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(Dix heures huit minutes)
Le Président: À l'ordre!
En vous souhaitant le bonjour, nous allons nous recueillir quelques
instants.
Veuillez prendre vos places.
Aux affaires courantes. Il n'y a pas de déclaration
ministérielle. Au dépôt de documents.
M. le ministre de l'Éducation.
Rapport annuel du Conseil supérieur
de l'éducation et rapport du Conseil
supérieur de l'évaluation
M. Laurin: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel du
Conseil supérieur de l'éducation pour l'année 1982-1983
ainsi qu'un rapport du Conseil supérieur de l'évaluation portant
sur l'évaluation de 1982-1983.
Le Président: Rapports déposés. M. le
ministre de l'Environnement.
Rapport annuel du Conseil consultatif des
réserves écologiques
M. Ouellette: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel
1982-1983 du Conseil consultatif des réserves écologiques.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
du Revenu.
Rapport annuel du ministère du Revenu
M. Marcoux: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel du
ministère du Revenu pour l'année 1982-1983.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
des Communautés culturelles et de l'Immigration.
Rapport annuel du ministère
des Communautés culturelles
et de l'Immigration
M. Godin: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel du
ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration pour
l'année 1982-1983.
Le Président: Rapport déposé. M. le leader
du gouvernement.
Rapports annuels de la SAO et de la CNA M- Bertrand: Au nom du
ministre des Affaires municipales, je voudrais déposer le rapport annuel
1982-1983 de la Société d'aménagement de l'Outaouais ainsi
que le rapport annuel 1982-1983 de la Commission nationale de
l'aménagement.
Le Président: Rapports déposés.
Dépôt de rapports de commissions élues.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Dépôt de documents, M. le
Président. (10 h 10)
Le Président: Oui.
Requête de citoyens demandant
que leur municipalité soit
rattachée
à la MRC de Beauce-Sartigan
M. Mathieu: J'ai ici une requête signée par
plusieurs personnes qui se lit comme suit: "Je, soussigné,
résident de la municipalité de Saint-Prosper, Beauce-Sud, demande
le détachement de notre municipalité de la MRC des Etchemins et
son rattachement à la MRC de Beauce-Sartigan. De plus, j'appuie les
démarches faites en ce sens par notre conseil municipal. J'autorise
également notre député, M. Hermann Mathieu, à
présenter cette requête à l'Assemblée nationale." Je
ne vous lis pas les signatures.
Un autre dépôt avec votre permission, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Beauce-Sud, je
vous en prie.
Requête des producteurs
acéricoles
de la Beauce réclamant une aide
financière et technique
M. Mathieu: "Sainte-Clothilde, Beauce, le 17 décembre
1983. Considérant les pertes majeures occasionnées aux
érablières des producteurs acéricoles suite aux
tempêtes de verglas du 14 et 15 décembre 1983, nous,
soussignés, dans la présente requête demandons et exigeons
ce qui suit: "Premièrement, de mandater le député de
Beauce-Sud, Hermann Mathieu, de déposer la présente requête
à l'Assemblée nationale du Québec. "Deuxièmement,
d'exiger du gouvernement provincial de déclarer sans délai
région sinistrée les territoires des municipalités dont
une liste partielle des producteurs acéricoles ont signé la
présente. "Troisièmement, de fournir immé-
diatement une aide financière et technique ou autre aux-dits
producteurs acéricoles." C'est signé par 110 producteurs
provenant de Sainte-Clothilde, Beauce-Sud, East-Broughton, Frontenac,
Saint-Méthode, Frontenac, Sacré-Coeur-de-Marie, Frontenac,
Robertsonville, Frontenac, Saint-Pierre-de-Broughton, Frontenac, Saint-Ephrem,
Beauce-Sud, Saint-Victor, Beauce-Sud, Saint-Alfred, Beauce-Nord,
Saint-Antoine-de-Pontbriand, Frontenac, Leeds Village, Frontenac,
Thetford-Mines et Saint-Jean-de-Bréboeuf ainsi qu'Inverness.
Le Président: Pétitions déposées. Au
dépôt de rapports de commissions élues, M. le
député de Saint-Jean.
Étude du projet de loi 35
M. Proulx: M. le Président, j'ai le grand honneur de
déposer ce matin le rapport de la commission élue permanente des
affaires culturelles qui a siégé le 19 décembre 1983 aux
fins d'étudier article par article le projet de loi 35, Loi sur les
musées nationaux. Ce projet de loi a été adopté
avec amendements.
Étude du projet de loi 3
II y en a un deuxième, M. le Président. En tant qu'adjoint
parlementaire j'ai le grand honneur de déposer ce matin le 20
décembre le rapport de la commission élue permanente des affaires
culturelles qui a siégé les 14 et 19 décembre 1983 aux
fins d'étudier article par article le projet de loi 3 sur les archives.
Nous avons travaillé fortement. Ce projet de loi a été
adopté avec amendements, M. le Président.
Le Président: Rapports déposés. Au
dépôt de projets de loi au nom du gouvernement, M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: L'article f) du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 60 Première lecture
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales propose
la première lecture du projet de loi 60, Loi modifiant la Loi sur la
protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives. M. le
ministre des Affaires sociales.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, ce projet de loi vise
à donner des suites à la commission spéciale de
l'Assemblée nationale sur la question de la protection de la jeunesse.
Il a principalement pour objet de distinguer les mécanismes
d'intervention applicables en matière de protection de la jeunesse de
ceux qui sont applicables en matière de délinquance. Il vise
également à retrancher de la Loi sur la protection de la jeunesse
les dispositions relatives aux infractions commises par des enfants à
des lois ou à des règlements en vigueur au Québec, de
même que les dispositions relatives aux mécanismes d'orientation
de l'enfant en matière de délinquance.
Ce projet introduit certains principes et droits nouveaux au chapitre
des droits des enfants, afin d'augmenter la protection des enfants dont la
sécurité ou le développement est compromis. Il
précise, par ailleurs, les fonctions respectives du comité de
protection de la jeunesse et du directeur de la protection de la jeunesse.
À la lumière de l'expérience acquise depuis
l'entrée en vigueur de la Loi sur la protection de la jeunesse, ce
projet de loi apporte des modifications substantielles relativement aux
interventions sociales et judiciaires faites en vertu de cette loi, afin de les
rendre plus efficaces et de les adapter à la réalité.
De plus, il introduit de nouveaux recours pour faciliter l'accès
au Tribunal de la jeunesse et augmenter la protection des enfants dont la
sécurité ou le développement est compromis.
Ce projet distingue, en outre, les différentes infractions que
prévoit la Loi sur la protection de la jeunesse, afin d'accorder une
meilleure garantie procédurale aux personnes accusées de les
avoir commises. Enfin, il modifie la Loi concernant les enquêtes sur les
incendies et la Loi sur les poursuites sommaires, afin d'établir un lien
cohérent avec les droits reconnus aux enfants dans la Loi sur la
protection de la jeunesse.
Le Président: La première lecture du projet de loi
60 est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Deuxième lecture,
séance subséquente. M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: L'article e) du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 59 Première lecture
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme propose la première lecture du projet de loi 59, Loi
modifiant la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi
sur les heures d'affaires des établissements commerciaux afin,
notamment, d'inclure le dimanche, jusqu'à présent couvert par la
loi fédérale de 1907, dans la liste des jours couverts par la loi
québécoise et d'enlever l'obligation de fermeture de ces
établissements pour certains jours ou parties de jour.
Ce projet de loi a de plus pour objet d'ajouter une heure aux heures
d'ouverture le samedi et de prolonger les heures d'ouverture jusqu'à 21
heures pendant certaines périodes de l'année.
Il vise également à augmenter les catégories
d'établissements commerciaux exclus de l'application de la loi. Ce
projet de loi permet de plus au ministre d'autoriser des exemptions à
l'application de la loi pour des régions touristiques ou près des
limites territoriales du Québec ou pour des festivals, des foires, des
salons ou des expositions.
Ce projet de loi prévoit enfin une augmentation du montant des
amendes payables à la suite des infractions à la loi.
Le Président! La première lecture du projet de loi
59 est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. J'ai deux questions en
même temps. M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: Pourrais-je demander au leader du gouvernement s'il
est dans l'intention du gouvernement de déférer ce projet de loi
à une commission parlementaire avant la deuxième lecture afin de
permettre à tous les intéressés de se faire entendre et,
si oui, à quel moment cette commission siégera-t-elle?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
Renvoi à la commission
M. Bertrand: Oui, M. le Président, et justement pour
donner suite à cette demande, je fais motion pour que ce projet de loi
soit déféré à la commission parlementaire
permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme. Quant au moment, ce sera
durant le mois de février, mais on précisera la date au cours des
prochaines semaines.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté. Cela répond-il à votre question, M. le
député?
M. Bourbeau: J'allais poser la même question, M. le
Président.
Le Président: Ce qui nous mène donc à la
période des questions des députés. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
L'administration du programme PECEC
M. Scowen: Le 15 décembre, j'ai posé deux questions
à la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu concernant l'administration du programme PECEC. La première
question était à savoir si la ministre était satisfaite de
la façon dont le mandat accordé au comité directeur pour
le versement des subventions dans le cadre du programme PECEC était
respecté jusqu'à maintenant et à laquelle la ministre a
répondu: Oui, je suis satisfaite. La deuxième question
était à savoir si le deuxième volet du programme qui
touchait la création des emplois et le sauvetage des compagnies
respectait le décret, à laquelle la ministre a répondu:
Oui. Comme par hasard, hier, le Vérificateur général a
sorti son rapport dans lequel il parle précisément de ces deux
questions et dans lequel il critique sévèrement la ministre et le
ministère. Il a dit même dans une entrevue hier qu'il y avait des
irrégularités impardonnables dans ces deux domaines. Je cite
brièvement ce qu'il a dit dans son rapport pour que ce soit très
clair. Dans le premier cas, il a dit: Nous sommes d'avis qu'en ne reliant pas
directement la totalité de la subvention à être
versée on s'éloigne des fins auxquelles les crédits
avaient été affectés par le Parlement.
Dans la deuxième partie, il dit que la politique de subvention
qu'applique le comité directeur n'est pas conforme aux décrets
concernant les modalités administratives du PECEC confirmées par
le conseiller juridique.
M. le Président, il y a trois possibilités: ou le
Vérificateur général a tort, ou la ministre n'a pas dit la
vérité à ses collègues en cette Chambre le 15
décembre, ou il y a des gens du ministère de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu qui n'ont pas dit la
vérité non plus.
Je demande à la ministre de nous dire laquelle des trois
réponses elle trouve la meilleure. (10 h 20)
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: M. le Président, je pourrai aussi lire un
certain nombre d'autres commentaires tirés du rapport du
Vérificateur général qui répondront
adéquatement aux questions soulevées. Je réitère
que je suis particulièrement satisfaite
et que, comme gouvernement, on est particulièrement satisfait des
résultats qu'a donnés PECEC quant à la création
d'emplois et aussi quant au volet de consolidation d'emplois. Il serait, me
semble-t-il, assez illogique dans les faits, alors qu'on tente de créer
désespérément des emplois, qu'on en laisse tomber d'autres
alors qu'un coup de pouce serait nécessaire pour les maintenir.
Cela dit, je maintiens ce que j'ai dit à cette Assemblée
lors des questions qu'a soulevées le député de
Notre-Dame-de-Grâce concernant le PECEC puisque c'est sur la foi d'un
avis reproduit dans le rapport du Vérificateur général que
j'avais répondu à la question. Le comité directeur du
PECEC, dont le président est le président de l'Office de
planification et de développement du Québec, dit ceci: Les
politiques du comité directeur relativement aux consolidations
d'entreprises se situent à l'intérieur d'un cadre juridique - on
mentionne les décisions du Conseil des ministres à cet
égard - et ont été préparées en prenant les
précautions habituelles, y compris l'obtention préalable d'avis
juridiques du ministère de la Justice qui remontent à septembre
1980, lesquelles reconnaissent la conformité de la politique
administrative du comité directeur avec les décrets. Je pense que
c'est très clairement énoncé ici. Il y a sans doute
mésentente sur ces avis juridiques.
Cela dit, nous avons eu totalement raison sur le fond. Si, pour entrer
dans les règles du jeu concernant les critères d'allocations des
fonds, parce qu'il n'y a pas eu là malversation ou quoi que ce soit,
n'est-ce pas?, on a aidé à soutenir ou à créer des
emplois, s'il y a lieu que nous procédions par décret une fois
qu'on aura clarifié ces avis juridiques différents, on le fera,
M. le Président. Merci.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Permettez-moi de qualifier la réponse de la
ministre d'arrogance inqualifiable. C'est certain que le comité
directeur...
Le Président: C'est une question complémentaire, M.
le député, à laquelle vous avez droit. Posez-la, je vous
prie.
M. Scowen: N'est-il pas vrai, M. le Président, qu'on peut
attendre du comité directeur qu'il va défendre ce qu'il fait? Le
point qu'on soulève ce matin, c'est que le Vérificateur
général a soumis un rapport disant qu'il n'est pas d'accord avec
le comité directeur. Est-ce que la ministre est en train de nous dire
que, quant à elle, le Vérificateur général a tort
quand il critique le comité directeur?
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: Je dis, M. le Président, qu'il y a deux avis
juridiques différents. Il est d'ailleurs dit, à la fin du
paragraphe que je vous lisais tout à l'heure: Nous comprenons - il
s'agit là du comité directeur cependant les préoccupations
du vérificateur et nous n'hésiterons pas à soumettre cette
question de nouveau au ministère de la Justice.
À cet égard, je dis qu'on verra, s'il y a lieu, qu'il y
ait concordance entre les avis juridiques et s'il n'y en avait pas, compte tenu
des recommandations du vérificateur, nous corrigerons la situation.
Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, question complémentaire.
M. Scowen: Deux dernières questions additionnelles. La
première critique du Vérificateur général qui ne
touche pas les avis juridiques était qu'il n'existe aucune
vérification de la part du ministère pour s'assurer que les
emplois créés sont actuellement créés. Les
subventions sont versées sans vérification des résultats
du programme.
M. le Président, la question que je pose à la ministre est
la suivante: N'est-il pas vrai que l'Assemblée nationale a voté
des fonds pour la création d'emplois permanents, quelque chose que tout
le monde, surtout le premier ministre, a trouvé d'une très grande
importance, et que le gouvernement est en train, avec ce qu'il fait ici,
d'après le Vérificateur général, de
détourner les fonds votés pour la création d'emplois
permanents à d'autres fins et, de plus, de ne pas établir les
vérifications nécessaires pour s'assurer que même les buts
visés par leur propre programme sont atteints.
M. le Président, la question que je pose à la ministre est
à savoir si...
Le Président: En cours de route, vous avez utilisé
la forme interrogative. J'ai présumé que cela n'avait pas pour
but de faire indirectement ce qui est interdit de faire directement,
c'est-à-dire un préambule à une question
complémentaire. Compte tenu de la longueur de ce qui semblait être
votre question, je vais maintenant proposer à Mme la ministre d'y
apporter une réponse.
Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
Mme Marois: Alors, M. le Président...
M. Scowen: Est-ce que je peux terminer ma question?
Le Président: Une question très directe
et sans détour.
M. Scowen: Est-ce que la ministre a l'intention d'agir
immédiatement pour rectifier les deux problèmes soulevés
par le Vérificateur général du Québec?
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: Oui, M. le Président. On parle, entre autres,
de plus de 65 entreprises qui ont été aidées
jusqu'à présent. Je pense que les personnes qui oeuvrent dans ces
entreprises ne nous pardonneraient pas qu'on corrige ces choses. Merci, M. le
Président.
Le Président: Question principale, M. le
député de Mont-Royal.
Offre d'une compagnie ontarienne à
Quebecair
M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Transports. Est-ce que le ministre peut confirmer ou infirmer que
Quebecair a signé ou doit signer une entente avec une compagnie
ontarienne de promoteurs de vols nolisés?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, tout ce que je peux confirmer
au député de Mont-Royal, c'est que des négociations sont
en cours entre Quebecair et des grossistes de la région de Toronto. Les
informations que j'avais il y a une semaine sur cette question étaient
à l'effet que rien n'était signé. Maintenant, je ne vois
absolument aucun scandale dans le fait qu'alors que Worldways de Toronto vient
négocier occasionnellement des contrats avec des grossistes de
Montréal, Quebecair puisse faire de même avec des grossistes de
Toronto.
Une voix: II est sur la défensive, là.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je ne sais pas si c'est parce qu'on a
siégé toute la nuit que le ministre est sur la défensive
ou bien s'il y a quelque chose...
Le Président: M. le député.
M. Ciaccia: ...qu'il ne trouve pas tout à fait
régulier. Est-ce que le ministre peut nous dire quelle analyse il a
faite sur les promoteurs et quelles garanties vous avez obtenues ou vous allez
obtenir en cas de problèmes sérieux, financiers ou autres, que
pourraient rencontrer les promoteurs, comme cela a été le cas
dans plusieurs instances de promoteurs de vols nolisés? Quand le
ministre dit qu'il n'a rien signé, serait-il possible que jeudi dernier
Quebecair ait signé une lettre d'entente avec le promoteur?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, le député me pose
la question comme si j'étais l'administrateur de Quebecair. Quebecair a
un conseil d'administration, une nouvelle direction, et ce sont eux qui
procèdent aux analyses afin de déterminer si, sur le plan
commercial, telle ou telle activité est lucrative ou non et, comme ce
soir, justement, j'ai une session de travail avec des gens de la direction de
Quebecair et de la Société québécoise des
transports, j'avais l'intention de passer en revue les différents
dossiers qui sont présentement en marche à Quebecair, c'est un de
ces dossiers parmi d'autres. Mais, aux dernières nouvelles, ce que je
peux vous dire, c'est que l'offre qui était faite par des grossistes de
Toronto était sur la base de ce qu'on appelle un "cost plus". Alors,
c'est fréquent que ces choses se présentent dans le
métier. On sait que, l'été dernier, Quebecair a eu des
négociations avec des grossistes de Montréal, mais finalement,
parce que l'affaire semblait trop risquée à cause de la
concurrence très vive d'autres transporteurs, Quebecair n'a pas
signé le contrat. Qu'elle soit présentement en discussion avec
d'autres, je pense que c'est tout à fait dans la normalité des
choses, Quebecair essaie de se développer, de développer de
nouvelles activités, elle est administrée comme une entreprise
commerciale et je ne pense pas que ce soit ni le député de
Mont-Royal ni moi-même qui allons diriger l'entreprise. (10 h 30)
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je trouve curieux la réponse du ministre,
quand Quebecair a perdu 22 000 000 $ et est en train de perdre 18 000 000
$...
Le Président: La question, M. le député.
M. Ciaccia: ...peut-être devriez-vous faire un peu plus
attention au conseil...
Des voix: Question.
Le Président: M. le député, la question.
M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que je pourrais
demander au ministre, considérant
les pertes considérables que pourrait subir encore Quebecair dans
les contrats et les négociations qui sont en cours, les garanties qu'il
va exiger des promoteurs? Car il semble que les deux personnes avec qui
Quebecair est en train de s'associer étaient avec Worldways
International, que l'entente que vous vous apprêtez à signer porte
sur les mêmes destinations en Europe que Worldways International avait,
avec les mêmes types d'avions et il semblerait que les deux personnes
avec qui vous transigez actuellement ont mis Worldways International dans une
situation financière désastreuse.
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, les garanties que Quebecair
demande pour l'ensemble de ces contrats sont les mêmes garanties que
celles que les autres compagnies de transport aérien exigent dans le
domaine commercial de l'aviation et j'imagine que ce sont les mêmes
garanties que les administrateurs de Quebecair vont exiger en cette
matière.
Finalement, quant aux pertes financières, je souligne au
député que justement, alors que l'an dernier, les pertes
cumulatives du groupe Quebecair dépassaient 21 000 000 $, cette
année elles sont prévues pour être inférieures
à 18 000 000 $, ce qui est déjà une amélioration
par rapport à l'année dernière.
En ce qui concerne les résultats financiers de Quebecair, la
Société québécoise des transports s'est
engagée à publier des états trimestriels. Le
député connaîtra ainsi la situation financière de la
compagnie de trois mois en trois mois.
M. Ciaccia: Dernière question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le ministre croit-il suffisant d'obtenir les
mêmes garanties que dans d'autres cas? Quand Worldways International a
perdu 3 000 000 $, ces deux personnes, avec qui vous allez vous associer,
étaient respectivement vice-présidentes à la finance et
à l'exécutif et elles ont été tenues responsables
des pertes en question.
Croyez-vous que les garanties ordinaires suffisent? Ne croyez-vous pas
que vous devriez, vous, le ministre des Transports, porter une attention un peu
plus spéciale à ce contrat afin d'éviter des pertes de 18
000 000 $ ou de 21 000 000 $ chez Quebecair, de l'argent des contribuables?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre des
Transports.
M. Clair: Nous avons nommé, chez Quebecair, un conseil
d'administration de 15 membres, formé de personnes compétentes
qui proviennent de toutes les régions du Québec. Il y a une
nouvelle direction chez Quebecair qui comprend des gens qui viennent de
plusieurs compagnies aériennes, et tous sont reconnus pour leur
compétence. Ils ont été nommés pour administrer,
gérer Quebecair de la manière la plus efficace et la plus
productive possible. Nous avons l'intention de leur faire confiance et non pas
de commencer à discuter contrat par contrat les différentes
soumissions de Quebecair pour obtenir des contrats.
Finalement, ce que le député de Mont-Royal laisse
entendre, c'est que Quebecair ne pourrait pas, alors que d'autres compagnies
aériennes de l'Ontario viennent régulièrement
négocier des contrats avec des grossistes sur le marché de
Montréal, le faire sur le marché de Toronto. C'est tout à
fait dans la ligne de pensée de son voisin de gauche qui n'a jamais
voulu donner à Quebecair la chance de se développer.
M. Bourbeau: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: II n'y a pas de matière à
privilège là-dessus, M. le député.
M. Bourbeau: Je viens d'être insulté par le ministre
des Transports.
Le Président: C'est une expression d'opinion; une
divergence d'opinions ne donne pas matière à soulever une
question de privilège.
Une voix: On verrai
Le Président: Question principale, M. le
député d'Argenteuil.
Dossier des micro-ordinateurs scolaires
M. Ryan: Ma question s'adresse au premier ministre et porte
toujours sur le dossier des micro-ordinateurs scolaires. Cette question reste
enveloppée de mystère. Comme on le sait, le gouvernement a
télescopé un échéancier qu'il avait fixé
lui-même. Ce qui aurait dû normalement prendre trois mois s'est
fait dans six jours et peut-être même dans une fin de semaine.
Deuxièmement, on a pris une décision sur la base de
document de cinq pages envoyé par les entreprises. Ce document ne
pouvait pas, sérieusement, servir de base à une décision,
mais il devait plutôt servir à ouvrir des négociations avec
des soumissionnaires les plus sérieux.
Quoi qu'il en soit, pour faire la lumière
sur ce sujet, je demandais au premier ministre, la semaine
dernière, s'il serait prêt à rendre publics maintenant deux
documents: d'abord, les propositions soumises par les entreprises qui avaient
été reconnues comme les plus sérieuses, les trois ou les
huit, selon les versions que le gouvernement a données, et qui avaient
été retenues comme finalistes; deuxièmement, le
gouvernement est-il prêt à rendre publics le rapport et les
recommandations qu'il a reçus de ses fonctionnaires après
l'étude de leur part?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Est-ce que je pourrais prendre avis
de la question en disant très clairement que pour autant qu'on puisse
évaluer la possibilité, les permissions à obtenir, etc.,
je ne le sais pas, mais en m'engageant tout de suite à donner une
réponse et peut-être satisfaction en même temps au
député d'Argenteuil dès demain qui, normalement, est le
dernier jour de la session? Je ne peux pas aller plus loin ce matin.
Le Président: M. le député d'Argenteuil, en
complémentaire.
M. Ryan: M. le Président, je veux bien que le premier
ministre prenne la journée, ça fait déjà une
semaine que ça traîne. Je voudrais lui demander si, dès ce
matin, il ne serait pas prêt à s'engager à dévoiler
au moins la proposition qui a été faite par la firme à qui
a été octroyé le contrat. Dans ce cas-là il me
semble que vous ne devriez pas avoir besoin du consentement de la firme, c'est
une décision de caractère public. Au moins celle-là, il
serait important de la connaître. Dans le cas des autres ce sera beaucoup
moins difficile.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je vais tenir compte de cette
question additionnelle et plus insistante du député d'Argenteuil
et, demain, pour tout ce qui sera disponible, on verra.
Le Président: Question additionnelle, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Est-ce que je pourrais demander au premier ministre de
noter également la demande que je fais à propos du rapport qui
aurait été soumis par le comité des fonctionnaires qui a
étudié la question?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): D'accord, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Bellechasse,
question principale.
Allocation de certains contrats du gouvernement
canadien
M. Lachance: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
au ministre des Finances et responsable du développement
économique. Jeudi dernier, ici même en cette Chambre, mon
collègue le député de Vachon dénonçait
vigoureusement la décision de la Société canadienne des
postes de confier à une firme américaine plutôt qu'à
une entreprise de Saint-Hubert, dans Vachon, le contrat de fabrication de 225
boîtes de camions postaux. Or, dans sa réponse au
député de Vachon qui s'enquérait des répercussions
économiques découlant de la perte de ce contrat, le ministre des
Finances faisait état d'un deuxième cas probant où le
gouvernement canadien a choisi de privilégier une entreprise
étrangère au détriment d'une entreprise
québécoise.
J'aimerais savoir de la part du ministre des Finances si ce
deuxième cas, auquel il se referait la semaine dernière, concerne
la construction de la nouvelle ambassade du Canada à Ryad en Arabie
Saoudite pour laquelle une importante entreprise de ma région, en
l'occurrence la firme Hervé Pomerleau, de Saint-Georges-de-Beauce, avait
présenté la plus basse soumission conforme aux plans et devis?
(10 h 40)
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Effectivement, M. le Président,
j'annonçais la semaine dernière que j'étais sur une autre
piste à cet égard et cela s'est confirmé de la
façon suivante: Le gouvernement fédéral a
décidé de faire reconstruire son ambassade en Arabie Saoudite,
comme d'ailleurs un bon nombre de pays occidentaux le font. Il y a eu six
soumissions dont cinq émanant de constructeurs canadiens dont
Hervé Pomerleau, de Saint-Georges-de-Beauce. Soit dit en passant,
Hervé Pomerleau est une des grandes entreprises de construction. Comme
entrepreneur général c'est un des très gros constructeurs
qu'il y a ici.
Il s'agit d'un contrat d'une vingtaine de millions et, sur les six
soumissionnaires dont je parlais tout à l'heure, cinq étaient
canadiens et un britannique. Hervé Pomerleau Inc. est arrivé le
plus bas des Canadiens et il était conforme. Le Britannique était
à 89 000 $ de moins sur 20 000 000 $ mais n'était pas conforme en
ce sens qu'il n'y avait pas un cent de contenu canadien ou
québécois. Rien! Il n'était donc pas conforme.
Le gouvernement fédéral a demandé à
Hervé Pomerleau Inc. et cette firme
britannique de présenter, mais eux deux seulement, à
nouveau une soumission. Hervé Pomerleau a refusé de le faire et a
dit simplement: Ma soumission s'applique. Le Britannique a pu modifier sa
soumission. On ne sait pas quel peut être le contenu canadien
là-dedans. Il ne peut pas être très important,
d'après tous les renseignements que nous avons obtenus - s'il y en a un
-mais la firme britannique finalement a eu le contrat.
Il s'agit d'un contrat important. Le contenu québécois de
ce contrat était de l'ordre de 12 000 000 $. En termes de construction
domiciliaire, 12 000 000 $, cela donnerait à peu près 200
personnes-année de travail que le Québec n'aura pas.
C'est un autre cas, M. le Président, où cette acceptation
par le gouvernement fédéral de soumissions à
l'égard de contrats publics, utilisant l'argent des contribuables et ne
faisant appel à aucune contenu canadien ou québécois,
c'est un autre cas qu'il est important de signaler.
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Parizeau: En période de relance économique, il
n'est pas normal de fonctionner comme cela. Il n'est pas normal de perdre des
emplois, lorsqu'on en a tellement besoin, et cela avec l'argent des
contribuables. C'est un autre dossier que je vais incorporer à la lettre
que je suis en train de préparer pour M. Lumley, le ministre
fédéral de l'Industrie et du Commerce.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Bellechasse.
M. Lachance: J'aimerais savoir du ministre des Finances comment
il peut expliquer qu'en une période économique difficile telle
que celle que nous traversons au Québec et dans l'ensemble du Canada, le
gouvernement canadien en soit venu à une telle décision.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, la situation est d'autant
plus bizarre - et c'est là où on voit à quel point il y a
une sorte de naïveté dans la façon dont le gouvernement
fédéral transige certains contrats de nos jours - que la
compagnie britannique dont nous parlons, et qui a eu le contrat pour
l'ambassade canadienne, est la même compagnie britannique qui a eu la
construction de l'ambassade britannique en Arabie Saoudite, sauf que, dans le
cas de ce contrat pour, encore une fois, la construction d'une ambassade
britannique en Arabie
Saoudite, aucun entrepreneur canadien ou québécois
n'était admissible.
Une voix: Eh bien!
Le Président: M. le député de Pontiac. Le
programme Corvée-habitation
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Elle
concerne le programme Corvée-habitation. Le programme
Corvée-habitation a été créé pour relancer
l'industrie de la construction et favoriser l'accès à la
propriété. Il semble que le programme ait atteint ses objectifs.
Mais dans ma région, un groupe d'acheteurs de maisons ont fait confiance
à la société Amaric Inc., à Aylmer, et ce dans le
cadre du programme Corvée-habitation. Or, ladite société a
fait faillite, et les acheteurs se trouvent dans la situation suivante: sans
maison ou avec une maison inachevée, sans titre de
propriété ou avec un titre non valide, sans acte d'achat ou avec
un acte non valide, sans document d'enregistrement au programme
Corvée-habitation. Ma question est celle-ci: Est-ce que ce programme
Corvée-habitation prévoit des clauses spéciales dans des
cas semblables afin de dédommager les acheteurs?
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur.
M. Tardif: M. le Président, je remercie le
député de sa question, d'autant plus qu'il avait eu l'obligeance
de me faire part de ses inquiétudes privément la semaine
dernière.
M. Middlemiss: Excusez-moi, question de privilège, M. le
Président.
Le Président: II n'y a pas matière à
privilège là, M. le député.
M. Middlemiss: Je n'ai jamais, la semaine dernière,
parlé au ministre de ce cas. J'ai parlé au ministre du cas de
Jova construction il y a plus d'un mois.
Le Président: Enfin, vous auriez pu corriger cela en
complémentaire.
M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.
M. Tardif: Je ne voulais pas du tout inférer que le
député m'avait parlé de tous les cas, il m'avait
simplement saisi de son inquiétude face à certaines faillites
dans l'Outaouais. C'est une des choses que nous avons tenu à avoir
dès le lancement du programme Corvée-habitation,
c'est-à-dire un
plan d'assurance, un plan de garantie. Nous avons insisté pour
que toutes les maisons réalisées dans ce plan soient couvertes
par le certificat de garantie de maisons neuves de l'APCHQ, c'est-à-dire
l'Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec ou un
plan équivalent. Or, le fait est que dans le premier cas, celui de Jova
et ce n'était pas là-dessus évidemment que portait la
question du député, mais la couverture est faite par le plan de
l'APCHQ alors que dans le cas d'Amaric constructions, c'est la
Fédération de la construction du Québec qui couvre ces
maisons.
Il s'agit, en l'occurrence, d'un projet de quelque 80 maisons dont 52,
me dit-on, seraient couvertes par le programme de certificat de garantie rendu
obligatoire par Corvée-habitation et offert par la
Fédération de la construction du Québec. Il y a,
cependant, 28 cas sur 80 qui poseraient un problème, c'est-à-dire
que ces unités auraient été mises en chantier sans avoir
fait l'objet au départ d'une délivrance du certificat de garantie
par la Fédération de la construction du Québec et,
à cet égard, il semble que la FCQ, tout comme d'ailleurs l'APCHQ
le fait dans des cas semblables, se penche également sur ces cas puisque
généralement les plans de certification de garantie impliquent
que les dépôts jusqu'à concurrence de 20 000 $ sont
remboursés, que les travaux peuvent être refaits sinon par
l'entrepreneur lui-même, du moins par la Fédération de la
construction ou bien par l'APCHQ et, évidemment, que les acheteurs, en
quelque sorte, obtiennent satisfaction.
Nous suivons ces cas, M. le Président, et s'il devait
s'avérer que les plans mis en marche par les deux associations de
constructeurs devaient s'avérer insuffisants, ce que
l'expérience, enfin j'espère, ne nous révélera pas
et si tant est que c'était le cas, nous devrons prendre des mesures pour
que les garanties soient encore plus complètes que celles qui existent
jusqu'à maintenant. Je suis la situation de jour en jour puisque quand
même...
Le Président: J'ai demandé de conclure une
première fois, je vous ai rappelé une deuxième fois. Eh
bien voilà, il faut toujours s'adresser au président dans cette
Chambre, voyez-vous! Question complémentaire, M. le député
de Pontiac.
M. Middlemiss: Est-ce que je peux comprendre de la réponse
du ministre qu'il est en train de s'en laver les mains, il fait son Ponce
Pilate. Toutefois, je crois qu'il a énormément de
responsabilité. Je lis du rapport no 1, M. le Président...
Le Président: Ce n'est pas la période des
commentaires, M. le député. C'est une période des
questions. Il n'y a pas de commentaire, il n'y a pas de préambule sur
les questions complémentaires. Je m'évertue à le
répéter et je vous prie de bien vouloir poser une question
complémentaire si c'est effectivement ce que vous voulez faire.
M. Middlemiss: Est-ce que le ministre est au courant que dans le
rapport de Corvée-habitation no 1, à la suite de
l'énoncé des résultats fabuleux du programme
Corvée-habitation et je cite: "Ces résultats démontrent
clairement que les efforts de tous les partenaires n'ont pas été
vains. En effet, un sondage scientifique mené en novembre 1982 par le
Bureau de la statistique du Québec a démontré qu'un
acheteur sur deux était influencé par Corvée-habitation.
Ce sondage s'est révélé valide parce que plus de
45%...
Le Président: M. le député. On ne peut pas
faire indirectement ce qui n'est pas permis de faire directement. Votre
question avait beaucoup plus l'allure d'un préambule interdit. Si vous
avez une question à poser, je vous en prie posez-la, mais
immédiatement.
M. Middlemiss: Merci. Comment le ministre peut-il s'en laver les
mains à la suite de la lecture et du pétage de bretelles qu'on a
dans le rapport no 1 de Corvée-habitation? (10 h 50)
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur.
M. Tardif: M. le Président, il n'est pas question de s'en
laver les mains. Au contraire. Je dis que je suivais cette situation et il m'a
fait plaisir de transmettre aux députés tous les renseignements
que je pouvais avoir sur ce dossier. Depuis le temps que nous entendons
l'Opposition libérale prêcher les vertus de la libre entreprise,
ce que nous avons fait en l'occurrence, c'est de laisser le milieu
s'autodiscipliner et mettre sur pied son propre programme de garanties, aussi
bien l'APCHQ que la FCQ, au lieu d'aller de l'avant avec un programme de
garanties gouvernementales. Ce ne sont quand même pas les libéraux
en face de nous qui vont s'opposer à cela.
Le milieu s'est pris en main et a mis sur pied des programmes de
certification de garanties. Laissons-les donc agir. S'il arrivait que ces
programmes s'avéraient insuffisants, il sera toujours temps pour
l'État d'intervenir. Mais laissons le milieu s'autodiscipliner.
Des voix: Bravo!
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Pontiac.
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Le ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur est-il conscient que les 28
acheteurs des maisons n'ont pas été avisés que
l'entrepreneur avait seulement droit au quota de 50 maisons, mais que la grosse
enseigne de Corvée-habitation était là pour faire la
promotion?
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur.
M. Tardif: M. le Président, cela faisait partie des
conditions mêmes du programme. C'était imprimé sur les
formulaires que pour être admissibles au programme, il fallait que les
maisons érigées soient protégées par un plan de
garantie d'assurance. Si certains employeurs ont effectivement bâti des
maisons, les ont vendues, les ont mises en vente et ont fait remplir des
formulaires sur lesquelles cela était dit, mais qu'ils n'ont pas inscrit
ces maisons auprès de leur assurance qui est leur association
professionnelle, c'est là une autre chose que nous devrons regarder de
plus près pour voir s'il n'y a pas eu fausse représentation de la
part de l'entrepreneur. Mais c'est une autre chose.
M. Middlemiss: M. le Président.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Pontiac.
M. Middlemiss: Le ministre peut-il s'engager à faire le
nécessaire afin que les victimes du projet Amaric soient
dédommagées dans le plus bref délai, soit en s'assurant
que les soussignés soient dûment dédommagés des
sommes déboursées, ou en prenant les dispositions
nécessaires pour que les constructions soient exécutées
dans des conditions acceptables pour tous les acheteurs?
Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la
Protection du consommateur.
M. Tardif: M. le Président, je l'ai dit au
député, j'ai bien l'intention de prendre tous les moyens voulus
à ma disposition pour que ces consommateurs trouvent satisfaction et non
seulement cela, mais pour prévenir semblable situation. On ne pourra
jamais prévenir des situations de faillite de l'entrepreneur avec les
inconvénients que cela peut provoquer chez certains. On peut
certainement tenter d'en minimiser l'impact chez les consommateurs. C'est
là l'objectif que je poursuis, comme le député de
Pontiac.
Le Président: Question principale, Mme la
députée de L'Acadie.
Réforme des services de santé et
sociaux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Affaires sociales. Il était en Chambre il y a quelques
instants.
M. le Président, un document intitulé "Cadre relatif au
partage des responsabilités, centres de services sociaux et centres
locaux de services communautaires en matière de services sociaux"
circule depuis une semaine dans le réseau des affaires sociales. Ce
document fait connaître les orientations du ministère des Affaires
sociales qui, si elles étaient mises en application, modifieraient en
profondeur les services sociaux du Québec. La préparation de ce
document s'est faite, pour ainsi dire, en cachette. Les principaux
intéressés n'ont pas été consultés, ni les
citoyens qui reçoivent les services, ni les professionnels qui les
dispensent depuis plusieurs décennies à la population de cette
province.
Selon mes informations - ce document m'est parvenu il y a quelques
jours, mais compte tenu que nous sommes maintenant à la fin de la
session, je ne voudrais pas que le ministre profite de l'intersession pour
faire adopter en vapeur et en catimini des politiques extrêmement
importantes - les modifications apportées aux services sociaux seraient
aussi importantes que celles qui ont donné suite à la commission
Castonguay et qui avaient nécessité une consultation de trois
ans.
Les deux questions que je veux poser au ministre sont les suivantes:
Pourquoi le ministre a-t-il choisi d'engager une restructuration des services
sociaux par la voie administrative et à partir d'une politique
ministérielle et complètement en dehors des mécanismes de
consultation? Pourquoi veut-il procéder en marge de toute participation
de cette Chambre à l'égard de l'examen critique normal pour une
opération aussi importante?
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il s'agit
effectivement de mesures administratives qui visent, à toutes fins
utiles, à traduire dans la réalité ce qu'étaient
les objectifs initiaux de la réforme de la santé et des services
sociaux au début des années soixante-dix.
On se rappellera que les centres de services sociaux comme les
départements de santé communautaire sont, à toutes fins
utiles, des fiduciaires de certaines activités qui, normalement,
devaient, au moment où cette réforme a été
conçue, aller au niveau des CLSC. Évidemment, mettre sur pied un
système, quel qu'il soit et quelle que soit sa nature, implique un
certain temps. Le réseau
des CLSC n'étant pas complété, beaucoup de CSS ont
conservé, en tant que fiduciaires, certaines activités qui,
normalement, auraient été dévolues aux CLSC.
Le cadre vise essentiellement à permettre de définir quels
types d'activités seront transférés au niveau des centres
de services sociaux vers les CLSC. Une consultation a été
amorcée sur le plan administratif. Je dirai cependant que jusqu'à
il y a à peine une semaine les discussions avec certains
représentants des CSS ont été particulièrement
difficiles. Ceux-ci s'opposaient, à toutes fins utiles, à tout
dialogue avec les représentants du ministère des Affaires
sociales.
Je pense que cette attitude a maintenant changé et il y a une
rencontre qui, aujourd'hui même, est prévue entre l'Association
des centres de services sociaux du Québec et le sous-ministre en titre
du ministère, M. Deschênes, qui me fera rapport
éventuellement.
Le Président: Question complémentaire, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, comment le ministre
peut-il affirmer sérieusement que la réforme - certains la
qualifient de contre-réforme - que le ministère veut entreprendre
se situe dans la lignée du rapport Castonguay alors que justement on
avait procédé à un regroupement des services sociaux pour
assurer une plus grande efficacité et que la proposition qui est
maintenant faite par le ministère les rediviserait entre 160 centres de
santé communautaire? Je pense que cela n'est pas beaucoup dans la
lignée.
Voici ma question précise. Le ministre dit: On procède
à une consultation. Comment peut-il parler de consultation quand les
gens consultés se résument à quelques
privilégiés qui n'ont le document que depuis une semaine et
qu'ils n'ont pas pu consulter les membres de leur association respective? Le
ministre peut-il nous dire s'il entend procéder à une
consultation vraiment plus large et à une consultation qui permette une
réaction des principaux intéressés et
particulièrement des professionnels nombreux qui sont impliqués
dans la dispensation des services sociaux au Québec?
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je
réitère qu'à l'égard de beaucoup d'activités
les centres de services sociaux étaient et sont encore des fiduciaires
de certaines activités que la commission Castonguay, à
l'époque, considérait comme devant déboucher au niveau de
ce qu'on appelle la première ligne, au niveau des CLSC.
On se rappellera qu'à l'époque de la commission Castonguay
il n'y avait pas de CLSC. Il y en a maintenant plus d'une centaine sur le
territoire et on continue de compléter le réseau.
Deuxièmement, il est exact que le cadre vise aussi à
transférer certaines activités qui sont actuellement
régionalisées dans les CSS. Troisièmement, il n'est pas
question pour autant de démanteler le réseau des CSS mais
simplement de confirmer - on le verra dans le cas du projet de loi en
matière de protection - le rôle extrêmement important dans
certaines activités en tant que structure régionale mais, au
niveau de la première ligne, de transférer d'autres effectifs qui
sont plus accessibles aux citoyens, à la communauté et où,
à notre avis, le caractère de friction administrative d'un gros
organisme régional ne jouant plus, nous croyons qu'il y aura une
potentialisation des activités de ces services sociaux au niveau des
centres locaux de services communautaires.
Finalement, je dirai que je m'attends effectivement à voir une
série de représentations écrites. Mon sous-ministre,
encore une fois, a consulté les représentants des associations.
Je présume que les principaux intéressés me feront
parvenir très bientôt leurs propositions écrites ou leurs
commentaires écrits et je trancherai avant d'émettre les
directives au niveau des centres de services sociaux et des CLSC.
Le Président: Mme la députée de L'Acadie,
question complémentaire.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je regrette que le
ministre n'ait pas répondu à ma question
véritablement.
Est-ce que le ministre entend tenir une consultation plus large que
celle qui se fait présentement auprès de quelques
privilégiés? Une consultation plus large dans le sens d'une
commission parlementaire pour permettre un forum qui soit au moins un peu
semblable à celui qui avait été prévu au moment de
la commission Castonguay pour procéder à l'organisation des
services sociaux dans le Québec? La réponse que vous me donnez
m'apparaît tout à fait insatisfaisante. (11 heures)
Le Président: Mme la députée.
Mme Lavoie-Roux: Comment le ministre peut-il affirmer qu'il n'y
aura pas démantèlement des services sociaux alors qu'on soustrait
de la responsabilité des centres de services sociaux la majorité
des services d'aide psychosociale qui sont dispensés par ces services
sociaux pour ne leur laisser finalement, à toutes fins utiles, que des
miettes.
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je suis un peu
étonné d'entendre la députée de L'Acadie parler des
miettes qu'on laisserait aux CSS, alors que le projet de loi no 60 que j'ai
déposé ce matin vise non seulement à consolider mais
à raffermir le rôle des CSS en matière de protection de la
jeunesse, ce qui est un rôle extrêmement important qui à nos
yeux doit être joué sur le plan de l'application de la loi surtout
au niveau des ressources régionales et d'une coordination de ces
ressources, donc au niveau des CSS. Je pense que qualifier de miettes ce qui
"resterait", c'est une exagération considérable.
Deuxièmement, la nature de la consultation. M. le
Président, encore une fois je suis prêt à recevoir des
consultations écrites. J'avoue que je n'avais pas envisagé la
tenue d'une commission parlementaire sur un sujet de nature administrative
comme celui-là. Je regrette, encore une fois, que certains des
intervenants aient jugé bon de ne pas collaborer comme ils l'ont
démontré à plusieurs reprises, comme des
représentants des CSS me l'ont confirmé en disant qu'ils avaient
parfois l'impression que leur association voulait jouer de la politique,
plutôt de faire ce qu'ils avaient à faire en termes de
représentations très concrètes.
Si le dossier a piétiné depuis un certain temps, je pense
que ce n'est pas seulement dû au ministère des Affaires sociales.
C'est aussi largement dû à l'esprit dans lequel certains
représentants des centres de services sociaux ont agi dans ce dossier.
Ceci dit, ce n'est pas exactement une consultation privilégiée de
quelques personnes, mais c'est l'Association des centres de services sociaux du
Québec, qui est un organisme central pour les services sociaux et qui
est censé être représentatif.
Le Président: Question principale, M. le
député de Portneuf.
Amendements projetés à la Loi sur les
décrets de conventions collectives
M. Pagé: Merci, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre du Travail. Le 26 avril 1983 vous demandiez à
chacun des comités paritaires de l'industrie de la coiffure de vous
faire des représentations concernant les amendements projetés
à la Loi sur les décrets de conventions collectives. Depuis cette
date les comités, les travailleurs et les travailleuses qui sont parties
intégrantes de ces comités se sont réunis, des
représentations ont été faites. Ils ont
délibéré dans plusieurs régions. Des
représentations ont été faites auprès de votre
ministère concernant plus particulièrement la
représentativité des associations, la juridiction de
métier, la juridiction territoriale, la qualification, l'apprentissage,
les heures de travail, etc.
Le but de ma question est de demander au ministre, après toutes
ces étapes et compte tenu que nous en sommes à la fin de
l'année 1983 et que cette question est sur le tapis, si je peux utiliser
le terme, depuis janvier, j'aimerais savoir du ministre du Travail si le
gouvernement en est encore à réfléchir sur la question
à ce moment-ci? A-t-il des intentions précises? Prendra-t-il des
décisions, dans quel délai et que comporteront-elles?
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Fréchette: M. le Président, il n'y a pas que la
coiffure qui est touchée par la question dont parle le
député de Portneuf. Il y a effectivement l'ensemble des
comités paritaires qui existent dans toutes les activités
où ils existent. Dans la coiffure en particulier, il est exact qu'il y a
eu des représentations dans le sens que suggère le
député de Portneuf. Il y a bien sûr la question de la
représentativité qui revient très souvent. Dans la
coiffure, le problème qui revient le plus souvent c'est celui d'arriver
à régler rapidement la question du statut du coiffeur. C'est un
problème qui peut se régler sans qu'il soit nécessaire de
procéder à des amendements à la Loi sur les décrets
de conventions collectives.
Quant à la question principale et globale du député
de Portneuf, il est exact que le processus d'amendement à la Loi sur les
décrets de conventions collectives a été amorcé. Je
devrais normalement recevoir au cours de janvier prochain des propositions dans
le sens d'amendements à la Loi sur les décrets. J'ai
également informé tous les directeurs des comités
paritaires que nous procéderions par voie d'avant-projet de loi aux fins
de soumettre à la consultation de tout le milieu la nature des
propositions d'amendements que nous voudrions incorporer dans la loi.
Le Président: Très courte question
complémentaire, M. le député.
M. Pagé: Dois-je comprendre, d'après la
réponse du ministre, qu'il nous annonce ce matin que les
représentations vont se terminer en janvier et que, peu après,
vous prévoyez déposer un avant-projet de loi qui embrasserait
l'ensemble de la question de tous les décrets de conventions collectives
ou seulement ce décret spécifique?
Le Président: Une aussi courte réponse, M. le
ministre.
M. Fréchette: M. le Président, effectivement, le
député de Portneuf comprend bien la nature de la réponse
que je viens de donner. Quant aux représentations,
évidemment, il n'est pas question pour ceux et celles qui
souhaiteraient continuer d'en faire, de ne pas accepter ces
représentations, mais déjà elles ont été
faites, déjà une équipe au ministère a
été affectée à la préparation d'un
avant-projet, au début de l'année prochaine, soumis à la
consultation du milieu concerné.
Le Président: Fin de la période de questions. A
moins qu'il n'y ait de motions non annoncées, cela nous mène au
vote reporté. Il y a effectivement un vote à tenir ce matin,
alors, qu'on appelle les députés.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Les
députés sont priés de prendre leur siège.
MM. les députés de Saint-Louis et de
D'Arcy McGee, s'il vous plaît!
Mise aux voix de la motion blâmant
le gouvernement de la situation
dans l'industrie de la construction
Je mets maintenant aux voix la motion de censure de M. le
député de Portneuf proposant que cette Assemblée
blâme le gouvernement qui, par son refus d'abolir ou à tout le
moins de modifier substantiellement le règlement de placement dans
l'industrie de la construction, empêche systématiquement des
milliers d'ouvriers et de jeunes diplômés de travailler dans le
domaine de la construction, les condamnant ainsi au chômage ou à
l'aide sociale.
Que les députés qui sont favorables à cette motion
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lalonde
(Marguerite- Bourgeoys), O'Gallagher (Robert Baldwin), Bourbeau (Laporte),
Ciaccia (Mont-Royal), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Ryan (Argenteuil), Mme
Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Marx
(D'Arcy McGee), Mathieu (Beauce-Sud), Caron (Verdun), Blank (Saint-Louis),
Middlemiss (Pontiac), Polak (Sainte-Anne), Saintonge (Laprairie), Rocheleau
(Hull), Fortier (Outremont), Gratton (Gatineau), Pagé (Portneuf),
Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Paradis (Brome- Missisquoi), Lincoln (Nelligan),
Cusano (Viau), Doyon (Louis-Hébert), Dubois (Huntingdon), Sirros
(Laurier), Picotte (Maskinongé), French (Westmount), Dauphin
(Marquette), Kehoe (Chapleau), Houde (Berthier), Hains (Saint-Henri), Leduc
(Saint-Laurent), Mme Saint-Amand (Jonquière).
Le Président: Que ceux et celles qui sont contre veuillent
bien se lever, s'il vous plaît:
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Bertrand (Vanier), Jolivet (Laviolette), Mme Marois (La Peltrie), MM.
Bédard (Chicoutimi), Laurin (Bourget), Johnson (Anjou),
Bérubé (Matane), Landry (Laval-des-Rapides), Lazure (Bertrand),
Gendron (Abitibi-Ouest), Godin (Mercier), Biron (Lotbinière), Marcoux
(Rimouski), Ouellette (Beauce-Nord), Mme LeBlanc-Bantey
(Îles-de-la-Madeleine), MM. Martel (Richelieu), Bordeleau (Abitibi-Est),
Tardif (Crémazie), Garon (Lévis), Léonard (Labelle), Clair
(Drummond), Fréchette (Sherbrooke), Brassard (Lac-Saint-Jean), Duhaime
(Saint-Maurice), Chevrette (Joliette), Richard (Montmorency), Paquette
(Rosemont), Rancourt (Saint-François), Leduc (Fabre), Proulx
(Saint-Jean), Gauthier (Roberval), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme
Lachapelle (Dorion), MM. Boucher (Rivière-du-Loup), Dean
(Prévost), Rodrigue (Vimont), Beaumier (Nicolet), Gagnon (Champlain),
Dussault (Châteauguay), Vaugeois (Trois-Rivières), Desbiens
(Dubuc), Mme Juneau (Johnson), MM. Fallu (Groulx), Perron (Duplessis),
Rochefort (Gouin), Marquis (Matapédia), Baril (Arthabaska), Laplante
(Bourassa), Charbonneau (Verchères), Champagne (Mille-Îles),
Lavigne (Beauharnois), Blouin (Rousseau), Dupré (Saint-Hyacinthe),
Lachance (Bellechasse), Gravel (Limoilou), LeMay (Gaspé), Mme Harel
(Maisonneuve), MM. Brouillet (Chauveau), Levesque
(Kamouraska-Témiscouata), Payne (Vachon), Paré (Shefford),
Tremblay (Chambly), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue).
Le Secrétaire: Pour: 35
Contre: 65
Abstentions: 0
Le Président: La motion est rejetée. Aux motions,
M. le leader du gouvernement.
Travaux des commissions
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion
pour qu'à la salle 80-A de 11 h 20 à 13 heures, de 15 heures
à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, la commission du revenu
siège pour étudier les projets de loi 54 et 44, article par
article; qu'à la salle 81-A, la commission parlementaire permanente de
la justice se réunisse de 11 h 20 à 13 heures, de 15 heures
à 18 heures et de 20 heures à 24 heures pour procéder
à l'étude du projet de loi 50, article par article. Je
demanderais le consentement de l'Opposition pour que la commission des affaires
municipales puisse siéger au salon rouge, de 11 h 20 à 13 heures,
de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, pour
étudier le projet de loi 45, article par article, et les projets de loi
privés 241 concernant Saint-Sauveur-des-
Monts, 220 concernant la ville de La Baie, 233 concernant la ville de
Sorel, 282 concernant la ville de Drummondville, 211 concernant la ville de
Mont-Joli, 200 concernant la charte de la ville de Montréal, 235
concernant la ville de Gatineau et 232 concernant la ville de Hull.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: M. le Président, si je comprends bien, le
leader du gouvernement a changé d'idée et a convenu d'inviter les
représentants des municipalités qui ont des projets de loi.
Certaines avaient reçu des avis hier dans le sens qu'elles ne
viendraient pas ou enfin! elles avaient peut-être entendu des rumeurs...
Nous sommes parfaitement d'accord pour que les projets de loi concernant les
différentes municipalités soient étudiés en
commission parlementaire. Nous sommes tout à fait en désaccord
pour que ce soit étudié après le projet de loi 45. On ne
sait pas quand cela va se terminer et les maires des municipalités et
les autres représentants pourraient attendre pour rien. Nous sommes
parfaitement d'accord pour que les projets de loi concernant les
municipalités soient entendus. Le gouvernement n'a qu'à choisir
une autre commission parlementaire pour étudier un autre projet de
loi.
Le Président: M. le leader du gouvernement. (11 h 20)
M. Bertrand: M. le Président, je veux simplement poser une
question au leader de l'Opposition. Est-ce que je comprends bien qu'il ne donne
pas son accord pour qu'une troisième commission étudie le projet
de loi 45 article par article avant de procéder à l'étude
des projets de loi privés?
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Nous donnons notre accord pour que la commission des
affaires municipales étudie les projets de loi privés concernant
les municipalités de la ville de Montréal, de Sorel et tous les
projets qui ont été nommés. Nous laissons au gouvernement
le soin de choisir quelle deuxième commission parlementaire pourrait
siéger pour étudier d'autres projets de loi.
Le Président: Selon le règlement. M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Très bien, M. le Président. C'est
parce que la façon dont le leader de l'Opposition officielle s'exprimait
laissait croire qu'il était en désaccord pour que la commission
étudie le projet de loi 45, mais en accord pour que la commission
étudie les projets de loi privés inscrits au nom de certains
députés pour certaines municipalités. M. le
Président, il m'indique qu'il est d'accord pour que cette commission
parlementaire siège, mais qu'il n'y ait qu'une seule autre commission
parlementaire qui siège.
M. Lalonde: M. le Président, si vous le permettez, pour
préciser, ce que nous suggérerions, c'est que la commission des
affaires municipales entende d'abord les représentants des
municipalités sur les projets de loi privés avant d'aborder la
loi 45. Ce sont des invités et on leur doit quand même certaines
marques de politesse.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, la motion que j'ai
présentée était la suivante: qu'une commission
parlementaire siège à la salle 80-A, celle du revenu; qu'une
autre siège à la salle 81-A, celle de la justice pour
l'étude des projets de loi 54, 44 et 50 et que, s'il y avait
consentement, une troisième commission puisse siéger pour
étudier le projet de loi 45 et les projets de loi privés.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Pourquoi le leader du gouvernement place-t-il les
municipalités en dernier lieu? Pourquoi ne pas leur démontrer une
marque de respect et proposer une commission parlementaire d'abord pour les
projets de loi des municipalités? Ensuite, le leader choisira la
deuxième commission que le règlement lui permet de convoquer sans
notre consentement.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, il est bien évident
que la législation qui est soumise aux commissions parlementaires
à 80-A et 81-A est une législation qui n'empêche pas que
nous puissions avoir une commission parlementaire qui siège pour
entendre les représentants des municipalités. Or, pour les
représentants des municipalités, par ces projets de loi, ce n'est
pas au gouvernement qu'on cherche à faire plaisir. Vous parlez depuis
des jours et des jours des municipalités et là, les
municipalités sont présentes pour l'étude de leurs projets
de loi privés. Je demande le consentement de l'Opposition et ce genre de
consentement a déjà été donné dans le
passé, je demande le consentement de l'Opposition pour que les
représentants des municipalités puissent se faire
entendre.
Il y a entre autres la charte de la ville de Montréal, pour
l'expropriation de terrains permetttant la construction de la bâtisse de
l'Orchestre symphonique de Montréal. C'est un projet de loi important et
je pense qu'il mériterait que l'Opposition donne son consentement.
M. Lalonde: Je pense que le leader du gouvernement vient de faire
un vibrant plaidoyer en faveur de convoquer en premier lieu la commission des
affaires municipales pour étudier d'abord les projets de loi
privés. Il sait très bien que les autres projets de loi, que ce
soit le 45, le 50 et les deux projets de loi 44 et 54, ne pourront être
adoptés avant la fin de cette partie de la session, au moins, sans les
consentements unanimes de la Chambre, alors qu'il a pris sur lui d'inviter des
représentants de plusieurs municipalités. Je pense qu'il est de
son devoir et cela, au-delà de tout consentement - il n'a pas besoin de
notre consentement - d'assurer ces municipalités qu'elles seront
entendues ce matin.
Il n'a pas besoin de notre consentement. Il a seulement à les
convoquer, à convoquer cette commission et surtout à faire
entendre ces projets de loi en priorité avant le projet de loi 45, qui
n'est pas entamé et qui prendra encore plusieurs heures.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, dans les circonstances,
puisque, effectivement, je n'ai pas le consentement de l'Opposition pour que
cette troisième commission parlementaire puisse siéger pour
entendre des municipalités qui ont des modifications à apporter
à leur loi constitutive, nous devrons donc faire siéger la
commission du revenu à la salle 80-A et la commission de la justice
à la salle 81-A, et envisager de quelle façon nous pourrons
procéder à l'étude des projets de loi des
municipalités.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président,
parce que je pense que le leader du gouvernement vient d'induire la Chambre -
peut-être inconsciemment - en erreur en disant que nous devrons convoquer
ces deux commissions seulement et non pas la commission des affaires
municipales. C'est son choix à lui de convoquer ces deux commissions et
non pas la commission des affaires municipales.
M. le Président, encore sur la question de règlement, il
ne m'est pas permis comme leader de l'Opposition et il ne nous est pas permis
comme membres de l'Opposition de proposer la tenue de la commission des
affaires municipales pour entendre les municipalités. Seul le leader du
gouvernement peut faire cette proposition.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, la motion est la suivante:
80-A, commission du revenu; 81-A, commission de la justice.
Le Président: M. le leader, il n'est pas question de la
commission sur la fonction publique?
