
Je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas profiter de
l'occasion qui nous est offerte ici ce soir pour souligner ma satisfaction face
aux efforts remarquables qui ont été consentis dans ce domaine
par un très grand nombre de fonctionnaires et de professionnels de mon
ministère. Ils ont parfois eu à travailler dans des
situations
difficiles et c'est pourquoi j'apprécie d'autant plus le sens des
responsabilités dont ils ont fait preuve.
Les autres ministères et organismes ont également
apporté leur contribution. Sous la direction de mon collègue, le
ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional, les orientations gouvernementales
prévues aux articles 11 et 16 de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme sont en préparation. Certains de ces documents d'orientation
gouvernementale ont déjà été livrés aux
municipalités régionales de comté, d'autres le seront
très prochainement.
M. le Président, c'est pour accentuer, pour
accélérer cet effort considérable en vue de faciliter
l'application de certaines dispositions de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme que j'ai présenté, en tant que ministre responsable
de cette loi, le projet de loi no 12. La Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme est une loi jeune et comme toute nouvelle loi, à mesure que
se généralise son application, des ajustements sont requis, comme
d'autres dans l'avenir seront requis. Il nous faut tenir compte d'une
réalité sans cesse changeante. Et, à mon avis, cette loi
peut être considérée comme un code de l'aménagement
qui devra faire l'objet de modifications. Il nous faudra, au fur et à
mesure que se développera l'expertise, en revoir certains points. Ces
changements devront toutefois toujours tenir compte des quatre principes de
base ou des quatre règles de base que je rappelais au début de
mon intervention. Ces principes sont d'ailleurs issus d'un consensus avec le
monde municipal qui, en ce qui concerne le projet de loi no 12, nous fera
connaître officiellement ses positions par l'intermédiaire des
deux unions, au moment de la commission parlementaire qui se réunira
sous peu.
Le projet de loi no 12 ne viendra modifier aucun élément
essentiel de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Ce projet de loi
apportera des ajustements techniques qui visent à simplifier la
procédure et à réduire les délais pendant la
période de contrôle intérimaire. Cette période est
déjà commencée dans les 61 municipalités
régionales de comté qui ont entrepris l'élaboration de
leur schéma d'aménagement et elle se terminera lorsque les
règlements d'urbanisme seront en vigueur en conformité avec le
schéma d'aménagement.
Les modifications proposées concernent la procédure
relativement 1°, aux opérations cadastrales et au morcellement d'un
lot pour fins de construction de voie de circulation; 2 , à la
conformité des interventions gouvernementales, en particulier pendant la
période de contrôle intérimaire et 3 , à
l'entrée en vigueur d'un règlement modifiant le contrôle
intérimaire.
Le premier point en ce qui concerne la question des opérations
cadastrales est le morcellement d'un lot pour fins de construction de voie de
circulation; c'est une modification qui trouvera une application limitée
mais néanmoins importante et qui est proposée à l'article
61 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Elle concerne le
contrôle intérimaire automatique qui s'applique dès le
début de l'élaboration du schéma d'aménagement mais
qui se termine avec l'entrée en vigueur d'un règlement de
contrôle intérimaire, à moins que celui-ci ne maintienne
les interdictions prévues à la loi sur certaines parties du
territoire.
L'article 2 du présent projet de loi a pour objet de modifier
l'article 61 de la loi en vue de prévoir une exception à
l'interdiction des nouvelles opérations cadastrales pendant la
période de contrôle intérimaire automatique. Cette
exception ne vaut que dans le cas où une opération cadastrale ou
un morcellement d'un lot par aliénation est effectué aux fins de
la construction d'une voie de circulation par le gouvernement ou par un de ses
ministères ou mandataires.
Lorsqu'ils font l'acquisition de terrains en vue de la construction de
routes, les ministères, en particulier celui des Transports,
procèdent de gré à gré plutôt que par
expropriation. Ce n'est qu'exceptionnellement que l'on a recours aux
procédures d'expropriation.
Le libellé actuel de la loi 61 empêche de conclure ces
ententes de gré à gré parce que le propriétaire du
terrain se voit interdire de morceler son terrain ou de procéder
à une opération cadastrale durant la période de
contrôle intérimaire automatique. (20 h 20)
Il est donc à noter qu'une municipalité régionale
de comté peut, elle, prolonger cette interdiction en la maintenant
expressément dans son règlement de contrôle
intérimaire.
Il existe, actuellement, en regard des réseaux
d'électricité, de gaz, de télécommunication et de
câblodistribution, une exception à cette interdiction de
procéder de gré à gré à de nouvelles
opérations cadastrales pendant la période de contrôle
intérimaire. À plusieurs égards, le réseau routier
peut être assimilé à des réseaux d'utilités
publiques. Comme pour ces réseaux d'utilités publiques, son
implantation implique un développement linéaire exigeant
l'acquisition de minces bandes de terrains appartenant à plusieurs
personnes différentes et situées dans diverses
municipalités.
Il était alors impossible de planifier et d'entreprendre
l'implantation d'un tel réseau si l'acquisition des terrains
nécessaires est rendue difficile dans certaines municipalités par
une prohibition de lotir, par une prohibition qui s'applique, même si les
propriétaires sont consentants évidemment,
dans le cas où on négocie de gré à
gré. L'article 2 vise précisément cette situation.
Aussi, pour permettre à ces citoyens de compléter leur
dossier, de recevoir leur paiement et pour éviter d'entraver la bonne
marche des projets de travaux publics générateurs de
retombées intéressantes, comme la construction de routes, il est
proposé de soustraire, pendant la période de contrôle
intérimaire, toute opération cadastrale ou tout morcellement d'un
lot fait par aliénation, reguis pour la construction de voies de
circulation par le gouvernement ou par ses ministères ou
mandataires.
En permettant aux propriétaires de terrains en bordure d'une
telle route d'effectuer une opération cadastrale ou tout simplement de
morceler un lot, l'amendement proposé vise uniquement à faciliter
la phase acquisition des terrains pour des projets de construction de voies de
circulation du gouvernement, de ses ministères ou mandataires
déjà en cours de réalisation et sur des territoires
où les interdictions de l'article 61 s'appliqueraient.
Deuxièmement, en ce qui concerne la conformité des
interventions gouvernementales pendant la période de contrôle
intérimaire, nous proposons des modifications qui n'affectent pas du
tout l'esprit de la loi. En vertu de l'article 2 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, le gouvernement, ses ministères et
mandataires, lorsqu'ils veulent intervenir sur le territoire sont liés
par un règlement de contrôle intérimaire d'une
municipalité régionale de comté et, éventuellement,
seront aussi liés par le schéma d'aménagement lorsqu'on
l'aura terminé.
Précisons donc dans quels cas ils sont liés. Dès
qu'il s'agit de l'implantation d'un équipement ou d'une infrastructure,
de la réalisation de travaux ou de l'utilisation d'un immeuble, ils sont
liés. Pendant l'élaboration du schéma
d'aménagement, l'application d'une telle disposition implique que ces
interventions gouvernementales soient confrontées au contenu d'un
règlement de contrôle intérimaire en vigueur sur le
territoire concerné. Les mécanismes actuellement en place pour
vérifier la conformité d'une intervention gouvernementale aux
dispositions d'un règlement de contrôle intérimaire sont de
deux ordres: premièrement, l'adresse d'un avis d'intention au conseil de
la municipalité régionale de comté qui fait
connaître son opinion sur la conformité et, deuxièmement,
l'obtention des permis et certificats prévus au règlement de
contrôle intérimaire.
Il s'agit là d'une double procédure qui risque d'alourdir
considérablement la gestion des règlements de contrôle
intérimaire et de ralentir sérieusement la réalisation de
projets gouvernementaux. En effet, qu'apporte de plus l'émission d'un
permis une fois la conformité d'une intervention établie?
Déjà, on commence à se rendre compte de l'importance de la
tâche administrative pour le personnel des municipalités
régionales de comté qui veut assumer pleinement sa
responsabilité dans l'application d'un règlement de
contrôle intérimaire.
Ces formalités supplémentaires risquent de gonfler la
paperasserie et les délais. C'est pourquoi je propose de modifier
l'article 2 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme de manière
à en conserver l'esprit, à savoir: le gouvernement demeure
lié par un règlement de contrôle intérimaire ou un
schéma d'aménagement, la vérification et
l'établissement, s'il y a lieu, d'une obligatoire conformité
entre une intervention gouvernementale et les dispositions d'un
règlement de contrôle intérimaire. Donc, ces deux points
demeurent. Il est à remarquer que la même procédure
s'appliquera lorsqu'il s'agira de vérifier la conformité d'un
projet gouvernemental aux objectifs d'un schéma d'aménagement
lorsque celui-ci sera en vigueur.
Voyons maintenant un aspect de la procédure relativement au
processus de réalisation d'une intervention gouvernementale. Lorsqu'un
avis d'intervention, qui concerne un projet gouvernemental, est adressé
par le ministre au conseil de la municipalité régionale de
comté, celui-ci fait connaître par écrit son opinion sur la
conformité du projet en question dans les 90 jours de la
réception de l'avis d'intention. Dans le cas où le conseil est
d'opinion que le projet est conforme, la réalisation du projet peut
aller de l'avant. Dans le cas où le conseil est d'opinion contraire, le
ministre peut demander à la Commission nationale de l'aménagement
son avis. S'il ne le fait pas, le texte législatif actuel ne nous donne
pas d'autre choix que d'attendre la fin d'une période de 90 jours avant
de pouvoir passer à l'étape suivante, c'est-à-dire la
modification du projet, des dispositions d'un règlement de
contrôle intérimaire ou des objectifs d'un schéma
d'aménagement, s'il y a lieu, de façon à aboutir à
une concordance qui permette d'assurer la conformité.
Je propose donc d'ajouter à l'article 151 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme la possibilité pour le ministre de
faire connaître sa décision à la municipalité
régionale de comté de ne pas s'adresser à la Commission
nationale de l'aménagement dès que l'opinion du conseil de la
municipalité régionale de comté lui sera parvenue.
Il ne sera donc plus toujours nécessaire d'attendre 90 jours
avant de passer à l'étape suivante dans le processus de
réalisation d'une intervention gouvernementale, mais la
possibilité pour le ministre de s'adresser à la Commission
nationale de l'aménagement existe toujours.
De plus, toujours dans un souci de réduire des délais et
de simplifier des formalités, si le conseil de la municipalité
régionale de comté a modifié son règlement de
contrôle intérimaire ou son schéma d'aménagement
pour rendre conforme une intervention gouvernementale, il ne sera plus
obligatoire pour le ministre d'adresser un nouvel avis, une fois la
modification en vigueur. Voilà l'essentiel des articles 1, 4, 5 et 6 du
présent projet de loi.
Je suis convaincu, M. le Président, que ces améliorations
à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme répondront
adéquatement aux besoins des instances concernées. Qu'il s'agisse
des municipalités, des municipalités régionales de
comté ou du gouvernement, tous pourront en tirer avantage.
Avant de conclure, M. le Président, vous me permettrez de faire
connaître quelques brefs commentaires sur le troisième point
visé par le projet de loi. Il concerne l'entrée en vigueur d'un
règlement modifiant un règlement de contrôle
intérimaire. Les règlements de contrôle intérimaire
déjà en vigueur dans 59 municipalités régionales de
comté et ceux qui entreront en vigueur dans les mois prochains
connaîtront nécessairement, c'est normal, plusieurs modifications
tout au cours de l'élaboration du schéma d'aménagement.
Ces règlements de contrôle intérimaire sont des instruments
de transition en attendant que les règlements d'urbanisme conformes
à un schéma d'aménagement soient en vigueur dans chacune
des municipalités. Ils sont donc des instruments essentiellement
évolutifs qui devront s'adapter rapidement, notamment, à
l'avancement des travaux en cours pour l'élaboration du schéma
d'aménagement. À l'heure actuelle, d'ailleurs, plusieurs
modifications au règlement de contrôle intérimaire sont
à l'étude dans les municipalités régionales de
comté.
La procédure prévoit que ces modifications sont soumises
à mon examen. Afin de pouvoir réagir plus rapidement, je propose
donc de modifier l'article 72 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme
en y ajoutant la possibilité de transmettre l'avis indiquant mon
intention de ne pas désavouer un règlement dans les plus brefs
délais, c'est-à-dire sans qu'un premier 45 jours ne se soit
écoulé. Je ne compte utiliser cette possibilité de
raccourcir les délais d'entrée en vigueur d'une modification au
règlement de contrôle intérimaire qu'à la condition
d'obtenir un large consensus des municipalités concernées, faute
de quoi les 45 jours prévus pour permettre à une
municipalité de s'opposer à une modification au règlement
de contrôle intérimaire devront être respectés. (20 h
30)
Cette possibilité supplémentaire devrait nous permettre de
raccourcir les délais d'entrée en vigueur pour toute
modification, et ceci, pour le plus grand bénéfice de tous, car
l'application de ces règlements de contrôle intérimaire
concerne une grande partie de la population. Cette modification fait d'ailleurs
suite à des représentations qui m'ont été faites
par le milieu municipal. Comme ce fut le cas avec toutes les modifications
déjà effectuées à la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme, le projet de loi no 12 respecte les fondements de cette loi
importante que nous adoptions en 1979. Ce que nous proposons aujourd'hui, c'est
des ajustements techniques qui se révèlent utiles,
nécessaires même, en vue de favoriser l'application de la loi.
Ces changements permettront de simplifier les procédures
administratives. Je crois bien qu'il s'agit là d'une
préoccupation que le monde municipal partage avec le gouvernement, avec
tous mes collègues d'ici. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Laprairie.
M. Jean-Pierre Saintonge
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Dans ce discours de
deuxième lecture du projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, je ferai un tour d'horizon, au tout
départ, de ce qu'est la loi 125, ce qu'on appelle les MRC, pour en
arriver aux modifications que le ministre nous présente dans son projet
de loi no 12. Nous pourrons voir que les modifications qu'on veut apporter par
le projet de loi no 12, aux yeux du ministre, ne répondent pas tout
à fait aux vues et aux opinions de l'Opposition.
En 1979, par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la loi 125,
le gouvernement du Québec cherchait à généraliser
la pratique de l'aménagement du territoire. La pierre d'assise de cette
loi était la création des municipalités régionales
de comté en regroupant les diverses municipalités du
Québec suivant leur appartenance.
Comme le ministre l'a mentionné tantôt, le gouvernement
avait énoncé les principes sous-jacents à cette loi. Je
répète les quatre principaux principes que le ministre a
dégagés tantôt. Premièrement, l'aménagement
est d'abord une responsabilité politique et non exclusivement technique.
Deuxièmement, le citoyen participe aux diverses étapes du
processus d'élaboration et de révision des instruments
d'aménagement. Troisièmement, l'aménagement est une
fonction partagée entre trois paliers de décisions: la
municipalité, la municipalité régionale de comté et
le gouvernement. J'insiste là-dessus: l'aménagement est une
fonction partagée entre trois paliers de décisions.
Quatrièmement, l'aménagement fait appel à la coordination
et à la conciliation
des choix et des actions des trois instances décisionnelles.
Le gouvernement entreprenait donc, en 1979, son processus de
restructuration du territoire qui, en plus d'affecter l'utilisation du sol,
engendrera un profond bouleversement de l'ensemble de la société.
En adoptant cette loi, le gouvernement créait des municipalités
régionales de comté et, pour la création de cette nouvelle
structure, il mettait en place les bases de sa nouvelle société
soi-disant décentralisée. Lors de la création des MRC,
celles-ci devaient avoir une vocation unifonctionnelle. Lors de l'étude
de cette loi, l'Opposition n'approuvait pas la proposition de créer de
toute pièce une structure d'une telle envergure ayant pour unique
fonction l'aménagement du territoire. Il proposait plutôt la
formation d'un conseil intermunicipal d'aménagement. Cependant, nous
notons ici que l'Opposition était d'accord à une certaine forme
de contrôle pour l'aménagement du territoire.
Quoique les intentions gouvernementales ne soient pas encore
officiellement dévoilées à ce jour, il est facile de
déceler, chez les intervenants péquistes, que leurs intentions
outrepassent la question d'aménagement, car, au hasard des interventions
et déclarations ministérielles, on s'aperçoit que des
responsabilités dans des domaines aussi diversifiés que la
voirie, le loisir, l'éducation, la culture, la santé et les
services sociaux pourraient être attribués aux MRC, ou, tout au
moins, à dépendre de l'étendue des territoires des MRC,
c'est-à-dire se rattacher au territoire des MRC. L'aménagement du
territoire revêt donc une importance très grande, compte tenu des
projets de réforme du gouvernement, telles la restructuration scolaire
ou la réforme électorale, qui se révèlent
conçues en étroite relation avec les MRC, avec les territoires
définis pour les MRC.
De l'avis même du ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional, bien peu de
gens, y compris des ministres, ont soupçonné les implications
profondes de la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. C'était
dans le Devoir du samedi 7 août 1982. Le gouvernement parle d'une loi qui
rapproche les citoyens des instances décisionnelles et implique ceux-ci
dans le projet. Peut-être y voit-on une implication de la part de la
population, mais cet exercice est factice, le ministre titulaire ayant un droit
de décision exceptionnel. Le gouvernement s'attribue ainsi le pouvoir de
redessiner la carte municipale du Québec à sa façon.
En fait, c'est en décembre 1982 que les dernières
municipalités régionales de comté furent
constituées. Le territoire du Québec est maintenant divisé
en 94 MRC, comme le ministre le soulignait tantôt. La division du
Québec en 94 municipalités régionales de comté
devait se faire à la suite d'une consultation. On définissait
alors le genre d'activité que ça devait être en disant:
"L'implantation des MRC, une opération valable de consultation". On
retrouve cela dans la revue Municipalité, publication du
ministère des Affaires municipales, où on énonce en fait
l'activité d'envergure qu'on doit effectuer pour créer ces MRC,
et on insiste grandement sur les étapes de la consultation. Comment la
consultation va-t-elle se faire pour créer ces MRC? Trois principales
étapes, selon la grande théorie: l'information aux élus,
aux organismes du milieu, aux médias et à la population. Donc, on
informe les gens et on suscite une discussion dans la population. Nous n'avons
rien contre cela, c'est très bien.
Deuxièmement, la délimitation de territoires provisoires.
Mise sur pied du Conseil des maires. On regroupe les gens pour tenter d'obtenir
un consensus de la population, un consensus du Conseil des maires pour tenter
de créer véritablement la MRC, regrouper les diverses
municipalités dans un territoire dans lequel celles-ci pourront sentir
réellement une appartenance. Je cite un extrait du texte qui
définissait les souhaits ou la procédure à adopter, selon
le Secrétariat à l'aménagement et à la
décentralisation.
On y dit: "La troisième étape constitue la phase la plus
importante de la consultation puisqu'elle doit mener à la
rédaction des lettres patentes et à la constitution officielle de
la municipalité régionale de comté. Elle vise
essentiellement à obtenir du Conseil des maires un consensus clairement
exprimé, non seulement au sujet du territoire définitif de la
municipalité régionale de comté et le mode de
représentation de chaque municipalité locale au sein du futur
conseil, mais aussi de la succession aux conseils de comté, du sort des
éventuelles ententes intermunicipales, de la date de la première
réunion de la municipalité régionale de comté, etc.
D'ailleurs, le gouvernement refusera d'entériner les propositions qui ne
reposeront pas sur un consensus et renverra au conseil provisoire les projets
jugés insatisfaisants afin que ce dernier poursuive sa réflexion
et parvienne à l'unanimité."
C'est la théorie, mais la pratique s'est
révélée pas mal différente dans les faits. Il
semble que l'harmonie ne règne guère autant qu'on l'aurait
souhaité ou autant que le ministre tente de le dire et de le faire
croire à la population en général. Plusieurs des
populations concernées sont mécontentes des délimitations
qui ont été décrétées et qui ne respectent
pas les régions d'appartenance. Il nous apparaît que les propos
tenus par les représentants municipaux et ceux du ministre à
l'égard des MRC sont fort différents.
En ce qui concerne l'opération de la consultation, nous avons de
la difficulté à concilier l'insatisfaction et le
mécontentement des populations avec les propos du ministre, notamment
ceux qu'il tenait lors des crédits de l'an dernier concernant le fait
que le gouvernement ait ou non imposé ses volontés aux
municipalités. Le ministre a dit: "Absolument pas, là-dessus,
cela a été un succès. Les comités ont très
bien fonctionné et la suite de l'émission des lettres patentes a
été plutôt un accord généralisé. Les
gens disaient après coup que les décisions qui ont
été prises ont été les meilleures." C'est au
journal des Débats, page 3927. (20 h 40)
En fait, la réalité de la consultation, ce n'est pas cela.
À plusieurs endroits au Québec, les municipalités qui se
sont vu intégrer dans les MRC et ont fait transmettre au ministre et au
ministère leur mécontentement vis-à-vis de cette
situation. Et je peux citer des exemples au ministre; je lui en ai d'ailleurs
cités, ces jours-ci, lors de l'étude des crédits de cette
année. Qu'on pense à la MRC de Champlain, qu'on pense à
l'Outaouais où quatre MRC dans la région sont prises avec des
problèmes: Pontiac, Gatineau, entre autres. Qu'on pense à la MRC
d'Acton où certaines municipalités ont manifesté
clairement leur désaccord à être intégrées
dans la municipalité d'Acton et veulent carrément aller dans
celle des Mascoutains. Cependant, le ministre fait la sourde oreille quoiqu'une
résolution de la MRC des Mascoutains se montre favorable à
l'accueil de ces municipalités dans leur propre MRC. Nous avons des
problèmes semblables en Beauce-Sartigan, à Lac-Etchemin et
à quelques autres endroits au Québec.
Mais, la consultation, le ministre n'en tient plus compte. Les
décrets sont passés et les municipalités doivent se
soumettre à la décision du ministère, à la
décision unilatérale du ministre, peu importe ce qu'il peut
advenir. De plus, le ministre vient maintenant dire qu'il y aura un moratoire.
Il confirmait hier qu'il n'est pas question de modifier les territoires des MRC
d'ici les prochaines années, d'ici à ce que le schéma
d'aménagement soit presque en vigueur, donc, d'ici les trois prochaines
années. Au moment de la consultation pour la création de ces MRC,
il reste que chacune des municipalités concernées n'avait pas
vraiment toutes les règles du jeu dans les mains, ne savait pas
exactement vers quoi on s'orientait, à quelles fins les MRC
étaient créées. Est-ce que c'était vraiment
uniquement l'aménagement ou si on sortait réellement de
l'aménagement pour aller dans d'autres domaines, comme je l'ai
mentionné tantôt: voirie, loisirs, affaires sociales, etc.?
