Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Dix heures dix minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous platt!
Un moment de recueillement!
Veuillez vous asseoir!
Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes, MM. les
députés, Mmes les députées.
Déclarations ministérielles.
M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Mis à part ceux qui sont malades ou ceux qui
nous ont informés qu'ils avaient une obligation, il y a quelques
ibsences dont on ne connaît pas les motifs, est-ce que le leader pourrait
justifier les dix absences?
Le Président: M. le leader du gouverne-nent.
M. Gratton: M. le Président, je ne sais trop de quelles
absences le leader du gouvernement est informé, mais je lui dirai que le
premier ministre, comme on le sait, est à New York où il est
conférencier devant le Council on Foreign Relations; le ministre
délégué aux Mines participe à l'inauguration du
village Umiujaq; le ministre de la Justice participe à une
conférence fédérale-provinciale; le ministre des Relations
internationales est à Paris; le ministre de Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation est au congrès de l'UPA.
Évidemment, je pense que le leader de l'Opposition sait que deux
ministres sont retenus par la maladie et que deux autres sont auprès
de...
Le Président: M. le leader de l'Opposi-tion.
M. Chevrette: Où est le ministre des affaires
municipales?
M. Gratton: II est absent pour cause de maladie, M. le
Président.
Le Président: Cela va, M. le leader de Opposition?
Nous procédons maintenant aux affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi.
M. Gratton: Article g, M. le Président.
Projet de loi 250
Le Président: II s'agit d'un projet de loi
d'intérêt privé. J'ai reçu le rapport du
Directeur de la législation et ce dernier a constaté que
l'avis a été fait et publié conformément aux
règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt
privé. J'aimerais déposer ledit rapport.
À l'article g du feuilleton, Mme la députée de
Groulx présente le projet de loi privé 250, Loi concernant
certains immeubles du cadastre de la paroisse
Sainte-Thérèse-de-Blainville. L'Assemblée accepte-t-elle
de se saisir de ce projet de loi?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que le
projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des
Affaires municipales en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion de
déférence est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Article j, M. le Président.
Projet de loi 272
Le Président: À l'article j, il s'agit d'un projet
de loi d'intérêt privé. J'ai reçu le rapport du
Directeur de la législation. Ce dernier a constaté que tous les
avis ont été publiés et qu'ils sont conformes au projet de
loi. Le projet de loi a cependant été déposé en
dehors des délais prévus à l'article 35 des règles
de fonctionnement et il ne peut, sans le consentement de cette
Assemblée, être adopté au cours de la présente
partie de session.
Y a-t-il consentement pour qu'on se saisisse immédiatement de ce
projet de loi? Adopté.
L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir du projet de loi 272, Loi
sur la Corporation intermunicipale de transport de la rive sud de
Québec, présenté par M. le député de
Lévis? Adopté.
M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Gratton: Je fais motion, M. le Président, pour que le
projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des
Affaires muncipale en soit membre.
Le Président: Le projet de loi 272 est
déféré?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Article 1, M. le Président.
Projet de loi 268
Le Président: Â l'article 1, j'ai reçu un
rapport du Directeur de la législation et ce projet de loi n'est pas
conforme. Nous devons obtenir également un consentement étant
donné qu'il a été présenté en dehors des
avis prévus à l'article 35 de notre règlement. Je voudrais
déposer ledit rapport.
Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on procède à la
présentation dudit projet de loi?
M. Chevrette: Consentement.
Le Président: M. le député de
Matapédia présente le projet de loi privé 268, Loi
annexant un territoire à celui de la ville de Mont-Joli.
L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi?
M. Chevrette: Nous en sommes saisis.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des
Affaires municipales en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion de
déférence est adoptée?
M. Chevrette: Adopté. Le Président:
Adopté.
Rapport annuel de la Commission des droits de la
personne
Dépôt de documents. Si vous me le permettez, j'aimerais
déposer le rapport annuel pour 1985 de la Commission des droits de la
personne du Québec.
Dépôt de rapports de commissions, M. le président de
la commission de l'éducation et député de
Sauvé.
Étude détaillée du projet de loi
156
M. Parent (Sauvé): M. le Président, j'ai l'honneur
de déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a
siégé le 2 décembre dernier afin de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi 156, Loi
modifiant la Loi médicale. Le projet de loi a été
adopté avec amendements, dont un au titre.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de pétitions. Ce matin, il n'y aura aucune
intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur
un fait personnel. Avant de céder la parole au premier intervenant de la
période de questions orales, j'avise immédiatement les membres de
cette Assemblée que nous procéderons, immédiatement
après la période de questions, au vote qui a été
reporté hier sur le projet de loi 119.
Période de questions et de réponses orales. Je vais
reconnaître M. le député de Mercier, en principale.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Demande de retrait du projet de loi 140
M. Godin: Après quinze ans de tourmente sociale,
après trois lois linguistiques douloureusement adoptées ici
même, dans cette Chambre, le Québec s'acheminait lentement vers
une situation de maturité linguistique, donc, de paix sociale si propice
au développement économique du Québec et à tous
égards. Depuis quelques mois, certains pyromanes gouvernementaux, dont
la ministre ne fait pas partie d'ailleurs, ont tellement berlandé que
tout le monde au Québec s'inquiète de l'équilibre fragile
qui avait été atteint: la Chambre de commerce, le Conseil du
patronat, M. Laurent Picard, 22 universitaires, le maire de
Montréal.
Par conséquent, Mme la ministre responsable de la loi 101, est-ce
que le gouvernement a pris la décision hier de reporter la loi 140 aux
oubliettes ou de la garder au feuilleton?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: La loi 140 n'est pas le fruit du hasard. Nous avons
rencontré, au début de l'année 1986, les présidents
des organismes qui ont la responsabilité de la protection de la Charte
de la langue française. Nous leur avions demandé à ce
moment-là de nous fournir un rapport concernant la
réorganisation administrative de ces organismes. Après quelque
temps, j'ai reçu ces rapports qui ont été confiés
ensuite un groupe de travail, qu'on a appelé le groupe de travail
Lalande, qui s'est penché sur l'ensemble du dossier administratif et qui
fait ses recommandations au gouvernement. La loi 140 découle de ces
recommandations et du choix que nous en avons fait. Depuis le
dépôt de la loi 140, j'ai été à
l'écoute, de la population, des groupes et des objections qui nous
étaient données par cette population et aussi des
inquiétudes exprimées. Je dois dire que l'affaiblissement de la
langue française date de 1982, au moment où l'ancien
gouvernement, sans le dire, avait mis un moratoire sur les poursuites. Ma
préoccupation fait en sorte qu'il nous faut avoir des organismes qui
soient efficients, qui se concertent, qui soient capables de bien administrer
les responsabilités que nous leur avons confiées, j'ai
travaillé avec un groupe de travail sur les amendements à
apporter à la loi 140, amendements que je soumettrai à
l'Opposition et, en même temps, par le fait même, à la
population du Québec que nous représentons tous et nous verrons
par la suite. (10 h 20)
Le Président: M. le député de Mercier, en
additionnelle.
M. Godin: M. le Président, est-ce que les coalitions
exceptionnelles syndicales-patronales et autres qui s'organisent
présentement ne seraient pas clair dans ce qui se passe et seule la
ministre verrait clair? Pourquoi cela inquiète-t-il? Où est
l'urgence, Mme la inistre? Est-ce qu'il y a des gens qui font des crises
cardiaques à parler français au Qébec? Est-ce qu'il y a
des gens qui font des manifestations dans les rues contre la loi 101? Est-ce
qu'il y a des gens qui veulent que cela change? Est-ce qu'il y a une urgence,
des pressions secrètes, des tractations? Est-ce qu'on peut savoir ce qui
se passe dans votre dos qui vous pousse à agir ainsi, Mme la
ministre?
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la vice-première linistre.
Mme Bacon: M. le Président, je comprends mal le
député de Mercier qui lui-même, au moment où j'avais
mentionné aux médias d'information, en janvier dernier, qu'il
fallait revoir l'administration et les structures administratives des
organismes, sait qu'il aurait voulu le faire. Je comprenais qu'à ce
moment-là il en était incapable, puisque celui qu'on a
appelé le père de la loi 101 siégeait avec lui.
Je pense que je vais tout simplement faire ce que lui n'a pas pu faire
dans son gouvernement. Il devrait comprendre les changements administratifs que
je fais maintenant. J'ai dit - je n'ai pas l'intention de dire que je suis la
seule à avoir le pas, ce n'est pas vrai - que je suis à
l'écoute de la population, je suis à l'écoute des gens et
des groupes qui ont fait connaître des objections au libellé de la
loi 140. La loi 140 permettra des structures administratives qui vont faire en
sorte d'assurer une meilleure protection et une meilleure cohésion dans
l'application de la Charte de la langue française. C'est pour cela que
j'ai travaillé hier avec un groupe de travail de mon ministère et
d'autres pour faire en sorte que les amendements que nous apporterons à
la loi 140 répondent justement à cette préoccupation que
nous avons et que d'autres ont dans la population, face à une
restructuration administrative.
Après dix ans, on peut rénover un édifice sans le
jeter par terre, M. le Président, et c'est ce que nous faisons.
Le Président: M. le député de Mercier, en
additionnelle.
M. Godin: Sans préambule, M. le Président.
Est-ce qu'il y a une différence entre toucher pour violer et
toucher pour muscler?
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Godin: Alors, pour que la ministre comprenne bien, est-ce
qu'il y a une différence entre toucher pour violer et toucher pour
muscler, M. le Président?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, je ne connais pas la
différence. Je n'ai jamais violé personne.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Mme Bacon: Mais venant d'un parti, M. le Président...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: Mais ces remarques venant d'un parti, M. le
Président, qui a fait croire à la population qu'il
l'amènerait à la terre promise et qui, à la veille d'une
élection, a changé son cap, je pense que je n'ai pas de
leçon à recevoir de ces gens-là.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de
Verchères, en additionnelle.
M. Charbonneau: En additionnelle, M. le Président. On
pourrait parler de la terre promise que les gens attendaient il y a un an.
Des voix: Oui.
Le Président: S'il vous plaît! En additionnelle, M.
le député de Verchères.
M. Charbonneau: Quand la ministre va-t-elle comprendre
qu'à ce moment-ci la seule chose acceptable, ce n'est pas de
présenter des amendements en catastrophe, mais c'est de retirer le
projet de loi 140?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, je répète
à nouveau - je pense que le député n'a pas compris - que
je déposerai en cette Chambre des amendements au projet de loi 140.
Après, nous verrons ce que nous ferons.
M. Charbonneau: Dans ce cas, je vais poser une question
très précise à la ministre.
Le Président: M. le député de
Verchères, en additionnelle.
M. Charbonneau: En additionnelle. Est-ce que vous écartez
définitivement toute possibilité de retirer le projet de loi 140
si l'opposition populaire continue de s'amplifier dans les deux prochaines
semaines?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: Je serais tentée, M. le Président, de
référer le député à un article que j'ai lu
ce matin dans La Presse et qui était fort intéressant. Je
demanderais aussi à l'Opposition de cesser de faire ces ballons, comme
elle l'a fait depuis le début pour compléter les ballons d'autres
qui sont tout à fait faux. Est-ce que l'Opposition veut dire ce matin,
par ses questions, qu'elle ne veut pas discuter de cette question des
amendements, qu'elle ne veut pas même en prendre connaissance? C'est cela
une opposition en Chambre?
Le Président: M. le député de Gouin,
question principale.
La portée linguistique du projet de loi
142
M. Rochefort: Oui. Merci, M. le Président. Encore une
fois, la ministre de la Santé et des Services sociaux a réussi
à créer un solide consensus contre un de se: projets de loi. On
sait que les milieux économiques et financiers, syndicaux,
universitaires, des gens de tous les milieux demandent non seulement le retrait
du projet de loi 140 mais aussi le retrait du projet de loi 142.
Non seulement la ministre n'a-t-elle reçu aucun appui du
réseau de la santé et des services sociaux mais l'Association des
hôpitaux du Québec a demandé formellement le retrait de
tous les articles à portée linguistique du projet de loi 142.
Ma question est simple. Pourquoi la ministre n'annonce-t-elle pas
dès aujourd'hui le retrait du projet de loi 142?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on sait fort bien que
l'Opposition a déployé beaucoup d'efforts au cours des
dernières semaines, et avec, je dois dire, un succès relatif pour
essayer de confondre dans l'esprit de la population les objets de la loi 140 et
de la loi 142.
En ce qui a trait à la loi 142, tel que le disait hier ou
avant-hier le premier ministre du Québec, c'était un engagement
que d'ailleurs le chef de l'Opposition actuelle avait pris vis-à-vis de
la minorité anglophone et que nous-mêmes avions pris. Cette
minorité anglophone demande particulièrement pour les personnes
les plus démunies, qu'il s'agisse de personnes âgées, qu'il
s'agissent de jeunes en besoin de protection, que ces gens puissent avoir
accès, dans des limites raisonnables évidemment et compte tenu de
l'organisation des services et de la disponibilité des ressources,
à des services dans leur langue.
Je voudrais rappeler à l'Opposition que ceci n'est pas le seul
fait de la minorité anglophone au Québec, au point de
départ, il faut le dire, à ses institutions beaucoup plus
enracinées que les francophones dans les autres provinces, mais on sait
que, dans tout le Canada, c'est un désir des minorités de pouvoir
s'assurer l'accès aux services de santé et aux services sociaux
dans leur langue.
Le Président: M. le député de Gouin,
question additionnelle.
M. Rochefort: M. le Président, la ministre de la
Santé et des Services sociaux est-elle consciente que l'ensemble des
intervenants du réseau de la santé et des services sociaux qui
ont fait beaucoup d'efforts et qui continuent de faire beaucoup d'efforts pour
dispenser d'excellents services aux minorités, jugent ce projet de loi
comme une injure à ce qu'ils ont fait jusqu'à aujourd'hui et
à ce qu'ils continuent de faire pour bien servir les
minorités du Québec?
Le Président: Mme la ministre de la santé et des
Services sociaux. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand le chef de
l'Opposition actuelle promettait d'assurer des services de santé et des
services sociaux dans sa langue à la minorité anglophone,
faisait-il injure à l'ensemble des intervenants du Québec? J'ai
rencontré les représentants des différentes
fédérations, qu'il s'agisse des CLSC, des CSS, enfin, des
intervenants du milieu de la santé et des services sociaux, et je dois
vous dire qu'il y a un consensus qui existe là, comme il existe
d'ailleurs à l'Association des hôpitaux du Québec, et qu'il
est tout à fait légitime que l'on puisse donner des services en
anglais, à la population de langue anglaise toujours à
l'intérieur d'un cadre bien défini.
Je sais que des efforts ont été faits. Je m'en
réjouis et je félicite les gens qui les ont faits. Il importe,
compte tenu des ressources qui existent - j'insiste sur ce point, dans les
régions éloignées - que l'on puisse rendre plus
disponibles en langue anglaise les services à ces populations anglaises
qui sont isolées dans certains coins du Québec. Je pense
particulièrement à la Gaspésie, aux Cantons de l'Est,
à la Basse-Côte-Nord. Je pense qu'il est important que, sur le
plan humain, sur le plan de la qualité des services, nous puissions
faire des arrangements ou planifier sur le plan administratif de telle sorte
que ces gens reçoivent les services dans leur langue. (10 h 30)
Le Président: M. le député de Gouin, en
additionnelle.
M. Rochefort: Comment la ministre peut-elle tenir un tel discours
alors qu'elle n'a aucun appui dans le réseau de la santé et des
services sociaux? Personne, parmi ceux et celles qui offrent ces services
à l'heure actuelle, n'appuie sa démarche. Est-ce qu'au moins,
hier, au Conseil des ministres, elle a défendu les intervenants du
réseau qui donnent des services aux minorités et qui demandent le
retrait du projet de loi?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je dois dire qu'aucun des quatre groupes, je
crois, que j'ai rencontrés il y a quelques jours, ne m'a demandé
le retrait du projet de loi, pour l'information du député de
Gouin. Dans le cas de l'Association des hôpitaux du Québec, qui,
à ma connaissance, est le seul groupe qui ait demandé le retrait
du projet de loi, ce n'était pas sur le principe de rendre accessibles
des services en langue anglaise, à la population anglaise mais ils font
une interprétation juridique différente de celle que nous
faisons, M. le Président, et c'est tout à fait leur droit. Je
pense aussi que le gouvernement doit prendre ses responsabilités.
Le Président: M. le député de Laviolette, en
additionnelle.
M. Jolivet: M. le Président, Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux est-elle consciente qu'après avoir
servi de fer de lance au président du Conseil du trésor pour
effectuer des coupures dans les services de santé, elle va
désormais servir de fer de lance à ce gouvernement pour un recul
du français au Québec.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mme
la ministre, vous avez la parole. À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je réalise que le
député de Laviolette veut utiliser toutes les secondes qui sont
à sa disposition pour passer une foule de messages. C'est son droit le
plus strict. Je pense que lorsque l'Opposition, et à ce moment en
particulier le député de Laviolette, brandit le recul du
français quand on pense qu'en toute équité on devrait
fournir à la minorité anglophone les services de santé et
les services sociaux dans leur langue...
Le Président: À l'ordre!
Mme Lavoie-Roux: Je pense que le député de
Laviolette erre. Je voudrais qu'on me dise depuis combien de temps le fait
d'avoir accès à des services en langue anglaise, là
où ils sont disponibles, peut menacer de quelque façon que ce
soit la langue française. M. le Président, s'ils ne le savent pas
encore - pourtant ils ont connu la loi 22, ils ont connu la loi 101 - les
outils d'intégration à la majorité francophone des
personnes du Québec, c'est la langue du travail et c'est la langue de
l'éducation et non pas, à l'occasion, l'accès à des
services de santé et des services sociaux.
Le Président: M. le député de Laviolette, en
additionnelle.
M. Jolivet: Devant le refus évident de reculer sur la loi
142, la ministre de la...
Le Président: Vous allez me permettre de juger de la forme
interrogative. Il n'est pas nécessaire que le premier terme
employé soit de la forme interrogative immédiatement. Je vais en
juger moi-même. M. le député.
M. Jolivet: Je répète. Devant le refus de la
ministre de la Santé et des Services sociaux de reculer devant les
demandes en ce qui concerne la loi 142, la ministre est-elle consciente qu'elle
va servir au leader, qui a mal préparé l'ensemble des travaux
parlementaires, pour faire siéger l'ensemble de cette Assemblée
à des heures indues, dans la nuit, de telle sorte que finalement nous
allons étudier ces projets de loi à des heures indues.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je
voudrais reconnaître le leader du gouvernement. À l'ordre, s'il
vous plaît! M. le leader du gouvernement sur la question.
M. Gratton: C'est simplement pour constater, effectivement, que
le député de Laviolette est fatigué ce matin.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Gouin, en principale ou en additionnelle?
M. Rochefort: En additionnelle, M. le Président.
Le Président: En additionnelle.
M. Rochefort: M. le Président, comment la ministre de la
Santé et des Services sociaux peut-elle affirmer que le projet de loi
142 n'aura pas de conséquences linguistiques graves pour le
Québec, alors que l'Association des hôpitaux du Québec
elle-même, en page 3 de son mémoire, dit que ce projet de loi
risque de saper la portée de la Charte de la langue française et
vient mitiger l'application de la Charte de la langue française pour les
établissements de santé et de services sociaux?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je le
répète, il ne s'agit pas d'une loi linguistique au sens strict,
il s'agit d'une loi qui facilite l'accès de la minorité
anglophone à des services de santé et à des services
sociaux dans sa langue.
Une voix: Très bien!
Le Président: En additionnelle, M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: M. le Président, est-ce que Mme
la ministre de la Santé et des Services sociaux pourrait dire aux
membres de cette Chambre si le chef de l'Opposition est intervenu
personnellement auprès de la ministre pour lui demander de ne pas donner
à la minorité anglophone des services de santé dans leur
langue, contrairement à ce que les membres de son parti réclament
et contrairement à ce qu'il a promis en campagne électorale?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il n'y a pas eu de telle
démarche de faite auprès de la ministre... Une voix: Vous
avez eu peur, là!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
J'ai bien entendu la question de M. le député de Vimont et
j'aimerais entendre la réponse de Mme la ministre. Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela ne change pas les
positions officielles qui ont été affirmées à la
fois en campagne électorale et au moment des propositions
constitutionnelles que le chef de l'Opposition officielle a acheminées
au fédéral dans le cadre des négociations
constitutionnelles.
M. le Président, je sais qu'il y a eu des discussions entre le
chef de l'Opposition et le premier ministre, et nous sommes disposés...
Je crois comprendre qu'il y a entente sur le principe. Je ne crois pas que
l'Opposition veuille refuser l'accès à des services en langue
anglaise à la minorité anglophone.
Des voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le Président, ils agissent tout
à fait comme s'ils étaient contre.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît M.
le député de Bertrand, en principale.
Valeur des actifs de SOQUEM vendus à
Cambior
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Après
plusieurs questions de l'Opposition en cette Chambre concernant la transaction
SOQUEM-Cambior, après plusieurs hésitations entre le ministre
délégué à la Privatisation et le ministre
délégué aux Mines, finalement, ce dernier a
déposé en cette Chambre des documents relatifs à ladite
transaction le 19 novembre dernier.
J'aimerais savoir de la part du ministre délégué
à la Privatisation s'il y a d'autres études et d'autres documents
concernant cette transaction en plus de ceux déposés par son
collègue pour justifier la valeur des actifs vendus à Cambior
pour 170 000 000 $.
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation. (10 h 40)
M. Fortier: M. le Président, mon collègue a
déposé en cette Chambre un document qui avait été
acheminé à la Commission des valeurs mobilières et qui
faisait état d'une étude faite par Cambior et de deux autres
études qui étaient en annexe. Je crois que le
député a pris connaissance de cette documentation. Ce sont
à peu près toutes les études qui ont été
faites sur ce sujet, sauf que le ministère des Finances a demandé
à la firme McNeil Mantha de nous faire une évaluation. Il faut
que les députés comprennent que l'ensemble des actifs qui
devaient être déplacés de SOQUEM à Cambior a
évolué. Donc, il y a eu certains actifs qui ont été
ajoutés à certains moments et d'autres qui ont été
retirés. Mais je peux l'assurer qu'en ce qui concerne la confirmation
que nous avons eue de McNeil Mantha, ils évaluaient l'ensemble des
actifs transférés à Cambior à beaucoup moins que le
chiffre qu'il a mentionné, qui a été le chiffre finalement
retenu.
Le Président: En additionnelle, M. le député
de Lévis.
M. Garon: Question additionnelle, au ministre des Finances dont
nous nous réjouissons du retour en cette Chambre. Est-ce que le ministre
des Finances, à titre d'actionnaire de SOQUEM, peut nous dire si son
ministère a pris la peine de faire, par l'entremise de ses propres
experts à l'intérieur du ministère, une étude
d'évaluation des actifs vendus à Cambior par SOQUEM? Est-ce qu'il
a, par ailleurs, engagé une firme indépendante pour faire cette
étude en plus ou au lieu du ministère des Finances?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, le ministre
délégué aux Finances a déjà répondu
à cette question et comme il est lui-même directement responsable
du dossier, il pourra compléter la réponse, s'il y a lieu.
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: II est très clair que le ministère des
Finances, par ses hauts fonctionnaires, a été directement
impliqué dans la négociation. Comme je viens de l'indiquer, nous
avons demandé à la firme McNeil Mantha de nous donner une
évaluation. Elle soutenait que le prix était moindre que le
chiffre qui fut retenu. Donc, nous avons obtenu plus que l'évaluation
obtenue du ministère des Finances. Je crois qu'il est clair que, dans
une négociation comme celle-là, il y a une négociation qui
se fait entre les preneurs fermes et les vendeurs. Comme le
député le sait peut-être, cette négociation se fait
le jour et la nuit durant les 48 heures qui précèdent la date
fatidique. Je peux l'assurer que, dans ce cas en particulier, les hauts
fonctionnaires du ministère des Finances ont été
directement impliqués dans cette négociation, qu'ils ont
défendu le dossier avec beaucoup de compétence. C'est ce qui a
fait que nous avons pu obtenir beaucoup plus que l'évaluation que nous
avait donnée McNeil Mantha qui soutenait que le prix des actifs
transposés à Cambior était moindre que le prix de 170 000
000 $ que nous avons finalement obtenu.
Le Président: M. le député de Lévis,
en additionnelle. '*
M. Garon: Est-ce qu'à titre d'actionnaire de SOQUEM, au
nom du gouvernement et au nom du public québécois, le ministre
des Finances a formellement donné son accord à la vente, à
titre de ministre des Finances, à la transaction entre Cambior et
SOQUEM?
Le Président: M. le minitre des Finances.
M. Levesque: M. le Président, non seulement le ministre
des Finances a concouru à cette décision, mais c'est l'ensemble
du gouvernement qui a pris la décision.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
additionnelle.
M. Parent (Bertrand): En additionnelle. Est-ce que le ministre
délégué à la Privatisation peut déposer en
cette Chambre l'étude de McNeil Mantha à laquelle il vient de
faire référence et qui est la seule pièce qui nous manque
pour compléter le dossier?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, si j'hésite, c'est que
- non, c'est parce qu'on parle de choses graves. Dans cette évaluation,
la firme faisait allusion à d'autres sociétés qui sont
cotées en Bourse - ayant le sens des responsabilités et j'en
appelle au sens des responsabilités des députés de
l'Opposition et du député de Bertrand en particulier, je sais que
l'information contenue dans cette étude pourrait affecter
négativement d'autres sociétés cotées en Bourse.
Mais si le député de Bertrand est prêt à accepter ma
proposition, je suis prêt à lui montrer ce document dans la mesure
où il en gardera la
confidentialité. Nous n'avons rien à cacher. Cependant, je
voudrais éviter qu'en déposant ce document, cela affecte
négativement d'autres sociétés québécoises
cotées en Bourse, des sociétés qui travaillent dans le
domaine minier. Mais je suis prêt à faire en sorte qu'il puisse
avoir accès à ce document pour prendre connaissance
lui-même de l'information qu'il contient, à la condition, bien
sûr, qu'il en préserve la confidentialité.
Le Président: M. le député d'Ungava, en
additionnelle.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Question additionnelle
au ministre délégué à la Privatisation et aux
Finances. C'est un gouvernement qui marche par délégation.
Le Président: En additionnelle.
M. Claveau: Peut-il déposer en cette Chambre...
Des voix: Oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: Une
remarque en entraînant plusieurs autres, j'aimerais que vous
procédiez à votre question additionnelle, M. le
député d'Ungava. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député d'Ungava, sans remarques.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Le ministre
délégué en question peut-il déposer en cette
Chambre les conditions qu'il a offertes et données aux cadres de Cambior
au moment de les engager au nom du gouvernement du Québec?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: De mémoire, je vous dirai ceci. SOQUEM, la
société minière, avait pris des engagements
vis-à-vis des nouveaux cadres de Cambior. Au moment où cela a
été fait, le député se souviendra que Cambior
était une filiale à 100 % de SOQUEM. Les cadres qui ont
été retenus, alors qu'ils quittaient des emplois très
rémunérateurs, ont exigé certaines garanties. Il faut se
souvenir que, si Cambior est maintenant un succès, à un certain
moment certains experts prétendaient que nous ne pourrions aller
chercher plus de 60 000 000 $ ou 70 000 000 $. Le fait que nous soyons
allés chercher plus de 150 000 000 $ peut paraître facile
maintenant.
Le député peut peut-être prétendre que la
vente a été faite à un prix moindre, ou trop bas, mais au
moment où ces cadres ont été engagés, il y avait un
très fort degré d'incertitude sur le succès de
l'opération. Ils avaient demandé et obtenu de la part de
SOQUEM certaines garanties. Par la suite ces mêmes cadres ont
demandé que cette garantie soit endossée par le gouvernement ou
par le ministre qui vous parle. Quitte à ce que je vérifie -
parce que je ne voudrais pas induire la Chambre en erreur - je crois pouvoir
dire que, finalement, le gouvernement et le ministre qui vous parle n'ont
jamais donné cette garantie.
Le Président: Une dernière additionnelle, M. le
député d'Ungava?
M. Claveau: Enfin, une additionnelle. Le Président: Une
additionnelle. Une voix: Bof! Une dernière... Une voix: Une
dernière supplémentaire. M. Claveau: C'est une
additionnelle.
Le Président: M. le député d'Ungava en
additionnelle.
M. Claveau: Le ministre peut-il confirmer...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Claveau: ...qu'alors, comme il vient de le dire, que SOQUEM
était l'unique actionnaire des actifs de Cambior, le 25 avril dernier,
un bloc de 95 000 actions à 10 $ l'unité a été
réservé pour trois membres de la direction actuelle de
Cambior?
Des voix: Oh!
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: Quitte à vérifier les chiffres, je
pourrai confirmer. Ce qu'il faut savoir, c'est que la décision que nous
avions prise était de faire de Cambior une société
privée. Ce qu'il faut savoir, c'est que dans le secteur privé il
est tout à fait normal d'intéresser les cadres de l'entreprise,
parce qu'il est connu que dans la mesure où les cadres sont
intéressés par un certain bloc d'actions, dans la même
mesure ils travaillent très fort pour s'assurer que l'entreprise est un
succès. Cela se fait dans toutes les entreprises minières et nous
avons voulu suivre ce pattern. C'est la raison pour laquelle SOQUEM - et je dis
bien SOQUEM -a accepté de négocier cette entente. Ce contrat ou
cette entente avec les cadres de Cambior n'a pas été
approuvé par le gouvernement comme tel, mais a été
approuvé par le conseil d'administration de SOQUEM. Comme je l'ai dit,
il s'agit d'une entente pratique, normale dans le monde des
affaires et surtout dans le secteur minier. Le député qui
vient d'une région minière devrait le savoir.
Le Président: En additionnelle, M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Dans la mesure
où le ministre est avant tout un représentant des
intérêts de l'État, le ministre peut-il nous donner les
noms d'autres entreprises du secteur public qui ont donné de tels
privilèges à leurs cadres supérieurs?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: Toutes les grandes entreprises
québécoises le font. Je pourrais vous en nommer plusieurs, toutes
les grandes entreprises le font. Quand j'étais dans le secteur
privé moi-même, j'avais accès à certains blocs
d'actions. Mes collègues qui étaient dans le secteur privé
et qui avaient des responsabilités à la direction d'entreprises
avaient eux-mêmes accès à certains blocs d'actions à
des coûts moindres. Je crois qu'il s'agit d'une pratique tout à
fait normale et, je le répète, dans la mesure où nous
voulions que Cambior soit une compagnie du secteur privé, nous avons
suivi la pratique du secteur privé pour intéresser les cadres de
l'entreprise à faire le succès de Cambior et c'est un grand
succès. (10 h 50)
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Mme la députée de
Kamouraska-Témiscouata, en principale.
Offre d'aide financière à la papeterie
Saint-Raymond
Mme Dionne: Merci, M. le Président. Le 21 octobre dernier,
j'adressais au ministre de l'Industrie et du Commerce une question concernant
la papeterie Saint-Raymond, de Desbiens. On sait qu'il y aura cinq ans demain,
la papeterie Saint-Raymond fermait ses portes. Depuis, de nombreux efforts ont
été faits afin de faire redémarrer cette entreprise d'une
importance capitale pour le développement économique et social de
la région du Lac-Saint-Jean.
Ma question est la suivante au ministre de l'Industrie et du Commerce:
À la suite du nouveau projet qui a été soumis au
gouvernement du Québec, par le biais de la Société de
développement industriel du Québec, le ministre peut-il nous
indiquer où en est rendu ce dossier?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je remercie la
députée de sa question. J'ai toujours indiqué que je
m'engageais à donner une réponse à la région de
Desbiens avant la fin de l'année. On a voulu me faire dire que ce devait
être en septembre, en octobre, mais il faut savoir que, depuis cinq ans,
il y a eu un ensemble de projets qui ont été soumis, tous
d'envergure variable. Le dernier projet avait fait l'objet d'une demande
à la Société de développement industriel au mois de
juin. Quelques mois plus tard... Il faut savoir qu'il y a un cheminement
d'analyse, d'approbation à différents niveaux, y compris dans
certains cas le Conseil exécutif, pour donner suite à des projets
de cette nature.
Étant donné que nous sommes encore vers la fin de
l'année, M. le Président, je pense ne pas avoir manqué
à ma parole en indiquant, aujourd'hui, que le gouvernement a su, hier,
approuver une offre d'aide financière aux partenaires impliqués
dans le projet qui a cours à Desbiens. Nous transmettrons notre offre
d'aide financière dans les heures et les jours qui viennent. Nous sommes
confiants que, sur la foi de cette aide financière, de ce qui s'ajoute
d'ailleurs à celle du gouvernement fédéral, nous saurons
assister à la relance de l'emploi. Il me fait plaisir de pouvoir le dire
aujourd'hui, à la veille du cinquième anniversaire de la
fermeture.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: M. le député de Roberval, en
principale.
SOQUIP et la politique de privatisation
M. Gauthier: Oui, M. le Président. Récemment, le
ministre de l'Énergie et des Ressources, à la suite du
dépôt du rapport annuel de la SOQUIP, indiquait que cette
dernière avait joué un rôle de premier plan au
Québec et était appelée à en jouer un encore,
principalement dans Soligaz et dans certains projets d'implantation d'usines
qui sont sur la table de travail. Il disait également que SOQUIP avait,
avec ses propriétés dans l'Ouest canadien, un rôle
extrêmement important qui pouvait devenir stratégique pour
l'avenir du Québec.
Voici ma question au ministre de l'Énergie et des Ressources:
Comment concilie-t-il ses propos fort élogieux - que je partage -
à l'endroit de SOQUIP avec la politique de privatisation de son
gouvernement qui place SOQUIP parmi une des cibles du ministre
délégué à la Privatisation.
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, je crois que le
député de Roberval a mal interprété
les intentions et les déclarations du gouvernement en ce qui
concerne SOQUIP. Ce n'est pas une question de cible de privatisation. Nous
avons indiqué que nous examinons le rôle de SOQUIP, que nous
verrons à la mission et aux objectifs de SOQUIP dans le cadre d'une
politique énergétique, en tenant compte des besoins
énergétiques du Québec. Dans cette optique, nous avons
examiné et continuons d'examiner ce que nous pouvons faire avec SOQUIP
pour la rendre encore plus efficace et pour mieux répondre aux besoins
du Québec.
Le Président: M. le député de Roberval, en
additionnelle.
M. Gauthier: J'aimerais savoir du ministre comment il concilie
ses propos avec ceux de son collègue à la Privatisation qui
disait, le 12 novembre, avant les élections, que le gouvernement
n'hésiterait pas à privatiser SOQUIP, que son mandat initial
était terminé et que les propriétés gazières
en Alberta n'avaient absolument aucune importance pour l'économie du
Québec.
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, il est vrai que le mandat
d'une des missions de SOQUIP, l'exploration pétrolière au
Québec, est terminé. Le ministre délégué
à la Privatisation avait entièrement raison. Au moment où
il a fait ces déclarations, les conditions dans le domaine
énergétique lui permettaient d'exprimer cette opinion, mais
depuis ce temps, il y a eu beaucoup de changements. Il y a eu la fermeture de
la raffinerie de Gulf. Il y a eu une baisse du prix du pétrole. Il y a
eu les importations, de plus en plus au Québec, des produits
pétroliers raffinés. Alors, quand les conditions changent, la
position d'un gouvernement doit changer. Je peux assurer le
député de Roberval que le ministre délégué
à la Privatisation et moi-même voyons le problème de la
même façon et que nous allons nous entendre sur les solutions
à apporter.
Le Président: M. le député de Roberval, en
additionnelle.
M. Gauthier: M. le Président, le ministre ne croit-il pas
qu'il serait beaucoup plus simple, pour prendre une décision entre
ministres, s'il prenait la peine de déposer, enfin, la politique
énergétique de ce gouvernement qui est inconnue de tout le monde
et qui a été mentionnée par le ministre
délégué à la Privatisation. C'est à peu
près comme la politique linguistique. Où est-elle? Allez-vous la
déposer?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, il y a deux façons de
gouverner. Une des façons, c'est de parler, d'avoir des livres blancs,
de dire tout ce que nous devrions faire, et ne pas agir. Ce n'est pas un
gouvernement de spectacle et ce n'est pas un ministère de spectacle.
Nous avons plutôt choisi d'agir, d'agir dans des dossiers
spécifiques pour le bien de la population, pour le développement
économique, par l'entremise du ministère de l'Énergie et
des Ressources. Nous développons, tout en agissant dans ces domaines,
une politique que nous rendrons publique en temps et lieu.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en principale.
Droit d'atterrissage à Toronto pour Taï
Airways
Mme Harel: Pendant que le débat se poursuit sur l'avenir
des aéroports de Dorval et de Mirabel, le gouvernement canadien
créait, récemment, un très dangereux
précédent en accordant un droit d'atterrissage à Toronto
à la compagnie thaïlandaise, TaT Airways, sans équivalence
de service avec Montréal. Après avoir perdu l'exclusivité
des droits d'atterrissage des vols internationaux, Montréal se voit,
pour la première fois, maintenant privée d'une équivalence
de service avec Toronto. Ce précédent est d'autant plus dangereux
que d'autres compagnies aériennes réclament le même
traitement: les compagnies Scandinave, japonaise, indienne.
Le ministre des Transports peut-il indiquer quelle démarche il a
entreprise auprès de son homologue fédéral et en quoi il a
agi pour faire cesser ce dangereux précédent où tout le
Québec, Dorval comme Mirabel, sort perdant?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai
eu l'occasion de discuter à plusieurs reprises, entre autres, avec M.
Mazankowski, en juin dernier, avec M. Crosbie en octobre de cette année,
à la suite des changements, et avec M. André Bissonnette,
ministre d'État aux Transports et responsable du Québec, dans le
gouvernement conservateur, de l'ensemble de la problématique des
aéroports de Mirabel et de Dorval. À nouveau, il y a eu des
conversations téléphoniques, lundi, avec M. Bissonnette. Je lui
ai indiqué l'inquiétude que le gouvernement du Québec
avait face à l'implication de cette mesure, de cette décision, et
je l'ai incité très fortement a
prendre des mesures qui s'imposent, puisque c'est à eux de
prendre les décisions dans ce cas-là.
Le Président: En principale ou en additionnelle, M. le
député de Verchères?
M. Charbonneau: En principale, M. le Président.
Le Président: En principale, M. le député de
Verchères.
Réforme de l'aide sociale au
Québec
M. Charbonneau: M. le Président, hier, au gouvernement
fédéral, on déposait le rapport Forget sur la
réforme de l'assurance-chômage. La réaction du ministre
fédéral a été qu'il ne prendrait pas de
décision avant le 15 mai 1987, tout au moins, et que la mise en oeuvre
d'une éventuelle réforme de l'assurance-chômage
n'interviendrait pas avant 1988. Comme le premier ministre et un peu moins
fermement le ministre avaient relié le dépôt de la
réforme de l'aide sociale annoncée par le gouvernement à
cette réforme de l'assurance-chômage par le gouvernement
fédéral, est-ce à dire que le gouvernement du
Québec reporterait d'au moins six mois la réforme de l'aide
sociale, sinon en 1988?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail. (11 heures)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, M. le Président. Le
gouvernement du Québec se propose d'étudier attentivement le
rapport de la commission Forget et de voir, dans l'éventualité
d'une application totale, partielle, à moyen terme ou à court
terme, quelles implications peut avoir le passage de certaines
clientèles de l'assurance-chômage à l'aide sociale ou en
sens inverse. Une fois ces implications analysées, nous serons en mesure
de répondre beaucoup plus précisément à votre
question quant à la période que vous mentionnez.
M. Charbonneau: Question additionnelle.
Le Président: M. le député de
Verchères, question additionnelle.
M. Charbonneau: Est-ce que tout au moins cela indique que le
gouvernement va attendre après Noël, après les fêtes
pour déposer son document d'orientation sur la réforme de l'aide
sociale?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que nous avions
indiqué très clairement que le rapport Forget était une
pièce importante du casse-tête quant à la publication d'un
document d'orientation sur l'aide sociale. Il y aura d'ici Noël des
mesures qui seront annoncées, qui se doivent d'être
annoncées, des mesures qui étaient contenues dans le budget du
printemps dernier du ministre des Finances, des mesures qui ont
également trait à l'indexation pleine et entière des
prestations des bénéficiaires de l'aide sociale.
M. Charbonneau: C'est sans doute de la
télépathie.
Le Président: M. le député de
Verchères, question additionnelle.
M. Charbonneau: Question additionnelle, M. le Président.
D'abord, est-ce que le ministre a l'intention - parce que ce n'est pas clair -
de publier son document d'orientation avant Noël, d'une part? D'autre
part, à l'égard de l'indexation dont il parle, est-ce que c'est
une autre indexation que celle qui est de toute façon prévue pour
le 1er janvier 1987, parce qu'il n'y aurait pas d'annonce dans cela.
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'aimerais
vous dire qu'il n'y a pas d'annonce et donner raison à mon
collègue, le député de Verchères. Mais au printemps
dernier il a tellement crié qu'il y avait abolition de l'indexation
qu'au moins pour lui cela doit constituer une annonce.
Le Président: Une très courte question
additionnelle. C'est la dernière question.
M. Charbonneau: Est-ce que le ministre veut faire croire aux
assistés sociaux que l'indexation annuelle et l'indexation dont il vient
de parler sont deux choses différentes? Est-ce qu'il va finir par
être honnête avec les gens et leur dire que l'indexation annuelle,
c'est la même chose et qu'il n'y a pas de nouveau pour les
assistés sociaux?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Gratton: La façon de poser la question: Est-ce que le
ministre va être honnête, est acceptable en fonction de nos
règlements, M. le Président?
Le Président: Non. C'est pourquoi je suis intervenu pour
demander la réponse à M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de
la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Le
ministre va continuer à dire la vérité aux gens qui sont
touchés. Nous leur avions dit, au printemps passé, qu'ils
auraient une indexation pleine et entière et ils auront cette indexation
pleine et entière.
M. Johnson (Anjou): Additionnelle.
Le Président: C'est terminé. M. le chef de
l'Opposition, non. C'est terminé depuis plus de 30 secondes, M. le chef
de l'Opposition. Excusez-moi. A l'ordre, s'il vous plaît: À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous
plaît! Avant de procéder au vote, M. le ministre
délégué à la Privatisation m'a annoncé qu'il
avait un complément de réponse à une question posée
à cette séance par M. le député d'Ungava. En vertu
de l'article 80, premier paragraphe, je lui permets d'apporter ce
complément de réponse. M. le député d'Ungava vous
aurez une question additionnelle à la suite de ce complément. M.
le ministre délégué à la Privatisation.
Option d'achat d'actions de Cambior accordée
à des cadres
M. Fortier: Sur l'option d'achat d'actions de Cambior qui a
été donnée aux trois dirigeants, je voulais confirmer
l'essence de la réponse à la question qui me fut posée.
Effectivement, le 25 avril 1986, des options d'achat pour 95 000 actions ont
été accordées à trois membres de la direction. Je
lui dirai simplement que le détail de cette information se retrouve dans
le prospectus de Cambior déposé le 15 mai dernier. Donc, il
s'agit d'une information publique. Je me permets de lui envoyer une copie de ce
prospectus puisque la question que vous m'avez posée a trait à
une information publique qui est disponible à tous depuis le 15 mai
dernier.
Le Président: M. le député d'Ungava, une
dernière question additionnelle.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je voudrais savoir du
ministre si c'est une mesure courante qu'une société
d'État, qu'un ministre, au nom d'un gouvernement, offre de tels
avantages à des cadres supérieurs. Si dans un deuxième
temps, c'était du domaine public comme il le dit, comment se fait-il
qu'il n'avait pas lui-même la réponse au moment où je lui
ai posé la question?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, bien sûr, l'Opposition
prépare ses questions et on ne tient pas le prospectus à
côté de nous continuellement. Si le député avait
fait sa recherche, il aurait trouvé dans le prospectus l'information
à la question qu'il me posait. En ce qui concerne la privatisation de
Cambior, je lui répète ceci: Nous recherchions des dirigeants qui
ont été un facteur de réussite dans l'émission
d'actions de Cambior. C'est la raison pour laquelle nous avons
négocié avec eux des conditions qui sont normales dans le secteur
privé puisque nous voulions vendre 70 % des actions et que nous nous
dirigions vers une privatisation. Les conditions qui ont été
négociées avec eux furent semblables à celles
négociées dans le secteur privé, dans le secteur minier en
particulier.
Le Président: Fin de la période des questions et
réponses orales. Non, non, c'est terminé. M. le
député d'Ungava, je vous donnerai l'occasion d'expliquer tout ce
que vous voulez à la période de questions demain. Je vous
donnerai toutes les additionnelles ou les principales.
Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Votes
reportés. Est-ce que, messieurs et mesdames les députés
vous êtes prêts à procéder au vote qui apparaît
au feuilleton? S'il vous plaît! Si vous voulez reprendre vos
sièges.
Mise aux voix de la motion
proposant l'adoption du principe du projet de loi
119
Je mets maintenant aux voix la motion du ministre du Travail proposant
que le principe du projet de loi 119, Loi modifiant la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction, soit maintenant adopté.
Que ceux et celles qui sont en faveur de ladite motion veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Saintonge
(Laprairie), Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan
(Argenteuil), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Paradis (Brome-Missisquoi),
Côté (Rivière-du-Loup), Dutil (Beauce-Sud), Mmes
Gagnon-Tremblay (Saint-François), Robic (Bourassa), MM. Vallerand
(Crémazie), Lincoln (Nelligan), French (Westmount), Côté
(Charlesbourg), Ciaccia (Mont-Royal), Johnson (Vaudreuil-Soulanges),
Vallières (Richmond), Gobeil (Verdun), Picotte (Maskinongé),
Fortier (Outremont), Cusano (Viau), Vaillancourt (Orford), Maltais (Saguenay),
Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM.
Lefebvre (Frontenac), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Sirros (Laurier),
Doyon (Louis-Hébert), Maciocia (Viger), Middlemiss (Pontiac), Beaudin
(Gaspé), Cannon (La Peltrie), Chagnon (Saint-Louis), Lemire
(Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat
(Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak (Sainte-Anne), Audet
(Beauce-Nord), Baril (Rouyn-NorandaTémiscamingue), Bélanger
(Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Iles), Mme Hovington (Matane), M.
Séguin (Montmorency), Mmes Trépanier (Dorion), Bélanger
(Mégantic-Compton), MM. Fortin (Marguerite-Bourgeoys), Parent
(Sauvé), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix),
Brouillette (Champlain), Camden (Lotbinière), Mme Cardinal
(Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), MM. Farrah (Îles-de-la-Madeleine),
Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet),
Gobé (Lafontaine), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois
(Huntingdon), Bissonnet (Jeanne-Mance), Hains (Saint-Henri), Houde (Berthier),
Kehoe (Chapleau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Leclerc (Taschereau),
Hétu (Labelle), Joly (Fabre), Khelfa (Richelieu), Lemieux (Vanier),
Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Richard
(Nicolet), Tremblay (Rimouski), Tremblay (Iberville), Thérien
(Rousseau), Théorêt (Vimont), Saint-Roch (Drummond),
Le Président: Que les députés qui s'opposent
à cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Johnson (Anjou), Chevrette
(Joliette), Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Jolivet
(Laviolette), Garon (Lévis), Rochefort (Gouin), Charbonneau
(Verchères), Mme Juneau (Johnson), MM. Gendron (Abitibi-Ouest), Brassard
(Lac-Saint-Jean), Filion (Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Mme
Vermette (Marie-Victorin), MM. Paré (Shefford), Claveau (Ungava),
Boulerice (Saint-Jacques), Blais (Terrebonne), Dufour (Jonquière),
Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve),
Le Secrétaire: Pour: 85
Contre: 22
Le Président: La motion du ministre du Travail concernant
le projet de loi 119 est adoptée.
Motions sans préavis.
M. Gratton: M. le Président, motion de renvoi.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que le
projet de loi 119 soit déféré à la commission de
l'économie et du travail pour étude détaillée.
Le Président: Est-ce que cette motion de renvoi est
adoptée?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président: Adopté.
Motions sans préavis.
Je vais maintenant suspendre les travaux de cette Assemblée pour
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 12)
(Reprise à 11 h 17)
Le Président: Nous allons maintenant continuer les
affaires courantes.
Avis touchant les travaux des commissions.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: M. le Président, avec le consentement des
membres de l'Assemblée, j'aimerais apporter une correction à la
motion de renvoi du projet de loi 135, Loi modifiant la Loi sur les allocations
familiales et la Loi sur les impôts. Hier, celle-ci a été
déférée pour étude détaillée à
la commission du budget et de l'administration. Jusque-là il n'y a pas
de problème, sauf que la motion visait également à ce que
la commission soit présidée par un président de
séance. Or, on voudrait, au contraire, que la commission soit
présidée par le président de la commission qui est le
député de Vanier. Si les membres y consentent, je voudrais que la
motion soit corrigée en conséquence.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour cette
modification? Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée
qu'aujourd'hui, de 11 heures à 13 heures, de 15 heures à 18
heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil
législatif, la commission de l'économie et du travail
procédera à des consultations particulières dans le cadre
de l'étude du projet de loi 119, Loi modifiant la Loi sur les relations
du travail dans l'industrie de la construction. Oui, oui, je m'excuse,
effectivement, c'est 11 h 30; c'était la décision de la
commission. Je corrige donc: La commission siégera de 11 h 30 à
13 heures.
Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15
heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des
équipements poursuivra l'étude détaillée des
projets de loi suivants et ce, dans l'ordre
indiqué: le projet de loi 127, Code de la sécurité
routière; le projet de loi 121, Loi concernant certaines
rétrocessions de droits dont le gouvernement est devenu titulaire par
expropriation avant le 1er avril 1976; le projet de loi 144, Loi modifiant la
Loi sur les transports. De 15 heures à 18 heures et, si
nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 135, Loi modifiant la Loi sur les allocations familiales et la Loi sur les
impôts.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres avis? Nous allons
maintenant passer aux renseignements concernant les travaux de
l'Assemblée. Nous allons appeler les affaires du jour. Normalement, aux
affaires du jour aujourd'hui, je me devais d'appeler la motion de censure
présentée par l'Opposition. On m'a dit qu'il y avait une demande,
M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Je vais demander au leader du gouvernement de nous
faire part de l'entente intervenue entre les deux formations politiques.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président, on sait que la motion de
censure prévue par notre règlement aurait dû normalement
être débattue dès maintenant. Mais, à la suite
d'échanges, de façon à permettre au premier ministre de
participer au débat sur cette motion, l'Opposition et le gouvernement se
sont entendus pour que le débat ait lieu et ce, avec le consentement
unanime, le lundi 8 décembre, de 15 heures à 17 heures. Je
voudrais qu'on en fasse un ordre de l'Assemblée.
Le Président: Si j'ai bien saisi, la motion de censure
sera débattue de 15 heures à 17 heures lundi prochain en cette
Chambre. Le temps sera réparti comme suit: une heure de chaque
côté. Je pense que les dix dernières minutes seront
réservées pour la réplique de celui qui a proposé
la motion. C'est bien cela, 55 minutes chacun et un droit de réplique de
10 minutes?
M. Gratton: D'accord.
Le Président: Je m'excuse. Et toute liberté
à l'intérieur de chacune des enveloppes quant à la
durée des interventions. En faites-vous un ordre de
l'Assemblée?
M. Gratton: Oui.
Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement,
aux affaires du jour.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler
l'article 34 du feuilleton.
Projet de loi 147 Adoption du principe
Le Président: À l'article 34 du feuilleton, M. le
ministre délégué à la Réforme
électorale propose l'adoption du principe du projet de loi 147, Loi
modifiant la Loi sur la délimitation des circonscriptions
électorales. M. le ministre délégué à la
Réforme électorale, vous avez la parole.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président. Je tenterai
brièvement d'expliquer le pourquoi de ce projet de loi en
commençant par expliquer l'objet du projet de loi. Effectivement, il
s'agit pour l'Assemblée nationale de décider s'il est opportun de
reporter les travaux de la Commission de la représentation quant au
découpage de la carte des circonscriptions électorales, du 2
décembre, c'est-à-dire mardi dernier, date à laquelle on
devait procéder à ces travaux, au 1er mai prochain de
façon à permettre à un certain nombre de choses de se
produire.
Je voudrais d'abord, M. le Président, situer ce projet de loi
dans la chronologie des étapes que nous avons franchies depuis
décembre dernier. On sait que la Loi sur la représentation
électorale exige de la Commission de la représentation de
procéder, dès le lendemain d'une élection
générale, à des travaux préparatoires à la
production de rapports qui, éventuellement, en fonction d'un processus
qui est défini dans toutes ses étapes dans la loi, permettent
d'arriver à la délimitation des circonscriptions
électorales.
Or, au lendemain des élections du 2 décembre dernier, le
gouvernement avait décidé de procéder à un examen
complet tant de la Loi sur la représentation électorale que de la
Loi électorale elle-même. En accord avec l'Opposition, nous avions
convenu d'adopter le projet de loi 23 qui faisait en sorte que les travaux qui
devaient normalement débuter le 2 décembre dernier,
c'est-à-dire au lendemain de l'élection générale,
soient reportés au 2 décembre 1986, c'est-à-dire à
mardi dernier. D'ailleurs, une commission parlementaire avait entendu le
Directeur général des élections à cet effet. On
s'était assuré que ce délai d'un an ne porterait pas
préjudice à
la possibilité de confectionner une nouvelle carte
électorale à temps pour une prochaine élection
générale éventuelle. Le projet de loi 23 fut donc
adopté à l'unanimité par les membres de l'Assemblée
le 27 mars 1986.
Je m'étais engagé auprès de la commission des
institutions, qui avait entendu le Directeur général des
élections à ce moment-là, à faire en sorte que
toutes les formations politiques représentées à
l'Assemblée nationale soient consultées avant de revenir devant
l'Assemblée nationale avec des modifications à la Loi
électorale parce que nous savions, d'ores et déjà, au
lendemain de l'élection, qu'il y aurait des modifications à
apporter à la loi puisque nous avions convenu à la commission
parlementaire sur le projet de loi 23 que les critères qui
président à la délimitation des circonscriptions
nécessitaient des changements.
En effet, le Directeur général des élections nous
avait indiqué qu'à partir des barèmes présentement
inscrits dans la loi il constatait déjà qu'une douzaine de
circonscriptions électorales ne répondaient plus aux
critères actuels et que nous devrions donc les modifier, sinon, nous
serions exposés à voir la nouvelle carte comporter un certain
nombre de circonscriptions électorales additionnelles ou à avoir
un nombre accru de circonscriptions électorales qui feraient exception
aux critères présentement inscrits dans la loi. Nous avions
également convenu avec l'Opposition qu'il n'était pas dans
l'intérêt de l'Assemblée nationale de permettre qu'on
ajoute un trop grand nombre de circonscriptions électorales. J'avais
pris l'engagement de faire une réflexion en profondeur sur l'ensemble de
la Loi sur la représentation électorale et de faire rapport aux
membres de l'Assemblée dans les meilleurs délais.
Or, en août dernier, le Secrétariat à la
réforme électorale déposait un rapport dans lequel on
proposait une certaine orientation. Je n'irai pas sur le fond de ce rapport, M.
le Président, puisque l'aboutissement de notre démarche nous
amènera en commission parlementaire, dès janvier prochain, pour
dégager les consensus qui peuvent exister sur les divers
éléments de ce rapport. Ce rapport préparé par le
Secrétariat à la réforme électorale fut transmis
dans les jours suivants à l'Opposition, de même qu'à la
Tribune de la presse pour diffusion, ainsi qu'au Directeur
général des élections à qui nous avions
demandé de nous fournir ses commentaires ou suggestions quant à
la portée et quant à l'administration d'une loi qui comporterait
les changements prévus ou proposés dans ce rapport.
Par la suite, il y eut des pourparlers entre l'Opposition et le
gouvernement quant à la démarche à suivre. À la
suite des commentaires du Directeur général des élections,
lesquels nous furent fournis le 14 octobre 1986, nous dûmes constater
que, compte tenu de la date, il devenait impossible de présenter un
projet de loi pour adoption avant le 19 décembre, à moins
d'obtenir des consentements, lesquels étaient loin d'être
assurés, sur l'ensemble des propositions du secrétariat.
L'Opposition avait, d'ailleurs, indiqué dès le
début, au moment de la réception du rapport du secrétariat
et des commentaires éventuels du Directeur général des
élections, son accord pour retarder à nouveau les travaux de la
Commission de la représentation si cela devait permettre de
procéder par consensus, ce à quoi je m'étais
engagé, je le répète, M. le Président, au moment de
l'étude du projet de loi 23.
Effectivement, la semaine dernière, je crois que c'était
le 27 novembre, nous avons convoqué la commission des institutions. Nous
avons entendu le Directeur général des élections pour nous
assurer que, si le projet de loi 147 était adopté,
c'est-à-dire que si nous reportions à nouveau le début des
travaux de la Commission de la représentation au 1er mai, cela ne
comporterait aucun problème insurmontable pour assurer que nous aurions
une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales
suffisamment de temps avant la prochaine élection générale
pour que tous, les partis politiques et les citoyens, en soient les mieux
informés possible. (11 h 30)
C'est le constat qu'à mon avis nous avons pu faire en commission
parlementaire, avec la participation du Directeur général des
élections, le 27 novembre dernier. À cette commission, j'ai pris
l'engagement auprès des membres de la commission de procéder
d'une façon très précise. Je voudrais maintenant faire
part à l'ensemble de l'Assemblée de l'engagement que je
réitère à l'égard de la démarche à
poursuivre pour que nous en arrivions à ce que la Commission de la
représentation puisse débuter ses travaux le 1er mai. Je
présenterai même, tantôt, un amendement au projet de loi qui
nous permettra de prévoir le début des travaux même avant
le 1er mai si l'Assemblée nationale ou une commission parlementaire
qu'elle désigne décidait d'autoriser la commission à
entreprendre les travaux de délimitation.
Je me suis engagé et je m'engage au nom du gouvernement à
ce qu'une commission parlementaire ait lieu au plus tard au début de
février, mais j'opterais dès maintenant pour la troisième
semaine de janvier, si cela agrée aux membres de la commission. À
cette commission parlementaire, à partir du rapport du
Secrétariat à la réforme électorale, nous
examinerions là où il y a consensus,
consensus étant défini, pour ma part, comme étant
l'agrément ou l'approbation des partis politiques
représentés à l'Assemblée nationale, soit, pour les
nommer, le Parti québécois et le Parti libéral du
Québec.
Je m'engage également à ce que, lors de cette commission,
les sujets qui auront fait l'objet du consensus soient transcrits dans un
projet de loi qui serait déposé ici, à l'Assemblée
nationale, à temps pour qu'il soit adopté avant le 1er mai 1987,
c'est-à-dire avant le moment prévu pour le début des
travaux de la Commission de la représentation. C'est dans le but de
respecter les engagements premiers que j'avais pris, de faire en sorte que,
lorsque nous légiférerons sur toute matière touchant
l'exercice du droit de vote - on sait que la représentation
électorale, la délimitation des circonscriptions
électorales, c'est la base même de l'exercice du droit de vote -
nous le ferions, sinon à l'unanimité des membres, tout au moins
à l'unanimité des formations politiques
représentées à l'Assemblée nationale. C'est
l'engagement que je réitère aujourd'hui, M. le
Président.
Je résume. Une commission parlementaire dès la
troisième semaine de janvier; en tout cas, au plus tard au début
de février. Nous conviendrons du mandat de cette commission avant
l'ajournement des fêtes. Nous fixerons également la date exacte de
la commission parlementaire avant l'ajournement des fêtes. À cette
commission parlementaire, nous dégagerons les consensus sur les divers
éléments que contient le rapport du Secrétariat à
la réforme électorale, mais aussi sur tout autre sujet qui a
trait à la représentation électorale et dont tout membre
de la commission pourra saisir la commission.
En même temps à cette commission, nous évaluerons,
à partir des consensus que nous aurons dégagés, s'il est
utile ou souhaitable que la Commission de la représentation
débute ses travaux même avant le 1er mai, en fonction de
l'amendement que je présenterai tantôt, et dont j'ai remis copie
au député de Gouin, le porte-parole de sa formation politique en
la matière. Donc, le projet de loi lui-même devant amender la loi
actuelle sur la représentation électorale pourrait être
déposé, uniquement à partir des consensus
dégagés, au début de la prochaine partie de la session -
je crois que c'est la deuxième semaine de mars - pour être
adopté avant le 1er mai, et ainsi être assuré que la
nouvelle carte électorale soit en vigueur amplement à temps pour
que tous les citoyens, les formations politiques, bref tous ceux qui
s'intéressent à la question puissent en être
informés bien avant la prochaine élection
générale.
M. le Président, voilà en résumé ce que nous
avons convenu de faire à la commission parlementaire du 27 novembre
dernier. Je souhaite que l'Opposition réagisse favorablement à
cette proposition et nous pourrons ainsi adopter le projet de loi 147
dès ce matin. J'avise d'ailleurs que je proposerai que nous
procédions à l'étude détaillée à la
commission plénière immédiatement après l'adoption
du principe du projet de loi 147 de façon à me permettre de
déposer l'amendement dont j'ai parlé quant à la reprise
des travaux, qui pourrait être possible en fonction d'une décision
de l'Assemblée ou d'une commission qu'elle désigne, et,
deuxièmement, pour corriger une erreur de frappe dans les dates que
contient l'article actuel alors que c'est strictement une erreur de typographie
qui fait que la date du 15 septembre devra être remplacée par
celle du... C'est-à-dire que le mot "novembre" dans l'article 1 soit
remplacé par le mot "septembre".
J'attends les commentaires de l'Opposition. Si j'ai omis de faire
état de quelque élément que ce soit dont nous avons
parlé à la commission parlementaire ou dans les rencontres que
j'ai eues avec l'Opposition depuis cette commission parlementaire, je fournirai
les détails sur demande du député de Gouin.
J'espère que nous pourrons tous ensemble procéder pour faire en
sorte que dans les meilleurs délais nous puissions donner les
instructions nécessaires au Directeur général des
élections par voie d'amendement à la Loi sur la
représentation électorale, de façon que les travaux
puissent être entrepris eux aussi dans les meilleurs délais.
Le Président: Je remercie M. le ministre
délégué à la Réforme électorale.
Maintenant, toujours à l'étape de l'adoption du principe du
projet de loi 147 présenté par M. le ministre, je vais
céder la parole à M. le député de Gouin. M. le
député.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Merci, M. le Président. D'entrée de
jeu, je veux dire aux membres de l'Assemblée nationale que, du
côté de ma formation politique, nous considérons que le
Québec a connu des progrès importants, fondamentaux au plan de la
démocratisation de nos institutions politiques au cours des dix, quinze
dernières années.
Nous avons aujourd'hui un processus électoral qui suscite la
confiance des hommes et des femmes qui sont appelés à participer
à ce processus électoral, c'est-à-dire la population du
Québec. Nous avons réussi à atteindre un niveau de
qualité et de profondeur de démocratisation de nos institutions
politiques qui fait que nous avons une participation importante de nos citoyens
et de nos citoyennes à la chose politique par un nombre
élevé de nos concitoyens et
concitoyennes qui sont membres de partis politiques, qui souscrivent
à la caisse électorale de partis politiques, qui participent
à la vie des partis politiques, qui participent à l'organisation
des campagnes électorales et qui, ultimement, massivement, participent
par l'exercice de leur droit de vote au choix de leurs dirigeants politiques.
(11 h 40)
Si nous assistons à une telle confiance, à une telle
importance quant à la participation de nos citoyens et de nos citoyennes
à chacune des étapes et à chacune des phases de notre vie
politique, c'est que nous avons réussi à nous bâtir un
modèle proprement québécois, supérieur à ce
que nous rencontrons dans bon nombre de sociétés occidentales
quant à la démocratisation de nos institutions politiques. Nous
considérons qu'il s'agit là d'un acquis important, d'un acquis
fondamental pour le peuple québécois, d'un acquis qui fait la
fierté de l'ensemble des Québécois et des
Québécoises et qui est très souvent cité en
modèle ailleurs, dans les autres provinces canadiennes, chez nos voisins
des États-Unis et dans plusieurs pays occidentaux comme étant
à un modèle de démocratisation plein, complet et large de
nos institutions politiques. Pour nous, il faut que, dans cette constante
recherche d'une démocratisation la plus grande et la plus
élevée possible de nos institutions politiques, nous en arrivions
à maintenir en totalité les acquis que nous avons
accumulés au fil des années, que nous avons atteints au cours des
différentes Législatures que les Québécois et les
Québécoises ont connues au cours des dernières
décennies et que nous continuions à progresser dans cette voie
d'une démocratisation toujours de plus en plus large, de plus en plus
grande, de plus en plus profonde de nos institutions politiques.
Cette réflexion doit être toujours animée
prioritairement, avant toute autre considération, par cette
première grande préoccupation qui est celle de maintenir et
d'accroître dans la mesure du possible cette confiance que les hommes et
les femmes du Québec ont acquise dans leurs institutions politiques. Si
nous voulons que l'Assemblée nationale demeure l'Assemblée
nationale du peuple québécois, une Assemblée nationale
représentative, une Assemblée nationale respectée par
l'ensemble de nos concitoyens et de nos concitoyennes, c'est à cette
condition et à cette seule condition que nous pourrons atteindre cet
objectif, condition qui est de maintenir nos acquis en termes de
démocratisation de nos institutions et qu'à chaque fois que nous
posons un geste ce geste nous permette d'accroître, de progresser quant
à cette démocratisation et non pas à faire du surplace, ou
encore moins à reculer quant à cette démocratisation de
nos institutions politiques que nous avons connues et dont nous sommes tous
fiers.
D'ailleurs, M. le Président, personne au Québec n'est venu
remettre en cause, particulièrement dans le dossier qui nous occupe, la
mécanique, la procédure qui a été
arrêtée par l'Assemblée nationale du Québec il y a
une dizaine d'années pour délimiter les circonscriptions
électorales du Québec. Cette façon de délimiter les
circonscriptions électorales que nous avons conçue entre nous,
Québécois et Québécoises, est une formule qui, je
devrais dire, non seulement fait plus que consensus, fait presque
l'unanimité dans notre société, mais c'est une formule que
bon nombre d'autres sociétés envient et que bon nombre d'autres
sociétés tentent de copier pour atteindre ce degré
élevé de perfection et d'impartialité du processus de
délimitation des circonscriptions électorales au
Québec.
Deuxièmement, lorsque le leader du gouvernement, le ministre
délégué à la Réforme électorale, a
déposé le projet de loi 23 en mars dernier, qui visait à
reporter d'une année le processus d'enclenchement de toute une nouvelle
délimitation des circonscriptions électorales du Québec,
la position de ma formation politique a été la suivante: D'une
part, nous avons demandé et obtenu de bon gré du ministre que ce
processus soit reporté pour une période d'une année
seulement et que ce processus puisse être réenclenché
automatiquement sans une nouvelle démarche de l'Assemblée
nationale du Québec, contrairement à ce qui nous était
proposé au départ, et je rappelle quel était le premier
contenu du projet de loi 23. Le projet de loi 23 nous demandait de suspendre
l'enclenchement du processus de délimitation des circonscriptions
électorales et demandait à l'Assemblée nationale de
confier au gouvernement la décision de réenclencher ce processus
de délimitation des nouvelles circonscriptions électorales au
moment où il le jugerait opportun. M. le Président, nous avons
donc souhaité que nous limitions cette suspension et que nous la
limitions d'une façon automatique afin que nous puissions
concrètement, dès ce moment, maintenir nos acquis en ces
matières qui font que maintenant les partis politiques ne soient
associés à aucune des étapes du processus
décisionnel de délimitation des circonscriptions
électorales du Québec. Rappelons-nous notre passé
récent en cette matière où les partis politiques
étaient impliqués directement dans ce processus de
délimitation des circonscriptions électorales et où
l'ensemble des membres de cette Assemblée nationale avait un rôle
prépondérant dans la délimitation des circonscriptions
électorales. Cela nous avait menés à des situations
où il y avait du découpage sur mesure qui était fait par
des partis politiques représentés à l'Assemblée
nationale. Nous considérions et nous considérons toujours que le
fait d'avoir retiré
toute implication directe dans les décisions qui mènent
aux délimitations des circonscriptions électorales, d'avoir
retiré tout pouvoir, toute implication aux partis politiques et aux
membres de l'Assemblée nationale, nous donne aujourd'hui non seulement
une meilleure carte électorale plus soucieuse de l'ensemble des
particularités régionales et locales que nous retrouvons dans
l'ensemble des régions et des localités du Québec, mais
nous permet aussi d'obtenir une carte électorale qui n'est
discutée quant à son impartialité et quant à son
objectivité par quiconque dans la société
québécoise.
Ce sont ces motifs et ces principes fondamentaux qui sont les
nôtres qui nous ont amenés à proposer au gouvernement qu'on
ne suspende pas de façon indéterminée le processus de
délimitation des circonscriptions électorales et que,
contrairement à la proposition qui nous avait été faite,
on ne laisse pas entre les mains du seul gouvernement la décision de la
date du départ du processus de délimitation des circonscriptions
électorales, mais que ce nouveau départ soit automatique et que,
si un jour quelqu'un devait se repencher dessus, ce soit l'ensemble des membres
de l'Assemblée nationale, pour qu'on en arrive encore une fois à
un consensus des formations politiques.
Aujourd'hui, le leader du gouvernement, ministre
délégué à la Réforme électorale, nous
demande de reporter, une nouvelle fois, la date du départ de cette mise
en application visant à refaire les délimitations des
circonscriptions électorales du Québec. Je dis
immédiatement que lorsque ce projet de loi nous a été
soumis, quant à l'effet de reporter, une nouvelle fois, ce départ
du processus de redélimitation des circonscriptions électorales,
faisant passer ce départ, cette fois, du 2 décembre 1986 au 1er
mai 1987, nous avions des réticences et des objections importantes.
Pourquoi avions-nous des objections importantes? Dans un premier temps - je
l'affirme au nom de ma formation politique - nous jugeons absolument essentiel
qu'une nouvelle refonte de la carte électorale soit
réalisée avant le prochain scrutin général au
Québec, tel que la Loi sur la représentation électorale,
qui a été adoptée, ici, à l'Assemblée
nationale, le dicte et le commande. Si nous ne procédons pas à
une nouvelle refonte de la carte électorale avant le prochain scrutin
général, nous nous retrouverons dans la même situation que
celle que nous avons connue à plusieurs reprises dans le passé,
où l'on se retrouvera, encore une fois, comme au moment où nous
nous parlons à la suite du scrutin du 2 décembre 1985, où
des hommes et des femmes siègent, ici, à l'Assemblée
nationale en représentant 24 000, 25 000 ou 26 000 électeurs et
que d'autres siègent ici avec le même pouvoir, pas moins, pas
plus, et avec le même poids politique, pas moins, pas plus, que ces
mêmes députés, alors qu'ils représentent des
circonscriptions électorales qui regroupent 50 000, 52 000, 53 000, et
même, dans certains cas, 54 000 électeurs. (11 h 50)
Voilà une situation qui doit être corrigée en
permanence pour que nous maintenions ce grand principe universellement reconnu
dans le monde occidental et reconnu depuis toujours par les membres de cette
Assemblée, celui de l'égalité entre les électeurs
du Québec, ce vieux principe d'un homme un vote, une femme un vote, de
façon que tous les citoyens du Québec soient sur un même
pied quant au poids politique qu'ils ont sur les décisions prises
à l'Assemblée nationale du Québec et qui ont des effets
sur leur vie de tous les jours.
Faut-il le rappeler, sans vouloir faire un exposé de sciences
politiques, si nous avons un processus électoral, si nous avons des
institutions politiques qui font que 122 hommes et femmes du Québec se
retrouvent ici pour prendre des décisions qui affectent la vie
quotidienne de toute la population, c'est parce qu'on ne peut demander à
6 500 000 personnes de se réunir à tous les jours pour prendre
des décisions collectivement qui affectent leur vie de tous les jours.
Si nous avons des institutions politiques c'est parce que ces 6 500 000
personnes ont décidé, comme dans le plupart des autres
sociétés, de déléguer cette responsabilité
et ces pouvoirs qui sont les leurs à 122 personnes qui consacrent tout
leur temps à prendre des décisions en leur nom, au nom de ces
hommes et de ces femmes qui constituent le peuple québécois.
Il faut donc nous assurer, même si nous sommes
délégués pour prendre des décisions ici même
en leur nom, que nous sommes parfaitement représentatifs de chacun
d'entre eux. La meilleure façon d'être parfaitement
représentatifs de chacun d'entre eux, c'est d'avoir un processus
électoral parfaitement démocratique et, deuxièmement,
d'avoir des hommes et des femmes élus ici, qui ont tous un poids
politique identique et qui représentent tous un nombre
d'électeurs à peu près comparable de sorte que,
ultimement, cette souveraineté du peuple québécois soit
assumée de façon égale, c'est-à-dire que chaque
citoyen est égal devant ses concitoyens et concitoyennes dans cette
grande vie démocratique qui est absolument nécessaire et qui est
la nôtre au Québec.
Donc, nous souhaitons que cette réforme de la carte
électorale puisse entrer en vigueur avant le prochain scrutin
général, ce qui nous donnera des garanties que cette carte
électorale continuera d'évoluer au rythme de nos
déplacements de population au Québec et sera respectueuse des
évolutions et des changements démographiques que nous connaissons
au Québec. Nous maintiendrons
ainsi ce principe fondamental qui est la pierre d'assise de nos
institutions politiques et de nos institutions démocratiques, celui de
l'égalité entre les électeurs et entre ceux et celles qui
composent le corps électoral du Québec.
Deuxièmement, nous souhaitons que ce travail soit toujours fait
par une commission indépendante des formations politiques, par une
commission impartiale qui ne rencontre aucune entrave et dans laquelle il n'y a
aucun rôle décisionnel direct ou indirect d'un, deux ou de tous
les membres de l'Assemblée ou de l'une ou l'autre des formations
politiques présentes sur le territoire du Québec. Nous souhaitons
et nous défendrons le maintien d'une commission impartiale sur laquelle
les hommes et les femmes politiques du Québec, comme les formations
politiques du Québec, n'auront aucune prise, aucune influence directe
face aux décisions à prendre.
Voilà les grands principes que nous voulons faire valoir dans
cette refonte de la carte électorale d'ici les prochaines
élections. C'est à partir de ces principes que, comme je le
disais tantôt, nous avions des inquiétudes et des objections
à reporter une nouvelle fois la date du départ de
l'opération de la nouvelle délimitation des circonscriptions
électorales. Car il faut savoir que le 1er mai 1987, selon les tableaux
qui nous ont été fournis par le Directeur général
des élections, nous menait à une nouvelle carte électorale
qui entrerait en vigueur de façon opérationnelle, pour l'ensemble
des Québécois et des Québécoises, des formations
politiques et des hommes et des femmes qui les composent, quelque part au
printemps de l'année 1989, donc dans la quatrième année de
mandat du gouvernement. Il faut se rappeler que nous n'avons pas des
institutions politiques où les scrutins sont à date fixe et qu'en
conséquence il faut que nous nous dotions d'un calendrier qui nous
assure que, le jour où le premier ministre décidera d'annoncer et
de décréter une élection générale, ce
travail de refonte de la carte électorale aura été
effectué suffisamment longtemps à l'avance pour qu'il puisse
faire en sorte que cette élection soit tenue sur la base de cette
nouvelle carte électorale qui maintiendra le degré
élevé de démocratisation de notre processus
électoral et donc de représentativité parfaite de
l'ensemble des électeurs, des hommes et des femmes qui constituent le
collège électoral du Québec.
Si nous avons progressé dans notre réflexion, c'est, d'une
part, parce que nous avons eu l'occasion, avec le ministre
délégué à la Réforme électorale et un
certain nombre de ses collègues, de bien étudier les calendriers
qui nous ont été soumis par le Directeur général
des élections et d'avoir l'ensemble des assurances que nous
recherchions. Tous ensemble, les deux formations politiques et
particulièrement le gouvernement, puisque l'initiative des travaux
parlementaires revient au gouvernement, nous ferions en sorte de travailler
maintenant, quitte à prendre les bouchées doubles, afin que, le
plus tôt possible, mais de façon convenable et respectueuse des us
et coutumes en cette matière, nous puissions procéder à
cette refonte de la carte électorale.
Nous reconnaissons en ce sens que les ouvertures, les propositions qui
nous ont été faites par le ministre délégué
à la Réforme électorale nous permettent d'envisager, dans
la mesure où ces ouvertures seront respectées - je crois qu'elles
seront respectées par le ministre et son gouvernement - que nous
puissions étudier ces questions, y réfléchir dans des
délais qui nous permettront quand même de procéder à
cette refonte de la carte et faire en sorte que cette carte soit
opérationnelle, soit effective à l'occasion de la prochaine
élection générale. C'est d'ailleurs en ce sens que nous
avons souhaité que le leader du gouvernement nous présente un
amendement que nous discuterons tout à l'heure en comission
plénière qui aura pour effet de permettre à la commission
parlementaire qui se réunira en janvier prochain non pas de faire en
sorte que nous attendions au 1er mai pour amorcer le processus de refonte de la
carte mais que, dès la fin de nos travaux en janvier prochain, lorsque
nous aurons fait la liste des consensus, donc des accords auxquels les deux
formations politiques en sont arrivés, puisque le leader du gouvernement
s'engage à ne légiférer que sur les accords intervenus
entre les deux formations politiques, dès le moment où ces
accords seront connus, dis-je, c'est-à-dire fin janvier, début
février, la Commission de la représentation puisse
immédiatement entreprendre son travail de préparation de son
rapport préliminaire. Cela nous fera gagner quatre ou cinq mois de
travaux et nous permettra même de devancer la date finale à
laquelle cette nouvelle carte électorale pourrait entrer en vigueur.
Nous discuterons tout à l'heure de cet amendement. (12 heures)
La deuxième raison qui fait que nous sommes prêts à
concourir à l'adoption du projet de loi 147, c'est que le leader du
gouvernement, le ministre délégué à la
Réforme électorale, y est allé d'engagements très
clairs et très formels en son nom personnel et au nom de son
gouvernement pour que, dans le projet de loi amendant la Loi sur la
représentation électorale, les amendements qui seront
déposés et adoptés par l'Assemblée nationale au
cours de la prochaine session ne seront que des amendements qui ont fait
l'objet d'accords entre les
deux formations politiques représentées à
l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le Parti libéral et le
Parti québécois. À partir du moment où le leader du
gouvernement nous donne l'assurance qu'on ne tentera pas d'imposer à
l'Opposition et aux autres Québécois et Québécoises
des modifications au processus de représentation électorale mais
qu'au contraire le gouvernement s'engage à se limiter - et c'est bien ce
que je comprends de l'engagement du leader du gouvernement - comme au printemps
dernier, à légiférer sur les sujets sur lesquels il y a un
accord formel entre les deux formations politiques, accord devant intervenir au
cours de la commission parlementaire qui se tiendra à la fin de janvier
et au début du mois de février prochain, cela nous donne des
assurances de cette volonté de poursuivre le processus d'ajustement,
d'amélioration de nos lois électorales à partir des
mêmes procédures qui ont été utilisées au
cours des dernières années.
Faut-il rappeler que la dernière élection
générale au Québec, celle du 2 décembre 1985, s'est
tenue selon une Loi électorale profondément modifiée,
selon une Loi régissant les listes électorales qui a connu des
changements importants, sur une Loi sur le financement des partis politiques
qui avait connu des ajustements substantiels. Tous ces changements
étaient le fruit d'accords formels entre le Parti libéral, qui
constituait l'Opposition à cette époque, et le Parti
québécois qui formait le gouvernement. Je décrirai comment
cela s'est déroulé, M. le Président.
Nous siégions au conseil consultatif présidé par le
Directeur général des élections, où nous
retrouvions un certain nombre de techniciens du Directeur général
des élections, du Parti libéral du Québec et du Parti
québécois en présence de l'actuel ministre des Transports,
député de Charlesbourg, qui représentait, à ce
comité, le Parti libéral qui formait l'Opposition et moi, comme
député de Gouin, représentant la majorité
gouvernementale de l'époque, du Parti québécois.
Comment avons-nous procédé? Le député de
Charlesbourg proposait des modifications, nous nous entendions sur le contenu
de ces modifications et c'était inclus dans le projet de loi. Le
Directeur général des élections proposait des
modifications. S'il y avait accord entre le député de
Charlesbourg et le député de Gouin, nous mettions cet article
dans le projet de loi à être déposé. Je faisais des
propositions qui obtenaient l'accord du député de Charlesbourg et
de sa formation politique, cette disposition était amenée dans le
projet de loi.
À partir du moment où, soit le député de
Charlesbourg, soit le Directeur général des élections ou
le député de Gouin proposait une modification qui ne rencontrait
pas l'accord de l'autre formation politique, automatiquement, nous prenions le
sujet, l'article proposé, nous le mettions de côté et
jamais le Parti québécois, lorsqu'il formait le gouvernement au
cours de ces procédures, n'a tenté de ramener des modifications
sur lesquelles il n'y avait pas eu accord formel entre les deux formations
politiques.
Cela nous a menés à une refonte importante de la Loi
électorale, à des modifications majeures à la Loi
régisant les listes électorales et à des ajustements
substantiels à la Loi sur le financement des partis politiques qui ont
été mises en application au cours de la dernière
élection générale et qui n'ont posé de
problèmes à personne. Jamais personne n'est venu contester la
légitimité de ces dispositions et l'impartialité dans
laquelle ces dispositions avaient été décidées.
Dans la mesure où le ministre délégué
à la Réforme électorale et leader parlementaire nous dit
que nous allons procéder de la même façon, par le biais
d'une commission parlementaire, dans le cadre de la Loi sur la
représentation électorale, c'est-à-dire que nous
discuterons tous ensemble publiquement, ouvertement, en commission
parlementaire, de l'ensemble des recommandations du rapport Rémillard,
des recommandations qui pourraient nous venir du Directeur
général des élections ou de toute autre suggestion qui
pourrait nous venir des membres de cette commission parlementaire, lorsqu'il y
aura accord, nous inclurons ces accords dans la liste des
éléments que contiendra le projet de loi et lorsqu'il n'y aura
pas accord entre les deux formations politiques, nous suspendrons et nous
reporterons ultérieurement les amendements que le gouvernement, un
membre ou le directeur général souhaitait apporter, dans la
mesure, donc, où le projet de loi qui sera déposé au
printemps prochain reflétera les accords, les ententes intervenues entre
les deux formations politiques présentes en cette Chambre et qui
composeront cette commission parlementaire. Il s'agit de garanties qui nous
permettent aujourd'hui de souscrire à l'adoption du projet de loi
147.
Je le répète, cette attitude et ces engagements formels du
leader du gouvernement, alliés à cette volonté
exprimée qui sera débattue tantôt en commission
plénière, de permettre à la Commission de la
représentation électorale de commencer ses travaux dès la
conclusion de la commission parlementaire qui aura identifié les
consensus, donc qui nous permettra de gagner du temps, gui ajoutera quant aux
garanties que nous aurons que la prochaine élection
générale se tiendra avec une nouvelle carte électorale,
font en sorte que nous sommes prêts à collaborer pleinement avec
le ministre délégué à la Réforme
électorale et
que nous sommes en mesure d'appuyer l'adoption du projet de loi 147.
J'ajoute que nous souhaitons, comme l'a dit le leader du gouvernement,
que le mandat, la durée et le moment de cette commission parlementaire
soient définis ici à l'Assemblée nationale par un mandat
de la Chambre avant l'ajournement du 19 décembre et que, quant à
nous, ce mandat devrait se résumer pour l'essentiel à
étudier les recommandations du rapport Rémillard que pourrait
nous faire le Directeur général des élections ou tout
membre de la commission parlementaire et que le mandat de cette commission
serait d'étudier l'ensemble de ces recommandations, d'identifier les
sujets d'accord entre les formations politiques et de recommander par la suite
un projet de loi qui reflétera en totalité et de façon
exclusive les accords intervenus entre les deux formations politiques.
Compte tenu que nous connaîtrons donc dès la fin de cette
commission parlementaire les sujets sur lesquels il y a accord, donc les sujets
qui seront compris dans le projet de loi, la Commission de la
représentation électorale pourrait commencer ses travaux
immédiatement, et tel est le voeu de l'Opposition. D'autant plus que les
quatre ou cinq premiers mois de ces travaux consistent à préparer
un rapport préliminaire, donc une proposition de refonte de la carte. Ce
n'est pas un processus public mais un processus de travail interne pour la
commission qui nous permettrait de gagner quatre ou cinq mois pour en arriver,
au moment de l'adoption du projet de loi, à ce que la commission soit
prête dès ce moment à partir en consultation
générale de l'ensemble des Québécois et des
Québécoises, des élus locaux et régionaux qui
voudraient faire part de leurs commentaires sur les propositions qui sont
faites et qui doivent recevoir les commentaires pour faire en sorte que
celles-ci tiennent bien compte des réalités locales et
régionales du Québec pour qu'elles suscitent l'adhésion et
la confiance d'une grande participation de nos citoyens au processus
électoral que nous connaissons.
Voici en gros les principes qui nous guident dans l'étude de ce
projet de loi, les objectifs que nous recherchons et les motifs de notre accord
au projet de loi.
Je conclus mon intervention en disant, M. le Président, que nous
sommes heureux de l'ouverture d'esprit, de l'attitude et des engagements
réitérés par le leader du gouvernement de procéder
par consensus, par accord des formations politiques sur ces questions. Je pense
que c'est le prix que nous devons payer pour conserver non seulement ce
degré élevé de démocratisation de nos institutions
et de notre processus électoral mais que c'est ce prix que nous devons
payer pour maintenir et accroître encore, dans la mesure du possible,
cette confiance et cette participation de l'ensemble de nos concitoyens et
concitoyennes du Québec à ce processus électoral qui n'est
pas le nôtre, qui n'est pas fait pour nous mais qui est le leur, qui est
fait pour qu'ils puissent être bien entendus, bien
représentés démocratiquement ici à
l'Assemblée nationale quand vient le temps de prendre des
décisions qui, ultimement, auront toujours des effets sur eux parce
qu'elles sont prises en leur nom et que les conséquences sont
portées par nos concitoyens et nos concitoyennes du Québec.
Je vous remercie M. le Président. Quant à nous, nous
sommes prêts à adopter le principe de ce projet de loi et, comme
l'a demandé le leader du gouvernement, à étudier les
différents articles en comission plénière.
Le Président: Merci, M. le député de
Gouin.
Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe...
M. le leader du gouvernement.
M. Michel Gratton (réplique)
M. Gratton: Brièvement, M. le Président, si on me
permet...
Une voix: En réplique. (12 h 10)
M. Gratton: ...en réplique, de donner quelques
précisions. Le député de Gouin a parlé, à
juste titre, de la confiance que doit avoir la population dans le processus
électoral, plus spécifiquement dans le processus de
délimitation des circonscriptions électorales. Cette confiance
qui existe effectivement existe surtout parce que tout le travail, tout le
processus est exécuté et réalisé par une commission
indépendante, la Commission de la représentation, qui est
composée de trois membres qui sont nommés par l'Assemblée
nationale aux deux tiers de ses membres, ce qui veut dire, en fait, à
l'unanimité, comme c'est le cas pour les trois membres qui sont
présentement à la commission, laquelle est présidée
par le Directeur général des élections.
Je voudrais, à ce moment-ci, en profiter pour rectifier une
affirmation que contenait une dépêche de la Presse canadienne,
à la suite de la commission parlementaire du 27 novembre dernier, qui
faisait allusion au fait que le rapport du Secrétariat à la
réforme électorale, communément appelé le rapport
Rémillard, avait proposé ou proposait le remplacement de
l'actuelle commission indépendante par un comité gouvernemental.
C'est ce que disait la dépêche. M. le Président, dans le
rapport de la commission, dans les affirmations du gouvernement, il n'a jamais
été question de procéder au remplacement de l'actuelle
commission par un comité gouvernemental; loin de là. Le
rapport indiquait fort bien, en parlant de changements possibles, que, d'abord,
la commission devait continuer d'exister, sinon de façon permanente,
tout au moins par la formule d'une commission ad hoc dont les membres seraient
nommés de la même façon que présentement,
c'est-à-dire par les deux tiers des membres de l'Assemblée
nationale. Il n'a jamais été question, il n'est pas question, il
ne sera pas question de retourner à ce qui a déjà
existé, c'est-à-dire un processus qui permettait aux partis
politiques d'intervenir. Évidemment, on conservera ce qui existe
déjà dans le processus actuel, c'est-à-dire la
possibilité pour les membres de l'Assemblée nationale, pour
toutes les personnes intéressées et pour la population de faire
valoir leur point de vue devant la Commission de la représentation. Mais
il n'a jamais été question - je le répète - il
n'est pas question et il ne sera jamais question de ne pas conserver le
caractère d'absolue indépendance que la Commission de la
représentation possède par rapport aux partis politiques.
Cela dit, M. le Président, je voudrais tout simplement accepter
de répéter que, oui, c'est l'intention du gouvernement, c'est mon
intention de faire en sorte que les modifications qu'on apportera à la
Loi sur la représentation électorale soient limitées
uniquement à celles qui auront fait l'objet d'un accord des partis
politiques représentés à l'Assemblée nationale. Je
l'ai dit et je le répète, il n'est pas question de faire quoi que
ce soit qui n'aura pas été agréé par les partis
politiques représentés à l'Assemblée nationale.
Je dis à l'avance au député de Gouin que je
tâcherai de le convaincre et de convaincre sa formation politique, en
commission parlementaire, du bien-fondé de la plupart des
éléments que contient le rapport Rémillard et d'autres
dont nous avons discuté depuis la production de ce rapport. Mais nous
nous limiterons dans les amendements apportés à la Loi sur la
représentation électorale uniquement à ces
éléments qui auront été l'objet d'un accord des
partis politiques représentés, de façon à faire en
sorte - je pense, d'ailleurs, que c'est la seule façon de
procéder - qu'on ne touche pas au processus électoral sans
l'assentiment... J'irais même jusqu'à dire, sauf des exceptions
que je ne peux pas m'imaginer, mais de façon unanime. Je pense que c'est
ce qu'on souhaite. C'est ce que nous rechercherons, et j'ai confiance que nous
obtiendrons l'unanimité de l'ensemble des 122 députés de
l'Assemblée nationale -évidemment, on l'a déjà;
j'en remercie le député de Gouin - sur l'adoption du principe du
projet de loi 147, mais également sur les amendements à apporter
à la loi.
J'ouvre une courte parenthèse pour dire que cela n'a pas toujours
été le cas. Il est vrai, comme l'évoquait le
député de Gouin, que tous les amendements à la loi
électorale qui ont été adoptés au cours des quatre
dernières années l'ont été unanimement après
des travaux au comité consultatif prévu dans la loi
électorale.
M. le Président, je le constate et il est tout à fait vrai
que cela fut le cas sauf qu'il faut dire que, lorsque la Loi sur la
représentation électorale a été adoptée,
elle l'a été à l'unanimité mais pas pour chacun de
ses éléments. Notamment, je me rappelle fort bien qu'à
titre de porte-parole de ma formation politique j'avais fait valoir qu'on ne
devait pas laisser à la Commission de la représentation la
décision du nombre des circonscriptions électorales, qu'il
appartenait plutôt à l'Assemblée nationale elle-même
de décider d'avance du nombre de députés qui devraient
représenter la population à l'Assemblée nationale et
qu'ensuite la commission pourrait, à partir des critères que cela
comportait, en arriver à délimiter la carte.
Le gouvernement d'alors n'avait pas retenu la formule et je suis
très heureux de constater que l'Opposition aujourd'hui se dit
prête à examiner la chose et nous assure même de sa
collaboration de ce côté. On ne saurait agir de façon
responsable en laissant le nombre des circonscriptions varier selon des
critères démographiques qui nous échappent
évidemment.
Cela étant dit, M. le Président, je répète
que nous ferons cet exercice pour atteindre l'unanimité et que,
plutôt de le faire au sein d'un comité consultatif qui a eu sa
valeur et qui a toujours sa valeur mais dont le mandat, à mon avis,
selon la loi, est bien plus de conseiller le Directeur général
des élections que d'"înitier" des gestes législatifs, nous
procéderons plutôt par la voie de commissions parlementaires. Les
discussions seront publiques, elles seront enregistrées et
consignées au Journal des débats. De cette façon, nous
pourrons associer à notre démarche un plus grand nombre de
personnes encore et l'ensemble des citoyens puisque ce sont eux qui sont les
premiers touchés.
Là-dessus, M. le Président, une fois l'adoption du
principe consommé, je proposerai que nous nous transformions en
commission plénière de façon à pouvoir
étudier de façon détaillée le projet de loi et
surtout d'adopter les deux amendements auxquels j'ai fait
référence et qui viendront répondre aux demandes de
l'Opposition, tout au moins quant au deuxième amendement.
Je sollicite donc le concours des membres de l'Assemblée pour
l'adoption du principe du projet de loi 147.
Le Président: Merci, M. le ministre. Est-ce que la motion
proposant l'adoption du
principe du projet de loi 147 est adoptée? M. Gendron:
Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Oui. Alors, M. le Président, je fais motion
pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière
pour que nous procédions immédiatement à l'étude
détaillée du projet de loi.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Gendron: Adopté. (12 h 20)
Le Président: Adopté. Alors, cette Assemblée
se transforme immédiatement en commission plénière pour
étudier le projet de loi 147.
Commission plénière
M. Saintonge (président de la commission
plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission parlementaire se réunit donc pour s'acquitter de son mandat,
soit l'étude détaillée du projet de loi 147, Loi modifiant
la Loi sur la délimitation des circonscriptions électorales. Au
départ, est-ce que M. le ministre a quelque autre commentaire à
faire à la commission?
M. Gratton: Non, M. le Président, sauf peut-être
pour vous demander de faire lecture, tout au moins, du premier amendement dont
vous avez obtenu copie et que j'ai d'ailleurs remis au député de
Gouin. Quant au deuxième, il y aura des modifications de forme à
apporter, mais si vous pouvez faire lecture du premier amendement pour qu'on
puisse s'entendre sur son adoption.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin, cela vous convient, vous n'avez pas de remarques préliminaires?
Tout est déjà fait?
M. Rochefort: Non. Peut-être une remarque à la suite
de l'intervention du ministre dans son droit de réplique, pour lui dire
que nous aborderons les travaux de la commission parlementaire en janvier
prochain avec toute l'ouverture d'esprit qu'implique une telle discussion et
que nous tenterons d'apporter tous les éclairages qui seront
nécessaires pour permettre un débat sain, positif, constructif et
pour tenter d'en arriver à des propositions satisfaisantes pour tout le
monde.
Le Président (M. Saintonge): Très bien, merci. M.
le ministre.
M. Gratton: Sauf si on me permettait de remercier d'avance le
député de Gouin pour cette ouverture et le remercier d'autant
plus sincèrement que je reconnais ses grandes qualités
d'organisateur électoral, qui pourront être extrêmement
utiles à la commission.
Étude détaillée
Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le
ministre. Je vous remercie. Nous allons donc procéder à l'appel
des articles. J'appelle l'article 1 et à l'article 1, comme le ministre
délégué à la Réforme électorale en
faisait mention, j'ai reçu un amendement qu'il m'a soumis et qui se lit
comme suit: Que l'article 1 soit modifié en remplaçant, dans la
deuxième ligne du deuxième paragraphe, le mot "novembre" par le
mot "septembre", ce qui fait que le deuxième paragraphe se lirait comme
suit: "par le remplacement, dans la sixième ligne du même
alinéa, de "15 septembre 1987" par "15 février 1988". C'est bien
cela?
M. Gratton: Oui. Alors, il s'agit simplement de corriger une
faute de frappe, qui n'est pas sans avoir une certaine conséquence, mais
effectivement c'est le 15 septembre 1987 plutôt que 15 novembre 1987.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: II est évident que pour nous cela ne pose
pas de problème, d'autant plus qu'il s'agit finalement d'un article de
concordance, à partir du moment où on accepte de reporter la
date. La seule question que j'adresserais peut-être au ministre, c'est la
suivante: Ces modifications de dates tiennent compte et découlent d'un
nouveau départ à partir du 1er mai 1987. Dans la mesure où
- puisqu'on en discutera au prochain amendement - la Commission de la
représentation commencerait ses travaux dès la mi-février
qui vient, est-ce que ces dates qui sont dans la loi sont des dates ultimes
pour répondre à ces différentes étapes, ou est-ce
que ce sont des dates avant lesquelles la commission ne peut procéder
pour les étapes prévues?
M. Gratton: II s'agit de dates ultimes. Par exemple, dans le cas
du 15 septembre dont il est question ici, il s'agit de la date ultime. En vertu
de l'article 25 du projet de loi 23, le rapport devait être remis au plus
tard le 2 décembre 1986. Maintenant, il doit être remis au plus
tard le 15 septembre 1987. Donc, c'est au plus tard. Il n'y a rien qui
empêche la commission de le produire beaucoup plus tôt. C'est ce
qui d'ailleurs va se produire, semble-t-il.
M. Rochefort: Dans les circonstances, M. le Président,
avec la réponse du ministre, nous sommes prêts à adopter
l'amendement.
Le Président (M. Saintonge): D'accord. L'amendement
proposé est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que
l'article 1 tel qu'amendé est adopté?
M. Gratton: Oui. Je présume que oui. M. Rochefort:
Oui.
M. Gratton: Sauf qu'à ce moment il y a le deuxième
amendement dont je pense que nous devrions faire lecture.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre, si vous le
permettez, le deuxième amendement, en fin de compte, va ajouter un
article. Donc, nous allons commencer par adopter l'article 1 tel
qu'amendé pour revenir à l'article 1.1. D'accord?
