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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le jeudi 7 mai 1987 - Vol. 29 N° 104

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures sept minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un moment de recueillement.

M. Boulerice: Pour effacer vos péchés.

Le Président: Veuillez vous asseoir. Nous allons commencer l'ordre du jour. Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Je vous prie d'appeler l'article c au feuilleton s'il vous plaît!

Projet de loi 6

Le Président: À l'article c au feuilleton, M. le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation présente le projet de loi 6, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les valeurs mobilières.

M. le ministre.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, le présent projet de loi a pour objet de modifier diverses dispositions législatives qui s'appliquent aux offres publiques d'achat, d'échange ou de rachat, dans le but d'assurer une plus grande uniformité de la réglementation avec celle des autres provinces.

En outre, ce projet a pour objet de modifier d'autres dispositions de la loi afin notamment d'élargir le droit de résolution accordé aux souscripteurs, de reporter au règlement certains éléments du régime des déclarations d'initiés et d'assurer une meilleure répression des infractions en matière d'information privilégiée.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir du projet de loi 6?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté, M. le leader de l'Opposition?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article e, M. le Président.

Projet de loi 30

Le Président: À l'article e au feuilleton, M. le ministre du Travail présente le projet de loi 30, Loi constituant la Commission des relations du travail et modifiant diverses dispositions législatives.

M. le ministre du Travail.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.

Ce projet de loi a pour objet la mise sur pied d'une Commission des relations du travail qui aura tous les pouvoirs nécessaires pour agir sur une partie importante des rapports collectifs du travail.

Ainsi, le projet de loi confie à cette commission le mandat d'assurer le libre exercice du droit d'association déjà reconnu par le Code du travail et les chartes en faveur des salariés et d'administrer le processus d'accréditation des syndicats.

La commission pourra aussi intervenir pour faire respecter les dispositions du Code du travail, d'abord par voie de médiation et ensuite, si nécessaire, en ordonnant aux personnes concernées de se conformer au code, afin de solutionner certains conflits de travail rapidement et d'une manière appropriée au domaine des relations du travail.

Elle aura également parmi ses autres fonctions, celle de voir à la détermination et au respect des services essentiels en cas de grève suivant les règles actuellement prévues pour les services publics et les secteurs public et parapublic.

Le projet de loi prévoit en conséquence le transfert des responsabilités actuelles du Bureau du commissaire du travail, du Tribunal du travail, du Conseil des services essentiels et du Commissariat de la construction à la nouvelle commission. Il apporte aussi les ajustements nécessaires au Code du travail et a d'autres lois.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se... M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Considérant que ce sera probablement la seule loi qui aura un peu de corps à cette session-ci, est-ce que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu envisage une consultation préalable? Compte tenu des modifications importantes prévues au Code du travail et à

plusieurs mécanismes de relations du travail, est-ce que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu considère qu'il y aurait lieu d'envisager une commission parlementaire élargie?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, au moment où on se parle, je n'ai pas été consulté par le ministre. On pourra se concerter et en aviser les membres de l'Assemblée dans les meilleurs délais.

Le Président: Adopté?

Dépôt de documents, M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Rapport annuel de la CPCOQ

M. Ryan: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de la Corporation professionnelle des conseillers d'orientation du Québec pour l'exercice 1985-1986.

Le Président: Document déposé. Rapports de commissions. Dépôt de pétitions.

Cet après-midi, il n'y a pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur une question de fait personnel.

Avant de procéder à la période de questions orales, j'aimerais aviser les membres de cette Assemblée que nous aurons à procéder, immédiatement après la période de questions, à un vote qui a été reporté hier après-midi.

Egalement, M. le ministre de l'Environnement apportera un complément de réponse à une question posée par M. le député de Terrebonne il y a environ quinze jours. Je vais reconnaître une première question orale. Question principale, M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Droit de veto sur l'intervention

du fédéral dans les domaines de

juridiction provinciale

M. Johnson (Anjou): Oui, M. le Président, au premier ministre. Hier, après avoir admis qu'à toutes fins utiles il n'a pas obtenu le droit de veto pour lequel il demandait un mandat à la population dans son programme électoral, le premier ministre a élaboré un nouveau concept qui est celui du droit de dire non pour le Québec en matière de pouvoir de dépenser. J'ai quelques questions pour lui sur ce sujet.

On sait que le pouvoir de dépenser c'est la capacité pour l'État fédéral de taxer de façon illimitée, et donc de dépenser de façon illimitée, surtout, à même un déficit croissant qui est en train d'endetter l'ensemble des contribuables du Canada depuis de nombreuses années. On sait que ce pouvoir de dépenser a été utilisé par l'État fédéral depuis de nombreuses années pour faire des incursions dans les domaines de juridiction des provinces et qu'il en est résulté, à toutes fins utiles, à l'occasion, ce qu'on a qualifié de maisons de fous, de confusion, ou encore, comme le dit Maîtriser l'avenir, du Parti libéral, que c'est devenu une pomme de discorde chaque fois que le gouvernement fédéral a voulu s'en servir comme levier pour imposer aux provinces, et singulièrement au Québec, des conditions plus ou moins rigides dans l'utilisation des sommes versées.

Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il a obtenu un droit de veto sur la capacité pour le fédéral d'intervenir dans les domaines de juridiction provinciale et, deuxièmement, si ce droit de veto s'applique aux programmes existants?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je remercie, évidemment, le chef de l'Opposition d'être ici parce que d'habitude, le jeudi, il parcourt la province. J'apprécie beaucoup qu'il ait fait exception aujourd'hui. Probablement que la mobilisation générale doit aller très bien et cela lui permet d'être ici cet après-midi. Je voudrais dire au chef de l'Opposition, encore une fois - ça fait quatre fois que je le lui dis - que, dans le programme du Parti libéral - j'ai cité hier même le texte - puisqu'il a mentionné, dans sa question, que c'est un programme sur lequel nous avions été élus, c'est mentionné - dans le programme Maîtriser l'avenir - qu'il y a deux formules acceptables. Donc c'est faux, c'est absolument faux encore une fois de dire que nous n'avons pas été élus sur cette plateforme, qui a permis... Puisque le chef de l'Opposition veut parler du droit de veto, il va me permettre encore une fois de dire un mot de l'historique. Il a voulu mentionner cette question dans le préambule. C'est ma responsabilité de rétablir les faits.

Le droit de veto n'existait pas pour le Québec, y compris pour les institutions fédérales. Il n'existait que dans la formule de 7-50, c'est-à-dire sept provinces constituant 50 % de la population. Donc, ça pouvait exclure le Québec. Nous avons obtenu le droit de veto sur les institutions fédérales. Gain net. Plus que cela, dans l'ancienne formule qui existait ou dans la formule actuelle, le droit de retrait n'existe que pour l'éducation et la culture. Nous avons obtenu son extension à l'ensemble des secteurs. Deux gains nets dans les pouvoirs du Québec de pouvoir s'opposer soit par veto, soit par retrait.

M. le Président, je m'excuse. Je voulais simplement et je le ferai chaque fois que le chef de l'Opposition fera des affirmations fausses comme il l'a fait à la télévision avant-hier soir, trompant effrontément la population...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! En conclusion, M. le premier ministre. En conclusion.

M. Bourassa: Je le ferai chaque fois que ce sera nécessaire. Quant au pouvoir de dépenser, cela fait partie d'une des cinq conditions qui avaient comme objectif de limiter le pouvoir de dépenser. Le chef de l'Opposition est capable de lire comme nous tous. Il n'a qu'à lire l'amendement...

Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...et il va s'apercevoir que nous avons obtenu de nos partenaires une limitation au pouvoir de dépenser.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Johnson (Anjou): Je reviens au programme du Parti libéral, M. le Président, du conseil général du mois de juin 1985...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): ...publié quelques jours après la position constitutionnelle que le gouvernement du Québec avait alors déposée. Je lui rappelle l'article 28.10, s'il veut bien le lire: "Qu'un gouvernement libéral réclame que la nouvelle constitution reconnaisse formellement, au Québec, un droit de veto sur toutes les questions de nature constitutionnelle" et non pas un droit de retrait.

Deuxièmement, est-ce que le premier ministre est prêt à reconnaître que, dans le cas du pouvoir de dépenser, le programme de son parti dit bel et bien, à l'article 28.9.1: Que la création par le fédéral de tout nouveau programme impliquant des subventions conditionnelles aux provinces soit soumise à leur approbation, une telle approbation s'exprimant formellement dans le cadre d'une règle décisionnelle similaire à la formule d'amendement.

Est-ce que je dois comprendre que ce qu'a obtenu le premier ministre, indépendamment de ce que dit le communiqué du lac Meech, c'est que, dorénavant, avant de lancer un nouveau programme - souvent, source de confusion pour les citoyens, pour les provinces et pour les budgets, source d'augmentation des déficits, frictions administratives - le fédéral devra obtenir l'approbation de sept provinces représentant 50 % de la population?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition peut lire tous les commentateurs - il y en a plusieurs qui se sont prononcés aujourd'hui, pas nécessairement dans le sens de son analyse - qui concluent que c'est un gain très net. Nous obtenons un droit de retrait.

Le texte parle d'un droit de retrait pour des mesures qui sont en conformité avec les objectifs nationaux. J'ai dit au chef de l'Opposition, avant-hier, que c'était peut-être l'un des cinq points qui est le plus technique, là où le texte juridique - j'étais d'accord avec lui - était très important à examiner, évidemment. Dans le cas de la formule d'amendement - on vient d'en discuter tantôt - je pense qu'on peut être très clair, ainsi que dans le cas des juges pour la Cour suprême. Pour ce qui est de l'immigration, cela pourrait être complexe. Mais, dans le cas du pouvoir de dépenser, c'est une question technique. Nous nous sommes donc entendus sur des principes. Ce qui est important pour nous, c'est que si nous ne sommes pas d'accord - le Québec représente quand même 25 % de la population - avec un programme fédéral, nous avons la possibilité de nous retirer avec une juste compensation. On parle de pleine compensation, de juste compensation, de compensation raisonnable, ce sont toutes des choses dont nous allons discuter la semaine prochaine, de notre côté, avec le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, avec le ministre de l'Éducation, qui connaît bien ces questions et d'autres... Vous avez l'air d'hésiter.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! En conclusion, M. le ministre.

M. Bourassa: En tout cas, une résolution sera présentée tantôt. Nous avons l'intention d'examiner toutes les modalités de manière à satisfaire la curiosité légitime du chef de l'Opposition.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle. (14 h 20)

M. Johnson (Anjou): C'est bien gentil tout cela.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): C'est bien gentil tout cela, M. le Président, mais ce que je demande au premier ministre, c'est: Considère-t-il que ce qu'il a obtenu, et qui devrait normalement être traduit dans des textes, pour qu'on travaille sur quelque chose de sérieux, c'est la garantie que le

gouvernement fédéral ne peut plus verser, par exemple, des subventions aux institutions ou aux particuliers dans le domaine de la culture et de l'éducation?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je crois que nous avons déjà donné notre point de vue. Il est évident qu'il reste toujours la possibilité, pour la fiscalité et, étant donné que nous vivons dans une fédération, il est assez difficile d'empêcher le gouvernement fédéral d'agir sur le plan fiscal, cela s'est déjà fait. Sur le plan des institutions, nous avons eu l'occasion de rétablir les faits à l'occasion d'une déclaration qui aurait été faite, il y a quelques jours, et qui, d'ailleurs, a été plus ou moins corrigée par M. Murray, hier, dans un débat au Sénat, où il a dit clairement que, dans cet accord, le gouvernement du Québec obtenait des pouvoirs additionnels très importants. Nous sommes actuellement à discuter avec nos partenaires pour la rédaction d'un texte juridique couvrant tous ces angles et pour lequel nous aurons une discussion très utile, la semaine prochaine.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Johnson (Anjou): Je veux bien, M. le Président, que le premier ministre nous dise qu'il a obtenu bien des choses, sauf le droit de veto, dans ces questions fondamentales, mais ma question au premier ministre -avant qu'on ait les textes, et dans la mesure où M. Murray ne semble pas dire la même chose à Toronto qu'à Ottawa ou quand il parle en français ou en anglais - est celle-ci: Pourrait-on savoir si l'entendement du premier ministre à l'occasion de cet accord préliminaire qui, semble-t-il, est en train de donner lieu à une deuxième négociation constitutionnelle... Le premier ministre pourrait-il nous dire s'il considère que, dorénavant, le gouvernement du Québec devra donner son approbation pour les versements faits à des individus dans les secteurs de l'éducation et de la culture ou à des institutions dans les secteurs de l'éducation et de la culture.

M. Bourassa: M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je viens de répondre au chef de l'Opposition. Il y a toutes sortes d'interprétations qui peuvent être données. Vous avez, d'un côté, M. Turner et M. Broadbent qui disent que cela met en danger les principes de répartition de la richesse au Canada. Il y en a d'autres, par ailleurs, qui disent qu'il faut aller dans ce sens ou cela pourrait ne pas avoir des résultats concrets.

Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que nous avons obtenu comme principe que pour un nouveau programme nous pouvons - c'est quand même écrit clairement dans le texte - obtenir un droit de retrait. C'est quand même un gain net. C'est la première fois depuis 23 ans que nous obtenons un tel résultat.

C'est évident, comme je le dis au chef de l'Opposition, qu'il y a les pouvoirs fiscaux du gouvernement fédéral et c'est dans ce contexte que nous examinons actuellement une formule qui protégerait les intérêts du Québec et nous permettrait de nous retirer des programmes avec lesquels nous ne serions pas d'accord et que nous voudrions remplacer par des mesures ou des initiatives qui seraient conformes en même temps aux objectifs nationaux.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le premier ministre ne reconnaît pas que c'est un peu de la nature d'une espèce de droit de stationnement sur la lune, ce qu'il est en train de nous dire dans la mesure où...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le premier ministre ne reconnaît pas qu'en pratique, une des sources de la grande inefficacité de l'État québécois à l'égard notamment de la réinsertion des bénéficiaires d'aide sociale sur le marché du travail, à l'égard de la formation professionnelle, à l'égard des politiques de main-d'oeuvre, ce qui a fait l'objet d'un accord depuis vingt ans au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre entre les représentants patronaux et syndicaux, qu'une des sources fondamentales d'inefficacité du système québécois à cause du système fédéral, c'est précisément la présence de l'État fédéral dans tout le secteur de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu et qu'il n'a rien obtenu là-dessus?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, ça fait 25 ans qu'il y a les programmes conjoints, 25 ans qu'on discute au Canada du pouvoir de dépenser avec tous les gouvernements, une demi-douzaine de gouvernements. C'est la première fois que nous pouvons réussir. De la part de nos partenaires, cela n'a pas été nécessairement facile et on voit actuellement les réactions des différents chefs de parti au niveau fédéral. C'est la première fois que

nous pouvons réussir au Canada, qu'une province est capable d'obtenir de l'ensemble des autres provinces et du gouvernement fédéral un accord pour limiter le pouvoir de dépenser. C'est quand même un gain net que vous n'avez pas été capables de réussir, quelle que soit la situation politique où vous vous trouviez. Que vous ayez été en position de force ou en position de faiblesse, vous n'avez jamais été capables d'obtenir quoi que ce soit dans ce secteur. Nous, nous le faisons.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Johnson (Anjou): Plutôt que de parler de l'histoire ou de la préhistoire, est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte qu'il a manqué une occasion extraordinaire puisque, semble-t-il, il est arrivé un peu comme un surhomme au lac Meech...

Une voix: Un matamore.

M. Johnson (Anjou): ...qu'il a manqué une occasion extraordinaire de permettre au Québec d'avoir des moyens de développer des politiques d'emploi intelligentes pour les citoyens du Québec, en obtenant que le fédéral renonce à sa présence dans ce secteur et fasse les transferts au Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je ne suis pas arrivé en surhomme au lac Meech. Je crois que je n'ai pas, de mon côté, ce genre de prétention.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: Je dis au chef de l'Opposition que la position de négociation...

Le Président: Â l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: ...du Québec était liée aux concessions, aux abandons que vous aviez faits. C'était la position de négociation du Québec. Pas de droit de veto sur les institutions fédérales, pas de droit de retrait. Plusieurs années de fonctionnement du système fédéral, sans que l'on puisse dire que, de façon générale, il y avait eu dans l'ensemble du Canada des soubresauts parce que le Québec ne faisait pas partie de l'entente constitutionnelle. Il y avait le risque énorme qu'au fil des ans la situation du Québec soit banalisée, en ne faisant pas partie de l'entente constitutionnelle. Donc, on n'arrivait pas là en surhommes. On arrivait avec quelques atouts qui nous ont permis, parce qu'ils ont été bien utilisés - la qualité de l'équipe, notamment dirigée par le ministre délégué aux Affaires intergouverne- mentales canadiennes, et des hauts fonctionnaires d'une exceptionnelle qualité, qu'a connus le chef de l'Opposition - alors avec une équipe comme celle-là et quelques atouts, un certain sens de la synchronisation des événements nous ont permis de récolter...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: ...nous ont permis d'obtenir des gains exceptionnels pour l'avenir du Québec. C'est cela qu'on a obtenu.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je dirai au premier ministre, qui évoque la présence de hauts fonctionnaires que j'ai connus, que ce qui fait la qualité d'un haut fonctionnaire - Dieu sait que M. Louis Bernard et Me Jean-K. Samson sont de remarquables hauts fonctionnaires - c'est sa compétence, sa loyauté à exécuter des mandats. Dans le cas présent, le problème c'est celui qui donnait les mandats.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que c'est en principale ou en additionnelle? En additionnelle, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, est-ce que le premier ministre est en mesure, toujours relativement au pouvoir fédéral de dépenser, de confirmer la déclaration du sénateur Murray qui indiquait qu'il y avait bien des moyens de contourner les limites au pouvoir de dépenser du Parlement fédéral, en particulier les subventions directes aux individus et aux institutions? Concrètement, est-ce que le Québec pourra exercer son veto, empêcher le gouvernement fédéral, par exemple, de verser des subventions aux bibliothèques publiques ou de verser des subventions aux organismes d'éducation populaire...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brassard: ...dans le secteur de la culture et de l'éducation? Est-ce que...

Le Président: Votre question, s'il vous plaît! Votre question, s'il vous plaît!

M. Brassard: Vraiment!

Le Président: Vous m'aviez dit en additionnelle, M. le député de Lac-Saint-Jean, et vous avez dépassé de beaucoup le temps accordé pour une question additionnelle. Je m'excuse. Je reconnais que depuis toujours j'ai accordé des discrétions au chef de

l'Opposition et au premier ministre, mais peu importe le sujet, je voudrais qu'on respecte les règles établies depuis le début.

M. Brassard: La règle établie...

Le Président: Ne recommencez pas la question.

M. Brassard: Sur la question de règlement, M. le Président, ma question avait une forme interrogative d'un bout à l'autre.

Le Président: Oui, mais là... Elle est très... oui, mais ce n'était pas une question principale, c'était une question additionnelle.

M. Brassard: II n'y avait pas de préambule non plus.

Le Président: Vous avez dépassé. (14 h 30)

M. Brassard: Est-ce que le Québec va pouvoir exercer son veto, empêcher le gouvernement fédéral de verser des subventions aux individus, aux institutions, par exemple, dans le cas des bibliothèques publiques ou des organismes d'éducation populaire, etc.? Est-ce que vous allez pouvoir empêcher le fédéral d'empiéter dans des domaines de juridiction exclusive du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je voudrais répondre au député de Lac-Saint-Jean - et en l'occurrence un peu le frappeur de relève du chef de l'Opposition - que les propos du sénateur Murray ont été, comme je l'ai dit tantôt au chef de l'Opposition, corrigés par lui-même en disant que le Québec obtenait des gains additionnels très importants.

S'il lit l'amendement comme tel - c'est dit que dans les juridictions de nature provinciale, c'est-à-dire l'article 92 - il va constater que nous avons un droit de retrait. C'est un texte constitutionnel, cela a des implications juridiques importantes, c'est évident que nous avons notre programme. Il y a une tradition au Québec qui s'est réalisée à quelques reprises. On pense, par exemple, à la lutte de M. Lesage dans le cas des régimes de retraite.

Nous voulons et nous travaillons actuellement un texte juridique qui nous permet de consacrer dans la constitution ces gains très importants, mais en même temps, M. le Président, de tenir compte de la structure fédérale dans laquelle évolue le Québec et qui lui donne des avantages indéniables.

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Taillon, en principale.

Textes juridiques de l'entente du lac Meech

M. Filion: En principale, M. le Président, mais encore dans le dossier constitutionnel. Il est établi que le premier ministre, dans ce dossier, agit sans mandat réel de la population, avec une précipitation injustifiée, compte tenu du délai de trois ans contenu à la loi de 1982. D'autre part, l'accord lui-même est rédigé sous la forme d'un communiqué de presse - il faut le faire, en matière constitutionnelle - à tel point que toutes les interprétations contradictoires ont actuellement cours au Canada.

M. Mulroney rassure le Canada anglais: Québec n'a rien gagné qu'il n'avait déjà; le premier ministre du Québec corrige les propos...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

Une voix: En principale...

Le Président: Allez, allez:

M. Filion: ...le premier ministre corrige les propos de M. Murray. Finalement, c'est le Toronto Star d'avant-hier, dans son éditorial, qui résume le mieux ce qui se passe et l'état de confusion actuelle. Après avoir fait le tour des contradictions, il conclut: "But if Bourassa is right, they are wrong." "They", c'était M. Mulroney et M. Peterson, premier ministre de l'Ontario.

M. le premier ministre, la population du Québec veut savoir qui dit vrai, et quel est, au juste, l'accord du lac Meech. Par respect pour les parlementaires, pour les experts, pour la population du Québec, le premier ministre ne croit-il pas qu'il est indécent de tenir une commission parlementaire sans avoir les textes juridiques servant de base en droit constitutionnel?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je demanderais au député de Taillon, si ce n'est pas trop lui demander, de me faire parvenir la copie de l'éditorial du Toronto Star. Je ne m'attendais pas que les députés du Parti québécois citent le Toronto Star cet après-midi. J'apprécierais...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Rochefort: ...

M. Bourassa: Je dirais au député de Gouin que ce n'est pas moi qui ai parlé du Toronto Star. Il a toujours tendance à être

agité un peu, lors de la période de questions.

Le Président: À la question... S'il vous plaît!

M. Bourassa: Je demande simplement au député de Taillon...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: ...qui cite le Toronto Star, de nous faire parvenir l'éditorial. On pourra en citer, des éditoriaux. Je pourrais vous citer, aujourd'hui, MM. Léon Dion, Marcel Adam, Gérald Beaudoin et d'autres, et je ne suis pas sûr, si vous aviez eu le temps de les lire, que vous auriez posé les mêmes questions.

M. le Président, nous avons décidé de tenir une commission parlementaire de six jours. On parlait de trois jours et on a prolongé a six jours, le plus longtemps possible avant la conférence constitutionnelle des premiers ministres. Télédiffusée. On ne craint pas de discuter ouvertement à la télévision, comme nous le faisons, ici, à l'Assemblée nationale. On n'a pas l'impression qu'à ce jour cela nous a nui plus que normalement. On ne craint pas du tout de faire la télédiffusion des travaux de cette commission parlementaire.

Je dirai au député de Taillon, comme je l'ai dit publiquement au chef de l'Opposition mardi - ce sont toujours les mêmes questions qu'on répète constamment - que je comprenais son intérêt pour obtenir les textes juridiques. Je viens de lui dire que, notamment, dans le cas du pouvoir de dépenser, la question est complexe et importante et c'est un enjeu majeur pour l'équilibre du fédéralisme au sein du Canada. Je comprends qu'on doive avoir un texte de manière à pouvoir nous informer, mais au niveau des principes, je crois qu'on peut commencer la commission parlementaire. Nous soumettrons les textes juridiques le plus rapidement possible. On peut commencer la commission parlementaire. Il y a des principes très importants tels que la question du droit de veto, la nomination des juges.

Le Président: En conclusion.

M. Bourassa: Je crois qu'il y a lieu...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: On va discuter tantôt de la formation de la commission. Je crois qu'il y a lieu, M. le Président, de commencer cette commission. On a suffisamment de matière et la venue d'experts pourra en justifier pleinement et totalement l'utilité même si, au départ, on n'a pas tous les textes juridiques en cause.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: M. le Président, est-ce que le premier ministre reconnaît, étant donné l'importance capitale du dossier constitutionnel, qu'on ne peut pas convier les experts, les intervenants du Québec à une commission parlementaire sans avoir le texte même, surtout qu'en droit constitutionnel -le premier ministre est avocat, je le lui rappellerai, cela ne paraît pas beaucoup -...

Des voix: Oh!

M. Filion: ...les textes, les concepts, les mots ont une importance extrême. En ce sens, je rappelle...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Filion: ...au premier ministre, s'en souvient-il? que l'importance des mots, qu'il a soulignée en Chambre mardi, est telle qu'il faut, pour commencer une commission parlementaire, pour faire des travaux productifs, que nous ayons d'abord le contrat avant de le signer.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, le député de Taillon sait fort bien que nous avons soumis à l'occasion des propositions, pas des orientations générales très vagues. Si nous examinons l'un des cinq exemples, notamment le cas du droit de veto, tout est spécifié: les secteurs, à quelles institutions s'applique le droit de veto. Nous avons eu la chance de pouvoir nous entendre sur des propositions constitutionnelles. Je lisais le projet d'accord constitutionnel du Parti québécois - vous citez notre programme, on peut citer le vôtre - dans lequel on voit les hommages que rend le chef de l'Opposition au premier ministre du Canada pour sa volonté de régler le problème constitutionnel. Nous avons réussi à le faire. Nous avons des textes très précis; peut-être pas des textes juridiques ou très détaillés, mais très précis. Je pense qu'il y a un intérêt évident pour tous à discuter les principes et les modalités qu'on trouve dans ces textes. Lorsque nous aurons les textes juridiques, parce qu'il y en a certains, on le sait, qui doivent être discutés plus en détail, nous pourrons poursuivre le travail de la commission. Mais je ne comprends pas du tout l'attitude du député de Taillon et celle de l'Opposition de ne pas vouloir voir l'utilité de cette commission parlementaire. Est-ce que cela va être utile de prendre connaissance de ces questions? On dirait qu'ils veulent absolument...

Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...des mesures dilatoires pour essayer de nous empêcher de récupérer ce qu'ils ont perdu.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Johnson (Anjou): En additionnelle, M. le Président. Il me semble que la question est simple. Je comprends que le premier ministre n'est jamais capable de répondre simplement. Est-ce que le premier ministre ne reconnaît pas...

Une voix: Sauf...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Johnson (Anjou): ...qu'en matière de droit constitutionnel, le libellé et les textes sont importants? Achèteriez-vous une maison sans la visiter? Hein? Je comprends que vous êtes capable de la vendre sans regarder, par exemple. (14 h 40)

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): Plutôt que de nous faire de longs exposés et des...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): ...placotages répétés, est-ce que le premier ministre peut prendre l'engagement clair, aujourd'hui jeudi, que, mardi, au moment de l'ouverture de nos travaux, nous aurons en commission parlementaire, l'ensemble des textes juridiques qui vont engager l'avenir du Québec?

Des voix: C'est cela.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Qui parle de vendre la maison, M. le Président, quand on voit les abandons historiques qui ont été faits par l'ancien gouvernement?

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: S'il y a un parti qui est mal placé dans l'histoire du Québec pour faire des reproches sur la défense des intérêts, c'est bien celui qui assume l'Opposition aujourd'hui et probablement pour fort longtemps. J'ai répondu au chef de l'Opposition que nous avons suffisamment de matière, de textes, d'affirmations et de données, d'ailleurs qui sont commentés par les plus grands spécialistes ces jours-ci. On n'a qu'à examiner les journaux d'aujourd'hui. Ils n'attendent pas les textes juridiques finaux, ils sont prêts à assumer la responsabilité de leurs commentaires, quitte à faire des suggestions. Alors, je ne vois pas pourquoi...

Une voix: ...

M. Bourassa: Forcément. Je veux dire, ils peuvent. J'ai dit qu'à la commission parlementaire, on va permettre de faire des suggestions. J'espère que l'attitude de l'Opposition ne sera pas uniquement négative. Ce ne sera pas nouveau, mais on s'attend que, sur des questions comme celle-là, elle fasse preuve d'un minimum de responsabilités. Je dis au chef de l'Opposition que nous avons actuellement suffisamment de matière. Si nous pouvons, pour mardi prochain, terminer tous les textes juridiques, nous allons le faire, mais il peut arriver qu'il en manque quelques-uns. Mais nous aurons quand même suffisamment de matière, simplement avec les décisions du lac Meech, pour pouvoir occuper le chef de l'Opposition. Je ne vois pas en quoi il maintient cette manoeuvre de diversion. Alors que nous avons tout le nécessaire pour faire oeuvre utile pour l'avenir du Québec, le chef de l'Opposition s'acharne sur des modalités, alors qu'on a deux semaines pour discuter de ces questions.

Le Président: M. le député de Lévis, en principale.

L'économie découlant de la modification des allocations de disponibilité

M. Garon: M. le Président, hier, j'ai eu l'occasion de poser une question au ministre des Finances...

Une voix: Avant-hier.

M. Garon: Avant-hier. Après avoir révisé les chiffres...

Une voix: ...une bonne question sur l'indépendance.

M. Garon: ...concernant l'allocation de disponibilité... Ne vous énervez pas, il n'y a personne qui pense que le premier ministre est un matamore qui fait face à dix premiers ministres forts de même, vous savez.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Garon: Alors, j'aimerais...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: En principale, M. le député de Lévis, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Avant-hier, le ministre des Finances, qui n'avait peut-être pas eu le temps de lire complètement le discours sur le budget qui lui provenait du bureau du premier ministre, avait l'air un peu mêlé dans l'allocation de disponibilité. Quand on regarde les statistiques pour 1985, on se rend compte qu'il y avait 255 860 familles qui avaient un enfant de moins de six ans au Québec, 96 917 familles qui avaient deux enfants de moins de six ans, seulement 9742 familles qui avaient trois enfants de moins de six ans, et quelques centaines de familles qui avaient plus de trois enfants de moins de six ans.

Le Président: Votre question.

M. Garon: Cela veut dire que 363 219 familles avaient au moins un enfant de moins de six ans. On a appris dans le discours sur le budget que le ministre des Finances a coupé 200 $ à ces premiers enfants, puisque l'allocation passe de 300 $ à 100 $ et que ces chèques qui représentent des chèques... Il s'agit de multiplier 363 000 par 200 $. Cela veut dire plus de 72 000 000 $. J'aimerais demander au ministre des Finances comment il se fait qu'il arrive en disant que la mesure, dans son discours sur le budget, va s'appliquer à 1987, mais qu'il va économiser seulement 48 000 000 $ alors qu'il va couper 200 $ à 363 000 familles?

J'aimerais que le ministre des Finances nous dise combien il va économiser en 1987 avec ces changements, combien il va économiser avec l'allocation de disponibilité qu'il a baissée de 300 $ à 100 $ pour le premier enfant?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, voilà justement le genre de questions qui a été prévu pour les travaux en commission.

Des voix: Ah bon:

M. Levesque: Pourquoi notre règlement...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque: ...prévoit-il un débat de quinze heures ici à l'Assemblée nationale, suivi d'une autre période de travaux de dix heures en commission? Justement pour pouvoir répondre d'une façon pertinente et exacte lorsque l'on entre dans les détails comme le fait présentement le député de Lévis. Mais, pour lui répondre immédiatement, je vais lui dire que si nous avons touché aux allocations de disponibilité...

M. Jolivet: ...l'ancien gouvernement. M. Levesque: Vous l'avez dit! Des voix: Ha! Ha! Ha! Ha! Ha! Ha! Ha! Le Président: À l'ordre!

M. Levesque: C'est le député de Laviolette à qui on ne peut rien cacher, qui l'a deviné, M. le Président. Il dit: C'est la faute de l'ancien gouvernement: Et comment a-t-il pu ainsi arriver à dire exactement la vérité, M. le Président?

Le Président: En conclusion. En conclusion. En conclusion, M. le ministre des Finances.

M. Levesque: En effet, M. le Président, j'ai l'honneur et le privilège de travailler aujourd'hui avec des gens qui ont également travaillé avec l'ancien gouvernement et, sans vouloir commettre d'indiscrétion, je ne puis que confirmer ce que vient de dire le député de Laviolette. Mais on n'a pas voulu, évidemment, donner suite à cela à la toute dernière minute. Pourquoi? Parce qu'on était à la veille, veille, veille d'un appel au peuple. Mais pourquoi? Il y avait une logique là-dedans. C'est qu'on venait d'augmenter les exemptions personnelles - on se rappelle cela - et on avait pensé, en augmentant les exemptions personnelles, qu'on pouvait enlever l'allocation de disponibilité. Il ne faut pas oublier que l'allocation de disponibilité n'est qu'une alternative, parce qu'on a droit soit à cela, soit aux soins de garde pour les enfants.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Levesque: C'est pour cela, M. le Président, que j'aimerais entrer dans cette question-là, mais j'attends de rencontrer le député de Lévis en commission parlementaire pour le confondre bien davantage sur cette question.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: M. le député de Lévis, en additionnelle. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: M. le Président, j'aimerais demander au ministre des Finances qui dit qu'il avait prévu cette mesure dans son dernier budget de l'an dernier, du 1er mai 1986 - il doit être un peu au courant - de nous dire pourquoi il veut couper 72 000 000 $ en chèques aux mères de famille qui ont un enfant de moins de six ans - quel que soit le nombre - soit 200 $ par enfant de moins de six ans? C'est facile, 200 $ pour 363 000 familles. Comment arrive-t-il à nous dire que ça ne coupera que 48 000 000 $ alors qu'on arrive, en multipliant le nombre d'enfants par 200, à 72 000 000 $? Si le ministre est au courant, qu'il nous donne donc une petite idée plutôt que d'attendre la commission parlementaire, parce que les mères de famille sont intéressées de savoir pourquoi elles seront coupées de 72 000 000 $.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, je m'en tiens exactement aux chiffres qu'il y a dans le budget et je demanderais au député de Lévis d'être extrêmement prudent lorsqu'il avance des chiffres, des dates ou quoi que ce soit. Je relevais encore récemment quelque chose qu'il disait, en posant une question hier ou avant-hier, que la cote Moody's de la province avait été augmentée à l'époque de Pâques...

Une voix: ...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque: ...1986, avant le budget. Or, pourquoi le député de Lévis a-t-il dit de pareilles - j'allais dire quelque chose de non parlementaire - pourquoi a-t-il fait ça, alors que c'est le 13 août que Moody's l'a fait et cela à cause justement du budget présenté le 1er mai par le gouvernement actuel.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: En conclusion, M. le ministre. (14 h 50)

M. Levesque: Je dis au député de Lévis d'être extrêmement prudent lorsqu'il avance des chiffres. Qu'il ait l'humilité de penser que les fonctionnaires du ministère des Finances, lorsqu'ils ont donné ces chiffres en annexe, il y a bien plus de chances que ces chiffres soient exacts que le genre de chiffres avancés par le député de Lévis qui -j'en ai des exemples; si on avait le temps, je lui donnerais au moins trois, quatre autres exemples où il a erré d'une façon... Je ne dis pas que c'est volontaire, mais je lui demande au moins d'avoir un minimum de prudence lorsqu'il avance des chiffres.

Le Président: M. le député de Lévis, question additionnelle.

M. Garon: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre des Finances s'il a lu l'article du journaliste Jean-Jacques Samson, du Soleil, qui se référait au journaliste de Radio-Canada, Miville Tremblay, qui avait su, lors d'un voyage à New York, au mois de février 1986, que la cote du Québec serait relevée, qu'il savait, dès le mois de février 1986, que la cote du Québec serait relevée?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, qui ignorait l'élection du Parti libéral? C'est triste!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais reconnaître maintenant un député de la formation ministérielle. Question principale, M. le député de Richmond.

Refus de la démission du ministre des Finances

M. Vallières: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. À la suite des événements de jeudi dernier qui ont entraîné le dépôt du budget le même jour, est-ce que le premier ministre peut nous indiquer pourquoi il aurait refusé la démission du ministre des Finances?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je ne vois pas pourquoi l'Opposition s'oppose à ce que je réponde à cette question. Avec toutes les accusations qui ont été faites encore, il y a quelques minutes, par la députée de Johnson, très charmante personne par ailleurs, mais, dans ses propos, il y a quelques minutes, avec M. Pierre Pascau, je l'ai déjà trouvée meilleure.

M. Chevrette: ...s'il vous plaît!

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, vous aurez remarqué qu'on aurait pu se lever

probablement à quatre ou cinq occasions pour faire respecter l'article 79. La question est claire, M. le Président. Cela vient de leur côté. J'espère qu'on va pouvoir le faire respecter. Il n'y a pas eu de préambule. Ce sont les questions pour lesquelles il a refusé la démission. Quant aux ritournelles qu'il a apprises des spécialistes, avant, pour venir à bout de les passer toutes - il n'avait pas réussi à les capsuler toutes jusqu'à maintenant - il me semble qu'il pourrait nous en faire part un autre jour. La farce est finie aujourd'hui. Qu'il réponde aux questions précises. Voyonsl

Le Président: M. le premier ministre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: Un peu de sang froid. Je comprends vos problèmes, mais, quand même! Je veux dire au whip en chef, que la complexité croissante de l'administration publique explique la multiplication de ces accidents de parcours. Ce n'est pas le premier qui arrive. Il y en a eu un ici, il y a quelques années, un à Toronto, un à Ottawa. Donc, ce n'est pas nouveau. Je crois que, à la lumière de cette complexité qui incite les ministres des Finances et leurs collègues - j'ai moi-même assisté et participé à une dizaine de réunions avec une dizaine de fonctionnaires - la complexité croissante qui incite et justifie les communications avec différents milieux, je crois que cela doit nous inciter à actualiser les limites de la responsabilité du ministre des Finances dans le cas du secret budgétaire.

M. le Président, j'ai parlé d'actualiser les limites du secret budgétaire et de la responsabilité du ministre des Finances. Si le ministre des Finances devait être tenu responsable, alors que la formation et la réalisation du budget suppose toute une série de consultations, de la moindre fuite ou de la fuite du budget, qui serait prêt à jouer ce rôle?

Je crois que je peux répondre à une question soulevée de façon très importante il y a quelques jours.

Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: C'est pour ces raisons que j'ai refusé la démission du ministre des Finances et surtout celle de Gérard D. Levesque, vu la qualité du budget qu'il nous a fourni. Je crois qu'on ne peut certainement pas conclure que ce budget a été un budget impopulaire. Juste pour terminer, M. le Président, en quelques secondes, on a dit que la fuite aurait été organisée. Mais comment penser que, pour un budget qui diminue les impôts de dizaines de milliers de personnes, ceux des bas revenus où il y a des politiques nouvelles en matière de recherche et de développement, qui réduit les taxes que vous aviez imposées sur les vidéo cassettes...

Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...comment penser que nous aurions voulu camoufler ce budget par une fuite précipitée?

Le Président: Â l'ordre, s'il vous platt! En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: En terminant, M. le Président, je suis fier de la décision qui a été prise. La raison - quelques phrases seulement - de ce secret budgétaire, c'est d'empêcher qu'il y ait des bénéficiaires. Nous avons agi immédiatement pour empêcher qu'il y ait des bénéficiaires de cette fuite.

Le Président: À l'ordre, s'il vous platt!

M. Bourassa: C'est pourquoi...

M. Chevrette: Question de règlement.

Le Président: Un instant! C'est la première question ministérielle cette semaine. Je pense que... À l'ordre! Si vous me permettez - s'il vous plaît - sur la question de règlement! Sur la question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, cela aurait beau être la première, et cela aurait beau être le fait qu'il n'y en ait pas eu du tout, cela ne justifie pas que le premier ministre prenne quatre minutes pour répondre à une question plantée. Il y a toujours, M. le Président, l'ombre de la queue du bon sens qui doit marcher dans cette Chambre. Cela n'a plus de bon sens. Ce n'est même plus, M. le Président, une question de latitude, comme le décrivait un journaliste. Ce n'est même plus une question de laisser-aller. On dirait qu'il y a deux personnes en Chambre: vous qui écoutez et M. Bourassa qui parle, alors que nous autres on a le droit de parler.

Une voix: Deux poids, deux mesures.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur la même question de règlement. Sur la même question de règlement.

M. Gratton: II me semble, M. le Président, que le leader de l'Opposition a un rôle particulier à jouer ici à l'Assemblée nationale, soit celui de respecter intégralement le règlement. Il peut se plaindre d'un accroc au règlement comme il vient de le faire, mais il me semble qu'il doit le faire dans le respect du règlement en utilisant des termes qui sont parlementaires et en exerçant un minimum de retenue. M. le

Président, ce genre de propos à votre endroit ou à l'endroit de tout membre de l'Assemblée nationale, quant à moi, n'est pas justifié et n'a pas sa place ici à l'Assemblée nationale.

Si quiconque en cette Assemblée, incluant le leader de l'Opposition, a des reproches à faire, des blâmes à adresser, le règlement prévoit des dispositions très spécifiques disant comment le faire, notamment l'article 315 et les articles suivants. Il me semble qu'il est inacceptable, surtout de la part d'un leader parlementaire de l'Opposition, qu'on fasse ce genre d'intervention qui se répète tous les jours depuis quelque temps.

Le Président: M. le chef de l'Opposition. M. le chef de l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): M. le Président... Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): Sur la question de règlement?

Le Président: Sur la même question de règlement, M. le chef de l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, vous savez que sur ces questions, je suis un homme tolérant. J'ai eu l'occasion...

Le Président: Je pense que c'est très important. Je vous demanderais, s'il vous plaît... J'ai accordé la parole au chef de l'Opposition, je voudrais l'entendre.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur ces questions, vous savez que je suis un homme tolérant. Vous avez été à même d'ailleurs, à l'occasion, de l'apprécier. Je vous dirai, M. le Président, à la défense de mon collègue et contrairement à ce que vient de dire le leader du gouvernement, que si on veut faire planer sur cette Assemblée, au moment où elle doit décider des questions constitutionnelles, une diversion autour...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! (15 heures)

M. Johnson (Anjou): ...une diversion, M. le Président, autour de la confiance de cette Opposition à votre égard, j'avertis tout de suite le leader du gouvernement que nous ne marcherons pas dans une telle manoeuvre et que vous savez, M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): ...que ces circonstances vous donnent d'autant plus de ce que vous appelez votre latitude. J'avertis tout de suite le leader du gouvernement et le premier ministre que nous discuterons ici...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson (Anjou): ...indépendamment des scénarios qu'ils veulent créer ou inventer ou des situations qu'ils voudraient provoquer, de ce qui est important.

Le Président: Sur la même question de règlement, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: ...je voudrais dire...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...au chef de l'Opposition que je n'ai pas l'impression, jusqu'à présent -je ne peux pas prévoir l'avenir en politique -que c'est de notre côté qu'on a besoin de diversion sur le débat constitutionnel.

Pour compléter ma réponse sur le budget, parce que je n'ai pas eu de questions de l'Opposition, alors qu'on a....

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse, M. le premier ministre.

Le Président: M. le premier ministre...

M. Chevrette: M. le premier ministre, je m'excuse.

Le Président: ...on est sur une question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Le respect des règles...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que vous êtes toujours sur la même question de règlement, M. le leader de l'Opposition?

M. Chevrette: M. le Président, il y a un minimum auquel l'Opposition a droit comme respect des règles. Vous nous avez fait venir, M. le Président, les deux leaders ensemble. Vous nous avez donné des directives précises quant aux minutes à respecter pour ce qui est des réponses. Vous avez même indiqué, en ce qui concerne les minutes à respecter quant aux questions et réponses des deux chefs, une certaine latitude, mais vous l'avez chiffrée, vous

l'avez quantifiée. Cela ne devait, en aucun temps, dépasser deux minutes et demie, trois minutes pour un chef. C'est vous-même qui me l'avez dit, M. le Président.

Je veux bien être respectueux des règles et faire la courbette devant vous. Cela me ferait plaisir de le faire. Mais, mon rôle, c'est de faire respecter, non seulement le règlement et la lettre du règlement, mais aussi, et à plus forte raison, vos propres directives que vous nous transmettez. Comment voulez-vous que je ne me lève pas quand cela fait, à une question ministérielle, quatre ou quatre minutes et demie que le premier ministre, à une question plantée, est en train de conter l'histoire, de répondre à la députée de Johnson, de faire une allusion au député de Lévis, se permettre n'importe quoi. Alors que vous savez pertinemment que l'article 79 de notre règlement dit ceci: à une question précise, il faut que la réponse se rapporte au sujet précis.

Plusieurs bouts de son intervention n'avaient même pas l'ombre d'un rapport à la question, et vous le laissez aller quand même. On n'est pas les seuls à se rendre compte de cela. Vous avez eu des articles de journaux disant que la pertinence des réponses par rapport aux questions posées, c'était devenu un spectacle. L'Assemblée nationale veut bien respecter l'article 77, même vous appuyer quand vous allez reprocher à l'Opposition que les questions suscitent des débats, mais vous devez, à mon point de vue, M. le Président, avoir la même rigueur pour les réponses. Quand on se met à parler de la pluie... Dans le relevé...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! En conclusion, s'il vous plaît!

M. Chevrette: ...du règlement...

Le Président: En conclusion, s'il vous plaît!

M. Chevrette: ...vous regarderez, il y a un exemple concret qui vous est donné. C'est vous qui nous avez fait publier ce beau petit document. Je lisais, par exemple, qu'à un député, qui posait une question portant sur le budget fédéral et son impact au Québec, le ministre des Finances commence sa réponse en invoquant le programme du Parti libéral. On dit: Cela n'a ni queue ni tête, cela n'a pas de lien. Donc, non-pertinence, déclaré hors du sujet. C'est la jurisprudence de l'application. On a toléré...

Je vais vous faire parvenir, pour votre information, le relevé de toutes les réponses et de toutes les questions adressées au premier ministre depuis le début de la session. Si vous me trouvez une question parmi toutes celles qui ont été posées au premier ministre qui ne déroge pas à l'article 79 - les réponses, dis-je - vous allez être un des seuls. On l'a fait vérifier, il n'y a pas une réponse aux questions posées par l'Opposition qui est relative à la question qui a été posée. Il me semble que c'est cela qu'on demande comme respect. N'oublions pas que le respect engendre le respect.

Le Président: Sur la question de règlement seulement, M. le premier ministre, parce que la période de questions est terminée.

M. Bourassa: Si le leader de l'Opposition veut garder un minimum de crédibilité dans sa fonction, il ne devrait pas déformer les faits. Si j'ai mentionné la députée de Johnson, c'est qu'on parlait du secret budgétaire et que, à 13 heures cet après-midi... M. le Président, quand même!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: On a le droit de rectifier les faits. La députée répétait des attaques sur le secret budgétaire. Il n'y a pas eu de questions de l'Opposition sur le secret budgétaire. C'est une question fondamentale dans notre système politique. Je comprends que vous fassiez preuve d'une certaine latitude. Je crois que j'ai dit que, dans le cas du secret budgétaire actuellement, tout le monde commence à réévaluer cette question. J'ai dit, M. le Président, que la raison d'être du secret budgétaire, c'est les avantages de la suite. Il n'y a pas eu d'avantages de la suite parce que le ministre a fait son discours le jour même. Voilà pourquoi il doit rester à son poste en plus de toutes les autres raisons exceptionnelles dont la qualité du budget et sa propre compétence.

Des voix: Bravo!

Le Président: Sur la question de règlement, telle que posée par M. le leader de l'Opposition et sur laquelle sont intervenus M. le chef de l'Opposition et M. le leader du gouvernement. Je ferai remarquer que lorsque vous êtes intervenu, M. le leader de l'Opposition, ce ne faisait pas quatre minutes et demie, mais trois minutes et cinq secondes que M. le premier ministre répondait à la question. Ce sont... Je m'excuse là... Si on met en doute les greffiers, alors là... À l'ordre, s'il vous plaît! On m'a dit trois minutes et cinq secondes et on vient de m'apporter la confirmation. C'est le temps qui va apparaître également au Journal dés débats.

Dans un deuxième temps, depuis que je suis président - et mes prédécesseurs l'ont fait également, - j'ai donné une latitude très large au premier ministre et au chef de l'Opposition, ce que je tente, avec la

collaboration de tous, de faire respecter. À plusieurs reprises, des deux côtés de cette Chambre, on a dépassé le temps, non pas le chef de l'Opposition pour qui c'est régulier et pour M. le premier ministre également. Mais, pour tous les autres intervenants, je tente de faire respecter le temps.

J'aimerais vous faire remarquer ceci: C'est la première fois dans toutes les Législatures que la formation ministérielle a sa question principale après une 4e question principale de l'Opposition et ce, depuis plus longtemps que ma décision rendue en mai 1986.

Dans un troisième temps, c'est la première fois, je pense, qu'un président, dans le but d'accélérer la période de questions, impose un minimum de temps aux deux formations politiques.

J'aimerais vous rappeler que, dans la Législature qui nous a précédés, en 1983, 1984 et 1985, je pourrais vous citer plusieurs périodes de questions où plusieurs ministres et certaines personnes qui sont ici, répondaient sans aucune question de règlement, sans aucune intervention d'aucun membre de cette Chambre pendant quatre minutes quelquefois, d'autres fois, trois minutes et quarante-huit secondes, d'autres fois, quatre minutes et trentre-deux secondes et il ne s'agissait pas du chef de l'Opposition ni du premier ministre.

Je veux bien, et j'ai demandé... M. le leader de l'Opposition, c'est moi qui suis allé au-devant et qui ai demandé au mois de mai, lors de ma décision sur la période de questions, dans le but de tenter d'améliorer -je m'excuse, s'il vous plaîtl - la période de questions, dans le but de permettre à l'Opposition de poser plus de questions... J'ai moi-même vérifié dans les Législatures précédentes et depuis quelques mois, nous nous sommes beaucoup améliorés quant au nombre total de questions qui sont posées ici à l'Assemblée nationale.

Je comprends très bien que, quelquefois, on ne respecte pas totalement la directive, mais je demande encore une fois, comme je l'ai fait en mai 1986, la collaboration des deux côtés de cette Chambre dans le but de bien faire fonctionner les travaux.

Peu importent les remarques... Pour répondre plus directement à votre intervention, M. le chef de l'Opposition, je n'ai pas à répondre... Si vous me permettez, pour répondre à votre intervention, M. le chef de l'Opposition, je n'ai à répondre à aucune remarque concernant la façon dont j'ai pu rendre certaines décisions ou quoi que ce soit. Je suis ici pour présider les travaux et je le fais avec la collaboration des deux côtés de cette Chambre.

Fin de la période de questions.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, mais la période de questions est terminée.

Affaire de gageure lors de la série Nordiques-Canadien

M. Chevrette: Oui. Je voudrais demander, M. le Président, d'une façon particulière... Je sais qu'on n'a pas le droit d'entrer dans cette Chambre costumé et d'avoir l'air partisan. Voudriez-vous demander au ministre des Transports, M. le Président, de nous expliquer pourquoi il est costumé puisque vous ne désirez pas que les gens puissent entrer dans cette Chambre costumés.

Le Président: La période de questions est terminée. On n'est plus à la période de questions.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends, M. le Président, qu'il y a un consentement. Je vais simplement expliquer que j'ai pris une gageure, je l'ai perdue. Comme les libéraux sont respecteux de leurs engagements, on les respecte.

Des voix: Bravo!

(15 h .10)

Le Président: J'ai accepté un consentement de trop!

M. Chevrette: C'est parce que j'avais cru entendre la comparaison avec Bergeron que je pouvais m'adresser à un arbitre pour connaître le partisan!

Des voix: Ah! Ah!

Le Président: Fin de la période de questions orales.

Adoption sur division des

amendements et de la motion

amendée du chef de l'Opposition

réclamant que le gouvernement

n'adhère pas à la constitution

sans obtenir des pouvoirs accrus

Contrairement à ce que j'ai annoncé avant la période de questions, il n'y aura pas de complément de réponse, et ce, de consentement avec les deux côtés de la Chambre. Nous allons maintenant procéder au vote. Excusez-moi. Nous allons procéder immédiatement au vote reporté.

Je demanderai votre attention. J'ai à vous faire lecture des amendements qui ont été proposés. Avant de procéder à la mise aux voix... À l'ordre, s'il vous plaît...

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: Oui, M. le leader de

l'Opposition. À l'ordre...

M. Chevrette: M. le Président, ayant été mis au courant de ce qui doit venir, je demanderais qu'on évite le vote enregistré et qu'on dise "sur division", vu qu'on est contre l'amendement.

Le Président: Alors, nous allons procéder sur les amendements et, après, le vote inversé. Je vais faire lecture des amendements. Cette motion d'amendement se lit comme suit: Que la motion en discussion soit amendée, dans un premier temps, a) en remplaçant, à la cinquième ligne, la virgule et les mots "garantissant la reconnaissance du" par les mots "et le"; b) en remplaçant, à la sixième ligne, le mot "exclusif par le mot "fondamental"; c) en ajoutant, après le mot "territoire", à la septième ligne, ce qui suit: "sous réserve des articles 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 et 23 de la Loi constitutionnelle de 1982"; d) en remplaçant, à la huitième ligne, le mot "et" par une virgule et en ajoutant après le mot "justice", à la neuvième ligne, ce qui suit: "et à l'immigration," et e) en ajoutant, à la dixième ligne, après le mot "sociaux" les mots "et la sécurité culturelle".

Si cette motion d'amendement était adoptée, la motion principale se lirait comme suit: "Que cette Assemblée réclame du gouvernement qu'il n'engage pas l'avenir du Québec en adhérant à la constitution sans obtenir des pouvoirs spécifiques accrus confirmant notre identité nationale et le droit fondamental de l'Assemblée nationale de disposer sur son territoire, sous réserve de l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 et de l'article 23 de la loi constitutionnelle de 1982, des questions linguistiques reliées à l'éducation, à l'administration de la justice et à l'immigration et assurant les progrès économiques et sociaux et la sécurité culturelle du Québec."

Que ceux et celles qui sont pour cette motion amendée...

Des voix: Adopté sur division.

Le Président: Adopté sur division. Si je comprends bien...

M. Gratton: Êtes-vous pour la motion amendée?

Le Président: Même chose pour la motion. Adopté.

M. Chevrette: C'est la même chose sur la motion, elle ne veut plus rien dire.

M. Gratton: Motion adoptée sur division.

Le Président: Sur division, parfait! Nous allons maintenant procéder aux motions sans préavis.

M. Gratton: M. le Président, pourrais-je, avec le consentement des membres de l'Assemblée...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: ...procéder d'abord aux avis touchant les travaux des commissions puisque les motions sans préavis pourront nous amener à des travaux qui s'engageront immédiatement. Est-ce que j'ai le consentement pour procéder aux avis touchant les travaux des commissions immédiatement?

Le Président: Est-ce qu'il a consentement pour procéder aux avis? M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: M. le Président, je remercie l'Opposition. J'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales poursuivra ses consultations particulières dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le Code civil du Québec et le Code de procédure civile, et du projet de règlement sur l'adoption internationale, tel qu'il a été publié dans la Gazette officielle du Québec le 11 mars 1987. Ladite commission poursuivra ses travaux le mardi 12 mai 1987 dans la même salle, et ce, de 10 heures à midi.

Après les affaires courantes, jusqu'à 17 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 100, Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.

M. le Président, j'avise également cette Assemblée que le jeudi 14 mai 1987, après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'économie et du travail entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 246, Loi concernant la dissolution de l'Association des employés de Yellow Sample.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres avis concernant... M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Les motions sans préavis.

Le Président: Motions sans préavis, oui.

M. Brassard: Je... M. le Président.

M. Chevrette: Un instant, s'il vous plaît!

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Aux motions sans préavis, d'accord.

Le Président: Motions sans préavis, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, je solliciterais le consentement de cette Chambre pour adopter la motion suivante: Qu'à l'occasion de la Semaine des assistés sociaux, l'Assemblée nationale presse le gouvernement de respecter ses promesses à l'endroit des assistés sociaux, notamment en accordant la parité aux jeunes, mais aussi en enclenchant la réforme de l'aide sociale. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, je craindrais trop la réaction du député d'Abitibi-Ouest si je devais consentir. Donc, il n'y aura pas consentement.