M. Bertrand: Quant à la commission sur la fonction
publique, on m'a indiqué qu'il y avait accord, maintenant, pour que les
deux amendements proposés par le Bureau de l'Assemblée nationale
puissent être intégrés à cette Loi sur la fonction
publique qui est présentée par Mme la ministre de la Fonction
publique. Par ailleurs, après en avoir discuté avec son
vis-à-vis de l'Opposition, il semblerait que l'Opposition
arrêterait sa position relativement à la possibilité
d'étudier le projet de loi sur la fonction publique entre 18 heures et
20 heures ce soir. J'aurais pu faire motion pour qu'elle puisse siéger
entre 13 heures et 15 heures et 18 heures et 20 heures pour poursuivre
l'étude du projet de loi 51, mais on m'a indiqué que le caucus
serait saisi de la possibilité que la commission puisse siéger de
18 heures à 20 heures. Ayant pris note de ce qui m'a été
dit, je n'ai donc pas fait motion.
Le Président: Donc, sur la motion telle que
présentée visant à faire siéger la commission du
revenu et la commission de la justice... Oui M. le...
M. Pagé: Vote enregistré.
Le Président: Qu'on appelle les députés. (11
h 27 - 11 h 30)
Le Président: À l'ordre! M. le député
de Saint-Louis.
Je mets maintenant au voix la motion du leader du gouvernement visant
à faire siéger la commission parlementaire du revenu à la
salle 80-A, aux heures indiquées, et la commission de la justice
à la salle 81-A, aux mêmes heures.
Que les députés qui sont favorables à cette motion
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Bertrand (Vanier), Jolivet (Laviolette), Mme Marois (La Peltrie), MM. Laurin
(Bourget), Bérubé (Matane), Lazure (Bertrand), Gendron
(Abitibi-Ouest), Godin
(Mercier), Biron (Lotbinière), Marcoux (Rimouski), Ouellette
(Beauce-Nord), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine), MM. Martel
(Richelieu), Bordeleau (Abitibi-Est), Tardif (Crémazie), Garon
(Lévis), Léonard (Labelle), Clair (Drummond), Fréchette
(Sherbrooke), Brassard (Lac-Saint-Jean), Duhaime (Saint-Maurice), Chevrette
(Joliette), Richard (Montmorency), Paquette (Rosemont), Rancourt
(Saint-François), Leduc (Fabre), Proulx (Saint-Jean), Gauthier
(Roberval), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Boucher (Rivière-du-Loup),
Dean (Prévost), Rodrigue (Vimont), Beaumier (Nicolet), Gagnon
(Champlain), Dussault (Châteauguay), Desbiens (Dubuc), Mme Juneau
(Johnson), MM. Fallu (Groulx), Perron (Duplessis), Rochefort (Gouin), Baril
(Arthabaska), Laplante (Bourassa), Charbonneau (Verchères), Champagne
(Mille-Îles), Lavigne (Beauharnois), Blouin (Rousseau), Dupré
(Saint-Hyacinthe), Lachance (Bellechasse), Gravel (Limoilou), LeMay
(Gaspé), Brouillet (Chauveau), Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Payne (Vachon), Paré (Shefford),
Tremblay (Chambly), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Lafrenière (Ungava),
Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue).
Le Président: Les députés qui s'y opposent
sont priés de se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Lalonde
(Marguerite-Bour-geoys), O'Gallagher (Robert Baldwin), Bourbeau (Laporte),
Ciaccia (Mont-Royal), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Ryan (Argenteuil), Mme
Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Marx
(D'Arcy McGee), Mathieu (Beauce-Sud), Caron (Verdun), Blank (Saint-Louis),
Middlemiss (Pontiac), Polak (Sainte-Anne), Saintonge (Laprairie), Rocheleau
(Hull), Fortier (Outremont), Gratton (Gatineau), Pagé (Portneuf),
Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Paradis (Brome-Missisquoi), Lincoln (Nelligan),
Cusano (Viau), Doyon (Louis-Hébert), Dubois (Huntingdon), Sirros
(Laurier), Picotte (Maskinongé), French (Westmount), Dauphin
(Marquette), Kehoe (Chapleau), Houde (Berthier), Hains (Saint-Henri), Leduc
(Saint-Laurent), Mme Saint-Amand (Jonquière).
Le Secrétaire: Pour: 59
Contre: 35
Abstentions: 0
Le Président: La motion est adoptée.
Y a-t-il des questions sur les travaux de la Chambre? Oui, M. le
député de D'Arcy McGee.
Recours à l'article 34
M. Marx: M. le Président, en ce qui concerne le projet de
loi 50, il est possible que ce soit nécessaire de convoquer certains
ministres.
Le Président: M. le député, je m'excuse,
votre question est sans doute très intéressante, mais il
règne un vacarme caractéristique de cette période à
l'Assemblée nationale. Si les députés veulent quitter la
Chambre, ils sont priés de le faire rapidement de manière que les
autres puissent entendre ce que leurs collègues ont à dire.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Merci, M. le Président. En ce qui concerne
l'étude article par article du projet de loi omnibus 50, il sera
peut-être nécessaire de convoquer un certain nombre de ministres.
Donc, je demande au leader de faire en sorte que les ministres soient
prêts à venir en commission parlementaire pour expliquer les
amendements aux lois dont ils ont la responsabilité.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Je suis parfaitement d'accord, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, étant donné
que le leader du gouvernement a refusé d'entendre les
municipalités en commission parlementaire, est-ce que le leader du
gouvernement a l'intention de prendre en considération les coûts
de transport de chacun des représentants de ces municipalités et
de les rembourser?
Le Président: Ce n'est pas précisément une
question sur les travaux de la Chambre, M. le député.
Néanmoins, M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Je suis prêt à recevoir les factures,
mais je les refilerai au parti qui a refusé son consentement pour faire
siéger la commission.
M. Pagé: Question de privilège. Ce que vient de
dire le leader du gouvernement, c'est très grave. Le leader du
gouvernement vient de nous imputer une responsabilité parce que les
municipalités... On a voté contre la motion parce que vous
refusiez de les entendre.
Le Président: Bon, bon, bon! Oui, M. le leader de
l'Opposition.
M. Lalonde: Le leader du gouvernement peut-il nous expliquer
comment il se fait qu'il ait convoqué tous les représentants
des
municipalités pour aujourd'hui sans pouvoir les assurer - parce
que sa décision aurait pu être à l'effet de les entendre -
d'être entendus? Comment va-t-il expliquer aux municipalités qu'il
pouvait choisir de les entendre sans le consentement... Il n'a pas besoin d'un
consentement, il a droit à deux commissions sans notre consentement;
comment va-t-il expliquer cela aux municipalités?
Le Président: Encore une fois, il ne s'agit pas, à
proprement parler, d'une question sur les travaux de la Chambre. M. le leader
du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, pour peu qu'on se
réfère à ce que l'on peut appeler une tradition, une
coutume à l'Assemblée nationale du Québec, quand on
reçoit des municipalités pour l'étude de leur projet de
loi, on n'apparente pas cela à la discussion des projets de loi publics.
On accepte que les municipalités puissent se faire entendre à
leur commission parlementaire pour l'étude de leur projet de loi sans
empêcher, pour autant, les travaux normaux de l'Assemblée
nationale de fonctionner. Si l'Opposition décide de porter cette
responsabilité, c'est à elle de la porter. Ce n'est pas à
nous.
M. Lalonde: Comment le leader du gouvernement peut-il dire que ce
sera une commission additionnelle puisque, à cette commission, il
faisait étudier, avant d'entendre les municipalités, le projet de
loi 45, d'après son projet?
M. Bertrand: Justement pas, M. le Président. C'est pour
cela que j'ai posé la question au leader de l'Opposition. Je lui ai
demandé si le refus de consentement était sur le fait
d'étudier le projet de loi 45 avant les projets de loi privés et
j'ai dit que j'étais prêt à retirer l'étude du
projet de loi 45, article par article, et à faire siéger la
commission uniquement pour les projets de loi privés.
Une voix: Trop tard.
M. Bertrand: Refus de consentement encore une fois. Vous nous
dites de le faire, mais vous refusez de donner votre consentement pour qu'il y
ait une troisième commission parlementaire. Très bien.
M. Lalonde: Vous avez le choix. (11 h 40)
Le Président: M. le député de Verdun. C'est
très bien. Tout cela n'est pas enregistré au journal.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: En vertu de l'article 34, M. le Président?
Le Président: Je m'excuse, M. le député de
Gatineau en vertu de l'article 34.
M. Bertrand: M. le Président, pour une fois, ce matin,
est-ce que je pourrais faire plaisir à quelqu'un et déposer un
document?
Le Président: Oui, dans deux secondes. C'est parce que M.
le député de Gatineau...
M. Bertrand: Réponse de...
Le Président: ...m'avait demandé la parole au
moment où nous avons fait la pause de l'humour. M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, le leader du gouvernement
vient de convoquer deux commissions parlementaires, qui, dans les deux cas,
nécessiteront un consentement de l'Opposition pour pouvoir franchir les
étapes et être adoptés avant l'ajournement: une pour
étudier des projets de loi du ministère du Revenu dans l'autre
cas, il s'agit du projet de loi 50 qui a été
déféré à la commission parlementaire de la justice
qui, lui aussi requerra un consentement unanime pour pouvoir franchir toutes
les étapes.
La question que je pose au leader du gouvernement: comment entend-il
faire adopter ces projets de loi? Finalement, pourquoi convoquer ces deux
commissions quand il sait que cela ne pourra aboutir à rien, alors qu'il
a lui-même convoqué les maires, qu'ils sont présents
à Québec et qu'il pourrait les entendre en commission
parlementaire des affaires municipales? Quelle est la logique dans la
planification des travaux du leader?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je suis disposé,
quant à moi, dans toute la mesure du possible, après que nous
ayons répondu à une question qui est inscrite au feuilleton,
question en vertu de l'article 34, à rencontrer le leader de
l'Opposition et à discuter de cette question avec lui.
Une voix: C'est sûr qu'il est toujours à votre
disposition.
M. Lalonde: M. le Président. J'ai toujours accepté
les invitations du leader du gouvernement.
Le Président: Pas besoin de carton d'invitation? M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: En vertu de l'article 34, M. le Président. M.
le Président, Jean-Claude Leclerc, samedi dans Le Devoir, disait
qu'Urgences-santé est la seule structure qui
reste pour sauver des vies en cas d'accident ou d'attaque
sérieuse. Un examen en profondeur s'impose.
Le Président: Justement, justement. Votre voisin de
Mont-Royal aura la bonne réponse à la période de questions
de demain. Cela déborde très nettement le cadre des questions sur
les travaux parlementaires et, s'il n'y a pas d'autres questions...
Apparemment, le leader du gouvernement a une réponse à
fournir.
M. Paradis: Question de règlement.
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Ma question touche les travaux de cette Chambre.
J'aimerais savoir du leader du gouvernement - et c'est pour cela que j'ai
cité cet article, c'était pour le situer, parce que le ministre
des Affaires sociales est absent - s'il entend convoquer une commission
parlementaire sur le dossier Urgences-santé dans les meilleurs
délais?
Le Président: Vous me posez une question précise en
vertu de l'article 34. M. le leader.
M. Bertrand: Tout en vous indiquant, M. le Président, que
j'ai le sentiment qu'il ne s'agit pas d'une question en vertu de l'article 34,
je vais tout de même répondre au député que le
ministre ne m'a pas donné d'information à savoir qu'il souhaitait
qu'une commission parlementaire soit convoquée.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
Réponses aux questions inscrites au
feuilleton
M. Bertrand: M. le Président, il me fait plaisir que le
député de Viger, M. Maciocia, puisse recevoir réponse
à une question qu'il a posée au feuilleton relativement au Manoir
Richelieu. Alors je fais motion pour dépôt de document.
Le Président: Motion adoptée? Des voix:
Adopté.
Le Président: Adopté. Document
déposé. Ce qui nous mène aux affaires du jour. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article 1 du feuilleton et, pour ce faire, je voudrais donc faire
motion pour que vous quittiez votre fauteuil et que nous nous convertissions en
commission plénière pour la poursuite de l'étude des
crédits supplémentaires.
Le Président: La motion est-elle adoptée?
M. Lalonde: Adopté. Le Président:
Adopté.
M. Jolivet (président de la commission
plénière): Donc, je vais suspendre quelques instants, le
temps de faire venir les gens qui vont poser des questions au ministre des
Affaires municipales. Suspension pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 50)
(Reprise de la séance à 11 h 54)
Affaires municipales
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! Nous allons
donc commencer. A partir de maintenant, le temps qui est prévu pour le
ministre des Affaires municipales est de combien dans l'entente, si je veux
la... C'est une heure, M. le député, jusqu'à 13
heures?
M. Scowen: Nous avons l'intention de continuer avec le ministre
des Affaires municipales pendant...
Une voix: Une heure quatre minutes.
M. Scowen: ...peut-être 45 minutes, pas plus d'une
heure.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. Donc, M. le ministre
a-t-il des remarques préliminaires à nous formuler concernant les
programmes 6 et 7 des Affaires municipales, prévus à la page
4?
Remarques générales M. Jacques
Léonard
M. Léonard: M. le Président, essentiellement, il y
a deux éléments qui sont affectés dans le budget
supplémentaire ou les crédits supplémentaires. L'un touche
l'aide financière à la construction de réseaux d'aqueduc
et d'égout, où nous avons une somme de 3 452 400 $; le
deuxième est une aide financière à la
Société d'aménagement de l'Outaouais, où nous avons
une somme de 12 000 000 $, pour un total de 15 452 400 $.
En ce qui concerne l'aide financière à PAIRA, nous avons
indiqué ici une somme de 3 452 400 $ de crédits additionnels.
C'est pour permettre d'utiliser pleinement les fonds du programme
d'équipements communautaires, pour lequel nous avions signé une
entente
avec le gouvernement fédéral en 1979. Ces fonds
étaient à d'autres ministères mais ne pouvaient être
utilisés. Nous les utilisons pleinement dans le cadre de PAIRA à
l'heure actuelle. Cela implique des crédits additionnels de 3 452 400 $,
mais, en contrepartie, au niveau des revenus, nous avons aussi 3 452 400 $ de
plus en provenance du gouvernement fédéral, suite à
l'entente PAEC que nous avions signée en 1979.
Je rappelle que cette entente a été dénoncée
par le gouvernement fédéral le 12 novembre 1980 et qu'il n'y a
pas eu la troisième phase pour laquelle il y avait déjà
une entente verbale. Cependant, vous vous rappellerez, M. le Président,
que j'ai dit à maintes reprises ici, en Chambre, que, le 4 octobre
dernier, je rencontrais M. John Roberts pour lui proposer de doubler les fonds
que nous avions mis à PAIRA, le plus rapidement possible, de doubler,
donc, les 45 000 000 $ que nous avions mis au mois d'avril dernier dans ce
programme pour qu'eux aussi y mettent 45 000 000 $ de plus, de sorte qu'on
pourrait faire face à beaucoup plus de demandes présentement.
Cela explique ces crédits additionnels. Par ailleurs,
deuxième élément en ce qui concerne l'aide
financière à la Société d'aménagement de
l'Outaouais, on se rappellera que la Société d'aménagement
de l'Outaouais avait dû faire un emprunt important, au cours de
l'année 1974, pour acquérir des terrains et des immobilisations
dans la ville de Hull, à l'intérieur du territoire de Hull. Ces
crédits étaient toujours restés extra-budgétaires,
de sorte qu'elle avait dû se financer à même une marge de
crédit, à la Caisse populaire Saint-Joseph de Hull.
Nous réglons cette question maintenant en donnant les
crédits pour combler l'emprunt initial plus les intérêts
courus depuis ce temps.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Critiques du Vérificateur général
concernant la SAO
M. Scowen: M. le Président, j'ai une série de
questions. Je vais poser la première très brièvement,
parce que c'est une question de fait. Elle touche la Société
d'aménagement de l'Outaouais. Dans le rapport du Vérificateur
général, hier, vous avez reçu des critiques très
sévères quant à la façon dont les obligations, les
dettes de cette société ne sont pas montrées sur les
livres.
M. Léonard: ...
M. Scowen: Et, est-ce que cela va régler le
problème effectivement?
M. Léonard: Oui, je le suppose. Je n'ai pas lu le rapport
du Vérificateur général jusqu'ici.
M. Scowen: Si ma mémoire est bonne, il s'agit de 22 000
000 $ qui n'apparaissent pas dans les livres, mais...
M. Léonard: II y a deux choses ici. Cela peut faire partie
du dossier, mais il y a aussi des avances faites par le gouvernement, qui sont
indiquées comme comptes à recevoir et pour lesquels, finalement,
ces comptes à recevoir sont de peu de valeur.
Un instant, M. le député, je vais avoir plus de
précision.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Léonard: Alors, M. le Président, dans les dettes
de la SAO, la Société d'aménagement de l'Outaouais, nous
trouvons trois éléments. D'abord des avances
extrabudgétaires, pour une somme de 35 000 000 $, qui ont
été consenties, au cours des années, depuis la
création de la SAO, et surtout au début, pour aller jusque vers
les années 1978 à peu près, si ma mémoire est
bonne. Ensuite, vous avez des intérêts accumulés sur ces
avances, parce que, selon la charte de la SAO, la loi constitutive de la SAO,
elle devait payer des intérêts sur les avances, 23 000 000 $.
Donc, premier élément, 35 000 000 $, plus 23 000 000 $, plus
maintenant une marge de crédit bancaire à la Caisse populaire
Saint-Joseph-de-Hull, de 12 000 000 $, que nous régularisons par ce
crédit. (12 heures)
Projets d'investissements dans la région de
Montréal
M. Scowen: Merci. Le deuxième aspect des questions que
j'aimerais vous poser, M. le ministre, touche la relance économique et
surtout ce qui est prévu pour la région de Montréal.
Hier, pendant l'étude des crédits supplémentaires,
on avait droit à un discours exagéré, que je peux
même qualifier de démagogique, de la part du ministre des Finances
concernant les investissements. Effectivement, ce que nous avons
demandé, c'était s'il y aura vraiment une augmentation importante
des investissements publics et privés au Québec durant les deux
prochaines années, parce que le premier ministre, quand il a
annoncé son plan de relance, le 13 novembre, a dit qu'il avait
l'intention, à court terme, soit pour 1984-1985, de réaliser un
taux de croissance économique qui soit plus élevé au
Québec que la moyenne
canadienne.
On ne voit presque rien dans le plan de relance qui indique que ce soit
possible, il n'y a rien de concret pour nous faire penser que cet objectif
pourrait être réalisé. Hier, en commission, on a
essayé de comprendre, on a demandé au président du Conseil
du trésor et, par la suite, au ministre des Finances ce qu'il y avait
dans ces programmes pour indiquer que cet objectif, qui est fort louable,
pourrait être réalisé.
Ce matin, je veux vous poser des questions précises sur les
fiches techniques qui apparaissent dans le plan de relance, surtout celles
libellées 2.4, la région montréalaise. Nous voulons savoir
si vous connaissez assez bien votre dossier et les chiffres pour nous indiquer
un peu ce qui va se passer. Si je comprends le portrait de ce volet du plan de
relance, il s'agit d'une augmentation des dépenses dans les
investissements publics à Montréal.
La première question que je vais vous poser - je vais terminer et
vous pourrez peut-être répondre à toutes les questions en
même temps - est la suivante: Quels étaient les niveaux
d'investissements publics à Montréal pour les quatre ou cinq
dernières années? Donnez-moi les chiffres allant jusqu'en 1977 ou
1976. De quel pourcentage seront-ils augmentés l'année prochaine
et l'année suivante?
Quand j'ai qualifié, hier, le discours du ministre des Finances
de démagogique, ce que je voulais dire, c'est qu'il a cité une
série d'investissements. Il a dit: II y a Pechiney, il y a Bell
Helicopter, il a cité certains cas. Mais tout le monde sait que,
l'année dernière, nous avions environ 13 000 000 000 $
d'investissements publics et privés au Québec, c'est facile de
citer des exemples. La question est de savoir si le total sera plus
élevé que l'année passée. Nous avons
souligné, hier, au ministre des Finances, que si nous voulons vraiment
avoir une part des investissements publics et privés au Québec
qui soit égale, per capita, à celle du Canada, il faut que nos
investissements publics et privés montent de 13 000 000 000 $ à
19 000 000 000 $.
M. Parizeau, le ministre des Finances, a annoncé le projet
Pechiney, d'une façon conservatrice, au moins 100 fois. C'est un projet
de 2 000 000 000 $ et, comme il l'a annoncé 100 fois, les gens
commencent à penser que c'est un projet de 200 000 000 000 $. On a
entendu parler de l'affaire de Reynolds. On a entend parler de toutes sortes de
choses, mais ce sont les totaux qui comptent.
La première question: Quel a été le niveau des
investissements publics à Montréal pendant ces années et
qu'est-ce qu'on va réaliser en investissements publics l'année
prochaine ainsi qu'en 1985? Donnez-nous un peu plus de détails, si
possible, parce qu'il y a certains volets de ce programme, prévu pour la
région de Montréal, qui sont très importants.
Premièrement, un des rares cas que nous ayons, dans le plan de
relance, où nous avons droit à certains chiffres, c'est au sujet
de l'intercepteur sud du système d'égout de la CUM. On voit que
la première phase des travaux devrait commencer dès 1984-1985,
entraînant des investissements immédiats de plus de 50 000 000
$.
La deuxième question que je pose est à savoir si cela veut
dire que les 50 000 000 $ immédiats, c'est pour 1984, si c'est pour 1984
et 1985. Est-ce que c'est 25 000 000 $ par année, pendant deux ans?
Si ma mémoire est bonne, le coût total de cet intercepteur
est de quelque 700 000 000 $. Quand est-ce qu'on va terminer le projet? Est-ce
que la seule phase qui est approuvée est la première phase?
Est-ce que la totalité du projet est approuvée? Vous indiquez ici
que seulement les 50 000 000 $ sont pour l'année prochaine. Je
désirerais un peu plus de précision à ce sujet.
Passons au volet b) le départ immédiat du programme de
rénovation des zones industrielles vétustes. Combien pour 1984?
Combien pour 1985, précisément? Si possible, quel est le nombre
d'emplois qui seront créés par ces programmes? Pour
l'accélération des programmes d'habitation, notamment, sur le
terrain des anciennes usines Angus, dans ce dernier cas, les investissements
prévus en 1984 sont de 9 000 000 $ et, en 1985, de 15 000 000 $ à
20 000 000 $. Très bien. C'est le genre d'information qu'on aimerait
avoir sur tous les programmes. C'est un des rares exemples où on le
voit. Mais dans le volet c), une question se pose. Vous parlez des programmes
d'habitation et, par la suite, vous dites: Notamment, le terrain des anciennes
usines Angus. Dans ce dernier cas, c'est 9 000 000 $ en 1984 et 15 000 000 $ en
1985. Est-ce qu'il y a d'autres programmes appliqués là, ou
est-ce que c'est le seul? S'il y en a d'autres, quels sont-ils et combien
coûteront-ils?
Pour la reconduction de l'entente sur la rénovation des quartiers
historiques, comment, quand, combien? Pour la construction de la maison de
l'OSM, pour laquelle des investissements de 160 000 000 $, financés par
les secteurs public et privé, sont prévus, le seront-ils en 1984
ou en 1985 ou plus tard? Le centre de recherche, cela est assez clair. Terre
des hommes, on a droit à une demi-page de déclarations
d'intention et, une fois de plus, il n'y a pas d'échéancier, il
n'y a pas de coûts et il n'y a pas d'intention manifestée pour la
création d'emplois.
Après que vous nous aurez donné quelques détails
sur chacun de ces programmes, j'aimerais que vous reveniez, si possible, au
début de l'exercice pour nous
indiquer combien vous prévoyez pour les investissements publics
et privés et s'ils vont augmenter dans l'agglomération de
Montréal en 1984 et 1985 par rapport aux années récentes
parce que c'est simplement en regardant le total des chiffres qu'on peut avoir
une vue de l'ensemble.
Je répète que cela a été hier la grande
faiblesse du discours du ministre des Finances. Il nous a donné des
exemples qui sont toujours faciles à trouver, mais, malheureusement,
c'est le même ministre des Finances qui a présidé depuis
sept ans à un affaiblissement sans pareil de nos finances publiques,
à un affaiblissement sans pareil de notre économie. Parce qu'il
donne habilement des exemples, il oublie le total, il oublie le problème
dans son ensemble. Tout le monde est porté à croire qu'il y a
quelque chose qui se passe ici, quand ce n'est pas vrai. Ce qu'on attend du
ministre des Affaires municipales, ce matin, c'est une démonstration
plus précise de ses intentions au niveau des projets que j'ai
mentionnés et aussi sur le plan de la totalité, de l'envergure de
ce programme, comparé avec les années
précédentes.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: M. le Président, on me demande de
faire, disons, le portrait global des investissements qui sont faits à
Montréal. Je vais simplement souligner d'abord que la plupart des
dossiers qui ont été soulevés ici par le
député relèvent d'autres ministres présentement.
Néanmoins, je voudrais quand même indiquer un certain nombre de
choses sur différents éléments. Il nous parle de
l'assainissement des eaux; les travaux sur l'intercepteur nord sont finis.
L'usine elle-même, les pompes sont terminées. Maintenant, nous en
sommes à penser à l'intercepteur sud. Donc, ce que nous avons
décidé, c'est de commencer les travaux là-dessus et je
pense bien que les 50 000 000 $ prévus, c'est à partir de
maintenant, pour l'an prochain. Donc, cela, on pourra toujours le revoir. J'ai
fait venir, à l'heure actuelle, pendant que vous me parliez, les plans
d'investissement de la CUM là-dessus. Vous savez que le gouvernement
participe très largement au financement des projets d'investissement de
la CUM.
(12 h 10)
Les travaux sur l'assainissement des eaux sur l'intercepteur sud de
Montréal, c'est un dossier très important où il y aura des
investissements lourds pour plusieurs années à venir mais qui
commencent dès maintenant.
Il y a les autres dossiers qui ont été soulevés
ici. Je pense que, en ce qui concerne l'Orchestre symphonique de
Montréal, vous avez là un investissement d'une valeur qu'on a
estimée à 160 000 000 $.
Vous avez aussi la Maison des sciences et de la technologie dont on
estime le coût entre 65 000 000 $ et 117 000 000 $, selon un groupe de
travail, dépendant des hypothèses qu'on retiendra. Ce sont aussi
des dossiers qui pourront commencer bientôt.
En ce qui concerne le transport en commun, des études se
poursuivent à l'heure actuelle avec la CUM, le BTM et le gouvernement du
Québec, le COTREM et je pense qu'on devrait arriver quand même
à des décisions assez rapidement. Le ministre des Transports s'y
occupe très activement à l'heure actuelle.
Sur d'autres plans, en ce qui concerne les programmes
d'habitation-rénovation, je pense que c'est un secteur qui peut toucher,
de façon considérable, la ville de Montréal surtout en
mettant en place un programme qui touche à la rénovation des
bâtiments résidentiels ou industriels ou même commerciaux
mais surtout industriels. Nous savons qu'il s'agit d'une priorité de M.
Lamarre à l'heure actuelle, président du conseil exécutif
de la ville de Montréal et qu'ils ont des projets sur la
rénovation de centres industriels vétustes. Il y en a un certain
nombre qu'ils ont délimités et je considère que cela entre
tout-à-fait dans nos politiques présentement. La
rénovation de centre-ville, vous savez que Montréal
là-dessus a innové avec la création des premières
SIDAC au Québec. J'étais allé inaugurer,
l'été dernier, la SIDAC de la Plaza Saint-Hubert où le
gouvernement a mis 4 000 000 $, la ville 8 000 000 $ environ et les marchands
eux-mêmes, par leur association, 1 200 000 $.
Alors, ce sont des dossiers qui vont servir d'exemple à mon sens,
pour d'autres SIDAC à l'intérieur de la ville de
Montréal.
Maintenant, en ce qui concerne les investissements - quand vous parlez
des 13 000 000 000 $ d'investissements de cette année ou de l'an
passé, enfin, je pense que c'est cette année, et des 19 000 000
000 $ prévus l'an prochain, que ça prendrait pour suivre le taux
de croissance du Canada, j'aimerais bien voir d'où vous tenez ces
chiffres - il reste que dans ces 19 000 000 000 $ et ces 13 000 000 000 $, sont
compris tous les investissements privés. Il y a les investissements
publics.
Je pense que l'effort que le gouvernement fait dans la région de
Montréal est substantiel si on le compare à celui d'autres
années.
Nous avons investi des sommes considérables dans
différents dossiers notamment l'assainissement des eaux mais cette
année, il y a concertation de plusieurs secteurs d'activité que
ce soit l'habitation, que ce soit la rénovation en
général, l'assainissement des eaux et nous comptons bien que,
dans le domaine des transports,
nous pourrons arriver rapidement à des solutions et à la
mise en marche d'un grand nombre de travaux.
Le Président (M. Rancourt): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, je veux que le ministre me
comprenne davantage.
Nous sommes devant une situation où une bonne partie de la
population du Québec vit la pire crise économique dans
l'histoire. On a demandé, d'une façon continuelle, au
gouvernement, d'agir. Il a un plan de relance, un soi-disant plan de relance.
Il commence à passer des messages publicitaires à savoir que la
relance est commencée avec son plan.
On étudie le plan et de plus en plus, on a la conviction qu'il
n'y a rien là-dedans, que c'est une affaire qui n'est pas
cohérente, qui est conçue en fonction surtout des projets qui
existaient sur les tablettes des divers ministères, qui pouvaient sortir
entre la réunion de Pointe-au-Pic et celle de Compton. Il n'y a aucun
plan d'ensemble.
Le ministre des Affaires municipales, c'est le deuxième,
après le ministre des Finances, qui se disait étonné quand
j'ai déclaré que les investissements publics et privés
sont de 13 000 000 000 $ cette année et qu'il faut réaliser un
niveau de 19 000 000 000 $ pour aller au niveau canadien dans les
investissements. Cela est l'objectif visé par le premier ministre
lui-même. Pour que ce soit très clair - parce que le ministre des
Finances m'a posé la même question hier - les investissements
publics et privés prévus au Canada, cette année, sont de
l'ordre de 73 798 000 000 $ et la population du Canada sera d'à peu
près 24 789 000, ce qui donne une moyenne d'investissements par personne
de 2977 $.
Dans le cas du Québec, je fais exactement le même calcul,
sur la base d'à peu près 13 000 000 000 $ d'investissements pour
6 500 000 personnes, et vous avez à peu près 2000 $ en
investissements publics et privés au Québec. Ce n'est pas
compliqué, ce sont les chiffres de Statistique Canada.
Maintenant, je comprends que ce n'est pas l'intention du premier
ministre d'aller au niveau canadien immédiatement. Mais cela est
l'objectif qui est visé. Alors on dit: Très bien, expliquez-nous
comment les programmes que vous proposez vont réaliser ces chiffres. Et
on découvre que les ministres, même le ministre des Finances, pour
ne pas mentionner le ministre des Affaires municipales, ne sont même pas
conscients de l'écart qui existe. Dites-nous, par exemple, dans le cas
de Montréal... parce qu'un des éléments les plus
importants dans le programme du premier ministre, c'est la reprise à
Montréal. Il a consacré, vous vous en souvenez, toute une partie
de son discours à ce sujet. Il parle beaucoup des investissements
publics à Montréal. Montréal, c'est une
municipalité, une série de municipalités. Je demande au
ministre des Affaires municipales - Dieu sait qu'après le projet de loi
38, tout le monde est conscient que les municipalités relèvent du
gouvernement du Québec - à la personne qui est soi-disant la
personne qui est aussi responsable pour ces municipalités, ceci: Dans le
grand Montréal, axe central de cette relance économique, quel a
été le niveau d'investissements publics l'année
passée et l'année précédente et qu'est-ce que vous
proposez de réaliser pour les années 1984 et 1985? Et le ministre
n'est pas capable de me le dire. Il dit: Cela ne relève pas de moi. Il
dit: Je peux parler brièvement des égouts, je ferai parvenir les
informations.
Au moins il faut que vous acceptiez que pour réaliser un
objectif, un niveau de croissance québécois plus
élevé que celui du Canada dans le domaine de l'emploi, des
investissements du PIB, il faut que le plan soit un plan d'ensemble, un plan
cohérent, et que vous soyez capable de dire comment vous prévoyez
aller de A à Z.
Alors, je demande pour une deuxième fois au ministre de
m'éclairer un peu et de me dire quel niveau d'investissements vous
prévoyez, quelles sont les sommes totales qui seront investies
d'après vous, en 1984 et 1985, dans le grand Montréal, suite
à votre intention de faire ce programme d'accélération des
investissements publics. Et au nom de toute la population, ne dites pas que
vous ne le savez pas.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: M. le Président, on peut faire de la
haute voltige économique. À l'heure actuelle, vous tentez de le
faire parce que les chiffres qui sont lancés sur la table ne sont pas
plus précis que ceux que le gouvernement a mis sur la table. Au
contraire, lorsqu'on a dévoilé le plan de relance
économique, il y a eu quand même des choses qui ont
été dites et on peut retourner aussi au discours sur le budget.
Les prévisions qui sont là ont été établies
avec tous les experts du ministère des Finances. Moi, jusqu'à
nouvel ordre, je leur fais confiance, autant - c'est le moins que je puisse
dire - qu'au député qui nous fait face.
Je vais rappeler quand même une chose. Je veux bien qu'on parle du
développement économique; on peut parler de l'importance des
municipalités dans le développement économique. Elles
dépensent des fonds considérables pour leurs propres
équipements, leur propre budget de fonctionnement et, surtout, elles
sont associées à des décisions qui concernent les
investissements. Or, ce ne sont pas elles qui
prennent les décisions d'investissements, la plupart du temps. Il
reste que, malgré le fait qu'elles y soient associées, elles ne
prennent pas les premières décisions en ce qui concerne les
investissements privés, notamment, mais, règle
générale, nous travaillons avec elles beaucoup plus lorsqu'il
s'agit d'investissements publics. (12 h 20)
En ce qui concerne les investissements publics, le gouvernement du
Québec, comme je l'ai dit tout à l'heure, a fait un effort
considérable, comparativement aux années antérieures. On
leur a d'abord donné des moyens, on est en train de leur donner des
moyens, si l'Opposition veut consentir à continuer l'étude du
projet de loi 45. Nous allons, par ce projet de loi, donner des moyens aux
municipalités en ce qui concerne la rénovation des centre-ville,
en ce qui concerne l'accélération du programme d'assainissement
des eaux et toute une série de mesures qui vont leur permettre de mettre
en route les éléments de la programmation ou de la relance que
nous avons rendue publique les 13 et 15 novembre dernier.
Nous, au ministère des Affaires municipales, nous fournissons les
moyens juridiques aux municipalités de faire des choses, de s'associer
au gouvernement, d'accélérer les programmes, la programmation.
Lorsqu'on bloque des lois, effectivement, on bloque le développement
économique du Québec. C'est exactement ce qu'on est en train de
faire, au moment où l'on se parle, à la fin de cette session, en
bloquant l'adoption du projet de loi 45.
Je dis que cela affecte, par exemple, les travaux pour l'Orchestre
symphonique de Montréal, le démarrage de ces travaux, le
démarrage des travaux de rénovation de parcs industriels
vétustes, d'habitations, de toute espèce de revitalisation du
centre-ville et vous savez combien Montréal en a besoin pour rendre la
ville agréable à vivre et attirer chez elle des gens et des
investissements.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Encore aucune réponse, M. le Président.
Je sais combien on a besoin de refaire le centre de la ville de Montréal
pour le rendre plus agréable. Tout le monde est d'accord. On
était d'accord en 1977, en 1978. C'est un voeu pieux, c'est quelque
chose qu'on peut toujours dire. Ce qu'on cherche, je le répète,
c'est de savoir combien et quand...
M. Léonard: Donnez-nous la loi 45. Elles-mêmes
pourront exercer leur initiative, spécialement la ville de
Montréal et les autres.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Alors, si je comprends bien, le ministre n'est pas
capable de nous dire, ni pour Montréal, ni pour l'ensemble des
municipalités du Québec, les montants qu'il prévoit pour
les investissements publics pour l'année 1984-1985. Vous n'êtes
pas capable de les comparer avec les investissements semblables de cette
année et des années précédentes, non plus.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: Les investissements publics des
municipalités, en ce qui concerne les immobilisations qui paraissent aux
états financiers, sont d'environ 700 000 000 $ par année. Cela a
varié de 500 000 000 $ à 600 000 000 $ et je pense que, cette
année, cela devrait tourner aux alentours de 700 000 000 $.
M. Scowen: Pour?
M. Léonard: Pour les investissements des
municipalités dans l'ensemble du Québec.
M. Scowen: Et l'objectif du plan de relance pour 1984-1985, c'est
d'augmenter ces investissements à quel niveau?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: II n'y a pas eu d'objectif fixé aux
municipalités. Nous déterminons, nous, des programmes dans chacun
des ministères et les municipalités vont en
bénéficier le plus possible. Vous savez qu'on a fait appel
à leur collaboration. Je suis convaincu qu'elles vont la donner, leur
collaboration. Par exemple, lorsque nous avons lancé PRIME, vous savez
fort bien que les municipalités ont participé beaucoup à
ce programme et ont fait des immobilisations; elles ont utilisé un
programme de création de main-d'oeuvre pour se doter
d'équipements durables.
Je pense que cela est un des éléments et les
municipalités, règle générale, ont toujours dans
leurs dossiers, dans leurs cartons, des projets prêts à
démarrer.
Moi, je pense, en particulier dans le domaine de la revitalisation des
centre-ville, nous allons stimuler beaucoup les investissements des
municipalités ou d'organismes paramunicipaux tels que les SIDAC, ce qui
va entraîner aussi des investissements de la part des marchands pour
améliorer l'aspect extérieur de leurs villes ou de leurs
villages.
Tous les programmes de rénovation et d'habitation - vous savez
fort bien que les
municipalités, en collaboration avec le gouvernement dans ce
secteur en particulier, ont fait démarrer la relance économique
au Québec plus rapidement qu'ailleurs, plus rapidement que dans d'autres
provinces. C'est la collaboration du gouvernement et des municipalités
qui a fait cela et nous comptons bien que dans le domaine de la
rénovation, nous atteindrons des records sur ce plan en facilitant les
choses encore une fois avec des dispositions législatives sur les
centre-ville.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâces.
M. Scowen: Avant de donner la parole à mon
collègue, le député de Laprairie et sans vouloir
être méchant, M. le Président, j'espère que vous
pouvez comprendre la déception de tous ceux qui ont été
obligés d'analyser ce programme du gouvernement. Tout le monde
s'attendait à des choses susceptibles de donner une reprise
économique.
Je demande au ministre, les investissements, les objectifs des
investissements publics. Il dit traditionnellement, c'est de l'ordre de 7QQ 000
000 $ mais j'ai dit: "Quels sont les objectifs pour 1984 et 1985?". Il a
répondu: II n'y a pas d'objectifs précis.
Mais vous pouvez comprendre que si vous voulez réaliser un
objectif global qui est une croissance économique plus forte au
Québec qu'au Canada, qui est l'objectif dans le document du premier
ministre, il faut que cet objectif soit réalisé en une
série de mesures qui vont avoir, elles-mêmes, des sous-objectifs
et je suis persuadé que ni le ministre des Finances, ni le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme ni le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation ne sont capables de nous donner le moindre
éclaircissement sur les parties de cet ensemble et effectivement, il n'y
en a pas. C'est pitoyable.
Nous sommes devant une situation ici où le plan de relance
n'existe pas. C'est un catalogue. C'est exactement la même chose que
"Bâtir le Québec 1" et "Bâtir le Québec 3". C'est
effectivement, cette affaire-ci, "Bâtir le Québec 3". Je m'excuse,
on avait droit à 1 et 2 mais maintenant on a droit à 3. Un autre
catalogue de déclarations d'intentions sans échéancier,
sans chiffres et il faut que vous acceptiez qu'avec les deux premiers
"Bâtir le Québec", énoncés d'une politique
économique, l'économie du Québec a descendu d'une
façon sans précédent.
J'avais espoir que, peut-être, le ministre des Affaires
municipales qui est responsable d'un secteur bien défini, aurait pu nous
donner des indications quant au rôle que, lui et son ministère
pourraient jouer dans l'affaire. Malheureusement, tout ce qu'il peut me dire,
c'est que ce serait agréable que les centre-ville, surtout celui de
Montréal, deviennent plus agréables. Franchement, c'est pitoyable
et c'est la population qui va payer pour cette négligence. De toute
façon, je pense que je vais donner la parole à mon
collègue.
Le Président (M. Rancourt): Donc, M. le ministre des
Affaires municipales.
M. Léonard: II n'y a plus rien à faire après
ce que vient de dire le député. M. le député, c'est
comme si tout ce qu'on avait dit, ce n'était rien. Évidemment, il
passe toujours à côté de la question.
Quand nous avons parlé du programme d'assainissement des eaux et
des nouvelles modalités du programme de financement de l'assainissement
des eaux, il semble que cela va avoir un impact. Qu'on ne vienne pas me dire
que ce n'est rien.
Je pense que quand il parle de chiffres, il fait cela comme s'il
pelletait des feuilles en automne.
Alors, l'assainissement des eaux; nous avons coupé la
participation municipale par deux jusqu'au 31 mars 1986 ce qui fait que les
municipalités vont investir, elles vont le faire, ce qui n'a jamais
été fait auparavant pas plus sous votre gouvernement
antérieurement, cela n'a jamais été fait. (12 h 30)
Disons que, maintenant, elles ont un intérêt précis
à y aller et à y aller vite, donc avant le 31 mars 1986. Nous
allons, nous, augmenter notre participation à 90%, à 91%. Cela
est un incitatif majeur. Vous savez que, là-dedans, il y a des fonds
considérables, des investissements considérables, dont les
retombées sont proprement québécoises, sont à 90%
ou 95% québécoises. Mais on ne reconnaît même pas
cela, on n'en parle pas. Le député, tout en promenant des gros
chiffres comme cela, pour essayer d'épater la galerie, ne parle pas des
programmes très précis qui sont là. Le programme
d'assainissement des eaux, cela en est un important, qui relève du
ministre de l'Environnement; il pourra lui poser des questions bien
précises quand le ministre viendra.
Quant à nous, au ministère des Affaires municipales, nous
donnons les moyens juridiques aux municipalités de faire des choses;
avant tout, c'est cela notre fonction.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, ce n'est pas que je sors les
gros chiffres, c'est le contraire. Je veux que vous sortiez les gros chiffres.
Vous dites que vous avez un programme pour l'assainissement des eaux. Si je me
souviens bien, il s'agissait
d'engagements qui vont jusqu'à 800 000 000 $. Très
intéressant! Est-ce que ces dépenses vont se faire pendant 1, 2,
3, 4, 5, 6, 20 années? On ne sait pas. Mais vous pouvez répondre
à la question avec des chiffres très clairs et très
simples, nous dire si, en moyenne, les investissements dans les
municipalités, les investissements publics des municipalités ont
été dernièrement, de l'ordre de 800 000 000 $ par
année - c'est cela que vous avez dit - avec le plan de relance.
M. Léonard: C'est cela, à peu près.
M. Scowen: Dans le plan qui comprend le programme
accéléré d'assainissement des eaux, combien
prévoyez-vous comme investissements publics dans ce domaine pour 1984 et
1985? Même s'il y a une augmentation à l'assainissement des eaux,
il peut y avoir en même temps une baisse des investissements de la
voirie, ou de toutes sortes d'autres édifices publics. C'est le total
qui nous intéresse, et - je m'excuse de le dire - vous avez fait
exactement la même chose que le ministre des Finances hier quand on a
posé ces mêmes questions. Il a dit: Prenez l'exemple de Bell
Helicopter. Mais il y a toujours eu ici, au Québec, depuis longtemps,
à peu près 13 000 000 000 $ d'investissements publics et
privés par année. La question est de savoir combien de plus. La
seule façon de le savoir, ce n'est pas avec des exemples, c'est avec vos
objectifs chiffrés. Tout le monde vous a posé ces questions
depuis le 13 novembre et tout le monde attend encore. C'est le problème.
J'espère que vous me comprenez.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: Si on pose la question sur l'assainissement
des eaux...
M. Scowen: Je n'essaie pas d'être méchant, mais,
pour comprendre le programme, il faut avoir une idée des objectifs et,
semble-t-il, vous n'en avez pas.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: M. le Président, si on veut savoir
combien le ministère de l'Environnement pense pouvoir investir dans
l'assainissement des eaux, le député pourra poser la question au
ministre de l'Environnement quand il viendra ici. C'est ça?
M. Scowen: Merci.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Je vais faire
certaines mises au point aussi, en partant, au ministre des Affaires
municipales, après avoir entendu ce que j'ai entendu dans les quinze
dernières minutes. Nous avons eu un exemple d'une façon de
collaborer du ministre avec le monde municipal et depuis quelque temps. Le
ministre reproche à l'Opposition de bloquer si, j'ai bien compris, la
loi 45. Pour adopter la loi 45, vous n'avez pas de problème; je vois de
beaux signes de tête de l'autre côté.
Je vais commencer, avant d'arriver à la loi 45, juste par un
exemple de ce qu'on a vu ce matin. Le leader du gouvernement expose sa
préparation des travaux. On sait qu'on a eu un mois de délai
avant le début des travaux de la Chambre. Nous arrivons en fin de
session, c'est comprimé de partout. Nous devons étudier un projet
de loi comme le projet de loi 38, déposé depuis le mois de juin,
que le ministre considère absolument fondamental - et je reparlerai,
pour la relance économique, de ce que cela fait, le projet de loi 38,
aux municipalités.
Ce matin, on avait convoqué des municipalités du
Québec, certaines municipalités, je pense qu'il y en avait huit,
à une commission parlementaire pour l'étude des projets de loi
privés. Vous vous rappelez que cette commission-là avait
été convoquée, dans un premier temps, pour jeudi dernier.
Cela a été remis. La convocation a été remise ce
matin même, aux municipalités. Hier, dans l'étude du projet
de loi 45, on a eu, je dirais, une certaine façon, pas l'audace mais
presque, en tout cas, une espèce de mépris, de
téléphoner à des municipalités pour mentionner, au
niveau du ministère, que peut-être les projets de loi
privés ne seraient pas entendus ce matin parce que l'Opposition, dit-on,
bloquait le 45. Si elle arrête de nous bloquer, on vous entendra. Ce
matin, on revient en Chambre, le leader du gouvernement convoque deux
commissions parlementaires mais pas celle des affaires municipales. Pourtant,
dans ce cas, des convocations pour entendre les municipalités avaient
été faites par le gouvernement. Il n'y avait aucune obligation de
convoquer les deux autres commissions parlementaires puisque, à ce
moment, dans ce cadre, on vous dit: Donnez-nous un consentement. Le leader de
l'Opposition l'a mentionné, les projets de loi étudiés ce
matin dans les commissions parlementaires sont des projets de loi qui, en
théorie et en pratique, ne peuvent pas être adoptés avant
la fin de la session demain soir s'il n'y a pas le consentement de
l'Opposition. Quel était l'intérêt du leader du
gouvernement d'appeler ces deux commissions parlementaires au lieu d'appeler,
les municipalités du Québec qui avaient été
convoquées pour ce matin. C'est
de la mauvaise planification mais aussi, c'est une espèce
d'odieux chantage sur les municipalités, en mentionnant que c'est
l'Opposition qui empêche la tenue de cette commission. C'est absolument
faux, c'est tromper non seulement l'Assemblée nationale mais c'est
tromper également les municipalités et le public du
Québec, c'est votre façon d'agir. C'est une façon d'agir
avec l'Opposition et avec le monde municipal qu'on doit dénoncer ici au
niveau du gouvernement.
Deuxièmement, devrais-je rappeler que dans le projet de loi 45,
il y a certaines mesures qui pourraient favoriser, selon le ministre, les
centre-ville, l'assainissement des eaux, les municipalités. J'en suis,
on reconnaît qu'il peut y avoir certaines dispositions qui pourraient
être valables éventuellement pour les municipalités. Le
ministre des Affaires municipales a déposé son projet de loi le
15 novembre au retour de la session; le leader du gouvernement a appelé
ce projet de loi en deuxième lecture en décembre et la commission
parlementaire pour l'étude article par article du projet de loi 45, qui
contient - dois-je le noter - 135 articles. Ce projet de loi a
été appelé vendredi en commission parlementaire pour
l'étudier à la vapeur. Ce qui est le plus curieux, c'est que
vendredi, la commission a siégé trois heures exactement. Dans les
trois heures, vers 17 h 30 - je peux le montrer à la caméra - on
a apporté des amendements. Ce sont les amendements qu'on propose au
projet de loi 45. On dit à l'Opposition: Adoptez cela pour lundi, il n'y
a pas de problème, soyez collaborateurs avec nous.
On veut bien être collaborateurs, mais il faut au moins savoir de
quoi on parle. Également, il y a certaines dispositions que le ministre
veut imposer aux municipalités sur lesquelles le monde municipal n'est
pas toujours d'accord, mais le ministre n'entend aucune représentation.
Il nous a reproché, hier matin, de prolonger les débats
inutilement après trois heures de commission parlementaire et de ne pas
adopter le projet de loi. C'est une façon de fonctionner qui
m'apparaît un peu antidémocratique.
Un exemple quand on parle d'assainissement des eaux. On en a
parlé tantôt. Hier, en commission parlementaire, nous sommes
arrivés à une modification très importante aux yeux du
ministre, au niveau de l'assainissement des eaux concernant une question
d'octroi de contrat. Vous comprendrez, quand nous voyons certains amendements
du genre de celui proposé à l'article 22,1 de la loi, qu'on peut
s'interroger sérieusement sur les bienfaits d'un tel article et les
dangers d'un tel article, puisque dans un tel cas, c'était prévu.
On sait que la règle générale, au niveau des corporations
municipales, les contrats sont octroyés suivant des soumissions
publiques. Dans un tel cas, on passe à côté de cette
question de soumissions publiques. On donne la possibilité aux
corporations, avec l'autorisation du gouvernement, de négocier un
contrat sans être tenues de demander des soumissions.
C'est le gouvernement, cependant, qui peut, en donnant son autorisation
à la corporation, lui imposer des conditions quant aux contrats, aux
contractants ou à la façon de le choisir. De notre
côté, on s'interroge sérieusement, éventuellement,
sur les bienfaits d'un tel article, sur ce qui se cache en arrière de
tout cela. Je pense qu'il y avait lieu de s'interroger activement
là-dessus.
On a aussi, le contrat clés en main, comme on l'appelle, un peu
plus loin, par les amendements qui sont amenés où une corporation
peut conclure une convention avec les ministres des Affaires municipales et de
l'Environnement par laquelle ils l'autorisent à négocier, y
compris avec la Société québécoise d'assainissement
des eaux, un contrat connu sous le nom de contrat clés en main dans
l'exercice de sa compétence en matière d'assainissement des eaux.
La corporation et les ministres peuvent convenir des conditions quant aux
contrats, aux contractants et à la façon de le choisir. C'est un
peu dans le même style de contrat.
Cela m'apparaît sérieux à discuter en commission
parlementaire. Il y a de quoi obtenir certaines informations vis-à-vis
de cela pour voir ce qui en est exactement. Au niveau des municipalités,
on fait grand cas des municipalités. Les deux unions des
municipalités qui étaient présentes hier à cette
commission parlementaire, c'est une nouvelle pour elles ce genre de contrat, ce
genre de possibilité pour les municipalités d'agir à
l'intérieur de ce nouveau cadre sans soumissions publiques. (12 h
40)
Dans certains cas, le gouvernement peut imposer des conditions quant au
choix du contractant ou la façon de le choisir, mais les
municipalités ne savaient pas trop non plus où elles s'en
allaient, elles avaient besoin d'examiner attentivement cette chose-là.
Cela n'est pas seulement pour s'opposer et vouloir retarder le projet de loi,
d'aucune façon, et le ministre le sait fort bien. C'est toujours en fin
de session qu'on arrive avec des embourbements. Ce n'est pas normal qu'on
présente des amendements qui sont deux fois plus volumineux que la loi
et qu'on nous dise qu'il y en a d'autres qui s'en viennent. C'est la
façon d'agir du ministre des Affaires municipales. Avant de lancer des
pierres chez le voisin et de blâmer l'Opposition, il faudrait qu'au
niveau du ministère des Affaires municipales, en commençant par
le ministre lui-même, on respecte le jeu de la démocratie au
niveau de la commission parlementaire, ce serait
beaucoup mieux.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Saintonge: M. le Président, je n'ai pas
terminé.
Le Président (M. Rancourt): Donc, vous pouvez
poursuivre.
M. Saintonge: Au niveau de la création d'emplois, on a
parlé du rôle des municipalités. Je veux soulever un point
ici. On sait que nous sommes en période législative intense, on
sait que nous discutons du projet de loi 38. Il y a pratiquement deux nuits que
nous siégeons à ce sujet; nous en avons parlé
jusqu'à 3 heures du matin cette nuit. Dans la nuit de jeudi à
vendredi, on a fait le tour de l'horloge, on a battu un record parlementaire
sur ce sujet.
Le projet de loi 38, c'est quoi? Le ministre veut pénaliser les
municipalités qui accepteraient des subventions du gouvernement
fédéral. Dans toute cette affaire - je l'ai dit hier en cette
Chambre et je le répète ce matin - si vraiment le ministre a
l'intention de considérer les municipalités du Québec
comme des partenaires du gouvernement provincial, des partenaires avec qui le
ministère des Affaires municipales, le ministre ainsi que le
gouvernement verront à faire une relance de l'économie, verront
à participer à des programmes économiques pour le
bien-être des citoyens du Québec, comment se fait-il que dans le
cas des négociations qui entourent toute la question du projet de loi 38
relativement aux subventions du fédéral qui pourraient être
offertes aux municipalités du Québec, le ministre, dans le cadre
de ces négociations, prenne tellement de temps à aboutir? On
lance des pierres au fédéral mais si on regarde la
correspondance, les rencontres entre le ministre des Affaires municipales du
Québec, Jacques Léonard, et John Roberts, du ministère de
l'Emploi et Immigration du Canada, le 4 octobre dernier, au moins, on a quelque
chose de précis. Pas nécessaire de regarder ce qui s'est
passé avant; du 4 octobre dernier jusqu'à aujourd'hui, où
en est rendu le dossier, où en sont les négociations, de quelle
façon, dans quel délai un accord pourrait-il être
réalisé?
La relance économique, c'est ça, l'important, et c'est
pour maintenant. Ce n'est pas quand l'économie du Québec sera
repartie à grands pas que ce sera le temps, c'est dans une conjoncture
difficile qu'on en a besoin. Dans un tel cas, je pense qu'il y va de la bonne
volonté de tous les participants. C'est un gouvernement de concertation,
un ministre de la concertation. Il y aurait lieu, je pense, qu'il fasse de la
bonne concertation avec le ministre fédéral, avec le gouvernement
fédéral pour tenter d'en arriver à une entente au moins
sur un point, la création d'emplois temporaires. Que le ministre laisse
tomber la question de la participation financière du gouvernement
fédéral au niveau du paiement des "en lieu" de taxes, etc., c'est
un problème qui pourra être réglé plus tard.
Dans le cas qui nous occupe, un programme est offert par le gouvernement
fédéral pour la création d'emplois temporaires, auquel les
municipalités du Québec pourraient participer s'il y avait un
minimum de bonne volonté, un minimum de désir du ministre d'en
arriver à une entente positive pour permettre aux municipalités
de jouer un rôle pour le bien-être de leurs concitoyens. Les
municipalités représentent les citoyens du Québec, mais
également les citoyens du Canada. Dans un tel cas, il y aurait lieu que
le ministre des Affaires municipales négocie le plus rapidement possible
cette entente avec le fédéral, justement pour permettre la
participation des municipalités au programme de relance de l'emploi.
Quant aux autres programmes fédéraux dont a parlé
le ministre, il a rencontré M. Roberts et il nous a parlé
tantôt de PAIRA. M. Roberts se situe au niveau du programme de
création d'emplois temporaires au ministère de l'Emploi et
Immigration. M. Johnston, je pense, s'occupe des problèmes
d'investissement au niveau des structures. C'est à ce niveau que le
ministre Léonard devra faire porter ses interventions pour renouveler
certains autres programmes que le fédéral pourrait bien vouloir
renouveler s'il y a lieu. Je sais que le ministre a souligné plusieurs
secteurs au gouvernement fédéral auxquels il aimerait participer,
mais encore faut-il qu'il aille discuter, négocier de bonne foi, de
façon positive, pour tenter de bénéficier de ces
programmes pour le Québec. Ce n'est pas en voulant faire une guerre des
drapeaux et en se réfugiant derrière certains arguments quant
à la compétence du Québec en matière municipale.
C'est clairement établi qu'Ottawa va la respecter. Nous avons eu des
déclarations à cet effet. Les modalités concernant les
ententes à signer, c'est ce qui est important. C'est là que le
ministre doit faire preuve de souplesse et c'est là que le ministre doit
faire preuve d'imagination également pour permettre au Québec de
bénéficier des programmes que le gouvernement
fédéral met à la disposition des provinces et des
municipalités. C'est cela qu'il faut déplorer.
Je laisserai le ministre répondre là-dessus, à
savoir quand il entend réaliser au minimum ces ententes. Quel
délai va-t-il effectivement se donner? Quel est le mandat précis?
Quand va-t-il se convaincre de l'utilité de ces ententes pour les
municipalités du Québec? C'est le souhait des
municipalités du Québec depuis le printemps dernier, depuis que
ce problème existe. On ne me fera pas accroire que c'est toujours la
faute des autres. C'est le gouvernement, c'est son discours politique. C'est la
faute de tout le monde, sauf de lui-même. C'est un autre cas
précis où on voit que le gouvernement n'agit pas, manque de
leadership, et la seule façon de s'en sortir, c'est de tenter de
pénaliser les municipalités. Si le ministre veut bien
répondre à cela. Quand on reproche au fédéral de
donner à droite et à gauche des subventions
discrétionnaires aux municipalités, comment, par l'application de
son fameux projet de loi 38, arrivera-t-il à enlever cette
discrétion puisque le ministre n'a mis aucun élément dans
ce projet de loi quant à la façon dont il répartira les
montants que pourront aller chercher ces municipalités qui auront
participé directement, indirectement ou de quelque façon que ce
soit? Il va garder une discrétion aussi grande et, de plus, il va
même imposer une double pénalité à certaines
municipalités qui ne participeront pas au retour de ces fonds-là
si le ministre avait décidé de les pénaliser pour un acte
d'un tiers. Ce n'est pas de cette façon que la relance économique
du Québec va se faire, sans programmes précis, comme mon
collègue de Notre-Dame-de-Grâce l'a mentionné
tantôt.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: C'est fini, là?
Le Président (M. Rancourt): J'ai l'impression que M. le
député de Laprairie a terminé. Si vous voulez
répondre, M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: Alors, j'ai dit tout à l'heure que
l'Opposition bloquait les projets de loi; c'est effectivement ce qu'elle fait.
Elle bloque les projets de loi. Quand on a assisté aux débats sur
le projet de loi 38, durant des heures et des heures, à
répéter les mêmes insanités, les mêmes
faussetés, c'est un "filibuster" en règle qui a été
fait...
Une voix: Question de règlement.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Saintonge: Question d'opinion.
M. Léonard: C'est cela qui bloque partout. Ils bloquent
tout, de façon bornée, dans toutes les commissions à
l'heure actuelle...
Une voix: ...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît:
M. Léonard: ...simplement pour le plaisir de bloquer les
discussions et de bloquer les projets de loi...
Une voix: ...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît:
M. Léonard: ...sans égard aux conséquences
que cela peut avoir pour la population du Québec.
Une voix: ...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le
député de Laprairie. M. le ministre.