M. Gratton: D'accord.
Le Président (M. Saintonge): Est-ce que l'article 1 tel
qu'amendé est adopté?
M. Rochefort: Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Adopté. Avant
d'adopter l'article 2, nous allons aller au deuxième amendement que m'a
soumis le ministre délégué à la Réforme
électorale. Cet amendement a pour but d'insérer, après
l'article 1, le suivant: 1.1. Cette loi est modifiée par l'insertion
après l'article 1 du suivant: "1.1. Malgré le premier
alinéa de l'article 1, à la demande de l'Assemblée
nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, des
opérations relatives à la délimitation des
circonscriptions électorales peuvent reprendre avant le 1er mai
1987."
M. le ministre.
M. Gratton: Pour la forme, d'abord, M. le Président, je
pense qu'on pourrait biffer les mots "le premier alinéa" et tout
simplement dire: "Malgré l'article 1". Finalement, l'article 1 est
complet en soi. Je ne pense pas qu'on doive se référer au premier
alinéa. Donc, je propose qu'on biffe les mots "le premier alinéa
de".
Le Président (M. Saintonge): D'accord, on biffe ces
mots.
M. Gratton: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Saintonge): Donc, l'amendement est le
suivant: "Malgré l'article 1".
M. Gratton: Cela va? M. Rochefort: Adopté.
M. Gratton: Sur le fond, M. le Président, c'est pour
répondre a la demande fort justifiée, à mon avis, du
député de Gouin qui souhaite comme nous que si... Je pense bien
que l'on ne doit pas dire si, mais quand nous aurons dégagé des
consensus dont nous avons parlé en commission parlementaire, à la
fin de janvier ou au début de février, si la commission le
souhaite, il serait tout à fait normal que la Commission de la
représentation puisse commencer ses travaux malgré l'article 1
qui, lui, prévoit que les travaux ne débutent que le 1er mai.
C'est donc la façon de le formuler. Nous avons cru bon d'indiquer que
l'Assemblée nationale devrait pouvoir autoriser le Directeur
général des élections à commencer ses travaux avant
le 1er mai ou, comme il est fort probable que l'Assemblée nationale ne
sera pas en session au moment où la commission terminera ses travaux,
que ce soit la commission que l'Assemblée désigne.
Je voudrais indiquer tout de suite au député de Gouin
qu'il est de notre intention, évidemment, sous réserve de la
vérification des mandats qui pourront être confiés aux
diverses commissions durant la période d'intersession, de confier
à la commission des institutions le mandat de procéder au travail
dont nous avons parlé, en janvier ou en février.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Quant à l'objectif visé par
l'amendement, il est clair que nous y adhérons totalement. Quant
à la formulation, j'aurais peut-être un certain nombre de
commentaires. Lorsqu'on dit: "ou de la commission parlementaire qu'elle
désigne", est-ce qu'on ne devrait pas être plus précis et
dire: ou de la commission parlementaire qui étudiera ces questions en
janvier prochain? Je n'ai évidemment pas refait le texte, mais ne
serait-ce pas plus précis?
M. Gratton: Ce serait plus précis... Nous y avons
pensé, mais nous étions rendus a trois ou quatre phrases pour
définir quelle commission ce serait, la commission qui procédera
à dégager des consensus. Comme nous ne pouvons pas nous
référer aux dates, nous pensons que, dans sa formulation
actuelle, il n'y a pas de méprise. Je pense que l'intention est claire
de part et d'autre et que nous ne risquons pas que cela porte à
confusion. À moins que le député de Gouin ne puisse me
suggérer une formule qui...
M. Rochefort: Ce que je dirais, M. le Président, à
la réponse du ministre délégué à la
Réforme électorale, c'est que, dans la mesure où on laisse
le texte tel quel, je crois que, lorsque nous adopterons ici le mandat de la
commission avec sa durée et son moment, on devra indiquer que c'est
cette commission qui est désignée au sens de l'article 1.1 de la
loi 147. Il faudrait que ce soit clair...
M. Gratton: Je suis prêt à m'engager à
cela.
M. Rochefort: ...et qu'on inscrive cela dans le mandat que
l'Assemblée dégagera pour que cela ne porte à confusion
d'aucune façon et qu'on ne se retrouve pas en plein coeur de
l'intersession avec un vide juridique qui nous empêcherait de donner les
suites pour lesquelles nous débattons l'amendement déposé
par le ministre. (12 h 30)
M. Gratton: D'accord, M. le Président. Dans le mandat que
nous présenterons ici à l'Assemblée nationale avant
l'ajournement des fêtes, nous indiquerons que la commission des
institutions, en supposant que ce soit elle comme je l'indiquais tantôt,
est celle visée par l'article 1.1 du projet de loi 147.
M. Rochefort: Parfait, je suis satisfait de la réponse du
ministre.
J'ai un deuxième commentaire sur l'autre partie où on dit
"de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle
désigne des opérations relatives à la délimitation
des circonscriptions électorales peuvent reprendre avant le 1er mai
1987". Est-ce que là aussi on n'aurait pas avantage à être
un peu plus précis et à dire plutôt que l'Assemblée
nationale ou la commission parlementaire qu'elle désigne peut donner le
mandat à la Commission de la représentation d'entreprendre ses
travaux avant le 1er mai 1987?
Cela pourrait se lire comme ceci: Malgré l'article 1, à la
demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire
qu'elle désigne, la Commission de la représentation
électorale peut reprendre ses travaux relatifs à la
délimitation des circonscriptions électorales avant le 1er mai
1987.
M. Gratton: M. le Président, effectivement, on s'entend
pour dire que c'est la même intention qui est traduite de façon
différente. Comme le projet de loi 147 fait référence au
projet de loi 23 qui, lui, fait référence à la Loi sur la
représentation électorale, il est évident qu'il s'agit de
la commission permanente. D'ailleurs, pour tout vous dire, la formulation que
nous avons là nous a été suggérée par le
Directeur général des élections qui est président
de la
Commission de la représentation électorale. Je
présume que, s'il nous fait cette suggestion - il me l'a, d'ailleurs,
faite à ma demande et le député de Gouin était
présent à ce moment-là - étant beaucoup plus
ferré que moi dans ce domaine, il devrait satisfaire tout le monde.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Je comprends la réponse du ministre. Je ne
voudrais pas faire de la procédure, mais j'avoue que je souhaiterais
qu'on modifie l'article 1.1 comme ceci: "Malgré l'article 1, à la
demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire
qu'elle désigne, la Commission de la représentation
électorale peut reprendre, avant le 1er mai 1987, les opérations
relatives à la délimitation des circonscriptions
électorales." Je peux le déposer. Évidemment, je l'ai
écrit avec des flèches, mais c'est clair, quant à moi.
S'il y a des problèmes de lecture...
Le Président (M. Saintonge): C'est donc un sous-amendement
déposé par M. le député de Gouin, qui aurait pour
effet de modifier l'article 1.1 de façon qu'il se lise comme suit:
"Malgré l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale
ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, la Commission de la
représentation...
M. Rochefort: Peut reprendre.
Le Président (M. Saintonge): ...peut reprendre...
M. Rochefort: La Commission de la représentation
électorale.
Le Président (M. Saintonge): Excusez. M. Rochefort:
Non? D'accord.
M. Gratton: C'est la Loi sur la représentation
électorale, mais c'est la Commission de la représentation.
Le Président (M. Saintonge): C'est la Commission de la
représentation.
M. Rochefort: D'accord.
Le Président (M. Saintonge): Donc, "la Commission de la
représentation peut reprendre les opérations relatives à
la délimitation des circonscriptions électorales avant le 1er mai
1987."
M. Rochefort: C'est cela.
M. Gratton: Cela va, M. le Président. Il semble, M. le
Président, que vous êtes le
seul à avoir des problèmes.
Le Président (M. Saintonge): Je le relis pour être
bien sûr que nous nous entendons bien sur ce que nous faisons. Le
sous-amendement a pour but de remplacer. Question de forme, nous allons
présenter cela comme un seul amendement. Cette loi est modifiée
par l'insertion après l'article 1 du suivant: "1.1 Malgré
l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale ou de la
commission parlementaire qu'elle désigne, la Commission de la
représentation peut reprendre les opérations relatives à
la délimitation des circonscriptions électorales avant le 1er mai
1987." Est-ce que cet amendement est adopté?
M. Gratton: Adopté. M. Rochefort:
Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que
l'article 1.1 est adopté?
M. Rochefort: Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Adopté. J'appelle
maintenant l'article 2. Est-ce que l'article 2 est adopté?
M. Rochefort: Adopté. M. Gratton:
Adopté.
Le Président (M. Saintonge): L'article 2 est
adopté.
M. Rochefort: Je ferais peut-être un commentaire, M. le
Président...
Le Président (M. Saintonge): Oui, un commentaire.
M. Rochefort: ...avant de passer à l'adoption du titre du
projet de loi. C'est une suggestion que je fais, peut-être plus au leader
du gouvernement qu'au ministre délégué à la
Réforme électorale. Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable que,
dès que la décision aura été prise quant au choix
de la commission qui procédera à ces travaux en janvier prochain,
il y ait un genre de comité directeur, qui pourrait être celui de
la commission des institutions, qui nous prépare ce mandat, la
proposition de durée, le moment de siéger, comme cela se fait
dans l'ensemble des autres commissions lorsqu'on étudie le cadre d'un
mandat d'initiative, les engagements financiers ou des choses comme cela? Cela
permettrait à des députés, une fois cette décision
prise, de travailler immédiatement à préparer ce mandat
qui pourrait ensuite être soumis et formellement retenu par
l'Assemblée.
M. Gratton: M. le Président, une chose est certaine: pour
ce qui est du libellé du mandat à donner à la commission,
de la désignation de la commission, de même que des dates
où elle siégera, je vais tâcher de déterminer cela
au cours de la semaine prochaine, en consultation avec le député
de Gouin et le président de la commission qui sera chargé
d'exécuter le mandat. On pourra prévoir, soit une séance
de travail de la commission ou une réunion du comité directeur
pour dégager le terrain. Mais je préférerais qu'on le
fasse seulement après que je serai saisi des documents que j'ai
commandés au Secrétariat à la réforme
électorale en vue de cela. Je m'engage, d'ailleurs, à fournir ces
documents à l'ensemble des membres de la commission, ce qui pourra nous
permettre de déblayer beaucoup plus rapidement le terrain quant à
la façon de procéder. Mais on pourra réunir, soit le
comité directeur, soit la commission en séance de travail avant
que nous nous quittions le 19 décembre prochain.
M. Rochefort: J'aurais une question à poser, M. le
Président.
Le Président (M. Saintonge): Oui, M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: C'est sur le nouvel élément
apporté par le ministre dans sa réponse. Â quel moment le
document en préparation au Secrétariat à la réforme
électorale sera-t-il disponible?
M. Gratton: Je pense que ce pourrait être sûrement
avant le 19 décembre.
M. Rochefort: Au fond, cela pourrait faire partie des...
M. Gratton: Dans le fond, il y a plusieurs des documents qui sont
déjà connus, par exemple le rapport Rémillard, les
commentaires du Directeur général des élections et un
certain nombre d'autres données que le Directeur général
des élections nous a fournies à l'occasion des deux commissions
parlementaires qu'on a tenues et d'autres documents qui sont disponibles au
secrétariat et dont je prendrai connaissance au cours des jours qui
viennent. Ce sera sinon à la fin de la semaine prochaine, au plus tard
au début de la semaine suivante.
M. Rochefort: Merci.
Le Président (M. Saintonge): Très bien. Est-ce que
le titre du projet de loi est adopté?
M. Rochefort: Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Adopté.
Nous allons faire motion pour la renumérotation. Est-ce que cette
motion est adoptée?
M. Rochefort: Adopté. M. Gratton:
Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que le
projet de loi tel qu'amendé est adopté?
M. Rochefort: Adopté. M. Gratton:
Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Cela met fin à notre
mandat. Afin de faire rapport au président de l'Assemblée
nationale, je demanderais aux personnes qui sont dans l'enceinte de
l'Assemblée nationale et qui n'en sont pas membres de bien vouloir
quitter, s'il vous plaît.
Le Vice-Président: M. le Président de la commission
plénière.
M. Lemieux (président de la commission
plénière): M. le Président, je vous fais rapport que
la commission a adopté le projet de loi 147, Loi modifiant la Loi sur la
délimitation des circonscriptions électorales, avec
amendements.
Le Vice-Président: Très bien. Est-ce que ce rapport
de la commission plénière est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, compte tenu de l'heure, nous
suspendrons nos travaux jusqu'à 15 heures, auquel moment nous aborderons
l'adoption du principe de projets de loi - au pluriel - inscrits au nom du
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et du Tourisme.
Le Vice-Président: Y a-t-il consentement à ce que
nous suspendions nos travaux?
Des voix: Oui.
Le Vice-Président: II y a consentement. L'Assemblée
nationale suspend donc ses travaux jusqu'à cet après-midi, 15
heures
(Suspension de la séance à 12 h 46)
(Reprise à 15 h 8)
La Vice-Présidente: À l'ordrel Nous allons
reprendre les travaux de l'Assemblée. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui, Mme la Présidente. Pourrais-je
suggérer que nous suspendions quelques instants pour permettre au
ministre du Tourisme de se joindre à nous, s'il vous plaît?
Une voix: D'accord.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée? Adopté. Nous allons suspendre nos travaux pour quelques
instants.
(Suspension de la séance à 15 h 9)
(Reprise à 15 h 11)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez vous asseoir.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Ciaccia: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 37 du feuilleton.
Projet de loi 152 Adoption du principe
La Vice-Présidente: À l'article 37 du feuilleton,
il s'agit de l'adoption du principe du projet de loi 152, Loi sur les
établissements touristiques.
M. le ministre du Tourisme.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir
aujourd'hui de vous présenter le projet de loi sur les
établissements touristiques qui remplacera, après son adoption,
l'actuelle Loi sur l'hôtellerie.
La refonte globale de ce texte législatif applicable au secteur
de l'hébergement touristique, de la restauration, du camping et de
l'information touristique, vise à doter l'ensemble des entreprises qui
oeuvrent dans ce domaine des dispositions législatives claires, modernes
et conformes à la réalité du vécu des gens qui
façonnent le Québec touristique.
Quatre principes fondamentaux sont à la base de
l'élaboration du projet de loi qui est soumis aujourd'hui à mes
collègues de l'Assemblée nationale. Premièrement,
reconnaître la diversité de l'offre touristique et le
développement de multiples formes d'hébergement et de
restauration. Le projet de loi s'appliquera à de nouveaux types
d'établissement, comme les gîtes touristiques qu'on appelle
communément les "bed and breakfast", les bases de plein air, les camps
de vacances, les auberges de jeunesse. De cette façon, l'ensemble des
établissements qui accueillent des touristes et qui font de
l'hébergement commercial seront soumis à des règles
communes et appropriées à chacune des catégories. En
agissant ainsi, nous facilitons l'accès pour le touriste à un
produit diversifié et de qualité.
En plus de préciser les règles du jeu pour l'ensemble des
établissements touristiques, le projet de loi corrige des situations
inéquitables. Vous me permettrez, Mme la Présidente,
d'énumérer dans l'ordre certaines de ces situations
qualifiées d'inéquitables. Premièrement, la Loi sur
l'hôtellerie empêchait pratiquement, par l'article 9, le
développement des gîtes touristiques, les "bed and breakfast",
alors que cette formule est maintenant répandue chez nos concurrents
comme l'Ontario et les États de la Nouvelle-Angleterre.
Deuxièmement, le fait que certains établissements étaient
exclus du champ d'application de la loi alors qu'ils font bel et bien partie de
l'offre touristique - je parle ici des établissements comme les bases de
plein air, les camps de vacances qui constituent des éléments
attractifs en termes de séjour touristique au Québec -
était, de fait, aussi une situation inéquitable. L'exclusion des
pourvoiries du champ d'application de la Loi sur l'hôtellerie
était, à mon avis, un troisième irritant.
Les pourvoiries demeurent toujours sous l'égide de la Loi sur la
conservation et la mise en valeur de la faune. Celles-ci devront cependant se
conformer à des normes minimales édictées en vertu de ce
projet de loi en matière d'hébergement, de restauration, de
sécurité et de salubrité. Ce projet de loi vise donc
à rétablir une équité dans les secteurs
concernés. Les établissements seront soumis aux mêmes
règles de base, peu importe leur statut de société, de
corporation ou d'organisme à but non lucratif.
En second lieu, il faut s'assurer que des règles minimales
liées à l'exploitation d'un établissement touristique
soient respectées. C'est justement un des objectifs importants de ce
projet de loi que nous étudions aujourd'hui.
Sur ce plan, le rôle du gouvernement se veut davantage incitatif
qu'interventionniste. Dans le passé, les dispositions
législatives applicables au secteur de l'hébergement et de la
restauration étaient nettement conçues dans une perspective
d'orientation du produit par la définition de normes strictes
d'aménagement et de services. Ce projet de loi préconise une
démarche davantage orientée vers les besoins du marché.
Dieu sait, Mme la Présidente si ces besoins du marché ont
évolué depuis quelques années, compte tenu de la
concurrence que nos voisins peuvent nous apporter. Je pense que ce point est
aussi important et capital.
En conséquence, les normes élaborées seront
minimales de façon à ne pas être un frein au
développement de nouveaux types d'hôtellerie, de nouvelles
formules d'hébergement ou encore de restauration. Â cet
égard, nous pouvons voir deux types de normes d'exploitation d'un
établissement touristique: Un premier type qui oblige l'exploitation
à offrir à sa clientèle un minimum d'aménagement et
de services propres à sa catégorie d'établissement. Un
deuxième type de normes sont celles édictées en vue de
protéger et d'informer le client, c'est-à-dire l'affichage du
permis, l'affichage des prix, la déclaration des prix, l'affichage du
taux de change et des menus.
Le respect de ces exigences minimales est lié à la
délivrance du permis d'exploitation ou à son renouvellement. Le
projet de loi introduit un mécanisme d'appel pour l'exploitant en cas de
refus, suspension et annulation du permis.
Troisièmement, Mme la Présidente, reconnaître la
qualité des établissements par la classification.
L'élaboration de règles minimales d'exploitation communes
à l'ensemble des établissements relatives à
l'aménagement, aux services minimaux, à l'affichage, ne fait pas
abstraction du rôle promotionnel et d'information dévolu au
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.
Le projet de loi introduit le pouvoir de classifier les
établissements touristiques de façon que les niveaux de
qualité des établissements soient établis et que le
touriste consommateur sache à quoi il peut s'attendre lorsqu'il fait le
choix de séjourner à tel ou tel autre établissement de son
choix. Cet équilibre entre, d'une part, des règles minimales
d'exploitation et, d'autre part, la classification des établissements
m'apparaît des plus fondés. Au lieu de placer le gouvernement dans
un rôle où il définit pratiquement tel ou tel produit par
l'édiction de normes très détaillées qui risquent,
au fil des années, de ne plus correspondre aux besoins de la
clientèle ou qui font en sorte qu'elles accroissent les coûts
d'investissement dans le secteur, l'actuel projet de loi mise sur le
professionnalisme des intervenants et leur capacité de concevoir un
produit de qualité et concurrentiel conforme, comme je l'ai
mentionné tantôt, au marché et à la concurrence du
marché.
La classification des établissements s'inscrit dans une
perspective redéfinie de l'intervention gouvernementale où les
actions du ministère du Tourisme viseront à susciter l'innovation
à l'intérieur d'un cadre législatif souple et à
rendre compte de la qualité des établissements plutôt que
d'avoir une
approche basée sur une inspection
généralisée et tatillonne. À l'heure actuelle, le
ministère du Tourisme classifie les établissements
hôteliers et les salles à manger. Ces programmes sont en
révision et leurs critères seront inscrits dans un
règlement tel que le prévoit l'actuel projet de loi.
Il en sera de même pour tout projet de classification d'autres
catégories d'établissements. L'obligation d'afficher la
classification est un des éléments majeurs introduits par le
projet de loi. Cet élément vise à faire en sorte que le
touriste soit mieux informé dans le choix d'un établissement.
Cette mesure aura également un effet certain sur la recherche de
l'excellence en matière d'hébergement touristique et
accroîtra, d'une manière générale, la qualité
des établissements par son effet d'émulation. (15 h 20)
En ce qui regarde les pourvoiries, Mme la Présidente, le volet de
la classification demeure sous la responsabilité du ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Cependant, l'actuel projet de loi
prévoit la collaboration du ministère du Tourisme à ce
dossier, les pourvoiries étant des établissements très
distinctifs de l'offre touristique du Québec.
Un quatrième principe de base introduit dans ce projet de loi
vise à responsabiliser les exploitants au respect des normes de
sécurité, de salubrité et d'environnement
édictées par d'autres ministères, que ce soit en ce qui
concerne la sécurité dans les édifices publics, la
qualité des aliments ou la protection de l'environnement. De
façon à simplifier les démarches administratives
auxquelles un exploitant est souvent confronté avant de détenir
un permis, il est prévu de demander à ce dernier, par le moyen
d'un formulaire de déclaration assermentée, de nous indiquer sa
conformité aux autres lois sans pour autant qu'il ait à produire
l'ensemble des certificats ou attestations originant des autres
ministères.
Ce principe, bien qu'il prône le respect des juridictions des
autres ministères, permet tout de même au ministère du
Tourisme de s'assurer de la conformité des établissements
à certains objets élémentaires comme la
sécurité des installations et des équipements, la
qualité de l'eau et ce, avant d'émettre un permis d'exploitation.
Mon ministère développera ainsi des relations plus
intégrées avec les autres ministères dans le cadre de
l'administration de ce projet de loi de façon à éviter
qu'une personne qui demande un permis soit obligée de frapper à
36 portes différentes afin de se procurer autant d'attestations. C'est
souventefois ce qu'il faut éviter quand nous faisons des lois où
nous voulons exercer un certain contrôle, à la fois de
qualité ou de sécurité, afin de permettre une
efficacité du système tout en sachant et en ayant à
l'esprit qu'il faut que les intervenants se soient soumis à des
règles bien précises ailleurs, mais sans prendre tellement de
temps, pour qu'en fin de compte la lenteur administrative vienne freiner aussi
des développements qui sont importants, tout en permettant aussi
à l'État, je pense bien, Mme la Présidente, d'avoir un bon
contrôle à toutes fins utiles.
J'aimerais également porter à votre attention qu'à
la suite d'une consultation avec le ministère des Affaires municipales,
le présent projet de loi permet aux municipalités et aux
communautés urbaines et régionales habilitées de faire de
la promotion touristique, d'exploiter un bureau d'information touristique. Cet
élément complète les modifications mineures
déjà apportées à la Loi sur l'hôtellerie, le
printemps dernier, au sujet des bureaux d'information touristique.
On se souviendra, Mme la Présidente, qu'au mois de juin dernier
nous avions adopté, à l'unanimité de l'Assemblée
nationale, des modifications majeures et très intéressantes au
sujet des bureaux d'information touristique. Il restait cependant au
ministère du Tourisme à faire une consultation à la table
de Québec-municipalités pour bien s'assurer que les
municipalités étaient d'accord et possédaient certains
pouvoirs du côté des bureaux d'information touristique. C'est la
raison pour laquelle nous ajoutons ce point à l'intérieur du
projet de loi, tel que nous en avions convenu ensemble lors de son étude
il y a déjà quelques mois. Ce projet de loi a fait l'objet d'une
consultation menée auprès des associations et organismes durant
la période estivale. Un large consensus découle de cette
consultation menée conjointement par le ministère du Tourisme et
le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Au-delà de la diversité des établissements
touristiques et des objectifs qui animent les responsables de ces
établissements, il est clair aujourd'hui que chacun d'entre eux a le
goût de participer aux mêmes efforts de développement du
tourisme. À cet égard, il ne convient plus de parler du tourisme
strictement commercial ou de tourisme associatif, mais il convient de parler
d'une diversité d'établissements touristiques Veconnus par un
même texte législatif.
J'aimerais ouvrir une parenthèse, Mme la Présidente, pour
souligner le travail et l'excellente collaboration des différentes
associations dans le domaine touristique où nous avons vraiment, avec
des fonctionnaires compétents, passé la majorité de notre
temps, durant les quelques mois d'été, à discuter avec ces
différentes associations, que ce soit les restaurateurs, les
hôteliers, les bases de plein air.
Face à ce qu'on appelle le développement touristique comme
élément majeur
important et comme retombée économique de premier ordre,
comme possibilité de création d'emplois rapide à des
coûts moindres et passablement moins dispendieux que dans d'autres
domaines, tout le monde s'est donné la main pour faire en sorte que le
touriste qui vient chez nous soit toujours bien accueilli avec un sourire, un
bonjour, que ce soit du portier au propriétaire de certaines auberges.
Cet accueil est primordial. L'ex-gouvernement et nous-mêmes avons agi
dans le même sens. Il était juste de penser en ce sens: l'accueil
et le bonjour du Québec, c'est important. Cela a aussi
conscientisé tout le monde au fait que notre meilleur propagandiste,
notre meilleur publicitaire pour demander à des concitoyens et
concitoyennes de venir visiter le Québec, de venir séjourner au
Québec, restera toujours le touriste qui est bien accueilli. S'il est
bien accueilli, il va en parler, s'il est mal accueilli, il va en parler aussi.
Mais combien néfaste pourra être finalement cette publicité
faite à d'autres concitoyens si les gens ne sont pas bien
accueillis.
C'est dans cette foulée que je vous disais, Mme la
Présidente, il y a quelques instants que je suis très satisfait
non seulement du large consensus intervenu entre les différentes
associations, mais de l'apport positif de chacune d'elles dans la
préparation dudit projet de loi. Cela nous a permis un niveau de
maturité dans les échanges faisant en sorte que tous les
intervenants touristiques seront appelés à respecter les
mêmes règles du jeu.
C'est un autre élément important, le fait que les gens se
soient parlé, soient conscientisés, se soient attablés. Je
pense que cela les implique drôlement à vouloir bien respecter les
règles du jeu. Cela aussi est important. C'est aussi important que de se
promener avec des inspecteurs ou aller importuner dans chacun des milieux une
foule de personnes qui pourraient aller, comme je le disais... ou être
tatillons et, par le fait même, briser des efforts et des élans
que les gens veulent mettre du côté du développement
touristique. Tout ce beau monde sera convié à un même
défi, celui de développer le Québec touristique et
d'accueillir des hommes et des femmes d'ici ou d'ailleurs, des jeunes
voyageurs, des enfants pour la période estivale ou des classes de neige,
des personnes âgées, concrétisant ainsi la diversité
de notre offre touristique. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Tourisme.
M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Je vous dirai
d'entrée de jeu que l'Opposition officielle va évidemment
accorder son appui au projet de loi 152, Loi sur les établissements
touristiques. Cet appui est d'autant plus sans réserve qu'il est bon de
signaler que cette refonte du projet de loi sur les établissements
touristiques, anciennement appelé Loi sur l'hôtellerie, a
été amorcée sous le gouvernement du Parti
québécois. (15 h 30)
C'est l'ex-ministre du Tourisme, M. Marcel Léger, qui a pris
l'initiative de la démarche conduisant aujourd'hui à la refonte
de la Loi sur l'hôtellerie, d'abord, en mettant sur pied un comité
regroupant tous les intervenants du milieu touristique, tous les intervenants
intéressés par cette loi -l'association des hôteliers, bien
sûr, mais aussi l'association des pourvoyeurs, en particulier - de
façon que la refonte puisse obtenir l'assentiment des intervenants
intéressés par un tel projet de loi. La meilleure façon de
le faire a été de les impliquer dès le départ, et
c'est ce que M. Marcel Léger avait fait à l'époque. Il
avait mis sur pied un comité qui regroupait tous les intervenants.
Il a retenu l'essentiel des recommandations de ce groupe de travail
où l'on retrouvait les intervenants intéressés. On les
retrouve évidemment dans le projet de loi que le nouveau ministre du
Tourisme a fait sien et a présenté à l'Assemblée
nationale pour adoption. Par conséquent, c'est un projet de loi qui a
été préparé par l'ancien gouvernement, qui obtient
l'accord des intéressés, et il est clair que, compte tenu de ces
faits, il n'est pas question pour nous de nous opposer à un projet de
loi semblable.
Le ministre du Tourisme, l'autre jour, en commission parlementaire,
à l'occasion de l'étude de ses engagements financiers, a fait
l'éloge de son prédécesseur, M. Marcel Léger, et
j'aurais cru qu'à l'Assemblée nationale, à l'occasion de
l'étude du projet de loi 152, il aurait fait le même éloge
à l'occasion de ce projet de loi, compte tenu du rôle joué
par son prédécesseur dans l'élaboration de ce projet de
loi... Ah bon...
Un élément intéressant qui est nouveau, qui
n'apparaît pas dans la loi actuelle sur l'hôtellerie, c'est la
possibilité pour un citoyen - là-dessus, nous sommes
évidemment pleinement d'accord - d'interjeter appel de la
décision du ministre devant la Cour provinciale. Lorsque le ministre
refuse un permis d'hôtellerie, par exemple, ou refuse de renouveler un
permis, avec la nouvelle loi, l'hôtelier en question pourra faire appel
de la décision du ministre devant la Cour provinciale. C'est une
nouvelle notion. Cela n'apparaît pas dans la loi actuelle. C'est
maintenant une disposition qu'on retrouve dans le projet de loi 152 et nous
sommes parfaitement d'accord avec cet élément nouveau. Je pense
que cela permettra à des
citoyens ou des citoyennes qui se sentent lésés dans leurs
droits à la suite d'une décision ministérielle relative
à un permis d'exploitation de faire appel et, possiblement, de voir la
décision du ministre rejetée.
Mme la Présidente, il est important, dans ce domaine-là,
de légiférer, de refondre la loi. Là-dessus nous sommes
pleinement d'accord mais il faut aussi que cette loi soit respectée sur
le terrain de façon concrète. Il faut que les dispositions de la
loi soient respectées, que les normes et les règlements issus de
la loi soient respectés si l'on veut justement atteindre l'objectif
qu'on se fixe par une telle loi, c'est-à-dire améliorer la
qualité du produit touristique, en particulier dans le secteur de
l'hébergement. Pour que la loi soit respectée, il faut inspecter,
procéder à des inspections. Il y a des inspecteurs qui sont
habilités à faire des inspections.
Je m'étonne que dans le nouveau projet de loi - le ministre a
sans doute des explications à ce sujet - on ne retrouve plus la
disposition de la loi actuelle qui stipule que l'émission d'un permis
doit être faite après la production d'un rapport d'inspection. Un
inspecteur visite les lieux, vérifie si les normes et les
règlements sont respectés, fait rapport et c'est à la
suite de ce rapport, selon la loi actuelle, que le permis est émis. Or,
cette disposition disparaît dans le nouveau projet de loi. Cela
m'étonne un peu, parce qu'il m'apparaît essentiel que l'on
vérifie, avant d'émettre le permis, si les normes, si les
règlements issus de la loi sont respectés par le demandeur, par
celui qui demande un permis. Celui qui demande un permis d'hôtellerie,
par exemple, a un certain nombre de règles à respecter, un
certain nombre de normes et de critères à respecter. On m'informe
que même la disposition actuelle de la loi ne serait pas
appliquée. Actuellement, il semble j'aimerais que le ministre m'informe
là-dessus - qu'on émette des permis sans inspection
préalable alors que l'article 6 de l'actuelle loi, pourtant, oblige
à produire un rapport d'inspection avant toute émission de
permis. C'est un peu surprenant que, dans le projet de loi 152, cette
disposition n'apparaisse pas. Je suppose que le ministre a des explications.
J'aimerais beaucoup les connaître, parce que cela ne m'apparaît pas
acceptable. Il me semble que si l'on vise à améliorer la
qualité du produit touristique, il faut faire en sorte que l'on puisse
vérifier de façon sérieuse le respect de la loi par les
intervenants.
Je vous signale également, Mme la Présidente, qu'à
l'article 36 du projet de loi 152 on fait une longue énumération
de matières pour lesquelles le gouvernement aura à produire des
règlements, à adopter des règlements; quatorze en tout.
L'article 36 stipule que le gouvernement peut, par règlement, et il y a,
ensuite, énumération de quatorze sujets ou matières que le
gouvernement devra préciser et pour lesquels un règlement sera
adopté. Je pense qu'on examinera en commission parlementaire la
pertinence de toute cette réglementation. Certains de ces
règlements sont déjà d'ailleurs en vigueur. Ils seront
peut-être modifiés ou amendés par la suite, mais certains
sont déjà en vigueur.
On va examiner en commission parlementaire la pertinence de ces
règlements, mais je signale simplement, encore une fois, au ministre du
Tourisme, membre d'un gouvernement qui se vantait de
déréglementer, qui a même annoncé ses couleurs
à ce sujet, qui a claironné dès son accession au pouvoir
son intention de déréglementer, que proclamer son intention de
déréglementer et le faire, ce sont deux choses bien distinctes.
On se rend compte que ce n'est pas si simple et on se rend compte, finalement,
que l'État est générateur de règles, l'État
est, par nature, producteur de règlements. C'est un de ses rôles
d'ailleurs. Il y a des règlements qui sont non seulement utiles, mais
nécessaires. Je signale simplement que le voeu ou l'intention de
déréglementer est très souvent un voeu pieux dans la
plupart des domaines qu'on peut bien proclamer quand on n'exerce pas le
pouvoir, mais, à partir du moment où on exerce le pouvoir, on se
rend vite compte que ce n'est pas si simple que cela, ce n'est pas si facile
que cela de déréglementer et qu'il faut au contraire, parfois,
produire des règlements nouveaux, adopter des règlements
nouveaux. On s'en rend compte avec ce projet de loi où, à
l'article 36, quatorze règlements sont prévus. (15 h 40)
Je vous signale tout de suite, Mme la Présidente, que ce sont
sans doute des règlements utiles, fort pertinents, sans doute même
réclamés par les intervenants, mais je tenais à faire
cette remarque justement parce qu'on a en face de nous un gouvernement qui
s'est souvent vanté de procéder à une
déréglementation systématique. Dans le secteur
touristique, il est important, il est utile de légiférer - c'est
ce qu'on fait présentement - et de réglementer, ce qu'on va faire
aussi. On va produire des règlements issus de cette loi. C'est donc
important, puisqu'on souhaite et qu'on a comme objectif d'améliorer la
qualité du produit touristique.
Toutefois, le ministre indiquait tout à l'heure en conclusion que
le grand défi qu'il convient de relever, c'est le développement
du Québec touristique et il est évident que je suis pleinement
d'accord avec cette affirmation. Encore faut-il cependant que les
décisions du gouvernement, les décisions du ministre soient en
accord ou en conformité avec cet objectif, avec cette intention. Ce
n'est pas toujours le cas. Je vous signale
que, s'il est bon et utile de légiférer et de
réglementer, il est aussi essentiel, si l'on veut développer le
secteur touristique chez nous, de prendre des décisions qui favorisent
le développement touristique. À ce sujet, ce n'est pas toujours
le cas.
Je vous signale en particulier deux décisions qui sont nuisibles
au développement touristique. J'espère que le ministre va
s'efforcer de corriger la situation à ce niveau. Le premier domaine,
c'est celui des liaisons aériennes pour la région de la Vieille
Capitale. On sait qu'avec la privatisation de Quebecair il y a des vols, des
liaisons aériennes qui ont été supprimées, abolies
entre Québec et un certain nombre de villes. Raymond Giroux du Soleil
écrivait en éditorial le 21 octobre dernier, et je cite: "Les
principaux bénéficiaires de l'industrie touristique du
Québec crient au loup. La région perd des millions de dollars
chaque année à cause de son isolement aérien. Le milieu
hôtelier local - je vous signale que le milieu hôtelier, c'est ce
milieu qui est touché par le projet de loi 152 - souffre de l'absence de
lien direct avec les aéroports américains et notamment New
York."
Les intervenants touristiques, d'ailleurs, allaient dans le même
sens. M. Giroux faisait référence à ces intervenants
touristiques qui se sont plaints de l'absence de liaison aérienne entre
Québec et les principales villes nord-américaines. Entre autres,
l'Office du tourisme et des congrès de la communauté urbaine,
l'association hôtelière du district de Québec de même
que la chambre de commerce réclament avec vigueur, et je cite Le Soleil
du 20 octobre, "une liaison aérienne directe entre la Capitale et les
grandes villes nord-américaines. Selon les porte-parole de ces
organismes, qui participaient à une table ronde, l'absence d'un tel lien
direct engendre une perte dépassant les 6 000 000 $ par année
pour l'économie de la Vieille Capitale." C'est vrai
particulièrement dans le domaine du ski, surtout pour la saison qui
s'est amorcée dans le domaine du ski.
Je cite un autre article, celui-là du 20 octobre
également: "Déception cruelle de l'industrie du tourisme. La
liaison Québec-New York abolie au moment où elle était en
plein élan." Et c'est à la suite de la privatisation de
Quebecair. En privatisant Quebecair, ces liaisons aériennes ont
été abolies. "Le gouvernement du Québec, dit-on, a mis la
hache dans la liaison directe Québec-New York - de même que
Québec-Boston, d'ailleurs - de Quebecair, au moment où ce service
arrivait au seuil de la rentabilité". Les intervenants ajoutaient:
"Quebecair avait prouvé la rentabilité de cette ligne. Nous y
avions investi beaucoup d'énergie, nous avions une confiance
inébranlable et nous sommes amers, cela fait deux fois qu'on nous fait
le coup."
Le président Jacques Dussault, de l'Office du tourisme et des
congrès de la communauté urbaine, déplorait la
façon cavalière dont les choses s'étaient passées.
Mme la Présidente, tout en étant pleinement d'accord avec le
projet de loi qui aura pour effet, sans aucun doute, d'améliorer la
qualité du produit touristique, particulièrement dans le secteur
de l'hôtellerie, je signale qu'en même temps, il y a des
décisions qui sont prises et qui ont des effets négatifs,
néfastes, nuisibles dans le secteur touristique, en particulier,
l'abandon des liaisons aériennes Québec-Boston, Québec-New
York, à la suite de la privatisation de Quebecair.
Je dis que c'est important de voter des lois, de refondre des lois, de
les réviser, de les bonifier, de les moderniser, sans aucun doute, mais
il faut que cela s'accompagne de décisions positives dans le secteur
touristique, dans d'autres volets du secteur touristique. C'est la même
chose également... Je lisais ce matin, toujours dans Le Soleil
d'aujourd'hui, que la subvention au Carnaval de Québec allait subir une
diminution substantielle. Je cite évidemment les promoteurs du Carnaval
de Québec: "Nous avons reçu 270 000 $ seulement en comparaison
des 338 500 $ versés l'an dernier, informait le président Pierre
Barbeau, et le ministère nous a fait savoir qu'il ajouterait 25 000 $.
Mais, à ce seul poste, nous devrons déjà compenser un
manque à gagner de 43 000 $." C'est un peu étonnant une
décision comme celle-là. C'est un peu décevant aussi,
parce qu'on connaît évidemment l'importance du Carnaval de
Québec dans le domaine touristique pour ce qui est de la Vieille
Capitale. M. Barbeau disait: "Nul besoin de répéter que le
Carnaval de Québec est une industrie touristique rentable qui
déborde nos frontières, qui est reconnue dans le monde et qui
distingue le Québec du reste du monde."
C'est un peu étonnant de voir qu'on diminue la subvention
à un événement touristique reconnu, dont la
réputation n'est plus à faire et qui, évidemment...
La Vice-Présidente: M. le député de
Lac-Saint-Jean....
M. Brassard: Oui.
La Vice-Présidente: ...je voudrais vous rappeler à
la pertinence du débat. Nous devons débattre la Loi sur les
établissements touristiques et vous êtes en train de nous parler
du Carnaval de Québec. Si vous pouviez revenir au projet de loi. Je
comprends qu'à un moment donné, on puisse bifurquer, mais
j'aimerais qu'on puisse revenir au sujet.
M. Brassard: C'est très pertinent, parce
qu'on parle du principe d'un projet de loi qui porte sur les
établissements touristiques et, en particulier, le réseau
hôtelier, les hôtels. Et je dis que c'est bien beau de voter des
lois pour encadrer l'activité hôtelière, mais qu'il ne faut
pas que cela s'accompagne de décisions nuisibles à ce
réseau d'établissements qu'on veut encadrer par un nouveau projet
de loi. C'est le cas des liaisons aériennes. Cela nuit au réseau
hôtelier, particulièrement, à celui de Québec.
Couper la subvention du Carnaval de Québec, cela a des effets
nuisibles dans le secteur touristique. Et je fais un parallèle entre une
initiative heureuse, souhaitable, avec laquelle je suis pleinement d'accord,
qui est de présenter un projet de loi sur les établissements
touristiques, qui est une refonte de la loi, qui est une amélioration de
la loi actuelle sur l'hôtellerie... Je suis pleinement d'accord avec
cela, mais je signale que ce n'est pas tout de voter des lois, ce n'est pas
tout de produire des règlements, il faut aussi que cela s'inscrive dans
une politique de développement touristique qui permette le
développement touristique, qui n'ait pas d'effets nuisibles sur le
développement touristique. Voilà ce que je voulais signaler. Je
pense que j'étais parfaitement pertinent. (15 h 50)
Cela dit, Mme la Présidente, il est évident que nous
allons accorder notre appui à l'adoption du principe de ce projet de
loi. En commission parlementaire, nous allons examiner chacune des dispositions
ou chacun des articles du projet de loi pour voir s'il n'y a pas lieu de les
améliorer et aussi, évidemment, nous allons tenter d'obtenir des
explications sur un certain nombre de dispositions, en particulier sur
l'article 36 concernant les règlements. J'aimerais également que
dans sa réplique le ministre me fournisse, si c'est possible, des
explications quant à la disparition des dispositions relatives au
rapport d'inspection qui était obligatoire avant d'émettre un
permis. Il semblerait même qu'actuellement on accorde des permis sans
exiger la production de ce rapport d'inspection. Cela me paraît
étonnant. Le ministre a peut-être des explications, mais je pense
qu'il serait intéressant de savoir pourquoi on en est arrivé
à supprimer cette disposition qui apparaît dans la loi actuelle
sur l'hôtellerie. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Matane.
Mme Claire-Hélène Hovington
Mme Hovington: Merci, Mme la Présidente. Il me fait
plaisir d'intervenir sur le projet de loi 152, cet après-midi, mais il
me fait surtout plaisir d'entendre mon collègue, le député
de Lac-Saint-Jean, mentionner que l'Opposition donnera son appui à ce
projet de loi sur les établissements touristiques au Québec.
Je veux souligner aussi que le député de Lac-Saint-Jean a
raison quand il dit que cette révision de la loi fait suite aux travaux
menés par un groupe de travail qui a été formé en
décembre 1984. Ce groupe de travail avait été formé
à la suite des modifications apportées au règlement sur
les établissements hôteliers et les restaurants en 1984. Mais, Mme
la Présidente, cette opération, qualifiée de
déréglementation à ce moment-là, ne reçut
pas l'assentiment des associations sectorielles concernées. C'est
pourquoi nous avons procédé plus en profondeur,
c'est-à-dire que nous avons eu une phase de consultation qui a quand
même été importante au sujet de ce projet de loi. La phase
de consultation a justement tenu compte des associations sectorielles
concernées. Elle a eu lieu de juin à septembre 1986.
À plusieurs reprises durant la période estivale, les
représentants des associations et organismes se sont penchés sur
le projet de loi. Permettez-moi de nommer quelques-uns de ces organismes qui
sont importants, parce que ce sont vraiment les intervenants du milieu qui se
sont penchés sur ce projet de loi. En ce qui concerne
l'hébergement touristique, il y a eu l'Association des hôteliers
de la province de Québec, l'Association des pourvoyeurs du
Québec, l'Association des camps du Québec, les réseaux
plein air, les bases de plein air, le Mouvement des camps familiaux,
l'Association des auberges de jeunesse et les Agricotours, qui sont les
gîtes touristiques. Pour les campings, il y a eu l'Association des
terrains de camping du Québec et la Fédération
québécoise de campinq-caravaning. Pour la restauration, il y a eu
l'Association des restaurateurs du Québec.
Ces divers organismes et associations, Mme la Présidente, ont
été étroitement liés à l'élaboration
du projet de loi 152 et de la réglementation. Il y a eu aussi une phase
de consultation interministérielle avec le ministère de la
Main-d'Oeuvre, de la Sécurité du revenu et du Travail, le
ministère de l'Environnement, le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, le ministère des Affaires
municipales et le ministère de la Justice afin de délimiter les
mandats respectifs de chacun de ces ministères et éviter ainsi le
double emploi de dispositions législatives pour que, quand des
intervenants du milieu veulent faire la demande d'un permis, ils n'aient pas
à frapper à la porte de différents ministères avant
d'avoir leur autorisation.
Vous voyez, Mme la Présidente, que ce projet de loi a reçu
le consensus des
différents intervenants du milieu et ceci est important. Dans le
projet de loi sur les établissements touristiques, la notion
d'établissement touristique, ici, englobera les établissements
qui font de l'hébergement, de la restauration, les sites de camping et
les bureaux d'information touristique aussi.
Mme la Présidente, d'abord les effets du projet de loi. Il y a un
règlement d'application au lieu de quatre règlements, une refonte
globale en un seul règlement. Au lieu d'avoir le règlement sur
les établissements hôteliers, les restaurants, le règlement
sur le camping, le règlement sur l'hôtellerie nordique et le
règlement sur les bureaux d'information touristique, il n'y a plus qu'un
seul règlement d'application au lieu de quatre. Il y aura aussi un cadre
pour les nouvelles formes d'hébergement, c'est-à-dire que ce
projet de loi encadre le développement de gîtes touristiques, de
chalets, de condominiums offerts en location. Il corrige des situations
inéquitables qui existaient auparavant. II y a aussi des
éléments d'attraction pour les touristes qui étaient
exclus du champ d'application de la Loi sur l'hôtellerie: les bases de
plein air, les camps de vacances, les auberges de jeunesse. Tous ces
éléments d'hôtellerie font partie de la demande
touristique, que ce soit en région périphérique ou en
région urbaine.
Il y a aussi un élément qui assure la qualité des
établissements. Nous entendons orienter davantage l'action de promotion
du tourisme par une classification des établissements.
L'élément nouveau dans ce projet de loi, c'est qu'il y a un
affichage obligatoire de la classification qui permettra ainsi une meilleure
information pour le touriste qui s'apprête à séjourner dans
un établissement. Le touriste sait à ce moment-là à
quelle porte il frappe. En fait, il n'a pas de mauvaise surprise, il sait
à quoi s'attendre, parce que la classification aura été
bien affichée.
Cette perspective de classification vise à développer et
à susciter l'innovation dans le milieu touristique et à rendre
compte de la qualité des établissements. En fait, nous misons sur
le professionnalisme des intervenants, sur l'esprit de créativité
du milieu des intervenants touristiques. En fait, il est plus sain de miser sur
la qualité et la classification des établissements que sur des
inspections souvent tatillonnes qui nuisent au bon déroulement de la loi
et des établissements touristiques en général.
Il y a aussi, Mme la Présidente, que nous voulons
développer la responsabilisation des exploitants au niveau des
hébergements, de l'hôtellerie et des restaurateurs en
général pour qu'il y ait un respect des règles minimal,
que ce soit en matière de sécurité, que ce soit en
matière de salubrité pour la qualité des aliments offerts
dans les restaurants, la protection de l'environnement.
Les exploitants seront tenus par la loi de déclarer que leur
établissement est conforme à ces règles avant que le
permis d'exploitation soit délivré. Cela est important, Mme la
Présidente. Des normes spécifiques qui tiendront compte de la
diversité des établissements touristiques seront
édictées. Ces normes touchent l'aménagement, les services,
l'affichage des prix et du taux de change offert dans un établissement.
En fait, ces éléments visent à assurer une qualité
minimale dans tous les établissements touristiques au Québec et
aussi la protection du touriste consommateur.
Le nombre d'établissements visés est important au
Québec. Seulement dans l'hôtellerie, que ce soit les hôtels,
motels, auberges, chalets, nous avons 1900 établissements au
Québec; dans la restauration, 12 188 établissements, avec un
volume d'affaires au Québec de 2 600 000 000 $ seulement dans la
restauration, qui engendrent plus de 100 000 emplois directs.
Dans les campings, nous avons 695 établissements; les
pourvoiries, 530 établissements; les gîtes touristiques, 229; les
bureaux d'information touristique, 200; les établissements de touristes,
que ce soit la base de plein air ou les auberges de jeunesse, 265
établissements.
Vous voyez que l'industrie touristique au Québec est un
élément important de développement économique.
C'est grâce à la consultation que nous avons effectuée au
cours de l'été que chaque intervenant du milieu a appuyé
le projet de loi, l'a étudié et s'est vraiment penché sur
chacun des éléments. Tout cela va nous assurer que tous ces
intervenants touristiques poursuivent un même but: développer le
Québec touristique, faire du Québec une destination touristique
pour que les visiteurs, que ce soit du Québec ou d'ailleurs, des autres
provinces, des États-Unis ou du monde entier, puissent retourner chacun
chez eux et dire: Au Québec, nous sommes bien reçus et tout ce
que nous voulons, c'est y retourner. (16 heures)
C'est pourquoi j'appuierai le projet de loi 152 parce qu'il aide
à rehausser cette qualité que chacun de nous recherche, que ce
soit ici ou ailleurs. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Matane.
