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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le vendredi 13 juin 1986 - Vol. 29 N° 45

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures cinq minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Aux affaires courantes, ce matin, il n'y a pas de déclarations ministérielles. Présentation de projets de loi.

Projet de loi 232

J'informe cette Assemblée que j'ai reçu le rapport du directeur de la législation concernant le projet de loi 232: "Au président de l'Assemblée nationale. J'ai examiné le projet de loi no 232 intitulé Loi modifiant la charte de la ville de Québec et j'ai constaté que tous les avis ont été publiés et qu'ils sont conformes au projet de loi. Le projet a cependant été déposé en dehors des délais prévus à l'article 36 des règles de fonctionnement et il ne peut, sans le consentement de l'Assemblée, être adopté au cours de la présente partie de la session. Et j'ai signé: M. Rémi Geoffrion." Je vais déposer ledit rapport.

À l'article b, M. le député de Taschereau présente le projet de loi portant le no 232, Loi modifiant la charte de la ville de Québec. Est-ce que l'Assemblée accepte de se saisir de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Gratton: Oui, M. le Président, je voudrais faire motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Motion de déférence adoptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté. Il n'y a pas de dépôt de documents ce matin.

Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission du budget et de l'administration.

Étude du projet de loi 53

M. Lemieux: J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 11 juin 1986 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 53, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Le projet de loi a été adopté.

Le Président: Rapport de la commission déposé.

Je n'ai pas reçu de pétition dans les délais et selon les formes requises par nos règlements.

Il n'y a aucune intervention ce matin portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Avant de procéder à la période de questions, j'informe immédiatement les membres de cette Assemblée que nous devrons procéder ce matin à deux votes qui ont été reportés hier. Il s'agit d'une motion du ministre des Transports et, également, la motion de clôture en vertu de l'article 251 du règlement.

Renseignements sur les questions complémentaires

Avant de procéder immédiatement à la période de questions, ce n'est pas une question de directive qui m'a été posée ce matin mais plutôt, je pense, M. le leader du gouvernement, une question d'information quant à la période de questions, plus précisément sur les questions additionnelles ou complémentaires qui ont été permises depuis le 15 mai dernier à la suite d'une directive que j'avais rendue.

Après vérification, il est vrai qu'avant le 15 mai j'ai accordé à quelques reprises des questions additionnelles autres que des additionnelles faisant suite à la question principale posée par le parti ministériel.

Quant à la fréquence, M. le leader du gouvernement, avant le 15 mai j'avais accordé en cette Chambre, pour 26 jours de séances, douze questions additionnelles au parti ministériel et depuis le 15 mai à ce jour, j'ai accordé sept questions additionnelles au parti ministériel. Je retiens l'avis que vous m'avez fait hier. Je sais que, des fois, j'ai refusé des demandes qu'on appelle silencieuses parce qu'elles n'apparaissaient pas au feuilleton. J'accorderai comme avant le 15 mai, à quelques reprises, selon la question et le député concerné par le problème à être étudié par cette Assemblée, des questions additionnelles même s'il ne s'agit pas de la question principale posée par le parti ministériel.

M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, j'aurais

une question d'information. Je voudrais demander au leader du gouvernement de faire le rapport d'absence des ministres ce matin.

M. Gratton: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: ...le ministre délégué aux Mines rencontre son homologue fédéral à Ottawa. On le sait, le premier ministre est à Boston. Le ministre de l'Énergie et des Ressources et le ministre des Relations internationales accueillent tous deux le résident d'Italie. Le ministre des Transports préside une réunion des présidents des commissions de transport à Montréal et le ministre des Communications, depuis le début de la semaine, est à Vancouver à titre de coprésident d'un colloque international sur les communications. Le ministre de l'Environnement accompagne le premier ministre à Boston et dans le cas du président du Conseil du trésor et de la ministre de la Santé et des Services sociaux, tous deux seront présents dans quelques minutes, dès qu'ils se seront libérés d'une réunion de négociation à laquelle ils assistent ce matin et, semble-t-il, cela va assez bien, merci.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Et les autres ne vous ont pas avisé.

M. Gratton: Les autres sont ici, je pense.

M. Chevrette: Non, non. Je pense... Des voix: Ahl Ahl Ahl

M. Chevrette: Je conclus donc qu'il y en a quatre qui ne vous ont pas avisé.

M. Gratton: Je n'ai pas fait le décompte, M. le Président, mais je sais que, cette nuit, le leader de l'Opposition ne s'est pas trompé une fois quand il n'a pas appelé le quorum. Je présume qu'il ne se trompe pas ce matin non plus.

Le Président: Maintenant, est-ce qu'on peut procéder à la période de questions?

M. le chef de l'Opposition, en principale.

Achat de biens ou de services provenant de l'Afrique du Sud

M. Johnson (Anjou): M. le Président, en l'absence du premier ministre et du ministre des Relations internationales, pour les raisons évoquées par le leader, ma question s'adressera à la vice-première ministre ou au ministre des Finances, selon le cas.

On sait que le gouvernement du Canada a annoncé hier qu'il prenait quatre mesures pour faire des pressions sur le gouvernement d'Afrique du Sud, qui maintient le régime d'apartheid. Deux de ces moyens de pression sont de nature économique, l'un concernant la promotion touristique sud-africaine au Canada et l'autre concernant les achats par le gouvernement fédéral de biens et services en provenance de l'Afrique du Sud. Je demanderais donc au ministre des Finances ou à la vice-première ministre s'ils entendent donner des directives au niveau du gouvernement du Québec pour que celui-ci n'affecte pas des deniers publics qui serviraient à acheter des biens ou des services en provenance de l'Afrique du Sud.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, je dois dire que cette question a déjà été abordée par notre gouvernement. Plus particulièrement, comme ministre des Finances, j'avais été sensibilisé à cette question par le président de l'Assemblée des évêques et par d'autres intervenants, si ma mémoire est fidèle. Mais c'était surtout relativement aux politiques de la Caisse de dépôt et placement du Québec. À ce moment-là, je suis intervenu auprès du président de la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui m'a fait part de la politique suivie par la Caisse de dépôt. Il est clair que, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, nous ne pouvons pas accepter la politique d'apartheid, mais de là à décider des politiques du Canada dans le domaine des relations internationales, il y a un pas qu'il faut toujours bien respecter, justement dans le respect des juridictions. Cependant, j'ai été rassuré par le président de la Caisse de dépôt qui m'a fait part qu'à chaque occasion qui lui était donnée, il faisait part justement de ses préoccupations vis-à-vis ses relations entre des institutions du Québec et des sociétés qui puissent faire affaires en Afrique du Sud. Par la suite, le président de la Caisse de dépôt m'a fait part, particulièrement dans le cas d'Alcan, qu'on s'était départi de ces intérêts en Afrique du Sud.

C'est un peu dans ce contexte que nous travaillons présentement. Quant à la politique d'achat du gouvernement, elle relève plus de quelqu'un que connaît bien le chef de l'Opposition, le ministre de l'Industrie et du Commerce.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, question additionnelle.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, on

sait que la décision du gouvernement canadien est une des premières décisions qui vont en ce sens prises en Occident, à part le gouvernement du Danemark. À cet égard, même si les mesures sont jugées timides, elles sont néanmoins des mesures qui vont dans le sens du boycottage économique. Le gouvernement canadien a demandé hier - et ma question s'adresse au ministre des Finances - la collaboration des gouvernements provinciaux dans l'application de cette politique qui vise non pas à interdire aux intervenants économiques du Canada de traiter avec l'Afrique du Sud, cela n'en est pas rendu là, semble-t-il, mais au moins d'amener les gouvernements dans leurs propres décisions d'achat de biens et services à faire en sorte qu'il n'y ait pas de deniers publics qui aillent vers l'Afrique.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, comme le dit le chef de l'Opposition, cette demande était tellement récente que nous n'avons sûrement pas pu nous rencontrer depuis qu'elle a été formulée. Mais je ne pense pas non plus, sans avoir fait un examen même superficiel de la question, que du côté des achats du gouvernement du Québec, il y ait une proportion bien importante qui puisse provenir de ce pays. Cependant, je puis rassurer le chef de l'Opposition quant à notre attitude générale à ce sujet. Sans vouloir impliquer l'ensemble du gouvernement ni aucun de mes collègues en particulier, j'ai l'impression que cet appel devra recevoir une réponse, au moins dans les faits, de la part de notre gouvernement.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Lévis.

M. Garon: J'aurais voulu poser ma question au premier ministre. Il n'est pas là, je voudrais poser ma question au ministre des Finances. Comme le gouvernement du Québec fait une entente avec la compagnie Lantic et qu'on sait qu'une partie du sucre de canne importé vient de l'Afrique du Sud, est-ce que le gouvernement du Québec s'est assuré dans sa transaction avec Lantic que les importations de canne à sucre qui vont remplacer la production de betteraves qui était faite au Québec ne seront pas sous forme de canne à sucre provenant de l'Afrique du Sud alors qu'on sait que la Ligue antiesclavage de Londres considère que couper la canne à sucre dans les pays pauvres, actuellement, c'est de l'esclavage moderne?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Je dois dire que ce n'est pas dans mes fonctions de ministre des Finances que j'aurai à traiter du sucre Lantic. Cependant, si le député veut poser la question à quelqu'un qui pourrait probablement ou sans doute lui donner plus de satisfaction, libre à lui.

Le Président: M. le député de Lévis.

M. Garon: Cela pourrait être la vice-première ministre qui remplace le premier ministre.

Le Président: C'est une question additionnelle ou principale, M. le député de Lévis?

M. Garon: Non, non, c'est la même question. Le ministre des Finances dit qu'il n'est pas capable de répondre. Est-ce que la vice-première ministre, qui remplace le premier ministre, pourrait nous dire si le gouvernement du Québec a fait en sorte dans sa transaction avec Lantic de voir à ce que le sucre importé ne vienne pas de l'Afrique du Sud alors qu'on sait qu'une partie du sucre, sous forme de canne à sucre, est importée d'Afrique du Sud alors qu'on veut remplacer la betterave à sucre par la canne à sucre?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: J'ai deux collègues qui sont prêts à répondre au député de Lévis. Je vais leur passer la parole.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: Le député de Lévis fait référence à l'exploitation de la canne à sucre dans certains pays avec beaucoup de sensibilité, beaucoup de conviction, voulant éveiller un sentiment de solidarité internationale. Je dois vous dire, en réponse à la question du député de Lévis, que sa question va exactement - mais exactement -dans le sens contraire de ce qu'il a fait, de ce qu'il prévoyait faire et de ce qu'il voulait faire avec la Raffinerie de sucre du Québec.

Le Président: M. le ministre, en réponse à la question.

M. Pagé: Très brièvement, le plan de développement de la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire s'appuyait en partie pour la production de la betterave, mais la rentabilité de la raffinerie, selon les prévisions du député de Lévis...

M. Chevrette: Question de règlement,

M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition. À l'ordre, s'il vous plaît;

M. Chevrette: La question était spécifique: Qu'est-ce que le gouvernement du Québec a fait vis-à-vis de l'importation de la canne à sucre? Et il répond sur la rentabilité de la raffinerie de Saint-Hilaire. Voyons; L'article 79... (10 h 20)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît;

M. Chevrette: L'Afrique... l'article 79 par rapport à l'importation de l'Afrique du Sud, c'est clair...

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, je vous avais déjà rappelé à l'ordre en vertu de l'article 79 en vous demandant de répondre à la question. Si vous voulez très brièvement répondre à la question de M. de député de Lévis.

M. Pagé: M. le Président, l'honnêteté et la clarté à l'égard de cette question et ce débat commandent que je réponde que la rentabilité proposée par le député de Lévis, alors qu'il était ministre de l'Agriculture, pour la raffinerie s'appuyait pour 88 000 tonnes sur la canne. C'est cela.

Le Président: M. le député de Taillon, en principale. À l'ordre, s'il vous plaît; M. le député de Taillon, en principale.

Les négociations dans l'industrie de la construction

M. Filion: M. le Président, les négociations dans la construction relèvent du secteur privé, cependant, elles sont clairement d'intérêt national. Ainsi, la huitaine ou la dizaine de jours perdus à la suite des grèves ou du lock-out sont l'équivalent de 500 000 à 1 000 000 de jours-hommes perdus alors que, pour vous donner une idée, pour l'année 1985, le total des jours-hommes perdus à la suite des conflits de travail n'était que de 1 100 000.

S'ajoutent à tout cela les pertes économiques - on le sait - encourues par l'industrie en général, par l'économie en général, les délais causés aux acheteurs de maisons neuves. Il apparaît clairement qu'il s'agit d'un conflit où le ministre du Travail ne doit pas se contenter de laisser passer les papiers des négociateurs et doit utiliser son autorité morale pour provoquer un règlement.

Voici ma question au ministre du Travail: Compte tenu que le ministre du Travail a sûrement une bonne idée sur la valeur des propositions échangées entre les parties, peut-il nous dire s'il a songé à faire part de ses réflexions et de sa position à chacune des parties?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, le député de Taillon me permettra sans doute un bref rappel des événements depuis la semaine dernière, depuis mercredi dernier. Le gouvernement du Québec, le Conseil des ministres avait décidé, à ce moment, de demander aux parties de faire preuve de maturité et de surseoir à leurs moyens de pression, soit, dans un cas, la grève générale, soit, dans l'autre, le lock-out général.

Les parties ont répondu positivement à cet appel à la raison lancé par le gouvernement du Québec et, à compter de lundi matin, tous les chantiers de construction étaient ouverts dans la province de Québec. Au moment où on se parle, les employeurs ont respecté le moratoire, ainsi que la coalition syndicale et les autres parties syndicales impliquées.

En début de semaine, il y a eu une trop brève séance de négociation, hélas; Le conciliateur au dossier, M. Raymond Leboeuf, m'a fait rapport qu'il n'y avait plus moyen de discuter sur la base des propositions globales patronales. Le conciliateur a alors demandé à la coalition syndicale de lui soumettre une offre globale ou des propositions globales, ce que la coalition syndicale a fait en fin de journée hier.

En conclusion, au moment où on se parle, le conciliateur en est encore à analyser ce document. Il a convoqué une réunion prévue pour cet après-midi, à 14 heures, avec les représentants de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Si tout fonctionne bien au cours de la journée, il y aura une réunion entre le conciliateur et les deux parties au dossier, soit la partie patronale et la partie syndicale. Cette réunion est prévue pour ce soir, à 19 heures.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: M. le Président, puisque le ministre du Travail fait référence à sa conférence de presse de la semaine dernière, à son appel à la raison, dit-il, comment peut-il se féliciter de son ultimatum de la semaine dernière alors qu'au moment où il prononçait sa conférence de presse la trêve entre les parties avait déjà été négociée?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le

Président, dans ce dossier - je ne l'ai jamais fait remarquer à ce jour - le député de Taillon a été mal informé et il vient de faire preuve de sa méconnaissance du dossier.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Filion: Est-ce que le ministre du Travail veut dire clairement en cette Chambre qu'il n'était pas au courant, à 18 heures ou 19 heures, lorsqu'il a tenu sa conférence de presse, qu'une entente était intervenue entre les parties le jour même, à l'heure du midi, portant sur une trêve dans les moyens de pression?

Une voix: Qu'il le dise;

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si mon critique, le député de Taillon, a besoin de plus de précision, je lui dirai que je n'avais aucune assurance de toutes les parties impliquées qu'il y avait trêve à ce moment-là.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: M. le Président, est-ce que le ministre du Travail est conscient que son inaction, de façon générale, conjuguée aux promesses électorales...

Des voix: Ah!

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! Sans commentaire, s'il vous plaît, M. le député de Taillon.

M. Filion: Le ministre du Travail est-il conscient, notamment à cause des promesses électorales de son parti...

Des voix: Ah!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Vous êtes en additionnelle, M. le député de Taillon. Sans commentaire.

M. Filion: M. le Président, c'est un fait. Est-ce que le ministre du Travail est conscient que la position adoptée par son parti lors de la campagne électorale a provoqué un certain immobilisme des parties, particulièrement de la part de la partie patronale, eu égard au règlement de placement?

M. Gauthier: Voilà!

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, dans ce conflit, après avoir fait appel de façon répétée à la maturité des parties, je vais être obligé, ce matin, de faire appel à la maturité de mon critique.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lors de la campagne électorale, le Parti libéral s'était engagé, dans le domaine des relations du travail, à mettre à la disposition de chacune des parties tous les outils, toutes les ressources humaines et autres dont il dispose pour faciliter, dans le maximum de cas, le règlement des conflits par les parties elles-mêmes.

Pour ce qui est de l'aspect plus précis de votre question concernant le règlement de placement et, plus précisément, la carte de classification, il y a quelques mois j'ai mis sur pied un comité composé des représentants des sept associations patronales dans le secteur de la construction, des cinq associations syndicales, de trois sous-ministres - celui du Travail, celui ce la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et celui de l'Éducation - ainsi que des membres de la haute direction de l'Office de la construction du Québec de façon qu'à compter du 1er janvier prochain la carte de classification, le permis de travail qui empêche l'accès au marché du travail, surtout à notre jeunesse, soit aboli et que cela soit remplacé par des critères fondés sur la compétence. Dans ce dossier, et la partie patronale et la partie syndicale ont fait jusqu'à maintenant preuve de beaucoup de maturité.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: M. le Président, est-ce que le ministre a envisagé, lors de la trêve annoncée par les parties, la possibilité de modifier le statut de son conciliateur, M. Raymond Leboeuf, pour en faire un médiateur avec possibilité de déposer une proposition globale qui pourrait mettre fin à ce conflit?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cette possibilité a été envisagée, mais elle n'a pas

été retenue au moment où on se parle.

Le Président: M. le député de Shefford, en additionnelle.

M. Paré: Oui, en additionnelle au ministre des Affaires municipales, responsable de l'Habitation. Le ministre a-t-il prévu une aide quelconque à ceux et celles qui ne pourront entrer dans leur maison tel que prévu le 1er juillet prochain?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation.

 l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourbeau: La réponse est non, M. le Président.

Le Président: M. le député de Shefford, en additionnelle.

M. Paré: En additionnelle au ministre de la Justice, responsable de la Protection du consommateur. Quels moyens le ministre a-t-il envisagés pour venir en aide aux futurs propriétaires qui seront sans logement à partir du 1er juillet prochain?

Le Président: M. le ministre de la Justice. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, on peut bien s'amuser de l'autre côté, mais je vous prierais de juger...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais entendre la question de règlement.

M. Gratton: ...de la pertinence d'une question additionnelle qui, normalement, devrait se rattacher au sujet de la question principale qui portait sur le conflit dans le secteur de la construction et non sur l'ensemble des conséquences à tous les points de vue.

M. Chevrette: Sur la question de règlement. (10 h 30)

Le Président: Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Est-ce que les conséquences d'un conflit peuvent ou non toucher les consommateurs? C'est tout à fait pertinent et, loin de s'amuser, on ne veut pas non plus, cependant, par le biais du règlement, éviter de poser le problème tel qu'il se pose.

Le Président: Je pense que vous avez répondu, M. le leader du gouvernement, ce sont des conséquences directes que tout le monde reconnaît déjà depuis quelques semaines à la suite du conflit. Je vais permettre la dernière additionnelle à M. le député de Shefford qui était adressée, je pense, au ministre de la Justice. Est-ce exact?

M. Paré: Oui.

Le Président: M. le ministre de la Justice, une dernière question additionnelle sur ce sujet.

M. Marx: À ma connaissance, il n'y a rien de prévu, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gouin, en principale.

M. Jolivet: Les journaux vont bien répéter cela.

Engagements envers les infirmières et les infirmiers

M. Rochefort: Depuis quelque temps les infirmières et les infirmiers du Québec sont en colère. Non seulement sont-ils profondément insatisfaits de la tournure des négociations entourant leurs conditions de travail, mais ils viennent de comprendre qu'eux aussi, comme des milliers d'autres Québécois et Québécoises, ont été trompés par le Parti libéral lors de la dernière campagne électorale.

Des voix: Oh!

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: L'article 77,5°, défend au député de Gouin de faire ce qu'il vient de faire, c'est-à-dire poser une question suscitant un débat. À moins que vous ne le rappeliez à l'ordre, M. le Président, on va devoir répondre de la même manière, et Dieu sait que les débats en cette Assemblée ont duré, il me semble, assez tard la nuit dernière pour pouvoir l'éviter au moment de la période de questions.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: L'ex-ministre et député de Gouin est en question principale et, pour bien faire comprendre sa principale, il l'a précédée d'un préambule. Vous verrez, en écoutant le préambule au complet, qu'il a tout à fait raison de procéder de cette façon.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais vous permettre de reprendre votre

question en vous soulignant, M. le député de Gouin, qu'il faudrait quand même que l'on respecte l'article 77,5° afin de ne pas provoquer de débat. Vous étiez en principale et vous avez donc droit à un préambule, tel que reconnu, sauf que le préambule comme la question principale ne doivent pas contenir de commentaires suscitant un débat, autant sur les questions principales ou additionnelles que sur les réponses. Je vous écoute, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, à votre invitation, je vais répéter ma question. Depuis quelques jours, les infirmières et les infirmiers du Québec sont en colère. Non seulement sont-ils profondément insatisfaits de la tournure des présentes négociations concernant leurs relations ou conditions de travail, mais ils viennent de comprendre qu'eux aussi, comme les autres, ont été trompés par les promesses électorales du Parti libéral au cours de la campagne.

Des voix: Oh!

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Rochefort: Ma question, M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: Je vois déjà la réponse de la ministre qui va tenter... Non, je pense que votre dernière allusion était de trop; avant cela, cela allait très bien.

M. Rochefort: M. le Président, je m'excuse, je ne croyais pas que c'étaient mes propos qui provoquaient des débats, mais plutôt les promesses électorales du Parti libéral.

Le Président: M. le député de Gouin, votre question.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Le député de Gouin a récidivé. Normalement, ne devrait-il pas être rappelé à l'ordre de façon très sévère pour se conduire de façon aussi indisciplinée ce matin?

Des voix: Oh!

Le Président: S'il vous plaît: II pleut ce matin, nous nous sommes tous couchés très tard hier soir... J'aimerais entendre maintenant, M. le député de Gouin, votre question, mais je prends bonne note de votre remarque, M. le leader du gouvernement. Votre question maintenant.

M. Rochefort: Exactement, M. le Président, c'est là que j'étais rendu. Ma question s'adresse donc à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux et c'est la suivante: Pourquoi la ministre n'a-t-elle pas respecté ses engagements envers les infirmières et les infirmiers du Québec dans le règlement qu'elle a fait adopter par le Conseil des ministres, la semaine dernière, sur l'organisation et l'administration des établissements de santé au Québec et qui est entré en vigueur le jour de sa publication à la Gazette officielle, le 14 mai dernier?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord dire que les engagements électoraux du Parti libéral du Québec ont été respectés par le gouvernement libéral qui est maintenant à la direction du Québec. D'abord, dans le domaine de la santé, qui était l'un des engagements principaux, je dois vous dire que nous avons livré au-delà même de ce que nous avions promis.

M. Gratton: C'est vrai!

Mme Lavoie-Roux: Alors que le gouvernement antérieur avait négligé ce domaine pendant des années...

Une voix: C'est vrai!

Mme Lavoie-Roux: ...au point où nous étions rendus dans un chaos indescriptible, je pense que nous nous sommes mis à l'oeuvre et que cette première promesse est remplie et sur le point d'être totalement remplie.

Une voix: Bravo!

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, nous avions un deuxième engagement électoral, celui de remettre le Québec sur pied sur le plan économique. Je pense que la façon...

M. Chevrette: Question de règlement. Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: À l'ordre, s'il vous plaît: Messieurs les députés!

M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Chevrette: Comme le leader du gouvernement se levait avec beaucoup de promptitude pour parler de l'article 77, je vais vous parler de l'article 79. Les règle-

ments et les engagements électoraux relatifs au statut d'infirmier et d'infirmière, ce ne sont pas des promesses électorales sur le plan économique. Je pense que cela va de soi. Qu'elle s'en tienne aux engagements électoraux...

Le Président: Je voudrais entendre la question de règlement.

M. Chevrette: Que Mme la ministre s'en tienne aux engagements électoraux face aux infirmiers et aux infirmières et je ne me lèverai pas pour vous soulever une question de règlement, M. le Président.

M. Gratton: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur la question de règlement.

M. Gratton: Par trois fois, j'ai souligné que le député de Gouin, en formulant sa question comme il l'a fait, suscitait un débat. Force nous est de reconnaître qu'on a maintenant un débat. La seule chose qui semble irriter nos amis d'en face c'est que, pour eux, il faudrait qu'ils soient les seuls à parler. Mais ça ne marchera pas comme ça.

Le Président: Mme la ministre, en respectant l'article 79, s'il vous plaît et, si possible, en évitant...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis généralement assez docile particulièrement aux instructions du président de l'Assemblée nationale, mais je vous ferai remarquer que c'est à deux reprises que le député de Gouin a soulevé le fait que nous ne remplissions pas nos engagements électoraux. Il m'apparaît nécessaire de rétablir les faits.

M. Gratton: Absolument!

Mme Lavoie-Roux: En ce qui a trait à la santé, je l'ai dit. En ce qui a trait au domaine économique, nous avions aussi comme engagement électoral de remettre l'économie en marche. Je pense que la façon dont le gouvernement, jusqu'à maintenant, a rempli ses responsabilités dans ce domaine en ne prenant pas toujours des décisions faciles démontre qu'il va également remplir très rapidement ce deuxième engagement.

Quant au troisième engagement sur lequel me questionne... Je peux lui répondre à celui-là aussi, M. le Président!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: Quant à ce troisième engagement auquel fait allusion le député de Gouin, d'abord je lui ferai remarquer qu'il ne s'agit pas d'un engagement électoral, mais que l'été dernier, au moment où l'ancien gouvernement était in abstentia dans tous les domaines et particulièrement dans ce domaine-là et que les infirmières faisaient de nombreuses réclamations, eu égard à l'application du règlement de la loi 27, de ma propre initiative, parce que le gouvernement du temps demeurait totalement immobile, j'ai convoqué la commission parlementaire des affaires sociales dont j'étais la présidente. Il veut une réponse, je veux bien l'assurer que j'ai rempli mes engagements. N'eût été cette initiative, on serait encore dans le néant. À la suite de cette initiative, des recommandations ont été adressées...

Le Président: En conclusion.

Mme Lavoie-Roux: ...au ministre des Affaires sociales du temps, le député de Joliette, qui n'a eu aucune réaction, M. le Président.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Des voix: Bravo!

Le Président: En conclusion, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Quand j'ai été nommée titulaire du ministère de la Santé et des Services sociaux, une des premières questions que j'ai posées fut de savoir ce qu'il advenait des recommandations...

M. Gendron: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je suis en train de calculer le temps. Si elle arrête avant 11 heures on sera d'accord, mais écoutez! On n'aura même pas le temps de poser quatre questions principales, M. le Président.

Le Président: J'ai rappelé ouvertement Mme la ministre à l'ordre à deux reprises. Elle allait conclure. Elle est encore dans son délai. Elle vient à peine de terminer le temps qui lui était alloué pour une réponse. (10 h 40)

Des voix: ...

Le Président: Je m'excuse. À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: Voulez-vous imposer le bâillon?

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: M. le député d'Abitibi-Ouest, le 15 mai, j'avais émis des directives que j'ai communiquées à M. le leader de l'Opposition quant au temps accordé pour les réponses principales et au temps accordé pour les questions principales. Madame venait tout juste de dépasser le temps. Je l'ai invitée deux fois à conclure. Je vous inviterais à conclure et très brièvement, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Oui, M. le Président. Je voudrais bien le faire hâtivement, mais c'est quand même assez complexe.

En ce qui a trait aux deux recommandations qui avaient été acheminées au ministre du temps, je les ai reprises à mon arrivée au ministère de la Santé et des Services sociaux. Je peux dire au député que ces deux modifications au règlement seront publiées en préavis à la Gazette officielle d'ici à quelques semaines.

Le Président: M. le député de Gouin, en additionnelle.

M. Rochefort: M. le Président, comment la ministre de la Santé et des Services sociaux peut-elle prétendre que sa formation n'a pas pris d'engagements électoraux envers les infirmiers et les infirmières du Québec sur cette question alors que le premier ministre du Québec d'aujourd'hui, alors chef de l'Opposition, écrivait le 11 novembre 1985, donc en pleine campagne électorale, qu'il reprenait au compte de sa formation politique les recommandations de la ministre, alors députée de L'Acadie, et qu'il s'engageait à les réaliser advenant son élection?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le député de Gouin rappelle l'existence de cette lettre que, momentanément, j'avais oubliée, et c'est exact...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais un instant:

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

Une voix: Un instant:

Mme Lavoie-Roux: Un instant: M. le Président, je pense...

Une voix: Écoutez-vous ou si vous n'écoutez pas?

Mme Lavoie-Roux: ...que j'ai néanmoins répondu à la question du député de Gouin. Je lui ai dit que ces engagements relatifs à la modification des règlements de la loi 27 paraîtront à la Gazette officielle en prépublication d'ici à quelques semaines.

Le Président: M. le député de Gouin, en additionnelle.