Le Président: II n'y a pas consentement pour débattre de cette motion. Toujours aux motions sans préavis. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le Président, il n'y a pas le consentement, mais il y a un problème. J'ai été mis en cause et je ne comprends pas pourquoi. Quand même...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Je m'excuse auprès du député d'Abitibi-Ouest, c'était une boutade qu'il comprend, mais qui n'a rien à voir avec son intérêt pour les assistés sociaux. Je l'assure d'avance que notre refus de consentement n'a rien à voir non plus avec notre manque d'intérêt pour la question.

Le Président: D'accord, cela va. Aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

Convocation de la commission des

institutions sur l'entente du lac

Meech et proposition que le ministre

de l'Éducation en fasse partie

M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, concernant la commission qui se penchera sur l'entente du lac Meech, je voudrais proposer la motion suivante: Que la commission des institutions entende les représentations de ses membres, de personnes et d'organismes relativement à l'entente intervenue le 30 avril 1987 au lac Meech concernant la constitution du Canada; que le mardi 12 mai 1987, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures la commission entende les représentations de membres de la commission des institutions et que le temps de parole soit réparti équitablement entre les groupes parlementaires; que la commission procède à l'audition d'individus reconnus comme experts les 13 et 14 mai 1987, et ce, aux heures où peuvent siéger les commissions; que la commission poursuive, si nécessaire, ces auditions, y compris pour entendre, s'il y a lieu, d'autres experts, les 19, 20 et 21 mai 1987, et ce, aux heures où peuvent siéger les commissions.

Quant à la durée des auditions et des remarques préliminaires et finales ainsi que l'ordre de comparutions de personnes et d'organismes, ceux-ci seront déterminés par entente entre les leaders parlementaires. À défaut d'entente entre les leaders, la commission des institutions en disposera lors de séances de travail qui se tiendront le lundi 11 mai 1987 à compter de 15 heures et, si nécessaire, le vendredi 15 mai 1987 à compter de 10 heures.

Que la séance de travail prévue à l'article 176 du règlement se tienne, s'il y a lieu, au plus tard le mardi 26 mai 1987; que le rapport de la commission soit déposé à l'Assemblée nationale au plus tard le mercredi 27 mai 1987; que les séances de la commission, sauf les séances de travail, soient télédiffusées à compter du début de ces travaux le mardi 12 mai 1987 jusqu'au plus tard 22 heures le jeudi 21 mai 1987; que, malgré ce qui précède, le ministre de la Justice et la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration puissent participer aux délibérations touchant leur secteur de responsabilité, et ce, pour la durée du mandat; et, finalement, que le premier ministre, le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes et le député de Gouin soient membres de ladite commission, et ce, pour la durée du mandat.

Je rétière ici la demande que je faisais cet après-midi au leader de l'Opposition pour que nous puissions ajouter le nom du ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science comme membre de ladite commission, et ce en accordant à l'Opposition la possibilité de désigner un membre additionnel de sa formation politique.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, la motion du leader du gouvernement est assez conforme, sauf sur deux points. Il y a entente sur la majorité des points qu'il y a là, mais il y a désaccord sur la fermeture de la commission. Je pense qu'il faut le souligner, parce que j'ai toujours dit au leader du gouvernement qu'on n'était pas d'accord sur une date limite parce qu'il se pourrait fort bien qu'un plus grand nombre de groupes veuillent se faire entendre. Quant à nous, sur un sujet comme la constitution, on ne peut pas limiter le nombre de ceux qui voudraient se faire entendre, d'autant plus que le gouvernement a pris un mois, deux mois pour consulter sur la création d'un conseil consultatif de la jeunesse qui n'engageait tout de même pas l'avenir du Québec.

Le ministre des Affaires municipales vient d'annoncer une consultation assez longue, un délai très long même pour lever le moratoire sur les condominiums dans le domaine de l'habitation. Deux mois pour l'habitation, et pour ce qui est de l'avenir du Québec... (15 h 20)

Une voix: Deux semaines!

M. Chevrette: ...le texte du contrat qui peut lier pour des années, des dizaines d'années l'avenir du Québec: Deux semaines, six jours. On ne peut pas accepter cette partie-là, c'est évident, j'ai toujours dit au leader du gouvernement que je n'acceptais pas cette partie.

Quant au consentement qu'il nous demande expressément pour la présence du ministre de l'Éducation, on en a discuté longuement, M. le Président. Ce sont des députés qui siègent normalement aux commissions, c'est clair. Par principe, on accepte toujours que le ministre responsable en soit membre; cela, c'est vrai, et on le dit, M. Rémillard. On dit que le premier ministre, bien sûr, qui est le chef "négociateur", entre guillemets, y sera au moins quelques fois, on peut lui permettre d'être membre, oui. On a dit aussi que Mme Robic, la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, aura un droit de parole quand cela touchera ses éléments. On a dit que lorsqu'il y aura des éléments spécifiques pour le ministre de la Justice, il aura un droit de parole. Je pense qu'on doit avoir touché passablement tous les points. Le ministre de l'Éducation a probablement beaucoup de problèmes avec les universités, on va lui donner la chance de les régler. On ne donne pas notre consentement.

Le Président: M. le premier ministre, toujours sur la motion du leader du gouvernement.

M. Bourassa: Je suis estomaqué!

Le Président: II y a consentement pour en débattre, c'est ce que j'ai compris de l'intervention. Vous avez la parole, M. le premier ministre.

M. Robert Bourassa

M. Bourassa: Je suis estomaqué des propos du leader de l'Opposition, je ne sais pas si le chef de l'Opposition les endosse. Il signale dans la première partie de son exposé que c'est un débat exceptionnellement important. C'est malheureux qu'il quitte actuellement, mais, en tout cas, le chef de l'Opposition sera là pour répondre. Il signale que c'est un débat exceptionnellement important pour l'avenir du Québec, déterminant pour des dizaines et des dizaines d'années, parlant au nom de son parti. Nous voulons, dans cette commission parlementaire, faire participer ceux qui peuvent apporter une contribution - c'est la règle générale - ceux qui, à cause de leur expérience, ceux qui, à cause de leurs réalisations, peuvent apporter une contribution particulièrement utile, nous voulons les faire participer à cette commission parlementaire.

J'ai moi-même suggéré au leader d'inclure le ministre de l'Éducation qui suit cette question depuis 25 ans, Voilà que, dans un geste sans précédent de mesquinerie de la part des membres de l'Opposition on veut bloquer la présence du ministre de l'Éducation...

Une voix: Ils en ont peur.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!'

M. Bourassa: ...à un débat qu'eux-mêmes qualifient d'historique. M. le Président, si j'étais à la place du chef de l'Opposition - je le dis en toute candeur et très sincèrement - j'aurais honte du geste qu'ils viennent de poser.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, toujours sur la même motion.

M. Pierre Marc Johnson

M. Johnson (Anjou): Oui, M. le Président. Le ministre de l'Éducation et le premier ministre savent le respect que j'ai pour la contribution historique d'un grand éditorialiste et aussi d'un homme qui a été chef de son parti, à l'époque où il était dans l'Opposition autour de la réflexion sur les enjeux constitutionnels au Québec et au Canada. Deuxièmement, je ne nie aucunement l'intérêt personnel persistant du ministre de l'Éducation pour ces questions. Il ne s'agit pas, pour nous, de mettre en doute

ni la valeur de la contribution historique ni l'intérêt personnel que porte ce ministre au dossier. Il s'agit pour nous, au moment où le premier ministre nous enferre dans une procédure accélérée: trente jours pour décider de l'avenir du Québec alors que la constitution canadienne prévoit trois ans comme possibilité entre le moment où il y a une entente et le moment où les amendements peuvent être adoptés; six jours en commission parlementaire, aucune garantie malgré les efforts au moins verbaux du premier ministre que nous aurons des textes juridiques sur lesquels nous discuterons; fermeture de la commission comme une guillotine au bout d'un certain nombre de jours...

Le premier ministre reconnaîtra que, dans les circonstances - encore une fois, sans mettre en doute la valeur de la contribution personnelle apportée par le ministre de l'Éducation dans ce dossier depuis un certain nombre d'années - nous croyons qu'il faille limiter les dérogations au peu de règlements qui nous restent entre les mains pour faire valoir notre point de vue, qu'il faille nous limiter à accepter que des ministres, exceptionnellement, viennent comme membres de la commission, parce que le leader ne veut pas qu'ils comparaissent, dans la mesure où des objets précis dans cette entente touchent leur ministère. C'est le cas de la ministre de l'Immigration et on peut également considérer que c'est le cas du ministre de la Justice, comme jurisconsulte du gouvernement et, dans certains objets spécifiques, notamment autour de la formule d'amendement.

Par ailleurs, M. le Président, je devrai constater aussi que, à ce que je sache, le principe de la responsabilité ministérielle, au cas où il y aurait encore des doutes ici au Parlement, existe encore. Je comprends qu'il n'y a plus de responsabilité de la part du ministre des Finances quand il y a une fuite budgétaire - le premier ministre nous l'a expliqué - mais le principe de la responsabilité ministérielle existe encore dans le système parlementaire. Le principe de la responsabilité ministérielle veut que, lorsque le premier ministre ou un ministre parle, il parle au nom du gouvernement et, en ce sens, je m'attends que lui-même et son ministre des Relations internationales, quand ils parleront, le fassent au nom du gouvernement. Il ne s'agit pas, dans ces quelques jours qui nous restent, compte tenu du peu de moyens que nous avons, de permettre qu'individuellement, des gens qui ont apporté une contribution à ce dossier puissent bénéficier d'un privilège qui va à l'encontre, je crois, de l'application de ce principe de la responsabilité ministérielle, ou de celle du premier ministre ou de son ministre responsable.

Le ministre de l'Éducation aurait pu être présent si, dans l'entente du lac Meech, le premier ministre avait démontré, par exemple, que le Québec récupérait des sommes et obtenait que le fédéral sorte du secteur de l'éducation. Ça, j'aurais compris ça et j'aurais dit: Oui, le ministre doit être là. Â ma connaissance, le ministre de l'Éducation n'assume pas, autrement que par sa contribution personnelle dans certains comités, la responsabilité du dossier. Deuxièmement, rien dans cette entente ne touche le secteur de l'éducation, à notre grand regret, M. le Président. Troisièmement, écoutez, on a peu de moyens; si on pouvait respecter le minimum de règles dans les circonstances... Il comprendra que cela n'a rien à voir avec une attitude personnelle ou une mesquinerie qu'on ferait au ministre de l'Éducation. Absolument pas, et le ministre le sait à part cela. Mais, dans ce domaine-là comme dans tellement d'autres dans le dossier, cela a été amorcé tout croche et cela donne des affaires tout croches.

Une voix: Question de règlement. M. Brassard: Question de règlement.

Le Président: M. le premier ministre. Pardon?

M. Brassard: Question de règlement.

Le Président: Sur une question de règlement.

M. Brassard: Sur la motion qui est en discussion, le premier ministre a exercé son droit de parole.

M. Bourassa: Mais ils ont donc peur, M. le Président, de...

Des voix: Non, non.

Une voix: La règle, la règle.

M. Gratton: ...consentement, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement pour que M. le premier ministre intervienne étant donné l'intervention de courte durée d'il y a quelques minutes?

Une voix: Non.

Le Président: II n'y a pas consentement. Alors, sur une motion, en vertu de l'article 146 de nos règlements...

M. Michel Gratton

M. Gratton: J'interviendrai très brièvement pour souligner à mon tour la

mesquinerie qui a atteint son comble, M. le Président, en ce qu'on refuse au premier ministre de fournir des explications. Il aurait pu dire au chef de l'Opposition que la perception qu'on a de l'attitude de l'Opposition, qui refuse son consentement pour que le ministre de l'Éducation soit présent à la commission, c'est qu'elle est tout à fait inexplicable. Quant à nous, M. le Président, la question qui se pose, c'est de savoir si la contribution du ministre de l'Éducation pourrait contribuer à servir les intérêts du Québec.

Une voix: Le livre beige.

M. Gratton: L'auteur du livre beige du Parti libéral du Québec, est-ce que ce n'est pas l'ex-chef du Parti libéral qui a présidé à cette politique du gouvernement, cette politique du parti et maintenant du gouvernement, qui a été en très grande partie entérinée par l'entente du lac Meech? Est-ce que la contribution du ministre de l'Éducation serait de nature à servir ou à desservir les intérêts du Québec s'il participait à la commission parlementaire? C'est la question qui se pose. Si le premier ministre, à titre de chef du gouvernement, sent qu'il pourrait être utile de pouvoir compter sur les conseils, l'expérience et la connaissance du dossier du ministre de l'Éducation, je ne peux qu'interpréter comme mesquinerie très basse de la part de l'Opposition, pour des raisons qui n'ont rien à voir avec le fond, mais qui ont tout à voir avec des intérêts strictement partisans du Parti québécois, le refus de son consentement.

Nous en prenons note, nous en prenons acte, M. le Président, et nous serons présents à la commission. Nous serons là non pas pour servir des intérêts partisans, mais pour tenter de servir les intérêts supérieurs du Québec. Nous déplorons, M. le Président, que le ministre de l'Éducation ne soit pas présent pour y contribuer. (15 h 30)

Le Président: M. le député de Gouin, sur la même motion.

M. Jacques Rochefort

M. Rochefort: Oui, M. le Président. Dans un premier temps, vous me permettrez de souligner ma très grande surprise devant les propos que vient de tenir le leader...

M. Gratton: Question de règlement. Je m'excuse auprès du député de Gouin.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur une question de règlement.

M. Gratton: Question de règlement, parce que je sais que, dans une telle situation, il est nécessaire que les choses soient clarifiées. J'ai fait la motion, M. le Président, je viens d'intervenir et je voudrais que vous m'indiquiez si, du côté de l'Opposition, on considère l'intervention que je viens de faire comme étant mon droit de réplique, auquel cas le débat est terminé et, sinon, si, du côté de l'Opposition - et je laisse à l'Opposition le loisir de choisir l'intervention que je viens de terminer n'est pas mon droit de réplique, évidemment, je me réserverai le droit de répliquer à la fin du débat.

Le Président: Sur le même point de droit, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je crois que le député de Gatineau et leader du gouvernement n'était pas du tout intervenu sur la question. Il s'était contenté de lire la motion. Et, à mon point de vue, il vient de livrer son premier message, ce qui lui donne, comme parrain de la motion, le droit de conclure.

Le Président: D'accord. Sinon, cela mettait fin au débat parce que personne ne peut intervenir après la réplique.

M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je veux souligner ma très grande surprise, mon étonnement devant les propos que vient de nous tenir le député de Gatineau et leader du gouvernement, ici même à l'Assemblée nationale, quant au respect qu'il a, dit-il, pour les compétences constitutionnelles du ministre de l'Éducation.

Il faut rappeler que c'est vrai que le ministre de l'Éducation est un homme compétent en matière constitutionnelle. Mais la première personne qui, ici, à l'Assemblée nationale, est allée à l'encontre des opinions, des orientations, des points de vue, des prises de position de l'actuel ministre de l'Éducation, alors qu'il occupait la fonction de chef de l'Opposition, alors qu'il était chef du Parti libéral et que ce parti était dans l'Opposition, c'est justement le député de Gatineau, le leader du gouvernement...

Une voix: Voilà!

M. Rochefort: ...à l'Assemblée nationale présentement. C'est lui-même qui avait avoué que c'était pour des raisons partisanes, de basse partisanerie électoraliste qu'il avait refusé d'endosser les points de vue du député d'Argenteuil alors qu'il était chef de l'Opposition. C'est lui qui, pour des raisons partisanes, électoralistes, mesquines, faisant passer les intérêts du Québec derrière les positions et les intérêts du député de Gatineau sur le plan électoral et partisan, était venu planter un poignard dans le dos du

ministre de l'Éducation, de son chef... Une voix: Voilà: Une voix: Oui, oui, oui. Ah oui!

M. Rochefort: C'est lui qui a fait en sorte que l'ancien chef de l'Opposition, l'ancien chef du Parti libéral, actuel ministre de l'Éducation, perde ses lettres de noblesse à l'intérieur de sa propre formation politique en matière constitutionnelle.

Des voix: C'est vrai!

M. Rochefort: C'est d'ailleurs dans les semaines qui ont suivi ce geste que l'actuel ministre de l'Éducation, le député d'Argenteuil, a été forcé, par les manoeuvres du député de Gatineau, peut-être pas étrangères aux ambitions de l'actuel premier ministre de se retirer...

M. Bourassa: Question de règlement. Question de règlement.

M. Rochefort: Sur quoi se lève-t-il? Une voix: Une question de règlement.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. le premier ministre, sur une question de règlement.

M. Rochefort: Ce n'est pas une question de règlement, ça.

Le Président: Un instant!

M. Rochefort: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Bourassa: M. le Président, j'ai été mis en cause par le député de Gouin.

M. Rochefort: Ce n'est pas une question de règlement. J'ai le droit de dire mon opinion.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je lui demanderais, pour présager d'une façon un peu plus optimiste de la teneur de cette commission parlementaire, d'éliminer de ses propos une indécence inqualifiable.

M. Rochefort: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président: Sur la question de règlement, M. le député de Gouin. S'il vous plaît!

M. Rochefort: Je vous ferai remarquer,

M. le Président, que vous auriez pu rappeler à l'ordre le premier ministre, parce que sa question de règlement avait pour but d'exprimer une opinion contraire à la mienne. Ce n'est pas par le biais d'une question de règlement qu'on peut faire ça.

Le Président: Bon! Je vous rappellerai aussi à la règle de la pertinence, s'il vous plaît, sur la motion.

Une voix: II était pertinent.

Le Président: La motion, s'il vous plaît!

M. Rochefort: M. le Président, je suis très pertinent, je m'exprime sur un des volets qui est refusé par ma formation politique, du libellé même de la motion du député de Gatineau et leader du gouvernement à l'Assemblée nationale.

Le Président: Allez! Allez!

M. Rochefort: Je disais que, si à l'intérieur même du Parti libéral, le député d'Argenteuil n'a plus les lettres de noblesse qu'il avait en matière constitutionnelle, si, peut-être, ne s'est-il pas vu confier la responsabilité des relations fédérales-provinciales, de la négociation constitutionnelle entre l'actuel gouvernement et le gouvernement fédéral et les autres provinces, c'est peut-être même lié à ce geste qu'avait entrepris le député de Gatineau pour miner, peut-être à jamais, à l'intérieur de sa propre formation politique, la crédibilité, la noblesse qu'avait eues jusqu'à ce jour le ministre de l'Éducation et député d'Argenteuil dans sa propre formation politique.

Aujourd'hui, on va nous dire qu'on pose un geste partisan, on va nous dire qu'on pose un geste mesquin. Là où il y a eu mesquinerie, là où il y a eu partisanerie, c'est quand on a miné, du côté libéral, la crédibilité du député d'Argenteuil en matière constitutionnelle. Si l'actuel premier ministre avait voulu corriger cet affront fait au député d'Argenteuil, notamment en matière constitutionnelle, il lui aurait probablement confié la responsabilité, dès le 13 décembre 1985, d'être son ministre des relations fédérales-provinciales, d'aller négocier avec le gouvernement fédéral et les gouvernements des neuf autres provinces en matière constitutionnelle.

S'il y a des gens en cette Chambre qui ne reconnaissent pas la compétence du ministre de l'Éducation en matière constitutionnelle et qui ne lui font pas confiance en la matière, qui ont refusé de lui confier des responsabilités gouvernementales, non pas des responsabilités d'intérêt personnel, mais des responsabilités

gouvernementales en la matière, c'est le député de Gatineau et l'actuel premier ministre du Québec. Qu'ils assument les conséquences de leur propre décision.

Une voix: ...parler du nez comme Rémillard.

M. Rochefort: Est-ce que je dois comprendre qu'on va aussi proposer de faire venir les autres ministres de l'actuel gouvernement qui, en matière constitutionnelle, ont aussi lancé un couteau au député d'Argenteuil lorsqu'il était chef de l'Opposition? Est-ce que c'est l'opération récupération de l'affront qui avait été fait à l'époque au député d'Argenteuil que vous êtes en train de faire, que vous tentez de mettre en place ou est-ce que vous voulez qu'on bâtisse un cadre qui nous permettra de discuter du dossier constitutionnel sérieusement, rigoureusement avec les institutions gouvernementales qui nous gouvernent?

Je veux aussi souligner ma très grande surprise de l'intérêt subit que le premier ministre accorde tout à coup à la présence ou à l'absence du député d'Argenteuil à cette commission, alors qu'il renvoie du revers de la main l'importance, la dimension essentielle du dépôt des textes juridiques avant que la commission n'entreprenne ses travaux.

Oui, M. le Président, je suis un des députés qui, ici, reconnaissent les compétences du ministre de l'Éducation en matière constitutionnelle. Mais, entre les compétences du ministre de l'Éducation en matière constitutionnelle et la dimension essentielle de la présence des textes de traduction juridique du communiqué de presse issu du lac Meech, pour nous, il est primordial que nous ayons entre les mains et que les experts, comme tous les groupes qui se présenteront devant nous, aient entre les mains les documents juridiques de traduction du communiqué de presse du lac Meech. Voilà un élément beaucoup plus important, beaucoup plus déterminant dans le déroulement de la commission et dans la préparation de l'avenir du Québec. Si le Parti libéral a des regrets quant au geste qu'il a posé visant à miner, à l'intérieur de sa propre formation politique, la crédibilité du député d'Argenteuil en matière constitutionnelle, il n'a qu'à s'en mordre les pouces.

Le Président: Sur la même motion, M. le ministre des Finances.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: M. le Président, nous venons d'être témoins de ce que l'on peut appeler là performance habituelle, présente, contemporaine de l'Opposition, celle du Parti québécois, au stade où il en est. Une voix: Décadence!

M. Levesque: M. le Président, ces gens nous disent depuis je ne sais combien de temps, combien de jours et de semaines que la question est importante, tellement importante que le chef de l'Opposition lui-même a dit que le budget, ce n'est même pas important - je comprends qu'il est trop bon pour eux, mais il n'est pas important -tellement l'autre question est importante. Il a mentionné: Le budget? Il y en aura d'autres budgets. Mais, la question qui doit retenir l'attention de toute la population, c'est quoi? C'est la question constitutionnelle. (15 h 40)

La question constitutionnelle est tellement importante que le chef de l'Opposition demande à tous les citoyens et citoyennes du Québec de mettre de côté leurs occupations, de se rallier et de marcher je ne sais où, mais derrière lui. L'avenir du Québec, l'avenir des générations qui viennent, il n'y a rien de plus important.

Du même souffle, ces gens se comportent comme ils viennent de le montrer à la face de la population du Québec, en refusant une contribution parmi les plus importantes qui pourraient être amenées sans que cela ne coûte un seul cent; pas question d'argent, pas question de faire toutes sortes de procédures complexes. Simplement dire: Oui, nous donnons notre consentement pour que le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, apporte sa contribution à cette question tellement importante. Mais non, on ne veut pas. Pourquoi? Non pas qu'on doute de la compétence du député d'Argenteuil. Au contraire, le député de Gouin vient de souligner qu'il n'est pas question de mettre en doute la compétence du député d'Argenteuil. Comment pourrait-il? Personne au Québec ou au Canada ne croirait le député de Gouin. Tout le monde le sait parce que le député d'Argenteuil a toute une feuille de route dans le domaine justement qui nous intéresse et qui est supposé être la question primordiale de l'heure.

Le député d'Argenteuil a parcouru le Canada sur les questions constitutionnelles. Il a rencontré et discuté avec les plus grands constitutionnalistes de notre époque. Il a rencontré tous les chefs de gouvernement. Il a lui-même été chef de parti. Autrement dit, M. le Président, il a été dans le domaine politique l'une des figures les plus présentes dans le débat constitutionnel. De plus, il a été amené, de par sa fonction de journaliste et d'éditorialiste, à étudier et non pas seulement étudier à la façon péquiste superficielle, sa caractéristique est d'étudier

en profondeur. C'est justement le genre de personnage qui a fait une étude approfondie de toutes ces questions constitutionnelles.

M. le Président, s'il y a quelqu'un qui peut témoigner de l'intérêt, du dévouement et de l'implication du député d'Argenteuil dans les questions constitutionnelles, c'est celui qui vous parle. Nous avons travaillé ensemble dans ces questions. Combien de jours et combien de nuits Claude Ryan n'a-t-il pas passés justement dans ces documents de nature constitutionnelle qui nous préoccupent aujourd'hui, sur cette question qui, selon le chef de l'Opposition, fait que tout le Québec doit s'arrêter, le Canada doit s'arrêter, le monde entier doit s'arrêter. C'est tellement important, on doit mettre de côté tout ce qui existe, même le budget, tellement c'est important, et voilà la contribution d'un Québécois qui s'offre. Non. Non. On ne peut pas faire cela.

Pourquoi? Quels sont les arguments de fond que l'on a? M. le Président, cela fait pitié de voir ce qui se passe ici, à cette Assemblée nationale, aujourd'hui. Qu'est-ce qu'on refuse? On ne demande pas de faveur. On demande de contribuer. On dit: Voici quelqu'un qui est pourtant bien occupé, qui a pourtant bien d'autre boulot, qui pourrait se réfugier derrière son travail énorme. Mais non. Il s'offre pour accepter l'invitation du premier ministre de travailler à l'intérieur de cette commission.

Nous avons devant nous une motion visant justement à permettre que cette commission se penche sur l'entente intervenue le 30 avril 1987 au lac Meech, concernant la constitution du Canada. M. le Président, nous avons présentement besoin des meilleurs cerveaux de notre Législature. Parmi ces meilleurs cerveaux, il y a le député d'Argenteuil. Tout le monde reconnaît, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, son expérience, sa connaissance du dossier. Tout cela, on le met de côté. Pourquoi? Pour des raisons purement et strictement partisanes, petites, réellement inqualifiables selon le vocabulaire permis dans cette Législature. M. le Président, je le dis et je le répète, le député d'Argenteuil est un des plus qualifiés que nous ayons pour faire partie de cette commission. Il ne prend la place de personne. Il s'ajoute.

Cela n'enlève pas de place ou de siège à l'Opposition. Elle pourra conserver tous ses droits, tous ses privilèges, tout son temps de parole. Il n'y a rien qui est enlevé. Il y a quelque chose qui s'ajoute, et on aime mieux faire de la procédurite. On aime mieux faire ce que l'on a fait depuis le commencement de ce débat. Je dis qu'il est important pour l'avenir du Québec que nous fassions tout ce que nous pouvons afin de donner le meilleur éclairage possible. Le premier ministre du Québec va être là. La ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles sera là. Le ministre des Affaires canadiennes sera là. Et les autres membres de la commission seront là, du côté ministériel comme du côté de l'Opposition.

Qu'est-ce que ça enlève de demander simplement d'ajouter une autre contribution qui serait de nature à rendre des services au Québec? Je pose la question en terminant. Qu'est-ce qui motive l'Opposition? Où est-ce que l'on met l'accent? Est-ce qu'on met l'accent, comme je prétends qu'on le fait du côté de l'Opposition, sur les intérêts partisans? Est-ce qu'on ne devrait pas, comme on prétend toujours vouloir le faire, mettre l'accent sur les intérêts véritables du Québec? Ces gens se prétendent les défenseurs des intérêts du Québec. Voici une occasion où, simplement par un geste ouvert, un geste non pas de magnanimité, mais un geste d'intérêt pour le Québec, ils auraient pu dire: Certainement, et si vous avez d'autres contributions à apporter, apportez-les, nous allons travailler ensemble dans l'intérêt du Québec. Nous pouvons diverger sur certains moyens. Mais nous allons prendre tout ce que nous avons à notre disposition pour faire en sorte que cette commission réussisse à démontrer dans quel sens les intérêts du Québec se dirigent.

Je regrette, encore une fois, cette attitude de l'Opposition. J'espère qu'avant la fin de ce présent débat, on se ravisera. Ceux qui nous écoutent, les gens du Québec, ne comprennent pas que Claude Ryan ne puisse pas participer à cela. Ils ne comprennent pas cela. Il n'y a personne qui peut comprendre une attitude comme celle-là. Si c'était pour enlever la place à un député de l'Opposition, d'accord, je comprendrais. Même si le député de l'Opposition est moins bon, c'est un député pareil, c'est un député de l'Opposition et la formation politique... On comprendrait. Y a-t-il une raison pour laquelle vous refusez? Vous avez confiance dans Claude Ryan. Vous avez confiance, comme la population du Québec a confiance parce qu'il a toute l'étoffe nécessaire pour apporter une contribution valable. Pourquoi ne voulez-vous pas? Pourquoi? Vous avez peur. Vous êtes pris dans - enfin, je n'ai pas à le qualifier encore - la soupe, vous êtes pris dans une sorte de situation où vous pouvez difficilement, d'abord, vous entendre entre vous. Présentement, tout ce que vous dites c'est: Non, on ne veut pas voir M. Ryan là. On ne veut pas le voir là. Et vous prétendez défendre les intérêts du Québec?

Voyons! Voyons! Voyons! Vous défendez quoi? Vous essayez simplement de survivre dans votre soupe. Restez où vous êtes. Vous serez là pour l'éternité, ainsi soit-il.

Le Président: Toujours sur la même motion sans préavis, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Quelques remarques pour expliquer l'attitude de l'Opposition sur cette motion. D'abord, nous avons réclamé pendant des jours et des jours, depuis jeudi dernier, que la commission parlementaire qui va porter sur ce dossier majeur qu'est la question constitutionnelle soit une commission ouverte. Or, vous l'avez constaté par la motion du leader du gouvernement, cette commission est, pourrait-on dire, fermée; elle est limitée à six jours, à six séances, au cours des deux prochaines semaines. (15 h 50)

Un dossier de cette importance aurait pu au moins nécessiter, de la part du gouvernement, qu'il maintienne cette commission ouverte, de façon que tous les groupes, intervenants ou individus, qui souhaitent, au Québec, prendre position, témoigner, exprimer leur point de vue sur cette question constitutionnelle, aient la possibilité de le faire. Avec une commission fermée, ce qui risque d'arriver, ce qui peut arriver, c'est qu'on se retrouve, après les six jours de séances, avec des groupes, des organismes, des associations ou des individus qui ne pourront ni être entendus ni exprimer leur point de vue sur cette question majeure concernant l'avenir même du Québec. Cela nous apparaît absolument inacceptable.

Je pense qu'une Opposition responsable se devait de ne pas donner son consentement à ce que la commission parlementaire des institutions portant sur la question constitutionnelle soit une commission fermée.

Pourtant, quand on voit ce qui s'est passé depuis quelques mois, ici même en cette Chambre, on se rend compte que, sur des dossiers sans doute importants, mais moins majeurs, je dirais, que celui du dossier constitutionnel, on a permis à des commissions de siéger pendant des semaines et des semaines, sans échéance, sans limite, permettant d'entendre tous les groupes qui souhaitaient le faire. Je pense en particulier à la commission qui, récemment, a étudié le projet de mise en place d'une commission consultative sur la jeunesse. Tous les groupes qui ont voulu se faire entendre sur cette question l'ont fait. Elle a siégé pendant plusieurs semaines. Je veux bien croire qu'une commission consultative sur la jeunesse, c'est important, mais, dans mon esprit, cela m'apparaît pas mal moins important que l'avenir même du Québec qui se joue à la suite de l'entente constitutionnelle du lac Meech. Cela m'apparaît pas mal moins important.

Comment se fait-il qu'on ait exigé de fermer cette commission? Pour nous, c'est inacceptable. Cela laisse planer des doutes sur les intentions du gouvernement en cette matière. Pourquoi cet empressement? Comment expliquer cet empressement à tenir cette commission, à mettre fin le plus rapidement possible aux travaux de cette commission? On peut se permettre d'avoir un certain nombre de doutes sur les intentions gouvernementales. Cela ressemble étrangement à du "bulldozage" en matière constitutionnelle sur une question aussi vitale et aussi capitale. Cela ressemble à du "bulldozage".

Le gouvernement, sur la question constitutionnelle, est en train de "bulldozer" le Parlement en imposant une commission fermée qui siège rapidement, dès la semaine prochaine, sans même qu'on soit assuré d'avoir les textes juridiques. Pourtant, Dieu sait que c'est important, sur un dossier de cette nature, d'avoir les textes juridiques en main, de pouvoir les étudier et les analyser. On n'est pas sûr de les avoir. On tient rapidement la commission parlementaire. On limite le nombre de jours de séance, risquant ainsi de voir des groupes ou des associations être empêchés de s'exprimer sur cette question. Cela ressemble à du "bulldozage" de la part du gouvernement sur cette question. On ne peut pas accepter de s'associer à une telle attitude.

Que craint le gouvernement? Pourquoi craint-il un examen approfondi de cette entente, de cette question? Pourquoi a-t-il peur d'un examen approfondi de la part de la commission parlementaire? Je pense que la question est pertinente.

Quant à la présence du ministre de l'Éducation, je vous dirai ceci. Si le premier ministre souhaitait ou voulait vraiment la présence du ministre de l'Éducation, je dirais qu'il n'avait qu'à être plus exigeant en matière de conditions d'entrée du Québec dans la fédération canadienne; il n'avait qu'à être plus exigeant et qu'à ne pas se contenter des cinq conditions dangereusement minimales qui ont été les siennes et celles de son gouvernement sur ce dossier, avec des reculs, en plus, sur plusieurs de ces cinq conditions déjà minimales au départ. Il n'avait qu'à être plus exigeant en matière constitutionnelle.

Je vous dis, M. le Président, que si le gouvernement libéral avait exigé que soit reconnu au Québec le droit exclusif de déterminer sa langue officielle et de légiférer sur toute matière linguistique dans les secteurs de sa compétence, on aurait été très heureux, à ce moment-là, d'avoir la présence du ministre de l'Éducation, parce que cela le concernait, on aurait été aussi très heureux de la présence de la ministre des Affaires culturelles responsable de l'application de la charte du français. Si cela avait fait partie des exigences et des conditions du gouvernement libéral... Malheureusement, cela n'a pas été le cas.

Si, également, on avait exigé que le versement des subventions fédérales aux individus et aux institutions oeuvrant dans les

domaines de la culture et de l'éducation soit soumis à l'approbation du Québec, cela aurait concerné l'éducation, et on aurait été enchantés de permettre au ministre de l'Éducation de siéger. Ce n'est pas le cas, cela ne fait pas partie des conditions de ce gouvernement.

Si le Québec s'était vu confirmer dans l'entente du lac Meech comme maître d'oeuvre de l'ensemble du domaine de la main-d'oeuvre, avec tous les pouvoirs et les ressources que cette responsabilité comporte, on aurait été enchantés, fort heureux et fort satisfaits de permettre au ministre responsable de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu de siéger à la commission. Ce n'est malheureusement pas le cas.

Pour tout dire, M. le Président, si le ministre de l'Éducation, pour nous, ne doit pas siéger à cette commission, le principal responsable est le premier ministre lui-même, le gouvernement libéral, qui a exigé des conditions tellement minimales au lac Meech qu'on n'a pas de raison, quant à nous, de justifier la présence du ministre de l'Éducation.

Pour la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, on a dit oui. Pourquoi? Parce qu'il y a une condition, un élément de l'entente qui porte sur l'immigration. Cela se justifie. La présence de la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration se justifie. Le ministre de la Justice, oui, cela se justifie, il y a un élément de l'entente qui porte sur la Cour suprême. Cela justifie la présence, à l'occasion, du ministre de la Justice. Mais il n'y a rien, dans cette entente, sur l'éducation, absolument rien. On ne voit pas comment justifier la présence du ministre de l'Éducation.

Je ne reviendrai pas sur les propos du député de Gouin relativement aux attitudes passées du leader du gouvernement et de certains de ses collègues, en particulier ses neuf collègues; cela m'apparaissait important de le signaler tantôt. C'est pour ces raisons que nous nous opposons, d'une part, à ce que cette commission soit fermée et, d'autre part, à ce que le ministre de l'Éducation en soit membre pendant toute la durée de ses séances.

Le Président: Sur la même motion sans préavis, M. le ministre des Transports.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'avais quitté pour aller vaquer à d'autres occupations, entre autres, pour rencontrer, à la demande du député de Roberval, des maires d'une de ses MRC qui avaient des inquiétudes quant à la construction d'un certain chemin, et j'ai passé devant un téléviseur. Ce que j'entendais, à mon grand étonnement, c'est que l'Opposition refusait au député d'Argenteuil le droit de siéger à une commission aussi déterminante pour l'avenir du Québec. Très étonné, je me suis arrêté pour prendre soin de regarder ou d'analyser ce qui pouvait se passer, ce qui pouvait motiver une décision comme celle-là de la part de l'Opposition, une Opposition qui, bien sûr, n'est pas mesquine, une Opposition qui est ouverte, une Opposition issue du Parti québécois, qui a fait la gloire du Québec au cours des années 1976 pour sa transparence, sa lucidité quant à l'avenir, cette ouverture d'esprit sur le fond et sur la forme, ce parti de rénovateurs. C'est un parti, il faut bien le dire, qui est devenu un petit parti, dont nous avons les plus simples expressions devant nous. (16 heures)

Dans cette négociation que le gouvernement a eue avec la loyale Opposition de Sa Majesté, il a offert et donné des choses pour être capable de se préparer dans un débat aussi important que celui-là. On a offert et mis à la disposition de l'Opposition des sommes d'argent qui vont lui permettre d'engager un spécialiste en droit constitutionnel et qui va bien la conseiller pour qu'elle soit capable d'affronter cette commission.

Mais - faut-il le dire à la population -ce que nous visons aujourd'hui, ce que le premier ministre et le député de Jean-Talon ont réglé la semaine dernière au lac Meech, c'est la réparation des erreurs commises dans le passé par le parti qui est aujourd'hui dans l'Opposition. Bien sûr, le député de Lévis peut ne pas être d'accord avec cela. On le comprend, avec le combat qu'il mène à l'intérieur de son propre parti depuis déjà un certain temps.

Les erreurs commises par les gens d'en face dans le passé ont été réparées, la semaine dernière, et c'est probablement sur le fond que ces individus ont largement peur d'aller en commission parlementaire et de faire face au parti ministériel, qui est prêt à défendre son dossier. Ces erreurs du passé, ce sont vos erreurs que notre parti, notre gouvernement a réparées la semaine dernière. Qu'on refuse au député de Charlesbourg le soin d'être membre de cette commission, c'eût été très normal, vu son niveau de compétence et de connaissance du dossier constitutionnel, mais qu'on le refuse au député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation, cela renverse toutes les données pour le moins intelligentes du débat actuel.

Pourquoi le député d'Argenteuil et ministre de l'Éducation doit-il assister à cette commission? D'abord, il faut tenir compte du poste extrêmement important qu'il occupe dans ce gouvernement comme ministre. Deuxièmement, il n'y a pas un seul

individu dans tout le Québec qui va vous prendre au sérieux, quant aux compétence et qualités de l'homme, qui ne se sont jamais démenties dans toute son histoire, pour la défense des intérêts du Québec et aussi sa connaissance profonde de l'histoire du Québec.

La troisième raison, extrêmement importante, qui est à la base même de ce parlementarisme, le droit non pas d'un ministre, mais d'un député... Est-ce que le député d'Argenteuil n'est pas ici député au même titre que ses 121 collègues qui ont le droit fondamental de participer à une commission parlementaire? Vous qui, très souvent, par l'entremise de votre leader, vous levez pour clamer, pour revendiquer des droits qui, selon vous, sont très souvent bafoués, ces droits de l'Opposition, que faites-vous des droits du député d'Argenteuil qui, tout comme vous, a été élu par ses concitoyens pour représenter les électeurs du comté d'Argenteuil? Je pense que vous avez là une porte de sortie pour réparer votre erreur d'aujourd'hui, qui risque d'être historique.

Si vous ne voulez pas accepter le ministre de l'Éducation, acceptez le député d'Argenteuil qui, lui, a des droits sur le plan des droits fondamentaux dans notre société, sur le plan de la démocratie, qui doivent être respectés et non pas foulés aux pieds comme vous le faites actuellement.

Pourquoi cette attitude de l'Opposition et par qui? Le pourquoi est très simple à régler. Nous avons devant nous et à travers le Québec un parti moribond. Les statistiques sont très claires, à la fois sur le plan du membership et sur le plan du financement de ce parti politique. Bien sûr, on a pensé, avec ce qui s'est passé au lac Meech, la semaine dernière, voir la lumière au bout du long tunnel pour être capable de soulever les gens au Québec, soulever l'armée, pour être capable de se "revamper", de se maquiller encore une fois, pour être capable d'aller chercher un minimum d'appuis au Québec, appuis que ce parti n'a plus en raison des virages éternels qu'il a faits, pas plus qu'il n'a de crédibilité.

Il est là, le pourquoi. Vous avez fondamentalement peur de venir discuter à cette table des progrès majeurs et substantiels qu'a obtenus le Québec. C'est cela la vérité et le pourquoi: Cacher votre propre turpitude, cacher votre faiblesse sur le plan du nombre et sur le fond, que vous reconnaissez dans votre chef et dans votre parti aussi. Les dernières semaines et les derniers mois sont très convaincants: 15 personnes par ci, 30 par là, un appui populaire fantastique à votre base, et ça, c'est clair et c'est ça que vous voulez masquer. Et 'par qui, M. le Président? Par qui? Par le député de Gouin, le premier, l'organisateur en chef, lors du dernier congrès au leadership, le député d'Anjou qui est maintenant votre chef, M. le député de Terrebonne. L'organisateur en chef, celui-là même qui, de l'intérieur de votre propre parti - on a pu le constater et le voir ici, le vivre à chaque jour au cours des années antérieures à 1985... L'organisateur en chef du député d'Anjou s'est levé et a dit: Vous ne pouvez pas, vous, le gouvernement libéral, faire en sorte que le député d'Argenteuil puisse être à la commission compte tenu de votre passé. Mais vous avez une très courte mémoire, vous êtes sélectifs dans votre vision, dans vos choix, compte tenu de tout ce que René Lévesque a pu vivre à l'intérieur de votre parti, fomenté de l'intérieur, alimenté par celui qui, tout à l'heure, se levait, le député de Gouin, et qui faisait des reproches à la partie gouvernementale.

Il y a aussi le député de Lac-Saint-Jean qui s'est levé et qui est devenu un spécialiste en matière constitutionnelle depuis quelque temps, bien sûr, prenant la relève de son chef. Deux individus qu'on a vus de l'intérieur et qui, dans les deux cas, ont très clairement choisi leur propre intérêt, lorsqu'ils étaient en pleines difficultés à l'intérieur de leur parti, leur propre intérêt, jeunes ministres qu'ils étaient, et ils ont choisi celui qui, dans les sondages à l'époque, était un peu plus populaire que les autres, du moins auprès des membres du Parti québécois.

Oui, c'est une erreur grossière, c'est une erreur extrêmement importante et dommageable que de se priver de l'expérience du député d'Argenteuil à cette commission parlementaire, lui qui a un passé très riche en connaissances, en analyses, et Dieu sait que tout le monde le reconnaît dans tout le Québec. Tout le monde le reconnaît dans tout le Québec. Aussi, cela me semble le point fondamental sur lequel vous devez réfléchir, les droits d'un député à l'Assemblée nationale, celui du député d'Argenteuil à être membre à part entière de cette commission. Vous avez commis une erreur. Je pense que vous vous devez de la réparer immédiatement et de faire en sorte que cela devienne un voeu unanime de cette Assemblée que le député d'Argenteuil puisse, avec ses connaissances, son expérience, son jugement, éclairer les travaux de cette commission et ce pour le grand bien de l'ensemble de la collectivité québécoise et aussi de tout le Canada. Merci, M. le Président.

Le Président: La totalité de l'enveloppe qui est accordée aux deux côtés de cette Chambre pour cette motion est d'une heure. Il reste six minutes, dont un droit de réplique accordé à M. le leader du gouvernement. Je vous informe qu'il reste à peine six minutes au débat pour la totalité, incluant la

réplique, en vertu de nos règlements, c'est-à-dire l'article 146 du règlement. M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, il aurait peut-être fallu que le leader du gouvernement s'entende avec le ministre des Finances et le député de Charlesbourg qui ont parlé trop longtemps. Mais, M. le Président, essentiellement, la question est très simple: Si le premier ministre considérait les lumières du député d'Argenteuil si grandes, pourquoi ne l'a-t-il pas amené avec lui au lac Meech? Le premier ministre n'a pas jugé important d'amener avec lui, lors des négociations sur l'entente constitutionnelle, le député d'Argenteuil. Il n'avait pas besoin de ses lumières à ce moment-là. Ce n'était pas nécessaire. Aujourd'hui, il veut enfermer le député d'Argenteuil dans une trappe. Alors qu'il n'en avait pas besoin pour conclure l'entente, là, il en a besoin pour cimenter l'unité de son parti, pour défendre l'entente. (16 h 10)

Là, le premier ministre voudrait que le député d'Argenteuil fasse partie de la commission pour défendre l'entente qu'il a signé à genoux. Pensez-vous, M. le Président, qu'un seul Québécois croit à "Bob le Matamore", pense vraiment que le premier ministre du Québec est un premier ministre fort, capable d'affronter l'ensemble du Canada pour défendre les droits du Québec? Le premier ministre du Canada a dit clairement que le Québec n'avait rien gagné dans cette entente. M. Mulroney a dit à la face de tout le Canada anglais que le Québec n'a rien gagné qu'il n'avait déjà.

M. le Président, il faudrait savoir que l'Opposition protège, dans le fond, le député d'Argenteuil contre le premier ministre qui veut l'enfermer dans une trappe. Et alors qu'il n'en avait pas besoin pour négocier avec lui au lac Meech, maintenant, il voudrait se servir de la crédibilité qu'a établie le ministre de l'Éducation lorsqu'il était éditorialiste au Devoir pour l'obliger à défendre l'entente qu'il a conclue, accompagné seulement du député de Jean-Talon.

M. le Président, quant au ministre des Finances, j'aimerais qu'il se serve de ses propres arguments. Pourquoi n'amène-t-il pas le ministre de l'Éducation quand il discute, lui qui se fait organiser régulièrement par le gouvernement fédéral, d'entente sur la santé, des transferts fédéraux de paiements au Québec sur la santé et l'enseignement supérieur où il a été le plus mauvais négociateur des 20 dernières années au gouvernement fédéral?

Quand il y avait des questions difficiles à régler entre le gouvernement du Parti québécois autrefois, le ministre des Finances, comme député de Bonaventure, disait toujours: C'est une question de savoir négocier. Il n'y en a pas un qui s'est fait organiser autant que le ministre des Finances. C'est par centaines de millions que le Québec a été coupé de transferts fédéraux dans les domaines de la santé et de l'enseignement supérieur. Si le ministre des Finances est sincère pourquoi n'a-t-il pas appliqué lui-même ses propres principes en se faisant accompagner du ministre de l'Éducation pour être capable de négocier des fonds qu'il n'a pas été capable de négocier?

C'est pourquoi le gouvernement fédéral a versé beaucoup moins au Québec depuis l'arrivée de ce fameux parti qui se prétendait un parti de négociateurs, mais où jamais le Québec ne s'est fait autant organiser que depuis qu'il est là. M. le Président, l'incapacité de négocier avec le gouvernement fédéral du premier ministre, M. Bourassa, et du ministre des Finances, M. Levesque, est connue. Jamais le Québec ne s'est autant fait organiser dans les négociations. Et aujourd'hui le premier ministre voudrait nous dire: Donnez-nous le député d'Argenteuil dans une commission dont il ne fait pas partie pour venir défendre, au nom du Parti libéral, une entente où le premier ministre a jugé qu'il n'était pas utile lors des négociations.

Nous ne ferons pas ce coup-là au député d'Argenteuil et nous allons obliger le gouvernement, le premier ministre, à vivre avec le député de Jean-Talon. S'ils sont trop faibles pour se défendre en commission parlementaire, les gens s'en rendront compte. Mais on n'obligera pas le député d'Argenteuil à défendre une entente en commission parlementaire, alors que le premier ministre a jugé que, lors des négociations, le député d'Argenteuil n'était pas nécessaire. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Lévis.

Si je comprends bien, M. le leader de l'Opposition a une question de règlement avant la réplique de M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je suppose que vous avez annoncé de votre siège que c'était une heure en fonction de l'article 146. Je voudrais vous dire que la motion que nous avons devant nous n'est pas un renvoi simple en commission. Dans la motion que nous avons devant nous, on parle de modalités, de composition, et ça devient donc une motion qui n'est pas exclusivement de renvoi à une commission et qui vous obligerait à limiter le débat à une heure. Je pense que le député de Lévis a encore droit à du temps compte tenu du fait que cette motion est plus englobante... C'est pourquoi le leader du gouvernement a pris la peine de

se lever pour dire: J'irai aux motions. Vous vous rappellerez que je me suis levé pour lui demander s'il ne faisait pas son annonce aux avis du jour pour l'envoyer en commission. Il a dit: Non, je ferai une motion non annoncée. Je comprends parce qu'une grande partie du texte que vous avez devant vous est une entente, à l'exception de la limite. Il y a des notions sur composition même de la commission. Il parle des deux ministres qui en font partie. Il parle des modalités: les premières journées c'est entre parlementaires, la deuxième journée, c'est avec les experts pour les deux autres, et ensuite ce sont les groupes.

Il y a plusieurs dimensions qui, à mon point de vue, font que cette motion non annoncée n'en est pas une au titre de l'article 146, mais bien une motion non annoncée qui permet aux parlementaires, quel que soit leur nombre, de s'exprimer. Je vous demanderais peut-être de le prendre en délibéré quelques minutes, je pense que c'est important. Dans la motion présentée par le leader du gouvernement - je pourrais vous en faire la lecture, mais je pense que vous l'avez lue autant que moi - il y a plusieurs dimensions qui font qu'elle échappe précisément à l'article 146 qui n'est qu'un renvoi en commission qui est discutable dans un débat restreint. Pour toute motion non annoncée qui comprend d'autres éléments, si, les 23, on décidait de parler, dès qu'il y a consentement pour la discussion, d'après le règlement, vous savez qu'après le nombre de minutes, à moins qu'il y ait entente entre les deux leaders, entre les deux formations politiques, il n'y a plus de limite.

Ne vous en déplaise, M. le Président, je voudrais que vous considériez que, dans la motion, il y a des dimensions qui font qu'elle échappe à l'article 146, puisqu'on parle de modalités de fonctionnement, des personnes qui peuvent être présentes et, plus que cela, le débat se fait sur une demande de consentement. Tout le débat, depuis le début - je pense que le leader du gouvernement en conviendra, c'est même un extra, un peu, de la proposition qui est ici - s'est fait sur une demande de consentement qu'a faite le leader du gouvernement.

M. le Président, je vous demanderais de reconsidérer votre décision concernant la stricte application de l'article 146. Tel que vous venez de le faire, le leader du gouvernement n'aurait même pas une minute pour répliquer alors qu'il s'est lui-même levé en cette Chambre. Je n'ai pas à plaider pour lui, mais je veux démontrer qu'en fonction de l'article 146, on serait un peu dans les carottes. En fonction de l'article 146, on aurait dû prévoir un droit de réplique au proposeur dans un débat restreint, alors qu'on a dépassé l'heure, au moment où l'on se parle. Je pense que le député de Lévis a dépassé de une ou deux minutes le temps de l'heure complète. À mon point de vue, comme ce n'est pas une motion en vertu de l'article 146, le député de Lévis a un droit de parole de 20 minutes au maximum, s'il devait le prendre. On devrait prévoir un temps de réplique dévolu normalement au leader du gouvernement ou à tout parrain d'une motion non annoncée.

Le Président: Avant de reconnaître le leader du gouvernement, je pense qu'il y a peut-être eu confusion. Il y avait peut-être une entente des deux côtés de cette Chambre, sans que je le sache, pour les enveloppes et le partage du temps. Je n'ai pas rendu de décision et je ne veux pas la rendre. Je veux vous écouter, M. le leader du gouvernement, à la suite de l'intervention de M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Oui. M. le Président.

Le Président: Tout le monde semble comprendre qu'il s'agissait d'un débat de deux heures et non d'une heure, tel que...

Une voix: Même pas de deux heures.

Le Président: Même pas de deux heures? Motion non annoncée: 20 minutes de chaque côté, s'il n'y a pas d'entente. D'accord. C'est pour chaque intervenant.

M. Gratton: Aussi brièvement que possible, M. le Président. Nonobstant le fait dans la motion que j'ai déposée tantôt, qu'on y lit en titre qu'elle est présentée en vertu de l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale, ce qui vous a manifestement amené à interpréter que l'article 146 devait s'appliquer, je dois reconnaître le bien-fondé de l'argumentation du leader de l'Opposition qui dit que, finalement, cette motion a été présentée aux motions sans préavis parce qu'il y avait entente et consentement unanime pour que nous la considérions. Évidemment, je suis aussi obligé de reconnaître, comme lui, que le contenu de la motion est beaucoup plus que le simple renvoi d'une question en commission parlementaire. De ce fait, je serais porté, moi aussi, à considérer que ce sont les règles, non pas de l'article 146, quant à l'enveloppe de temps, qui s'appliquent, mais plutôt les règles qui s'appliquent à toutes les motions sans préavis, c'est-à-dire que la durée du débat est limitée par le nombre d'intervenants qui veulent prendre la parole pendant une période de 20 minutes.

Compte tenu de tout cela, j'irais volontiers dans le sens de ce que suggère le leader de l'Opposition: que vous preniez la question en délibéré et, si le député de Lévis n'a pas terminé, qu'il puisse terminer son intervention jusqu'à un maximum de 20 minutes. Entre-temps, j'inviterais le leader

de l'Opposition à ce qu'on se rencontre en votre présence et on pourrait ensemble déterminer Une enveloppe de temps qui pourrait peut-être mettre fin à ce débat afin de commencer l'autre. (16 h 20)

Je veux que ce soit bien clair. Quand j'ai demandé le consentement pour présenter les avis touchant les travaux des commissions avant de procéder aux motions sans préavis, je n'avais aucune indication, à ce moment-là, que le débat sur cette motion sans préavis occuperait l'Assemblée aussi longtemps. J'avais plutôt à l'esprit une autre motion que je présenterai après celle-là et qui a trait à la suspension des règles et qui, elle, sera présentée en vertu de l'article 182 et qui débouchera justement sur la présentation, par le ministre de l'Éducation, d'une loi d'exception. Cette loi, évidemment, aurait empêché les commissions de siéger si nous n'avions pas donné les avis préalablement.

M. le Président, je fais mienne la suggestion du leader de l'Opposition que vous preniez en délibéré que nous nous rencontrions et que nous tentions ensemble de déterminer une enveloppe de temps pour disposer de cette motion.

Le Président: Nous allons continuer le débat. Je vais reconnaître M. le député de Lévis. Je ne veux pas créer de précédent. C'est pourquoi je vais me retirer et rencontrer les deux leaders sur l'article 146. M. le député de Lévis, vous avez toujours la parole sur la même motion. Il vous reste, M. le député de Lévis... M. le greffier, s'il vous plaît, combien reste-t-il de temps?

Une voix: Six minutes.

Le Président: II vous reste six minutes, M. le député de Lévis. M. le député de Lévis, vous avez la parole.

Une voix: Quatorze. Le Président: Combien?

Une voix: Quatorze minutes.

Le Président: Quatorze. Excusez-moi. Quatorze minutes.

M. Garon: Merci, M. le Président. J'étais au début de mon exposé. Je voulais dire que le premier ministre n'a pas jugé bon de se faire accompagner du ministre de l'Éducation lorsqu'il a négocié avec les neuf autres provinces et le gouvernement fédéral. Il n'a pas jugé bon de se faire accompagner et d'avoir les lumières du ministre de l'Éducation qui, tous le reconnaissent, a travaillé sur ces questions constitutionnelles plus que d'autres.

C'est au moment des négociations que les lumières du député d'Argenteuil étaient nécessaires, pas au moment où on essaie de vendre la salade aux Québécois, mais, au moment où on négociait et où on avait besoin des gens les plus forts. Pourquoi le premier ministre nous dit-il, aujourd'hui: Le ministre de l'Éducation est mon ministre le plus fort, mais, à Ottawa, je me contentais du député de Jean-Talon. L'ancien premier ministre, M. Lévesque, quand il allait négocier avec Ottawa, se faisait accompagner de plusieurs ministres, ceux qu'il considérait qui devaient l'aider dans les dossiers. Je me rappelle; il était accompagné du député de Louis-Hébert, M. Morin, du ministre de la Justice et leader du gouvernement, M. Marc-André Bédard, du leader du gouvernement, M. Charron, de plusieurs personnes. À une certaine négociation où les affaires agricoles étaient en cause, j'ai accompagné le premier ministre.

