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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le jeudi 4 décembre 1986 - Vol. 29 N° 71

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

Dix heures dix minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous platt!

Un moment de recueillement!

Veuillez vous asseoir!

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes, MM. les députés, Mmes les députées.

Déclarations ministérielles.

M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Mis à part ceux qui sont malades ou ceux qui nous ont informés qu'ils avaient une obligation, il y a quelques ibsences dont on ne connaît pas les motifs, est-ce que le leader pourrait justifier les dix absences?

Le Président: M. le leader du gouverne-nent.

M. Gratton: M. le Président, je ne sais trop de quelles absences le leader du gouvernement est informé, mais je lui dirai que le premier ministre, comme on le sait, est à New York où il est conférencier devant le Council on Foreign Relations; le ministre délégué aux Mines participe à l'inauguration du village Umiujaq; le ministre de la Justice participe à une conférence fédérale-provinciale; le ministre des Relations internationales est à Paris; le ministre de Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est au congrès de l'UPA. Évidemment, je pense que le leader de l'Opposition sait que deux ministres sont retenus par la maladie et que deux autres sont auprès de...

Le Président: M. le leader de l'Opposi-tion.

M. Chevrette: Où est le ministre des affaires municipales?

M. Gratton: II est absent pour cause de maladie, M. le Président.

Le Président: Cela va, M. le leader de Opposition?

Nous procédons maintenant aux affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.

M. Gratton: Article g, M. le Président.

Projet de loi 250

Le Président: II s'agit d'un projet de loi d'intérêt privé. J'ai reçu le rapport du

Directeur de la législation et ce dernier a constaté que l'avis a été fait et publié conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. J'aimerais déposer ledit rapport.

À l'article g du feuilleton, Mme la députée de Groulx présente le projet de loi privé 250, Loi concernant certains immeubles du cadastre de la paroisse Sainte-Thérèse-de-Blainville. L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article j, M. le Président.

Projet de loi 272

Le Président: À l'article j, il s'agit d'un projet de loi d'intérêt privé. J'ai reçu le rapport du Directeur de la législation. Ce dernier a constaté que tous les avis ont été publiés et qu'ils sont conformes au projet de loi. Le projet de loi a cependant été déposé en dehors des délais prévus à l'article 35 des règles de fonctionnement et il ne peut, sans le consentement de cette Assemblée, être adopté au cours de la présente partie de session.

Y a-t-il consentement pour qu'on se saisisse immédiatement de ce projet de loi? Adopté.

L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir du projet de loi 272, Loi sur la Corporation intermunicipale de transport de la rive sud de Québec, présenté par M. le député de Lévis? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Gratton: Je fais motion, M. le Président, pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires muncipale en soit membre.

Le Président: Le projet de loi 272 est déféré?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article 1, M. le Président.

Projet de loi 268

Le Président: Â l'article 1, j'ai reçu un rapport du Directeur de la législation et ce projet de loi n'est pas conforme. Nous devons obtenir également un consentement étant donné qu'il a été présenté en dehors des avis prévus à l'article 35 de notre règlement. Je voudrais déposer ledit rapport.

Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on procède à la présentation dudit projet de loi?

M. Chevrette: Consentement.

Le Président: M. le député de Matapédia présente le projet de loi privé 268, Loi annexant un territoire à celui de la ville de Mont-Joli. L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi?

M. Chevrette: Nous en sommes saisis.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

M. Chevrette: Adopté. Le Président: Adopté.

Rapport annuel de la Commission des droits de la personne

Dépôt de documents. Si vous me le permettez, j'aimerais déposer le rapport annuel pour 1985 de la Commission des droits de la personne du Québec.

Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de l'éducation et député de Sauvé.

Étude détaillée du projet de loi 156

M. Parent (Sauvé): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a siégé le 2 décembre dernier afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 156, Loi modifiant la Loi médicale. Le projet de loi a été adopté avec amendements, dont un au titre.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de pétitions. Ce matin, il n'y aura aucune intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel. Avant de céder la parole au premier intervenant de la période de questions orales, j'avise immédiatement les membres de cette Assemblée que nous procéderons, immédiatement après la période de questions, au vote qui a été reporté hier sur le projet de loi 119.

Période de questions et de réponses orales. Je vais reconnaître M. le député de Mercier, en principale.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Demande de retrait du projet de loi 140

M. Godin: Après quinze ans de tourmente sociale, après trois lois linguistiques douloureusement adoptées ici même, dans cette Chambre, le Québec s'acheminait lentement vers une situation de maturité linguistique, donc, de paix sociale si propice au développement économique du Québec et à tous égards. Depuis quelques mois, certains pyromanes gouvernementaux, dont la ministre ne fait pas partie d'ailleurs, ont tellement berlandé que tout le monde au Québec s'inquiète de l'équilibre fragile qui avait été atteint: la Chambre de commerce, le Conseil du patronat, M. Laurent Picard, 22 universitaires, le maire de Montréal.

Par conséquent, Mme la ministre responsable de la loi 101, est-ce que le gouvernement a pris la décision hier de reporter la loi 140 aux oubliettes ou de la garder au feuilleton?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: La loi 140 n'est pas le fruit du hasard. Nous avons rencontré, au début de l'année 1986, les présidents des organismes qui ont la responsabilité de la protection de la Charte de la langue française. Nous leur avions demandé à ce

moment-là de nous fournir un rapport concernant la réorganisation administrative de ces organismes. Après quelque temps, j'ai reçu ces rapports qui ont été confiés ensuite un groupe de travail, qu'on a appelé le groupe de travail Lalande, qui s'est penché sur l'ensemble du dossier administratif et qui fait ses recommandations au gouvernement. La loi 140 découle de ces recommandations et du choix que nous en avons fait. Depuis le dépôt de la loi 140, j'ai été à l'écoute, de la population, des groupes et des objections qui nous étaient données par cette population et aussi des inquiétudes exprimées. Je dois dire que l'affaiblissement de la langue française date de 1982, au moment où l'ancien gouvernement, sans le dire, avait mis un moratoire sur les poursuites. Ma préoccupation fait en sorte qu'il nous faut avoir des organismes qui soient efficients, qui se concertent, qui soient capables de bien administrer les responsabilités que nous leur avons confiées, j'ai travaillé avec un groupe de travail sur les amendements à apporter à la loi 140, amendements que je soumettrai à l'Opposition et, en même temps, par le fait même, à la population du Québec que nous représentons tous et nous verrons par la suite. (10 h 20)

Le Président: M. le député de Mercier, en additionnelle.

M. Godin: M. le Président, est-ce que les coalitions exceptionnelles syndicales-patronales et autres qui s'organisent présentement ne seraient pas clair dans ce qui se passe et seule la ministre verrait clair? Pourquoi cela inquiète-t-il? Où est l'urgence, Mme la inistre? Est-ce qu'il y a des gens qui font des crises cardiaques à parler français au Qébec? Est-ce qu'il y a des gens qui font des manifestations dans les rues contre la loi 101? Est-ce qu'il y a des gens qui veulent que cela change? Est-ce qu'il y a une urgence, des pressions secrètes, des tractations? Est-ce qu'on peut savoir ce qui se passe dans votre dos qui vous pousse à agir ainsi, Mme la ministre?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la vice-première linistre.

Mme Bacon: M. le Président, je comprends mal le député de Mercier qui lui-même, au moment où j'avais mentionné aux médias d'information, en janvier dernier, qu'il fallait revoir l'administration et les structures administratives des organismes, sait qu'il aurait voulu le faire. Je comprenais qu'à ce moment-là il en était incapable, puisque celui qu'on a appelé le père de la loi 101 siégeait avec lui.

Je pense que je vais tout simplement faire ce que lui n'a pas pu faire dans son gouvernement. Il devrait comprendre les changements administratifs que je fais maintenant. J'ai dit - je n'ai pas l'intention de dire que je suis la seule à avoir le pas, ce n'est pas vrai - que je suis à l'écoute de la population, je suis à l'écoute des gens et des groupes qui ont fait connaître des objections au libellé de la loi 140. La loi 140 permettra des structures administratives qui vont faire en sorte d'assurer une meilleure protection et une meilleure cohésion dans l'application de la Charte de la langue française. C'est pour cela que j'ai travaillé hier avec un groupe de travail de mon ministère et d'autres pour faire en sorte que les amendements que nous apporterons à la loi 140 répondent justement à cette préoccupation que nous avons et que d'autres ont dans la population, face à une restructuration administrative.

Après dix ans, on peut rénover un édifice sans le jeter par terre, M. le Président, et c'est ce que nous faisons.

Le Président: M. le député de Mercier, en additionnelle.

M. Godin: Sans préambule, M. le Président.

Est-ce qu'il y a une différence entre toucher pour violer et toucher pour muscler?

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Godin: Alors, pour que la ministre comprenne bien, est-ce qu'il y a une différence entre toucher pour violer et toucher pour muscler, M. le Président?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je ne connais pas la différence. Je n'ai jamais violé personne.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Mme Bacon: Mais venant d'un parti, M. le Président...

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Mais ces remarques venant d'un parti, M. le Président, qui a fait croire à la population qu'il l'amènerait à la terre promise et qui, à la veille d'une élection, a changé son cap, je pense que je n'ai pas de leçon à recevoir de ces gens-là.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: En additionnelle, M. le Président. On pourrait parler de la terre promise que les gens attendaient il y a un an.

Des voix: Oui.

Le Président: S'il vous plaît! En additionnelle, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Quand la ministre va-t-elle comprendre qu'à ce moment-ci la seule chose acceptable, ce n'est pas de présenter des amendements en catastrophe, mais c'est de retirer le projet de loi 140?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je répète à nouveau - je pense que le député n'a pas compris - que je déposerai en cette Chambre des amendements au projet de loi 140. Après, nous verrons ce que nous ferons.

M. Charbonneau: Dans ce cas, je vais poser une question très précise à la ministre.

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: En additionnelle. Est-ce que vous écartez définitivement toute possibilité de retirer le projet de loi 140 si l'opposition populaire continue de s'amplifier dans les deux prochaines semaines?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Je serais tentée, M. le Président, de référer le député à un article que j'ai lu ce matin dans La Presse et qui était fort intéressant. Je demanderais aussi à l'Opposition de cesser de faire ces ballons, comme elle l'a fait depuis le début pour compléter les ballons d'autres qui sont tout à fait faux. Est-ce que l'Opposition veut dire ce matin, par ses questions, qu'elle ne veut pas discuter de cette question des amendements, qu'elle ne veut pas même en prendre connaissance? C'est cela une opposition en Chambre?

Le Président: M. le député de Gouin, question principale.

La portée linguistique du projet de loi 142

M. Rochefort: Oui. Merci, M. le Président. Encore une fois, la ministre de la Santé et des Services sociaux a réussi à créer un solide consensus contre un de se: projets de loi. On sait que les milieux économiques et financiers, syndicaux, universitaires, des gens de tous les milieux demandent non seulement le retrait du projet de loi 140 mais aussi le retrait du projet de loi 142.

Non seulement la ministre n'a-t-elle reçu aucun appui du réseau de la santé et des services sociaux mais l'Association des hôpitaux du Québec a demandé formellement le retrait de tous les articles à portée linguistique du projet de loi 142.

Ma question est simple. Pourquoi la ministre n'annonce-t-elle pas dès aujourd'hui le retrait du projet de loi 142?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on sait fort bien que l'Opposition a déployé beaucoup d'efforts au cours des dernières semaines, et avec, je dois dire, un succès relatif pour essayer de confondre dans l'esprit de la population les objets de la loi 140 et de la loi 142.

En ce qui a trait à la loi 142, tel que le disait hier ou avant-hier le premier ministre du Québec, c'était un engagement que d'ailleurs le chef de l'Opposition actuelle avait pris vis-à-vis de la minorité anglophone et que nous-mêmes avions pris. Cette minorité anglophone demande particulièrement pour les personnes les plus démunies, qu'il s'agisse de personnes âgées, qu'il s'agissent de jeunes en besoin de protection, que ces gens puissent avoir accès, dans des limites raisonnables évidemment et compte tenu de l'organisation des services et de la disponibilité des ressources, à des services dans leur langue.

Je voudrais rappeler à l'Opposition que ceci n'est pas le seul fait de la minorité anglophone au Québec, au point de départ, il faut le dire, à ses institutions beaucoup plus enracinées que les francophones dans les autres provinces, mais on sait que, dans tout le Canada, c'est un désir des minorités de pouvoir s'assurer l'accès aux services de santé et aux services sociaux dans leur langue.

Le Président: M. le député de Gouin, question additionnelle.

M. Rochefort: M. le Président, la ministre de la Santé et des Services sociaux est-elle consciente que l'ensemble des intervenants du réseau de la santé et des services sociaux qui ont fait beaucoup d'efforts et qui continuent de faire beaucoup d'efforts pour dispenser d'excellents services aux minorités, jugent ce projet de loi comme une injure à ce qu'ils ont fait jusqu'à aujourd'hui et à ce qu'ils continuent de faire pour bien servir les

minorités du Québec?

Le Président: Mme la ministre de la santé et des Services sociaux. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand le chef de l'Opposition actuelle promettait d'assurer des services de santé et des services sociaux dans sa langue à la minorité anglophone, faisait-il injure à l'ensemble des intervenants du Québec? J'ai rencontré les représentants des différentes fédérations, qu'il s'agisse des CLSC, des CSS, enfin, des intervenants du milieu de la santé et des services sociaux, et je dois vous dire qu'il y a un consensus qui existe là, comme il existe d'ailleurs à l'Association des hôpitaux du Québec, et qu'il est tout à fait légitime que l'on puisse donner des services en anglais, à la population de langue anglaise toujours à l'intérieur d'un cadre bien défini.

Je sais que des efforts ont été faits. Je m'en réjouis et je félicite les gens qui les ont faits. Il importe, compte tenu des ressources qui existent - j'insiste sur ce point, dans les régions éloignées - que l'on puisse rendre plus disponibles en langue anglaise les services à ces populations anglaises qui sont isolées dans certains coins du Québec. Je pense particulièrement à la Gaspésie, aux Cantons de l'Est, à la Basse-Côte-Nord. Je pense qu'il est important que, sur le plan humain, sur le plan de la qualité des services, nous puissions faire des arrangements ou planifier sur le plan administratif de telle sorte que ces gens reçoivent les services dans leur langue. (10 h 30)

Le Président: M. le député de Gouin, en additionnelle.

M. Rochefort: Comment la ministre peut-elle tenir un tel discours alors qu'elle n'a aucun appui dans le réseau de la santé et des services sociaux? Personne, parmi ceux et celles qui offrent ces services à l'heure actuelle, n'appuie sa démarche. Est-ce qu'au moins, hier, au Conseil des ministres, elle a défendu les intervenants du réseau qui donnent des services aux minorités et qui demandent le retrait du projet de loi?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je dois dire qu'aucun des quatre groupes, je crois, que j'ai rencontrés il y a quelques jours, ne m'a demandé le retrait du projet de loi, pour l'information du député de Gouin. Dans le cas de l'Association des hôpitaux du Québec, qui, à ma connaissance, est le seul groupe qui ait demandé le retrait du projet de loi, ce n'était pas sur le principe de rendre accessibles des services en langue anglaise, à la population anglaise mais ils font une interprétation juridique différente de celle que nous faisons, M. le Président, et c'est tout à fait leur droit. Je pense aussi que le gouvernement doit prendre ses responsabilités.

Le Président: M. le député de Laviolette, en additionnelle.

M. Jolivet: M. le Président, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux est-elle consciente qu'après avoir servi de fer de lance au président du Conseil du trésor pour effectuer des coupures dans les services de santé, elle va désormais servir de fer de lance à ce gouvernement pour un recul du français au Québec.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la ministre, vous avez la parole. À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je réalise que le député de Laviolette veut utiliser toutes les secondes qui sont à sa disposition pour passer une foule de messages. C'est son droit le plus strict. Je pense que lorsque l'Opposition, et à ce moment en particulier le député de Laviolette, brandit le recul du français quand on pense qu'en toute équité on devrait fournir à la minorité anglophone les services de santé et les services sociaux dans leur langue...

Le Président: À l'ordre!

Mme Lavoie-Roux: Je pense que le député de Laviolette erre. Je voudrais qu'on me dise depuis combien de temps le fait d'avoir accès à des services en langue anglaise, là où ils sont disponibles, peut menacer de quelque façon que ce soit la langue française. M. le Président, s'ils ne le savent pas encore - pourtant ils ont connu la loi 22, ils ont connu la loi 101 - les outils d'intégration à la majorité francophone des personnes du Québec, c'est la langue du travail et c'est la langue de l'éducation et non pas, à l'occasion, l'accès à des services de santé et des services sociaux.

Le Président: M. le député de Laviolette, en additionnelle.

M. Jolivet: Devant le refus évident de reculer sur la loi 142, la ministre de la...

Le Président: Vous allez me permettre de juger de la forme interrogative. Il n'est pas nécessaire que le premier terme employé soit de la forme interrogative immédiatement. Je vais en juger moi-même. M. le député.

M. Jolivet: Je répète. Devant le refus de la ministre de la Santé et des Services sociaux de reculer devant les demandes en ce qui concerne la loi 142, la ministre est-elle consciente qu'elle va servir au leader, qui a mal préparé l'ensemble des travaux parlementaires, pour faire siéger l'ensemble de cette Assemblée à des heures indues, dans la nuit, de telle sorte que finalement nous allons étudier ces projets de loi à des heures indues.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais reconnaître le leader du gouvernement. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement sur la question.

M. Gratton: C'est simplement pour constater, effectivement, que le député de Laviolette est fatigué ce matin.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Gouin, en principale ou en additionnelle?

M. Rochefort: En additionnelle, M. le Président.

Le Président: En additionnelle.

M. Rochefort: M. le Président, comment la ministre de la Santé et des Services sociaux peut-elle affirmer que le projet de loi 142 n'aura pas de conséquences linguistiques graves pour le Québec, alors que l'Association des hôpitaux du Québec elle-même, en page 3 de son mémoire, dit que ce projet de loi risque de saper la portée de la Charte de la langue française et vient mitiger l'application de la Charte de la langue française pour les établissements de santé et de services sociaux?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je le répète, il ne s'agit pas d'une loi linguistique au sens strict, il s'agit d'une loi qui facilite l'accès de la minorité anglophone à des services de santé et à des services sociaux dans sa langue.

Une voix: Très bien!

Le Président: En additionnelle, M. le député de Vimont.

M. Théorêt: M. le Président, est-ce que Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux pourrait dire aux membres de cette Chambre si le chef de l'Opposition est intervenu personnellement auprès de la ministre pour lui demander de ne pas donner à la minorité anglophone des services de santé dans leur langue, contrairement à ce que les membres de son parti réclament et contrairement à ce qu'il a promis en campagne électorale?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il n'y a pas eu de telle démarche de faite auprès de la ministre... Une voix: Vous avez eu peur, là!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! J'ai bien entendu la question de M. le député de Vimont et j'aimerais entendre la réponse de Mme la ministre. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela ne change pas les positions officielles qui ont été affirmées à la fois en campagne électorale et au moment des propositions constitutionnelles que le chef de l'Opposition officielle a acheminées au fédéral dans le cadre des négociations constitutionnelles.

M. le Président, je sais qu'il y a eu des discussions entre le chef de l'Opposition et le premier ministre, et nous sommes disposés... Je crois comprendre qu'il y a entente sur le principe. Je ne crois pas que l'Opposition veuille refuser l'accès à des services en langue anglaise à la minorité anglophone.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le Président, ils agissent tout à fait comme s'ils étaient contre.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît M. le député de Bertrand, en principale.

Valeur des actifs de SOQUEM vendus à Cambior

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Après plusieurs questions de l'Opposition en cette Chambre concernant la transaction SOQUEM-Cambior, après plusieurs hésitations entre le ministre délégué à la Privatisation et le ministre délégué aux Mines, finalement, ce dernier a déposé en cette Chambre des documents relatifs à ladite transaction le 19 novembre dernier.

J'aimerais savoir de la part du ministre délégué à la Privatisation s'il y a d'autres études et d'autres documents concernant cette transaction en plus de ceux déposés par son collègue pour justifier la valeur des actifs vendus à Cambior pour 170 000 000 $.

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation. (10 h 40)

M. Fortier: M. le Président, mon collègue a déposé en cette Chambre un document qui avait été acheminé à la Commission des valeurs mobilières et qui faisait état d'une étude faite par Cambior et de deux autres études qui étaient en annexe. Je crois que le député a pris connaissance de cette documentation. Ce sont à peu près toutes les études qui ont été faites sur ce sujet, sauf que le ministère des Finances a demandé à la firme McNeil Mantha de nous faire une évaluation. Il faut que les députés comprennent que l'ensemble des actifs qui devaient être déplacés de SOQUEM à Cambior a évolué. Donc, il y a eu certains actifs qui ont été ajoutés à certains moments et d'autres qui ont été retirés. Mais je peux l'assurer qu'en ce qui concerne la confirmation que nous avons eue de McNeil Mantha, ils évaluaient l'ensemble des actifs transférés à Cambior à beaucoup moins que le chiffre qu'il a mentionné, qui a été le chiffre finalement retenu.

Le Président: En additionnelle, M. le député de Lévis.

M. Garon: Question additionnelle, au ministre des Finances dont nous nous réjouissons du retour en cette Chambre. Est-ce que le ministre des Finances, à titre d'actionnaire de SOQUEM, peut nous dire si son ministère a pris la peine de faire, par l'entremise de ses propres experts à l'intérieur du ministère, une étude d'évaluation des actifs vendus à Cambior par SOQUEM? Est-ce qu'il a, par ailleurs, engagé une firme indépendante pour faire cette étude en plus ou au lieu du ministère des Finances?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, le ministre délégué aux Finances a déjà répondu à cette question et comme il est lui-même directement responsable du dossier, il pourra compléter la réponse, s'il y a lieu.

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: II est très clair que le ministère des Finances, par ses hauts fonctionnaires, a été directement impliqué dans la négociation. Comme je viens de l'indiquer, nous avons demandé à la firme McNeil Mantha de nous donner une évaluation. Elle soutenait que le prix était moindre que le chiffre qui fut retenu. Donc, nous avons obtenu plus que l'évaluation obtenue du ministère des Finances. Je crois qu'il est clair que, dans une négociation comme celle-là, il y a une négociation qui se fait entre les preneurs fermes et les vendeurs. Comme le député le sait peut-être, cette négociation se fait le jour et la nuit durant les 48 heures qui précèdent la date fatidique. Je peux l'assurer que, dans ce cas en particulier, les hauts fonctionnaires du ministère des Finances ont été directement impliqués dans cette négociation, qu'ils ont défendu le dossier avec beaucoup de compétence. C'est ce qui a fait que nous avons pu obtenir beaucoup plus que l'évaluation que nous avait donnée McNeil Mantha qui soutenait que le prix des actifs transposés à Cambior était moindre que le prix de 170 000 000 $ que nous avons finalement obtenu.

Le Président: M. le député de Lévis, en additionnelle. '*

M. Garon: Est-ce qu'à titre d'actionnaire de SOQUEM, au nom du gouvernement et au nom du public québécois, le ministre des Finances a formellement donné son accord à la vente, à titre de ministre des Finances, à la transaction entre Cambior et SOQUEM?

Le Président: M. le minitre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, non seulement le ministre des Finances a concouru à cette décision, mais c'est l'ensemble du gouvernement qui a pris la décision.

Le Président: M. le député de Bertrand, en additionnelle.

M. Parent (Bertrand): En additionnelle. Est-ce que le ministre délégué à la Privatisation peut déposer en cette Chambre l'étude de McNeil Mantha à laquelle il vient de faire référence et qui est la seule pièce qui nous manque pour compléter le dossier?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: M. le Président, si j'hésite, c'est que - non, c'est parce qu'on parle de choses graves. Dans cette évaluation, la firme faisait allusion à d'autres sociétés qui sont cotées en Bourse - ayant le sens des responsabilités et j'en appelle au sens des responsabilités des députés de l'Opposition et du député de Bertrand en particulier, je sais que l'information contenue dans cette étude pourrait affecter négativement d'autres sociétés cotées en Bourse. Mais si le député de Bertrand est prêt à accepter ma proposition, je suis prêt à lui montrer ce document dans la mesure où il en gardera la

confidentialité. Nous n'avons rien à cacher. Cependant, je voudrais éviter qu'en déposant ce document, cela affecte négativement d'autres sociétés québécoises cotées en Bourse, des sociétés qui travaillent dans le domaine minier. Mais je suis prêt à faire en sorte qu'il puisse avoir accès à ce document pour prendre connaissance lui-même de l'information qu'il contient, à la condition, bien sûr, qu'il en préserve la confidentialité.

Le Président: M. le député d'Ungava, en additionnelle.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Question additionnelle au ministre délégué à la Privatisation et aux Finances. C'est un gouvernement qui marche par délégation.

Le Président: En additionnelle.

M. Claveau: Peut-il déposer en cette Chambre...

Des voix: Oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: Une remarque en entraînant plusieurs autres, j'aimerais que vous procédiez à votre question additionnelle, M. le député d'Ungava. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Ungava, sans remarques.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Le ministre délégué en question peut-il déposer en cette Chambre les conditions qu'il a offertes et données aux cadres de Cambior au moment de les engager au nom du gouvernement du Québec?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: De mémoire, je vous dirai ceci. SOQUEM, la société minière, avait pris des engagements vis-à-vis des nouveaux cadres de Cambior. Au moment où cela a été fait, le député se souviendra que Cambior était une filiale à 100 % de SOQUEM. Les cadres qui ont été retenus, alors qu'ils quittaient des emplois très rémunérateurs, ont exigé certaines garanties. Il faut se souvenir que, si Cambior est maintenant un succès, à un certain moment certains experts prétendaient que nous ne pourrions aller chercher plus de 60 000 000 $ ou 70 000 000 $. Le fait que nous soyons allés chercher plus de 150 000 000 $ peut paraître facile maintenant.

Le député peut peut-être prétendre que la vente a été faite à un prix moindre, ou trop bas, mais au moment où ces cadres ont été engagés, il y avait un très fort degré d'incertitude sur le succès de l'opération. Ils avaient demandé et obtenu de la part de

SOQUEM certaines garanties. Par la suite ces mêmes cadres ont demandé que cette garantie soit endossée par le gouvernement ou par le ministre qui vous parle. Quitte à ce que je vérifie - parce que je ne voudrais pas induire la Chambre en erreur - je crois pouvoir dire que, finalement, le gouvernement et le ministre qui vous parle n'ont jamais donné cette garantie.

Le Président: Une dernière additionnelle, M. le député d'Ungava?

M. Claveau: Enfin, une additionnelle. Le Président: Une additionnelle. Une voix: Bof! Une dernière... Une voix: Une dernière supplémentaire. M. Claveau: C'est une additionnelle.

Le Président: M. le député d'Ungava en additionnelle.

M. Claveau: Le ministre peut-il confirmer...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Claveau: ...qu'alors, comme il vient de le dire, que SOQUEM était l'unique actionnaire des actifs de Cambior, le 25 avril dernier, un bloc de 95 000 actions à 10 $ l'unité a été réservé pour trois membres de la direction actuelle de Cambior?

Des voix: Oh!

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: Quitte à vérifier les chiffres, je pourrai confirmer. Ce qu'il faut savoir, c'est que la décision que nous avions prise était de faire de Cambior une société privée. Ce qu'il faut savoir, c'est que dans le secteur privé il est tout à fait normal d'intéresser les cadres de l'entreprise, parce qu'il est connu que dans la mesure où les cadres sont intéressés par un certain bloc d'actions, dans la même mesure ils travaillent très fort pour s'assurer que l'entreprise est un succès. Cela se fait dans toutes les entreprises minières et nous avons voulu suivre ce pattern. C'est la raison pour laquelle SOQUEM - et je dis bien SOQUEM -a accepté de négocier cette entente. Ce contrat ou cette entente avec les cadres de Cambior n'a pas été approuvé par le gouvernement comme tel, mais a été approuvé par le conseil d'administration de SOQUEM. Comme je l'ai dit, il s'agit d'une entente pratique, normale dans le monde des

affaires et surtout dans le secteur minier. Le député qui vient d'une région minière devrait le savoir.

Le Président: En additionnelle, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Dans la mesure où le ministre est avant tout un représentant des intérêts de l'État, le ministre peut-il nous donner les noms d'autres entreprises du secteur public qui ont donné de tels privilèges à leurs cadres supérieurs?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: Toutes les grandes entreprises québécoises le font. Je pourrais vous en nommer plusieurs, toutes les grandes entreprises le font. Quand j'étais dans le secteur privé moi-même, j'avais accès à certains blocs d'actions. Mes collègues qui étaient dans le secteur privé et qui avaient des responsabilités à la direction d'entreprises avaient eux-mêmes accès à certains blocs d'actions à des coûts moindres. Je crois qu'il s'agit d'une pratique tout à fait normale et, je le répète, dans la mesure où nous voulions que Cambior soit une compagnie du secteur privé, nous avons suivi la pratique du secteur privé pour intéresser les cadres de l'entreprise à faire le succès de Cambior et c'est un grand succès. (10 h 50)

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata, en principale.

Offre d'aide financière à la papeterie Saint-Raymond

Mme Dionne: Merci, M. le Président. Le 21 octobre dernier, j'adressais au ministre de l'Industrie et du Commerce une question concernant la papeterie Saint-Raymond, de Desbiens. On sait qu'il y aura cinq ans demain, la papeterie Saint-Raymond fermait ses portes. Depuis, de nombreux efforts ont été faits afin de faire redémarrer cette entreprise d'une importance capitale pour le développement économique et social de la région du Lac-Saint-Jean.

Ma question est la suivante au ministre de l'Industrie et du Commerce: À la suite du nouveau projet qui a été soumis au gouvernement du Québec, par le biais de la Société de développement industriel du Québec, le ministre peut-il nous indiquer où en est rendu ce dossier?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je remercie la députée de sa question. J'ai toujours indiqué que je m'engageais à donner une réponse à la région de Desbiens avant la fin de l'année. On a voulu me faire dire que ce devait être en septembre, en octobre, mais il faut savoir que, depuis cinq ans, il y a eu un ensemble de projets qui ont été soumis, tous d'envergure variable. Le dernier projet avait fait l'objet d'une demande à la Société de développement industriel au mois de juin. Quelques mois plus tard... Il faut savoir qu'il y a un cheminement d'analyse, d'approbation à différents niveaux, y compris dans certains cas le Conseil exécutif, pour donner suite à des projets de cette nature.

Étant donné que nous sommes encore vers la fin de l'année, M. le Président, je pense ne pas avoir manqué à ma parole en indiquant, aujourd'hui, que le gouvernement a su, hier, approuver une offre d'aide financière aux partenaires impliqués dans le projet qui a cours à Desbiens. Nous transmettrons notre offre d'aide financière dans les heures et les jours qui viennent. Nous sommes confiants que, sur la foi de cette aide financière, de ce qui s'ajoute d'ailleurs à celle du gouvernement fédéral, nous saurons assister à la relance de l'emploi. Il me fait plaisir de pouvoir le dire aujourd'hui, à la veille du cinquième anniversaire de la fermeture.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le député de Roberval, en principale.

SOQUIP et la politique de privatisation

M. Gauthier: Oui, M. le Président. Récemment, le ministre de l'Énergie et des Ressources, à la suite du dépôt du rapport annuel de la SOQUIP, indiquait que cette dernière avait joué un rôle de premier plan au Québec et était appelée à en jouer un encore, principalement dans Soligaz et dans certains projets d'implantation d'usines qui sont sur la table de travail. Il disait également que SOQUIP avait, avec ses propriétés dans l'Ouest canadien, un rôle extrêmement important qui pouvait devenir stratégique pour l'avenir du Québec.

Voici ma question au ministre de l'Énergie et des Ressources: Comment concilie-t-il ses propos fort élogieux - que je partage - à l'endroit de SOQUIP avec la politique de privatisation de son gouvernement qui place SOQUIP parmi une des cibles du ministre délégué à la Privatisation.

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, je crois que le député de Roberval a mal interprété

les intentions et les déclarations du gouvernement en ce qui concerne SOQUIP. Ce n'est pas une question de cible de privatisation. Nous avons indiqué que nous examinons le rôle de SOQUIP, que nous verrons à la mission et aux objectifs de SOQUIP dans le cadre d'une politique énergétique, en tenant compte des besoins énergétiques du Québec. Dans cette optique, nous avons examiné et continuons d'examiner ce que nous pouvons faire avec SOQUIP pour la rendre encore plus efficace et pour mieux répondre aux besoins du Québec.

Le Président: M. le député de Roberval, en additionnelle.

M. Gauthier: J'aimerais savoir du ministre comment il concilie ses propos avec ceux de son collègue à la Privatisation qui disait, le 12 novembre, avant les élections, que le gouvernement n'hésiterait pas à privatiser SOQUIP, que son mandat initial était terminé et que les propriétés gazières en Alberta n'avaient absolument aucune importance pour l'économie du Québec.

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, il est vrai que le mandat d'une des missions de SOQUIP, l'exploration pétrolière au Québec, est terminé. Le ministre délégué à la Privatisation avait entièrement raison. Au moment où il a fait ces déclarations, les conditions dans le domaine énergétique lui permettaient d'exprimer cette opinion, mais depuis ce temps, il y a eu beaucoup de changements. Il y a eu la fermeture de la raffinerie de Gulf. Il y a eu une baisse du prix du pétrole. Il y a eu les importations, de plus en plus au Québec, des produits pétroliers raffinés. Alors, quand les conditions changent, la position d'un gouvernement doit changer. Je peux assurer le député de Roberval que le ministre délégué à la Privatisation et moi-même voyons le problème de la même façon et que nous allons nous entendre sur les solutions à apporter.

Le Président: M. le député de Roberval, en additionnelle.

M. Gauthier: M. le Président, le ministre ne croit-il pas qu'il serait beaucoup plus simple, pour prendre une décision entre ministres, s'il prenait la peine de déposer, enfin, la politique énergétique de ce gouvernement qui est inconnue de tout le monde et qui a été mentionnée par le ministre délégué à la Privatisation. C'est à peu près comme la politique linguistique. Où est-elle? Allez-vous la déposer?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, il y a deux façons de gouverner. Une des façons, c'est de parler, d'avoir des livres blancs, de dire tout ce que nous devrions faire, et ne pas agir. Ce n'est pas un gouvernement de spectacle et ce n'est pas un ministère de spectacle. Nous avons plutôt choisi d'agir, d'agir dans des dossiers spécifiques pour le bien de la population, pour le développement économique, par l'entremise du ministère de l'Énergie et des Ressources. Nous développons, tout en agissant dans ces domaines, une politique que nous rendrons publique en temps et lieu.

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve, en principale.

Droit d'atterrissage à Toronto pour Taï Airways

Mme Harel: Pendant que le débat se poursuit sur l'avenir des aéroports de Dorval et de Mirabel, le gouvernement canadien créait, récemment, un très dangereux précédent en accordant un droit d'atterrissage à Toronto à la compagnie thaïlandaise, TaT Airways, sans équivalence de service avec Montréal. Après avoir perdu l'exclusivité des droits d'atterrissage des vols internationaux, Montréal se voit, pour la première fois, maintenant privée d'une équivalence de service avec Toronto. Ce précédent est d'autant plus dangereux que d'autres compagnies aériennes réclament le même traitement: les compagnies Scandinave, japonaise, indienne.

Le ministre des Transports peut-il indiquer quelle démarche il a entreprise auprès de son homologue fédéral et en quoi il a agi pour faire cesser ce dangereux précédent où tout le Québec, Dorval comme Mirabel, sort perdant?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai eu l'occasion de discuter à plusieurs reprises, entre autres, avec M. Mazankowski, en juin dernier, avec M. Crosbie en octobre de cette année, à la suite des changements, et avec M. André Bissonnette, ministre d'État aux Transports et responsable du Québec, dans le gouvernement conservateur, de l'ensemble de la problématique des aéroports de Mirabel et de Dorval. À nouveau, il y a eu des conversations téléphoniques, lundi, avec M. Bissonnette. Je lui ai indiqué l'inquiétude que le gouvernement du Québec avait face à l'implication de cette mesure, de cette décision, et je l'ai incité très fortement a

prendre des mesures qui s'imposent, puisque c'est à eux de prendre les décisions dans ce cas-là.

Le Président: En principale ou en additionnelle, M. le député de Verchères?

M. Charbonneau: En principale, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Verchères.

Réforme de l'aide sociale au Québec

M. Charbonneau: M. le Président, hier, au gouvernement fédéral, on déposait le rapport Forget sur la réforme de l'assurance-chômage. La réaction du ministre fédéral a été qu'il ne prendrait pas de décision avant le 15 mai 1987, tout au moins, et que la mise en oeuvre d'une éventuelle réforme de l'assurance-chômage n'interviendrait pas avant 1988. Comme le premier ministre et un peu moins fermement le ministre avaient relié le dépôt de la réforme de l'aide sociale annoncée par le gouvernement à cette réforme de l'assurance-chômage par le gouvernement fédéral, est-ce à dire que le gouvernement du Québec reporterait d'au moins six mois la réforme de l'aide sociale, sinon en 1988?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail. (11 heures)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, M. le Président. Le gouvernement du Québec se propose d'étudier attentivement le rapport de la commission Forget et de voir, dans l'éventualité d'une application totale, partielle, à moyen terme ou à court terme, quelles implications peut avoir le passage de certaines clientèles de l'assurance-chômage à l'aide sociale ou en sens inverse. Une fois ces implications analysées, nous serons en mesure de répondre beaucoup plus précisément à votre question quant à la période que vous mentionnez.

M. Charbonneau: Question additionnelle.

Le Président: M. le député de Verchères, question additionnelle.

M. Charbonneau: Est-ce que tout au moins cela indique que le gouvernement va attendre après Noël, après les fêtes pour déposer son document d'orientation sur la réforme de l'aide sociale?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que nous avions indiqué très clairement que le rapport Forget était une pièce importante du casse-tête quant à la publication d'un document d'orientation sur l'aide sociale. Il y aura d'ici Noël des mesures qui seront annoncées, qui se doivent d'être annoncées, des mesures qui étaient contenues dans le budget du printemps dernier du ministre des Finances, des mesures qui ont également trait à l'indexation pleine et entière des prestations des bénéficiaires de l'aide sociale.

M. Charbonneau: C'est sans doute de la télépathie.

Le Président: M. le député de Verchères, question additionnelle.

M. Charbonneau: Question additionnelle, M. le Président. D'abord, est-ce que le ministre a l'intention - parce que ce n'est pas clair - de publier son document d'orientation avant Noël, d'une part? D'autre part, à l'égard de l'indexation dont il parle, est-ce que c'est une autre indexation que celle qui est de toute façon prévue pour le 1er janvier 1987, parce qu'il n'y aurait pas d'annonce dans cela.

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'aimerais vous dire qu'il n'y a pas d'annonce et donner raison à mon collègue, le député de Verchères. Mais au printemps dernier il a tellement crié qu'il y avait abolition de l'indexation qu'au moins pour lui cela doit constituer une annonce.

Le Président: Une très courte question additionnelle. C'est la dernière question.

M. Charbonneau: Est-ce que le ministre veut faire croire aux assistés sociaux que l'indexation annuelle et l'indexation dont il vient de parler sont deux choses différentes? Est-ce qu'il va finir par être honnête avec les gens et leur dire que l'indexation annuelle, c'est la même chose et qu'il n'y a pas de nouveau pour les assistés sociaux?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Gratton: La façon de poser la question: Est-ce que le ministre va être honnête, est acceptable en fonction de nos règlements, M. le Président?

Le Président: Non. C'est pourquoi je suis intervenu pour demander la réponse à M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la

Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Le ministre va continuer à dire la vérité aux gens qui sont touchés. Nous leur avions dit, au printemps passé, qu'ils auraient une indexation pleine et entière et ils auront cette indexation pleine et entière.

M. Johnson (Anjou): Additionnelle.

Le Président: C'est terminé. M. le chef de l'Opposition, non. C'est terminé depuis plus de 30 secondes, M. le chef de l'Opposition. Excusez-moi. A l'ordre, s'il vous plaît: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Avant de procéder au vote, M. le ministre délégué à la Privatisation m'a annoncé qu'il avait un complément de réponse à une question posée à cette séance par M. le député d'Ungava. En vertu de l'article 80, premier paragraphe, je lui permets d'apporter ce complément de réponse. M. le député d'Ungava vous aurez une question additionnelle à la suite de ce complément. M. le ministre délégué à la Privatisation.

Option d'achat d'actions de Cambior accordée à des cadres

M. Fortier: Sur l'option d'achat d'actions de Cambior qui a été donnée aux trois dirigeants, je voulais confirmer l'essence de la réponse à la question qui me fut posée. Effectivement, le 25 avril 1986, des options d'achat pour 95 000 actions ont été accordées à trois membres de la direction. Je lui dirai simplement que le détail de cette information se retrouve dans le prospectus de Cambior déposé le 15 mai dernier. Donc, il s'agit d'une information publique. Je me permets de lui envoyer une copie de ce prospectus puisque la question que vous m'avez posée a trait à une information publique qui est disponible à tous depuis le 15 mai dernier.

Le Président: M. le député d'Ungava, une dernière question additionnelle.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Je voudrais savoir du ministre si c'est une mesure courante qu'une société d'État, qu'un ministre, au nom d'un gouvernement, offre de tels avantages à des cadres supérieurs. Si dans un deuxième temps, c'était du domaine public comme il le dit, comment se fait-il qu'il n'avait pas lui-même la réponse au moment où je lui ai posé la question?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: M. le Président, bien sûr, l'Opposition prépare ses questions et on ne tient pas le prospectus à côté de nous continuellement. Si le député avait fait sa recherche, il aurait trouvé dans le prospectus l'information à la question qu'il me posait. En ce qui concerne la privatisation de Cambior, je lui répète ceci: Nous recherchions des dirigeants qui ont été un facteur de réussite dans l'émission d'actions de Cambior. C'est la raison pour laquelle nous avons négocié avec eux des conditions qui sont normales dans le secteur privé puisque nous voulions vendre 70 % des actions et que nous nous dirigions vers une privatisation. Les conditions qui ont été négociées avec eux furent semblables à celles négociées dans le secteur privé, dans le secteur minier en particulier.

Le Président: Fin de la période des questions et réponses orales. Non, non, c'est terminé. M. le député d'Ungava, je vous donnerai l'occasion d'expliquer tout ce que vous voulez à la période de questions demain. Je vous donnerai toutes les additionnelles ou les principales.

Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Votes reportés. Est-ce que, messieurs et mesdames les députés vous êtes prêts à procéder au vote qui apparaît au feuilleton? S'il vous plaît! Si vous voulez reprendre vos sièges.

Mise aux voix de la motion

proposant l'adoption du principe du projet de loi 119

Je mets maintenant aux voix la motion du ministre du Travail proposant que le principe du projet de loi 119, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, soit maintenant adopté.

Que ceux et celles qui sont en faveur de ladite motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Saintonge (Laprairie), Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Paradis (Brome-Missisquoi), Côté (Rivière-du-Loup), Dutil (Beauce-Sud), Mmes Gagnon-Tremblay (Saint-François), Robic (Bourassa), MM. Vallerand (Crémazie), Lincoln (Nelligan), French (Westmount), Côté (Charlesbourg), Ciaccia (Mont-Royal), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Vallières (Richmond), Gobeil (Verdun), Picotte (Maskinongé), Fortier (Outremont), Cusano (Viau), Vaillancourt (Orford), Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Lefebvre (Frontenac), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Sirros (Laurier), Doyon (Louis-Hébert), Maciocia (Viger), Middlemiss (Pontiac), Beaudin (Gaspé), Cannon (La Peltrie), Chagnon (Saint-Louis), Lemire (Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat

(Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak (Sainte-Anne), Audet (Beauce-Nord), Baril (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Bélanger (Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Iles), Mme Hovington (Matane), M. Séguin (Montmorency), Mmes Trépanier (Dorion), Bélanger (Mégantic-Compton), MM. Fortin (Marguerite-Bourgeoys), Parent (Sauvé), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Brouillette (Champlain), Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), MM. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet), Gobé (Lafontaine), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon), Bissonnet (Jeanne-Mance), Hains (Saint-Henri), Houde (Berthier), Kehoe (Chapleau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Leclerc (Taschereau), Hétu (Labelle), Joly (Fabre), Khelfa (Richelieu), Lemieux (Vanier), Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Richard (Nicolet), Tremblay (Rimouski), Tremblay (Iberville), Thérien (Rousseau), Théorêt (Vimont), Saint-Roch (Drummond),

Le Président: Que les députés qui s'opposent à cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Johnson (Anjou), Chevrette (Joliette), Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Jolivet (Laviolette), Garon (Lévis), Rochefort (Gouin), Charbonneau (Verchères), Mme Juneau (Johnson), MM. Gendron (Abitibi-Ouest), Brassard (Lac-Saint-Jean), Filion (Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Mme Vermette (Marie-Victorin), MM. Paré (Shefford), Claveau (Ungava), Boulerice (Saint-Jacques), Blais (Terrebonne), Dufour (Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve),

Le Secrétaire: Pour: 85

Contre: 22

Le Président: La motion du ministre du Travail concernant le projet de loi 119 est adoptée.

Motions sans préavis.

M. Gratton: M. le Président, motion de renvoi.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi 119 soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion de renvoi est adoptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté.

Motions sans préavis.

Je vais maintenant suspendre les travaux de cette Assemblée pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 12)

(Reprise à 11 h 17)

Le Président: Nous allons maintenant continuer les affaires courantes.

Avis touchant les travaux des commissions.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: M. le Président, avec le consentement des membres de l'Assemblée, j'aimerais apporter une correction à la motion de renvoi du projet de loi 135, Loi modifiant la Loi sur les allocations familiales et la Loi sur les impôts. Hier, celle-ci a été déférée pour étude détaillée à la commission du budget et de l'administration. Jusque-là il n'y a pas de problème, sauf que la motion visait également à ce que la commission soit présidée par un président de séance. Or, on voudrait, au contraire, que la commission soit présidée par le président de la commission qui est le député de Vanier. Si les membres y consentent, je voudrais que la motion soit corrigée en conséquence.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour cette modification? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui, de 11 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail procédera à des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 119, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Oui, oui, je m'excuse, effectivement, c'est 11 h 30; c'était la décision de la commission. Je corrige donc: La commission siégera de 11 h 30 à 13 heures.

Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants et ce, dans l'ordre

indiqué: le projet de loi 127, Code de la sécurité routière; le projet de loi 121, Loi concernant certaines rétrocessions de droits dont le gouvernement est devenu titulaire par expropriation avant le 1er avril 1976; le projet de loi 144, Loi modifiant la Loi sur les transports. De 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi 135, Loi modifiant la Loi sur les allocations familiales et la Loi sur les impôts.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres avis? Nous allons maintenant passer aux renseignements concernant les travaux de l'Assemblée. Nous allons appeler les affaires du jour. Normalement, aux affaires du jour aujourd'hui, je me devais d'appeler la motion de censure présentée par l'Opposition. On m'a dit qu'il y avait une demande, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je vais demander au leader du gouvernement de nous faire part de l'entente intervenue entre les deux formations politiques.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président, on sait que la motion de censure prévue par notre règlement aurait dû normalement être débattue dès maintenant. Mais, à la suite d'échanges, de façon à permettre au premier ministre de participer au débat sur cette motion, l'Opposition et le gouvernement se sont entendus pour que le débat ait lieu et ce, avec le consentement unanime, le lundi 8 décembre, de 15 heures à 17 heures. Je voudrais qu'on en fasse un ordre de l'Assemblée.

Le Président: Si j'ai bien saisi, la motion de censure sera débattue de 15 heures à 17 heures lundi prochain en cette Chambre. Le temps sera réparti comme suit: une heure de chaque côté. Je pense que les dix dernières minutes seront réservées pour la réplique de celui qui a proposé la motion. C'est bien cela, 55 minutes chacun et un droit de réplique de 10 minutes?

M. Gratton: D'accord.

Le Président: Je m'excuse. Et toute liberté à l'intérieur de chacune des enveloppes quant à la durée des interventions. En faites-vous un ordre de l'Assemblée?

M. Gratton: Oui.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement, aux affaires du jour.

M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 34 du feuilleton.

Projet de loi 147 Adoption du principe

Le Président: À l'article 34 du feuilleton, M. le ministre délégué à la Réforme électorale propose l'adoption du principe du projet de loi 147, Loi modifiant la Loi sur la délimitation des circonscriptions électorales. M. le ministre délégué à la Réforme électorale, vous avez la parole.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je tenterai brièvement d'expliquer le pourquoi de ce projet de loi en commençant par expliquer l'objet du projet de loi. Effectivement, il s'agit pour l'Assemblée nationale de décider s'il est opportun de reporter les travaux de la Commission de la représentation quant au découpage de la carte des circonscriptions électorales, du 2 décembre, c'est-à-dire mardi dernier, date à laquelle on devait procéder à ces travaux, au 1er mai prochain de façon à permettre à un certain nombre de choses de se produire.

Je voudrais d'abord, M. le Président, situer ce projet de loi dans la chronologie des étapes que nous avons franchies depuis décembre dernier. On sait que la Loi sur la représentation électorale exige de la Commission de la représentation de procéder, dès le lendemain d'une élection générale, à des travaux préparatoires à la production de rapports qui, éventuellement, en fonction d'un processus qui est défini dans toutes ses étapes dans la loi, permettent d'arriver à la délimitation des circonscriptions électorales.

Or, au lendemain des élections du 2 décembre dernier, le gouvernement avait décidé de procéder à un examen complet tant de la Loi sur la représentation électorale que de la Loi électorale elle-même. En accord avec l'Opposition, nous avions convenu d'adopter le projet de loi 23 qui faisait en sorte que les travaux qui devaient normalement débuter le 2 décembre dernier, c'est-à-dire au lendemain de l'élection générale, soient reportés au 2 décembre 1986, c'est-à-dire à mardi dernier. D'ailleurs, une commission parlementaire avait entendu le Directeur général des élections à cet effet. On s'était assuré que ce délai d'un an ne porterait pas préjudice à

la possibilité de confectionner une nouvelle carte électorale à temps pour une prochaine élection générale éventuelle. Le projet de loi 23 fut donc adopté à l'unanimité par les membres de l'Assemblée le 27 mars 1986.

Je m'étais engagé auprès de la commission des institutions, qui avait entendu le Directeur général des élections à ce moment-là, à faire en sorte que toutes les formations politiques représentées à l'Assemblée nationale soient consultées avant de revenir devant l'Assemblée nationale avec des modifications à la Loi électorale parce que nous savions, d'ores et déjà, au lendemain de l'élection, qu'il y aurait des modifications à apporter à la loi puisque nous avions convenu à la commission parlementaire sur le projet de loi 23 que les critères qui président à la délimitation des circonscriptions nécessitaient des changements.

En effet, le Directeur général des élections nous avait indiqué qu'à partir des barèmes présentement inscrits dans la loi il constatait déjà qu'une douzaine de circonscriptions électorales ne répondaient plus aux critères actuels et que nous devrions donc les modifier, sinon, nous serions exposés à voir la nouvelle carte comporter un certain nombre de circonscriptions électorales additionnelles ou à avoir un nombre accru de circonscriptions électorales qui feraient exception aux critères présentement inscrits dans la loi. Nous avions également convenu avec l'Opposition qu'il n'était pas dans l'intérêt de l'Assemblée nationale de permettre qu'on ajoute un trop grand nombre de circonscriptions électorales. J'avais pris l'engagement de faire une réflexion en profondeur sur l'ensemble de la Loi sur la représentation électorale et de faire rapport aux membres de l'Assemblée dans les meilleurs délais.

Or, en août dernier, le Secrétariat à la réforme électorale déposait un rapport dans lequel on proposait une certaine orientation. Je n'irai pas sur le fond de ce rapport, M. le Président, puisque l'aboutissement de notre démarche nous amènera en commission parlementaire, dès janvier prochain, pour dégager les consensus qui peuvent exister sur les divers éléments de ce rapport. Ce rapport préparé par le Secrétariat à la réforme électorale fut transmis dans les jours suivants à l'Opposition, de même qu'à la Tribune de la presse pour diffusion, ainsi qu'au Directeur général des élections à qui nous avions demandé de nous fournir ses commentaires ou suggestions quant à la portée et quant à l'administration d'une loi qui comporterait les changements prévus ou proposés dans ce rapport.

Par la suite, il y eut des pourparlers entre l'Opposition et le gouvernement quant à la démarche à suivre. À la suite des commentaires du Directeur général des élections, lesquels nous furent fournis le 14 octobre 1986, nous dûmes constater que, compte tenu de la date, il devenait impossible de présenter un projet de loi pour adoption avant le 19 décembre, à moins d'obtenir des consentements, lesquels étaient loin d'être assurés, sur l'ensemble des propositions du secrétariat.

L'Opposition avait, d'ailleurs, indiqué dès le début, au moment de la réception du rapport du secrétariat et des commentaires éventuels du Directeur général des élections, son accord pour retarder à nouveau les travaux de la Commission de la représentation si cela devait permettre de procéder par consensus, ce à quoi je m'étais engagé, je le répète, M. le Président, au moment de l'étude du projet de loi 23.

Effectivement, la semaine dernière, je crois que c'était le 27 novembre, nous avons convoqué la commission des institutions. Nous avons entendu le Directeur général des élections pour nous assurer que, si le projet de loi 147 était adopté, c'est-à-dire que si nous reportions à nouveau le début des travaux de la Commission de la représentation au 1er mai, cela ne comporterait aucun problème insurmontable pour assurer que nous aurions une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales suffisamment de temps avant la prochaine élection générale pour que tous, les partis politiques et les citoyens, en soient les mieux informés possible. (11 h 30)

C'est le constat qu'à mon avis nous avons pu faire en commission parlementaire, avec la participation du Directeur général des élections, le 27 novembre dernier. À cette commission, j'ai pris l'engagement auprès des membres de la commission de procéder d'une façon très précise. Je voudrais maintenant faire part à l'ensemble de l'Assemblée de l'engagement que je réitère à l'égard de la démarche à poursuivre pour que nous en arrivions à ce que la Commission de la représentation puisse débuter ses travaux le 1er mai. Je présenterai même, tantôt, un amendement au projet de loi qui nous permettra de prévoir le début des travaux même avant le 1er mai si l'Assemblée nationale ou une commission parlementaire qu'elle désigne décidait d'autoriser la commission à entreprendre les travaux de délimitation.

Je me suis engagé et je m'engage au nom du gouvernement à ce qu'une commission parlementaire ait lieu au plus tard au début de février, mais j'opterais dès maintenant pour la troisième semaine de janvier, si cela agrée aux membres de la commission. À cette commission parlementaire, à partir du rapport du Secrétariat à la réforme électorale, nous examinerions là où il y a consensus,

consensus étant défini, pour ma part, comme étant l'agrément ou l'approbation des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale, soit, pour les nommer, le Parti québécois et le Parti libéral du Québec.

Je m'engage également à ce que, lors de cette commission, les sujets qui auront fait l'objet du consensus soient transcrits dans un projet de loi qui serait déposé ici, à l'Assemblée nationale, à temps pour qu'il soit adopté avant le 1er mai 1987, c'est-à-dire avant le moment prévu pour le début des travaux de la Commission de la représentation. C'est dans le but de respecter les engagements premiers que j'avais pris, de faire en sorte que, lorsque nous légiférerons sur toute matière touchant l'exercice du droit de vote - on sait que la représentation électorale, la délimitation des circonscriptions électorales, c'est la base même de l'exercice du droit de vote - nous le ferions, sinon à l'unanimité des membres, tout au moins à l'unanimité des formations politiques représentées à l'Assemblée nationale. C'est l'engagement que je réitère aujourd'hui, M. le Président.

Je résume. Une commission parlementaire dès la troisième semaine de janvier; en tout cas, au plus tard au début de février. Nous conviendrons du mandat de cette commission avant l'ajournement des fêtes. Nous fixerons également la date exacte de la commission parlementaire avant l'ajournement des fêtes. À cette commission parlementaire, nous dégagerons les consensus sur les divers éléments que contient le rapport du Secrétariat à la réforme électorale, mais aussi sur tout autre sujet qui a trait à la représentation électorale et dont tout membre de la commission pourra saisir la commission.

En même temps à cette commission, nous évaluerons, à partir des consensus que nous aurons dégagés, s'il est utile ou souhaitable que la Commission de la représentation débute ses travaux même avant le 1er mai, en fonction de l'amendement que je présenterai tantôt, et dont j'ai remis copie au député de Gouin, le porte-parole de sa formation politique en la matière. Donc, le projet de loi lui-même devant amender la loi actuelle sur la représentation électorale pourrait être déposé, uniquement à partir des consensus dégagés, au début de la prochaine partie de la session - je crois que c'est la deuxième semaine de mars - pour être adopté avant le 1er mai, et ainsi être assuré que la nouvelle carte électorale soit en vigueur amplement à temps pour que tous les citoyens, les formations politiques, bref tous ceux qui s'intéressent à la question puissent en être informés bien avant la prochaine élection générale.

M. le Président, voilà en résumé ce que nous avons convenu de faire à la commission parlementaire du 27 novembre dernier. Je souhaite que l'Opposition réagisse favorablement à cette proposition et nous pourrons ainsi adopter le projet de loi 147 dès ce matin. J'avise d'ailleurs que je proposerai que nous procédions à l'étude détaillée à la commission plénière immédiatement après l'adoption du principe du projet de loi 147 de façon à me permettre de déposer l'amendement dont j'ai parlé quant à la reprise des travaux, qui pourrait être possible en fonction d'une décision de l'Assemblée ou d'une commission qu'elle désigne, et, deuxièmement, pour corriger une erreur de frappe dans les dates que contient l'article actuel alors que c'est strictement une erreur de typographie qui fait que la date du 15 septembre devra être remplacée par celle du... C'est-à-dire que le mot "novembre" dans l'article 1 soit remplacé par le mot "septembre".

J'attends les commentaires de l'Opposition. Si j'ai omis de faire état de quelque élément que ce soit dont nous avons parlé à la commission parlementaire ou dans les rencontres que j'ai eues avec l'Opposition depuis cette commission parlementaire, je fournirai les détails sur demande du député de Gouin. J'espère que nous pourrons tous ensemble procéder pour faire en sorte que dans les meilleurs délais nous puissions donner les instructions nécessaires au Directeur général des élections par voie d'amendement à la Loi sur la représentation électorale, de façon que les travaux puissent être entrepris eux aussi dans les meilleurs délais.

Le Président: Je remercie M. le ministre délégué à la Réforme électorale. Maintenant, toujours à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 147 présenté par M. le ministre, je vais céder la parole à M. le député de Gouin. M. le député.

M. Jacques Rochefort

M. Rochefort: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je veux dire aux membres de l'Assemblée nationale que, du côté de ma formation politique, nous considérons que le Québec a connu des progrès importants, fondamentaux au plan de la démocratisation de nos institutions politiques au cours des dix, quinze dernières années.

Nous avons aujourd'hui un processus électoral qui suscite la confiance des hommes et des femmes qui sont appelés à participer à ce processus électoral, c'est-à-dire la population du Québec. Nous avons réussi à atteindre un niveau de qualité et de profondeur de démocratisation de nos institutions politiques qui fait que nous avons une participation importante de nos citoyens et de nos citoyennes à la chose politique par un nombre élevé de nos concitoyens et

concitoyennes qui sont membres de partis politiques, qui souscrivent à la caisse électorale de partis politiques, qui participent à la vie des partis politiques, qui participent à l'organisation des campagnes électorales et qui, ultimement, massivement, participent par l'exercice de leur droit de vote au choix de leurs dirigeants politiques. (11 h 40)

Si nous assistons à une telle confiance, à une telle importance quant à la participation de nos citoyens et de nos citoyennes à chacune des étapes et à chacune des phases de notre vie politique, c'est que nous avons réussi à nous bâtir un modèle proprement québécois, supérieur à ce que nous rencontrons dans bon nombre de sociétés occidentales quant à la démocratisation de nos institutions politiques. Nous considérons qu'il s'agit là d'un acquis important, d'un acquis fondamental pour le peuple québécois, d'un acquis qui fait la fierté de l'ensemble des Québécois et des Québécoises et qui est très souvent cité en modèle ailleurs, dans les autres provinces canadiennes, chez nos voisins des États-Unis et dans plusieurs pays occidentaux comme étant à un modèle de démocratisation plein, complet et large de nos institutions politiques. Pour nous, il faut que, dans cette constante recherche d'une démocratisation la plus grande et la plus élevée possible de nos institutions politiques, nous en arrivions à maintenir en totalité les acquis que nous avons accumulés au fil des années, que nous avons atteints au cours des différentes Législatures que les Québécois et les Québécoises ont connues au cours des dernières décennies et que nous continuions à progresser dans cette voie d'une démocratisation toujours de plus en plus large, de plus en plus grande, de plus en plus profonde de nos institutions politiques.

Cette réflexion doit être toujours animée prioritairement, avant toute autre considération, par cette première grande préoccupation qui est celle de maintenir et d'accroître dans la mesure du possible cette confiance que les hommes et les femmes du Québec ont acquise dans leurs institutions politiques. Si nous voulons que l'Assemblée nationale demeure l'Assemblée nationale du peuple québécois, une Assemblée nationale représentative, une Assemblée nationale respectée par l'ensemble de nos concitoyens et de nos concitoyennes, c'est à cette condition et à cette seule condition que nous pourrons atteindre cet objectif, condition qui est de maintenir nos acquis en termes de démocratisation de nos institutions et qu'à chaque fois que nous posons un geste ce geste nous permette d'accroître, de progresser quant à cette démocratisation et non pas à faire du surplace, ou encore moins à reculer quant à cette démocratisation de nos institutions politiques que nous avons connues et dont nous sommes tous fiers.

D'ailleurs, M. le Président, personne au Québec n'est venu remettre en cause, particulièrement dans le dossier qui nous occupe, la mécanique, la procédure qui a été arrêtée par l'Assemblée nationale du Québec il y a une dizaine d'années pour délimiter les circonscriptions électorales du Québec. Cette façon de délimiter les circonscriptions électorales que nous avons conçue entre nous, Québécois et Québécoises, est une formule qui, je devrais dire, non seulement fait plus que consensus, fait presque l'unanimité dans notre société, mais c'est une formule que bon nombre d'autres sociétés envient et que bon nombre d'autres sociétés tentent de copier pour atteindre ce degré élevé de perfection et d'impartialité du processus de délimitation des circonscriptions électorales au Québec.

Deuxièmement, lorsque le leader du gouvernement, le ministre délégué à la Réforme électorale, a déposé le projet de loi 23 en mars dernier, qui visait à reporter d'une année le processus d'enclenchement de toute une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales du Québec, la position de ma formation politique a été la suivante: D'une part, nous avons demandé et obtenu de bon gré du ministre que ce processus soit reporté pour une période d'une année seulement et que ce processus puisse être réenclenché automatiquement sans une nouvelle démarche de l'Assemblée nationale du Québec, contrairement à ce qui nous était proposé au départ, et je rappelle quel était le premier contenu du projet de loi 23. Le projet de loi 23 nous demandait de suspendre l'enclenchement du processus de délimitation des circonscriptions électorales et demandait à l'Assemblée nationale de confier au gouvernement la décision de réenclencher ce processus de délimitation des nouvelles circonscriptions électorales au moment où il le jugerait opportun. M. le Président, nous avons donc souhaité que nous limitions cette suspension et que nous la limitions d'une façon automatique afin que nous puissions concrètement, dès ce moment, maintenir nos acquis en ces matières qui font que maintenant les partis politiques ne soient associés à aucune des étapes du processus décisionnel de délimitation des circonscriptions électorales du Québec. Rappelons-nous notre passé récent en cette matière où les partis politiques étaient impliqués directement dans ce processus de délimitation des circonscriptions électorales et où l'ensemble des membres de cette Assemblée nationale avait un rôle prépondérant dans la délimitation des circonscriptions électorales. Cela nous avait menés à des situations où il y avait du découpage sur mesure qui était fait par des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale. Nous considérions et nous considérons toujours que le fait d'avoir retiré

toute implication directe dans les décisions qui mènent aux délimitations des circonscriptions électorales, d'avoir retiré tout pouvoir, toute implication aux partis politiques et aux membres de l'Assemblée nationale, nous donne aujourd'hui non seulement une meilleure carte électorale plus soucieuse de l'ensemble des particularités régionales et locales que nous retrouvons dans l'ensemble des régions et des localités du Québec, mais nous permet aussi d'obtenir une carte électorale qui n'est discutée quant à son impartialité et quant à son objectivité par quiconque dans la société québécoise.

Ce sont ces motifs et ces principes fondamentaux qui sont les nôtres qui nous ont amenés à proposer au gouvernement qu'on ne suspende pas de façon indéterminée le processus de délimitation des circonscriptions électorales et que, contrairement à la proposition qui nous avait été faite, on ne laisse pas entre les mains du seul gouvernement la décision de la date du départ du processus de délimitation des circonscriptions électorales, mais que ce nouveau départ soit automatique et que, si un jour quelqu'un devait se repencher dessus, ce soit l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale, pour qu'on en arrive encore une fois à un consensus des formations politiques.

Aujourd'hui, le leader du gouvernement, ministre délégué à la Réforme électorale, nous demande de reporter, une nouvelle fois, la date du départ de cette mise en application visant à refaire les délimitations des circonscriptions électorales du Québec. Je dis immédiatement que lorsque ce projet de loi nous a été soumis, quant à l'effet de reporter, une nouvelle fois, ce départ du processus de redélimitation des circonscriptions électorales, faisant passer ce départ, cette fois, du 2 décembre 1986 au 1er mai 1987, nous avions des réticences et des objections importantes. Pourquoi avions-nous des objections importantes? Dans un premier temps - je l'affirme au nom de ma formation politique - nous jugeons absolument essentiel qu'une nouvelle refonte de la carte électorale soit réalisée avant le prochain scrutin général au Québec, tel que la Loi sur la représentation électorale, qui a été adoptée, ici, à l'Assemblée nationale, le dicte et le commande. Si nous ne procédons pas à une nouvelle refonte de la carte électorale avant le prochain scrutin général, nous nous retrouverons dans la même situation que celle que nous avons connue à plusieurs reprises dans le passé, où l'on se retrouvera, encore une fois, comme au moment où nous nous parlons à la suite du scrutin du 2 décembre 1985, où des hommes et des femmes siègent, ici, à l'Assemblée nationale en représentant 24 000, 25 000 ou 26 000 électeurs et que d'autres siègent ici avec le même pouvoir, pas moins, pas plus, et avec le même poids politique, pas moins, pas plus, que ces mêmes députés, alors qu'ils représentent des circonscriptions électorales qui regroupent 50 000, 52 000, 53 000, et même, dans certains cas, 54 000 électeurs. (11 h 50)

Voilà une situation qui doit être corrigée en permanence pour que nous maintenions ce grand principe universellement reconnu dans le monde occidental et reconnu depuis toujours par les membres de cette Assemblée, celui de l'égalité entre les électeurs du Québec, ce vieux principe d'un homme un vote, une femme un vote, de façon que tous les citoyens du Québec soient sur un même pied quant au poids politique qu'ils ont sur les décisions prises à l'Assemblée nationale du Québec et qui ont des effets sur leur vie de tous les jours.

Faut-il le rappeler, sans vouloir faire un exposé de sciences politiques, si nous avons un processus électoral, si nous avons des institutions politiques qui font que 122 hommes et femmes du Québec se retrouvent ici pour prendre des décisions qui affectent la vie quotidienne de toute la population, c'est parce qu'on ne peut demander à 6 500 000 personnes de se réunir à tous les jours pour prendre des décisions collectivement qui affectent leur vie de tous les jours. Si nous avons des institutions politiques c'est parce que ces 6 500 000 personnes ont décidé, comme dans le plupart des autres sociétés, de déléguer cette responsabilité et ces pouvoirs qui sont les leurs à 122 personnes qui consacrent tout leur temps à prendre des décisions en leur nom, au nom de ces hommes et de ces femmes qui constituent le peuple québécois.

Il faut donc nous assurer, même si nous sommes délégués pour prendre des décisions ici même en leur nom, que nous sommes parfaitement représentatifs de chacun d'entre eux. La meilleure façon d'être parfaitement représentatifs de chacun d'entre eux, c'est d'avoir un processus électoral parfaitement démocratique et, deuxièmement, d'avoir des hommes et des femmes élus ici, qui ont tous un poids politique identique et qui représentent tous un nombre d'électeurs à peu près comparable de sorte que, ultimement, cette souveraineté du peuple québécois soit assumée de façon égale, c'est-à-dire que chaque citoyen est égal devant ses concitoyens et concitoyennes dans cette grande vie démocratique qui est absolument nécessaire et qui est la nôtre au Québec.

Donc, nous souhaitons que cette réforme de la carte électorale puisse entrer en vigueur avant le prochain scrutin général, ce qui nous donnera des garanties que cette carte électorale continuera d'évoluer au rythme de nos déplacements de population au Québec et sera respectueuse des évolutions et des changements démographiques que nous connaissons au Québec. Nous maintiendrons

ainsi ce principe fondamental qui est la pierre d'assise de nos institutions politiques et de nos institutions démocratiques, celui de l'égalité entre les électeurs et entre ceux et celles qui composent le corps électoral du Québec.

Deuxièmement, nous souhaitons que ce travail soit toujours fait par une commission indépendante des formations politiques, par une commission impartiale qui ne rencontre aucune entrave et dans laquelle il n'y a aucun rôle décisionnel direct ou indirect d'un, deux ou de tous les membres de l'Assemblée ou de l'une ou l'autre des formations politiques présentes sur le territoire du Québec. Nous souhaitons et nous défendrons le maintien d'une commission impartiale sur laquelle les hommes et les femmes politiques du Québec, comme les formations politiques du Québec, n'auront aucune prise, aucune influence directe face aux décisions à prendre.

Voilà les grands principes que nous voulons faire valoir dans cette refonte de la carte électorale d'ici les prochaines élections. C'est à partir de ces principes que, comme je le disais tantôt, nous avions des inquiétudes et des objections à reporter une nouvelle fois la date du départ de l'opération de la nouvelle délimitation des circonscriptions électorales. Car il faut savoir que le 1er mai 1987, selon les tableaux qui nous ont été fournis par le Directeur général des élections, nous menait à une nouvelle carte électorale qui entrerait en vigueur de façon opérationnelle, pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises, des formations politiques et des hommes et des femmes qui les composent, quelque part au printemps de l'année 1989, donc dans la quatrième année de mandat du gouvernement. Il faut se rappeler que nous n'avons pas des institutions politiques où les scrutins sont à date fixe et qu'en conséquence il faut que nous nous dotions d'un calendrier qui nous assure que, le jour où le premier ministre décidera d'annoncer et de décréter une élection générale, ce travail de refonte de la carte électorale aura été effectué suffisamment longtemps à l'avance pour qu'il puisse faire en sorte que cette élection soit tenue sur la base de cette nouvelle carte électorale qui maintiendra le degré élevé de démocratisation de notre processus électoral et donc de représentativité parfaite de l'ensemble des électeurs, des hommes et des femmes qui constituent le collège électoral du Québec.

Si nous avons progressé dans notre réflexion, c'est, d'une part, parce que nous avons eu l'occasion, avec le ministre délégué à la Réforme électorale et un certain nombre de ses collègues, de bien étudier les calendriers qui nous ont été soumis par le Directeur général des élections et d'avoir l'ensemble des assurances que nous recherchions. Tous ensemble, les deux formations politiques et particulièrement le gouvernement, puisque l'initiative des travaux parlementaires revient au gouvernement, nous ferions en sorte de travailler maintenant, quitte à prendre les bouchées doubles, afin que, le plus tôt possible, mais de façon convenable et respectueuse des us et coutumes en cette matière, nous puissions procéder à cette refonte de la carte électorale.

Nous reconnaissons en ce sens que les ouvertures, les propositions qui nous ont été faites par le ministre délégué à la Réforme électorale nous permettent d'envisager, dans la mesure où ces ouvertures seront respectées - je crois qu'elles seront respectées par le ministre et son gouvernement - que nous puissions étudier ces questions, y réfléchir dans des délais qui nous permettront quand même de procéder à cette refonte de la carte et faire en sorte que cette carte soit opérationnelle, soit effective à l'occasion de la prochaine élection générale. C'est d'ailleurs en ce sens que nous avons souhaité que le leader du gouvernement nous présente un amendement que nous discuterons tout à l'heure en comission plénière qui aura pour effet de permettre à la commission parlementaire qui se réunira en janvier prochain non pas de faire en sorte que nous attendions au 1er mai pour amorcer le processus de refonte de la carte mais que, dès la fin de nos travaux en janvier prochain, lorsque nous aurons fait la liste des consensus, donc des accords auxquels les deux formations politiques en sont arrivés, puisque le leader du gouvernement s'engage à ne légiférer que sur les accords intervenus entre les deux formations politiques, dès le moment où ces accords seront connus, dis-je, c'est-à-dire fin janvier, début février, la Commission de la représentation puisse immédiatement entreprendre son travail de préparation de son rapport préliminaire. Cela nous fera gagner quatre ou cinq mois de travaux et nous permettra même de devancer la date finale à laquelle cette nouvelle carte électorale pourrait entrer en vigueur. Nous discuterons tout à l'heure de cet amendement. (12 heures)

La deuxième raison qui fait que nous sommes prêts à concourir à l'adoption du projet de loi 147, c'est que le leader du gouvernement, le ministre délégué à la Réforme électorale, y est allé d'engagements très clairs et très formels en son nom personnel et au nom de son gouvernement pour que, dans le projet de loi amendant la Loi sur la représentation électorale, les amendements qui seront déposés et adoptés par l'Assemblée nationale au cours de la prochaine session ne seront que des amendements qui ont fait l'objet d'accords entre les

deux formations politiques représentées à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le Parti libéral et le Parti québécois. À partir du moment où le leader du gouvernement nous donne l'assurance qu'on ne tentera pas d'imposer à l'Opposition et aux autres Québécois et Québécoises des modifications au processus de représentation électorale mais qu'au contraire le gouvernement s'engage à se limiter - et c'est bien ce que je comprends de l'engagement du leader du gouvernement - comme au printemps dernier, à légiférer sur les sujets sur lesquels il y a un accord formel entre les deux formations politiques, accord devant intervenir au cours de la commission parlementaire qui se tiendra à la fin de janvier et au début du mois de février prochain, cela nous donne des assurances de cette volonté de poursuivre le processus d'ajustement, d'amélioration de nos lois électorales à partir des mêmes procédures qui ont été utilisées au cours des dernières années.

Faut-il rappeler que la dernière élection générale au Québec, celle du 2 décembre 1985, s'est tenue selon une Loi électorale profondément modifiée, selon une Loi régissant les listes électorales qui a connu des changements importants, sur une Loi sur le financement des partis politiques qui avait connu des ajustements substantiels. Tous ces changements étaient le fruit d'accords formels entre le Parti libéral, qui constituait l'Opposition à cette époque, et le Parti québécois qui formait le gouvernement. Je décrirai comment cela s'est déroulé, M. le Président.

Nous siégions au conseil consultatif présidé par le Directeur général des élections, où nous retrouvions un certain nombre de techniciens du Directeur général des élections, du Parti libéral du Québec et du Parti québécois en présence de l'actuel ministre des Transports, député de Charlesbourg, qui représentait, à ce comité, le Parti libéral qui formait l'Opposition et moi, comme député de Gouin, représentant la majorité gouvernementale de l'époque, du Parti québécois.

Comment avons-nous procédé? Le député de Charlesbourg proposait des modifications, nous nous entendions sur le contenu de ces modifications et c'était inclus dans le projet de loi. Le Directeur général des élections proposait des modifications. S'il y avait accord entre le député de Charlesbourg et le député de Gouin, nous mettions cet article dans le projet de loi à être déposé. Je faisais des propositions qui obtenaient l'accord du député de Charlesbourg et de sa formation politique, cette disposition était amenée dans le projet de loi.

À partir du moment où, soit le député de Charlesbourg, soit le Directeur général des élections ou le député de Gouin proposait une modification qui ne rencontrait pas l'accord de l'autre formation politique, automatiquement, nous prenions le sujet, l'article proposé, nous le mettions de côté et jamais le Parti québécois, lorsqu'il formait le gouvernement au cours de ces procédures, n'a tenté de ramener des modifications sur lesquelles il n'y avait pas eu accord formel entre les deux formations politiques.

Cela nous a menés à une refonte importante de la Loi électorale, à des modifications majeures à la Loi régisant les listes électorales et à des ajustements substantiels à la Loi sur le financement des partis politiques qui ont été mises en application au cours de la dernière élection générale et qui n'ont posé de problèmes à personne. Jamais personne n'est venu contester la légitimité de ces dispositions et l'impartialité dans laquelle ces dispositions avaient été décidées.

Dans la mesure où le ministre délégué à la Réforme électorale et leader parlementaire nous dit que nous allons procéder de la même façon, par le biais d'une commission parlementaire, dans le cadre de la Loi sur la représentation électorale, c'est-à-dire que nous discuterons tous ensemble publiquement, ouvertement, en commission parlementaire, de l'ensemble des recommandations du rapport Rémillard, des recommandations qui pourraient nous venir du Directeur général des élections ou de toute autre suggestion qui pourrait nous venir des membres de cette commission parlementaire, lorsqu'il y aura accord, nous inclurons ces accords dans la liste des éléments que contiendra le projet de loi et lorsqu'il n'y aura pas accord entre les deux formations politiques, nous suspendrons et nous reporterons ultérieurement les amendements que le gouvernement, un membre ou le directeur général souhaitait apporter, dans la mesure, donc, où le projet de loi qui sera déposé au printemps prochain reflétera les accords, les ententes intervenues entre les deux formations politiques présentes en cette Chambre et qui composeront cette commission parlementaire. Il s'agit de garanties qui nous permettent aujourd'hui de souscrire à l'adoption du projet de loi 147.

Je le répète, cette attitude et ces engagements formels du leader du gouvernement, alliés à cette volonté exprimée qui sera débattue tantôt en commission plénière, de permettre à la Commission de la représentation électorale de commencer ses travaux dès la conclusion de la commission parlementaire qui aura identifié les consensus, donc qui nous permettra de gagner du temps, gui ajoutera quant aux garanties que nous aurons que la prochaine élection générale se tiendra avec une nouvelle carte électorale, font en sorte que nous sommes prêts à collaborer pleinement avec le ministre délégué à la Réforme électorale et

que nous sommes en mesure d'appuyer l'adoption du projet de loi 147.

J'ajoute que nous souhaitons, comme l'a dit le leader du gouvernement, que le mandat, la durée et le moment de cette commission parlementaire soient définis ici à l'Assemblée nationale par un mandat de la Chambre avant l'ajournement du 19 décembre et que, quant à nous, ce mandat devrait se résumer pour l'essentiel à étudier les recommandations du rapport Rémillard que pourrait nous faire le Directeur général des élections ou tout membre de la commission parlementaire et que le mandat de cette commission serait d'étudier l'ensemble de ces recommandations, d'identifier les sujets d'accord entre les formations politiques et de recommander par la suite un projet de loi qui reflétera en totalité et de façon exclusive les accords intervenus entre les deux formations politiques.

Compte tenu que nous connaîtrons donc dès la fin de cette commission parlementaire les sujets sur lesquels il y a accord, donc les sujets qui seront compris dans le projet de loi, la Commission de la représentation électorale pourrait commencer ses travaux immédiatement, et tel est le voeu de l'Opposition. D'autant plus que les quatre ou cinq premiers mois de ces travaux consistent à préparer un rapport préliminaire, donc une proposition de refonte de la carte. Ce n'est pas un processus public mais un processus de travail interne pour la commission qui nous permettrait de gagner quatre ou cinq mois pour en arriver, au moment de l'adoption du projet de loi, à ce que la commission soit prête dès ce moment à partir en consultation générale de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, des élus locaux et régionaux qui voudraient faire part de leurs commentaires sur les propositions qui sont faites et qui doivent recevoir les commentaires pour faire en sorte que celles-ci tiennent bien compte des réalités locales et régionales du Québec pour qu'elles suscitent l'adhésion et la confiance d'une grande participation de nos citoyens au processus électoral que nous connaissons.

Voici en gros les principes qui nous guident dans l'étude de ce projet de loi, les objectifs que nous recherchons et les motifs de notre accord au projet de loi.

Je conclus mon intervention en disant, M. le Président, que nous sommes heureux de l'ouverture d'esprit, de l'attitude et des engagements réitérés par le leader du gouvernement de procéder par consensus, par accord des formations politiques sur ces questions. Je pense que c'est le prix que nous devons payer pour conserver non seulement ce degré élevé de démocratisation de nos institutions et de notre processus électoral mais que c'est ce prix que nous devons payer pour maintenir et accroître encore, dans la mesure du possible, cette confiance et cette participation de l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes du Québec à ce processus électoral qui n'est pas le nôtre, qui n'est pas fait pour nous mais qui est le leur, qui est fait pour qu'ils puissent être bien entendus, bien représentés démocratiquement ici à l'Assemblée nationale quand vient le temps de prendre des décisions qui, ultimement, auront toujours des effets sur eux parce qu'elles sont prises en leur nom et que les conséquences sont portées par nos concitoyens et nos concitoyennes du Québec.

Je vous remercie M. le Président. Quant à nous, nous sommes prêts à adopter le principe de ce projet de loi et, comme l'a demandé le leader du gouvernement, à étudier les différents articles en comission plénière.

Le Président: Merci, M. le député de Gouin.

Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe...

M. le leader du gouvernement.

M. Michel Gratton (réplique)

M. Gratton: Brièvement, M. le Président, si on me permet...

Une voix: En réplique. (12 h 10)

M. Gratton: ...en réplique, de donner quelques précisions. Le député de Gouin a parlé, à juste titre, de la confiance que doit avoir la population dans le processus électoral, plus spécifiquement dans le processus de délimitation des circonscriptions électorales. Cette confiance qui existe effectivement existe surtout parce que tout le travail, tout le processus est exécuté et réalisé par une commission indépendante, la Commission de la représentation, qui est composée de trois membres qui sont nommés par l'Assemblée nationale aux deux tiers de ses membres, ce qui veut dire, en fait, à l'unanimité, comme c'est le cas pour les trois membres qui sont présentement à la commission, laquelle est présidée par le Directeur général des élections.

Je voudrais, à ce moment-ci, en profiter pour rectifier une affirmation que contenait une dépêche de la Presse canadienne, à la suite de la commission parlementaire du 27 novembre dernier, qui faisait allusion au fait que le rapport du Secrétariat à la réforme électorale, communément appelé le rapport Rémillard, avait proposé ou proposait le remplacement de l'actuelle commission indépendante par un comité gouvernemental. C'est ce que disait la dépêche. M. le Président, dans le rapport de la commission, dans les affirmations du gouvernement, il n'a jamais été question de procéder au remplacement de l'actuelle

commission par un comité gouvernemental; loin de là. Le rapport indiquait fort bien, en parlant de changements possibles, que, d'abord, la commission devait continuer d'exister, sinon de façon permanente, tout au moins par la formule d'une commission ad hoc dont les membres seraient nommés de la même façon que présentement, c'est-à-dire par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale. Il n'a jamais été question, il n'est pas question, il ne sera pas question de retourner à ce qui a déjà existé, c'est-à-dire un processus qui permettait aux partis politiques d'intervenir. Évidemment, on conservera ce qui existe déjà dans le processus actuel, c'est-à-dire la possibilité pour les membres de l'Assemblée nationale, pour toutes les personnes intéressées et pour la population de faire valoir leur point de vue devant la Commission de la représentation. Mais il n'a jamais été question - je le répète - il n'est pas question et il ne sera jamais question de ne pas conserver le caractère d'absolue indépendance que la Commission de la représentation possède par rapport aux partis politiques.

Cela dit, M. le Président, je voudrais tout simplement accepter de répéter que, oui, c'est l'intention du gouvernement, c'est mon intention de faire en sorte que les modifications qu'on apportera à la Loi sur la représentation électorale soient limitées uniquement à celles qui auront fait l'objet d'un accord des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale. Je l'ai dit et je le répète, il n'est pas question de faire quoi que ce soit qui n'aura pas été agréé par les partis politiques représentés à l'Assemblée nationale.

Je dis à l'avance au député de Gouin que je tâcherai de le convaincre et de convaincre sa formation politique, en commission parlementaire, du bien-fondé de la plupart des éléments que contient le rapport Rémillard et d'autres dont nous avons discuté depuis la production de ce rapport. Mais nous nous limiterons dans les amendements apportés à la Loi sur la représentation électorale uniquement à ces éléments qui auront été l'objet d'un accord des partis politiques représentés, de façon à faire en sorte - je pense, d'ailleurs, que c'est la seule façon de procéder - qu'on ne touche pas au processus électoral sans l'assentiment... J'irais même jusqu'à dire, sauf des exceptions que je ne peux pas m'imaginer, mais de façon unanime. Je pense que c'est ce qu'on souhaite. C'est ce que nous rechercherons, et j'ai confiance que nous obtiendrons l'unanimité de l'ensemble des 122 députés de l'Assemblée nationale -évidemment, on l'a déjà; j'en remercie le député de Gouin - sur l'adoption du principe du projet de loi 147, mais également sur les amendements à apporter à la loi.

J'ouvre une courte parenthèse pour dire que cela n'a pas toujours été le cas. Il est vrai, comme l'évoquait le député de Gouin, que tous les amendements à la loi électorale qui ont été adoptés au cours des quatre dernières années l'ont été unanimement après des travaux au comité consultatif prévu dans la loi électorale.

M. le Président, je le constate et il est tout à fait vrai que cela fut le cas sauf qu'il faut dire que, lorsque la Loi sur la représentation électorale a été adoptée, elle l'a été à l'unanimité mais pas pour chacun de ses éléments. Notamment, je me rappelle fort bien qu'à titre de porte-parole de ma formation politique j'avais fait valoir qu'on ne devait pas laisser à la Commission de la représentation la décision du nombre des circonscriptions électorales, qu'il appartenait plutôt à l'Assemblée nationale elle-même de décider d'avance du nombre de députés qui devraient représenter la population à l'Assemblée nationale et qu'ensuite la commission pourrait, à partir des critères que cela comportait, en arriver à délimiter la carte.

Le gouvernement d'alors n'avait pas retenu la formule et je suis très heureux de constater que l'Opposition aujourd'hui se dit prête à examiner la chose et nous assure même de sa collaboration de ce côté. On ne saurait agir de façon responsable en laissant le nombre des circonscriptions varier selon des critères démographiques qui nous échappent évidemment.

Cela étant dit, M. le Président, je répète que nous ferons cet exercice pour atteindre l'unanimité et que, plutôt de le faire au sein d'un comité consultatif qui a eu sa valeur et qui a toujours sa valeur mais dont le mandat, à mon avis, selon la loi, est bien plus de conseiller le Directeur général des élections que d'"înitier" des gestes législatifs, nous procéderons plutôt par la voie de commissions parlementaires. Les discussions seront publiques, elles seront enregistrées et consignées au Journal des débats. De cette façon, nous pourrons associer à notre démarche un plus grand nombre de personnes encore et l'ensemble des citoyens puisque ce sont eux qui sont les premiers touchés.

Là-dessus, M. le Président, une fois l'adoption du principe consommé, je proposerai que nous nous transformions en commission plénière de façon à pouvoir étudier de façon détaillée le projet de loi et surtout d'adopter les deux amendements auxquels j'ai fait référence et qui viendront répondre aux demandes de l'Opposition, tout au moins quant au deuxième amendement.

Je sollicite donc le concours des membres de l'Assemblée pour l'adoption du principe du projet de loi 147.

Le Président: Merci, M. le ministre. Est-ce que la motion proposant l'adoption du

principe du projet de loi 147 est adoptée? M. Gendron: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui. Alors, M. le Président, je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière pour que nous procédions immédiatement à l'étude détaillée du projet de loi.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Gendron: Adopté. (12 h 20)

Le Président: Adopté. Alors, cette Assemblée se transforme immédiatement en commission plénière pour étudier le projet de loi 147.

Commission plénière

M. Saintonge (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission parlementaire se réunit donc pour s'acquitter de son mandat, soit l'étude détaillée du projet de loi 147, Loi modifiant la Loi sur la délimitation des circonscriptions électorales. Au départ, est-ce que M. le ministre a quelque autre commentaire à faire à la commission?

M. Gratton: Non, M. le Président, sauf peut-être pour vous demander de faire lecture, tout au moins, du premier amendement dont vous avez obtenu copie et que j'ai d'ailleurs remis au député de Gouin. Quant au deuxième, il y aura des modifications de forme à apporter, mais si vous pouvez faire lecture du premier amendement pour qu'on puisse s'entendre sur son adoption.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Gouin, cela vous convient, vous n'avez pas de remarques préliminaires? Tout est déjà fait?

M. Rochefort: Non. Peut-être une remarque à la suite de l'intervention du ministre dans son droit de réplique, pour lui dire que nous aborderons les travaux de la commission parlementaire en janvier prochain avec toute l'ouverture d'esprit qu'implique une telle discussion et que nous tenterons d'apporter tous les éclairages qui seront nécessaires pour permettre un débat sain, positif, constructif et pour tenter d'en arriver à des propositions satisfaisantes pour tout le monde.

Le Président (M. Saintonge): Très bien, merci. M. le ministre.

M. Gratton: Sauf si on me permettait de remercier d'avance le député de Gouin pour cette ouverture et le remercier d'autant plus sincèrement que je reconnais ses grandes qualités d'organisateur électoral, qui pourront être extrêmement utiles à la commission.

Étude détaillée

Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le ministre. Je vous remercie. Nous allons donc procéder à l'appel des articles. J'appelle l'article 1 et à l'article 1, comme le ministre délégué à la Réforme électorale en faisait mention, j'ai reçu un amendement qu'il m'a soumis et qui se lit comme suit: Que l'article 1 soit modifié en remplaçant, dans la deuxième ligne du deuxième paragraphe, le mot "novembre" par le mot "septembre", ce qui fait que le deuxième paragraphe se lirait comme suit: "par le remplacement, dans la sixième ligne du même alinéa, de "15 septembre 1987" par "15 février 1988". C'est bien cela?

M. Gratton: Oui. Alors, il s'agit simplement de corriger une faute de frappe, qui n'est pas sans avoir une certaine conséquence, mais effectivement c'est le 15 septembre 1987 plutôt que 15 novembre 1987.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Gouin.

M. Rochefort: II est évident que pour nous cela ne pose pas de problème, d'autant plus qu'il s'agit finalement d'un article de concordance, à partir du moment où on accepte de reporter la date. La seule question que j'adresserais peut-être au ministre, c'est la suivante: Ces modifications de dates tiennent compte et découlent d'un nouveau départ à partir du 1er mai 1987. Dans la mesure où - puisqu'on en discutera au prochain amendement - la Commission de la représentation commencerait ses travaux dès la mi-février qui vient, est-ce que ces dates qui sont dans la loi sont des dates ultimes pour répondre à ces différentes étapes, ou est-ce que ce sont des dates avant lesquelles la commission ne peut procéder pour les étapes prévues?

M. Gratton: II s'agit de dates ultimes. Par exemple, dans le cas du 15 septembre dont il est question ici, il s'agit de la date ultime. En vertu de l'article 25 du projet de loi 23, le rapport devait être remis au plus tard le 2 décembre 1986. Maintenant, il doit être remis au plus tard le 15 septembre 1987. Donc, c'est au plus tard. Il n'y a rien qui empêche la commission de le produire beaucoup plus tôt. C'est ce qui d'ailleurs va se produire, semble-t-il.

M. Rochefort: Dans les circonstances, M. le Président, avec la réponse du ministre, nous sommes prêts à adopter l'amendement.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. L'amendement proposé est-il adopté?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que l'article 1 tel qu'amendé est adopté?

M. Gratton: Oui. Je présume que oui. M. Rochefort: Oui.

M. Gratton: Sauf qu'à ce moment il y a le deuxième amendement dont je pense que nous devrions faire lecture.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre, si vous le permettez, le deuxième amendement, en fin de compte, va ajouter un article. Donc, nous allons commencer par adopter l'article 1 tel qu'amendé pour revenir à l'article 1.1. D'accord?

M. Gratton: D'accord.

Le Président (M. Saintonge): Est-ce que l'article 1 tel qu'amendé est adopté?

M. Rochefort: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Avant d'adopter l'article 2, nous allons aller au deuxième amendement que m'a soumis le ministre délégué à la Réforme électorale. Cet amendement a pour but d'insérer, après l'article 1, le suivant: 1.1. Cette loi est modifiée par l'insertion après l'article 1 du suivant: "1.1. Malgré le premier alinéa de l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, des opérations relatives à la délimitation des circonscriptions électorales peuvent reprendre avant le 1er mai 1987."

M. le ministre.

M. Gratton: Pour la forme, d'abord, M. le Président, je pense qu'on pourrait biffer les mots "le premier alinéa" et tout simplement dire: "Malgré l'article 1". Finalement, l'article 1 est complet en soi. Je ne pense pas qu'on doive se référer au premier alinéa. Donc, je propose qu'on biffe les mots "le premier alinéa de".

Le Président (M. Saintonge): D'accord, on biffe ces mots.

