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(Dix heures deux minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous allons nous recueillir quelques instants. Veuillez prendre vos places.
Présentation du nouveau député de
Saint-Jacques, M. Jean-François Viau
Avant de passer aux affaires courantes, j'ai le plaisir de
déposer la lettre du Directeur général des
élections au Secrétaire général de
l'Assemblée qui se lit ainsi: "Conformément à l'article
134 de la Loi électorale, je vous transmets le nom du candidat
proclamé élu à la suite de l'élection partielle du
26 novembre 1984, tenue en vertu d'un décret du gouvernement émis
le 23 octobre 1984. L'avis de proclamation d'élection est publié
dans l'édition de la Gazette officielle du Québec en date du 8
décembre 1984 dont je dépose copie".
Permettez-moi de vous souligner que le deuxième alinéa de
l'article 134 se lit comme suit: "À compter de la publication de cet
avis, le député est membre de l'Assemblée nationale."
Le nouveau député de Saint-Jacques est M.
Jean-François Viau du Parti libéral.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le chef de l'Opposition, si vous voulez
bien nous présenter votre nouveau collègue.
Souhaits de bienvenue Le Président
J'ai le grand plaisir d'accueillir en votre nom notre nouveau
confrère, le député de Saint-Jacques, M.
Jean-François Viau. Il arrive en plein mois de décembre,
c'est-à-dire à une époque particulièrement fertile
des travaux de l'Assemblée nationale et qui, pour quelqu'un qui arrive
de l'extérieur, peut même paraître, à certains
moments, déroutante. Quoi qu'il en soit, comme immersion totale, c'est
sans doute la période la mieux trouvée de l'année. Je veux
l'assurer de l'entière collaboration, non seulement des services de
l'Assemblée nationale, bien sûr, mais des services qui
relèvent directement de la présidence.
Notre nouveau collègue, faute d'espace dans l'immeuble, se trouve
en quelque sorte à innover. Jusqu'à maintenant, comme on le sait,
les députés ministériels étaient au
troisième étage, les députés de l'Opposition au
deuxième étage et il y avait un certain partage au premier. Tous
les bureaux du sous-sol, du rez-de-chaussée, du premier et du
deuxième étage étant occupés à pleine
capacité, nous avons dû nous résoudre à loger le
nouveau député de Saint-Jacques au troisième étage.
Cela contribue à illustrer encore une fois, mais de manière
peut-être plus immédiate, le problème qu'a
l'Assemblée nationale avec ses locaux en cette époque.
Je lui souhaite à nouveau la bienvenue et je lui souhaite une
bonne, peut-être brève pour cette Législature-ci, en tout
cas, mais une bonne carrière à l'Assemblée nationale.
M. le chef de l'Opposition.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, simplement
pour enchaîner sur ce que vous venez de dire, il n'y a aucun doute que
les députés du Parti libéral prennent de plus en plus de
place dans l'Assemblée nationale.
Une voix: Ce n'est pas fini.
M. Levesque (Bonaventure): Je pense bien, comme l'indique un de
mes collègues, que ce n'est pas fini. Je suis très heureux,
particulièrement heureux ce matin, au nom du chef du Parti
libéral, au nom de notre formation politique, de souhaiter la plus
cordiale et chaleureuse bienvenue à un nouveau député, le
député de Saint-Jacques, un jeune député de 26 ans,
un jeune député compétent. C'est un gestionnaire, un
animateur social. C'est, en plus, un célibataire, M. le
Président. Avis aux intéressées. Il a poursuivi des
études collégiales au collège de Rosemont, en sciences
administratives et en sociologie. Il a poursuivi des études
universitaires à l'Université McGill en sciences politiques et en
économie, également des études postuniversitaires, des
stages en administration aux Hautes Études commerciales de
Montréal. Il a été administrateur de quelques compagnies
privées, déjà à l'âge de 26 ans. Il a
été coordonnateur de Montréal Métropolitain et
responsable national de l'animation pour l'organisation du Sommet
québécois de la jeunesse en 1983.
Il a été consultant au service d'animation et
d'organisation du Parti libéral du Québec, à la commission
jeunesse. Il a eu plusieurs autres activités déjà:
participation à l'organisation du congrès des jeunes, la
commission jeunesse du parti. Il est membre de l'Association canadienne des
jeunes leaders politiques, membre de l'Association
canadienne des Nations Unies. Autrement dit, M. le Président, il
a toutes les qualités et déjà toute la préparation
pour venir s'ajouter à notre équipe et l'enrichir par sa
jeunesse, par son dynamisme, par sa compétence. Je suis convaincu qu'il
fera un excellent député.
Nous sommes fort heureux, évidemment, de l'accueillir ce matin
lorsque l'on songe aussi au fait que, pour la 22e fois depuis 1976, c'est une
victoire libérale dans les élections partielles.
Jean-François Viau est à l'écoute de la population de
Saint-Jacques, la population de Saint-Jacques que nous remercions pour cette
confiance qu'elle fait à notre formation politique et à
Jean-François Viau. Cette population a reconnu chez lui qu'il avait,
justement, l'intention de bien servir la population de Saint-Jacques. Ses
préoccupations quant à la qualité de la vie de ses
concitoyens et de ses concitoyennes du comté, ses préoccupations
sur des questions aussi vitales pour la population de Saint-Jacques que le
logement, les questions touchant le bien-être des personnes
âgées, les services à domicile, l'allocation des ressources
suffisantes dans le domaine des services médicaux et hospitaliers sa
préoccupation première dans le domaine de l'économie et,
particulièrement, en ce qui concerne le chômage des jeunes qui est
particulièrement tragique dans le comté qu'il représente
désormais ici à l'Assemblée nationale. Je voudrais
simplement, encore une fois, féliciter le nouveau et jeune
député de Saint-Jacques, l'assurer de notre plus grande
collaboration et lui former des voeux d'une excellente et fructueuse
carrière.
Encore une fois, nous sommes heureux de l'accueillir ce matin. Nous
sommes anxieux, désireux de l'entendre prononcer son premier discours
ici à l'Assemblée nationale qui ne sera certainement pas le
dernier. Je suis convaincu que la population de Saint-Jacques a fait un
excellent choix. Puis-je ajouter, sans aucune partisanerie, qu'il y a là
un autre témoignage de la volonté de la population du
Québec chaque fois qu'elle a eu l'occasion de se prononcer depuis 1981
et je le répète, sans partisanerie, je pense bien que je puis
dire que c'est une volonté de plus en plus évidente de la
population du Québec de voir un changement de vie, un changement
d'attitude, un changement véritable, c'est-à-dire un changement
de gouvernement. J'espère que l'élection de Saint-Jacques sera le
prélude à un véritable changement qui se traduira lors des
prochaines élections générales. Je vous remercie.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Jean-François Bertrand M. Bertrand: Une victoire est
une victoire, une défaite est une défaite. Je me demandais
toujours comment le député de Bonaventure et chef de l'Opposition
faisait pour garder l'excellente forme physique qui le caractérise. Je
pense que les seuls pas qu'il effectue, c'est la 22e fois aujourd'hui, de sa
banquette jusqu'à l'arrière de l'Assemblée nationale pour
aller chercher les députés libéraux élus aux
élections partielles suffisent probablement à le mettre non
seulement d'excellente humeur, mais, bien sûr, à raffermir sa
condition physique. Le premier ministre m'a demandé de dire quelques
mots ce matin sur l'arrivée d'un nouveau collègue à
l'Assemblée nationale. Peut-être est-ce parce qu'il porte le
prénom de Jean-François, je n'en sais trop rien. Est-ce parce
qu'il est célibataire comme l'est le député de Vanier? Je
n'en sais trop rien. Toujours est-il que nous devons tout de même
signaler, avant de féliciter M. Viau, qu'il succède à un
député qui, pour le comté de Saint-Jacques, pendant trop
peu de mois, a fait un excellent travail, notre ex-collègue le
député Serge Champagne, décédé rapidement,
après avoir servi très convenablement ses concitoyens et
concitoyennes du comté de Saint-Jacques. Je suis, comme tous mes
collègues, assuré que M. Viau va poursuivre dans le style qu'a
tenté d'imprimer M. Champagne au mandat qu'il remplissait depuis cette
élection partielle qui lui avait permis de succéder à
l'ancien député de Saint-Jacques, M. Claude Charron.
On peut dire de M. Viau qu'à 26 ans, comme le disait le chef de
l'Opposition officielle, il a déjà à son palmarès
une vaste, une large, une bonne expérience sur le plan de l'engagement
social et communautaire. Ce que le chef de l'Opposition décrivait tout
à l'heure, qui fait partie de ce qu'on appelle habituellement le C.V. de
qui que ce soit dans la société - le curriculum vitae -des gens
qui s'impliquent, est un bon témoignage, éloquent, de la
capacité de ce jeune de faire en sorte que, maintenant, il puisse au
niveau d'une circonscription électorale apporter le meilleur de
lui-même.
À l'occasion, quand des femmes sont élues, que ce soit
à l'occasion d'élections partielles ou d'élections
générales, on se réjouit toujours à
l'Assemblée nationale de voir le pourcentage, la progression de la
présence des femmes à l'Assemblée nationale.
Espérons que cela ira en s'amplifiant au fil des années, mais
quand il s'agit aussi de jeunes qui sont en bas de la trentaine, là
aussi, il y a lieu, comme Assemblée nationale, de se réjouir de
voir entrer ici des jeunes qui vont dans toute la mesure du possible, comme
c'est le cas de notre côté et comme c'est le cas maintenant, en
face, avec la présence du député de Saint-Jacques, tenter
de faire en sorte que nous puissions parler de ces problèmes qui
affectent de façon dramatique
la jeunesse d'aujourd'hui, jeunesse qui est confrontée à
des problèmes, à des difficultés et qui a aussi des
rêves à réaliser. Elle souhaite que cette Assemblée
nationale soit réceptive à ces rêves, que ce soit par les
lois que nous adoptons, mais surtout par les attitudes et les comportements que
nous adoptons face à ces défis. (10 h 20)
En terminant, je voudrais aussi indiquer au député de
Saint-Jacques, sans aucune forme de malice outre mesure, que j'ai souvenir,
tout juste avant les élections générales de 1981, de deux
députés qui avaient été élus à des
élections partielles, l'un dans le comté de Maisonneuve, l'autre
dans le comté de Johnson. C'était tout juste avant les
élections générales. Cela n'a pas duré très
longtemps, ce mandat pour ces deux députés puisque, à
peine quelques mois après, deux députés du Parti
québécois leur succédaient, à savoir Mme la
députée de Johnson, Mme Juneau, et Mme la députée
de Maisonneuve, Mme Harel. De toute façon, quoi qu'il en soit de ces
élections générales qui viendront bien, j'espère,
avec tous mes collègues, que le député de Saint-Jacques,
M. Viau, connaîtra beaucoup de succès dans ses fonctions et qu'il
sera ici, je n'en doute pas, un digne représentant des électeurs
et électrices du comté de Saint-Jacques.
Le Président: M. le député de
Saint-Jacques.
Des voix: Bravo!
M. Jean-François Viau
M. Viau: M. le Président, M. le leader du gouvernement -
qui sera certainement déçu de me voir ici après les
élections générales - M. le chef de l'Opposition, chers
collègues, mes premiers mots dans cette Assemblée me viennent du
coeur. Ils vont à mes concitoyens et concitoyennes de Saint-Jacques. Ces
mots sont: Merci et gardez espoir.
Merci, d'abord, pour avoir partagé avec moi, pour avoir
échangé si sincèrement et si fraternellement. Merci de
m'avoir ouvert vos portes et de m'avoir accueilli avec tant d'amitié.
Merci à Saint-Jacques d'avoir fait confiance à un jeune de 26
ans, d'avoir cru en la jeunesse et d'avoir cru en mon parti. Quoi qu'en disent
mes collègues d'en face, les électeurs de Saint-Jacques ont
comparé les candidats, les programmes, les approches, la
sincérité et l'honnêteté des deux partis politiques.
Ils ont choisi un jeune. Ils ont choisi le Parti libéral du
Québec. Ils ont choisi entre le bluff et la volonté d'un parti
qui veut travailler à l'amélioration de leur qualité de
vie et qui veut se battre pour leurs droits.
Nous avons triplé la majorité libérale dans
Saint-Jacques parce que Saint-Jacques a choisi et a comparé. Le
Québec a hâte de comparer et de choisir de nouveau, de choisir le
Parti libéral du Québec. Cette victoire, je la dois à
Saint-Jacques. Je la dois aussi à mes collaborateurs de tous les
instants, aux militants et militantes de mon association de comté qui
ont démontré, encore une fois, dans leur travail exemplaire, que
la meilleure recette au succès, c'est d'être honnête et
d'échanger constamment avec nos concitoyens et nos concitoyennes. Cette
victoire est aussi celle de notre regretté ami, Serge Champagne, qui a
su, en si peu de temps, marquer profondément sa collectivité.
Saint-Jacques lui doit beaucoup. Je tenterai de suivre son exemple et
j'espère avoir la sagesse pour suivre ses traces.
Mon deuxième message est: Gens de Saint-Jacques, gardez espoir,
gardez espoir dans vos capacités à faire de votre comté un
endroit où l'on pourra assurer à tous un logement décent
à des coûts décents. Gardez espoir dans
l'amélioration nécessaire de la condition de vie des personnes
âgées afin qu'on leur assure des services auxquels elles ont
droit. Personnes âgées avec qui j'ai pu avoir des liens
très serrés et de qui j'ai beaucoup appris durant cette campagne.
Personnes âgées à qui nous ne reconnaîtrons jamais
assez la contribution à notre société
québécoise. Gardez espoir, gens de Saint-Jacques, d'avoir un
environnement stimulant, motivant, un environnement que vous méritez.
Gardez espoir de voir notre société assurer, pour les plus
démunis, les sans emplois, les femmes et les discriminés, non pas
le minimum vital, mais bien la qualité de vie à laquelle vous
avez droit. Gardez espoir aussi que nous puissions vivre toujours dans la paix
et de ne jamais perdre cette volonté du dialogue et de
l'échange.
Et nous, jeunes du Québec, qui vivons de cet espoir, de cette
vision de l'avenir, ne perdons jamais cette vitalité, cette
combativité, ce vouloir qui nous caractérise tous. Nous devons
nous battre aujourd'hui pour l'avenir de demain. Prenons notre place, la place
qui nous revient.
Les raisons qui m'ont amené en politique sont simples, M. le
Président, c'est de me battre avec toutes mes forces pour
améliorer la condition de vie des plus démunis. C'est d'assurer
à cette génération, qui est la mienne, qu'elle soit
considérée comme un partenaire réel dans le
développement du Québec. C'est de croire en l'initiative
individuelle. C'est aussi de croire à la confiance dans l'imagination.
C'est de favoriser l'autonomie de mes concitoyens et concitoyennes.
J'ai choisi le Parti libéral du Québec parce qu'il me
permet de croire et d'espérer. J'ai choisi le Parti libéral pour
la place réelle qu'il fait aux jeunes et la confiance qu'il a en eux.
Les élections dans mon comté
l'ont prouvé. Les jeunes ont leur place en politique et c'est au
Parti libéral du Québec qu'on les retrouve.
Lors de ma campagne dans Saint-Jacques, j'ai proposé à mes
concitoyens et concitoyennes une nouvelle approche au travail de
député. J'ai proposé un député animateur qui
stimulera l'autonomie et favorisera la prise en charge par le milieu des outils
d'intervention. C'est aux groupes populaires et communautaires que l'on doit
confier les responsabilités de la définition de notre cadre de
vie. Ce râle d'animateur, j'ai déjà commencé
à l'assumer. Je me suis aussi engagé à trouver des moyens
pour assurer une plus grande stabilité financière des groupes et
des regroupements communautaires et populaires qui oeuvrent dans le milieu.
Il est maintenant révolu le temps où l'on tenait en
otages, pour des raisons politiques, des groupes représentatifs. Elle
est maintenant finie l'ère où la subvention était
conditionnelle à la déclaration d'allégeance. On a vu cela
dans Saint-Jacques, lors des dernières élections partielles, et
le gouvernement actuel est passé maître dans ces
méthodes.
En terminant, j'ai beaucoup d'espoir en entrant dans cette
Assemblée. Je tiens à le dire immédiatement, je n'ai pas
l'intention de faire de disque ou de vidéorock ou encore de changer
d'orientation politique ou d'orientation fédéraliste au premier
coup de vent. J'ai l'intention d'être le représentant des
aspirations et des attentes de mes concitoyens et concitoyennes de
Saint-Jacques. Vous pouvez donc compter, M. le Président, sur mon
entière collaboration et sur mon profond respect envers cette
Assemblée. Merci.
Nouveau diagramme de l'Assemblée
Le Président: Je dépose donc en deux copies le
nouveau diagramme de l'Assemblée nationale.
Des voix: Encore!
Le Président: Aux affaires courantes, il n'y a pas de
déclaration ministérielle ni de présentation de projets de
loi. Au dépôt de documents, M. le leader du gouvernement.
M. Houde: Et les pétitions?
Le Président: En leur temps. M. le premier ministre.
Rapport de l'Office des services de garde à
l'enfance
M. Lévesque (Taillon): Si vous permettez, M. le
Président, j'ai l'honneur de dépo- ser, pour l'année
1983-1984, le rapport de l'Office des services de garde à l'enfance.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
de l'Éducation.
Décret relatif à la
création
du Centre québécois pour
l'informatisation de la production
M. Bérubé: M. le Président, permettez-moi de
faire le dépôt en deux exemplaires de la copie du décret
autorisant la délivrance des lettres patentes concernant la
création du Centre québécois pour l'informatisation de la
production, dans le cadre de la Loi favorisant le développement
scientifique et technologique du Québec.
Le Président: Rapport déposé. M. le leader
du gouvernement.
Rapport annuel du ministère de la Fonction
publique
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais déposer
le rapport annuel 1983-1984 du ministère de la Fonction publique.
Le Président: Rapport déposé. Il n'y a pas
de dépôt de rapports de commissions.
Une voix: Non.
Le Président: On m'a signalé... M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Le ministre responsable de la langue
française... (10 h 30)
Le Président: Oh! Je m'excuse. En effet, M. le ministre
délégué aux Affaires linguistiques.
Rapport du Conseil de la langue
française
M. Godin: M. le Président, permettez-moi de déposer
le rapport du Conseil de la langue française pour l'année
1983-1984.
Le Président: Rapport déposé. Il n'y a pas
de dépôt de rapports de commissions. M. le député de
Berthier, vous sembliez m'indiquer que vous vouliez déposer une
pétition.
M. Houde: Des pétitions, M. le Président. J'ai deux
pétitions...
Le Président: À l'ordre! On ne me signale pas, du
secrétariat général, que la pétition a
été déposée dans les formes et selon le
règlement, ni qu'elle était conforme au règlement. Je vous
renvoie aux articles pertinents de nos règles de procédure
à ce
sujet.
M. Houde: Elles ont été déposées, les
pétitions, M. le Président.
Le Président: Si elles sont déposées, c'est
donc qu'on a dû vous dire qu'elles ne sont pas conformes au
règlement, à ce moment-là.
M. Houde: Est-ce que je peux lire mon texte?
Le Président: Bien non. M. le député je
viens... Nos règles, là-dessus, cherchent à encadrer la
manière et le contenu d'une pétition; si votre pétition
n'est pas conforme aux règles de procédure, je ne puis vous
autoriser à la présenter.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: Me permettriez-vous de solliciter le consentement de
l'Assemblée pour que le député de Berthier procède
au dépôt de ses deux pétitions?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, ce n'est pas la question de
donner ou de refuser un consentement, c'est la question de savoir si oui ou non
les règles sont respectées et en quoi elles ne le sont pas. Si
elles ne le sont pas, s'il y a effectivement des problèmes qui se posent
quant à la présentation de la pétition, je pense qu'il est
du devoir du président de l'Assemblée nationale de le signaler et
de faire en sorte que, s'il y a des correctifs à apporter à la
présentation de la pétition, ils soient apportés.
Le Président: II ne semble donc pas y avoir de
consentement, M. le député.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): On m'indique que la seule
irrégularité est que c'est adressé au gouvernement
plutôt qu'à l'Assemblée. Je pense que c'est une erreur
technique que l'on pourrait facilement corriger immédiatement.
Une voix: II n'y a plus de gouvernement!
Le Président: M. le leader du gouverne- ment.
M. Bertrand: Dans les circonstances, M. le Président, il
n'y a pas de problème.
Une voix: II n'y a plus de gouvernement!
Le Président: Je veux bien, mais je signale à tout
hasard, pour tous ceux qui voudraient déposer des pétitions,
l'article 62 qui stipule qu'une pétition doit s'adresser à
l'Assemblée, au pouvoir législatif et non au gouvernement. Si on
veut s'adresser au gouvernement, il y a la poste royale pour ce faire. M. le
député de Berthier.
Sauvegarder les emplois menacés par la
fermeture de Melchers, à Berthierville
M. Houde: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée par 10 358 pétitionnaires du comté de Berthier
invoquant les faits suivants: "Considérant l'annonce officielle de la
fermeture de l'usine Melchers de Berthierville; considérant la perte
d'une centaine d'emplois reliés directement à la fermeture de
Melchers; considérant la perte d'une cinquantaine d'autres emplois
indirects; considérant les conséquences désastreuses pour
les nombreuses familles affectées par cette situation;
considérant le manque à gagner par la perte des taxes
municipales; considérant les effets négatifs importants sur
l'activité économique de l'ensemble de notre région;
considérant le très haut niveau des sans-emplois dans notre
région; et concluant: pour toutes ces raisons et bien d'autres, nous,
soussignés, demandons aux gouvernements du Canada et du Québec
d'intervenir immédiatement pour la sauvegarde des emplois perdus par la
fermeture de Melchers à Berthierville".
M. le Président, j'en ai une deuxième.
Le Président: Le consentement vaut pour la deuxième
aussi, j'imagine.
Conserver l'intégrité du territoire du
CLSC de Brandon
M. Houde: Merci, M. le Président, merci encore une fois.
J'ai l'honneur de déposer l'extrait d'une pétition
adressée à l'Assemblée nationale par 4892
pétitionnaires du comté de Berthier: "Considérant que le
CLSC Brandon est implanté depuis 1973 et dessert une population rurale
de 17 800 personnes; considérant que la MRC de D'Autray, que la
très grande majorité des municipalités où vit la
population desservie et que l'ensemble des groupes socio-communautaires
reconnaissent qu'il est plus avantageux d'être desservi par le CLSC
Brandon; considérant que le réaménagement
du territoire des CLSC en fonction des territoires des MRC pose plus
d'inconvénients que d'avantages à la population du CLSC Brandon;
considérant que ce réaménagement va amener une diminution
de services et des coûts supérieurs; considérant que
d'autres territoires de CLSC ne correspondent pas à celui de la MRC dans
le Québec, par exemple, Mirabel, Jacques-Cartier; considérant
qu'aucune consultation n'a été faite auprès des
populations touchées, nous demandons que le territoire du CLSC Brandon
soit conservé dans son intégrité." Merci.
Une voix: Très bien! QUESTIONS ORALES DES
DÉPUTÉS
Le Président: Ce qui nous mène à la
période des questions. Je signale qu'il y aura un complément de
réponse du ministre des Affaires sociales à l'issue de la
période des questions.
M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: Merci, M. le Président. Est-ce que le leader
du gouvernement pourrait m'indiquer si le ministre de la Justice sera ici pour
la période des questions?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, étant donné
les responsabilités que le ministre assume au niveau des
Communautés culturelles et de l'Immigration, il doit être
présent aujourd'hui au sommet sur le Québec dans le monde.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
L'enquête sur un complot pour corrompre deux
députés
M. Gratton: C'est évidemment ce qui arrive quand un
ministre cumule plusieurs postes. Est-ce que le premier ministre me permettrait
de lui adresser les questions? Je conviens qu'il devra probablement en prendre
avis, mais il nous semble qu'il serait nécessaire que les questions
soient posées ce matin de façon qu'on obtienne les informations
du ministre de la Justice ou du premier ministre le plus tôt
possible.
Hier, le ministre de la Justice confirmait que son sous-ministre
était intervenu dans une enquête policière concernant une
tentative de corruption de deux députés péquistes. Il a
tenté de banaliser la chose en prétendant qu'il arrive
très fréquemment que ces dossiers fassent l'objet d'une saisie de
leur contenu par le sous-ministre.
Je conviendrai avec le ministre, M. le Président, que tel
était effectivement le cas au temps de Maurice Duplessis et semble-t-il
que tel est encore le cas sous le gouvernement actuel. Quant à nous, il
ne nous apparaît ni normal ni souhaitable que l'administratif et le
politique interviennent dans le déroulement des enquêtes
policières.
J'aimerais que le ministre réponde à des questions
très précises sur l'enquête policière qui nous
préoccupe:
Peut-il nous dire, dans un premier temps, qui a agi comme substitut du
Procureur général à Montréal dans cette affaire? Ce
dernier a-t-il été consulté par la Sûreté du
Québec pour savoir si des mandats de perquisition devaient être
exécutés dans le cadre de cette enquête? Si oui, quand
a-t-il été consulté et quelle a été sa
recommandation à la Sûreté du Québec?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pense
que le leader de l'Opposition a très bien prévu ce que pourrait
être ma réponse. La seule chose qu'elle peut être, c'est que
sur cette question comme sur d'autres, peut-être, qui peuvent se poser,
d'abord je ne peux rien ajouter pour le moment à ce qu'a dit hier mon
collègue de la Justice.
Deuxièmement, il est entendu que la grande conférence qui
a été préparée depuis un an par à peu
près tous les gens les plus éminents qui s'occupent de choses
internationales au Québec, doit se terminer cet après-midi. Il
est donc évident que le ministre de la Justice, sauf erreur, sera ici
demain et, comme les questions additionnelles ont été
enregistrées, il se fera un devoir de répondre autant qu'il le
pourra.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Gratton: Oui, M. le Président. De façon que le
ministre puisse nous fournir le plus d'informations possible, j'ai quelques
questions complémentaires:
Qui, à la Sûreté du Québec, a consulté
le sous-ministre de la Justice? Quelles ont été les
représentations de la Sûreté du Québec au
sous-ministre de la Justice? Pourquoi la Sûreté du Québec
a-t-elle consulté directement le sous-ministre? A-t-on voulu contourner
ou court-circuiter le substitut du procureur de la couronne à
Montréal? Quelle a été la recommandation du sous-ministre
à la Sûreté du Québec quant aux mandats de
perquisition?
J'aimerais que le ministre nous dise s'il ne reconnaît pas qu'il y
a eu un délai de huit jours, ce qui est tout à fait anormal dans
ce genre de chose, dans l'exécution des mandats de perquisition
accordés le 28
novembre 1984 et qui n'ont été exécutés que
le 6 décembre, soit huit jours plus tard?
J'aimerais finalement qu'il nous dise s'il est en mesure d'affirmer de
façon catégorique que toutes ces consultations entre le
sous-ministre et la Sûreté du Québec n'ont pas
contribué à retarder l'exécution des mandats de
perquisition avec les conséquences qui auraient pu en
découler?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Même réponse, M. le
Président.
Le Président: Question principale, M. le
député de Charlesbourg.
M. Côté: J'espère que le premier ministre est
rassuré un peu ce matin, M. le Président.
M. Pagé: Êtes-vous mieux qu'hier?
La Fondation des Québécois pour le
oui
M. Côté: On se rappellera qu'au printemps 1983,
l'Assemblée nationale apprenait que la poursuite de 30 000 000 $ de la
Société d'énergie de la Baie James, à la suite du
saccage de la Baie James, s'était réglée pour 200 000 $
à l'occasion d'une négociation entre Jean-Roch Boivin, ex-chef de
cabinet du premier ministre, les avocats de Geoffrion & Prud'homme, soit
Michel Jetté, Jean-Paul Cardinal et François Aquin, l'avocat
Rosaire Beaulé et l'avocat Michel Jasmin. Ce règlement est
intervenu le 13 mars 1979. Le 9 octobre 1979, quelque sept mois plus tard, la
Fondation des Québécois pour le oui était
incorporée. Le premier ministre peut-il nous dire s'il est exact que
cette fondation, dont l'objet était de recueillir de l'argent ou tout
autre bien pour appuyer le oui, a été incorporée par trois
avocats de Geoffrion, Prud'homme, à savoir Michel Jetté, Michel
Blouin et René Beaulac, ex-associés de Jean-Roch Boivin? (10 h
40)
Une voix: C'est quoi la question?
Le Président: M. le. premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vous
avoue que je vais être obligé de prendre avis une deuxième
fois parce que, jusqu'à nouvel ordre, la seule chose que j'en sais,
parce qu'il y a pas mal de choses d'entremêlées dans la question
du député, c'est qu'il semble possible - je m'excuse de le dire,
parce que je ne peux pas aller plus loin - qu'il n'y ait rien là. Alors,
on verra.
Le Président: M. le député de
Charlesbourg.
M. Côté: Pour faciliter la recherche du premier
ministre, question additionnelle. Dans vos recherches, le premier ministre
peut-il nous dire s'il est exact que le secrétaire-trésorier de
la fondation était Me André J. Bélanger, l'associé
de Rosaire Beaulé? Le premier ministre prend avis.
Une autre question additionnelle. Peut-il nous dire s'il est exact que
l'un des administrateurs de la fondation était Me Michel Jasmin qui a
négocié le règlement hors cour de l'affaire de la Baie
James?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, le
député a peut-être la nostalgie de certaines enquêtes
aussi invraisemblables que ridicules, mais quand il aura fini de poser ses
questions, peut-être que quelqu'un, un jour, lui répondra,
peut-être avant les fêtes.
Une voix: Qu'est-ce que c'est cela?
M. Côté: Certainement, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Charlesbourg.
Une voix: Ni de près ni de loin.
M. Côté: Question supplémentaire. Le premier
ministre peut-il nous dire, tout en effectuant ses recherches, s'il est exact
que l'adresse du siège social de la fondation était le 5835,
boulevard Léger, à Montréal-Nord...
Le Président: M. le député, là je me
dois d'intervenir sur la nature de vos questions. D'une part, j'ai des doutes
sérieux quant à la compatibilité de vos questions et le
règlement de l'Assemblée. Les questions qui sont posées
aux ministres sont posées aux ministres dans le champ de
compétence de leurs activités. Or, on pose des questions sur une
fondation qui est distincte du gouvernement. Mais surtout la nature des
questions, compte tenu qu'elle remonte loin dans le temps, implique de tels
détails que, normalement, c'est le genre de questions qui doivent aller
au feuilleton.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: Vous conviendrez sûrement que les questions
portent sur la Fondation des Québécois pour le oui, une fondation
qui a été mise sur pied pour faire campagne ou, en tout cas,
faire une campagne préréférendaire...
M. Bertrand: M. le Président...
Le Préaident: II y a une question...
Une voix: Laissez-le terminer.
M. Gratton: ...que ce référendum...
M. Bertrand: ...argumentation.
Une voix: Oui, il faut qu'il explique.
M. Gratton: ...a été tenu en vertu d'une loi et
d'une question adoptée ici en vertu de la Loi sur la consultation
populaire. Donc, il est de la compétence de l'Assemblée nationale
d'en traiter et, évidemment, pour le premier ministre responsable du
gouvernement d'y répondre ou d'en prendre avis.
Le Président: En tout cas, sur cette question-là,
est-ce que c'est, oui ou non, de la compétence administrative du premier
ministre et du gouvernement? Cela me semble douteux, mais si le premier
ministre veut y répondre, bien libre à lui de le faire. Par
contre, concernant le deuxième aspect de mon intervention, c'est la
nature des questions remontant aussi loin dans le temps. Il faut bien se
rappeler qu'une question doit être une question d'actualité.
Alors, on remonte dans le temps et on pose des questions qui impliquent
tellement de détails que, normalement, ce genre de questions doivent
apparaître au feuilleton de l'Assemblée et non pas venir à
la période des questions.
M. Gratton: M. le Président, j'ajoute un point.
Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: II s'agit du contrôle des dépenses d'une
fondation dans le cadre d'une consultation populaire tenue en vertu de nos lois
et de l'application d'une Loi sur le financement des partis politiques et sur
le financement des campagnes référendaires. Je ne vois
réellement pas, M. le Président, comment cela ne pourrait pas
être traité ici, à l'Assemblée nationale, sinon
où pourrait-on en traiter?
Le Président: Ce que je vous souligne, M. le
député, ce n'est pas nécessairement que ce n'est pas
à l'Assemblée qu'il faut en traiter, mais c'est sur la
manière. Lorsque l'on veut avoir une réponse qui implique des
recherches sur une série de détails - par exemple, la
dernière question complémentaire du député de
Charlesbourg sur l'adresse - il me semble que, normalement, ce genre de
question doit apparaître au feuilleton. Mais je ne dis pas pour autant
qu'elle ne doit pas être posée. Je dis que l'endroit pour la poser
est le feuilleton plutôt que la période des questions.
M. Côté: M. le Président.
Le Président: Oui, M. le député de
Charlesbourg.
M. Côté: Avec les prochaines questions, vous allez
facilement comprendre et faire le lien.
Le premier ministre peut-il nous dire s'il est exact que l'adresse qu'on
a mentionnée tantôt à Montréal-Nord est l'adresse
d'affaires d'Yvan Guérin, l'ex-trésorier du PQ, l'ex-agent
officiel du premier ministre dans le comté de Taillon et
l'associé de Luc Cyr dans Transit Construction? Peut-il nous dire aussi
s'il est exact que la fondation aurait récolté 1 229 468 $ et que
Luc Cyr était l'un des principaux...
Le Président: M. le député. Un rappel au
règlement, M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, j'invoque, à la suite
des propos que vous avez tenus, surtout l'article 75 du règlement
à savoir que les questions qui sont posées doivent avoir un
caractère d'actualité et que dans la mesure... C'est tout
à fait vrai, c'est inscrit à l'article 75. Est-ce que vous riez
du règlement que vous avez adopté à l'unanimité?
Des questions qui portent sur des aspects très spécifiques
doivent être habituellement inscrites au feuilleton. Vous vous
rappellerez d'ailleurs très bien qu'une question avait été
posée par un député ministériel, qui était
bien loin de demander des détails aussi précis que ceux que
demande en ce moment le député de Charlesbourg, et vous aviez dit
au député ministériel: Inscrivez votre question au
feuilleton, c'est la meilleure façon d'obtenir une réponse
puisqu'une recherche normale doit être effectuée. Il y a deux
questions inscrites au feuilleton, en ce moment. Je pourrais lire les deux.
Non, non. Je pourrais lire simplement un paragraphe: "Existe-t-il des
études sur la question du lobbying qui auraient été
effectuées depuis janvier 1983 par les services de recherche de
l'Assemblée?" C'est inscrit au feuilleton. Cela m'apparaît encore
plus général au niveau de sa formulation que les questions du
député de Charlesbourg, je vous fais valoir que c'est vraiment le
genre de question qui devrait aller au feuilleton.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Gratton: Sur la question de règlement. Effectivement
l'article 75 dit bien que les questions doivent porter sur des affaires
d'intérêt public - je pense qu'il n'y a personne qui va nier qu'il
s'agit d'intérêt public dans les questions du député
de Charlesbourg - ayant un caractère d'actualité ou d'urgence. Il
y avait deux articles dans les journaux, ce matin, qui faisaient état de
cela. Si ce n'est pas d'actualité, lisez les journaux, vous allez voir.
Le ministre voudrait nous renvoyer au feuilleton pour avoir des réponses
quand? En mars ou en avril. On va ajourner la semaine prochaine. Il me semble
que le seul endroit pour poser ces questions, c'est ici même à la
période des questions.
Le Président: Je réitère que les questions
posées peuvent impliquer des recherches. Comme je l'ai indiqué a
Mme la députée de Dorion, il y a quelque temps, ce genre de
question doit paraître au feuilleton. Si la période de questions
est transformée en un moment où tout député peut se
lever et faire référence à n'importe quelle époque
plus ou moins lointaine et demander des détails très
précis du genre de ceux que demande le député de
Charlesbourg, la seule réponse qu'on va avoir à la période
de questions, cela va forcément être que le gouvernement prend
avis de la question parce que ce sont des questions qui demandent des
recherches détaillées et relativement poussées... Quand on
entend les questions assis où je le suis, cela semble être des
questions qui demandent effectivement des recherches; c'est le genre de
questions qu'on inscrit normalement au feuilleton.
M. Côté: M. le Président, deux
dernières questions additionnelles.
Le Président: M. le député, je viens de vous
faire valoir que les questions que vous posez sont de la nature de ces
questions qui s'inscrivent normalement au feuilleton. Je pense que vous en
conviendrez avec moi. Les questions qui demandent des recherches doivent
normalement s'inscrire au feuilleton. Je ne vois pas en quoi celles-ci font
exception à la règle.
M. Côté: Ce sont des questions d'ordre
général.
Le Président: De quoi?
M. Côté: D'ordre plus général. Dans la
même veine, mais d'ordre général au lieu d'être plus
spécifiques. Dans le respect de la Loi sur le financement des partis
politiques, est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il est exact que la
fondation a récolté 1 229 000 $ et que M. Luc Cyr
était...
M. Bertrand: M. le Président...
Le Président: II y a un rappel au règlement.
M. Côté: ...l'un des principaux... M. Bertrand: M.
le Président...
Le Président: Rappel au règlement. M. le leader
parlementaire du gouvernement.
M. Bertrand: C'est exactement de la même nature. Le leader
de l'Opposition disait tout à l'heure que parce que c'est dans le
journal, ce matin, cela a un caractère d'actualité. Dans le
journal La Presse, il y a une page...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Bertrand: ...qui s'intitule "II y a 100 ans." Il y a une
émission à la télévision qui s'intitule "20 ans
après." C'est une émission à la télévision.
Si c'est ça l'Opposition, 20 ans après...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Bertrand: ...ou il y a 100 ans, ce n'est pas ça la
période de questions...
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.
(10 h 50)
M. Gratton: Sur la question de règlement. Il me semble que
le règlement prévoit exactement comment le gouvernement peut
refuser de répondre à des questions s'il considère que ce
n'est pas d'intérêt public. L'argumentation que vient de faire le
leader du gouvernement... Que je sache Luc Cyr cela ne fait pas 100 ans qu'il
est ami du premier ministre, il l'est encore.
Le Président: Vous pouvez considérer que les
questions sont inscrites au feuilleton, le moins qu'on puisse dire c'est
qu'elles sont en tout cas inscrites au Journal des débats et qu'il y
aura réponse en temps opportun. M. le député de Portneuf,
question principale.
M. Pagé: M. le Président, une question principale
au premier ministre. J'espère qu'il est en bonne forme ce matin, plus
qu'hier. Hier, ce n'était pas trop édifiant
évidemment.
Le Président: M. le député.
Les responsabilités des membres de la
Sûreté du Québec
M. Pagé: Vous comprendrez que la question vous est
adressée en l'absence du
ministre de la Justice et elle se rapporte à la position abusive
adoptée par votre gouvernement dans le décret adopté le 28
novembre dernier, comme suite de la sentence arbitrale rendue il y a quelques
semaines par le juge Claude-René Dumais et relative au renouvellement du
contrat de travail des policiers de la Sûreté du
Québec.
Le premier ministre pourrait-il confirmer ou infirmer devant cette
Chambre les informations qui ont été données par le
Syndicat des policiers, à l'effet que le nombre de policiers entre 1977
et 1983 avait augmenté de 30 seulement pour le corps policier de la
Sûreté du Québec; que l'indice de la charge de travail pour
le nombre d'interventions par 100 policiers était passé de 667
à 1223; que ce corps policier s'est vu attribuer au cours de cette
période des responsabilités additionnelles en regard de
l'application du Code de la route et du Code de la sécurité
routière, entre autres pour les véhicules lourds; qu'il s'est vu
confier la responsabilité d'application et de contrôle de la Loi
sur les alcools? Comment concilier cette augmentation de charge et de
responsabilité à un corps policier comme celui de la
Sûreté du Québec avec l'attitude et la position
intransigeante adoptée par votre gouvernement?
Le deuxième volet de cette question: Le ministre de la Justice
s'est longuement référé au niveau de comparaison du
salaire payé aux policiers de la Sûreté du Québec.
Est-ce que le premier ministre nie les faits que le policier et l'agent de la
Sûreté du Québec, en 1985, gagnera moins que le policier de
ville La Baie, de Pincourt, de Chicoutimi, de Saint-Eustache, de Beloeil, de
Saint-Bruno, de Châteauguay, de Saint-Hyacinthe et d'Iberville?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, le
député ne s'attend sûrement pas que je commence à
éplucher les chiffres d'augmentation de tâches qu'il a
évoqués. Je peux probablement les confirmer tout de suite en
rappelant simplement que, jusqu'à récemment et forcément
au pire de la crise alors qu'on avait dû prendre l'engagement, et il faut
le tenir, que si l'ensemble des secteurs public et parapublic devait faire un
effort, il faudrait que tout le monde fasse un effort à peu près
équivalent. C'est quand même récent qu'on n'ait pas pu
s'entendre. Dieu sait que, tout compris, on s'était entendu ces
dernières années jusqu'à tout récemment, au point
que la progression méritée des membres de la Sûreté
du Québec a été plus rapide que celle d'à peu
près tous les autres secteurs du domaine public ou parapublic.
Cela étant dit, il est évident que personne ne regrette
autant que nous qu'on n'ait pas pu arriver à une entente, seulement -
enfin je peux le dire comme je le pense -je suis heureux que, dans l'ensemble,
jusqu'ici, les moyens de pression qu'on peut comprendre n'aient pas
entaché de façon trop grave la réputation plus que
méritée que, depuis des années et des années et
d'année en année, s'est faite un corps de police qui est vraiment
un corps d'élite. J'espère que cela tournera
éventuellement de la même façon à Montréal.
On n'a pas besoin de se faire de dessin.
Maintenant, il est évident qu'il y a eu des espèces de
flambées à la suite d'arbitrage dans certaines villes du
Québec qui, espérons-le, ne seront plus obligées de
créer des patterns terriblement artificiels et surtout aussi douloureux
qu'on le sait sur les populations qui doivent payer localement à
même leurs impôts ou leurs taxes.
Je veux bien partager ce que dit le député en ce qui
concerne la situation. Je ne sais s'il est prêt à partager le voeu
que je viens d'exprimer, mais j'espère en tout cas que, aussi bien
à Montréal que dans les villes où il y a eu de ces
flambées arbitrales, on viendra à une sorte de pattern qui
reconnaîtra d'abord et avant tout comme un plafond d'excellence, le corps
d'élite par excellence qu'est la Sûreté du Québec,
mais cela ne se fait pas en criant ciseaux.
Le Président: M. le député de Portneuf en
complémentaire.
M. Pagé: Question additionnelle à double volet:
Comment concilier votre déclaration de ce matin se
référant à la flambée des coûts et des
augmentations en regard des sentences arbitrales rendues pour les
municipalités, alors qu'une même sentence arbitrale est rendue et
déposée pour les policiers de la Sûreté du
Québec et que vous ne la respectez pas? Devons-nous comprendre que,
quand ce sont les municipalités qui paient, vous ne vous en occupez pas
et que, quand c'est vous qui payez, cela vous préoccupe?