Quelles solutions reste-t-il maintenant à ces
municipalités qui, en fait, ont vu le ministre ne pas respecter leur
autonomie quant à la délimitation du territoire d'appartenance?
Quelles solutions restent donc à ces municipalités? Il n'en reste
aucune. Elles doivent se maintenir dans le territoire
décrété par le ministre, contre leur propre gré.
Dans certains cas, la volonté exprimée clairement par ces
municipalités s'est traduite par des pétitions, des lettres
signées par plus de 90% de la population. Mais, le ministre n'en fait
aucun cas.
Outre le problème de la création des MRC, il y a
également à prendre en considération l'aide
financière. Le ministre a parlé tantôt de l'aide
financière qui a été accordée aux MRC, aux
municipalités régionales de comté, par le gouvernement. Au
moment de l'étude du projet de loi no 125, le ministre avait pris
l'engagement, au nom de son gouvernement, que les ressources financières
nécessaires seraient allouées aux MRC pour les dépenses
inhérentes au fonctionnement, à la rémunération du
préfet et des membres et à l'élaboration du schéma
d'aménagement. À la suite de cet engagement, on a donc, à
maintes reprises, entendu dire que le gouvernement subventionnait les MRC. Or,
ce n'est pas entièrement subventionné. On se rappellera qu'au
début de décembre dernier, alors que les budgets étaient
adoptés, le ministre des Affaires municipales, M. Léonard,
informait les MRC d'une diminution de l'assistance financière qui leur
était autorisée après que celles-ci eurent fait parvenir
leurs prévisions budgétaires. Pourtant, le ministre a
effectué une coupure de 1 500 000 $ dans l'aide financière qu'il
s'était engagé à verser. La coupure en question, pour une
partie, représentait une économie appréciable d'une
certaine façon par le ministère, une coupure au niveau des fonds
alloués pour la rémunération des préfets.
C'était une bonne chose dans le sens que la rémunération
précédente accordée aux MRC prévoyait un nombre de
réunions peut-être beaucoup trop considérable. On a
coupé du tiers ou du quart ces réunions, de 20 à 15, et
l'aide financière a été diminuée en
conséquence. Ceci peut fort bien aller. Mais quand même il reste
que sur le solde du montant, il y a 800 000 $ qui ont été
enlevés au financement des MRC pour leur fonctionnement même.
Ce financement des MRC, un autre problème qui apporte une
interrogation sérieuse chez toutes les municipalités qu'il
concerne: Le montant alloué au fonctionnement des MRC pour la
rémunération des préfets et des membres durera combien de
temps? Lors d'une certaine conférence de presse, tout récemment,
le ministre annonçait que les MRC devaient possiblement trouver à
brève échéance des moyens de financement en
faisant preuve d'ouverture d'esprit et d'imagination. C'étaient
les paroles du ministre qu'on rapportait lors d'une conférence de presse
dans l'Estrie. Donc, on commençait déjà à souligner
un danger pour les MRC quant à leur financement éventuel. Est-ce
que le financement sera maintenu de façon intégrale ou pas? C'est
la question que le monde municipal se pose. À ce point de vue
également, dans les prochaines années, pour l'élaboration
du schéma d'aménagement, un montant est prévu, mais il
reste que cette structure implantée par le ministère pourra
être modifiée. Sur quelle base de financement cela sera-t-il fait?
Le monde municipal s'interroge encore aujourd'hui pour l'avenir, à
savoir quelle sorte de financement leur sera réservé dans les
prochaines années.
Cette chose-là est importante pour la raison suivante. Les MRC ne
sont pas seulement fonction de l'aménagement du territoire. J'ai
parlé tantôt du fait qu'on tende à décentraliser
vers les MRC certains pouvoirs. Évidemment, les municipalités
sont assez sceptiques là-dessus et ont demandé au ministre une
conférence Québec-municipalités sur la
décentralisation ou, à tout le moins, une rencontre
là-dessus. Le ministre a accepté les vues soumises par les
représentants du monde municipal et a promis une conférence
devant être tenue l'automne prochain. Depuis deux ans, les
municipalités réclament cette conférence car depuis que la
loi 125 a été adoptée bien peu d'entre elles savent
où elles vont.
Dernièrement, le premier ministre affirmait que les MRC ne se
verraient pas déléguer d'autres responsabilités sans les
ressources financières adéquates, mais l'incertitude plane encore
malgré cette déclaration du premier ministre. De part et d'autre,
on nous fait part d'intentions diverses. C'est ainsi que, dans le dernier avis
du Conseil de planification et de développement du Québec, les
auteurs dressent une liste des intentions possibles de décentralisation:
conseils régionaux de la santé et des services sociaux, loisirs,
transport scolaire, réforme scolaire, réforme électorale,
taxi.
Dans le rapport d'étape du comité ministériel sur
la décentralisation des activités gouvernementales, en juin 1982,
il était proposé que les limites territoriales des régions
administratives s'ajustent à celles des MRC et que soit
encouragée l'harmonisation des territoires des CLSC avec ceux des MRC.
Le rapport identifie certaines fonctions à décentraliser vers les
MRC: voirie municipale, promotion économique et touristique,
équipements de loisir et de récréation. À cet
égard, le ministre confirmait justement aujourd'hui la signature de deux
ententes, par la voirie municipale, il y a quelque temps.
Dans une déclaration récente, le ministre Biron a
exprimé l'intention de favoriser l'adaptation des
périmètres des corporations de développement
économique à ceux des territoires des MRC. On est bien loin du
débat sur le projet de loi no 125, où le ministre parlait de la
MRC comme d'une structure unifonctionnelle destinée uniquement à
l'aménagement. Considérant que la MRC est une création du
ministre et qu'elle n'était pas réclamée de la population,
nous vous soumettons cette déclaration du Conseil de planification et de
développement du Québec faite au début de 1983: "Le
conseil ne souscrit pas à cette orientation gouvernementale qui vise
à faire un gouvernement régional de la MRC. C'est une orientation
qui ne lui apparaît fondée ni sur les besoins ni sur les
aspirations des collectivités locales, mais plutôt tenir des
positions technocratiques relevant davantage des données
théoriques."
L'implantation des MRC étant commencée, les MRC
étant créées - il y a 94 MRC - nous allons examiner un
point important, la question du contrôle intérimaire. Le ministre
y a fait allusion tantôt. À la suite de la loi, une
résolution concernant l'élaboration du schéma
d'aménagement devait être adoptée pour le mois de
décembre et, dès lors, on arrivait au système du
contrôle intérimaire. La planification éventuelle de
l'adoption d'un règlement de contrôle intérimaire devait se
faire dans une étape qui prenait environ deux à trois mois au
minimum. Entre le temps où la fameuse résolution, concernant
l'élaboration du schéma d'aménagement, était
donnée, qui devait se faire au début de décembre et
l'adoption du règlement de contrôle intérimaire, il y avait
ce qu'on appelle une période de gel, c'est-à-dire une
période où certaines fonctions dans la municipalité
pouvaient être gelées, où on pouvait empêcher le
développement du territoire. (20 h 50)
Le ministre se souviendra sans doute des mises en garde que lui ont
fournies à maintes reprises les députés de l'Opposition
-notamment lors de l'étude du projet de loi no 92 en décembre
dernier - en demandant un moratoire d'un an afin de limiter au maximum les
effets économiques négatifs du contrôle intérimaire
ou du gel créé par le fait de la résolution pour
l'élaboration du schéma d'aménagement, qui amenait un gel
automatique jusqu'au moment de l'entrée en vigueur du règlement
de contrôle intérimaire.
Nous avions souligné les conséquences du contrôle
intérimaire relatives entre autres à l'obtention de subventions
fédérales de 3000 $ pour les mises en chantier faites avant avril
1983. Le ministre n'a pas cru bon de s'arrêter à ces
représentations de l'Opposition. Pourtant, plusieurs personnes,
plusieurs instances dans le monde municipal
réclamaient que le ministre fasse preuve d'une certaine souplesse
à l'égard de cette demande du monde municipal. Cette demande de
souplesse était aussi valable, considérant le fait que ce ne sont
pas toutes les MRC qui, à l'époque, étaient dans la
même situation, c'est-à-dire étaient rendues au point de
l'adoption de la résolution pour l'élaboration du schéma
d'aménagement. De telle sorte qu'on créait au Québec deux
sortes de territoires: des territoires où on commençait à
être gelé, si vous voulez, à être pris dans le
processus du contrôle intérimaire et certains autres où ce
processus était retardé, allant même jusqu'à la fin
de décembre 1983, puisque certaines MRC n'ont été
créées qu'en décembre dernier.
Cette demande de moratoire pendant une année aurait eu pour but
de permettre aux municipalités régionales de comté de
reporter l'adoption de la résolution pour l'élaboration du
schéma d'aménagement, et de là, le processus pour
l'adoption du contrôle intérimaire pour un an. Ce faisant, il
aurait été possible, vu un amendement que le ministre avait
apporté à la loi, en décembre dernier, de faire en sorte
que le règlement de contrôle intérimaire eût pu
être préparé et être adopté à tous
égards pratiquement en même temps que la résolution et
l'élaboration du schéma d'aménagement et donc
éliminer d'une façon certaine le gel de trois à quatre
mois que certaines MRC ont du subir.
Cette chose est importante puisque dans l'adoption du règlement
de contrôle intérimaire, dans la soumission d'un projet de
règlement de contrôle intérimaire au bureau du
ministère des Affaires municipales, les municipalités
régionales de comté, de façon majoritaire, se sont
butées à certaines difficultés concernant les
intransigeances du ministère à cet égard.
Je peux citer à cet effet un article de M. Robert Langlois,
urbaniste, qui paraissait dans le Soleil du jeudi 7 avril 1983: "Depuis plus
d'un an, maintenant que les MRC fonctionnent, il apparaît
intéressant de faire un premier bilan qui, quoique sommaire,
révèle une réalité différente des intentions
originales. On peut analyser la situation à partir de deux
éléments concrets: les règlements d'un contrôle
intérimaire et les plans de travail."
L'important dans ce que M. Langlois rapporte c'est: "Le fait qu'au
niveau du contrôle intérimaire, on arrive en fait, pour les MRC,
à une responsabilité contrôlée dans le sens que pour
juger de la valeur des règlements, le ministère des Affaires
municipales a donc mis de l'avant des critères de désaveu
relatifs aux dimensions des terrains sans services et avec un seul service, en
fonction de la proximité ou non du cours d'eau ou d'un lac et de la
présence d'un talus. Ces critères sont les mêmes à
travers toutes les MRC du Québec quelles que soient les
caractéristiques du territoire. Les responsables du ministère ont
affirmé, et ce, clairement que ces critères étaient les
seuls points de désaveu officiel."
Je continue la citation: "Par contre, on s'est aperçu au niveau
de l'approche du ministère que ces critères ne seraient pas les
seuls et que le jugement des fonctionnaires sur les règlements de
contrôle intérimaire seraient prépondérants.
Déjà donc une première entrave à la
responsabilité politique, mais ce n'est pas la seule, loin de
là."
Donc, les règlements sont analysés par les fonctionnaires
et des modifications sont suggérées pour en assurer la
conformité à la loi. Ces modifications sont toujours
suggérées oralement et non par écrit, pour éviter
ainsi d'engager quelque responsabilité. Ce qui importe, c'est que, en
résumé, le ministère, par l'entremise de ses
fonctionnaires, oriente directement le contenu des règlements de
contrôle intérimaire des MRC sous peine de voir ceux-ci
désavoués, ce qui aurait pour conséquence de continuer le
gel du développement sur le territoire. Il aurait été plus
simple d'imposer directement un règlement de contrôle
intérimaire standard à toutes les MRC du Québec mais,
évidemment, cela aurait nui à l'image qu'on veut donner de la
liberté des élus de contrôler le développement de
leur territoire.
Les plaintes fusaient de plusieurs endroits au Québec au sujet de
l'élaboration du règlement de contrôle intérimaire,
de la soumission au ministère du règlement de contrôle
intérimaire pour son approbation. On demandait aux municipalités
de discuter avec leurs citoyens, de faire des propositions au gouvernement en
suivant une certaine base. Ultérieurement, quand on arrivait au
ministère, on imposait certaines modifications pour lesquelles les
municipalités n'avaient pas le choix d'accepter, sinon, c'était
le gel automatique, le désaveu du règlement et la
possibilité de se le faire imposer par le ministère. Donc,
l'autonomie municipale en prenait pour son rhume.
On en arrive maintenant au projet de loi no 12 qui modifie la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme et qui vise essentiellement à
permettre au gouvernement, ses ministères ou mandataires, de se
soustraire aux multiples contraintes imposées par le contrôle
intérimaire. Par l'adoption de cette loi, nous adopterons des
dispositions privilégiées pour les interventions du gouvernement
en matière d'aménagement. Le ministre parlait tantôt de
l'article 2. On dit que le schéma d'aménagement et le
règlement de contrôle intérimaire lient le gouvernement
dans la seule mesure prévue au chapitre 6, titre 1, soit les articles
149 à 157.
Les articles 149 à 157 lient le gouvernement au niveau des
interventions, mais en se rappelant que, au niveau des interventions, dans le
cadre du contrôle intérimaire ou du schéma
d'aménagement, le gouvernement possède toujours le pouvoir de
modifier le schéma ou le règlement. Le gouvernement se trouve
donc lié, mais d'une façon assez accessoire. L'important dans
l'article 2 - ce qui donne toute la lumière aux modifications qu'on veut
faire ici à la loi 125 - c'est ceci: je cite le paragraphe 2:
"Notamment, le gouvernement, ses ministères et ses mandataires ne sont
pas tenus d'obtenir un permis ou un certificat exigé en vertu d'un
règlement de contrôle intérimaire." Donc,
immédiatement, le gouvernement se sort des dispositions usuelles des
formalités de la loi.
Or un des objectifs fondamentaux de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme est de permettre aux municipalités de contrôler
l'ensemble des interventions sur le territoire, effectuées tant par les
citoyens que par le gouvernement afin d'éviter un développement
anarchique et un gaspillage du territoire. À ce propos, le ministre des
Affaires municipales disait devant les représentants municipaux
réunis au congrès de l'Union des municipalités du
Québec, le 28 avril dernier, et je cite ses paroles: "L'autre grand
défi municipal des dernières années était d'enrayer
le gaspillage du territoire. Ma démarche dans ce domaine a
été très simple. Pour moi, le gouvernement du
Québec devait travailler obligatoirement avec ceux qui administraient de
façon plus quotidienne la chaîne des terrains, c'est-à-dire
vous, les élus municipaux. Ce n'est pas qu'un défi
d'aménagement, c'est aussi un défi économique dont vous
sentez l'intensité. Il est vrai qu'un équipement mal
situé, bon an mal an, entraîne des coûts
supplémentaires aux ressources publiques, tout aussi importantes, sinon
plus, qu'un équipement mal géré. En ce sens, vous
êtes devenus des artisans de la texture économique du pays. Vous
l'êtes devenus dans le cadre d'une loi qui vous octroie cette
liberté de choix et d'action avant tous les autres intervenants dans le
cadre d'une loi qui contraint le gouvernement à s'astreindre à
vos schémas d'aménagement sous peine de débats publiques
où les citoyens vont devoir juger au mérite." (21 heures)
Or, le 5 mai, quelques jours après cette déclaration et
après que le ministre eut entendu les revendications des
municipalités qui, unanimement, déploraient les contraintes, la
lourdeur administrative et les difficultés qu'engendrait le
contrôle intérimaire, le ministre dépose le projet de loi
no 12. Ainsi, au lieu d'assouplir le processus pour l'ensemble des
municipalités en établissant des normes et une
réglementation précise et officielle, et non pas sous forme
verbale ou de directive, le gouvernement, incapable de se soumettre à la
lourde procédure administrative qu'il a lui-même
créée, nous demande d'adopter des dispositions qui le
soustrairont à toute cette confusion, sans toutefois répondre aux
demandes des premiers concernés de cette démarche. Encore une
fois, le gouvernement fait preuve d'incohérence et de confusion entre
les lois qu'il adopte et le discours politique qu'il tient. Prônant
l'autonomie locale, il adopte des lois et une réglementation qui
viennent interférer dans ce principe.
Ce projet de loi illustre bien le manque de planification dont fait
preuve le ministre. En décembre dernier, l'article 61 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme était modifié par la loi
omnibus. Moins de six mois plus tard, cet article fait l'objet d'une autre
modification. Donc, moins de six mois plus tard, on se rend compte que la
planification du gouvernement n'avait pas eu lieu. On se rend compte qu'au
moment de l'adoption du règlement de contrôle intérimaire,
dans tout ce processus, les désirs d'implantation de structures du
gouvernement n'étaient pas planifiés, n'étaient pas
prévus.
En plus de dénoncer l'attitude du gouvernement qui outrepasse sa
loi et qui ne respecte pas ses propres intentions, principalement celle
d'être un citoyen à part entière - comme on le sait, le
citoyen ne peut déroger aux dispositions de la loi no 125 et ce,
même si cela lui crée certains préjudices - nous devons
également dénoncer le fait que ce gouvernement, qui prône
la consultation, n'a pas consulté avant de rédiger et de
déposer ce projet de loi. En fait, c'est l'Opposition qui a
contacté l'Union des municipalités du Québec et l'Union
des municipalités régionales de comté et les
municipalités locales pour leur faire part de ce nouveau projet de loi,
pour leur faire part du dépôt d'un tel projet de loi, quelques
jours après le congrès de l'Union des municipalités du
Québec. Nous avons obtenu certains commentaires de l'Union des
municipalités du Québec relativement à ce projet de
loi.
Premièrement, on s'étonnait, évidemment, qu'on
n'ait pas été consultés, qu'on n'ait pas appris
l'existence d'un tel projet de loi. Les commentaires portent sur les points
suivants. Fondamentalement - on réfère aux articles 1 et 2 - ces
deux articles traduisent une volonté, de la part du gouvernement, de se
soustraire aux contraintes des contrôles intérimaires
adoptés par les municipalités. Or, un tel comportement est
contraire à l'esprit de la loi no 125 qui visait justement à
permettre aux élus municipaux de contrôler les interventions sur
leur territoire, tant des particuliers que des instances gouvernementales. De
façon spécifique au
projet de loi, l'article 1 apparaît non souhaitable dans la mesure
où l'émission d'un permis constitue un moyen de contrôle et
d'analyse des projets. En outre, un tel permis n'enlève pas les
avantages reliés à la procédure relative aux interventions
gouvernementales. On réfère aux articles 149 à 157.
Quant à l'article 2, cette nouvelle modification à
l'article 61 de la loi no 125 semble devenir une habitude malsaine. En
décembre dernier, l'article 76 de la loi 92 a introduit une modification
au même article, de façon à alléger les contraintes
pour le gouvernement, ses ministères et ses mandataires. En somme, le
projet de loi no 12, c'est une simplification à l'avantage du
gouvernement, de ses ministères et de ses mandataires, et cela remet en
cause l'équité de tels amendements face aux autres contribuables.
Il peut être sain de revoir l"'opérationalisation" de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, mais cette révision devait
être également élargie aux problèmes
affrontés par les municipalités. Le ministre, étant au
courant des problèmes que les municipalités éprouvent
relativement au contrôle intérimaire, ne s'en soucie guère.
Cependant, par le projet de loi no 12, il vient apporter des modifications pour
justement enlever certaines contraintes qui lui causent des
problèmes.
Quant à l'UMRCQ, l'Union des municipalités
régionales de comté, ses commentaires portaient d'abord sur la
surprise de voir le dépôt d'un tel projet de loi, parce que le
monde municipal ne trouve aucune réponse aux problèmes auxquels
il est confronté, d'une part, et, deuxièmement, ce projet de loi
ne satisfait aucune demande des municipalités. On n'a jamais
consulté ces municipalités pour connaître leur point de vue
à ce sujet. C'est la consultation, évidemment.
De plus, ce projet de loi, aux yeux de l'UMRCQ, semble une loi qu'on
veut adopter à la sauvette, sans avoir au préalable
consulté les intéressés. Le ministre a bien
mentionné tantôt, lors de la deuxième lecture, qu'il
consulterait les représentants des unions. Ma réponse à
cela est que la consultation aurait pu fort bien se faire avant le
dépôt du projet de loi d'une façon beaucoup plus valable.
Avant, pour savoir exactement au niveau des unions, au niveau des
municipalités touchées par les modifications ou par la loi 125,
si des modifications accessoires ne pouvaient pas être amenées,
qui auraient pu faciliter également la mise en marche du processus
à l'égard des MRC. Maintenant, concernant l'article 1, avec toute
la publicité que le gouvernement a faite comme bon citoyen -le
gouvernement se dit un citoyen à part entière - maintenant par
l'article 1 il vient s'exclure des permis et des certificats exigés par
la loi. Donc, on arrive à une étape suivante. Le gouvernement
n'est plus le citoyen ordinaire, il s'exclut en fait du processus.
De fait, on se rend compte de quoi dans le projet de loi no 125? En
quelques mots, au lieu d'arriver avec des points tellement techniques, on se
rend compte que si l'intention du gouvernement, si l'intervention du
gouvernement n'est pas conforme au schéma, qu'est-ce qui arrive? La
municipalité régionale de comté devra revoir le
schéma. Concernant le contrôle intérimaire, le gouvernement
n'est pas obligé d'obtenir un certificat. Durant le contrôle
intérimaire, le gouvernement se soustrait de l'application des articles
de la loi. Il s'exclut du processus lui-même. Il soumet tout le monde
à l'obtention d'un permis, sauf lui-même. Donc, cela dénote
quoi? Cela dénote que le gouvernement n'était pas prêt
à faire face à la musique, dans le sens que la planification
qu'on exige, la planification que le ministre trouvait importante d'exiger
auprès des municipalités, auprès des constructeurs,
auprès des divers organismes privés, le gouvernement n'est pas
obligé de s'y soumettre parce que s'il n'est pas aligné pour
participer au processus, ce n'est pas grave, il s'en sort.
C'est donc le schéma qui va se soumettre à l'avenir au
processus, au désir du gouvernement. Le gouvernement se sort du
processus et s'enlève des contraintes. C'est cela le point fondamental
de la loi. Cette chose fait en sorte que le principe tellement valable de
l'autonomie municipale, du respect de l'autonomie municipale se trouve
piétiné à mon point de vue. Et c'est un recul important au
niveau des municipalités, des structures municipales, au niveau
même de la nouvelle structure créée, c'est-à-dire de
la municipalité régionale de comté.