Mais le premier ministre nous dit, aujourd'hui: Mon ministre, que tout le monde va reconnaître comme compétent en matière constitutionnelle, c'est le ministre de l'Éducation. Mais lorsqu'il a négocié avec le gouvernement fédéral et les neuf autres provinces, il n'en avait pas besoin. Ce n'était pas nécessaire. Il voulait avoir la gloire pour lui tout seul. Mais lorsque arrive la commission parlementaire, il ne voudrait pas que le monde pense que le ministre de l'Éducation n'est pas complètement d'accord. Là, il veut le mettre au "bat". Il veut le mettre à la commission parlementaire pour l'obliger à défendre son brouillon pour lequel nous n'avons même pas eu encore le texte juridique.

Il voudrait enfermer le ministre de l'Éducation et lui dire: Maintenant, vous allez faire le soldat, un bon soldat. Vous allez aller en commission parlementaire et défendre le papier le plus faible de toutes les négociations qu'il y a eu avec le gouvernement fédéral. Quand vous lisez les journaux, c'est évident qu'on ne se fiera pas au député de Jean-Talon pour nous dire ce qu'il pense de l'entente. Mais regardons ce que disent les journaux anglais. Le Globe and Mail de Toronto disait, le 24 avril 1987: Jamais le Québec n'a demandé si peu pour signer la constitution canadienne. Le Globe and Mail est considéré comme un bon journal. Il avertissait les Anglais: Signez au plus vite; jamais le Québec n'a été à terre comme cela, jamais le Québec n'a été à genoux.

Si le premier ministre n'a pas jugé bon, à ce moment, de se faire accompagner du ministre de l'Éducation, qui pensait que le député de Jean-Talon suffisait, qu'il n'a jamais eu de demande aussi faible, pourquoi, aujourd'hui, demanderait-il au député d'Argenteuil de venir défendre ce bout de papier à propos duquel le Globe and Mail déclare que jamais le Québec n'a demandé

aussi peu.

On voit plus tard, dans Le Devoir du 5 mai 1987: Le sénateur Lowell Murray... Pardon. On voit ce que déclare le premier ministre du Canada. On dit: Mulroney et Murray - le sénateur Lowell Murray -rassurent le Canada anglais. Québec n'a gagné aucun pouvoir qu'il n'avait déjà. Voulez-vous dire que M. Mulroney est en train de mentir au Canada anglais? Voulez-vous dire que le sénateur Murray est en train de mentir au Canada anglais? Voulez-vous dire que le Globe and Mail est en train de mentir au Canada anglais? Ils sont en train de dire jamais on n'a vu un gouvernement aussi faible. Pensez-vous qu'il y ait un seul Québécois qui pense sérieusement que Robert Bourassa, premier ministre du Québec, est un homme fort, que c'est un homme qui a une colonne vertébrale d'acier, que c'est un homme qui va mettre le poing sur la table et va faire fendre la vitre en deux? Personne ne pense cela. Tout le monde sait que Robert Bourassa, premier ministre du Québec, est un homme mou. Que dans toutes ses négociations avec Ottawa, il a toujours été mou. Aujourd'hui, il voudrait se faire défendre par un homme qui s'est bâti une réputation d'homme de principe dans les années passées comme éditorialiste. Il voudrait l'obliger à aller à une commission parlementaire pour défendre un texte.

Nous considérons que nous ne devons pas faire ce coup-là au député d'Argenteuil. J'ai eu l'occasion de voir, par exemple, des gens nommés à des commissions parlementaires se désister. J'ai vu votre commission de l'Assemblée nationale où ça devait être cinq présidents de commission qui devaient siéger, et quatre se sont désistés pour qu'on nomme des hommes de bras du Parti libéral. Voyez-vous? Si c'est ça le parlementarisme... Il faut commencer à appliquer dans cette Chambre certains des principes du parlementarisme. On ne voudrait pas que le premier ministre se serve de l'ancien éditorialiste du Devoir pour violer ces principes fondamentaux de base.

Si le premier ministre avait tellement besoin des lumières du député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation, il aurait pu lui demander de l'accompagner au lac Meech. Là le député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation, aurait défendu un projet qu'il aurait contribué à négocier. C'était trop l'histoire du passé au Québec, la partisanerie politique. C'était trop l'histoire du passé. Cela a été l'histoire du passé pour nous faire entrer dans la Confédération et, à différentes époques de notre histoire, par partisanerie politique, on a oublié les droits fondamentaux du Québec. Il est temps qu'au fond on applique un peu les règles du Parlement. Si on a un livre de règlements, pourquoi faudrait-il toujours, sans arrêt, en changer les règles alors que ces règles ont été établies comme les règles du parlementarisme?

Est-ce que le premier ministre n'est pas capable de défendre lui-même l'entente qu'il a lui-même négociée avec le député de Jean-Talon? Ces deux matamores, ces deux personnes qui veulent nous faire croire qu'elles ont mis le Canada anglais à genoux défendront leur position, alors que tous les gens qui commencent à approfondir cette question se rendent compte qu'une société distincte, on ne voit ça dans aucun texte constitutionnel, dans aucun pays au monde. On parle de société quand il s'agit de société commerciale, mais jamais de société politique. On parle alors de peuple. On parle du pouvoir de dépenser alors que les gens qui commencent à analyser se rendent compte qu'un des grands problèmes des années passées, c'était le pouvoir de dépenser et que le texte en question ne règle d'aucune façon la question du droit de dépenser.

M. le Président, il est temps qu'on mette deux personnes devant elles-mêmes en commission parlementaire, devant leur miroir pour qu'elles puissent défendre elles-mêmes le brouillon, le papier qui ne donne rien aux Québécois à toutes fins utiles. Si le premier ministre n'avait pas besoin du député d'Argenteuil pour négocier avec lui au lac Meech, s'il ne voulait pas avoir le député d'Argenteuil, si le député d'Argenteuil lui portait ombrage, si le député d'Argenteuil n'était pas le si grand conseiller dont il avait besoin pour négocier, pourquoi aurait-il besoin de ce conseiller une fois que l'entente est signée pour essayer de nous bourrer?

M. le Président, les Québécois ne sont pas dupes et ils veulent voir à la télévision le premier ministre lui-même avec son principal conseiller en cette matière, le député de Jean-Talon, venir défendre leur propre brouillon, leur propre papier, mais avec un texte juridique. Pas un texte de placotage. Pas un communiqué de presse comme pour la Baie James, dans les années qui ont précédé, en 1974, où on a annoncé dans un grand geste publicitaire, à la Goebbels, au Colisée de Québec, une Baie James dont les coûts ont été trois ou quatre fois plus élevés que ceux qui avaient été prévus. Ces grands spécialistes, ces faux spécialistes des droits du Québec n'ont rien négocié véritablement au lac Meech. (16 h 30)

Plus les gens grattent, plus les gens se rendent compte qu'ils n'ont rien négocié. Nous sommes actuellement, parce que non signataires de la constitution canadienne, dans une position que nous ne retrouverons jamais sur le plan des négociations constitutionnelles et ce n'est pas en acceptant des "guidis-guidis", des points-virgules et en refusant de faire le véritable débat de fond... Vous savez, le premier ministre ne nous a jamais dit ce qu'il demandait. Le

ministre des Finances, actuellement, dans la réforme fiscale canadienne, ne nous dit pas ce qu'il demande. Ce gouvernement est trop mou pour nous dire, à l'avance, ce qu'il demande parce qu'il sait qu'il ne l'aura pas. Après cela, il voudrait défendre le texte signé plutôt que les demandes du Québec.

Madame... M. le Président, vous êtes revenu, je veux vous dire que ce n'est pas pour nuire au gouvernement, mais, au contraire, selon la logique qu'il a lui-même établie, pour faire que ceux qui ont défendu l'accord constitutionnel à Ottawa soient ceux qui viennent la défendre devant les Québécois. Qu'ils n'essaient pas de se faire aider par d'autres qu'ils n'ont pas considéré utile devoir les accompagner dans ces négociations fédérales-provinciales.

Le député d'Argenteuil n'était pas nécessaire au lac Meech. Ils n'avaient pas besoin de ses lumières, de ses conseils; ils ne voulaient surtout pas qu'il leur porte ombrage. Ils ne voulaient surtout pas qu'il demande plus. Mais, aujourd'hui, une fois qu'ils ont signé leurs papiers, ils voudraient que celui qui a une plus grande réputation quant aux principes vienne leur prêter main-forte pour défendre leurs papiers.

Nous ne devons pas enfermer le député d'Argenteuil dans cette logique infernale de partisanerie. Nous devons le laisser en dehors de ce débat où il n'a pas été partie. Que le député de Jean-Talon et le premier ministre défendent ce qu'ils ont bâti eux-mêmes seuls, sans l'appui du Québec, sans demander quoi que ce soit au Québec, sans même informer le Québec de ce qu'ils demandaient.

Qu'ils vivent eux-mêmes avec leur propre turpitude!

Le Président: Je remercie M. le député de Lévis. Toujours sur la même motion, je reconnais maintenant M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, je serai bref. Je veux seulement souligner, le plus sincèrement possible, ma surprise et ma profonde déception devant l'attitude de l'Opposition. Très sincèrement, je me demande pourquoi l'Opposition refuse que le ministre de l'Éducation soit présent, soit membre de cette commission qui étudiera l'entente conclue par les premiers ministres du Canada au lac Meech pour rapatrier le Québec dans la Fédération canadienne.

Ce sera une commission parlementaire historique parce que l'entente, qui a été conclue au lac Meech, est une entente historique, une entente qui devrait nous amener à vivre comme Québécois, comme Québécoises, comme des partenaires majeurs de cette fédération canadienne, et une entente aussi qui permettra au fédéralisme canadien de pouvoir évoluer dans une dimension nouvelle, plus conforme au défi que nous avons maintenant comme partenaire de cette fédération à laquelle nous tenons comme Québécois et comme membres de ce que nous appelons le Québec, société distincte, auquel nous tenons aussi.

Nous connaissons la très grande compétence du ministre de l'Éducation comme artisan de la politique gouvernementale, qui est présentement celle du gouvernement, et qui, à toutes fins utiles, a trouvé son aboutissement, sous plusieurs de ses aspects, dans cette entente du lac Meech.

Pourquoi l'Opposition veut-elle refuser au député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation du Québec, de faire partie de cette commission? Pourquoi, si ce n'est la peur de voir ce ballon, qu'ils ont gonflé à vide, se dégonfler trop rapidement? Cette attitude du chef de l'Opposition, de l'Opposition en général est déplorable. Depuis que nous avons conclu cette entente, dès le lendemain, le chef de l'Opposition parlait du monstre du lac Meech. Nous avions vendu la maison sans l'avoir visitée, mais le problème, c'est qu'il commentait l'entente sans l'avoir lue. Maintenant qu'il l'a lue, il commence à trouver que ce n'est peut-être pas tout à fait aussi mauvais.

De toute façon, les réactions sont là. Dès le lendemain de cette entente, dans la presse, partout, les meilleurs commentateurs, les commentateurs les plus avisés, les constitutionnalistes les plus compétents, les plus reconnus au Québec et au Canada nous disaient qu'il s'agissait d'une entente historique. Seulement aujourd'hui, seulement ce matin, le professeur Léon Dion dit: "Compte tenu des circonstances, cette entente a atteint les limites du possible." Le professeur Dion nous dit que ce que M. Bourassa a obtenu au lac Meech constitue un progrès considérable sur les demandes initiales du Parti québécois.

M. le Président, on connaît la grande compétence du professeur Dion, comme on reconnaît aussi la pertinence des propos du journaliste Marcel Adam qui, ce matin, lui aussi, nous disait: "Et ceux qui connaissent un peu l'histoire récente et ne manquent pas tout à fait de sens politique ne peuvent qu'être étonnés de l'ampleur des gains obtenus par M. Bourassa le 30 avril." Partout dans la presse, on reconnaît la valeur de cette entente comme un événement historique pour le Québec et pour le Canada.

La véritable raison qui fait que l'Opposition refuse au ministre de l'Éducation de venir siéger à cette commission, c'est qu'ils ont peur de la réaction. Ils ont peur qu'on démontre qu'ils ont réagi trop vite. Ce que je veux dire à l'Opposition, c'est qu'il n'est pas trop tard, réalisez que vous vous

êtes trompés. D'accord, vous avez agi trop rapidement, ça se peut, ce sont des choses qui arrivent, mais réalisez que vous avez une entente qui fera du Québec un partenaire majeur de cette fédération avec des droits que vous-mêmes n'avez même pas demandés.

Je dis à l'Opposition: Réalisez et venez en commission parlementaire pour que, sereinement, au-dessus de la partisanerie, au-dessus de la démagogie, nous puissions ensemble étudier cette entente du lac Meech et que nous puissions voir si des experts pourraient y trouver des failles. Nous, nous sommes persuadés qu'il n'y a pas de faille parce que nous nous sommes assurés, pendant tout ce long processus de discussions et, à la fin, de négociations, que ce que nous négociions, ce que nous avons obtenu, c'est ce que nous pouvions obtenir de meilleur pour le Québec.

J'entendais tout à l'heure le député de Lévis dire: Le ministre de l'Éducation n'a pas à être membre de la commission parce qu'il n'a pas été impliqué dans le processus de discussions. Je veux dire au député de Lévis que, de fait, le ministre de l'Éducation a été impliqué dans tout le processus que nous avons suivi depuis le début jusqu'à la fin comme membre de ce comité que nous avons créé au sein du cabinet pour suivre le dossier constitutionnel. C'est donc un autre motif qui devrait nous amener à recevoir avec plaisir la participation du ministre de l'Éducation à la commission qui étudiera cette entente du lac Meech. (16 h 40)

De fait, le seul motif qui peut pousser l'Opposition à refuser la présence du ministre de l'Éducation, c'est la peur d'être confrontée à une réalité qui, chaque jour, s'affiche maintenant, d'une façon de plus en plus évidente. J'ai de bons amis avec lesquels je m'entends très bien, mais avec qui je ne partage pas les opinions politiques. Ce sont des indépendantistes, les Rhéaume, Manière, de Bellefeuille, pour lesquels j'ai beaucoup de respect. J'ai beaucoup de respect pour ces gens qui sont indépendantistes, qui croient à un Québec indépendant et qui n'ont pas peur d'exprimer leurs idées clairement, qui nous disent clairement: Nous sommes indépendantistes. Ils m'ont dit: Gil, on ne peut pas être d'accord avec votre entente, parce que, nous, nous sommes indépendantistes et, avec cette entente, il ne nous sera plus possible de faire l'indépendance du Québec parce que tous les Québécois et Québécoises vont se rendre compte qu'on peut vivre comme Québécois, comme Québécoises, avec tout ce que cela comprend, au sein de la Fédération canadienne, en tirer les bénéfices que nous devons en retirer. Ils le disent très franchement, honnêtement: Nous sommes contre l'entente parce que nous sommes des indépendantistes.

Il y en a d'autres qui m'ont dit: Nous, on ne peut pas accepter de toucher au pouvoir du gouvernement fédéral que nous voulons le plus fort possible. C'est certain. Je leur dis: Vous avez l'honnêteté de faire valoir vos idées et vous avez un bon motif pour être contre cette entente du lac Meech parce que c'est une entente qui respecte le fédéralisme et qui respecte aussi le fait que les provinces sont des entités politiques autonomes au sein de cette fédération.

Je ne comprends pas l'attitude de l'Opposition et je lui demande le plus sincèrement possible de s'élever au-dessus de la partisanerie et de la démagogie et d'accepter que le ministre de l'Éducation fasse partie de cette commission pour que nous puissions ensemble étudier cette entente du lac Meech pour le mieux-être de l'ensemble de la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le ministre. Je vais reconnaître, sur la même motion, M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je vais essayer, comme à mon habitude, d'avoir, dans mon discours, le respect des êtres humains. Vu qu'une personne est en cause, il faut faire attention plus qu'à l'accoutumée.

Avant de parler de cette motion de fond, je voudrais simplement relever une phrase qui, je l'espère, a été lâchée de façon malheureuse par le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes. Il dit que certains souverainistes lui disent qu'il sera impossible de faire la souveraineté du Québec si cette entente est signée. C'est faux! Il n'y a rien qui empêche un peuple, quelle que soit sa situation, de se libérer. On a vu des gens beaucoup plus mal pris que nous qui l'ont fait. Alors, je dirais à Gil: On le fera.

M. le Président, je voudrais absolument que le ministre des Affaires canadiennes, qui brandit le signe des nazis en me regardant, retire ce geste.

Le Président: M. le député de Terrebonne, je pense que vous avez la parole et je n'ai pas vu de signe qui était...

M. Blais: M. le Président, je tiens à ce qu'il retire ce geste.

M. Gratton: M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, je ne sais si on peut demander à des députés membres

de l'Assemblée nationale de retirer des gestes, mais moi, je demanderai au député de Terrebonne de se rappeler les dispositions de l'article 35, qui lui interdisent de désigner un député, par son nom et, de surcroît, par son prénom. La réserve et le respect des personnes qu'évoquait lui-même le député de Terrebonne au début de ses remarques devraient, je pense, l'inspirer à plus de retenue dans son intervention, ce qui permettra de terminer ce débat dans le calme et la sérénité.

Le Président: M. le député de Terrebonne, vous avez la parole.

M. Blais: M. le Président, parle-mentairement parlant, je ne peux pas vous appeler par votre prénom, mais ce n'est pas un manque de respect envers votre personne. Cela m'a échappé et je le dis. Cependant, je n'aime pas, quand quelqu'un ne partage pas l'idée d'un autre, qu'on fasse un geste comme si être souverainiste au Québec, c'était être nazi. Il y a tout de même une limite. Si vous voulez que je vous porte du respect, ayez-en à mon endroit et envers tous les souverainistes du Québec. Je vous en supplie. Il n'y a rien, absolument rien qui peut empêcher un peuple, quelles que soient les ententes, de prendre... Tous les peuples du monde ont droit à l'autodétermination et le peuple québécois aussi. Nous avons droit à cette autodétermination qui pourrait nous mener à la souveraineté. Donc, quelles que soient les ententes que vous fassiez, je n'aime pas que vous disiez qu'on ne pourrait pas faire la souveraineté. Cependant, comme souverainistes, vu que nous voulons passer d'un pays dont nous faisons partie, qui est fédéraliste, pour aller vers la souveraineté et qu'actuellement la démocratie nous commande - et je respecte la démocratie -de vivre dans ce système fédéraliste, tant qu'à y vivre, nous aimerions, nous les souverainistes, y vivre le mieux possible. Cette entente, nous trouvons qu'elle n'est pas convenable pour le peuple québécois, que vous appelez, par dégradation, la société québécoise. Nous voulons que le peuple québécois vive le mieux possible dans cette fédération avant que, démocratiquement, nous en sortions.

C'est la remarque sur cette phrase que vous avez dite que j'avais à vous faire et je regrette que vous ne puissiez pas retirer votre signe. Il n'a pas été vu à la télévision, mais il était très insultant, monsieur, pour la personne à qui vous parlez. Pour commander le respect aux autres, on doit d'abord respecter la personne à qui on veut le demander. Je ne suis pas un fasciste, je ne suis pas un hitlérien, monsieur. Je suis un grand démocrate.

Celui qui est concerné par cette motion, je me souviens que lorsqu'il était chef du Parti libéral, je me suis levé ici, en Chambre, pour lui rendre hommage. Je m'en souviens, plusieurs mois avant qu'il démissionne, je lui conseillais de démissionner parce que je disais: Le Parti libéral ne peut pas avoir à sa tête un homme qui pense; il lui faut un homme qui dépense, et je savais qu'on le jetterait en bas du précipice. Je reconnais l'honnêteté intellectuelle de cet homme. Je le respecte, je le respecte du fond de moi-même à cause de ses qualités intellectuelles, à cause de ses connaissances. Bien sûr, il peut être ombragé, faisant partie du cabinet, par la solidarité ministérielle. Cela peut ombrager les déclarations qu'une personne peut faire après. On est tenu, quand on est dans un groupe, d'être solidaire. Je reconnais que cet homme serait capable de participer à la commission et serait solide pour ce faire. Mais vu que la chapelle qui est actuellement au pouvoir ne reconnaissait pas ses qualités pendant qu'on était sur la ligne de feu, je ne vois pas pourquoi aujourd'hui on voudrait cibler sur lui pour lui faire poser des gestes qu'il poserait peut-être par solidarité, mais non pas convaincu comme il l'était avant quand il disait aux neuf de ne pas aller parader à Ottawa pour sabrer le rapatriement unilatéral. C'est aussi par décence pour son rôle de député, à cause des nombreux problèmes qu'il y a actuellement au ministère de l'Éducation, la grève des chargés de cours, la grève de Transco, les difficultés avec Le Royer, les parents de Jonquière qui s'énervent, les changements d'école dans Brossard, et que sais-je encore?

C'est bien sûr que vous ambitionnez sur lui, je le vois, mais à ce point, c'est outrepasser les capacités d'un être que je respecte. De ce fait, je m'opposerai à ce qu'il soit à cette commission parce qu'il y a trop... Son devoir d'état lui a toujours servi de leitmotiv dans sa vie. Il serait obligé d'abandonner ses responsabilités du ministère de l'Éducation pour aller essayer de sauver une entente que, nous disait-on, on n'avait pas lue, une entente qu'on qualifie d'historique. Je ne voudrais pas qu'il soit obligé de négliger son devoir d'état pour essayer de sauver du gouffre certaines personnes qui s'y sont elles-mêmes engouffrées. (16 h 50)

M. le Président, je tiens à dire qu'ils ont besoin de lui aujourd'hui pour cette entente. Le communiqué de presse que nous avons limite le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral dans les objectifs futurs mais dans les intrusions du pouvoir de dépenser du fédéral dans le passé aucune entente n'a été conclue, et le gouvernement fédéral est dans l'éducation, dans la formation professionnelle et dans la main-d'oeuvre. Ce sont trois points où le fédéral a mis la main sur l'autonomie du Québec. Nous aurions aimé la participation du ministre de

l'Éducation qui s'oppose certainement à cela, il s'y est toujours opposé, pour qu'il en parle à cette commission mais c'est vous-même qui l'avez rendu persona non grata, et, quant à nous, cela nous peine beaucoup de poser le geste que vous nous commandez de faire par la reconnaissance de ses qualités que vous n'avez pas su faire lorsque le temps y était. Quand quelqu'un est sous les feux de la rampe, on lui donne la main, quand il s'en retire, je m'excuse, on n'essaie pas, par des tergiversations, de venir redonner au pot de beurre son titre de pot de beurre. Quand le pot de beurre est vidé parce qu'on l'a fait sécher au soleil, il n'y a plus rien dans le pot. Merci, M. le Président.

Le Président: Je vous remercie, M. le député de Terrebonne.

Si je comprends bien, M. le leader du gouvernement, c'est la réplique à votre motion?

M. Michel Gratton (réplique) M. Gratton: Oui, M. le Président...

Le Président: Une dernière intervention, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: ...si cela agrée aux membres de l'Assemblée. Très rapidement, j'aimerais simplement clore ce débat en disant que je suis surpris que, du côté de l'Opposition, alors qu'on réclame à cor et à cri qu'on tienne une commission parlementaire ouverte à tous les intéressés, qu'on le fasse à partir de textes juridiques complets, qu'on le fasse supposément, selon les dires du chef de l'Opposition, dans le meilleur intérêt de la défense du Québec, dans la même phrase, on se refuse de laisser et d'accepter la participation d'un des personnages qui ont probablement marqué les dernières années au niveau constitutionnel, autant sinon plus que tout autre, en la personne du député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation.

Je ne relèverai pas les nombreuses accusations qui ont été portées par certains membres de l'Opposition, notamment le député de Gouin, comme si, de ce côté-ci, celui qui vous parle ou tout autre membre de l'équipe ministérielle avait des leçons de loyauté, des leçons de rectitude, à recevoir des membres de l'Opposition et, particulièrement, du chef de l'Opposition aujourd'hui. Sûrement que le comportement du député d'Anjou, chef de l'Opposition, à l'endroit de son chef d'alors, René Lévesque, n'a rien de comparable à ce que tentaient de reprocher certains porte-parole de l'Opposition tantôt à certains membres ministériels.

Ce n'est pas de cela qu'il s'agit, M. le Président. Il nous était apparu, et je suis sûr que c'est ce qui a motivé le premier ministre autant que le ministre délégué aux Affaires canadiennes lorsqu'ils m'ont demandé, à titre de leader parlementaire, de négocier la possibilité que le ministre de l'Éducation, député d'Argenteuil, puisse participer aux travaux de la commission... Ils reconnaissaient, et reconnaissent depuis longtemps, la valeur des avis, des conseils que leur prodigue à tous deux le député d'Argenteuil. Ce n'est pas pour rien que le député d'Argenteuil est membre du comité ministériel sur la constitution. Ce n'est pas pour rien non plus que le premier ministre le consulte sur toutes ces questions, et ce, de façon régulière. C'est donc ce qui incitait le premier ministre et le ministre délégué aux Affaires canadiennes à souhaiter très vivement la présence du ministre de l'Éducation au cours de ces travaux que l'Opposition tantôt qualifie d'historiques, tantôt qualifie d'exercices bidons. Il faudrait savoir, et on le saura peut-être au cours des travaux de la commission, à compter de mardi prochain, où se loge l'Opposition, si, vraiment, ce qui anime l'Opposition, c'est la défense des intérêts des Québécois ou si, par hasard, ce n'est pas plutôt la défense des intérêts du parti et, en particulier, du chef actuel du parti. Je laisse aux membres du Parti québécois le soin d'en juger puisque, il faut bien le constater, ce sont à peu près les seules personnes qui s'intéressent maintenant à ce qui se passe à l'intérieur du Parti québécois.

Pour nous, la commission siégera, tel que le prévoit cette motion que j'ai présentée tantôt, à compter de mardi, 15 heures. Ses travaux seront télédiffusés en direct pour les séances du matin et de l'après-midi et, en différé, à compter de 23 heures pour ce qui touche la partie des travaux qui seront exécutés après 18 heures, c'est-à-dire de 20 heures à 22 heures. La commission siégera trois jours au cours de la semaine prochaine. Le premier jour sera consacré à un débat entre parlementaires, les députés membres de la commission, dont le premier ministre et le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, malheureusement, sans pouvoir y inclure le député d'Argenteuil. Les deux jours suivants porteront sur l'audition d'experts invités tant par le gouvernement que par la formation de l'Opposition. Au cours des trois jours de la semaine suivante, on pourra inviter d'autres experts. Bien sûr, on entendra également des personnes, des organismes qui auront manifesté le désir de se faire entendre.

Nous pensons effectivement qu'il s'agit là d'une commission dont les travaux sont extrêmement importants pour l'avenir du Québec. Nous entendons nous y consacrer de façon sérieuse dans le calme et la sérénité, si possible. Je spécifie "si possible" parce que, si le débat que nous venons d'observer cet après-midi est une indication, cela risque

fort de ne pas servir les meilleurs intérêts des Québécois. Je dis tout de suite, M. le Président, que, quant à nous, nous abordons ces travaux avec objectivité, avec le souci très sincère de tenter d'améliorer le sort des Québécois, de tenter de faire en sorte qu'enfin le Québec soit partie prenante de l'acte constitutionnel de 1982 et ce, dans le meilleur intérêt de nos concitoyens. J'invite l'Opposition, la réflexion de la fin de semaine aidant, à reconsidérer la possibilité de permettre au député d'Argenteuil de faire partie des travaux de la commission. Quoi qu'il en soit, nous serons là à l'heure convenue et nous invitons l'Opposition à nous y retrouver.

Le Président: Je remercie le leader du gouvernement. Avant d'appeler le vote sur la motion de renvoi en commission, en vertu de l'article 146 de nos règles de procédure, je tiens à aviser les membres de cette Assemblée qu'il y a eu consentement des deux formations politiques composant cette Chambre pour aller au-delà de l'article 146 de notre règlement, quant à cette motion, cet après-midi, sans créer de précédent. Est-ce que la motion de renvoi en commission sur l'entente du lac Meech est adoptée?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président: Adopté sur division. Toujours aux motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, je voudrais maintenant proposer la motion suivante...

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Le leader du gouvernement va comprendre pourquoi je me lève. Étant donné qu'il s'apprête à faire une motion de suspension des règles, il y a un ordre de la Chambre pour discuter d'une motion du député de Lévis et je pense qu'on pourrait annoncer immédiatement qu'il y a eu consentement pour que cet ordre de la Chambre soit reporté à mardi.

Le Président: Sur l'intervention de M. le leader de l'Opposition, M. le leader du gouvernement. (17 heures)

Motion proposant la suspension de certaines règles en vue de l'adoption du projet de loi 48

M. Michel Gratton M. Gratton: Oui, M. le Président. Le leader de l'Opposition a raison. D'ailleurs, le libellé de la motion que je présente prévoit déjà les dispositions qui nous permettront de disposer de ce débat, qui avait été considéré comme prioritaire pour la séance d'aujourd'hui. Donc, je fais motion afin de suspendre certaines règles de procédure en vertu de l'article 182 du règlement de l'Assemblée nationale.

La motion se lit comme suit: Qu'en raison de l'urgence de la situation, il y a lieu, conformément aux dispositions des articles 182 et 183 du règlement, et ce, en vue de l'adoption du projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal, de proposer que les règles ci-après mentionnées soient suspendues. Les articles 20 et 54, les deuxième et troisième alinéas de l'article 84, les deuxième, troisième et cinquième paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 93, 111 à 114, 205 à 208, 230, 232, 233, 236, 237, 240, 241, le deuxième alinéa de l'article 244, à l'article 248, les mots "l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente", les deuxième et troisième alinéas de l'article 256 et à l'article 272 les mots "le discours et le débat à l'Assemblée sont prioritaires".

Que les règles ci-dessus énumérées soient suspendues jusqu'à l'adoption du projet de loi.

Report du débat sur le rapport de la commission de l'Assemblée nationale

Que le débat de cinq heures sur le rapport de la commission de l'Assemblée nationale, qui devait se tenir aujourd'hui, conformément à un ordre de l'Assemblée, soit reporté au mardi 12 mai 1987.

Que, malgré les dispositions de l'article 29, toutes les séances de l'Assemblée nationale soient publiques, que la commission plénière fasse rapport au plus tard deux heures après le début des travaux; que, dix minutes avant l'expiration de ce délai, le président mette aux voix sans débat les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé. Que le débat sur l'adoption du projet de loi soit limité à 20 minutes par groupe parlementaire et que l'Assemblée puisse siéger dès l'appel des affaires du jour jusqu'à l'adoption du projet de loi 48 sous réserve de compléter les deux dernières étapes des affaires courantes.

M. le Président, ce qui justifie la présentation de cette motion de suspension des règles, c'est essentiellement que la grève des chargés de cours de l'Université du Québec à Montréal a commencé le 23 mars et en est maintenant à sa septième semaine. Il y a 1900 chargés de cours membres du syndicat et inscrits sur les listes de l'université. Il y a entre 1000 et 1100

chargés de cours engagés par session.

Malgré l'intervention d'un médiateur du ministère du Travail dans le dossier et les rencontres qui ont eu lieu avec les parties, aucune entente n'est possible au moment où nous nous parlons. Un écart de 7 000 000 $ sépare les parties et cet écart porte principalement sur les clauses salariales et sur le perfectionnement.

Cette grève cause un tort considérable aux étudiants de l'UQAM. Plusieurs ont des engagements pour des emplois d'été à l'extérieur. D'autres doivent compléter leur baccalauréat pour être admis aux examens ou aux stages des corporations professionnelles. La session d'été est déjà fort compromise et plusieurs ne pourront compléter leur formation dans les délais qu'ils s'étaient fixés. Pour l'institution, cette grève s'ajoute à celle qu'a déclenchée l'ANÈQ, l'automne dernier, et nuit considérablement à sa réputation.

Les règlements de l'Université du Québec prévoient qu'une session doit comprendre douze semaines complètes de cours pour qu'elle puisse être valide. Normalement, une session comprend quinze semaines. Au moment où la grève fut déclenchée, dix semaines de cours avaient été complétées. Le projet de loi vise donc à assurer le retour au travail des chargés de cours pour permettre à l'université d'organiser le rattrapage de deux semaines nécessaires pour valider la session et pour voir à l'organisation de la session d'été.

Ce sont ces raisons qu'explicitera davantage le ministre de l'Éducation, parrain du projet de loi 48, qui incite le gouvernement à ne faire simplement qu'assumer ses responsabilités devant l'urgence de la situation.

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement, pourriez-vous faire le dépôt de votre motion, s'il vous plaît?

M. le ministre de l'Éducation.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Mme la Présidente, c'est toujours avec une réelle tristesse que nous devons inviter l'Assemblée nationale à intervenir de manière extraordinaire dans un conflit de travail qui devrait, suivant l'économie de nos lois et suivant notre tradition démocratique, trouver sa solution par la négociation libre entre les parties qui sont immédiatement concernées. Nous avons chaque année à mettre au point au Québec des centaines de conventions collectives de travail. La très grande majorité sont arrêtées à la suite de négociations libres entre les parties à l'intérieur d'un cadre que définit la législation du Québec avec l'aide, au besoin, des services du ministère du Travail et, généralement, le processus se termine par une décision libre des parties concernées.

Dans ce cas-ci, c'est-à-dire dans le cas du conflit qui sévit à l'Université du Québec depuis le 23 mars dernier, c'est-à-dire depuis sept semaines, les chargés de cours, au nombre d'environ 1000 comme l'a dit tantôt le leader du gouvernement, ont décidé de mettre fin à la prestation de leurs cours parce qu'ils ne réussissaient pas à s'entendre autour de la table de négociation avec leur employeur, qui est l'Université du Québec à Montréal. Nous avons dès le début du conflit et même bien auparavant suivi de près le déroulement des événements tout en respectant la liberté de chacune des parties. En particulier, dans ce cas-ci, la liberté de l'Université du Québec à Montréal qui est un grand établissement universitaire et qui dispose comme toutes les autres universités de la faculté de négocier elle-même ses ententes collectives de travail avec ses employés salariés.

Mais à mesure que le conflit se prolongeait, nous en avons été saisis de manière de plus en plus pressante. Les deux parties ont d'abord fait appel à l'autorité du gouvernement par la voie des services réguliers du ministère du Travail. Dès le début du conflit, la partie patronale faisait appel au ministère du Travail demandant l'intervention d'un conciliateur. Je dois rendre hommage à mon collègue, le ministre du Travail, qui parlera tantôt sur le principe même du projet de loi, pour la collaboration dont il a assuré les parties et pour la collaboration qui a constamment existé entre lui et le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science depuis le tout début du conflit.

Le ministre du Travail a mis au service des parties deux conciliateurs qui sont parmi les meilleurs de la magnifique équipe de conciliateurs que nous avons au ministère du Travail. Ces deux conciliateurs se sont mis à la disposition des parties, ont multiplié les démarches pour les rapprocher et ils ont dû conclure qu'il était impossible d'en arriver à un règlement négocié. Moi-même, en ma qualité de ministre responsable de l'enseignement universitaire, devant les pressions qu'on exerçait sur moi, à la fois la partie syndicale, la partie patronale et les étudiants, surtout les étudiants... Je pense qu'on me connaît assez dans cette Chambre. Mon principal défaut n'est pas l'indifférence. Le député de Laviolette m'a souvent reproché au contraire d'intervenir peut-être un peu trop dans certaines situations. Il aurait voulu que je reste parfois plus collé à ma chaise. J'ai bien de la difficulté. J'ai rencontré les parties. Je les ai rencontrées le 10 avril une première fois. J'avais laissé le conflit se développer pendant quelques jours.

Au bout d'une couple de semaines, j'ai dit aux parties: J'aimerais bien vous voir

pour vérifier où en est le conflit. Les deux sont venues. J'ai fait venir les étudiants également. Chacun m'a saisi de son expérience, de sa perception du problème. Nous avons repris l'expérience le 27 avril. C'était au lendemain de Pâques comme vous savez. La première rencontre avait eu lieu avant Pâques. Nous espérions que le congé pascal procurerait le répit nécessaire pour permettre aux parties d'en venir à une entente. Au lendemain de Pâques, comme le conflit n'était pas réglé, j'ai rencontré de nouveau les parties. Comme rien n'arrivait encore, je les ai rencontrées une troisième fois, le 4 mai, c'est-à-dire lundi de cette semaine. (17 h 10)

Avant de m'en venir à Québec pour la session, j'ai insisté pour voir les deux parties afin de leur dire clairement qu'on ne pouvait pas continuer indéfiniment à chercher en vain une solution.

Nous avons eu une dernière rencontre hier soir, au bureau du premier ministre, avec le président de la CSN, accompagné d'un de ses conseillers. J'étais accompagné, de mon côté, du négociateur principal de la partie patronale, Me Richard Drouin. Nous avons fait une dernière tentative, pendant au moins une couple d'heures, pour trouver un terrain de rapprochement. Au bout de ces conversations, nous avons dû convenir, de part et d'autre, que l'écart séparant les deux parties était trop grand et qu'il serait impossible, dans une période de temps que je qualifierais de raisonnable, de trouver une solution par la voie des négociations.

Donc, premier point, voici un conflit qui ne présente aucune chance sérieuse d'aboutir à un règlement négocié dans un avenir prévisible. Cela est une conclusion que tirent les conciliateurs, les deux parties, le ministre du Travail que j'ai consulté avant d'en venir à ma conclusion et que je tire moi-même, Mme la Présidente, en mon âme et conscience. J'en ai fait part au gouvernement, hier après-midi, à l'occasion de la réunion du Conseil exécutif.

Deuxième facteur central, le plus important de tous, les conséquences de ce conflit pour les étudiants. On peut bien se dire théoriquement: Les deux parties ne s'entendent pas aujourd'hui, cela fait sept semaines, bien qu'elles continuent une huitième semaine, une neuvième semaine, une dixième semaine, et, un jour, elles se rendront bien compte de la nécessité d'en venir à un accord.

Ce serait vrai si nous étions dans un conflit ordinaire de travail. S'il s'agit d'une entreprise qui vend des vêtements, des chaussures ou des appareils ménagers et où on est en grève, le client de ladite entreprise peut se procurer les biens dont il a besoin ailleurs. C'est la pénalité que les employés imposent à l'employeur. Ils lui disent: II n'y a pas moyen d'en venir à une entente avec vous, nous allons empêcher le fonctionnement de l'entreprise en retirant librement notre prestation de travail, en retour de quoi, vos clients seront dégagés et ils pourront s'adresser ailleurs avec le risque que vous les perdiez pour toujours. Cela est un facteur qui agit sur l'entrepreneur pour l'amener à chercher un règlement négocié.

Dans ce cas-ci, vous êtes en face d'une clientèle captive. Ce n'est pas du tout la même chose. Un étudiant, qui a commencé sa formation à l'UQAM, ne peut pas facilement décider, au milieu d'une année, en plein coeur d'un semestre, de s'en aller à l'Université de Montréal ou à l'Université McGill. Il a suivi des cours suivant une économie qui est propre à l'UQAM, suivant un cheminement qui n'est pas le même à cette institution que dans les autres. La seule voie de sortie qu'il a, c'est de s'en aller sur le marché du travail en risquant de gaspiller toute cette longue période de sa vie qu'il a consacrée à se préparer à acquérir un diplôme universitaire. Voici une clientèle qui est captive.

Maintenant, si j'apportais mon seul témoignage, vous auriez raison d'en douter parce que je ne suis plus étudiant à l'université. Je l'ai été autrefois, à une époque où les grèves d'étudiants et de professeurs n'étaient pas aussi fréquentes que depuis quelques années. Par conséquent, je ne suis pas le meilleur témoin.

J'ai fait venir les étudiants qui m'avaient écrit, tout d'abord. Je vais vous lire le message qu'ils m'adressaient dès le 8 avril dernier. Ensuite, je vous donnerai les éléments qu'ils m'ont communiqués ces jours derniers, à ma demande. Dès le 8 avril dernier, le Front commun des étudiants de l'UQAM, lequel regroupe environ 65 % de tous les étudiants de l'UQAM - il regroupe tous les étudiants des sciences de l'administration, du secteur de la formation des maîtres et de l'informatique; c'est au moins 55 % à 60 %, peut-être que 65 %, c'est un peu fort - m'a envoyé cette lettre: "M. le ministre, la présente vous est adressée par le Front commun des associations étudiantes de l'UQAM, qui regroupe tout près de 20 000 étudiants actuellement inscrits à l'Université du Québec à Montréal. Nous représentons 55 % de la clientèle étudiante de cette institution." Il y a eu des déplacements de voies au cours des dernières semaines, pour des raisons sur lesquelles j'aurai l'occasion de revenir plus tard. "Les sept associations étudiantes qui composent le front commun - dont voici la liste, entre parenthèses: Association générale des étudiants en informatique, Association des étudiants du module des sciences comptables, Association des étudiants au certificat en sciences comptables, Association

des étudiants en ressources humaines, Association des étudiants du module d'administration, Association des étudiants du module du baccalauréat en comptabilité et en management et Association des étudiants du secteur de la formation des maîtres -réclament aujourd'hui l'intervention de votre gouvernement et de l'Assemblée nationale, s'il y a lieu, afin d'accélérer le plus possible le règlement du conflit qui sévit entre le Syndicat des chargés de cours et la direction de l'UQAM. Cette intervention nous apparaît d'autant plus urgente que la direction de l'université a fait connaître son intention de prolonger la session actuelle d'une journée pour chaque jour de grève des chargés de cours, à compter du lundi 13 avril. "Depuis le 23 mars dernier, les étudiants de l'UQAM sont les victimes involontaires d'une grève qui, malgré son caractère légal, ne cesse de leur porter préjudice de plusieurs manières: perte de cours, formation incomplète ou insuffisante, incapacité potentielle de se présenter aux examens des corporations professionnelles, retard éventuel dans l'obtention d'un diplôme, incertitude quant à la tenue de stages déjà planifiés pour la saison d'été, danger de perte d'emplois d'été si le calendrier académique est prolongé, difficultés d'inscription aux cours de la prochaine session, perte éventuelle de salaire et d'expérience, rajustement possible au chapitre des prêts et bourses, dépenses supplémentaires de logement et de subsistance. "Ce sont là les exemples les plus évidents et, malheureusement, aussi, les plus éloquents de l'odieux que cette grève fait porter sur les épaules des étudiants qui ont acquitté l'ensemble de leurs frais de scolarité et qui s'attendent à recevoir l'ensemble des cours auxquels ils sont inscrits. Chaque jour supplémentaire de grève accroît ce préjudice imposé aux étudiants. Nous croyons donc tout à fait justifié de réclamer l'intervention des pouvoirs publics que vous représentez afin que les deux parties trouvent rapidement un terrain d'entente et, partant de là, que les cours reprennent le plus tôt possible, suivant l'horaire régulier."

Cela, c'était en date du 8 avril. J'ai fait revenir les étudiants à mon bureau à Montréal le 27 avril. Je voulais savoir où ils en étaient, et ils m'ont dit que la situation était infiniment plus grave qu'elle ne l'était lorsque je les avais rencontrés la première fois. Je leur ai demandé de me mettre par écrit des exemples concrets de ces préjudices que subissent les étudiants, d'en énumérer quelques-uns.

On me signale que l'obtention de bourses privées - il y a les bourses du gouvernement, mais il y a beaucoup de bourses privées qui sont également à la disposition des étudiants - nécessite la plupart du temps la réussite d'un certain nombre de crédits durant une année académique. Plusieurs étudiants comptaient sur la session d'été pour accumuler ces crédits. Si la session d'hiver n'a pas pu être complétée normalement, la session d'été ne peut pas commencer pour ces étudiants. Il faut d'abord qu'ils complètent leur session d'hiver avant d'avoir accès à la session d'été, et c'est la clé de la situation qui nous oblige à nous réunir de manière spéciale aujourd'hui. Tant que la session d'hiver n'a pas été complétée, la session d'été est compromise, elle ne peut pas avoir lieu pour des centaines d'étudiants. Dans ces cas-ci, les étudiants qui avaient planifié l'obtention de bourses privées en vue de l'année 1987-1988 seraient privés de l'accès à ces bourses. C'est grave.

L'ensemble des maîtrises offertes dans les universités commencent en septembre, de manière très générale, et pour plusieurs, la session d'été constitue la dernière chance de finir à temps leur baccalauréat, sinon, ils devront attendre une année supplémentaire avant d'avoir accès à un programme de maîtrise. Pour plusieurs entreprises, l'obtention du bac est une condition sine qua non à l'embauche d'un finissant d'université. La reprise des cours de la présente session et la tenue de la session d'été sont primordiales pour permettre à des centaines d'entre eux - là on ne parle pas de quelques douzaines, ils sont des centaines et des milliers... Seulement en sciences de la gestion à l'Université du Québec à Montréal, savez-vous combien il y a d'étudiants, Mme la Présidente? Il y en a près de 15 000. Alors, ce ne sont pas des choses qu'on peut traiter à la légère - près de 15 000 étudiants. (17 h 20)

On a parlé du problème du logement de ces étudiants. Un grand nombre d'entre eux étaient logés à Montréal et devaient terminer leurs études à la fin d'avril. Mais, leurs baux sont échus. Où sont-ils? Moi, je crains beaucoup que plusieurs d'entre eux ne soient retournés dans leur foyer; un grand nombre d'entre eux viennent de l'extérieur de Montréal. Ce ne sera pas facile de les ramener pour finir la session d'hiver. Il faut essayer de les ramener par tous les moyens. Déjà, un préjudice financier énorme est infligé à ces personnes tout à fait innocentes du litige dont elles sont les victimes.

Perte de salaire pour plusieurs d'entre eux pendant la saison d'été. Vous savez que les emplois d'été se règlent au mois d'avril ou au tout début de mai; c'est pratiquement réglé. Dans ce cas-ci, la plupart devaient commencer à travailler à compter de la fin de mai. Ne sachant pas à quoi s'en tenir, qu'est-ce qui va arriver? La mesure que nous proposerons tantôt va permettre de terminer cette session au cours des deux prochaines

semaines. Ils vont savoir à quoi s'en tenir et, après cela, ils seront libres, ils auront réglé leur trimestre, ils pourront engager la session d'été, dans le cas de ceux qui sont intéressés à poursuivre en été.

Je dois souligner qu'à l'UQAM, contrairement à nos autres institutions universitaires, avec une exception majeure pour Concordia, les études, cela marche à longueur d'année. Les gens, en moyenne, sont plus âgés que dans les universités ordinaires. C'est une université, nous le savons tous, qui, à bien des égards, a été plus proche des citoyens ordinaires; elle a pratiqué l'idéal de l'accessibilité d'une manière plus poussée que les autres et, par conséquent, sur le modèle de l'ancien collège Sir George Williams qui est maintenant devenu l'Université Concordia dont nous sommes tous fiers, surtout de ce point de vue, a essayé de faire une université plus "peuple", une université plus proche du peuple. C'est malheureux parce que c'est celle qui a été le plus appelée à souffrir de conflits de travail de toutes sortes qui rendent l'accessibilité beaucoup plus symbolique et théorique. Quand les cours ne sont pas offerts, on a beau avoir les plus beaux principes et les plus beaux programmes gouvernementaux, au bout de la ligne, cela donne un gros zéro; c'est ça que cela donne.

Je pourrais continuer, je le ferai tantôt, parce que le temps se fait court, mais il y en a une quantité énorme, j'ai une quinzaine d'exemples concrets qui m'ont été présentés. Je pense que c'est assez clair. Des milliers d'étudiants ont signé un contrat avec l'UQAM en vertu duquel ils ont droit de recevoir des prestations de cours et des services de professeurs pour la formation à laquelle ils aspirent à juste titre. Â cause de ce conflit qui se prolonge, ils subissent déjà, si nous n'agissions pas maintenant, un préjudice très grave que la collectivité n'a pas le droit de leur imposer. C'est tout l'idéal de l'accessibilité, de l'égalité des chances et de la démocratisation de l'éducation qui est impliqué dans la mesure que nous sommes appelés à prendre aujourd'hui. Si nous voulons que l'accessibilité soit autre chose qu'un idéal théorique, qu'elle soit une réalité vécue, il faut que cela s'applique pour les étudiants d'abord; c'est à eux que nous pensons.

Vous me direz: Le groupe qui est allé vous voir, M. le ministre de l'Enseignement supérieur, ne représente pas 100 % de la clientèle étudiante. Il y a un autre groupe qui représente une partie de la clientèle étudiante qui n'a pas demandé à rencontrer le ministre de l'Enseignement supérieur, qui a essayé de compliquer les choses en venant faire une occupation sauvage à mon bureau de Lachute, une occupation barbare. Je vous le dis franchement, je les ai fait sortir par la police, on n'a pas attendu, ils n'avaient pas affaire là, ce n'était pas leur droit d'occuper un lieu public, on leur a dit de retourner chez eux, de s'occuper utilement dans la société, qu'on ne marchait pas avec des cris, avec de la force, cela a été bien simple.

Ils ont fait cela à mon bureau de Montréal, une fois également. Pendant que des collaborateurs de mon bureau négociaient avec eux dans mon bureau de Québec, une autre bande de jeunes voyous s'est présentée à mon bureau et a terrorisé mon personnel. Ils ne m'auraient pas terrorisé si j'avais été là. On n'a pas pu discuter sérieusement avec eux. On ne peut pas vraiment s'interroger sur l'apport qu'ils pourraient fournir au conflit; ils ont eu toute la chance de le fournir. Dieu sait que le ministre actuel et ses collaborateurs sont accessibles à tous ceux qui ont des points de vue à communiquer. Nous nous faisons un point d'honneur de les écouter et de réagir quand ils nous communiquent une opinion. Par conséquent, je pense que de ce point de vue la démonstration a été amplement faite que des dommages, déjà irréparables malheureusement, ont été subis. Le souci le plus élémentaire du bien commun oblige donc l'Assemblée nationale à prendre maintenant ses responsabilités.

Il y a un autre facteur sur lequel je dois insister. C'est le dégât que cet arrêt de travail cause à l'Université du Québec. L'Université du Québec est en train de devenir un de nos excellents établissements universitaires. Je signale, par exemple, que dans le domaine des sciences de la gestion, c'est l'établissement universitaire qui obtient les meilleurs résultats aux compétitions nationales de l'Institut des comptables agréés de tout le Canada. Elle n'a pas peur de présenter ses candidats à ces compétitions et je me souviens d'un jour où l'ancien ministre de l'Enseignement supérieur, M. Bérubé, et moi-même avions été d'accord pour féliciter l'Université du Québec à Montréal de ses excellentes performances à ces compétitions nationales.

Je recevais ces jours derniers, en date du 4 mai, une lettre du recteur de l'Université du Québec à Montréal - dont je vais vous donner lecture; je pense que cette lettre parle plus que tous les autres témoignages que je pourrais apporter moi-même - au sujet du tort irréparable qui est causé à l'Université du Québec par cet arrêt de travail qui se prolonge indéfiniment. "M. le ministre. "Au moment où débute la septième semaine de la grève du syndicat des chargés de cours, je dois m'adresser à vous pour vous faire part de l'angoisse croissante que ce conflit inspire à toute la communauté de l'Université du Québec à Montréal. Ce qui a débuté comme un conflit de travail dégénère en un processus très inquiétant de désagrégation de l'université et menace

maintenant tout l'avenir de l'établissement.

Ce conflit de travail, en dépit du calme apparent qui l'entoure, a déjà fait de sérieux ravages. Évidemment, la réputation de l'université en est atteinte, bien injustement, compte tenu des remarquables progrès que nous avions enregistrés au cours des dernières années. Les étudiants, les professeurs, le personnel non enseignant et les cadres sont profondément perturbés et démoralisés par une situation dont ils sentent tous et toutes qu'ils sont des victimes impuissantes.

Au-delà de ces difficultés prévisibles, la persistance du conflit a d'ores et déjà occasionné de très graves préjudices aux étudiants et aux étudiantes ainsi qu'à la mission pédagogique de l'université. J'en veux pour preuve ce qui suit. La validation et la conclusion de la session d'hiver 1987 pour les cours dispensés par les chargés de cours deviennent chaque jour plus complexes et plus problématiques. Un nombre croissant d'étudiants ont quitté l'université ou s'apprêtent à le faire en raison de leur travail d'été, de l'expiration de leur bail, de contraintes personnelles ou familiales aussi valables. Seront-ils disponibles pour la reprise des activités? De même, de nombreux chargés de cours occupant ailleurs qu'à l'université un emploi principal seront-ils disponibles pour reprendre le travail?

Il y a plus grave encore. Pour la session d'hiver 1987, l'étirement du conflit et la distance temporelle croissante entre les dix semaines d'enseignement complétées avant le 23 mars et les deux autres semaines qui sont le minimum nécessaire à la validation de la session menacent sérieusement la qualité des apprentissages des étudiants. Sur ce point précis, j'ai le devoir de vous faire part, à titre de recteur, de ma très grande inquiétude, laquelle est largement partagée par les étudiants et les étudiantes et par toute la communauté de l'UQAM. La session d'été 1987, indispensable à de nombreux étudiants, est significativement réduite puisqu'une partie importante des enseignements ne peut pas être attribuée, les chargés de cours n'étant pas là pour accepter les charges. De plus, la session d'hiver, nous l'avons vu tantôt, n'est pas encore complétée. L'ombre de ce conflit commence même à menacer la session d'automne 1987 dont l'organisation est de plus en plus problématique avec chaque jour qui passe. La détérioration de la vie pédagogique de l'université, le préjudice très grave que subissent étudiants et étudiantes, le danger qui pèse toujours davantage sur l'université ne peuvent ni ne doivent être sous-estimés." (17 h 30)

Je passe sur d'autres passages que j'aurai peut-être l'occasion de citer plus tard dans le débat. Je n'aurai pas d'objection à communiquer copie de cette lettre à l'Opposition si elle veut bien que je la dépose. "J'ai donc le pressant devoir de vous informer que, seule, l'UQAM ne peut plus assurer la sauvegarde des droits essentiels des étudiants et des étudiantes et que seule - et j'ai compris que "seule", cela voulait dire sans l'aide du gouvernement et de l'Assemblée nationale - l'UQAM ne peut plus assumer l'intégralité de ses obligations académiques envers la société québécoise. L'UQAM sait que vous serez sensibles à cet état de fait dramatique."

Je termine ici la citation. Je pense que ces faits et ces passages de la lettre du recteur de l'UQAM en date du 4 mai, que j'ai portés à votre connaissance, parlent plus fort que tous les arguments que je pourrais invoquer, Mme la Présidente, afin de justifier l'urgence que nous sentons actuellement et qui nous inspire la conviction qu'il est du devoir de l'Assemblée nationale d'agir sur ce conflit pendant qu'il est encore temps de sauver au moins l'essentiel de cette session d'hiver qui est déjà, quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse à compter de maintenant, gravement compromise, mais qu'il serait encore pire et infiniment condamnable de laisser se perdre totalement sans que l'Assemblée nationale ne fasse rien.

Voilà la raison qui nous a inspirés de présenter la motion d'urgence déposée tantôt par le leader du gouvernement. Je pense que nous avons fait tout ce qui est raisonnablement possible pour empêcher qu'on en vienne jusque là. Mais, parce que nous respectons la lettre et l'esprit de notre législation du travail, nous ne pouvions faire autrement que nous ne l'avons fait jusqu'à maintenant et nous en sommes venus au point où l'incitation n'est plus suffisante, où l'encouragement et la présence ne produisent pas les résultats attendus, il faut la présence concrète et agissante de l'Assemblée nationale elle-même. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Éducation, de la Science et de l'Enseignement supérieur.

M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez tout d'abord de reprendre certains propos du ministre de l'Éducation puisque le leader lui a confié la responsabilité, en tout cas c'était leur droit de se partager un temps. Je dois vous avouer que je suis énormément surpris des propos utilisés par le ministre de l'Éducation parce que toute son argumentation est basée sur le sens des responsabilités, sur son devoir d'agir. À mon point de vue, M. le Président, au moment où le ministre aurait dû

intervenir, il n'a précisément pas pris ses responsabilités. Il a regardé passer le train. Là, il a dit: C'est grave, il y a des préjudices pour les étudiants. Je comprends qu'il y a des préjudices pour les étudiants, et, au moment où le projet de loi intervient, il va en créer encore davantage des préjudices pour les étudiants.