Le deuxième volet de ma question: Si vous aviez un effort
à demander à la Sûreté du Québec et à
ses membres, pourquoi ne le leur avez-vous pas demandé le 8 juin
dernier, alors que les négociations achoppaient, plutôt que de les
convier à un arbitrage où, finalement, vous leur avez dit
à peu près ceci: On s'en va en arbitrage, on va passer les
fêtes de l'été, on va passer la visite du Pape; si cela
tombe du côté pile, je gagne et si cela tombe du côté
face, tu perds? C'est ce que vous avez fait, M. le premier ministre.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, est-ce que
je pourrais vous dire très
simplement que je pense que tout le monde comprenait que, dans une
situation où il y avait quand même - on peut le dire - la
réputation du Québec et loin au-delà de ses
frontières, c'était, je pense, indiqué. Je pense que tout
le monde a compris aussi qu'il fallait quand même que le conflit se
règle un jour. Mais je pense que le bon sens et ce que j'appelais tout
à l'heure l'excellence de ce corps...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lévesque (Taillon): ...policier ont quand même
prévalu en grande partie à cause des circonstances que vient
d'évoquer le député de Portneuf. Quant à la
conciliation entre la flambée que j'évoquais du côté
- Dieu sait que c'est connu - de certaines municipalités et l'arbitrage
qu'on a cru devoir - et je crois qu'on avait raison de penser qu'on devait le
faire - refuser, celui de la Sûreté du Québec, sans entrer
dans les détails, à moins qu'on veuille encore passer au
feuilleton, je ferai simplement un rappel. Telles que les choses sont
jusqu'à nouvel ordre, les arbitrages en ce qui concerne la
Sûreté du Québec ne sont pas exécutoires. Ce sont
des recommandations...
Une voix: Voilà!
M. Lévesque (Taillon): ...tandis que les
municipalités sont aux prises avec des sentences exécutoires.
Maintenant, est-ce que l'avenir sera pareil? Cela reste à voir.
Une voix: C'est cela.
Le Président: M. le député de Portneuf, en
complémentaire.
M. Pagé: Nous prenons évidemment acte de
l'admission du premier ministre qui est grosse ce matin à savoir
que...
Le Président: La question, M. le député.
M. Pagé: ...tout cela a été fait par
stratégie.
Le Président: M. le député.
M. Pagé: L'arbitrage a été demandé
par stratégie.
Le Président: M. le député, la question.
M. Pagé: Additionnelle, à double volet encore.
Devons-nous comprendre de la position du gouvernement que vous
considérez que le juge Dumais a erré en droit par la sentence et,
en quoi a-t-il erré, l'honorable juge?
Le deuxième volet. Est-il exact que le premier ministre, dans une
rencontre privée qu'il a eue avec les représentants des policiers
provinciaux, le ou vers les 17 ou 18 novembre, leur a dit, avec sa bonhommie
habituelle: Vous avez raison. Vous avez raison sur le fond, mais vous savez,
les gars...
Une voix: Lâchez pas, les gars.
Une voix: Lâchez pas.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Ce n'était pas si mal
à l'époque! M. le Président, je n'ai pas à
ajouter... Si on veut feuilletonner les questions de jour en jour, il reste
quelques jours. Je crois que je n'ai pas à répondre à la
première question. Cela a déjà été -excusez
ma faute de français - "répondu" par mon collègue de la
Justice, entre autres. Si on veut lui demander une opinion juridique sur le
rapport du juge, Bah! Seigneur! il sera là demain.
Quant à la rencontre privée qu'évoque le
député, c'est sûr, j'étais très heureux
-enfin, heureux... J'ai été heureux de toute façon de
pouvoir rencontrer les porte-parole du syndicat des policiers dont M. Richard,
le président. Ils nous ont - et c'est normal
-répété l'essentiel de ce qui était quand
même l'ensemble de leurs réclamations. Là-dessus, j'ai
dû admettre - pourquoi pas? -qu'ils avaient raison sauf sur un point,
c'est-à-dire qu'on croyait que cela n'était pas correct d'aller
jusque là dans les fonds publics. Sur bien des points, comme il arrive
toujours dans les conflits de bonne foi, oui, ils pouvaient avoir raison. Dans
certains cas, c'est sûr qu'on pouvait avoir au moins en partie tort, mais
cela ne change pas la conclusion à laquelle on était tenu quant
à nous.
Le Président: Question principale, M. le
député de Bellechasse.
La déréglementation dans l'industrie de
la coiffure
M. Lachance: M. le Président, ma question s'adresse
à la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu. Lundi dernier, le 10 décembre, Mme la ministre a annoncé
la décision du Conseil des ministres de déréglementer les
régimes d'apprentissage ainsi que les mécanismes de qualification
professionnelle dans l'industrie de la coiffure. Si j'ai bien compris, ce
projet va faciliter indistinctement l'accès au métier de coiffeur
pour hommes et de coiffeur pour dames. J'aimerais savoir de la ministre,
premièrement, ce que cette décision va changer
concrètement dans le fonctionnement quotidien des salons de
coiffure;
deuxièmement, si cette annonce de déréglementation
dans le secteur de la coiffure a été
précédée d'une consultation auprès des intervenants
concernés? (11 heures)
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: Merci, M. le Président. D'abord - le
député le mentionnait lui-même - cette distinction entre
coiffeur pour hommes ou coiffeur pour dames sera éliminée,
c'est-à-dire qu'on soit un salon spécialisé pour les
hommes ou pour les femmes, on pourra recevoir des gens de l'autre sexe aussi.
Je dois dire que c'est une réglementation qui existait depuis
près de 35 ans, M. le Président, et qu'elle ne correspondait plus
à notre réalité sociale et culturelle.
L'autre élément, c'est, effectivement, une
déréglementation dans l'ordre de la qualification et de la
formation professionnelles. Ce que cela va changer, très
concrètement, dans les salons, c'est que cela remettra en question
toutes ces notions de ratios qui, selon les comités paritaires et
là où ils existent - parce qu'ils n'existent pas partout et
n'existent pas pour les métiers selon l'un ou l'autre sexe dans
certaines régions... - Nous retoucherons les ratios, nous ouvrirons la
politique d'apprentissage, nous l'élargirons. Notre souhait, c'est de
travailler tant avec les comités paritaires qu'avec les associations de
coiffeurs ou de coiffeuses là où elles existent pour revaloriser
le statut de coiffeur et de coiffeuse et de faire en sorte que l'apprentissage
dans les salons soit beaucoup plus ouvert que ce ne l'est maintenant.
Le Président: M. le député de Bellechasse,
en complémentaire.
M. Lachance: Comme c'est un sujet de préoccupation
actuellement, j'aimerais savoir de la ministre, ce qu'il va advenir des heures
d'affaires auxquelles doivent se conformer les travailleurs et les
travailleuses dans le domaine de la coiffure?
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: II y avait d'abord un deuxième volet à
la question auquel je n'avais pas répondu, c'était la
consultation. Les heures d'affaires, je vais y revenir. Concernant la
consultation, je suis à mon ministère depuis un an. J'ai
rencontré, à peine quelques semaines après mon
entrée au ministère, tant des représentants des
comités paritaires que des propriétaires de salon de coiffure
pour hommes ou pour dames ou des associations de coiffeurs ou coiffeuses. Nous
avons eu de très longues discussions pendant, je dirais, de longs mois,
au moins un an et après ces consultations, dès le moment de ces
consultations, j'avais déjà dit aux représentants de ces
différents organismes que mon orientation était plutôt que
nous proposerions au gouvernement de déréglementer le secteur.
Après ces consultations, j'ai pris cette décision et je l'ai
recommandée au gouvernement qui l'a retenue.
Quant aux heures d'affaires, je pense qu'il faut bien clarifier cette
question. Les établissements commerciaux, c'est-à-dire de vente,
sont réglementés, - on le sait, il y a eu un débat ici
à ce sujet, - il y a donc des heures réglementaires et des
conditions. Dans le cas des services du type de la coiffure ou d'autres types
de services, il n'y a pas de réglementation. Il y a, cependant, une
réglementation qui concerne les conditions de travail des personnes qui
oeuvrent dans ces services et c'est évidemment la loi sur les normes
minimales du travail qui prévoit un nombre d'heures maximales par
semaine et qui prévoit un certain nombre de conditions. Cependant,
puisque nous n'abolissons pas les comités paritaires, les comités
paritaires pourront continuer d'exister et pourront définir,
région par région, des règles et s'entendre sur ces
règles de relation du travail de même que d'ouverture ou de
fermeture en termes d'heures d'affaires.
Le Président: En complémentaire, M. le
député d'Orford.
M. Vaillancourt: M. le Président, en
complémentaire. Est-ce que la ministre peut nous dire - est-ce qu'elle
m'écoute? - si la déréglementation de la coiffure va
permettre à une personne qui sort des études, qui a suivi un
cours en coiffure pour homme ou pour dame, d'ouvrir un salon sans être
obligée de passer trois ans avec une coiffeuse qualifiée?
Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Mme Marois: Si cette personne devait avoir la formation et le
talent de façon quasi innée, finalement, elle pourrait le faire
immédiatement à sa sortie de l'école. Je lui souhaite
cependant une très bonne chance. Peut-être qu'elle aura un certain
nombre de problèmes à avoir des clients et des clientes en
permanence. Mais elle pourrait le faire. Si, effectivement, elle a le talent
pour le faire, il sera possible, j'imagine, qu'elle ait une clientèle
qui s'adresse à elle.
Le Président: Question principale, M. le
député de Berthier.
Comment remplacer les emplois qui
seront perdus lors de la fermeture
de l'usine Melchers?
M. Houde: Merci, M. le Président. Je voudrais profiter de
l'occasion pour vous parler de notre belle usine qui est en train de fermer
à Berthier et, en même temps, saluer les gens de Berthier qui sont
dans la galerie ce matin.
Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie et du Commerce. Le 30
novembre dernier, la compagnie Seagram annonçait s'être
portée acquéreur de Distillateurs Mel-can Limitée, groupe
appartenant à la distillerie Melchers de Berthierville. Or, Seagram
profita de la même occasion pour annoncer la fermeture de la distillerie
Melchers de Berthierville, fermeture qui doit se réaliser sur une
période de six mois et qui est imputée à l'escalade des
taxes fédérales et provinciales qui sont trop
élevées sur les spiritueux.
Cette distillerie qui existe depuis 100 ans est une des plus importantes
entreprises de Berthierville. Elle y génère une activité
économique importante. Sa fermeture amènerait la perte de 100
emplois directs et d'environ 50 emplois indirects. En plus, la
municipalité perdrait 200 000 $ en taxes municipales.
Voici ma question: Quelles mesures concrètes le ministre
entend-il prendre afin que soient remplacés les emplois qui seraient
perdus lors de la fermeture de l'usine Melchers?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Biron: M. le Président, on est en face d'une
décision qui a été prise par deux entreprises
privées. Je voudrais que mes collègues, celui de Berthier en
particulier, vis-à-vis de leur parti politique, apportent un peu de
logique là-dedans lorsqu'on dit qu'on est favorable à
l'entreprise privée. Si deux entreprises privées prennent une
décision, bien sûr, il faut en accepter les
conséquences.
Nous, du côté du gouvernement du Québec, nous avons
dit, au début de la longue discussion qu'on a eue avec les entreprises
privées dans le secteur des boissons alcooliques et avec la
Société des alcools, qu'il fallait conserver un secteur
témoin à la Société des alcools pour faire en sorte
de conserver le maximum d'entreprises possible.
L'entente entre Melchers et Seagram est une entente entre deux
entreprises privées. Ce que nous essayons de faire présentement,
puisque nous avons déjà discuté avec les gens de Seagram,
c'est chercher d'autres possibilités d'embouteillage ou l'embouteillage
d'autres choses. Par exemple, on embouteillait à Berthierville les
liqueurs Marie Brizard qui appartiennent à un concurrent de Seagram. Il
est certain que ce n'est pas Seagram qui va embouteiller pour lui. On essaie de
voir si on ne pourrait pas conserver cette partie, mais en trouvant bien
sûr un entrepreneur qui serait prêt à acheter les
installations de Melchers ou à bâtir des installations à
côté, pour au moins cette partie-là.
Deuxièmement, on vise aussi à embouteiller au maximum le
vin et les spiritueux qui seront consommés au Québec et
exportés à partir du Québec. Là aussi, il y a des
possibilités mais à la condition, encore une fois, de trouver un
investisseur ou un entrepreneur qui est prêt à prendre un certain
risque en investissant de l'argent dans cette entreprise.
M. Houde: M. le Président, question additionnelle, s'il
vous plaît!
Le Président: Oui, M. le député de Berthier,
en complémentaire.
M. Houde: Est-ce que le ministre est prêt à
organiser une rencontre avec les représentants de Seagram et les
représentants du comité pour la survie des employés de
Berthier ainsi que moi-même pour tenter de retarder, d'abord, le
délai de la fermeture et essayer de trouver une solution?
Une voix: Très bien.
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Biron: Oui, M. le Président. Je suis prêt
à essayer d'organiser une rencontre entre Seagram et les gens de
Berthier, bien sûr...
M. Houde: Dans les plus brefs délais.
M. Biron: ...mais il faut quand même... Vous savez, M. le
député, et je pense que tous les députés
libéraux, comme les députés du Parti
québécois, le savent, lorsque vous soulevez des problèmes
particuliers, je respecte toujours le député du comté.
Je dois dire que c'est quand même une décision
économique qui a été prise par deux entreprises. Comme
objectif, il s'agit de trouver d'autres lignes de production que nous n'avons
pas à l'heure actuelle au Québec ou qui s'en iraient à
l'extérieur du Québec. Bien sûr, il faut faire un effort
énorme pour trouver un ou des entrepreneurs dans la région de
Berthier qui seraient prêts à prendre la relève des anciens
propriétaires de Melchers.
Le Président: Mme la députée de
Mégantic-Compton. (11 h 10)
Le Guide des aînés sera-t-il
publié en anglais?
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre des Communications. Dernièrement, on assistait,
par le biais des médias, au lancement du Guide des aînés.
Cette publication contient de l'information sur les droits des gens
âgés et les services qui leur sont disponibles auprès des
diverses agences gouvernementales. Or, il n'existe pas de version anglaise du
guide afin de desservir la population âgée anglophone qui compte
79 330 peronnes, soit 14% de toutes les personnes âgées du
Québec. Une association anglophone de l'Estrie mentionnait
récemment que la grande majorité des personnes âgées
de 65 ans et plus de langue anglaise est incapable de lire et de comprendre le
français. 9250 personnes sont ainsi concernées dans l'Estrie.
Selon nos informations, aucune version anglaise n'a encore
été imprimée et ne semblerait pas l'être dans les
semaines qui viennent. Le ministre a-t-il l'intention de publier dans les plus
brefs délais la version anglaise du Guide des aînés?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: M. le Président, je remercie beaucoup la
députée de Mégantic-Compton de me poser cette question.
J'ai effectivement refusé de signer toute lettre de réponse
à des organismes représentant des communautés anglophones
qui m'ont effectivement fait part de leur désir d'avoir le Guide des
atnés traduit en anglais puisque, effectivement, cela semble
correspondre à un besoin chez les personnes âgées. J'ai
refusé de répondre à ces lettres de la façon dont
elles m'étaient préparées au ministère des
Communications parce que l'argument qui est invoqué est le suivant.
À l'époque, quand nous avions diffusé le Guide du
citoyen, nous avions imprimé 95 000 guides du citoyen en
français; ils ont tous été vendus. Nous en avions
imprimé 5000 en anglais et il n'y en a pas 1500 qui ont
été vendus. Il y a donc un problème réel de
commercialisation du guide qui pose au ministère des Communications, sur
le plan des coûts budgétaires, un certain nombre de
difficultés. Comme je suis sensible aux représentations qui sont
faites par les regroupements de personnes âgées, nos atnés,
comme il semble y avoir une demande réelle pour que le Guide des
atnés soit traduit en anglais, j'essaie d'évaluer en ce moment
quelle pourrait être la demande exacte et aussi la réponse exacte,
la plus exacte possible des personnes âgées si jamais nous
décidions, par exemple, de traduire le guide en anglais et ainsi le
rendre accessible aux personnes âgées.
Donc, je peux assurer Mme la députée que je regarde ce
dossier de très près en ce moment au ministère des
Communications, que je me refuse pour l'instant à transmettre une
réponse à ces groupes leur disant que, pour des raisons de
commercialisation...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Bertrand: ...il est impossible de procéder à la
traduction du guide en anglais. Dès que j'aurai une réponse
définitive, il me fera grand plaisir de la communiquer à Mme la
députée de Mégantic-Compton.
Le Président: En complémentaire, Mme la
députée de Mégantic-Compton.
Mme Bélanger: Le ministre nous parle de l'échec du
Guide des citoyens; le ministre pourrait-il nous dire s'il y a eu autant de
publicité pour la version anglaise que pour la version française
et est-ce que cette publicité pour la version anglaise a
été faite en anglais ou en français?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: D'abord, je remercie Mme la députée de
m'encourager à poursuivre nos programmes de publicité, c'est
réconfortant. C'est de la bonne, c'est de la publicité
informative, comme d'habitude.
Le Président: Allons, allons!
M. Bertrand: Je voudrais dire à Mme la
députée qu'évidemment, une bonne politique de marketing,
de quelque publication que ce soit, doit évidemment s'adapter à
la clientèle qu'on veut desservir. Dans cette perspective, il est
évident que lorsque nous avons diffusé le Guide du citoyen, nous
nous sommes assurés, dans toute la mesure du possible, bien sûr,
qu'il soit connu de la communauté anglophone.
Vous, on vous en envoie un exemplaire gratuit, habituellement.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre!
M. Bertrand: Je suis sûr que si vous me faites la demande,
M. le député, on va vous l'envoyer.
Le Président: M. le ministre des Communications, la
question ne venait pas...
M. Bertrand: Mme la députée, je puis vous assurer
que dans la mesure où j'obtiendrais une demande qui correspondrait
à une possibilité réelle de faire en sorte que
nous puissions assumer les coûts que représentent la
production, la traduction, la commercialisation du Guide des
aînés, bien sûr, si c'est possible, à ce
moment-là, la politique de marketing qui sera utilisée fera en
sorte qu'on puisse permettre aux personnes âgées de
connaître l'existence du Guide des aînés et d'y avoir
accès de la meilleure façon possible.
M. Vaillancourt: Question supplémentaire, M. le
Président.
Une voix: Question additionnelle.
Le Président: II y en a trois en même temps, on va
accorder le droit d'aînesse au député d'Orford.
M. Vaillancourt: Est-ce que l'aîné peut
commencer?
Est-ce que le ministre peut nous dire quand il va prendre sa
décision pour traduire le Guide des aînés car nous avons
beaucoup de correspondance venant de la région des Cantons-de-l'Est, du
comté de Brome-Missisquoi et d'un peu partout du Québec nous
demandant quand il sera disponible pour les anglophones. Je crois que c'est
très important.
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: Alors là, M. le Président, j'avoue
que, si on invoque des demandes qui parviendraient du comté de
Brome-Missisquoi, je les prendrai peut-être en très
sérieuse considération, sans oublier bien sûr, celles qui
pourraient originer du comté d'Orford ou du comté de
Mégantic-Compton. J'ai reçu aussi des demandes de cette
très large partie de la communauté anglophone qui vit davantage
dans la région de Montréal et dans la région de
l'Outaouais. Je veux dire à madame que jusqu'à maintenant j'ai
refusé de répondre à ces groupes en leur donnant une
réponse négative. Je veux tenter de trouver une solution qui
réponde aux besoins légitimes de ces personnes. Dans la mesure
où ce sera possible, espérons que ce ne sera pas à
Pâques ou à la Trinité, si possible avant Noël,
j'essaierai de donner la réponse aux députés de
l'Assemblée nationale.
M. Vallières: Question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Richmond.
M. Vallières: Est-ce que le ministre pourrait nous
indiquer s'il a envisagé la possibilité de
récupérer quelques milliers de dollars sur les millions de
dollars de publicité propagandiste du gouvernement du Québec et
de les affecter aux personnes âgées plutôt que de se donner
les délais qu'il prend actuellement?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: II est toujours possible, à
l'intérieur du budget d'un ministère, d'effectuer un certain
nombre de réaffectations, bien sûr, toujours en transitant par le
Conseil du trésor mais je veux de nouveau rappeler au
député mon intention formelle, qui d'ailleurs, en ce
moment-même, est à l'étude au ministère des
Communications, que dans toute la mesure du possible, tout en tenant compte des
problèmes que ça peut susciter, et ils sont réels, nous
répondions à une demande qui nous est transmise par les personnes
âgées et qui m'apparaît tout à fait
légitime.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre
des Communications pourrait nous expliquer pourquoi l'évaluation qu'il
se dit prêt à faire maintenant, n'a pas été faite en
temps utile? Le problème qu'on lui soulève maintenant est un
problème auquel il devait s'attendre. Pourquoi a-t-il attendu que des
demandes affluent de tout bord et de tout côté pour évaluer
ce besoin qui existait déjà, s'il a fait son travail
convenablement?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Bertrand: Parce que, m'inspirant de la sagesse et de
l'expérience des aînés, justement, je m'en suis remis
à une expérience qui a été vécue, il y a
quelques années avec le Guide du citoyen. Je dis au député
que, malgré le fait que nous ayons traduit le Guide du citoyen en
anglais -5000 exemplaires - il n'y en a pas 1500 finalement qui ont
été achetés par des citoyens qui voulaient avoir
accès à ce guide en langue anglaise. Donc, ça n'a pas
été une réussite, ça n'a pas été un
succès et cela a posé des problèmes sur le plan de la
commercialisation et de la production.
La réponse est satisfaisante? Très bien!
Le Président: M. le député de Saint-Henri
souhaite poser une question, j'imagine, au ministre des Affaires culturelles
qui souhaite probablement s'en faire poser une.
M. le député de Saint-Henri.
La démolition de la maison
Pagé-Quercy
M. Hains: M. le Président, ma question
s'adresse évidemment au ministre des Affaires culturelles. Le
samedi 3 novembre dernier, la maison historique Pagé-Quercy tombait sous
le pic des démolisseurs. C'est un cruel contraste qu'on détruise
le patrimoine pour bâtir le Musée de la civilisation. D'ailleurs
étrange, a dit le ministre lui-même, que cette démolition
ait eu lieu un samedi après-midi, en catimini. Étrange, a-t-il
dit encore lui-même, que la Société immobilière du
Québec n'ait pas respecté des directives qu'il lui avait
données. Sous le coup, M. le ministre a fait une crise de colère.
Il a dit ceci: "Nous avons demandé à notre contentieux de voir
à intenter des poursuites contre les responsables. D'ailleurs, le
Conseil des monuments et des sites du Québec, en date du 20 novembre
dernier, a demandé au ministre de poursuivre les coupables et d'imposer
des pénalités. Ma question est celle-ci: M. le ministre peut-il
nous dire quel est l'avis de son contentieux sur ce litige et des poursuites
ont-elles déjà été intentées contre les
responsables? (11 h 20)
Le Président: M. le ministre des Affaires culturelles.
M. Richard: M. le Président, j'ai effectivement
demandé au contentieux du ministère de fournir un avis à
ce sujet. Je n'ai pas encore pris connaissance de cet avis. Je ne sais pas s'il
est prêt. Dès qu'il sera prêt, je pourrai en informer le
député de Saint-Henri.
Le Président: M. le député de Saint-Henri,
en additionnelle.
M. Hains: M. le Président, il me semble que M. le ministre
semble retarder...
Le Président: En complémentaire, M. le
député.
M. Hains: ...c'est une grave responsabilité dans ce
dossier...
Le Président: M. le député, la
période des questions arrive à sa fin. La question
complémentaire, s'il vous plaît!
M. Hains: Voilà. M. le ministre ne craint-il pas que son
omission d'intervenir dans le scandale du Grand Théâtre de
Québec et que ce nouveau retard dans ce nouveau scandale de la maison
Pagé-Quercy, eh bien, ne grèvent sérieusement sa
réputation de ministre responsable?
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président: M. le ministre des Affaires culturelles.
M. Richard: M. le Président, je saisis mal le rapport qui
existe entre le Grand Théâtre et la maison Pagé-Quercy. En
ce qui a trait à la maison Pagé-Quercy, c'est manifestement... En
tout cas, c'est l'opinion de la Société immobilière qui
prétend que l'interprétation qu'elle devait donner au permis lui
permettait de démolir tout le rez-de-chaussée de cette maison, ce
qu'elle a fait un samedi. Mais il faut dire, à la décharge de la
Société immobilière, que si elle a dû travailler un
samedi, c'est en raison des contraintes qu'impose la ville de Québec, et
à bon droit, pour fermer des rues durant la semaine. C'est l'explication
fournie par la Société immobilière.
Le Président: II y a un complément de
réponse du ministre des Affaires sociales à une question
posée par le député de Maskinongé.
Le départ de M. Bernard Barbera du CLSC
Sainte-Thérèse
M. Chevrette: M. le Président, hier, le
député de Maskinongé m'adressait des questions dont j'ai
pris note et je voudrais apporter les éléments de réponse
suivants.
Tout d'abord, contrairement à ce que le député de
Maskinongé a affirmé, à savoir que le conseil
d'administration du CLSC Sainte-Thérèse avait demandé la
démission, il y a eu une proposition qui fut rejetée par la
majorité des membres, et c'est M. Barbera lui-même qui a
démissionné et non pas le conseil d'administration.
Deuxièmement, à l'indeminité grassement
payée, le recherchiste du député aurait dû lui
souligner qu'à la page 2044 de la Gazette officielle du 18 mai 1983, il
est dit ceci: "Un employeur peut verser une indemnité de départ
à un directeur général dans le cas de congédiement,
de non-réengagement, de résiliation d'engagement.
Également, l'indemnité est versée mensuellement par
l'employeur. Elle ne peut être de plus de six mois et cesse lorsque le
directeur général occupe un autre emploi ou prend sa retraite.
Toutefois, elle peut être de dix mois si le directeur
général a plus de dix années de service." Dans le cas de
M. Barbera, il avait quatorze années de service et c'est tout à
fait conforme à la réglementation publiée dans la Gazette
officielle du 18 mai 1983.
Maintenant, M. le Président, M. le député de
Maskinongé a dit ceci: Le ministre pourrait-il aussi nous dire s'il
existe un lien entre cette démission grassement payée et les
plaintes pour harcèlement sexuel qui ont été
déposées contre M. Barbera à la Commission des droits de
la personne? Selon les informations obtenues, il n'y avait aucune plainte de
déposée à la Commission des droits de la personne au
moment de la
démission de M. Barbera.
L'autre question par le député de Maskinongé: Le
ministre peut-il nous dire aussi s'il existe un lien entre cette
démission grassement payée et la plainte pour détournement
de mineure qui a été déposée auprès du
Directeur de la protection de la jeunesse? Après vérification au
bureau du Directeur de la protection de la jeunesse, il n'y avait aucune
plainte de déposée.
M. le Président, quant à l'autre allégation du
député de Maskinongé qui dit ceci: Est-ce le même
monsieur qui est président régional du PQ de Ville-Marie? Oui,
c'est le même monsieur - après information - qui est
président du PQ de Ville-Marie et qui, à mon avis, est absolument
blessé dans ses droits, profondément, quand on allègue,
sous le couvert de l'immunité parlementaire de si grossières
affirmations, et l'immunité parlementaire ne devrait tout au moins pas
friser l'irresponsabilité d'un homme public.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Est-ce que le ministre des Affaires sociales pourrait
me dire si effectivement il y a déjà eu, au moment de la
démission, avant la démission ou après la démission
de M. Barbera, des plaintes à la Commission des droits de la personne
pour harcèlement sexuel? La même chose du côté de la
protection de la jeunesse. Est-ce qu'il y a eu les mêmes plaintes? Le
ministre me mentionne qu'il y a des clauses dans la loi pour des
indemnités de départ. Or, vous m'avez dit que c'était une
démission. Est-ce que dans le cas des démissions c'est
prévu? Vous n'en avez pas fait lecture.
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Chevrette: Je vais relire: "Un employeur peut verser une
indemnité de départ à un directeur général
dans le cas de congédiement, de non-réengagement,
résiliation d'engagement, entente pour mettre fin à un engagement
ou démission, à la condition que le directeur
général ait renoncé par écrit à tout
recours." C'est tout ça, 1983. Quand on formule les questions, il faut
regarder aussi les éléments de réponse qu'on peut trouver
à même nos propres documents. Deuxième partie, vous m'avez
demandé, hier, s'il était vrai qu'il y avait un lien entre la
démission et les plaintes. Je vous ai répondu qu'il n'y avait
aucune plainte au moment de la démission.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
Des voix: Ah! Ah!
M. Chevrette: II n'y a pas de ah! ah!
Laissez-moi répondre. Vous allez voir que les ah! ah! vont se
dégonfler. Il n'y a aucune plainte... Le Directeur de la protection de
la jeunesse relève de mon ministère et il n'y a pas de plainte.
Quant à la Commission des droits de la personne, cela relève de
M. le ministre de la Justice. Il n'y avait pas de plainte au moment de la
démission. Le complément de réponse à la question
que vous posez aujourd'hui, j'irai le chercher au ministère de la
Justice et je vous répondrai. Cela n'empêche pas que lancer des
accusations de harcèlement sexuel, cela m'apparaît tout à
fait irresponsable, d'autant plus que j'apprenais ce matin même que M.
Barbera lui-même a logé une plainte auprès de la Commission
des droits de la personne pour obtenir justice. Si vous voulez lui rendre
service, allez le répéter devant les journalistes. Vous allez lui
rendre bien service.
Le Président: Aux motions sans préavis.
Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader
parlementaire du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Bertrand: Aujourd'hui, le mercredi 12 décembre,
après les affaires courantes, c'est-à-dire à 11 h 30
jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures
à 21 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission
de l'économie et du travail poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail
et les maladies professionnelles. Aux mêmes heures, à la salle 81,
la commission de l'éducation et de la main-d'oeuvre poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi sur
l'enseignement primaire et secondaire public. À la salle 91, la
commission de l'aménagement et des équipements entreprendra
l'étude détaillée du projet de loi 8, Loi sur la
Société de transport de la ville de Laval. Lorsque cette
commission aura terminé l'étude du projet de loi 8, elle
entreprendra l'étude détaillée du projet de loi 81, Loi
modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres
dispositions législatives.
Le Président: De mon côté, j'ai un avis de la
commission de la culture à savoir qu'elle souhaite tenir une
séance de travail après les affaires courantes. Cela ferait
évidemment quatre commissions qui siégeraient en même
temps. Est-ce qu'il y a consentement à ce que la commission de la
culture tienne cette séance de travail ce matin? Il y a donc
consentement. Les quatre commissions pourront siéger. Oui, M. le
député d'Argenteuil, sur les travaux de l'Assemblée?
M. Ryan: Une question au leader du gouvernement. Je lisais dans
un journal ce matin que le leader aurait déclaré que les
représentants de l'Opposition à la commission de
l'éducation et de la main-d'oeuvre auraient réclamé hier
la tenue d'une deuxième journée de consultation
particulière autour du projet de loi 3. Je soutiens que c'est faux. Je
demande au ministre s'il voudrait retirer cette affirmation vu que les
consultations particulières sont de toute manière
terminées depuis hier soir. (11 h 30)
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, excusez-moi si j'ai pris
information auprès du ministre du l'Éducation, mais je veux
être tout à fait correct à l'endroit du
député d'Argenteuil. Ce que le député d'Argenteuil
a évoqué hier en commission parlementaire, c'est qu'il
considérait qu'étant donné le nombre de groupes qu'il y
avait, il pourrait être utile de prolonger au-delà d'une
journée la tenue... On pourrait peut-être se référer
aux galées d'hier, mais il a évoqué la possibilité
que cela puisse déboucher sur une deuxième journée. Je
crois savoir, par ailleurs, qu'il n'a pas insisté sur la question, mais
il a évoqué la possibilité que cela puisse se poursuivre
une deuxième journée. De toute façon, nous
procéderons aux vérifications. S'il est exact que j'ai
erré en évoquant que le député d'Argenteuil avait
demandé formellement qu'il y ait une deuxième journée de
consultation, il me fera plaisir ici, à l'Assemblée nationale, de
retirer mes paroles.
Le Président: Nous sommes aux renseignements sur les
travaux de l'Assemblée. M. le député de
Louis-Hébert.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
M. Doyon: Oui, M. le Président. Hier j'avais l'occasion de
demander au leader parlementaire du gouvernement quelles étaient les
intentions du gouvernement en ce qui concerne le projet de loi
d'intérêt privé, Loi concernant le parc industriel
technologique Québec-Sainte-Foy, déposé le 23 octobre par
le député de Chauveau, M. Brouillet. Le leader parlementaire m'a
indiqué à ce moment-là qu'il s'empresserait de consulter
le ministre de la Science et de la Technologie - ce qu'il est probablement en
train de faire à sa banquette - pour savoir si ce projet de loi ferait
l'objet d'une adoption avant la fin de la présente session de
façon que les principaux intéressés, la ville de
Sainte-Foy et la ville de Québec ainsi que les groupes et les
entreprises qui veulent s'implanter dans le parc technologique de
Sainte-Foy-Québec, puissent savoir à quoi s'en tenir.
J'attends la réponse du leader et ministre des Communications.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je peux indiquer au
député de Louis-Hébert que ce soir même, le ministre
responsable de la Science et de la Technologie doit rencontrer son homologue
fédéral pour discuter entre autres choses du développement
d'un centre de recherche en particulier qui relève plus
spécifiquement du gouvernement fédéral, celui sur
l'optique laser. Dans cette perspective-là, après la rencontre
qu'auront eue les deux ministres, le ministre de la Science et de la
Technologie sera en mesure de m'indiquer plus clairement s'il sera possible de
procéder à l'adoption de ce projet de loi privé avant la
période des fêtes. Au moment où on se parle, le ministre
m'indique que ce serait, quant à lui, son souhait que nous puissions
procéder à l'adoption du projet de loi avant la période
des fêtes.
Le Président: M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Une question au leader.
Pourrait-il nous confirmer, peut-être à nouveau ou à tout
événement confirmer ce qu'on en a lu dans les journaux, qu'il
n'est aucunement encore de l'intention du gouvernement de présenter pour
adoption avant Noël le projet de loi 90, Loi sur le Vérificateur
général?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: C'est exact, M. le Président. Le ministre des
Finances, après en avoir discuté d'ailleurs avec le
Vérificateur général, m'a fait part qu'il n'était
pas de son intention de demander à l'Assemblée nationale
d'adopter le projet de loi sur le Vérificateur général
avant la période des fêtes. Mais cette décision du ministre
des Finances qui a été endossée par le Conseil des
ministres a fait l'objet de consultations avec le Vérificateur
général. Le ministre des Finances ainsi que le
Vérificateur général ont compris qu'il pouvait être
possible de reprendre ce projet de loi quelque part au début de
l'année 1985, c'est-à-dire à la reprise des travaux
parlementaires au mois de mars prochain.
Le Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Lachance: M. le Président, ma question s'adresse au
leader. J'aimerais
savoir si le projet de loi privé inscrit en mon nom en date du 13
novembre 1984, le projet de loi 244 concernant la Fédération des
commissions scolaires du Québec, sera appelé avant la fin des
travaux le 21 décembre?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je prendrai information et
je pourrai donner la réponse au député de Bellechasse dans
les meilleurs délais.
Le Président: M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Toujours au leader. Quant
à des annonces qui auraient été faites plus tôt, de
publication d'un livre blanc sur la fiscalité, la Chambre peut-elle
s'attendre que le gouvernement publie ce document avant la période des
fêtes?
Le Président: Je veux bien laisser le leader du
gouvernement répondre, bien que la question est
irrégulière à ce moment-ci.
Une voix: II faut qu'il réponde.
Le Président: Non, la question... Il peut... Je n'ai pas
d'objection à ce qu'il réponde, mais ce genre de question devrait
être posée à la période de questions car il ne
s'agit pas d'un sujet qui est inscrit au feuilleton.
M. Bertrand: Effectivement, malgré... C'est tout à
fait normal, d'ailleurs, que vous nous indiquiez chaque fois si, oui ou non,
nous respectons le règlement à ce point de vue. Mais je suis
disposé à répondre au député de
Vaudreuil-Soulanges qu'il est effectivement de l'intention du gouvernement de
procéder à la publication du livre blanc sur la fiscalité
avant la période des fêtes.
Une voix: Vous n'aurez pas beaucoup de temps.
Le Président: II n'y a pas d'autre question. Cela nous
mène aux affaires du jour et au débat sur l'adoption du principe
du projet de loi 7. Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: Oui. Me permettriez-vous de demander au leader du
gouvernement de nous indiquer, dans l'ordre si possible, quels sont les projets
de loi qui seront appelés au cours de la séance d'aujourd'hui? Je
sais qu'il y a eu des tractations avec les ministres et les
députés porte-parole de l'Opposition. Il serait peut-être
bon pour l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale de
connaître, si possible, quel sera l'ordre de l'appel des projets de loi
au cours de la séance d'aujourd'hui.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, nous allons commencer ce
matin par le projet de loi 5...
M. Gratton: Le projet de loi 5? M. Bertrand: Oui. M.
Gratton: Rapport?
M. Bertrand: Oui. C'est l'adoption. Dans le cas du projet de loi
5, il s'agit de l'adoption du projet de loi au nom du ministre du Revenu.
Ensuite, nous enchaînerons avec le projet de loi 9, Loi sur la location
de forces hydrauliques de la rivière du Lièvre à Les
Produits forestiers Bellerive Ka'N'Enda Inc. Par la suite, on m'indique que
nous pourrions procéder assez rapidement à la prise en
considération des rapports relatifs aux projets de loi 2 et 4 sur les
affaires municipales. Ensuite, on m'indique qu'il serait aussi possible,
probablement autour de 15 heures cet après-midi, d'aborder
l'étude du projet de loi sur les valeurs mobilières. Il semble
que, de part et d'autre, on se soit entendu pour discuter de ce projet de loi
sur les valeurs mobilières. Ce pourrait être fait vers la reprise
des travaux cet après-midi. S'il y avait changement, bien sûr,
j'en informerai le leader de l'Opposition officielle.
Ensuite, normalement, nous étudierions le projet de loi 11, Loi
modifiant diverses dispositions législatives en matière de
relations du travail. Enfin, nous procéderions à l'étude
du projet de loi 16, Loi sur le transfert de certains fonctionnaires du
ministère de l'Éducation à la Société de
gestion du réseau informatique des commissions scolaires.
Le Président: Le projet de loi 18, ce n'est pas pour
aujourd'hui?
M. Bertrand: Pardon? Le Président: Le projet de loi
18. M. Gratton: M. le Président. M. Bertrand: Non.
Le Président: D'accord. Oui, M. le leader de
l'Opposition.
M. Gratton: Dans le cas du projet de loi 16, par exemple, on sait
que le ministre
et les membres de la commission de l'éducation seront en
séance pour faire l'étude détaillée du projet de
loi 3. Dois-je présumer qu'on suspendra les travaux de la commission
pour l'étude de ce projet de loi?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: Je donne une indication de l'ordre dans lequel les
projets de loi seront appelés.
M. Gratton: D'accord. On verra en cours de route.
M. Bertrand: C'est cela. Il pourrait même arriver que le
projet de loi 16 ne soit pas discuté aujourd'hui, selon l'avancement des
autres projets de loi. On verra en cours de route de quelle façon on
organisera les travaux des commissions parlementaires pour tenir compte, bien
sûr, des travaux de l'Assemblée nationale.
Le Président: M. le whip de l'Opposition.
M. Pagé: Est-ce que le leader du gouvernement
témoigne d'autant de flexibilité et de souplesse en regard du
projet de loi 11 qui commande la présence du ministre du Travail ici,
lequel est retenu en commission pour l'étude du projet de loi 42 et n'a
pas encore le don d'ubiquité?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: C'est exactement la même réponse que je
dois fournir au député de Portneuf. Nous verrons à
organiser les travaux de telle sorte que, si le ministre doit être
présent à l'Assemblée nationale, bien sûr, les
travaux en commission parlementaire seront suspendus.
Projet de loi 5 Adoption
Le Président: Bien. Nous reprenons aux affaires du jour,
mais cette fois-ci, avec l'adoption du projet de loi 3, Loi modifiant diverses
dispositions législatives d'ordre fiscal. Oui, M. le ministre du Revenu.
(11 h 40)
M. Robert Dean
M. Dean: M. le Président, très brièvement,
le projet de loi 5...
Le Président: Je m'excuse, c'est le projet de loi 5.
Allez-y.
M. Dean: ...Loi modifiant diverses dispositions
législatives d'ordre fiscal, donne suite à l'énoncé
budgétaire du ministre des Finances, le 22 mai dernier. Il vient
consacrer les mesures fiscales annoncées dans le discours sur le budget
1984-1985, mesures qui sont d'ores et déjà en vigueur et qui ont
déjà fait l'objet d'un débat ici à
l'Assemblée nationale.
Le projet de loi 5 est un projet de loi omnibus qui modifie les lois
suivantes: la Loi sur les droits successoraux, la Loi concernant l'impôt
sur la vente en détail, la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la
Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi
concernant la taxe sur les carburants et la Loi concernant la taxe sur les
télécommunications.
Lors de l'étude à la commission permanente du budget et de
l'administration, cinq amendements ont été introduits dans ce
projet de loi. La plupart d'entre eux visent des ajustements d'ordre technique.
Cependant, l'un de ces amendements a pour objet de modifier la Loi sur le
ministère du Revenu, afin de préciser les personnes et organismes
sujets à la règle de confidentialité des dossiers à
ce même ministère. Ces amendements ont tous été
adoptés lors de la prise en considération du rapport de la
commission, comme l'ont d'ailleurs été chacun des articles du
présent projet de loi, à la commission permanente du budget et de
l'administration.
Je tiens à nouveau à remercier le critique officiel de
l'Opposition, le député de Saint-Louis, dont, comme d'habitude,
les remarques astucieuses et très à-propos ont contribué
à apporter certaines précisions et une bonification utile
à ce projet de loi.
Le projet de loi soumis à votre attention contient plusieurs
dispositions qui allègent le fardeau fiscal des contribuables de classes
diverses et favorise la croissance et le développement de petites et de
moyennes entreprises dans maints secteurs d'activité. Des mesures visent
à aider le développement de l'agriculture. D'autres viennent en
aide aux entreprises de pointe. Certaines favorisent la recherche et le
développement ou encore la croissance de notre industrie
québécoise du cinéma, sans compter celles concernant le
développement du transport et l'accès à la
propriété.
Nous ne prétendons pas que ce projet de loi vienne
réformer la fiscalité au Québec. Le livre blanc,
énonçant les politiques gouvernementales en matière de
fiscalité, sera publié sous peu. Notre gouvernement s'attaquera
alors à cette tâche complexe. Néanmoins, le projet de loi 5
introduit des mesures fiscales bénéfiques pour nos concitoyens et
concitoyennes et contient plusieurs dispositions pour soutenir et relancer nos
entreprises et favoriser la reprise économique.
Je demande à cette Assemblée de procéder maintenant
à l'adoption du projet de loi 5. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Saint-Louis.
M. Harry Blank
M. Blank: M. le Président, je suis d'accord avec le
ministre du Revenu quand il dit qu'il y a dans ce projet de loi des
bénéfices pour les contribuables québécois. C'est
vrai, mais ces bénéfices sont minimes, si on considère
toute la taxation imposée à la province. Dans le projet de loi,
il est vrai qu'on va réduire un peu la taxe sur l'essence, mais on a
oublié qu'on l'avait augmentée deux fois auparavant. On prend un
montant de 400 000 000 $ et on donne 200 000 000 $ en retour. Cela veut dire
que les gens du Québec paient 200 000 000 $ de plus, seulement sur
l'essence.
Le ministre des Finances, la semaine dernière ou il y a deux
semaines, a mentionné qu'il n'y aurait pas d'indexation. C'est un
montant de 250 000 000 $ de plus de la part des Québécois. Il est
vrai qu'on nous donne quelque chose dans ce projet de loi, mais ce sont de
vrais petits "candies", considérant le fardeau fiscal des contribuables
dans cette province.
Nonobstant cela, on va prendre ce qu'on nous donne. A little is better
than nothing. On va le prendre. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que le projet de
loi 5, Loi modifiant diverses dispositions législatives d'ordre fiscal,
est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Il n'y a
pas de leader. Nous allons passer maintenant au projet de loi 9 - non, je
m'excuse - à l'article 9, qui est le projet de loi 11...
M. Blouin: Non, non, non.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce n'est pas
celui-là?