Lors de l'étude de ce projet de loi, nous nous y opposerons,
compte tenu qu'il ne respecte pas les objectifs de la loi 125 et le principe de
l'autonomie municipale, compte tenu qu'il donne au gouvernement des
privilèges et un pouvoir d'intervention direct en matière
d'aménagement, compte tenu qu'il ne répond pas aux revendications
des élus municipaux - donc, il n'apporte aucune solution aux
problèmes réels auxquels ils étaient confrontés ces
derniers temps - et compte tenu qu'il a été déposé
à l'Assemblée nationale sans faire l'objet de consultation
auprès des milieux concernés. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional, président du Comité de
l'aménagement, député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, cela me fait plaisir, comme
ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional, d'intervenir sur le projet de loi no 12.
J'essaierai de ne pas faire comme le député de Laprairie.
Après une demi-heure il a dit: Maintenant, je vais vous parler du sujet
de ce soir qui comporte des modifications à la loi 12. Je vais revenir
tantôt sur certaines dispositions pour lesquelles, je pense, il parlait
beaucoup plus du passé que de l'actualité.
Je voudrais profiter de cette occasion quand même, comme mon
collègue des Affaires municipales, responsable de la loi 125 sur
l'aménagement du territoire, non pas pour rappeler les principes parce
qu'il l'a très bien fait, mais pour, à partir de cela, dire que
la loi 125 consacrait certains principes auxquels le gouvernement du
Québec tenait. Un de ces principes: je ne fais qu'une phrase pour vous
dire que c'était justement d'échanger des informations, des
niveaux de collaboration et permettre que l'ensemble des MRC puissent
connaître les éléments qu'il faut pour travailler sur leur
mission première qui n'a pas changé. (21 h 10)
Contrairement à ce que j'ai entendu dans les 40, 45 minutes du
député de Laprairie, la mission première, fondamentale des
MRC du Québec est toujours l'aménagement de leur territoire dans
la préparation d'un schéma d'aménagement. Pour ce faire -
d'ailleurs, je pense que c'est ma responsabilité - je compte
prochainement transmettre à chaque MRC, dès le mois de juin
prochain, un document global intitulé Aménager l'avenir, traitant
des orientations générales d'aménagement poursuivies par
le gouvernement, ses ministères, ses organismes et la plupart de ses
mandataires. Ce document constitue une première contribution
gouvernementale à l'élaboration des schémas
d'aménagement qui ont commencé à s'amorcer, et certaines
sont déjà rendues à des étapes assez
avancées.
Je voudrais profiter également de cette occasion pour vous
rappeler que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme prévoit que
le gouvernement contribue à l'élaboration de ces schémas
en transmettant à chacune des MRC des informations sur nos orientations
comme gouvernement, sur les différents projets que la plupart des
ministères et organismes entendent poursuivre sur le territoire du
Québec. C'est dans ce cadre, d'ailleurs, que le document Aménager
l'avenir a été préparé, puisque bon nombre
d'orientations de ces aménagements sont de caractère
général et sont donc valables pour l'ensemble du territoire
québécois. Il nous apparaissait important, comme gouvernement, de
profiter de l'occasion pour colliger à l'intérieur d'un
même document une série d'informations pertinentes qui sont
communiquées aux MRC pour qu'elles se mettent au travail, toujours sur
leur mission fondamentale, qui est le schéma d'aménagement.
L'originalité du document Aménager l'avenir, qui sera
rendu public prochainement, tient au fait qu'il dégage et regroupe dans
un même document les objectifs et les orientations qui
caractérisent les multiples interventions gouvernementales en
matière d'aménagement du territoire. Il traduit tout aussi bien
la volonté du gouvernement de mieux informer et de faire preuve d'une
plus grande transparence en ce qui concerne ces orientations. C'est à ce
sujet que je voudrais reprendre le commentaire qu'on me faisait tantôt en
disant que j'ai déjà déclaré - oui, c'est vrai, et
je le referais - que mes collègues du Conseil des ministres avaient
été surpris de l'ampleur non pas des conséquences, mais
des suites à donner à la loi 125. J'ai dit à chacun des
collègues ministériels: Dorénavant, on veut que le
gouvernement du Québec se lie, on veut que le gouvernement du
Québec fasse connaître ses orientations; ça s'appelle de la
planification et c'est important dans le monde de l'avenir de permettre que les
MRC puissent avoir des schémas d'aménagement qui tiennent compte
des orientations gouvernementales, des projets gouvernementaux qui ont des
références directes à la façon de concevoir un
schéma d'aménagement.
Comme c'est nouveau, l'aménagement du territoire, comme on
n'avait peut-être pas mesuré l'ampleur de cette obligation que
nous nous sommes donnée comme gouvernement, il y a eu une
réaction de surprise en disant: Oui, c'est imposant, il y a passablement
d'éléments qui vont conditionner une meilleure planification
à l'intérieur de la machine gouvernementale au sens global, les
ministères et les organismes. D'ailleurs, à la suite de la
transmission de ces informations, les MRC entreprennent ce que j'appelle la
démarche soutenue qui les conduira directement à leur
schéma d'aménagement.
On doit faire cela avec un dialogue constant entre les instances et
l'appareil gouvernemental parce que la démarche même de la loi 125
était basée sur des principes de cette nature. Certes, la
transmission de documents d'orientation et de projets est importante, mais
l'élément majeur se situe plutôt dans le fait que chaque
ministère ou mandataire discute, transige avec les MRC une à une.
C'est le résultat de ces discussions entre les paliers de
décision qui ont des fonctions partagées et des
responsabilités propres qui, en fin de compte, constituera le
schéma d'aménagement.
Un schéma, ça ne peut pas se faire
uniquement par une juxtaposition de textes. Un schéma, ça
se fait dans l'action, en consultation, en évolution, et c'est comme
ça qu'on entend convier l'ensemble des MRC du Québec à
faire chacune son schéma d'aménagement. Pour ma part, j'entends
faire en sorte que toutes les informations pertinentes, les orientations soient
transmises aux MRC pour qu'elles puissent enclencher rapidement le processus de
confectionner leur schéma d'aménagement par les mécanismes
qui sont prévus dans la loi 125.
Comme le gouvernement, ses ministères et organismes sont
liés par le règlement de contrôle intérimaire. Que
le ministre des Affaires municipales ait le pouvoir de modifier ou de
désavouer en totalité ou en partie le règlement de
contrôle intérimaire de chaque MRC, cela a été
examiné par le ministre responsable de la loi avant son entrée en
vigueur et l'attitude du ministre des Affaires municipales qui a prévalu
sur ce plan en a été une de souplesse, de pragmatisme pour
permettre leur entrée en vigueur le plus tôt possible et ainsi
éliminer certains inconvénients du gel automatique.
Le processus d'examen des règlements de contrôle
intérimaire par les divers ministères a permis de déceler
certaines lacunes et ambiguïtés de la loi dont certaines ont trait
à mes responsabilités comme ministre désigné
responsable de l'application de la procédure spécifique aux
interventions gouvernementales. Ce sont ces lacunes, ces ambiguïtés
que le projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme a pour objet de corriger, sans altérer les principes de la
loi 125, sans modifier l'esprit et sans nous délier des obligations pour
lesquelles on voulait demeurer liés.
Avant de toucher uniquement pour quelques minutes les modifications
particulières de la loi 12, j'aimerais quand même... Je
mentionnais tantôt que le député de Laprairie nous a
parlé durant une demi-heure du découpage des territoires. Il
alléguait que dans le découpage des territoires... En passant,
cela s'est fait il y a un an ou un an et demi, je ne sais pas s'il aime
toujours vivre dans le passé. On va en avoir des preuves prochainement
s'ils nous font réapparaître celui qui était disparu
pendant un certain temps. Il n'en demeure pas moins que le découpage du
territoire du Québec était une responsabilité du ministre
des Affaires municipales parce que c'est lui qui était responsable de la
loi. Et ce découpage, dans l'ensemble, s'est fait avec
énormément de consultations. Je me souviens, seulement dans ma
région, d'une façon bien concrète, où les
comités de consultation ont siégé pendant huit à
douze mois. Quand un comité de consultation, M. le Président,
siège pendant huit à douze mois, il a sûrement vu quelqu'un
quelque part. Il y en a eu des rencontres. Il y en a eu des échanges,
pour expliquer le processus, expliquer les objectifs de la loi 125, expliquer
pourquoi le gouvernement du Québec voulait choisir cette nouvelle
orientation d'un palier intermédiaire entre la localité et la
grande région de concertation qui s'appelle la région
administrative.
Écoutez, quand on connaît le territoire du Québec,
quand on finit cette démarche avec 94 MRC, oui, il est normal - il faut
être honnête - qu'il y ait eu certaines frictions. Il y a eu,
à certains égards, des territoires pour lesquels le ministre
responsable a dû statuer, comme à peu près dans n'importe
quelle évolution de chose normale. À un moment donné, il
arrive un temps où on se doit de trancher, où on se doit de
prendre des décisions. On peut bien reconsidérer à gauche
et à droite, mais pour certains territoires, il a dû exercer sa
responsabilité. Mais, nous entretenir pendant 25 minutes comme si cette
démarche-là avait été une démarche qu'on
avait menée seuls, en catimini, c'est complètement en dehors de
toute réalité objective, M. le Président, parce que ce
n'est pas cela, la réalité. Alors, je tenais à revenir
à des proportions plus réalistes.
Pendant l'autre moitié de demi-heure de sa demi-heure en dehors
du sujet, le député de Laprairie nous a parlé des
responsabilités différentes que le gouvernement s'apprête
à confier aux MRC. Je peux vous dire, M. le Président, que cela
fait plusieurs fois que j'ai l'occasion de rectifier cela et de mettre au
défi des collègues, particulièrement de l'autre
côté de cette Chambre, de dire: Donnez-moi donc des exemples de
mesures qu'on a décentralisées au palier de la MRC, nommez-m'en.
J'ai entendu tantôt: Ils sont en train de décentraliser la voirie
tertiaire. Ce n'est pas cela du tout. Il faut vraiment être
malhonnête. Mais, ce n'est pas la première fois. C'est le genre de
discours qu'ils ont, ces gens-là.
Les MRC nous ont dit: Est-ce que ce serait possible de tester une, deux
ou trois expériences pilotes dans le domaine de la voirie tertiaire? On
va regarder ce que cela donne, on va les tester, on va les analyser et
après cela, on va vous dire: Oui, dans le domaine de la voirie
tertiaire, cela nous intéresserait d'exercer des responsabilités
additionnelles après qu'on se sera acquitté de notre
responsabilité première qui est celle de confectionner un
schéma d'aménagement pour l'avenir. Ce n'est pas de la
décentralisation. Il me semble qu'on a le droit, comme gouvernement,
à partir du moment où on a mis des heures et des heures, des
semaines, des mois, d'arriver avec une loi importante au Québec pour
cadrer le développement du Québec d'une façon
organisée, d'une façon structurée. Cela s'appelle la loi
125 sur
l'aménagement du territoire. Après avoir mis un an et
demi, deux ans en commission parlementaire - je n'étais même pas
ministre quand on a discuté de cela en commission parlementaire -
après avoir fait deux ou trois tournées du Québec pour
expliquer tout cela, cela ne peut pas être une structure pour quinze
jours; cela ne peut pas être une structure pour quelques mois. Ce sera
une structure qui effectivement va demeurer avec une responsabilité
première au schéma d'aménagement et, par la suite, on
verra. (21 h 20)
Pour ce qui est du contenu des matières qu'on va
décentraliser éventuellement, on a pris des engagements et on va
les respecter. Mais, on leur a dit: On ne décentralisera rien d'autre
que ce que vous prétendrez être capables d'exercer comme
responsabilités. On organisera un colloque, on se parlera entre nous et
vous, faites vos devoirs; c'est ce qu'ils nous ont dit qu'ils feraient pendant
une année. Nous avons commencé à réfléchir,
il me semble que cela devrait être encore permis, je ne sais pas s'ils
ont oublié cela de l'autre bord. Oui, on a réfléchi
à des orientations. Oui, on a réfléchi que possiblement,
dans l'avenir, il pourrait être intéressant de confier des
responsabilités additionnelles, dans la mesure où elles le
veulent, dans la mesure où elles sont capables de les exercer. C'est
bien différent de l'épouvantail à moineaux que le
député de Laprairie a essayé de nous mettre dans la
face.
Un dernier commentaire avant de faire quelques remarques sur la loi
même. Quand il nous a dit tantôt que le règlement de
contrôle intérimaire avait empêché les contribuables
québécois de bénéficier des 3000 $ pour le
programme d'aide au logement, ce n'est pas cela le problème. Le
problème fondamental, c'est simplement que Lalonde le savait qu'il n'en
avait plus. C'est bien plus cela qui est grave, c'est bien plus le fait de
mettre fin au programme qui était valable pour les
Québécois et les Québécoises qui voulaient se
construire. C'est bien plus dramatique que les quelques cas qui, effectivement,
d'une façon temporaire, ont pu éprouver quelques
difficultés avant que ces choses-là s'ajustent, comme c'est
normal dans une nouvelle loi. C'est bien différent de ce qui a
été mentionné tantôt.
Je disais que nous avons pensé que, sans modifier l'esprit de la
loi, sans altérer les grands principes de la loi 125, la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, il était normal d'établir
peut-être une procédure qui simplifiera certaines démarches
sans se soustraire au principe et c'est dans ce sens-là que le ministre
des Affaires municipales, toujours responsable de l'application de la loi 125,
a expliqué qu'effectivement il fallait apporter des correctifs à
une nouvelle loi qui, à l'exercice, nous avait permis de constater qu'il
y avait certaines choses qu'on devait simplifier.
À cet effet, la loi a prévu une procédure
spécifique qui établit de quelle façon le gouvernement,
ses ministères, ses mandataires, doivent procéder lorsqu'ils
envisagent d'intervenir sur le territoire. Les articles 149 à 157 de la
loi prévoient en effet qu'avant que les interventions gouvernementales
concernant l'implantation d'un équipement, d'une infrastructure ou de
tous autres travaux d'utilisation ou d'immeubles, un avis de l'intervention
projetée doit être donné au préalable au conseil de
la MRC et que cette intervention doit être jugée conforme aux
objectifs du schéma ou aux dispositions du règlement de
contrôle intérimaire en vigueur.
D'autre part, les règlements de contrôle intérimaire
ont fait ressortir que l'obtention de permis - parce que c'est ce à quoi
on touche - ou certificat du fonctionnaire de la MRC était obligatoire
pour tout intervenant sur le territoire. Une ambiguïté est alors
apparue quand on a regardé cela. La procédure que je viens de
décrire et qui nécessite l'opinion du conseil de la MRC est-elle
suffisante ou faut-il en plus obtenir un permis du fonctionnaire de la MRC en
vertu du règlement du contrôle intérimaire? On a
regardé cela et on a fait un choix. On a dit que, pour éviter un
dédoublement manifeste de procédures qui risque de perturber
sérieusement les interventions gouvernementales dans le territoire des
MRC, en accord avec le ministre des Affaires municipales, il fallait rendre
claire l'obligation du gouvernement - pas se soustraire - des ministères
et des mandataires et déterminer, en termes d'amendements à la
loi 125, une clarification et dire que dorénavant on exigera aussi un
permis de l'officier administratif de la MRC.
Il faut rappeler que, selon l'interprétation de l'article 2 de la
loi qui avait été donnée jusqu'à maintenant tant
par le Secrétariat à l'aménagement que par le ministre des
Affaires municipales, il apparaissait clair que le gouvernement n'était
lié par un règlement de contrôle intérimaire que
selon et dans la mesure des articles 149 et suivants. Cette procédure
avait d'ailleurs été justement insérée dans la loi
en lieu et place du régime des permis auquel il était apparu non
souhaitable d'assujettir le gouvernement.
De plus, cette procédure traduit bien l'un des principes que
j'évoquais au début de mon allocution, que l'aménagement
est un acte politique. C'est le conseil de la MRC et non pas le
secrétaire de la MRC qui doit donner son opinion sur la
conformité de l'intervention projetée. Il pourra le faire en
même temps en termes administratifs et en termes d'opportunité de
l'intervention. Donc, c'est tout à fait contraire à ce que le
député de Laprairie mentionnait. Il n'est pas question de
se sortir d'un mécanisme auquel on souhaite être assujetti mais on
ne veut pas le faire à trois ou quatre niveaux différents, on
veut le faire à un niveau qui s'appelle les articles 147, 149 et
suivants ou en même temps qu'on demandera l'avis au conseil de la MRC, il
y aura une occasion d'expression d'opportunité sur le fond.
C'est dans cet esprit, M. le Président, que la plupart - je ne
veux pas tous les reprendre - des amendements s'inscrivent: perspectives
d'assouplissement, procédures pour clarifier des niveaux
d'interventions, sans en altérer l'objectif fondamental qu'elles visent.
Tant les MRC que les ministères pourront profiter de ces modifications.
Il y a au moins une chose qui est claire: elles faciliteront certainement la
réalisation des interventions gouvernementales, ce qui, d'après
nos amis d'en face, devrait convenir en cette période où,
heureusement, on commence à s'en sortir, mais où on a connu
toutes sortes de difficultés. Plus vite on sera sur le champ, plus vite
on fera des interventions, plus vite cela va permettre à
l'économie de progresser.
C'est l'essentiel du message que je voulais livrer en mentionnant tout
simplement qu'il faut se rappeler que nos amis d'en face ont voté contre
la loi 125...
Une voix: Très juste.
M. Gendron: Si, suivant leur logique, les modifications au projet
de loi no 12 vont à l'en- contre de la loi 125, comme ils ont
voté contre la loi 125, ils devraient tous être d'accord sur les
modifications apportées au projet de loi no 12.
J'espère qu'ils se retrouveront dans une logique que tout le
monde peut comprendre. Je suis convaincu que ces modifications étaient
nécessaires et elles permettront au gouvernement du Québec, non
pas de se soustraire à ce à quoi il ne désire pas se
soustraire, mais de faciliter la compréhension des dispositions
imprécises de la loi 125; elles permettront aussi que des interventions
sur le territoire québécois puissent se faire dans les meilleurs
délais. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Il est difficile
d'endosser l'hypocrisie et le mensonge de ténors ministériels
dans...
Des voix: Bravo!
M. Mathieu: ...l'approche du monstre que constituent les MRC.
À les entendre, tout va bien. Il n'y a pas de problème. Il y a eu
des comités de consultation très démocratiques,
très élaborés. Vous pouvez rigoler tant que vous voudrez,
je vais vous faire une démonstration et on s'en reparlera après
pour voir si la rigolade va durer. On écoute leurs paroles doucereuses,
comme ils ont l'habitude de le faire. Les paroles sont doucereuses, mais les
gestes et la matraque sont au bout. C'est ce qui s'est passé dans ma
région, dans mon comté de Beauce-Sud. Je pense que cela s'est
aussi passé ailleurs dans la province.
La marque de commerce de ce gouvernement, c'est l'autoritarisme, c'est
l'arbitraire, c'est, en quelque sorte, un appel à la violence, non pas
la violence physique, ils sont trop subtils pour cela, la violence morale est
encore plus subtile, encore plus efficace, encore plus révoltante que la
violence physique.
Qu'est-ce que la violence? Le dictionnaire Larousse nous dit:
brutalité, fougue, véhémence, abus de force, contrainte
exercée sur une personne pour obtenir son acquiescement à un acte
juridique.
Ce qui s'est passé dans ma région est pire encore. Quand
je vois l'arrogance de ce gouvernement... Cela me fait penser
précisément à la remarque de leur leader parlementaire:
"Le gouvernement va vous passer sur le corps". C'est ce qu'ils font chez nous
dans Beauce-Sud. C'est ce que le ministre des Affaires municipales fait dans le
comté de Beauce-Sud, il passe sur le corps de cette municipalité.
Sept sur 37. Il nous dit: Cela va bien dans la province, 95% ont
accepté. Chez nous, j'en ai 7 sur 37. Je prends à témoin
la signature des gens de ces municipalités pour lesquels j'ai
déposé des pétitions en leur nom, pétitions qui
contenaient de 75% à 100% des signatures des contribuables de ces
municipalités. Seulement 90%, seulement 100%, cela ne vaut pas la peine
d'en tenir compte. Ce gouvernement consulte, j'en conviens, mais tout est
décidé à l'avance. C'est une consultation pour la forme,
c'est un simulacre de démocratie. Tout a été
décidé à l'avance par des petits patroneux du comté
ou de je ne sais où. Chez nous, je sais où ils sont. (21 h
30)
Révisons brièvement ce qui a été dit. Quand
je vous dis qu'ils emploient des paroles doucereuses, écoutez bien ceci.
J'ai ici un discours prononcé par M. Jacques Léonard, ministre
d'État à l'Aménagement, à l'hôtel
Châteauneuf de Saint-Joseph-de-Beauce, le 28 août 1980. C'est son
allocution d'inauguration - cela partait sur un bon ton -de la consultation
pour la constitution des municipalités régionales de
comté. Allons voir ce qu'il disait à la page 4 et je cite: "J'ai
aussi un large sentiment de confiance parce que tout ce processus avec lequel
vous êtes en train de vous familiariser, nous
l'avons voulu très intimement démocratique." Que de belles
paroles!
Page 6: "Je l'ai toujours dit, on ne change pas la société
par décret." Il a changé d'idée, depuis ce temps. "Notre
philosophie, dans l'approche d'une grande concertation entre tous ces agents,
c'est ce que j'oserais appeler le jeu démocratique dans la
continuité." Que de belles paroles! Plus loin, page 8: "Ces choix de
collaboration que vous allez faire durant les mois qui viennent sont hautement
démocratiques et donc exigeants et contraignants en regard des
gouvernements et des grandes entreprises. Ces grands dictateurs du territoire
devront collaborer aux projets de lettres patentes et se soumettre aux mots
mêmes de ces lettres qui deviendraient en quelque sorte la charte
d'aménagement de votre région d'appartenance."
Plus loin: "Ce seront vos choix à vous". Que de belles paroles!
Page 11: "Cette perspective qui se concrétise aujourd'hui dans le
domaine de l'aménagement pourrait, si vous le jugiez un jour à
propos, toucher d'autres fonctions, etc."
Ensuite, on a pris le soin de préparer un guide. On l'a
très bien préparé. Je vous le dis, en fait de
paperasserie, ils sont imbattables: Guide pour vous aider à
préciser votre zone d'appartenance et les raisons pour lesquelles vous
engloberez chaque municipalité à l'intérieur de ce
territoire; le territoire doit être un lieu de première
appartenance. Je ne reviendrai pas là-dessus, mon collègue, tout
à l'heure, en a fait mention. Belle littérature pour leurrer la
population!
Autres documents. Je vous dis qu'ils ne ménagent pas le papier.