J'ajouterai un bémol cependant. Pour les finissants, je comprends que c'est un problème très particulier puisqu'ils devraient peut-être se réinscrire à des sessions. Mais, pour les étudiants réguliers qui sont en cours d'études, qui n'ont pas terminé, qui ne sont pas à la fin de leurs études ou pour qui ce n'est pas la session terminale, ou bien on manque d'imagination, ou bien on manque de moyens, mais il me semble qu'il y a une foule de possibilités. Combien d'individus qui, à cause de maladie au cours d'une session, se réinscrivent à des cours additionnels à l'autre session et réussissent à rattraper à l'intérieur d'un délai de six ou sept mois ce qu'ils ont perdu?

Ma surprise est d'autant plus grande que c'est le ministre lui-même qui dit: Dans deux semaines, on aura rattrapé tout ça. Pourquoi n'a-t-il pas agi au moment où c'était important et que tous les étudiants étaient encore dans les universités, où ces jeunes n'auraient pas perdu l'occasion d'avoir un travail de vacances? Mon fils est à l'Université de Montréal, et ils ont fini. Si le ministre était intervenu après quatre semaines de conflit comme ministre de l'Éducation, quatre semaines de conflit, c'est beaucoup en éducation. Le gouvernement du Québec est toujours intervenu en éducation après un maximum de douze ou treize jours. C'est l'ultime nombre de jours de grève que j'ai vu en éducation.

M. le Président. C'est la première fois que je vois... Je ne parle pas du projet de loi 67, M. le ministre. Vous parlez d'avant le projet de loi 25. Je parle depuis le projet de loi 25, depuis le moment où les négociations sont contrôlées par le niveau de l'État, par le gouvernement pour le contenu monétaire. Il n'y a jamais eu une grève qui ait dépassé treize jours dans quelque secteur de l'éducation que ce soit. C'est une première, c'est une première loi d'exception dans le domaine de l'université à ma connaissance, en tout cas, pour la vie politique. Si le ministre était intervenu au bout de quatre semaines en disant qu'il reste deux semaines, ces jeunes auraient fini le rattrapage de deux semaines et seraient précisément sur le marché du travail, comme tous leurs autres collègues.

Vous demandez à des jeunes de quitter des emplois, dans certain cas, à d'autres, de se priver d'aller dans quelques jours sur le marché du travail. Simultanément, ce beau gouvernement fait des annonces et demande à des gens d'affaires de faire de la publicité pour le placement étudiant. Vous devriez vous consulter un peu, vous devriez vous parler un tantinet. Il me semble que le ministre, avec son sens des responsabilités, toute son argumentation aurait eu de la logique - parce que, dit-il, ce sont deux semaines de récupération - avant de placer des jeunes dans une situation encore pire.

Sept semaines! C'est lui-même qui dit sept semaines de conflit. Sept semaines de conflit à l'université, entre vous et moi, est-ce que le ministre n'aurait pas pu tenir les mêmes propos après quatre semaines de grève dans le monde universitaire? Est-ce que le ministre n'aurait pas placé les jeunes dans une situation moins odieuse que celle où il les place aujourd'hui? La première personne qu'on doit regarder quand on traite d'un conflit pareil, c'est le bénéficiaire, le jeune, l'étudiant, celui ou celle qui est à parfaire ses études. On est capable de faire preuve d'imagination, que ce soit dans une commission scolaire, dans un cégep ou dans une université, pour permettre à certains de ne pas être pénalisés doublement.

Ce que le ministre fait aujourd'hui en obligeant les jeunes à revenir, en ne leur offrant même pas la possibilité de récupération sans qu'ils soient pénalisés, c'est qu'il les pénalise doublement, M. le Président. Non seulement il les oblige à payer du logement dans certains cas... Les jeunes avaient loué un logement jusqu'au 30 avril. Vous les obligez à payer du logement, bien souvent, en mai. Ce sera un mois de loyer à payer, qu'on le veuille ou non, ou des chambres à prix fort élevé. Ce n'est pas tout le monde qui demeure au campus universitaire, là où il y en a. Qu'est-ce qu'on leur demande dans certains cas? De quitter l'emploi qu'il ont postulé. On leur demande des sacrifices extraordinaires, à ces jeunes.

Je comprends et j'ajoute toujours la nuance que j'ai faite en ce qui regarde les finissants. Je comprends que c'est un point de vue assez différent. Il me semble que le ministre, au moment où il invoque l'urgence, le train est passé. II aurait dû invoquer l'urgence au moment où il plaçait au moins... Ce n'est jamais si bon, une session de douze semaines quand c'est quinze semaines, le programme normal; je n'en disconviens pas, c'est clair. Mais, au moins c'est un minimum qui était fixé, douze semaines. Si le ministre avait posé ce geste à la fin de la quatrième ou à la fin de la cinquième semaine, il plaçait au moins l'étudiant dans la même situation que les autres étudiants du Québec, peut-être pas en termes de contenu de cours, mais au moins en termes de capacité d'emploi, en termes de possibilité pour le placement étudiant, en termes de préjudice additionnel qu'il doit subir et qu'on lui fera subir par l'adoption de cette loi, au moment où l'on se parle.

À mon point de vue, M. le Président,

ce n'est pas une rigueur qu'on vient de démontrer, c'est une mollesse, une faiblesse antérieure. Invoquer l'urgence à ce stade-ci, à mon point de vue, M. le Président, c'est carrément reconnaître notre impuissance à faire quelque chose au moment où cela aurait été encore plus facile et moins préjudiciable pour les jeunes étudiants de l'Université du Québec. 3e suis énormément surpris. Le ministre invoque également les questions de bourses. Je m'excuse, mais, là-dessus, le ministre sait très bien que toute la notion de prêts et bourses, c'est une question réglementaire. Il pouvait pertinemment régler ce problème en disant: Je ne suis pas pour pénaliser des jeunes sur le plan d'une bourse parce qu'ils sont victimes d'une grève de relation du travail. Je peux bien décider, comme ministre ou avec l'assentiment du Conseil des ministres, et ce, par décret, que tous les jeunes qui ne sont pas nécessairement finissants, mais qui poursuivront des cours aux autres sessions, ne se verront pas pénalisés sur le plan des bourses. Cela se faisait très bien par une décision ministérielle, par décret gouvernemental et, à mon point de vue, c'eût été facile d'éviter au moins cette partie de préjudice que le ministre invoque pour justifier l'urgence d'aujourd'hui. Cela ne m'apparaît pas une montagne à surmonter, M. le Président. (17 h 40)

Deuxièmement, au temps où on est rendu, les jeunes sont dans le décor, ils se sont trouvé des emplois. Il me semble qu'il aurait été facile pour le ministre de l'Éducation de regarder le conflit sous deux angles. Qu'est-ce qu'il y a à faire pour les finissants concrètement à court terme? N'y a-t-il pas possibilité de s'asseoir avec l'Association des professeurs d'université et des chargés de cours et dire: Écoutez, messieurs, je suis à regarder le refinancement des universités et je ne suis pas certain qu'on n'arrivera pas à des conclusions en juin ou en juillet, mais, pour le moment, je vais vous demander de faire un effort. Je ne demanderai pas un effort à tout le monde. Je vais vous demander un effort particulier pour des jeunes dont la carrière sur le marché du travail doit débuter à la fin de l'été, c'est-à-dire les finissants.

Aux chargés de cours pour les finissants, je vais vous demander carrément de poser le geste de responsabilité comme groupe en acceptant de donner les cours aux finissants. Et on va continuer à renégocier de bonne foi avec les mécanismes de conciliation et avec les mécanismes de médiation spéciale s'il le faut. Mais ce n'est pas cela qui se passe. On dit à tout le monde: La grève est finie après sept semaines dans l'éducation. Plus que cela, vous allez revenir. On dit aux jeunes: Vous allez repayer du logement, vous allez peut-être perdre votre possibilité d'emploi alors que tous vos collègues des autres universités... Vous êtes déjà dans le décor à la recherche d'un emploi qui est peut-être même déjà trouvé.

On dit au jeune: Tu seras peut-être privé... Savez-vous, Mme la Présidente, qu'il y a des jeunes qui vont à l'université et dont les parents gagnent 24 000 $, 25 000 $? Et, parce que les parents gagnent 24 000 $, 25 000 $, ils ne sont pas admissibles aux bourses d'études. Le fameux TP4 qu'on demande aux jeunes. On dit: Donne-moi les formules d'impôt de tes parents. Savez-vous que ces jeunes, dont les parents gagnent 24 000 $, 25 000 $, 26 000 $, ne sont pas des millionnaires? Ces gens sont exclus des bourses. Savez-vous que c'est le seul revenu de travail qu'ils ont pour payer leurs études si ce n'est qu'un prêt dans certains cas? C'est un préjudice extraordinaire pour cette clientèle et il y a un très grand nombre d'étudiants placés dans cette situation, où le parent gagne juste un peu plus que la norme pour être admissible aux bourses. C'est grâce au revenu de travail de ce jeune durant les vacances qu'il réussit à payer ses études. Et on lui demande fort probablement de perdre son emploi, on lui demande fort probablement d'aller dépenser d'une façon accrue à part cela pour le logement parce qu'il avait loué jusqu'au 30 avril, à peu près la fin normale dans toutes les universités du Québec.

C'est cela qu'on fait aujourd'hui. Et on a laissé passer le bateau au moment où le ministre aurait pu, d'une façon responsable, d'une façon qui, je pense, lui revient de droit comme ministre de l'Éducation, intervenir au moins au moment où les préjudices n'étaient pas aussi grands que ceux qu'ils peuvent occasionner aujourd'hui. Aux préjudices déjà subis, il vient ajouter d'autres préjudices, des préjudices financiers importants pour l'étudiant, des préjudices importants pour certains pères de famille, pour certaines familles québécoises pas si bien nanties. Assez faiblement... Sur le plan de la rémunération, un père de famille qui gagne 24 000 $ devra payer des chambres pour son jeune ou sa fille à l'Université du Québec pendant environ quinze jours, payer de la nourriture, pour savoir, en fin de compte, qu'en plus de payer, son jeune ou sa fille se verra peut-être privé d'un emploi d'été parce que tous les autres universitaires sont disponibles au moment où on se parle.

C'est extrêmement difficile d'accepter l'argumentation du ministre de l'Éducation, qu'il veut, dit-il, une argumentation responsable. Quand on est responsable, quand on se dit responsable, quand on se dit rigoureux, il me semble qu'on analyse l'ensemble du portrait en cours de route. Le ministre savait qu'il y avait grève depuis le 23 mars. Le ministre savait que ça prenait douze semaines, j'espère, de session pour que

la session soit valide. Est-ce que le ministre n'aurait pas pu intervenir au moment où c'était correct, où le jeune et la jeune n'auraient pas eu à être pénalisés d'une façon additionnelle? Comment concilier cela avec le sens des responsabilités?

Il y a des pères de famille qui viennent à nos bureaux le lundi matin et qu'est-ce qu'ils nous disent? S'il faut que mon jeune retourne à l'université, je n'ai pas une cenne pour lui payer sa chambre parce que son logement était loué jusqu'au 30 avril. Il louait au mois. Je n'ai pas d'argent pour lui payer sa bouffe. Plus que cela, mon jeune qui s'est trouvé un emploi, qu'est-ce qui va lui arriver? S'il lâche, est-ce que l'agriculteur ou est-ce que l'entreprise n'en prendra pas un autre qui est disponible? Mme la Présidente, où est le sens des responsabilités? On est capable, il me semble, comme ministériel, quand on accepte la fonction de ministre, de faire preuve d'imagination, de dire à ceux qui sont en cours d'études, mais qui ne sont pas nécessairement finissants: Écoutez, vous avez six mois, vous avez huit mois ou vous avez douze mois pour rattraper le nombre de cours perdus à la session d'hiver. On vous donnera jusqu'au mois de février l'an prochain pour rattraper les heures de cours perdues. Peut-être que les étudiants n'iront pas chercher des cours pour douze semaines. Ils iront peut-être chercher quinze semaines de cours pour valider leur propre session.

À ce moment, le ministre aurait le temps de regarder le financement des universités; de regarder si c'est bien vrai que l'Université du Québec est si mal prise qu'elle ne peut pas traiter ses enseignants chargés de cours d'une façon correcte et raisonnable. Mme la Présidente, quand on voit les professeurs chargés de cours à l'université qui ne font que ça, à 12 000 $, vous ne viendrez toujours pas me dire que c'est une fortune. On va parler du fond tantôt. Mais sur l'urgence même, pour en revenir au fond même de la motion présentée par le leader du gouvernement et plaidée par le ministre de l'Éducation, ça sonne faux. On n'a pas évalué au moment où on se parle les répercussions et les préjudices causés aux jeunes. Ces étudiants sont déjà assez touchés. Ces étudiants sont déjà assez pénalisés.

Il me semble que le ministre, lui qui aime se mêler des conflits, aurait pu prendre la solution de régler le sort des finissants dans un premier temps, de regarder ce qu'il pouvait faire avec le reste dans un deuxième temps. Cela me serait apparu une façon responsable. II aurait pu faire adopter un décret et faire dire par son gouvernement: Les jeunes qui n'ont pas terminé la session ne seront pas pénalisés sur le plan des bourses d'études. Cela me serait apparu quelque chose d'extrêmement intelligent et l'Opposition aurait concouru à ce type d'opération. Mais non, on fait plus que ça. On suspend toutes les règles. Là on renouvelle une convention collective - qu'on va voir tantôt - jusqu'au 31 décembre 1988 et on décrète les salaires, sachant pourtant qu'on doit analyser sous peu le financement des universités.

On renouvelle quand même les salaires jusqu'en 1988, indépendamment du fait que les gens aient raison sur le fond. On le dit dans la même foulée. Le ministre a eu une question la semaine dernière, il s'est levé et a dit: Oui, il faut réviser le financement des universités, mais je ne suis pas prêt, je me compose un comité. Bien oui, après s'être composé un comité, si celui-ci en arrive à des conclusions heureuses et si elles ont pour objet d'améliorer la situation financière des universités, qu'est-ce qui nous dit que cela n'aurait pas pour objet, à ce moment-là, de dénouer l'impasse en ce qui concerne les relations du travail entre l'université et ses enseignants chargés de cours? II me semble que cela se faisait, il admet lui-même qu'il faut que ce soit révisé.

Préjudice financier, Mme la Présidente, préjudice à tous les chapitres pour le jeune, oui, c'est vrai; mais, il me semble que, pour deux semaines, pour valider la fin de session, le ministre me serait apparu beaucoup plus responsable s'il avait trouvé un terrain d'entente pour les finissants et s'il s'était organisé pour que les autres ne soient pas doublement pénalisés. Je n'en reviens tout simplement pas, qu'un ministre de l'Éducation au Québec, après quatre ou cinq semaines de grève dans une université, n'ait pas pensé à ces phénomènes. Est-il si "déconnecté" qu'il ne sait pas comment cela se passe dans les universités, qu'il ne sait pas à quel moment les années scolaires se terminent, jusqu'à quel point un jeune universitaire se cherche de l'emploi à partir du mois de janvier pour s'assurer qu'au mois d'avril il puisse commencer à travailler? Serait-il "déconnecté" au point de ne pas savoir que certains jeunes étudiants, hommes et femmes, ne vivent que grâce à leur pitance qu'ils vont chercher par leur travail d'été? Est-ce que le ministre est au courant qu'avec son système de bourses, une personne, passé X milliers de dollars, c'est pas admissible? Il me semble que le ministre de l'Éducation a manqué le bateau. (17 h 50)

Aujourd'hui, il voudrait rentrer en gare et il court après le train. Pour courir après le train, il risque d'en enfarger un joyeux paquet. Il risque, précisément, qu'il y ait un bon nombre d'étudiants qui auront un douloureux choix à faire, un difficile choix à faire. Il y a des étudiants qui auront le choix de dire: Bien, je reprendrai ma session à un autre moment parce que je n'ai pas les moyens de perdre les 4000 $ ou 5000 $ que

je pourrais gagner parce que j'ai mon emploi. C'est le difficile choix. À toutes fins utiles, à ce moment-ci, on reporte tout l'odieux, par cette décision, sur le jeune. Je ne le prends pas. On ne peut pas être d'accord.

On dit au ministre: T'as peut-être manqué le bateau ou le train au moment où t'aurais dû le prendre. Mais, aujourd'hui, le ministre devrait se retourner de bord, devrait chercher d'autres solutions, d'autres hypothèses pour permettre aux jeunes d'être moins pénalisés. Dans sa recherche pour que le jeune soit moins pénalisé, il y a deux ou trois solutions. Que le ministre cherche la solution aujourd'hui-même pour les finissants et que, pour les autres, il leur annonce qu'ils ne seront pas pénalisés dans le système boursier ni dans le système de prêts; qu'il leur annonce également qu'ils auront douze mois pour reprendre le nombre de cours perdus à l'intérieur ou en sus de leur session normale. Et, automatiquement, à ce moment-là, lui qui se dit si respectueux des lois et de la législation du travail, eh bien, il laissera cours à la libre négociation avec les mécanismes prévus dans le Code du travail. Le ministre ne serait pas, sans le vouloir - il est peut-être bien de bonne foi, je ne veux pas lui faire de procès d'intention - le parrain d'une loi qui vient pénaliser davantage un grand nombre de jeunes, un grand nombre d'étudiants du Québec.

Pour toutes ces raisons, il est bien évident que nous voterons contre cette motion parce que, à notre point de vue, elle n'est nullement justifiée à ce stade-ci. Que voulez-vous, le ministre a manqué le bateau, qu'il rame, maintenant;

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader de l'Opposition, député de Joliette.

Si vous me permettez, dans la motion de suspension des règles, on demande de dépasser 18 heures. Mais comme cette motion n'est pas encore adoptée, y a-t-il consentement pour que nous dépassions 18 heures?

M. Chevrette: Oui, il y a eu une entente selon laquelle on n'arrête pas à 18 heures, on poursuit.

La Vice-Présidente: D'accord, merci. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Brièvement, Mme la Présidente, parce que j'aurai l'occasion d'intervenir plus longuement sur le fond. En ce qui me concerne, il m'appartiendra davantage d'intervenir sur le fond de ce projet de loi spécial, de la mesure exceptionnelle.

Par contre, je voudrais joindre ma voix, pendant quelques minutes, sur la motion d'urgence qui, encore une fois, nous convie à la suspension des règles. Ce gouvernement avait le beau discours, je vois la vice-première ministre - je m'en souviens tellement - qui, en l'absence du premier ministre qui a pris du temps à se trouver un comté pour se faire élire, avait lu le discours inaugural et disait: Nous, vous allez voir que ça va changer, les choses vont changer, ce ne sera plus pareil. Nous, on va l'avoir, l'ouverture, le bon discours et le dialogue. Vous verrez, c'est fini, les lois matraques, c'est fini, les lois d'exception, c'est fini, les lois du travail qui font qu'à un moment donné, on est obligé de suspendre les règles, comme ça. Au diable ce qui est prévu, on suspend les règles, et là, on plaide l'urgence.

Là, le ministre de l'Éducation nous dit: Écoutez, ce qui arrive est tellement grave, tellement majeur qu'il faut absolument que l'Assemblée nationale soit saisie d'une loi. Il plaide l'urgence qu'il a lui-même créée, parce que c'est un peu son habitude dans les conflits de travail de s'arranger pour organiser l'urgence, pour créer l'urgence. Sur l'urgence, je suis obligé de vous dire une seule chose: L'urgence, ce n'est pas ce qui nous arrive, c'est l'absence de responsabilité de ce gouvernement dans une situation qui était connue dès le début. J'aurai l'occasion de revenir sur le fond tantôt, sur ce qui s'appelle le sous-financement des bases universitaires. C'est cela, l'urgence fondamentale dans ce dossier.

C'est tellement vrai que le ministre de l'Éducation... Pensez-vous qu'il sait plus aujourd'hui que dès le début de ce conflit, que, essentiellement, la demande était d'ordre salarial, que j'aurai à expliquer tantôt. Fondamentalement, dès le début, le problème de cette négociation était un problème d'ordre salarial. Il y avait une demande de statut afin que l'université reconnaisse que l'apport des chargés de cours est majeur dans le système d'éducation universitaire québécois. En conséquence, un chargé de cours doit être rémunéré pour les prestations professionnelles qu'il donne et il y avait lieu d'effectuer un rattrapage majeur, important et fondamental. Pour ce faire, cela prend un minimum de financement universitaire. J'aurai l'occasion de revenir là-dessus parce que cela m'apparatt fondamental.

Aujourd'hui, après avoir laissé pourrir une situation, après sept semaines pendant lesquelles on a laissé effectivement ce conflit non pas se développer, mais progresser, comme c'est normal dans un conflit de travail - normalement, un conflit de travail doit progresser - on l'a laissé aller complètement et, à un moment donné, on s'est dit... Les intentions du gouvernement devaient être connues au préalable. À partir du moment où c'est un problème de "cennes et de piastres" et qu'il appartient au gouver-

nement de donner les enveloppes d'argent requis... Je suis convaincu qu'il y a quatre semaines, le ministre de l'Education savait tout autant qu'aujourd'hui, compte tenu que l'écart était à peu près toujours le même depuis le début de cette négociation, qu'il n'y aurait pas plus de possibilité d'y donner suite. Aujourd'hui, il nous dit: Suspension des règles, urgence, il faut sauver la session des étudiants qu'il a contribué lui-même à gaspiller complètement. Il voudrait que, nous, on soit conscients d'une seule chose en disant: Essayons de régulariser une situation que j'ai laissé pourrir, indépendamment des conséquences graves, dramatiques pour un très grand nombre d'étudiants. Mon collègue de Joliette, leader de l'Opposition, a très bien laissé voir les conséquences que cela entraîne au plan de l'emploi et du rappel des étudiants qui sont retournés à l'étranger. Le ministre de l'Éducation sait au moins une chose: il sait que, normalement, dans le monde de l'éducation universitaire, la session est terminée. C'est sept semaines après... Il laisse finir la session et, là, loi spéciale, suspension des règles, urgence de procéder à régulariser l'affaire alors que cela aurait été tellement possible, tellement plus normal de regarder cela plus sérieusement après deux ou trois semaines, puisque, sur l'ensemble des demandes syndicales, fondamentalement, la demande principale a toujours porté sur une rémunération un peu plus normale pour l'apport de ces gens-là dans le monde de l'éducation. Cet élément était connu. Il n'y a aucune différence...

Règle générale, Mme la Présidente - ce n'est pas moi qui ai inventé cela - quand on plaide l'urgence, c'est qu'il est arrivé des choses qui ont changé dans les conflits. Il est arrivé une série de situations qui se sont précipitées et, à un moment donné, on dit: II y a urgence que l'Assemblée nationale soit saisie d'une loi spéciale. Mais qu'est-ce qu'il y a eu de changé dans l'évolution de ce conflit, Mme la Présidente, si ce n'est que le ministre de l'Éducation, volontairement, l'a laissé aller jusqu'à la fin de la session, sachant, bien sûr, et prétendant, bien sûr, qu'il serait beaucoup plus facile pour lui d'attendre que la session soit presque terminée, qu'il ait tous les inconvénients majeurs qu'il nous a relatés en disant: Écoutez, je pourrais vous citer des lettres du recteur, de sept associations qui réclament notre intervention. Oui, mais les associations étudiantes n'ont jamais réclamé une loi spéciale. Elles ont réclamé l'intervention du gouvernement en termes de responsabilités.

Prendre ses responsabilités, cela voulait dire mettre du fric à la bonne place, dans le sous-financement que lui-même, le ministre de l'Éducation, dénonçait. Le ministre de l'Éducation, comme critique de l'Opposition, l'a dénoncé pendant des années quand, pour un bout de temps, j'étais responsable de l'Éducation, qu'il y avait un problème de sous-financement universitaire. On a fait un bout de chemin, Mme la Présidente. On a essayé de corriger un peu. Il est arrivé ce que vous savez et, aujourd'hui, c'est eux autres qui ont la responsabilité de diriger l'État québécois. Le problème est aussi grave. Il est aussi important. Il n'y a rien de réglé et, aujourd'hui, on va essayer de nous faire accroire qu'on va passer comme du beurre dans la poêle une suspension des règles, plaider une motion d'urgence.

On va arriver avec une loi spéciale qui va régler toute l'affaire pour valider une session des étudiants parce que, effectivement, on aura contribué, par le laisser-faire, par le pourrissement de ce conflit, à ce qu'on arrive dans une situation qui est trop pénalisante pour les étudiants. Comme mon collègue l'a laissé voir, il me semble que la seule urgence nouvelle qu'il y a dans ce dossier-là c'est que, bien sûr, après sept semaines de conflit, je pense que les problèmes sont exactement ceux qui étaient connus dès le début du conflit et il ne nous apparaît pas qu'il y a plus d'urgence aujourd'hui qu'il n'y en avait dès le début du conflit. L'urgence dramatique, je vous l'ai mentionnée tantôt, était présente, connue, et elle était là dès le début du conflit à cause du sous-financement des bases universitaires.

En conséquence, je ne veux pas aller plus loin sur l'urgence parce qu'il n'y a pas d'argument si ce n'est de témoigner et constater l'irresponsabilité de ce gouvernement, l'irresponsabilité du ministre de l'Éducation de s'être assuré que le conflit progresse et évolue mais sur des bases où l'Université du Québec à Montréal aurait pu assumer davantage ses responsabilités et tenir compte d'une demande légitimement déposée dans une perspective où l'université aurait été en mesure d'avoir les crédits suffisants pour la considérer au mérite, l'évaluer au mérite, et nous n'aurions pas eu à faire un projet de loi spécial avec une motion de suspension des règles, Mme la Présidente, ni à plaider l'urgence.

En ce qui me concerne, je pense que nous aurons l'occasion tantôt de démontrer, sur le fond même du projet de loi, que le ministre de l'Éducation et le gouvernement ont manqué à leurs responsabilités. (18 heures)

La Vice-Présidente: Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le leader du gouvernement.

M. Michel Gratton (réplique)

M. Gratton: Mme la Présidente, je m'abstiendrai de répliquer aux propos du député de Joliette, leader de l'Opposition, et de son adjoint, le député d'Abitibi-Ouest, sauf pour dire qu'il me semble un peu incongru qu'on prétende de ce côté-là qu'il y

avait urgence il y a déjà quelques semaines et qu'on s'apprête à voter contre la motion de suspension des règles qui s'appuie sur l'urgence de la situation.

Je propose donc, Mme la Présidente, que nous adoptions, que l'Assemblée nationale adopte la motion de suspension des règles pour que le ministre de l'Enseignement supérieur puisse immédiatement proposer l'adoption du principe du projet de loi 48, ce qui lui permettra en même temps de rectifier certaines affirmations, malheureusement très erronées, faites par les membres de l'Opposition.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du gouvernement. J'en déduis que le débat est clos. Est-ce que vous me relevez de l'obligation de lire toute la motion?

M. Gratton: Oui.

La Vice-Présidente: Vous me relevez de cette obligation? Bon. Est-ce que la motion afin de suspendre certaines règles de pratique en vue de l'adoption du projet de loi 48 est adoptée?

M. Chevrette: Sur division.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

La Vice-Présidente: Adopté sur division. Si vous me permettez, je vais vous donner les renseignements concernant les travaux de l'Assemblée. Veuillez prendre avis que l'interpellation prévue pour le vendredi 15 mai 1987 portera sur la négligence du gouvernement libéral face au développement régional, notamment dans le secteur de la voirie, sera présentée par le député de Joliette et s'adressera au ministre des Transports.

Je vous rappelle également que l'interpellation du vendredi 8 mai 1987, soit demain, portera sur les propositions constitutionnelles du lac Meech. Le député de Lac-Saint-Jean s'adressera alors au ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Projet de loi 48 Présentation

Comme nous venons de suspendre les règles de cette Assemblée, nous allons donc procéder immédiatement aux étapes pour adopter le projet de loi 48. Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science présente donc le projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal. Est-ce que l'Assemblée accepte de se saisir de ce projet de loi?

M. Gratton: Je pense que ce serait mieux que le ministre procède à la lecture des notes explicatives.

M. Chevrette: Je pense qu'il faudrait lire les notes explicatives.

La Vice-Présidente: M. le ministre, s'il vous plaît, veuillez nous lire vos notes explicatives.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Mme la Présidente, le projet de loi vise à assurer la reprise de certains services d'enseignement à l'Université du Québec à Montréal. À cette fin, il fait obligation aux chargés de cours présentement en grève de reprendre l'exercice de leurs fonctions à compter de 8 heures le 11 mai 1987.

De plus, le projet maintient en vigueur, jusqu'au 31 décembre 1988, les stipulations de la dernière convention collective, tout en majorant les taux de rémunération selon le barème applicable au secteur public. Enfin, le projet prévoit que tout contrevenant à la loi s'exposera à des sanctions pénales ou, dans le cas d'un chargé de cours, à la perte du pointage de priorité qu'il a accumulé en vertu de la convention collective.

La Vice-Présidente: Est-ce que l'Assemblée nationale accepte de se saisir de ce projet de loi?

M. Chevrette: Sur division.

Adoption du principe

La Vice-Présidente: Accepté sur division. Le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose l'adoption du principe du projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal. Oui M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la Présidente, je vous prierais, avec le consentement de l'Opposition, de reconnaître d'abord le ministre du Travail qui interviendra en premier.

La Vice-Présidente: II y avait consentement M. le leader? M. le ministre du Travail.

M. Chevrette: On va suspendre pour trente secondes.

La Vice-Présidente: II y a consentement pour qu'on suspende trente secondes?

M. Chevrette: On ne s'oppose pas à ce que le ministre parle, c'est juste une question, Mme la Présidente. Je vais essayer

d'expliquer ouvertement, il n'y a pas de cachette. Si le ministre du Travail, Mme la Présidente, intervient sur le fond du projet de loi, il est évident que ce n'est pas le discours principal, on s'attend que ce soit le ministre de l'Éducation. Personnellement, si le leader n'y voit pas d'objection, étant donné qu'on veut entendre le principe de fond avant d'intervenir, on n'aura pas d'objection à ce qu'ils interviennent tous les deux et après cela le principal intervenant de notre côté interviendra. On voudrait entendre les motifs et la plaidoirie du parrain du projet de loi avant que notre principal porte-parole intervienne. On n'a pas d'objection à ce qu'ils se suivent.

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la Présidente, je ne voudrais pas qu'on me prenne pour un naïf et je conviens volontiers que la procédure, bien qu'inhabituelle, puisse être retenue. Cependant, je ferai remarquer au leader de l'Opposition que j'avais consenti tantôt qu'on intervienne de façon continue du côté de l'Opposition et, évidemment, le ministre de l'Éducation, n'ayant pas été le parrain de la motion, ne pouvait exercer un droit de réplique. Nous pensons que si cela peut faciliter les choses, soit, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu interviendra en premier. Le ministre de l'Éducation fera le discours de fond sur le principe du projet de loi. Les députés de l'Opposition pourront ensuite intervenir. Possiblement que d'autres membres ministériels interviendront également. À la fin de quoi, le ministre de l'Éducation, évidemment, exercera son droit de réplique.

La Vice-Présidente: Oui, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: On est d'accord. Je voudrais quand même signaler, parce que nos dires sont enregistrés, que ce n'est pas ce qu'on demande et ce qu'on va faire qui va être inhabituel. Ce qui est inhabituel, c'est que, pour la première fois, sur le principe d'un projet de loi en deuxième lecture, ce n'est pas le parrain du projet de loi qui va commencer l'exposé. Ouvertement, on pense qu'il est bien plus légitime avant de permettre à l'Opposition, ce n'est quand même pas nous qui présentons la loi spéciale... Si le ministre du Travail veut discourir, même si la loi est au nom du ministre de l'Éducation, nous sommes d'accord, que le ministre du Travail y aille. Cependant, avant d'entendre une réplique de l'Opposition, on voudrait entendre l'intervenant concerné par le projet de loi, puisque ce n'est pas nous qui avons décidé que le projet de loi serait sous la responsabilité du ministre de l'Éducation.

Que le ministre de l'Éducation dise: Moi, je veux savoir ce que le ministre du Travail a fait dans cela et qu'il le dise publiquement, c'est son affaire. Mais on pense qu'il est beaucoup plus opportun d'avoir une réplique de l'Opposition qui pourra prendre l'ensemble des éléments de ce conflit à la suite de l'intervention du parrain du projet de loi qui est le ministre de l'Éducation.

La Vice-Présidente: D'accord. En vertu des règles de cette Assemblée, je reconnais le premier qui se lève. Je crois comprendre qu'il y a une entente pour que le ministre du Travail commence, par la suite le ministre de l'Éducation comme représentant du gouvernement sur ce projet de loi, puis, je reconnaîtrai deux autres députés du côté de l'Opposition. Sur cela, M. le ministre du Travail.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, Mme la Présidente. Strictement pour préciser des questions de procédure. Dans une situation qui n'était pas complètement identique mais qui était similaire, là où mon collègue le ministre de l'Éducation avait eu à présenter une loi spéciale dans le cas, vous vous en souviendrez, des Autobus Terrebonne, le côté ministériel avait adopté une stratégie complètement inverse à celle qu'il adopte ce soir. À ce moment, il disait: Cela devrait être le ministre du Travail qui parle le premier pour nous expliquer ce qui se passe sur le plan des relations du travail. -(18 h 10)

Mme la Présidente, j'ai écouté attentivement les interventions de tous ceux qui ont évoqué la question de l'urgence de la situation. Vous me permettrez d'être surpris - et de vous l'indiquer - du vote de mes collègues d'en face quant à cette question d'urgence. Après avoir écouté le député de Joliette, j'en étais arrivé à la conclusion que, si le gouvernement avait quelque chose à se reprocher, c'est d'avoir attendu trop longtemps pour intervenir. Donc, ce que le député de Joliette a plaidé, c'est que l'urgence est encore plus présente qu'on peut l'avoir dit en Chambre. Je m'attendais que l'Opposition concoure et vote avec le gouvernement sur la question de l'urgence d'intervenir afin que l'on puisse minimiser les inconvénients que subissent et qu'ont déjà subis les étudiants victimes de ce conflit.

J'ai également écouté les discours des porte-parole de l'autre côté et, comme ministre du Travail, je me suis senti visé par les blâmes qu'on a adressés, par la bande, au ministre de l'Éducation. On nous a accusés, comme gouvernement, de ne pas avoir pris

nos responsabilités, de ne pas avoir déployé tous les efforts nécessaires pour que les parties en arrivent à une entente négociée à la table des négociations. On nous a accusés de nous traîner les pieds - si je peux utiliser l'expression - dans ce dossier. On nous a accusés de ne pas être intervenus avant.

Si vous m'y autorisez, Mme la Présidente, je ferai une liste des événements survenus depuis le 6 mai 1987 entre l'UQAM et le syndicat des chargés de cours de l'UQAM. Je commencerai en plaçant cette listé d'événements dans son contexte historique. La convention collective qui liait l'Université du Québec au syndicat des chargés de cours est expirée depuis le 26 février 1986. Nous avons reçu un avis de négociation, au ministère du Travail, des deux parties impliquées le 13 novembre 1986. Nous avons également reçu de la partie patronale, c'est-à-dire de l'université, une demande de conciliation le 19 mars 1987. Le 20 mars 1987, trois jours après la demande de conciliation, le ministère du Travail a nommé, comme conciliateur au dossier, Yvan Saintonge et a demandé la convocation des parties pour une première séance de conciliation. Le 23 mars 1987, il y a eu effectivement une première séance conjointe de conciliation; le 25 mars 1987, séance conjointe de conciliation, suivie d'une séance particulière et privée avec chacune des parties impliquées; le 27 mars 1987, séance conjointe de conciliation; le 2 avril 1987, rencontre du conciliateur avec la partie syndicale et avec la partie patronale, séparément; le 3 avril 1987, rencontre du conciliateur avec la partie syndicale, qui maintient ses prérequis, c'est-à-dire la reconnaissance du principe "à travail égal, salaire égal", et, deuxièmement, le règlement du salarial avant de discuter du normatif.

À la suite de cette séance, il y a eu un ajournement sine die. La même journée, j'ai nommé Normand Gauthier, directeur du service de médiation dans le secteur public, comme ressource supplémentaire à ce dossier. Entre le 3 et le 7 avril 1987, il y a eu des rencontres informelles entre les représentants des parties et Normand Gauthier, directeur du service de la médiation; le 8 avril 1987, séance conjointe de conciliation et rencontre entre le ministre de l'Éducation et les représentants des parties; le 9 avril 1987, séance conjointe, où l'UQAM fait une offre salariale. Le 10 avril 1987, séance conjointe de conciliation, la partie syndicale rejette l'offre patronale à la suite de son assemblée générale. Les deux parties attendent à ce moment de rencontrer le ministre de l'Éducation. Le 11 avril 1987, Mme la Présidente, les deux parties rencontrent le ministre de l'Éducation. Le 13 avril 1987, séance conjointe de conciliation, contre-proposition salariale de la partie syndicale, rejetée la journée même par la partie patronale. Entre le 13 et le 22 avril 1987, rencontre informelle entre les représentants des deux parties et M. Normand Gauthier. Le 22 avril 1987, séance conjointe de conciliation, nouvelle offre patronale basée sur un taux différentiel, rejetée par la partie syndicale le soir même. Le 27 avril 1987, rencontre des deux parties avec le M. le ministre de l'Éducation, rencontre du conciliateur avec le porte-parole syndical.

Entre les 27 et 29 avril 1987, rencontre informelle entre les représentants de toutes les parties et M. Normand Gauthier. Le 29 avril 1987, séance conjointe de conciliation en présence du conciliateur et de M. Normand Gauthier, rejet par les deux parties des hypothèses de travail soumises par les conciliateurs et nouvelle offre de la partie patronale, basée sur le taux unique. Entre le 29 avril et le 4 mai, rencontre informelle entre les représentants des parties et M. Normand Gauthier. Le 4 mai 1987, séance conjointe de conciliation, contreproposition syndicale, rejetée par la partie patronale à la table des négociations. Le 5 mai 1987, l'assemblée générale des syndiqués rejette l'offre de l'employeur du 29 avril 1987.

Mme la Présidente, que l'Opposition accuse le gouvernement de n'avoir rien fait dans ce dossier, de s'être tratné les pieds, relève d'une méconnaissance totale des actions que le ministère du Travail et le ministre de l'Éducation ont posées conjointement dans cet important dossier. Il y a eu dix-huit rencontres de conciliation conjointes ou ex parte. Il y a eu, Mme la Présidente, de nombreux contacts informels des conciliateurs avec les parties. Le ministère du Travail a mis toutes ses ressources à la disposition des parties. Le ministre du Travail est demeuré en contact constant, en semaine, en fin de semaine, de jour et de nuit, avec son collègue, le ministre de l'Éducation. Conformément au mandat généralement assumé par le ministère du Travail dans ce type de dossier, nous avons, par le biais de nos ressources au dossier, tenté l'impossible pour amener les parties à un règlement négocié qui, pour nous au ministère du Travail - et cet avis est partagé par le ministre de l'Éducation -demeure et demeurera la meilleure de toutes les solutions aux différends des partenaires d'une entreprise ou d'un service. Malheureusement, malgré tous nos efforts et tous nos appels au sens des responsabilités et à la maturité des parties, nous n'avons pu réussir à les amener à s'entendre sur un règlement négocié. Pas même les impacts majeurs sur des tiers, que soulignait à raison le député de Joliette et leader de l'Opposition, sur les étudiants, n'ont ébranlé les parties. Jusqu'aux toutes dernières heures, elles sont demeurées fermement ancrées sur leur position.

(18 h 20)

Nous avons pris soin d'affecter à cet important dossier les ressources humaines du ministère du Travail, qui avaient, au cours des derniers mois, connu de brillants succès dans les dossiers à peu près les plus difficiles et les plus complexes. Mon collègue d'en face, le député d'Abitibi-Ouest, se rappellera de l'intervention couronnée de succès de MM. Saintonge et Gauthier dans le dossier fort complexe du mont Grand Fonds où ces deux personnes ont réussi à amener à la table des négociations, à une entente négociée, une entreprise de Raymond Malenfant et un syndicat de la CSN.

Nous pensions qu'en affectant ces ressources humaines au dossier, elles pourraient dans un dossier qui, à première vue, nous apparaissait aussi difficile, mais qui, après analyse, nous apparaît encore plus complexe, amener les parties à une entente négociée. En toute dernière heure et à la suite du Conseil des ministres d'hier, le ministre de l'Éducation lui-même a rencontré au bureau du premier ministre le chef de la CSN, Gérald Larose, dans le but d'en arriver à la toute dernière minute, encore une fois, sans compromis déshonorant pour une partie ou pour l'autre, à un compromis qui aurait permis d'éviter l'intervention toujours déplorable de l'Assemblée nationale dans un conflit de travail. Malheureusement, les efforts du ministre de l'Éducation pas plus que ceux des personnes ressources du ministère qui avaient réussi dans le mont Grand Fonds n'ont réussi à amener les parties à une entente négociée.

Dans ces circonstances et face aux menaces qui pèsent sur des tiers, des étudiants, face a un blocage pour ne pas dire à un braquage des parties dans les négociations, le gouvernement sur recommandation du ministre de l'Éducation a décidé de passer à l'action. Là-dessus, le ministre du Travail appuie sans équivoque le ministre de l'Éducation. Hier au Conseil des ministres, tous les membres du gouvernement ont sans équivoque également donné leur appui au ministre de l'Éducation. Je suis certain que, de ce côté-ci de la Chambre, tous les députés ministériels donneront également leur appui au ministre de l'Éducation. Ce que je demande à nos collègues d'en face, ce n'est pas d'applaudir à l'action gouvernementale, parce que les négociations que nous avons tenté de mener jusqu'à la toute dernière heure se sont conclues par un échec, c'est de prendre acte de toutes les démarches qui ont été effectuées, c'est de prendre acte de la qualité des intervenants au dossier, qu'il s'agisse des personnes ressources du ministère du Travail ou de l'action directe menée par le ministre lui-même. C'est de prendre acte de la célérité avec laquelle ces personnes sont intervenues à chaque étape. C'est de prendre acte de cette volonté gouvernementale de maintenir, dans des circonstances souvent très difficiles et explosives, le contact entre les parties. C'est de prendre acte que tous les efforts humainement possibles ont été déployés par le gouvernement du Québec pour amener les parties à une entente négociée à la table des négociations.

Je demande également aux députés de l'Opposition de prendre acte que cette intervention spéciale de l'Assemblée nationale vise, d'abord et avant tout, à faire en sorte que les étudiants et les étudiantes ne soient pas davantage pénalisés. N'eût été la présence des étudiants et des étudiantes, les négociations auraient pu se poursuivre. Les chargés de cours sont représentés par un syndicat qui est fort et qui aurait été capable de poursuivre les négociations pendant longtemps. L'Université du Ouébec comme telle aurait pu, comme employeur, poursuivre les négociations pendant longtemps. Mais au centre de ce conflit, ceux et celles qui en subissent présentement les répercussions, ce sont les étudiants et les étudiantes. C'est pourquoi le présent projet de loi est parrainé par le ministre de l'Éducation. Si le ministère du Travail en était arrivé à la conclusion que, sur le plan des négociations, il n'y avait absolument plus rien à faire et que les étudiants n'avaient pas été affectés, cela aurait été différent.

Au moment où nous nous parlons, ce que je vous dis, c'est que possiblement, il y a encore de la place pour de la discussion entre les parties, mais que le gouvernement ne peut pas tolérer plus longtemps que les étudiants paient la facture. J'ai mal compris pourquoi l'Opposition a voté contre la motion du leader du gouvernement qui demandait que l'on intervienne de façon que les cours reprennent dès lundi pour sauver ce qui reste à être sauvé. J'ai mal compris la décision de l'Opposition de voter contre le dépôt même du projet de loi alors qu'ils ont énuméré à peu près tous les inconvénients que peuvent subir les étudiants. Je les implore de prendre acte de tous les gestes que le ministère du Travail et que le ministre de l'Éducation ont posés dans ce dossier. Je leur demande de considérer les torts irréparables qui pourront être causés à des centaines de jeunes au Québec. Je leur demande, sur la base de ces deux considérations, de fouiller un peu leur conscience, de ne pas agir ou voter par partisanerie politique, de voter en leur âme et conscience en faveur de l'adoption d'un projet de loi qui fera en sorte que dès lundi matin, les étudiants et étudiantes de l'Université du Québec à Montréal pourront enfin avoir accès à des cours dont ils ont été privés malheureusement depuis trop longtemps déjà. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Travail. M. le ministre de l'Édu-

cation et ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Mme la Présidente, à l'exemple de mon collègue, le ministre du Travail, je m'étonne de l'attitude adoptée par l'Opposition dans ce débat. Je m'en étonne à deux points de vue.

Tout d'abord, on nous dit: Vous auriez dû agir plus vite. On ne dit pas ce que nous aurions dû faire. On n'indique pas du tout ce que nous aurions dû faire plus vite. Nous avons des lois du travail au Québec que le député d'Abitibi-Ouest connaît très bien. Il sait très bien qu'en vertu de nos lois sur le travail, quand un conflit éclate dans une entreprise ou un établissement, il y a des procédures qui doivent être suivies en vue d'acheminer le conflit vers un règlement négocié. Ces procédures sont sous l'autorité du ministre du Travail. Pendant toute la période pendant laquelle nous avons eu des raisons sérieuses de croire à la possibilité d'un règlement négocié, le conflit était sous l'autorité de mon collègue, le ministre du Travail, avec qui j'étais en contact continu. Nous étions convenus dès le début, comme nous l'avons fait dans des conflits antérieurs, que le jour où nous serions d'accord pour conclure qu'une intervention spéciale devenait nécessaire, nous prendrions nos responsabilités. Je n'avais pas à m'immiscer dans les responsabilités qui relèvent de mon collègue, de même que celui-ci respecte les attributions du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et je vous dis franchement, Mme la Présidente, pendant les premières semaines qu'a duré ce conflit, je ne vois pas du tout ce qu'aurait pu faire le gouvernement pour imposer un règlement. À moins que nous ne croyions pas du tout à la responsabilité des parties en négociation et ce n'est pas la position du gouvernement actuel. (18 h 30)

Une condition m'apparaît essentielle pour qu'arrive une intervention spéciale du gouvernement et de l'Assemblée nationale dans un conflit de travail. Il faut, d'abord, que le conflit ait mûri dans l'esprit des parties. Il faut que les parties, à force de chercher - loyalement je veux le croire - un règlement négocié aient été amenées progressivement à conclure qu'elles en étaient incapables. Il faut aussi que les effets pervers du conflit sur des tiers soient perçus un peu clairement par l'opinion publique. C'est une entreprise que nous faisons avec le concours extrêmement important de l'opinion publique.

Or, ces conditions ne pouvaient pas être réunies il y a trois semaines ou un mois. Que le député d'Abitibi-Ouest et ses collègues se souviennent seulement du climat qui existait pendant la période de Pâques. Est-ce que c'était le moment d'introduire une loi spéciale? Vous auriez été les premiers - j'ai presque envie d'employer le mot "pharisien" - à ce moment-là, à nous dire: Qu'est-ce que vous faites dans ce conflit-là? Vous n'avez pas d'affaire, laissez donc la négociation se poursuivre. C'est facile de jouer les vierges offensées, aujourd'hui, mais je vous assure que je ne vois pas à quel moment, avant aujourd'hui, nous aurions pu intervenir en respectant véritablement les parties en leur laissant prendre leurs responsabilités au maximum.

J'aimerais que vous nous disiez ce que vous auriez fait, il y a un mois, cela m'intéresserait et j'aimerais, comme l'a signalé mon collègue le ministre du Travail, que vous nous expliquiez par quel raisonnement subtil vous êtes capables de conclure qu'il existait une urgence il y a un mois et qu'il n'en existerait plus aujourd'hui au point que vous avez voté, tantôt, pour dire à la population du Québec que vous ne croyez pas qu'il soit urgent de régler le problème de l'Université du Québec à Montréal.

J'aimerais que vous nous expliquiez, que vous nous disiez par quelle contorsion mentale vous êtes conduits à la conclusion que ce qui était urgent, à votre point de vue, il y a un mois, ne le serait plus maintenant.

J'aimerais que vous nous disiez, surtout, quels moyens vous mettriez en oeuvre, aujourd'hui, pour résoudre ce problème. J'entendais le député de Joliette tantôt, le leader de l'Opposition, bien connu pour sa facilité à parler de tous les sujets sans les avoir trop étudiés le plus souvent. Il nous disait: "Vous auriez dû vous occuper du cas des finissants, vous auriez dû faire des arrangements spéciaux avec le syndicat." J'aurais aimé qu'il fût conciliateur dans ce conflit-là et qu'il tentât cette approche.

Nous l'avons tentée, nous avons fait des approches à la partie syndicale pour examiner la possibilité d'offrir des services spéciaux aux catégories d'étudiants qui étaient le plus directement affectés. Vous savez très bien ce qu'on nous répond dans ce temps-là, c'est le principal instrument de marchandage dont dispose la partie syndicale dans un conflit, ce sont les éléments qui sont les plus affectés par le conflit qu'on n'a pas intérêt à servir tout de suite. Alors, je vous dis c'est une proposition purement théorique qui n'a aucun rapport avec le véritable rapport de forces qui se déroulait sur le terrain.

C'est bien facile de venir dire cela après coup. Alors, nous attendrons vos lumières là-dessus et, s'il arrivait qu'il y ait des lumières tout à fait inattendues, elles étaient sûrement absentes de vos discours de tantôt, en tout cas.

Que des lumières tout à fait

inattendues se manifestassent nous les accueillerions avec grand plaisir parce qu'il n'y a rien qui me répugne autant, personnellement, comme d'être obligé de proposer à l'Assemblée nationale une loi spéciale.

M. Gendron: Mme la Présidente, une question de règlement.

La Vice-Présidente: Question de règlement M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je ne me rappelle pas du dernier terme utilisé par le ministre de l'Éducation mais ce qui ne fait pas vraiment notre affaire, c'est que ce gouvernement est en train d'adopter une loi spéciale et on n'a même pas quorum en Chambre. Alors, il me semble qu'il serait plus facile, pour nous, en tout cas, de comprendre l'importance, l'urgence. Une façon de signaler l'urgence, ce serait, à tout le moins, qu'il y ait quelques collègues qui viennent appuyer le ministre de l'Éducation, qui est en train de prétendre que la terre ne tournera plus et il a peut-être raison, on va l'écouter attentivement, mais il faudrait, au moins, que quelques collègues viennent le signaler.

La Vice-Présidente: Effectivement, M. le député d'Abitibi-Ouest, je demanderais qu'on appelle les députés. (18 h 35 - 18 h 38)

Nous allons voir s'il y a quorum.

Le quorum étant atteint, nous allons poursuivre. M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Mme la Présidente, je poursuis l'exposé que j'ai commencé tantôt. Je rappelle brièvement l'étonnement que m'a causé l'attitude adoptée par l'Opposition sur la motion d'urgence et j'espère qu'au cours du débat les porte-parole de l'Opposition pourront nous expliquer cette nouvelle contradiction dans laquelle ils se sont enferrés et nous expliquer comment une chose qui était urgente à leur point de vue il y a un mois serait moins urgente maintenant, au point qu'on ne serait pas obligé de le reconnaître à l'occasion d'un vote. C'est une chose, au point de vue de la logique, que j'aimerais me faire expliquer parce que j'ai du mal à la comprendre. (18 h 40)

J'en reviens au fond du problème. Nous sommes en présence d'un conflit qui affecte l'Université du Québec à Montréal. L'Université du Québec à Montréal est une jeune université dont la fondation remonte à 1969, qui, par conséquent, n'a pas encore 20 ans et qui regroupe déjà plus de 35 000 étudiants dont une très forte proportion sont des étudiants à temps partiel, donc, des étudiants qui ne répondent pas tout à fait à la définition univoque que proposait, dans son intervention de tantôt, le député de Joliette. Il y a toutes sortes d'étudiants à l'Université du Québec à Montréal, et je ne serais pas étonné qu'une majorité de ces étudiants soit des personnes qui travaillent. La proportion d'étudiants à temps partiel est plus forte à l'Université du Québec à Montréal que dans nos universités traditionnelles pour la raison que je mentionnais plus tôt. C'est une université qui a été fondée en vue d'être au service du peuple, d'être immédiatement accessible sous les formes les plus variées et les plus souples.

Or, cette université a connu un développement phénoménal dans diverses disciplines, en particulier dans les sciences humaines, dans les sciences de la nature et dans les sciences de la gestion. Dans ces trois secteurs, l'Université du Québec compte des services d'excellente qualité, qui se distinguent très souvent de ceux qu'on trouve dans les autres institutions, mais qui sont de plus en plus respectés à cause de leur qualité.

À cause du développement très rapide qu'elle a connu, l'Université du Québec doit faire face à deux problèmes, plus aigus chez elle que dans les autres institutions. Il y a d'abord un problème de financement. L'Université du Québec à Montréal nous rappelle souvent que le niveau de subventionnement auquel elle a droit de la part du gouvernement est inférieur à celui qu'on observe dans toutes les autres institutions universitaires. Dans une lettre que le recteur m'adressait et dont j'ai cité des extraits plus tôt, je trouvais le rappel des faits suivants. Pour l'année 1985-1986, la subvention gouvernementale à l'Université du Québec à Montréal s'élevait à 4770 $ par étudiant. Dans les autres universités, la moyenne des subventions était de 6942 $. Au niveau collégial, elle était de 5118 $. Cela veut dire que la subvention moyenne per capita versée à l'Université du Québec à Montréal était inférieure en 1985-1986. Et le député d'Abitibi-Ouest se souviendra, j'espère, que l'année 1985-1986 fut la dernière du gouvernement dont il a fait partie, dont il a été le ministre de l'Éducation.

Voilà une situation dont nous avons hérité, qui s'est développée au cours des dix dernières années et qui demande de toute évidence un examen approfondi et surtout des solutions. Quand nous sommes arrivés au pouvoir, il n'y avait pas de ressources nouvelles pour les universités pendant la première année. Nous avons même dû imposer un léger volume de compressions aux universités. Est-ce que nous pouvions décemment enlever à des universités qui en avaient besoin, des sommes, pour les transférer à l'Université du Québec à Montréal? Nous ne pouvions pas le faire. J'avais dit clairement aux autorités de

l'UQAM, à ce moment-là, que, lorsque nous obtiendrions des ressources additionnelles du gouvernement, nous verrions à établir des normes de partage des ressources qui assureraient une justice raisonnable à tous les établissements. Je renouvelle cet engagement ce soir.

Dans le dernier budget du ministre des Finances, le gouvernement a annoncé qu'il injectera, cette année, une somme de 15 000 000 $ pour le rehaussement de la base de financement des universités du Québec, une somme de 10 000 000 $ pour le financement indirect de la recherche, une somme de 8 000 000 $ pour le soulagement des déficits des universités et d'autres sommes au titre de l'enrichissement des bibliothèques, et de l'amélioration et la modernisation des équipements. Inutile de préciser, Mme la Présidente, que nous considérerons avec attention les problèmes de l'Université du Québec à Montréal lorsque viendra le moment d'établir le partage.

Un autre problème qui est venu s'ajouter à celui-là et qui en est la suite logique, le gouvernement précédent se baladait dans tout le Québec en se vantant de favoriser l'accès du plus grand nombre à l'université, d'ouvrir toutes grandes les portes de l'université. Toutefois, on a vu les ministres de l'Enseignement supérieur ou de l'Éducation se promener en disant: Nous sommes à l'avant-garde de l'accessibilité des services collégiaux et universitaires. À quel prix? En même temps qu'on augmentait le nombre des inscriptions dans les universités, on diminuait le nombre des subventions accordées aux universités par étudiant, tellement que lorsque nous avons pris le pouvoir, la subvention per capita versée à chaque université équivalait à peu près à 70 % en valeur réelle de ce qu'elle était lorsque le Parti québécois a pris le pouvoir en 1976.

Alors, qu'est-il arrivé? Les universités augmentent leurs clientèles, l'Université du Québec à Montréal, en particulier. On a dit: On va fournir de l'enseignement à meilleur marché. On a été porté à multiplier le recours aux chargés de cours. Le chargé de cours, c'est une institution très importante dans la vie de toute université. Cela ne commence pas avec l'Université du Québec, nous en sommes tous conscients. Quand je faisais mes études en relations industrielles et en service social à l'Université de Montréal, il y a déjà un bon nombre d'années, la grande majorité de mes professeurs étaient des chargés de cours. C'étaient des dirigeants d'entreprises, des dirigeants de relations industrielles dans des grandes entreprises industrielles, des avocats spécialisés en relations du travail, des personnes versées dans ces questions-là, mais des professeurs permanents, il n'y en avait pratiquement pas.