M. Blouin: Non.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement. J'attends vos ordres.
M. Blouin: Oui, très bien, M. le Président. Tel que
le leader du gouvernement l'a annoncé au leader de l'Opposition il y a
quelques secondes, c'est maintenant le projet de loi 9 que nous allons
étudier, la Loi sur la location des forces hydrauliques de la
rivière du Lièvre à Les Produits forestiers Bellerive
Ka'N'Enda Inc. C'est donc l'article 5 de notre feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 9 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Rancourt): Très bien, M. le
leader. Nous allons commencer le débat sur le principe du projet de loi
9, Loi sur la location des forces hydrauliques de la rivière du
Lièvre à Les Produits forestiers Bellerive Ka'N'Enda Inc. M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Jean-Guy Rodrigue
M. Rodrigue: Merci, M. le Président. L'objet du projet de
loi 9, dont nous amorçons l'étude en deuxième lecture, est
de louer une partie des forces hydrauliques de la rivière du
Lièvre à la compagnie Les Produits forestiers Bellerive Ka'N'Enda
Inc. En fait, il s'agit, par ce projet de loi, de renouveler un bail de
location des forces hydrauliques, bail qui avait été consenti
à cette compagnie ou à un prédécesseur en 1943 et
qui venait à échéance récemment.
Le projet de loi porte sur ce que l'on qualifie de la partie publique
des forces hydrauliques qui est exploitée par cette compagnie qui est
une filiale de REXFOR, une entreprise d'État qui est exploitée
aux rapides de l'Orignal, sur la rivière du Lièvre, à
Mont-Laurier.
En fait, la portion concernée par le projet de loi
représente environ 90% des forces hydrauliques de cet emplacement qui
sont exploitées à la centrale des rapides de l'Orignal; les
autres 10% des forces hydrauliques avaient déjà été
concédés auparavant en propriété entière
à une entreprise qui, par la suite, a cédé ses droits et
qui appartient aujourd'hui à la compagnie Bellerive Ka'N'Enda Inc.
Les deux forces hydrauliques, ces deux potentiels sont exploités
dans une seule centrale, conjointement, et il serait évidemment
impossible de les dissocier si on voulait le faire. 10% appartiennent en propre
à l'entreprise et 90% sont concédés par une loi, un bail
de 40 ans, pour une centrale déjà en place. Vous comprendrez
qu'il serait difficile de procéder autrement que renouveler le bail,
d'autant plus qu'il n'y aurait pas intérêt à le faire.
En ce qui concerne l'exploitation de cet ouvrage, des
vérifications ont été faites auprès
d'Hydro-Québec en décembre 1983 et après consultation
auprès de notre entreprise d'État, il est apparu clairement
qu'Hydro-Québec n'avait aucun intérêt dans cette petite
centrale installée à Mont-Laurier. Même si pour
Hydro-Québec cette petite centrale ne présente pas
d'intérêt, cependant,
pour l'entreprise concernée, qui gère cette exploitation
sur les lieux depuis un bon nombre d'années, évidemment, les
immobilisations ont été amorties. Pour elle, cela
représente quand même un certain intérêt de pouvoir
continuer à l'exploiter.
Cette centrale est profitable à l'entreprise Bellerive-Ka'N'Enda
et également, il faut bien le dire, aux gens de Mont-Laurier qui
travaillent dans les usines de cette entreprise. Elle permet une production de
l'ordre de 16 000 000 de kWh par année pour une puissance
installée de 2,36 mégawatts. D'un point de vue
énergétique, l'intérêt de cette production est
évident et la compagnie qui la dirige actuellement est certainement la
mieux placée pour poursuivre cette activité.
En premier lieu, cela lui permet de réduire ses coûts de
production et également d'envisager des investissements importants dans
une usine de fabrication de panneaux de bois pressé qui est
évaluée à environ 70 000 000 $ et de l'envisager dans un
contexte où l'énergie qui servirait à cette nouvelle usine
proviendrait également de la centrale existante qui fait l'objet du
projet de loi qui est devant nous. (11 h 50)
Les usines de cette compagnie emploient actuellement 300 personnes dans
la région de Mont-Laurier. Il est évident que la perte d'une
production d'électricité à des coûts aussi
intéressants que ceux que la compagnie peut avoir avec la production de
la centrale actuelle augmenterait d'une façon sensible ses coûts
de production et contribuerait possiblement à mettre son avenir en
situation précaire face aux concurrences auxquelles elle doit faire
face. Il y a donc intérêt là à ce que le bail soit
renouvelé pour permettre à cette compagnie de poursuivre ses
activités dans la région de Mont-Laurier et de fournir du travail
aux gens de Mont-Laurier.
Actuellement, la compagnie a une usine de sciage et également une
manufacture de portes dans la région. L'usine de portes est
alimentée directement par les installations de la centrale dont nous
parlons, tandis que l'usine de sciage est actuellement alimentée par le
réseau d'Hydro-Québec. Cependant, Bellerive-Ka'N'Enda
prévoit relier prochainement l'usine de sciage à son
réseau privé. Tout ce qui lui reste à faire pour
réaliser ça, c'est de construire un bout de ligne de transport
qui n'est pas très long. Une fois cette opération
complétée, les installations de Bellerive, qui vont consommer
approximativement la moitié de l'énergie produite par le barrage
du rapide de l'Orignal, vont permettre d'alimenter ses deux usines.
Pour ce qui est du surplus de production, il y a une entente entre cette
entreprise et Hydro-Québec qui achète tout surplus de production
de la centrale du rapide de l'Orignal. Donc, la pleine production de cette
usine est utilisée soit dans le réseau public, soit pour le
réseau privé de la compagnie.
II est donc possible d'envisager également, et c'est ce que la
compagnie nous a indiqué, l'alimentation d'une usine de panneaux MDF qui
serait construite dans cette région-là. Il y a un projet pour
lequel les études se poursuivent actuellement, qui semble assez
prometteur. On pourrait l'alimenter avec l'électricité produite
par la compagnie à sa centrale des rapides de l'Orignal, ce qui
permettrait d'avoir accès à des sources d'énergie à
des coûts fort intéressants. Les informations que j'ai pu prendre
auprès du président de REXFOR nous indiquent que le barrage
actuel pourrait combler en grande partie les besoins de la nouvelle usine.
L'exploitation de cette centrale, tout en étant profitable à
l'entreprise, est également profitable au gouvernement du Québec
puisqu'elle rapporte actuellement des revenus au Trésor public, pour les
droits qui y sont perçus, d'environ 26 000 $. C'est la projection,
l'estimation que nous avons faite pour cette année.
Dans la situation où nous sommes, si ce projet de loi
n'était pas adopté, comme Hydro-Québec n'est pas
intéressée, l'entreprise devrait tout simplement cesser sa
production. On ne gagnerait pas grand-chose à refuser une telle demande
puisque l'alternative serait qu'on laisserait la centrale à l'abandon et
qu'éventuellement ces installations seraient perdues. Cela va un peu
à l'encontre du courant que l'on constate, pas tellement au
Québec, mais aux États-Unis, dans les États de la
Nouvelle-Angleterre et dans l'État de New York. Dans ces États,
on a actuellement un programme très intensif de mise en service de
petites centrales de cette nature à des emplacements de barrages souvent
existants. Tout ce qu'il y a à faire c'est souvent d'installer une
turbine à un barrage déjà existant qui sert actuellement
à régulariser un cours d'eau et ça permet, dans bien des
cas, de développer de l'énergie à même les
installations existantes à des coûts qui peuvent finalement se
comparer avantageusement pour les Américains - ce ne serait pas notre
cas - au coût des autres sources d'énergie électrique dont
ils peuvent disposer. On sait que les Américains sont beaucoup
alimentés par le pétrole, par le charbon et par l'énergie
nucléaire, qui sont des sources d'énergie beaucoup plus
coûteuses que l'énergie hydroélectrique que nous produisons
et consommons au Québec.
Dans un contexte comme ça, je pense que la logique nous indique
qu'il faut accéder à la demande de Bellerive-Ka'N'Enda et
renouveler le bail pour les forces hydrauliques sur cette rivière. C'est
dans
l'intérêt de l'entreprise et, comme je l'indiquais, c'est
dans l'intérêt du gouvernement également qui va toucher des
redevances là-dessus.
Si on fait une projection de ces redevances que versera Ka'N'Enda pour
les 40 prochaines années, qui serait la durée du bail consenti,
sur la base d'une production de 15 000 000 de kilowattheures par année,
dans l'hypothèse que le taux d'inflation se maintiendrait autour de 5%
en moyenne pour ces 40 prochaines années, nos calculs nous indiquent que
les redevances de cette entreprise qui seraient versées au Trésor
public atteindraient, pour les 40 ans, la somme de 2 630 000 $ en dollars
courants. Si, au contraire, on maintenait un taux d'inflation de 10% pour cette
période -évidemment, ce que je ne souhaite pas à cause des
conséquences que cela peut avoir sur l'économie autant du
Québec que de toute l'Amérique du Nord et de tout le monde
industrialisé, mais pour donner un point de comparaison, si, au lieu
d'être de 5%, le taux d'inflation était de 10% en moyenne au cours
des 40 prochaines années, évidemment ce seraient des revenus de
l'ordre de 10 500 000 $ qui seraient versés par cette entreprise au
gouvernement du Québec.
M. le Président, on constate donc que, tout en maintenant la
production d'une usine qui permet à une entreprise d'avoir accès
à des sources d'énergie à faible coût et
d'être concurrentielle, donc de maintenir des emplois dans la
région de Mont-Laurier et, possiblement, par le projet d'usine de
panneaux MDF, d'augmenter le nombre d'emplois dans cette région et, cela
fait, en même temps, par le biais des redevances, que les coffres du
gouvernement du Québec vont s'enrichir d'une somme d'environ 2 500 000 $
à 2 600 000 $ selon la première hypothèse au cours des 40
prochaines années.
En somme, M. le Président, il s'agit ici d'un projet de loi
à caractère essentiellement économique. Il est important
pour l'avenir de Bellerive-Ka'N'Enda et également pour l'avenir
économique de toute la région de Mont-Laurier. Ce projet de loi,
loin d'exiger des investissements massifs pour soutenir la création
d'emplois, atteint le même but tout en générant des revenus
pour le gouvernement du Québec. Dans ces circonstances, je ne peux que
souhaiter que l'Assemblée donne suite rapidement à l'adoption de
ce projet de loi pour que nous puissions renouveler le bail concernant les
forces hydrauliques des rapides de l'Orignal, renouveler le bail de Les
Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Merci, M. le Président. Je parlerai au nom de
ma formation politique sur le projet de loi 9. Malgré ce qu'en a dit le
ministre, je crois que chaque fois que l'État donne un privilège
à une société, une société privée ou
même une société d'État, il faut se poser certaines
questions puisqu'il s'agit justement de privilégier une entreprise en
particulier. Dans ce cas-ci, il s'agit de la location de droits
hydroélectriques pour une période de 40 ans, qui n'est pas une
période très courte, vous l'admettrez avec moi, M. le
Président, et qui fera bénéficier cette entreprise d'une
marge de manoeuvre très intéressante sur les coûts
d'électricité. D'ailleurs, si on fait le calcul du prix que
devrait payer cette société et du prix dont elle
bénéficiera justement à la suite de la location des droits
hydroélectriques, on peut facilement constater que, sur une
période de 40 ans, il s'agit d'un bénéfice de 5 000 000 $
à 10 000 000 $. Je crois que ce projet de loi, même s'il n'inclut
aucun chiffre, est une subvention de 5 000 000 $ à 10 000 000 $ à
Bellerive Ka'N'Enda qui, à toutes fins utiles, est une division de
REXFOR.
Je crois que la question que l'on doit se poser ressemble beaucoup aux
questions que nous nous sommes posées en juin dernier, je crois, lorsque
nous avons adopté la loi 70 alors que le gouvernement nous demandait
d'approuver un nouveau bail hydroélectrique pour une période de
50 ans afin de renouveler les droits hydroélectriques de la
rivière Péribonka. De fait, si on examine le texte juridique des
deux projets de loi, on s'aperçoit qu'il est à peu près
identique. (12 heures)
M. le Président, beaucoup de PME au Québec aimeraient
avoir un tel bénéfice, être assurées, pendant 40
ans, d'avoir une subvention de l'ordre de 5 000 000 $ à 10 000 000 $.
Mais les questions que l'on doit poser sont celles que j'avais posées
lorque nous avions voté pour la loi 70 qui faisait
bénéficier l'Alcan de pouvoirs hydroélectriques sur une
période de 50 ans et qui lui permettait, lui a permis dans le
passé et lui permettra dans l'avenir d'assurer le développement
économique de la région du Saguenay et du Lac-Saint-Jean.
À ce moment, j'avais, avec enthousiasme, endossé le projet de loi
70 parce qu'en faisant une analyse, justement, de la force de l'Alcan au
Québec, de son activité, pour employer un anglicisme, de sa
présence bénéfique en tant que citoyen corporatif, ce son
acharnement à diriger cette entreprise mondiale, à partir du
Québec, à faire la recherche et le développement à
partir du Québec, à assurer justement pour les 50 prochaines
années qu'il y aura au Québec - je crois qu'il y a des
engagements à cet effet auprès du
gouvernement - que l'Alcan construirait trois ou quatre usines
semblables à celle qui est présentement en construction au
Saguenay...
Pour toutes ces raisons, j'avais fait un parallèle avec Pechiney
qui, elle, a son siège social à Paris, qui fait sa recherche et
son développement à Paris, qui dirige son marketing international
à partir de Paris, j'avais fait un parallèle qui m'amenait
à me convaincre moi-même qu'il était dans le meilleur
intérêt public d'accorder un privilège à l'Alcan
pour qu'elle continue cette présence bénéfique au
Québec même et surtout au Saguenay et au Lac-Saint-Jean et dans
bien d'autres régions du Québec également. La question qui
se pose en ce qui concerne Bellerive-Ka'N'Enda est du même genre. Je suis
certain que beaucoup de ceux qui nous écoutent présentement ne
savent pas du tout quelle est cette société Bellerive-Ka'N'Enda
et dans une certaine mesure, cela n'a pas tellement d'importance puisqu'il
s'agit d'une division de REXFOR.
Si vous regardez l'état financier de REXFOR, vous allez vous
apercevoir que REXFOR a, dans plusieurs régions du Québec,
plusieurs filiales à part entière dont celle-ci à
Mont-Laurier qui a été achetée vers 1981 et qui
était une acquisition qui n'avait pas été demandée
par le gouvernement du Québec et que REXFOR avait achetée pour se
développer et se donner un certain "know-how" dans un domaine qu'elle
n'avait pas jusque-là. Comme vous le savez, lorque nous avons dû
approuver le projet de loi 65 au printemps, nous avons posé de
nombreuses questions. À vrai dire, nous avons même demandé
d'avoir une commission parlementaire qui nous a permis de recevoir, en
commission parlementaire, REXFOR, et c'était la première fois, je
crois, en quinze ans que cette société d'État venait
devant les élus du peuple pour expliquer sa mission, pour expliquer son
plan de développement, pour expliquer quels étaient ses
engagements face à l'avenir. Je dois vous avouer que cette commission
parlementaire nous a donné quelques réponses, mais pas toutes les
réponses, quoique nous ayons appris beaucoup de choses. Nous aurions
voulu entendre également les gens du secteur privé qui
travaillent dans le secteur du bois, des gens qui sont en concurrence avec
REXFOR et qui se plaignent de concurrence déloyale de sa part.
Malheureusement, le gouvernement et le ministre de l'Énergie et
des Ressources de l'époque ont refusé d'entendre les gens du
secteur privé, les différentes associations patronales de ceux
qui regroupent les producteurs de bois, des scieries surtout en région,
et qui nous auraient permis de faire une revue totale de la situation. On
comprend bien là le genre de transparence que nous fait vivre le
gouvernement qui nous dirige. De toute façon, nous en avons assez appris
pour savoir ce qui suit: C'est que la mission de REXFOR est tout à fait
ambiguë. Dans certains cas, semble-t-il, le président de REXFOR
nous dit qu'il recherche le profit, qu'il est en concurrence avec le secteur
privé pour s'assurer que le développement économique se
fasse de la même façon que le fait le secteur privé qu'il
recherche une profitabilité semblable aux industries du secteur
privé.
Par ailleurs, M. Duchesneau nous expliquait que très souvent le
gouvernement impose des responsabilités à REXFOR qui lui imposent
d'assumer des fardeaux, une orientation que la société ne
voudrait pas prendre d'elle-même. Bien sûr, lorsqu'on cherche
à analyser les états financiers de REXFOR, on s'aperçoit
que REXFOR a eu une piètre performance financière depuis quatre
ou cinq ans et qu'il est à peu près impossible de s'y retrouver
et de déterminer si les sociétés qu'elle a achetées
justement pour se rentabiliser fonctionnent bien alors que tous les chiffres
sont noyés dans un tout complet qui nous empêche de
connaître la réalité véridique.
M. le Président, ceci est d'autant plus curieux, et je l'avais
manifesté lors de mon discours en troisième lecture au mois de
juin, puisque le président-directeur général, M.
Duchesneau, a un contrat qui le lie à REXFOR pour la rentabiliser de
façon qu'il puisse obtenir des bonis de meilleure productivité.
D'autant plus que ce contrat avait été signé au moment
où M. Bérubé était ministre des Terres et
Forêts et qu'il avait justement demandé à REXFOR
d'être aussi rentable que le secteur privé.
M. le Président, mission ambiguë. J'avais dit au ministre
à ce moment-là que j'avais de la misère à
comprendre qu'on puisse demander à l'Assemblée nationale
d'approuver une capitalisation accrue de 65 000 000 $ alors que la
société d'État elle-même ne sait pas où elle
s'en va, alors que le gouvernement semble accepter beaucoup trop facilement
l'ambiguïté dans laquelle il semble diriger cette
société d'État.
On peut faire une analyse de toutes les sociétés
d'État. Demain, j'aurai l'occasion de faire une conférence de
presse à ce sujet puisque notre parti politique s'est donné une
politique sur les sociétés d'État. Nous formons le seul
parti politique à ce moment-ci à s'être donné une
politique à ce sujet. Dans cette analyse, on retrouve une
rétrospective des performances des sociétés d'État,
que ce soit SIDBEC, REXFOR ou la SGF au tout début, pour s'apercevoir
qu'à chaque fois qu'une société d'État n'a pas une
mission très stricte, qu'elle n'a pas une mission très bien
définie, à chaque fois cela a mené à des
déficits considérables, chaque fois cela a mené à
des déboires comme ceux
qu'a connus SIDBEC dernièrement.
M. le Président, en juin dernier j'avais finalement
accepté au nom de l'Opposition libérale le fait que le
gouvernement augmente le capital-actions de REXFOR uniquement parce que je
croyais que la Gaspésie en particulier avait un besoin immédiat
d'un effort fait pour financer la construction d'une papeterie à Matane
même. Mais dans ma conclusion je vais citer ce que j'avais dit à
ce moment-là, à la page 7364 du Journal des débats du 20
juin dernier: "Nous croyons qu'en 1984, il n'est pas décent pour une
société d'État de ne pas avoir de plan d'orientation. Nous
croyons qu'il n'est pas décent pour le Parlement de voter 65 000 000 $
en capital-actions supplémentaire et de ne pas savoir quel sera le
rendement sur l'investissement fait par le gouvernement d'autant plus qu'une
très grande partie de ce capital-actions sera injectée dans une
papeterie à Matane." Plus loin je disais: "Nous nous résignons
malheureusement face à cette déficience du gouvernement gui nous
dirige et surtout du ministre de l'Energie et des Ressources, à voter
pour le projet de loi parce que nous croyons qu'il y a des besoins
immédiats, impératifs en Gaspésie et qu'il n'est pas
décent pour l'Opposition libérale de s'opposer à la
réalisation d'une papeterie à Matane même." Je disais ceci:
"J'ose espérer... Nous supplions le ministre et le gouvernement de faire
le travail qui aurait dû être fait avant de venir ici à
l'Assemblée nationale pour demander des fonds additionnels et s'assurer
que l'orientation de REXFOR soit précisée d'une façon
publique, connue et non en catimini sur le plan de développement de
REXFOR." Je terminais en disant que j'espérais qu'en juillet, août
et septembre, le gouvernement fairait le travail nécessaire pour
justement préciser l'orientation de REXFOR, définir son plan de
développement et pour nous permettre de pouvoir juger à l'avenir
quelle serait la rentabilité de REXFOR. Malheureusement, absolument rien
de cela n'a été fait et encore bien plus, le gouvernement qui
nous dirige ne sait pas où il va. La situation qui est faite à
REXFOR est une situation dont le gouvernement assume une très grande
responsabilité.
Pour revenir à la question qui est devant nous, je disais
qu'accorder un privilège aussi considérable que de donner des
pouvoirs hydroélectriques pour 40 ans exigeait de déterminer si
REXFOR était justement le genre de société qui pourrait
faire bénéficier le Québec d'une performance accrue dans
l'avenir et qu'elle pourrait soutenir le développement économique
d'une région de la province de Québec en général.
(12 h 10)
REXFOR a soumis un plan de développement au gouvernement il y a
trois ans. Ce plan de développement n'était pas approuvé
en juin dernier et nous nous retrouvons maintenant ici au mois de
décembre 1984 et, autant que je sache, le plan de développement
n'a pas été approuvé, la mission de REXFOR n'a pas
été précisée et voilà qu'on nous demande de
plus, en dépit des déficits de REXFOR et de la mauvaise gestion,
de la mauvaise performance financière de cette société
d'État, d'accorder une subvention de 5 000 000 $ à 10 000 000 $
pour les 40 prochaines années.
Je vais évoquer avec vous, si vous le permettez, quelques-unes de
ces facettes de l'administration de REXFOR pour que nous puissions juger
ensemble si, véritablement, la demande qui nous est faite est
fondée et si la demande qui est faite à l'Assemblée
nationale devrait être acceptée. En ce qui concerne la performance
financière de REXFOR, j'avais évoqué au mois de juin
dernier ce tableau ici qui indique les ventes, les pertes et les frais de vente
et d'administration. Vous verrez ici qu'en 1977-1978, les ventes de REXFOR
étaient de 27 000 000 $ pour une perte brute, c'est-à-dire la
perte brute avant quelques revenus qui peuvent venir de certains placements
comme dans la compagnie Soucy ou la compagnie Tembec. De fait, il s'agit ici de
juger de la performance de REXFOR sur la gestion de filiales comme celle de
Bellerive-Ka'N'Enda où la société REXFOR a la
totalité - je dis bien la totalité - de la responsabilité
et en excluant les autres sociétés où REXFOR n'a pas la
gestion de l'entreprise. En toute honnêteté, je crois qu'en
faisant l'analyse financière de REXFOR, on doit mettre de
côté les sociétés où elle n'assume pas la
gestion proprement dite et on doit juger de la performance financière de
REXFOR en fonction, justement, des sociétés où elle a le
contrôle effectif et où elle a la responsabilité
totale.
Donc, en 1977-1978, des ventes de 27 000 000 $ et une perte de 1 600 000
$. En 1982-1983, des ventes de 50 000 000 $ et une perte de 11 000 000 $.
Depuis, à la fin de juin, nous avons reçu les états
financiers de l'année 1983-1984 qui nous disent que le chiffre
d'affaires a augmenté à 85 000 000 $ pour une perte de 7 000 000
$.
Ce qui est troublant là-dedans, c'est que depuis sept ans, REXFOR
a eu une performance déficitaire sur une base cumulative. Si on
additionne ces pertes brutes - on peut le faire facilement avec moi ici - on
s'aperçoit que REXFOR, depuis 1977, a eu une performance
financière déficitaire de l'ordre de 33 000 000 $. Ce qui est
plus grave, c'est que les frais de vente et d'administration ne sont pas sous
contrôle. Pour un chiffre d'affaires de
27 000 000 $ en 1977, les frais de vente et d'administration
étaient de 2 175 000 $. En 1983-1984, les ventes étaient de 85
000 000 $ et les frais de vente et d'administration étaient de 10 000
562 $. On voit qu'en gros, les ventes de REXFOR depuis 1977-1978 ont
augmenté par un facteur de 3 alors que les frais de vente et
d'administration ont augmenté par un facteur de 5.
C'étaient là les questions que nous avions
soulevées lors des discussions que nous avons eues au mois de juin quand
le gouvernement nous a demandé d'approuver un montant de 65 000 000 $.
Avec beaucoup de réticence et malgré cette performance
financière désastreuse... Encore là, je le dis, la
responsabilité n'est pas uniquement celle des dirigeants de REXFOR;
c'est également la responsabilité du gouvernement qui est en
face, du ministre qui n'a pas assumé ses responsabilités et du
gouvernement qui ne sait pas où il s'en va. Je l'avais
évoqué au mois de juin, je disais ceci: Si le gouvernement ne
sait pas ce qu'il veut faire de REXFOR, comment voulez-vous qu'elle-même
puisse se donner une mission qui soit en accord avec les priorités du
gouvernement? Si REXFOR a soumis son plan de développement il y a trois
ans et que ce plan de développement n'est pas encore approuvé,
comment voulez-vous que REXFOR oriente son action pour aligner son action sur
les priorités du gouvernement et ce qu'elle doit faire exactement?
Depuis juin - cela fait donc six mois -nous sommes exactement dans la
même position. C'est désolant. Comment ce gouvernement peut-il, en
toute crédibilité, penser se faire réélire à
la prochaine élection? Les faits étaient patents. Nous avons pris
le temps en commission parlementaire de scruter la performance
financière de REXFOR, d'étudier sa mission et de poser des
questions à son président-directeur général sur ce
qu'il entrevoyait lui-même pour son action prochaine.
L'ambiguïté de REXFOR provient de l'ambiguïté du
gouvernement. Le manque d'orientation de REXFOR provient du manque
d'orientation du gouvernement qui ne sait pas où il va. J'avais
évoqué à ce moment-là le proverbe chinois qui dit
ceci: "Quand on ne sait pas où on va, tous les chemins y
mènent".
Ce gouvernement maintenant nous demande d'approuver un autre projet de
loi donnant un autre bénéfice à REXFOR, alors que tous les
concurrents de REXFOR se posent des questions sur sa raison d'être
même. Je dois vous dire que, de plus en plus, nous-mêmes, du Parti
libéral du Québec, nous posons des questions sur l'existence
même de REXFOR et, très bientôt, nous saurons conclure
à ce sujet-là.
Donc, REXFOR n'a aucun plan de développement. Elle n'en a pas
plus maintenant qu'elle en avait à ce moment-là. Au mois de juin
dernier, juste pour vous dire jusqu'à quel point le gouvernement sait
où il va, je vais vous dire les réponses qu'on nous a
données et les contradictions que nous avons vécues depuis cette
date.
Lorsque le ministre nous a dit qu'il désirait obtenir 65 000 000
$ de l'Assemblée nationale et qu'on lui demandait à quoi
servirait ce nouveau capital-actions, il nous a donné les chiffres
suivants: En Gaspésie, pour la rénovation des scieries, il nous
disait que REXFOR avait besoin de 8 000 000 $ en capital-actions; pour l'usine
de panneaux MDF à Mont-Laurier, que REXFOR avait besoin de 10 900 000 $
avec une participation à 55% de REXFOR; au Témiscamingue, pour
une usine de panneaux gaufrés, 4 000 000 $. Dans ce cas-ci, je crois que
ce projet se fait avec la participation de Tembec, qui a été un
succès décisif parce que, justement, REXFOR n'était pas la
gestionnaire de l'entreprise. Pour la papeterie de Matane, on nous demandait 35
000 000 $ de capital-actions avec une participation de REXFOR de 24%.
On peut se poser la question, étant donné que nous avions
voté l'argent au mois de juin, où en est rendu maintenant le
projet de la papeterie de Matane? Étant donné qu'au mois de juin,
le gouvernement nous demandait de voter 65 000 000 $, dont la plus grande
partie allait à la papeterie de Matane, où en sommes-nous
maintenant?
Je vais vous donner les dernières nouvelles. Dans la Presse, le
18 septembre, on nous disait: "Le projet de la papeterie de Matane est mis en
veilleuse jusqu'à la fin de l'année". Un drôle de
progrèsl Le 17 septembre, on nous disait ceci: "Le projet est à
l'étude et le gouvernement a demandé à la
Société générale de financement de faire une
étude avec Consolidated Bathurst pour une usine de pâte blanchie,
à Matane". Mais comment se fait-il qu'au mois de juin on nous demande de
voter 65 000 000 $ pour que REXFOR ouvre une papeterie à Matane et qu'au
mois d'août, on donne un mandat à la SGF pour qu'elle
s'intéresse à une autre étude de pâte blanchie,
à Matane?
Je vous l'ai dit tout à l'heure, ce gouvernement ne sait pas
où il va. Au mois de juin, il dit que c'est REXFOR qui va
réaliser le projet de papeterie à Matane et, aux mois
d'août et septembre, c'est la Société
générale de financement. Encore plus curieux, c'est que
même les ministres du gouvernement ne semblent pas connaître les
vraies décisions de ce gouvernement. J'oserais penser que le
député de Matane aurait été celui qui aurait suivi
de plus près ce mandat qui avait été donné à
la Société générale de financement, pour qu'il
sache, au moins lui, à quoi s'en tenir si la population de Matane ne
peut le savoir et si les parlementaires dans cette Chambre ne
peuvent le savoir non plus.
Justement, dans la Voix gaspésienne du 19 septembre, sous le
titre "Une autre avenue à explorer pour implanter une usine à
Matane", interrogé à ce sujet - je cite le journal - il dit:
"Cette étude - la nouvelle étude de la Société
générale de financement - ne met pas nécessairement un
terme au projet d'usine de papier journal dont il avait lui-même
annoncé la réalisation, il y a plus de quatre ans. Cependant,
d'ajouter le ministre, il est clair qu'on ne pourra pas réaliser deux
projets de cette taille". Là, ils sont rendus avec deux projets.
C'était le 19 septembre. Juste pour vous dire à quel point le
député de Matane et ministre de l'Éducation était
bien renseigné, le 31 octobre suivant, il y avait un décret du
gouvernement concernant le remboursement des coûts des études et
des travaux exécutés par REXFOR pour la réalisation d'un
projet de papeterie à Matane. À toutes fins utiles, cela voulait
dire que le gouvernement remboursait les frais encourus par REXFOR et qu'il
demandait à REXFOR de mettre ce dossier de côté
complètement. (12 h 20)
Est-ce que le gouvernement sait où il va? Est-ce que le ministre
de l'Énergie et des Ressources a menti à l'Assemblée
nationale lorsqu'il nous a dit, au mois de juin dernier, qu'il avait besoin de
40 000 000 $ pour la papeterie de Matane, quand il nous a demandé de
voter pour le projet de loi 65 et que deux mois plus tard, avec le cabinet des
ministres, il décidait que c'était la Société
générale de financement, une autre société
d'État, qui prenait la relève?
Ces gens-là ne savent pas où ils vont. Ils nous demandent
d'approuver des budgets et, ensuite, ils changent de société
d'Etat comme si c'était la chose la plus facile à faire. J'avais
justement évoqué, au mois de juin, le fait qu'une
société d'État qui demande un accroissement de
capital-actions devrait le faire de la même façon qu'une
société privée qui, selon les exigences de la Commission
des valeurs mobilières, doit préparer un prospectus afin de dire
aux gens qui souscriront au capital-actions sollicité, quelle en sera
l'utilisation.
Je dirais qu'il est heureux que REXFOR ne soit pas une
société publique parce que ses actions en bourse auraient
chuté d'une façon dramatique. S'il fallait qu'une
société comme Tembec ou Papier Cascades, au mois de juin, dise
à la population du Québec: nous allons être
impliqués dans une papeterie à Matane, et qu'au mois de juillet
elle décide de mettre ce projet de côté alors qu'elle a
obtenu 40 000 000 $ pour un tel projet, vous pouvez vous imaginer quelle serait
la valeur d'une telle société si elle était cotée
en Bourse.
Mais, avec le gouvernement qui nous dirige, nous ne sommes pas à
une contradiction près. Ce sont de mauvais gestionnaires qui ne savent
pas où ils vont, de mauvais gestionnaires qui obligent malheureusement
les dirigeants de REXFOR à poser des gestes qui ne favorisent pas la
rentabilité de l'entreprise.
Comme je le disais, j'ai nettement l'impression que le gouvernement a
menti à l'Assemblée nationale lorsqu'on nous a demandé
d'approuver les 65 000 000 $ de capital-actions. Mais ce qui est encore plus
grave, c'est que le gouvernement, depuis sept ans, depuis huit ans, a menti
à la population de Matane. Quand le député de Matane est
arrivé, en 1976, et qu'il est devenu le titulaire du ministère
des Terres et Forêts, il a dit à la Société
générale de financement qui, justement, tentait de
présenter un projet comme celui dont nous parlons présentement:
"Ne vous bâdrez pas de cela, je veux que ce soit ma société
d'État, REXFOR, qui réalise ce projet."
Huit ans plus tard, REXFOR est mise de côté. C'est
justement la Société générale de financement avec
la Consolidated Bathurst qui va probablement, je l'espère,
réaliser ce projet. Je dis à la population de Matane que le
gouvernement et le député de Matane lui ont fait perdre huit ans.
Ils vous ont menti et il vous ont fait perdre huit ans en vous promettant que
REXFOR réaliserait cette entreprise.
Dans la même veine, puisque nous sommes toujours à nous
demander si nous devons accorder ce privilège qu'on peut évaluer
à 5 000 000 $ ou 10 000 000 $, de donner à REXFOR ou à la
filiale de REXFOR un privilège hydroélectrique sur une
période de 40 ans, puisque justement nous nous questionnons sur la
pertinence de donner un tel privilège à une société
d'État qui a eu une performance si douteuse dans le projet de la
papeterie de Matane. Je vous parlerai maintenant, très rapidement, de la
Société des Monts.
Ah! oui, avant cela, j'ai une citation assez extraordinaire ici du
ministre Duhaime qui, le 8 décembre 1982, avait dit: "Je voudrais vous
dire que nous avons la ferme intention de commencer les travaux de la papeterie
de Matane dans les premiers jours de 1983". C'était la ferme intention
du député de Saint-Maurice, alors ministre de l'Énergie et
des Ressources...
Une voix: C'est le ministre des Finances.
M. Fortier: Maintenant ministre des Finances, mais autrefois
ministre de l'Énergie et des Ressources.
Parlons maintenant de la Société des Monts, cette
société qui a obtenu un contrat, au mois de mai dernier, de 3 200
000 $ justement pour la société d'État REXFOR. Je l'ai
évoqué en Chambre la semaine
dernière, j'ai posé une question au ministre qui m'a dit
qu'il s'informerait. Je ne sais pas si, après une semaine, il a les
informations qu'il aurait dû obtenir. S'il ne les a pas, je suis bien
à même de les lui donner parce que je suis allé à
Matane il y a une dizaine de jours, à la demande même des
producteurs de bois de Matane, justement. C'est rendu que lorsque des gens ont
des problèmes en régions ils appellent l'Opposition
libérale. Ils disent: Au moins, eux, on sait qu'ils sont là. Au
moins on sait que c'était Pierre Fortier qui était porte-parole
dans le domaine de la forêt la semaine dernière et il est encore
porte-parole pour la forêt cette semaine. Quelqu'un m'a dit qu'il avait
appelé au cabinet du nouveau ministre de l'Énergie et des
Ressources et, comme, semble-t-il, le ministre n'a pas encore engagé ses
attachés politiques, toute demande est transmise ou refilée au
sous-ministre. Ceux qui veulent obtenir des explications sur l'orientation du
gouvernement ne peuvent les obtenir parce que, avec tous ces changements
ministériels, les nouveaux ministres n'ont pas encore eu le temps de
comprendre leur dossier et de nommer les attachés politiques qui leur
permettraient de savoir ce qu'ils ont à faire, par exemple, à
l'intérieur d'un ministère aussi important que celui de
l'Énergie et des Ressources.
Dans le cas de la Société des Monts, c'est REXFOR qui a
accordé un contrat de 3 200 000 $. Au mois d'avril, les nouveaux
administrateurs de la Société des Monts avaient demandé de
n'être pas obligés de réaliser ce contrat, puisque la
soumission avait été trop basse, ou d'être
exonérés de l'obligation de remplir ce contrat, j'ai donc
demandé au ministre: "Ne croyez-vous pas qu'une société
d'État comme REXFOR a une obligation de s'assurer que les contrats
qu'elle donne seront remplis par des sociétés responsables qui ne
mettront pas en faillite des sous-traitants qui pourraient travailler pour
elles?"
Ce qui arrive maintenant, c'est qu'à la suite de cette mauvaise
performance de la Société des Monts, qui est quasiment en
faillite après avoir réalisé 80% de ce contrat, à
peu près 200 travailleurs seront touchés par une faillite
éventuelle, des producteurs de bois vont être touchés, des
camionneurs pourront subir des pertes de 60 000 $ à 80 000 $ chacun,
tout ça à cause d'une mauvaise gestion de la
Société des Monts et d'une mauvaise gestion, j'en suis convaincu
moi-même, de la part de REXFOR.
Je demandais justement au ministre: "Ne croyez-vous pas qu'une
société d'État comme REXFOR a la responsabilité de
s'assurer que, lorsqu'elle donne un contrat, la société qui
accepte le contrat a la compétence pour le faire, a l'organisation pour
le faire, qu'elle a une comptabilité et des contrôles de
coûts et qu'elle ne mettra pas en péril des travailleurs de la
région et des petites et des moyennes entreprises qui pourraient
travailler pour qui obtient un contrat?"
Le nouveau ministre, qui est très renseigné, m'a dit: M.
le député d'Outremont - je cite la Presse - "une
société d'État comme REXFOR ne peut exclure de ses appels
d'offres les compagnies en difficultés financières."
Le nouveau ministre de l'Énergie et des Ressources devrait en
savoir un peu plus que cela. Je sais fort bien que pendant les nombreuses
années qu'il était à HydroQuébec il a passé
plusieurs années comme délégué auprès du
syndicat mais dans les quelques années qu'il a pratiqué comme
ingénieur à Hydro-Québec il aurait dû savoir
qu'Hydro-Québec elle-même, lorsqu'elle va en-appel d'offres, pose
les questions pertinentes et que, de fait, elle s'arrange pour exclure les
entrepreneurs qui ne pourraient satisfaire aux exigences
d'Hydro-Québec.
Si le ministre de l'Énergie et des Ressources n'a pas fait la
vérification que j'ai faite, puisque j'ai obtenu un document -voyez
l'épaisseur de ce document - d'appel d'offres d'Hydro-Québec...
Je vais vous lire certains passages qui sont tout à fait pertinents.
À la page B-9, sur le rejet des soumissions, on dit ceci: "Toute
soumission qu'Hydro-Québec juge non équilibrée ou qui ne
contient pas tous les renseignements permettant l'analyse et la comparaison des
soumissions pourra être rejetée."
À la page B-12, on dit ceci, sous le thème de
"Compétence, expérience et responsabilité": "Pour
l'adjudication du contrat, Hydro-Québec tiendra compte de la
compétence, de l'expérience et de la responsabilité du
soumissionnaire. Le soumissionnaire doit joindre à sa soumission une
brève description des travaux similaires qu'il a exécutés.
Il doit donc être prêt à produire les documents
nécessaires établissant ses titres et ses qualités s'il
est requis de le faire."
À la page C-8, on demande justement la liste des contrats en
cours de réalisation par l'entreprise et la liste des contrats que
l'entreprise a réalisés au cours des cinq dernières
années. (12 h 30)
De plus, à la page C-9, on demande la liste du personnel de
commande que la société entend affecter à
l'exécution des travaux de chantier, une description sommaire des
dispositions que l'entreprise entend prendre afin de garantir la
sécurité, l'hygiène et le bien-être des
travailleurs, enfin les références bancaires.
M. le Président, j'ai pris la peine d'obtenir ce document et de
parler à des administrateurs de contrats d'Hydro-Québec
pour m'assurer que, dans les faits et contrairement à ce qu'a dit
le ministre de l'Énergie et des Ressources, Hydro-Québec
s'arrange pour obtenir les informations nécessaires et pour
écarter, lorsque les contrats sont trop importants, un soumissionnaire
qui ne satisferait pas aux exigences d'Hydro-Québec. Si la
société d'État REXFOR ou sa filiale, Matabois, à
Matane, avait pris la peine de s'informer, d'exiger, dans les documents d'appel
d'offres, le même genre d'information qu'Hydro-Québec exige
lorsqu'elle fait des appels d'offres publics, je vous dis que REXFOR n'aurait
pas accordé ce contrat à la Société des Monts
puisque tout le monde dans la région sait pertinemment que, depuis un an
ou deux, l'administration est précaire, que la Société des
Monts n'a jamais eu de système de comptabilité qui mérite
ce nom, qu'elle n'a jamais eu de contrôle de coûts et
qu'effectivement en acceptant un contrat de 3 200 000 $, on a mis en
péril une bonne partie des petits artisans et des producteurs de bois de
cette région.
D'ailleurs, je dois dire que c'était tout à fait amusant
parce qu'à la suite de cette question que j'avais posée au
nouveau ministre de l'Énergie et des Ressources, le Devoir, je crois,
qui s'est trompé, a titré, en date du 6 décembre:
"Rodrigue juge irresponsable l'attitude de REXFOR". Je dois vous dire que, pour
ma part, je suis tout à fait d'accord avec ce journal où on dit
que le nouveau ministre de l'Énergie et des Ressources juge
irresponsable l'attitude de REXFOR.
La décision de REXFOR de donner ce contrat à la
Société des Monts a mis en péril la performance
financière du contrat, a mis en péril 200 artisans de la
région, va mettre en péril d'autres artisans camionneurs qui
perdront chacun 60 000 $, 80 000 $, 90 000 $. Je crois que si REXFOR avait fait
son "homework", son travail, elle aurait pu éviter ce
problème.
Mais ce qui est encore pire, M. le Président, c'est que REXFOR,
qui a obtenu des coupes de bois du ministère de l'Énergie et des
Ressources, n'a pas su faire respecter la réglementation du
ministère en ce qui concerne la coupe en forêt. Alors qu'on se
plaint en Gaspésie et que le ministre nous dit, dans son document sur la
réflexion qu'il veut faire sur la nouvelle politique forestière,
qu'on manquera de bois en Gaspésie, qu'il faut voter des subventions
pour faire des plantations, qu'il faut s'assurer qu'aucun bois n'est perdu,
voilà que REXFOR n'a pas su exercer la supervision qu'elle aurait
dû pour s'assurer que la Société des Monts ou
elle-même ne fasse pas une coupe à blanc pour laisser en
forêt des bouleaux, des cèdres, des arbres de toute dimension,
même de dimension extrêmement importante, ce qui est, en fait, un
gaspillage éhonté de la matière ligneuse de la
Gaspésie.
J'ai ici, M. le Président, quelques photos qui ont
été prises il y a quelque trois semaines justement dans les
forêts domaniales de la Gaspésie où on montre des arbres
couchés par terre, des bouleaux, des merisiers, des cèdres, de
toute dimension, qui ont été laissés là pour
l'hiver et qui vont pourrir sur place. C'est une honte d'avoir un gouvernement
et une société d'État qui ne respectent pas les
obligations qui sont imposées aux petites scieries, qui ne respectent
pas les obligations qui sont imposées à tous ceux qui obtiennent
des droits de coupe du gouvernement.