M. Rochefort: M. le Président, comment la ministre peut-elle prétendre que le respect de ces engagements électoraux viendront dans un deuxième temps alors que le règlement qu'elle a publié et qui est actuellement en vigueur depuis le 14 mai dernier, à l'article 5 qu'elle a adopté, ne comporte aucune des modifications demandées pour lesquelles elle et son chef se sont engagés?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le règlement de la loi 27 avait paru le 7 août en prépublication. Alors, la partie de ce règlement qui devait être adoptée ayant été publiée, elle sera adoptée ou mise en vigueur. Néanmoins, je réaffirme que les deux engagements que nous avons pris eu égard à ce règlement seront prépubliés dans les quelques semaines qui viennent et je pense qu'à cet égard nos engagements sont remplis, M. le Président.

Le Président: M. le député de Verchères, en principale.

La question de la hausse du salaire minimum

M. Charbonneau: M. le Président, dans le contexte actuel de la chasse au travail au noir et au travail à domicile chez les assistés sociaux, en vertu même de la directive du ministre et dans l'optique de la mise en place de mesures incitatrices au travail, tel qu'on en parlait dans le livre blanc sur la fiscalité à l'égard de la réforme de l'aide sociale, est-ce que le gouvernement a pris une décision quant à la hausse du salaire minimum?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai eu l'occasion d'indiquer en cette Chambre, comme certains de mes collègues qui s'occupent des dossiers économiques, que toute la question du salaire minimum soulève, bien sûr, le problème du niveau de vie ou du niveau de rémunération des plus bas salariés dans la société. Il faut tenir

compte en considérant cette question, bien sûr, de ce niveau de vie qui peut se situer, suivant certaines données, au seuil de la pauvreté ou même en deçà du seuil de la pauvreté. Il faut également tenir compte de l'incitation au travail, c'est-à-dire de ce facteur ou de ce paramètre qui fait que si on travaille au salaire minimum, on se demande si on reçoit plus d'argent que si on est un bénéficiaire de l'aide sociale? Il faut également tenir compte de la situation compétitive de nos entreprises québécoises, spécialement de nos petites et moyennes entreprises québécoises. Il faut regarder notre milieu concurrentiel. J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer en cette Chambre qu'en ce qui concerne les États de la Nouvelle-Angleterre...

Le Président: En conclusion.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...là-bas on a un salaire minimum qui est supérieur à ce qui est payé présentement au Québec.

M. Charbonneau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Je n'ai pas demandé au ministre un cours sur le salaire minimum. J'ai demandé si le gouvernement avait pris une décision.

Le Président: M. le ministre, en conclusion, s'il vous plaît:

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À la suite de la nature des questions que "mon" critique m'a déjà posées dans le passé, j'en profite pour lui donner un bref cours, vous m'excuserez.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faut tenir compte de la situation concurrentielle du Québec. Comme je l'indiquais, les États de la Nouvelle-Angleterre ont un salaire minimum qui est supérieur à celui du Québec. Il nous reste, je ne voudrais pas faire d'annonces prématurées, quelques fils à attacher. J'ai déjà indiqué qu'il était important que nous regardions du côté de l'Ontario et je vous dirai qu'au cours des derniers mois, des dernières semaines et spécialement au cours des derniers jours, des pourparlers intensifs ont été menés de ce côté.

M. Charbonneau: M. le Président.

Le Président: M. le député de Verchères, question additionnelle.

M. Charbonneau: Est-ce que "mon" ministre...

Le Président: Non. Je pense qu'il ne suscite pas de débat. Non, non. M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Est-ce que "mon" ministre pourrait me dire s'il a présenté un mémoire au Conseil des ministres?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, au moment où on se parle, un mémoire n'a pas été présenté comme tel au Conseil des ministres.

M. Charbonneau: M. le Président.

Le Président: M. le député de Verchères, question additionnelle.

M. Charbonneau: Est-ce que le ministre entend déposer un mémoire au Conseil des ministres pour décision avant la fin de cette session, c'est-à-dire dans une semaine, tel que le demandent plusieurs groupes dans le Québec, à l'égard de la hausse du salaire minimum?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dès que les critères de niveaux de revenu, de situations compétitives et concurrentielles, dès que l'ensemble de tous les fils - et j'ai indiqué qu'il y en avait ou qu'il en restait à peine quelques-uns qui n'étaient pas attachés - sera réuni, je déposerai un mémoire au Conseil des ministres, parce qu'il s'agit là, encore une fois, d'un engagement du Parti libéral du Québec et que nous entendons, dans ce domaine comme dans les autres, tenir nos engagements.

Le Président: M. le député de Labelle, question principale.

Arrêt de publicité pour Cambior

M. Hétu: Question principale, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre délégué à la Privatisation. Ces jours derniers, nous avons pu lire dans les journaux que la Commission des valeurs mobilières canadiennes a demandé à la société Cambior, filiale à 100 % de SOQUEM et qui est en voie d'être privatisée, d'arrêter toute forme de publicité. Est-ce que ceci affectera ou peut affecter l'émission d'actions que Cambior Inc. veut faire d'ici à la fin du mois et, ainsi, entraver le premier appel public à

l'épargne, dans les cadres du programme de privatisation du gouvernement?

Le Président M. le ministre délégué à la Privatisation. À l'ordre. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Fortier: M. le Président, c'est un sujet très important. Cela devrait intéresser les députés d'en face puisque la population est très intéressée par l'émission de Cambior. Je dirais même qu'il est de plus en plus difficile de trouver des courtiers qui ont des actions à vendre.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais entendre la réponse. M. le député de Beauharnois, s'il vous plaît! À l'ordre, M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: J'aimerais rassurer...

Le Président: Sur une question de règlement, M. le député de Beauharnois.

M. Marcil: Oui, M. le Président. Concernant l'interruption des députés, dans les dernières semaines, le leader de l'Opposition se levait continuellement pour vous demander d'intervenir afin que les députés gardent le silence en cette Chambre. Pourriez-vous demander la même chose au leader de l'Opposition, s'il vous plaît?

Le Président: M. le député de Beauharnois. Si je vous ai nommé, c'est parce que je vous ai vu au moment où il y avait du bruit. Cela faisait déjà quelques instants que je vous voyais vous adresser à plusieurs banquettes plus loin certaines paroles. Je vais céder la parole à M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: Merci, M. le Président. Je voudrais rassurer le député. Il y a eu un incident à la suite de la parution de publicité dans les journaux après le dépôt du prospectus provisoire. L'on sait que les règlements de la Commission des valeurs mobilières sont très stricts à ce sujet. Une fois le dépôt d'un prospectus fait, toute publicité doit normalement arrêter. Les commentaires et les explications qui doivent être donnés doivent se limiter au contenu du prospectus proprement dit.

Pour une raison que je ne connais pas, peut-être due au fait que Cambior est une nouvelle compagnie, il y a eu parution d'une certaine publicité dans plusieurs journaux, de l'Ontario et du Québec. À la suite de cet incident, il y a eu rencontre entre les courtiers représentant Cambior et la direction de Cambior et il y a eu explication. La publicité a été arrêtée et l'incident est clos.

(10 h 50)

Par ailleurs, j'aimerais dire au député que la direction et les courtiers sont présentement en Europe. Il y a eu des rencontres avec les courtiers européens à Londres, à Paris, à Francfort et à Genève. L'enthousiasme qui est suscité par Cambior en Europe est égal à l'enthousiasme qui a été suscité au Québec et au Canada et tout va bien dans le lancement de Cambior. J'ose espérer que très bientôt nous pourrons confirmer la réalisation de cette privatisation très importante.

Le Président: M. le député de Lévis, question principale.

La hausse des taux d'inflation

M. Garon: Sur le fil de presse de ce matin, on voit que Statistique Canada a révélé que le taux d'inflation est en hausse au Canada. Il est passé de 3,9 % en avril à 4,1 % en mai. Dans les villes de Québec et de Montréal, le taux d'inflation atteint 5,1 %, en hausse de 0,4 % et la hausse du coût de la vie est plus prononcée dans ces deux villes que la moyenne canadienne. On indique également que ce sont les prix de l'essence et de l'électricité qui expliquent la hausse de l'inflation au Québec. Le ministre des Finances a fait des prévisions qui sont erronées avec des taux d'inflation à 3 % alors que depuis le début de l'année financière, les taux s'élèvent plutôt au-dessus de 5 %. Est-ce que le ministre des Finances a l'intention de réviser les chiffres qu'il a utilisés jusqu'à maintenant puisque les faits indiquent que ses prévisions sont fausses?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Je dirai que le député de Lévis, comme c'est son habitude, saute assez rapidement à des conclusions. Ce n'est pas simplement parce qu'il y a une indication ponctuelle, limitée dans le temps, relativement au taux d'inflation que l'on doit, à ce moment, mettre en doute ce qui a pu être des prévisions pour une année entière. Deuxièmement, ce qui semble préoccuper le député de Lévis quant aux chiffres que nous avons retenus comme taux d'inflation... D'ailleurs, il a été confirmé par plusieurs autres prévisionnistes. Ce taux, vous savez, je pourrais dire qu'il était conservateur, mais s'il augmente, c'est sûr que cela ne fera pas de tort aux équilibres financiers du gouvernement; si c'est cela qui l'inquiète. Troisièmement, je dois lui dire que quant aux chiffres qu'il a révélés ce matin, j'aimerais avoir un peu plus de temps pour les considérer, les juger et les évaluer dans une perspective qui ne soit pas simplement à aussi court terme.

Le Président: M. le député de Jonquière, question principale.

Transfert de services judiciaires de Jonquière à Chicoutimi

M. Dufour: Le ministère de la Justice s'apprête à transférer au palais de justice de Chicoutimi l'ensemble des services judiciaires donnés à Jonquière depuis 1916 par le greffe de la Cour provinciale. Est-ce que le ministre de la Justice - c'est ma question -a l'intention de continuer cette démarche?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Marx: J'ai déjà été contacté par certaines personnes de la région et j'ai l'intention de revoir cette décision qui a été prise dans mon ministère. Je vais communiquer avec le député en temps et lieu.

Le Président: M. le député de Saint-Jacques, question principale ou additionnelle?

M. Boulerice: Question principale.

Le Président: Question principale, M. le député de Saint-Jacques.

La réduction des subventions aux bibliothèques municipales

M. Boulerice: Récemment, le conseil municipal de Drummondville s'ajoutait à cette longue liste d'intervenants demandant au gouvernement de reconsidérer sa décision quant à la coupure de 4 000 000 $ dans les subventions aux bibliothèques municipales. Les journaux sont plein de lettres aux lecteurs là-dessus, d'ailleurs. Ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales: Est-ce que vous partagez l'opinion des municipalités, M. le ministre, qui déplorent le fait que l'on aide les municipalités à implanter des bibliothèques et que par la suite, on leur coupe l'aide au fonctionnement sans tenir compte des besoins et des attentes des citoyens qui sont générés par la présence d'une bibliothèque dans leurs municipalités et...

Le Président: À l'ordre!

M. Boulerice: ...une bibliothèque qu'ils fréquentent d'ailleurs de plus en plus, selon les statistiques.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation.

M. Bourbeau: Dans le cadre des compressions budgétaires qui ont été décidées récemment par le gouvernement, une certaine compression a été effectuée à l'égard des bibliothèques municipales. Je dois dire que la ministre responsable des Affaires culturelles est venue expliquer ces compressions à la table Québec-municipalités, il y a deux ou trois mois. Elle a donné les explications nécessaires et selon ce que j'ai pu comprendre, les unions municipales ont accepté de bon coeur la décision gouvernementale.

Le Président: M. le député de Saint-Jacques, en additionnelle.

M. Boulerice: Est-ce que la ministre des Affaires culturelles entend reconsidérer, ce que je lui demandais à l'étude des crédits, sa décision de couper 4 000 000 $ dans le budget des bibliothèques, compte tenu de l'impact négatif qu'on connaît maintenant de cette coupure et qui va à l'encontre d'une véritable politique du livre et de la lecture au Québec? Le ministre fédéral a même dû intervenir. Quelle honte pour le Québec, puisque cette coupure...

M. Gratton: Question de règlement!

Le Président: J'avais déjà interpellé M. le député de Saint-Jacques. Vous êtes en additionnelle, s'il vous plaît! Concluez, M. le député de Saint-Jacques, sans commentaire. Vous êtes en additionnelle et je l'avais déjà rappelé.

M. Gratton: M. le Président, sur une question de règlement. Non seulement le député de Saint-Jacques suscite-t-il un débat, mais il l'entretient à lui seul.

Des voix: Bravo!

M. Boulerice: C'est fausser le problème...

Le Président: Si vous me permettez, M. le leader du gouvernement, c'était une remarque, mais non une question de règlement. M. le député de Saint-Jacques, en conclusion, s'il vous plaît, et je vous rappelle que vous êtes en additionnelle!

M. Boulerice: Est-ce que la ministre va reconsidérer cette décision arbitraire de couper 4 000 000 $ dans les bibliothèques, parce que cela affecte les heures d'ouverture, l'achat de livres et le maintien de personnel?

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles. Â l'ordre, s'il vous plaît! Mme la vice-première ministre et ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: Sérieusement, M. le

Président, le pourcentage des subventions aux bibliothèques est de 12 %. Donc, 3 % sont coupés cette année. Nous avons dit aux responsables des bibliothèques des municipalités que les normes étaient assouplies pour cette période où nous devons faire des compressions budgétaires. Je pense que le député de Saint-Jacques devrait être prudent dans ses questions et prudent également dans ce qu'il véhicule dans ce dossier. Nous avons également dit à la table de concertation Québec-municipalités que nous allions cheminer avec elles au cours de cette année pour trouver des solutions adéquates à cette situation déplorable en raison de la succession que nous avons reçue, et je vais le redire. Si nous avions eu les moyens, nous n'aurions pas fait de compressions budgétaires.

VI. le Président, vous allez me permettre de continuer ma réponse. J'ai rencontré, hier encore, les gens représentant les bibliothèques centrales de prêts que nous n'avons pas coupées. Le député de Saint-Jacques ne le dit pas. Avec eux aussi, nous allons faire ce cheminement au cours des mois qui viennent pour faire en sorte que, vers octobre, nous soyons capables de trouver une solution avec les municipalités qui puisse nous permettre de continuer à accorder cette aide aux bibliothèques et a trouver une équité dans les subventions aux bibliothèques centrales de prêts et aux bibliothèques autonomes.

M. Boulerice: Dernière question complémentaire, M. le Président.

Le Président: Non, M. le député de Saint-Jacques, c'est dommage. Vous êtes trois minutes et demie en retard et j'ai dû vous le rappeler. Je vais mettre fin a la période régulière de questions, mais j'ai été avisé - si vous me permettez avant de procéder aux deux votes - qu'il y aura un complément de réponse de la part du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation à une question de M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en complément de réponse.

Programmes agricoles applicables au Saguenay—Lac-Saint-Jean

M. Pagé: M. le Président, effectivement, le député de Lac-Saint-Jean s'inquiétait de l'entrée en vigueur de certains programmes qui sont sous la juridiction du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je lui ai indiqué en début de semaine la volonté ferme de notre gouvernement d'accélérer la mise en place des programmes, compte tenu que les semences se font tôt en saison.

Il me fait plaisir de lui confirmer ce matin que les programmes applicables à sa région, notamment l'aide pour le désherbage des terrains aménagés en bleuetières familiales a été signée le 24 avril 1986; le programme d'aide à l'amélioration des sols chez les producteurs de bleuets, le 11 juin dernier, cette semaine; même chose pour l'aide au déchaulage des sols dans la région agricole 12, soit la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. (11 heures)

Pour l'utilisation du lactosérum pour le moulage à la ferme, c'est la même chose, le programme a été adopté dès cette semaine alors que l'année dernière, il avait été mis en vigueur le 1er septembre seulement. C'est la même chose pour la production ovine. Destruction du chiendent dans les champs de céréales non drainés, c'est la même chose, le programme a été signé le 11 juin 1986. L'aide au développement de l'horticulture de la région agricole 12, 11 juin 1986.

Je tiens à rappeler au député que l'année dernière, les budgets qui avaient été prévus pour les programmes dans la région 12 totalisaient une somme de 240 000 $, alors que cette année, ils totalisent 630 000 $.

Des voix: Bien! Bien!

Le Président: En additionnelle, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Une question additionnelle a deux volets. Est-ce que le ministre maintient la durée de trois ans du plan tel qu'il avait été annoncé et réclamé? J'ai peut-être mal compris. Est-ce que le programme national pour la conservation des pommes de terre a été également signé par le ministre?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: M. le Président, j'ai signé ces programmes pour une durée d'un an. J'avais d'ailleurs parlé du droit pour un ministre de revoir la période d'application des programmes signés par un prédécesseur à quelques mois ou à quelques semaines d'une élection. Donc, ces programmes s'appliqueront jusqu'au 31 mars 1987. Concernant l'autre volet du programme, il doit être mis en application éventuellement.

Le Président: Fin de la période des questions.

Nous allons procéder dans quelques instants aux deux votes sur les motions qui ont été reportées à ce matin. Est-ce que les députés de cette Chambre sont prêts à procéder aux deux votes? Nous allons attendre quelques instants. Est-ce que les

députés de cette Chambre sont prêts immédiatement à procéder à la mise aux voix de la première motion? (11 h 1-11 h 3)

Mise aux voix de la motion

proposant l'adoption du principe du projet de loi 19

Le Président: Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la première motion présentée par M. le ministre des Transports proposant que le principe du projet de loi 19, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile, soit maintenant adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, à la suite d'une entente du ministre des Transports avec l'Opposition, nous sommes maintenant prêts à adopter unanimement le principe du projet de loi 19. Donc, il ne sera pas nécessaire d'enregistrer le vote.

Le Président: Unanimement, le projet de loi 19 est adopté.

Mise aux voix de la motion de clôture pour mettre fin à l'étude du projet de loi 58

Nous allons maintenant procéder immédiatement, si je comprends bien, au vote sur la deuxième motion. Si vous me le permettez, je vais faire lecture de la deuxième motion. Il s'agit de la mise aux voix de la motion présentée par M. le leader du gouvernement en vertu de l'article 251 de notre règlement. Elle se lit comme suit: "Que la commission de l'éducation à qui a été confiée l'étude du projet de loi 58, Loi sur l'admissibilité à l'enseignement en anglais de certains enfants, mette fin à ses travaux dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport au moment prévu de la période des affaires courantes de la séance qui suit celle au cours de laquelle aura été adoptée la présente motion."

Que ceux et celles qui...

M. Jolivet: Même vote inversé.

Le Président: Que ceux et celles qui sont en faveur de ladite motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Saintonge (Laprairie), Marx (D'Arcy McGee), Pagé (Portneuf), Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Bourbeau (Laporte), Paradis (Brome-Missisquoi), Latulippe (Chambly), Dutil (Beauce-Sud), Mmes Gagnon-Tremblay (Saint-François), Robic (Bourassa), MM. MacDonald

(Robert Baldwin), Vallières (Richmond), Picotte (Maskinongé), Fortier (Outremont), Ro-cheleau (Hull), Gobeil (Verdun), Mme Bégin (Bellechasse), MM. Cusano (Viau), Vaillancourt (Orford), Dauphin (Marquette), Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Lefebvre (Frontenac), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Sirros (Laurier), Doyon (Louis-Hébert), Maciocia (Viger), Middlemiss (Pontiac), Beaudin (Gaspé), Cannon (La Peltrie), Chagnon (Saint-Louis), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat (Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak (Sainte-Anne), Assad (Papineau), Audet (Beauce-Nord), Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamin-gue), Bélanger (Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Îles), Mme Hovington (Matane), M. Séguin (Montmorency), Mmes Trépanier (Dorion), Bélanger (Mégantic-Compton), MM. Fortin (Marguerite-Bourgeoys), Parent (Sauvé), Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), MM. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet), Gobé (Lafontaine), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon), Bissonnet (Jeanne-Mance), Hains (Saint-Henri), Houde (Berthier), Kehoe (Cha-pleau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Leclerc (Taschereau), Hétu (Labelle), Joly (Fabre), Lemieux (Vanier), Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Richard (Nicolet), Tremblay (Rimouski), Tremblay (Iberville), Thérien (Rousseau), Théorêt (Vimont), Saint-Roch (Drummond).

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre ladite motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: MM. Johnson (Anjou), Chevrette (Joliette), Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Jolivet (Laviolette), Garon (Lévis), Rochefort (Gouin), Charbonneau (Verchères), Mme Juneau (Johnson), MM. Gendron (Abitibi-Ouest), Brassard (Lac-Saint-Jean), Filion (Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Paré (Shefford), Boulerice (Saint-Jacques), Blais (Terrebonne), Dufour (Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve).

Le Secrétaire: Pour: 85

Contre: 20

Abstentions: 0

Le Président: La motion en vertu de l'article 251 de notre règlement est adoptée. Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Il n'y a aucune motion sans préavis ce matin. Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouverne-

ment.

Renvoi du projet de loi 19 à

la commission de l'aménagement

et des équipements

M. Gratton: Oui, M. le Président, mais avant que nous procédions, pourrais-je solliciter le consentement de l'Assemblée pour faire une motion de déférence du projet de loi 19 que nous avons adopté unanimement tantôt? Je fais donc motion pour que le projet de loi 19 soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Président: La motion de déférence du projet de loi 19 est-elle adoptée? Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: Aux avis touchant les travaux des commissions, je prierais les membres d'être attentifs puisque les heures de séance pourront en surprendre certains. D'abord, aujourd'hui, à compter de maintenant et jusqu'à 13 heures, de 15 heures a 17 heures et de 19 heures à 22 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants, dans l'ordre: projet de loi 85, Loi sur la vente de la Raffinerie de sucre du Québec, et projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur la protection sanitaire des animaux.

Aux mêmes heures, c'est-à-dire jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 17 heures et de 19 heures à 22 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi 40, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale; projet de loi 46, Loi modifiant la Loi sur les travaux municipaux; projet de loi 48, Loi modifiant la Loi sur la Société de transport de la rive sud de Montréal; projet de loi 49, Loi modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik; projet de loi 50, Loi modifiant la Loi de la Communauté urbaine de Montréal; projet de loi 67, Loi concernant la ville de Schefferville et, finalement, le projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les élections dans certaines municipalités. (11 h 10)

À la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, de maintenant jusqu'à 13 heures, de même que de 15 heures à 17 heures, la commission du budget et de l'administration poursuivra l'étude du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives.

S'il n'y a pas de questions au sujet des avis concernant les travaux des commissions, j'aurais des détails à communiquer aux membres de l'Assemblée quant à nos travaux de lundi, ce qui pourrait permettre aux membres de l'Assemblée de préparer leur agenda.

Le Président: Si vous me le permettez, M. le leader du gouvernement, j'ai également un avis à faire concernant les travaux des commissions. La commission des institutions se réunira en séance de travail le 13 juin, après la période des affaires courantes jusqu'à 12 h 30 à la salle 85 de l'Hôtel du Parlement. Quant à la clôture ou à la suspension des travaux cet après-midi vers 17 heures, M. le leader du gouvernement, serait-il possible que toutes et chacune des commissions suspendent ses travaux peut-être sept ou huit minutes avant 17 heures étant donné que nous recevons cet après-midi, à 17 heures pile, le président de la République d'Italie? Il sera déjà, à 17 heures, à l'intérieur du Parlement et les parlementaires pourront se joindre à nous, au salon rouge, au Conseil législatif après 17 heures. Cela va? Est-il possible que les commissions suspendent les travaux quelques minutes avant 17 heures?

M. le leader du gouvernement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

M. Gratton: Au sujet des travaux de l'Assemblée, j'aimerais informer les membres que l'Assemblée se réunira lundi à compter de 13 heures pour les affaires courantes. Pour donner une indication des projets de loi qui seront appelés dans l'ordre, sous réserve des ajustements de dernière minute qui pourraient survenir, le projet de loi 55 concernant les ex-enseignants religieux, le projet de loi 54, transfert de certains employés du ministère de l'Éducation à Radio-Québec, le projet de loi 30, commission scolaire du Nouveau-Québec, réimpression, le projet de loi 73, accès aux documents des organismes publics. Il y aura, évidemment, plusieurs prises en considération, dont le projet de loi 60, Code de la sécurité routière, le projet de loi 84 concernant les non-fumeurs.

Comme il s'agira de la dernière semaine de session, on peut considérer que le menu des travaux est constitué de l'ensemble de ce qui se retrouve au feuilleton. Plus tard, en cours de journée, nous donnerons des avis quant à la tenue de certaines commissions parlementaires qui se réuniront à 10 heures lundi matin, une fois que j'aurai eu l'occasion de consulter le leader de l'Opposition à ce sujet.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres

renseignements concernant les travaux? M. le leader de l'Opposition?

M. Chevrette: Juste sur un projet de loi, il m'apparaît que le projet de loi 74 n'a pas encore fait l'objet d'appel et n'est pas prévu pour les travaux d'aujourd'hui. Est-ce que c'est prévu pour les travaux de la semaine prochaine?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Nous procéderons lundi, mardi, quelque part dans ce temps-là, à l'appel de l'adoption du principe de ce projet de loi.

Le Président: Cela va? Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Je vous prierais d'appeler l'article 21 du feuilleton, s'il vous plaît, M. le Président.

Projet de loi 75 Adoption du principe

Le Président: À l'article 21 au feuilleton, il s'agit du début du débat sur la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et services sociaux, présenté par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Thérèse Lavoïe-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Nous entamons aujourd'hui le discours sur l'adoption du principe du projet de loi 75 qui vient modifier la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Il me fera plaisir d'établir clairement et précisément les objectifs qui sous-tendent l'étude et l'adoption de ce projet de loi, étant donné que ces objectifs consistent essentiellement à assurer une meilleure efficacité et une meilleure efficience des services de santé à la population et surtout une meilleure accessibilité à l'ensemble des services pour l'ensemble de la population et, également, une meilleure qualité des services... Bien, écoutez là, franchement...

La Vice-Présidente: Je demanderais à ceux qui sont en arrière de bien vouloir reprendre leur siège ou de quitter l'Assemblée.

Vous pouvez continuer, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je disais donc que nous entamions aujourd'hui - si je répète ces phrases, c'est que je pense que c'était assez difficile d'entendre - le discours sur l'adoption du principe du projet de loi 75 qui vient modifier la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Je voudrais donc établir clairement et précisément les objectifs qui sous-tendent l'étude et l'adoption de ce projet de loi, parce que ces objectifs consistent essentiellement à assurer une meilleure efficacité et une meilleure efficience des services de santé à la population et, surtout, une meilleure accessibilité et une meilleure qualité de ces services.

L'accès universel à des soins de qualité est l'un des principes fondamentaux de notre système de santé et il fait l'objet d'une préoccupation gouvernementale grandissante. Durant les dernières décennies, divers programmes gouvernementaux ont contribué progressivement à rendre les services de santé accessibles à l'ensemble de la population. Nous avons eu tout d'abord l'introduction du programme d'assurance-hospitalisation puis, au début des années soixante-dix - nous en sommes toujours fiers sous le gouvernement de M. Bourassa, l'introduction du programme d'assurance-maladie qui a été l'un des facteurs les plus déterminants dans la mise sur pied d'un système de santé universel, accessible et de qualité. Éliminant, à toutes fins utiles, les barrières financières d'accès aux soins, ces deux programmes ont été également à l'origine d'un développement important des services offerts, autant les services de base que les services spécialisés ou ultraspécialisés.

Au cours des quinze dernières années, on a pu également assister à la mise en place d'un nombre important d'établissements qui constituent un réseau, qu'il s'agisse des hôpitaux, des centres locaux de services communautaires, ce qu'on appelle les CLSC, qu'il s'agisse des centres d'accueil ou de différents établissements de services sociaux ou communautaires. Évidemment, nous sentons toujours la difficulté d'interrelation entre ces établissements, même si, depuis plusieurs années, chacun s'efforce de rapprocher ces différents établissements pour vraiment permettre à la population d'avoir accès à des services continus, bien articulés et qui répondent à ses besoins.

On pourrait peut-être croire que, devant la présence de ce réseau très complet - enfin, le plus complet possible dans notre système de santé et de services sociaux - les objectifs que notre société s'est donnés au début des années soixante-dix ont tous été véritablement atteints. On pourrait peut-être croire également que nous n'avons qu'à

arrêter d'y travailler parce que le travail est déjà fait. Malheureusement, la réalité est tout autre car, malgré le système de santé dont nous nous sommes dotés en tant que société, une proportion importante de la population demeurant en régions périphériques et même intermédiaires n'a pas un accès adéquat aux services de santé.

Je voudrais simplement ici reprendre quelques mots de ce que disait le président de la commission Rochon dans une conférence de presse qu'il tenait hier pour clore la première partie des travaux de la commission: "Les disparités sont telles entre les grands centres et les régions éloignées qu'il est illusoire de croire que les services offerts aux Québécois sont égaux en qualité et en quantité partout dans la province. Les régions périphériques sont toujours pénalisées eu égard à la distribution géographique des services de santé et même des services sociaux. L'allocation concrète des ressources, que ce soit en termes matériels ou humains, ne s'est pas toujours faite selon une évaluation réelle des besoins et en fonction d'indicateurs des différentes pathologies ou des environnements." (11 h 20)

Le gouvernement tente, et a tenté, dans le passé - il faut aussi le souligner, l'ancien gouvernement - de présenter des mesures à la fois incitatrices et désincitatrices pour tenter d'améliorer cette situation, mais on sait fort bien que nous restons toujours devant des problèmes aigus qu'encore une fois, pas plus tard qu'hier, le président de la commission Rochon soulignait.