L'aménagement du territoire au Québec, un projet collectif. On
trouve de belles choses. Le citoyen, page 12. "Ainsi, la population d'une
municipalité régionale de comté sera informée -
chez nous, elle ne l'a pas été - sera consultée tout au
long du processus - chez nous, elle ne l'a pas été - depuis la
mise en place de la municipalité régionale de comté
jusqu'à l'élaboration de la modification du schéma
d'aménagement." Dans le comté de Beauce-Sud, il n'y a pas eu de
consultation. Il y a eu un comité de consultation, un comité de
patroneux, un comité d'arbitraires, un comité nommé pour
satisfaire des fins et des objectifs tracés à l'avance. Le
comité, qu'est-ce qu'il avait à faire? C'était de faire
semblant de consulter. C'était un simulacre de démocratie. Les
fins, les zones étaient déterminées à l'avance. Et
il faut vivre avec cela maintenant.
Je vous citerai brièvement le cas de Saint-Prosper. Saint-Prosper
a fait des démarches. Je ne relèverai pas tout le dossier, j'ai
à peu près six pouces d'épais de documents: demandes de
rencontre avec le ministre, rencontres avec des membres du cabinet, des
fonctionnaires, des membres du cabinet du premier ministre, etc. Finalement,
arrive la signification d'une action. Municipalité régionale de
comté Les Etchemins, partie demanderesse, contre municipalité
Saint-Prosper, partie défenderesse, en date du 15 décembre 1982.
On demande au tribunal de condamner la défenderesse à payer
à la demanderesse 3614,22 $ avec intérêts à 24% l'an
sur 1807,11 $ à compter du 1er juin 1982 au taux de 24% - ce n'est pas
cher! - sur 1807,11 $ à compter du 1er octobre 1982 et les dépens
en entier. C'est la méthode péquiste de réaliser une
nouvelle association: une action en Cour provinciale.
Le maire avait écrit au premier ministre et, en désespoir
de cause, le conseil municipal. Le 2 mars 1983, réponse du Conseil
exécutif, cabinet du premier ministre, document signé par M.
Jean-Roch Boivin. Je lis un paragraphe: "C'est ainsi que le premier ministre
s'est rendu à l'argumentation de son collègue des Affaires
municipales en faveur du maintien de la décision que vous contestez et
qu'il a demandé à M. Jacques Léonard de vous exposer, dans
les meilleurs délais, les conclusions de sa mûre
réflexion." Ce qui a fait adopter une résolution en date du 29
mars 1983 à une séance régulière du conseil. Je lis
simplement la conclusion: "Proposé par M. Loyola Laflamme,
secondé par M. Nelson Paré, il est résolu que le conseil
municipal de Saint-Prosper demande au premier ministre du Québec la
démission du ministre des Affaires municipales, M. Jacques
Léonard, étant donné...
Des voix: Ah!
M. Mathieu: ... - vous pouvez rire; c'est drôle - le peu de
respect qu'il a démontré pour les conseils municipaux dans le
découpage des municipalités régionales de
comté."
M. le Président, voici des articles de journaux: "Les MRC, le
bélier mécanique est passé à plusieurs endroits."
Un autre article: "Saint-Prosper devra se soumettre." M. le Président,
les Beaucerons n'ont pas l'habitude de marcher à genoux. Ils ont
l'habitude de marcher debout.
Une autre municipalité, Saint-Zacharie. Un jugement en date du 16
février 1983 de la part de la municipalité régionale de
comté Les Etchemins à la municipalité Saint-Zacharie
village, 801,09 $, et procès-verbal de saisie par un huissier. Quel bien
fut saisi, M. le Président? La municipalité n'avait pas
d'immeubles. Or, on a saisi un camion à incendie qui appartenait
à la municipalité. Belle manière de réaliser une
nouvelle association! Je lis, sur la photo, la légende: "Camion à
incendie, Saint-Zacharie, saisi par MRC Etchemins." Cela va bien. Nous
voyons,
sur la photographie, le conseil municipal au complet ainsi que le corps
de pompiers et les dirigeants du corps de pompiers. Cela va bien dans le
découpage.
Je dis au ministre des Affaires municipales que c'est le temps de
modifier sa décision. Le ministre s'est toujours montré d'une
imperméabilité à toute épreuve et je dirais d'une
arrogance inacceptable. Je lui dis: C'est le temps de modifier votre
décision. Je fais appel pour que les sept municipalités du
comté de Beauce-Sud, qui sont Saint-Prosper, Saint-Zacharie village,
Saint-Zacharie paroisse, qui sont intégrées malgré elles
à la MRC Etchemins - elles veulent adhérer à la MRC
Beauce-Sartigan -de même que quatre autres municipalités
rattachées à la MRC du Granit, qui sont Saint-Robert et les trois
municipalités de Saint-Ludger... Je fais appel, je dis au ministre: Vous
ne mettrez pas les Beaucerons à genoux, M. le ministre; vous
n'êtes pas assez gros pour cela. Je ne sais pas s'il va me comprendre. Je
ne sais pas si le premier ministre va me comprendre. Je ne sais pas si les
ministres vont me comprendre. Vous vous engagez dans une déclaration de
guerre contre les Beaucerons. Vous apprendrez que vous ne les soumettrez pas
par la force.
Vous nous faites toute une démonstration de l'importance du
comité de consultation. Nous avons cru à votre romance des liens
d'appartenance. C'est pourquoi les Beaucerons veulent que les liens
d'appartenance qu'ils ressentent eux-mêmes, non pas les fonctionnaires,
à Québec, ou les patroneux, mais eux-mêmes, les Beaucerons
de Saint-Prosper, de Saint-Zacharie, de Saint-Robert, de Saint-Ludger... Eux
ont décidé que leur appartenance était la Beauce. Le
ministre, pour le cas de Saint-Prosper, nous dit: Ah! Saint-Prosper, mais c'est
rattaché à la même commission scolaire que Lac-Etchemin. M.
le Président, nous avons justement affaire à des institutions
vieilles de plusieurs années. Saint-Prosper était autrefois dans
le comté de Dorchester. Ce comté n'existe plus au
fédéral. Ce comté n'existe plus au provincial depuis 1972
et le ministre vient d'une manière suave nous dire: Oui, mais c'est le
comité de consultation qui a décidé cela. Petit
comité. (21 h 40)
Je n'ai pas de mots assez forts pour vous dire tout le mépris que
je ressens pour ce petit comité biaisé, petit comité de
patroneux, comité injuste. Les mots me manquent pour rendre ma
pensée et c'est peut-être préférable parce que je
crois qu'ils seraient certainement antiparlementaires. Quand je vois que le
ministre a besoin d'un paravent aussi méprisable, aussi puant, il faut
dire le mot, je trouve cela indigne d'un ministre de se servir d'un paravent
aussi inacceptable. M. le Président, même si le ministre passe
pour être un dictateur, je pense qu'il n'a pas avec lui une Gestapo assez
forte pour mettre les Beaucerons à genoux. C'est debout que les
Beaucerons vont négocier.
Une voix: J'ai honte de mon gouvernement.
M. Mathieu: Cela me fait penser à l'URSS qui va
protéger l'Afghanistan. C'est cela. L'URSS est allée
protéger l'Afghanistan et le ministre fait pareil. ' Imaginez-vous si
ces municipalités avaient besoin de protection. Je dis au ministre: Il
peut bien rire tant qu'il voudra, c'est une déclaration de guerre. Je
dis au ministre: Votre patente ne marchera pas. Vous allez vous ramasser avec
des procédures devant les tribunaux. Des saisies, mettez-en tant que
vous voudrez, jusqu'à la Cour suprême et au Conseil privé
si cela existait encore! Je vous le dis, vous ne mettrez pas les Beaucerons
à genoux, certainement pas. Vous avez beau rigoler tant que vous
voudrez.
Je fais un appel et c'est le temps de le faire, avant que le
schéma d'aménagement ne soit enclenché. C'est le temps ou
jamais parce que dans un an, dans deux ans, ils vont dire: Maintenant que le
schéma d'aménagement est enclenché on ne peut plus. Moi je
dis, M. le Président, et je prends l'engagement solennel, si le
gouvernement a le courage, un jour, de faire des élections et que le
Parti libéral du Québec prend le pouvoir, de rapatrier ces
municipalités selon leur volonté.
Je voudrais démontrer la contradiction entre la loi 90 et la loi
125. Lorsque le gouvernement a adopté la loi 90 sur la protection du
territoire agricole... Avec ce gouvernement, on a des protecteurs, c'est
effrayant: protecteur de la jeunesse, protecteur du citoyen, protecteur du
malade mental, protecteur du territoire agricole; on a tellement de protecteurs
que cela va nous prendre un protecteur pour nous protéger de nos
protecteurs! Quand il a adopté la Loi sur la protection du territoire
agricole, pour calmer les craintes des gens, il disait: Vous avez un droit
acquis d'un demi-hectare sur votre propriété, sur votre maison
résidentielle, il n'y a rien là. Qu'est-ce qu'on fait avec le
droit acquis par l'intermédiaire de la loi 125? On vient le neutraliser.
On vient l'annuler parce que le droit acquis existe sur une superficie d'un
demi-hectare, c'est-à-dire 53 818 pieds carrés. On vient par
l'imposition des règlements... Le ministre va me dire: Les
règlements, ce n'est pas moi qui ai fait cela. Ce sont les MRC. Ce sont
les municipalités locales qui ont fait les règlements. Oui, mais
le ministre va-t-il nous dire également qu'il faut que le
règlement soit soumis à son bureau, qu'il y mette sa griffe
personnelle et si le règlement ne fait pas son affaire, il le
désavoue?
Si le fédéral désavouait une loi du Québec,
qu'est-ce que le gouvernement ferait à juste titre? Ce serait une
catastrophe épouvantable. Qu'est-ce que fait le ministre là? Par
son règlement qui fait qu'il désavoue, si la municipalité
ne fait pas ce qu'il veut? Le ministre dit: Il faut, pour donner un permis de
construction, que le terrain ait 32 000 pieds carrés. Donc, sur le
demi-hectare, il entre juste 32 000 pieds carrés. Donc, on vient de
neutraliser. J'ai des cas, M. le Président - je peux vous en sortir dix
en file - de gens qui avaient un terrain avant le zonage agricole avec le droit
acquis, etc., qui ne peuvent plus s'en servir à cause justement de la
mise en application de ce règlement.
Pour conclure, dans la Presse du 29 avril 1983, on dit: "Léonard
aux maires: Aidez-nous à faire l'indépendance du Québec."
Le pot aux roses se découvre: les MRC, c'est un casse-tête. Si les
gens avaient vu tous les morceaux avant, ils n'auraient jamais voulu de ce
casse-tête. On fait un casse-tête, on met l'autre morceau, l'autre
morceau et on commence à voir quel est le but du gouvernement. Il le
dit: Il a besoin de cela pour faire l'indépendance. Moi, je vous dis
non. Si le ministre m'avait demandé: Aidez-nous à faire
l'indépendance, j'aurais dit: Commencez par nous donner notre propre
indépendance chez nous. J'espère que le ministre, aujourd'hui
même, prendra l'engagement de respecter le voeu de la population.
Je fais un appel au ministre. Je sais qu'il passe pour un dictateur et
tout ce que vous voudrez, mais, je vous le répète, M. le
ministre, vous ne réussirez pas à mettre les Beaucerons à
genoux. Vous êtes aussi bien d'en faire votre deuil immédiatement
et votre petit comité, votre petit paravent patroneux que vous avez
nommé pour faire votre pseudo-consultation, c'est un vrai
déshonneur quand vous prenez la parole des gens qui formaient ce
comité. Il me semble qu'en tant que ministre d'un gouvernement qui se
respecte vous devriez faire une vraie consultation. Dans la plupart des
municipalités, les gens n'ont jamais su qu'il y avait une consultation -
je conclus - qui devait les lier pour aussi longtemps et pour autant de choses.
On ne lie pas les générations futures sans leur permission et,
quand on dit qu'on les consulte, qu'on les consulte vraiment.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. Jacques LeBlanc
M. LeBlanc: Merci, M. le Président. Je me devais
d'intervenir sur ce projet de loi pour des raisons bien évidentes que je
vous mentionnerai tout au cours de mon intervention. Nous venons d'entendre le
député de Beauce-Sud, qui nous a énoncé tous les
malheurs qui semblent frapper la région de la Beauce qu'il
représente. Je ne relèverai pas toutes les interventions qu'il a
faites sur des cas précis de découpage des territoires, etc.,
mais il y a un point sur lequel je ne peux me taire: il s'agit de l'accusation
de patronage dans la composition des comités de consultation.
Le gouvernement du Québec, le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional, ne désignait qu'un membre parmi
les trois qui formaient le comité de consultation. Deux membres
étaient nommés, désignés, d'une part, par l'Union
des municipalités du Québec et le troisième membre
était désigné par l'Union des conseils de comté du
Québec. Si le député ne fait pas confiance à ces
deux organismes qui représentent le monde municipal et qu'il les accuse
de patronage dans la composition majoritaire de ce comité, je pense que,
lorsqu'il relira ses propos, il sera étonné de ce qu'il a
prononcé.
J'ai appartenu au monde municipal, j'ai été maire et j'ai
également assumé la responsabilité de la présidence
d'un de ces 19 comités de consultation qui ont procédé
à la mise en place des municipalités régionales de
comté. J'ai donc été en contact avec plus de 100 maires
sur le territoire qui m'était dévolu pour procéder
à cette tâche avec des élus municipaux. Je dois rendre
témoignage à ces gens qui m'ont accompagné et je pense que
tous les présidents des 19 comités de consultation peuvent en
faire autant: l'Union des municipalités du Québec et l'Union des
conseils de comté du Québec, je pense, ont désigné
des gens qu'ils considéraient valables pour accomplir la besogne et je
pense que leur choix a été très bon, qu'ils ont accompli
une tâche magnifique. Je félicite les deux adjoints que j'avais
dans mon comté qui, soit dit en passant, n'étaient pas des
péquistes, pour l'information du député de Beauce-Sud. (21
h 50)
Pour revenir au sujet qui nous préoccupe, la modification qui est
apportée à la loi no 125 par la loi no 12, je dois vous avouer,
M. le Président, que j'ai eu, personnellement, un premier réflexe
lors du dépôt du projet de loi. Je me suis spontanément
posé la question: Est-ce qu'un ministère, entre autres, voudrait
se soustraire aux obligations et aux engagements pris lors de la confection
d'un schéma d'aménagement, en se dispensant d'une demande de
permis, entre autres, pour la réalisation - si je prends l'exemple du
ministère des Transports - de travaux sur les réseaux routiers?
Mais la lecture sérieuse du projet de loi no 12 m'a rassuré
pleinement, parce que la loi no 12 ne vise essentiellement qu'à
réduire ou à comprimer les délais existants pour permettre
une exécution plus rapide des
projets mis de l'avant et déjà soumis au conseil des
maires, à la MRC, pour la confection de son schéma
d'aménagement. L'application du contrôle intérimaire, tel
qu'il existe, ne prévoyait aucun morcellement et on constate la
complication qui surgit lorsque le ministère des Transports, par
exemple, doit procéder à la réfection ou à la
construction d'une route où plusieurs propriétaires
étaient concernés dans l'aliénation des parcelles de
terrain nécessaires à la mise en chantier des travaux de ladite
route.
J'ai fait référence tantôt à l'Union des
municipalités du Québec. Je pense que les deux organismes qui ont
réagi à l'annonce du projet de loi, soit l'Union des
municipalités du Québec tout autant que l'Union des
municipalités régionales de comté et des
municipalités locales, ont fait preuve de vigilance et je ne pense pas
qu'on doive l'interpréter comme un geste de méfiance. Les
élus municipaux et, en particulier, les maires qui siègent aux
conseils des MRC sont des personnes averties et responsables et il est normal
qu'elles expriment des interrogations et même des inquiétudes.
C'est la marque primordiale d'une prise de responsabilité qui les
honore.
J'ai cheminé - je l'ai dit tantôt - avec près de 100
maires sur un territoire donné lors de la mise en place des
municipalités régionales de comté. Je suis en contact
constant avec les 29 maires de mon comté. Je ne suis pas coupé du
monde municipal où j'ai moi-même assumé des
responsabilités. C'est un monde qui m'intéresse au plus haut
point et cet intérêt s'explique, ne serait-ce que pour un point,
mais il est de taille: Je considère que le monde municipal est le
gouvernement le plus près des citoyens. Donc, ses élus sont la
voix la plus autorisée pour exprimer les besoins de leur population
auprès du seul autre palier de gouvernement, celui du Québec, qui
a la responsabilité de bâtir, de moderniser ou de modifier la
législation qui régit les municipalités du Québec.
Le projet de loi no 12 ne modifie pas en profondeur, ne modifie en rien le fond
de la loi no 125 et la responsabilité, l'obligation qu'auront toujours
le gouvernement du Québec et ses différents ministères de
soumettre au conseil de la MRC, à ceux qui ont la responsabilité
de préparer le schéma d'aménagement, leurs projets pour la
confection du schéma. Je ne crois aucunement qu'il y a matière
à protestation dans la discussion qui peut s'articuler autour du projet
de loi no 12, car la règle fondamentale du respect de l'obligation
à la conformité demeure. Si on élimine l'une des
procédures par la loi no 12, soit l'élimination de la demande du
permis, l'obligation de conformité demeure toujours. Je pense que c'est
là l'essentiel de la loi no 125 et de cette particularité qui lie
le gouvernement du Québec aux schémas d'aménagement des
municipalités régionales de comté.
Tout en gardant le ton le plus positif possible dans ce débat, je
ne peux souscrire à tout ce qui a été dit du
règlement de contrôle intérimaire et aux prétextes
évoqués du côté de l'Opposition, par certains de ses
membres en particulier, notamment à cette fausseté: des milliers
de constructions, prétendent-ils, n'ont pu être
réalisées à cause des exigences du règlement de
contrôle intérimaire des MRC au cours de l'hiver 1983 et de
l'automne 1982. La vérité est tout autre et la raison majeure
qu'ils se gardent bien de dire, la cause principale qui a empêché
ou retardé la construction de logements, la véritable raison,
c'est un niveau scandaleux des taux d'intérêt décidé
par cet autre palier de gouvernement, celui d'Ottawa, celui qu'ils
défendent sans égard aux intérêts du
Québec.
Je ne puis que faire allusion également à tout ce
décor, à toute cette dimension dans le paysage du monde municipal
québécois, soit cette intervention insidieuse du gouvernement
fédéral d'Ottawa auprès des municipalités du
Québec. Quel but poursuit le fédéral dans ses tentatives
d'intervention? Est-ce que les bonnes relations qui existent entre le monde
municipal, le gouvernement du Québec et le ministère des Affaires
municipales, en particulier, leur portent ombrage? Après tout le
bouleversement qui, depuis quelques années, est survenu dans le monde
municipal, les élus municipaux auraient amplement raison d'être
aigris, d'être complètement braqués contre le gouvernement
du Québec et contre le ministère des Affaires municipales, mais
c'est le contraire qui se produit.
J'ai vécu l'expérience d'un premier contact avec des
maires pour la mise en place, la création des municipalités
régionales de comté. Au départ, il y avait ce sentiment de
scepticisme qui se lisait sur la figure de plusieurs intervenants. Les
allégeances politiques aidant, c'était assez visible, mais
à mesure que la loi 125 a été expliquée, que
l'information a été transmise, on a heureusement constaté
que cette méfiance du départ a fondu pour devenir une
participation franche et entière à cette réforme en
profondeur du monde municipal et à la création de cette structure
administrative et politique qui était offerte aux maires à cette
table de concertation qu'était la municipalité régionale
de comté.
Je vous dis, d'après l'expérience que j'ai avec les maires
que je contacte dans ma région, qu'ils savent drôlement bien
utiliser cette table de concertation. Cette intervention fédérale
et cette recherche d'infiltration et d'ingérence dans le monde
municipal, est-elle due à la compétence des municipalités,
à leur acceptation d'un
dialogue constant avec le gouvernement du Québec, à
l'instauration d'un régime fiscal qui les place aujourd'hui dans une
situation très avantageuse? On n'a qu'à constater les surplus,
les excédents budgétaires des municipalités du
Québec; certaines ont des surplus absolument extraordinaires. Les
municipalités du Québec n'ont pas subi les effets
désastreux de la crise de l'année 1982 de laquelle nous sortons
lentement. Est-ce que cette compétence des municipalités, ces
bonnes relations avec le gouvernement du Québec les fatiguent assez pour
vouloir substituer à cela l'incompétence fédérale?
(22 heures)
On n'a qu'à se remémorer l'existence d'un ministère
fédéral des Affaires urbaines qui n'était qu'un
prétexte d'infiltration également et que, par décence,
finalement, on a décidé d'abolir. Veut-on faire au niveau
fédéral, par la bande, ce qu'on ne peut pas faire directement? Je
comprends que cela les prive d'un contact avec les élus municipaux. Cela
les empêche d'organiser une distribution de fonds fédéraux
de façon discrétionnaire et d'ériger en système une
distribution discrétionnaire. Bien sûr, cela va les priver aussi
des parades du Père Noël pour annoncer dans une prochaine rencontre
qu'ils annonceront quelque chose, comme cela s'est fait dans mon
comté.
Le projet de loi no 12 s'inscrit dans une prise de responsabilité
du gouvernement du Québec de doter la législation municipale, et
non pas de les laisser traîner, de modifications qui s'avèrent
nécessaires et qu'on doit faire quand c'est le temps de les faire. Ceci
pour un bon fonctionnement du ministère des Transports entre autres,
précisément pour ne pas pénaliser la voirie rurale en
retardant la réalisation d'améliorations au réseau routier
rural. Les besoins dans ce domaine sont tellement urgents que je souscris
d'emblée à toute démarche qui vise à
accélérer la réalisation et la concrétisation des
projets d'amélioration du réseau routier rural.
Le projet de loi no 12 est une modification qui s'inscrit aussi dans ce
que j'ai moi-même proposé aux élus municipaux, à
savoir que la loi 125, au moment où on mettait en place les
municipalités régionales de comté, n'était pas
coulée dans le ciment pour des années à venir et que,
lorsqu'il s'avérerait nécessaire - à l'usage,
c'était une structure nouvelle, nous impliquions dans ce
procédé des maires de municipalités dans tout le
Québec - d'apporter des modifications pour son bon fonctionnement, nous
le ferions immédiatement. Je ne croyais pas, à ce moment, avoir
la tâche d'intervenir sur une de ces modifications, mais aujourd'hui je
suis heureux de le faire pour que la législation municipale soit
adaptée, soit modernisée pour convenir au Québec
d'aujourd'hui. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Germain Leduc
M. Leduc (Saint-Laurent): Avec le projet de loi no 12, le
ministre des Affaires municipales demande à l'Assemblée nationale
de voter un projet de loi qui va permettre au gouvernement, à son propre
ministère, à tous les autres ministères et à tous
ses mandataires de déroger à sa propre loi et aux règles
qu'il avait lui-même imposées par l'adoption en 1979 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, soit la loi 125. En effet, en vertu de ce
projet de loi no 12, le gouvernement, ses ministères ou mandataires
pourront effectuer des opérations cadastrales et des morcellements de
terrains durant la période de contrôle intérimaire. Ainsi,
ils pourront se soustraire à leurs propres exigences, soit celles
établies par la loi 125.