Nous en avons ajouté plusieurs milliers au cours des 25 dernières années, tellement qu'aujourd'hui, les professeurs permanents dans nos universités, il doit y en avoir à peu près 8000 ou 9000 à travers le Québec. Ce n'était pas suffisant pour répondre à la demande. Alors les universités ont été enclines à recourir davantage aux chargés de cours qui sont rémunérés sur une base bien inférieure aux professeurs réguliers. C'est le cas de l'Université du Québec, en particulier, qui s'est retrouvée avec un nombre de chargés de cours très élevé. C'est environ 1000 à 1100 chargés de cours pour la session encore à terminer qui avaient été engagés par contrat par l'Université du Québec. Certains donnent une charge de cours pendant le semestre, c'est-à-dire 45 heures; d'autres en donnent deux; d'autres trois. Cela peut aller jusqu'à six charges de cours maximum pendant l'année et, dans certains cas, il y a des exceptions qui vont jusqu'à sept ou huit. Mais, de manière générale, le chargé de cours a une charge d'enseignement moins lourde que le professeur régulier, mais il est rémunéré pour une charge de cours.

La rémunération pour l'année 1986, la dernière année de la convention qui finissait en février 1986, je pense que c'était 2934 $. Alors, les chargés de cours trouvent que c'est inférieur. Ils ont demandé une rémunération considérablement accrue. C'est le coeur du litige. Pour le reste il n'y a pas de problème. Sur les clauses normatives, les parties seraient prêtes à accepter demain matin que la convention existante soit reconduite, parce que je dois préciser, Mme la Présidente, que ces chargés de cours sont syndiqués, sont autorisés à se regrouper en syndicat dûment reconnu pour fins de négociations collectives depuis une dizaine d'années.

Or, cette année, ils ont présenté des demandes d'augmentations salariales qui auraient porté la rémunération à un niveau supérieur à 4000 $, à partir de 2934 $ où c'était à la fin de la dernière convention. Mettez-vous à la place de la partie patronale, une minute, qui est l'Université du Québec à Montréal. Ce n'est pas la Canadian Industries Limited; ce n'est pas la compagnie General Motors, c'est l'Université du Québec à Montréal, laquelle retire la très grande majorité de ses revenus, au moins 85 % de ses revenus, de subventions du gouvernement du Québec.

Mme la Présidente, vous savez comme moi que nous avons indiqué à tous les établissements qui relèvent du financement public, par voie de subventions du gouvernement, qu'en matière de rémunération, nous ne sommes pas intéressés à les voir prendre les devants sur le gouvernement lui-même. Nous voulons qu'il s'aligne sur la politique de rémunération du gouvernement. Cette politique, nous l'avons défendue avec vigueur pendant toute l'année 1986 à l'occasion de la

ronde de négociations qui a eu lieu dans le secteur public. (18 h 50)

Nous avions défini une ligne de conduite au départ et nous l'avons généralement maintenue moyennant des assouplissements raisonnables, ce qui a donné un taux d'augmentation pour les trois années d'une convention de 3,5 %, pour la première année, 4 %, pour la deuxième année, et, pour la troisième année, un taux qui peut varier de 4,15 % à 4,82 %. Les professeurs de l'UQAM avaient déjà signé une convention, l'an dernier, bien avant le règlement du secteur public, dès le printemps de 1986, dans laquelle ils écrivaient et bien sagement, à mon point de vue, bien judicieusement: "La rémunération sera alignée sur la politique gouvernementale qui sortira des conventions collectives du secteur public." Ils nous ont épargné un temps considérable de discussion. Ils ont fait montre de réalisme. Ils ne se sont pas déchirés entre eux. Ils n'ont pas perturbé la vie de l'établissement. Ce modèle a été imité dans un certain nombre d'autres conventions collectives de professeurs d'université.

Alors, l'Université du Québec à Montréal a fait, à ses chargés de cours, des propositions qui s'inspiraient de la politique générale du gouvernement. À cette politique, elle a ajouté, en cours de route, certains adoucissements, certains assouplissements mineurs, j'en conviens, mais qui, quand même, amélioraient de manière intéressante les propositions initiales. C'est là que nous en sommes.

Je vais donner quelques chiffres pour que ce soit clair. Le degré de niveau actuel de la rémunération, comme je l'ai dit tantôt, est de 2936 $ à la fin de la dernière convention. L'Université du Québec à Montréal - je vais prendre sa dernière offre pour être le plus récent - proposait 3037 $ pour l'année 1986, 3307 $ pour l'année 1987 et, finalement, elle a arrondi les angles pour la dernière année en proposant 3500 $. C'est légèrement supérieur à la politique de rémunération du gouvernement. Mais l'Université du Québec avait décidé, dans son budget, qui est de l'ordre de 135 000 000 $ par année, de prendre une somme d'environ 500 000 $ et de l'affecter à des suppléments au chapitre des rémunérations pour rendre les choses plus faciles à l'intention des chargés de cours.

Mais la dernière demande des chargés de cours s'établit à ceci. C'est celle que m'a déposée, hier soir, M. Larose; la précédente était encore plus élevée. Par conséquent, jusqu'à hier soir, nous avions des écarts qui étaient de l'ordre d'environ 500 $ par année. La dernière proposition, première année, 3400 $ par rapport à 3037 $ de proposition patronale, 3600 $ pour la deuxième année par rapport à 3307 $ de la proposition patronale et demande syndicale pour la troisième année, de 3800 $ par rapport à la proposition syndicale de 3500 $. Finalement, le syndicat demandait, pour la quatrième année soit 1989, un montant de 4000 $ qui, nous a-t-il dit, était le montant magique qu'on visait.

Nous avons fait quelques avances de dernière minute pour essayer de rétrécir l'écart, mais il s'est avéré impossible de trouver un rapprochement suffisant. Au terme de conversations qui avaient duré longtemps et qui furent, je dois le dire en toute vérité, empreintes de courtoisie, de respect mutuel et de dignité, il n'y a eu aucun éclat, aucune accusation, aucune dénonciation, ni aucune insulte. Les conversations se sont déroulées dans un climat vraiment exemplaire. Mais nous étions obligés de conclure que l'écart qui séparait les deux parties s'élève, seulement pour l'UQAM, pour les trois premières années d'une convention, à environ 4 800 000 $.

Mais quand on arrête une décision pour l'UQAM, il faut penser plus loin que son nez. Il faut penser que, demain, il y a des chargés de cours qui sont en négociation à l'Université du Québec à Rimouski. Il faut penser qu'il y en a qui seront en négociation à l'Université du Québec à Chicoutimi. Il faut penser qu'il y en a qui le sont à l'Université du Québec à Trois-Rivières. Il faut penser qu'une négociation doit s'engaqer avec des chargés de cours à l'Université Laval. Il faut penser également -je ne sais pas si l'Opposition est informée de ces faits - qu'il y a peine deux mois, une convention était signée avec les chargés de cours à l'Université de Montréal. La convention signée par les chargés de cours et les autorités de l'Université de Montréal s'établit à un niveau très voisin de celui qu'évoque les propositions de l'Université du Québec à Montréal à ses chargés de cours. Les autorités de l'Université de Montréal ont consulté le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science avant de faire leurs propositions. Elles ont veillé loyalement - je leur en sais gré, je leur en rends hommage - à présenter des propositions qui restaient à l'intérieur des paramètres de la politique gouvernementale.

Est-ce que le gouvernement pourrait sérieusement dire à l'Université du Québec à Montréal: Bien, vous autres qui avez toujours été un peu en avance sur les autres universités en matière de rémunération de vos chargés de cours, vous allez faire un bond en avant, vous allez leur donner une leçon encore une fois, on va vous donner une avance plus grande que jamais? Il faudrait être totalement dépourvu du sens des responsabilités pour fonctionner comme cela. Il fallait absolument garder à l'esprit la dimension plus large qui est celle du statut

de la rémunération du chargé de cours dans l'ensemble des universités du Québec. Nous ne tenons pas à leur imposer des conditions uniformes partout. Nous voulons que chaque université garde la responsabilité de ses décisions.

En matière de rémunération, il est clair - je dois le réaffirmer avec toute la force dont je suis capable - que les universités doivent tenir compte dans leur décision des politiques de rémunération du gouvernement. Alors, voilà, Mme la Présidente, le fond du problème. Voilà ce qui nous a obligés à agir. Quand on se heurte à une résistance invincible à des propositions qui sont l'expression fidèle et loyale de la politique du gouvernement, politique qui a été confirmée dans des ententes collectives signée avec 250 000 travailleurs au moins, je pense qu'on ne doit pas rester les bras croisés. Je pense qu'on doit se rendre compte qu'il y a des responsabilités à prendre. Il fallait avoir acquis la conviction qu'un règlement négocié était devenu complètement hors d'atteinte et que les conséquences d'un prolongement du conflit devenaient irréparables. Cette conviction nous l'avons acquise au cours des derniers jours de manière certaine. C'est pourquoi nous avons agi à ce moment-ci.

Maintenant, les chargés de cours nous signalent qu'ils sont soumis à des conditions de travail inacceptables. Ils nous ont fait des représentations à la commission parlementaire de l'éducation qui a étudié l'an dernier le financement et les orientations des établissements universitaires. Nous les avons écoutés avec respect. Sans tirer de conclusion pour l'instant, je conviens qu'il faut étudier très attentivement la condition du chargé de cours dans les universités du Québec. J'ai dit au syndicat dès le début du conflit, dès la première rencontre que j'ai eue avec lui, que l'arrêt de travail n'était pas le contexte propice pour l'étude impartiale et plus large qui doit être faite à ce sujet. On nous dit par exemple que certains chargés de cours ont des charges d'enseignement aussi lourdes que celles des professeurs réguliers mais qu'ils sont rémunérés à 12 000 $ ou 15 000 $ par année, tandis que le professeur régulier retire 45 000 $, 50 000 $ et 55 000 $. Nous allons vérifié ces allégations.

Je crois comprendre que dans ce groupe de 1100 chargés de cours qui sont en grève à l'Université du Québec à Montréal, il y a un noyau composé de personnes qu'on appelle des chargés de cours mais dont l'activité se rapproche davantage, peut-être, de celle de professeur ou d'assistant professeur que de celle de chargé de cours au sens technique du terme. On va regarder ces choses. S'il fallait conclure que des redressements s'imposent et que des redéfinitions de statut sont nécessaires dans certains cas, cet examen sera fait au cours des mois à venir. C'est un examen que nous voulons poursuivre en même temps que nous examinerons d'un autre côté la charge de travail du professeur d'université. On ne peut pas examiner la condition du chargé de cours sans approfondir également les problèmes qui se posent en relation avec la charge de travail du professeur régulier d'université. Ce sont deux sujets que je ne voulais pas aborder personnellement tant que je n'aurais pas reçu l'assurance que le gouvernement serait disposé à injecter un peu plus de ressources dans le réseau universitaire. J'aurais été incapable de me présenter devant les universités... Mon collègue, le député de Rimouski, qui a suivi avec moi les travaux de la commission parlementaire de manière très ponctuelle, très attentive, se souvient très bien des problèmes qu'on nous a posés. Si nous étions allés soumettre les universités à de nouvelles exigences sans faire montre en retour d'un minimum de compréhension et d'accueil à leur endroit, nous n'aurions pas été pris au sérieux. (19 heures)

Alors, il fallait que nous agencions tous ces facteurs, de manière à pouvoir aller au fond des choses, autant en ce qui touche la charge de travail du professeur régulier qu'en ce qui touche la condition du chargé de cours. Et je veux dire aux chargés de cours que je vois avec énormément de sympathie et de respect la contribution qu'ils fournissent à la formation des étudiants universitaires du Québec. A l'Université du Québec, les chargés de cours fournissent, à eux seuls, plus de 50 % de tous les cours dispensés au 1er cycle de formation universitaire, c'est-à-dire au niveau du baccalauréat, plus de 50 % des cours.

Quand ils me disent qu'ils touchent seulement 10 % des rémunérations versées à l'Université du Québec, je ne suis pas capable d'être indifférent, c'est évident. Et je ne voudrais pas que, du côté de l'Opposition, on s'imagine qu'on va m'apprendre ces faits. Nous en sommes parfaitement conscients. Nous en sommes très bien informés. Mais on ne peut pas généraliser certains cas à l'intérieur du groupe des chargés de cours sans avoir examiné tout l'ensemble. Il y en a un bon nombre qui n'ont pas de problème urgent ni aigu. L'avocat qui gagne 150 000 $ par année sur la rue Saint-Jacques à Montréal, qui va donner un cours de droit à la faculté de droit de Montréal, il lui est assez indifférent de toucher 2500 $ ou 5000 $ de rémunération. S'il est prêt à fournir une contribution à bon compte à l'Université de Montréal, je ne vois pas pourquoi cette Chambre s'agiterait pour s'en inquiéter et je ne vois pas franchement ce que la CSN viendrait faire là-dedans, ni la FTQ. On a des problèmes de ce côté-là. Il va falloir

qu'on regarde tranquillement.

Il faut cesser de se créer des obligations mécaniques, des obligations institutionnelles, dont on n'a pas mesuré la note en fin de compte. Il est bien facile de dire qu'on va syndiquer tout ce monde-là. On va mettre tout le monde au même niveau. Ce qu'il faut savoir, et je veux l'illustrer concrètement, c'est que l'écart qui sépare la partie syndicale de la partie patronale, au moment où nous nous parlons, est un écart qui veut dire 4 800 000 $ pour l'UQAM. Et si vous l'appliquez à l'ensemble des universités, il faut multiplier par huit. Cela veut dire que cela fait 38 400 000 $. Le gouvernement cette année n'est pas capable. Et ne demandez pas au ministre de l'Enseignement supérieur d'aller recommander au gouvernement de mettre uniquement dans cette chose-là toutes les ressources nouvelles qui ont été libérées pour des besoins des universités que nous avons laborieusement, mais assez clairement, identifiés à la faveur du travail accompli par la commission parlementaire de l'éducation sur les orientations et du financement des universités l'an dernier.

Voilà le problème auquel nous faisons face. Nous allons l'approfondir. J'ai proposé aux chargés de cours à un moment donné -je pense que c'est dès les premières rencontres - faisons donc une chose, rentrez donc pour un an avec la politique gouvernementale. On va étudier la condition qui vous est faite. On négociera une nouvelle condition dans un an. Refus catégorique. Du côté de l'Opposition, on semblait s'inquiéter tantôt de ce que rien n'ait été dit. Tout a été tenté, Mme la Présidente. Tout a été essayé. Quand on se heurte à une réponse négative, répétée de manière systématique - et je ne prête pas d'intention, je ne porte pas d'accusation ou de jugement - on doit tirer des conclusions, lorsqu'on a la responsabilité du bien général.

Maintenant, j'en viens au projet de loi. C'est très simple, un projet de loi comme celui-ci est malheureusement très simple. Il doit l'être. Il y a trois éléments essentiels à souligner dans le projet de loi. Tout d'abord, le projet de loi crée pour les deux parties, la partie patronale et la partie syndicale, l'obligation de reprendre le service à compter du lundi 11 mai à 8 heures. Ceux qui sont appelés par leur horaire à se rapporter seulement l'après-midi, il n'y a pas de problème évidemment. Mais 8 heures est l'heure symbolique qui est indiquée. Il faut que l'UQAM reprenne son fonctionnement normal à partir de 8 heures, lundi matin. L'obligation créée par la loi que nous proposons vaut autant pour la partie patronale que pour la partie syndicale. Interdiction est faite à toute personne, de l'intérieur comme de l'extérieur, de faire obstacle à la reprise des cours lundi matin.

Autrement, le législateur parlerait pour ne rien dire. Il y a des "finasseux" dans ce monde-là comme dans tous les milieux qui cherchent toujours ce qu'on appelle en anglais un "loophole", un petit trou dans la loi. S'il y a des choses qui ne sont pas dites, il y en a qui concluent assez légitimement à mon point de vue qu'elles sont permises. Alors il faut les dire. C'est dit clairement que personne ne pourra s'ériger en intermédiaire pour empêcher des professeurs, des chargés de cours et les étudiants de pénétrer dans l'université et d'y recevoir l'enseignement auquel ils ont droit. C'est la première partie du projet de loi.

Deuxième partie, règlement du litige. Le règlement qui est proposé ici est très simple. D'un côté, toute la partie normative, toutes les clauses mécaniques, toutes les clauses qui sont d'ordre normatif qu'on appelle, on reconduit la convention actuelle et les deux parties m'avaient recommandé ces derniers jours qu'on s'en tienne à la convention actuelle. C'est ce qu'elles auraient fait elles-mêmes avec l'aide du conciliateur qui leur était affecté. Par conséquent, il n'y a pas de problème ici.

Au sujet des salaires, nous n'avions pas d'objection à la dernière proposition qu'avait présentée l'Université du Québec à Montréal parce qu'il y avait une certaine marge dans son budget que l'Université du Québec à Montréal avait jugé opportun d'utiliser pour embellir légèrement les offres qu'elle avait faites à ses salariés. C'était son initiative, c'était sa responsabilité. Nous l'avions acceptée. Mais là, c'est le gouvernement qui agit, c'est l'Assemblée nationale. Notre norme, c'est la politique salariale du gouvernement. C'est la politique qui a été définie dans les conventions collectives que nous avons signées avec de très nombreux syndicats, avec des dizaines et des dizaines de milliers de travailleurs du secteur public et, par conséquent, les montants d'argent qui sont indiqués en annexe au projet de loi 48 pour la rémunération des chargés de cours sont des montants qui ont été établis à partir de la rémunération actuelle ajustée suivant les pourcentages qui sont indiqués dans la politique gouvernementale de rémunération.

Un dernier point. Pour que la loi soit efficace, il faut certaines sanctions. Le législateur ne parle pas pour rien dire, autrement on pourrait écrire ces articles dans des journaux et cela suffirait. Mais quand le législateur parle, c'est parce qu'il veut être écouté. C'est pour cela qu'il a été mandaté par ses concitoyens pour agir en leur nom, non pour parloter en leur nom, pas pour délibérer, pas pour réfléchir en secret, mais pour agir, pour trancher des problèmes, pour définir des solutions et pour voir à ce qu'elle soient appliquées, que ses décisions soient observées.

Dans le projet de loi, nous avons introduit deux sortes de sanctions. Il y a tout d'abord des amendes pour ceux qui porteraient obstacle à l'application de la loi. Ces amendes n'ont rien d'étonnant, ce sont les mêmes que prévoit le Code du travail. Si on lit le Code du travail, on y verra que les amendes prescrites en cas de violation d'une convention collective ou des lois du travail sont exactement du même ordre que celles que nous avons inscrites dans le projet de loi 48. Il y en a une autre que nous avons inscrite aussi: le chargé de cours qui jugerait devoir défier la loi, qui déciderait, sans raison valable, sans motif raisonnable de ne pas répondre aux obligations qu'il a contractées par son contrat envers la collectivité universitaire de l'UQAM, serait considéré comme ayant renoncé à la priorité de pointage à laquelle lui donne droit la convention existante. En vertu de la convention actuelle, Mme la Présidente, une personne qui a été porteuse d'une charge de cours acquiert un titre d'ancienneté, un titre de priorité pour le cas où la même charge de cours serait attribuée à un chargé de cours l'année suivante. Elle accumule ces points de priorité et lorsqu'elle a eu la chance d'avoir plusieurs charges de cours, elle occupe une place qui lui donne une chance beaucoup plus grande de se voir attribuer des charges de cours. Alors j'indique clairement que les chargés de cours qui décideraient de se placer au dessus de la loi seront considérés comme ayant renoncé à ces points de priorité que leur confère le régime actuel de relations du travail à l'UQAM. (19 h 10)

Mme la Présidente, je pense avoir dit l'essentiel au sujet de ce projet de loi. Le gouvernement est très attaché à l'UQAM. L'Université du Québec et ses filiales sont des créations directes de l'Assemblée nationale du Québec. Elles ne sont pas des établissements privés ou semi-privés. Elles sont des établissements universitaires pleinement publics, c'est-à-dire créés de toutes pièces par la volonté du législateur, de l'Assemblée nationale, et maintenus par l'intermédiaire d'un lien direct avec le gouvernement, beaucoup plus direct que dans le cas des autres universités. Nous portons, par conséquent, à l'Université du Québec et à ses constituantes, en particulier à la principale de ses constituantes, l'Université du Québec à Montréal, un intérêt, un attachement et une affection particuliers. Nous tenons à ce que cet établissement se développe dans les meilleures conditions possible. Je voudrais rendre hommage, à ce moment-ci, à la direction de l'Université du Québec, à son recteur, M. Claude Corbo, et aussi à ses collaborateurs, qui ont fait montre d'une présence, d'une disponibilité, d'un esprit de collaboration et de réalisme exemplaires dans ce conflit. J'ai eu l'occasion de les connaître davantage, de mieux connaître les points de vue qu'ils défendaient. J'ai respecté leur liberté de décision. Je dois dire que j'ai appris, au cours de ces semaines pénibles, par mes contacts, à la fois, avec les autorités de l'Université du Québec, avec les chargés de cours, avec les étudiants également, à mieux comprendre cet établissement et à mieux comprendre pourquoi nous devons faire en sorte qu'ils puissent recommencer sans délai à se développer dans les meilleures conditions.

J'ai été particulièrement affecté quand j'ai pris connaissance de la lettre que m'a adressée, l'autre jour, M. Corbo, lettre dans laquelle il confirmait des propos qu'il m'avait tenus verbalement le matin du même jour. Quand il m'a dit: M. Ryan, c'est la réputation et l'intégrité de l'Université du Québec à Montréal qui sont attaquées, il faut qu'on agisse vite parce que cela peut être tragique. Jusqu'à ce moment-là, ce n'est pas le langage qu'on m'avait tenu. On m'avait dit: C'est grave, les conséquences sont sérieuses, mais nous pensons pouvoir nous en tirer par la négociation. Nous encouragions et le syndicat et l'UQAM à faire cela. Dès que les autorités de l'Université du Québec à Montréal - et j'aurais souhaité que l'Opposition en fasse autant, qu'elle aille se renseigner à la même source - m'eurent communiqué clairement leur diagnostic concernant le stade dramatique et extrêmement critique qu'avait atteint la situation, j'ai décidé d'agir. J'ai tenté une dernière démarche auprès des parties. Ensuite, je suis allé immédiatement au Conseil exécutif faire rapport au gouvernement que cette situation avait assez duré et que le gouvernement ne saurait, pour aucune considération, permettre qu'elle se prolonge davantage.

Je tiens à souligner, Mme la Présidente - M. le Président, excusez, nous avons eu un changement - que le projet de loi reconduit la convention collective existante dans toutes ces dispositions qui ne sont pas l'objet de modifications précises dans le texte même du projet de loi. Cela veut dire que nous retombons en régime de convention collective normal et qu'une grande marge d'initiative est rendue, par le fait même, aux parties. Les parties sont libres de se retrouver demain, après-demain, au début de la semaine et d'apporter à leur convention certains ajustements dont elles pourront convenir entre elles. Nous ne leur enlevons en aucune manière, sauf dans les points qui sont définis par le projet de loi, la liberté de négociation que leur reconnaissent nos lois du travail.

J'ose espérer qu'une fois cette étape difficile passée - j'en conviens - un climat de collaboration pourra être restauré entre

les chargés de cours et les autorités de l'Université du Québec, ainsi qu'entre les chargés de cours, les professeurs réguliers et les étudiants, de manière qu'on voie fleurir de nouveau, à l'Université du Québec a Montréal, cet esprit de communauté universitaire, cette atmosphère de collaboration, de partage, de critique saine également, mais dans un climat de dialogue qui doit être caractéristique d'un établissement universitaire. Qu'on dise ce qu'on voudra, le climat de confrontation qu'ont connu trop d'établissements d'enseignement depuis une quinzaine d'années n'est pas propice au développement de la vie intellectuelle dans les universités, les collèges et les établissements d'enseignement. Le développement de la vie intellectuelle doit se faire dans un climat où les idées puissent être échangées sans que toute la vie soit perturbée.

Le gouvernement apporte sa modeste collaboration à l'amélioration très vivement souhaitée de l'atmosphère et du climat à l'Université du Québec à Montréal. Je sais que c'est une passe difficile, je ne me fais aucune illusion. Nous sommes capables de la traverser.

Je voudrais remercier, avant de m'asseoir, le président de la CSN, M. Larose, dont on me disait qu'il a fait des commentaires au sujet du projet de loi cet après-midi, commentaires empreints de dignité et de respect. Il n'est pas d'accord avec nous. M. Larose aurait souhaité vivement qu'il n'y eût point de projet de loi. Il a fait une critique digne d'un homme civilisé et responsable, j'en suis très heureux. Je suis convaincu que si nous procédons dans le même esprit, nous réussirons ensemble à finir la tâche qui n'est pas terminée. Je conviens très bien qu'il y a encore beaucoup de travail à faire, mais il faut faire ce pas-ci pour être capable d'entreprendre les autres. Merci M. le Président.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, mes premiers mots seront d'abord pour vous indiquer et indiquer aux membres de cette Chambre que nous aussi, en ce qui nous concerne, on va essayer d'avoir des propos dignes et civilisés. Je connais tellement le ministre de l'Éducation pour l'avoir eu comme critique, l'avoir côtoyé depuis un certain temps ici à l'Assemblée nationale! H a cette bonne habitude, peu importent les circonstances, de flatter à peu près tous les personnages avec qui il a des relations et c'est une marque de politesse, comme on me l'indique, de distinction. Il n'en demeure pas moins qu'on a une responsabilité. On a des choses à faire comme Opposition officielle et on a l'intention de les faire le plus convenablement possible à l'intérieur des règles qui nous régissent, M. le Président.

Ce n'est pas par toutes sortes de flatteries qu'il faut oublier ce pourquoi nous sommes convoqués avec une suspension des règles; nous sommes quand même en train de discuter un projet de loi spécial. Peu importent les commentaires que nous ferons sur le projet de loi, il n'en demeure pas moins que c'est une mesure d'exception. A ce sujet, ce gouvernement a à peu près tout dit avec ses ténors quand il était dans l'Opposition sur notre incapacité, l'irresponsabilité, les conflits qui traînaient en longueur et qui, obligatoirement, nous obligeaient à arriver avec des règlements en catastrophe, ce qu'on appelait les lois spéciales. Cela, je l'ai dit tantôt, ce serait fini avec ce beau et bon gouvernement qui, lui, respecterait sa parole, qui, lui, aurait à peu près toutes les solutions, à n'importe quel moment, à tous les maux de la société.

Le projet de loi comme tel, M. le Président, avant d'aborder les questions de fond et de revenir systématiquement sur les choses qui ont été dites, il est clair... J'ai trouvé cela curieux, d'ailleurs le ministre de l'Éducation a parlé pendant trois ou quatre minutes sur le projet de loi et il a bien parlé 45 minutes sur des grandes théories, valables mais qui méritent dans une société d'être partagées et d'être discutées. Ce n'est pas si certain que nous allons, à chaque fois qu'il y aura de la théorisation sur des grands principes sociaux, partager ceux du Parti libéral. Quand on sait que c'est d'abord et avant tout un gros club privé, d'intérêts privés, il me semble que c'est important de dire cela à la population. Les gens le savent, les gens sont conscients qu'il y a des choses qu'il faut dire.

Tout ce que le projet de loi dit, M. le Président, c'est qu'on veut que la grève cesse. Même si le "timing" n'est plus là, la session est finie, les étudiants sont partis, ce n'est pas grave. On fait accroire à la population que nous sommes des gestionnaires efficaces et qu'on s'occupe... J'en ai entendu un, et on va y revenir tantôt, dire que le coeur, le centre du conflit, c'est la préoccupation des étudiants, imaginez! Ils sont tous partis, la session est finie. Ils veulent avoir des jobs durant les vacances, c'est normal. Il y a des étudiants étrangers qui étudient à l'Université du Québec à Montréal. Ils sont retournés là d'où ils venaient, c'est normal. On va essayer de faire accroire cela à la population et on va le laisser passer parce que c'est doucereux, que M. Larose a été gentil et que tout le monde est beau et fin? Non, c'est un projet de loi spécial, M. le Président, et on va en parler. Le projet de loi comme tel dit, ce

n'est pas malin: Arrêtez cela, cela n'a pas de bon sens, même si on a laissé faire pendant sept semaines où c'était capital qu'il y ait un règlement.

Deuxièmement, on fait obligation d'arriver à 7 h 50 ou 8 h 15 si c'est votre horaire. Imaginez! dans un projet de loi spécial, commencer à discuter de l'horaire! S'il y en a qui sont convoqués à 16 heures, arrivez à 16 heures, on ne vous fera pas de problème.

Troisièmement, on reconduit la convention collective. Là vous avez un point important, M. le Président. M. le ministre de l'Éducation a eu la franchise de dire: On reconduit la convention collective. À un moment donné il a dit d'une façon très claire: Ce n'est pas l'urgence, ce n'est pas les cours, c'est qu'on veut que la politique salariale du gouvernement, qui s'applique à l'ensemble des secteurs public et parapublic, soit également applicable à des chargés de cours, même si la problématique est tout autre. (19 h 20)

Même si les besoins sont fondamentalement différents, même si cela n'a pas un brin d'allure, à un moment donné ne pas regarder précisément les besoins d'un groupe en particulier, vous allez passer dans le canal de la politique supposément de la fonction publique et parapublique que nous avons. C'est cela que le ministre de l'Éducation a dit, à un moment donné, d'une façon très claire.

Je voudrais, M. le Président, parce que c'est ma responsabilité revenir d'abord sur les propos du ministre du Travail. Qu'est-ce qu'est venu faire le ministre du Travail dans ce débat? Comme d'habitude, avec son ton le ministre du Travail est venu nous dire qu'il était correct comme ministre du Travail, qu'il avait fait sa "job", qu'il n'avait absolument rien à se reprocher. Et puis il nous a fait l'historique du conflit de travail dont nous parlons, à savoir celui des chargés de cours dont la grève a débuté le 23 mars et qui en est à sa septième semaine. D'une façon très détaillée, comme il est capable de le faire, en mentionnant étape par étape, jour par jour, l'ensemble des interventions de son équipe de travail, il est venu nous dire que, lui, comme ministre du Travail, il s'était assuré de mettre les meilleures ressources humaines disponibles qu'il y avait au ministère parce que, ailleurs, ces mêmes ressources humaines avaient réussi à régler un conflit et qu'en conséquence il n'avait rien à se reprocher. Il est venu nous dire qu'il y avait eu 18 séances de conciliation. Il est venu nous expliquer qu'il n'avait aucun reproche à se faire parce qu'il avait eu des contacts informels, il avait eu des contacts formels, il avait mis toute sa disponibilité, nuit et jour, nous a-t-il dit, avec son collègue membre du gouvernement, le ministre de l'Éducation.

On n'a jamais dit que ces gens-là ne s'étaient pas parlé. J'espère qu'ils se parlent de temps en temps. On n'a jamais dit que le ministre du Travail n'avait pas assumé les responsabilités de ministre du Travail. Mais on va dire ce qu'on a à dire et on va expliquer un peu leur interrogation, leur dire pourquoi nous ne sommes pas d'accord avec le projet de loi. Pourquoi nous sommes contre le projet de loi? Je vais avoir l'occasion d'y revenir et de le dire d'une façon très précise. Je voulais juste couvrir un peu l'aparté du ministre du Travail qui est venu nous dire: Regardez-moi comme je suis beau, comme je suis fin, moi, je fais ma "job" comme ministre du Travail. Qu'il y ait des conflits, que cela se termine par une loi spéciale, ce n'est pas mon problème. Moi, j'ai fait ma "job", j'ai mis toutes les dispositions à la portée des parties. Le résultat n'est pas concluant. Donc je n'ai rien à me reprocher. Je veux reprocher une seule chose au ministre du Travail, premièrement, c'est d'être membre de ce gouvernement, deuxièmement, comme membre du gouvernement de ne pas avoir assumé leurs responsabilités. Je vais revenir tantôt sur le problème majeur, le problème de fond de ce conflit qui a été très bien identifié par le ministre de l'Éducation.

Même chose en ce qui concerne le ministre de l'Éducation. Revenons-en aux propos du ministre de l'Éducation qui commence son plaidoyer en disant: Nous n'aurions pas pu faire autrement. Et là, il m'explique, il dit: Vous, M. Gendron, cela fait quand même un bout de temps que vous êtes ici. Vous savez que, tant qu'un conflit est sous la responsabilité du ministre du Travail, je ne peux rien faire. Il faut que je le laisse sous la responsabilité du titulaire responsable des relations du travail parce que c'est un conflit de travail. Je ne veux pas savoir cela. Je suis au courant de cela, M. le Président. Il nous dit: Quand aurait-il fallu intervenir? Êtes-vous capable de m'indiquer que cela aurait été plus avantageux d'intervenir au préalable? À quel moment précis nous aurait-il fallu intervenir comme gouvernement? À la cinquième, sixième, huitième semaine? Nous on dit: Oui. On va vous la donner la réponse. Nous pensons que fondamentalement ce conflit, puisqu'il est relié à une question de sous-financement décriée, dénoncée depuis des années, pour lesquels ces qens-là ont pris des engagements en campagne électorale en disant: Cela n'a pas de bon sens, il faut rehausser les bases de financement universitaire, pas uniquement pour mettre plus d'argent dans le système, mais pour que les parties concernées, y compris les dirigeants de l'Université du Québec à Montréal, puissent assumer, pleinement et entièrement, l'entièreté de la gestion d'un centre d'études universitaires au

Québec.

Il appartenait à l'Université du Québec à Montréal de négocier avec l'autre partie, à savoir le syndicat des chargés de cours de l'Université du Québec à Montréal. Mais pour le faire, il est inacceptable qu'une des premières remarques qu'ils ont faites, avant même de commencer les négociations... Avant même que les négociations commencent, l'administration de l'Université du Québec à Montréal a dit ceci: Nous avons recours massivement aux chargés de cours à cause d'un sous-financement chronique. Je tiens à vous signaler que ce n'est pas moi qui parle. Je ne suis que le haut-parleur de ce qui a été dit par les dirigeants universitaires. Je répète parce que c'est fondamental. L'administration de l'université a recours massivement aux chargés de cours à cause d'un sous-financement chronique. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie deux choses. Tout le monde sait - M. le ministre de l'Éducation l'a répété à trois ou quatre reprises - que le coût annuel d'un chargé de cours, pour l'université, n'est sûrement pas le même que celui d'un professeur à temps plein. Il a dit que la situation des chargés de cours, cela fait longtemps qu'elle existe, que ce n'est pas lui qui avait inventé cela et que c'est nécessaire dans le réseau universitaire, nous en sommes, mais pas abusivement.

Quand une université dit: On utilise de façon massive des chargés de cours pour dispenser l'enseignement, elle sait très bien que, ce faisant, elle ne s'acquitte pas pleinement de sa responsabilité universitaire, compte tenu des faiblesses de la dimension recherche et de l'encadrement; j'y reviendrai tantôt. Quand l'université dit: Écoutez, je suis étouffée, je n'ai pas fait le choix -c'est toujours l'université qui parle - de faire des déficits accumulés, et je veux essayer de rester dans les limites du financement qu'on m'accorde, elle nous dit par là qu'en utilisant massivement les chargés de cours -excusez l'expression - elle fait de l'argent. Cela lui coûte moins cher, elle économise et, par le fait même, il y a des gens qui sont pénalisés.

Comme je vous l'ai mentionné, M. le Président, c'est connu depuis fort longtemps. Ce sont ces gens qui, en campagne électorale, ont dit: Nous, on va réqler le problème du sous-financement universitaire. Ils voulaient tellement le régler que, tout de suite après la prise du pouvoir, ils ont également, comme geste inconséquent et irréfléchi, coupé encore, en plus de ce qui s'était passé compte tenu des difficultés budgétaires et de la crise économique de 1981, 1982 et 1983. Ils ont encore sous-financé les universités.

C'est tellement vrai que ce sous-financement a été maintes et maintes fois dénoncé par le ministre de l'Éducation actuel qui était critique en matière d'éducation dans l'Opposition. Combien de fois pourrait-on sortir les beaux discours qu'il a prononcés en cette Chambre? Combien de fois? II a également été amplement démontré, lors de la commission parlementaire, que ce gouvernement a pris l'engagement d'entendre l'ensemble des parties concernées pour faire l'évaluation du financement des universités du Québec et pour conclure, non pas ce qu'on a entendu, qu'il fallait continuer à regarder cela et qu'il fallait continuer à faire des analyses, mais le ministre lui-même, avant de se faire rabrouer par son premier ministre, avant de perdre la petite bataille qu'il a livrée avec le président du Conseil du trésor, a été obligé, dans ses conclusions de la commission parlementaire sur le financement universitaire, de reculer comme jamais par rapport aux positions d'entrée qu'il a utilisées lors de l'ouverture de la commission parlementaire, constatant le sous-financement universitaire. Coupure de 34 000 000 $ dans l'enveloppe, par ce gouvernement, la première année de sa gestion! Cette année, avec des crédits additionnels, avec une année d'abondance, selon le président du Conseil du trésor et le ministre des Finances dans un budget présenté en catastrophe, tout ce qu'ils ont pu ajouter est à peine l'équivalent de la compression qu'ils avaient effectuée l'an dernier. Donc, on est en 1987, mais cela veut dire qu'on revient au niveau de 1985-1986.

L'UQAM a raison de prétendre qu'elle ne touchera pas grand-chose de ces sommes. On ajoute seulement 15 000 000 $ à la base de financement, soit - écoutez bien le chiffre - 1,5 % de l'enveloppe actuelle. Le ministre de l'Éducation lui-même a convenu qu'elles étaient sous-financées. Il en a parlé tantôt en disant que la subvention per capita par étudiant à l'Université du Québec à Montréal est de 4700 $ alors que, dans les autres universités, elle se situe davantage autour de 7000 $ per capita. Donc, le sous-financement a notamment eu pour effet de bloquer l'embauche de nouveaux professeurs, d'engager davantage de chargés de cours et, avec toutes les conséquences que cela implique, les professeurs de l'Université du Québec à Montréal ont essayé de dire: Pour nous, il serait à peu près temps de revendiquer une classification salariale c'est cela le coeur du problème - et un perfectionnement qui permettrait un véritable développement de l'université sur des bases d'équité qui, seules, peuvent permettre une expansion continuelle et équilibrée de l'Université du Québec à Montréal. (19 h 30)

Nous avons exactement le même point de vue, à savoir qu'il appartenait aux dirigeants de l'Université du Québec, s'ils avaient la conviction que, pour eux, le

moment était venu de faire un effort pour tenir compte d'une situation particulière des chargés de cours, il leur appartenait, à l'intérieur de l'enveloppe dont ils disposent, d'exercer librement cette orientation. Mais avec un sous-financement chronique comme ils connaissent, avec l'obligation de s'en tenir à l'intérieur des enveloppes octroyées et de ne pas faire le choix de déficits accumulés ou exagérés, il devenait très difficile d'aller plus loin. Ils ont fait le choix de ne pas négocier, de ne pas tenir compte véritablement de la demande syndicale, de la situation particulière, en sachant que le ministre de l'Éducation, le gouvernement arriverait, en fin de compte, avec une loi spéciale parce que, comme je l'ai mentionné tantôt, ces éléments étaient connus depuis le début. Ces éléments étaient connus depuis le début de la négociation et, fondamentalement, le point majeur de cette négociation, c'était une politique salariale mieux adaptée à la réalité des chargés de cours. C'était cela, M. le Président. Ces éléments étaient connus depuis le tout début.

Je pense également, M. le Président, qu'on ne peut pas laisser passer sous silence Ce que j'ai mentionné tantôt, ce qu'ils ont essayé d'appeler la justification de leur loi spéciale parce qu'ils s'occupaient du coeur du problème, ce qui est au centre du conflit, les conséquences graves et importantes pour les étudiants. Nous ne pouvons pas être d'accord, nous ne pouvons pas marcher et contribuer d'une façon illusoire à l'idée qu'en intervenant par une loi spéciale, on va ainsi régler les problèmes étudiants et que, ainsi, on va régler les problèmes majeurs causés aux étudiants par l'arrêt de travail. Nous sommes convaincus que le problème est beaucoup plus fondamental.

Je voudrais prendre quelques minutes sur cet aspect parce qu'il m'apparaît primordial. J'ai eu l'occasion, M. le Président, entre autres, de communiquer avec Mme Josette COté, qui est une des responsables d'associations étudiantes et elle m'a dit ceci: M. Gendron, je suis personnellement contre une intervention du gouvernement, surtout par loi spéciale, parce que, de toute façon, c'est encore les étudiants qui vont continuer à être pénalisés. Les étudiants vont continuer à être pénalisés parce que, d'abord, on n'améliorera sûrement pas le climat à l'intérieur du personnel concerné, qui a l'obligation et qui a également la conviction qu'il joue un rôle important dans la formation des jeunes qui passent par l'université, même s'ils ont un statut de chargé de cours. Je reviendrai quelques minutes sur le statut. Elle nous dit en plus que c'est dégrader le climat. Nous serons exactement, l'an prochain, dans les mêmes conditions, M. le Président.

Quelle est exactement la condition des chargés de cours? J'ai eu l'occasion de le dire quelques secondes tantôt. Ce sont des gens qui, dans certains cas, ne bénéficient à peu près d'aucun encadrement professionnel. Quand je parle comme cela, M. le Président, ce n'est pas contre les personnes concernées. Ils n'ont même pas de statut professionnel reconnu. Ils n'ont pas un statut institutionnel véritablement de professeurs d'université qui ont une responsabilité éducative. Donc, cela veut dire des temps d'enseignement, des temps de recherche, des temps d'encadrement. Toutes ces dispositions, M. le Président, ce n'est pas par une loi spéciale, avec le prétexte qu'on va faire redémarrer les cours, qu'on va permettre que les conditions de vie des chargés de cours et, par voie de conséquence, des étudiants qui doivent recevoir ces cours, vont être améliorées pour les prochaines années. Si je reviens à Mme Josette Côté, elle me disait: C'est pourquoi nous avons appuyé la revendication des chargés de cours depuis le début. C'est pourquoi nous sommes en accord avec leurs revendications. Cela ne veut pas dire que nous partageons à 100 % les demandes du syndicat des professeurs et des chargés de cours. On partage une chose: Laissons à l'université la responsabilité, par un financement adéquat, de prendre ses responsabilités. Cela va éviter les ingérences continuelles du ministre de l'Éducation dans le domaine de l'enseignement supérieur, ingérences, à tout bout de champ, répétées à la suite de la commission sur le financement, son beau discours sur le refus de considérer la nomination de l'ancien ministre libéral, M. Jean-Paul L'Allier comme recteur de l'Université Laval, son ingérence dans un comité, récemment, concernant la gestion du réseau UQ, concernant les orientations et le financement du réseau UQ. Nous ne pensons pas, M. le Président, qu'on va réussir à développer d'une façon convenable la responsabilisation des intervenants universitaires si, à tout bout de champ, c'est le ministre de l'Éducation qui dit: Vous allez passer par là, vous allez passer à travers la politique salariale du gouvernement.

Si le ministre de l'Éducation a voulu par une loi confier la responsabilité de l'enseignement supérieur à des directions universitaires, il leur appartient de prendre certaines décisions. Comme il leur appartenait cette année de faire un effort pour la reconnaissance d'une classification salariale qui aurait tenu compte de l'apport important et significatif des chargés de cours, mais pas uniquement en ce qui concerne le temps d'enseignement. Ces gens-là ont prétendu dans des documents quand même assez étoffés, dans des documents qui ont été fouillés que si au minimum ils avaient une responsabilité de 50 % de temps d'enseignement, s'appuyant sur certains documents, le syndicat évaluant à 50 % le temps consacré par les professeurs à

l'enseignement, donc un chargé de cours devrait être payé un huitième du salaire moyen d'un professeur.

Je ne veux pas faire ici, dans un débat de deuxième lecture, un très long exposé sur les chiffres. Tout ce que je veux signaler, M. le Président, c'est que nous arrivons avec une loi spéciale qui dit qu'il faut que cela recommence, mais je veux signaler qu'on n'a rien réglé. Il y a donc danger que cela recommence mais pas de la bonne façon. Le ministre de l'Éducation est constamment revenu - et je suis convaincu qu'il va y revenir dans sa réplique - en disant: Oui, mais écoutez, vous n'avez rien préconisé comme solution, vous n'avez pas mentionné ce que vous auriez fait à notre place. Oui, on dit que nous, dans ce dossier-là, si on avait, après la commission parlementaire sur le financement des études universitaires, convenu - il me semble que la preuve a été largement faite, largement démontrée, largement appuyée - qu'il était urgent d'avoir un financement plus respectueux des besoins respectifs, cela aurait permis que les responsables, les gens concernés, les parties... Il disait souvent: Suivant nos lois du travail, on n'a pas... il faut laisser courir... il faut laisser les parties cheminer et, à un moment donné, le conflit arrive à une maturité puis il se règle, et s'il n'arrive pas à maturité parce qu'il n'a pas mûri, le gouvernement intervient et prend les responsabilités à la place des intervenants concernés.

Si l'université avait le financement requis, il me semble qu'il aurait été beaucoup plus facile de faire les pressions chez qui de droit, de donner le soutien technique qu'il fallait donner, de donner la part du ministère du Travail, mais une fois pour toutes permettre de faire une brèche significative importante dans cette reconnaissance fondamentale d'une forme de rémunération mieux adaptée à ce que font les chargés de cours.

Là on va le voir article par article, M. le Président, et on va le voir à un moment donné dans les annexes, on va imposer à ces gens-là même pas les dernières offres pour probablement les culpabiliser, probablement pour leur montrer que c'est le gouvernement du Québec qui mène et que tout le monde doit passer dans le pipeline de sa politique salariale qu'il n'a jamais débattue publiquement. Il n'a jamais expliqué pourquoi il n'y a pas certains groupes, M. le Président, qui devraient, avec les justifications appropriées, être soustraits, être à l'écart de cette politique générale qui effectivement peut s'expliquer à l'intérieur de la fonction publique, mais qui ne tient sûrement pas compte des conditions particulières et spécifiques de ce que sont les chargés de cours et de ce que font les chargés de cours.

Quant à la référence au sujet de l'urgence et au fait d'avoir une loi spéciale pour que les cours reprennent le plus rapidement sans évaluer, M. le Président, à ce moment-ci les conséquences absolument dramatiques pour les gens concernés, les étudiants, parce qu'on sait qu'il y en a un très grand nombre... Même si on dit les cours reprennent, lundi matin à telle heure, est-ce à dire que les étudiants de l'étranger vont être là lundi matin à huit heures? Est-ce à dire que ceux qui ont trouvé un emploi et qui ont décidé qu'ils verraient à l'automne, à la prochaine session, comment finaliser la session en cours, vont être là lundi matin parce qu'on l'a dit dans une loi spéciale?

Nous, on pense, M. le Président, que c'est de la poudre aux yeux pour les gens concernés, en ce qui concerne les étudiants, et ce n'est pas exact qu'une telle loi spéciale va permettre de rééquilibrer et, comme une intervention en bout de ligne, au tout début, avec un financement approprié l'aurait permis, permettre aux parties de jouer davantage leurs responsabilités, de s'acquitter de ce qui leur appartient en termes de décision. J'ai toujours pensé, M. le Président, que si l'Université du Québec à Montréal voulait faire un effort et tenir compte de sa situation particulière et spécifique, encore fallait-il qu'elle puisse avoir les crédits requis pour regarder cela. A la lumière des documents qu'on a examinés, à la lumière de cette conviction qu'en fin de compte, si le conflit s'éternisait, le gouvernement prendrait sa responsabilité d'intervenir par une loi spéciale, c'était facile pour elle d'avoir l'attitude qu'elle a eue, de ne pas trop faire d'efforts pour tenir compte de la demande précise. (19 h 40)

Parce que le ministre de l'Éducation a été très clair tantôt: le coeur du problème, toute la question des négociations, pour ce qui est des chargés de cours, se résumait à une question salariale fondamentalement. Lui-même, insistant tantôt, disait: Écoutez, on est bons princes, on reconduit la convention actuelle. Il n'a pas complètement tort, d'abord en disant qu'à reconduire la convention collective actuelle, il n'y a pas beaucoup de problèmes majeurs, puisque, quand on regarde leurs dernières demandes, leurs dernières discussions, on se rend compte que, fondamentalement, sur les clauses normatives, c'est le statu quo, sauf pour l'accès aux charges de cours par la clause de réserve pour les étudiants, et ainsi de suite, et, en dernier, cela a été abandonné. Je suis convaincu qu'ils ne sont pas pleinement satisfaits de l'offre déposée par la partie patronale quant au perfectionnement, mais ce n'était pas un objet majeur, tout le monde en conviendra. Pour les vacances, le statu quo, soit 8 %, il n'y a pas de drame. Reconduire la

convention collective, il n'y a pas de drame. Il y avait un problème majeur et, encore une fois, on ne l'aura pas évalué au mérite, on n'aura pas permis que les concernés, la partie patronale, puisse en faire une appréciation, une évaluation vraiment significative en étant consciente qu'elle aurait pu prendre cette responsabilité si elle avait eu les crédits requis.

Non, je pense que, comme on l'a mentionné, la loi spéciale va donner l'image, artificiellement, que tout est correct, que tout va être repris et qu'enfin les sept semaines sont passées. Les étudiants vont pouvoir reprendre leurs activités comme si on était en plein milieu de l'année scolaire. On n'est pas en plein milieu d'une année scolaire dans le monde universitaire, on est à la fin d'une session qui, pour la plupart, est bel et bien terminée dans des conditions difficiles ou, effectivement, on est resté une patte en l'air. Ce n'est pas en retournant ces gens pour aller chercher une validation officielle de la session qu'on va améliorer le climat et qu'on va corriger les faiblesses de l'absence de locaux.

J'écoutais le ministre de l'Éducation tantôt. Il a dit: Oui, on va regarder cela parce que des chargés de cours m'ont dit qu'ils avaient une tâche qui, parfois, était aussi complète que des professeurs à temps plein et qu'ils avaient la moitié, le tiers, parfois le quart de leur rémunération. Je m'engage à regarder cela. Pensez-vous que le ministre de l'Éducation ne connaissait pas ces éléments depuis fort longtemps, lui qui a été critique en matière d'éducation, lui qui est ministre de l'Éducation depuis deux ans? Pensez-vous qu'il a besoin de dire: J'ai encore besoin de recul pour regarder cela? C'est sa tendance, règle générale, au lieu de prendre des décisions, il faut qu'il regarde toutes les implications. Quand il a fini de toutes les regarder, il recommence parce qu'il n'est pas sûr d'avoir toutes les informations.

Il me semble que, dans ce dossier, il y a des éléments qui étaient connus. Quand il me dit: J'ai entendu dire que certains chargés de cours travaillaient dans des conditions pénibles: absence de locaux, absence de bureaux de travail, incapacité d'être associés à des projets de recherche, pensez-vous que ce ne sont pas des éléments que le ministre de l'Éducation connaît depuis fort longtemps?

Ma conclusion est la suivante. Artificiellement, on veut donner l'impression que ces gens ont pris toutes les informations, on fait toutes les vérifications et que, dans le présent cas, il y avait une seule façon de régler l'affaire, même si on a fait des suggestions, même si d'autres solutions auraient pu être regardées. On a laissé aller la fin de session, on a laissé aller le conflit et on arrive avec une loi spéciale parce qu'on veut imposer fondamentalement la politique salariale du gouvernement à un groupe qui aurait mérité mieux, à un groupe qui aurait mérité qu'on regarde une fois pour toutes si, oui ou non, on fait un effort important pour convenir que les chargés de cours ont une mission éducative, une mission de recherche, une mission d'encadrement et qu'en conséquence ils méritent que ceux pour qui ils travaillent... Que je sache les chargés de cours de l'Université du Québec à Montréal ne travaillent pas pour le gouvernement du Québec; ils travaillent pour l'université. Que l'Université du Québec ait la capacité elle-même de regarder cela et de convenir si oui elle pouvait effectivement tenir compte de leurs demandes mais à une condition fondamentale, celle d'avoir le financement requis, ce qui n'est pas le cas pour l'ensemble du réseau universitaire et ce n'est sûrement pas le cas avec le petit montant qui a été ajouté dans le récent budget du ministre des Finances. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. C'est avec consternation que j'apprenais aujourd'hui le dépôt de cette loi d'exception par le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. Il fut une époque qui n'est pas si lointaine où le député d'Argenteuil, qui officiait de ce côté-ci de la Chambre, blâmait avec sévérité le gouvernement pour sa gestion des relations du travail par l'utilisation de lois d'exception. Je me rappelle le test à l'époque que le député d'Argenteuil proposait au gouvernement en ce sens que toutes les étapes devaient avoir été franchies d'une manière absolument exemplaire et irréprochable - c'était ses propres paroles - pour pouvoir justifier l'usage d'une telle loi d'exception.

J'aimerais examiner, M. le Président, les diverses étapes qui ont été franchies dans ce dossier des chargés de cours. J'aimerais par ailleurs rappeler rapidement au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science les propos qu'il tenait à l'époque, en février 1983, notamment, lorsqu'il disait: La libre négociation, c'est un principe aussi fondamental en démocratie que la liberté d'expression, que la liberté de vote, que la liberté d'association; c'est un corollaire absolument indispensable de la liberté d'association. Si vous avez la liberté d'association et que vous refusiez la liberté de négociation, vous n'êtes pas sérieux, c'est une liberté de papier que vous avez, ce n'est pas une liberté réelle. Ce que nous condamnons, disait-il à l'époque, c'est l'utilisation de l'Assemblée nationale pour

contourner l'esprit et les exigences de nos lois ordinaires du travail.

M. le Président, est-ce que tous les efforts humainement possibles ont été déployés? C'est là, je pense bien, la question qu'on doit se poser lorsqu'on a devant nous une loi d'exception comme celle qui nous est présentée présentement. Je dois vous dire, M. le Président, que je me suis toujours méfiée, quel que soit le côté de la Chambre que j'ai occupé, des motifs et justifications qu'on utilise à l'usage des lois d'exception qu'on veut déposer. Encore une fois, je me suis rendu compte aujourd'hui que j'avais bien raison, parce que l'intérêt supérieur des étudiants que l'on dit défendre, finit par se résumer dans les interventions par la politique de rémunération salariale qu'on veut imposer.

Voyez-vous, M. le Président, le ministre du Travail et le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science ont fait état que les parties étaient ancrées. On a parlé d'une voie sans issue, puisque les parties étaient, disait-on, ancrées dans leur position. Alors, il faut comprendre que le déblocage ne pouvait venir que du rattrapage. Le rattrapage supposait de la part du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science un acquiescement à sortir de la voie d'une politique salariale dictée par le Conseil du trésor. Ce n'aurait pas été un précédent, M. le Président. Pensons aux procureurs de la couronne. Son homologue, le ministre de la Justice, n'a-t-il pas d'abord plaidé, M. le Président? Peut-être que c'est la première chose à laquelle on s'attendait de la part du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, qu'il plaide la légitimité des revendications des chargés de cours. Ce serait peut-être une piètre consolation pour les chargés de cours de constater malgré tout que leur campagne de sensibilisation aura été réussie dans le cadre de leur présente négociation. Leur campagne de sensibilisation à leurs revendications légitimes a passé l'indifférence de l'opinion publique.

M. le Président, je relisais l'ensemble des coupures de presse qui ont fait état depuis sept semaines de cette question et je dois vous dire que c'est là un très large consensus, cette situation ne peut pas longtemps durer. Les chargés de cours ont certainement réussi à augmenter les appuis dans la communauté universitaire, mais je dirais dans la classe politique et dans les médias, des appuis sur la nécessité de corriger cette situation qui est elle-même génératrice de conflits. (19 h 50)

II faut voir que pour des centaines d'entre eux - on ne peut peut-être pas parler pour la totalité des chargés de cours mais certainement pour une bonne majorité d'entre eux - être chargé de cours c'est constituer une main-d'oeuvre à bon marché, ne disposant pas - tout le monde en convient -des conditions essentielles à un travail universitaire de qualité. C'est finalement occuper un emploi précaire, c'est être un enseignant à la pièce, c'est avoir un salaire insuffisant, être considéré comme un contractuel, communément entendu un contractuel sous-payé, c'est être exclu de la participation aux instances décisionnelles à l'université et c'est, en d'autres termes, maintenir à l'université plus de 50 % de l'enseignement sans être partie prenante à part entière. On peut certainement reconnaître, M. le Président, même si c'est pour une piètre consolation, qu'ils ont certainement réussi à rejoindre l'opinion publique pour bien faire connaître leurs revendications et la légitimité de leurs revendications.