La mauvaise répartition géographique des effectifs médicaux, en d'autres termes, la mauvaise répartition géographique de la main-d'oeuvre médicale, des médecins, représente, à l'heure actuelle, la cause la plus importante des problèmes d'accès aux soins dans ces régions. Pour des raisons qu'un peu tous connaissent, les forces du marché ne président plus à l'affectation des ressources médicales au Québec. À titre d'information, les derniers chiffres de la Corporation professionnelle des médecins du Québec nous indiquaient que ses ressources médicales étaient composées, en décembre 1984, de 13 303 médecins, dont 5918 omnipraticiens et 6055 médecins spécialistes. Il n'y a pas de manque de main-d'oeuvre médicale au Québec, mais il y a une mauvaise distribution de cette main-d'oeuvre et il y a aussi probablement la nécessité de se pencher sur la répartition entre les médecins omnipraticiens et les médecins spécialistes, un problème qui fera d'ailleurs l'objet de cette table de concertation permanente dont je parlerai tout à l'heure et à laquelle toutes les fédérations seront appelées à participer.

Le problème majeur de la distribution des médecins nous donne donc un portrait de la situation qui est moins que réjouissant. Malgré une croissance très grande de l'effectif médical - cinq fois plus vite que l'accroissement de la population durant la dernière décennie, pour atteindre au Québec le ratio d'un médecin par 500 habitants, certainement un des plus hauts dans le monde occidental - il manque toujours dans les régions éloignées environ 50 omnipraticiens et 200 médecins spécialistes.

Dans la région de la Côte-Nord, par exemple, on retrouve près de dix fois moins de médecins spécialistes que dans la région de Montréal et même si on exclut... Il faut bien en tenir compte, il y a, à Montréal, des universités où des médecins enseignent, des hôpitaux surspécialisés et aussi des endroits où on fait de la recherche. Même si on soustrait de ces chiffres les médecins engagés dans des activités de recherche, d'enseignement et de soins ultraspécialisés, le ratio de Montréal par rapport à la Côte-Nord, en termes de spécialistes, demeure supérieur à cinq.

La Côte-Nord, parmi les quelques régions à avoir réalisé leur plan d'effectifs médicaux, possède seulement le tiers des effectifs spécialisés prévus à ce plan et constate des pénuries importantes dans les spécialités de base. D'ailleurs, dans l'ensemble des régions périphériques, il y a une carence d'au moins 50 % selon les plans d'effectifs médicaux que ces régions se sont donnés.

Pour ne donner qu'un seul exemple, il n'existe aucun obstétricien-gynécologue pour toute cette région de 110 000 habitants, région où le taux de mortalité périnatale est parmi un des plus élevés au Québec. De façon générale, les régions éloignées possèdent moins de la moitié des spécialistes par rapport aux besoins qu'elles ont pu évaluer. Pourtant, certaines études précisent que le fardeau de la maladie y est souvent beaucoup plus important que dans des grandes régions urbaines.

Le problème n'est toutefois pas limité aux régions éloignées. En effet, les régions intermédiaires comme la Mauricie, les Laurentides et Lanaudière, le Saguenay—Lac-Saint-Jean vivent aussi un problème sérieux d'accès aux services de santé, notamment à l'égard de certaines spécialités. Par exemple, plus de la moitié des Québécois et Québécoises n'ont pas accès à un niveau acceptable de services psychiatriques. Le dernier rapport de la Corporation professionnelle des médecins du Québec indique une détérioration de la situation au Saguenay—Lac-Saint-Jean ainsi que dans les Laurentides et Lanaudière. Dans une région qui est quand même, je dirais, très près de Montréal, la région 6C, qu'on appelle la Montérégie, la rive sud de Montréal, on nous faisait état, le 14 mars 1986, des carences en effectifs médicaux, particulièrement en

spécialité. Par exemple, on nous disait que des hôpitaux de soins de courte durée, tels ceux de Granby, Saint-Hyacinthe, Valleyfield, Haut-Richelieu, manquaient de médecins spécialistes, les services les plus touchés dans ces cas-là étant ceux de la psychiatrie, de l'anesthésie et de la cardiologie, pour ne nommer que les principaux. Je pourrais reprendre - mais je ne veux pas m'étendre inutilement - des données similaires pour la région de l'Outaouais, par exemple, et, il va sans dire, pour les régions vraiment périphériques. Je pense que tout le monde est fort conscient de ce problème.

Cette même étude nous confirmait également qu'on constate une amélioration marquée de la répartition des médecins omnipraticiens, mais qu'il n'y a aucune amélioration de la répartition des médecins spécialistes. C'est évidemment dans les régions les moins bien desservies en termes d'effectifs médicaux ou de main-d'oeuvre médicale que la disponibilité des médecins spécialistes diminue le plus. Au problème de la répartition géographique s'ajoute le problème de la répartition par spécialité. De 1980 à 1984, il y aurait eu détérioration du ratio population-médecins pour les spécialistes en anesthésie-réanimation, chirurgie générale, neurochirurgie, oto-rhino-laryngologie et urologie.

Pour compléter le portrait de la situation de la distribution de la main-d'oeuvre ou des besoins en main-d'oeuvre médicale au Québec, nous ne pouvons passer sous silence la situation des petits centres hospitaliers des régions intermédiaires et même des centres hospitaliers non universitaires dans les grandes régions urbaines qui multiplient les cris d'alarme auprès du gouvernement. En effet, certains menacent de réduire leurs heures d'ouverture et leur service d'urgence par manque de médecins effectuant les services de garde auprès des établissements. En ce sens, la responsabilité des médecins qui gravitent dans le même environnement que ces centres hospitaliers est majeure et nécessite une plus grande prise de conscience du problème.

Dans le but de résoudre l'ensemble des problèmes relatifs à cette répartition des médecins, le gouvernement a adopté dans le passé des mesures allant des primes d'installation à l'implantation de la rémunération différenciée, en passant par des programmes de bourses, de décentralisation, de formation médicale et de jumelage intra et interrégionale. Évidemment, toutes ces mesures ne sont pas encore en vigueur et certaines ne le sont pas d'une façon tout à fait satisfaisante, mais il y a quand même eu un grand nombre de ces mesures qui ont été appliquées. Il est peut-être un peu tôt pour évaluer d'une façon absolument rigoureuse l'effet de chacune d'elles ou l'impact global de l'ensemble de ces mesures.

On peut cependant, à ce stade, dégager certaines conclusions dont une, entre autres, provient du rapport de la Corporation des médecins qui souligne que les projections pour 1988 indiquent que la répartition interrégionale pourrait s'améliorer légèrement pour les omnipraticiens, mais demeurera inchangée pour les spécialistes. On me disait, par exemple, que dans la région du Nord-Ouest, de l'Abitibi-Témiscamingue, il n'y a pas un seul cardiologue. Évidemment, on a tenté de suppléer à ces carences par toutes sortes de mesures transitoires telle, par exemple, celle qu'on appelle l'itinérance des médecins; des médecins vont en régions éloignées des fins de semaine ou pendant des périodes données. Mais la population là-bas, qui est quand même considérable, trouve, et avec raison, qu'il est absolument injuste de toujours se trouver à la merci de mesures transitoires ou temporaires. Pourtant, la qualité et la continuité des soins exigent que les régions éloignées aient, comme toutes les autres régions, des ressources permanentes sur place.

Le gouvernement précédent a introduit, en 1981, lors de l'étude du projet de loi 27 qui modifiait, entre autres, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, un article obligeant tous les établissements hospitaliers à élaborer un plan d'organisation des services dans lequel se retrouverait une évaluation des besoins en termes de main-d'oeuvre médicale. Cet article du projet de loi donnait également une responsabilité aux conseils régionaux de la santé et des services sociaux d'approuver ces plans effectués par les établissements. (11 h 30)

Certaines régions - il est assez intéressant de le constater - particulièrement les régions éloignées, ont élaboré très facilement ces plans d'effectifs, compte tenu du fait qu'elles étaient en pénurie de main-d'oeuvre, qu'elles manquaient de médecins. C'était évidemment plus facile. Par contre, dans les autres régions, la concentration très grande de la main-d'oeuvre médicale - je pense particulièrement à Montréal - a rendu cette tâche beaucoup plus difficile et même irréalisable en ce sens que le mandat donné aux conseils régionaux pour planifier la main-d'oeuvre régionale n'était pas explicite. L'absence de plan dans chaque région a donc rendu inopérante et inefficace cette obligation faite aux conseils régionaux et au ministère d'approuver les plans d'établissement. Même si presque tous les établissements hospitaliers, ou du moins un très grand nombre, ont transmis leurs plans, ceux-ci sont restés sans réponse, faute de mandat explicite dévolu à chaque conseil régional et faute de l'obligation de soumettre un plan d'effectifs médicaux. Ce qui démontre tout simplement qu'il est plus facile de planifier la main-d'oeuvre, lorsqu'il n'y a pas de

ressources que lorsqu'il y en a, et que les résistances dans ces régions y sont également beaucoup moins prononcées.

Il est de la responsabilité du gouvernement de rendre ce principe adopté en 1981 applicable et opérationnalisable. Comment pourrait-on sans cela effectuer une véritable planification de la main-d'oeuvre médicale, planification dont même les fédérations médicales reconnaissent la nécessité? Évidemment, le projet de loi a eu des critiques. Le gouvernement croit qu'il est de son devoir de persister avec l'accord d'un grand nombre d'intervenants et surtout de répondre aux besoins de la population et croit que le projet de loi 75 est un pas positif en ce sens. Le gouvernement n'a nullement dans ses intentions de conscrire la profession médicale comme certains l'ont crié peut-être un peu trop rapidement, ni même d'obliger les médecins à travailler en régions éloignées; sauf, cette année, pour le cas de 50 médecins spécialistes qui avaient été accordés en surplus du contingentement habituel et ont signé un engagement de servir en régions éloignées pour une période de quatre ans. C'est un engagement volontaire qu'ils signent et il ne s'agit pas d'étendre cette mesure à l'ensemble des spécialistes comme certains ont pu le croire.

La seule intention qui peut nous être accordée, c'est de vouloir mettre un terme à l'incohérence de la répartition géographique des médecins. Celle-ci doit se faire davantage en fonction des caractéristiques démographiques de la population régionale et de ses besoins sociosanitaires. Le projet de loi 75 ne doit pas non plus être vu comme un projet pour ou contre la profession médicale, mais davantage comme un projet qui vise une plus grande efficacité des moyens déjà mis de l'avant. D'ailleurs, le gouvernement a déjà démontré son intention de collaborer avec les fédérations médicales en les invitant à se joindre à une table de concertation continue qui étudiera et élaborera la politique de détermination des postes de résidents et d'internes pour les trois prochaines années.

Il me fait plaisir de dire que non seulement les fédérations, mais également les universités et désormais, après l'adoption du projet de loi des représentants des CLSC, des représentants des centres d'accueil, parce qu'eux aussi devront participer à ce plan d'effectifs médicaux, se joindront à cette table, sans compter des représentants régionaux et j'en passe. Cette table de concertation existait depuis deux ans. C'est-à-dire qu'à deux occasions, mais uniquement à l'occasion de l'étude des effectifs médicaux pour l'année à venir, cette table s'est réunie. Nous croyons que cela est loin d'être suffisant et que, si nous voulons vraiment trouver les solutions les plus adéquates possibles, il faut qu'il s'agisse d'une table continue et c'est le sens de l'invitation que nous avons adressée aux différents intervenants et à laquelle les différents intervenants ont manifesté le désir de collaborer.

Rappelons que cet effort de concertation était également le sujet d'un engagement électoral de ma formation politique, au cours de la dernière campagne électorale. Cela me fait plaisir de dire cela au député de Gouin. J'ai confiance que le dialogue qui doit s'installer de façon permanente entre tous les intervenants au dossier demeure la meilleure garantie d'une évaluation des besoins et d'une plus grande planification de cette main-d'oeuvre médicale. Ce ne serait très certainement pas en reconstituant cette table de façon sporadique, comme elle l'a été dans le passé, qu'on peut vraiment en arriver à une entente sur le sujet. Le gouvernement ne rejette donc pas la consultation. Bien au contraire, il la veut permanente.

En ce qui a trait au projet de loi 75, on constate que cette question des plans d'effectifs médicaux a déjà été largement traitée lors de la commission parlementaire qui se tenait il y a un an, en mai 1985, et à laquelle tous les principaux intervenants avaient largement contribué. Plusieurs groupes, à ce moment-là, ont affirmé la nécessité de se doter de plans d'effectifs régionaux, que ce soit la Conférence des conseils régionaux de la santé et des services sociaux, que ce soit la Fédération des centres locaux de services communautaires, les CLSC, que ce soit l'Association des centres d'accueil ou l'Association des hôpitaux du Québec et même l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec. Ils avaient manifesté ce désir qu'il y ait une planification des effectifs médicaux pour l'ensemble du territoire du Québec.

D'ailleurs, à ce moment, les CLSC et les centres d'accueil avaient manifesté leur désir d'être partie aux plans d'effectifs médicaux régionaux. C'est donc à cette volonté que le gouvernement répond en introduisant l'article qui prévoit l'obligation pour un centre local de services communautaires ou un centre d'accueil de déterminer dans son plan d'organisation le nombre de médecins et de dentistes qui peuvent y exercer leur profession.

Je ne peux, non plus, m'empêcher de relever les paroles mêmes du député de Joliette ministre des Affaires sociales à l'époque à cette commission parlementaire, qui soulignait l'importance pour les conseils régionaux de la santé et des services sociaux de pouvoir faire des plans d'effectifs régionaux sur une base régionale ou sous-régionale. "Au plus vite", disait-il. C'est une clé indispensable si on veut planifier concrètement, si on veut doter chacune de

nos régions d'effectifs de base nécessaires". Puis-je en conclure, M. le Président, que l'Opposition et le gouvernement, aujourd'hui, pourraient être d'accord sur ce projet de loi, compte tenu des propos tenus en mai 1985 par le député de Joliette?

Le projet de loi n'a pas d'autres objectifs que de compléter les dispositions relatives aux plans d'organisation et de prévoir que le conseil régional devra, à partir notamment de ces plans, élaborer un plan régional de la main-d'oeuvre médicale et dentaire nécessaire à la population de la région. Le ministre pourra enfin, dans le but d'assurer ultimement une répartition géographique adéquate, modifier un plan régional et les plans d'organisation qui ont servi à son élaboration. Ces mesures sont complétées par des dispositions transitoires garantissant leur application et permettant d'harmoniser celles-ci dans le temps, incluant des dispositions prévoyant les pouvoirs réglementaires requis à cet égard.

Lors de la rencontre que j'ai eue avec les fédérations médicales mercredi dernier, si ma mémoire est bonne - la semaine dernière sûrement - celles-ci ont manifesté le désir que les cabinets privés ne soient pas inclus dans le plan régional d'effectifs médicaux. Ce point soulève, évidemment, d'une part, la capacité d'établir un cabinet privé n'importe où, mais soulève également, d'autre part, le problème du partage des effectifs entre les cabinets privés et l'activité en établissement.

Tel que promis aux fédérations, nous avons examiné attentivement cette question ou cette requête qu'elles nous ont adressée. Je peux, dès maintenant, Mme la Présidente, annoncer que, lors de la commission parlementaire qui étudiera le projet de loi article par article ou de façon détaillée, comme on le dit aujourd'hui, je serai en mesure d'apporter une réponse qui ira dans le sens de la requête qu'ils m'ont adressée.

Le projet de loi 75, Mme la Présidente, comporte, par ailleurs, trois autres éléments de fond. Tout d'abord, il prévoit l'obligation pour un médecin ou un dentiste qui pratique en établissement de donner un préavis avant de quitter cet établissement. Actuellement, les médecins et les dentistes jouissent d'un statut et ont des privilèges qui leur sont conférés par les centres hospitaliers, conformément à la Loi sur les services de santé et les services sociaux et aux règlements sur l'organisation et l'administration des établissements.

Certains centres d'accueil et centres locaux de services communautaires confèrent également un tel statut à ces professionnels. Or, rien n'est prévu actuellement pour qu'en contrepartie les médecins ou les dentistes assurent le maintien des services médicaux en établissement. Aucune obligation ne leur est faite de donner un préavis avant de cesser leurs activités dans un établissement.

Certains centres hospitaliers, par contre, se sont toutefois dotés d'un règlement interne demandant un préavis de 30 jours avant de quitter l'établissement. Mais la difficulté de concilier ce pouvoir que certains conseils d'administration d'établissements se sont donné avec le type de relations qu'ils doivent conserver avec leurs médecins, à la suite d'un conflit ou lors d'un conflit, rend ce règlement difficile d'application. (11 h 40)

C'est ainsi que certains établissements, sans aucun avis préalable, se sont retrouvés sans médecin à l'urgence ou dans le département des soins intensifs parce que tous les médecins qui y oeuvraient avaient décidé par mesure de pression ou autres de quitter en même temps.

Le projet prévoit, M. le Président, qu'un médecin ou un dentiste ne pourra quitter un établissement dans lequel il exerce sans avoir donné un préavis de 60 jours. Cependant, nous prévoyons qu'un médecin ou un dentiste pourrait, toutefois, quitter un établissement sans préavis ou après avoir donné un préavis d'une durée moindre si son départ n'a pas, de l'avis du conseil d'administration de l'établissement, pour effet d'affecter la qualité ou la suffisance des services médicaux ou dentaires offerts à la population desservie par cet établissement. Je pense que cela tombe sous le sens qu'un médecin ou un dentiste, pour des raisons qui lui sont personnelles ou des raisons qui sont tout à fait légitimes et qui n'affectent pas le fonctionnement général d'un centre hospitalier, peut avoir l'autorisation de quitter l'établissement sans avoir donné ces 60 jours de préavis.

Il est, en outre, prévu que le médecin ou le dentiste qui quitte sans préavis ou sans l'autorisation du conseil d'administration soit, aux fins de la Loi sur l'assurance-maladie, considéré non participant pour une période établie en fonction de la durée non écoulée du préavis. Des amendements seront également apportés à la Loi sur l'assurance-maladie pour prévoir que la régie émet, le cas échéant, une ordonnance de non-participation applicable à un dentiste ou à un médecin, l'en avise et en publie un avis à la Gazette officielle.

Ainsi le gouvernement souhaite créer un incitatif à la discussion plutôt qu'à l'utilisation de moyens de pression qui peuvent avoir des impacts néfastes et même dangereux sur l'accessibilité et la qualité des services de santé. La responsabilité de mon ministère à l'égard de la santé publique et de la protection de la population nécessite que soit introduite cette mesure et que les modalités prévues en cas de non-respect soient suffisamment dissuasives pour les rendre efficaces.

Le projet de loi prévoit en second lieu

des motifs d'inadmissibilité à la fonction de membre du conseil d'administration d'un établissement. C'est ainsi qu'une personne ne peut être admissible à ce poste si, au cours des trois années précédentes, elle a été déchue de ses fonctions comme membre du conseil d'administration d'un établissement au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Il en est de même pour la personne qui, au cours des trois années précédentes, a été reconnue coupable d'une infraction à l'une des dispositions de cette loi ou des règlements du gouvernement ou du ministre. Il est arrivé dans le passé certains cas où des personnes ont été déchues de leur poste à l'intérieur d'un conseil d'administration d'un établissement pour des raisons de cet ordre, très graves. Comme il n'y avait rien de prévu dans la loi, on les retrouvait quelques mois ou possiblement un an après dans un autre conseil d'administration. Alors, nous voulons que quelqu'un qui a été destitué pour des causes aussi graves ne puisse pas se représenter ou siéger à un autre conseil d'administration à l'intérieur de trois ans.

J'espère, en terminant, que nous procéderons à l'adoption de ce projet de loi, car je crois très sincèrement qu'il rejoint les objectifs que nous nous sommes donnés en tant que société lorsque nous avons mis sur pied notre système de santé et de services sociaux. Il ne modifie en rien ces principes. Il vient plutôt en renforcer l'application afin d'assurer une meilleure efficacité et une meilleure efficience des services de santé à la population.

Mme la Présidente, je suis convaincue que certains de mes collègues reprendront certains des nombreux témoignages que nous avons reçus, entre autres de la Fédération des conseils régionaux de la santé et des services sociaux, qui ont indiqué leur appui complet à ces mesures et même qui auraient souhaité que nous allions plus loin. Je pourrais ici simplement prendre le témoignage du conseil régional de la santé et des services sociaux de la Côte-Nord qui, justement, exprime son accord avec la récente décision du Conseil des ministres relative au contingentement des postes en spécialité, et qui appuie entièrement aussi les changements proposés par le projet de loi 75 modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Il trouve extrêmement importante l'obligation faite aux CRSSS de préparer un plan régional d'effectifs médicaux et dentaires nécessaires à la population de la région, en tenant compte notamment des plans d'organisation clinique des établissements qu'il a approuvés.

Alors, Mme la Présidente, il y a ce témoignage et il y a des témoignages d'éditorialistes. Nous avons rencontré également les différents intéressés, que ce soit les fédérations de médecins... La

Corporation professsionnelle des médecins et dentistes a également demandé de nous rencontrer. Nous l'avons rencontrée et toutes les demandes qui nous ont été adressées à cet égard, que ce soit de la part de l'Association des hôpitaux ou de l'ensemble des... nous avons accédé à leurs demandes. Je dois vous dire que nous avons tenté et que nous tenterons le mieux possible de tenir compte des représentations qui nous ont été faites lors de ces rencontres.

Il y a une chose qui est certaine, c'est que les besoins sont urgents d'une meilleure planification de la main-d'oeuvre pour justement permettre de respecter le plus possible ce principe d'accessibilité et d'universalité dans le domaine des services de santé. Je pense que de plus en plus la population des régions éloignées ne veut tolérer d'être laissée à la merci des événements quand elle requiert des services de santé. Ceci ne veut pas dire qu'on recréera dans les régions périphériques ou éloignées un institut de cardiologie ou un institut de neurologie, mais il reste qu'il y a des services de base et des services spécialisés que les régions requièrent et qu'elles sont en droit de requérir.

Mme la Présidente, la population des régions périphériques et intermédiaires réclame un meilleur accès aux services de santé et je pense que l'ensemble des Québécois et des Québécoises ont droit à des services de qualité. Je pense que, pour toutes ces raisons, l'objectif d'une meilleure planification de la main-d'oeuvre médicale nous apparaît essentielle et nous pensons qu'avec ces deux instruments - d'une part, l'adoption de la loi 75 pour confier ce mandat de planification régionale et sous-régionale aux conseils régionaux de la santé et des services sociaux et, d'autre part, le travail qui sera accompli par cette table de concertation où se trouveront les principaux intervenants et qui veut planifier, justement, ces besoins sur une période de trois ans -nous devrions trouver des solutions satisfaisantes pour tenter de régler un problème qui devient de plus en plus intolérable dans une société comme la nôtre. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le député de Gouin.

M. Jacques Rochefort

M. Rochefort: Merci, Mme la Présidente. À chacune de ses interventions entourant le projet de loi 75, la ministre de la Santé et des Services sociaux tente de limiter la portée et les objectifs visés par ce projet de loi à la question de la répartition des effectifs médicaux en régions. Or, Mme la Présidente, le projet de loi 75 va

beaucoup plus loin que la question des effectifs médicaux en régions. D'ailleurs, Mme la Présidente, il soulève un tollé, des débats importants et des oppositions qui sont nombreuses et pas seulement en provenance des syndicats de médecins.

Le débat qui a entouré ce projet de loi et les oppositions qui ont été manifestées ne vont en aucune façon dans le sens de s'opposer aux mesures visant à donner aux régions les médecins auxquels elles ont droit. Ce débat n'aurait pas eu lieu si le projet de loi s'était limité à poser des gestes, à prendre des décisions et des actions allant dans le sens d'une meilleure présence, d'une plus grande présence et d'une présence suffisante et satisfaisante des médecins dans les différentes régions du Québec qui sont, il faut le reconnaître, en pénurie actuellement. Mme la Présidente, la question du problème de la répartition et de la présence des médecins dans les différentes régions du Québec est un problème très important. Le niveau de qualité et de disponibilité, la présence de services de santé et de services sociaux de façon suffisante et satisfaisante dans l'ensemble des régions du Québec est une question absolument essentielle, primordiale et qui d'ailleurs, à mes yeux, comme membre de cette Assemblée nationale, est probablement le problème, la question qui mérite d'être placée, tant au plan politique qu'au plan budgétaire, en tête des priorités du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. (11 h 50)

D'ailleurs, Mme la Présidente, le Parti québécois, alors qu'il était au gouvernement, a bien reconnu l'importance de cette question et a posé des gestes concrets pour se mettre sur la voie de solutions complètes et définitives à ces problèmes. Les mesures que nous avons prises, les moyens que nous avons mis en place lorsque nous étions au gouvernement nous ont permis d'obtenir des résultats qui sont reconnus par tous comme étant des résultats positifs. Bien loin de moi l'intention de prétendre que tout est réglé, bien au contraire, mais tous reconnaissent que les mesures que nous avons mises en place, que les actions que nous avons prises, que les gestes que nous avons posés ont donné des résultats positifs, constituent un progrès substantiel par rapport aux problèmes qui existaient auparavant.

En même temps, une voie est tracée pour arriver à une solution définitive et complète de ce problème qui, je le répète, à mes yeux, quant à moi, doit retenir la priorité politique et budgétaire au ministère de la Santé du Québec, quelle que soit la formation politique qui représente le gouvernement.

D'ailleurs, les mesures que nous avons prises ont, pour l'essentiel - et la ministre l'a reconnu lors de son intervention sur la présentation du projet de loi tantôt - réglé la question de la présence des médecins omnipraticiens dans l'ensemble des régions du Québec. Non seulement la ministre l'a-t-elle reconnu, mais les études produites par son ministère, de même que les évaluations faites par l'ensemble des conseils régionaux de la santé et des services sociaux reconnaissent que pour l'essentiel le problème de la présence des omnipraticiens, avec les mesures prises jusqu'à maintenant, est en voie de règlement, si ce n'est déjà fait.

D'autre part, sur la question des médecins spécialistes en régions, les mesures que nous avons prises, alors que nous faisions partie du gouvernement, ont ajouté un nombre intéressant de médecins spécialistes qui ont permis à des Québécois et à des Québécoises, dans ces régions en pénurie, de profiter de meilleurs services et d'une plus grande quantité et qualité de services de santé et de services sociaux. Mais je reconnais aussi que les résultats de ces mesures au plan de la présence de ces médecins spécialistes n'ont pas été suffisants jusqu'à aujourd'hui.

Je dois aussi avouer, et nous devons tous ensemble reconnaître que l'ensemble des mesures qui ont été prises par le Parti québécois, l'ensemble des gestes qui ont été posés l'ont été en concertation non seulement avec la profession médicale, non seulement avec les conseils régionaux de la santé et des services sociaux, particulièrement ceux des régions concernées, mais aussi avec l'ensemble de ceux et de celles qui sont préoccupés par ces questions tant à Québec, au ministère, que dans l'ensemble des régions du Québec et particulièrement dans les régions qui avaient des problèmes. Cette concertation entre le gouvernement du Québec, alors dirigé par le Parti québécois, et l'ensemble des intervenants, notamment, de la profession médicale, a permis d'avoir des résultats, d'avoir sur le terrain, d'avoir dans les régions du Québec, d'avoir dans les établissements de santé du Québec, dans les régions en pénurie des médecins qui étaient de bonne humeur, des médecins qui allaient, de plein gré, pratiquer dans ces régions.

Je crois qu'il faut poursuivre les mesures qui ont été prises jusqu'à maintenant, qu'il faut poursuivre sur la voie d'une solution définitive et complète quant à la présence des médecins tant omnipraticiens que spécialistes dans l'ensemble des régions du Québec. Quant à nous, nous croyons qu'il ne faut rien négliger qui nous permette de mieux atteindre et d'atteindre véritablement les objectifs partagés par tous quant à la présence des médecins en régions.

Contrairement aux prétentions de la ministre comme quoi son projet de loi vient régler le problème de la présence des médecins dans les différentes régions du Québec qui sont en pénurie, il faut

reconnaître, tous ensemble, ce que veut dire et ce qu'impliquera concrètement le projet de loi 75 une fois en application sans reconnaître moins que ce qu'il va apporter mais sans lui donner plus de vertu qu'il n'en comprend dans sa forme actuelle.

D'abord, il faut se dire quelque chose franchement, tous ensemble. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de le faire en réponse à des questions qui me provenaient justement de régions à qui le projet de loi avait été présenté d'une façon un peu rapide. Il faut reconnaître tous ensemble que le projet de loi 75 ne vient ajouter aucun médecin dans aucune région du Québec et dans aucun des établissements qui vivent à l'heure actuelle une pénurie de médecins, notamment de médecins spécialistes. Donc, il ne faut pas se raconter d'histoires et accorder plus de vertu au projet de loi 75 qu'il n'en contient véritablement. D'autre part, il faut reconnaître que dans la décision 86-84 du Conseil des ministres, datée du 23 avril dernier, nous retrouvons là les orientations de la ministre de la Santé et des Services sociaux et de son gouvernement quant au nombre de médecins, quant aux gestes qu'ils sont prêts à poser pour ajouter des médecins dans les régions qui sont en pénurie. Cela nous permet de voir vraiment quelles sont les intentions véritables du gouvernement quant à l'ajout, quant à une solution concrète, pratique de la pénurie des médecins dans un certain nombre de régions du Québec.