Par le présent projet de loi, ainsi que par le projet de loi
omnibus de décembre dernier, qui modifiait l'article 61 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, le gouvernement reconnaît
expressément qu'il ne peut se soumettre à sa propre loi, à
ses propres règles du jeu. Il reconnaît expressément que
les règles qu'il a établies dans la loi 125 sont nettement trop
contraignantes et exigeantes. Il reconnaît expressément qu'il ne
peut se soumettre à la lourdeur administrative et aux nombreuses
difficultés créées par le schéma
d'aménagement et le contrôle intérimaire.
Par le présent projet de loi, le ministre décrète
que le gouvernement est au-dessus de sa propre loi. Au lieu d'assouplir le
processus conduisant à l'aménagement du territoire, comme l'ont
souvent demandé les intervenants du monde municipal et
particulièrement les municipalités, le gouvernement, se sentant
incapable de se soumettre à la lourde procédure administrative
qu'il a lui-même créée, nous demande d'adopter une loi lui
permettant de se soustraire à toute confusion sans toutefois
répondre aux nombreuses demandes des intervenants dans ce dossier et,
particulièrement, bien sûr, des municipalités.
Il faut bien le dire: Le gouvernement fait encore preuve ici
d'incohérence et de confusion entre les discours qu'il tient à la
population et la législation qu'il fait adopter à
l'Assemblée nationale. Tout en prônant l'autonomie locale des
municipalités du Québec et le droit pour ces dernières de
faire respecter sur leur territoire les lois et règlements les
régissant, le gouvernement vient, par son projet de loi no 12, renier ce
principe en statuant que le gouvernement est au-dessus des lois et au-dessus de
l'autorité des municipalités. Le gouvernement veut bien que les
municipalités soient autonomes, mais
à la condition que cette autonomie ne lui crée aucune
contrainte et aucun préjudice. Le gouvernement veut bien que l'on
procède à l'aménagement du territoire, mais à la
condition que les lois et les règlements qui doivent y présider
ne le dérangent pas et, surtout, ne l'obligent pas à obtenir des
permis et des certificats exigés en vertu d'un règlement de
contrôle intérimaire.
Il ne faut pas, non plus, que ces lois et règlements
l'empêchent de construire une voie de circulation. Le gouvernement, en
fait, se refuse à respecter les lois et règlements qu'il a
lui-même édictés. La question qu'on doit se poser ici,
c'est celle-ci: Est-ce que le gouvernement ou un juge est au-dessus des lois?
Comme dans le cas d'un juge, à mon avis, le gouvernement doit respecter
les lois et voir à ce qu'elles soient appliquées. Le
gouvernement, pas plus qu'un juge, n'a le droit de se soustraire ou de
soustraire qui que ce soit aux lois existantes et, surtout, il n'a pas le droit
de se soustraire lui-même à ses lois.
Si le gouvernement entend se soustraire aux lois et règlements
qu'il a édictés, c'est donc que ces lois et règlements lui
causent des préjudices. Or, il est évident que, dans le dossier
de l'aménagement, plusieurs intervenants subissent, comme le
gouvernement, des préjudices. Qu'il suffise de mentionner ici les
municipalités, les constructeurs et les contribuables en
général, qui subissent sûrement des contraintes et des
préjudices à cause de ces lois et règlements sur
l'aménagement du territoire. Les délais occasionnés par la
préparation du schéma d'aménagement, ainsi que par la
préparation et l'adoption des règlements de contrôle
intérimaire sont sûrement des causes de retard dans les projets de
développements domiciliaires, commerciaux et industriels. Mais si tous
reconnaissent que c'est le prix à payer pour éviter un
développement anarchique et un gaspillage du territoire
québécois, il faudrait, il me semble, que l'État, au
même titre que les citoyens, participe à la réalisation de
l'objectif visé et ne tente pas de se soustraire par des dispositions
privilégiées aux lois qu'il a lui-même
édictées à cette fin.
Qu'advient-il des garanties que le ministre des Affaires municipales
donnait aux représentants municipaux réunis au congrès de
l'Union des municipalités le 28 août dernier, alors qu'il
affirmait: "En ce sens, vous êtes devenus des artisans de la texture
économique du pays. Vous l'êtes devenus dans le cadre d'une loi,
soit la loi 125, qui vous octroie cette liberté de choix et d'action
avant tous les autres intervenants, dans le cadre d'une loi qui contraint le
gouvernement à s'astreindre à vos schémas
d'aménagement sous peine de débats publics où les citoyens
vont devoir juger au mérite"?
Je dois vous dire, M. le ministre, qu'avec le dépôt du
projet de loi no 12 vous avez décidé de ne pas vous astreindre
aux schémas d'aménagement et les citoyens du Québec vont
vous juger au mérite. J'ai grand peur que le verdict en soit un de
culpabilité. Même l'Union des municipalités et l'Union des
municipalités régionales de comté se montrent très
sévères à l'endroit du gouvernement. Les deux unions
trouvent tout à fait inacceptable qu'un gouvernement qui prétend
prôner la consultation auprès des parties concernées n'ait
nullement consulté ces deux instances. Bien plus, c'est l'Opposition qui
a informé l'Union des municipalités et l'Union des
municipalités régionales de comté du dépôt de
cette fameuse loi 12. (22 h 10)
Dans leurs commentaires sur ce projet de loi, les deux unions
déplorent le comportement du gouvernement face aux contraintes
imposées par le contrôle intérimaire et ne peuvent
s'empêcher de mettre en cause, face aux autres contribuables
québécois, l'équité des amendements proposés
par le projet de loi no 12 qui favorise le gouvernement, ses ministères
et ses mandataires. Tout en constatant qu'il peut être sain de revoir les
mécanismes de fonctionnement de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, les deux organismes ne peuvent s'empêcher de proposer que
cette révision soit également élargie aux problèmes
éprouvés par les municipalités.
Les deux organismes concluent leurs commentaires en soulignant qu'ils ne
peuvent s'empêcher de ressentir certaines frustrations après toute
la publicité faite autour de la loi no 125 et de l'avenir de
l'aménagement au Québec, alors que l'on constate un retour en
arrière, soit le rétablissement des anciennes procédures
à quelques nuances près. Ces municipalités et ces unions
terminent ainsi: "Enfin, on en arrive toujours au vieil axiome: un gouvernement
est fait pour gouverner et ce, envers et contre tous."
Je pense, M. le Président, que ces commentaires traduisent assez
bien l'état d'esprit qui règne dans le monde des
municipalités locales et des municipalités régionales de
comté. Tous les intervenants municipaux sont d'accord pour
reconnaître que la protection du territoire et son aménagement
rationnel sont essentiels pour éviter le développement anarchique
et un gaspillage de ce territoire québécois. Mais tous sont
également d'accord pour condamner les modalités d'application de
la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme.
Après avoir, dans bien des cas, imposé à des
municipalités une appartenance à une MRC qui n'était pas
toujours souhaitable et souhaitée, le ministre des Affaires municipales
a décrété qu'il n'était absolument pas question
pour les
municipalités régionales de comté de modifier leur
territoire au cours des quatre ou cinq prochaines années. Il semble donc
que les territoires sont coulés dans le béton pour les quatre ou
cinq prochaines années. Impossible pour les municipalités d'en
sortir.
Bien plus, le ministre a indiqué que, même si la loi a
prévu des mécanismes pour le cas où ces
municipalités voudraient se détacher de la MRC dont elles font
partie, elles ne pourront utiliser ces mécanismes pour cette
période de quatre ou cinq ans. Imaginez, par le projet de loi no 12, le
ministre entend se soustraire à des exigences de la loi no 125, alors
qu'il ne permet pas aux municipalités d'utiliser des dérogations
qui sont prévues et permises par cette même loi no 125.
Pourquoi, dans le cas particulier de Brome-Missisquoi, le ministre
n'a-t-il pas respecté la volonté de la population qui
désirait avoir une MRC à la mesure de sa véritable
région d'appartenance? Que penser maintenant de la situation qui
prévaut à la MRC Pontiac? Il est très difficile, il me
semble, de concilier, d'une part, l'affirmation du ministre, à savoir
que toutes les consultations ont été faites dans les
démarches pour déterminer les territoires des MRC et, d'autre
part, l'insatisfaction et le mécontentement général des
populations touchées par la formation des MRC.
Comment concilier également le fait que, chaque jour, les
journaux régionaux font état des problèmes qui existent au
sein des MRC et la déclaration du ministre qui affirmait que le
gouvernement n'avait nullement imposé ses volontés aux
municipalités, que les comités de consultation avaient
très bien fonctionné, que l'émission des lettres patentes
avait été plutôt un accord généralisé
et que les gens disaient, après coup, que les décisions qui
avaient été prises avaient été les meilleures?
En plus de geler les territoires des MRC pour une période de
quatre ou cinq ans, le ministre annonce aux MRC, comme si une mauvaise nouvelle
devait nécessairement en amener une deuxième, qu'elles devront
trouver, et ce à très court terme, des sources autonomes de
revenus pour assurer leur bon fonctionnement. Maintenant que le réseau
des MRC est créé, le ministre annonce gentiment aux contribuables
de ces MRC que le financement par le gouvernement tire à sa fin et que
les MRC devront faire preuve d'imagination pour trouver leurs propres sources
de revenus. Il faut que le ministre ait drôlement de l'imagination et, je
dirais, surtout du culot pour demander aux MRC de faire preuve d'imagination
pour trouver leurs propres sources de revenus. Je suppose que, parmi les
dirigeants des 1600 municipalités locales du Québec, il s'en
trouve certains qui ne manquent pas d'imagination. Pourtant, je ne sache pas
qu'ils aient, encore jusqu'à maintenant, trouvé d'autres moyens
d'obtenir des sources de revenus qu'en taxant leurs contribuables.
Il ne faudrait pas, il me semble, prendre les Québécois
pour des imbéciles. Ils ont compris, eux, depuis longtemps qu'avec ce
gouvernement, tout se paie et que la facture est toujours très
élevée. Il aurait fallu, il me semble, dès le
début, être très clair et aviser la population et les
contribuables concernés que l'aménagement du territoire, cela a
un coût et qu'il faut le payer et ce, même en temps de crise
économique. Il est évident qu'un nouvel organisme créant
un nouveau palier de gouvernement va nécessairement entraîner des
coûts aux contribuables. Ces coûts seront d'autant plus importants
que les champs d'activité des MRC seront très étendus.
Quant à savoir justement quels champs d'activité seront
dévolus aux MRC, le ministre, il faut bien le dire, se fait discret et
vague à souhait. Il ne faudrait surtout pas, M. le Président, que
le gouvernement soit tenté de régler ses graves problèmes
financiers et budgétaires par l'entremise des MRC. Il ne faudrait
surtout pas que le gouvernement refile aux MRC les responsabilités qui
se veulent gouvernementales, comme celles de la voirie, de la gestion des
déchets, de l'évaluation, des équipements physiques, des
services d'éducation et de santé. La tentation peut être
grande, mais il ne faudrait pas - je pense que les municipalités, leurs
dirigeants et leurs contribuables sont d'accord là-dessus - que le
gouvernement impose aux MRC un rôle qui déborderait celui de
l'aménagement du territoire. Personne au Québec ne pourrait
accepter que les MRC leur imposent un autre régime de taxation. Je pense
qu'au Québec, nous avons notre quota en ce qui concerne les taxes et les
impôts.
En ce qui concerne la décentralisation, le ministre nous annonce
que le débat n'a pas encore eu lieu. Il indique que, tant que le
Québec fera partie de la Confédération canadienne, la
décentralisation sera fort limitée alors que, dans l'optique d'un
Québec indépendant, des pouvoirs beaucoup plus larges seraient en
cause. Imaginez, le ministre voudrait nous faire croire, je ne sais trop par
quelle recette magique, qu'un Québec indépendant pourrait donner
davantage de pouvoirs aux contribuables et aux municipalités, bien
sûr. On n'est pourtant pas encore en régime
indépendantiste. Rien n'empêche, cependant, le ministre actuel de
l'Éducation de vouloir réduire considérablement les
pouvoirs des commissions scolaires. Mais que peut signifier, M. le ministre, un
transfert des pouvoirs aux municipalités si elles n'ont pas les revenus
pour exercer ces pouvoirs?
Je terminerai en disant que, si le
gouvernement veut confier véritablement l'aménagement du
territoire aux élus, aux municipalités, il devra, je pense,
respecter d'abord lui-même les règles qu'il a mises en place. Ce
n'est sûrement pas en se soustrayant ainsi et en soustrayant ses
ministères et ses mandataires aux contraintes de la loi 125 que les MRC
auront l'impression de contrôler l'aménagement du territoire. Les
MRC n'auront pas plus l'impression de contrôler cet aménagement si
les fonctionnaires, comme cela semble se produire actuellement, orientent
directement le contenu des règlements de contrôle
intérimaire sous peine, bien sûr, si ces règlements ne sont
pas acceptés, de les désavouer, ce qui aurait pour
conséquence immédiate de maintenir le gel du développement
sur le territoire. (22 h 20)
Comme les règlements de contrôle intérimaire, pour
être acceptés, doivent nécessairement se conformer aux
exigences préétablies par le ministère des Affaires
municipales, il aurait été, je pense, beaucoup plus
expéditif et beaucoup plus honnête d'imposer directement un
règlement de contrôle intérimaire standard à toutes
les MRC du Québec. Ce processus aurait peut-être nui à
l'image que le gouvernement veut projeter de la liberté pour les MRC de
contrôler le développement de leur territoire, mais il aurait eu
l'avantage de représenter la réalité. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Groulx.
M. Élie Fallu
M. Fallu: M. le Président, il est manifeste que les
libéraux, du moins ceux que nous avons ici en cette Chambre, ont
passablement de difficulté à vivre dans la société
moderne du Québec. Souvenez-vous de leurs ministres, il y a à
peine sept ans, ces ministres qui laissaient aller le territoire agricole, ces
ministres qui ont massacré littéralement l'environnement, ces
ministres qui ont agi à leur guise, sur le territoire faisant passer les
routes en plein milieu des terres.
La société moderne du Québec a changé,
mesdames et messieurs. Elle est faite d'économie des sols en vue de la
survivance de la nation. Elle est faite de la conservation de la qualité
de la vie. Elle est faite de la participation des citoyens, des citoyennes et
des élus à la gestion collective. Les libéraux n'admettent
pas les valeurs nouvelles qui sont apparues dans la société:
l'écologie, la décentralisation, la prise en main par les
citoyens. Ils sont actuellement déconnectés de la
société, débranchés de ses aspirations. Ils ne
savent pas avec quel enthousiasme les élus municipaux se sont mis
à l'aménagement avec leurs concitoyens et leurs concitoyennes.
Ils ne connaissent pas l'ampleur des espoirs nés de la recherche d'un
nouvel aménagement des pouvoirs dans notre société.
Vous avez écouté tantôt ces cris et ces hurlements.
Ce sont les libéraux, ces centralisateurs et ces dictateurs des
années 1970 à 1976 qui, en trois lois, ont fusionné de
force pas moins de 70 municipalités. On a entendu déjà
trois discours, le froissement du même papier qui se tournait sur les
bureaux, la même récitation apprise, les mêmes vieux
discours répétés. Même si, en Chambre, en commission
parlementaire, dans tous nos débats, ils ont reçu réponse
à leurs questions et soulagement à leur état d'âme,
ils répètent inlassablement les mêmes rengaines. C'est
croire qu'ils ont fini par y croire eux-mêmes, à moins que ce soir
ils ne profitent de la télévision pour essayer de faire passer
leur message, puisque plus aucun média ne rapporte leurs paroles ou
leurs dires.
M. le Président, ces gens cherchent des poux. Je voudrais vous
signaler que les poux sont rouges. Qu'ils se grattent tout seuls.
De quoi s'agit-il? De la création des MRC? Du découpage du
territoire? De la loi 125? Laissez-moi simplement vous rappeler que, sur 1510
municipalités qui ont pris part à la consultation, les attentes
formulées ont été satisfaites à 99%. J'aimerais
simplement reprendre ce que, en cette Chambre, en 1964, rappelait fort
justement - mais je pense qu'il a été le dernier à le
rappeler -Jean Lesage à propos d'un aménagement à l'une
des lois municipales. Le premier ministre rappelait avec force, avec toute
l'autorité du gouvernement libéral de l'époque, que
c'était à l'Assemblée nationale que revenait
l'autorité suprême de délimiter les territoires municipaux
et de donner les pouvoirs aux municipalités.
L'esprit a changé, M. le Président, par la consultation.
C'est en tout une douzaine de cas de demandes de modifications et souvent a
posteriori, après un changement dans une élection municipale,
après qu'un groupe de citoyens aient - je dirais, entre nous -
désavoué, pour ainsi dire, leurs élus, que certains
"problèmes", surtout certaines charges de cavalerie comme celle à
laquelle nous avons assisté tout à l'heure... On croyait
plutôt voir un jarret noir embourbé.
Pendant que ces libéraux, ici en Chambre, ronchonnent
éternellement des choses qui n'existent pas, qu'en est-il sur le
territoire? Laissez-moi simplement vous lire ce qu'un préfet raconte: La
loi 125, c'est la plus belle mesure dont ait jamais hérité le
monde municipal. Il existe enfin une loi permettant aux citoyens d'agir
directement sur les élus et de travailler avec eux à
l'aménagement du territoire sur lequel ils vivent. C'est sans doute la
meilleure loi qui
n'ait jamais été votée, pour autant que les
municipalités sont concernées. Voilà quelqu'un qui n'est
pas venu à l'Assemblée nationale, qui est resté
près de son monde, chez lui. Pourtant, il était candidat à
la dernière élection pour le Parti libéral: le
préfet de la Matawinie.
Après ces drames, ces cris, je vois les gens maintenant de la
région de Pontiac ou de Gatineau confondre encore une fois le territoire
municipal et leurs propres anciennes circonscriptions électorales, dans
cette Chambre, comme ils le font régulièrement. On va les
entendre tout à l'heure. Je vous préviens, M. le
Président, vous avez déjà assisté à ce
spectacle, par des questions en Chambre notamment.
De quoi s'agit-il ce soir en cette Chambre? D'un projet de loi qui a
à peine quelques articles, neuf, dont le dernier: La présente loi
entre en vigueur le jour de sa sanction. Un projet de loi qui vise à
"dépaperasser", qui vise la simplification administrative. Mais Dieu!
est-ce qu'ils sont contre la simplification administrative, ces gens-là?
Certainement pas. Est-ce qu'ils sont contre la paperasse? Certainement pas. Je
peux, puisqu'ils sont terminés, faire allusion aux travaux de la
commission des affaires municipales. J'ai entendu de mes oreilles, depuis deux
jours, des affirmations absolument invraisemblables de la part de ces
députés libéraux, membres de la commission parlementaire
des affaires municipales, qui sont venus nous dire qu'il ne fallait pas trop
instruire les élus municipaux. Il y en a un qui se reconnaît dans
cette Chambre.
Une voix: Qui ça?
M. Fallu: Ah, il rit jaune dans son coin. Il y en a un autre - il
a quitté tout à l'heure - qui a dit qu'il fallait
réglementer l'affichage dans les journaux, au mépris de la
liberté de presse. Ah non, c'est le même. Il est toujours
là. Un autre nous a proposé une commission municipale
itinérante afin de réprimer les abus des élus
municipaux.
Une voix: Est-il en Chambre?
M. Fallu: C'est un maire. Il n'y a pas beaucoup de maires...
Une voix: Est-il en Chambre ce soir? M. Fallu: ...dans
cette Assemblée, Une voix:Est-ce qu'il est là ce
soir?
M. Fallu: Il n'est pas là ce soir. Évidemment, ce
sont les affaires municipales. Donc...
Une voix: Il est en congé, le maire. (22 h 30)
M. Fallu: Il y en a un autre qui réclamait des
contrôles fréquents des élus et lui, c'est un ex-maire.
Une voix: Pas le député de Hull?
M. Fallu: Ce sont ces gens-là qui veulent nous proposer
une très jolie société. Vont-ils s'opposer à la
"dépaperasserie", à la simplification administrative? M. le
Président, vous n'avez pas pu suivre le débat depuis le
début, peut-être sans doute de vos appartements mais, au
cas...
Une voix: Ses bureaux.
M. Fallu: Pardon, de vos bureaux, maintenant. En quelques mots et
d'une façon la plus simple possible, je présenterai l'objet de la
loi.
Une voix: Il serait quasiment temps.
M. Fallu: Par la loi 125, le gouvernement lui-même, ses
ministères, ses mandataires et ses organismes, se sont obligés
à se soumettre à la loi sur l'aménagement fabriquée
par les citoyens et les citoyennes, avec leurs élus locaux, en
collaboration avec les élus municipaux. Le gouvernement s'est
obligé à se soumettre à ses propres lois comme il l'a fait
dans le domaine agricole et dans le domaine de l'environnement. Or, un
mécanisme ad hoc a été prévu, de l'article 149
à l'article 157, qui oblige un ministère à
présenter à la municipalité régionale de
comté...
M. Dubois: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Question de règlement, M. le
député de Groulx.
M. le député de Huntingdon.
M. Dubois: Je pense que le député vient d'induire
cette Chambre en erreur. Il vient d'indiquer que le gouvernement prend
l'application de la loi à son compte, c'est-à-dire qu'il respecte
la loi. Le gouvernement ne respecte pas la loi 90 puisqu'un article indique que
le gouvernement...
Le Président: L'un n'exclut pas nécessairement
l'autre, M. le député. De toute façon, il ne s'agit pas
là d'une question de règlement, mais d'une question
d'opinion.
M. le député de Groulx.
M. Fallu: Je vous remercie d'avoir protégé mes
droits de parlementaire, M. le Président.
Le gouvernement s'oblige à donner à la MRC un avis
d'intention. Le ministère des Transports, le MLCP ou le ministère
de
l'Énergie et des Ressources qui veut construire une route doit
donc donner un avis d'intention à la MRC. Cette MRC, c'est-à-dire
des élus, réunit ses membres et donne ou non un avis de
conformité. Si oui, on procède; sinon, en dedans de 90 jours, on
avise des changements. Passons sur les détails parce qu'il ne s'agit pas
de cela.