M. le ministre du Tourisme, en réplique.
M. Yvon Picotte (réplique)
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente, je suis
particulièrement heureux de constater que l'Opposition va voter pour ce
projet de loi et faire en sorte que, dans les meilleurs délais, nous
puissions l'adopter. Ce projet de
loi va sans doute clarifier une foule de situations que nous devions
vivre dans le domaine de l'hôtellerie, à cause d'une loi qui
était, à mon avis, désuète et qu'on amendait au
gré du temps et au gré des vents pour tâcher de corriger
certaines situations rapidement, sans pour autant y aller en profondeur alors
que nous, nous décidons d'aller en profondeur.
J'ai dit tout à l'heure à mon collègue de
Lac-Saint-Jean que je gardais pour mon temps de réplique un léger
paragraphe concernant mon prédécesseur. Cela fait
référence un peu à ce qu'il vous disait quand il faisait
allusion à la commission parlementaire où j'avais vanté
mon ex-collègue, M. Léger. Cela n'avait pas trait
nécessairement à ce dossier, mais à celui du Manoir
Richelieu. Je reste encore persuadé que le travail qu'a fait M.
Léger du côté de la vente du Manoir Richelieu, pour
enclencher le processus de vente du Manoir Richelieu, accompagné de ses
collègues au Conseil du trésor et aux différents COMPADR,
Conseil de développement économique et Conseil des ministres...
Je suis persuadé que la recommandation de M. Léger qui
recommandait au député de Lac-Saint-Jean, qui faisait partie du
Conseil des ministres à cette époque et à ses
collègues, de vendre le Manoir Richelieu à M. Malenfant
était vraiment quelque chose qui avait été pensé,
réfléchi. La décision prise à ce moment-là
et finalisée par notre gouvernement avec l'approbation, si je peux dire,
du chef de l'Opposition qui, lorsque les dossiers ont été
transférés à l'actuel chef du gouvernement, mettait
prioritaire le dossier de la vente du Manoir Richelieu, était la
décision qu'il fallait prendre pour déveloopper ce coin de
pays.
On aura beau dire par la suite... Il y a des malins qui sont
allés vérifier évidemment le rapport du Directeur du
financement des partis politiques en disant que certains de nos
collègues d'en face avaient accepté des montants d'argent,
légalement d'ailleurs, selon la Loi sur le financement des partis
politiques. Indépendamment de cela, le dossier a été
mené de main de maître, de façon parfaite et c'était
le dossier qu'il fallait acheminer de la façon dont il a
été acheminé. Je pense qu'il faut rendre à
César ce qui est à César et attribuer ce fait à M.
Léger et au Conseil des ministres précédent.
En ce qui concerne la loi que nous étudions, je suis prêt
à mentionner qu'effectivement, cette loi a commencé sous
l'égide de mon prédécesseur, M. Marcel Léger, qui
avait amorcé des discussions avec l'Association des hôteliers pour
tâcher d'en arriver à manier, changer ou modifier cette loi pour
la rendre vraiment plus adéquate à l'époque où nous
vivons et concurrentielle avec celles de nos voisins. Ce que je reprochais
cependant à M. Léger, c'était de consulter uniquement
l'Association des hôteliers. Je pense que Mme la députée de
Matane y a fait allusion. J'ai mentionné au député de
Lac-Saint-Jean, quand nous avons étudié ensemble la loi
abolissant le Conseil québécois du tourisme, que ce qui est
important dans ce domaine, ce n'est pas nécessairement d'avoir un
Conseil québécois du tourisme, c'est de bien s'assurer, par notre
relation privilégiée au ministère du Tourisme, que nous
consultons tous les intervenants.
Je dois vous dire que, bien enclenchées par mon
prédécesseur, les discussions commencées par lui avec
l'Association des hôteliers, je les ai poursuivies et j'ai tenu à
ajouter les organismes qui ont été mentionnés tantôt
et que je me permets, moi aussi, de rappeler: le Mouvement
québécois des camps familiaux, la Fédération des
agricotours du Québec, la Fédération
québécoise de l'ajisme, l'Association des camps du Québec,
le Réseau plein air, l'Association des pourvoyeurs du Québec
Inc., l'Association des terrains de camping du Québec, la
Fédération québécoise de camping et caravaning,
l'Association des hôteliers du Québec. On a même
ajouté l'Association des restaurateurs du Québec.
On a donc multiplié par dix nos échanges avec les gens du
milieu. Nous avons préféré prendre trois bons mois de
discussions avec eux pour nous permettre d'être bien certains que le
projet de loi sur l'hôtellerie pouvait être non pas parfait, parce
que, pour ceux et celles qui nous écoutent, parler de perfection dans un
projet de loi, ce serait vraiment en mettre un peu trop, mais le plus parfait
possible.
Je m'étonne, cependant, que mon collègue de Lac-Saint-Jean
ait soulevé ce point parce que, m'a-t-on dit, la difficulté
majeure qu'a vécue M. Marcel Léger, dans le temps où il
était ministre du Tourisme, c'était d'essayer de convaincre son
collègue du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche d'inclure, à ' l'intérieur de ce réseau, les
pourvoiries, les camps de vacances, les colonies de vacances, etc.
On m'a toujours dit, selon ce que m'ont rapporté les gens qui
étaient assis autour de la même table pour discuter de ce projet,
que la difficulté était d'inclure les domaines qui appartenaient
ou relevaient du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
De là l'importance d'avoir un ministre qui chapeaute les deux
ministères. Quand je suis arrivé, je me rappelle très bien
que le fonctionnaire responsable de ce dossier m'a dit: M. le ministre, la
difficulté qu'on va avoir, c'est de convaincre les gens du Loisir de
faire partie ou de s'intégrer à la loi.
J'ai répondu: Vous n'aurez pas de difficulté majeure,
parce que je vais parler à l'autre ministre. Je pense qu'il va
rapidement donner instruction à ses fonctionnaires de
s'attabler avec tout ce qui s'appelle hébergement et qui provient
du ministère du Loisir, de la Chasse ou de la Pêche ou du
Tourisme, afin que ces gens se parlent et visent vraiment le même
objectif. C'est curieux, on a réussi cela en permettant à tout ce
beau monde de s'asseoir à une table pour faire en sorte que nous ayons
ce projet de loi.
Comme je vous l'ai dit tantôt, je pense qu'il faut dire les choses
telles qu'elles sont. Il faut féliciter les gens qui, depuis quelques
mois, non seulement à l'arrivée du ministre actuel, mais aussi du
temps de celui qui a enclenché le processus, bien qu'il l'ait fait d'une
façon un peu restreinte â notre goût -pas assez de
consultations - malgré tout, il a eu le courage de vouloir faire quelque
chose et il a essayé de convaincre ses collègues du Conseil des
ministres de participer à la bonification de ce projet de loi, ce qui
n'a pu être fait à temps mais ce qui est maintenant, aujourd'hui,
une réalité.
J'aimerais répondre sur les quelques points qu'a soulignés
tantôt mon collègue de Lac-Saint-Jean concernant les
règlements. Oui, parlons-en, des règlements. Je soutiens que,
tout compte fait, il y aura beaucoup moins de règlements dans la
nouvelle loi qu'il en existait auparavant. Vous allez me dire: Comment le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et ministre du Tourisme
peut-il bien faire un calcul semblable quand il est dit que 14 sujets seront
réglementés? Effectivement, 14 sujets seront
réglementés. Si on s'en était tenu uniquement à la
classification des hôtels au Québec, il y aurait eu moins de
règlements dans la nouvelle loi que dans l'ancienne, donc, une
diminution de règlements. Mais le petit bout que le député
de Lac-Saint-Jean a oublié d'additionner, c'est qu'on touche à
beaucoup plus de domaines par cette loi qu'il en existait auparavant. (16 h
10)
C'est évident, Mme la Présidente, qu'il y aura un peu plus
de réglementation parce qu'il y a des domaines qui n'étaient
nettement pas réglementés. On se souviendra - je vais faire appel
à la mémoire du député de Lac-Saint-Jean qui a
vécu cette expérience au MLCP - et tout le monde sait que du
côté des bases de plein air, pour ne prendre que l'exemple des
bases de plein air, on avait des millions à injecter dans ce milieu pour
faire uniquement la mise aux normes. Encore aujourd'hui, nous tentons de faire
l'impossible pour corriger toutes ces situations. Dans certains cas, il n'y
avait aucune sécurité. Tout le monde conviendra que la
journée où un ministre décide, parce que ce n'est pas
assez sécuritaire, de fermer une base de plein air, c'est un
tollé dans le milieu où on dit carrément au ministre:
Pourquoi fermez-vous ça? C'est un besoin.
Le député de Lac-Saint-Jean, qui était ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, sait très bien, autant que
moi-même ou que nos prédécesseurs, que s'il avait
procédé à la fermeture de certains établissements
à cause d'un manque de sécurité, tout de suite,
l'Opposition, peu importe laquelle, peu importe la couleur du parti politique,
se serait levée en Chambre pour dire: Mais pourquoi fermer une base de
plein air, M. le ministre? On aurait réussi à dire: Ce sont des
personnes handicapées qui vont là, ce sont des gens
démunis, des gens qui ne sont pas capables de se payer des vacances dans
des hôtels. On aurait fait tout un plat là-dessus, si on avait
décidé de fermer une base de plein air pour des raisons de
sécurité. Soit; On aurait fait un problème quasiment
provincial avec la fermeture d'une base de plein air.
Examinons le deuxième côté de la médaille,
parce que justement, certaines bases de plein air ne sont pas
sécuritaires. Supposons - espérons que ça n'arrive jamais
nulle part - pour un instant qu'arrive une catastrophe dans une base de plein
air, une conflagration, un feu et que, parce qu'il y a un manque de
sécurité, on ait 10, 12, 15 ou 20 blessés ou 10, 12, 15 ou
20 morts. Je verrais, comme première question en Chambre, peu importe la
couleur de l'Opposition, peu importe l'individu qui est critique du MLCP, que
ce soit Mme la députée de Marie-Victorin, que ce soit
l'ex-critique qui était député de Charlesbourg dans le
temps, que ce soit le député de Maskinongé ou un autre,
tenir le ministre responsable de la mort, du décès ou des
blessures causées à un certain nombre de personnes, parce qu'il y
a eu une conflagration et qu'il n'y avait pas suffisamment de
sécurité. Cela aurait été un autre langage le
lendemain matin, justement, parce qu'il n'y avait pas de réglementation,
parce qu'on ne réglementait pas. Dans certains cas, on ne pouvait pas
obliger certaines normes de sécurité, ce que nous faisons avec le
projet de loi en incluant tout cela.
Vous comprendrez qu'en ajoutant les pourvoiries, tout le
phénomène d'hébergement, les bases de plein air, les
colonies de vacances, etc., c'est bien évident qu'il y aura un peu plus
de réglementation. On touche à dix ou douze
éléments additionnels du projet de loi. Le député
de Lac-Saint-Jean ne m'a rien appris en disant qu'il y aurait un peu plus de
réglementation. Si nous avions réglementé exactement
chacun des sujets comme cela aurait dû être fait, on verrait
qu'à la fin on arriverait avec plus de règlements qu'il ne va en
exister dans la nouvelle loi. Donc, diminution de la réglementation
à cause du nombre de sujets touchés. Je pense que ce n'est pas
sorcier, tout le monde comprendra ça rapidement. Je suis convaincu que
mon collègue, le député
de Lac-Saint-Jean, a déjà compris ça.
Il faut bien se dire aussi que, dans le même langage, quand on
parle d'inspecteurs, d'inspections, etc., il ne pourra pas y avoir
d'inspecteurs qui vont se promener sur le terrain et qui n'auront pas de
règlements dans leurs poches pour les faire resoecter. Je comprends mal
que le député de Lac-Saint-Jean, dans la même
envolée oratoire, me parle d'une possibilité de catastrophe parce
qu'il n'y a pas d'inspecteur et me dise: II ne faut pas que vous
réglementiez davantage. Je pense que ça va de soi, Mme la
Présidente.
Puisque je viens déjà de vous parler d'inspecteurs, je
pense que je vais toucher à cette partie pour laquelle s'est
interrogé mon collègue de Lac-Saint-Jean. Je vous ai dit, au
cours de mon allocution, qu'on tentait de plus en plus de se modeler sur nos
voisins, nos concurrents. Il faut être vigilant face à la
concurrence et permettre les mêmes avantages quand il s'agit d'inciter
les gens à venir chez nous. Il ne faut pas qu'il y ait tellement de
différence, je pense, entre ce qui existe en Ontario ou dans les
États du Nord-Est américain et ce qui existe au Québec,
compte tenu de la clientèle qu'on invite et compte tenu de nos
possibilités. On se modèle là-dessus, c'est bien, avec ce
qui existe. Si le député de Lac-Saint-Jean se rappelle, je lui ai
dit qu'on oriente tous nos efforts vers la classification. Quand on parle de
classification, cela veut dire que ces établissements seront
classifiés à mon ministère. On va déjà en
connaître la classification et on va savoir de quel type
d'hébergement il s'agit.
Je pense que vous avez la réponse à la question que vous
m'avez posée. Nous fonctionnons par classification et on est certains
qu'à ce moment-là... Pour classifier les établissements,
il faut savoir la sorte d'établissement. Il faut savoir quel genre de
services il offre et la qualité. En ayant une qualité, je pense
que le type d'inspecteurs auquel faisait allusion le député de
Lac-Saint-Jean, qui existait auparavant, n'a plus sa raison d'être
à cause du principe de la classification qui, sans doute, va nous
permettre d'offrir beaucoup mieux aux touristes qui viennent chez nous, tant
ceux du Québec que ceux hors Québec. Cela va nous permettre
à la fois même une possibilité de services ou une foule de
services additionnels et le touriste saura à l'avance dans quel type
d'établissement il sera hébergé.
Dans la restauration, s'il s'agit d'une fleur de lys, de deux fleurs de
lys ou de trois fleurs de lys, il saura de quel genre d'établissement il
s'agit. Il saura en plus ce que cela lui coûtera à peu près
pour l'hébergement à cet endroit. Je pense que le
député de Lac-Saint-Jean a déjà une réponse
à ce point d'interrogation qu'il est important, je dois le dire, de
soulever pour qu'on puisse donner certaines réponses.
Il y aura cependant toujours un service d'inspection qui va fonctionner,
mais qui fonctionnera sur plainte. Quand des citoyens achemineront une plainte
à mon ministère, des inspecteurs iront vérifier
l'exactitude de la plainte et séviront si, évidemment, il y a
lieu de le faire selon le rapport qui nous sera soumis. C'est évident
qu'on s'achemine beaucoup plus vers des possibilités dans le domaine
touristique de façon permissive et non pas coercitive.
J'aimerais dire deux mots, Mme la Présidente - vous allez sans
doute me le permettre pour répondre à deux questions -en ce qui
concerne les lignes aériennes. J'ai fait part au député de
Lac-Saint-Jean en commission parlementaire, l'autre jour, de la très
mauvaise expérience que nous avions vécue avec Quebecair. Cela a
coûté 162 000 $ au ministère pour établir une
liaison entre New York et Québec et la première journée
qu'on devait effectuer cette liaison, Quebecair s'est nettement
décommandée. J'ai même dû effectuer un voyage
à New York pour aller en discuter. Je prends à témoin
notre déléguée touristique à New York, Mme
Marsolais, qui m'a alerté immédiatement à ce sujet car on
s'est vraiment fait une très mauvaise publicité touristique. Par
contre, il y aura des liaisons d'organisées avec City Express, via
Toronto et Québec, ce qu'on appelle du "charter", vers le mont
Sainte-Anne, et je pense qu'il y a d'autres choses qui sont organisées.
Mais c'est vrai que c'est un domaine où il va falloir mettre à
l'avenir beaucoup d'efforts pour être capable de l'améliorer. (16
h 20)
En terminant, Mme la Présidente, je veux vous souligner et
souligner au député de Lac-Saint-Jean que, quand il parlait du
Carnaval de Québec comme événement touristique, il est
vrai et j'en conviens. Or, je pense qu'à toutes fins utiles il ne faut
pas faire un plat avec la différence de ce que nous avons offert au
Carnaval de Québec. La différence entre ce que nous offrons cette
année et ce que nous avons donné l'an passé n'est que de
28 000 $, alors que, l'an passé, nous avions indiqué
déjà à ces messieurs du Carnaval de Québec que nous
allions diminuer nos efforts du côté du soutien financier, et
qu'ils devaient voir à essayer de faire un peu plus du côté
de l'autofinancement.
Il ne faut pas oublier que le montant que nous donnons au Carnaval de
Québec représente environ 40 % de notre enveloppe
budgétaire du côté de l'attraction touristique. Si j'ai
pris sur moi de vouloir - et je termine par cela - diminuer un peu les
subventions aux événements qui sont un peu plus gros dans le
domaine touristique, c'était justement dans le but de satisfaire...
Le
député de Lac-Saint-Jean ne m'en tiendra pas rigueur.
Est-ce que je dois continuellement augmenter la subvention au Carnaval de
Québec et ne plus permettre à Chicoutimi de tenir le sien, son
carnaval, ou si je dois encore dire au Carnaval de Québec, qui attire
beaucoup de monde, beaucoup de population: Privez-vous donc de 28 000 $ pour
qu'on puisse tenir un carnaval à Chicoutimi pour développer cette
région? En dehors de Québec et de Montréal, il y a des
régions et il me semble qu'elles ont le droit de
bénéficier de touristes. C'est là la vraie réponse
et je suis certain que le député de Lac-Saint-Jean comprend
très bien cette philosophie. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Le débat étant clos,
est-ce que le principe du projet de loi 152, Loi sur les établissements
touristiques, est adopté?
M. Brassard: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources et leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Ciaccia: Mme la Présidente, je fais motion pour
déférer ledit projet de loi à la commission de
l'économie et du travail.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Brassard: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources et leader adjoint du gouvernement.
M. Ciaccia: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 19.
Projet de loi 126 Adoption du principe
La Vice-Présidente: À l'article 19 de notre
feuilleton, il s'agit de l'adoption du principe du projet de loi 126, Loi
modifiant la Loi concernant les environs du parc du Mont-Sainte-Anne, qui avait
été présenté par le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche le 11 novembre 1986. M. le ministre du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi
sera sans doute beaucoup plus aride que le précédent, puisque
nous allons parler d'une chose qui est un peu plus compliquée, qui
relève d'engagements juridiques, qui vient normaliser finalement une
situation qui existait et perdurait et qui lésait certains citoyens de
notre belle province.
Sans doute qu'après avoir étudié rapidement ce
projet de loi le prochain projet de loi qui sera appelé, celui sur la
faune, sera beaucoup plus captivant pour nos collègues. Il y aura
peut-être beaucoup plus d'intervenants. De toute façon, je
n'anticipe pas sur ce qui pourrait se passer. Je vous dis tout simplement qu'en
1970, à la suite de l'arrêté en conseil 957 du 11 mars, le
ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement a acquis en vrac
tous les actifs de la Commission du parc du Mont-Sainte-Anne pour les besoins
du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.
De plus, le gouvernement décida d'exproprier une plus grande
étendue de territoire dans le but de consolider ses acquis et d'y
créer un parc. Une réserve de chasse fut établie le 15
décembre 1971 -l'arrêté en conseil 4202 - sur les
territoires publics et privés ayant été retenus pour le
projet de parc, ceci dans le but de protéger les adeptes des
activités de plein air.
Cependant, ce nouveau projet entraîna le développement
rapide des municipalités environnantes et le gouvernement dut intervenir
le 23 décembre 1971 par une loi s'intitulant Loi concernant les environs
du parc du Mont-Sainte-Anne de manière que le développement
desdites municipalités se fasse d'une manière ordonnée et
fonctionnelle, en harmonie avec le projet du parc.
Cette loi, par son article 6, soustrait le territoire du parc du
Mont-Sainte-Anne, décrit en annexe à cette loi, au
règlement de construction et de zonage des municipalités
touchées par cette loi dont, entre autres, la ville de
Beaupré.
Certains terrains situés dans la ville de Beaupré
étant des parties du lot 640 du cadastre de la paroisse de Sainte-Anne
et de l'ancienne route de Saint-Féréol, propriété
de M. Roland Dupont, sont inclus dans le territoire visé par la loi et
n'ont jamais été expropriés. Autrement dit, il y a un
citoyen qui se trouve inclus dans la loi pour laquelle le gouvernement n'a
jamais payé de frais d'expropriation.
La direction des acquisitions du ministère des Transports du
Québec a négocié, pour le ministère du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche, une entente d'échange selon laquelle M.
Roland Dupont se porterait acquéreur de diverses parcelles des lots 639
et 648 du cadastre de la paroisse de Sainte-Anne, propriété du
gouvernement, alors que le gouvernement se porterait acquéreur de
parcelles du lot 640 et de l'ancienne route de Saint-Féréol,
propriété de M. Roland Dupont, tout en versant à ce
dernier une indemnité compensatoire
d'environ 14 500 $, cet échange tenant compte des besoins du
territoire du parc du Mont-Sainte-Anne. En raison de cet échange, les
limites du territoire décrit en annexe à la loi concernant les
environs du parc du Mont-Sainte-Anne devront être modifiées afin,
entre autres, de retourner sous la gestion municipale les immeubles non compris
dans le territoire du parc, cette modification faisant partie de l'entente avec
M. Roland Dupont, y compris le règlement complet et final de la
poursuite mentionnée auparavant.
Les deux parties ont intérêt à cet échange.
L'assemblage des terrains permet au parc de reconstituer à cet endroit
une limite de territoire plus cohérente et au propriétaire
privé de reconstituer une propriété plus facile à
aménager, ce qui met le propriétaire dans une situation
avantageuse, le dédommageant ainsi en partie pour le long gel de ses
propriétés.
Le projet de loi 126 vise donc essentiellement à modifier la
limite nord-est du parc du Mont-Sainte-Anne et permettra de corriger un
anachronisme qui existe dans ce secteur depuis 1971, à la suite de
l'inclusion dans la réserve de chasse du Mont-Sainte-Anne de terrains
privés, et qui trouve son aboutissement dans le présent projet de
loi.
En effet, lorsque ce projet de loi aura été adopté,
le gouvernement du Québec, par l'entremise du ministère des
Transports, pourra procéder à un échange de terrains avec
le propriétaire dont les terrains sont inclus dans la réserve de
chasse, ce qui aura comme avantage, premièrement, de dégager les
ambiguïtés qui existent actuellement en regard des terrains
situés de part et d'autre de la route 360 menant au centre de ski du
Mont-Sainte-Anne, sur lesquels la municipalité ne peut agir.
Deuxièmement, d'établir un cadre administratif clair tant pour le
ministère que pour le propriétaire. Troisièmement, de
permettre à la municipalité de Beaupré de faire appliquer
ses propres règlements de zonage sur les terrains ainsi
dégagés. Quatrièmement, de permettre des
développements nouveaux et importants par l'entreprise privée
dans le respect des règlements de zonage municipaux.
Cinquièmement, de permettre au gouvernement le règlement d'un
dossier à la satisfaction des parties en cause, soit le
propriétaire, la municipalité et le ministère, donc, les
trois parties en cause, sans débourser de sommes d'argent
importantes.
Par ailleurs, la modification à la limite du Mont-Sainte-Anne ne
pourra entraîner de problème majeur pour le développement
des environs dudit parc, compte tenu que la municipalité est en accord
avec le projet et a le pouvoir de zoner le territoire et de statuer sur les
développements qui pourront y être exécutés. En
somme, Mme la
Présidente, par ce projet de loi, le ministère va
clarifier une situation, régler un préjudice causé
à un citoyen, permettre de nouveaux développements par
l'entreprise privée sans mettre en danger la qualité de
l'environnement du parc du Mont-Sainte-Anne qui continue, année
après année, à atteindre une performance exceptionnelle au
niveau de son attrait touristique. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: M. le ministre a bien circonscrit le cadre du
projet de loi. Il s'agit tout simplement de redonner ce qui revient de droit et
à juste titre à un citoyen, ce qui était sa
propriété, citoyen qui, compte tenu des circonstances, en 1971,
se sentait lésé. Depuis lors, le ministère des Transports
a négocié au nom du gouvernement l'achat de ce terrain et enfin
une entente est intervenue pour régler ce litige. (16 h 30)
Par contre, il m'aurait été beaucoup plus facile de suivre
le ministre dans la déclaration qu'il a faite tantôt en ce qui
concerne la loi, pour comprendre exactement ce qu'il en était du
cadastre, parce qu'il était difficile de trouver les plans. J'ai
essayé de trouver les plans où se situaient ces terrains pour
justement visualiser la partie qui était
rétrocédée, et tenter de découvrir si le fait qu'on
touche à cette partie du patrimoine aurait des conséquences sur
l'ensemble de nos parcs et de nos réserves au Québec. Vous savez
tout comme moi que l'ensemble des parcs et des réserves du Québec
est un fleuron des plus importants pour l'industrie touristique
québécoise. Les parcs et les réserves, c'est un produit
fort enviable et très recherché, et qui démontre une
adéquation optimale entre les attentes et les besoins des
clientèles visées. Les parcs et les réserves, c'est une
offre qui s'étale sur quatre saisons et qui permet une gamme
d'activités fort intéressantes pour l'ensemble des
clientèles qui veulent justement participer au bien-être des
loisirs de plein air. Aussi, nos parcs et nos réserves offrent une
importante immobilisation, un important budget d'exploitation, et ils ont un
impact économique important. C'est important de conserver notre
patrimoine de parcs et de réserves parce qu'ils sont un apport
considérable au développement économique du
Québec.
Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aujourd'hui,
régularise une situation par un projet de loi qui, ma foi, me laisse
avec certaines interrogations. Justement j'en profite pour soulever ces
interrogations en cette Chambre. Comme on
le sait, la SEPAQ doit administrer l'ensemble des parcs et
réserves, et elle a un rôle important à jouer. Mes
interrogations sont au sujet du rôle que doit jouer justement la SEPAQ et
de son avenir. On se souviendra que la Société des
établissements de plein air du Québec, qui s'appelle SEPAQ, est
propriétaire du mont Sainte-Anne. Cette compagnie, dont le siège
social a été sanctionné le 21 décembre 1984 par
l'ancien gouvernement - il faut bien le souligner -est une
société de gestion qui, selon le ministre actuel, fait
très bien son travail. Et, pour le moment, il ne veut pas la remettre en
cause.
Donc, la SEPAQ, organisme créé par l'ancien gouvernement
du Parti québécois, a pour mandat de gérer les
équipements et les immeubles ou les territoires à vocation
récréative ou touristique que lui confie le gouvernement.
À ce titre, la SEPAQ assure l'accès des Québécois
et des Québécoises à différentes activités
de loisirs, et ces propriétés si importantes le sont au
mérite et on peut en nommer plusieurs. Notamment dans le secteur du ski.
Cette société gère les équipements et les terrains
de camping, de golf, de ski alpin et de randonnée du parc du
Mont-Sainte-Anne. On touche énormément à tout l'aspect du
plein air. Cet aspect du plein air qui va avec une qualité de vie, qui
favorise la participation à l'activité physique, qui permet
à des centaines de citoyens et de citoyennes de vaquer à des
loisirs et qui leur permet justement de se maintenir en équilibre
physique et même quelquefois mental. Qu'on se rappelle le vieil adage: Un
esprit sain dans un corps sain.
Nous arrivons maintenant, Mme la Présidente, à une
ère de privatisation. Alors que la tendance actuelle favorise de plus en
plus la privatisation, ne serait-il pas plus important de boucler la boucle
avec le secteur privé pour l'émergence duquel beaucoup
d'investissements et d'énergie ont été consentis? Ce qui
me fait demander au ministre s'il va vraiment travailler avec les gens qui sont
déjà là et consolider ce qui est en place plutôt que
de le démembrer et vraiment faire appel à un secteur
d'activité dont les gens connaissent plus ou moins le
développement, le tissu social de ceux qui participent au milieu du
loisir.
Dans cette ère de réorientation et de changement du
rôle de l'État, il était important aussi de modifier
certaines attitudes. J'espère que le ministre s'attardera beaucoup,
qu'il prendra son temps, là comme ailleurs, pour arriver à
trouver des solutions que le monde du plein air mérite et aussi tous les
gens qui s'adonnent au camping.
Plusieurs intervenants s'occupent du plein air, on peut parler notamment
de tout l'ensemble des partenaires, autant privés que ceux d'organismes
en milieu de loisir qui, par leur fédération, ont un rôle
important à jouer dans le développement des activités de
plein air.
J'aimerais revenir, Mme la Présidente, sur le rôle de la
SEPAQ. Bien sûr, au tout début de son mandat, M. le ministre est
très prudent, c'est un ministre qui n'ose pas vraiment donner
l'orientation dans laquelle il développera sa politique de loisir,
à tel point qu'on se demande: A-t-il vraiment souci du
développement du loisir? On y va avec tellement de prudence, tellement
à petits pas, on entend si peu parler du développement des
politiques du monde du loisir qu'on est en train de se demander ce qui va
arriver dans ce monde. Est-on en train de démembrer toutes les
activités du monde du loisir? Est-ce que ce sera un ministère
uniquement de la chasse et de la pêche? Y aura-t-il encore une place pour
le monde du loisir? Étude après étude, nous attendons
toujours les réponses de notre ministre en ce qui concerne le loisir et
les politiques de l'ensemble du monde du loisir.
Je sais, Mme la Présidente, que la SEPAQ n'est pas en danger pour
le moment. Déjà, le ministre s'est prononcé en ce qui
concerne l'avenir de la SEPAQ, mais c'est un avenir ponctuel parce que sa
réponse est que, pour le moment, la SEPAQ n'est pas en danger.
Qu'adviendra-t-il une fois les analyses terminées? Aura-t-on à
trancher avec le ministre des Transports pour qui la SEPAQ devait
disparaître complètement pendant la campagne électorale? De
qui faudra-t-il prendre la parole? C'est difficile à cerner. Même
le président du Conseil du trésor affirmait dans son rapport, le
rapport Gobeil, que tout le monde reconnaît présentement, que la
SEPAQ devait, elle aussi, disparaître.
J'estime, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche,
que vous allez avoir besoin de beaucoup de soutien de vos collègues pour
continuer à aller dans le sens que vous avez déjà choisi
vis-à-vis de la SEPAQ. J'espère que vous trouverez des appuis car
nous, de notre côté, nous sommes convaincus que le rôle de
la SEPAQ est important et qu'elle devra continuer à jouer le rôle
qu'elle a joué depuis des années et qui permet l'essor du
développement récréo-touristique. (16 h 40)
J'aimerais démontrer à quel point justement on arrive
à ce double langage du gouvernement. Pendant la campagne
électorale, le ministre des Transports et député de
Charlesbourg clamait très haut et très fort qu'il fallait
démanteler la SEPAQ. Comme je le disais tout à l'heure, le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a toujours
rectifié le tir quant à l'avenir de la SEPAQ. Pour lui, il ne
faut pas aller trop rapidement. C'est important, dit-il, avant de commencer
à éliminer des choses, de prendre le temps de
réévaluer les
structures de la SEPAQ. Il affirmait même que le parc du
Mont-Sainte-Anne était finalement à la tète de la SEPAQ et
que s'il privatisait le parc du Mont-Sainte-Anne, c'était la faillite
assurée pour la SEPAQ. Il faut comprendre que le ministre n'a vraiment
pas l'intention de faire disparaître la SEPAQ et donne de plus en plus de
charges et de responsabilités à cet organisme.
J'espère qu'on n'aura pas affaire au double langage.
J'espère que sa prudence n'en est pas une momentanée mais une
prudence qui fait appel à des attitudes bien ancrées chez le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Lors d'une rencontre des établissements hôteliers, il
déclarait au Journal de Québec, le 30 janvier, au sujet du Manoir
Montmorency et de Fort-Prével et je cite: "Je ne suis pas certain que
notre rôle social en tant que ministère soit de laisser tomber ces
deux endroits. Après une visite de ces endroits, j'ai compris qu'ils
répondent à un besoin précis pour la population, besoin
que nous pouvons combler alors qu'une entreprise privée ne pourrait le
faire, question de rentabilité." J'ose croire que ce sont plus que des
mots. J'ose croire que les citations que je viens de faire en cette Chambre
prendront forme et demeureront...
J'ai l'impression que les propos du ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche doivent en faire sourciller plus d'un au Conseil des
ministres. J'espère que vous continuerez, M. le ministre, à faire
sourciller vos collègues, parce que, actuellement, avec les formes de
privatisation prises par votre gouvernement, effectivement, il n'y a pas de
rentabilité pour les Québécois et les
Québécoises à démembrer des projets tels que
Quebecair, des compagnies qui permettaient à nos régions d'avoir
un service de qualité et qui permettaient aussi d'avoir droit de regard
en ce qui concerne le transport aérien. Vous faites bien, M. le
ministre, de vouloir maintenir la SEPAQ. Je suis fort heureuse qu'enfin, dans
ce gouvernement, il y ait au moins un ministre qui soit capable de prendre en
considération des organismes qui ont l'intérêt de
développer l'ensemble des lieux de plein air, les établissements
qui favorisent la participation aux activités de conditionnement
physique et qui permettent à nos parcs et réserves de maintenir
une intégrité qui fera que nos enfants et nos petits-enfants
auront toujours cette fierté du patrimoine qui leur permettra, à
eux aussi, de retourner dans les sentiers où, déjà, leurs
ancêtres auront foulé ces mêmes espaces verts. M. le
Président, je vous remercie.
Le Vice-Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche, pour votre droit de réplique.
M. Yvon Picotte (réplique)
M. Picotte: Merci, M. le Président. Quel pot-pourri de
valses, de marches militaires, de musique western! Finalement, tout y a
passé. En parlant d'un projet de loi pour modifier un morceau de
terrain, ce qui va rendre justice à un de nos concitoyens, on a pu
entendre toutes les litanies possibles et impossibles et Dieu sait si, à
certaines occasions, ces litanies étaient fausses!
J'ai eu l'occasion - et je ne voudrais pas être
désagréable envers ma collègue de Marie-Victorin - de lui
dire à quelques reprises en commission parlementaire qu'elle aurait tout
intérêt à changer ses recherchistes, parce que Mme la
députée de Marie-Victorin me dit qu'il n'y a pas eu moyen de
vérifier les cadastres, de vérifier les lignes, d'avoir un plan.
Je lui ai dit à maintes reprises, compte tenu de ce que j'ai pu
constater de la pauvreté de son service de recherche: Mme la
députée, vous êtes la bienvenue à mon
ministère en n'importe quel temps. Venez nous voir, on va
répondre à toutes vos questions et il y aura sans doute des
réponses qui ne vous feront pas plaisir, sur lesquelles vous ne serez
pas d'accord et vous aurez toute liberté, même si vous êtes
venue nous voir, de les critiquer.
Dans le temps que j'étais dans l'Opposition, Dieu sait que
certains de mes collègues d'en face n'aimaient pas le genre de critique
que je faisais, mais jamais personne n'a pu m'empêcher de critiquer des
mesures présentées par le gouvernement. Mme la
députée de Marie-Victorin pourrait venir à mon
ministère, rencontrer mes attachés politiques, pour s'informer
adéquatement; cela ne lui enlèverait en rien son droit de nous
critiquer sévèrement. Il faudrait, après un an de vie
parlementaire, que Mme la députée de Marie-Victorin
décide, une fois pour toutes, d'ignorer ses recherchistes si elle veut
faire montre de talent à l'Assemblée nationale et éclairer
sa lanterne.
J'ai toujours eu et je les ai ici, devant moi... C'est évident
que vous ne pouvez les voir de si loin, mais c'est pour vous dire, Mme la
députée de Marie-Victorin, que vous auriez pu, en n'importe quel
temps, consulter ces plans à mon ministère. Compte tenu du fait
qu'aveb l'ancien gouvernement, dans certains cas, les décisions se
prenaient au pifomètre, comme on le dit si bien en langage
québécois, ou se prenaient à la va-comme-je-te-pousse,
vous comprendrez bien que cela a changé depuis un an et que nous y
allons de façon à être bien certains que tout est bien
attaché, que tout est bien balisé.
Nous avons les plans et - je vous le dis et je vous lance l'invitation;
en commission parlementaire, c'est peut-être moins perçu par le
public mais, ici, ce sera perçu davantage, nos collègues
étant plus nombreux
- vous êtes toujours la bienvenue, Mme la députée,
au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour vous
enquérir de tout ce que nous faisons, pour vérifier ce que nous
faisons. Il n'y a rien de caché, il n'y a rien en dessous de la table
dans tous les domaines. Il nous fera plaisir de vous renseigner
adéquatement et peut-être aussi pourriez-vous amener vos
recherchistes pour qu'on puisse leur accorder quelques heures additionnelles
afin de bien les orienter en ce qui concerne les discussions que nous pourrions
avoir. Je trouverais tellement agréable de discuter avec vous, à
mon ministère, concernant le monde du loisir et celui du sport en
général.
Vous comprendrez bien, M. le Président, que je n'ai pas
l'intention de répondre aux interrogations de madame en ce qui concerne
SEPAQ, elle a abondamment cité d'excellents articles et fait
d'excellentes citations de celui qui vous parle, passages qu'elle a relus et
qu'elle a vus, j'imagine, au Journal des débats et dans certains
journaux. Je pense que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
n'a jamais eu peur de dire ce qu'il avait à dire et d'appeler les choses
telles qu'il devait les appeler. Pas plus que je ne vais m'engager - et cela,
personne ne m'en tiendra rigueur - à signer un contrat de mariage avec
la SEPAQ. On sait très bien que certains contrats qu'on prétend
signer à vie, dans certaines occasions ne sont pas nécessairement
d'une durée indéfinie. (16 h 50)
Je n'ai l'intention d'aucune façon d'ajouter à tout ce que
j'ai dit concernant la SEPAQ. Je dirai, cependant, à la
députée que je pourrai amplement discuter, d'ici à
quelques mois lors de l'étude de nos crédits en mars, avril ou au
début de mai, de l'avenir de la SEPAQ. Je peux lui dire qu'il y aura des
éléments nouveaux sur lesquels elle pourra parler, parce que des
choses vont se passer. Contrairement à ce qui existait avant au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, les choses se
font, se décident, et ça bouge.
La députée aurait pu citer certains articles de journaux
qui disaient récemment qu'il s'est fait plus au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche en un an que ce que nos
prédécesseurs avaient fait en neuf ans. C'est donc dire que,
finalement, elle verra encore d'autres changements se produire pour le
mieux-être de nos clientèles. Je lui dirai, à elle qui
prétend que rien ne s'est fait dans le sport, que l'an dernier, entre
autres, dans les loisirs et dans le sport, concernant les
fédérations sportives, aucune coupure n'a été
exercée. Pour un ministre qui ne s'en soucie pas, ce n'est pas si mal.
Après avoir été obligé de faire des compressions
budgétaires importantes à cause de la situation qui nous avait
été léguée par nos prédécesseurs,
qu'un ministre du sport qui, au dire de Mme la députée, ne
s'occupe pas de ses affaires, réussisse à ne pas couper 1 % aux
sports, aux élites, à l'excellence, aux programmes, je pense que
ce n'est pas si mal d'avoir réussi à travailler avec les chiffres
de cette façon-là.
De toute façon, tous ces renseignements seront à sa
disposition à mon ministère. Nous pourrons faire une discussion
de fond en ce qui concerne la SEPAQ, les loisirs, le socioculturel, le sport,
la faune, le Palais des congrès, l'ITHQ, et enfin tous les domaines qui
relèvent de la compétence du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche et du ministère du Tourisme. Je vous
remercie, M. le Président, en espérant que cette situation nous
permettra de corriger justement un problème qui existait depuis
déjà fort longtemps.
Je vous ferai remarquer, en terminant, que si nous sommes appelés
à corriger cette situation, c'est parce qu'en 1970, un gouvernement a
décidé d'acheter le mont Sainte-Anne parce qu'il croyait au
développement des loisirs, qu'il a décidé d'en faire un
parc parce qu'il croyait au développement du ski au Québec, qu'il
a décidé de mettre des budgets et que, chaque fois qu'on a mis
des budgets là-dedans, il y a eu tellement de retombées
économiques qu'on est obligé de faire des arrangements de
terrains de cette façon-là. Bravo! Cent fois bravo! si enfin un
gouvernement décide d'arrêter de réfléchir et de
passer des semaines à penser, de déposer des livres blanc,
câille, rouge, jaune et décide de s'impliquer au point de vue
économique parce que je pense que c'est de la création d'emplois,
des retombées économiques dans le milieu. Donc, merci au
gouvernement antérieur d'avoir fait ça et merci sans doute au
gouvernement actuel de corriger cette situation qui aurait normalement dû
être corrigée par nos prédécesseurs en neuf ans de
règne s'ils avaient cru vraiment au développement
économique. Malheureusement, c'est un dossier qui dormait sur les
tablettes et qui n'avait même pas réussi à attirer ou
à aiguiser l'appétit de mes prédécesseurs, les
ministres du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Merci.
Une voix: Très bien!
Le Vice-Président: Ceci met fin au débat à
cette étape de l'étude du projet de loi. Est-ce que la motion
d'adoption du principe du projet de loi 126, Loi modifiant la Loi concernant
les environs du parc du Mont-Sainte-Anne, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Ciaccia: M. le Président, je fais motion pour
déférer ledit projet de loi à la commission de
l'aménagement et des équipements.
Le Vice-Président: Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 38 du feuilleton.
Projet de loi 153 Adoption du principe
Le Vice-Président: À l'article 38 du feuilleton, M.
le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche propose que le
principe du projet de loi 153, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la
mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs, soit maintenant
adopté.
Je cède la parole à M. le ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je vous dirai que je
suis particulièrement heureux de soumettre ce projet de loi à
l'attention de l'Assemblée nationale et de corriger une situation qui
s'est malheureusement drôlement détériorée depuis
quelques années. Sans doute la volonté politique que nous avons
manifestée et que nous manifestons avec ce projet de loi viendra-t-elle
corriger une foule de choses. Il était temps, je pense, que quelqu'un
mette de l'ordre dans ce domaine. Vous pouvez être assuré, M. le
Président, que nous ne négligerons aucun effort dans ce domaine,
comme dans tous les domaines qui relèvent de mon ministère, afin
d'améliorer la situation.
Depuis que je dirige le ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche, j'ai eu maintes occasions de mesurer combien le braconnage
était un fléau. Cette déplorable activité entrave
largement la gestion efficace de la faune. Les agents de conservation, pourtant
désignés pour lutter contre le braconnage, ne disposent pas de
tous les outils nécessaires à leur tâche. Sous l'ancien
gouvernement animé par le souci de rendre l'utilisateur responsable, on
a éliminé de la loi certaines dispositions. L'expérience,
par la suite, a cependant démontré leur utilité. C'est
dans l'esprit essentiellement de réaffirmer la saine gestion de la faune
que j'ai proposé à cette Assemblée certaines modifications
à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et
à la Loi sur les parcs.
M. le Président, je tiens à vous préciser que je
n'agis pas de façon isolée. Au cours de l'année qui
s'achève, j'ai eu l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises
les différents organismes de la faune. Leur voix était unanime.
Il faut améliorer de façon sensible la lutte contre le braconnage
qui menace l'équilibre naturel de la faune et qui, par le fait
même, en menace l'utilisation, privant d'autant certaines régions
de retombées économiques et touristiques tangibles. Tous ont
été unanimes pour exiger de mon ministère qu'il se dote
des outils adéquats pour gérer efficacement cette ressource.
Un seul groupe que je n'ai pas eu personnellement l'occasion de
rencontrer semble, m'a-t-on dit, s'opposer catégoriquement à
toute mesure visant à éliminer le braconnage. Ce sont - vous
l'avez deviné, M. le Président - les braconniers. Ils
préféreraient que je continue dans la même voie du laxisme.
Si vous me le permettez, M. le Président, je ne tiendrai pas compte de
leurs revendications.
Les organismes de la faune qui m'ont signifié leur accord dans la
mise en oeuvre de moyens destinés à combattre le braconnage
représentent ensemble plus de 2 000 000 d'utilisateurs de la faune dont
1 500 000 de détenteurs de permis. Un tel lobby est impressionnant. Des
gestes concrets s'imposent. Les modifications proposées aujourd'hui aux
deux lois font partie d'une série de mesures destinées a
éliminer, autant que cela se peut, cet acte répréhensible,
cet acte que l'on pourrait qualifier de crime contre la nature et contre la
société. Il me faut, M. le Président, vous préciser
que ma volonté de mettre un terme à ce délit ne se traduit
pas uniquement par le renforcement de la loi.
D'autres mesures viendront compléter les dispositions
législatives. Il en sera ainsi de l'augmentation du nombre des agents de
conservation, de la réinstauration d'une ligne
téléphonique unique pour dénoncer le braconnage, de la
mise en oeuvre d'un plan de communications destiné à sensibiliser
le public sur les différentes manifestations de braconnage et à
développer une intolérance à l'égard de cette
activité. Ces dernières mesures de portée éducative
seront mises en oeuvre avec le concours des divers organismes de la faune,
notamment la Fédération québécoise de la faune. (17
heures)
Dans le projet de loi que j'ai déposé, certaines
dispositions touchent les territoires
fauniques. Ce sont les réserves fauniques, les ZEC, les refuges
fauniques et les pourvoiries. Ces dispositions sont destinées à
en améliorer la gestion. Je tiens à vous préciser, M. le
Président, que ce sont des mesures s'inscrivant dans le courant de la
déréglementation. En ce qui concerne la Loi sur les parcs, je
propose également certaines modifications, principalement pour assurer
sa concordance avec la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la
faune.
Si vous me le permettez, je passerai plus en détail les diverses
modifications que je propose. Dans un premier temps, je traiterai de celles
concernant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Le
présent projet de loi introduit de nouvelles prohibitions et augmente de
façon significative les sanctions imposées aux contrevenants.
Trois nouvelles dispositions viennent mieux encadrer l'interdiction de
chasser la nuit. Elles sont nécessaires en raison des abus qui ne
cessent d'augmenter. Une présomption sera même
réintroduite. Ainsi, lorsqu'une personne sera en possession d'un
projecteur et d'une arme à feu dans un endroit fréquenté
par le gros gibier, elle sera présumée chasser la nuit à
moins de preuve contraire. L'utilisation d'un projecteur la nuit pour
déceler la présence d'un animal dans un endroit
fréquenté par le gros gibier sera interdite. Également, il
sera interdit d'être en possession, la nuit, d'une arme à feu non
chargée dans un véhicule ou un aéronef sauf si elle est
insérée dans un étui ou disposée dans le coffre du
véhicule ou la soute de l'aéronef.
D'ailleurs, tout chasseur consciencieux s'applique, pour des raisons de
sécurité, à garder son arme dans son étui ou dans
le coffre de son véhicule. Selon la gravité de l'infraction, le
montant des amendes sera augmenté de façon significative.
Dans le cas des condamnations conduisant à des amendes dites
faibles, les minimums et maximums de .135 $ et 425 $ passeront 200 $ et 600 $.
La notion de récidive sera introduite et conduira à des amendes
minimales et maximales triplées, c'est-à-dire de 600 $ et 1800 $
dans le cas de récidive.
Dans le cas des condamnations imposées pour des infractions plus
graves que les précédentes, conduisant à des amendes
moyennes, les pénalités passeront de l'actuelle fourchette de 225
$ à 625 $ à justement de nouvelles amendes s'échelonnant
de 400 $ à 1200 $ et ceci pour la première infraction. Les
minimums et maximums seront triplés dans le cas de récidive.
Également, le juge pourra à sa discrétion imposer un
emprisonnement d'au plus 90 jours lorsqu'il y a récidive.
Pour une infraction grave, M. le Président, les amendes seront
lourdes. Les actuelles amendes variant de 1050 $ à 3150 $ passeront de
1500 $ à 4500 $. La récidive entraînera des amendes
triplées, 4500 $ à 13 500 $ et des peines d'emprisonnement d'au
plus un an, toujours à la discrétion du juge.
Pour ce qui est des pénalités, la loi ne prévoit
pas actuellement de disposition concernant les espèces
vulnérables ou menacées. Le projet que je vous soumets propose
d'introduire un article imposant des pénalités pour les
infractions commises à l'égard de ces espèces.
En outre, le présent projet propose de changer certaines
infractions de catégorie et d'augmenter ainsi l'importance des
sanctions. En effet, certaines infractions actuellement dans la
catégorie de faibles passeront à la catégorie moyenne et
de moyenne à lourde. La notion de récidive que j'ai
abordée précédemment présente dans le projet de loi
une portée plus grande. Toute personne condamnée une
deuxième fois pour la même infraction dans un délai de
trois ans sera passible d'une sanction supérieure à celle
prévue pour la première infraction.