M. Gratton: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Saintonge): Donc, l'amendement est le suivant: "Malgré l'article 1".

M. Gratton: Cela va? M. Rochefort: Adopté.

M. Gratton: Sur le fond, M. le Président, c'est pour répondre a la demande fort justifiée, à mon avis, du député de Gouin qui souhaite comme nous que si... Je pense bien que l'on ne doit pas dire si, mais quand nous aurons dégagé des consensus dont nous avons parlé en commission parlementaire, à la fin de janvier ou au début de février, si la commission le souhaite, il serait tout à fait normal que la Commission de la représentation puisse commencer ses travaux malgré l'article 1 qui, lui, prévoit que les travaux ne débutent que le 1er mai. C'est donc la façon de le formuler. Nous avons cru bon d'indiquer que l'Assemblée nationale devrait pouvoir autoriser le Directeur général des élections à commencer ses travaux avant le 1er mai ou, comme il est fort probable que l'Assemblée nationale ne sera pas en session au moment où la commission terminera ses travaux, que ce soit la commission que l'Assemblée désigne.

Je voudrais indiquer tout de suite au député de Gouin qu'il est de notre intention, évidemment, sous réserve de la vérification des mandats qui pourront être confiés aux diverses commissions durant la période d'intersession, de confier à la commission des institutions le mandat de procéder au travail dont nous avons parlé, en janvier ou en février.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Quant à l'objectif visé par l'amendement, il est clair que nous y adhérons totalement. Quant à la formulation, j'aurais peut-être un certain nombre de commentaires. Lorsqu'on dit: "ou de la commission parlementaire qu'elle désigne", est-ce qu'on ne devrait pas être plus précis et dire: ou de la commission parlementaire qui étudiera ces questions en janvier prochain? Je n'ai évidemment pas refait le texte, mais ne serait-ce pas plus précis?

M. Gratton: Ce serait plus précis... Nous y avons pensé, mais nous étions rendus a trois ou quatre phrases pour définir quelle commission ce serait, la commission qui procédera à dégager des consensus. Comme nous ne pouvons pas nous référer aux dates, nous pensons que, dans sa formulation actuelle, il n'y a pas de méprise. Je pense que l'intention est claire de part et d'autre et que nous ne risquons pas que cela porte à confusion. À moins que le député de Gouin ne puisse me suggérer une formule qui...

M. Rochefort: Ce que je dirais, M. le Président, à la réponse du ministre délégué à la Réforme électorale, c'est que, dans la mesure où on laisse le texte tel quel, je crois que, lorsque nous adopterons ici le mandat de la commission avec sa durée et son moment, on devra indiquer que c'est cette commission qui est désignée au sens de l'article 1.1 de la loi 147. Il faudrait que ce soit clair...

M. Gratton: Je suis prêt à m'engager à cela.

M. Rochefort: ...et qu'on inscrive cela dans le mandat que l'Assemblée dégagera pour que cela ne porte à confusion d'aucune façon et qu'on ne se retrouve pas en plein coeur de l'intersession avec un vide juridique qui nous empêcherait de donner les suites pour lesquelles nous débattons l'amendement déposé par le ministre. (12 h 30)

M. Gratton: D'accord, M. le Président. Dans le mandat que nous présenterons ici à l'Assemblée nationale avant l'ajournement des fêtes, nous indiquerons que la commission des institutions, en supposant que ce soit elle comme je l'indiquais tantôt, est celle visée par l'article 1.1 du projet de loi 147.

M. Rochefort: Parfait, je suis satisfait de la réponse du ministre.

J'ai un deuxième commentaire sur l'autre partie où on dit "de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne des opérations relatives à la délimitation des circonscriptions électorales peuvent reprendre avant le 1er mai 1987". Est-ce que là aussi on n'aurait pas avantage à être un peu plus précis et à dire plutôt que l'Assemblée nationale ou la commission parlementaire qu'elle désigne peut donner le mandat à la Commission de la représentation d'entreprendre ses travaux avant le 1er mai 1987?

Cela pourrait se lire comme ceci: Malgré l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, la Commission de la représentation électorale peut reprendre ses travaux relatifs à la délimitation des circonscriptions électorales avant le 1er mai 1987.

M. Gratton: M. le Président, effectivement, on s'entend pour dire que c'est la même intention qui est traduite de façon différente. Comme le projet de loi 147 fait référence au projet de loi 23 qui, lui, fait référence à la Loi sur la représentation électorale, il est évident qu'il s'agit de la commission permanente. D'ailleurs, pour tout vous dire, la formulation que nous avons là nous a été suggérée par le Directeur général des élections qui est président de la

Commission de la représentation électorale. Je présume que, s'il nous fait cette suggestion - il me l'a, d'ailleurs, faite à ma demande et le député de Gouin était présent à ce moment-là - étant beaucoup plus ferré que moi dans ce domaine, il devrait satisfaire tout le monde.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Je comprends la réponse du ministre. Je ne voudrais pas faire de la procédure, mais j'avoue que je souhaiterais qu'on modifie l'article 1.1 comme ceci: "Malgré l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, la Commission de la représentation électorale peut reprendre, avant le 1er mai 1987, les opérations relatives à la délimitation des circonscriptions électorales." Je peux le déposer. Évidemment, je l'ai écrit avec des flèches, mais c'est clair, quant à moi. S'il y a des problèmes de lecture...

Le Président (M. Saintonge): C'est donc un sous-amendement déposé par M. le député de Gouin, qui aurait pour effet de modifier l'article 1.1 de façon qu'il se lise comme suit: "Malgré l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, la Commission de la représentation...

M. Rochefort: Peut reprendre.

Le Président (M. Saintonge): ...peut reprendre...

M. Rochefort: La Commission de la représentation électorale.

Le Président (M. Saintonge): Excusez. M. Rochefort: Non? D'accord.

M. Gratton: C'est la Loi sur la représentation électorale, mais c'est la Commission de la représentation.

Le Président (M. Saintonge): C'est la Commission de la représentation.

M. Rochefort: D'accord.

Le Président (M. Saintonge): Donc, "la Commission de la représentation peut reprendre les opérations relatives à la délimitation des circonscriptions électorales avant le 1er mai 1987."

M. Rochefort: C'est cela.

M. Gratton: Cela va, M. le Président. Il semble, M. le Président, que vous êtes le

seul à avoir des problèmes.

Le Président (M. Saintonge): Je le relis pour être bien sûr que nous nous entendons bien sur ce que nous faisons. Le sous-amendement a pour but de remplacer. Question de forme, nous allons présenter cela comme un seul amendement. Cette loi est modifiée par l'insertion après l'article 1 du suivant: "1.1 Malgré l'article 1, à la demande de l'Assemblée nationale ou de la commission parlementaire qu'elle désigne, la Commission de la représentation peut reprendre les opérations relatives à la délimitation des circonscriptions électorales avant le 1er mai 1987." Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Gratton: Adopté. M. Rochefort: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que l'article 1.1 est adopté?

M. Rochefort: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. J'appelle maintenant l'article 2. Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Rochefort: Adopté. M. Gratton: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): L'article 2 est adopté.

M. Rochefort: Je ferais peut-être un commentaire, M. le Président...

Le Président (M. Saintonge): Oui, un commentaire.

M. Rochefort: ...avant de passer à l'adoption du titre du projet de loi. C'est une suggestion que je fais, peut-être plus au leader du gouvernement qu'au ministre délégué à la Réforme électorale. Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable que, dès que la décision aura été prise quant au choix de la commission qui procédera à ces travaux en janvier prochain, il y ait un genre de comité directeur, qui pourrait être celui de la commission des institutions, qui nous prépare ce mandat, la proposition de durée, le moment de siéger, comme cela se fait dans l'ensemble des autres commissions lorsqu'on étudie le cadre d'un mandat d'initiative, les engagements financiers ou des choses comme cela? Cela permettrait à des députés, une fois cette décision prise, de travailler immédiatement à préparer ce mandat qui pourrait ensuite être soumis et formellement retenu par l'Assemblée.

M. Gratton: M. le Président, une chose est certaine: pour ce qui est du libellé du mandat à donner à la commission, de la désignation de la commission, de même que des dates où elle siégera, je vais tâcher de déterminer cela au cours de la semaine prochaine, en consultation avec le député de Gouin et le président de la commission qui sera chargé d'exécuter le mandat. On pourra prévoir, soit une séance de travail de la commission ou une réunion du comité directeur pour dégager le terrain. Mais je préférerais qu'on le fasse seulement après que je serai saisi des documents que j'ai commandés au Secrétariat à la réforme électorale en vue de cela. Je m'engage, d'ailleurs, à fournir ces documents à l'ensemble des membres de la commission, ce qui pourra nous permettre de déblayer beaucoup plus rapidement le terrain quant à la façon de procéder. Mais on pourra réunir, soit le comité directeur, soit la commission en séance de travail avant que nous nous quittions le 19 décembre prochain.

M. Rochefort: J'aurais une question à poser, M. le Président.

Le Président (M. Saintonge): Oui, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: C'est sur le nouvel élément apporté par le ministre dans sa réponse. Â quel moment le document en préparation au Secrétariat à la réforme électorale sera-t-il disponible?

M. Gratton: Je pense que ce pourrait être sûrement avant le 19 décembre.

M. Rochefort: Au fond, cela pourrait faire partie des...

M. Gratton: Dans le fond, il y a plusieurs des documents qui sont déjà connus, par exemple le rapport Rémillard, les commentaires du Directeur général des élections et un certain nombre d'autres données que le Directeur général des élections nous a fournies à l'occasion des deux commissions parlementaires qu'on a tenues et d'autres documents qui sont disponibles au secrétariat et dont je prendrai connaissance au cours des jours qui viennent. Ce sera sinon à la fin de la semaine prochaine, au plus tard au début de la semaine suivante.

M. Rochefort: Merci.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Rochefort: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté.

Nous allons faire motion pour la renumérotation. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Rochefort: Adopté. M. Gratton: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que le projet de loi tel qu'amendé est adopté?

M. Rochefort: Adopté. M. Gratton: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Cela met fin à notre mandat. Afin de faire rapport au président de l'Assemblée nationale, je demanderais aux personnes qui sont dans l'enceinte de l'Assemblée nationale et qui n'en sont pas membres de bien vouloir quitter, s'il vous plaît.

Le Vice-Président: M. le Président de la commission plénière.

M. Lemieux (président de la commission plénière): M. le Président, je vous fais rapport que la commission a adopté le projet de loi 147, Loi modifiant la Loi sur la délimitation des circonscriptions électorales, avec amendements.

Le Vice-Président: Très bien. Est-ce que ce rapport de la commission plénière est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, compte tenu de l'heure, nous suspendrons nos travaux jusqu'à 15 heures, auquel moment nous aborderons l'adoption du principe de projets de loi - au pluriel - inscrits au nom du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et du Tourisme.

Le Vice-Président: Y a-t-il consentement à ce que nous suspendions nos travaux?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président: II y a consentement. L'Assemblée nationale suspend donc ses travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures

(Suspension de la séance à 12 h 46)

(Reprise à 15 h 8)

La Vice-Présidente: À l'ordrel Nous allons reprendre les travaux de l'Assemblée. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, Mme la Présidente. Pourrais-je suggérer que nous suspendions quelques instants pour permettre au ministre du Tourisme de se joindre à nous, s'il vous plaît?

Une voix: D'accord.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 9)

(Reprise à 15 h 11)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Ciaccia: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 37 du feuilleton.

Projet de loi 152 Adoption du principe

La Vice-Présidente: À l'article 37 du feuilleton, il s'agit de l'adoption du principe du projet de loi 152, Loi sur les établissements touristiques.

M. le ministre du Tourisme.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir aujourd'hui de vous présenter le projet de loi sur les établissements touristiques qui remplacera, après son adoption, l'actuelle Loi sur l'hôtellerie.

La refonte globale de ce texte législatif applicable au secteur de l'hébergement touristique, de la restauration, du camping et de l'information touristique, vise à doter l'ensemble des entreprises qui oeuvrent dans ce domaine des dispositions législatives claires, modernes et conformes à la réalité du vécu des gens qui façonnent le Québec touristique.

Quatre principes fondamentaux sont à la base de l'élaboration du projet de loi qui est soumis aujourd'hui à mes collègues de l'Assemblée nationale. Premièrement, reconnaître la diversité de l'offre touristique et le développement de multiples formes d'hébergement et de restauration. Le projet de loi s'appliquera à de nouveaux types

d'établissement, comme les gîtes touristiques qu'on appelle communément les "bed and breakfast", les bases de plein air, les camps de vacances, les auberges de jeunesse. De cette façon, l'ensemble des établissements qui accueillent des touristes et qui font de l'hébergement commercial seront soumis à des règles communes et appropriées à chacune des catégories. En agissant ainsi, nous facilitons l'accès pour le touriste à un produit diversifié et de qualité.

En plus de préciser les règles du jeu pour l'ensemble des établissements touristiques, le projet de loi corrige des situations inéquitables. Vous me permettrez, Mme la Présidente, d'énumérer dans l'ordre certaines de ces situations qualifiées d'inéquitables. Premièrement, la Loi sur l'hôtellerie empêchait pratiquement, par l'article 9, le développement des gîtes touristiques, les "bed and breakfast", alors que cette formule est maintenant répandue chez nos concurrents comme l'Ontario et les États de la Nouvelle-Angleterre. Deuxièmement, le fait que certains établissements étaient exclus du champ d'application de la loi alors qu'ils font bel et bien partie de l'offre touristique - je parle ici des établissements comme les bases de plein air, les camps de vacances qui constituent des éléments attractifs en termes de séjour touristique au Québec - était, de fait, aussi une situation inéquitable. L'exclusion des pourvoiries du champ d'application de la Loi sur l'hôtellerie était, à mon avis, un troisième irritant.

Les pourvoiries demeurent toujours sous l'égide de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Celles-ci devront cependant se conformer à des normes minimales édictées en vertu de ce projet de loi en matière d'hébergement, de restauration, de sécurité et de salubrité. Ce projet de loi vise donc à rétablir une équité dans les secteurs concernés. Les établissements seront soumis aux mêmes règles de base, peu importe leur statut de société, de corporation ou d'organisme à but non lucratif.

En second lieu, il faut s'assurer que des règles minimales liées à l'exploitation d'un établissement touristique soient respectées. C'est justement un des objectifs importants de ce projet de loi que nous étudions aujourd'hui.

Sur ce plan, le rôle du gouvernement se veut davantage incitatif qu'interventionniste. Dans le passé, les dispositions législatives applicables au secteur de l'hébergement et de la restauration étaient nettement conçues dans une perspective d'orientation du produit par la définition de normes strictes d'aménagement et de services. Ce projet de loi préconise une démarche davantage orientée vers les besoins du marché. Dieu sait, Mme la Présidente si ces besoins du marché ont évolué depuis quelques années, compte tenu de la concurrence que nos voisins peuvent nous apporter. Je pense que ce point est aussi important et capital.

En conséquence, les normes élaborées seront minimales de façon à ne pas être un frein au développement de nouveaux types d'hôtellerie, de nouvelles formules d'hébergement ou encore de restauration. Â cet égard, nous pouvons voir deux types de normes d'exploitation d'un établissement touristique: Un premier type qui oblige l'exploitation à offrir à sa clientèle un minimum d'aménagement et de services propres à sa catégorie d'établissement. Un deuxième type de normes sont celles édictées en vue de protéger et d'informer le client, c'est-à-dire l'affichage du permis, l'affichage des prix, la déclaration des prix, l'affichage du taux de change et des menus.

Le respect de ces exigences minimales est lié à la délivrance du permis d'exploitation ou à son renouvellement. Le projet de loi introduit un mécanisme d'appel pour l'exploitant en cas de refus, suspension et annulation du permis.

Troisièmement, Mme la Présidente, reconnaître la qualité des établissements par la classification. L'élaboration de règles minimales d'exploitation communes à l'ensemble des établissements relatives à l'aménagement, aux services minimaux, à l'affichage, ne fait pas abstraction du rôle promotionnel et d'information dévolu au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

Le projet de loi introduit le pouvoir de classifier les établissements touristiques de façon que les niveaux de qualité des établissements soient établis et que le touriste consommateur sache à quoi il peut s'attendre lorsqu'il fait le choix de séjourner à tel ou tel autre établissement de son choix. Cet équilibre entre, d'une part, des règles minimales d'exploitation et, d'autre part, la classification des établissements m'apparaît des plus fondés. Au lieu de placer le gouvernement dans un rôle où il définit pratiquement tel ou tel produit par l'édiction de normes très détaillées qui risquent, au fil des années, de ne plus correspondre aux besoins de la clientèle ou qui font en sorte qu'elles accroissent les coûts d'investissement dans le secteur, l'actuel projet de loi mise sur le professionnalisme des intervenants et leur capacité de concevoir un produit de qualité et concurrentiel conforme, comme je l'ai mentionné tantôt, au marché et à la concurrence du marché.

La classification des établissements s'inscrit dans une perspective redéfinie de l'intervention gouvernementale où les actions du ministère du Tourisme viseront à susciter l'innovation à l'intérieur d'un cadre législatif souple et à rendre compte de la qualité des établissements plutôt que d'avoir une

approche basée sur une inspection généralisée et tatillonne. À l'heure actuelle, le ministère du Tourisme classifie les établissements hôteliers et les salles à manger. Ces programmes sont en révision et leurs critères seront inscrits dans un règlement tel que le prévoit l'actuel projet de loi.

Il en sera de même pour tout projet de classification d'autres catégories d'établissements. L'obligation d'afficher la classification est un des éléments majeurs introduits par le projet de loi. Cet élément vise à faire en sorte que le touriste soit mieux informé dans le choix d'un établissement. Cette mesure aura également un effet certain sur la recherche de l'excellence en matière d'hébergement touristique et accroîtra, d'une manière générale, la qualité des établissements par son effet d'émulation. (15 h 20)

En ce qui regarde les pourvoiries, Mme la Présidente, le volet de la classification demeure sous la responsabilité du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Cependant, l'actuel projet de loi prévoit la collaboration du ministère du Tourisme à ce dossier, les pourvoiries étant des établissements très distinctifs de l'offre touristique du Québec.

Un quatrième principe de base introduit dans ce projet de loi vise à responsabiliser les exploitants au respect des normes de sécurité, de salubrité et d'environnement édictées par d'autres ministères, que ce soit en ce qui concerne la sécurité dans les édifices publics, la qualité des aliments ou la protection de l'environnement. De façon à simplifier les démarches administratives auxquelles un exploitant est souvent confronté avant de détenir un permis, il est prévu de demander à ce dernier, par le moyen d'un formulaire de déclaration assermentée, de nous indiquer sa conformité aux autres lois sans pour autant qu'il ait à produire l'ensemble des certificats ou attestations originant des autres ministères.

Ce principe, bien qu'il prône le respect des juridictions des autres ministères, permet tout de même au ministère du Tourisme de s'assurer de la conformité des établissements à certains objets élémentaires comme la sécurité des installations et des équipements, la qualité de l'eau et ce, avant d'émettre un permis d'exploitation. Mon ministère développera ainsi des relations plus intégrées avec les autres ministères dans le cadre de l'administration de ce projet de loi de façon à éviter qu'une personne qui demande un permis soit obligée de frapper à 36 portes différentes afin de se procurer autant d'attestations. C'est souventefois ce qu'il faut éviter quand nous faisons des lois où nous voulons exercer un certain contrôle, à la fois de qualité ou de sécurité, afin de permettre une efficacité du système tout en sachant et en ayant à l'esprit qu'il faut que les intervenants se soient soumis à des règles bien précises ailleurs, mais sans prendre tellement de temps, pour qu'en fin de compte la lenteur administrative vienne freiner aussi des développements qui sont importants, tout en permettant aussi à l'État, je pense bien, Mme la Présidente, d'avoir un bon contrôle à toutes fins utiles.

J'aimerais également porter à votre attention qu'à la suite d'une consultation avec le ministère des Affaires municipales, le présent projet de loi permet aux municipalités et aux communautés urbaines et régionales habilitées de faire de la promotion touristique, d'exploiter un bureau d'information touristique. Cet élément complète les modifications mineures déjà apportées à la Loi sur l'hôtellerie, le printemps dernier, au sujet des bureaux d'information touristique.

On se souviendra, Mme la Présidente, qu'au mois de juin dernier nous avions adopté, à l'unanimité de l'Assemblée nationale, des modifications majeures et très intéressantes au sujet des bureaux d'information touristique. Il restait cependant au ministère du Tourisme à faire une consultation à la table de Québec-municipalités pour bien s'assurer que les municipalités étaient d'accord et possédaient certains pouvoirs du côté des bureaux d'information touristique. C'est la raison pour laquelle nous ajoutons ce point à l'intérieur du projet de loi, tel que nous en avions convenu ensemble lors de son étude il y a déjà quelques mois. Ce projet de loi a fait l'objet d'une consultation menée auprès des associations et organismes durant la période estivale. Un large consensus découle de cette consultation menée conjointement par le ministère du Tourisme et le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Au-delà de la diversité des établissements touristiques et des objectifs qui animent les responsables de ces établissements, il est clair aujourd'hui que chacun d'entre eux a le goût de participer aux mêmes efforts de développement du tourisme. À cet égard, il ne convient plus de parler du tourisme strictement commercial ou de tourisme associatif, mais il convient de parler d'une diversité d'établissements touristiques Veconnus par un même texte législatif.

J'aimerais ouvrir une parenthèse, Mme la Présidente, pour souligner le travail et l'excellente collaboration des différentes associations dans le domaine touristique où nous avons vraiment, avec des fonctionnaires compétents, passé la majorité de notre temps, durant les quelques mois d'été, à discuter avec ces différentes associations, que ce soit les restaurateurs, les hôteliers, les bases de plein air.

Face à ce qu'on appelle le développement touristique comme élément majeur

important et comme retombée économique de premier ordre, comme possibilité de création d'emplois rapide à des coûts moindres et passablement moins dispendieux que dans d'autres domaines, tout le monde s'est donné la main pour faire en sorte que le touriste qui vient chez nous soit toujours bien accueilli avec un sourire, un bonjour, que ce soit du portier au propriétaire de certaines auberges. Cet accueil est primordial. L'ex-gouvernement et nous-mêmes avons agi dans le même sens. Il était juste de penser en ce sens: l'accueil et le bonjour du Québec, c'est important. Cela a aussi conscientisé tout le monde au fait que notre meilleur propagandiste, notre meilleur publicitaire pour demander à des concitoyens et concitoyennes de venir visiter le Québec, de venir séjourner au Québec, restera toujours le touriste qui est bien accueilli. S'il est bien accueilli, il va en parler, s'il est mal accueilli, il va en parler aussi. Mais combien néfaste pourra être finalement cette publicité faite à d'autres concitoyens si les gens ne sont pas bien accueillis.

C'est dans cette foulée que je vous disais, Mme la Présidente, il y a quelques instants que je suis très satisfait non seulement du large consensus intervenu entre les différentes associations, mais de l'apport positif de chacune d'elles dans la préparation dudit projet de loi. Cela nous a permis un niveau de maturité dans les échanges faisant en sorte que tous les intervenants touristiques seront appelés à respecter les mêmes règles du jeu.

C'est un autre élément important, le fait que les gens se soient parlé, soient conscientisés, se soient attablés. Je pense que cela les implique drôlement à vouloir bien respecter les règles du jeu. Cela aussi est important. C'est aussi important que de se promener avec des inspecteurs ou aller importuner dans chacun des milieux une foule de personnes qui pourraient aller, comme je le disais... ou être tatillons et, par le fait même, briser des efforts et des élans que les gens veulent mettre du côté du développement touristique. Tout ce beau monde sera convié à un même défi, celui de développer le Québec touristique et d'accueillir des hommes et des femmes d'ici ou d'ailleurs, des jeunes voyageurs, des enfants pour la période estivale ou des classes de neige, des personnes âgées, concrétisant ainsi la diversité de notre offre touristique. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Tourisme.

M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Je vous dirai d'entrée de jeu que l'Opposition officielle va évidemment accorder son appui au projet de loi 152, Loi sur les établissements touristiques. Cet appui est d'autant plus sans réserve qu'il est bon de signaler que cette refonte du projet de loi sur les établissements touristiques, anciennement appelé Loi sur l'hôtellerie, a été amorcée sous le gouvernement du Parti québécois. (15 h 30)

C'est l'ex-ministre du Tourisme, M. Marcel Léger, qui a pris l'initiative de la démarche conduisant aujourd'hui à la refonte de la Loi sur l'hôtellerie, d'abord, en mettant sur pied un comité regroupant tous les intervenants du milieu touristique, tous les intervenants intéressés par cette loi -l'association des hôteliers, bien sûr, mais aussi l'association des pourvoyeurs, en particulier - de façon que la refonte puisse obtenir l'assentiment des intervenants intéressés par un tel projet de loi. La meilleure façon de le faire a été de les impliquer dès le départ, et c'est ce que M. Marcel Léger avait fait à l'époque. Il avait mis sur pied un comité qui regroupait tous les intervenants.

Il a retenu l'essentiel des recommandations de ce groupe de travail où l'on retrouvait les intervenants intéressés. On les retrouve évidemment dans le projet de loi que le nouveau ministre du Tourisme a fait sien et a présenté à l'Assemblée nationale pour adoption. Par conséquent, c'est un projet de loi qui a été préparé par l'ancien gouvernement, qui obtient l'accord des intéressés, et il est clair que, compte tenu de ces faits, il n'est pas question pour nous de nous opposer à un projet de loi semblable.

Le ministre du Tourisme, l'autre jour, en commission parlementaire, à l'occasion de l'étude de ses engagements financiers, a fait l'éloge de son prédécesseur, M. Marcel Léger, et j'aurais cru qu'à l'Assemblée nationale, à l'occasion de l'étude du projet de loi 152, il aurait fait le même éloge à l'occasion de ce projet de loi, compte tenu du rôle joué par son prédécesseur dans l'élaboration de ce projet de loi... Ah bon...

Un élément intéressant qui est nouveau, qui n'apparaît pas dans la loi actuelle sur l'hôtellerie, c'est la possibilité pour un citoyen - là-dessus, nous sommes évidemment pleinement d'accord - d'interjeter appel de la décision du ministre devant la Cour provinciale. Lorsque le ministre refuse un permis d'hôtellerie, par exemple, ou refuse de renouveler un permis, avec la nouvelle loi, l'hôtelier en question pourra faire appel de la décision du ministre devant la Cour provinciale. C'est une nouvelle notion. Cela n'apparaît pas dans la loi actuelle. C'est maintenant une disposition qu'on retrouve dans le projet de loi 152 et nous sommes parfaitement d'accord avec cet élément nouveau. Je pense que cela permettra à des

citoyens ou des citoyennes qui se sentent lésés dans leurs droits à la suite d'une décision ministérielle relative à un permis d'exploitation de faire appel et, possiblement, de voir la décision du ministre rejetée.

Mme la Présidente, il est important, dans ce domaine-là, de légiférer, de refondre la loi. Là-dessus nous sommes pleinement d'accord mais il faut aussi que cette loi soit respectée sur le terrain de façon concrète. Il faut que les dispositions de la loi soient respectées, que les normes et les règlements issus de la loi soient respectés si l'on veut justement atteindre l'objectif qu'on se fixe par une telle loi, c'est-à-dire améliorer la qualité du produit touristique, en particulier dans le secteur de l'hébergement. Pour que la loi soit respectée, il faut inspecter, procéder à des inspections. Il y a des inspecteurs qui sont habilités à faire des inspections.

Je m'étonne que dans le nouveau projet de loi - le ministre a sans doute des explications à ce sujet - on ne retrouve plus la disposition de la loi actuelle qui stipule que l'émission d'un permis doit être faite après la production d'un rapport d'inspection. Un inspecteur visite les lieux, vérifie si les normes et les règlements sont respectés, fait rapport et c'est à la suite de ce rapport, selon la loi actuelle, que le permis est émis. Or, cette disposition disparaît dans le nouveau projet de loi. Cela m'étonne un peu, parce qu'il m'apparaît essentiel que l'on vérifie, avant d'émettre le permis, si les normes, si les règlements issus de la loi sont respectés par le demandeur, par celui qui demande un permis. Celui qui demande un permis d'hôtellerie, par exemple, a un certain nombre de règles à respecter, un certain nombre de normes et de critères à respecter. On m'informe que même la disposition actuelle de la loi ne serait pas appliquée. Actuellement, il semble j'aimerais que le ministre m'informe là-dessus - qu'on émette des permis sans inspection préalable alors que l'article 6 de l'actuelle loi, pourtant, oblige à produire un rapport d'inspection avant toute émission de permis. C'est un peu surprenant que, dans le projet de loi 152, cette disposition n'apparaisse pas. Je suppose que le ministre a des explications. J'aimerais beaucoup les connaître, parce que cela ne m'apparaît pas acceptable. Il me semble que si l'on vise à améliorer la qualité du produit touristique, il faut faire en sorte que l'on puisse vérifier de façon sérieuse le respect de la loi par les intervenants.

Je vous signale également, Mme la Présidente, qu'à l'article 36 du projet de loi 152 on fait une longue énumération de matières pour lesquelles le gouvernement aura à produire des règlements, à adopter des règlements; quatorze en tout. L'article 36 stipule que le gouvernement peut, par règlement, et il y a, ensuite, énumération de quatorze sujets ou matières que le gouvernement devra préciser et pour lesquels un règlement sera adopté. Je pense qu'on examinera en commission parlementaire la pertinence de toute cette réglementation. Certains de ces règlements sont déjà d'ailleurs en vigueur. Ils seront peut-être modifiés ou amendés par la suite, mais certains sont déjà en vigueur.

On va examiner en commission parlementaire la pertinence de ces règlements, mais je signale simplement, encore une fois, au ministre du Tourisme, membre d'un gouvernement qui se vantait de déréglementer, qui a même annoncé ses couleurs à ce sujet, qui a claironné dès son accession au pouvoir son intention de déréglementer, que proclamer son intention de déréglementer et le faire, ce sont deux choses bien distinctes. On se rend compte que ce n'est pas si simple et on se rend compte, finalement, que l'État est générateur de règles, l'État est, par nature, producteur de règlements. C'est un de ses rôles d'ailleurs. Il y a des règlements qui sont non seulement utiles, mais nécessaires. Je signale simplement que le voeu ou l'intention de déréglementer est très souvent un voeu pieux dans la plupart des domaines qu'on peut bien proclamer quand on n'exerce pas le pouvoir, mais, à partir du moment où on exerce le pouvoir, on se rend vite compte que ce n'est pas si simple que cela, ce n'est pas si facile que cela de déréglementer et qu'il faut au contraire, parfois, produire des règlements nouveaux, adopter des règlements nouveaux. On s'en rend compte avec ce projet de loi où, à l'article 36, quatorze règlements sont prévus. (15 h 40)

Je vous signale tout de suite, Mme la Présidente, que ce sont sans doute des règlements utiles, fort pertinents, sans doute même réclamés par les intervenants, mais je tenais à faire cette remarque justement parce qu'on a en face de nous un gouvernement qui s'est souvent vanté de procéder à une déréglementation systématique. Dans le secteur touristique, il est important, il est utile de légiférer - c'est ce qu'on fait présentement - et de réglementer, ce qu'on va faire aussi. On va produire des règlements issus de cette loi. C'est donc important, puisqu'on souhaite et qu'on a comme objectif d'améliorer la qualité du produit touristique.

Toutefois, le ministre indiquait tout à l'heure en conclusion que le grand défi qu'il convient de relever, c'est le développement du Québec touristique et il est évident que je suis pleinement d'accord avec cette affirmation. Encore faut-il cependant que les décisions du gouvernement, les décisions du ministre soient en accord ou en conformité avec cet objectif, avec cette intention. Ce n'est pas toujours le cas. Je vous signale

que, s'il est bon et utile de légiférer et de réglementer, il est aussi essentiel, si l'on veut développer le secteur touristique chez nous, de prendre des décisions qui favorisent le développement touristique. À ce sujet, ce n'est pas toujours le cas.

Je vous signale en particulier deux décisions qui sont nuisibles au développement touristique. J'espère que le ministre va s'efforcer de corriger la situation à ce niveau. Le premier domaine, c'est celui des liaisons aériennes pour la région de la Vieille Capitale. On sait qu'avec la privatisation de Quebecair il y a des vols, des liaisons aériennes qui ont été supprimées, abolies entre Québec et un certain nombre de villes. Raymond Giroux du Soleil écrivait en éditorial le 21 octobre dernier, et je cite: "Les principaux bénéficiaires de l'industrie touristique du Québec crient au loup. La région perd des millions de dollars chaque année à cause de son isolement aérien. Le milieu hôtelier local - je vous signale que le milieu hôtelier, c'est ce milieu qui est touché par le projet de loi 152 - souffre de l'absence de lien direct avec les aéroports américains et notamment New York."

Les intervenants touristiques, d'ailleurs, allaient dans le même sens. M. Giroux faisait référence à ces intervenants touristiques qui se sont plaints de l'absence de liaison aérienne entre Québec et les principales villes nord-américaines. Entre autres, l'Office du tourisme et des congrès de la communauté urbaine, l'association hôtelière du district de Québec de même que la chambre de commerce réclament avec vigueur, et je cite Le Soleil du 20 octobre, "une liaison aérienne directe entre la Capitale et les grandes villes nord-américaines. Selon les porte-parole de ces organismes, qui participaient à une table ronde, l'absence d'un tel lien direct engendre une perte dépassant les 6 000 000 $ par année pour l'économie de la Vieille Capitale." C'est vrai particulièrement dans le domaine du ski, surtout pour la saison qui s'est amorcée dans le domaine du ski.

Je cite un autre article, celui-là du 20 octobre également: "Déception cruelle de l'industrie du tourisme. La liaison Québec-New York abolie au moment où elle était en plein élan." Et c'est à la suite de la privatisation de Quebecair. En privatisant Quebecair, ces liaisons aériennes ont été abolies. "Le gouvernement du Québec, dit-on, a mis la hache dans la liaison directe Québec-New York - de même que Québec-Boston, d'ailleurs - de Quebecair, au moment où ce service arrivait au seuil de la rentabilité". Les intervenants ajoutaient: "Quebecair avait prouvé la rentabilité de cette ligne. Nous y avions investi beaucoup d'énergie, nous avions une confiance inébranlable et nous sommes amers, cela fait deux fois qu'on nous fait le coup."

Le président Jacques Dussault, de l'Office du tourisme et des congrès de la communauté urbaine, déplorait la façon cavalière dont les choses s'étaient passées. Mme la Présidente, tout en étant pleinement d'accord avec le projet de loi qui aura pour effet, sans aucun doute, d'améliorer la qualité du produit touristique, particulièrement dans le secteur de l'hôtellerie, je signale qu'en même temps, il y a des décisions qui sont prises et qui ont des effets négatifs, néfastes, nuisibles dans le secteur touristique, en particulier, l'abandon des liaisons aériennes Québec-Boston, Québec-New York, à la suite de la privatisation de Quebecair.

Je dis que c'est important de voter des lois, de refondre des lois, de les réviser, de les bonifier, de les moderniser, sans aucun doute, mais il faut que cela s'accompagne de décisions positives dans le secteur touristique, dans d'autres volets du secteur touristique. C'est la même chose également... Je lisais ce matin, toujours dans Le Soleil d'aujourd'hui, que la subvention au Carnaval de Québec allait subir une diminution substantielle. Je cite évidemment les promoteurs du Carnaval de Québec: "Nous avons reçu 270 000 $ seulement en comparaison des 338 500 $ versés l'an dernier, informait le président Pierre Barbeau, et le ministère nous a fait savoir qu'il ajouterait 25 000 $. Mais, à ce seul poste, nous devrons déjà compenser un manque à gagner de 43 000 $." C'est un peu étonnant une décision comme celle-là. C'est un peu décevant aussi, parce qu'on connaît évidemment l'importance du Carnaval de Québec dans le domaine touristique pour ce qui est de la Vieille Capitale. M. Barbeau disait: "Nul besoin de répéter que le Carnaval de Québec est une industrie touristique rentable qui déborde nos frontières, qui est reconnue dans le monde et qui distingue le Québec du reste du monde."

C'est un peu étonnant de voir qu'on diminue la subvention à un événement touristique reconnu, dont la réputation n'est plus à faire et qui, évidemment...

La Vice-Présidente: M. le député de Lac-Saint-Jean....

M. Brassard: Oui.

La Vice-Présidente: ...je voudrais vous rappeler à la pertinence du débat. Nous devons débattre la Loi sur les établissements touristiques et vous êtes en train de nous parler du Carnaval de Québec. Si vous pouviez revenir au projet de loi. Je comprends qu'à un moment donné, on puisse bifurquer, mais j'aimerais qu'on puisse revenir au sujet.

M. Brassard: C'est très pertinent, parce

qu'on parle du principe d'un projet de loi qui porte sur les établissements touristiques et, en particulier, le réseau hôtelier, les hôtels. Et je dis que c'est bien beau de voter des lois pour encadrer l'activité hôtelière, mais qu'il ne faut pas que cela s'accompagne de décisions nuisibles à ce réseau d'établissements qu'on veut encadrer par un nouveau projet de loi. C'est le cas des liaisons aériennes. Cela nuit au réseau hôtelier, particulièrement, à celui de Québec.

Couper la subvention du Carnaval de Québec, cela a des effets nuisibles dans le secteur touristique. Et je fais un parallèle entre une initiative heureuse, souhaitable, avec laquelle je suis pleinement d'accord, qui est de présenter un projet de loi sur les établissements touristiques, qui est une refonte de la loi, qui est une amélioration de la loi actuelle sur l'hôtellerie... Je suis pleinement d'accord avec cela, mais je signale que ce n'est pas tout de voter des lois, ce n'est pas tout de produire des règlements, il faut aussi que cela s'inscrive dans une politique de développement touristique qui permette le développement touristique, qui n'ait pas d'effets nuisibles sur le développement touristique. Voilà ce que je voulais signaler. Je pense que j'étais parfaitement pertinent. (15 h 50)

Cela dit, Mme la Présidente, il est évident que nous allons accorder notre appui à l'adoption du principe de ce projet de loi. En commission parlementaire, nous allons examiner chacune des dispositions ou chacun des articles du projet de loi pour voir s'il n'y a pas lieu de les améliorer et aussi, évidemment, nous allons tenter d'obtenir des explications sur un certain nombre de dispositions, en particulier sur l'article 36 concernant les règlements. J'aimerais également que dans sa réplique le ministre me fournisse, si c'est possible, des explications quant à la disparition des dispositions relatives au rapport d'inspection qui était obligatoire avant d'émettre un permis. Il semblerait même qu'actuellement on accorde des permis sans exiger la production de ce rapport d'inspection. Cela me paraît étonnant. Le ministre a peut-être des explications, mais je pense qu'il serait intéressant de savoir pourquoi on en est arrivé à supprimer cette disposition qui apparaît dans la loi actuelle sur l'hôtellerie. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Matane.

Mme Claire-Hélène Hovington

Mme Hovington: Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi 152, cet après-midi, mais il me fait surtout plaisir d'entendre mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, mentionner que l'Opposition donnera son appui à ce projet de loi sur les établissements touristiques au Québec.

Je veux souligner aussi que le député de Lac-Saint-Jean a raison quand il dit que cette révision de la loi fait suite aux travaux menés par un groupe de travail qui a été formé en décembre 1984. Ce groupe de travail avait été formé à la suite des modifications apportées au règlement sur les établissements hôteliers et les restaurants en 1984. Mais, Mme la Présidente, cette opération, qualifiée de déréglementation à ce moment-là, ne reçut pas l'assentiment des associations sectorielles concernées. C'est pourquoi nous avons procédé plus en profondeur, c'est-à-dire que nous avons eu une phase de consultation qui a quand même été importante au sujet de ce projet de loi. La phase de consultation a justement tenu compte des associations sectorielles concernées. Elle a eu lieu de juin à septembre 1986.

À plusieurs reprises durant la période estivale, les représentants des associations et organismes se sont penchés sur le projet de loi. Permettez-moi de nommer quelques-uns de ces organismes qui sont importants, parce que ce sont vraiment les intervenants du milieu qui se sont penchés sur ce projet de loi. En ce qui concerne l'hébergement touristique, il y a eu l'Association des hôteliers de la province de Québec, l'Association des pourvoyeurs du Québec, l'Association des camps du Québec, les réseaux plein air, les bases de plein air, le Mouvement des camps familiaux, l'Association des auberges de jeunesse et les Agricotours, qui sont les gîtes touristiques. Pour les campings, il y a eu l'Association des terrains de camping du Québec et la Fédération québécoise de campinq-caravaning. Pour la restauration, il y a eu l'Association des restaurateurs du Québec.

Ces divers organismes et associations, Mme la Présidente, ont été étroitement liés à l'élaboration du projet de loi 152 et de la réglementation. Il y a eu aussi une phase de consultation interministérielle avec le ministère de la Main-d'Oeuvre, de la Sécurité du revenu et du Travail, le ministère de l'Environnement, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministère des Affaires municipales et le ministère de la Justice afin de délimiter les mandats respectifs de chacun de ces ministères et éviter ainsi le double emploi de dispositions législatives pour que, quand des intervenants du milieu veulent faire la demande d'un permis, ils n'aient pas à frapper à la porte de différents ministères avant d'avoir leur autorisation.

Vous voyez, Mme la Présidente, que ce projet de loi a reçu le consensus des

différents intervenants du milieu et ceci est important. Dans le projet de loi sur les établissements touristiques, la notion d'établissement touristique, ici, englobera les établissements qui font de l'hébergement, de la restauration, les sites de camping et les bureaux d'information touristique aussi.

Mme la Présidente, d'abord les effets du projet de loi. Il y a un règlement d'application au lieu de quatre règlements, une refonte globale en un seul règlement. Au lieu d'avoir le règlement sur les établissements hôteliers, les restaurants, le règlement sur le camping, le règlement sur l'hôtellerie nordique et le règlement sur les bureaux d'information touristique, il n'y a plus qu'un seul règlement d'application au lieu de quatre. Il y aura aussi un cadre pour les nouvelles formes d'hébergement, c'est-à-dire que ce projet de loi encadre le développement de gîtes touristiques, de chalets, de condominiums offerts en location. Il corrige des situations inéquitables qui existaient auparavant. II y a aussi des éléments d'attraction pour les touristes qui étaient exclus du champ d'application de la Loi sur l'hôtellerie: les bases de plein air, les camps de vacances, les auberges de jeunesse. Tous ces éléments d'hôtellerie font partie de la demande touristique, que ce soit en région périphérique ou en région urbaine.

Il y a aussi un élément qui assure la qualité des établissements. Nous entendons orienter davantage l'action de promotion du tourisme par une classification des établissements. L'élément nouveau dans ce projet de loi, c'est qu'il y a un affichage obligatoire de la classification qui permettra ainsi une meilleure information pour le touriste qui s'apprête à séjourner dans un établissement. Le touriste sait à ce moment-là à quelle porte il frappe. En fait, il n'a pas de mauvaise surprise, il sait à quoi s'attendre, parce que la classification aura été bien affichée.

Cette perspective de classification vise à développer et à susciter l'innovation dans le milieu touristique et à rendre compte de la qualité des établissements. En fait, nous misons sur le professionnalisme des intervenants, sur l'esprit de créativité du milieu des intervenants touristiques. En fait, il est plus sain de miser sur la qualité et la classification des établissements que sur des inspections souvent tatillonnes qui nuisent au bon déroulement de la loi et des établissements touristiques en général.

Il y a aussi, Mme la Présidente, que nous voulons développer la responsabilisation des exploitants au niveau des hébergements, de l'hôtellerie et des restaurateurs en général pour qu'il y ait un respect des règles minimal, que ce soit en matière de sécurité, que ce soit en matière de salubrité pour la qualité des aliments offerts dans les restaurants, la protection de l'environnement.

Les exploitants seront tenus par la loi de déclarer que leur établissement est conforme à ces règles avant que le permis d'exploitation soit délivré. Cela est important, Mme la Présidente. Des normes spécifiques qui tiendront compte de la diversité des établissements touristiques seront édictées. Ces normes touchent l'aménagement, les services, l'affichage des prix et du taux de change offert dans un établissement. En fait, ces éléments visent à assurer une qualité minimale dans tous les établissements touristiques au Québec et aussi la protection du touriste consommateur.

Le nombre d'établissements visés est important au Québec. Seulement dans l'hôtellerie, que ce soit les hôtels, motels, auberges, chalets, nous avons 1900 établissements au Québec; dans la restauration, 12 188 établissements, avec un volume d'affaires au Québec de 2 600 000 000 $ seulement dans la restauration, qui engendrent plus de 100 000 emplois directs.

Dans les campings, nous avons 695 établissements; les pourvoiries, 530 établissements; les gîtes touristiques, 229; les bureaux d'information touristique, 200; les établissements de touristes, que ce soit la base de plein air ou les auberges de jeunesse, 265 établissements.

Vous voyez que l'industrie touristique au Québec est un élément important de développement économique. C'est grâce à la consultation que nous avons effectuée au cours de l'été que chaque intervenant du milieu a appuyé le projet de loi, l'a étudié et s'est vraiment penché sur chacun des éléments. Tout cela va nous assurer que tous ces intervenants touristiques poursuivent un même but: développer le Québec touristique, faire du Québec une destination touristique pour que les visiteurs, que ce soit du Québec ou d'ailleurs, des autres provinces, des États-Unis ou du monde entier, puissent retourner chacun chez eux et dire: Au Québec, nous sommes bien reçus et tout ce que nous voulons, c'est y retourner. (16 heures)

C'est pourquoi j'appuierai le projet de loi 152 parce qu'il aide à rehausser cette qualité que chacun de nous recherche, que ce soit ici ou ailleurs. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Matane.

M. le ministre du Tourisme, en réplique.

M. Yvon Picotte (réplique)

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente, je suis particulièrement heureux de constater que l'Opposition va voter pour ce projet de loi et faire en sorte que, dans les meilleurs délais, nous puissions l'adopter. Ce projet de

loi va sans doute clarifier une foule de situations que nous devions vivre dans le domaine de l'hôtellerie, à cause d'une loi qui était, à mon avis, désuète et qu'on amendait au gré du temps et au gré des vents pour tâcher de corriger certaines situations rapidement, sans pour autant y aller en profondeur alors que nous, nous décidons d'aller en profondeur.

