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(Dix heures une minute)
Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!
Nous allons nous recueillir quelques instants.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
M. le ministre du Revenu.
Unification des perceptions fiscale et sociale
M. Alain Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, lors du discours inaugural de
mars 1983, le gouvernement du Québec précisait sa volonté
de poursuivre ses efforts en vue d'arriver à un appareil administratif
moins lourd et plus efficace. Cette démarche doit entraîner des
modifications profondes à certains organismes gouvernementaux.
De plus, au cours des travaux du Comité sur la relance de
l'économie et de l'emploi, les députés ministériels
ont fait valoir la nécessité de simplifier les exigences
administratives imposées aux entreprises québécoises au
niveau de la perception fiscale et des contributions aux fonds d'avantages
sociaux en vigueur au Québec.
En conséquence, le gouvernement a décidé
d'entreprendre des démarches afin d'intégrer les systèmes
de cotisation, de perception et de vérification de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, de la Commission des
normes du travail et du ministère du Revenu du Québec.
Actuellement, que se passe-t-il? D'une part, l'entreprise reçoit
différentes formules à remplir, doit effectuer des paiements
à différents organismes et est susceptible de recevoir, au cours
de l'année, la visite de plusieurs vérificateurs à qui
elle doit fournir un local de travail, prêter ses livres et registres et
autres pièces justificatives, répondre aux questions,
prêter toute aide raisonnable.
D'autre part, chacun de ces organismes doit développer et
maintenir à jour des systèmes administratifs pour connaître
sa clientèle, émettre ses comptes, identifier ses
délinquants, encaisser ses sommes reçues, recouvrer ses comptes
à recevoir et vérifier les livres de paie au niveau de chaque
individu et de la masse salariale.
Pour deux régies, le gouvernement du Québec a su
éviter ces dédoublements. La Régie de l'assurance-maladie
et la Régie des rentes du Québec ont déjà
confié au ministère du Revenu leurs activités de
cotisation, de perception et de vérification, à la satisfaction
de tous.
Au cours de la réunion spéciale du Conseil des ministres,
à Compton, les 9, 10 et 11 novembre dernier, le gouvernement a conclu
qu'il serait possible et souhaitable d'unifier toutes les activités de
cotisation, de perception et de vérification effectuées par ces
organismes qui se servent des salaires versés par les employeurs comme
assiette de revenus et d'en confier le mandat au ministère du Revenu du
Québec. Bien que j'entende compléter l'opération dans les
meilleurs délais, je tiens à assurer les fonctionnaires et les
entreprises que nous procéderons par étapes de façon
à ne pas bousculer les personnes impliquées, ni perturber les
communications et le service offert aux entreprises. Il me semble possible de
compléter l'ensemble de la démarche dans un an environ. Des
modifications législatives seront sans doute requises pour traduire ces
changements dans les lois qui régissent chacun des organismes.
Le principal objectif de cette décision est de réduire la
paperasse et le nombre de contrôles des entreprises et ainsi satisfaire
une demande maintes fois formulée par les milieux d'affaires
québécois. Je demeure convaincu que le ministère du Revenu
peut agir comme mandataire efficace pour recueillir les sommes
nécessaires au financement des programmes des normes du travail, de
santé et de sécurité au travail, au même titre qu'il
le fait actuellement pour la Régie des rentes du Québec. Il
résultera de cette fusion un meilleur service aux entreprises et une
efficacité accrue des ressources investies dans l'administration
publique. C'est en ce sens que le gouvernement du Québec a
décidé d'agir.
Le Président: M. le député de Portneuf.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. En l'absence de
mon collègue de Saint-Louis, qui est le porte-parole de notre parti
à l'égard du ministère du Revenu, il me fait plaisir
d'intervenir au nom de notre groupe, ce matin, à la suite de la
déclaration ministérielle formulée par le ministre du
Revenu. C'est certainement avec beaucoup de réceptivité et
beaucoup d'intérêt qu'on a pris connaissance de la
déclaration du ministre. On se rappellera que mes collègues et
moi avons, à plusieurs reprises, en cette
Chambre, soit par des motions ou par la question avec débat,
voulu sensibiliser le ministre du Revenu aux nombreux problèmes
inhérents à l'administration du ministère et à
toute cette question qui est abordée ce matin à l'égard de
la paperasse, des formules et du prélèvement des cotisations.
Essentiellement, le ministre nous confirme, ce matin, que le
ministère du Revenu, dans un avenir qu'il souhaite le plus
rapproché, soit d'ici à un an, agira comme mandataire pour
recueillir les sommes nécessaires au financement des programmes de
normes du travail et aussi de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. On doit retenir et on doit constater que le
gouvernement, à juste titre - vous allez comprendre le pourquoi de notre
réceptivité donne suite non seulement aux représentations
qui sont formulées, mais à des éléments
particuliers de notre programme politique où nous disions souhaiter que
le gouvernement, de quelque parti politique qu'il soit formé, puisse en
venir à une telle intégration au niveau de la cotisation chez les
entreprises du Québec. À cet égard, merci de suivre les
recommandations du Parti libéral du Québec.
Deuxièmement, on constate que le gouvernement - probablement
à la lumière des sondages qui lui accordent seulement 25% ou 27%,
selon les périodes - a décidé d'intervenir au niveau de ce
qu'on appelle -entre guillemets - des "irritants". Cela en est un ce matin.
Évidemment, il y en a plusieurs autres auxquels on pourra faire
référence tout à l'heure.
Le ministre nous a indiqué que les emplois étaient
protégés, d'une part. D'autre part, il nous a indiqué que
ses intentions étaient que tout cela se concrétise d'ici à
un an et que des lois devraient être déposées. Nous sommes
donc en droit de présumer que ces lois seront déposées
probablement seulement au mois de mars ou d'avril, parce qu'on sait que la
période pour déposer les projets de loi est maintenant
passée.
Une question au ministre. Une telle intégration des cotisations
va faire en sorte que le ministère du Revenu pourra plus facilement
maintenant établir des statistiques du montant de taxes qui est
imposé à la masse salariale des employeurs du Québec,
taxes provenant de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, montants à payer pour les normes de
travail à d'autres égards, impôt, taxe de vente, etc.
J'aimerais demander au ministre du Revenu, des Travaux publics et de
l'Approvisionnement s'il peut nous donner l'assurance ce matin que de telles
statistiques, premièrement, pourront être compilées et,
deuxièmement, rendues publiques peut-être à chaque
trimestres.
On s'attendait, ce matin - je terminerai mon propos là-dessus -
lorsqu'on a été informés que le ministre du Revenu, des
Travaux publics et de l'Approvisionnement ferait une déclaration
ministérielle, qu'il serait en mesure d'aborder d'autres irritants
aussi. Qu'il me suffise de lui mentionner que nous avons des problèmes
dans chacun de nos comtés actuellement, plus particulièrement
dans les comtés ruraux, alors que le gouvernement, en vertu d'une loi
adoptée le 22 juin dernier - si ma mémoire est fidèle - a
décrété qu'à l'avenir la vente et les achats
d'équipements forestiers seraient taxables, par exemple les scies
mécaniques. Nous avons eu beaucoup de représentations de la part
de ces commerçants qui nous ont informés récemment qu'ils
n'avaient reçu aucune information, aucune lettre, aucun avis du
ministère. Vous comprendrez comme moi que la Gazette officielle n'est
pas le livre de chevet de la majorité des Québécois. C'est
ainsi que ceux-ci sont susceptibles de se voir réclamer des montants
significatifs et importants qu'ils n'ont, d'ailleurs, pas
prélevés parce que non informés. Quand même, ils
recevront sous peu ces avis de cotisation du ministère du Revenu. (10 h
10)
En terminant, je veux réitérer que c'est avec beaucoup
d'intérêt que nous accueillons votre mesure. Cela s'inscrit dans
une démarche pour diminuer la paperasse, diminuer les coûts,
diminuer et faciliter les contrôles. On vous remercie. Vous faites
exactement ce qu'on vous a demandé et on espère que vous pourrez
faire de même à l'égard d'autres irritants, parce qu'il en
reste beaucoup; entre autres le règlement de placement dans l'industrie
de la construction pour lequel des engagements assez clairs ont
été formulés par le premier ministre dans sa
déclaration d'un certain dimanche soir, à savoir qu'ils seraient
modifiés. On n'a encore rien eu. C'est avec beaucoup d'impatience qu'on
attend que le ministre du Travail puisse se lever pour annoncer des
modifications au règlement de placement dans l'industrie de la
construction.
Je terminerai en disant que, si on veut vraiment régler tous les
irritants au Québec, si on veut surtout régler l'irritant, il
faut régler le sort du Parti québécois et le battre aux
prochaines élections.
Le Président: M. le ministre du Revenu, en
réplique.
M. Alain Marcoux (réplique)
M. Marcoux: Je suis heureux de voir la réaction positive
de l'Opposition à cette décision du gouvernement. Je dois dire
que, si cette idée a été discutée au Conseil des
ministres spécial de Compton et acceptée par le Conseil des
ministres, c'est qu'elle provenait du comité des députés
rattaché au comité de l'emploi et de l'économie qui a
insisté sur des mesures concrètes visant à
simplifier la paperasse pour les entreprises du Québec et à
diminuer les dédoublements d'action de la part du gouvernement, des
organismes mandataires du gouvernement ou des sociétés
parapubliques gouvernementales auprès des entreprises
québécoises. C'était la principale recommandation de ce
comité des députés du Parti québécois. C'est
pourquoi je suis heureux comme ministre du Revenu d'avoir à y donner
suite au nom du Conseil des ministres.
Je pense que ce que le gouvernement du Québec vient d'annoncer
aujourd'hui s'ajoute à différentes mesures visant à aider
l'entreprise du Québec qui veut actuellement participer à la
relance, que ce soit les diminutions de cotisations annoncées en ce qui
concerne la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, que ce soit le plan Biron, phase 2, dont les critères ont
été rendus publics hier, que ce soit les bourses pour les jeunes
du Québec qui veulent se lancer en affaires. C'est une autre mesure que
nous annonçons aujourd'hui qui fait partie de cette volonté
d'action pour permettre à l'entreprise du Québec, qui a des
projets, de les concrétiser. On lui facilite les choses au maximum.
Quant aux questions posées par le député de
Portneuf, les statistiques concernant la fiscalité ou le poids de la
fiscalité des entreprises du Québec sont largement connues.
Probablement que par cette intégration, lorsque le ministère du
Revenu, chaque année, publiera les statistiques officielles, ce sera
plus facile pour le citoyen comme pour les députés de se rendre
compte du poids global, puisque ces statistiques seront davantage
unifiées à ce moment-là. Mais je dois indiquer que ce sont
tous des éléments connus qui seront à ce moment-là
regroupés.
En ce qui concerne la taxation, je m'étonne que le
député de Portneuf n'ait pas parlé de l'abolition de la
taxe de vente sur le matériel roulant des scieries et de l'industrie
forestière, qui a été décrétée lors
du dernier discours sur le budget. C'était un autre effort pour
faciliter les investissements dans le matériel de production dans lesindustries de sciage, dans les industries liées au matériel
forestier et à la production minière, tel qu'annoncé dans
le discours sur le budget du ministre des Finances, en mai dernier.
Je suis heureux de constater cette unanimité à
l'Assemblée nationale face à un autre geste concret,
précis du gouvernement dans le sens de la volonté d'agir et de la
relance économique du Québec.
Des voix: Bravo!
Le Président: II n'y a rien au dépôt de
documents, au dépôt de rapports de commis- sions élues, au
dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés, ni à la présentation de projets de loi au nom du
gouvernement ou au nom des députés, ce qui nous mène
à la période des questions. M. le député de
Laurier.
M. Gratton: M. le Président, question de
règlement.
Le Président: M. le député de Gatineau,
sur une question de règlement.
M. Gratton: Étant donné l'absence de plus de la
moitié du cabinet, est-ce qu'on aura, quand même, une
période complète de questions et, notamment, est-ce que le
premier ministre sera ici? Ah! Je le vois arriver et je l'en remercie, M. le
Président.
M. Pagé: Le voilà! Il suffit de parler du diable
pour qu'il arrive!
Le Président: M. le député de Laurier.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Les bureaux d'aide sociale ont-ils pratiqué le
favoritisme
M. Sirros: Merci, M. le Président. Hier,
j'alléguais devant cette Assemblée que le gouvernement est au
courant, depuis plus d'un an, de ce que j'ai appelé un système de
favoritisme, teinté de népotisme, dans l'octroi de postes, dans
les bureaux d'aide sociale. Le premier ministre, quant à lui, a
allégué qu'il s'agissait là d'une fabrication. Est-ce que
Mme la ministre, maintenant qu'elle a eu le temps de le trouver, peut nous dire
si elle déposera devant cette Chambre le rapport d'enquête qu'elle
détient sur cette situation?
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: M. le Président, vous me permettrez de
répondre le plus complètement possible à la question
soulevée par le député de Laurier. Je pense qu'il a
laissé planer hier un certain nombre de soupçons. Je sais qu'il a
repris ce matin les mots mêmes qu'il a utilisés dans son
intervention d'hier. Cependant, dans les journaux de ce matin, on semble
vouloir soupçonner que mon ex-collègue, celui que je remplace,
aurait été pris à partie par les problèmes qu'a
soulevés le député de Laurier, hier. Je pense que c'est
très grave, M. le Président, et je vais y revenir à la fin
de ma réponse.
Je vais y aller promptement, mais je pense que c'est assez important que
je prenne le temps de le faire. Pensons qu'il y a au-delà de 4000
fonctionnaires au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du
revenu et que, lorsqu'on laisse planer de tels doutes, ce sont ces 4000
personnes qu'on risque d'atteindre aussi.
J'ai rencontré, hier, mes hauts fonctionnaires. Nous avons,
d'abord, discuté du plan de relance, et, par la suite, nous avons
discuté de la question qui avait été soulevée
à l'Assemblée nationale, hier. Voici ce qu'on m'a remis comme
information. Il y a eu un rapport de vérification de la Commission de la
fonction publique à la suite d'une plainte soumise, à savoir que
la promotion et l'affectation étaient facilitées par des
fonctionnaires qui pouvaient avoir des liens de parenté avec des membres
de la Direction générale de l'aide sociale. Voici le rapport dont
je parle. En octobre 1982 - on s'entend, il y a eu plainte - la Commission de
la fonction publique prend connaissance du rapport de la Direction de la
vérification. Le 5 novembre 1982, le secrétaire de la Commission
de la fonction publique transmet le rapport au sous-ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. À la demande du
ministre et dès réception du rapport, le sous-ministre convoque
les gestionnaires et procède à un examen attentif du rapport.
À la suite de cette analyse, le sous-ministre écrit, en
février 1983, au président de la commission pour lui faire part
de ses commentaires et demande une rencontre afin d'en discuter.
Cependant, ce même sous-ministre a eu des problèmes de
santé, on s'en souviendra; il n'a pas été possible pour
lui de rencontrer rapidement le président. Cependant, la commission a
décidé de procéder à un examen de l'analyse que lui
avait présentée la Main-d'Oeuvre et la Sécurité du
revenu.
En juin 1983, il y a une lettre de commentaires du commissaire de la
Commission de la fonction publique sur le rapport de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Ces commentaires sont acheminés au
bureau du ministre. Le sous-ministre par intérim demande une rencontre
avec M. Marois à cet égard, vers le 10 juillet, afin que le
sous-ministre ait le temps de prendre entièrement connaissance du
dossier et de faire ses commentaires.
Ensuite, qu'est-ce qui est arrivé? Compte tenu des conclusions de
la commission, des analyses et des contre-analyses qui ont été
faites au ministère, est-ce qu'on doit ou non prendre des mesures
disciplinaires à la suite des recommandations du rapport?
Premièrement, dans les anomalies soulevées par la commission, il
n'y a pas d'accrocs majeurs à la lettre des lois et des
règlements, même s'il semble évident que l'esprit peut
avoir été entaché, n'a pas toujours été
respecté. Deuxièmement, il est possible de prendre des mesures
disciplinaires à l'endroit du ou des fonctionnaires qui pourraient
être coupables de manoeuvres frauduleuses. Cependant, les
vérifications faites par notre contentieux n'ont pas mis en
lumière d'action illégale. Troisièmement, les conclusions
de la commission ne sont pas basées sur des illégalités
démontrées par des faits, mais reposent plutôt sur des
présomptions. (10 h 20)
À la suite de cela, que s'est-il fait au ministère? Des
directives ont été données de telle sorte que les
attitudes et les comportements des directeurs généraux se
modifient, et on a demandé qu'il y ait un renforcement des
contrôles sur les concours de promotion et d'affectation, puisqu'il
s'agissait de ce type de problème. Enfin, j'ai demandé à
mes fonctionnaires, hier, d'être vigilants quant à l'application
de ces recommandations.
Le Président: En conclusion, Mme la ministre.
Mme Marois: Cela dit, ces rapports sont confidentiels pour
protéger d'abord le plaignant ou la plaignante qui a
déposé la plainte et, d'autre part les personnes qui sont mises
en cause par ce rapport, puisque nous n'avons pas d'assise pour entamer quelque
poursuite que ce soit. On viendrait alors, je pense, démolir des
personnes sans avoir de preuve pour le faire.
Je termine maintenant, M. le Président. Écoutez! On a eu,
au ministère, à partir du début d'avril 1982, 45 plaintes.
Est-ce qu'on va, chaque jour de cette session, soulever une plainte
après l'autre?
Une voix: Non.
Mme Marois: Quant aux allégations qu'on retrouve
actuellement dans les journaux et aux soupçons qu'on a laissé
planer - je ne pense pas qu'on ait fait d'affirmations, mais on a laissé
planer des soupçons - quant à mon ex-collègue, à sa
famille et à ses proches, si on a des faits concrets à
présenter, je demande que, de son siège, le député
de Laurier ait le courage de le faire.
Je termine, M. le Président. J'affirme de mon siège que je
n'ai ni plaintes, ni raisons, que je ne possède aucune information,
aucun soupçon d'élément d'information qui me porteraient
à croire de telles choses. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravoi
M. Sirros: Question additionnelle, M. le Président. C'est
incroyable, M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député de Laurier.
Une voix: Attendez, les farceurs. Attendez, les farceurs.
M. Sirros: Peut-être que vous me permettrez un petit
préambule, M. le Président, après tout ce que Mme la
ministre a dit.
Des voix: Des faits. Des faits.
Le Président: J'ai été d'une largesse tout
à fait exceptionnelle à l'endroit de Mme la ministre.
Mme Marois: Je le reconnais.
Le Président: Je ne tolère ordinairement pas de
réponse au-delà de trois minutes et celle-là a duré
sept minutes. En conséquence, je pense que je dois faire preuve d'une
largesse quelque peu analogue à l'endroit de M. le député
de Laurier. C'est, quand même, donnant donnant. M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Premièrement, quant à ce que Mme la
ministre appelle les allégations que j'ai faites, M. le
Président, j'aimerais l'informer que je n'ai fait que
répéter mot pour mot ce qui est inclus dans deux lettres, dont
l'une, de M. Michel Poirier, secrétaire de la Commission de la fonction
publique, dit la chose suivante: "La commission, lors de sa dernière
assemblée d'octobre 1982, a étudié le rapport qui lui a
été soumis par sa Direction de la vérification au terme de
l'enquête qui s'est avérée longue et difficile en raison de
la nature particulière du projet. La commission me charge de vous
informer qu'à la suite de l'étude des dossiers et des
témoignages recueillis elle est d'avis que le système que vous
avez dénoncé a existé. La commission estime que les droits
des fonctionnaires n'ont pas été respectés au sein de la
Direction générale de l'aide sociale. Le rapport a
été soumis au sous-ministre...".
Une deuxième lettre, cette fois de la collègue de Mme la
ministre, Mme LeBlanc-Bantey, ministre de la Fonction publique: "Depuis, la
commission, en date du 6 octobre, a produit un rapport concluant que les
principales allégations contenues dans votre plainte étaient
fondées et qu'elle avait été à même
d'identifier "des situations de favoritisme teinté de
népotisme".
Des voix: Ah, Ah!
M. Sirros: Quant à laisser planer des soupçons, M.
le Président, tout ce que j'ai fait a été de
répéter les mots qui ont été utilisés par le
gouvernement concernant le rapport.
Deuxièmement, je pense que cela éclairerait beaucoup la
situation si Mme la ministre acceptait de déposer les rapports en
biffant les noms, parce que je suis tout à fait d'accord pour qu'on
garde la confidentialité du plaignant qui a dénoncé la
création d'un poste non nécessaire, semble-t-il, pour
l'épouse d'une des personnes impliquées, l'engagement du
beau-frère de la même personne impliquée, l'engagement, si
ma mémoire est bonne, de la soeur du supérieur immédiat de
la personne impliquée. Si cette chose ne trouble pas assez la ministre
pour qu'elle dépose les rapports afin d'apporter toute la
lumière, je me demande ce qu'il reste de la transparence.
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: Je pense que, malheureusement, le
député de Laurier n'a pas entendu ou n'a pas écouté
ma réponse de tout à l'heure. J'ai parlé justement de ces
faits au tout début de mon intervention en disant qu'un rapport avait
été fait par la Commission de la fonction publique, qu'il avait
été transmis, que la ministre de la Fonction publique l'avait
transmis à mon excollègue, que celui-ci l'avait transmis à
ses fonctionnaires, etc. Le député de Laurier se
réfère aux plaintes qui ont été portées et
à la première analyse que la commission en a faite.
Je lui ai donné tout le déroulement de ce qui s'ensuivit
à l'intérieur de mon ministère. À la suite de ce
déroulement... M. le Président, il ne m'a pas entendu et, s'il ne
m'écoute pas encore, il ne m'entendra pas non plus, je suis
désolée.
Ce que j'ai dit à cette Chambre, c'est que ce rapport avait
été analysé chez nous. Il y a une contre-expertise de la
commission sur ce rapport interne. À la suite de cette contre-expertise
et de l'analyse que nous avons fait faire par notre contentieux, j'ai bien
terminé mon intervention tout à l'heure en parlant du fait qu'il
n'y avait pas matière à poursuite légale, que nous ne
pouvions pas intervenir à cet égard.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre!
Mme Marois: J'ai aussi dit que des mesures correctives avaient
été apportées. Je m'excuse, M. le Président, mais
on sait fort bien que ce type de rapport - c'est la question que le
député de Laurier soulève -même si on y biffe des
noms, est habituellement assez explicite pour qu'on puisse savoir, à la
suite de sa lecture, parce que c'est un rapport, qui est public à partir
du moment où je le dépose, qu'on peut effectivement identifier
ces personnes dans l'un ou l'autre des bureaux où cela peut être
arrivé. À ce moment-là, je pense que cela leur porterait
nettement préjudice. Je n'ai pas l'intention, M. le Président, de
déposer ce rapport. Merci.
M. Sirros: Question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Premièrement, est-il normal, est-il d'usage
que, lorsque la Commission de la fonction publique dépose une
enquête, il y ait une révision, à la demande du
sous-ministre, concernant les allégations contenues dans le rapport?
Cela m'indique qu'il doit y avoir des faits passablement troublants dans le
premier rapport.
Deuxièmement, vous avez parlé d'une lettre de
commentaires, à la suite de cette révision et de cette analyse.
Cette lettre contient-elle une centaine de pages? Est-ce vrai? Je vous demande
cela.
Troisièmement, dans cette deuxième vérification,
à la suite de la demande du sous-ministre ou de l'ex-ministre de la
Main-d'Oeuvre, est-ce exact que les allégations contenues dans le
premier rapport ont été vérifiées et que d'autres
faits troublants ont été trouvés? Vous n'avez
peut-être pas de recours légal, mais vous avez sûrement un
recours administratif.
Une voix: Oui.
Une voix: C'est cela. (10 h 30)
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: Pour ce qui est de la première partie de la
question, j'imagine que ma collègue, la ministre de la Fonction
publique, pourra répondre beaucoup mieux que moi, puisqu'elle
possède très bien l'ensemble des règles du jeu concernant
le rôle de la Commission de la fonction publique. Maintenant, j'essaie de
reprendre la deuxième partie de la question sur les lettres et
commentaires. Est-ce qu'on pourrait me la rappeler, s'il vous plaît? Je
l'ai oubliée.
M. Sirros: J'appelle cela une lettre de commentaires, ou
plutôt, un deuxième rapport d'enquête.
Mme Marois: Comme j'ai pu voir l'ensemble des documents, j'ai
considéré qu'il s'agissait d'expertise contre expertise et que,
selon l'analyse qui en avait été faite par notre contentieux,
vous l'avez dit vous-même d'ailleurs, je me rappelle votre intervention,
il devait y avoir des mesures administratives à prendre. J'ai
répondu déjà au tout début en disant que ces
mesures avaient été prises et avaient été mises en
oeuvre.
Le Président: Mme la ministre de la Fonction publique.
Mme LeBlanc-Bantey: Vous me permettrez de replacer les choses
dans leur plus juste perspective. Je comprends que c'est très facile de
lancer toutes sortes d'insinuations et surtout...
Le Président: À l'ordre:
Mme LeBlanc-Bantey: ...quand la personne principalement
concernée n'est pas ici pour se défendre. M. le Président,
il a effectivement été porté à ma connaissance, par
un fonctionnaire... c'est-à-dire qu'un fonctionnaire s'est
adressé à la fonction publique demandant qu'on vérifie
certaines pratiques qui, semblait-il, avaient cours dans certaines directions
du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu. Nous avons recommandé à cette personne de s'adresser
à la Commission de la fonction publique, normalement, parce que c'est la
Commission de la fonction publique qui a la responsabilité de faire
enquête sur l'observance de la Loi sur la fonction publique. Dès
que nous avons eu une première enquête de la Commission de la
fonction publique, j'en ai fait parvenir une copie à mon
ex-collègue de la Main-d'Oeuvre. À ma connaissance, mon
collègue de la Main-d'Oeuvre, dès ce moment, a tout mis en oeuvre
pour vérifier dans son ministère s'il y avait lieu d'accorder foi
aux plaintes et à l'enquête de la commission. C'est tout à
fait normal qu'à la suite d'allégations d'un rapport qu'un
ministère concerné, comme ma collègue a très bien
expliqué, rencontre ses gestionnaires et examine les accusations ou les
vérifications de la commission.
Ma collègue a reconnu, ainsi que le ministère et les
gestionnaires, qu'il y avait effectivement, de la part de certains
fonctionnaires, et à ma connaissance, ni de près ni de loin, ni
le ministre, ni mon excollègue de la Main-d'Oeuvre, ni aucun de ses
collaborateurs n'étaient impliqué dans la plainte du
fonctionnaire. Il s'agissait d'une plainte envers certains fonctionnaires de la
Main-d'Oeuvre. Là-dessus, je me joins à ma collègue pour
dire que c'est quand même injuste de laisser planer des doutes, non
seulement sur l'ancien ministre, mais sur les 4000 fonctionnaires de la
Main-d'Oeuvre. Qu'un ou deux ou trois aient des attitudes condamnables, je
pense que la ministre l'a reconnu, que le ministère voit à ce
qu'il n'y ait plus de cas de favoritisme détourné ou légal
ou, si vous voulez insinuer, cela va... Mais qu'en même temps on laisse
croire qu'il s'agissait de faits dont l'ex-collègue était au
courant et qu'il s'agirait d'une pratique généralisée dans
les centres de main-d'oeuvre, je trouve que c'est parfaitement injuste et c'est
faire injure, finalement, à l'ensemble des fonctionnaires de la
Main-d'Oeuvre qui tentent de faire leur travail correctement.
M. Sïrros: Je mettrai au défi... Le Président:
À l'ordre! À l'ordre!
M. Sirros: ...les deux ministres de lire l'ensemble des
reportages qui ont été faits dans le journal et
répéter ce qu'ils viennent de dire par rapport aux
allégations que j'ai faites. Je voudrais également dire qu'ils ne
sont pas ici pour défendre seulement les excollègues, ils sont
ici pour répondre aussi aux gestes administratifs de leur
ministère. C'est inacceptable que cela ait pris tant de temps à
trouver un écho en public. Deuxièmement, c'est inacceptable que
la ministre ne dépose pas les rapports, M. le Président.
Troisièmement, qu'est-ce qui se passe? Il y a le premier ministre qui
dit: C'est une fabrication. Il y a la ministre qui dit que ce sont des
soupçons qu'on laisse planer. Il y a l'autre ministre qui dit que les
plaintes sont fondées et qu'il y a une situation, telle que je l'ai
décrite, signée de sa main. Qui dit vrai? Déposez le
rapport afin que l'on sache.
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: J'ai compris qu'il n'y avait pas de question, il y
avait des commentaires. On a parlé du temps pour faire écho
à ces rapports. J'ai donné la chronologie des
événements et je pense que c'était d'une très
grande efficacité; on en conviendra. Le rapport était à
peine arrivé sur le bureau du ministre qu'il y avait rencontre avec les
hauts fonctionnaires et que tout le processus se mettait en branle. J'ai
déjà dit que je ne déposerais pas ce rapport, compte tenu
qu'il pourrait porter préjudice aux personnes qui sont concernées
et que, d'autre part, à la suite des directives données, j'ai
réaffirmé, hier, le fait que je voulais qu'on suive avec
attention, avec vigilance les correctifs qui allaient être
apportés dans les pratiques administratives pour que de tels
comportements ne puissent se reproduire. Merci, M. le Président.
M. Pagé: M. le Président, dernière question
additionelle en ce qui me concerne en tout cas.
Le Président: M. le député de Portneuf,
dernière question additionnelle.
M. Pagé: Très brièvement, une question
additionnelle au premier ministre. M. le premier ministre, Mme la ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu répond ce
matin qu'à la lumière de ce rapport, il n'y a pas matière
à poursuite. Mme la ministre de la Fonction publique, dans une lettre
sous sa signature, confirme les conclusions du rapport et confirme qu'il y a eu
effectivement des cas de favoritisme teintés de népotisme.
Premier volet de la question: Le gouvernement doit avoir une seule voix et le
gouvernement doit être solidaire. Qui dit vrai entre les deux
ministres?
Deuxième volet de la question: Est-ce que ces faits ont
été portés à votre attention par le ministre Marois
lorsqu'il vous a rencontré pour vous annoncer sa démission?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour
répondre à la deuxième partie de la question, la
réponse est non. Pour répondre à la première partie
de la question - je pense que cela va expliquer un peu ce que je viens de dire
à propos de la dernière rencontre que j'ai eue avec M. Marois,
quand il était ministre - c'est que des cas occasionnels de favoritisme
ou de népotisme, il est évident que nous sommes exposés
à cela. C'est évident que dans la fonction publique il y a des
milliers et des milliers d'employés. L'immense majorité sont des
gens qui font leur travail conscieusement et qui suivent les règles
d'étique normales. Mais il y en a toujours, exceptionnellement - et
c'est malheureux - qui vont abuser. S'il y a matière à poursuite
ou matière à destitution, à ce moment les mesures doivent
être prises. S'il y a plutôt matière à correction
administrative ou à réprimande, je suppose qu'elles sont prises
aussi. Je ne vois pas pourquoi - au point d'entretenir des gens qui ne
demandent pas mieux que de faire des manchettes avec des mots écoeurants
comme "nauséabond", etc..
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît; M.
le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): ...on entretien une espèce
de balloune comme celle-là autour de choses qui, dans toute
administration publique, sont exposées à arriver et, qu'à
l'occasion, quand cela arrive, on doit essayer de corriger le plus vite
possible. C'est, me semble-t-il, ce qui a été fait.
M. Pagé: M. le Président, je voudrais poser une
autre question additionnelle, il n'a pas répondu à la
question.
Le Président: C'est vraiment la dernière question
additionnelle, M. le député, parce que d'autres collègues
veulent poser des questions.
M. Pagé: Oui. Vous êtes chef du gouvernement, M. le
premier ministre. Vous avez un ministre qui dit blanc et l'autre
ministre qui dit noir. Qui dit vrai dans cela? C'est ce qu'on veut
savoir. La réponse et la position du gouvernement. Mme la ministre dit
que les faits ne donnent pas lieu à des poursuites. L'autre Mme la
ministre, sous sa signature, après, je présume, avoir
étudié le rapport, confirme tous les faits. Laquelle des deux dit
vrai? Pouvez-vous dire la vérité?
Des voix: Qui cachez-vous?
Le Président: Mme la ministre de la Fonction publique.
Mme LeBlanc-Bantey: M. le député de Portneuf me
permettra le complément de réponse. À ma connaissance,
vous avez une lettre que j'ai signée après la réception du
premier rapport de la Commission de la fonction publique, lequel rapport a
été étudié par les gestionnaires du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
tel que ma collègue l'a dit tout à l'heure. Les gestionnaires de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ont fourni, eux
aussi, un rapport à la Commission de la fonction publique disant: Dans
une certaine série d'allégations, certaines nous apparaissent
fondées et nous allons faire en sorte que cela ne se reproduise plus et
d'autres sont fausses ou n'ont pas été prouvées. La
Commission de la fonction publique, à la suite de cette
vérification des gestionnaires du ministère en question, a fait
un second rapport qui n'est pas - en tout cas à ma connaissance -
parvenu jusqu'à moi. Donc, à ce dernier rapport, à la
suite de la vérification des gestionnaires du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, je n'ai pas
répondu puisque je n'en ai pas pris connaissance.
Cela étant dit, ma collègue a reconnu qu'il y avait
effectivement eu des pratiques douteuses chez certains fonctionnaires - je le
répète: chez certains fonctionnaires. Tout à l'heure,
lorsque j'ai dit que mon ex-collègue n'était pas impliqué,
vous avez tenté de couvrir ma voix, mais je le répète,
chez certains fonctionnaires il semble y avoir eu des pratiques douteuses. Ma
collègue a clairement dit que les gestionnaires du ministère
concerné avaient déjà commencé à
réagir à ces pratiques douteuses. Si, effectivement, il y a des
preuves concrètes que certains fonctionnaires ont fait du favoritisme...
(10 h 40)
Une voix: ...
Mme LeBlanc-Bantey: Oui. Par ailleurs, ma collègue a dit
que rien jusqu'à maintenant n'avait prouvé qu'il y avait eu de
l'illégalité. Vous allez être les premiers à
admettre que la Loi sur la fonction publique protège nos fonctionnaires
et qu'on ne peut, sur la foi de simples faits qui peuvent paraître
apparents, mais qui ne fournissent pas nécessairement de preuves
d'illégalité, congédier des fonctionnaires. S'il y a lieu
d'aller jusque-là, nul doute que ma collègue impliquée
appliquera les sanctions qui s'imposent quant aux faits qui sont
invoqués ou allégués.
Par ailleurs...
Le Président: ...madame.
Mme LeBlanc-Bantey: ...je pense qu'il serait temps, M. le
Président, qu'on cesse de discréditer l'ensemble d'un
ministère, des collègues et peut-être même l'ensemble
de la fonction publique sur quelques cas précis dans un
ministère. Le premier ministre l'a très bien dit, il y a 60 000
fonctionnaires et plus dans la fonction publique. On ne pourra jamais
éviter qu'ici et là des gens qu'on ne peut contrôler
entièrement - on ne peut pas avoir un policier pour chaque
fonctionnaire, vous le comprendrez - abusent. Je pense que c'est très
clair. On est prêt à faire face à la situation. Le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
a déjà commencé. On devrait cesser d'en parler.
M. French: Question additionnelle, M. le Président.
Le Président: M. le député, je vous signale
que votre collègue de Viger et d'autres collègues veulent poser
des questions et qu'il reste moins de 20 minutes à la période des
questions.
M. French: La dernière, M. le Président.
Le Président: La dernière question additionnelle?