Le projet de loi innove en prolongeant la notion de récidive dans
le cas de certaines infractions commises à l'égard de gros
gibier. En effet, il introduit une présomption de récidive
lorsqu'une personne commet une infraction alors qu'elle a déjà
commis une autre infraction dans les délais prescrits. Ainsi, à
titre d'exemple, une personne qui a commis une première infraction en
chassant dans un ravage de chevreuils et qui, dans les trois ans qui suivent
cette condamnation, est reconnue coupable d'avoir chassé la nuit sera
punie pour ce deuxième cas comme si c'était la deuxième
fois qu'elle chassait la nuit.
Le projet de loi identifie six infractions considérées
comme des récidives. Je vous les énumère: la chasse avec
un véhicule, un aéronef ou une embarcation - c'est
considéré comme récidive - la chasse ou l'action de
déranger le gros gibier dans son ravage; l'usage d'un dispositif pour
chasser; l'usage d'un poison ou d'une autre substance pour chasser ou
piéger; la capture du gros gibier avec un piège; l'action de
tirer à partir d'un véhicule ou d'un aéronef. Voilà
les six points que je viens de vous énumérer.
Les sanctions administratives seront également renforcées.
Actuellement, pour des infractions commises à l'égard du gros
gibier, la suspension du permis est automatique pour deux ans. Première
nouveauté importante, le contrevenant dont le permis de chasse sera
annulé ne pourra obtenir aucun autre permis de la catégorie
permis de chasse pendant la période d'annulation.
Actuellement, une personne s'étant fait retirer son permis pour
l'activité à l'égard de laquelle l'infraction a
été commise conserve le droit d'obtenir d'autres
catégories de permis de chasse.
Deuxième nouveauté, la notion de récidive sera
également réintroduite dans le cas de sanctions administratives.
Il s'agit de la suspension ou de l'annulation du certificat ou des permis. Une
première récidive dans les trois ans suivant l'infraction pourra
entraîner une annulation ou une suspension du certificat ou du permis
pour le double de la durée imposée lors de l'infraction
première. Une deuxième récidive dans les trois ans pourra
entraîner une annulation ou une suspension pour une durée
triple.
M. le Président, ces nouvelles mesures peuvent paraître
sévères. Sans doute. Je vous dirai, à ce sujet, que j'ai
rencontré presque tous les groupes de la société. Je n'ai
entendu, jusqu'à maintenant, aucune voix discordante face à la
sévérité à la fois des amendes et des mesures. Les
seules jusqu'à maintenant qui ont été portées
à ma connaissance, ce sont les plaintes des braconniers.
Je suis persuadé qu'aucun autre groupe de notre
société ne voudrait critiquer cette sévérité
de peur de s'associer à ceux qui pillent notre faune, de peur de
s'associer à ceux qui n'ont aucun respect et qui mettent nettement, dans
certaines régions - c'est prouvable et démontrable - en danger le
cheptel et la ressource même. J'en suis convaincu. Je défie le
député de Laviolette, qui me demande des preuves, de venir avec
moi dans la région où il vit, où une bonne partie de la
population vit de chasse, du côté de La Tuque. Je le mets au
défi de venir avec moi dans n'importe quel groupe de la
société soucieux de protéger notre faune, sauf
évidemment les braconniers, et de me trouver un groupe qui va venir me
dire que j'ai été excessif. Je le mets au défi et je mets
au défi n'importe quel député de cette Chambre. J'avais un
de mes collègues de Montréal qui me disait que l'autre jour, dans
une réunion de l'âge d'or, je pense, en plein coeur de la ville de
Montréal, des gens qui n'étaient pas des habitués de la
chasse et de la pêche lui ont parlé justement de ce projet de loi
et lui ont dit: Demandez donc au ministre de ne céder aucun pouce du
côté de la sévérité, du côté de
la loi parce que je pense que c'est épouvantable. (17 h 10)
Je suis persuadé, et l'Opposition aussi sans doute avec ce que
j'ai déjà vécu ici... Rappelons-nous que lorsque justement
il y a eu la noyade des caribous et que les gens se sont installés
devant leur téléviseur, quelle a été la
constatation générale des gens devant ce carnage que je
qualifierais de naturel. Rappelons-nous jusqu'à quel point le ministre
de l'Énergie et des Ressources d'alors a paniqué. Sans doute que,
lui, il attribuait ce carnage à un manque de jugement des caribous, M.
Rodrigue avait alors qualifié cela ainsi. Rappelons-nous jusqu'à
quel point on est allé vérifier si toutes les mesures avaient
été prises de la part d'Hydro-Québec et de la part de tout
le monde pour éviter ce carnage.
Savez-vous que dans nos régions et dans la région de
l'Estrie, entre autres, dans une période de courte durée, il y a
eu 700 chevreuils de tués illégalement, c'est-à-dire ceux
dénombrés par le ministère à part ceux qu'on n'a
pas dénombrés et à part ceux qui nous ont
été cachés. Au moins, 700 chevreuils dans un court laps de
temps. On va me faire accroire que ces gens dans cette Chambre, des élus
du peuple, vont s'associer à un tel carnage! Si c'était larmoyant
la catastrophe naturelle des caribous, c'est tout aussi larmoyant là et
c'est fait par des pilleurs de faune. Je suis persuadé que personne ne
voudrait voir associer son nom ou son groupe à condamner la
sévérité du ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche face à ce carnage. De toute façon, si des gens ont
des reproches à faire sur cela, je m'engage et à faire le tour du
Québec et à dénoncer ceux qui se seront associés
aux braconniers pour condamner la sévérité du ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Ces nouvelles mesures peuvent - et je l'ai dit - paraître
sévères, mais elles ne seront, je pense, jamais assez
sévères tant qu'on n'aura pas corrigé une situation qui
s'est détériorée depuis dix ans, tant sur le nombre
d'agents de conservation qui ne sont plus sur le territoire, passant de 500
à 325 ou 330, tant du côté des agents de conservation qui
ont diminué lamentablement, que du côté de
l'accessibilité où on a laissé un laxisme inqualifiable.
Les défenseurs de la méthode douce de conscientisation, de
sensibilisation et d'éducation auront peut-être un réflexe
d'indignation, mais je vous ai mentionné tantôt qu'il y en aura de
l'éducation et qu'il y en aura de la sensibilisation. Je pense que c'est
tout cela qui fera en sorte que les gens apprendront à respecter notre
faune. Je répondrai qu'il est plus indignant encore de voir des
tricheurs s'employer sciemment à détourner la loi et à
détruire la faune. Je leur rappellerai également l'exemple de la
répression de l'ivresse au volant où il a fallu, pour obtenir les
résultats tangibles que nous observons, assortir les mesures de
sensibilisation à des mesures légales impitoyables.
En outre, il me faut vous réitérer que l'utilisation de la
faune constitue un levier économique non négligeable lorsqu'elle
est sciemment exploitée. Il est donc de mon devoir de lui assurer un
cadre de protection adéquat. J'entends souvent des députés
de régions venir me parler de pourvoiries, de ZEC, d'utilisation du
territoire, de donner des territoires additionnels aux utilisateurs. Ceux qui
défendront et qui critiqueront la sévérité du
ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche, ce sont ceux qui voudront effectivement que, dans
cinq ans, il ne reste à peu près plus rien dans nos
régions, et là, cela ne donnera plus rien aux
députés d'aller défendre l'apport économique des
régions puisqu'on aura, par notre laxisme, laissé tout faire et
aurons tout permis. On ne peut se permettre cela d'aucune façon. Je
serai intransigeant de ce côté. Je le dis et je tiens à ce
que les gens en soient avertis. Il n'est pas question que je retraite ou que je
recule à ce sujet. Je ne reculerai pas et je serai en mesure... Je suis
persuadé que les journalistes qui nous écoutent et qui suivent
cela attentivement - encore hier à la suite d'une rencontre avec
certains d'entre eux où je leur ai dit: Suivez cela demain, nous allons
avoir le débat à ce sujet - vont dénoncer avec beaucoup
d'acharnement ceux qui demanderont au ministre de retraiter. Je
préfère - si des gens veulent me faire une discussion à
fond de train là-dessus - ne pas adopter le projet de loi cette
année plutôt que de retraiter un seul instant. Mais ceux qui le
feront auront à payer très cher cette décision. Je suis
persuadé, parce que j'ai discuté avec de nombreux
collègues, que tout le monde est conscient de cela et tout le monde me
le mentionne. Je pense qu'il sera important que les gens suivent cela de
près et nous allons le faire en ce qui nous concerne, comme
gouvernement.
J'aborderai maintenant les modifications proposées
destinées à renforcer les pouvoirs des agents de conservation. La
première mesure vise à harmoniser la Loi sur la conservation et
la mise en valeur de la faune et la Loi sur les pêcheries et la Loi sur
la convention concernant les oiseaux migrateurs. Le projet de loi introduit en
effet le pouvoir d'inspection qui permettra à un agent de conservation,
en vue de procéder à des inspections, de pénétrer
à toute heure raisonnable dans un véhicule, un aéronef,
une embarcation ou dans un endroit autre qu'une maison d'habitation où
il y a des motifs raisonnables de croire à la présence d'animaux
à fourrure, d'engins de chasse ou de piégeage. S'il constate que
des infractions ont été commises, il pourra alors effectuer des
saisies.
La durée maximale pendant laquelle les agents de conservation
pourront assurer la garde des biens saisis sera portée de 90 à
120 jours. Ceci permettra de tenir compte du contexte dans lequel les agents
doivent exercer leurs fonctions. En outre, lors d'une saisie, l'agent de
conservation ne sera plus obligé de remettre au contrevenant le
véhicule ou l'aéronef saisi. Il pourra, s'il le juge opportun,
conserver la garde de ce véhicule, de cet aéronef au même
titre qu'il peut le faire actuellement pour une embarcation ou pour un
chien.
La loi prévoit actuellement qu'il est interdit de donner
sciemment de faux renseignements au ministre, à un agent ou à un
auxiliaire de la conservation de la faune. La portée de cette
disposition sera étendue aux autres fonctionnaires du ministère
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans l'exercice de leurs
fonctions.
En matière d'entrave, une nouvelle infraction est introduite. En
vertu des modifications proposées, il sera interdit d'entraver
volontairement l'action d'un agent de conservation, d'un auxiliaire de
conservation ou d'un fonctionnaire, évidemment, toujours dans l'exercice
de leurs fonctions.
Voilà, M. le Président, quelques mesures destinées
à faciliter l'application de la loi.
J'aborderai maintenant les modifications proposées pour
améliorer la situation des territoires fauniques. En fait, il s'agit de
simplifier la désignation de ces territoires et de donner plus de
souplesse à certains pouvoirs réglementaires. La simplification
s'imposait pour la désignation des territoires fauniques. En effet, pour
les réserves, les ZEC, les refuges fauniques et les parties de terre
domaniales destinées à l'exploitation des pourvoiries, cette
désignation se fera par décret plutôt que par
règlement. Ainsi, tout ajustement ne sera plus contraint au délai
important occasionné par les modifications aux règlements.
De plus, le gouvernement pourra instituer des zones d'exploitation
contrôlée et des refuges fauniques pour l'utilisation ou la
protection d'une espèce faunique particulière. Évidemment,
cette opération se fera en respectant les prescriptions légales
existantes, notamment la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Je vous rappellerai, M. le Président, que la gestion des
territoires fauniques peut être administrée d'une façon
différente de la voie réglementaire, n'étant pas
considérée comme une norme en vertu de la Loi sur les
règlements.
Les pouvoirs de réglementation à l'égard des baux
de droits exclusifs de chasse, de pêche et de piégeage seront
réduits. Seul sera reconduit le pouvoir de déterminer la valeur
maximale des constructions que pourra faire le titulaire d'un bail de droits
exclusifs de piégeage.
Les conditions auxquelles seront assujettis les locataires de droits
exclusifs seront fixées dans le bail. De fait, les pouvoirs
réglementaires existant actuellement ne sont pas utilisés. Ainsi,
ils seront éliminés. Voici un bel exemple de
déréglementation.
Par ailleurs, les pouvoirs réglementaires à l'égard
des zones d'exploitation contrôlée, des réserves et des
refuges fauniques seront assouplis pour permettre de fixer les tarifs pour la
pratique d'activités en fonction des catégories d'usagers, de
l'activité pratiquée, de l'espèce faunique
recherchée ou de
l'endroit où les activités de chasse, de pêche et de
piégeage sont pratiquées. (17 h 20)
À titre de ministre responsable, je serai dorénavant
autorisé à accorder des baux de droits exclusifs de
piégeage dans une ZEC ou dans une réserve faunique. Actuellement,
je ne peux que délivrer un permis pour autoriser le piégeage dans
les ZEC et les réserves fauniques. En vertu du projet que je vous
soumets, je serai autorisé à accorder des baux de
piégeage. D'une part, cette modification permettra d'assurer une
meilleure gestion et un meilleur contrôle de cette activité et,
d'autre part, elle permettra aux trappeurs de profiter de meilleures conditions
pour leur pratique. Inutile de vous rappeler l'importance que revêt pour
le Québec et pour le Canada l'industrie de la fourrure.
Essentiellement, je viens de vous présenter les modifications que
je propose à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la
faune. J'aimerais maintenant aborder la question des modifications à la
Loi sur les parcs. Comme je le mentionnais précédemment, elle
porte essentiellement sur des ajustements par rapport à la Loi sur la
conservation et la mise en valeur de la faune.
Enfin, ce sont des modifications de même nature rendues
nécessaires pour fins de concordance. Une seule exception, la
modification à l'appellation "parc national". Cette appellation a
été source de bien des confusions en raison, notamment, de la
présence au Québec de parcs nationaux canadiens. Je propose donc
de reconduire l'ancienne appellation, celle de "parc de conservation" qui cadre
mieux avec l'esprit qui a conduit à l'adoption de la Loi sur les parcs.
Ainsi, le Québec disposera de parcs créés pour conserver
des échantillons représentatifs ou exceptionnels du patrimoine
naturel du Québec, des parcs de conservation, et de parcs
créés pour favoriser l'accomplissement d'activités
récréatives en milieu naturel, des parcs de
récréation. On comprendra que cette modification
n'entraînera qu'une différence dans les règles actuelles
d'accessibilité.
Les modifications que je propose aux deux lois constituent une
première brochette de mesures visant à améliorer la
gestion de la faune au Québec. Dans le cas de la Loi sur la conservation
et la mise en valeur de la faune, elles introduisent de nouveaux interdits
rendus nécessaires pour lutter efficacement contre le braconnage et
majorent les sanctions pour augmenter l'effet dissuasif. Elles renforcent
également les pouvoirs des agents de conservation de façon
à leur permettre de mieux appliquer l'esprit de la loi. Enfin, elles
permettent d'améliorer la gestion des territoires fauniques. Pour la Loi
sur les parcs, des modifications sont rendues nécessaires pour assurer
la concordance avec les modifications à la Loi sur la conservation et la
mise en valeur de la faune et l'appellation "parc de conservation" vient
remplacer celle de "parc national". Ces ajustements sont nécessaires
dans les plus brefs délais, surtout pour mettre un frein au braconnage,
une pratique déplorable que toute société doit
combattre.
L'impression d'abondance propre à notre province a conduit par le
passé les Québécoises et les Québécois
à trop souvent fermer les yeux devant cette pratique faisant même
parfois, comme je le disais en février dernier, des "braconniers de
Robin des bois à l'envers". La réalité est tout autre. La
faune québécoise n'est pas inépuisable, contrairement
à ce que certains peuvent penser et prétendre. La forêt
québécoise n'est pas une corne d'abondance faunique. Nous avons,
certes, un potentiel remarquable dont on doit s'enorgueillir mais qu'il nous
faut gérer efficacement. Si les peines sont lourdes pour ceux qui
enfreignent la loi, c'est pour assurer aux chasseurs et pêcheurs le droit
d'utiliser la faune, et pour profiter de cette ressource économique.
C'est aussi pour permettre à tous nos concitoyens et concitoyennes de
profiter de la présence faunique et enfin, c'est pour assurer aux
générations futures les mêmes privilèges que ceux
dont nous bénéficions aujourd'hui. J'espère que nous
serons tous d'accord pour que, le plus rapidement possible, nous mettions cette
loi en marche, que nous l'adoptions, que nous puissions sans doute nous
permettre, une fois pour toutes, de contrôler, de préserver notre
cheptel et notre faune au Québec. Merci.
Le Vice-Président: Merci, M. le ministre. Je vais
maintenant donner la parole à M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Merci, M. le Président. M. Picotte: M.
le Président.
Le Vice-Président: M. le ministre du Tourisme.
M. Picotte: Afin de permettre à mon collègue de.
faire son discours sans interruption, j'aimerais demander immédiatement
le consentement de la Chambre pour dépasser l'heure, s'il y a lieu. Je
pense que cela nous éviterait, à 18 heures, d'interrompre notre
collègue et cela nous permettrait, au moins, de terminer cette
section.
Le Vice-Président: Oui, d'accord.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président: Évidemment, je dois
exiger à ce moment-ci, même si ce n'est peut-être pas
la procédure usuelle, un consentement anticipé si le
député de Dubuc devait poursuivre son intervention au-delà
de 18 heures. En fait, je suppose qu'il y a consentement actuellement en cette
Chambre. Si on ne soulève pas la question à 18 heures, je
permettrai la poursuite du débat. M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, je donne mon consentement. Je
vais le donner pour mon collègue et, en même temps, pour le
ministre, ce qui lui permettra d'autres occupations au cours de la
soirée. Si on ne terminait pas, il serait obligé de revenir.
Le Vice-Président: D'autant plus, M. le
député de Laviolette, que tel que convenu hier un ordre de la
Chambre demande que, de 20 heures à 23 heures, nous reprenions les
discussions sur le projet de loi 124, Loi modifiant de nouveau la Loi sur
l'assurance-maladie. C'est donc un ordre de la Chambre que ledit débat
reprenne à 20 heures, ce soir, jusqu'à 23 heures. Comme je l'ai
mentionné tantôt, c'est non usuel de procéder de cette
façon, par un consentement anticipé, parce que ça prend un
consentement unanime. Si des députés arrivaient en Chambre et
voulaient s'opposer, je serais obligé de reconnaître les
députés qui demanderaient que nous suspendions nos travaux
à 18 heures. Si je n'ai pas de telle demande, du consentement des gens
qui sont présents, on laissera poursuivre le débat jusqu'à
la fin de l'intervention de M. le député de Dubuc.
Vous avez la parole, M. le député de Dubuc.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Merci, M. le Président. Donc, c'est à
l'avantage des deux sans doute, du ministre et de moi-même. Je n'ai pas
minuté mon discours, mais cela ne devrait pas tellement dépasser
l'heure. Je remercie le ministre, vous-même et tous mes collègues
d'avoir accepté qu'on dépasse peut-être de quelques
minutes.
Notre patrimoine faunique, au triple titre de ressource essentielle
à l'équilibre écologique, de potentiel
récréotouristique et de générateur
d'activité économique nécessite toute notre attention. Le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous convie, par son
projet de loi 153, à un important exercice de réflexion sur
l'approche et les moyens à privilégier pour le gérer.
Nous sommes tous d'accord sur l'ampleur des infractions à la Loi
sur la conservation et la mise en valeur de la faune. À elle seule, pour
prendre quelques exemples, l'Estrie se dirige vers une année record,
alors que 85 cas de braconnage ont été répertoriés
contre une cinquantaine l'an dernier et une quarantaine en 1984. Le 6 juin
dernier, les agents de conservation de la faune et la direction
régionale de Montréal ont procédé au
démantèlement d'un important réseau de braconnage de
l'esturgeon. Cette opération, qui s'est déroulée en face
du parc Bellerive, dans l'est de Montréal, a permis d'arrêter 17
personnes et de procéder à la saisie de 3000 $
d'équipement de pêche et de 1000 livres d'esturgeon.
Une autre filière devait être mise à jour le 1er
novembre: 12 personnes ont été arrêtées et 300 kilos
de viande de chevreuil ont été saisis au cours d'une vaste
opération qui a mobilisé 30 agents de conservation et policiers
de la Sûreté du Québec dans les villes de Farnham,
Sainte-Brigitte, Longueuil, Montréal et Laval.
Enfin, un dernier cas parmi tant d'autres, le 12 novembre, les agents de
conservation du MLCP mettaient fin aux activités d'un réseau de
braconniers opérant dans la réserve Papineau-Labelle dans les
Laurentides. Bilan: une quinzaine de personnes perquisitionnées et 1200
kilos de gibier saisis. Tel est le cercle presque infernal des captures, de
possession, de ventes et d'achats illégaux, et à quel prix!
La pêche et la chasse se révèlent chez nous des
valeurs économiques de premier plan. Selon une récente
étude de l'Association des pourvoyeurs du Québec, en 1985,
quelque 1 200 000 pêcheurs actifs du Québec ont
qénéré des dépenses de l'ordre de 598 000 000 $
pour les résidents québécois et encore 52 000 000 $ pour
les non-résidents du Québec.
Pour leur part, en 1981, les 350 000 adeptes de la chasse ont
insufflé 163 000 000 $ dans l'économie québécoise.
Si on considère de plus les pourvoyeurs et les ZEC qui ont permis 3 000
000 de jours-récréation et des retombées
économiques de 1 000 000 000 $ en 1981, si on pense, de plus, à
la pêche sportive du saumon, qui a rapporté 12 000 000 $, ce sont
des faits très éloquents qui démontrent l'importance
économique de notre ressource faunique. (17 h 30)
Autre fait éloquent, c'est la récolte d'animaux à
fourrure qui a augmenté de 15 % au Québec en 1985-1986. Et les
ventes de fourrure, selon les chiffres du ministère, ont
représenté une source globale d'environ 8 800 000 $. Il faut
savoir qu'il y a 25 000 trappeurs au Québec, ce qui représente 15
% de tous les trappeurs du Canada parmi lesquels on se classe au
deuxième rang. Il y a 57 000 emplois au Québec reliés au
domaine de la fourrure, soit dans la transformation, le nettoyage, le tannage,
la teinture, la coupe, le commerce de la fourrure, ce qui représente 75
% de tous les emplois créés dans ce domaine au Canada.
II faut se rappeler aussi qu'il y a 1800 établissements qui
fabriquent des articles de fourrure au Québec, qu'il y a 221
manufacturiers de produits de fourrure au Québec, ce qui
représente 85 % de tout ce qui se produit au Canada. Tout cela exige
donc la protection de la faune, et le braconnage doit être
enrayé.
Dans l'arsenal des mesures que le ministre propose à cette
Assemblée, il introduit de nouvelles infractions auxquelles il
prête un caractère dissuasif. Parmi celles-ci, l'interdiction
d'entraver un agent de conservation de la faune dans l'exercice de ses
fonctions ou l'interdiction d'être en possession, la nuit, d'une arme
à feu, sauf si elle est insérée dans un étui
fermé ou déposée dans le coffre d'un véhicule ou
dans la soute d'un aéronef. Si la première prohibition semble
acceptable, la seconde, quant à elle, risque de provoquer de multiples
interprétations, ne serait-ce que pour savoir jusqu'où la
fermeture éclair de l'étui d'une arme est légalement
fermée. C'est ce genre de difficulté d'ailleurs qui a
amené à l'origine, en 1983, la disparition de cet article de la
loi sur la préservation de la faune.
Il est une disposition, toutefois, qui ne manque pas de soulever de plus
fortes inquiétudes. En effet, M. le Président, l'article 8 du
projet de loi 153 stipule que nul ne peut chasser le gros gibier la nuit avec
un projecteur et que nul ne peut utiliser un projecteur la nuit pour
déceler la présence d'un animal dans un endroit
fréquenté par le gros gibier. Soit: Mais, poursuit l'article 8,
une personne en possession la nuit d'un projecteur et d'une arme à feu
chargée ou d'une arbalète ou d'un arc armés dans un
endroit fréquenté par le gros gibier est, en l'absence de toute
preuve contraire, présumé être en possession de ce
projecteur et de cette arme pour chasser.
La clause de présomption de culpabilité est ainsi
réintroduite après avoir été soustraite en 1983 de
la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, parce que
difficilement applicable, les tribunaux ayant statué à maintes
reprises que cette notion de présomption avait des limites dans son
application. Elle avait été retirée, dois-je ajouter,
à la demande de plusieurs organismes qui s'étaient
présentés en commission parlementaire lors des audiences de
novembre 1982.
Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche déroge
par ailleurs, semble-t-il, aux Chartes canadienne et québécoise
des droits et libertés qui établissent respectivement aux
articles ll(d) et 33 que tout accusé est présumé innocent
jusqu'à preuve du contraire.
Le ministre a-t-il discuté de la question avec le Procureur
général et jurisconsulte du
Québec, responsable de la Charte des droits et libertés de
la personne et de l'économie de nos lois? Le ministre a-t-il
demandé l'opinion de la Commission des droits de la personne et, si oui,
quelles ont été ses recommandations? Le braconnage est un acte
répréhensible, certes, mais sa répression est-elle ici
pleinement justifiée, surtout mesurée? Le ministre devra
répondre à ces questions.
Le 8 novembre, quelques jours avant la présentation de ce projet
de loi, le ministre déclarait devant 150 participants à un
colloque organisé par l'Association des pourvoyeurs: "C'est une loi qui
va avoir des dents mais pas encore assez à mon goût." Le ministre
disait même avoir été retenu par ses conseillers
juridiques. "Ils m'ont dit, ajoutait-il, que j'allais peut-être un peu
trop loin. Quant à moi, j'étais prêt à arrêter
seulement à la peine de mort." C'est bien sûr une conclusion que
le ministre faisait, à la blague peut-être, mais de telles paroles
restent quand même révélatrices d'un certain état
d'esprit, d'une certaine conception de la justice sur laquelle je reviendrai
plus loin.
Ne serait-il pas incidemment équitable que le ministre se
soumette lui-même à un régime de plus grande
sévérité en évitant de se donner de nouvelles
prérogatives qui pourraient mener à l'abus et à
l'arbitraire?
Les articles 69 et 70 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur
de la faune stipulent que nul ne peut vendre, acheter ou offrir d'acheter de la
chair d'animal ou du poisson d'une espèce dont la vente est interdite
par règlement. Toutefois, le gouvernement peut, par règlement, en
autoriser la vente selon les normes et conditions qu'il détermine.
Toutefois, l'article 12 du projet de loi 153 dit que, "malgré les
articles 69 et 70, le ministre peut - ce n'est plus le gouvernement; c'est le
ministre - aux conditions qu'il détermine - ce n'est plus par
règlement; c'est aux conditions qu'il détermine - délivrer
un permis autorisant la vente ou l'achat de poisson ou de chair d'animal pour
consommation sur place par les personnes qui participent à une
activité spéciale décrite dans le permis." M. le ministre,
qu'est-ce qu'une activité spéciale? Quelles sont les conditions
d'achat et de vente que vous aurez à déterminer selon vos propres
critères? Quelles seront les coordonnées de ces permis?
Répétitives, aléatoires, arbitraires, ces exceptions
spéciales ne risquent-elles pas de devenir la règle et de mener,
comme un chroniqueur de chasse et de pêche en manifestait la crainte,
à la commercialisation du patrimoine faunique?
Il ne s'agit pas là, par ailleurs, des seules prérogatives
nouvelles que se confère le ministre. Ainsi, à l'article 16 du
projet de loi, il s'accorde le droit de "donner à bail des droits
exclusifs de piégeage dans une
zone d'exploitation contrôlée", sabrant ainsi dans
l'autonomie des ZEC. Mais, pis encore, M. le Président - nous aurons
l'occasion d'y revenir en détail plus tard - le ministre s'arroge un
pouvoir discrétionnaire démesuré à l'égard
de l'aménagement et de l'affectation du territoire au moment où
l'article 19 soustrait de la réglementation gouvernementale la
détermination, entre autres, des catégories de baux de droits
exclusifs de chasse, de pêche ou de piégeage, les conditions
d'obtention, de transfert et de renouvellement de ces baux, les normes et
conditions de construction et de localisation des bâtiments auxquelles
doit se conformer le locataire.
Tout ceci m'apparaît d'ailleurs complètement à
l'antipode de ce que ce même gouvernement qui, par l'intermédiaire
d'un autre de ses députés, notre collègue, le
député de Notre-Dame-de-Grâce, dans le rapport qui est
intitulé, Réglementer moins et mieux, où il n'est jamais
question, M. le Président, que le mot "déréglementation"
soit associée à une absence de réglementation... Au
contraire, aux pages 32 et suivantes -j'en lirai quelques phrases - le
député de Notre-Dame-de-Grâce dit très bien "Une
participation - c'est le titre du chapitre -accrue des individus et des
entreprises au processus de réglementation." On y lit, entre autres:
"Les relations avec les citoyens ont fait l'objet, ces récentes
années, d'une préoccupation beaucoup plus grande de la part du
gouvernement et de l'administration publique." Un peu plus loin, on lit: "La
réglementation constitue un élément fort important de la
relation d'un État avec ses citoyens." Encore: "L'effort de
simplification du langage de la réglementation devra être
accompagné d'un autre effort visant à impliquer davantage les
intéressés et la population dans son ensemble dans la
préparation de la réglementation." Une dernière citation:
"Cette volonté d'associer -la population, les citoyens - doit se trouver
aussi dans les ministères et elle suppose la mise en place de diverses
techniques de consultation qui varient selon que la réglementation prend
la forme d'une loi ou d'un règlement." (17 h 40)
Je pourrais continuer la lecture de ce rapport du député
de Notre-Dame-de-Grâce, mais nulle part on ne trouve l'association que
semble faire le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, que
déréglementer, c'est ne plus avoir de règlement, que
déréglementer, cela devient arbitraire pour un ministre. Ce que
le rapport dit, c'est qu'une réglementation doit être plus souple,
plus simple, plus claire pour les citoyens mais aussi en associant de plus en
plus les citoyens et que ce qui n'est pas dans un règlement on doit le
retrouver dans la loi, ce que ne fait pas du tout le ministre dans son projet
de loi 153 où il s'accorde des droits de l'absolu, de l'arbitraire.
Si c'est nécessaire - c'est fort possible, le ministre est en
mesure d'évaluer si la réglementation est trop
sévère, si elle l'empêche d'agir véritablement dans
les meilleurs intérêts de la protection de la faune
québécoise, - qu'il assouplisse la réglementation. Cela,
nous en sommes mais pour des pouvoirs absolus, de l'arbitraire, non merci, M.
le Président.
Le projet de loi 153 introduit aussi par ailleurs dans sa batterie de
mesures répressives une inflation telle des amendes imposées
qu'on peut s'interroger sérieusement sur les chances de réussite
de l'application de la loi et, a fortiori, sur la qualité de son
influence dissuasive. Prenons un exemple. La faute est grave,
répréhensible certes, mais voyez jusqu'où la sanction peut
aller. Chasser le gros gibier sans permis, en vertu de l'article 32 du projet
de loi 153, est passible, en outre du paiement des frais pour une
première infraction, d'une amende d'au moins 400 $ et d'au plus 1200 $
et, pour toute récidive dans les trois ans de la condamnation pour une
infraction à la même disposition, d'une amende d'au moins 1200 $
et d'au plus 3600 $.
Toujours à l'article 32, dans le cas d'une récidive, le
juge peut en outre condamner le contrevenant à un emprisonnement d'au
plus 90 jours. Rien de moins, M. le Président, pour avoir chassé
le gros gibier sans permis ou ne pas avoir fermé l'étui dans
lequel une arme à feu doit être insérée la nuit.
Et que dire des infractions lourdes? Ainsi, à l'égard du
gros gibier, chasser la nuit avec un projecteur, tuer ou capturer
au-delà de la quantité déterminée par
règlement, tirer avec une arme à feu, un arc ou une
arbalète à partir d'un véhicule ou d'un aéronef
sont, à titre d'exemples, des infractions, en vertu de l'article 34 du
projet de loi, passibles d'amendes d'au moins 1500 $ et d'au plus 4500 $ et, en
cas de récidive, d'amendes d'un minimum de 4500 $ à un maximum de
13 500 $, sans compter la possibilité d'une condamnation à un
emprisonnement d'au plus un an.
M. le Président, par rapport à l'actuelle Loi sur la
conservation de la faune, les sanctions pénales de ce projet de loi
appellent des amendes doublées, sinon triplées, portent le
délai de récidive de deux à trois ans et incluent la
possibilité d'emprisonnement. On peut s'interroger sur le sérieux
véritable du ministre. Entend-il porter un grand coup, faire
éclat, prouver son attachement au patrimoine faunique? Il risque de
faire fausse route, son projet de loi pouvant se révéler
inopérant.
Le ministre peut-il nous dire comment il justifie l'amende de 13 500 $
et la possibilité d'emprisonnement d'un an pour
avoir récidivé dans la vente, l'achat ou l'offre d'achat
de chair de gros gibier par rapport à l'article 722 du Code criminel ou
on retrouve une amende maximale de 2000 $ et un emprisonnement de six mois ou
l'une de ces peines pour qui est reconnu coupable en vertu d'une
procédure sommaire de l'infraction criminelle de voies de fait? 2000 $
pour une infraction criminelle de voies de fait sur la personne par rapport
à 13 500 $ pour peut-être un orignal. Comment justifier cela?
Comment justifier toujours la sévérité des
pénalités à l'égard du braconnage avec celle du
conducteur d'un véhicule routier qui croise ou qui dépasse un
autobus affecté au transport d'écoliers dont les feux
intermittents sont en marche et qui est passible, outre la perte de neuf points
d'inaptitude, à des amendes d'au moins 200 $ et d'au plus 300 $, selon
l'article 507 du projet de loi 127 sur le Code de la sécurité
routière actuellement à l'étude en commission
parlementaire de l'aménagement?
Je ne peux m'empêcher ici d'établir un lien entre le projet
de loi 153, la loi 160 votée il y a quelque temps pour mettre fin aux
grèves illégales, aux lois votées en juin dernier sur la
contrebande du tabac, des carburants, la Loi sur les impôts et le projet
de loi 127 sur le Code de la sécurité routière qui est
présentement à l'étude article par article. Ces projets de
loi et ces lois ont tous un dénominateur commun: des
pénalités très sévères, si
sévères qu'on peut douter même qu'elles soient applicables.
Il y a là une caractéristique de ce gouvernement qui croit sans
doute que la répression est une formule de vie en
société.
Ce gouvernement est en train de développer et d'appliquer cette
politique dans toutes les lois qu'il nous propose d'adopter, sauf, bien
sûr, s'il s'agit des élèves illégaux et de la loi
101. C'est une pente dangereuse et où s'arrêtera cette escalade,
si ces lois, si le phénomène de la loi 153 répète
le phénomène de la loi sur la faune qui déjà, en
1983, avait augmenté certaines peines? Là, on se voit
obligé de les augmenter à nouveau. Est-ce que cela sera
suffisant? Qu'est-ce qu'on amènera comme pénalité
prochaine dans une nouvelle loi d'ici deux ans, trois ans, quand on se rendra
compte qu'il y a encore du braconnage? La peine de mort, comme l'exprimait le
ministre en boutade? S'agissait-il vraiment d'une boutade? Car il se retrouvera
toujours quelqu'un ou quelqu'une pour transgresser une loi ou un
règlement et vous savez que les Québécois, à cet
égard, sont assez habiles, comme le rapportait un chroniqueur de chasse
et de pêche. Ce sont de petits malins, des petits "torieux" et il y a
même un dicton aujourd'hui qui dit: Ce n'est pas défendu de
chasser, ce n'est pas défendu de braconner, mais c'est défendu de
se faire prendre.
D'ailleurs, une étude toute récente qui vient d'être
publiée, qui vient d'être effectuée par le Bureau
d'assurance du Canada conclut que c'est davantage la probabilité
d'être appréhendé, que la sévérité de
la peine prévue, qui empêche la transgression d'une loi.
L'étude en question portait, évidemment, sur le Code de la
sécurité routière, mais par analogie on peut très
bien en reconnaître la pertinence au niveau de n'importe quelle de nos
lois. La sévérité, de plus - j'ajouterai cet
élément -peut faire peur aussi aux agents de conservation. De
deux façons. D'abord, l'importance de la pénalité parce
qu'on sait que des braconniers, il y en a dans presque tous les villages; ils
sont bien connus de tout le monde, y compris des agents de conservation et ce
sont parfois des connaissances très proches, parfois même des amis
ou des parents. On peut se demander si un agent de conservation ne craindra pas
de nuire de façon irrémédiable à quelqu'un de ses
connaissances en l'obligeant à aller passer un an en prison ou à
subir 13 500 $ d'amende.
Ce qui est plus important, je pense, surtout ce qui peut faire peur
davantage, c'est qu'à l'intérieur des réseaux de
braconniers, là où c'est vraiment difficile, c'est dangereux
aussi. On peut se poser la question, M. le Président, jusqu'où un
braconnier professionnel à l'intérieur d'un réseau qui se
sentirait coincé et se verrait devant l'éventualité
d'aller en prison ou de subir une amende de 13 500 $, jusqu'où, se
sentant ainsi coincé, il ne prendrait pas le risque de tirer aur un
agent de conservation. C'est à y penser! Lui-même issu du milieu
de l'éducation, d'ailleurs, le ministre est en mesure d'évaluer
que ce n'est justement pas la sévérité d'une peine qui
empêche un jeune de poser un geste répréhensible ou pas,
mais que c'est la pleine connaissance des conséquences de ses actes. De
nouveau, le ministre a-t-il discuté avec le Procureur
général du Québec, responsable de l'économie de nos
lois en matière pénale?
D'autre part, pourquoi le ministre, à l'article 32 de son projet
de loi, soumet-il aux mêmes sanctions pénales une infraction
d'ordre purement technique, celle relative à l'arme à feu devant
être, la nuit, insérée dans un étui et une
infraction pouvant porter atteinte au cheptel, telle l'utilisation d'un
projecteur la nuit pour déceler la présence d'un animal dans un
endroit fréquenté par du gros gibier? Il y a là, il me
semble, un défaut de concordance et même de cohérence.
À cet égard, je me permettrai de faire référence
à la Loi sur la qualité de l'environnement où les
pénalités à un individu pour une atteinte grave à
la qualité de l'environnement en vertu de l'article 20 seront de 200 $
à 5000 $. S'il s'agit d'une corporation qui fait, par exemple, un
épandage d'insecticide et qui porte atteinte à la vie d'un
troupeau, eh bien, ce sera de 600 $ à 5000 $. Ces 600 $, c'est justement
le minimum qu'on va imposer comme pénalité à un braconnier
pour avoir tué un seul animal. Il y a ici, semble-t-il, une
incohérence entre les diverses lois sur l'importance et la
sévérité des amendes. (17 h 50)
Nous signalons enfin à ce chapitre que les amendes minimales
à diverses infractions sont à ce point élevées dans
ce projet de loi que les individus condamnés, à défaut
répétitif de paiement, risquent de provoquer un engorgement des
travaux communautaires compensatoires. C'est une autre brèche dans
l'économie de nos lois. D'ailleurs, le ministre disait pourtant
lui-même en conférence de presse, le 10 septembre, deux mois avant
le dépôt de ce projet de loi, et je cite: "Le braconnage est une
maladie contagieuse et des amendes même fortes ne règlent pas
toujours le problème. Lorsque le braconnier n'est pas capable de payer,
poursuivait-il, on le condamne à des travaux communautaires, et encore
beau que ce ne soit pas des travaux en forêt." Que dire de plus, M. le
Président? C'est vrai que le braconnage existe, qu'il est
néfaste, qu'il doit être combattu, mais il ne faudrait tout de
même pas créer une véritable psychose du braconnage, alors
que, d'une part, les données sur cette activité sont presque
inexistantes au Québec et que, d'autre part, tant les hauts
fonctionnaires du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
lui-même que les agents de conservation de la faune s'accordent à
dire, selon ce que révélait le journal La Presse, le 5 avril
dernier, que la situation n'a guère changé dans ce domaine au
cours des dernières années.
Le ministre peut bien, au début novembre, jouer à l'agent
de conservation en se joignant, en Estrie, à une patrouille de nuit,
mais rien n'y fera. Les braconniers seraient, par ailleurs, moins nombreux mais
mieux organisés on le sait, regroupés en réseaux bien
structurés et dotés de moyens de communications plus efficaces.
Avant de se lancer tous azimuts dans une vaste et ambitieuse loi truffée
d'imperfections, disproportionnée dans plus d'une mesure et
potentiellement inopérante, le ministre aurait pu préalablement
procéder à trois exercices susceptibles d'apporter un meilleur
éclairage au problème.
Dans un premier temps, le ministre aurait pu attendre les
résultats d'une importante étude que l'École de
criminologie de l'Université de Montréal lui propose de mener.
Les négociations sont présentement en cours entre le MLCP et
l'École de criminologie pour des projets de recherche touchant le profil
socio-économique et les motivations des braconniers, l'attitude du
public ainsi que celle des juges à leur égard.
À notre avis, de telles données sont aujourd'hui
essentielles à la conception d'une pièce législative
visant à contrer le braconnage.
En deuxième lieu, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche aurait pu procéder à une vaste campagne
d'éducation et de sensibilisation du public à l'importance
collective de la faune, campagne qui aurait eu le double avantage de dissuader
le braconnier actif ou potentiel et d'associer le citoyen à la
répression du crime en l'invitant à dénoncer les actes
illégaux dont il est témoin à l'égard de la
faune.
La ressource faunique appartient à tous les
Québécois et Québécoises. C'est un bien collectif
d'une valeur inestimable. Les pêcheurs, les chasseurs, les trappeurs qui
agissent légalement ont le droit d'exiger la protection de ce
patrimoine. Il faut tout de même se rappeler, M. le Président, que
le braconnage fait partie de nos us et coutumes, de notre mentalité et
de nos habitudes de vie. Il faut donc travailler à déraciner ce
quasi-caractère acquis. C'est par l'éducation d'abord que nous y
arriverons. Il faut démystifier l'image de héros qui
auréole encore le braconnier. Et c'est possible. Des expériences
heureuses ont été faites dans le comté de
Témiscouata, par exemple, où on s'est rendu jusqu'à
l'intérieur de l'école même. Dans mon propre comté,
le comté de Dubuc, un groupe de jeunes, sensibilisés au
problème du braconnage du saumon, entre autres, se sont attachés
à la tâche de convaincre la population des méfaits du
braconnage sur le développement touristique des municipalités par
l'épuisement de la ressource saumon qu'entraînait l'action des
braconniers.
Après trois ans, le succès de leur action est aujourd'hui,
évident. Le braconnage a diminué, les braconniers sont maintenant
considérés comme des voleurs de la collectivité. Cette
campagne d'éducation, cette campagne d'information pourrait être
suivie et, à cet égard, le ministre m'a répondu à
l'avance puisqu'il a mentionné la possibilité de
rétablissement d'une ligne téléphonique,
Télé-faune, sans frais, permettant en tout temps de
dénoncer les actes de braconnage. Là-dessus, je suis d'accord
avec lui, parce que cela pourra se révéler très efficace
mais pour autant qu'il y ait eu d'abord une campagne d'éducation et
d'information. C'est une façon, entre autres, de faire de l'ensemble de
la population ni plus ni moins les agents auxiliaires du ministre dans la
protection de la faune.
Enfin et sinon avant tout, le ministre aurait dû procéder
à une augmentation sensible du nombre d'agents de conservation de la
faune sans qui toute loi visant à contrer le braconnage, quelle que soit
sa sévérité et ses ambitions, ne peut être
appliquée. Campagne d'éducation, campagne
d'information, donc faire participer la population à son travail
de conservation de la faune.
Il y a un autre préalable aussi qui est important. Pour que la
loi soit appliquée, il faut qu'il y ait des gens pour l'appliquer. Il
nous semble à ce sujet quelque peu inquiétant de constater que le
ministre ignore le nombre exact d'agents de conservation de la faune
chargés d'appliquer, entre autres lois, celle sur la conservation de la
faune et ses règlements, d'informer la population sur les dispositions
de ces lois et règlements et de promouvoir la conservation de la faune.
Le 4 mai dernier alors qu'il rencontrait à Sainte-Foy les
délégués du congrès printanier de la
Fédération québécoise de la faune, le ministre
disait qu'il entendait porter prochainement le nombre d'agents de 383 à
420. Le 26 du même mois, devant les membres du Club de conservation
chasse et pêche, Memphrémagog, le ministre déclarait
vouloir augmenter de 300 le nombre d'agents. Cela veut dire que du début
du mois à la fin, le ministre avait diminué de 383 à 300.
Le 11 septembre, lors d'une conférence de presse à Québec,
il promettait une majoration de 350 à 500. Enfin, le 28 octobre,
à l'étude des engagements financiers, le ministre me disait qu'il
estimait à 460, y compris l'encadrement, le nombre d'agents de
conservation. Ce nombre inclurait toutefois aussi les 40 agents sans expertise
ni formation pour la chasse et la pêche sportives provenant du ministre
délégué aux Pêcheries. D'ici au 31 mars 1987, il
n'entendait procéder à aucune nouvelle embauche.
Voilà déjà une lourde hypothèque pour le
projet de loi 153. Guère plus nombreux, il est vrai, par ailleurs, que
les agents de conservation seront dotés - et c'est positif -en vertu de
ce projet de loi de pouvoirs accrus en matière de répression du
braconnage. Ainsi, au chapitre des saisies et en vertu des articles 6 et 7 du
projet de loi, la durée de rétention serait portée de 90
à 120 jours. Par surcroît, l'agent de conservation ne serait plus
obligé, dans le cas d'un résident du Québec, de remettre
le véhicule ou l'aéronef saisi. En fait, il pourrait, au
même titre que lorsqu'il s'agit d'un chien de chasse ou d'une embarcation
saisie, en conserver la garde à sa discrétion.
Le ministre devra expliquer les motifs d'une telle majoration du
délai de rétention. Il devra aussi justifier
l'élargissement des pouvoirs de l'agent relativement aux saisies parce
que, d'une part, susceptibles d'être abusifs et, d'autre part, difficiles
d'application.
Nous aurons l'occasion de rediscuter en détail de ces nouvelles
prérogatives en commission. Cependant, pour l'instant, il est une
nouvelle disposition contre laquelle nous devons nous élever et le
ministre comprendra. L'article 4 du projet de loi confère à
l'agent de conservation un nouveau pouvoir l'autorisant à
pénétrer à toute heure raisonnable dans un
véhicule, une embarcation, un aéronef ou dans un endroit autre
qu'une maison d'habitation où il a motif raisonnable de croire en la
présence d'un animal, de fourrures ou d'un objet pouvant servir à
chasser ou piéger un animal ou documents afférents à
l'application de la loi et de ses règlements en vue d'en faire
l'inspection. Ce pouvoir d'inspection sans mandat s'accompagnerait de l'article
15 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune qui accorde
au même agent ou à un auxiliaire de la conservation de la faune un
pouvoir de perquisition sans mandat.
Or, le ministre semble ignorer que le projet de loi 92, Loi modifiant
diverses dispositions législatives eu égard à la Charte
des droits et libertés de la personne, vient d'amender substantiellement
cet article 15 en obligeant l'agent ou l'auxiliaire de conservation à
obtenir, après déclaration sous serment, un mandat d'un juge de
paix avant de procéder à une perquisition. Ainsi, selon ce qu'on
peut constater, l'article 4 du projet de loi 153 permettrait de faire ce que le
nouvel article 15 de la Loi sur la conservation de la faune, bonifié par
le projet de loi 92, pour le rendre conforme à la charte des droits et
libertés, interdit de faire. C'est un point où il y a donc une
incertitude très grande et que le ministre devrait vérifier.
Enfin, M. le Président - dernier volet de ma réplique -
sous prétexte de renforcer la Loi sur la conservation et de la mise en
valeur de la faune eu égard à la lutte au braconnage, le
ministre, à l'encontre de ce que défend son gouvernement, nous
présente ici un projet de loi omnibus. Cette supercherie est condamnable
et nous la dénonçons sous trois aspects. Premièrement, le
projet de loi 153, sans crier gare et sans aucune justification apparente,
logique, modifie l'appellation "parc national", à l'article 41, pour le
vocable "parc de conservation".
Le projet de loi 48, Loi modifiant diverses dispositions
législatives, adopté le 20 juin 1985, avait déjà
procédé à la conversion inverse. Pourquoi revenir à
"parc de conservation", pourquoi abandonner le mot "national"? Aucune
explication, si ce n'est la crainte de cette épithète,
semble-t-il, chez le ministre et les libéraux. On dirait que
l'affirmation du Québec, ne serait-ce que dans un mot, leur brûle
la langue. Je ne rappellerai pas ici tous les petits et gros coups
d'épingle, comme les lois 140 et 142, qui viennent confirmer ce que je
dis ici.
D'autre part, M. le Président, ce projet de loi omnibus, fait
dans la déréglementation sauvage, a des conséquences
nombreuses et
inquiétantes pour l'aménagement et l'affectation du
territoire. Ainsi, à l'article 19 sur les terres domaniales
désignées à des fins de développement de
l'utilisation des ressources fauniques, le gouvernement se départit de
son droit de déterminer par règlement les catégories de
baux de droits exclusifs de chasse, de pêche et de piégeage, les
conditions d'obtention de transfert et de renouvellement, la durée, le
mode de calcul et les conditions de paiement du loyer pour chaque
catégorie de baux, les normes et conditions de construction et de
localisation des bâtiments ou constructions auxquelles doit se conformer
le locataire, les types de bâtiments ou constructions qui peuvent faire
l'objet d'indemnité ou d'achat, les critères servant à la
fixation des indemnités.