M. Léonard: M. le député a utilisé le
mot "mentir". Quand je dis "bloquer", quand on a passé trois jours en
commission parlementaire et qu'on était encore à l'article 1,
j'appelle cela "bloquer".
Une voix: Et qu'on passe des nuits blanches.
M. Léonard: Et qu'on passe des nuits blanches ici, alors
qu'il y a beaucoup d'autres projets de loi et que le projet de loi était
connu, qu'il y a eu de la consultation là-dessus...
M. Saintonge: ...
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Laprairie.
M. Léonard: On vient nous dire ici que c'est une guerre de
drapeaux, il y a beaucoup plus que cela. C'est une question de bonne
administration publique et ce n'est pas d'abord une question de guerre de
drapeaux, parce qu'à ce moment-là, il faudrait qu'il m'explique
pourquoi tous les premiers ministres du Québec ont tenu la
position qu'ils ont tenue dans le passé, et que tous les premiers
ministres du Québec...
M. Saintonge: ...
M. Léonard: ...qui vont se respecter vont tenir aussi.
M. Saintonge: ...
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Laprairie.
M. Léonard: Quand je l'entends dire que le
fédéral a dit qu'il respectait la constitution, c'est le
contraire qu'il fait, et
je m'en rends compte si lui ne voit rien, s'il ne lit pas les journaux,
s'il ne voit pas ce que font les députés fédéraux.
Ils font exactement le contraire de ce qu'ils disent. Le gouvernement
fédéral fait exactement le contraire de ce qu'il dit.
Une voix: ...affaires municipales...
M. Léonard: Là-dessus, je pense qu'ils bloquent'
les projets de loi à l'heure actuelle. Ils bloquent des projets de loi
valables. Ils empêchent aujourd'hui la commission sur les projets de loi
privés de siéger. Il faut, au départ, s'assurer que le
projet de loi 45 soit adopté pour l'ensemble des municipalités du
Québec et on va pouvoir régler les problèmes qui se posent
à certaines municipalités au Québec.
M. Scowen: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Rancourt): Question de règlement,
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Léonard: Je ne vous ai pas interrompu, vous.
Une voix: Ils ont le droit de dire n'importe quoi.
M. Scowen: Non, et je n'ai pas l'intention...
M. Léonard: Bon! Alors?
M. Scowen: ...de vous interrompre non plus. J'invoque le
règlement.
Le Président (M. Rancourt): Question de règlement.
Je vous écoute, M. le député.
M. Scowen: Je veux simplement savoir si le ministre peut affirmer
que, pendant ce débat, nous avons utilisé des moyens qui ne sont
pas prévus dans le règlement de l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: Ce n'est pas cela que j'ai dit. J'ai dit
qu'à toutes fins utiles, toute leur attitude, à l'heure actuelle,
tout ce qu'ils faisaient visait à bloquer l'adoption de la
législation du gouvernement du Québec, des projets de loi qui
vont rendre des services aux municipalités comme le projet de loi 45.
Ils ont fait des reproches sur le projet de loi 45. Il a été
déposé, la première fois, le 15 novembre, M. le
Président, le projet de loi omnibus traditionnel sur les affaires
municipales. (12 h 50)
M. Saintonge: Vous avez déposé les amendements
à quelle date?
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Léonard: Nous les avons déposés
dès que nous sommes entrés en commission parlementaire, M. le
Président...
M. Saintonge: À 17 h 30.
M. Léonard: ...pour en faire l'étude article par
article.
Une voix: Quand?
M. Léonard: À la première occasion, nous
avons déposé ces amendements. Si on n'avait pas tant
retardé l'adoption des autres projets de loi, le projet de loi 38, par
exemple, à ce moment-là, on aurait pu y aller beaucoup plus
vite.
Une voix: Les vacances.
M. Léonard: M. le Président, le projet de loi
omnibus, cette année, a été déposé le 15
novembre, quinze jours avant la date habituelle dans les années
antérieures.
M. Saintonge: À quelle date avez-vous déposé
les amendements?
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le
député de Laprairie!
M. Léonard: Si le député de Laprairie veut
se plaindre, qu'il se plaigne, mais s'il ne veut pas travailler, qu'il ne s'en
prenne pas aux autres.
M. le Président, en ce qui concerne les négociations avec
le fédéral, je pense qu'il est bon de faire le point parce que,
depuis toujours, nous tendons la perche au gouvernement fédéral.
Ce n'est pas nous qui sommes sortis de la troisième phase du PAEC, c'est
le gouvernement fédéral. Ce n'est pas nous, je regrette, c'est la
réalité. Personne ne dira le contraire ici, en cette Chambre, ou
n'importe où ailleurs, n'importe où au Canada, parce que toutes
les autres provinces ont été affectées par cela. Ce n'est
pas parce que nous sommes du Parti québécois que cela a
affecté les provinces du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et de la
Colombie britannique.
M. Saintonge: On n'a jamais dit cela.
M. Léonard: Le fédéral s'est retiré.
Admettez-le et jugez-en les conséquences aussi.
M. Saintonge: Cela a été admis.
M. Léonard: Nous lui demandons de revenir à la
table, mais il se fait tirer l'oreille pour revenir à la table, il se
fait drôlement tirer l'oreille. Il veut revenir à ses conditions,
en voulant mettre le pied dans les municipalités. C'est ce qu'il fait,
c'est ce qu'il pose comme conditions réelles. Il veut envoyer sa
série de fonctionnaires, son armée de fonctionnaires dans les
municipalités pour réaliser son vieux rêve de mettre la
patte sur les institutions municipales non seulement ici, au Québec,
mais dans tout le Canada. Or, ici au Québec, nous disons non à
cela et nous allons dire non à cela.
À l'heure actuelle, il essaie de contourner, de façon
"politicailleuse", partisane, avec des interventions tout à fait
discrétionnaires... On ne le reproche pas aux députés
fédéraux, mais dès qu'il y a le soupçon d'une
discrétion du gouvernement qui est obligé de se défendre
ici, à l'Assemblée nationale, c'est inadmissible alors qu'on ne
parle pratiquement pas des interventions discrétionnaires des
députés fédéraux chacun dans son comté.
C'est drôle, il y a deux poids, deux mesures. J'appelle cela se
constituer en valets d'Ottawa. Quand on regarde la situation, quand on regarde
leur attitude, ce sont des valets d'Ottawa et ce seront des valets
d'Ottawa.
Une voix: Exactement.
M. Léonard: M. le Président, la relance de
l'emploi, nous en sommes. Les députés fédéraux
empruntent sur le dos des Québécois. Lorsqu'ils sont au
fédéral, ils n'ont pas besoin de passer par des
référendums, comme dans les municipalités. C'est facile,
on fait marcher la planche à billets et on a de l'argent comme cela pour
faire des cadeaux à tout le monde, sauf que la réalité
économique, c'est que nous allons devoir payer le service de la dette
qui s'ensuit. Nous payons cette dette par un taux d'inflation, par nos
impôts. Nous allons payer par nos impôts à venir et nos
enfants vont payer ces petites orgies de dépenses
préélectorales que les députés
fédéraux font à droite et à gauche. C'est la
réalité.
On nous fait un grand "filibuster" concernant le projet de loi 38, en
disant que nous faisons encore une querelle fédérale-provinciale.
En réalité, nous défendons des droits qui sont les plus
sacrés depuis le début de la Confédération et,
au-delà de ces droits, nous défendons des principes de bonne
administration publique, ce qui n'embarrasse pas les gens du
fédéral et les gens d'en face.
Nous voulons faire la relance de l'emploi avec nos fonds, en stimulant
l'entreprise privée, en intéressant les municipalités, en
associant les municipalités et nous voulons aussi utiliser les fonds du
fédéral, puisque, finalement, c'est nous qui allons les payer. Il
faut au moins aller chercher une partie de ce qui nous revient. L'idéal,
ce serait qu'on aille tout chercher, évidemment, mais nous allons au
moins aller chercher une partie de ce qui nous revient.
C'est pour cela que j'ai déposé des projets d'entente, le
4 octobre, à M. Roberts et à M. Johnston. M. Roberts s'occupe des
programmes de création d'emplois temporaires. Je lui ai dit que nous
voulons notre part là-dedans, que nous souhaitons que ces emplois
temporaires servent à créer des équipements, à
créer des choses qui restent pour les municipalités. Nous avons
déposé toute une autre série qui portait cette fois
directement sur les équipements de municipalités. PAIRA, nous en
avons parlé tout à l'heure. Nous pourrions doubler les fonds dans
PAIRA. C'est effectivement ce que nous avons fait dans PAEC. Nous avons mis 45
000 000 $. Nous pourrions mettre un autre 45 000 000 $. Nous avions mis dans la
voirie municipale, l'amélioration des chemins municipaux, 35 000 000 $
au cours de 1983. Nous proposons de doubler au fédéral. S'ils ont
de l'argent, qu'ils mettent cela pour des choses utiles. Cela va créer
de l'emploi.
Dans le programme d'assainissement des eaux, nous avons proposé
qu'il paie la part des municipalités pour que les municipalités
n'aient pas à assumer le service des dettes et que ce qu'elles auraient
à assumer ce serait simplement, strictement des coûts de
fonctionnement des réseaux. Il y a des fonds immenses, énormes
là-dedans. Simplement pour le bénéfice du
député de Notre-Dame-de-Grâce, si le fédéral
met 10% ou bien 18%, on sait qu'il va retirer 13% de tous ces investissements
en termes de retombées. Donc, pour lui-même ce serait une
décision intelligente que d'embarquer là-dedans.
Également, la programmation des loisirs. Il y a des fonds
considérables qui sont dispensés, à l'heure actuelle, de
façon discrétionnaire par les députés
fédéraux; on ne parle pas de cela. On dit, une ligne, on n'est
pas d'accord, mais en fait jamais on va critiquer comme on critique le
gouvernement du Québec. En réalité, si les gens d'en face
nous aidaient, nous appuyaient, les députés
fédéraux se mettraient vite à l'ordre là-dedans et
c'est cela qu'il faudrait qu'ils fassent s'ils n'étaient pas des valets
d'Ottawa.
Nous avons ajouté deux autres volets dans une lettre que j'ai
écrite à M. Johnston, le 28 octobre, une qui porte sur la
revitalisation des centre-ville. C'est un dossier très important,
très intéressant pour les municipalités. Il y a des fonds
considérables qu'on peut mettre là-dedans qui seraient
très utiles et enfin un autre volet que nous avons ajouté, c'est
celui de la récupération, le recyclage des déchets. Tout
le monde sait quel problème avec lequel les municipalités sont
aux prises à l'heure
actuelle dans ce domaine qui n'a pas été résolu et
qui devrait connaître une solution. Voilà des
éléments, des volets où on pourrait signer des ententes.
On pourrait en ajouter encore 10, 15, 20. Il faut aller récupérer
les fonds municipaux. Il faut le faire dans l'ordre des choses. Il faut le
faire en concertation avec le Québec et ses municipalités, mais
il faut que le fédéral, le gouvernement d'Ottawa signe une
entente avec le gouvernement du Québec. Il n'y a pas d'autre
façon par laquelle les municipalités peuvent toucher des fonds du
fédéral.
Nous sommes d'accord pour aller chercher les fonds du
fédéral, absolument d'accord, mais par le biais d'ententes. Pas
n'importe comment. Mais pourtant, l'Opposition a voté contre l'article
premier du projet de loi 38. Le seul qu'elle ait finalement consenti à
étudier. L'article 1 qui indiquait que nous disions que les
municipalités pouvaient toucher des fonds du fédéral
à condition que ce soit par des ententes, ils ont voté contre, M.
le Président. C'est cela l'Opposition.
M. Saintonge: C'est déjà dans la Loi sur les
affaires intergouvernementales.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: J'aurais une petite question pour le ministre. Il a
parlé de la loi 45, au niveau de la relance économique. C'est
important pour les petites compagnies, les petites PME de participer à
cela. Il y avait un programme qui était au niveau de l'excédent
de la taxe d'affaires qui était attribuable à un taux
supérieur à 15% qui était en place. Le gouvernement payait
cet excédent. Suivant les informations que j'ai, cela devait toucher 45
000 entreprises. C'est près de 8 000 000 $. Le gouvernement, le ministre
par son projet de loi 45 abroge cette disposition à la moitié
pour la prochaine année et dans deux ans le programme sera
terminé. Est-ce que le ministre considère - c'est une implication
de 8 000 000 $ pour la prochaine année environ, peut-être 4 000
000 $ ou environ 4 000 000 $ pour la prochaine année - que c'est une
façon d'assurer la relance économique, d'aider les petites PME
dans le cadre du projet de loi ou si c'est une façon de
récupérer des fonds pour le ministre des Affaires municipales et
de les transmettre au ministre des Finances? Parce que l'an passé, on a
vu qu'au niveau de la péréquation, on a coupé 6 000 000 $
des subventions aux MRC. On a coupé 1 500 000 $, là on est rendu
à peu près à 8 000 000 $ aux taxes d'affaires qu'on va
toucher. Les transferts minimums vont être abolis pour 12 000 000 $ l'an
prochain.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais
répondre très brièvement à cela. C'est que ce
programme faisait suite à une entente qui a été conclue
lorsqu'on a fait la réforme de la fiscalité, en particulier pour
les communautés urbaines, parce que c'est surtout elles que cela
touchait, jusqu'à ce qu'elles aient réalisé leur
rôle d'évaluation nouvelle génération. La date
limite pour le finir, ce rôle d'évaluation nouvelle
génération, était le 31 décembre 1983, dans la loi.
Cette date limite est arrivée.
Or, non seulement nous ne l'abolissons pas immédiatement, ce qui
serait quand même conforme à l'entente tacite qu'il y avait eue
à l'époque, mais nous le poursuivons encore l'an prochain pour la
moitié. Alors, au contraire, nous poursuivons un engagement qui ne
tenait pas au-delà du 31 décembre 1983.
Le Président (M. Rancourt): La commission
plénière suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise de la séance à 15 h 7)
Le Président (M. Jolivet): Nous allons procéder. M.
le député de Bourassa. Si nous pouvions commencer, nous sommes
déjà en retard de sept minutes. Nous avons une heure de
disponible - une heure, une heure et quart, je pense - selon une entente entre
l'Opposition et les représentants du gouvernement, pour les
crédits du ministère de l'Énergie et des Ressources. Il
s'agit des programmes 3 et 4. J'invite donc le ministre à faire une
entrée en matière.
Énergie et Ressources
M. Duhaime: Merci, M. le Président. Les crédits
supplémentaires dont nous avons besoin sont rapportés au livre
des crédits, à la page 73 pour ce qui est des programmes du
secteur des forêts, pour un montant total de 7 720 000 $, et vous
retrouverez ensuite la ventilation au livre des crédits, aux pages 75,
76 et 77.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse.
Il y a des sons qui me viennent aux oreilles et qui m'ennuient. M. le
député d'Outremont.
Reforestation
M. Fortier: M. le Président, nous aimerions profiter de
cette heure - une heure et quart peut-être - avec le ministre
pour connaître davantage le programme annoncé
dernièrement par le premier ministre et par le ministre de l'Energie et
des Ressources en ce qui concerne la reforestation. On nous a indiqué
que c'était là une phase importante du plan de relance et, si le
ministre le voulait bien, nous aimerions qu'il nous précise les
objectifs qu'il s'est fixés dernièrement en ce qui concerne la
reforestation des forêts québécoises qui, comme nous le
savons tous, est un élément extrêmement important dans
l'économie québécoise. Nous aimerions qu'il nous
remémore les objectifs et les moyens qu'il entend prendre pour arriver
à ces objectifs.
D'abord, nous aimerions avoir quelques éclaircissements sur ces
aspects du programme annoncé dernièrement puisque, de toute
évidence, l'augmentation des crédits dans le domaine de la
forêt s'inscrit, dans une certaine mesure, dans ce plan annoncé
récemment. Comme on nous a indiqué que, bien sûr, il y
aurait d'autres crédits dans les années à venir, nous
croyons que c'est un élément important du plan annoncé par
le premier ministre et par le ministre de l'Énergie et des Ressources.
Nous aimerions en savoir davantage.
Le Président (M. Jolivet): Juste avant d'accorder la
parole à M. le ministre, M. le leader du gouvernement a quelque chose
à annoncer.
M. Bertrand: M. le Président, je pense qu'un peu de
confusion a été semée dans les esprits de certaines
personnes. Il y a des gens qui croient que la commission des affaires
municipales siège cet après-midi, de 15 heures à 18
heures, pour étudier les projets de loi privés. Ce n'est pas
exact. On se rappelle que ce matin j'ai fait motion pour que deux commissions
parlementaires siègent, celle du revenu et celle de la justice. Mais je
pense qu'il y a une communication qui a peut-être été faite
d'une façon erronée par le Secrétariat des commissions
parlementaires à savoir que la commission des affaires municipales
siégeait cet après-midi à 15 heures, ce qui n'est pas
exact. Nous n'avons pas la possibilité de faire siéger cette
commission parlementaire cet après-midi. Je veux donc que ce soit bien
inscrit au journal des Débats, parce qu'il y a des députés
qui se posaient des questions et les représentants des
municipalités aussi.
Le Président (M. Jolivet): Donc, les deux commissions qui
siègent cet après-midi et ce soir sont celles de la justice et du
revenu, aux salles 80 et 81?
M. Bertrand: Au moins cet après-midi, parce que les
indications que j'ai, M. le Président, c'est que les travaux progressent
relativement rapidement dans les deux commissions parlementaires et il n'est
pas impossible que je fasse motion vers la fin de l'après-midi ou au
début de la soirée pour que des mandats nouveaux soient
donnés à des commissions parlementaires, dans la mesure où
celles qui siègent en ce moment, au revenu, sur les projets de loi 44 et
54, et à la justice, sur le projet de loi 50, auraient terminé
leurs travaux à 18 heures.
Le Président (M. Jolivet): Donc, on attendra. M. le leader
de l'Opposition.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que le leader du
gouvernement pourrait nous indiquer, dans l'hypothèse qu'il vient de
décrire, s'il y a quand même de bonnes chances que ce soit la
commission parlementaire des affaires municipales qui pourrait étudier
ce soir les projets de loi privés sur les municipalités.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Bertrand: Dès que j'aurai une indication, M. le
Président, que les deux commissions parlementaires, ou que l'une des
deux commissions parlementaires aura terminé ses travaux à 18
heures, à ce moment-là, j'aurai une information finale, donc une
motion à l'Assemblée nationale. J'aurai une information finale
vers environ 19 heures, ce qui m'amènerait à faire une motion
à l'Assemblée à 20 heures pour ce qui est de la suite des
travaux en commissions parlementaires.
M. Lalonde: Oui, mais est-il exclu que ce soient les projets de
loi privés, parce qu'il y a des gens qui nous attendent?
M. Bertrand: Actuellement, ce n'est pas exclu. J'ai
rencontré quelques représentants de municipalités ce midi
et je leur ai indiqué qu'effectivement, c'est à 19 heures que je
serais en mesure de leur communiquer l'information à savoir si la
commission des affaires municipales siège ou non sur les projets de loi
privés ce soir.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le ministre, en
réponse à la question posée par le député
d'Outremont.
M. Duhaime: M. le Président, cela me fait bien plaisir
qu'on parle de reboisement. Seulement, sur le plan de la méthodologie,
je voudrais seulement savoir une chose pour ne pas qu'on se perde. Est-ce que
je tiens pour acquis que les 7 720 000 $ demandés au chapitre
incendie-tordeuse, voirie forestière sont acceptés et qu'ensuite,
on considère la politique du reboisement?
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, je crois qu'il y a eu
une convention à savoir que tous les crédits seront
adoptés à la fin de l'exercice. Donc, nous aimerions profiter de
la période de temps qui nous est accordée pour connaître
davantage les politiques du ministère à ce sujet. Nos questions
ne traiteront pas des chiffres spécifiquement, mais plutôt des
politiques, des objectifs et des moyens que le ministère entend mettre
en oeuvre.
M. Duhaime: Ah bon, c'est parce qu'on ne m'avait pas
prévenu de cela, M. le Président. On m'avait dit essentiellement
que l'Opposition s'en tiendrait aux chiffres des crédits additionnels.
Mais je n'ai aucune objection, au contraire, à parler de ce programme de
reboisement qui était annoncé dans le coeur du programme de la
relance par le premier ministre, le 13 novembre dernier, je crois. Et
même si, jusqu'à présent, l'effort de reboisement arrivait
à satisfaire les besoins de l'industrie, je rappelle essentiellement
qu'il y a un plan quinquennal qui est en marche, dont l'objectif est
d'atteindre 100 000 000 de plants à l'horizon de 1985-1986. Et si nous
avons pris cette décision de tripler l'effort de reboisement, ce n'est
pas essentiellement pour prévoir et mieux satisfaire les besoins de
l'industrie, mais c'est pour aller au-delà. 0e ne sais pas si vous me
permettriez quelques minutes. J'aurais un petit texte qui n'est pas tellement
long et qui pourrait peut-être répondre à l'avance à
plusieurs des questions que vous pourriez avoir à l'esprit. Je rappelle
qu'en...
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
d'Outremont. Excusez-moi, M. le ministre.
M. Fortier: Est-ce que le ministre pourrait nous donner les
chiffres des nouveaux plants de cette année? Ou quels sont... Il a fait
allusion au plan quinquennal actuel. Peut-il nous dire dans sa
présentation quels sont les chiffres exacts pour l'année en
cours, en particulier?
M. Duhaime: Pour l'année en cours, nous aurons, pour
l'année 1983, mis en terre 65 000 000 de plants dont - c'est à
peu près moitié moitié - 30 000 000 ont été
plantés sur la forêt publique et 35 000 000 sur la forêt
privée. Maintenant, qui a produit ces plants? Le ministère en a
produit 56 000 000 et le secteur privé 9 000 000. Ces chiffres n'ont pas
comptabilisé l'effort de reboisement qui peut être conduit par
diverses compagnies qui oeuvrent particulièrement dans le secteur de la
production du papier journal ou de la pâte.
En 1983-1984, l'ensemencement dans nos pépinières et dans
les serres a été fait en vue d'une production éventuelle
de 100 000 000 de plants, - c'est ce que j'indiquais plus tôt - dont 87
000 000 dans les pépinières du gouvernement, alors
qu'effectivement nous avons mis en terre 65 000 000 de plants. Vous comprenez
facilement qu'en 1983, avec 65 000 000 de plants, un peu plus en 1984 et un peu
plus en 1985 à l'horizon de 1986, nous pourrions mettre en terre 100 000
000 de nouveaux plants.
À partir de 1984-1985, je parle donc du programme de reboisement
qui a été annoncé récemment, l'ensemencement sera
augmenté progressivement de façon à atteindre 300 000 000
de plants par année à compter de 1988-1989. J'ai un tableau
devant moi qui nous donne la séquence et indique à quel rythme de
croisière on va porter notre effort de 100 000 000 à 300 000 000
de plants sur 5 ans. De ce nombre, 200 000 000 seront destinés à
la forêt publique, c'est-à-dire les deux tiers. Cela nous
permettra sur une base annuelle, de reboiser 60 000 hectares à
même des superficies qui se régénèrent mal, ainsi
que des superficies de l'ordre de 20 000 hectares à même des
territoires déjà coupés. Les terrains où seront
concentrés les travaux seront ceux qui présenteront le meilleur
potentiel à cet égard.
Pour ce qui est de l'autre tiers, c'est-à-dire 100 000 000 de
plants, ils seront destinés à la forêt privée pour
reboiser environ 40 000 hectares de terrain propre à l'agriculture et
aussi pour des terrains où des coupes ont dû être
effectuées aux fins de récupérer des bois affectés
par la tordeuse de bourgeon d'épinette.
C'est donc dire que, pour atteindre de tels volumes de production, il
faudra profiter au maximum de la prochaine bonne année semencière
pour augmenter la récolte de cônes afin d'obtenir une
récolte moyenne de 24 000 hectolitres par année pour les 5
prochaines années, ce qui veut dire un effort énorme.
Bref, cela veut dire 200 000 000 de ces plants destinés à
la forêt publique et 100 000 000 à la forêt
privée.
Est-ce que vous seriez intéressés à voir de quoi
auraient l'air ces petits plants? Je ne sais pas si l'on pourrait m'apporter
mes plants...
M. Fortier: Vous m'en enverrez pour Noël.
M. Duhaime: J'en ai apporté pour vous les montrer.
Quelles vont être les modalités d'application? C'est le
ministère qui a produit, dans ses propres pépinières, la
plus grande proportion des plants disponibles pour le reboisement et qui en
assume aussi
entièrement les travaux en forêt publique. En forêt
privée, nous nous contentons de jouer un rôle de fournisseur et de
soutien technique. Il est bien sûr que ces règles du jeu seront
modifiées dans le but d'impliquer plus directement le secteur
privé dans la poursuite de ces nouveaux objectifs.
Quel sera le coût de l'opération? Je vous donne les
chiffres suivant ce que nous pouvons les estimer aujourd'hui. Le budget global
du reboisement pour l'exercice financier en cours en 1983-1984 est de l'ordre
de 41 000 000 $. Ce budget sera porté à un peu plus, en fait on
devrait dire tout près de 73 000 000 $ l'an prochain. En 1985-1986, 93
000 000 $; en 1986-1987, 112 000 000 $; en 1987-1988, 138 000 000 $; en
1988-1989, 172 000 000 $. Ce qui veut dire que, sur une période de 5
ans, c'est environ 600 000 000 $ qui seront affectés à l'effort
de reboisement de ce programme. (15 h 20)
J'ai ici également les détails des implications
budgétaires pour 1984-1985. Je peux vous les donner si cela vous
intéresse. Cela explique aussi que le programme de relance
n'apparaît pas nécessairement au budget qui a suivi, le budget
supplémentaire du 15 novembre, parce que beaucoup de l'effort
budgétaire pour financer le programme de relance sera fait sur un, deux
ou trois ans et, dans ce cas-ci, sur cinq ans.
Vous allez comprendre également qu'un programme comme celui-ci
est très fortement créateur d'emplois. On pense donner du travail
à 8000 personnes-année. Si on considère que la saison des
travaux dans les pépinières, dans les serres et en forêt
compte pour environ cinq à six mois, ce sont 16 000 individus qui seront
visés.
Un dernier mot sur le plan des immobilisations. Nous avons estimé
à environ 80 000 000 $ les investissements qui seront requis;
là-dessus, il y a un montant de 20 000 000 $ qui consistera à
construire une usine de semence et aussi à améliorer les centres
de production du ministère. Les autres dépenses vont dans le sens
que nous prévoyons - et toutes les indications vont dans ce sens - que
le secteur privé réponde avec enthousiasme à ce programme.
Suivant une répartition régionale qui a été faite,
nous croyons que sept serres seront nécessaires pour alimenter le
programme, de même que la construction ou l'installation de 25 nouvelles
pépinières pour des investissements globaux de l'ordre d'environ
60 000 000 $. Voilà à peu près en gros... Cela signifie
que si on considère que nous coupons du bois sur environ 240 000
à 250 000 hectares de forêt ces années-ci, avec un
programme de cette envergure, nous en arriverons à reboiser 50% du
parterre de coupe lorsque ce programme sera à plein régime.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, nous prenons acte des
décisions du gouvernement et du ministère de faire quelque chose
pour sauver la forêt. La question qui vient à l'esprit, c'est:
Pourquoi avoir tant tardé pour prendre des décisions qui
s'imposaient depuis très longtemps? Nous savons tous que nous avons au
Québec certaines énergies renouvelables: l'eau en est une, la
forêt est censée être une autre ressource renouvelable.
Malheureusement, depuis plusieurs années, cette ressource soi-disant
renouvelable l'est de moins en moins.
Je vous référerais à une déclaration du
ministre des Terres et Forêts, le député de Matane, le
ministre Bérubé, en 1979. J'ai ici une manchette du Soleil du 9
mai 1979 dans laquelle il dit: "Forêts à sauver". Si vous
permettez, je vais lire cette coupure de journal du Soleil où on lit
ceci: "D'après le ministre Bérubé, une action
énergique est devenue nécessaire pour assurer la
pérennité de la forêt québécoise qui fait
l'objet d'une exploitation intensive dans plusieurs forêts. Le temps est
venu - a-t-il dit - pour l'industrie québécoise de rationaliser
sa production forestière, car à moins d'une intervention bien
articulée, le bois se fera toujours de plus en plus loin et de plus en
plus cher. Le tiers de nos forêts ne se regénère pas ou se
regénère en essences indésirables." Un peu plus loin,
c'était au mois de juillet 1979, également dans un article du
Soleil qui titrait: "La forêt du Québec sera reboisée au
rythme de 100 000 000 de plants en 1983", sous la plume de Pierre Pelchat, on
lisait ceci: "Si le gouvernement québécois a entrepris de
reboiser 100 000 acres de forêt annuellement à compter de 1983,
soit l'équivalent de la moitié de la superficie de l'île
d'Orléans, c'est pour mieux couper cette forêt. Selon une
étude gouvernementale, ces coûts sont supérieurs de 22 $ au
Québec - on parle des hausses constantes des coûts
d'approvisionnement en matière ligneuse pour les usines de pâtes
et papiers - et, de plus en plus, depuis quelques années, les
exploitants forestiers du Québec se doivent d'aller toujours plus loin
en forêt pour aller quérir leurs billes.
Alors, il semblerait, M. le Président, que dès 1979 on
avait identifié qu'il y avait un problème extrêmement grave
en termes de regénération de la forêt. Même si le
ministre faisait allusion à un plan quinquennal qui est beaucoup moins
ambitieux que celui que le ministre a annoncé il y a quelques mois, il
reste que nous avons accusé un retard considérable pour nous
assurer que cette forêt soit réellement une ressource
renouvelable.
La question que j'aimerais poser au
ministre est celle-ci. Elle est double dans un certain sens. Compte tenu
du diagnostic qui avait été posé par le ministre
Bérubé, ministre responsable des Terres et Forêts en 1979,
comment se fait-il que les efforts n'ont pas été
déployés en 1979 pour s'assurer que la forêt
québécoise soit regénérée, pour assurer que
les territoires, comme en Gaspésie, le Bas-Saint-Laurent, le Saguenay,
les Cantons de l'Est ou ailleurs, dans l'Outaouais, dans le Nord-Ouest...
Comment se fait-il, étant donné que le diagnostic avait
été fait, que le gouvernement n'ait pas mis en oeuvre à ce
moment-là les politiques qu'il aurait fallu mettre en oeuvre? Comme le
titre de cet article: La forêt du Québec sera reboisée au
rythme de 100 000 000 de plants en 1983, on annonçait dès ce
moment une politique. Je ne sais pas si le titre reflétait une politique
officielle du ministère, mais il semblerait que c'était un
chiffre qui avait été avancé par M. Bérubé
pour indiquer l'ampleur du problème.
Le ministre nous a dit il y a un instant qu'on avait réussi cette
année à planter 65 000 000 de plants, c'est donc dire qu'on avait
en 1979 établi un objectif de 100 000 000 de plants. On en a
réalisé 65 000 000. Malgré le diagnostic qui avait
été fait par le ministre Bérubé à ce moment
- et on sait que le député de Matane était un ministre des
Terres et Forêts qui était très près de son
ministère, à ce moment. C'était un ministère en soi
qui n'était pas associé au ministère de l'Énergie
et des Ressources. Le ministre du temps avait tout le temps pour se
dévouer à ce ministère en particulier - qu'il fallait 100
000 000 de plants en 1983, pourquoi avoir tant tardé et avoir
réalisé en 1983 uniquement 65 000 000 de plants,
c'est-à-dire 65% de l'objectif qui avait été fixé,
selon ce qu'il avait dit en public?
M. le Président, si on a tant tardé pour réaliser
qu'il y avait un réel besoin, alors que le diagnostic en ce qui concerne
la forêt québécoise avait été très
bien établi, comment le ministre peut-il nous expliquer ce retard
considérable durant les cinq dernières années à
mettre en oeuvre le plan qu'il met maintenant? Même si on prend acte et
que l'on se doit de constater que le plan qu'il désire mettre en oeuvre
maintenant est un programme ambitieux et qui devrait recevoir notre appui,
pourquoi avoir tant tardé pour remédier à la
dégénérescence de la forêt québécoise,
compte tenu des délais considérables qui sont impliqués
dans la regénération de la forêt?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, il y a sûrement des
réponses aux questions qui sont posées. Je peux essayer de les
donner au meilleur de ma connaissance, en espérant que celui qui les a
posées ne me prête pas d'intentions politiques partisanes.
Je dirai au député d'Outremont que nous sommes partis de
zéro dans le sens suivant: Lorsqu'en 1979 et en 1980, au
ministère, on a commencé à parler du programme de relance
et de modernisation dans le secteur des pâtes et papiers, il fallait
tenir pour acquis, indépendamment d'autres capacités qui
viendraient s'ajouter, qu'il fallait fournir à l'industrie 1 000 000 de
cunits de bois par année. Au ministère, avant le plan quinquennal
de 100 000 000 qui existe et qui n'est pas en-deçà de ses
objectifs, l'objectif était de faire en sorte qu'en 1985, 100 000 000 de
plants soient mis en terre. C'est dans le cheminement normal de ce programme
que cette année, en 1983, nous avons réussi à planter 65
000 000 de ces arbres. (15 h 30)
Je pense qu'il est bien important de faire une distinction entre ce
qu'on appelle du reboisement et de l'ensemencement. Ici, je ne veux pas
être chicanier inutilement mais ce serait sûrement
intéressant pour nos collègues d'en face d'informer leur chef de
ce qui se passe dans ce dossier parce qu'il y a eu une déclaration qui,
à mon sens, a été malheureuse de la part de M. Bourassa
qui disait que notre effort de reboisement était moindre que celui du
Nouveau-Brunswick. Il parlait de 14 000 hectares. Il n'y a rien de plus fou, M.
le Président. Quand on parle de 14 000 ou 15 000 hectares, on parle
d'ensemencement par voie aérienne et cela n'a rien à voir comme
tel avec le reboisement. Je crois que cette année l'effort de
reboisement porte sur au-delà de 40 000 hectares.
Pourquoi est-ce que je dis qu'une déclaration comme
celle-là est malheureuse? C'est à un double égard.
D'abord, ce n'est tout simplement pas vrai. Il faudrait quand même rendre
justice, même si c'est notre gouvernement, à l'effort qui est
fait. Deuxièmement, cela crée des problèmes à
l'industrie aussi parce que l'effort de reboisement est en quelque sorte le
meilleur garant des garanties d'approvisionnement.
Le député d'Outremont nous dit: Pourquoi n'avez-vous pas
commencé plus tôt? Ce que je lui réponds c'est: Nous
aurions pu attendre encore quelques années et, en ajoutant 100 000 000
de plants par année à partir de 1985, nos forêts ne se
retrouvaient pas dans un état de rupture de stock. Je pense que si on
examine la problématique à plus long terme ou, devrais-je dire,
à très long terme parce qu'on parle d'une période de 30,
35 et même 40 ans. C'est dans ce sens que si on peut compter sur 300 000
000 de plants mis en terre chaque année, à partir de 1988, il est
bien certain que c'est toute la problématique des appro-
visionnements qui va être modifiée dans le sens qu'on va
pouvoir offrir à l'industrie des blocs ou des approvisionnements que le
ministère de l'Énergie et des Ressources conservait pour des
années beaucoup plus lointaines.
Autrement dit, on va pouvoir rapprocher les inventaires et, ce faisant,
augmenter la capacité de production, soit dans le secteur du papier
journal ou soit encore dans le secteur du sciage. C'est dans ce sens que le
programme a été arrêté.
Un dernier élément de ma réponse: La tordeuse de
bourgeons de l'épinette. On s'aperçoit, par exemple, que cette
année il y a une diminution du fléau. Si mon souvenir est exact,
l'an dernier on nous avait prédit une recrudescence. Quand les
biologistes sont sur le terrain et qu'ils ont fait les analyses avec les
données qu'ils ont, ils préviennent les officiers du
ministère qu'il y a hausse ou diminution et le programme des arrosages,
soit aux produits chimiques ou biologiques, est ajusté en
conséquence.
Il est bien certain que les ravages de la tordeuse dans certains coins
du Québec, particulièrement la région sud du
Québec, toute la région du Bas-Saint-Laurent et de la
Gaspésie, sont énormes. Comme je l'ai indiqué tantôt
dans ma réponse, c'est en tenant compte de l'évolution de ce
fléau qu'une banque additionnelle pourrait être en mesure de
soutenir l'effort de reboisement avec quelques dizaines de millions de plants
de plus par année. Nous serons très certainement en mesure non
seulement de consolider et de mieux garantir les approvisionnements à
l'industrie mais viser à des augmentations de capacité parce que
ces années-ci - si on prend les années 1982 et 1983 - il ne se
coupera pas au Québec 28 000 000 de mètres cubes de bois.
C'est dans l'hypothèse où on bûche et lorsque
l'industrie du sciage et l'industrie du papier journal tournent à 100%
de capacité. Lorsque le sciage tourne à 50%, 52% de
capacité et que l'industrie du papier journal tourne à 80%, on
fait en quelque sorte une banque de quelques millions de mètres cubes
d'arbres adultes qui seraient prêts à aller à l'industrie
mais qui n'y vont pas à cause des ralentissements sur le
marché.
Il faut tenir compte de ces facteurs et c'est pourquoi le programme de
reboisement n'est pas là pour répondre à un
problème à court terme ou même à moyen terme mais
à un problème à long terme.
M. Fortier: M. le Président, ce que j'essayais de faire
constater au ministre, c'est qu'il y a eu une négligence assez
impardonnable même s'il s'agit d'une politique à long terme. Le
ministre Bérubé avait identifié un problème
très précis; il avait fixé des objectifs très
importants. Dans le même article, on disait que dès 1979, les
travaux sylvicoles étaient extrêmement importants. À juste
titre, on indiquait que des travaux sylvicoles appropriés pouvaient
tripler les possibilités de coupe en forêt. C'est connu de tous
ceux qui s'intéressent au domaine de la forêt.
Lorsqu'on regarde les statistiques qui nous viennent du ministère
- c'est un document qui a été publié par le
ministère de l'Énergie et des Ressources dans Ressources et
industries forestières - en ce qui concerne les travaux sylvicoles en
particulier, on s'aperçoit que depuis 1978-1979 - chose assez curieuse,
à partir du moment où le ministre Bérubé
identifiait la nécessité de faire un effort très important
pour sauvegarder la fôret, soit dans le domaine de la plantation, soit
dans le domaine des travaux sylvicoles - le ministère de
l'Énergie et des Ressources a diminué les volumes
récupérés ou les superficies traitées par des
travaux sylvicoles. Il y a là une négligence inexplicable et,
même s'il s'agit de résoudre un problème à long
terme, on doit constater une certaine négligence.
Je me demande si le ministre ne pourrait pas accepter comme explication
l'éditorial qu'on retrouve dans Au fil du bois, dans le numéro
d'octobre-novembre 1983, dans lequel M. Richard Lacasse, directeur
général, met le problème sur la table. Il tente de nous
expliquer que, dans le fond, tant et aussi longtemps que Terres et Forêts
était un ministère séparé, tant et aussi longtemps
qu'il y avait un ministre qui s'occupait des terres et forêts, qui avait
à coeur le développement de la forêt, qui
s'intéressait à ses dossiers, et tant qu'il n'était pas
détourné vers d'autres problèmes dans le domaine de
l'énergie, dans le domaine des mines, aussi longtemps qu'il y avait un
ministère avec un ministre attitré -il fait justement allusion au
ministre Bérubé qui, durant ces années-là,
était considéré comme un très bon ministre des
Terres et Forêts... M. Lacasse, qui est le directeur
général de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du
Québec, constate que depuis ce temps il semble y avoir une
négligence de la part du ministre, puisqu'il n'a plus le temps de
s'occuper du domaine des terres et forêts. Il indique que le ministre de
l'Énergie et des Ressources fait un bon travail - ce n'est pas moi qui
le dis, c'est lui et je ne qualifierai pas son jugement sur le travail que le
ministre fait dans le domaine de l'énergie - qu'il passe beaucoup de
temps dans le domaine de l'énergie, mais très peu de temps dans
le domaine des terres et forêts.
Est-ce qu'il y a négligence du gouvernement dans le domaine des
terres et forêts? Est-ce qu'il y a négligence de la part du
ministre à s'occuper d'un domaine aussi important pour l'économie
du Québec puisque cela représente, vous le savez bien, un
pourcentage considérable du produit intérieur brut? Est-ce
que cette négligence ne vient pas de la décision du chef du
gouvernement, M. Lévesque, et du cabinet de fusionner le
ministère des Terres et Forêts au ministère de
l'Énergie et des Ressources? Est-ce que cette décision du
gouvernement n'est pas responsable du fait qu'il y ait eu négligence du
gouvernement et du ministre à s'occuper d'un dossier aussi
important?
C'est le cri d'alarme des gens de la forêt; c'est le cri d'alarme
de tous ceux qui oeuvrent dans ce domaine puisqu'ils constatent qu'aussi
longtemps qu'il y a eu un ministre attitré aux terres et forêts il
avait le temps de contacter les gens, de dialoguer avec ceux qui s'occupent de
la forêt et, de plus, il avait le temps de s'occuper de son
ministère. Je crois que ces explications sont très valables et je
me demande si le ministre ne le constaterait pas, comme nous. Au lieu de
négliger un secteur économique très important, au lieu de
rattraper le temps perdu avec des objectifs ambitieux, mais qui masquent une
négligence très importante du gouvernement dans ce domaine,
est-ce que le ministre ne ferait pas mieux, étant donné qu'il y
aura un remaniement ministériel très prochainement, de
recommander au premier ministre de rescinder le ministère de
l'Énergie et des Ressources pour créer un ministère des
Terres et Forêts isolé, avec un ministre en titre qui s'occuperait
des problèmes des terres et forêts du Québec?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. (15 h 40)
M. Duhaime: M. le Président, je ne pensais pas qu'on
faisait des discours en commission plénière sur les
crédits supplémentaires, je pensais qu'on posait des
questions.
Je voudrais peut-être rappeler tout simplement au
député d'Outremont, s'il passe la commande à son
équipe de recherche, qu'il va voir que, en 1973, sous le gouvernement de
M. Bourassa, il y a eu mise en terre de 16 000 000 de plants. Je voudrais vous
rappeler...
M. Fortier: Je le sais, j'ai cela sur ma feuille.
M. Duhaime: Je ne répliquerai pas au député
d'Outremont, parce que je pense qu'il n'est pas tellement sérieux cet
après-midi, il y a sûrement quelqu'un qui lui a écrit un
mauvais discours!
Je voudrais simplement mentionner que, si on regarde les chiffres du
ministère - je pense que le livre des crédits est là - le
volet du reboisement est, bien sûr, un volet très important dans
les politiques forestières que conduit le ministère, mais il y a
aussi la lutte à la tordeuse, il y a les budgets de voirie
forestière, le budget de protection contre les incendies et, enfin, les
inventaires.
La progression est, je dirais, constante, si on s'en tient au seul
chapitre du reboisement; le budget qui était, en 1978-1979, de 10 000
000 $, a été augmenté de 18%, pour passer à 11 800
000 $ et il a été augmenté ensuite de 24%, pour passer
à 14 600 000 $; il a été augmenté de 35%, en
1981-1982, pour passer à 19 000 000 $ et, ensuite, il a
été augmenté de 32,8%, pour passer à 26 000 000 $.
Alors, quand on regarde la progression, depuis 1978-1979, si le
député d'Outremont ne veut pas trop charrier, les augmentations
sont les suivantes: 18%, 24%, 35,3% et 32,8%. Je pense que c'est un des
endroits où c'est directement relié à la
préoccupation de mon collègue, M. Bérubé, qui,
dès 1976, je crois, était titulaire du portefeuille des Terres et
Forêts et qui a été le premier à lancer un plan
quinquennal de reboisement. Je ne veux pas être méchant
inutilement, mais, autant sous le gouvernement de M. Lesage que sous le
gouvernement de M. Johnson, ou encore sous le gouvernement de tous les autres,
incluant le gouvernement de M. Bourassa, il n'y a jamais eu de plan quinquennal
de reboisement. On faisait de l'ensemencement; le gros du travail,
c'était de l'ensemencement par voie aérienne et il y avait un
effort en pépinière et en serre, qui était d'environ 16
000 000 de plants, en 1973; c'était sûrement un peu
supérieur les années subséquentes, mais rien de vraiment
massif. Alors, libre à vous, si vous voulez faire de la petite politique
avec mes petits plants. Moi, je vous dis que c'est sans précédent
d'avancer un chiffre comme celui de 300 000 000 de plants, ce qui va faire
passer le budget du reboisement qui, cette année, est de 41 000 000 $
à l'horizon, à 72 700 000 $ dès le prochain budget et qui
va monter à 172 300 000 $. La marge d'erreur, sur trois ou quatre ans,
étant ce qu'elle est, c'est entre 170 000 000 $ et 175 000 000 $,
à l'horizon de 1988-1989.
Si vous voulez être de bon compte et faire l'addition
mathématique de ce qui est prévu, c'est quelque chose autour de
600 000 000 $ qui vont être investis durant les cinq prochaines
années, dans un effort sans précédent de reboisement. Non
pas qu'on soit en face d'une panique généralisée, mais je
pense qu'en basse conjoncture économique, dans une période
où la nécessité de créer des emplois existe, et
qu'il s'agit ici d'une dépense capitale, d'une dépense
d'investissement dans un potentiel de ressources, c'est très
certainement un des meilleurs placements que le Québec puisse faire et,
je pense, là-dessus, que l'Opposition est d'accord.
Alors, pourquoi en faites-vous un plat? Vous pourriez simplement dire:
Nous sommes d'accord. Sauf erreur, je suis à l'Assemblée
nationale depuis sept ans, M. le Président et j'ai occupé
différents portefeuilles. Au ministère de l'Énergie et des
Ressources, je me retrouve là avec beaucoup de bonheur depuis le
printemps 1981. Je n'ai jamais entendu un député de l'Opposition
faire un discours sur le reboisement. Qu'est-ce que vous me sortez là
cet après-midi? Jamais dans cent ans. À aucune étude des
crédits, il n'en a été question non plus de votre part.
Aujourd'hui, vous êtes en train de découvrir que les plantations
existent...
M. Fortier: Ah! Ah! C'est effrayant, être menteur comme
celai
M. Duhaime: ...et que le reboisement existe. Pourquoi? Pourquoi
me sortez-vous cela cet après-midi? Je trouve cela un peu curieux. On
avait des demandes de l'industrie. On a eu des demandes du milieu. On
reconnaît que tout n'est pas parfait, il y a sûrement encore
beaucoup de choses à faire à l'endroit, par exemple, des
propriétaires des boisés privés - on va y venir - mais
chaque chose en son temps, comme on dit. Je le répète, M. le
Président, ces investissements dans la ressource répondent
à une problématique de longue portée. Si on veut faire en
sorte que, sur les marchés internationaux, dans quelques années
d'ici, ce ne soit pas seulement les Finlandais, les Mexicains, les Chiliens ou
les Argentins qui ajoutent de la capacité sur le marché
international, il va falloir qu'on ait la ressource et c'est sur une
problématique à long terme. Je pense qu'on répond à
un besoin qui est bien identifié et je n'ai pas l'intention de faire de
petits discours avec l'Opposition. Je vous mets les chiffres sur la table et je
pense que nous aurons à travailler très fort pour réussir
ce programme. C'est M. Caron, qui est à mes côtés ici, qui
a la responsabilité du programme et je suis absolument convaincu qu'on
va réussir.
M. Fortier: M. le Président, je vais seulement relever les
inexactitudes que le ministre a dites et même une fausseté ou un
mensonge. Lors de l'étude des crédits du mois de juin, je crois
qu'on a passé environ 25% à 30% du temps sur les terres et
forêts avec mon collègue de Pontiac. Avant de passer la parole
à mon collègue de Beauce-Sud, j'aimerais tout simplement conclure
ici avec Richard Lacasse, directeur général de l'Association des
manufacturiers de bois de sciage qui dit: "Où en sommes-nous maintenant?
Des fonctionnaires qui rappellent avec nostalgie les belles années
d'alors, le temps où tout jeune forestier était appelé par
le ministre lui-même à participer à une session en manches
de chemise. On en sortait motivé, chauffé à bloc. Cela
bougeait. Aujourd'hui, ces mêmes fonctionnaires travaillent avec plus ou
moins d'intérêt sur des dossiers qui n'aboutiront même pas
en haut." Et je laisse la parole à mon collègue de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: Oui, merci.
M. Duhaime: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: ...sans pour autant brimer le droit de parole de mon
collègue de Beauce-Sud, il y a des fois que M. Lacasse travaille
chauffé à bloc lui aussi. Je le connais très bien. Soyez
sans inquiétude.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Le ministre nous dit
qu'il ne veut pas faire de discours. Mais il n'a qu'à arrêter de
parler! On ne le force pas. Il placote et il n'avance à rien.
M. Fortier: Ah! Ah!
M. Mathieu: Ce que je voudrais lui dire, moi, c'est que nous
sommes d'accord, bien sûr, avec le programme de reboisement, mais un
programme de reboisement qui soit réaliste, qui tienne compte de toutes
les étapes à franchir avant d'en arriver à un reboisement
intelligent, un reboisement profitable. Nous avons toujours reconnu la valeur
importante de la forêt dans l'économie du Québec. Je pense
que le gouvernement de M. Bourassa, dans les années 1970, 1971 et 1972 a
publié un livre blanc très important dont le ministère
s'inspire encore. Il mériterait peut-être une mise à jour
présentement, parce qu'il semble qu'il n'y ait pas eu de mise à
jour. C'est à peu près la bible du ministère depuis
1971-1972. Ensuite, quand le ministre de l'Énergie et des Ressources ou
le premier ministre a-t-il enfourché le cheval du reboisement? C'est
depuis un an. M. Robert Bourassa a fait le tour du Québec disant
partout, dans ma région et ailleurs, que nous avions un retard
considérable dans le reboisement et qu'il fallait reprendre le temps
perdu. Nous reboisions moins que le Nouveau-Brunswick...
Une voix: En pourcentage.
M. Mathieu: ...en pourcentage toujours, bien sûr, et
finalement, le gouvernement s'est réveillé avec son plan de
relance. Il voyait que M. Bourassa avait parfaitement raison et il voulait
s'approprier une partie du crédit. (15 h 50)
Ce qui nous rend un peu sceptiques,
c'est parce que nous avons affaire à un gouvernement de
propagande, un gouvernement d'images qui annonce la même chose à
tous les deux ou trois ans. Je prends, par exemple, les belles manchettes du
ministre Bérubé dans le Soleil du 31 juillet 1979: "La
forêt du Québec sera reboisée au rythme de 100 000 000 de
plants en 1983." Imaginez-vous, encore la conférence de presse, la
propagande, tout ce que vous voulez qui l'entoure et on nous arrive avec le
programme de reboisement, la trouvaille que le premier ministre a
annoncée au salon rouge le 13 novembre, confirmée par le ministre
des Finances et le ministre de l'Énergie et des Ressources. Dans ce
programme, on retrouve 65 000 000 $ en 1983. Avant ce fameux plan, on devait
avoir 100 000 000 $ en 1983, selon le ministre Bérubé, et on n'a
que 65 000 000 $. On aura 100 000 000 $ soi-disant en 1984. Tant mieux! Ce que
nous espérons, c'est que ce ne soit pas seulement un exercice qui
permette de divertir la galerie et d'avoir de beaux titres dans les journaux.
Nous voulons vraiment que cela colle à la réalité.
En parlant de reboisement, je voudrais aller un peu du côté
de la forêt privée. Le temps fuit rapidement et il y a quelques
questions que j'aimerais vider avec l'aide du ministre. Hier, le ministre me
disait, dans un langage plus ou moins parlementaire, quant au nombre de petits
propriétaires de forêt privée que j'avais avancé,
125 000, que j'errais considérablement. Je voudrais lui demander quel
est le chiffre exact, avant de poursuivre.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Mathieu: Combien y a-t-il de propriétaires?
M. Duhaime: Si vous avez bien compris quand je vous ai
répondu à l'Assemblée nationale, quand vous avez
parlé de 125 000 petits propriétaires, je vous ai très
bien dit qu'il s'agissait de la totalité. Si vous regardez les rapports
annuels du ministère, vous allez voir que tout le monde s'entend
à peu près pour dire qu'il y en a 125 000.
M. Mathieu: Justement...
M. Duhaime: II y a 125 000 propriétaires de boisés
privés.
M. Mathieu: ...M. le Président, j'ai ici...
Le Président (M. Jolivet): Un à la fois. Juste un
instant, vous avez posé une question...
M. Duhaime: Non, non...
Le Président (M. Jolivet): Oui, d'accord. M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: J'ai ici le rapport annuel du ministère de
l'Énergie et des Ressources pour 1981-1982, comme quoi je m'inspire de
vos écrits. Forêt privée, page 28, je cite: "La forêt
privée couvre 10% de la superficie forestière commerciale du
Québec et est détenue par quelque 125 000 petits
propriétaires." Ce sont vos chiffres à vous, pourquoi nous
qualifier de termes antiparlementaires que vous êtes obligé de
retirer? Ce sont vos chiffres à vous: "125 000 petits
propriétaires (moins de 800 hectares)". Je trouve que vous y allez un
peu cavalièrement. Je ne vous en fais pas grief, c'était
peut-être l'émotion ou la fin de la session.
M. Duhaime: Ce n'est pas là-dessus que j'ai employé
les propos que j'ai regrettés et que j'ai retirés.
M. Mathieu: Probablement que vous avez regretté un mot
plus que l'autre. Quoi qu'il en soit, ne revenons pas là-dessus, c'est
réglé.
Je voudrais approfondir un peu plus avant d'en arriver au reboisement.
C'est bien beau d'investir des millions de dollars pour planter 300 000 000 de
plants, mais il y a des conditions préalables. Je regarde la forêt
privée que je connais, celle de ma région, celle des Cantons de
l'Est, de La Pocatière, de la Beauce; avant de reboiser, il faut penser
aux amoncellements de bois détruits par la tordeuse. Il y a du bois qui
est récupérable et d'autre pas. Il me semble que la condition
préalable est d'abord de récupérer le bois
récupérable ou nettoyer le terrain, tout au moins.
Deuxièmement, dans ma région, il y a à peu
près 35% à 40% du territoire sujet au reboisement où il
faudrait faire des travaux de drainage forestier parce qu'il y a des
accumulations d'eau de deux ou trois pieds au temps des sécheresses.
Comment allez-vous pouvoir planter des arbres dans deux pieds d'eau? Je pense
que la lettre est grosse, cela saute aux yeux. Ensuite, tout en faisant ces
travaux de drainage, on doit en profiter pour faire des travaux de voirie
forestière. Quand le bélier mécanique ou la pelle
mécanique fait des fossés, avec la terre qu'on enlève, on
peut s'occuper de la voirie forestière, de faire des chemins. Il faut
toujours songer que la récolte, ce n'est pas pour dans trois mois. Ce ne
sont pas des céréales qu'on va planter, qu'on va semer. Notre
récolte sera prête dans 50 ans, 60 ans, 70 ans. Ces
infrastructures sont donc nécessaires pour une saine gestion, une saine
utilisation des fonds publics.
Ensuite, M. le Président, il y a également le
problème de la fiscalité
municipale qui, actuellement, "désincite" la plantation. Nous
savons que, si le petit propriétaire fait du reboisement, son sol prend
une plus-value et il sera plus taxé au plan municipal. C'est une chose
qui "désincite" parce que sa récolte ne se fera pas dans trois
mois comme la récolte des céréales; elle se fera dans 60
ans. Donc, ce sont toutes des conditions préalables qu'il faut ajuster.
Je ne vois pas grand-chose dans le domaine de la récupération -
je vais y revenir - dans le domaine du drainage, de l'égouttement
forestier, de la voirie forestière. Il n'y a rien de significatif qu'on
fait dans le moment. Il va falloir que l'on ait des programmes de travaux
mécanisés à offrir aux producteurs, un peu du genre de ce
qui se fait pour les producteurs agricoles. Quant à la fiscalité
municipale, je vais y revenir.
Je voudrais m'attarder à la récupération. Hier, le
ministre me disait que je charroyais quand je parlais de 3 000 000 de cordes de
bois à récupérer. J'avais appelé au
préalable la Fédération des producteurs de bois et j'ai
également appelé chacun des syndicats des producteurs de bois du
Québec. À la fédération, on m'a dit: En perdition,
présentement, il y a 15 000 000 de mètres cubes,
c'est-à-dire 4 000 000 de cordes. J'ai voulu être prudent en
parlant de 3 000 000 de cordes, parce que, simplement dans ma région, la
Beauce, il y a 1 000 000 de cordes de bois en perdition. Dans le
Bas-Saint-Laurent, Rimouski, il y en a 1 000 000 également.
Or, M. le Président, c'est une richesse très importante
pour tous les petits propriétaires de forêt qui s'envole, qui
brûle. C'est leur régime d'épargne-retraite en quelque
sorte. C'est leur source de revenu d'appoint. Supposons qu'un petit
propriétaire ou un petit agriculteur, qui a un boisé
privé, a besoin d'un surplus pour finir l'année, il va aller
couper 35, 40 ou 50 cordes de bois et cela lui fait un revenu d'appoint.
Maintenant, tout cela est en train de s'effondrer. Je voudrais savoir ce que le
ministre va faire, parce que je ne suis pas satisfait de sa réponse
d'hier, à savoir s'il entend faire un effort sur la
récupération du bois de la forêt privée
affecté par la tordeuse et en perdition. Également, il y a le
bois déjà perdu. Commençons par celui en perdition.
J'aimerais entendre le ministre nous dire quel effort il va faire pour venir en
aide à ces petits producteurs.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Vous allez admettre avec moi, M. le Président,
que c'est une longue question. Le député de Beauce-Sud trouvait
que je parlais beaucoup. Je pourrais lui rendre la politesse.
M. Mathieu: C'était mon entrée en matière,
M. le Président.
M. Duhaime: On va essayer de se comprendre rapidement.
Le Président (M. Jolivet): Simplement pour vous dire qu'il
reste quand même un maximum de dix minutes.
M. Duhaime: Dans votre question de l'autre jour, M. le
député, vous avez dit: II y a 125 000 petits propriétaires
qui attendent les gestes que vous poserez, etc. Comprenons-nous sur au moins
une chose. Ce n'est pas tous les boisés privés qui sont
affectés par la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Donc, il ne
peut pas s'agir d'un bassin de 125 000 propriétaires; c'est
impossible.
Comprenons-nous également sur un second point. Lorsque vous dites
qu'il y a 3 000 000 de cordes de bois en perdition, vous avez raison, mais vous
avez tort en même temps.
Une voix: C'est brillant!
M. Duhaime: Non, soyons objectifs. On peut s'obstiner sur
tellement de choses. Au moins sur les arbres, on peut peut-être se
comprendre. Quand vous dites que c'est en perdition, je vais vous donner raison
si vous dites que, si ce bois n'était pas récupéré,
c'est évident que, sur trois, quatre ou cinq ans, il serait
appelé à mourir. Dans ce sens-là, je vous donne
raison.
Par ailleurs, on sait que, lorsqu'une forêt est atteinte par la
tordeuse des bourgeons de l'épinette, d'abord, ce n'est pas
nécessairement tous les arbres qui sont atteints. Cela peut être
par secteurs, très souvent. Il faut bien comprendre aussi que, si ce
bois est récupéré à temps, il peut être
utilisé autant par l'industrie du sciage que par l'industrie du papier
journal. Encore ce midi, j'ai vu une photo d'un chargement de bois dit
affecté par la tordeuse, qui est payé aux producteurs comme si
c'était du bois de tordeuse, avec la subvention du ministère, et
je vous jure sur mon âme - allez-y voir de près - que ce ne sont
pas toutes les billes qui sont affectées par la tordeuse. Il y a du bois
vert là-dedans, tout le monde sait cela. Il y a donc une espèce
de mélange. (16 heures)
Vous allez me répondre que ce ne serait pas économique de
faire des coupes dans des boisés, de laisser les arbres verts debout et
de ne couper que les arbres atteints par la tordeuse. Je suis d'accord avec
vous, mais lorsqu'on parle de 3 000 000 à 4 000 000 de cordes je dois
vous dire ceci: Je discute avec la Fédération des producteurs de
bois et M. Fillion, son président, depuis plusieurs années
déjà. Je
pense que si M. Fillion était avec nous, il l'admettrait sans
aucun doute, quand on commence une discussion sur le bois qui doit être
récupéré durant l'année, il y a toujours ce que
j'appellerais un certain gonflement des chiffres. Je ne blâme pas M.