Bien, M. le député.
M. French: II y a devant l'Assemblée nationale
actuellement une Loi sur la fonction publique. Le premier ministre ou la
ministre responsable de l'appareil bureaucratique en question sont-ils
satisfaits du fait qu'actuellement, à moins qu'un fonctionnaire pose un
geste susceptible de l'amener directement devant les tribunaux, tout ce qu'ils
peuvent faire, eux, devant ce que le ministre a caractérisé dans
sa lettre de situation de favoristime teinté de népotisme, c'est
de dire aux fonctionnaires responsables, des fonctionnaires seniors: Allez et
ne péchez plus? Est-ce une situation que nous pouvons accepter, alors
que tout ce qu'on est capable de faire, c'est de se trouver impuissants devant
cette situation et donner des avertissements en douce, comme cela?
Une voix: Qui cachez-vous? Mme Marois: M. le
Président...
Mme LeBlanc-Bantey: Je m'excuse. Je vais quand même
soulever une question de privilège...
Le Président: Non, madame.
Mme LeBlanc-Bantey: ...parce qu'il a fait allusion à la
Loi sur la fonction publique.
Le Président: II n'y a aucune matière à
privilège là-dessus, Mme la ministre. Je vous
réfère à ma décision d'avant-hier. Quant au fond de
la réponse, Mme la ministre de la Fonction publique...
Mme LeBlanc-Bantey: Quant au fond de ma réponse, M. le
Président, je voudrais dire qu'on a dit à plusieurs
reprises...
Des voix: Ah! Ah!
Mme LeBlanc-Bantey: Nous visons toutes les deux la même
chose, il y a une osmose de ce côté-là. Je voudrais quand
même répéter au député que nous avons
déjà dit à deux reprises, tant ma collègue que moi
comme ministre de la Fonction publique, qu'il y aurait des mesures qui seraient
prises pour éviter que ce genre de...
Une voix: Lesquelles?
Mme LeBlanc-Bantey: Des sanctions, si vous voulez, plus
précisément. Deuxièmement, nous vivons dans une
société démocratique qui donne le bénéfice
du doute à des gens qui peuvent être accusés et avant de
condamner à la peine capitale...
Le Président: À l'ordre!
Mme LeBlanc-Bantey: ...on attend d'avoir des preuves
irréfutables. Cela me semble tout à fait normal et très
sain.
Des voix: Bravo!
Le Président: Question principale, M. le
député de Viger.
M. Maciocia: M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre. On a appris cette semaine la nomination de Yves Michaud,
délégué général du Québec à
Paris...
Des voix: Bravo!
M. Yves Michaud à la présidence du
Palais des congrès
M. Maciocia: Continuez, continuez. On a appris cette semaine, M.
le Président, comme je le disais tantôt, la nomination de M. Yves
Michaud, délégué général du Québec
à Paris - apparemment à la dépense facile -à la
présidence du Palais des congrès de Montréal et ce, pour
une période de cinq ans. Ma question au premier ministre est celle-ci:
Le premier ministre peut-il nous dire sur quels critères de
compétence le gouvernement a basé son choix, si cette
décision a été prise après consultation avec les
principaux intervenants du secteur touristique de Montréal et si tous
les membres du conseil d'administration du Palais des congrès sont
d'accord avec cette nomination?
Le Président: M. le premier ministre. Une voix: II
a servi du café!
M. Lévesque (Taillon): M. Michaud, pendant les quatre ans
qu'il a passés à Paris...
Une voix: II vient de rentrer.
M. Lévesque (Taillon): ...n'a même pas eu le temps
de liquider la cave à vin que l'ancien ministre libéral, M.
Cloutier, avait bâtie à sa résidence à Paris.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Une voix: Une autre question.
M. Lévesque (Taillon): C'est franchement un des cas
où on parle de corde dans la maison du pendu. Pendant ces quatre ans -
tous ceux qui ne sont pas de petits partisans de deuxième ordre
l'admettent - M. Michaud, grâce à sa compétence et à
la diplomatie qu'il a su exercer en France, nous a aidés, comme
gouvernement du Québec, à faire une transition extrêmement
difficile. Il y a eu un changement en France après vingt ans de
gouvernement et on a dû se rajuster. Il y avait certaines
appréhensions que peut-être il serait plus difficile de maintenir
de la même façon les relations franco-québécoises.
Il a contribué énormément à rendre cette
transition, entre deux époques politiques en France, très
rentable, au sens le plus noble du mot, pour les deux sociétés
concernées.
Ce seul exemple de compétence constante suffit quand même
pour nommer quelqu'un qui, jusqu'à nouvel ordre, était membre de
la Fonction publique. Je dis "jusqu'à nouvel ordre" parce que, quand il
a accepté sa nouvelle nomination - c'est le deuxième cas en un
mois - il a renoncé aux avantages permanents de la Fonction publique
pour ne prendre qu'un contrat. Ce contrat, qui est la décision du
gouvernement de lui demander d'assurer la présidence et la direction
générale éventuelle du Palais des congrès,
correspond très exactement aux qualités que nous trouvons chez M.
Michaud.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Viger.
M. Maciocia: De la réponse du premier ministre, j'ai pu
comprendre que c'est uniquement une récompense.
Des voix: Oh!
M. Maciocia: Je crois que mes questions étaient
très précises; le premier ministre ne peut pas me reprocher de
n'avoir pas été précis.
Le Président: Votre question, M. le
député.
M. Maciocia: Je l'ai déjà posée: Est-ce que
cette décision a été prise en collaboration avec les
principaux intervenants du secteur touristique de Montréal et est-ce que
tous les membres du conseil d'administration du Palais des congrès sont
d'accord avec cette nomination? Ces deux questions n'ont pas eu de
réponse de la part du premier ministre. Est-ce que le premier ministre
pourrait répondre à ces deux questions?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): II y a eu des consultations
normales. Mon collègue, le ministre de la Main-d'Oeuvre... de
l'Industrie et du Commerce...
Des voix: Ah! Ah! Ah! Une voix: Pas encore!
Une voix: II vous manque depuis qu'il est parti!
Le Président: À l'ordre!
M. Lévesque (Taillon): II y a quelque chose qui ressemble
à de l'infantilisme, en face, aujourd'hui, mais enfin... Une fois de
plus, une fois de moins...
Les consultations normales - non pas un référendum
à l'échelle du Québec - ont été faites. Mon
collègue, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme pourra
en donner plus de détails. Je sais que cela suffisait; c'est une
décision du gouvernement et elle est amplement justifiée.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Viger.
M. Maciocia: Est-ce que l'une des raisons ou l'un des
critères qui ont amené la nomination, serait le passage de M.
Michaud comme directeur du journal Le Jour, de 1973 à 1976?
Des voix: Oh!
M. Maciocia: Est-ce que ce sont les mêmes critères
de compétence - c'est ma question - qui ont amené la nomination,
à titre de membre de la Régie des loteries et des courses du
Québec, de l'ex-député de Laprairie, Gilles Michaud, pour
une période de trois ans à 45 000 $ par année? Est-ce que
ce sont les mêmes critères de compétence qui ont
amené la nomination, à titre de membre de la Commission
municipale de Québec, et ce pour une période de dix ans, de
l'ex-députée de Vaudreuil-Soulanges, Mme Louise Cuerrier? Est-ce
que ce sont les mêmes critères qui ont amené la nomination,
à titre de membre de la Commission municipale du Québec, encore
pour une période de dix ans, de l'ex-maire de Longueuil, M. Marcel
Robidas? (10 h 50)
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): D'abord, en plus d'avoir
été l'ancien directeur du Jour, qui a été une
période héroïque pour nous et qui, n'ayant pas
réussi, dans un contexte où trois ou quatre journaux quotidiens
appuyés par des fortunes énormes avaient fait faillite, ce
journal a été liquidé honorablement après avoir
duré plus longtemps que certains de ceux qui avaient été
grassement alimentés et, curieusement, il a été
liquidé honorablement, de façon, je pense, impeccable, au moment
où, sauf erreur, le Parti libéral, pourtant bien doté,
faisait une faillite un peu moins reluisante avec son Club de réforme.
Cela me rappelle des souvenirs.
Cela dit, c'est évident que des gens ayant fait de la politique,
ayant également une compétence dans la vie, peuvent être
nommés. Je crois que l'on a été plus scrupuleux dans ces
nominations que les gouvernements qui nous ont précédés.
Je pourrais citer des noms, j'en connais quelques-uns, je pourrais en faire une
liste, mais qu'est-ce que cela donne? Est-ce qu'on reconnaît que
quelqu'un qui a été député, quelqu'un qui a pu
être ministre - en règle générale, s'il a une
compétence comme par exemple, l'ancien maire de Longueuil, M. Robidas,
également un des animateurs principaux et des fondateurs de
l'Association internationale des villes jumelées qui va d'ailleurs avoir
son congrès à Montréal bientôt - que des gens comme
ça n'ont pas de compétence? Si, dans le cas de la Commission
municipale, ils sont nommés pour dix ans, c'est à cause de la loi
qui a été fabriquée avant nous. Jusqu'à
présent, on a éliminé toutes ces nominations pour dix ans.
C'est la dernière qui reste et on espère pouvoir la nettoyer au
plus coupant aussi, mais il faudrait que la loi elle-même soit
révisée.
Tout cela me paraît être encore une fois de la bouillie pour
les chats, de la propagande purement partisane au plus bas niveau et faute
d'avoir quoi que ce soit à dire sur les sujets sérieux qui
concernent les Québécois.
Une voix: Très bien. Des voix: Bravol
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Viger.
M. Maciocia: Ma dernière question additionnelle s'adresse
toujours au premier ministre, M. le Président. Le premier ministre
peut-il, premièrement, déposer le contrat de M. Yves Michaud?
Deuxièmement, est-ce que cette nomination a été faite par
le premier ministre ou par le ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme? Si c'est le premier ministre qui a fait cette nomination, est-ce
qu'il s'est justement assuré auprès du secteur touristique de
Montréal si cette nomination était la bienvenue?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Cette nomination a
été proposée, comme c'est normal, par le ministre tuteur,
c'est-à-dire responsable du Palais des congrès, mon
collègue de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Elle a
été appuyée à l'unanimité, je dois dire. Il
n'y a pas de vote dans un Conseil des ministres, mais il n'y a pas eu de
discussion importante, parce que connaissant la personne qui était
nommée, tout le monde était d'accord. C'est le Conseil des
ministres qui a ratifié la nomination.
Pour ce qui est du contrat, je vais vérifier dans les jours qui
viennent pour voir si cela ne créerait pas un précédent
idiot, mais, à mon humble avis, il n'y a rien qui s'y oppose.
M. Pagé: Question principale. M. Maciocia: M. le
Président...
Le Président: En complémentaire encore, M. le
député de Viger.
M. Maciocia: À cause de la réponse du premier
ministre, j'ai une autre question additionnelle à lui poser. N'est-il
pas vrai, M. le premier ministre, que le 26 mai 1983, je posais une question au
ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme lui demandant s'il
était au courant d'une possibilité de la nomination de Michaud
comme président du Palais des congrès de Montréal?
M. Laplante: M. Michaud.
M. Maciocia: Le ministre m'a répondu: Vous me donnez des
informations, M. le député, que je ne possède pas et qui
circulent probablement dans le réseau du Parti libéral du
Québec.
Il a pris un engagement...
Le Président: M. le député! M. le
député'. M. le député! II n'y a pas de
préambule à une question complémentaire. Ce n'est pas une
question de dire: N'est-il pas vrai que j'ai posé une question à
telle date? C'est une façon déguisée de faire un
préambule qui n'est pas permis. Si vous voulez poser une question
précise, posez-la, mais sans préambule.
M. Maciocia: Le premier ministre est-il au courant de
l'engagement pris par son ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme
quand il a dit au mois de mai, premièrement qu'il n'était pas au
courant de cette possibilité; deuxièmement, que la
décision serait arrêtée après consultation avec les
principaux intervenants du secteur touristique de Montréal?
Le premier ministre peut-il nous dire, aujourd'hui, si ces engagements
ont été respectés?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): À propos de M. Michaud, je
ne répondrai pas à Maciocia. Je répondrai au
député en disant monsieur.
Des voix: Oh!
M. Lévesque (Taillon): Oui. Il y a un minimum de
décence qu'on doit quand même essayer de maintenir quand on parle
des gens. Pour ce qui est des consultations, je prends avis de la question et
on verra jusqu'où c'est allé quand mon collègue sera de
retour.
Le Président: Question principale, M. le
député de Gatineau.
Moratoire imposé par le ministre de
l'Éducation
M. Gratton: M. le Président, en l'absence du ministre de
l'Éducation, j'adresserai ma question au ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration.
On sait qu'en juin 1982, l'ex-président de la Commission de
surveillance de la langue française, M. Maurice Forget, accusait le
ministre de l'Éducation d'ingérence dans l'administration de la
Commission de surveillance surtout en ce qui a trait à la poursuite des
enquêtes de la commission. Hier, au réseau TVA, un porte-parole de
la
Commission de surveillance de la langue française
dévoilait qu'au début de l'été 1982, le ministre de
l'Éducation, alors responsable de l'ensemble de l'application de la loi
101, avait imposé un moratoire sur les enquêtes découlant
des contraventions aux dispositions sur l'affichage.
J'aimerais demander au ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration, premièrement, pourquoi et de quelle autorité le
ministre de l'Éducation avait imposé ce moratoire et,
deuxièmement, pourquoi le ministre des Communautés culturelles et
de l'Immigration, au printemps dernier, a décidé de lever ce
moratoire?
Le Président: M. le ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration.
M. Godin: M. le Président, je suis informé que,
dans l'interrègne entre la présence de M. Forget à la
présidence de la Commission de surveillance et la nomination du nouveau
président, il y a effectivement eu une levée des activités
de la commission dans certains secteurs, parce que M. Cholette s'était
engagé à réviser - d'ailleurs, il en fait état dans
son rapport annuel qui a été déposé ici, il y a
quelques mois. Quand j'ai été nommé responsable des
organismes qui relèvent de la charte, M. Cholette m'a posé la
question suivante: Est-ce que le moratoire est toujours en application? J'ai
dit: La loi doit s'appliquer tant qu'elle n'est pas changée. Je pense
que c'est la meilleure solution dans les circonstances.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Le laconisme du ministre en dit beaucoup plus long
que ce que sa réponse nous révèle, M. le Président.
Je ne le blâme pas d'en dire le moins possible. N'est-il pas vrai et le
ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration ne sait-il pas
que ce moratoire a été imposé et que c'est
l'ex-président de la Commission de surveillance qui disait dans une
lettre qui a été publiée dans la Presse du 17 juin 1982,
que le ministre de l'Éducation avait déposé une
procédure-cadre jugée illégale dont il exigeait la mise en
application et qui officialisait et institutionnalisait un pouvoir
d'ingérence politique dans la direction de la Commission de
surveillance, notamment, dans la conduite des enquêtes? Comment le
ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration peut-il
concilier sa décision de dire que la loi s'applique en attendant qu'elle
soit changée avec les reproches qu'il a lui-même formulés
à l'endroit de la Commission de surveillance de la langue
française, tout récemment, lui reprochant un excès de
zèle puisqu'elle avait produit une trentaine de dossiers en l'espace de
six mois et qu'il s'agissait précisément des dossiers qui avaient
été accumulés pendant la période de ce moratoire
décrété par le ministre de l'Éducation? Comment
peut-il, d'une part, reprocher à la Commission de surveillance d'avoir
fait son travail alors que c'est lui-même, au printemps dernier, qui
avait exigé qu'elle le fasse?
Le Président: M. le ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration.
M. Godin: M. le Président, je répéterai ce
que j'ai dit. J'ai eu des demandes du député de Pontiac et de Mme
la députée de Jacques-Cartier de suspendre la loi pour
l'affichage anglais dans leur région, parce que, peut-être, des
changements s'en venaient. J'ai répondu à Mme la
députée de Jacques-Cartier et à mon collègue de
Pontiac: La loi ne sera pas suspendue -d'ailleurs, un journaliste m'attendait
à la porte à la suite de cette lettre - et la loi n'est pas
modifiée, c'est-à-dire que tant que la loi n'est pas
modifiée, elle continue de s'appliquer. Je pense que c'est la pratique
normale. Ce serait bien curieux qu'un ministre, par exemple, le ministre du
Revenu, dise: Écoutez! Comme on s'en vient avec des changements dans
quelques mois, on va lever cet aspect de la loi. Ce n'est pas ma manière
de procéder, M. le Président, et je n'ai pas l'intention de
changer.
M. Gratton: M. le Président. Une voix: M. le
Président.
Le Président: Dernière question additionnelle. (11
heures)
M. Gratton: Je veux bien, M. le Président. On y reviendra
la semaine prochaine, j'imagine.
Si le ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration a
jugé qu'en attendant qu'il dépose des amendements à la loi
101 la loi devait s'appliquer, comment, lui ou le premier ministre,
explique-t-il que son prédécesseur, le ministre de
l'Éducation, alors qu'il était responsable de l'application de
cette partie de la loi 101, a décrété un moratoire qui a
été en vigueur pendant dix mois? Quelles étaient les
raisons qui ont amené le ministre de l'Éducation à dire:
N'appliquez plus la loi, alors que le ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration nous dit, lui, qu'il fallait qu'elle
s'applique?
Le Président: M. le ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration.
M. Godin: M. le Président, je vous
répète que l'information que j'ai porte sur l'existence
d'un moratoire entre les deux nominations des présidents. À
l'époque où il n'y avait pas de président, il y a eu
effectivement moratoire, mais les informations que je détiens sont que
ce moratoire n'a couvert que quelques mois d'activités de la commission
en attendant que le nouveau président soit nommé, d'une part, et
que, deuxièmement, il soumette à son ministre à
l'époque ses recommandations qui ont été suivies
totalement. D'ailleurs, je n'interviens nullement dans le travail de la
commission. Je n'ai même pas été avisé quand ces
plaintes ont été transmises à la justice, ni celle de
Sainte-Marie - je l'ai appris par les journaux - ni celles des autres. Il n'est
pas dans mon intention, non plus, d'intervenir dans quelque aspect des travaux
de la commission qui les concernent.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Question de règlement, M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, le ministre nous dit selon
ses informations. Je lui demande simplement: Pourrait-il s'engager...
Le Président: Vous savez très bien, M. le
député de Gatineau, qu'il n'y a pas là matière
à appel au règlement.
M. le premier ministre a un complément de réponse à
fournir à une question posée par le chef de l'Opposition hier, je
pense.
La cartonnerie de Jonquière
M. Lévesque (Taillon): Oui, M. le Président. Hier,
de façon tout à fait exceptionnelle, il y avait une question,
peut-être deux, sur des problèmes socio-économiques qui
intéressent vraiment les citoyens. La question, exceptionnelle, Dieu
sait - et on a vu ce matin que ce n'est pas une habitude de l'Opposition -
portait sur la cartonnerie de Jonquière, l'ex-cartonnerie de la
compagnie Abitibi Price. Je suis obligé de donner un complément
de réponse qui nous mène jusqu'à cette fin de semaine-ci.
En fait, je n'avais pas cette information hier. Ce matin, on pouvait lire ceci
dans un journal: "II n'est point bon pour un gouvernement que les citoyens
apprennent qu'une industrie qui emploie quelque 300 personnes fermera ses
portes dans quelques semaines. C'est ce qui se passe avec la cartonnerie de
Jonquière."
Je ne sais pas de quelle façon invraisemblable - j'aime mieux ne
pas l'imaginer - un journaliste a pu inventer ce genre de fermeture finale
à travers ce qu'on a pu échanger comme propos hier. Je n'ose pas
envisager les raisons d'une telle incompréhension, parce qu'il n'y avait
rien là qui disait autre chose que ceci. D'abord, il y a des discussions
sur d'autres plans que les liens entre le syndicat et l'éventuel
employeur qui est Papier Cascades. Il y a des discussions avec
Hydro-Québec, entre autres, à propos d'ajustements dans la
fourniture d'électricité, qui doivent se poursuivre. Il y a
également des discussions avec les employés que, moi aussi, j'ai
rencontrés il y a quelques semaines. Les ayant rencontrés, j'ai
gardé l'impression qu'avec une attitude raisonnable et de bonne foi de
part et d'autre on peut très bien en arriver bientôt à une
entente qui sauvera des emplois qui, il y a quelques mois, étaient
condamnés à mort, littéralement, et qui assurera le
redémarrage de l'entreprise.
Ce que je ne pouvais pas ajouter hier, parce que je n'en connaissais pas
le détail, c'est que, en fin de semaine, c'est-à-dire
précisément demain, il doit y avoir une nouvelle rencontre entre
les employés - c'est vrai qu'il y a eu un refus préliminaire des
offres de Papier Cascades ces jours derniers - et un groupe de la région
et aussi des employeurs pour voir comment on peut ajuster d'ici à la fin
décembre la décision finale qui, je l'espère, on peut y
compter, sera le maintien en activité de cette cartonnerie et de ses
quelque 300 employés.
M. Côté: La question à propos de Kruger, c'en
était une aussi.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de...
M. Côté: Comme par hasard, on répond à
celle sur Jonquière, partielle.
Le Président: M. le député de
Charlesbourg.
À l'ordre, s'il vous plaîtl À l'ordre, s'il vous
plaîtl
M. Pagé: M. le Président...
Le Président: À l'ordrel Question
complémentaire, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, très
brièvement... Un peu de calme! Un peu de calme'.
Des voix: Oh!
M. Pagé: M. le Président, on comprend que le
premier ministre nous fournit un complément de réponse sur un cas
qui préoccupe les gens de Jonquière. On retient qu'on est
à la veille des élections là-bas. Mais le premier ministre
pourrait-il aussi, parce que nous étions soucieux aussi d'un autre
problème hier, soit le problème de
l'alimentation en bois à l'usine Kruger, fournir la
réponse? Il n'y a pas d'élection partielle là-bas,
cependant. J'aimerais avoir la réponse avant le 6 décembre.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Dans le cas de la cartonnerie de
Jonquière, c'est assez normal. D'ailleurs, avec une indécence
rare, le même journaliste commence son article, ce matin - on n'a jamais
le dernier mot avec ces gens, mais dans certains cas il faut le dire quand
même - par ceci: "Quatre jours avant la tenue d'une élection
complémentaire dans une circonscription électorale comme celle de
Jonquière, il n'est point bon pour un gouvernement d'apprendre qu'une
industrie va fermer." C'est complètement faux.
Une voix: Lis le reste.
M. Lévesque (Taillon): Partant de là, ce que je
répondrai au député, en deux mots, c'est ceci: Ayant
rencontré ces employés et également d'autres intervenants
dans ce dossier, puisque, comme nos amis d'en face et comme leur chef
renouvelé, j'ai eu l'occasion de passer par Jonquière pour des
motifs évidents, j'ai été mis au courant de ce dossier et,
forcément, si on me pose des questions, j'y réponds de mon
mieux.
En ce qui concerne Kruger, le cas de la Mauricie, sauf erreur, je n'ai
pas les réponses. Aussitôt que le ministre de l'Énergie et
des Ressources reviendra, je les aurai ou il les aura; mais pour l'instant, je
ne les ai pas.
M. Chevrette: Question de directive, M. le Président.
Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
M. Chevrette: Pour ne pas poser une question de règlement
ni de privilège, je vais demander une directive. De mon siège
ici, je viens de comprendre et d'entendre de la part du journaliste assis dans
les estrades, les paroles suivantes: "Lis le reste," donnant un ordre au
premier ministre de lire le reste. Donnez-nous une directive une fois pour
toutes là-dessus, M. le Président. Vous empêchez les gens
d'applaudir dans les galeries. Si on permet à des individus de donner
des ordres à quelque parlementaire que ce soit, j'aimerais que vous
fassiez protéger les privilèges et les droits de cette Chambre,
s'il vous plaît.
Des voix: Bravo!
Une voix: C'est rendu à l'expression!
Une voix: Faut-il être faible!
Le Président: M. le député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président...
M. Chevrette: M. le Président, je vous ai posé une
question et je veux que vous y répondiez.
M. Gratton: ...sur une question de règlement.
Le Président: M. le ministre, une question de directive,
cela n'existe pas; c'est un rappel au règlement. Si vous faites une
question de privilège, évidemment, à ce moment-là,
il n'y a pas de débat, il n'y a pas de réplique de qui que ce
soit; cela s'adresse directement au président. Si vous faites un rappel
au règlement, la tradition est que l'on permette à quelqu'un de
s'exprimer de l'autre côté. M. le député de Gatineau
veut le faire, si je comprends, sur votre rappel au règlement.
M. Gratton: Sur une question de règlement,
premièrement, pour confirmer ce que vous venez de dire. Si le ministre a
senti ou perçu que quelqu'un le brimait dans ses privilèges, en
effet, il doit soulever une question de privilège, M. le
Président.
Quant à nous, M. le Président, on n'a absolument rien
entendu.
Des voix: Ah!
M. Gratton: Un instant! un instant!
Une voix: Soyez calmes.
M. Gratton: On n'a absolument rien entendu; on ne s'est pas senti
brimés. On n'a pas senti qu'un seul de nos droits ou privilèges
était brimé par quiconque, peut-être parce qu'on a moins
à se reprocher que le gouvernement, M. le Président.
M. Chevrette: M. le Président...
M. Pagé: Cela témoigne de la faiblesse et de la
peur du gouvernement.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre!
M. Gratton: II n'écoute pas les directives de son...
Le Président: C'est terminé? Merci. Leministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, puisque nous
évoquions cette semaine, encore une fois, la notion de ce qu'est une
question de privilège, aurait effectivement pu soulever une question de
privilège, puisqu'il pouvait y avoir atteinte immédiate,
sur-le-champ, aux droits et privilèges de la Chambre, si effectivement
quelqu'un qui
n'est pas un parlementaire se permet d'émettre un commentaire
à voix haute en cette Chambre. Je dois dire que, j'ai effectivement, moi
aussi, entendu des paroles en provenance de la Tribune de la presse. (11 h
10)
M. le député, je vous en prie. Il est bien évident,
ai-je besoin de le rappeler surtout aux courriéristes parlementaires qui
le savent normalement aussi bien que n'importe qui, qu'il est absolument
interdit, formellement interdit de prendre la parole dans cette Chambre, sauf
lorsqu'on est élu par la population. Comme ce n'est pas le cas,
normalement, on ne doit pas prendre la parole. Non seulement normalement, mais
en aucun cas, on ne doit prendre la parole en cette Chambre à moins d'y
être élu par la population.
M. Gratton: M. le Président, question de privilège
au nom du droit de la population à l'information.
Le Président: Invoquer un privilège de la
population en cette Chambre, je pense que vous siégez depuis assez
longtemps en cette Chambre, M. le député, pour savoir qu'il n'y a
là aucune matière à privilège.
M. Gratton: M. le Président, j'ai fait un mauvais choix de
mots. C'est une directive que je voudrais vous demander dans le même sens
que le ministre l'a fait tantôt. J'ai entendu un député, je
pense que c'est le député de Johnson, dire: Qu'on sorte les
journalistes!
M. Bertrand: Question de règlement.
Une voix: Vous avez dit: Sortez-le, tantôt.
Le Président: Vous savez très bien que, si nous
devons relever tous les propos qui ne sont pas directement attribués
à un député et enregistrés, lorsque son microphone
est ouvert, cela donnera lieu à toutes sortes de situations. On l'a vu
hier. Vous l'illustrez encore aujourd'hui. Bien. Motions non
annoncées.
Une voix: En vertu de l'article 34?
Le Président: Nous ne sommes pas encore rendus là,
M. le député. Aux motions non annoncées, M. le ministre
des Communautés culturelles et de l'Immigration.
Invitation à souscrire à la campagne de
souscription d'OXFAM
M. Godin: M. le Président, pour changer totalement de
registre, c'est au sujet de la campagne annuelle de souscription d'OXFAM
Québec. Je sollicite l'accord de cette
Chambre pour faire état de cette campagne de souscription.
Le Président: Y a-t-il consentement à la
présentation de la motion? Consentement. M. le ministre.
M. Gérald Godin
M. Godin: Chaque année, OXFAM Québec lance une
campagne de souscription dont les fruits sont utilisés pour assurer le
développement des parties du monde qui sont parmi les plus mal prises et
les plus sous-développées. Je pense que cette campagne est
l'occasion pour tous les citoyens et citoyennes du Québec de marquer
concrètement leur solidarité avec la misère du monde. Par
conséquent, je souhaite que cette Assemblée se joigne à
moi pour inciter tous les citoyens du Québec à contribuer
généreusement à cette campagne de souscription d'OXFAM
Québec qui commence ces jours-ci et qui se tient encore pour quelques
semaines. Merci.
Le Président: M. le député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Je voudrais appuyer, au nom de notre parti, la motion
du ministre au sujet de la campagne de souscription d'OXFAM. Pour nous qui
vivons dans des pays relativement riches et prospères, où nos
problèmes souvent se résument à nous demander si nous
devons nous acheter une deuxième voiture ou une deuxième maison
à la campagne, des organismes comme OXFAM, l'UNICEF, la Salvation Army,
CARE, et tous les autres qui oeuvrent dans le secteur de l'aide aux pays
sous-développés, soit pour des problèmes d'alimentation,
d'adoption ou pour stimuler des projets locaux dans les milieux
défavorisés surtout dans le tiers monde, sont essentiel pour nous
aider à prendre conscience de nous-mêmes, pour nous aider à
prendre conscience du fait que dans le monde entier plus des trois quarts de la
population mondiale est sous-alimentée, vit dans la pauvreté la
plus crasse, dans des conditions sanitaires et hygiéniques parfois
indescriptibles.
Moi, qui ai vécu une certaine partie de ma vie dans des pays
où la misère de certaines parties de la population est tout
à fait significative, je voudrais appuyer la motion du ministre pour que
nous tenions compte des organismes comme OXFAM et que nous appuyions son projet
de campagne financière actuel et dans les années à
venir.
Le Président: La motion de M. le ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Ceci nous mène
à l'enregistrement des votes reportés. Qu'on appelle les
députés afin de prendre le vote sur le projet de loi sur la
fonction publique. (11 h 15 - 11 h 23)
Mise aux voix de la deuxième lecture du projet
de loi 51
Le Président: À l'ordre! Je mets aux voix la motion
de Mme la ministre de la Fonction publique proposant que le projet de loi 51,
Loi sur la fonction publique, soit maintenant lu une deuxième fois. Que
celles et ceux qui sont favorables à cette motion veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Bertrand (Vanier), Jolivet (Laviolette), Mme Marois (La Peltrie), MM.
Bédard (Chicoutimi), Morin (Sauvé), Johnson (Anjou),
Bérubé (Matane), Landry (Laval-des-Rapides), Godin (Mercier),
Marcoux (Rimouski), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine)...
Des voix: Bravo!
Le Secrétaire adjoint: ...MM. Martel (Richelieu), Tardif
(Crémazie), Fréchette (Sherbrooke), Brassard (Lac-Saint-Jean),
Chevrette (Joliette), Rancourt (Saint-François), Proulx (Saint-Jean),
Gauthier (Roberval), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Lachapelle (Dorion),
MM. Boucher (Rivière-du-Loup), Beaumier (Nicolet), Gagnon (Champlain),
Desbiens (Dubuc), Mme Juneau (Johnson), MM. Fallu (Groulx), Bordeleau
(Abitibi-Est), Rochefort (Gouin), Marquis (Matapédia), Baril
(Arthabaska), Laplante (Bourassa), Champagne (Mille-Îles), Blais
(Terrebonne), Blouin (Rousseau), Dupré (Saint-Hyacinthe), Lachance
(Bellechasse), Gravel (Limoilou), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Lavigne
(Beauharnois), Brouillet (Chauveau), Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Paré (Shefford), Tremblay (Chambly),
Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Levesque (Bona-venture), Ciaccia
(Mont-Royal), Mailloux (Charlevoix), Marx (D'Arcy McGee), Bourbeau (Laporte),
Assad (Papineau), Maciocia (Viger), Polak (Sainte-Anne), Mme Dougherty
(Jacques-Cartier), MM. Gratton (Gatineau), Pagé (Portneuf),
Côté (Charlesbourg), Lincoln (Nelligan), Cusano (Viau), Dubois
(Huntingdon), Saintonge (Laprairie), French (Westmount), Bissonnet
(Jeanne-Mance), Dauphin (Marquette), Doyon (Louis-Hébert), Leduc
(Saint-Laurent), Maltais (Saguenay), Bisaillon (Sainte-Marie).
Le Secrétaire: Pour: 69
Contre: 0
Abstentions: 0
Le Président: J'en déduis donc que la motion est
adoptée.
Aux avis à la Chambre, M. le leader du gouvernement.
Travaux des commissions
M. Bertrand: Je fais motion, M. le Président, pour faire
siéger une commission ce matin et deux cet après-midi. D'abord,
ce matin, à la salle 91-A, de 11 h 30 à 13 heures, et cet
après-midi, de 15 heures à 18 heures, la commission du loisir, de
la chasse et de la pêche poursuivra l'étude du projet de loi 9,
Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, article par article.
Cet après-midi, de 15 heures à 18 heures, au salon rouge, se
tiendra la commission parlementaire permanente de la fonction publique pour
l'étude du projet de loi 51, article par article, de 15 heures à
18 heures.
Le Président: Votre motion inclut la motion de
déférence?
Renvoi du projet de loi 51
à la commission de la fonction publique
M. Bertrand: Oui, M. le Président, j'ai omis de faire
motion pour déférer le projet de loi 51 à cette commission
parlementaire de la fonction publique.
Le Président: Cette motion omnibus est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Des questions sur les travaux de la Chambre?
M. le député de D'Arcy McGee, je crois comprendre que vous
voulez en poser.
Recours à l'article 34
M. Marx: Le leader du gouvernement et ministre responsable de la
loi sur l'accès à l'information a dit hier, en parlant du
ministre de la Justice, et je cite: Le ministre pourrait - probablement qu'il
le fera en commission parlementaire d'ailleurs donner une longue liste
d'organismes qui se sont dits favorables au projet de loi, qui ont
exprimé leur satisfaction face au projet de loi. Il s'agit, bien
sûr, du projet de loi 36 sur les coroners.
J'aimerais demander au leader s'il sera possible au ministre de la
Justice de déposer sa liste et les interventions de ces organismes lundi
matin. Cela aiderait au bon fonctionnement des travaux de cette commission
d'avoir toute cette information avant de commencer l'étude article par
article du projet de loi.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Pour en avoir discuté avec le ministre de la
Justice, je pense qu'au moment où vous entreprendrez vos travaux en
commission parlementaire, au moment de l'étude article par article du
projet de loi, il y aura des échanges d'information - cela pourrait
être sous forme verbale aussi - du ministre de la Justice vers le
député de D'Arcy McGee et probablement du député de
D'Arcy McGee vers le ministre de la Justice. Pour le reste, je laisse à
la commission parlementaire le soin de voir comment elle organisera ses
travaux.