Si la réglementation, comme je le disais il y a quelques minutes,
est trop sévère, trop restrictive, empêche le ministre
d'agir véritablement, ce n'est pas le règlement qu'il faut
enlever mais la façon de procéder. Il faut l'assouplir.
Ce que nous dénonçons ici, c'est que toutes ces
prérogatives que se donne maintenant le ministre relèvent de
l'arbitraire et de sa discrétion et que celui-ci pourra faire tous les
arrangements qui lui conviendront sans consultation aucune et à l'abri
de tout regard. C'est la porte ouverte à un retour possible aussi aux
clubs privés par des moyens détournés, entre autres le
système de pourvoirie. Les cas Grantair risquent fort d'être
institutionnalisés par les modifications proposées à
l'article 19. Un retour vers l'établissement de deux classes de
citoyens, ceux qui auront les moyens de payer des coûts d'accès
à une pourvoirie à qui on aurait confié les meilleurs
territoires, ceux et celles aussi qui devront se satisfaire du reste.
C'est tout le principe, finalement, de l'accessibilité qui semble
remis en cause par l'abolition de la réglementation de l'article 19.
C'est aussi contraire aux volontés exprimées par les ZEC. C'est
inadmissible, ça ouvre la porte à l'exploitation sauvage de notre
patrimoine faunique au profit d'une certaine classe. L'article 19 du projet de
loi, quant à nous, à moins d'explications supplémentaires
du ministre, doit donc être abrogé comme ceux, d'ailleurs, qui
accordent des pouvoirs discrétionnaires au ministre.
En dernier lieu, M. le Président, il est des plus inadmissibles
que la désignation, la délimitation des parties de terres
domaniales aux fins de développer l'utilisation des ressources fauniques
ainsi que l'établissement sur les terres domaniales de zones
d'exploitation contrôlées, de réserves fauniques et de
refuges fauniques se fasse désormais par décret gouvernemental et
non plus par règlement. Les articles 15, 20, 22 et 26 du projet de loi
en font le voeu. Ainsi, pour ces importantes affectations territoriales,
déterminantes pour l'avenir du patrimoine faunique et du loisir
ré-créotouristique, capitales dans la cartographie
environnementale du Québec, il n'y aurait plus de prépublication
de règlements, ni de délai de consultation, ni de
mécanisme de contrôle par l'Assemblée nationale,
dispositions pourtant incluses dans la nouvelle Loi sur les règlements
présentée par le gouvernement que représente le ministre
et qui sont entrées en vigueur en septembre dernier. L'Opposition
demande que soit rétablie la désignation des territoires
fauniques par réglementation.
Ce projet de loi est truffé d'imperfections et de contradictions,
la preuve en ayant largement été faite. C'est à la seule
condition que le ministre saura, dans sa réplique, apporter certains
éclaircissements ou nous indiquer les modifications, les corrections
nécessaires que l'Opposition pourra s'associer à sa
démarche. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Gauvin: M. le Président, je demanderais, à ce
moment-ci, la suspension des travaux.
Le Vice-Président: La suspension du débat. Est-ce
que cette motion de suspension du débat sur l'adoption du principe du
projet de loi 153 est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Nous allons maintenant
suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 6)
(Reprise à 20 h 3)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez reprendre vos sièges. Veuillez vous asseoir.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 18 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 124
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
La Vice-Présidente: À l'article 18, il s'agit de la
reprise du débat qui avait été ajourné le 3
décembre dernier par le député de Saint-Hyacinthe
concernant le projet de
loi 124, Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'assurance-maladie. M. le
député de Saint-Hyacinthe. Si vous me permettez, je vais lire
l'ordre qui avait été adopté hier soir concernant le
projet de loi 124 et qui se lit comme suit: "Que, à la reprise du
débat sur la motion portant adoption du principe du projet de loi 124,
un maximum de trois heures soit consacré pour mettre fin à ce
débat incluant la réplique du ministre; que le temps de parole
soit réparti ainsi: deux heures à l'Opposition et une heure au
groupe parlementaire du gouvernement. Le débat..." Oui, M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, tel qu'il apparaît
au procès-verbal, vous remarquerez que le débat a
été ajourné par le leader de l'Opposition et non pas par
le député de Saint-Hyacinthe.
La Vice-Présidente: ...leader adjoint de l'Opposition.
M. Gendron: C'est exact, Mme la Présidente. Comme le
premier intervenant, on va demander à mon collègue de
Lac-Saint-Jean de continuer le débat sur le projet de loi 124.
La Vice-Présidente: M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi
124, comme on le sait, a pour objet de permettre la suppression du
deuxième examen dentaire annuel chez les enfants de quinze ans et moins.
La question qu'on doit se poser quand on examine ce projet de loi est la
suivante: Pourquoi une telle mesure par la ministre de la Santé et des
Services sociaux? Qu'est-ce qui justifie une pareille décision et le
dépôt d'un projet de loi semblable?
Bien sûr, la ministre peut nous répondre qu'elle a
reçu une commande expresse de la part de son collègue du Conseil
du trésor visant à sabrer, à couper dans ses budgets et
qu'elle a, par conséquent, choisi de couper dans les soins dentaires
pour les enfants du Québec. Je me permets de dire et nous nous
permettons de dire ici de ce côté, Mme la Présidente, qu'il
s'agit d'un fort mauvais choix, d'une mauvaise décision que cette
coupure dans les soins dentaires chez les enfants du Québec.
Pourtant, elle aurait pu, j'imagine, faire un autre choix. Quand on
administre et quand on gère un budget d'environ 8 000 000 000 $ en
matière de santé et de services sociaux - 8 000 000 000 $ c'est
pas mal d'argent - j'imagine qu'on fait face à une diversité de
choix, qu'il est possible de faire des choix. D'ailleurs, certains intervenants
sur cette question ont fait des suggestions. Je ne dis pas que ce sont
celles-là que la ministre aurait pu choisir, aurait dû choisir,
mais enfin ils ont fait des suggestions. L'Association des consommateurs du
Québec, par exemple, en dénonçant le projet de loi 124,
suggérait que la ministre aurait pu regarder du côté des
100 000 000 $ de dépenses publiques pour les soins de santé hors
Québec, dont 90 000 000 $ pour des frais d'hospitalisation et 10 000 000
$ en frais d'honoraires. Il y a 100 000 000 $ qui se dépensent hors
Québec pour des citoyens québécois, bien sûr. Il ne
s'agit pas de supprimer ces 100 000 000 $, mais sur 100 000 000 $, selon
l'Association des consommateurs du Québec, peut-être aurait-il
été possible de trouver, d'identifier quelques compressions qui
auraient fait moins mal, qui auraient fait moins de dégâts que la
suppression du deuxième examen annuel chez les enfants en matière
de soins dentaires.
L'Association des hôpitaux du Québec, de son
côté, a suggéré, a proposé au gouvernement
d'imposer une taxe sur les aliments sucrés de luxe à calories
vides, comme le chocolat, la gomme, les bonbons, les boissons gazeuses, etc.
C'est une suggestion. Simplement pour illustrer le fait que la ministre avait
devant elle une large possibilité de choix. Devant cette
possibilité, cette diversité de choix, elle a fait, à
notre avis, le pire des choix. Elle a pris la plus mauvaise des
décisions. Dans un budget de 8 000 000 000 $, elle a coupé dans
les soins dentaires, elle a supprimé le deuxième examen dentaire
annuel pour les enfants du Québec.
Je me souviens fort bien du temps où Mme la ministre était
dans l'Opposition. Elle avait pendant ces années-là
prononcé de nombreux discours sur la prévention. Elle avait un
ton extraordinairement sincère et convaincant, quand elle parlait de
prévention. Dans de nombreuses interventions qu'elle a faites du temps
qu'elle était dans l'Opposition, elle a mis l'accent, avec raison
d'ailleurs, sur la prévention. Elle a affirmé de façon
fort convaincante qu'il faudrait donner une priorité à la
prévention et à la mise en application de programmes
préventifs par rapport au curatif. C'était là un discours
que l'on entendait souvent et qu'elle a elle-même prononcé souvent
en cette Chambre lorsqu'elle était de ce côté-ci. Elle
affirme, elle confirme et elle opine de la tête, confirmant ce que
j'avance.
Or, Mme la Présidente, dans quel secteur se situe le
deuxième examen, les deux examens dentaires annuels qu'il était
possible aux enfants québécois d'avoir en allant chez le
dentiste? Cela se situe dans le secteur préventif. Il s'agit là
d'un programme de prévention, d'un programme dont la dimension
préventive prédomine, puisque l'enfant se rendant chez le
dentiste, en
subissant deux examens dentaires par année, permet au dentiste de
prévenir les caries et, par conséquent, d'améliorer la
santé dentaire des enfants québécois. C'était
d'autant plus nécessaire que tout le monde reconnaît que la
santé dentaire des Québécois était médiocre
et pitoyable à maints égards, mais qu'elle avait quand même
connu certains progrès depuis une dizaine d'années grâce,
en particulier, au programme mis en place par le ministère de la
Santé et des Services sociaux.
Il est évident, tout le monde le reconnaît, tous ceux qui
s'intéressent à cette question confirment le fait, que par cette
mesure prise par la ministre et contenue dans le projet de loi 124, on va
assister à une régression, à une
détérioration et à des reculs de la santé dentaire
des Québécois. Il faudra évidemment payer plus tard, c'est
ce que confirme un spécialiste, M. Gilles Dussault, qui est un
professeur en administration de la santé à l'Université de
Montréal, dans ce sens qu'il faudra payer en soins curatifs plus tard ce
qu'on n'aura pas payé en soins préventifs maintenant. Il est
étonnant que la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui
est responsable de la santé au Québec, cautionne une
décision semblable, prenne une décision semblable qui risque
d'avoir des conséquences très graves et d'entraîner une
détérioration de la santé dentaire des
Québécois.
La pratique des Québécois s'était pourtant
modifiée au cours des dernières années. En effet, 75 % des
enfants québécois de trois à quinze ans allaient chez le
dentiste à tous les sept mois. C'était là un
progrès tout à fait remarquable par rapport aux pratiques du
passé. On avait donc assisté à des changements fort
heureux dans les comportements et dans les habitudes des
Québécois. Or, une décision comme celle qui est
prévue par le projet de loi 124 aura pour effet de perturber cette
évolution heureuse des mentalités et des habitudes qui avaient
besoin et qui ont besoin encore aujourd'hui d'être consolidées,
parce que ces habitudes, ces pratiques nouvelles chez les
Québécois ne sont pas encore suffisamment enracinées,
n'ont pas encore suffisamment pris racine. Il faut donc que les programmes en
vigueur aient pour effet de consolider ces habitudes. Or, l'adoption du projet
de loi 124 aura pour effet de faire reculer, de modifier, de perturber,
d'empêcher et de stopper l'évolution des mentalités et des
habitudes en matière de soins dentaires au Québec. La ministre
elle-même reconnaît la nécessité des deux examens
annuels puisqu'elle continuera de les permettre pour les assistés
sociaux. Il est évident que, s'il devient nécessaire de maintenir
deux examens annuels pour les enfants des assistés sociaux, je pense que
c'est une reconnaissance explicite qu'il est nécessaire, pour un enfant,
de subir deux examens par année sauf que, par sa mesure, en ne payant
pas le deuxième examen annuel pour les enfants québécois,
elle va encourager en quelque sorte la régression et un recul en
matière de santé dentaire.
Parfois, certains ministres, c'est connu, se complaisent dans la
solitude du pouvoir et sont affectés de ce qu'on pourrait appeler le
syndrome de la tour d'ivoire. Très rapidement, chez certains ministres,
on se rend compte qu'on est presque en face de "la voie, la
vérité, la vie" et que leur position, leurs affirmations doivent
être considérées comme paroles d'Évangile ou comme
de véritables dogmes qu'il est évidemment indécent,
inconvenant de remettre en question. La ministre de la Santé et des
Services sociaux fait partie de cette catégorie de ministres que rien
n'ébranle. C'est là un beau cas assez remarquable
d'entêtement et de possession tranquille de la vérité. On
s'est rendu compte à l'occasion du projet de loi 142, encore ce matin,
à la période de questions qu'elle est toute seule à avoir
le pas. Elle est toute seule à approuver cette mesure, le projet de loi
142 en matière de services sociaux aux anglophones. Personne dans la
société n'approuve cette mesure. Tout le monde réclame le
retrait du projet de loi mais Mme la ministre est convaincue d'avoir le pas
toute seule et de posséder, toute seule, la vérité.
C'est la même chose avec le projet de loi 124; personne ne
l'approuve. On peut faire une revue de presse la plus exhaustive possible,
personne ne l'approuve. Aucun organisme qui s'intéresse à cette
question de près ou de loin, aucun intervenant qui s'intéresse
à ce dossier n'approuve la ministre. Au contraire, non seulement on ne
l'approuve pas, mais on s'y oppose. On est contre, parfois même assez
farouchement contre le projet de loi 124 en matière de soins
dentaires.
Les dentistes, bien sûr, c'est évident, les dentistes s'y
opposent avec...
Mme Lavoie-Roux: Avec véhémence.
M. Brassard: ...véhémence. La ministre me
suggère un terme fort juste, avec véhémence. L'Association
des chirurgiens dentistes, l'Ordre des dentistes, on pourrait peut-être
penser que voilà des organisations ou des intervenants qui sont plus ou
moins en conflit d'intérêts. On pourrait penser cela, mais on
pourrait aussi penser qu'ils le font en connaissance de cause puisque c'est
là leur profession. Le soin des dents, c'est là leur
profession.
Mais s'il n'y avait qu'eux, on pourrait peut-être penser que c'est
par intérêt qu'ils s'opposent à cette mesure. Or, ce n'est
pas le cas. La liste est longue, la liste est fort longue d'intervenants,
d'organisations,
d'organismes qui s'opposent à cette mesure: l'Association des
hôpitaux du Québec, la Fédération des affaires
sociales, la Fédération des CLSC, la Société
dentaire de Québec. Si on fait la revue des éditorialistes, on se
rend compte qu'il n'y a pas un seul éditorialiste, dans tous les
quotidiens du Québec, qui a approuvé le projet de loi 124, la
mesure présentée par la ministre. (20 h 20)
Elle est toute seule à avoir raison, évidemment, si on
examine son point de vue. Elle est seule à posséder la
vérité. Cela me paraît un peu étrange que, dans le
cas du projet de loi 142, dans le cas du projet de loi 124, par
entêtement, de façon très butée, la ministre de la
Santé et des Services sociaux prétende détenir toute
seule, contre tous, contre toutes, la vérité. Il me semble que
l'Opposition a parfaitement raison de s'opposer avec véhémence -
pour employer l'expression de la ministre - farouchement à ce projet de
loi qui est présenté devant nous parce que nous refusons de nous
associer de près ou de loin à un recul, à une
régression, à une détérioration de la santé
dentaire des Québécois. C'est pourquoi nous allons prendre tous
les moyens, toutes les mesures possibles qui nous sont permis pour
empêcher l'adoption du projet de loi 124. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Si vous me permettez, j'aimerais
donner une interprétation que je vais donner à l'ordre qui a
été établi hier soir concernant les interventions. On
accorde un débat maximum de trois heures, mais comme on ne
spécifie pas que les interventions sont sans limite de temps, je verrai
donc à appliquer la règle générale qui
spécifie que c'est 20 minutes, à moins qu'il y ait une motion
contraire à cet effet.
M. Gendron: Mme la Présidente, je ne pense pas que cela
fasse problème mais c'est l'inverse de ce que vous venez de dire. Dans
la motion, les deux leaders avaient eu l'occasion de dire que, comme
d'habitude, quand il y a une entente sur une enveloppe globale de temps, c'est
sans limite dans l'utilisation de notre enveloppe. Deux heures nous sont
attribuées. Les leaders avaient décidé que chaque
intervenant pourrait utiliser le temps qui lui semble approprié mais
à l'intérieur de la limite de l'enveloppe et c'est la même
chose pour l'Opposition*. Je pense qu'on va fonctionner plutôt avec
ça.
La Vice-Présidente: De consentement. Vous comprendrez, M.
le leader adjoint de l'Opposition, que ce n'était pas mentionné
dans l'entente et que je ne pouvais pas le savoir.
M. Lefebvre: D'accord, Mme la
Présidente. Il y a consentement.
La Vice-Présidente: D'accord. M. le leader de
l'Opposition.
Une voix: Chef!
La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le chef de
l'Opposition.
M. Pierre Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): Je vous en prie. Mme la Présidente, je
me permettrai d'entretenir l'Assemblée pendant quelques minutes d'un
sujet que la ministre connaît bien et que j'ai eu également
l'occasion de connaître pendant un certain nombre d'années au
ministère des Affaires sociales.
Ce que j'ai à dire ne fera sans doute pas plaisir à la
ministre à qui je porte, par ailleurs, elle le sait, sur le plan
personnel, beaucoup d'estime et de respect, mais je dois dénoncer dans
ce projet de loi une certaine tartuferie gouvernementale, une certaine approche
systématique de désinformation, pour reprendre une expression
chère au premier ministre, bref à voir comment les promesses
rouges se traduisent, y compris en matière de santé dentaire.
Que dit le projet de loi 124? Il nous dit essentiellement que les
enfants, du jour de leur naissance jusqu'à l'âge de 15 ans, qui,
en ce moment, ont droit à deux examens dentaires annuels, n'auront droit
maintenant qu'à un examen annuel. Pour justifier cette coupure
réelle dans un programme à caractère universel dans notre
système de santé et de services sociaux, la ministre invoque le
fait que, de toute façon, ce n'est pas si grave que cela puisqu'en
moyenne, les enfants de 0 à 15 ans fréquentent le dentiste pour
un examen à peu près tous les treize mois. Ce que la ministre
oublie de dire cependant, c'est que les enfants de 3 à 15 ans
fréquentent le dentiste en moyenne aux sept mois, donc deux fois par
année. Dans ses statistiques, la ministre inclut évidemment les
enfants de 0 à 3 ans. Mais savez-vous, les enfants de 0 à 3 ans
n'ont pas beaucoup de caries. Cela s'explique fort bien. C'est parce qu'en
général ils n'ont pas beaucoup de dents. La ministre oublie de
nous dire que l'immense majorité des enfants dans notre système
d'assurance en matière de soins dentaires, 75 % des enfants de 3
à 15 ans, doivent fréquenter le dentiste à peu près
deux fois par année, et elle coupe une de ces fois.
Deuxièmement, la ministre invoque le fait qu'elle fera là
une économie nécessaire de 8 000 000 $ qu'elle réinjectera
dans des services plus importants. D'abord, on peut s'étonner quelque
peu que la ministre considère que ce n'est pas trop important la
deuxième visite chez le dentiste en un an
pour un enfant âgé entre 3 et 15 ans alors que, dans le cas
des enfants des familles qui bénéficient de l'aide sociale, elle
conserve les deux visites. Est-ce qu'elle s'appuie sur des études qui
nous démontreraient, Mme la Présidente, que les enfants n'ont pas
besoin de deux visites par année? Mais non. Ce qu'on nous a cité
jusqu'à maintenant, ce sont des études qui disent ne pas pouvoir
démontrer que c'est essentiel, mais qui ne démontrent
certainement pas que c'est inutile.
La ministre, en nous parlant de ces 8 000 000 $, omet de dire que ce
n'est pas une coupure de 8 000 000 $ qu'elle fait, mais bel et bien de 20 000
000 $. En effet, Mme la Présidente, quand un enfant se présente
chez le dentiste pour un examen, le dentiste regarde la bouche de l'enfant,
évalue, palpe les gencives, voit si les dents branlent, vérifie
s'il y a des caries. S'il y a des caries, le dentiste intervient. Quand il
intervient, il pose un acte dentaire qui consiste à nettoyer la dent et
à obturer la cavité de façon mécanique. Ce service
de l'acte dentaire qui suit l'examen fait par le dentiste est un service
rémunéré. Les chiffres que nous possédons de ces
professionnels de la santé sont les suivants. Pour chaque dollar
d'examen, il y a environ 1,53 $ en acte qui est posé. En effet, quand
les parents amènent leurs enfants chez le dentiste, c'est souvent parce
qu'il y a des problèmes. La ministre va couper le deuxième examen
annuel mais le dentiste qui examine l'enfant à l'occasion de ce
deuxième examen habituellement pose des gestes. Quel est l'effet net de
cela? C'est que l'économie réalisée par la ministre n'est
pas de 8 000 000 $ mais de 20 000 000 $, d'une part, et elle nous a vaguement
dit que peut-être elle injecterait cette économie de 8 000 000 $
dans des services plus importants. Nous aimerions entendre dire la ministre
qu'elle injectera plus de 8 000 000 $ même dans sa logique interne.
Troisièmement, toujours dans le cadre de l'argumentation de la
ministre, c'est l'introduction d'un ticket modérateur pour les parents
pas de 2 $, pas de 5 $, pas de 10 $ mais de 23 $, et je m'explique. Un parent a
un enfant de 5, 6, 8, 9 ou 10 ans, qui est allé chez le dentiste disons
au mois de janvier. L'enfant, au mois de septembre, au moment de la
rentrée scolaire se plaint qu'il a mal aux dents. Le père ou la
mère constate que l'enfant a un problème. Au moins, il s'en
plaint. Le parent devra se rendre chez le dentiste et débourser 23 $
pour cette visite puisque ce sera la deuxième visite, dans
l'année. Après cet examen pour lequel les parents auront dû
payer 23 $ de ticket modérateur, le dentiste pourra procéder, par
exemple, à l'obturation d'une carie, le drainage d'un abcès, le
nettoyage de quantité de tartre anormale.
(20 h 30)
La ministre n'est pas franche quand elle parle de ce dossier dans la
mesure où elle ne met pas les enjeux clairement sur la table. Oui, nous
avions pour notre part effectué une diminution de 25 000 000 $ de ce qui
était anticipé dans le système de soins dentaires quand
nous étions au gouvernement. Je ne m'en cache pas, Mme la
Présidente, comme d'ailleurs je ne m'en cachais pas à
l'époque en prétendant faire un acte de progrès social
démocratique par une coupure. Non, Mme la Présidente. Quand nous
avons fait ces ponctions dans le budget des affaires sociales, nous avons dit
ce qui en était.
Il faut se rappeler le contexte 1981-1982. Comment en sommes-nous
arrivés à revoir et à rationaliser les programmes de
santé au Québec? Parce que les taux d'intérêt
étaient à 22 %, parce que le chômage était à
16 %, parce que l'inflation était à 10 %, parce que l'ensemble
des Québécois avaient perdu 6 % de leur richesse collective en
l'espace de deux ans. Cela craquait de partout, y compris dans l'État.
Et il fallait partout, dans l'État québécois, essayer de
faire plus avec moins ou, au minimum, de faire autant avec moins parce que,
dans un contexte de hausse des taux d'intérêt, d'augmentation du
chômage, d'augmentation du nombre d'assistés sociaux à
cause d'une crise économique brutale, tout cela exigeait que
l'État adopte des mesures contraignantes sur le plan des finances
publiques. C'est ce que nous avons fait.
C'est ce que nous avons fait dans le cas des affaires sociales alors que
cela se faisait partout dans le gouvernement, dans tous les ministères,
en diminuant le rythme de croissance anticipé des affaires sociales de
200 000 000 $ en 1981-1982 sur un budget qui, aujourd'hui, est d'environ 8 000
000 000 $. Ce ne sont pas des coupures en chiffres absolus, mais une diminution
des transferts dans les différents programmes ou dans les
hôpitaux, ou dans les services de santé et les services sociaux,
une diminution des transferts qui était ou inférieure à
l'inflation ou inférieure à ce qu'on appelle les ajustements
mécaniques.
Ah: sûrement, cela a été contraignant; Cela a
été difficile aussi. On n'a pas conté de blague aux gens,
par exemple. On ne leur a pas encore raconté que cela allait bien. On ne
leur a pas dit: C'est parfait et on va mettre plus d'argent. On a dit: Non,
c'est une période difficile pour le Québec. Je suis parti avec
d'autres et on a fait le tour des associations. On a dû en parler avec
des travailleurs syndiqués. On en a parlé avec tous les syndicats
de professionnels. On en a discuté dans les conseils régionaux,
avec l'Association des centres d'accueil, l'Association des hôpitaux, la
Fédération des CLSC, l'Association des centres de services
de santé et des services sociaux, les associations de centres
d'accueil privés ou conventionnés et avec les gens, avec les
citoyens à qui on a parlé honnêtement. On ne leur a pas
pété une broue en disant qu'on mettait 800 000 000 $ de plus dans
la santé. On leur a dit: Cela va être dur, mais on va essayer de
le faire ensemble.
On est parvenu à le faire ensemble. Je ne prétends pas que
cela a été facile ni même agréable, par bouts, mais
il fallait le faire. La situation économique du Québec, la
situation des finances publiques du Québec l'exigeait. Un minimum de
solidarité pour préserver l'essentiel de la qualité et de
la valeur de notre système de services de santé et de services
sociaux l'exigeait et nous motivait à le faire. On n'imposait pas des
diktats.
Cette approche nous a amenés, entre autres, dans le secteur des
soins dentaires, à effectuer une ponction d'environ 23 000 000 $ ou 25
000 000 $. La ministre, en nous disant que c'est 8 000 000 $, en fait une de 20
000 000 $. Qu'est-ce qu'on a fait dans ce contexte? D'abord, on a
négocié cette ponction avec les professionnels. La ministre me
reprochait hier, dans son discours, ou à mon collègue de Gouin:
Vous n'êtes même pas passés par l'Assemblée
nationale, vous autres, pour faire cette ponction en 1982-1983. Je
réponds à la ministre: Je comprends, ce n'était pas
nécessaire. On l'avait négociée avec les intervenants. On
était parvenu à une entente écrite négociée
avec l'association des dentistes pour rationaliser les programmes en fonction,
cependant, d'objectifs clairs.
Il ne s'agissait pas d'une affaire sortie du bureau du président
du Conseil du trésor ou d'une lubie technocratique, alors que 75 % des
enfants se prévalent de deux visites annuelles en disant: On va regarder
cela. On va cibler. On va mettre le radar là-dessus. Je sais comment
cela fonctionne au Trésor. J'ai eu à apprendre mes finances
publiques pendant quelques années avec les gens du Trésor quand
on exigeait 200 000 000 $ de coupures aux affaires sociales. Le ministre des
Finances a dû m'expliquer pourquoi à quelques reprises. Je sais
comment ils fonctionnent au Trésor. La ministre est victime de
l'appareil technocratique et du cabinet du ministre
délégué à l'Administration et président du
Conseil du trésor. Elle vient nous dire 8 000 000 $. Pas de rationnel
derrière cela, pas de cohérence dans l'approche de restrictions,
c'est tout croche, comme le reste. Pas de politique en matière de
santé dentaire. Il faut économiser 8 000 000 $. Dans le fond, ne
le dites à personne, c'est 20 000 000 $. Il n'y a pas d'objectif
précis, rien qui permette aux intervenants, aux professionnels de la
santé, de comprendre comment ces changements au système
amélioreront la santé dentaire des enfants du Québec,
parce qu'on le sait, pendant des années, on a connu des retards que nous
avons tenté de combler du mieux que nous avons pu à compter de
1976.
Qu'est-ce qu'on a fait à l'époque? À
l'époque, si on a opéré cette ponction d'un peu plus de 20
000 000 $, d'une part, on l'a négociée, deuxièmement, on
l'a fait dans un contexte cohérent pour préserver la
qualité du système et sa cohérence en fonction de ses
effets sur la santé dentaire des enfants au Québec, et
troisièmement, nous avons réinjecté 9 000 000 $ dans la
prévention, ce que ne fait pas la ministre. Car maintenant, depuis cette
époque où nous avons dû faire ces rationalisations, il y a
dans toutes les écoles du Québec, à partir notamment des
CLSC, des" hygiénistes dentaires qui couvrent maintenant 100 % des
enfants à l'école ou en garderie avec des injections de fluor,
avec de l'éducation dentaire, avec des services préventifs en
matière de santé dentaire. Ce sont 9 000 000 $ d'injectés
à partir de cette compression que nous avions dû faire d'un peu
plus de 20 000 000 $. La ministre elle ne promet rien. Vaguement, elle
évoque que cela va aller dans des choses plus essentielles. Mais elle
coupe. C'est ce qui lui vaut d'ailleurs le titre que lui a
décerné le président du Conseil du trésor
récemment, dans une revue très lue, de la meilleure coupeuse de
dépenses publiques, alors que nous entendons la ministre nous dire
qu'elle a injecté 800 000 000 $ d'argent neuf dans le réseau des
affaires sociales.
La ministre a fait un choix qui se défend mal sur le plan
technique, sur le plan de la cohérence, eu égard à la
santé dentaire des enfants du Québec, et tout cela pour
réaliser les basses oeuvres. Une fois de plus, la ministre sert de fer
de lance aux basses oeuvres du président du Conseil du
trésor.
Je rappellerai à la ministre qu'en dépit du contexte
économique du début des années quatre-vingt, avec 22 % de
taux d'intérêt, 16 % de chômage, 10 % d'inflation, nous
avons, au cours de cette période, ouvert des milliers de lits dans les
centres d'accueil, ouvert des milliers de lits dans les pavillons, fait en
sorte qu'il y ait 2675 lits de plus de courte durée de médecine
active dans nos hôpitaux. Nous avons créé
Urgences-santé. Nous avons soutenu des groupes communautaires. Nous
avons amorcé le parachèvement des réseaux des CLSC. Et
nous avons amélioré la quantité et la qualité des
services à domicile. (20 h 40)
Ce que je vois du côté de la ministre, cependant, ce sont
des coupures pour des coupures pour ensuite avoir la paix, mais avec le
résultat que la ministre responsable de la Politique familiale s'en
prend au système de soins dentaires qui touche les
enfants des familles du Québec.
C'est pour cela, Mme la Présidente, que vous nous entendrez
continuer de répéter que ce gouvernement, qui n'a pas de
politique linguistique, qui n'a pas de politique économique, n'a pas non
plus de politique en matière de santé et de services sociaux.
La Vice-Présidente: Merci, M. le chef de l'Opposition. M.
le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Mme la Présidente, à cause du rythme de
ceux qui prennent la parole sur ce projet de loi, vous n'êtes pas sans
savoir que nous sommes contre ce projet de loi et que nous allons voter contre
ce projet de loi. Nous allons voter contre ce projet de loi par devoir,
d'abord, et par respect pour les enfants du Québec, ensuite. Mme la
ministre a fait un choix très irrationnel en coupant des soins
primordiaux pour les enfants du Québec. Comme l'a dit notre whip, le
député de Lac-Saint-Jean, elle avait entre les mains un budget de
8 000 000 000 $, elle se vante depuis un certain temps d'avoir investi plus de
873 000 000 $ cette année dans son ministère et elle arrive
aujourd'hui pour nous dire qu'elle veut couper 8 000 000 $ dans le service
dentaire aux enfants, ou plutôt 20 000 000 $.
Et bien, il est difficile de comprendre pourquoi d'une main on investit
dans un ministère 873 000 000 $ et que de l'autre main on coupe 8 000
000 $ ou 20 000 000 $, même qu'au début c'était 30 000 000
$ qu'on voulait couper. Pourquoi, Mme la Présidente, la ministre
choisit-elle les enfants comme cible? À cause de leur faiblesse, parce
qu'ils sont moins bien organisés pour protester? C'est possible. Elle
coupe tant et si bien qu'on se demande ce que ces enfants auront comme
dentition lorsqu'ils seront devenus des adultes. Nous faisons, de notre
côté, tout en notre pouvoir pour que la ministre revienne sur sa
décision, parce que par cette décision elle crée deux
genres de jeunes enfants au Québec: un groupe de jeunes où les
deux examens de 23 $ seront compensés par les deniers de l'État,
ce sont les enfants dont les parents bénéficient des prestations
de l'aide sociale, et un autre groupe d'enfants dont les parents ne
bénéficient pas de l'aide sociale. Pour ces enfants-là, la
ministre décide de ne pas payer le deuxième examen, les 23 $
supplémentaires. Et elle demeure comme le mur de Berlin, devant nous,
inébranlable. Inébranlable.
Je sais que les enfants du Québec ont besoin au moins de deux
examens par année. C'est une question de santé. Selon les
études - nous avons plusieurs études et la ministre a ces
études. Il y a un dossier de la santé dentaire des
Québécois qui a été produit il y a quelques temps
et dans ce dossier, dans cette étude on dit ceci: "Selon l'enquête
STAMM, les jeunes Québécois présentent un fort taux de
dents cariées non traitées et un indice élevé de
dents manquantes." Si on regarde les principaux pays du monde, Québec
vient au premier rang pour les dents cariées, les dents dans la bouche
des jeunes enfants: 5 dents au Québec en moyenne; en Allemagne de
l'Ouest, 4,4; au Japon, 4,2; en Australie, 2,5; en Ontario - ce n'est pas loin
l'Ontario - 1,2. Depuis quelques temps, cette moyenne, le championnat des dents
cariées chez nos enfants diminuait à cause des programmes que
nous avions implantés. Dès que nous recommençons à
avoir une meilleure dentition pour notre jeunesse au Québec dans les
statistiques, la ministre vient mettre le couperet dans ce programme. Je crois
que ce n'est pas permis de faire cela. Pourquoi nos enfants au Québec
ont-ils plus de caries et plus de dents manquantes que dans la plupart de tous
les pays civilisés et industrialisés du monde? C'est une sorte de
tradition au Québec. Une autre étude nous dit que les
résultats connus révèlent que les habitudes de
consommation de sucreries en collation sont extrêmement répandues
chez les enfants et les adolescents du Québec. Ensuite, les pratiques
d'hygiène dentaire sont déficientes et très souvent
inefficaces. La moitié des écoliers ne brossent pas leurs dents.
C'est incroyable! La moitié des écoliers du Québec ne
brossent pas leurs dents malgré nos programmes, malgré
l'incitation, malgré que nous ayons des hygiénistes dentaires
dans la plupart de nos écoles dans tout le Québec... Je ne vous
dérange pas trop?
Une voix: Continuez.
M. Blais: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît!
M. Blais: II y a 95 %...
La Vice-Présidente: S'il vous plaît! Je demanderais
la collaboration de... S'il vous plaît, je demande... S'il vous
plaît! .
Vous pouvez continuer, M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Mme la Présidente, je comprends et je n'en veux
pas à mes confrères qui ont quelques distractions, parce qu'on
nous présente des projets de loi qui sont tellement négatifs et
tellemnt néfastes que nous faisons, malgré que nous ne soyons que
23, tout en notre pouvoir pour essayer de bloquer ces projets iniques,
inhumains, irrecevables en réalité pour tout esprit rationnel.
Eux sont obligés de nous écouter. Ils ne veulent pas parler sur
ce projet, ils en ont honte. Ils discutent entre eux. Je ne
vous en veux pas mais parlez moins fort, s'il vous plaît, pour que
je puisse au moins m'entendre moi-même. Je m'entends mal parce que vos
voix couvrent la mienne. Ce qui est très curieux c'est que je suis
persuadé que la plupart de ces députés du pouvoir qui
rigolent devant ces cavités qui sont dans la bouche de nos enfants ont,
eux aussi, des enfants qui subiront les conséquences néfastes de
ce projet de loi.
Les pratiques d'hygiène - je crois que vous devriez
écouter, messieurs, mesdames du gouvernement - les pratiques
d'hygiène chez les adolescents et les jeunes enfants du Québec ne
sont pas très recommandables. Ils ont de mauvaises pratiques. On dit, et
je répète pour que vous écoutiez, que la moitié des
écoliers ne se brossent pas les dents, 95 % de nos adolescents utilisent
des brosses non recommandables, les méthodes pour se brosser les dents
sont à 75 % incorrectes. Elles font tort aux gencives et produisent des
gingivites chez nos enfants. On lit que 5 % seulement des enfants utilisent la
soie dentaire. C'est un peu plus compliqué, la soie dentaire. C'est un
peu fastidieux aussi à employer mais, quand même, si on montrait
par des plans gouvernementaux aux jeunes enfants à se servir de la soie,
ils prendraient l'habitude de le faire et n'auraient plus de problème
à le faire après. (20 h 50)
Cependant, ce n'est pas avec des programmes comme ceux-là, avec
des lois comme celle que nous avons ici qu'on va pousser les jeunes à
mieux se brosser les dents et à suivre les conseils des
hygiénistes dentaires. Aussi, nous n'appuyons pas ce projet et nous
voterons contre parce que, dans le milieu dentaire, tous les gens qui
s'occupent de la bouche, les oto-rhino-laryngologistes, les chirurgiens
dentistes, les denturologues, tous ceux qui s'occupent des soins bucaux au
Québec s'opposent de façon formelle et non équivoque
à cette loi, mais pas dans le sens pécuniaire de la loi.
Les chirurgiens dentistes, ce n'est pas leurs affaires qu'un
gouvernement coupe 8 000 000 $ dans des soins dentaires à des gens. Mais
ils disent que le choix qu'ils font de couper le deuxième examen - c'est
cela qui est presque scandaleux - c'est la plus mauvaise décision que la
ministre pouvait prendre. J'ai ici un communiqué de l'Association des
chirurgiens dentistes du Québec et de l'Ordre des dentistes du
Québec qui ont signé conjointement un communiqué. Je vais
vous lire une partie de ce communiqué. Certaines personnes qui ont lu ce
communiqué souffrent. Ce sont des gens du gouvernement qui souffrent et
qui ont lu ce communiqué. Je ne peux pas comprendre, s'ils l'ont lu,
pourquoi personne ne se lève pour dire à la ministre de ne pas
passer cette loi. Les grands spécialistes du Québec s'y
opposent.
On dit: "L'Association des chirurgiens dentistes du Québec et
l'Ordre des dentistes du Québec s'opposent à ce projet de loi non
pas à cause de l'aspect monétaire, ils s'y opposent parce que le
but de l'examen "bi-annuel" pour la population de 0 à 15 ans est un
service dentaire..." Mme la Présidente, je ne peux pas continuer
à parler, cela jase trop fort tout autour de moi.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît, je demanderais
la collaboration de la Chambre. S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Écoutez, je demande la collaboration de la Chambre. Pour le meilleur
déroulement des travaux de cette Assemblée, je vous
demanderais... M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Nos
spécialistes disent ici: "Le but de l'examen "bi-annuel" pour la
population de 0 à 15 ans est de permettre à l'appareil
bucco-dentaire de remplir son rôle masticatoire." Pour avoir un
rôle masticatoire il faut d'abord que les dents soient saines et, pour
que nos dents soient saines, il nous faut un système de services sociaux
qui, en soi, soit sain et je crois que cette loi vient "désassainir" ce
système que nous avons.
Devant cela, devant tous ces experts qui disent que ce projet est
à toutes fins utiles irrecevable pour la jeunesse
québécoise, Mme la ministre demeure stoïque, imperturbable,
placide, presque lymphatique. On la voit même sourire par moments. Elle
prend un malin plaisir à tenir tête à l'Opposition devant
ce projet qu'elle sait elle-même irrecevable par les jeunes familles
québécoises.
On voit bien qu'il n'y a rien à faire pour ébranler Mme la
ministre, il n'y a rien à faire, c'est le mur de Berlin dans toute sa
splendeur. Pour marquer notre opposition, nous ne pouvons que le dire, le dire
haut et fort, mais il n'y a rien à faire, car elle a promis.
En conclusion, Mme la Présidente, cette même ministre a
promis durant la campagne électorale, avant le 2 décembre 19B5,
de ne faire aucune coupure dans le système social au Québec,
même d'y faire des investissements pour répondre aux besoins
qu'elle disait à l'époque les plus pressants de la population
québécoise. C'était une grosse balloune de promesses
rouges. Dès qu'on est arrivé, ce sont des lois de cet acabit qui
ont fait péter ce ballon rouge, Mme la Présidente. Ce sont des
lois pointues de cet acabit qui pètent cette balloune rouge, Mme la
Présidente, et c'est pertinent. Après avoir promis avant le 2
décembre 1985 d'être très condescendante et d'ajouter de
l'argent dans le domaine des affaires sociales, elle nous arrive et elle
reçoit... C'est le député de Gouin, responsable du dossier
des services
sociaux pour l'Opposition, qui lui a décerné la
médaille d'or. La médaille d'or des coupures de cette dame pour
les enfants et l'âge d'or, mais sous l'inspiration du titre donné
par les cisailles "gobeilliennes" elles-mêmes en la traitant de sa
meilleure coupeuse, comme si un tranchant pouvait mieux couper une tomate
à différents âges dans la société.
En terminant, et comme Noël approche, j'aimerais lui donner un
titre. J'aimerais l'appeler pour Noël qui vient, la fée des caries.
Je suis persuadé que la fée des caries, les enfants vont
l'appeler plutôt la "féroce" parce qu'elle est à les
édenter pour leur cadeau de Noël. Elle est à l'image du
Canada, elle est la "fée des rations canadiennes" parce que la ration
que les enfants doivent attendre d'elle, elle leur coupe pour Noël. Merci,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Terrebonne.
M. le député de Taschereau.
M. Jean Leclerc
M. Leclerc: Mme la Présidente, simplement quelques
secondes pour reprendre mon sérieux après cette intervention que
je n'ose pas dire farfelue.
Je lisais dans Le Soleil d'aujourd'hui un article de Mme Lia
Lévesque qui disait: "Pour les enfants, un seul examen dentaire
remboursé." Je voyais: "Opposition indignée." Excusez, Mme la
Présidente, tout à l'heure le député de Terrebonne
a fait certaines remarques parce qu'on discutait... Je voudrais lui demander de
ne pas discuter, au moins de ne pas faire ce qu'il nous reprochait.
M. Blais: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Je tiens à vous dire que je vais laisser le
député ministériel faire son discours. Il y en a tellement
peu de ce côté-là qui parlent. Je vais même aller
l'écouter à la télévision pour être sûr
qu'il dira ce qu'il a à dire, et j'espère qu'il va le dire de
façon très honnête, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Là-dessus, je demande la
collaboration de la Chambre pour le meilleur déroulement des
travaux.
M. le député de Taschereau, continuez votre
intervention.
M. Leclerc: Merci, Mme la Présidente. Je vous reporte
à l'article du Soleil d'aujourd'hui qui titrait: "Pour les enfants, un
seul examen dentaire remboursé." Ensuite, un petit paragraphe disait:
"Opposition indignée."
De son côté, le porte-parole péquiste pour les
questions de santé, le député Jacques Rochefort, s'est
encore une fois élevé avec fougue contre le projet de Mme la
ministre Lavoie-Roux. Là, je me suis dit: Le député de
Gouin va dormir sur ses deux oreilles ce soir. Il va donc être heureux
d'être ainsi passé à l'histoire, de s'être
indigné devant ce projet de loi. (21 heures)
Ce qui est le plus amusant, on va y revenir tout à l'heure, c'est
que le député de Gouin était adjoint parlementaire aux
Affaires sociales, à l'époque, si on se reporte en 1982, alors
que le chef de l'Opposition d'aujourd'hui était ministre des Affaires
sociales. C'est extraordinaire la différence qu'il peut y avoir entre un
adjoint parlementaire au ministre des Affaires sociales dans le gouvernement
d'alors et le critique de l'Opposition en matière de santé et de
services sociaux d'aujourd'hui. On dirait que ce n'est plus la même
personne. On dirait que ce qui était beau, bien et raisonnable hier
devient dramatique, épouvantable, scandaleux aujourd'hui.
Évidemment, l'Opposition a un rôle à jouer. On en
convient tous ici, mais c'est quasiment incroyable de voir que le même
homme, à deux postes différents, ne tient plus le même
discours, celui-là même qui s'est effacé quand le chef de
l'Opposition d'aujourd'hui, ministre des Affaires sociales en 1982, a fait des
coupures de 25 000 000 $, celui-là même qu'on n'a pas entendu, qui
s'est effacé, parce que c'était l'ami du chef de l'Opposition.
À l'époque, le ministre des Affaires sociales était
considéré comme le dauphin et il ne fallait pas parler contre le
dauphin. Or, le député de Gouin s'est effacé à ce
moment-là. On ne l'a pas entendu. Mais, aujourd'hui, il est critique de
l'Opposition et tout ce qu'il voit n'est que scandale. Tout ce qu'il voit n'est
qu'impôt sur les enfants - c'est son nouveau vocabulaire - et tout ce
qu'il voit, c'est un drame pour les familles du Québec.
Le chef de l'Opposition, qui a pris la parole il y a quelques minutes,
nous a dit que nous n'avions aucun appui. Je lui demanderai, par votre
intermédiaire: En avait-il des appuis lors du dernier budget
péquiste pour instaurer une taxe sur les assurances qui devait rapporter
700 000 000 $? Ce même chef de l'Opposition se demande où sont nos
appuis relativement à une coupure de 8 000 000 $. Ce n'était pas
grave, eux, c'était une taxe de 700 000 000 $ sur les assurances qui
touchait davantage les familles que notre petite coupure de 8 000 000 $. Ils
ont instauré une taxe de 700 000 000 $ sur les assurances, sans aucun
appui. Même les péquistes étaient contre. Même les
péquistes que je connais étaient contre la taxe sur les
assurances. Ces gens-là n'avaient aucun
appui, nulle part dans la société et, aujourd'hui, ils
nous disent: Où sont vos appuis pour faire une coupure de 8 000 000 $?
C'est sûr que les dentistes n'attendent pas à la porte pour nous
appuyer; c'est clair. On n'a jamais attendu que les dentistes nous appuient,
nous aiment et nous adorent.
Je ferai remarquer au chef de l'Opposition qu'à l'époque
où il était ministre des Affaires sociales, un article du Devoir
rapportait: "Les dentistes menacent de se retirer du régime de soins
dentaires gratuits..." Savez-vous comment ils qualifiaient, à
l'époque, les pirouettes du chef de l'Opposition, alors ministre des
Affaires sociales? Ce n'est pas moi qui l'invente, "...qualifiant d'acrobatie
politique les réductions proposées par Johnson". Ah bon! Nous
autres, on dit qu'on coupe 8 000 000 $ et l'ex-ministre des Affaires sociales
nous dit: Moi, vous savez, j'ai fait cela dans la
sérénité. J'ai coupé 25 000 000 $, c'est comme si
j'avais envoyé un beau bouquet de fleurs à tout le monde dans la
société. J'ai fait une tournée et on a fait passer notre
message; il n'y a pas eu de problème.
Quand on regarde ce qui s'est passé, par exemple, en 1982, les
articles de journaux disent "qualifiant d'acrobatie politique". Cela tranche un
peu avec ce qu'on vient d'entendre. Je pourrais vous en citer d'autres. On
rigole de ce côté-là. "Abolition possible des soins
dentaires gratuits", le lundi 8 février 1982. Ce n'est pas de notre
temps. C'est au temps du député de Gouin et adjoint
parlementaire.
Une voix: ...
M. Leclerc: Ah oui! On va vérifier. C'était juste
avant ou juste après.
Des voix: Ah! Ah!
M. Leclerc: Et le chef de l'Opposition d'aujourd'hui...
La Vice-Présidente: M. le député de
Taschereau, pour éviter toute... adressez-vous donc à la
présidence, s'il vous plaît!
M. Leclerc: On disait, le lundi 8 février, "Abolition
possible des soins dentaires gratuits". Le Soleil, le mardi 9 février,
"Économie des soins dentaires". "Abolition des soins dentaires gratuits
pour les enfants, absurde", dit l'ACDQ. Absurde. J'ai entendu tantôt le
chef de l'Opposition. Il nous a dit: On a coupé 25 000 000 $, on a
expliqué cela à tout le monde, cela a bien été.
Vous savez, le contexte était difficile. Comme si aujourd'hui le
contexte était facile. On prend un situation financière avec un
trou de 1 700 000 000 $, la vie est belle, cela va bien. On ne comprend pas
pourquoi on coupe. Mais dans leur temps c'était normal de couper, cela
allait très mal, voyez-vous. Alors, abolition des soins dentaires
gratuits pour les enfants, absurde. "Soins dentaires: La gratuité
demeure mais Québec veut réduire les coûts." Cela
commençait en 1982. "Santé: D'autres compressions. Une
économie de 45 000 000 $." Mme la Présidente, on se rend compte
que nous avons deux discours complètement différents. Si on se
réfère à ce qui se passait lorsque les gens qui sont dans
l'Opposition aujourd'hui étaient au pouvoir et si on regarde le discours
qu'ils nous tiennent depuis déjà un bon bout de temps sur la
question, on se rend compte qu'on a deux versions totalement
différentes. Ce qui était sain, normal, raisonnable pour 25 000
000 $ en 1982 devient tout à coup, en 1986, une ignominie. Je vais
passer certains qualificatifs que j'ai entendus parce qu'on en a tellement
entendu. Mais j'ai du mal à comprendre comment cela peut changer si
vite. J'ai du mal à comprendre comment quelque chose peut être
raisonnable en 1982 pour 25 000 000 $ et déraisonnable en 1986 pour 8
000 000 $.