J'ai dit tout à l'heure à mon collègue de Lac-Saint-Jean que je gardais pour mon temps de réplique un léger paragraphe concernant mon prédécesseur. Cela fait référence un peu à ce qu'il vous disait quand il faisait allusion à la commission parlementaire où j'avais vanté mon ex-collègue, M. Léger. Cela n'avait pas trait nécessairement à ce dossier, mais à celui du Manoir Richelieu. Je reste encore persuadé que le travail qu'a fait M. Léger du côté de la vente du Manoir Richelieu, pour enclencher le processus de vente du Manoir Richelieu, accompagné de ses collègues au Conseil du trésor et aux différents COMPADR, Conseil de développement économique et Conseil des ministres... Je suis persuadé que la recommandation de M. Léger qui recommandait au député de Lac-Saint-Jean, qui faisait partie du Conseil des ministres à cette époque et à ses collègues, de vendre le Manoir Richelieu à M. Malenfant était vraiment quelque chose qui avait été pensé, réfléchi. La décision prise à ce moment-là et finalisée par notre gouvernement avec l'approbation, si je peux dire, du chef de l'Opposition qui, lorsque les dossiers ont été transférés à l'actuel chef du gouvernement, mettait prioritaire le dossier de la vente du Manoir Richelieu, était la décision qu'il fallait prendre pour déveloopper ce coin de pays.

On aura beau dire par la suite... Il y a des malins qui sont allés vérifier évidemment le rapport du Directeur du financement des partis politiques en disant que certains de nos collègues d'en face avaient accepté des montants d'argent, légalement d'ailleurs, selon la Loi sur le financement des partis politiques. Indépendamment de cela, le dossier a été mené de main de maître, de façon parfaite et c'était le dossier qu'il fallait acheminer de la façon dont il a été acheminé. Je pense qu'il faut rendre à César ce qui est à César et attribuer ce fait à M. Léger et au Conseil des ministres précédent.

En ce qui concerne la loi que nous étudions, je suis prêt à mentionner qu'effectivement, cette loi a commencé sous l'égide de mon prédécesseur, M. Marcel Léger, qui avait amorcé des discussions avec l'Association des hôteliers pour tâcher d'en arriver à manier, changer ou modifier cette loi pour la rendre vraiment plus adéquate à l'époque où nous vivons et concurrentielle avec celles de nos voisins. Ce que je reprochais cependant à M. Léger, c'était de consulter uniquement l'Association des hôteliers. Je pense que Mme la députée de Matane y a fait allusion. J'ai mentionné au député de Lac-Saint-Jean, quand nous avons étudié ensemble la loi abolissant le Conseil québécois du tourisme, que ce qui est important dans ce domaine, ce n'est pas nécessairement d'avoir un Conseil québécois du tourisme, c'est de bien s'assurer, par notre relation privilégiée au ministère du Tourisme, que nous consultons tous les intervenants.

Je dois vous dire que, bien enclenchées par mon prédécesseur, les discussions commencées par lui avec l'Association des hôteliers, je les ai poursuivies et j'ai tenu à ajouter les organismes qui ont été mentionnés tantôt et que je me permets, moi aussi, de rappeler: le Mouvement québécois des camps familiaux, la Fédération des agricotours du Québec, la Fédération québécoise de l'ajisme, l'Association des camps du Québec, le Réseau plein air, l'Association des pourvoyeurs du Québec Inc., l'Association des terrains de camping du Québec, la Fédération québécoise de camping et caravaning, l'Association des hôteliers du Québec. On a même ajouté l'Association des restaurateurs du Québec.

On a donc multiplié par dix nos échanges avec les gens du milieu. Nous avons préféré prendre trois bons mois de discussions avec eux pour nous permettre d'être bien certains que le projet de loi sur l'hôtellerie pouvait être non pas parfait, parce que, pour ceux et celles qui nous écoutent, parler de perfection dans un projet de loi, ce serait vraiment en mettre un peu trop, mais le plus parfait possible.

Je m'étonne, cependant, que mon collègue de Lac-Saint-Jean ait soulevé ce point parce que, m'a-t-on dit, la difficulté majeure qu'a vécue M. Marcel Léger, dans le temps où il était ministre du Tourisme, c'était d'essayer de convaincre son collègue du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche d'inclure, à ' l'intérieur de ce réseau, les pourvoiries, les camps de vacances, les colonies de vacances, etc.

On m'a toujours dit, selon ce que m'ont rapporté les gens qui étaient assis autour de la même table pour discuter de ce projet, que la difficulté était d'inclure les domaines qui appartenaient ou relevaient du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. De là l'importance d'avoir un ministre qui chapeaute les deux ministères. Quand je suis arrivé, je me rappelle très bien que le fonctionnaire responsable de ce dossier m'a dit: M. le ministre, la difficulté qu'on va avoir, c'est de convaincre les gens du Loisir de faire partie ou de s'intégrer à la loi.

J'ai répondu: Vous n'aurez pas de difficulté majeure, parce que je vais parler à l'autre ministre. Je pense qu'il va rapidement donner instruction à ses fonctionnaires de

s'attabler avec tout ce qui s'appelle hébergement et qui provient du ministère du Loisir, de la Chasse ou de la Pêche ou du Tourisme, afin que ces gens se parlent et visent vraiment le même objectif. C'est curieux, on a réussi cela en permettant à tout ce beau monde de s'asseoir à une table pour faire en sorte que nous ayons ce projet de loi.

Comme je vous l'ai dit tantôt, je pense qu'il faut dire les choses telles qu'elles sont. Il faut féliciter les gens qui, depuis quelques mois, non seulement à l'arrivée du ministre actuel, mais aussi du temps de celui qui a enclenché le processus, bien qu'il l'ait fait d'une façon un peu restreinte â notre goût -pas assez de consultations - malgré tout, il a eu le courage de vouloir faire quelque chose et il a essayé de convaincre ses collègues du Conseil des ministres de participer à la bonification de ce projet de loi, ce qui n'a pu être fait à temps mais ce qui est maintenant, aujourd'hui, une réalité.

J'aimerais répondre sur les quelques points qu'a soulignés tantôt mon collègue de Lac-Saint-Jean concernant les règlements. Oui, parlons-en, des règlements. Je soutiens que, tout compte fait, il y aura beaucoup moins de règlements dans la nouvelle loi qu'il en existait auparavant. Vous allez me dire: Comment le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et ministre du Tourisme peut-il bien faire un calcul semblable quand il est dit que 14 sujets seront réglementés? Effectivement, 14 sujets seront réglementés. Si on s'en était tenu uniquement à la classification des hôtels au Québec, il y aurait eu moins de règlements dans la nouvelle loi que dans l'ancienne, donc, une diminution de règlements. Mais le petit bout que le député de Lac-Saint-Jean a oublié d'additionner, c'est qu'on touche à beaucoup plus de domaines par cette loi qu'il en existait auparavant. (16 h 10)

C'est évident, Mme la Présidente, qu'il y aura un peu plus de réglementation parce qu'il y a des domaines qui n'étaient nettement pas réglementés. On se souviendra - je vais faire appel à la mémoire du député de Lac-Saint-Jean qui a vécu cette expérience au MLCP - et tout le monde sait que du côté des bases de plein air, pour ne prendre que l'exemple des bases de plein air, on avait des millions à injecter dans ce milieu pour faire uniquement la mise aux normes. Encore aujourd'hui, nous tentons de faire l'impossible pour corriger toutes ces situations. Dans certains cas, il n'y avait aucune sécurité. Tout le monde conviendra que la journée où un ministre décide, parce que ce n'est pas assez sécuritaire, de fermer une base de plein air, c'est un tollé dans le milieu où on dit carrément au ministre: Pourquoi fermez-vous ça? C'est un besoin.

Le député de Lac-Saint-Jean, qui était ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, sait très bien, autant que moi-même ou que nos prédécesseurs, que s'il avait procédé à la fermeture de certains établissements à cause d'un manque de sécurité, tout de suite, l'Opposition, peu importe laquelle, peu importe la couleur du parti politique, se serait levée en Chambre pour dire: Mais pourquoi fermer une base de plein air, M. le ministre? On aurait réussi à dire: Ce sont des personnes handicapées qui vont là, ce sont des gens démunis, des gens qui ne sont pas capables de se payer des vacances dans des hôtels. On aurait fait tout un plat là-dessus, si on avait décidé de fermer une base de plein air pour des raisons de sécurité. Soit; On aurait fait un problème quasiment provincial avec la fermeture d'une base de plein air.

Examinons le deuxième côté de la médaille, parce que justement, certaines bases de plein air ne sont pas sécuritaires. Supposons - espérons que ça n'arrive jamais nulle part - pour un instant qu'arrive une catastrophe dans une base de plein air, une conflagration, un feu et que, parce qu'il y a un manque de sécurité, on ait 10, 12, 15 ou 20 blessés ou 10, 12, 15 ou 20 morts. Je verrais, comme première question en Chambre, peu importe la couleur de l'Opposition, peu importe l'individu qui est critique du MLCP, que ce soit Mme la députée de Marie-Victorin, que ce soit l'ex-critique qui était député de Charlesbourg dans le temps, que ce soit le député de Maskinongé ou un autre, tenir le ministre responsable de la mort, du décès ou des blessures causées à un certain nombre de personnes, parce qu'il y a eu une conflagration et qu'il n'y avait pas suffisamment de sécurité. Cela aurait été un autre langage le lendemain matin, justement, parce qu'il n'y avait pas de réglementation, parce qu'on ne réglementait pas. Dans certains cas, on ne pouvait pas obliger certaines normes de sécurité, ce que nous faisons avec le projet de loi en incluant tout cela.

Vous comprendrez qu'en ajoutant les pourvoiries, tout le phénomène d'hébergement, les bases de plein air, les colonies de vacances, etc., c'est bien évident qu'il y aura un peu plus de réglementation. On touche à dix ou douze éléments additionnels du projet de loi. Le député de Lac-Saint-Jean ne m'a rien appris en disant qu'il y aurait un peu plus de réglementation. Si nous avions réglementé exactement chacun des sujets comme cela aurait dû être fait, on verrait qu'à la fin on arriverait avec plus de règlements qu'il ne va en exister dans la nouvelle loi. Donc, diminution de la réglementation à cause du nombre de sujets touchés. Je pense que ce n'est pas sorcier, tout le monde comprendra ça rapidement. Je suis convaincu que mon collègue, le député

de Lac-Saint-Jean, a déjà compris ça.

Il faut bien se dire aussi que, dans le même langage, quand on parle d'inspecteurs, d'inspections, etc., il ne pourra pas y avoir d'inspecteurs qui vont se promener sur le terrain et qui n'auront pas de règlements dans leurs poches pour les faire resoecter. Je comprends mal que le député de Lac-Saint-Jean, dans la même envolée oratoire, me parle d'une possibilité de catastrophe parce qu'il n'y a pas d'inspecteur et me dise: II ne faut pas que vous réglementiez davantage. Je pense que ça va de soi, Mme la Présidente.

Puisque je viens déjà de vous parler d'inspecteurs, je pense que je vais toucher à cette partie pour laquelle s'est interrogé mon collègue de Lac-Saint-Jean. Je vous ai dit, au cours de mon allocution, qu'on tentait de plus en plus de se modeler sur nos voisins, nos concurrents. Il faut être vigilant face à la concurrence et permettre les mêmes avantages quand il s'agit d'inciter les gens à venir chez nous. Il ne faut pas qu'il y ait tellement de différence, je pense, entre ce qui existe en Ontario ou dans les États du Nord-Est américain et ce qui existe au Québec, compte tenu de la clientèle qu'on invite et compte tenu de nos possibilités. On se modèle là-dessus, c'est bien, avec ce qui existe. Si le député de Lac-Saint-Jean se rappelle, je lui ai dit qu'on oriente tous nos efforts vers la classification. Quand on parle de classification, cela veut dire que ces établissements seront classifiés à mon ministère. On va déjà en connaître la classification et on va savoir de quel type d'hébergement il s'agit.

Je pense que vous avez la réponse à la question que vous m'avez posée. Nous fonctionnons par classification et on est certains qu'à ce moment-là... Pour classifier les établissements, il faut savoir la sorte d'établissement. Il faut savoir quel genre de services il offre et la qualité. En ayant une qualité, je pense que le type d'inspecteurs auquel faisait allusion le député de Lac-Saint-Jean, qui existait auparavant, n'a plus sa raison d'être à cause du principe de la classification qui, sans doute, va nous permettre d'offrir beaucoup mieux aux touristes qui viennent chez nous, tant ceux du Québec que ceux hors Québec. Cela va nous permettre à la fois même une possibilité de services ou une foule de services additionnels et le touriste saura à l'avance dans quel type d'établissement il sera hébergé.

Dans la restauration, s'il s'agit d'une fleur de lys, de deux fleurs de lys ou de trois fleurs de lys, il saura de quel genre d'établissement il s'agit. Il saura en plus ce que cela lui coûtera à peu près pour l'hébergement à cet endroit. Je pense que le député de Lac-Saint-Jean a déjà une réponse à ce point d'interrogation qu'il est important, je dois le dire, de soulever pour qu'on puisse donner certaines réponses.

Il y aura cependant toujours un service d'inspection qui va fonctionner, mais qui fonctionnera sur plainte. Quand des citoyens achemineront une plainte à mon ministère, des inspecteurs iront vérifier l'exactitude de la plainte et séviront si, évidemment, il y a lieu de le faire selon le rapport qui nous sera soumis. C'est évident qu'on s'achemine beaucoup plus vers des possibilités dans le domaine touristique de façon permissive et non pas coercitive.

J'aimerais dire deux mots, Mme la Présidente - vous allez sans doute me le permettre pour répondre à deux questions -en ce qui concerne les lignes aériennes. J'ai fait part au député de Lac-Saint-Jean en commission parlementaire, l'autre jour, de la très mauvaise expérience que nous avions vécue avec Quebecair. Cela a coûté 162 000 $ au ministère pour établir une liaison entre New York et Québec et la première journée qu'on devait effectuer cette liaison, Quebecair s'est nettement décommandée. J'ai même dû effectuer un voyage à New York pour aller en discuter. Je prends à témoin notre déléguée touristique à New York, Mme Marsolais, qui m'a alerté immédiatement à ce sujet car on s'est vraiment fait une très mauvaise publicité touristique. Par contre, il y aura des liaisons d'organisées avec City Express, via Toronto et Québec, ce qu'on appelle du "charter", vers le mont Sainte-Anne, et je pense qu'il y a d'autres choses qui sont organisées. Mais c'est vrai que c'est un domaine où il va falloir mettre à l'avenir beaucoup d'efforts pour être capable de l'améliorer. (16 h 20)

En terminant, Mme la Présidente, je veux vous souligner et souligner au député de Lac-Saint-Jean que, quand il parlait du Carnaval de Québec comme événement touristique, il est vrai et j'en conviens. Or, je pense qu'à toutes fins utiles il ne faut pas faire un plat avec la différence de ce que nous avons offert au Carnaval de Québec. La différence entre ce que nous offrons cette année et ce que nous avons donné l'an passé n'est que de 28 000 $, alors que, l'an passé, nous avions indiqué déjà à ces messieurs du Carnaval de Québec que nous allions diminuer nos efforts du côté du soutien financier, et qu'ils devaient voir à essayer de faire un peu plus du côté de l'autofinancement.

Il ne faut pas oublier que le montant que nous donnons au Carnaval de Québec représente environ 40 % de notre enveloppe budgétaire du côté de l'attraction touristique. Si j'ai pris sur moi de vouloir - et je termine par cela - diminuer un peu les subventions aux événements qui sont un peu plus gros dans le domaine touristique, c'était justement dans le but de satisfaire... Le

député de Lac-Saint-Jean ne m'en tiendra pas rigueur. Est-ce que je dois continuellement augmenter la subvention au Carnaval de Québec et ne plus permettre à Chicoutimi de tenir le sien, son carnaval, ou si je dois encore dire au Carnaval de Québec, qui attire beaucoup de monde, beaucoup de population: Privez-vous donc de 28 000 $ pour qu'on puisse tenir un carnaval à Chicoutimi pour développer cette région? En dehors de Québec et de Montréal, il y a des régions et il me semble qu'elles ont le droit de bénéficier de touristes. C'est là la vraie réponse et je suis certain que le député de Lac-Saint-Jean comprend très bien cette philosophie. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Le débat étant clos, est-ce que le principe du projet de loi 152, Loi sur les établissements touristiques, est adopté?

M. Brassard: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources et leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Ciaccia: Mme la Présidente, je fais motion pour déférer ledit projet de loi à la commission de l'économie et du travail.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Brassard: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources et leader adjoint du gouvernement.

M. Ciaccia: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 19.

Projet de loi 126 Adoption du principe

La Vice-Présidente: À l'article 19 de notre feuilleton, il s'agit de l'adoption du principe du projet de loi 126, Loi modifiant la Loi concernant les environs du parc du Mont-Sainte-Anne, qui avait été présenté par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche le 11 novembre 1986. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi sera sans doute beaucoup plus aride que le précédent, puisque nous allons parler d'une chose qui est un peu plus compliquée, qui relève d'engagements juridiques, qui vient normaliser finalement une situation qui existait et perdurait et qui lésait certains citoyens de notre belle province.

Sans doute qu'après avoir étudié rapidement ce projet de loi le prochain projet de loi qui sera appelé, celui sur la faune, sera beaucoup plus captivant pour nos collègues. Il y aura peut-être beaucoup plus d'intervenants. De toute façon, je n'anticipe pas sur ce qui pourrait se passer. Je vous dis tout simplement qu'en 1970, à la suite de l'arrêté en conseil 957 du 11 mars, le ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement a acquis en vrac tous les actifs de la Commission du parc du Mont-Sainte-Anne pour les besoins du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

De plus, le gouvernement décida d'exproprier une plus grande étendue de territoire dans le but de consolider ses acquis et d'y créer un parc. Une réserve de chasse fut établie le 15 décembre 1971 -l'arrêté en conseil 4202 - sur les territoires publics et privés ayant été retenus pour le projet de parc, ceci dans le but de protéger les adeptes des activités de plein air.

Cependant, ce nouveau projet entraîna le développement rapide des municipalités environnantes et le gouvernement dut intervenir le 23 décembre 1971 par une loi s'intitulant Loi concernant les environs du parc du Mont-Sainte-Anne de manière que le développement desdites municipalités se fasse d'une manière ordonnée et fonctionnelle, en harmonie avec le projet du parc.

Cette loi, par son article 6, soustrait le territoire du parc du Mont-Sainte-Anne, décrit en annexe à cette loi, au règlement de construction et de zonage des municipalités touchées par cette loi dont, entre autres, la ville de Beaupré.

Certains terrains situés dans la ville de Beaupré étant des parties du lot 640 du cadastre de la paroisse de Sainte-Anne et de l'ancienne route de Saint-Féréol, propriété de M. Roland Dupont, sont inclus dans le territoire visé par la loi et n'ont jamais été expropriés. Autrement dit, il y a un citoyen qui se trouve inclus dans la loi pour laquelle le gouvernement n'a jamais payé de frais d'expropriation.

La direction des acquisitions du ministère des Transports du Québec a négocié, pour le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, une entente d'échange selon laquelle M. Roland Dupont se porterait acquéreur de diverses parcelles des lots 639 et 648 du cadastre de la paroisse de Sainte-Anne, propriété du gouvernement, alors que le gouvernement se porterait acquéreur de parcelles du lot 640 et de l'ancienne route de Saint-Féréol, propriété de M. Roland Dupont, tout en versant à ce dernier une indemnité compensatoire

d'environ 14 500 $, cet échange tenant compte des besoins du territoire du parc du Mont-Sainte-Anne. En raison de cet échange, les limites du territoire décrit en annexe à la loi concernant les environs du parc du Mont-Sainte-Anne devront être modifiées afin, entre autres, de retourner sous la gestion municipale les immeubles non compris dans le territoire du parc, cette modification faisant partie de l'entente avec M. Roland Dupont, y compris le règlement complet et final de la poursuite mentionnée auparavant.

Les deux parties ont intérêt à cet échange. L'assemblage des terrains permet au parc de reconstituer à cet endroit une limite de territoire plus cohérente et au propriétaire privé de reconstituer une propriété plus facile à aménager, ce qui met le propriétaire dans une situation avantageuse, le dédommageant ainsi en partie pour le long gel de ses propriétés.

Le projet de loi 126 vise donc essentiellement à modifier la limite nord-est du parc du Mont-Sainte-Anne et permettra de corriger un anachronisme qui existe dans ce secteur depuis 1971, à la suite de l'inclusion dans la réserve de chasse du Mont-Sainte-Anne de terrains privés, et qui trouve son aboutissement dans le présent projet de loi.

En effet, lorsque ce projet de loi aura été adopté, le gouvernement du Québec, par l'entremise du ministère des Transports, pourra procéder à un échange de terrains avec le propriétaire dont les terrains sont inclus dans la réserve de chasse, ce qui aura comme avantage, premièrement, de dégager les ambiguïtés qui existent actuellement en regard des terrains situés de part et d'autre de la route 360 menant au centre de ski du Mont-Sainte-Anne, sur lesquels la municipalité ne peut agir. Deuxièmement, d'établir un cadre administratif clair tant pour le ministère que pour le propriétaire. Troisièmement, de permettre à la municipalité de Beaupré de faire appliquer ses propres règlements de zonage sur les terrains ainsi dégagés. Quatrièmement, de permettre des développements nouveaux et importants par l'entreprise privée dans le respect des règlements de zonage municipaux. Cinquièmement, de permettre au gouvernement le règlement d'un dossier à la satisfaction des parties en cause, soit le propriétaire, la municipalité et le ministère, donc, les trois parties en cause, sans débourser de sommes d'argent importantes.

Par ailleurs, la modification à la limite du Mont-Sainte-Anne ne pourra entraîner de problème majeur pour le développement des environs dudit parc, compte tenu que la municipalité est en accord avec le projet et a le pouvoir de zoner le territoire et de statuer sur les développements qui pourront y être exécutés. En somme, Mme la

Présidente, par ce projet de loi, le ministère va clarifier une situation, régler un préjudice causé à un citoyen, permettre de nouveaux développements par l'entreprise privée sans mettre en danger la qualité de l'environnement du parc du Mont-Sainte-Anne qui continue, année après année, à atteindre une performance exceptionnelle au niveau de son attrait touristique. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: M. le ministre a bien circonscrit le cadre du projet de loi. Il s'agit tout simplement de redonner ce qui revient de droit et à juste titre à un citoyen, ce qui était sa propriété, citoyen qui, compte tenu des circonstances, en 1971, se sentait lésé. Depuis lors, le ministère des Transports a négocié au nom du gouvernement l'achat de ce terrain et enfin une entente est intervenue pour régler ce litige. (16 h 30)

Par contre, il m'aurait été beaucoup plus facile de suivre le ministre dans la déclaration qu'il a faite tantôt en ce qui concerne la loi, pour comprendre exactement ce qu'il en était du cadastre, parce qu'il était difficile de trouver les plans. J'ai essayé de trouver les plans où se situaient ces terrains pour justement visualiser la partie qui était rétrocédée, et tenter de découvrir si le fait qu'on touche à cette partie du patrimoine aurait des conséquences sur l'ensemble de nos parcs et de nos réserves au Québec. Vous savez tout comme moi que l'ensemble des parcs et des réserves du Québec est un fleuron des plus importants pour l'industrie touristique québécoise. Les parcs et les réserves, c'est un produit fort enviable et très recherché, et qui démontre une adéquation optimale entre les attentes et les besoins des clientèles visées. Les parcs et les réserves, c'est une offre qui s'étale sur quatre saisons et qui permet une gamme d'activités fort intéressantes pour l'ensemble des clientèles qui veulent justement participer au bien-être des loisirs de plein air. Aussi, nos parcs et nos réserves offrent une importante immobilisation, un important budget d'exploitation, et ils ont un impact économique important. C'est important de conserver notre patrimoine de parcs et de réserves parce qu'ils sont un apport considérable au développement économique du Québec.

Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aujourd'hui, régularise une situation par un projet de loi qui, ma foi, me laisse avec certaines interrogations. Justement j'en profite pour soulever ces interrogations en cette Chambre. Comme on

le sait, la SEPAQ doit administrer l'ensemble des parcs et réserves, et elle a un rôle important à jouer. Mes interrogations sont au sujet du rôle que doit jouer justement la SEPAQ et de son avenir. On se souviendra que la Société des établissements de plein air du Québec, qui s'appelle SEPAQ, est propriétaire du mont Sainte-Anne. Cette compagnie, dont le siège social a été sanctionné le 21 décembre 1984 par l'ancien gouvernement - il faut bien le souligner -est une société de gestion qui, selon le ministre actuel, fait très bien son travail. Et, pour le moment, il ne veut pas la remettre en cause.

Donc, la SEPAQ, organisme créé par l'ancien gouvernement du Parti québécois, a pour mandat de gérer les équipements et les immeubles ou les territoires à vocation récréative ou touristique que lui confie le gouvernement. À ce titre, la SEPAQ assure l'accès des Québécois et des Québécoises à différentes activités de loisirs, et ces propriétés si importantes le sont au mérite et on peut en nommer plusieurs. Notamment dans le secteur du ski. Cette société gère les équipements et les terrains de camping, de golf, de ski alpin et de randonnée du parc du Mont-Sainte-Anne. On touche énormément à tout l'aspect du plein air. Cet aspect du plein air qui va avec une qualité de vie, qui favorise la participation à l'activité physique, qui permet à des centaines de citoyens et de citoyennes de vaquer à des loisirs et qui leur permet justement de se maintenir en équilibre physique et même quelquefois mental. Qu'on se rappelle le vieil adage: Un esprit sain dans un corps sain.

Nous arrivons maintenant, Mme la Présidente, à une ère de privatisation. Alors que la tendance actuelle favorise de plus en plus la privatisation, ne serait-il pas plus important de boucler la boucle avec le secteur privé pour l'émergence duquel beaucoup d'investissements et d'énergie ont été consentis? Ce qui me fait demander au ministre s'il va vraiment travailler avec les gens qui sont déjà là et consolider ce qui est en place plutôt que de le démembrer et vraiment faire appel à un secteur d'activité dont les gens connaissent plus ou moins le développement, le tissu social de ceux qui participent au milieu du loisir.

Dans cette ère de réorientation et de changement du rôle de l'État, il était important aussi de modifier certaines attitudes. J'espère que le ministre s'attardera beaucoup, qu'il prendra son temps, là comme ailleurs, pour arriver à trouver des solutions que le monde du plein air mérite et aussi tous les gens qui s'adonnent au camping.

Plusieurs intervenants s'occupent du plein air, on peut parler notamment de tout l'ensemble des partenaires, autant privés que ceux d'organismes en milieu de loisir qui, par leur fédération, ont un rôle important à jouer dans le développement des activités de plein air.

J'aimerais revenir, Mme la Présidente, sur le rôle de la SEPAQ. Bien sûr, au tout début de son mandat, M. le ministre est très prudent, c'est un ministre qui n'ose pas vraiment donner l'orientation dans laquelle il développera sa politique de loisir, à tel point qu'on se demande: A-t-il vraiment souci du développement du loisir? On y va avec tellement de prudence, tellement à petits pas, on entend si peu parler du développement des politiques du monde du loisir qu'on est en train de se demander ce qui va arriver dans ce monde. Est-on en train de démembrer toutes les activités du monde du loisir? Est-ce que ce sera un ministère uniquement de la chasse et de la pêche? Y aura-t-il encore une place pour le monde du loisir? Étude après étude, nous attendons toujours les réponses de notre ministre en ce qui concerne le loisir et les politiques de l'ensemble du monde du loisir.

Je sais, Mme la Présidente, que la SEPAQ n'est pas en danger pour le moment. Déjà, le ministre s'est prononcé en ce qui concerne l'avenir de la SEPAQ, mais c'est un avenir ponctuel parce que sa réponse est que, pour le moment, la SEPAQ n'est pas en danger. Qu'adviendra-t-il une fois les analyses terminées? Aura-t-on à trancher avec le ministre des Transports pour qui la SEPAQ devait disparaître complètement pendant la campagne électorale? De qui faudra-t-il prendre la parole? C'est difficile à cerner. Même le président du Conseil du trésor affirmait dans son rapport, le rapport Gobeil, que tout le monde reconnaît présentement, que la SEPAQ devait, elle aussi, disparaître.

J'estime, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, que vous allez avoir besoin de beaucoup de soutien de vos collègues pour continuer à aller dans le sens que vous avez déjà choisi vis-à-vis de la SEPAQ. J'espère que vous trouverez des appuis car nous, de notre côté, nous sommes convaincus que le rôle de la SEPAQ est important et qu'elle devra continuer à jouer le rôle qu'elle a joué depuis des années et qui permet l'essor du développement récréo-touristique. (16 h 40)

J'aimerais démontrer à quel point justement on arrive à ce double langage du gouvernement. Pendant la campagne électorale, le ministre des Transports et député de Charlesbourg clamait très haut et très fort qu'il fallait démanteler la SEPAQ. Comme je le disais tout à l'heure, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a toujours rectifié le tir quant à l'avenir de la SEPAQ. Pour lui, il ne faut pas aller trop rapidement. C'est important, dit-il, avant de commencer à éliminer des choses, de prendre le temps de réévaluer les

structures de la SEPAQ. Il affirmait même que le parc du Mont-Sainte-Anne était finalement à la tète de la SEPAQ et que s'il privatisait le parc du Mont-Sainte-Anne, c'était la faillite assurée pour la SEPAQ. Il faut comprendre que le ministre n'a vraiment pas l'intention de faire disparaître la SEPAQ et donne de plus en plus de charges et de responsabilités à cet organisme.

J'espère qu'on n'aura pas affaire au double langage. J'espère que sa prudence n'en est pas une momentanée mais une prudence qui fait appel à des attitudes bien ancrées chez le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Lors d'une rencontre des établissements hôteliers, il déclarait au Journal de Québec, le 30 janvier, au sujet du Manoir Montmorency et de Fort-Prével et je cite: "Je ne suis pas certain que notre rôle social en tant que ministère soit de laisser tomber ces deux endroits. Après une visite de ces endroits, j'ai compris qu'ils répondent à un besoin précis pour la population, besoin que nous pouvons combler alors qu'une entreprise privée ne pourrait le faire, question de rentabilité." J'ose croire que ce sont plus que des mots. J'ose croire que les citations que je viens de faire en cette Chambre prendront forme et demeureront...

J'ai l'impression que les propos du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche doivent en faire sourciller plus d'un au Conseil des ministres. J'espère que vous continuerez, M. le ministre, à faire sourciller vos collègues, parce que, actuellement, avec les formes de privatisation prises par votre gouvernement, effectivement, il n'y a pas de rentabilité pour les Québécois et les Québécoises à démembrer des projets tels que Quebecair, des compagnies qui permettaient à nos régions d'avoir un service de qualité et qui permettaient aussi d'avoir droit de regard en ce qui concerne le transport aérien. Vous faites bien, M. le ministre, de vouloir maintenir la SEPAQ. Je suis fort heureuse qu'enfin, dans ce gouvernement, il y ait au moins un ministre qui soit capable de prendre en considération des organismes qui ont l'intérêt de développer l'ensemble des lieux de plein air, les établissements qui favorisent la participation aux activités de conditionnement physique et qui permettent à nos parcs et réserves de maintenir une intégrité qui fera que nos enfants et nos petits-enfants auront toujours cette fierté du patrimoine qui leur permettra, à eux aussi, de retourner dans les sentiers où, déjà, leurs ancêtres auront foulé ces mêmes espaces verts. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, pour votre droit de réplique.

M. Yvon Picotte (réplique)

M. Picotte: Merci, M. le Président. Quel pot-pourri de valses, de marches militaires, de musique western! Finalement, tout y a passé. En parlant d'un projet de loi pour modifier un morceau de terrain, ce qui va rendre justice à un de nos concitoyens, on a pu entendre toutes les litanies possibles et impossibles et Dieu sait si, à certaines occasions, ces litanies étaient fausses!

J'ai eu l'occasion - et je ne voudrais pas être désagréable envers ma collègue de Marie-Victorin - de lui dire à quelques reprises en commission parlementaire qu'elle aurait tout intérêt à changer ses recherchistes, parce que Mme la députée de Marie-Victorin me dit qu'il n'y a pas eu moyen de vérifier les cadastres, de vérifier les lignes, d'avoir un plan. Je lui ai dit à maintes reprises, compte tenu de ce que j'ai pu constater de la pauvreté de son service de recherche: Mme la députée, vous êtes la bienvenue à mon ministère en n'importe quel temps. Venez nous voir, on va répondre à toutes vos questions et il y aura sans doute des réponses qui ne vous feront pas plaisir, sur lesquelles vous ne serez pas d'accord et vous aurez toute liberté, même si vous êtes venue nous voir, de les critiquer.

Dans le temps que j'étais dans l'Opposition, Dieu sait que certains de mes collègues d'en face n'aimaient pas le genre de critique que je faisais, mais jamais personne n'a pu m'empêcher de critiquer des mesures présentées par le gouvernement. Mme la députée de Marie-Victorin pourrait venir à mon ministère, rencontrer mes attachés politiques, pour s'informer adéquatement; cela ne lui enlèverait en rien son droit de nous critiquer sévèrement. Il faudrait, après un an de vie parlementaire, que Mme la députée de Marie-Victorin décide, une fois pour toutes, d'ignorer ses recherchistes si elle veut faire montre de talent à l'Assemblée nationale et éclairer sa lanterne.

J'ai toujours eu et je les ai ici, devant moi... C'est évident que vous ne pouvez les voir de si loin, mais c'est pour vous dire, Mme la députée de Marie-Victorin, que vous auriez pu, en n'importe quel temps, consulter ces plans à mon ministère. Compte tenu du fait qu'aveb l'ancien gouvernement, dans certains cas, les décisions se prenaient au pifomètre, comme on le dit si bien en langage québécois, ou se prenaient à la va-comme-je-te-pousse, vous comprendrez bien que cela a changé depuis un an et que nous y allons de façon à être bien certains que tout est bien attaché, que tout est bien balisé.

Nous avons les plans et - je vous le dis et je vous lance l'invitation; en commission parlementaire, c'est peut-être moins perçu par le public mais, ici, ce sera perçu davantage, nos collègues étant plus nombreux

- vous êtes toujours la bienvenue, Mme la députée, au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour vous enquérir de tout ce que nous faisons, pour vérifier ce que nous faisons. Il n'y a rien de caché, il n'y a rien en dessous de la table dans tous les domaines. Il nous fera plaisir de vous renseigner adéquatement et peut-être aussi pourriez-vous amener vos recherchistes pour qu'on puisse leur accorder quelques heures additionnelles afin de bien les orienter en ce qui concerne les discussions que nous pourrions avoir. Je trouverais tellement agréable de discuter avec vous, à mon ministère, concernant le monde du loisir et celui du sport en général.

Vous comprendrez bien, M. le Président, que je n'ai pas l'intention de répondre aux interrogations de madame en ce qui concerne SEPAQ, elle a abondamment cité d'excellents articles et fait d'excellentes citations de celui qui vous parle, passages qu'elle a relus et qu'elle a vus, j'imagine, au Journal des débats et dans certains journaux. Je pense que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche n'a jamais eu peur de dire ce qu'il avait à dire et d'appeler les choses telles qu'il devait les appeler. Pas plus que je ne vais m'engager - et cela, personne ne m'en tiendra rigueur - à signer un contrat de mariage avec la SEPAQ. On sait très bien que certains contrats qu'on prétend signer à vie, dans certaines occasions ne sont pas nécessairement d'une durée indéfinie. (16 h 50)

Je n'ai l'intention d'aucune façon d'ajouter à tout ce que j'ai dit concernant la SEPAQ. Je dirai, cependant, à la députée que je pourrai amplement discuter, d'ici à quelques mois lors de l'étude de nos crédits en mars, avril ou au début de mai, de l'avenir de la SEPAQ. Je peux lui dire qu'il y aura des éléments nouveaux sur lesquels elle pourra parler, parce que des choses vont se passer. Contrairement à ce qui existait avant au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, les choses se font, se décident, et ça bouge.

La députée aurait pu citer certains articles de journaux qui disaient récemment qu'il s'est fait plus au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche en un an que ce que nos prédécesseurs avaient fait en neuf ans. C'est donc dire que, finalement, elle verra encore d'autres changements se produire pour le mieux-être de nos clientèles. Je lui dirai, à elle qui prétend que rien ne s'est fait dans le sport, que l'an dernier, entre autres, dans les loisirs et dans le sport, concernant les fédérations sportives, aucune coupure n'a été exercée. Pour un ministre qui ne s'en soucie pas, ce n'est pas si mal. Après avoir été obligé de faire des compressions budgétaires importantes à cause de la situation qui nous avait été léguée par nos prédécesseurs, qu'un ministre du sport qui, au dire de Mme la députée, ne s'occupe pas de ses affaires, réussisse à ne pas couper 1 % aux sports, aux élites, à l'excellence, aux programmes, je pense que ce n'est pas si mal d'avoir réussi à travailler avec les chiffres de cette façon-là.

De toute façon, tous ces renseignements seront à sa disposition à mon ministère. Nous pourrons faire une discussion de fond en ce qui concerne la SEPAQ, les loisirs, le socioculturel, le sport, la faune, le Palais des congrès, l'ITHQ, et enfin tous les domaines qui relèvent de la compétence du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et du ministère du Tourisme. Je vous remercie, M. le Président, en espérant que cette situation nous permettra de corriger justement un problème qui existait depuis déjà fort longtemps.

Je vous ferai remarquer, en terminant, que si nous sommes appelés à corriger cette situation, c'est parce qu'en 1970, un gouvernement a décidé d'acheter le mont Sainte-Anne parce qu'il croyait au développement des loisirs, qu'il a décidé d'en faire un parc parce qu'il croyait au développement du ski au Québec, qu'il a décidé de mettre des budgets et que, chaque fois qu'on a mis des budgets là-dedans, il y a eu tellement de retombées économiques qu'on est obligé de faire des arrangements de terrains de cette façon-là. Bravo! Cent fois bravo! si enfin un gouvernement décide d'arrêter de réfléchir et de passer des semaines à penser, de déposer des livres blanc, câille, rouge, jaune et décide de s'impliquer au point de vue économique parce que je pense que c'est de la création d'emplois, des retombées économiques dans le milieu. Donc, merci au gouvernement antérieur d'avoir fait ça et merci sans doute au gouvernement actuel de corriger cette situation qui aurait normalement dû être corrigée par nos prédécesseurs en neuf ans de règne s'ils avaient cru vraiment au développement économique. Malheureusement, c'est un dossier qui dormait sur les tablettes et qui n'avait même pas réussi à attirer ou à aiguiser l'appétit de mes prédécesseurs, les ministres du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Merci.

Une voix: Très bien!

Le Vice-Président: Ceci met fin au débat à cette étape de l'étude du projet de loi. Est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de loi 126, Loi modifiant la Loi concernant les environs du parc du Mont-Sainte-Anne, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Ciaccia: M. le Président, je fais motion pour déférer ledit projet de loi à la commission de l'aménagement et des équipements.

Le Vice-Président: Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 38 du feuilleton.

Projet de loi 153 Adoption du principe

Le Vice-Président: À l'article 38 du feuilleton, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche propose que le principe du projet de loi 153, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs, soit maintenant adopté.

Je cède la parole à M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je vous dirai que je suis particulièrement heureux de soumettre ce projet de loi à l'attention de l'Assemblée nationale et de corriger une situation qui s'est malheureusement drôlement détériorée depuis quelques années. Sans doute la volonté politique que nous avons manifestée et que nous manifestons avec ce projet de loi viendra-t-elle corriger une foule de choses. Il était temps, je pense, que quelqu'un mette de l'ordre dans ce domaine. Vous pouvez être assuré, M. le Président, que nous ne négligerons aucun effort dans ce domaine, comme dans tous les domaines qui relèvent de mon ministère, afin d'améliorer la situation.

Depuis que je dirige le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, j'ai eu maintes occasions de mesurer combien le braconnage était un fléau. Cette déplorable activité entrave largement la gestion efficace de la faune. Les agents de conservation, pourtant désignés pour lutter contre le braconnage, ne disposent pas de tous les outils nécessaires à leur tâche. Sous l'ancien gouvernement animé par le souci de rendre l'utilisateur responsable, on a éliminé de la loi certaines dispositions. L'expérience, par la suite, a cependant démontré leur utilité. C'est dans l'esprit essentiellement de réaffirmer la saine gestion de la faune que j'ai proposé à cette Assemblée certaines modifications à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et à la Loi sur les parcs.

M. le Président, je tiens à vous préciser que je n'agis pas de façon isolée. Au cours de l'année qui s'achève, j'ai eu l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises les différents organismes de la faune. Leur voix était unanime. Il faut améliorer de façon sensible la lutte contre le braconnage qui menace l'équilibre naturel de la faune et qui, par le fait même, en menace l'utilisation, privant d'autant certaines régions de retombées économiques et touristiques tangibles. Tous ont été unanimes pour exiger de mon ministère qu'il se dote des outils adéquats pour gérer efficacement cette ressource.

Un seul groupe que je n'ai pas eu personnellement l'occasion de rencontrer semble, m'a-t-on dit, s'opposer catégoriquement à toute mesure visant à éliminer le braconnage. Ce sont - vous l'avez deviné, M. le Président - les braconniers. Ils préféreraient que je continue dans la même voie du laxisme. Si vous me le permettez, M. le Président, je ne tiendrai pas compte de leurs revendications.

Les organismes de la faune qui m'ont signifié leur accord dans la mise en oeuvre de moyens destinés à combattre le braconnage représentent ensemble plus de 2 000 000 d'utilisateurs de la faune dont 1 500 000 de détenteurs de permis. Un tel lobby est impressionnant. Des gestes concrets s'imposent. Les modifications proposées aujourd'hui aux deux lois font partie d'une série de mesures destinées a éliminer, autant que cela se peut, cet acte répréhensible, cet acte que l'on pourrait qualifier de crime contre la nature et contre la société. Il me faut, M. le Président, vous préciser que ma volonté de mettre un terme à ce délit ne se traduit pas uniquement par le renforcement de la loi.

D'autres mesures viendront compléter les dispositions législatives. Il en sera ainsi de l'augmentation du nombre des agents de conservation, de la réinstauration d'une ligne téléphonique unique pour dénoncer le braconnage, de la mise en oeuvre d'un plan de communications destiné à sensibiliser le public sur les différentes manifestations de braconnage et à développer une intolérance à l'égard de cette activité. Ces dernières mesures de portée éducative seront mises en oeuvre avec le concours des divers organismes de la faune, notamment la Fédération québécoise de la faune. (17 heures)

Dans le projet de loi que j'ai déposé, certaines dispositions touchent les territoires

fauniques. Ce sont les réserves fauniques, les ZEC, les refuges fauniques et les pourvoiries. Ces dispositions sont destinées à en améliorer la gestion. Je tiens à vous préciser, M. le Président, que ce sont des mesures s'inscrivant dans le courant de la déréglementation. En ce qui concerne la Loi sur les parcs, je propose également certaines modifications, principalement pour assurer sa concordance avec la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.

Si vous me le permettez, je passerai plus en détail les diverses modifications que je propose. Dans un premier temps, je traiterai de celles concernant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Le présent projet de loi introduit de nouvelles prohibitions et augmente de façon significative les sanctions imposées aux contrevenants.

Trois nouvelles dispositions viennent mieux encadrer l'interdiction de chasser la nuit. Elles sont nécessaires en raison des abus qui ne cessent d'augmenter. Une présomption sera même réintroduite. Ainsi, lorsqu'une personne sera en possession d'un projecteur et d'une arme à feu dans un endroit fréquenté par le gros gibier, elle sera présumée chasser la nuit à moins de preuve contraire. L'utilisation d'un projecteur la nuit pour déceler la présence d'un animal dans un endroit fréquenté par le gros gibier sera interdite. Également, il sera interdit d'être en possession, la nuit, d'une arme à feu non chargée dans un véhicule ou un aéronef sauf si elle est insérée dans un étui ou disposée dans le coffre du véhicule ou la soute de l'aéronef.

D'ailleurs, tout chasseur consciencieux s'applique, pour des raisons de sécurité, à garder son arme dans son étui ou dans le coffre de son véhicule. Selon la gravité de l'infraction, le montant des amendes sera augmenté de façon significative.

Dans le cas des condamnations conduisant à des amendes dites faibles, les minimums et maximums de .135 $ et 425 $ passeront 200 $ et 600 $. La notion de récidive sera introduite et conduira à des amendes minimales et maximales triplées, c'est-à-dire de 600 $ et 1800 $ dans le cas de récidive.

Dans le cas des condamnations imposées pour des infractions plus graves que les précédentes, conduisant à des amendes moyennes, les pénalités passeront de l'actuelle fourchette de 225 $ à 625 $ à justement de nouvelles amendes s'échelonnant de 400 $ à 1200 $ et ceci pour la première infraction. Les minimums et maximums seront triplés dans le cas de récidive. Également, le juge pourra à sa discrétion imposer un emprisonnement d'au plus 90 jours lorsqu'il y a récidive.

Pour une infraction grave, M. le Président, les amendes seront lourdes. Les actuelles amendes variant de 1050 $ à 3150 $ passeront de 1500 $ à 4500 $. La récidive entraînera des amendes triplées, 4500 $ à 13 500 $ et des peines d'emprisonnement d'au plus un an, toujours à la discrétion du juge.

Pour ce qui est des pénalités, la loi ne prévoit pas actuellement de disposition concernant les espèces vulnérables ou menacées. Le projet que je vous soumets propose d'introduire un article imposant des pénalités pour les infractions commises à l'égard de ces espèces.

En outre, le présent projet propose de changer certaines infractions de catégorie et d'augmenter ainsi l'importance des sanctions. En effet, certaines infractions actuellement dans la catégorie de faibles passeront à la catégorie moyenne et de moyenne à lourde. La notion de récidive que j'ai abordée précédemment présente dans le projet de loi une portée plus grande. Toute personne condamnée une deuxième fois pour la même infraction dans un délai de trois ans sera passible d'une sanction supérieure à celle prévue pour la première infraction.

Le projet de loi innove en prolongeant la notion de récidive dans le cas de certaines infractions commises à l'égard de gros gibier. En effet, il introduit une présomption de récidive lorsqu'une personne commet une infraction alors qu'elle a déjà commis une autre infraction dans les délais prescrits. Ainsi, à titre d'exemple, une personne qui a commis une première infraction en chassant dans un ravage de chevreuils et qui, dans les trois ans qui suivent cette condamnation, est reconnue coupable d'avoir chassé la nuit sera punie pour ce deuxième cas comme si c'était la deuxième fois qu'elle chassait la nuit.

Le projet de loi identifie six infractions considérées comme des récidives. Je vous les énumère: la chasse avec un véhicule, un aéronef ou une embarcation - c'est considéré comme récidive - la chasse ou l'action de déranger le gros gibier dans son ravage; l'usage d'un dispositif pour chasser; l'usage d'un poison ou d'une autre substance pour chasser ou piéger; la capture du gros gibier avec un piège; l'action de tirer à partir d'un véhicule ou d'un aéronef. Voilà les six points que je viens de vous énumérer.