Le Président: Oui, M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: Pourrais-je demander au leader du gouvernement de
nous donner une indication des travaux que l'Assemblée nationale sera
appelée à entreprendre à compter de lundi prochain?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: La semaine prochaine, lundi, lorsque nous
reprendrons nos travaux à 15 heures, pour l'information de tous nos
collègues, nous allons commencer l'étude du projet de loi inscrit
au nom du ministre des Affaires culturelles, Loi sur les archives. Par la
suite, nous poursuivrons avec un autre projet de loi qui n'a pas encore
été déterminé, puisque, effectivement, sur les
archives, il n'y a pas beaucoup de porte-parole de part et d'autre; je pense
que c'est un ou deux au maximum. (11 h 30)
Mardi, par ailleurs, à la suite d'une entente intervenue hier, il
y aurait poursuite du débat sur la Loi sur le transport par taxi. Je
crois que vous avez deux intervenants de votre côté et le ministre
des Transports exercera son droit de réplique. Nous entreprendrons aussi
l'étude du projet de loi 38, inscrit au nom du ministre des Affaires
municipales. Nous aurons fort probablement aussi à entreprendre
l'étude du projet de loi 57, inscrit au nom du ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration. Comme tout cela, pour
l'instant, n'est pas nécessairement dans l'ordre, tout ce que je fais,
c'est d'indiquer au leader de l'Opposition les premiers projets de loi qui
pourraient être appelés. Il y en aura probablement un aussi au nom
du ministre du Revenu relativement à certaines lois inscrites à
son nom, pour qu'on puisse les envoyer en commission parlementaire. Lundi, nous
commencerions par la Loi sur les archives.
Prise en considération
du rapport de la commission
qui a étudié le projet de loi 37
Le Président: Ceci nous mène aux affaires du jour
et, dans un premier temps, à la prise en considération du rapport
de la commission permanente de la présidence du conseil et de la
constitution qui a étudié le projet de loi 37, Loi sur l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche. Ce
rapport est-il adopté?
M. Bertrand: Adopté.
Le Président: Adopté.
Reprise du débat sur la motion
du ministre des Finances proposant
l'adoption du complément aux politiques
budgétaires du gouvernement pour
l'année
1983-1984 et sur la motion de blâme
Nous reprenons donc le débat sur la motion de M. Parizeau
proposant que l'Assemblée approuve le complément aux politiques
budgétaires du gouvernement pour 1983 et 1984, et sur la motion de
censure suivante de M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): "Que cette
Assemblée blâme sévèrement le gouvernement qui, dans
son énoncé complémentaire au budget de 1983-1984, n'a rien
ajouté de précis ou de concret aux mesures mal définies
évoquées par le premier ministre le 13 novembre dernier, qui a
maintenu les deux tiers des taxes soi-disant temporaires en place depuis deux
ans, compromettant ainsi davantage une reprise économique
déjà incertaine et qui, par conséquent, a trompé
les attentes qu'il avait lui-même fait naître auparavant pour
tenter de justifier sa décision de retarder d'un mois la reprise des
travaux parlementaires."
Je cède la parole à M. le député de
Saint-Laurent.
M. Germain Leduc
M. Leduc (Saint-Laurent): Merci, M. le Président.
Après la fermeture du Parlement par le gouvernement pendant un mois et
sans doute pour marquer et célébrer sa réouverture, nous
avons eu droit à deux shows politiques, deux exercices de
publicité bien orchestrée, le tout, bien sûr, aux frais des
Québécois.
Nous avons eu droit d'abord au premier show, celui du premier ministre,
qui nous a déballé un véritable train de mesures qui
était, en somme, un catalogue du temps des fêtes. Un train de
mesures dont on ne connaît encore ni le coût, ni
l'échéancier, ni trop les priorités.
On nous a parlé également d'un programme de prêts
garantis de 2 000 000 000 $ aux entreprises. Nous avons appris hier que le
gouvernement était prêt à
investir environ 60 000 000 $ dans ce projet et que cette dépense
se ferait sur une période de 27 mois. On devrait normalement se poser la
question suivante: Combien d'emplois pourront créer ces mesures de
relance? Le premier ministre nous disait l'ignorer, mais, après y avoir
bien pensé, il nous a annoncé que cela pourrait - je dis bien que
cela pourrait - créer environ 100 000 emplois d'ici un an. Mais, encore
là, il nous avise qu'il n'est pas sûr.
À la suite de ce premier show, nous avons eu droit à un
deuxième show, celui du ministre des Finances, qui nous a
dévoilé un budget supplémentaire qu'on pourrait facilement
qualifier de mini-budget, je pense. Ce mini-budget nous annonce quelques
mesures et une seule mesure importante à mon sens, qui est de
réduire de 10% la surtaxe ou taxe ascenseur sur le carburant.
Je pense qu'on aurait pu le faire plus facilement et avec beaucoup moins
de tapage au moyen d'une déclaration ministérielle, pour
éviter à la population un tapage publicitaire à mon sens
absolument inapproprié.
Nous devons considérer que la taxe sur le carburant demeure
encore à 30%. Bien sûr, ces 30% contiennent les 10% de la surtaxe,
une taxe ascenseur à mon sens inacceptable, régressive, qui
frappe aussi bien les pauvres que les riches, qui est également
néfaste pour le développement économique, surtout dans nos
régions éloignées, la plupart du temps les régions
les plus défavorisées et les plus pauvres du Québec.
Également, la taxe ascenseur nuit considérablement dans le
domaine de la fabrication des produits à base de pétrole et nous
empêche d'être concurrentiels dans ce domaine. Qu'il suffise de
mentionner le cas de Pétromont, une entreprise qui doit être
financée, qui doit être subventionnée par l'État
constamment.
En Ontario, concernant la taxe sur l'essence, on constate que, pour
chaque litre d'essence, les Ontariens paient 0,07 $ alors qu'au Québec,
avant le budget supplémentaire, avant la réduction de 10%, il en
coûtait aux Québécois 0,16 $ le litre. Évidemment,
nous considérons que cette taxe est un handicap très
marqué vis-à-vis de la province de l'Ontario, la province
voisine, alors que nous devons maintenir un niveau inférieur de taxe
pour que les vendeurs d'essence dans les stations-service dans ces
régions puissent arriver à réaliser quelque profit. Ils
devront, pour être appuyés, avoir un statut particulier. C'est une
situation, à mon sens, qu'on pourrait facilement éviter en
enlevant complètement la taxe ascenseur.
Également, nous avons remarqué - les journaux en ont fait
mention - que les grands fournisseurs d'essence, de carburant, allaient
s'approvisionner en Ontario. Ils faisaient, en fait, un commerce qui
était, à mon sens, absolument inacceptable. Ils revendaient
l'essence ici en réalisant un profit supérieur. Ce qu'il
faudrait, c'est tout simplement retirer la surtaxe. Les 10% qui restent
devraient être enlevés. Pour aller chercher plus de 633 000 000 $,
on a taxé sans distinction ici aussi bien les riches que les plus
démunis du Québec. Il faut le faire, M. le Président.
On retrouve, dans ce mini-budget, une deuxième mesure qui indique
que le détenteur d'un permis de taxi aura maintenant droit à un
crédit de 500 $ par année, mais ce crédit ne sera pas
alloué avant le début de 1985. Je pense que la mesure est
valable, mais ce crédit aurait dû s'appliquer immédiatement
puisque la réduction de la taxe sur l'essence est immédiate.
Troisièmement, on diminue de 0,3% la taxe sur le capital
versé qui doit être imposée aux banques non participantes
au programme Corvée-habitation. Si on a parlé, dans ce programme,
de corvée, c'est donc dire que c'était un programme volontaire.
C'était un programme qui ne devait pas être imposé. Je
pense que c'était une taxe punitive et absolument inacceptable, et qu'il
fallait la retirer.
En plus de la réduction de la taxe ascenseur, on retient de
l'énoncé complémentaire - il faut ici le mentionner; il
n'y a pas lieu de pavoiser - d'abord, qu'avec et malgré la relance,
jusqu'à maintenant, les revenus sont en hausse de 343 000 000 $, mais
avec une contribution additionnelle du fédéral de 278 000 000 $.
Donc, nous constatons une augmentation réelle des revenus de 65 000 000
$ seulement. Quand on parle de revenus de 65 000 000 $, il s'agit de revenus
autonomes, ceux qui sont générés par des activités
économiques québécoises. À ce sujet, nous devons
faire état seulement d'un revenu additionnel de 65 000 000 $. Le reste
provient d'une augmentation des montants payés par le
fédéral, les paiements de transferts.
Nous constatons également dans ce budget qu'il y a une baisse du
revenu d'impôt de 126 000 000 $ à cause d'une assiette plus
restreinte des revenus assujettis à l'impôt 1982. C'est donc dire
que l'assiette fiscale, au Québec, a diminué durant cette
période.
Nous constatons, comme troisième mesure, que le budget
supplémentaire va injecter exactement 30 000 000 $ pour la relance du
premier ministre, soit, comme on l'a déjà mentionné, un
peu plus de 0,1% des dépenses de l'État durant l'année
fiscale 1983-1984. (11 h 40)
II y a un constat que nous devons faire. C'est que les dépenses
de publicité pour la relance ont été de 6 000 000 $, soit
exactement un cinquième des 30 000 000 $ dépensés pour la
relance ou 20 $ sur chaque
dollar affecté à cette relance. Je pense, M. le
Président, qu'il est absolument inacceptable qu'on affecte 20 $ par 100
$ dépensés aux seules fins de publicité. Je ne crois pas
qu'on puisse se permettre dans l'entreprise privée une dépense de
publicité aussi importante.
La conclusion des deux exercices, c'est que, bien sûr, la montagne
a accouché d'une mini-souris.
Les réalités. Au Québec, il y a des
réalités qui persistent, qui existent pour les
Québécois. Écoutez cela. D'abord, nous constatons qu'il
n'y a aucune diminution des taxes des particuliers et des entreprises. Cela
aurait été sûrement original de la part du parti au pouvoir
de diminuer les taxes, tant pour les particuliers que pour les entreprises.
Cela aurait été sûrement une mesure originale et il serait
temps que le parti au pouvoir y songe. Pour la relance, il aurait fallu le
faire et y penser. La taxe de vente demeure - c'est une réalité
au Québec - à 9%. L'augmentation de 1% de la taxe, qui devait
être temporaire, est devenue permanente, M. le Président. On
maintient dans ce budget les deux tiers des taxes temporaires. Avec ce
gouvernement, il n'y a rien de plus permanent que les taxes temporaires.
Demeurent également à la charge des Québécois les
50 nouvelles taxes ou hausses de taxes du PQ qui ont coûté au
Québec, à ce jour, 7 000 000 000 $ sur une période de sept
ans. Cela veut donc dire que les hausses de taxes ou les nouvelles taxes
imposées par ce gouvernement ont coûté aux
Québécois 1 000 000 000 $ par année.
Une autre constatation: malgré la relance, le déficit a
augmenté de près de 100 000 000 $, pour un déficit total
de près de 3 300 000 000 $. Le déficit de 3 000 000 000 $ est
devenu pour ce gouvernement un déficit normal, sécurisant, sain.
Autrement dit, un déficit de 3 000 000 000 $ pour ce gouvernement, c'est
un déficit zéro.
Il demeure également que nous devons emprunter, au Québec.
Les emprunts se situent à un chiffre faramineux de 2 235 000 000 $. Les
besoins avaient baissé, il faut le mentionner, à 1 745 000 000 $.
À mon sens, M. le Président, il n'existe aucune théorie au
monde qui puisse justifier qu'on dépense plus d'argent pour les services
à la population qu'on n'a de revenus.
Une autre constatation: la dette totale du Québec demeure
à plus de 20 000 000 000 $, tout près de 21 000 000 000 $. Le
service de la dette est une charge très importante pour les
Québécois. Il coûte plus de 2 000 000 000 $, soit
près de 1000 $ par famille par année. Les déficits, M. le
Président, il faut le mentionner, sont des facteurs importants dans la
fiscalité, puisque le déficit d'aujourd'hui représente les
taxes de demain. C'est une sorte de report sur l'avenir de la fiscalité.
Nos enfants auront à assumer, à payer ces déficits et cela
veut dire des taxes pour l'avenir.
On a, d'ailleurs, constaté, en tenant compte de ces
déficits, que la fiscalité était encore nettement plus
lourde et qu'elle dépassait même la fiscalité d'une
province comme Terre-Neuve par plus de 29%, si on inclut le facteur
déficit.
Au Québec, nous constatons également que chaque famille
est endettée de plus de 10 000 $. La taxe ascenseur et la taxe de vente
de 1%, supposément temporaire, ont coûté à chaque
famille 533 $ cette année.
Une autre constatation qui n'est pas tellement réjouissante: nous
avons également actuellement au Québec près de 400 000
chômeurs qui représentent au-delà de 13,6% de la population
des travailleurs. Nous constatons également qu'il y a 200 000
Québécois qui ne recherchent pas d'emploi. Nous devons
déduire que le total des chômeurs au Québec est nettement
supérieur à 13,5%.
Également, nous constatons chez nous, au Québec, que nous
avons 21% de chômage chez les jeunes. Une génération
sacrifiée, comme le mentionnait Lysiane Gagnon dans le journal La Presse
du 19 novembre 1983. Nous constatons également sur cette page qu'il y a,
à côté, une entrevue donnée par le ministre Laurin,
qui dit: "L'indépendance est plus nécessaire que jamais." Je
pense qu'il y a sûrement une relation entre l'article à gauche et
l'article à droite.
D'ailleurs, il serait peut-être intéressant - c'est un
article qui est très pertinent - de vous citer un paragraphe de
l'article de Lysiane Gagnon. Elle dit: "Passons sur le plan de relance
lui-même, cet exercice qui ne valait pas l'interruption des travaux de
l'Assemblée nationale. Les projets flous que le gouvernement offre aux
jeunes n'ont guère à voir avec une garantie sérieuse
d'avenir. Il s'agit, d'une part, de vagues promesses de stages dans l'industrie
à un moment où les ouvertures sont d'autant plus rares que les
entreprises doivent d'abord rappeler les employés qui ont
été mis à pied et il s'agit d'autre part d'emplois
"communautaires" liés à l'augmentation de l'aide sociale...
"emplois qui seront vraisemblablement éphémères et
sous-qualifiés, à l'écart du marché du travail
structuré: petits travaux manuels, plantations d'arbres... Voilà
qui ressemble fort aux anciens emplois d'été pour
étudiants, aux anciens programmes de travaux d'hiver. On ne peut pas
reprocher à un gouvernement, ajoute-t-elle, de ne pas créer des
emplois à partir de rien, c'est évident".
Sûrement, qu'il y a relation entre la génération
sacrifiée et l'indépendance plus nécessaire que
jamais.
Nous constatons également, si nous poursuivons, que nous avons au
Québec
375 000 assistés sociaux, que le nombre de personnes qui
dépendent de l'aide sociale atteint 600 000. En 1983. Nous avons
dénombré plus de 4000 faillites d'affaires au Québec, soit
près de 40% de l'ensemble du Canada, alors que nous représentons
environ 27% de la population canadienne.
Pour relancer l'économie au Québec, il va falloir faire
beaucoup de choses, mais autre chose que créer un comité sur la
relance qui se veut un exercice de publicité et surtout autre chose que
créer un comité sur l'indépendance. Autrement dit, on
crée un comité qui va défaire ce que l'autre pourrait
faire. Il va falloir faire également autre chose qu'injecter une somme
insignifiante de 30 000 000 $ dans l'économie québécoise,
alors qu'on affecte au seul titre de la publicité pour cette relance 6
000 000 $. Ce qu'il va falloir faire également, c'est créer un
climat et des conditions favorables à une véritable relance. Il
va falloir changer l'atmosphère au Québec, une atmosphère
qui est viciée par l'air péquiste. Ce qu'il va falloir faire,
c'est surtout enlever les obstacles ou les irritants, comme les appellent nos
gens de l'autre côté, qui freinent le développement
économique et empêchent la relance en ne donnant pas au ministre
des Finances une marge de manoeuvre suffisante. Il y a quelqu'un qui a dit que
personne au monde, que la conjoncture soit bonne ou mauvaise, n'est
intéressé à affronter des problèmes ou des
obstacles qui n'existent pas ailleurs. Que font les investisseurs face à
des obstacles? Ils vont ailleurs. C'est facile, d'ailleurs, à constater
quand nous voyons la faiblesse des investissements au Québec. Pour
relancer l'économie, il va falloir, d'abord et premièrement,
diminuer la fiscalité des entreprises, cette fiscalité qui
dépasse celle de l'Ontario par plus de 15%.
Une voix: Ce n'est pas vrai. (11 h 50)
M. Leduc (Saint-Laurent): Écoutez cela, M. le ministre: La
taxe sur la masse salariale est 87,7% plus lourde qu'en Ontario. Des facteurs
qui nous déclassent. Pour réussir, il faut viser l'excellence,
bien sûr, mais il faut être concurrentiel. Il est impensable que la
fiscalité soit différente de celle des autres provinces quand
nous faisons partie d'un seul pays. Tous veulent des investissements et font
des efforts inouïs pour attirer ces investisseurs. Ici, au Québec,
que faisons-nous pour attirer ces investisseurs? Nous parlons
d'indépendance.
Il va falloir également diminuer la fiscalité des
particuliers. "En 1983-1984 -c'est cité par la chambre de commerce;
peut-être que le ministre peut contester cela - si nous prenons la
fiscalité des particuliers, nous constatons qu'elle est de 14,4% plus
forte qu'en Ontario, qu'il en coûte pour chaque famille au Québec
1000 $." Bien sûr, la conséquence est que cela provoque un exode
des cadres et, donc, des sièges sociaux, que cela affecte notre position
concurrentielle, que cela provoque l'exode des cerveaux, cerveaux qui ont
coûté des efforts, qui ont coûté des sommes
énormes aux Québécois. Nous payons des taxes tous les ans
- que ce soit des taxes scolaires ou des impôts directs - pour former nos
jeunes, tant aux niveaux secondaire, collégial, qu'universitaire, et
nous perdons ces cerveaux.
On dit également qu'il est logique que les riches et les hauts
salariés paient plus de taxes et d'impôt que les gagne-petit. Je
suis parfaitement d'accord, M. le Président, mais nous
considérons qu'il y a des limites et, au-delà de ces limites,
nous devons constater qu'il y a perte de citoyens et, si ces citoyens partent,
ils partent avec leurs entreprises et leurs emplois. Nous avons
dénombré - je pense bien que c'est seulement la pointe de
l'iceberg - l'an passé, 128 entreprises qui sont parties depuis
l'arrivée du PQ, et nous parlons ici des entreprises les plus
importantes.
Autre mesure qu'il va falloir adopter, c'est de faire disparaître
la taxe ascenseur. La taxe ascenseur sur le carburant a entraîné
une augmentation de 168% des recettes de la taxe sur les carburants.
Imaginez-vous le saut, 168%; Cette taxe était, avant la réduction
de 10%, de 72,5% plus lourde qu'en Ontario. Quand notre réservoir
était plein, auparavant, on pouvait dire, avant la réduction de
la taxe, qu'on avait 60% de carburant dans notre réservoir et 40% de
taxe. Maintenant, nous allons pouvoir dire que nous avons 70% de carburant et
30% de taxe, lorsque notre réservoir sera plein.
Ce qu'il va falloir faire également, c'est faire
disparaître l'impôt sur les dons et les droits sur les successions.
Pourquoi? Parce que le Québec est la seule province qui maintienne
encore des droits sur les successions et un impôt sur les dons, autre
mesure qui nous déclasse et nous rend non concurrentiels. Il faut bien
considérer que l'impôt sur les dons et sur les successions
coûte très cher aux citoyens. Cela coûte cher de mourir au
Québec. Il faudrait sûrement en tenir compte. L'impôt sur
les dons est de 20%, alors que l'impôt sur les successions est de 20%
à 35%. On peut en rire de l'autre côté, mais les
Québécois qui ont à payer cet impôt n'en rient pas
du tout, ils ne trouvent pas cela drôle du tout. Même si le
ministre du Commerce extérieur trouve cela drôle, les
Québécois qui ont à payer l'impôt sur les dons et
l'impôt sur les successions ne trouvent pas cela drôle du tout. Je
pense qu'on devrait l'enlever. Cela rapporte - on a des chiffres - 45 000 000 $
par année, mais c'est un impôt qui, à mon
sens, coûte nettement plus cher aux Québécois. On a
évalué que l'exode des gens fortunés coûtait au
Québec entre 120 000 000 $ et 150 000 000 $.
Il y a une chose que ces gens de l'autre côté de la Chambre
doivent comprendre: c'est un impôt qui est punitif. Lorsque les riches
partent, ils emportent avec eux leurs entreprises et ils emportent
également les emplois. C'est donc dire une diminution d'emplois pour les
Québécois. C'est une chose qu'ils pourraient peut-être
retenir. Quand on dit que cette taxe frappe les riches, et qu'elle est punitive
pour eux, il n'y a pas que cela. Elle frappe également et
peut-être surtout les gens qui n'ont pas " les moyens de quitter le
Québec.
Ce qu'il va falloir faire également, c'est voter des lois
équilibrées dans le monde du travail. Nous avons reconnu les
droits des syndiqués. Je pense que c'est normal. Tout le monde est
d'accord. Il va également falloir reconnaître les droits des
employeurs. Ils ont des droits, ces gens-là. Les employeurs qui
créent des emplois, qui investissent et qui prennent des risques, je
pense qu'ils ont des droits et il va falloir les respecter. Il va falloir avoir
un préjugé favorable non seulement envers les syndiqués et
les employés - je veux bien qu'on ait un préjugé favorable
envers les syndiqués - mais aussi envers tous les
Québécois, y incluant, bien sûr, les employeurs qui
créent des emplois et qui font travailler nos Québécois.
Ce dont nous avons besoin au Québec, c'est de créateurs de
richesse et non pas des Robin des Bois qui distribuent l'argent des plus
fortunés à ceux qui en ont moins.
Il va également falloir tenir compte de la notion de profit qui
est, à mon sens, une notion importante lorsque nous vivons en
régime capitaliste. Les richesses ne se créent pas
d'elles-mêmes. Personne ne conteste cette affirmation. Il va falloir
également créer un climat, un environnement et des conditions
propices et favorables à la croissance économique et à la
création de richesse et d'emplois. Le ministre des Finances aurait
peut-être une meilleure marge de manoeuvre si on investissait moins dans
certaines sociétés d'État qui doivent être
appuyées à bout de bras par l'État. Qu'on pense ici aux
symboles qu'on veut maintenir et qu'on appuie par nos taxes. Qu'on pense ici
à Quebecair et la Société nationale de l'amiante qui
accumulent, année après année, des déficits
constituant de véritables fardeaux pour les Québécois et
qui vont continuer à accumuler des déficits. Bien sûr, nous
ne devons pas privatiser toutes les sociétés d'État. Il y
a des sociétés d'État qui ont un rôle à jouer
dans le développement économique et nous devrons les garder ou
les conserver.
Une voix: Lesquelles?
M. Leduc (Saint-Laurent): On pourrait en énumérer
plusieurs. Bien sûr qu'on pourrait parler d'Hydro-Québec et
d'autres sociétés qu'on doit maintenir, mais il y en a qui
devront disparaître, particulièrement les symboles si chers au
Parti québécois.
Un autre irritant qui devra disparaître, c'est la loi 101 qu'il va
falloir modifier. Elle doit être maintenue, mais on devra la modifier et
la clarifier dans ses abus. C'est une loi qui nuit au développement
économique tout autant, d'ailleurs, que la lourdeur fiscale qui
prévaut au Québec et tout autant que l'incertitude politique.
Tout le monde reconnaît - d'ailleurs, même la ville de
Montréal l'a reconnu - que cette loi nuit, qu'elle est néfaste
pour le développement économique au Québec. Des
modifications sérieuses devront y être apportées. Il faudra
aller plus loin que les propositions... Vous me mentionnez qu'il me reste deux
minutes, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Exactement.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...du ministre responsable de
l'application de la loi 101. Ce qu'il va falloir faire, c'est s'attaquer aux
véritables problèmes.
Je voudrais terminer en disant qu'il faut bien se rendre à
l'évidence que nous assistons à la fin d'un régime,
à la fin d'une époque, celle du Parti québécois.
Dans ce parti, on parle souvent de morosité, mais dites-vous bien,
mesdames et messieurs du gouvernement, que cette morosité n'est pas le
seul fait de vos seuls militants. Elle est endémique au Québec.
Depuis déjà trop longtemps et à cause de votre
gouvernement, tous les Québécois sont moroses. Malheureusement
pour les Québécois, les réalités de chaque jour
démentent vos promesses de la veille. À chaque sondage, à
chaque élection partielle, les Québécois et les
Québécoises vous signifient qu'ils ne sont plus d'accord, si
jamais ils l'ont été. Vous êtes majoritaires ici au
Parlement. Vous êtes minoritaires dans la population. Sept
Québécois sur dix ne veulent plus de vous. Vous avez fait,
jusqu'à maintenant, assez de dommages. Vous avez également
suffisamment hypothéqué l'avenir du Québec et, surtout,
l'avenir de nos jeunes. Vous avez sacrifié une génération
de jeunes. (12 heures)
Les Québécois ressentent, comme par une sorte d'intuition
collective et généralisée, qu'ils n'ont plus de
gouvernement, que ce gouvernement ne peut plus les représenter
légitimement. Il est temps que vous partiez. Vos politiques
néfastes pour les Québécois ont produit leurs effets.
J'estime qu'il n'y a aucune surprise dans tout ce qui est arrivé de
malheureux. La surprise la plus considérable eut été que
de mauvaises politiques aient pu engendrer de bons
résultats. Malheureusement, ceux qui ont pu espérer qu'ils
seraient un jour les bénéficiaires des politiques de ce
gouvernement - et ce sont, pour la plupart, les plus modestes de notre
société - découvrent aujourd'hui que la situation
économique au Québec ne frappe pas seulement les riches, les
privilégiés de notre société, mais par un effet de
choc, toutes les catégories sociales et surtout, plus durement, les
couches populaires et les jeunes.
Ce dont le Québec a le plus besoin, ce n'est pas d'un
comité sur l'indépendance, mais bien d'un gouvernement qui va
prendre ses responsabilités, qui va respecter le verdict du
référendum de 1980 et qui, par sa volonté d'appartenance
au Québec, va rétablir des conditions propices à
l'investissement et au développement économique du Québec.
C'est la seule recette et aucun comité ne pourra y remédier.
Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du Commerce
extérieur.
Une voix: Vas-y, donne-leur la claque! M. Bernard
Landry
M. Landry: Avant d'aborder le vif du sujet, je voudrais
simplement soumettre aux comptables, aux chefs d'entreprise, aux chefs de PME,
aux étudiants en administration qui nous écoutent un test de
crédibilité du discours du député de Saint-Laurent.
Il a affirmé, démontrant bien qu'il faisait partie du
problème et non de la solution, que les entreprises étaient plus
taxées au Québec qu'en Ontario. C'est revenu à plusieurs
reprises dans ses propos. Je ne veux pas reprendre tout le fatras de ce qu'il a
dit, mais à ceux dont j'ai parlé, qui veulent se faire une
idée du sérieux du député de Saint-Laurent, les
comptables, les chefs de PME, les étudiants en administration, pas un de
tous ceux-là, homme ou femme, ne sait pas que, pendant que l'impôt
sur les corporations est de 15% en Ontario, il est de moins de 5% au
Québec. Ce sont des chiffres facilement vérifiables.
Vérifiez ceux-là et, ensuite, faites-vous une idée de ce
que vient de dire l'intervenant précédent. Je ne m'attacherai pas
davantage à ses remarques; je pense, M. le Président, que ce
serait vous faire perdre votre temps et faire perdre le temps d'un vaste
auditoire qui veut probablement entendre parler d'autre chose dont je vais
essayer modestement de parler.
Le discours sur le budget d'automne, rappelons-le - le
député de Saint-Laurent n'était pas dans cette Chambre
auparavant, mais il devrait savoir que ce n'est pas le discours annuel sur le
budget de l'État - est un réajustement de parcours. Ce discours
sur le budget et le plan de relance qui l'a précédé de
quelques jours doivent être examinés par ceux qui recherchent
véritablement l'intérêt du Québec dans le contexte
général de son insertion, contexte d'après-crise dans le
monde occidental, contexte mondial, contexte qui dépasse le nez
collé sur la vitre et ce qui se passe cet après-midi ou demain,
mais qui vise cela et qui vise aussi ce qui concerne l'avenir des
Québécois et des Québécoises, quel est-il?
Premièrement, ce n'est un secret pour personne, le monde entier
est dans une ère de changement technologique profond et
accéléré. Depuis la deuxième guerre mondiale, on a
mis, dans tous les pays organisés, des milliers d'hommes et de femmes au
travail dans des centres de recherche. Il y a plus de chercheurs qui vont
rentrer au bureau après la période de lunch aujourd'hui qu'il y
en a eu dans toute l'histoire de l'humanité. Ce qui devait arriver
arriva: les chercheurs ont trouvé. Et ce qu'ils ont trouvé comme
technologie, comme application scientifique est en train, quotidiennement,
sûrement - même pas lentement et sûrement, mais rapidement et
sûrement - de modifier totalement nos méthodes de production, nos
méthodes de création de la richesse, même notre
façon de vivre, comme on peut l'expérimenter chaque jour.
C'est le premier grand chapitre que toute personne
intéressée à des modifications économiques
profondes doit examiner. Nous vivons maintenant dans une société
de haute technologie et rien ne sera plus comme avant.
Autrefois, les grandes entreprises étaient, et de loin, les
créatrices d'emplois. L'histoire économique du Québec de
1850 à 1970 le démontre largement, et les régions souvent
comptaient sur cela. Grand investissement égalait création
d'emplois. On retrouvait même cela dans les chansons des poètes,
dans une chanson de Gilles Vigneault en particulier: "II va y avoir un moulin
au lac d'en Haut, ça fera de la gâgne." C'étaient les
grandes entreprises, c'étaient souvent les multinationales qui
créaient l'emploi. Aujourd'hui, des statistiques américaines
démontrent que les 1000 plus grandes entreprises des États-Unis
d'Amérique - et en fait de grandes entreprises ce peuple s'y
connaît - ne créent plus que 10% des nouveaux emplois qui
apparaissent dans l'économie.
Autrefois un investissement de 1 500 000 000 $ créait des
dizaines et des dizaines de milliers d'emplois. À chaque coup
c'était une recette sûre. Aujourd'hui, des investissements de
milliards de dollars dans la modernisation, dans le rééquipement,
assurent une stabilité de l'emploi et, des fois, une
légère diminution. Cela nous force
à réviser complètement les conceptions que nous
avions du développement économique et de l'action de
l'État.
C'est la raison pour laquelle ce budget et le plan de relance, dont nous
sommes déjà en train de vivre les effets, sont marqués de
deux signes majeurs. Premièrement, le pragmatisme. Ni le budget ni le
plan de relance ne découlent d'une théorie, d'un système
sectaire de pensée. Ils découlent du désir du gouvernement
du Québec - gouvernement provincial et tout gouvernement provincial
qu'il soit - d'adapter son action aux réalités et non pas
à des théories.
C'est également un exercice progressiste. Nous ne reviendrons pas
à l'époque de la lampe à pétrole. Quand on a fait
part de préjugés favorables aux travailleurs, par exemple, cela
signifie qu'une société moderne ne peut pas rêver du
libéralisme sauvage qu'on a connu dans le passé pour faire le
bonheur des populations et ne peut pas compter là-dessus non plus comme
facteur de développement économique. Pragmatisme, oui, mais
progressisme résolu, c'est-à-dire un gouvernement qui travaille
pour les intérêts du plus grand nombre, qui travaille pour la
majorité, qui est soucieux de développement économique
autant que de la répartition de ce développement
économique.
C'est pour cette raison que, ne travaillant pas à courte vue et
en panique, le gouvernement, un des premiers au Canada et peut-être un
des premiers dans le monde occidental, a reconnu la nécessité de
faire un effort sans précédent pour que notre économie
prenne le virage technologique. Avant même la crise économique qui
nous a frappés, qui est un accident de parcours majeur - je ne veux pas
le minimiser - le gouvernement avait réfléchi, avait
convoqué tous les intervenants dans une concertation sans
précédent et avait décidé de prendre le virage
technologique. Ce ne sont pas des promesses pour demain matin, ce n'est pas du
court terme, ce n'est pas du superficiel, c'est la vision que nous devons avoir
de changements à moyen et à long terme de notre
société, qui seront les seuls à pouvoir faire notre
prospérité.
Un autre changement majeur s'est produit dans l'environnement
économique mondial: c'est celui qui touche le commerce international. Il
n'y a plus de telle chose pour nos entreprises que le marché du
Québec, par exemple, pour lequel on s'était habitué
à travailler pendant des années. Il n'y a même plus de
telle chose que le marché du Canada. Une entreprise
québécoise, aujourd'hui, une entreprise moderne, travaille pour
toute la demande solvable où qu'elle se trouve dans le monde. Nos
produits sont désirés par des gens qui sont capables de les
payer. Voilà notre stratégie de marketing et voilà
où doivent porter les efforts. Cela non plus n'est pas une mesure de
court terme. Ce n'est pas une mesure superficielle. C'est un virage majeur qui,
ajouté au virage technologique, fait que rien n'est plus comme avant.
(12 h 10)
On a beau essayer de proposer des solutions simplistes, elles ne sont
jamais sincères. Il n'y en a pas de solutions simplistes. Je vais donner
un exemple pour ceux d'entre nous qui sont moins familiers avec les choses
économiques. C'est un exemple d'actualité brûlante. Hier
soir, le club des Canadiens de Montréal a été
défait par les Nordiques. Les Nordiques ont bien travaillé et les
Canadiens ont également bien travaillé. Je veux en venir à
cette possibilité, à cette nécessité de concevoir
des stratégies à long terme. M. Serge Savard, une des grandes
vedettes du sport québécois, a accepté la
responsabilité de prendre en main le club des Canadiens. Il n'a pas dit
- là, il s'est comporté comme un stratège
économique: Demain matin, on va gagner toutes les parties et on va
redevenir les superglorieux; cela va prendre deux semaines, ôtez-vous, on
s'en vient. Il a été réaliste. Il a dit: Nous allons
reconstruire cette équipe et vous pourrez me demander des
résultats à court terme. Je veux bien que les Canadiens gagnent
toutes les parties, mais je vous dis d'avance que la gloire n'est pas pour
demain matin. S'il avait dit le contraire, il aurait perdu toute
crédibilité athlétique, il aurait trompé la
population.
Pour un gouvernement un peu conscient des réalités
économiques, l'approche intellectuelle, quoique encore plus complexe -je
n'en disconviens pas - est la même. Le gouvernement du Québec a
décidé de prendre le virage technologique. Le gouvernement du
Québec a décidé de faire du commerce extérieur une
de ses priorités sans jamais dire à quiconque que cela va
être un jardin de roses le lendemain matin. C'est simplement
empêcher que la situation ne se détériore. C'est simplement
préparer l'avenir.
En pratique, qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie, par exemple,
qu'au Québec, actuellement, sont en train de naître plus de
centres de recherche que nous n'en avons jamais eu et plus de centres de
recherche qu'il y en a au Canada. Le Québec a été
lourdement pénalisé par la politique fédérale de la
recherche, et les fédéraux l'ont reconnu - je dois le dire
honnêtement - et essaient de compenser, mais ils dépensent encore
environ 14% du budget, alors qu'on représente 25% de la population du
Canada, ce qui constitue une hémorragie perpétuelle et constante
que le gouvernement du Québec, avec les moyens d'une province qui ne
sont pas les moyens d'un État souverain, a décidé de
colmater. Nous voyons donc naître sous nos yeux, de jour en jour, dans
toutes les régions du Québec, des centres de recherche
qui vont faire que des hommes et des femmes vont se mettre à
l'oeuvre sur des problématiques qui peuvent être celles de la
chimie, de l'électrochimie ou des biotechnologies, de façon
à aménager l'avenir.