Que fait un citoyen qui veut intervenir sur le territoire, se
construire, creuser, etc.? Il va à sa municipalité et demande un
permis. Si sa demande est conforme au règlement de contrôle
intérimaire, au schéma d'aménagement, au règlement
d'urbanisme, on le lui délivre. Sinon, par le biais de ses voisins, de
ses concitoyens et concitoyennes, il fera les représentations
adéquates pour ajuster éventuellement les règlements ou le
schéma d'aménagement.
Qu'en est-il de cette loi maintenant? Le gouvernement s'était
soumis à la fois à cet avis d'intention et à la demande de
permis dans la municipalité. Je vous "scénarise" cela, M. le
Président. Une route doit être élargie cet
été, on doit corriger quelques courbes, on doit faire quelques
élargissements à certains endroits pour un dépassement. Il
fallait, pour chaque lot, pour chaque division, subdivision, demander un permis
comme s'il s'était agi de construire une polyvalente, une église
ou une maison de huit logements. Il fallait un permis pour chacun de ces lots,
pour deux pieds de large, devant une maison, pour deux pieds de large le long
d'une ferme. Qu'est-ce que le gouvernement fera dorénavant? Il va
simplement, tel que le prévoit la loi, déjà depuis 1979,
s'adresser à la MRC et faire vérifier par des élus la
conformité de ces travaux au schéma d'aménagement.
Simplification administrative "dépape- rasserie". Vous essayez
d'imaginer au Québec le monceau de permis que le gouvernement aurait
dû demander à chacune des municipalités pour chaque lot sur
lequel il serait intervenu.
Évidemment, on a oublié de nous parler de cela de l'autre
côté, parce qu'il semble qu'ils n'ont pas lu le projet de loi. Ces
gens ne semblent pas savoir comment cela fonctionne. Entre-temps, ils racontent
que le gouvernement ne se soumet plus à ses propres lois. Ils ont mal lu
les amendements. Il s'agit simplement de ceci. À l'article premier qui
amende l'article 2 de la loi 125, il y a deux mots qui sont importants: "Dans
la seule mesure prévue au." C'est-à-dire que le gouvernement
n'aura plus à demander les permis dans les municipalités, mais
néanmoins il reste obligé d'aller se chercher un avis de
conformité auprès de la MRC, auprès des élus. C'est
cela le projet de loi.
On ne se dédit pas comme gouvernement. À l'usage - on
l'avait dit en 1979 - un tel monument n'avait jamais existé dans notre
société dans laquelle les citoyens et les citoyennes
participaient dans leur municipalité, en recréant les anciens
conseils de comté sous forme de MRC pour y placer des relations
intermunicipales et un pôle de décision, en obligeant
gouvernement, MRC, municipalités enfin à faire
l'aménagement. On ne se dédit pas par rapport à ce qu'on a
dit en 1979. Mais on avait dit, en 1979, qu'il faudra constamment ajuster; ce
qu'on ne manque pas de faire d'ailleurs. Souvenez-vous de la loi 92, avant les
fêtes.
Vous avez saisi que le Parti libéral a choisi, ce soir, non pas
de parler de l'objet du projet de loi no 12, non pas de la simplification
administrative, non pas de l'efficacité dans notre
société, mais il a simplement voulu tâcher, encore une
fois... J'imagine qu'avec tous ces discours qu'ils ont relus et relus, ils vont
finir par les mettre dans des archives. Peut-être maintenant qu'avec la
Loi sur les archives cela va bien être classé, mais pensez
maintenant à l'avenir. Il y a encore des députés qui font
des rengaines sur les comités de consultation d'il y a trois ans.
Je pensais à mon collègue, tout à l'heure, le
député de Montmagny-L'Islet, qui a présidé un
comité de consultation, mais il est député ici à
l'Assemblée nationale depuis deux ans maintenant. C'est de l'histoire
ancienne. Cessez de raboter cela. Mettez vos discours dans les archives et
pensez à l'avenir. C'est ce que nous voulons faire; faire en sorte qu'au
cours de l'été, le ministère des Transports puisse
procéder rapidement, dans le respect des élus municipaux, dans le
respect des juridictions des MRC, au versement des 1300 chèques
d'expropriation qui attendent chez les notaires actuellement, qui n'ont pas pu
être versés, parce que, pour avoir pu être versés, il
aurait fallu que le ministre ne s'entende pas avec les riverains. Il aurait
fallu qu'il leur envoie des avis d'expropriation et que cela aille jusqu'au
Tribunal de l'expropriation. C'est tout simplement ce que nous voulons faire
dans le respect des élus municipaux et des pouvoirs des MRC. (22 h
40)
Des voix: Très bien.
Le Président: M. le député de Gatineau.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, il me semble que c'est
manifeste que le député de Groulx avait mandat de remplir un
trou, il l'a fait avec plus ou moins de brio, je dois l'avouer, en passant les
trois quarts de son intervention à attaquer les libéraux, comme
si les libéraux étaient responsables du fouillis qui
résulte de la politique du gouvernement en matière
d'aménagement. Finalement, il a réussi à nous donner
quelques cas d'espèce de ce qu'il considère être les
effets
bénéfiques du projet de loi no 12. Je reviendrai
d'ailleurs sur certains des points soulevés par le député
de Groulx qui témoignent de son ignorance complète de ce qui se
passe dans la réalité de certaines circonscriptions
électorales du Québec sinon possiblement dans la sienne.
On sait que ce gouvernement, qui se voulait si transparent, après
sa première élection, en 1976, est maintenant passé
maître dans l'art de camoufler ses vraies intentions derrière les
beaux discours, empreints d'un soi-disant désir de respecter la
volonté des citoyens, alors qu'il continue toujours de tenter d'imposer
ses propres volontés. C'est le cas de son option séparatiste
qu'il continue de tenter d'imposer malgré la volonté clairement
exprimée par 60% de la population, le 20 mai 1980, lors du
référendum. La loi 125, Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, s'inscrivait d'ailleurs parfaitement dans cette stratégie
étapiste du gouvernement péquiste.
Vous vous rappellerez, M. le Président, qu'on a commencé
par parler de décentralisation. On a publié une série de
fascicules, il y en avait sept ou huit, tous inspirés par ce grand
bonhomme, ex-ministre des Affaires municipales du gouvernement de l'Union
Nationale, le Dr Lussier, tous inspirés de sa philosophie qui voulait
que, dans un Québec indépendant, il fallait avoir nous aussi,
comme la France, nos préfectures, nos départements. La loi 125
est venue confirmer dans les faits, sans que jamais le gouvernement ne
l'admette, cette intention de créer un niveau de gouvernement
intermédiaire en prévision de l'accession du Québec
à l'indépendance.
On a publié des fascicules, mais, fait assez curieux, celui qui
devait traiter des pouvoirs des municipalités régionales de
comté, on l'a attendu pendant des années et on l'attend toujours.
Ce ministre des Affaires municipales, qui était alors ministre
d'État à l'Aménagement, est devenu l'un des principaux
artisans de ce discours mielleux, sourire en coin, selon lequel le gouvernement
veut décentraliser, veut confier plus de pouvoirs aux élus
locaux, veut respecter la volonté locale. Dans les faits, c'est le
rouleau compresseur; on y va à tour de bras. On pose des questions au
ministre des Affaires municipales à l'Assemblée nationale, on lui
pose des questions lors de l'étude des crédits - mon
collègue de Pontiac l'a fait pendant près d'une heure et demie au
cours de la journée d'hier. Tout ce que le ministre des Affaires
municipales se contente de faire, c'est de sourire béatement et de ne
jamais répondre directement aux questions. C'est comme s'il se disait:
On peut continuer de mentir par omission; on peut continuer de colporter
n'importe quelle sornette, n'importe quel mensonge, n'importe quelle
fausseté; la population en sera dupe puisque, de toute façon,
c'est nous qui avons le monopole de la vérité. Ce ministre des
Affaires municipales, lorsqu'il daigne nous fournir des bribes de
réponses, nous abreuve de commentaires qui, en ce qui concerne la
région de l'Outaouais, sont inspirés soit par l'ignorance, ou par
la malhonnêteté.
Donc, M. le Président, on se rappellera que, lorsqu'on a
présenté la loi no 125 sur l'aménagement et l'urbanisme,
ce devait être, pour les municipalités régionales de
comté, uniquement une question de faire de l'aménagement. Or, on
ne sait trop quel projet pilote nous attend. On a parlé de confier,
à titre de projet pilote, la responsabilité à certaines
MRC de l'entretien du réseau routier. On a évoqué toutes
sortes d'hypothèses sur les possibilités de donner des pouvoirs
aux municipalités régionales de comté. Mais, en 1977, il y
a six ans, on nous avait promis de fournir - je pense que c'était le
fascicule no 5 - les indications précises de ce que seraient les
pouvoirs éventuels des municipalités régionales de
comté. Six ans plus tard, on n'est toujours pas plus avancé.
C'est ce qui a fait qu'au Parti libéral du Québec, lors du
dernier conseil général tenu ici, dans la ville de Québec,
il y a deux ou trois semaines, des militants de la base provenant de l'ensemble
du territoire du Québec...
Je comprends que, de l'autre côté, on va dire: Ce sont des
libéraux. Comme le disait le député de Groulx,
tantôt: Les libéraux, cela compte pour rien. Ce que disent les
libéraux, cela ne vaut rien. Imaginez qu'ils ont le malheur, de temps
à autre, d'écouter ce que la population dit. Vous le faisiez,
messieurs du gouvernement, avant d'être au pouvoir. Vous étiez
à l'écoute des citoyens du Québec. Dieu sait que vous
étiez partout dans le paysage, y compris sur les lignes de piquetage,
aux manifestations contre le gouvernement. Vous étiez animés par
ce préjugé favorable aux travailleurs, par ce
préjugé favorable à la consultation et à la
participation des citoyens. Beau résultat depuis que vous êtes au
pouvoir! On continue à tenir exactement les mêmes discours que
quand on était dans l'Opposition, mais en disant: Voyez comment nous
avons changé la façon de procéder. Voyez comment nous
agissons de façon transparente en cachant nos vraies intentions et en
faisant croire qu'on respecte la volonté populaire. Le projet de loi no
12, M. le Président, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, s'inscrit exactement dans la foulée de ce que je viens de
décrire, une façon tortueuse, hypocrite pour le gouvernement d'en
arriver à ses fins en prêchant la décentralisation, en
prêchant le respect de la volonté populaire.
D'ailleurs, l'Union des municipalités du Québec le dit
clairement dans ses commentaires sur le projet de loi no 12: "Ce
projet de loi traduit une volonté de la part du gouvernement de
se soustraire aux contraintes des contrôles intérimaires
adoptés par les municipalités." C'est cela que le projet de loi
no 12 tente de faire. On peut bien nous faire tous les discours qu'on voudra,
de la part du député de Groulx, à savoir qu'on est donc
fin, qu'on est donc beau, qu'on est donc gentil au Parti
québécois, qu'on respecte la volonté des
municipalités, ce n'est pas le Parti libéral, c'est l'Union des
municipalités du Québec qui dit que le projet de loi no 12
"traduit une volonté de la part du gouvernement de se soustraire aux
contraintes des contrôles intérimaires adoptés par les
municipalités." Or, un tel comportement, continue l'union, est
"contraire à l'esprit de la loi 125 - que ce même ministre a
parrainée et a fait adopter ici à l'Assemblée nationale -
qui visait, justement, à permettre aux élus municipaux de
contrôler les interventions sur leur territoire, tant des particuliers
que des instances gouvernementales. (22 h 50)
Le gouvernement est toujours prêt à voter des lois,
à adopter des règlements pour empêcher des particuliers
d'agir ou pour leur imposer des contrôles. Dans un premier temps, dans la
loi 125, il a prétendu vouloir s'assujettir lui-même aux
contrôles qu'il imposait aux particuliers. Dans un deuxième temps,
il vient maintenant, par le biais du projet de loi no 12, dire: Les
contrôles qui s'appliquent aux particuliers demeurent toujours, mais nous
du gouvernement, on veut s'en soustraire.
C'est cela, le but du projet de loi no 12. Ce n'est pas moi qui le dis,
M. le Président; c'est l'Union des municipalités du
Québec. Quand on vient me parler de respecter la volonté locale,
la volonté des maires, des élus locaux, la volonté des
populations locales, s'il y en a un qui est bien placé pour parler de
l'hypocrisie, de la fausseté de tels propos, c'est bien le
député de Gatineau qui vous parle. Et, s'il y a une
municipalité régionale de comté où on n'a pas
respecté la volonté populaire, où on n'a même pas
respecté les critères inscrits dans la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme qu'a fait voter le même ministre,
c'est bien la municipalité régionale de comté de Gatineau
et, par voie de conséquence, les autres municipalités
régionales de l'Outaouais.
Le ministre qu'on a interrogé ici à l'Assemblée
nationale nous a dit: On a respecté le voeu des municipalités
quant aux territoires municipalisés. C'est vrai qu'il n'y a pas une
seule municipalité du comté de Gatineau qui a été
incluse dans le territoire de la municipalité de Pontiac, par exemple,
ou de la municipalité d'Antoine-Labelle. Ce serait bien le comble! On
n'est, quand même, pas pour envoyer Hull-Ouest qui est tout près
de Hull dans la municipalité d'Antoine-
Labelle avec Mont-Laurier. Même ces gens ne le feraient pas. Ils
ne sont pas cinglés à ce point. Mais ce dont il s'agit dans la
MRC de la vallée de la Gatineau, ce n'est pas de territoires
municipalisés; c'est de territoires non municipalisés, de
territoires non organisés. Mon collègue de Beauce-Sud disait ce
soir que, chez lui, il ne sait pas trop qui on a pu consulter pour en arriver
à tracer les limites du territoire de sa municipalité
régionale de comté. Chez nous, M. le Président, nous on le
sait qui on a consulté. On sait aussi qui on n'a pas consulté et
on sait qui on a consulté et bafoué ensuite.
C'est simple chez nous. On a le comté de Gatineau ici, on a,
à l'est, le comté de Laurentides-Labelle représenté
par le valeureux ministre des Affaires municipales et on a au nord un ministre
régional, le ministre délégué à
l'Aménagement et député d'Abitibi-Ouest. Regardez bien
comment on s'est coupé la tarte au sein du cabinet de M. le premier
ministre. On avait, d'abord, le territoire du lac des Trente et un Milles. Je
vous le dis tout de suite, le lac des Trente et un Milles est sur la limite de
la circonscription électorale de Gatineau et de celle de
Laurentides-Labelle. Mais, justement, il y a des chemins seulement d'un
côté. Devinez lequel. Du côté du comté de
Gatineau. Il n'y a aucun contribuable qui habite sur la rive est du lac des
Trente et un Milles; il n'y a aucun accès par le comté de
Labelle. Ceux qui possiblement voudraient s'installer du côté est
du lac des Trente et un Milles devraient prendre le chemin du côté
de Gatineau qui y mène et, ensuite, traverser en chaloupe. C'est assez
clair. Il n'y a pas d'accès. Vous allez me dire: Ils ont sûrement
inclus le territoire du lac des Trente et un Milles dans le comté de
Gatineau. Ce serait tout à fait logique et vous êtes un homme
logique, mais le ministre des Affaires municipales, non. Lui a amené
ça chez lui...
Une voix: J'ai mon voyage!
M. Gratton: ...dans la municipalité régionale de
comté d'Antoine-Labelle. Il me fait signe que non. Il viendra me le dire
tantôt. Qu'est-ce qu'on a fait du territoire dans le parc de La
Vérendrye? C'était l'autre ministre régional. Le
comté de Pontiac, à qui le conseil de comté a toujours
appartenu, avait agréé avec le comté de Gatineau de
céder ce territoire au comté de Gatineau. On se dit: Ils l'ont
mis soit dans le comté de Gatineau, soit dans le comté de
Pontiac. En fait, les deux ont négocié et se sont entendus, on ne
pouvait pas ne pas respecter cela. Savez-vous comment ils ont tranché le
litige qui, d'ailleurs, n'existait pas puisque les deux étaient
d'accord? Ils ont envoyé cela dans la Vallée-de-l'Or pour
satisfaire les aspirations du ministre régional,
le député d'Abitibi-Ouest. C'est assez ridicule, en
effet.
On a fait la même chose avec des territoires sur le Baskatong qui
n'ont jamais appartenu, où il n'y a pas d'accès par le
comté de Laurentides-Labelle. Il y en a peut-être quelques-uns.
À partir de l'aéroport de La Macaza, on peut y en aller en avion,
M. le Président; c'est à peu près à ça que
cela se limite. Si vous ne connaissez pas le territoire, je le connais pas mal
mieux que vous. Qu'a-t-on fait? On l'a envoyé dans le comté du
ministre parrain.
Vous allez me dire: Oui, mais les libéraux, ça chiale tout
le temps, c'est toujours en train de se plaindre des décisions du
gouvernement. Je vais vous lire un éditorial du journal La Gazette; ce
n'est pas The Montreal Gazette, c'est la Gazette de Maniwaki. Je vais vous lire
cela, ça s'intitule Une démission significative. "Le
président du Parti québécois du comté de Gatineau,
François Mathieu, vient d'annoncer sa démission aux fonctions
qu'il occupait au sein de ce ralliement politique (ralliement du rire, trois
cloches). Ce geste s'avère très significatif. Lorsqu'on analyse
les raisons qui ont motivé le président à agir de la
sorte, on constate amèrement que le premier porte-parole favorable
politiquement au gouvernement actuellement en place à Québec,
pour la région de la Haute-Gatineau plus particulièrement, doit
lui-même se résigner devant les portes qui, pendant un moment
ouvertes pour laisser cette aile militantiste exprimer ses revendications, se
sont par la suite refermées sans jamais donner espoir d'une
réponse favorable. "Le dossier du découpage de la MRC de la
vallée de Gatineau n'aura, en fait, été qu'une des
nombreuses déceptions du PQ de la région, et
particulièrement sa partie nord. Le complexe forestier qui ne vient pas,
la route Maniwaki-Témiscamingue qui n'en finit plus de voir ses budgets
coupés, les interventions du parti dans maints dossiers qui aboutissent
dans les fonds de tiroirs ou rencontrent les oreilles de sourds et cette
fameuse question du découpage territorial, où Mathieu et ses
militants ont eu beau présenter des documents étoffés pour
justifier le rattachement du territoire au nord et du lac des Trente et un
Milles avec Gatineau, n'ont fait que donner les résultats que l'on
connaît aujourd'hui. "Sur ce dernier point, le PQ Gatineau aura
joué son atout politique au même titre que Labelle, à cette
différence près que les résidents de la vallée de
la Lièvre auront eu avec eux un député-ministre." Plus
loin, on dit: "L'an dernier, à pareille date, au cours de la campagne de
financement du PQ, Mathieu avait alors décidé, au moment de
remettre les argents recueillis à un ministre qui s'était fait
l'obligeance de ne pas se rendre à Maniwaki, qu'il sentait que son
secteur était négligé et oublié.
L'ex-président n'a fait que confirmer par sa décision ses
premières présomptions. Devant l'indifférence qu'on lui a
signifiée, à lui et ses militants, Mathieu a posé le geste
qui se devait, non pas en signe de faiblesse et d'incapacité à
affronter les défis, il a plutôt prouvé le contraire, mais
pour faire comprendre au Parti québécois qu'à force de
bafouer et de rejeter ses militants de la base, il se saborde de
lui-même." (23 heures)
C'est le président du Parti québécois de
l'association du comté de Gatineau qui a dit cela, ce n'est pas le
président de l'association libérale. Quand on fait
l'unanimité, quand on va jusqu'à la démission du
président du parti au pouvoir pour contester une décision, quand
le Conseil régional de développement de l'Outaouais, quand les
maires, les 24 maires du comté, à l'unanimité, quand tout
ce monde-là, M. le Président, dit: On n'est pas satisfait du
découpage du territoire de la MRC de la vallée de la Gatineau,
qu'on n'ait pas le culot, au moins, de l'autre côté, de venir nous
dire qu'on respecte la volonté locale. Qu'on nous dise: On s'en fout,
des gens du comté de Gatineau, on s'en fout, des gens de l'Outaouais.
Cela au moins aura l'avantage d'être franc, honnête et transparent.
Mais, ne venez pas nous écoeurer avec vos discours de respecter la
volonté populaire. Et, M. le ministre des Affaires municipales, si vous
n'êtes pas capable de dire la vérité, ne dites rien. Vous
êtes capable. Vous avez apparemment passé près de dix
heures à l'étude des crédits à ne rien dire.
Continuez comme cela. Mais, ne venez pas nous dire que vous êtes
respectueux de la volonté populaire. Vous faites rire de vous chez nous,
pas seulement dans la Gatineau, mais dans l'ensemble des quatre MRC de la
région de l'Outaouais.
M. le Président, je terminerai en disant tout simplement ceci:
Comme mon collègue de Beauce-Sud l'a dit pour sa région, quand on
impose et qu'on nous dit: On impose un moratoire de trois ou quatre ans sur les
modifications qu'il pourrait y avoir aux territoires des MRC... On l'a
entendue, cette sornette-là, et on l'a entendue d'un gouvernement qui
n'était même pas péquiste - j'irai aussi loin que cela -
quand on a découpé les régions administratives. On a dit:
On impose un moratoire de trois ou quatre ans. Cela fait au-delà de 25
ans que le ministre des Affaires municipales est aussi au courant que moi que
Mont-Laurier est dans la région administrative de l'Outaouais. Est-ce
qu'il va me dire pour un seul instant que c'est logique et que cela a du bon
sens? Est-ce qu'il va me dire que ce n'est pas exactement le même genre
de mauvaises décisions qui a présidé à l'inclusion
de Mont-Laurier dans la région 07 de l'Outaouais, il y
a 20 ou 25 ans? C'est le même genre de décision qu'il prend
lui-même en envoyant le lac des Trente et un Milles à
Antoine-Labelle, les régions du Baskatong à Antoine-Labelle et le
parc de La Vérendrye dans la municipalité régionale de la
Vallée-de-l'Or.
Je supplie le ministre de cesser cet entêtement. Ce sont les
péquistes qui vous le disent que vous êtes sur la mauvaise
"track". Pour l'amour du bon Dieu, "switchez de track". Voyez à vous
diriger dans la bonne direction. Même si c'était pour une seule
fois, c'est peut-être votre dernière chance, M. le ministre.
Pensez-y donc. Pensez-y donc, non pas pour me plaire à moi, à
titre de député. Je vais vous encenser, je vais vous faire une
grosse réception là-bas, à Maniwaki, et on va vous dire
combien vous êtes fin, vous êtes bon. Mais, je dis, M. le
Président, que, si le ministre actuel des Affaires municipales ne le
fait pas, un gouvernement libéral éventuel va le faire, lui.