J'étais à Cabano en fin de semaine, puisque je vais assez
souvent de ce temps-ci en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent. Les
propriétaires de petites scieries me disaient que, lorqu'ils ne
respectent pas les règlements du ministère de l'Énergie et
des Ressources, ils ont à payer des pénalités très
sévères. Un propriétaire de scierie me disait que,
lorsqu'il ne respecte pas les règlements - il a déjà
été pénalisé - ses droits de coupe, qui sont
normalement de l'ordre de 0,66 $ le mètre cube, étaient
augmentés à 7 $ le mètre cube. C'est donc dire que les
droits de coupe, lorsqu'il y a pénalité aux petites scieries qui
ne respectent pas les règlements du ministère de l'Énergie
et des Ressources, sont multipliés par un facteur de dix. Savez-vous, M.
le Président, quel est le volume de bois qui a été
coupé en Gaspésie? C'est de l'ordre de 140 000 mètres
cubes. S'il fallait que les droits de coupe soient augmentés comme ce
propriétaire de petite scierie dans le Bas-Saint-Laurent me l'a
confié, cela voudrait dire que le ministère de l'Énergie
et des Ressources devrait pénaliser REXFOR et la Société
des Monts, et REXFOR en particulier pour un montant d'environ de 600 000 $
à 700 000 $. Je pose la question. Comment se fait-il que le
ministère de l'Énergie et des Ressources et son
représentant qui doit veiller aux règlements du ministère
lors de la coupe en forêt, comment se fait-il que ce représentant
n'a pas su faire respecter le règlement du ministère, même
s'il s'agissait d'une société d'État? Comment se fait-il
qu'il y a deux poids deux mesures avec ce gouvernement? Une façon
d'appliquer le règlement pour les petites scieries et une autre
façon lorsqu'il s'agit d'une société d'État.
C'est aberrant qu'une société d'État et la
Société des Monts agissent de cette façon, parce que c'est
bien REXFOR qui avait les droits de coupe, et c'est REXFOR qui avait obtenu les
droits de coupe du gouvernement de façon à alimenter ces usines.
On doit se demander si, alors même où on croit qu'il y aura des
ruptures de stocks en Gaspésie, alors même que tout le monde
s'inquiète de la possibilité d'avoir une matière ligneuse
pour dix ans, pour quinze ans, qu'une société
d'État comme REXFOR se rende responsable d'un abus aussi
éhonté qu'elle abuse de la responsabilité qu'on lui a
confiée, je crois que c'est une performance désolante et qui
mérite d'être traitée comme elle se doit. Ce qui est encore
pire, c'est qu'alors qu'il y a pénurie de bois et que le gouvernement
met en branle des programmes de sylviculture et de reforestation, c'est que ce
gouvernement ne se donne même pas la peine de vérifier où
va son argent. Si le ministre prend la peine de vérifier, comme je l'ai
fait, il se rendra compte que récemment la Société des
Monts a obtenu 100 000 $ pour faire de la sylviculture. Mais seulement 50 000 $
ont servi...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je m'excuse. J'ai une question de règlement du
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Je ne veux pas être désagréable
à l'égard du député d'Outremont, mais je pense
qu'il s'écarte sensiblement du débat que nous sommes en train de
tenir. Je lui rappelle la teneur de l'article 232 qui dit que "le débat
porte exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur
intrinsèque ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins"
que celui que propose le projet de loi que nous sommes en train de discuter. Le
projet de loi porte spécifiquement sur la location par le gouvernement
de forces hydroélectriques et nous ne devons pas, dans les
circonstances, faire porter le débat sur un tout autre sujet qui serait
celui de l'approvisionnement en bois de sciage, par exemple. Le projet de loi
qui est devant nous ne porte pas sur ce sujet. Je vous demande de faire
respecter l'article 232 de notre règlement. D'autant plus qu'un
député peut aborder toute espèce de sujet lorsque nous
sommes en train de débattre du discours d'ouverture. Ce n'est pas le
cas.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. J'ai fait
moi-même une demande de m'apporter le projet de loi 9 et jusqu'à
maintenant j'avais cru comprendre que le député d'Outremont
disait qu'il y avait un lien entre la société REXFOR et le sujet
qui était discuté, sauf que, effectivement, comme vous j'ai
remarqué qu'on ne parlait pas du projet de loi. Je pense qu'il vous
reste, M. le député, quelque 20 minutes, il serait bon de revenir
au projet de loi.
M. Fortier: Sur la question de règlement. Comme je l'ai
dit au tout début, il s'agit du projet de loi qui est devant nous de
donner un privilège à une société. Le genre de
discours que je fais présentement est exactement de la même teneur
que celui que j'ai fait lorsqu'on a parlé de l'Alcan sur le projet de
loi 70. Il s'agit, lorsqu'on donne un privilège à une
société, de juger si cette société est responsable,
de juger si un bénéfice public qui va être donné
à une société doit l'être compte tenu du fait que le
gouvernement s'engage pour une période de 40 ans et avant de donner un
privilège comme celui-là, je voulais évoquer en cette
Chambre la responsabilité de REXFOR dans ses actions quotidiennes dans
tout le Québec et de déterminer justement si le gouvernement du
Québec devrait lui accorder ce même privilège?
Je crois que je suis tout à fait pertinent. Vous avez tout
à fait compris là où je voulais en venir et je n'ai pas
encore terminé de faire l'évaluation de REXFOR et je veux le
faire avant de conclure. J'oserais croire qu'avec votre assentiment, je puisse
continuer à évoquer quelques faits que je veux évoquer
puisqu'il est de première importance, avant de donner un
privilège pour 40 ans, de déterminer si la société
le mérite. (12 h 40)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je tiens compte aussi du temps. Je suis très
large, compte tenu de ce que vous avez dit au départ, mais je tiens
à vous faire remaquer qu'il vous reste environ 20 minutes même pas
et qu'il serait bon qu'on entende de votre part ce que vous croyez du projet de
loi qui est devant nous. C'est le projet de loi qui est en discussion
actuellement. Je comprends que vous ayez utilisé une partie de votre
temps pour faire une démonstration, mais j'aimerais, comme tout le
monde, entendre parler du projet de loi 9.
M. Fortier: M. le Président, le projet de loi n'a que
quelques lignes. Tout ce que le projet de loi dit, c'est qu'on désire
donner un bénéfice hydroélectrique à cette
société pour une période de 40 ans. Je conclurai lorsque
je serai rendu aux conclusions, je ne suis pas encore rendu là. Avec
votre permission, M. le Président, j'aimerais continuer le débat
et vous allez vous apercevoir, si vous me permettez d'explorer plus à
fond, que je suis tout à fait pertinent.
J'avais d'ailleurs terminé avec la Société des
Monts. J'ai évoqué ces faits justement pour démontrer que,
dans ce cas très particulier, il m'a semblé que REXFOR n'avait
pas assumé ses responsabilités. Si le leader adjoint du
gouvernement a de la difficulté à me suivre, je vais lui dire
ceci: Il s'agit d'un bénéfice, par le projet de loi 9 qui est
devant nous, provenant du ministère de l'Énergie et des
Ressources à une société qui est une filiale de REXFOR.
Par ailleurs, j'évoquais le fait que REXFOR avait obtenu justement un
autre bénéfice. Obtenir un droit de coupe du ministère de
l'Énergie et des Ressources est un bénéfice puisque le
bois est coupé en forêt publique et, pour ma part, je crois
qu'avant de donner un
deuxième ou un troisième bénéfice à
une compagnie qui en a déjà eu plusieurs, on doit s'interroger
sur la responsabilité qu'elle a eue envers les premier et
deuxième bénéfices qu'elle a eus. Selon l'argumentation
que je suivais, lorsque le gouvernement donne des droits de coupe à
REXFOR, on a le droit de s'interroger sur la responsabilité qu'elle a
eue face à un bénéfice comme celui-là et, avant de
lui donner des droits hydroélectriques pour 40 ans, on doit se poser des
questions sur la responsabilité avec laquelle elle dirige ses
activités.
M. le Président, bien sûr, je reconnais que,
éventuellement, il se pourrait que Bellerive-Ka'N'Enda puisse
développer un projet, celui des panneaux MDF. Encore là,
j'aimerais évoquer avec vous... et je vais laisser à mes amis de
la Gatineau qui siègent en cette Chambre l'occasion d'en parler d'une
façon plus précise, parce que vous allez vous apercevoir que, de
la même façon que REXFOR a laissé croire aux gens de Matane
qu'ils auraient droit à une papeterie, pendant huit ans qu'on leur a
promis une telle chose, voilà qu'on a fait la même chose dans la
région de la Gatineau, on a fait les mêmes promesses. À la
veille des élections de 1981, on leur a même dit: Si vous votez
pour le Parti libéral, le projet de Maniwaki sera en danger. Les gens
ont voté pour le Parti libéral, c'est vrai qu'il n'y a pas eu de
projet à Maniwaki, mais cela n'a rien à faire avec notre
formation politique, parce que c'est dû justement aux décisions du
ministre et de REXFOR qui ont été autrement. Je vais laisser aux
gens de la Gatineau le soin d'en parler. On peut parler de
Grande-Vallée. On peut parler de bien d'autres sujets, mais chaque fois,
on se rend compte que le ministre qui dirige REXFOR et REXFOR ont
été complices l'un et l'autre pour faire des promesses
alléchantes à différentes parties de la population du
Québec. Chaque fois, ces gens n'ont pas respecté leurs
promesses.
Une voix: Hypocrites! Mensonges!
M. Fortier: Bien sûr, lorsque REXFOR a décidé
de s'implanter à Mont-Laurier, cela a été un vent
d'espoir. Ici, j'ai une coupure de journal de 1978 où on dit: "REXFOR
soulève plein d'espoir". Une autre coupure de 1981 dit: "REXFOR
achète une entreprise à Mont-Laurier." Je citerai le
député du coin, le député de Labelle:
"L'acquisition des deux usines de Mont-Laurier constituera une première
implication pour REXFOR dans l'industrie de transformation du bois feuillu au
Québec, a dit le député de Labelle, tout en soulignant que
cette société d'État était l'une des mieux
organisées et des plus rentables du gouvernement."
M. le Président, si ce n'était pas dramatique, il faudrait
en rire. Qu'un ministre du gouvernement juge que REXFOR est la meilleure
société d'État du gouvernement, voilà qui en dit
long sur les compétences économiques du ministre et, surtout, sur
la compétence économique du gouvernement qui nous dirige.
J'entendais le ministre nous dire, tout à l'heure, que cela
permettrait aux 300 employés de Mont-Laurier de continuer à
travailler dans les usines de Bellerive-Ka'N'Enda. Le ministre devrait savoir
que 50% de ces travailleurs sont présentement en chômage, qu'il y
a eu des mises à pied récemment et que, de fait,
présentement, Bellerive-Ka'N'Enda a eu beaucoup de difficultés
à s'en sortir.
Puisque vous voulez que je sois plus pertinent, plus près du
sujet de Mont-Laurier, parlons de la performance de Bellerive-Ka'N'Enda. Il
faut savoir que cette société, avant qu'elle soit achetée
par REXFOR, était une société très rentable. Si les
propriétaires du temps ont vendu, comme ils l'ont indiqué
eux-mêmes, c'était parce qu'ils n'avaient pas de successeurs,
qu'ils n'avaient pas de fils ou de descendants qui pouvaient assumer la
responsabilité de la direction de la compagnie. Ils ont
été très heureux de vendre à REXFOR pour un prix
mirobolant. Cela a certainement fait leur affaire. Mais on peut se demander
comment il se fait qu'une compagnie qui était très performante,
très rentable avant 1981, devienne soudainement non rentable une fois
achetée par REXFOR.
Si vous regardez les états financiers de Bellerive-Ka'N'Enda,
vous allez voir que la perte de Bellerive-Ka'N'Enda en 1982 a été
de 1 300 000 $; elle a été de 3 200 000 $ en 1983 et - tenez-vous
bien - en 1984, elle a réussi à faire un profit. Mais je vais
vous expliquer comment. Elle a réussi à faire un profit parce
qu'elle avait une perte de 690 000 $. Ce qu'elle a fait, c'est qu'elle a vendu
une de ses filiales, Grand-Remous, à REXFOR. On appelle cela du
fligne-flagne en comptabilité. Quand vous avez une perte dans vos
livres, vous vous arrangez pour vous vendre à vous-même, à
une autre compagnie du même groupe, une autre société et,
tout à coup, vous montrez un profit dans vos livres. C'est du beau
fligne-flagne, mais cela ne change pas la situation. C'est une
société qui était rentable et qui, depuis trois ans, fait
des pertes alors qu'elle bénéficie de pouvoir
hydroélectrique à bon marché.
On peut se poser la question suivante: Comment se fait-il qu'une
société qui faisait des profits avant que REXFOR l'achète
et qui bénéficie, comme le ministre de l'Énergie et des
Ressources le dit, de ressources hydroélectriques à bon
marché, puisque le ministre nous a dit qu'à toutes fins utiles
les barrages hydroélectriques étaient complètement
amortis... Si c'est complètement amorti, cela veut dire que
tout ce que la société a à payer, ce sont les
dépenses d'entretien et de réparation. Cela veut dire qu'une
industrie qui est à côté de Bellerive-Ka'N'Enda doit payer
à Hydro-Québec quelque deux cents le kilowattheure et que
Bellerive-Ka'N'Enda doit payer quelque deux dixièmes de cent. Autrement
dit, c'est un bénéfice énorme, ce qui veut dire que
Bellerive-Ka'N'Enda paie dix fois moins qu'une autre société qui
exploite dans la même région ou dans une région
similaire.
Performance financière désastreuse. Promesses
alléchantes, encore une fois, depuis qu'ils sont là: promesse
d'une usine MDF qui, peut-être, ne viendra jamais -c'est la même
usine qu'on a promise à Maniwaki - promesse à Matane, promesse au
Saguenay. Mais quand est-ce qu'on va arrêter de promettre?
Nous avons un projet de loi devant nous, nous demandant de reconduire
des droits hydroélectriques pour une période de 40 ans. J'ai
évoqué au début qu'il s'agit là d'un
bénéfice, d'une subvention cachée de l'ordre de 5 000 000
$ à 10 000 000 $ pour une période de 40 ans. J'ai
évoqué avec vous le fait que REXFOR n'a pas de mission connue ou
qu'elle a une mission ambiguë, qu'elle n'a pas de plan de
développement. Le gouvernement n'a pas encore approuvé son plan
de développement. REXFOR ne sait pas où elle va. REXFOR ne sait
pas où elle va parce que le gouvernement ne sait pas où il va. Le
gouvernement nous a demandé de voter 65 000 000 $ et, deux mois plus
tard, il demande à une autre société d'État de
prendre la relève. Maintenant, on nous demande de donner un
bénéfice à REXFOR ou à Bellerive-Ka'N'Enda pour une
période de 40 ans. Mais c'est complètement ridicule! Si le
ridicule tuait, cela ferait longtemps qu'on n'aurait plus de gouvernement. (12
h 50)
Je dois vous dire dès maintenant qu'à moins que le
ministre nous propose un amendement pour modifier la clause des 40 ans en la
réduisant à deux ans, pour permettre justement au gouvernement et
à REXFOR de se donner une mission, de se donner un plan de
développement pour que nous sachions ce que Bellerive-Ka'N'Enda et ce
que REXFOR vont faire avec ce bénéfice de 40 ans... Si nous ne le
savons pas, comment voulez-vous qu'on accorde un bénéfice de 40
ans? Pour préserver les emplois dans la région, bien sûr,
nous serions d'accord pour reconduire l'entente sur une période d'un an
ou de deux ans au maximum pour, justement, permettre à la
société d'État de faire approuver un plan de
développement, de nous dire ce qu'elle fera exactement, ce qu'elle fera
dans la région de Mont-Laurier et ce qu'elle fera également dans
les autres régions du Québec. Nous l'avons demandé au mois
de juin et nous ne l'avons pas su. Nous le demandons maintenant.
À moins que le gouvernement ne nous donne des assurances sur le
fait que cette mission sera définie, qu'un plan de développement
sera préparé, nous allons voter contre le projet de loi, à
moins qu'il n'y ait un amendement pour réduire la période de 40
ans à deux ans.
Le temps est fini où cette Assemblée et où le Parti
libéral du Québec étaient complices du gouvernement pour
donner des bénéfices indus aux sociétés
d'État qui ne savent pas où elles vont, qui prennent l'argent des
contribuables pour le gérer d'une façon qui n'est pas conforme
aux règles de l'art et qui abusent de la situation. Le temps des folies
est fini. Nous allons voter contre le projet de loi tel qu'il est, à
moins qu'un amendement n'abrège la durée du
bénéfice à deux ans.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Pontiac.
M. Robert Middlemiss
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir,
à ce stade-ci, de prendre la parole en deuxième lecture sur le
principe du projet de loi 9. À regarder le projet de loi, il semble que
ce soit seulement le renouvellement d'un contrat qui existait
déjà. Mais ce contrat est pour Les Produits forestiers
Bellerive-Ka'N'Enda qui est totalement la propriété de la
société REXFOR. Cela ne me surprendrait pas que, durant mon
discours, le leader adjoint du gouvernement se lève encore sur la
question de pertinence. Je pense qu'il est bien important d'y penser avant de
donner un consentement à une chose qui semble bien innocente et qui,
d'après les discussions ou les arguments du ministre, va
préserver 300 emplois à Mont-Laurier. Si j'étais devant un
bateau qui fait naufrage, j'hésiterais énormément avant
d'y embarquer. Je pense que comme gouvernement, avant de donner des
privilèges à Bellerive-Ka'N'Enda, il faudrait certainement
s'assurer que sa performance future ne ressemble pas à la feuille de
route du passé.
Cela, il faut le dire lorsqu'on regarde la papeterie de Matane. Pendant
six ans, on a promis aux gens de Matane qu'ils auraient une papeterie. Ensuite,
on a eu les événements de Grande-Vallée. Pour tenter
d'apaiser les gens, au lieu d'essayer d'éviter de tels
événements, on a attendu les moments difficiles pour faire des
promesses. On a fait des promesses et je crois que même les promesses sur
des scieries en Gaspésie ne sont pas respectées quant à la
cédule prévue. Une partie des justifications concernant les
scieries de la Gaspésie, c'était que l'un des produits des
scieries, soit les copeaux, serait utilisé à la papeterie de
Matane. Comme il n'y a pas de papeterie à Matane, du moins dans
l'avenir immédiat, qu'est-ce qu'on va faire? Comment va-t-on justifier
les sommes d'argent investies dans les scieries de la Gaspésie? Cela
faisait partie d'un tout.
On parle de la papeterie de Matane. Avant qu'on en parle à
Matane, c'était censé être la papeterie de la
vallée. Pour la remplacer et satisfaire les gens de la vallée de
la Matapédia, on leur a donné l'usine de panneaux de Sayabec. Les
gens de REXFOR même ont admis qu'au moment où on avait
décidé de construire l'usine de panneaux à Sayabec, on
prévoyait un marché outre-mer et l'endroit choisi pour
l'implantation de cette usine avait du sens. Pas longtemps après, on
s'aperçoit que l'étude de marché n'était
réellement pas très bonne, que le marché outre-mer
n'existe pas.
Le pire, c'est que le ministre lui-même a dit que le transfert
à Bellerive-Ka'N'Enda c'était alimenter ses usines. On va ajouter
aussi dans le futur une usine MDF. J'espère que la région de
l'Outaouais ne sera pas obligée de vivre les mêmes promesses qui
ont été faites en Gaspésie. Cette usine qu'on promet
aujourd'hui à Mont-Laurier on la promet depuis dix ans à
Maniwaki. Cela faisait partie du complexe forestier. On l'a promis: Mme
Ouellette défendra le dossier de la Haute-Gatineau; implantation du
complexe forestier; un projet approuvé par le Comité des
priorités du gouvernement. C'était approuvé pour
Maniwaki.
On sait que l'an dernier le gouvernement a décidé que ce
n'était plus Maniwaki mais Mont-Laurier... Qu'est-ce qui nous dit qu'on
va la construire éventuellement? Peut-être que les chances des
gens de Mont-Laurier sont moindres aujourd'hui: leur représentant n'est
plus ministre, il ne fait même plus partie de ce gouvernement, il
siège ici comme indépendant. Est-ce qu'il va être capable
de défendre aussi bien ce dossier dans l'intérêt des gens
de Mont-Laurier? Le temps le dira.
On est pleinement d'accord pour tenter de préserver les emplois
à Bellerive-Ka'N'Enda, mais je pense que la feuille de route de cette
compagnie démontre qu'elle n'a pas réussi à avoir une
année complète de production jusqu'à maintenant dans
aucune des opérations. Donc, on dit que la raison principale de donner
ce droit à Bellerive-Ka'N'Enda c'est d'assurer et de maintenir 300
emplois ou, si on ne fait pas ça, ça va fermer.
J'ai bien l'impression qu'en assumant que ce barrage n'avait pas
été donné à Bellerive-Ka'N'Enda... On a
Hydro-Québec qui produit de l'électricité, qui, à
ma connaissance, a énormément de surplus. Dans le discours
d'ouverture le premier ministre indiquait: On va utiliser nos surplus pour
tenter d'aider les entreprises à produire à un coût
moindre. Est-ce que le fait que le ministre nous dise que si ça ne
fonctionne pas il y a 300 emplois qui vont être perdus...
Je pense que le porte-parole de l'Opposition l'a bien dit: Pourquoi
donner un privilège pendant 40 ans sans savoir dans quelle direction
s'en va REXFOR? On sait, d'après sa feuille de route, que sa performance
laisse énormément à désirer. Il faudrait bien
arrêter toutes les promesses qui ont été faites un peu
partout dans tout le Québec. Il faudrait bien que REXFOR et le
gouvernement, REXFOR par l'entremise du gouvernement, fassent miroiter à
la population dans les régions qu'ils ont des solutions magiques aux
problèmes. Ils vont attendre pendant sept et huit ans pour s'apercevoir
qu'il y a rien là. Il n'y a rien de concret qui se fait. Comme le disait
notre porte-parole, de ce côté-ci, on n'est certainement pas
prêt à donner carte blanche à ce projet de loi. On donne
notre approbation sur une période jugée raisonnable, soit une
couple d'années, pour permettre à REXFOR de faire un plan
d'ensemble et de savoir où on se dirige.
M. le Président, comme le disait notre porte-parole,
j'espère que le ministre va comprendre et qu'au moment de l'étude
article par article en commission, on pourra certainement réduire la
période de temps, revoir tout l'ensemble et empêcher que ce
gouvernement, à tout bout de champ, fasse des promesses et ne livre
jamais la marchandise. Ses discours sont très bons, mais jamais il ne
passe à l'action pour réellement répondre et livrer la
marchandise. Ce que les gens veulent, c'est la livraison de la marchandise. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Je pense que le
prochain intervenant sur le débat sera... Vous voulez continuer?
M. Middlemiss: M. le Président, j'ai encore du
temps...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, exactement, c'est ce
que je voulais savoir. Donc, il vous restera douze minutes pour votre
intervention quand on reprendra le débat, puisque j'ai l'impression que
le leader adjoint veut demander l'ajournement.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, effectivement, à
compter de 15 heures, nous allons plutôt procéder à la
prise en considération des projets de loi 2 et 4 relatifs aux affaires
municipales et, par la suite, nous allons étudier le projet de loi 7,
Loi sur les valeurs mobilières. Ce n'est que par la suite que nous
étudierons le projet de loi 11 sur les relations du travail. Ensuite,
nous reviendrons à ce débat et c'est
évidemment M. le député de...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Pontiac. M. Blouin:
...Pontiac qui aura la parole.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Pontiac devrait donc me demander l'ajournement du débat.
M. Middlemiss: Oui, M. le Président. Est-ce qu'on pourrait
demander au leader adjoint quand - est-ce que c'est ce soir ou demain - on va
reprendre ce débat?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous avez raison. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: En termes d'heure, évidemment, selon le nombre
d'intervenants, nous prévoyons que nous pourrions réaborder ce
projet de loi vers la fin de l'après-midi ou au début de la
soirée.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, il y a motion pour
qu'on ajourne le débat sur le projet de loi en cours.
M. Middlemiss: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci.
M. le leader, à ce moment-là, je propose la suspension de
nos travaux pour que nous puissions les reprendre vers 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 8)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît! Veuillez prendre place. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je vous demande d'appeler les
articles 21 et 22 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 2
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en
considération du rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 2, Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les finances municipales. Est-ce que quelqu'un intervient? Est-ce
que cette prise en considération est adoptée?
Des voix: Adopté.
Projet de loi 4
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté. Nous passons maintenant au projet de loi 4, M. le leader
adjoint? Donc, la prise en considération du projet de loi 4, Loi sur le
ministère des Affaires municipales. Est-ce que cette prise en
considération est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Nous allons maintenant discuter du projet de loi 11,
Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de
relations du travail. Puisque nous allons discuter de ce projet de loi, la
commission de l'économie et du travail, qui poursuit normalement,
à compter de 15 heures, l'étude détaillée du projet
de loi 42, suspendra donc ses travaux le temps que durera ce débat, soit
environ une demi-heure. Puisque le ministre, m'a-t-on dit, est en train de se
rendre à l'Assemblée, nous allons suspendre nos travaux pour
quelques minutes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Frontenac, sur une question de...
M. Grégoire: De directive.
Le Vice-Président (M. Rancourt): ... directive.
M. Grégoire: Ce matin, l'Assemblée a émis un
ordre à savoir que la commission de l'économie et du travail
siège au salon rouge, pour étudier le projet de loi 42, de 11 h
30 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à
21 h 30 ce soir. Or voilà qu'on nous dit que c'est ici que va avoir lieu
la présentation d'un autre projet de loi. Ma demande de directive est la
suivante: Est-ce qu'à ce moment, cela ne prendrait pas le consentement
unanime de tous pour rescinder un ordre de l'Assemblée nationale? Alors
qu'il y a des membres de la commission sur l'économie et du travail qui
sont de l'autre côté et qui attendent, est-ce que ça ne
prendrait pas un consentement unanime pour rescinder un ordre qui a
été donné ce matin à l'Assemblée
nationale?
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: Sur cette question, peut-être pour
éclairer un peu le député de Frontenac, je lui signale que
ce matin, au moment où nous avons donné le menu législatif
de la journée, nous avons expliqué que pendant l'étude des
projets de loi 11 et
16 du ministère de l'Éducation il y aurait suspension des
travaux de la commission pour que les membres intéressés puissent
assister au bref débat qui se tiendra ici à l'Assemblée
nationale pendant cette période.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Frontenac, comme vous venez de l'entendre de la part du
leader adjoint du gouvernement, ce matin il y avait eu, effectivement, avis que
pourrait se produire durant le cours de nos travaux, des suspensions de
commissions, afin de permettre aux ministres concernés de venir
défendre un projet de loi ici à l'Assemblée nationale. M.
le député de Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, j'ai compris que, si
on cessait d'étudier le projet de loi 42 à la commission
parlementaire à 21 h 30, c'était pour permettre, à ce
moment-là, au ministre de débattre en Chambre le projet de loi
11, mais je n'ai jamais compris, dans l'avis de motion, qu'en ce qui concerne
les convocations de commissions, on cesserait de siéger à 3
heures ou aux heures approuvées. C'est pourquoi je me demande si le
leader adjoint a compris la même chose que moi ce matin.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je dois en conclure que le
député de Frontenac n'a pas effectivement compris ce que j'avais
dit.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, est-ce que cette
motion... M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, je pense que la demande de
directive du député de Frontenac est pertinente à savoir
qu'on requiert le consentement unanime de l'Assemblée pour changer
l'ordre de l'Assemblée qui a été donné ce matin. Il
me semble que oui, quant à moi. Je suis prêt à donner ce
consentement, mais il serait peut-être bon que vous statuiez sur la
question.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Frontenac, la commission est maîtresse de ses
travaux. Elle peut juger elle-même de suspendre ses travaux en premier
lieu ici. C'est une chose.
Ici, le leader du gouvernement peut faire, premièrement, cette
demande de collaboration de chacun d'entre vous ici afin de suspendre justement
nos travaux à ce moment-ci. M. le député de Sainte-Marie.
Évidemment, M. le ministre du Travail arrive. Cela réglera le
problème.
M. Bisaillon: Cela aura au moins permis, M. le Président,
au ministre de se rendre en Chambre. Vous avez fait remarquer, très
judicieusement, que la commission est maîtresse de ses travaux, mais,
premièrement, elle a suspendu ses travaux sans que la question ne lui
soit posée. Deuxièmement, elle a suspendu ses travaux à 15
heures, cet après-midi. Je dois vous indiquer, M. le Président,
qu'on arrive en fin de session et qu'on a besoin de la collaboration de tout le
monde et que, pour l'obtenir, il faut au moins qu'on soit informés de la
planification du leader du gouvernement, si elle existe, un peu plus longtemps
à l'avance.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: Enfin, M. le Président, je comprends
très bien le problème du député de Sainte-Marie et
celui du député de Frontenac. J'en conviens qu'ils ne peuvent pas
être partout à la fois.
Cependant, j'avais formellement indiqué ce matin que ces
événements se dérouleraient de cette façon. Si,
à ce moment-là, il y avait eu quelques commentaires, quelque
opposition ou quelque discussion que nous aurions pu avoir, nous aurions pu le
faire à ce moment-là, mais je conviens avec le
député de Sainte-Marie et avec le député de
Frontenac qu'il faudrait peut-être jeter un petit coup d'oeil pour voir
si ceux qui ne peuvent pas être partout à la fois soient
informés justement. J'en conviens.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, je vous demande donc d'appeler
maintenant l'article 9 de notre feuilleton.
Projet de loi 11 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, nous allons
discuter du principe du projet de loi 11, Loi modifiant diverses dispositions
législatives en matière de relations du travail. M. le ministre
du Travail.
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, j'ai manqué
un bout de la discussion qui vient de se faire, mais j'ai compris que
quelques-uns en perdaient un peu leur latin. Je vous signale que c'était
un peu mon cas aussi. On va quand même vous soumettre quelques
considérations à l'appui de ce projet de loi 11 dont les
objectifs essentiels sont de procéder à des amendements au Code
du travail, plus spécifiquement au chapitre des services essentiels, et
également de procéder
à des changements que je qualifierai d'ordre technique à
la Loi sur les décrets de convention collective. Dans l'un et l'autre
cas, ces changements sont proposés à la Chambre à la suite
de demandes, de recommandations très spécifiques faites par les
intervenants de l'un et l'autre secteur dont je viens de parler. Dans le
premier cas - on va s'en souvenir - il s'agit du Conseil des services
essentiels et dans l'autre cas, ce sont des suggestions qui nous ont
été faites par les personnes qui, en vertu de la loi, ont le
mandat d'administrer, en quelque sorte, les conventions collectives qui
découlent de la Loi sur les décrets de convention collective.
Les amendements au Code du travail contribueront à
améliorer le fonctionnement du Conseil des services essentiels. Le
projet de loi 11 prévoit, notamment, la création d'un poste de
vice-président ou de vice-présidente et l'argument fondamental
militant en faveur de la création de ce poste réside dans le fait
qu'actuellement, le président du conseil fait partie du quorum de toutes
les séances et en conséquence de cette disposition, son absence
empêche le conseil de fonctionner et advenant son décès,
par exemple, le conseil serait paralysé jusqu'à ce qu'une
nouvelle nomination soit effectuée par le Conseil des ministres. On
comprendra facilement ici les conséquences que pourrait occasionner une
semblable éventualité.
Retenons ici que la ou le vice-président sera nommé de la
même façon que le président et que le nombre de membres du
conseil ne sera pas augmenté, c'est-à-dire qu'il demeurera
à huit personnes. La nomination d'une ou d'un vice-président
permettra également au Conseil des services essentiels d'agir en
division, c'est-à-dire de fonctionner à partir de deux bancs
distincts.
Depuis l'expérience vécue, à partir du moment de la
création du Conseil des services essentiels, le 1er décembre
1982, il nous a paru que la nature des dossiers débattus devant le
Conseil des services essentiels ne requéraient pas nécessairement
la présence des huit membres du conseil en même temps.
Mentionnons, par exemple, lorsqu'il s'agit d'examiner une entente conclue entre
les parties ou encore selon le nombre de salariés visés par une
accréditation ou encore selon la nature des services essentiels à
être assurés.
Les dispositions actuelles de la loi oblige le président à
convoquer tous les membres chaque fois qu'il y a lieu, pour le conseil,
d'exercer son mandat. L'amendement proposé permettra ainsi au conseil de
siéger à deux endroits différents en même temps,
lorsqu'il y a urgence, assurant de ce fait une action plus rapide et plus
efficace tant pour le conseil que pour les parties elles-mêmes. Le projet
prévoit également qu'à défaut d'unanimité
dans une division du conseil, le dossier devra être
déféré au conseil complet.
Une autre des modifications suggérées devrait permettre au
Conseil des services essentiels de réaliser des économies
appréciables par le remplacement de l'obligation de publication des
décrets dans la Gazette officielle par un avis aux parties. Notons
simplement que ces publications ont représenté, au 1er
décembre 1984, des déboursés de plus de 136 000 $. (15 h
20)
La loi actuelle ne prévoit aucune disposition forçant les
parties à se présenter devant le conseil dans le but d'examiner
si la liste des services essentiels est suffisante. Par ailleurs, une telle
obligation existe, notamment en ce qui concerne les convocations du
conciliateur en vertu du Code du travail. Il nous est apparu qu'une telle
obligation créée par la loi permettrait un meilleur
fonctionnement du conseil.
Pour conclure sur la section relative aux services essentiels, notons
que le projet de loi 11 spécifie que dorénavant le délai
de sept jours requis pour l'avis au ministre sera "computé" en jours
juridiques, de sorte que le délai d'intervention du conseil en sera
allongé d'autant.
Enfin, il y sera spécifié que l'employeur ne pourra
modifier les conditions de travail des salariés à moins d'une
entente entre les parties. Cet amendement devrait permettre de mettre fin
à l'ambiguïté qui persistait sur cette question.
Le projet de loi 11 apporte également des modifications à
la Loi sur les décrets de convention collective. Je voudrais faire ici
un bref historique de cette loi et expliquer en quoi les amendements
proposés aujourd'hui ont été rendus
nécessaires.
Comme on le sait, la Loi sur les décrets de convention collective
a été adoptée en 1934, dans une période de crise
économique et sociale. Il s'agissait, à l'époque, de
mettre fin à la concurrence déloyale qui s'exerçait entre
les employeurs au détriment des salariés. D'une part, certains
employeurs refusaient purement et simplement de négocier, ce qui
n'était pas, à l'époque, illégal. D'autre part, la
crise économique sévissant, il n'y avait aucun
intérêt pour les employeurs à prendre le risque de se
placer dans une position concurrentielle intenable en s'engageant par
convention collective à verser des salaires plus élevés
que ceux payés par leurs concurrents.
La Loi sur les décrets de convention collective fut donc
adoptée avec pour objectifs fondamentaux d'assurer aux travailleurs des
conditions de travail décentes en empêchant que la concurrence se
fasse au détriment des salaires et des autres conditions de travail. Ces
objectifs me paraissent tout à fait valables aujourd'hui, en 1984. Bien
sûr, d'autres lois adoptées par les
différentes législatures ont eu pour effet de remettre en
question la pertinence même de la loi. De nombreuses discussions ont eu
lieu à cet égard. J'ai eu l'occasion, à maintes reprises,
de me prononcer pour le maintien du régime des décrets.
Ainsi, depuis 1934, la Loi sur l'extension juridique des conventions
collectives n'a subi que de très légères modifications et
il m'est donc apparu essentiel de procéder à une réforme
en profondeur de cette loi. C'est l'un des mandats qui ont été
confiés à la commission consultative sur le travail
chargée de procéder à l'évaluation des lois qui
régissent le travail.
Sans vouloir préjuger des conclusions de la commission Beaudry,
le gouvernement a donc opté pour le maintien de ce régime tout en
y apportant certaines modifications de nature à améliorer son
fonctionnement et à l'adapter au contexte actuel.
Les amendements proposés proviennent, dans l'ensemble, de
souhaits exprimés par les représentants des comités
paritaires, ceux-là même qui administrent quotidiennement la Loi
sur les décrets qui en découle.
Je reprendrai ici rapidement, certaines des modifications les plus
substantielles. Le projet de loi 11 prévoit une exemption de la Loi sur
les décrets de convention collective pour les personnes
bénévoles. Cette exemption fait suite au souhait de certains
organismes tels l'Office des personnes handicapées et de la Régie
de l'assurance automobile du Québec de pouvoir organiser, dans un but de
réadaptation, des stages non rémunérés pour
certaines personnes dans des secteurs couverts par décrets.
Les comités paritaires pourront dorénavant exercer un
recours en faveur des salariés non seulement selon les termes du
décret mais aussi à partir de la loi elle-même. Cette
modification nous est apparue nécessaire à la suite d'une
interprétation stricte des tribunaux qui limite les recours aux seules
dispositions du décret. Une clarification du principe de
responsabilité solidaire entre employeurs et sous-traitants et lors
d'une aliénation d'entreprise en ce qui concerne le salaire
impayé est également suggérée.
Dans le but d'accroître l'efficacité des comités
paritaires en ce qui a trait au recours en faveur des salariés, nous
souhaitons une harmonisation des périodes de prescriptions pour les
recours civils et pénaux avec celles prévues dans la Loi sur les
normes du travail. La prescription sera donc portée de six mois à
un an et un avis d'enquête du comité paritaire pourra interrompre
la prescription civile pour six mois.
En vertu de la Loi sur les décrets de convention collective, il
est interdit aux employeurs de suspendre ou de déplacer un
salarié parce qu'il a porté plainte à son comité
paritaire ou parce qu'il a témoigné ou fourni certaines
informations au comité paritaire. La réclamation à titre
de dommages et intérêts sera portée d'un mois à
trois mois de l'équivalent du salaire.
Depuis l'adoption de la loi en 1934, le montant des amendes et des
pénalités n'a pas été modifié. Il nous est
donc apparu que ces amendes devraient être augmentées afin que
celles prévues à la loi conservent un caractère
dissuasif.
Enfin, il sera désormais interdit aux comités paritaires
de retenir un pourcentage de ce qui est dû aux salariés. Dans la
loi actuelle, il est permis aux comités paritaires, lorsqu'ils exercent
les recours de salariés qui ont accepté de travailler à un
salaire moindre que celui prescrit par le décret, de garder 20% de la
différence entre ce salaire et celui du décret, et on croit que
le salarié peut difficilement refuser le taux offert dans ce cas.
Pour ce qui est des modifications fondamentales à cette
même loi, un groupe de travail du ministère a remis,
l'été dernier, un mémoire à la Commission
consultative sur le travail. Ce mémoire fait état des
problèmes qui nous préoccupent. Comme je l'ai déjà
dit précédemment, M. le Président, nous ne voulons pas
présumer des conclusions et des recommandations de la commmission.
Toutefois, si la commission opte pour le maintien du système des
décrets, il faudra apporter à la loi des modifications de fond
pour arrimer ce système mixte de détermination des conditions de
travail aux autres systèmes en vigueur au Québec.
Voilà, M. le Président, pour l'essentiel, les amendements
proposés par le projet de loi 11. Je sollicite donc la collaboration des
membres de cette Assemblée pour que l'on puisse procéder à
l'adoption du principe du projet de loi modifiant certaines dispositions
législatives en matière de relations du travail.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Portneuf et whip de l'Opposition.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci. C'est avec beaucoup d'intérêt
que nous prenons acte de l'intervention du ministre. Je m'attendais -compte
tenu des circonstances et je pourrai y revenir tout à l'heure - que le
ministre soit un peu plus éloquent en regard de certains décrets,
notamment de celui de l'industrie de la coiffure. J'espérais, avant
qu'il arrive, que son retard était dû à sa
préparation en rapport avec ce dossier ou encore je présumais
qu'il était en train de rappeler à l'ordre Mme la ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
pour les gestes administratifs qu'elle venait de poser. Tel ne semble
pas être le cas. Je profiterai de ces quelques minutes qui me sont
allouées pour tenter de sensibiliser le ministre à cet
égard. (15 h 30)
Le projet de loi 11 est davantage un projet de loi de la surtechnique
qu'une loi portant sur des principes fondamentaux ou des principes importants
en matière de relations du travail. Comme l'a indiqué le
ministre, ce projet de loi prévoit des modifications au Code du travail
en regard des services essentiels et du Conseil des services essentiels. Comme
on le sait, ce conseil est formé d'un certain nombre de membres. Le
projet de loi prévoit qu'à compter de son adoption, un
président, un des membres actuels pourrait être
désigné comme vice-président, qui pourra agir d'office
pour prendre fait et cause et remplacer, au besoin, le président actuel,
compte tenu des dispositions de la loi qui risquaient, dans le cas de
l'incapacité d'agir du président à cause de maladie ou
autrement, de mettre en péril finalement l'objectif pour lequel un tel
conseil a été créé et le paralyser de façon
indue.
Cette disposition aura aussi l'avantage de prévoir et de
permettre, comme le disait le ministre, que le conseil puisse siéger
à deux endroits en même temps, auquel cas le président et
le vice-président pourront agir simultanément. Pas de
problème, nous sommes d'accord avec ces dispositions qui ne sont, de
toute façon, que de nature technique.
Le projet de loi mentionne aussi des modifications aux avis et au
dépôt de tels avis ou encore à la publication des avis
donnés par le conseil, ce qui viendra faire en sorte qu'une
économie appréciable de quelque 130 000 $ soit
réalisée. Par contre, cet avis étant déposé
seulement auprès des parties, cela nous amène à la
question suivante: Comment de tels avis seront-ils rendus publics? Comment les
députés, comment ceux ou celles qui sont concernés ou
intéressés par la publication, ou le contenu de tels avis
plutôt, seront-ils informés de leur contenu et de leur impact,
etc., et dans quel délai? Le ministre devrait y revenir, d'une part.
D'autre part, la publication de tels avis ne devrait pas se limiter au
dépôt du rapport annuel ou du rapport que le conseil a à
déposer. Les autres dispositions portent essentiellement sur la Loi sur
les décrets de convention collective. Je dois vous exprimer ma surprise
qu'à ce moment-ci, le ministre du Travail profite de ce projet de loi
pour apporter des modifications qui apparaissent de prime abord assez mineures,
mais ce sont quand même des modifications qui risquent de devenir
substantielles, d'avoir un impact pour les entreprises, pour les travailleurs
et travailleuses dont l'entreprise est régie par un décret tenant
lieu de convention collective. Surpris pourquoi? Parce qu'on sait pertinemment
que les décrets de convention collective, que cette situation de droit a
évolué. On sait que la loi a été adoptée il
y a 50 ans. D'ailleurs, le 50e anniversaire était fêté
à Montréal il y a quelques semaines. On sait que les objectifs
pour lesquels cette loi a été adoptée en 1984 ne sont plus
nécessairement les mêmes aujourd'hui. La conjoncture n'est pas la
même, la conjoncture économique, la conjoncture de
représentation. Le droit pour un travailleur de négocier ses
propres conditions, d'être représenté par un syndicat, cela
a beaucoup évolué depuis plusieurs années. Le gouvernement
avait d'ailleurs annoncé en 1983, si ma mémoire est
fidèle, qu'il entreprenait un processus de consultation et de
réflexion qui devait conduire à une réforme significative,
mais nécessaire aussi de cette loi.
La commission Beaudry a reçu comme mandat de se pencher sur cet
aspect de l'établissement de nos conditions de travail au Québec.
On sait que la commission terminera ses consultations d'ici à quelques
semaines. Nous sommes donc en droit de présumer et de croire que le
gouvernement prendra connaissance de recommandations formelles dûment
écrites et motivées en regard de l'application de cette loi. Le
gouvernement aurait donc pu facilement attendre la réforme globale avant
d'arriver avec des modifications comme celles-là. Quoi qu'il en soit,
c'est le choix du gouvernement, il faut vivre avec; il a encore la
majorité.
Les dispositions de la présente loi viennent donc permettre qu'un
travailleur qui évolue dans le cadre d'un stage en milieu de travail,
dans le cadre d'un stage professionnel puisse être couvert par une telle
loi, malgré qu'il ne soit pas rémunéré. Pour cela,
aucune objection! Le principe est tout à fait défendable.