Il doit y avoir des jeunes assistés sociaux qui m'écoutent
actuellement et qui disent: Oui, c'est beau, mais pour moi? On en rencontre
dans nos bureaux de comté et on en rencontre dans nos activités
d'hommes et de femmes politiques. Ce n'est pas facile de répondre
à cette question. Ce n'est pas facile de répondre à un
jeune assisté social, qui, souvent, par définition, et à
bon droit, est un peu révolté que la société le
laisse pour compte, que la société n'ait pas
aménagé pour lui une place dans l'appareil productif... Comme je
l'ai fait dans le comté de Mégantic-Compton où je suis
allé faire campagne il y a quelques jours, il faut essayer de discuter
tranquillement et rationnellement avec ces jeunes, qui, souvent, sont au bord
du désespoir parce que frappés par des changements qui les
dépassent et qui nous dépassent, et leur dire que l'avenir ne
sera meilleur qu'à la condition d'avoir des stratégies à
long terme et que l'avenir ne sera meilleur que si on consent aujourd'hui,
patiemment et industrieusement, à demander à des hommes et
à des femmes de travailler dans des centres de recherche pour faire en
sorte que de nouveaux produits plus concurrentiels, meilleurs, plus comparables
à ceux des Japonais, à ceux des Allemands de l'Ouest ou à
ceux des Français soient fabriqués dans notre économie et
qu'à ce moment il y ait de la place pour intégrer, dans
l'appareil de production, tous les fils et toutes les filles du Québec
qui, aujourd'hui, sont victimes d'une crise mondiale.
Souvent, les accents catastrophiques qu'on entend de l'autre
côté de la Chambre sont démentis par nos conversations avec
la population. La population sait, à l'exception d'un partisan aveugle,
ou de quelqu'un qui n'a jamais lu les journaux ou écouté la
télévision, que cette situation, qui s'incarne au Québec
d'aujourd'hui, et souvent péniblement, est mondiale. Par exemple, dans
le cadre de mes fonctions, je suis allé à Chicago il n'y a pas
longtemps pour apprendre du gouverneur de l'État qu'il y avait plus de
chômage dans son État, proportionnellement, qu'à
Chicoutimi, par exemple. Dans une des grandes villes de la planète, une
des villes vedettes, une ville de science, une ville d'universités, une
ville de technologie, il y a plus de chômage qu'à Chicoutimi.
Quand on entend des hurlements pour essayer de québéciser
un phénomène de taille beaucoup plus vaste, quand on a un tant
soit peu une connaissance de l'économie sans être
économiste - encore une fois, on n'a qu'à lire les journaux - on
voit bien que cela ne tient pas debout.
Il y a donc une stratégie à long terme dans la recherche,
une stratégie à long terme dans les richesses naturelles. On a
parlé de plantation d'arbres. Ils ont fait des gorges chaudes, en face.
Il y en a même un qui a dit que les arbres ne poussaient pas l'hiver, ce
qui doit être relativement vrai d'ailleurs, ce qui ne rend pas sa phrase
intelligente pour cela, surtout lorsqu'il critique le plan de reboisement.
S'il y avait eu un plan de reboisement au Québec sous
Louis-Alexandre Taschereau, par exemple, je ne sais pas qui aurait fait des
gorges chaudes, mais, aujourd'hui, on ne craindrait pas la rupture des stocks
dans un certain nombre d'essences de feuillus pour lesquels la situation est
devenue désespérée. Dans Mégantic-Compton, l'une
des deux entreprises du Québec de déroulage de bois de merisier,
les Industries Mégantic, a d'énormes problèmes
d'approvisionnement. Pourquoi? D'abord, parce que 90% des merisiers de la
planète, imaginez-vous, poussent au Québec et sont encore au
Québec. Il n'y en a plus nulle part ailleurs. Cela prend 125 ans pour
faire une bille de déroulage de merisier. Ce serait absurde de faire des
gorges chaudes sur un plan de reboisement dans les conifères, parce que
c'est encore sauvage. Le Québec a conservé ses conifères.
La nature y a vu; beaucoup de choses y ont vu. Nous sommes encore capables de
sortir 12 000 000 ou 15 000 000 de cunits de bois par année sans risquer
la rupture de stocks, mais il faut se préparer pour l'avenir. C'est pour
cela qu'on va planter 300 000 000 d'arbres. Cela va faire travailler des gens
aujourd'hui.
Là, je rejoins mon jeune assisté social un peu
désespéré avec qui il était difficile de raisonner
à long terme. Sur la question de la reforestation, je peux raisonner
avec lui à long terme et à court terme. Je peux lui dire qu'il
faudra des gens habiles pour planter ces arbres. Comme on prend des
méthodes plus écologiques et plus douces, cela va prendre plus de
gens qu'autrefois avec des méthodes plus mécanisées, mais
plus brutales. Il y a donc du travail pour aujourd'hui, mais quelle que soit la
détresse d'un individu, il doit aussi penser à l'avenir de sa
collectivité; il doit penser aux générations futures. Il
ne peut pas, même si on comprend qu'il ne le fasse pas, dire: Je suis une
île. Je veux "une job" demain matin, job! job! job! et je ne veux rien
savoir sous aucune espèce d'autre considération. Notre
société entière, les hommes et les femmes qui la composent
doivent tenter d'avoir une vue plus globale du problème, et nous sommes
bien placés, avec ceux qui veulent faire ce petit effort, pour faire
naître, ici, un immense espoir dont nous avons eu un avant-goût
avant la crise économique.
Entre 1976 et 1981, alors que nous marchions vers un
référendum sur la souveraineté-association, alors que la
loi 101 venait d'être adoptée, le Québec a eu une
croissance économique double de celle de la puissante province voisine
de l'Ontario. Cela veut dire que toutes ces sottises d'importance secondaire
qu'on entend sur la loi 101 et le développement économique, la
poursuite de la souveraineté nationale et le développement
économique ont été formellement démenties par ce
qui s'est passé entre 1976 et 1981 alors que le Québec a eu une
croissance économique double de celle de l'Ontario. Je ne dis pas cela
tellement pour contredire l'adversaire que pour permettre à ceux qui
cherchent des raisons d'espoir d'en trouver. Si nous avons pu faire cela avant
la crise, il y a des raisons profondes.
Au nombre de ces raisons, évidemment, il y a les richesses
naturelles. Les Québécois et les Québécoises sont
bien familiers avec cette notion de la grande richesse de notre territoire.
Qu'il s'agisse des arbres dont on a parlé ou de la formidable
hydroélectricité, tout le monde à peu près est au
courant de cela, mais je veux surtout parler des ressources humaines du nouveau
Québec d'aujourd'hui. (12 h 20)
II y a eu des investissements majeurs faits dans les années
soixante fortement critiqués, également, par certains esprits
à courte vue qui disaient: Qu'est-ce que c'est que dépenser tout
cet argent dans l'éducation? Aujourd'hui, nous récoltons les
dividendes de cela. Une des raisons de notre croissance économique de
1976 à 1981 et une des raisons qui font qu'aujourd'hui le Québec
reprend le peloton de tête au Canada pour la rapidité de la
croissance, c'est précisément parce qu'à long terme, de
façon sage, nous avons investi dans les ressources humaines.
Aujourd'hui, de nos écoles secondaires, de nos cégeps, de nos
universités sortent en abondance des hommes et des femmes formés
aux techniques les plus modernes, aux techniques les plus exigeantes et, en
plus -c'est un phénomène dont je peux témoigner parce que
cela fait sept ans maintenant que je vis pratiquement quotidiennement avec des
gens d'affaires - une classe d'entrepreneurship extrêmement
motivée, extrêmement dynamique, extrêmement
crédible.
C'est un problème qui est derrière nous. Vous savez que
pendant des années on a dit: Ce qui nous manque, ce sont des
entrepreneurs. C'était un lieu commun. Tout le monde disait cela. Raison
d'espoir extraordinaire, ce n'est plus vrai. L'entrepreneurship
québécois d'aujourd'hui -et tout le monde peut le vérifier
dans son village, dans sa ville, partout - est devenu un entrepreneurship
dynamique, probablement parmi les plus dynamiques du continent.
Singulièrement plus entreprenant que l'entrepreneurship ontarien parce
que l'Ontario, vous le savez, a une économie beaucoup plus
dominée qu'au Québec. L'essentiel de l'appareil industriel de
l'Ontario tourne autour de l'automobile. Or, il n'y a pas une seule compagnie
ontarienne de l'automobile. Ce sont des filiales de compagnies
américaines, de grands géants multinationaux agissant en Ontario,
mais les décideurs ultimes, les entrepreneurs ne sont pas en Ontario. Au
Québec, notre économie s'est développée
différemment. Cela lui a donné des faiblesses. Pendant la crise,
les PME ont passé un mauvais quart d'heure parce que justement elles
n'étaient pas assises sur les fortunes des grandes entreprises
géantes comme il s'en trouve en Ontario. Cependant, il y a eu un
avantage dont nous réalisons l'importance aujourd'hui. Les autres ne
nous ayant pas développés comme ils ont développé
l'Ontario, nous avons appris à nous développer nous-mêmes.
C'est la raison pour laquelle on a une floraison fantastique de PME.
Cela m'amène à parler d'une mesure qui est contenue dans
le plan de relance, qui va être déterminante pour les PME.
D'abord, durant la crise, le premier plan Biron a empêché des
dizaines et des dizaines de milliers d'emplois de disparaître.
C'était une mesure défensive. Mais, maintenant que le
Québec s'en va vers une croissance économique plus
accélérée que partout au Canada, nous pouvons reprendre
l'offensive. L'heure n'est plus aux mesures défensives. L'heure est de
nouveau à l'expansion. Autre raison d'espoir pour ceux qui se sentent
laissés pour compte par le développement économique. De
nouveau l'heure de l'expansion, donc, de nouveau l'heure de l'emploi, l'heure
de l'embauche, l'heure de la réinsertion dans l'appareil productif. Ce
plan va permettre à nos PME du Québec, dont le principal
problème est la sous-capitalisation... Ce n'est pas du chinois, je
m'explique un peu. C'est parce que, comme nous n'avions pas de tradition
industrielle, comme nous avions été plutôt sur le plan
économique dominés et peu impliqués dans le
développement, nous avons dû souvent lancer des entreprises avec
rien.
Plusieurs chefs d'entreprise aujourd'hui prospères me disent:
Moi, quand j'ai lancé cela, je n'avais pas 0,50 $ pour m'acheter la
Presse. Quand vous n'avez pas 0,50 $ pour vous acheter la Presse, vous
êtes, si on peut dire, sous-capitalisé. Quand on est
sous-capitalisé, on est obligé d'aller emprunter à la
banque. On est obligé, surtout en période de crise, de payer des
taux d'intérêt faramineux. Donc, les entreprises
québécoises sont sous-capitalisées et, même quand
elles ont les commandes, quand elles ont le produit, même quand elles ont
le marché
d'exportation, quand le temps vient d'agrandir l'usine, le temps vient
d'acheter des machineries supplémentaires, elles ne sont pas en position
pour le faire parce que la banque dit: Avez-vous des garanties? Alors,
là, il y a des milliers de chefs d'entreprise, des hommes et des femmes
qui, quand la banque va dire: Avez-vous des garanties? vont répondre:
Oui, j'ai des garanties parce que, dans le plan de relance du gouvernement, on
me donne pour globablement jusqu'à 2 000 000 000 $ de garanties;
c'est-à-dire que 2 000 000 000 $ d'épargnes aujourd'hui dans les
institutions financières vont, à cause de cette seule mesure du
plan de relance, aller se transformer en machinerie, en immeuble, en
équipement, en fonds de roulement, et vont permettre, à tel
entrepreneur du Saguenay-Lac-Saint-Jean ou à tel autre de la
Gaspésie ou à tel autre de l'île de Laval de faire une
expansion qui va non seulement demander de la main-d'oeuvre, mais qui va
sécréter dans toute sa communauté une
prospérité économique qui ne sera pas le fruit du hasard
ou qui ne sera pas le fruit de mesures artificielles, mais qui sera simplement
le fruit de l'effort prodigieux que fait le gouvernement pour ajouter à
l'effort prodigieux que font déjà les petites et les moyennes
entreprises du Québec.
M. le Président, je vais donner une dernière raison
d'espoir qui est une synthèse des deux autres, si je puis dire. Des
richesses naturelles, nous en avons à profusion. Il y a un récent
rapport qui démontre, par exemple, qu'Hydro-Québec a plus de
réserves énergétiques qu'une des plus grandes
multinationales de l'énergie américaine, Exxon. Inutile que je
fasse d'autres démonstrations, tout le monde le sait. Nous avons des
ressources humaines - je l'ai dit - et, dans ces ressources humaines, des
entrepreneurs. Ce qui veut dire que cette partie de notre histoire où
nous avons vu l'emploi créé par un moulin au lac d'en Haut -
c'est-à-dire les richesses naturelles -peut se continuer, les richesses
naturelles sont toujours là.
Nous venons d'entrer dans une autre phase où notre
prospérité sera faite par notre intelligence, par notre
détermination, par notre audace, par notre enthousiasme à aller
prospecter les marchés étrangers, comme le font actuellement les
PME du Québec comme jamais dans l'histoire du Québec. Les
exportations du Canada, au dernier trimestre, ont monté d'à peu
près 3%, celles du Québec d'à peu près 9%; trois
fois plus vite. Voyez-vous les dividendes de notre investissement dans les
ressources humaines? Voyez-vous le formidable mélange d'une
économie maintenant basée sur l'intelligence, la
productivité, la créativité et l'audace et qui a encore sa
réserve de richesses naturelles? Quand on sait ce que des concurrents au
succès prodigieux ont fait sans richesses naturelles, imaginez-vous ce
que nous allons pouvoir faire en combinant les richesses humaines et les
richesses que la terre nous apporte, que la généreuse terre du
Québec nous a toujours apportées.
Donc il y a là, même pour ceux qui se sont sentis
laissés pour compte - on n'est pas pour faire deux sortes de
sociétés, une prospère et une qui vit dans la
marginalité; on n'est pas pour faire un quart-monde au Québec,
c'est-à-dire des gens qui vivent en pauvres dans des
sociétés riches - même pour ceux qui ont l'angoisse
d'être dans cette catégorie, qui ne doit pas exister, je pense
qu'il y a là de solides raisons d'espoir. À la condition
cependant - parce qu'il y a des choses qu'un gouvernement peut faire et il y a
des choses qu'il ne peut pas faire -que cet effort de relance soit
interprété par les Québécois et les
Québécoises comme un appel au dépassement. Que les chefs
d'entreprises, que les travailleurs, dans cette nouvelle période qui
commence, prennent l'appui du gouvernement, mais se souviennent quand
même qu'une économie solide trouve toujours son appui, non pas
dans l'État, mais dans les hommes et les femmes qui y vivent.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bourbeau: M. le Président.
M. Bisaillon: M. le Président... Sainte-Marie, est-ce que
cela existe dans votre langage, M. le député de...
M. Bourbeau: M. le Président, j'avais compris que
c'était le député de Laporte qui devait prendre la parole
à ce moment-ci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Marie s'est levé avant vous et il m'a
même mentionné par le nom "M. le Président", et j'ai
reconnu le député... S'il vous plaît; M. le
député de Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: M. le Président, je vais permettre au
député de Laprairie de s'asseoir ou de nous quitter, un des
deux...
Le Vice-Président (M. Rancourt): De Laporte.
M. Bisaillon: De Laporte. ...en lui soulignant que son attitude
est pour le moins curieuse. Il devrait savoir comment cela fonctionne dans
cette Chambre et au moins accepter de façon plus élégante
que les gens puissent prendre la parole. Quant à moi, je l'écoute
toujours avec attention quand il prend la parole. Je me serais attendu qu'il
fasse de même lorsque c'était mon tour.
(12 h 30)
Dans mon intervention portant sur le discours sur le budget
supplémentaire, je voudrais souligner qu'on ne peut pas faire l'analyse
de ce budget supplémentaire -déposé devant cette Chambre
par le ministre des Finances le 15 novembre dernier - sans le mettre en
parallèle avec l'opération publicitaire qui l'avait
précédé, c'est-à-dire le message inaugural hors
Parlement que nous avait livré le premier ministre, le 13 novembre
dernier. En effet, au moment où le premier ministre a mis de l'avant un
certain nombre de propositions faisant suite aux travaux d'un comité -
on se rappellera que ce comité avait siégé parce que les
travaux de la Chambre avaient été interrompus au moment où
le premier ministre a annoncé un certain nombre de mesures - il nous
avait indiqué qu'on trouverait les détails et les budgets,
forcément - c'est ce que tout le monde avait compris - dans le discours
sur le budget qui devait suivre deux jours plus tard. Or, que retrouve-t-on
dans le budget déposé par le ministre des Finances qui correspond
au plan de relance annoncé par le premier ministre? Comme une
activité suivait l'autre, on devrait s'attendre normalement à
trouver un ensemble de mesures budgétaires appuyant le plan de relance
proposé par le premier ministre.
Évidemment, on ne peut pas dire qu'il n'y a pas de bonnes choses
présentées dans ce budget. On ne peut pas dire non plus que cela
couvre l'ensemble de ce que M. le premier ministre avait annoncé le
dimanche précédent. Par exemple, en termes d'emplois - et j'y
reviendrai plus tard - tout ce qui apparaît dans ce budget
supplémentaire, c'est une somme de 30 000 000 $ qui devrait normalement
être affectée à ce virage nouveau, complet et
intégral que nous avait annoncé le premier ministre deux jours
plus tôt. On admettra facilement, M. le Président, que, par
rapport à l'annonce qui nous avait été faite, le montant
qu'on retrouve dans le budget à cet égard ne correspond pas du
tout à l'ampleur du programme annoncé. Il y a aussi un certain
nombre de questions qu'on pourrait se poser sur des absences qu'on retrouve
dans le budget par rapport à la fois à un plan de relance, mais
par rapport aussi à des besoins criants de la population.
Dans le fond, quand on le regarde, on doit se rendre compte qu'il y en a
beaucoup plus pour les hauts salariés et pour les entreprises qu'il y en
a pour les personnes démunies, pour les plus bas salariés de la
société, pour ceux à qui, finalement, on avait promis des
choses. Je voudrais cependant souligner un certain nombre d'aspects,
premièrement, la question du régime d'épargne-actions.
Dans le budget d'avril dernier, le ministre des Finances avait mis sur pied un
régime d'épargne-actions qui visait, d'une part, à inciter
les hauts salariés à investir dans des entreprises
québécoises, mais, au-delà de ces investissements dans des
entreprises québécoises, à bénéficier
d'avantages fiscaux que ces placements entraîneraient. Le régime
d'épargne-actions a donné des résultats à un point
tel qu'en cours de route, le ministre des Finances a dû l'ajuster et
développer ce qu'on appelle la section des corporations en voie de
développement. On sait que, dans le plan de régime
d'épargne-actions, un certain nombre d'entreprises permettaient des
évasions fiscales, des abris fiscaux ou des réductions sur
l'impôt sur le revenu de l'ordre de 100%, c'est-à-dire que si
j'investis 5000 $, j'ai une déduction d'impôt sur le revenu de
5000 $, alors que, dans le plan des corporations en voie de
développement, ce qui avait été prévu par le
budget, c'était un avantage de l'ordre de 150%. Si j'investis 5000 $,
j'aurai une possibilité de déduire sur mes revenus 150%,
c'est-à-dire 7500 $ de mon revenu.
C'était donc un plan intéressant, sauf que, dans le cas
des corporations en voie de développement, même si cela existait
dans le budget, c'était, à toutes fins utiles, inutilisable. J'ai
pu le vérifier en me rendant, juste avant que ce budget soit
dévoilé, au salon de l'épargne et du placement qui avait
lieu à Québec, il n'y a pas longtemps, et où les courtiers
n'avaient à offrir à la clientèle intéressée
que deux titres de companies, deux compagnies seulement dans lesquelles on
pouvait investir en vertu du Régime d'épargne-actions. Dans ce
sens, et sûrement pour faciliter l'accès à cette partie du
programme, le ministre des Finances nous annonce des modifications aux
critères qui visent à permettre à des corporations en voie
de développement d'être intégrées au Régime
d'épargne-actions. On annonce, par exemple, qu'au lieu d'avoir un actif
de 2 000 000 $ à 25 000 000 $, les actifs pourront être
diminués de l'ordre de 750 000 $, je pense. C'est donc un régime
nouveau, modifié, qui peut être intéressant et qui peut
stimuler l'économie du Québec. Par ailleurs, admettons que c'est
un régime qui va favoriser ceux qui ont des revenus
élevés. Ce sont encore les personnes à revenu
élevé qui pourront profiter de ce régime et, parce qu'ils
en profitent, ils bénéficieront par le fait même d'une
réduction d'impôt à laquelle les plus démunis de la
société n'auront pas accès.
À cet égard, je voudrais vous rappeler - vous vous en
souvenez sûrement - que le 1er décembre 1982, pendant cette longue
période de négociations que le gouvernement a entreprise avec ses
travailleurs de la fonction publique et du secteur parapublic... On trouvera
peut-être que je reviens souvent sur ces négociations d'il y a un
an et demi, mais le gouvernement nous avait tellement promis pendant ces
négociations que je ne
peux m'empêcher de rappeler aujourd'hui que la plupart des
discours qui se tenaient à l'époque ne sont pas respectés
aujourd'hui. Les 540 000 000 $ qu'on disait aller chercher dans la poche des
travailleurs des secteurs public et parapublic, ces 540 000 000 $ qu'on devait
redonner à l'ensemble des assistés sociaux et des chômeurs,
on n'en a pas encore vu la couleur.
Or, le 1er décembre 1982, dans une lettre que j'adressais au
premier ministre, M. René Lévesque, je proposais une façon
à la fois de régler la question des négociations dans son
aspect salarial et de créer de l'investissement et de l'injection de
capital dans l'économie québécoise. Je lui proposais
finalement ce que j'appelais à l'époque les bons
d'investissements. Je disais: Au lieu de couper les salaires des
employés des secteurs public et parapublic, et par le fait même de
perdre les impôts que ces salaires vont générer, au lieu
d'avoir un plus en partant amputé d'impôts non perçus,
qu'on paie ces salaires sous forme de bons d'investissement,
c'est-à-dire que la récupération de salaire ne se ferait
pas, mais ce que les employés recevraient serait des bons
d'investissement, c'est-à-dire des actions dans des compagnies, dans de
petites et moyennes entreprises du Québec.
Cela aurait eu comme effet d'injecter d'un coup 540 000 000 $ dans
l'économie du Québec. Cela aurait eu aussi comme effet, à
l'époque, de ne pas mécontenter les travailleurs puisque, s'ils
n'avaient pas d'argent comptant, ils avaient au moins en poche un bon
d'investissement, une action de compagnie qui pouvait, à un moment
donné, être échangeable. Ce projet, que j'avais soumis
pendant les négociations au premier ministre, il l'a traité comme
il a traité quelques autres projets que j'ai déposés en
cette Chambre - j'aurai l'occasion de revenir tantôt sur un autre projet
dont j'ai parlé en cette Chambre. Ce projet a été
traité de la même façon, c'est-à-dire mis de
côté de façon cavalière. Pourtant, quelques mois
plus tard, dans le discours sur le budget, on retrouvait le Régime
d'épargne-actions.
J'invite les personnes intéressées à comparer la
proposition que je faisais au premier ministre en décembre 1982 et le
Régime d'épargne-actions que le ministre des Finances a mis sur
pied par la suite et qu'il modifie par le budget actuel. Je les invite à
les comparer: c'est le même type de fonctionnement. La différence
est que dans ce cas-ci on n'a pas eu une injection globale de 540 000 000 $,
alors que dans ce cas-là on aurait pu l'avoir d'un coup. En plus, on
aurait eu un climat social amélioré et sûrement que le
gouvernement, non seulement n'aurait pas mécontenté une bonne
partie de la population, mais aurait pu aussi conserver une partie de sa
clientèle traditionnelle. (12 h 40)
C'est un exemple de projets qui viennent du côté
gouvernemental et qui ne sont pas suffisamment étoffés pour se
rendre au bout. C'est aussi un modèle du type d'administration du
gouvernement qui refuse, de façon systématique, tous les
commentaires, toutes les suggestions, toutes les propositions qui peuvent lui
venir de l'extérieur. C'est de l'autosuffisance poussée à
l'extrême quand cela n'est pas de la fatuité.
Dans sa réplique au député de Vaudreuil-Soulanges,
le ministre des Finances a dit - je vais retrouver la citation exacte -Dans
l'esprit du ministre Parizeau, il ne fait aucun doute que les propositions du
député de Vaudreuil-Soulanges ne sont rien d'autre que du
cosmétique. On admettra, M. le Président, qu'en
cosmétique, le ministre des Finances s'y connaît très
bien.
Quand on examine, par exemple, la question des 2 000 000 000 $ qu'on
promet aux entreprises du Québec en termes d'assistance ou de garanties
d'emprunt, le ministre des Finances a déclaré, lors de la
même intervention d'ailleurs, que ces 2 000 000 000 $ ne coûtaient
rien. Je reprends ses paroles: "C'est presque zéro - je ne ferai pas les
gestes; il a dû mettre la main dans sa poche, quelque part, à un
moment donné - je n'y peux rien, cela marche et ça ne coûte
rien." Or, aujourd'hui, on apprend maintenant que les détails de ce
projet nouveau et intéressant par ailleurs sont connus - probablement
qu'au moment où il a fait son budget, le ministre des Finances ne les
connaissait pas lui-même - le ministre responsable de ce secteur nous
dit: "Ça va coûter 60 000 000 $."
Je reviens aux propos du ministre des Finances qui nous disait: "Ce
projet-là, d'aider les entreprises à investir et de garantir 2
000 000 000 $ - je vais retrouver ma poche, M. le Président - je n'y
peux rien, ça ne coûte presque rien."
De l'autre côté, le ministre Biron nous dit: "Ça va
coûter 60 000 000 $." Mettons les deux bouts de la proposition ensemble:
Presque rien égale 60 000 000 $.
Revenons au budget, prenons le secteur de l'emploi. Ce qui est
prévu pour réaliser le programme annoncé par le premier
ministre: 30 000 000 $. Si je me fie aux propos du ministre des Finances, 30
000 000 $, c'est la moitié de rien. La moitié de rien pour
réaliser ce grand programme annoncé par le gouvernement.
Il me semble qu'on peut reconnaître qu'il y a de bonnes choses,
qu'il y a de la bonne volonté, qu'il y avait de bonnes mesures, mais il
faudrait, en même temps, qu'on reconnaisse qu'il y a un certain nombre de
mesures et de précautions qui n'ont pas été prises au
moment où on les a annoncées.
Parlons donc maintenant de ce programme d'emplois annoncé par le
premier ministre. Je ne répéterai pas les termes exacts du
premier ministre quand il l'a présenté, mais rappelons-nous qu'il
a, d'une part, dénoncé les genres de projets de création
d'emplois qu'on utilisait en disant que c'étaient des programmes
conjoncturels, ce qui est parfaitement exact, que c'étaient des
programmes trop à court terme, ce qui est parfaitement exact, que
c'étaient des programmes qui n'étaient pas suffisamment
orientés vers le développement d'emplois réguliers et
permanents, ce qui est parfaitement exact. Il disait: En conséquence, il
faut donc qu'on prenne un virage clair et définitif; il faut que tous
nos efforts vers la création d'emplois portent, d'abord, sur le fait de
sortir les jeunes et les autres du bien-être social et de leur situation
de chômeurs et de les placer dans une situation d'emploi. Il faut que cet
emploi soit durable - on parlait d'une période d'un an - et que ce soit
orienté vers des emplois nouveaux, neufs et permanents. C'est, M. le
Président, un programme excellent, une orientation excellente.
Pourrais-je vous rappeler, M. le Président, qu'en date du 3
décembre 1981... Je fais mes meilleures suggestions, M. le
Président, au mois de décembre; vous l'aurez constaté. Je
suis parti de 1982; je suis rendu en 1981; j'arrive bientôt à
1983. Le 3 décembre 1981, je déposais en cette Chambre un
mémoire visant la création d'un service national. Je corrigeais
ce texte par la suite à partir d'une consultation dans tout le
Québec, pour en arriver à un nouveau texte qui s'appelait:
Service national volontaire du Québec. Qu'est-ce que c'était, ce
programme? J'ai tenté de le concrétiser dans le projet de loi
195, Loi sur le service civil volontaire. Qu'est-ce que c'était, ce
programme? D'abord, il s'adressait aux jeunes, les 18-25 ans, de façon
privilégiée, mais cela couvrait l'ensemble des autres citoyens et
citoyennes du Québec, au-delà de la catégorie des 18-25
ans, qui étaient sans emploi, pas juste les assistés sociaux,
tous ceux qui étaient sans emploi. Cela visait à établir,
à mettre sur pied une mesure nous amenant à une politique de
plein emploi. Cela visait, pendant une période d'un an -c'est bien cela,
les propos du premier ministre, un an; c'est dans le programme gouvernemental
qui nous a été annoncé - le service civil volontaire.
Pendant cette année, qu'est-ce qui devait se faire? Il devait se faire
du complément de formation; cela faisait partie du programme
gouvernemental annoncé le 13 novembre par le premier ministre. Il devait
y avoir des stages en entreprise; cela faisait aussi partie du programme
annoncé par le premier ministre le 13 novembre. Il devait y avoir du
travail de développement d'emplois nouveaux dans des régions.
Quels étaient les exemples que je proposais, M. le Président? Je
proposais le travail en forêt. Je proposais du reboisement. Je proposais
des travaux régionaux susceptibles de créer des emplois qui
n'existaient pas, de réaliser des travaux qui ne se feraient pas
autrement. C'est ce que je proposais, M. le Président, le 3
décembre 1981.
Qu'est-ce que le premier ministre a répondu, le 3 décembre
1981? Ce n'est pas dans les priorités du gouvernement. C'était sa
réponse en décembre 1981. Par la suite, le premier ministre y est
allé encore plus cavalièrement qu'il ne l'a jamais fait. À
des questions que je lui posais en Chambre, il refusait de répondre. A
des interventions qui se faisaient dans le milieu et à quelques-uns de
ses propres députés qui appuyaient le projet, il ne
répondait strictement rien.
Or, M. le Président, ce projet que j'avais déposé
avait l'avantage d'avoir toutes les caractéristiques de ce qui nous a
été annoncé deux ans plus tard par le gouvernement. Deux
ans après, le gouvernement retient finalement un certain nombre de
critères, sauf qu'il ne retient pas en même temps et qu'il ne nous
annonce pas en même temps de quelle façon cela va se
réaliser.
Aujourd'hui, j'invite le ministre des Finances et le gouvernemnt
à retourner à ce projet et à vérifier comment,
rapidement, on pourrait appliquer le programme non seulement à la
catégorie des gens aptes au travail et qui sont des
bénéficiaires du bien-être social, mais à l'ensemble
des personnes qui sont sans emploi, peu importe leur âge et peu importe
leur situation. Le fait de limiter ce programme annoncé par le
gouvernement et qu'on retrouve dans le budget supplémentaire aux
personnes aptes au travail bénéficiaires de l'aide sociale,
c'est, à toutes fins utiles, continuer une vieille mentalité
qu'on avait et qui visait à retirer les gens du bien-être social
pour mieux les retourner au chômage. Cela ne nous amènera pas
à poser des gestes volontaires, fermes, qui vont nous inciter à
de la création d'emplois permanents.
Dans ce projet, M. le Président, je parlais entre autres de la
structure administrative légère qui devait être
nécessaire, mais j'étais loin d'approuver des programmes comme le
programme action jeunes volontaires, qui nous a été soumis
récemment et qui vient, de toute façon, à l'encontre de ce
qu'a proposé le premier ministre le 13 novembre dernier. (12 h 50)
M. le Président, je voudrais parler, avant de terminer, de deux
aspects du budget qui ont retenu mon attention au-delà de ce que je
viens de traiter, d'une part, des mesures intéressantes annoncées
au niveau de l'impôt sur le revenu, par exemple, pour une bonne
catégorie de la population, en
particulier ceux à faible revenu, mais qui ont des
économies, qui seront exemptés du paiement des impôts
trimestriels. Je pense que c'est là une excellente nouvelle, une
nouvelle que les gens du troisième âge attendaient
particulièrement depuis longtemps, une mesure qui va viser à
corriger la lourdeur administrative. Je pense qu'il faut savoir gré au
ministre actuel du Revenu d'avoir incité le ministre des Finances
à nous annoncer ces mesures dans le discours sur le budget.
Par ailleurs, je dois vous indiquer ma grande déception de ne
retrouver dans le discours actuel du budget aucune annonce quant à la
disparition et à la suppression de l'impôt sur les successions. Je
sais que le ministre des Finances voudra me blaguer en prétendant que
c'est pourtant une mesure hautement sociale-démocrate, pour ne pas dire
une mesure socialisante ou socialiste, et qu'en conséquence, on devrait
défendre la notion de l'impôt sur les successions, sauf qu'il
faudrait qu'on admette finalement que nous demeurons la seule province au
Canada à continuer d'imposer des taxes sur les successions. Parce que
nous sommes les seuls, cet impôt sur les successions est nuisible
à l'économie du Québec. Pour les 40 000 000 $ que
l'impôt sur les successions nous rapporte, j'évalue à pas
loin de 100 000 000 $ les effets négatifs de la même loi.
Comprenons que, d'une part, les personnes qui ont de grosses successions
ont beaucoup de facilité, étant donné que la loi
prévoit que c'est à l'endroit où les successions seront
versées, de faire verser leurs successions en Ontario ou dans d'autres
provinces du Canada ou dans des États américains et ainsi, de
cette façon, échapper à la Loi sur les droits
successoraux. Mais, en y échappant, ils drainent aussi leur argent,
leurs avoirs à l'extérieur du Québec. Pour y
échapper, ils sont obligés de procéder de cette
façon. Mais ce n'est pas là l'impact le plus sérieux.
L'impact le plus sérieux, c'est une question de confiance finalement. Ce
n'est pas tellement l'impôt que les gens vont avoir à payer qui
est nuisible, c'est l'idée qu'ils s'en font. C'est le fait qu'ils ne
sont pas portés ou amenés à le faire fructifier ou
à le placer dans l'économie québécoise.
L'autre élément, M. le Président, se retrouve au
niveau des petites et moyennes entreprises où la valeur de celles-ci
réside souvent dans le "know-how", dans l'expertise. Or, ce qu'on
remarque de plus en plus, à cause de la Loi sur les droits successoraux,
c'est qu'un bon nombre d'entreprises familiales, après 20, 25 ou 30 ans
d'exercice, liquident l'entreprise, vont vivre à l'extérieur et
on perd, de ce fait, non seulement les revenus qu'engendrerait une loi sur les
droits successoraux, mais on perd aussi toute la valeur de l'expertise dont on
pourrait profiter sur le plan économique si ces entreprises avaient
continué de fonctionner. C'est donc une loi qu'il nous faut de toute
urgence faire disparaître. J'implore mes collègues de
l'Assemblée nationale, particulièrement ceux du côté
ministériel, à faire des pressions auprès du
député de L'Assomption et ministre des Finances pour qu'il
supprime cette taxe sur les successions.
Je voudrais terminer, M. le Président, en parlant de la question
de la surtaxe sur l'essence. Le ministre des Finances a annoncé la
suppression de la surtaxe, ce qui devait avoir comme effet une diminution du
prix à la pompe de 0,04 $ pour chacun des contribuables, pour chacun des
usagers, pour les consommateurs. Je pense que c'était là une
mesure souhaitée par un grand nombre.