Fillion et sa fédération, ils ne font que reporter vers le haut
des chiffres qui partent d'en bas, des syndicats, des producteurs et des
associations au niveau des régions, mais, lorsque cela arrive en haut,
cela donne 400 000, 500 000 ou 600 000 cordes.
Je me souviens, en 1982, qu'au bout d'une demi-heure de discussion avec
les compagnies et la Fédération des producteurs de bois, on avait
réduit exactement de moitié le nombre de cordes de bois qui
devaient être récupérées ou encore absorbées
par les compagnies durant l'année. Je pense qu'il faut s'assurer,
d'abord, qu'on parle des mêmes choses et, deuxièmement, voir aussi
à les replacer dans leur contexte.
Je suis très heureux que la question du drainage ait
été abordée par le député de Beauce-Sud. Il
reconnaîtra lui-même que, depuis quelques années, depuis
deux ans seulement, des expériences pilotes ont été
faites. Par exemple, dans le budget de 1982-1983, nous avons
dépensé 50 000 $ avec la Fédération des producteurs
de bois et, en 1983-1984, nous avons dépensé 220 000 $. Si ces
expériences sont concluantes quant au ratio
coûts-bénéfices, il est évident qu'on va
continuer.
Je ne blâmerai pas le Parti libéral de n'avoir jamais rien
fait avant. J'imagine que le problème n'était pas aussi aigu ou
peut-être n'était-il pas identifié, mais il n'y en avait
pas avant. On a un bon pas de fait et il s'agira maintenant de voir comment on
pourrait accélérer un programme comme celui-là qui
coûte énormément d'argent. Faire du drainage dans des
boisés privés, pour un propriétaire qui se demande s'il va
voir le fruit de son investissement même de son vivant, parfois dans 10,
15, 20 ou 25 ans, j'admets qu'il va falloir mettre des mesures incitatrices,
mais notre intention est là.
C'est à l'occasion d'un colloque national qui va se tenir
à Nicolet, je crois, au mois d'avril prochain, qui a été
mis sur pied à l'instigation de la Fédération des
producteurs, en collaboration avec mon ministère - des consultations ont
déjà commencé - que cette question du drainage, de
même que celle de la voirie forestière sur les
propriétés privées, dans les boisés privés,
et la question de la fiscalité municipale seront abordées, et de
plein front, je l'espère. On verra ce qu'on sera capable de
dégager.
Seulement un mot, M. le Président, concernant la
fiscalité. J'ai eu l'occasion d'en parler à mon collègue,
le ministre des Affaires municipales. Je pense pouvoir dire que c'est avec
raison que les producteurs privés voient leurs biens de la forêt
évalués comme immeubles. Il y a très certainement des
choses qu'on peut faire. Je vous dirai, comme point de départ de ma
réflexion, que je serais peut-être tenté de suggérer
un amendement à Loi sur les cités et villes, mais principalement
au Code municipal pour qu'il soit loisible à une corporation municipale
de village ou de paroisse, ou encore de cité ou de ville, d'imposer ou
de ne pas imposer les forêts ou les boisés qui sont sur des
terrains privés. Autrement dit, à l'heure actuelle, la Loi sur
l'évaluation foncière fait obligation d'imposer, alors que ce que
je vous donne comme point de départ, sans m'engager pour autant pour
toujours, ni même engager le gouvernement là-dessus, c'est que
cela m'apparaîttrait intéressant comme formule que chaque
municipalité, en fonction de ses prévisions de revenus, de
l'importance de l'activité forestière à l'intérieur
de son propre territoire, puisse porter un jugement d'opportunité. Je le
dis sous réserve de discussions et d'échanges qu'on pourrait
avoir avec le Fédération des producteurs, avec les
différentes associations régionales que j'espère
rencontrer à Nicolet l'an prochain. Je le dis sous réserve, mais
moi, je pense qu'il faut qu'on bonifie leur situation.
M. Mathieu: M. le Président...
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Beauce-Sud, en considérant que l'entente d'une heure doit faire en sorte
que l'étude des crédits soit terminée à 16 h 8.
M. Mathieu: J'ai commencé en retard, M. le
Président.
Le Président (M. Rancourt): À 15 h 8, donc, une
heure, ce qui donne 16 h 8.
M. Mathieu: II y a le leader du gouvernement qui a eu un
échange avec le leader de l'Opposition, n'oubliez pas cela.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! J'ai
les heures qu'on m'a données personnellement ici: 16 h 8.
M. Fortier: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Rancourt): Question de règlement,
M. le député d'Outremont.
M. Fortier: J'ai un de mes collègues qui est censé
venir après moi. Si le ministre était d'accord, on
déborderait un peu et il n'y aurait pas de problème. Ceux qui
nous suivent seraient prêts à nous laisser un peu de temps. Il est
vrai qu'on avait une entente de principe pour une heure, mais, même si on
déborde, je crois que ceux qui nous
suivent accepteront de prendre un peu moins de temps.
Le Président (M. Rancourt): M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, le député de
Notre-Dame-de-Grâce, M. Scowen, m'a dit, avant qu'on entreprenne les
travaux, qu'il souhaiterait, étant donné qu'il y avait deux
députés qui voulaient poser des questions, avoir à peu
près une heure et demie avec le ministre de l'Énergie et des
Ressources, une demi-heure avec le ministre des Communications et une
demi-heure ensuite pour clore avec le ministre délégué
à l'Administration.
Le Président (M. Rancourt): Je prends note. M. le
député de Beauce-Sud, vous avez la parole.
La récupération du bois en
perdition
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
sur un point précis. Je voudrais vider ce point, ce n'est pas à
ma satisfaction dans le moment. Pour le bois en perdition qui doit être
récupéré, le ministre me dit qu'en 1982 les demandes de la
fédération étaient de 400 000 cordes et qu'elles ont
été réduites, lors, d'une réunion, à 200 000
cordes. Le ministre doit également considérer qu'en ce faisant
l'inventaire régional augmente d'autant, parce que le bois
récupéré augmente d'année en année et plus
on retarde à le livrer, plus il s'accumule. Comme conséquence,
dans ma région, dans la région de La Pocatière et dans la
région de Rimouski, maintenant, lorsqu'un camionneur va chez le
producteur charger son bois et qu'il n'est pas sûr qu'il va être
accepté, il fait signer un document comme quoi, si le bois est
refusé à l'usine de pâtes et papiers, le producteur va
donner 600 $, 700 $ ou 800 $ au camionneur qui va ramener le bois. Moi, je ne
suis pas satisfait de cette réponse, parce que je sais que les besoins
étaient de plus de 200 000 cordes. Or, M. le Président, pour vous
prouver que la situation s'aggrave, c'est qu'à un moment donné,
le 20 octobre 1983, la Régie des marchés agricoles demandait au
gouvernement de fixer, pour une compagnie, entre autres, les conditions devant
faire partie des conventions entre une compagnie et un office de producteurs et
demandait au ministre également que les modalités de livraison
soient arrêtées et que le tout soit fait avant le 31
décembre 1983.
Le ministre m'a dit, en réponse à ma question cette
semaine, qu'il n'avait pas l'intention de se conformer à cette demande
de la Régie des marchés agricoles qui, en un mot, lui demande
d'appliquer la loi 41, dite la loi Bona. Or, je voudrais demander au ministre,
lorsqu'il dit qu'il ne veut pas appliquer la loi Bona, s'il croit en
l'existence de la Régie des marchés agricoles. C'est le dernier
rempart pour la protection des petits producteurs et cette dernière
instance demande au ministre d'agir. (16 h 10)
Le ministre nous dit: Non, je continue à négocier, je suis
sûr qu'on va régler le problème. Le ministre disait cela en
1982. Le ministre disait cela en 1981. Le ministre disait cela en 1980. Et la
situation n'a fait que se détériorer, M. le Président.
Or, je voudrais lui demander ceci. Lorsque la Régie des
marchés agricoles entend une cause comme celle-là, d'abord, elle
est habilitée par la loi; elle est en bonne connaissance de tous les
éléments et quand elle fait la recommandation d'appliquer la loi
41, elle ne la fait pas à la légère. Je demande au
ministre s'il croit en l'existence de la régie. Est-ce que, selon lui,
cette Régie des marchés agricoles a un rôle à jouer
ou non?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, poser la question, c'est y
répondre. La Régie des marchés agricoles est là;
elle a sa loi constitutive; elle a son cadre de juridiction et, sauf erreur, la
régie n'a pas de juridiction pour ce qui est de la fixation des
quantités globales, ou plutôt sur les prix. Je n'ai pas le texte
devant moi. Si vous me le faites parvenir de ce côté-ci, cela
pourrait peut-être éclairer ma lanterne, mais que la régie
fasse une demande au gouvernement pour que des quotas quelconques soient
imposés, je ne crois pas que ce soit nouveau. Cela s'est fait à
plusieurs reprises, soit dans des jugements écrits ou autres. Je ne sais
pas si ce que le député de Beauce-Sud a en main fait
référence au jugement de la Régie des marchés dans
l'affaire de Kruger à Bromptonville.
M. Mathieu: Oui.
M. Duhaime: Bon. Alors, pour ce qui est de Kruger à
Bromptonville, nous avons réglé le problème. Cependant -
et je prends à témoin le président de notre commission, le
député de Saint-François, qui a des intérêts
vitaux dans cette région, il a été présent - on n'a
pas eu besoin de faire des arrêtés en conseil ou encore d'utiliser
la loi Bona en venant devant l'Assemblée nationale ou encore en
retournant devant la Régie des marchés. J'ai demandé
à mes fonctionnaires de communiquer avec la compagnie, ce qui a
été fait, pour que la décision rendue par la Régie
des marchés agricoles soit respectée dans le cas de Kruger. Il y
a eu des discussions sur les quantités de bois acheté par la
compagnie avant le 31 décembre 1982. Il y a eu la fameuse clause
des 10% qui reste à la discrétion de la compagnie. Aussi, il y a
eu une discussion sur les prix.
Ma position a été très ferme là-dessus. Il
était hors de question que l'on accepte que les producteurs de bois
livrent chez Kruger, à Bromptonville, des quantités de bois qui
soient en dessous du prix qui avait été retenu par tout le monde,
suivant une entente, au 31 décembre 1982.
J'ai ici la décision du 20 octobre 1983: "En conséquence,
la Régie des marchés agricoles du Québec demande au
gouvernement de fixer, selon les dispositions de l'article 3 de la Loi sur le
prix du bois à pâte vendu par des agriculteurs et des colons, les
conditions suivantes devant faire partie des conventions entre Kruger et les
offices de producteurs conclues en vertu de la Loi sur la mise en marché
des produits agricoles."
Alors, la régie dans son jugement se réfère
explicitement au cas Kruger qui, entre vous et moi, vous allez l'admettre, est
un cas réglé pour ce qui est de Bromptonville. Je ne crois pas
que la régie ait fait une demande au gouvernement pour une application
générale de la loi que vous appelez, de votre côté,
la loi Bona. Je dois dire que, nous aussi, on l'appelle comme cela - c'est plus
clair pour tout le monde - la loi 41. II est réglé, le
problème, alors je ne vois pas pourquoi on ferait une application
générale, parce que j'ai toujours une très grande
inquiétude pour ce qui est de la réglementation. J'expliquais
cela à votre collègue de droite l'autre jour, en commission
parlementaire de l'énergie, le député de
Notre-Dame-de-Grâce. Vous savez, de la même façon que votre
collège de Brome-Missisquoi l'autre jour... Il faudrait quand même
qu'on se fasse une idée sur un certain nombre de choses. L'autre jour,
le député de Notre-Dame-de-Grâce disait: Vos statistiques
et vos prévisions de croissance, etc. - en parlant d'Hydro-Québec
- ne sont pas les mêmes que celles du gouvernement. Il me demandait si je
donnerais des instructions quelconques pour qu'Hydro-Québec ajuste ses
prévisions de croissance. J'ai répondu non.
Une deuxième chose: l'autre jour, le député de
Brome-Missisquoi se lève en Chambre sur une question me demandant si
j'allais faire quelque chose dans le sens d'intervenir pour empêcher les
compagnies pétrolières d'augmenter le prix de l'essence. Bref,
est-ce que vous avez l'intention de réglementer?
Troisièmement, cet après-midi, le député de
Beauce-Sud me demande si je vais ressortir l'arsenal de la loi Bona. Pour
réglementer quoi, en fait? Pour dire aux compagnies qu'elles doivent
s'approvisionner en matière ligneuse: vous allez acheter en 1984 X
milliers ou X dizaines de milliers de cordes de bois? Première chose.
Deuxièmement, vous allez payer, le prix étant à la
discrétion de la régie? Mais, troisièmement je dirai
ensuite aux compagnies: Vous allez acheter tant de cordes de tel syndicat; tant
de cordes de tel autre syndicat. On me demande de réglementer. Ce que je
réponds, c'est qu'on fait cela en Russie soviétique à
l'intérieur de grandes planifications, à l'intérieur des
sovkhozes, par exemple, ou des kolkhozes, là on fait de la planification
à la russe. Alors, si le Parti libéral veut qu'on
réglemente au Québec le prix de l'essence, s'il veut qu'on
réglemente le prix du bois et la répartition des quotas, s'il
veut qu'on uniformise aussi toute la prévision économique, bien,
mon Dieu, dites-le bien clairement au lieu de le laisser entendre.
Moi, je vous réponds que, dans notre cas précis, nous
n'avons pas besoin de recourir nécessairement à la loi Bona. Si
nécessaire, nous y aurons recours, mais je ne vois pas là,
j'aimerais que le député de Beauce-Sud me le dise, en quoi il
faudrait, de toute urgence, et du consentement des deux côtés de
l'Assemblée nationale, que j'amène ici la loi Bona et qu'on
l'applique à partir du 1er janvier. Je ne vois pas.
M. Mathieu: M. le Président, le temps achève. Je ne
pourrai pas continuer à argumenter avec le ministre. Je prends acte de
sa méconnaissance des problèmes des petits producteurs qui ont 4
000 000 de cordes de bois en perdition. Je prends acte de cela. Je prends acte
qu'il refuse, bien plus que d'appliquer une solution aux problèmes, de
reconnaître qu'il y a un problème.
M. le Président, je le dis au ministre, par ailleurs, vu qu'il ne
veut pas accepter cette vérité, qu'il ne veut pas
reconnaître qu'il y a du bois en perdition, eh bien, il va y avoir un
problème de justice envers ces producteurs quant à la
compensation.
Si vous, M. le ministre, n'avez pas dans votre comté de petits
producteurs qui ont environ 300 à 400 cordes de bois qui est
brûlé, parce qu'il n'a pas été
récupéré, et que, pendant ce temps, vous donnez "at large"
des permis de coupe sur les terres publiques, si vous n'en avez pas dans votre
région, il y en a dans la mienne. M. le Président, il y en a dans
la région de Rimouski; il y en a dans la région de La
Pocatière, de l'Estrie et ces producteurs viennent dans nos bureaux de
comté. On les rencontre à leurs assemblées et ils ont
toujours l'espoir que vous allez faire quelque chose. Je prends donc acte de
votre refus catégorique, encore une fois, aujourd'hui et je vous pose,
en concluant, une question rapide. Vu que vous ne voulez pas vous impliquer
dans le domaine de la récupération
et que, plus vous retardez, plus le bois se perd, et plus la perte sera
grande, êtes-vous prêt à faire quelque chose pour compenser
ces petits producteurs qui voient littéralement brûler leur bois
car il n'est plus récupérable. Pour les producteurs qui ont
environ 200, 300, 400 à 500 tonnes de bois brûlé,
êtes-vous prêt à faire quelque chose en guise de
compensation? C'est ma dernière question, parce que le temps ne me
permet plus de continuer.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, avant de répondre
à la question, il faudrait que le député de Beauce-Sud
soit de bon compte. En 1982, vous avez soulevé cette question à
l'Assemblée nationale. On était censé vivre une
année épouvantable, presque l'Apocalypse. On a eu des
réunions, je l'ai répété encore cette semaine,
à mon ministère avec l'industrie et les producteurs. On s'est
entendu dans l'espace de deux jours, de longues heures de discussions
sur...
M. Mathieu: II n'y en a pas d'entente.
M. Duhaime: Non, non...
Le Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Mathieu: Quand vous dites cela, vous dites un mensonge. Dites
donc la vérité.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Beauce-Sud. M. le ministre.
M. Mathieu: M. le Président, il cache la
vérité et il tourne autour du pot depuis qu'on a commencé
à parler.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Beauce-Sud, vous avez posé votre question. S'il vous plaît! M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Mathieu: C'est un paquet de mensonges qu'il nous dit ici.
M. Duhaime: Si vous continuez ainsi, on va vous envoyer vous
confesser avant Noël, vous, c'est épouvantable.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
M. Duhaime: Je vous dis qu'on s'est entendu avec la
Fédération des producteurs de bois...
M. Fortier: C'est René Lévesque qui est le
confesseur. (16 h 20)
M. Duhaime: ...sur un montant de cordes de bois, que la
fédération, en 1982, se retournerait vers ses syndicats de
producteurs pour faire les allocations, et que l'industrie accepterait ce
montant au prix pré-établi entre les parties le 31
décembre. La même entente a été reconduite pour
1983. Vous ferez les discours que vous voudrez, M. le député de
Beauce-Sud, mais, pendant que je parle, vous n'écoutez pas et, ensuite,
vous dites que vous n'avez rien compris; cela ne me surprend pas.
Le dernier élément, M. le Président, la question
que vous posez...
M. Mathieu: Très drôle, M. l'arrogant seigneur de la
Mauricie!
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le
député de Beauce-Sud!
M. Duhaime: ...elle est fort pertinente. Pour l'instant, nous
n'avons aucun programme d'indemnité pour les producteurs et les
propriétaires de boisés privés qui essuient des pertes.
Nous allons plutôt travailler pour faire en sorte que le bois
affecté par la tordeuse soit récupéré au
maximum...
M. Mathieu: Cela fait quatre ans qu'il dit cela.
M. Duhaime: ...et votre problème sera réglé
de lui-même. Si vous me prêtez des intentions, vous vous
réécouterez quand vous faites des discours à 4 heures du
matin et vous verrez ensuite lequel des deux a les propos les plus logiques et
les plus cohérents. C'est tout ce que je peux vous dire, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Merci de votre arrogance, M. le ministre.
Le Président (M. Rancourt): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, les nombreuses questions
posées par mon collègue de Beauce-Sud indiquent que l'important,
ce sont ses dossiers et la nécessité d'avoir un ministre à
temps plein dans le dossier des terres et forêts. Mais, avant de passer
la parole à mon collègue de Gatineau sur un sujet bien
particulier à son comté, j'aurais juste une question très
anodine, j'en suis sûr. Ayant eu le plaisir d'aller dernièrement
dans la ville d'East-Angus, j'ai rencontré une PME qui utilise du bois
et qui, bien sûr, doit l'acheter directement du Syndicat des producteurs
de bois. Elle faisait état du fait qu'au mois de juillet, elle avait
subi une augmentation du prix du bois et qu'elle avait reçu
dernièrement une autre lettre lui indiquant que le prix du bois
passerait de 55 $ à 62 $
le 1er janvier prochain. Depuis que la loi a été
adoptée - peut-être que le ministre pourrait me rappeler la date
à laquelle cette loi donnait un monopole aux producteurs de bois - il
semblerait que cette petite PME se trouve en très grave
difficulté puisque, les coûts du bois ayant augmenté
considérablement, elle a maintenant de la difficulté à
vendre aux États-Unis et à concurrencer d'autres menuiseries qui
font des travaux de bois.
Devant se plier au diktat d'un syndicat qui est très puissant,
elle a de la difficulté à vivre. Je comprends bien que
l'idée qui avait prévalu à l'origine était
d'assurer un monopole au Syndicat des producteurs de bois, lorsqu'il
négociait avec de grosses compagnies comme Domtar et d'autres. Je pense
que les deux étaient sur un pied d'égalité, mais, chose
assez curieuse, elle me disait qu'elle avait dû subir cette augmentation
du prix du bois au mois de juillet et qu'on ne lui donnait aucune solution que
celle d'accepter une autre augmentation du prix du bois pour le 1er janvier,
alors que, d'après elle, Domtar - c'est toujours l'information qu'on m'a
donnée - n'a pas eu à subir d'augmentation du prix du bois. Je
trouvais assez curieux que, d'une part, une grande compagnie - maintenant c'est
peut-être Cascade qui exploite l'usine d'East-Angus - n'avait pas eu
à subir d'augmentation du prix du bois en provenance du Syndicat des
producteurs de bois de l'Estrie et que cette petite entreprise, cette petite
PME, elle, devait subir des augmentations du prix du bois.
La question que j'aimerais poser au ministre est celle-ci: Est-ce qu'il
y a des recours pour les petites entreprises? Est-ce qu'il y a des recours pour
les faibles, pour celles qui ont de la difficulté à se
défendre? Autrement dit, le ministre peut-il m'assurer que la loi permet
aux petites et moyennes entreprises, qui engagent de 30 à 40
employés, de se défendre, quand elles n'ont pas les moyens de le
faire? Est-ce qu'il y a un recours auprès du ministre ou auprès
d'un organisme public? De toute façon, quelle aide peut-on donner
à une petite entreprise qui semble, d'après l'information qu'on
m'a donnée - je dois admettre que je n'ai pas eu le temps de
vérifier toute l'information - en butte au diktat du Syndicat des
producteurs de bois? Si la loi avait été faite à l'origine
pour donner un certain pouvoir au Syndicat des producteurs de bois, pour lui
donner plus de pouvoir vis-à-vis des grosses compagnies de pâtes
et papiers, comment le gouvernement pourrait-il modifier la loi pour s'assurer
qu'une petite et moyenne entreprise, occupant de 30 à 40 personnes,
puisque se défendre dans les négociations vis-à-vis d'un
tel Syndicat des producteurs de bois?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: Sans avoir en tête le nom de cette entreprise,
il peut être assez difficile de répondre. Mais je comprends de
votre question que cette PME ne détient pas du ministère de
l'Énergie et des Ressources quelque garantie d'approvisionnement que ce
soit. Elle est en quelque sorte sur le marché pour s'approvisionner.
Dans ce genre de situation, la première chose qu'il faut voir,
c'est: Est-ce que le contrat entre cette entreprise et son fournisseur est fait
à l'intérieur du plan conjoint? C'est la première des
choses à regarder. La deuxième, c'est si ce sont davantage des
relations contractuelles qui existent. Si c'est dans le plan conjoint, cela a
nécessairement été approuvé. Est-ce que c'est un
syndicat de producteurs qui n'a plus de liens contractuels avec cette
entreprise qui décide d'augmenter la mise? Cela peut aussi être le
cas, mais j'avoue honnêtement être à peu près dans
l'impossibilité de vous éclairer. Mais si vous voulez
recommuniquer avec moi ou encore directement avec mon ministère, avec le
nom de l'entreprise, pour qu'on sache exactement de quoi il s'agit, parce que
depuis plusieurs années - cela fait quand même plusieurs
années - le ministère tente de donner des garanties
d'approvisionnement directement. Mais on ne peut pas, dans un pareil cas, si la
PME comme telle n'est pas en forêt pour faire sa propre coupe, lui
garantir de l'approvisionnement. Alors, elle est sur le marché libre, en
quelque sorte.
M. Fortier: Elle est sur le marché libre, mais il
semblerait qu'elle doive se plier aux exigences du syndicat des producteurs.
Elle n'a pas le choix; elle doit s'approvisionner auprès de ce
syndicat.
M. Duhaime: Oui, parce qu'il y a un plan conjoint dans la
région, mais les prix sont établis là-dedans. En fait, il
faudrait voir de près s'il n'y a pas... Les prix à
l'intérieur des plans conjoints, c'est une exclusivité, en un
sens. C'est entendu que c'est le syndicat des producteurs de cette
région qui va approvisionner et, à l'intérieur d'un plan
conjoint une répartition est faite ensuite, mais aussi, le prix est
établi. C'est pour cela que cela me surprend un peu que vous formuliez
votre question en disant: II y a une surenchère sur le prix, parce que,
comme on l'a souligné tantôt dans l'autre dossier dont il a
été question avec votre collègue de Beauce-Sud, le prix
est fixé par la Régie des marchés agricoles.
M. Fortier: M. le ministre, je crois que je vais...
Le Président (M. Rancourt): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ...si vous me le permettez, contacter votre
ministère. Je vous donnerai l'information que j'ai. Il semblerait que
ces gens avaient été en butte à une augmentation au mois
de juillet et à une autre au mois de janvier. Mais, de toute
façon, si vous le permettez, je communiquerai directement avec le
ministère pour vous donner toutes les précisions que j'ai. Je
reconnais la nécessité de donner un monopole à un syndicat
des producteurs de bois, mais il me semblait que, dans ce cas-ci,
c'était une petite entreprise en butte à un abus de pouvoir. Mais
peut-être que je n'ai pas raison et qu'en vérifiant avec votre
ministère, nous pourrons obtenir une information plus
précise.
M. Duhaime: Je pourrais peut-être vous donner une
information additionnelle tout de suite. Possiblement que ce syndicat s'est
placé dans une position de négociations en demandant un prix
à la hausse. Dans l'hypothèse que ce prix à la hausse est
agréé, il faudra nécessairement que la Régie des
marchés agricoles approuve ce prix, parce que c'est la régie qui
contrôle les prix à l'intérieur des plans conjoints. Mais,
soyez bien à l'aise de communiquer avec les gens de mon
ministère, on va vous donner toute l'information là-dessus. Je
comprends que vous ne vouliez pas dévoiler ici en commission
parlementaire le nom de cette entreprise, mais vous pouvez le faire en
communiquant avec les fonctionnaires de mon ministère, cela va nous
faire plaisir.
M. Fortier: M. le député de Gatineau, M. le
Président...
M. Duhaime: Si le député de Beauce-Sud a des
problèmes semblables, on va l'aider avec le même empressement.
Le Président (M. Rancourt): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, avant que le
député de Gatineau ne pose la question qu'il a à poser au
ministre, je voudrais faire motion pour qu'à la salle 80-A la commission
de la fonction publique siège à compter de 16 h 30 jusqu'à
18 heures pour étudier article par article le projet de loi 51. Si les
membres de la commission y consentent, dans la mesure où ils pourraient
terminer leurs travaux pas très tard après 18 heures, ils
pourront poursuivre leurs travaux après 18 heures.
Le Président (M. Rancourt): Cette motion... M. le leader
de l'Opposition.
M. Lalonde: Effectivement, pour le choix de la salle,
étant donné qu'il y a une réunion des
députés à 18 heures à 80-A, vous serait-il possible
de réunir les membres de cette commission au salon rouge qui est
actuellement libre? Ils pourront continuer jusqu'à 19 heures ou 19 h 30,
s'ils veulent terminer.
M. Bertrand: D'accord, M. le Président. Alors, au lieu de
80-A, salon rouge. Très bien.
Le Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement,
voulez-vous aussi qu'il y ait consentement pour qu'on fasse les
écritures comme si nous étions retournés en
Assemblée?
Y a-t-il consentement pour que l'on fasse les écritures comme si
nous étions retournés en Assemblée? (16 h 30)
M. Lalonde: Oui. On va donner ce consentement.
Le Président (M. Rancourt): Consentement. Donc, M. le
député de Gatineau, s'il vous plaît!
Le CITUF de la Haute-Gatineau
M. Gratton: M. le Président, très brièvement
je l'espère. Je sais que M. le ministre est pressé. Donc, il
pourra me donner des réponses directes à des questions directes
et on pourra tous s'en aller le plus tôt possible. Je voudrais qu'il me
fournisse un certain nombre d'informations sur le projet d'un complexe
intégré de transformation et de l'utilisation de la forêt,
le CITUF de la Haute-Gatineau, un projet qui découle de la
décision du gouvernement de procéder à la construction de
la route de pénétration en forêt connue sous le nom de
route Maniwaki-Témiscamingue qui, à un certain moment
donné, a failli déboucher dans le bout de Mont-Laurier
plutôt qu'à Maniwaki justement grâce aux interventions du
ministre.
Peu importe. On sait que ce projet a été promis - je ne
reprendrai pas toutes les déclarations ronflantes des porte-parole du
gouvernement. Le ministre d'État au Développement
économique, à ce moment, M. Landry, même le ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration s'y est mêlé
à un moment donné, Mme Ouellette, alors qu'elle était
ministre responsable de la région, l'actuel président du Conseil
du trésor; bref, à peu près tout le monde qui est venu
dans la Haute-Gatineau a toujours insisté sur le fait qu'il s'agissait
d'une priorité pour le gouvernement du Québec d'implanter ce
CITUF à Maniwaki.
Le ministre n'est pas sans savoir que REXFOR, une société
de la couronne... C'est
la première question que je lui poserai de me confirmer ou
d'infirmer la nouvelle selon laquelle REXFOR aurait fait une demande officielle
pour des subventions du gouvernement fédéral pour implanter une
usine de panneaux MDF à Mont-Laurier. La raison pour laquelle la chose
nous intéresse, c'est bien sûr parce que cette usine de panneaux
MDF, qui pourrait possiblement être construite à Mont-Laurier est
un des éléments les plus importants de ce CITUF, complexe
intégré, dont on parle pour Maniwaki.
Tout le monde reconnaît qu'il y a place pour une seule usine du
genre dans l'ensemble du Canada. Encore moins de place, donc, pour qu'il y en
ait deux dans un rayon d'environ 35 milles. La première question que je
pose au ministre est celle-ci: Peut-il nous confirmer que REXFOR a fait une
telle demande auprès du gouvernement fédéral? Je l'avise
tout de suite que, du côté du gouvernement fédéral,
on me dit que oui.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: Pourquoi me posez-vous une question?
M. Gratton: Pour savoir si vous êtes au courant.
M. Duhaime: Oui, je suis au courant. Écoutez, si le
gouvernement fédéral vous a dit qu'une filiale de REXFOR a fait
une demande de subvention, j'imagine que ce doit être vrai.
M. Gratton: Vous n'êtes pas plus au courant que cela?
M. Duhaime: Je suis convaincu que ce n'est pas ce que vous
vouliez savoir. Bellerive-Ka'n'enda ... Je vais prendre votre parole
là-dessus. Je n'ai pas eu l'occasion de vérifier, si,
récemment, une demande a été déposée au
gouvernement fédéral. Je tiendrais pour acquis que, s'il y a un
projet, il va nécessairement y avoir des démarches pour des
subventions aux deux gouvernements.
Dans la liste des déclarations que vous avez mentionnées
tantôt, je crois que vous en avez oublié plusieurs. Il y a la
mienne, entre autres, il y a celles de M. Bérubé et de Mme
Marois; vous avez parlé de M. Landry et je crois même que le
premier ministre s'en est mêlé pendant un certain temps.
M. Gratton: Surtout avant l'élection, oui.
M. Duhaime: Que ce soit avant ou après...
Une voix: Par pur hasard.
M. Gratton: Oui. C'est parce qu'avant l'élection, on
disait que les travaux débuteraient le printemps suivant. Cela fait
déjà deux ans de cela.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Duhaime: En fait, on a suivi votre tradition, non?
M. Gratton: Vous êtes rendus un vieux parti.
M. Duhaime: Plus sérieusement, M. le Président, sur
l'implantation d'un centre intégré de transformation et
d'utilisation de la forêt dans la Haute-Gatineau. J'ai eu l'occasion de
regarder ce dossier à de très nombreuses reprises. J'ai eu
l'occasion de me rendre également en Haute-Gatineau où j'ai eu
l'occasion de rencontrer des délégations. Il nous faut
absolument, pour que ce projet puisse voir le jour un jour, avoir un porteur de
ballons, un partenaire qui va prendre l'initiative. Je sais que la
région de la Haute-Gatineau fonde beaucoup d'espoirs sur ce
développement qui, de mémoire, peut entraîner des
investissements de l'ordre de 70 000 000 $ à 75 000 000 $, mais dont le
coeur est une usine MDF. C'est un secret de polichinelle maintenant que la
région de Mont-Laurier a un projet MDF avec le groupe
Bellerive-Ka'n'enda, qui est une filiale de REXFOR. Je ne suis pas en mesure de
vous dire où en est rendu ce dossier; tout ce que je sais, c'est
qu'à mon ministère il y a eu une demande pour des
approvisionnements et cette demande est sur mon bureau.
Par ailleurs, du côté de la Haute-Gatineau... Je pense
qu'il faut essayer de voir à un certain équilibre, le
ministère ne peut pas diriger telle entreprise dans telle
activité, dans tel secteur géographique du Québec, et je
pense que mon collègue en conviendra, on essaie de voir, dans
l'hypothèse où un projet MDF pour Mont-Laurier était
possible, s'il y a moyen d'équilibrer les choses. Je dois dire au
député de Gatineau - je suis convaincu que cela ne sera pas une
grande nouvelle pour lui - que j'ai eu l'occasion de discuter avec les
dirigeants de la compagnie McLaren pour voir l'expansion possible de ses
activités dans la Haute-Gatineau, en particulier à Maniwaki. En
termes d'emplois - je n'ai pas le dossier avec moi - je ne suis pas en mesure
de dire ce que cela pourrait donner de plus, mais cela me paraissait
énorme.
On parle du projet du CITUF; depuis que je suis au ministère de
l'Énergie et des Ressources, j'en entends parler. J'en avais entendu
parler par mon collègue, M. Bérubé, et par tous les autres
avant, mais,
concrètement et solidement sur le terrain, on n'a pas pu faire en
sorte jusqu'à présent que le dossier puisse s'attacher et aller
de l'avant. Quel sera le sort du projet, parce que c'est bien un projet dont on
parle quand on parle de la filiale de REXFOR pour Mont-Laurier? Je l'ignore. Je
crois pouvoir dire qu'il serait un peu injuste de priver une région d'un
investissement parce que la marchandise n'a pas été livrée
à propos d'un autre engagement. Je ne crois pas qu'on soit à la
croisée des chemins dans ce dossier et sur le point de rendre une
décision dans un sens ou dans l'autre. Je peux confirmer au
député qu'il y a très certainement eu des demandes de
subventions à mon ministère parce que c'est à
l'intérieur des programmes d'accélération. Je me souviens
très bien d'avoir vu passer récemment une demande sur une lettre
d'intention quant aux approvisionnements pour le projet de Mont-Laurier et j'ai
demandé de revoir le dossier en dehors du contexte des sessions du mois
de décembre. Je peux confirmer qu'il n'y a pas eu de lettre
envoyée dans ce sens-là.
M. Gratton: Est-ce que le ministre conviendra que...
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Gatineau, les 90 minutes allouées sont écoulées.
M. Gratton: Est-ce que j'aurais le consentement pour une autre
question?
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: Je vous remercie de votre
générosité, M. le Président. Est-ce que le ministre
ne conviendra pas que, si une usine de panneaux MDF s'installe à
Mont-Laurier, on ne pourra plus parler d'un CITUF à Maniwaki? On pourra
parler d'autre chose mais non d'un complexe intégré de
transformation, d'utilisation de la forêt?
M. Duhaime: Cela paraît assez évident. M. Gratton:
Pardon?
M. Duhaime: II n'y a pas de place sur le marché à
l'heure actuelle pour deux centres de production de MDF, c'est clair et net.
Est-ce que cela met en péril toute la notion du centre
intégré de transformation et d'utilisation de la forêt? Il
y a de grosses chances pour que ce soit oui, mais on n'en est pas là
actuellement.
M. Gratton: Je dois donc comprendre, M. le ministre - je vous
pose la question -que la déclaration que vous aviez faite le 3 septembre
1983, justement au moment où vous avez visité la Haute-Gatineau,
selon laquelle le complexe forestier demeurait toujours une priorité du
gouvernement, cela demeure?
M. Duhaime: Oui. Je n'ai pas de porte d'arrière.
M. Gratton: Même si une usine de panneaux MDF devait
s'installer à Mont-Laurier?
M. Duhaime: Mais il n'y a pas de partenaire. Il faut faire
attention; nous sommes au 20 décembre, quand je suis allé dans la
Haute-Gatineau au début de septembre, il n'y avait aucun projet sur la
table en provenance de Mont-Laurier.
M. Gratton: Et maintenant, il y en a un.
M. Duhaime: Pendant des années et des années, dans
la Haute-Gatineau, nous avons cherché un partenaire; il n'est pas venu.
N'allez pas plus loin qu'il n'est besoin pour les fins de notre discussion; on
n'est pas sur le point de prendre les dernières décisions dans ce
dossier. Je vous dis - je vais aller dans le sens de l'hypothèse que
vous faites -que si jamais, à tout hasard, le CITUF ne pouvait
être réalisé en Haute-Gatineau, il est bien évident
que cette région va avoir droit à une espèce de
compensation en termes d'emplois créés, et c'est dans ce sens que
je crois que ce serait au moins le minimum qui pourrait être fait. Mais
je ne voudrais pas qu'on me fasse le reproche d'avoir dit en septembre que
c'était une priorité. C'était vrai dans ce temps, cela
l'est encore aujourd'hui, sauf que, s'il y a un promoteur qui se
présente au ministère et qui dit: Je serais
intéressé à aller m'installer plus loin, et qu'on sait
qu'il y a de la place seulement pour un sur le marché, va-t-on dire:
Non, pas du tout, il n'en est pas question, vous allez aller ailleurs? Si, en
l'envoyant ailleurs, on empêche l'expansion d'une autre entreprise qui
voulait aller dans un autre secteur d'activité, cela reste une question
à être résolue. (16 h 40)
M. Gratton: M. le Président, on me permettra de dire, en
terminant sur ce sujet, que les propos du ministre sont loin d'être
rassurants et sont loin de traduire toute la réalité. Quand il
nous dit qu'on a recherché pendant longtemps un partenaire, on en avait
un, et c'est peut-être l'action de REXFOR, sinon l'action du
gouvernement, qui a fait que MacLaren ne semble plus intéressée
au projet. Si le gouvernement avait voulu réellement donner suite aux
intentions qu'il avait manifestées avant l'élection, on ne serait
pas dans la situation dans laquelle on est présentement.
Je n'en fais pas grief au ministre
actuel - il n'était pas titulaire du ministère à ce
moment - mais le fait demeure qu'aujourd'hui il est obligé de patiner
pour couvrir les erreurs de son prédécesseur.
M. Fortier: M. le Président, je voudrais...
Le Président (M. Rancourt): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: II y a tellement d'autres questions qu'on aurait
voulu aborder, entre autres, je voulais juste dire au ministre qu'il y a un M.
Tremblay qui m'a appelé avant le lunch; c'est un des 45 chômeurs
d'Hydro-Québec dans la région de Québec. Ces gens
s'insurgent contre le fait qu'Hydro-Québec n'a plus d'emploi pour eux.
C'est malheureux que nous n'ayons pas eu le loisir d'aborder ce dossier, mais
j'aimerais dire qu'il y a de nombreux chômeurs d'Hydro-Québec qui
se plaignent des coupures de budget d'Hydro-Québec dans la région
de Québec même. J'espère qu'on aura l'occasion d'aborder ce
dossier à un autre moment.
M. Duhaime: Nous sommes dans les forêts!
M. Fortier: Non, cela n'a pas trait aux forêts, cela a
trait à l'énergie et aux ressources et c'est vous qui êtes
responsable du dossier de l'énergie et des ressources. Je vous remercie,
M. le Président.
M. Duhaime: D'accord, à la prochaine.
Le Président (M. Rancourt): Ce qui termine l'étude
des crédits du ministère de l'Énergie et des Ressources.
Nous allons demander maintenant aux Communications de se présenter. M.
le ministre, vous êtes d'accord?
M. Bertrand: Oui, M. le Président.
Communications
Le Président (M. Rancourt): Nous commençons
l'étude des crédits du ministère des Communications. M. le
ministre.
M. Bertrand: M. le Président.
Le Président (M. Rancourt): II y a une entente pour le
temps?
M. Bertrand: Une demi-heure, je crois.
Le Président (M. Rancourt): Une demi-heure?
M. Scowen: Nous sommes à peu près quinze minutes en
retard, nous allons évaluer et essayer de raccourcir le plus possible.
Il nous reste à parler, en dernier lieu, avec le président du
Conseil du trésor et, finalement, à adopter les
crédits.
Je suis ici en l'absence - motivée - de mon collègue, le
député de Westmount, porte-parole dans le dossier des
Communications. Les crédits supplémentaires du ministère
des Communications sont si importants - si mes calculs sont bons, c'est une
augmentation d'à peu près 17% des crédits qui ont
été adoptés au début de l'année - que je
dois donner d'abord au ministre l'occasion de s'expliquer. La population va
certainement s'intéresser au fait qu'en pleine crise économique,
la plus grande augmentation, en termes de pourcentage, dans les crédits
supplémentaires de ce gouvernement, se trouve dans le domaine de la
publicité. Qu'il s'explique et, après, peut-être lui
poserai-je des questions.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Communications.
Remarques générales M.
Jean-François Bertrand
M. Bertrand: M. le Président, comme on le sait, le
ministère des Communications a, entre autres mandats, d'être un
ministère de services pour un ensemble de ministères et
d'organismes gouvernementaux. Je dois dire que l'essentiel des 15 519 500 $ de
crédits supplémentaires dont nous discutons aujourd'hui va
effectivement à ces fonctions que le ministère des Communications
a à assumer et qu'on peut qualifier de fonctions ou de missions de
services à l'endroit des ministères et organismes
gouvernementaux. Par exemple, sur ces 15 500 000 $ environ, il y a 5 285 000 $
qui servent à rembourser le fonds de suppléance. Par exemple,
pour un projet de radio-mobile... Vous savez qu'on tente en ce moment - on
tente de le faire depuis quelques années - et qu'on va continuer de
tenter de faire en sorte que nous puissions arriver à intéger les
différents réseaux de radios mobiles qui existent et dont nous
avons la responsabilité d'une façon générale.
Il y a aussi l'implantation d'un deuxième complexe ordinateur au
ministère des Communications puisque nous avons rapatrié chez
nous les responsabilités qu'assumaient auparavant le ministère
des Affaires sociales et le ministère des Transports. Nous avons aussi
l'agence de coordination qui nous permet de faire en sorte que tout le
placement média puisse se faire par le truchement d'une agence unique,
ce qui nous permet évidemment des rabais au niveau du placement
média. C'est beaucoup plus rationnel de fonctionner en ayant une seule
agence qui fait le placement et qui peut acheter en gros...
Une voix: ...
M. Bertrand: Non. Je vais vous montrer tantôt que ce que le
député de Vaudreuil-Soulanges a dit... Si ma mémoire est
bonne, c'était le 15 novembre au soir et, relativement à ces 6
000 000 $ qui sont inscrits à "information gouvernementale", ce n'est
pas du tout ce qu'il a dit que c'était. Il a dit: Pour un budget de
relance économique qu'on chiffre à 30 000 000 $ pour l'exercice
financier 1983-1984, on a 6 000 000 $ qui vont servir à faire de la
publicité, sur ces 30 000 000 $. Je vais lui donner une réponse
très claire tout à l'heure pour lui montrer - je ne lui dirai pas
qu'il mentait, ce serait vraiment antiparlementaire - qu'il errait.
C'était une erreur. Je suis convaincu que ce n'était pas une
erreur de mauvaise foi. C'était simplement une erreur au niveau des
renseignements et de l'information que nous allons fournir.
Donc, il y a des remboursements au fonds de suppléance et
ensuite, des dépassements qui ont été prévus dans
les comptes ministériels de télécommunications et aussi
dans le compte de l'agence de coordination. Par exemple, il y a des
ministères qui avaient prévu dépenser certains montants
d'argent et qui, finalement, vont dépenser plus. Ce qu'on fait à
ce moment-là, c'est qu'on effectue des gels dans le budget. Nous, on va
chercher l'argent, bien sûr, pour pouvoir le dépenser, mais le
fonds de suppléance se trouve à -comment dirais-je? - se repayer
par le gel qu'il effectue dans les ministères et organismes
gouvernementaux pour lesquels nous avons assumé des
responsabilités de services, par exemple, en téléphonie ou
en placement média, pour ce qui est de l'agence de coordination. Il y a
des crédits additionnels réels, ce qu'on peut vraiment appeler
des crédits additionnels réels, de l'ordre 1 662 000 $. Cela va
essentiellement à l'implantation du deuxième complexe ordinateur
dont j'ai parlé tantôt. Cela va essentiellement à une
campagne de 200 000 $ dans les hebdomadaires régionaux sur la relance
économique. Cela va à cette banque qui sert à faire en
sorte que nous puissions, mois après mois, assurer qu'il y a un
équilibre dans cette banque ou cette réserve pour faire face aux
hausses de tarifs, par exemple, dans le domaine des
télécommunications.
Il y a aussi la nouvelle politique d'implantation de la bureautique au
gouvernement du Québec pour laquelle un montant de 500 000 $ est
prévu. Il y a aussi les services téléphoniques de la
Corporation 1534-1984. Je crois que c'est un montant de 52 000 $. C'est en
crédits additionnels réels, c'est-à-dire que ce n'est pas
de l'argent qui va au fonds de suppléance; ce n'est pas de l'argent qui
est compensé dans les autres ministères et organismes par ce
qu'on appelle des CT gels. Pour les gens qui ne savent pas exactement ce que
cela veut dire, si nous recevons du Conseil du trésor, par exemple, 100
000 $, c'est pour donner un service à un ministère. Ce
ministère va devoir geler un montant de 100 000 $. Le Conseil du
trésor donne d'une main et reprend de l'autre, ce qui fait qu'en fin de
compte, c'est une opération qui peut s'évaluer par un nul. Donc,
cela vient au ministère des Communications. (16 h 50)
M. Scowen: La partie réelle, c'est combien?
M. Bertrand: Pardon?
M. Scowen: La partie réelle. Vous avez commencé une
phrase, mais vous ne l'avez pas terminée.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Bertrand: Sur les 15 519 500 $ en crédits additionnels
réels, il y a 1 662 000 $. Tout le reste, c'est ou du remboursement du
fonds de suppléance pour certaines activités dont nous avons la
responsabilité ou bien ce sont des dépassements dans certains
comptes ministériels, en télécommunications ou en
placement média pour la publicité; à ce moment-là,
les ministères doivent effectuer des gels pour le même montant
d'argent que ce que nous recevons. C'est donc une façon de comptabiliser
qui, finalement, vous donne en réalité des crédits
additionnels de 1 662 000 $.
M. Scowen: Donc, cela veut dire que sauf pour les 1 600 000 $, de
ce total de 15 500 000 $, la différence, qui est de 14 000 000 $, va se
retrouver de l'autre côté du bilan, dans les crédits
périmés?
M. Bertrand: Non.
M. Scowen: Non. Pour combien aurez-vous une réduction des
dépenses dans un autre ministère et qui vont contribuer aux
crédits périmés? Combien?
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Bertrand: Si j'ai bien compris la question du
député, il veut savoir combien du montant d'argent qui est
accordé au ministère des Communications est enlevé dans
les autres ministères.
M. Scowen: Voilà, parce que la différence est
l'augmentation réelle dans les dépenses.
M. Bertrand: Oui, mais... M. Scowen: Oui.
M. Bertrand: C'est un montant qui est égal.
M. Scowen: Oui, mais il est de combien, le montant qui est
égal? Combien de ces crédits additionnels, dans votre
ministère, seront compensés par des crédits
périmés?
M. Bertrand: Les dépassements prévus au compte
ministériel des télécommunications et de l'Agence de
coordination qui sont compensés par des gels ou par des remboursements
au fonds consolidé, c'est un montant de 8 572 300 $.
M. Scowen: Les gels? M. Bertrand: Oui.
M. Scowen: Nous avons adopté des crédits pour
divers ministères et vous m'avez dit que, dans certains cas, on a
décidé d'enlever ces dépenses d'un ministère pour
les attribuer à votre ministère. Bon, cela, je peux le
comprendre, c'est un transfert de dépenses d'un ministère
à un autre qui n'entraîne pas de dépenses additionnelles
pour l'État. Autrement dit, ce sont des montants qui seront
compensés directement par les crédits périmés. Pour
le reste, ce sont des dépenses additionnelles que nous sommes
obligés d'adopter.
La question que je pose au ministre est celle-ci: Combien, parmi ces 15
000 000 $, seront compensés par les crédits
périmés?
M. Bertrand: Je pense que le député de
Notre-Dame-de-Grâce commet une erreur non volontaire. Un ministère
n'envoie pas au ministère des Communications des montants d'argent, le
Conseil du trésor envoie au ministère des Communications certains
montants d'argent et, pour l'équivalent de cette somme d'argent, les
ministères et organismes gouvernementaux pour lesquels nous effectuons
ce travail, que ce soit en téléphonie ou en placement
média, eux, envoient au Conseil du trésor l'équivalent des
montants qui nous ont été transmis au ministère des
Communications. Le passage se fait dans cette direction plutôt que dans
la direction, par exemple, du ministère de l'Éducation vers le
ministère des Communications.
M. Scowen: Si je comprends bien, il n'y a pas de dépense
parmi les 15 000 000 $ qui seront compensées par les crédits
périmés. Effectivement, le total entraîne des
dépenses additionnelles pour les contribuables.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Bertrand: Je vais donner un exemple et je vais prendre une
information gouvernementale car c'est important de le faire. C'est d'ailleurs
le chiffre dont s'est servi le député de Vaudreuil-Soulanges.
Dans le budget de l'Agence de coordination, nous faisons des demandes de budget
supplémentaire pour 6 079 100 $. Si le député a son
cahier, c'est la deuxième feuille rose. Je crois que le
député de Vaudreuil-Soulanges a la feuille. On voit ici que la
demande est de 6 079 100 $ et cela concerne les comptes ministériels de
l'Agence de coordination. Ce sont les fameux 6 000 000 $ dont le
député de Vaudreuil-Soulanges avait parlé. Or, si on prend
bien les notes qui sont là, l'Agence de coordination permet aux
ministères et organismes du gouvernement d'acheter tout le placement
média, imprimés, électroniques et autres, et de
bénéficier ainsi d'escomptes de volume et de fréquence
accordés par les médias. C'est ce dont je parlais tantôt,
l'achat en gros. L'agence gère également pour les
ministères et organismes utilisateurs les comptes de publicité
obligatoire comme les appels d'offres, les offres d'emplois, les avis
publics.
Pour l'exercice financier 1983-1984, dans les crédits
déposés en mars dernier, un budget de base était
prévu pour l'Agence de coordination qui était de 3 187 400 $.
C'était le budget de base. Si vous vous référez aux
crédits de mars, c'est ce que vous aviez comme montant. Or, la
présente demande vise à recevoir des crédits additionnels
de 6 079 100 $, mais à quoi vont-ils servir? Pas à la campagne de
publicité dont parlait le député de Vaudreuil-Soulanges,
mais à deux choses. Premièrement, ils vont servir à
rembourser le fonds de suppléance d'un montant de 2 390 400 $ que nous
avons obtenu en août dernier pour les campagnes publicitaires sur la
relance économique, la création d'emplois, le plan d'action pour
les jeunes et pour les déficits encourus par certains ministères
aux comptes ministériels de l'agence. Chaque ministère a son
compte à l'agence.
Ensuite, quand on regarde les besoins des ministères d'ici
à la fin de l'année 1983-1984, il y a un déficit qui est
évalué à 3 688 000 $. Ce déficit anticipé de
3 688 000 $, il faut donc en tenir compte, et c'est pourquoi il est
prévu d'ajouter ce montant à l'Agence de coordination. Ce qui
fait qu'au total l'Agence de coordination aura géré, durant
l'année 1983-1984 l'addition que vous pourriez faire du budget de base
qui est de 3 187 000 $ et des crédits additionnels qui sont de 6 079 000
$ - un montant d'environ 9 250 000 $. Or, en gros, au gouvernement du
Québec, cette
année, en placements publicitaires de toutes sortes, c'est comme
cela d'ailleurs bon an mal an depuis environ quatre ou cinq ans, on place,
d'une année à l'autre, entre 10 000 000 $ et 12 000 000 $ en
placements média. Cela n'a pas changé. On est encore, je pense,
au 18e rang sur 25. L'Ontario est au 6e rang. Nous sommes au 18e rang. Je
pourrais vous dire par qui on est dépassé. Chrysler, Kellog,
Salada, Ford, General Motors et Nabisco Brands sont devant nous. En Ontario,
ils ont mis 23 200 000 $ en 1982 pour le placement média. Je pense qu'en
1982, nous avions mis environ 10 000 000 $. On est très loin. Le
gouvernement du Canada, pour votre information, est au premier rang avec 54 500
000 $ en 1982. On n'est pas très performants, je l'avoue, à ce
point de vue.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, je n'ai pas le temps de poser
plus de questions sur les détails. C'est évident, quant à
moi, que le ministre est en train de jouer à un petit jeu de cache-cache
avec tout le monde. Il dit que c'est un remboursement du fonds de
suppléance. Pour ceux qui ne comprennent pas les comptes
budgétaires du gouvernement, cela veut dire qu'ils ont
décidé, il y a quelques mois, d'ajouter à leurs
dépenses, dépenses qui n'étaient pas prévues dans
le budget original. Maintenant, ils disent: On repaie le fonds de
suppléance. Mais tout ou presque tout, de ces 15 000 000 $, cela
représente une augmentation, depuis le budget qui a été
approuvé au mois de mai, des dépenses du ministère des
Communications, soit pour la publicité qui, quant à nous, n'est
pas nécessaire, soit pour l'appui à la publicité qui est
encore moins nécessaire. Si le coût d'appui à la
publicité devient de plus en plus lourd, c'est clair que la
publicité va devenir de moins en moins efficace. Le ministre nous dit:
On dépense beaucoup moins que le Canada. Je l'espère bien. Nous
sommes 6 000 000; ils sont 24 000 000. On dépense beaucoup moins que
Chrysler. Quelle comparaison! Comment peut-on comparer les dépenses d'un
État avec celles d'une compagnie qui est effectivement en affaires et
dont la publicité est un aspect très important de ses
activités? Il y a des compagnies qui vendent des produits de
consommation dont le coût de publicité dépasse 20%, 30%,
40%, 50% du chiffre de vente. (17 heures)
M. Bertrand: Habituellement, dans les entreprises, la moyenne est
d'à peu près 3%.
M. Scowen: Excusez-moi, M. le Président, je vais seulement
terminer mon affaire.
M. Bertrand: Nous, sur un budget de 24 000 000 000 $, c'est
environ 0,0%.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, je vais essayer de ne pas
interrompre le ministre.
M. Bertrand: D'accord, excusez-moi.
M. Scowen: Si le ministre regarde les revenus et les
dépenses, par exemple, de la compagnie Coca-Cola, il verra que le
coût du produit pour celle-ci est une partie infime du total de ses
coûts et que les coûts de la publicité vont bien
au-delà de 50% du chiffre de vente. Il n'y a pas de comparaison. On
parle des besoins du Québec. On parle des besoins du Québec en
pleine crise économique. On parle des besoins du Québec en pleine
crise économique avec un gouvernement qui, face au choix de
dépenser de l'argent pour la relance économique ou dans la
publicité pour la relance économique, a décidé de
consacrer une partie très importante des augmentations de son budget
à la publicité pour la relance économique.
J'exagère légèrement lorsque je dis que, dans ce budget
supplémentaire, le gouvernement propose de dépenser 30 000 000 $
pour la relance économique et octroie 15 000 000 $ au ministère
des Communications, dont une partie importante servira pour la publicité
afin d'annoncer à tout le monde qu'il y a une relance
économique.
M. Bertrand: C'est inexact.
M. Scowen: M. le Président, cela devient bien difficile de
faire le discours que je suis en train de faire.
M. Bertrand: Oui, mais je n'ai pas le droit...
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce pose sa question.
M. Scowen: Je m'engage à ne pas vous interrompre.
M. Bertrand: Je dois vous protéger contre
vous-même.
M. Scowen: Je sais très bien que je vous fais mal.
M. Bertrand: Non, au contraire, je trouve qu'on ne dépense
pas assez.
M. Scowen: Laissez-moi terminer.
Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le
ministre!
M. Scowen: Laissez-moi terminer.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, si vous voulez continuer à poser votre
question.
M. Scowen: Merci. C'est très difficile ici. Je continue.
Nous sommes devant un budget dans lequel le gouvernement a décidé
de consacrer 30 000 000 $ de plus, d'ici la fin de l'année
financière, à la relance économique et 15 000 000 $ de
plus au ministère des Communications. Je conviens que la totalité
de ces 15 000 000 $ n'est pas applicable à la publicité comme
telle, mais c'est totalement soit pour des fins de publicité ou pour le
soutien de la publicité, les coûts applicables au
développement, à la diffusion, à l'administration dans le
domaine des communications gouvernementales. Je prétends que c'est une
mauvaise priorité. Je nomme seulement un élément qui est
le programme 2 qui s'appelle Information et publications gouvernementales. "Ce
programme vise - je cite la description du programme - à informer les
citoyens sur les programmes, les activités et les services du
gouvernement." Ce budget a été augmenté de 25%: de 25 000
000 $ qui étaient prévus pour cette année il est
passé à 31 000 000 $.
Lorsqu'on a examiné les crédits au mois de mai, le
ministre se vantait parce que l'année passée les crédits
pour ce programme étaient effectivement de 32 000 000 $. Le ministre a
dit: Regardez comme nous sommes bons ici, on va réduire le programme
Information et publications gouvernementales de 6 000 000 $. Tout le monde
disait: Très bien, vous faites un peu de progrès, mais on ne
s'attendait pas à un budget supplémentaire, six mois plus tard,
qui aurait pour effet d'augmenter le budget au même niveau que celui de
l'an passé. C'est exactement ce que le ministre des Finances a fait six
mois après la dernière élection. Il avait
présenté un budget préélectoral qui avait pour
effet de réduire les taxes et il a présenté un budget
postélectoral au mois de novembre pour les augmenter au-delà du
niveau qu'on avait avant. Ce n'est pas très impressionnant.
Je regarde la publicité. Il y a même de la fausse
publicité là-dedans. Je vais donner seulement un exemple: Avec
PECEC, "on s'emploie à la relance". On décrit le programme PECEC
comme il est décrit, bien sûr, dans le décret
approuvé par le gouvernement en disant que c'est un programme pour
créer des emplois permanents, mais la ministre de la Main- d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu nous a dit ce matin, lorsque je lui ai
posé la question, qu'en dépit de ce qui avait été
exigé par le Vérificateur général le programme
n'est pas utilisé en grande partie pour la création d'emplois
permanents, mais pour le sauvetage des compagnies qui sont au bord de la
faillite. C'est de la fausse publicité, M. le ministre, et je pense que
tout le monde doit être en mesure de le réaliser.
Avant de terminer - parce que j'ai l'impression que vous allez vouloir
faire quelques commentaires - je vais simplement soulever un autre
problème qui est venu à notre attention récemment. Il
s'agit d'un effort pour faire de la publicité en anglais. Il s'agit
d'une section spéciale qui a été publiée dans
l'International Herald Tribune au mois de septembre de cette année. Je
dois vous dire que, si vous avez payé avec les fonds publics les
personnes qui ont rédigé ou traduit, selon le cas, les textes en
anglais, vous devez aller immédiatement leur demander un remboursement
complet.
Je vais citer seulement deux exemples qui sont de toute beauté.