Des dispositions particulières s'appliquent dans le cas de
cession d'une entreprise, à savoir que le nouvel employeur sera soumis
aux mêmes conditions, aux mêmes règles et aux mêmes
exigences que l'ancien. C'est tout à fait légitime, c'est
intéressant. On aura l'occasion d'y revenir plus spécifiquement
en commission parlementaire.
Là où je m'interroge, c'est sur la raison de prolonger la
période de prescription de six mois à un an. Le ministre nous dit
que c'est pour être conforme à la Loi sur les normes du travail.
Encore une fois, on aura l'occasion d'y revenir en commission parlementaire.
 ma connaissance, il faudrait voir jusqu'où cette prescription
limitée à six mois a pu avoir des impacts sur l'application des
décrets et en quoi les comités paritaires ont été
brimés ou ont été affectés dans le droit qu'ils ont
d'entreprendre des procédures pour représenter et défendre
les intérêts d'un
travailleur.
Le projet de loi prévoit de plus la procédure en vertu de
laquelle le ministre pourra nommer un liquidateur ou un administrateur à
la place d'un comité paritaire dans une région et dans un domaine
donné. Le ministre nous annonce des dispositions particulières
visant les cas de congédiement d'un travailleur ou d'une travailleuse
pour avoir eu recours, s'être prévalu des conditions ou des droits
qui lui appartenaient en vertu du décret. On regardera cela en
commission parlementaire. De prime abord, c'est intéressant.
Enfin, vous augmentez les montants des amendes, qui étaient
devenus véritablement désuets. La question que je poserai au
ministre, c'est: dans combien de cas les amendes sont-elles versées au
comité paritaire et a-t-il eu l'occasion d'analyser l'effet que cela
aurait que de telles amendes ne soient pas versées au comité
paritaire comme tel?
Voilà l'essentiel des commentaires que j'avais à faire.
C'est un projet de loi de nature surtout technique. Nous aurons l'occasion de
revenir en commission parlementaire, mais là où je suis vraiment
surpris, c'est que le ministre du Travail n'aborde pas, à ce moment-ci,
la question de la coiffure, très probablement parce qu'il n'a pas eu
l'occasion de contacter son bureau de comté ou encore son cabinet,
depuis quelques heures. Chacun des bureaux de député
reçoit actuellement à tous les dix minutes, ou à peu
près, des télégrammes, des communications de gens qui
oeuvrent dans le monde de la coiffure et qui sont franchement inquiets des
dispositions qui ont été annoncées par Mme la ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Pour faire d'une longue histoire une histoire courte, on va aborder, si
vous voulez, dans les dernières minutes que j'ai, la question du
décret dans l'industrie de la coiffure et du statut du coiffeur. On sait
qu'à plusieurs reprises, depuis déjà un an, le ministre a
été sensibilisé à ces problèmes et cela,
c'est dans le sujet. C'est un décret. Mes collègues et
moi-même avons eu l'occasion de sensibiliser le ministre du Travail aux
problèmes de cette industrie, aux problèmes vécus par les
travailleurs, par les entreprises, par les régions. Essentiellement, la
Loi de l'industrie de la coiffure est normalement régie par un
règlement qui s'appelle le statut du coiffeur. Ce statut du coiffeur
constitue une application générale universelle et constitue la
partie première des décrets qui s'appliquent dans certaines
régions du Québec. Les problèmes dans l'industrie de la
coiffure jusqu'à maintenant étaient le résultat d'une loi
ou d'une réglementation qui était devenue vieillotte, caduque et
inutile dans plusieurs des cas. Qu'il me suffise de vous référer
à toute l'ambiguïté entourant le statut du coiffeur pour
hommes par rapport au statut du coiffeur pour dames, les limites et les
juridictions de chacun de ces métiers. (15 h 40)
À cet égard, on se rappellera, avec l'évolution des
temps, de la mode et des moeurs, que depuis quelques années, des
problèmes juridiques ont été soulevés comme suite
du voeu ou du désir de personnes de se faire coiffer, soit dans un salon
de coiffure pour hommes, soit dans un salon de coiffure pour dames. Des
poursuites ont été entreprises et cela a amené la
problématique du caractère sexuel de la coiffure au
Québec, le fameux problème du sexe des têtes. Il s'ensuivit
d'autres problèmes à la suite d'un statut de la coiffure qui est
mal défini, des problèmes en regard de la formation, de
l'apprentissage. Un des problèmes particuliers de cette industrie, c'est
qu'on doit constater que trop souvent, les gens ont choisi ce métier
pour ne pas choisir d'autre chose, sans plus d'intérêt, sans plus
de motivation et c'est, entre autres, ce qui explique que trop souvent,
malheureusement, des gens qui accèdent à cette industrie y
demeurent très peu de temps. C'est un aspect important en regard de la
formation et de l'apprentissage.
Il y a toute la question des heures d'affaires. J'ai eu l'occasion dans
une procédure de récente date de demander au ministre de
s'assurer que les heures d'affaires soient modifiées pour permettre que
cette industrie observe les mêmes heures que les établissements
commerciaux au Québec, soit du lundi au samedi. Or, nous avons inscrit
une procédure qui devait être débattue ici, soit à
l'interpellation du ministre, à la mi-novembre, le 23 novembre, si ma
mémoire est fidèle. Le ministre du Travail a été
dans l'incapacité d'agir. C'était explicable et on a
accepté que cette interpellation soit reportée au 7
décembre, vendredi dernier.
Vendredi dernier, ce que notre groupe politique a demandé au
ministre du Travail, c'est de modifier le statut de la coiffure pour
créer, permettre et légaliser les salons dits unisexes,
c'est-à-dire qu'un homme puisse se faire coiffer ou se faire couper les
cheveux dans le salon de son choix et la même chose pour une femme. Sur
ce, nous étions d'accord. La ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu l'a annoncé lundi. Parfait. C'est
réglé. Nous sommes d'accord.
Par contre, il y a un élément qu'on a demandé et
vous avez fait exactement le contraire. C'est qu'on a demandé au
gouvernement, par l'interpellation qu'on a faite, de s'assurer que le
contrôle de la profession ou le contrôle du métier s'appuie
davantage sur la qualification que sur une réglementation. Mme la
ministre de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu a annoncé lundi qu'elle
venait d'ouvrir les portes, qu'elle modifiait substantiellement les conditions
permettant à une personne de parfaire son apprentissage, qu'elle
permettait aux jeunes finissants d'ouvrir leur salon de coiffure, etc.
Qu'est-ce que le gouvernement du Québec s'apprête à faire
concernant la formation de ces gens, concernant le contrôle de leur
apprentissage, concernant la qualification, concernant le professionnalisme
qu'ils doivent démontrer et prouver dans l'exercice de leur
métier? Il y a beaucoup d'inquiétude actuellement vécue et
durement ressentie. Il serait urgent, premièrement, que le ministre du
Travail et Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu se parlent. Deuxièmement, qu'ils échangent entre eux.
Troisièmement, qu'ils se comprennent pour avoir une attitude claire,
nette et précise de façon à sécuriser tout le monde
et de façon à ne pas mettre de côté toute la notion
de formation et d'apprentissage.
Voilà l'essentiel des commentaires et des propos que j'avais
à tenir. Je comprends que j'aborde un aspect particulier, un
décret particulier. Le moment était bien choisi pour le faire,
compte tenu des nombreux contacts et des inquiétudes qu'on a dans le
milieu.
J'aurais aimé parler, évidemment, de la juridiction
concernant certains décrets parce qu'on sait qu'un des aspects de la
problématique de la mise en vigueur de cette loi, c'est qu'on a des
décrets qui s'appliquent dans certaines régions seulement, la
primauté d'un décret par rapport à une convention
collective à l'intérieur d'une entreprise. Là-dessus, on a
des cas patents, des cas aigus et des cas criants, devrais-je dire, qui doivent
être réglés en rapport avec la réforme globale que
le ministre nous annonce.
Une chose est certaine. Aujourd'hui, le propos est peut-être bref,
mais dans les délais qu'on espère les plus immédiats, nous
aurons l'occasion d'avoir un véritable débat de fond où
plus de députés pourront être mis à contribution sur
cette fameuse Loi sur les décrets de convention collective.
C'était l'essentiel du propos que j'avais à tenir. On
attend la réplique du ministre. On sera en commission parlementaire avec
des questions beaucoup plus spécifiques et beaucoup plus
précises. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: M. le Président, comme on l'a
souligné, le projet de loi 11 est un projet de loi technique qui apporte
des amendements relativement mineurs aux lois du Code du travail et à la
Loi sur les décrets de convention collective. Je ne pense pas qu'on
puisse avoir d'objections aux amendements qui nous sont apportés par le
projet de loi 11 puisque c'est, toutes proportions gardées, relativement
mineur par rapport à l'importance des lois en cause.
Je voudrais, cependant, profiter de l'occasion pour passer un
commentaire sur ce type de lois et la forme qu'elles prennent lorsqu'elles sont
déposées devant les parlementaires, des lois qui corrigent des
lois déjà existantes. Je dois vous indiquer, M. le
Président, que la lecture de ce type de projets de loi pour des
parlementaires est assez compliquée et qu'il faudrait probablement
songer, dans un avenir prochain, à nous présenter ce type de
projets de loi, des projets d'amendement, de façon différente -
ce à quoi on fait référence, c'est aux articles des lois
existantes - en nous indiquant les modifications qu'on veut y apporter sous
forme d'amendements, comme on le fait en commission parlementaire. En
commission parlementaire, la différence essentielle est qu'on a le
projet de loi initial devant nous.
Comment voulez-vous qu'un parlementaire puisse décemment
étudier un projet de loi ou voir la portée ou les
conséquences de l'ensemble des amendements qui lui sont proposés
quand ces projets de loi sont présentés sous cette forme? Je
pense qu'il y aurait avantage à ce qu'à l'avenir - je le dis au
moment de ce projet de loi, mais j'aurais pu le dire pour à peu
près l'essentiel des projets de loi qui ont été
déposés devant nous pour le mois de décembre et qui sont,
pour la plupart, tous des projets d'amendement aux lois actuelles. Cela aurait
pu nous être présenté avec le texte qu'on veut modifier, la
proposition d'amendement, de sorte qu'on puisse savoir exactement, sans avoir
besoin d'aller fouiller l'ensemble des lois, qu'on puisse avoir devant les yeux
le portrait complet de la situation.
Je n'entends pas revenir sur toutes les questions qu'a soulevées
le député de Portneuf, le sexe des cheveux a été
abondamment traité par le député de Portneuf. Je vois
d'ailleurs que le secrétaire de la commission s'intéresse peu
à la question de ce décret de la coiffure et pour des raisons
qu'on connaît. Le député de Portneuf a souligné, en
ce qui a trait à la Loi sur les décrets, au moins un aspect qui
me semble important: la prépondérance des décrets par
rapport aux conventions collectives. On sait que plusieurs mesures ont
été prises dans le Code du travail pour empêcher les
associations de gré à gré, ce qu'on appelle les syndicats
de boutique, ce type d'associations convenant souvent avec l'employeur de
conventions collectives inférieures aux décrets. Il n'est pas
clair que la portée des décrets dans ces conditions
prévale sur des conventions collectives qui peuvent exister. Je pense
que c'est une
question qu'on pourrait régler. Je ne sais pas si on doit
profiter du projet de loi 11 pour le faire, mais il me semble que c'est quelque
chose sur lequel il faudrait légiférer le plus rapidement
possible.
En tout état de cause, je voudrais apporter mon appui au projet
de loi 11 tel quel, souligner cependant que je suis fort étonné
que le ministre n'ait pas profité de l'occasion qu'on avait d'apporter
des amendements au Code du travail pour en apporter un qui me semblait
indiqué dans les circonstances. On se souviendra qu'au moment où
nous avons adopté dans cette Chambre le projet de loi 45, qui modifiait
le Code du travail aussi, qui apportait des correctifs au Code du travail, une
des mesures de la loi 45 avait pour effet d'imposer aux organisations
syndicales, à la fois pour l'adoption d'une convention collective comme
pour le vote de grève, de leur imposer un scrutin secret, de leur
imposer le vote à scrutin secret.
On se souviendra qu'à l'époque où ces amendements
au Code du travail nous avaient été présentés, le
ministre du Travail du temps, l'actuel dauphin du gouvernement, nous
présentait cette mesure comme étant une mesure de
démocratie ultime, une condition essentielle qu'il nous fallait
respecter si on voulait que la démocratie s'exerce en milieu syndical.
J'aurais pensé, compte tenu des circonstances, compte tenu du fait
surtout qu'on apprend aujourd'hui que le gouvernement du Parti
québécois, qui s'en va en congrès le 19 janvier prochain
sur une question fondamentale, va amener ses membres à voter à
main levée. J'aurais pensé que le ministre du Travail aurait
modifié le Code du travail pour au moins donner aux organisations
syndicales, en toute équité, le même traitement qu'il va
appliquer dans ses propres instances. (15 h 50)
Est-ce que la démocratie est différente en milieu syndical
et dans un mouvement politique? Est-ce que les conditions qui existaient pour
obliger les organisations syndicales à tenir un vote à scrutin
secret, au moment de l'adoption d'une convention collective ou d'un vote de
grève, ne sont pas aussi valables lorsqu'on se présente au
congrès du Parti québécois?
On sait que l'attaché politique du ministre de l'époque,
qui est maintenant un employé du parti, nous a dit que cette
procédure qu'on allait utiliser était tout à fait conforme
aux statuts et règlements du Parti québécois. Je veux bien
que ça soit conforme aux statuts et règlements, mais je me dis:
Comment se fait-il qu'un parti si hautement démocratique, si visible, si
transparent, n'applique pas aux autres, dans les projets de loi qu'il nous
présente, ce qu'il considère valable et bon pour lui? À
moins -je terminerai là-dessus - que ce que l'on veuille faire, le 19
janvier prochain, c'est d'imposer un vote obligatoire parce qu'on va les faire
voter à main levée. Souvenons-nous de tous les arguments qu'on a
utilisés pour imposer le vote à scrutin secret dans les
organisations syndicales.
M. le Président, je dis que c'est un ou l'autre. Ou bien on
profite du projet de loi 11 pour modifier à nouveau le Code du travail
et laisser les organisations syndicales décider de la façon dont
elles voteront l'adoption de leurs conventions collectives et les votes de
grève selon leurs règlements et leurs statuts, ou encore on
amène le gouvernement, par décence, par obligation morale,
à procéder de la même façon lorsqu'il se
présentera à son congrès.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre du
Travail, votre droit de réplique.
M. Raynald Fréchette (réplique)
M. Fréchette: M. le Président, ce n'est pas,
à proprement parler, un droit de réplique que j'exercerai parce
que je ne veux vous donner que deux ou trois commentaires à la suite des
interventions que nous avons entendues.
Un premier commentaire pour, peut-être, me permettre de dissiper
une ambiguïté qui aurait pu se glisser dans mes remarques
principales, lorsque j'ai fait référence à l'obligation
qu'a le Conseil des services essentiels de donner un avis à des parties
qui ont été assujetties par décret gouvernemental à
la loi sur les services essentiels.
J'ai indiqué que le projet de loi 11 prévoyait qu'il ne
serait plus nécessaire de procéder par avis dans les journaux
régionaux du domicile ou des endroits où se trouvent les
associations patronales ou syndicales.
Je voudrais être clair là-dessus. Je n'ai pas
indiqué que la loi prévoyait que nous allions abandonner la
publication de l'avis à la Gazette officielle, qui va continuer
d'être obligatoire. Quant aux parties elles-mêmes elles seront
convoquées par le Conseil des services essentiels de la façon
qu'il l'a fait, d'ailleurs, depuis qu'il existe.
Un mot seulement sur les observations du député de
Portneuf quant au dossier de la coiffure. Je voudrais essentiellement lui dire
que l'occasion était peut-être choisie pour discuter du dossier,
mais le député de Portneuf va aussi convenir que ce n'est pas
à l'intérieur d'un projet de loi comme celui que nous sommes en
train d'étudier que nous pouvons procéder à des
modifications aux différentes réglementations ou lois auxquelles
il se réfère. Qu'on en parle, ça peut aller, mais
convenons encore une fois que le projet de loi 11, ce n'est pas le moyen qui
devrait être utilisé pour atteindre les objectifs dont il nous
parle. D'ailleurs, il s'est lui-même
référé à cet exercice de l'interpellation
que nous avons tenu ensemble vendredi matin, au cours duquel le
député de Portneuf a, d'une façon très claire,
très précise, fait part de ses préoccupations autant en
rapport avec le statut du coiffeur qu'en rapport avec certaines autres
préoccupations qui procèdent des mêmes mécanismes
réglementaires ou législatifs.
Ce que j'ai dit, vendredi, au député de Portneuf et ce qui
demeure vrai, c'est que le mandat avait été donné,
dès après cette interpellation de vendredi matin, pour que chacun
des points soulevés par le député de Portneuf soit
examiné par les personnes responsables du service des décrets et
que d'ici à l'ajournement des fêtes, nous puissions arriver
à évaluer s'il y a lieu de faire un certain bout de chemin quant
à l'un ou l'autre des aspects qu'a soulevés le
député de Portneuf.
En terminant, M. le Président, permettez-moi de signaler mon
étonnement quant à une des observations du député
de Portneuf à la suite de l'annonce faite par Mme la ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu qui rendait publique
cette décision en vertu de laquelle la réglementation, à
certains égards, disparaîtrait. Ce dont je m'étonne, c'est
de constater que le député de Portneuf n'a pas l'air d'être
satisfait de cet aspect de la décision qui a été
annoncée. Il nous met en garde contre le goût, la tentation ou le
désir de trop déréglementer en cette matière alors
que, lorsqu'on parle du règlement de placement, par exemple, il nous
dit: Vous devriez, à toutes fins utiles, faire sauter le
règlement de placement et qu'on ne soit plus d'aucune espèce de
façon soumis ou contraints à respecter les dispositions qu'on
retrouve à l'intérieur de cette réglementation. Je ne fais
que constater, encore une fois, mon étonnement devant des positions qui,
à première vue en tout cas, m'apparaissent tout à fait et
fondamentalement contradictoires.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le principe du projet de
loi 11, Loi modifiant diverses dispositions législatives en
matière de relations du travail, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Blouin: M. le Président, je propose donc que ce projet
de loi soit envoyé à la commission de l'économie et du
travail qui procédera à son étude détaillée.
Je signale également que cette commission sera présidée
par un président de séance.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de renvoi est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais de
suspendre les travaux pendant deux minutes le temps que mon collègue, le
leader de l'Opposition officielle, puisse venir à l'Assemblée
nationale.
M. Gratton: Le voilà.
Convocation d'une conférence des
leaders
M. Bertrand: D'accord. Alors, nous ne suspendrons pas nos
travaux, M. le Président.
M. le Président, conformément à l'article 242 de
notre règlement qui se lit de la façon suivante: "Le leader du
gouvernement peut demander au Président de convoquer les leaders des
groupes parlementaires pour qu'ils s'entendent sur le moment où le
rapport de la commission devrait être déposé à
l'Assemblée. Le Président fait part à l'Assemblée
s'il y a eu ou non accord des leaders." Sur la base de cet article de notre
règlement, je vous demanderais de convoquer une conférence des
leaders pour 16 heures.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: M. le Président, je veux bien qu'on se
réunisse à votre invitation, mais encore faudrait-il qu'on me
donne au moins cinq minutes pour consulter le porte-parole en matière
d'éducation - puisque je présume que c'est de cela qu'on
discutera à la réunion - pour savoir au moins ce qui s'est
passé en commission parlementaire.
Le Président: 16 h 5, est-ce une heure convenable?
M. Gratton: On pourrait dire 16 h 15. Le Président:
16 h 15, à mon bureau. M. Bisaillon: M. le Président.
Le Président: Oui, M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Sur une question de règlement, M. le
Président. Peu de temps avant l'arrivée du leader du
gouvernement, le leader adjoint a donné avis que le projet de loi 11 qui
venait d'être adopté en deuxième lecture soit
déféré à la commission parle-
mentaire de l'économie et du travail et que cette étude en
commission parlementaire puisse se faire avec un président de
séance. Jusqu'à nouvel ordre, j'avais compris que la commission
de l'économie et du travail pouvait siéger à partir d'un
consentement unanime des membres de la Chambre sur le projet de loi 42, mais je
n'avais pas compris qu'il y avait eu de consentement qui dépassait le
projet de loi 42. Vous savez à quoi je fais référence. La
commission de l'économie et du travail, pour siéger doit
procéder à l'élection d'un président, lequel fait
la demande pour un président de séance. (16 heures)
Comme on voulait étudier la loi 42, on avait consenti à ce
que la loi 42 soit quand même traitée en commission parlementaire
avec la participation d'un président de séance. Je n'avais pas
compris que, de ce fait, on autorisait la commission de l'économie et du
travail à étudier l'ensemble des projets de loi. Je me demande si
cela ne prendrait pas un consentement unanime des membres de la Chambre
à chacune des occasions qu'on aura de faire siéger la commission
de l'économie et du travail?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Effectivement, les propos que vient de tenir le
député de Sainte-Marie reflètent la réalité.
Il y avait entente à l'Assemblée nationale pour qu'en l'absence
d'une procédure d'élection du nouveau ou de la nouvelle
présidente de la commission de l'économie et du travail, nous
puissions tout de même procéder à l'étude
détaillée, à l'analyse détaillée du projet
de loi 42. Il est clair que dans les circonstances, indépendamment de la
motion de déférence qui vient d'être faite par le leader
adjoint du gouvernement, je devrai, à la fois, consulter le leader de
l'Opposition et les députés indépendants pour m'assurer
que nous puissions, dans toute la mesure du possible, recréer les
mêmes conditions pour l'adoption de ces projets de loi.
Le Président: J'attire l'attention des
députés sur le procès-verbal de la séance du 14
novembre. Il est bien dit: Du consentement unanime de l'Assemblée et sur
la motion de M. Bertrand, le projet de loi 42 est envoyé pour
étude détaillée à la commission permanente de
l'économie et du travail. La charge de président de la commission
devant être assumée par le vice-président, malgré
l'article 131 des règles de procédure, et ce uniquement pour la
durée de l'étude de ce projet de loi. En effet, pour que la
commission puisse siéger de nouveau... On m'avait demandé, si ma
mémoire est bonne, une directive à ce sujet que je n'ai jamais
rendue pour l'excellente raison qu'il y a eu un consentement pour faire
siéger la commission sur le projet de loi 42.
Le problème se pose à nouveau pour tout autre projet de
loi. Je laisse le soin au leader et aux députés
indépendants de s'entendre entre eux. À défaut de quoi, il
faudra bien que je statue sur la demande de directive qui m'avait
été faite. Cela étant dit... 16 h 15 à mon bureau?
Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Nous allons parler de valeurs mobilières.
À cet égard, je vous demande d'appeler l'article 6 du feuilleton,
s'il vous plaît.
Projet de loi 7 Adoption du principe
Le Président: Nous commençons donc le débat
sur le principe du projet de loi 7, Loi modifiant la Loi sur les valeurs
mobilières. Je cède la parole au ministre des Finances.
M. Yves Duhaime
M. Duhaime: Nous entreprenons aujourd'hui le débat pour
l'adoption du principe du projet de loi 7, Loi modifiant la Loi sur les valeurs
mobilières. La première chose que je voudrais mentionner devant
l'Assemblée est que je ne m'attendais pas à devoir piloter cette
loi au cours du mois de décembre et que c'est dans des circonstances
où le facteur temps doit être pris en considération que je
m'adresse aujourd'hui à l'Assemblée nationale.
Depuis les derniers jours, j'ai eu l'occasion de prendre connaissance de
ce projet de loi, de discuter avec le président de la Commission des
valeurs mobilières, de même qu'avec le président de la
Bourse de Montréal et, par ailleurs, les hauts fonctionnaires de mon
ministère sont en contact presque quotidien avec l'Association des
banquiers canadiens de même qu'avec l'Association canadienne des
courtiers en valeurs mobilières.
Je voudrais également remercier mes collègues de
l'Opposition qui, je crois, mettent très franchement l'épaule
à la roue pour que l'on puisse - et c'est mon intention - avancer nos
travaux aujourd'hui et procéder ensuite à l'étude article
par article et, dans la mesure où on pourra concilier ce qui nous
apparaît aujourd'hui comme étant encore certains points de
divergence, faire adopter cette loi en troisième lecture avant
l'ajournement des fêtes. C'est peut-être un défi de taille,
mais je pense que ce n'est pas impossible. On peut d'ores et déjà
cerner là où se retrouvent les points de divergence, mais cette
loi m'apparaît... Elle est importante, bien sûr. Ce n'est pas. une
pièce législative de second ordre. Au contraire,
c'est une loi majeure. Notre milieu financier au Québec et, en
particulier celui de Montréal, a besoin de cette loi.
Vous me permettrez, M. le Président, de souligner quelques
données de fond ou encore la trame de fond sur laquelle doivent
s'inscrire ces modifications qu'on apporterait à la Loi sur les valeurs
mobilières. Pendant de très longues années, on parlait
d'espace économique restreint et, par voie de conséquence,
d'espace commercial restreint. Aujourd'hui, avec les ententes internationales
signées lors des dernières négociations du GATT, en
particulier à Genève, qui suivaient le Kennedy Round et le Tokyo
Round, il faut reconnaître une chose, que l'économie continentale
nord-américaine est en train de s'intégrer de plus en plus. S'il
est une donnée fondamentale, c'est de le reconnaître. Ces accords
internationaux qui lient le Canada et les États-Unis sont signés
et, par voie de conséquence, le Québec en fait partie.
Au 1er janvier 1988, les biens et les services produits en
Amérique du Nord pourront circuler sans droit de douane, sans
contingentement, sans barrière douanière. Environ 10% des biens
et des services seront affectés d'un droit quelconque. C'est dans ce
sens que nos entreprises, nos compagnies, nos maisons d'affaires qui ont besoin
des marchés financiers et qui ont accès quotidiennement à
des marchés financiers, doivent être en mesure de le faire sans
être pénalisées. C'est dans ce sens que s'inscrit la
démarche que nous proposons à l'Assemblée nationale
aujourd'hui par une série d'amendements: faire en sorte que le
marché financier de Montréal soit de plus en plus efficace, de
plus en plus concurrentiel, de plus en plus moderne et tourné vers
l'avenir. Tout récemment, cela remonte à un an ou deux, on parle
de plus en plus de faire de Montréal un grand centre bancaire
international, un grand centre financier international. Je voudrais dire
aujourd'hui que non seulement je suis parfaitement d'accord avec cette
approche, mais nous mettrons tout en oeuvre pour soutenir cette
démarche.
M. le Président, le projet de loi n'est pas très long ni
très compliqué. 11 comporte 66 articles dont un bloc majeur qui
est la refonte complète du titre IV portant sur les offres publiques;
vous le retrouvez dans la loi aux articles 110 à 147.23.
Il y a bien sûr d'autres modifications. Il faut se rappeler aussi
que les autres modifications devraient normalement nous indiquer une
volonté d'aller vers une meilleure harmonisation avec d'autres
marchés financiers avec qui nous sommes en concurrence et devraient
aussi souligner la volonté du gouvernement de voir
déréglementer de façon efficace ce qui pourrait nous
apparaître comme étant des entraves inutiles à la
liberté de faire commerce sur le marché des valeurs
mobilières. Si nous avons connu autant d'effervescence sur le
marché de Montréal depuis les dernières années,
sans que l'on veuille prendre tout le crédit, il faut souligner que la
création de toute pièce d'un Régime
d'épargne-actions par notre gouvernement a été un facteur
très important des effervescences que nous avons connues sur le
marché de Montréal d'une façon plus soulignée
durant les mois de fin d'année. (16 h 10)
Le Régime d'épargne-actions, c'est une chose. Il y a aussi
les actions accréditives qui constituent un marché
intéressant, également les sociétés en commandite
qui ont vu élargir leur part sur ce marché. C'est donc dire, M.
le Président, que ce projet de loi qui, pour certains, pourrait
paraître venir très rapidement puisque c'est en 1982, au mois de
décembre, à peu près jour pour jour, il y a deux ans, que
l'Assemblée nationale avait voté une nouvelle Loi sur les valeurs
mobilières, mais j'ai toujours pensé aussi que, dans les lois que
nous votions ici à l'Assemblée nationale, il nous fallait avoir
des lois qui puissent résister solidement à l'épreuve du
temps. Je n'ai pas eu le temps de relire la transcription du Journal des
débats de décembre 1982, mais la nouvelle Loi sur les valeurs
mobilières, qui existe maintenant depuis deux ans, mérite
d'être révisée et en particulier sur l'aspect des offres
publiques.
Je dois dire qu'en ce qui concerne la réglementation des offres
publiques, il faut souligner que la Commission des valeurs mobilières du
Québec a fait un travail efficace, un long travail, un méticuleux
travail de consultation et de pourparlers avec les autres commissions de
valeurs mobilières, qui ont des pouvoirs de réglementation sur
d'autres marchés financiers au Canada, en particulier, mais je sais
aussi que des consultations ont été faites avec les
marchés financiers américains et, dans le domaine des offres
publiques, donc, d'opérations qui se limitent très rarement
à notre seul territoire, il est souhaitable que nous visions, sinon une
harmonisation totale, du moins une uniformité dans la
réglementation aussi bien pour les porteurs de la société
visée par l'offre publique que pour l'initiateur qui fait l'offre. En
effet, le manque d'uniformité dans la réglementation des offres
publiques risque d'inciter l'initiateur à ne pas faire l'offre sur
certains marchés de manière que les porteurs qui oeuvrent sur ces
marchés soient laissés pour compte et cela pourrait être le
cas pour le Québec d'une façon particulière. Quant
à l'initiateur, l'uniformité lui facilitera les choses puisqu'il
n'aura pas à prendre en compte cinq, dix, huit réglementations
distinctes et, de ce côté-là, c'est une nette
amélioration que nous visons.
Nous espérons, bien sûr, que les commissions des valeurs
mobilières, en particulier celle de l'Ontario qui a travaillé
étroitement avec la Commission des valeurs mobilières de
Québec... La Commission des valeurs mobilières de l'Ontario doit
faire des représentations au gouvernement ontarien pour que
l'harmonisation vienne à jour presque en parallèle, sinon
simultanément.
Il convient ici de souligner le rôle important qu'a joué le
Québec dans l'élaboration de cette réglementation
uniforme. Ce sont les innovations qui ont été introduites ici
dans notre propre loi, en 1982, qui ont amorcé la remise en cause de la
réglementation des offres publiques dans l'ensemble canadien. La
réflexion a été alimentée par deux études,
le rapport d'un comité d'experts ontariens et le mémoire
présenté par un comité formé par les professionnels
des valeurs mobilières au Canada. Ce comité était
présidé par M. Pierre Lortie, président de la Bourse de
Montréal. Donc, les Commissions des valeurs mobilières du
Québec, de l'Ontario, de l'Alberta, de la Colombie britannique se sont
réunies à de très nombreuses reprises et ont mis au point
une certaine formule de réciprocité. Elles ont mis au point une
réglementation des offres publiques que nous retrouvons ici, dans le
projet de loi. Chacune des commissions s'est engagée - je le disais tout
à l'heure - à entreprendre des démarches auprès de
leur gouvernement respectif et je sais qu'un projet de loi similaire, du moins
pour la partie concernant les offres publiques, est actuellement en instance
devant l'Assemblée législative à Toronto.
Pour ce qui touche maintenant aux autres modifications, ce n'est pas
parce que nous avions attendu presque 30 ans avant de modifier, il y a deux
ans, la Loi sur les valeurs mobilières qu'il nous faudrait encore
laisser passer dix ans, quinze ans ou vingt ans avant d'apporter les
modifications diverses que vous retrouvez en particulier à partir des
articles 37 jusqu'à la fin et dans les 35 premiers. Nous voulons tenir
à jour cette loi, nous assurer que nous pourrons suivre
l'évolution du marché financier, en particulier à
Montréal, afin que nos hommes d'affaires et nos chefs d'entreprise
puissent bénéficier au maximum de l'accès au marché
des valeurs mobilières.
Quelques mots pour ce qui est de la réglementation des offres
publiques. Le comité d'experts ontariens nous avait proposé
d'abaisser à 10% les droits de vote, le seuil à partir duquel une
offre publique devient obligatoire. C'était la solution
déjà retenue dans le projet de loi. 176, présenté
à la Législature de l'Ontario en 1982 mais qui ne fut jamais
adopté. C'est aussi sensiblement la même chose qui avait
été retenue dans la Loi sur les sociétés
commerciales canadiennes. Au contraire, le mémoire du comité,
dirigé par M. Lortie, de la Bourse de Montréal,
préconisait le maintien de ce seuil à 20% tout en introduisant
une déclaration à 10%.
En fin de compte et après consultation, les commissions se sont
entendues sur une formule de compromis qui est la suivante: si le seuil est
maintenu à 20%, il est néanmoins abaissé puisqu'il n'est
plus défini par rapport à l'ensemble des titres comportant le
droit de vote, mais par rapport à l'ensemble des titres de la
catégorie comme dans la Loi sur les sociétés commerciales
canadiennes. D'autre part, la proposition d'une déclaration au moment
où elle franchit le seuil de 10%, faite par le comité Lortie, a
été retenue.
En ce qui concerne la dispense pour les cessions de blocs, les autres
marchés financiers, les autres commissions immobilières au Canada
se sont ralliées à la proposition du Québec. Au lieu du
mécanisme de l'offre ultérieure, si vous aimez mieux, le
"follow-up offer", qu'on trouve dans la loi ontarienne, les cessions de blocs
faites par un nombre restreint de porteurs ne donnent pas lieu à une
offre publique dans la mesure où l'on respecte une marge de variation de
15% par rapport au cours du marché.
La seule modification à intervenir dans le domaine consiste en
une diminution du nombre de personnes de qui on peut acquérir des titres
sous le régime de cette dispense. De 14 dans la loi actuelle, ce nombre
passerait à 5 dans les modifications que contient le projet de loi. En
outre, deux nouvelles dispenses sont proposées: l'une dans le cas d'une
offre qui s'adresse surtout à des porteurs non québécois
et l'autre dans le cas d'une offre portant sur les titres d'une
société comportant un nombre restreint d'actionnaires. Sous
réserve des dispenses, la procédure de l'offre publique
prévue par la loi s'appliquerait dès lors que l'initiateur compte
acquérir des titres d'au moins un porteur rattaché au
Québec. L'offre lierait donc l'initiateur à l'égard de
tous les porteurs de titres de la catégorie visée par l'offre
pour autant qu'il réside au Québec, soit d'après l'adresse
inscrite dans les registres de la société visée, soit dans
les faits.
Cependant, l'obligation de transmettre l'offre serait limitée,
dans le cas de porteurs non inscrits dans les registres, à ceux qui en
font la demande. Cette mesure permettra au porteur québécois dont
les titres sont inscrits au nom d'un courtier qui réside à
l'extérieur du Québec de bénéficier de toute offre
faite au Québec. Un point important est celui de la durée
minimale de la période de réflexion laissée au porteur de
titres de la société visée, qui serait portée de
dix jours à vingt et un jours. Cette extension paraît
nécessaire pour assurer que, dans tous les
cas, les porteurs aient le temps de considérer les documents
d'information établis à leur intention par le conseil
d'administration de la société visée. En outre, le droit
de révocation du dépôt des titres renaîtrait si
l'initiateur, au terme de 45 jours, n'en a pas encore pris livraison.
Voilà, en quelques mots, pour ce qui est de l'essentiel des
modifications au titre IV du projet de loi concernant les offres publiques. (16
h 20)
Quant aux autres modifications que contient le projet de loi, elles sont
essentiellement orientées dans le sens d'une simplification de la
réglementation. Même si cette affirmation ne paraît pas
d'une évidence flamboyante à tous ceux qui ont parcouru le projet
de loi, c'est l'intention du législateur de simplifier la
réglementation. Par exemple, à la demande des professionnels, le
projet de loi propose de donner une consécration législative
à l'inscription en compte. Ceci est un changement majeur
souhaité, voulu et important. Ce nouveau système permettra la
cession ou le nantissement de titres par le jeu de virements dans les comptes
tenus par une chambre de compensation. L'effet de ces opérations
vis-à-vis des tiers sera mieux assuré si la technique repose sur
un texte exprès ou explicite.
Le projet de loi propose également l'introduction du prospectus
préalable, une innovation inspirée de la pratique
américaine. Ce régime permet aux émetteurs importants,
dont les titres sont largement diffusés, de faire viser le prospectus
général de sorte qu'il leur suffira, au moment du placement, de
déposer auprès de la Commission des valeurs mobilières un
supplément ou une version mise à jour du prospectus
préalable. Il est également proposé de scinder en deux la
dispense de prospectus prévue à l'article 47 de la loi actuelle.
Cette dispense serait maintenue telle quelle pour les capitaux de lancement
puisqu'il s'agit de faciliter le financement d'une PME; au contraire, dans le
cas des valeurs refuges, la dispense ne serait accordée qu'en
contrepartie de l'établissement d'une notice d'offre fournissant aux
épargnants l'information voulue pour prendre leur décision.
Un nouvel article supprime le bénéfice des dispenses de
prospectus dans le cas du placement de titres par un émetteur qui
contrevient à la loi ou par une personne qui a acquis ces titres dans le
cadre d'un placement irrégulier. Cette mesure nous paraît
nécessaire pour empêcher que des personnes qui sont dans une
situation irrégulière ne profitent de dispenses qui sont
automatiques.
Certaines valeurs placées sous le régime d'une dispense de
prospectus sont admises à une dispense définitive de prospectus
lorsqu'elles ont été conservées pendant un certain temps
par la personne qui les a souscrites. À l'heure actuelle, ces
délais sont de 6, 12 ou 18 mois, selon la qualité des titres en
cause. Le projet de loi propose de faire disparaître le délai de
18 mois et de ne conserver que les délais de 6 mois et de 12 mois, ce
qui constitue un assouplissement important par rapport aux règles en
vigueur sur les autres marchés financiers au Canada.
Une autre innovation importante consiste en la faculté offerte
à l'émetteur qui satisfait aux obligations d'information
établies par une autre autorité législative d'être
considéré ici comme un émetteur assujetti et, avec
l'autorisation de la commission, de présenter un prospectus
simplifié. Voilà une autre mesure de nature à inciter les
émetteurs de l'extérieur du Québec à venir faire
des placements sur notre propre marché financier.
Le projet de loi apporte des précisions importantes en
matière d'utilisation d'information privilégiée. Pour
réprimer efficacement l'exploitation de l'information
privilégiée, il importe d'interdire non seulement les
opérations sur les titres d'émetteur, mais aussi sur les titres
reliés à d'autres émetteurs et celles sur les options ou
sur les marchés à terme.
En terminant, je voudrais souligner que la Commission des valeurs
mobilières du Québec a mis au point le titre IV quant aux offres
publiques et je suis à peu près certain que les consultations qui
ont été conduites par la Commission des valeurs mobilières
du Québec avec leurs correspondants en Ontario, en Colombie britannique,
en particulier, devraient connaître un suivi dans le sens que ces autres
Parlements devraient être saisis de projets de loi qui iraient dans le
même sens que ce que nous faisons ici.
Je voudrais, en terminant, dire un peu ce que j'indiquais à
l'ouverture de ce débat. Je souhaite que, dans les jours qui viennent,
nous puissions terminer les consultations entreprises. J'admets que les
délais sont peut-être fort courts, le projet de loi a
été déposé le 15 novembre, nous sommes aujourd'hui
le 12 décembre. Pour des spécialistes des valeurs
mobilières qui oeuvrent quotidiennement dans ce secteur des affaires, ce
projet de loi ne devrait pas créer de mystère et je souhaiterais
que dans les jours qui viennent - j'en fais l'ouverture, M. le Président
- nous puissions tenter de voir avec ceux qui sont les plus directement
visés par les amendements que comporte ce projet de loi, si nous pouvons
faire un accord sur certains aspects du projet de loi qui m'apparaissent pour
l'instant créer un problème. Par exemple, cette question de
l'arbitrage obligatoire; l'aspect de l'ordre non sollicité et sa
réglementation que vise le projet de loi; l'aspect de l'harmonisation
des
délais de divulgation; certaines définitions que contient
le projet de loi. Ce n'est pas là une liste exhaustive mais si
l'Opposition, comme le gouvernement, souhaite que ce projet de loi soit
adopté dans le courant de la semaine prochaine, je fais l'ouverture que
nous pourrions tenir des rencontres, voir si on ne peut pas nous entendre
d'abord entre nous, apporter les amendements nécessaires et, mon Dieu!
si l'entente cordiale se fait, nous pourrions adopter le projet de loi avant
Noël.
Ce que je dis c'est que si cette entente ne se fait pas avant Noël,
je demanderais quand même à l'Opposition de voter avec nous sur le
principe du projet de loi en deuxième lecture. Nous pourrions
déférer ensuite le projet de loi en commission parlementaire,
nous réunir entre députés et étudier le projet de
loi article par article ou encore recevoir l'Association des banquiers
canadiens, recevoir l'Association canadienne des courtiers en valeurs
mobilières, la Bourse de Montréal. On fera ça en janvier
ou en février. Il ne m'apparaît pas y avoir suffisamment de
problèmes pour retarder de deux ou trois mois l'adoption de ce projet de
loi.
Voilà ce que je voulais vous dire là-dessus, M. le
Président. J'inviterais l'Assemblée à adopter le principe
du projet de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Merci, M. le Président. D'abord le ministre a
parlé du lourd héritage qu'il vient de recevoir de son
prédécesseur, M. Parizeau. On convient avec lui qu'il a raison.
Il est à la fois obligé d'apprendre les finances publiques,
l'économie où il y a toujours quelques petits pas à
franchir et maintenant les institutions financières. Il a mis de
côté le Vérificateur général, je pense,
jusqu'aux calendes grecques comme son prédécesseur, mais il
n'était pas capable d'échapper à sa responsabilité
pour le projet de loi sur les valeurs mobilières.
Même s'il n'y a que 60 articles, je conviens avec lui que c'est un
projet de loi qui est un peu compliqué et qu'on doit procéder
avec beaucoup de précautions parce qu'il y a des sous impliqués
pour beaucoup de Québécois.
Je dois lui dire d'abord que, comme lui, on a constaté que c'est
une loi pour modifier la loi, pour la rendre plus conforme aux lois des autres
provinces du Canada. Il ne faut jamais oublier que cette juridiction dans les
valeurs mobilières c'est une juridiction provinciale, surtout pour
qu'elle concorde avec celle de l'Ontario qui est notre plus grande
concurrente.
Je pense que c'est sûr aussi que c'est l'aspect des offres
publiques d'achat qui a attiré de loin le plus d'attention, parce que
c'est à peu près pour la moitié du projet de loi.
Je pense que le ministre veut que le projet de loi soit adopté
avant Noël et on est d'accord avec lui en principe. On doit essayer de le
réaliser parce que je pense que ce sera bon pour le Québec. Quant
à moi je suis prêt à collaborer avec le ministre jusqu'au
bout parce qu'il m'a dit en privé, et aujourd'hui en public, son
désir de rendre la Loi sur les valeurs mobilières la plus
concurrentielle, la plus conforme possible avec celle de l'Ontario. (16 h
30)
Je conviens avec lui que c'est essentiel. C'est un endroit, je pense,
où la spécificité du Québec n'a aucune place. On
est ici devant un projet de loi pour régler une situation où,
dans le passé, la Commission des valeurs mobilières a trop
essayé de développer un modèle de société ou
une petite partie de ce modèle de société conforme
à certaines idées qu'elle avait. Elle avait oublié
d'accepter le fait qu'on vit à l'intérieur d'un ensemble
économique canadien et que la conformité avec la loi de l'Ontario
qui détient, même aujourd'hui, 75% du marché, est
essentielle si notre Bourse veut prospérer et si on veut permettre aux
actionnaires, aux acheteurs des actions du Québec de transiger à
la Bourse de Montréal plutôt qu'à la Bourse de Toronto.