Dans le même souffle, le ministre des Finances a annoncé
que, en ce qui a trait au transport en commun, il enlevait encore 10% de la
taxe supplémentaire sur l'essence, pour autant que cette surtaxe soit
attribuée, en termes d'avantages, de bénéfices, aux
usagers du transport en commun. M. le Président, à ce moment,
c'était une mesure excellente. Il faudrait peut-être qu'on se pose
des questions sur ses effets aujourd'hui. J'aimerais entendre les mêmes
ténors qui ont défendu ou qui ont demandé la supression de
la taxe sur l'essence en invoquant le fait que cela avait un effet
négatif sur l'économie, que cela faisait diminuer la consommation
de l'essence et, parce que la consommation diminuait, que cela produisait une
surcapacité de production dans les entreprises et que celles-ci
étaient obligées de fermer leurs portes ou de diminuer leur
personnel.
Tous ces ténors de l'économie qui nous ont expliqué
que c'était une taxe régressive, une taxe qui avait des effets
néfastes sur l'économie, j'aimerais aussi les entendre
aujourd'hui - Conseil du patronat, chambres de commerce, députés
de l'Assemblée nationale - parler contre les compagnies qui viennent
aujourd'hui d'imposer, directement au consommateur, un montant additionnel de
0,12 $. De façon uniforme, les consommateurs viennent de subir une
augmentation de 0,12 $ sur le prix de l'essence. Comment se fait-il qu'on
pouvait prétendre hier que, si c'est une taxe, cela fait baisser la
consommation et, quand c'est juste le prix, cela ne ferait plus baisser la
consommation? Cela n'aurait plus d'effet négatif sur l'économie?
Il me semble que les mêmes ténors qui ont demandé
l'abolition de la taxe devraient aussi demander en même temps une
diminution du prix actuel de l'essence et devraient surtout insister pour que
le gouvernement fédéral, dont c'est la responsabilité,
fasse enquête sur la façon dont cela s'est produit.
Est-ce que ce n'est pas étrange que, du jour au lendemain, toutes
les compagnies d'essence, du même coup et en même temps,
imposent 0,12 $ de plus au consommateur? Est-ce de la concertation, M.
le Président? Est-ce que cela ne serait pas prévu quelque part?
On ne le saura probablement jamais, étant donné que l'organisme
qui est chargé d'appliquer cette loi, le gouvernement
fédéral, est peut-être partie à la concertation par
le biais d'une entreprise d'État.
Tout cela doit nous amener à nous poser des questions et on peut,
entre autres choses, demander au ministre des Finances ce qui pouvait
l'empêcher de prendre la même mesure pour les consommateurs que
celle qu'il a utilisée pour les usagers du transport en commun.
Autrement dit, quand le ministre des Finances nous disait: Si les commissions
de transport réduisent le prix aux usagers, je vais accepter d'enlever
les 10% additionnels de la taxe sur l'essence, n'aurait-il pas pu dire la
même chose pour les consommateurs? Pour autant que cela aura un effet de
réduction de 0,04 $ pour les consommateurs, je vais enlever 10% de la
surtaxe sur l'essence. Qu'est-ce qui pouvait empêcher le ministre de
procéder de la sorte? Probablement une question de contrôle, mais
j'aimerais avoir une réponse précise là-dessus, M. le
Président, parce que je trouve que la situation dans laquelle nous
sommes placés fait finalement de l'Assemblée nationale le dindon
de la farce. Après avoir voulu aider les usagers du transport en commun
en imposant des restrictions aux commissions de transport, on fait en sorte
qu'aujourd'hui ce sont les commissions de transport qui sont
pénalisées par notre mesure, alors que, de toute évidence,
il aurait fallu privilégier ce secteur d'activité. (13
heures)
Je termine là-dessus en résumant brièvement le fait
que, dans ce discours sur le budget, on peut, premièrement, constater
qu'il n'y a pas suffisamment de fonds pour l'emploi, en tout cas pour
réaliser le programme qui nous a été annoncé par le
premier ministre; que la surtaxe sur l'essence n'a pas, de toute
évidence - en tout cas à la pompe, pour les usagers, les citoyens
et les citoyennes du Québec - donné les résultats qu'on
attendait, et il faudrait probablement annoncer d'autres mesures le plus
rapidement possible; on peut souligner que le régime
d'épargne-actions est une mesure intéressante qui devrait
être encouragée; là-dessus il faut féliciter le
ministre des Finances de l'avoir allégé et d'avoir donné
la possibilité à un plus grand nombre de personnes et surtout
d'entreprises de profiter de ce régime d'épargne-actions; on peut
peut-être déplorer aussi le fait qu'on n'a pas profité de
ce budget pour traiter de la question de la participation à la
Régie des rentes du Québec. Les annonces qui ont
été faites cette semaine, à savoir qu'en l'an 2000 les
coffres de la Régie des rentes seront vides, donc, qu'un bon nombre de
citoyens et de citoyennes du Québec ne pourront pas, si on ne modifie
pas notre mode de perception et notre taux de perception, toucher leurs rentes
du Québec lorsqu'ils auront l'âge de la retraite... Je voudrais
seulement souligner que ceux qui seront touchés en l'an 2000 par cet
aspect sont les mêmes qui, aujourd'hui, sont sans emploi et qu'on
voudrait mettre au travail.
Là-dessus, il me reste à souhaiter que le ministre des
Finances entendra un certain nombre de commentaires que, de ce
côté-ci de la Chambre, on a pu lui faire, et qu'il y aura des
mesures additionnelles qui seront apportées le plus rapidement
possible.
M. Picotte: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le député de Maskinongé.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Vu qu'il est
passé 13 heures et que, selon l'alternance normale, le tour devrait
revenir à un député libéral, je souhaiterais que
mon collègue demande la suspension du débat pour revenir à
15 heures.
M. Tremblay: Sur la question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de
règlement, M. le député de Chambly.
M. Tremblay: Comme le disait le député de
Maskinongé, la tradition veut qu'il y ait alternance entre l'Opposition
et le côté gouvernemental. Nous venons d'entendre un
député de l'Opposition et je réclame le droit de
parole.
M. Bisaillon: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Marie, sur la question de règlement.
M. Bisaillon: Le député devrait faire ses classes
car cette question a déjà été tranchée.
L'alternance, effectivement, de façon générale,
prévoit un député ministériel et un
député de l'Opposition, sauf lorsque c'est un débat
restreint comme c'est le cas actuellement. Dans le cadre d'un débat
restreint, il a toujours été entendu que j'intervenais au moment
où je devais intervenir, peu importe que le député qui a
parlé précédemment soit un député de
l'Opposition ou un député ministériel, de sorte que
l'alternance, dans des débats restreints, se joue entre les
députés ministériels et ceux de l'Opposition. Selon
moi et selon ce qui a déjà été
réglé en cette Chambre et en commission parlementaire, ce serait
plutôt à un député de l'Opposition à demander
la suspension puisque c'est le ministre du Commerce extérieur qui avait
parlé précédemment.
M. Polak: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je ne sais pas si vous avez
déjà rendu votre jugement, mais, au cas où vous seriez
encore à délibérer, nous vous disons que c'est maintenant
notre tour. C'est un ministre qui a parlé le dernier et le
député de Sainte-Marie n'est pas un membre de l'Opposition
officielle; c'est donc l'alternance d'un parti à l'autre. Je demande
donc la suspension du débat jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): D'une façon ou
d'une autre, le président, à 13 heures, a le droit de suspendre
les travaux jusqu'à 15 heures et ce, sans rendre de décision.
Je suspends donc nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 03)
(Reprise de la séance à 15 h 01)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Vous
pouvez vous asseoir. Nous reprenons le débat sur la motion en cours.
La parole est au député de Chambly.
M. Luc Tremblay
M. Tremblay: M. le Président, je suis très heureux
d'adresser la parole aujourd'hui et j'étais impatient de le faire
puisque les nouveaux élus du côté ministériel depuis
1981 n'ont pas eu une tâche des plus faciles. En effet, on se rappelle
qu'avant même cette élection, le ministre des Finances avait
déposé un budget qu'il est normal d'appeler un budget de
compressions budgétaires.
Depuis ce temps-là, autant les députés élus
de 1981 que ceux qui l'avaient été en 1976 ont eu à
expliquer à la population ces mesures qui ne sont pas toujours
populaires, mais, hélas, qui nous apparaissaient et qui nous
apparaissent toujours comme éminemment nécessaires.
Heureusement, depuis les débuts de 1983, l'économie au
Québec, ainsi que partout dans le monde - mais plus
particulièrement au Québec, et avec plus de vigueur au
Québec - fonctionne beaucoup mieux. Je peux en parler en connaissance de
cause puisque, avant d'occuper les fonctions que les citoyens du comté
de Chambly m'ont fait l'honneur de me demander d'assumer, j'étais
relié de très près au monde des affaires. J'ai
gardé des contacts constants avec ce milieu depuis lors. Je ne manque
pas une occasion d'interroger mes collègues du milieu des affaires sur
le fonctionnement de leur entreprise chaque fois que j'ai le plaisir de les
rencontrer. Systématiquement, depuis le début de l'année,
les gens du domaine des affaires me disent: Dans mon entreprise, ça va
bien; cette année, c'est reparti. Bien sûr, eux aussi, comme tout
le monde, comme les gouvernements, la crise les a forcés à
rationaliser leurs activités, à devenir plus productifs et,
effectivement, ceux qui sont encore en affaires aujourd'hui ont
été de bons gestionnaires et se sont organisés en fonction
de la crise. Maintenant qu'elle est traversée et que l'économie
fonctionne mieux, ces entreprises redeviennent prospères, ce qui est
encourageant pour l'avenir.
Que sera notre avenir au Québec? On sait que le Québec a
des outils extraordinaires pour développer une économie qui sera
non seulement viable, mais où les citoyens peuvent s'attendre à
une qualité de vie supérieure à la moyenne mondiale. Le
ministre du Commerce extérieur l'a mentionné ce matin, nous avons
la main-d'oeuvre qualifiée et nous avons fait des sacrifices au
Québec depuis 20 ans pour nous construire un réseau
d'éducation adéquat, moderne et efficace. Maintenant, ce
réseau d'éducation nous apporte des compétences qui sont
prêtes, qu'on peut prendre en main; c'est l'avenir du Québec. En
plus, nous avons nos ressources énergétiques et naturelles qui
abondent au Québec, ainsi qu'une structure manufacturière qui
pourrait nous apporter, dans l'avenir, des retombées très
intéressantes.
Ces éléments ne sauraient, à eux seuls, nous amener
le progrès économique. Il faut, à mon avis, que tous les
agents économiques au Québec se concertent, soient unanimes pour
faire en sorte que ce développement économique que nous
espérons puisse se concrétiser. Il faut que les patrons, le
gouvernement, les syndicats en arrivent à être conscients que
chacun d'entre nous a intérêt à se concerter pour faire du
Québec un pays encore plus rentable, plus profitable.
Je le disais tout à l'heure, le travail a été
entrepris. Déjà en 1962, au moment de la nationalisation de
l'électricité, on a posé un jalon important, presque
fondamental pour le succès économique que l'on connaît
maintenant.
M. le Président, récemment, le vice-président de
Kidder, Peabody & Company, une corporation américaine qui
émet des obligations et qui fait aussi des études sur les
différentes entreprises qui veulent vendre
des actions par son intermédiaire, déposait un rapport sur
Hydro-Québec, ce fantastisque outil que les Québécois se
sont donné en 1962. Je voudrais résumer un peu pour bien
démontrer l'importance de l'hydroélectricité au
Québec. On lit ici dans le rapport: "Hydro-Québec, the world's
premier electrical energy company." Je traduis: Hydro-Québec, la
principale compagnie d'électricité au monde. Voilà ce que
nous avons au Québec, M. le Président. Ce ne sont pas des
péquistes qui disent cela; c'est Kidder, Peabody & Company, une
entreprise américaine.
Mais qu'est-ce que dit le rapport? Je vais vous en citer quelques
extraits tout d'abord en anglais et je me permettrai une traduction de mon cru.
Si jamais des gens croient que ma traduction n'est pas fidèle, il y aura
plusieurs témoins pour me corriger. Je lis un passage: "Our analysis
shows that Hydro-Québec's record of performance is without equal among
Canadian provincial utilities, that it ranks among the highest quality, AAA,
rated electric and telephone utilities in the United States, that the
provincial Government of Québec, in addition to guaranteeing
Hydro-Québec's securities has repeatedly affirmed its support for the
maintenance of Hydro-Québec's conservative financial policies and energy
development plans. Il termine cette page en disant: "We believe that
Hydro-Québec is presently and will continue to be the premier electrical
energy company in the world. (15 h 10)
En français, cela donne ceci: "Notre analyse démontre que
la performance d'Hydro-Québec est sans égal parmi toutes les
entreprises d'utilité publique provinciales canadiennes, qu'elle se
compare avec les entreprises d'utilité publique des États-Unis
qui ont la cote AAA - comme on le sait, M. le Président, c'est la
meilleure cote - que le gouvernement du Québec, en plus de garantir ses
emprunts, a plusieurs fois réaffirmé sa volonté de
respecter sa politique financière et de développement."
Il poursuit en disant un peu plus loin: "Should actual load growth
demand for electricity exceed current forecast, HydroQuébec is in the
unique position to adjust quickly by accelerating hydroelectric constructions.
Hydro-Québec is unique not only for its financial performance as a
premier electric utility, but also for its overall performance as a premier
energy company. Hydro-Québec's hydroelectric energy resources can be
compared in terms of sizy and future net revenue with oil and gas resources and
all barrel equivalent. On this basis, our report quantifies and compares the
reserved value of Hydro-Québec's water resources with the reserved value
of the oil and gas resources in Canada and the largest United States oil
company. We have valued only those oil resources which can be developed on an
economic cost comparable to the energy cost associated with the economic
development of oil and gas."
En français, M. le Président, cela se lit: Nous croyons
donc qu'Hydro-Québec est présentement et continuera d'être
la principale entreprise d'énergie électrique au monde. Si les
prévisions de la demande d'électricité étaient
dépassées, Hydro-Québec serait en position
privilégiée de s'adapter rapidement à cette demande en
accélérant la construction de ses barrages
hydroélectriques. La performance financière d'Hydro-Québec
la distingue non seulement comme une des principales entreprises
d'électricité, mais aussi pour sa performance
générale comme principale entreprise du domaine
énergétique. Les ressources hydroélectriques
d'Hydro-Québec peuvent être comparées, en fonction du
volume et des revenus futurs, avec les ressources énergétiques
provenant du pétrole et du gaz en utilisant le baril de pétrole
comme unité de mesure." Autrement dit, M. le Président, on
compare des pommes avec des pommes, c'est-à-dire la valeur
énergétique de l'électricité comparée
à la valeur énergétique du gaz et du pétrole. "Sur
cette base, notre rapport estime et compare les ressources
hydroélectriques en réserve que possède
Hydro-Québec avec les réserves de pétrole et de gaz du
Canada et des plus grandes pétrolières des États-Unis.
Nous avons comptabilisé seulement les ressources hydroélectriques
dont le coût de développement pouvait être avantageux par
rapport à la mise en valeur du pétrole et du gaz."
Regardons un peu ce que cela donne en volume, si on prenait le potentiel
hydroélectrique d'Hydro-Québec qui est facilement exploitable et
économiquement rentable - pour utiliser un vieux terme -versus le
pétrole et le gaz. Le Canada entier, en gaz et en pétrole, a des
réserves connues aujourd'hui de 23 704 000 000 de barils; il faut
retenir ce chiffre, ce sont toutes les provinces du Canada réunies.
Hydro-Québec représente 57 337 000 000 de barils, ce qui veut
dire que le potentiel énergétique d'Hydro-Québec à
elle seule représente presque deux fois et demie la valeur
énergétique du pétrole connu au Canada.
On me dira: Au Canada il n'y a pas tant de pétrole que cela, si
ce n'est l'Alberta qui en a 17 000 000 000 de barils. Si on prend comme point
de comparaison les dix plus grandes compagnies de pétrole
américaines: Exxon - on sait comme c'est gros - Atlantic Richfield,
Standard Oil, Texaco, Mobil, Shell Oil, Gulf, Conoco, les réserves
connues de ces dix plus grandes pétrolières américaines
sont de 48 367 000 000 de barils. J'ai dit tout à l'heure
qu'Hydro-Québec avait, à elle seule,
57 000 000 000 de barils comme potentiel. Comparé à 48 000
000 000, cela fait environ 20% de plus pour Hydro-Québec. Cela veut dire
qu'Hydro-Québec a autant de réserves d'énergie connues que
les dix plus grandes compagnies américaines de pétrole
réunies, plus 20%.
M. le Président, je pense que c'est là une manifestation
du travail qui a été entrepris au Québec. Cette
réalisation a été en très grande partie accomplie
grâce au travail d'un homme qui était, en 1962, le ministre
responsable de l'électricité - je ne sais plus comment on
appelait dans le temps le ministre de l'Énergie et des Ressources -qui a
fait en sorte que le Québec nationalise les compagnies
d'électricité. Je ne peux pas ne pas sauter sur l'occasion pour
faire un parallèle puisque, en 1962, bien des Québécois
étaient sceptiques. Bien des Québécois disaient: On ne
peut pas, on est trop petit, cela coûte trop cher, on n'arrivera jamais,
on n'est pas capable. Malgré cela, une majorité de
Québécois ont dit: On est capables, on va y aller, on va prendre
un risque dans la vie. Et on a nationalisé
l'électricité.
Le même homme, le premier ministre du Québec
présentement, qui était ministre à ce moment-là du
gouvernement Lesage, nous propose à nous, Québécois, de
faire du Québec un pays souverain. Bien des gens nous disent: On n'est
pas capables, on n'a pas les ressources, on n'a pas ce qu'il faut. On les a.
C'est normal qu'il y ait des gens qui craignent le changement. On le craignait,
en 1962, le changement. Il s'est produit. On voit les résultats. Quand
on prend des initiatives; quand on prend des risques calculés dans la
vie, c'est comme cela qu'on progresse.
Ce ne sont pas les seuls outils qui sont à notre disposition, il
y en a d'autres. Par exemple, dans une importante étude - je prends ces
exemples à l'extérieur du Québec pour ne pas être
accusé de prendre des exemples de partisans - sur les politiques
économiques du Canada, publiée en septembre 1983 - c'est
récent, cela fait à peine deux ou trois mois - le Conseil des
sciences du Canada, un groupe pancanadien, écrivait: C'est le
Québec qui, parmi toutes les provinces, a mis sur pied la
stratégie industrielle la plus complète. Vous comprenez cela?
C'est lui qui a mis sur pied la stratégie industrielle la plus
complète parmi toutes les provinces canadiennes. (15 h 20)
Plus loin, dans le même rapport, on dit que c'est le Québec
qui, probablement, dispose de la gamme de moyens la plus diversifiée
pour mettre en oeuvre une stratégie industrielle. On a donc les moyens,
on a donc les compétences, on a donc les ressources pour réaliser
un développement économique sain, mais il faut faire plus. On a
fait bien des choses depuis deux ans: on a géré une situation
difficile, on a pris des mesures difficiles, on a posé des gestes qui
s'imposaient, à notre avis, qui n'ont pas, j'en conviens, tous
été aussi bien expliqués qu'ils auraient pu l'être,
qui n'ont pas été posés de façon parfaite, qui ont
été posés par des humains, mais des humains qui avaient
à coeur le bien-être du Québec, qui ont pris ces
décisions quoique cela pût rendre les élus impopulaires. Si
c'était à refaire - je suis très heureux qu'on n'ait pas
à le refaire - en ce qui me concerne, je n'hésiterais pas un
instant à reprendre les mêmes décisions dans le même
esprit.
C'est alors que, durant cette année, on a constaté, comme
tout le monde, que l'économie reprenait du poil de la bête,
reprenait de la vigueur. Nous nous sommes dit, de ce côté-ci de la
Chambre: Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer cette reprise, pour
faire en sorte que le Québec ait une progression de l'emploi plus rapide
que celle du reste du Canada? C'est déjà le cas, la reprise est
plus rapide au Québec, mais qu'est-ce qu'on peut faire pour la rendre
plus durable et plus efficace? L'Assemblée nationale est une institution
importante, mais les parlementaires ne peuvent être partout en même
temps. Si nous voulons faire une analyse sérieuse de la situation et
avoir une participation importante des élus - que cela ne soit pas fait
uniquement par des fonctionnaires - on s'est dit qu'il valait mieux suspendre
les travaux de l'Assemblée nationale de façon à
libérer le temps des parlementaires afin qu'ils consacrent toutes leurs
énergies à des solutions futures, non pas pour relancer
l'économie, puisque c'est déjà fait, mais pour donner une
plus grande vigueur à cette relance.
On s'est donc réuni en comités ministériels et en
comités du conseil des députés pour en discuter d'une
façon hebdomadaire pendant ce mois et demi, avec le résultat que,
le 13 novembre, le premier ministre annonçait un plan d'action qui vise
à contribuer à améliorer la relance de
l'économie.
Que faisaient les députés de l'Opposition pendant ce
temps-là? Ils sont venus nous dire en Chambre ici, au moment où
on a ajourné nos travaux au mois d'octobre: Vous vous en allez en
vacances. Pour ma part, j'ai compris: Nous nous en allons en vacances. Eux,
sont partis en vacances et, de toute évidence, c'est ce qu'ils ont fait
parce qu'ils sont arrivés ici sans idée, sans aucune proposition,
si ce n'est en disant: II y a trop de taxes; enlevez celle-ci, enlevez
celle-là. On est tous d'accord avec ça. Le pays idéal
serait celui où on aurait tous les services et où on ne paierait
pas de taxes. Ce serait merveilleux, mais c'est l'utopie de l'Opposition.
Ils auraient pu remplir le très grand
vide dans leurs politiques. J'ai ici - cela ne vient pas de moi encore -
une coupure de presse du jeudi 22 septembre 1983 où M. Léon Dion,
une personnalité bien connue et très respectée au
Québec, disait des libéraux: Comment peut-on à la fois
s'engager à restreindre le rôle de l'État quand, en
même temps, on promet d'engager ce dernier dans de nouveaux
mégaprojets? Incohérence de nos amis d'en face qui n'ont pas de
programme et qui auraient pu, au lieu de prendre des vacances durant ce
mois-là, travailler à s'en donner un et nous arriver le 15
novembre avec leurs solutions. Mais non, rien, le vide. Je poursuis le texte de
M. Dion: Comment entend-on réduire les coûts du fonctionnement de
l'État et sans s'en remettre davantage à l'initiative
privée pour assurer la justice sociale et le bien-être quand ce
sont précisément les insuffisances criantes de l'économie
capitaliste qui ont obligé les gouvernements à intervenir pour
améliorer l'accessibilité et la qualité des services
à l'ensemble des citoyens dans des domaines comme l'éducation, la
sécurité sociale et l'aide juridique?
M. Dion se posait la question au mois de septembre. Nous, M. le
Président, dans nos travaux, on a trouvé. Que faisaient nos amis
d'en face pendant ce temps? Ils étaient en vacances, M. le
Président.
Une voix: On n'est pas vos amis.
M. Tremblay: Et ils n'ont rien trouvé. Ils auraient pu,
eux aussi, faire un comité et chercher un peu pour trouver des
solutions. Eux aussi sont Québécois avant tout. Qu'est-ce qu'ils
ont réussi à trouver? Rien. Ils sont arrivés en Chambre
et, dans la première semaine - les questions à l'Assemblée
nationale, on sait comme elles sont importantes -quelles questions ont-ils
posées? Est-ce que le député de Frontenac serait sorti le
15? Est-ce qu'il aurait passé deux heures à l'Assemblée
nationale? Est-ce que c'est cela qui est important pour l'économie du
Québec? Cela n'est-il pas de la petite politique? Je m'excuse, M. le
Président, mais vous me faites signe qu'il me reste deux minutes. Je
pense qu'il me reste encore plus de temps. Non?
Le Vice-Président (M. Jolivet): II vous reste encore deux
minutes.
M. Tremblay: Je vais m'éloigner des gens d'en face, parce
que j'en aurais beaucoup à dire. M'avez-vous dit qu'il me reste deux
minutes, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui.
M. Tremblay: M. le Président, j'avais trois discours comme
celui-là. Je vais terminer avec un autre exemple prouvant que la relance
est bien enclenchée au Québec. J'ai trois coupures de journaux
qui font état d'une déclaration du Conseil économique du
Canada. Dans le Soleil du 3 novembre 1983 -c'est récent - il est
écrit: "L'économie du Québec devrait avoir le vent dans
les voiles pour le reste de l'année en 1984. Dans l'ensemble du pays,
c'est au Québec que la reprise est la mieux amorcée et la plus
vigoureuse." Ce n'est pas par accident. The Gazette, Thursday, November 3rd,
1983, rapportait: "Recovery will be uneven across the country this year, but
Québec can look forward to better than average growth, the Conference of
Canada said yesterday. Quebec was among those provinces hardest hit by the
recession, but despite strong obstacles to recovery such as weak demand for
Iron Ore and Asbestos, the Province appeared to have led the way in the
recovery." Ce n'est pas parfait, mais le Québec a fait ce qu'il avait
à faire et nous avons réussi à faire mieux que les autres
provinces.
En conclusion, M. le Président, je dirai que le gouvernement du
Parti québécois a fait des efforts énormes pour relancer
l'économie et cela a réussi. Maintenant, nous allons en faire
pour améliorer cette relance. On a eu des succès à
l'occasion et des insuccès. Et, lundi prochain, les citoyens des
comtés de Jonquière et de Mégantic-Compton doivent appuyer
le gouvernement en élisant des candidats du Parti
québécois lors des élections partielles. Ce faisant, ils
aideront grandement le gouvernement à rétablir un climat de
confiance et, par ce geste, ils se rendront service en aidant la relance et ils
rendront en même temps service au Québec et à tous les
Québécois et les Québécoises. Merci, M. le
Président. (15 h 30)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, s'il vous plaît! M. le député, s'il
vous plaît! M. le député! M. le député de
Sainte-Anne.
M. Maximilien Polak
M. Polak: Merci, M. le Président. Nous parlons en
réponse à l'énoncé du 15 novembre dernier du
ministre des Finances, M. Parizeau, concernant la politique budgétaire
du gouvernement.
M. le Président, vous vous souvenez sans doute qu'on est parti de
Québec le 23 juin, dernier jour de la session. Le premier ministre,
René Lévesque, disait: "À tous et à chacun, bonnes
vacances, merci pour le bon travail."
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député! M. le député! M. le député,
je m'excuse, mais deux de nos collègues parlent alors que c'est vous qui
avez le droit de parole. S'il vous plaît! M. le député.
M. Polak: Merci, M. le Président, de votre protection. Je
cite donc René Lévesque qui disait le 23 juin: "À tous et
à chacun, bonnes vacances, merci pour le bon travail. Maintenant, on le
sait, il n'y aura plus de surprise, normalement. Le retour se fera à une
date fixe au mois d'octobre." Un peu plus tard, la même journée,
le 23 juin, le leader parlementaire nous disait: "Je voudrais aussi annoncer
que la réforme parlementaire prend effet immédiatement. Puisque
je n'ai pas le choix, M. le Président, je dois faire motion pour que
l'Assemblée nationale du Québec soit donc ajournée
jusqu'au 18 octobre." Arrive le 18 octobre, et le gouvernement n'a pas
l'intention de siéger, de travailler ici à l'Assemblée
nationale. En fait, on nous a demandé de revenir seulement le 15
novembre. Presque un autre mois sans travail parlementaire. Nous appelons cela
un mois de vacances. C'est un mois où certainement l'Assemblée
n'a pas siégé, où il n'y a eu aucune discussion, aucun
plan, rien.
M. le Président, le premier ministre annonçait à la
population à ce moment-là qu'il avait créé deux
comités d'urgence, formés de ministres du gouvernement: un
comité sur la relance économique et un autre sur la question
nationale. Je me rappelle très bien que le premier ministre avait dit:
Ces groupes d'étude iront travailler partout. Ils vont nous
présenter, après ce mois de vacances additionnel, quelque chose
de spécial. Je me rappelle qu'il avait même dit en anglais: "We
are going to be task forcing all over the province."
Qu'est que nous avons vu du résultat du travail de ces deux
comités ministériels? D'abord en ce qui concerne le
deuxième comité, celui sur la question nationale, on n'a rien vu.
Il n'y a eu aucun rapport. Aucune communication ne nous a été
faite, sauf des déclarations des ministres qui indiquaient tout de
même quelque chose, parce que j'imagine qu'un ministre parle au nom du
gouvernement. Je vais dire ce que les travaux de ce soi-disant Comité
sur la question nationale ont apporté à la population. Voici ce
que quelques ministres ont déjà dit: Le ministre de la Science et
de la Technologie, M. Paquette, a dit: "Le défi technologique passe par
l'indépendance politique. Le Québec doit accéder au rang
des nations libres et souveraines." M. le ministre, jusqu'où peut-on
aller? Le Parti québécois est rendu au point de dire que, pour
avoir un développement technologique, il faut avoir
l'indépendance politique. C'est bizarre de voir, par exemple, que
beaucoup de nationalités ont participé aux dernières
missions spatiales, les Français, les Allemands et qu'ici au
Québec il faille avoir la souveraineté québécoise,
notre indépendance politique pour être capables de répondre
au défi technologique. C'est le ministre qui a dit cela.
Un autre ministre a parlé de cette question nationale, celui qui
a un peu plus de poids, le ministre des Finances, M. Parizeau. Qu'est-ce qu'il
a dit? Je cite un article du Soleil du 16 novembre 1983: "Le ministre
québécois a, par la même occasion, donné
publiquement la réponse, dans sa conférence de presse à
ceux et celles qui s'interrogeaient encore sur la conclusion du comité
ministériel qui a pour mission d'analyser la question nationale. La
promotion - c'est M. Parizeau qui parle - de l'indépendance politique du
Québec demeurera au programme pour le meilleur ou pour le pire. Si on ne
croit pas que ces deux ministres ont quelque chose à dire, je cite le
ministre Laurin, ministre de l'Éducation qui a dit - je rapporte un
article de la Presse du 19 novembre 1983 - : "L'indépendance est plus
nécessaire que jamais." C'est M. Laurin qui parle. S'il pense ainsi,
c'est qu'il croit que le Parti québécois est en mesure de gagner
une telle élection sur ce principe. "À la condition - M. Laurin
parle - de mettre à profit les deux années qu'il nous reste pour
convaincre les Québécois que l'indépendance est
nécessaire au plein développement économique du
Québec."
M. Laurin ne trouve absolument pas condamnable qu'un comité
gouvernemental s'emploie à chercher les meilleurs moyens de promouvoir
l'indépendance du Québec, option qui a été
clairement rejetée par les Québécois lors du
référendum. C'est quand même un gouvernement du PQ,
explique-t-il. M. le Président, M. Laurin ne trouve pas cela
condamnable; moi je trouve cela condamnable. Je le condamne parce que si le
gouvernement a formé un comité justement pour prendre position
sur la question nationale, il faut faire de deux choses l'une. Soit qu'on
considère que cette question nationale est déjà
décidée, que le gouvernement est convaincu qu'on va en
élection plus tard sur cette option de l'indépendance, que cela
n'est pas négociable. À ce moment, nous n'avons plus besoin d'un
comité pour étudier cela. Pourquoi? L'autre solution, la solution
de rechange: attendre au moins les résultats des
délibérations de ce comité, un rapport objectif, incluant
même la possibilité de rejeter une fois pour toutes la formule de
l'indépendance ou de la séparation.
Pourquoi former un comité si vous n'avez même pas
l'intention d'étudier sérieusement la question, y inclus la
possibilité une fois pour toutes de dire: La population ne le veut pas?
Il n'y a pas de doute que les deux questions, c'est-à-dire celle de
l'indépendance politique et celle de la relance économique sont
liées très étroitement. Tout le monde sait qu'il n'y a
rien de plus nerveux que l'argent. On n'a qu'à voir des exemples de
fuites de capitaux dans des pays, comme dernièrement la
France, l'Italie, beaucoup de pays, l'Amérique du Sud et aussi
dans notre province de Québec pour réaliser que l'incertitude
politique et l'instabilité politique créent de la
déstabilisation, de la confusion, un refus d'investir et conduisent
même à une fuite des capitaux. C'est bien beau de parler de
création d'emplois, mais pour chaque emploi créé, on en
perd un, ou un ou deux autres ne seront pas créés à cause
de l'option séparatiste ou indépendantiste et l'incertitude
politique. On est parti, comme je disais tout à l'heure, le 22 juin
1983. Notre retour était prévu pour quatre mois plus tard, le 18
octobre. Quatre mois.
Le gouvernement a eu les mois de juillet, août, septembre et une
partie du mois d'octobre pour travailler, pour consulter, pour
réfléchir et pour présenter un programme de relance
économique. Qu'est-ce qu'on a vu comme résultat après ces
quatre mois? Une demande d'ajournement pour un autre mois, jusqu'au 15
novembre. On avait créé tellement d'espoir avec cette demande
extraordinaire de la part du premier ministre: Donnez-moi un autre mois; mes
deux comités ministériels vont travailler fort, on va vous
présenter quelque chose de spectaculaire. La population attendait.
Qu'est-ce qu'on a vu? On a attendu. On a vu, finalement, le 13 novembre - je
crois que c'était un dimanche soir - le grand show
télévisé du PM, qui s'adressait à la nation pour
révéler le plan d'action gouvernemental pour intensifier la
relance de l'économie. Je me le rappelle très bien, M. le
Président, parce que je l'ai vu à la télévision. On
présentait cet homme d'État -René Lévesque - seul,
assis derrière une table dont la grandeur me faisait penser à une
table de ping-pong. Le PM avec tous les problèmes sur ses
épaules; pauvre Atlas! (15 h 40)
Je pensais aussi à un jeune bénéficiaire d'aide
sociale qui était venu me voir à mon bureau de comté une
semaine auparavant et qui m'avait fait le calcul démontrant qu'un
ministre du gouvernement reçoit, dans une semaine, presque le même
montant que ce bénéficiaire d'aide sociale reçoit durant
toute une année. C'est intéressant de réfléchir
à cela. C'était le grand show, c'était une
opération propagandiste et je ne suis pas seul à le penser. Je
vais vous citer un article qui a paru dans la Presse du 15 novembre 1983. On
parle du grand show. Je dois ajouter c'était le grand show et
c'était le grand "flop" en même temps. "Le premier ministre
Lévesque prétexta que son gouvernement avait besoin de cette
rallonge d'un mois pour mieux préparer la rentrée parlementaire,
mais personne ne fut dupe - c'est un article de M. Adam. Pour faire mentir les
critiques et démontrer qu'il avait bien utilisé son temps, le
premier ministre a cru bon, dimanche, de faire rapport directement à la
population de son emploi du temps qu'il avait enlevé à la
Chambre. Au moyen d'un spectacle à grand déploiement,
présenté pendant presque une heure et demie à l'autre
télévision, M. Lévesque a fait son numéro dans une
solennelle mise en scène. Mon propos - c'est le journaliste qui parle -
n'est pas de porter un jugement de valeur sur le contenu de cette
opération propagandiste, mais plutôt je me demande s'il est
convenable qu'un diffuseur de propriété publique - un
réseau qui appartient à nous tous et pour lequel on paie - je
suis content de voir que le leader parlementaire entre parce qu'il
connaît quelque chose au point de vue de la publicité - se serve
de cet organisme pour lequel nous, la population du Québec, payons, pour
se mettre aussi docilement au service d'intérêts aussi
manifestement politiques."
Lundi, tout le monde le sait, il y a deux élections partielles.