Les sanctions administratives seront également renforcées. Actuellement, pour des infractions commises à l'égard du gros gibier, la suspension du permis est automatique pour deux ans. Première nouveauté importante, le contrevenant dont le permis de chasse sera annulé ne pourra obtenir aucun autre permis de la catégorie permis de chasse pendant la période d'annulation.

Actuellement, une personne s'étant fait retirer son permis pour l'activité à l'égard de laquelle l'infraction a été commise conserve le droit d'obtenir d'autres

catégories de permis de chasse.

Deuxième nouveauté, la notion de récidive sera également réintroduite dans le cas de sanctions administratives. Il s'agit de la suspension ou de l'annulation du certificat ou des permis. Une première récidive dans les trois ans suivant l'infraction pourra entraîner une annulation ou une suspension du certificat ou du permis pour le double de la durée imposée lors de l'infraction première. Une deuxième récidive dans les trois ans pourra entraîner une annulation ou une suspension pour une durée triple.

M. le Président, ces nouvelles mesures peuvent paraître sévères. Sans doute. Je vous dirai, à ce sujet, que j'ai rencontré presque tous les groupes de la société. Je n'ai entendu, jusqu'à maintenant, aucune voix discordante face à la sévérité à la fois des amendes et des mesures. Les seules jusqu'à maintenant qui ont été portées à ma connaissance, ce sont les plaintes des braconniers.

Je suis persuadé qu'aucun autre groupe de notre société ne voudrait critiquer cette sévérité de peur de s'associer à ceux qui pillent notre faune, de peur de s'associer à ceux qui n'ont aucun respect et qui mettent nettement, dans certaines régions - c'est prouvable et démontrable - en danger le cheptel et la ressource même. J'en suis convaincu. Je défie le député de Laviolette, qui me demande des preuves, de venir avec moi dans la région où il vit, où une bonne partie de la population vit de chasse, du côté de La Tuque. Je le mets au défi de venir avec moi dans n'importe quel groupe de la société soucieux de protéger notre faune, sauf évidemment les braconniers, et de me trouver un groupe qui va venir me dire que j'ai été excessif. Je le mets au défi et je mets au défi n'importe quel député de cette Chambre. J'avais un de mes collègues de Montréal qui me disait que l'autre jour, dans une réunion de l'âge d'or, je pense, en plein coeur de la ville de Montréal, des gens qui n'étaient pas des habitués de la chasse et de la pêche lui ont parlé justement de ce projet de loi et lui ont dit: Demandez donc au ministre de ne céder aucun pouce du côté de la sévérité, du côté de la loi parce que je pense que c'est épouvantable. (17 h 10)

Je suis persuadé, et l'Opposition aussi sans doute avec ce que j'ai déjà vécu ici... Rappelons-nous que lorsque justement il y a eu la noyade des caribous et que les gens se sont installés devant leur téléviseur, quelle a été la constatation générale des gens devant ce carnage que je qualifierais de naturel. Rappelons-nous jusqu'à quel point le ministre de l'Énergie et des Ressources d'alors a paniqué. Sans doute que, lui, il attribuait ce carnage à un manque de jugement des caribous, M. Rodrigue avait alors qualifié cela ainsi. Rappelons-nous jusqu'à quel point on est allé vérifier si toutes les mesures avaient été prises de la part d'Hydro-Québec et de la part de tout le monde pour éviter ce carnage.

Savez-vous que dans nos régions et dans la région de l'Estrie, entre autres, dans une période de courte durée, il y a eu 700 chevreuils de tués illégalement, c'est-à-dire ceux dénombrés par le ministère à part ceux qu'on n'a pas dénombrés et à part ceux qui nous ont été cachés. Au moins, 700 chevreuils dans un court laps de temps. On va me faire accroire que ces gens dans cette Chambre, des élus du peuple, vont s'associer à un tel carnage! Si c'était larmoyant la catastrophe naturelle des caribous, c'est tout aussi larmoyant là et c'est fait par des pilleurs de faune. Je suis persuadé que personne ne voudrait voir associer son nom ou son groupe à condamner la sévérité du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche face à ce carnage. De toute façon, si des gens ont des reproches à faire sur cela, je m'engage et à faire le tour du Québec et à dénoncer ceux qui se seront associés aux braconniers pour condamner la sévérité du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Ces nouvelles mesures peuvent - et je l'ai dit - paraître sévères, mais elles ne seront, je pense, jamais assez sévères tant qu'on n'aura pas corrigé une situation qui s'est détériorée depuis dix ans, tant sur le nombre d'agents de conservation qui ne sont plus sur le territoire, passant de 500 à 325 ou 330, tant du côté des agents de conservation qui ont diminué lamentablement, que du côté de l'accessibilité où on a laissé un laxisme inqualifiable. Les défenseurs de la méthode douce de conscientisation, de sensibilisation et d'éducation auront peut-être un réflexe d'indignation, mais je vous ai mentionné tantôt qu'il y en aura de l'éducation et qu'il y en aura de la sensibilisation. Je pense que c'est tout cela qui fera en sorte que les gens apprendront à respecter notre faune. Je répondrai qu'il est plus indignant encore de voir des tricheurs s'employer sciemment à détourner la loi et à détruire la faune. Je leur rappellerai également l'exemple de la répression de l'ivresse au volant où il a fallu, pour obtenir les résultats tangibles que nous observons, assortir les mesures de sensibilisation à des mesures légales impitoyables.

En outre, il me faut vous réitérer que l'utilisation de la faune constitue un levier économique non négligeable lorsqu'elle est sciemment exploitée. Il est donc de mon devoir de lui assurer un cadre de protection adéquat. J'entends souvent des députés de régions venir me parler de pourvoiries, de ZEC, d'utilisation du territoire, de donner des territoires additionnels aux utilisateurs. Ceux qui défendront et qui critiqueront la sévérité du ministre du Loisir, de la Chasse

et de la Pêche, ce sont ceux qui voudront effectivement que, dans cinq ans, il ne reste à peu près plus rien dans nos régions, et là, cela ne donnera plus rien aux députés d'aller défendre l'apport économique des régions puisqu'on aura, par notre laxisme, laissé tout faire et aurons tout permis. On ne peut se permettre cela d'aucune façon. Je serai intransigeant de ce côté. Je le dis et je tiens à ce que les gens en soient avertis. Il n'est pas question que je retraite ou que je recule à ce sujet. Je ne reculerai pas et je serai en mesure... Je suis persuadé que les journalistes qui nous écoutent et qui suivent cela attentivement - encore hier à la suite d'une rencontre avec certains d'entre eux où je leur ai dit: Suivez cela demain, nous allons avoir le débat à ce sujet - vont dénoncer avec beaucoup d'acharnement ceux qui demanderont au ministre de retraiter. Je préfère - si des gens veulent me faire une discussion à fond de train là-dessus - ne pas adopter le projet de loi cette année plutôt que de retraiter un seul instant. Mais ceux qui le feront auront à payer très cher cette décision. Je suis persuadé, parce que j'ai discuté avec de nombreux collègues, que tout le monde est conscient de cela et tout le monde me le mentionne. Je pense qu'il sera important que les gens suivent cela de près et nous allons le faire en ce qui nous concerne, comme gouvernement.

J'aborderai maintenant les modifications proposées destinées à renforcer les pouvoirs des agents de conservation. La première mesure vise à harmoniser la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les pêcheries et la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs. Le projet de loi introduit en effet le pouvoir d'inspection qui permettra à un agent de conservation, en vue de procéder à des inspections, de pénétrer à toute heure raisonnable dans un véhicule, un aéronef, une embarcation ou dans un endroit autre qu'une maison d'habitation où il y a des motifs raisonnables de croire à la présence d'animaux à fourrure, d'engins de chasse ou de piégeage. S'il constate que des infractions ont été commises, il pourra alors effectuer des saisies.

La durée maximale pendant laquelle les agents de conservation pourront assurer la garde des biens saisis sera portée de 90 à 120 jours. Ceci permettra de tenir compte du contexte dans lequel les agents doivent exercer leurs fonctions. En outre, lors d'une saisie, l'agent de conservation ne sera plus obligé de remettre au contrevenant le véhicule ou l'aéronef saisi. Il pourra, s'il le juge opportun, conserver la garde de ce véhicule, de cet aéronef au même titre qu'il peut le faire actuellement pour une embarcation ou pour un chien.

La loi prévoit actuellement qu'il est interdit de donner sciemment de faux renseignements au ministre, à un agent ou à un auxiliaire de la conservation de la faune. La portée de cette disposition sera étendue aux autres fonctionnaires du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans l'exercice de leurs fonctions.

En matière d'entrave, une nouvelle infraction est introduite. En vertu des modifications proposées, il sera interdit d'entraver volontairement l'action d'un agent de conservation, d'un auxiliaire de conservation ou d'un fonctionnaire, évidemment, toujours dans l'exercice de leurs fonctions.

Voilà, M. le Président, quelques mesures destinées à faciliter l'application de la loi.

J'aborderai maintenant les modifications proposées pour améliorer la situation des territoires fauniques. En fait, il s'agit de simplifier la désignation de ces territoires et de donner plus de souplesse à certains pouvoirs réglementaires. La simplification s'imposait pour la désignation des territoires fauniques. En effet, pour les réserves, les ZEC, les refuges fauniques et les parties de terre domaniales destinées à l'exploitation des pourvoiries, cette désignation se fera par décret plutôt que par règlement. Ainsi, tout ajustement ne sera plus contraint au délai important occasionné par les modifications aux règlements.

De plus, le gouvernement pourra instituer des zones d'exploitation contrôlée et des refuges fauniques pour l'utilisation ou la protection d'une espèce faunique particulière. Évidemment, cette opération se fera en respectant les prescriptions légales existantes, notamment la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Je vous rappellerai, M. le Président, que la gestion des territoires fauniques peut être administrée d'une façon différente de la voie réglementaire, n'étant pas considérée comme une norme en vertu de la Loi sur les règlements.

Les pouvoirs de réglementation à l'égard des baux de droits exclusifs de chasse, de pêche et de piégeage seront réduits. Seul sera reconduit le pouvoir de déterminer la valeur maximale des constructions que pourra faire le titulaire d'un bail de droits exclusifs de piégeage.

Les conditions auxquelles seront assujettis les locataires de droits exclusifs seront fixées dans le bail. De fait, les pouvoirs réglementaires existant actuellement ne sont pas utilisés. Ainsi, ils seront éliminés. Voici un bel exemple de déréglementation.

Par ailleurs, les pouvoirs réglementaires à l'égard des zones d'exploitation contrôlée, des réserves et des refuges fauniques seront assouplis pour permettre de fixer les tarifs pour la pratique d'activités en fonction des catégories d'usagers, de l'activité pratiquée, de l'espèce faunique recherchée ou de

l'endroit où les activités de chasse, de pêche et de piégeage sont pratiquées. (17 h 20)

À titre de ministre responsable, je serai dorénavant autorisé à accorder des baux de droits exclusifs de piégeage dans une ZEC ou dans une réserve faunique. Actuellement, je ne peux que délivrer un permis pour autoriser le piégeage dans les ZEC et les réserves fauniques. En vertu du projet que je vous soumets, je serai autorisé à accorder des baux de piégeage. D'une part, cette modification permettra d'assurer une meilleure gestion et un meilleur contrôle de cette activité et, d'autre part, elle permettra aux trappeurs de profiter de meilleures conditions pour leur pratique. Inutile de vous rappeler l'importance que revêt pour le Québec et pour le Canada l'industrie de la fourrure.

Essentiellement, je viens de vous présenter les modifications que je propose à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. J'aimerais maintenant aborder la question des modifications à la Loi sur les parcs. Comme je le mentionnais précédemment, elle porte essentiellement sur des ajustements par rapport à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.

Enfin, ce sont des modifications de même nature rendues nécessaires pour fins de concordance. Une seule exception, la modification à l'appellation "parc national". Cette appellation a été source de bien des confusions en raison, notamment, de la présence au Québec de parcs nationaux canadiens. Je propose donc de reconduire l'ancienne appellation, celle de "parc de conservation" qui cadre mieux avec l'esprit qui a conduit à l'adoption de la Loi sur les parcs. Ainsi, le Québec disposera de parcs créés pour conserver des échantillons représentatifs ou exceptionnels du patrimoine naturel du Québec, des parcs de conservation, et de parcs créés pour favoriser l'accomplissement d'activités récréatives en milieu naturel, des parcs de récréation. On comprendra que cette modification n'entraînera qu'une différence dans les règles actuelles d'accessibilité.

Les modifications que je propose aux deux lois constituent une première brochette de mesures visant à améliorer la gestion de la faune au Québec. Dans le cas de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, elles introduisent de nouveaux interdits rendus nécessaires pour lutter efficacement contre le braconnage et majorent les sanctions pour augmenter l'effet dissuasif. Elles renforcent également les pouvoirs des agents de conservation de façon à leur permettre de mieux appliquer l'esprit de la loi. Enfin, elles permettent d'améliorer la gestion des territoires fauniques. Pour la Loi sur les parcs, des modifications sont rendues nécessaires pour assurer la concordance avec les modifications à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et l'appellation "parc de conservation" vient remplacer celle de "parc national". Ces ajustements sont nécessaires dans les plus brefs délais, surtout pour mettre un frein au braconnage, une pratique déplorable que toute société doit combattre.

L'impression d'abondance propre à notre province a conduit par le passé les Québécoises et les Québécois à trop souvent fermer les yeux devant cette pratique faisant même parfois, comme je le disais en février dernier, des "braconniers de Robin des bois à l'envers". La réalité est tout autre. La faune québécoise n'est pas inépuisable, contrairement à ce que certains peuvent penser et prétendre. La forêt québécoise n'est pas une corne d'abondance faunique. Nous avons, certes, un potentiel remarquable dont on doit s'enorgueillir mais qu'il nous faut gérer efficacement. Si les peines sont lourdes pour ceux qui enfreignent la loi, c'est pour assurer aux chasseurs et pêcheurs le droit d'utiliser la faune, et pour profiter de cette ressource économique. C'est aussi pour permettre à tous nos concitoyens et concitoyennes de profiter de la présence faunique et enfin, c'est pour assurer aux générations futures les mêmes privilèges que ceux dont nous bénéficions aujourd'hui. J'espère que nous serons tous d'accord pour que, le plus rapidement possible, nous mettions cette loi en marche, que nous l'adoptions, que nous puissions sans doute nous permettre, une fois pour toutes, de contrôler, de préserver notre cheptel et notre faune au Québec. Merci.

Le Vice-Président: Merci, M. le ministre. Je vais maintenant donner la parole à M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. M. Picotte: M. le Président.

Le Vice-Président: M. le ministre du Tourisme.

M. Picotte: Afin de permettre à mon collègue de. faire son discours sans interruption, j'aimerais demander immédiatement le consentement de la Chambre pour dépasser l'heure, s'il y a lieu. Je pense que cela nous éviterait, à 18 heures, d'interrompre notre collègue et cela nous permettrait, au moins, de terminer cette section.

Le Vice-Président: Oui, d'accord.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président: Évidemment, je dois

exiger à ce moment-ci, même si ce n'est peut-être pas la procédure usuelle, un consentement anticipé si le député de Dubuc devait poursuivre son intervention au-delà de 18 heures. En fait, je suppose qu'il y a consentement actuellement en cette Chambre. Si on ne soulève pas la question à 18 heures, je permettrai la poursuite du débat. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, je donne mon consentement. Je vais le donner pour mon collègue et, en même temps, pour le ministre, ce qui lui permettra d'autres occupations au cours de la soirée. Si on ne terminait pas, il serait obligé de revenir.

Le Vice-Président: D'autant plus, M. le député de Laviolette, que tel que convenu hier un ordre de la Chambre demande que, de 20 heures à 23 heures, nous reprenions les discussions sur le projet de loi 124, Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'assurance-maladie. C'est donc un ordre de la Chambre que ledit débat reprenne à 20 heures, ce soir, jusqu'à 23 heures. Comme je l'ai mentionné tantôt, c'est non usuel de procéder de cette façon, par un consentement anticipé, parce que ça prend un consentement unanime. Si des députés arrivaient en Chambre et voulaient s'opposer, je serais obligé de reconnaître les députés qui demanderaient que nous suspendions nos travaux à 18 heures. Si je n'ai pas de telle demande, du consentement des gens qui sont présents, on laissera poursuivre le débat jusqu'à la fin de l'intervention de M. le député de Dubuc.

Vous avez la parole, M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Donc, c'est à l'avantage des deux sans doute, du ministre et de moi-même. Je n'ai pas minuté mon discours, mais cela ne devrait pas tellement dépasser l'heure. Je remercie le ministre, vous-même et tous mes collègues d'avoir accepté qu'on dépasse peut-être de quelques minutes.

Notre patrimoine faunique, au triple titre de ressource essentielle à l'équilibre écologique, de potentiel récréotouristique et de générateur d'activité économique nécessite toute notre attention. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous convie, par son projet de loi 153, à un important exercice de réflexion sur l'approche et les moyens à privilégier pour le gérer.

Nous sommes tous d'accord sur l'ampleur des infractions à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. À elle seule, pour prendre quelques exemples, l'Estrie se dirige vers une année record, alors que 85 cas de braconnage ont été répertoriés contre une cinquantaine l'an dernier et une quarantaine en 1984. Le 6 juin dernier, les agents de conservation de la faune et la direction régionale de Montréal ont procédé au démantèlement d'un important réseau de braconnage de l'esturgeon. Cette opération, qui s'est déroulée en face du parc Bellerive, dans l'est de Montréal, a permis d'arrêter 17 personnes et de procéder à la saisie de 3000 $ d'équipement de pêche et de 1000 livres d'esturgeon.

Une autre filière devait être mise à jour le 1er novembre: 12 personnes ont été arrêtées et 300 kilos de viande de chevreuil ont été saisis au cours d'une vaste opération qui a mobilisé 30 agents de conservation et policiers de la Sûreté du Québec dans les villes de Farnham, Sainte-Brigitte, Longueuil, Montréal et Laval.

Enfin, un dernier cas parmi tant d'autres, le 12 novembre, les agents de conservation du MLCP mettaient fin aux activités d'un réseau de braconniers opérant dans la réserve Papineau-Labelle dans les Laurentides. Bilan: une quinzaine de personnes perquisitionnées et 1200 kilos de gibier saisis. Tel est le cercle presque infernal des captures, de possession, de ventes et d'achats illégaux, et à quel prix!

La pêche et la chasse se révèlent chez nous des valeurs économiques de premier plan. Selon une récente étude de l'Association des pourvoyeurs du Québec, en 1985, quelque 1 200 000 pêcheurs actifs du Québec ont qénéré des dépenses de l'ordre de 598 000 000 $ pour les résidents québécois et encore 52 000 000 $ pour les non-résidents du Québec.

Pour leur part, en 1981, les 350 000 adeptes de la chasse ont insufflé 163 000 000 $ dans l'économie québécoise. Si on considère de plus les pourvoyeurs et les ZEC qui ont permis 3 000 000 de jours-récréation et des retombées économiques de 1 000 000 000 $ en 1981, si on pense, de plus, à la pêche sportive du saumon, qui a rapporté 12 000 000 $, ce sont des faits très éloquents qui démontrent l'importance économique de notre ressource faunique. (17 h 30)

Autre fait éloquent, c'est la récolte d'animaux à fourrure qui a augmenté de 15 % au Québec en 1985-1986. Et les ventes de fourrure, selon les chiffres du ministère, ont représenté une source globale d'environ 8 800 000 $. Il faut savoir qu'il y a 25 000 trappeurs au Québec, ce qui représente 15 % de tous les trappeurs du Canada parmi lesquels on se classe au deuxième rang. Il y a 57 000 emplois au Québec reliés au domaine de la fourrure, soit dans la transformation, le nettoyage, le tannage, la teinture, la coupe, le commerce de la fourrure, ce qui représente 75 % de tous les emplois créés dans ce domaine au Canada.

II faut se rappeler aussi qu'il y a 1800 établissements qui fabriquent des articles de fourrure au Québec, qu'il y a 221 manufacturiers de produits de fourrure au Québec, ce qui représente 85 % de tout ce qui se produit au Canada. Tout cela exige donc la protection de la faune, et le braconnage doit être enrayé.

Dans l'arsenal des mesures que le ministre propose à cette Assemblée, il introduit de nouvelles infractions auxquelles il prête un caractère dissuasif. Parmi celles-ci, l'interdiction d'entraver un agent de conservation de la faune dans l'exercice de ses fonctions ou l'interdiction d'être en possession, la nuit, d'une arme à feu, sauf si elle est insérée dans un étui fermé ou déposée dans le coffre d'un véhicule ou dans la soute d'un aéronef. Si la première prohibition semble acceptable, la seconde, quant à elle, risque de provoquer de multiples interprétations, ne serait-ce que pour savoir jusqu'où la fermeture éclair de l'étui d'une arme est légalement fermée. C'est ce genre de difficulté d'ailleurs qui a amené à l'origine, en 1983, la disparition de cet article de la loi sur la préservation de la faune.

Il est une disposition, toutefois, qui ne manque pas de soulever de plus fortes inquiétudes. En effet, M. le Président, l'article 8 du projet de loi 153 stipule que nul ne peut chasser le gros gibier la nuit avec un projecteur et que nul ne peut utiliser un projecteur la nuit pour déceler la présence d'un animal dans un endroit fréquenté par le gros gibier. Soit: Mais, poursuit l'article 8, une personne en possession la nuit d'un projecteur et d'une arme à feu chargée ou d'une arbalète ou d'un arc armés dans un endroit fréquenté par le gros gibier est, en l'absence de toute preuve contraire, présumé être en possession de ce projecteur et de cette arme pour chasser.

La clause de présomption de culpabilité est ainsi réintroduite après avoir été soustraite en 1983 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, parce que difficilement applicable, les tribunaux ayant statué à maintes reprises que cette notion de présomption avait des limites dans son application. Elle avait été retirée, dois-je ajouter, à la demande de plusieurs organismes qui s'étaient présentés en commission parlementaire lors des audiences de novembre 1982.

Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche déroge par ailleurs, semble-t-il, aux Chartes canadienne et québécoise des droits et libertés qui établissent respectivement aux articles ll(d) et 33 que tout accusé est présumé innocent jusqu'à preuve du contraire.

Le ministre a-t-il discuté de la question avec le Procureur général et jurisconsulte du

Québec, responsable de la Charte des droits et libertés de la personne et de l'économie de nos lois? Le ministre a-t-il demandé l'opinion de la Commission des droits de la personne et, si oui, quelles ont été ses recommandations? Le braconnage est un acte répréhensible, certes, mais sa répression est-elle ici pleinement justifiée, surtout mesurée? Le ministre devra répondre à ces questions.

Le 8 novembre, quelques jours avant la présentation de ce projet de loi, le ministre déclarait devant 150 participants à un colloque organisé par l'Association des pourvoyeurs: "C'est une loi qui va avoir des dents mais pas encore assez à mon goût." Le ministre disait même avoir été retenu par ses conseillers juridiques. "Ils m'ont dit, ajoutait-il, que j'allais peut-être un peu trop loin. Quant à moi, j'étais prêt à arrêter seulement à la peine de mort." C'est bien sûr une conclusion que le ministre faisait, à la blague peut-être, mais de telles paroles restent quand même révélatrices d'un certain état d'esprit, d'une certaine conception de la justice sur laquelle je reviendrai plus loin.

Ne serait-il pas incidemment équitable que le ministre se soumette lui-même à un régime de plus grande sévérité en évitant de se donner de nouvelles prérogatives qui pourraient mener à l'abus et à l'arbitraire?

Les articles 69 et 70 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune stipulent que nul ne peut vendre, acheter ou offrir d'acheter de la chair d'animal ou du poisson d'une espèce dont la vente est interdite par règlement. Toutefois, le gouvernement peut, par règlement, en autoriser la vente selon les normes et conditions qu'il détermine. Toutefois, l'article 12 du projet de loi 153 dit que, "malgré les articles 69 et 70, le ministre peut - ce n'est plus le gouvernement; c'est le ministre - aux conditions qu'il détermine - ce n'est plus par règlement; c'est aux conditions qu'il détermine - délivrer un permis autorisant la vente ou l'achat de poisson ou de chair d'animal pour consommation sur place par les personnes qui participent à une activité spéciale décrite dans le permis." M. le ministre, qu'est-ce qu'une activité spéciale? Quelles sont les conditions d'achat et de vente que vous aurez à déterminer selon vos propres critères? Quelles seront les coordonnées de ces permis? Répétitives, aléatoires, arbitraires, ces exceptions spéciales ne risquent-elles pas de devenir la règle et de mener, comme un chroniqueur de chasse et de pêche en manifestait la crainte, à la commercialisation du patrimoine faunique?

Il ne s'agit pas là, par ailleurs, des seules prérogatives nouvelles que se confère le ministre. Ainsi, à l'article 16 du projet de loi, il s'accorde le droit de "donner à bail des droits exclusifs de piégeage dans une

zone d'exploitation contrôlée", sabrant ainsi dans l'autonomie des ZEC. Mais, pis encore, M. le Président - nous aurons l'occasion d'y revenir en détail plus tard - le ministre s'arroge un pouvoir discrétionnaire démesuré à l'égard de l'aménagement et de l'affectation du territoire au moment où l'article 19 soustrait de la réglementation gouvernementale la détermination, entre autres, des catégories de baux de droits exclusifs de chasse, de pêche ou de piégeage, les conditions d'obtention, de transfert et de renouvellement de ces baux, les normes et conditions de construction et de localisation des bâtiments auxquelles doit se conformer le locataire.

Tout ceci m'apparaît d'ailleurs complètement à l'antipode de ce que ce même gouvernement qui, par l'intermédiaire d'un autre de ses députés, notre collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce, dans le rapport qui est intitulé, Réglementer moins et mieux, où il n'est jamais question, M. le Président, que le mot "déréglementation" soit associée à une absence de réglementation... Au contraire, aux pages 32 et suivantes -j'en lirai quelques phrases - le député de Notre-Dame-de-Grâce dit très bien "Une participation - c'est le titre du chapitre -accrue des individus et des entreprises au processus de réglementation." On y lit, entre autres: "Les relations avec les citoyens ont fait l'objet, ces récentes années, d'une préoccupation beaucoup plus grande de la part du gouvernement et de l'administration publique." Un peu plus loin, on lit: "La réglementation constitue un élément fort important de la relation d'un État avec ses citoyens." Encore: "L'effort de simplification du langage de la réglementation devra être accompagné d'un autre effort visant à impliquer davantage les intéressés et la population dans son ensemble dans la préparation de la réglementation." Une dernière citation: "Cette volonté d'associer -la population, les citoyens - doit se trouver aussi dans les ministères et elle suppose la mise en place de diverses techniques de consultation qui varient selon que la réglementation prend la forme d'une loi ou d'un règlement." (17 h 40)

Je pourrais continuer la lecture de ce rapport du député de Notre-Dame-de-Grâce, mais nulle part on ne trouve l'association que semble faire le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, que déréglementer, c'est ne plus avoir de règlement, que déréglementer, cela devient arbitraire pour un ministre. Ce que le rapport dit, c'est qu'une réglementation doit être plus souple, plus simple, plus claire pour les citoyens mais aussi en associant de plus en plus les citoyens et que ce qui n'est pas dans un règlement on doit le retrouver dans la loi, ce que ne fait pas du tout le ministre dans son projet de loi 153 où il s'accorde des droits de l'absolu, de l'arbitraire.

Si c'est nécessaire - c'est fort possible, le ministre est en mesure d'évaluer si la réglementation est trop sévère, si elle l'empêche d'agir véritablement dans les meilleurs intérêts de la protection de la faune québécoise, - qu'il assouplisse la réglementation. Cela, nous en sommes mais pour des pouvoirs absolus, de l'arbitraire, non merci, M. le Président.

Le projet de loi 153 introduit aussi par ailleurs dans sa batterie de mesures répressives une inflation telle des amendes imposées qu'on peut s'interroger sérieusement sur les chances de réussite de l'application de la loi et, a fortiori, sur la qualité de son influence dissuasive. Prenons un exemple. La faute est grave, répréhensible certes, mais voyez jusqu'où la sanction peut aller. Chasser le gros gibier sans permis, en vertu de l'article 32 du projet de loi 153, est passible, en outre du paiement des frais pour une première infraction, d'une amende d'au moins 400 $ et d'au plus 1200 $ et, pour toute récidive dans les trois ans de la condamnation pour une infraction à la même disposition, d'une amende d'au moins 1200 $ et d'au plus 3600 $.

Toujours à l'article 32, dans le cas d'une récidive, le juge peut en outre condamner le contrevenant à un emprisonnement d'au plus 90 jours. Rien de moins, M. le Président, pour avoir chassé le gros gibier sans permis ou ne pas avoir fermé l'étui dans lequel une arme à feu doit être insérée la nuit.

Et que dire des infractions lourdes? Ainsi, à l'égard du gros gibier, chasser la nuit avec un projecteur, tuer ou capturer au-delà de la quantité déterminée par règlement, tirer avec une arme à feu, un arc ou une arbalète à partir d'un véhicule ou d'un aéronef sont, à titre d'exemples, des infractions, en vertu de l'article 34 du projet de loi, passibles d'amendes d'au moins 1500 $ et d'au plus 4500 $ et, en cas de récidive, d'amendes d'un minimum de 4500 $ à un maximum de 13 500 $, sans compter la possibilité d'une condamnation à un emprisonnement d'au plus un an.

M. le Président, par rapport à l'actuelle Loi sur la conservation de la faune, les sanctions pénales de ce projet de loi appellent des amendes doublées, sinon triplées, portent le délai de récidive de deux à trois ans et incluent la possibilité d'emprisonnement. On peut s'interroger sur le sérieux véritable du ministre. Entend-il porter un grand coup, faire éclat, prouver son attachement au patrimoine faunique? Il risque de faire fausse route, son projet de loi pouvant se révéler inopérant.

Le ministre peut-il nous dire comment il justifie l'amende de 13 500 $ et la possibilité d'emprisonnement d'un an pour

avoir récidivé dans la vente, l'achat ou l'offre d'achat de chair de gros gibier par rapport à l'article 722 du Code criminel ou on retrouve une amende maximale de 2000 $ et un emprisonnement de six mois ou l'une de ces peines pour qui est reconnu coupable en vertu d'une procédure sommaire de l'infraction criminelle de voies de fait? 2000 $ pour une infraction criminelle de voies de fait sur la personne par rapport à 13 500 $ pour peut-être un orignal. Comment justifier cela? Comment justifier toujours la sévérité des pénalités à l'égard du braconnage avec celle du conducteur d'un véhicule routier qui croise ou qui dépasse un autobus affecté au transport d'écoliers dont les feux intermittents sont en marche et qui est passible, outre la perte de neuf points d'inaptitude, à des amendes d'au moins 200 $ et d'au plus 300 $, selon l'article 507 du projet de loi 127 sur le Code de la sécurité routière actuellement à l'étude en commission parlementaire de l'aménagement?

Je ne peux m'empêcher ici d'établir un lien entre le projet de loi 153, la loi 160 votée il y a quelque temps pour mettre fin aux grèves illégales, aux lois votées en juin dernier sur la contrebande du tabac, des carburants, la Loi sur les impôts et le projet de loi 127 sur le Code de la sécurité routière qui est présentement à l'étude article par article. Ces projets de loi et ces lois ont tous un dénominateur commun: des pénalités très sévères, si sévères qu'on peut douter même qu'elles soient applicables. Il y a là une caractéristique de ce gouvernement qui croit sans doute que la répression est une formule de vie en société.

Ce gouvernement est en train de développer et d'appliquer cette politique dans toutes les lois qu'il nous propose d'adopter, sauf, bien sûr, s'il s'agit des élèves illégaux et de la loi 101. C'est une pente dangereuse et où s'arrêtera cette escalade, si ces lois, si le phénomène de la loi 153 répète le phénomène de la loi sur la faune qui déjà, en 1983, avait augmenté certaines peines? Là, on se voit obligé de les augmenter à nouveau. Est-ce que cela sera suffisant? Qu'est-ce qu'on amènera comme pénalité prochaine dans une nouvelle loi d'ici deux ans, trois ans, quand on se rendra compte qu'il y a encore du braconnage? La peine de mort, comme l'exprimait le ministre en boutade? S'agissait-il vraiment d'une boutade? Car il se retrouvera toujours quelqu'un ou quelqu'une pour transgresser une loi ou un règlement et vous savez que les Québécois, à cet égard, sont assez habiles, comme le rapportait un chroniqueur de chasse et de pêche. Ce sont de petits malins, des petits "torieux" et il y a même un dicton aujourd'hui qui dit: Ce n'est pas défendu de chasser, ce n'est pas défendu de braconner, mais c'est défendu de se faire prendre.

D'ailleurs, une étude toute récente qui vient d'être publiée, qui vient d'être effectuée par le Bureau d'assurance du Canada conclut que c'est davantage la probabilité d'être appréhendé, que la sévérité de la peine prévue, qui empêche la transgression d'une loi. L'étude en question portait, évidemment, sur le Code de la sécurité routière, mais par analogie on peut très bien en reconnaître la pertinence au niveau de n'importe quelle de nos lois. La sévérité, de plus - j'ajouterai cet élément -peut faire peur aussi aux agents de conservation. De deux façons. D'abord, l'importance de la pénalité parce qu'on sait que des braconniers, il y en a dans presque tous les villages; ils sont bien connus de tout le monde, y compris des agents de conservation et ce sont parfois des connaissances très proches, parfois même des amis ou des parents. On peut se demander si un agent de conservation ne craindra pas de nuire de façon irrémédiable à quelqu'un de ses connaissances en l'obligeant à aller passer un an en prison ou à subir 13 500 $ d'amende.

Ce qui est plus important, je pense, surtout ce qui peut faire peur davantage, c'est qu'à l'intérieur des réseaux de braconniers, là où c'est vraiment difficile, c'est dangereux aussi. On peut se poser la question, M. le Président, jusqu'où un braconnier professionnel à l'intérieur d'un réseau qui se sentirait coincé et se verrait devant l'éventualité d'aller en prison ou de subir une amende de 13 500 $, jusqu'où, se sentant ainsi coincé, il ne prendrait pas le risque de tirer aur un agent de conservation. C'est à y penser! Lui-même issu du milieu de l'éducation, d'ailleurs, le ministre est en mesure d'évaluer que ce n'est justement pas la sévérité d'une peine qui empêche un jeune de poser un geste répréhensible ou pas, mais que c'est la pleine connaissance des conséquences de ses actes. De nouveau, le ministre a-t-il discuté avec le Procureur général du Québec, responsable de l'économie de nos lois en matière pénale?

D'autre part, pourquoi le ministre, à l'article 32 de son projet de loi, soumet-il aux mêmes sanctions pénales une infraction d'ordre purement technique, celle relative à l'arme à feu devant être, la nuit, insérée dans un étui et une infraction pouvant porter atteinte au cheptel, telle l'utilisation d'un projecteur la nuit pour déceler la présence d'un animal dans un endroit fréquenté par du gros gibier? Il y a là, il me semble, un défaut de concordance et même de cohérence. À cet égard, je me permettrai de faire référence à la Loi sur la qualité de l'environnement où les pénalités à un individu pour une atteinte grave à la qualité de l'environnement en vertu de l'article 20 seront de 200 $ à 5000 $. S'il s'agit d'une corporation qui fait, par exemple, un

épandage d'insecticide et qui porte atteinte à la vie d'un troupeau, eh bien, ce sera de 600 $ à 5000 $. Ces 600 $, c'est justement le minimum qu'on va imposer comme pénalité à un braconnier pour avoir tué un seul animal. Il y a ici, semble-t-il, une incohérence entre les diverses lois sur l'importance et la sévérité des amendes. (17 h 50)

Nous signalons enfin à ce chapitre que les amendes minimales à diverses infractions sont à ce point élevées dans ce projet de loi que les individus condamnés, à défaut répétitif de paiement, risquent de provoquer un engorgement des travaux communautaires compensatoires. C'est une autre brèche dans l'économie de nos lois. D'ailleurs, le ministre disait pourtant lui-même en conférence de presse, le 10 septembre, deux mois avant le dépôt de ce projet de loi, et je cite: "Le braconnage est une maladie contagieuse et des amendes même fortes ne règlent pas toujours le problème. Lorsque le braconnier n'est pas capable de payer, poursuivait-il, on le condamne à des travaux communautaires, et encore beau que ce ne soit pas des travaux en forêt." Que dire de plus, M. le Président? C'est vrai que le braconnage existe, qu'il est néfaste, qu'il doit être combattu, mais il ne faudrait tout de même pas créer une véritable psychose du braconnage, alors que, d'une part, les données sur cette activité sont presque inexistantes au Québec et que, d'autre part, tant les hauts fonctionnaires du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche lui-même que les agents de conservation de la faune s'accordent à dire, selon ce que révélait le journal La Presse, le 5 avril dernier, que la situation n'a guère changé dans ce domaine au cours des dernières années.

Le ministre peut bien, au début novembre, jouer à l'agent de conservation en se joignant, en Estrie, à une patrouille de nuit, mais rien n'y fera. Les braconniers seraient, par ailleurs, moins nombreux mais mieux organisés on le sait, regroupés en réseaux bien structurés et dotés de moyens de communications plus efficaces. Avant de se lancer tous azimuts dans une vaste et ambitieuse loi truffée d'imperfections, disproportionnée dans plus d'une mesure et potentiellement inopérante, le ministre aurait pu préalablement procéder à trois exercices susceptibles d'apporter un meilleur éclairage au problème.

Dans un premier temps, le ministre aurait pu attendre les résultats d'une importante étude que l'École de criminologie de l'Université de Montréal lui propose de mener. Les négociations sont présentement en cours entre le MLCP et l'École de criminologie pour des projets de recherche touchant le profil socio-économique et les motivations des braconniers, l'attitude du public ainsi que celle des juges à leur égard.

À notre avis, de telles données sont aujourd'hui essentielles à la conception d'une pièce législative visant à contrer le braconnage.

En deuxième lieu, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche aurait pu procéder à une vaste campagne d'éducation et de sensibilisation du public à l'importance collective de la faune, campagne qui aurait eu le double avantage de dissuader le braconnier actif ou potentiel et d'associer le citoyen à la répression du crime en l'invitant à dénoncer les actes illégaux dont il est témoin à l'égard de la faune.

La ressource faunique appartient à tous les Québécois et Québécoises. C'est un bien collectif d'une valeur inestimable. Les pêcheurs, les chasseurs, les trappeurs qui agissent légalement ont le droit d'exiger la protection de ce patrimoine. Il faut tout de même se rappeler, M. le Président, que le braconnage fait partie de nos us et coutumes, de notre mentalité et de nos habitudes de vie. Il faut donc travailler à déraciner ce quasi-caractère acquis. C'est par l'éducation d'abord que nous y arriverons. Il faut démystifier l'image de héros qui auréole encore le braconnier. Et c'est possible. Des expériences heureuses ont été faites dans le comté de Témiscouata, par exemple, où on s'est rendu jusqu'à l'intérieur de l'école même. Dans mon propre comté, le comté de Dubuc, un groupe de jeunes, sensibilisés au problème du braconnage du saumon, entre autres, se sont attachés à la tâche de convaincre la population des méfaits du braconnage sur le développement touristique des municipalités par l'épuisement de la ressource saumon qu'entraînait l'action des braconniers.

Après trois ans, le succès de leur action est aujourd'hui, évident. Le braconnage a diminué, les braconniers sont maintenant considérés comme des voleurs de la collectivité. Cette campagne d'éducation, cette campagne d'information pourrait être suivie et, à cet égard, le ministre m'a répondu à l'avance puisqu'il a mentionné la possibilité de rétablissement d'une ligne téléphonique, Télé-faune, sans frais, permettant en tout temps de dénoncer les actes de braconnage. Là-dessus, je suis d'accord avec lui, parce que cela pourra se révéler très efficace mais pour autant qu'il y ait eu d'abord une campagne d'éducation et d'information. C'est une façon, entre autres, de faire de l'ensemble de la population ni plus ni moins les agents auxiliaires du ministre dans la protection de la faune.

Enfin et sinon avant tout, le ministre aurait dû procéder à une augmentation sensible du nombre d'agents de conservation de la faune sans qui toute loi visant à contrer le braconnage, quelle que soit sa sévérité et ses ambitions, ne peut être appliquée. Campagne d'éducation, campagne

d'information, donc faire participer la population à son travail de conservation de la faune.

Il y a un autre préalable aussi qui est important. Pour que la loi soit appliquée, il faut qu'il y ait des gens pour l'appliquer. Il nous semble à ce sujet quelque peu inquiétant de constater que le ministre ignore le nombre exact d'agents de conservation de la faune chargés d'appliquer, entre autres lois, celle sur la conservation de la faune et ses règlements, d'informer la population sur les dispositions de ces lois et règlements et de promouvoir la conservation de la faune. Le 4 mai dernier alors qu'il rencontrait à Sainte-Foy les délégués du congrès printanier de la Fédération québécoise de la faune, le ministre disait qu'il entendait porter prochainement le nombre d'agents de 383 à 420. Le 26 du même mois, devant les membres du Club de conservation chasse et pêche, Memphrémagog, le ministre déclarait vouloir augmenter de 300 le nombre d'agents. Cela veut dire que du début du mois à la fin, le ministre avait diminué de 383 à 300. Le 11 septembre, lors d'une conférence de presse à Québec, il promettait une majoration de 350 à 500. Enfin, le 28 octobre, à l'étude des engagements financiers, le ministre me disait qu'il estimait à 460, y compris l'encadrement, le nombre d'agents de conservation. Ce nombre inclurait toutefois aussi les 40 agents sans expertise ni formation pour la chasse et la pêche sportives provenant du ministre délégué aux Pêcheries. D'ici au 31 mars 1987, il n'entendait procéder à aucune nouvelle embauche.

Voilà déjà une lourde hypothèque pour le projet de loi 153. Guère plus nombreux, il est vrai, par ailleurs, que les agents de conservation seront dotés - et c'est positif -en vertu de ce projet de loi de pouvoirs accrus en matière de répression du braconnage. Ainsi, au chapitre des saisies et en vertu des articles 6 et 7 du projet de loi, la durée de rétention serait portée de 90 à 120 jours. Par surcroît, l'agent de conservation ne serait plus obligé, dans le cas d'un résident du Québec, de remettre le véhicule ou l'aéronef saisi. En fait, il pourrait, au même titre que lorsqu'il s'agit d'un chien de chasse ou d'une embarcation saisie, en conserver la garde à sa discrétion.

Le ministre devra expliquer les motifs d'une telle majoration du délai de rétention. Il devra aussi justifier l'élargissement des pouvoirs de l'agent relativement aux saisies parce que, d'une part, susceptibles d'être abusifs et, d'autre part, difficiles d'application.

Nous aurons l'occasion de rediscuter en détail de ces nouvelles prérogatives en commission. Cependant, pour l'instant, il est une nouvelle disposition contre laquelle nous devons nous élever et le ministre comprendra. L'article 4 du projet de loi confère à l'agent de conservation un nouveau pouvoir l'autorisant à pénétrer à toute heure raisonnable dans un véhicule, une embarcation, un aéronef ou dans un endroit autre qu'une maison d'habitation où il a motif raisonnable de croire en la présence d'un animal, de fourrures ou d'un objet pouvant servir à chasser ou piéger un animal ou documents afférents à l'application de la loi et de ses règlements en vue d'en faire l'inspection. Ce pouvoir d'inspection sans mandat s'accompagnerait de l'article 15 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune qui accorde au même agent ou à un auxiliaire de la conservation de la faune un pouvoir de perquisition sans mandat.

Or, le ministre semble ignorer que le projet de loi 92, Loi modifiant diverses dispositions législatives eu égard à la Charte des droits et libertés de la personne, vient d'amender substantiellement cet article 15 en obligeant l'agent ou l'auxiliaire de conservation à obtenir, après déclaration sous serment, un mandat d'un juge de paix avant de procéder à une perquisition. Ainsi, selon ce qu'on peut constater, l'article 4 du projet de loi 153 permettrait de faire ce que le nouvel article 15 de la Loi sur la conservation de la faune, bonifié par le projet de loi 92, pour le rendre conforme à la charte des droits et libertés, interdit de faire. C'est un point où il y a donc une incertitude très grande et que le ministre devrait vérifier.

Enfin, M. le Président - dernier volet de ma réplique - sous prétexte de renforcer la Loi sur la conservation et de la mise en valeur de la faune eu égard à la lutte au braconnage, le ministre, à l'encontre de ce que défend son gouvernement, nous présente ici un projet de loi omnibus. Cette supercherie est condamnable et nous la dénonçons sous trois aspects. Premièrement, le projet de loi 153, sans crier gare et sans aucune justification apparente, logique, modifie l'appellation "parc national", à l'article 41, pour le vocable "parc de conservation".

Le projet de loi 48, Loi modifiant diverses dispositions législatives, adopté le 20 juin 1985, avait déjà procédé à la conversion inverse. Pourquoi revenir à "parc de conservation", pourquoi abandonner le mot "national"? Aucune explication, si ce n'est la crainte de cette épithète, semble-t-il, chez le ministre et les libéraux. On dirait que l'affirmation du Québec, ne serait-ce que dans un mot, leur brûle la langue. Je ne rappellerai pas ici tous les petits et gros coups d'épingle, comme les lois 140 et 142, qui viennent confirmer ce que je dis ici.

D'autre part, M. le Président, ce projet de loi omnibus, fait dans la déréglementation sauvage, a des conséquences nombreuses et

inquiétantes pour l'aménagement et l'affectation du territoire. Ainsi, à l'article 19 sur les terres domaniales désignées à des fins de développement de l'utilisation des ressources fauniques, le gouvernement se départit de son droit de déterminer par règlement les catégories de baux de droits exclusifs de chasse, de pêche et de piégeage, les conditions d'obtention de transfert et de renouvellement, la durée, le mode de calcul et les conditions de paiement du loyer pour chaque catégorie de baux, les normes et conditions de construction et de localisation des bâtiments ou constructions auxquelles doit se conformer le locataire, les types de bâtiments ou constructions qui peuvent faire l'objet d'indemnité ou d'achat, les critères servant à la fixation des indemnités.

Si la réglementation, comme je le disais il y a quelques minutes, est trop sévère, trop restrictive, empêche le ministre d'agir véritablement, ce n'est pas le règlement qu'il faut enlever mais la façon de procéder. Il faut l'assouplir.

Ce que nous dénonçons ici, c'est que toutes ces prérogatives que se donne maintenant le ministre relèvent de l'arbitraire et de sa discrétion et que celui-ci pourra faire tous les arrangements qui lui conviendront sans consultation aucune et à l'abri de tout regard. C'est la porte ouverte à un retour possible aussi aux clubs privés par des moyens détournés, entre autres le système de pourvoirie. Les cas Grantair risquent fort d'être institutionnalisés par les modifications proposées à l'article 19. Un retour vers l'établissement de deux classes de citoyens, ceux qui auront les moyens de payer des coûts d'accès à une pourvoirie à qui on aurait confié les meilleurs territoires, ceux et celles aussi qui devront se satisfaire du reste.