Je pense que ceux qui comprennent l'anglais vont s'amuser
énormément. Écoutez ceci, et c'est une annonce du
ministère des Affaires intergouvernementales, les sophistiqués de
notre gouvernement, les gens qui connaissent toutes les langues du monde. Ils
parlent de notre connaissance économique: "Yes, Québec knows all
about building dams and subway systems; a piece of cake really." Ce n'est pas
à rire, c'est à pleurer. Je vais vous donner juste un autre
exemple, M. le ministre. J'insiste pour que vous alliez chercher la personne
qui a écrit ces textes et que vous lui demandiez un remboursement total,
au moins. Le ministre des Finances, vous le connaissez, c'est un autre qui est
parfaitement bilingue. Voici une annonce que lui a mise dans le même
journal, The International Herald Tribune, un journal très
réputé, un journal qui est diffusé dans le monde.
Écoutez ce que M. Jacques Parizeau, le ministre des Finances, a dit en
anglais pour encourager les gens à acheter les obligations du
Québec. "The purchase of these securities is a wise investment in such a
wide country." I am going to repeat that. This is Jacques Parizeau: "The
purchase of these securities is a wise investment in such a wide country.
Besides, ranking amongst the most developed in the world shows still greater
potential. All in all, an investment in Quebec securities is a movement towards
development, safety and profit."
C'est beau, mais ce n'est pas anglais. Le ministre des Finances
lui-même a publié et a payé pour une telle annonce et, si
je comprends bien, toute la publicité gouvernementale est
coordonnée par le ministère des Communications.
M. Bertrand: Attention sur une chose, M. le
député.
M. Scowen: Je vais vous citer le ministre du Commerce
extérieur, M. Bernard Landry. Il avait aussi une annonce dans ce journal
dans laquelle il dit: "Quebec technology has been on its feet for quite
sometime. In 1968, Quebec industry constructed the feet for the LEM, the
touchdown on the lunar surface." C'est une triste affaire, franchement. Je le
soulève parce que je suis certain que vous, après avoir pris
connaissance de cela, allez agir parce que, franchement, je suis
québécois, j'ai des amis qui parlent anglais et je n'aime pas
quand ils rient de nous autres.
Pour toutes ces raisons, M. le ministre, nous avons de grandes
réserves quant à vos intentions d'augmenter le budget pour le
ministère des Communications de 17% après vous avoir
déjà voté des crédits très substantiels. (17
h 10)
M. Jean-François Bertrand
M. Bertrand: M. le Président, pour ce qui est des
dernières remarques, je dois dire que mon anglais n'est pas à ce
point bon que je sois capable... Si je voyais les textes, peut-être que
je verrais mieux où sont les erreurs de traduction. Mais je vais dire
une chose au député de Notre-Dame-de-Grâce et c'est
important à comprendre. C'est vrai que c'est via le ministère des
Communications que se fait le placement dans les médias, mais, ceci
étant dit, chaque ministère garde la responsabilité, par
exemple, de travailler avec une agence de publicité pour ce qui est de
préparer son matériel publicitaire. Très souvent, quand il
s'agit de publicité qui s'adresse à l'étranger, qui doit
être traduite, il peut donner cela à contrat. Alors, il ne faut
pas, non plus, s'imaginer que tout transite par le ministère des
Communications. Il y a les ministères et les organismes.
Très souvent, moi-même, je m'en plains parce qu'il y a un besoin
de cohérence dans l'action gouvernementale.
M. Scowen: Vous devriez en glisser un mot à M. Parizeau et
à M. Landry.
M. Bertrand: Oui, c'est cela que je vais faire. Je vais prendre
des photocopies de vos trois articles. Donc, les ministères et les
organismes gardent la responsabilité de la préparation de cette
publicité, avec les agences qui, bien sûr, sont choisies pour le
faire.
Je voudrais simplement relever, M. le Président, en terminant,
que ce qu'a dit le député de Notre-Dame-de-Grâce
m'apparaît tout à fait incorrect. Sur les 15 500 000 $, bien
sûr, il admettait que tout n'allait pas en publicité, cela va de
soi, j'ai donné les chiffres tantôt. Il y a un montant de 6 000
000 $ là-dedans qui va pour l'Agence de coordination qui s'occupe de
faire le placement dans les médias, mais c'est pour un ensemble de
programmes et de services offerts par un ensemble de ministères et
d'organismes gouvernementaux.
Je dirai au député de Notre-Dame-de-Grâce que, pour
la relance économique et la création d'emplois comme telles,
c'est-à-dire les priorités que le gouvernement a
arrêtées pour l'année 1983-1984, nous avons, en ce moment,
dépensé environ 2 200 000 $. Cela peut intéresser le
député, parce que je vais donner des chiffres précis. Par
exemple, depuis le 13 novembre, depuis la conférence de presse du
premier ministre, jusqu'à la période des fêtes, en tout, il
se sera dépensé exactement 550 500 $.
Je vous donne la ventilation de cet argent: 171 000 $ de placement
média à la télévision pour 200 occupations, ce
qu'on pourrait appeler des "spots" publicitaires, comme on dit dans le
métier. La production de messages télévision pour
préparer ce placement média de 75 000 $, un cahier spécial
dans les hebdos - je crois que c'est 120 hebdos du Québec - pour un
montant de 290 000 $, ensuite des pochettes de presse, du graphisme, etc., pour
un montant de 18 500 $, ce qui fait un montant de 550 500 $.
En d'autres mots, dans ce montant total d'environ 10 000 000 $ qui va
pour le placement média, il y a un montant d'environ 2 200 000 $ qui a
été consacré aux priorités gouvernementales. Le
reste, c'est la responsabilité des ministères et des organismes
gouvernementaux. Donc, dans ce contexte-là, je dois dire que je ne peux
pas vraiment être d'accord avec ce qu'a dit le député de
Notre-Dame-de-Grâce, parce que ce que nous avons fait c'est ni plus ni
moins, à toutes fins utiles, que ce que nous avons fait l'année
dernière ou l'année d'avant.
Ceci étant dit, M. le Président, je pense que maintenant
nous serions disposés à passer - je pense que c'est 25 minutes
qu'il nous reste -...
M. Scowen: M. Bérubé, oui.
M. Bertrand: ...au ministre délégué à
la Réforme administrative. Merci beaucoup.
M. Scowen: Merci, M. le ministre. Le Président (M.
Rancourt): Cela va?
M. Scowen: Oui. On attend le président du Conseil du
trésor.
Le Président (M. Rancourt): On attend le président
du Conseil du trésor. Nous allons
suspendre quelques instants pour attendre son arrivée.
(Suspension de la séance à 17 h 14)
(Reprise de la séance à 17 h 23)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! Voici ce qui
va se produire, pour qu'on comprenne bien: le député de
Notre-Dame-de-Grâce va utiliser un droit de parole et le ministre
responsable du Conseil du trésor et délégué
à la Réforme administrative aura un droit final de
réplique. On clora ensuite l'ensemble des discussions. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
Conclusion M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, en terminant cette
étude de huit heures des crédits supplémentaires d'environ
650 000 000$ demandés par le gouvernement au-delà des
dépenses qu'il avait déjà fait approuver aux mois de mai
et juin, je dirai que nous avons essayé, du côté de
l'Opposition, de suivre une certaine ligne de pensée pendant ces
travaux, dans le but d'essayer de comprendre davantage ce que le gouvernement
voulait dire par le plan de relance.
Depuis que le plan a été rendu public au mois de novembre
par le premier ministre, il a été critiqué non seulement
par nous, mais par les journalistes, par les observateurs les plus neutres et
apolitiques. Les raisons sont très claires: premièrement, les
moyens ne sont pas très intéressants; deuxièmement, ils ne
sont pas chiffrés, il n'y a pas d'échéancier;
troisièmement, il n'y a pas d'objectifs très clairs.
Je veux poser quelques questions, à la suite des questions que
nous avons posées aux autres ministres dans l'espoir qu'avant que se
termine cette étude des crédits le ministre président du
Conseil du trésor, puisse nous éclairer davantage.
Dans son allocution, le premier ministre, pour la première fois,
s'est donné un objectif très clair - je pense que c'est important
que le ministre me suive dans cette affaire - il a dit: Nous avons l'intention,
pas seulement cette année, mais de façon permanente, de nous
donner un rythme de croissance économique supérieur à la
moyenne canadienne. Et c'est précisé plus loin: Cela veut dire,
pour 1984 et 1985, que l'on établit comme objectif une croissance
économique plus grande, plus importante que celle de la moyenne
canadienne.
Alors, cela peut se mesurer de plusieurs façons. Le PIB, les
investissements et surtout, je comprends, on peut le mesurer en termes
d'emplois. J'imagine qu'on va utiliser tous les trois, mais surtout la
création d'emplois, parce que c'est ce qui touche la plupart des
Québécois. Après avoir affaibli pendant sept ans la part
des emplois canadiens que l'on trouve ici au Québec, si on peut relancer
la création d'emplois, tout le monde sera très heureux. On
n'était pas capable de savoir précisément de quoi il
s'agissait dans cette déclaration du premier ministre. Voici une
question à laquelle on voudrait une réponse aujourd'hui: Quels
critères le premier ministre va-t-il utiliser pour définir la
réalisation ou non de ces objectifs?
Une deuxième chose, les moyens. On a essayé, tout au long
de cette étude des crédits, de poser des questions aux ministres,
à savoir: Quels sont vos objectifs précis? Par exemple, le
ministre des Affaires municipales était ici aujourd'hui. Un volet
très important du plan, ce sont les investissements publics dans les
municipalités et surtout à Montréal. Le ministre des
Affaires municipales n'a pas été capable de nous dire
l'importance de l'augmentation des investissements publics à
Montréal et à Québec. Il a dit: Les investissements
publics dans les municipalités au Québec augmentent d'environ 800
000 000$ par année. Je n'ai aucune idée des objectifs
définis pour 1984 et 1985.
Plutôt d'établir les objectifs d'une façon
cohérente, il fait exactement ce que le ministre des Finances a fait
dans son exposé hier. Il nous donne des exemples. Il dit, pour la
dixième ou la vingtième fois: Regardez, on va construire une
salle pour l'Orchestre symphonique de Montréal; on va créer
Pechiney. Cela fait cinquante fois qu'on annonce le projet Pechiney. Ces
exemples ne valent rien, parce que nous avons, au Québec, chaque
année, un niveau d'investissements d'environ 13 000 000 000 $, qui
comprennent des centaines, des milliers de petits projets. La question n'est
pas de savoir s'il va y avoir des projets, l'année prochaine; c'est
clair qu'on va avoir des projets. Quand n'importe quel ministre essaie
d'expliquer un plan de relance à la population en citant des exemples en
disant: On va faire ceci, on va faire cela, il n'éclaire pas du tout la
population parce qu'il ne nous donne pas la totalité, l'objectif global
visé. C'est tout simplement de la démagogie.
J'ai pris la peine d'examiner deux autres plans de relance que nous
avons vus et qui ont été déposés par le
gouvernement depuis son élection en 1977. Depuis 1977, l'économie
du Québec s'est affaiblie continuellement. En 1979, on a eu droit
à un document qui constituait le premier plan de relance du
gouvernement. Cela s'appelait Bâtir le Québec; vous vous en
souvenez? C'était un catalogue des intentions du gouvernement. Je vais
vous citer quelques-
uns de ces projets spécifiques qu'il voulait faire à cette
époque; un, entre autres, qui ressemble énormément
à un élément du plan de relance de M. le premier ministre;
la modernisation de l'industrie forestière, le reboisement et
l'ensemencement. Les superficies traitées vont passer de 40 000 à
100 000 acres et on va passer de 42 000 à 100 000 plants. Le plan de
reboisement existait dans l'affaire de 1979. On retrouve aujourd'hui dans le
programme du premier ministre presque les mêmes idées qu'il y
avait dans Bâtir le Québec. Par exemple, une plus grande
accessibilité de l'entreprise aux programmmes d'aide de l'État.
Il parle d'un mandat élargi pour la SDI, qui est la même chose que
ce que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme nous propose
aujourd'hui. (17 h 30)
Bâtir le Québec, le premier plan de relance
économique a été déposé en 1979 et, pendant
deux ans, l'affaiblissement du Québec a continué, les
investissements ont baissé, la croissance de l'emploi a baissé,
la dette du Québec, qui était de l'ordre de 4 000 000 000 $, a
augmenté à 7 000 000 000 $. Finalement, deux ans après, on
a eu droit à Bâtir le Québec 2, qui s'appelait Le virage
technologique. Une fois de plus, on a eu droit à un catalogue de presque
200 projets très précis qu'on va entreprendre pour relancer
l'économie du Québec. Il ressemble énormément
à celui annoncé au mois de novembre 1983 par le ministre et
l'économie a continué de s'effondrer. C'était les
mêmes idées: on va faire du reboisement, on va encourager la
petite et moyenne entreprise, on va encourager l'exportation, on va encourager
la haute technologie.
M. Landry, le ministre responsable, était très fier. La
première fois, il n'avait que 180 projets spécifiques et, cette
fois, dans Bâtir le Québec 2, il y avait 200 projets, des
consultations, des discussions, des petits projets ici et là, non
chiffrés, sans échéancier. À la fin de Bâtir
le Québec 2, l'économie de nouveau a continué de
s'affaiblir, de s'effondrer. L'emploi a baissé; la dette du gouvernement
a augmenté; la situation économique s'est
détériorée de nouveau.
Alors, maintenant, nous sommes devant Bâtir le Québec 3. Je
préfère appeler ces affaires: Affaiblir le Québec;
Affaiblir le Québec 1, Affaiblir le Québec 2 et, maintenant,
Affaiblir le Québec 3. Ce n'est pas voulu par vous, je comprends. Ce
n'est pas voulu par la population, non plus, c'est certain. Mais ces programmes
sont si mal conçus, si incohérents dans leur conception, si
faibles qu'ils ne peuvent avoir pour effet que d'affaiblir le
Québec.
Alors, j'aimerais beaucoup que le ministre fasse un dernier effort
sérieux aujourd'hui pour nous expliquer avec des chiffres et des
échéanciers, en termes de création d'emplois, en termes
d'investissements publics et privés, en termes de PIB, ce que vous
prévoyez, ce que vous avez établi comme objectifs pour 1984 et
1985. À la page 2 de ce document du premier ministre du 13 novembre, on
dit: "Le plan d'action comporte des objectifs à court terme, d'ici la
fin de 1985 - c'est deux ans, M. le Président - qui vont nous permettre
non seulement d'atteindre, mais de maintenir un rythme de croissance
supérieur à la moyenne canadienne."
Donc, qu'est-ce qu'on prévoit dans la création d'emplois
par le plan de la 5DI pour l'encouragement à l'investissement? Qu'est-ce
qu'on prévoit précisément, pour 1984 et 1985, comme
création d'emplois permanents dans le reboisement? Combien
prévoit-on comme objectif dans le domaine des investissements publics
pour l'année prochaine? Au moins, vous devez être en mesure de
nous dire combien vous prévoyez investir additionnellement dans le
domaine des investissements publics; c'est votre responsabilité. Le
ministre des Affaires municipales n'était pas capable aujourd'hui de
nous dire même quel était le montant des investissements publics
de l'année passée.
Nous avons l'impression, en terminant, M. le Président, que c'est
un projet sans cerveau, un projet avec comme idée maîtresse la
croissance supérieure à la moyenne canadienne, mais dont les
moyens sont complètement détachés de cet objectif. Les
moyens sont effectivement, étrangement, une liste de projets sortis de
Bâtir le Québec 1 et 2 et placés dans un autre ordre,
auxquels vous en avez ajouté peut-être un ou deux nouveaux. Je ne
les ai pas encore trouvés; peut-être qu'il en existe un ou deux.
Mais, effectivement, c'est le troisième catalogue des idées des
divers ministères du gouvernement, dont la majeure partie, dans les deux
premiers cas, n'a jamais vu le jour. Devant cela - c'est le côté
triste de l'histoire - nous sommes persuadés que l'emploi,
l'investissement et le PIB du Québec sont voués non seulement
à ne pas atteindre le niveau de croissance du Canada, mais à
continuer de se détériorer.
Alors, en terminant, si le ministre, dans sa réplique, peut faire
une seule chose cet après-midi, ce serait de définir les
objectifs chiffrés que le premier ministre veut établir dans le
domaine de la croissance économique en termes d'emploi, de PIB et
d'investissements publics et privés pour 1984 et 1985 et de nous dire
comment, aussi précisément que possible, chacun des volets de
cette liste, de ce catalogue de projets, va contribuer à nous faire
atteindre cet objectif global. Si le ministre n'est pas capable de le faire -
et je suis prêt à lui donner tout le temps nécessaire -
s'il n'est pas capable de
donner des chiffres cohérents pour l'année 1984 et 1985,
nous allons quitter le salon bleu cet après-midi convaincus - et la
population en sera convaincue aussi - que le plan de relance est une coquille
vide.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Yves Bérubé
(réplique)
M. Bérubé: Merci, M. le Président. Je viens
d'écouter l'intervention du député de
Notre-Dame-de-Grâce et ce qui frappe dans cette intervention, d'une part,
c'est une espèce de manie, une sorte d'incantation autour de:
Donnez-nous les chiffres du nombre d'emplois créés, plutôt
que de mettre l'accent sur le contenu. Je pense que ceci est lié au fait
que, lorsqu'on discute avec un politicien libéral, on se rend compte
immédiatement qu'il n'a pas de contenu, il n'a pas d'idées. Il
n'a pas de vision de la société, de l'orientation qu'on veut
prendre. Donc, cela se raccroche à des chiffres. Il faut lancer des
chiffres en l'air. Par exemple, dans l'Est du Québec, le gouvernement
fédéral, qui est contrôlé par un Parti
libéral, a lancé 235 000 000 $ dans un plan de relance. En
fouillant, on s'est rendu compte que c'était 235 000 000 $ sur cinq ans,
c'est-à-dire essentiellement un peu moins que ce que le gouvernement
consacre à l'Est du Québec annuellement dans des
activités, justement, de soutien à l'économie. Le chiffre
ne voulait rien dire, mais, comme on le mettait sur cinq ans, cela faisait un
gros chiffre et, par conséquent, on pensait épater la foule.
Première observation: Je pense que l'objectif qu'on doit
poursuivre dans notre plan de relance, c'est d'abord de mettre l'accent sur un
certain nombre de mesures qui vont restructurer l'économie, qui vont
avoir un impact sur l'économie. On jugera de l'efficacité du plan
de relance à la réalisation des mesures qu'on a
décidé de promouvoir. C'est à cela qu'on va le juger. Si,
par exemple, on se donne comme objectif, face à 15 000 jeunes qui ont
quitté l'école et qui n'ont pas une éducation suffisante
pour leur permettre de s'intégrer à une économie normale,
de les retourner en milieu scolaire, on jugera le gouvernement sur le fait
qu'il a ou non réussi à retourner ces 15 000 jeunes à
l'école. C'est là-dessus qu'on va le juger.
Deuxièmement, on va le juger non pas sur un paquet de chiffres
creux, mais sur l'atteinte de cibles, la mise en place de programmes. C'est
cela qu'on va regarder. On va regarder dans quelle mesure, comme gouvernement,
lorsque nous disons quelque chose, on peut se fier à ce que nous disons.
En même temps, cela va me permettre d'illustrer l'approche du
député de Notre-
Dame-de-Grâce. Par exemple, un peu en coin, il a laissé
glisser tantôt: Nous venons d'examiner des crédits
supplémentaires qui vont augmenter les dépenses gouvernementales
de 650 000 000 $. Je crois que c'est le chiffre qu'il a cité, alors je
vais simplement le reprendre: 650 000 000 $ de dépenses additionnelles.
Donc, pour quelqu'un qui nous écoute, 650 000 000 $ de plus, cela veut
dire qu'on a des dépenses de plus.
(17 h 40)
Tout ce qu'il a essayé de faire, c'est vous induire en erreur. Ce
n'est pas le cas. Il y a, c'est vrai, 317 000 000 $ de dépenses de plus
dans les ministères. Il y a 30 000 000 $ de plus, qu'on a ajoutés
pour couvrir les premières dépenses liées au plan de
relance, c'est vrai, pour un total d'environ 350 000 000 $, c'est vrai. Mais il
n'a pas dit qu'il y avait 541 000 000 $ prévus en dépenses que
nous avons annulés. Enlevez 541 000 000 $ de dépenses qui ne se
feront pas, ajoutez 352 000 000 $ de dépenses qui, elles, se feront et
qui n'étaient pas prévues, cela ne donne pas des dépenses
additionnelles, cela donne des dépenses de moins. Ah! Cela
n'apparaît pas du tout dans l'intervention du député de
Notre-Dame-de-Grâce. Il a oublié de dire que, si je mets 352 000
000 $ en dépenses de plus, mais que j'en annule 541 000 000 $, le net,
c'est moins de dépenses.
Que fait-on avec cet argent? Nous constatons que, dans le réseau
des affaires sociales et de l'éducation, il y a des déficits
accumulés, des dépenses qui ont été faites et qui
n'ont pas encore été payées. Ce que nous disons, c'est que
nous allons payer nos factures plus rapidement. Ce ne sont pas de nouvelles
dépenses, c'est du remboursement de factures, du paiement de factures
plus rapide pour des dépenses faites il y a plusieurs années.
Donc, il n'y a pas d'augmentation des dépenses au sens de nouvelles
activités dans le budget qui nous est présenté.
On a parlé de la façon d'évaluer
l'efficacité du plan de relance. Il y a peut-être une façon
de l'évaluer. On prend le nombre de chômeurs au Québec, on
prend le nombre de chômeurs au Canada et on dit: On fait partie du
Canada, regardons si on a notre part. Au début du mandat de M. Bourassa,
il y avait 33% des chômeurs canadiens qui vivaient au Québec.
À la fin de son mandat, il y en avait 33%, toujours. Comme performance,
ce n'est pas particulier; le tiers des chômeurs, alors qu'on n'a que 26%
de la population.
Vous allez me dire: Comment pourriez-vous mesurer votre performance?
C'est bien simple. En faisant en sorte que le tiers des chômeurs
canadiens qu'on a toujours eu depuis 1945 on ne l'ait plus et qu'on se retrouve
peut-être avec 30%, 28%, 25% du chômage canadien. Si on se
retrouvait avec
26% du chômage canadien et 26% de la population, on pourrait dire:
Bien, on a notre part, c'est-à-dire qu'on fonctionne aussi bien que le
Canada en moyenne. Et, si on trouve qu'on a trop de chômeurs, bien, c'est
qu'il y en a trop au Canada. On pourra dire cela. Donc, dans la mesure
où l'on réduit l'écart entre le chômage au
Québec et le chômage au Canada, on pourra dire qu'on a atteint
notre objectif. Oui, voilà un objectif qui est facile à mesurer,
qui est publié tous les mois et qui permettra de voir si, oui ou non,
l'objectif gouvernemental est atteint.
Je termine en donnant des exemples. Au Conseil du trésor,
aujourd'hui, se discutait le plan d'immobilisations gouvernementales parce que
les décisions n'étaient pas entièrement prises et qu'elles
ne le seront sans doute pas avant le retour au début de janvier. Il n'y
a rien qui presse, il s'agit de l'année 1984-1985 et on a le temps de
faire une analyse comme il faut. Mais il y a des choses que nous savons. Nous
savons déjà que, dans les ministères, dans les
édifices publics, nous allons injecter près de 270 000 000 $
d'immobilisations de plus. Nous savons déjà que le métro,
c'est au moins 60 000 000 $ de plus. Nous savons que l'assainissement des eaux
sur les deux années, c'est au moins 400 000 000 $ de plus, en moyenne
200 000 000 $ de plus par année. Nous savons qu'à
Hydro-Québec, en maintenant le niveau des immobilisations là
où il est plutôt que de le laisser décroître, comme
le prévoyait Hydro-Québec, nous allons injecter 200 000 000 $ de
plus. J'additionne et cela me fait 300 000 000 $, plus 200 000 000 $, plus 200
000 000 $. Je suis déjà rendu à 700 000 000 $, plus 60 000
000 $ pour le métro et je suis rendu à 800 000 000 $
d'immobilisations de plus, l'an prochain, que ce qui était prévu.
Voilà une réalité bien concrète.
Vous allez me dire: Combien cela va créer d'emplois? On verra. Ce
que je sais, c'est que ce sont des activités industrielles de
construction de plus au Québec qui vont nécessairement contribuer
à stimuler l'économie, mais je n'ai pas de boule de cristal. Je
ne contrôle pas l'économie canadienne. Je ne contrôle pas
l'économie américaine et, par conséquent, je serai
toujours tributaire des mouvements au sein de ces économies.
Je termine, M. le Président, sur un dernier point...
M. Scowen: Est-ce que le ministre me permettrait...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant!
M. Scowen: ...une très courte question? Le
Président (M. Jolivet): Juste un instant!
M. Bérubé: M. le Président, j'ai
l'impression que le député de Notre-Dame-de-Grâce a pris un
temps assez long, réduisant d'autant mon droit de parole. Par
conséquent, je préférerais terminer vu que nous avons des
votes à prendre.
Le Président (M. Jolivet): C'est votre droit, M. le
ministre.
M. Bérubé: Merci, M. le Président. Je vais
vous donner un dernier exemple, pour terminer, pour vous montrer que, lorsque
nous disons que nous allons faire des choses, nous les faisons. Il a
cité le plan de reboisement en disant: "Ce n'est pas nouveau." Quand
nous sommes arrivés au gouvernement, il ne se plantait pas 10 000 000
d'arbres au Québec à chaque année. Je peux même vous
rappeler que des centaines de milliers de plants ont été
brûlés en 1975 parce que le gouvernement avait oublié de
prévoir les budgets pour la plantation. C'est lorsque je suis
arrivé comme ministre des Terres et Forêts que les fonctionnaires
m'ont dit: M. Bérubé, ne vous engagez pas trop vite dans des
plans de reboisement, on ne sait jamais s'il y a une volonté politique
suffisante pour faire en sorte que si, aujourd'hui, on prépare les
pépinières, dans trois ans, quand les plants seront prêts,
on puisse les planter en forêt.
Nous avons dit que nous mettrions en place un programme
échelonné sur cinq ans, visant à planter 100 000 000
d'arbres au Québec. Nous sommes partis de 10 000 000; après trois
ans et quelques mois d'écoulés, où en sommes-nous?
À 65 000 000. Où en serons-nous à la fin? Il y a toutes
les raisons de croire que nous en serons à 100 000 000 puisque tout est
en place pour produire les 100 000 000 de plants dont on parlait. Les budgets
sont là. Nous avons fait adopter la 101 créant le fonds forestier
à l'Assemblée nationale, de manière à garantir les
budgets nécessaires. Nous sommes partis de 10 000 000 pour monter cela
à 100 000 000. Déjà, en ce moment, nous sommes à 65
000 000 et le programme n'est pas arrivé à sa fin.
Vous voulez une preuve? Bien oui, c'est facile. On n'a qu'à aller
dans les pépinières, on n'a qu'à aller compter les plants,
si l'Opposition ne nous croit pas. On va bien voir. C'est cela les chiffres; la
réalité est là.
Donc, nous avons mis l'accent sur des principes bien simples: investir
dans nos ressources, la forêt, l'hydroélectricité, pour,
essentiellement, asseoir un développement industriel original au
Québec.
Deuxièmement, nous avons misé sur la
créativité de nos Québécois en passant au premier
rang des provinces canadiennes pour
la formation de docteurs en sciences. Cela est un objectif
précis. Combien cela va-t-il créer d'emplois? On verra. Quand les
Japonais ont décidé de se lancer dans le développement de
la télévision en couleur, si un député de
l'Opposition avait posé la question au ministre de l'époque:
Combien cela va-t-il créer d'emplois? Il aurait fait rire de lui parce
qu'il ne le savait pas, sauf qu'aujourd'hui, il n'y a personne qui se pose des
questions à savoir combien l'industrie de l'électronique
japonaise crée d'emplois au Japon. C'est cela, la différence. Ils
n'ont aucune vision de ce qu'est le développement économique. Il
faut faire des virages de base au départ en tablant sur la
capacité de nos citoyens, après cela, prendre la relève et
assurer le développement. Donc, passer au premier rang pour la formation
de chercheurs au Québec, cela est un objectif. Dégager 125 000
000 $ pour permettre à des jeunes qui terminent l'université ou
le cégep de partir leur entreprise, cela est un objectif précis.
Ce sera facile de voir si on a des milliers de nouveaux entrepreneurs dans
quelques années. Garantir les deux tiers des pertes aux banques qui
financeront le développement de nos entreprises manufacturières,
cela, c'est concret. On n'aura qu'à voir combien on en a garanti,
quelles ont été les demandes venant des entreprises et combien on
en a garanti. On pourra voir si, effectivement, on a respecté notre
engagement. Je n'ai aucun doute que ce sera respecté.
Donc, on a misé sur la créativité: création
d'un institut de design au Québec, d'un centre de recherche conjoint
industrie et université. Cela est un concept. Vous n'entendez jamais les
libéraux parler du problème du transfert de la technologie de la
recherche universitaire vers l'industrie. Non! Ils ne comprennent pas cela. Ils
n'en parlent jamais. Vous ne trouverez cela nulle part. C'est l'un des
éléments importants de notre plan de relance. C'est concret; ce
sera facile de voir dans quelques années s'il y a effectivement six
centres de recherche qui ont été créés.
Est-ce que le Musée de la science et de la technologie est en
construction? Est-ce que le Musée des arts modernes à
Montréal est en construction? Est-ce que l'Orchestre symphonique de
Montréal est logé dans son immeuble? Ce sera facile de voir cela.
Ce sont nos objectifs. On les a précisés en termes de choses
à faire et non pas en termes de chiffres creux qui ne veulent rien dire
et qui, finalement, servent de pensée au Parti libéral. (17 h
50)
Je termine sur le dernier point. M. le Président, ce plan de
relance repose essentiellement sur une attitude de
générosité. Faire en sorte que, premièrement, tous
nos concitoyens au Québec aient la chance de faire oeuvre utile, de
contribuer à l'édification de notre société. Nous
avons des besoins sociaux qui sont insatisfaits. Nous avons des gens à
l'aide sociale qui peuvent les satisfaire. Pourquoi ne créerait-on pas
des emplois à temps partiel pour ces gens-là, de telle sorte que
ce ne soit pas du "cheap labour", qu'ils soient rémunérés
sur une base raisonnable et qu'ils puissent effectivement offrir à leurs
concitoyens leurs talents et répondre en même temps à des
besoins? Cela, c'est un objectif concret. Vous allez voir dans quelques mois si
cela fonctionne ou si cela ne fonctionne pas. C'est là-dessus qu'on
jugera.
Nous avons également décidé de miser sur la
formation de nos jeunes, la formation de nos travailleurs, en retournant ceux
qui n'ont pas complété leurs études et en leur permettant
aussi la formation en entreprise. Jamais on n'a voulu faire confiance à
l'entreprise pour former nos jeunes. Eh bien, voilà un virage qu'on
prend qui est fondamental. C'est là-dessus qu'on nous jugera. On nous
jugera sur les choses que nous aurons mises en place. On nous jugera sur la
valeur des éléments que nous avons mis en place. Personnellement,
ce que j'ai surtout retenu des journaux au lendemain de l'annonce du plan de
relance, cela a été, d'une part, une certaine surprise devant la
qualité du plan et, d'autre part, une certaine préoccupation
quant à la capacité pour le gouvernement de livrer la
marchandise. Mais ceci ne me fait absolument pas peur, parce que, d'ici
quelques mois, tout le monde sera en mesure de mesurer exactement les
résultats du plan de relance. Vous verrez que les résultats
seront là.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre. Le temps
prévu pour la durée de ces débats étant maintenant
écoulé, je vais devoir faire rapport.
M. Scowen: Je pense qu'on doit adopter les crédits.
Le Président (M. Jolivet): Non, pas pour le moment, cela
viendra plus tard...
M. Scowen: Non?
Le Président (M. Jolivet): ...parce qu'il faut
attendre...
M. Scowen: Plus tard?
Le Président (M. Jolivet): ...la fin du discours sur le
budget. En fait, vous voulez dire que l'ensemble des crédits sont
adoptés? Oui, oui.
M. Scowen: Normalement, c'est l'étude des crédits.
Le Président (M. Jolivet): Oui, oui. D'accord, il n'y a
pas de problème.
M. Scowen: On a décidé de les adopter à la
fin de...
Le Président (M. Jolivet): D'accord! On avait dit qu'on
adoptait en bloc l'ensemble de tous les crédits.
M. Scowen: Voilà!
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.
M. Scowen: Alors, sur division.
Le Président (M. Jolivet): Sur division. D'accord!
M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que la
commission plénière a fini l'étude et a adopté tous
les crédits supplémentaires 1983-1984.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que ce rapport est
adopté?
Une voix: Sur division.
Une voix:
Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur
division.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais, s'il
vous plaît, d'appeler l'article 10 du feuilleton d'aujourd'hui.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi 53
Le Vice-Président (M. Rancourt): J'aimerais bien qu'on me
l'apporte. Prise en considération du rapport de la commission permanente
des affaires municipales qui a étudié le projet de loi 53, Loi
annexant un territoire à celui de la ville de Chicoutimi.
Est-ce que cette prise en considération est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Donc, M.
le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, il y en a un autre qui est
à adopter, c'est l'article 5 du feuilleton, la troisième lecture
du projet de loi 52.
Projet de loi 52 Troisième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Troisième lecture
du projet de loi 52, Loi modi- fiant diverses lois fiscales en vue d'instituer
un nouveau recours pour les contribuables. Est-ce que cette troisième
lecture est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: Je vous demanderais d'appeler l'article 6 du
feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 55 Troisième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt): Troisième lecture
du projet de loi 55, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions
législatives concernant l'adoption. Est-ce que cette troisième
lecture est adoptée?
Mme la députée de L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Deux mots, M. le Président. L'unique
raison pour laquelle je sens le besoin de me lever et de dire quelques mots,
c'est qu'il y avait beaucoup de familles, d'individus et de personnes
travaillant dans le milieu de l'adoption qui s'inquiétaient beaucoup
à savoir si le projet de loi 55, qui vise à clarifier les
règles de droit applicables en matière d'adoption internationale,
serait adopté avant la fin de la session, vu que des problèmes,
particulièrement dans la Mauricie et dans d'autres endroits du
Québec, avaient été créés parce que les
règles n'étaient pas suffisamment claires en termes d'adoption
internationale.
C'est simplement pour leur dire que nous n'avons pas eu de
difficulté à nous mettre d'accord quant aux dispositions
contenues dans le projet de loi 55, en ce qui touche le ministre des Affaires
sociales et l'Opposition. Il n'y a eu, à ma connaissance, en tout cas -
le ministre en parlera tout à l'heure - que deux amendements
d'apportés: un amendement qui est véritablement un amendement
technique, pour clarifier les choses afin qu'il n'y ait pas de confusion selon
qu'on se réfère au Code de procédure civile ou qu'on se
réfère à la loi 55; le deuxième, c'était -
et je tiens en expliquer les raisons - d'augmenter les pénalités
qui sont prévues pour ceux qui ne procéderaient pas par les
canaux juridiques pour l'adoption internationale. Et ceci, non pas dans un but
de revanche ou quoi que ce soit, mais compte tenu des implications que les
adoptions, qu'elles soient domestiques ou qu'elles soient internationales, ont
sur les individus et particulièrement sur les enfants,
et pour éviter toutes les circonstances pénibles,
même si on ne peut pas dire qu'elles ont été très
nombreuses. Quel qu'en soit le nombre, il faut les éviter le plus
possible. Alors, c'est dans le but de dissuader davantage les personnes qui
auraient voulu continuer de contourner la loi pour procéder à des
adoptions internationales. Je pense que la loi prévoit maintenant que
les choses sont régularisées et, tout ce que l'on peut souhaiter,
c'est que, dans un avenir prochain, ceux qui désirent adopter un enfant
par le processus de l'adoption internationale puissent le faire dans des
délais plus courts que ceux qu'ils ont connus jusqu'à maintenant.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Affaires sociales.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que je n'ai
vraiment rien à ajouter à ce que vient de dire la
députée de L'Acadie, qui connaît fort bien le dossier, je
pense, et partage avec nous les mêmes préoccupations.
Effectivement, nous avons la collaboration de l'Opposition sur ce dossier et,
comme nous l'avons, nous pourrons être en mesure, d'une part, de voir
à la sanction de ce projet de loi le plus rapidement possible et donc
à sa mise en vigueur très rapidement, ce qui aura comme
conséquence de faciliter le travail du secrétariat à
l'égard de l'adoption internationale, parce qu'on clarifie les
règles de droit international privé; cela aura comme
conséquence surtout, je pense, d'apporter une sécurité
recherchée par des centaines de familles au Québec, qui se sont
adonnées à ce processus d'adoption internationale depuis un
certain nombre d'années, à la fois à l'égard des
enfants comme de leurs parents et, finalement, de s'assurer que, à
l'avenir, il n'y aura pas d'abus. On se donne, en tout cas, des instruments
pour empêcher des formes d'abus qui, je pense, étaient
carrément inadmissibles dans le processus des adoptions internationales.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette
troisième lecture est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je ferais motion pour que
nous suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de suspension des travaux est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Nos
travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise de la séance à 20 h 6)
Le Président: À l'ordre! M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Fréchette: M. le Président, je vous prierais
d'appeler l'article 3 du feuilleton, s'il vous plaît.
Travaux des commissions
Le Président: Peut-on auparavant, M. le leader du
gouvernement... Je crois comprendre que, pour les travaux de la commission
parlementaire sur la justice, il y en a encore pour, environ, une demi-heure et
qu'après coup, la commission sur le projet de loi 57 doit se
réunir. Peut-on, entre les deux, faire siéger la commission de
l'Assemblée nationale, un quart d'heure, une demi-heure, simplement de
manière... Alors, vous pouvez faire une motion en ce sens pour obtenir
un ordre de la Chambre.
M. Bertrand: Très bien, M. le Président.
Effectivement, je voudrais faire motion pour qu'à la salle 81, à
compter de maintenant et pour à peu près une demi-heure, la
commission de la justice se réunisse pour étudier le projet de
loi 50, terminer l'étude du projet de loi 50, article par article; par
la suite, si c'est effectivement notre voeu à tous, nous pourrions nous
réunir une quinzaine de minutes, une vingtaine de minutes pour recevoir
le rapport de la sous-commission qui a siégé sur la
réforme parlementaire et, par la suite, faire en sorte que, à peu
près vers 21 heures ou 21 h 15, la commission des communautés
culturelles et de l'immigration puisse se réunir pour l'étude du
projet de loi 57, article par article, et qu'au salon rouge - ils attendent
qu'on le leur dise, on devrait peut-être le leur dire officiellement - la
commission des affaires municipales se réunisse pour entendre les
municipalités dont les projets de loi privés sont inscrits au
feuilleton, à savoir les projets de loi 241, 220, 233, 282, 211, 200,
235 et 232.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais
maintenant d'appeler l'article 3 du feuilleton d'aujourd'hui.
Projet de loi 46
Reprise du débat sur la troisième
lecture
Le Président: Troisième lecture du projet de loi
46, Loi sur les conseils intermunicipaux de transport dans la région de
Montréal et modifiant diverses dispositions législatives. Je
cède la parole à M. le ministre des Transports.
M. Clair: M. le Président, j'ai déjà eu
l'occasion de faire mon discours de troisième lecture. Je pense que
c'est le député de Mont-Royal qui avait demandé
l'ajournement des débats.
Le Président: Je m'excuse. Alors, M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: À la suite des problèmes qui existaient
sur la rive sud et dans certains secteurs desservis par la CTCUM, une solution
s'imposait non seulement quant aux services qui devaient être fournis aux
différentes municipalités de la rive sud et de la région
de Montréal, mais aussi quant aux coûts de la facture et aux
coûts de fonctionnement.
Vous vous souviendrez, M. le Président - brièvement, juste
pour situer et rappeler les raisons du projet de loi 46 - que le gouvernement
avait obligé la CTRSM à acquérir Métropolitain Sud
qui était une compagnie qui était sur le bord de la faillite. La
CTRSM a été obligée d'acheter les actifs, de fournir le
service aux différentes municipalités et, après quelques
années, on s'est aperçu que les municipalités s'opposaient
aux factures et aux coûts d'administration du service de la filiale de la
CTRSM. (20 h 10)
Le gouvernement a alors suggéré, avec le projet de loi 46,
de cesser de dissoudre la filiale de la CTRSM et de prévoir que les
municipalités pourraient se former en conseils intermunicipaux de
transport dans la région de Montréal.
M. le Président, je crois qu'une solution s'imposait. Les
factures étaient trop élevées, les municipalités
n'avaient pas de contrôle sur les coûts d'administration et sur le
service. Ce qu'on pourrait reprocher au gouvernement serait que le projet de
loi a pris un peu trop de temps à être présenté
à l'Assemblée nationale. Il est venu à un moment où
il n'y avait pas assez de temps pour donner une chance à la CTRSM de
vraiment se départir, de négocier les contrats avec les
différentes municipalités qu'elle dessert maintenant et qu'elle
pourrait desservir dans l'avenir.
Mon collègue, le député de Laporte, insistera un
peu plus sur la question de la CTRSM. Je voudrais seulement souligner qu'il y
avait eu un télégramme qui avait été envoyé
par la Commission de transport de la rive sud de Montréal demandant une
compensation si elle avait à subir des dommages ou si elle ne pouvait
pas continuer ses activités dans le cas où les conseils
intermunicipaux de transport n'auraient pas utilisé ses services, parce
que le projet de loi prévoit que les municipalités peuvent
utiliser un transporteur privé. Nous avions demandé au ministre
d'inclure dans le projet de loi ou de donner des garanties à la
Commission de transport de la rive sud de Montréal selon lesquelles elle
ne subirait pas de dommages.
Le ministre nous assure que, d'après lui, la CTRSM n'aura pas de
dommages à subir, mais cela ne semble pas être l'opinion de la
Commission de transport de la rive sud de Montréal à la suite de
son télégramme. Ces gens avaient aussi demandé un sursis,
un délai pour pouvoir négocier certains contrats.
C'est un problème qui, je pense, existe encore, que le projet de
loi n'a pas résolu. C'est malheureux de placer la CTRSM dans une
position où elle pourrait être obligée de subir certains
dommages, d'assumer certaines sommes ou certains montants dans la question du
personnel, dans la question du coût du personnel, si elle ne signe pas de
contrat de services avec les autres municipalités.
M. le Président, l'autre problème que nous avions
souligné au ministre concernait le pouvoir du ministre d'obliger les
municipalités à faire part d'une entente malgré leur
désir de ne pas participer à une entente avec les autres
municipalités. Nous avons réussi à baliser un peu les
critères, à obliger le ministre à restreindre son
intervention, mais le fait demeure qu'il y a encore une intervention, un
pouvoir ministériel d'arbitrage sur les décisions locales en
matière de transport et l'Union des municipalités a
souligné cet aspect du projet de loi, c'est-à-dire qu'il y a
une ingérence gouvernementale dans ses décisions et des
pouvoirs ministériels de désaveu sur le service de transport au
sein des conseils intermunicipaux de transport. On aurait
préféré laisser à ces municipalités une
entière discrétion et le pouvoir décisionnel. À
elles de décider si elles voulaient faire partie d'une entente ou
non.
Selon le projet de loi, il semble que cela sera plus facile pour une
municipalité de faire partie de l'entente, mais, une fois qu'elle aura
signé une entente avec d'autres
municipalités, cela sera beaucoup plus difficile de se retirer.
On aurait préféré laisser encore à ces
municipalités le pouvoir décisionnel de décider si, oui ou
non, elles voulaient faire partie d'une entente avec les municipalités
avoisinantes.
Cependant, je dois vous dire que, puisqu'il était assez important
d'apporter une solution à une cinquantaine de municipalités - il
y a la question des factures, la question des coûts de fonctionnement -
je crois qu'une solution s'imposait. Nous sommes d'accord avec le principe;
nous sommes d'accord avec les pouvoirs qui seront donnés à ces
municipalités afin d'engager un service de transport privé ou de
faire des ententes avec la CTRSM. Nous allons voter en faveur du projet de loi
parce que je crois qu'on ne peut pénaliser, malgré qu'il y ait
des défauts dans le projet de loi... On aurait
préféré d'autres changements pour protéger la
Commission de transport de la rive sud de Montréal; il est malheureux
que le ministre n'ait pas pu donner de telles garanties mais, dans l'ensemble,
je crois qu'on ne voudrait pas pénaliser les municipalités qui,
à partir du 31 mars, auront la marge de manoeuvre pour s'organiser en
conseils intermunicipaux de transport et effectuer des ententes avec les
transporteurs qu'elles veulent.
Mon collègue, le député de Laporte, va souligner au
ministre les problèmes plus spécifiques qui existent à la
Commission de transport de la rive sud de Montréal. Il n'est pas trop
tard pour le ministre de donner certaines garanties, bien que je comprenne que
certains aspects des garanties ne peuvent être inclus dans le projet de
loi. Par exemple, le ministre nous a lu une lettre qu'il a envoyée
à la Commission de transport de la rive sud de Montréal,
relativement aux poursuites qui avaient été prises contre la
CTRSM, selon laquelle le ministre s'engageait à en prendre la
responsabilité. Je comprends qu'une telle garantie ne puisse être
incluse dans le projet de loi, mais on suggère au ministre de donner des
garanties à CTRSM par une lettre, par un engagement du ministère
des Transports, du gouvernement qu'elle n'aurait pas de dommages à subir
advenant le cas où, après le 31 mars 1984, elle n'aurait pu
conclure une entente avec toutes les municipalités et elle se trouverait
dans la situation où elle a du personnel à payer - parce que la
masse salariale est assez élevée.
On ose espérer que le ministre pourra donner de telles garanties
à la Commission de transport de la rive sud de Montréal. Si cela
est fait, nous pourrons dire que le projet de loi répond vraiment aux
besoins de tous les intervenants, de tous ceux qui seront affectés. Si
le ministre ne prend pas cet engagement, je crois qu'il y aura une lacune dans
le projet de loi et, malgré que celui-ci apporte une solution à
la cinquantaine de municipalités affectées, il ne résoudra
pas complètement les problèmes de la Commission de transport de
la rive sud de Montréal.
Nous espérons, M. le Président, que le ministre prendra en
considération ces représentations, non seulement celles que nous
faisons ici, mais celles que nous faisons au nom de la commission de transport,
et qu'il sera prêt à s'engager afin que la Commission de transport
de la rive sud de Montréal ne soit pas pénalisée à
la suite de l'adoption du présent projet de loi. Merci.
Le Président: M. le député de Laporte. M.
André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Le projet de loi 46
que nous étudions présentement en troisième lecture vise
à réorganiser les services de transport en commun dans la
région de Montréal, à l'extérieur du territoire des
commissions de transport public. Il s'agit des territoires situés
à l'extérieur des trois grandes commissions de transport public
qui oeuvrent dans la région de Montréal, soit la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Montréal, qui oeuvre sur
l'île de Montréal, la Commission de transport de Laval, qui oeuvre
sur l'île Jésus, et la Commission de transport de la rive sud de
Montréal, qui oeuvre sur ce qu'on appelle généralement la
rive sud immédiate. (20 h 20)
En ce qui concerne la rive sud immédiate, les
municipalités membres de la CTRSM sont les suivantes: la ville de
Saint-Lambert, dans le comté de Laporte - je devrais dire le beau
comté de Laporte - la ville de Lemoyne, dans le même comté
de Laporte; la ville de Greenfield-Park, également dans le même
comté; la ville de Longueuil, qui a le grand avantage de faire partie de
trois comtés, le comté de Laporte, bien sûr, le
comté de Marie-Victorin et le comté de Taillon; il y a
également la ville de Brossard, dans le comté de Laprairie; la
ville de Saint-Hubert, dans le comté de Vachon et la ville de
Boucherville, dans le comté de Bertrand. Alors, l'ensemble de ces
municipalités forme les municipalités membres de la CTRSM et
constitue une population d'environ 350 000 personnes.
Le projet de loi que nous avons devant nous pour adoption en
troisième lecture vise à former des conseils intermunicipaux de
transport, une mesure qui reçoit l'approbation de l'Opposition d'une
façon générale, comme le disait tout à l'heure mon
collègue, le député de Mont-Royal et porte-parole officiel
de l'Opposition en matière de transport.
Toutefois, ce projet de loi vise à abolir, dans ses articles 71,
72 et 73, la filiale de la Commission de transport de la
rive sud de Montréal qu'on appelle Métropolitain Sud. Les
citoyens de la rive sud immédiate connaissent bien cette compagnie
Métropolitain Sud qui, jusqu'en 1978, desservait toutes les
municipalités en dehors du territoire de la CTRSM. La filiale a
été acquise en 1978, à la suite de pressions
énormes qui avaient été exercées à ce moment
par le gouvernement du Québec. Elle dessert les 50 municipalités
situées à l'extérieur du territoire de la CTRSM. Il est
à noter que la filiale ne fait que du transport interurbain, et non du
transport urbain comme le fait la CTRSM.
Lors de l'acquisition de Métropolitain Sud par la CTRSM, en 1978,
le gouvernement du Québec avait obligé les 50
municipalités hors territoire à combler les déficits
d'exploitation de cette compagnie, même si les municipalités qui
étaient desservies n'avaient absolument aucun mot à dire dans
l'administration de la filiale de Métropolitain Sud. Lorsque les
factures ont été émises deux ans plus tard, les maires de
ces 50 municipalités ont refusé de payer, prétextant
qu'ils n'avaient pas été consultés, et ils avaient bien
raison. Alors, le gouvernement a tenté de régler le
problème et a offert de payer lui-même une partie de la facture.
Il a offert de payer la partie de la facture qui avait trait à
l'acquisition de Métropolitain Sud et la partie de la facture qui avait
trait à l'acquisition de certains équipements. Enfin, il a
proposé que les municipalités ne paient que leur proportion du
déficit d'exploitation.
À partir de 1984, la filiale de Métropolitain Sud de la
CTRSM étant abolie, l'article 71 du projet de loi stipule que les biens
de Métropolitain Sud seront dévolus à la CTRSM, laquelle
assume les obligations de Métropolitain Sud. D'autre part, il est
spécifié que la CTRSM n'a droit à aucune indemnité
pour la dissolution de sa filiale.
Ces articles causent beaucoup d'émoi chez les
municipalités membres de la CTRSM, puisqu'ils font en sorte que les
membres de la CTRSM devront hériter d'un passif important qui comprend,
entre autres, les salaires à payer aux 145 employés de
Métropolitain Sud, soit une masse salariale présentement
estimée à 5 000 000 $. La valeur des 43 autobus pourrait se
chiffrer, quant à elle, à 2 000 000 $. Alors, on voit que la
CTRSM hérite d'autobus qui valent 2 000 000 $ et d'une obligation de
payer une masse annuelle de salaires de 5 000 000 $.
Présentement, la CTRSM tente de négocier des contrats de
services avec certaines des 50 municipalités hors territoire pour les
années à venir, ce qui permettrait d'utiliser le matériel
et une partie du personnel de Métropolitain Sud. Cependant, je dois dire
qu'il n'y a absolument rien de signé et qu'on nage en plein inconnu. On
ne sait pas du tout s'il y aura des contrats signés, quand ils seront
signés et pour quelle longueur de temps ils seront signés. Il
semble que les négociations portent présentement sur des contrats
d'une durée d'un an, ce qui n'est pas très rassurant pour
l'avenir. En effet, la nouvelle loi autorise les 50 municipalités hors
territoire à négocier de gré à gré, soit
avec un transporteur public, soit avec un transporteur privé et
même avec des transporteurs scolaires, le service dont elles auront
besoin dans les années à venir. Il n'est donc pas du tout
assuré que ces municipalités hors territoire en viendront
à une entente ou à des ententes avec la CTRSM puisque, dans bien
des cas, le transporteur privé pourrait offrir des conditions beaucoup
plus intéressantes que la CTRSM. Étant donné que le
ministre des Transports veut faire adopter sa loi dès maintenant et la
mettre en vigueur le 1er janvier 1984, les municipalités membres de la
CTRSM craignent d'être obligées d'absorber des obligations
importantes qu'elles n'ont pas prévues dans leurs budgets courants,
budgets qui sont déjà adoptés dans tous les cas et qui ne
comportent aucune provision pour ces excédents. Il s'agit là d'un
cas où le gouvernement ne tient pas compte des recommandations qui ont
été faites par ces municipalités et où il tente
d'imposer sa solution au détriment de l'intérêt des
contribuables des municipalités membres de la CTRSM.
D'autre part, le ministre des Transports a fait preuve de bien peu de
franchise le 12 décembre dernier lorsqu'en commission parlementaire il a
déclaré qu'à son avis, les dirigeants de la CTRSM
étaient généralement plutôt satisfaits de la
situation présente et ne voyaient pas pourquoi l'Opposition soulevait
des problèmes qui n'existaient pas. Or, au moment où le ministre
des Transports faisait cette déclaration en commission parlementaire, il
avait déjà en sa possession un télégramme qui avait
été envoyé le matin même par le conseil des maires
et par la CTRSM. C'était signé par le président du conseil
et par le directeur général de la CTRSM. Ce
télégramme faisait état de l'inquiétude du conseil
des maires vis-à-vis du projet de loi 46. Il disait que, si le projet de
loi n'était pas modifié, il pourrait avoir des
conséquences importantes pour les sept municipalités, ce qui va
à l'encontre de ce que nous a dit le ministre et de ce qu'il va nous
dire tout à l'heure dans sa réplique, j'en suis convaincu. Les
municipalités demandaient au ministre de les protéger et
d'apporter des mesures compensatoires et des garanties de mesures
compensatoires pour les pertes qu'elles pourraient subir. L'Opposition, en
conséquence, a présenté ici même, en Chambre, lors
du rapport, des amendements visant à faire en sorte que les
municipalités membres de la CTRSM soient pleinement
compensées pour ces coûts excédentaires. Mon
collègue, le député de Mont-Royal a présenté
ces amendements qui, malheureusement, ont tous été refusés
par le ministre. C'est malheureux parce qu'ils visaient justement à
protéger les municipalités membres de la CTRSM.
En conclusion, j'aimerais dire ceci. Il appert évident que les
municipalités membres de la CTRSM risquent d'écoper de lourdes
charges financières additionnelles avec l'adoption du projet de loi 46
que se propose de faire, par l'Assemblée nationale, le gouvernement du
Parti québécois. L'abolition de Métropolitain Sud, filiale
de la CTRSM est susceptible de créer de graves préjudices aux
municipalités membres, soit les municipalités que j'ai
nommées tout à l'heure, puisque le projet de loi vise à
faire assumer par les municipalités membres toutes les obligations de
leurs filiales sans avoir droit à une indemnité ou une
compensation financière en contrepartie. À la suite des
propositions de l'Union des municipalités du Québec et des
municipalités membres de la CTRSM, l'Opposition libérale, comme
je l'ai dit, a présenté des amendements qui auraient
obligé le gouvernement du Québec à compenser pleinement
les pertes financières que subiront nécessairement les
municipalités membres de la CTRSM. Ces amendements ont été
rejetés par le gouvernement.
Je conclus, M. le Président, en disant que le gouvernement avait
commis une injustice en 1978 en obligeant les 50 municipalités
situées hors du territoire de la CTRSM à contribuer au
déficit de la filiale malgré elles. Le gouvernement tente
maintenant de réparer son erreur en créant une nouvelle injustice
à l'égard des municipalités membres de la CTRSM. Je trouve
que le gouvernement doit prendre ses responsabilités et payer pour ses
erreurs plutôt que de tenter d'en refiler la note à des
municipalités déjà lourdement taxées.
L'équité et la justice la plus élémentaire
justifient que le gouvernement fasse droit aux demandes des
municipalités membres de la CTRSM et de l'Opposition. Je déplore
l'attitude du ministre des Transports à ce sujet. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre
droit de réplique.
M. Michel Clair (réplique)
M. Clair: M. le Président, en d'autres circonstances, je
serais porté à me fâcher, mais, aujourd'hui, je suis
porté à rire et à trouver cela drôle parce que je ne
comprends vraiment pas les propos que vient de tenir le député de
Laporte, qui m'accuse d'à peu près toutes les infamies, de
créer des injustices. Je le cite, M. le Président, il m'accuse de
commettre des injustices importantes à l'égard des
municipalités membres de la CTRSM et il a confirmé les dires du
porte-parole officiel de l'Opposition officielle en matière de
transports et député de Mont-Royal selon lesquels il va
personnellement comme le député de Laporte, voter en faveur du
projet de loi, en troisième lecture.
M. le Président, c'est la première fois que je vois
quelqu'un, qui se prétend un grand justicier, voter en faveur d'une
injustice et dont son propre parti va voter en faveur d'une injustice. Je
trouve cela drôle M. le Président. Je trouve cela drôle,
parce que cela ne tient tellement pas debout que j'ai de la difficulté
à le suivre. D'autant plus qu'il me semble avoir répondu, comme
ministre des Transports, à toutes les interrogations du
député de Laporte en ce qui concerne l'avenir de la CTRSM.
Il a clairement été établi que, depuis plus d'un
an, le gouvernement s'est engagé à défrayer 100% des
coûts d'acquisition de Métropolitain Sud. La même offre a
été présentée à Métropolitain
Provincial. J'ai également établi que les quotes-parts, de 1978
à 1982, étaient à peu près toutes payées par
les municipalités. Il reste quelque chose comme 50 000 $ en suspens, ce
qui n'est pas significatif quand on parle d'un budget de l'ordre de dizaines de
millions de dollars.
D'autre part, en ce qui concerne les poursuites, je confirme ce que j'ai
dit: je m'empresserai, demain ou dès que j'aurai l'occasion de passer
à mon bureau, d'adresser comme ministre des Transports, une lettre au
président de la CTRSM et au président du Conseil des maires de la
rive sud de Montréal, qui va reproduire le texte du paragraphe que j'ai
lu, l'autre jour, au député de Mont-Royal.
En ce qui concerne les délais à respecter par la CTRSM
pour ses conventions collectives, nous avons apporté un amendement qui,
si ma mémoire est fidèle, a même été
bonifié par la commission parlementaire, à la suite de la
suggestion de certains députés de l'Opposition, afin de s'assurer
qu'il n'y aurait pas, là non plus, de conséquences
négatives pour les villes membres de la CTRSM, advenant que celles-ci se
trouvent contraintes de procéder à des mises à pied
à la suite de leur retrait de certains corridors de transport.
M. le Président, je ne vois en aucune manière comment ce
projet de loi pourrait causer préjudice aux municipalités membres
qui forment la Commission de transport de la rive sud de Montréal. Je
pense que c'est une lyre - on appelait cela comme cela chez nous, M. le
Président - dans la bouche du député de Laporte qui
répète, de manière incessante, la même chose,
même s'il sait, au fond, que cela est inexact. Jamais cela n'a
été dans l'intention du gouvernement de pénaliser la CTRSM
en modifiant
l'organisation du transport en commun dans toute la
périphérie de l'île de Montréal et je pense que la
démonstration en est faite par quiconque prend connaissance du projet de
loi.
M. le Président, le deuxième point sur lequel j'aimerais
revenir, c'est celui qu'a souligné, tantôt, le
député de Mont-Royal, à savoir la possibilité qui
est réservée au gouvernement, et non pas au ministre des
Transports, mais au gouvernement, à la demande d'un certain nombre de
municipalités, lorsqu'elles adoptent toutes unanimement des
résolutions pour forcer une municipalité à joindre une
entente intermunicipale seulement lorsque les municipalités ont des
motifs sérieux et qu'elles peuvent faire la preuve que, s'il n'y a pas
ainsi une imposition de leur participation au transport en commun dans leurs
corridors à l'entente intermunicipale, l'absence de cette
municipalité risquerait de compromettre l'organisation du transport en
commun ou le rendre trop onéreux pour qu'il soit "organisable", ou,
encore, que des résidents, dans un bout de ligne, sont susceptibles
d'utiliser en nombre important les services de transport en commun
défrayés par les autres municipalités sans que celles-ci
soient appelées à y contribuer financièrement.