Dans le comté de Mégantic-Compton, qu'est-ce que le candidat du
Parti québécois fait pour essayer de gagner l'élection? Il
suit son chef René Lévesque; grande opération de
publicité. Il dit aux citoyens: Votez pour un député du
côté du pouvoir pour bien défendre nos
intérêts, parce que nous n'avons pas les moyens de rester dans
l'Opposition. C'est ce qu'ils disent, ce sont les purs qui parlent. Vous vous
rappelez quand votre parti a été formé dans le temps, vous
trouviez cela choquant. Maintenant, ce sont les mêmes purs qui parlent.
La politique que vous exercez, c'est de la petite politique de bonbon, de
"candy" et, en anglais, de "pork barrel", mais la population est très
bien renseignée, elle ne va pas tomber dans le piège du tout,
parce qu'elle est venue à la conclusion que c'est la fin d'un
régime, c'est la fin d'une ère, c'est la fin de la misère
que vous avez créée pour le Québec.
D'ailleurs, on se sert d'une déclaration... Imaginez-vous, il y a
un maire, dans une des petites municipalités du comté de
Mégantic-Compton, qui a écrit une lettre concernant quelques
subventions qui ont été versées. C'étaient
d'ailleurs des subventions payées par la population. Et on cite ce
maire, mais on ne révèle pas la signature parce que le maire n'a
jamais donné la permission. Donc, on insère juste le nom du maire
sur le dépliant publicitaire péquiste, mais pas la signature.
C'est le groupement auquel on fait face.
M. le Président, ce plan d'action gouvernemental que le premier
ministre nous annonçait pendant le grand show du 13 novembre, un
dimanche soir, qu'est-ce qu'il contient? Certainement qu'au moment où ce
plan d'action était annoncé il n'y avait pas de programme
concret, pas de calendrier, pas de détail, pas de cours ni non plus de
détail sur la provenance de l'argent pour financer tous ces programmes,
ces promesses vagues.
Je vais vous donner des exemples, M. le Président.
Le premier ministre disait que le gouvernement allait garantir, que la
Société de développement industriel du Québec, la
SDI, en accord et en coopération avec les principales institutions
financières du Québec, les banques, pourra garantir
jusqu'à 2 000 000 0000 $ de prêts aux entreprises
manufacturières, aux établissements d'hébergement
touristique et aux entreprises de services techniques qui ont du potentiel
exportateur. Il faut bien comprendre que le gouvernement était
prêt à garantir. Il y a une grande différence entre les
mots "garantir" et "investir", parce qu'il y a un document qui circule
maintenant, que le gouvernement distribue dans tous les domiciles
québécois et qui s'appelle Agir. C'est le nouveau mot, la
nouvelle expression québécoise péquiste, "agir", pour
avoir des résultats. Dans Agir, on parle d'un investissement de 2 000
000 000 $. Ce n'est pas vrai du tout. Ce n'est pas un investissement. Le
gouvernement n'investit pas en dollars. Le gouvernement garantit au cas
où il serait nécessaire de payer celui qui a obtenu le
prêt.
Dans ce programme de garantie jusqu'à 2 000 000 000 $, quelles
sont les conditions d'admissibilité au plan de ce type de financement
garanti? Jusqu'à hier - on était rendu au 1er décembre -
aucun détail ne nous est donné, mais en réponse à
une question du député de Vaudreuil-Soulanges, le ministre des
Finances - et j'étais en Chambre à ce moment-là - a
répondu: Cela ne coûte rien au gouvernement. Pour que ce plan
coûte quelque chose, il faudrait que les entreprises se cassent la gueule
dans les semaines qui suivent le prêt. Il a dit, et je cite M. Parizeau:
Je n'y peux rien; cela marche et cela ne coûte pas cher. De deux choses
l'une: soit que ce plan de 2 000 000 000 $ de financement garanti fournira une
protection pour du capital de risque dans des entreprises et dans ce cas, il y
aura sans doute des réclamations et des paiements par le gouvernement en
vertu de la garantie... Par le fait même, le plan entraînera des
dépenses et le ministre des Finances n'a pas été
sérieux dans sa réponse. C'est une possibilité. Quand il
dit: Cela ne coûte rien, cela veut dire qu'il n'y a aucune tentative
d'investir de l'argent dans du capital de risque. Donc, il n'y a rien à
faire pour celui qui fait l'emprunt. Dans ce cas-là, cela ne coûte
rien, ou bien les conditions pour obtenir la garantie seront tellement strictes
et difficiles que les entreprises ne se qualifieront pas. Dans ce
cas-là, il n'y aura pas beaucoup de demandes garantie de prêt et
évidemment, pas de risque. Le ministre des Finances avait alors raison
de dire que le plan ne coûtera pas cher. À ce moment-là,
tout le plan ne serait qu'une promesse vide et n'aiderait pas à la
relance économique.
Hier, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a
donné quelques détails sur ce plan et déjà, il y a
une critique. Je cite un article de journal de ce matin. D'abord, on dit: "Si
les banques se sont un peu fait tirer l'oreille, c'est qu'elles - ce sont les
banques, ce sont elles qui savent très bien ce que signifie la relance
économique - croient que le principal problème des entreprises
québécoises en est un de sous-capitalisation auquel le programme
n'apporte aucune solution." Si on voulait financer les PME et aider
évidemment, il faut aider pour du capital de risque pour que les gens
veuillent investir et tenter leur chance - à ce moment-là, cela
aurait du bon sens. Ce n'est pas moi qui le dis. Ce sont les banques qui l'ont
dit. Les banques disent: Dans votre cas, le problème, c'est qu'il y a de
la sous-capitalisation et votre programme de garantie de 2 000 000 000 $ ne
couvre pas cela d'aucune façon. Mais encore pire, M. Parizeau, le
ministre des Finances, se moquait un peu du député de
Vaudreuil-Soulanges en disant: Mais voici, cela ne coûte rien. C'est
simplement une garantie. Comment se fait-il qu'hier, le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a dit: Le gouvernement prévoit
perdre jusqu'à 60 000 000 $ durant les 27 mois que durera le programme,
et il ne veut pas que ce soit en vain? C'est une contradiction claire et nette.
Le ministre des Finances dit que cela ne coûte rien et un autre vient
nous dire que cela va coûter jusqu'à 60 000 000 $ durant les 27
mois. Ils devraient vérifier s'ils parlent du même plan de relance
au point de vue de la garantie de financement.
(15 h 50)
Le premier ministre a également parlé - et je le cite lors
de cette fameuse soirée de dimanche à la télévision
alors qu'il a parlé à la population - de l'une des plus
importantes décisions prises au cours de la séance
spéciale de son Conseil des ministres quelques jours avant son discours.
C'était justement sur les six grandes mesures pour aider les
assistés sociaux. C'était le grand programme. Il faut d'ailleurs
connaître quelques faits. Au mois d'août 1983, on avait ici, dans
la province de Québec, 400 000 cas d'aide sociale. Un cas d'aide sociale
est défini comme un individu ou une famille. Selon les statistiques, il
y a une moyenne de deux personnes par cas. Cela veut donc dire qu'il y a un
total de 800 000 individus québécois qui dépendent de
l'aide sociale. 800 000 au mois d'août 1983.
De ces 400 000 cas, il y en a 250 000 qui sont jugés aptes au
travail. Donc, 250 000 sur le nombre total de 400 000 cas. Les 250 000 qui sont
aptes au travail sont sous-divisés en 128 000 de moins de 30 ans
qui reçoivent, comme vous le savez, la somme de 149 $ par mois
pour vivre, et 122 000 ont plus de 30 ans.
Le premier ministre nous annonçait ce qui suit. Je cite ici un
article de Pierre Vincent dans la Presse du lundi 14 novembre: "Pour cesser de
maintenir dans l'inactivité ces centaines de milliers de travailleurs,
Québec se propose d'implanter six grandes mesures relatives à la
main-d'oeuvre. Première mesure: les bénéficiaires d'aide
sociale aptes au travail devront désormais faire oeuvre utile. Sans
mettre en péril les emplois déjà existants, on les
incitera ou bien à s'adonner à des travaux communautaires,
à des travaux ménagers pour personnes âgées ou
handicapées, par exemple, ou bien à se recycler." C'est le
premier ministre qui parlait de la relance économique. Voici ce qu'il va
faire pour les assistés sociaux.
Qu'est-ce que cela veut dire: les gens qui sont aptes au travail doivent
faire oeuvre utile? Il y a des journalistes qui ont posé des questions
parce qu'il ne donnait aucun détail. M. le premier ministre, qu'est-ce
que cela veut dire, les travaux communautaires? Que va faire cette armée
de gens, de moins de 30 ans, qui jusqu'à maintenant reçoivent 149
$ par mois? Qu'est-ce qu'on va faire avec eux? On a répondu: Les travaux
communautaires, c'est, par exemple, pelleter la neige, laver les
fenêtres, etc. Je me demande où est la permanence d'emploi. Est-ce
qu'on va dire à quelqu'un qui a 20 ans, par exemple: Vous, vous allez
faire des travaux communautaires, vous allez pelleter de la neige. Il va me
répondre: Oui, mais c'est juste pour l'hiver; pour combien
d'années? Pour le restant de vos jours! On ne donnera plus des emplois
de 20 semaines pour les envoyer ensuite au fédéral sur
l'assurance-chômage. Non, on va faire quelque chose de permanent.
Ils peuvent aussi laver des fenêtres. Oui, mais pendant combien de
temps? Combien de milliers de ces jeunes iront laver les fenêtres? On
parle de travaux ménagers pour les personnes âgées,
qu'est-ce que cela veut dire? La question a été posée.
Qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce que cela veut dire qu'une personne
âgée aura maintenant quelqu'un, une sorte de serviteur personnel,
un assisté social qui va venir faire un tour chez elle quelques fois par
semaine pour aller faire l'épicerie? Je ne le sais pas. Si vous avez
d'autres plans, dites-le donc! Jusqu'à maintenant, ce qu'on a entendu,
ce ne sont que des expressions comme les travaux communautaires.
Combien d'assistés sociaux le gouvernement Lévesque
compte-t-il pouvoir séduire avec ces nouveaux programmes? J'aimerais le
savoir.
On a eu la réponse de l'ex-ministre Marois du mois de novembre.
Il a dit: II n'est pas question d'entrer dans la plomberie. Donc, si je pose la
question, on ne veut rien savoir. Il n'est pas question d'entrer dans ce qu'on
appelle la plomberie. Si on demande: Qu'est-ce que ça veut dire les
travaux communautaires? C'est de la plomberie. Il a répondu: "Je veux
d'abord et avant tout discuter de toute cette question avec le gouvernement
fédéral. Je ne veux pas gâter mes chances de voir Ottawa
embarquer avec nous."
M. le Président, le PQ est au pouvoir depuis 1976, soit depuis
sept ans maintenant. Il n'y a rien de nouveau et c'est encore la même
chanson. Dans ces idées qui ont été soumises par le
premier ministre, il n'y a rien de nouveau là-dedans. C'est tout
simplement un changement d'expressions. On a entendu la même histoire
pendant des années et des années. On parle de la relance
économique depuis trois ou quatre ans et comme on ne peut plus parler de
relance économique maintenant, on parle d'intensifier la relance
économique. C'est la dernière expression.
Je vois que mon temps achève. Un article a été
écrit le 19 novembre dans la Gazette par Marie-Josée Drouin:
"Quebec policies too little, too late." C'est important que je cite cet article
parce que ça décrit très bien la situation actuelle de ce
gouvernement: "In a very real sense, the same comment applies to the economic
program outlined this week by Premier René Lévesque and Finance
Minister Jacques Parizeau. "The disappointment expressed by large segments of
the population stems from the expectation built up during the summer...." C'est
ça, M. le Président, l'expectative, en ordonnant un mois encore
avant de reprendre la session. Qu'est-ce qu'on a eu? Zéro. "... and his
ministers who had promised a major new thrust to economic policy and who, by
delaying the reopening of the National Assembly, had nourished the hope that,
at last, creative, original and dynamic proposals would be advanced. "Instead,
Lévesque presented a smorgasbord of economic proposals, some newer than
others but nothing particularly original."
Comme je vous l'ai dit, M. le Président, rien de neuf. On a
changé un peu les expressions seulement. "These general measures were
not sufficiently explained or detailed, and obvious questions relating to the
funding of all these proposals were left unanswered. "Two days later - c'est
vrai, deux jours après le discours du premier ministre, le ministre des
Finances, et je cite l'article -Parizeau brought down a mini-budget which left
us with the definite impression that he had not heard Premier Lévesque's
exposé." C'est triste que nous en soyons arrivés à ce
point-là.
"This type of incoherence is probably the most striking feature of the
PQ's economic policy. Does the right hand know what the left hand is doing?"
Est-ce que la main droite sait ce que la main gauche fait? On est rendu
à ce point où on doit se poser ces questions et ni dans
l'énoncé complémentaire aux politiques budgétaires
du gouvernement, ni dans le grand discours du premier ministre, n'avons-nous
trouvé quelque chose de substantiel, de nouveau pour vraiment commencer
cette relance économique.
Un député péquiste a mentionné tout à
l'heure que les députés de l'Opposition avaient parlé d'un
mois de vacances... Pour nous, ce n'était pas un mois de vacances. On a
travaillé durant ce mois comme durant tout l'été mais vous
qui constituez le gouvernement, vous devez venir ici et vous auriez dû
avoir le courage de venir avec des programmes qu'on aurait pu discuter. On
aurait bien aimé discuter ici du 15 octobre au 15 novembre des
programmes comme, par exemple, la participation du travail; le partage du
travail et la retraite anticipée qui sont des projets très
intéressants. Il y a en Europe des pays qui sont très
avancés à ce sujet. On a des formules et beaucoup de choses
à discuter mais vous ne soumettez absolument rien, sauf des slogans, des
grands énoncés, de belles expressions mais rien de positif. Je
vous remercie, M. le Président. (16 heures)
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Lac-Saint-Jean et whip du gouvernement.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci, M. le Président. Pour faire la liaison
avec ce que vient de dire le député de...
Une voix: Saint-Laurent.
M. Brassard: Non.
Une voix: Sainte-Anne.
M. Brassard: ...Sainte-Anne, qui disait qu'on ne proposait rien
en matière de participation des travailleurs, je vous signale qu'au mois
de juin dernier, on a adopté, en cette Chambre, un projet concernant une
idée fort excellente de la Fédération des travailleurs du
Québec, le Fonds de solidarité, qui est actuellement en voie de
constitution, pour justement permettre aux travailleurs de prendre des actions,
de participer aux entreprises. Peut-être qu'on l'aurait oublié,
mais il faut le rappeler; en face, les gens ont voté contre ce projet de
loi créant le Fonds de solidarité qui est actuellement en train
de faire un succès.
Quand on examine l'action du gouvernement depuis quelques mois, on doit
constater et reconnaître, à moins d'être un adversaire d'une
partisanerie primaire, que le gouvernement actuel multiplie les efforts,
concentre toutes ses énergies et utilise aussi toutes ses ressources
pour tenter d'accélérer la relance, pour tenter de
développer au maximum l'économie du Québec, pour tenter de
prendre ce qu'il est convenu d'appeler maintenant le virage technologique, pour
tenter de créer de plus en plus d'emplois et également de
réduire le gaspillage des ressources humaines que constitue le
régime actuel de l'aide sociale.
Le gouvernement ne prétend pas avoir trouvé de recette
magique, le remède universel pour guérir tous nos maux, mais au
moins, reconnaissons-le, il agit, il propose des solutions, il met en place des
politiques, des programmes, des mesures de relance. Ai-je besoin de vous
rappeler les principaux éléments du plan de relance
annoncé il y a quelques semaines?
On a précisé récemment le programme de 2 000 000
000 $ de prêts garantis aux entreprises du Québec. Pensons
également à la mise en place de centres de recherche
appliquée dans tout le Québec, à la politique de rabais
des tarifs d'électricité qui sera maintenant étendue
à d'autres secteurs que l'aluminium, à la création de
bourses d'affaires pour les jeunes entrepreneurs, à un vaste programme
de reboisement ayant comme objectif, comme vous le savez, 300 000 000 de plants
pour les trois prochaines années, ce qui créera près de 20
000 emplois au Québec, et à la réforme en profondeur de
l'aide sociale afin de favoriser le retour au travail de ceux qui en sont
aptes.
Bref, quand on fait le compte des actions et des intentions du
gouvernement, on doit conclure que non seulement il y a un effort réel
pour intensifier la reprise économique, mais qu'on réussit
à mettre en oeuvre des solutions adéquates et efficaces, et
à dégager des perspectives d'avenir.
Jetons un coup d'oeil, M. le Président, du côté du
Parti libéral avec, maintenant, à sa tête, le "renouveau"
chef. On pourrait s'attendre enfin à une critique constructive de la
part de ses membres, à des propositions, à des suggestions,
à un programme cohérent, le plus complet possible, bref, à
ce qu'on appelle et à ce qu'il est convenu d'appeler un projet de
société. Pas du tout; rien de tout cela. Vous venez d'entendre le
député de Sainte-Anne; un flot de critiques exclusivement, du pur
négativisme, comme toujours, comme depuis sept ans d'ailleurs. Rien de
positif et rien de concret.
Ce n'est pas seulement moi qui le dis, M. le Président. Dans la
course au leadership
du Parti libéral, l'un des candidats, le député de
Brome-Missisquoi, déclarait à la Presse, dans un article du 20
août 1983 (c'est le député de Brome-Missisquoi qui parle):
"Quand on demande à un péquiste pourquoi il adhère au
Parti québécois, la réponse ne se fait pas attendre. C'est
parce qu'il croit à l'indépendance du Québec. Pour le
Parti québécois, l'indépendance constitue la flamme, le
flambeau de ses partisans. Mais, quand on demande aux libéraux pourquoi
ils adhèrent à notre parti, ils se grattent la tête et,
plus souvent qu'autrement, tout ce qu'ils trouvent à dire, c'est qu'ils
sont libéraux parce qu'ils ne sont pas péquistes, parce qu'ils ne
sont pas séparatistes. Actuellement, continue le député de
Brome-Missisquoi qu'on n'a pas revu en cette Chambre depuis plusieurs semaines,
le corridor libéral est tellement large qu'il n'y a plus de ciment. Il
n'y a plus rien qui tienne le parti ensemble à part le fait que nous
sommes tous antipéquistes. Je veux donner au parti des orientations
précises - il n'en aura pas l'occasion, puisqu'il n'a pas
été élu - pas pour rétrécir le corridor,
mais pour indiquer - c'était une belle intention - dans quelle direction
on se dirige." C'est le député de Brome-Missisquoi qui dit cela.
Le Parti libéral n'a pas de ciment pour réunir ensemble ses
membres. Il n'a pas de programme; il n'a pas de direction; il n'a pas
d'orientation précise. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le
député de Brome-Missisquoi, à l'occasion de la course au
leadership du Parti libéral du Québec.
Le Parti libéral du Québec, ce qui le caractérise,
c'est ce que nous dit le député de Brome-Missisquoi; ce qui le
caractérise, ce qui le distingue, c'est qu'il est contre, il est contre
l'indépendance du Québec. Il n'est pas pour quelque chose.
Normalement, on pourrait s'attendre qu'un parti politique soit pour quelque
chose. Le Parti libéral, ce qui le caractérise, c'est qu'il est
contre quelque chose; il est contre l'indépendance du Québec.
Remarquez qu'on pourrait à la rigueur dire aussi qu'il est pour
quelque chose, mais c'est un peu gênant de dire qu'il est pour la
dépendance. Puisqu'il est contre l'indépendance, cela veut dire
qu'il est pour la dépendance. Il est pour son contraire, mais c'est un
peu gênant de dire publiquement qu'on est pour la dépendance.
C'est un peu humiliant. Alors, tout ce qu'il trouve à dire, c'est qu'il
est contre l'indépendance. Voilà le seul ciment du Parti
libéral. C'est sa déclaration et c'est l'analyse qu'en fait le
député de Brome-Missisquoi.
Certains rétorqueront: Oui, mais cela va changer, M. Bourassa est
maintenant à la tête du Parti libéral, et il a
déjà rendu public un programme complet à l'occasion de la
course au leadership. Regardons-le un peu, M. le Président, ce
programme. On verra d'abord que M. Bourassa n'a pas tellement changé
depuis sept ans. Il continue toujours... Ce qui compte pour lui, c'est de faire
semblant, c'est de donner l'impression. Pour lui, ce qui compte, c'est
l'impression beaucoup plus que la réalité, c'est de jeter de la
poudre aux yeux, de faire illusion.
Regardons rapidement ce programme. M. Bourassa, pendant la campagne au
leadership a rendu public un document sur les hautes technologies. J'en ai pris
connaissance. La conclusion est très facile à tirer; il s'agit
purement et simplement d'un plagiat du document gouvernemental Le virage
technologique, publié en 1979. C'est un plagiat. Cela n'a rien
d'original. Il n'y a rien d'original dans ce document. C'est une copie conforme
du virage technologique. Il en est encore d'ailleurs à la phase
d'identification des objectifs en matière de science et de technologie,
alors que nous sommes entrés, depuis plusieurs mois, dans la phase des
réalisations.
Dans le journal d'aujourd'hui, on pouvait prendre connaissance du fait
que le Québec implantait à Laval un complexe de biotechnologie,
un centre de recherche en biotechnologie. Donc, nous sommes déjà
rendus à la phase de réalisation, alors que dans son document, M.
Bourassa n'en est qu'à la phase d'identification des objectifs. Il
demeure donc, comme toujours, dans le vague, dans le flou, au niveau des voeux
pieux, alors que nous sommes déjà, quant à nous, au stade
de l'action concrète en cette matière.
C'est un peu décevant, puisqu'on aurait cru que sept ans de
soi-disant réflexion lui auraient peut-être permis d'effectuer
à tout le moins le rattrapage requis pour nous rejoindre en
matière de science et de technologie.
Il a également publié un autre document sur le commerce
extérieur. Là aussi, c'est un ramassis de bonnes intentions, de
voeux pieux, d'éloges de la vertu. J'en donne un exemple. Parmi les
principes directeurs, il dit: "L'aide gouvernementale doit être
accordée en priorité aux entreprises québécoises
commercialement viables."
Comme voeu pieux, on peut faire difficilement mieux! "Celles-ci doivent
offrir des produits et des services de qualité à des prix
concurrentiels." C'est vraiment l'éloge de la vertu, dans le domaine du
commerce extérieur!
Il propose également dans ce document - un autre exemple - des
mesures qu'on applique déjà. Il propose un programme de garantie
de risques économiques et de risques de change, ce qui est
déjà en place. La SDI a déjà un programme similaire
qui complète celui de la Société canadienne d'expansion
des exportations. (16 h 10)
Quand on examine le document sur
l'agro-alimentaire rendu public, toujours à l'occasion de la
course au leadership, par M. Bourassa, là, on est en face de ce qu'on
pourrait appeler un monument d'ignorance, d'incohérence et de
fausseté. Là, c'est vraiment le comble, c'est le sommet. D'abord,
il annonce ses couleurs dès le départ en dénonçant
avec vigueur la politique d'autosuffisance et d'auto-approvisionnement du
gouvernement actuel depuis 1976. Je vous en cite quelques extraits, c'est
très révélateur. "Au cours de son mandat, dit-il, le
gouvernement actuel a poursuivi son objectif d'indépendance en proposant
sa politique d'autosuffisance. Au nom du nationalisme, le Parti
québécois a ainsi entraîné des producteurs dans une
aventure." Plus loin on peut lire ceci: "Le seul but qu'il poursuivait -
parlant du Parti québécois -était de faire passer
l'autosuffisance agricole pour de l'indépendance économique et
politique." Encore plus loin, à la page 14 du même document: "Au
niveau des autres productions, le Parti québécois a lancé
plusieurs d'entre elles dans le seul but de satisfaire les visées de sa
politique irréaliste d'autosuffisance et d'indépendance." J'en
passe.
En d'autres termes, on retrouve l'équation suivante dans ce
document. L'option indépendantiste du gouvernement actuel et du Parti
québécois égale politique d'autosuffisance en
matière agro-alimentaire. M. Bourassa, dans son document, fait
l'équation. L'option indépendantiste, cela égale une
politique d'auto-approvisionnement et d'autosuffisance agricole. Comme il est
contre - on le sait, tout le monde le sait -notre option, comme il est contre
la souveraineté, comme il est contre l'option du Parti
québécois, il en conclut évidemment de façon
enfantine et ridicule qu'il faut aussi s'opposer à la politique
d'auto-approvisionnement, à la politique d'autosuffisance en
matière agricole. Mais peut-être est-il contre cette politique
d'autosuffisance parce que sous son gouvernement la situation s'était
gravement détériorée à ce chapitre.
En 1969, à la veille de la prise du pouvoir par le Parti
libéral, le degré d'autosuffisance agro-alimentaire au
Québec était de 60,5%. Il est descendu, en 1973, à 50,4%.
Il s'est retrouvé en 1976, à la fin du régime Bourassa,
à 47,4%. Une dégradation absolument effarante en matière
de degré d'autosuffisance agro-alimentaire. Grâce à nos
politiques, toutefois, il faut mentionner que le degré d'autosuffisance
est de nouveau, au Québec, de 60%. Dans le domaine des
céréales, par exemple, la production est passée de 762 000
tonnes, en 1976, à 1 745 000 tonnes en 1982. En cette matière, le
degré d'autosuffisance est donc passé de 31% à 54%. En
1990, Agriculture Canada prévoit, dans le domaine des
céréales, que notre degré d'autosuffisance sera de l'ordre
de 82%. C'est cela qu'il qualifie d'aventure. C'est cela qu'il qualifie de
politique irréaliste et de politique rétrograde. Pour tout dire,
M. Bourassa, pour l'agriculture du Québec, disons le carrément,
c'est un danger public.
Il y a aussi des faussetés énormes dans ce document sur
l'agriculture au Québec. Sur SOQUIA, par exemple. Il accuse SOQUIA
d'entrer directement en concurrence avec l'entreprise privée. C'est
l'accusation formelle qu'il fait dans son document. Or, c'est tout à
fait faux. Conformément à son mandat et à sa vocation,
SOQUIA soutient et apporte une aide à l'entreprise privée et ne
concurrence pas l'entreprise privée. Elle la soutient. Il suffit de
voir, dans le rapport annuel de SOQUIA, la liste des entreprises dans
lesquelles SOQUIA a une participation. Sur 18 entreprises, il y en a une seule
où SOQUIA est majoritaire. La moyenne de participation se situe autour
de 30%. Donc, c'est une participation minoritaire. Il ne s'agit donc pas d'une
concurrence déloyale, mais purement et simplement d'une aide et d'un
soutien à l'entreprise privée. On pourrait conclure à ce
sujet, M. le Président, ce que concluait Mario Dumais dans La terre de
chez nous du 13 octobre 1983, à propos du document Bourassa sur
l'agriculture. Il disait ceci: "L'espace nous manque pour relever toutes les
inepties que contient le mauvais pamphlet qu'a produit M. Bourassa.
L'agriculture est trop importante et le métier d'agriculteur trop
respectable pour que la partisanerie politique excuse la production d'un
dossier aussi peu sérieux."
Un parti politique, en face de nous, sans programme, sans orientation,
sans projet, sans politique. Non seulement le Parti libéral n'a pas de
programme, non seulement il n'a rien à proposer, sauf des critiques
purement négatives, mais avec le retour de l'ancien chef on voit
apparaître au palmarès ou au "hit parade", si vous
préférez, les vieilles rengaines d'autrefois, les bonnes vielles
tounes d'antan. Ce qui démontre éloquemment d'ailleurs que M.
Bourassa n'a pas changé, il est toujours le même, aussi simpliste,
aussi, je dirais, démagogue distingué et aussi "casettophone"
qu'avant. Il y a d'abord cette rengaine de la Baie-James que nous entendons de
nouveau. M. Bourassa se promène actuellement au Québec - ce
depuis plusieurs mois - en se présentant comme un expert en
hydroélectricité et l'expert prêche le bon peuple. Il faut
développer, dit-il, la phase 2 de la Baie-James. Pourquoi?
Réponse: Pour vendre de l'électricité aux
Américains.
On l'interroge à plusieurs reprises: Combien de mégawatts
seront aménagées? 5000, 7000, 10 000 mégawatts? Il ne le
sait pas. Combien cela coûtera-t-il? 8 000 000 000 $, 12 000 000 000
$,
15 000 000 000 $, 20 000 000 000 $? Il ne le sait pas non plus. C'est
l'ignorance totale à ce sujet. M. le Président, drôle
d'expert en hydroélectricité. D'ailleurs, si vous le voulez bien,
comparons nos experts. Car le premier ministre actuel, il est bon de le
rappeler, on l'a peut-être oublié, est aussi un expert en
hydroélectricité, car c'est lui qui est le père de la
nationalisation de l'électricité. En 1962-1963, c'est lui qui a
mis au monde, qui a mis en place ce merveilleux outil de développement
économique que constitue Hydro-Québec et sans lequel, disons-le
en passant, la Baie-James n'aurait pas été possible.
D'un côté, M. Lévesque, le père de la
nationalisation de l'électricité. En 1962, quand il demande
à la population de l'appuyer, à l'occasion d'une élection,
M. Lévesque dit: La nationalisation de l'électricité va
nous coûter 600 000 000 $. Les adversaires d'alors, il y en a qui s'en
souviennent, en particulier M. Johnson, disaient: C'est impossible, cela va
dépasser le 1 000 000 000 $. M. Lévesque disait: La
nationalisation de l'électricité va coûter 600 000 000 $.
On nationalise et savez-vous combien cela a coûté? J'aimerais vous
le rappeler, cela a coûté 604 000 000 $, un écart
insignifiant de 4 000 000 $.
Voyons l'autre expert, celui qui est redevenu le chef du Parti
libéral du Québec et qui se promène un peu partout en
plastronant et en s'affichant comme un expert en
hydroélectricité. Le 29 avril 1971, M. le Président, vous
vous souvenez sans doute, au petit Colisée de Québec, devant une
foule partisane, M. Bourassa annonce le projet de la Baie-James au coût,
dit-il, de 5 000 000 000 $. Première petite erreur, il se trompe de
rivière; drôle d'expert. Il annonce l'aménagement des
rivières du sud, ce sont celles du nord qu'on va aménager, dont
la rivière La Grande. Deuxième petite erreur - de taille
celle-là - il se trompe de coût, il annonce 5 000 000 000 $ en
1971. En 1974, le coût de la Baie-James est passé à 11 900
000 000 $, en 1976 c'est rendu à 16 500 000 000 $. C'est
multiplié par plus que trois.
Heureusement, en 1976, nous sommes arrivés au pouvoir et nous
avons réduit les coûts de 1 000 000 000 $. Finalement cela a
coûté 15 500 000 000 $ quand notre expert est revenu au pouvoir
pour remplacer le leur. (16 h 20)
Alors, expert pour expert, je dois vous dire que je
préfère le nôtre. Il est pas mal plus fiable. Il est pas
mal plus sûr. Il est aussi pas mal plus efficace. Quand on
considère de plus ce que l'on pourrait appeler les approches
stratégiques concernant l'utilisation de l'électricité, ma
confiance demeure toujours à l'endroit du premier ministre actuel.
Quelle est l'approche stratégique de M. Bourassa en
matière d'électricité? Elle est très simple.
Produisons de l'électricité pour la vendre aux Américains
et ainsi créer des emplois ailleurs. L'approche stratégique du
premier ministre actuel et du gouvernement actuel est tout à fait
différente. Elle consiste à dire: Nous avons des surplus.
Utilisons au maximum ces surplus pour développer l'économie du
Québec, créer ici chez nous des emplois et des entreprises. Avec
M. Bourassa, des jobs aux États-Unis. Avec M. Lévesque, des jobs
chez nous. C'est là toute la différence du monde entre les deux
approches stratégiques en matière d'utilisation de
l'électricité.
Il y a une autre rengaine aussi qui revient fréquemment et qu'on
a entendue dans les discours sur le budget. L'autre rengaine, c'est celle de
l'incertitude. On l'a entendue à satiété à
l'époque référendaire et elle nous revient. C'est la
même vieille rengaine, celle qui consiste à dire que notre option
est dangereuse, que notre option de souveraineté est nuisible aux
investissements. C'est le refrain qu'on entend fréquemment et chacun des
députés de l'Opposition qui défile à l'occasion du
débat sur le budget reprend la même rengaine qu'on était
habitué d'entendre à l'époque référendaire
avant 1980. Or, il faut dire qu'elle n'est pas conforme aux faits. Elle n'est
pas conforme à la réalité.
De 1976 à 1983, en dollars constants, le Québec a connu un
meilleur taux de croissance économique que l'Ontario, sa voisine, 13,2%
versus 11,6%. Donc, un meilleur taux de croissance économique au
Québec par rapport à l'Ontario, avec un gouvernement
souverainiste ici chez nous et un gouvernement fédéraliste
à Toronto. La rengaine n'a pas grande signification; la rengaine sur
l'incertitude, la rengaine sur le caractère nuisible ou dangereux de
notre option n'est pas fondée du tout. Quand on regarde, d'ailleurs...
Et je vous rappelle en passant qu'avant le référendum, à
une époque qui devait être une époque d'incertitude
extraordinaire, chez nous, dans ma région, au Saguenay-Lac-Saint-Jean,
c'est à cette époque qu'on a connu le plus gros investissement
privé de toute l'histoire économique de la région depuis
son ouverture dans les années 1840, un investissement de 500 000 000 $
de la part de l'Alcan à la ville de La Baie, pendant cette
période dite d'incertitude au cours de laquelle, prétendait-on,
notre option était nuisible aux investissements.
D'ailleurs, examinons les chiffres. Actuellement, le climat, dit-on, est
très propice, est très bon pour les investissements, et ces
derniers, d'ailleurs, se multiplient dans tout le Québec. Pensons aux
investissements dans le secteur de l'aluminium, 500 000 000 $ à
Reynolds,
1 500 000 000 $ à Bécancour pour Pechiney, 370 000 000 $
dans le secteur des mines depuis mars dernier, et c'est ainsi dans à peu
près tous les secteurs au Québec. Les investissements se
multiplient et le taux de croissance des investissements est nettement meilleur
qu'en Ontario et même que dans l'ensemble du Canada. Les hommes
d'affaires sont satisfaits. On pouvait lire dans le Journal de Québec du
19 novembre l'article suivant: "Les hommes d'affaires étrangers ont
recommencé à investir leurs capitaux au Québec parce que
le climat est meilleur qu'il y a un an ou deux et que les conditions sont plus
propices aux investissements." Savez-vous qui a dit cela? Ce n'est pas un
péquiste ni un ministre du gouvernement actuel. C'est ce que
prétend le président du comité exécutif de la
Communauté urbaine de Montréal, M. Pierre Des Marais II. "Devant
un groupe d'hommes d'affaires de la Chambre de commerce canado-suisse, l'une
des plus prestigieuses dans ce domaine, M. Des Marais s'est dit convaincu que
la reprise économique est véritablement amorcée et que le
meilleur reste à venir. Cela se sent, a-t-il dit."
Non seulement cela se sent, mais cela se vérifie; les chiffres
sont là pour le prouver. En matière de croissance de la
production, en matière de taux de croissance, selon le Conference Board
- ce n'est pas le Parti québécois, on l'a déjà
mentionné, mais soulignons-le tout de même de nouveau - le
Québec est en tête parmi les provinces canadiennes avec un taux de
croissance de 3% pour 1983 et un taux prévu, pour 1984, de 3,2%. C'est
meilleur qu'au Canada, qui se situe à 2,1%; c'est aussi meilleur qu'en
Ontario qui se situe à 2,7%; c'est meilleur que presque toutes les
provinces du Canada, sauf la Nouvelle-Écosse qui est à 3,5%.
C'est le taux de croissance de la production.