C'est tout le principe, finalement, de l'accessibilité qui semble remis en cause par l'abolition de la réglementation de l'article 19. C'est aussi contraire aux volontés exprimées par les ZEC. C'est inadmissible, ça ouvre la porte à l'exploitation sauvage de notre patrimoine faunique au profit d'une certaine classe. L'article 19 du projet de loi, quant à nous, à moins d'explications supplémentaires du ministre, doit donc être abrogé comme ceux, d'ailleurs, qui accordent des pouvoirs discrétionnaires au ministre.

En dernier lieu, M. le Président, il est des plus inadmissibles que la désignation, la délimitation des parties de terres domaniales aux fins de développer l'utilisation des ressources fauniques ainsi que l'établissement sur les terres domaniales de zones d'exploitation contrôlées, de réserves fauniques et de refuges fauniques se fasse désormais par décret gouvernemental et non plus par règlement. Les articles 15, 20, 22 et 26 du projet de loi en font le voeu. Ainsi, pour ces importantes affectations territoriales, déterminantes pour l'avenir du patrimoine faunique et du loisir ré-créotouristique, capitales dans la cartographie environnementale du Québec, il n'y aurait plus de prépublication de règlements, ni de délai de consultation, ni de mécanisme de contrôle par l'Assemblée nationale, dispositions pourtant incluses dans la nouvelle Loi sur les règlements présentée par le gouvernement que représente le ministre et qui sont entrées en vigueur en septembre dernier. L'Opposition demande que soit rétablie la désignation des territoires fauniques par réglementation.

Ce projet de loi est truffé d'imperfections et de contradictions, la preuve en ayant largement été faite. C'est à la seule condition que le ministre saura, dans sa réplique, apporter certains éclaircissements ou nous indiquer les modifications, les corrections nécessaires que l'Opposition pourra s'associer à sa démarche. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: M. le Président, je demanderais, à ce moment-ci, la suspension des travaux.

Le Vice-Président: La suspension du débat. Est-ce que cette motion de suspension du débat sur l'adoption du principe du projet de loi 153 est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Nous allons maintenant suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

(Reprise à 20 h 3)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez reprendre vos sièges. Veuillez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 18 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 124

Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente: À l'article 18, il s'agit de la reprise du débat qui avait été ajourné le 3 décembre dernier par le député de Saint-Hyacinthe concernant le projet de

loi 124, Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'assurance-maladie. M. le député de Saint-Hyacinthe. Si vous me permettez, je vais lire l'ordre qui avait été adopté hier soir concernant le projet de loi 124 et qui se lit comme suit: "Que, à la reprise du débat sur la motion portant adoption du principe du projet de loi 124, un maximum de trois heures soit consacré pour mettre fin à ce débat incluant la réplique du ministre; que le temps de parole soit réparti ainsi: deux heures à l'Opposition et une heure au groupe parlementaire du gouvernement. Le débat..." Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, tel qu'il apparaît au procès-verbal, vous remarquerez que le débat a été ajourné par le leader de l'Opposition et non pas par le député de Saint-Hyacinthe.

La Vice-Présidente: ...leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: C'est exact, Mme la Présidente. Comme le premier intervenant, on va demander à mon collègue de Lac-Saint-Jean de continuer le débat sur le projet de loi 124.

La Vice-Présidente: M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi 124, comme on le sait, a pour objet de permettre la suppression du deuxième examen dentaire annuel chez les enfants de quinze ans et moins. La question qu'on doit se poser quand on examine ce projet de loi est la suivante: Pourquoi une telle mesure par la ministre de la Santé et des Services sociaux? Qu'est-ce qui justifie une pareille décision et le dépôt d'un projet de loi semblable?

Bien sûr, la ministre peut nous répondre qu'elle a reçu une commande expresse de la part de son collègue du Conseil du trésor visant à sabrer, à couper dans ses budgets et qu'elle a, par conséquent, choisi de couper dans les soins dentaires pour les enfants du Québec. Je me permets de dire et nous nous permettons de dire ici de ce côté, Mme la Présidente, qu'il s'agit d'un fort mauvais choix, d'une mauvaise décision que cette coupure dans les soins dentaires chez les enfants du Québec.

Pourtant, elle aurait pu, j'imagine, faire un autre choix. Quand on administre et quand on gère un budget d'environ 8 000 000 000 $ en matière de santé et de services sociaux - 8 000 000 000 $ c'est pas mal d'argent - j'imagine qu'on fait face à une diversité de choix, qu'il est possible de faire des choix. D'ailleurs, certains intervenants sur cette question ont fait des suggestions. Je ne dis pas que ce sont celles-là que la ministre aurait pu choisir, aurait dû choisir, mais enfin ils ont fait des suggestions. L'Association des consommateurs du Québec, par exemple, en dénonçant le projet de loi 124, suggérait que la ministre aurait pu regarder du côté des 100 000 000 $ de dépenses publiques pour les soins de santé hors Québec, dont 90 000 000 $ pour des frais d'hospitalisation et 10 000 000 $ en frais d'honoraires. Il y a 100 000 000 $ qui se dépensent hors Québec pour des citoyens québécois, bien sûr. Il ne s'agit pas de supprimer ces 100 000 000 $, mais sur 100 000 000 $, selon l'Association des consommateurs du Québec, peut-être aurait-il été possible de trouver, d'identifier quelques compressions qui auraient fait moins mal, qui auraient fait moins de dégâts que la suppression du deuxième examen annuel chez les enfants en matière de soins dentaires.

L'Association des hôpitaux du Québec, de son côté, a suggéré, a proposé au gouvernement d'imposer une taxe sur les aliments sucrés de luxe à calories vides, comme le chocolat, la gomme, les bonbons, les boissons gazeuses, etc. C'est une suggestion. Simplement pour illustrer le fait que la ministre avait devant elle une large possibilité de choix. Devant cette possibilité, cette diversité de choix, elle a fait, à notre avis, le pire des choix. Elle a pris la plus mauvaise des décisions. Dans un budget de 8 000 000 000 $, elle a coupé dans les soins dentaires, elle a supprimé le deuxième examen dentaire annuel pour les enfants du Québec.

Je me souviens fort bien du temps où Mme la ministre était dans l'Opposition. Elle avait pendant ces années-là prononcé de nombreux discours sur la prévention. Elle avait un ton extraordinairement sincère et convaincant, quand elle parlait de prévention. Dans de nombreuses interventions qu'elle a faites du temps qu'elle était dans l'Opposition, elle a mis l'accent, avec raison d'ailleurs, sur la prévention. Elle a affirmé de façon fort convaincante qu'il faudrait donner une priorité à la prévention et à la mise en application de programmes préventifs par rapport au curatif. C'était là un discours que l'on entendait souvent et qu'elle a elle-même prononcé souvent en cette Chambre lorsqu'elle était de ce côté-ci. Elle affirme, elle confirme et elle opine de la tête, confirmant ce que j'avance.

Or, Mme la Présidente, dans quel secteur se situe le deuxième examen, les deux examens dentaires annuels qu'il était possible aux enfants québécois d'avoir en allant chez le dentiste? Cela se situe dans le secteur préventif. Il s'agit là d'un programme de prévention, d'un programme dont la dimension préventive prédomine, puisque l'enfant se rendant chez le dentiste, en

subissant deux examens dentaires par année, permet au dentiste de prévenir les caries et, par conséquent, d'améliorer la santé dentaire des enfants québécois. C'était d'autant plus nécessaire que tout le monde reconnaît que la santé dentaire des Québécois était médiocre et pitoyable à maints égards, mais qu'elle avait quand même connu certains progrès depuis une dizaine d'années grâce, en particulier, au programme mis en place par le ministère de la Santé et des Services sociaux.

Il est évident, tout le monde le reconnaît, tous ceux qui s'intéressent à cette question confirment le fait, que par cette mesure prise par la ministre et contenue dans le projet de loi 124, on va assister à une régression, à une détérioration et à des reculs de la santé dentaire des Québécois. Il faudra évidemment payer plus tard, c'est ce que confirme un spécialiste, M. Gilles Dussault, qui est un professeur en administration de la santé à l'Université de Montréal, dans ce sens qu'il faudra payer en soins curatifs plus tard ce qu'on n'aura pas payé en soins préventifs maintenant. Il est étonnant que la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est responsable de la santé au Québec, cautionne une décision semblable, prenne une décision semblable qui risque d'avoir des conséquences très graves et d'entraîner une détérioration de la santé dentaire des Québécois.

La pratique des Québécois s'était pourtant modifiée au cours des dernières années. En effet, 75 % des enfants québécois de trois à quinze ans allaient chez le dentiste à tous les sept mois. C'était là un progrès tout à fait remarquable par rapport aux pratiques du passé. On avait donc assisté à des changements fort heureux dans les comportements et dans les habitudes des Québécois. Or, une décision comme celle qui est prévue par le projet de loi 124 aura pour effet de perturber cette évolution heureuse des mentalités et des habitudes qui avaient besoin et qui ont besoin encore aujourd'hui d'être consolidées, parce que ces habitudes, ces pratiques nouvelles chez les Québécois ne sont pas encore suffisamment enracinées, n'ont pas encore suffisamment pris racine. Il faut donc que les programmes en vigueur aient pour effet de consolider ces habitudes. Or, l'adoption du projet de loi 124 aura pour effet de faire reculer, de modifier, de perturber, d'empêcher et de stopper l'évolution des mentalités et des habitudes en matière de soins dentaires au Québec. La ministre elle-même reconnaît la nécessité des deux examens annuels puisqu'elle continuera de les permettre pour les assistés sociaux. Il est évident que, s'il devient nécessaire de maintenir deux examens annuels pour les enfants des assistés sociaux, je pense que c'est une reconnaissance explicite qu'il est nécessaire, pour un enfant, de subir deux examens par année sauf que, par sa mesure, en ne payant pas le deuxième examen annuel pour les enfants québécois, elle va encourager en quelque sorte la régression et un recul en matière de santé dentaire.

Parfois, certains ministres, c'est connu, se complaisent dans la solitude du pouvoir et sont affectés de ce qu'on pourrait appeler le syndrome de la tour d'ivoire. Très rapidement, chez certains ministres, on se rend compte qu'on est presque en face de "la voie, la vérité, la vie" et que leur position, leurs affirmations doivent être considérées comme paroles d'Évangile ou comme de véritables dogmes qu'il est évidemment indécent, inconvenant de remettre en question. La ministre de la Santé et des Services sociaux fait partie de cette catégorie de ministres que rien n'ébranle. C'est là un beau cas assez remarquable d'entêtement et de possession tranquille de la vérité. On s'est rendu compte à l'occasion du projet de loi 142, encore ce matin, à la période de questions qu'elle est toute seule à avoir le pas. Elle est toute seule à approuver cette mesure, le projet de loi 142 en matière de services sociaux aux anglophones. Personne dans la société n'approuve cette mesure. Tout le monde réclame le retrait du projet de loi mais Mme la ministre est convaincue d'avoir le pas toute seule et de posséder, toute seule, la vérité.

C'est la même chose avec le projet de loi 124; personne ne l'approuve. On peut faire une revue de presse la plus exhaustive possible, personne ne l'approuve. Aucun organisme qui s'intéresse à cette question de près ou de loin, aucun intervenant qui s'intéresse à ce dossier n'approuve la ministre. Au contraire, non seulement on ne l'approuve pas, mais on s'y oppose. On est contre, parfois même assez farouchement contre le projet de loi 124 en matière de soins dentaires.

Les dentistes, bien sûr, c'est évident, les dentistes s'y opposent avec...

Mme Lavoie-Roux: Avec véhémence.

M. Brassard: ...véhémence. La ministre me suggère un terme fort juste, avec véhémence. L'Association des chirurgiens dentistes, l'Ordre des dentistes, on pourrait peut-être penser que voilà des organisations ou des intervenants qui sont plus ou moins en conflit d'intérêts. On pourrait penser cela, mais on pourrait aussi penser qu'ils le font en connaissance de cause puisque c'est là leur profession. Le soin des dents, c'est là leur profession.

Mais s'il n'y avait qu'eux, on pourrait peut-être penser que c'est par intérêt qu'ils s'opposent à cette mesure. Or, ce n'est pas le cas. La liste est longue, la liste est fort longue d'intervenants, d'organisations,

d'organismes qui s'opposent à cette mesure: l'Association des hôpitaux du Québec, la Fédération des affaires sociales, la Fédération des CLSC, la Société dentaire de Québec. Si on fait la revue des éditorialistes, on se rend compte qu'il n'y a pas un seul éditorialiste, dans tous les quotidiens du Québec, qui a approuvé le projet de loi 124, la mesure présentée par la ministre. (20 h 20)

Elle est toute seule à avoir raison, évidemment, si on examine son point de vue. Elle est seule à posséder la vérité. Cela me paraît un peu étrange que, dans le cas du projet de loi 142, dans le cas du projet de loi 124, par entêtement, de façon très butée, la ministre de la Santé et des Services sociaux prétende détenir toute seule, contre tous, contre toutes, la vérité. Il me semble que l'Opposition a parfaitement raison de s'opposer avec véhémence - pour employer l'expression de la ministre - farouchement à ce projet de loi qui est présenté devant nous parce que nous refusons de nous associer de près ou de loin à un recul, à une régression, à une détérioration de la santé dentaire des Québécois. C'est pourquoi nous allons prendre tous les moyens, toutes les mesures possibles qui nous sont permis pour empêcher l'adoption du projet de loi 124. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Si vous me permettez, j'aimerais donner une interprétation que je vais donner à l'ordre qui a été établi hier soir concernant les interventions. On accorde un débat maximum de trois heures, mais comme on ne spécifie pas que les interventions sont sans limite de temps, je verrai donc à appliquer la règle générale qui spécifie que c'est 20 minutes, à moins qu'il y ait une motion contraire à cet effet.

M. Gendron: Mme la Présidente, je ne pense pas que cela fasse problème mais c'est l'inverse de ce que vous venez de dire. Dans la motion, les deux leaders avaient eu l'occasion de dire que, comme d'habitude, quand il y a une entente sur une enveloppe globale de temps, c'est sans limite dans l'utilisation de notre enveloppe. Deux heures nous sont attribuées. Les leaders avaient décidé que chaque intervenant pourrait utiliser le temps qui lui semble approprié mais à l'intérieur de la limite de l'enveloppe et c'est la même chose pour l'Opposition*. Je pense qu'on va fonctionner plutôt avec ça.

La Vice-Présidente: De consentement. Vous comprendrez, M. le leader adjoint de l'Opposition, que ce n'était pas mentionné dans l'entente et que je ne pouvais pas le savoir.

M. Lefebvre: D'accord, Mme la

Présidente. Il y a consentement.

La Vice-Présidente: D'accord. M. le leader de l'Opposition.

Une voix: Chef!

La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le chef de l'Opposition.

M. Pierre Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): Je vous en prie. Mme la Présidente, je me permettrai d'entretenir l'Assemblée pendant quelques minutes d'un sujet que la ministre connaît bien et que j'ai eu également l'occasion de connaître pendant un certain nombre d'années au ministère des Affaires sociales.

Ce que j'ai à dire ne fera sans doute pas plaisir à la ministre à qui je porte, par ailleurs, elle le sait, sur le plan personnel, beaucoup d'estime et de respect, mais je dois dénoncer dans ce projet de loi une certaine tartuferie gouvernementale, une certaine approche systématique de désinformation, pour reprendre une expression chère au premier ministre, bref à voir comment les promesses rouges se traduisent, y compris en matière de santé dentaire.

Que dit le projet de loi 124? Il nous dit essentiellement que les enfants, du jour de leur naissance jusqu'à l'âge de 15 ans, qui, en ce moment, ont droit à deux examens dentaires annuels, n'auront droit maintenant qu'à un examen annuel. Pour justifier cette coupure réelle dans un programme à caractère universel dans notre système de santé et de services sociaux, la ministre invoque le fait que, de toute façon, ce n'est pas si grave que cela puisqu'en moyenne, les enfants de 0 à 15 ans fréquentent le dentiste pour un examen à peu près tous les treize mois. Ce que la ministre oublie de dire cependant, c'est que les enfants de 3 à 15 ans fréquentent le dentiste en moyenne aux sept mois, donc deux fois par année. Dans ses statistiques, la ministre inclut évidemment les enfants de 0 à 3 ans. Mais savez-vous, les enfants de 0 à 3 ans n'ont pas beaucoup de caries. Cela s'explique fort bien. C'est parce qu'en général ils n'ont pas beaucoup de dents. La ministre oublie de nous dire que l'immense majorité des enfants dans notre système d'assurance en matière de soins dentaires, 75 % des enfants de 3 à 15 ans, doivent fréquenter le dentiste à peu près deux fois par année, et elle coupe une de ces fois.

Deuxièmement, la ministre invoque le fait qu'elle fera là une économie nécessaire de 8 000 000 $ qu'elle réinjectera dans des services plus importants. D'abord, on peut s'étonner quelque peu que la ministre considère que ce n'est pas trop important la deuxième visite chez le dentiste en un an

pour un enfant âgé entre 3 et 15 ans alors que, dans le cas des enfants des familles qui bénéficient de l'aide sociale, elle conserve les deux visites. Est-ce qu'elle s'appuie sur des études qui nous démontreraient, Mme la Présidente, que les enfants n'ont pas besoin de deux visites par année? Mais non. Ce qu'on nous a cité jusqu'à maintenant, ce sont des études qui disent ne pas pouvoir démontrer que c'est essentiel, mais qui ne démontrent certainement pas que c'est inutile.

La ministre, en nous parlant de ces 8 000 000 $, omet de dire que ce n'est pas une coupure de 8 000 000 $ qu'elle fait, mais bel et bien de 20 000 000 $. En effet, Mme la Présidente, quand un enfant se présente chez le dentiste pour un examen, le dentiste regarde la bouche de l'enfant, évalue, palpe les gencives, voit si les dents branlent, vérifie s'il y a des caries. S'il y a des caries, le dentiste intervient. Quand il intervient, il pose un acte dentaire qui consiste à nettoyer la dent et à obturer la cavité de façon mécanique. Ce service de l'acte dentaire qui suit l'examen fait par le dentiste est un service rémunéré. Les chiffres que nous possédons de ces professionnels de la santé sont les suivants. Pour chaque dollar d'examen, il y a environ 1,53 $ en acte qui est posé. En effet, quand les parents amènent leurs enfants chez le dentiste, c'est souvent parce qu'il y a des problèmes. La ministre va couper le deuxième examen annuel mais le dentiste qui examine l'enfant à l'occasion de ce deuxième examen habituellement pose des gestes. Quel est l'effet net de cela? C'est que l'économie réalisée par la ministre n'est pas de 8 000 000 $ mais de 20 000 000 $, d'une part, et elle nous a vaguement dit que peut-être elle injecterait cette économie de 8 000 000 $ dans des services plus importants. Nous aimerions entendre dire la ministre qu'elle injectera plus de 8 000 000 $ même dans sa logique interne.

Troisièmement, toujours dans le cadre de l'argumentation de la ministre, c'est l'introduction d'un ticket modérateur pour les parents pas de 2 $, pas de 5 $, pas de 10 $ mais de 23 $, et je m'explique. Un parent a un enfant de 5, 6, 8, 9 ou 10 ans, qui est allé chez le dentiste disons au mois de janvier. L'enfant, au mois de septembre, au moment de la rentrée scolaire se plaint qu'il a mal aux dents. Le père ou la mère constate que l'enfant a un problème. Au moins, il s'en plaint. Le parent devra se rendre chez le dentiste et débourser 23 $ pour cette visite puisque ce sera la deuxième visite, dans l'année. Après cet examen pour lequel les parents auront dû payer 23 $ de ticket modérateur, le dentiste pourra procéder, par exemple, à l'obturation d'une carie, le drainage d'un abcès, le nettoyage de quantité de tartre anormale.

(20 h 30)

La ministre n'est pas franche quand elle parle de ce dossier dans la mesure où elle ne met pas les enjeux clairement sur la table. Oui, nous avions pour notre part effectué une diminution de 25 000 000 $ de ce qui était anticipé dans le système de soins dentaires quand nous étions au gouvernement. Je ne m'en cache pas, Mme la Présidente, comme d'ailleurs je ne m'en cachais pas à l'époque en prétendant faire un acte de progrès social démocratique par une coupure. Non, Mme la Présidente. Quand nous avons fait ces ponctions dans le budget des affaires sociales, nous avons dit ce qui en était.

Il faut se rappeler le contexte 1981-1982. Comment en sommes-nous arrivés à revoir et à rationaliser les programmes de santé au Québec? Parce que les taux d'intérêt étaient à 22 %, parce que le chômage était à 16 %, parce que l'inflation était à 10 %, parce que l'ensemble des Québécois avaient perdu 6 % de leur richesse collective en l'espace de deux ans. Cela craquait de partout, y compris dans l'État. Et il fallait partout, dans l'État québécois, essayer de faire plus avec moins ou, au minimum, de faire autant avec moins parce que, dans un contexte de hausse des taux d'intérêt, d'augmentation du chômage, d'augmentation du nombre d'assistés sociaux à cause d'une crise économique brutale, tout cela exigeait que l'État adopte des mesures contraignantes sur le plan des finances publiques. C'est ce que nous avons fait.

C'est ce que nous avons fait dans le cas des affaires sociales alors que cela se faisait partout dans le gouvernement, dans tous les ministères, en diminuant le rythme de croissance anticipé des affaires sociales de 200 000 000 $ en 1981-1982 sur un budget qui, aujourd'hui, est d'environ 8 000 000 000 $. Ce ne sont pas des coupures en chiffres absolus, mais une diminution des transferts dans les différents programmes ou dans les hôpitaux, ou dans les services de santé et les services sociaux, une diminution des transferts qui était ou inférieure à l'inflation ou inférieure à ce qu'on appelle les ajustements mécaniques.

Ah: sûrement, cela a été contraignant; Cela a été difficile aussi. On n'a pas conté de blague aux gens, par exemple. On ne leur a pas encore raconté que cela allait bien. On ne leur a pas dit: C'est parfait et on va mettre plus d'argent. On a dit: Non, c'est une période difficile pour le Québec. Je suis parti avec d'autres et on a fait le tour des associations. On a dû en parler avec des travailleurs syndiqués. On en a parlé avec tous les syndicats de professionnels. On en a discuté dans les conseils régionaux, avec l'Association des centres d'accueil, l'Association des hôpitaux, la Fédération des CLSC, l'Association des centres de services

de santé et des services sociaux, les associations de centres d'accueil privés ou conventionnés et avec les gens, avec les citoyens à qui on a parlé honnêtement. On ne leur a pas pété une broue en disant qu'on mettait 800 000 000 $ de plus dans la santé. On leur a dit: Cela va être dur, mais on va essayer de le faire ensemble.

On est parvenu à le faire ensemble. Je ne prétends pas que cela a été facile ni même agréable, par bouts, mais il fallait le faire. La situation économique du Québec, la situation des finances publiques du Québec l'exigeait. Un minimum de solidarité pour préserver l'essentiel de la qualité et de la valeur de notre système de services de santé et de services sociaux l'exigeait et nous motivait à le faire. On n'imposait pas des diktats.

Cette approche nous a amenés, entre autres, dans le secteur des soins dentaires, à effectuer une ponction d'environ 23 000 000 $ ou 25 000 000 $. La ministre, en nous disant que c'est 8 000 000 $, en fait une de 20 000 000 $. Qu'est-ce qu'on a fait dans ce contexte? D'abord, on a négocié cette ponction avec les professionnels. La ministre me reprochait hier, dans son discours, ou à mon collègue de Gouin: Vous n'êtes même pas passés par l'Assemblée nationale, vous autres, pour faire cette ponction en 1982-1983. Je réponds à la ministre: Je comprends, ce n'était pas nécessaire. On l'avait négociée avec les intervenants. On était parvenu à une entente écrite négociée avec l'association des dentistes pour rationaliser les programmes en fonction, cependant, d'objectifs clairs.

Il ne s'agissait pas d'une affaire sortie du bureau du président du Conseil du trésor ou d'une lubie technocratique, alors que 75 % des enfants se prévalent de deux visites annuelles en disant: On va regarder cela. On va cibler. On va mettre le radar là-dessus. Je sais comment cela fonctionne au Trésor. J'ai eu à apprendre mes finances publiques pendant quelques années avec les gens du Trésor quand on exigeait 200 000 000 $ de coupures aux affaires sociales. Le ministre des Finances a dû m'expliquer pourquoi à quelques reprises. Je sais comment ils fonctionnent au Trésor. La ministre est victime de l'appareil technocratique et du cabinet du ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor. Elle vient nous dire 8 000 000 $. Pas de rationnel derrière cela, pas de cohérence dans l'approche de restrictions, c'est tout croche, comme le reste. Pas de politique en matière de santé dentaire. Il faut économiser 8 000 000 $. Dans le fond, ne le dites à personne, c'est 20 000 000 $. Il n'y a pas d'objectif précis, rien qui permette aux intervenants, aux professionnels de la santé, de comprendre comment ces changements au système amélioreront la santé dentaire des enfants du Québec, parce qu'on le sait, pendant des années, on a connu des retards que nous avons tenté de combler du mieux que nous avons pu à compter de 1976.

Qu'est-ce qu'on a fait à l'époque? À l'époque, si on a opéré cette ponction d'un peu plus de 20 000 000 $, d'une part, on l'a négociée, deuxièmement, on l'a fait dans un contexte cohérent pour préserver la qualité du système et sa cohérence en fonction de ses effets sur la santé dentaire des enfants au Québec, et troisièmement, nous avons réinjecté 9 000 000 $ dans la prévention, ce que ne fait pas la ministre. Car maintenant, depuis cette époque où nous avons dû faire ces rationalisations, il y a dans toutes les écoles du Québec, à partir notamment des CLSC, des" hygiénistes dentaires qui couvrent maintenant 100 % des enfants à l'école ou en garderie avec des injections de fluor, avec de l'éducation dentaire, avec des services préventifs en matière de santé dentaire. Ce sont 9 000 000 $ d'injectés à partir de cette compression que nous avions dû faire d'un peu plus de 20 000 000 $. La ministre elle ne promet rien. Vaguement, elle évoque que cela va aller dans des choses plus essentielles. Mais elle coupe. C'est ce qui lui vaut d'ailleurs le titre que lui a décerné le président du Conseil du trésor récemment, dans une revue très lue, de la meilleure coupeuse de dépenses publiques, alors que nous entendons la ministre nous dire qu'elle a injecté 800 000 000 $ d'argent neuf dans le réseau des affaires sociales.

La ministre a fait un choix qui se défend mal sur le plan technique, sur le plan de la cohérence, eu égard à la santé dentaire des enfants du Québec, et tout cela pour réaliser les basses oeuvres. Une fois de plus, la ministre sert de fer de lance aux basses oeuvres du président du Conseil du trésor.

Je rappellerai à la ministre qu'en dépit du contexte économique du début des années quatre-vingt, avec 22 % de taux d'intérêt, 16 % de chômage, 10 % d'inflation, nous avons, au cours de cette période, ouvert des milliers de lits dans les centres d'accueil, ouvert des milliers de lits dans les pavillons, fait en sorte qu'il y ait 2675 lits de plus de courte durée de médecine active dans nos hôpitaux. Nous avons créé Urgences-santé. Nous avons soutenu des groupes communautaires. Nous avons amorcé le parachèvement des réseaux des CLSC. Et nous avons amélioré la quantité et la qualité des services à domicile. (20 h 40)

Ce que je vois du côté de la ministre, cependant, ce sont des coupures pour des coupures pour ensuite avoir la paix, mais avec le résultat que la ministre responsable de la Politique familiale s'en prend au système de soins dentaires qui touche les

enfants des familles du Québec.

C'est pour cela, Mme la Présidente, que vous nous entendrez continuer de répéter que ce gouvernement, qui n'a pas de politique linguistique, qui n'a pas de politique économique, n'a pas non plus de politique en matière de santé et de services sociaux.

La Vice-Présidente: Merci, M. le chef de l'Opposition. M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Mme la Présidente, à cause du rythme de ceux qui prennent la parole sur ce projet de loi, vous n'êtes pas sans savoir que nous sommes contre ce projet de loi et que nous allons voter contre ce projet de loi. Nous allons voter contre ce projet de loi par devoir, d'abord, et par respect pour les enfants du Québec, ensuite. Mme la ministre a fait un choix très irrationnel en coupant des soins primordiaux pour les enfants du Québec. Comme l'a dit notre whip, le député de Lac-Saint-Jean, elle avait entre les mains un budget de 8 000 000 000 $, elle se vante depuis un certain temps d'avoir investi plus de 873 000 000 $ cette année dans son ministère et elle arrive aujourd'hui pour nous dire qu'elle veut couper 8 000 000 $ dans le service dentaire aux enfants, ou plutôt 20 000 000 $.

Et bien, il est difficile de comprendre pourquoi d'une main on investit dans un ministère 873 000 000 $ et que de l'autre main on coupe 8 000 000 $ ou 20 000 000 $, même qu'au début c'était 30 000 000 $ qu'on voulait couper. Pourquoi, Mme la Présidente, la ministre choisit-elle les enfants comme cible? À cause de leur faiblesse, parce qu'ils sont moins bien organisés pour protester? C'est possible. Elle coupe tant et si bien qu'on se demande ce que ces enfants auront comme dentition lorsqu'ils seront devenus des adultes. Nous faisons, de notre côté, tout en notre pouvoir pour que la ministre revienne sur sa décision, parce que par cette décision elle crée deux genres de jeunes enfants au Québec: un groupe de jeunes où les deux examens de 23 $ seront compensés par les deniers de l'État, ce sont les enfants dont les parents bénéficient des prestations de l'aide sociale, et un autre groupe d'enfants dont les parents ne bénéficient pas de l'aide sociale. Pour ces enfants-là, la ministre décide de ne pas payer le deuxième examen, les 23 $ supplémentaires. Et elle demeure comme le mur de Berlin, devant nous, inébranlable. Inébranlable.

Je sais que les enfants du Québec ont besoin au moins de deux examens par année. C'est une question de santé. Selon les études - nous avons plusieurs études et la ministre a ces études. Il y a un dossier de la santé dentaire des Québécois qui a été produit il y a quelques temps et dans ce dossier, dans cette étude on dit ceci: "Selon l'enquête STAMM, les jeunes Québécois présentent un fort taux de dents cariées non traitées et un indice élevé de dents manquantes." Si on regarde les principaux pays du monde, Québec vient au premier rang pour les dents cariées, les dents dans la bouche des jeunes enfants: 5 dents au Québec en moyenne; en Allemagne de l'Ouest, 4,4; au Japon, 4,2; en Australie, 2,5; en Ontario - ce n'est pas loin l'Ontario - 1,2. Depuis quelques temps, cette moyenne, le championnat des dents cariées chez nos enfants diminuait à cause des programmes que nous avions implantés. Dès que nous recommençons à avoir une meilleure dentition pour notre jeunesse au Québec dans les statistiques, la ministre vient mettre le couperet dans ce programme. Je crois que ce n'est pas permis de faire cela. Pourquoi nos enfants au Québec ont-ils plus de caries et plus de dents manquantes que dans la plupart de tous les pays civilisés et industrialisés du monde? C'est une sorte de tradition au Québec. Une autre étude nous dit que les résultats connus révèlent que les habitudes de consommation de sucreries en collation sont extrêmement répandues chez les enfants et les adolescents du Québec. Ensuite, les pratiques d'hygiène dentaire sont déficientes et très souvent inefficaces. La moitié des écoliers ne brossent pas leurs dents. C'est incroyable! La moitié des écoliers du Québec ne brossent pas leurs dents malgré nos programmes, malgré l'incitation, malgré que nous ayons des hygiénistes dentaires dans la plupart de nos écoles dans tout le Québec... Je ne vous dérange pas trop?

Une voix: Continuez.

M. Blais: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: S'il vous plaît!

M. Blais: II y a 95 %...

La Vice-Présidente: S'il vous plaît! Je demanderais la collaboration de... S'il vous plaît, je demande... S'il vous plaît! .

Vous pouvez continuer, M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Mme la Présidente, je comprends et je n'en veux pas à mes confrères qui ont quelques distractions, parce qu'on nous présente des projets de loi qui sont tellement négatifs et tellemnt néfastes que nous faisons, malgré que nous ne soyons que 23, tout en notre pouvoir pour essayer de bloquer ces projets iniques, inhumains, irrecevables en réalité pour tout esprit rationnel. Eux sont obligés de nous écouter. Ils ne veulent pas parler sur ce projet, ils en ont honte. Ils discutent entre eux. Je ne

vous en veux pas mais parlez moins fort, s'il vous plaît, pour que je puisse au moins m'entendre moi-même. Je m'entends mal parce que vos voix couvrent la mienne. Ce qui est très curieux c'est que je suis persuadé que la plupart de ces députés du pouvoir qui rigolent devant ces cavités qui sont dans la bouche de nos enfants ont, eux aussi, des enfants qui subiront les conséquences néfastes de ce projet de loi.

Les pratiques d'hygiène - je crois que vous devriez écouter, messieurs, mesdames du gouvernement - les pratiques d'hygiène chez les adolescents et les jeunes enfants du Québec ne sont pas très recommandables. Ils ont de mauvaises pratiques. On dit, et je répète pour que vous écoutiez, que la moitié des écoliers ne se brossent pas les dents, 95 % de nos adolescents utilisent des brosses non recommandables, les méthodes pour se brosser les dents sont à 75 % incorrectes. Elles font tort aux gencives et produisent des gingivites chez nos enfants. On lit que 5 % seulement des enfants utilisent la soie dentaire. C'est un peu plus compliqué, la soie dentaire. C'est un peu fastidieux aussi à employer mais, quand même, si on montrait par des plans gouvernementaux aux jeunes enfants à se servir de la soie, ils prendraient l'habitude de le faire et n'auraient plus de problème à le faire après. (20 h 50)

Cependant, ce n'est pas avec des programmes comme ceux-là, avec des lois comme celle que nous avons ici qu'on va pousser les jeunes à mieux se brosser les dents et à suivre les conseils des hygiénistes dentaires. Aussi, nous n'appuyons pas ce projet et nous voterons contre parce que, dans le milieu dentaire, tous les gens qui s'occupent de la bouche, les oto-rhino-laryngologistes, les chirurgiens dentistes, les denturologues, tous ceux qui s'occupent des soins bucaux au Québec s'opposent de façon formelle et non équivoque à cette loi, mais pas dans le sens pécuniaire de la loi.

Les chirurgiens dentistes, ce n'est pas leurs affaires qu'un gouvernement coupe 8 000 000 $ dans des soins dentaires à des gens. Mais ils disent que le choix qu'ils font de couper le deuxième examen - c'est cela qui est presque scandaleux - c'est la plus mauvaise décision que la ministre pouvait prendre. J'ai ici un communiqué de l'Association des chirurgiens dentistes du Québec et de l'Ordre des dentistes du Québec qui ont signé conjointement un communiqué. Je vais vous lire une partie de ce communiqué. Certaines personnes qui ont lu ce communiqué souffrent. Ce sont des gens du gouvernement qui souffrent et qui ont lu ce communiqué. Je ne peux pas comprendre, s'ils l'ont lu, pourquoi personne ne se lève pour dire à la ministre de ne pas passer cette loi. Les grands spécialistes du Québec s'y opposent.

On dit: "L'Association des chirurgiens dentistes du Québec et l'Ordre des dentistes du Québec s'opposent à ce projet de loi non pas à cause de l'aspect monétaire, ils s'y opposent parce que le but de l'examen "bi-annuel" pour la population de 0 à 15 ans est un service dentaire..." Mme la Présidente, je ne peux pas continuer à parler, cela jase trop fort tout autour de moi.

La Vice-Présidente: S'il vous plaît, je demanderais la collaboration de la Chambre. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Écoutez, je demande la collaboration de la Chambre. Pour le meilleur déroulement des travaux de cette Assemblée, je vous demanderais... M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Nos spécialistes disent ici: "Le but de l'examen "bi-annuel" pour la population de 0 à 15 ans est de permettre à l'appareil bucco-dentaire de remplir son rôle masticatoire." Pour avoir un rôle masticatoire il faut d'abord que les dents soient saines et, pour que nos dents soient saines, il nous faut un système de services sociaux qui, en soi, soit sain et je crois que cette loi vient "désassainir" ce système que nous avons.

Devant cela, devant tous ces experts qui disent que ce projet est à toutes fins utiles irrecevable pour la jeunesse québécoise, Mme la ministre demeure stoïque, imperturbable, placide, presque lymphatique. On la voit même sourire par moments. Elle prend un malin plaisir à tenir tête à l'Opposition devant ce projet qu'elle sait elle-même irrecevable par les jeunes familles québécoises.

On voit bien qu'il n'y a rien à faire pour ébranler Mme la ministre, il n'y a rien à faire, c'est le mur de Berlin dans toute sa splendeur. Pour marquer notre opposition, nous ne pouvons que le dire, le dire haut et fort, mais il n'y a rien à faire, car elle a promis.

En conclusion, Mme la Présidente, cette même ministre a promis durant la campagne électorale, avant le 2 décembre 19B5, de ne faire aucune coupure dans le système social au Québec, même d'y faire des investissements pour répondre aux besoins qu'elle disait à l'époque les plus pressants de la population québécoise. C'était une grosse balloune de promesses rouges. Dès qu'on est arrivé, ce sont des lois de cet acabit qui ont fait péter ce ballon rouge, Mme la Présidente. Ce sont des lois pointues de cet acabit qui pètent cette balloune rouge, Mme la Présidente, et c'est pertinent. Après avoir promis avant le 2 décembre 1985 d'être très condescendante et d'ajouter de l'argent dans le domaine des affaires sociales, elle nous arrive et elle reçoit... C'est le député de Gouin, responsable du dossier des services

sociaux pour l'Opposition, qui lui a décerné la médaille d'or. La médaille d'or des coupures de cette dame pour les enfants et l'âge d'or, mais sous l'inspiration du titre donné par les cisailles "gobeilliennes" elles-mêmes en la traitant de sa meilleure coupeuse, comme si un tranchant pouvait mieux couper une tomate à différents âges dans la société.

En terminant, et comme Noël approche, j'aimerais lui donner un titre. J'aimerais l'appeler pour Noël qui vient, la fée des caries. Je suis persuadé que la fée des caries, les enfants vont l'appeler plutôt la "féroce" parce qu'elle est à les édenter pour leur cadeau de Noël. Elle est à l'image du Canada, elle est la "fée des rations canadiennes" parce que la ration que les enfants doivent attendre d'elle, elle leur coupe pour Noël. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Terrebonne.

M. le député de Taschereau.

M. Jean Leclerc

M. Leclerc: Mme la Présidente, simplement quelques secondes pour reprendre mon sérieux après cette intervention que je n'ose pas dire farfelue.

Je lisais dans Le Soleil d'aujourd'hui un article de Mme Lia Lévesque qui disait: "Pour les enfants, un seul examen dentaire remboursé." Je voyais: "Opposition indignée." Excusez, Mme la Présidente, tout à l'heure le député de Terrebonne a fait certaines remarques parce qu'on discutait... Je voudrais lui demander de ne pas discuter, au moins de ne pas faire ce qu'il nous reprochait.

M. Blais: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Je tiens à vous dire que je vais laisser le député ministériel faire son discours. Il y en a tellement peu de ce côté-là qui parlent. Je vais même aller l'écouter à la télévision pour être sûr qu'il dira ce qu'il a à dire, et j'espère qu'il va le dire de façon très honnête, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Là-dessus, je demande la collaboration de la Chambre pour le meilleur déroulement des travaux.

M. le député de Taschereau, continuez votre intervention.

M. Leclerc: Merci, Mme la Présidente. Je vous reporte à l'article du Soleil d'aujourd'hui qui titrait: "Pour les enfants, un seul examen dentaire remboursé." Ensuite, un petit paragraphe disait: "Opposition indignée."

De son côté, le porte-parole péquiste pour les questions de santé, le député Jacques Rochefort, s'est encore une fois élevé avec fougue contre le projet de Mme la ministre Lavoie-Roux. Là, je me suis dit: Le député de Gouin va dormir sur ses deux oreilles ce soir. Il va donc être heureux d'être ainsi passé à l'histoire, de s'être indigné devant ce projet de loi. (21 heures)

Ce qui est le plus amusant, on va y revenir tout à l'heure, c'est que le député de Gouin était adjoint parlementaire aux Affaires sociales, à l'époque, si on se reporte en 1982, alors que le chef de l'Opposition d'aujourd'hui était ministre des Affaires sociales. C'est extraordinaire la différence qu'il peut y avoir entre un adjoint parlementaire au ministre des Affaires sociales dans le gouvernement d'alors et le critique de l'Opposition en matière de santé et de services sociaux d'aujourd'hui. On dirait que ce n'est plus la même personne. On dirait que ce qui était beau, bien et raisonnable hier devient dramatique, épouvantable, scandaleux aujourd'hui.

Évidemment, l'Opposition a un rôle à jouer. On en convient tous ici, mais c'est quasiment incroyable de voir que le même homme, à deux postes différents, ne tient plus le même discours, celui-là même qui s'est effacé quand le chef de l'Opposition d'aujourd'hui, ministre des Affaires sociales en 1982, a fait des coupures de 25 000 000 $, celui-là même qu'on n'a pas entendu, qui s'est effacé, parce que c'était l'ami du chef de l'Opposition. À l'époque, le ministre des Affaires sociales était considéré comme le dauphin et il ne fallait pas parler contre le dauphin. Or, le député de Gouin s'est effacé à ce moment-là. On ne l'a pas entendu. Mais, aujourd'hui, il est critique de l'Opposition et tout ce qu'il voit n'est que scandale. Tout ce qu'il voit n'est qu'impôt sur les enfants - c'est son nouveau vocabulaire - et tout ce qu'il voit, c'est un drame pour les familles du Québec.

Le chef de l'Opposition, qui a pris la parole il y a quelques minutes, nous a dit que nous n'avions aucun appui. Je lui demanderai, par votre intermédiaire: En avait-il des appuis lors du dernier budget péquiste pour instaurer une taxe sur les assurances qui devait rapporter 700 000 000 $? Ce même chef de l'Opposition se demande où sont nos appuis relativement à une coupure de 8 000 000 $. Ce n'était pas grave, eux, c'était une taxe de 700 000 000 $ sur les assurances qui touchait davantage les familles que notre petite coupure de 8 000 000 $. Ils ont instauré une taxe de 700 000 000 $ sur les assurances, sans aucun appui. Même les péquistes étaient contre. Même les péquistes que je connais étaient contre la taxe sur les assurances. Ces gens-là n'avaient aucun

appui, nulle part dans la société et, aujourd'hui, ils nous disent: Où sont vos appuis pour faire une coupure de 8 000 000 $? C'est sûr que les dentistes n'attendent pas à la porte pour nous appuyer; c'est clair. On n'a jamais attendu que les dentistes nous appuient, nous aiment et nous adorent.

Je ferai remarquer au chef de l'Opposition qu'à l'époque où il était ministre des Affaires sociales, un article du Devoir rapportait: "Les dentistes menacent de se retirer du régime de soins dentaires gratuits..." Savez-vous comment ils qualifiaient, à l'époque, les pirouettes du chef de l'Opposition, alors ministre des Affaires sociales? Ce n'est pas moi qui l'invente, "...qualifiant d'acrobatie politique les réductions proposées par Johnson". Ah bon! Nous autres, on dit qu'on coupe 8 000 000 $ et l'ex-ministre des Affaires sociales nous dit: Moi, vous savez, j'ai fait cela dans la sérénité. J'ai coupé 25 000 000 $, c'est comme si j'avais envoyé un beau bouquet de fleurs à tout le monde dans la société. J'ai fait une tournée et on a fait passer notre message; il n'y a pas eu de problème.

Quand on regarde ce qui s'est passé, par exemple, en 1982, les articles de journaux disent "qualifiant d'acrobatie politique". Cela tranche un peu avec ce qu'on vient d'entendre. Je pourrais vous en citer d'autres. On rigole de ce côté-là. "Abolition possible des soins dentaires gratuits", le lundi 8 février 1982. Ce n'est pas de notre temps. C'est au temps du député de Gouin et adjoint parlementaire.

Une voix: ...

M. Leclerc: Ah oui! On va vérifier. C'était juste avant ou juste après.

Des voix: Ah! Ah!

M. Leclerc: Et le chef de l'Opposition d'aujourd'hui...

La Vice-Présidente: M. le député de Taschereau, pour éviter toute... adressez-vous donc à la présidence, s'il vous plaît!

M. Leclerc: On disait, le lundi 8 février, "Abolition possible des soins dentaires gratuits". Le Soleil, le mardi 9 février, "Économie des soins dentaires". "Abolition des soins dentaires gratuits pour les enfants, absurde", dit l'ACDQ. Absurde. J'ai entendu tantôt le chef de l'Opposition. Il nous a dit: On a coupé 25 000 000 $, on a expliqué cela à tout le monde, cela a bien été. Vous savez, le contexte était difficile. Comme si aujourd'hui le contexte était facile. On prend un situation financière avec un trou de 1 700 000 000 $, la vie est belle, cela va bien. On ne comprend pas pourquoi on coupe. Mais dans leur temps c'était normal de couper, cela allait très mal, voyez-vous. Alors, abolition des soins dentaires gratuits pour les enfants, absurde. "Soins dentaires: La gratuité demeure mais Québec veut réduire les coûts." Cela commençait en 1982. "Santé: D'autres compressions. Une économie de 45 000 000 $." Mme la Présidente, on se rend compte que nous avons deux discours complètement différents. Si on se réfère à ce qui se passait lorsque les gens qui sont dans l'Opposition aujourd'hui étaient au pouvoir et si on regarde le discours qu'ils nous tiennent depuis déjà un bon bout de temps sur la question, on se rend compte qu'on a deux versions totalement différentes. Ce qui était sain, normal, raisonnable pour 25 000 000 $ en 1982 devient tout à coup, en 1986, une ignominie. Je vais passer certains qualificatifs que j'ai entendus parce qu'on en a tellement entendu. Mais j'ai du mal à comprendre comment cela peut changer si vite. J'ai du mal à comprendre comment quelque chose peut être raisonnable en 1982 pour 25 000 000 $ et déraisonnable en 1986 pour 8 000 000 $.