Le chef de l'Opposition est intrigué et dit: Mais qu'est-ce que
vous allez faire avec les 8 000 000 $? Vous savez, avec les 25 000 000 $, on a
fait plein de belles choses. Je vais lui dire ce qu'on va faire avec les 8 000
000 $ et ce qu'on a déjà fait avec les 8 000 000 $. Des
crédits supplémentaires, et ce dès notre arrivée au
pouvoir, de 465 000 000 $ ont été injectés dans le
réseau. Oui. Dès l'entrée en fonction de la nouvelle
équipe ministérielle.
Des familles d'accueil, 11 000 000 $. Au cours de la première
année, malgré un contexte difficile, 800 000 000 $ ont
été injectés. Le chef de l'Opposition se demande ce qu'on
va faire avec les 8 000 000 $ qu'on coupe, 8 000 000 $ de plus que les familles
du Québec auront à payer. Hé bien! Je lui réponds:
Nous sommes arrivés dans une conjoncture difficile, nous avons dû
faire des réinjections énormes d'argent dans le réseau des
affaires sociales. Ne cherchez pas les 8 000 000 $, ils sont là.
Malgré la coupure de 8 000 000 $, -et c'est important qu'on se le
dise - notre régime demeure l'un des meilleurs au Canada. En effet, le
programme québécois de soins dentaires pour enfants est l'un des
plus importants au Canada avec ceux de la Nouvelle-Écosse et de
l'Île-du-Prince-Édouard. Mais, également, en
Nouvelle-Écosse et à l'Île-du-Prince-Édouard, on ne
prévoit qu'un seul examen dentaire par année. Si c'est bon en
Nouvelle-Écosse, si c'est bon à
l'Île-du-Prince-Édouard qui ont de très bons programmes
dentaires, ce devrait être pas pire pour nous autres, n'est-ce pas? Cela
devrait avoir du bon sens.
Mme la Présidente, notre mesure est raisonnable. Je l'appuie et
j'ai la certitude que la ministre fera un excellent usage des 8 000 000 $ ainsi
épargnés. Qu'on pense aux 64 % d'augmentation du budget de
l'Office des personnes handicapées du Québec, qu'on pense
à l'augmentation globale de 6,4 % du budget du ministère de la
Santé et des Services sociaux, voilà des choses concrètes.
Voilà des montants investis qui nous ont permis de désengorger
les urgences, de débloquer beaucoup de projets qui n'avaient
reçu, du temps où l'Opposition était au pouvoir, que de
belles lettres d'intentions. J'ai fait le tour des hôpitaux dans mon
comté. Ils avaient eu des lettres. Il n'y avait pas de problème
pour cela. Et si je me rappelle bien, il y avait 1 % ou 2 % de l'argent
dégelé. C'était pour faire les études de
"préfaisabilité". On promettait des millions et des millions, on
débloquait des petits 10 000 $ et on s'imaginait que tout était
beau, tout allait bien au Québec. Non. Nous autres, on a fait des
réinjections majeures au ministère de la Santé et des
Services sociaux. (21 h 10)
Je n'ai donc aucune honte, aucune inquiétude à appuyer ce
projet de loi et je voudrais simplement demander au député de
Gouin, par votre entremise, bien sûr, de se rappeler un peu le temps
où il était au pouvoir. Alors qu'il n'est, mais absolument pas
intervenu sur les coupures de 25 000 000 $, maintenant qu'il est dans
l'Opposition il intervient à répétition toujours avec la
même rengaine pour nous dire que c'est épouvantable. Si
c'était si épouvantable que cela, cela l'aurait été
en 1982 et il aurait dû avoir la cohérence, à ce moment, de
se lever et de le dire. Il ne l'a pas fait.
Bref, c'est une mesure raisonnable. C'est une mesure que j'appuie et
c'est une mesure que les Québécois et les
Québécoises vont comprendre, je crois. C'est une mesure que les
citoyens et les citoyennes du Québec vont comprendre tellement elle est
plus légère que la coupure de 25 000 000 $ que ces gens leur ont
fait subir en 1982. Mme la Présidente, je vous remercie.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Taschereau. M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Mme la Présidente, le dernier personnage en
cette Chambre que je m'attendais de voir parler sur ce projet de loi, c'est le
député de Taschereau parce que le député de
Taschereau sait lui qui vient d'une famille qui produit des biscuits, ou aurait
dû savoir qu'une des causes de la carie dentaire, c'est justement le
sucre et les biscuits sucrés. De la même façon qu'on
demande aux entreprises qui produisent des boissons alcooliques de mettre des
indications sur les étiquettes comme quoi consommer trop de boissons
alcooliques peut apporter des problèmes sur le plan de la santé,
ou aux manufacturiers de cigarettes et de tabac d'avoir des restrictions de
santé sur leurs produits, je me serais plutôt attendu que le
député de Taschereau dise qu'il était pour les soins et
que lui-même comprenait cela. Étant issu d'une famille qui a
oeuvré dans le biscuit, il connaît les effets du sucre sur la
carie dentaire et il sait sûrement qu'on ne peut pas - surtout quand on
vient d'une famille qui connaît ce secteur - être
indifférent au résultat pour les enfants de consommer des
produits sucrés.
Il ne peut pas ne pas savoir non plus qu'un des taux les plus
élevés de carie, pas un des taux les plus élevés,
mais le taux le plus élevé de carie dentaire en Amérique
du Nord se trouve au Québec, justement parce qu'on consomme plus de
produits sucrés qu'ailleurs. Je me serais attendu que le
député de Taschereau au moins se sente un peu en conflit
d'intérêts et ne pense pas à parler sur un projet de loi
comme celui-là autrement qu'en nous appuyant, premièrement.
Deuxièmement, le député de Taschereau vient d'un
comté qui n'est pas un des plus fortunés du Québec.
Réduire l'assurance-santé dans un comté où les
revenus ne sont pas très élevés et avoir
répété aussi souvent qu'il donnait son appui aux coupures
des soins d'assurance-santé, des soins dentaires, dans un comté
comme le sien, en disant qu'il l'appuyait fortement et en le
répétant à plusieurs reprises, c'est de l'inconscience. Je
ne dis pas s'il avait été député de Westmount.
J'aurais peut-être compris, ses électeurs étant des gens
fortunés, qu'ils avaient les moyens de payer des visites chez le
dentiste. Je dis que, dans des comtés où on représente
surtout des travailleurs, des gens qui ont des revenus qui ne sont pas les plus
élevés au Québec, on devrait, sur le plan de
l'éthique sociale, penser que cette mesure n'est pas bonne.
Le premier ticket modérateur qui aura été
établi par la ministre de la Santé et des Services sociaux, une
femme, cela aura été une mesure sur le dos des enfants. C'est une
triste journée, c'est une triste semaine actuellement où on
établit un ticket modérateur dans le Régime
d'assurance-santé du Québec sur le dos des enfants. Ce
n'était pas la première proposition de la ministre, car la
première proposition était plus cynique. Elle prévoyait
que les parents qui n'auraient pas amené les enfants chez le dentiste
seraient récompensés par un crédit d'impôt. Les
parents qui n'auraient pas vu à faire soigner leurs enfants par des
dentistes pour les soins dentaires, dans l'endroit où il y a le plus de
caries dentaires en Amérique du Nord, auraient eu un crédit
d'impôt
comme incitatif à ne pas faire soigner leurs enfants.
Une voix: Cela n'a pas de bon sens.
M. Garon: Mme la Présidente, je suis surpris, parce que je
ne suis pas capable de comprendre pourquoi la ministre des Affaires sociales,
qui a oeuvré longtemps dans le monde de l'éducation, dont on se
serait attendu qu'elle comprenne ces problèmes, qu'on aurait
estimée plus près des besoins des gens, parce que d'avoir
oeuvré dans les commissions scolaires, peut-être à un
niveau trop élevé, normalement nous rend plus conscients des
besoins des enfants. Personnellement, après avoir été
candidat et avoir fait de nombreuses campagnes électorales, je peux vous
dire qu'il est facile, quand on se promène un peu partout, et
c'était encore plus facile il y a quelques années, de se rendre
compte à quel point il y avait des problèmes de carie dentaire,
parce qu'on avait au Québec un taux beaucoup plus élevé
qu'ailleurs. Le taux a diminué considérablement, mais il est
encore plus élevé qu'ailleurs. On a fait du rattrapage, mais on a
encore un taux élevé de caries dentaires.
Vu que la ministre avait l'expérience du milieu scolaire
où elle avait oeuvré pendant des années, on se serait
attendu qu'elle soit sensibilisée à ces questions, qu'elle soit
consciente des problèmes qu'elle a dû connaître dans les
écoles. Elle a dû normalement oeuvrer dans des programmes ou voir
à ce qu'il y ait des programmes d'hygiène, des programmes de
santé dans les écoles pour les questions d'alimentation. Je sais,
par exemple, pour avoir discuté longtemps avec le Conseil scolaire de
l'Ile de Montréal, que des personnes étaient très
sensibillisées là-bas à la question de l'alimentation et
justement à cause des caries dentaires. J'ai eu personnellement
l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises -il faut dire que la
ministre n'était pas à ce moment-là au Conseil scolaire de
l'île de Montréal, elle l'avait quitté puisqu'elle avait
été élue députée à Québec -
entre 1976 et 1985, les représentants du Conseil scolaire de l'île
de Montréal ou ceux qui oeuvraient dans le domaine de l'hygiène
alimentaire et tout un programme de saine alimentation avait été
établi auquel s'était ajouté un verre de lait par jour
pour les enfants, justement pour qu'ils aient une meilleure alimentation et
pour prévenir en grande partie la carie dentaire et pour qu'ils aient en
bonne partie une source additionnelle de calcium parce qu'on sait que, pour
avoir de bonnes dents, de bons os, une bonne charpente, les enfants ont besoin
d'avoir une certaine alimentation et une certaine qualité
d'alimentation.
J'aurais pensé que la ministre des
Affaires sociales serait une personne sensibilisée, puis qu'elle
n'aurait pas coupé d'abord sur le dos des enfants. J'ai
été épouvantablement déçu de voir que c'est
la ministre des Affaires sociales qui a apporté une mesure comme
celle-là. Du Parti libéral, je n'ai pas été
surpris, parce que je sais qu'il s'est dit: Un peuple édenté ne
mord pas. Je sais qu'on peut s'attendre à tout du Parti libéral,
et cela ne m'étonne pas que les principales mesures aient
été prises sur le dos de gens qui ne sont pas les plus
fortunés, au contraire, qui sont les plus démunis. On peut en
nommer un grand nombre depuis un an: Des baisses d'impôt surtout pour les
riches, des baisses de déductions fiscales, surtout pour les moins
fortunés, des exemptions fiscales accrues avec des gains de capitaux de
500 000 $ exemptés pour les gens fortunés. On aurait pu, par
exemple, si on manquait de fonds, puisqu'on trouvait qu'on manquait de fonds,
baisser les gains de capitaux au lieu de 500 000 $ à 450 000 $ ou
à 400 000 $ et on serait allé chercher la différence
d'argent. Mais non, on a préféré couper sur le dos des
enfants dans des mesures que l'on a trouvées à différents
endroits. (21 h 20)
On a même voulu, en plus de couper les soins dentaires, couper les
verres de lait aux enfants. C'est uniquement à cause de la vigilance de
l'Opposition, alors que nous avons réagi immédiatement, que les
gens dans l'ensemble du Québec ont dit: Non, cela ne passera pas. Des
comités de parents dans les écoles se sont élevés
pour dire: Non, le verre de lait gratuit doit demeurer. Le Parti
libéral, avec le ministre de l'Agriculture, voulait diminuer le nombre
des verres de lait de cinq à trois par semaine pour sauver de l'argent,
disait-il, ou pour implanter un programme pour des femmes en milieu
défavorisé. On attend encore le programme. C'est vouloir sauver
de l'argent aux dépens de ceux qu'on devrait aider.
Au Québec, alors qu'on a le taux de natalité le plus bas
au monde, ce n'est pas normal que le gouvernement veuille adopter des mesures
qui vont affecter les familles en élevant le coût de
l'éducation ou le coût de l'entretien des enfants. On dit qu'on
veut couper de 23 '$ par année, par enfant, pour que cela coûte 23
$ de plus par enfant aux parents, sans compter le coût du nettoyage et de
l'application du fluor. Or on sait - je le sais pour avoir accompagné
occasionnellement mes enfants chez le dentiste - qu'on commence d'abord par un
examen des dents par l'hygiéniste dentaire, un nettoyage des dents, un
traitement au fluor, avant que le dentiste voie quel est l'état de la
dentition de l'enfant. Là, on a décidé de couper une
visite alors qu'on sait qu'actuellement la moyenne est d'une visite aux sept
mois, que les parents vont rencontrer le dentiste une
fois à tous les sept mois.
On commence peut-être à comprendre plus au Québec
que le gouvernement n'est pas une "business", qu'on ne dirige pas un
État ou un gouvernement comme une "business". Le rôle d'un
gouvernement n'est pas uniquement de faire des profits, ce n'est pas un
commerce. Ce n'est pas un stand commercial. Ce n'est pas un distributeur de
produits dont la seule évaluation doit être des critères de
rentabilité. Le gouvernement c'est essentiellement aussi un dispensateur
de services à l'ensemble de la population, un distributeur de justice
sociale, de répartition de la richesse pour faire en sorte que ceux qui
en ont moins, sur le territoire administré par le gouvernement, puissent
être moins défavorisés grâce à l'action du
gouvernement.
Quand on veut se comporter uniquement comme si c'était une
"business", on arrive à des aberrations. Aberrations qu'on a connues et
qu'on connaît actuellement dans la région de Québec
où la seule clinique spécialisée pour les maladies
transmises sexuellement a été fermée le 31 octobre dernier
alors que les médecins parlent de près de 20 000 cas dans la
région immédiate de Québec susceptibles d'avoir à
recevoir des soins d'une telle clinique, enfin, pas seulement de cette
clinique, mais d'être traités pour ces maladies. Là encore,
qui seront les principales victimes? Les femmes qui auront des enfants, et non
seulement les femmes qui auront des enfants, mais aussi les enfants
eux-mêmes dans des grossesses qui pourront être ce qu'on appelle
des grossesses tubaires parce qu'il pourra y avoir des conséquences
à des maladies vénériennes qui n'auront pas
été traitées à temps.
Mme la Présidente, si vous le voulez, il faudrait appeler le
quorum parce qu'il semble que les députés du gouvernement ne sont
pas très intéressés par le projet de loi.
Des voix: C'est vrai. C'est une bonne idée.
La Vice-Présidente: On va vérifier... M. le
député de Lévis, je remarque que nous sommes quatorze. Il
y a donc quorum. M. le député de Lévis.
M. Garon: Mme la Présidente, vous devriez constater que,
à la suite de mon appel du quorum, les députés sont
entrés. Je n'ai pas appelé le quorum alors qu'il y avait quorum.
Il n'y avait pas quorum. Les députés sont sortis des fumoirs pour
rentrer à l'Assemblée nationale. On n'en a pas assez de vouloir
imposer des lois iniques, en même temps...
Une voix: On se cache.
M. Garon: ...on se cache. Mme la Présidente, vous aussi
vous venez d'un comté où les gens ont des besoins. Le
comté de Bellechasse n'est pas un comté de millionnaires. Les
gens de Bellechasse sont dans l'un des comtés qui vont payer plus cher
pour des soins qu'ils avaient auparavant dans de meilleures conditions, parce
qu'on a décidé de gagner de l'argent sur le dos des enfants.
Pourquoi couper 20 000 000 $ dans le programme de santé dentaire?
Pourquoi sabrer dans l'un des programmes préventifs les plus
nécessaires destiné à compenser l'immense retard dont
souffre le Québec en matière de santé dentaire?
Le projet de loi va compromettre les progrès considérables
réalisés au cours des dernières années sous le
gouvernement précédent. C'est une décision qui risque de
creuser l'écart négatif entre le Québec et l'Ontario au
moment où nous approchions de l'indice de caries observé en
Ontario. L'indice de caries en 1977, au Québec, pour les enfants de 11
à 13 ans était de 9; il a été réduit
à 6 en 1984 alors qu'en Ontario, en 1977, il était de 6,3 mais il
avait été réduit à 3 en 1984. Nous étions
encore à 3 points, 3 caries de plus qu'en Ontario. Comme on sait que la
santé dentaire au Québec est la moins bonne en Amérique du
Nord, ce n'était sûrement pas l'endroit le plus indiqué
pour couper.
Le projet de loi va également à l'encontre de toutes les
décisions qui ont été prises dans ce dossier depuis dix
ans. C'est une décision qui amènera la perte d'acquis et des
investissements consentis jusqu'à ce jour. C'est une décision qui
va coûter cher parce qu'elle va avoir des conséquences qui vont
amener des coûts beaucoup plus élevés à moyen terme
que l'économie de bouts de chandelle réalisée actuellement
sur le dos des enfants. Elle va aussi à l'encontre... La ministre de la
Santé et des Services sociaux est en train de se faire une
réputation de la personne la plus entêtée depuis
l'ouverture de ce Parlement. On n'a jamais vu quelqu'un s'arc-bouter dans tous
les domaines... J'ai vu cela dans le dossier de la clinique des maladies
transmises sexuellement dans la région de Québec, à
l'H5tel-Dieu de Lévis. Malgré toutes les opinions unanimes en
faveur de cette clinique, elle continue à la maintenir fermée
après avoir dit au début que les CLSC pourraient rendre des
services. Ensuite, elle a spécifié que ce ne serait pas tous les
services mais une partie seulement. Après on s'est rendu compte dans des
reportages faits par différents médias, qu'au contraire, les
cliniques n'offraient même pas les services de dépistage dont elle
parlait en cette Chambre, induisant la Chambre en erreur...
La Vice-Présidente: M. le député, je vous
demanderais de revenir à la pertinence du débat. Je peux bien
vous permettre de bifurquer un peu du sujet concernant la Loi
sur l'assurance-maladie mais de là à en faire un discours
principal... Je vous demanderais...
M. Gendron: Mme la Présidente, je voudrais seulement faire
remarquer qu'il s'agit d'un projet de loi où le gouvernement a pris la
décision de couper un service offert à la population. À ma
connaissance, mon collègue de Lévis est en train de donner des
exemples, toujours dans le même domaine, exactement dans le même
secteur de la santé, d'autres coupures qui ont été
effectuées, même si la ministre a donné des informations
contraires, ici en cette Chambre. C'est de cela qu'il est en train de vous
parler. Il dit que la coupure de 8 000 000 $ dans les soins dentaires va avoir
des effets négatifs tout comme l'exemple qu'il citait. Il n'y a rien de
plus pertinent que ces propos par rapport à un projet de loi comme
celui-là. L'effet du projet de loi, c'est la coupure d'un service de 8
000 000 $. 20 000 000 $ en termes d'évaluation, mais 8 000 000 $ selon
les chiffres de la ministre; 20 000 000 $ réellement, après c'est
de l'argumentation et des preuves. Il me semble que l'essentiel du projet de
loi, c'est une coupure de services et les exemples qu'il donnait se
référaient à d'autres coupures de services du même
genre.
M. Lefebvre: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Le leader adjoint de l'Opposition a souligné,
hier soir, que c'était la présidence qui avait la
responsabilité de la surveillance et de la pertinence et de l'ensemble
des règlements. Vous avez rendu votre décision. Sur la même
question de règlement, je vous demanderais d'inviter le
député de Lévis à retirer la dernière partie
de sa phrase, à savoir que la ministre aurait induit la Chambre en
erreur.
M. Gendron: Mme la Présidente, si vous me le permettez. Je
veux signaler que je ne retire rien des propos que j'ai évoqués
hier à savoir qu'il vous appartient effectivement, comme
présidente des débats, de juger si les propos sont pertinents ou
pas. Mais, Mme la Présidente, je veux vous indiquer que, de tout temps,
il a toujours été permis, à la suite d'un rappel de la
présidence, au leader du gouvernement comme au leader de l'Opposition de
donner leur point de vue. (21 h 30)
La Vice-Présidente: Là-dessus, je vais expliquer un
peu plus ma décision, mais elle revient tout de même à la
même chose. L'article 239 est celui auquel on doit se
référer parce qu'il s'agit de la règle
générale. Il est bien mentionné que "le débat porte
exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur
intrinsèque ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins."
Or, le projet de loi, si on lit les notes explicatives, porte sur les services
dentaires. J'aimerais bien entendre parler de services dentaires. Je comprends
qu'à un moment donné vous puissiez bifurquer, mais il faudrait
parler surtout de services dentaires.
M. le député de Lévis, je vous demanderais de
continuer là-dessus.
M. Garon: Mme la Présidente, je suis obligé de
constater que vous devriez lire le projet de loi. Il ne porte pas sur les
services dentaires, il porte sur l'assurance-santé.
M. Rochefort: Qu'elle lise le titre.
M. Garon: Si vous voulez lire le titre, vous verrez que cela
donne les pouvoirs indiqués. Si vous regardez le titre du projet de loi,
il modifie... Je l'avais ici. C'est la Loi modifiant de nouveau la Loi sur
l'assurance-maladie.
M. Rochefort: C'est cela.
M. Garon: Cela couvre un champ d'action beaucoup plus large. Ce
que je m'apprêtais à dire, Mme la Présidente, ce que je
donnais comme exemple, c'est que la seule raison qui fait que la ministre ne
change pas d'idée - je suis en train de faire une preuve de
caractère - c'est qu'elle est entêtée. Je disais que, dans
le dossier des maladies transmises sexuellement, elle s'est
entêtée envers et contre tous, il n'y a pas eu une opinion
divergente sur la nécessité de cette clinique qui a
été fermée. Elle a dit en cette Chambre que les CLSC de la
région de Québec faisaient du dépistage de maladies
sexuelles alors que, par la suite, tout cela a été
démontré comme étant faux.
Je dis maintenant que, dans ce cas-ci, c'est le même
phénomène d'entêtement alors que tous, sans exception, ont
indiqué qu'il y avait erreur. La ministre fait fi des oppositions des
intervenants du milieu: Comité de santé dentaire provincial,
l'Ordre des dentistes du Québec, l'Association des chirurgiens-dentistes
du Québec, la Société dentaire de Québec,
l'Association des dentistes en santé communautaire de Québec,
l'Association des hôpitaux du Québec, le Cercle des
infirmières Varennes-Québec, l'Alliance des hygiénistes
dentaires du SaguenayLac-Saint-Jean, la Fédération des
CLSC.
La Fédération des CLSC. Que font les CLSC? Ils donnent
justement de l'information, ils sont les instruments de première ligne
pour savoir quels sont véritablement, dans tous les milieux du
Québec, les besoins des Québécois, des jeunes
Québécois ou des personnes âgées. La
Fédération des CLSC, qui sont des instruments de
première ligne au Québec pour connaître les besoins des
Québécois, dit: Vous errez. Vous devriez laisser en place les
services dentaires dont a besoin notre population.
Les éditorialistes ont dit aussi la même chose, sans
exception. Les lettres de nombreux citoyens et dentistes dans les journaux. La
ministre reste inflexible. Elle reste inflexible. Certains ont parlé du
mur de Berlin, d'autres ont parlé de la dame de fer, elle reste
inflexible même si la santé de nos enfants est en cause. Je pense
que ce projet est essentiellement mauvais parce qu'il réduit le nombre
d'examens couverts par l'assurance-maladie pour les soins dentaires à un
seul examen par année, alors qu'on a un taux plus élevé
qu'ailleurs de caries dentaires.
C'est quoi, l'objectif? Je ne comprends pas qu'un gouvernement
s'entête de cette façon à aller contre les besoins de la
population quand, en même temps, on peut exempter des gains de capitaux
pour 500 000 $ au Québec, quand on est capable de réduire les
taxes de 1300 $ pour ceux qui gagnent 100 000 $ par année et de 10 $
pour ceux qui gagnent 20 000 $. On est capable de faire ce genre de gymnastique
fiscale en faveur des plus riches au détriment des plus démunis
et, après, on vient dire qu'on n'a pas assez d'argent pour assurer les
soins dentaires des enfants du Québec. On a de l'argent, par exemple,
pour exempter les millionnaires, on a de l'argent pour favoriser les riches.
Là, on en a de l'argent. Quand il s'agit d'aider ceux qui sont dans le
besoin, ceux qui ont moins de revenus, ceux qui sont moins fortunés,
ceux qui sont moins pourvus financièrement, il n'y en a plus, ce n'est
plus possible. On s'est dit encore une fois, et ce sera le symbole de ce
gouvernement qui a voulu couper à deux endroits, dans le lait dans les
écoles pour les enfants et dans les soins dentaires des enfants... Ce
qui indique que la préoccupation sociale d'équité fiscale,
d'équité sociale n'est pas présente dans ce gouvernement
où il n'y a pas de sentiment de justice, de sentiment
d'équité en faveur de ceux qui ont des besoins.
Vous savez, quand on a le taux de natalité à peu
près le plus bas au monde et qu'on essaie de pénaliser davantage
la famille, alors qu'on devrait faire exactement l'inverse... Aujourd'hui, un
des principaux drames du Québec, c'est le faible taux de natalité
ou la pyramide n'est plus une pyramide mais une toupie. Au lieu d'avoir une
pyramide au point de vue des âges avec en haut les gens plus
âgés qui sont les moins nombreux et en bas les gens moins
âgés qui sont les plus nombreux, on a maintenant une toupie, une
pyramide qui descend et, dans les bas âges, on a moins de personnes au
Québec à quelques mois, lan, 2 ans, 3 ans, 4 ans, 5 ans, 6 ans,
qu'on en a à 20 ans ou 21 ans ou 25 ans parce que le taux de
natalité a baissé de façon dramatique au Québec.
Qu'est-ce qu'on voit en cette Chambre depuis que nous sommes arrivés
ici, depuis l'arrivée du Parti libéral, ce sont des mesures qui
touchent les enfants, les familles, dans ce qui, au fond, devrait être
protégé par le gouvernement. On devrait avoir toutes sortes de
mesures pour favoriser les familles qui ont des enfants parce que,
tantôt, ce sera un drame social au Québec d'avoir une
société trop âgée par rapport à ceux qui vont
la soutenir sur le plan des taxes.
On a actuellement 7 % des gens qui ont plus de 65 ans au Québec.
Dans très peu d'années d'ici, dans une quinzaine d'années
on aura 12 % des gens qui auront plus de 65 ans. Peut-être que ces
enfants à qui on aura refusé des soins dentaires, quand ils
auront l'âge de voter, penseront à ceux en cette Chambre qui
seront rendus à l'âge de recevoir, à l'âge où
les jeunes devront payer pour eux, et auront le même souci. Ils diront:
Ils ne payaient pas pour nos soins dentaires quand on était jeunes,
pourquoi paierait-on pour eux maintenant qu'ils sont vieux?
Quand on bâtit une société sur la dureté, sur
des coeurs durs, quand on est capable de dire: On va couper dans les soins aux
enfants... On voudrait plus tard que les enfants aient plus de coeur en faveur
de ces personnes qui auront coupé pour leurs besoins en coupant
l'assurance-maladie pour les enfants. L'équité sociale,
l'exemple, ça se bâtit de certaines façons, par la
générosité, pas par la mesquinerie. Et vouloir s'attaquer
à ceux qui sont les plus faibles dans notre société en se
disant: II n'y aura pas de réactions, il n'y aura sans doute pas
beaucoup de plaintes parce que les enfants endureront leur mal, perdront leurs
dents, auront les effets d'avoir une mauvaise dentition.
Quand on voit les députés en cette Chambre qui n'ont pas
plus de sens social, de sens de la mesure et qu'on voit la ministre des
Affaires sociales qui s'entête avec acharnement à couper dans les
soins les plus nécessaires... S'il n'y avait pas eu de rationalisation
et qu'il y eut une rationalisation è faire, nous serions les premiers
à acquiescer, mais il y a eu en 1982, comme cela a été
mentionné tout à l'heure, des rationalisations faites en vue
d'améliorer les services.
On a eu une revue de tous les programmes pour faire en sorte que les
gens soient traités pour que ça coûte moins cher mais d'une
façon efficace avec la consultation, la concertation et, en même
temps, l'acquiescement des gens du milieu pour que ça puisse être
réalisé. Aujourd'hui ce n'est pas ça, les coupures se font
d'une
façon autoritaire, unilatérale, sans consultation, sans
concertation, contre les enfants du Québec, contre les jeunes du
Québec, contre ceux qui vont se rappeler un jour que, s'ils ont plus de
problèmes avec leurs dents, c'est parce qu'un jour, en 1986, un nouveau
gouvernement qui pensait mener le gouvernement comme une "business", a
trouvé que ce n'était pas payant de soigner les dents des
enfants, a décidé de couper dans les programmes
d'assurance-maladie pour faire en sorte que les soins coûtent moins cher.
Ces enfants-là sauront qu'il y aura plus de caries dans leur
génération, dans leur groupe d'âge parce que ce
gouvernement aura pris le pouvoir le 2 décembre 1985 et qu'ils en paient
les conséquences. (21 h 40)
Mme la Présidente, je ne veux pas être plus long, mon temps
est écoulé. Je veux vous dire que je vais personnellement voter
contre ce projet de loi. Je me serais attendu que le député de
Taschereau vote contre ce projet de loi au lieu de l'appuyer. Dans le
comté de Taschereau, les gens vont payer plus cher maintenant, 23 $ par
enfant, sans compter l'application du fluor et sans compter l'hygiène
dentaire, c'est-à-dire le nettoyage des dents, parce qu'il aura
été l'un de ceux qui auront voté pour ce projet de loi, et
il s'en est glorifié.
Mme la Présidente, je pense que vous êtes un peu chanceuse
d'être sur le banc et de ne pas avoir à voter, mais
peut-être qu'au moment du vote, vous aurez à voter et, vous aussi,
je vous dis que si vous votez pour ce projet de loi, vous aurez à vous
en repentir parce que, dans le comté de Bellechasse aussi, les gens ont
besoin de ces soins. Vous ne devriez pas voter pour ce projet de loi ou encore
si cela vous gêne, abstenez-vous, parce que si vous votez pour ce projet
de loi, vous voterez contre les besoins, contre les intérêts de la
population que vous représentez. La plupart de ceux qui sont en cette
Chambre, en votant pour ce projet de loi qui va couper les soins dentaires aux
enfants, vont voter contre la famille, contre les enfants. Cela va faire en
sorte que l'assurance-santé sera moins efficace et elle le sera parce
qu'on aura imposé le premier ticket modérateur au Québec
sur le dos des enfants. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Lévis.
Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, en
réplique.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
(réplique)
Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, nous avons eu, ce
soir, l'occasion d'entendre une foule d'affirmations de la part des membres de
l'Opposition, certaines valables, d'autres absolument farfelues. S'il me
fallait tenter de réfuter chacune des affirmations qui ont
été faites ce soir d'une façon inexacte, cela me prendrait
probablement, moi aussi, une heure pour y répondre et rectifier toutes
les choses qui ont été dites.
Je vais quand même en reprendre simplement quelques-unes. On les a
répétées tellement souvent que je pense qu'il est
important que la population sache vraiment où se situe la
vérité. On a entendu souvent les membres de l'Opposition dire que
le gouvernement, parce qu'il réduisait de deux examens à un seul,
le programme des soins dentaires pour les enfants, imposait un ticket
modérateur, le premier ticket modérateur, selon le
député de Lévis, qui était imposé au
Québec.
Vous me permettrez, Mme la Présidente, de citer un extrait d'un
article d'Alain Dubuc, dans La Presse du 29 mai 1986, dont, je pense, personne
ici ne contestera la valeur comme journaliste et comme expert en
économie. Je cite ce que disait M. Alain Dubuc justement à
l'égard de cette mesure que le gouvernement proposait au printemps et
contre laquelle, déjà, l'Opposition - c'était son droit le
plus strict - s'opposait avec véhémence. Il disait: "II faut
quand même, en politique, regarder les mots qu'on utilise. Les mots
maqiques de cet univers, ceux qui déclenchent rapidement des
réflexes émotifs sont employés à toutes les sauces.
C'est particulièrement vrai pour les concepts de ticket
modérateur et d'universalité. C'est Jacques Parizeau - je cite
toujours au texte - qui a utilisé le premier le terme de ticket
modérateur il y a plus de cinq ans. Il a rapidement compris que
c'était un terme tabou. Pierre Marc Johnson, l'actuel chef de
l'Opposition, s'en est fait le partisan en pleine campagne électorale.
Enfin, on s'est mis à en reparler avec le débat sur les soins
dentaires et c'est l'Opposition qui est revenue continuellement avec cette
notion de ticket modérateur."
M. Dubuc ajoutait: "Le projet de la ministre
Thérèse Lavoie-Roux prévoit qu'au lieu de deux examens
dentaires gratuits par enfant par année, il n'y en aura qu'un seul. Le
second, pour les familles qui le solliciteront, devra être payé au
coût de 23 $." Cela est exact, Mme la Présidente. Et M. Dubuc
d'ajouter: "II n'y a pas de ticket modérateur là-dedans." Ce
n'est pas moi qui le dis, Mme la Présidente. C'est un des journalistes
économiques les plus réputés non seulement au
Québec mais au pays et dont on a reconnu la compétence au plan
canadien. "Il n'y a pas de ticket modérateur là-dedans",
disait-il. "Les frais modérateurs sont d'habitude un montant symbolique
que l'on exige non pas pour couvrir le coût d'un service mais pour
empêcher que les utili-
sateurs abusent d'un service gratuit. Au Québec, le gouvernement
Lévesque y a songé parce qu'il y a surconsommation de services
médicaux. Mais il a estimé que les tickets modérateurs
seraient lourds et inefficaces. "Dans le projet de Mme Lavoie-Roux, le premier
examen est gratuit, ce qui ne modère rien. Quant au second, il est
carrément désassuré. On le paiera, si on l'utilise, au
plein prix mais ce n'est pas un ticket modérateur. C'est le plein prix
que la personne paiera. Et il faut par ailleurs ajouter, continuait M. Dubuc,
que le gouvernement du Québec - et il s'agissait du gouvernement du
Parti québécois - a, lui, imposé plusieurs tickets
modérateurs au fil des ans. Par exemple, il faut payer un montant
symbolique à la Cour des petites créances, 10 $ pour les petites
réclamations et 20 $ pour les plus grosses. Ce n'est donc pas nouveau.
"Sous ce même gouvernement, disait M. Dubuc, le ticket modérateur
prend la forme, comme à la Régie du logement, non pas d'un ticket
modérateur mais en forçant les citoyens à se
présenter en personne plutôt que de transiger par
téléphone." Mme la Présidente, ce n'est là qu'un
des écarts de langage et d'une partie de la démagogie ou de
l'expression démagogique que les gens d'en face ont utilisée
depuis un bon nombre d'heures.
J'ai entendu le chef de l'Opposition qui s'est déplacé,
sans doute pour tenter de refaire sa virginité quant à la
façon dont il s'est comporté alors qu'il était à la
tête du ministère de la Santé et des Services sociaux et
que durant sept ans - il n'a pas occupé ce poste durant les sept ans, il
faut quand même faire la part des choses... Durant les neuf années
du règne du Parti québécois, on a assisté à
des coupures et à des compressions budgétaires - parce qu'il y a
une différence entre les deux - de l'ordre de 700 000 000 $ ou
même de 800 000 000 $ selon certains.
Je trouvais quand même assez surprenant de voir l'ancien ministre
de la Santé et des Services sociaux se scandaliser de cette
réduction de deux examens à un seul pour un montant de 8 000 000
$, alors que cette même personne, cet actuel chef de l'Opposition, cet
ancien ministre de la Santé et des Services sociaux imposait, en 1982,
pour 30 000 000 $ de coupures, et de coupures véritables dans les
programmes de soins dentaires pour les enfants.
Aujourd'hui, il se scandalise, et ses collègues se scandalisent,
paraît-il parce que les enfants n'auront désormais qu'un examen de
payé au lieu de deux, comme cela se fait dans les deux seules autres
provinces qui ont des programmes de soins dentaires pour les enfants. Il n'y en
a pas dans les autres provinces. Là, on brandit tous les spectres. Les
enfants vont se retrouver avec un état de santé dentaire
absolument déplorable. (21 h 50)
Mme la Présidente, quand on met cela en opposition avec la nature
des coupures que le ministre de la Santé et des Services sociaux du
temps, le chef actuel de l'Opposition, avait faites en retranchant la
restauration des dents pour les enfants de treize, quatorze et quinze ans, qui
est la période absolument critique où justement on a davantage
besoin de restauration dentaire, certainement davantage qu'à un
âge plus jeune... Mais cela, on n'en parle pas. Cela n'avait aucun
inconvénient. Mettez en opposition - je suis certaine que la population
peut les mettre en opposition -d'une part, ce que nous proposons,
c'est-à-dire la réduction de deux examens à un, et,
d'autre part, les mesures que l'ancien gouvernement avait prises; non seulement
d'enlever la restauration des dents pour les onze, douze et treize ans, mais
aussi de désassurer d'autres services qui étaient rendus aux
enfants de trois à douze ans. Cela, on n'en parle jamais. Si on
réalise que c'est le tiers du programme des soins dentaires qui existait
à ce moment qui a été amputé par l'ancien
gouvernement, on ne peut s'empêcher, Mme la Présidente, de dire:
Ces gens, intellectuellement, ne sont pas honnêtes.
De plus, le chef de l'Opposition se montre scandalisé que nous
réduisions de deux à un examen dentaire par année pour les
enfants. Ce soir, il a parlé de transparence: Nous, nous l'avons fait
publiquement. Et nous retrouvons prépublié dans la Gazette
officielle un avis de cet ancien ministre, de ce chef de l'Opposition qui,
à ce moment, réduisait de deux à un examen dentaire pour
les enfants sans se soumettre à une modification de la loi qui, elle,
est discutée à l'Assemblée nationale au vu et au su de
tous, alors que lui procédait d'une façon ultra vires et allait
directement à la Gazette officielle sans passer par l'Assemblée
nationale pour d'abord demander une modification à la loi avant de
procéder à cette modification au règlement. Parler de
transparence quand on agit de cette façon, c'est pour le moins
surprenant.
La même chose quand le député de Lévis nous
rappelle - je ne devrais probablement pas tomber dans ce piège, mais il
semble avoir une sorte d'obsession et cela me semble être un
problème particulièrement aigu dans le comté de
Lévis plus qu'ailleurs, à l'entendre parler en tout cas - ce
problème des maladies transmises sexuellement. Il a reçu
lui-même du CRSSS de la région de Québec, dans lequel se
trouve l'Hôtel-Dieu de Lévis, une lettre fort
détaillée dans laquelle on lui dit: Les services ne seront pas
donnés de la même façon, mais ils seront néanmoins
fournis à la population à partir d'autres sources dont la
principale demeurera l'Hôtel-Dieu de Lévis quant au
prélèvement, quant au traitement. On entend à
satiété le député de Lévis déformer
les faits et faire de la démagogie autour de cette question.
Mme la Présidente, ce ne sont là que deux exemples ou
quelques exemples que je voulais relever. Je veux dire ici à la
population, et elle le sait, que notre gouvernement, depuis qu'il est
arrivé au pouvoir, qu'il dirige le Québec, a injecté dans
la santé et les services sociaux des centaines de millions et c'est
l'Association des hôpitaux du Québec qui elle-même le
disait. Je n'ai pas le texte sous les yeux, j'ai eu l'occasion de le mentionner
ici à l'Assemblée nationale. Elle disait qu'après une
décennie de coupures et de compressions, finalement, elle en
félicitait le gouvernement, elle reconnaissait très ouvertement
que le gouvernement a très largement ou dans une large part rempli ses
engagements électoraux, et elle s'en réjouissait.
M. le Président, ce sont là les faits. Il est exact que,
dans le programme des soins dentaires... Et si quelqu'un voulait tenter de nous
accuser de ne pas l'avoir fait publiquement, je trouve qu'il est assez
étonnant que l'on puisse penser une telle chose, alors qu'il s'agit
d'une décision qui avait été prise le printemps dernier,
que l'Opposition, pour les raisons qui lui conviennent, n'a pas voulu que nous
adoptions et qu'aujourd'hui nous revenions avec cette même
décision.
Il est évident, et je ne l'ai jamais caché, que nous
retranchons 8 000 000 $ des programmes de soins dentaires pour les enfants.
Ceci va se traduire strictement par la réduction de deux examens
à un seul examen dentaire par année. Tous les autres services
sont maintenus. Je voudrais aussi que les parents sachent que, si leurs
enfants, pour des raisons d'urgence - mal de dents, abcès, occlusion de
dents, enfin toutes les autres conditions d'urgence qui pourraient survenir -
pourront recourir au service du dentiste et que tous les frais seront
payés.
M. le Président, le gouvernement avait des responsabilités
à prendre sur le plan administratif, sur le plan des finances publiques,
de l'assainissement des finances qui, tout le monde le sait, étaient
fort mal en point quand nous sommes arrivés à la direction du
Québec. Toutes les difficultés ne sont pas encore aplanies, mais
ce que je peux dire et j'ai eu souvent l'occasion de le dire - si je le
répète c'est que l'Opposition revient à la charge - c'est
que le gouvernement a fait des coupures, mais a évité de les
faire dans le domaine de la santé et des services sociaux, sauf pour ces
8 000 000 $ qui nous apparaissaient être une rationalisation qui ne
pénaliserait pas la population.
Sans aucun doute, on cite des études d'un côté, on
cite des études de l'autre, pour appuyer chacun sa thèse, mais
une chose demeure certaine, les mêmes études que l'Opposition a
citées, celles de Eldeton, entre autres, les études anglaises,
concluent qu'il n'y a pas d'étude scientifique qui prouve qu'un examen
au lieu de deux soit préjudiciable à la santé dentaire des
enfants.
Alors, M. le Président, je veux répéter à la
population que les services ou le programme des soins dentaires pour les
enfants, tel qu'il existe, demeure dans sa totalité, sauf pour la
réduction de deux examens à un examen. Je voudrais ajouter en
terminant, M. le Président, qu'à la mesure des ressources
financières que le gouvernement a à sa disposition, nous
maintenons une situation, quant au programme de soins dentaires pour les
enfants, qui est de beaucoup supérieure à ce qui existe partout
ailleurs au Canada, sauf encore une fois en Nouvelle-Écosse et dans
lÎîle-du-Prince-Édouard, là où il faut quand
même que les parents déboursent soit 4 $ par enfant ou 12 $ par
année pour s'en prévaloir.
Mais il y a aussi des responsabilités qui doivent être
prises par les familles dans ce domaine-là. Je pense que les familles
sont conscientes de ces responsabilités de plus en plus. Aurions-nous le
programme dentaire pour enfants le plus complet possible si certaines
responsabilités ne sont pas assumées par les familles, par
exemple une saine alimentation, des habitudes d'hygiène dentaire
améliorées, s'il n'y a pas de mesures alimentaires mises en
oeuvre par exemple pour les femmes enceintes, parce que cela aussi aura
éventuellement une influence sur l'état de la santé des
enfants... (22 heures)
C'est dans cette direction que nous nous acheminions quand nous avons
annoncé, il y a maintenant peut-être quelques mois, que nous
mettions à la disposition de deux CLSC, dans des milieux
défavorisés, un programme d'alimentation qui permettrait de
fournir aux femmes enceintes des milieux défavorisés une ration,
si je puis dire, une distribution de lait et d'oeufs, justement pour
améliorer l'alimentation de ces femmes enceintes.
M. le Président, nous sommes conscients de nos
responsabilités. En tant que gouvernement, nous tentons de les assumer
et nous avons fait cette année, hors de tout doute, la
démonstration que nous étions capables de le faire, que nous
avions injecté dans le domaine de la santé et des services
sociaux des sommes très considérables pour tenter de faire ce
redressement qui s'imposait depuis plusieurs années et qui, s'il
n'était pas fait, conduisait inexorablement notre système de
santé et de services sociaux vers une qualité fortement
diminuée. Nous aurions continué sur cette pente dangereuse que le
gouvernement antérieur avait imposée à notre
système de santé et
de services sociaux.
M. le Président, encore une fois, je pense que la population sera
juge, en bout de ligne, de la façon dont le gouvernement actuel assume
ses responsabilités et je suis certaine que toute comparaison qui
pourrait être faite dans ce domaine avec la façon dont le
gouvernement antérieur s'est acquitté de ces mêmes
responsabilités, sera une réponse positive à notre
endroit, comme le démontrait d'ailleurs, encore ce matin, dans des
sondages, l'appréciation et le contentement de la population, eu
égard aux décisions que le gouvernement actuel a eu à
prendre depuis qu'il est à la direction des affaires du Québec.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Ceci met fin au débat à
cette étape de l'étude du projet de loi 124. Est-ce que la motion
d'adoption du principe du projet de loi 124, Loi modifiant de nouveau la Loi
sur l'assurance-maladie proposée par Mme la ministre de la Santé
et des Services sociaux est adoptée?
M. Gratton: Vote enregistré.
Le Vice-Président: Oui, M. le leader du gouvernement.
M. Lefebvre: II y a effectivement entente pour que le vote soit
reporté à demain et je fais motion dans ce sens, pour que le vote
soit reporté à la séance des affaires courantes de
demain.
Le Vice-Président: Le vote enregistré est donc
reporté à la période des affaires courantes de demain. M.
le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article 38 du feuilleton.
Projet de loi 153
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président: Alors, à l'article 38 du
feuilleton, nous reprenons le débat sur la motion du ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche pour que le principe du projet de loi 153,
Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la
Loi sur les parcs soit maintenant adoptée. Lors de l'ajournement du
débat, la parole était au député de
Montmagny-L'Islet que je reconnais à ce moment-ci. M. le
député de Montmagny-L'Islet, vous avez la parole.
M. Réal Gauvin
M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je suis
particulièrement heureux de m'adresser aux membres de cette
Assemblée aujourd'hui sur le projet de loi 153. Heureux,
première- ment, parce que ce projet de loi va tendre, sinon à
anéantir le braconnage au Québec, du moins à diminuer
sensiblement ce fléau pour certaines régions
québécoises. Heureux également, parce que, en diminuant le
braconnage, on pourra ainsi accentuer la protection de certaines espèces
animales qui se font de plus en plus rares dans certaines régions du
Québec. Heureux également, parce que ce projet de loi 153 est un
geste important et significatif que pose le gouvernement libéral.
Important parce que les mesures contenues dans cette loi devraient avoir un
impact économique favorable dans toutes les régions et contribuer
indirectement à la création d'emplois.
Je tiens également à dire, M. le Président, que
cette loi touche directement le comté que je représente car,
comme vous le savez, Montmagny-L'Islet est constitué d'un fort
pourcentage de forêts et la chasse y est un sport très
pratiqué. C'est donc dire que je connais très bien ce qu'on
aborde ce soir, c'est-à-dire la conservation de la faune au
Québec. Je disais donc, M. le Président, que cette loi
présentée par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche aura des incidences économiques de taille car elle permettra
l'augmentation du nombre d'agents de conservation qui devrait, en 1987,
être substantiellement majoré.
J'aimerais dire que je suis particulièrement fier des sanctions
contenues dans ce projet de loi. Comme vous le savez, ce projet de loi dont le
but principal est de favoriser la lutte contre le braconnaqe augmente les
sanctions pénales et administratives prévues dans l'actuelle Loi
sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Je suis content que le
ministre n'ait pas eu peur de multiplier fortement le coût des amendes
car il importe que cesse la dilapidation éhontée de certaines de
nos ressources.
Il faut rappeler, M. le Président, que certaines régions
voyaient leur cheptel presque décimé à cause du
braconnage. Certains diront que ces amendes sont exagérées, mais
je demeure assuré que c'est l'unique façon de faire cesser ce
braconnage et d'accentuer la conservation de notre faune
québécoise. D'ailleurs, vues sous l'étiquette de la
conservation de la faune, je suis assuré que tous les véritables
chasseurs et pêcheurs, de même que les amants de la nature sont
d'accord avec les mesures plus sévères annoncées par le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans ce projet de loi
153. Toutefois, on note avec beaucoup d'intérêt que le ministre
annonce dans son discours de présentation en deuxième lecture
d'autres mesures, plus particulièrement au niveau éducatif, qui
viendront compléter la loi.
Dans un premier temps, il est important de bien connaître le
profil type
des braconniers afin de mieux cibler les campagnes d'information, de
sensibilisation ou d'éducation dans le domaine de la protection de la
faune.
D'ailleurs, les États américains qui se sont donné
des mesures de ce genre commencent déjà à en
récolter les fruits. Ils ont vu leur cheptel d'animaux de toutes sortes
augmenter de façon importante et vous avez vu la mentalité des
citoyens de ces régions changer sensiblement avec les années
d'application de ces lois, ce qui peut faire toute la différence, M. le
Président.