Premièrement, il faut souligner que la disposition prévue dans cette décision du Conseil des ministres qui prévoit que pour l'année qui vient 50 postes seront réservés en faculté pour des médecins qui s'engagent à aller pratiquer dans une spécialité en pénurie dans une région pour quatre ans... Il faut reconnaître que cette décision va en deçà des consensus obtenus par le Parti québécois et notamment par le député de Joliette alors qu'il était ministre de la Santé et des Services sociaux pas longtemps avant l'élection, consensus qu'il avait obtenus qu'on réserve 50 postes en médecine dans les spécialités en pénurie pour des médecins qui s'engagent à aller pratiquer pendant au moins quatre ans dans les régions en pénurie, non seulement pour un an mais pour au moins quatre ou cinq ans. D'ailleurs, les fédérations médicales ont réitéré cet appui, ce consensus, cette volonté de voir réserver 50 postes pas pour un an mais pour au moins les quatre ou cinq prochaines années pour ajouter un nombre substantiel de médecins qui iraient pratiquer de plein gré, de bonne humeur dans les régions qui sont en pénurie. Donc, une première décision qui va en deçà des accords, des consensus obtenus par le Parti québécois et auxquels les fédérations ont réaffirmé leur appui il y a à peine deux ou trois semaines.

Deuxièmement, toujours dans cette décision, alors qu'on nous dit qu'il y a un problème - et nous le reconnaissons nous aussi, on l'a prouvé concrètement - alors que tous s'entendent pour dire qu'il y a pénurie de médecins spécialistes dans un certain nombre de régions du Québec et - la ministre y a fait allusion tantôt - même dans un certain nombre de spécialités dans les grands centres, notamment la psychiatrie, cette décision officielle du Conseil des ministres nous indique qu'à compter de l'an prochain il y aura moins d'entrées en spécialités dans les facultés de médecine du Québec pour les années 1987-1988, 1988-1989 et 1989-1990 alors que tous, y compris la ministre, viennent nous dire: On en a besoin de plus. Ce que le gouvernement libéral décide, c'est qu'on va en faire rentrer moins en faculté même si on en a besoin de plus dans les régions du Québec et, dans certains cas, même dans les grands centres.

Troisièmement, alors que, comme je l'ai indiqué tantôt, le Parti québécois avait pris des mesures importantes, nombreuses et variées, assez complètes pour faire face à ces questions, mais qu'il s'agissait là de mesures par une approche consensuelle, par une approche concertée, par une approche incitative et que tous reconnaissent que ces mesures ont donné des résultats positifs, la décision du Conseil des ministres du gouvernement libéral à la demande de la ministre de la Santé et des Services sociaux vient nous annoncer, à la page 3, article d, de soumettre - c'est un mandat qui est donné à la ministre - au Conseil du trésor un projet de rationalisation des mesures incitatives de répartitions géographiques.

Vous me permettrez de dire, Mme la Présidente, pour l'information des membres de cette Chambre et de ceux qui s'intéressent à nos travaux, que, quand on parle de rationalisation au Conseil du trésor, ce n'est pas pris dans le sens littéraire du mot, c'est pris dans le sens de réduire, couper les budgets affectés aux mesures incitatives qui, tout le monde le reconnaît, même la ministre y a fait allusion tantôt, ont donné des résultats positifs et sont satisfaisantes. (12 heures)

D'ailleurs, il est important de rappeler que M. Yves Bergevin, le haut fonctionnaire responsable du dossier des effectifs médicaux en régions, dans un rapport daté du 18 septembre dernier, nous indiquait - il est au ministère, c'est un fonctionnaire; ce n'est pas un membre du Parti québécois ni un membre de cabinet politique; c'est un haut fonctionnaire de l'État québécois - dans son document: Recommandation no 1 - pas n'importe quelle, pas la 98e recommandation, la première: II est recommandé de maintenir sans modifications le programme actuel de mesures incitatives et de ne pas introduire

de nouvelles mesures, quelle qu'en soit la nature, pour l'instant. Il demande de réévaluer ce programme à la ,fin du printemps 1986. Le Conseil des ministres, aujourd'hui, toujours sous prétexte qu'on va mettre plus de médecins dans les régions en pénurie, nous annonce une décision en trois volets qui aura pour effet d'aller moins loin que ce à quoi nous avions convaincu les fédérations médicales dans les...

M. Sirros: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Laurier.

M. Sirros: Mme la Présidente, j'aimerais savoir si on discute de la décision du Conseil des ministres ou du projet de loi 75. J'aimerais que vous rappeliez le député à la pertinence, s'il vous plaît:

La Vice-Présidente: Sur la question de règlement, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Mme la Présidente, sur la question de règlement, je demanderais, d'une part, au député de Laurier un peu d'éthique parlementaire. Tout à l'heure, pendant...

M. Sirros; Question de règlement, Mme la Présidente.

M. Rochefort: Mme la Présidente, je vais terminer mon intervention, si vous le permettez. Le député de Laurier est fébrile, il prendra ses 20 minutes tout à l'heure.

Sur la question de règlement, tout à l'heure, lorsque la ministre de la Santé et des Services sociaux faisait son discours, il n'y avait pas quorum en cette Chambre. Je n'ai pas voulu soulever cette question pour ne pas interrompre la ministre, pour lui permettre de développer tout son raisonnement pour la bonne compréhension de tous.

Deuxièmement, tout le monde reconnaît que ce dont je parle est pertinent, parce que je parle de présence de médecins dans les régions du Québec. La ministre, dans son discours de présentation des principes de son projet de loi, prétend ce matin, comme depuis toujours, que ce projet de loi a pour effet de donner des ressources médicales additionnelles aux régions. D'autre part, si le député de Laurier est gêné des décisions du Conseil des ministres...

La Vice-Présidente: Pourriez-vous conclure...

M. Rochefort: ...c'est son problème.

La Vice-Présidente: M. le député de Gouin. Un instant! Sur la question de règle- ment, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, en tout temps, un député peut soulever une question de règlement, particulièrement pour rappeler un intervenant à la pertinence du débat. Je ne vois pas en quoi le député de Gouin peut parler de manque d'éthique parlementaire lorsqu'on se conforme au règlement de l'Assemblée nationale. Ce qui a été relevé, c'est la pertinence du débat. Je pense qu'on avait tout à fait raison de soulever une question de règlement sur ce point. Le rappel à l'éthique parlementaire est, quant à moi, complètement déplacé.

La Vice-Présidente: Le député de Gouin faisait référence à un document écrit par un haut fonctionnaire, M. Bergevin, qui parlait des médecins en régions. Ce que j'ai cru comprendre du projet de loi, c'est qu'il traite du problème des médecins en régions. Donc, je considère que l'intervention du député de Gouin était pertinente. Cependant, je voudrais aviser le député de Gouin qu'il ne peut pas prétendre que le fait que le député de Laurier se soit levé pour une question de règlement était contraire à l'éthique parlementaire, puisque le règlement a été respecté. Là-dessus, je vous demanderais de poursuivre.

M. Rochefort: Je vous remercie de votre décision, Mme la Présidente. J'espère qu'évidemment...

M. Sirros: Sur la question de règlement...

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Laurier.

M. Sirros: ...je voudrais simplement ajouter ceci. Je comprends ce que vous venez de dire, à savoir que la décision du Conseil des ministres parle effectivement des médecins en régions éloignées. C'est précisément pour cette raison que je me suis levé sur la pertinence, parce que, pour ceux qui ne savent pas exactement ce qui se passe dans la décision du Conseil des ministres et dans le projet de loi 75, c'est facile pour quelqu'un qui veut semer la confusion de le faire. Je prétends que c'est ce que le député de Gouin faisait.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le député de Laurier, j'aimerais savoir en vertu de quel article vous soulevez la question de règlement. Je ne reconnais pas votre question de règlement, si vous ne pouvez me citer l'article.

M. Sirros: C'est en vertu de l'article 204, Mme la Présidente, sur la pertinence. Je ne contesterai pas votre décision si vous

jugez que c'est pertinent, mais je voulais souligner le fait que cela pouvait semer la confusion.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le député de Laurier, j'avais rendu ma décision, à savoir que je reconnaissais la pertinence des propos du député de Gouin. Or, je vous souligne que vous aurez un temps de parole de 20 minutes et que vous pourrez apporter les corrections appropriées. M. le député de Gouin, vous pouvez poursuivre.

M. Rochefort: Je vous remercie, Mme la Présidente, de votre décision. Je souhaite qu'on tienne compte du temps qu'on a perdu en procédure dans le temps de parole qui m'est alloué. Deuxièmement, je ne reprochais pas au député de soulever une question de règlement. C'était son droit. Mais j'aurais souhaité qu'il me permette de développer mon raisonnement dans un tout, comme je l'ai fait tantôt à l'endroit de la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Pour résumer, alors qu'on nous dit que ce projet de loi a pour but de régler la question de la pénurie des médecins dans les régions du Québec, en même temps on prend connaissance d'une décision du Conseil des ministres qui aura pour effet et pour conséquence de réduire le nombre de médecins dans les régions si cette décision n'est pas changée. Nous considérons qu'il s'agit là d'une incohérence et cela devait être dit au grand jour.

Je conclus donc sur ce volet du projet de loi en disant que ce projet de loi n'apporte aucun médecin additionnel dans les régions du Québec et, deuxièmement, que la décision du Conseil des ministres vient réduire le nombre de médecins qui auraient pu être formés pour aller pratiquer dans les différentes régions. Donc prétendre que le projet de loi 75 vient régler de façon définitive le problème des médecins en régions est, à mon sens, une sursimplification de la portée réelle du projet de loi présentement à l'étude.

Je pense qu'il faut regarder le projet de loi 75 dans ce qu'il contient vraiment. Le projet de loi 75, comme l'a dit la ministre, permet la mise en place de plans d'effectifs médicaux dans tous les établissements, fixe une date limite pour que ces plans soient réalisés, apporte des sanctions très précises et des pénalités pour les membres d'un conseil d'administration qui ne se conformeront pas à cette obligation, donne des responsabilités et des pouvoirs importants aux conseils régionaux et à la ministre de la Santé et des Services sociaux sur ces questions, prévoit des mécanismes de désistement pour les médecins et des pénalités à l'endroit des médecins qui ne respecteront pas ces mécanismes. Voilà donc ce que contient le projet de loi 75 eu égard aux médecins en régions.

Quant à l'effet de l'établissement de plans d'effectifs régionaux, je reconnais qu'il s'agit là d'une mise en place d'un système, d'un mécanisme qui va nous permettre comme société de mieux identifier, de mieux définir, de mieux quantifier les besoins en médecins dans les différentes régions du Québec, que cela constituera un instrument et un guide de planification de la profession médicale, de la présence des médecins dans les différentes régions du Québec, et que cela constitue un outil de gestion et de répartition et aussi de stabilité de la présence des effectifs médicaux qui est intéressant, qui est utile et qui, quant à nous, est positif. Donc, nous reconnaissons qu'il s'agit là d'un geste positif qui va sûrement non pas solutionner, mais contribuer à améliorer nos interventions possibles quant à la présence des médecins en régions. En même temps, il faut être bien réservé sur le sens à donner à ces plans d'effectifs et, comme le mentionnaient plusieurs intervenants, notamment des éditorialistes, il faudra prendre des mesures très précises pour éviter qu'on tombe dans une bureaucratie très lourde, très lente et très paralysante avec l'élaboration de ces différents plans d'effectifs médicaux. C'est un danger qui pourrait nous guetter si nous ne nous donnons pas des règlements qui nous permettent de bien nous assurer que ces plans d'effectifs se réaliseront quand même à partir de réglementations souples et légères.

D'autre part, quant à l'avis de 60 jours, un médecin qui est déjà admis dans un hôpital, donc qui est inséré dans le plan des effectifs médicaux, ne pourra quitter son établissement de santé avant d'avoir donné un préavis de 60 jours disant qu'il a l'intention de quitter. Là aussi, Mme la Présidente, je reconnais qu'il s'agit d'un outil, d'une disposition qui va nous permettre de mieux voir venir les retraits de médecins, qui va nous permettre de mieux gérer la stabilité et la présence des médecins dans les plans d'effectifs médicaux et qui, au fond, plutôt que d'être à la recherche, de recruter des médecins pendant que la population n'en a pas, nous permettra de recruter des nouveaux médecins pendant que la population continue de bénéficier du service et de la présence de médecins dans les établissements. (12 h 10)

Mme la Présidente, je pense que là aussi il s'agit d'un apport positif que nous reconnaissons d'emblée. Mais du même coup, il faut reconnaître que l'ensemble de ces mesures, plans d'effectifs, pouvoirs, sanctions, pénalités et procédures des 60 jours, poseront sûrement des problèmes d'application. De pense qu'il faudra que la ministre et son gouvernement, à l'occasion de l'étude article par article du projet de

loi, soient prêts à mieux baliser les articles qu'on vise à faire adopter par l'Assemblée nationale. Il faudra mieux organiser toute cette dynamique de façon à nous assurer que des problèmes d'application très réels, très concrets ne viendront pas à l'encontre des objectifs visés.

Par exemple, il faut reconnaître que donner des pouvoirs aux conseils régionaux non seulement pour adopter, mais pour modifier les plans d'effectifs médicaux des établissements, de la même façon que leur donner des plans d'effectifs médicaux au niveau des régions et des sous-régions, suscite encore une fois - on l'a vu de la part de bon nombre d'intervenants - le grand débat autour des fameux pouvoirs des conseils régionaux des services sociaux et de santé. D'ailleurs, il s'agit là d'un vieux débat dans le réseau de la santé. La ministre y a largement contribué lorsqu'elle était de ce côté-ci de la Chambre, notamment au moment de l'étude du projet de loi 27. Encore récemment, quelqu'un de bien connu ici en cette Assemblée, M. Marc Lalonde, ancien ministre fédéral des Finances, aujourd'hui président du conseil d'administration du centre hospitalier Hôtel-Dieu à Montréal, indiquait que, quant à lui, les conseils régionaux ne devaient pas se voir ajouter de nouveaux pouvoirs et qu'on devait rediscuter de l'ensemble des pouvoirs et de la place des conseils régionaux dans la répartition des responsabilités à l'intérieur de notre réseau.

De la même façon, l'Association des hôpitaux du Québec qui, comme l'a dit la ministre, appuie pour l'essentiel son projet de loi, nous dit aussi qu'elle s'oppose à ce que le pouvoir d'adoption et de modification des plans d'effecifs médicaux des établissements soit confié aux CRSSS puisque, selon eux, et avec raison, les budgets de ces établissements correspondant aux plans d'effectifs ne viendront pas des CRSSS, mais du ministère de la Santé et des Services sociaux.

D'autre part, Mme la Présidente, il faut voir que donner des pouvoirs à la fois au CRSSS et à la ministre des Services sociaux pour adopter avec ou sans modification les plans d'établissements et les plans régionaux, soulève une question très importante, une grande question. À partir de quoi un conseil régional ou la ministre de la Santé et des Services sociaux pourrait-il adopter intégralement ou modifier des plans d'effectifs médicaux d'établissements ou de régions s'il n'a pas au préalable défini quelle était la quantité et quelle était la nature des services qu'il veut que chaque région offre à sa population et que chaque établissement dispense à ses bénéficiaires.

En ce sens, je pense qu'il y a un peu un problème d'application de ces plans d'effectifs médicaux. À partir de quoi la ministre et les conseils régionaux pourront-ils les adopter ou les modifier? Je pense que la ministre met peut-être un peu la charrue devant les boeufs. Je pense qu'il faudrait -pas seulement de Québec - que non seulement le ministère de la Santé et des Services sociaux et les conseils régionaux des régions concernées, mais aussi les intervenants du milieu qui représentent les bénéficiaires, qui représentent les citoyens, la population, et qui vivent et sentent quels sont leurs besoins en matière de santé, soient associés à la définition des contenus, donc du nombre et de la ventilation par spécialité des effectifs médicaux nécessaires dans les régions. Ensuite, à partir d'un plan, à partir d'une définition ou d'un contenu obtenu par consensus, en concertation, donc voulu par l'ensemble des bénéficiaires d'une région donnée, qu'à partir de cela que les conseils régionaux et le ministère de la Santé et des Services sociaux aient un instrument pour décider si, effectivement, le plan de l'établissement X correspond aux besoins et, en conséquence, mérite d'être adopté sans modification et que s'il y a des modifications apportées à la hausse ou à la baisse, elles correspondent à des quantum, à des quantités et des types de services que l'ensemble des intervenants ont décidé de se donner en région. Ce n'est pas non plus indifférent des budgets qui seront afférents à ces plans d'effectifs médicaux et que devra fournir, aux établissements de santé et de services sociaux, la ministre de la Santé et des Services sociaux en toute cohérence.

D'autre part, je veux aussi souligner que les pouvoirs donnés aux conseils régionaux peuvent, dans une certaine mesure, suspendre une épée de Damoclès sur des établissements du réseau qui sont moins organisés, qui sont moins vus comme des établissements au grand réseau bien organisé dans les conseils régionaux que sont, par exemple, les centres d'accueil ou les centres locaux de services communautaires. Il faudra être très vigilant à l'endroit des décisions qui se prendront dans les conseils régionaux, quant à la répartition des effectifs entre différents types d'établissements d'une même région, pour éviter qu'on se retrouve avec des établissements comme les centres d'accueil et d'hébergement, comme les centres locaux de services communautaires où on donnerait moins de services, parce qu'ils sont moins forts, qu'ils sont moins présents autour de la table du conseil régional, que ce qu'on donnerait à différents centres hospitaliers qui seront peut-être et qui sont dans les faits, reconnaissons-le tous ensemble, mieux représentés souvent et dans des positions de plus grands pouvoirs dans les conseils régionaux.

Je veux aussi souligner que ces plans d'effectifs, qu'on demande à l'ensemble des centres locaux de services communautaires de toutes les régions du Québec, donc, y

compris des milieux urbains, soulèvent des soupçons, des appréhensions quant à moi légitimes de la part des centres locaux de services communautaires des milieux urbains qui se disent, compte tenu justement de tout ce climat entourant les discussions, les discours, les décisions de la ministre de la Santé et des Services sociaux, les discours du président du Conseil du trésor autour du rôle éventuel des centres locaux de services communautaires, que cette décision de les obliger à se doter d'un plan d'effectifs médicaux avec un pouvoir accordé au conseil régional et à la ministre de les modifier, pour eux, représente une appréhension et une crainte quant à une décision qui pourrait, par exemple, réduire considérablement ou même éliminer la présence de médecins dans les centres locaux de services communautaires dans les milieux urbanisés du Québec. Là aussi, nous voudrons obtenir des réponses et des garanties législatives dans la mesure du possible sur ces questions.

Il faut bien voir que les pouvoirs donnés aux conseils régionaux et à la ministre, quant aux plans d'effectifs, vont un peu plus loin que les plans d'effectifs médicaux puisque, par une interprétation très juste des dispositions qui nous sont soumises aujourd'hui par la ministre, on donne, non seulement des pouvoirs aux conseils régionaux sur les effectifs médicaux, mais même sur l'organisation des départements et des services cliniques. Là aussi, nous demanderons des précisions, nous demanderons là aussi des garanties législatives pour qu'on ne confie pas, par la porte d'en arrière, de nouveaux pouvoirs qu'ils n'ont pas, qu'ils n'ont jamais eus aux conseils régionaux. Personne n'a réussi à obtenir un consensus autour de nouveaux pouvoirs et de nouvelles responsabilités des conseils régionaux en cette matière.

Les sanctions prévues dans le projet de loi - la ministre y a fait allusion - tant pour les membres des conseils d'administration que pour les médecins, sont des sanctions très lourdes. Un membre d'un conseil d'administration qui n'appliquerait pas la loi, donc, par exemple, qui ne participerait pas à une décision visant à établir un plan d'effectifs médicaux dans son établissement, si on comprend bien les dispositions législatives soumises, pourrait devenir inadmissible et pourrait être mis à l'amende, être l'objet de sanctions de l'ampleur de celles qui frappent ceux qui fraudent les fonds publics au sein d'un conseil d'administration. Je pense qu'il s'agit là de sanctions qui sont disproportionnées et je pense qu'il s'agit là de mesures qui auront un effet démobilisateur pour les hommes et les femmes du Québec qui, de bonne foi, d'une façon constructive et positive, veulent bénévolement servir leurs concitoyens et concitoyennes en siégeant dans des conseils d'administration.

De la même façon, il faut souligner que les peines prévues à l'endroit des médecins qui ne respecteraient pas ce préavis auquel nous nous associons, ce préavis de 60 jours de retrait d'un plan d'effectifs médicaux, sont là aussi très lourdes, très graves et très sérieuses, très sévères, puisque ces médecins sont menacés de devenir non participants au Régime d'assurance-maladie, donc des médecins dont les services ne seront plus payés par la Régie de l'assurance-maladie. Et tout cela sans même que le médecin en cause ait eu le droit de se faire entendre, sans même que le médecin en cause ait eu le droit de faire appel ou de demander une révision de la décision de l'établissement ou de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. (12 h 20)

Mme la Présidente, je pense que là aussi il faut faire un petit peu attention et apporter des assouplissements pour nous permettre de bien atteindre nos objectifs. Mais, contrairement au vieil adage, dans de telles situations parfois trop fort casse trop fort. Je pense qu'il faudra là aussi apporter un certain nombre de modifications permettant d'avoir un moyen qui est utile, qui est opérationnel mais qui est aussi respectueux des hommes et des femmes qui seront concernés par ces décisions.

D'autre part, je veux souligner que cette disposition du 60 jours aura sûrement, reconnaissons-le franchement ensemble, des effets à l'endroit de médecins qui aujourd'hui, de Québec ou de Montréal, vont une, deux ou trois journées par semaine, ou par deux semaines ou par dix jours dans les régions du Québec, participer à une meilleure présence médicale dans ces régions, se disant et disant à leur conjoint: Écoute, le jour où tu trouveras que le sacrifice est trop grand pour nous, je me retirerai et cela s'arrêtera là. Avec la mécanique du 60 jours, sûrement que cela constituera un frein pour un certain nombre de professionnels qui jusqu'à ce jour acceptaient de participer partiellement à la solution des problèmes d'effectifs médicaux dans les régions.

Par ailleurs, Mme la Présidente, je veux souligner que là aussi, cette disposition des 60 jours, avec les sanctions qui l'accompagnent, pourrait très bien créer des situations qui vont complètement à l'encontre des buts recherchés. Prenons l'exemple d'une petite municipalité qui est éloignée des centres, et où on retrouve à peu près cinq ou six médecins en tout et partout. Pour une raison, X, Y, Z, bonne ou mauvaise, ces cinq ou six médecins se retirent de l'établissement de santé auquel ils sont attachés sans avoir donné le préavis de 60 jours. Automatiquement ils deviennent médecins non-participants au Régime de l'assurance-maladie du Québec. Donc, les

services qu'ils dispensent ne sont plus dans aucun cas défrayés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Dans quelle situation allons-nous nous retrouver dans cette municipalité? Il n'y aura plus aucun médecin dans cette municipalité qui pourra donner des services auxquels la population a droit, dont elle a besoin et qui sont payés par la Régie de l'assurance-maladie.

Mme la Présidente, je pense que là aussi il va falloir trouver le moyen, tout en essayant de maintenir ce dispositif intéressant et utile, de faire en sorte que, par l'application d'un tel dispositif, on ne se retrouve pas dans des situations où on obtiendra à 100 % carrément, l'inverse de l'objectif recherché, puisque la population d'une telle municipalité qui est éloignée d'autres centres se verrait privée de la présence de médecins, et se verrait donc dans une situation où il n'y a aucune possibilité de services de santé et de services sociaux par un professionnel assuré à la RAMQ. Il faut aussi voir que pour la population, une telle disposition d'un médecin qui, s'étant retiré, n'est plus participant au Régime d'assurance-maladie... Il faut être franc avec la population, il faut dire à la population quelles sont les conséquences possibles de telle disposition. On pourrait très bien se retrouver avec des patients, des bénéficiaires pour qui cela va être compliqué de changer de médecin, parce que, non seulement le médecin avait une bonne connaissance de cette personne, de son bilan médical, de son état de santé général et de l'historique de ses problèmes médicaux, mais il y a aussi la dimension confiance.

Reconnaissons que la médecine ce n'est pas que de la mécanique, il y a un élément confiance important entre un bénéficiaire et son médecin. Le fait de lui dire: Ton médecin n'est plus participant au Régime d'assurance-maladie du Québec, cela va aussi comporter des inconvénients importants, réels à l'endroit de ce bénéficiaire et pour ce bénéficiaire qu'il faut reconnaître, qu'il faut avouer. Je souhaite qu'en commission parlementaire nous soyons en mesure d'apporter des modifications au projet de loi pour prévoir ce genre de situation.

Enfin, Mme la Présidente, il faut aussi voir que de commencer à dire à des médecins: Vous ne serez plus participants au Régime d'assurance-maladie, cela ouvre la porte d'une certaine façon à un nouveau champ de pratique de la médecine privée, c'est-à-dire de pratique de la médecine où les gens devront payer pour des services qu'ils recevront, puisque des médecins ne seront plus participants au Régime d'assurance-maladie du Québec. Je reviendrai sur ces questions de médecine privée tantôt.

Mme la Présidente, voilà donc le sens et la portée, pour nous, des dispositions du projet de loi 75, eu égard aux médecins en régions, et voilà l'essentiel des remarques que nous avions à faire tant positives que constructives en ce qui concerne les dispositions réelles du projet de loi et les modifications qui devront y être apportées pour éviter qu'il ne comporte des conséquences néfastes à l'endroit de la population du Québec et, également, pour éviter qu'il ne comporte des conséquences qui aillent à l'inverse des buts avoués et recherchés par la ministre dans son projet de loi.

Mme la Présidente, au-delà de tout cela, il faut reconnaître que le projet de loi 75 va beaucoup, beaucoup, beaucoup plus loin que d'être un simple moyen d'ajouter aux solutions qui seront mises en place pour régler le problème de la présence des médecins dans les régions du Québec. Lorsqu'on lit le projet de loi 75, avec, à côté de nous, la décision du Conseil des ministres 36-84 datée du 23 avril 1986 et pour laquelle la ministre a reconnu qu'il y avait des dispositions qui avaient été enlevées, pas de problème, on n'en parlera pas, on va parler des dispositions qu'elle a reconnues et qui ont été maintenues.

On lit à la page 3, au point c, que la ministre a reçu du Conseil des ministres un mandat qui est consigné dans cette décision et que la ministre a reconnu publiquement avoir reçu du Conseil des ministres, qui est de soumettre au Conseil des ministres un projet de loi visant à introduire une corrélation entre le droit de participer au Régime d'assurance-maladie des futurs médecins, donc, le droit pour un futur médecin d'être inscrit aux services de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, d'être payé par la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour les services qu'il donnera, donc à ce droit d'être reconnu par la régie et l'obtention de postes désignés par le ministère de la Santé et des Services sociaux dans le cadre des plans d'effectifs médicaux. Ce qu'il faut comprendre, c'est que ce que vient nous demander la ministre par le projet de loi 75, ce que mettra en place le projet de loi 75, c'est une structure, un mécanisme, une mécanique qui permettra au gouvernement, en appliquant la décision 86-84, à la page 3 au point c du Conseil des ministres du 23 avril dernier, qui permettra au Conseil des ministres de contrôler la pratique médicale au Québec parce que, maintenant, non seulement nous connaissons la volonté politique du gouvernement de le faire, mais le projet de loi 75 contient toute la mécanique, tous les mécanismes, tous les outils nécessaires pour appliquer ce contrôle de la pratique médicale. Ce projet de loi serait la première étape d'un acte en deux étapes, la première étant le projet de loi 75 et la deuxième le projet de loi que la ministre a le mandat de préparer et de soumettre au Conseil des ministres et qui

fera en sorte qu'à partir d'aujourd'hui nous connaîtrons au Québec un contrôle autoritaire de la pratique médicale au Québec.

Mme la Présidente, il faut avouer tous ensemble que tout cela se fera ou se ferait sous le couvert d'assurer une meilleure présence des médecins dans les régions du Québec. Il s'agit là d'un changement de cap majeur, d'un changement de cap imprévu et non annoncé par la ministre de la Santé et des Services sociaux. D'ailleurs, on le voit bien. La boucle est fermée par la façon dont les plans d'effectifs médicaux sont présentés dans le projet de loi 75. Si quelqu'un n'a pas de poste dans un plan d'effectifs médicaux, cette personne n'aura pas le droit d'être reconnue comme médecin participant au Régime d'assurance-maladie. Cela veut donc dire que ce n'est pas pour les régions. Cela veut dire qu'on veut contingenter la pratique médicale au Québec et non pas la porte d'entrée des facultés de médecine en se disant, par exemple, qu'on a besoin d'un nombre X de médecins, qu'on va donc admettre en faculté de médecine un nombre X de médecins. Cela veut dire qu'on laisse les portes largement ouvertes à l'entrée de la faculté de médecine et, quand on aura terminé notre médecine, on se fera dire que c'est bien malheureux, mais qu'on n'a pas de poste pour vous, et que vous n'êtes donc pas reconnu comme médecin participant au Régime d'assurance-maladie du Québec. (12 h 30)

Là aussi, il faut bien être franc envers l'ensemble de la population. La seule profession au Québec qui n'a aucun autre débouché professionnel que celui d'être reçu médecin participant à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, c'est la profession médicale. Dans toutes les autres professions ou tous les autres métiers, il existe toujours une alternative. Une personne qui est professeur et qui n'a pas de poste à Montréal a le choix entre un poste à Sept-Îles ou aller pratiquer sa profession dans un établissement privé. Quelqu'un qui est ingénieur, s'il n'y a pas un poste de disponible quelque part, peut ouvrir sa boîte privée d'ingénieur et laisser libre cours au libre marché. Par une telle décision, Mme la Présidente, on se retrouverait avec une seule profession, un seul corps de métier dans notre société et, lui, on lui dirait: Quand tu sortiras de là, on t'annoncera peut-être que tu as fait des études pour rien du tout.