Effectivement, les territoires... Oui, je termine là-dessus, M. le
Président - on a donc de la difficulté à nous entendre,
vous et moi, sur le moment où je dois finir - en disant que, pour nous,
pour moi, pour les gens qui ont le moindrement de bon sens, le sens du
fair-play, les territoires qui ont appartenu depuis toujours à une
région ne doivent pas en être détachés au profit des
intérêts partisans ou personnels d'un député, d'un
ministre ou de qui que ce soit. Je pense que l'aménagement du
territoire, c'est trop important pour qu'on laisse cela à ces
aléas. Et j'invite le ministre à y réfléchir et
à nous dire qu'il entend, au moins, réétudier la question
avant de vouer ces territoires à un sort qu'ils ne méritent
réellement pas.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole
à M. le ministre des Transports, je veux simplement dire au
député de Gatineau que, malheureusement, le temps n'est pas
illimité ici, comme à la commission à laquelle il
participe avec moi.
M. le ministre des Transports.
M. Michel Clair
M. Clair: M. le Président, si vous n'aviez interrompu le
député de Gatineau, comme c'était parfaitement votre droit
de le faire, le député de Gatineau allait indiquer, je pense,
qu'un gouvernement du Parti libéral corrigerait, lui, un certain nombre
d'erreurs, semble-t-il, que le gouvernement actuel aurait commises. Et, il
vient d'affirmer que c'est un fait.
M. le Président, le député de Gatineau est
amnésique, il n'a pas de mémoire. Heureusement pour lui,
d'ailleurs.
Heureusement pour lui, parce qu'il aurait honte. Et, après le
discours qu'il vient de prononcer, je me demande comment il fait, non pas pour
se regarder lui-même dans le miroir le matin, mais comment il fait,
cependant, pour regarder dans le miroir le parti auquel il appartient, en
matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire au
Québec.
Le député de Gatineau était là avant 1976.
Quel a été le résultat de l'administration du Parti
libéral du Québec, puisque c'est de cela qu'il voulait parler en
parlant d'avenir? Quel a été le résultat des politiques du
Parti libéral du Québec en matière d'aménagement du
territoire de 1970 à 1976? Le record, comme on dit dans mon milieu, est
éloquent. Je voudrais dresser un bref bilan de l'action des
libéraux provinciaux de 1970 à 1976. Qu'ont-ils fait, M. le
Président - je vois le député de Huntingdon qui
s'intéresse aux questions d'agriculture - en matière de
protection du territoire agricole au Québec...
Une voix: Rien.
M. Clair: ...de 1970 à 1976? Ils n'ont rien fait si ce
n'est de laisser mourir sur la table du Conseil des ministres de l'autre
côté un projet de loi visant à la protection des terres
agricoles au Québec. Leur courage s'est arrêté sur la table
du Conseil des ministres de l'autre côté de la rue, de l'autre
côté de Grande-Allée. C'est connu à travers tout le
Québec que M. Kevin Drummond, ministre de l'Agriculture de
l'époque, a déposé un projet de loi au Conseil des
ministres du temps visant essentiellement aux mêmes objectifs que ceux
qu'a poursuivis le député de Lévis et ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Les libéraux
ont manqué juste d'une affaire, M. le Président. Ils ont
manqué de courage en matière d'aménagement.
Aujourd'hui, je mets le député de Gatineau au défi
d'aller dans toutes nos campagnes, dans tous nos villages, chez les maires des
villes, pour les consulter sur les effets positifs de la Loi sur la protection
du territoire agricole, eux qui n'ont pas eu le courage de déposer, ici
même à l'Assemblée nationale, un projet de loi. Le
mémoire est mort au feuilleton du gouvernement Bourassa en
matière d'aménagement.
Qu'ont-ils fait en matière d'aménagement routier, les
libéraux, de 1970 à 1976?
Une voix: Rien.
M. Clair: Il n'y a pas une région au Québec -
Nicolet pour l'autoroute 30, la région de Boucherville pour la 430, la
région de Saint-Jean, Farnham pour l'autoroute 25 -prenez n'importe
quelle région du Québec, ils ont littéralement
massacré le territoire québécois. Il n'y a pas une
région qui n'a pas goûté au bulldozer du Parti
libéral du
Québec de 1970 à 1976, même la fameuse autoroute
Ville-Marie, à Montréal. Ils ne se contentaient pas de
détruire nos campagnes en matière d'aménagement, ils sont
allés détruire des milliers de logements sur l'île de
Montréal et, comble de l'ironie, ils ont commencé à
construire une autoroute en sens inverse des logements qu'ils avaient
détruits sur l'île de Montréal. C'est le "score" des
libéraux en matière d'aménagement de 1970 à
1976.
Qu'est-ce qu'ils ont fait maintenant en matière d'expropriation?
Les libéraux qui accusent aujourd'hui le ministre des Affaires
municipales d'agir à la sauvette alors qu'il dépose un projet de
loi, d'imposer ses volontés en matière d'aménagement et
d'urbanisme, qu'est-ce qu'ils ont fait en matière d'expropriation? Nous
savons tous que nous avions une vieille loi de l'expropriation aux alentours de
1974-1975, qu'elle était contestée par tous les avocats, par tous
les expropriés, par tout le monde qui a un peu de bon sens, un peu de
tête sur les épaules. Qu'est-ce qui est arrivé en 1975? Les
libéraux ont décidé d'amender la loi de l'expropriation et
de la rendre un peu plus civilisée, loi d'ailleurs qu'on s'apprête
à perfectionner au cours des prochaines semaines à la suite du
dépôt, hier, d'un projet de loi. (23 h 10)
Qu'est-ce qu'ils ont fait en 1975? Je vois que cela intéresse le
député de Laprairie, M. le Président. Ils ont fait deux
opérations simultanées. Ils ont préparé le projet
de loi, ils l'ont fait étudier au Conseil des ministres, au Conseil du
trésor. Ils ont suivi toutes les étapes et, en même temps,
ils ont demandé au ministère des Transports et au
ministère des Travaux publics de sortir à peu près tout ce
qu'ils avaient comme projets d'expropriation pour les 20 prochaines
années et peut-être même les 50 prochaines années. Et
juste avant de faire adopter le projet de loi sur l'expropriation, ils ont fait
des expropriations massives dans tout le Québec, pour lesquelles, encore
aujourd'hui, en 1983, huit ans plus tard, comme ministre des Transports, je
dois vous dire que j'ai au moins quelques millions de dollars qui ne servent
qu'à payer des expropriations pour des autoroutes qui ne seront jamais
construites, des expropriations inutiles qui nous ont entraînés
dans des poursuites devant les tribunaux à un point tel que,
jusqu'à l'année dernière, de 1975 à 1982, on peut
évaluer à au moins 20 000 000 $ par année, l'argent qui a
été inutilement dépensé dans des expropriations
pour des projets de construction de toute espèce qui n'avaient aucun
sens.
J'en donne juste deux exemples: une autoroute à quatre voies
entre Farnham, Saint-Jean-sur-Richelieu et Iberville. Une autoroute à
quatre voies sur une distance d'à peu près 20 kilomètres
pour une municipalité, Farnham, qui ne compte pas 10 000 habitants,
Saint-Jean-sur-Richelieu, et une autre, qui en compte un peu plus de 10 000.
Pas plus tard que la semaine dernière, le maire de Boucherville vient me
voir et me dit: En 1975, on a exproprié un immense terrain pour
l'autoroute 430; on a enlevé les droits d'un propriétaire qui
voulait développer ce terrain. On l'a exproprié pour des raisons
de construction d'autoroute. Aujourd'hui, il n'y a plus personne qui la
réclame. Ceci va intéresser les collègues. On a une
difficulté aujourd'hui pour rétrocéder à la
municipalité ou à l'exproprié le terrain, parce qu'on doit
prouver que la raison pour laquelle on a exproprié, c'était pour
la construction d'une autoroute; en vertu de la Loi sur la voirie, je ne peux
céder l'emprise à la municipalité que dans la mesure
où je peux faire la preuve qu'il y avait une raison valable
d'exproprier.
Des cas comme cela, il y en a dans tout le Québec. Cela a
coûté environ 20 000 000 $ par année. C'est un bel exemple
de ce que les libéraux ont fait et feraient en matière
d'aménagement du territoire.
M. le Président, il y a plus beau que cela. Le hasard fait
parfois curieusement les choses. Je pourrais parler du parrain de l'Outaouais,
M. Parent, et de son rôle à la Commission de la capitale nationale
pour concéder du territoire québécois au gouvernement
fédéral. Je pourrais parler de l'abandon des chemins municipaux
à la charge des municipalités de 1970 à 1976,
qu'aujourd'hui on doit reprendre à notre entretien dans bien des
cas.
Le temps me manque. Comme je le disais, le hasard fait parfois bien les
choses. Aujourd'hui, ce que nous faisons, nous reconnaissons que la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme n'était pas parfaite; nous ne
croyons pas détenir le monopole de la vérité. À
l'usage, il s'est révélé qu'il y avait un certain nombre
de faiblesses dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, des
technicités plus qu'autre chose, si on veut parler du contenu du projet
de loi. Or, le ministre des Affaires municipales y propose des amendements. Par
un curieux hasard, c'est le projet de loi no 12. En voyant le numéro du
projet de loi, cela m'a rappelé qu'en 1975 -imaginez-vous ce qui nous
tenait lieu de gouvernement - le gouvernement avait lui aussi
déposé un projet de loi no 12, "Bill No. 12", selon la tradition
de l'époque, intitulé Loi sur l'urbanisme et l'aménagement
du territoire municipal.
Aujourd'hui, ce qu'on fait avec le projet de loi du ministre des
Affaires municipales, on améliore essentiellement deux points. On
diminue des formalités pour le contrôle, la soumission des
instances gouvernementales au règlement de contrôle
intérimaire et on permet à un propriétaire qui
s'entend avec le ministère des Transports au moment d'une expropriation,
de pouvoir morceler de gré à gré plutôt que de
forcer le gouvernement à recourir à une expropriation. C'est
très simple. Mais on taxe le ministre des Affaires municipales de
dictateur, de rouleau compresseur, comme disait le député de
Gatineau tantôt.
Voyons donc quel était le contenu de ce projet de loi
déposé par le ministre des Affaires municipales libéral du
temps, le 18 mars 1976. Voyons un certain nombre d'articles. L'article 9
prévoit le conseil d'agglomération, ce qu'on appelle le conseil
des MRC maintenant: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, sur la
recommandation du ministre des Affaires municipales, décréter que
le territoire des municipalités que désigne le décret est
régi par un conseil d'agglomération pour les fins de la
présente loi."
Des voix: Ah!
M. Clair: Ce qu'on a fait, c'est un exercice démocratique
harassant, difficile, qui allait certainement susciter des insatisfactions
à gauche et à droite, mais qui était la
responsabilité de personnes régionales, élues dans la
plupart des cas ou nommées sur recommandation du ministre des Affaires
municipales. Eux, qu'est-ce qu'ils faisaient, les sépulcres blanchis,
comme on les appelait? Que faisaient-ils, eux qui accusent le ministre de
dictature? Ils prévoyaient que, pour la désignation du territoire
d'une MRC, cela se ferait par décret. Vous repasserez, comme on dit
aussi chez nous. C'est ce que j'indique aux libéraux en matière
de démocratie par rapport au bill 12, qui a été
jeté à la poubelle par l'ensemble du monde municipal en 1976.
Un autre exemple, l'article 30 du projet de loi no 12
déposé par le Parti libéral, toujours: "Le
lieutenant-gouverneur en conseil peut en tout temps, par décret,
modifier une agglomération par l'augmentation du nombre des
municipalités qui en font partie."
Une voix: C'est effrayant!
M. Clair: Encore une fois, nous avons mené une
consultation. Cela demandait un certain courage politique pour la respecter: 19
comités ont siégé à travers le Québec et ils
se disaient que le moyen expéditif...
Une voix: C'est effrayant!
M. Clair: ...était, en tout temps, de modifier une
agglomération par décret. Pis que cela, l'article 31: "Le
lieutenant-gouverneur en conseil peut en tout temps, par décret,
dissoudre un conseil d'administration d'une municipalité
régionale de comté...
Des voix: Non, non!
M. Clair: ...ou réduire le nombre de municipalités
qui en font partie." Et ces gens-là ont le front de venir nous accuser
de dictature et d'être des rouleaux compresseurs!
Mieux que cela! On prévoyait pouvoir exclure une
municipalité d'un conseil d'agglomération d'une MRC.
Écoutez bien: "La municipalité exclue de l'agglomération
demeure tenue au paiement de sa quote-part des dépenses encourues au
moment de son exclusion de l'agglomération et au paiement de toute dette
contractée par elle comme municipalité
agglomérée".
Une voix: Le principe "no taxation without representation".
M. Clair: On étendait à tout le Québec le
principe du "no taxation without représentation", c'est-à-dire,
au contraire, le principe du "taxation" légal, sans
représentation. Et ces gens-là ont le front de venir nous parler
de démocratie!
Maintenant, en matière de schéma d'aménagement. On
en parlait dans le projet de loi no 12, article 32: "Dans le délai
prescrit par le ministre, le conseil d'agglomération doit
énoncer, au moyen d'un schéma, ses objectifs quant aux
modalités et aux phases d'aménagement du territoire soumis
à sa juridiction et adopter cet énoncé par
règlement comme schéma d'aménagement". Voyons maintenant
quels auraient été les pouvoirs du ministre à
l'égard de ce schéma d'aménagement. L'article 42 dit: "Le
règlement d'adoption du schéma d'aménagement est soumis
à l'approbation du ministre, qui peut l'approuver avec ou sans
modification". Et on fait reproche au ministre des Affaires municipales d'avoir
éclairé les MRC sur le contenu de la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme! Il y en a d'autres, toujours sur le pouvoir des ministres.
Une voix: C'est incroyable!
M. Clair: L'article 48 de ce projet qui a entraîné
en grande partie la perte des libéraux dans le monde municipal en 1976
dit écoutez bien cela, M. le Président - "Le conseil
d'agglomération peut en tout temps modifier son schéma
d'aménagement en suivant les procédures requises pour son
adoption". Écoutez bien la suite: "Il doit le faire - le conseil, la MRC
- de la même manière si le ministre le lui ordonne par avis
écrit."
Une voix: C'est écoeurant!
M. Clair: Et on a quand même fait preuve d'une certaine
gentillesse, car l'avis indique le délai dans lequel la modification
doit être effectuée. On s'engageait, au moins, au moment de la
proposition de projet de loi no 12, à dire à la MRC: Le ministre
peut vous imposer une modification de votre schéma d'aménagement,
vous devez le faire aux dates et délais prescrits, mais on va vous
aviser un peu d'avance du temps qui vous sera accordé pour faire cette
modification à votre schéma d'aménagement. (23 h 20)
Je ne pense pas que l'on pouvait faire une réforme aussi
importante en matière d'aménagement du territoire sans deux
données fondamentales: d'abord, une volonté politique de
procéder à l'aménagement de notre territoire avec les
élus municipaux et les MRC, les conseils de comté, comme on les
appelait auparavant. Deuxièmement, je ne pense pas non plus qu'on
pouvait procéder à une réforme aussi en profondeur des
règles qui régissent l'aménagement de notre territoire et
nous donner une politique moderne dans ce secteur sans que... Cela aurait pu
être dans mon comté, M. le Président. C'est à
Saint-Prosper. C'est au lac des Trente et un Milles. C'est évident qu'on
ne pouvait pas procéder à une réforme aussi importante
sans qu'il y ait un certain nombre d'accrochages à gauche ou à
droite.
Mais, pour ce qui nous concerne, nous avons procédé de la
manière la plus transparente, la plus démocratique, la plus
ouverte, la plus exigeante pour les municipalités et pour le
gouvernement qu'on pouvait utiliser. Mais, au moins, le leader du gouvernement
et le ministre des Affaires municipales n'ont pas été
obligés de poser le geste humiliant qu'a dû poser le chef de
l'Opposition, qui était le leader du gouvernement, à
l'époque - je vais vous donner la date exacte, je l'ai relevée
tantôt - le 28 juin 1976, à peine trois mois après le
dépôt du projet de loi no 12 de 1976, après la loi sur
l'expropriation, après le massacre des terres agricoles et de milliers
de logements dans nos villes. Le leader du gouvernement et le ministre des
Affaires municipales, même s'il y a eu des difficultés, n'ont pas
été obligés de poser le geste humiliant de retirer, de
révoquer l'ordre de première lecture du projet de loi et de le
reléguer aux oubliettes purement et simplement. Nous avons assumé
nos responsabilités.
Le ministre des Affaires municipales qui, à l'époque,
était ministre d'État à l'Aménagement, a fait face
à des responsabilités difficiles à assumer. Il est
parvenu, grâce à sa diplomatie et à un exercice
démocratique très difficile à mener, à se faire des
alliés dans l'ensemble du monde municipal et à dire: C'est vrai
qu'il va falloir faire des compromis et des concessions. Mais c'est fini le
règne des libéraux où on laisse aller le bulldozer dans le
paysage, n'importe où, n'importe quand, n'importe comment.
M. le Président, le député de Gatineau,
tantôt, nous parlait de l'avenir du Parti libéral. Si les gens
avaient eu l'occasion de l'entendre sur les vraies intentions du Parti
libéral, je suis convaincu que le député de Gatineau
serait leader adjoint de l'Opposition avec toute sa "gang", pendant encore bien
des années, en matière d'aménagement. Je vous remercie, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: Merci, M. le Président. Je n'aurais pu
m'abstenir de participer à ce débat tant les élus
municipaux sont indignés et désabusés du comportement
antidémocratique du ministre des Affaires municipales.
Par ce projet de loi, le ministre empire une loi déjà
condamnable dans plusieurs de ses éléments, et aussi et surtout
dans l'interprétation qu'en fait le ministre lui-même. Le ministre
et ses mandataires se soustraient à l'application des règlements
de contrôle intérimaire et je pourrais qualifier le ministre
d'être un "Indian giver" puisqu'il avait déjà
accepté que le gouvernement soit contraint aux exigences de la loi,
ainsi que ses ministères et ses mandataires. Maintenant, après
avoir dit tout cela aux élus municipaux, il leur enlève ce qu'il
avait donné. Il se soustrait à l'application de la loi. Je suis
d'avis, avec les maires de ma région, que c'est un geste condamnable de
la part du ministre et c'est un geste antidémocratique. C'est pour cela
que je l'ai spécifié au début de mon intervention.
Également, par ce projet de loi no 12, le ministre écrase
davantage, le ministre piétine davantage les élus municipaux, les
maires du Québec, les préfets du Québec et
également les citoyens du Québec. Je pourrai vous dire que les 26
maires des 26 paroisses du comté de Huntingdon et plusieurs autres
maires de la région du sud-ouest du Québec sont tous
dégoûtés du régime péquiste, sont tous
désabusés du régime dictatorial imposé par le
ministre des Affaires municipales. Ils qualifient tous le projet de loi no 12
de loi hypocrite, préparée à l'insu des élus
municipaux, sans aucune consultation préalable, sans que le ministre
accepte la tenue d'une commission parlementaire pour entendre les principaux
organismes, les MRC, les préfets et les maires, qui auraient voulu se
faire entendre ici, en commission parlementaire. Le ministre a
déposé ce projet de loi à leur insu, sans que les
élus municipaux en aient connaissance. C'est une
autre raison pour qu'ils soient désabusés du comportement
du ministre des Affaires municipales. Je pourrais qualifier l'attitude du
ministre de très dangereuse. C'est du despotisme total que le ministre
nous amène présentement par son comportement. Le ministre n'a
aucun respect pour l'autonomie municipale. Il ne connaît pas ce qu'est le
respect. Il ne connaît ce qu'est la consultation. Il ne connaît pas
la franche discussion honnête et la discussion avec les maires et avec
les préfets. Actuellement, les maires et les préfets du
Québec sont dégoûtés du système qui leur est
imposé par le ministre des Affaires municipales. Plusieurs maires
spécifient actuellement ne pas vouloir se représenter à
leurs postes. Plusieurs le spécifient. Ils accusent
régulièrement - et je l'entends fréquemment, M. le
Président; c'est peut-être antiparlementaire, mais ils le font
tout de même - le ministre d'être hypocrite dans son comportement.
Ils qualifient le ministre de cette façon.
Ce n'est pas peu dire quand les maires en sont rendus à affubler
un ministre de ce qualificatif. L'hypocrisie est devenue encore plus apparente.
Les élus municipaux furent poussés à accepter les
directives du ministre alors qu'ils préparaient les règlements de
contrôle intérimaire. Ils étaient poussés à
les accepter parce qu'ils auraient été désavoués
s'ils n'avaient pas accepté les demandes du ministre sur la
réglementation des contrôles intérimaires. Le ministre
s'est servi de son pouvoir, d'un pouvoir abusif, pour forcer les préfets
des MRC à accepter la réglementation, non pas celle qu'ils
avaient soumise, mais celle que le ministre leur a imposée. Les raisons
particulières pour lesquelles les MRC ont du accepter les directives du
ministre, c'est que les MRC ne voulaient pas pénaliser les citoyens. Il
y avait, à ce moment, des subventions disponibles du gouvernement
fédéral pour la construction de résidences. Cette
subvention s'élevait à 3000 $ et, juste au moment ou au temps
où cette subvention devenait disponible, le ministre en a profité
pour imposer sa réglementation.
Les maires se sont vus dans une position de pression de la part de leurs
concitoyens. Les préfets des MRC se sont vu également presser par
leurs maires. Ils ont du finalement accepter, sous la pression du ministre des
Affaires municipales, les règlements tels qu'ils leur furent
imposés par le ministère des Affaires municipales et par le
ministre. Je crois que c'est une attitude très abusive de la part du
ministre des Affaires municipales. Il y avait tellement de résidents qui
voulaient profiter de ces 3000 $ que, sous la pression, les MRC ont
plié, mais elles n'étaient pas heureuses de plier. Elles ont
promis de revenir à la charge et j'espère qu'elles vont le faire.
En plus, il faut dire que la construction était gelée. Il y avait
un moratoire qui avait été décrété par le
ministre sur la construction partout au Québec et, afin de
dégeler le territoire, de mettre fin à ce moratoire, encore sous
la pression du ministre, les maires ont du plier et les préfets
également.
Il y a un autre exemple frappant de l'attitude despotique du ministre.