Quand on nous dit que notre option est dangereuse et nuisible, les
chiffres démontrent tout à fait le contraire. Regardons au niveau
des investissements. M. Desmarais dit: Cela se sent que ça va bien, que
la reprise est amorcée. Cela se vérifie par les chiffres aussi.
En matière d'investissements privés et publics, le Québec
est en tête et bat la marche à ce niveau avec un taux de
croissance, pour 1983, de 2,6% alors qu'en Ontario le taux de croissance est de
1,8% et qu'au Canada, dans son ensemble, on est encore à l'ère de
la décroissance, on est à moins 1,7%.
Par conséquent, cela ne fait pas sérieux de
prétendre que notre option est nuisible aux investissements. C'est tout
le contraire des chiffres du Conference Board, pour ce qui est du taux de
croissance, et de Statistique Canada pour ce qui est des investissements
privés. Ce n'est pas le Parti québécois, c'est donc
très crédible. Cette performance, disons-le de nouveau, se
produit actuellement avec un gouvernement souverainiste, voilà la
réalité. Cette rengaine que nous servent de nouveau les
députés de l'Opposition n'a plus aucune signification, n'a plus
aucun écho, d'ailleurs, dans l'opinion publique, dans la population. Il
n'y a pas d'incertitude de notre côté, quoi qu'en disent les
députés de l'Opposition parce que notre option est connue et elle
est claire; tout le monde le sait et tout le monde la connaît.
D'ailleurs, on en parle tellement, de l'autre côté, qu'il n'y a
personne qui ne connaisse notre option politique.
Nos politiques économiques sont connues aussi, clairement
précisées. Nos intentions sont aussi très claires. De
notre côté, que ce soit en matière de développement
social ou de développement économique ou que ce soit en
matière constitutionnelle, l'incertitude n'existe pas. Je dirais
plutôt que l'incertitude se situe du côté de ceux qui
chantent continuellement la rengaine de l'incertitude, elle se situe du
côté du Parti libéral. Incertitude quant à leur
programme, ils n'en ont pas; il n'y a rien de plus incertain du
côté du Parti libéral, ils n'en ont pas, aucun programme.
Incertitude quant à leur orientation. Comme le disait - je le rappelais
au début - le député de Brome-Missisquoi, ils n'ont pas
d'orientation parce qu'il disait: II faudrait qu'on se donne des orientations.
Quand on dit "il faut qu'on se donne des orientations", cela signifie qu'on
n'en a pas. Incertitude du Parti libéral quant à leur
orientation, incertitude quant à leur vision sociale, incertitude quant
à leur projet de société car, là aussi, ils n'en
ont pas. Quand on écoute les discours des députés de
l'Opposition, à part la critique de ce que fait le gouvernement, il n'y
a rien de positif. C'est l'incertitude totale de ce côté.
Je dirais, en concluant: Qu'ils continuent comme cela et je vous assure
que le Parti libéral du Québec va demeurer à la place qui
lui convient depuis 1976, c'est-à-dire l'Opposition. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: Les téléspectateurs du Québec,
qui auront eu la joie et le plaisir d'écouter le député de
Lac-Saint-Jean qui vient de terminer son allocution, reconnaîtront sans
doute que le député est aussi vide d'idées que son parti.
Le député de Lac-Saint-Jean a pris 25 de ses 30 minutes à
descendre le Parti libéral du Québec, à descendre
l'Opposition. Il était tellement vide d'idées qu'il n'a pas pu
dire un traître mot sur le mini-budget de son ministre des Finances.
M. Lalonde: C'est vrai.
(16 h 30)
M. Dubois: II s'est levé pour parler sur le mini-budget de
son ministre des Finances, mais il n'en a pas dit un traître mot. Vous
voyez, M. le Président, que c'est l'évidence même que ce
parti-là est vide d'idées, que c'est un parti qui
s'éteint. Enfinl
Le dimanche 13 novembre 1983, lors d'une extraordinaire mise en
scène au salon rouge de l'Assemblée nationale, le premier
ministre du Québec, dans une de ses plus vastes opérations de
propagande et de publicité, offrait aux chômeurs du Québec
et aux assistés sociaux du Québec, son troisième recueil
de voeux de relance en moins d'un an. Il suffirait d'une simple
vérification pour constater que depuis sept ans de pouvoir
péquiste il y a eu plus d'annonces de programmes ou de projets de
relance que d'emplois stables créés au Québec. Je vous
assure qu'il n'est aucunement nécessaire d'être un expert
comptable pour en vérifier l'exactitude.
L'opération propagande ne devait pas s'arrêter là
puisque à peine deux jours plus tard, soit le soir du 15 novembre,
c'était au tour de l'honorable ministre des Finances d'annoncer de son
siège qu'enfin les Québécois pourraient se relever et
qu'enfin il venait de décider de ne nous asséner que 30 coups sur
la tête au lieu de 40. Comme si payer 30% de taxe ascenseur
spéciale c'était nous faire un cadeau dans le domaine des prix du
carburant!
Les exploits du ministre ne s'arrêtèrent pas là et,
avec toute la prestance qu'on lui connaît, il nous annonça un
programme de plantation de cocottes en serre, ce qui produira évidemment
un jour des petits arbustes qui, à leur tour, seront transplantés
en forêt. Ceci représente à peu près l'essentiel de
l'aboutissement de quatre mois de travail intensif de la part du Comité
des priorités économiques du Parti québécois et
celui du gouvernement qui détient les guides du pouvoir.
En réponse à une question de l'Opposition, le premier
ministre nous a indiqué qu'un programme aussi vaste qu'ingénieux
commandait beaucoup d'efforts. Il exigeait de suspendre les travaux de
l'Assemblée nationale pour une période d'un mois
supplémentaire à ce qui avait déjà
été annoncé.
En toute objectivité, je devrais dire qu'il y a aussi un
élément additionnel au projet de relance du Parti
québécois, si on peut l'appeler ainsi, le plan Biron. M. Biron a
annoncé hier aux institutions financières ainsi qu'aux
sociétés manufacturières du Québec, ses intentions
et la teneur de son programme. Les institutions prêteuses seront dans le
coup pour un tiers des déficits s'il y en a.
Je ne veux quand même pas expliquer ici le programme de M. Biron
mais strictement faire allusion au tapage publicitaire qu'il y a eu autour des
2 000 000 000 $. La population du Québec a peut-être compris, et
je pense qu'elle a compris, qu'on mettait 2 000 000 000 $ dans
l'économie du Québec. Le ministre des Finances, quelques jours
après avoir livré son discours sur son mini mini-budget, nous
disait que cela va tellement bien dans ces entreprises que ce programme ne
coûte rien.
D'une part, gros tapage publicitaire à savoir qu'il y a 2 000 000
000 $ pour l'entreprise et le ministre des Finances dit que ça ne
coûtera rien au gouvernement du Québec. Franchement, je pense que
les deux ministres devraient se parler avant de faire des déclarations
aussi folichonnes.
Enfin, ce même gouvernement, par la bouche de son premier
ministre, a eu le culot, il y a quelques jours, de dire aux électeurs de
Mégantic-Compton: Donnez-nous un député de
Mégantic-Compton au pouvoir pour au moins les deux ans qui s'en
viennent. C'est de la vraie folie furieuse de demander cela aux gens de
Mégantic-Compton. Cela fait sept ans que le Québec recule, cela
fait sept ans que l'économie dépérit. Comment le premier
ministre peut-il s'imaginer un instant que les électeurs de
Mégantic-Compton peuvent le prendre au sérieux?
Les résidents de Mégantic-Compton comme tous les autres
résidents du Québec ont leur voyage de ce gouvernement. Ils
n'iront certainement pas s'engloutir davantage et élire un
député péquiste dans le comté de
Mégantic-Compton. Ce serait ridicule de le faire. Je pense que tout le
monde a hâte de voir disparaître ce gouvernement à la
tête du Québec et c'est clair que, dans les deux comtés
où il y aura des élections lundi, vous allez voir le Parti
québécois en faillite, une faillite qui s'ajoute à tout ce
qu'il a connu depuis sept ans.
Le 15 novembre 1976, j'ai été élu
député du comté de Huntingdon en même temps que ce
qu'on appelle communément la portée péquiste de 1976.
À ce moment-là, même devant la prise du pouvoir par le
Parti québécois, je croyais que le progrès au
Québec se poursuivrait. Quelle illusion, M. le Président! Cela a
fait sept ans, le 15 novembre dernier, que j'ai eu l'honneur de
représenter les citoyens et les citoyennes du comté de Huntingdon
à cette Assemblée nationale. Je n'aurais jamais cru
qu'après sept ans, ils auraient à constater et à vivre une
situation aussi pénible et aussi triste que celle que l'on connaît
aujourd'hui au Québec.
Lors de la prise du pouvoir en 1976, l'économie était
bonne. Il y avait peu de déficits au Québec. Les gens
travaillaient au Québec. Il y avait la moitié moins
d'assistés sociaux qu'aujourd'hui. Tous les éléments
étaient place. Toutes les structures avaient été mises en
place par le Parti libéral de 1970 à 1976 pour que la croissance
se
poursuive.
Mais cela a été plutôt sept ans de débandade.
Même avec tous les outils, le parti d'en face n'a pu rien faire de
concret au Québec. Il s'agit de regarder, d'une façon bien
objective, ce qui est arrivé depuis sept ans de pouvoir péquiste,
sept ans d'administration exercée par des rêveurs.
Premièrement, on a eu droit à sept ans de batailles
constitutionnelles stériles qui n'ont rien produit de concret pour les
Québécois. On a vécu et on a entendu de nombreuses
insultes de la part de ce gouvernement péquiste à l'endroit de
nos confrères d'Ottawa, les administrateurs fédéraux,
à l'endroit du pays qui s'appelle le Canada. J'écoutais, tout
à l'heure - je fais une remarque - le discours du député
de Lac-Saint-Jean. Il disait qu'être Canadien, c'est être
dépendant. Tous les gens du globe désireraient venir demeurer au
Canada. Le député de Lac-Saint-Jean dit que c'est être
dépendant que de vouloir demeurer Canadien. C'est, encore une fois, de
la folie furieuse.
Je disais que sept ans d'insultes au gouvernement fédéral,
aux anglophones, aux Canadiens, nous ont menés à la situation
économique que l'on connaît aujourd'hui. À la suite de
toutes les mesquineries insensées de ce parti et à force de
discréditer tout ce qui n'est pas québécois pure laine, on
en est rendu à une situation de péril, je dirais, au
Québec.
Nous sommes également rendus dans un trou, à un
déficit accumulé depuis sept ans d'environ 20 000 000 000 $,
déficit que ce gouvernement a réussi à accumuler à
la suite d'une prise de pouvoir en 1976, alors que tous les
éléments étaient prêts pour une remontée
économique.
On a eu droit à des augmentations fulgurantes des taxes et des
impôts, soit d'environ 40% depuis sept ans. Nous avons eu droit à
presque le double des chômeurs au Québec. Nous avons eu droit
aussi, depuis sept ans, au double des assistés sociaux au Québec.
Nous avons eu droit à 200% de progrès dans le chômage chez
les jeunes. Nous avons connu une bureaucratie écrasante et de plus en
plus lourde durant ces sept ans. Nous avons connu une double
réglementation, abusive. Nous avons eu droit à un grand nombre de
nouvelles régies, de nouvelles commissions, de nouvelles
sociétés, de nouveaux offices. Le nombre a presque doublé
dans les sept ans du régime péquiste. (16 h 40)
Je peux dire que le premier discours que j'ai entendu en cette Chambre
de la part du ministre des Finances, en 1977, comparé avec celui que
j'ai entendu concernant son mini-budget tout dernièrement, tout ce que
je peux en déduire, c'est qu'on est 20 000 000 000 $ de plus "dans le
trou" qu'on ne l'était, on est plus pauvre qu'on ne l'a jamais
été. On a connu une pauvreté progressive depuis sept ans.
Le PQ a réussi à étouffer nos entreprises. Il a
réussi à enlever la motivation chez nos entrepreneurs. Il a
tellement augmenté la réglementation, les taxes et les
impôts que beaucoup d'entreprises ont dû fermer leurs portes. Il a
abusé évidemment de tous les créateurs d'emplois. Il a
abusé des capitalistes. Il a même accusé à certains
moments les multinationales d'être presque des voleuses. Si elles
faisaient de l'argent, c'étaient des voleuses; si elles faisaient
faillite, c'étaient des imbéciles. C'est à peu près
comme cela que se comporte le Parti québécois. C'est comme cela
qu'il évalue le progrès au Québec.
On a presque traité d'indésirables ceux qui ont
participé au progrès économique du Québec,
malgré tous les bois dans les roues que leur a placés le Parti
québécois.
De plus, on sait que, pour le Parti québécois,
l'indépendance passe par la pauvreté. C'est évident
après l'avoir vu fonctionner pendant sept ans, après avoirconstaté pendant sept ans le genre de gestion administrative qu'il a
exercée. Peu importe si le Québec est pauvre, pour autant qu'il
sera indépendant. C'est sa marotte, M. le Président. On peut le
réaliser en regardant toutes les interventions qu'il a faites depuis
sept ans. Tout est aligné sur le capital politique, le capital politique
et électoraliste. Tout est de nature partisane. Tous les gestes
gouvernementaux visent un but, un but ultime, l'indépendance. Qui paie
cela? Qui paie cette dette aujourd'hui, la dette des folies furieuses du Parti
québécois? Ce sont les petits épargnants du Québec,
les travailleurs du Québec, nos assistés sociaux, les
chômeurs, nos jeunes qui ne travaillent pas, qui ne peuvent plus avoir
d'emplois à cause d'une gestion gouvernementale épouvantable,
écrasante.
C'est aussi un gouvernement de 20 semaines, parce que toutes "les jobs"
que ce gouvernement a pu créer depuis sept ans ont été des
jobs de 20 semaines, tout a été du court terme. Jamais on a
réussi à présenter un programme de ce côté
qui permettrait de créer des emplois stables, des emplois à long
terme. Je comprends que le Parti québécois a exercé,
depuis sept ans, un dumping systématique des jobs de 20 semaines au
fédéral. Alors, on a institué des programmes de 20
semaines et on disait: On envoie cela au fédéral. Ce n'est pas
notre pays le Canada, nous envoyons cela au fédéral. Il
paiera.
Eh bien! M. le Président, heureusement pour nous de ce
côté-ci, on sait que le Canada, c'est notre pays, qu'il demeurera
le Canada, que le Québec va demeurer au Canada et on voudrait quand
même agir avec plus de justesse envers le pays qui est le nôtre, et
je pense que c'est inacceptable de
voir un gouvernement du Québec agir d'une telle façon dans
la création d'emplois, surtout quand cet argent vient d'un gouvernement
de notre pays. Si c'était un gouvernement étranger, je dirais: On
va chercher le maximum, mais ce n'est pas comme cela qu'on va bâtir le
Québec, non pas avec des emplois de 20 semaines, loin de là. Tant
que ce gouvernement ne s'arrêtera un jour de penser... De toute
façon, il ne lui reste pas longtemps à penser, parce qu'il
achève et, chose certaine, ce gouvernement ne sera jamais
réélu au Québec.
J'espère qu'il ne nous reste qu'un court terme à subir
l'administration péquiste, mais pour le peu de temps qui reste,
j'espère qu'elle aura assez d'intelligence pour au moins offrir aux
Québécois des programmes de création d'emplois à
long terme et non du court terme de 20 semaines comme elle l'a fait depuis sept
ans.
M. le Président, je lisais un communiqué du ministre de
l'Énergie et des Ressources qui parlait de son programme de plantation
d'arbustes, de reboisement de la forêt. Encore là, le même
ministre nous disait que cela va créer des jobs. Il a parlé de
8000 dans un premier temps, 8000 jobs de 20 semaines encore. Vingt semaines,
à l'intérieur du programme, un an au fédérall C'est
sûr que c'est intéressant si on le voit du côté
séparatiste indépendantiste, mais étant donné que
le Québec sera dans le Canada demain, très longtemps, qu'il va
être toujours dans le Canada, je pense qu'il faut agir d'une façon
plus décente envers notre pays.
Ce gouvernement "dump" des jobs au fédéral. Il fait du
dumping systématique. Je pense qu'on pourrait le dire ainsi. Ce n'est
pas ainsi qu'on va avoir une stabilité de l'économie au
Québec. Ce n'est pas de cette façon qu'on va créer la
certitude chez des jeunes surtout et, particulièrement, qu'ils pourront
vivre au Québec et qu'ils pourront avoir des jobs stables et à
long terme. C'est une vraie bonne chance que l'on vive au Canada. Je pense que
le ministre des Finances ne pourrait jamais dire le contraire. Parce que nous
recevons plus du fédéral que nous donnons. C'est une chose qui a
été bien établie, il y a quelques années. Nous
recevons plus en retour du fédéral que nous donnons en taxes et
en impôts.
Je me demande bien ce que ferait un gouvernement québécois
dans l'optique indépendantiste. Si le Québec devenait
indépendant, le surplus d'argent qui nous provient du
fédéral ne rentrerait plus. Je me demande comment on pourrait
administrer un Québec séparé. Ce serait pas mal difficile,
parce que là il n'y aurait plus de dumping de jobs au
fédéral: on aurait deux pays séparés. Il y a
là matière à réflexion.
Je voudrais parler aussi de subventions irréfléchies de ce
gouvernement. Subventions qui provoquent de temps à autre des faillites
et assez souvent. Souvent, par l'entremise de la SDI, le ministère de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme donne des subventions à des
entreprises qui concurrencent dans la même région une autre
entreprise qui ne reçoit pas de subvention, ce qui souvent pousse la
deuxième entreprise qui ne reçoit pas de subvention à la
faillite et, des fois, qui provoque tellement de concurrence entre les deux que
les deux font faillite, finalement.
Je pense qu'il faudrait que le ministre de l'Industrie, du Commerce et
du Tourisme révise l'application de certains programmes dans certains
secteurs d'activité. Je ne parle pas de tous les secteurs
d'activité. Il est évident que beaucoup de subventions
données par ce gouvernement ont créé des faillites
plutôt que de sauver des compagnies. Dans les domaines,
particulièrement, où il y a surcapacité de production, on
va injecter des fonds pour produire encore davantage. C'est bien sûr
qu'on crée une surproduction qui nuit à toutes les compagnies
impliquées dans un domaine d'activité en particulier. Aussi, on
en a des preuves. Ce gouvernement a subventionné des entreprises qui
étaient déjà pratiquement en faillite. Je pourrais
même produire, en temps et lieu, des preuves, à ce sujet, de
compagnies qui étaient même fermées, techniquement en
faillite, et qui ont reçu de l'aide financière.
Je pense que ces folies furieuses, il va falloir qu'elles cessent, parce
notre déficit de 20 000 000 000 $ ne peut pas monter et monter
progressivement. Bientôt, on devra payer des intérêts des
intérêts de nos emprunts, si cela continue. Je pense que
l'État doit intervenir, oui. Mais, pas pour écraser une
entreprise concurrentielle dans le même domaine d'activité. Dans
les secteurs où on est déficient, dans les secteurs où on
doit importer les produits ici au Canada, ici au Québec, oui
peut-être que c'est bon d'avoir des interventions gouvernementales. Dans
les secteurs où on importe massivement ici, je pense qu'on veut
développer un meilleur degré d'auto-approvisionnement et
d'autosuffisance. Alors j'accepte très bien que le gouvernement s'engage
dans des aides financières. Mais pas pour déplacer des jobs non
plus, parce que souvent, on investit des fonds par le truchement de la SDI, de
la SOQUIA ou d'autres sociétés d'État qui provoquent le
départ de certaines entreprises ou qui affectent la productivité
de certaines entreprises. Souvent des montants sont investis dans des
sociétés où on fait seulement déplacer des
emplois.
On ne crée pas d'emplois bien souvent. On prend les emplois d'un
endroit et on les envoie à un autre. Sur le plan politique, c'est
peut-être bon pour certains députés qui veulent se
créer un capital politique dans leur comté, mais finalement,
à la fin de
l'année, on n'a rien créé. On a
déplacé certains emplois. Je pense que ces folies devront
arrêter, parce que ce n'est pas pour rien qu'on est arrivé
à 20 000 000 000 $ de déficit, c'est parce qu'il y a eu de la
mauvaise gestion et de la mauvaise administration du côté du Parti
québécois. Cela est évident. Pour faire suite aux
multiples dépenses folichonnes du gouvernement et des 20 000 000 000 $
accumulés en déficit depuis sept ans, il va falloir aussi que ce
gouvernement respecte mieux les contribuables du Québec, les payeurs
d'impôts, les petits salariés. C'est quand même eux qui
auront à assumer ces 20 000 000 000 $. Ce ne sont certainement pas les
députés péquistes ni les ministres qui vont
défrayer les 20 000 000 000 $ de déficit accumulé. Ce sera
peut-être leurs enfants, ce sera nos enfants, ce sera les
générations qui s'en viennent qui auront à payer ces
déficits. Je pense que ce serait peut-être intéressant de
connaître les commentaires des gens d'en face à savoir qui, un
jour, paiera ces 20 000 000 000 $ de déficit accumulé. (16 h
50)
Je parlais tout à l'heure de subventions discrétionnaires
et subventions accordées à des compagnies qui n'ont pas
créé d'emplois et n'ont pas créé une
stabilité. Mais on a vu aussi, depuis 1976, le plus grand patronage qui
se soit jamais exercé au Québec. Il y a une différence,
par exemple, c'est que les péquistes ont su faire cela peut-être
d'une façon plus subtile, d'une façon plus obscure, un peu plus
sournoise, un peu plus hypocrite. Mais il y a eu plus de patronage au
Québec depuis 1976 qu'il n'y en avait jamais eu avant.
M. le Président, que penser du droit au travail des jeunes? Dans
les secteurs d'activité de la construction on enlève aux jeunes
le droit de travailler. Un droit fondamental. Je pense que s'il y a un droit
fondamental pour un individu, pour un être humain, c'est bien le droit de
gagner sa vie, le droit de travailler. Mais, dans les métiers de la
construction, on est encore avec le règlement de classification qui ne
permet pas à un jeune, même compétent, de s'insérer
dans le marché du travail. Pourtant, il y a une belle charte des droits
et libertés individuelles qui autorise tout Québécois et
tout Canadien à travailler. Mais une loi péquiste interdit aux
jeunes de travailler dans le secteur de la construction. C'est très
abusif envers ces gens et, étant donné que c'est contraire aux
droits fondamentaux les plus stricts, je pense qu'il y aurait lieu qu'un
changement se produise dans les meilleurs délais.
Nous croyions bien que ministre des Finances ou le premier ministre, le
dimanche 13 novembre, nous annoncerait des amendements au règlement de
placement. Mais nous n'avons eu droit à rien dans ce sens. Le
gouvernement, en ne laissant pas le droit de travailler aux jeunes, les laisse
sombrer dans le désespoir, dans l'oisiveté, dans le
découragement, dans le chômage et ils deviennent automatiquement
insouciants chroniques parce que, M. le Président, quand on n'a pas le
droit de travailler, avec les années on devient insouciant. C'est
vraiment honteux, pour un gouvernement qui se dit démocratique,
d'enlever le droit au travail à des Québécois dans ce
sens. Je pense qu'on pourrait créer des emplois si on laissait une
certaine liberté dans des domaines comme le peinturage de
résidences ou des réparations mineures. On pourrait laisser
travailler des jeunes qui ont une carte de compétence en main, mais qui
n'ont pas de carte de classification. Ce serait pas mal plus motivant que de
les laisser comme bénéficiaires de l'aide sociale à 147 $.
Il y a lieu de réfléchir à ce sujet et j'espère que
le Parti québécois, pour le peu de temps qu'il lui reste au
pouvoir, pourra apporter des amendements aux lois qui régissent le Code
du travail.
Je ne sais pas qui va pouvoir régler, dans un court laps de
temps, toutes les erreurs commises par le Parti québécois. Ce ne
sera pas facile, j'en suis certain, ce sera une tâche très
difficile, mais ce que le Parti québécois nous léguera
d'ici peu ce sera la misère, ce sera la pauvreté, ce sera
l'endettement, ce sera le désespoir, ce sera le chômage et l'exode
hors du Québec. Mais je peux vous assurer que bientôt, lors de la
prise du pouvoir par le Parti libéral, nous allons prendre la situation
en main, nous allons rapiécier tous les débris laissés par
l'administration péquiste. Nous saurons être à la hauteur
de la situation. Nous saurons bien redonner au Québec tout son
dynamisme. Nous saurons bien faire revivre le goût d'investir et le
goût de s'installer au Québec. Nous saurons bien aussi redonner
aux Québécois ce souffle d'air frais que tous attendent avec
impatience depuis très longtemps. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Rousseau.
M. René Blouin
M. Blouin: Merci, M. le Président. J'ai
écouté comme tout le monde le discours du député de
Huntingdon. Jespère que tous les électeurs et les
électrices, enfin, le plus grand nombre possible, des comtés de
Mégantic-Compton et de Jonquière qui devront aller aux urnes,
lundi prochain, ont bien écouté les propos du
député de Huntingdon, qu'ils en ont tiré les leçons
qui s'imposent, qu'ils ont essayé d'abord de le suivre d'une idée
à l'autre - c'était assez difficile - et qu'ils ont retenu au
moins deux
trames: le Parti québécois, c'est l'enfer et le Canada,
c'est le ciel. On a déjà entendu cela, il y a quelques
décennies, au Québec. Cela m'inspire certains commentaires qui,
de toute évidence, doivent être soulignés.
D'abord, le député de Huntingdon a raison de dire que nous
sommes au Canada. Eh bien, oui, nous sommes au Canada. Nous sommes des
Canadiens et des Canadiennes forcés, dans notre esprit, mais nous en
sommes. Nous respectons les règles du jeu puisque, lors du
référendum, la population a décidé majoritairement
qu'elle voulait, encore pour un certain temps, continuer à vivre dans
cet ensemble canadien. Que nous offre cet ensemble canadien qui était
décrit un peu comme le paradis par le député de
Huntingdon? Nous offre-t-il la sécurité? C'est important, dans la
vie, la sécurité. Réfléchissons-y. La
sécurité culturelle et linguistique, d'abord. Le Canada nous
offre-t-il la sécurité culturelle et linguistique? Il y a une
centaine d'années, les francophones formaient environ 50% de l'ensemble
de la population canadienne. Statistique Canada vient de déposer son
dernier rapport. Où en sommes-nous? Le poids relatif des anglophones au
Canada a augmenté de 67% à 68,2% entre 1971 et 1981, alors que
celui des francophones a chuté de 25,7% à 24,6%. Le Canada,
sécurité sur le plan culturel, sur le plan linguistique?
Certainement pas. Mais le Canada est-il un pays - essayons de nous
sécuriser avec quelque chose - qui nous offre au moins une
sécurité face à nos libertés fondamentales? Bonne
question. Voyons quelle est la politique actuelle du gouvernement canadien
à cet égard. On vient de déposer un projet de loi sur le
service canadien de renseignements de sécurité. Qu'est-ce que le
service canadien de renseignements de sécurité? C'est un service
qui, tout bonnement, permettrait à la Gendarmerie royale du Canada de
faire les choses suivantes qui, jusqu'à maintenant, étaient
illégales: monter un système d'espionnage interne, faire de la
manipulation, de l'agitation, de la provocation, écrire de nouveaux
communiqués du FLQ comme elle l'a déjà fait et qui
étaient faux, ouvrir le courrier, incendier des granges, écouter
des conversations téléphoniques entre citoyens ordinaires, faire
du chantage dans le but de recruter des informateurs, poser des bombes et les
faire sauter. Voilà quel est le projet de loi qui est défendu par
le gouvernement canadien, projet de loi sur un service canadien de
renseignement et de sécurité. La sécurité à
l'égard de nos libertés fondamentales, le Canada nous
l'offre-t-il? Je ne pense pas. Mais quelle sécurité nous offre le
Canada? Le Canada nous offre-t-il à nous, Québécois, la
sécurité économique? C'est important, l'économie.
Il faut en parler. C'est une préoccupation constante et avec raison. La
sécurité économique: qui a la sécurité
économique au Canada, qui en profite au maximum?
La recherche. Voici un exemple. C'est très important, la
recherche. On en parle beaucoup par les temps qui courent. On dit que les
sociétés qui auront réussi à investir et à
se développer grâce à la recherche dans des secteurs de
pointe seront celles qui s'en tireront le mieux dans l'avenir. Que fait le
Canada à l'égard du Québec au niveau de la recherche? Nous
accorde-t-il la sécurité? Pour une population de 37% de
l'ensemble canadien, l'Ontario reçoit 52% des fonds de recherche qui
viennent du gouvernement fédéral et qui sont les plus importants.
Le Québec, avec 26% de la population, reçoit 16% des fonds. Non,
nous n'avons pas la sécurité au Canada à l'égard de
la recherche et, pourtant, c'est un aspect fondamental du développement
économique. (17 heures)
Avons-nous la sécurité à l'égard des grandes
entreprises qui viennent s'établir au Canada grâce à la
permission du gouvernement fédéral qui leur indique où
elles doivent s'établir? Non, c'est l'Ontario qui est gagnante avec 90%
de l'industrie automobile, notamment. Avons-nous gagné? Avons-nous eu la
sécurité économique à la suite des retombées
des fameux avions de chasse F-18? Non, à un point tel qu'Ottawa cesse de
mesurer les retombées du F-18, c'est trop gênant. On nous avait
dit, lors du référendum, que nous aurions la moitié de ces
retombées économiques importantes; c'est l'Ontario, encore une
fois, qui en a trois fois plus que nous. Ottawa cesse de calculer qui en a plus
et qui en a moins parce que tout s'en va tellement en Ontario que la
sécurité économique à cet égard aussi se
situe en Ontario. Ce sont des décisions qui viennent du gouvernement
canadien.
Un autre exemple économique. Veut-on assurer au Québec la
sécurité économique? Le projet de loi S-31, qu'est-ce que
c'est? Le projet de loi S-31 est un projet de loi qui, tout bonnement, comme
par hasard, interdit à des sociétés publiques d'investir
dans de grandes entreprises de transport au Canada. Cela vise qui? Est-ce que
cela vise des sociétés ontariennes? Cette fois, ce n'est pas pour
avoir la manne, c'est pour restreindre des activités de
développement sur un territoire du Canada. Quel territoire est
visé? Le Québec, évidemment.
On veut empêcher le gouvernement du Québec, via la Caisse
de dépôt et placement, de prendre une part significative des
actions de Canadien Pacifique. Pourquoi? Parce que Canadien Pacifique a
toujours été concentré en Ontario en termes de
décisions, près de Toronto. Les décisions sont prises
à cet endroit. Nous savons que le Canadien pacifique est la plus
importante société d'investissements privés au Canada. Le
gouvernement fédéral ne veut surtout pas voir
de Québécois mettre la main sur des sociétés
aussi importantes. Il faut garder cela pour le reste du Canada. Ce serait trop
sécurisant à l'égard du Québec. On
préfère toujours sécuriser les Ontariens, et les gens de
l'Ouest canadien plutôt que de sécuriser le Québec.
C'est donc un système, comme nous l'avons vu et contrairement
à ce qu'évoquait le député de Huntingdon, qui nous
insécurise. Que voulons-nous, dans la vie? Voulons-nous être
insécurisés ou être sécurisés? Voulons-nous
faire partie d'un système qui, constamment et sans arrêt, prend
des décisions pour les autres, pour la majorité, pour la
favoriser, pour améliorer son sort ou voulons-nous, au contraire,
prendre dans cet ensemble économique la place qui nous revient parce que
nous sommes capables de la prendre? Nous allons en reparler au cours des mois
qui viennent. Nous allons en reparler jusqu'à la prochaine
élection au cours de laquelle nous allons, encore une fois, demander aux
Québécois de se situer face à la sécurité
collective du Québec. Nous allons nous demander, encore une fois, si
nous pouvons être aussi bons que les autres, si nous avons assez
confiance en nous pour prendre uniquement la place qui nous revient, sans piler
sur les pieds des autres, mais en arrêtant de se faire piler sur les
pieds. Nous y reviendrons au cours des mois qui viennent et nous y reviendrons
à la prochaine élection.
Où sommes-nous? Nous sommes au Canada. Qui avons-nous devant
nous? Nous avons une Opposition - nous venons d'entendre le
député de Huntingdon - qui est encore déprimée. Je
me promène un peu partout et je m'aperçois que les citoyens et
citoyennes du Québec, ceux et celles de mon comté, le
comté de Rousseau, et partout, dans les municipalités, commencent
à réaliser qu'effectivement, le pire est passé, que les
meilleurs mois et les meilleures années s'en viennent. Les gens
commencent à être un peu plus de bonne humeur, à rehausser
leur moral, à se dire: On a passé la pire époque et,
maintenant, il faut envisager des lendemains meilleurs.
Mais les libéraux, eux, sont encore déprimés, sont
encore maussades, sont encore moroses. On ne sait pas à quel moment ils
vont commencer à sortir de la pénombre et à
réaliser, comme la plupart des citoyens et citoyennes du Québec
le réalisent et comme nous le réalisons aussi - et nous ne sommes
pas les seuls, j'en reparlerai - que le ciel commence à être un
peu plus clair et que le soleil commence à percer. Ils ne se sont pas
aperçus de cela.
Je suis très étonné d'entendre le
député de Vaudreuil-Soulanges, le critique officiel du ministre
des Finances qui a présenté ce budget, tenir un discours qui ne
me paraît pas parfaitement logique et cohérent par rapport au
discours qu'il tenait il y a à peine quelques semaines. Je m'explique.
Depuis environ deux ans, c'est-à-dire depuis le moment où le
ministre des Finances a imposé... C'était dur et nous le savions,
mais il l'a fait, parce que la situation économique était telle
qu'il fallait aller chercher des revenus supplémentaires, compte tenu du
fait qu'un grand nombre de nos concitoyens tombaient en chômage, payaient
moins d'impôt et que les services à donner à la population
coûtaient de plus en plus cher. Il a donc fallu prendre des mesures
exceptionnelles et la plus difficile à prendre et celle qui a
été reçue avec le plus de difficulté par l'ensemble
des citoyens et des citoyennes du Québec est, sans aucun doute, la
surtaxe sur l'essence. Il a fallu imposer cette suxtaxe pendant environ deux
ans. Le député de Vaudreuil-Soulanges, Daniel Johnson, se levait
à tout bout de champ, presque invariablement à chacune des
périodes de questions, pointait le ministre des Finances et dans ses
préambules il disait toujours: Compte tenu, M. le Président, que
la surtaxe sur l'essence a provoqué et provoque l'effondrement de
l'économie au Québec, le ministre des Finances pourrait-il me
dire... Il poursuivait alors avec une question qui avait certaines variantes -
cela revient quand même toujours au même - de temps à
autre.
Pendant deux ans on a entendu cette rengaine-là. Selon le
député de Vaudreuil-Soulanges, la surtaxe sur l'essence
était un des éléments qui provoquaient l'effondrement -
selon ce qu'il disait - de l'économie au Québec. Parmi ceux qui
l'écoutent il y en a qui finissent par se dire: C'est son opinion, il
doit y croire, il a peut-être raison... Il y en a qui se posent des
questions en écoutant cela. Or, événement important, il y
a deux semaines environ, en fait le 15 novembre, le ministre des Finances a
annoncé à cette Assemblée nationale, et toute la
population a été rapidement informée, que la surtaxe sur
l'essence allait diminuer de moitié. Donc, selon la logique du
député de Vaudreuil-Soulanges, si, lorsqu'elle était
complète, elle provoquait l'effondrement de l'économie du
Québec, si elle diminue de moitié cela va faire remonter
l'économie du Québec, j'imagine. Ce doit être significatif,
ce doit être important. Or, que dit le député de
Vaudreuil-Soulanges, quelques minutes seulement après cette annonce, lui
qui disait depuis deux ans que la surtaxe sur l'essence était le
fléau économique du Québec? "Et ce soir, disait-il, les
Québécois devraient se réjouir d'ici le 31 mars 1984, de
la baisse de la taxe sur l'essence qui leur fera économiser - à
chacune des familles québécoises - à peu près 80
$." Ce n'était plus important tout d'un coup. "Deux réservoirs,
deux "tank" de gaz. Merci, M. le ministre." Cela devenait deux "tank" de
gaz,
80 $, des niaiseries, des pinottes, alors qu'au moment où la taxe
a été instaurée c'était la fin du monde.