Mme la Présidente, il s'agit de quelque chose de majeur et aussi de très grave à moyen terme. Parce que par ce biais - je ne prétends pas que tel est l'objectif de la ministre de la Santé et des Services sociaux mais je prétends que tel est l'effet possible d'une telle mesure - on pourrait très bien se retrouver à moyen terme, non pas la semaine prochaine ni dans un an, à moyen terme, dans deux, trois ou quatre ans, avec un désistement massif de médecins du Régime d'assurance-maladie du Québec qui ouvriraient un nouveau champ de pratique large et organisée de médecine privée au Québec. Ce qui ferait en sorte qu'on reviendrait aux années cinquante et soixante au niveau de la santé et des services sociaux. On aurait alors deux types de médecine: une médecine pour les gens moins fortunés, qui est assumée par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et une autre médecine pour les gens fortunés qui auront les moyens de se payer des services à même leurs propres revenus, des services de médecins dans n'importe quelle région du Québec.

Mme la Présidente, je le répète, je ne prête pas cette intention à la ministre de la Santé et des Services sociaux, mais je dis toutefois qu'une des conséquences de telles dispositions pourrait très bien être d'ouvrir la porte à moyen et à long terme à une nouvelle pratique de la médecine privée au Québec, ce qui constituerait un retour en arrière et ramènerait deux types et deux qualités de médecine au Québec, une pour les gens moins fortunés payée par la Régie de l'assurance-maladie du Québec et une autre, payée à même les revenus personnels des individus qui pourraient se payer des médecins qui pourront leur donner les services qu'ils souhaitent, ce qui en soi est une menace à cette fameuse universalité et gratuité des services de santé et des services sociaux.

D'autre part, il faut souligner que l'effet d'une telle décision retirerait la possibilité aux jeunes Québécois et aux jeunes Québécoises qui sont actuellement dans des facultés ou qui le seront l'an prochain ou dans deux ans, d'avoir accès au réseau, d'avoir accès à la profession médicale une fois leurs études terminées. On se retrouverait donc là comme dans d'autres professions avec une absence de sang neuf, avec une absence de renouvellement professionnel.

Je pense qu'il est dangereux pour le Québec, dangereux pour la santé des Québécois et des Québécoises qu'on refuse qu'il y ait une présence de sang neuf à chaque année dans la pratique médicale pour le service de l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Mme la Présidente, c'est une chose pour un médecin qui est formé depuis un certain nombre d'années d'aller se recycler pour apprendre à travailler avec certains nouveaux équipements qui découlent du développement technologique, et c'en est une autre que d'avoir été formé avec ces instruments, que d'avoir suivi un stage autour de ces instruments. Je dis qu'il faut que nous maintenions une place large aux jeunes Québécois et aux jeunes Québécoises qui

veulent pratiquer la médecine pour maintenir une bonne répartition de jeunes et de moins jeunes dans cette profession qui est absolument importante et essentielle pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Mme la Présidente, comme je le disais, le projet de loi 75 lu avec la décision 86-84 du Conseil des ministres peut très bien être le début de la mise en place d'un mécanisme, d'une structure de contrôle de la pratique médicale au Québec. Quand on voit cela, il n'est pas surprenant que ce projet de loi et cette décision aient soulevé les tollés qu'ils ont soulevés, qu'ils aient suscité les débats qu'ils ont suscités parce qu'il s'agit d'un changement de cap majeur.

Ceux qui veulent banaliser, rendre anodin, mettre à un niveau anodin les dispositions et les conséquences d'un tel projet de loi, je leur citerai un certain nombre de personnes qui sont réputées compétentes en la matière et qui ont vu ce que cela constituait. Par exemple, l'éditorialiste du journal Le Devoir, M. Jean Francoeur, dit dans un éditorial daté du 29 mai dernier: "C'est énorme. Il s'agit d'un renversement de situation qui bouleverse les conditions d'exercice de la médecine au Québec." L'éditorialiste, Roch Bilodeau de la Tribune de Sherbrooke le 30 mai dernier a dit: "Les médecins ne sont pas d'accord et ils ont raison. Un tel autoritarisme est inacceptable." Il ajoute plus loin: "Mais rien ne justifie qu'il - en parlant du gouvernement - décide unilatéralement de l'avenir de centaines d'individus qui se dirigeront vers une carrière médicale dans les prochaines années."

Prenons Mme la Présidente, M. Vianney Duchesne dans le journal Le Soleil qui disait: "Les projets de loi laissent - parlant des projets 74 et 75 - planer des imprécisions inquiétantes pour le corps médical". Je pourrais en citer d'autres. Les gens - pas moi tout seul - de l'extérieur reconnaissent que ces projets de loi constituent des changements majeurs et radicaux, des bouleversements dans la profession médicale au Québec. Donc, c'est facile de comprendre les levées de boucliers que ces projets de loi ont suscitées.

D'ailleurs, ce qui a été aussi beaucoup dénoncé dans cette décision et ce projet de loi, c'est la façon de faire de la ministre de la Santé et des Services sociaux tant dans les projets de loi 74 et 75 que dans la décision 86-84, tant sur le volet concernant les effectifs médicaux en régions que sur le volet concernant le contrôle de la pratique médicale au Québec. Non seulement rien de cela n'avait été prévu de la part des intervenants, mais la ministre elle-même n'en a jamais fait état. Dans une question que je lui posais à l'ouverture de l'étude de ses crédits, je lui ai demandé quelles étaient ses intentions législatives pour l'année à venir.

Jamais elle n'a fait allusion à un tel projet de loi. D'ailleurs, lorsque la ministre a déposé le projet de loi, après avoir entendu la lecture qu'elle nous a faite des notes explicatives, je me suis immédiatement levé pour demander à la ministre de tenir une commission parlementaire sur ces projets de loi, ce qu'elle a refusé.

Par la suite, j'ai communiqué avec l'ensemble des associations et des intervenants concernés par ce projet de loi. Je n'ai pu trouver aucun intervenant qui m'a dit qu'il était au courant d'un tel dépôt de projet de loi et qu'il avait été consulté sur le contenu d'un tel projet de loi. Non seulement le contenu revêt-il des conséquences qui pourraient être graves, mais la façon de faire de la ministre de la Santé et des Services sociaux a été dénoncée. Absolument personne n'avait été consulté, n'avait été mis dans le coup d'une telle décision de sa part. Pas plus que la ministre de la Santé et des Services sociaux n'a accepté, comme l'ensemble de ses collègues de sa formation politique, de tenir une commission parlementaire pour permettre aux intervenants, non pas de venir à son bureau lui dire à elle ce qu'ils pensaient de ses projets, mais de venir dire ce qu'ils pensent de ses projets de loi à l'ensemble des parlementaires intéressés et concernés par ces questions. Cela aurait aussi permis tant à eux qu'à la ministre de la Santé et des Services sociaux de présenter publiquement, au grand jour, leur vision et leur perception personnelles des projets de loi qui sont sur la table. Dans ce gouvernement, on préfère faire les consultations derrière les portes closes pour ne pas que les gens sachent, contestent nos décisions et pour ne pas qu'on soit en mesure d'être mis dans une position où on serait mal à l'aise de défendre les décisions qui ont été prises.

Mme la Présidente, tous, sauf deux organismes, ont demandé la tenue d'une commission parlementaire. La ministre nous a dit: Non, il y a eu, il y a quatre ans, une commission parlementaire sur le projet de loi 27. Il y en a eu une l'été dernier sur les problèmes de garde des résidants et des internes du Québec un peu autour des questions d'effectifs médicaux. Donc, je n'ai pas l'intention de tenir de commission parlementaire. Elle nous a dit: D'autre part, je vais convoquer ma table de concertation - ce dont elle a parlé tantôt - pour discuter de ces questions. La réponse lui est venue rapidement. Les quatre principaux intervenants de sa table de concertation, à laquelle elle fait allusion et à laquelle elle tient - avec raison, quant à moi - sont venus lui dire que justement ils ne reconnaissaient pas que la table de concertation était un forum utile et nécessaire pour débattre de ces questions, mais que c'était par une commission parlementaire qu'on pourrait discuter de ces questions et qu'une fois ces

choses réglées on pourrait entreprendre les travaux de la table de concertation. (12 h 40)

Mme la Présidente, d'autre part, je dois aussi rappeler que dans cette façon de faire on a connu un peu la confusion totale. Il y avait une décision du Conseil des ministres qui était complète en soi. On nous disait: Non, la décision n'est pas complète. Il y a eu des omissions; il y a eu des choses qui ont été incluses par inadvertance, on va la corriger; mais, jamais la nouvelle décision revue et corrigée n'a été rendue publique. J'ai moi-même, le lendemain que la ministre m'a donné ces réponses, écrit à la ministre de la Santé et des Services sociaux pour lui dire: Je suis bien prêt à prendre votre parole, mais serait-il possible que vous me fassiez parvenir cette nouvelle décision, de façon à être bien certain que nous connaissons les volontés et les orientations du gouvernement et que l'on parle de choses qui existent vraiment? Non seulement je n'ai pas reçu copie de cette décision, mais je n'ai pas encore à ce jour reçu d'accusé de réception à ma lettre.

Mme la Présidente, il faut aussi souligner que, non seulement cette façon improvisée et "cheveu sur la soupe" de faire, cette façon de procéder sans aucune consultation, sans commission parlementaire, est un geste d'autorité unilatéral, mais cela vient plus profondément nuire au climat de concertation absolument nécessaire et essentiel à la qualité de la médecine au Québec et donc des services de santé dont nous avons tous besoin pour faire en sorte que l'ensemble des intervenants participent de bon gré, de bonne humeur et donc dans un climat positif et serein, à la pratique médicale au Québec.

Mme la Présidente, quand on agit de cette façon, de façon aussi cavalière, unilatérale et autoritaire, on instaure un climat malsain et négatif à l'endroit d'une médecine de qualité au Québec. Comment aujourd'hui fouler aux pieds les fédérations médicales, les fédérations des différents intervenants du monde de la santé au Québec sur ces questions et demain matin prétendre que l'on pourra gentiment, sereinement, avec un beau sourire et dans la plus totale bonne humeur, demander à l'ensemble de ces intervenants un peu de bonne collaboration, un peu de confiance et un peu de gentillesse, parce que l'on doit travailler ensemble et on doit collaborer? On a chacun une contribution à apporter à une médecine de qualité au Québec. Comment pourrons-nous maintenir une médecine de qualité en créant et en instaurant un tel climat dans le réseau de la santé et des services sociaux à l'endroit de ceux et de celles - qu'on les aime ou qu'on ne les aime pas - qui chaque jour font que la santé est une réalité pour des milliers de Québécois et de Québécoises?

Mme la Présidente, il faut être responsable si nous voulons obtenir la confiance, la participation et une collaboration positive et constructive des médecins et de l'ensemble des intervenants. Ce n'est pas en les traitant de cette façon que nous pouvons donner aujourd'hui des garanties à la population du Québec qu'une médecine de qualité se pratiquera au Québec et qu'il y aura un climat positif et sain dans la pratique médicale et de l'ensemble des services de santé et des services sociaux au Québec. Il s'agit là d'une erreur majeure de la ministre de la Santé et des Services sociaux, dans le climat dont elle a la responsabilité première d'établir, de maintenir et d'accroître une saine collaboration et du positivisme à l'endroit de l'ensemble des intervenants, parce que la santé au Québec, ce n'est pas que la ministre de la Santé et des Services sociaux, ce n'est pas que le gouvernement, ce n'est pas que l'Assemblée nationale, c'est surtout et avant tout ceux et celles qui, chaque jour, positivement, de façon compétente, efficace et de grande qualité, dispensent des services de santé et de services sociaux dont la population du Québec a besoin.

Mme la Présidente, je dois aussi ajouter que la ministre y a fait allusion dans son intervention tantôt. Elle sait que je suis préoccupé par ses engagements électoraux et que dans ses engagements électoraux, aucune de ces choses-là ne se retrouvait. Tout ce qui se retrouvait dans ses engagements électoraux, c'étaient deux choses: la table de concertation, oui effectivement il aurait été sage, responsable et rationnel de convoquer, pas une, mais des tables de concertation avant d'arriver avec de tels projets législatifs et de telles décisions gouvernementales. Il aurait aussi été sage de montrer un peu plus de déférence et de respect à l'endroit de ces groupes. Mais ce n'était pas prévu dans les promesses électorales. Il y avait juste la table de concertation et de maintenir l'essentiel. Des mesures incitatives que le Parti québécois avait mises en place. D'une part, on fait cela sans table de concertation et, deuxièmement, on annonce qu'il y a une décision de réduire les budgets pour les mesures incitatives. Parlons-en! encore une fois, des promesses électorales sur ces questions.

Mme la Présidente, si le gouvernement libéral, si la ministre de la Santé et des Services sociaux veulent en arriver à un contrôle rigoureux et autoritaire de la pratique médicale au Québec, qu'ils le disent clairement, en toute franchise, en toute ouverture et qu'ils acceptent donc de déposer des documents qui seront rendus publics et qui seront soumis à une large consultation auprès des intervenants et de la population.

Mme la Présidente, voyons bien quelles sont les conséquences d'une telle décision. Ils

pourraient remettre en question les consensus sociaux du Québec, les équilibres sociaux, la paix sociale, les consensus autour du partage de la richesse, les consensus - auxquels, oui, le Parti libéral a eu une contribution importante et positive au cours des années -autour d'un système de santé et de sévices sociaux où il y a une seule médecine pour tout le monde. Un système de santé et de services sociaux qui est universel.

Mme la Présidente, nous disons non à une approche improvisée, précipitée, confuse, à la cachette, à la sauvette, irresponsable et qui manque de franchise, de transparence, de respect des autres et de courage de la part de la ministre de la Santé et des Services sociaux et de son gouvernement!

Mme la Présidente, nous serons toujours prêts à souscrire, comme nous l'avons fait lorsque nous étions au gouvernement, à des solutions pour régler de façon complète et définitive le problème des médecins dans les différentes régions du Québec. Nous demandons au moins à la ministre de maintenir ce qui existait et qui a donné des résultats, sinon de faire plus. Non pas, sous couvert de faire plus, de diminuer ce qui a été fait jusqu'à maintenant et non pas, non plus, venir, aujourd'hui, dans un discours démagogique, utiliser les gens des régions du Québec pour prétendre que, sous couvert de donner des médecins aux régions du Québec, on va, à partir de maintenant, effectuer à la cachette, sans débat, sans consultation, un contrôle autoritaire de la pratique médicale au Québec. Non seulement un contrôle sans consultation, mais un contrôle sans débat. Un contrôle qui se fera non pas a la porte d'entrée des facultés de médecine, mais à la porte de sortie des facultés de médecine.

Mme la Présidente, jamais le Parti québécois n'a procédé de cette façon. Jamais nous ne cautionnerons une façon aussi irresponsable, improvisée et dictatoriale de procéder dans un dossier auquel l'ensemble des Québécois et des Québécoises ont toujours été associés par consensus et pour lequel les consensus ont donné des résultats positifs qui profitent à l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Gouin. M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: On nous a servi le style de discours dont, de plus en plus, le député de Gouin est en train de nous habituer depuis les quelques mois qu'on siège en cette Chambre. Un discours, encore une fois, qui nous laisse, à la fin d'une heure environ d'intervention, sans savoir si le député de Gouin est pour ou contre le projet de loi. Il aurait peut-être pu nous dire s'il était en faveur ou contre.

Mme la Présidente, le discours du député de Gouin, de plus en plus, essaie de parler de la façon de faire de la ministre. Je constate qu'il a fait un choix dans ce sens. En parlant tout à l'heure d'éthique professionnelle ou d'éthique parlementaire quand je soulevais une question sur la pertinence, Mme la Présidente, je pense que le député de Gouin s'est ouvert à énormément de critiques dans ce sens. Je pense qu'il aurait beaucoup de leçons à prendre encore avant de pouvoir parler d'éthique parlementaire ou d'éthique professionnelle.

Simplement, un point à reprendre. Quand il a cité un éditorial du Devoir où on disait: C'est gros, c'est énorme, un bouleversement majeur. Il a fait allusion, deux lignes avant, au projet de loi 75, mais l'éditorial ne parlait pas, lui, du projet de loi 75. L'éditorial parlait d'une décision du Conseil des ministres, point sur lequel j'essayais d'attirer votre attention en soulevant la question de pertinence parce qu'effectivement il s'agit de deux choses complètement différentes. (12 h 50)

Le député de Gouin a choisi, volontairement, de semer la confusion dans cette affaire en prêtant toutes sortes d'intentions au gouvernement et à la ministre, soulevant le spectre d'un épouvantail énorme par rapport aux conditions de travail des médecins et à la médecine au Québec, en même temps qu'on disait que c'est quand même essentiel d'avoir des outils de planification de l'effectif médical en régions.

Mme la Présidente, c'est effectivement et précisément ce que vise le projet de loi 75. Il s'agit d'un projet de loi qui vise à donner aux conseils régionaux le pouvoir d'élaborer des plans d'effectifs médicaux régionaux. C'est une suite logique à un projet de loi que le gouvernement précédent avait lui-même adopté. Le gouvernement précédent avait adopté le projet de loi 27 qui demandait aux centres hospitaliers, uniquement et strictement, d'établir leur plan d'effectifs médicaux. On se rend compte et la population des régions périphériques se rend compte tous les jours, Mme la Présidente, que, effectivement, ce n'est pas opérationnel, dans ce sens.

J'aimerais saluer le départ du député de Gouin, je pense que... Ah! Il va revenir, tant mieux! Franchement, il nous a amusés pendant une heure, Mme la Présidente, une heure qui a été...

M. Rochefort: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Question de règlement. M. le député de Laurier, je m'excuse...

M. Rochefort: Sur la question de règlement, Mme la Présidente, je voudrais souligner que je ne pensais pas que le député de Laurier était portier, ici. Deuxièmement, je lui soulignerai que, à toutes les interventions que j'ai faites jusqu'à maintenant, dans des débats entourant la santé et les services sociaux, c'est la première fois que la ministre reste en place pour mes discours.

La Vice-Présidente: Je considère, M. le député de Gouin, que ce n'est pas une question de règlement. Là-dessus, M. le député de...

M. Sirros: Je le saluais par courtoisie, Mme la Présidente. Cela faisait environ deux heures qu'on était ensemble en cette Chambre à s'écouter, je constatais qu'il quittait et je le saluais, Mme la Présidente. C'est tout.

La Vice-Présidente: Question de règlement, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, c'est la première fois que je présente un projet de loi en Chambre. Si le député de Gouin a voulu pérorer sur un tas de choses depuis des mois, cela le regarde, mais je ne suis pas toujours obligée de rester ici pour le regarder. Mon projet de loi est ici et je reste en Chambre pour écouter ce que les gens ont à dire. C'est la première fois que je présente un projet de loi.

La Vice-Présidente: M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Oui, Mme la Présidente, simplement sur la question de règlement. C'est vrai que c'est le premier projet de loi présenté par la ministre, mais je dois dire que ce n'est pas la première fois qu'il y a une motion qui concerne la santé et les services sociaux ici même. Chaque fois, j'ai écouté les interventions de la ministre et je pense que c'est la première fois qu'elle reste pour écouter mes interventions. C'est simplement ce que je voulais souligner, pour faire écho aux questions de règlement du député de Laurier.

La Vice-Présidente: En vertu des questions... S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre! Question de règlement, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il convient de rectifier les choses. J'ai dit tout à l'heure que c'était le premier projet de loi que je présentais en Chambre et, d'ailleurs, le député de Gouin l'a concédé. Les autres motions auxquelles il fait allusion, ce sont des débats de cinq minutes, à vingt-deux heures, le soir, parce qu'il n'était pas satisfait d'une question. Je les ai peut-être écoutées en dehors, mais c'étaient des motions de cinq minutes.

La Vice-Présidente: Je m'excuse. Jusqu'à maintenant, il n'y a réellement pas eu de question de règlement. Donc, je pense qu'il serait bien que j'intervienne et que je reconnaisse le député de Laurier. Ce n'étaient pas des questions de règlement. Une question de règlement doit être faite en vertu des règles de procédure de la Chambre et personne ne s'est basé sur les règles de procédure de la Chambre. Donc, je ne reconnais... C'est sûr que je ne peux pas reconnaître, pour l'avenir, des questions de règlement, mais, pour l'instant, il n'y a pas eu de question de règlement et je cède la parole au député de Laurier.

M. Rochefort: Question de règlement, en vertu de l'article 212 de notre règlement.

La Vice-Présidente: En vertu de l'article 212, M. le député de...

M. Rochefort: Mme la Présidente, c'est simplement pour corriger ce que vient de dire la ministre. Il y a eu le débat sur les urgences, à l'Assemblée nationale, qui a duré deux mercredis et qui n'était pas un débat de cinq minutes.

M. Lefebvre: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: En vertu de l'article 212 soulevé par le député de Gouin. Si le député de Gouin désire intervenir, il doit attendre que l'intervention du député de Laurier soit terminée; c'est cela, l'article 212.

La Vice-Présidente: Effectivement, l'article 212 dicte bien, M. le député de Gouin, que vous devrez intervenir après le discours. M. le député de... À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Il reste peu de temps avant d'ajourner, alors, je demanderais, s'il vous plaît, la collaboration de cette Chambre. M. le député de Laurier.

M. Sirros: ...consciente, Mme la Présidente, qu'une simple salutation de départ de ma part au député de Gouin aurait soulevé tant de problèmes chez lui. Je peux le comprendre, étant donné que, pendant une heure, il nous a parlé d'une façon - comment puis-je dire, Mme la Présidente? - pas correcte, je dirais, dans le sens que...

M. Maltais: Mme la Présidente, je m'excuse auprès de mon collègue de Laurier.

Question de directive. Est-ce que vous pourriez m'informer si l'Opposition a démissionné parce qu'il ne reste plus personne, présentement, en Chambre?

La Vice-Présidente: Ce n'est pas une question de règlement, M. le député de Saguenay. S'il y a quorum, l'Assemblée peut continuer de siéger.

M. Sirros: Mais c'est peut-être, Mme la Présidente, significatif de la confusion ou de la contradiction, je dirais, dont fait preuve l'Opposition dans ce dossier. D'une part, on nous dit que c'est extrêmement important, que c'est essentiel, que c'est primordial, même que cela devrait être une priorité, comme nous l'a dit le député de Gouin, que cette question soit traitée. Il n'y a pas un député de l'Opposition qui siège en cette Chambre pendant que l'on parle de quelque chose que le député de Gouin considère primordial, prioritaire et essentiel.

On a eu droit à un discours d'une heure à partir de cette constatation que nous partageons, effectivement. C'est la raison pour laquelle on présente le projet de loi 75. On trouve que c'est essentiel pour la santé des personnes qui se trouvent en régions périphériques d'avoir un outil de planification des effectifs médicaux au Québec et d'avoir une image complète de la situation des CLSC, des hôpitaux et des centres d'accueil, en termes de pratique de la profession médicale. Il n'y en avait pas jusqu'à maintenant.

Alors, ce qu'on fait avec le projet de loi 75, c'est de donner un outil de planification. Le député de Gouin, pendant une heure, nous a entraînés avec des histoires sur la conscription des médecins -on dirait quasiment que c'est ce qu'on est en train de faire - et qu'on avait tout cela de préparé. C'était le premier pas d'un complot machiavélique qu'on avait préparé au ministère de la Santé et des Services sociaux pour conscrire les médecins dans tout le Québec, afin de les forcer à oeuvrer et à travailler dans des conditions épouvantables, par une ministre qui était démagogique, irresponsable, incohérente, irréfléchie; mettez-en donc, je pense qu'il n'a pas oublié un qualificatif qu'il aurait pu trouver dans un quelconque dictionnaire. À la suite de cela, il a qualifié la ministre de démagogique et je pense que c'est là la preuve de l'incohérence et de la contradiction de l'approche de l'Opposition, à l'heure actuelle.

Par la suite, ils disparaissent tous. Il n'y en a pas un qui est ici. J'aurais le goût de dire, Mme la Présidente, que nous sommes dans une situation très Kafkaïenne, qui nous est présentée de l'autre côté. Est-ce qu'on doit prendre leur parole? Je sais que le règlement demande de croire les députés quand ils parlent. Le député nous dit que cette question est essentielle. Je comprends bien que, peut-être, il a des engagements à l'extérieur de cette Chambre. Mais j'imagine que dans une formation politique où quelque chose est essentiel, il doit y avoir au moins une personne qui pourrait trouver le temps de venir écouter ce que les gens disent en cette Chambre sur un sujet qu'ils estiment essentiel.

Le député de Gouin a laissé échapper quelque chose, qui, quant à moi, est peut-être indicatif de son approche et des inquiétudes qu'il pourrait avoir vis-à-vis de ce projet de loi. Il a dit dans son discours, à un moment donné, qu'il soupçonne que du fait que les hôpitaux, les centres d'accueil et les CLSC auraient, tous ensemble, à fournir des plans pour préparer un plan régional des effectifs médicaux, il y aurait possibilité que les établissements qui seraient moins forts -je pense que c'est le mot qu'il a utilisé -moins organisés - il a donné l'exemple des CLSC et des centres d'accueil - pourraient se retrouver désavantagés par rapport aux hôpitaux. Je pense qu'il y a là une approche différente et fondamentale entre le Parti québécois et le gouvernement actuel. Si c'est la préoccupation du Parti québécois de voir à la protection de certains genres d'institutions et d'établissements, nous n'avons pas de préjugés envers aucun genre d'institution. Nous avons seulement un préjugé et une préoccupation, c'est en rapport aux besoins, en termes de santé, de la population. Ce qui importe, c'est d'avoir des instruments qui nous permettront de faire face auxdits besoins. Ici, il est nécessaire de savoir qui oeuvre dans les hôpitaux, les CLSC et les centres d'accueil, et non seulement les médecins; c'est ce que nous faisons avec le projet de loi 75. (13 heures)

Je ferai remarquer aussi - parce qu'il ne me reste qu'environ deux minutes avant la suspension des travaux - que le député de Gouin a pris une heure pour parler du projet de loi 75. La ministre a utilisé beaucoup moins de temps, parce qu'elle s'est contentée, effectivement, de parler du projet de loi 75, de sa portée. C'est un projet de loi qui comporte, au grand total 11 articles. Loin de là un effort de ma part d'essayer de banaliser la portée du projet de loi, parce que je reviens sur un point d'accord commun entre le député de Gouin et les députés de notre côté. C'est qu'il est essentiel qu'on puisse élaborer, qu'on puisse avoir un instrument qui nous permette d'élaborer des plans d'effectifs régionaux. Il faut avoir une image complète dans une région, non pas savoir - comme c'était le cas avec le projet de loi 27 que le précédent gouvernement avait adopté - combien de médecins oeuvrent dans tel ou tel hôpital. Il faudrait avoir, si on veut faire face aux besoins de la population en termes de santé, une image de

l'ensemble, Mme la Présidente.

J'arrêterai peut-être là pour l'instant en demandant l'ajournement, étant donné qu'il est une heure...

La Vice-Présidente: Je constate, M. le député de Laurier, je m'excuse. Il est présentement 13 heures et j'aurais besoin, si vous voulez poursuivre, du consentement des membres de cette Assemblée. Il reste huit minutes à votre intervention. Y a-t-il consentement des membres de cette Assemblée pour procéder? Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je crois comprendre que le député de Laurier voudrait demander l'ajournement des travaux à 15 heures et être reconnu en reprise de séance.

La Vice-Présidente: Ce que vous voulez c'est suspendre les travaux concernant l'adoption du projet de loi 75. Donc, nous allons suspendre les travaux concernant le projet de loi 75 et nous allons reprendre, si je comprends bien, avec le député de Laurier.

M. Bélanger: Sur une question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Oui, M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Bélanger: Est-ce qu'on pourra s'assurer cet après-midi d'avoir au moins la présence d'un représentant de l'Opposition?

La Vice-Présidente: Écoutez, M. le député de Laval-des-Rapides, ce n'est pas une question de règlement et ce n'est pas... Ce n'est pas une question de règlement.

Là-dessus, nous allons suspendre les travaux et les reprendre à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

(Reprise à 15 h 3)

La Vice-Présidente: À l'ordre! Avant qu'on ne commence nos travaux, j'aimerais demander s'il y aurait l'autorisation de cette Chambre pour qu'on puisse terminer à 16 h 45, compte tenu du fait qu'on aura au Parlement aujourd'hui la présence du président de la République d'Italie, M. Francesco Cossiga. Est-ce qu'il y a autorisation pour qu'on termine à 16 h 45 et qu'on en fasse un ordre de l'Assemblée?

M. Lefebvre: Cela va de notre côté, Mme la Présidente.

M. Gendron: On est d'accord du côté de l'Opposition. II n'y a pas de problème. On veut accueillir le plus dignement possible le président d'Italie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Vous comprendrez que c'est pour permettre aux députés d'aller rencontrer le président.

M. Gendron; Je souhaite que l'ensemble des parlementaires se rendent à l'invitation que vous nous faites.

La Vice-Présidente: Donc, c'est un ordre de la Chambre qu'on termine à 16 h 45. Là-dessus, nous allons reprendre le débat qui avait été suspendu concernant le projet de loi 75, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Nous étions rendus à l'intervention du député de Laurier. Il lui restait neuf minutes. M. le député de Laurier.

M. Sirros: Merci, Mme la Présidente. Un merci spécial au député de Terrebonne, de l'autre côté, qui applaudit.

Mme la Présidente, avant la suspension, j'étais en train de reprendre un peu les arguments, l'approche et le style des critiques de l'Opposition sur ce projet de loi, une approche et un style qui essaient de mêler les choses à même des éléments sur le tapis qui ne sont pas effectivement les questions qu'on étudie actuellement, des critiques qu'on ne peut que qualifier de démagogiques.