Le chef de l'Opposition est intrigué et dit: Mais qu'est-ce que vous allez faire avec les 8 000 000 $? Vous savez, avec les 25 000 000 $, on a fait plein de belles choses. Je vais lui dire ce qu'on va faire avec les 8 000 000 $ et ce qu'on a déjà fait avec les 8 000 000 $. Des crédits supplémentaires, et ce dès notre arrivée au pouvoir, de 465 000 000 $ ont été injectés dans le réseau. Oui. Dès l'entrée en fonction de la nouvelle équipe ministérielle.

Des familles d'accueil, 11 000 000 $. Au cours de la première année, malgré un contexte difficile, 800 000 000 $ ont été injectés. Le chef de l'Opposition se demande ce qu'on va faire avec les 8 000 000 $ qu'on coupe, 8 000 000 $ de plus que les familles du Québec auront à payer. Hé bien! Je lui réponds: Nous sommes arrivés dans une conjoncture difficile, nous avons dû faire des réinjections énormes d'argent dans le réseau des affaires sociales. Ne cherchez pas les 8 000 000 $, ils sont là.

Malgré la coupure de 8 000 000 $, -et c'est important qu'on se le dise - notre régime demeure l'un des meilleurs au Canada. En effet, le programme québécois de soins dentaires pour enfants est l'un des plus importants au Canada avec ceux de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard. Mais, également, en Nouvelle-Écosse et à l'Île-du-Prince-Édouard, on ne prévoit qu'un seul examen dentaire par année. Si c'est bon en Nouvelle-Écosse, si c'est bon à l'Île-du-Prince-Édouard qui ont de très bons programmes dentaires, ce devrait être pas pire pour nous autres, n'est-ce pas? Cela devrait avoir du bon sens.

Mme la Présidente, notre mesure est raisonnable. Je l'appuie et j'ai la certitude que la ministre fera un excellent usage des 8 000 000 $ ainsi épargnés. Qu'on pense aux 64 % d'augmentation du budget de l'Office des personnes handicapées du Québec, qu'on pense à l'augmentation globale de 6,4 % du budget du ministère de la Santé et des Services sociaux, voilà des choses concrètes. Voilà des montants investis qui nous ont permis de désengorger les urgences, de débloquer beaucoup de projets qui n'avaient reçu, du temps où l'Opposition était au pouvoir, que de belles lettres d'intentions. J'ai fait le tour des hôpitaux dans mon comté. Ils avaient eu des lettres. Il n'y avait pas de problème pour cela. Et si je me rappelle bien, il y avait 1 % ou 2 % de l'argent dégelé. C'était pour faire les études de "préfaisabilité". On promettait des millions et des millions, on débloquait des petits 10 000 $ et on s'imaginait que tout était beau, tout allait bien au Québec. Non. Nous autres, on a fait des réinjections majeures au ministère de la Santé et des Services sociaux. (21 h 10)

Je n'ai donc aucune honte, aucune inquiétude à appuyer ce projet de loi et je voudrais simplement demander au député de Gouin, par votre entremise, bien sûr, de se rappeler un peu le temps où il était au pouvoir. Alors qu'il n'est, mais absolument pas intervenu sur les coupures de 25 000 000 $, maintenant qu'il est dans l'Opposition il intervient à répétition toujours avec la même rengaine pour nous dire que c'est épouvantable. Si c'était si épouvantable que cela, cela l'aurait été en 1982 et il aurait dû avoir la cohérence, à ce moment, de se lever et de le dire. Il ne l'a pas fait.

Bref, c'est une mesure raisonnable. C'est une mesure que j'appuie et c'est une mesure que les Québécois et les Québécoises vont comprendre, je crois. C'est une mesure que les citoyens et les citoyennes du Québec vont comprendre tellement elle est plus légère que la coupure de 25 000 000 $ que ces gens leur ont fait subir en 1982. Mme la Présidente, je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Taschereau. M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Mme la Présidente, le dernier personnage en cette Chambre que je m'attendais de voir parler sur ce projet de loi, c'est le député de Taschereau parce que le député de Taschereau sait lui qui vient d'une famille qui produit des biscuits, ou aurait dû savoir qu'une des causes de la carie dentaire, c'est justement le sucre et les biscuits sucrés. De la même façon qu'on demande aux entreprises qui produisent des boissons alcooliques de mettre des indications sur les étiquettes comme quoi consommer trop de boissons alcooliques peut apporter des problèmes sur le plan de la santé, ou aux manufacturiers de cigarettes et de tabac d'avoir des restrictions de santé sur leurs produits, je me serais plutôt attendu que le député de Taschereau dise qu'il était pour les soins et que lui-même comprenait cela. Étant issu d'une famille qui a oeuvré dans le biscuit, il connaît les effets du sucre sur la carie dentaire et il sait sûrement qu'on ne peut pas - surtout quand on vient d'une famille qui connaît ce secteur - être indifférent au résultat pour les enfants de consommer des produits sucrés.

Il ne peut pas ne pas savoir non plus qu'un des taux les plus élevés de carie, pas un des taux les plus élevés, mais le taux le plus élevé de carie dentaire en Amérique du Nord se trouve au Québec, justement parce qu'on consomme plus de produits sucrés qu'ailleurs. Je me serais attendu que le député de Taschereau au moins se sente un peu en conflit d'intérêts et ne pense pas à parler sur un projet de loi comme celui-là autrement qu'en nous appuyant, premièrement.

Deuxièmement, le député de Taschereau vient d'un comté qui n'est pas un des plus fortunés du Québec. Réduire l'assurance-santé dans un comté où les revenus ne sont pas très élevés et avoir répété aussi souvent qu'il donnait son appui aux coupures des soins d'assurance-santé, des soins dentaires, dans un comté comme le sien, en disant qu'il l'appuyait fortement et en le répétant à plusieurs reprises, c'est de l'inconscience. Je ne dis pas s'il avait été député de Westmount. J'aurais peut-être compris, ses électeurs étant des gens fortunés, qu'ils avaient les moyens de payer des visites chez le dentiste. Je dis que, dans des comtés où on représente surtout des travailleurs, des gens qui ont des revenus qui ne sont pas les plus élevés au Québec, on devrait, sur le plan de l'éthique sociale, penser que cette mesure n'est pas bonne.

Le premier ticket modérateur qui aura été établi par la ministre de la Santé et des Services sociaux, une femme, cela aura été une mesure sur le dos des enfants. C'est une triste journée, c'est une triste semaine actuellement où on établit un ticket modérateur dans le Régime d'assurance-santé du Québec sur le dos des enfants. Ce n'était pas la première proposition de la ministre, car la première proposition était plus cynique. Elle prévoyait que les parents qui n'auraient pas amené les enfants chez le dentiste seraient récompensés par un crédit d'impôt. Les parents qui n'auraient pas vu à faire soigner leurs enfants par des dentistes pour les soins dentaires, dans l'endroit où il y a le plus de caries dentaires en Amérique du Nord, auraient eu un crédit d'impôt

comme incitatif à ne pas faire soigner leurs enfants.

Une voix: Cela n'a pas de bon sens.

M. Garon: Mme la Présidente, je suis surpris, parce que je ne suis pas capable de comprendre pourquoi la ministre des Affaires sociales, qui a oeuvré longtemps dans le monde de l'éducation, dont on se serait attendu qu'elle comprenne ces problèmes, qu'on aurait estimée plus près des besoins des gens, parce que d'avoir oeuvré dans les commissions scolaires, peut-être à un niveau trop élevé, normalement nous rend plus conscients des besoins des enfants. Personnellement, après avoir été candidat et avoir fait de nombreuses campagnes électorales, je peux vous dire qu'il est facile, quand on se promène un peu partout, et c'était encore plus facile il y a quelques années, de se rendre compte à quel point il y avait des problèmes de carie dentaire, parce qu'on avait au Québec un taux beaucoup plus élevé qu'ailleurs. Le taux a diminué considérablement, mais il est encore plus élevé qu'ailleurs. On a fait du rattrapage, mais on a encore un taux élevé de caries dentaires.

Vu que la ministre avait l'expérience du milieu scolaire où elle avait oeuvré pendant des années, on se serait attendu qu'elle soit sensibilisée à ces questions, qu'elle soit consciente des problèmes qu'elle a dû connaître dans les écoles. Elle a dû normalement oeuvrer dans des programmes ou voir à ce qu'il y ait des programmes d'hygiène, des programmes de santé dans les écoles pour les questions d'alimentation. Je sais, par exemple, pour avoir discuté longtemps avec le Conseil scolaire de l'Ile de Montréal, que des personnes étaient très sensibillisées là-bas à la question de l'alimentation et justement à cause des caries dentaires. J'ai eu personnellement l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises -il faut dire que la ministre n'était pas à ce moment-là au Conseil scolaire de l'île de Montréal, elle l'avait quitté puisqu'elle avait été élue députée à Québec - entre 1976 et 1985, les représentants du Conseil scolaire de l'île de Montréal ou ceux qui oeuvraient dans le domaine de l'hygiène alimentaire et tout un programme de saine alimentation avait été établi auquel s'était ajouté un verre de lait par jour pour les enfants, justement pour qu'ils aient une meilleure alimentation et pour prévenir en grande partie la carie dentaire et pour qu'ils aient en bonne partie une source additionnelle de calcium parce qu'on sait que, pour avoir de bonnes dents, de bons os, une bonne charpente, les enfants ont besoin d'avoir une certaine alimentation et une certaine qualité d'alimentation.

J'aurais pensé que la ministre des

Affaires sociales serait une personne sensibilisée, puis qu'elle n'aurait pas coupé d'abord sur le dos des enfants. J'ai été épouvantablement déçu de voir que c'est la ministre des Affaires sociales qui a apporté une mesure comme celle-là. Du Parti libéral, je n'ai pas été surpris, parce que je sais qu'il s'est dit: Un peuple édenté ne mord pas. Je sais qu'on peut s'attendre à tout du Parti libéral, et cela ne m'étonne pas que les principales mesures aient été prises sur le dos de gens qui ne sont pas les plus fortunés, au contraire, qui sont les plus démunis. On peut en nommer un grand nombre depuis un an: Des baisses d'impôt surtout pour les riches, des baisses de déductions fiscales, surtout pour les moins fortunés, des exemptions fiscales accrues avec des gains de capitaux de 500 000 $ exemptés pour les gens fortunés. On aurait pu, par exemple, si on manquait de fonds, puisqu'on trouvait qu'on manquait de fonds, baisser les gains de capitaux au lieu de 500 000 $ à 450 000 $ ou à 400 000 $ et on serait allé chercher la différence d'argent. Mais non, on a préféré couper sur le dos des enfants dans des mesures que l'on a trouvées à différents endroits. (21 h 20)

On a même voulu, en plus de couper les soins dentaires, couper les verres de lait aux enfants. C'est uniquement à cause de la vigilance de l'Opposition, alors que nous avons réagi immédiatement, que les gens dans l'ensemble du Québec ont dit: Non, cela ne passera pas. Des comités de parents dans les écoles se sont élevés pour dire: Non, le verre de lait gratuit doit demeurer. Le Parti libéral, avec le ministre de l'Agriculture, voulait diminuer le nombre des verres de lait de cinq à trois par semaine pour sauver de l'argent, disait-il, ou pour implanter un programme pour des femmes en milieu défavorisé. On attend encore le programme. C'est vouloir sauver de l'argent aux dépens de ceux qu'on devrait aider.

Au Québec, alors qu'on a le taux de natalité le plus bas au monde, ce n'est pas normal que le gouvernement veuille adopter des mesures qui vont affecter les familles en élevant le coût de l'éducation ou le coût de l'entretien des enfants. On dit qu'on veut couper de 23 '$ par année, par enfant, pour que cela coûte 23 $ de plus par enfant aux parents, sans compter le coût du nettoyage et de l'application du fluor. Or on sait - je le sais pour avoir accompagné occasionnellement mes enfants chez le dentiste - qu'on commence d'abord par un examen des dents par l'hygiéniste dentaire, un nettoyage des dents, un traitement au fluor, avant que le dentiste voie quel est l'état de la dentition de l'enfant. Là, on a décidé de couper une visite alors qu'on sait qu'actuellement la moyenne est d'une visite aux sept mois, que les parents vont rencontrer le dentiste une

fois à tous les sept mois.

On commence peut-être à comprendre plus au Québec que le gouvernement n'est pas une "business", qu'on ne dirige pas un État ou un gouvernement comme une "business". Le rôle d'un gouvernement n'est pas uniquement de faire des profits, ce n'est pas un commerce. Ce n'est pas un stand commercial. Ce n'est pas un distributeur de produits dont la seule évaluation doit être des critères de rentabilité. Le gouvernement c'est essentiellement aussi un dispensateur de services à l'ensemble de la population, un distributeur de justice sociale, de répartition de la richesse pour faire en sorte que ceux qui en ont moins, sur le territoire administré par le gouvernement, puissent être moins défavorisés grâce à l'action du gouvernement.

Quand on veut se comporter uniquement comme si c'était une "business", on arrive à des aberrations. Aberrations qu'on a connues et qu'on connaît actuellement dans la région de Québec où la seule clinique spécialisée pour les maladies transmises sexuellement a été fermée le 31 octobre dernier alors que les médecins parlent de près de 20 000 cas dans la région immédiate de Québec susceptibles d'avoir à recevoir des soins d'une telle clinique, enfin, pas seulement de cette clinique, mais d'être traités pour ces maladies. Là encore, qui seront les principales victimes? Les femmes qui auront des enfants, et non seulement les femmes qui auront des enfants, mais aussi les enfants eux-mêmes dans des grossesses qui pourront être ce qu'on appelle des grossesses tubaires parce qu'il pourra y avoir des conséquences à des maladies vénériennes qui n'auront pas été traitées à temps.

Mme la Présidente, si vous le voulez, il faudrait appeler le quorum parce qu'il semble que les députés du gouvernement ne sont pas très intéressés par le projet de loi.

Des voix: C'est vrai. C'est une bonne idée.

La Vice-Présidente: On va vérifier... M. le député de Lévis, je remarque que nous sommes quatorze. Il y a donc quorum. M. le député de Lévis.

M. Garon: Mme la Présidente, vous devriez constater que, à la suite de mon appel du quorum, les députés sont entrés. Je n'ai pas appelé le quorum alors qu'il y avait quorum. Il n'y avait pas quorum. Les députés sont sortis des fumoirs pour rentrer à l'Assemblée nationale. On n'en a pas assez de vouloir imposer des lois iniques, en même temps...

Une voix: On se cache.

M. Garon: ...on se cache. Mme la Présidente, vous aussi vous venez d'un comté où les gens ont des besoins. Le comté de Bellechasse n'est pas un comté de millionnaires. Les gens de Bellechasse sont dans l'un des comtés qui vont payer plus cher pour des soins qu'ils avaient auparavant dans de meilleures conditions, parce qu'on a décidé de gagner de l'argent sur le dos des enfants. Pourquoi couper 20 000 000 $ dans le programme de santé dentaire? Pourquoi sabrer dans l'un des programmes préventifs les plus nécessaires destiné à compenser l'immense retard dont souffre le Québec en matière de santé dentaire?

Le projet de loi va compromettre les progrès considérables réalisés au cours des dernières années sous le gouvernement précédent. C'est une décision qui risque de creuser l'écart négatif entre le Québec et l'Ontario au moment où nous approchions de l'indice de caries observé en Ontario. L'indice de caries en 1977, au Québec, pour les enfants de 11 à 13 ans était de 9; il a été réduit à 6 en 1984 alors qu'en Ontario, en 1977, il était de 6,3 mais il avait été réduit à 3 en 1984. Nous étions encore à 3 points, 3 caries de plus qu'en Ontario. Comme on sait que la santé dentaire au Québec est la moins bonne en Amérique du Nord, ce n'était sûrement pas l'endroit le plus indiqué pour couper.

Le projet de loi va également à l'encontre de toutes les décisions qui ont été prises dans ce dossier depuis dix ans. C'est une décision qui amènera la perte d'acquis et des investissements consentis jusqu'à ce jour. C'est une décision qui va coûter cher parce qu'elle va avoir des conséquences qui vont amener des coûts beaucoup plus élevés à moyen terme que l'économie de bouts de chandelle réalisée actuellement sur le dos des enfants. Elle va aussi à l'encontre... La ministre de la Santé et des Services sociaux est en train de se faire une réputation de la personne la plus entêtée depuis l'ouverture de ce Parlement. On n'a jamais vu quelqu'un s'arc-bouter dans tous les domaines... J'ai vu cela dans le dossier de la clinique des maladies transmises sexuellement dans la région de Québec, à l'H5tel-Dieu de Lévis. Malgré toutes les opinions unanimes en faveur de cette clinique, elle continue à la maintenir fermée après avoir dit au début que les CLSC pourraient rendre des services. Ensuite, elle a spécifié que ce ne serait pas tous les services mais une partie seulement. Après on s'est rendu compte dans des reportages faits par différents médias, qu'au contraire, les cliniques n'offraient même pas les services de dépistage dont elle parlait en cette Chambre, induisant la Chambre en erreur...

La Vice-Présidente: M. le député, je vous demanderais de revenir à la pertinence du débat. Je peux bien vous permettre de bifurquer un peu du sujet concernant la Loi

sur l'assurance-maladie mais de là à en faire un discours principal... Je vous demanderais...

M. Gendron: Mme la Présidente, je voudrais seulement faire remarquer qu'il s'agit d'un projet de loi où le gouvernement a pris la décision de couper un service offert à la population. À ma connaissance, mon collègue de Lévis est en train de donner des exemples, toujours dans le même domaine, exactement dans le même secteur de la santé, d'autres coupures qui ont été effectuées, même si la ministre a donné des informations contraires, ici en cette Chambre. C'est de cela qu'il est en train de vous parler. Il dit que la coupure de 8 000 000 $ dans les soins dentaires va avoir des effets négatifs tout comme l'exemple qu'il citait. Il n'y a rien de plus pertinent que ces propos par rapport à un projet de loi comme celui-là. L'effet du projet de loi, c'est la coupure d'un service de 8 000 000 $. 20 000 000 $ en termes d'évaluation, mais 8 000 000 $ selon les chiffres de la ministre; 20 000 000 $ réellement, après c'est de l'argumentation et des preuves. Il me semble que l'essentiel du projet de loi, c'est une coupure de services et les exemples qu'il donnait se référaient à d'autres coupures de services du même genre.

M. Lefebvre: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Le leader adjoint de l'Opposition a souligné, hier soir, que c'était la présidence qui avait la responsabilité de la surveillance et de la pertinence et de l'ensemble des règlements. Vous avez rendu votre décision. Sur la même question de règlement, je vous demanderais d'inviter le député de Lévis à retirer la dernière partie de sa phrase, à savoir que la ministre aurait induit la Chambre en erreur.

M. Gendron: Mme la Présidente, si vous me le permettez. Je veux signaler que je ne retire rien des propos que j'ai évoqués hier à savoir qu'il vous appartient effectivement, comme présidente des débats, de juger si les propos sont pertinents ou pas. Mais, Mme la Présidente, je veux vous indiquer que, de tout temps, il a toujours été permis, à la suite d'un rappel de la présidence, au leader du gouvernement comme au leader de l'Opposition de donner leur point de vue. (21 h 30)

La Vice-Présidente: Là-dessus, je vais expliquer un peu plus ma décision, mais elle revient tout de même à la même chose. L'article 239 est celui auquel on doit se référer parce qu'il s'agit de la règle générale. Il est bien mentionné que "le débat porte exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur intrinsèque ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins." Or, le projet de loi, si on lit les notes explicatives, porte sur les services dentaires. J'aimerais bien entendre parler de services dentaires. Je comprends qu'à un moment donné vous puissiez bifurquer, mais il faudrait parler surtout de services dentaires.

M. le député de Lévis, je vous demanderais de continuer là-dessus.

M. Garon: Mme la Présidente, je suis obligé de constater que vous devriez lire le projet de loi. Il ne porte pas sur les services dentaires, il porte sur l'assurance-santé.

M. Rochefort: Qu'elle lise le titre.

M. Garon: Si vous voulez lire le titre, vous verrez que cela donne les pouvoirs indiqués. Si vous regardez le titre du projet de loi, il modifie... Je l'avais ici. C'est la Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'assurance-maladie.

M. Rochefort: C'est cela.

M. Garon: Cela couvre un champ d'action beaucoup plus large. Ce que je m'apprêtais à dire, Mme la Présidente, ce que je donnais comme exemple, c'est que la seule raison qui fait que la ministre ne change pas d'idée - je suis en train de faire une preuve de caractère - c'est qu'elle est entêtée. Je disais que, dans le dossier des maladies transmises sexuellement, elle s'est entêtée envers et contre tous, il n'y a pas eu une opinion divergente sur la nécessité de cette clinique qui a été fermée. Elle a dit en cette Chambre que les CLSC de la région de Québec faisaient du dépistage de maladies sexuelles alors que, par la suite, tout cela a été démontré comme étant faux.

Je dis maintenant que, dans ce cas-ci, c'est le même phénomène d'entêtement alors que tous, sans exception, ont indiqué qu'il y avait erreur. La ministre fait fi des oppositions des intervenants du milieu: Comité de santé dentaire provincial, l'Ordre des dentistes du Québec, l'Association des chirurgiens-dentistes du Québec, la Société dentaire de Québec, l'Association des dentistes en santé communautaire de Québec, l'Association des hôpitaux du Québec, le Cercle des infirmières Varennes-Québec, l'Alliance des hygiénistes dentaires du Saguenay—Lac-Saint-Jean, la Fédération des CLSC.

La Fédération des CLSC. Que font les CLSC? Ils donnent justement de l'information, ils sont les instruments de première ligne pour savoir quels sont véritablement, dans tous les milieux du Québec, les besoins des Québécois, des jeunes Québécois ou des personnes âgées. La

Fédération des CLSC, qui sont des instruments de première ligne au Québec pour connaître les besoins des Québécois, dit: Vous errez. Vous devriez laisser en place les services dentaires dont a besoin notre population.

Les éditorialistes ont dit aussi la même chose, sans exception. Les lettres de nombreux citoyens et dentistes dans les journaux. La ministre reste inflexible. Elle reste inflexible. Certains ont parlé du mur de Berlin, d'autres ont parlé de la dame de fer, elle reste inflexible même si la santé de nos enfants est en cause. Je pense que ce projet est essentiellement mauvais parce qu'il réduit le nombre d'examens couverts par l'assurance-maladie pour les soins dentaires à un seul examen par année, alors qu'on a un taux plus élevé qu'ailleurs de caries dentaires.

C'est quoi, l'objectif? Je ne comprends pas qu'un gouvernement s'entête de cette façon à aller contre les besoins de la population quand, en même temps, on peut exempter des gains de capitaux pour 500 000 $ au Québec, quand on est capable de réduire les taxes de 1300 $ pour ceux qui gagnent 100 000 $ par année et de 10 $ pour ceux qui gagnent 20 000 $. On est capable de faire ce genre de gymnastique fiscale en faveur des plus riches au détriment des plus démunis et, après, on vient dire qu'on n'a pas assez d'argent pour assurer les soins dentaires des enfants du Québec. On a de l'argent, par exemple, pour exempter les millionnaires, on a de l'argent pour favoriser les riches. Là, on en a de l'argent. Quand il s'agit d'aider ceux qui sont dans le besoin, ceux qui ont moins de revenus, ceux qui sont moins fortunés, ceux qui sont moins pourvus financièrement, il n'y en a plus, ce n'est plus possible. On s'est dit encore une fois, et ce sera le symbole de ce gouvernement qui a voulu couper à deux endroits, dans le lait dans les écoles pour les enfants et dans les soins dentaires des enfants... Ce qui indique que la préoccupation sociale d'équité fiscale, d'équité sociale n'est pas présente dans ce gouvernement où il n'y a pas de sentiment de justice, de sentiment d'équité en faveur de ceux qui ont des besoins.

Vous savez, quand on a le taux de natalité à peu près le plus bas au monde et qu'on essaie de pénaliser davantage la famille, alors qu'on devrait faire exactement l'inverse... Aujourd'hui, un des principaux drames du Québec, c'est le faible taux de natalité ou la pyramide n'est plus une pyramide mais une toupie. Au lieu d'avoir une pyramide au point de vue des âges avec en haut les gens plus âgés qui sont les moins nombreux et en bas les gens moins âgés qui sont les plus nombreux, on a maintenant une toupie, une pyramide qui descend et, dans les bas âges, on a moins de personnes au Québec à quelques mois, lan, 2 ans, 3 ans, 4 ans, 5 ans, 6 ans, qu'on en a à 20 ans ou 21 ans ou 25 ans parce que le taux de natalité a baissé de façon dramatique au Québec. Qu'est-ce qu'on voit en cette Chambre depuis que nous sommes arrivés ici, depuis l'arrivée du Parti libéral, ce sont des mesures qui touchent les enfants, les familles, dans ce qui, au fond, devrait être protégé par le gouvernement. On devrait avoir toutes sortes de mesures pour favoriser les familles qui ont des enfants parce que, tantôt, ce sera un drame social au Québec d'avoir une société trop âgée par rapport à ceux qui vont la soutenir sur le plan des taxes.

On a actuellement 7 % des gens qui ont plus de 65 ans au Québec. Dans très peu d'années d'ici, dans une quinzaine d'années on aura 12 % des gens qui auront plus de 65 ans. Peut-être que ces enfants à qui on aura refusé des soins dentaires, quand ils auront l'âge de voter, penseront à ceux en cette Chambre qui seront rendus à l'âge de recevoir, à l'âge où les jeunes devront payer pour eux, et auront le même souci. Ils diront: Ils ne payaient pas pour nos soins dentaires quand on était jeunes, pourquoi paierait-on pour eux maintenant qu'ils sont vieux?

Quand on bâtit une société sur la dureté, sur des coeurs durs, quand on est capable de dire: On va couper dans les soins aux enfants... On voudrait plus tard que les enfants aient plus de coeur en faveur de ces personnes qui auront coupé pour leurs besoins en coupant l'assurance-maladie pour les enfants. L'équité sociale, l'exemple, ça se bâtit de certaines façons, par la générosité, pas par la mesquinerie. Et vouloir s'attaquer à ceux qui sont les plus faibles dans notre société en se disant: II n'y aura pas de réactions, il n'y aura sans doute pas beaucoup de plaintes parce que les enfants endureront leur mal, perdront leurs dents, auront les effets d'avoir une mauvaise dentition.

Quand on voit les députés en cette Chambre qui n'ont pas plus de sens social, de sens de la mesure et qu'on voit la ministre des Affaires sociales qui s'entête avec acharnement à couper dans les soins les plus nécessaires... S'il n'y avait pas eu de rationalisation et qu'il y eut une rationalisation è faire, nous serions les premiers à acquiescer, mais il y a eu en 1982, comme cela a été mentionné tout à l'heure, des rationalisations faites en vue d'améliorer les services.

On a eu une revue de tous les programmes pour faire en sorte que les gens soient traités pour que ça coûte moins cher mais d'une façon efficace avec la consultation, la concertation et, en même temps, l'acquiescement des gens du milieu pour que ça puisse être réalisé. Aujourd'hui ce n'est pas ça, les coupures se font d'une

façon autoritaire, unilatérale, sans consultation, sans concertation, contre les enfants du Québec, contre les jeunes du Québec, contre ceux qui vont se rappeler un jour que, s'ils ont plus de problèmes avec leurs dents, c'est parce qu'un jour, en 1986, un nouveau gouvernement qui pensait mener le gouvernement comme une "business", a trouvé que ce n'était pas payant de soigner les dents des enfants, a décidé de couper dans les programmes d'assurance-maladie pour faire en sorte que les soins coûtent moins cher. Ces enfants-là sauront qu'il y aura plus de caries dans leur génération, dans leur groupe d'âge parce que ce gouvernement aura pris le pouvoir le 2 décembre 1985 et qu'ils en paient les conséquences. (21 h 40)

Mme la Présidente, je ne veux pas être plus long, mon temps est écoulé. Je veux vous dire que je vais personnellement voter contre ce projet de loi. Je me serais attendu que le député de Taschereau vote contre ce projet de loi au lieu de l'appuyer. Dans le comté de Taschereau, les gens vont payer plus cher maintenant, 23 $ par enfant, sans compter l'application du fluor et sans compter l'hygiène dentaire, c'est-à-dire le nettoyage des dents, parce qu'il aura été l'un de ceux qui auront voté pour ce projet de loi, et il s'en est glorifié.

Mme la Présidente, je pense que vous êtes un peu chanceuse d'être sur le banc et de ne pas avoir à voter, mais peut-être qu'au moment du vote, vous aurez à voter et, vous aussi, je vous dis que si vous votez pour ce projet de loi, vous aurez à vous en repentir parce que, dans le comté de Bellechasse aussi, les gens ont besoin de ces soins. Vous ne devriez pas voter pour ce projet de loi ou encore si cela vous gêne, abstenez-vous, parce que si vous votez pour ce projet de loi, vous voterez contre les besoins, contre les intérêts de la population que vous représentez. La plupart de ceux qui sont en cette Chambre, en votant pour ce projet de loi qui va couper les soins dentaires aux enfants, vont voter contre la famille, contre les enfants. Cela va faire en sorte que l'assurance-santé sera moins efficace et elle le sera parce qu'on aura imposé le premier ticket modérateur au Québec sur le dos des enfants. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Lévis.

Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, en réplique.

Mme Thérèse Lavoie-Roux (réplique)

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, nous avons eu, ce soir, l'occasion d'entendre une foule d'affirmations de la part des membres de l'Opposition, certaines valables, d'autres absolument farfelues. S'il me fallait tenter de réfuter chacune des affirmations qui ont été faites ce soir d'une façon inexacte, cela me prendrait probablement, moi aussi, une heure pour y répondre et rectifier toutes les choses qui ont été dites.

Je vais quand même en reprendre simplement quelques-unes. On les a répétées tellement souvent que je pense qu'il est important que la population sache vraiment où se situe la vérité. On a entendu souvent les membres de l'Opposition dire que le gouvernement, parce qu'il réduisait de deux examens à un seul, le programme des soins dentaires pour les enfants, imposait un ticket modérateur, le premier ticket modérateur, selon le député de Lévis, qui était imposé au Québec.

Vous me permettrez, Mme la Présidente, de citer un extrait d'un article d'Alain Dubuc, dans La Presse du 29 mai 1986, dont, je pense, personne ici ne contestera la valeur comme journaliste et comme expert en économie. Je cite ce que disait M. Alain Dubuc justement à l'égard de cette mesure que le gouvernement proposait au printemps et contre laquelle, déjà, l'Opposition - c'était son droit le plus strict - s'opposait avec véhémence. Il disait: "II faut quand même, en politique, regarder les mots qu'on utilise. Les mots maqiques de cet univers, ceux qui déclenchent rapidement des réflexes émotifs sont employés à toutes les sauces. C'est particulièrement vrai pour les concepts de ticket modérateur et d'universalité. C'est Jacques Parizeau - je cite toujours au texte - qui a utilisé le premier le terme de ticket modérateur il y a plus de cinq ans. Il a rapidement compris que c'était un terme tabou. Pierre Marc Johnson, l'actuel chef de l'Opposition, s'en est fait le partisan en pleine campagne électorale. Enfin, on s'est mis à en reparler avec le débat sur les soins dentaires et c'est l'Opposition qui est revenue continuellement avec cette notion de ticket modérateur."

M. Dubuc ajoutait: "Le projet de la ministre Thérèse Lavoie-Roux prévoit qu'au lieu de deux examens dentaires gratuits par enfant par année, il n'y en aura qu'un seul. Le second, pour les familles qui le solliciteront, devra être payé au coût de 23 $." Cela est exact, Mme la Présidente. Et M. Dubuc d'ajouter: "II n'y a pas de ticket modérateur là-dedans." Ce n'est pas moi qui le dis, Mme la Présidente. C'est un des journalistes économiques les plus réputés non seulement au Québec mais au pays et dont on a reconnu la compétence au plan canadien. "Il n'y a pas de ticket modérateur là-dedans", disait-il. "Les frais modérateurs sont d'habitude un montant symbolique que l'on exige non pas pour couvrir le coût d'un service mais pour empêcher que les utili-

sateurs abusent d'un service gratuit. Au Québec, le gouvernement Lévesque y a songé parce qu'il y a surconsommation de services médicaux. Mais il a estimé que les tickets modérateurs seraient lourds et inefficaces. "Dans le projet de Mme Lavoie-Roux, le premier examen est gratuit, ce qui ne modère rien. Quant au second, il est carrément désassuré. On le paiera, si on l'utilise, au plein prix mais ce n'est pas un ticket modérateur. C'est le plein prix que la personne paiera. Et il faut par ailleurs ajouter, continuait M. Dubuc, que le gouvernement du Québec - et il s'agissait du gouvernement du Parti québécois - a, lui, imposé plusieurs tickets modérateurs au fil des ans. Par exemple, il faut payer un montant symbolique à la Cour des petites créances, 10 $ pour les petites réclamations et 20 $ pour les plus grosses. Ce n'est donc pas nouveau. "Sous ce même gouvernement, disait M. Dubuc, le ticket modérateur prend la forme, comme à la Régie du logement, non pas d'un ticket modérateur mais en forçant les citoyens à se présenter en personne plutôt que de transiger par téléphone." Mme la Présidente, ce n'est là qu'un des écarts de langage et d'une partie de la démagogie ou de l'expression démagogique que les gens d'en face ont utilisée depuis un bon nombre d'heures.

J'ai entendu le chef de l'Opposition qui s'est déplacé, sans doute pour tenter de refaire sa virginité quant à la façon dont il s'est comporté alors qu'il était à la tête du ministère de la Santé et des Services sociaux et que durant sept ans - il n'a pas occupé ce poste durant les sept ans, il faut quand même faire la part des choses... Durant les neuf années du règne du Parti québécois, on a assisté à des coupures et à des compressions budgétaires - parce qu'il y a une différence entre les deux - de l'ordre de 700 000 000 $ ou même de 800 000 000 $ selon certains.

Je trouvais quand même assez surprenant de voir l'ancien ministre de la Santé et des Services sociaux se scandaliser de cette réduction de deux examens à un seul pour un montant de 8 000 000 $, alors que cette même personne, cet actuel chef de l'Opposition, cet ancien ministre de la Santé et des Services sociaux imposait, en 1982, pour 30 000 000 $ de coupures, et de coupures véritables dans les programmes de soins dentaires pour les enfants.

Aujourd'hui, il se scandalise, et ses collègues se scandalisent, paraît-il parce que les enfants n'auront désormais qu'un examen de payé au lieu de deux, comme cela se fait dans les deux seules autres provinces qui ont des programmes de soins dentaires pour les enfants. Il n'y en a pas dans les autres provinces. Là, on brandit tous les spectres. Les enfants vont se retrouver avec un état de santé dentaire absolument déplorable. (21 h 50)

Mme la Présidente, quand on met cela en opposition avec la nature des coupures que le ministre de la Santé et des Services sociaux du temps, le chef actuel de l'Opposition, avait faites en retranchant la restauration des dents pour les enfants de treize, quatorze et quinze ans, qui est la période absolument critique où justement on a davantage besoin de restauration dentaire, certainement davantage qu'à un âge plus jeune... Mais cela, on n'en parle pas. Cela n'avait aucun inconvénient. Mettez en opposition - je suis certaine que la population peut les mettre en opposition -d'une part, ce que nous proposons, c'est-à-dire la réduction de deux examens à un, et, d'autre part, les mesures que l'ancien gouvernement avait prises; non seulement d'enlever la restauration des dents pour les onze, douze et treize ans, mais aussi de désassurer d'autres services qui étaient rendus aux enfants de trois à douze ans. Cela, on n'en parle jamais. Si on réalise que c'est le tiers du programme des soins dentaires qui existait à ce moment qui a été amputé par l'ancien gouvernement, on ne peut s'empêcher, Mme la Présidente, de dire: Ces gens, intellectuellement, ne sont pas honnêtes.

De plus, le chef de l'Opposition se montre scandalisé que nous réduisions de deux à un examen dentaire par année pour les enfants. Ce soir, il a parlé de transparence: Nous, nous l'avons fait publiquement. Et nous retrouvons prépublié dans la Gazette officielle un avis de cet ancien ministre, de ce chef de l'Opposition qui, à ce moment, réduisait de deux à un examen dentaire pour les enfants sans se soumettre à une modification de la loi qui, elle, est discutée à l'Assemblée nationale au vu et au su de tous, alors que lui procédait d'une façon ultra vires et allait directement à la Gazette officielle sans passer par l'Assemblée nationale pour d'abord demander une modification à la loi avant de procéder à cette modification au règlement. Parler de transparence quand on agit de cette façon, c'est pour le moins surprenant.

La même chose quand le député de Lévis nous rappelle - je ne devrais probablement pas tomber dans ce piège, mais il semble avoir une sorte d'obsession et cela me semble être un problème particulièrement aigu dans le comté de Lévis plus qu'ailleurs, à l'entendre parler en tout cas - ce problème des maladies transmises sexuellement. Il a reçu lui-même du CRSSS de la région de Québec, dans lequel se trouve l'Hôtel-Dieu de Lévis, une lettre fort détaillée dans laquelle on lui dit: Les services ne seront pas donnés de la même façon, mais ils seront néanmoins fournis à la population à partir d'autres sources dont la

principale demeurera l'Hôtel-Dieu de Lévis quant au prélèvement, quant au traitement. On entend à satiété le député de Lévis déformer les faits et faire de la démagogie autour de cette question.

Mme la Présidente, ce ne sont là que deux exemples ou quelques exemples que je voulais relever. Je veux dire ici à la population, et elle le sait, que notre gouvernement, depuis qu'il est arrivé au pouvoir, qu'il dirige le Québec, a injecté dans la santé et les services sociaux des centaines de millions et c'est l'Association des hôpitaux du Québec qui elle-même le disait. Je n'ai pas le texte sous les yeux, j'ai eu l'occasion de le mentionner ici à l'Assemblée nationale. Elle disait qu'après une décennie de coupures et de compressions, finalement, elle en félicitait le gouvernement, elle reconnaissait très ouvertement que le gouvernement a très largement ou dans une large part rempli ses engagements électoraux, et elle s'en réjouissait.

M. le Président, ce sont là les faits. Il est exact que, dans le programme des soins dentaires... Et si quelqu'un voulait tenter de nous accuser de ne pas l'avoir fait publiquement, je trouve qu'il est assez étonnant que l'on puisse penser une telle chose, alors qu'il s'agit d'une décision qui avait été prise le printemps dernier, que l'Opposition, pour les raisons qui lui conviennent, n'a pas voulu que nous adoptions et qu'aujourd'hui nous revenions avec cette même décision.

Il est évident, et je ne l'ai jamais caché, que nous retranchons 8 000 000 $ des programmes de soins dentaires pour les enfants. Ceci va se traduire strictement par la réduction de deux examens à un seul examen dentaire par année. Tous les autres services sont maintenus. Je voudrais aussi que les parents sachent que, si leurs enfants, pour des raisons d'urgence - mal de dents, abcès, occlusion de dents, enfin toutes les autres conditions d'urgence qui pourraient survenir - pourront recourir au service du dentiste et que tous les frais seront payés.

M. le Président, le gouvernement avait des responsabilités à prendre sur le plan administratif, sur le plan des finances publiques, de l'assainissement des finances qui, tout le monde le sait, étaient fort mal en point quand nous sommes arrivés à la direction du Québec. Toutes les difficultés ne sont pas encore aplanies, mais ce que je peux dire et j'ai eu souvent l'occasion de le dire - si je le répète c'est que l'Opposition revient à la charge - c'est que le gouvernement a fait des coupures, mais a évité de les faire dans le domaine de la santé et des services sociaux, sauf pour ces 8 000 000 $ qui nous apparaissaient être une rationalisation qui ne pénaliserait pas la population.

Sans aucun doute, on cite des études d'un côté, on cite des études de l'autre, pour appuyer chacun sa thèse, mais une chose demeure certaine, les mêmes études que l'Opposition a citées, celles de Eldeton, entre autres, les études anglaises, concluent qu'il n'y a pas d'étude scientifique qui prouve qu'un examen au lieu de deux soit préjudiciable à la santé dentaire des enfants.

Alors, M. le Président, je veux répéter à la population que les services ou le programme des soins dentaires pour les enfants, tel qu'il existe, demeure dans sa totalité, sauf pour la réduction de deux examens à un examen. Je voudrais ajouter en terminant, M. le Président, qu'à la mesure des ressources financières que le gouvernement a à sa disposition, nous maintenons une situation, quant au programme de soins dentaires pour les enfants, qui est de beaucoup supérieure à ce qui existe partout ailleurs au Canada, sauf encore une fois en Nouvelle-Écosse et dans lÎîle-du-Prince-Édouard, là où il faut quand même que les parents déboursent soit 4 $ par enfant ou 12 $ par année pour s'en prévaloir.

Mais il y a aussi des responsabilités qui doivent être prises par les familles dans ce domaine-là. Je pense que les familles sont conscientes de ces responsabilités de plus en plus. Aurions-nous le programme dentaire pour enfants le plus complet possible si certaines responsabilités ne sont pas assumées par les familles, par exemple une saine alimentation, des habitudes d'hygiène dentaire améliorées, s'il n'y a pas de mesures alimentaires mises en oeuvre par exemple pour les femmes enceintes, parce que cela aussi aura éventuellement une influence sur l'état de la santé des enfants... (22 heures)

C'est dans cette direction que nous nous acheminions quand nous avons annoncé, il y a maintenant peut-être quelques mois, que nous mettions à la disposition de deux CLSC, dans des milieux défavorisés, un programme d'alimentation qui permettrait de fournir aux femmes enceintes des milieux défavorisés une ration, si je puis dire, une distribution de lait et d'oeufs, justement pour améliorer l'alimentation de ces femmes enceintes.

M. le Président, nous sommes conscients de nos responsabilités. En tant que gouvernement, nous tentons de les assumer et nous avons fait cette année, hors de tout doute, la démonstration que nous étions capables de le faire, que nous avions injecté dans le domaine de la santé et des services sociaux des sommes très considérables pour tenter de faire ce redressement qui s'imposait depuis plusieurs années et qui, s'il n'était pas fait, conduisait inexorablement notre système de santé et de services sociaux vers une qualité fortement diminuée. Nous aurions continué sur cette pente dangereuse que le gouvernement antérieur avait imposée à notre système de santé et

de services sociaux.

M. le Président, encore une fois, je pense que la population sera juge, en bout de ligne, de la façon dont le gouvernement actuel assume ses responsabilités et je suis certaine que toute comparaison qui pourrait être faite dans ce domaine avec la façon dont le gouvernement antérieur s'est acquitté de ces mêmes responsabilités, sera une réponse positive à notre endroit, comme le démontrait d'ailleurs, encore ce matin, dans des sondages, l'appréciation et le contentement de la population, eu égard aux décisions que le gouvernement actuel a eu à prendre depuis qu'il est à la direction des affaires du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Ceci met fin au débat à cette étape de l'étude du projet de loi 124. Est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de loi 124, Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'assurance-maladie proposée par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux est adoptée?

M. Gratton: Vote enregistré.

Le Vice-Président: Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Lefebvre: II y a effectivement entente pour que le vote soit reporté à demain et je fais motion dans ce sens, pour que le vote soit reporté à la séance des affaires courantes de demain.

Le Vice-Président: Le vote enregistré est donc reporté à la période des affaires courantes de demain. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 38 du feuilleton.

Projet de loi 153

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président: Alors, à l'article 38 du feuilleton, nous reprenons le débat sur la motion du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour que le principe du projet de loi 153, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs soit maintenant adoptée. Lors de l'ajournement du débat, la parole était au député de Montmagny-L'Islet que je reconnais à ce moment-ci. M. le député de Montmagny-L'Islet, vous avez la parole.

M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je suis particulièrement heureux de m'adresser aux membres de cette Assemblée aujourd'hui sur le projet de loi 153. Heureux, première- ment, parce que ce projet de loi va tendre, sinon à anéantir le braconnage au Québec, du moins à diminuer sensiblement ce fléau pour certaines régions québécoises. Heureux également, parce que, en diminuant le braconnage, on pourra ainsi accentuer la protection de certaines espèces animales qui se font de plus en plus rares dans certaines régions du Québec. Heureux également, parce que ce projet de loi 153 est un geste important et significatif que pose le gouvernement libéral. Important parce que les mesures contenues dans cette loi devraient avoir un impact économique favorable dans toutes les régions et contribuer indirectement à la création d'emplois.

Je tiens également à dire, M. le Président, que cette loi touche directement le comté que je représente car, comme vous le savez, Montmagny-L'Islet est constitué d'un fort pourcentage de forêts et la chasse y est un sport très pratiqué. C'est donc dire que je connais très bien ce qu'on aborde ce soir, c'est-à-dire la conservation de la faune au Québec. Je disais donc, M. le Président, que cette loi présentée par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche aura des incidences économiques de taille car elle permettra l'augmentation du nombre d'agents de conservation qui devrait, en 1987, être substantiellement majoré.

J'aimerais dire que je suis particulièrement fier des sanctions contenues dans ce projet de loi. Comme vous le savez, ce projet de loi dont le but principal est de favoriser la lutte contre le braconnaqe augmente les sanctions pénales et administratives prévues dans l'actuelle Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Je suis content que le ministre n'ait pas eu peur de multiplier fortement le coût des amendes car il importe que cesse la dilapidation éhontée de certaines de nos ressources.

Il faut rappeler, M. le Président, que certaines régions voyaient leur cheptel presque décimé à cause du braconnage. Certains diront que ces amendes sont exagérées, mais je demeure assuré que c'est l'unique façon de faire cesser ce braconnage et d'accentuer la conservation de notre faune québécoise. D'ailleurs, vues sous l'étiquette de la conservation de la faune, je suis assuré que tous les véritables chasseurs et pêcheurs, de même que les amants de la nature sont d'accord avec les mesures plus sévères annoncées par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans ce projet de loi 153. Toutefois, on note avec beaucoup d'intérêt que le ministre annonce dans son discours de présentation en deuxième lecture d'autres mesures, plus particulièrement au niveau éducatif, qui viendront compléter la loi.

Dans un premier temps, il est important de bien connaître le profil type

des braconniers afin de mieux cibler les campagnes d'information, de sensibilisation ou d'éducation dans le domaine de la protection de la faune.

D'ailleurs, les États américains qui se sont donné des mesures de ce genre commencent déjà à en récolter les fruits. Ils ont vu leur cheptel d'animaux de toutes sortes augmenter de façon importante et vous avez vu la mentalité des citoyens de ces régions changer sensiblement avec les années d'application de ces lois, ce qui peut faire toute la différence, M. le Président.

Les études dynamiques de population faunique qui permettent de mieux déceler le pourcentage de mortalités dues au braconnage sont également des mesures importantes dans lesquelles le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche investit des efforts qui seront récompensés par une meilleure lutte au braconnage.

Il est important également que les attitudes des procureurs et des magistrats, en regard du type de délits reliés au braconnage, permettent à la loi proposée par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche d'avoir sa pleine efficacité.