Je crois que le député de Vaudreuil-Soulanges n'est pas
sérieux. Il aurait avantage à faire attention parce que, s'il
continue avec de pareils scénarios, sa crédibilité dans le
public risque d'être lourdement entachée. Comment en effet,
peut-on croire un homme qui, du jour au lendemain, essaie de nous faire croire
que c'est la fin du monde et, lorsqu'on enlève la moitié de la
fin du monde, il vient nous dire qu'il n'y avait rien là? J'invite le
député de Vaudreuil-Soulanges à réfléchir
à ces questions s'il veut être pris au sérieux par la
population du Québec.
Ce n'est pas tout. Il n'y a pas que le député de
Vaudreuil-Soulanges de l'autre côté. Il y a un ancien nouveau, le
chef du Parti libéral, M. Robert Bourassa. Que disent les proches de M.
Bourassa, ses anciens proches ou ceux qui sont encore députés?
Que pensent-ils de lui? Est-ce que c'est un homme qu'ils estiment ou si c'est
un homme au sujet duquel ils se posent certaines questions? (17 h 10)
Un des importants ministres sous le gouvernement Bourassa, de 1970
à 1976, dit à peu près ceci de M. Bourassa: "M. Robert
Bourassa - ce n'est pas moi qui parle; c'est M. Guy Saint-Pierre qui a
été ministre sous le gouvernement Bourassa - est un homme
tourné vers le passé, qui a les mêmes défauts qu'en
1976."
Une voix: Ils ne se parlent pas depuis longtemps.
M. Blouin: II le connaît. M. Saint-Pierre continue: "Robert
Bourassa a les mêmes défauts qu'avant. Il a l'esprit tourné
vers le passé et non vers l'avenir. Il veut prouver qu'il avait raison
dans le passé. Devant les défis économiques importants, la
dernière chose dont on a besoin, ce sont des gens qui pensaient avoir
les solutions en 1960 ou en 1976." C'est son ex-collègue, M.
Saint-Pierre, qui pense cela de lui.
Une voix: Garneau ne pense pas la même chose.
M. Blouin: II dit aussi: "N'est-il pas étonnant que le
leadership du Parti libéral du Québec qui a le vent dans les
voiles, selon les sondages populaires, ne soulève pas plus
d'intérêt chez les personnes de fort calibre", laissant entendre
par là, selon son jugement, que M. Bourassa ne fait pas partie de cette
catégorie d'hommes publics.
Mais ce n'est pas tout. Il y a même des députés qui
siègent encore avec nous, qui ont une triste opinion du chef du Parti
libéral du Québec.
Le député M. Gratton - quel est le nom de son
comté?
Une voix: Gatineau.
M. Blouin: Le député de Gatineau, que pense-t-il du
chef du Parti libéral du Québec? En fait, M. Gratton aurait
préféré la venue de M. Garneau. Celle de M. Bourassa le
déçoit terriblement. Ce n'est pas moi qui le dis; c'est M. Michel
Gratton. "M. Gratton voit dans M. Garneau le type de leader qu'il attend du
PLQ. M. Bourassa, dit M. Gratton, est une hypothèque.
Des voix: Oh non!
M. Blouin: Ce n'est pas tout. Il y en a d'autres. Il y en a
même un qui, lui, un peu comme le député de
Vaudreuil-Soulanges, sans aucune espèce de vergogne, change
d'idée, change de chemise, d'une journée à l'autre. Cela
ne le dérange pas du tout. Écoutez bien son histoire! Il
s'appelle M. Marc-Yvan Côté et il est député de
Charlesbourg depuis quelques mois. On sait que M. Marc-Yvan Côté
était un supporteur de M. Raymond Garneau et il a pris des initiatives.
Il a voulu faire démarrer un mouvement pour que M. Raymond Garneau
finisse par accepter de se présenter à la chefferie du Parti
libéral parce qu'il considérait que c'était un candidat de
haut calibre. On lit, dans le Journal de Québec du 16 mai 1983: "Robert
Bourassa qui, tel un marathonien, mène lentement sa campagne depuis
quelques mois, ne serait pas le candidat de l'unanimité." Il y en a qui
ne l'aiment pas. "C'est pourquoi M. Côté - il ne l'aime pas -
cherche à lui opposer un adversaire de talent - concluant, j'imagine,
que l'autre n'en a pas - et d'expérience aux vues
fédéralistes solides." C'est M. Marc-Yvan Côté qui
dit cela et qui devient, quelques semaines plus tard, son principal
organisateur.
M. Marc-Yvan Côté, le député de Charlesbourg:
"Le prochain chef libéral devra être un libéral et un
fédéraliste sincère et non pas - faisant allusion à
M. Bourassa - un cryptoséparatiste et un social-démocrate."
Pourtant, quelques semaines plus tard, il devenait son principal organisateur.
Comme c'est curieux. M. Côté va plus loin et établit un
lien direct entre sa victoire et le fait qu'il soit identifié à
M. Raymond Garneau. Il venait de gagner ses élections partielles.
"Beaucoup de gens de mon comté, disait-il lorsqu'il a été
élu - c'est une déclaration qu'il a faite au Journal de
Québec - disaient qu'ils m'appuyaient parce que je soutiens la
candidature de M. Raymond Garneau. Il y en a plusieurs qui m'ont dit qu'ils ne
voteraient pas libéral si M. Garneau n'était pas le chef du parti
lors des prochaines élections générales."
Des voix: Bravo!
M. BJouin: Voilà les témoignages que les
électeurs de Charlesbourg ont transmis à leur
député Marc-Yvan Côté qui, quelques semaines plus
tard, devenait curieusement l'organisateur du nouveau chef du Parti
libéral, M. Robert Bourassa.
Voilà ce qu'on dit de Robert Bourassa, mais, lui, que dit-il?
Robert Bourassa, c'est un homme qui parle d'hydroélectricité. Il
se présente comme le fin connaisseur de l'hydroélectricité
au Québec. Tout à l'heure, le député de
Lac-Saint-Jean a bien expliqué que le père de
l'hydroélectricité au Québec, c'était le premier
ministre actuel et, pour des raisons que je vais démontrer maintenant,
nous allons voir quel est, comme disait le député de
Lac-Saint-Jean, le véritable expert en cette matière.
Vous connaissez les choix que le gouvernement du Québec a faits
à l'égard de l'utilisation de l'hydroélectricité et
vous savez que le Québec est un lieu privilégié à
l'égard des réserves hydroélectriques. C'est
intéressant de savoir cela. Si on transpose cela en termes de barils de
pétrole, les réserves hydroélectriques du Québec
représentent 54 000 000 000 de barils de pétrole. C'est
l'équivalent des réserves de l'Arabie Saoudite. L'Alberta, que
tout le monde convoite, qui a du pétrole, combien a-t-elle de milliards
de barils de réserve? Non pas 54 000 000 000, comme le Québec, si
on le transpose en électricité, 17 000 000 000 de barils. Nous
voyons donc que nous avons là une ressource qui est fondamentale, et
c'est le premier ministre actuel, M. René Lévesque, qui avait
éveillé la conscience populaire au début des années
soixante à cette évidence dont il fallait assurer le
développement intelligent et dont il fallait, bien sûr, devenir
propriétaire.
M. Bourassa dit que nous devons vendre nos surplus aux
États-Unis. Le gouvernement actuel dit, bien sûr, qu'il faut en
vendre à l'extérieur, mais qu'il faut garder une part
significative de ces surplus pour développer l'entreprise au
Québec, lui vendre de l'électricité, lui vendre de
l'hydroélectricité moins cher que cela ne coûte, en fait
pour l'inviter à venir chez nous. M. Bourassa dit: Non, je suis le
champion des ventes à l'extérieur de
l'hydroélectricité, le champion!
Voici un tableau qui illustre - je ne sais pas si on peut bien le voir,
je l'espère -les ventes d'électricité aux
États-Unis au cours de la dernière décennie, avec les
projections jusqu'en 1988. C'est très intéressant. C'est un
tableau qui démontre qu'en termes de dollars canadiens les ventes
d'électricité aux États-Unis, en 1972,
représentaient 500 000 $. Ce n'était pas beaucoup, 500 000 $ en
1972. M. Bourassa était là depuis deux ans.
En 1975 - j'en saute quelques-unes; vous pouvez avoir un
problème, parce que j'ai mis des couleurs, du rouge pour la
période de M. Bourassa, la période libérale, et du bleu
pour la celle du Parti québécois, la période
péquiste; je comprends que vous ne voyiez pas beaucoup le rouge, mais ce
n'est pas une erreur, c'est parce qu'il n'y en a pas beaucoup - 16 200 000 $;
en 1976, cela n'augmente pas, cela tombe, 10 000 000 $. Voilà maintenant
l'arrivée du Parti québécois. Qu'est-ce que cela donne?
Cela donne, en 1983, au moment où nous nous parlons, 32 fois plus
d'exportations d'hydroélectricité que sous la période de
M. Bourassa et, en 1988, selon les ententes qui ont été conclues
par le premier ministre, M. Lévesque, et les États de la
Nouvelle-Angleterre, il y aura 88 fois plus d'exportations
d'électricité au Québec que sous la période de
l'expert Robert Bourassa.
Le gouvernement a annoncé - les libéraux ont essayé
de tourner cela en dérision; ce n'est pas ridicule, c'est très
sérieux et c'est très important - un plan de relance il y a
quelque temps. Je leur demande de faire attention aux qualificatifs qu'ils
attribuent à ce plan de relance s'ils veulent être d'accord avec
leur chef actuel, Robert Bourassa, parce que, le lendemain de la
présentation par M. Lévesque du plan de relance, Robert Bourassa
qui passait à la télévision à son tour n'a pas dit,
comme j'ai entendu certains députés libéraux le dire,
qu'il n'y avait rien là et que c'étaient des insignifiances. Non
ce n'est pas cela qu'il a dit. M. Bourassa a dit le lendemain, et je cite ce
qui est rapporté dans le Devoir, "que les mesures de relance qui avaient
été annoncées par le premier ministre Lévesque
étaient des mesures louables. S'il dit que c'est louable, c'est parce
qu'il trouve cela bon, et s'il trouve cela bon, c'est probablement qu'il avait
pensé à certaines de ces mesures, mais qu'il y en a eu tellement
plus qu'il pensait, qu'il trouve cela louable. Il est porté à
louer le gouvernement après cette annonce. Le chef du Parti
libéral qui loue le gouvernement le lendemain des annonces. II ajoute,
parce qu'il faut bien qu'il soit chef de l'Opposition un peu: Mais c'est trop
tard. Si c'est louable et que c'est trop tard, selon son avis, qu'est-ce qu'il
fait dans le paysage? Il ne pourra pas être là de toute
façon avant deux ans. (17 h 20)
La position de M. Bourassa dans le dossier de la relance est
extrêmement délicate. Premièrement, il ne peut pas nier que
c'est un plan de relance qui est louable et, deuxièmement, tout ce qu'il
trouve à dire, comme si la crise n'avait pas existé au
Québec, c'est que cela arrive trop tard. Parlons-en deux minutes de ce
plan de relance. C'est un plan de relance qui aidera les entreprises à
se financer lorsqu'on veut faire des affaires, lorsqu'on veut
améliorer
son affaire, lorsqu'on veut agrandir, prendre de l'expansion, exporter
ses produits à l'occasion; cela prend du financement. Il faut avoir de
l'argent. Le gouvernement met de l'avant des garanties de prêts et non
pas comme le disait le député de Huntingdon, qui s'est
trompé encore, des subventions. Ce sont des garanties de prêts qui
s'adresseront aux entreprises et il y en aura d'ici trois ans des prêts
pour environ 2 000 000 000 $, ce qui, bien sûr, contribuera au
développement économique du Québec de façon
très significative.
J'ai parlé de l'électricité. Les forêts
aussi, c'est très important. Voilà une autre de nos très
grandes ressources naturelles au Québec. Il faut procéder
à du reboisement. Si on coupe sans arrêt et qu'on ne prend pas la
peine de faire de façon significative du reboisement pour que les
forêts se regénèrent, nous mettons en péril une de
nos principales ressources naturelles. Encore une fois, regardons un petit
tableau en termes de reboisement. Pour pouvoir conserver cette richesse
naturelle du Québec, la forêt, qu'a fait le gouvernement du
Québec actuel et que s'apprête-t-il à faire? Et qu'a fait
le gouvernement de Robert Bourassa? Vous ne voyez pas encore les couleurs.
N'ajustez pas votre appareil, ils n'ont presque rien fait. Nous allons faire
dix fois plus qu'ils n'ont fait.
Les libéraux, nous les avons entendus tout à l'heure se
plaindre. Ils ne cessent de venir essayer de ternir la situation du
Québec alors que le gouvernement essaie, au contraire, d'indiquer
à tout le monde que la situation accompagne bien la reprise et que nous
sommes bien engagés dans cette reprise économique. Les gens qui
s'occupent d'économie en Angleterre viennent donner des leçons
aux députés du Parti libéral du Québec. C'est le
Financial Times de Londres qui recommande le Québec aux investisseurs.
Ce ne sont pas les députés libéraux qui sont
irresponsables. Les analystes financiers du prestigieux Financial Times de
Londres estiment que le Québec est maintenant devenu une terre où
il est intéressant et valable d'investir.
Il n'y a pas que des étrangers. Il y a des
Québécois qui prennent conscience de cette situation. M. Pierre
Lortie, président de la Bourse, dit que l'État péquiste
aide davantage l'entreprise. Le Québec offre et de loin le meilleur
environnement sur le plan fiscal pour le financement des entreprises, de
déclarer M. Lortie qui, note le journaliste, n'est pas un
péquiste dans ses convictions politiques, mais il a quand même les
yeux ouverts.
M. le Président, je voudrais simplement conclure en vous disant
que quant à nous, nous avons le goût du Québec, nous avons
le goût de la relance, nous avons le goût d'être les
meilleurs, d'être meilleurs que les autres.
Ce que nous proposons à tous ceux qui veulent embarquer dans ce
mouvement, c'est simplement de mettre l'épaule à la roue, de se
cracher dans les mains, de repartir parce que c'est le temps de repartir et de
laisser la morosité à l'Opposition libérale et à
son nouveau chef et d'inviter, comme le gouvernement l'a fait avec son plan de
relance, toute la population à regarder l'avenir avec optimisme et
à finalement créer pour l'ensemble de la population du
Québec des conditions de vie qui seront enviées par toutes les
populations qui nous entourent. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Marquette.
M. Claude Dauphin
M. Dauphin: Merci, M. le Président. Contrairement au
député de Rousseau, qui demandait aux citoyens des comtés
de Johnson et de Saguenay de bien voter, lundi, c'est son droit, moi je demande
aux citoyens de Jonquière et de Mégantic-Compton de bien voter
lundi, de voter pour les deux candidates du Parti libéral du
Québec afin que notre formation puisse avoir deux autres femmes à
l'intérieur de son groupe parlementaire.
Maintenant, M. le député de Rousseau a bien voulu nous
parler de notre chef. J'aimerais vous parler de votre chef moi aussi. Je vais y
revenir occasionnellement tout au long de mon intervention. Au moins, M. Robert
Bourassa, lorsqu'il était premier ministre, n'a jamais souhaité
la mort des personnes âgées. Je n'ai jamais entendu M. Robert
Bourassa, alors qu'il était premier ministre - et qui va le redevenir
d'ici un an ou un an et demi - souhaiter le décès des personnes
âgées. Également, je n'ai jamais vu M. Robert Bourassa
céder le droit de veto du Québec, comme le premier ministre
Lévesque l'a fait. Au contraire, M. Robert Bourassa l'a utilisé
le droit de veto à Victoria, lorsqu'il y a eu une conférence
constitutionnelle. Je n'ai jamais vu non plus M. Robert Bourassa, alors qu'il
était premier ministre et qu'il participait à une activité
dans son comté, avoir 75 ou 80 personnes, comme le premier ministre
Lévesque a eu, la semaine dernière, lors de la
célébration du quinzième anniversaire du Parti
québécois.
Une voix: C'est épouvantable!
M. Dauphin: Également, M. le député de
Rousseau...
Une voix: ...
M. Dauphin: M. le Président, si vous me permettez. M.
Robert Bourassa n'a jamais eu de député-prisonnier à
l'intérieur
de son équipe lorsqu'il était premier ministre du
Québec.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Dauphin: Le député de Rousseau nous parlait du
projet hydroélectrique, du projet de la Baie-James. C'est M. Robert
Bourassa qui a réalisé le projet de la Baie-James et c'est
grâce au projet de la Baie-James si on a pu attirer - ce dont vous vous
vantez continuellement - l'usine Pechiney au Québec en réduisant
les coûts d'électricité. Mais j'y reviendrai
tantôt.
J'aimerais poursuivre mon intervention en touchant un peu plus au
discours sur le budget supplémentaire du 15 novembre prononcé par
le ministre des Finances. Comme vous savez, M. le Président, ce discours
était bien attendu de la population du Québec. Car,
l'avant-veille, le premier ministre du Québec nous avait fait un
spectacle à l'autre télévision, au salon rouge de
l'Assemblée nationale. Des voeux. Mais, malheureusement, deux jours plus
tard, la montagne a accouché d'une souris. Le ministre des Finances,
dans son budget supplémentaire, ne nous a à peu près rien
donné. Qu'est-ce qu'on a découvert, après avoir
écouté le ministre des Finances? On a découvert que le
gouvernement fédéral, au niveau des transferts fiscaux, avait
donné 278 000 000 $ de plus que ce que le ministre des Finances avait
prévu. Qu'a fait le ministre des Finances avec ces 278 000 000 $? Il
s'est dit: On va garder cela pour l'an prochain et on appliquera ces 278 000
000 $ pour les dépenses de l'an prochain. On s'attendait,
l'avant-veille, avec les voeux du premier ministre pour un plan de relance, que
le ministre des Finances injecte des fonds. Il aurait même pu se servir
de ces 278 000 000 $ pour vraiment créer de l'emploi permanent pour tous
nos chômeurs, nos bénéficiaires d'aide sociale et, plus
particulièrement, pour les 40% des jeunes du Québec qui sont,
soit prestataires de l'assurance-chômage, soit
bénéficiaires de l'aide-sociale. Donc, 30 000 000 $ prévus
pour relancer l'économie.
Ce qu'on a découvert également dans le budget
supplémentaire - dans la souris encore une fois - c'est que les taxes -
entre autres, la taxe sur l'essence qui devait être temporaire, qui
devait être éliminée au 31 mars 1983, ainsi que la taxe de
vente qui est passée de 8% à 9%, qui devait être
éliminée en mars 1983 - sont devenues des taxes permanentes. On a
découvert cela également, M. le Président.
Avec les 30 000 000 $, comme je le mentionnais tantôt, c'est un
peu comme un père qui dit à son petit gars, l'avant-veille de
Noël: II va y avoir une enveloppe au bas du sapin de Noël, le 25
décembre. Elle va contenir de l'argent et tu vas pouvoir t'acheter une
bicyclette. Le jeune homme, rendu au 25 décembre, ouvre l'enveloppe et
se rend compte qu'il y a 2 $ dans l'enveloppe. C'est, un peu en caricaturant,
ce que le ministre des Finances nous a démontré le 15 novembre
dernier. Le premier ministre est rendu spécialiste des cadeaux. Des
cadeaux bien enveloppés, bien enrubannés. Il y a juste un
problème, c'est que c'est complètement vide à
l'intérieur. On en a eu la preuve également l'an passé.
(17 h 30)
Comme vous savez, M. le Président, j'ai à coeur les
dossiers des jeunes; d'ailleurs c'est la responsabilité que le caucus du
Parti libéral m'a confiée. Le 9 mars 1983, on s'en souvient,
à grand renfort de publicité, le premier ministre, dans une
déclaration ministérielle, nous annonçait un grand plan
d'action pour les jeunes du Québec; 150 000 000 $ étaient
prévus pour les jeunes du Québec. À l'intérieur de
ce plan d'action était créé un programme, le programme des
jeunes volontaires. Également à l'intérieur de ce plan
d'action gouvernemental se trouvait la création d'un secrétariat
à la jeunesse. Comme vous le savez, à la suite de
différents sommets québécois, les
délégués du sommet québécois à la
jeunesse demandaient la démission du député de
Verchères, nouvellement nommé adjoint parlementaire et
responsable du secrétariat à la jeunesse.
On s'est rendu compte, deux mois après, qu'il
démissionnait sans donner de raison. On s'est rendu compte
également que le directeur du fameux programme qui devait créer
20 000 emplois, M. Raymond Hart du secrétariat à la jeunesse,
démissionnait. Maintenant, c'est le premier ministre, René
Lévesque, qui est responsable du secrétariat à la
jeunesse. Je vous signale que ce n'est aucunement rassurant. Devant ce
programme, les jeunes ont manifesté à cor et à cri pour
dire qu'ils n'avaient été nullement consultés dans son
élaboration, que c'était tout simplement une farce
monumentale.
Ce qui est le plus ridicule, c'est que le 9 mars 1983, il nous
annonçait un plan d'action de 150 000 000 $, création d'un
programme, 100 $ par mois de rémunération pour les jeunes
volontaires, en plus de l'aide sociale, et sept ou huit mois plus tard,
à l'autre télévision, le 13 novembre, au salon rouge de
l'Assemblée nationale du Québec, tous les programmes, tout ce
qu'on a fait depuis deux ans, cela ne valait pas de la m... C'étaient
des "jobines". C'était une farce monumentale. D'ailleurs, l'ex-ministre
de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, le patron de ces
"jobines", de cette farce, démissionne sans donner de raison. Pourquoi
a-t-il démissionné? On le saura éventuellement.
On fait face à un gouvernement constamment en pleine
contradiction. Une journée, on crée des jobs de 20 semaines,
comme le mentionnait tantôt le député de Huntingdon, des
"jobines" de 20 semaines. On refile ensuite les jeunes à
l'assurance-chômage. On les refile sous l'autorité du gouvernement
fédéral et nous, pendant ce temps, on créait d'autres
"jobines", d'autres vingt semaines: ramasser des feuilles dans le parc,
ramasser des pierres au bord des ruelles, au bord des lacs, des "jobines" de 20
semaines. Effectivement, l'Opposition a toujours décrié ces
programmes de "jobines", autant dans les "sex bars", partout. C'étaient
des "jobines". Maintenant, le premier ministre réalise, quelques
années plus tard, que ces programmes n'étaient pas bons, que ces
programmes étaient une farce monumentale. J'emploie effectivement les
expressions qu'il a employées le 13 novembre à la
télé, l'autre télévision.
Le premier ministre du Québec nous disait également, le 9
mars 1983, dans son plan d'action pour les jeunes, que les jeunes
célibataires à 149 $ par mois, c'était pour être
réglé un mois, un mois et demi, deux mois plus tard. On se
retrouve presque un an plus tard et ce n'est toujours pas réglé.
Évidemment, dans son allocution du 13 novembre au soir, à l'autre
télévision, il nous dit qu'il va réorganiser le
système d'aide sociale. On en convient. On est d'accord s'il
réorganise le système d'aide sociale, mais malheureusement, aucun
détail. Quand cela va-t-il s'appliquer? Sûrement pas dans
l'exercice financier qui se termine le 31 mars. Il a prévu 30 000 000 $.
Évidemment, on est fier, pour une fois.
Effectivement, il a démissionné. C'est peut-être une
des raisons de sa démission, qu'il soit allé à Ottawa,
qu'il se soit assis avec son homologue fédéral et, à ce
qu'on nous a dit, qu'il ait pu s'entendre pour une fois. Imaginez-vous, le
gouvernement du Québec, péquiste, séparatiste, s'entendant
avec le gouvernement fédéral. C'est un peu notre problème
depuis sept ans. Je dirais que c'est un des problèmes majeurs. Le Parti
québécois, dans son programme politique, à l'article 1 qui
est le but de son existence, veut la souveraineté du Québec,
l'indépendance, la séparation du Québec du reste du
Canada. D'un autre côté, il se fait élire hypocritement
depuis deux mandats. La première fois: élisez un bon
gouvernement. Référendum en 1980. Il perd 60-40. On pensait que
c'était réglé, mais le lendemain, ce n'était pas
réglé. En 1981, la même chose. Mettons cela en veilleuse.
Faisons-nous élire comme un gouvernement et l'indépendance, c'est
en veilleuse, de toute façon, on n'en parle pas. Mais le
problème, c'est que dans son programme, cela existe. L'aile radicale,
l'aile militante est justement dans ce parti pour cette raison. Finalement,
comment voulez-vous qu'on arrive à des ententes avec le gouvernement
fédéral alors que, eux, politiquement, ont à faire la
démonstration que cela ne fonctionne pas, qu'il n'y a aucune entente
possible? Au contraire, on cherche constamment des désaccords. C'est
pour cela que j'ai été très heureux la semaine
dernière, surtout pour nos jeunes assistés sociaux du
Québec qui sont aptes au travail, d'entendre parler de
réorganiser le système d'aide sociale et surtout de l'obtention
d'une entente de principe. Les modalités suivront.
Malheureusement, à son retour, celui qui avait réussi, je
ne sais depuis combien de temps, à obtenir une entente de principe avec
le gouvernement fédéral s'en va sans donner de raison. Serait-ce
que le premier ministre l'a réprimandé parce qu'il s'est entendu
avec le gouvernement fédéral, ce qui est contraire aux
intérêts propres des militants du Parti québécois?
Serait-ce cela? On le saura éventuellement.
On parle constamment d'indépendance, on nous dit que
l'indépendance ne nuit aucunement à l'économie du
Québec. Combien de fois, ici même, en cette Chambre, a-t-on fait
la démonstration que c'est nuisible à l'investissement au
Québec, que c'est nuisible à l'économie du Québec?
Comment demander à une personne désireuse d'investir au Canada,
s'il y a un choix entre dix provinces et s'il y en a une des dix dont on ne
sait pas si, dans l'avenir, elle se servira d'une monnaie
québécoise, d'une monnaie canadienne, d'une monnaie
américaine d'y venir? Le ministre actuel du Commerce extérieur
proposait, il n'y a pas tellement longtemps, une espèce de
souveraineté-association avec les États-Unis d'Amérique.
Où est-ce qu'on s'en va? Est-ce que le député-prisonnier
avait raison en disant que l'argent, on va aller le chercher dans les arbres,
avec son ancien patron? On ne le sait plus. C'est dans le flou, c'est dans le
vague.
Pour eux, comme on l'a toujours dit, c'est toujours la faute des autres.
Je me souviens, lorsque j'étais à l'école secondaire, que
je lisais la propagande du Parti québécois, à
l'époque, dans les années 1968-1969, au début de la
création du Parti québécois, dont les cofondateurs sont
connus internationalement, c'était la faute des Américains,
à l'époque. Si cela allait mal au Québec, si
l'économie du Québec n'allait pas bien, c'était la faute
des multinationales américaines qui étaient implantées
chez nous, au Québec. Un peu plus tard, j'ai fait mon entrée au
cégep et c'était alors la faute des Anglais. Si cela allait mal
au Québec, c'était parce qu'il y avait des compagnies
canadiennes-anglaises au Québec, parce qu'il y avait beaucoup d'Anglais.
Cela n'allait pas bien, l'économie allait mal.
Un peu plus tard, lorsqu'ils ont pris le
pouvoir, en 1976, alors que j'étais rendu à
l'université, c'était la faute de l'ancien gouvernement. Ils sont
même revenus là-dessus aujourd'hui. On parle constamment contre
notre nouveau chef, M. Robert Bourassa, qui deviendra premier ministre dans un
an ou un an et demi. On est revenu là-dessus, maintenant, c'est la faute
de l'ancien gouvernement si, économiquement, cela ne va pas bien au
Québec.
Un peu plus tard, c'est la faute du fédéral. Je venais
d'être élu député à l'Assemblée
nationale et le député de Jeanne-Mance aussi, en même
temps, en 1981. Le député de Portneuf, lui, était
expérimenté, il était déjà ici. À ce
moment-là, c'était la faute à qui? La faute du
fédéral. On l'a laissé un peu tomber ces temps-ci, on
l'entend moins souvent. C'est vrai qu'il y en a un qui s'occupe d'un "poil"
particulier dans la région d'Orsainville. Mais dans le temps,
c'était constamment la faute du fédéral.
Encore plus tard - on l'a vécu encore tout récemment, l'an
passé, le député de Sainte-Marie en parlait cet
après-midi - c'est devenu la faute des employés de l'État
si, économiquement, cela n'allait pas bien au Québec. Il fallait
récupérer 20%; à l'époque, une somme de 540 000 000
$ qu'on a réduite à 480 000 000 $ à peu près. On
entendait les députés péquistes justifier ce geste cynique
de couper les salaires de 20% alors qu'il y avait un contrat
négocié, conclu, une convention collective, avant le
référendum. On entendait les députés
péquistes qui disaient: On va prendre ces 400 000 000 $ pour les donner
aux plus démunis, aux assistés sociaux, aux jeunes qui ne
travaillent pas, aux gens qui vivent de l'assurance-chômage, on va
créer de l'emploi avec cela. On a créé des "jobines", mais
on n'a pas utilisé cet argent à ces fins. On a peut-être
payé l'Asbestos avec cet argent, j'y reviendrai tantôt.
Plus tard encore, c'est devenu la faute des journalistes. Encore
aujourd'hui, on en a eu une preuve, une démonstration. C'est la faute
des journalistes si une compagnie de Jonquière ou une compagnie de
Trois-Rivières n'a pas eu les fonds nécessaires. Maintenant,
c'est rendu la faute des journalistes.
Mais est-ce que ces messieurs se sont déjà
interrogés pour savoir si ce n'est pas simplement la faute du PQ si cela
ne va pas bien au Québec économiquement? D'ailleurs, M. le
Président, j'aimerais vous citer un passage de l'exposé d'un
politicien bien connu au Québec qui disait: "Aucun ministre du cabinet
de René Lévesque n'est compétent dans le domaine
économique."
M. Bissonnet: Aucun.
M. Dauphin: "Ce sont des théoriciens, de grands
rêveurs. Il y en a trop dans le présent cabinet. Il faut des
administrateurs et jamais je ne confierais 25 $ à l'actuel
gouvernement...
(17 h 40)
M. Bissonnet: Heavy!
M. Dauphin: ...de crainte qu'il ne l'envoie en fumée."
Signé: Rodrigue Biron.
Une voix: "Heavy".
M. Dauphin: Février 1978.
Une voix: Une bonne opinion qui compte.
M. Dauphin: M. le Président.
Une voix: Qu'est-ce qu'il fait Biron maintenant?
M. Dauphin: Pour votre information, M. le Président, M.
Biron est maintenant ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme du
gouvernement du Québec.
Une voix: C'est curieux.
M. Dauphin: Cela va bien. Cela va bien.
M. le Président, je suis persuadé que, lors des
élections partielles de lundi prochain, les électeurs et les
électrices des comtés de Mégantic-Compton -
l'épouse de feu notre ancien collègue, M. Fabien Bélanger,
sera avec nous, j'en suis persuadé -et de Jonquière sauront juger
sévèrement le gouvernement du Québec, son administration,
son inertie sur le plan économique et nous enverront deux candidates
libérales, deux députées libérales. Je pourrais
continuer. J'ai droit à combien de temps encore?
On faisait référence à l'ancien gouvernement,
à M. Robert Bourassa. Au moins, M. Bourassa, lorsqu'il était
premier ministre et lorsqu'il avait à instituer des commissions
d'enquête, nommait des personnes d'autres formations politiques ou des
personnes soi-disant neutres pour faire des enquêtes. On se souvient
qu'à la commission d'enquête Cliche siégeait l'actuel
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui n'était pas
particulièrement libéral à ce moment-là, et
également l'actuel chef conservateur fédéral. Le PQ, lui,
qu'est-ce qu'il fait depuis qu'il est au pouvoir? L'ancien candidat de
Louis-Hébert, M. Jean Keable, a été nommé
commissaire-enquêteur à la commission qui porte son nom.
On veut jouer les purs, M. le Président. À la
période de questions, encore aujourd'hui, notre collègue de Viger
faisait mention de nominations purement politiques. Je me souviens qu'avant
1976 ces gens-là étaient pour être limpides, la
pureté même, aucune nomination politique, strictement une bonne
administration. C'étaient des purs, effecti-
vement. On a vu le genre d'opposition qu'ils ont faite de 1973 à
1976 plus particulièrement. Je me souviens, j'étais
étudiant à ce moment-là et lorsqu'il y avait des conflits
de travail, entre autres dans le secteur public et parapublic, ils disaient: On
va changer le climat social si nous prenons le pouvoir et ce genre de conflit
ne se reproduira plus.
Qu'est-ce qu'on a vécu avec le gouvernement du Parti
québécois? On a été obligé d'augmenter le
personnel de l'infirmerie ici pour soigner les travailleurs assommés
devant le parlement lors des derniers conflits dans les secteurs public etparapublic. Eux ne feraient pas cela. On se souvient de l'ancien
député de Saint-Jacques qui se promenait avec le micro devant le
parlement pour encourager les manifestants à jeter des trucs sur le
parlement ou à faire quoi que ce soit.
Nous, on a été plus responsables, comme Opposition, lors
de ces conflits. On n'a jamais mis d'huile sur le feu devant le parlement,
précisément par respect de l'institution et par respect de notre
système parlementaire britannique.
En terminant, j'aimerais lire la motion pour laquelle je vais voter
évidemment -celle pour laquelle je ne voterai pas, je ne la lirai pas -
la motion du député de Vaudreuil-Soulanges, M. Johnson: "Que
cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement
qui, dans son énoncé complémentaire au budget de
1983-1984, n'a rien ajouté de précis ou de concret aux mesures
mal définies évoquées par le premier ministre, le 13
novembre dernier, qui a maintenu les deux tiers des taxes soi-disant
temporaires en place depuis deux ans, compromettant ainsi davantage une reprise
économique déjà incertaine, et qui, par conséquent,
a trompé les attentes qu'il avait lui-même fait naître
auparavant pour tenter de justifier sa décision de retarder d'un mois la
reprise des travaux parlementaires,
M. le Président, je vous remercie. Les électeurs de
Jonquière et de Mégantic-Compton, on vote libéral.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: M. le Président, je demande la suspension du
débat à une séance ultérieure compte tenu
que...
Une voix: ...
M. Bissonnet: Vous parlez, monsieur?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, au nom d'un de mes
collègues qui prendra probablement la parole...
Une voix: Je pense que c'est à toi à parler. Il est
17 h 45...
M. Bertrand: Est-ce que vous pensiez que votre
député était prêt à prendre la parole
à ce stade-ci? Non, il a demandé la suspension du
débat.
M. le Président, je voudrais donc demander la suspension du
débat.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Je fais aussi motion, M. le Président, pour
que nous ajournions nos travaux à lundi prochain, 15 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée? Adopté.
Nos travaux sont ajournés à lundi, 15 heures.
(Fin de la séance à 17 h 46)