Dans les quelques minutes qu'il me reste, j'aimerais peut-être ramener les choses là où elles devraient se situer et parler plus précisément de ce qu'on discute ici aujourd'hui, le projet de loi 75. Je répète encore une fois que le projet de loi 75 est une suite logique au projet de loi 27 adopté par le précédent gouvernement, mais qui, en ce qui concerne la planification des effectifs médicaux, était inopérant.

Le projet de loi 27, adopté en 1982 si ma mémoire est bonne, ne prévoyait l'élaboration de plans d'effectifs que par les centres hospitaliers, c'est-à-dire uniquement par rapport à un établissement donné. Ce que nous faisons avec le projet de loi 75 c'est de nous donner, comme gouvernement, un instrument de planification qui permettrait de rendre réel le désir de voir une répartition équitable des effectifs médicaux dans l'ensemble du territoire du Québec.

Le projet de loi 75 donne le pouvoir aux conseils régionaux de préparer des plans d'effectifs régionaux à partir des chiffres qui seront fournis par les centres hospitaliers tel qu'il était prévu déjà dans le projet de loi 27, mais également à partir des chiffres quant aux médecins et dentistes qui devraient pratiquer dans les CLSC et dans les centres d'accueil également. Ce n'est qu'au moment où on va avoir une image

complète de la situation en ce qui concerne la répartition des effectifs médicaux... Il y a même, à l'heure où on se parle, des différences entre ce que les fédérations comptabilisent en matière d'effectifs et ce que le ministère comptabilise. On a remis -parce qu'on a fait cela aussi - en marche une table de concertation qui regroupe les fédérations, le ministère de la Santé et des Services sociaux et d'autres qui sont impliqués dans le dossier pour qu'on puisse tout au moins se conscientiser ensemble au fait qu'il y a un problème.

On parle souvent des régions périphériques, mais je vous ferais remarquer que ce n'est pas seulement dans les régions périphériques qu'il y a un problème parce qu'il y a aussi plusieurs régions qu'on peut appeler intermédiaires qui sont peut-être près de Montréal, mais qui connaissent elles aussi des problèmes d'effectifs médicaux. L'Opposition nous accusait de vouloir contingenter. Je leur rappellerais seulement que le contingentement, s'ils veulent parler de contingentement, c'est quelque chose qu'ils ont déjà fait en ce qui concerne l'entrée en médecine par rapport au ratio omnipraticiens-spécialistes.

L'autre élément qui a été apporté, c'est les dispositions du projet de loi 75 par rapport à la pénalité prévue en ce qui concerne les médecins qui décident de quitter leurs fonctions sans donner de préavis. Nous établissons, dans le projet de loi 75, un préavis nécessaire de 60 jours pour un médecin qui voudrait arrêter de pratiquer dans un centre hospitalier. On s'est retrouvé, et le gouvernement précédent aussi, dans la situation - je souligne le cas de l'hôpital de Dolbeau - où, du jour au lendemain, les médecins qui pratiquaient dans un centre hospitalier décidaient, comme moyen de pression sur l'hôpital ou sur le gouvernement par rapport à des problèmes qu'ils auraient pu avoir, sans préavis parce que ce n'était pas requis, d'arrêter leur pratique en centre hospitalier. Du jour au lendemain, l'hôpital et la population - cela est plus important que strictement l'hôpital - se retrouvaient sans médecins à l'intérieur d'un centre hospitalier. Les médecins, même s'ils ne pratiquaient pas en centre hospitalier, pouvaient continuer leur pratique en cabinet privé.

Ce qu'on préconise avec le projet de loi 75, c'est de normaliser les choses, en ce sens que nous estimons que c'est tout à fait raisonnable et normal qu'un médecin, comme pour l'ensemble des autres professions et métiers, soit tenu de donner un avis de son intention de quitter, particulièrement dans un domaine comme la santé de la population, étant donné que ce n'est pas quelque chose qui n'a pas de graves conséquences. Cela a des conséquences très graves et ce que nous exigeons, c'est un préavis de 60 jours avant qu'un médecin puisse quitter et on prévoit également que, s'il y a des raisons particulières, personnelles, par exemple, qui ne bouleversent pas le fonctionnement de l'hôpital, la personne peut effectivement quitter l'hôpital sans nécessairement donner le préavis de 60 jours. (15 h 10)

Mais, si on veut vraiment rendre cet article opérationnel, il faut, comme dans toute autre chose, prévoir des conséquences à un geste quelconque. Alors, on prévoit - on dit ceci et j'aimerais que ce soit clarifié -que, s'il y a des médecins qui décident de quitter l'hôpital sans donner de préavis de 60 jours, ils seront - durant un temps limité, qui est l'équivalent de deux jours pour chaque jour où ils n'auront pas donné de préavis - soustraits de la Régie de l'assurance-maladie, ce qui, Mme la Présidente, serait une conséquence sérieuse pour les médecins dans le sens qu'ils ne pourraient pas, à ce moment, quitter l'hôpital pour aller pratiquer dans un cabinet privé.

Quant à l'argumentation selon laquelle ce geste pourrait ouvrir la porte à deux formes de médecine - là, je trouve que c'était vraiment un charriage extrême de la part de l'Opposition - je vous rappelle seulement que, dans le contexte où nous sommes, nous ne pouvons pas prendre au sérieux ce genre de menace qui nous est brandi de l'autre côté de la Chambre. Les médecins sont des personnes qui ont une conscience sociale peut-être beaucoup plus développée que d'autres. Deuxièmement, Vlme la Présidente, il s'agit d'une période limitée qui est la conséquence d'un geste qui contrevient à ce qui prévu dans la loi.

Alors, Mme la Présidente, si on regarde les aspects véritables du projet de loi 75, je pense que - et même le député de Gouin l'a souligné - c'est essentiel qu'on puisse planifier de façon rationnelle la distribution des effectifs médicaux. J'aurais souhaité que le député de Gouin soit un peu plus clair quant aux intentions de sa formation politique. Il me semble que, si on est d'accord sur l'essentiel du projet de loi, on ne devrait pas y ajouter toutes sortes d'autres éléments pour tenir le temps de la Chambre occupé pendant une heure en faisant cette démagogie, comme je le disais, qu'on commence à connaître de plus en plus de la part du député de Gouin.

Quant à moi, en terminant, je pense que c'est un projet de loi qui donnera un instrument nécessaire au gouvernement et qui rendra possible la planification des effectifs médicaux de façon à répondre véritablement aux besoins de la population du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laurier. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Mme la Présidente, je me dois, comme député d'une circonscription éloignée, de saisir l'occasion qui m'est offerte pour exprimer mon point de vue et celui de l'Opposition sur un sujet qui nous a toujours préoccupés et qui me préoccupe personnellement depuis plusieurs années. Effectivement, même si le projet de loi 75 a, je pense, une envergure plus grande que les propos que je vais tenir lors de ce débat sur l'adoption du principe, je me devais de souligner l'aspect plus spécifique de viser à une meilleure répartition des effectifs médicaux dans les régions dites éloignées.

Je ne reprendrai pas l'ensemble des principes sous-jacents au projet de loi 75 parce que, en ce qui me concerne, je pense que notre critique en la matière, le député de Gouin, a pris le temps de faire un excellent survol de tous les éléments compris dans ce projet de loi, tout autant pour ce qui est du contenu que de la forme et de la façon dont ce projet de loi nous est arrivé par la tête.

Le projet de loi vise à modifier la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour y ajouter l'obligation pour un centre local de services communautaires - ce qu'on appelle un CLSC - ou à un centre d'accueuil de prévoir dans son plan d'organisation le nombre de médecins... On précise également le rôle du conseil régional qui peut approuver, avec ou sans modification, un tel plan qui sera soumis par un centre local de services communautaires. On y ajoute enfin que le conseil régional devra, à l'avenir, établir un plan régional des effectifs médicaux et dentaires nécessaires à la population de la région.

Ce sont sûrement, dans les notes explicatives, des éléments importants du projet de loi 75 parce qu'il introduit de nouvelles dispositions. Il introduit l'obligation pour un CLSC et un centre d'accueil d'établir un plan d'organisation, l'obligation pour les conseils régionaux de santé et de services sociaux de réaliser un plan régional d'effectifs médicaux et dentaires incluant l'ensemble des activités professionnelles des médecins et dentistes et parle même d'une prescription concernant l'échéancier. Bien sûr, comme je l'ai mentionné, il y a d'autres principes.

Cependant, l'important, pour nous, c'est de démontrer que le projet de loi 75 est quand même un projet de loi qui a une portée de très grande envergure. La ministre de la Santé et des Services sociaux tente de laisser croire que le projet de loi, dans le fond, se résume à la question majeure et la plus importante qu'elle voulait corriger, dit-elle, c'est-à-dire avoir un meilleur contrôle quant à la répartition des effectifs médicaux dans tout le Québec, bien sûr, mais en particulier dans les régions où le problème était le plus aigu parce que, règle générale, quand on agit pour l'ensemble du Québec, c'est pour corriger des causes qui sont plus douloureuses à subir dans certaines régions du Québec. Je pense que cela n'est pas exact d'avoir cette tendance parce que - je voulais compléter ma phrase - de limiter la portée du projet de loi au seul fait qu'enfin, par la loi 75, on aurait une disposition qui permettrait de mieux contrôler la répartition des effectifs...

Le projet de loi 75 va beaucoup plus loin. Ce n'est pas pour rien, d'ailleurs. Si ce n'était que la question de régler les effectifs en régions, je suis loin d'être sûr que nous aurions assisté au tollé de protestations auquel nous avons assisté. Moi, aujourd'hui, je vous le dis tout de suite, je n'ai l'intention de défendre personne. Ce qui m'intéresse, c'est d'avoir un meilleur appui de la ministre de la Santé et des Services sociaux, du gouvernement actuel par rapport au problème fondamental qu'on vit depuis plusieurs années - j'y reviendrai tout à l'heure. C'est ce qui m'intéresse. Tout ce que je veux défendre, ce sont des effectifs médicaux répartis équitablement, parce que, au cas où les gens ne le sauraient pas, nous aussi, dans les régions, nous sommes des contribuables. Non seulement sommes-nous des contribuables, mais nous sommes des "contributeurs", très importants pour le fonds consolidé du Québec grâce à la vente et à l'exportation des richesses naturelles. Lorsqu'on parle d'un Québec fort avec les régions qui le composent, sachant que la plupart des ressources sont dans les régions, on veut, de temps en temps, nous aussi, avoir un équilibre dans la distribution de l'assiette fiscale.

Dans le domaine des services de santé, bien sûr qu'on a effectué un certain rattrapage, qu'on a amélioré la situation. Mais il reste encore beaucoup à faire. Le problème de la répartition et de la présence des médecins est un problème majeur en ce qui a trait à la qualité et à l'accessibilité aux services de santé pour l'ensemble des Québécois. Là-dessus, je rejoins la ministre de la Santé et des Services sociaux. Je la rejoins également lorsqu'elle mentionne que la commission Rochon qui continue à tenir des audiences un peu partout au Québec est constamment interpellée sur cette question majeure. Certains prétendent encore que, dans les régions périphériques, nous n'avons pas véritablement ce que j'appellerais des services de santé convenables en 1986 par rapport au jugement populaire posé dans tout le Québec, à savoir que nous avons quand même au Québec un régime de santé et de services sociaux qui est passablement bien organisé, qui donne de bons résultats à l'ensemble de la population du Québec. En conséquence, quand nous entendons des

comparaisons à l'extérieur sur la valeur du système de santé québécois, on est un peu déçu de voir dans les régions qu'on n'y a pas toujours notre compte dans la part de l'ensemble du Québec. Dans ce sens, je pense que ce doit être une priorité politique et administrative pour un gouvernement responsable, la question de tout faire pour s'assurer qu'à l'avenir il y ait une répartition plus équitable, mieux équilibrée des médecins pour assurer une accessibilité de meilleure qualité et plus réelle pour l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec.

Je voudrais prendre quelques minutes cependant pour vous dire que, si je parle du problème, c'est parce qu'il m'intéresse. Je n'ai jamais eu la conviction que nous n'avions pas assumé nos responsabilités comme gouvernement là-dedans. Contrairement à ce que j'entendais tantôt du député de Laurier que nous n'avions pas posé des gestes qui avaient changé quelque chose, ce n'est pas exact, en tout cas, en ce qui concerne la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Je ne dis pas que le problème est réglé, je veux être très bien compris; il n'est pas réglé et il faut constamment poser des gestes additionnels pour s'assurer que nous renforçons particulièrement cette présence de spécialistes qui nous font encore défaut. Si c'est vrai pour la région de chez nous, c'est sûrement vrai pour la région du Saguenay— Lac-Saint-Jean, c'est également vrai pour les régions de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent, de la Mauricie, enfin pour toutes les régions autres que les bassins importants de population du Québec métropolitain et, bien sûr, de la région métropolitaine du grand Montréal. (15 h 20)

Dans ce sens-là, Mme la Présidente, nous, comme gouvernement, nous avons consacré beaucoup d'énergie à mettre sur pied un ensemble de mesures visant à apporter des solutions. Je ne les citerai pas toutes, je n'en ferai pas l'historique, mais je voudrais juste vous indiquer que moi, en tout cas, j'ai été un défenseur de la loi 27 et je suis convaincu que la loi 27, pour des régions comme la nôtre, a donné des résultats mesurables, palpables, concrets. Je me rappelle, entre autres, en 1981, lorsqu'on était en campagne électorale et qu'on citait des statistiques. On a repris certaines de ces statistiques en 1985 sur le nombre d'omnipraticiens en Abitibi-Témiscamingue et le nombre de spécialistes. Lorsque nous avions à faire la comparaison entre 1981 et 1985 - entre les deux, il y avait eu l'événement de la loi 27 - nous étions en mesure, à tout le moins pour ce qui est des omnipraticiens, de prouver noir sur blanc que nous avions eu une augmentation du double. Pour ceux qui nous suivent, si on avait 50 Omnipraticiens - le chiffre exact, je ne me le rappelle pas - on en avait 100 en 1985. On a donc réussi à doubler la présence des omnipraticiens en Abitibi-Témiscamingue. On a eu un peu moins de succès pour les spécialistes; je ne dis pas que cela ne s'explique pas, je dis que nous ne l'acceptons pas. Ce n'est pas normal que dans une région comme la nôtre nous n'ayons pas, nous aussi, droit à des spécialistes pour des spécialités qui sont quand même de plus en plus universelles et qui doivent être distribuées à l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec.

Donc, on a essayé et réussi, dans une certaine mesure, à améliorer la performance de la distribution des effectifs médicaux et c'était important que ce soit fait. L'ensemble des mesures incitatives ont produit des résultats significatifs - j'étais en train de le démontrer - des progrès considérables. La répartition des médecins omnipraticiens est à peu près réglée pour l'essentiel. Il y a cependant, comme je l'ai dit tantôt, un effort important à faire au niveau des spécialistes parce que c'est loin d'être suffisant. Le rapport Bergevin, qui a été cité avec éloquence par mon collègue, le député de Gouin, et les études du MSSS reconnaissent l'apport significatif de ces mesures incitatives élaborées en concertation avec le milieu. Ce qu'on veut dire à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux aujourd'hui, c'est que ce n'est pas quand quelque chose a donné des résultats qu'on arrête complètement et qu'on tourne à 90 degrés la voie ferrée. Nous pensons que la position adoptée par la ministre dans le projet de loi 75, au-delà de nous faire croire ce qui n'est pas le fondement même du projet de loi, que c'est davantage un projet pour régler la répartition, ce qui n'est pas exact, c'est beaucoup plus global que cela, nous pensons qu'il y a un virage un petit peu trop radical par rapport à ce qui s'est fait dans le passé.

Je pense qu'une juste combinaison, un bon "mix", si vous me permettez l'expression, entre toutes les mesures à caractère incitatif et les mesures à caractère coercitif, si on faisait un bon "mix" de ces deux éléments, j'ai l'impression que nous serions dans la bonne voie et que, là, tranquillement, on progresserait dans le sens souhaité par n'importe quel gouvernement responsable, vers un plus grand équilibre, un meilleur équilibre entre la répartition, dans toutes les régions du Québec, autant que faire se peut, d'omnipraticiens et de spécialistes pour que nous ayons droit aussi à une médecine de 1986, une médecine moderne qui permette une plus grande accessibilité et une meilleure qualité de la médecine.

Les véritables intentions du projet de loi 75, Mme la Présidente, c'est, bien sûr, d'avoir un portrait plus exact des besoins. La réalisation d'un plan d'effectifs médicaux

régionaux, y compris la pratique en cabinet privé, comportant un échéancier strict et prévoyant des pénalités si le plan n'est pas réalisé, on ne peut pas être contre cela en soi, c'est une excellente chose que faire cet exercice. Cependant, je n'ai pas la conviction que, parce qu'on réaliserait le plus beau plan d'effectifs possible au monde, on viendrait régler le problème de la répartition. Je n'ai jamais compris qu'un plan d'effectifs comme tel, c'est-à-dire donner l'heure juste des besoins, Mme la Présidente, cela égale ce qu'il faut comme mesures pour s'assurer qu'à l'avenir la répartition sera convenable, équitable et correspondra véritablement aux besoins du milieu.

C'est la même chose pour l'accroissement des pouvoirs du CRSSS et de la ministre. Cela ne m'assure de rien que la ministre me dise: Je vais augmenter mes pouvoirs, je vais augmenter les pouvoirs du CRSSS et les problèmes vont être réglés. On n'est pas plus avancé. Ce n'est pas parce qu'un CRSSS a plus de pouvoirs sur la possibilité de faire un meilleur plan d'effectifs, donc de décrire mieux le portrait, qu'on va être en Cadillac par rapport aux besoins qui sont les nôtres. Je n'ai pas de garantie là-dessus. J'aimerais en avoir un peu plus.

Il y a également - mon collègue l'a très bien expliqué - des réserves quant à l'application du plan d'effectifs par le CRSSS, surtout si on décide de faire cela en catimini, si on décide de faire cela sans que ce soit véritablement ouvert au public. D'ailleurs, à cet effet, Mme la ministre, j'aimerais faire une citation. J'ai ici, et vous l'avez sans doute reçu - les régionaux, en particulier ceux de l'Abitibi-Témiscamingue, tenaient à ce que j'en parle lors du débat en deuxième lecture sur le principe du projet de loi 75 - un télégramme de la Conférence régionale des centres hospitaliers de l'Abitibi-Témiscamingue qui m'a été envoyé et qui a été envoyé à la ministre concernant le problème qu'on discute. Il dit ceci: La Conférence régionale des centres hospitaliers de l'Abitibi-Témiscamingue est d'accord avec la ministre de la Santé et des Services sociaux pour créer l'obligation d'établir des plans d'effectifs médicaux au Québec.

C'est une bonne note pour la ministre pour le premier bout. On ajoutait: Cependant, ces plans devront tenir compte des ratios médecins-population au sein des territoires régionaux, des municipalités régionales de comté et des besoins spécifiques de certaines municipalités. Ces plans devraient, pour être applicables, comporter des limites quant au nombre de médecins ayant accès au territoire et à l'éligibilité de participation à la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Les problèmes de recrutement des médecins en régions éloignées - écoutez bien cela - ne trouveront leurs solutions que dans la mesure où des règles et des normes globales seront établies pour tous les territoires du Québec.

J'ajouterai dans la mesure où on aura deux orientations - cela a été très bien exposé par le critique de l'Opposition en matière de santé et de services sociaux -que nous poursuivions encore pour quelques années cette recherche de solution dans le volet à caractère plus incitatif et, possiblement, à la suite d'échanges avec les gens concernés - ce à quoi semble vouloir se soustraire la ministre de la Santé et des Services sociaux - un bon débat sur une meilleure emprise - je suis d'accord avec la ministre - pour s'assurer que le contrôle sur la capacité d'infléchir davantage la répartition des effectifs ne soit pas juste un discours, mais devienne une réalité mesurable, palpable, pour que de temps en temps, l'État québécois qui contribue à très forts coûts à la formation des jeunes qui s'inscrivent dans les facultés de médecine comme spécialistes ou comme généralistes les omnipraticiens... C'est dispendieux pour l'État. On n'a pas d'objection que l'État s'impose ces sacrifices à condition qu'à un moment donné l'État en ait des retours mesurables, et une façon d'avoir des retours mesurables pour ce que je discute, c'est de s'assurer que l'équilibre dans la répartition des effectifs médicaux est plus équilibré, si vous me permettez l'expression, que ce qu'on a observé jusqu'à maintenant. La Conférence régionale des centres hospitaliers de l'Abitibi-Témiscamingue est très sensible à cette question. J'en profite d'ailleurs pour la remercier du travail qu'elle a fait depuis plusieurs années sur la question du recrutement. Ils en ont mis des heures et des efforts pour s'assurer eux aussi de pousser sur le bateau, pour s'assurer également que le gouvernement, quel qu'il soit, soit très préoccupé par cette question d'agir dans le domaine, de poser les gestes requis pour que, comme je l'ai mentionné tantôt, nous aussi nous puissions de temps en temps avoir des services de santé et des services sociaux accessibles à nos contribuables pour réduire les coûts de déplacement inutiles et réduire les coûts tout court. Je pense qu'on a marqué des progrès intéressants. On a progressé dans cette voie. Mais il ne faudrait pas changer radicalement de façon de faire pour perdre les nombreux avantages que nous avons gagnés.

Dans le projet de loi qui est sur la table, Mme la Présidente, les autres aspects, toute la question de certains contrôles autoritaires, changement de cap sans consultation, annonce qu'on bouleverse les conditions d'exercice de la profession médicale au Québec, tout le volet et la relation que nous sommes obligés de faire constamment parce que c'est une relation

nécessaire entre le projet de loi 75 et le résumé de la décision 86-84 sur la politique de détermination des postes internes, ce sont là des questions qui doivent également être débattues à ce moment-ci, parce que c'est le choix de la ministre. C'est la ministre qui a décidé de mêler cela ensemble.

Personnellement, si j'avais à débattre aujourd'hui un projet de loi qui me donnerait les garanties que je recherche, à savoir que j'aurais de meilleures perspectives quant au règlement de la question de la répartition des effectifs, je n'aurais aucune espèce d'hésitation à applaudir complètement l'ensemble des orientations prises par la ministre dans ce projet de loi. (15 h 30)

Si la ministre avait voulu déposer une projet de loi portant spécialement et exclusivement sur la répartition des effectifs médicaux en régions, je dirais qu'on a vraiment fait un coup de barre important dans une direction qui est souhaitée à peu près par tous les intervenants sociaux depuis plusieurs années et, en particulier, ceux des régions dites périphériques. Mais on n'a pas le droit, je pense, de se servir de cette dure et froide réalité qui est celle d'une répartition non équilibrée pour prétexter faire adopter le projet de loi 75 qui constitue en fait la première étape d'une politique de contingentement de la pratique médicale.

J'entendais le député de Laurier qui disait - c'est donc facile quand on est au pouvoir - qui prétendait que nous n'avons fait qu'une chose, c'est de la démagogie, alors que je pense que mon collègue a essayé de traiter très sérieusement - il l'a fait très professionnellement - le fond de cette question. Mais quand on traite une question de fond en deuxième lecture, on doit regarder l'ensemble des éléments qui sont compris dans les projets de loi et non pas ce que j'appellerais l'appendice le plus favorable qui est, bien sûr, de viser à une répartition plus équilibrée. Cela est bon, c'est alléchant, c'est une bonne mesure. Mais il y a autre chose là-dedans, et je pense que mon collègue de Gouin avait tout à fait raison d'attirer l'attention des citoyens et des citoyennes du Québec, parce qu'une politique qui introduit le contingentement de la pratique médicale nécessite à tout le moins un débat majeur, à tout le moins qu'on ait l'occasion d'en débattre pendant plusieurs semaines. C'est ce que mon collègue a voulu faire savoir.

En conclusion, Mme la Présidente, puisque vous m'indiquez que mon temps est presque expiré, je voudrais tout simplement dire que mon appui, comme député d'Abitibi-Ouest, au gouvernement et à la ministre de la Santé et des Services sociaux sera toujours là quand j'aurai la conviction que les mesures qui sont mises sur la table sur le plan législatif sont clairement dans le sens souhaité par les régionaux et celui qui vous parle depuis plusieurs années, oui, d'avoir la capacité de répartir d'une façon plus équitable les effectifs médicaux, tout autant pour les spécialistes que pour les omnipraticiens pour que nous aussi, nous ayons enfin droit à une médecine vraiment accessible et universelle, mais à des coûts qui correspondraient à ceux que les citoyens des grands bassins de population se doivent d'assumer. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Guy Bélanger

M. Bélanger: Depuis plusieurs années, les régions éloignées du Québec connaissent une pénurie de médecins et de spécialistes très importante. Pourtant, on sait, en termes absolus, qu'il y a au Québec plus de médecins que ne l'exigent nos besoins. À titre indicatif, mentionnons que, de 1970 à 1982, la croissance des effectifs médicaux a été onze fois supérieure à celle de la population et qu'il y a actuellement au Québec 13 163 médecins, évidemment, avec de très fortes concentrations dans les grands centres comme Montréal et Québec. Ces concentrations sont faciles à comprendre: si on regarde les équipements des grands hôpitaux, si on regarde tous les avantages de pratique qu'offrent les grands centres, il est évident que c'est beaucoup plus attrayant et incitatif que la pratique en régions éloignées. Dans le passé, le gouvernement précédent a mis en place un certain nombre de mesures. Je me rappelle, entre autres, avoir plaidé à la commission parlementaire sur la loi 27 alors que le chef de l'Opposition était ministre des Affaires sociales et que le député de Taillon était son chef de cabinet. Nous avions, à cette époque, apporté un appui inconditionnel à la loi 27. On reconnaissait certaines faiblesses à cette loi, mais on y voyait surtout les ferments qui permettraient une amorce de solution extrêmement intéressante à ce problème déplorable de répartition des effectifs.

Malgré cette loi 27 et malgré les effets positifs de ce que les médecins appelaient alors le décret punitif Johnson, car ils voyaient des aspects négatifs dans le projet, tout le problème n'est pas réglé. Il continue à persister et avec autant d'acuité qu'avant. Le projet de loi de Mme !a ministre de la Santé et des Services sociaux est un effort réel pour corriger ce problème. Les conseils régionaux des régions éloignées nous ont fait valoir leur point de vue là-dessus et offrent un appui inconditionnel à Mme la ministre dans cet effort de planification et de meilleure répartition des ressources. Il est évident que les fédérations

de médecins ont réagi plutôt négativement sur certains aspects. Comme syndicats voués à la défense de leurs membres, aux intérêts de leurs membres, il est évident que certains aspects que comprend une loi qui sont un peu plus contraignants ne faisaient pas leur bonheur. On les comprend bien. Mais, en aucun temps, ils n'ont contesté les objectifs poursuivis par cette loi. Au contraire, ils les ont constamment appuyés et continuent de les appuyer. Je pense qu'il faut le souligner.

Il faut aussi savoir, pour bien comprendre ce problème, que la médecine ne répond pas aux mêmes lois du marché que les autres professions. On a vite réalisé, depuis longtemps au Québec, qu'en médecine la demande s'ajuste à l'offre. Plus il y a de médecins, plus il y a de demandes. À preuve, un nombre très important de médecins pratique à Montréal et je défie quiconque de me trouver un seul médecin qui ne gagne pas bien sa vie. Je ne parlerai même pas d'un médecin chômeur. C'est une conception qui n'entre pas dans notre tête.

Par contre, si on regarde les ingénieurs, ils n'ont pas la même problématique. Il y a beaucoup de chômage parmi les ingénieurs, les avocats ou dans bien d'autres professions.

Lorsque de grands projets se sont faits, lorsqu'on a eu besoin ou que le marché de la pratique était ailleurs, par exemple, à la Baie James, on n'a jamais eu de problèmes pour amener des ingénieurs à la Baie James. Ils allaient là où ils pouvaient gagner leur vie, là où était le travail. En médecine, la "castonguette" marche aussi bien à Montréal que n'importe où ailleurs. Alors, pourquoi s'isoler? Il y a là un aspect qu'il faut toujours considérer lorsqu'on parle du problème de la médecine.

Donc, l'État, qui est finalement celui qui paie ou qui est le patron - c'est lui qui paie les frais par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, c'est lui qui paie les salaires aux médecins - a le devoir d'intervenir. Étant l'outil privilégié ou le seul qui puisse intervenir efficacement dans ce problème, il se doit de poser des gestes qui amèneront une solution et qui tendront à amener des médecins dans les régions éloignées.

Si on veut prendre une expression à la mode, je pense que les régions éloignées sont quand même assez modestes dans leurs demandes vis-à-vis des besoins en médecins. Elles ne demandent pas la parité avec Montréal, elles ne demandent pas l'équipement de grands centres comme Montréal. Ce qu'elles souhaitent, c'est avoir chez elles quelqu'un qui puisse leur apporter sécurité et garantie de la qualité de vie qui est nécessaire à une communauté, surtout lorsqu'on vit dans des régions plus éloignées.

Mme la ministre a eu le courage de nous proposer un projet de loi qui ne sera pas nécessairement facile à faire accepter par ceux qui pratiquent la médecine, mais il faut savoir que cette loi s'inscrit en continuité avec les dispositions de la loi 27 et que cette loi qui avait déjà, comme on le disait tout à l'heure, corrigé un certain nombre de choses, méritait un appui substantiel pour donner les résultats auxquels on est en droit de s'attendre.