Il est important de mentionner également que cela n'est pas venu
d'une proposition du ministre des Transports, mais bel et bien d'une prise de
position des municipalités qui nous ont accompagnés pendant tout
ce processus de révision de l'organisation du transport en commun en
périphérie de Montréal.
M. le Président, voilà donc ce que je voulais indiquer en
réponse aux deux principales critiques qui ont été
soulevées par le député de Mont-Royal et le
député de Laporte.
J'aimerais maintenant m'attarder, avant de conclure, sur le triple
défi que pose l'adoption de ce projet de loi. C'est un défi pour
150 municipalités en périphérie de Montréal; c'est
un défi pour les transporteurs, tant publics que privés, et c'est
également, je dois le dire, un défi pour le ministère des
Transports du Québec lui-même.
Je dis que c'est un défi pour les municipalités parce que,
effectivement, depuis plusieurs années, pour ne pas dire depuis
toujours, les 150 municipalités qui sont situées dans le pourtour
de l'île de Montréal reçoivent des services de transport
collectif, sans y être impliquées, bien souvent, à quelque
titre que ce soit. La situation avait atteint son seuil de l'inacceptable
à compter du moment où, devant la faillite
appréhendée ou annoncée de deux entreprises, le
gouvernement avait dû procéder à l'expropriation et de
Métropolitain Provincial et de Métropolitain Sud. Cela
avait entraîné l'imposition de quotes-parts à cette
centaine de municipalités pour des services qu'elles ne
contrôlaient pas, qu'elles n'avaient pas eu le loisir de choisir et dont
elles ne pouvaient absolument pas, encore moins, fixer le déficit.
Aujourd'hui, le défi qui s'offre à ces
municipalités, c'est celui d'être habilitées, avec tous les
pouvoirs juridiques nécessaires à leur portée, à
offrir à leurs résidents des services de transport en commun
comme alternative à l'automobile privée. Nombreux sont les maires
dans la région de Montréal, maintenant, qui sont conscients que
pour le déplacement domicile-travail de leurs résidents, il
importe que les pouvoirs publics voient à l'organisation, au maintien et
même à l'amélioration de services de transport en commun en
direction de Montréal afin d'éviter des engorgements sur les
ponts, d'améliorer la qualité de la vie, d'offrir un service qui,
somme toute, est moins coûteux pour la collectivité que
l'automobile privée quand on pense à ce qu'il en coûte de
construire des routes et autoroutes en périphérie de
Montréal. Je pense que c'est là un des défis les plus
intéressants qu'on ait donnés aux municipalités à
relever au cours des dernières années dans cette grande zone de
la région métropolitaine de Montréal.
Je suis confiant, quant à moi, chargé de ce dossier depuis
près de deux ans et demi, que l'immense majorité des
municipalités vont assumer très adéquatement leurs
responsabilités, parce qu'elles ont eu l'occasion de cheminer, de voir
quels étaient les avantages, les inconvénients, de pouvoir offrir
du transport en commun soit avec un transporteur privé, soit avec un
transporteur public, en subventionnant le transport en commun ou en ne le
subventionnant pas, qu'au cours des prochains mois elles auront l'occasion
d'assumer pleinement et de manière adéquate, dis-je, leurs
responsabilités dans ce domaine, comme elles l'ont réclamé
depuis quelques années à cet égard.
En effet, quelles étaient les grandes attentes des
municipalités dans la périphérie de Montréal?
Premièrement, elles voulaient que leur autorité soit
respectée en matière de taxation, pouvoir déterminer
elles-mêmes le niveau des services de transport en commun, les parcours,
les fréquences, les tarifs. Ce projet de loi leur donne cela.
Maintenant, c'est un défi à relever pour elles que de
procéder à la mise en place de ces systèmes de transport
en commun.
C'est également un défi pour les transporteurs, tant les
transporteurs publics que les transporteurs privés. Vous savez que nous
avons offert aux municipalités le libre choix de la négociation
de contrats de services soit avec les transporteurs privés, soit avec
les transporteurs publics. Pour les
transporteurs privés, le défi est intéressant. Il
s'agit pour eux de faire la preuve qu'ils peuvent offrir à des tarifs
raisonnables, dans des conditions acceptables, un service de transport
collectif qui soit en mesure de concurrencer les transports en commun
organisés par le secteur public. (20 h 40)
II ne s'agit pas ici de tomber dans une privatisation à outrance
des systèmes de transport en commun. Nous savons bien que personne ne
voudrait acquérir la CTCUM demain matin, ou la CTRSM, ou la CTR, ou la
CTCUQ. Mais, cependant, il faut essayer de trouver l'endroit le plus judicieux
où tirer la ligne entre les transporteurs privés et les
transporteurs publics dans la périphérie des grandes villes.
C'est un phénomène qui se produit dans toutes les grandes villes
du monde. Allez voir dans la région parisienne, dans la région
lyonnaise, à Hambourg, vous allez constater que particulièrement
dans le pourtour des grandes agglomérations, il y a un départage
qui s'est fait entre les transporteurs privés et les transporteurs
publics, afin de s'assurer que l'on retient le modèle qui offre la
meilleure qualité de service pour les usagers au moindre coût pour
la collectivité, en matière de transport en commun. Donc, un
défi intéressant pour les transporteurs privés qui auront
l'occasion de faire la preuve - une occasion exceptionnelle - que
l'envahissement du transport en commun public est suffisant au Québec et
que, maintenant, on peut aller de l'avant dans les territoires qu'il reste
à organiser en mettant en concurrence, au libre choix des
municipalités, les transporteurs publics et les transporteurs
privés.
Ce projet de loi constitue également un défi
intéressant pour les transporteurs publics eux-mêmes. Parce que,
jusqu'à maintenant, la position de la CTCUM et de la CTRSM dans cette
affaire était très confortable. Je ne le dis pas de
manière péjorative, mais elles étaient bien assises sur
deux lois qui avaient été adoptées par le Parlement, qui
leur donnaient toute autorité sur l'organisation du transport en commun
dans plus de 150 municipalités, si on inclut la Commission de transport
de Laval, et qu'elles pouvaient, dans 100 cas sur 150, expédier
simplement les quotes-parts des déficits à la fin de
l'année en disant: Municipalité, voici ce qu'il en coûte
pour avoir offert le service chez vous, sans qu'elle n'ait à
négocier quoi que ce soit avec la municipalité
concernée.
Dorénavant, lorsque ces commissions de transport public voudront
conserver un corridor de transport, parce qu'il serait intéressant tant
pour leur territoire à elles, ces commissions, pour leurs usagers que
pour ceux de l'extérieur, elles devront adopter une approche
commerciale, une approche client à l'égard des
municipalités des environs de
Montréal plutôt que de compter seulement sur l'existence
d'une loi coercitive qui oblige ces municipalités à transiger
avec elles.
Et là aussi, je dois vous dire que, jusqu'à maintenant, je
pense que je peux dire que je suis extrêmement fier de voir l'attitude
positive adoptée malgré ce qu'en dit le député de
Laporte, tant par la CTRSM, le conseil des maires de la rive sud, la CTCUM que
la Communauté urbaine de Montréal. Quand on ne s'entend pas, on a
le droit de le dire; mais quand on est satisfait de la coopération qu'on
a pu obtenir de grands organismes publics de transport, comme le sont les
commissions de transport, on doit aussi le signaler et cela me fait plaisir de
le dire. Elles sont en train de relever, je pense avec succès, mais en
tout cas certainement avec beaucoup d'ouverture d'esprit, le défi qui
est le leur en ce qui concerne cette réorganisation du transport en
commun dans 150 municipalités autour de Montréal.
Finalement, je dis que c'était également un défi
pour le ministère des Transports lui-même. En effet, vous
n'ignorez pas que, dans une agglomération comme la vôtre,
justement, dans la région de Shawinigan-Grand-Mère, dans ma ville
à Drummondville, dans des villes comme Saint-Jérôme,
Saint-Jean-sur-Richelieu, à Rimouski, il existe encore, de nombreux
problèmes à régler en matière de transport en
commun. Je pense que l'expérience, que nous allons vivre au cours des
prochains mois, avec des transporteurs privés et des transporteurs
publics en concurrence, sera très utile pour l'élaboration des
politiques futures du ministère des Transports en matière
d'organisation du transport en commun sur tout le territoire
québécois.
Je termine, M. le Président, en remerciant publiquement de leur
travail les fonctionnaires du COTREM à Montréal, ceux du
ministère des Transports du Québec et je voudrais remercier tous
les maires de la grande région de Montréal que j'ai eu l'occasion
de rencontrer, dans certains cas, à de multiples reprises, dans d'autres
cas, à une ou deux occasions. J'ai toujours pu bénéficier
de leur ouverture d'esprit dans une réorganisation qui était loin
d'être facile, même à imaginer et encore moins à
réaliser, et je dois dire là-dessus que j'ai pu
bénéficier d'une excellente collaboration de l'immense
majorité d'entre eux.
Je voudrais également remercier mes collègues,
députés tant ministériels que de l'Opposition, pour leur
ouverture d'esprit et la collaboration qu'ils m'ont offerte. Je pense au
député de Châteauguay, que je vois justement
derrière moi avec qui j'ai eu l'occasion de travailler en ce qui
concerne le corridor sud-ouest vers Châteauguay, Valleyfield,
Beauharnois, toute cette région-là.
Je tiens à remercier également le député de
Mont-Royal, qui m'a dit tantôt qu'au nom de son parti, il voterait pour
le projet de loi. Je le remercie sincèrement, parce que c'est une
tâche particulièrement complexe, difficile à
réaliser, très exigeante pour tous les partenaires qui croient
dans le transport en commun. Je pense que, grâce à l'ouverture
d'esprit qu'il a manifestée en commission parlementaire, nous sommes
parvenus à améliorer le contenu du projet de loi et je ne peux
que me réjouir de sa collaboration et du fait que l'Opposition
officielle votera pour ce projet de loi en troisième lecture.
Je vous remercie de votre attention, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je crois donc comprendre
que la troisième lecture du projet de loi 46, Loi sur les conseils
intermunicipaux de transport dans la région de Montréal et
modifiant diverses dispositions législatives, est adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Fréchette: M. le Président, je demanderais qu'en
vertu de l'article 106, il y ait enregistrement des noms et à la
prochaine séance, s'il vous plaît!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, c'est dans ce
cas-là accordé, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Fréchette: M. le Président, je vous prierais
d'appeler l'article 4 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 18 Troisième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture
du projet de loi 18, Loi sur la Société immobilière du
Québec. La parole est au ministre des Travaux publics et de
l'Approvisionnement. M. le ministre.
M. Alain Marcoux
M. Marcoux: M. le Président, mes propos seront très
brefs. Je voudrais tout d'abord remercier l'Opposition de sa collaboration lors
de l'adoption en deuxième lecture à l'unanimité de ce
projet de loi créant la Société immobilière du
Québec en remplacement du ministère des Travaux publics et de
l'Approvisionnement ainsi que pour l'étude de la loi, article par
article, à la commission parlementaire qui s'est déroulée
dans un climat très positif.
Aujourd'hui, comme le règlement me le permet en troisième
lecture, j'aimerais proposer trois amendements au projet de loi 18 tel
qu'adopté en commission parlementaire et qui ont pour effet de bonifier
le projet de loi sous trois aspects.
Je ne sais pas si vous souhaitez qu'on se transforme en commission
plénière immédiatement ou si, de consentement, on peut
éviter de se transformer en commission plénière, j'ai
déjà communiqué à l'Opposition officielle les trois
amendements et je pense qu'il y a accord pour que ces trois amendements soient
intégrés à la loi. Je pourrais les lire et proposer que
nous les considérions comme partie intégrante du projet de loi et
qu'ils soient adoptés.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vais poser la question.
Est-ce que vous êtes d'accord? D'accord.
M. Marcoux: Je vais donc lire les trois amendements qui sont
proposés ainsi que le sens qui leur est donné.
Le premier amendement a pour effet que le deuxième alinéa
de l'article 46 soit modifié pour des raisons de concordance,
étant donné que le premier alinéa se réfère
déjà aux fonctionnaires permanents. Il y a donc lieu de
prévoir le même type de référence au deuxième
alinéa, pour éviter toute ambiguïté.
Et, deuxièmement, dans ce même article 46, on
prévoit que si le ministère des Travaux publics et de
l'Approvisionnement intégrait d'autres fonctionnaires du reste du
gouvernement d'ici au 1er octobre ou d'ici à la promulgation de cet
article de la loi, ces fonctionnaires qui deviendraient membres du
ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement d'ici à
la promulgation de l'article auraient tous les droits que les autres
fonctionnaires conserveront en acceptant d'aller à la
Société immobilière du Québec.
Alors, l'article 46 de ce projet de loi serait remplacé par le
suivant et se lirait de la façon suivante:
Article 46 - "Toute personne à l'emploi de la
Société peut demander sa mutation dans un emploi de la fonction
publique ou participer à un concours de promotion conformément
à la Loi sur la fonction publique (LRQ, chapitre F-3.1) si le
(insérer ici la date d'entrée en vigueur du
présent article) elle était fonctionnaire permanent au
ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement et si sa
nomination à la société est survenue avant le
(insérer ici la date d'entrée en vigueur de l'article 75). (20 h
50) "Le présent article s'applique également à un
fonctionnaire permanent du ministère des Finances ou du ministère
de la Justice qui était au service du ministère des Travaux
publics et de l'Approvisionnement le (insérer ici la date
d'entrée en vigueur du présent article) et qui est à
l'emploi de la société."
C'est le premier amendement que j'ai proposé à cette
Assemblée.
Le deuxième amendement a trait à l'article 51.1 et a pour
but de modifier l'article de façon à prévoir
spécifiquement une protection à l'égard des conventions
relatives aux agents de la paix et aux constables spéciaux du
gouvernement du Québec. C'est par oubli que ces conventions n'ont pas
été insérées dans le texte précédent.
La modification proposée fait suite aux représentations de la
Direction générale des relations du travail du ministère
de la Fonction publique. Si l'amendement était accepté par cette
Assemblée, l'article 51.1 serait modifié par le remplacement du
troisième alinéa par les alinéas suivants: "Les
dispositions des conventions collectives suivantes s'appliquent aux
employés de la Société dans la mesure où elles sont
applicables: 1° Les conventions collectives déposées au
greffe du commissaire général du travail, conformément
à la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public
(1982, chapitre 45); 2 la convention collective signée le 21 avril 1978
entre le Syndicat des agents de la paix de la fonction publique et le
gouvernement du Québec; 3° toute convention collective entre le
gouvernement du Québec et le Syndicat des constables spéciaux du
gouvernement du Québec signée après la date de la sanction
de la présente loi et dont la date d'expiration est fixée au 31
décembre 1985."
L'article 46... Un instant.
Le Vice-Président (M. Jolivet): En aucune circonstance,
les dispositions de ces conventions collectives concernant la
sécurité d'emploi ne peuvent s'appliquer aux employés
visés au deuxième alinéa.
M. Marcoux: Exactement. C'est parce que j'ai remis plusieurs
copies à...
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela.
M. Marcoux: "Toutefois, en aucune circonstance, les dispositions
de ces conventions collectives concernant la sécurité d'emploi ne
peuvent s'appliquer aux employés visés au deuxième
alinéa."
Voici pour le deuxième amendement.
Le troisième amendement modifie l'annexe 1 de façon
à couvrir plus particulièrement le règlement
régissant les conditions de travail des agents de gestion du personnel
et l'annexe 1 se lirait de la façon suivante: "Annexe 1 (article 51.1) 1
Le "Règlement sur les conditions de travail du personnel de bureau,
techniciens et assimilés, de certains employés à la
résidence officielle du lieutenant-gouverneur, des chauffeurs de
ministre et du personnel ouvrier adopté le 13 avril 1982 par
l'arrêté ministériel 188-82 approuvé par le CT
138835 du 27 avril 1982, modifié le 2 décembre 1982 par
l'arrêté ministériel 263-82, approuvé par le CT
142047 du 7 décembre 1982, modifié le 17 décembre 1982 par
l'arrêté ministériel 269-82, approuvé par le CT
142284 du 20 décembre 1982 et modifié le 10 mai 1983 par
l'arrêté ministériel 292-83 approuvé par le CT
144821 du 7 juin 1983. 2 Le "Règlement sur les conditions de travail du
personnel professionnel" adopté le 12 janvier 1982 par
l'arrêté ministériel 187-82 approuvé par le CT
137510 du 16 février 1982, modifié le 29 mars 1982 par
l'arrêté ministériel 215-82 approuvé par le CT
139121 du 11 mai 1982, modifié le 2 décembre 1982 par
l'arrêté ministériel 261-82 approuvé par le CT
142045 du 7 décembre 1982, modifié le 17 décembre 1982 par
l'arrêté ministériel 268-82 approuvé par le CT
142283 du 20 décembre 1982, et modifié le 10 mai 1983 par
l'arrêt ministériel 294-83 approuvé par le CT 144823 du 7
juin 1983. L'annexe 1 de l'article 51.1 se lirait comme suit: Le
"Règlement sur la rémunération, les avantages sociaux et
les autres conditions de travail de certains fonctionnaires" (RRQ 1981,
chapitre F-3.1, r.19), modifié le 2 décembre 1982 par
l'arrêté ministériel 262-82 approuvé par le CT
142046, du 7 décembre 1982, modifié le 28 février 1983 par
l'arrêté ministériel 279-83 approuvé par le CT
143074 du 1er mars 1983 et modifié le 10 mai 1983 par
l'arrêté ministériel 295-83 approuvé par le CT
144824 du 7 juin 1983.
M. le Président, je propose l'adoption de ces trois amendements
à la loi 18, qui ont pour but de protéger, je dirais,
intégralement, à la fois les droits acquis des agents de
personnel du ministère, les droits des nouveaux fonctionnaires qui
pourraient être intégrés au ministère des Travaux
publics dans les prochains mois avant la promulgation de ces articles et
également protéger en totalité les droits des constables
spéciaux, qui n'ont pas actuellement de convention, et, enfin, faire en
sorte que toute convention qui pourrait être signée avec eux et
qui se terminerait d'ici le 31 décembre 1985 ait la même valeur
que celles que nous avons accordées à l'ensemble des autres
syndicats de fonctionnaires.
Je ne veux pas être plus long, M. le Président, dans ces
propos. Je suis convaincu que ces amendements seront acceptés par
l'Opposition et que l'ensemble du projet de loi 18 sera adopté par cette
Assemblée comme il l'a été en deuxième lecture et
en commission parlementaire.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: M. le Président, les amendements
présentés par le ministre, nous sommes prêts à les
accepter; je crois que
mon collègue, le député de Louis-Hébert,
voit dans ces amendements une sécurité de plus pour une grande
partie des travailleurs qui vivent dans son secteur, qui est la ville de
Québec. On trouve qu'avec cette sécurité additionnelle,
les travailleurs du ministère seront plus aptes à coopérer
à cette nouvelle société.
M. le Président, les amendements sont adoptés.
Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. Les amendements
sont adoptés.
Est-ce que d'autres personnes veulent intervenir?
Oui, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?
Non? Je dois donc comprendre que nous avons accepté les
amendements. Nous sommes de retour tel que prévu, en commission
plénière et nous sommes revenus au rapport adopté avec les
amendements. Finalement, nous sommes rendus au stade de la troisième
lecture.
Sur la troisième lecture, est-ce que M. le minsitre veut
intervenir? M. le ministre?
M. le député de Robert Baldwin, sur la troisième
lecture.
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: M. le Président, après une
étude approfondie du projet de loi, l'Opposition s'inquiète
encore quant à la sincérité des intentions du ministre.
Nous avons l'intention de seconder tout effort ou toute mesure qui imposera
à toute société d'État ainsi qu'aux
ministères des objectifs de productivité, de rendement et
d'efficacité comme en connaît l'industrie privée.
M. le Président, nous croyons même que cette nouvelle
structure proposée dans le projet de loi nous permettra de mesurer la
performance de cette nouvelle société, c'est-à-dire qu'on
pourra comparer la performance de cette société à celle de
sociétés semblables dans l'industrie privée. Cependant, M.
le Président, nulle part dans ce débat, soit en deuxième
lecture, ou durant l'étude article par article, le ministre n'a
répondu aux demandes de l'Opposition, en produisant une étude
complète de la rentabilité de cette opération,
préparée par un bureau d'experts-comptables, comme cela a
été fait en Colombie britannique, province qui a, elle aussi,
transformé son ministère des Travaux publics en
société d'État, en 1976. Cette étude pourrait
démontrer au public et à l'Opposition et à toute autre
personne intéressée ce que seront les effets sur les
différents ministères et les sociétés d'État
sur une période de courte échéance ou sur une
période de plusieurs années. Ce serait important de savoir cela.
(21 heures)
Ce rapport pourrait aussi nous démontrer les cibles de
rentabilité visées qui devraient être
améliorées. Ce cibles seraient là pour essayer de les
atteindre le plus vite possible. Cette étude pourrait aussi comprendre
un programme pour la mise en marche de cette nouvelle société
d'État. Cette étude pourrait nous donner les chiffres sur
l'avenir quant au parc d'immeubles disponibles, soit en location ou comme
propriété du gouvernement. Cela encore, ce sont des cibles qu'on
pourrait essayer d'atteindre dans une période assez brève.
On voudrait tout simplement avoir une espèce d'horaire nous
montrant les objectifs d'efficacité et de rentabilité que propose
le ministre par son nouveau projet de loi.
M. le Président, même si ce projet de loi est basé
sur l'expérience de British Columbia Building Corporation, il est
à noter cependant que, dans le cas de la BCBC, cette
société relève d'un comité de direction
nommé par le lieutenant-gouverneur. Alors, par le fait même, elle
est plus autonome que la future Société immobilière du
Québec. Cette nouvelle société peut-elle atteindre le
même degré de succès du point de vue de la
rentabilité, même si elle n'a pas le même degré
d'autonomie?
M. le Président, nous allons quand même appuyer ce projet
de loi, car nous sommes en faveur de toute mesure qui pourra favoriser une
meilleure utilisation des deniers publics. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Vous voyez, je n'ai même pas commencé. M.
le Président, l'équipe ministérielle qui a persuadé
la population de Québec, il y a à peine quelques années,
que pour son bonheur, elle devrait devenir les actionnaires et les
administrateurs d'une ligne aérienne et d'une mine d'amiante,
aujourd'hui, est tombée sur la tête dans le bon sens, quant
à moi. Elle a décidé de faire un premier pas vers la
dénationalisation d'une partie très importante de ce qu'on
appelle l'appareil gouvernemental. Je pense que, lorsqu'un gouvernement
commence à faire les pas dans la bonne direction, on doit lui rendre
hommage, le féliciter et lui souhaiter bonne chance.
Nous avons ici un projet de loi qui aura pour effet de créer une
société d'État. En général, on n'est pas
pour la création de sociétés d'État quand il s'agit
d'enlever quelque chose au secteur privé, mais, cette fois, il s'agit
d'enlever quelque chose au gouvernement, à la fonction publique et de
l'amener vers le secteur privé. Dans ce sens c'est une démarche
très intéressante.
De plus, nous avons un modèle. On ne fait pas une
expérience que personne n'a
jamais faite avant. On se base sur un modèle qui est
déjà fonctionnel, qui existe depuis cinq ans en Colombie
britannique et qui a eu un grand succès. La démarche que fait le
ministre va lui causer, j'en suis certain - et certainement aux personnes qui
accepteront - de diriger l'entreprise beaucoup de problèmes. Il faut
qu'ils acceptent qu'ils vont avoir des échecs pendant les
premières années. Les problèmes vont arriver. Vous allez
un peu vers l'inconnu dans cette affaire, au Québec du moins. Je pense
que vous devrez persister, que vous devrez continuer dans cette direction
même s'il y a des échecs, des petits problèmes qui
surgissent.
L'entreprise sera grande. Cette année le budget pour le
ministère des Travaux publics est de quelque 300 000 000 $ alors que la
nouvelle entreprise aura un chiffre d'affaires à peu près
équivalent, peut-être un peu moins au départ, 250 000 000
$, et un actif qui va très vite aller à un niveau de 1 000 000
000 $. Si je comprends bien l'objectif du ministre, ce qui va arriver c'est
que, premièrement, on va nommer un conseil d'administration formé
de gens qui ont de l'expérience, j'espère, dans le secteur
privé, dans la gestion immobilière. Il existe beaucoup de
compagnies québécoises qui font ce genre d'activité avec
grand succès.
Ce conseil d'administration, qui sera autonome, sauf pour deux ou trois
exceptions que je vais soulever tantôt, sera doté d'un directeur
général et d'une administration qui aura l'objectif très
précis d'administrer les espaces qui sont loués par tous les
ministères sur une base qui est à la fois concurrentielle avec
les espaces disponibles dans le secteur privé et rentable dans le sens
que la compagnie sera obligée de faire un profit.
Autrement dit, si le ministre de l'Éducation, qui occupe
l'édifice G à côté, reçoit l'an prochain une
facture pour la première fois - ce sera une bonne démarche en soi
- pour la location des bureaux qu'il occupe, le ministre de l'Éducation
sera obligé de l'évaluer et de comparer avec les espaces qui sont
disponibles dans les autres édifices qui l'entourent à
Québec. Si le prix proposé par la nouvelle société
est 20 $ le pied carré et qu'il peut obtenir l'équivalent
à Place d'Youville, dans un édifice commercial à bureaux,
pour 15 $, il va se retourner vers le président et dire: Écoutez,
vous n'êtes pas concurrentiels.
Le président ou le directeur de notre nouvelle
société d'État sera obligé de regarder ses
coûts, de les comparer avec ceux qui existent dans le secteur
privé et de faire en sorte que ses coûts d'administration baissent
pour qu'ils puissent être concurrentiels avec le marché à
Québec, à Montréal ou à Trois-Rivières,
selon le cas.
Forcément, si l'affaire fonctionne comme il faut, on va avoir des
économies très importantes dans l'administration de l'espace. Il
va y avoir un deuxième avantage, M. le Président. Le ministre de
l'Éducation -que je prends en exemple - sera lui aussi obligé de
regarder ses coûts de location. Jusqu'à maintenant, ce
n'était pas un problème pour lui, c'en était un pour le
ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement. Maintenant, le ministre
de l'Éducation sera obligé de regarder les espaces qu'il occupe,
et si les espaces sont trop grands, plus grands que nécessaire, il va
dire: Écoutez, je peux réduire mes coûts cette
année. Je vais peut-être réduire un peu l'espace qu'on
loue, les fonctionnaires seront peut-être obligés de se tasser un
peu. On va avoir cette pression continuelle, non seulement sur la
société immobilière, mais sur les ministères, de
réduire les coûts de location. (21 h 10)
Tout cela est très bon en principe. Je pense que
l'expérience qu'on tire de la société semblable en
Colombie britannique indique que cela doit fonctionner. J'ai fait des petits
calculs et il y a des choses très intéressantes qui en sortent.
Par exemple, M. le Président, en Colombie britannique, on calcule le
nombre de mètres carrés administrés par une personne;
c'est une indication du coût du personnel. En Colombie britannique, quand
ils ont créé la société en 1978, chaque
employé en moyenne administrait 1165 mètres carrés
d'espace. Cinq ans plus tard, chaque employé administre 1760
mètres carrés; une augmentation d'environ 50%. Le chiffre qui est
le plus intéressant c'est qu'aujourd'hui au Québec, chaque
employé administre à peu près 647 mètres
carrés. Effectivement, nous avons trois fois plus de personnel pour
chaque mètre carré qu'ils n'en n'ont en Colombie britannique
aujourd'hui.
Regardez cet aspect seulement: cela peut entraîner, si c'est fait
d'une façon cohérente pendant une période raisonnable,
sans mettre tout le monde à la porte d'une façon brutale, une
réduction - si on le fait d'une façon aussi compétente que
le modèle qui existe déjà - de l'augmentation de l'espace
administré de 300%; autrement dit, une baisse des deux tiers dans le
nombre de personnes requises pour administrer nos locaux. C'est
déjà une indication de ce qu'on peut atteindre, simplement en
faisant un transfert de cette vaste entreprise vers le modèle du secteur
privé où les deux critères sont: un prix de location
rentable, compétitif et une rentabilité de la
société immobilière, chaque année, et le respect de
ces deux critères.
On ne peut que féliciter le ministre et le gouvernement de cette
initiative. J'espère que le ministre, lorsqu'il n'occupera plus le poste
de ministre, sera transféré au ministère des Transports
où j'espère il
pourrait regarder sérieusement Québecair et
peut-être penser à la possibilité de retourner cette
compagnie au secteur privé. Par la suite, je propose qu'il prenne la
place du ministre de l'Énergie et des Ressources parce que, en plus de
la Société nationale de l'amiante, il y a de nombreuses autres
entreprises de l'État dont on n'a pas besoin et qui pourraient
être aussi bien gérées sur la base de critères que
lui-même a définis pour le cas qui est devant nous dans le projet
de loi 18.
Avant de terminer, je veux soulever un élément avec lequel
j'ai quelques problèmes. Je le soulève parce qu'il est possible
qu'il y ait des réflexes un peu méfiants qui existent au sein du
Parti québécois concernant l'entreprise privée. Je dois
soulever un autre avantage avant...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, il ne vous reste que 30 secondes.
M. Scowen: Oui, 30 secondes. J'ai des choses...
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement?
M. Scowen: Je vais simplement, si vous me le permettez...
Le Vice-Président (M. Jolivet): II n'y a pas consentement.
Rapidement pour terminer.
M. Scowen: Est-ce que vous me permettez deux minutes de plus?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deux minutes, mais pas
plus.
M. Scowen: Je veux simplement faire une suggestion au ministre,
ce ne sera pas long. Il s'agit de l'article 34 qui donne au gouvernement le
droit par règlement de s'assurer qu'il n'y a pas de patronage à
la Société immobilière du Québec. La
société sera obligée de respecter les règles
concernant les appels d'offres, l'adjudication des contrats et le fichier
central et l'article 44 qui oblige la société à soumettre
son budget au début de chaque année. Si vous regardez le projet
de loi en Colombie britannique, ces contraintes n'existent pas. M. le ministre,
je veux simplement vous dire que je pense très honnêtement que
vous allez voir à l'usage que ces contraintes ne sont pas
nécessaires parce que le fait d'appartenir au secteur privé et
d'être obligé de concurrencer le secteur privé,
enlèvera en grande partie les problèmes de patronage et les
problèmes qui existent jusqu'à maintenant dans le secteur public.
Je vais vous citer un exemple: la personne qui est responsable de cette
société devra être en mesure de la concurrencer et elle ne
sera pas capable de se permettre d'engager des personnes moins
compétentes que d'autres parce que c'est lui qui va payer la note
maintenant. Cela va paraître dans la rentabilité à la fin.
Il ne sera pas capable de donner les contrats aux amis du parti au pouvoir,
parce qu'il va savoir que les coûts additionnels de ces contrats aussi
vont retomber sur son dos, car c'est lui qui sera jugé sur sa
performance.
Je veux simplement soulever ce point, quant à moi, c'est parce
qu'il existe encore une certaine méfiance envers la capacité du
secteur privé de gérer ces entreprises et je pense qu'à
l'usage, vous allez voir que cela n'est plus nécessaire. Je ne veux pas
dire que le favoritisme n'existe pas dans le secteur privé mais, en
général, cela est contrôlé par les exigences de la
performance des dirigeants et les exigences du marché.
Avec cette réserve, M. le Président, je termine
là-dessus et je remercie beaucoup tout le monde de m'avoir permis de
dépasser mon temps. Je souhaite bonne chance au ministre et à son
projet de loi et je le répète de ne pas se décourager si,
pendant les premières années, il y a des problèmes. Il
faut les surmonter et je suis certain que cela est possible. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Papineau.
M. Mark Assad
M. Assad: Juste quelques instants, M. le Président.
Concernant ce nouveau projet de loi, la Société
immobilière du Québec, le but en est valable. Comme on a eu un
précédent en Colombie britannique, cela nous donne l'occasion de
comparer avec l'entreprise privée. C'est un moyen d'évaluation
fort raisonnable, je trouve, et il faut dire que c'est l'absence de moyens
d'évaluation qui caractérise les activités
gouvernementales en général.
Avec ce projet de loi qui crée la Société
immobilière du Québec, j'espère que toute l'initiative en
sera utilisée pour atteindre une saine administration et surtout
minimiser le gaspillage et écarter le superflu qu'on a connu dans
l'emploi de l'espace gouvernemental. Les économies, la rationalisation
pourraient servir de modèle pour l'avenir des activités
gouvernementales, surtout dans le domaine de l'aménagement d'espaces,
etc.
À titre de suggestion, je trouve qu'avec ce projet,
évidemment, vous avez un exemple en Colombie britannique, on peut
éviter des erreurs qui ont pu être commises là, mais
l'élément le plus important, c'est le fait que vous avez un outil
de comparaison avec l'entreprise privée qui est absolument essentiel et
cela vous aide à rationaliser vos
activités.
Dans ma suggestion, M. le ministre, je trouve que vous avez une occasion
idéale de démontrer que le gouvernement n'est pas
nécessairement toujours un mauvais administrateur. Je vous souhaite
beaucoup de chance je ne veux pas dire dans cette nouvelle aventure, mais je
trouve que c'est un pas dans la bonne direction et je suis sûr qu'on peut
démontrer que les gouvernements, quand ils ont des instruments de
comparaison et d'évaluation, peuvent avoir autant de succès que
l'entreprise privée, surtout quand la bonne foi y règne.
Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: M. le Président, je voudrais intervenir
seulement quelques moments sur le projet de loi 18, Loi créant la
Société immobilière du Québec. Je n'ai pu
intervenir en deuxième lecture à cause des élections
partielles qui m'ont retenu dans un comté à l'extérieur de
la ville de Québec et dont vous connaissez les résultats. (21 h
20)
II y a quelques questions que je me posais sur ce projet de loi qui
crée une nouvelle société d'État. Sur le principe,
je pense que personne ne peut s'opposer mais on ne connaît pas encore les
résultats que donnera cette nouvelle société. Si cette
société avait effet d'apporter une bien meilleure gestion
financière, une meilleure administration interne des biens de
l'État, on pourrait dire bravo, dans quelques années,
peut-être. Mais, actuellement, M. le Président, je pense qu'il n'y
a aucune raison qui peut nous porter à penser que cela va aller mieux
que cela va présentement. C'est peut-être aussi une façon
pour le ministre des Finances de redorer son blason, parce que c'est un
éléphant blanc qu'il n'a pas à supporter dans ses
états financiers et c'est peut-être un peu de poudre aux yeux pour
les Québécois. Une poudre aux yeux un peu colorée,
péquiste aussi, M. le Président, en passant.
C'est possible que ce soit aussi un nouveau nid à patronage.
Connaissant les faiblesses du gouvernement qu'on a en face de nous, connaissant
la façon dont il procède dans les nominations, on peut s'attendre
que les petits amis du pouvoir fassent leur petit cheminement à travers
cette compagnie. C'est fort possible.
Il y a plusieurs petites questions que je me posais, comme, par exemple,
l'obligation pour les ministères et les autres sociétés
d'État de faire affaires exclusivement avec cette nouvelle
société. Le ministre n'a pas été précis dans
ce sens-là et j'espère que, dans sa réplique tout à
l'heure, le ministre pourra nous rassurer ou nous donner la liste
complète de tous les ministères et les sociétés
d'État qui seront obligés de travailler exclusivement avec cette
compagnie, avec cette nouvelle société. Le projet de loi ne le
spécifie pas. On laisse quand même la porte ouverte à la
possibilité que certaines sociétés d'État se
retirent ou que certains ministères même puissent se soustraire
à cette obligation.
On a dit qu'on copiait, avec ce nouveau projet de loi, la British
Columbia Building Corporation. Selon les informations que j'ai eues, il ressort
que le fonctionnement de cette société d'État en Colombie
britannique n'est pas aussi efficace qu'on pourrait le laisser prévoir.
Il y a beaucoup de lacunes, apparemment, dans cette société de la
Colombie britannique. Si le ministre se sert de cette société
pour présenter la sienne, croyant que tout va aller comme dans le
meilleur des mondes, je pense que le ministre devrait être prudent dans
ses approches et prendre sous toute réserve les informations qu'il peut
avoir reçues de la British Columbia Building Corporation.
De plus, j'ai l'impression que cette nouvelle société ne
changera absolument rien dans les caprices, extrêmement dispendieux, je
dirais, des hauts fonctionnaires de chacun des ministères. On sait que
les hauts fonctionnaires ont des caprices particuliers. Ils veulent avoir de
beaux bureaux dorés, "chromés", comme on dit. Dans ce sens, je
pense qu'il y aurait lieu d'apporter peut-être une certaine
modération au niveau des ministères, des hauts fonctionnaires
dans leurs besoins de bureaux modèles.
On s'aperçoit que, dans bien des endroits, certains
fonctionnaires n'osent même pas ou ne veulent même pas accepter les
établissements que leur propose le ministère des Travaux publics.
Il y a beaucoup d'établissements qui sont libres actuellement au
Québec et dont les officiers supérieurs de certains
ministères ou de certaines sociétés d'État ne
veulent même pas. Ils disent: Donnez-moi une bâtisse neuve. Je
pense qu'il y aurait lieu d'apporter des corrections dans ce sens
également.
Sur le plan des intentions du ministre, je pense que c'est louable, mais
j'espère que nous pourrons apporter une bien meilleure gestion
financière, et ce n'est pas prouvé encore. J'espère que ce
sera prouvé dans quelques années. Mais, d'ici ce temps, on ne
peut donner un chèque en blanc au ministre et prétendre que cette
loi va régler tous les problèmes qui existent présentement
au ministère des Travaux publics.
Il y a aussi le fait qu'on risque de soulever des conflits au niveau des
relations du travail, surtout avec le Syndicat des professionnels. C'est une
possibilité. Là aussi, il faudrait être prudent. Je crois
personnellement que ce projet de loi n'est
pas tout à fait mûr. Il aurait été
préférable, je pense, de le laisser mûrir un peu. C'est
prématuré de la part du ministre de nous amener cela en fin de
session, surtout qu'il y a plusieurs questions dans le projet de loi auxquelles
le ministre n'a pu répondre. J'espère qu'il pourra y
répondre dans quelques minutes, sinon, je pense que je me réserve
le droit de mon vote en troisième lecture en plus.
C'est une nouvelle créature. On pourra peut-être constater
dans quelque temps, dans quelques années, ce qu'elle apporte aux
Québécois, ce qu'elle fait économiser en fonds publics aux
Québécois également. M. le Président, si on apporte
une nouvelle structure, cela devrait être pour améliorer la
gestion, cela devrait être pour apporter un meilleur rendement, cela
devrait être pour faire économiser des fonds publics aux
contribuables québécois. Je pense que c'est l'aspect le plus
important.
Il y a un autre élément qui me tient
énormément à coeur. On nous amène une nouvelle
société, mais pour en évaluer le comportement et la
qualité administrative qu'elle nous apportera, à l'avenir je
pense qu'il serait de mise que le ministre réponde favorablement
à la demande de mon collègue, le député de Robert
Baldwin, concernant le dépôt de la banque de données de
toutes les bâtisses, en propriété ou en location, du
ministère des Travaux publics. Je pense que c'est un
élément très important pour qu'on puisse donner un suivi
à ce dossier. Le ministre pourrait répondre favorablement
à cette question. D'ailleurs, il devait déposer cela entre la
période de deuxième lecture et l'étape de troisième
lecture. J'espère que ce sera fait sous peu; cela répondrait
à un de nos voeux. Ce serait la façon idéale pour nous de
suivre ce dossier de près, de vérifier ce qui existe actuellement
dans cette banque de données, ce que la nouvelle société
peut offrir comme bâtisses. Je pense que ce serait la seule façon
d'accomplir un travail véritable et intelligent dans cette Chambre.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. Le projet de loi 18 que
nous avons devant nous marque un changement de cap important en ce qui concerne
la gestion des biens immobiliers de l'État.
Il y a un certain nombre d'incongruités ou de contradictions
internes qui me viennent à l'esprit. Il y a peine quelques instants, je
sortais de la commission parlementaire permanente sur la fonction publique
où l'on étudiait un projet de loi dont les objectifs
étaient d'augmenter la productivité des employés de
l'État, d'augmenter la rentabilité, d'augmenter ce qu'on a
appelé finalement l'efficience des employés publics, des
fonctionnaires. On nous a proposé un tout nouveau projet de loi qui a
comme objectif de faire en sorte que la première préoccupation
des employés de l'État soit le service à la
clientèle. La ministre de la Fonction publique nous a fait valoir, tout
au long de l'étude que nous avons faite article par article, qu'avec ce
nouveau projet de loi, nous serions en mesure d'avoir une fonction publique
plus efficiente, plus rentable, plus productive, plus près de la
clientèle et plus disponible.
En même temps, à quelques heures d'intervalle, nous sommes
ici à l'Assemblée nationale pour étudier un projet de loi
créant la Société immobilière du Québec dont
l'une des principales caractéristiques est de sortir des employés
de cette société immobilière de la fonction publique,
justement pour les rendre plus rentables, plus productifs et plus près
de la clientèle.
Est-ce que ce n'est pas un peu spécial, un peu bizarre qu'on nous
tienne des discours aussi différents et aussi disparates? D'un
côté, on nous dit: On vous présente une nouvelle loi de la
fonction publique et avec cette loi vous aurez, dorénavant, des
fonctionnaires qui seront véritablement au service du public, au service
de la population, des fonctionnaires qui seront rentables, productifs, et, en
même temps, le ministre des Travaux publics, fort de bonne foi, nous
tient un discours où il dit: Voici, je vous présente un projet de
loi créant la Société immobilière du Québec,
destinée à administrer les biens immobiliers de l'État,
et, pour atteindre mes objectifs de rentabilité, pour atteindre mes
objectifs de productivité, pour atteindre mes objectifs de service
à la clientèle, pour obtenir l'efficience nécessaire, je
suis obligé de soustraire les employés de cette
société immobilière à la Loi sur la fonction
publique.
Moi, je suis prêt à croire tout le monde sur parole
jusqu'à ce qu'on se contredise d'une façon aussi flagrante.
À partir de là, bien, je suis obligé de me poser des
questions. (21 h 30)
Je veux tout simplement souligner au ministre la difficulté qu'il
y a parfois à suivre le gouvernement dans les méandres de son
raisonnement. Si la ministre de la Fonction publique a raison, ce que je serais
prêt à croire, à l'entendre, lui, par voie de
conséquence, ne peut pas avoir raison en même temps. Il y en a un
des deux qui se trompe. Le gouvernement ferait mieux d'ajuster son tir, de se
parler et d'accorder ses violons. C'est bizarre. En même temps, et cela,
c'est la première réflexion qui me
vient à l'esprit, je suis sûr que vous-même, M. le
Président, vous l'avez eue cette réflexion à l'idée
en disant: Voici, en commission permanente, on discute de cela, on fait valoir
tel argument et, en même temps, ici devant moi, on en fait valoir
d'autres, exactement l'effet contraire. Vous êtes probablement
déchiré vous-même entre ces preuves et entre ces
discours.
Je vois le député de Saint-Marie qui, lui aussi, se pose
des questions. Il n'était probablement pas au courant, lui non plus,
qu'on était devant un dilemme semblable. On est embêté. Qui
doit-on croire? Le ministre des Travaux publics qui est là, il a l'air
d'un bon garçon, un gars qui fait son possible. Tout à l'heure,
j'ai eu exactement les mêmes réflexions vis-à-vis la
ministre de la Fonction publique, qui semblait de bonne foi, quelqu'un qui
faisait de son mieux, mais qui prononçait des discours totalement
à l'opposé, aux antipodes les uns des autres. C'est
embêtant de donner raison à l'autre. Donner raison au ministre des
Travaux publics, c'est donner tort à la ministre de la Fonction
publique. Je ne voudrais pas faire cela et, d'un autre côté, ne
pas le faire, c'est donner tort à la ministre de la Fonction publique.
On est mal pris. Cela montre jusqu'à quel point le gouvernement a de la
difficulté parfois à ajuster son discours, à savoir
où il veut s'en aller exactement.
Une autre chose me frappe, M. le Président, dans ce projet de
loi, c'est que le ministre des Travaux publics nous fait état qu'il est
devenu nécessaire d'établir une rentabilité, une
espèce de comptabilité des ministères consommateurs
d'espace vis-à-vis de l'Assemblée nationale et vis-à-vis
du Conseil des ministres, de façon que chaque ministère sache et
dise combien il dépense pour la location de ses espaces et combien il en
coûte au pied carré, au mètre carré, etc. L'argument
qu'il nous fait valoir - et le président du Conseil du trésor
nous l'a fait valoir aussi - c'est qu'il est nécessaire de travailler
dans ce sens-là et d'avoir un projet de loi semblable, parce qu'on s'est
rendu compte que de nombreux ministères faisaient tout simplement se
gonfler au fur et à mesure qu'on rendait des espaces disponibles.
Par un curieux phénomène qui est purement bureaucratique,
plus on donne de l'espace à cet animal bureaucratique qu'est toute
administration publique, plus il s'élargit pour prendre de l'espace.
C'est comme un soufflé, cela gongle et gonfle. Alors, le
président du Conseil du trésor et le ministre des Travaux publics
nous disent: II faut qu'on puisse contrôler cela, parce qu'on sait qu'il
y a trop d'espace employé et qu'il y a trop d'espace pour les besoins
des ministères. On sait cela, parce que la preuve en est et qu'on
diminue les effectifs... Je me souviens trop bien des démonstrations que
nous fait le président du Conseil du trésor en se gonflant le
torse, en disant: On a diminué les effectifs. On a moins de monde dans
ceci et dans cela. On fait plus avec moins. Mais, en même temps, il
s'aperçoit qu'avec moins de monde, avec moins d'effectifs, il prend au
moins le même espace, si ce n'est pas plus. Alors, il en tire une
conclusion fort logique. C'est qu'il y a quelqu'un qui prend trop d'espace
quelque part.
Pour mettre un frein à cela, on dit: On va obliger à
mettre des signes de piastres partout. On va savoir combien cela prend de pieds
carrés et de mètres carrés et, avec cela, on va savoir
combien cela coûte et les ministères devront justifier
l'utilisation qu'ils font des superficies qu'ils utilisent. Mais le hic
là-dedans, c'est que cette démonstration est le plus bel aveu
d'échec de la part du Conseil du trésor. Cela équivaut,
pour le président du Conseil du trésor, à nous dire: Le
contrôle que je dois exercer sur l'utilisation des espaces pour les
ministères, les organismes et les régies, je ne suis pas capable
de l'exercer. Le seul moyen que j'ai pour l'exercer, c'est de passer par le
système de la facturation. C'est ce qu'on retrouve dans ce projet de
loi. C'est un système de facturation où un ministère, une
société immobilière, une société
d'État -appelons cela comme on voudra - va en facturer un autre,
où on va obliger les ministères à mettre dans leur budget
ce que va coûter la location des espaces, l'utilisation qu'ils font des
espaces. Encore là, c'est un drôle de retour des choses parce
qu'il n'y a pas longtemps...
Ne me dites pas qu'il me reste seulement deux minutes, M. le
Président. Catastrophe! M. le Président, ce qu'il y a de
drôle là-dedans c'est qu'il y a à peine quelques
années, alors que j'étais fonctionnaire au gouvernement
provincial, on avait renoncé au système de facturation, disant
que c'était ridicule qu'un ministère en facture un autre, qu'on
s'envoie des factures l'un à l'autre et qu'on fasse de la compensation
par un phénomène bureaucratique. On avait dit: Cela n'a pas de
bons sens, cela vient de la même poche finalement. Est-ce qu'on va
rentrer dans un système où on va enlever de la poche gauche
quelque chose et le mettre dans la poche droite? On va plutôt faire un
contrôle central. On ne demandera pas au ministère des
Communications de facturer des services aux différents
ministères. On va tout simplement faire un contrôle central de
cela.
Maintenant on nous arrive avec ce qui équivaut à un
nouveau système de facturation. Il est possible que ce soit
nécessaire, mais c'est dommage qu'on en soit rendu là.
En terminant, M. le Président, il est important que les
employés qui, actuellement, doivent accepter d'être mutés
ou de rester dans la fonction publique
sachent quels vont être les effets de cela. Il y a de fortes
inquiétudes. Le ministre nous a fait valoir en commission parlementaire
qu'il y en avait très peu qui avaient refusé leur mutation. J'ai
posé la question au ministre: N'est-ce pas parce que, finalement, en
refusant la mutation dans la nouvelle société immobilière
cela les oblige à se mettre eux-mêmes en disponibilité et
à la merci du Conseil du trésor qui va maintenant s'occuper de la
fonction publique?
La vieille règle s'applique là-dedans comme dans d'autres
choses: entre deux maux on choisit le moindre. Connaissant la réputation
qu'a le Conseil du trésor dans la fonction publique du Québec, je
n'en connais pas beaucoup qui accepteraient de bon gré de se mettre
à la merci du Conseil du trésor en acceptant une mise en
disponibilité. Que seulement 10, 20, 50 personnes aient refusé la
mutation à la société immobilière n'est pas un
signe que ce changement agrée aux fonctionnaires. C'est un signe qu'on a
plus peur du Conseil du trésor que de la société
immobilière.
Je sais que c'est terminé. J'aurais eu à parler longuement
de toute la question de la reconnaissance syndicale là-dedans, qui pose
des problèmes qui ont été grandement résolus en
partie par des amendements qui nous ont été proposés en
commission parlementaire et encore aujourd'hui. J'en suis heureux. J'aurais
aussi aimé expliquer toute la question des conditions de travail pour
les employés. M. le Président, consentement là-dessus?
C'est pour les employés les plus mal payés de la fonction
publique. Est-ce que je peux avoir un consentement deux minutes
là-dessus?
Des voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a
consentement pour deux minutes?
Des voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deux minutes maximum.
Allez.
M. Doyon: Deux minutes, M. le Président. Je ne les
prendrai même pas. L'inquiétude que je fais valoir, c'est envers
les employés qui sont les plus mal rémunérés, qui
sont les plus mal payés et qui sont les plus susceptibles de subir une
baisse de salaire ou une diminution dans leurs conditions de travail. Parce que
n'oublions pas, M. le Président, que si on veut que la
société immobilière soit rentable, il faut qu'elle soit
concurrentielle. Pour ce faire, elle doit offrir des conditions de travail
semblables à celles qui sont offertes dans l'entreprise
privée.
Or, on sait que dans l'entreprise privée les conditions de
travail dans ce domaine de l'entretien immobilier, en particulier, de tout ce
qui concerne l'immobilier, sont des conditions de travail minimales. Les
employés actuellement sont protégés par des conventions
collectives ou, depuis peu de temps, sont "protégés" - la
protection, il faudrait en discuter, mais en tout cas - par des décrets.
Il est à prévoir qu'éventuellement, un jour ou l'autre,
les employés qui sont habitués à des conditions de travail
de la fonction publique pourront être "minorisés". Ils devront
l'être avec des conditions de travail inférieures parce que la
nature de leur travail amènera leur employeur éventuel,
c'est-à-dire la Société immobilière du
Québec, à leur offrir des conditions qui devront être
comparables à celles des entreprises privées qui oeuvrent dans le
même domaine.
M. le Président, étant donné que mes deux minutes
sont terminées, je ne veux pas insister. Ce sont les choses que je
voulais porter à l'attention du ministre. J'espère que dans la
pratique la société immobilière va se
révéler un succès. Je voudrais aussi assurer le ministre
que nous allons suivre les choses de très près.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre
droit de réplique.
(21 h 40)
M. Alain Marcoux (réplique)
M. Marcoux: M. le Président, je dois, d'abord, me
réjouir que le porte-parole de l'Opposition ait annoncé son
intention de voter en faveur de l'adoption de ce projet de loi en
troisième lecture. Ceci indique qu'aux différentes étapes
de ce projet de loi, soit en deuxième lecture où il a
été adopté à l'unanimité, en commission
parlementaire où l'ensemble des articles comme les amendements que j'ai
proposés au nom du gouvernement ont également été
adoptés, ainsi que les trois derniers amendements que j'ai
proposés ce soir, il y a eu un large consensus des membres de cette
Assemblée à la fois sur les objectifs de la création de
cette société immobilière et de l'abolition du
ministère des Travaux publics et sur la façon dont le
gouvernement a choisi de le faire.
Je commencerai peut-être par les derniers propos qui ont
été tenus, soit ceux du député de Huntingdon et
ceux du député de Louis-Hébert qui ont fait grief d'une
certaine incongruité entre la démarche suivie par la ministre de
la Fonction publique et celle que j'ai suivie en tant que ministre des Travaux
publics. J'aurais souhaité qu'ils entendent l'ensemble des discours de
ce soir sur cette loi en troisième lecture; ils auraient peut-être
pu constater que l'incongruité ou l'incohérence qu'ils croient
décerner de notre côté était peut-être dans
les propos qui ont été tenus de l'autre côté de la
Chambre. Je ne veux pas insister parce
que ce sont des choses normales; il peut y avoir des opinions
différentes à l'intérieur d'une Opposition et je respecte
entièrement ce point de vue. Je peux vous dire, cependant, que la
démarche de la ministre de la Fonction publique proposant l'abolition de
son ministère pour responsabiliser davantage l'ensemble des
ministères existants par rapport à leur gestion de personnel est
une démarche à laquelle je concours entièrement.
Je peux vous dire qu'à l'opposé l'abolition du
ministère des Travaux publics et sa transformation en une
société immobilière, en somme une société
commerciale qui ne sera plus assujettie à la Loi sur la fonction
publique et à la Loi sur l'administration financière, est une
démarche à laquelle concourt entièrement ma
collègue de la Fonction publique. Je pense qu'il n'y a pas
d'incohérence dans cette action. Comme je l'ai toujours indiqué,
ce n'est pas parce que les employés du ministère des Travaux
publics étaient plus incompétents, moins compétents que
j'ai proposé la création de cette société
immobilière. C'est que j'ai cru que, dans le cadre d'une structure
où les données sur lesquelles cette société
immobilière devrait fonder son action seraient plus comparables à
celles de l'entreprise privée, il y aurait moyen d'atteindre un plus
grand degré d'efficacité, un plus grand degré de service
à la clientèle.
Je l'ai déjà dit à plusieurs reprises: Le
ministère des Travaux publics, avant que j'y arrive avait
déjà atteint deux grands objectifs, dont celui de la
compétence. Je pense que tout le monde va reconnaître que la
construction du Palais des congrès de Montréal, dans les
délais et coûts prévus, un édifice fort complexe
à construire, témoigne de la compétence du
ministère des Travaux publics; la même chose pour le palais de
justice de Québec. De plus, le ministère a déjà
atteint l'objectif de la transparence, puisque depuis longtemps le
ministère se soumet à des appels d'offres publics et qu'il
recourt au fichier central des fournisseurs pour le choix des firmes qui lui
donnent des services professionnels.
Il y a maintenant un troisième grand défi à relever
pour ce ministère, c'est celui de l'amélioration des services
à la clientèle, comme le font d'autres sociétés qui
fournissent des services publics, par exemple Hydro-Québec, Bell Canada,
Québec-Téléphone. On veut l'amélioration des
services à la clientèle dans le sens de l'accroissement de la
rapidité de ces services, de l'efficacité de ces services et de
la possibilité de les fournir au meilleur coût possible. Ce que
j'ai proposé à mes collègues du Conseil des ministres
comme à cette Assemblée nationale, c'est que le cadre d'une
société publique autonome permettrait davantage d'atteindre ces
objectifs.
J'ai constaté, en étant ministre des Travaux publics,
c'est que ce n'était pas un ministère politique au sens large du
terme; ce n'est pas un ministère qui définit des politiques; ce
n'est pas un ministère qui légifère, qui fait adopter des
lois; ce n'est pas un ministère qui établit des programmes pour
la population et ce n'est pas un ministère qui réglemente la vie
économique, la vie sociale et la vie culturelle. C'est essentiellement
un ministère administratif qui gère des immeubles,
propriétés du gouvernement ou des immeubles loués par le
gouvernement. J'en suis arrivé à la conclusion que, dans cette
gestion immobilière quotidienne à établir, il n'y avait
pas, à proprement parler de décisions politiques ou de politiques
d'orientation à donner. C'était davantage une administration la
plus saine possible à mettre en place. En ce sens, je suis convaincu que
le cadre de cette société immobilière permettra plus
facilement d'atteindre les objectifs de rentabilité,
d'efficacité.
J'ai évoqué l'expérience de la Colombie
britannique, qui l'a depuis sept ans, et elle est arrivée - pour ceux
qui ont vu le dernier rapport annuel qui fait le résumé des cinq
ou six dernières années - à des résultats
très intéressants en termes d'accroissement de
l'efficacité de gestion, de la rentabilité de l'entreprise. Bien
sûr, atteindre les mêmes résultats dans notre cas sera
peut-être plus difficile puisque nous partons d'un degré
d'efficacité déjà plus grand. Il faut se souvenir qu'en
Colombie britannique, on offrait beaucoup de services d'entretien, de
gardiennage, etc., où c'étaient des fonctionnaires. Ce
n'était pas la politique du faire faire. On n'allait pas en appels
d'offres dans l'entreprise privée pour faire faire ce type de services,
alors qu'au ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement du
Québec cette orientation d'avoir une politique du faire faire, de
recourir à des services extérieurs dans l'entreprise
privée pour une grande partie des services professionnels, le
génie, l'architecture, pour une grande partie des services d'entretien,
de gardiennage, etc., est déjà en place et on la pousse de plus
en plus loin à chaque étape. Ce que je veux dire, c'est que je
suis convaincu que la création de la Société
immobilière du Québec va fournir un cadre qui va permettre
d'améliorer le service à notre clientèle.
Je voudrais aborder rapidement quelques questions précises qui
ont été soulevées. Le député de Huntingdon
dit que cette loi a été adoptée à la vapeur,
à la fin de la session. Je vous ferai remarquer que le projet de loi a
été déposé en juin dernier, qu'il a
été appelé en deuxième lecture, il y a
déjà trois semaines ou un mois, et qu'il a franchi une
étape normale en commission parlementaire. Je pense que cinq mois
à partir du dépôt
pour étudier un projet de loi constitue un long délai, un
délai qui dépasse le temps que prennent la majorité des
projets de loi pour être étudiés à cette
Assemblée.
Quant aux informations qui ont été demandées, pour
l'étude de rentabilité, nous nous sommes basés sur
l'expérience de la Colombie britannique et sur l'expérience de
sociétés immobilières comparables au Québec, qui
sont dans le domaine privé. Nous avons cru ainsi qu'il n'était
pas nécessaire de faire une longue étude de rentabilité
pour justifier la création de cette société. Quant
à l'autonomie, je peux vous assurer, pour avoir visité la
Colombie britannique au printemps dernier, durant une journée et demie,
que le contexte dans lequel aura à fonctionner cette
société est absolument comparable - même si le texte de la
loi peut différer - au contexte dans lequel elle a à fonctionner
en Colombie britannique. Il faut dire même qu'à cet endroit le
ministre de tutelle fait partie du conseil d'administration. Il faut dire que
c'est une habitude là-bas; tous les conseils d'administration de
sociétés d'État ont un ou deux ministres et même, je
pense, dans un cas, trois ministres membres du conseil d'administration.
Quant aux nominations au conseil d'aministration, je peux vous assurer
qu'une large place sera faite aux gens d'affaires puisque que nous voulons
insuffler un esprit nouveau au ministère des Travaux publics. Alors,
nous ferons une large place aux gens du milieu des affaires, en particulier de
l'entreprise privée.