Nous sommes d'accord, en principe, pour collaborer étroitement avec le
ministre, comme on l'a fait récemment d'ailleurs, et on espère
aussi que cela pourra être réglé.
Je vais revenir sur le processus dans quelques minutes, mais avant de
passer au projet de loi, je voudrais parler brièvement de ce
marché des valeurs mobilières au Québec. Il faut constater
que ce qui était, il y a quelques années, un loisir ou une
occupation pour les privilégiés de notre société,
est devenu essentiellement l'affaire de tout le monde. Il y a des centaines de
milliers de Québécois qui sont aujourd'hui les détenteurs
d'actions de compagnies publiques. La Bourse de Toronto, qui est la plus grande
au Canada, transige pour une valeur de 35 000 000 000 $ par année. Notre
Bourse de Montréal qui devient de plus en plus importante va transiger,
cette année, pour au moins 7 000 000 000 $. Il y a au moins 400
compagnies et au-delà de 800 titres inscrits à la Bourse de
Montréal. Les Québécois ont un grand choix. Cependant, il
faut accepter qu'il y a presque deux fois plus de titres qui sont
transigés à Toronto, et cela fait partie du défi de notre
Bourse de faire en sorte qu'ils soient tous transigés à notre
Bourse de Montréal éventuellement.
De toute façon, les marchés boursiers sont devenus un peu
l'affaire de tout le
monde aujourd'hui. Au Québec, on a fait des progrès
très importants depuis quelques années. Le ministre les a
attribués au système REA qui a été
développé par son prédécesseur. Je pense que la
plupart des Québécois, surtout ceux qui connaissent le domaine,
seront plus portés à donner le crédit pour ce
développement à un certain nombre d'hommes et de femmes qui
travaillent à la Bourse de Montréal, dans le domaine du courtage
immobilier et dans l'industrie, aux industriels eux-mêmes, dans le
secteur privé, qui ont pris la relève ces dernières
années et qui sont vraiment les personnes responsables de ce
développement. Ce n'est pas le secteur public, ce n'est pas le ministre
des Finances, ce n'est pas une loi de l'Assemblée nationale qui a
été le moteur de ce développement rapide qu'on a connu
dernièrement à Montréal.
Pour ce qui est de la Bourse de Montréal, depuis 1981, quand M.
Lortie en est devenu le président, on a vu beaucoup de changements. La
constitution de la Bourse de Montréal a été refaite. Il y
avait des marchés très importants dans les options qui
étaient développés. La Bourse de Montréal
était devenue une des plus automatisées en Amérique du
Nord. Des accords internationaux ont été faits et quelques-uns
sont très importants. La Bourse du Québec a accepté le
défi de la concurrence. Je le répète, cela n'a rien
à faire avec le gouvernement si cela s'est réalisé. Le
marché s'est agrandi. Le nombre de compagnies québécoises
qui sont publiques aujourd'hui est devenu plus important. On peut acheter
aujourd'hui au Québec non seulement les titres traditionnels comme
Alcan, la Banque Royale, la Banque Nationale et Domtar, mais on a droit aussi
d'acheter des actions dans les compagnies comme Papier Cascades, Ivaco,
Bombardier, Provigo, des compagnies québécoises qui se sont
développées. Si vous voulez un symbole de cette croissance, de
cet intérêt accru, vous n'avez qu'à regarder Le
téléjournal tous les soirs. Dorénavant, vous auriez le
droit non seulement de savoir si les Nordiques ont battu les Canucks de
Vancouver, mais vous avez le droit, même aujourd'hui, de savoir ce qui
s'est passé aux Bourses de Montréal, Toronto et New York au
téléjournal. Si les gens des médias électroniques
s'en occupent, c'est parce qu'ils savent que c'est quelque chose qui est
très important et très intéressant. Je pense que le leader
veut faire une déclaration, alors je m'arrête.
Le Président: C'est le leader qui souhaite que vous
arrêtiez, M. le député, parce que c'est à moi de
faire part à la Chambre qu'il n'y a pas eu accord à la suite de
la conférence que nous avons eue en vertu de l'article 242.
Motion de clôture
M. Bertrand: Je remercie le député de
Notre-Dame-de-Grâce de me permettre, relativement à la
conférence qui a été demandée par le leader du
gouvernement, qui a été convoquée par le président
de l'Assemblée nationale et qui a réuni les leaders des deux
formations politiques à l'Assemblée nationale, le leader du
gouvernement et le leader de l'Opposition, de procéder en vertu de
l'article 244, puisque vous venez d'indiquer qu'en vertu de l'article 242, il
n'y a pas eu accord, entente entre les leaders des formations politiques quant
à un processus qui nous permettrait d'aboutir à l'adoption du
projet de loi 3 avant le 21 décembre prochain. En conséquence, me
prévalant de l'article 244 de notre règlement, je voudrais
présenter la motion suivante: Que les travaux de la commission de
l'éducation et de la main-d'oeuvre sur le projet de loi 3, Loi sur
l'enseignement primaire et secondaire public, se terminent immédiatement
et que le rapport soit déposé dès l'adoption de la
présente motion.
Je voudrais simplement indiquer, pour la bonne compréhension des
membres de l'Assemblée nationale, que ce nouveau type de libellé
de la motion, par rapport à celle qui existait dans le passé,
avec les mots "se terminent immédiatement" ne veut pas indiquer,
n'indique pas que la commission met en ce moment fin à ses travaux, mais
qu'elle mettra fin à ses travaux quand la motion sera
adoptée.
Cette motion que je présente à ce moment-ci, motion sans
préavis, ne peut être discutée qu'à la séance
suivante et forcément elle suivra son cours, c'est-à-dire qu'elle
sera débattue à l'Assemblée nationale du Québec. Si
nous procédons à l'adoption de cette motion, c'est à ce
moment seulement que la commission de l'éducation et de la main-d'oeuvre
qui étudie le projet de loi 3 mettra fin à ses travaux.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, en espérant que vous n'avez pas perdu le fil
de votre idée.
Projet de loi 7 M. Reed Scowen (suite)
M. Scowen: Non, je ne l'ai pas perdu. Je vais poursuivre
exactement où j'en étais quand le leader m'a interrompu. J'avais
terminé une partie de mon discours dans lequel je voulais
démontrer que ce projet de loi qui n'a pas suscité beaucoup
d'intérêt peut avoir des implications pour beaucoup de monde au
Québec. Il y a des centaines de milliers et indirectement des millions
de Québécois qui détiennent des actions ordinaires et qui
sont protégés et réglementés effectivement par
ce
projet de loi. C'est quelque chose qui est en train de devenir de plus
en plus intéressant pour beaucoup de monde.
Il y a un autre phénomène qu'il faut signaler, qui est
important pour comprendre le contexte dans lequel on adopte ce projet de loi.
L'industrie de courtage évolue très rapidement non seulement
quant à ses marchés, mais quant à ses structures. Je peux
mentionner deux ou trois aspects seulement pour illustrer ceci.
Premièrement, il y a toute cette question de décloisonnement. Si
l'Association canadienne des banquiers, par exemple, a un intérêt
dans ce projet de loi, c'est parce que le rôle des banquiers et le
rôle du courtage mobilier commencent à se rapprocher d'une
façon très importante. On a parlé, au mois de mai, de
décloisonnement des activités des compagnies d'assurances. Ce
projet de loi n'a pas pour but d'aller dans ce sens en ce qui concerne le
courtage mobilier. On a remarqué pendant les discussions qu'on a eues
avec des compagnies, des banques et même avec des courtiers, que cela
touchait le projet de loi à plusieurs égards. Il est important de
le constater parce qu'à l'étude article par article cette
question va revenir. (16 h 40)
Nous sommes aujourd'hui dans une situation où plusieurs de nos
compagnies d'assurances ont commencé à acheter des actions, des
parts importantes dans des compagnies de courtage mobilier: La Laurentien-ne,
Geoffrion Leclerc, par exemple, et il y en a d'autres. Il y a certainement des
liens d'affinité ou d'amitié entre l'Industrielle et
Lévesque Beaubien. Aux États-Unis, c'est même allé
plus loin. La compagnie Sears et ses magasins sont maintenant courtiers en
valeurs mobilières aux États-Unis. À Toronto, il y a la
Toronto Dominion Bank qui a commencé à transiger les valeurs
mobilières d'une certaine façon et la Banque Nationale est aussi
impliquée dans quelques démarches qui ont suscité des
règlements et des décisions de notre Commission des valeurs
mobilières dans ces derniers jours.
Il y a aussi toute la question de la déréglementation des
commissions qui a été effectuée récemment. Il y a
la situation très importante de l'automatisation de l'industrie. Un
élément très important qui sera touché,
j'espère, par la loi, c'est la dématérialisation des
titres. Cela veut dire qu'on va effectivement essayer de trouver les moyens de
permettre le transfert des titres sans être obligé de passer les
certificats de papier à gauche et à droite partout en
Amérique du Nord, quelque chose qui va devenir de plus en plus difficile
vu que le nombre de personnes qui ont des actions devient de plus en plus
important.
Il y a aussi l'internationalisation de ces marchés boursiers.
Aujourd'hui, il est possible de transiger 24 heures par jour sur un certain
nombre d'actions, sur l'or et certaines monnaies. Toutes ces choses ont pour
effet de situer le projet de loi dans un cadre exceptionnellement complexe et
exceptionnellement important, dans le sens que si on fait des erreurs lors de
l'étude article par article, on risque de créer des
problèmes non seulement pour un courtier mais pour un tas d'autres
personnes et institutions.
Passons maintenant, M. le Président, au projet de loi comme tel.
Je le répète, la Loi sur les valeurs mobilières, c'est une
loi provinciale. Chaque province a le droit de légiférer dans ce
domaine. Notre loi, qui existe depuis longtemps, a à peu près
cinq objets principaux. Premièrement, la loi a pour effet de
régler les appels publics à l'épargne. Effectivement, elle
définit ce qu'on doit mettre dans un prospectus pour s'assurer que les
acheteurs potentiels sont bien informés.
Une deuxième partie touche l'information que les
détenteurs d'actions ont le droit de recevoir, sur une base
régulière, des compagnies.
Une troisième section touche les règles qui
définissent les courtiers et les conseillers en valeurs qui peuvent agir
et quelles sont les règles du jeu qu'ils doivent respecter.
Une quatrième section de notre loi avait pour effet de
créer la Commission des valeurs mobilières, l'organisme
d'autorégle-mentation de l'industrie, et de définir son
rôle.
Finalement, un titre a pour effet de contrôler ce qu'on appelle
les offres publiques d'achat. C'est cette cinquième partie qui est la
plus affectée. L'objet principal de notre projet de loi aujourd'hui est
de modifier cette cinquième partie.
J'espère que le ministre et moi-même nous nous entendrons
au moins sur ce titre parce que ce sera le centre de nos discussions à
l'étude article par article. L'objectif, c'est l'harmonisation, la
concordance avec nos voisins de l'Ontario qui détiennent la majeure
partie du marché. Si on s'entend aujourd'hui sur ce principe - je pense
qu'on s'entend et j'espère que le ministre va le répéter
dans sa réplique - je suis persuadé qu'on peut adopter le projet
de loi assez rapidement. Il faut éviter les petits débats
stériles sur les points qui causent seulement des problèmes pour
les marchés.
Je vais lui donner un exemple qu'il connaît déjà,
mais je vais le répéter parce que c'est seulement un exemple:
c'est la question des délais dans les rapports trimestriels et annuels
qui sont soumis par les compagnies à la fin de leur exercice pour
informer les actionnaires des résultats financiers pour l'année
précédente et le trimestre précédent. En Ontario,
par exemple, le rapport annuel doit être déposé pas plus
loin que 140 jours après la fin de l'exercice. Pour des raisons
métaphysiques,
quant à moi, le Québec a décidé que ce
n'était pas 140 jours, mais 90 jours. Une compagnie qui est inscrite
à la Bourse de Toronto où elle fait probablement 80% de ses
activités est invitée par le président de la Bourse de
Montréal à s'inscrire également à Montréal
pour que les Québécois puissent acheter dans leur propre
marché et elle dit: Bon! C'est une bonne idée. On veut le faire,
mais elle se trouve devant un article de la loi qui dit: Si vous vous inscrivez
à Montréal, vous êtes obligée de nous donner votre
rapport annuel, pas 140 jours après la fin de votre exercice, mais 90
jours.
Le système de cette compagnie est organisé par les
règles de Toronto et elle dit: Je n'ai pas l'intention de changer en
entier mon comportement et mon administration, simplement pour faire plaisir
à la Bourse de Montréal. Je n'ai pas besoin de la Bourse de
Montréal. J'aimerais être inscrit là, mais si vous
êtes ici pour... Si vous dites que vous avez toutes sortes de
règles qui sont différentes de celles de Toronto, je veux rester
à Toronto. Et le monsieur de Montréal ou la dame de Sherbrooke
qui veut acheter une action va simplement faire acheter cette action à
la Bourse de Toronto. Ce n'est pas compliqué. Le courtier peut le faire
également sous l'une ou l'autre. Si on s'entend, le ministre et moi,
à savoir que notre objectif est de mettre fin à ces petites
différences qui se sont développées pour toutes sortes de
raisons - et on ne va pas s'interroger sur les raisons, on va laisser de
côté le passé et on va essayer de créer une
concordance pour permettre à notre Bourse d'encourager les courtiers
à Montréal à favoriser la Bourse de Montréal - on
n'aura pas de problème avec le projet de loi, j'en suis
persuadé.
Quant au projet de loi comme tel, on va en parler brièvement,
mais avant d'en discuter, j'aimerais seulement parler deux minutes, au
ministre, au sujet du processus qui a été utilisé par son
prédécesseur. Je ne le blâme pas. Ce n'est pas lui qui est
responsable des dernières semaines dans le développement de ce
projet de loi, mais on est aujourd'hui devant certains petits accrocs. Un
problème, c'est que le projet de loi que nous avons devant nous, comme
le ministre le sait très bien - il ne l'a pas dit, mais il le sait - ce
n'est pas le projet de loi qu'on va adopter. On a déjà au moins
une trentaine d'amendements importants pour un projet de loi qui comporte
à peu près 60 articles et ce sont des amendements qui ont
été proposés, soit par la Bourse, soit par la Commission
des valeurs mobilières, soit par l'Opposition, soit par, plus
récemment, l'Association canadienne des banquiers. Ces amendements ont
été proposés après qu'un avant-projet de loi eut
été soumis et je pense que dans le cas d'un projet de loi qui a
un intérêt limité - c'est une loi spécialisée
- ce n'est pas mauvais en soi que le ministre essaie de consulter les
intéressés, qu'il donne l'avant-projet de loi, par exemple,
à l'Association des courtiers en valeurs et à la Bourse. Mais je
ne serai jamais capable de comprendre pourquoi le ministre n'a pas donné
l'avant-projet de loi à l'Association canadienne des banquiers, parce
que si on se trouve aujourd'hui dans une situation où les banquiers
arrivent devant nous à peine 24 heures avant le débat avec toutes
sortes de problèmes qu'ils soulèvent et ils disent qu'ils n'ont
pas été consultés, il faut admettre qu'ils ont raison en
quelque sorte. C'est sûr que les banquiers sont impliqués ou
affectés par ce projet de loi et j'espère que le ministre va
essayer dorénavant de trouver une meilleure façon de s'assurer
que le milieu, tous les intéressés soient consultés. Une
façon de le faire - je le sais très bien -ce sont les audiences
publiques, une invitation à tout le monde de venir. J'ai toujours
pensé que c'est la meilleure façon. Comme ça, vous ne
courez jamais le risque de voir le jour où quelqu'un dira: Je n'ai pas
été invité à une consultation. Mais si vous
décidez de ne pas aller vers le public, que vous vous assuriez au moins
que vous avez envoyé les documents et que vous avez consulté
toutes les personnes qui peuvent y avoir un intérêt. (16 h 50)
Ceci étant, je suis persuadé, et j'espère, que les
problèmes, soulevés par l'Association canadienne des banquiers,
peuvent être réglés dans les prochaines heures et dans les
prochains jours. Si c'est le cas, bien sûr, on va adopter le projet de
loi avec plaisir.
L'aspect principal du projet de loi est l'amendement du titre "Les
offres publiques d'achat". Je veux en parler brièvement. Les offres
publiques d'achat font l'objet de règles particulières dans la
loi parce qu'on considère que lorsqu'une personne ou un groupe de
personnes désirent acquérir une part significative du droit de
vote d'une corporation, toute prime que cet acquéreur est disposé
à payer, en raison du fait qu'il détient un plus grand nombre de
votes, devrait être répartie d'une façon
équilibrée, équitable entre les actionnaires de la
corporation, sur la base du prorata, si vous voulez. Par conséquent,
celui qui détient un pourcentage spécifique d'actions votantes du
capital-actions ne peut en acquérir d'autres, sauf exception
prévue par la loi, sans procéder à une offre formelle
d'achat à tous les détenteurs de sous-titres d'actions
effectués au prorata du nombre d'actions de chacun de ces
détenteurs. C'est l'idée de base.
Le projet de loi, dans notre esprit, a pour effet de déterminer
à partir de quel moment un actionnaire détient une part
suffisante des actions votantes. Le ministre a
décrit un peu la définition qui est prévue dans la
loi pour justifier qu'on lui impose de procéder à une offre
publique d'achat. La loi doit et va certainement aussi établir la marge
de variation permise entre le prix auquel peuvent être acquises des
actions dans le cas de l'application d'une dispense et le cours du
marché. Il y a deux ou trois articles qui le mentionnent.
Tous ces effets étant dans le projet de loi sur les offres
publiques d'achat, nous ne pouvons que nous déclarer pour la poursuite
d'un tel objectif. En effet, dans un commerce effectué pour sa quasi
totalité sur une échelle nationale et même internationale,
l'existence de règles particulières pour le Québec
entraînent inévitablement une diminution de la participation du
Québec et surtout de la participation de la Bourse de
Montréal.
Dans un contexte de juste concurrence, nos marchés financiers
doivent être tout aussi accessibles que ceux des autres provinces
canadiennes, sans comporter des contraintes additionnelles, tout en
étant structurés d'une façon à assurer une
protection optimale des épargnants. L'idée de l'harmonisation des
règles concernant les offres publiques d'achat est une mesure qui a
été reçue par tous les intervenants. Jusqu'ici, je pense
qu'on fait l'unanimité là-dessus. Il y a des modifications qui
seront apportées et qui vont certainement dans ce sens.
En général, on est d'accord sur les principes et les
articles dans la section qu'on appelle les offres publiques d'achat. Il y a
quand même certaines modifications qui sont proposées et sur
lesquelles nous ne sommes pas d'accord. Je vais souligner simplement les plus
importantes.
Premièrement, et je l'ai déjà mentionné,
dans un objectif d'harmonisation totale, nous sommes en désaccord avec
toute disparité pouvant demeurer entre les législations
québécoise et ontarienne. Le projet de loi fait toujours
certaines disparités. Elles sont plutôt d'ordre technique. Sans
les mentionner ici, nous désirons faire connaître notre dissidence
sur ces articles qui ne sont pas en concordance, s'il en reste.
Deuxièmement, il y a bien sûr cette question que j'ai
soulevée, il y a quelques minutes. Ce sont les délais dans les
rapports trimestriels et annuels. On va revenir là-dessus parce que nous
trouvons que c'est fondamental. Par la suite, il y a quelques questions sur les
pouvoirs de surveillance de la commission. Le projet de loi introduit une forme
de contrôle pour la Commission des valeurs mobilières. Il lui
confère l'intérêt requis pour intenter au nom et pour le
compte des porteurs intéressés toute action visant à
repérer les conséquences d'une contravention à la loi ou
à ses règlements.
Compte tenu du pouvoir d'intervention que possède
déjà la commission dans les recours civils, compte tenu de la
possibilité pour les porteurs d'exercer eux-mêmes un recours,
compte tenu de la possibilité pour un groupe de porteurs d'intenter des
recours collectifs financés par les fonds publics, compte tenu de toutes
les mesures administratives et pénales déjà prévues
dans la loi, nous ne pouvons identifier un besoin particulier pour qu'un tel
intérêt soit légalement conféré à la
commission. Nous allons attendre avec intérêt des justifications
de la part du ministre.
Finalement, en ce qui concerne les choses avec lesquelles on n'est pas
en accord, il s'agit de la question de la création d'un tribunal
d'arbitrage. Les dernières modifications au projet de loi que nous avons
devant nous, un des derniers amendements proposés par l'un des
intéressés, apportés au projet de loi, contenait une
disposition au terme de laquelle on prévoit la création d'un
tribunal d'arbitrage devant lequel le client d'un courtier aura
éventuellement la faculté de soumettre tout litige l'opposant
à son courtier, la procédure d'arbitrage et le mode de
désignation de l'arbitre devant être établi par
règlement.
Sans nous prononcer à ce stade sur le fond de la question,
à savoir si un tel système d'arbitrage doit exister, nous
trouvons que l'ajout d'une telle modification à la loi actuelle est
inapproprié. D'une part, la mise en place d'un nouveau recours devrait
se faire après consultation et surtout après consultation avec le
barreau parce qu'on est en train d'établir un autre tribunal
administratif. D'autre part, quant à nous, les modalités
d'exercice d'un recours, y compris la limite de l'objet du litige, devraient
être beaucoup mieux définies dans la loi et pas par
règlement.
Ce sont nos soucis principaux, les choses sur lesquelles nous ne sommes
pas d'accord. On ne va pas parler de tous les éléments avec
lesquels on est en accord, je pense que c'est clair. Un seul
élément que nous voulons ajouter est que nous tenons
énormément à une idée qui a été
soumise et qui fait maintenant partie des amendements, je pense, le ministre
l'a mentionné, c'est la question de définir la
légalité du transfert et du nantissement des titres
dématérialisés. Cet ajout prévoit le mode de
transfert et de nantissement dématérialisé dans un
contexte moderne. Ce processus de dématérialisation des titres
est déjà répandu en Europe et aux États-Unis et
cela est maintenant engagé au Québec et au Canada.
Face à cette réalité, il est nécessaire,
quant à nous, d'ouvrir la voie aux valeurs mobilières sans
certificat et d'ajuster certains principes de droit civil
québécois afin de qualifier et de légaliser les transferts
et les nantissements de ces titres de valeur. On comprend très bien que
les banques
doivent s'impliquer dans la rédaction de cet article parce que ce
sont les banques qui sont les plus impliquées. L'existence de cette
idée est une autre très bonne raison d'encourager l'Association
canadienne des banquiers à faire partie de nos discussions dans les
heures et les jours qui suivent.
En terminant, je veux féliciter la Commission des valeurs
mobilières qui a participé, je pense, à la
rédaction d'une grande partie de ce projet de loi. Ils ont
démontré enfin qu'ils sont capables de faire face aux grands
défis de la concurrence nationale et internationale à laquelle le
Québec fait face. S'ils ne se sont pas complètement
débarrassés de leurs vieux complexes, de leur désir de
créer un monde à part ici, au Québec, cela se comprend
parce qu'ils sont issus d'un gouvernement qui a exactement le même
problème. Mais vous faites un peu de progrès, vous autres, la
commission fait des progrès avec vous et on espère tous que le
progrès va continuer. Vous avez mis de côté vos
idées, selon lesquelles le secteur public doit être le moteur de
l'économie, vous avez commencé à mettre cela de
côté, je pense, il y a trois ou quatre ans. Vous avez
commencé à mettre de côté l'idée que c'est
par la réglementation que le bonheur va arriver pour tous les
Québécois. C'est le deuxième pilier de votre programme
politique. Plus récemment, bravo! vous avez commencé à
mettre de côté l'idée que le bonheur peut arriver seulement
par la voie de l'indépendance. (17 heures)
Une voix: Non...
M. Scowen: Oui, il y en a quelques-uns au moins. Sur cet aspect,
le troisième, il y a un peu de confusion toujours, mais quand même
c'est intéressant de voir que vous devenez de plus en plus
réalistes. Si la Commission des valeurs mobilières commence
elle-même à se débarrasser de ses vieux complexes, c'est au
profit de tous les Québécois.
On peut dire, dans un certain sens, que nous sommes devant un projet de
loi libéral parce que vous avez véhiculé les idées
libérales dans une grande partie de ce projet de loi. Je pense avoir
l'engagement du ministre qu'il va continuer dans cette voie lors de
l'étude article par article.
Avant de terminer et d'énoncer en terminant trois ou quatre
principes libéraux que je trouve incarnés enfin, Dieu merci! dans
le projet de loi, je veux simplement remercier les personnes que nous avons
consultées dernièrement dans le développement de notre
position, notamment M. Lortie, le président de la Bourse, et son
personnel ainsi que M. Pierre Brunet, le président de l'Association
canadienne des courtiers en valeurs mobilières, et son personnel, qui
ont été très utiles pour les intérêts de tous
les Québécois.
Si le ministre peut nous donner son engagement qu'il veut travailler
dans le sens de ces quatre principes libéraux que je vais
énumérer en terminant, il pourra compter sur notre appui lors de
l'étude article par article et pour l'adoption de ce projet de loi dans
les plus brefs délais.
Le premier, c'est la nécessité d'accepter qu'on vit ici,
au Québec, au Canada, d'accepter les règles de jeu de la
concurrence canadienne et de gagner, et on peut gagner.
Le deuxième principe qu'on a essayé d'expliquer à
la population depuis maintenant huit ans et que vous commencez à
comprendre de votre côté, c'est la nécessité de
reconnaître le rôle national et international de Montréal
comme centre financier et d'encourager les chefs de file du secteur
privé à Montréal, la Bourse, les courtiers, les hommes
d'affaires, par une législation québécoise qui va leur
permettre de réaliser ce rôle pour Montréal.
Le troisième principe libéral c'est la
nécessité d'encourager les entreprises québécoises
de taille moyenne à avoir accès au marché financier
québécois et, pour le réaliser, il faut une Bourse
à Montréal qui soit forte.
Le quatrième principe libéral c'est la
nécessité d'encourager tous les gens au Québec à
investir davantage dans le secteur privé de leur propre économie,
avec à la fois l'incitation et la protection que seule une
législation gouvernementale peut apporter.
Si c'est ça l'objectif du ministre, peu importe qu'il
décide de rester avec le gouvernement du Parti québécois
ou de passer de notre côté, ce n'est pas important s'il accepte
ces principes libéraux que nous avons véhiculés depuis
huit ans, s'il peut les adopter comme siens, s'il peut procéder d'ici
à la fin de la troisième lecture de ce projet de loi dans cette
voie, on va regarder chaque article, on va écouter les autres. On va
écouter la commission, la Bourse, les banquiers, mais lui et moi on va
procéder, sur la base de ces principes libéraux, à
développer un Québec concurrentiel dans le monde canadien, dans
le monde nord-américain, dans le monde entier pour encourager nos
propres entreprises privées, encourager les Québécois
à avoir confiance dans les entreprises québécoises du
secteur privé.
Si on s'entend sur tout cela, M. le Président, je suis certain
qu'on aura une très bonne loi et qu'on l'aura dans un très bref
avenir. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Roberval et adjoint parlementaire au ministre des
Finances.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que
ce n'est pas particulièrement facile de structurer une intervention
très passionnante autour d'un sujet qui est passionnant pour les
spécialistes, mais qui est si peu, hélas, à la
portée de l'ensemble des citoyens qui, bénéficiant de
réglementation, d'un encadrement dans le domaine financier, le
protégeant, lui permettant de faire des affaires dans le meilleur
contexte possible, même s'ils profitent du système, n'en
connaissent pas nécessairement toutes les modalités et tout l'A B
C. Mais nous allons quand même tenter, au cours de ce débat en
deuxième lecture, de clarifier certains éléments.
Je voudrais tout d'abord remercier le critique officiel de l'Opposition
dans ce domaine qui nous a offert sa collaboration la plus totale, la plus
entière. Je dois dire que je crois en ces paroles de collaboration
puisque j'ai eu l'occasion, depuis quelques années, de travailler avec
le député de Notre-Dame-de-Grâce qui a toujours
montré une très grande ouverture quand il s'agissait de discuter
de projets de loi un peu techniques, soit, mais tellement importants sur le
plan de la protection des finances des citoyens du Québec. Nous avons eu
l'occasion de travailler dans le domaine de la déréglementation
des assurances concernant les compagnies d'assurances et je me souviens des
remarques fort à propos qu'il nous a soumises. C'est avec plaisir que
nous avons travaillé à essayer de trouver tous ensemble la
meilleure voie possible, je le répète, pour garantir aux
Québécoises et aux Québécois la protection de leurs
épargnes.
Il y a quelques éléments sur lesquels j'aimerais revenir,
et je me permettrai de le faire par une boutade. Quand le député
de Notre-Dame-de-Grâce a parlé de principes libéraux, un
moment j'ai pensé qu'il s'agissait là de principes qui
sous-tendaient l'action et la pensée du Parti libéral du
Québec. J'ai écouté avec attention et j'ai compris que le
député de Notre-Dame-de-Grâce, quand il parlait de
principes libéraux, parlait d'une pensée libérale,
c'est-à-dire une pensée innovatrice, une pensée dynamique,
une pensée ouverte, ce qui n'a rien à voir, bien sûr, on
l'aura compris, avec le parti du même nom qui forme l'Opposition
officielle.
Les principes libéraux dont le député de
Notre-Dame-de-Grâce nous a parlés, je pense qu'on est
entièrement d'accord pour les respecter. On nous parle d'encourager les
gens du Québec. C'est le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui nous parle d'encourager les citoyens du
Québec à investir dans le secteur privé au Québec.
Soit, M. le Président, et je rappellerai à mon collègue de
Notre-Dame-de-Grâce les efforts inouïs qui ont été
faits par ce gouvernement et par l'ex-ministre des Finances pour
intéresser les Québécoises et les Québécois
à investir dans le secteur privé. Je me permettrai de rappeler
à cette Chambre, très brièvement, la mise sur pied du
Régime d'épargne-actions qui a ouvert définitivement, je
pense, une porte aux Québécoises et aux Québécois
moyens dans le domaine de l'investissement, dans l'achat d'actions
d'entreprises qui sont inscrites à la Bourse. C'était là,
je crois, le plus grand pas qu'on pouvait faire et c'est là aussi la
démonstration claire et évidente au député de
Notre-Dame-de-Grâce que nous acceptons ce premier principe, ce principe
d'encourager les gens du Québec à investir dans l'entreprise
privée. Nous y croyons et nous posons des gestes, nous avons posé
des gestes qui étaient garants de notre bonne foi en ce domaine. (17 h
10)
Le député de Notre-Dame-de-Grâce nous a parlé
également d'un principe d'encourager les entreprises
québécoises à avoir accès aux marchés
boursiers, aux marchés étrangers. Il nous a également
parlé de l'ouverture sur le reste du Canada dans le domaine des
opérations financières. Je dois dire que, quand on nous parle
d'encourager les entreprises québécoises à avoir
accès aux marchés boursiers, il y a eu des mesures aussi dans les
derniers budgets qui étaient nettement dans cette direction et qui, je
pense, sont la preuve évidente que nous acceptons ce principe de
permettre à Montréal de jouer un rôle national et
international, soit. Le ministre des Finances l'avait indiqué
très clairement dans son intervention de départ. Il y a une
volonté ferme et nous n'avons qu'à constater les succès
absolument renversants de la Bourse de Montréal actuellement, qui
dérange d'autres Bourses au Canada et qui - la Bourse de Toronto, en
l'occurrence - fait des progrès absolument intéressants parce que
la Bourse de Montréal a trouvé chez ce gouvernement une
collaboration constante, un esprit d'ouverture et le goût de voir cette
Bourse se développer.
Également, on nous parle d'accepter le principe qu'on vit dans
l'espace économique canadien, en concurrence. Oui, nous admettons que
nous sommes en concurrence avec chacune des parties du Canada. Nous sommes
aussi en concurrence - que ce soit sur le plan du commerce ou sur le plan des
marchés financiers - avec tout l'espace américain en quelque
sorte, car les échanges se font de plus en plus fréquents. Les
ouvertures, à ce niveau, ne se mesurent plus. C'est à chaque jour
que nous prenons connaissance de mouvements de capitaux, de transactions, de
jonctions d'entreprises entre les entreprises américaines, canadiennes
et québécoises, et nous sommes tellement conscients de cette
nécessité de s'ouvrir à
tous ces marchés et de vivre dans cet espace économique
canadien, d'un océan à l'autre, que nous avons aujourd'hui un
projet de loi qui a comme but essentiel d'harmoniser des
réglementations, de simplifier la tâche aux investisseurs comme
aux acheteurs. Leur permettre - que ce soit dans un territoire plutôt que
dans un autre -de faire des transactions avec beaucoup plus de facilité
sans avoir de complications administratives indues.
C'est dans cette perspective que les gens de la Bourse de
Montréal ont travaillé; que les gens de valeurs mobilières
ont travaillé avec M. Lortie de la Bourse pour préparer un
rapport. C'est dans cette perspective également que nous avons tenu
compte dans la confection même de la loi d'un rapport qui avait
été préparé par des experts ontariens. Nous sommes
non seulement d'accord avec les principes "libéraux", entre guillemets,
énoncés par le député de Notre-Dame-de-Grâce,
mais nous sommes ceux qui avons fait le plus pour placer ces principes dans
toute notre action, dans le domaine économique, dans le domaine
commercial aussi. J'élargis davantage. Nous avons posé des gestes
concrets qui devraient être de nature à rassurer notre bon ami, le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
Revenons-en plus particulièrement à l'essence même
du projet de loi 7 et essayons de vulgariser, même si cela n'est pas
nécessairement facile, le contenu de ces quelque 60 articles qui portent
le nom de Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières.
Essentiellement, un des objectifs - j'en ai traité brièvement -
c'est d'ouvrir tous les marchés à cet espace économique
canadien. C'est de permettre qu'une uniformisation de la réglementation
simplifie le travail des offrants, des vendeurs comme des acheteurs. C'est de
permettre d'éviter, d'enlever un ensemble de barrières
susceptible de priver, de laisser pour compte des détenteurs d'actions
de certaines entreprises qui seraient dans d'autres territoires, de les priver
de certaines offres d'achat qui seraient faites sur un territoire
donné.
Il s'agit de favoriser de façon la plus claire possible la
circulation de l'information dans les deux sens. Il s'agit, dans ce projet de
loi, de faire en sorte qu'il n'existe pas sur l'espace économique qui
nous intéresse plus particulièrement de frein à la
circulation de cette information concernant les transactions importantes, les
offres d'achat, les offres de vente qui pourraient survenir sur le
marché, les discussions impliquant plusieurs groupes et des blocs
d'actions importantes de compagnies importantes. Il s'agit, par le projet de
loi, de faciliter cette information. Le public, ceux qui nous écoutent,
ceux dont on est les représentants sont fortement
intéressés parce qu'ils peuvent être eux-mêmes
détenteurs d'actions, ils peuvent être eux-mêmes
impliqués dans une transaction d'importance et ils ont tout
intérêt à ce que, de façon très claire et
très précise, l'information circule, qu'elle soit
diffusée.
Le projet de loi veut également faciliter les transactions en
permettant, dans certains cas, de s'abstenir de certains processus dont l'offre
publique obligatoire entre autres. Il y a des circonstances où il n'est
pas essentiel pour la protection du public, où il n'est pas
nécessaire que tout le processus de l'offre publique qui est obligatoire
pour un ensemble de transactions ne soit pas nécessairement retenu comme
étant obligatoire, dans certains cas bien particuliers qui sont
précisés dans le projet de loi.
Également, M. le Président, le projet de loi voudrait
éviter qu'il se passe sur les marchés financiers et tous les
projets de loi qui touchent ce sujet veulent éviter des concentrations
exagérées de blocs d'actions et surtout des concentrations
insoupçonnées. Il est important que le public qui peut
détenir une partie d'un portefeuille sache qui s'intéresse
à l'entreprise dont il détient des actions. Il est important que
le public sache quelles sont les offres qui sont faites, à quel montant,
qui sont les groupes qui détiennent des blocs d'actions importants et
qui peuvent détenir une partie importante du contrôle d'une
entreprise dans laquelle ils ont eux-mêmes des intérêts.
Voilà, pour l'essentiel, les objectifs poursuivis par le projet
de loi 7. J'essaie évidemment de les rendre le plus claires et le plus
simples possible. Mais je vous avoue que, à travers des parties du
projet de loi, certains articles de loi pourraient éventuellement
être assez difficiles à interpréter pour un profane. On
parle évidemment des prospectus, de la circulation de l'information, de
la Commission des valeurs mobilières, de ses pouvoirs. On parle de la
façon de procéder lorsqu'il se passe des mouvements financiers
importants. Bref, M. le Président, un certain nombre de changements qui
sont très certainement souhaités puisqu'ils ont été
entrepris par des groupes qui connaissent le domaine en question, mais sur
lesquels il faudra poursuivre une certaine consultation avec l'Association des
banquiers canadiens, bien sûr, qui a très certainement, et
à juste titre d'ailleurs, un point de vue intéressant à
faire connaître. Le gouvernement veut, avec l'Opposition, avec les
intervenants qui sont intéressés à la question,
élaborer un projet de loi le plus simple possible, le plus clair
possible, qui permette de protéger les épargnes, de
protéger les investissements et de permettre à tous et à
chacun des Québécoises et des Québécois qui sont
intéressés dans des entreprises de savoir ce
qui s'y passe quand on parle de grands mouvements de capitaux ou de
grands mouvements de blocs d'actions.
Modifier, M. le Président, pour harmoniser notre
réglementation. Modifier parce qu'il faut éviter que des
personnes qui sont des détenteurs d'actions soient laissées pour
compte dans certains secteurs. Il faut modifier parce que d'autres provinces
vont aussi ajuster leur réglementation de telle sorte que, dans tout
l'espace économique canadien, il y ait des possibilités
intéressantes pour les marchés financiers, des facilités,
une simplification de la procédure. (17 h 20)
M. le Président, il y a des changements dont le ministre a fait
état et sur lesquels j'avais l'intention de faire porter une partie de
mon intervention, mais je crois qu'il est inutile de rappeler tout ce qui a
été dit déjà, sinon qu'on a simplifié toute
la question de l'offre publique à partir des recommandations qui ont
été faites par différents groupes. On a simplifié
cette procédure. D'aucuns diront que cette simplification, qui assure la
protection du public, surtout parce que c'est l'objectif de l'offre publique,
est peut-être un peu trop complexe encore, ne permet peut-être pas
toutes les facilités qu'elle voulait bien initialement prévoir.
À ce moment-là, il s'agira en commission parlementaire de
regarder, avec les recommandations de chacun, comment on peut en arriver
à arranger le tout dans un projet de loi correct. Il y a des dispenses
qui sont également prévues. Il y a beaucoup de cas pour lesquels
il est prévu une dispense de cette offre publique, des cas où la
sécurité publique ne semble pas exiger une offre publique.
Il y a des cas sur lesquels on pourra s'arrêter en commission
parlementaire, à l'étude article par article, pour nous permettre
de vérifier si, effectivement, le législateur est dans la bonne
voie, dans ce qui est inscrit dans le projet de loi. Il y a un article qui
prévoit que des personnes qui seraient lésées par suite
d'une contravention à la réglementation des offres publiques
puissent demander une réparation. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce a fait tout à l'heure une suggestion, je
pense, à cet égard. Il s'agira de voir, mais j'ai bien
l'impression que ce qui est prévu dans le projet de loi est
satisfaisant. Nos points de vue pourront s'échanger en commission
parlementaire. On pourra regarder quel est l'intérêt d'apporter
des modifications à cet égard, mais il nous semble toujours, dans
la perspective où il faille simplifier le processus, que ce qui est
prévu dans le projet de loi, le mécanisme prévu - le
recours au tribunal - soit le plus approprié à ce moment-ci. Il y
a également d'autres modifications qui sont prévues et qui sont
de nature, encore une fois, à encadrer, entre autres, l'utilisation de
l'information privilégiée.
En conclusion, M. le Président - parce que je ne veux pas
indûment prolonger ce débat - nous aurons l'occasion de revenir
là-dessus en commission parlementaire, pour la meilleure protection des
citoyens du Québec, des épargnants, des hommes d'affaires, des
entreprises aussi qui travaillent dans ces marchés, qui font leur pain
quotidien de ces transactions, ces mouvements boursiers. Nous allons faire une
loi, avec la collaboration assurée de l'Opposition, qui sera la
meilleure possible. Nous aurons réussi à simplifier, je pense,
à déréglementer, à uniformiser et à rajeunir
tout ce domaine des valeurs mobilières, de telle sorte que nous serons
heureux de pouvoir continuer tout ce travail déjà amorcé
de rajeunissement et de décloisonnement dans le domaine de la finance,
dans le domaine du monde financier. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
Je ne cesse jamais de m'étonner devant les propos du
député de Roberval qui a indiqué sa surprise que mon
collègue de Notre-Dame-de-Grâce plaide en faveur de principes
libéraux. Je rappelle à cette Chambre que les principes
libéraux dont notre parti s'inspire sont cohérents. Ce sont ceux
dont se réclame aujourd'hui de façon bien tardive le
député de Roberval d'une façon très claire, je
dirais grossière. Le ministre des Finances, quant à lui, n'a pas
versé dans ces excès. Je l'en remercie, d'ailleurs. Cela permet
de garder le débat à un niveau d'assez haute tenue.
Ce que le député de Roberval évoquait, entre
autres, c'était que le Régime d'épargne-actions
était un exemple de la façon dont les principes "libéraux"
- entre guillemets - pouvaient être appliqués par le gouvernement
actuel. Je me permets de rappeler au député que c'est en raison
des taux d'imposition particulièrement sauvages qui existent au
Québec, comparativement au reste du Canada, que sous la force des
pressions qui montaient constamment, sous la force ou le constat de
l'érosion d'une grande partie du secteur économique, notamment
dans la région métropolitaine, que le ministre des Finances
d'alors avait consenti à inventer un système, par ailleurs assez
compliqué, qui permettait à des gens de diminuer leurs
impôts, non pas d'investir dans l'avenir du Québec. Cela devenait
incident. L'objectif premier était de réduire les impôts.
Il faut bien avoir cela à l'esprit.
Par ailleurs, quand on a un gouvernement qui se targue, par la voix du
député
de Roberval, de faire preuve de grande cohérence dans son action
quant à l'application de principes économiques d'ouverture sur le
monde, de libre échange avec nos voisins, il faut également se
souvenir et rappeler, de toute façon, au député de
Roberval que ce sont des collègues de son gouvernement qui parlent
constamment, notamment en matière d'agriculture, d'autosuffisance, qui
parlent d'achats chez nous, qui parlent de favoriser les fournisseurs
domestiques. On a donc une situation absolument étrange où, si
tout le monde se comportait comme le gouvernement du Québec
actuellement, tous les gouvernements du monde exhorteraient leurs citoyens
à exporter et s'assureraient en retour que les citoyens ne pourraient
pas importer de l'étranger. On voit tout de suite l'espèce de
cul-de-sac, l'illogisme total dans lequel on baigne, si tous les gouvernements,
ne prenons que deux pays voisins, à titre d'exemple, avaient tous les
deux des politiques d'exportation extrêmement agressives pour
pénétrer le marché de l'autre et avaient en même
temps des barrières douanières ou tarifaires, non tarifaires ou
politiques très élevées afin de ne pas laisser entrer les
produits qui viennent de chez le voisin.
On voit donc, quand on parle de principes libéraux en
matière économique, au moins, de ce côté-ci de la
Chambre, que nous sommes parfaitement disposés, compte tenu des
impératifs de concurrence auxquels il faut nous astreindre, à
avoir les mêmes gestes que nos discours annoncent, contrairement à
ce qu'on voit trop souvent de la part du gouvernement du Parti
québécois, depuis plusieurs années.