Il y a moins d'un an, Mme la ministre, qui présidait la commission des affaires sociales, avait procédé sur le même sujet à une série de consultations. On se rappelle que toutes les fédérations, la FMSQ, la FMOQ, la Fédération des médecins internes et résidents du Québec, étaient venues en commission donner leurs points de vue sur la répartition des effectifs médicaux dans la province. On y avait établi certains consensus. On avait pris un certain nombre de mesures et tout le monde semblait heureux de la volonté qui s'était dégagée de ces rencontres. Malheureusement, les résultats n'ont pas été à la mesure des attentes ou de cette volonté qui s'était dégagée. Aujourd'hui, il faut procéder plus à fond. Dorénavant, avec la loi 75, il y aura une planification qui nous permettra d'anticiper ou de réagir avant que la situation soit rendue à un point de dégradation tel que certaines régions se voient, à toutes fins utiles, privées de médecins, surtout lorsque ceux-ci décident de démissionner en bloc comme moyen de pression, comme on l'a vu, il y a quelques mois, dans certaines régions.

Il était important que cette loi 75 prévoie des mécanismes qui empêchent ces moyens de pression qui prennent un peu la population en otage et qui créent beaucoup d'insécurité. Il nous fallait donc une planification adéquate. Ce sera le mandat des conseils régionaux de soumettre à Mme la ministre des plans d'effectifs médicaux. Ce sera également le mandat des établissements, tels les hôpitaux, les CLSC et les centres d'accueil, de soumettre leurs besoins aux conseils régionaux et à Mme la ministre par leurs plans d'organisation. Donc, il y aura, à l'avenir, un mécanisme de planification plus rigoureux qui nous permettra de voir venir les situations qui pourront être conflictuelles et de prendre des mesures anticipatrices pour éviter ces problèmes. (15 h 40)

En conclusion, malgré le fait que certains membres de l'Opposition ont tenté, par leurs interventions, d'amener les divers organismes, que ce soient les associations d'établissements, que ce soit la Conférence des conseils régionaux, que ce soient les fédérations de médecins, à réclamer à cor et à cri une commission parlementaire, ils n'ont reçu à peu près aucun appui à ce niveau. Les associations d'établissements comme l'Association des hôpitaux, l'Association des

centres d'accueil, la Conférence des CRSSS de la province de Québec accordent à Mme la ministre un appui inconditionnel à son projet et même, sur certains aspects, trouvent qu'on ne va pas assez loin, que nous ne sommes pas assez exigeants et rigoureux.

C'est donc avec plaisir et avec la satisfaction du devoir accompli que j'appuierai votre projet de loi car il est pour moi un outil de changement social des plus importants pour le mieux-être de la population. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez quelques mots sur l'intervention du député de Laval-des-Rapides. C'est quand même assez fantastique! Voilà un projet de loi qui réglemente la pratique de la médecine et le député de Laval-des-Rapides nous dit: Écoutez, l'AHQ est pour, les CRSSS sont pour, mais tous les corps professionnels qui pratiquent la médecine sont contre; cela a bien de l'allure, allons-y quand même, Mme la Présidente. Je ferai remarquer au député de Laval-des-Rapides et à Mme la ministre que, dans le cas de l'AHQ, c'est un appui réservé. De plus, si ma mémoire est fidèle, elle dit: Mme la ministre, ne donnez pas plus de pouvoirs aux CRSSS. Dans le cas de l'appui donné par les CRSSS, encore une fois, sauf erreur, selon le document qui a été reproduit dans les journaux, les CRSSS disent essentiellement: Allez au bout des mesures incitatives avant de songer à aller plus loin dans les mesures coercitives.

Quand on parle d'appui à votre projet de loi, je pense qu'il faut faire des réserves. Mais là où on s'entend des deux côtés de la Chambre, c'est que voilà un projet de loi qui fait l'unanimité des corps professionnels qui pratiquent la médecine: la FMSQ, la Fédération des médecins spécialistes du Québec, qui est directement et principalement concernée par ce projet de loi, la FMOQ, les omnipraticiens, les généralistes, la corporation médicale elle-même et les résidents internes, soit les quatre groupes de professionnels qui doivent vivre quotidiennement avec les réalités de la médecine. À moins qu'on n'ait changé un peu l'ordre des choses sous le soleil et sur le globe terrestre, la médecine est d'abord et avant tout l'affaire des médecins tout comme, d'ailleurs, si on n'avait pas de médecins, il n'y aurait pas d'hôpitaux.

Quant à nous, n'importe quelle solution qui écarte les médecins eux-mêmes dans la résolution d'un problème qui, je l'admets, n'est pas facile, soit la pratique en régions éloignées devient bien vite une solution biaisée, une solution illogique et une solution qui risque de courir à sa perte, à moins, comme je le suggérerai tantôt à Mme la ministre, qu'on ne fasse à ce moment-là ce qu'on a toujours fait, particulièrement à l'époque de la loi 27 dont parlait le député de Laval-des-Rapides, c'est-à-dire qu'on entende ces gens, qu'on les écoute, qu'on leur explique, qu'on échange.

Mme la ministre se souviendra que, quand on a adopté la loi 27, grosso modo, c'était la première fois qu'on légiférait et qu'on intervenait sur l'épineuse question de la répartition des médecins dans tout le territoire du Québec. Dans la loi 27 se trouvaient, on s'en souviendra, des modifications qui permettaient la rémunération différenciée, qui a été l'un des atouts de la solution partielle du problème. Encore une fois, je concède qu'il s'agit d'une solution partielle. La loi 27 modifiait la loi de façon importante en prévoyant l'intégration du médecin à l'intérieur des établissements de santé et, sauf erreur, elle prévoyait également des plans d'effectifs pour les centres hospitaliers. Ce sont les trois gros blocs que comprenait la loi 27.

A ce moment-là, qu'est-ce qui a été fait par le gouvernement lorsque les corporations professionnelles médicales se sont opposées? Parce qu'elles disaient: Cela n'a pas d'allure, écoutez-nous. Je me souviens que Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui était à ce moment-là critique de son parti en matière de santé, évidemment membre de l'Opposition, avait demandé une commission parlementaire pour pouvoir entendre ces gens-là. Je m'en souviens comme si c'était hier. Comme l'a souligné le député de Laval-des-Rapides, j'étais à ce moment-là directeur de cabinet de celui qui est aujourd'hui chef de l'Opposition. On s'est retrouvé de l'autre côté, au salon rouge avec, disons-le, n'ayons pas peur des mots, un front commun de toutes les personnes engagées dans l'exercice de la médecine. Cela incluait la FMSQ, la FMOQ, les résidents internes et, également, les dentistes. Je pense que le député de Laurier s'en souviendra également parce qu'il était membre de cette commission parlementaire. Tous ces gens-là faisaient ensemble un front commun contre le projet de loi 27, en particulier contre l'introduction de mesures coercitives à l'égard du problème des médecins en régions éloignées.

Qu'est-il arrivé par la suite? C'est une commission parlementaire qui avait duré plusieurs jours, qui avait été houleuse, mais où le gouvernement avait expliqué aux parties ce qu'il en était réellement de son projet de loi, où les professionnels de la santé avaient également fait part de leur anxiété qui, dans certains cas, était justifiée et qui, dans d'autres, ne l'était pas. Celui

qui avait la responsabilité du dossier, c'était le ministre des Affaires sociales de l'époque, actuel chef de l'Opposition et toujours député d'Anjou. À ce moment-là, les gens entre eux s'étaient compris, avaient dialogué. Il y avait eu des modifications apportées à la loi 27 pour qu'elle soit acceptable aux médecins qui étaient les principales personnes affectées par ce projet de loi.

Si, aujourd'hui, on peut dire que la loi 27 a résolu une partie des effets de ce problème, c'est parce que le gouvernement du Parti québécois de l'époque a eu le courage d'affronter les intervenants. Le mot "affrontement" n'est pas trop fort, les médias de l'époque en parlaient, c'était un affrontement. Mais l'affrontement, quand les gens sont capables de s'exprimer de façon civilisée et, surtout, quand on leur donne une chance de se parler et de se comprendre, peut, dans certains cas, amener une bonification des mesures et, dans d'autres, le retrait des mesures.

La ministre de la Santé et des Services sociaux, dont je ne mets pas en doute la bonne foi, devrait le savoir; elle vient tout juste de vivre l'expérience dans le secteur des soins dentaires où elle a été obligée, à cause d'une absence de consultation préalable, de réviser sa position. Ce n'est pas grave de réviser sa position après avoir entendu les gens. Dans ce cas-ci, on parle d'un projet de loi qui, lorsqu'il sera adopté, aura des effets cinglants sur ceux qui sont les principaux artisans de la médecine au Québec, le mot le dit, les médecins eux-mêmes. Je pense que la ministre de la Santé et des Services sociaux devrait avoir le courage de cet exercice démocratique que constituerait une commission parlementaire, parce que son projet de loi met en cause bien plus que le problème de la répartition des effectifs régionaux. Son projet de loi 75 va beaucoup plus loin et met en cause, même si on tente d'en limiter la portée, les principes mêmes, les assises de notre système, à savoir l'universalité et l'accessibilité des services.

Bien sûr, la répartition des médecins est un problème très important qui affecte, encore une fois, les notions de la qualité des soins qui doivent être donnés aux bénéficiaires et de l'accessibilité. Pour n'importe quel gouvernement, quel qu'il soit - je pense que le Parti québécois, là-dessus, est celui qui a donné le signal - le problème de la répartition des effectifs doit être une priorité, une priorité politique, une priorité budgétaire. Je suis convaincu que, pour la ministre de la Santé et des Services sociaux, ce dossier doit être considéré d'une façon prioritaire, et c'est probablement ce qu'elle fait. (15 h 50)

Le gouvernement du Parti québécois l'avait reconnu en y consacrant non seule- ment la loi 27, mais toutes les mesures administratives qui vont de pair avec une loi. J'ai déjà eu l'occasion de mentionner que ce n'est pas tout d'adopter des lois. La loi 27, en soi, n'aurait pas réglé les problèmes qu'elle a réglés si elle n'avait pas été accompagnée de mesures administratives. C'est le gouvernement du Parti québécois qui a permis la rémunération différenciée à la fois par des amendements législatifs et réglementaires. La rémunération différenciée, des médecins selon leur lieu de pratique sur le territoire québécois. C'était 115 % du tarif lors de la première année de pratique des omnipraticiens dans les territoires désignés.

Une autre mesure, cette fois-ci purement administrative, mise sur pied par le gouvernement du Parti québécois: les programmes de bourses pour étudiants en médecine, conditionnels à la pratique en régions éloignées pendant un certain nombre d'années. La création de comités locaux et régionaux de recrutement et de rétention de médecins. Je me souviens, toujours à cette époque, d'avoir accompagné l'actuel leader de l'Opposition, alors ministre, dans une tournée qui nous avait menés dans les principales régions éloignées du Québec.

Je ne sais pas si Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, avant d'introduire son projet de loi 75, a fait semblables démarches d'aller à Chapais voir ce qui se passe, d'aller aux Îles-de-la-Madeleine pour constater le problème, d'aller voir les régions éloignées, sur place, pour sentir le problème ou, tout au moins, de donner la chance à ces gens de venir se présenter en commission parlementaire parce que, encore une fois, c'est là que sont vécus les problèmes et les situations que nous, comme législateurs, en adoptant un projet de loi, on pense régler en un tour de main. Ce n'est pas vrai.

Il ne faut pas prendre les médecins pour des canards sauvages. Ce sont des professionnels consciencieux, qui savent faire leur boulot et qui ont souvent eu des Vocations, des considérations humanitaires ayant souvent présidé au choix de leur profession. On ne peut pas écarter du revers de la main toutes les corporations professionnelles, toutes les fédérations de médecins en disant que ces gens ont des objectifs autres que la pratique de la médecine. Ces gens, d'abord et avant tout, ont choisi de consacrer leur vie à soulager la misère et la souffrance. Comme vocation, c'en est une belle; il faut savoir respecter cette motivation chez les professionnels de la santé.

Création de comités locaux et régionaux de recrutement et de rétention de médecins. Dans certains cas, il faut aller voir les médecins, il faut bâtir les comités. Il faut qu'un ministère de la Santé et des

Services sociaux continue le travail qui avait été amorcé à l'époque, mais cela demande autre chose que des lois; cela demande des coups de téléphone, des lettres, des campagnes de sensibilisation afin que la roue puisse continuer à tourner.

Programme de jumelage entre les hôpitaux des régions éloignées et certains hôpitaux universitaires des grands centres. On n'a pas beaucoup entendu la ministre de la Santé et des Services sociaux, pas plus que les autres intervenants, nous parler de cette mesure administrative simple, mais efficace parce qu'elle permet aux médecins qui oeuvrent dans des régions éloignées de garder le contact avec les médecins qui, eux, sont à l'affût des derniers développements en matière d'innovation médicale.

Décentralisation de la formation médicale par l'organisation de stages adaptés à la réalité de la pratique en régions, un ensemble cohérent de mesures législatives et administratives pour attaquer le coeur du problème et s'assurer que véritablement, dans les faits, cela va améliorer la situation. Quels ont été les résultats de ces mesures adoptées par le gouvernement du Parti québécois? Je pense qu'on peut dire en cette Chambre qu'en ce qui concerne les omnipraticiens, les généralistes, le problème est à peu près réglé. Il faut continuer à être vigilant, bien sûr, mais de façon générale le problème est à peu près réglé. Il reste, par exemple, malgré l'ajout important de nombreux médecins spécialistes en régions, encore un problème.

J'ai été surpris, très surpris de voir que le gouvernement libéral avait reculé par rapport à certaines des mesures qui avaient été mises en place précédemment. Je parle du décret 86-84 quant au nombre de médecins spécialistes pour les régions. En fait, il a fallu que je vérifie avec le député de Gouin, qui est critique en cette matière, pour arriver à comprendre pourquoi on a succombé à cette commande, probablement, de rationalisation du Conseil du trésor. Est-ce qu'on voulait économiser de l'argent aussi facilement que ça, alors que le dossier devait être une priorité? Parce que rationalisation, dans ce cas-ci, veut dire réduction, réduction d'une mesure, alors que tous s'entendent pour dire que les mesures sont bonnes et doivent être maintenues. C'est le rapport Bergevin qui soulignait l'efficacité de cette mesure administrative. Pourquoi avoir reculé sur cette mesure qui avait pourtant donné d'excellents résultats?

Je disais tantôt que le projet de loi débordait le cadre du strict problème des médecins en régions éloignées. En parcourant ce projet de loi, certaines mesures m'ont particulièrement frappé. Est-ce que ce sont là les véritables intentions du gouvernement? D'abord, la réalisation de plans d'effectifs médicaux régionaux, y inclus la pratique en cabinet privé, et comportant un échéancier -on le sait, le député de Gouin l'a mentionné - extrêmement strict, prévoyant des pénalités également si le plan n'est pas réalisé.

Quant à l'accroissement du pouvoir des CRSSS et de la ministre, je dois vous dire que je partage plutôt l'opinion qui a été émise par l'AHQ à ce sujet-là. Je ne dis pas que, éventuellement, dans un plan un peu plus organisé, qui aura fait l'objet d'un plus grand consensus, on ne pourrait pas penser à ce genre d'octroi de pouvoirs additionnels, mais, dans la situation actuelle, en l'absence de dialogue, en l'absence de consensus, je ne suis pas sûr de partager ce point de vue qui est contenu dans le projet de loi.

En terminant, Mme la Présidente, je dois insister une dernière fois, dans le sillon du critique officiel de l'Opposition, le député de Gouin, pour réclamer du gouvernement une commission parlementaire, un débat public sur cette question. On n'a qu'à lire la page des lecteurs des grands quotidiens pour se rendre compte que ce n'est pas un problème qui intéresse seulement quelques fonctionnaires du ministère ou quelques fonctionnaires des CRSSS, des associations sectorielles ou des corporations professionnelles. Il s'agit d'un problème qui intéresse la vaste majorité des régions qui demandent tout simplement au gouvernement et à Mme la ministre d'avoir le courage d'entendre les parties. Peut-être que cela donnera une chance à Mme la ministre d'expliquer un peu plus ses mesures, mais peut-être que dans d'autres cas elle pourra prendre note des commentaires qui lui seront faits. Elle se souviendra de cette commission parlementaire sur la loi 27. On ne pouvait imaginer climat d'affrontement plus réel, plus aigu qu'à cette époque-là - le député de Laurier s'en souviendra - et pourtant le gouvernement du Parti québécois a réussi à établir un consensus.

Je dois le dire, le gouvernement du Parti libéral est en train de donner une leçon d'autoritarisme non seulement dans ce cas-ci, mais dans une grande majorité des mesures qu'il essaie de faire adopter à la sauvette par ce Parlement, en particulier depuis trois semaines. On veut décider de tout d'une façon autoritaire, en ayant peur d'entendre les gens, en ayant peur d'échanger tout simplement avec eux, alors que Mme la ministre sait fort bien que nous sommes dans une matière vitale où on ne peut pas se passer du consentement des gens pour réaliser des progrès. Il faut embarquer le monde dans des réalisations comme celle-là si on veut que cela voie le jour; sinon, ce sont des réformes qui prennent le chemin de la poubelle. (16 heures)

C'est tout ce que demande l'Opposition, Mme la ministre, depuis le début: un peu plus d'ouverture d'esprit, un peu plus de générosité, un exercice démocratique. Est-ce

que c'est trois mois qui pressent dans ce dossier? Pas du tout, Mme la Présidente. Pas du tout. La loi 27 a permis, sur de longues années, parce que ces problèmes-là ne se règlent pas du jour au lendemain, de faire un immense pas en avant. Si on veut aller plus loin, qu'on prenne trois mois de plus, qu'on prenne une semaine en commission parlementaire, au mois d'août - je suis convaincu que l'Opposition accepterait - ou durant l'été ou immédiatement même, on pourrait entendre les parties la semaine prochaine. Elles sont habituées, à part cela, à témoigner en commission parlementaire. Elles peuvent de façon concise - si Mme la ministre a peur que cela soit trop long -résumer leur argumentation et, en une heure, vous la présenter. Vous pourrez de votre côté vous servir de ce temps-là pour leur parler. C'est tout. Ce sont des gens "parlables", comme je l'ai expliqué tantôt.

En terminant, je dirai simplement à Mme la ministre, et c'est pourquoi j'ai demandé d'intervenir sur ce projet de loi 75, que je connais sa motivation et sa bonne foi, mais sa façon de procéder est inacceptable. Je pense qu'il y a des gens autour de Mme la ministre qui commencent à déteindre et que ce gouvernement commence à influencer ses meilleurs éléments dans le sens de décider de façon autoritaire. Je le sais, on a dû dire: Écoutez! C'est le temps d'agir; cela fait six mois qu'on est élus. Les gens du bunker ont pensé à tout cela et ils ont dit: Aie, c'est le temps, allons-y, cela fait six mois qu'on est élus, on a une grosse majorité, faisons nos mesures déplaisantes, ne nous occupons pas de ce que les gens ont à dire, de ce que les intervenants ont à dire et décidons. Mme la Présidente, dans le domaine de la santé comme dans les autres secteurs... Je vois le ministre de la Justice; on va peut-être se parler aujourd'hui concernant son projet de loi 87 où il fusionne le Comité de la protection de la jeunesse avec la Commission des droits de la personne sans même entendre ces deux organismes-là...

Une voix: C'est épouvantable!

M. Filion: ...comme s'il s'agissait d'un petit jeu de blocs. Peu importe, Mme la Présidente, on sait le genre de théorie facile qui a cours au bunker où l'on décide... Je termine, Mme la Présidente, là-dessus.

La Vice-Présidente: Pourriez-vous conclure, M. le député de Taillon?

M. Filion: Je termine. On sait le genre de petite théorie politique facile qui a cours au bunker: Allons-y pendant six mois, c'est le temps de régler nos problèmes et les gens, on ne les écoutera pas, ils chialeront plus tard, cela n'est pas grave, les élections, c'est juste dans trois ans. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, je vous...

Des voix: Dans cinq ans.

La Vice-Présidente: M. le député de Taillon.

M. Filion: ...connais un petit peu. Je sais que vous avez de la bonne foi et de la motivation pour tenir cette commission parlementaire...

La Vice-Présidente: M. le député de Taillon, je vous ai demandé de conclure.

M. Filion: ...et faire fi des conseils que vous donnent les collègues...

La Vice-Présidente: M. le député...

M. Filion: ...ou les gens du bunker. Merci.

M. Bélanger: Mme la Présidente, j'ai une question...

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Laval-des-Rapides?

M. Bélanger: Je vous remercie. Le député de Taillon me fait dire des propos...

La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le député de Laval-des-Rapides. Est-ce que vous avez soulevé une question de règlement?

M. Bélanger: Question de règlement en vertu de l'article 212. Je voudrais apporter un correctif à ce que le député de Taillon me fait dire dans ses propos. Est-ce que vous m'y autorisez?

La Vice-Présidente: Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: II faudrait que le député ait fait un discours pour rectifier ses propres mots. Que voulez-vous...

Des voix: II l'a fait.

M. Bélanger: Si vous aviez assisté à...

M. Chevrette: Mme la Présidente, en vertu de l'article 212, est-ce que le député veut corriger son propre discours ou corriger le député de Taillon? On doit le savoir avant qu'il invoque une question de règlement.

La Vice-Présidente: M. le leader...

M. Lefebvre: Sur la question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Sur la même question de règlement. C'est exactement ce que veut faire le député de Laval-des-Rapides. Il a fait une intervention tout à l'heure et il prétend avoir été mal interprété par le député de Taillon. Alors, il veut, en vertu de l'article 212, corriger, rectifier. C'est exactement ce que l'article 212 lui permet de faire.

M. Filion: Sur la question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: J'ai entendu votre leader, M. le député de Taillon.

M. Filion: Sur la même question de règlement.

La Vice-Présidente: Je vais me prononcer sur cette question de règlement, si vous me le permettez. Effectivement, en vertu de l'article 212, le député de Laval-des-Rapides peut intervenir à ce stade-ci s'il prétend que vous avez mal interprété ses propos dans votre intervention. Donc, je reconnais le député de Laval-des-Rapides.

M. Filion: Sur une question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Sur une question de règlement, M. le député de Taillon.

M. Filion: Une autre question de règlement. Je voudrais simplement vous signaler que je suis prêt à répondre à n'importe quelle question du député de Laval-des-Rapides.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le député de Taillon, je tiens à vous dire que ce n'était pas une question de règlement. II n'avait pas besoin de votre approbation sur cet article-là.

M. le député de Laval-des-Rapides, je voudrais bien vous faire remarquer que votre intervention ne doit apporter aucun élément nouveau à la discussion et ne susciter aucun débat.

M. Bélanger: Bien, Mme la Présidente. Je serai bref. Le député de Taillon me fait dire que, dans mon intervention tout à l'heure, je disais que la Fédération des médecins omnipraticiens et la Fédération des médecins spécialistes sont en désaccord avec nous sur le projet de loi 75. Ce que j'ai bien dit, c'est que j'ai rencontré la Fédération des médecins omnipraticiens, la Fédération des médecins spécialistes du Québec, j'ai rencontré aussi la Fédération des médecins et internes résidents du Québec, et qu'ils étaient profondément d'accord avec les objectifs poursuivis par cette loi. Ils ne sont pas d'accord avec certaines modalités. C'est leur rôle de syndicat de médecins de ne pas être d'accord avec certaines modalités. C'est ce que j'ai dit, madame. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Mme la députée de Matane.

Mme Claire-Hélène Hovington

Mme Hovington: Oui. Merci, Mme la Présidente. Je suis née en région éloignée sur la Côte-Nord. Je suis députée du comté de Matane, situé dans la Gaspésie, aussi en région éloignée. Je suis donc en mesure, pour en avoir été témoin personnellement, de signaler l'existence de cas tragiques survenus dans mon village et dans d'autres villages voisins, cas tragiques de mort accidentelle ou autres, souvent dus à l'éloignement des centres hospitaliers, souvent dus au manque de médecins et de spécialistes dans nos régions. Une heure de route avec un enfant souffrant avant d'arriver à l'hôpital pour finalement ne pas trouver de pédiatre.

Mme la Présidente, pourquoi les régions devraient-elles toujours souffrir de leur éloignement des grands centres urbains, que ce soit dans les coûts de transport, les écoles et maintenant dans les soins aussi essentiels que la santé? Toute une population est pénalisée à cause de son éloignement. Il est inconcevable qu'en 1986 de pareilles situations existent encore. C'est pourquoi, en tant que gouvernement responsable, nous avons, depuis le 2 décembre, déjà pris des mesures pour aider les régions éloignées. Le projet de loi 75 concernant les mesures de répartition géographique des effectifs médicaux s'inscrit logiquement dans cette volonté du gouvernement libéral.

Le problème des médecins en régions éloignées n'est pas récent, mais son caractère aigu nous oblige à prendre des moyens pour y remédier et pour accroître les effectifs médicaux en régions. Bien que le Québec dispose maintenant d'un nombre adéquat de médecins, à la suite de l'augmentation des dernières années - en 1972, il y en avait 7498 et, en 1984, il y en a 11 973, sans compter les résidents - leur distribution géographique continue de poser un problème sérieux à l'accès aux soins en régions éloignées.

Oh! II y a eu des essais pour aider la région à régler les problèmes de recrutement des médecins. En 1981, la loi 27 présentée par le chef actuel de l'Opposition obligeait les centres hospitaliers à élaborer des plans d'effectifs médicaux. Mais le fait que cet article de loi n'inclut pas les CLSC et les centres d'accueil, pas plus d'ailleurs qu'il n'oblige les conseils régionaux de la santé et

des services sociaux à produire des plans d'effectifs médicaux régionaux, rend cet article difficilement applicable, car ces plans permettraient d'évaluer les besoins dans chacune des régions et ainsi de mieux répartir les effectifs médicaux entre les régions plutôt qu'ils soient concentrés dans les centres urbains.

En 1984, une table de concertation regroupant les intervenants du monde médical et de la santé fut créée par le ministre des Affaires sociales, M. Camille Laurin, dans le but de régler une fois pour toutes ce problème. Il a songé au salariat, à diverses mesures. Le 7 novembre 1984, il finit par annoncer onze mesures incitatives qui ont coûté 9 000 000 $ en six mois.

En 1985, le 17 août, nous pouvons lire dans le Droit d'Ottawa, en gros titres: "Chevrette entend mettre le poing sur la table." Cet article était signé par Camille Beaulieu. Alors, je cite: "On ne permettra pas que les gens en régions éloignées subissent le chantage de quelque bonze que ce soit. Le ministre a dénoncé la puissance de la force de frappe de lobbying des associations de médecins. Il va falloir mettre le poing sur la table et leur dire: Chers enfants, la puissance que vous avez va vous étouffer vous autres mêmes." Paroles de M. Chevrette. (16 h 10)

Mme la Présidente, toutes ces nombreuses mesures décrétées pour inciter ou inviter les médecins omnipraticiens et les médecins spécialistes à s'installer en régions périphériques n'ont pas porté fruit. Selon le rapport présenté par le groupe de recherche interdisciplinaire en santé de la Faculté de médecine de l'Université de Montréal présenté déjà en décembre 1985 sur les effectifs médicaux au Québec depuis 1972, l'évolution de la répartition géographique des médecins depuis le début des années soixante-dix montre, premièrement, une amélioration marquée dans la répartition des omnipraticiens, mais aucune amélioration significative dans la distribution des spécialistes; des situations difficiles persistantes dans les régions éloignées; une détérioration relative de la situation dans deux régions, Saguenay—Lac-Saint-Jean, Laurentides et Lanaudière; un niveau de spécialisation aussi du corps médical très différent d'une région à l'autre.

Dans les régions éloignées, 93 % des médecins sont des omnipraticiens alors que ce pourcentage n'est que de 40 % dans les régions universitaires. Ils disent aussi qu'un renouvellement des effectifs médicaux en régions éloignées se présente comme un flot continu de médecins débutants qui y viennent pour quelques années et retournent par la suite dans les grands centres. On peut lire aussi dans le Soleil du 11 avril 1985, sous la signature du journaliste Jean-Didier Fessiou: "Échec des mesures pour attirer les médecins en régions périphériques. Les nombreuses mesures décrétées par le ministère des Affaires sociales - c'était en 1985 - pour inciter médecins omnipraticiens et spécialistes à s'installer en régions périphériques n'ont pas donné les résultats escomptés. À ce rythme cela prendrait 20 ans pour combler les besoins de cette vaste région qu'est la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine. En effet, il y manque encore 150 médecins, 43 omnipraticiens et 107 spécialistes pour rejoindre les normes reconnues ailleurs au Québec. C'est un échec."

Il faut se réjouir de ce projet de loi 75 qui vise à rendre opérationnel le principe des plans d'effectifs médicaux établi dans la loi 27 de 1981, de ce projet de loi qui travaille dans le sens d'un meilleur équilibre entre les régions quant aux médecins omnipraticiens et spécialistes, en étendant aussi l'obligation d'élaborer des plans d'effectifs médicaux aux CLSC et aux centres d'accueil et en obligeant chaque conseil régional à élaborer un plan régional d'effectifs médicaux. C'est sûr, il y a obligation pour le médecin de donner un préavis de 60 jours avant de quitter un établissement. Une pénalité est même prévue si le médecin ne respecte pas ce préavis, c'est-à-dire qu'il deviendra un professionnel non participant aux fins de la Loi sur l'assurance-maladie pour une période égale à deux fois le nombre de jours qu'il restait à écouler avant l'expiration du délai de préavis applicable. Cet article est introduit afin d'éviter que certains établissements, sans aucun avis préalable, comme cela s'est déjà produit d'ailleurs, ne se retrouvent sans médecin à l'urgence et ne se retrouvent sans médecin dans le département des soins intensifs parce que tous les médecins décident par mesures de pression ou autres de quitter en même temps. C'est déjà arrivé.