Quand on regarde la loi 90, la Loi sur la protection du territoire agricole,
où le ministre de l'Agriculture avait concédé aux
propriétaires de ferme 53 000 pieds carrés sur leur ferme pour
leur résidence et aussi pour pouvoir se construire une deuxième
maison, c'était déjà quelque chose d'acquis. Pour les
agriculteurs du Québec, c'était un droit acquis d'avoir 53 000
pieds carrés disponibles sur leur ferme. C'était la seule chose
qui leur restait où ils pouvaient disposer librement d'un espace de
terrain, 53 000 pieds carrés, ce qui était un demi-hectare.
Ce qui fut concédé dans la loi 90 par le ministre de
l'Agriculture est maintenant arraché, enlevé, par le ministre des
Affaires municipales. L'exigence de quelque 32 500 pieds carrés pour un
terrain en territoire agricole rend impossible la construction d'une
deuxième résidence sur un lot de 53 000 pieds carrés.
L'attitude du ministre des Affaires municipales dans ce dossier est
inqualifiable. Je crois que tout ce qu'a concédé le ministre de
l'Agriculture, le peu qu'il a concédé, 53 000 pieds
carrés, est déjà enlevé par le ministre des
Affaires municipales. Je pense qu'il devrait y avoir plus de cohérence
au niveau des ministres de ce gouvernement pour qu'au moins ce qui est
concédé par un ministre ne soit pas enlevé par un
autre.
De toute façon, quand un gouvernement peut déchirer des
contrats dûment signés avec les employés des secteurs
public et parapublic, quand il peut, de son propre pouvoir, ne pas respecter
ses écrits, je pense bien qu'un ministre des Affaires municipales ou un
ministre de l'Agriculture peut enlever tout ce qu'il avait donné. C'est
exactement ce que fait aujourd'hui le ministre des Affaires municipales. Il
avait concédé dans sa loi, originalement, qu'il se soumettrait
aux impératifs de la loi 125. Il dit: À présent que les
contrôles intérimaires ont été, forcément,
acceptés par les préfets et les MRC, on va leur enlever
graduellement ce qu'on leur a donné antérieurement. C'est
exactement ce qui existe actuellement. Cela veut dire, finalement, que les
écrits et les paroles de ce gouvernement, du gouvernement du Parti
québécois, n'ont aucune valeur. Ce n'est pas respectable parce
que ça n'a aucune valeur. Vous enlevez des droits acquis, vous
déchirez des écrits, vous faites ce que vous voulez, vous
êtes au pouvoir. Vous n'y êtes plus pour longtemps, mais, pendant
que vous êtes là, vous
pénalisez la population entière du Québec.
En plus, actuellement, le ministre des Affaires municipales, n'ayant pas
voulu consulter les 1600 maires du Québec, les met tous au défi.
Les 1600 maires sont défiés par le ministre des Affaires
municipales parce qu'il n'y a pas un maire au Québec qui est heureux des
impositions que vous lui faites, qui est heureux de la réglementation de
contrôle intérimaire forcé. Il n'y a pas un maire qui est
heureux de cela au Québec; ils sont tous mécontents. Peu importe
qu'ils soient du Parti québécois ou du Parti libéral, ils
font connaître à leur député respectif qu'ils sont
mécontents du ministre. Le ministre ne semble pas être au courant
de cela. Je ne sais pas s'il vit dans une tour d'ivoire, mais il semble
totalement décroché de la réalité. Pour lui, tout
va bien, tout le monde est heureux. Mais c'est faux: il y a 1600 maires
malheureux au Québec. C'est la vérité que je vous dis.
L'autonomie locale étant maintenant battue en brèche,
bafouée, on peut dire que c'est une tutelle présentement. Les
maires et les préfets des MRC sont en tutelle. On leur impose un
règlement et on leur dit: Vous allez par là, vous faites
ça, c'est nous qui avons le pouvoir. Le ministre a le pouvoir, il
décrète ce qu'il veut, il change des lois et des modalités
qu'il avait antérieurement acceptées. Il dit aux maires: C'est
moi qui mène, je vous contrôle, allez par ici, allez par
là. Il n'y a pas un maire qui a conservé un certain
contrôle dans sa municipalité. Il n'y a pas un préfet de
MRC qui peut dire: Moi, je peux, sur mon territoire, amener des
aménagements qui font l'affaire de mes contribuables. Non, il faut que
le ministre impose ses points de vue. On a bafoué les élus
municipaux, on leur enlève tout pouvoir et, présentement, le
ministre pense que le monde municipal est content, que les contribuables sont
contents, que les électeurs du Québec sont contents. Tant mieux
s'il le pense, parce qu'il ne sera pas longtemps ministre des Affaires
municipales, je peux vous dire cela.
Enfin, la cerise sur le gâteau, c'est quand le ministre des
Affaires municipales est allé dire aux préfets que, s'ils ne
devenaient pas indépendantistes, ils n'auraient pas de budget pour des
pouvoirs additionnels. Le ministre leur a dit: Devenez indépendantistes,
devenez souverainistes, on vous donnera, à ce moment-là, des
pouvoirs additionnels, on vous donnera l'argent nécessaire pour
administrer ces pouvoirs qu'on va vous donner. Cela, c'est l'attitude du
ministre. Est-ce que vous pensez que c'est de la démocratie municipale?
Devenez indépendants, devenez séparatistes, on vous donnera des
pouvoirs. C'est du joli, M. le Président; c'est ça, la belle
démocratie que veut appliquer ce gouvernement. N'est-ce pas
dérisoire, M. le Président? Je ne sais pas ce que vous en pensez,
mais je pense que vous pensez comme moi: C'est vraiment dérisoire,
n'est-ce pas?
M. le Président, je vous soumettrai un autre cas. Un mandataire
du ministre, il y a quelques jours, a déjà tenu pour acquis que
la loi 12 était sanctionnée. Il s'agit, entre autres,
d'Hydro-Québec, dans la MRC du Haut-Saint-Laurent. Ce mandataire du
gouvernement, qui est Hydro-Québec - je pense bien que c'est un
mandataire du gouvernement - s'est prévalu, hier ou avant-hier, des
dispositions du projet de loi no 12, malgré qu'il ne soit pas encore
sanctionné, que l'étape de la deuxième lecture ne soit pas
terminée et qu'on ne soit pas rendu à la troisième
lecture. Il arrive qu'Hydro-Québec s'est prévalue du projet de
loi qui est à l'étude présentement pour passer outre
à l'article 149 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et,
sans l'avis préalable - si M. le ministre veut bien, je vais le lui
confirmer - du ministre ou de ses mandataires, on a procédé
à la démolition d'un poste de transmission d'Hydro-Québec
dans la MRC du Haut-Saint-Laurent. La construction ou la démolition, je
pense que cela fait partie des mêmes restrictions apportées
à l'article 149, selon la description ou l'évaluation de
l'article 149 faite par les principaux élus de la région, en tout
cas. Je ne suis pas ici pour discuter de l'application de l'article 149 de la
loi 125. Je n'ai pas de formation juridique pour dire si vraiment elle
était obligée d'envoyer un avis préalable, mais les
responsables de la MRC du Haut-Saint-Laurent m'ont avisé que
l'obligation existait selon l'article 149. Alors, si le gouvernement, ses
mandataires ou le ministre peut se prévaloir d'une loi qui n'est pas
sanctionnée, je me demande quel respect on donne aux autres lois du
Québec. On a pu s'en apercevoir dans les décrets du gouvernement,
dans les contrats signés ils déchirent ce qu'ils veulent, ils
font ce qu'ils veulent. Ils ont le pouvoir. Alors, s'ils ont le pouvoir, ils
procèdent à la démolition du poste
d'Hydro-Québec.
Avant de terminer, je dois dire qu'il existe une guerre constante
interne entre le ministère des Affaires municipales et les autres
ministères. Actuellement, aucun ministère en dehors du
ministère des Affaires municipales, n'accepte que ses officiers en
région participent au processus de consultation en matière
d'aménagement. Les ministères ont avisé leurs officiers en
région de ne pas participer au processus de consultation en
matière d'aménagement. On voit bien le genre de guerre interne
qui existe entre le ministère des Affaires municipales et les autres
ministères. Un autre exemple: il ne s'est jamais dégagé de
consensus d'une façon transparente entre les élus municipaux et
le ministre. Jamais il n'y a eu de consensus transparent entre vous, M.
le ministre, et les préfets des MRC ou les maires. Jamais il n'y
en a eu. En plus, le ministre rétracte tout ce qui a été
dit ou tout ce qui a été écrit, toutes les ententes
officieuses conclues entre les MRC et ses fonctionnaires. Parce que,
finalement, on arrive dans un entonnoir, tout ce que les fonctionnaires ont pu
faire, ont pu dire, ont pu écrire d'une façon non officielle, le
ministre se retire de cela et dit: C'est moi le patron et c'est moi qui dicte.
Alors, il l'a dicté tout le long.
De plus, les communications entre les officiers du ministère, les
préfets et les fonctionnaires des MRC sont inexistantes. Il n'existe
aucun genre de communication entre ces gens-là. C'est impossible de
communiquer entre les MRC et les fonctionnaires du ministère des
Affaires municipales en ce qui a trait à l'aménagement et au
développement. Il n'y a, non plus, aucune continuité dans les
propos que tiennent les officiers du ministère des Affaires municipales.
Il n'y a jamais une ligne de conduite constante. Il n'y a pas un officier du
ministère qui dit la même chose deux jours d'affilée. C'est
un fait que toutes les MRC réalisent depuis plusieurs mois.
Alors, je crois que le ministre aurait intérêt à
expliquer également aux MRC, par exemple, ce qu'il entend, lui, le
ministre, par délimitation des périmètres d'urbanisation.
C'est un terme qui est écrit dans la loi 125 et après cinq
évaluations de ce terme-là, il n'y a pas un fonctionnaire qui est
arrivé avec la même évaluation et la même description
de ce qu'était une délimitation des périmètres
d'urbanisation. Personne ne le comprend. Les officiers du ministère ne
le comprennent pas. Le ministre ne le comprend pas plus. Comment peut-il
l'expliquer aux préfets des MRC ou aux maires? Je dois vous dire, pour
préciser, que c'est l'article 5, alinéa 3 de la loi 125. (23 h
40)
En terminant, je veux dire que le ministre devra, une fois pour toutes,
définir deux termes simples: aménagement et développement.
Si le ministre ne sait pas ce qu'est l'aménagement et le
développement, il va falloir qu'un bon jour quelqu'un du
ministère des Affaires municipales dise aux préfets de
comté où commence l'aménagement et où il finit et
où commence le développement et où cela finit, parce que
personne ne se comprend dans ce domaine-là, M. le Président. Pas
un maire ne se comprend et pas un préfet ne se comprend. Le ministre ne
se comprend pas, les officiers du ministère ne le comprennent pas et il
faudra qu'un bon jour quelqu'un comprenne quelque chose dans ce
ministère qui semble complètement abasourdi. Je vous remercie, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Bellechasse.
M. Claude Lachance
M. Lachance: Merci, M. le Président. Le hasard,
aujourd'hui, a fait en sorte que, pour la deuxième fois, j'ai à
intervenir après le député de Huntingdon. Je suis un peu
estomaqué des propos que le député de Huntingdon vient de
tenir, surtout que je viens de prendre connaissance des notes biographiques qui
sont contenues dans cette brochure publiée par l'Assemblée
nationale et que j'ai découvert, à ma grande surprise, que le
député de Huntingdon a été maire d'une
municipalité, celle de Saint-Rémi, de 1972 à 1976.
M. Dubois: M. le Président, une demande de directive.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Huntingdon, une demande de directive.
M. Dubois: Comment pourrais-je faire savoir au
député que mes propos reflètent ce que les maires pensent
au Québec? Le fait que j'ai été maire, M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. le député de Bellechasse, vous pouvez continuer.
M. Lachance: Merci, M. le Président. J'ai des petites
nouvelles pour le député de Huntingdon. Je rencontre des maires,
moi aussi; il y en a 34 dans le comté que je représente et, pas
plus tard que vendredi soir dernier, j'étais encore avec 24 des 34
maires. Vous pouvez être certain que le langage que j'ai entendu ce soir
ne reflète absolument pas la réalité qu'on entend quand on
se promène parmi les maires. Je prierais le député d'aller
voir plus souvent ses maires; peut-être qu'il constaterait que ce qu'il
pense n'est pas conforme à la réalité
québécoise.
Celui qui vous parle, M. le Président, ne parle pas à
travers son chapeau. Celui qui vous parle a été maire de 1973
à avril 1981. Au moment où je suis arrivé à la
mairie en 1973, si on fait une brève rétrospective, on se
souviendra qu'on avait à cette époque un nouveau ministre des
Affaires municipales qui a été cité tantôt, M.
Goldbloom, qui arrivait à la suite de la disparition rapide d'un certain
M. Maurice Tessier, député de Rimouski, qui avait osé
essayer de s'attaquer aux conseils de comté à l'époque,
qui avait essayé de les faire sauter.
Vous le savez vous-même, M. le Président, puisque vous avez
été maire de votre municipalité; vous avez vu ce qui est
arrivé à cet individu. M. Goldbloom était un
bon bonhomme, quelqu'un de qui on peut dire qu'il était un bon
garçon, mais il était patineur de fantaisie. Il a donc su faire
assez de slalom pour ne pas avoir trop de problèmes. Cependant, c'est
drôle, durant son exposé, je m'attendais que le
député de Huntingdon fasse référence à son
expérience municipale, qu'il nous parle un peu de ce qu'il avait
vécu pendant qu'il était maire. Pas un mot de cette
période probablement creuse ou noire, je ne le sais pas, de 1972
à 1976.
J'étais maire à cette époque et je peux vous dire
que le monde municipal à cette époque-là attendait des
choses qui sont venues depuis 1976. Oui, la réforme de la
fiscalité, la loi 57 était attendue depuis 20 ans - pas 10 ans,
pas 5 ans, mais 20 ans -et elle est venue grâce au gouvernement actuel.
La loi 105 sur la démocratie municipale et toute une série de
lois sont venues moderniser le Code municipal qui en avait tant besoin.
Quand j'entends les propos de mes amis d'en face - comme dirait l'un de
mes concitoyens, ils ne sont pas nécessairement ses amis - je suis un
peu surpris, parce que c'est tellement déconnecté de la situation
qu'on connaît, qu'on vit, qu'on côtoie chaque jour, qu'il me semble
que ce sont des propos qu'on ne devrait pas entendre de la part de gens
responsables. Il ne faut pas prendre les citoyens pour des imbéciles.
Dans tout le Québec, il y a - on l'a dit tantôt - peut-être
1600 municipalités et ces gens qui nous écoutent et qui nous
entendent doivent avoir de la difficulté à se reconnaître
et se dire: Est-ce bien de nous qu'on parle à cette Assemblée
nationale? Je peux vous dire que, comme partout dans le monde, c'est bien
sûr que tout n'est pas parfait. On est humain, c'est perfectible, mais ce
n'est vraiment pas une vision apocalyptique, une vision aussi tronquée
qu'on rencontre lorsqu'on côtoie les gens du monde municipal.
J'écoutais tout à l'heure le député de
Huntingdon parler du projet de loi no 12 et nous dire que le gouvernement
prenait la liberté de se soustraire à l'application de la loi
125. C'est faux. Le gouvernement va continuer, par les articles 149 et
suivants, à se lier aux interventions qu'il doit faire sur des
équipements dans le milieu. Ce que le projet de loi no 12 fait, c'est
spécifiquement lors d'opérations cadastrales et dans les cas de
morcellement pour la construction de routes par le gouvernement. Je pense bien
que le député de Huntingdon, comme d'autres députés
des comtés ruraux, ne doit pas être contre la construction du
réseau routier municipal ou du réseau routier régional ou
rural. Cela a été demandé tellement souvent à notre
ami, le ministre des Transports. Maintenant qu'on veut essayer
d'accélérer les travaux qui sont nécessaires, qui sont
demandés par la population des comtés ruraux, on vient nous le
reprocher, on vient dire qu'on met de côté les dispositions de la
loi 125. C'est une fausseté de laisser croire aux gens qu'avec le projet
de loi no 12 on la met de côté parce que cela fait notre affaire.
Tout simplement, on veut permettre l'exécution de travaux qui,
autrement, ne pourraient pas être réalisés rapidement.
C'est pour une période limitée.
On a entendu, ce soir, énormément de propos intempestifs,
je dirais même incendiaires, de la part de plusieurs
députés concernant les MRC. C'est drôle comme on n'a pas la
même vision des choses. J'ai vécu - je vous l'ai dit tantôt
- de très près tout le processus qui a amené
l'implantation des municipalités régionales de comté au
Québec. Je l'ai vécu de près parce qu'à partir de
1977, j'étais préfet suppléant du comté de
Dorchester, en 1979, préfet jusqu'à mon élection le 13
avril 1981. Nous avions eu, à l'époque, des rencontres
fréquentes avec les personnes chargées de la consultation - parce
qu'il y a eu une consultation, quoi qu'on en dise - et, s'il y a eu certains
problèmes d'ajustement à certains endroits - je peux dire que,
dans la MRC de Bellechasse qui compte 24 municipalités, il y a eu
quelques problèmes d'ajustement entre les maires, parce qu'il y avait eu
des changements de territoire - c'est normal, c'est humain. Mais, aujourd'hui,
après un an et demi de fonctionnement, les maires, que je rencontre
très fréquemment, ont appris à vivre en harmonie et
à s'ajuster, et l'entité de la MRC devient un lieu de
rassemblement non seulement sur la scène municipale, mais c'est aussi un
lieu, au niveau du territoire du CLSC, qui est considéré comme
étant tout à fait homogène, qui doit fonctionner en
harmonie avec le niveau municipal.
Plus que cela, je vais vous raconter une petite anecdote.
Dernièrement, il y a eu un projet provenant de certains fonctionnaires
du ministère de l'Éducation qui visait, dans la perspective de la
restructuration scolaire, à placer une commission scolaire pour la MRC
de Bellechasse plus la MRC Desjardins dans le secteur de Lévis-Lauzon.
Aussitôt que j'ai pris connaissance de cette hypothèse, je me suis
empressé d'aller consulter non pas les maires et les conseillers
municipaux, parce que je connaissais leur avis, mais les commissaires
d'écoles. Personne ne peut dire que les commissaires d'écoles
sont des péquistes ou des gens dévoués aux
intérêts du Parti québécois. Je suis allé les
voir et je leur ai demandé ce qu'ils en pensaient. De façon
unanime, ils ont dit ceci: On veut avoir le même territoire que la
municipalité régionale de comté de Bellechasse. Donc, pour
le niveau municipal, c'est acquis. Pour le niveau du CLSC, ce sera chose faite
bientôt et, pour la commission scolaire qu'on souhaite, on veut avoir le
même territoire. Ceci prouve que, lorsqu'on a fait de la
consultation dans ce coin, il y avait quelque chose de solide. Ce
n'était pas que des impressions; c'était vraiment la
volonté des gens du milieu de travailler sur un territoire unique. (23 h
50)
On raconte toutes sortes de sornettes, on fait peur au monde en disant
que les MRC, ce sera épouvantable, que cela donnera des pouvoirs que les
gens ne veulent pas. Qu'est-ce qu'il y a de nouveau avec l'arrivée de la
municipalité régionale de comté depuis l'adoption de la
loi 125? Un pouvoir supplémentaire. Pas dix, pas cinq, un: le pouvoir
d'aménager le territoire. Les municipalités régionales de
comté conservent les mêmes pouvoirs que les conseils de
comté détenaient: s'occuper des cours d'eau qui franchissent deux
ou trois municipalités, s'occuper des routes intermunicipalités
également, un pouvoir qui avait été acquis au moment
où le député de Huntingdon était maire de sa
municipalité, en 1974. Le pouvoir de l'évaluation
foncière, vous savez que c'était un pouvoir dévolu
à chacune des municipalités locales. À partir du 1er
janvier 1974, le conseil de comté a pris comme responsabilité,
qui lui a été confié par le gouvernement de
l'époque, l'évaluation foncière. Personnellement, j'ai
travaillé à l'élaboration de la stratégie pour
respecter la Loi sur l'évaluation foncière. On a mis, dans notre
coin, notre propre bureau d'évaluation sur pied et on n'a eu qu'à
s'en féliciter puisque ça fonctionnait bien.
Il ne faut pas toujours attendre de se laisser tirer la manche; il faut
pouvoir dire: On fonctionne, on s'adapte, on dialogue. Le monde municipal, je
vous l'assure, a fait des pas de géant depuis quelques années. Ce
sont des gens ouverts, ils ne sont pas malheureux. Les personnes que je
rencontre régulièrement - encore une fois, j'ai de
fréquents contacts, je communique régulièrement avec des
maires par téléphone; je les rencontre et on communique aussi par
écrit - je vous l'assure, ne sont pas des faces de mi-carême ou
des gens qui passent leur temps à chialer contre le gouvernement. Au
contraire, ils commencent à se rendre compte qu'il y a une
cohérence, une unité de fonctionnement. Évidemment, il y a
encore place à amélioration à l'avenir.
Je pense que c'est dans cette perspective qu'il faut envisager
l'amélioration des pouvoirs confiés aux municipalités.
Vous savez que le pouvoir municipal, ce n'est pas un pouvoir qui est en
régression, mais bien un pouvoir qui, actuellement, est respecté
et en évolution. On regarde, lors d'élections municipales, la
progression du taux de participation. Ce n'est pas un hasard si, aujourd'hui,
tant de gens s'intéressent aux élections municipales et
également à l'arrivée des femmes dans les conseils
municipaux. C'est par des mesures qui ont été mises en place
graduellement, par l'intérêt manifesté par le gouvernement
du Québec, qui est le maître, qui a mis au monde les
municipalités, pour s'occuper d'elles.
En terminant, je voudrais vous dire, M. le Président, que les
personnes qui, aujourd'hui, décrient les modifications à la loi
no 125, ce sont ces mêmes personnes -vous vous en souvenez - qui ont
voté, à deux mains, contre la loi no 90 sur la protection du
territoire agricole. Vous vous souvenez de ce qui est arrivé durant la
campagne électorale. Ils ont tenté, en panique, en catastrophe,
de récupérer la loi concernant le zonage agricole, parce qu'ils
se sont rendu compte que, dans la population, c'était quelque chose
d'intéressant. Ces mêmes personnes ont voté contre la loi
no 67 sur l'assurance automobile. Qui veut revenir en arrière? Ils ne
nous parlent plus de cela. La loi no 125, je suis convaincu que c'est une loi
que l'histoire retiendra au Québec comme étant une des plus
importantes adoptées par le gouvernement du Parti
québécois. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Berthier.
M. Houde: M. le Président, je demanderais l'ajournement du
débat.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
d'ajournement est adoptée?
Des voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Boucher: M. le Président, je fais motion pour que nous
ajournions nos travaux à demain, 10 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
d'ajournement est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont
ajournés à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 55)