Une chose m'étonne, et positivement jusqu'à un certain
point, dans les remarques qui ont été faites par le
député de Notre-Dame-de-Grâce concernant l'article 34. J'ai
toujours cru qu'il était essentiel, pour qu'aucune accusation de
tentative de patronage, de manque de transparence ne soit adressée
à cette société, que les règles actuelles
concernant les appels d'offres gouvernementaux, concernant le choix des firmes
professionnelles qui donneraient des services à cette
société immobilière, concernant la politique d'achat,
concernant les achats de cette société devaient grosso modo
être les mêmes que celles qui s'appliquent actuellement au
ministère des Travaux publics. J'aurais craint - je pense que vous
auriez pu le faire à bon droit - si j'avais supprimé ces
exigences actuelles, d'être accusé de vouloir réinstaurer
le système de patronage dans une société d'État
publique.
Je retiens positivement, pour une réflexion à venir, le
sens des propos du député de Notre-Dame-de-Grâce qui dit:
Ces accusations de patronage ou de manque de transparence qu'on aurait voulu
porter seraient rapidement éliminées du fait que cette
société aura à comparer ses données avec d'autres
sociétés immobilières et visera à atteindre le
meilleur coût pour facturer le moins possible ses clients que seront les
ministères. (21 h 50)
Je pense que c'est un point de vue à examiner, c'est
peut-être un point de vue qu'il faudra retenir pour l'avenir. Je pense
qu'à l'étape de la création il ne fallait pas perdre les
acquis de compétence et de transparence, quitte à se donner de
nouveaux moyens pour atteindre l'efficacité.
Je terminerai par ce point, M. le Président, parce qu'il
m'apparaît essentiel. Concernant les employés du ministère
des Travaux publics, je ne partage aucunement les appréhensions du
député de Louis-Hébert. Les employés du
ministère des Travaux publics, je les connais. Depuis deux ans que je
travaille avec eux, je les ai rencontrés fréquemment et je peux
dire que l'immense majorité des employés des Travaux publics sont
heureux de cette idée de créer une société
immobilière. Ils y voient un défi intéressant, et
même un défi passionnant. Ils sont d'autant plus heureux et
rassurés que nous avons décidé d'inviter l'ensemble des
employés syndiqués, l'ensemble des agents de maîtrise
à faire partie de cette société, sans choix. Nous avons
invité tous les syndiqués, tous les agents de maîtrise.
Au niveau de l'encadrement, c'est bien sûr que là nous
ferons des choix puisque nous voulons insuffler un esprit nouveau, un dynamisme
nouveau, une orientation nouvelle. Il est normal qu'au niveau de l'encadrement
nous tentions de faire place à du sang nouveau dans une certaine
mesure.
Je peux dire que les inquiétudes qu'a cru déceler le
député de Louis-Hébert ne se sont pas manifestées,
d'autant plus que nous protégeons entièrement les droits acquis,
au complet, des employés. Nous protégeons les droits acquis je
dirais même des centrales, des syndicats qui protègent ces
employés, qui ont négocié des conventions collectives, qui
doivent appliquer des décrets. En ce sens, je peux vous assurer que les
employés du ministère des Travaux publics, dans une très
large majorité, sont fiers et ambitionnent déjà
d'appartenir à cette société immobilière qui, j'en
suis convaincu, dans quelques années, sera un très grand
succès. Nous en serons tous fiers.
Nous ne créons pas une deuxième structure
parallèle. J'aurais partagé les inquiétudes du
député de Huntingdon, par exemple, si nous avions maintenu une
partie du ministère des Travaux publics qui aurait assuré le
contrôle d'une société comme la société
immobilière. Mais ce n'est pas cela que nous faisons. Nous faisons
disparaître le ministère des Travaux publics pour le remplacer par
la nouvelle Société immobilière du Québec. Dans ce
sens-là, je pense que nous ne créons pas de dédoublement.
Nous allons dans le sens qu'a
voulu le premier ministre en parlant dans son discours inaugural
d'alléger les structures administratives, d'alléger les
structures technocratiques et les structures bureaucratiques.
En terminant, M. le Président, je voudrais remercier mes
collègues et l'Opposition qui ont participé à l'ensemble
de l'adoption de cette loi, aux différentes étapes, dans un
esprit positif. Je pense que c'est le meilleur gage, à la fois pour les
administrateurs et les futurs employés de cette société,
qu'ils partent avec la confiance des membres de l'Assemblée nationale.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste avant, je vais voir
si je peux permettre une question. C'est ce que je crois comprendre. La seule
chose que je vais vous dire, c'est que le droit de réplique du ministre
est le dernier droit de parole. Le ministre accepte de répondre à
une courte question? Oui. M. le député de Huntingdon.
M. Dubois: M. le Président, j'aimerais demander au
ministre s'il est d'accord pour répondre favorablement à la
demande de mon collègue de Robert Baldwin de déposer la banque de
données des propriétés gouvernementales, ainsi que des
locations.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Marcoux: M. le député, j'ai déjà
pris l'engagement en commission parlementaire de faire ce dépôt.
Nous avons une liste préliminaire qui est constituée d'environ
1000 propriétés et d'environ 819 locations, ou l'inverse, mais
c'est l'ordre de grandeur des deux données, des propriétés
et des locations. Également, nous avons déjà
déposé en commission parlementaire la liste des ministères
qui y seront assujettis. Je sais qu'il y a eu plusieurs questions posées
dans vos discours de troisième lecture, mais plusieurs ont eu des
réponses au moment de la commission parlementaire. Je n'ai pas voulu,
pour ne pas étirer le discours, les reprendre. Je peux vous assurer que
la liste des ministères assujettis est la liste actuelle et qu'en ce qui
concerne les propriétés et les locations, dans les prochaines
semaines, la liste sera transmise, quitte à ce qu'elle soit
complétée et raffinée, puisqu'une de nos tâches,
c'est d'avoir une liste exhaustive de l'ensemble de nos locations en
mètres carrés, etc., des types de locations et de
propriétés. Alors, je peux répondre affirmativement
à votre question, M. le député de Huntingdon.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je demande donc: Est-ce
que la troisième lecture du projet de loi 18, Loi sur la
Société immobilière du Québec, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais, s'il
vous plaît, d'appeler l'article 2 du feuilleton.
Reprise du débat sur
l'énoncé
complémentaire au budget de 1983-1984
et sur la motion de censure
Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article 2, c'est la
reprise du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que
l'Assemblée approuve le complément aux politiques
budgétaires du gouvernement pour 1983-1984, et sur la motion de censure
suivante du député de Vaudreuil-Soulanges: "Que cette
Assemblée blâme sévèrement le gouvernement qui, dans
son énoncé complémentaire au budget de 1983-1984, n'a rien
ajouté de précis ou de concret aux mesures mal définies
évoquées par le premier ministre, le 13 novembre dernier, qui a
maintenu les deux tiers des taxes soi-disant temporaires en place depuis deux
ans, compromettant ainsi davantage une reprise économique
déjà incertaine et qui, par conséquent, a trompé
les attentes qu'il avait lui-même fait naître auparavant pour
tenter de justifier sa décision de retarder d'un mois la reprise des
travaux parlementaires."
La parole était au député de Viau. M. le
député, vous avez la parole.
M. William Cusano
M. Cusano: Merci, M. le Président. Lorsque j'ai
demandé l'ajournement, ce matin à 9 h 40, il faut se rappeler que
l'on siégeait depuis la veille. Cela fait plusieurs nuits blanches que
l'on passe ici, à l'Assemblée nationale, et on espère, M.
le Président, que ce gouvernement va se comporter d'une façon
adulte et qu'il ne nous fera pas passer d'autres nuits blanches dans les
prochains jours.
Je me joins à mes collègues dans ce débat sur
l'énoncé complémentaire sur le budget et,
spécifiquement, sur la motion de mon collègue, le
député de Vaudreuil-Soulanges, qui se lit comme suit: "Que cette
Assemblée blâme sévèrement le gouvernement qui, dans
son énoncé complémentaire au budget de 1983-1984, n'a rien
ajouté de précis ou de concret aux mesures mal définies
évoquées par le premier ministre, le 13 novembre dernier, qui a
maintenu les deux tiers des taxes soi-disant temporaires en place depuis deux
ans, compromettant ainsi davantage une reprise économique
déjà incertaine et qui, par conséquent, a trompé
les attentes qu'il avait lui-même fait naître auparavant pour
tenter
de justifier sa décision de retarder d'un mois la reprise des
travaux parlementaires."
M. le Président, ce budget complémentaire s'inscrit dans
la vraie tradition du gouvernement péquiste. Je vais essayer de vous en
faire la preuve. Il s'y inscrit de deux façons: premièrement,
c'est le deuxième budget complémentaire depuis 1981 et,
deuxièmement, c'est que ce budget a été
précédé par de belles promesses, mirobolantes, de grandes
conférences de presse, de grandes promesses à droite et à
gauche. On est même venu nous dire, M. le Président, qu'il fallait
fermer la Chambre pendant un mois pour qu'on puisse mettre les points sur les
"i", et les barres sur les "t", pour arriver avec de grandes surprises pour la
population du Québec, que nous annonçait ici, dans le salon
rouge, le premier ministre. Au commencement de sa conférence de presse,
il semblait très éloquent, mais, lorsque questionné par
les journalistes, ses réponses n'étaient pas tout à fait
précises. Il se cachait derrière le ministre des Finances, celui
qu'on a déjà appelé le grand magicien financier. On
s'attendait de lui... Oui, on l'a déjà appelé le grand
magicien, M. le Président, parce qu'il était capable de sortir
toutes sortes de chiffres et de faire accroire à la population des
choses qui n'étaient pas vraiment des faits.
Alors le premier ministre s'est caché derrière le ministre
des Finances, ce grand magicien qui, je dois le dire, doit être
maintenant rendu à sa préretraite, parce que, comme magicien, il
n'a pas fait grand-chose. Il n'a rien sorti du chapeau par son minibudget, M.
le Président. Il n'a pas sorti grand-chose. (22 heures)
On entend des discours, de l'autre côté de la Chambre,
où on nous dit qu'on a de bonnes intentions. Lorsqu'on essaie de
chiffrer précisément ce que cela veut dire en termes d'emplois,
vous êtes muets, MM. les ministériels, vous ne pouvez plus
répondre, vous êtes à bout, vous ne savez plus où
vous allez. On nous a parlé d'un virage technologique, on nous a
parlé d'un virage psychologique; vous parlez tellement de virage que
vous tournez en rond, chers amis. Au lieu de vous préoccuper des graves
problèmes, occupez-vous de trouver des "jobs" pour les gens du
Québec. C'est ce que veulent les gens.
Ce grand spectacle, on y a assisté aussi lors du
dépôt d'autres projets de loi ou avant-projets de loi où on
prétend connaître toute la vérité. On peut donner
comme exemple le fameux projet de loi 40 sur la restructuration scolaire. Il
est beau, celui-là. Le ministre de l'Éducation, le bon docteur,
devrait prendre soin du leader parlementaire qui est maintenant devenu le Dr
Jekyll and Mr. Hyde de l'Assemblée nationale. On nous a
déjà parlé des conséquences du stress sur les
députés de cette Assemblée. Ce projet de loi du ministre
de l'Éducation, on voulait nous faire croire que c'était la plus
grande nécessité pour les Québécois, qu'il fallait
restructurer tout notre système scolaire. En réponse à
certaines questions posées en Chambre, le ministre disait que
c'était un projet de loi désiré.
On a même dit qu'il se faisait une consultation. Après, on
a appris que c'était une consultation privée, une consultation
où seulement les amis du ministre étaient invités. Je
comprends bien, lorsqu'on invite ses amis, on ne dit pas qu'on est
méchant ou mauvais, tout est beau et gentil. N'est-ce pas vrai, M. le
ministre? Je pense que vous êtes d'accord avec moi. Lorsque la
consultation a eu lieu et qu'on a demandé aux gens de se prononcer sur
la restructuration scolaire, il a fallu retarder la commission parlementaire
parce que les mémoires n'arrêtaient pas d'arriver ici, à
l'Assemblée nationale. Il y en a 285 à mon bureau, M. le
Président, 285 mémoires. Je peux vous dire qu'il n'y en a pas
beaucoup qui appuient le projet du ministre de l'Éducation, lui qui nous
disait, avec toute sa franchise, que son projet de loi était
désiré, que son projet de loi allait améliorer la
situation scolaire. On l'avait averti, on lui avait dit que ce n'était
pas le temps de faire une réforme parce que, pendant que vous mobilisez
les forces en vue d'une restructuration scolaire, qu'arrive-t-il? Ceux qui ont
de l'expérience dans le domaine scolaire savent - vous, M. le
Président, le savez - que lorsqu'on s'occupe de structure, d'habitude,
c'est la pédagogie qui en souffre.
Je lisais justement, il n'y a pas très longtemps, dans le Devoir,
que les élèves de la CECM n'ont pas de bons résultats. Je
comprends, tout le monde a été préoccupé par cette
restructuration scolaire et ce, en plus des décrets qui ont
paralysé le système scolaire dans la région de
Montréal et ailleurs dans la province. C'est cela qu'on appelle la
franchise, venir nous dire en Chambre que ce projet de loi était
demandé, exigé par la population? Était-il exigé
par la population ou par le ministre? Lorsqu'il a préparé son
projet de loi, répondait-il aux désirs de la population ou s'il
répondait à ses propres désirs d'avoir une structure
scolaire qui portera son nom à l'avenir, dans l'histoire du
Québec?
C'est un peu la même chose qui se produit avec le projet de loi
38, qui a été déposé en cette Chambre le 21 juin
dernier. On n'a pas eu le temps de consulter le milieu concerné. Du mois
de juin jusqu'au mois d'octobre, on n'a pas eu le temps. Pourquoi? Est-ce que
le ministre des Affaires municipales avait peur d'aller consulter? Il savait
fort bien que ce qui l'attendait, c'était le même sort qui fut
réservé au ministre de l'Éducation. On s'en
aperçoit
maintenant, de cette réticence à consulter. Il ne faut pas
oublier une chose, M. le Président. Un gouvernement, pour qu'il soit
légitime, doit répondre aux besoins de la population et je ne
vois pas comment le projet de loi 40 et le projet de loi 38 répondent
aux besoins de la population du Québec. On s'aperçoit que ces
deux projets de loi répondent aux désirs des individus qui les
parrainent. Plus spécifiquement concernant le projet de loi 38, on s'en
aperçoit après avoir entendu les discours de l'autre
côté de cette Chambre. J'ai entendu des ministériels dire:
Mais ce projet de loi va nous permettre plus de visibilité. On se
plaignait que, chez les ministres ou les députés
fédéraux, il y avait trop de visibilité dans les
comtés parce qu'ils se promenaient avec des subventions. Lorsqu'on est
préoccupé par la visibilité d'un parti politique, on ne
répond plus aux aspirations et aux besoins d'une population.
La population de mon comté qui, malheureusement, se trouve entre
deux carrières, la carrière Miron à l'ouest, et la
carrière Francon à l'est, subit depuis quelques années non
seulement les tempêtes de neige du Québec qu'on connaît
tous, mais encore des tempêtes de poussière. Il y a
également des odeurs qui se dégagent du site d'enfouissement de
cette carrière. Qu'est-ce qu'on a fait, puisque c'est ce gouvernement
qui a donné le permis d'enfouissement des vidanges dans cette
carrière? À la suite des questions que j'ai posées ici au
ministre de l'Environnement, il s'est rendu sur les lieux pour constater
lui-même les faits. Il s'y est rendu, par coïncidence, durant la
campagne de financement du Parti québécois dans le comté.
Alors, il a visité la carrière. Depuis sa visite, les odeurs dans
le comté ont augmenté. Lorsque les électeurs de Viau qui
demeurent près de cette carrière disent qu'ils ont envie de
vomir, oui, ils l'ont. Ce n'est pas le même vomissage que celui du
premier ministre, et ce n'est pas la même senteur, non plus, dont se
plaignait le ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration
qui disait que, si on n'aimait pas sa senteur, on n'avait qu'à s'en
aller. Malheureusement, dans le comté de Viau, ceux qui demeurent
près de la carrière, près de ce site d'enfouissement
où il n'y a aucun contrôle, où il y a même des
produits dangereux enfouis, s'ils n'aiment pas cette senteur-là, ne
peuvent pas s'en aller du jour au lendemain.
Les électeurs du comté de Viau me demandaient, durant la
fermeture du Parlement, ce à quoi on pouvait s'attendre du grand
ministre des Finances. Je leur ai dit: Je suis sûr qu'il va arriver avec
quelques petits cadeaux pour paver un peu le chemin vers une élection.
On l'a vu, il a baissé la taxe sur l'essence qu'il avait lui-même
doublée. Il dit l'avoir réduite de 50%, mais ce n'est pas tout
à fait 50%. Il a réduit la taxe de 50%, mais ce n'est pas
exactement cela qu'il a fait, M. le Président. (22 h 10)
Pour les gens du comté de Viau qui n'ont pas les moyens de
s'acheter de nouvelles voitures très économiques, ceux qui ont
des voitures assez vieilles, des gros huit cylindres, comme on les appelle,
vous savez combien cela coûte pour faire le plein d'essence. Cela
coûte encore 45 $ et, à des endroits, même 50 $ pour faire
le plein, M. le Président.
M. le Président, le ministre nous avait dit, en 1981, lorsqu'il
avait présenté le budget supplémentaire: Ce seront des
mesures temporaires. Des mesures temporaires! Nous les avons encore, ces
mesures. Il a dit qu'il a baissé un peu la taxe. Quelle est la
différence? Absolument aucune, M. le Président. En 1981, il a
fait passer la taxe de vente de 8% à 9%. Cela aussi était
censé être temporaire. S'il ne nous l'a pas dit dans ses propres
mots, il a laissé comprendre à l'ensemble de la population que
ces mesures, cette taxe qui était de 8% passant à 9%, seraient
mises en place seulement jusqu'au budget de 1983. Qu'est-ce qui est
arrivé lors budget de 1983? La taxe est là, la taxe est
restée.
Qu'est-ce qui est arrivé au budget supplémentaire? Que
fait ce budget pour les chômeurs du Québec? Absolument rien, M. le
Président. On n'est pas capable de nous dire, de l'autre
côté de la Chambre, combien de jobs seront créés par
ce fameux budget complémentaire du ministre qu'il ose appeler la
relance. Quelle relance? C'est un recul. Il s'en va à reculons, comme le
Parti québécois va à reculons. On a vu les derniers
sondages. C'est même gênant, messsieurs du côté
ministériel. Vous êtes rendus à 27%, avec votre premier
ministre qui voulait imiter le premier ministre du Canada en faisant des
voyages autour du monde, en se rendant en Italie et en parlant au
président de l'Italie. J'ose espérer que la conversation... Je
l'excuserais si la conversation avait eu lieu en italien, mais M. Pertini parle
un aussi bon français que Jacques-Yvan Morin. Lorsque des choses sont
dites, c'est vrai qu'on entend seulement ce qu'on veut entendre.
Oui, c'est la pertinence du débat, oui, c'est parce que vous
causez des difficultés à la population québécoise,
parce que vous n'êtes pas capables d'administrer.
Une voix: Une autre gaffe.
M. Cusano: Une autre gaffe, oui, vous causez des problèmes
à l'ensemble des Québécois au niveau international. Vous
qui cherchez l'indépendance, vous qui voulez être le nombril du
monde, vous envoyez votre premier ambassadeur en Italie et il fait la plus
belle gaffe.
Une voix: II ne sait pas sortir.
M. Cusano: II ne sait pas sortir. C'est exactement cela, M. le
député, il ne sait pas sortir. Quand quelqu'un ne sait pas
sortir, M. le Président, on devrait le garder dans un coin quelque part
et bien le protéger.
Mr. Speaker, we are faced here tonight with a debate on a supplementary
budget and this morning, when I asked the adjournment at 9:40, I must remind
all of those listening to us that we had started the previous day at 10 o'clock
in the morning. This Government, that closed in June, took five months holidays
and, when they came here in the House, they told us that they had beautiful
plans. They needed one more month to finalize the big salad. La grande salade,
oui. De la marmelade encore. They took one month. They closed this House. Why
did they close it? I suspect because they did not want to have any questions
from the Opposition. That is why they closed it, Mr. President.
They came back with the big show, the big performance next door, in the
red room, the big press conference. Oh! I am sorry, Mr. Minister, that is not
quite true. Big press conference, the Prime Minister of the Province announces
that he has grandiose plans for the Province of Québec. However, when
he got to the question period by the journalists, he was a little
embarrassed. He did not know exactly what to answer. He wanted to keep the
suspense and therefore, he announced that the great Minister of Finance, the
large Minister of Finance, the heavy Minister of Finance would have concrete
proposals to bring before the House.
Two days later, we find out that the great magician, Mr. President, is
just about to be fired because all the miracles he was expected to produce were
never produced. What does this budget do for the population of Québec,
the unemployed, those on social welfare? We are speaking of the unemployed
according to the official statistics, but there are the so-called hidden
unemployed, the ones that are no longer a statistical figure because they have
given up looking for work. We find that the province has the largest percentage
of unemployment in Canada. What has this Government done? They closed the
Parliament as a solution, because they did not want to have any questions being
asked from this side. This kind of show that we witnessed on live
television is repeated here in this House many a times, whenever a bill is
introduced. It goes through a ceremonial. First, little leaks, trial balloons,
then the many "communiqués de presse", then the press
conferences, and all this is part of the propaganda of this Government, but
when we get down to the real McCoy, we find that there is absolutely
nothing.
M. le Président, la population du Québec, depuis 1981,
vous l'a dit très carrément: elle ne vous croit plus. Elle vous
l'a dit dans Louis-Hébert lorsque votre ministre, le grand
étapiste, a démissionné. Elle vous l'a dit, M. le
Président, pas à vous, mais au Parti québécois que
l'étapisme, elle ne voulait plus en entendre parler. Messieurs les
ministériels, dans Saint-Jacques, qu'est-ce qu'elle vous a dit? Elle
vous a dit très carrément que les petits amis du ministre et les
petits incidents à droite et à gauche, les bornes-fontaines qui
se ramassent à terre, on n'en veut pas. C'est cela qu'elle vous a dit
dans Saint-Jacques, M. le Président.
À Charlesbourg, elle vous a dit qu'elle en avait assez de la
suspension des règles pour imposer des décrets. Elle vous l'a dit
très carrément. Encore au Saguenay, elle vous a dit qu'elle en
avait assez de votre patronage et des scandales de la fête nationale.
Quand allez-vous arrêter ce jeu-là, ces querelles entre
Québec et Ottawa?
En passant, on nous a déposé aujourd'hui un projet de loi
qui concerne les heures d'ouverture et de fermeture des magasins. Je n'ai pas
le projet de loi devant moi, mais, de mémoire, on dit qu'on ne peut pas
entrer dans certains magasins le 1er janvier. On dit qu'on ne peut pas entrer
dans certains magasins - la liste est là - le 24 juin, jour de la
fêtre nationale. Je suis complètement d'accord. Le prochain titre,
c'est qu'on ne pourra pas entrer dans ces magasins le 1er juillet. On a
oublié de dire que c'était la fête du Canada, c'est un
petit oubli. Vous ne l'avez pas compris le message de 1980?
Ah! II n'y a rien là, me dit-on. Messieurs les
ministériels, on est encore dans le Canada et, pendant qu'on y est, on
va agir comme des Canadiens responsables. Ne nous arrivez pas avec des projets
de loi partisans, des projets de loi qui invoquent la partisanerie ou des
projets de loi qui sont écrits pour faire plaisir à des
ministériels qui se plaignent qu'ils n'ont pas assez de
visibilité dans les comtés. Imaginez-vous! C'est le projet de loi
38, au cas où vous ne le sauriez pas, M. le Président, ce projet
de loi totalitaire, ce projet de loi qui donne des pouvoirs
discrétionnaires au ministre des Affaires municipales. On dit aussi que,
selon son bon jugement, certaines choses seront faites. Le bon jugement de ce
gouvernement, il n'y en a pas?
Dans le même projet de loi, on invoque les plus beaux principes au
monde, une saine gestion des fonds publics. Est-ce qu'une saine gestion des
fonds publics consiste à donner des subventions à des "sex bars"?
C'est cela que vous appelez une saine gestion des fonds publics? Par ce projet
de loi, vous allez dire à des clubs de loisirs, à des clubs
sociaux: Ne prenez pas d'argent du gouvernement fédéral parce
que, d'abord, on va pénaliser les municipalités en question. Dans
ce même
projet de loi, vous allez nous faire croire que, vous, messieurs d'en
face, allez gérer ces fonds d'une façon saine? Que l'on pense aux
"sex bars".
Il y a dans mon comté des petites entreprises - oui, M. le
ministre - qui ont demandé des subventions et elles n'en ont pas eu
beaucoup. Vous me donnerez la liste si vous le pouvez, des gens du comté
de Viau qui en ont fait la demande et qui ont eu des subventions. Lorsqu'on
fait une demande pour un "sex bar", l'argent est là, mais, quand
quelqu'un veut acheter de l'équipement et créer des emplois, il
n'y a pas d'argent. Le comté de Viau n'est pas un comté
péquiste. Oui, c'est cela le patronage, M. le ministre. C'est ce que
vous appelez la transparence? Vous l'admettez, vous ne donnez des subventions
que dans vos comtés, c'est ce que vous voulez dire, dans les
comtés péquistes? C'est cela qu'on appelle un bon
gouvernement.
Mais la population en a assez de vos chicanes, de votre patronage. Mon
collègue de Laurier et mon collègue de Maskinongé ont bien
prouvé la semaine dernière et cette semaine que ce gouvernement
peut trouver de belles jobs à des amis du régime. C'est ce que
vous appelez de la saine administration? - je conclus, M. le Président -
je ne le pense pas. Donnez donc la chance à la population de se
prononcer et de vraiment porter un jugement sur votre administration. Vous
allez vous apercevoir, si vous avez le courage de déclencher une
élection générale, que les résultats seront plus
élevés que 67%-27%. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Hull.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Disons que cette
Assemblée nationale siège depuis déjà 36 heures et
30 minutes. Nous avons effectivement débuté le 19 décembre
et ça se poursuit aujourd'hui pour se terminer quand? Seul Dieu le
sait.
Je trouve absolument aberrante l'attitude de ce gouvernement qui me fait
actuellement penser à un gros bateau sans gouvernail. Un gouvernement
qui est à la dérive. Un gouvernement qui ne sait plus
légiférer, mais un gouvernement, aussi, qui se perd dans la
procédure.
Ceci fait que, depuis la dernière semaine, cette Assemblée
nationale a dû siéger la nuit. Elle a dû siéger la
nuit, pourquoi? Pour satisfaire à la volonté du petit
général, le leader du gouvernement, satisfaire à une
certaine forme d'incompétence dans le travail qui se fait du
côté ministériel actuellement et qui compliquera
sûrement la vie des citoyens et citoyennes du Québec.
Ce que je trouve le plus aberrant... Je toucherai sûrement
certains points du budget tantôt, mais je ne peux m'empêcher de
profiter de cette occasion qui m'est offerte pour dénoncer le
gouvernement vis-à-vis du monde municipal. On sait que, ce matin, lors
des discussions qui étaient soulevées par le leader du
gouvernement sur des ententes qu'il aurait souhaitées avec l'Opposition,
ententes unilatérales, c'est-à-dire, ententes qui faisaient
uniquement son affaire, nous nous étions limités, comme le
règlement le veut, à deux commissions parlementaires. Encore une
fois, ce même gouvernement -c'est odieux et je tiens à le rappeler
- a reporté une commission parlementaire qui devait avoir lieu ce matin
et qui devait entendre le monde municipal. Plusieurs municipalités
avaient été convoquées par le secrétaire des
commissions, à la demande du leader du gouvernement, afin de
procéder à l'étude article par article de projets de loi
privés. On mentionne la ville de Sorel, la ville de La Baie, la ville de
Drummondville, la ville de Saint-Sauveur-des-Monts, la ville de Montréal
- non pas la moindre - la ville de Gatineau et la ville de Hull, dont j'avais
le privilège de parrainer le projet de loi privé.
On a retardé indûment cette commission parlementaire,
simplement pour satisfaire les appétits du leader du gouvernement, qui a
absolument et complètement perdu les pédales dans cette fin de
session.
On entendait même, ce matin, le leader accuser l'Opposition de
perturber les travaux. Seigneur! M. le Président - pour le
bénéfice de la population - si vous saviez comment l'Opposition
n'a pas le contrôle, n'a pas les capacités parce qu'elle n'a pas
les rênes du pouvoir et ce n'est pas elle qui décide de la marche
des travaux dans cette Assemblée nationale! C'est le côté
ministériel et, plus particulièrement, le leader du gouvernement.
(22 h 30)
On a reporté l'ouverture de la session du 18 octobre au 15
novembre, en laissant présager que le Messie s'en venait, que la manne
allait retomber sur l'ensemble des Québécois et des
Québécoises et que les années de noirceur de la
récession étaient terminées. Le 13 novembre, le premier
ministre du Québec, avec fanfare et trompettes, nous annonçait un
supposé plan de relance. Le 15 novembre, quelques jours après, le
ministre des Finances déposait les crédits additionnels. C'est
là qu'on s'est aperçu que le pétard était
mouillé, que cela ne fonctionnait plus dans cette boîte et que
c'était tout simplement rire de l'ensemble des gens du Québec, de
retarder la session de l'Assemblée nationale d'un mois pour nous
annoncer à peine certaines petites modifications, infuser dans les
dépenses additionnelles des crédits de 30 000 000 $
et modifier quelque peu la taxe ascenseur sur l'essence
décriée par l'Opposition depuis plus de deux ans. Mon
collègue, le député de Vaudreuil-Soulanges a d'ailleurs
fait valoir tous les aspects négatifs de cette taxe ascenseur sur
l'essence appliquée par le ministre des Finances, M. Parizeau, il y a
deux ans.
M. le Président, nous nous posons de sérieuses questions
quand on se rend compte que la population du Québec ne supporte plus ce
gouvernement. Les derniers sondages l'ont démontré d'une
façon claire, nette et précise. Pour aller plus loin, les
dernières élections complémentaires du 5 décembre,
dans les comtés de Mégantic-Compton et de Jonquière, ont
démontré l'insatisfaction des citoyens et des citoyennes du
Québec à l'égard de ce gouvernement qui les a
trompés depuis 1976, mais qui les a trompés davantage depuis
1981, alors que le premier ministre du Québec se promenait en province,
quelque peu avant les élections du 13 avril 1981. Il passait avec sa
brouette à cadeaux et distribuait des bonbons un peu partout. Il faisait
partout des énoncés de nouveaux projets: construction de routes,
viaducs, construction d'hôpitaux, construction d'écoles. En
faisant le total de l'ensemble de ces dépenses et de ces
immobilisations, il y en avait pour 6 000 000 000 $, 6 000 000 000 $ de
promesses qui ont déferlé sur l'ensemble du Québec quelque
peu avant les élections de 1981.
Qu'a-t-on eu depuis ce temps? Rien. Une répétition dans le
discours du premier ministre le 13 novembre, un ramassis de vieilles promesses
déjà mâchées et redites, rien de nouveau. Et on
vient se foutre maintenant... Et quand on tente de faire une comparaison entre
la relance économique et certains projets de loi qui apparaissent dans
cette Chambre et pour lesquels l'Assemblée nationale doit siéger
24 heures sur 24 à cause de l'intransigeance et de l'arrogance du
préfet de discipline, le député de Vanier et leader du
gouvernement... C'est concevable qu'un gouvernement soit rendu aussi bête
que de se botter le derrière tout seul.
Examinons quelques projets de loi en regard de cette fameuse relance
économique, le pétard mouillé annoncé par le
premier ministre du Québec et réchauffé par son ministre
des Finances quelques jours après. Si on prend le projet de loi 43,
qu'on a adopté dans cette Chambre il y a à peine quelques jours,
vendredi dernier, il traite des pourboires dans le secteur de la restauration,
des pourboires qui sont, en somme, une appréciation du service et de la
qualité du produit offert au consommateur, pourboires attribués
aux serveurs et aux serveuses. Ce projet de loi a été
décrié par les 70 000 serveurs et serveuses du Québec,
décrié par les syndicats, décrié par les chambres
de commerce, décrié par le patronat, décrié dans
cette Assemblée nationale par l'Opposition mais sans pouvoir
arrêter le rouleau compresseur du gouvernement qui voulait adopter une
loi dont le ministre du Revenu ne sait même pas de quelle façon
elle sera appliquée. Ce matin, dans le journal, on apprenait que le
ministre du Revenu n'allait pas appliquer cette loi; c'est de la folie
furieuse!
On s'en prend à tout le monde. Là, on s'en prend au petit
travailleur. On sait que les serveurs et les serveuses doivent travailler en
rotation, un peu comme on le fait à cette Assemblée nationale
actuellement et, nous, on n'aime pas cela. Pourtant, ce ne sont que quelques
jours par année, à cause de la folie furieuse de ce gouvernement.
Ces gens, qui travaillent dans le secteur de la restauration, le font à
l'année. Ce sont de petits salariés, en général,
exception faite des grandes cuisines, des grands restaurants.
Ce gouvernement établit à sa discrétion que le
serveur ou la serveuse doit déclarer un minimum de 8% de ses pourboires.
Il doit déclarer un minimum, indépendamment du montant
reçu. Je parlais, en fin de semaine - je fais une émission de
radio le dimanche où je m'adresse à mes commettants, ceux de mon
comté et de ma région, une ligne ouverte - avec des citoyens et
des citoyennes qui me téléphonaient pour discuter de cette foire,
ici, à l'Assemblée nationale, de l'improvisation du gouvernement
et de l'adoption de lois aussi bêtes et stupides que la loi 43, entre
autres. Il y en a plusieurs autres, mais parlons de celle-là.
Une serveuse me mentionnait - et je me pose encore des questions
là-dessus et sûrement que tous les serveurs et toutes les
serveuses du Québec pourraient se poser la même question s'ils
demeurent dans une ville frontalière - que, demeurant en Ontario, elle
travaille au Québec. Est-ce qu'elle doit déclarer ses pourboires
étant donné que dans la province voisine - aucune loi semblable
n'existe ailleurs au Canada - elle n'a pas à les déclarer? Est-ce
qu'elle doit les comptabiliser? Je prétends que non, que c'est à
sa discrétion de déclarer, en sus de son salaire de base, les
pourboires qu'elle fait, tenant compte des dépenses qui sont
inhérentes à ce genre de service donné aux citoyens. On
sait que la serveuse doit toujours être dans une tenue impeccable, doit
passer chez la coiffeuse une ou deux fois par semaine, etc., ce qui lui
occasionne des dépenses additionnelles.
Souvent, quand une serveuse bénéficie de l'aide de celui
qu'on appelle communément, dans le langage de la restauration, le
"busboy", elle lui donne aussi un montant à la fin de la journée.
De quelle façon peut-elle comptabiliser tout cela? Pour cette serveuse,
cela posait des problèmes
assez particuliers. (22 h 40)
D'autre part, un serveur m'a téléphoné, dans le
cadre de mon émission, pour me dire que, lui, réside au
Québec, mais travaille en Ontario. En Ontario, on n'oblige pas la
comptabilisation des pourboires. Alors, on ne doit pas les déclarer. Ce
bonhomme-là revient au Québec, calcule ses impôts et
déclare à sa discrétion les pourboires reçus durant
l'année. C'est tout cela, M. le Président, que ce gouvernement ne
comprend pas. Le gouvernement décide, un bon matin, de nous pondre une
loi. Un des hauts fonctionnaires, qui a pelleté des nuages pendant un
certain nombre d'heures, décide finalement de nous pondre une loi.
Qu'est-ce qu'il faut aller chercher? Il faut aller chercher 40 000 000 $. Le
ministre a placé une commande: Allez fouiller dans tous les fonds de
tiroirs pour essayer de soutirer de l'argent des citoyens; on en a besoin pour
boucher nos trous. Non pas pour créer de nouveaux programmes, mais pour
boucher les trous qu'ils ont déjà faits au cours des
dernières années. 40 000 000 $, M. le Président, qu'on va
aller chercher dans les poches de ces petits travailleurs, sans pour autant
avoir établi la règle du jeu ou le règlement, pour tenir
compte de son application, sans pour autant avoir considéré le
problème que l'on créait à l'employeur qui devra tenir
à jour une comptabilité de ces pourboires qui seront
dévoilés, à la fin de la journée, par chacun des
employés. C'est un coût additionnel pour l'employeur concernant
les avantages sociaux applicables sur les pourboires qui auront
été dévoilés. C'est un coût additionnel pour
l'employeur au point de vue de la gestion, au point de vue de la
comptabilité, au point de vue de la répartition des coûts
et au point de vue des dépenses. Qu'est-ce que cela fera au
Québec? Quand on parle réellement d'économie, quand on
traite de l'aspect touristique et qu'on dit que le Québec, c'est une
province accueillante, c'est une province qui reçoit bien ses touristes,
et le pourboire, c'est une forme d'appréciation. Mais à compter
de maintenant, ce n'est plus une forme d'appréciation, c'est une
obligation de comptabiliser un montant de 8%. Je dis que l'on peut avoir un
service inférieur à ce que nous avions antérieurement et
cela peut être dangereux pour l'industrie hôtelière. De
plus, ce gouvernement n'aurait-il pas dû tenir compte d'un aspect
important? La restauration au Québec, depuis les cinq dernières
années, est en perte de vitesse. On compte à peine 8% des
entreprises de restauration qui font des profits actuellement. On en compte 20%
qui cassent égal dans leurs dépenses et on en compte 70% qui
perdent de l'argent depuis quelques années, plus particulièrement
depuis que les péquistes sont au pouvoir. Oui, parce que les
péquistes, à les regarder de près, ce n'est pas invitant.
Ce n'est pas invitant pour quelqu'un de l'extérieur du Québec de
venir se faire tomber sur la tête. Si on a le malheur d'être
anglophone et qu'on traverse un des ponts pour entrer au Québec, on se
fait regarder comme si on était tout croche.
M. le Président, tant et aussi longtemps que ce gouvernement va
être là, on ne ramènera pas ce climat de fierté, ce
climat d'hospitalité, ce climat où on invite toutes les nations
du monde à nous visiter, peu importe leur religion, leur couleur ou leur
langue. Nous au Québec, actuellement, avec ce gouvernement, on fait des
distinctions. Les anglophones et les entreprises anglophones au Québec
ne sont pas contents? Ce sont des "bums", qu'ils s'en aillent ailleurs. On a en
a perdu une maudite "gang", M. le Président, depuis quelques
années et on en perd encore. Lorsqu'on parle d'économie et qu'on
les perd, on ne va pas en chercher beaucoup. Lorsque le président d'une
compagnie pense venir s'installer au Québec, il regarde tous les
éléments, les contraintes, les irritants et, à ce
moment-là, il fait son choix. On s'aperçoit souvent qu'il va
s'installer dans une province voisine. Là, on blâme le
fédéral: c'est la faute du fédéral s'il y a un
manque d'investissements au Québec.
C'est toujours la même ritournelle, M. le Président. On
retrouve cela dans le projet de loi 38 concernant les subventions aux
municipalités, alors que les municipalités, actuellement,
à cause du fait que ce gouvernement et le petit ministre intransigeant
des Affaires municipales, le bourreau du monde municipal, plutôt que
d'aller rencontrer son homologue du gouvernement canadien et de conclure avec
lui une entente qui nous aurait permis, depuis le printemps dernier, de faire
bénéficier nos municipalités, nos organismes
régionaux et locaux de plusieurs millions de dollars qui auraient permis
la création d'emplois, afin de sortir des gens du bien-être social
et du chômage et de faire travailler nos jeunes... Non, c'est un blocage
systématique, M. le Président. On est d'une arrogance absolument
impensable. Nous allons probablement, dans les prochaines heures,
étudier à nouveau ce projet de loi odieux en troisième
lecture. J'ai hâte de voir de quelle façon il nous sera
présenté. Peut-être comme tous les autres projets, d'une
façon toute croche, d'une manière ratoureuse, d'une façon
cachée. On va nous faire travailler encore la nuit, lorsque les gens du
Québec seront couchés, lorsque les gens vont faire leur petit
dodo pour la nuit. À ce moment-là, ces gens vont nous faire
adopter leur saloperies à la télévision alors que personne
ne regardera. Un gouvernement est rendu à devoir se cacher la nuit pour
faire travailler l'Opposition, afin de faire adopter ses ragots
à la population du Québec, et le lendemain matin, la
population se réveille et le gouvernement s'imagine que la population ne
sait pas cela. Il faut dire au gouvernement que la presse écrite,
parlée, télévisée appartient au XXe siècle.
M. le Président, partout au Québec, on apprend ce que ce
gouvernement impose à la population. C'est comme s'il ne s'en rendait
pas compte.
Ce projet de loi 38 encore là brime les municipalités. Je
dis bien qu'il brime les municipalités, peu importe le fait qu'on
connaît, qu'on reconnaît la compétence du Québec au
niveau des municipalités. Le fédéral reconnaît cela.
Les municipalités reconnaissent cela. L'Opposition reconnaît cela.
Tout le monde reconnaît cela. Mais le ministre des Affaires municipales
va encore aller picocher pendant que le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation picoche sur les projets de loi 48 et 49,
encore là pour imposer un double permis dans le domaine des
pêcheries, afin de mettre une fleur de lis sur la queue des poissons,
pour les rendre peut-être un peu plus pesants et un peu plus gras, un peu
plus en santé. C'est cela qu'on nous fait. Des stupidités, des
folies inacceptables, impensables.
Là, on va charrier encore pour les quelques prochains jours. On
va tenter de faire comprendre au gouvernement qui est absolument capoté,
parti... Il est dans la brume, cela vague. C'est surtout la nuit, je vous dis
que les fumées qui se dégagent dans cette Assemblée
nationale renversent souvent les plus humbles de ceux qui peuvent être
ici. On travaille dans cette atmosphère et on fait subir à notre
population des projets de loi improvisés, des projets de loi mal
pensés, mal conçus, mal planifiés, mal
préparés et on passe cela au Québec le lendemain matin et
après cela on dit aux gens: Venez-vous en chez nous. Venez demeurer au
Québec. Venez investir au Québec. Venez placer des millions au
Québec.
En terminant parce que vous m'avez indiqué, je pense, qu'il me
reste à peine quelques secondes... Non?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'est pas ce que je
voulais vous indiquer quand j'ai pris mon règlement. C'est que vous
faisiez référence à des projets de loi et en vertu de
l'article sur le budget et en regard de l'article 99.2, je voulais simplement
vous faire remarquer qu'il est interdit à un député qui a
la parole de faire référence à une affaire inscrite au
feuilleton en vertu du budget. C'est simplement cela que je voulais vous
rappeler.
M. Rocheleau: J'ai appris cela la semaine passée. J'ai
appris aussi qu'il y a certains mots qu'on ne doit pas employer dans cette
Assembée nationale, le mot malhonnête. On ne peut pas utiliser
cela. Certaines autres choses comme vous venez de m'indiquer. Je vous remercie,
M. le Président. Je n'avais pas l'intention de creuser dans les autres
projets de loi ou de les utiliser. Je voulais simplement faire un petit tour
d'horizon là-dessus. (22 h 50)
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je voudrais simplement
vous indiquer qu'il vous reste cinq minutes et demie encore.
M. Rocheleau: Je vous remercie de votre diligence de m'entendre,
premièrement. Je sais par contre que la population du Québec suit
les débats de l'Assemblée nationale et elle trouve cela
intéressant des fois parce que nous, on apprend des choses à la
population du Québec. Le côté ministériel cache des
choses. On est là, vigilants, à tous les moments de la
journée et à tous les moments de la nuit et on suit de
très près l'évolution de chacun des dossiers. Une autre
affaire quand on parle de relance économique.
Quand je vois ce gouvernement qui, au niveau de la construction... Moi,
je trouve cela assez bête, assez fou, je n'ose quasiment plus en parler
aux ministériels parce que ce monde est borné. Cela ne comprend
plus, ç'a des oeillères, c'est complètement fermé.
On parle du règlement de la construction, de la carte de placement. M.
le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur vous
empêchez les travailleurs de la construction de travailler. Savez-vous
cela? Avec la carte de placement dans la construction. Mais oui, cela prend une
carte. Un "pocket number", un peu comme les taxis, ils ont un "pocket number",
les gars de la construction cela leur prend une espèce de "pocket
number". S'ils n'ont pas fait leurs 1000 heures, ils ne peuvent plus
travailler. Assisté social en passant par chômeur. Fini. Je trouve
cela aberrant, M. le Président. Comment peut-on expliquer que l'homme ou
la femme, on est venu au monde pas pour être des
bénéficiaires de l'aide sociale. On est venu au monde pour gagner
notre pain à la sueur de notre front. Ceux qui malheureusement sont
accrochés à l'aide sociale, il faut les aider. Ceux qui sont
chômeurs, il faut les aider, mais il ne faut pas les empêcher de
retourner sur le marché du travail. C'est rendu que c'est un crime au
Québec celui qui travaille! Cela se peut-il qu'un gouvernement nous
passe des stupidités semblables? Après cela on nous parle de
relance économique.
Il y a des inspecteurs à l'OCQ - mon collègue de
Beauce-Sud appelle cela l'office du crime du Québec, un genre de petite
gestapo - qui se promènent dans les fonds de caves pour voir s'ils ne
voient pas un ouvrier en train de clouer un clou. S'ils le prennent
sur le fait, houp! 50 bâtons d'amende. S'il ne paie pas... Aussi
bête que c'est - j'écoutais cela à la radio, à
Québec, il y a quelques semaines - un bonhomme s'est fait poigner deux
fois. La troisième fois, il ne travaillait toujours pas et il avait une
petite "jobine" et il n'avait pas assez d'argent pour payer l'amende; il a dit:
Je vais aller en prison. Savez-vous à quoi le juge l'a condamné?
À faire des travaux communautaires, savez-vous ce que c'était?
C'était de peinturer, c'était de faire le job qu'il pratiquait.
C'est celai Le juge l'a condamné à peinturer alors que l'OCQ l'a
surpris à peinturer. Est-ce que cela se peut?
On patente des programmes pour les jeunes, on leur donne des bons
d'emploi de 3000 $, aux apprentis électriciens. Quand ils vont demander
une job, on leur dit: Va en ligne et attends ton tour. Ton ambition, ton
courage, ton coeur au travail, "parque toi" sur le coin, Pit, et attends qu'on
t'appelle. Est-ce que c'est cela l'ambition qu'on est en train de donner
à nos jeunes au Québec. Ils sont pris avec leur bon de 3000 $
dans la poche d'en arrière et ils sont "parqués" sur le coin de
la rue et ils attendent un job. Ils viennent de sortir de l'école, ils
n'ont jamais travaillé pendant une heure dans leur métier et
l'autre gang lui dit: Tu n'as pas fait tes 1000 heures, toil Tu n'as pas ton
"pocket number" pour travailler.
N'est-ce pas assez fou qu'un gouvernement puisse penser à cela?
Quand je vois cela, cette majorité servile de l'autre bord, quand le
gouvernement et son petit général, quand il décide
d'adopter une loi, qu'il tire sur la chaîne, tu vois les pattes se lever.
Quand tu regardes cela, tu te demandes si cela a du maudit bon sens qu'un
gouvernement aussi servile que cet ensemble laisse faire cela et accepte cela.
C'est cela qui n'est plus acceptable. C'est cela, M. le Président.
Cela fait 36 ou 37 heures que je suis debout, je n'ai pas encore dormi
et ils ne me coucheront pas. Je vais en coucher une couple avant d'aller
dormir. Je les regarde pâlir tranquillement et jaunir. Je peux encore
parler. Je retourne en commission parlementaire de l'autre côté
parce qu'on a d'autre ouvrage à faire. On va revenir vous voir au cours
de la nuit, Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu; j'espère que vous allez veiller avec nous cette nuit et on
pourra étudier ensemble les projets de loi qui sont sur la table et pour
lesquels l'Opposition refuse de jouer votre jeu. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Mme Pauline Marais
Mme Marois: Merci, M. le Président. J'écoutais le
député de Hull et, quand il parle du fait qu'on encourage,
semble-t-il, les bénéficiaires de l'aide sociale à y
rester, sans même leur offrir quelque espoir ou quelque motivation pour
qu'ils en sortent, je pense que, malheureusement, il n'a sûrement pas vu,
constaté les efforts qu'on a faits jusqu'à maintenant - j'y
reviendrai, M. le Président - et qu'on s'apprête à faire
à l'égard des gens qui sont bénéficiaires de l'aide
sociale et qui n'ont qu'un rêve, en sortir, qui n'ont qu'un rêve,
être utiles à leur société, être utiles
à eux-mêmes et devenir autonomes. J'espère que ce sera
toujours l'objectif qu'un gouvernement se donnera, qu'il voudra poursuivre
à tout prix. C'est celui, en tout cas, dans lequel nous nous sommes
engagés comme gouvernement.
Le député de Hull faisait aussi référence
à certaines règles dans les relations du travail ou concernant
certains métiers pour lesquels on a réglementé, en disant
qu'on avait fait une espèce de cafouillis en disant: Vous n'avez pas
travaillé vos 3000 heures, vous ne pouvez pas avoir accès
à tel métier. Vous savez, dans ce cas, on a effectivement
réglementé et, quand on dit aux gens: Cela vous prend un certain
nombre d'heures accumulées pour assumer ces fonctions, dans le fond on
dit: Ce sont les personnes qui ont une certaine expérience à qui
on va offrir en priorité un certain nombre d'emplois. Et, à la
limite, si le marché était parfait et que nous étions en
situation de plein emploi, ces règles pourraient tomber sauf que,
à partir du moment où le marché de l'emploi nous dit: II y
a des offres de travail possible dans les métiers de la construction
pour 80 000 personnes, et qu'il y a 100 000 personnes qualifiées, il
s'agit de choisir comment, de la façon la moins douloureuse possible, on
va faire en sorte que 20 000 personnes n'y aient pas accès. C'est
terrible, mais c'est le choix que, dans certaines situations, nous sommes
amenés à faire dans une perspective où on établit
des règles pour tenir compte de la plus grande équité
possible. On s'entend?
C'était un certain nombre de commentaires que je voulais faire,
à la suite de l'intervention du député de Hull.
Cela étant dit, j'aimerais revenir à ce budget
supplémentaire pour lequel nous sommes ici ce soir et sur lequel nous
discutons. Je voudrais, d'abord, parler d'un des éléments
importants de ce budget supplémentaire. Je vais simplifier - je le sais
- mais peut-être dans une vision un peu pédagogique des choses. Ce
budget supplémentaire prévoit des baisses de taxes d'environ 135
000 000 $ pour ce qui est de l'année financière actuelle et
d'environ
345 000 000 $ pour 1984-1985. Il s'agit principalement,
évidemment, de la baisse de la taxe sur l'essence. Ce geste posé
par notre gouvernement vise essentiellement à appuyer la relance dans
une perspective où l'effet de consommation qui a démarré
lentement et progressivement pourra effectivement se continuer de façon
durable, stable et certaine, dans une perspective où on va effectivement
sentir un certain niveau de confiance. Je pense que c'est ce sur quoi repose
essentiellement et fondamentalement une relance, c'est-à-dire une
reprise en main par les gens, par les entrepreneurs, par les entreprises et par
les investisseurs, des moyens dont ils ont besoin pour développer leur
économie. On veut aussi rassurer les consommateurs de telle sorte qu'ils
procèdent progressivement à des achats de biens de consommation
durables, ce qui aura un effet quant à la reprise des investissements
dans le secteur manufacturier, dans le secteur industriel. Évidemment,
s'il y a reprise des investissements dans ces secteurs, M. le Président,
on conviendra avec moi que des emplois vont être soutenus, maintenus, et
même ajoutés. (23 heures)
Le problème qu'on vit maintenant n'est pas un problème
d'absence d'argent. Le niveau de l'épargne est très important au
Québec. C'est une question de confiance. Cette confiance a
commencé à se rétablir depuis un certain nombre de mois.
L'effet a commencé à se faire sentir sur notre économie.
Et, comme gouvernement, ce qu'on a décidé, c'est de l'appuyer le
plus ouvertement, le plus clairement possible, mais en tenant compte aussi des
contraintes dans lesquelles on se trouve comme gestionnaires des fonds publics,
se rappelant que ces années difficiles à travers lesquelles on
est passé, on ne souhaiterait pas les revivre et que cette ouverture
qu'on fait maintenant dans le but de rendre disponible un plus grand montant
d'argent pour l'ensemble des personnes va effectivement venir appuyer ce
mouvement de fond qui est actuellement engagé.
Cela, c'est un des éléments de ce budget
supplémentaire. En soi, ce geste ne signifierait sans doute pas
grand-chose s'il ne s'inscrivait, d'autre part, dans une perspective beaucoup
plus globale, beaucoup plus intéressante, à mon point de vue, qui
est effectivement le plan de relance que nous avons adopté et
proposé à l'ensemble des partenaires du Québec. Et ce plan
de relance, je vais vous dire, moi, pourquoi il me satisfait, pourquoi il
m'apparaît intéressant. Il aurait pu être, ce plan de
relance, essentiellement composé d'un amalgame de mesures très
cosmétiques, comme on dit dans notre langage - c'est-à-dire de
mesures qui ont un effet qui attire l'oeil, mais qui, dans les faits, donnent
plus ou moins de résultats ou risquent de donner plus ou moins de
résultats concrets. Je pense que ce qui est intéressant dans ce
plan de relance, c'est essentiellement la vision d'une intervention de court
terme, qui doit donc donner des résultats immédiatement, parce
que les personnes qui bénéficient de l'aide sociale actuellement
attendent de nous des résultats immédiats. Il y a aussi des
mesures qui vont avoir des effets à moyen terme et, enfin, des mesures
qui vont avoir un effet plus restructurant, plus structurant sur notre
économie. C'est sans doute la plus grande satisfaction que peut me
donner actuellement ce plan de relance dans le sens où c'est un tout
intégré, pensant à des besoins immédiats qu'il faut
combler, pour lesquels nous devons adopter un certain nombre de mesures.
Je pense, entre autres, à toute la réorientation de l'aide
sociale qui devrait donner des effets immédiats, à très
court terme, mais se prolonger dans le temps pour donner des effets à
moyen terme. Et je m'explique. Nous souhaitons mettre en oeuvre un certain
nombre de programmes qui vont s'adresser aux personnes aptes au travail,
actuellement bénéficiaires de l'aide sociale. Essentiellement,
ces programmes ou ces projets, sur une base volontaire, sans aucune
espèce de coercition de quelque façon que ce soit, visent
à augmenter le niveau d'employabilité des personnes qui vont
s'inscrire dans l'une ou l'autre de ces mesures.
Qu'est-ce que cela veut dire, le niveau d'employabilité? On sait
qu'il y a peu d'emplois disponibles actuellement qui n'exigent pas au minimum
une formation de base. Le secondaire V, je dirais, est la formation minimale
à laquelle on s'attend que les personnes auront eu accès. Donc,
augmenter le niveau d'employabilité en permettant le retour aux
études de ces jeunes ou moins jeunes qui iront chercher un diplôme
minimal de base, cela a un effet immédiat puisque ces jeunes pourront
s'occuper, non dans le sens de l'occupationnel, mais pourront investir du temps
dans leur formation, dans l'acquisition de connaissances et
d'expériences leur permettant d'être équipés
à moyen terme pour eux-mêmes et pour la société dans
laquelle ils s'inscriront et à laquelle ils participeront.
Donc, employabilité comme objectif; première mesure, un
retour aux études pour, à tout le moins, acquérir le
minimum de base de formation.
Le second volet de ce plan qui a un effet à court terme, mais un
entraînement à moyen terme, c'est le stage en entreprise ou
l'alternance entre la formation et l'apprentissage. Ce projet se raccroche
d'ailleurs à un programme de création d'emplois qu'on a mis sur
pied l'année dernière et à partir de l'évaluation
duquel on
a pu retirer un certain nombre d'éléments nous permettant
maintenant d'orienter et d'offrir ce type de mesures.
On a un peu ridiculisé tout à l'heure le bon d'emploi. Le
député de Hull le faisait sans se soucier du fait qu'un bon
nombre de jeunes qui se sont prévalus de ce bon d'emploi ont
occupé et continuent d'occuper des emplois permanents dans une
proportion importante. Mais, essentiellement, au départ, quelle
était l'idée derrière le bon d'emploi? L'idée
était que les jeunes qui sortaient de l'école n'avaient pas
d'expérience et on leur disait, chaque fois qu'ils se
présentaient pour obtenir un emploi: Bien, c'est dommage, vous n'avez
pas d'expérience. Oui, mais je sors de l'école, comment puis-je
avoir de l'expérience? C'est dommage, mais vous n'en avez pas. Et le
cercle vicieux reprenait. Donc, ce bon d'emploi visait essentiellement à
permettre à des jeunes d'acquérir une première
expérience de travail dont ils pourraient se prévaloir sur le
marché de l'emploi.
Ces jeunes, d'ailleurs, ne se sont pas installés, comme le disait
le député de Hull, sur le coin de la rue en attendant Godot. Ce
n'est absolument pas le cas. Ces jeunes sont devenus des agents de
main-d'oeuvre pour eux-mêmes. Ils se sont cherché, je dirais avec
agressivité, avec bonne foi, un emploi. Ils en ont trouvé, M. le
Président, pour un bon nombre d'entre eux. Le bon d'emploi,
jusqu'à maintenant, a permis à 14 621 jeunes et ce, pour
l'année 1983-1984, de se trouver un emploi, de vivre une
expérience.
A partir de cette expérience du bon d'emploi, du fait qu'il
était important que ces jeunes acquièrent une expérience,
est née l'idée de ces stages en entreprise. Et quand on dit stage
en entreprise, j'aimerais bien qu'on comprenne la notion d'entreprise. Souvent,
entreprise, pour nous, cela signifie l'entreprise manufacturière, mais
une société d'État, c'est une entreprise. Une boutique,
c'est une entreprise. Un bureau où on apprend de nouvelles techniques
reliées à la bureautique, par exemple, est une entreprise. Alors,
ce concept d'entreprise est donc très large. On en conviendra. (23 h
10)
Cette deuxième mesure vise donc à permettre à des
jeunes et à des moins jeunes d'augmenter, là encore, leur niveau
d'employabilité dans le sens qu'ils acquièrent une
expérience pratique et concrète des règles du jeu du monde
du travail, combinée à la "complétion" d'une formation de
base. C'est cela qu'on vise à l'intérieur de cette
deuxième mesure.
Enfin, la troisième mesure est de l'ordre des travaux
communautaires, le mot "communautaire" étant pris au sens large,
c'est-à-dire la communauté dans l'ensemble de ses composantes.
Souvent, le mot "communautaire" a pu signifier pour les gens des services
d'ordre social, alors que la communauté est une notion beaucoup plus
large que cela. Le troisième volet de ce projet a un impact à
court terme, mais son effet d'entraînement à moyen terme est aussi
évident. Ces personnes inscrites pendant un certain temps à l'un
ou l'autre de ces programmes - nous songeons actuellement à une base
d'un an - ressortiront soit mieux formées, soit mieux
expérimentées, soit, à la limite, possédant de
meilleurs instruments pour s'occuper elles-mêmes d'elles-mêmes, se
trouver des emplois et entrer sur le marché du travail. C'est là
essentiellement un des grands objectifs de ce plan de relance en ce qui a trait
à la réorientation de l'aide sociale, qui a des effets à
court terme, mais qui a aussi des effets d'entraînement à moyen
terme.
Ce serait, évidemment, insatisfaisant, M. le Président, si
on ne devait s'arrêter qu'à ces mesures de court terme. On me
dira: Même si nous formons des jeunes mieux préparés
à occuper des emplois, s'il n'y en a pas? Je tomberai
particulièrement d'accord avec vous si vous me dites cela. Il y a donc
des mesures de moyen terme, c'est-à-dire des mesures qui
démarrent maintenant, mais dont on sait que l'effet ne sera réel
que dans un an, deux ans ou trois ans. Je pense à toutes les mesures
reliées à l'aide au financement d'entreprises pour qu'elles
augmentent leurs investissements. Il y a aussi l'encouragement à
l'entrepreneurship dont nous développerons un volet particulier pour les
femmes. Les femmes ont des idées d'entreprise, elles doivent être
guidées, au départ, et être accueillies dans l'ensemble des
structures que nous possédons. On le fera, j'en suis très
fière, d'ailleurs.