Ce projet de loi a reçu l'appui de l'Association des hôpitaux du Québec, de la Conférence des CRSSS du Québec, du CRSSS de la Côte-Nord aussi. On peut lire dans le Soleil du 12 mai 1984, sous la plume de Jean-Jacques Samson qui interviewe M. Augustin Roy, président de la Corporation professionnelle des médecins: "Est-ce qu'on forme des médecins de luxe pour la ville ou si on forme des médecins qui, en plus d'être compétents, sont aussi dévoués et ont le goût de remplir une mission sociale?" Le Dr Roy continue: "II va falloir avoir le courage politique pour poser des gestes qui vont déplaire à beaucoup de monde, mais qui sont inévitables si on veut solutionner réellement le problème de l'installation des médecins dans les régions éloignées."

Ce courage politique, nous l'avons et le projet de loi 75 en est la preuve. C'est un projet de loi qui assurera une accessibilité

égale pour tous les citoyens du Québec à des services de santé de qualité, un projet de loi qui assurera une répartition équitable de la main-d'oeuvre médicale. L'amélioration de l'état de santé de la population de l'ensemble des régions qui forment la province de Québec doit demeurer une préoccupation pour nous tous. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Matane. M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Mme la Présidente, presque un an, jour pour jour, le très nuancé député de Brome-Missisquoi et Mme la députée de L'Acadie attaquaient systématiquement, presque quotidiennement en cette Chambre, le ministre des Affaires sociales d'alors. On lui reprochait de rencontrer les médecins. On lui reprochait même de montrer les dents, de temps à autre, lors de ses négociations avec les médecins. On lui reprochait parfois d'utiliser un langage passablement dur, Mme la Présidente. Le même ministre d'alors avait réussi à asseoir à un seul endroit l'ensemble des fédérations médicales, des résidents et internes, du monde universitaire et nous étudiions, nous travaillions ensemble à l'élaboration de solutions concrètes. Lorsque nous sommes sortis d'une journée complète de travail à laquelle le ministre lui-même assistait - pas uniquement des hauts fonctionnaires - nous pouvions déjà annoncer un échéancier, un calendrier de travail qui permettait à ce beau monde, bien sûr, de mettre en commun leur expérience, de se mettre ensemble à la recherche de solutions concrètes pour faire en sorte que ce ne soient pas des solutions imposées, mais des solutions désirées par l'ensemble des groupes intéressés.

Mme la Présidente, nous avions fait consentir à chacun de ces groupes impliqués que, pour une période de trois ou quatre ans, c'étaient au moins 50 postes de spécialité par année qu'on devait ouvrir dans les régions. Mme la ministre, toute pompeuse, annonce présentement qu'elle a consenti pour un an seulement 50 postes de spécialité et la députée de Matane se gonfle, "se bidonne" du succès de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux qui détruit, à toutes fins utiles, le consensus qui avait été établi auprès des fédérations médicales, des spécialistes, des omnipraticiens, des résidents et internes, qui acceptaient cette méthode, du monde universitaire également. Comment se fait-il que la ministre puisse se vanter, se targuer d'avoir trouvé des solutions miracles, alors qu'au moment même où elle annonce cela, c'est quatre fois moins que ce qu'on avait décidé par consensus antérieurement? Il y a des limites à dire des demi-vérités en cette Chambre et à ne pas raconter exactement les faits, tels qu'ils sont, Mme la Présidente.

Un an, jour pour jour. Ces très nuancés députés qui avaient les recettes à tous les maux, que disent-ils? Le président du Conseil du trésor oblige Mme la députée de L'Acadie et ministre de la Santé et des Services sociaux à réviser même, à lui livrer de l'argent, à remettre en cause des méthodes incitatives, qui n'ont pas toutes porté leurs fruits, c'est vrai - il faut le reconnaître -mais qui ont quand même comblé des lacunes dans plusieurs régions du Québec. Il faut en être conscient. Qu'on aille sur la Côte-Nord s'informer, qu'on aille dans le Bas-du-Fleuve s'informer. Il ne faut pas être victime ou encore être renfermé dans sa propre municipalité, il faut regarder l'impact régional de temps en temps pour savoir qu'il y a des mesures incitatives qui ont porté leurs fruits. Il y a de jeunes résidents qui se promènent de Gaspé à Québec. C'est parce qu'il y a eu des mesures incitatives, parce que ces résidents ne seraient pas allés à Gaspé, pour le bénéfice de la députée de Matane. Je pense qu'il y a eu des faits concrets, des exemples tangibles. Le président même des résidents et internes, l'an dernier, le Dr Lemieux, allait de Québec à Gaspé sur une base régulière faire de la médecine grâce précisément à l'une des quatorze mesures incitatives que le précédent gouvernement avait mises à la disposition des résidents, des internes et d'autres médecins, et des régions également.

Un an, jour pour jour, ou à peu près, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, se levait en cette Chambre, avec le très nuancé député de Brome-Missisquoi, et attaquait systématiquement toute mesure qui visait à améliorer la situation. Ils attaquaient même la supposée inertie du gouvernement qui visait à l'affrontement. On va s'en parler d'affrontement, Mme la Présidente. (16 h 20)

Au moment de ce discours que nous faisons présentement en cette Chambre, la députée de Matane se lève avec un article de journal qui date du mois d'avril et elle dit: Augustin Roy appuie la ministre. J'en ai un beaucoup plus récent, du 30 mai: Augustin Roy a pris connaissance du projet de loi de la ministre. Si Mme la députée de Matane avait lu l'article au complet, elle nous aurait rapporté son opposition aux projets de loi 74 et 75. C'est bien précis. La loi 75, pour le bénéfice de la députée de Matane, est la loi qu'on étudie. J'espère que le titre est assez gros: "Augustin Roy donne raison aux médecins". C'était le 30 mai. Il faut quand même arrêter de camoufler les vérités dans cette Chambre et dire exactement ce qui se passe, il ne faut pas essayer de prêter des

appuis à quelqu'un qui a eu le courage politique de le dire publiquement.

Mme la Présidente, je suis d'accord concernant la répartition des effectifs médicaux. C'est vrai que les gens en régions ont le droit d'avoir des services de qualité tout autant qu'à Montréal et à Québec. Je suis tellement d'accord que nos politiques étaient précisément de fournir aussi de l'équipement aux petites régions, de régler les cas des urgences en régions. Quand il y a 57 lits à l'Hôpital régional de Joliette, 57 civières à l'urgence, cela ne presse pas. C'était quelques jours, quelques semaines, c'est maintenant six mois. Ce n'est pas grave. Ce qui pressait pour ce cabinet montréalais, c'était de régler les problèmes de Montréal et de Québec et oublier qu'il y a des régions au Québec.

Mme la ministre, pour se donner bonne conscience, pour essayer de donner aux régions l'illusion qu'elle a réglé le problème, dépose une loi qui lui donne un outil, bien sûr, mais qui ne rejoint en rien les consensus. Au contraire, il vise précisément l'affrontement avec les intéressés, et c'est ce que je trouve dommage. On a peut-être élevé la voix à un certain moment, mais ce n'était pas pour casser les reins de quelqu'un. On a élevé la voix pour les asseoir et leur dire qu'on leur faisait confiance dans la recherche de solutions. C'est ce que j'ai fait personnellement pendant un an. Nous avions réussi à trouver quelque chose d'acceptable pour les régions, pour le monde universitaire, pour les fédérations médicales et acceptales, de facto, pour la population.

Je pense que la ministre de la Santé et des Services sociaux, malgré qu'elle témoigne toujours de cette sincérité quand elle plaide, devrait avoir le courage de dire qu'elle n'a pas consulté les gens impliqués, qu'elle n'a pas réussi à dégager un consensus, qu'elle s'est donné un outil qui ne veut rien dire, et je vais tenter de vous le démontrer. Elle dit aux CRSSS: Définissez vos plans d'effectifs médicaux. Qu'est-ce que cela veut dire, définir un plan d'effectifs médicaux? Est-ce que cela veut dire que dans telle région du Québec, s'il y a tant de population, cela prend tant de médecins? Pas nécessairement, c'est faux. Il y a des critères dont il faut tenir compte quand on établit des plans d'effectifs médicaux. Il y a des situations de fait qui existent. Il y a des CLSC à des endroits, il n'y en a pas à d'autres. Il y a des cliniques à certains endroits et il n'y en a pas à d'autres. Il y a des hôpitaux, des centres hospitaliers à certains endroits et il n'y en a pas à d'autres. Il y a des CHSP, des centres hospitaliers de soins prolongés à des endroits, il n'y en a pas à d'autres. Il faut tenir compte des situations, il faut tenir compte des normes et des critères si on ne veut pas que ces plans soient farfelus.

Quel outil la ministre a-t-elle fourni aux régions pour bâtir des plans d'effectifs médicaux qui ont de l'allure? Aucun outil. Elle se donne un outil, mais elle ne leur donne pas les moyens nécessaires pour remplir la commande qu'elle leur donne. Plus encore, elle donne aux organismes régionaux le pouvoir d'en développer en se gardant le pouvoir de les sanctionner, d'ajouter ou de réduire. Elle va réduire à partir de quoi? Elle va ajouter à partir de quoi dans les plans d'effectifs médicaux? Elle ne peut pas répondre à cette question parce qu'elle a fait fi du fait qu'il y a des gens qui sont intéressés à cheminer avec le ministère, qui avaient commencé à cheminer avec le ministère, qui étaient prêts à s'asseoir, à ouvrir les livres, à considérer les données. Il y a des facteurs fondamentaux dont il fallait tenir compte dans les plans d'effectifs médicaux, entre autres, le vieillissement et la féminisation de la profession.

Nous avions reçu l'assurance que la Corporation des médecins participerait, ouvrirait grands ses livres et permettrait au ministère, d'abord, de parler sur les mêmes statistiques, sur une même base. Nous avions obtenu des deux fédérations médicales le désir de s'asseoir pour pouvoir trouver des solutions. Nous avions obtenu des universités cette approbation, ce désir de vouloir collaborer à la recherche de solutions. Que fait la ministre? Pour pouvoir se promener durant les vacances et dire: Je me suis donné un outil. Cela ne donne pas un médecin, cela, Mme la Présidente. Elle s'est donné un outil pour faire taire les ténors régionaux qui voudraient parler de répartition médicale en disant: J'ai une loi, je me suis donné un outil. Quelles seront les normes de base pour le plan d'effectifs médicaux de l'Abitibi? Quelles seront les normes qu'utiliseront les gens de la Gaspésie pour établir leurs plans d'effectifs médicaux? Les gens de la Côte-Nord auront quels critères pour établir leurs plans d'effectifs médicaux? La ministre est allée vite pour se donner, bien sûr, extérieurement, une façon d'intervenir en public en disant: Nous, du Parti libéral, nous sommes efficaces, nous produisons. Bien, nous ne produisons rien!

Entre-temps, la même ministre voit son budget amputé dans les mesures incitatives pour maintenir à court terme... Demain matin, cela va en prendre du monde en Abitibi. Demain matin, cela va en prendre du monde en Gaspésie. Demain matin, cela va en prendre du monde sur la Basse-Côte-Nord et la Côte-Nord. M. le président du Conseil du trésor aura demandé à Mme la ministre de la Santé: Réduisez, coupez, n'ayez plus d'incitatifs pour qu'ils aillent... Entre-temps, formons, seulement pour une année, 50 places en spécialité, ouvrons pour une année seulement. Elle va se targuer d'avoir travaillé pour la répartition efficace de la

médecine en régions. C'est de la bouillie pour les chats! Foutaise! C'est de la foutaisel

On est prêt à collaborer avec la ministre, à trouver des solutions concrètes. Mais, pour trouver des solutions concrètes à court terme, je dis bien à court terme, il nous faut absolument la collaboration de tous les intéressés. Il faut que la conférence des CRSSS s'assoie et ne recherche pas l'affrontement avec les fédérations médicales, qu'elle s'assoie avec elles et leur démontre le bien-fondé de mesures concrètes pour avoir des médecins en régions. Ce n'est pas dans l'affrontement que nous allons trouver les solutions à court terme; c'est dans la recherche de consensus. Nous avions commencé à établir ces consensus d'une façon efficace si bien que, pour trois ou quatre ans, nous avions déjà une perspective de 150 à 200 spécialistes qui allaient vers les régions. Mais la ministre a mis fin à cela. Courte vue, en plusl Poudre aux yeux pour pouvoir dire: Nous, du Parti libéral, nous agissons. Je mets au défi la ministre de convoquer les fédérations médicales. On va s'assoir l'un en face de l'autre devant ces trois fédérations et on va voir qui ment en cette Chambre et qui dit la vérité. On verra qui dit des demi-vérités en cette Chambre. On pourra utiliser les coupures de presse qui font notre affaire mais, concrètement et à court terme, ce qu'on a besoin de savoir, c'est la volonté politique de ce gouvernement d'aider l'Abitibi, la Côte-Nord, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, des régions aussi peu éloignées que Dolbeau, pour résoudre le problème des effectifs médicaux et de certains types de spécialités en particulier. On sait qu'en anesthésie, il y a un problème. On sait qu'en cardiologie, il y a un problème. On sait qu'en psychiatrie, il y a un problème. Il y a 575 psychiatres sur 634 de cantonnés à Québec et à Montréal. On sait qu'il y a des problèmes. Mais, est-ce que cela va être un outil en disant: Faites cela en régions. Moi, je me garde le privilège de faire ce que je veux derrière mon bureau. (16 h 30)

C'est un peu cela le projet de loi, parce qu'elle ne leur dit pas sur quelle base le faire. Comment cela va-t-il arriver au ministère? Quelle grille d'analyse Mme la ministre va-t-elle prendre pour juger qu'un tel plan d'effectifs médicaux a de l'allure et que tel autre n'en a pas? Je veux bien que la ministre sourit. C'est leur chanson. Ils ont été avisés par des spécialistes en communications que, pour la première année de leur mandat, ils n'ont qu'à tout rejeter sur l'ancien gouvernement et ils vont s'en tirer. Cela achève, cette chanson, Mme la Présidente. Elle ne pourra plus faire supporter les décisions qu'elle prend présentement par l'ancien gouvernement. La coupure d'au moins 100 places en spécialité pour les deux prochaines années, c'est elle qui l'a prise, ce n'est pas son prédécesseur. La réduction, les ponctions dans les mesures incitatrices, ce n'est pas le précédent gouvernement, c'est elle et son collègue du Trésor qui viennent d'en prendre la décision. C'est elle qui a annoncé qu'elle réglerait les urgences dans les régions périphériques mais on a toujours 57 ou 60 civières, par exemple, dans la région de Lanaudière.

Pour Montréal, on a annoncé un règlement. On verra si c'est efficace ou pas. Mais qu'est-ce qui reste pour les régions? Qu'est-ce qui reste pour l'hôpital de Mont-Laurier? Qu'est-ce qui reste pour l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme? Que reste-t-il pour la Montérégie? Que reste-t-il pour Roberval, pour Chicoutimi, pour le Saguenay—Lac-Saint-Jean? Que reste-t-il pour le centre hospitalier régional Lanaudière? Que reste-t-il d'argent dans vos coffres? Une semaine, deux jours, trois jours, six mois, plus rien de grave, on est efficace, nous, du Parti libéral. On écrit quatre lignes par feuille de papier pour faire de la législation mais, dans les faits, ce n'est que de la poudre aux yeux de début de mandat pour essayer de donner une image d'efficacité. Il n'y a rien de plus faux, il n'y a rien qui sonne plus faux.

Je suis surpris qu'il y en ait encore qui se laissent endormir après avoir vu tout ce qui s'est passé depuis leur élection. On a littéralement déchiré tous les engagements. Le 15 décembre dernier, nous posions une question à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux en cette Chambre, nous lui demandions: Êtes-vous pour les tickets modérateurs? Non, non, seigneur, jamais je ne serai pour celai Elle cautionne les soins dentaires, un impôt pour les jeunes, un ticket modérateur déguisé. Mais elle n'était pas pour cela.

Le ministre de l'Éducation s'est levé pour dire: II n'y aura pas d'augmentation de frais de scolarité. Cela coûte 200 $ de frais indirects par jeune à l'université; je le sais, j'en ai un à l'université. Ce sont littéralement des demi-vérités. On déchire les engagements, on renie littéralement... la Raffinerie de sucre, noir sur blanc. Jamais on ne fera celai On l'a fait pareil. Noir sur blanc, M. Bourassa écrit aux infirmiers et infirmières: Je n'adopterai pas tel règlement...

La Vice-Présidente: Mais, vous savez que vous devez, lorsque vous vous adressez à un membre de cette Chambre, le nommer par son titre, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: À l'époque, il n'avait aucun titre, il s'en cherchait un, Mme la Présidente. C'est le 11 novembre pour votre information. Donc, le 11 novembre dernier, M. Robert Bourassa, alors pas du tout

ministre, pas du tout député, mais aspirant député dans Bertrand, à l'époque, qu'avait-il écrit aux infirmiers et infirmières? "Le règlement présentement en consultation, nous serons contre et je vous garantis - il est allé plus loin que cela - même qu'avant d'appliquer cela, j'irai devant la commission Rochon". Vous avez lu sans doute, Mme la ministre, cette lettre. Que faites-vous depuis le 14 mai? Quoi? Règlement qui fait fi encore de ces engagements, qui fait fi de ces promesses. Mais ce n'est pas grave, voyons! C'est la faute de l'ancien gouvernement. Vous savez toujours bien que ce n'est pas leur faute. Quand ils ont écrit ça, ils ne savaient pas tout. Voyons! Tout à coup, ce règlement-là a de l'allure, mais on a leurré ces gens-là, par exemple. On leur a fait croire que les recettes qu'on envisageait ne seraient pas celles du présent gouvernement et on est à plagier quotidiennement les décisions qu'on a prises antérieurement. Là, elles sont devenues bonnes, meilleures, appréciables. Plus que ça, elles défendent même ses positions.

Mme la Présidente, on veut bien en cette fin de session se faire présenter des projets de loi, mais ce n'est pas parce qu'on sera bousculé par le temps qu'on ne prendra pas le temps nécessaire pour étudier chaque paragraphe, pour faire en sorte qu'on ne passe pas de sapin aux citoyens. Ils s'en sont fait passer un solide le 2 décembre, mais au moins on va le leur rappeler chaque fois qu'il y aura un projet de loi, chaque fois qu'on fera fi de ses promesses. Chaque fois qu'on reniera sa parole de ce côté-là de la Chambre, il s'en trouvera un des 23 ici pour rappeler aux citoyens du Québec que cela a déjà assez duré depuis six mois, la désinvolture poussée au point de renier tout engagement, de renier toutes les recettes miracles qu'ils avaient. Ces gens ouvraient la lumière et ils avaient la recette. Au lendemain du 2, comme par enchantement, l'est de Montréal devait obtenir la prospérité économique. La santé devait, comme par hasard, arrêter d'être malade au Québec, comme ils disaient si bien. Regardez cela, l'urgence, à Joliette, n'a jamais été aussi encombrée. On est rendu à 57 civières. Dans mon temps, le plus haut où c'est allé, c'est à 34. Mais Mme la ministre devait tout régler. Elle se promenait avec Corriveau par la main dans les corridors et elle devait tout régler. Allez-y voir maintenant! Là, ce serait le temps d'y aller. Vous avez la responsabilité maintenant, vous aspiriez à l'avoir à l'époque, quand vous trouviez cela terrible, là vous l'avez. Allez-y donc vous promener par la main, vous allez constater que vos recettes miracles, vous ne les avez plus. Plus encore, vous traînez en longueur des situations qui auraient dû être réglées depuis fort longtemps. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Joliette.

Mme la ministre, j'aimerais vous aviser d'abord qu'il y a eu entente entre les leaders de cette Chambre vers 15 heures, à savoir qu'on devait terminer vers 16 h 45, de sorte que votre intervention devra être finie.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! On continue de siéger. Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente...

M. Gendron: Un instant, Mme la Présidente!

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député?

M. Gendron: Non, je ne veux pas être désobligeant. Est-ce à dire que la ministre de la Santé et des Services sociaux arrêtera à 16 h 45, selon l'ordre de la Chambre, et qu'elle continuera la semaine prochaine?

M. Gratton: Elle n'a pas le choix, il y a un ordre de la Chambre. Laissez-la...

M. Gendron: Oui, je la laisse commencer. Cela me fait plaisir...

Mme Thérèse Lavoie-Roux (réplique) La Vice-Présidente: Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, j'ai écouté l'Opposition dans ses quelques interventions et je me disais: Ce doit donc être difficile d'être en même temps pour et contre. Elle est dans une situation tellement pénible parce qu'elle doit, comme on dit, se protéger contre l'opinion publique, à savoir qu'il faut être vertueux et dire que la planification de la main-d'oeuvre médicale est une chose importante, particulièrement en régions éloignées, et on fait une grande confession là-dessus. On nous dit même que les mesures contenues dans le projet de loi sont très bonnes parce qu'elles vont donner un outil de gestion intéressant, utile et positif. Par contre, après, on s'exerce de toutes les façons possibles, à déformer ce qu'il y a dans la loi, Mme la Présidente. Par exemple, quand on dit - je voudrais bien qu'on me le montre dans le projet de loi -que le projet de loi 75 vient introduire le contingentement des médecins, il n'y a rien là-dedans à cet effet, parce que l'objectif du projet de loi, c'est d'opérationnaliser ce qui avait déjà été adopté par la loi 27, à savoir le plan d'organisation ou d'effectifs médicaux que les établissements devaient fournir, et c'était tout à fait inopérant, parce qu'on

n'avait pas les outils nécessaires pour le faire. C'est dans ce sens-là que nous introduisons maintenant la notion de plan d'effectifs régionaux et sous-régionaux.

On parle d'éléments surprises. On réclame une commission parlementaire et, à tour de rôle, l'un et l'autre se sont efforcés de démontrer combien, déjà, en 1981, toutes les fédérations médicales avaient participé à une commission parlementaire précisément sur cette question des effectifs médicaux et qu'encore au mois de mai dernier, toutes les fédérations et tous les intervenants, non seulement les fédérations médicales, mais l'ensemble des établissements, étaient venus aussi en commission parlementaire.

Le député de Joliette parle du fait qu'on veut réduire des mesures incitatives, qu'on coupe dans la santé, qu'on ne s'occupe pas de ci, qu'on ne s'occupe pas de ça. Mais, Mme la Présidente, il faut avoir le culot de l'Opposition, qui a considéré la santé et les services sociaux comme le parent pauvre de ses priorités pendant près de dix ans pour venir tenir ce langage pendant que mon propre gouvernement - ce n'est pas ma décision à moi, unique; je suis heureuse de rendre hommage à mes collègues - consent, cette année, une augmentation de 465 000 000 $ dans le budget de la santé et des affaires sociales alors que, depuis des années, tout ce dont on entendait parler, c'était des coupures, des coupures et des compressions.

Mme la Présidente, ces personnes tiennent un langage que je ne comprends pas. Le député de Gouin nous disait ce matin: Nous, on a envoyé des gens de bonne humeur dans les régions. A-t-il déjà oublié le décret punitif dont on parlait, qui était aussi de la coercition, que si vous n'alliez pas en régions éloignées, vous ne gagniez que 70 % et que si vous alliez en régions éloignées, vous gagniez 115 %? On envoyait des gens de bonne humeur dans les régions et tous les conflits qui ont eu lieu dans les régions avec les médecins, que ce soit Rimouski en 1983, que ce soit Dolbeau, Gaspé, Port-Cartier, Blanc-Sablon, etc. Mme la Présidente, je suis heureuse de penser que la profession médicale était heureuse avec l'ancien gouvernement. Si elle ne l'avait pas été, je ne sais pas ce que la population aurait eu à supporter. (16 h 40)

Mme la Présidente, je pense qu'il est important de rappeler, parce qu'il ne me reste que quelques minutes, l'objectif fondamental de ce projet de loi qui est vraiment la planification de la main-d'oeuvre médicale sur l'ensemble du territoire du Québec. Il y a deux volets: Un premier qui est la loi elle-même qui prévoit les plans d'effectifs régionaux et sous-régionaux, auxquels on nous dit souscrire, et il y a également cet autre volet qu'est la table de planification. On en a beaucoup parlé de la table de planification, tout à l'heure par le député de Joliette.

Dois-je vous apprendre qu'elle a siégé deux fois? Une fois avec le ministre Laurin du temps - je m'excuse de le nommer mais il n'est plus dans la Chambre - et l'autre fois avec le député de Joliette. C'était cela leur table de planification continue. On s'est rencontré deux fois. Mais, Mme la Présidente, nous et les fédérations qui sont d'accord de même que tous les autres intervenants, c'est une véritable table de concertation continue que nous voulons. Ensemble, nous allons examiner quels doivent être les plans d'effectifs pour les trois prochaines années.

Si nous avions l'intention ou s'il y avait, dans la loi, tous les plans machiavéliques dont on nous impute la responsabilité, alors que ce n'est pas dans la loi, je peux vous assurer qu'à ce moment, j'aurais eu une commission parlementaire parce que je n'imposerais pas d'autorité ce genre de mesures qu'on a tenté de décrire ou même d'inventer ou d'imaginer de l'autre côté de la Chambre.

Tout ceci pour vous dire qu'il y a deux objectifs: Mieux faire notre planification de la main-d'oeuvre médicale, mais en collaboration avec tous les intervenants auxquels maintenant viendront s'ajouter les centres d'accueil, les CLSC. Je veux aussi reprendre une remarque du député de Joliette et peut-être du député d'Abitibi-Est...

Des voix: Ouest.

Mme Lavoie-Roux: ...Ouest, selon lequel il ne faudrait quand même pas... D'où allez-vous procéder? Comment allez-vous procéder? On le sait exactement, Mme la Présidente, puisqu'on est fort conscient qu'il faudra déterminer, dans le cas d'un conseil régional, la forme du plan régional des effectifs médicaux et dentaires, les éléments qu'il doit contenir et les méthodes ou règles selon lesquelles il doit être élaboré. C'est évident qu'il y a des balises à établir et que nous allons les établir en collaboration avec tout le monde.

On nous parle également du fait que nous ne remplissons pas ces magnifiques promesses que l'ancien gouvernement avait faites du point de vue de l'ajout de médecins en spécialité. Faut-il une fois de plus rétablir les faits? C'est bien beau d'avoir des beaux plans, de faire des consensus, mais le Conseil du trésor du temps ne les a jamais acceptés. Il a refusé de permettre aux médecins immigrants justement qui demandaient depuis longtemps d'aller en régions éloignées d'y aller. C'était un refus. Il a fallu refaire la démarche du début pour tenter justement d'obtenir ces effectifs supplémentaires pour les régions éloignées.

Notre responsabilité - et je tiens à le répéter ici - c'est de fournir à la population les services dont elle a besoin, de tenter de respecter et de travailler à ce que ces principes d'accessibilité et d'universalité vaillent pour l'ensemble de la population. C'est ce à quoi nous nous exerçons et non seulement aujourd'hui, mais dans l'avenir. Avec la collaboration de tout le monde, je pense que nous pourrons peut-être y arriver et nous y travaillerons jusqu'à ce que la population du Québec au plan de la santé et des services sociaux se sente en sécurité. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Le débat étant clos sur l'adoption du principe du projet de loi 75, est-ce que le principe du projet de loi 75, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et des services sociaux, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Chevrette: Adopté, sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Gratton: Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: Avant qu'on ajourne, je voudrais donner les avis suivants. On sait que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation étudie présentement les projets de loi 85 et 69. Advenant le cas où celle-ci n'aurait pas terminé ses travaux à 22 h 30 ce soir, je donne avis que la commission siégera lundi, à compter de 10 heures à la salle Louis-Joseph-Papineau pour continuer l'étude détaillée des projets de loi 85 et 69. De même, à la commission de l'aménagement et des équipements qui étudie présentement les projets de loi 67 et 97, advenant que la commission n'ait pas terminé ses travaux ce soir à 22 h 30, elle siégera à compter de 10 heures, lundi, pour continuer l'étude de ces projets de loi à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine. J'avise finalement que le lundi 16 juin, de 10 heures à 12 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi 75 dont on vient d'adopter le principe, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Là-dessus, Mme la Présidente, je vous prierais d'ajourner les travaux de l'Assemblée à lundi, 13 heures, en faisant remarquer de façon très spécifique que c'est à 13 heures que la période des affaires courantes débutera.

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement, comme vous le dites, il faut que j'aie le consentement de cette Chambre pour pouvoir ajourner à 13 heures, compte tenu du fait que c'est contraire à nos règles de procédure. Est-ce que j'ai le consentement de cette Chambre pour que les travaux reprennent lundi à 13 heures?

M. Gendron: Oui, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Lundi, 13 heures. Donc, nous allons...

M. Gratton: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: On me dit que je n'ai pas mentionné, même si je pense l'avoir fait, que les commissions siégeront de 10 heures à midi, lundi. Je le répète pour le bénéfice de ceux qui ne l'auraient pas entendu.

La Vice-Présidente: Les travaux sont ajournés à lundi, 13 heures.

(Ein de la séance à 16 h 47)

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