Le ministre de l'Enseignement supérieur nous dit qu'il y avait impasse, donc une voie sans issue, puisque - et je rapporte ici les propos qu'il a tenus dans cette Chambre il y a à peine quelques minutes - le coeur du litige étant que 85 % des revenus de subventions émanant du gouvernement du Québec, il fallait appliquer la politique salariale, la politique de rémunération. Je vous rappelle qu'il y a des précédents où la générosité gouvernementale, tout récemment, a été tout autre. Pensons aux procureurs de la couronne qui eux aussi, avec raison, plaidaient la légitimité de leurs revendications et eux aussi plaidaient la nécessité d'un rattrapage et qui, pour les années 1986, 1987 et 1988 ont obtenu une augmentation totale de 35,8 %, augmentation de 35,8 %, consentie par le gouvernement à l'égard de cette catégorie d'emploi, les procureurs de la couronne, qui - et tout le monde en convenait - devaient bénéficier d'un rattrapage et qui avaient une situation devant être corrigée.

Certainement que bon nombre de chargés de cours nous écoutent et qui ont écouté le ministre de l'Enseignement supérieur se sont quelque part indignés des marques d'affection qu'il a manifestées à leur égard - je pense que c'est le terme même qu'il a utilisé - et je dirais même sa préoccupation en ce qui concerne l'amélioration de l'atmosphère et du climat intellectuel à l'UQAM. La loi d'exception qui est devant nous, M. le Président, aura plus pour effet d'amener un climat de dégradation qu'un climat d'amélioration des relations à l'université. Si on fait le test des étapes qui doivent être franchies pour mettre à l'abri un gouvernement qui utilise des lois d'exception, il faut reconnaître que, malgré les séances de négociations dont a fait état le ministre du Travail, il faut reconnaître que quelque action, pourparlers, rencontres qui ont été conduits l'ont été par un ministre qui savait de toute façon que cela ne devait donner aucun résultat puisque,

ultimement, la politique salariale du Conseil du trésor devait être celle que le ministre entendait imposer.

L'État a plus de responsabilité que quiconque parmi les parties puisqu'il a le pouvoir ultime d'imposer et de contraindre. Il a aussi le pouvoir de dénouer l'impasse avant que les parties en arrivent à une voie sans issue. En l'occurrence, comme le ministre de l'Enseignement supérieur l'a lui-même reconnu dans ce dossier des chargés de cours, la seule façon de résoudre la question était d'accepter qu'il y ait du rattrapage, était au moins d'acquiescer au fait et de reconnaître le caractère inadmissible de la situation, de reconnaître qu'il ne pouvait peut-être pas y avoir une correction immédiate, mais qu'il devait y avoir certainement un mouvement vers la correction dans le temps de ces disparités qui ne sont pas acceptables. H y a deux catégories d'enseignants réguliers, on le sait maintenant. Il y a des enseignants réguliers à plein temps qui sont les professeurs et il y a des enseignants réguliers qui sont, eux, des pigistes, qui sont instables. Maintenant, l'ensemble des examens qui ont été faits de la situation permettent certainement de constater que c'est en partie le travail qui est réalisé par ces chargés de cours qui assure le financement de l'université. Il y a là quelque chose de paradoxal, M. le Président, qui ne peut pas durer longtemps et qui est, en soi, générateur de conflits.

La recherche loyale d'un règlement négocié, puisque c'est certainement ce test qu'on examine du côté des partis pour savoir si on est en droit, maintenant, d'imposer une loi d'exception, la recherche loyale d'un règlement négocié passait par l'acceptation d'un rattrapage salarial du côté gouvernemental et c'est ce refus, M. le Président, qui m'amène, comme députée, à refuser également d'entériner cette loi d'exception qui ne me semble pas, loyalement avoir été justifiée dans les circonstances. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Alors, je reconnais maintenant M. le leader de l'Opposition, le député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président, je voudrais joindre ma voix à celles du député d'Abitibi-Ouest et de Mme la députée de Maisonneuve et dire quelques mots sur ce projet de loi 48.

M. le Président, je ne reprendrai pas essentiellement ce qui a été dit mais je voudrais attirer l'attention sur un ou deux articles de ce projet de loi, même si l'étude article par article se fera en commission plénière tantôt. On en est au niveau de l'adoption du principe.

Le principe d'une loi d'exception c'est de prévoir des pénalités si les gens ne se conforment pas à la loi. Je me rends compte, M. le Président, que le ministre va complètement à l'encontre de son discours sur le principe lui-même quand on lit le projet de loi. Je vais m'expliquer. Le ministre reconnaît que certains chargés de cours, pour ne pas dire la totalité des chargés de cours, méritent une étude bien attentive - il y en a qui sont, peut-être, dans des conditions même pas correctes -qu'il faudrait modifier cela, qu'il faudrait créer, je ne sais pas si c'est un comité, mais celui-ci devrait se pencher là-dessus.

M. le Président, je pense que cela ne prend pas de longues études pour se rendre compte que si l'Université du Québec en est rendue à avoir 1100 chargés de cours, c'est parce qu'elle a trouvé là un moyen comme université de pallier son manque d'argent en engageant des chargés de cours au lieu de professeurs réguliers. C'est, comme pour les hôpitaux, d'ailleurs, où, au Québec, on en était rendu à 55 %, à 60 % de personnel pratiquement à temps partiel. C'est un des moyens que les administrations locales ont trouvé durant les crises économiques pour pallier le manque de budget.

Donc, un chargé de cours qui donne le même nombre de cours qu'un professeur à temps plein et qui reçoit à peu près le tiers ou la moitié de son salaire, ce n'est sûrement pas une justice sociale. On doit, donc, conclure assez facilement que ces gens-là ont droit à un rattrapage.

Je me demande, à ce moment-là, à moins que mes renseignements ne soient inexacts, pourquoi un des derniers articles, l'annexe en particulier qui prévoit les salaires... Si on est conscient des anomalies, si on est conscient des lacunes graves, si on est conscient du manque à gagner et du rattrapage que doivent faire les chargés de cours, je me demande à ce moment-là - et je demande au ministre dans sa réplique de me répondre et d'informer cette Chambre là-dessus - pourquoi, s'il est exact que la dernière offre de la partie patronale est supérieure à l'annexe, on ne retrouve pas, à ce moment-là, quand on reconnaît le principe du rattrapage, au moins l'offre la plus haute qu'ils auraient reçue. Déjà il y a quelque chose qui ne marche pas, il y a quelque chose qui accroche là. Il y a quelque chose, M. le Président, qui me dit qu'on reconnaît candidement au niveau du discours qu'il y a un rattrapage certain à faire et on les pénalise par rapport même à l'offre supérieure qu'ils auraient reçue au cours des négociations.

Une voix: C'est cela.

M. Chevrette: Cela ne marche sûrement pas, M. le Président. Vis-à-vis des chargés de

cours on a assez de leur imposer une loi d'exception, une loi spéciale qu'on devrait, au moins, quand on reconnaît le caractère plutôt ombrageux dans lequel ils sont sur le plan de la reconnaissance de leurs droits sur le plan salarial, qu'on reconnaît qu'il y a un rattrapage à faire... Je me demande bien pourquoi une loi spéciale viendrait les pénaliser davantage.

C'est un peu cela que la députée de Maisonneuve fait ressortir et c'est drôlement important. C'est une loi qui serait punitive à double titre à ce moment-là pour les chargés de cours. (20 heures)

M. le Président, je suis aussi surpris que dans ce projet de loi qui veut mettre un terme à une grève, on se donne des pouvoirs de présomption de culpabilité carrément. Quand on dit "qui aurait dû savoir", on ne prend même pas la précaution d'aller voir si l'individu est en mesure de savoir, mais on le présume coupable. C'est une présomption de culpabilité dans le droit qu'on se donne. On se donne le pouvoir d'engager n'importe qui par décret aux conditions qu'on fixe, qui peuvent même être supérieures aux conditions qu'on offre. Ça va jusque là. Quant à pousser l'illogisme, on peut le pousser au bout. On pourrait adopter un décret et paye les chargés de cours l'équivalent du salaire moyen payé aux universitaires. Et, les professeurs à qui on reconnaît une certaine forme de rattrapage, on les pénalise par rapport à la meilleure offre qu'ils auraient reçue. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas là. Je suis convaincu que le ministre devrait nous éclairer là-dessus lors de son droit de réplique, parce que c'est quand même important d'essayer de comprendre les enjeux du projet de loi.

Ce projet de loi vise-t-il à punir absolument ou s'il vise à mettre un terme à une grève? En tout cas, ça m'apparaît être de deux niveaux à ce moment-ci, à moins qu'on ne me prouve le contraire. Non seulement ce projet de loi vise à mettre un terme par des pénalités très fortes, mais il vise également à pénaliser les individus qui auraient utilisé un droit légal, un droit reconnu par les lois du travail.

M. le Président, plus que ça, le projet de loi va plus loin. Il dit: On peut engager des professeurs sans pour autant limiter la tâche. Est-ce pour donner exclusivement du rattrapage dans le cadre du rattrapage à opérer ou si on peut engager n'importe qui pour substituer pour tout le temps? Ce n'est pas dit dans le projet de loi. Il faudra le regarder très sérieusement avec le ministre parce qu'il m'apparaît que ça pourrait être l'occasion d'exercer des vengeances, d'autant plus que le ministre ne se garde pas de pouvoirs quant aux vengeances éventuelles. Il laisse tout ça à l'autorité compétente qui est l'Université du Québec.

Quand le législateur intervient, il doit au moins essayer de ne pas en donner plus que le client en demande à l'autre bout. Je ne pense pas que l'université soit allée jusqu'à lui demander de lui donner porte ouverte à des vengeances et à un esprit revanchard quant à l'application d'une loi. Je pense qu'il faudra le regarder très sérieusement lors de l'étude article par article.

Je voudrais revenir sur ce que je disais vers les 17 heures cet après-midi en ce qui concerne l'urgence. Malqré qu'on ait laissé filer longtemps cette grève sans intervention au moment où on aurait dû le faire, il m'apparaît qu'on n'a pas fait preuve de grande imagination pour essayer d'éviter que les étudiants soient pénalisés davantage. Je reviens sur cet aspect parce que je pense que le projet de loi risque de faire deux victimes: non seulement les chargés de cours, mais également, doublement, les étudiants. Cela m'agace que le ministre, qu'un ministère ou qu'un gouvernement ne fasse pas les efforts pour minimiser les impacts et les préjudices, pour les réduire au maximum. Cela m'inquiète.

Est-ce que le ministre a véritablement pensé à des formules pour tâcher de limiter les préjudices causés aux étudiants? Est-ce que le ministre a pensé à des formules pour tâcher de faire en sorte qu'un étudiant qui se verrait, à toutes fins utiles, privé de son gagne-pain, qui se verrait peut-être refuser une bourse parce que sa session n'est pas finie et peut-être refuser son travail... S'il continue son travail et ne vient pas finir sa session, il va perdre sa bourse et, en plus, il va se retrouver dans une reprise éventuelle de la session. Est-ce que le ministre, à ce moment-ci, ne pourrait pas faire montre d'ouverture à ce niveau, essayer de regarder des cas particuliers? Il y a des pauvres dans notre société. Il y a des gens qui sont juste au-dessus du seuil de la possibilité d'avoir des bourses et pour qui c'est drôlement important de travailler et qui se sont fiés dans leur embauche purement et simplement au fait que l'université se termine le ou vers le 30 avril et qui ont commencé à travailler depuis une semaine. Ces gens vont avoir à faire un choix extrêmement douloureux. Ces jeunes devront peut-être abandonner leur travail qu'ils viennent de commencer, se priver d'un revenu de 4000 $, 5000 $ gagné durant les vacances pour pouvoir continuer leurs études en septembre. Ne pourrait-on pas offrir à cette jeunesse la possibilité d'avoir un laps de temps X pour compléter le minimum d'heures qu'il faut pour réaliser cette session sans être placés devant l'éventualité où ils perdraient, à toutes fins utiles, le revenu qui leur permet de continuer leurs études universitaires?

Il me semble qu'il y a place à l'imagination, il y a place à la recherche de

formules qui permettraient d'éviter au maximum les préjudices. Il me semble que, comme législateurs, comme Parlement, on se doit d'aller dans ce sens. D'autant plus - je le répète - que, si on avait voulu, les préjudices auraient été un peu moins grands, il y a quelques semaines, pour l'étudiant. Actuellement, pour bon nombre d'étudiants, les préjudices sont pires aujourd'hui qu'ils l'auraient été il y a deux ou trois semaines.

D'autant plus que le ministre lui-même a dit qu'avec deux semaines de session, cela pouvait couvrir au moins la validité de la session. Si tel est le cas, il me semble que, placé devant un état de fait où des individus risquent à la fois de perdre une subvention ou une bourse parce qu'ils n'ont pas fini et avoir à choisir entre une bourse et un salaire qui leur permet de continuer, il y a de la place pour trouver des solutions et pour permettre aux jeunes de continuer correctement leurs études, puisqu'on n'a pas annoncé, que je sache, de réforme au plan des prêts et bourses pour la prochaine année. Ce n'est pas encore fait.

Il faut bien essayer de composer avec ce qui existe. Moi, cela m'apparaît quelque chose qu'il faut fouiller, qu'il faut trouver à très brève échéance pour permettre aux jeunes étudiants de l'UQAM de ne pas être doublement pénalisés. Je terminerai mon bref exposé en demandant, bien sûr, au ministre de l'Éducation de faire preuve de beaucoup de souplesse parce qu'on sait bien que le poids du nombre va jouer. Quand bien même on se lèverait et qu'on parlerait pendant deux heures, trois heures ou quatre heures, on sait que le poids du nombre va jouer pour l'adoption de la loi. On a beau être contre, elle sera adoptée, on le sait.

Il n'en demeure pas moins qu'il me semble qu'avec un peu de souplesse de la part du ministre, un tant soit peu, si le ministre est aussi conscient des préjudices qui ont été causés aux étudiants, il devrait être conscient des préjudices que lui-même s'apprête à causer à d'autres étudiants et, dans plusieurs cas, des préjudices qui seront en double vis-à-vis de certains étudiants. Cela m'apparaît... Ce ne sont pas tous des gens de Montréal qui vont à l'UQAM. Ce ne sont pas tous des gens résidant à Pointe-aux-Trembles ou à Montréal-Est ou à Montréal-Nord. Il y a des gens de Joliette, il y a des gens d'un peu partout dans le Québec qui vont à l'UQAM. Il y a des jeunes qui ont à payer un logement, ils ont à payer des frais de déplacement. Il y a des jeunes qui devront séjourner à Montréal et dont le bail est échu depuis le 30 avril. C'est à ces jeunes qu'on va demander des sacrifices additionnels en plus peut-être de leur demander de sacrifier un travail assez rémunérateur qu'ils avaient déjà trouvé.

Donc, M. le Président, nous serons certainement contre ce projet de loi, parce que nous pensons qu'il arrive à un moment inapproprié. On est convaincu, à ce stade-ci, que le ministre aurait pu consacrer ses énergies beaucoup plus à trouver des solutions administratives face aux jeunes. Il était capable, par décret de s'assurer que les jeunes ne seraient pas pénalisés en ce qui concerne les prêts et bourses; il était capable, par directives administratives de s'assurer que les jeunes pourraient reprendre, dans un laps de temps x, le nombre d'heures manquées pour terminer leur session; il était capable, sur le plan administratif, de trouver des solutions pour ce qui est des finissants et de faire en sorte, M. le Président, que cela lui donne le temps nécessaire pour la révision du financement des universités. Trouver des solutions, car l'Université du Québec, on peut l'appeler l'université populaire, l'université du peuple. Il me semble qu'elle a le droit aux mêmes traitements que les autres universités; j'en suis convaincu et je pense que le ministre de l'Éducation est conscient qu'on ne peut pas avoir un financement de 4500 $ per capita quand on sait que, dans certaines universités, c'est 7000 $ ou 8000 $ per capita que l'on reçoit comme ressources financières ou qu'on a comme ressources financières. (20 h 10)

II y a une équité, d'autant plus que l'on doit la rechercher. Le ministre lui-même disait à plusieurs reprises, et je me souviens que, quand il était dans l'Opposition, il parlait de sous-financement puis de sous-financement des universités. Malgré l'effort de 37 000 000 $ qu'on avait fait la dernière année, en 1985, je me souviens que le ministre de l'Éducation, qui était à l'époque critique de l'Opposition en matière d'éducation, avait dit de son siège: Ce n'est pas beaucoup. C'est le commencement d'un balbutiement quant au redressement du financement des universités.

Ce même ministre, M. le Président, en 1986, s'est fait couper 34 000 000 $ et cette année, il vante et louange le ministre des Finances de lui avoir donné 40 000 000 $. Il se retrouve avec un solde net, pour deux ans, de 6 000 000 $, ce qui ne représente même pas l'indexation normale des dépenses du gouvernement pour l'Université du Québec. C'est 6 000 000 $ net de financement que le Parti libéral a apporté aux universités, 6 000 000 $ de plus, M. le Président, avec un nombre accru d'inscriptions, avec un nombre d'options beaucoup plus développées, et cela, le ministre ne le dit pas.

Dans son discours sur le budget, hier, je l'ai écouté religieusement. Il a louangé le ministre des Finances de lui avoir donné 40 000 000 $. Il n'a pas dit qu'il s'était fait couper 34 000 000 $, puis il ne se rappelait pas avoir dit que c'étaient des balbutiements quand on avait donné 37 000 000 $. La

rigueur intellectuelle, M. le Président, c'est quoi? C'est de dire: Oui, je n'avais pas trouvé ça gros, 37 000 000 $. Je le répète, ce n'était pas gros, 37 000 000 $. Là, on aurait reconnu l'ancien éditorialiste du Devoir. On aurait vu que le gars était cohérent et qu'il assumait la rigueur qu'on lui connaît. C'étaient des balbutiements quand on donnait 37 000 000 $. Il disait qu'il allait au fond des choses, qu'il grattait, qu'il fouillait, que c'était rigoureux, son affaire. Il ridiculisait le ministre des Finances de l'époque d'avoir donné 37 000 000 $. Il s'en fait couper 34 000 000 $, il ne dit pas un mot. Il en ajoute 40 000 000 $ et il crie au miracle, alors que ça ne fait que 6 000 000 $ de plus que le dernier budget du gouvernement du Parti québécois.

Si 37 000 000 $, c'était un balbutiement en 1985, imaginez 6 000 000 $ de financement additionnel sur deux ans, sur deux budgets du Parti libéral, 6 000 000 $ de plus, solde net. Où est-ce qu'on va? Je le comprends de dire que les universités sont sous-financées, qu'elles ont de graves problèmes, qu'elles ont cherché des solutions pour s'en sortir, mais il y a deux victimes dans ces solutions, qu'ont trouvées le ministre et l'université: ce sont les chargés de cours, qui sont les parias de l'enseignement universitaire, et ce sont les étudiants qui, à ce stade-ci, sont doublement pénalisés, non seulement sur le plan des études, mais également sur le plan des revenus pour études. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Claude Ryan (réplique)

M. Ryan: J'ai écouté avec intérêt les choses qui ont été dites par nos amis de l'Opposition. J'essaie de trouver la ligne directrice dans la position adoptée par nos amis d'en face, et j'ai un peu de difficulté à y voir clair. Il y a une chose qui était claire dans l'intervention de la députée de Maisonneuve. Elle a cité un écrit que j'avais commis, je pense, à l'occasion du débat sur la désastreuse loi 111. C'est une loi qui enlevait aux travailleurs, d'un coup de plume, sans négociation, sans rien, des droits fondamentaux. J'avais écrit des lignes que la députée de Maisonneuve a citées, et je suis heureux de répondre ce soir à la question qu'elle a posée.

Est-ce que toutes les étapes ont été respectées? Oui, elles l'ont été. Le ministre du Travail en a donné l'ample démonstration tantôt. Justement, nous n'intervenons à ce stade que parce que nous nous sommes soigneusement assurés que toutes les étapes du processus démocratique de négociation ont été suivies. Ce que j'ai du mal à comprendre, c'est l'attitude des collègues de la députée de Maisonneuve, y compris le leader de l'Opposition. Je ne voudrais pas qu'il se sauve...

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Ryan: C'est l'attitude du leader de l'Opposition qui, lui, aurait voulu que nous fassions cela il y a un mois. Il n'a jamais dit ce qu'il aurait voulu qu'on fasse il y a un mois, mais il aurait sûrement été en contradiction avec la députée de Maisonneuve s'il avait voulu que nous agissions par voie de législation il y a un mois. Je pense que, s'il y avait eu un petit caucus entre vous pour préciser plus clairement votre ligne de conduite, peut-être nous auriez-vous été plus utiles dans les interventions que vous avez faites ce soir.

Je veux assurer la députée de Maisonneuve, pour revenir au premier thème des interventions de l'Opposition, que du côté du gouvernement, nous tenons beaucoup à ce que les processus réguliers de la négociation tels que définis dans nos lois soient observés au complet. Là-dessus, je suis heureux de signaler, une fois de plus, et j'ai eu l'occasion de le faire souvent en cette Chambre, que je suis tout à fait d'accord avec le ministre du Travail et avec l'orientation générale qu'il imprime à la politique du gouvernement en matière de relations du travail et, plus particulièrement, en matière de conflits de travail. Par conséquent, quand je dis ces choses, je m'appuie sur un exemple très solide, celui qui est donné par le ministre responsable de ces choses au sein du gouvernement.

La députée de Maisonneuve a dit une autre chose très importante à mon point de vue. Elle a dit: II ne pouvait y avoir de déblocage dans ce conflit qu'à partir d'un rattrapage - je pense qu'elle a raison - à partir d'une injection d'argent additionnel. Le mot "rattrapage", je ne l'emprunte pas tout de suite, je ne l'épouse pas maintenant, parce que je n'ai pas complété l'étude que nous devons faire à ce sujet. Je voudrais rappeler à la fois au leader du gouvernement... C'est malheureux quand il est obligé de s'absenter, parce qu'il revient avec le même argument qu'il avait employé avant; on lui a répondu deux ou trois fois, mais il n'en a pas eu connaissance. Il n'écoute pas. Le dialogue, cela progresse quand on écoute l'autre. Autrement, on n'avance à rien.

Je reviens à l'argument invoqué par la députée de Maisonneuve au sujet du rattrapage. J'ai cité le cas de l'Université de Montréal qui a signé une convention avec ses chargés de cours, il y a à peine deux mois. Il s'agit d'un syndicat de chargés de cours affilié à la même fédération de la CSN que

le Syndicat des chargés de cours de l'UQAM et ce syndicat a réglé pour trois ans en respectant la politique salariale du gouvernement; l'Université de Montréal aussi. Est-ce qu'on voudrait suggérer qu'il eût été désirable que le gouvernement dise à l'Université de Montréal et à son syndicat des chargés de cours: Vous vous êtes comportés comme des naïfs, comme des gens innocents; nous allons vous donner l'exemple; voici une convention que vous auriez dû signer si vous aviez été un petit peu plus forts dans les jeux de pression?

La preuve n'a pas été faite que, dans les nombreuses priorités qu'ils nous sollicitent au niveau des universités, l'augmentation considérable de la rémunération des chargés de cours doive être la première des priorités à retenir. Nous avons une obligation qui nous impose d'aligner la rémunération des chargés de cours sur celle donnée dans l'ensemble des secteurs public et parapublic. Je pense que la politique que nous suivons est difficile à critiquer parce que, même les centrales syndicales - les grandes centrales syndicales, la CEQ, la FTQ et la CSN - ont signé avec le gouvernement des conventions qui respectent cette politique salariale du gouvernement. On l'a définie avec elles dans certaines modalités. Ce n'est pas une chose unilatérale qui a été faite, mais les fondements qui avaient été établis par le gouvernement sont demeurés. Alors, nous appliquons cette politique-là au problème des chargés de cours. (20 h 20)

On dit, du côté de l'Opposition: II y a un rattrapage à faire. Moi, je dis: Je ne suis pas au stade où je peux faire une recommandation à caractère général au gouvernement en ce qui touche le rattrapage qui devrait être fait. Je dis que nous avons besoin de faire une étude plus approfondie, de vérifier des faits plus soigneusement. Je m'engage à le faire au cours de la prochaine année ou des prochains mois et je ne pense pas que ce serait responsable de proposer davantage actuellement.

Je tiens à rappeler, encore une fois, que les priorités que nous présentent les universités sont extrêmement nombreuses et coûteuses. Le renouvellement du personnel régulier est peut-être un problème plus urgent et plus aigu pour les universités que le problème des chargés de cours à bien des égards. On n'engage pas de personnel enseignant nouveau dans les universités depuis déjà quatre ou cinq ans. Le personnel enseignant vieillit d'une année à chaque année. La moyenne d'âge, qui était de 45 ans, il y a cinq ans, a monté d'une année par année depuis ce temps-là. Je dis 45 ans, c'est hypothétique; je ne l'affirme point. Mais on voit la moyenne d'âge augmenter d'année en année. Le potentiel de création en matière de recherche et d'enseignement est affecté et il ne peut pas demeurer au même point s'il n'y a pas un renouvellement continu qui se fait. Cela prend de l'argent pour cela. Où va-t-on mettre exactement l'argent? Là, nous avons fixé quelques objectifs. Nous augmentons la base de financement de 15 000 000 $ cette année. Nous ajoutons une somme de 10 000 000 $ pour le financement des frais indirects de la recherche.

On nous a dit de toute part que les universités qui font de la recherche sont pénalisées par rapport aux autres, parce que pour un projet de recherche qu'un professeur obtient, il y a des dépenses qui vont avec ça. Il y a du personnel, il y a des locaux, il y a de la papeterie, il y a des services de communication, etc. On dit que, pour 1 $ que vous obtenez pour la recherche proprement dite, ça coûte un autre 1 $ pour les frais indirects. Là, nous disons que nous allons injecter une somme dans ce secteur pour la prochaine année. Pas dans deux ans mais pour l'année 1987-1988, celle qui est commencée. De plus nous disons: II y a des déficits accumulés. Notre principe, c'est que les universités doivent financer leurs déficits, les reprendre en main. Mais il y a eu des cas d'injustice, d'inégalité au cours des dernières années. On va donner un certain coup de pouce à des universités qui ont été l'objet d'un traitement carrément inégal. Ce n'est pas énorme mais c'est quand même un bon coup de pouce qui sera apprécié de la part des universités.

On nous avait signalé que les équipements dans les universités laissent énormément à désirer. Je l'ai constaté moi-même, je l'ai signalé dans des interventions antérieures en cette Chambre. Nous aurons 5 000 000 $ garantis par année pendant les quatre prochaines années pour l'amélioration des équipements.

Les bibliothèques, 5 000 000 $ par année pour les deux prochaines années. En tout, les crédits nouveaux qui sont engagés pour les universités au cours des quatre prochaines années, 119 000 000 $. Ce n'est pas la fin, ça. Je peux vous assurer tout de suite que l'an prochain je vais revenir. Il y a d'autres besoins qui vont se présenter mais ce sont des choses qui sont acquises, c'est un fondement sur lequel on va bâtir davantage. À comparer avec le régime malthusien qu'on avait connu auparavant, je pense que c'est une immense amélioration et cela pratiquement au début du mandat du gouvernement et non pas juste à la veille de l'élection, comme l'avait été l'injection de 38 000 000 $ du gouvernement précédent.

Je pense que la position que nous défendons se justifie très bien. Je comprends le souci de la députée de Maisonneuve et encore une fois, quand nous aurons cerné avec plus de clarté les données réelles de ce problème, nous verrons à proposer les

remèdes qui pourraient être nécessaires.

Le député de Joliette semblait beaucoup s'inquiéter des étudiants et de l'accès aux bourses. Quand j'ai parlé au début de notre débat, je parlais des étudiants qui veulent tenter d'obtenir des bourses privées pour l'année prochaine. Il faut qu'ils fassent leur demande au printemps ou à l'été. On dit: Pour l'obtention de telles bourses, il faut que vous ayez un baccalauréat ou il faut que vous ayez une maîtrise. Les étudiants qui étaient au niveau du baccalauréat, il y a la moitié de leurs cours qui n'étaient pas donnés depuis six semaines. Pas de baccalauréat, pas de demande admissible pour l'obtention d'une bourse privée. On ne parlait pas des bourses publiques. Dans le domaine public, le député de Joliette n'a pas à s'inquiéter, nous allons faire en sorte que personne ne soit l'objet de conséquences injustes découlant du conflit. Je peux vous assurer qu'on va regarder avec une attention particulière les problèmes qui pourraient exister. Tous ceux qui étaient inscrits, qui avaient accès à l'aide financière, ils ont reçu l'aide financière à laquelle ils avaient droit et on n'a exigé de personne qu'ils nous remboursent les sept semaines pour lesquelles ils auraient touché une bourse ou un prêt et pendant lesquelles ils n'auraient pas reçu de cours. Ça va faire deux semaines de cours au lieu de cinq et on ne demandera pas la différence, ça va rester dans l'un des goussets de l'étudiant ou de l'étudiante concerné.

Par conséquent, c'est bien beau de verser des larmes pour la télévision mais il faut d'abord s'informer des problèmes réels et après ça peut-être qu'on peut tenir un langage bien différent.

Je finis. Il y a un autre point sur lequel j'entends des apitoiements mal éclairés de la part de l'Opposition. On parle de ces jeunes qui sont partis de chez eux. Il y en a qui sont partis chez eux, je l'ai dit moi-même, qui restent loin, qui ont déjà pris des emplois. C'est vrai qu'il y a des conséquences qu'on ne pourra pas réparer. Je l'ai dit tout le long du débat.

Ainsi que je l'ai signalé, la majorité des étudiants inscrits à l'UQAM sont des adultes qui travaillent à Montréal ou dans la région, qui vont être très heureux de compléter leur session au cours des deux prochaines semaines et qui pourront ensuite entreprendre une session d'été ou une nouvelle session en septembre prochain qui leur permettra d'atteindre l'objectif qu'ils se sont fixé. Mais penser que c'est rien que des jeunes et qu'on aurait pu arranger tout cela il y a un mois, aie, sortez du simplisme élémentaire! Ce ne sont pas des "cannes de bines". C'est plus compliqué que cela.

Je peux vous assurer que ce que nous faisons est dans le plus grand intérêt de la clientèle réelle de l'Université du Québec à

Montréal à l'heure actuelle et non pas d'une clientèle imaginaire comme celle qui existe encore chez ceux qui conçoivent l'université selon les dimensions où on la connaissait il y a dix ou quinze ans. L'université d'aujourd'hui est une réalité très différente. On s'en va de plus en plus vers une situation où la majorité des étudiants inscrits dans nos universités sont en même temps au travail. Même dans les collèges, M. le Président, une enquête récente a montré qu'un étudiant sur deux travaille en même temps qu'il suit des cours. A l'université, à plus forte raison, il y en a encore plus que cela.

Par conséquent, ce que nous faisons est absolument nécessaire pour tous ces étudiants qui vont être capables physiquement, professionnellement et humainement de reprendre le collier à l'Université du Québec à Montréal lundi prochain. Pour le reste, je pense que nous avons fait amplement la preuve que nous sommes capables de prendre un problème et de le mener à terme. Mais qu'on n'attende pas de nous des solutions tant que nous n'aurons pas complété les études nécessaires. Ce serait agir de manière irresponsable.

Le projet de loi que nous présentons est modéré. Je pense qu'il est ferme également parce que c'est un projet de loi qui vise de l'action. Ce n'est pas un énoncé de théories. Nous visons des résultats concrets lundi prochain et je veux assurer tous les intéressés, les autorités de l'Université du Québec à Montréal, les professeurs réguliers, les chargés de cours, les étudiants, que nous leur accorderons toute la collaboration et l'aide qui peuvent être attendues du gouvernement afin que les fins pour lesquelles cet établissement universitaire a été créé par l'Assemblée nationale puissent être remplies au maximum. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé à cette étape de l'étude du projet de loi, est-ce que cette motion d'adoption du principe du projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal, est adoptée?

M. Chevrette: Adopté sur division.

Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

Étude détaillée

M. Gratton: M. le Président, conformément à la motion que nous avons adoptée, je proposerais maintenant que l'Assemblée se transforme en commission plénière pour que nous procédions à l'étude détaillée du projet de loi.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. L'Assemblée nationale se transforme donc maintenant en commission plénière. (20 h 30)

Commission plénière

M. Saintonge (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît-La commission plénière se réunit pour l'étude détaillée du projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal. Au départ, je dois préciser que la durée maximum du mandat qui nous a été alloué est de deux heures puisque nous avons à faire rapport au plus tard deux heures après le début de nos travaux et que dix minutes avant l'expiration de ce délai je devrai mettre aux voix, sans débat, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé à ce moment. Puisqu'il est exactement 20 h 33, notre mandat ne pourra excéder 22 h 33.

Je demanderais si dès maintenant M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la

Science ou même les représentants de l'Opposition ont des amendements à déposer ' pour étude par cette commission.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Je voudrais déposer un projet d'amendement touchant l'article 18. C'est un amendement qui ne touche pas le fond de l'article 18, mais qui vise une certaine clarification dans la formulation.

Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le ministre. Je comprends que cet amendement a déjà été distribué à l'Opposition et nous en sommes saisis. Nous y reviendrons à l'étude de l'article 18. Au début de nos travaux, je demanderais au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science s'il a quelques remarques préliminaires. M. le ministre.

M. Ryan: Je n'ai pas d'autre remarque préliminaire que de rappeler l'objet du projet de loi qui est d'assurer la reprise normale des activités d'enseignement des chargés de cours à l'Université du Québec à Montréal à compter du lundi matin 11 mai.

Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le ministre. Pour l'Opposition, M. le leader de l'Opposition, aucune remarque?

M. Chevrette: Étant donné qu'on a seulement deux heures pour s'attaquer à l'étude article par article, je pense qu'on va s'abstenir de tout commentaire.

Interprétation et application

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Je vous remercie. Nous allons donc dès maintenant commencer l'étude article par article. J'appelle par conséquent l'article 1. M. le ministre.

M. Ryan: II s'agit dans l'article 1 de définitions. Je n'ai pas de remarque particulière à faire au sujet des définitions qui me paraissent tout à fait acceptables.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Est-ce qu'il y a quelque question? Pas de question. L'article 1 est-il adopté?

M. Chevrette: C'est une terminologie juridique en fonction des conventions existantes, je suppose, et des accréditations. On n'a pas à définir... Je suppose que cela a été vérifié dûment par Me Brière.

Le Président (M. Saintonge): C'est ça. Donc, est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Reprise des services

Le Président (M. Saintonge): Adopté. J'appelle maintenant l'article 2, à la section II de la loi, Reprise des services. L'article 2. M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, l'article 2 prévoit que toute personne visée par cette loi doit reprendre ses activités d'enseignement et fournir la prestation d'enseignement, d'encadrement et d'évaluation que détermine l'employeur, afin d'assurer la validité de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987, et ce, à compter de 8 heures le 11 mai 1987.

On dit ensuite que pendant le reste de la période couverte par la convention, le salarié devra accomplir tous les devoirs rattachés à ses fonctions, compte tenu des conditions de travail qui lui sont applicables sans arrêt, sans ralentissement ou diminution de ses activités normales.

Alors, c'est l'article principal, c'est l'article majeur du projet de loi avec l'article 3 qui s'applique à l'employeur. Je ne veux cependant pas devancer, je veux dire qu'on pourrait les examiner ensemble pour voir s'il y a relation de proportionnalité entre les obligations imposées à l'un et à l'autre qu'on est en droit de souhaiter. Nous avons fait de notre mieux de ce point de vue-là et, comme nous en sommes à l'article 2, je n'entends point anticiper.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le Président, on aurait un amendement à proposer. Il s'agit de s'entendre. Dès qu'on va l'annoncer, on va vous le distribuer. Le temps qu'il est distribué, je vais en expliquer un peu le sens et la portée.

Comme vous venez de dire, l'article 2 est sûrement un article majeur important de cette loi spéciale, si on veut s'assurer de la reprise des activités. Cependant, comme on l'a souligné à quelques reprises, même si on devait être sans doute encore une fois dans l'erreur - parce que c'est très rare, selon le ministre de l'Éducation, que l'Opposition peut apporter une contribution positive à quelque chose - il nous apparaît que c'est fondamental qu'il faille limiter le plus possible les impacts négatifs pour les étudiants, notamment ceux qui résident à l'extérieur de Montréal ou ceux qui auraient pris des engagements quant à des emplois d'été.

On souhaiterait que dans l'article 2 du projet de loi, il y ait une disposition un peu plus précise quant à l'obligation des parties de tout mettre en oeuvre pour que les impacts soient le moins négatif possible. Je sais bien qu'on va nous répondre que c'est clair que la partie patronale va tout mettre en oeuvre pour éviter les impacts. Mais on ne verrait pas pourquoi, si c'est très clair, il n'y aurait pas lieu de resserrer et préciser dans le projet de loi une disposition qui ferait que le moins possible - à partir du moment où on veut valider cette session et qu'il y ait lieu de reprendre un certain nombre de cours - cela ait des effets négatifs sur un très grand nombre d'étudiants. On pense que tel que libellé à l'article 2, c'est passablement général et, en plus, il n'y a aucune précision quant à l'obligation de l'employeur de tout mettre en -oeuvre pour que les effets soient le moins dommageables possible aux concernés. Dans ce sens-là, M. le Président, on suggère que l'amendement soit agréé.

Le Président (M. Saintonge): Donc vous avez reçu l'amendement. M. le ministre.

M. Ryan: Malheureusement, nous ne pouvons pas accueillir cet amendement, parce qu'on créerait des obligations qui sont imprécises par la présentation même, qu'on en fait qui ne seraient pas facilement vérifiables et qui risqueraient d'entraîner des complications sans résultat vraiment positif. Ce sont des choses justes cependant; ce sont des choses dont on peut convenir assez facilement quant à l'esprit général. Mais, nous estimons que cela fait partie des devoirs de l'employeur dans ce cas-ci d'assurer ces choses-là. Cela fait partie de ses devoirs réguliers et nous n'éprouvons pas le besoin ni la justification nécessaire pour lui donner une directive formelle à cette fin dans le texte de loi. (20 h 40)

M. Gendron: Vous ne croyez pas, M. le ministre, que d'abord... Je dirai trois choses très rapidement, parce que j'ai envie de fonctionner et non pas de discourir: Premièrement, c'est dans la mesure du possible; deuxièmement, vous ne croyez pas que cela permette de donner des indications nécessaires à l'employeur dans le sens qu'il apprendrait par là que le législateur est d'accord pour que l'employeur tienne compte de certaines dispositions précises afin de pénaliser le moins possible. Et sur le plan concret, cela voudrait dire que dans certains cas, il est possible que cela soit plus opportun, pour éviter de pénaliser un certain nombre d'étudiants, de commercer jeudi soir. C'est un exemple, je ne veux pas qu'on discute cela ce soir. Mais si c'était dans le texte de loi, il me semble que, d'une façon très claire, l'employeur saurait que le législateur, dans sa loi spéciale, souhaite qu'il y ait des dispositions d'analyse, des indications qui permettraient effectivement à l'employeur de tenir compte de certains impératifs que je ne peux pas évaluer ici ce soir et que je ne peux pas mesurer, mais il me semble que cela serait donc simple de l'écrire en disant qu'on souhaite que... Si je ne l'ai pas dans la mesure du possible, je dirais: Ecoutez, c'est une limitation trop restrictive, cela peut donner un cadre interprétatif qui, lui, pourrait avoir des conséquences, comme vous l'avez expliqué tantôt, mais ce n'est pas le cas. Dans la mesure du possible, voulez-vous tenir compte de certaines dispositions pour limiter les impacts négatifs et dans ce sens, il pourrait y avoir des accomodements, des adaptations? Je m'arrête là parce que je ne peux pas voir ce que je dirais de plus, c'est très clair.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Je pense que le député d'Abitibi-Ouest l'a très bien dit. Autant je ferai part à la direction de l'Université du Québec à Montréal de mes propres préoccupations à ce sujet, autant elle sera saisie des préoccupations du député d'Abitibi-Ouest à la lecture du compte-rendu des débats que nous aurons eus. Mais je ne vois pas l'opportunité d'inclure cet amendement dans le projet de loi que nous discutons. Tout d'abord, c'est un projet de loi qui porte strictement sur les relations du travail. C'est un conflit de travail auquel nous apportons une solution. Nous nous en tenons à cet aspect-là et la gestion académique de l'Université du Québec à Montréal est un domaine qui ne doit pas être régi par cette

loi-ci, qui obéit à d'autres normes, à d'autres canaux de responsabilité et je ne vois pas le lieu de l'insérer dans ce projet de loi-ci.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: M. le ministre, cela va être ma dernière... D'abord, quand on ordonne à des chargés de cours d'être là à telle heure, je suppose que cela doit être pour donner des cours à du monde en face d'eux et non pas pour des réunions administratives et tout cela. Donc, est-ce que vous ne croyez pas qu'avec une disposition comme la vôtre cela peut être difficile d'avoir l'ensemble des étudiants concernés -je ne sais pas, je donne un exemple au-delà des textes - à 10 heures mardi matin ou lundi matin prochain à 8 heures? Qu'est-ce qui va arriver pour ces étudiants? Vous me répondez que vous ne le voulez pas, mais je n'ai pas senti l'argument pour lequel vous ne voulez pas.

M. Ryan: Oui, mais je vous ai dit que cela n'entre pas dans le champ de cette loi-ci. Cela fait partie des responsabilités normales d'ordre académique des autorités de l'Université du Québec à Montréal et du personnel de cet établissement. Et là, nous cherchons une solution à un arrêt de travail. Nous cherchons à assurer que la prestation régulière de service reprendra lundi et le postulat que nous devons entretenir, tout au long du projet de loi, c'est que les parties vont prendre leurs responsabilités. On pourrait bien dire aux enseignants et également aux chargés de cours: Là, vous devrez donner vos cours de telle et telle manière en considérant que les élèves ont été absents pendant six ou sept semaines, en considérant qu'il y en a un qui va arriver en retard d'une demi-journée. On ne veut pas s'engager dans ces choses-là. De demander à des gens de faire cela dans la mesure du possible, c'est de la tautologie.

M. Gendron: Dans votre libellé, M. le ministre, est-ce que cela signifie que la prestation d'enseignement pourrait commencer mercredi matin au lieu de vendredi matin ou lundi matin?

M. Ryan: Dans certains cas... Voulez-vous répéter votre question?

M. Gendron: Bien... Vous aviez déjà commencé à donner une réponse!

M. Ryan: J'ai reçu une indication de mon conseiller, mais je veux m'assurer que j'ai bien compris votre question.

M. Gendron: Ma question est: Avec votre libellé, est-ce que la prestation d'enseignement pourrait débuter à un moment autre et dans un cadre autre que celui prescrit par l'article 2?

M. Ryan: Je ne comprends pas ce que vous voulez dire. "Dans un moment autre", "dans un cadre autre"... A un moment autre, évidemment! Disons qu'un chargé de cours a deux heures de cours à donner à l'Université du Québec à Montréal par semaine et sa charge de cours tombe le mercredi matin et le mercredi après-midi, il ne sera pas là le lundi matin à 8 heures. Sa responsabilité est d'être là conformément à son horaire.

M. Gendron: Cela va, M. le ministre, mais celui qui doit être là, lundi matin, à 8 heures, peut-être qu'il est d'accord pour être là, mais, après avoir fait des vérifications avec la direction des universités, peut-être que son groupe d'étudiants ne veut pas être là parce que 95 % de son groupe sont des étudiants étrangers ou des étudiants occupés à un travail et qui ont décidé de ne pas y aller. Ce que je veux savoir très clairement, c'est si votre libellé permet cette souplesse pour organiser cela autrement afin que les impacts soient moins négatifs pour les gens concernés, qu'un de vos collègues a appelé le coeur du problème, soit les étudiants.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Ce sont des décisions qui relèvent des autorités compétentes. Je présume que les autorités du département, du module ou de la famille vont prendre les décisions pertinentes.

M. Gendron: Cela signifie, M. le ministre, que vous me confirmez que, si l'université ne pouvait pas prendre les dispositions pour faire les vérifications, vous êtes en train de me dire que l'article permet, effectivement, qu'on ne tienne pas compte des impacts négatifs.

M. Ryan: Si j'avais la moindre raison de penser que la direction de l'Université du Québec à Montréal ne voulait pas prendre de dispositions pour que cet article soit appliqué loyalement, je lui retirerais ma confiance.

M. Chevrette: M. le ministre, par l'article 2 tel que libellé, qu'est-ce qui arrive à un enseignant chargé de cours?

Le Président (M. Saintonge): Juste une seconde. Est-ce que vous voulez qu'on dispose immédiatement de l'amendement proposé ou si vous intégrez vos questions à l'intérieur de l'amendement?

M. Chevrette: Cela ne me dérange pas,

c'est pour vous; moi, je n'ai plus rien à dire sur l'amendement. Ce sont des questions sur la portée de l'article 2 tel que libellé.

Le Président (M. Saintonge): On va disposer de l'amendement, donc, mise aux voix de l'amendement. Je comprends que...

M. Chevrette: Adopté. Une voix: ...

Le Président (M. Saintonge): L'amendement est donc rejeté.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): L'amendement a été rejeté. Ne vous faites pas d'illusion, c'est rejeté, purement et simplement.

M. Chevrette: J'aimerais que vous disiez bien clairement que c'est nous qui l'avons présenté.

Le Président (M. Saintonge): Donc, effectivement, pour le Journal des débats, l'amendement présenté à l'article 2 par le député d'Abitibi-Ouest est rejeté. Nous revenons à la discussion sur l'article 2 et je cède la parole à M. le député de Joliette et leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Ma question est la suivante. Dans le premier paragraphe tel que libellé, qu'arrive-t-il d'un enseignant qui a quitté, qui travaille pour un autre employeur, qui a décidé qu'il en avait assez de crever de faim à l'université? Est-ce que la portée de l'article 1 ne vient pas annuler tout effet légal ou geste que l'individu pourrait avoir posé de lui-même ou, si vous ne le liez pas, le rendez-vous punissable en vertu des chapitres subséquents?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Effectivement, s'il était à l'emploi de l'université le 22 mars, il doit compléter sa prestation d'enseignement pour la session qui prendra fin d'ici la fin du mois de mai. Il va exécuter son contrat, il est lié par un contrat.

M. Chevrette: Oui, je comprends, mais l'individu qui est lié par un contrat, est lié jusqu'au 30 avril, la fin des cours. II arrive une grève et l'individu se retrouve avec un contrat en poche depuis même assez longtemps, et c'est le 30 avril. Est-ce que votre loi ne vient pas lier cet individu à l'université?

M. Ryan: Dans ces cas, il y a deux choses: il y a d'abord la réaction de l'employeur. Il faudrait que l'employeur porte une plainte et, dans ces cas, je ne vois pas que l'employeur porterait une plainte, irait pourchasser quelqu'un qui se serait orienté autrement et qui aurait des motifs très très sérieux de ne pas être capable de revenir. Deuxièmement, le Procureur général doit intervenir là-dedans aussi et exercer sa discrétion. Il va agir suivant l'esprit de la loi. Je ne pense pas que cela comporte vraiment de dangers. Il y a ces deux crans de sûreté qui sont quand même très importants.

M. Chevrette: M. le ministre, vous dites que c'est probablement l'article le plus important ou un des plus importants du projet de loi. Je voudrais savoir si vous êtes au courant des intentions de l'Université du Québec à Montréal pour la session d'été? Est-ce que vous pourriez nous dire si c'est vrai que la session d'été pourrait ne pas être dispensée par certains chargés de cours, comme c'était prévu antérieurement? A cause de la grève, elle ne le serait pas. Est-ce que c'est vrai? (20 h 50)

M. Ryan: Selon mes renseignements -mes conseillers pourront me corriger si je suis dans l'erreur ou si je communique des choses incomplètes - une résolution avait été adoptée par les autorités de l'UQAM il y a à peu près deux ou trois semaines suivant laquelle la session d'été allait être organisée par le recours à des professeurs réguliers. Vu que les professeurs chargés de cours étaient en grève, on ne pouvait pas organiser la session en négociant des contrats avec eux. Comme il fallait faire un choix entre renoncer à la possibilité de toute session ou faire une session avec les ressources sur lesquelles on pouvait vraiment compter, un plan a été fait pour une session d'été qui sera assurée par des professeurs réguliers. Ce qui veut dire que les prestations seront à peu près, selon les souvenirs que j'en conserve, au tiers de ce qu'elles auraient été durant l'année normale. Déjà - et ceci est un élément que je porte à votre attention d'une manière spéciale - plusieurs chargés de cours ont laissé entendre qu'ils sont intéressés à avoir des charges de cours pour la session d'été et les autorités de l'Université du Québec à Montréal m'informaient, cet après-midi même, qu'elles sont disposées à négocier pour ajouter des prestations d'enseignement qui permettront de mobiliser les chargés de cours intéressés.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais demander au ministre si le fait de mettre un terme à la grève des chargés de cours, de les forcer à retourner au travail... S'il n'y avait pas eu grève, est-ce que les cours d'été n'auraient pas été donnés par les

chargés de cours?

M. Ryan: En partie, sûrement.

M. Chevrette: M. le Président, si je pose cette question, c'est parce que vous faites cesser par un projet de loi le mouvement de grève. Le gâteau - appelons cela un gâteau pour les besoins de la cause, pour essayer de nous comprendre - le champ d'action de ces chargés de cours, c'était notamment la session d'été également. L'Université du Québec à Montréal dit: Non, cela va se donner par des professeurs réguliers. Vous faites cesser la grève par une loi spéciale et vous ne leur donnez pas la possibilité de reprendre leur champ d'action, c'est donc un lock-out. On pourrait, à la rigueur, appeler cela un lock-out par l'UQAM et ce serait une triple pénalité dans les circonstances. Je vais expliquer les deux autres après.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: On m'informe qu'on ne pouvait pas fixer de prestations d'enseignement pour les chargés de cours quand ils étaient en grève. Mais, dès ce soir, on commence à établir des plans qui permettront d'attribuer des charges de cours aux chargés de cours en suivant de manière très rapprochée le modèle de la dernière année.

M. Chevrette: M. le ministre, c'est drôlement important et je vais vous dire pourquoi. Dans certains cas, c'était précisément cette session additionnelle qui permettait à des individus qui avaient peu de revenus d'aller chercher un minimum vital. Si jamais la priorité était donnée aux enseignants réguliers, vous les coupez carrément... Ce serait punitif, à mon point de vue, d'une triple façon, punitif, parce qu'ils n'ont pas, à l'intérieur de l'annexe, la meilleure offre patronale mais bien le pattern de la fonction publique; punitif à ce stade-ci parce qu'on leur enlèverait un des champs d'action; cela me paraîtrait assez... Je voudrais au moins que le ministre prenne un engagement ferme en cette Assemblée nationale afin que le champ d'action normalement dévolu à ces salariés ou à cette catégorie de salariés soit remis à cette catégorie de salariés. Il me semble que c'est un minimum d'engagement que le ministre doit prendre ce soir, s'il ne veut pas passer pour... Pas lui... L'université pourrait décider que ce sont les réguliers et, automatiquement, conscients qu'ils ont un rattrapage à faire, ils n'auraient même pas leur propre champ d'action privilégié... Cela me paraîtrait odieux et je voudrais que le ministre prenne un engagement ferme devant cette Chambre. Cela n'a pas de bon sens.

M. Ryan: On vient de me donner l'assurance de la part des autorités de l'UQAM que, dès ce soir, on commence à établir des plans en vue d'attribuer aux chargés de cours des charges de cours correspondant le plus près possible au modèle qui existait les années précédentes. D'après ce que je peux comprendre, le modèle général qu'on pouvait observer, c'est qu'il y avait à peu près un tiers des charges de cours en été qui étaient assumées par des professeurs réguliers et deux tiers par des chargés de cours. On va viser un équilibre semblable, mais il y a une chose sur laquelle on n'a aucun contrôle, c'est la demande. Quelles seront les inscriptions? C'est un point qui va conditionner l'ensemble. Il peut très bien arriver que tel cours particulier ne puisse être assuré que par un professeur régulier ou vice versa. Ces réserves étant faites, je pense que j'ai reçu des autorités de l'UQAM l'assurance que demandait le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Pourriez-vous me dire, M. le ministre, à quelle date commencera la session d'été vu le report, d'une certaine façon, de la session d'hiver qui est prolongée?

M. Ryan: Les plans ont été faits pour qu'elle commence le 19 mai.

M. Chevrette: Là, il manquerait une semaine.

M. Ryan: Non. Il était prévu, comme le volume de prestation de l'enseignement pour la session d'été était seulement au tiers de ce qu'il aurait été normalement, qu'on pouvait avoir la cohabitation des deux pendant la deuxième semaine de récupération. Mais il y aura des ajustements qui vont se faire...

M. Chevrette: Mais pour les étudiants...

M. Ryan: Soyez assuré qu'une priorité spéciale sera accordée aux étudiants qui ont une session à compléter.

M. Chevrette: Oui, mais, à plus forte raison, si c'est pour les étudiants qui finissent la session d'hiver, comment vont-ils commencer le 19 si vous les forcez à aller en classe du 11 aux environs du 20? Comment vont-ils pouvoir commencer la session d'été le 19? Cela ne fonctionne pas. Ne pourriez-vous pas demander à l'université de reculer d'autant le début de la session d'été? Il me semble que cela m'apparaîtrait un peu cohérent.

M. Ryan: Si on se place dans la

perspective des chargés de cours, la situation ne se présente pas tout à fait comme semble le penser le député de Joliette. En fait, la session d'été pour les chargés de cours, leurs prestations commenceront, eux, à compter du 8 juin. Ils vont avoir tout le temps voulu pour compléter leurs prestations d'enseignement à l'intention des étudiants de la session qui prend fin au mois de mai. Ils auront le temps de corriger leurs examens et tout, et leurs prestations de cours commenceront le 8 juin pour la session d'été.

M. Gendron: Entre-temps, qui va donner la prestation? Entre-temps, entre le début du 19 mai... Ah, mais oui.

M. Chevrette: C'est-à-dire que la session... Est-ce que je comprends bien que la session d'été donnée par les enseignants réguliers pourrait commencer le 19 mat...

M. Ryan: C'est cela.

M. Chevrette: ...et que les deux tiers de plus - c'est le tiers qui commencerait le 19 mai - et que le deuxième tiers qui serait donné par les chargés de cours, semblable au pattern de l'an dernier, ce serait une prestation qui débuterait le 8 juin?

M. Ryan: C'est cela.

M. Chevrette: Pour l'étudiant qui voudrait s'inscrire à la session d'été, mais à l'intérieur du cadre du tiers donné par les enseignants réguliers, comment va-t-il chevaucher les cours s'il commence le 19 et que vous l'obligez à aller à l'école jusqu'aux environs du 20?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Excusez-moi. J'ai raté la question. Si vous voulez m'excuser. Voulez-vous répéter la question, s'il vous plaît?

M. Chevrette: Oui. Il se peut qu'il y ait des étudiants de la session d'hiver qui veuillent s'inscrire à la session d'été commençant le 19. Qu'est-ce qui arrive pour ces étudiants qui sont forcés, en vertu de la loi, de terminer leur première session vers le 20 alors que vous dites que la session commence le 19? Il y a un chevauchement de cours qui ne fonctionne pas.

Le Président (M. Saintonge): Nous allons donner au ministre le temps de faire les consultations nécessaires. M. le ministre.

M. Ryan: La direction de l'université verra à ce que l'arrimage nécessaire soit fait pendant cette semaine, ces quelques jours. L'arrimage sera fait et les validations seront assurées de manière qu'ils puissent passer à l'autre étape ensuite sans encourir de difficultés.