Un certain nombre de mesures reliées à l'aide à
l'entreprise, à l'aide au financement, à l'encouragement à
l'entrepreneurship, à l'aide à la construction. Nous avons
prolongé certains éléments du programme
Corvée-habitation. Des mesures reliées aux immobilisations des
ministères qui vont avoir des effets à moyen terme, le moyen
terme étant toujours susceptible d'évaluation, deux ans, trois
ans: un an pour préparer les plans et devis, une deuxième
année pour que les travaux s'enclenchent et qu'ils
s'opérationnalisent et aient un effet sur l'emploi.
Enfin, si on avait voulu être essentiellement politiques dans le
sens étroit que ce mot peut parfois avoir... M. le Président, il
y a des collègues devant moi qui m'agacent en faisant un certain nombre
de remarques à voix basse; ils dérangent mon intervention.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous avez raison.
Mme Marois: Je vous en fais part. Si
vous pouviez intervenir, cela me rendrait service.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le message est
passé.
Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Celui-là ne
m'agace pas, il me déplaît profondément.
Je parle donc de mesures qui ont un effet à moyen terme. Si on ne
touchait que ces éléments, encore là ce serait
insatisfaisant. Il faut avoir aussi un impact structurant à long terme.
Je pense à toutes les mesures qui ont trait à la recherche et
à l'innovation. Il est bien évident que des investissements au
niveau de la recherche, cela n'a jamais - mais alors jamais - un effet
immédiat. Ce sont des procédés, ce sont des produits, ce
sont des techniques nouvelles qu'on expérimente. Souvent, il faudra un
certain nombre d'années avant qu'on arrive à trouver ces
techniques, à les mettre en oeuvre et à les expérimenter.
Ce sont des mesures à long terme. Ce n'est pas très rentable
politiquement à court terme, mais c'est essentiel pour une
société, par exemple, qui veut survivre, qui veut se reprendre en
main, qui veut se donner les instruments de son développement
économique, social, culturel et scientifique. C'est cela le choix qu'on
a fait comme gouvernement avec ce plan de relance: des mesures qui ont des
effets immédiats, des mesures qui ont des effets à moyen terme et
des mesures qui ont des effets à long terme.
Il y a une autre mesure qui combine un peu l'ensemble de ces facteurs et
je la trouve intéressante. Cela a l'air drôle, les gens vont
peut-être se poser des questions, on va l'expliquer. C'est l'aide au
reboisement. À court terme, évidemment -n'est-ce pas, cher
collègue de l'Énergie et des Ressources - il y aura des personnes
qui devront aller cueillir des "cocottes", les planter, replanter ces petits
arbres qui auront poussé. Donc, évidemment, cela requierra une
main-d'oeuvre immédiatement. Mais, essentiellement, ce n'est pas cela,
l'impact profond d'une mesure comme celle-là. C'est le fait que nous
investissons à long terme sur notre territoire, que nous reconstruisons
notre patrimoine de ressources. C'est cela que ça veut dire. Cela veut
dire que des forêts qu'on a coupées pendant des dizaines et des
dizaines d'années s'épuisent. Si on ne songe pas à les
remplacer, dans 10 ans ou 20 ans, la matière première dont on
aurait besoin pour faire fonctionner nos usines de pâtes et papiers, pour
faire fonctionner nos usines de bois de sciage, on ne l'aura plus. Comme
gouvernement, c'est avoir une vision d'une société en
développement avec des objectifs à atteindre non pas demain
matin, mais sur une longue période, sachant, cependant, qu'il faut vivre
maintenant, qu'il faut effectivement pouvoir créer le plus d'emplois
qu'il est possible de créer à ce moment-ci, sans, d'autre part,
avoir cette courte vue qui ferait en sorte qu'on s'autodétruirait
finalement comme société.
Je dois dire que, si je me sens si à l'aise dans ce plan de
relance, c'est essentiellement à cause de l'ensemble des
éléments dont j'ai fait mention ici. J'aurais pu,
évidemment, faire état d'un nombre de mesures encore très
importantes et très nombreuses. Qu'on pense à l'effort essentiel
qu'on va faire à l'égard des investissements pour
Montréal. Je pense que c'est le député de Mont-Royal qui
disait ce matin: La situation à Montréal est un peu
pénible, le taux de chômage est plus élevé et il est
important que, si une large partie de la population vit à
Montréal ou en périphérie, nos programmes aient un impact
à l'égard de cette population. Nous partageons essentiellement ce
commentaire du député. Nous l'avons même un peu
devancé puisque, dans le plan de relance, il est prévu des
efforts importants pour la région de Montréal qui, effectivement,
a un effet de levier et un effet d'entraînement quant au potentiel de
développement économique du Québec et quant au
développement économique réel du Québec. Là
encore, on y a songé dans ce plan de relance. (23 h 20)
M. le Président, moi j'en suis fière. Je puis dire
à cette Assemblée, compte tenu des mesures qu'on a
déjà assumées à l'intérieur de ce budget
supplémentaire que nous allons adopter et de ces mesures
annoncées qui s'opérationnalisent à l'intérieur du
plan de relance, qu'on aura assumé pleinement nos responsabilités
dans une perspective où on sera capables d'offrir aux
Québécois et aux Québécoises non seulement de
l'espoir, mais concrètement et réellement du tangible: plus
d'emplois pour les hommes et les femmes du Québec, plus de
possibilités d'emploi parce que mieux équipés et mieux
formés, plus de possibilités d'emploi parce que des gens
d'entreprise vont avoir reçu le coup de pouce nécessaire pour
procéder aux investissements dont eux aussi souhaitaient la
réalisation, mais qu'à cause d'une certaine
insécurité ils ne débloquaient pas. C'est cela,
j'espère, qu'on aura atteint par ce plan de relance. Je vous remercie,
M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'accorder la parole
au député de Laurier, je dois vous dire que, normalement, au
moment où je vous parle, je devrais à titre de président
de cette Assemblée protéger le droit de réplique du
ministre des Finances qui, normalement, en vertu de l'article 127,
paragraphe 3, est d'une heure. Cependant, à la suite d'une
entente qui peut être confirmée par le leader adjoint du
gouvernement, nous dirigerons le temps: une demi-heure de réplique pour
le ministre des Finances, si j'ai bien compris, et une autre demi-heure qui
pourrait être prise par des membres de l'Opposition et qu'ils pourront
partager à leur gré. Est-ce cela, M. le leader?
M. Boucher: C'est exact, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laurier, vous pouvez commencer la période d'une demi-heure.
M. Christos Sirros
M. Sirros: M. le Président, vous comprendrez, après
m'avoir dit à deux ou trois reprises que je parlais, que je ne parlais
pas, que je parlais et que je ne parlais pas, que le gouvernement s'est
finalement décidé. Le ministre de l'Énergie et des
Ressources devient bien tannant parce que cela a l'air qu'il ne peut pas
arrêter les mouvements spasmodiques de ses mains. C'est bien normal de ce
gouvernement spamodique, c'est à peu près ce qui le
caractérise. Cependant, pour changer de sujet et pour ne plus parler du
ministre et ainsi devenir plus sérieux... Eh bien, chacun a ses
opinions, M. le ministre.
On vient d'entendre la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu nous parler du budget supplémentaire.
On a peu appris, malheureusement je dois le dire, parce que, pour presque
l'ensemble de la demi-heure, la ministre s'est contentée de parler de
généralités en ce qui concerne le soi-disant plan de
relance et en particulier de quelques aspects des plans annoncés par le
premier ministre concernant le dossier dont elle est maintenant
l'héritière, qui, malheureusement, ne contiennent - et on avait
l'occasion hier d'en parler un peu à l'étude des crédits -
aucune précision spécifique, M. le Président.
Pour regarder l'affaire un peu plus concrètement et pour juger
finalement à un moment où on parle du budget
supplémentaire, il faudrait peut-être retourner en arrière
et voir jusqu'à maintenant ce que le gouvernement a fait et regarder par
après ce que le gouvernement propose par rapport à la crise qu'on
vient de passer. On nous disait tout à l'heure que, semble-t-il, les
membres du gouvernement voient une certaine confiance montante dans la
population. Ce n'est sûrement pas dans les 27% de la cote de
popularité. Est-ce parlementaire ce geste, M. le Président, du
ministre de l'Énergie et des Ressources?
M. Duhaime: Question de règlement, M. le
Président.
Une voix: Cela veut dire "fuddle duddle"
M. Sirros: Je comprends qu'ils doivent être bien
tannés de ce temps-ci de se faire engueuler, si je peux m'exprimer
ainsi, mais je crois sincèrement que chaque engueulade qu'ils ont eue
jusqu'à maintenant valait la peine à 100%, surtout en ce qui
concerne les interventions du ministre. Si c'est caractérisé par
ce genre d'intervention, vous comprendrez, M. le Président, que c'est
bon que les caméras ne le prennent pas.
Pour revenir un peu à l'affaire, jusqu'à maintenant qu'a
fait le gouvernement durant les deux ans de crise qu'on a tous vécus? On
sera peut-être, en regardant cela, en meilleure position pour
évaluer ce que le gouvernement propose à ce moment-ci pour,
soi-disant, sortir de la crise, cette crise qu'on nous dit être est en
train de passer.
Au moment de la crise comme telle, où tout s'effondrait, le
gouvernement a réagi avec une série de mesures de panique. En ce
qui concerne l'emploi, au moment où le Québec perdait plus
d'emplois que partout au Canada et le plus rapidement, parce que la perte des
emplois a commencé ici bien avant que la crise ait atteint le niveau de
perte d'emplois dans le reste du Canada, le gouvernement n'était pas du
tout préparé à faire face à cette question et a
réagi avec une série de mesures dont il reconnait aujourd'hui
l'aspect temporaire. Le premier ministre qualifiait de "jobines" tous ces
emplois créés par les programmes temporaires. Cela a
été amené avec légèreté et un manque
d'encadrement et de structure assez incroyable de la part du gouvernement qui
investissait au-delà de 180 000 000 $, si ma mémoire est bonne,
dans des programmes de création d'emplois garrochés ni plus ni
moins par les fenêtres dans le sens qu'une fois cet argent
dépensé il n'y avait rien qui restait.
On aurait cru tout au moins que pendant que tout cela se passait le
gouvernement aurait été en train de penser à la
façon de sortir de la crise à un moment donné quand la
crise commencerait à s'atténuer. Au moment où on
commencerait à sortir du tunnel de la crise on serait prêt
à embarquer pour faire en sorte qu'il y aurait des actions
gouvernementales précises qui pourrraient permettre d'envisager le moyen
terme, dont le ministre parlait, avec un peu plus de confiance et le long terme
avec un peu plus de clarté.
Bien que logiquement tout le monde aurait été en droit de
s'attendre à avoir ce genre de sérieux dans l'entourage du
gouvernement, on s'est retrouvé, deux ans après le début
de la crise, avec l'incapacité du
gouvernement de venir devant la population pour présenter quoi
que ce soit de concret. Le plus bel exemple de tout cela, c'est le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
où son titulaire, une semaine ou deux à peine après
l'annonce de toutes ces soit-disant mesures spectaculaires et magnifiques de la
part du premier ministre, était obligé, selon lui, selon sa
propre conscience semble-t-il, de démissionner en disant tout simplement
qu'il ne se sentait plus utile.
Si on s'attarde quelques instants sur cette déclaration de cet
ex-ministre à l'effet qu'il ne se sentait plus utile au sein de ce
gouvernement, on peut comprendre pourquoi il est arrivé à cette
conclusion. Quand on regarde les mesures qui ont été
proposées par le premier ministre, le 13 novembre, en conférence
de presse, dans le salon rouge, devant les caméras, avec tout le tralala
qui accompagne ce genre de spectacle, après avoir fermé le
Parlement pendant un mois pour penser, pour réfléchir, on
constate une chose: dans toutes les mesures proposées, il manque un
élément majeur. C'est un élément qui concerne
effectivement l'emploi. Il n'y a rien, nulle part, dans les propositions pour
intensifier le plan de relance - je pense que c'était le titre - qui
parle vraiment sérieusement d'une politique d'emploi. On nous a
annoncé une série d'éléments
déconnectés les uns par rapport aux autres qu'on a trouvés
- quelqu'un le disait l'autre jour d'une façon pittoresque - entre
Pointe-au-Pic à la première réunion du Conseil des
ministres et Compton. Dans ce chemin, on a ramassé tous les
éléments qu'on pouvait ramasser qui, de près ou de loin,
pouvaient parler un peu d'emploi. On les a mis dans un sac, on les a
emballés et on les a présentés au salon rouge.
De là à parler de politique d'emploi, il y a un
énorme pas parce que normalement une politique d'emploi serait
basée sur deux ou trois principes essentiels au lieu d'être une
série d'éléments déconnectés allant du
reboisement jusqu'au travail communautaire pour les bénéficiaires
d'aide sociale. Je reviendrai là-dessus dans un instant. (23 h 30)
Sans cette politique d'emploi, sans aucune réelle tentative de
mettre sur pied une politique qui permettrait de viser l'accroissement de
l'emploi au Québec, surtout - comme quelqu'un le disait - depuis
longtemps que c'est ce que cela prendrait au Québec, on arrive à
la conclusion qu'on n'est plus utile et qu'on démissionne. C'est ce qui
est arrivé au prédécesseur de Mme la ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. La conclusion
était - si je peux interpréter un peu ses déclarations,
étant donné le peu d'informations qui nous ont été
données - mon interprétation était qu'ayant
constaté, à la suite de deux ans de crise qui avaient
dévasté tant de personnes dans la société et en
particulier chez les jeunes, où le taux de chômage se trouve aux
alentours de 22%, 23%, 24% et 25% selon les périodes... Après un
moment comme celui-là où tout ce monde a été
dévasté, on s'est retrouvé au Québec avec à
peu près 26% de la population active inactive, sur le chômage ou
sur le bien-être social. Vous avez quelque 400 000 personnes sur
l'assistance sociale, 400 000 ou 450 000 personnes sur le chômage, soit
26% à peu près de toute la population active du Québec.
C'est un fardeau très lourd pour n'importe quelle société.
Face à l'ampleur du problème, tout ce qu'on a à proposer
c'est le travail communautaire qui pourrait atteindre 10 000 ou 20 000 jeunes
bénéficiaires d'aide sociale et un programme sur lequel on a
beaucoup de questions à poser; surtout en ce qui concerne le maintien de
la marginalité de ces personnes; un programme qui parle d'apprentissage
dans l'entreprise lequel vise, pour le mois de juin comme début,
éventuellement on ne sait pas quand, un maximum de 30 000 personnes, le
maintien ou le retour aux études de 10 000 jeunes à peu
près si ma mémoire est bonne - je me fie à ma
mémoire à ce moment-ci.
On met à côté de cela l'ampleur du problème
qu'on a vécu ici au Québec et qui traîne encore dans le
décor. Car quoiqu'on dise sur la crise, je n'ai pas vu de diminution
dans le nombre de bénéficiaires d'assistance sociale. Au
contraire, on vient d'adopter un autre budget supplémentaire qui vote 66
000 000 $ pour l'augmentation des prestations d'aide sociale issue directement
de l'augmentation du nombre de bénéficiaires d'aide sociale. Je
n'ai pas vu le taux de chômage réduit d'une façon
quelconque.
Même si on dit que la crise est passée, je pense que les
gens qui vivent la situation ne comprennent pas la même chose. Il doit y
avoir des indices économiques à un moment donné qui
parlent de la disparition de la crise. Les indices humains parlent encore de
crise. Il y a encore crise au Québec. C'est peut-être cette crise
qui se réflète dans les récents sondages. C'est pour cela
que j'ai dit au tout début que j'aurais aimé entendre, au lieu de
voeux pieux, au lieu de grands mots sur l'espoir qu'il faut redonner aux
Québécois, chose qu'on entend depuis bon nombre d'années
de ce gouvernement, j'aurais de beaucoup préféré entendre
des choses bien concrètes, bien terre à terre, des choses qui
s'attaqueraient directement au coeur du problème d'une façon
sérieuse sans essayer de faire croire aux gens qu'on fait vraiment
quelque chose.
Je prétends que ce qu'on fait, même si en soi les
programmes comme l'apprentissage en entreprise, les programmes comme le travail
communautaire, les programmes comme le maintien et le retour aux
études
sont des éléments qui ont une valeur, pris dans leur
ensemble, avec la crise qu'on a vécue, avec l'ampleur du problème
qu'on a, je dis tout simplement que ce n'est pas sérieux. Ce n'est pas
sérieux, M. le Président, car si on commence en regardant ces
trois programmes en particulier, si on veut parler de la réorientation
de l'aide sociale et qu'on escamote complètement toute notion de
réintégration réelle sur le marché du travail ou
toute incitation réelle sur le marché du travail des
assistés sociaux, en ne faisant rien - on va peut-être me dire que
cela va venir à un moment donné; je rappellerais que tout ce
qu'il va y avoir au mois de janvier ou février sera un livre blanc et
d'un livre blanc à une loi on a beaucoup de temps à attendre en
escamotant tout l'aspect d'incitation au travail des assistés sociaux,
en maintenant les taux d'imposition réelle de tout revenu
supplémentaire qu'un assisté social pourrait aller chercher sur
le marché du travail à peu près 90% ou 95%...
Je ne sais pas si vous le savez, M. le Président, à
l'heure actuelle si vous êtes bénéficiaire d'aide sociale
et que vous recevez des prestations de 424 $ par mois si vous êtes seul,
tout ce que vous avez le droit de gagner en plus par travailleur sans que,
dollar pour dollar, votre aide soit coupée, c'est un grand total de 25
$. Après ces 25 $, chaque dollar de revenu supplémentaire que
vous gagnez vous est enlevé sur vos prestations d'aide sociale. Je
prétends qu'il aurait pu y avoir un premier pas fait dans la direction
d'inciter les bénéficiaires d'aide sociale de retourner sur le
marché du travail en ajustant cette exemption, en permettant de faire en
sorte que le travail soit payant. Parce qu'à l'heure actuelle, si vous
faites un calcul simple, vous allez constater que si quelqu'un travaille 80
heures par mois - j'avais pris l'exemple d'une famille monoparentale avec deux
enfants où la personne aurait décroché un travail à
temps partiel à vingt heures par semaine -au salaire minimum, la
conclusion, si vous faites le calcul après avoir déduit les
sommes d'argent qui sont récupérées par l'aide sociale,
qui pénalise le travail, le taux horaire du travail de la personne
revient à environ 0,62 $ l'heure. C'était le calcul que j'avais
fait.
Je ne connais pas beaucoup de personnes qui iraient travailler pour 0,62
$ l'heure quand l'État leur dit en ce moment, si vous faites rien et que
vous restez à la maison, vous recevez X dollars par mois. Si vous
travaillez, vous ne recevez pas beaucoup plus. Même, un grand total, si
vous êtes seul, de 25 $ par mois de plus.
Un premier élément sérieux aurait été
d'agir directement sous cet aspect d'incitation au travail. La deuxième
chose absolument essentielle aurait été de vraiment pondre une
politique d'emploi basée sur certains principes comme la
fiscalité, comme une politique salariale pour l'ensemble du
Québec et comme, par exemple, des subventions aux emplois basées
sur la subvention directe de l'emploi et non pas la création temporaire
des emplois.
Je vois que vous me faites signe qu'il me reste environ 30 secondes. Je
vais m'arrêter là pour l'instant...
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est votre enveloppe,
vous pouvez la partager avec les députés.
M. Sirros: Je pensais que j'empruntais le temps du ministre des
Finances et je ne voulais jamais faire cela. Vous savez comme il est jaloux de
son temps.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Du tout, c'est parce que
j'avais cru comprendre que vous partagiez moitié, moitié. C'est
la raison pour laquelle je vous faisais signe que vous étiez rendu
à quinze minutes.
M. Sirros: M. le Président, suite aux annonces qu'a faites
le premier ministre le 13 novembre, suite à ce manque de politique
cohérente de l'emploi, je vois très mal comment on peut dire -
comme vient de le dire la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu - qu'on puisse être fier de ce qui s'est
fait jusqu'à maintenant. Je ne crois pas qu'on peut être fier
quand on vit encore dans une situation où il y 450 000 chômeurs,
400 000 assistés sociaux et qu'encore plus, la ministre responsable de
la création d'emplois et de l'aide sociale -sécurité du
revenu, ça inclut cela - tout ce qu'elle peut amener à cette
Chambre dans cette première intervention sur le budget, qui est quand
même un moment important dans la vie parlementaire, tout ce qu'elle a pu
nous dire c'étaient des généralités, des
banalités même, je dirais dans certains cas parce que je crois
honnêtement que la population attendait beaucoup plus le 13 novembre. La
population après avoir vu le parlement fermé pendant un mois,
après avoir eu tout ce beau monde réuni ensemble en caucus
éloigné quelque part en privé pour pondre, pour penser,
pour réfléchir, pour arriver à la suite d'une crise la
plus sérieuse qu'on ait connue depuis les années vingt,
semble-t-il...
Tout ce qu'ils ont pu faire c'est d'annoncer, non pas des choses
concrètes mais des intentions. On va faire ci, on va faire ça et
quand on posait des questions comme combien cela va coûter? Qui
visiez-vous? Quand cela va-t-il commencer à fonctionner? Ils
n'étaient pas capables de nous le dire. Le premier ministre disait:
Attendez dans les semaines qui vont suivre, il y a les ministres qui vont faire
d'autres conférences
de presse pour vous annoncer des choses concrètes.
(23 h 40)
En ce qui concerne particulièrement le dossier de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, jusqu'à
maintenant, il n'y a pas eu un iota de plus qu'on avait le 13 novembre. On
n'est pas plus avancé qu'on l'était il y a au-delà d'un
mois. On a eu une visite éclair, à la dernière minute, de
l'ex-ministre d'Ottawa pour s'entendre avec son homologue
fédéral. L'homologue fédéral a dit: Bien, oui, cela
a du bon sens. Effectivement, j'étais surpris de voir qu'il y avait des
gens qui croyaient qu'il y aurait eu des objections de l'autre
côté, parce que je pense que les deux gouvernements sont aux
prises avec une situation... Il faut repenser certains articles,
particulièrement en ce qui concerne l'aide sociale et la loi de
l'assistance publique du Canada, une loi qui a été votée,
je pense, il y a maintenant dix-huit ou vingt ans, et qui n'a jamais
été changée ou retouchée. Et c'est clair pour tout
le monde qui veut bien le voir que c'est une loi qui est désuète
quant à la situation qu'on a connue ces deux ou trois dernières
années, que c'est une loi qui ne permet pas d'aller sur une autre voie
si on veut mieux faire dans l'avenir.
Alors, je ne crois pas qu'il y avait là matière à
désaccord. Au contraire, j'aurais préféré, et je
crois que cela aurait été beaucoup plus sérieux et
responsable si ce genre de négociations et de discussions avaient
été entamées avant que la soi-disant crise expire parce
que si, tout ce qu'on a fait, a été d'attendre que l'on sorte de
cette soi-disant crise pour commencer à faire des choses, vous pouvez
voir que pendant un certain temps, je dirais au moins six mois ou un an, il n'y
a pas grand-chose qui va se faire. Au contraire, si on avait voulu vraiment
donner une orientation, prendre des actions sérieuses dans ce domaine,
il aurait fallu agir au moment le plus propice, c'est-à-dire au moment
où la crise commençait à être
désamorcée. C'est un peu comme si on mettait toutes les choses
sur le "hold" et qu'on disait: Que personne n'agisse avant qu'on puisse, nous,
s'organiser.
Je vous rappelle une dernière chose, avant de conclure.
C'était en avril 1983, lors du discours inaugural, que le premier
ministre disait de son siège, très solennellement en parlant aux
jeunes qui recevaient de l'assistance sociale - les 18-30 ans qui sont
condamnés, ni plus ni moins, à vivre avec 149 $ par mois -: II y
a quelque chose qui s'en vient pour vous pour le mois de juin 1983 - à
ce moment-là. On va régler la question, ou, en tout cas,
régler la question des 18-30 ans qui reçoivent de l'aide sociale.
On a vu le mois de juin passer; on a eu quelques bribes... Il y a eu,
semble-t-il, au Conseil des ministres, quelques discussions, et le Conseil des
ministres a cru bon, dans sa sagesse, de ne pas donner suite à cette
promesse. On a vu l'été passer. On a attendu les fameuses
annonces du premier ministre le 13 novembre. Moi, en tout cas, j'étais
parmi ceux qui disaient: C'est sûr qu'ils ne l'ont peut-être pas
fait pour le mois de juin, mais il y aura certainement quelque chose lors de
ces grands discours que le premier ministre va nous faire le 13 novembre. Et
j'étais aussi parmi ceux qui furent très étonnés de
voir que c'était un discours vide, caractérisé de
pétards mouillés.
Je pense que la personne qui a fait cette caractérisation a
été bien gentille, parce que, en ce qui concerne le domaine de la
main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu, en ce qui concerne en
particulier les 18-30 ans, à la suite de promesses qui leur ont
été faites, je crois que c'était même cynique. C'est
cynique de dire à des gens qui sont les plus dans le besoin, qui n'ont
aucune porte de sortie: Attendez, on va régler votre problème et
revenir sans aucune solution. C'est ce qui, je crois, est cynique.
En conclusion, je crois qu'il y a bien des gens de l'autre
côté qui ont perdu contact avec la réalité. Je ne
peux pas les qualifier autrement, si on est en train de nous dire qu'on est
fier, si on est en train de nous dire qu'on a fait en sorte que la confiance
des gens commence à remonter. Je répète que les chiffres
en ce qui concerne les plus démunis dans cette société
n'ont pas changé. Ils sont encore les mêmes. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Pontiac, vous avez à votre disposition les sept minutes trente qui
vous restent.
M. Robert Middlemiss
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Quelle
différence, à la fin du budget, comparativement à toutes
les attentes que la population avait le 13 novembre dernier. On avait
annoncé une pièce en deux temps deux mouvements qui a
débuté par notre premier ministre dans le salon rouge. Il nous a
annoncé toutes sortes de bons projets et on a pu s'apercevoir, au moment
où les questions ont été posées par les
journalistes, qu'en réalité il y avait très peu de
substance. C'était plutôt un show. Toutefois, on a laissé
entendre que le ministre des Finances, qui présenterait un mini-budget
le mardi suivant, était pour nous donner les détails concernant
le nombre d'emplois qui seraient créés, le montant d'argent que
cela coûterait. Mais - il fallait bien s'attendre à cela, M. le
Président - on s'est aperçu le mardi suivant que nous
n'étions pas plus éclairés sur la réalité de
cette soi-disant relance.
Comme il reste très peu de temps, M. le Président,
j'aimerais toucher à certains aspects du budget. On parle beaucoup du
reboisement. On est rendu à 300 000 000 de plants par année.
Toutefois, il y a certainement quelque chose qui ne va pas; le gouvernement a
pris conscience tout d'un coup qu'il y avait réellement un
problème de reboisement. Cela faisait déjà longtemps qu'on
posait des questions au ministre concernant la politique de reboisement. On
attirait son attention sur le fait qu'ici au Québec on reboisait 5,8% de
ce qu'on récoltait comparativement à la province de l'Ontario
où on reboise 13% et, en Colombie britannique, 34%. Je me
réfère à l'étude des crédits datée du
17 juin 1983. À ce moment, le ministre nous disait: "Nous allons, bien
sûr, au cours de l'année 1983-1984, maintenir les programmes
d'amélioration des forêts publiques et privées du
Québec et, à cette fin, y affecter une somme de 55 500 000 $".
Et, à ce moment-là, on parlait de 100 000 000 de plants.
De plus, M. le Président, j'ai eu l'occasion de poser des
questions au ministre. Il répondait que tous les intervenants dans le
domaine de la forêt étaient extrêmement satisfaits du
programme de reboisement. Pourquoi, rendu au mois de novembre 1983, qui n'est
pas la saison propice au reboisement, vient-on de découvrir que
maintenant cela nous prendra 300 000 000 de plants? C'est très beau de
parler, au mois de novembre, de 300 000 000, mais les gens qui ont
été trompés dans le passé se posent des questions,
à savoir si réellement on va réussir à avoir les
300 000 000 de plants qu'on est censé avoir pour le reboisement. En
parlant de reboisement, le ministre du Commerce extérieur, durant la
campagne électorale partielle dans Mégantic-Compton, avait eu
l'occasion de visiter les industries du Lac-Mégantic, une industrie de
déroulage qui utilise du merisier. Il a dit qu'il était
épaté par cette politique de reboisement, laissant même
miroiter que cette politique de reboisement pourrait assurer
l'approvisionnement. Premièrement, je ne crois pas que, dans cette
politique de reboisement, on parle de merisier et, même si on en parlait,
cela prend 125 ans avant qu'un arbre atteigne la grosseur pour le rendre
rentable et le dérouler.
Il y a aussi les annonces du projet Corvée-habitation. Le premier
ministre, au moment de l'annonce, a dit, sans spécifier: Le projet
Corvée-habitation est prolongé jusqu'au 15 juillet 1984. Mais il
a oublié de dire - et je sais que le ministre, un peu plus tard, dans
une conférence de presse, l'a dit -que c'est la phase IV toutefois. On
n'a pas tenté d'expliquer aux gens que le phase III garantissait
un taux de 9,5% d'intérêt pendant 3 ans, 2000 $ avec une
possibilité d'un autre montant de 1000 $ si la municipalité
contribuait 1000 $. C'était un bon plan. Le ministre a même dit
que, si à cause du prolongement, au lieu de livrer la maison au mois de
mars, on la livrait au mois de mai, on aurait 5000 mises en chantier dans un
mois. (23 h 50)
J'espère qu'un jour le ministre pourra me dire sur quoi sont
basées ces 5000 mises en chantier. Le meilleur mois qu'on ait jamais eu
en construction a été le mois de mai de cette année. Au
mois de mai, on a atteint environ 5700 mises en chantier. Si on part du 13
novembre - les vacances de la construction commencent le 23 décembre
-les deux mois qu'on a donnés en fin de compte n'affectent rien, il faut
encore avoir fait le début des travaux de la maison au 31
décembre. Il restait un mois pour ces mises en chantier. J'espère
qu'on pourra atteindre 5000 mises en chantier. Avec la saison qu'on
connaît et le climat, le mois de décembre n'a jamais
été un gros mois pour commencer une construction. Espérons
qu'on va l'atteindre. D'après moi, ce sont encore des beaux discours. On
fait miroiter à la population ce que l'on va faire, qu'on va faire ces
choses, sans garantir qu'on va les avoir.
M. le Président, il y a énormément de
problèmes - mon collègue de Hull y a touché - dans
l'affaire de l'OCQ. Dans mon comté, nous avons plusieurs jeunes
personnes qui demeurent dans les régions éloignées des
centre-ville et qui ont obtenu des bons d'emploi. Ces jeunes avaient aussi un
employeur qui voulait les engager. Toutefois, lorsqu'un jeune était
obligé de se rapporter à l'OCQ, on lui dit: Vous êtes le
douzième sur la liste. Les entrepreneurs qui avaient besoin de ces
apprentis, s'ils étaient obligés de suivre les exigences de
l'OCQ, devaient faire venir des gens qui demeuraient à 80 milles de
l'endroit où était le travail, payer leur pension et ceci leur
causait des problèmes quant à leur capacité
d'exécuter les travaux à un prix concurrentiel. Les perdants dans
tout cela, c'est la population. Ce gouvernement donne d'une main un bon
d'emploi et, de l'autre main, il fait des lois qui empêchent les gens de
travailler.
En terminant - M. le Président, vous m'avez fait signe que mon
temps est terminé - le budget a commencé par un gros show. On
nous a obligé à discuter le budget durant la nuit. Je suis
convaincu que, s'il avait été si bon que cela, on ne l'aurait pas
fait durant la nuit. Je vais dire comme mon collègue de Laurier, c'est
un gros pétard mouillé.
Le Président suppléant (M. Paré): La parole
est maintenant au ministre des Finances, M. le député de
L'Assomption, votre droit de réplique.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, il y a un thème qui
revient fréquemment dans les propos de l'Opposition depuis quelques
jours, c'est que nous avons à discuter tard le soir ou même la
nuit d'un exposé complémentaire sur les politiques
budgétaires du gouvernement que j'ai eu l'honneur de présenter le
15 novembre dernier. Rien, en effet, n'est plus bizarre, pour un document qui a
une certaine importance pour les contribuables puisque, en somme, sur une
année entière, on aura baissé leurs impôts de 320
000 000 $ que de voir que l'on ait à en discuter au milieu de la nuit et
que j'aie à présenter cette réplique à peu
près à 23 h 55 aujourd'hui.
Je vous rapellerai qu'il n'est pas dans nos habitudes ou dans nos
traditions d'avoir des exposés complémentaires à
l'automne. Normalement, nous nous contentons d'un discours sur le budget au
printemps. Il y a deux ans, cependant, en novembre 1981, j'ai dû
présenter un exposé complémentaire parce que la situation
économique était telle qu'elle entraînait, sur le plan des
équilibres financiers du gouvernement, une situation qui était
insupportable, qui exigeait des augmentations à très court terme
des impôts. À ce moment, puisque c'était nouveau dans nos
pratiques, nous nous étions entendus des deux côtés de la
Chambre pour que le débat puisse tenir dans douze heures. Ce
n'était pas un discours sur le budget régulier. On s'est donc
entendu de part et d'autre pour que le débat dans cette Chambre soit
relativement limité.
Cette fois-ci, nous avons un exposé complémentaire sur le
budget qui a été fait le 15 novembre dernier. Cette fois, il ne
s'agit pas d'augmenter les impôts; il s'agit de les réduire. On
pourrait s'imaginer que l'Opposition ne tienne pas particulièrement
à étendre un débat lorsqu'on annonce des baisses
d'impôt. Mais l'important cette fois-ci, c'est de démontrer
à quel point un Parlement qui siège moins longtemps que
d'habitude à l'automne est paralysé. Donc, on paralyse le
Parlement. Donc, au lieu d'une entente normale de douze heures de débat
sur un exposé complémentaire, l'Opposition exige que ce soit 25
heures - il n'y a pas longtemps, cela fait trois ou quatre jours qu'elle l'a
exigé - prévues pour un débat sur le budget.
Forcément, comme les journées ne sont pas parfaitement
élastiques et qu'on nous annonce, il y a quelques jours à peine,
que ce ne sera pas 12 heures, mais 25 heures, eh bien, on siège quand on
peut. C'est ce qui nous amène à discuter de ces questions
à des heures où, reconnaissons-le, tous ensemble on
préférerait probablement être au lit au lieu d'être
en Chambre.
Je noterai, cependant, que cela n'a pas l'air de déranger
particulièrement nos voisins d'en face que je fasse ma réplique
à une heure pareille; nous sommes une bonne quinzaine de notre
côté et ils sont deux. Qu'ils m'excusent de les faire veiller
aussi tard, ces deux-là. Je leur souhaite, au prochain exposé
complémentaire de l'automne, si jamais nous en avons un, de choisir
plutôt 12 heures que 25. J'entends de ces deux le commentaire que,
peut-être, ce que j'ai à dire à l'heure actuelle est un peu
léger. Je vous avouerai qu'après maintenant quelque 36 heures
d'affilée dans cette Chambre - non, il ne faut quand même pas que
j'exagère, on a dépassé largement 24 heures ininterrompues
- j'ai entendudes choses à ce point légères que je n'ai
pas d'excuse à présenter.
Passons au fond du débat. On m'en excusera, même s'il est
tard et même si les deux représentants de nos amis d'en face qui
sont ici ce soir peuvent se plaindre de l'heure tardive. Passons au fond du
débat. Depuis quatre ans, le gouvernement de Québec s'est rendu
compte - je pense avant tous les autres - que nous allions vers une situation
où il serait terriblement difficile d'équilibrer ses comptes, de
ne pas montrer des déficits absolument monstrueux. Nous avons
été d'abord préoccupés, ensuite saisis, ensuite -
je dois le dire - un peu paniques de voir de quelle façon les revenus
prévus étaient inférieurs à ce qu'on pouvait
attendre, à quel point les dépenses s'emballaient - vous vous en
souviendrez - il y a deux ans ou deux ans et demi, quand le taux d'inflation
était de 10% ou 12% par année, et à quel point
d'énormes déficits apparaissaient qui remettaient en cause
l'aptitude des gouvernements à fonctionner.
Dans ces conditions, nous avons eu, nous, comme gouvernement, un certain
nombre de choix très difficiles à faire. Il a fallu qu'on
augmente les impôts, il a fallu qu'on baisse la croissance des
dépenses. À l'égard de nos alliés politiques,
c'est-à-dire les gens qui sont non seulement dans les syndicats en
général, mais dans les syndicats du secteur public, on a
été forcé de dire: Non, vous n'aurez pas les augmentations
de salaire auxquelles vous pouviez vous attendre parce que cela
représente plus de la moitié des dépenses du gouvernement.
C'est tellement important, cela a un rapport tellement direct avec la ponction
fiscale et les impôts qu'on doit établir, qu'on doit trancher et
que vous n'aurez pas les augmentations auxquelles vous vous attendiez. Cela n'a
pas été facile. (minuit)
Regardons maintenant où nous en sommes, au cours de l'hiver 1983,
dans le canevas général des finances publiques en Amérique
du Nord. Tous les Canadiens et tous les Québécois ont l'habitude
de se dire: Mais les Américains ont des déficits
épouvantables. Le gouvernement fédéral
américain a un déficit de 200 000 000 000 $. Tous les
Canadiens, qui ont l'habitude de chiffres plus modestes, de dire: Ce que c'est
énorme! Ce que c'est fabuleux! Pas étonnant que les choses
aillent mal lorsque le gouvernement américain a 200 000 000 000 $ de
déficit. M. le Président, nous avons une longue habitude au
Canada de nous justifier et de justifier nos turpitudes en nous comparant avec
les Américains simplement parce qu'ils sont dix fois plus gros que
nous.
Le déficit du gouvernement fédéral canadien,
à la même échelle de population qu'aux États-Unis,
ne serait pas de 30 000 000 000 $ comme il l'est, il serait de 300 000 000 000
$. Le gouvernement américain, par rapport au gouvernement canadien, mais
il est modeste! Le gouvernement canadien a "exubéré". Il s'est
tapé un déficit de 30 000 000 000 $ avec, je dois dire, une
béatitude surprenante. C'est beau d'avoir une Banque centrale à
main droite. C'est commode, c'est beau, c'est grand, c'est
généreux, comme le disait le général de Gaulle
à propos d'autre chose, une banque centrale. Bien sûr, cela peut
imprimer de l'argent. Nous nous sommes tapé au Canada, depuis trois ou
quatre ans, des déficits absolument gigantesques relativement à
nos ressources.
Mais cherchons à poser le Québec là-dedans. J'ai
dit tout à l'heure: Le gouvernement fédéral canadien s'est
tapé un déficit cette année de 30 000 000 000 $. Ne
parlons pas de déficit, en ce sens que d'un gouvernement à
l'autre au Canada la définition du déficit sur le plan comptable
est très différente. Il y a certains gouvernements qui traitent
leur fonds de pension d'une certaine façon, d'autres qui n'en tiennent
pas compte, d'autres qui sont sur une base d'exercice et d'autres sur une base
de caisse. Sur le plan comptable, la notion de déficit n'est pas tout
à fait comparable d'un gouvernement à l'autre. Parlons d'une
notion qui, elle, est comparable et qui a trait aux besoins financiers nets.
Les besoins financiers nets, essentiellement, c'est ceci: les ressources qu'un
gouvernement doit emprunter en dehors de lui-même pour équilibrer
ses comptes. C'est cela, les besoins financiers. Quand je dis "en dehors de
lui-même", comprenons-nous bien. C'est en dehors du gouvernement
lui-même. Quand nous empruntons à la Caisse de dépôt
et placement du Québec, c'est emprunter en dehors; quand l'Alberta
emprunte au Heritage Fund, c'est emprunter en dehors d'elle-même; quand
les autres provinces canadiennes empruntent du Canada Pension Plan, c'est
emprunter en dehors d'elles-mêmes. De la même façon que les
emprunts sur les marchés privés et à l'étranger
sont des emprunts en dehors de soi-même.
Alors, comparons ces besoins financiers nets à une donnée
qui a trait aux revenus de chacun de ces gouvernements, à tout ce qu'ils
ramassent comme impôts, comme taxes, comme transferts, tout ce que vous
voulez: leurs revenus. Là, le déficit du gouvernement
fédéral n'est pas de 30 000 000 000 $, il est de 26 600 000 000
$. Qu'est-ce que cela représente par rapport à tous les
impôts, à toutes les taxes, royautés et redevances que le
gouvernement fédéral perçoit? On veut savoir ce que cela
représente? 45%. Le gouvernement fédéral emprunte sur les
marchés 45% de ses ressources propres.
On veut comparer cela aux autres provinces? Il y a des provinces qui ne
sont guère mieux que le gouvernement fédéral sur ce plan.
Par exemple, dans l'Ouest, le Manitoba a des besoins financiers nets qui
représentent 29% de toutes ses recettes d'impôt. C'est beaucoup.
La Saskatchewan, 36%, la Colombie britannique, auprès de laquelle nous
sommes, sur le plan des relations avec la fonction publique, pusillanimes, 22%.
Il y a une province dans l'Ouest dont on peut dire, si on me passe
l'expression, que son score est relativement modeste, c'est l'Alberta. Ses
besoins financiers nets représentent 9% de ses revenus.
Passons de l'autre côté du Canada, aux provinces maritimes.
Terre-Neuve, la pauvre Terre-Neuve, qui a une taxe de vente à 11%, pas
à 9%, qui bat toutes les provinces canadiennes sur le plan des taxes
à la consommation, qui ratiboise ses consommateurs autant qu'elle le
peut, a, néanmoins, des besoins financiers nets qui représentent
13,3% de ses revenus. L'Île-du-Prince-Édouard, c'est un peu moins
que la moitié de ville Laval. Alors, je n'en parlerai pas. 16,1%, si on
veut. J'aurais pu dire que c'est un peu moins que Longueuil ici. Enfin, c'est
une province, mais c'est une petite ville, sauf que c'est une province sur dix.
Parfois sur le vote, c'est important. La Nouvelle-Écosse: ses besoins
financiers nets par rapport à ses revenus sont de 20,7%. Le
Nouveau-Brunswick: 19,5%.
Venons-en aux deux provinces centrales, celles qu'on compare toujours.
L'Ontario: ses besoins financiers nets représentent 12,8% de ses
revenus. Le Québec, M. le Président, 10,5%. La deuxième
meilleure performance de toute la Confédération canadienne
après l'Alberta. J'espère qu'on va finir, de l'autre
côté, de nous casser les pieds et les oreilles, pour ne signaler
que deux morceaux d'anatomie, avec l'ampleur de nos déficits.
Normalement, on devrait même, si on peut le justifier par des
investissements additionnels, peut-être par des réductions
d'impôt, augmenter ces besoins financiers nets. Peut-être que, dans
la situation économique que nous connaissons, ce ne serait pas
totalement inapproprié.
Comprenons-nous bien. Le Québec, à cet égard, se
situe aujourd'hui dans une situation tout à fait exceptionnelle. Le
Québec est capable et a déjà commencé à
baisser les impôts parce que son déficit, traduit en besoins
financiers nets, est finalement assez modeste, comme aurait pu le dire le maire
de Montréal, par rapport aux autres provinces canadiennes. On peut poser
des gestes. Il est possible de faire des choses au Québec maintenant
dans le sens de la relance, qu'on ne peut faire ailleurs.
Regardons, par exemple, ce que le gouvernement fédéral non
seulement nous a promis, mais a fait voter comme augmentations d'impôts
pour les trois prochaines années. Je ne me sers ici que des deux budgets
de mon homologue à Ottawa, M. Lalonde. Je ne remonte pas, entendons-nous
bien, à M. MacEachen. Je tire de l'exposé du 27 octobre 1982 de
M. Lalonde et de son budget du 19 avril 1983 ces augmentations de perception de
taxes et d'impôts qui s'appliquent au Québec seulement. J'inclus
dans tous ces changements dans les taxes et les impôts l'augmentation des
cotisations de l'assurance-chômage parce que les gens les paient, ces
cotisations. Le gouvernement fédéral, en 1983-1984, aura
augmenté le fardeau fiscal des Québécois, dans cette seule
année 1983-1984, de 473 000 000 $. Les augmentations d'impôt l'an
prochain, dans trois mois, passeront à 760 000 000 $; l'année
suivante, à 1 212 000 000 $; l'année suivante, à 1 455 000
000 $. Ce sont les augmentations d'impôt et de charges sociales et
fiscales annoncées dans les budgets du gouvernement
fédéral et adoptées par la Chambre des communes.
Par opposition à quoi? Par opposition à un gouvernement
à Québec qui a été forcé de procéder
à des choix difficiles, mais qui, maintenant, alors que la relance
s'amorce, est en mesure de bouger. Sur le plan fiscal, nos amis nous ont dit
pendant des mois: Votre taxe sur l'essence est une abomination dans la
désolation. Cela nuit aux particuliers, aux entreprises, aux compagnies
de transport, aux zouaves, aux bonnes d'enfants, tout le monde est visé.
C'est une catastrophe, cette surtaxe sur l'essence. Bien. Nous la baissons de
moitié dans notre dernier budget, c'est 320 000 000 $. (0 h 10)
Vous observerez, M. le Président, le contraste entre les baisses
d'impôt que nous avons décrétées et les
augmentations d'impôt sur les Québécois par le
fédéral dont je viens de parler. On ne s'est pas placé
dans la situation d'avoir des besoins financiers nets qui représentent
45% de nos ressources totales ou de nos impôts totaux. On a essayé
d'être un peu plus prudents et on est en mesure de baisser les
impôts maintenant.
Après nous avoir dit: La surtaxe sur l'essence est l'abomination
de la désolation, ou l'inverse, comme vous voudrez, on la coupe en deux.
On nous dit de l'autre côté: Selon que vous ayez une Rabbit ou une
Lincoln, c'est deux réservoirs d'essence par an ou quatre. En somme, si
je comprends bien, 20%, c'est catastrophique; 10%, ce n'est rien du tout.
Voilà, au fond, de tout ce débat de 25 heures la conclusion
essentielle que nous avons tirée de nos amis d'en face.
Nous sommes en mesure - et nous sommes probablement le seul gouvernement
au Canada à l'heure actuelle - à cause de la gestion de nos fonds
publics, de baisser les impôts. Nous avons commencé sur une
échelle assez importante parce que 320 000 000 $ par an, c'est beaucoup
d'argent. Nous avons été en mesure de commencer et nous avons
l'intention de poursuivre devant un gouvernement fédéral et des
gouvernements d'autres provinces qui sont placés exactement dans la
situation inverse. Il y a une raison à cela, c'est peut-être
justement la gestion des finances publiques que nous avons cherché
à opérer depuis deux ou trois ans.
Cependant, il est clair que ce n'est pas seulement par des
réductions d'impôt que nous pouvons imaginer relancer
l'économie comme il le faut. Il y a d'autres gestes à poser.
À cet égard, il faudrait peut-être reconnaître que le
gouvernement de Québec ne s'est pas tellement trompé par rapport
à d'autres, dont certains sont littéralement adorés par
nos amis d'en face. Nous avons été les premiers, à la fin
de 1981, au moment où l'économie a cassé un peu partout au
Canada, à dire: Ce ne sera pas une récession comme une autre, ce
sera beaucoup plus sérieux. À Ottawa, on nous a dit: Mais enfin,
voyons! L'inflation, on doit lutter contre; le chômage, où le
voyez-vous? Nous étions la seule province qui commençait à
perdre des emplois. Évidemment, quand le Québec perd des emplois,
il n'y a pas de récession au Canada; bien sûr, tout le monde sait
cela. En février, à l'occasion de la réunion des ministres
et premiers ministres, le gouvernement de Québec a averti et
réaverti que cette récession allait aller beaucoup plus loin que
la plupart des gens le pensaient. Pensez-vous, nous répondaient les gens
d'Ottawa, nous luttons contre l'inflation.
En février 1982, il n'y avait pas de perte d'emplois dans les
autres provinces. Il n'y avait qu'au Québec qu'il y avait des pertes
d'emplois. Donc, il n'y avait pas de récession au Canada. En avril 1982,
en mai 1982, là on commence à perdre des emplois en Ontario. Il
commence à y avoir récession au Canada, là c'est
sérieux. Ce n'est vraiment que plusieurs mois plus tard, passé
l'été 1982 qu'on commence à se réveiller à
Ottawa au fait que, sans doute, il y a récession au Canada. Devant
l'incapacité totale de nous entendre avec ces luminaires
- je reconnais que, vraiment, selon une tradition qui date maintenant
d'au moins deux générations, le gouvernement
fédéral a des presciences remarquables à cet égard
-comme on n'arrivait pas à les faire aboutir, on a commencé
à bouger. Je pense qu'on dira dans quelques années, quand les
passions partisanes se seront un peu refroidies et qu'on ne sera pas à 0
h 15 du matin, grâce au remarquable travail d'obstruction de
l'Opposition, que les mesures prises par le gouvernement de Québec, en
1982 et 1983, auront joué un rôle majeur dans la prise de
conscience par le Québec et par les Québécois. On peut,
non pas s'isoler du reste du monde mais, frappés par une
récession qui nous vient du reste du monde, nous en sortir pas mal bien
et, en fait, de mieux en mieux.
Mais ces mesures que nous avons adoptées à partir de 1982,
elles ont pris un certain temps à se manifester.
Corvée-habitation, on en a décidé à la fin du
printemps 1982. On a mis cela en vigueur après les vacances de la
construction, en juillet 1982. Cela a commencé à donner des
résultats en septembre, octobre 1982. Vraiment, cela s'est
manifesté sur le plan d'un redoublement de la construction domiciliaire
anticipée au Québec de la fin de l'automne 1982 à la fin
de l'automne 1983. C'est à ce moment qu'on a vu le plein impact. Cela a
pris plusieurs mois.
Le plan d'urgence, dit Biron, pour sauver 25 000 ou 30 000 emplois dans
des entreprises sous forme de garantie de prêts dans des entreprises qui
avaient passé à travers deux grosses augmentations de taux
d'intérêt et qui étaient au bout, des entreprises qui
très souvent auraient fait des profits pendant dix ans mais qui
là, étaient rendues à bout de souffle. On s'est rendu
compte de l'importance de cela, des premiers scores, de ce que cela avait
donné. Le chiffre de 25 000, 30 000 n'est pas apparu le lendemain du
programme. C'est vraiment au milieu de l'année 1983 qu'on s'est
retourné, on a dit qu'est-ce qu'on a fait, on a dit c'est vrai, ce
programme a sauvé 30 000 emplois au Québec. Mais cela a pris huit
ou neuf mois.
Je parle de certaines des mesures de 1982. Du programme de
Mont-Saint-Anne, mars 1983. Hier, dans cette Assemblée, j'ai
indiqué à quel point on peut probablement évaluer, si on
tient compte de Mont-Saint-Anne et des décisions quant au rabais
d'électricité pour l'aluminium, à quelque chose comme 7
000 000 000 $ déjà, un peu plus de 7 000 000 000 $, les
retombées de Mont-Saint-Anne. Ce n'est pas rien, M. le
Président.
Les investissements totaux au Québec en un an cela est 13 500 000
000 $. Cela est considérable ajouter 7 000 000 000 $ sur une
période de deux, trois ans aux investissements totaux en l'espace de
quelques mois. Mars 1983 à décembre 1983, on admettra que ce
n'est pas de la tarte d'avoir augmenté les investissements de 7 000 000
000 $ pendant ce temps. Sauf que cela a pris un certain nombre de mois.
On se dit, tout de même, avec toutes ces mesures que nous avons
prises, il reste que le chômage va rester trop élevé
pendant les années qui viennent. C'est pas mal, ce qu'on a fait, mais ce
n'est pas suffisant. On décide de faire un pas un peu plus loin et c'est
la réunion du Conseil des ministres de Compton, c'est la
présentation du programme de relance du premier ministre, le 13
novembre.
Le problème avec nos amis d'en face à cet égard,
c'est que pour des raisons que je ne comprends pas, parce que beaucoup d'entre
eux sont assez initiés aux affaires, ils savent de quoi on parle en ce
moment... Je peux admettre qu'à l'égard de gens qui n'ont jamais
touché aux affaires, on ne comprenne pas que ces choses ne sont pas
instanter. Bon nombre de nos amis d'en face - je le sais parce que je les
fréquente, pour certains d'entre eux, bien avant d'avoir fait de la
politique - savent très bien que dans ce domaine, quand on pèse
sur le bouton, il n'y a pas des résultats instanter le lendemain,
à moins qu'on veuille être outrageusement partisan.
On sait très bien, que sortant un programme
d'accélération d'un certain nombre de dépenses et
d'investissements le 15 novembre 1983 on dit: Messieurs, si vous ne mettez 300
000 000 $ ou 400 000 000 $ de dépenses d'ici le mois de mars, vous
n'êtes pas sérieux. Je vous renvoie l'argument: Messieurs, vous
n'êtes pas sérieux. Il est tout à fait clair, quand on sait
comment ces choses se font, que ce n'est pas en pesant sur un bouton le 15
novembre 1983 que l'on dépense des centaines de millions dans les trois
mois qui viennent. Mais attention; de la même façon que
Mont-Saint-Anne aura produit 7 000 000 000 $ d'investissements un certain
nombre de mois plus tard, ce programme de relance du premier ministre,
regardez-le dans sept ou huit mois d'ici. (0 h 20)
Fondamentalement, voici ce qu'il y a peut-être d'essentiel dans
ces démarches d'abord de 1982. Nos balbutiements de résistance
à la récession alors qu'on est les seuls au Canada à
croire vraiment qu'il y a une récession, ensuite, nos décisions
à l'égard des tarifs d'électricité, ensuite,
Mont-Sainte-Anne, ensuite, le programme de relance du premier ministre,
fondamentalement, il y a une constante à travers tout cela, une
constante fondamentale. C'est que les investissements au Québec sont
fragiles, ne sont pas suffisants, doivent être augmentés. Il y a
de nos amis d'en face qui s'imaginent - et là encore, j'ai de la
difficulté à
comprendre pourquoi - que les investissments au Québec, par
exemple par rapport à l'Ontario - et je parle ici d'investissements
privés - sont bas pour des raisons d'incertitude politique. Mais alors,
l'incertitude politique est une sorte de mal endémique au
Québec.
Il y a maintenant plus de - enfin, non -presque 40 ans que nous
disposons d'un relevé des investissements par province dans ce pays,
presque 40 ans. Sur une période aussi longue, les investissements
manufacturiers au Québec, par rapport aux investissements manufacturiers
en Ontario, cela représente quoi? À peu près la
moitié et habituellement, moins de la moitié.
Une voix: C'est à cause de la loi 101.
M. Parizeau: Quarante ans! À cause de la loi 101, bien
sûr. De la loi 17? Sans doute. Des droits successoraux?
Évidemment. Mais voyons!
Une voix: Cela fait 40 ans que...
M. Parizeau: II est clair que, depuis 40 ans, ce Parti
québécois qui, il y a 40 ans n'était pas encore une
intention - on en conviendra, n'est-ce-pas - pèse d'un poids très
lourd sur l'économie du Québec...
Une voix: ...Grégoire.
M. Parizeau: M. le Président, les auditeurs qui nous
écoutent n'ont pas entendu ce qui vient d'être dit par
l'Opposition. Ils ne peuvent pas savoir, puisque les micros sont fermés.
Il faudrait qu'ils le sachent. Savez-vous, M. le Président, ce que deux
ou trois d'entre eux, pour discuter du niveau d'investissements au
Québec pendant 40 ans m'ont donné comme argumentation? Ils m'ont
dit: Gilles Grégoire. Voilà à quel niveau de
sérieux... Les gens à la télévision ne peuvent pas
se rendre compte de cela, parce que les micros de l'Opposition sont
fermés, mais nous, en Chambre, on entend cela. C'est cela, le
degré de sérieux de ces messieurs. C'est de cela dont nous
discutons. On parle des investissements depuis 40 ans; on parle, au fond, de la
prospérité des Québécois, du niveau de
chômage et on nous répond cela, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous devez conclure. (10
h 20)
M. Parizeau: Je termine. Je termine en disant que cette notion
d'investissement, pour nous, elle est fondamentale. Ce que nous cherchons
à faire pour relever l'économie du Québec, avec les moyens
dont nous disposons - ce ne sont pas tous les moyens qu'on pourrait avoir, mais
ce sont les moyens dont nous disposons - doivent être orientés
vers une augmentation systématique du niveau des investissements. Nous
sommes le premier gouvernement au Québec depuis 40 ans...
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Gratton: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, pourriez-vous nous indiquer
à quelle heure le ministre des Finances doit terminer? Quant à
nous, il nous semble qu'il a dépassé, et de loin, le temps qui
lui était alloué.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de
l'Opposition, j'ai avisé M. le ministre qu'il devait conclure et M. le
ministre a dépassé son temps d'une minute.
M. Parizeau: M. le Président, puis-je demander à
l'Opposition si elle me donnerait une minute pour conclure?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Consentement?
Des voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Rancourt): II y a consentement, M.
le ministre.
Une voix: On vous a donné 30 minutes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Parizeau: M. le Président, pris dans une situation
telle en Chambre depuis maintenant sept ans, j'avais l'habitude de donner un
consentement pour une minute avec un peu plus de grâce.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
M. Parizeau: Je conclus donc...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, si le ministre des Finances
avait eu l'occasion de siéger pendant 24 heures consécutives
à deux reprises, comme on l'a fait, peut-être qu'il comprendrait
notre refus de consentir.
Des voix: Très bien.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: M. le Président, je pense savoir exactement
ce que veut dire le député. J'ai participé à tous
les votes pendant ces deux nuits. Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Parizeau: Oui, M. le Président. Je termine
essentiellement en disant ceci. Il est fondamental que l'on puisse augmenter le
niveau des investissements au Québec et non seulement le niveau des
investissements publics - tout le monde est toujours d'accord au Québec
sur cela - mais le niveau des investissements privés. Cela prend un
certain nombre de mesures. Nous sommes le premier gouvernement qui,
systématiquement, oriente ses politiques en ce sens. Les
résultats sont déjà tout à fait remarquables.
La relance, à l'heure actuelle, au Québec, elle se fait.
Cela va mieux. Cela va beaucoup mieux mais ce n'est que dans la mesure
où, systématiquement, dans les deux ou trois années qui
viennent, on met en place les éléments nécessaires quant
au financement des entreprises, quant aux subventions nécessaires, quant
au climat aussi, que l'on pourra faire en sorte que les investissements au
Québec atteignent un niveau qui, sur le plan de l'emploi et sur le plan
de la prospérité des Québécois, indiquera que,
lorsqu'on veut s'atteler vraiment à ce genre de tâche au
Québec, on peut le faire.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous allons mettre aux
voix la motion du ministre des Finances et la motion de censure.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Fréchette: M. le Président, je voudrais me
prévaloir des dispositions de l'article 106 et demander que le vote soit
fait par enregistrement et reporté à la prochaine
séance.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, vote reporté
à ce matin, à la prochaine séance.
M. Fréchette: M. le Président, je crois comprendre
qu'il y aura un consentement pour que nous suspendions nos travaux pour
quelques minutes. Est-ce que je suis bien informé?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc...
M. Picotte: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui.
M. Picotte: M. le Président, consentement pour une
suspension de quelques minutes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, consentement pour
suspendre nos travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 0 h 27)
(Reprise de la séance à 1 h 53)
Le Président: À l'ordre s'il vous plaîtl M.
le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, si on peut appeler cela me
donner la parole, je voudrais faire motion pour que nous ajournions nos travaux
à ce matin, 10 heures.
Le Président: La motion est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. L'Assemblée nationale
ajourne ses travaux à ce matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 1 h 53)