Il n'en reste pas moins qu'il y a des choses qu'on a soulignées
comme étant positives qui, dans ce projet de loi, reflètent des
demandes des milieux particulièrement intéressés aux
institutions financières au Québec. Non pas simplement au
Québec, mais, évidemment, dans d'autres provinces dans la mesure
où certaines des dispositions ici viennent d'un consensus qui a
été établi avec les régulateurs d'institutions
financières, de marchés financiers d'autres provinces, notamment,
l'Ontario, l'Alberta et la Colombie britannique, bien entendu.
Pourquoi donc faut-il applaudir à la cohérence, à
la concordance des lois des différents territoires voisins? Tout
simplement parce que si on veut attirer des investissements pour vrai, il faut
s'assurer que le climat en est un, que les lois en sont et que les
règlements sont également des expressions du caractère
prévisible de ce qui attend l'investisseur, prévisible parce que
c'est comparable, semblable, cela concorde avec ce qui se fait ailleurs. Cela
simplifie également la tâche. Le caractère
prévisible comme tel est déjà un gros actif comme point de
vente, si on veut, ou comme argument de vente pour des investisseurs. On lui
dit: Voici, quel est l'état de notre législation, de notre
réglementation. Vous agissez déjà ailleurs? Fort bien.
Vous n'aurez pas tellement d'ajustements à faire car nous avons une
législation qui est semblable à celle de nos voisins. C'est un
excellent argument de vente pour attirer l'investisseur.
Deuxièmement, la simplicité, même dans les lois
compliquées. Je m'explique. Dans la mesure où, quand plusieurs
juridictions ont les mêmes complications, les mêmes
réglementations ou les mêmes points techniques extrêmement
difficiles à manipuler, déjà, on simplifie le
problème d'une juridiction à l'autre quand tout le monde
reflète dans sa législation le même degré de
complication auquel on ne peut pas toujours échapper. Quand on regarde
les façons de calculer certaines choses, quand on regarde les
délais, quand on regarde des définitions parce que le
marché des institutions financières devient de plus en plus
sophistiqué et que les définitions se multiplient, on parle,
à titre d'exemple, de choses pas tellement courantes chez nous mais qui
le deviennent, des titres dématérialisés,
c'est-à-dire ces représentations d'une part dans une
société qui n'est pas nécessairement exprimée par
un certificat de papier, comme c'est encore la vieille méthode,
majoritairement, chez nous. (17 h 30)
Déjà en Europe, dans certains endroits, il y a un immense
marché de compensation à même des "certificats", entre
guillemets, des actions dématérialisées. C'est dans ce
contexte qu'on peut parler de simplification. Une fois que les investisseurs,
les institutions financières, les intermédiaires financiers se
sont habitués à un système même compliqué, il
est fort simple pour eux de faire affaires sur d'autres territoires parce
qu'ils n'ont pas d'ajustement additionnel à faire, ils connaissent
déjà le tabac, ils connaissent la chanson, ils connaissent
même les mots de la chanson et, dans ce sens, on simplifie la tâche
et, donc, on attire les investisseurs.
La conclusion de ce double caractère de
prévisibilité et de simplicité c'est qu'on peut à
ce moment-là parler de certitude. Il y a quand même un climat, une
espèce d'indication ou un symptôme, une fois qu'on a ces
éléments, qui se révèle aux yeux de l'investisseur
à l'effet qu'il est certain - et cela est très important à
des fins de planification - de ce qui l'attend. Il a conscience d'entrer sur un
terrain connu et il n'y a rien de tel que l'inconnu pour décourager les
investisseurs; il n'y a rien de tel que l'instabilité, il n'y a rien de
tel que la complexité additionnelle, il n'y a rien de tel que la
nécessité de s'adapter à des choses dont il n'a jamais
entendu parler, il n'y a rien de tel, autrement dit, à l'égard
de
ce qui était et de ce qui est encore, à bien des
égards, le problème no 1 déterminé par les
politiques du gouvernement du Parti québécois, il n'y a rien de
pis que d'être tout seul à avoir le pas. On peut voir que
finalement on s'est rendu compte, de l'autre côté, que
d'être seul à avoir le pas, de s'attendre que tout le reste du
régiment, sur tout le continent, emboîte le pas de celui qui n'est
pas au même pas que les autres, c'est tout à fait
irréaliste.
Les politiques dont nous parlons de ce côté-ci, ce sont des
politiques où on parle de réalisme, effectivement, de
pragmatisme, mais collées à ce qui se passe sur le continent
nord-américain en matière économique, financière,
fiscale, commerciale, industrielle. C'est de cela qu'on parle de ce
côté-ci. Et le député de Roberval pourra faire
toutes les petites blagues qu'il voudra, lorsqu'il intervient sur un projet de
loi, il n'en reste pas moins que la population peut comparer la
cohérence et surtout la façon dont nous, de ce
côté-ci, sommes collés à la réalité
nord-américaine contrairement à ce qui se passe de l'autre
côté, où il y a essentiellement des débats pour
adopter un modèle suédois ou un modèle autrichien de
société. Ce n'est pas vraiment de cela dont il est question, ce
n'est pas de cela que les Québécois veulent entendre parler.
J'aimerais simplement, pour illustrer un peu ce que je viens de dire
quant à l'attrait qu'un territoire peut constituer pour un investisseur,
d'une part, et quant à certaines des contradictions qu'on peut entendre
de l'autre côté, retenir un simple élément, celui
sur les offres publiques d'achat d'actions. La question doit se poser quand
même dès le départ: Si les offres d'achat d'actions
amènent quelque chose à l'économie. Il y a un débat
qui continue à cet égard afin de savoir si une
société financière qui prend le contrôle d'une autre
accomplit quelque chose dans l'économie. Est-ce que notre produit
intérieur brut a augmenté? Est-ce que le nombre d'emplois a
augmenté? Ce n'est pas évident à sa face même, quand
on regarde les bilans successifs, avant et après une prise de
contrôle, qu'il y ait quelque chose de substantiel de changé.
Pour avoir vécu, avant d'être député à
temps plein comme je le suis depuis près de quatre ans, des situations
en raison de ma profession, de mon occupation, j'ai constaté ce qui se
passait dans les offres d'achat d'actions. Je peux dire que dans bien des cas,
alors qu'à l'évidence même le bilan pro forma, avant et
après la prise de contrôle, ne semble pas dénoter quelque
différence substantielle au point de vue économique, sur une
période de temps où celui qui prend le contrôle d'une
institution - le gouvernement l'a fait avec les sociétés
d'État, il pourrait nous en parler aussi - prend des décisions
qui ont trait à la qualité de la gestion qu'on peut retrouver
à l'intérieur de la nouvelle filiale. On peut, par le biais du
conseil d'administration, changer les gens qui sont là, changer les
directions stratégiques qu'une société emprunte et,
à cet égard, on peut prétendre qu'il y a des
bénéfices possibles pour l'économie, à supposer que
celui qui a pris le contrôle d'une société est
lui-même compétent, comprend lui-même comment fonctionne
l'économie et est particulièrement sensible au fait qu'une
gestion rigoureuse, dans le sens que d'abord on ne gaspille pas et que,
deuxièmement, on doit apprendre et s'astreindre à planifier
l'avenir, cela dépend essentiellement, donc, de la qualité des
retombées d'une prise de contrôle, de celui qui achète.
Ça, c'est une chose.
Il n'en reste pas moins qu'il faut maintenir cette capacité de
nos entreprises de croître de façon externe. On peut
croître, quand on est une entreprise, de ses propres initiatives en
réinvestissant dans le même genre d'équipement, dans le
même genre de machinerie, en développant par, je ne sais trop,
l'instauration de nouveaux systèmes de contrôle, en diminuant les
dépenses, en devenant plus rentable, pouvant ainsi réinvestir, en
développant de nouveaux marchés; toujours à l'interne, ce
développement et cette croissance. On peut également souhaiter
que la loi permette, de façon pas trop compliquée ou à
tout le moins, pas trop différente d'ailleurs, que nos entreprises
puissent croître de façon externe afin de diversifier leurs
activités, en devenant les propriétaires, les compagnies
mères, les sièges sociaux de sociétés qui sont dans
d'autres genres d'activités.
C'est pour ça que ces dispositions sur les offres publiques
d'achat existent, doivent être maintenues, doivent se rapprocher le plus
possible de celles qui existent ailleurs afin de continuer à conserver
un climat quelconque qui devient un peu certain, donc prévisible, donc
attrayant pour les investisseurs qui se demandent comment se comporter sur le
marché des institutions financières, le marché financier
au Québec.
La question est de savoir si, une fois qu'on a accepté que c'est
fait comme ça, il faut regarder dans la loi pour trouver là
l'expression d'une cohérence de la part du gouvernement.
Cohérence entre l'action et le discours, prétendait le
député de Roberval. Peut-être, sauf que lorsqu'on regarde,
à l'égard de l'article 114 qui est proposé, par exemple,
je cite des notes explicatives, des commentaires: "Cet article vise à
empêcher qu'on échappe à la réglementation sur les
offres publiques en acquérant des titres d'une société par
la voie d'une prise de contrôle d'une société dont les
titres ne sont pas négociés sur un marché
organisé." Savez-vous ce que ça me rappelle, M. le
Président? Ça me rappelle l'amiante, Asbestos, où des
centaines ou des milliers d'individus au
Québec, détenteurs d'actions de la Société
Asbestos, ont été privés du bénéfice que
General Dynamics a eu de pouvoir vendre sa part non pas d'actions d'Asbestos
mais d'une filiale canadienne dont les actions n'étaient pas
transigées, donc étaient en marché fermé et qui
elle-même détenait une majorité des actions d'Asbestos. Ce
sont les Américains qui, par le biais d'une filiale dont ils ont vendu
les actions au gouvernement du Québec avec lequel ils ont conclu un
contrat vont réaliser un gain substantiel. C'est
précisément ça l'exemple que le projet de loi tente de
corriger. À sa rédaction pure et simple, cet article vise
à empêcher qu'on échappe à la réglementation
qui oblige celui qui prend le contrôle, à offrir au moins la
même chose aux pauvres gens qui, eux, n'ont pas des blocs de
contrôle dans ces sociétés-là, si,
évidemment, les règles de 15% excédant le cours du
marché sont appliquées. C'est précisément ça
que le gouvernement du Québec n'a pas fait. Il n'a pas
protégé les petits actionnaires qui avaient cru dans l'avenir,
à tort ou à raison, d'une société qui exploitait
les richesses naturelles du Québec.
L'exemple m'est venu à l'esprit en écoutant le
député de Roberval. Je n'ai donc pas un tas de chiffres devant
moi, de dates, d'adresses des actionnaires, de listes d'actionnaires mais je
serais très curieux de savoir si ce n'est pas important pour les gens de
la région de l'amiante qui s'étaient peut-être fait vendre
des actions de cette société assez facilement... Ils y
étaient attachés, ils voyaient la mine, les camions, leur mari,
leur oncle, leur tante, leur frère, leur soeur travaillaient là.
Ils avaient véritablement une participation au développement
économique de leur région. Le gouvernement du Québec est
arrivé avec ses raisons idéologiques, d'une part, mais, d'autre
part, de façon extrêmement cynique, a acheté une prise de
contrôle que des Américains détenaient sans être
tenus, comme ils seraient peut-être aujourd'hui - il faudrait voir les
chiffres - du moins en principe ou moralement - le gouvernement aime ça
parler d'obligation morale et de victoire morale - tenus de donner la
même chance, une chance semblable aux petits actionnaires d'Asbestos qui
avaient investi dans cette société de chez eux. (17 h 40)
Quand on parle de cohérence entre le discours et l'action, il me
semble qu'il reste beaucoup de chemin à faire. En matière
d'institutions financières, un marché fort concurrentiel, le
gouvernement semble peut-être encore trop disposé à se
donner des chances que les autres n'ont pas. Je parle de la façon dont
les sociétés de la couronne peuvent intervenir dans le
marché. D'abord, au point de vue des coûts du capital d'une
société de la couronne - mais on n'en parle pas - c'est l'argent
de nos taxes, c'est voté ici, à l'Assemblée. Il n'y a
aucune espèce d'exigence à verser des dividendes, à
rembourser ou quoi que ce soit. Il faut quand même être raisonnable
et voir que, sur le marché privé, ce n'est pas comme ça
que cela fonctionne. Si quelqu'un veut ramasser du capital, il faut quand
même qu'il s'engage - c'est très ferme - à verser, un jour,
un dividende et, si c'est un emprunt à long terme, à verser de
l'intérêt et à rembourser le prêt. Ce n'est pas comme
cela que les sociétés de la couronne du Québec se
comportent.
Deuxièmement, les sociétés de la couronne
elles-mêmes, comme mandataires du gouvernement, devraient être
soumises à une loi comme celle-ci et agir sur le même
marché que la Caisse de dépôt, qui n'est pas soumise, dans
certains cas, aux dispositions de la loi, ce qui est un peu inquiétant
pour les autres acteurs du marché financier. C'est ce que, d'ailleurs,
l'Association des courtiers en valeurs mobilières a demandé au
ministre. Le commentaire de l'association des courtiers était dans le
sens que les activités croissantes dans le marché des valeurs de
certains organismes ou fonds qui sont visés à l'article 4 - les
définitions, notamment des sociétés de la couronne, les
mandataires du gouvernement ou de l'État - justifient que ces derniers,
en parlant de la Caisse de dépôt, une autre société
de la couronne ou un autre organisme public, soient soumis aux mêmes
règles que l'ensemble des participants sur le marché, qu'ils
soient ou non considérés comme agents de la couronne. Une chose
est certaine, il apparaît particulièrement important que, lors de
l'étude article par article, le ministre garde le même -
dirais-je, intérêt de coopération, d'ouverture quant
à savoir si on va s'assurer que le marché financier au
Québec soit comparable à ce qui existe ailleurs afin que ce soit
plus simple, plus prévisible et plus certain pour l'investisseur. Que le
ministre s'assure donc que le projet de loi qui modifie la Loi sur les valeurs
mobilières et qu'il nous soumet aujourd'hui s'applique de façon
égale à tout le monde, y compris les mandataires du gouvernement,
les sociétés de la couronne. Cela m'apparaît un principe
important.
J'aimerais que, dans sa réplique, dans quelques instants, le
ministre nous indique de quel côté il penche à cet
égard. On parle de marchés en concurrence. On parle de se
comparer avec ce qui se passe partout ailleurs. Parlons également,
à l'interne, de la façon dont les différents agents
peuvent se comparer entre eux quant aux privilèges qu'ils ont dans le
cas de certaines sociétés de la couronne et quant aux
contraintes, si on parle des gens du secteur privé, qu'automatiquement
ces différences qui interviennent déterminent.
M. le Président, à ce moment-ci, vous me faites signe que
le temps est écoulé.
J'ose croire que j'ai pu exprimer de ce côté-ci que nous
avons de la cohérence dans le discours et dans les gestes que nous avons
déjà posés et que nous continuerons à poser. Une
chose est certaine, c'est à la lumière de l'expérience
pratique du milieu économique, du milieu financier que des gens peuvent
ici agir de façon beaucoup plus cohérente, acceptable, quant
à moi, et favorable au développement économique du
Québec. C'est ce que nous entendons continuer à faire.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des
Finances, votre droit de réplique.
M. Yves Duhaime (réplique)
M. Duhaime: Merci. D'abord, je voudrais donner une assurance
à l'Opposition que si j'ai pris la décision, que je l'ai
proposée au Conseil des ministres, de ne pas procéder avec la Loi
modifiant la Loi du Vérificateur général, la contrepartie
c'est qu'au feuilleton il y a une nouvelle loi qui est déposée
qui a franchi l'étape de la première lecture qui est un
amendement à la Loi de la Caisse de dépôt et de placement.
J'en retire une. Je vous en propose une autre.
Je voudrais, non pas commenter le communiqué de presse
qu'émettait dans le courant de l'après-midi le
député de Vaudreuil-Soulanges parce que sans aucun doute ce sont
les inspirations du téléjournal d'hier soir sur les commentaires
du Vérificateur général du Canada qui est penché
aujourd'hui sur l'administration libérale qui a été
là pendant de très longues années. Fédéral,
oui. Sinon vos amis, c'est voisin. On parle en particulier d'une transaction
concernant Pétro-Canada et Pétrofina qui a été
payée, de mémoire,
I 700 000 000 $. Tout le monde convient que c'est passablement au-dessus
du marché.
II est toujours question des F-18 que j'avais dénoncés, je
me souviens, cela doit faire maintenant cinq ou six ans, en disant que
c'était de la folie furieuse. Cela va nous coûter 3 500 000 000 $
de plus. J'aime autant ne pas en parler davantage.
Je ne voudrais pas, avant d'exercer ma réplique comme telle, que
le député de Notre-Dame-de-Grâce ait été
induit en erreur par mes propos tout à l'heure. Je veux bien rendre
à César ce qui est à César et à Dieu ce qui
est à Dieu. La Bourse de Montréal, depuis deux ou trois ans, a
fait un travail absolument fantastique de mobilisation, d'abord, et ce que
j'appellerais ce souffle de dynamisme qui s'est produit presque comme un coup
de vent à Montréal. Habitant une des grandes régions
économiques du Québec, je suis très heureux de constater
ce dynamisme à la Bourse de Montréal, d'autant plus que le
président de la Bourse de Montréal a commencé des
tournées en région. Il a l'intention de sensibiliser
également les hommes d'affaires et les entrepreneurs des grandes
régions économiques à l'extérieur de
Montréal à la réalité du marché financier,
du marché boursier, des transactions sur les marchés des valeurs
mobilières.
Le député de Vaudreuil-Soulanges nous dit: Le
Régime d'épargne-actions, ce n'était pas pour encourager
tellement l'investissement. C'est parce que les tables d'impôt pour les
mieux rémunérés dans notre société sont trop
élevées. On a fait nous un choix politique. Ce que j'appellerais
un choix de société. Si le gouvernement de l'Ontario choisit
d'imposer plus fortement les bas salariés et les moins
rémunérés pour donner une marge de manoeuvre plus grande
à ceux qui sont dans l'échelle sociale la plus
élevée sur le plan de leur rémunération, c'est
l'oeuvre d'un gouvernement conservateur dont nous ne sommes pas. Nous avons
fait ce choix. Il est entendu que c'est une incitation à
l'investissement le Régime épargne-actions.
J'ai ici les chiffres. Prenons les trois dernières années.
1982, 1983, 1984, en disant tout de suite que pour 1985 les prévisions
d'investissement à la faveur du Régime d'épargne-actions
sont à la hausse. Ce n'est pas étranger, bien sûr, aux
activités du marché financier de Montréal, parce que les
actions de grandes entreprises sont admises au Régime
d'épargne-actions. Je pense à Bell Téléphone,
à Alcan et à d'autres, il y en a toute une série. On n'est
pas ici pour passer des commerciaux. Il serait peut-être bon que
l'Opposition note que lorsque le Régime d'épargne-actions a
démarré, en 1979, 14 348 contribuables s'en sont prévalus;
en 1982, 43 699; en 1983, 112 729; en 1984, 145 000 Québécois ou
Québécoises qui, à la faveur du Régime
d'épargne-actions, ont fait des investissements dans du
portefeuille-actions d'entreprises au Québec. C'est absolument
fantastique. Qu'est-ce que cela a donné comme résultat? En 1982,
le total des transactions était de 165 000 000 $; en 1983, de 498 000
000 $; en 1984, de 677 000 000 $. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce indiquait tantôt que le marché financier
de Montréal était autour de 7 000 000 000 $ sur une base
annuelle. Ce ne sont pas toutes des transactions qui passent par la Bourse de
Montréal, mais la partie la plus importante du Régime
d'épargne-actions passe par des transactions de valeurs
mobilières inscrites en Bourse sur le marché de Montréal.
Cela a coûté au gouvernement en 1983, 139 000 000 $; en 1984, 186
300 000 $. C'est ce qui fait que j'indiquais l'autre jour qu'à la fin du
semestre de l'année en cours, il y a une baisse des entrées de
fonds au chapitre du revenu, quant à l'impôt sur le revenu des
particuliers, justement à cause de la très
haute performance du Régime d'épargne-actions. Il y a une
espèce d'action combinée... (17 h 50)
Poser la question, c'est y répondre, M. le Président. Si
on abolissait demain matin le Régime d'épargne-actions, y
aurait-il autant d'investissements? L'Opposition va dire: Bien sûr! Je
vous répondrai: Non! La progression est trop sensationnelle pour refuser
de voir les chiffres. 49 000 000 $ d'investissements en 1979 dans le
Régime d'épargne-actions et 677 400 000 $ en 1984. Si la Bourse
de Montréal a augmenté son volume d'affaires, j'en suis
très heureux, mais il faut reconnaître... L'Opposition fait
parfois des blagues à l'Assemblée nationale, au fond, elle est
bien convaincue que le Régime d'épargne-actions est absolument
performant.
Je voudrais cependant mettre en garde le député de
Notre-Dame-de-Grâce quand il me parle des grands principes
libéraux. Vous devriez plutôt parler des grands principes du
libéralisme, dont nous sommes. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce dit: Le gouvernement a changé! Le gouvernement
n'a pas changé. Enfin, vous commencez à comprendre qui nous
sommes et où nous allons. C'est bien différent!
M. le Président, j'écoutais tantôt mon bon ami le
député de Notre-Dame-de-Grâce dire - comment avez-vous
appelé cela? - Les trois piliers, les sociétés
d'État ou le secteur public, la réglementation et la
souveraineté. Je vais commencer par le début dans le même
ordre. Les sociétés d'État, il faut bien comprendre que
leur présence est absolument essentielle dans notre économie. Je
suis convaincu que le député de Notre-Dame-de-Grâce n'est
pas sérieux, il n'est pas prêt à nous faire un discours
pour nous demander de privatiser Hydro-Québec. Il n'est pas prêt
à nous faire un discours pour dire que la Société
générale de financement doit disparaître, parce qu'au fil
des années, ce qui s'est produit, ces grands éléphants de
la révolution tranquille comme Hydro-Québec, la SGF, Sidbec,
ajoutons SOQUIP, SOQUEM, REXFOR, qui a créé ces grandes
sociétés d'État? C'est le Parti libéral et je suis
parfaitement d'accord avec l'existence de ces sociétés
d'État parce que, de plus en plus, nos sociétés
d'État s'associent avec l'entreprise privée. Si on prend SOQUEM,
par exemple, elle a des partenaires dans la mine Doyon. REXFOR a des
partenaires à peu près dans tous ses projets aujourd'hui. La
Société générale de financement également,
entre autres, une participation de 25% dans l'aluminerie de
Bécancour.
Je ne parlerai pas de Sidbec parce que je vais mettre en colère
le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il connaît
très bien ce dossier et surtout la partie des investissements dans le
secteur minier qui ont été faits à l'époque
où Sidbec, pour être bien correct, M. le Président, ne
relevait pas du ministère de l'Industrie et du Commerce où
était attaché politique le député de
Notre-Dame-de-Grâce aujourd'hui, mais Sidbec relevait du ministre des
Finances qui, à l'époque, était M. Garneau. C'est lui qui
a pris la décision d'investir 750 000 000 $ sur la Côte-Nord et
nous avons dû nous déprendre de cette histoire qui nous faisait
perdre au-delà d'une centaine de millions de dollars par année.
Pour votre information -cela va vous consoler - la Société de
cartographie est en vente et c'est le gouvernement libéral qui l'avait
créée en 1975. Je dis cela, non pas pour m'éloigner de
notre sujet, mais pour illustrer tout simplement que quand on fait une
déclaration comme celle que je viens d'entendre, il faut parfois la
qualifier, la nuancer et l'ajuster aussi aux circonstances du moment.
Le deuxième pilier, a-t-on dit, c'est la réglementation.
Vous avez parfaitement raison. Nous sommes trop réglementés,
archiréglernentés, mais mon Dieu Seigneur, est-ce que je pourrais
vous suggérer d'inviter à dîner avec vous ce soir le
député de Portneuf? Ma collègue, Mme la ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, a annoncé hier
en conférence de presse que nous voulions déréglementer un
métier, une profession, les coiffeurs et les coiffeuses. Vous avez
entendu tantôt le député de Portneuf blâmer le
gouvernement parce qu'on venait de déréglementer? Alors, il
faudrait peut-être, si vous nous reprochez parfois de ne pas être
toujours concordants, essayer d'accorder vos violons aussi de l'autre
côté.
Le troisième pilier, M. le Président, la
souveraineté. Notre position est très claire là-dessus.
Nous sommes des souverainistes. Pour employer l'expression du premier ministre,
il a dit: On va la mettre dans le réfrigérateur et qu'est-ce
qu'on fait? On va tenter, dans l'honneur, ce que j'appellerais la trêve
constitutionnelle. C'est aussi simple que ça.
Maintenant, quant au député de Notre-Dame-de-Grâce,
je suis très heureux de ses propos dans l'ensemble, pour être bien
honnête, car nous travaillons dans la même direction. Nous
travaillons sur les mêmes objectifs, pour ce qui est de ce projet de loi,
à tout le moins, soit faire de Montréal un centre financier, un
grand centre bancaire international, moderne, où on va
dématérialiser ou, dans mes mots, éliminer du papier afin
de pouvoir faire inscrire sur le marché boursier de Montréal des
transactions qui, à l'heure actuelle, se font à Toronto, Zurich,
New York, Londres. Pourquoi? Probablement parce que nous ne sommes pas
suffisamment modernes et efficaces. Si l'Opposition veut travailler avec moi
dans cette direction, je voudrais vous donner l'assurance qu'on peut y aller
très
vite.
Un dernier mot. Le député de Vaudreuil-Soulanges, tout
à l'heure, disait: Vous manquez de cohésion parce que,
aujourd'hui, vous parlez de vous ouvrir sur un marché et vous semblez
dire: Enfin! Ensuite, on nous reproche, par exemple, de parler d'autosuffisance
dans le secteur de l'agriculture et d'avoir une politique d'achat.
Je vais vous faire une proposition. Le désarmement n'est jamais
unilatéral. Vous savez comment l'Europe verte est construite. Toutes les
économies agricoles sont protégées. Celle gui est la plus
protégée du monde est aux Etats-Unis et dans l'Ouest canadien,
subventionnée au surplus. Quand on dit qu'on veut maintenir une
agriculture solide et vivante au Québec, avec les mesures qui ont
été adoptées dans le secteur du développement
agricole, tout le monde sait que, depuis que nous sommes élus, les
superficies cultivées au Québec ont augmenté de 25%. C'est
un fait. Si on nous propose de libéraliser le marché agricole,
cela ne peut pas se faire unilatéralement non plus. Cela va se faire sur
une base bilatérale. Moi, je serais prêt à regarder le
dossier. Même chose sur le plan de la politique d'achat.
Les gens de l'Ontario sont très sages. Je devrais dire, non pas
qu'ils sont rusés, mais qu'ils sont fins, dans le sens qu'ils ne parlent
jamais de leur politique d'achat mais ils l'appliquent. Si vous appelez le
président de Bombardier, il va vous en donner des nouvelles. Bombardier
ne peut pas entrer en Ontario, mais Bombardier entre à Mexico et dans
les grandes villes américaines également. Il doit y avoir une
raison. Si on doit désarmer sur le plan de l'agriculture et sur le plan
de la politique d'achat, moi, je veux bien qu'on regarde cela, mais on va le
faire sur une base de désarmement bilatéral et non pas en allant
ouvrir notre marché, abandonner une certaine protection et ne rien
retirer en retour. Savez-vous d'où je m'inspire pour vous parler de
cette manière? J'ai eu l'occasion de lire il y a plusieurs
années, il y a un an ou deux, la date la plus récente, le "Buy
America Act". C'est un bel exemple de protectionnisme en matière de
politique d'achat et cela existe aux États-Unis d'Amérique, des
politiques d'achat.
Si on applique au marché des valeurs mobilières ce que le
projet de loi nous propose, qui est en quelque sorte un désarmement, si
vous me passez l'expression, cela veut dire qu'on veut que sur notre
marché boursier, notre marché financier à Montréal,
les valeurs mobilières puissent se transiger en ayant bien sûr
à l'esprit le souci de protéger ceux qui se portent
acquéreur de titres, s'assurer qu'ils ont l'information divulguée
en temps utile, l'information nécessaire pour être en mesure de
porter des jugements d'achat, de vente ou de transaction mais, en même
temps - et ce n'est pas incompatible ou contradictoire -monter à
Montréal un marché financier dont le volume des affaires ira en
augmentant.
Nos concurrents, on sait où ils se trouvent. Ils sont à
Toronto, bien sûr, principalement, mais ils sont aussi à New York,
ils sont en Europe, dans une moindre mesure, mais il est évident que si
on ouvre le marché de Montréal à des grandes entreprises
étrangères qui veulent venir placer des titres ici, mon Dieu
Seigneur, on aura fait un progrès énorme et on aura brassé
des affaires et fait avancer les choses.
Je disais récemment au président de la Bourse de
Montréal: Si vous prospérez et si vous grandissez à un
point tel qu'un jour on parle du centre de Montréal comme étant
un grand centre financier international, un grand centre bancaire
international, vous pouvez compter sur l'appui inconditionnel de notre propre
gouvernement pour vous aider à atteindre cet objectif le plus rapidement
possible.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le principe du projet de
loi 7 est-il adopté? Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Blouin: M. le Président, je propose donc que ce projet
de loi soit maintenant envoyé à la commission du budget et de
l'administration qui procédera à son étude
détaillée. Je vous signale que cette commission sera
présidée pour l'occasion par un président de
séance.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Sur ce, M. le Président, nous allons suspendre
nos travaux jusqu'à 20 heures. Je vous signale qu'à compter de 20
heures, nous reprendrons l'étude du projet de loi 9, Loi sur la location
des forces hydrauliques de la rivière du Lièvre à Les
Produits forestiers Bellerive.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont
suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
(Reprise à 20 h 2)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. le leader adjoint du gouvernement, vous avez la parole.
M. Blouin: M. le Président, comme nous l'avions
indiqué à 18 heures, nous allons maintenant poursuivre le
débat sur le projet de loi 9. Il s'agit de l'article 5 de notre
feuilleton que je vous demande d'appeler, s'il vous plaît.
Projet de loi 9
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président (M. Jolivet): II s'agit de l'adoption du
principe du projet de loi 9, Loi sur la location de forces hydrauliques de la
rivière du Lièvre à Les Produits forestiers
Bellerive-Ka'N'Enda Inc.
M. le député de Pontiac, il vous restait douze minutes et
vous avez la parole.
M. Robert Middlemiss (suite)
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Après sept
heures de suspension de ce projet de loi 9, nous y revenons. Je pense qu'il
faut faire une petite rétrospective. Le projet de loi 9 concerne la
location de forces hydrauliques de la rivière du Lièvre à
Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc.
Dans les huit premières minutes de mon intervention, j'ai
tenté de démontrer que la société REXFOR a
créé jusqu'à maintenant dans toutes les régions du
Québec énormément d'attentes chez la population.
Malheureusement, que ce soit en Gaspésie, sur la Côte-Nord, dans
l'Outaouais, cela s'est toujours terminé par un échec.
Toutefois, pour revenir au projet de loi 9, en terminant son allocution
aujourd'hui, le ministre responsable, parrain de ce projet de loi nous disait
qu'il s'agit d'un projet, de loi à caractère essentiellement
économique. Il est important pour l'avenir de Bellerive-Ka'N'Enda et
également pour l'avenir économique de toute la région de
Mont-Laurier. Ce projet de loi, loin d'exiger des investissements massifs pour
soutenir la création d'emplois, atteint le même but tout en
générant des revenus pour le gouvernement du Québec. Dans
ces circonstances, je ne peux que souhaiter que l'Assemblée donne suite
rapidement à l'adoption de ce projet de loi pour que nous puissions
renouveler le bail concernant les forces hydrauliques des rapides de l'Orignal
à Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda.
Peut-être que dans le passé, avant que la
société REXFOR ne devienne propriétaire de
Bellerive-Ka'N'Enda, cette entreprise privée créait de l'emploi
et avait une vocation économique. Je remonte au 23 février 1981
au moment où REXFOR devenait acquéreur de l'entreprise à
Mont-Laurier. Les propriétaires à l'époque, le Dr Georges
Lachapelle et M. Gaétan Lauzon, disaient, et je cite: "II y a toutefois
à préciser que la vente des entreprises n'avait rien à
voir avec leur situation financière, bien au contraire. On pourrait
doubler les effectifs et vendre toute la production, ont-ils dit, car le
marché que nous avons se compose de clients des États-Unis."
Une entreprise qui avait eu un succès depuis de nombreuses
années devient la propriété de la société
REXFOR. Qu'est-ce qu'on lit dans L'Écho, de la Lièvre, le 21
octobre 1981? "Fermeture, dès décembre prochain." M. le
Président, lorsque le ministre nous dit que c'est une vocation
économique, a-t-il oublié que peut-être ce l'était
avant que REXFOR devienne propriétaire de Bellerive-Ka'N'Enda?
Fermeture, décembre prochain, et c'est seulement une série de
fermetures et d'ouvertures. Même si le ministre aujourd'hui nous disait
que la raison principale pour laquelle on devrait accéder à cette
demande, c'était, premièrement, de rendre l'entreprise
concurrentielle et, deuxièmement, de protéger 300 emplois, on lit
encore, M. le Président, dans L'Écho, de la Lièvre, le 18
novembre 1981: "Probabilité de mises à pied." Ensuite, on lit:
"À compter du 4 décembre, 160 mises à pied chez
Bellerive-Ka'N'Enda." Cela donne l'impression qu'une fois que la
société REXFOR est devenue propriétaire de
Bellerive-Ka'N'Enda, sa vocation économique a totalement disparu.
Aujourd'hui, on nous dit: Regardez! Cette usine, cette centrale
hydroélectrique produit de l'énergie. La moitié de cette
énergie va être consommée par l'entreprise
Bellerive-Ka'N'Enda, mais ceci implique aussi la construction d'une usine de
panneaux, les panneaux MDF à densité moyenne. Ce projet de
construction de panneaux n'est pas encore décidé. Le gouvernement
est en train de faire des études de rentabilité. Mais je pense
que, dans la région de l'Outaouais, ce n'est pas tellement qu'on fasse
des études aujourd'hui qui compte. La région de l'Outaouais se
sent encore trahie par un gouvernement qui a promis maintes et maintes fois, et
même au moment des élections de 1981, lorsqu'on parlait du CITUF
à Maniwaki, le complexe forestier de Maniwaki dont devait faire partie
cette usine de panneaux à densité moyenne... Aujourd'hui, on a
décidé de construire cette usine, si jamais on la construit,
à Mont-Laurier. J'aimerais dire aux gens de Mont-Laurier que lorsqu'on
regarde la feuille de route de ce gouvernement et de la société
REXFOR...
Allons en Gaspésie, allons dans la
vallée de la Matapédia, l'usine de papier qui était
censée y être construite ne l'a pas été. On a
construit une usine de panneaux et, malheureusement, cela a été
construit en vue du marché d'outre-mer. On s'est aperçu, à
la suite de la construction, qu'il n'y avait pas de marché outre-mer. On
a donc déplacé l'usine qui était censée être
dans la vallée de la Matapédia, à Matane, et, aujourd'hui,
après de nombreuses années d'attente, les gens de Matane sont
énormément déçus. Est-ce que la papeterie de Matane
verra le jour? À cause de la papeterie de Matane, on a tenté de
régler les problèmes de Grande-Vallée; on a tenté
de régler le problème des scieries de la Gaspésie. La
rentabilité de tout le projet en marche aujourd'hui dépendait
énormément de l'approvisionnement en copeaux à la
papeterie de Matane. Il ne faut pas se leurrer. Les copeaux, il n'y a pas
tellement... Les distances qui existent en Gaspésie sont tellement
grandes que la vente des copeaux ne pourrait pas être rentable. Les
transporter à l'extérieur de la Gaspésie diminuerait
encore la rentabilité. Lorsque le ministre - je dois peut-être
comprendre que c'est son premier projet de loi; il n'aura pas tellement de
choses à nous dire au sujet du projet de loi - nous dit que c'est une
vocation économique, que c'est important de transmettre tous les droits
à Bellerive-Ka'N'Enda, je pense qu'on a raison de se poser des questions
quand on regarde la feuille de route de REXFOR un peu partout dans la province
de Québec.
Aussi, on nous dit que cette centrale hydroélectrique va utiliser
à peu près 50% de la production. Les autres 50%, c'est
Hydro-Québec qui s'est engagée à les acheter. Si on
regarde le bilan des dernières années, la période de temps
où l'entreprise Bellerive-Ka'N'Enda est en activité, toute cette
production d'énergie, si on n'exploite pas la scierie, si on n'exploite
pas l'usine du tout, qu'est-ce qui arrive? Est-ce que c'est Hydro-Québec
qui, à 100%, doit acheter l'énergie produite par cette
centrale?
Un des gros arguments que nous donnait le ministre, c'est que le
gouvernement du Québec va s'enrichir de 2 500 000 $ à 2 600 000
$, selon la première hypothèse; en 40 ans, on va toucher ces
sommes. Qu'est-ce qui arrive si on n'utilise pas un kilowattheure de production
de cette centrale? Où sont les retombées dans la province?
Hydro-Québec est obligée, même si le ministre nous a dit au
tout début de son intervention qu'Hydro-Québec n'était pas
du tout intéressée, de devenir propriétaire de cette
centrale hydroélectrique. C'est à se demander... Si on regarde la
feuille de route de Bellerive-Ka'N'Enda, ils ont toujours été
déficitaires, sauf cette année. Pourquoi? Parce qu'ils ont
réussi à vendre pour une somme assez considérable une
partie de l'entreprise, ils montrent un profit. Comme le gouvernement tente
toujours de démontrer qu'il est excellent dans la gestion, en vendant il
fait un profit au lieu d'un déficit. La question à se poser
c'est: Est-ce qu'un jour, vu la performance de Bellerive-Ka'N'Enda, celle-ci et
REXFOR ne tenteront pas de vendre la centrale hydroélectrique à
Hydro-Québec pour montrer des profits dans leurs opérations
encore une fois?
En terminant, comme notre porte-parole et moi-même l'avons dit ce
matin, on demanderait au ministre de reconsidérer la question. Au lieu
de maintenir la période de 40 années pour ce contrat, qu'on le
fasse donc pour un ou deux ans afin de donner une chance à REXFOR de se
donner un cadre d'opération, une vocation qu'on puisse comprendre.
À ce moment-là, pour préserver des emplois - Dieu sait
qu'on en a besoin au Québec - nous serions certainement d'accord pour
endosser un tel projet, mais pour 40 ans, on se pose de sérieuses
questions. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Matapédia et adjoint parlementaire, secteur forêt, du ministre
de l'Énergie et des Ressources.
M. Léopold Marquis
M. Marquis: M. le Président, comme vous venez de le
mentionner, il me fait grandement plaisir de prendre la parole pour la
première fois depuis que j'ai été nommé adjoint
parlementaire au ministre de l'Énergie et des Ressources sur un projet
de loi présenté par le nouveau ministre de l'Énergie et
des Ressources.
Il est peut-être surprenant d'entendre un député de
l'Est du Québec, de la Gaspésie, prendre la parole sur un projet
de loi qui concerne une région totalement à l'Ouest du
Québec, mais je viens de dire que c'est à titre d'adjoint
parlementaire d'abord, mais aussi parce que le critique officiel de
l'Opposition, l'honorable député d'Outremont, s'est permis, en se
prononçant sur le principe de ce projet de loi, de mener une charge
à fond de train sur la société REXFOR en particulier sur
ses opérations dans notre région, dans la Gaspésie, le
Bas-Saint-Laurent et, particulièrement, dans la vallée de la
Matapédia - et c'est pour cela que j'y reviendrai un peu plus tard - de
même que le député d'Outremont s'est permis de soulever les
difficultés qui existent à l'heure actuelle à la
Société d'exploitation des ressources des Monts qui est
également située dans la Gaspésie et sur laquelle j'aurai
l'occasion, si le temps me le permet, de revenir. Mais pour le moment, puisque
nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 9
intitulé "Loi sur la location de forces hydrauliques de la
rivière du Lièvre à Les Produits forestiers
Bellerive-Ka'N'Enda
Inc.", comme l'a mentionné le ministre et comme l'ont
répété les porte-parole de l'Opposition, c'est un projet
de loi à caractère essentiellement économique.
En effet, le projet de loi 9 permet d'envisager un investissement
important à Mont-Laurier dans une usine de fabrication de panneaux de
bois pressé évaluée à environ 70 000 000 $ et qui
créera 175 nouveaux emplois. Là-dessus, je comprends mes
collègues de la région de l'Outaouais qui ont pris la parole ou
qui la prendront après moi puisque, comme vient de le souligner le
député de Pontiac, il semble que cette usine de panneaux de bois
pressé faisait l'envie des gens de Maniwaki et des gens de la Gatineau.
Il semble qu'elle sera dans la région de Maniwaki et elle a
été promise aux gens de Mont-Laurier. Là-dessus, cela fait
penser, comme l'a souligné également le député
tantôt, à un projet de papeterie qui devait s'implanter dans la
vallée de la Matapédia, qui a été
déménagé à Matane et qui est mis en cause, qui est
abandonné à l'heure actuelle.
Le projet de loi 9 vise à autoriser le gouvernement du
Québec à livrer, et ce, rétroactivement au 1er janvier
1984, la partie publique des forces hydrauliques aux rapides de l'Orignal sur
la rivière du Lièvre, à Mont-Laurier. Cette portion
représente environ 90% des forces hydrauliques exploitées
à la centrale des rapides de l'Orignal. L'autre 10% des forces
hydrauliques appartient déjà à l'entreprise Les Produits
forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc., filiale à 100% de la
société d'État REXFOR. Évidemment, c'est à
partir de cette affiliation entre Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda
Inc. et la société d'État REXFOR que les
députés de l'Opposition ont décidé de mener, comme
je l'ai dit au début, une charge à fond de train contre cette
société d'Etat. (20 h 20)
L'entreprise Bellerive-Ka'N'Enda prévoit produire 16 000 000 de
kWh par année qui serviront, entre autres, à alimenter la future
usine de panneaux de densité moyenne qu'on appelle MDF, d'une
capacité de production annuelle de 75 000 000 de pieds carrés.
Présentement, la compagnie génère 300 emplois dans le
domaine du contre-plaqué et du sciage. L'usine de contre-plaqué,
qui produit essentiellement des portes, est alimentée par les
installations hydroélectriques de Bellerive-Ka'N'Enda tandis que l'usine
de sciage est approvisionnée à l'heure actuelle par le
réseau d'Hydro-Québec.
Comme les installations de Bellerive ne consomment qu'environ la
moitié de l'énergie produite par la compagnie, il est possible
d'alimenter une nouvelle usine de panneaux MDF avec l'électricité
produite par le barrage des rapides de l'Orignal. C'est ce que vient
concrétiser le projet de loi 9 en permettant au gouvernement,
conformément à l'article 3 de la Loi sur le régime des
eaux (LRQ, chapitre R-13), de louer pour une période de 40 ans une
partie des forces hydrauliques de la rivière du Lièvre à
la compagnie Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc.
Comme Hydro-Québec n'est pas intéressée à se
porter acquéreur de la centrale qui, par ailleurs, est en très
bonne condition de production, il est d'intérêt public que ces
installations continuent à contribuer au potentiel
hydroélectrique du Québec. De plus, ce projet de loi sera
profitable au gouvernement du Québec qui s'assure des revenus de
location d'environ 2 630 000 $, en dollars courants, pour les 40 prochaines
années, c'est-à-dire environ 26 000 $ par année avec un
taux moyen d'inflation de 5%.
Donc, en facilitant la construction d'une usine de panneaux de bois
pressé évaluée à environ 70 000 000 $, le projet de
loi 9 s'avère important pour l'avenir de la compagnie Les Produits
forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc. et pour l'avenir économique de toute
la région de Mont-Laurier. C'est pour cela que le ministère de
l'Énergie et des Ressources est heureux de présenter ce projet de
loi qui permettra de créer environ 175 emplois dans la région de
Mont-Laurier lorsque cette usine sera construite et aura atteint son rythme de
croisière.