Les études dynamiques de population faunique qui permettent de
mieux déceler le pourcentage de mortalités dues au braconnage
sont également des mesures importantes dans lesquelles le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche investit des
efforts qui seront récompensés par une meilleure lutte au
braconnage.
Il est important également que les attitudes des procureurs et
des magistrats, en regard du type de délits reliés au braconnage,
permettent à la loi proposée par le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche d'avoir sa pleine efficacité.
Le ministre m'informait qu'une étude était actuellement en
cours au ministère sur les attitudes des procureurs, ceci principalement
dans le but d'améliorer les règlements préparés par
son ministère pour en faciliter l'application. Cette étude
permettra également que les infractions soient mieux
préparées par les agents de conservation de la faune afin
d'atteindre l'efficacité recherchée.
Enfin, il est important de sensibiliser le monde judiciaire à la
gravité des délits concernant la faune. Il faudrait aussi
mentionner l'ensemble de l'éducation offerte par le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en collaboration avec la
Fédération québécoise de la faune, dans le cadre du
programme d'éducation en sécurité et en conservation de la
faune. (22 h 10)
En effet, en plus des programmes bien connus dont celui, en particulier,
sur la sécurité dans le maniement des armes à feu, il faut
ajouter qu'en 1986 deux nouveaux modules ont été
développés, portant l'un, sur les premiers soins en forêt
et l'autre, sur la sécurité en embarcation. De plus,
actuellement, le ministère, en collaboration avec la
Fédération québécoise de la faune, développe
le module sur la chasse à l'arc.
Il faut également mentionner les efforts que le ministre fait
depuis son arrivée en poste au ministère du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche afin d'augmenter le nombre d'agents de conservation de la
faune et de leur assurer un équipement adéquat dans
l'accomplissement de leur tâche importante.
En conclusion, on s'aperçoit que le préjugé
favorable du ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche pour la conservation de la faune n'est pas
nouveau. Pour lui, c'est un souci quotidien. Cependant, ce que vient faire ce
projet de loi 53, c'est ajouter des dents à l'actuelle loi afin de
diminuer, sinon d'anéantir, le braconnage et par là
d'accroître la protection de notre faune.
Encore une fois, vous avez là un bel exemple du bon gouvernement
qu'est le gouvernement libéral. Nous agissons pour le bien de toute la
collectivité et surtout pour léguer aux générations
futures un Québec fort, sain et prospère. Ce projet de loi 153
est donc un parfait exemple de protection de notre patrimoine. En l'occurrence,
ici, c'est le patrimoine faunique.
En terminant, j'aimerais féliciter le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche pour son courage et son grand sens de la
conservation. C'est un geste important qu'il pose aujourd'hui et les
générations à venir lui en seront redevables pour
longtemps. C'est ce qu'on appelle protéger nos intérêts
collectifs. J'espère donc ardemment que l'Opposition se joindra à
nous afin d'appuyer une loi fort importante pour la protection du patrimoine.
Je vous remercie.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Je dois dire que,
moi aussi, je suis heureux d'intervenir sur le projet de loi 153, très
rapidement, afin de pouvoir exprimer mes commentaires, mes satisfactions, mais
aussi et peut-être surtout, parce que je trouve utile de le faire, mes
inquiétudes sur les modifications qui sont apportées concernant
la conservation de la faune dans ce projet de loi.
Le projet de loi 153, pour situer un peu le débat, s'intitule:
Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la
Loi sur les parcs. Avant d'aller sur le fond du sujet comme tel, je pense qu'il
serait bon de parler de l'importance du patrimoine faunique comme richesse
économique du Québec. On le dit souvent, on le pense et c'est
aussi une réalité, le Québec est un paradis pour les
adeptes de la chasse et de la pêche. Je suis tout à fait d'accord
que l'on en fasse la promotion au Québec, mais aussi à
l'étranger pour encourager cette activité économique.
Pour en voir toute l'importance, c'est bon de rappeler qu'il y a au
Québec environ 1 200 000 pêcheurs actifs qui
génèrent des dépenses annuelles de près de 600 000
000 $, ce qui est quand même très important. Il y a aussi au
Québec 350 000 chasseurs qui, eux, dépensent pour plus de 160 000
000 $. C'est donc tout près de
1 000 000 000 $ de dépenses annuelles occasionnées par nos
pêcheurs et nos chasseurs.
Je vais en profiter - vous allez dire que c'est peut-être un peu
chauvin, mais il faut profiter de l'occasion quand elle passe -pour m'adresser
aux 350 000 chasseurs québécois. S'ils sont déjà au
courant, tant mieux; s'ils ne le sont pas, je pense que c'est l'occasion toute
rêvée de les informer qu'il existe ici, au Québec, le
Musée québécois de la chasse. C'est un musée unique
en Amérique du Nord qui est situé à Waterloo, dans les
Cantons de l'Est. C'est un musée qui vaut le déplacement, je dois
vous le dire. Comme tout musée, on retrouve à l'intérieur
de très belles choses à voir, de l'animation et beaucoup
d'informations dans l'un des sites les plus enchanteurs des Cantons de l'Est.
J'invite tous les chasseurs québécois, leur famille et leurs
amis, et, évidemment, le ministre de la Chasse et de la Pêche
à venir y faire un tour, à venir découvrir non seulement
le musée comme tel mais à en faire leur lieu de rassemblement -ce
pourquoi ce musée a été mis sur pied -non seulement pour
des visites, mais pour des manifestations et aussi pour des
compétitions, ce qui est déjà commencé, d'ailleurs.
J'espère que tous les chasseurs de toutes les espèces vont finir
par en faire leur lieu de rassemblement, sinon annuel, le plus souvent
possible. Je pense que c'est important.
Je vais en profiter pour féliciter les différentes
personnes qui ont mis sur pied ce Musée québécois de la
chasse, les gens qui ont eu l'idée au début, qui l'ont mis sur
pied dans des conditions très difficiles pendant la crise
économique et tous ceux qui l'ont bâti et qui continuent
aujourd'hui à le développer et à l'animer, ce qui est
très important. Je veux en profiter pour féliciter et remercier
mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, qui est ici ce
soir, qui, lorsqu'il était ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, a donné le coup de pouce, pour ne pas dire l'aide
financière nécessaire à ce moment-là pour permettre
de sauver le musée et de le développer. Donc, aujourd'hui, c'est
un musée qui est en place et qui est vraiment le rendez-vous des 350 000
chasseurs québécois et de leur famille. Je voudrais terminer en
disant que c'est un musée unique en Amérique du Nord et que vous
êtes toujours les bienvenus.
Avant d'entrer sur le fond du projet de loi 153, je voudrais aussi
parler des responsabilités des agents de conservation de la faune. C'est
important parce que ces gens-là ont quand même une tâche
très importante puisqu'ils sont chargés de l'application de la
Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et de ses
règlements, ce qui n'est pas peu dire, car, en plus d'informer la
population sur cette loi et ses règlements, ils doivent promouvoir la
conservation. C'est très important parce que, comme je le disais
tantôt, c'est près de 1 000 000 000 $ qui sont
générés dans le milieu chaque année. Ces agents de
conservation sont très importants.
Je veux féliciter aussi ceux de chez moi, les agents de
conservation qui sont rattachés au bureau de Granby. Je veux les
féliciter parce qu'ils étaient, justement, de ceux qui ont
participé au démantèlement du réseau de braconniers
dont on parlait dans La Presse au début du mois de novembre; ceci a
permis l'arrestation d'une douzaine de personnes et la saisie de 300 kilos de
viande de chevreuil dans les municipalités de Farnham, Sainte-Brigitte,
Longueuil, Montréal et Laval. Ces gens-là sont très
utiles; ils font un très bon travail. En plus, et c'est pourquoi je les
remercie, ils m'ont permis de découvrir la situation de la chasse au
Québec à l'heure actuelle. Cette situation justifie que le projet
de loi 153 soit déposé.
J'ai eu le plaisir de visiter, moi aussi, à la noirceur dans mon
coin, dans les chemins de campagne, avec justement un agent, les routes pour
aller voir ce qui se passe. J'ai été à même de
découvrir en moins de deux heures qu'avec les fameux projecteurs on peut
voir énormément de chevreuils. Je peux vous dire qu'en moins
d'une heure trente minutes j'en ai vu une trentaine, soit de façon
isolée ou par groupes. Je n'ai pas seulement découvert qu'il y
avait beaucoup de chevreuils chez nous, mais j'ai aussi découvert qu'il
y avait une foule de chasseurs qui se promenaient en avant et en arrière
de nous avec les mêmes projecteurs pour découvrir où se
tenaient les chevreuils. Malheureusement ce soir-là, ou heureusement,
cela m'a permis de découvrir que le braconnage se pratiquait partout, y
compris autour de nos grandes villes. On est, justement, arrivé au
moment où un chevreuil venait d'être abattu et laissé sur
le bord de la forêt en attendant probablement qu'il soit 4 heures ou 5
heures du matin pour aller le chercher. Donc, j'ai été à
même de découvrir ça.
J'ai aussi eu à mon bureau de comté, comme probablement
beaucoup de mes collègues ici, énormément de plaintes des
citoyens du coin. Il y a eu des plaintes, bien sûr, à propos des
limites du territoire de chasse, mais surtout sur l'utilisation du projecteur.
Ce n'est pas très plaisant pour les gens qui vivent à la campagne
de voir passer, à partir de la brunante jusqu'au lendemain matin au
lever du soleil, les fameux projecteurs, les "spotlights" comme on dit chez
nous, avec une intensité presque incroyable qui se promènent sur
le bétail dans les champs, les bâtiments de ferme et même
sur les maisons familiales. Ce n'est pas plaisant. On a eu beaucoup de plaintes
là-dessus.
(22 h 20)
C'est pourquoi je suis pour la lutte au braconnage et d'accord avec des
principes qu'on retrouve dans le projet de loi 153. Je vais
énumérer ces principes qui, à mon avis, sont très
importants. Premièrement, l'augmentation du nombre d'agents de
conservation de la faune. Je pense que c'est élémentaire. Si on
veut que la loi soit plus sévère et mieux appliquée,
qu'elle apporte une meilleure protection de la faune au Québec, il faut
se donner les moyens physiques, les moyens humains, donc avoir plus d'agents.
Deuxièmement, l'interdiction d'entraver un agent de conservation dans
l'exercice de ses fonctions. C'est tout à fait normal. Si on veut qu'ils
soient plus nombreux, il faut aussi qu'ils puissent bien remplir leurs
responsabilités. Le troisième point important, c'est que nul ne
peut chasser le gros gibier la nuit avec un projecteur. C'est
précisément pour corriger la situation que je viens de vous
décrire. Le quatrième point important, c'est que nul ne peut
utiliser un projecteur la nuit pour déceler la présence d'un
animal dans un endroit fréquenté par le gros gibier.
Cinquièmement, l'interdiction de la possession, la nuit, d'une arme
à feu, sauf si cette arme est insérée dans un étui
ou déposée dans le coffre arrière d'une voiture.
Sixièmement, l'augmentation des infractions.
M. le Président, oui, je suis d'accord avec ces principes et je
trouve que c'est bon parce que cela va protéger la faune, cela va
protéger les chevreuils et le gros gibier au Québec. Cela va
permettre d'avoir plus d'agents de conservation de la faune et leur permettre
aussi de donner un meilleur service.
Par contre, j'espère que le ministre profitera de la
présente discussion, qui se tient ici ce soir, et de la commission
parlementaire pour changer certains points qui, à mon avis, sont
démesurés. Le premier point, c'est le montant des amendes.
Comment peut-on expliquer qu'un braconnier soit passible d'une amende de 3500 $
et d'une année de prison, quand un individu n'est condamné
qu'à 2000 $ ou six mois de prison pour voie de fait sur une autre
personne? Ce n'est pas sur un animal; c'est sur une autre personne. La
pénalité est de beaucoup inférieure. Comment expliquer
aussi qu'un conducteur, qui met la vie de nos enfants en péril ou en
danger en dépassant un autobus scolaire avec ses feux clignotants, soit
passible d'une amende de 200 $? Dans une société qu'on dit
moderne, qu'on dit civilisée et qu'on dit avancée, je pense qu'il
faut une certaine logique, une certaine équité dans les
différents secteurs d'activité. Donc, il faut être
raisonnable, à mon avis, dans les amendes qu'on veut imposer, parce que
le secteur de la faune n'est pas isolé en soi. C'est un secteur de la
vie qui concerne tous les citoyens du Québec. Donc, c'est important
qu'il n'y ait pas de démesure dans les pénalités qui sont
prévues dans ce secteur. Il faut tenir compte qu'on vit dans une
société et qu'il y a d'autres secteurs, que les lois doivent
être équitables et qu'il doit y avoir une certaine logique dans
les amendes qui sont prévues.
Le deuxième point qui, à mon avis, mérite une
considération - j'espère que le ministre va en tenir compte - ce
sont les dispositions qui sont inconciliables avec la charte des droits et
libertés. Premièrement, la présomption de
culpabilité. Il ne faudrait pas oublier que les chartes canadienne et
québécoise des droits et libertés établissent que
tout accusé est présumé innocent jusqu'à preuve du
contraire. Il ne faudrait pas oublier que les chartes sont au-dessus des lois,
qu'il y a des principes fondamentaux dans une société. On est
fier de la Charte des droits et libertés de la personne du
Québec. Elle s'applique à toutes les lois et le présent
projet de loi ne peut pas y faire exception. Donc, un individu doit être
considéré innocent tant et aussi longtemps qu'on n'a pas
prouvé le contraire.
Un deuxième point auquel on doit faire attention pour respecter
la charte des droits et libertés, c'est le pouvoir de perquisition sans
mandat. Pourtant, ce projet de loi 153 donne ce pouvoir aux agents de
conservation de la faune. Pendant ce temps, il y a quelques jours seulement, le
ministre de la Justice, dans le projet de loi 92, apportait une modification
à la loi existante qui régit tout le secteur de la faune.
L'amendement présenté oblige l'agent de conservation de la faune
à obtenir, après déclaration sous serment, un mandat d'un
juge de paix avant de procéder à une perquisition. J'invite M. le
ministre à bien écouter, parce que c'est important. Je pense
qu'on ne peut pas inclure dans ce projet de loi ces deux facteurs qui sont la
perquisition sans mandat et la présomption de culpabilité. Je
pense que le ministre ferait mieux, dès maintenant, de modifier la loi
plutôt que d'attendre, dans deux mois ou six mois, que son
collègue, le ministre de la Justice, responsable de l'application de la
Charte des droits et libertés de la personne du Québec, vienne
corriger cette loi par une loi omnibus. Aussi bien le savoir tout de suite. De
toute façon, quand on adopte une loi, cela doit être fait dans le
respect des autres lois, mais surtout dans le respect de la Charte des droits
et libertés de la personne du Québec. On ne peut pas être
au-dessus de cette charte.
Le troisième point qui mérite l'attention du ministre -
j'espère qu'il va le considérer et le changer dans le projet de
loi - ce sont les pouvoirs discrétionnaires que le ministre se donne,
entre autres, dans l'affectation du territoire par décret et non plus
par règlement. Ce que cela signifie,
c'est que, dans l'affectation du territoire maintenant, il n'y aura plus
aucune prépublication, aucune consultation et aucun contrôle par
l'Assemblée nationale. Je pense, puisque les terres publiques
appartiennent à l'État, donc à l'ensemble des citoyens,
que l'Assemblée nationale et les élus doivent avoir un
contrôle sur ce qu'on fait de l'affectation de ce territoire. Je pense
que le ministre doit retirer cette demande, qui est faite dans le projet de loi
153, de faire cela maintenant par décret plutôt que par
réglementation.
Toujours dans les pouvoirs discrétionnaires xque se donne le
ministre, le ministre peuït, aux conditions qu'il détermine,
délivrer un permis autorisant la vente ou l'achat de poisson ou de chair
animale pour une activité spéciale. Je dois dire que cela aussi
est inquiétant, parce que c'est un pouvoir discrétionnaire qui
est tellement vague qu'on ne sait pas où cela va s'arrêter, parce
qu'une activité spéciale peut être tellement de choses.
J'aimerais ici montrer au ministre et lire - je pense que cela en vaut la peine
- un article qu'on retrouve dans le journal Le Soleil du 19 novembre dernier -
cela ne fait pas tellement longtemps - sous la plume de M. André
Bellemare, donc quelqu'un qui connaît très bien le secteur de la
chasse et de la faune. Le titre "Un article du projet de loi 153 fait peur.
Commerce de la faune?"
Je vais vous en lire juste deux petits paragraphes. Je pense que cela
vaut la peine pour savoir à quel point on peut s'inquiéter de cet
article qu'on retrouve dans le projet de loi 153. "Ce nouvel article de la loi,
anodin en apparence, c'est la porte ouverte à la commercialisation du
patrimoine faunique." "Les plus vieux se souviendront de la Régie des
alcools, qui octroyait des permis "très spéciaux", à des
conditions "très spéciales", pour la vente et l'achat de boissons
alcoolisées à consommer sur place lors d'activités
très spéciales. Ce qui était l'exception voilà
quelques dizaines d'années est maintenant devenu la règle pourvu
que le demandeur verse le tarif prescrit."
C'est donc comme cela qu'on a procédé pour ce qui est de
l'alcool. On est en train de procéder de la même façon
concernant la commercialisation de la viande de gibier. Donc, si c'est la
volonté du ministre qu'il le dise clairement, mais non pas par un
pouvoir discrétionnaire comme cela, qui laisse entendre que c'est
seulement très rarement. Mais des activités spéciales, ce
n'est pas très clair. Cela devrait être plus clair et, à
mon avis, le ministre devrait reconsidérer cela lors de l'étude
article par article du projet de loi 153.
Donc, en conclusion, M. le Président, oui, à des
changements qui sont contenus dans le projet de loi 153, mais non à
certaines modifications qui sont exagérées ou qui ne respectent
pas la charte des droits et libertés du Québec, ce qui, à
mon avis, est fondamental. Non aux pouvoirs discrétionnaires trop
nombreux au ministre, alors que la population exige de plus en plus de
transparence et des règles claires et précises en ce qui concerne
le fonctionnement gouvernemental. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le députe d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Merci, M. le Président. Un peu comme tout le
monde au cours des dernières semaines et des derniers mois, le ministre,
en ouvrant son journal le matin, a pris connaissance qu'il y avait des
braconniers qui trafiquaient quelques chairs, quelques viandes provenant du
domaine public. Certes, nous reconnaissons qu'il y a là un
problème. Il y a quelque chose à faire, il y a toujours de
l'amélioration à apporter partout. C'est bien clair mais, pour le
faire comme il faut, il faut prendre le temps de regarder où on va et de
savoir à quoi on s'attaque quand on décide de réqler un
problème.
Or, le ministre, en prenant son café au petit déjeuner, se
rend compte qu'il y a des braconniers dans le bois. Comme il est dans une passe
où il n'a pas beaucoup de travail, semble-t-il, il n'est pas très
occupé, il se dit: Ah! Voilà une belle occasion d'essayer de me
mettre en lumière. Voilà une belle occasion de montrer que moi,
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je vais, une fois pour
toutes, régler le problème des braconniers et je vous assure
qu'il n'y aura plus de braconniers au Québec.
Est-ce que M. le ministre...
Le Vice-Président: Allez-y, M. le député.
(22 h 30)
M. Claveau: Oui. Vous permettez? On s'entendra ensuite sur la
valeur des watts de l'un et de l'autre.
Toujours est-il, comme je le disais, que le ministre essaie de se
trouver un moyen de se mettre en lumière, et à peine quelques
jours plus tard apparaît en gros titre dans le journal, et je le cite -
vous permettrez même si le ministre peut se sentir offusqué:
"Picotte montre les dents". En lisant l'article, j'étais certain qu'il
s'intéressait à la loi sur les soins dentaires. J'ai dit:
voilà enfin un ministre qui va essayer de démontrer devant la
population que la ministre de la Santé et des Services sociaux n'a pas
raison de couper dans les soins dentaires. "Picotte montre les dents". C'est en
lisant l'article que je me suis rendu compte qu'on ne parlait pas tout à
fait des mêmes dents. Il nous arrive, comme cela,
avec un projet de loi qui se veut réglementaire par rapport
à des infractions qui certes existent dans le domaine public et pour
lesquelles il y a quelque chose à faire.
Enfin, si le ministre est aussi sérieux dans son projet de loi
que dans l'attitude qu'il a actuellement... Il montre les dents, mais il faut
croire que c'est pour sourire plutôt que pour mordre. Le ministre nous
présente un projet de loi dans lequel il essaie de s'attaquer à
certaines lacunes. Il dit: Par contre - mon collègue vient d'effleurer
la question tout à l'heure -qu'est-ce qu'on pourrait faire pour
régler cela? Il y a des gens qui vendent illégalement de la
chair, qui vendent illégalement de la ressource animale qu'ils
prélèvent sans permis dans la forêt, alors, qu'est-ce qu'on
va faire? Probablement que le meilleur moyen de ne pas avoir de
problème, c'est de leur donner des permis, de leur permettre d'en vendre
légalement.
Voilà à peu près le tour de passe-passe que trouve
le ministre pour justifier son projet de loi prématuré, parce
qu'il n'a pas pris suffisamment de temps pour penser et pour y apporter des
correctifs majeurs et certains. Voilà que le ministre s'apprête
à délivrer à sa discrétion, pardon, un certain
nombre de permis qui pourraient faire en sorte que des gens puissent, au choix
du ministre, commercialiser de la viande, du poisson, enfin, des espèces
que l'on ne retrouve pas généralement sur le marché, et en
faire la mise en marché légalement au lieu de le faire
illégalement comme ils le faisaient avant. Certes, c'est une
façon de réglementer. C'est une façon de voir les choses.
Mais on est en droit de se poser sérieusement la question sur les
mécanismes que le ministre va mettre en place afin de faire en sorte
qu'il y ait un certain respect du décorum, entre autres dans
l'allocation de ces permis qu'il prétend pouvoir donner à sa
discrétion à qui en fera la demande. Il ne dit pas que cela va
être à tout le monde. Cela va être à sa
discrétion.
Voilà que nous affrontons un nouveau dilemme qui risque
peut-être, au contraire de ce que le ministre pense, de créer un
nouveau problème qui peut même accentuer le braconnage, parce que
celui qui va se voir refuser un permis de commercialisation n'arrêtera
peut-être pas pour autant de braconner. Voilà que le ministre dit:
II y a un problème. La solution pour celui à qui je n'aurais pas
voulu à ma discrétion donner un permis: je vais lui imposer des
amendes extrêmement lourdes. Nous nous retrouvons dans une situation
où le crime d'avoir tué un lièvre en forêt risque
d'être aussi pénalisé que s'il s'était agi d'un
crime envers un de nos concitoyens.
Nous croyons que les mesures coercitives qu'amène notre ministre
dans ce projet de loi sont relativement exagérées par rapport au
problème en soi. Une bonne gestion, une bonne surveillance, une
application assidue de la réglementation et des lois déjà
en vigueur seraient suffisantes car, M. le Président, il faut bien
être clair, ce n'est pas en changeant la loi qu'on va régler le
problème. Il va falloir que le ministre se donne les moyens de faire
appliquer cette loi. Même si les mesures sont plus coercitives,
même si le fait de prendre moins d'individus en flagrant délit va
lui permettre de récupérer plus d'argent pour le Trésor
public... C'est à se demander si en fin de compte ce n'est pas encore
son confrère du Conseil du trésor qui lui aurait demandé
d'essayer de participer un peu plus à sa façon dans
l'équilibrage des colonnes du budget gouvernemental en trouvant le moyen
de faire entrer quelques sous supplémentaires dans la cagnotte du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
C'est à se demander si ce n'est pas cela la justification
fondamentale du projet de loi en question. Car, il n'est vraiment pas dit dans
ce projet de loi que le ministre va avoir les ressources nécessaires,
que son collègue du Trésor va lui allouer les ressources
nécessaires pour pouvoir exercer un véritable contrôle sur
son projet de loi. Comment voulez-vous, par exemple, M. le Président,
qu'une dizaine d'agents de conservation sur le grand territoire de la
Baie-James puissent à eux seuls couvrir l'ensemble du territoire et
s'assurer qu'il n'y aura pas de braconnage? Êtes-vous capable de
m'expliquer comment cela va se faire? Même si la loi a des dents plus
longues, même si la loi est plus coercitive, si le président du
Conseil du trésor ne permet pas au ministre d'allouer des fonds
supplémentaires à la surveillance sur le terrain, on n'a pas
réglé le problème. Alors, peut-être que le ministre
s'est dit: La meilleure façon de détourner la chose sans trop que
cela paraisse et afin que tout le monde soit content, c'est de m'organiser pour
que les braconniers puissent à l'avenir commercialiser légalement
leur viande à ma discrétion. C'est une hypothèse. On a le
droit de se poser des questions quand le ministre arrive avec des ouvertures
semblables dans un projet de loi, parce qu'il ne faut pas oublier qu'il s'agit
là d'un précédent dangereusement dangereux, devrais-je
dire, par rapport à ce qui se fait actuellement et qui s'est toujours
fait.
Comment va-t-on pouvoir à l'avenir contrôler la viande qui
est de la viande d'orignal, de la viande de cerf, de la viande de caribou qui
va avoir été mise sur le marché, si elle vient oui ou non
de quelqu'un qui détient un permis ou si elle vient du réseau
illégal? Actuellement on sait que, lorsqu'il y en a sur le
marché, elle vient nécessairement du réseau illégal
et on peut toujours essayer de remonter la chaîne et d'arriver au
véritable coupable. Mais, à
partir du moment où il y a deux sortes de viande sur le
marché, comment va-t-on pouvoir exercer des contrôles
réglementaires suffisants pour s'assurer que la viande que l'on a au
bout de sa fourchette dans son assiette, M. le Président, soit une
viande vendue légalement alors qu'à mon avis il n'existe pas
beaucoup de différence entre la couleur et la saveur d'un steak, qu'il
vienne d'un orignal ou d'un autre?
En fait, le ministre, dans la perspective de régler un
problème avec lequel il est pris et pour lequel il s'est avancé
peut-être un peu prématurément en ouvrant sans
réserve la guerre aux contrebandiers, se crée un autre
problème qui sera peut-être plus grave que celui auquel il a
affaire actuellement et qui va faire en sorte qu'il va être
complètement impossible à l'avenir de contrôler les
origines des viandes et des poissons qui ne sont pas généralement
commercialisés, mais qui vont l'être à partir du moment
où le ministre va avoir émis certains permis à sa
discrétion pour qui il voudra bien qu'ils mettent de la viande sur le
marché.
Alors, il y a là un dilemme fondamental sur lequel le ministre
devra sûrement nous amener des éclaircissements en commission
parlementaire, si jamais le projet de loi se rend jusque-là, bien
entendu. Étant donné les différents dilemmes et les
contradictions de base qu'il y a dans ce projet de loi, il est probable que nos
collègues ministériels s'organisent pour le faire retirer tout de
suite en deuxième lecture. Comme cela nous n'aurons pas à perdre
de temps à discuter sur des points ou des litiges qui découlent
d'un travail mal fait.
Le ministre se donne aussi des droits pratiquement sans réserve
quant à la présomption de culpabilité. Comment peut-on
dans notre structure juridique, dans nos coutumes judiciaires, accuser
quelqu'un d'avoir illégalement transporté sur son dos un quartier
d'orignal à partir d'une présomption de culpabilité? Il
faudra d'abord le prendre sur le fait. Déjà là il y a un
problème. Il va falloir que le ministre refasse ses devoirs avec son
collègue, le ministre de la Justice, afin de se faire expliquer les
codes de procédure que nous utilisons sur le territoire
québécois en termes d'application de la justice et il est fort
probable que son collègue de la Justice le ramènera à
l'ordre en lui disant qu'entre autres la présomption de
culpabilité dans notre structure judiciaire va diamétralement
à l'encontre et à des dispositions inconciliables avec la Charte
des droits et libertés de la personne que nous nous sommes donnée
en tant que peuple. Alors, il y a encore là une autre piste qui nous
permet de croire que le ministre est allé prématurément,
que le ministre ne s'est pas donné le temps d'approfondir le
problème et se crée encore une fois, à partir d'un projet
de loi ou d'un article qui semble anodin, un autre problème pour lequel
il aura un jour ou l'autre à répondre à la population. (22
h 40)
II y a d'autres dispositions qui sont tout aussi abracadabrantes. Par
exemple, la question du contrôle de l'utilisation des projecteurs la nuit
pour la chasse. Imaginez-vous qu'en période de chasse, ou autrement, en
pleine nuit, un pauvre chasseur malchanceux perd ses clés à 20
mètres de sa voiture, dans une nuit obscure et sans lune, et que,
malheureusement au moment où notre chasseur qui doit sortir du bois
prématurément, qui ne peut pas attendre le matin, se met à
chercher ses clés avec son projecteur, au même instant un agent de
conservation passe par là. Â partir d'une simple
présomption de culpabilité, quels vont être les recours qui
vont rester à notre chasseur pour essayer de prouver devant le tribunal
qu'il était bel et bien en train de chercher ses clés? On pourra
toujours, à la limite, essayer de faire accroire qu'il a laissé
tomber ses clés à la dernière minute pour montrer qu'il
les cherchait plutôt qu'il cherchait des yeux de chevreuil. Voilà
des cas concrets auxquels le ministre va sûrement avoir à faire
face un jour ou l'autre s'il applique sa loi comme il l'applique là.
Comment peut-on, par exemple, à partir d'une telle
réglementation, empêcher quelqu'un de bonne foi de cheminer sur un
sentier en forêt, en pleine nuit, avec de la lumière? Ce sont des
choses qui arrivent, M. le Président, en milieu forestier, ce sont des
choses qui arrivent dans des milieux où, je dirais, la forêt est
à toutes fins utiles la base de la récréologie. Ce sont
des choses que l'on connaît dans mon milieu, M. le Président, et
il n'est pas rare que pour toutes sortes de raisons un campeur, quelqu'un qui a
un chalet, quelqu'un qui aime la nature, un simple amant de la nature,
écologiste à l'occasion par ses temps perdus, aille se promener
en forêt la nuit, ne serait-ce que pour observer les hiboux. On le
retrouve avec une lampe et, parce qu'il y a un orignal ou un chevreuil à
quelques mètres ou à un demi-mille de là, on va
présumer qu'il était en train d'essayer de "spotter" les yeux du
chevreuil pour être capable de mieux le tirer. Voilà, M. le
Président, des faits concrets, des problèmes immédiats,
des problèmes anodins, certes, mais réels que le ministre va
devoir affronter quand il arrivera pour appliquer sa présomption de
culpabilité envers un individu qui se promène avec un projecteur
en forêt en pleine nuit.
La question, M. le Président, des armes à feu la nuit.
Quand on dit qu'elles devront être dans un étui, ou
déposées dans le coffre d'un véhicule ou dans la soute
d'un aéronef, encore là, M. le Président, il faudrait
d'abord définir la notion d'étui. À peu près tout,
si je ne m'abuse, peut être un étui. À
la limite, si on ne définit pas la notion d'étui, ce
qu'est légalement un étui pour transporter une arme à
feu... S'il m'arrive d'enrouler mon arme à feu dans mon sac de couchage
pour me promener avec en dessous du bras pour changer de tente dans mon
campement, à ce moment-là je me crois en droit de
prétendre que mon sac de couchage était devenu un étui
pour mon arme à feu, qu'il la protégeait pendant que je la
transportais. Si la notion d'étui n'est pas plus précise que
cela, il y a encore un certain nombre de dilemmes avec lesquels le ministre va
devoir vivre et coucher, puisqu'il s'agit de la nuit, M. le
Président.
Encore, que signifie une arme dans un étui? On ne précise
pas, par exemple, que la fermeture éclair doit être fermée
au maximum, aux trois quarts ou à moitié, on ne dit pas que
l'arme doit être chargée ou pas. On oublie des choses. C'est un
travail fait en vitesse, un travail fait pour répondre à un
besoin immédiat mais qui s'appliquera à long terme. Voilà
peut-être, M. le Président, ce que ce gouvernement n'a pas encore
compris. C'est que, lorsqu'on légifère pour régler des
problèmes immédiats, on doit faire des lois qui auront une
répercussion à long terme, qui vont s'échelonner dans le
temps. Même si on règle notre problème immédiat avec
la loi qu'on adopte, il faut s'imaginer que cette loi va rester inscrite dans
ce qu'on appelle les lois refondues du Québec, en ce qui nous concerne,
nous, le peuple québécois, et que dans dix ou quinze ans
quelqu'un pourra se prévaloir du même article de loi pour
peut-être des fins tout autres que celles pour lesquelles on l'a
adopté dans un instant d'euphorie pour régler un problème
particulier. Il nous semble, à la lecture de ce projet de loi, qu'il y a
énormément de choses en suspens, qu'il y a
énormément de choses que le ministre ne semble pas avoir
lui-même comprises et que, dans bien des occasions, certains articles
sont là uniquement pour remplir des feuilles qui, autrement, seraient
restées blanches, puisqu'on ne connaît pas les modalités
d'application. On n'a pas d'assurance, il n'y a rien qui nous dit... Je suis
certain que le ministre lui-même serait gêné de prouver que
son collègue, le président du Conseil du trésor, dans la
conjoncture qu'il ne cesse de véhiculer, est prêt à lui
allouer toutes les ressources nécessaires afin que son projet de loi,
comme tout autre projet de loi déjà existant, puisse s'appliquer
comme il devrait être appliqué, entre autres en milieu forestier.
Voilà les problèmes auxquels nous avons à faire face et
voilà pourquoi nous interrogeons sérieusement le ministre quant
à l'intérêt de déposer en catastrophe, à la
dernière minute, un projet de loi qui, semble-t-il, émane d'une
lecture de journal, un samedi matin en prenant son café noir.
Lorsque le ministre nous est arrivé avec un projet de loi, une
fois que j'eus compris que ce n'était pas les questions dentaires qui le
préoccupaient, je me suis dit: Le ministre va probablement nous arriver
avec un projet de loi de concordance pour aligner le problème de la
gestion de la faune avec celui de la gestion des forêts puisque le
ministre délégué aux Forêts, depuis un certain temps
déjà, est en train de nous démontrer que son projet de loi
ne sera pas applicable s'il n'y a pas toute une série de concordances
avec les différents autres aspects de l'intervention en forêt.
Mais il semble que la question n'ait pas effleuré le ministre.
Probablement qu'il va attendre de lire dans le journal de samedi matin que son
ministre délégué aux Forêts est en train de faire un
projet de loi qui aura des incidences sur ses interventions à lui en
forêt et que c'est juste à ce moment-là, après avoir
ingurgité son café au petit déjeuner, qu'il se
décidera à nous présenter un projet de loi de concordance
qui fera en sorte que la Loi sur les forêts soit applicable comme elle
devrait l'être. Mais il nous aurait semblé, dans la conjoncture
actuelle, qu'il eût été beaucoup plus consciencieux de la
part du ministre de s'intéresser aux questions de concordance entre la
Loi sur les forêts et l'éventuelle Loi sur les terres du domaine
public qui, peut-être, ne sera pas appliquée ou
étudiée. Dans ce cadre-là, il aurait été
très intéressant de mener un débat global sur l'ensemble
des problématiques de gestion forestière et les interventions du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans le
domaine.
Voilà quelques-unes des observations que j'avais à faire
sur ce projet de loi. Malheureusement, on n'a jamais le temps suffisant pour
faire le tour. On aura sûrement l'occasion de revoir le ministre
responsable dudit projet de loi en commission parlementaire afin
d'éclaircir les quelques questions que j'ai bien daigné vous
exposer ici, aujourd'hui. Merci, M. le Président.
M. Picotte: M. le Président.
Le Vice-Présidents Oui, M. le ministre.
M. Picotte: Est-ce que le député me permettrait une
question, avec le consentement, en vertu de l'article 213?
Le Vice-Président: M. le député d'Ungava,
est-ce que vous autorisez le ministre à vous poser une question? En
vertu de notre règlement, c'est possible. La question doit être
brève, la réponse doit être également
brève.
M. Claveau: ...
Le Vice-Président: M. le ministre.
M. Picotte: M. le Président, j'ai écouté
avec beaucoup d'attention le savant exposé de mon
collègue. Je l'ai même entendu dire qu'il lui arrivait, même
si ce n'est pas sécuritaire, d'envelopper son fusil dans son sac de
couchage. Je me demande, après avoir entendu ce qu'il a dit, s'il lui
arrive de coucher dans l'étui de son fusil.
Le Vice-Président: M. le ministre, vous savez fort bien
que ce n'était pas une question permise au sens de notre
règlement. Je dois simplement le déplorer à ce
moment-ci.
M. Claveau: C'est ce qu'on appelle coucher en chien de fusil.
Le Vice-Président: C'est bien, il n'y aura pas de
débat là-dessus. Je cède la parole à M. le
député de Joliette et leader de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais vous dire que
vous avez là à peu près tout le sérieux d'un
ministre. C'est un niveau intellectuel très élevé, comme
vous avez pu le constater. Je vais essayer de m'en tenir au projet de loi. (22
h 50)
Tout d'abord, je pense que tout le monde est d'accord avec le principe
de lutter contre le braconnage. Je pense bien que sur le principe comme tel...
Comment voulez-vous qu'on soit contre le braconnage? Mais le projet de loi ne
se limite pas à parler de braconnage. Il modifie fondamentalement des
approches. Il crée un nouveau système de désignation de
territoires, par exemple. Il impute de nouvelles pénalités et, en
plus, il donne au ministre un pouvoir discrétionnaire un peu fort, en
tout cas, en ce qui me concerne, sur plusieurs aspects.
Premièrement, je voudrais vous dire, M. le Président,
qu'il y a environ deux ou trois ans nous étions amenés en cette
Chambre à modifier la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la
faune. Je suis surpris que le ministre actuel ne se souvienne pas qu'il ait
adhéré unanimement aux modifications qu'on avait apportées
à l'époque. À l'époque, on avait dit: Nous allons
épurer la loi pour ne plus avoir d'interprétations qui servent
à toutes sortes de folies et à toutes sortes
d'exagérations. Il y avait la fameuse fermeture éclair de
l'étui: si elle n'était pas complètement fermée et
si on rencontrait un agent pour qui on ne faisait pas l'affaire, il pouvait
nous accuser d'infraction.
Quand on a parlé de réflecteurs pour la nuit, on a dit:
C'est bien sûr que, s'il est pris avec un fusil chargé en main et
un réflecteur, il n'y a pas de problème. Mais le gars en plein
bois, celui qui est dans des caches, qui dort dans un petit chalet de fortune,
a à sortir la nuit avec un réflecteur. En vertu de l'article 30.2
du projet de loi, il est réputé chercher à
découvrir où passe le gros gibier et une présomption de
culpabilité est inhérente à cet article. Il me semble que
c'est très grave. Il pourrait ne pas avoir un fusil dans les mains,
seulement sortir pour des besoins naturels, être en plein bois dans un
camp de fortune et il est présumé rechercher le gros gibier; cela
va jusque-là. C'est un peu fort quand même. C'est un petit peu
fort quand même. Il m'apparaît carrément qu'il ne faut pas
verser dans le ridicule quand on amende une loi. On doit chercher le juste
milieu en voulant atteindre nos propres objectifs bien précis. Mais, de
grâce, il ne faut pas aller mettre une présomption de
culpabilité quand l'individu n'a même pas un fusil dans les mains,
surtout en plein bois. Il faut avoir chassé un peu; il faut être
allé dans le bois le soir pour savoir que si on ne veut pas s'enfarger
en sortant il me semble que cela peut prendre au moins une "flashlight", comme
disent les Québécois. Il me semble que c'est abusif, M. le
Président.
Ce qui m'apparaît abusif aussi, c'est le montant des amendes. Vous
savez, quand c'est rendu à 13 500 $ pour une pénalité,
entre vous et moi, c'est rendu qu'il y a des gens qui commettent des crimes sur
des humains et qui sont moins en danger vis-à-vis des cours de justice
que quelqu'un qui tue un lièvre. C'est un peu fort. Quand on veut
être crédible il ne faut pas sombrer dans le ridicule. Je pense
qu'il faut y aller mollo, il faut y aller d'une façon raisonnable.
Personnellement, je suis d'accord avec le député d'Ungava.
Ce qui manque au Québec, à cause des années de crise
économique et financière, c'est le nombre d'agents de
conservation de la faune. C'est un fait. Je pense que depuis six ou sept ans,
depuis le début des difficultés financières, il n'y a pas
eu d'ouverture de postes. C'est évident qu'il n'y en a presque pas.
C'est évident qu'il en manque. C'est évident qu'ils n'ont pas
nécessairement tous les outils pour assurer pleinement leur travail. Ce
n'est pas en augmentant les amendes que nous aurons plus d'agents. C'est
seulement pénaliser plus fortement ceux qui sont pénalisés
présentement. À mon sens, ce n'est pas là une solution au
véritable problème. Il manque d'agents de conservation de la
faune et je sais jusqu'à quel point il en manque parce que j'ai
été personnellement ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. Je sais combien ces gars travaillent fort. Ils sont obligés
d'accomplir plusieurs fonctions avec un groupe réduit. Ce n'est pas
drôle. On leur demande d'appliquer la loi sur la forêt, la loi sur
l'environnement près des lacs et une série de lois qu'on leur
demande d'appliquer
en plus. À mon avis, la solution réside ailleurs que dans
la croissance effrénée ou farfelue même des amendes; pour
certains cas cela m'apparaîtrait plus intelligent d'y aller
conformément aux coutumes des tribunaux civils, au moins. Il me semble
qu'on doit ajuster, mettre en relief certaines valeurs, faire des comparaisons
et dire: Écoutez, telle infraction pour telle chose, c'est
peut-être comparable à telle infraction dans le secteur de la
faune. En tout cas, je vous avoue que 13 500 $ pour une amende, je trouve cela
personnellement extrêmement exagéré, M. le
Président.
Il y a un autre point. Quant au pouvoir d'inspection, je pense que,
véritablement, les agents de conservation de la faune - je ne parle pas
des agents auxiliaires - étaient assez limités. On ne voulait
pas, non plus, que ce soient des perquisitions en règle et qu'on ait le
pouvoir absolu de jouer à la police. Vous savez, il y avait un danger.
Le débat qui s'est fait lors des amendements à la
législation, il y a deux ans environ, était le suivant: il y a
deux écoles de pensée chez les agents de la faune, l'école
de pensée police, fière d'avoir le "gun" et contente de pouvoir
jouer à la police, mais il y a aussi une deuxième école
qui s'est développée au niveau des agents, qui dit qu'ils ont un
rôle éducatif à jouer. Personnellement, je trouve
extrêmement positive l'approche de ceux qui, par exemple, font des
tournées près des parcs, s'habituent à jaser avec les gens
pour les mettre en garde contre différents types d'infractions qu'ils
peuvent commettre et les inciter à respecter la Loi sur la
qualité de l'environnement. Cela m'apparaît la formule d'avenir,
mais pas nécessairement jouer au système policier, pas
exclusivement, en tout cas. Je comprends qu'il y aura toujours des gens qui
dérogeront à la loi, qui ne voudront rien savoir et qui sont des
braconniers depuis toujours. C'est quasiment une institution dans certains
villages, on les connaît. À partir de là, je comprends
qu'il a un rôle à jouer au niveau du respect des lois, mais je
pense que l'agent de la faune a aussi un rôle extrêmement positif
à jouer auprès des gens. C'est ce rôle que j'avais
essayé personnellement de promouvoir, pour qu'il y ait cette nouvelle
approche qui m'apparaissait intéressante.
M. le Président, il y a un point du projet de loi qui me fait
encore hésiter. J'espère que le ministre le clarifiera dans son
droit de réplique. Cela me fait encore hésiter à voter
pour en deuxième lecture. Le ministre change le pouvoir
réglementaire par un pouvoir de décret. Qu'est-ce que ça
signifie? Vous savez très bien que le pouvoir réglementaire de la
législation oblige le ministre à une prépublication
à la Gazette officielle. On sait donc quels sont les changements qui
sont à venir. On sait donc sur quoi le ministre veut modifier son
règlement, mais le ministre dit: Non, dorénavant, ce ne sera plus
un pouvoir réglementaire, ce sera un pouvoir donné par
décret. À mon point de vue, c'est la porte ouverte à des
gestes de patronage, une porte ouverte à une discrétion qui
conduira à des abus carrément en faveur d'amis du système
ou du régime, et ça me fait peur. Ça me fait peur surtout
quand la désignation des territoires fauniques ou des zones
d'exploitation contrôlée est laissée à la
discrétion entière du ministre par voie de décret. On sait
que ça pourrait se faire par décret sans que la zone
d'exploitation contrôlée soit mise au courant, sans que les
dirigeants d'un territoire d'une réserve faunique soient mis au courant.
Le lendemain matin, un décret dûment signé par le greffier
du Québec nous annonce que telle réserve faunique a
été amputée de tel territoire et que cela a
été confié à un pourvoyeur, et tout cela s'est fait
par décret. Cela me fait peur et, personnellement, c'est un des points
qui me font le plus hésiter à voter pour ce projet de loi en
deuxième lecture.
Il me semble que cela a été révolu pendant
plusieurs années, cette notion d'ouvrir des portes à la
discrétion au point de servir les amis du régime plutôt que
d'y aller honnêtement, ouvertement, par une prépublication
à la Gazette officille qui permettait aux groupes, autant des dirigeants
de ZEC ou des travailleurs d'une réserve faunique, de venir dire au
ministre, par une lettre, parce qu'ils ont vu cela à la Gazette
officielle: Attention, M. le ministre, cette réserve faunique est une
pouponnière pour le chevreuil à toutes fins utiles, M. le
Président. C'est une pouponnière. Il faut faire attention, on
peut se faire amputer des plus beaux morceaux d'une réserve par
décret, sans qu'on le sache, purement et simplement à la
discrétion du ministre. Ce point-là me fait hésiter
grandement et je vous avoue que cela fera même l'objet d'une discussion
au sein de notre équipe parce qu'à ce stade-ci de nos
réflexions c'est assez gros pour nous faire hésiter à
adhérer à un principe qui est bon en soi. Sur le braconnage comme
tel, on pourrait bien être d'accord, mais ce projet de loi est un projet
de loi omnibus. Ce n'est pas un projet de loi exclusivement sur le braconnage.
Quand le ministre se donne le droit de pouvoir amputer une réserve
faunique d'une partie de son territoire, quand il se donne le privilège
de changer les désignations, par exemple, d'une zone d'exploitation
contrôlée, cela m'apparaît extrêmement dangereux.
Je vous avoue que nous hésiterons, en tout cas, jusqu'à
demain certainement avant de dire qu'on votera pour en deuxième lecture.
Je ne veux pas abuser du temps de cette Chambre outre mesure. Je voulais
souligner les quelques dangers que je voyais dans cette loi à une
première lecture. Ayant occupé cette fonction de ministre du
Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, je pense que je me devais d'attirer
l'attention des parlementaires, parce qu'il n'est pas encore trop tard pour
modifier des choses dans ce projet de loi.
Il me semble qu'on est capable, si on veut faire un travail positif, de
regarder les côtés positifs que soumet l'Opposition et de le
corriger. Corriger, à mon point de vue, les exagérations qu'il y
a dans les sanctions. Corriger la notion de présomption de
culpabilité, surtout quand un individu n'a même pas un fusil en
main. Corriger les désignations par décret. Pour cela, il
m'apparaît qu'il faut rayer complètement cet article, M. le
Président, d'autant plus que c'est une modalité que se donne le
ministre à l'intérieur d'une loi dite contre le braconnage.
Corriger également, bien sûr, quelques sanctions pénales
qui m'apparaissent nettement prohibitives par rapport aux objectifs
recherchés surtout par rapport à la mentalité que cela
pourrait développer, de faire jouer un rôle exclusivement policier
et non pas éducatif quant à la conservation et à la mise
en valeur de la faune.
On a changé le titre de cette loi. C'était la Loi sur la
conservation de la faune. On avait ajouté au titre: Loi sur la
conservation et la mise en valeur de la faune. Je pense qu'il y a de plus en
plus de Québécois qui circulent en forêt pour toutes sortes
de types de loisirs. La faune peut être mise en valeur, mais pas
exclusivement en fonction de la chasse. Je pense que vous le savez très
bien. Tous les parlementaires ici savent combien on a d'amants de la nature,
combien de gens se promènent dans le décor aujourd'hui avec leur
caméra, combien de gens font du sentier pédestre à
l'intérieur de certains de nos parcs nationaux, combien de gens font des
excursions, combien de gens font du ski de fond à l'intérieur de
nos forêts?
Moi, en tout cas, je pense que le ministre a essayé vraiment de
nous en passer une petite vite. Sous prétexte, bien sûr, que tout
le monde était contre le braconnage, il essaie de se donner des pouvoirs
discrétionnaires qui ouvrent la porte au patronage et, à mon
point de vue, surtout dans son cas, il ne faut pas lui en donner la chance.
Le Vice-Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, je demanderais l'ajournement
de nos travaux.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement
du débat est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Je fais motion pour l'ajournement des travaux
à demain, 10 heures.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement
de nos travaux est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Donc, l'Assemblée
nationale ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 3)