M. Gendron: Vous voyez, M. le ministre, dans le même sens que mon collègue, combien cela aurait été important d'accepter - oui, permettez-moi de finir - la proposition de tantôt parce que là, il y aurait au moins dans la loi du gouvernement l'obligation de tenir compte de... Ce sont des genres de situations particulières où, si on ne veut pas que les inconvénients soient majeurs pour l'étudiant... (21 heures)

Vous dites: Elle va en tenir compte. Mais on connaît le résultat. Je suis convaincu, M. le ministre, qu'on pourra dire de certains étudiants qu'ils auront été dans l'incapacité de prendre la session intensive et en plus, l'été, le malheur pour ceux qui connaissent ça, c'est d'être intensif. Donc, il arrive souvent qu'à l'horaire vous ayez des cours deux ou trois soirs par semaine, parce qu'ils ont une courte période pour prendre leurs cours. Je suis convaincu qu'il y a des étudiants qui seront pris dans le rattrapage -c'est une décision du gouvernement dans sa loi spéciale - et qui n'auront pas l'opportunité de prendre l'ensemble des cours qu'ils auraient voulu suivre à la session d'été. Cela ne veut pas dire que je leur prête une mauvaise foi. Je dis qu'ils n'ont pas l'obligation légale, dans une loi, de tenir compte d'une disposition qui doit prendre en considération ces situations particulières.

Vous nous dites: Laissez-leur ça, c'est leur affaire, l'université va s'arranger avec ça. Je n'ai pas d'objection, mais on dit que c'est faible, que ce n'est pas assez fort. Il n'y a pas de commune mesure entre une loi spéciale versus ne pas avoir assez d'ouverture pour accepter une disposition comme celle-là qui tiendrait compte de ce qu'on vient d'évoquer.

M. Ryan: M. le Président, on sait que le député d'Abitibi-Ouest a fait partie d'un gouvernement qui se spécialisait dans les lois fortes. Des médecines de cheval, on n'en veut pas. On veut des médecines qui restent les plus douces possible, même s'il faut imposer une solution à contrecoeur. Je tiens...

M. Gendron: Imaginez-vous que ce soir vous n'êtes pas bien placé!

M. Ryan: Non, non, le dossier historique parle par lui-même. Si on veut ouvrir ce volet-là, on va l'ouvrir avec plaisir, avec peine plutôt.

Une voix: Oui.

M. Ryan: Oui? La loi 111, ça vous

intéresse de revenir là-dessus?

M. Chevrette: Oui, oui, on est prêt. Ça va vous donner quoi dans votre loi, ça?

M. Ryan: Ça ne donnera rien, mais ça montrera peut-être votre vraie orientation.

Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous plaîtî Je demanderais qu'on demeure sur le fond du sujet, c'est-à-dire le projet de loi 48. On a un mandat de deux heures et on n'étendra pas le mandat à d'autres lois spéciales, on va rester sur le projet de loi 48. Je vous demande de respecter la discussion sur les articles qui sont appelés.

M. le ministre.

M. Ryan: Oui. Je crois comprendre, M. le Président, que l'Opposition a hâte de passer à l'article 3 qui répond précisément à ses préoccupations.

M. Gendron: Oui, juste un commentaire. Je pense que, s'il y a un soir où le ministre de l'Éducation est mal placé pour parler de médecine de cheval, c'est quand on est en train de regarder une loi spéciale. Je ne pensais pas que c'était revenir sur le passé. On l'a fait de bonne foi. Je veux juste conclure en disant que l'article 2 aurait permis avec notre amendement de tenir compte des cas dont mon collègue a discuté. C'est le choix du ministre, on en regardera les effets dans le vécu.

Pour ce qui est de l'article 3, on a un amendement...

Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous plaît!

M. Chevrette: J'aurais une autre question à l'article 2, moi.

Le Président (M. Saintonge): À l'article 2, oui, s'il y a d'autres questions, M. le député de Joliette et leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, qu'arrive-t-il à un étudiant de la Gaspésie qui serait à l'UQAM si l'université a décidé que c'était tel jour tel examen et qu'il ne peut pas se rendre pour des raisons X? Comment se verra-t-il valider sa session?

M. Ryan: J'apprécie les inquiétudes pratiques du député de Joliette. Je pense qu'il nous oblige à préciser certaines choses et je pense que c'est très utile. Le cas que vient de soulever le député de Joliette relève des rapports entre l'étudiant et le professeur concerné. Il arrive fréquemment qu'un étudiant ne puisse pas passer l'examen tel jour. Il va passer une entente avec son professeur en vertu de laquelle il passera l'examen tel ou tel jour. C'est la règle de base. Moi-même, j'ai un de mes jeunes qui a fini au cégep récemment. Il avait un ou deux examens à compléter et ne pouvait pas être là le jour où l'examen était administré à tout le monde. Le professeur lui a dit: Viens tel autre jour, on va s'entendre. C'est le régime de base.

Maintenant, on m'assure que, dans l'hypothèse où des ententes raisonnables ne pourraient pas être conclues entre un étudiant et un chargé de cours, à ce moment-là, il y a des mécanismes pour assurer que les droits de l'étudiant seront respectés.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre est conscient qu'à ce stade-ci un étudiant qui ne se présente pas n'est pas considéré au stade de l'abandon, mais au stade de l'échec? Si j'ai bien compris, la date de l'abandon n'est pas considérée à ce stade-ci par rapport au temps de la session où on est. Elle serait considérée comme un temps d'échec dans le dossier scolaire lui-même. Pour compléter ma question, l'université va-t-elle inscrire incomplet pour ne pas mettre d'échec?

M. Ryan: C'est l'intention de l'université de tenir compte de toutes les circonstances spéciales ayant découlé de l'interruption dans la prestation des services d'enseignement et d'accorder à chacun et à chacune un traitement juste et équitable.

M. Chevrette: En vertu de quel article de votre loi l'université peut-elle aider les jeunes, par exemple, qui sont dans des situations ou des aberrations que je vous donnais dans les exposés tantôt, M. le ministre? Est-ce que l'université a le pouvoir ou a des directives à l'intérieur de votre projet de loi, ou des lignes qui nous permettent de croire que l'université, par exemple, pourrait aménager à l'intérieur de la session d'automne, certains cours permettant à ceux qui n'ont pas été capables de valider la session d'hiver de le faire?

M. Ryan: Ce sont toutes des choses qui sont possibles, mais il y a tellement de possibilités, de situations inédites et de solutions imaginatives que cela ne servirait à rien de vouloir les prévoir toutes dans le texte de la loi.

M. Chevrette: Sans pouvoir les prévoir toutes, M. le ministre, je sais que c'est impossible de tout prévoir. Probablement que si on regardait une facette d'un problème on en trouverait dix autres. Je pense que, si on avait au moins un principe de portée générale qui obligerait l'Université du Québec à Montréal, l'UQAM, à rechercher Se maximum de souplesse dans l'aménagernent

des horaires d'ici X mois, permettant ainsi au plus grand nombre d'étudiants possible de ne pas être pénalisés, sans aller dans le détail, au moins on aurait dans la loi un principe qui forcerait l'université... Je ne dis pas qu'elle ne le fera pas; ce n'est pas une question de juger de la bonne foi ou de la non bonne foi.

Mais, je m'excuse, ce n'est pas un homme qui mène à l'université, il y a plusieurs départements et plusieurs secteurs. Je sais comment cela marche, une boîte. J'ai été ministre, moi aussi. Quand bien même on voudrait que cela aille bien dans certaines directions, on est obligé d'y aller parfois, n'est-ce pas? Je prétends qu'on devrait introduire au moins un principe de base forçant l'Université du Québec à assumer toute la souplesse possible et imaginable, à faire preuve d'imagination. Parce que, je le répète et vous le savez, il y a des étudiants qui, à ce stade-ci, ont trouvé un travail rémunérateur. C'est peut-être le montant de 4000 $ ou 5000 $ qu'ils vont gagner cet été qui va leur permettre précisément de revenir à l'université l'an prochain, et ce sont eux qui ont des parents gagnant peut-être juste un peu trop pour ne pas avoir la bourse, en plus. On connaît la "game" dans cela.

Il me semble qu'on pourrait avoir un principe de portée générale qui oblige l'université à faire cela. Cela nous permettrait, autant à vous qu'à nous de l'Opposition, de jouer un râle positif dans ce sens et, à l'occasion, de rappeler qu'il y a un principe et peut-être, ne pas se le cacher, se donner un outil de pression pour que l'université fasse le maximum. Parce que ce sont des bénéficiaires et ce sont des jeunes qui jouent avec leur avenir. C'est sérieux. Est-ce que vous accepteriez un amendement de portée générale, un principe de portée générale sans aller dans le détail, mais qui obligerait l'université à assouplir au maximum ses mesures et dans le temps à part cela?

M. Ryan: Ma première inclination serait de répondre de manière négative pour la raison suivante: Si on introduit le critère de souplesse dans la législation, cela peut tendre à accréditer le préjugé que le genre de validation qui aurait été fait aurait été une validation au rabais.

M. Chevrette: Je n'ai pas compris les derniers mots, je m'excuse.

M. Ryan: Cela pourrait accréditer le préjugé voulant que la validation qui aurait été faite aurait été une validation au rabais. On ne veut pas donner cette impression, mais je souscris tout à fait à l'objectif qui inspire l'intervention du leader de l'Opposition. J'y souscris tellement qu'avant de lui donner une réponse définitive je vais consulter mes collègues qui m'entourent. S'ils m'amenaient à voir sa proposition dans une perspective plus positive, cela me ferait bien plaisir de vous le dire.

M. Gendron: Juste un instant, M. le ministre. M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Oui.

M. Gendron: Avant de consulter vos collègues, j'aimerais bien que vous preniez en considération l'esprit de l'amendement qu'on voulait proposer à l'article 3, qui est exactement dans le même 3ens qu'on aimerait vous entendre. Mais, en tout cas, dans votre réflexion, si vous preniez en considération le libellé proposé comme amendement à l'article 3, j'ai l'impression que cela permettrait de tenir compte des préoccupations soulevées par mon collègue, le député de Joliette. (21 h 10)

M. Ryan: Je trouve que l'article... L'amendement d'abord, on en a disposé tantôt.

Le Président (M. Saintonge): Là-dessus, on distribue un autre amendement.

M. Chevrette: Un nouveau texte. Il commence pareil, mais ce n'est pas...

Le Président (M. Saintonge): C'est ça. C'est un amendement à l'article 3 de la loi. Je vais le lire immédiatement. Je comprends que ça peut influencer l'article 2. En sachant l'amendement proposé à l'article 3, cela pourrait compléter...

M. Gendron: II a exactement le même objectif.

Le Président (M. Saintonge): ...la discussion de l'article 2. Je vais lire le projet d'amendement proposé par M. le député d'Abitibi-Ouest au projet de loi 48. Le projet de loi est modifié par l'ajout à l'article 3 d'un deuxième alinéa se lisant comme suit: "Rien dans le présent article ne limite la possibilité pour l'employeur d'aménager dans le temps comme dans la forme les services d'enseignement requis pour assurer la validité de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987 de façon à limiter au maximum les impacts négatifs d'un prolongement de la session d'hiver pour les étudiants concernés."

C'est un amendement à l'article 3, même si nous sommes à l'article 2. Comme je l'ai dit tantôt, cela peut compléter l'article 2. J'en fais part immédiatement à l'Assemblée, ce qui n'empêchera pas de voter l'article 2 et de revenir à l'amendement comme tel, pour le voter, à l'article 3.

M. Chevrette: Pour information...

Le Président (M. Saintonge): C'est ça.

M. Chevrette: ...si l'esprit agrée, même si les mots n'agréent pas, ce n'est pas grave. On peut changer les mots. Mais on veut véritablement qu'il y ait un principe de portée générale, parce qu'il me semble qu'on a le même objectif. J'ai écouté le discours du ministre tantôt et ça ressemblait étrangement à ce que j'ai dit par la suite. Si on converge vers un même objectif, il me semble qu'on doit donner une pression morale dans le projet de loi.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Quand le député de Joliette est laissé libre de m'écouter - parfois, il ne m'écoute pas parce qu'il est dérangé par d'autres - on se comprend très bien.

M. Chevrette: C'est le temps que vous en fassiez la preuve: acceptez un principe de portée générale.

M. Ryan: Disons qu'on n'est pas au stade des propositions, juste des réactions pour tout de suite, M. le Président. Je vais lire l'amendement parce que ceux qui nous écoutent ne sont point informés: "Rien dans le présent article ne limite la possibilité pour l'employeur d'aménager dans le temps comme dans la forme les services d'enseignement requis pour asssurer la validité de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987 de façon à..." Là, vous autres, vous écrivez: "limiter au maximum les impacts négatifs d'un prolongement de la session d'hiver pour les étudiants concernés." Moi, je serais plutôt porté à écrire quelque chose comme ceci - là, c'est tout à fait exploratoire - de façon à tenir compte, sans préjudice pour la qualité de l'enseignement, des conditions particulières ayant découlé de l'interruption de services.

M. Chevrette: Je n'ai pas d'objection à ça. J'irais même, quant à moi, dans le temps, j'accepterais même un sous-amendement du ministre encore - je sais qu'il a un spécialiste en législation bien plus rapide que nous - qui pourrait dire que ces possibilités pourraient s'étendre même à l'ajout de cours à l'intérieur d'autres sessions, pour montrer que cela est vaste. C'est vaste délibérément. Moi, je ne voudrais pas, M. le ministre, et je pense que vous, non plus, vous ne voudriez sûrement pas apprendre qu'un jeune a perdu ses revenus lui permettant d'aller à l'université à l'automne et qu'il ne puisse pas reprendre ses cours le soir durant la session d'automne, par exemple. Il me semble que ce sont des possibilités.

M. Ryan: Je n'ai pas d'objection à ce que nous suspendions...

M. Chevrette: Oui, l'article pour permettre une rédaction.

M. Ryan: ...le débat sur l'article 3, de manière à donner le temps à nos conseillers...

M. Chevrette: D'accord.

M. Ryan: ...de prendre les moyens appropriés pour nous aider à trouver les réponses à nos difficultés.

M. Chevrette: On pourrait suspendre les articles 2 et 3. D'abord, on voulait le proposer à l'article 3, mais si jamais vous l'ameniez à 2 tantôt...

M. Ryan: Je n'ai pas d'objection.

M. Chevrette: ...on pourrait suspendre 2 et 3.

M. Ryan: Ce sont deux articles qui se complètent.

Le Président (M. Saintonge): En conséquence, nous allons suspendre l'article 2 et l'article 3 également. Vous comprendrez, quand même, que ce qu'on fait est un peu dérogatoire à nos règles puisqu'on avait introduit un amendement à l'article 3 avant d'avoir disposé de l'article 2, mais...

M. Chevrette: À titre d'information.

Le Président (M. Saintonge): ...c'était à titre d'information, car les deux articles étaient complémentaires. Donc, je suspends à ce moment-ci l'article 2, de même que l'article 3. J'appelle l'article 4. À l'article 4, M. le ministre avez-vous certains commentaires?

M. Ryan: On aura un texte tantôt, dans quelques minutes.

Le Président (M. Saintonge): Pour l'article 3 ou l'article 2, selon ce que vous avez décidé. Maintenant, j'ai appelé l'article 4. Avez-vous quelques commentaires à l'article 4?

M. Ryan: Je n'ai aucun commentaire sur l'article 4.

Le Président (M. Saintonge): Y a-t-il des questions sur l'article 4? Pas de questions. Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Gendron: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): L'article 4

est adopté. J'appelle maintenant l'article 5. Y a-t-il des commentaires, M. le ministre, sur l'article 5?

M. Ryan: À l'article 5, je n'ai pas vraiment de commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Saintonge): Y a-t-il des questions à l'article 5?

M. Chevrette: Nous avons un amendement, M. le Président, que je voudrais présenter à l'article 5. Nous aimerions que le libellé de cet article soit le suivant: L'association de salariés doit prendre les moyens appropriés pour informer les salariés des obligations leur résultant des dispositions de la présente loi.

A l'avenir, M. le Président, pour la compréhension de ceux et celles qui nous écoutent à ce moment-ci, il serait peut-être bon qu'on lise l'article de la loi, parce que, si on arrive avec un amendement, on détonne beaucoup quand on n'a pas entendu la lecture de la loi. On pourrait peut-être tenir pour acquis comme procédure que le ministre ferait la lecture de l'article de la loi et cela nous permettrait à ce moment-là d'arriver avec l'amendement.

Une voix: Vous devriez, vous, le lire, M. le Président.

M. Chevrette: Ou bien le président pourrait le lire.

Le Président (M. Saintonge): L'article 5, tel que libellé actuellement, se lit comme suit: "L'association de salariés doit prendre les moyens appropriés pour amener les salariés qu'elle représente à se conformer à l'article 2." J'ai reçu un amendement proposé par M. le leader de l'Opposition qui se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié en remplaçant l'article 5 par le suivant: "L'association de salariés doit prendre les moyens appropriés pour informer les salariés des obligations leur résultant des dispositions de la présente loi.

Donc, sur l'article 5, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je pourrais peut-être le présenter en 30 secondes, M. le Président. La seule différence, c'est qu'on dit: "doit prendre les moyens appropriés pour amener les salariés qu'elle représente à se conformer à l'article 2." Déjà, on empêche des leaders syndicaux, on empêche tout officier syndical de parler contre la loi. On peut leur faire l'obligation d'informer des obligations de la loi, mais de là à aller leur dire de faire plus que le client n'en demande... Vous leur demandez de ne pas parler contre, c'est déjà beaucoup, mais demander de les informer pourrait être suffisant.

À notre point de vue, l'article 5, tel que nous le proposons avec l'amendement, reflète plus la logique des choses, le bon sens.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Je serais porté à accepter plutôt ceci: maintenir l'article 5 dans sa formulation actuelle, mais ajouter les mots suivants: L'association de salariés doit notamment prendre les moyens appropriés pour informer les salariés des obligations leur résultant des dispositions de la présente loi.

M. Chevrette: M. le ministre, si vous regardez votre article 11, vous vous couvrez déjà. "Quiconque contrevient, incite ou encourage une personne à contrevenir à une disposition des articles 2, 3 ou 6 commet une infraction et est passible, outre le paiement des frais, d'une amende." Là, vous avez toutes les catégories. Déjà, à l'article 11, vous prévoyez tous les types d'infractions. J'ajoute même que l'article 12 crée une infraction pour le non-respect de l'article 5.

À partir de là, M. le Président, quand on propose l'amendement à l'article 5, c'est un devoir d'informer qu'on leur fait. Vous, c'est plus qu'un devoir d'informer que vous leur demandez. Vous leur demandez, à part cela, de prendre les moyens pour qu'ils rentrent. Dès qu'il y en a un qui ne rentre pas pour toutes sortes de motifs qui seraient à analyser, vous rendez automatiquement passibles au pénal les officiers du syndicat. En vertu de l'article 12, c'est ce que vous faites. Donnez-leur l'obligation de les informer, oui, mais l'obligation, par exemple, de "prendre les moyens pour...", c'est forcer la note un peu. Ce serait quels moyens?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Y compris, au premier chef, la diffusion de l'information.

M. Chevrette: Mais après avoir dit tout cela, pouvez-vous m'en donner une couple? J'ai déjà vu un chef politique dire: Nommez-moi un seul cas, puis on en a nommé 40. Si cela ne vous fait rien, je vais vous demander juste un exemple.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: C'est un texte qui figure dans à peu près toutes les lois d'exception que nous avons adoptées ces dernières années. Ce n'est pas un texte inédit, c'est un texte que nous avons emprunté, celui-là, j'en suis convaincu, à de nombreux exemples de lois antérieures.

(21 h 20)

M. Chevrette: M. le Président, que ce texte soit emprunté à quatorze ou quinze lois, quand on légifère, on a le droit, je pense, de proposer des amendements qui nous apparaissent logiques. Il me semble que vous les faites payer assez cher, regardez les amendes, on peut être imaginatif à ce prix-là. Parce que, si on ne fait qu'emprunter au texte, je serai bientôt capable de vous en rédiger un, à force de vous en faire! Cela en fait cinq de collés que vous me faites faire! Vous n'aurez plus besoin de conseillers tantôt; vous viendrez me voir, je vais vous recoller tous vos articles l'un après l'autre. Cela ne vous coûtera rien.

Je veux dire qu'on est là pour légiférer, on doit avoir le droit d'amender des textes qui nous apparaissent un peu... Des fois, trop fort, ce n'est pas mieux, M. le ministre. Trop, des fois, c'est comme pas assez. Vous savez cela. Ici, vous dites que vous allez les informer. Mais, plus que cela, vous allez prendre les moyens pour qu'ils rentrent. Si un gars ne veut pas rentrer, tords-lui le bras. Là, c'est permis de tordre le bras à quelqu'un pour qu'il rentre. Mais ce n'est surtout pas permis pour qu'il ne rentre pas.

M. le ministre, regardez les articles 11 et 12 et vous comprendrez que la cohérence des textes pourrait nous permettre de dire informez-les, à l'article 5.

M. Ryan: Cet article-là reste subordonné à la charte des droits. Personne n'a le droit de contraindre un autre de force.

M. Chevrette: Pourquoi écrivez-vous: "L'association de salariés doit prendre les moyens appropriés pour amener les salariés qu'elle représente à se conformer à l'article 2"? Et, à l'article 2, c'est que tu rentres au travail le lundi, 11. D'accord? Le représentant n'a pas le droit de lui dire de ne pas rentrer. Donc, il n'y a pas de problème: il n'a pas le droit de le lui dire, il est passible d'une amende. Il n'a pas le droit de lui dire: Ne rentre pas parce qu'il y a une infraction à l'article 12 à part cela, parce qu'il y a le non-respect pour ne pas avoir pris les moyens pour. Si le gars arrive en avant, M. le Président, un chef syndical, et qu'il informe son assemblée: Écoutez, messieurs, si vous ne rentrez pas, c'est tant d'amende par jour, la loi le dit. Messieurs, si je vous disais de ne pas rentrer, cela me coûterait de 10 000 $ à 50 000 $, etc. Je ne comprends pas quel est votre objectif et votre désir de mettre cela dans la loi.

M. Ryan: On ne se comprend pas. Ici, "l'association de salariés doit prendre les moyens appropriés pour amener les salariés qu'elle représente à se conformer à l'article 2." On va prendre un exemple. Ce sont des citoyens responsables, ils ne veulent pas se comporter ou se conformer d'une manière enfantine. L'association a l'obligation de les réunir, par exemple, pour leur permettre de discuter de cette loi, de voir la manière dont ils vont s'y conformer. Ce n'est pas seulement un devoir d'information. Elle va fournir le forum où les membres pourront se réunir pour prendre la décision d'obéir à la loi. Cela va plus loin que l'information. Cela fait partie des moyens appropriés pour amener...

M. Chevrette: M. le ministre, êtes-vous en train de me dire qu'il est obligatoire pour un syndicat de convoquer son monde pour lui faire accepter de respecter la loi? Je m'excuse, quand le législateur vote une loi, j'ai toujours compris que tu fais une réunion d'information dans ce temps-là. Tu leur dis: Voici la loi. Si vous leur donnez l'occasion de se prononcer sur votre loi, je ne suis pas sûr qu'ils vont l'adopter.

M. Ryan: Excusez-moi, mais j'ai assisté à plusieurs réunions syndicales dans ma vie où des travailleurs se sont prononcés sur l'obéissance à des lois adoptées par cette Assemblée nationale. Je me souviens qu'un soir, il était 1 heure du matin, il y avait une loi qui ramenait les travailleurs du transport en commun à Montréal au travail. Leur avocat, dans le temps, était un ancien collègue du député de Joliette, M. Robert Burns, aujourd'hui juge du travail. Il avait été obligé de venir leur dire qu'il fallait qu'ils rentrent parce que c'était ce que dictait la loi. Mais il y avait une grosse réunion. Il y avait au-delà de 1500 travailleurs qui étaient là, vous savez. C'est courant. Il y a toutes sortes de méthodes. Ce sont "les moyens appropriés". On n'en définit pas un en particulier. Ils doivent "prendre les moyens appropriés".

M. Chevrette: M. le ministre, ce n'est pas là-dessus...

M. Gendron: C'est pour amener...

M. Chevrette: L'obligation est faite au leader syndical de ne pas inciter à... Est-ce qu'on reconnaît cela dans la loi? L'obligation est faite au leader, en vertu de l'article 11, de ne pas inciter. D'accord? S'il n'a pas le droit d'inciter, qu'est-ce qu'il peut faire d'autre en assemblée générale que d'informer des obligations de la loi?

M. Ryan: Un leader syndical... Où est cet article?

M. Chevrette: L'article 11, M. le ministre.

M. Ryan: L'article 11? Dites-moi donc où exactement.

M. Chevrette: "Quiconque contrevient, incite ou encourage une personne à contrevenir à une disposition des articles 2, 3 ou 6 commet une infraction et est passible"... Et, s'il s'agit d'un chef, c'est encore plus fort. L'incitation n'est pas trop forte rendue à 25 000 $.

M. Ryan: Mais des condamnations pour incitation ou sédition, il n'y en a à peu près jamais.

M. Chevrette: Pardon?

M. Ryan: Des condamnations pour incitation ou sédition, il n'y en a à peu près jamais.

M. Chevrette: Pourquoi le mettez-vous dans votre loi?

M. Ryan: C'est une mesure de précaution qui est utilisée par ces messieurs. Essayez de faire une cause avec de l'incitation et de la sédition, et vous allez dépenser bien des frais d'avocat pour rien.

M. Chevrette: Donc, si c'est inutile dans la loi, on l'enlèvera tantôt quand on y arrivera.

M. Ryan: Cela complète. Vous l'enlèverez quand vous serez au pouvoir.

M. Gendron: M. le Président, je veux bien que le ministre soit préoccupé par autre chose, mais, écoutez, l'article 5 n'a vraiment pas de bon sens, surtout après ce que vous venez de dire. Si l'article 11 prévoit toutes les contraventions, les incitations, les encouragements, ainsi de suite, le ministre me dit que ce n'est pas pareil. Un instant, je suis prêt à vous donner raison, vous avez raison, ce n'est pareil. Vous le savez d'avance, vous avez raison. Est-ce que l'article 5, c'est pour ramollir l'article 11? Vous savez bien que non; par définition, l'article 5 doit en rajouter.

Le problème qu'on a... Je ne suis pas avocat. On en a de moins grand gabarit que ceux de l'État et à des salaires inférieurs, mais, au-delà de cela, ils ont quand même un peu d'expérience et ils nous disent qu'en termes de droit pénal l'individu qui lit cela... "Prendre les moyens appropriés", cela ne nous dérange pas. Ce n'est pas cela qui nous dérange. C'est "pour amener les salariés qu'elle représente à se conformer"; on prétend que ça va à l'encontre de la charte canadienne et de la charte québécoise des droits de la personne. La personne concernée peut ne pas savoir ce pourquoi elle pourrait être pénalisée. Cela n'a pas de bon sens, en termes de droit pénal, qu'un individu ne sache pas, dans un texte de loi; il pourrait faire des affaires et être pénalisé, alors qu'il ne sait pas.

De deux choses l'une: l'article 11 couvre toute l'affaire et votre article 5 est inutile. Cela ne semble pas être votre prétention, vous dites que ce n'est pas la même chose. Soit, on vous donne raison, on vous donne notre bénédiction. L'article 5, ce n'est pas comme l'article 11. Si l'article 5 n'est pas pareil, vous allez quand même préciser que les moyens appropriés ne peuvent pas dépasser l'information du contenu de la loi puisque toutes les autres dispositions, pour des gens qui contreviendraient au contenu de la loi, auront leurs effets pénalisants, négatifs et ainsi de suite. On avait l'idée de vous proposer de biffer l'article 5. Si on ne biffe pas l'article 5, au moins, il ne faudrait pas lui prêter un libellé qui va probablement à l'encontre de la Charte des droits et libertés de la personne. J'aimerais vous entendre là-dessus, M. le ministre.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: La loi s'adresse à l'association de salariés qui est à l'origine de la grève. C'est sous les auspices de l'association qu'a été prise la décision de faire la grève et qu'a été maintenu l'arrêt de travail. Des individus isolés, coupés les uns des autres n'auraient pas réussi. Là, le législateur dit: L'association de salariés, qui est responsable de la grève, doit prendre les moyens appropriés pour que les salariés qu'elle représente se conforment à l'article 2.

M. Gendron: Savez-vous, M. le ministre, que l'article 5 crée une infraction non définie? Où avez-vous déjà vu, en droit pénal, créer une infraction qui n'est pas définie?

M. Ryan: Mon conseiller me dit qu'on a vu ça au moins 20 ou 25 fois au cours des dernières années. Dans chaque loi spéciale, des infractions de cette nature ont été créées. Chaque fois qu'il y a une loi spéciale, il y en a un certain nombre qui viennent s'ajouter.

M. Gendron: Est-ce que c'est testé par un tribunal, l'article 5 tel que libellé? Est-ce que votre conseiller peut ajouter: testé par un tribunal?

M. Chevrette: Jamais. Il ne peut pas l'ajouter, ça n'a jamais été fait.

M. Ryan: Les lois, jusqu'à maintenant, ont toujours été observées. Il y a eu de

brefs interludes dans certains cas, mais on est revenu vite à l'observance de la loi, fort heureusement.

M. Chevrette: Le législateur n'est pas censé parler pour ne rien dire; c'est un principe fondamental dans le droit parlementaire. M. le Président, vous n'avez pas assez de contraindre l'individu à ne pas dire ce qu'il pense, vous le rendez punissable en droit pénal de ne pas dire ce qu'il pense, il n'a pas le droit de le dire. II n'a pas le droit de dire que la loi n'a pas d'allure. Il faut qu'il dise que la loi a du bon sens; sinon, il est contraignable.

M. Ryan: Non. Je regrette infiniment, je suis en désaccord total avec cette interprétation.

M. Chevrette: M. le Président, vous n'avez pas le droit d'inciter...

M. Ryan: Je suis en désaccord total. (21 h 30)

M. Chevrette: Si l'individu arrive devant l'assemblée de son syndicat et dit à son monde: Je trouve que la loi est inique, qu'elle n'a pas de bon sens, qu'elle n'a pas d'allure, il devient donc un agent provocateur en vertu de l'article 11 de votre loi. Bien oui, en vertu de l'article 11, vous dites qu'on n'a pas le droit d'inciter, M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président.

M. Chevrette: Vous n'avez pas parlé pour ne rien dire. "Quiconque contrevient, incite ou encourage une personne a contrevenir..."

M. Ryan: Je pense qu'on s'égare.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Je pense qu'on s'égare. Il n'y a absolument rien dans cette loi qui interdit la libre expression des opinions les plus vigoureuses au sujet de la loi. Je veux que ce soit bien clair. Cela m'aurait échappé s'il en était autrement. Mais entre émettre une critique très sévère, dire que c'est une loi inique - on peut même dire que c'est une loi pourrie - et dire aux gens: On va s'organiser, je vous invite à défier cette loi, c'est là qu'est la différence. Je pense qu'il n'y a absolument aucune limite à la liberté de jugement.

M. Chevrette: D'accord. Je suis votre raisonnement, M. le ministre.

M. Ryan: Oui.

M. Chevrette: Je reçois la nuance que vous faites. Vous lui permettez de dire qu'elle est inique, vous lui permettez de dire qu'elle est pourrie, mais il n'a pas le droit de dire qu'elle doit être défiée. Moi, je suis d'accord avec vous, c'est cela que la loi dit aussi. À partir de là, il a seulement à informer qu'on n'a pas le droit de braver la loi. Pourquoi lui dites-vous de prendre les moyens? Déjà, vous le forcez à les informer qu'ils n'ont pas le droit. Là, vous dites de prendre des moyens additionnels, en plus.

La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Je pense qu'on finit par se comprendre un petit mieux de part et d'autre à mesure qu'on se parle. C'est de valeur que le temps soit limité. Si vous n'avez pas d'objection, Mme la Présidente, on va examiner cette chose de nouveau. Il y a quelque chose dans ce que vous dites.

M. Chevrette: Je vais vous donner un autre exemple pour vous convaincre définitivement.

M. Ryan: Cela n'est pas nécessaire. M. Gendron: Cela vous convaincrait.

M. Chevrette: Non, cela vous convaincrait.

M. Ryan: Oui.

M. Chevrette: Mme la Présidente, je suis président de syndicat...

M. Ryan: Peut-être que mes collègues ne veulent pas que je sois convaincu.

La Présidente (Mme Bégin): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, mais moi, je veux... M. Gendron: Cela, on le sent.

M. Chevrette: ...parce que c'est vous qui êtes ministre et qui avez la sanction finale.

M. Ryan: Ha! Ha! Ha!

M. Chevrette: Je suis président de syndicat, je dis à mes commettants: C'est une loi pourrie, c'est une loi inique, cela n'a pas de bon sens. La loi dit, cependant, que vous pouvez être poursuivi, etc. Savez-vous que vous pouvez l'accuser de ne pas avoir pris les moyens pour qu'ils rentrent en vertu de l'article 5 parce qu'il n'aura pas dit: Rentrez? Non, il a dit qu'elle est pourrie et vous avez dit "libre expression". Vous avez même dit "libre expression", vous, tantôt.

M. Ryan: Oui.

M. Chevrette: Vous avez utilisé très clairement ces mots et je pense que vous étiez sincère. À partir du moment où vous êtes très sincère, M. le ministre...

M. Ryan: Toujours.

M. Chevrette: ...déjà il les a informés, quand on le rend coupable après, il me semble qu'on n'est pas obligé d'ajouter... Cela, c'est du tordage de bras à l'envers.

M. Ryan: M. le Président, nous avons écouté avec intérêt les observations de l'Opposition. Nous en prenons note et nous reviendrons un peu plus tard dans la discussion sur cet article dans l'espoir de pouvoir en venir à une entente.

Le Président (M. Saintonge): Est-ce que je comprends que nous suspendons...

M. Chevrette: Oui, suspension. D'accord.

Le Président (M. Saintonge): ...l'article 5. Nous suspendons et l'amendement et l'article 5.

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. J'appelle donc l'article 6.

M. Chevrette: Quant à nous, on n'a aucun commentaire. Mais ce serait bon pour ceux qui nous écoutent de bénéficier de la lecture de l'article 6.

Le Président (M. Saintonge): Je peux me conformer à la lecture de chacun des articles. Très bien. Je note simplement que nous avons commencé à 20 h 33.

M. Chevrette: Cela va bien, on a une heure.

Le Président (M. Saintonge): Je vais finir à 22 h 23 pour appeler les autres. D'accord?

L'article 6 se lit comme suit: "Nul ne peut par omission ou autrement faire obstacle à l'exécution normale par les salariés des tâches qui leur incombent en vertu des conditions de travail qui leur sont applicables." Cet article est-il adopté?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division.

J'appelle l'article 7 qui se lit comme suit: "Nul ne peut entraver l'accès d'une personne à un lieu où elle a le droit d'accéder pour exercer ses fonctions ou pour bénéficier d'un service dispensé par l'employeur."

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division.

M. Ryan: Vous voulez que j'empêche les charqés de cours d'entrer?

M. Chevrette: Non, ce n'est pas cela, M. le ministre. Ce n'est pas cela.

Le Président (M. Saintonge): Donc, adopté sur division.

J'appelle l'article 8...

M. Chevrette: C'est sur le fond du projet de loi.

Le Président (M. Saintonge): ...qui se lit comme suit...

M. Chevrette: Cela aurait l'air fou, M. le ministre, de vous donner raison sur chaque article...

Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous plaît!

M. Chevrette: ...et d'arriver à voter contre à la fin.

Le Président (M. Saintonge): M. le leader de l'Opposition. Je pense que la discussion sur l'article...

M. Ryan: Pardon? Moi, j'espérais vous amener à voter pour les articles et à changer votre jugement à la fin....

M. Chevrette: Une cohérence.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre, un instant.

M. Ryan: ...pour des articles et à changer votre jugement à la fin.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre, un instant, s'il vous plaît!

M. Ryan: Pardon?

Le Président (M. Saintonge): La discussion est terminée sur l'article 7 et nous n'allons pas faire de discussion de ce genre.

M. Chevrette: D'accord. C'est correct. C'est le ministre qui a commencé, encore.

Le Président (M. Saintonge): J'appelle l'article 8 qui se lit comme suit: "S'il estime

que les salariés ne se conforment pas à l'article 2 en nombre suffisant pour assurer les services d'enseignement de l'employeur, le gouvernement peut, par décret, à compter de la date, pour la période et aux conditions qu'il fixe, remplacer, modifier ou supprimer toute disposition de la convention collective liant l'employeur et l'association de salariés, afin de pourvoir au mode selon lequel l'employeur comble un poste, procède à l'embauche de nouveaux employés et à toute matière se rapportant à l'organisation du travail. "Les dispositions d'un décret adopté en vertu du premier alinéa font partie, pour la période qui y est indiquée, de la convention collective qu'elles visent."

M. Chevrette: ...sûr que Me Brière va être d'accord avec.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Chevrette: On peut présenter notre amendement?

Le Président CM. Saintonge): Vous avez un amendement?

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Saintonge): Oui, d'accord. Donc, il y a un amendement présenté à l'article 8 par le leader de l'Opposition...

M. Chevrette: Non, par le député d'Abitibi-Ouest.

Le Président (M. Saintonge): ...qui se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié, à la troisième ligne du premier alinéa de l'article 8, par l'ajout, après le mot "employeur", des mots "aux seules fins de fournir les prestations d'enseignement, d'encadrement et d'évaluation pour assurer la validation de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987". Est-ce que nous avons copie pour...

M. Chevrette: Oui, ils l'ont.

Le Président (M. Saintonge): Vous avez reçu copie de l'amendement.

M. Gendron: Ah oui! M. le Président.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je voudrais tout simplement mentionner au ministre de l'Éducation qu'il s'est sûrement emporté dans son allégresse, après le mot "employeur", en ne limitant pas les possibilités gouvernementales de décréter à peu près n'importe quelle situation. L'objectif de cette loi, M. le ministre, vous le savez, vous l'avez présentée sur le principe, c'est que cela recommence rapidement et de valider la session.

Une voix: Décréter pour P-2, P-3.

M. Gendron: C'est de valider la session, que cela recommence et décréter P-2, P-3. Que, la disposition - nous pensons qu'elle est très importante - sur les possibilités que le gouvernement puisse agir par décret, plutôt que la convention collective s'applique, soit limitée aux seules fins de fournir les prestations d'enseignement, d'encadrement et d'évaluation pour assurer la validation de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987. C'est cela l'objectif. Je pense que vous avez raison d'avoir une disposition comme l'article 8 à condition qu'elle soit limitée aux fins pour lesquelles il y a un projet de loi spécial. Le projet de loi, vous l'avez expliqué, nous pensons qu'ici, avec une disposition comme celle-là, cela ne permet pas au gouvernement... Alors, je vois que vous êtes d'accord. J'arrête de plaider.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Continuez votre plaidoyer. Il a besoin d'être poussé plus loin.

M. Gendron: Oui?

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Abitibi-Ouest, allez-y.

M. Gendron: S'il a besoin que je plaide davantage, j'aurai besoin d'être entendu. Vous étiez en consultation. Très sérieusement, M. le ministre, je pense qu'ici nous... Lisez l'article: Si vous estimez - c'est le gouvernement qui parle dans la loi - que les salariés ne se conforment pas à l'article ? en nombre suffisant pour assurer les services d'enseignement de l'employeur, mais uniquement aux fins de fournir les prestations d'enseignement, d'encadrement et d'évaluation pour assurer la validation de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987 -et là c'est fini. C'est fini dans le sens que le pouvoir...

Une voix: ...

M. Gendron: Non, un instant. S'il manque du personnel, etc., ce sont les dispositions de la convention collective, M. le ministre, qui devraient s'appliquer qui, là, deviennent un décret parce qu'effectivement vous décrétez les conditions de travail. Mais c'est la convention collective qui devrait pourvoir à tout le reste des responsabilités. Par rapport à la possibilité que le gouverne-

ment puisse décréter, nous sommes convaincus que, s'il y avait la disposition uniquement quant à la prestation d'enseignement, d'encadrement et d'évaluation de la session, là il n'y aurait pas de pouvoir additionnel conféré au ministre.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: Je pense qu'il y a maldonne entre l'Opposition et le gouvernement autour de l'article 8. L'article 2 auquel se réfère l'article 8 dit clairement: "Pendant la période comprise entre le début de la session d'été 1987 et le 31 décembre 1988, un salarié doit accomplir tous les devoirs attachés à ses fonctions, compte tenu..." L'article 8 veut tenir compte de toute situation susceptible de survenir pendant la durée de la convention qui doit s'étendre jusqu'à la fin de 1988. (21 h 40)

M. Gendron: Mais si vous répondez comme ça, ça signifie que la convention est complètement mise à l'écart. C'est tellement vrai, M. le ministre, que j'ai ici le projet de loi 160. À l'article 9 du projet de loi... Je me rappelle, on a fouillé le procès-verbal et c'est exactement le même processus. Ça a pris un peu de temps à vous convaincre. Voici le texte. Je ne Vous lirai pas l'article 9 au complet mais c'est écrit: "...uniquement aux fins d'assurer les services essentiels", parce qu'on pensait que toute la portée de l'article 9 dans le projet de loi 160 devait se référer uniquement aux services essentiels. Nous pensons que dans le présent cas les obligations auxquelles vous faites référence à l'article 2... La loi spéciale est justifiée pour que ces gens-là fassent obligation à ce pourquoi il y a nécessité d'adopter le projet de loi qui porte le no 48, à savoir fournir les prestations d'enseignement, d'encadrement et d'évaluation, pour assurer quoi? La validation de la présente session. C'est ça le problème. Tout votre argument en deuxième lecture, M. le ministre, était: Ça n'a pas de bon sens de ne pas prendre les dispositions, premièrement pour que ça recommence; deuxièmement, pour valider la session. Mais c'est pour ces fins-là que l'article 8 existe et qu'il y a une référence à l'article 2 parce que autrement "toute disposition de la convention" ça ne tient plus et ça signifie que le gouvernement pourrait, tel que vous l'avez écrit à l'article 8, pour toute autre chose que la validation, les prestations d'enseignement d'encadrement et d'évaluation, stipuler qu'il est autorisé à prendre des mesures par décret pour fixer des conditions de différente nature. Vous l'avez dit dans votre phrase tantôt... Écoutez! vous avez dit: À l'article 2 il y a d'autres obligations que celles de valider la session et d'encadrer les prestations d'enseignement et d'encadrement. Vous avez tout à fait raison, mais qu'est-ce qui régit habituellement toutes les autres dispositions? C'est la convention collective, ce n'est pas la loi. La loi est obligée de régir uniquement ce qu'elle doit couvrir: il faut que ça recommence, il faut que vous donniez de l'enseignement, de l'encadrement et de l'évaluation et que vous validiez la présente session, c'est-à-dire que la session qui ne s'est pas terminée doit être validée.

Chaque fois qu'il y a à régir d'autres dispositions, M. le ministre, vous devriez être à l'intérieur du cadre de la convention collective et non dans le cadre de la loi spéciale.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, nous allons prendre en considération les observations qui nous ont été soumises par le député d'Abitibi-Ouest. Je demanderais que cet article-là soit gardé en réserve pour un peu plus tard.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Nous allons suspendre et la discussion de l'amendement et la discussion...

M. Ryan: Pour ne pas agir de manière purement machinale je veux vérifier si dans le cas de la loi 160 il s'était agi d'une loi visant à mettre un terme à un arrêt de travail illégal. Si c'était un arrêt de travail illégal, à ce moment-là, je comprends qu'on ait mis des dispositions visant à empêcher la répétition d'un tel arrêt pendant la durée de la convention et donnant au gouvernement le pouvoir de décider par décret. On va vérifier ce point-là et si des éléments nous invitaient à réfléchir dans le sens où nous y invite le député d'Abitibi-Ouest, on le ferait.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Nous allons suspendre la discussion sur l'amendement ainsi que sur l'article 8 au complet.

Règlement du différend

Nous allons maintenant passer à la section III de la loi, intitulée "Règlement du différend." J'appelle l'article 9. Est-ce que l'article 9 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. J'appelle maintenant l'article 10 qui se lit comme suit: "Les stipulations visées à l'article 9 constituent une convention collective au sens du Code du travail et lient les parties jusqu'au 31 décembre 1988." J'ai reçu un amendement à l'article 10 par

M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre, j'ai reçu un amendement présenté par M. le député d'Abitibi-Ouest à l'article 10, amendement qui se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié par l'ajout, à l'article 10, d'un deuxième alinéa se lisant comme suit: "Les stipulations visées au premier alinéa pourront être modifiées de temps à autre du consentement de l'association de salariés et de l'employeur." Donc, M. le député d'Abitibi-Ouest, sur votre amendement.

M. Gendron: Oui. Je ne voudrais pas me le présenter, je le connais. À l'article 10, M. le ministre de l'Éducation, on vous disait qu'on avait un petit amendement à présenter. Je veux juste l'expliquer. C'est que nous pensons que l'article 10, tel qu'il est écrit: "Les stipulations visées à l'article 9 constituent une convention collective au sens du Code du travail et lient les parties jusqu'au 31 décembre 1988." pourrait être modifié par l'ajout, à la fin du deuxième alinéa - c'est-à-dire non. On remplacerait complètement l'article 10, n'est-ce pas?

Le Président (M. Saintonge): Vous ajoutez un deuxième alinéa.

M. Gendron: D'accord. On ajoute. Excusez-moi. On ajouterait un deuxième alinéa qui dirait: "Les stipulations visées au premier alinéa pourront être modifiées de temps à autre du consentement de l'association de salariés et de l'employeur". Ceci, pour permettre qu'en cours de vécu de la loi spéciale, sur consentement mutuel, les parties qui voudraient apporter des modifications puissent le faire.

M. Ryan: Mes conseillers juridiques m'indiquent qu'il serait superflu d'ajouter une clause comme celle-ci parce que c'est de la nature même d'une convention collective d'être sujette à modification sur libre consentement des deux parties concernées. Dans des lois adoptées antérieurement dans des circonstances semblables, on n'a pas mis de dispositions comme celle-là. Il semble que ce serait faire parler le législateur pour ne rien dire, qui ne soit déjà dans la nature des choses.

M. Gendron: Oui, M. le ministre. Je suis d'accord avec vous. Mais, comme c'était notre prétention, une couple d'articles auparavant, que justement il y avait des dispositions qui faisaient parler le législateur pour ne rien dire, on s'est dit, s'il nous donne cet argument, puis qu'il a refusé certains amendements sur la même base, peut-être qu'il va les accepter. Mais, pour être plus sérieux, si vous prétendez que l'article 10, conformément aux dispositions du Code du travail, n'a pas besoin de cet ajout parce que c'est superfétatoire, comme vous dites parfois, et que le Code du travail le prévoit, parfait. Cela nous agrée. On retire l'amendement proposé à l'article 10.

Le Président (M. Saintonge): Donc, l'amendement est retiré. Est-ce que l'article 10 est adopté?

M. Gendron: Oui.

Sanctions

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Nous allons maintenant passer à la section IV de la loi, intitulée "Sanctions" et à la première partie, "Poursuites pénales". L'article 11.

Donc, à l'article 11, est-ce que vous avez quelques commentaires, M. le ministre?

M. Ryan: Oui, M. le Président. J'aimerais demander à mon collègue, le ministre du Travail, de fournir certaines explications au sujet de l'article 11, si vous le permettez.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Il s'agit peut-être, M. le Président, de...

M. Gendron: ...d'explications. On est d'accord. Vous pouvez y aller avec des explications, mais, nous autres, on n'a pas de problème avec l'article 11.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes d'accord avec les sanctions, les poursuites pénales et les pénalités qui sont incluses au projet de loi.

M. Chevrette: On ne parle pas du quantum nécessairement. Quant au libellé...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faudrait que vous vous entendiez. Il y en a un qui me dit qu'il est d'accord, l'autre me dit qu'il ne l'est pas. (21 h 50)

M. Gendron: Non, non. Un instant. M. le Président. On est tous les deux à la même place, au même endroit et à la même heure. C'est que, depuis le début, si le ministre du Travail avait suivi, quand on parle de notre accord, c'est sur la compréhension du libellé qu'il y a là. Ce n'est pas notre accord sur le fond. On n'était pas d'accord sur la loi. Alors, je ne suis pas d'accord sur l'article 11. Je n'ai pas besoin d'un long discours du ministre du Travail pour m'expliquer l'article 11. C'est ça que je veux dire. On est d'accord qu'on comprend très bien les pénalités, ce qui est écrit à l'article 11. On vous demande de

nous faire grâce de vos explications à l'article 11.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À ce moment, je comprends que vous êtes d'accord que vous compreniez bien ce que vous retrouvez, ce que vous lisez. Maintenant, ce qui nous intéresse de ce côté-ci, dans le débat, c'est de savoir si vous partagez également, au niveau des peines et des sanctions qui sont indiquées, l'avis du gouvernement qu'il s'aqit de sanctions et de peines qui sont raisonnables ou si vous les qualifiez de déraisonnables, et c'est là qu'il pourrait y avoir...

M. Chevrette: Ça, M. le ministre...

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: ...chaque parlementaire dit bien ce qu'il veut sur chaque article. À ce stade-ci je pense que vous n'êtes pas en position d'interroger. C'est vous autres qui avez préparé le projet de loi. C'est à nous autres de poser des questions sur votre loi. Je comprends que vous avez des réminiscences du passé et que vous y reviendrez. Pour le moment, imaginez-vous qu'on joue le rôle que vous avez déjà joué.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député de Joliette, je vous demandais si vous aviez des questions; si vous n'avez pas de question et que vous êtes d'accord qu'il s'agit là - non simplement que vous avez compris l'article - de pénalités qui sont en équilibre, si je peux utiliser l'expression...

M. Chevrette: Je vais le dire au moment du vote.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...à ce moment, cela va nous permettre de passer à l'article suivant. Si vous avez des réserves...

M. Gendron: On était déjà à l'article 12, M. le Président.

Le Président (M. Saintonge): S'il vous plaît, on va régler le problème si vous voulez, pour qu'on s'entende très bien.

M. Chevrette: Un instant. De ce côté-ci?

Le Président (M. Saintonge): Non, non. Des deux côtés. Simplement, c'est que j'avais donné la parole au ministre du Travail pour expliquer quelque chose. On a dit: On est d'accord. Je pense que ce que je vais faire pour que le débat se fasse proprement, je vais demander au ministre du Travail de donner ses explications et vous aurez aussi vos questions.

M. Chevrette: C'est bien correct. On n'en a plus besoin.

Le Président (M. Saintonge): Je pense que c'est la seule façon, sinon on est en train de susciter un débat sur autre chose. M. le ministre du Travail, vous avez la parole pour expliquer les dispositions de l'article 11.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, tout simplement pour indiquer très brièvement à l'Opposition ainsi qu'à ceux et celles qui nous écoutent que vous retrouvez là à l'article 11, autant sur le plan du libellé que des quanta, ce que l'on retrouve à l'article 142 du Code du travail, et que dans les circonstances le gouvernement est d'avis qu'il s'agit là de sanctions qui sont en équilibre, vu les répercussions que peut avoir un tel conflit.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: II faut reconnaître que les pénalités individuelles ressemblent plus au code qu'à certaines lois d'exception.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les pénalités individuelles tout comme celles qui visent les dirigeants ou employés d'une association et celles qui visent les associations comme telles sont exactement celles que vous retrouvez à l'article 142 du Code du travail.

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Est-ce que l'article 11 est adopté?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division. J'appelle l'article 12. L'article 12 se lit comme suit: "Si l'association de salariés ne se conforme pas aux articles 4 ou 5, elle commet une infraction et est passible, outre le paiement des frais, de l'amende prévue au paragraphe 3 de l'article 11 pour chaque jour ou partie de jour pendant lequel des salariés représentés par l'association de salariés contreviennent à l'article 2." Est-ce qu'il y a des questions sur l'article 12? M. le député de Joliette.

M. Chevrette: C'est le lien qu'on a fait tantôt avec M. le ministre, l'article 2 par rapport à l'article 12. Les amendements dont on a parlé tantôt.

Le Président (M. Saintonge): Je vais suspendre l'article 12.

M. Chevrette: Si vous vous rappelez, on

a dit que si on avait un texte, étant donné que l'article 12 créait une infraction à l'article 5 - non, c'est à l'article 5, je m'excuse. C'est vrai. L'article 12 crée une infraction à l'article 5.

Le Président (M. Saintonge): C'est ça. Une voix: L'article 5 est suspendu.

M. Chevrette: L'article 5 est suspendu présentement.

Le Président (M. Saintonge): Je comprends que vous voulez que je suspende également l'article 12, vu la suspension de l'article 5.

M. Chevrette: Si jamais on avait un texte qui allait dans le sens de ce qu'on avait dit, peut-être qu'on éviterait de faire un amendement ici.

Le Président (M. Saintonge): Vous êtes d'accord que nous allons suspendre l'article 12." Nous y reviendrons après avoir adopté l'article 5.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si on le suspend...

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, si on le suspend comme tel, je comprends que vous avez des réserves à cause de l'article 5 qui a déjà été suspendu, mais que vous n'avez pas de réserve en ce qui concerne l'application quant à l'article 4.

M. Chevrette: L'article 4 a été, à ce que je sache, voté à cette commission.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous n'avez pas de réserve sur l'application de l'article 12 en relation avec l'article 4. Vos seules réserves portent sur l'application de l'article 12 en relation avec 5.

M. Chevrette: C'est-à-dire qu'on n'avait aucune réserve quant à la compréhension de l'article 4 effectivement.

Le Président (M. Saintonge): L'article 12 est suspendu. J'appelle l'article 13.

M. Chevrette: C'est ça.

Le Président (M. Saintonge): Est-ce que vous voulez que je lise l'article 13 également?

M. Chevrette: S'il vous plaît!

Le Président (M. Saintonge): Très bien. "Quiconque contrevient à l'article 7 commet une infraction et est passible, outre le paiement des frais, d'une amende de 1000 $ à 10 000 $. "S'il s'aqit d'une personne visée au paragraphe 2 de l'article 11, l'amende prévue au premier alinéa est de 2000 $ à 25 000 $."

M. le ministre, pas de commentaire?

M. Ryan: Pas de commentaire.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pas de commentaire. Cela nous semble là, encore une fois, M. le Président, des montants qui visent un respect de la loi et qui ont été fixés pour que nous nous retrouvions le plus en équilibre.

M. Chevrette: Mais l'article 13, M. le Président...

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Si je comprends bien, l'article 13 crée la pénalité à la désobéissance de l'article 7.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est cela. C'est exact.

M. Chevrette: Et l'article 7, c'est l'accès aux lieux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): "Nul ne peut entraver l'accès d'une personne à un lieu où elle a le droit d'accéder pour exercer ses fonctions ou pour bénéficier d'un service dispensé par l'employeur."

M. Chevrette: Mais, à l'article 11, si vous aviez écrit - je reviens en arrière pour les fins d'explication, M. le Président -"Quiconque contrevient, incite ou encourage une personne à contrevenir à une disposition des articles 2, 3, 6 ou 7, commet une infraction, l'article 13 serait inutile.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais les pénalités ne sont pas les mêmes. Si vous regardez la corrélation: dans l'article 13, vous ne retrouvez pas...

M. Chevrette: Une à 10 000 $ et deux à 25 000 $. Alors que vous avez...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne retrouvez pas 25 000 $ à 100 000 $, vous retrouvez 1000 $ à 10 000 $ et vous retrouvez, non pas 5000 $ à 50 000 $, mais 2000 $ à 25 000 $. Donc, on n'aurait pas pu agir comme vous nous le suggérez présente-

ment en ayant les mêmes résultats que nous visons, avec les chiffres dont nous faisons état.

M. Chevrette: Est-ce qu'on peut savoir brièvement, parce que c'est la première fois qu'on revoit la distinction de ce type d'amende en tout cas, à ma mémoire... Peut-être que cela s'est vu, mais dans le projet de loi 160 je ne me souviens pas d'avoir vu cette distinction législative quant aux pénalités à l'accès des lieux par rapport aux autres. Est-ce que je fais erreur ou si c'est ma mémoire purement et simplement?

Une voix: Vous avez une bonne mémoire. On n'a jamais vu une amende différente.

M. Chevrette: Dans 160, entre autres, il me semble qu'on ne voyait pas la distinction.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On est en train de vérifier présentement, parce que 160 a été un projet de loi qui a été parrainé par Mme la ministre des Affaires sociales. Ce n'était ni le ministre de l'Éducation ni le ministre du Travail, mais certains techniciens étaient les mêmes.