M. le Président, à partir de ce principe et comme il est
question de la société d'État REXFOR, puisque la compagnie
dont il est question dans le projet de loi est une filiale à 100% de
notre société d'État, je voudrais parler un peu de REXFOR
et inviter là-dessus mon collègue d'Outremont à faire
preuve d'un peu plus de retenue dans les accusations portées à
l'endroit d'une société d'État et de vérifier un
certain nombre de choses, de vérifier ses dossiers avant de mettre toute
la faute, tout ce qui ne va pas bien dans différentes entreprises dans
lesquelles la société d'État REXFOR est partenaire, avant
de mettre toute la faute sur cette société d'État.
J'inviterais le député d'Outremont, qui a une formation
d'ingénieur, qui est supposé être une sommité du
côté de l'Opposition dans le domaine de l'énergie
nucléaire - je le reconnais quand même comme étant un
député de grande valeur qui est capable d'approfondir des
dossiers - d'être un peu plus positif lorsqu'il parle de
sociétés d'État.
L'Opposition a cette fâcheuse habitude de descendre les
différentes sociétés d'État qui existent au
Québec. Ils ignorent, pour plusieurs d'entre eux, que c'est le Parti
libéral, de 1960 à 1966 et de 1970 à 1976 qui a
créé le plus de sociétés d'État au
Québec. Or, pour un parti qui a formé le gouvernement à
l'époque, qui n'avait pas
honte de fonder, de créer des sociétés
d'État, je me demande un peu pourquoi aujourd'hui, dans les
années quatre-vingt, les sociétés d'État qui ont
joué un rôle important dans différents domaines ne seraient
pas appelées à jouer également un rôle tout aussi
important dans les années à venir.
Ceci m'amène à parler particulièrement d'une
région que je connais bien. On pourrait faire des projections, et
ajouter que ce qui s'est produit dans notre région du
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie peut se produire également
ailleurs.
Il a été mentionné justement par le
député d'Outremont que la société REXFOR s'est
impliquée dans des usines de sciage et également dans une usine
de panneaux meubles dans la région du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie
et particulièrement dans la région de Matane, de
Gaspé-Nord et de la vallée de la Matapédia.
S'il n'y avait pas eu une société d'État comme
REXFOR, qui avait pris la décision, si on avait laissé ça
à l'entreprise privée, qui aurait été capable, par
exemple, dans ma région, de racheter les actifs de la scierie de
Saint-Léon-le-Grand ou de celle de Lac-au-Saumon, qui aurait
été en mesure de devenir partenaire des frères Kunz,
d'Allemagne, en vue de l'implantation de l'usine de panneaux meubles de Sayabec
dans la Vallée de la Matapédia qui justement nous a
été donnée en échange de la papeterie qui est
déménagée, du moins en théorie, à Matane, au
cours de l'année 1981? Et qui, dans la situation actuelle de l'industrie
du sciage au Québec - je vous prie de retenir que c'est loin
d'être intéressant pour les industriels du sciage à l'heure
actuelle -quelle est l'entreprise privée qui aurait été
capable de se lancer dans un projet de plus de 30 000 000 $ pour une usine de
préparation de bois à Matane afin d'ouvrir des
débouchés pour l'usine de Grande-Vallée, pour celle de
Marsoui, pour celle de Sainte-Anne-des-Monts, pour celle de
Saint-Léon-le-Grand, pour celle de la Lac-au-Saumon et pour quelques
autres également qui sont prévues dans les prochaines
années ou les prochains mois dès que des problèmes de
faillite seront réglés? Quelle est l'entreprise privée qui
aurait été capable de se lancer dans un tel projet?
Il ne faudrait pas que le Parti libéral répète les
mêmes erreurs là-dessus qu'il a faites dans le passé. Qui
était propriétaire de l'usine de Saint-Léon? Qui a
été le premier promoteur de l'usine de Saint-Léon
lorsqu'elle a été implantée? Qui était
propriétaire de l'usine de Lac-au-Saumon lorsque la
société d'État REXFOR s'en est portée
acquéreur? Je pense qu'il y aurait des choses intéressantes
à mentionner à ce sujet.
Je ne voudrais pas qu'on mette la société d'État...
On voit carrément, par les paroles que j'ai entendues cet
après-midi, que le député d'Outremont voudrait ni plus ni
moins la mort, carrément, de la société REXFOR. Pour faire
quoi? Probablement pour redistribuer les usines les plus rentables parmi un
certain nombre d'amis de ce parti, ce qui a été fait dans le
passé. La société d'État REXFOR est intervenue dans
notre région, elle a pu racheter les actifs et faire redémarrer
des usines de sciage dans une période extrêmement difficile dans
ce domaine. Donc, avant de jeter la pierre à cette
société, avant de vouloir la détruire, avant de lui faire
une mauvaise réputation dans tout le Québec, j'invite M. le
député d'Outremont - il a dit qu'il venait souvent dans la
région; je l'ai rencontré à l'aéroport de
Québec; il partait pour la Côte-Nord ou la Gaspésie -
à revenir encore plus souvent, à revenir chez nous, et à
constater sur place le travail que la société REXFOR a
été appelée à faire. Là-dessus, je vais
être très clair, je voudrais dire que je n'absous pas la
société REXFOR de toute faute. Il est possible, parce qu'on lui a
confié des mandats difficiles, que cette société ait fait
des bons coups, et elle en a fait. Il est possible qu'elle ait fait des coups
un peu moins intéressants, mais quand le gouvernement libéral
aussi bien que le nôtre, nous nous sommes servis de cette
société pour aller au secours d'entreprises en difficulté,
cette société y est allée et pas toujours dans les
conditions les plus favorables. Je voudrais que, là-dessus, on donne
à chacun ce qui lui est dû et qu'avant de condamner cette
société d'État, on s'informe davantage et on approfondisse
les dossiers. (20 h 30)
Le député d'Outremont a fait allusion à la
papeterie de Matane en disant que nous avions fait perdre comme gouvernement
-évidemment, il a mis le ministre de l'Énergie et des Ressources
à l'époque, le député de Matane, dans le coup, et
également la société REXFOR - huit ans aux gens de Matane
qui attendaient une papeterie. Je voudrais corriger d'abord quelque chose.
Avant d'être la papeterie de Matane, c'était la papeterie de la
Matapédia. J'ai ici ce qui s'est écrit dans les journaux au sujet
de la papeterie de la vallée de la Matapédia. Cela s'est
passé en 1979-1980 et une partie de 1981. Quand le député
d'Outremont vient dire que la population de Matane attend sa papeterie ou
attendait une papeterie depuis huit ans, je l'inviterais à
vérifier ses sources et à s'informer davantage. Je suis heureux
qu'un député de la région de Montréal
s'intéresse au dossier d'une région comme la nôtre, mais je
l'invite à approfondir davantage ses dossiers avant d'en parler à
l'Assemblée nationale et de se prononcer d'une façon
catégorique.
Le député d'Outremont, dans son intervention sur le
principe de la loi, a
également mentionné le problème qui existe à
la Société d'exploitation des ressources des Monts qui, à
l'heure actuelle, éprouve de sérieuses difficultés
financières, à la suite d'erreurs administratives possibles - ce
sera démontré en temps et lieu si on doit aller jusque là.
Le député d'Outremont semblait mettre la faute sur REXFOR parce
que REXFOR est allée en soumissions et que la Société des
Monts a eu le contrat de coupe de bois. Il ne s'interroge pas sur toutes les
causes qui pourraient être à la source de ce problème qui
existe à la Société des Monts. Là aussi, je
voudrais faire un bref historique des sociétés d'exploitation.
D'où cela vient-il? Il y en a partout dans la région chez nous.
Il y en a une dizaine ou une quinzaine dans la région du
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. Elles sont nées des opérations
"Dignité" dans les années où il devait y avoir une
quarantaine de paroisses fermées dans le
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie et que les gens des petites paroisses se sont
levés pour dire: Vous ne fermerez pas nos paroisses. C'était sous
le gouvernement libéral. D'ailleurs, le rapport Higgins, Martin,
Raynauld - dont l'un des coauteurs était l'ancien député
d'Outremont que je respecte beaucoup -recommandait de fermer les paroisses dans
notre région et d'envoyer le monde dans les villages et dans les villes
et de les faire vivre dans des HLM. Cela a réussi dans une dizaine de
villages, mais, à un moment donné, les opérations
"Dignité" ont commencé et cela s'est arrêté.
Ensuite, cela a donné lieu a la fondation de sociétés
d'exploitation des ressources. Dans ces sociétés qui sont des
groupements populaires, ce ne sont pas des gens qui ont de grandes
connaissances en administration qui dirigent ces sociétés, ces
conseils d'administration. Ils ont sauvé notre région et,
même s'il y a eu des erreurs commises à cause d'un manque de
connaissances ou carrément des erreurs, il ne faudrait peut-être
pas leur jeter la pierre immédiatement, parce que, dans les entreprises
privées, les petites, les moyennes et les grandes comme Massey-Ferguson
aux États-Unis - il y en a également au Canada et au
Québec - il y a des compagnies privées qui ont fait des erreurs.
Pourtant, elles sont censées être dirigées par des gens
d'une grande compétence. Alors, avant de lancer la pierre aux gens de la
région de Matane qui ont supporté la Société
d'exploitation des Monts pendant des années, qui ont créé
des emplois, là aussi, je recommande au député d'Outremont
d'aller voir un peu plus loin ce qu'il y a dans ce dossier. En passant, hier,
au cabinet du ministre, il y a eu une réunion qui a duré
plusieurs heures avec les représentants de la société par
le biais du Syndicat des producteurs de bois du Bas-Saint-Laurent et,
dès vendredi, une recommandation sera remise au ministre de
l'Énergie et des
Ressources et une décision sera prise dans ce dossier.
Voilà ce que j'avais à dire, d'abord, sur l'adoption du
principe du projet de loi et aussi dans une tentative de relever un certain
nombre d'erreurs qui ont été mentionnées par le critique
officiel de l'Opposition sur ce dossier. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Papineau.
M. Mark Assad
M. Assad: Merci, M. le Président. J'écoutais le
député de Matapédia parler de REXFOR, et le reste, une
société de la couronne ou une société
d'État, si vous voulez. Vous savez, dans le passé je crois qu'on
a hésité à critiquer les sociétés
d'État pour la simple raison que c'est la création d'un
gouvernement, la création d'une collectivité. Les objectifs sont
toujours fort louables et on hésite à critiquer. Mais je crois
que depuis des années on n'a pas eu un grand succès avec nos
sociétés d'État. La raison est peut-être qu'on a
hésité à les critiquer. D'ailleurs, du fait que ce sont
des sociétés d'État, on aurait dû davantage
critiquer, c'est-à-dire vouloir que ce soit absolument impeccable comme
activité. Si ça ne peut pas être rentable, au moins qu'il
n'y ait pas les déficits énormes qu'on connaît chez nos
sociétés d'État.
Dans ce projet de loi-ci, on sait que le maître-d'oeuvre, c'est
REXFOR. Je voudrais simplement, sans faire le procès de la
société d'État REXFOR, rétablir quelques faits,
faire l'évaluation des objectifs de REXFOR. Il y a peut-être cinq
grandes lignes qui pourraient définir les objectifs de REXFOR: la
récupération du bois, la stabilisation, l'aménagement
forestier, la sauvegarde des intérêts locaux, comme le
député de Matapédia l'a mentionné pour sa
région, la création d'emplois.
Au chapitre de la récupération, REXFOR a été
créée en 1969 pour récupérer et exploiter toute
agglomération de bois qui est menacée d'être perdue sur les
terrains des domaines publics et que le lieutenant-gouverneur en conseil a
jugé assez considérable pour qu'il soit dans
l'intérêt général du Québec de la
récupérer et de l'exploiter. Je crois que REXFOR a encore subi un
échec il y a quelques années avec une quantité
énorme de bois qui finalement était perdu, n'avait pas
été récupéré à temps et,
évidemment, cela n'a pas été exploité à
notre avantage. Avec le temps, cet objectif déclina progressivement. On
n'en conserve plus, à toutes fins utiles, que le nom. Il est à
noter que l'implication de REXFOR dans la récupération du bois a
été affectée par la tordeuse et ça n'a pas
été tellement efficace.
Qu'est-ce qui touche la stabilisation et l'approvisionnement? On voit
qu'en 1973, REXFOR devient une compagnie à fonds social ayant le mandat
de stimuler l'implantation et le développement de l'industrie
forestière. Elle va garantir des approvisionnements en bois aux
industries forestières. Elle utilise ce levier d'approvisionnement pour
exiger, dans certains cas, une participation avec l'entreprise privée en
achetant une partie du capital-actions. En 1973, REXFOR s'implique de plus en
plus dans l'industrie forestière et tente de développer une
stratégie industrielle.
Pour ce qui concerne l'aménagement forestier, de 1973 à
1978, REXFOR a construit 148 000 kilomètres de chemins d'accès
afin de rendre possible la cueillette dans certains territoires. Bien que la
loi de REXFOR stipule que la société doit, en premier,
revaloriser, conserver et protéger la forêt, il semble qu'il
n'existe pas de véritable préoccupation de revalorisation des
ressources forestières, surtout depuis 1976.
Qu'est-ce qui touche la sauvegarde des intérêts locaux?
Encore en 1973, REXFOR s'est impliquée dans plusieurs industries et dans
plusieurs régions du Québec. Au fil des années, sa
participation dans les filiales a beaucoup changé. Cinq de ses filiales
principales sur un total de sept ont fait des pertes en 1982 et 1983. Certes
REXFOR a une signification vitale pour certaines régions comme la
Gaspésie. Cependant, on devrait s'interroger sur la manière
d'agir et la gestion de cette compagnie dans certains cas, c'est-à-dire
pour la scierie de Taschereau et Samoco, ITT Rayonier et d'autres. (20 h
40)
Dans le domaine de la création d'emplois, depuis quelques
années REXFOR essaie autant que possible de sauvegarder des emplois dans
l'industrie. Son apport est important, mais ce qui nous inquiète, c'est
que REXFOR a tendance à faire concurrence à l'entreprise
privée, ce qui diminue la performance de cette dernière et
provoque une baisse de l'emploi. C'est cela qui arrive finalement.
Si on regarde l'évolution des filiales de REXFOR depuis 1977,
elles ont connu une expansion et un changement remarquable. Si on arrête
à l'examen des états financiers des trois dernières
années, il s'avère que la scierie Bernier Inc. a connu des
profits nets de l'ordre de 88 000 $ en 1981 et des pertes de 635 000 $ en 1982.
Finalement, en 1983, une perte qui a presque atteint 900 000 $. Les Produits
forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc. ont connu des bénéfices nets
de l'ordre de 54 000 $ en 1981 et des pertes nettes de 1 300 000 $ en 1983 et
de 3 200 000 $ en 1982 et 1983 respectivement.
Finalement lorsqu'on regarde la performance de REXFOR, il faut dire
qu'elle a eu un rôle un peu ambigu c'est-à-dire celui de
compétiteur du secteur privé et celui d'aide au secteur
privé. Cela nous fait poser la question de la mission de REXFOR. Quelle
est-elle? Doit-elle aider les entreprises en difficulté? Ou doit-elle
prendre un contrôle majoritaire et absolu des sociétés en
difficulté une fois qu'elle les aura remis en route? En effet, c'est la
confusion dans les rôles de REXFOR. On se rappellera qu'il y a environ
deux ans, REXFOR a présenté un plan de développement au
Conseil des ministres. Celui-ci n'a jamais été approuvé.
REXFOR se trouve avec une mission et un mandat confus et ambigu depuis quelques
années. Nous déplorons le manque d'orientation du gouvernement et
de REXFOR. Nous déplorons que l'orientation et les définitions
d'orientation ne soient pas données par le gouvernement, comme c'est
d'ailleurs son rôle. REXFOR doit se comporter comme une
société rentable tout en tenant compte de l'aspect social. Il est
évident que dans des périodes d'inflation où le taux
d'intérêt est très élevé, il n'est pas
toujours possible d'être rentable. Mais au moins que les pertes soient
réduites autant que possible.
Finalement quand on dit que le rôle de REXFOR est ambigu.
Pourtant, l'article 24.1 de la Loi sur REXFOR stipule que la
société doit, à chaque année, soumettre au
gouvernement pour approbation son plan de développement et celui de ses
filiales. Le gouvernement détermine la forme et la teneur du plan de
développement ainsi que l'époque où il doit être
présenté.
En conclusion, M. le Président, on prétend que le
rôle de REXFOR devrait être celui d'une aide à l'entreprise
privée. Pas de faire de concurrence avec l'entreprise privée et
pas non plus de prendre le contrôle de l'entreprise privée, mais
d'être une aide. Pour jouer ce rôle, c'est au gouvernement de le
définir, une fois pour toutes. Qu'on sache tous que son rôle est
d'aider des compagnies pour exploiter la forêt, les compagnies
privées et que le gouvernement qui définira le rôle de
REXFOR s'assure effectivement qu'elle le remplira.
Que REXFOR possède des compagnies privées, on trouve que
c'est la manière la plus efficace pour l'ensemble de la population parce
que le gouvernement possède les deux armes les plus importantes dans une
démocratie, c'est-à-dire le droit de légiférer et
le droit de taxer. Donc, l'État possède l'instrument par
excellence, que ce soit l'entreprise privée - ce n'est pas un
péché mortel - et ce n'est pas un péché mortel non
plus que le gouvernement, par l'entremise de ses compagnies, comme ses filiales
ou ses sociétés d'État qui l'aident, soit prospère,
qu'il crée des emplois, qu'il
stabilfse le marché des produits forestiers. Dans l'ensemble, on
va bénéficier de ces créations d'emplois et avec des
profits, évidemment, le gouvernement va avoir sa part par la taxation et
on va être tous des gagnants à la fin. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Hull.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Merci à mes
collègues de leurs applaudissements. Le projet de loi dont nous
étudions le principe ce soir en deuxième lecture concerne la
location de forces hydrauliques de la rivière du Lièvre
située effectivement dans l'Outaouais québécois Les
Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc., qui appartient maintenant
à REXFOR. C'est un projet de loi qui peut paraître anodin, parce
que c'est de reconduire un bail pour une durée de 40 ans, mais quand on
examine de plus près le rôle qu'a joué cette
société d'État jusqu'à maintenant,
c'est-à-dire la société REXFOR, on peut se poser de
sérieuses questions, à savoir si on doit continuer à faire
confiance à cette société d'État et plus
particulièrement à faire confiance à ce gouvernement qui
nous arrive avec des projets de loi semblables.
Si j'ai accepté de dire quelques mots sur ce projet de loi, c'est
parce que chez nous, en Outaouais, cela nous préoccupe davantage parce
qu'on avait promis aux cinq comtés de l'Outaouais dont je suis l'un des
représentants en 1981 entre autres, la construction d'un complexe
forestier en Haute-Gatineau. On se souvient à ce moment-là que
les ministres du gouvernement actuel, avant l'élection de 1981,
faisaient la parade dans les différents comtés du Québec
et allaient annoncer des projets ou l'implantation de projets. Ce qui me
préoccupe aujourd'hui dans le projet de loi 9, c'est qu'on confie
à une société d'État, c'est-à-dire à
REXFOR un mandat, un bail à long terme et ce bail à long
terme...
On devrait, premièrement, discuter de la raison d'être
aujourd'hui ou de la raison de continuer d'être, de REXFOR. Pour nous,
dans l'Outaouais québécois, REXFOR, c'est pratiquement un
concurrent. C'est une société d'État qui a servi ou qui a
été en complicité avec le gouvernement actuel pour nous
soustraire littéralement un complexe forestier en Haute-Gatineau et plus
précisément à Maniwaki, un complexe forestier d'une valeur
approximative de 11 000 000 $. Maniwaki devait implanter une usine de MDF.
Depuis ce temps, on a appris quoi? Pourtant, en 1981, les ministres du
gouvernement, comme je le disais tantôt, entre autres, M.
Bérubé, qui était ministre de l'Énergie et des
Ressources à ce moment- là, le ministre Landry du
Développement économique, le ministre Duhaime, qui est
allé faire un tour dans les parages de la Haute-Gatineau, la
députée et ministre des Travaux publics, Mme Jocelyne Ouellette,
la marraine de l'Outaouais à ce moment-là, avaient annoncé
ce complexe forestier qui avait été approuvé par le
Comité des priorités du gouvernement. (20 h 50)
On s'aperçoit aujourd'hui, à la lecture du projet de loi
9, que l'on veut confier une autre fois un bail à long terme à
une société d'État qui a effectivement été
complice avec le gouvernement au cours des dernières années pour
nous soustraire les promesses qu'on nous avait faites. Je m'explique mal que le
ministre, ce matin, nous ait dit à peine quelques mots sur ce projet de
loi et soit parti immédiatement, avant même d'entendre la
réplique de mon collègue, le député d'Outremont,
qui était très pertinente à l'ensemble du projet de loi et
très pertinente aussi quant à la remise en question de cette
société par l'Opposition officielle. Nous considérons
qu'elle est devenue à toutes fins utiles un concurrent de l'entreprise
privée. Et encore, si c'était un concurrent qui rapportait
à l'État des profits... Mais, au contraire, elle accumule des
pertes d'année en année. Son coût d'administration est
assez élevé et ses succès sont relatifs.
Chez nous, dans l'Outaouais, on pourrait nous annoncer demain matin que
REXFOR a été tout simplement limogée, je pense que tous
les gens de l'Outaouais en seraient heureux. Heureux, je l'ai mentionné
tantôt, parce qu'on s'est fait avoir une autre fois par la
complicité entre le gouvernement et REXFOR dans le but d'aménager
une industrie à Mont-Laurier. On se souviendra qu'à ce
moment-là, le ministre et député du comté de
Labelle, ex-ministre des Affaires municipales et ex-ministre des Transports,
maintenant député indépendant, avait travaillé fort
lui aussi dans le but de soustraire à l'Outaouais ce projet important
afin de l'implanter plutôt à Mont-Laurier par l'entremise de la
société REXFOR.
Ce qui m'a déçu le plus, à ce moment-là,
c'est que REXFOR est effectivement venue en concurrence avec la compagnie
MacLaren qui, à ce moment-là, étudiait les
possibilités de l'implantation d'une usine de MDF à Maniwaki. On
n'a jamais su effectivement le fond de l'histoire. REXFOR, d'une part,
Mont-Laurier et, d'autre part, MacLaren à Maniwaki, MacLaren qui avait
déjà dépensé des milliers de dollars dans le but de
parfaire une étude sur les intérêts et les
possibilités de l'implantation de ce complexe forestier dans le secteur
Maniwaki, dans la Haute-Gatineau, et l'implantation d'une usine MDF.
Selon ce qu'on a entendu par la suite,
certaines pressions se sont exercées sur MacLaren afin qu'elle se
retire tout simplement du dossier, qu'elle abandonne la possibilité
d'implanter un projet ou un complexe forestier en Haute-Gatineau et, plus
particulièrement, dans le secteur Maniwaki. Je sais pertinemment que
MacLaren ne pourrait pas aller dénoncer le gouvernement du
Québec, que MacLaren ne pourrait pas non plus affirmer ou infirmer le
fait qu'elle a dû abandonner son projet à Maniwaki au
bénéfice de REXFOR à Mont-Laurier, tout simplement
à cause du fait que les coupes de bois, les permissions et les
concessions sont accordées par le gouvernement du Québec.
À ce moment-là, MacLaren se serait trouvée dans une
situation délicate pour renouveler ses baux ou ses possibilités
de concessions de bois, d'autant plus qu'elle avait certaines de ses coupes
dans le secteur de Mont-Laurier.
J'ai été terriblement déçu à
l'époque, d'autant plus que je trouve que c'est malhonnête de la
part d'un gouvernement ou de la part de ministres qui se rendent dans une
région frappée par un chômage fort élevé, qui
connaît un niveau d'assistance sociale très important, faire
miroiter des projets semblables pour, par la suite, tout simplement les
transférer d'une région à une autre, c'est-à-dire
dans le secteur Mont-Laurier qui, à la suite du découpage de
l'Outaouais québécois, fait maintenant partie des
Laurentides.
Ce n'était pas acceptable pour nous, ce l'est encore moins
aujourd'hui et nous contestons le fait que cette société
d'État, à qui on a confié des mandats importants, devienne
ni plus ni moins un compétiteur pour l'entreprise privée qui
aurait pu faire démarrer un projet important employant un nombre assez
important d'ouvriers.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, comme mon
collègue d'Outremont l'a mentionné ce matin, nous consentirions
à voter pour le projet de loi moyennant le fait que le ministre accepte
de modifier, par un amendement, la durée du bail en faisant passer la
durée de 40 ans à deux ans.
Durant ce temps, la société d'État REXFOR pourrait
faire une remise en question de son existence. Si elle n'était pas
capable de le faire elle-même, le gouvernement pourrait sûrement
confier un mandat à une firme d'experts-conseils dans le but de
réévaluer cette société d'État et
d'empêcher qu'elle serve de complice au gouvernement pour éviter
l'implantation au Québec d'industries de l'entreprise privée.
Pour cette raison en particulier, je sais pertinemment que notre
formation politique devra se prononcer contre le projet de loi 9 et attendre en
commission parlementaire pour savoir si le ministre a l'intention d'y apporter
certains amendements dans le but de permettre à cette
société d'État de faire une évaluation de son
travail jusqu'à aujourd'hui, d'examiner aussi les programmes qu'elle
envisage pour les années à venir et de soumettre ça
à l'attention de l'Assemblée nationale ou à l'attention du
ministre responsable pour qu'on puisse, par la suite, en faire une
évaluation et y apporter nos commentaires.
Là-dessus, je conclus, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre,
dans votre droit de réplique.
M. Jean-Guy Rodrigue (réplique)
M. Rodrigue: Merci, M. le Président. Quand on s'adresse
à des hommes d'affaires et qu'on leur demande d'investir dans
l'économie du Québec, de prendre des risques jusqu'à un
certain point, parce que tous ceux qui investissent assument plus ou moins des
risques dans ce domaine-là, il ne m'apparaît pas sérieux de
faire comme l'Opposition et de leur dire: Dans deux ans on vous dira si on
continue les ententes qu'on a avec vous ou bien on décidera si, au
contraire, on les annule.
Ce n'est pas comme ça que ça se passe. Il me semble que
là-dessus l'Opposition utilise ce que je qualifie non pas d'un argument
mais d'un prétexte pour la justifier de voter contre un projet de loi
qui, somme toute, a sensiblement les mêmes conséquences que le
projet de loi 70 que nous avons adopté l'an passé, pour lequel
elle a voté et qui concernait des quantités d'énergie
beaucoup plus fortes que celle qui est concernée par ce projet de loi.
Finalement, nos amis d'en face ont beaucoup parlé de REXFOR pendant le
débat mais il est peut-être utile de rappeler, pour ceux qui nous
écoutent, que finalement l'objet de ce projet de loi, c'est de louer une
partie des forces hydrauliques de la rivière du Lièvre à
la société Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc,
filiale de REXFOR. (21 heures)
Finalement, il s'agit de renouveler un bail qui avait été
consenti en 1943. Qui plus est, cette compagnie est propriétaire de 10%
des forces hydauliques, propriétaire à parts entières.
D'autre part, 90% des forces hydrauliques étaient inutilisées et
elles lui ont été louées, mais cette compagnie
était déjà sur place et elle possède encore les 10%
des forces hydrauliques en propre. À ce moment-là, si on ne
consent pas à les lui louer, qui va opérer cette petite centrale
qui est à Mont-Laurier? J'aimerais que l'Opposition
réfléchisse à cela, parce que...
Enfin, M. le Président, je pense que tout cela, c'est un
prétexte finalement. C'est un prétexte pour attaquer REXFOR. Je
pense que le projet de loi 9 avait un tout autre objet, mais, là, on a
trouvé que l'occasion était belle. Je ne sais pas si c'est
pour
régler des vieux comptes. Je sais que, l'an passé, il y a
eu une commission parlementaire et je ne sais pas si l'Opposition est
frustrée de ce qui s'est déroulé cette
journée-là. Je sais qu'elle avait beaucoup de questions à
poser. Elle les a posées et elle a eu les réponses qu'elle
cherchait. Cela ne cadrait pas toujours avec ce qu'ils auraient voulu entendre
comme réponses, mais les réponses étaient là et ils
ont bien dû les accepter. Dans un contexte comme celui-là, c'est
peut-être le fruit d'une frustration qui, aujourd'hui, nous amène
à entendre tous ces éclats concernant REXFOR alors que nous
étudions un petit projet de loi tout simple qui a pour objet de
renouveler un bail qui avait déjà été consenti en
1943 et que nous voulons renouveler pour une autre quarantaine d'années
parce que cette compagnie est la seule à pouvoir utiliser ces forces
hydrauliques, de toute façon.
Je pense que c'est utile de le rappeler, ce projet de loi 9, qui porte
sur la location des forces hydrauliques de la rivière du Lièvre,
est un projet de loi qui, dans le fond, a un caractère essentiellement
économique. Son adoption nous permettrait d'envisager un investissement
important à Mont-Laurier, un investissement important dans une usine de
fabrication de panneaux de bois qui est évaluée à environ
70 000 000 $ et qui permettrait de générer 175 nouveaux emplois.
Comme ministre de l'Énergie et des Ressources - je pense que c'est
l'attitude de l'ensemble des collègues du gouvernement -nous n'avons
aucune objection à ce que des investissements se fassent à
Maniwaki aussi. Dans la mesure du possible, nous allons tenter également
de susciter des investissements à Maniwaki. Mais il appert que, pour
cette usine de bois, ceux qui ont fait l'analyse économique du
côté de REXFOR et compte tenu qu'il y a peut-être là
un avantage parce qu'il y a une petite centrale qui lui appartient, en sont
venus à la conclusion que, sur le plan économique, il y avait
intérêt pour eux à s'installer à Mont-Laurier. Mais
je sais que mon prédécesseur, l'actuel ministre des Finances,
enfin l'ex-ministre de l'Énergie et des Ressources, soit directement ou
par l'intermédiaire de ses fonctionnaires, avait établi des
contacts avec les gens de Maniwaki à l'occasion de certaines
manifestations et il avait quand même été convenu de faire
l'examen d'un certain nombre de mesures et de tenter de piloter des projets
pour en arriver à créer également une activité
économique dans la région de Maniwaki de façon qu'ils
puissent aussi profiter de la relance économique qui se produit au
Québec cette année.
M. le Président, le fait que ce soit bon pour Mont-Laurier, je
pense, ne doit pas être pris avec ombrage par les gens de la
vallée de la Gatineau. Le projet de route de Belleterre, si le
gouvernement fédéral veut s'impliquer, comme l'a souligné
mon prédécesseur, quant à nous, nous sommes
disposés à le pousser également. Je pense que les gens de
Maniwaki le souhaitent ardemment. Il y a également d'autres projets qui
ont été envisagés lors de ces rencontres et qui pourraient
éventuellement aboutir.
En fait, l'Opposition, dans ce débat, n'a pas montré
beaucoup d'intérêt pour le projet de loi. Son porte-parole, le
député d'Outremont, finalement, a utilisé - je l'ai
chronométré - je pense qu'il a parlé trois minutes sur le
projet de loi et il a parlé 17 minutes pour faire le procès de
REXFOR, une importante société d'État. Je trouve que cette
méthode est un peu cavalière dans la mesure où on fait le
procès d'une entreprise, on la critique, on l'attaque alors qu'elle
n'est pas là pour se défendre. Lorsque la commission
parlementaire a eu lieu en juin dernier, les porte-parole de REXFOR
étaient présents, les députés de l'Opposition
étaient là. Ils ont pu poser toutes les questions aux
porte-parole de REXFOR, à ceux qui représentaient cette compagnie
et ils ont eu les réponses qu'ils souhaitaient. Je pense que c'est dans
le cadre d'un débat comme celui-là qu'on doit soulever ce genre
de questions.
Il ne s'agit pas de cesser de s'interroger sur l'orientation, sur la
façon dont sont administrées les sociétés
d'État, sur les résultats qu'elles obtiennent ou non. C'est notre
rôle d'examiner la gestion des sociétés d'État et
dans ce sens, l'Opposition a le droit de le faire autant que les
députés ministériels. Mais de profiter d'un projet de loi
comme celui-là qui porte sur un tout autre objet pour attaquer
indûment une société d'État qui, je pense, dans la
période difficile que nous avons connue récemment a quand
même tiré son épingle du jeu et a permis de sauvegarder un
bon nombre d'emplois au Québec et de le faire alors que cette
société n'est pas en mesure de se défendre par ses
représentants, cela me paraît cavalier et cela ne me paraît
pas très courageux non plus. En juin dernier, lors de la commission
parlementaire, les échanges entre les parlementaires et REXFOR ont
duré une journée. À ce moment-là, l'Opposition a eu
toute la chance de poser les questions qu'elle voulait poser à REXFOR.
Si elle en avait d'autres, pourquoi ne pas l'avoir fait à ce
moment-là? Il me semble que cela démontre un peu, finalement, que
c'est plus facile d'attaquer quand ceux qui sont visés ne sont pas
là pour donner la réplique. C'est un peu ce qui se produit
aujourd'hui.
Un peu dans la même veine, d'ailleurs, dans le discours qu'a
prononcé le porte-parole officiel de l'Opposition, il s'est
demandé - et il a laissé planer des doutes là-dessus - si
mon prédécesseur, le ministre des Finances et
député de Saint-Maurice, avait menti à l'Assemblée
nationale en juin
dernier lorsqu'il a demandé de voter pour le projet de loi 66 qui
octroyait un capital-actions de 35 000 000 $ à REXFOR pour la
réalisation de la papeterie de Matane alors que, trois mois plus tard,
le mandat était transféré à la
Société générale de financement. Puisque la
question a été posée, j'aimerais y apporter ici la
réponse qui est toute simple. Au moment où l'actuel ministre des
Finances qui était à cette époque ministre de
l'Énergie et des Ressources a fait cette annonce, effectivement, REXFOR
avait reçu mandat de piloter ce projet à Matane. Ce qui est
intervenu par la suite, c'est qu'à la mi-septembre, la
Société générale de financement et la compagnie
Consolidated Bathurst Inc. ont annoncé qu'elles entreprenaient de leur
côté une étude de faisabilité pour une usine de
pâte chimico-thermo-mécanique blanchie à Matane d'une
capacité de 180 000 tonnes. Matane peut recevoir une usine; elle ne peut
pas en recevoir deux. Il y a une question d'approvisionnement. La
Société générale de financement est une
société d'État; REXFOR est une société
d'État. Vous comprendrez que, devant cette situation, étant
donné que le projet SGF-Consol, comme on l'appelle, semblait prometteur,
le gouvernement a décidé en octobre 1984, sous la recommandation
du ministre de l'Énergie et des Ressouces, de mettre fin, d'une part, au
mandat de REXFOR quant à la papeterie de Matane, de confier le mandat de
poursuivre son étude de faisabilité au consortium SGF et
Consolidated Bathurst et a demandé, par ailleurs, à REXFOR
d'aller examiner quelles seraient les possibilités d'aménagement
d'une usine de pâte du côté de Port-Cartier,
c'est-à-dire à l'ancienne usine de Rayonier. En fin de compte, il
était un peu ridicule d'avoir deux sociétés d'État
qui visaient le même projet et le même emplacement et, d'un autre
côté, d'être pris avec une usine qui est fermée, pour
laquelle on cherche une vocation et dont personne ne s'occupe.
C'est la raison pour laquelle le Conseil des ministres du gouvernement
du Québec a décidé de confier à chacune des
entreprises un mandat bien spécifique: SGF-Consol à Matane et
REXFOR du côté de Port-Cartier. Je sais que REXFOR envisage un
certain nombre de projets de ce côté. Il y a des consortiums
européens qui sont en train de faire des analyses. REXFOR agit avec eux
pour essayer de les intéresser le plus possible et de les amener
à utiliser cette usine. (21 h 10)
C'est cela qui s'est passé tout simplement. Je ne pense pas qu'il
y ait lieu de monter sur ses grands chevaux et faire des drames avec ça.
Ce sont des décisions toutes simples et toutes logiques et souvent les
décisions les plus logiques sont les plus simples. C'est ce qui s'est
passé dans ce cas. Maintenant, il serait peut-être utile qu'on
revienne au projet de loi 9 parce que finalement c'est ça qui est
l'objet de notre débat. L'Opposition dit que le projet de loi sur la
location des forces hydrauliques de la rivière du Lièvre à
Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda est à peu près
identique au projet de loi 70 adopté en juin dernier qui a permis
d'approuver un nouveau bail hydroélectrique pour une période de
50 ans sur la rivière Péribonka.
Si l'objectif est identique et comme l'Opposition a voté pour, je
ne sais pas ce qui a pu survenir entre le moment où ils ont
décidé de voter sur ce projet de loi et aujourd'hui, alors qu'ils
nous annoncent qu'ils vont voter contre, mais il me semble qu'il y a là
un illogisme qui n'est pas expliqué et qui n'a pas été
expliqué par eux à l'occasion de leurs discours. En fait,
l'objectif du projet de loi 70 qui portait sur la rivière
Péribonka était un projet de nature économique qui a
permis des investissements importants dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean et qui a permis de créer un certain nombre
d'emplois. L'objectif du projet de loi qui est devant nous est également
économique. Il permettrait également de créer un certain
nombre d'emplois, soit environ 175 dans la région de Mont-Laurier cette
fois. Curieusement, quand il s'agit de Mont-Laurier, l'Opposition dit non
à la création d'emplois. Elle dit non aux investissements, tout
simplement parce qu'il y a là une source d'énergie qui pourrait
procurer un léger avantage aux gens de Mont-Laurier.
Lorsque c'était le cas de la région du Saguenay, lorsque
c'était le cas de Péribonka, ils disaient oui. Parce que c'est
Mont-Laurier, ils disent non. Ce qui est remarquable, ceux qui disent non sont
des gens qui sont pour la plupart de la région de l'Outaouais et de la
région de la Gatineau, les députés de l'Opposition qui
sont de la région de la Gatineau et de l'Outaouais. Cela sent un peu
l'esprit de clocher. Cela sent un peu la vengeance. Il me semble que la
population de Mont-Laurier mérite mieux que cela. Je pense que les
travailleurs de Mont-Laurier qui ont entendu les discours des
députés de l'Opposition sur ce projet de loi et qui, finalement,
se rendent compte que lorsqu'il s'agit de leur région, l'Opposition dit
non à la création d'emplois dans cette région, je pense
que ces travailleurs sauront s'en rappeler le temps venu.
L'Opposition prétend que la location des droits
hydroélectriques sur une période de 40 ans fera
bénéficier Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda d'une
subvention de 5 000 000 $ à 10 000 000 $. Ils ont l'air de trouver cela
tout à fait inusité, tout à fait effrayant. D'abord, il
faut dire que 5 000 000 $ à 10 000 000 $ sur une période de 40
ans, cela ne fait pas énormément lorsqu'on répartit cela
sur un an. Bien sûr, pour un individu cela représente
beaucoup de choses.
Mais pour une compagnie qui fabrique, qui emploie 175 personnes, 5 000
000 $ pendant 40 ans cela représente quoi? 125 000 $ par année.
C'est la paie des trois quarts, à peu près, des cadres
payés pas trop cher, c'est tout. Finalement, il n'y a pas de quoi en
faire un plat. Il ne s'agit pas d'un précédent parce que
Hydro-Québec a négocié des tarifs
privilégiés avec des entreprises récemment; elle l'a fait
avec Reynolds, elle l'a fait avec Pechiney. Hydro-Québec a, pour les
entreprises, un programme de tarifs d'électricité réduits.
Aux entreprises qui viennent s'installer au Québec ou encore aux
entreprises québécoises qui augmentent leur production, donc leur
consommation d'énergie, Hydro-Québec offre des tarifs
particuliers pour leur surplus de consommation d'énergie. Il ne s'agit
pas là de quelque chose qui est tout à fait inusité, qui
arrive comme cela dans le décor sans qu'il n'y ait de
précédent. Des précédents, M. le Président,
il y en a. Plusieurs entreprises du Québec qui viendraient investir, des
petites et moyennes entreprises, pourraient bénéficier de rabais
tarifaires d'Hydro-Québec si ce sont de nouvelles entreprises,
c'est-à-dire si ce sont de nouvelles consommatrices, ou encore si elles
augmentent leur consommation d'électricité.
Je ne vois pas en quoi l'Opposition peut trouver scandaleux que cela
puisse être également le cas de la compangie Bellerive-Ka'N'Enda.
Je ne vois pas vraiment là de scandale. Je ne vois pas ce qui peut
motiver l'Opposition à crier au scandale. Cela se fait sur une grande
échelle au Québec parce que, justement, nous voulons profiter de
cet avantage important que nous procurent nos ressources
hydroélectriques pour attirer des industriels au Québec et pour
créer des emplois permanents dans des industries de base, des industries
qui vont rester ici longtemps et qui seront permanentes longtemps. Il y a
permanent et permanent. Il y a du permanent temporaire, du permanent à
temps partiel, du permanent qui dure longtemps. Dans le cas qui nous occupe,
quand des investisseurs injectent 75 000 000 $, ce n'est pas pour fermer
boutique deux ans après. C'est parce qu'ils sont sérieux, qu'ils
ont bien analysé leurs dossiers et qu'à ce moment-là ils
veulent s'installer pour un bon bout de temps. Ils ont fait leur analyse de
marché.
M. le Président, en conclusion, on constate que tout en
maintenant la production d'une usine qui permet à une entreprise d'avoir
accès à des sources d'énergie à faible coût
et d'être concurrentielle on maintient des emplois dans la région
de Mont-Laurier. Le projet d'usine de panneaux MDF permet d'augmenter
même le nombre d'emplois dans cette région et, en même
temps, par le biais des redevances, de gonfler les coffres du gouvernement du
Québec d'une somme qui peut varier entre 2 500 000 $ et 2 600 000 $
selon l'hypothèse d'un taux d'inflation de 5%, et ce pour une
période de 40 ans.
En somme, M. le Président, il s'agit ici d'un projet de loi
à caractère essentiellement économique. Il est important
pour l'avenir de Bellerive-Ka'N'Enda et également pour l'avenir
économique de toute la région de Mont-Laurier. Ce projet de loi
est loin d'exiger des investissements massifs pour soutenir la création
d'emplois parce que, en fin de compte, il n'y a rien à investir. Tout ce
qu'il y a à faire, c'est d'accorder un bail. Cela sauvegarde les emplois
actuels et incite une entreprise à venir investir pour créer 175
emplois nouveaux.
Donc, pour le gouvernement comme tel, il y a un revenu, pas
d'investissement et des emplois sont créés. Peut-on demander une
situation plus intéressante que celle-là? Pourtant, M. le
Président, l'Opposition dit non à la création d'emplois
à Mont-Laurier. C'est assez difficile à comprendre. Quant
à moi, dans ces circonstances, je ne peux que souhaiter que
l'Assemblée donne suite rapidement à l'adoption de ce projet de
loi pour que nous puissions renouveler le bail concernant les forces
hydrauliques des rapides de l'Orignal et accorder à la
société forestière Bellerive-Ka'N'Enda les conditions
qu'elle souhaite pour poursuive son exploitation dans les usines actuelles et,
également, mener à terme le projet important d'investissements
qu'elle a pour Mont-Laurier. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Le principe du projet de
loi 9, Loi sur la location de forces hydrauliques de la rivière du
Lièvre à Les Produits forestiers Bellerive-Ka'N'Enda Inc. est-il
adopté?
Des voix: Adopté. Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Blouin: M. le Président, conformément à
notre règlement, je propose donc que nous envoyions ce projet de loi
pour étude détaillée à la commission de
l'économie et du travail en vous rappelant que cette commission sera
présidée par un président de séance.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de renvoi est adoptée? Adopté.
M. Blouin: Sur ce, M. le Président, nous allons ajourner
nos travaux à demain matin, 10 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion
d'ajournement est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Nos
travaux sont ajournés à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 20)