Le ministre m'informait qu'une étude était actuellement en cours au ministère sur les attitudes des procureurs, ceci principalement dans le but d'améliorer les règlements préparés par son ministère pour en faciliter l'application. Cette étude permettra également que les infractions soient mieux préparées par les agents de conservation de la faune afin d'atteindre l'efficacité recherchée.

Enfin, il est important de sensibiliser le monde judiciaire à la gravité des délits concernant la faune. Il faudrait aussi mentionner l'ensemble de l'éducation offerte par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en collaboration avec la Fédération québécoise de la faune, dans le cadre du programme d'éducation en sécurité et en conservation de la faune. (22 h 10)

En effet, en plus des programmes bien connus dont celui, en particulier, sur la sécurité dans le maniement des armes à feu, il faut ajouter qu'en 1986 deux nouveaux modules ont été développés, portant l'un, sur les premiers soins en forêt et l'autre, sur la sécurité en embarcation. De plus, actuellement, le ministère, en collaboration avec la Fédération québécoise de la faune, développe le module sur la chasse à l'arc.

Il faut également mentionner les efforts que le ministre fait depuis son arrivée en poste au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche afin d'augmenter le nombre d'agents de conservation de la faune et de leur assurer un équipement adéquat dans l'accomplissement de leur tâche importante.

En conclusion, on s'aperçoit que le préjugé favorable du ministre du Loisir, de la

Chasse et de la Pêche pour la conservation de la faune n'est pas nouveau. Pour lui, c'est un souci quotidien. Cependant, ce que vient faire ce projet de loi 53, c'est ajouter des dents à l'actuelle loi afin de diminuer, sinon d'anéantir, le braconnage et par là d'accroître la protection de notre faune.

Encore une fois, vous avez là un bel exemple du bon gouvernement qu'est le gouvernement libéral. Nous agissons pour le bien de toute la collectivité et surtout pour léguer aux générations futures un Québec fort, sain et prospère. Ce projet de loi 153 est donc un parfait exemple de protection de notre patrimoine. En l'occurrence, ici, c'est le patrimoine faunique.

En terminant, j'aimerais féliciter le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour son courage et son grand sens de la conservation. C'est un geste important qu'il pose aujourd'hui et les générations à venir lui en seront redevables pour longtemps. C'est ce qu'on appelle protéger nos intérêts collectifs. J'espère donc ardemment que l'Opposition se joindra à nous afin d'appuyer une loi fort importante pour la protection du patrimoine. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Je dois dire que, moi aussi, je suis heureux d'intervenir sur le projet de loi 153, très rapidement, afin de pouvoir exprimer mes commentaires, mes satisfactions, mais aussi et peut-être surtout, parce que je trouve utile de le faire, mes inquiétudes sur les modifications qui sont apportées concernant la conservation de la faune dans ce projet de loi.

Le projet de loi 153, pour situer un peu le débat, s'intitule: Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs. Avant d'aller sur le fond du sujet comme tel, je pense qu'il serait bon de parler de l'importance du patrimoine faunique comme richesse économique du Québec. On le dit souvent, on le pense et c'est aussi une réalité, le Québec est un paradis pour les adeptes de la chasse et de la pêche. Je suis tout à fait d'accord que l'on en fasse la promotion au Québec, mais aussi à l'étranger pour encourager cette activité économique.

Pour en voir toute l'importance, c'est bon de rappeler qu'il y a au Québec environ 1 200 000 pêcheurs actifs qui génèrent des dépenses annuelles de près de 600 000 000 $, ce qui est quand même très important. Il y a aussi au Québec 350 000 chasseurs qui, eux, dépensent pour plus de 160 000 000 $. C'est donc tout près de

1 000 000 000 $ de dépenses annuelles occasionnées par nos pêcheurs et nos chasseurs.

Je vais en profiter - vous allez dire que c'est peut-être un peu chauvin, mais il faut profiter de l'occasion quand elle passe -pour m'adresser aux 350 000 chasseurs québécois. S'ils sont déjà au courant, tant mieux; s'ils ne le sont pas, je pense que c'est l'occasion toute rêvée de les informer qu'il existe ici, au Québec, le Musée québécois de la chasse. C'est un musée unique en Amérique du Nord qui est situé à Waterloo, dans les Cantons de l'Est. C'est un musée qui vaut le déplacement, je dois vous le dire. Comme tout musée, on retrouve à l'intérieur de très belles choses à voir, de l'animation et beaucoup d'informations dans l'un des sites les plus enchanteurs des Cantons de l'Est. J'invite tous les chasseurs québécois, leur famille et leurs amis, et, évidemment, le ministre de la Chasse et de la Pêche à venir y faire un tour, à venir découvrir non seulement le musée comme tel mais à en faire leur lieu de rassemblement -ce pourquoi ce musée a été mis sur pied -non seulement pour des visites, mais pour des manifestations et aussi pour des compétitions, ce qui est déjà commencé, d'ailleurs. J'espère que tous les chasseurs de toutes les espèces vont finir par en faire leur lieu de rassemblement, sinon annuel, le plus souvent possible. Je pense que c'est important.

Je vais en profiter pour féliciter les différentes personnes qui ont mis sur pied ce Musée québécois de la chasse, les gens qui ont eu l'idée au début, qui l'ont mis sur pied dans des conditions très difficiles pendant la crise économique et tous ceux qui l'ont bâti et qui continuent aujourd'hui à le développer et à l'animer, ce qui est très important. Je veux en profiter pour féliciter et remercier mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, qui est ici ce soir, qui, lorsqu'il était ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, a donné le coup de pouce, pour ne pas dire l'aide financière nécessaire à ce moment-là pour permettre de sauver le musée et de le développer. Donc, aujourd'hui, c'est un musée qui est en place et qui est vraiment le rendez-vous des 350 000 chasseurs québécois et de leur famille. Je voudrais terminer en disant que c'est un musée unique en Amérique du Nord et que vous êtes toujours les bienvenus.

Avant d'entrer sur le fond du projet de loi 153, je voudrais aussi parler des responsabilités des agents de conservation de la faune. C'est important parce que ces gens-là ont quand même une tâche très importante puisqu'ils sont chargés de l'application de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et de ses règlements, ce qui n'est pas peu dire, car, en plus d'informer la population sur cette loi et ses règlements, ils doivent promouvoir la conservation. C'est très important parce que, comme je le disais tantôt, c'est près de 1 000 000 000 $ qui sont générés dans le milieu chaque année. Ces agents de conservation sont très importants.

Je veux féliciter aussi ceux de chez moi, les agents de conservation qui sont rattachés au bureau de Granby. Je veux les féliciter parce qu'ils étaient, justement, de ceux qui ont participé au démantèlement du réseau de braconniers dont on parlait dans La Presse au début du mois de novembre; ceci a permis l'arrestation d'une douzaine de personnes et la saisie de 300 kilos de viande de chevreuil dans les municipalités de Farnham, Sainte-Brigitte, Longueuil, Montréal et Laval. Ces gens-là sont très utiles; ils font un très bon travail. En plus, et c'est pourquoi je les remercie, ils m'ont permis de découvrir la situation de la chasse au Québec à l'heure actuelle. Cette situation justifie que le projet de loi 153 soit déposé.

J'ai eu le plaisir de visiter, moi aussi, à la noirceur dans mon coin, dans les chemins de campagne, avec justement un agent, les routes pour aller voir ce qui se passe. J'ai été à même de découvrir en moins de deux heures qu'avec les fameux projecteurs on peut voir énormément de chevreuils. Je peux vous dire qu'en moins d'une heure trente minutes j'en ai vu une trentaine, soit de façon isolée ou par groupes. Je n'ai pas seulement découvert qu'il y avait beaucoup de chevreuils chez nous, mais j'ai aussi découvert qu'il y avait une foule de chasseurs qui se promenaient en avant et en arrière de nous avec les mêmes projecteurs pour découvrir où se tenaient les chevreuils. Malheureusement ce soir-là, ou heureusement, cela m'a permis de découvrir que le braconnage se pratiquait partout, y compris autour de nos grandes villes. On est, justement, arrivé au moment où un chevreuil venait d'être abattu et laissé sur le bord de la forêt en attendant probablement qu'il soit 4 heures ou 5 heures du matin pour aller le chercher. Donc, j'ai été à même de découvrir ça.

J'ai aussi eu à mon bureau de comté, comme probablement beaucoup de mes collègues ici, énormément de plaintes des citoyens du coin. Il y a eu des plaintes, bien sûr, à propos des limites du territoire de chasse, mais surtout sur l'utilisation du projecteur. Ce n'est pas très plaisant pour les gens qui vivent à la campagne de voir passer, à partir de la brunante jusqu'au lendemain matin au lever du soleil, les fameux projecteurs, les "spotlights" comme on dit chez nous, avec une intensité presque incroyable qui se promènent sur le bétail dans les champs, les bâtiments de ferme et même sur les maisons familiales. Ce n'est pas plaisant. On a eu beaucoup de plaintes là-dessus.

(22 h 20)

C'est pourquoi je suis pour la lutte au braconnage et d'accord avec des principes qu'on retrouve dans le projet de loi 153. Je vais énumérer ces principes qui, à mon avis, sont très importants. Premièrement, l'augmentation du nombre d'agents de conservation de la faune. Je pense que c'est élémentaire. Si on veut que la loi soit plus sévère et mieux appliquée, qu'elle apporte une meilleure protection de la faune au Québec, il faut se donner les moyens physiques, les moyens humains, donc avoir plus d'agents. Deuxièmement, l'interdiction d'entraver un agent de conservation dans l'exercice de ses fonctions. C'est tout à fait normal. Si on veut qu'ils soient plus nombreux, il faut aussi qu'ils puissent bien remplir leurs responsabilités. Le troisième point important, c'est que nul ne peut chasser le gros gibier la nuit avec un projecteur. C'est précisément pour corriger la situation que je viens de vous décrire. Le quatrième point important, c'est que nul ne peut utiliser un projecteur la nuit pour déceler la présence d'un animal dans un endroit fréquenté par le gros gibier. Cinquièmement, l'interdiction de la possession, la nuit, d'une arme à feu, sauf si cette arme est insérée dans un étui ou déposée dans le coffre arrière d'une voiture. Sixièmement, l'augmentation des infractions.

M. le Président, oui, je suis d'accord avec ces principes et je trouve que c'est bon parce que cela va protéger la faune, cela va protéger les chevreuils et le gros gibier au Québec. Cela va permettre d'avoir plus d'agents de conservation de la faune et leur permettre aussi de donner un meilleur service.

Par contre, j'espère que le ministre profitera de la présente discussion, qui se tient ici ce soir, et de la commission parlementaire pour changer certains points qui, à mon avis, sont démesurés. Le premier point, c'est le montant des amendes. Comment peut-on expliquer qu'un braconnier soit passible d'une amende de 3500 $ et d'une année de prison, quand un individu n'est condamné qu'à 2000 $ ou six mois de prison pour voie de fait sur une autre personne? Ce n'est pas sur un animal; c'est sur une autre personne. La pénalité est de beaucoup inférieure. Comment expliquer aussi qu'un conducteur, qui met la vie de nos enfants en péril ou en danger en dépassant un autobus scolaire avec ses feux clignotants, soit passible d'une amende de 200 $? Dans une société qu'on dit moderne, qu'on dit civilisée et qu'on dit avancée, je pense qu'il faut une certaine logique, une certaine équité dans les différents secteurs d'activité. Donc, il faut être raisonnable, à mon avis, dans les amendes qu'on veut imposer, parce que le secteur de la faune n'est pas isolé en soi. C'est un secteur de la vie qui concerne tous les citoyens du Québec. Donc, c'est important qu'il n'y ait pas de démesure dans les pénalités qui sont prévues dans ce secteur. Il faut tenir compte qu'on vit dans une société et qu'il y a d'autres secteurs, que les lois doivent être équitables et qu'il doit y avoir une certaine logique dans les amendes qui sont prévues.

Le deuxième point qui, à mon avis, mérite une considération - j'espère que le ministre va en tenir compte - ce sont les dispositions qui sont inconciliables avec la charte des droits et libertés. Premièrement, la présomption de culpabilité. Il ne faudrait pas oublier que les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés établissent que tout accusé est présumé innocent jusqu'à preuve du contraire. Il ne faudrait pas oublier que les chartes sont au-dessus des lois, qu'il y a des principes fondamentaux dans une société. On est fier de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Elle s'applique à toutes les lois et le présent projet de loi ne peut pas y faire exception. Donc, un individu doit être considéré innocent tant et aussi longtemps qu'on n'a pas prouvé le contraire.

Un deuxième point auquel on doit faire attention pour respecter la charte des droits et libertés, c'est le pouvoir de perquisition sans mandat. Pourtant, ce projet de loi 153 donne ce pouvoir aux agents de conservation de la faune. Pendant ce temps, il y a quelques jours seulement, le ministre de la Justice, dans le projet de loi 92, apportait une modification à la loi existante qui régit tout le secteur de la faune. L'amendement présenté oblige l'agent de conservation de la faune à obtenir, après déclaration sous serment, un mandat d'un juge de paix avant de procéder à une perquisition. J'invite M. le ministre à bien écouter, parce que c'est important. Je pense qu'on ne peut pas inclure dans ce projet de loi ces deux facteurs qui sont la perquisition sans mandat et la présomption de culpabilité. Je pense que le ministre ferait mieux, dès maintenant, de modifier la loi plutôt que d'attendre, dans deux mois ou six mois, que son collègue, le ministre de la Justice, responsable de l'application de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, vienne corriger cette loi par une loi omnibus. Aussi bien le savoir tout de suite. De toute façon, quand on adopte une loi, cela doit être fait dans le respect des autres lois, mais surtout dans le respect de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. On ne peut pas être au-dessus de cette charte.

Le troisième point qui mérite l'attention du ministre - j'espère qu'il va le considérer et le changer dans le projet de loi - ce sont les pouvoirs discrétionnaires que le ministre se donne, entre autres, dans l'affectation du territoire par décret et non plus par règlement. Ce que cela signifie,

c'est que, dans l'affectation du territoire maintenant, il n'y aura plus aucune prépublication, aucune consultation et aucun contrôle par l'Assemblée nationale. Je pense, puisque les terres publiques appartiennent à l'État, donc à l'ensemble des citoyens, que l'Assemblée nationale et les élus doivent avoir un contrôle sur ce qu'on fait de l'affectation de ce territoire. Je pense que le ministre doit retirer cette demande, qui est faite dans le projet de loi 153, de faire cela maintenant par décret plutôt que par réglementation.

Toujours dans les pouvoirs discrétionnaires xque se donne le ministre, le ministre peuït, aux conditions qu'il détermine, délivrer un permis autorisant la vente ou l'achat de poisson ou de chair animale pour une activité spéciale. Je dois dire que cela aussi est inquiétant, parce que c'est un pouvoir discrétionnaire qui est tellement vague qu'on ne sait pas où cela va s'arrêter, parce qu'une activité spéciale peut être tellement de choses. J'aimerais ici montrer au ministre et lire - je pense que cela en vaut la peine - un article qu'on retrouve dans le journal Le Soleil du 19 novembre dernier - cela ne fait pas tellement longtemps - sous la plume de M. André Bellemare, donc quelqu'un qui connaît très bien le secteur de la chasse et de la faune. Le titre "Un article du projet de loi 153 fait peur. Commerce de la faune?"

Je vais vous en lire juste deux petits paragraphes. Je pense que cela vaut la peine pour savoir à quel point on peut s'inquiéter de cet article qu'on retrouve dans le projet de loi 153. "Ce nouvel article de la loi, anodin en apparence, c'est la porte ouverte à la commercialisation du patrimoine faunique." "Les plus vieux se souviendront de la Régie des alcools, qui octroyait des permis "très spéciaux", à des conditions "très spéciales", pour la vente et l'achat de boissons alcoolisées à consommer sur place lors d'activités très spéciales. Ce qui était l'exception voilà quelques dizaines d'années est maintenant devenu la règle pourvu que le demandeur verse le tarif prescrit."

C'est donc comme cela qu'on a procédé pour ce qui est de l'alcool. On est en train de procéder de la même façon concernant la commercialisation de la viande de gibier. Donc, si c'est la volonté du ministre qu'il le dise clairement, mais non pas par un pouvoir discrétionnaire comme cela, qui laisse entendre que c'est seulement très rarement. Mais des activités spéciales, ce n'est pas très clair. Cela devrait être plus clair et, à mon avis, le ministre devrait reconsidérer cela lors de l'étude article par article du projet de loi 153.

Donc, en conclusion, M. le Président, oui, à des changements qui sont contenus dans le projet de loi 153, mais non à certaines modifications qui sont exagérées ou qui ne respectent pas la charte des droits et libertés du Québec, ce qui, à mon avis, est fondamental. Non aux pouvoirs discrétionnaires trop nombreux au ministre, alors que la population exige de plus en plus de transparence et des règles claires et précises en ce qui concerne le fonctionnement gouvernemental. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le députe d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Merci, M. le Président. Un peu comme tout le monde au cours des dernières semaines et des derniers mois, le ministre, en ouvrant son journal le matin, a pris connaissance qu'il y avait des braconniers qui trafiquaient quelques chairs, quelques viandes provenant du domaine public. Certes, nous reconnaissons qu'il y a là un problème. Il y a quelque chose à faire, il y a toujours de l'amélioration à apporter partout. C'est bien clair mais, pour le faire comme il faut, il faut prendre le temps de regarder où on va et de savoir à quoi on s'attaque quand on décide de réqler un problème.

Or, le ministre, en prenant son café au petit déjeuner, se rend compte qu'il y a des braconniers dans le bois. Comme il est dans une passe où il n'a pas beaucoup de travail, semble-t-il, il n'est pas très occupé, il se dit: Ah! Voilà une belle occasion d'essayer de me mettre en lumière. Voilà une belle occasion de montrer que moi, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je vais, une fois pour toutes, régler le problème des braconniers et je vous assure qu'il n'y aura plus de braconniers au Québec.

Est-ce que M. le ministre...

Le Vice-Président: Allez-y, M. le député. (22 h 30)

M. Claveau: Oui. Vous permettez? On s'entendra ensuite sur la valeur des watts de l'un et de l'autre.

Toujours est-il, comme je le disais, que le ministre essaie de se trouver un moyen de se mettre en lumière, et à peine quelques jours plus tard apparaît en gros titre dans le journal, et je le cite - vous permettrez même si le ministre peut se sentir offusqué: "Picotte montre les dents". En lisant l'article, j'étais certain qu'il s'intéressait à la loi sur les soins dentaires. J'ai dit: voilà enfin un ministre qui va essayer de démontrer devant la population que la ministre de la Santé et des Services sociaux n'a pas raison de couper dans les soins dentaires. "Picotte montre les dents". C'est en lisant l'article que je me suis rendu compte qu'on ne parlait pas tout à fait des mêmes dents. Il nous arrive, comme cela,

avec un projet de loi qui se veut réglementaire par rapport à des infractions qui certes existent dans le domaine public et pour lesquelles il y a quelque chose à faire.

Enfin, si le ministre est aussi sérieux dans son projet de loi que dans l'attitude qu'il a actuellement... Il montre les dents, mais il faut croire que c'est pour sourire plutôt que pour mordre. Le ministre nous présente un projet de loi dans lequel il essaie de s'attaquer à certaines lacunes. Il dit: Par contre - mon collègue vient d'effleurer la question tout à l'heure -qu'est-ce qu'on pourrait faire pour régler cela? Il y a des gens qui vendent illégalement de la chair, qui vendent illégalement de la ressource animale qu'ils prélèvent sans permis dans la forêt, alors, qu'est-ce qu'on va faire? Probablement que le meilleur moyen de ne pas avoir de problème, c'est de leur donner des permis, de leur permettre d'en vendre légalement.

Voilà à peu près le tour de passe-passe que trouve le ministre pour justifier son projet de loi prématuré, parce qu'il n'a pas pris suffisamment de temps pour penser et pour y apporter des correctifs majeurs et certains. Voilà que le ministre s'apprête à délivrer à sa discrétion, pardon, un certain nombre de permis qui pourraient faire en sorte que des gens puissent, au choix du ministre, commercialiser de la viande, du poisson, enfin, des espèces que l'on ne retrouve pas généralement sur le marché, et en faire la mise en marché légalement au lieu de le faire illégalement comme ils le faisaient avant. Certes, c'est une façon de réglementer. C'est une façon de voir les choses. Mais on est en droit de se poser sérieusement la question sur les mécanismes que le ministre va mettre en place afin de faire en sorte qu'il y ait un certain respect du décorum, entre autres dans l'allocation de ces permis qu'il prétend pouvoir donner à sa discrétion à qui en fera la demande. Il ne dit pas que cela va être à tout le monde. Cela va être à sa discrétion.

Voilà que nous affrontons un nouveau dilemme qui risque peut-être, au contraire de ce que le ministre pense, de créer un nouveau problème qui peut même accentuer le braconnage, parce que celui qui va se voir refuser un permis de commercialisation n'arrêtera peut-être pas pour autant de braconner. Voilà que le ministre dit: II y a un problème. La solution pour celui à qui je n'aurais pas voulu à ma discrétion donner un permis: je vais lui imposer des amendes extrêmement lourdes. Nous nous retrouvons dans une situation où le crime d'avoir tué un lièvre en forêt risque d'être aussi pénalisé que s'il s'était agi d'un crime envers un de nos concitoyens.

Nous croyons que les mesures coercitives qu'amène notre ministre dans ce projet de loi sont relativement exagérées par rapport au problème en soi. Une bonne gestion, une bonne surveillance, une application assidue de la réglementation et des lois déjà en vigueur seraient suffisantes car, M. le Président, il faut bien être clair, ce n'est pas en changeant la loi qu'on va régler le problème. Il va falloir que le ministre se donne les moyens de faire appliquer cette loi. Même si les mesures sont plus coercitives, même si le fait de prendre moins d'individus en flagrant délit va lui permettre de récupérer plus d'argent pour le Trésor public... C'est à se demander si en fin de compte ce n'est pas encore son confrère du Conseil du trésor qui lui aurait demandé d'essayer de participer un peu plus à sa façon dans l'équilibrage des colonnes du budget gouvernemental en trouvant le moyen de faire entrer quelques sous supplémentaires dans la cagnotte du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

C'est à se demander si ce n'est pas cela la justification fondamentale du projet de loi en question. Car, il n'est vraiment pas dit dans ce projet de loi que le ministre va avoir les ressources nécessaires, que son collègue du Trésor va lui allouer les ressources nécessaires pour pouvoir exercer un véritable contrôle sur son projet de loi. Comment voulez-vous, par exemple, M. le Président, qu'une dizaine d'agents de conservation sur le grand territoire de la Baie-James puissent à eux seuls couvrir l'ensemble du territoire et s'assurer qu'il n'y aura pas de braconnage? Êtes-vous capable de m'expliquer comment cela va se faire? Même si la loi a des dents plus longues, même si la loi est plus coercitive, si le président du Conseil du trésor ne permet pas au ministre d'allouer des fonds supplémentaires à la surveillance sur le terrain, on n'a pas réglé le problème. Alors, peut-être que le ministre s'est dit: La meilleure façon de détourner la chose sans trop que cela paraisse et afin que tout le monde soit content, c'est de m'organiser pour que les braconniers puissent à l'avenir commercialiser légalement leur viande à ma discrétion. C'est une hypothèse. On a le droit de se poser des questions quand le ministre arrive avec des ouvertures semblables dans un projet de loi, parce qu'il ne faut pas oublier qu'il s'agit là d'un précédent dangereusement dangereux, devrais-je dire, par rapport à ce qui se fait actuellement et qui s'est toujours fait.

Comment va-t-on pouvoir à l'avenir contrôler la viande qui est de la viande d'orignal, de la viande de cerf, de la viande de caribou qui va avoir été mise sur le marché, si elle vient oui ou non de quelqu'un qui détient un permis ou si elle vient du réseau illégal? Actuellement on sait que, lorsqu'il y en a sur le marché, elle vient nécessairement du réseau illégal et on peut toujours essayer de remonter la chaîne et d'arriver au véritable coupable. Mais, à

partir du moment où il y a deux sortes de viande sur le marché, comment va-t-on pouvoir exercer des contrôles réglementaires suffisants pour s'assurer que la viande que l'on a au bout de sa fourchette dans son assiette, M. le Président, soit une viande vendue légalement alors qu'à mon avis il n'existe pas beaucoup de différence entre la couleur et la saveur d'un steak, qu'il vienne d'un orignal ou d'un autre?

En fait, le ministre, dans la perspective de régler un problème avec lequel il est pris et pour lequel il s'est avancé peut-être un peu prématurément en ouvrant sans réserve la guerre aux contrebandiers, se crée un autre problème qui sera peut-être plus grave que celui auquel il a affaire actuellement et qui va faire en sorte qu'il va être complètement impossible à l'avenir de contrôler les origines des viandes et des poissons qui ne sont pas généralement commercialisés, mais qui vont l'être à partir du moment où le ministre va avoir émis certains permis à sa discrétion pour qui il voudra bien qu'ils mettent de la viande sur le marché.

Alors, il y a là un dilemme fondamental sur lequel le ministre devra sûrement nous amener des éclaircissements en commission parlementaire, si jamais le projet de loi se rend jusque-là, bien entendu. Étant donné les différents dilemmes et les contradictions de base qu'il y a dans ce projet de loi, il est probable que nos collègues ministériels s'organisent pour le faire retirer tout de suite en deuxième lecture. Comme cela nous n'aurons pas à perdre de temps à discuter sur des points ou des litiges qui découlent d'un travail mal fait.

Le ministre se donne aussi des droits pratiquement sans réserve quant à la présomption de culpabilité. Comment peut-on dans notre structure juridique, dans nos coutumes judiciaires, accuser quelqu'un d'avoir illégalement transporté sur son dos un quartier d'orignal à partir d'une présomption de culpabilité? Il faudra d'abord le prendre sur le fait. Déjà là il y a un problème. Il va falloir que le ministre refasse ses devoirs avec son collègue, le ministre de la Justice, afin de se faire expliquer les codes de procédure que nous utilisons sur le territoire québécois en termes d'application de la justice et il est fort probable que son collègue de la Justice le ramènera à l'ordre en lui disant qu'entre autres la présomption de culpabilité dans notre structure judiciaire va diamétralement à l'encontre et à des dispositions inconciliables avec la Charte des droits et libertés de la personne que nous nous sommes donnée en tant que peuple. Alors, il y a encore là une autre piste qui nous permet de croire que le ministre est allé prématurément, que le ministre ne s'est pas donné le temps d'approfondir le problème et se crée encore une fois, à partir d'un projet de loi ou d'un article qui semble anodin, un autre problème pour lequel il aura un jour ou l'autre à répondre à la population. (22 h 40)

II y a d'autres dispositions qui sont tout aussi abracadabrantes. Par exemple, la question du contrôle de l'utilisation des projecteurs la nuit pour la chasse. Imaginez-vous qu'en période de chasse, ou autrement, en pleine nuit, un pauvre chasseur malchanceux perd ses clés à 20 mètres de sa voiture, dans une nuit obscure et sans lune, et que, malheureusement au moment où notre chasseur qui doit sortir du bois prématurément, qui ne peut pas attendre le matin, se met à chercher ses clés avec son projecteur, au même instant un agent de conservation passe par là. Â partir d'une simple présomption de culpabilité, quels vont être les recours qui vont rester à notre chasseur pour essayer de prouver devant le tribunal qu'il était bel et bien en train de chercher ses clés? On pourra toujours, à la limite, essayer de faire accroire qu'il a laissé tomber ses clés à la dernière minute pour montrer qu'il les cherchait plutôt qu'il cherchait des yeux de chevreuil. Voilà des cas concrets auxquels le ministre va sûrement avoir à faire face un jour ou l'autre s'il applique sa loi comme il l'applique là. Comment peut-on, par exemple, à partir d'une telle réglementation, empêcher quelqu'un de bonne foi de cheminer sur un sentier en forêt, en pleine nuit, avec de la lumière? Ce sont des choses qui arrivent, M. le Président, en milieu forestier, ce sont des choses qui arrivent dans des milieux où, je dirais, la forêt est à toutes fins utiles la base de la récréologie. Ce sont des choses que l'on connaît dans mon milieu, M. le Président, et il n'est pas rare que pour toutes sortes de raisons un campeur, quelqu'un qui a un chalet, quelqu'un qui aime la nature, un simple amant de la nature, écologiste à l'occasion par ses temps perdus, aille se promener en forêt la nuit, ne serait-ce que pour observer les hiboux. On le retrouve avec une lampe et, parce qu'il y a un orignal ou un chevreuil à quelques mètres ou à un demi-mille de là, on va présumer qu'il était en train d'essayer de "spotter" les yeux du chevreuil pour être capable de mieux le tirer. Voilà, M. le Président, des faits concrets, des problèmes immédiats, des problèmes anodins, certes, mais réels que le ministre va devoir affronter quand il arrivera pour appliquer sa présomption de culpabilité envers un individu qui se promène avec un projecteur en forêt en pleine nuit.

La question, M. le Président, des armes à feu la nuit. Quand on dit qu'elles devront être dans un étui, ou déposées dans le coffre d'un véhicule ou dans la soute d'un aéronef, encore là, M. le Président, il faudrait d'abord définir la notion d'étui. À peu près tout, si je ne m'abuse, peut être un étui. À

la limite, si on ne définit pas la notion d'étui, ce qu'est légalement un étui pour transporter une arme à feu... S'il m'arrive d'enrouler mon arme à feu dans mon sac de couchage pour me promener avec en dessous du bras pour changer de tente dans mon campement, à ce moment-là je me crois en droit de prétendre que mon sac de couchage était devenu un étui pour mon arme à feu, qu'il la protégeait pendant que je la transportais. Si la notion d'étui n'est pas plus précise que cela, il y a encore un certain nombre de dilemmes avec lesquels le ministre va devoir vivre et coucher, puisqu'il s'agit de la nuit, M. le Président.

Encore, que signifie une arme dans un étui? On ne précise pas, par exemple, que la fermeture éclair doit être fermée au maximum, aux trois quarts ou à moitié, on ne dit pas que l'arme doit être chargée ou pas. On oublie des choses. C'est un travail fait en vitesse, un travail fait pour répondre à un besoin immédiat mais qui s'appliquera à long terme. Voilà peut-être, M. le Président, ce que ce gouvernement n'a pas encore compris. C'est que, lorsqu'on légifère pour régler des problèmes immédiats, on doit faire des lois qui auront une répercussion à long terme, qui vont s'échelonner dans le temps. Même si on règle notre problème immédiat avec la loi qu'on adopte, il faut s'imaginer que cette loi va rester inscrite dans ce qu'on appelle les lois refondues du Québec, en ce qui nous concerne, nous, le peuple québécois, et que dans dix ou quinze ans quelqu'un pourra se prévaloir du même article de loi pour peut-être des fins tout autres que celles pour lesquelles on l'a adopté dans un instant d'euphorie pour régler un problème particulier. Il nous semble, à la lecture de ce projet de loi, qu'il y a énormément de choses en suspens, qu'il y a énormément de choses que le ministre ne semble pas avoir lui-même comprises et que, dans bien des occasions, certains articles sont là uniquement pour remplir des feuilles qui, autrement, seraient restées blanches, puisqu'on ne connaît pas les modalités d'application. On n'a pas d'assurance, il n'y a rien qui nous dit... Je suis certain que le ministre lui-même serait gêné de prouver que son collègue, le président du Conseil du trésor, dans la conjoncture qu'il ne cesse de véhiculer, est prêt à lui allouer toutes les ressources nécessaires afin que son projet de loi, comme tout autre projet de loi déjà existant, puisse s'appliquer comme il devrait être appliqué, entre autres en milieu forestier. Voilà les problèmes auxquels nous avons à faire face et voilà pourquoi nous interrogeons sérieusement le ministre quant à l'intérêt de déposer en catastrophe, à la dernière minute, un projet de loi qui, semble-t-il, émane d'une lecture de journal, un samedi matin en prenant son café noir.

Lorsque le ministre nous est arrivé avec un projet de loi, une fois que j'eus compris que ce n'était pas les questions dentaires qui le préoccupaient, je me suis dit: Le ministre va probablement nous arriver avec un projet de loi de concordance pour aligner le problème de la gestion de la faune avec celui de la gestion des forêts puisque le ministre délégué aux Forêts, depuis un certain temps déjà, est en train de nous démontrer que son projet de loi ne sera pas applicable s'il n'y a pas toute une série de concordances avec les différents autres aspects de l'intervention en forêt. Mais il semble que la question n'ait pas effleuré le ministre. Probablement qu'il va attendre de lire dans le journal de samedi matin que son ministre délégué aux Forêts est en train de faire un projet de loi qui aura des incidences sur ses interventions à lui en forêt et que c'est juste à ce moment-là, après avoir ingurgité son café au petit déjeuner, qu'il se décidera à nous présenter un projet de loi de concordance qui fera en sorte que la Loi sur les forêts soit applicable comme elle devrait l'être. Mais il nous aurait semblé, dans la conjoncture actuelle, qu'il eût été beaucoup plus consciencieux de la part du ministre de s'intéresser aux questions de concordance entre la Loi sur les forêts et l'éventuelle Loi sur les terres du domaine public qui, peut-être, ne sera pas appliquée ou étudiée. Dans ce cadre-là, il aurait été très intéressant de mener un débat global sur l'ensemble des problématiques de gestion forestière et les interventions du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans le domaine.

Voilà quelques-unes des observations que j'avais à faire sur ce projet de loi. Malheureusement, on n'a jamais le temps suffisant pour faire le tour. On aura sûrement l'occasion de revoir le ministre responsable dudit projet de loi en commission parlementaire afin d'éclaircir les quelques questions que j'ai bien daigné vous exposer ici, aujourd'hui. Merci, M. le Président.

M. Picotte: M. le Président.

Le Vice-Présidents Oui, M. le ministre.

M. Picotte: Est-ce que le député me permettrait une question, avec le consentement, en vertu de l'article 213?

Le Vice-Président: M. le député d'Ungava, est-ce que vous autorisez le ministre à vous poser une question? En vertu de notre règlement, c'est possible. La question doit être brève, la réponse doit être également brève.

M. Claveau: ...

Le Vice-Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, j'ai écouté

avec beaucoup d'attention le savant exposé de mon collègue. Je l'ai même entendu dire qu'il lui arrivait, même si ce n'est pas sécuritaire, d'envelopper son fusil dans son sac de couchage. Je me demande, après avoir entendu ce qu'il a dit, s'il lui arrive de coucher dans l'étui de son fusil.

Le Vice-Président: M. le ministre, vous savez fort bien que ce n'était pas une question permise au sens de notre règlement. Je dois simplement le déplorer à ce moment-ci.

M. Claveau: C'est ce qu'on appelle coucher en chien de fusil.

Le Vice-Président: C'est bien, il n'y aura pas de débat là-dessus. Je cède la parole à M. le député de Joliette et leader de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais vous dire que vous avez là à peu près tout le sérieux d'un ministre. C'est un niveau intellectuel très élevé, comme vous avez pu le constater. Je vais essayer de m'en tenir au projet de loi. (22 h 50)

Tout d'abord, je pense que tout le monde est d'accord avec le principe de lutter contre le braconnage. Je pense bien que sur le principe comme tel... Comment voulez-vous qu'on soit contre le braconnage? Mais le projet de loi ne se limite pas à parler de braconnage. Il modifie fondamentalement des approches. Il crée un nouveau système de désignation de territoires, par exemple. Il impute de nouvelles pénalités et, en plus, il donne au ministre un pouvoir discrétionnaire un peu fort, en tout cas, en ce qui me concerne, sur plusieurs aspects.

Premièrement, je voudrais vous dire, M. le Président, qu'il y a environ deux ou trois ans nous étions amenés en cette Chambre à modifier la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Je suis surpris que le ministre actuel ne se souvienne pas qu'il ait adhéré unanimement aux modifications qu'on avait apportées à l'époque. À l'époque, on avait dit: Nous allons épurer la loi pour ne plus avoir d'interprétations qui servent à toutes sortes de folies et à toutes sortes d'exagérations. Il y avait la fameuse fermeture éclair de l'étui: si elle n'était pas complètement fermée et si on rencontrait un agent pour qui on ne faisait pas l'affaire, il pouvait nous accuser d'infraction.

Quand on a parlé de réflecteurs pour la nuit, on a dit: C'est bien sûr que, s'il est pris avec un fusil chargé en main et un réflecteur, il n'y a pas de problème. Mais le gars en plein bois, celui qui est dans des caches, qui dort dans un petit chalet de fortune, a à sortir la nuit avec un réflecteur. En vertu de l'article 30.2 du projet de loi, il est réputé chercher à découvrir où passe le gros gibier et une présomption de culpabilité est inhérente à cet article. Il me semble que c'est très grave. Il pourrait ne pas avoir un fusil dans les mains, seulement sortir pour des besoins naturels, être en plein bois dans un camp de fortune et il est présumé rechercher le gros gibier; cela va jusque-là. C'est un peu fort quand même. C'est un petit peu fort quand même. Il m'apparaît carrément qu'il ne faut pas verser dans le ridicule quand on amende une loi. On doit chercher le juste milieu en voulant atteindre nos propres objectifs bien précis. Mais, de grâce, il ne faut pas aller mettre une présomption de culpabilité quand l'individu n'a même pas un fusil dans les mains, surtout en plein bois. Il faut avoir chassé un peu; il faut être allé dans le bois le soir pour savoir que si on ne veut pas s'enfarger en sortant il me semble que cela peut prendre au moins une "flashlight", comme disent les Québécois. Il me semble que c'est abusif, M. le Président.

Ce qui m'apparaît abusif aussi, c'est le montant des amendes. Vous savez, quand c'est rendu à 13 500 $ pour une pénalité, entre vous et moi, c'est rendu qu'il y a des gens qui commettent des crimes sur des humains et qui sont moins en danger vis-à-vis des cours de justice que quelqu'un qui tue un lièvre. C'est un peu fort. Quand on veut être crédible il ne faut pas sombrer dans le ridicule. Je pense qu'il faut y aller mollo, il faut y aller d'une façon raisonnable.

Personnellement, je suis d'accord avec le député d'Ungava. Ce qui manque au Québec, à cause des années de crise économique et financière, c'est le nombre d'agents de conservation de la faune. C'est un fait. Je pense que depuis six ou sept ans, depuis le début des difficultés financières, il n'y a pas eu d'ouverture de postes. C'est évident qu'il n'y en a presque pas. C'est évident qu'il en manque. C'est évident qu'ils n'ont pas nécessairement tous les outils pour assurer pleinement leur travail. Ce n'est pas en augmentant les amendes que nous aurons plus d'agents. C'est seulement pénaliser plus fortement ceux qui sont pénalisés présentement. À mon sens, ce n'est pas là une solution au véritable problème. Il manque d'agents de conservation de la faune et je sais jusqu'à quel point il en manque parce que j'ai été personnellement ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Je sais combien ces gars travaillent fort. Ils sont obligés d'accomplir plusieurs fonctions avec un groupe réduit. Ce n'est pas drôle. On leur demande d'appliquer la loi sur la forêt, la loi sur l'environnement près des lacs et une série de lois qu'on leur demande d'appliquer

en plus. À mon avis, la solution réside ailleurs que dans la croissance effrénée ou farfelue même des amendes; pour certains cas cela m'apparaîtrait plus intelligent d'y aller conformément aux coutumes des tribunaux civils, au moins. Il me semble qu'on doit ajuster, mettre en relief certaines valeurs, faire des comparaisons et dire: Écoutez, telle infraction pour telle chose, c'est peut-être comparable à telle infraction dans le secteur de la faune. En tout cas, je vous avoue que 13 500 $ pour une amende, je trouve cela personnellement extrêmement exagéré, M. le Président.

Il y a un autre point. Quant au pouvoir d'inspection, je pense que, véritablement, les agents de conservation de la faune - je ne parle pas des agents auxiliaires - étaient assez limités. On ne voulait pas, non plus, que ce soient des perquisitions en règle et qu'on ait le pouvoir absolu de jouer à la police. Vous savez, il y avait un danger. Le débat qui s'est fait lors des amendements à la législation, il y a deux ans environ, était le suivant: il y a deux écoles de pensée chez les agents de la faune, l'école de pensée police, fière d'avoir le "gun" et contente de pouvoir jouer à la police, mais il y a aussi une deuxième école qui s'est développée au niveau des agents, qui dit qu'ils ont un rôle éducatif à jouer. Personnellement, je trouve extrêmement positive l'approche de ceux qui, par exemple, font des tournées près des parcs, s'habituent à jaser avec les gens pour les mettre en garde contre différents types d'infractions qu'ils peuvent commettre et les inciter à respecter la Loi sur la qualité de l'environnement. Cela m'apparaît la formule d'avenir, mais pas nécessairement jouer au système policier, pas exclusivement, en tout cas. Je comprends qu'il y aura toujours des gens qui dérogeront à la loi, qui ne voudront rien savoir et qui sont des braconniers depuis toujours. C'est quasiment une institution dans certains villages, on les connaît. À partir de là, je comprends qu'il a un rôle à jouer au niveau du respect des lois, mais je pense que l'agent de la faune a aussi un rôle extrêmement positif à jouer auprès des gens. C'est ce rôle que j'avais essayé personnellement de promouvoir, pour qu'il y ait cette nouvelle approche qui m'apparaissait intéressante.

M. le Président, il y a un point du projet de loi qui me fait encore hésiter. J'espère que le ministre le clarifiera dans son droit de réplique. Cela me fait encore hésiter à voter pour en deuxième lecture. Le ministre change le pouvoir réglementaire par un pouvoir de décret. Qu'est-ce que ça signifie? Vous savez très bien que le pouvoir réglementaire de la législation oblige le ministre à une prépublication à la Gazette officielle. On sait donc quels sont les changements qui sont à venir. On sait donc sur quoi le ministre veut modifier son règlement, mais le ministre dit: Non, dorénavant, ce ne sera plus un pouvoir réglementaire, ce sera un pouvoir donné par décret. À mon point de vue, c'est la porte ouverte à des gestes de patronage, une porte ouverte à une discrétion qui conduira à des abus carrément en faveur d'amis du système ou du régime, et ça me fait peur. Ça me fait peur surtout quand la désignation des territoires fauniques ou des zones d'exploitation contrôlée est laissée à la discrétion entière du ministre par voie de décret. On sait que ça pourrait se faire par décret sans que la zone d'exploitation contrôlée soit mise au courant, sans que les dirigeants d'un territoire d'une réserve faunique soient mis au courant. Le lendemain matin, un décret dûment signé par le greffier du Québec nous annonce que telle réserve faunique a été amputée de tel territoire et que cela a été confié à un pourvoyeur, et tout cela s'est fait par décret. Cela me fait peur et, personnellement, c'est un des points qui me font le plus hésiter à voter pour ce projet de loi en deuxième lecture.

Il me semble que cela a été révolu pendant plusieurs années, cette notion d'ouvrir des portes à la discrétion au point de servir les amis du régime plutôt que d'y aller honnêtement, ouvertement, par une prépublication à la Gazette officille qui permettait aux groupes, autant des dirigeants de ZEC ou des travailleurs d'une réserve faunique, de venir dire au ministre, par une lettre, parce qu'ils ont vu cela à la Gazette officielle: Attention, M. le ministre, cette réserve faunique est une pouponnière pour le chevreuil à toutes fins utiles, M. le Président. C'est une pouponnière. Il faut faire attention, on peut se faire amputer des plus beaux morceaux d'une réserve par décret, sans qu'on le sache, purement et simplement à la discrétion du ministre. Ce point-là me fait hésiter grandement et je vous avoue que cela fera même l'objet d'une discussion au sein de notre équipe parce qu'à ce stade-ci de nos réflexions c'est assez gros pour nous faire hésiter à adhérer à un principe qui est bon en soi. Sur le braconnage comme tel, on pourrait bien être d'accord, mais ce projet de loi est un projet de loi omnibus. Ce n'est pas un projet de loi exclusivement sur le braconnage. Quand le ministre se donne le droit de pouvoir amputer une réserve faunique d'une partie de son territoire, quand il se donne le privilège de changer les désignations, par exemple, d'une zone d'exploitation contrôlée, cela m'apparaît extrêmement dangereux.

Je vous avoue que nous hésiterons, en tout cas, jusqu'à demain certainement avant de dire qu'on votera pour en deuxième lecture. Je ne veux pas abuser du temps de cette Chambre outre mesure. Je voulais souligner les quelques dangers que je voyais dans cette loi à une première lecture. Ayant occupé cette fonction de ministre du Loisir,

de la Chasse et de la Pêche, je pense que je me devais d'attirer l'attention des parlementaires, parce qu'il n'est pas encore trop tard pour modifier des choses dans ce projet de loi.

Il me semble qu'on est capable, si on veut faire un travail positif, de regarder les côtés positifs que soumet l'Opposition et de le corriger. Corriger, à mon point de vue, les exagérations qu'il y a dans les sanctions. Corriger la notion de présomption de culpabilité, surtout quand un individu n'a même pas un fusil en main. Corriger les désignations par décret. Pour cela, il m'apparaît qu'il faut rayer complètement cet article, M. le Président, d'autant plus que c'est une modalité que se donne le ministre à l'intérieur d'une loi dite contre le braconnage. Corriger également, bien sûr, quelques sanctions pénales qui m'apparaissent nettement prohibitives par rapport aux objectifs recherchés surtout par rapport à la mentalité que cela pourrait développer, de faire jouer un rôle exclusivement policier et non pas éducatif quant à la conservation et à la mise en valeur de la faune.

On a changé le titre de cette loi. C'était la Loi sur la conservation de la faune. On avait ajouté au titre: Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Je pense qu'il y a de plus en plus de Québécois qui circulent en forêt pour toutes sortes de types de loisirs. La faune peut être mise en valeur, mais pas exclusivement en fonction de la chasse. Je pense que vous le savez très bien. Tous les parlementaires ici savent combien on a d'amants de la nature, combien de gens se promènent dans le décor aujourd'hui avec leur caméra, combien de gens font du sentier pédestre à l'intérieur de certains de nos parcs nationaux, combien de gens font des excursions, combien de gens font du ski de fond à l'intérieur de nos forêts?

Moi, en tout cas, je pense que le ministre a essayé vraiment de nous en passer une petite vite. Sous prétexte, bien sûr, que tout le monde était contre le braconnage, il essaie de se donner des pouvoirs discrétionnaires qui ouvrent la porte au patronage et, à mon point de vue, surtout dans son cas, il ne faut pas lui en donner la chance.

Le Vice-Président: M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, je demanderais l'ajournement de nos travaux.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je fais motion pour l'ajournement des travaux à demain, 10 heures.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement de nos travaux est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Donc, l'Assemblée nationale ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 3)

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