M. Chevrette: Oui, je serais surpris qu'ils soient différents.

Le Président (M. Saintonge): L'article 13 est-il adopté ou...

M. Chevrette: Cela dépend. On attend une petite réponse.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Nous allons faire la vérification demandée. M. le ministre.

M. Ryan: La distinction que nous avons dans le projet de loi 48 était déjà contenue dans la loi 160. Les montants étaient différents, ils étaient plus gros dans la loi 160, parce qu'on transigeait avec de plus grosses associations.

M. Gendron: La question n'était pas de vérifier - j'aimerais cela que M. Brière écoute aussi - si les montants étaient différents ou pas, c'est qu'ici vous avez...

M. Ryan: Ce n'est pas cela que j'ai dit. M. Gendron: Ah, excusez-moi. M. Ryan: La distinction de base, 7. M. Gendron: Entre l'accès et le reste?

M. Ryan: C'est cela. M. Gendron: D'accord.

M. Ryan: Cela y était dans le projet de loi...

M. Gendron: Si c'est ce que vous avez dit, cela va. C'est ce qu'on voulait savoir, merci.

M. Ryan: C'est cela.

Le Président (M. Saintonge): Donc, cela convient. Est-ce que l'article 13 est adopté?

M. Chevrette: Sur division. (22 heures)

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division. J'appelle donc l'article 14 qui se lit comme suit: "Toute personne qui, par son acte ou son omission, en aide une autre à commettre une infraction est coupable de cette infraction comme si elle l'avait commise elle-même, si elle savait ou aurait dû savoir que son acte ou son omission aurait comme conséquence probable d'aider à la commission de l'infraction."

Est-ce que vous avez quelque information...

M. Gendron: Oui, un amendement.

Le Président (M. Saintonge): Un amendement à l'article 14?

M. Gendron: A l'article 14.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Un amendement à l'article 14 présenté par...

M. Chevrette: II faudrait peut-être déposer les articles 14 et 15 parce qu'ils sont de même nature.

M. Gendron: Oui. Les articles 14 et 15 sont...

Le Président (M. Saintonge): Je préférerais qu'on règle l'article 14, M. le leader de l'Opposition. On reviendra à l'article 15...

M. Chevrette: Compte tenu du temps, M. le Président, étant donné que c'est exactement la même nature...

Le Président (M. Saintonge): D'accord.

M. Chevrette: Je pense que cela pourrait peut-être permettre...

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Donc, à l'article 14, il y a un amendement qui est proposé par M. le député d'Abitibi-Ouest qui se lit comme suit: Le projet de loi

48 est modifié par la suppression, à la quatrième ligne de l'article 14, des mots "ou aurait dû savoir".

Pour le bénéfice de la discussion, l'article 15 se lit comme suit: "Toute personne qui, par des encouragements, des conseils ou des ordres, en amène une autre à commettre une infraction est coupable de cette infraction ainsi que de toute autre infraction que l'autre commet en conséquence des encouragements, des conseils ou des ordres, si elle savait ou aurait dû savoir que ceux-ci auraient comme conséquence probable la commission de l'infraction."

Il y a également une modification apportée à cet article 15 par M. le député d'Abitibi-Ouest. La modification se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié par la suppression, à la sixième ligne de l'article 15, des mots "ou aurait dû savoir".

Ce sont donc les deux amendements aux deux articles en question. Est-ce qu'il y a quelque commentaire, M. le député d'Abitibi-Ouest, sur vos amendements?

M. Gendron: Le commentaire ne sera pas tellement long. Je commence à trouver que des dispositions présomptives, dans une loi spéciale, sont quand même en termes, encore là, de droit, surtout avec des conséquences pénales, un peu, pas mal, beaucoup, passionnément, comme diraient certains, abusives: Toute personne, par son acte ou son omission, qui en aide une autre à commettre une infraction est coupable de cette infraction comme si elle l'avait commise elle-même si elle savait ou aurait dû savoir... La disposition "aurait dû savoir" m'apparaît très abusive et c'est d'introduire encore une fois une présomption de culpabilité. La présomption de culpabilité, encore là sans avoir une grande expérience comme juriste, m'apparaît être un peu du droit nouveau, être dangereuse au niveau des droits et libertés de la personne. Je ne pense pas qu'on ait affaire à des criminels. Quand on est dans le domaine de l'éducation, des chargés de cours qui ont comme mission éducative de former des jeunes pour la relève et la société de demain et qu'on met une disposition présomptive qui impute d'avance des motifs d'ordre criminel, il me semble que c'est aller très loin. En conséquence, l'Opposition préférerait qu'aux articles 14 et 15 la disposition "aurait dû savoir" soit à tout le moins éliminée.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais tenter de convaincre le député d'Abitibi-Ouest du bien-fondé de maintenir au projet de loi l'expression "aurait dû savoir". Je pense que l'expression "si elle savait" ne pose pas de problème entre les deux formations politiques si la mens rea est là et qu'elle est complète, que l'infraction soit constatée, ça va. Je ne partage pas l'analyse qu'en fait cependant le député d'Abitibi-Ouest quand il nous dit que lorsqu'on écrit dans le projet de loi "aurait dû savoir", on change la présomption. On ne change absolument pas la présomption. Celui qui accuse ou l'accusateur devra démontrer que la personne aurait dû savoir. C'est là pour éviter peut-être... Je vais tenter de vous donner l'exemple qui me vient le plus rapidement à la tête. Ce n'est peut-être pas l'exemple le plus parfait, c'est peut-être un exemple qui va clocher, mais c'est quand même un exemple qui va illustrer ce que nous tentons d'éviter. Si les salariés étaient informés par circulaires distribuées à leur domicile, on peut difficilement faire la preuve que la personne savait. Si elle a pris la circulaire en la recevant et, ne sachant pas de quoi il s'agissait l'a mise à la poubelle... "...aurait dû savoir". Il faut que l'institution, le gouvernement, la personne qui porte la plainte, prenne tous les moyens nécessaires pour s'assurer que la personne aurait dû savoir et il faut faire cette preuve que la personne aurait dû savoir. Ce n'est pas aussi simple que vous le mentionnez en disant qu'il y a renversement de présomption. La présomption n'est pas sur le travailleur, n'est pas sur la personne qui pourrait commettre l'infraction. La présomption d'innocence demeure, elle est pleine, complète et entière. Cela vise à éviter que des gens, dans certains cas, posent des gestes pour éviter de savoir. C'est finalement le but d'inclure cette expression.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Je ne sais pas si la consultation des juristes, c'est pour confirmer ou corroborer les dires du ministre du Travail. Comme il y avait possibilité tantôt, après une réflexion d'un ministre, d'aller chercher une corroboration - ou l'inverse -des spécialistes de ces questions qui en ont traité d'autres, je voudrais savoir si M. Brière peut dire au ministre de l'Éducation s'il partage l'explication qui a été fournie? Je ne demande pas qu'il le dise lui-même, mais qu'on le dise par la voix d'un consultant qui dit à son ministre quoi dire, et si le ministre veut prendre à son compte la réflexion de M. Brière...

M. Ryan: Je n'ai pas besoin de consulter 25 encyclopédies; "aurait dû savoir" me semble être plein de bon sens. Dans une loi comme celle-là, c'est une expression qui me semble parfaitement sensée.

M. Gendron: Parfaitement essentielle,

avez-vous dit?

M. Ryan: Parfaitement sensée.

M. Gendron: Sensée.

M. Ryan: Je vais vous donner...

M. Chevrette: Mais M. le ministre...

M. Ryan: Est-ce que je peux expliquer ma pensée?

M. Chevrette: Allez-y, excusez-moi. Je pensais que vous aviez fini.

M. Ryan: C'est un grand mot pour une petite chose. Disons, par exemple, que la direction du syndicat envoie une lettre circulaire à ses membres pour les informer de ce qui était dans la loi et leur faire part des obligations résultant pour eux de cette loi-là. Le gars qui est chez lui et qui reçoit cela peut dire: Moi, ces maudites affaires de syndicat et de gouvernement, je ne veux pas en entendre parler, je fourre ça au panier. Il n'était pas au courant, mais il aurait dû le savoir. Il a été convoqué à une assemblée, il a dit: Moi, j'en ai plein mon voyage, je ne vais plus à ces affaires-là, j'aime autant rien savoir. Il aurait dû savoir, il ne peut pas plaider qu'il ne le savait pas.

Il me semble que c'est le sens commun, dans une société de communication très développée comme la nôtre, à part ça.

M. Chevrette: Je vais peut-être adresser ma question au ministre du Travail qui avait commencé à y répondre. À l'article 14, vous avez expliqué que vous aviez le fardeau de la preuve.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.

M. Chevrette: Relisons l'article 14 ensemble: "Toute personne qui, par son acte ou son omission...". Il ne va pas à l'assemblée; c'est un délégué de département et il ne va pas à l'assemblée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas une infraction.

M. Chevrette: Non, mais regardez bien: "par... son omission, en aide une autre à commettre une infraction est coupable..."

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais ne pas aller à l'assemblée n'est pas une infraction.

M. Chevrette: Non, mais une omission. Le fait de ne pas avoir fait circuler une feuille, par exemple, ça va jusqu'à l'omission. C'est écrit "est coupable".

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député de Joliette, je veux bien répondre à l'exemple que vous me donnez, mais ne pas assister à l'assemblée syndicale...

M. Chevrette: Bon, oublier l'assemblée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ... pour le travailleur ne constitue pas une infraction, ni au sens du Code du travail, ni au sens de la loi que nous avons devant nous présentement.

M. Chevrette: II a un paquet de feuilles à distribuer et il ne les distribue pas.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas une infraction.

M. Chevrette: Ce n'est pas une infraction.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II n'a pas d'obligation, d'après la loi, de distribuer des feuilles.

M. Chevrette: Bon. Donnez-moi donc un exemple d'omission qui pourrait rendre le délégué coupable?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II omet de se présenter à son travail.

M. Chevrette: Mais en quoi l'omission de se présenter à son travail le rend-il coupable d'une infraction? Il n'aide pas un autre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais vous donner un exemple parfait. Il a la responsabilité d'afficher une liste, un horaire.

M. Chevrette: Au babillard, disons.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une responsabilité qu'il a et il omet de le faire. À ce moment-là, cela peut constituer une infraction.

M. Chevrette: Ce n'est pas une infraction? "aide une autre à commettre une infraction est coupable"; vous le rendez coupable. Vous dites que vous avez le fardeau de la preuve?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est la question de la notion de complicité. On a déterminé...

M. Chevrette: Le "guilt by association".

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a déterminé, au moment où on se parle, qui était coupable de quoi. Maintenant, ces gens peuvent commettre des infractions, mais pour commettre des infractions, ils peuvent être

aidés. C'est toute la question de la notion de la complicité. Là, on vous dit que toute personne qui, par son acte ou omission, en aide une autre, est complice d'une autre dans l'infraction commise en vertu de la loi, est coupable de cette infraction. On dit que celui qui aide est aussi coupable que celui qui commet l'infraction. C'est tout ce que cet article vise. (22 h 10)

M. Chevrette: Êtes-vous prêt à indiquer que le fardeau de la preuve incombe à l'employeur?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je suis prêt à vous garantir...

M. Chevrette: Si vous me dites qu'il n'y a pas de présomption...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...que la présomption d'innocence joue et que le fardeau de la preuve incombe à celui qui accuse.

M. Chevrette: Êtes-vous prêt à l'écrire?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faudrait que je reproduise dans ce texte de loi l'ensemble des règles d'interprétation et de présomption. La présomption d'innocence joue tout le temps en matière d'infraction et d'actes criminels.

M. Chevrette: Non, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pourrais l'écrire, mais ce serait redondant.

M. Chevrette: M. le ministre, dans plusieurs lois du travail depuis quelques années...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans votre temps.

M. Chevrette: Non, non, non, dans votre temps, avec M. Jean Cournoyer, les lois 129 et 130. Je pourrais en relever une couple. Effectivement, dans certaines lois depuis douze ans, il y a eu des renversements de preuves et je ne suis pas certain, par le libellé de l'article 14 - je demanderais au ministre de bien le lire - je ne suis pas certain que, dans les articles 14 et 15, tels que libellés, on ne commande pas l'individu, que ce n'est pas lui qui a le fardeau de la preuve, tels que libellés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, je suis prêt à en faire la lecture, M. le député de Joliette, parce que ce n'est pas là l'intention du gouvernement. Nous n'avons pas l'intention de renverser le fardeau de la preuve. Nous n'avons pas l'intention de faire en sorte que la personne soit présumée coupable par la loi. Si nous lisons attentivement l'article 14, "toute personne qui, par son acte ou son omission..." Donc, il faut que la personne agisse, soit un acte, soit une omission, en aide une autre - la notion de complicité, d'assistance - à commettre une infraction. On ne présume pas qu'il y a une infraction, il faut la prouver: "est coupable de cette infraction comme si elle l'avait commise elle-même". Mais il " faut prouver qu'il y a eu infraction et il faut prouver que la personne, par son action ou par son omission, a aidé l'autre. Le fardeau de la preuve incombe à la personne qui porte la plainte: "Est coupable de cette infraction comme si elle l'avait commise elle-même si elle savait - donc, il n'y a pas de problème, c'est la notion de la mens rea complète et entière - ou aurait dû savoir - là, il faut prouver que la personne aurait dû savoir, il n'y a pas de présomption que la personne aurait dû savoir - que son acte ou son omission aurait comme conséquence probable d'aider à la commission de l'infraction."

La seule distinction qu'il y a avec la rédaction d'une infraction habituelle est le "aurait dû savoir" que vous avez dépisté au tout début et nous vous avons expliqué pourquoi le gouvernement a ajouté les mots "aurait dû savoir". Mais le fardeau de la preuve pour démontrer que la personne aurait dû savoir, pour démontrer qu'il y a complicité, pour démontrer qu'il y a infraction, appartient à celui ou à celle qui porte l'accusation. Il n'y a pas de renversement du fardeau de la preuve comme vous venez de le mentionner et comme vous l'avez déjà aperçu dans certaines lois spéciales du travail.

Le Président (M. Saintonge): Je voudrais informer l'Assemblée qu'à 22 h 23, je devrai mettre aux voix tous les articles et amendements qui n'ont pas été appelés et pour lesquels on n'a pas voté. Il y a actuellement trois articles qui sont suspendus, avec certains amendements à apporter aux articles 3, 5 et 8.

M. Chevrette: Passons au vote des articles 14 et 15.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Nous allons procéder aux articles 14 et 15 et je suggérerais que nous revenions immédiatement aux articles 3, 5 et 8, sinon nous ne pourrons pas revenir...

M. Chevrette: C'est-à-dire qu'on avait déposé l'article 15, mais on va le retirer. Si l'amendement est battu à 14, il va être battu à 15.

M. Gendron: Réglez 14 et 15.

M. Chevrette: Cela ne donne rien de...

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Est-ce que l'amendement proposé à l'article 14 est adopté?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): C'est-à-dire qu'il est rejeté. Je comprends donc...

M. Chevrette: C'est-à-dire que...

Le Président (M. Saintonge): Non, mais l'amendement...

M. Chevrette: ...l'amendement est rejeté.

Le Président (M. Saintonge): L'amendement est rejeté. Donc, l'amendement à l'article 14 est rejeté. Ce sera la même chose... Est-ce que l'article 14 est adopté?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division. Est-ce que l'amendement proposé à l'article 15 est adopté? Non, je comprends qu'il y a des...

M. Chevrette: On ne le dépose pas, on le retire.

Le Président (M. Saintonge): Je l'ai déjà lu.

M. Chevrette: Ah! d'accord. Dans ce cas-là, faites comme l'autre, comme pour l'article 14.

Le Président (M. Saintonge): II est rejeté? Adopté sur division, n'est-ce pas, dans les deux cas? Donc, les articles 14 et 15 sont adoptés sur division.

M. Chevrette: On n'accepte pas l'article 16.

Articles en suspens

Le Président (M. Saintonge): Nous allons revenir à l'article 3 du projet de loi. Et à cet article, je comprends qu'il y avait un amendement proposé par l'Opposition. On était en train d'examiner s'il y avait lieu de recevoir cet amendement ou même de le sous-amender. Est-ce que, M. le ministre, vous avez une réaction à ce moment-ci?

M. Ryan: M. le Président, pour être exact, nous avions accueilli avec intérêt l'amendement présenté par l'Opposition, mais j'avais moi-même mis de l'avant une formulation différente pour les deux dernières lignes, et nous sommes en train de mettre au point cette formulation. Cela viendra d'ici deux minutes. En attendant, je voudrais que nous disposions tout de suite de l'article 5...

Le Président (M. Saintonge): D'accord.

M. Ryan: ...que nous avions laissé en suspens. Nous serions prêts à accepter l'amendement proposé par l'Opposition.

Le Président (M. Saintonge): À l'article 5?

M. Ryan: Oui.

,Le Président (M. Saintonge): Donc, l'amendement est adopté.

Une voix: Oui.

M. Gendron: Cela prend du temps parfois, mais...

Le Président (M. Saintonge): Et l'article 5...

M. Gendron: ...on ne perd pas complètement notre temps.

Une voix: Toujours. M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): L'article 5 est adopté tel qu'amendé. Est-ce que nous allons à l'article 8?

M. Ryan: L'article 8, ensuite. Là, nous ne pouvons pas accepter l'amendement proposé par l'Opposition. Nous sommes très sensibles aux représentations qui nous ont été faites, mais nous devons peser éqalement les risques inhérents à la situation dans laquelle nous sommes placés, une situation délicate. Et il n'y aura rien de plus mauvais pour le gouvernement que d'être obligé de revenir ici, à supposer que la situation se gâche. Vous avez dit vous-même dans vos discours que ce n'est pas nécessairement de nature à corriger toute la situation dans peu de temps. On aura besoin d'un peu de temps pour manoeuvrer. Nous estimons que cette protection-là est nécessaire tout en ayant la ferme détermination de ne pas y recourir.

Le Président (M. Saintonge): Donc, l'amendement proposé à l'article 8 est rejeté. Est-ce que l'article 8 est adopté?

M. Gendron: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division. Est-ce que nous sommes en état de revenir à l'article 3, M. le ministre?

M. Ryan: Si vous voulez peut-être en passer juste un autre avant, M. le Président.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. En conséquence, je vais appeler l'article 16.

Une voix: L'article 16, cela va.

Le Président (M. Saintonge): L'article 16, cela va. Donc, l'article 16 est adopté.

M. Ryan: L'article 16 est adopté. Merci.

Une voix: Pardon?

M. Ryan: L'article 16 est adopté.

Le Président (M. Saintonge): L'article 16 est adopté.

M. Chevrette: ...

Le Président (M. Saintonge): J'appelle maintenant... Est-ce que c'est sur division ou adopté?

M. Ryan: C'est bon, ça. C'est le premier. Non, il est adopté.

M. Gendron: ...sur division, mais je veux dire, l'article 16, on n'a pas de problème et l'article 17, on n'a pas de problème.

M. Ryan: Je pensais qu'il était adopté. Le Président (M. Saintonge): Un instant.

M. Ryan: M. le Président, vous nous nuisez. Vous faites reprendre les votes.

Le Président (M. Saintonge): Non, M. le ministre, ce n'est pas cela.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Saintonge): C'est simplement qu'à ma gauche, j'entends: Adopté, et en même temps que j'écris, j'entends: Adopté sur division. Je veux mettre cela bien clair. C'est qu'actuellement...

M. Gendron: C'est un mot qui va à la suite de l'autre.

M. Ryan: Je n'avais pas compris les mots. Moi, j'ai les oreilles...

Le Président (M. Saintonge): ...depuis le début de l'étude du projet de loi...

M. Ryan: ...je n'avais pas compris les mots "sur division". Vous êtes plus proche d'eux que moi, par vos fonctions.

Le Président (M. Saintonge): Très bien, mais je dois vous dire, M. le ministre, qu'à l'article 16, j'avais indiqué "adopté sur division".

M. Ryan: D'accord. C'est bien. M. Chevrette: C'est cela. M. Gendron: 17, également.

Le Président (M. Saintonge): Je dois vous avouer que, depuis le début, il y a certains articles qui n'ont pas été adoptés sur division. J'ai demandé: Adopté? On m'a dit: Adopté, et je n'ai pas entendu "sur division".

M. Chevrette: II y en a eu un.

M. Gendron: Bien oui, il a accepté un amendement. Alors, j'ai compris qu'on a dit "adopté".

M. Chevrette: II ne faut pas que vous votiez quand c'est nous qui proposons.

M. Gendron: ...adopté sur division après un amendement accepté de l'Opposition.

M. Ryan: ...si vous voulez être cohérent.

Le Président (M. Saintonge): Je vais tenter de mettre un peu d'ordre dans cela.

M. Chevrette: Non, cela va bien.

M. Gendron: II y en a partout. 17 est adopté sur division.

Le Président (M. Saintonge): D'accord, mais je vais simplement...

M. Gendron: Non, c'est sérieux?

M. Ryan: Maintenant, est-ce qu'on est prêt avec l'article 2?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre, un instant. Je vais faire une mise au point extrêmement claire ici. Je veux qu'on s'entende très bien. C'est un projet de loi spécial quand même. Il y a certains articles, comme l'article 1, qui est adopté purement et simplement. L'article 2, on n'y est pas rendu encore; on ne l'a pas adopté, ni l'article 3. L'article 4 est adopté. L'article 5 est adopté tel qu'amendé. L'article 6 est adopté sur division, 7 sur division, 8 sur division, 9 et 10 adoptés, 11 adopté sur division, 13 adopté sur division, 14, 15 et 16 adoptés sur division. Et j'appelle l'article 17.

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur

division. Est-ce que vous êtes prêts pour l'article 2?

M. Ryan: L'article 2, nous sommes prêts.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Nous revenons, à ce moment-ci, à l'article 2 qui avait été suspendu. Il y a principalement également un amendement qui avait été apporté... Non, il n'y avait pas d'amendement à l'article 2.

M. Chevrette: M. le ministre en a déposé un.

M. Ryan: ...amendement auquel nous apporterions un sous-amendement. On peut peut-être commencer par le sous-amendement. Â l'article 2, nous rejetons l'amendement proposé, mais nous sommes prêts à considérer un amendement à l'article 3.

Le Président (M. Saintonge): Donc, l'amendement est rejeté à l'article 2.

M. Ryan: À l'article 2, nous rejetons l'amendement?

M. Chevrette: À l'article 2, vous ne faites plus d'autre amendement.

M. Ryan: Non.

M. Gendron: 2, sur division.

M. Chevrette: Donc, l'article 2 serait adopté sur division.

M. Ryan: C'est cela.

Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous plaît! Il y a peut-être une confusion ici...

M. Chevrette: Non, c'est correct.

Le Président (M. Saintonge): ...mais l'article 2, je n'ai aucun amendement. Je n'ai reçu aucun amendement à l'article 2.

M. Chevrette: C'est correct. Sur division.

M. Ryan: Cela va.

Le Président (M. Saintonge): Donc, l'article 2 est adopté sur division. (22 h 20)

M. Chevrette: C'est parce qu'on avait mis le texte sur les deux articles.

Le Président (M. Saintonge): À l'article 3 maintenant.

M. Ryan: Le premier alinéa de l'article 3 serait adopté sur division si je comprends bien. Si vous voulez l'adopter sans division, ce serait encore mieux.

Le Président (M. Saintonge): J'appelle l'article 3. J'ai un amendement à l'article 3 qui a pour but d'ajouter un deuxième alinéa. Donc, le premier alinéa demeure tel quel et il y a le deuxième alinéa. Est-ce que l'amendement est adopté ou...

M. le ministre, sur l'amendement.

M. Ryan: Sur l'amendement, M. le Président, peut-être que ça simplifierait si on lisait tout le texte comme nous voudrions l'amender. Si vous voulez le proposer, on acquiescera. "Rien dans le présent article ne limite la possibilité pour l'employeur d'aménager, dans le temps comme dans la forme, les services d'enseignement requis pour assurer la validité de la session d'hiver de l'année universitaire 1986-1987 de façon à tenir compte, sans préjudice, à la qualité de l'enseignement, des circonstances particulières résultant de l'interruption de cette session."

M. Chevrette: On peut considérer que ça peut être l'amendement plutôt que de refaire un autre texte. Il nous reste à peine deux minutes et on a un autre amendement à déposer.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Vous allez me répéter les mots, M. le ministre: "...de façon à tenir compte...

M. Ryan: ...sans préjudice à la qualité de l'enseignement, des circonstances...

Le Président (M. Saintonge): Un instant: "...sans préjudice...

M. Ryan: "...à la qualité de l'enseignement...

Le Président (M. Saintonge): "À la qualité de l'enseignement..."

M. Ryan: Virgule.

Le Président (M. Saintonge): Virgule.

M. Ryan: "...des circonstances particulières...

Le Président (M. Saintonge): "...des circonstances particulières...

M. Ryan: "...résultant de l'interruption de cette session...

Le Président (M. Saintonge): "...résultant de l'interruption...

M. Ryan: "...de cette session."

Le Président (M. Saintonqe): "...de cette session." Point, fermez les guillemets. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Chevrette: L'amendement est adopté.

Le Président (M. Saintonge): L'amendement est adopté.

M. Chevrette: L'article tel qu'amendé est adopté.

Le Président (M. Saintonge): Et l'article 3, tel qu'amendé, est adopté. M. le ministre.

M. Ryan: Est-ce que vous êtes à l'article 18, là?

Le Président (M. Saintonge): Un instant! Je vais arriver avec ça immédiatement.

M. Ryan: Nous avions un amendement à proposer. Nous avions déposé un amendement au tout début de la session.

Le Président (M. Saintonge): Oui. L'article 12 a été suspendu.

M. Ryan: D'accord?

Le Président (M. Saintonge): Est-ce que l'article 12 est adopté?

M. Ryan: Sur division.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division. Puisqu'il est 22 h 23, je vais devoir maintenant...

M. Chevrette: J'ai une suggestion à faire au ministre.

Le Président (M. Saintonge): Oui.

M. Chevrette: Étant donné qu'il y a l'amendement de l'article 18 à considérer et qu'on a un amendement à déposer sur l'annexe, on peut, de consentement des deux parties, prolonger de quelques minutes et faire un travail qui soit le plus sérieux possible. Est-ce que le ministre accepterait?

Le Président (M. Saintonge): Là-dessus, M. le député de Joliette, j'ai un ordre de l'Assemblée...

M. Chevrette: Oui, oui, mais je vous parle d'un consentement des deux partis.

Le Président (M. Saintonge): ...auquel je ne peux déroger ici en commission. Je pense qu'il nous reste dix minutes et nous pourrons arriver à considérer les amendements. Je dois considérer chacun des amendements qui sont déposés et je vais les appeler et les considérer. D'accord?

M. Chevrette: Oui, mais il nous reste sept minutes. Si on peut en profiter on va les prendre.

Le Président (M. Saintonge): J'appelle l'article 18. L'ordre de l'Assemblée m'est venu de l'Assemblée. En commission je ne peux pas déroger à un ordre de l'Assemblée. D'accord?

M. Chevrette: Même si les deux leaders vous disaient qu'ils sont d'accord?

Amendements proposés

Le Président (M. Saintonge): Même si vous consentiez, je ne le pourrais pas parce que la commission plénière n'a pas juridiction sur un ordre de l'Assemblée. C'est l'Assemblée elle-même qui pourrait contrevenir à son ordre et le changer. Donc, à l'article 18 tel que présenté, j'ai un amendement proposé par M. le ministre de l'Éducation qui a déjà été déposé et qui se lit comme suit: "L'article 18 du projet de loi est modifié par le remplacement des cinq dernières lignes du troisième alinéa par les suivantes: "s'il s'est conformé à l'article 2 ou si, sans être partie à une action concertée, il en a été empêché malgré qu'il ait pris tous les moyens raisonnables pour s'y conformer".

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): L'amendement est adopté sur division.

M. Chevrette: Vous en avez un autre? M. Gendron: II va l'appeler.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres amendements à l'article 18?

M. Gendron: II y a le nôtre que vous allez appeler.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Très bien. Donc, j'appelle l'amendement que vous me demandez d'appeler. L'article 18, l'amendement. J'ai deux amendements proposés par l'Opposition. Un amendement qui se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié par l'ajout, à la fin du troisième alinéa de l'article 18, des mots "le dépôt

d'un grief par un salarié suspend toute perte de pointage de priorité jusqu'à ce que le grief ait fait l'objet d'une décision finale". Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

M. Ryan: M. le Président, j'aimerais vous en donner lecture de nouveau. Je m'excuse, j'ai eu un moment de fuite.

Le Président (M. Saintonge): Très bien.

M. Chevrette: Vous n'êtes pas chanceux cette semaine: les fuites du budget...

Le Président (M. Saintonge): Le projet de loi 48 est modifié... C'est un amendement proposé par l'Opposition, qui se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié par l'ajout, à la fin du troisième alinéa de l'article 18, des mots "le dépôt d'un grief par un salarié suspend toute perte de pointage de priorité jusqu'à ce que le grief ait fait l'objet d'une décision finale".

M. Ryan: C'est un vieux débat, M. le Président, que nous sommes prêts à ouvrir jusqu'à la fin de la présente session, mais sur lequel nous ne pouvons pas céder.

Le Président (M. Saintonge): Donc, je comprends que cet amendement est rejeté.

M. Ryan: Nous sommes obligés de le rejeter. C'est un vieux débat qu'on ne résoudra pas ce soir.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. Il y a un autre amendement qui est proposé par l'Opposition: Le projet de loi 48 est modifié par l'ajout à la fin du dernier alinéa de l'article 18 des mots "la décision d'infirmer une décision prise par l'employeur doit rétablir le salarié dans tous ses droits comme s'il n'avait jamais fait l'objet d'une telle décision".

Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Ryan: Pardon?

Le Président (M. Saintonge): Sans discussion. Je dois...

M. Ryan: L'amendement est refusé.

Le Président (M. Saintonge): Refusé. Donc, l'amendement est rejeté. Est-ce que l'article 18 est adopté?

M. Ryan: II est adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division.

M. Ryan: Tel qu'amendé.

Le Président (M. Saintonge): Oui, c'est vrai. Adopté tel qu'amendé.

Une voix: Sur division, mais tel qu'amendé.

Dispositions diverses

Le Président (M. Saintonge): Maintenant, nous passons à la section V, Dispositions diverses. L'article 19. Est-ce que l'article 19 est adopté?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division.

J'appelle maintenant l'article 20. Est-ce que l'article 20 est adopté?

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division.

J'appelle maintenant l'article 21. Est-ce que l'article 21 est adopté? Adopté sur division.

Annexe

Nous allons maintenant appeler et regarder l'annexe. A l'annexe j'ai reçu aussi de l'Opposition un, deux, trois, quatre amendements qui se lisent comme suit...

M. Chevrette: Est-ce qu'on pourrait expliquer 30 secondes à M. le ministre quel est l'esprit des amendements? Il va le comprendre très rapidement.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Je vous donne une minute.

M. Chevrette: Bon. M. le ministre, c'est purement et simplement pour rendre conforme ce qu'on disait durant nos exposés, à savoir qu'ils ont eu une offre supérieure aux tarifs qui sont dans la présente loi. On a ajusté les montants en fonction de la meilleure offre sachant qu'il y a du rattrapage à faire, sachant que la partie patronale l'a suggéré en négociation, sachant que l'objectif du projet de loi, c'est la reprise des cours et non pas la pénalité des salariés, sachant que c'est une université qui est quand même, au dire de tout le monde, de tous les connaisseurs, sous-financée. On pense que ce ne serait pas l'occasion, au moment d'une législation spéciale, de leur enlever au moins la meilleure offre salariale qu'ils ont eue sur la table. Cela m'apparaîtrait quelque chose de punitif et d'outrancier. Je pense que vous pourriez vous rendre facilement aux quatre amendements, quitte à vérifier les quantums pour voir s'ils suivent bien la dernière offre patronale.

Le Président (M. Saintonge): J'ai trois amendements, M. le député.

M. Chevrette: C'est trois, oui. C'est cela.

Le Président (M. Saintonge): Donc, à ce moment-ci, je vais appeler chacun des amendements. Le premier amendement: Le projet de loi 48 est modifié par le remplacement, au paragraphe b de l'article 1 de l'annexe, des chiffres 3158,64 $ par les chiffres 3307,36 $. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Ryan: Rejeté.

Le Président (M. Saintonge): Rejeté. Un deuxième amendement présenté par l'Opposition se lit comme suit: Le projet de loi 48 est modifié par le remplacement, au paragraphe c de l'article 1 de l'annexe, des chiffres 3294,73 $ par les chiffres 3500 $. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Ryan: Rejeté. (22 h 30)

Le Président (M. Saintonge): Rejeté. Et un troisième amendement, toujours à l'annexe, proposé par l'Opposition: "Le projet de loi 48 est modifié par la suppression de l'article 4 de l'annexe." Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Ryan: Rejeté.

Le Président (M. Saintonge): Rejeté. L'amendement est rejeté. Est-ce que l'annexe est adoptée?

M. Ryan: Oui.

M. Chevrette: Sur division.

Le Président (M. Saintonge): Adopté...

M. Chevrette: Et même j'aurais le goût d'inscrire ma dissidence là-dessus parce que cela a l'air vengeur. Je l'inscris.

Le Président (M. Saintonge): Adopté sur division.

M. Chevrette: Je ne sais pas ce qu'un gouvernement peut gagner à faire cela.

M. Ryan: II n'y a rien qui les empêche de convenir entre eux d'un ajustement.

M. Chevrette: Voyons. L'université se déplace pour venir vous dire qu'ils ne veulent pas que vous l'acceptiez. Je ne sais pas en quoi ils peuvent vous dire oui tout de suite. Ils ont des représentants. Vous avez dit que vous avez des représentants.

Le Président (M. Saintonge): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Chevrette: II reste trois minutes, M. le Président.

Le Président (M. Saintonge): Les discussions sont terminées sur le projet de loi, je regrette.

M. Ryan: Je voudrais que vous sachiez que, dans le texte de la loi, c'est le gouvernement qui a pris sa décision et non pas l'Université du Québec à Montréal.

Le Président (M. Saintonge): Un instant. Un instant. S'il vous plaît. Un instant.

M. Chevrette: Non, mais le gouvernement avait le droit de modifier le texte.

Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous plaît. Les débats en cette commission sont maintenant terminés. Je dois faire adopter certains autres éléments. Je vous rappelle que nous allons revenir quand même a l'étape de l'adoption du projet de loi et que chacun des partis aura un droit de parole. Est-ce que tous les intitulés du projet de loi sont adoptés? Adopté. Est-ce que tous les intitulés sont adoptés?

M. Chevrette: Oui, oui.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté. Est-ce que l'ensemble du projet de loi tel qu'amendé est adopté?

Des voix: Sur division.

M. Saintonge (président de la commission plénière): Adopté sur division. Ceci met donc fin aux travaux de la commission plénière exactement dans le temps qui nous avait été alloué par l'Assemblée nationale. Afin de faire rapport à la présidence, je demanderais à toutes les personnes qui accompagnaient les parlementaires, qui ne sont pas membres de cette Assemblée, de bien vouloir quitter les lieux.

À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez prendre place. Je demanderais aux membres de l'Assemblée de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

Donc, je demanderais à l'ensemble des députés de bien vouloir prendre leur siège, s'il vous plaît.

Mme la Présidente, j'ai l'honneur de vous faire rapport que la commission plénière a procédé à l'étude détaillée du projet de loi

48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal et que ce projet de loi a été adopté avec amendement.

La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté tel qu'amendé?

M. Chevrette: Sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division.

À ce stade-ci de nos travaux, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose l'adoption du projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal et je suis prête à reconnaître le premier intervenant.

M. Chevrette: Est-ce qu'on peut suspendre une minute?

La Vice-Présidente: Compte tenu de l'accord, nous allons donc suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 37)

(Reprise à 22 h 41)

Adoption

La Vice-Présidente: Je vous demanderais de reprendre vos sièges. Nous allons reprendre le débat concernant l'adoption du projet de loi 48. Je vais céder la parole au ministre de l'Éducation et ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Mme la Présidente, nous voici rendus au terme de ce débat que nous avons dû tenir aujourd'hui sur la grève des chargés de cours à l'UQAM. Après sept semaines de grève, il a fallu en venir à la conclusion que si l'Assemblée nationale n'agissait pas tout de suite, la session d'hiver était irrémédiablement perdue pour tous les étudiants de l'UQAM. Elle sera perdue ou compromise pour un certain nombre d'entre eux, nonobstant la loi que nous avons adoptée ce soir. Mais nous avons de très bonnes raisons de croire que, pour la grande majorité des étudiants inscrits à cette session, la reprise des activités d'enseignement et de travail académique à l'UQAM dès le lundi matin, 11 mai prochain, permettra à la plupart d'entre eux de récupérer le temps perdu et de faire suffisamment de travail au cours des deux semaines qui suivront pour que leur session soit validée, c'est-à-dire considérée comme régulière, comme ayant eu régulièrement lieu à l'Université du Québec à Montréal.

Je pense que pour les étudiants - nous agissons d'abord pour eux ce soir, je pense que nous en sommes tous très conscients - la décision qu'a prise l'Assemblée nationale d'adopter ce projet de loi est un immense soulagement. Elle sera accueillie avec beaucoup de satisfaction par tous ceux qui avaient saisi le gouvernement de leur désir de voir l'Assemblée nationale passer à l'action.

La loi que nous avons adoptée est une loi dure, comme le sont toutes les lois d'exception en matière de relation du travail, mais comparée à d'autres lois que nous avons connues sous le gouvernement précédent, la loi 48 reste une loi modérée. C'est une loi dont on a vu à circonscrire les effets de manière qu'ils ne s'adressent qu'aux événements ou qu'aux facteurs qui ont été directement reliés à l'arrêt de travail ou à la possibilité d'une répétition de l'arrêt de travail. Au cours des travaux que nous avons faits en commission plénière, l'Opposition -dont je regrette qu'elle n'ait pas approuvé le projet de loi avec le gouvernement parce que je suis convaincu que, foncièrement, elle l'approuve - l'Opposition, dis-je, a manifesté un esprit constructif. Je pense que nous avons pu examiner le projet de loi article par article dans un esprit de collaboration. Nous avons été très heureux, du côté gouvernemental,. d'accepter les amendements qu'avait proposés l'Opposition afin de bonifier le projet de loi. L'un de ces amendements a une portée significative au point de vue des libertés fondamentales. Nous avions inscrit dans le projet de loi une disposition qui prévoyait que l'association de salariés doit prendre les moyens appropriés pour ramener ses membres au travail. Comme si on amenait des gens au travail par la main, de force, ou en les réunissant dans une charrette en disant: On s'en va tous à notre destination.

On nous a rappelé ces implications possibles de la formulation que nous avions choisie, et nous avons été heureux, après discussion, de nous rallier à l'amendement de l'Opposition suivant lequel le devoir de l'association de salariés consistera d'abord à informer ses membres des obligations résultant pour eux de l'adoption du projet de loi. Je pense que la première démarche de tout comportement civilisé, c'est l'information. Le projet de loi parle clairement du devoir d'information qui incombe à l'association concernée; je pense que nous l'acceptons tous facilement. Même sur ce point, l'Opposition, qui s'efforçait de voter contre d'autres dispositions tout aussi justifiées, a été obligée de voter avec nous, et je l'en félicite.

Vers la fin du débat, l'Opposition a présenté des amendements que nous avons malheureusement dû refuser et au sujet desquels je dois quelques explications à

l'Assemblée nationale et aux travailleurs concernés. Il s'agit de modifications qui visaient à apporter des changements à l'annexe du texte de loi traitant de la rémunération des chargés de cours. L'Opposition s'est étonnée de ce que le gouvernement, dans le projet de loi, ait retenu comme base de rémunération des normes empruntées directement à la politique salariale du gouvernement. Nous avions l'obligation de le faire. Du nous avons une politique salariale, ou nous n'en avons point. Je l'ai déjà dit, dans la mesure où j'avais à me prononcer sur ces choses. Quand nous avons soumis à l'Assemblée nationale, il y a déjà plus d'un an, un projet de loi demandant le retour au travail des conducteurs d'autobus de la compagnie Autobus Terrebonne à la commission scolaire des Manoirs et à la commission scolaire Les Écores, nous avions inscrit dans le projet de loi un pourcentage d'augmentation de salaire moins élevé que la dernière offre patronale, et nous avions fondé notre décision sur le fait que si on oblige le gouvernement à intervenir, il doit intervenir en fonction de ses critères et de ses politiques à lui, et non pas des critères ou des points de référence particuliers de l'employeur.

C'est le fondement de la décision que nous avons prise. Nous avons dû, à regret, refuser les amendements que proposait l'Opposition, et je voudrais ajouter une précision qui me paraît significative. En vertu de la loi 48, la convention déjà existante, qui était expirée depuis février 1986, continue d'être en vigueur selon les dispositions de notre Code du travail tant qu'elle n'a pas été remplacée par une autre. Cette convention collective continue de s'appliquer pour la période devant embrasser l'année 1987 et l'année 1988. Par conséquent, toutes les dispositions que contenait la convention collective déjà existante, sauf celles qui ont été expressément modifiées par la loi 48, sont maintenues. Il y a une de ces dispositions qui relève de notre législation générale du travail et suivant laquelle les deux parties à une convention sont libres d'apporter des modifications à leur convention.

Si un employeur a un contrat avec son syndicat de travailleurs, même si le contrat vaut jusqu'au 31 décembre 1988, à supposer que les deux parties décident d'y apporter des modifications, elles sont libres de le faire. Dans cet esprit, je dis à mes collègues de l'Opposition et à mes collègues du côté ministériel que si la partie syndicale et la partie patronale, c'est-à-dire l'Université du Québec à Montréal et son syndicat des chargés de cours, décidaient de convenir, d'un commun accord, de modifier une partie de la loi 48 pour lui substituer la dernière offre qui avait été faite par l'Université du

Québec à Montréal, il n'y a absolument rien qui empêche les deux parties de procéder ainsi. C'est la responsabilité de l'Université du Québec à Montréal; c'est elle qui est l'employeur dans ce dossier. Nous, nous agissons comme gouvernement et nous ne la conduisons pas par la main jusque dans les détails. (22 h 50)

Personnellement, je pense qu'il serait fort intéressant pour l'avenir de la convention et pour les mois que ces parties devront vivre ensemble, surtout pour les étudiants, jeunes et adultes, qui devront bénéficier de l'activité des chargés de cours, que l'on en vienne sur ce point à une entente dans les meilleurs délais. Nous ne pouvions pas décider unilatéralement de faire une chose comme celle-là, d'abord par respect pour l'employeur et, deuxièmement, parce que le syndicat avait formellement rejeté, encore aujourd'hui, cette proposition en disant qu'il aimait mieux celle qui serait choisie par le gouvernement. Il appartiendra par conséquent aux parties de rechercher à ce sujet, dans la mesure où elles le désireront - et je souhaite que cette mesure soit réelle et grande - les ajustements qui pourraient être souhaitables à ce point dont nous venons de discuter de même qu'à d'autres articles de la convention.

Je voudrais rappeler en terminant ce que j'ai dit à quelques reprises au cours de la journée, à savoir que nous sommes très conscients du côté gouvernemental des problèmes que pose à notre conscience collective la condition du chargé de cours à l'Université du Québec à Montréal et dans les autres universités du Québec, quoique à des degrés divers et sous des formes qui varient d'un établissement à l'autre. Nous sommes conscients des problèmes qui existent de ce côté. Nous entendons, au cours des mois à venir, pousser à fond l'étude de toute la question reliée au statut et aux espoirs légitimes, aux aspirations fondées que peuvent nourrir les chargés de cours.

Il n'est pas normal qu'on ait besoin de chargés de cours dans une proportion aussi élevée qu'actuellement et qu'à bien des points de vue ils soient comme des parias à l'université, qu'ils soient des personnes rejetées, qui n'ont pas de lieu de travail. Ils ne sont pas invités aux commissions pédagogiques, ils ne sont pas invités aux lieux de décisions où on délibère de choses qui les intéressent au plus haut point. Je ne fais de reproche à aucune université en disant ces choses, je fais des constatations qui ont déjà été portées à l'attention de la commission parlementaire de l'éducation l'automne dernier. Ce sont des choses que nous examinerons en profondeur, à tête reposée, avec un dossier complet d'informations à notre portée. Je pense qu'après cet examen, nous serons en mesure,

s'il y a lieu et moyennant démonstration et identification claire des vrais problèmes, de procéder aux ajustements qui pourront s'imposer.

Je termine en disant un mot pour l'Université du Québec à Montréal. Nous avons, comme je l'ai dit pendant le débat, un attachement particulier pour l'Université du Québec et toutes ses constituantes. Parmi celles-ci, la plus importante est l'Université du Québec à Montréal. Cette université a des titres de noblesse qui nous sont chers. Elle s'est distinguée en particulier par son désir de servir le peuple, de servir les travailleurs, les adultes qui sont engagés dans la vie active mais qui veulent rechercher un complément de culture ou de formation. Dans la mesure où l'Université du Québec à Montréal veut poursuivre cette vocation, je pense qu'elle a le droit de s'attendre à la compréhension et à l'appui des pouvoirs publics et, en particulier, de l'Assemblée nationale et du gouvernement. Je veux assurer à la fois ses dirigeants, ses professeurs, ses chargés de cours, son personnel, ses étudiants et ses étudiantes de la sympathie active, de la compréhension du gouvernement pour l'accomplissement de l'oeuvre très importante qui a été confiée à l'Université du Québec.

Je remercie tous les parlementaires qui ont suivi assidûment nos débats, même pendant l'heure du souper, au cours de laquelle nous avions décidé de siéger sans interruption. Je remercie nos collègues de l'Opposition de l'apport constructif qu'ils ont fourni à nos débats. J'espère qu'ensemble, nous collaborerons à la réalisation des objectifs qu'a voulu poursuivre le législateur en adoptant cette loi. Merci, Mme la Présidente.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.

M. le député de Joliette et leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente. C'est le député d'Abitibi-Ouest qui, immédiatement après sa communication avec le lieutenant-gouverneur en conseil, prendra la parole comme critique de l'Opposition. Cela pourrait prendre une minute. Le ministre de l'Éducation me fait signe qu'il a une intervention à ajouter. Donc, cela peut donner le temps à notre collègue de revenir.

La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: Mme la Présidente, je remercie le leader de l'Opposition de son obligeance. J'avais fait deux oublis dont je voudrais m'excuser, mais surtout pour les réparer constructivement. Je voudrais tout d'abord remercier le leader du gouvernement et le leader de l'Opposition de l'excellente collaboration qu'ils nous ont apportée dans l'examen de ce projet de loi. Je pense que c'est grâce à l'obligeance du leader du gouvernement que nous avons pu procéder avec diligence et dans un climat de collaboration au débat d'aujourd'hui.

Je voudrais remercier aussi de manière spéciale le ministre du Travail pour la collaboration qu'il m'a accordée pendant tout le cours de ce conflit. Nous avons fonctionné en étroite symbiose, dans un esprit de consultation et de concertation continue, et je voudrais le remercier d'avoir été avec nous pendant tous nos débats d'aujourd'hui et de ce soir. Je l'ai vivement apprécié.

Je voudrais également adresser des remerciements aux personnes qui m'accompagnaient pour l'étude en commission plénière, à M. Brière que nous taquinons, qui a servi sous un gouvernement et sous l'autre, sous une férule également lourde, sous un régime comme sous l'autre apparemment, mais toujours avec un sourire, une bonhomie, une serviabilité exemplaires. Nous avions également la présence de M. Richard Drouin, un négociateur bien connu du gouvernement qui nous a accompagnés de ses sages conseils et qui avait été retenu par l'Université du Québec à Montréal comme conseiller spécial dans cette négociation.

J'avais également mes collaborateurs du ministère, en particulier M. Claude Benjamin, le sous-ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, et mon directeur de cabinet, M. André Fortier, que j'oublie toujours de remercier, mais à qui j'ai pensé ce soir dans un élan de spontanéité dont je suis très fier.

Je pense que ces personnes-là forment une équipe formidable quand arrivent des problèmes comme celui auquel nous avons fait face. Je voudrais rassurer l'Opposition en lui disant que nous avons une équipe qui suit les choses de très très près, qui agit beaucoup, mais qui essaie de ne jamais agir tant que son heure n'est pas arrivée. Merci.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Éducation.

M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Mme la Présidente, je vais vous demander une suspension d'une minute. Vous comprendrez. Le leader du gouvernement est au courant de la communication qu'a présentement le député d'Abitibi-Ouest. Ce ne sera pas nécessaire, Mme la Présidente, il vient de terminer. Donc, au moment où je me rassois, il pourra prendre la parole en réplique.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader de l'Opposition.

M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. 3e ne veux pas être très long en troisième lecture. Je veux tout simplement signaler qu'il s'agissait bel et bien d'une loi spéciale qui ordonne la reprise de l'enseignement par les chargés de cours dans des conditions où nous, nous sommes loin d'avoir la conviction qu'effectivement les premiers concernés pourront bénéficier de cet enseignement de qualité auquel ils auraient eu droit. Je veux tout simplement prendre quelques minutes pour expliquer pourquoi nous étions en désaccord avec toutes les phases à travers lesquelles notre régime parlementaire nous demande de passer.

Fondamentalement, c'est une loi, même si elle a un caractère spécial, qui ne règle absolument rien au fond du problème. Le fond du problème a été soulevé, a été souligné à plusieurs reprises. Il s'agit d'un problème de sous-financement pour lequel le gouvernement a manqué à ses responsabilités. Même si le ministre du Travail ou le ministre de l'Éducation nous ont dit qu'à chacune des étapes ils se parlaient et mettaient toutes les instances pour faciliter les choses, il n'en demeure pas moins que le gouvernement n'a pas assumé sa responsabilité de permettre à l'Université du Québec à Montréal de pouvoir prendre la pleine et entière responsabilité d'une libre négociation consentie entre les parties, en étant capable elle-même de prendre une décision quant au modèle à instaurer dans le cadre d'une nouvelle formule de rémunération pour des gens qu'on appelle des chargés de cours, qui offrent une prestation éducative importante, nécessaire, dans le régime d'aujourd'hui. (23 heures)

Également, une raison pour laquelle on est contre, c'est que cela gèle l'embauche de nouveaux professeurs avec les impacts sur la qualité de l'enseignement. Le ministre non plus, à ces égards, n'a apporté aucune solution à la suite de la commission parlementaire qui, elle, n'a pas eu Heu lors du début des négociations. La commission parlementaire sur le financement universitaire a eu lieu depuis fort longtemps et, en conséquence, si le ministre de l'Education et le gouvernement avaient pris leurs responsabilités, nous n'aurions pas, ce soir à 23 heures, à sanctionner la troisième lecture d'un projet de loi.

Nous sommes également contre, et je l'ai mentionné, parce qu'il s'agit, encore une fois, d'une ingérence du gouvernement dans les affaires du réseau UQ, une ingérence qu'on se doit de dénoncer. Ce n'est pas la première. Ce fut le cas avec le comité Desprès, ça été le cas récemment avec le refus de la sanction quant à la nomination de M. Lallier comme directeur de l'INRS. Le ministre de l'Éducation ne s'est pas mêlé de ses affaires; il est intervenu, il s'est ingéré dans le processus, et c'est une première loi spéciale pour forcer le retour au travail des employés du secteur universitaire. On ne pense pas qu'il était opportun d'intervenir dans ce secteur-là pour le moment.

Les étudiants subissent, ont subi et subiront des sévices importants, même si on a travaillé sérieusement et c'est ce qui est déplorable. Parce que je savais d'avance que dans la réplique du ministre de l'Éducation, encore là, on se serait félicité, on se serait flatté en disant qu'on a travaillé sérieusement. Nous pensons que c'est toujours ce qu'on fait. On travaille sérieusement parce qu'on a un travail à faire et, effectivement, on a travaillé très sérieusement pour préparer rapidement 16 ou 17 amendements. Personne qui aurait pu être témoin de cette commission plénière, Mme la Présidente, n'aurait pu constater qu'à peu près sur chacun des amendements qu'on a apportés on a eu un effet de surprise de la part du ministre de l'Éducation, un effet de bon agrément, si vous me permettez l'expression, en disant: Vous avez là quelque chose d'important, vous avez là quelque chose de sérieux, vous avez des amendements valables. À notre grand étonnement, on se rendait compte que le ministre de l'Éducation, pour la plupart des articles du projet de loi spécial où on a plaidé l'urgence, pour lesquels on a arrêté toutes les procédures, était en situation de déséquilibre - c'est très rare qu'on voit ça chez le ministre de l'Éducation - par rapport à la portée réelle des articles de son propre projet de loi spécial. C'est nous qui avons dû assumer la responsabilité d'apporter des amendements et de montrer les inconvénients majeurs que son projet de loi pouvait avoir.

Ce qu'il y a de plus grave, Mme la Présidente, c'est qu'à long terme également, à plus long terme, on va avoir adopté une loi spéciale et on n'aura pas réglé grand-chose pour les étudiants, on n'aura pas innové pour une nouvelle formule de rémunération pour les chargés de cours et, pis encore, au niveau de la qualité éducative, en septembre 1987, ces étudiants seront dans les mêmes conditions avec des chargés de cours qui n'ont pas l'encadrement, qui n'ont pas ce que j'appellerais l'environnement professionnel pour s'assurer de donner un enseignement rayonnant de pleine qualité qui contribuerait davantage à cette qualité éducative qu'on devrait tous, les uns et les autres, avoir comme objectif.

Ce qu'il y a de plus grave, c'est que le ministre de l'Éducation qui, en règle générale, n'a pas cet esprit partisan - cela

ne cause pas de problème - avait cet esprit revanchard - c'est rare qu'on voit ça chez le ministre de l'Éducation - chose qu'à tout le moins, on pensait que dans une loi spéciale, la décence, la normalité, les convenances commendaient que nous allions obtenir, comme parlementaires, dans une loi spéciale, au minimum, ce qui avait été déposé à la table de négociation. Non, ce n'est même pas ça. Au nom d'un faux prétexte, au nom de faux principes, au nom d'une politique soi-disant salariale applicable à tout le monde, comme on dit en latin "across the board", sans nuance, alors qu'on sait très bien...

Une voix: Comme on dit en anglais.

M. Gendron: Je le sais très bien! Alors qu'on sait très bien que constamment un gouvernement qui a un peu de sensibilité... Et un des premiers réflexes en politique, il me semble, c'est d'avoir cette sensibilité réactionnelle à des besoins particuliers, à des besoins spécifiques, parce que la société et les individus ne sont pas tous faits de la même façon, ils ne doivent pas tous passer dans le même moule, quels que soient les motifs.

Il me semble que si on avait eu un peu de convenance, on aurait au moins permis que ces gens-là puissent toucher ce qu'on appelle le maximum de la dernière offre, pas quelque chose qu'on a inventé, pas quelque chose qu'on veut prendre et une bonification dans une loi spéciale.

Je suis d'accord avec la philosophie du ministre du Travail qu'une loi spéciale ne doit pas être une loi qui vient bonifier les choses par surcroît, sous prétexte qu'on va prendre nos responsabilités, mais tellement à regret, tellement par dépit qu'on va y ajouter une somme quelconque. Ce n'est pas cela qu'on demande et ce n'est pas cela qui serait logique. La logique serait au moins de permettre que, dans les annexes, ces gens puissent toucher le dernier dépôt qui a été offert à la table de négociation. Ce n'est pas inventé par nous. À la table de négociation. Voilà pourquoi nous serons contre le projet de loi.

Une autre raison pour laquelle je pense qu'il y a lieu d'être en désaccord total sur ce projet de loi, c'est que le ministre a tenté de justifier les salaires décrétés en disant que cela se comparait avantageusement à ce qu'ont obtenu les chargés de cours de l'Université de Montréal. Il l'a même cité et il aime toujours cela, nous prendre un peu comme si nous, c'était la première fois qu'on parle, la première fois qu'on touche à quelque chose, on ne connaît rien. Il a demandé: Le député d'Abitibi-Ouest sait-il que les chargés de cours de l'Université de Montréal - pas l'Université du Québec à Montréal - ont signé une convention? Bien oui, je le sais. Je le sais, je l'ai. J'ai la copie. Je l'avais avant qu'il me demande d'aller la chercher. On l'a lue, on l'a vue. Est-ce que la situation des chargés de cours de l'Université du Québec à Montréal est exactement la même que celle de l'Université de Montréal? Pas du tout, il l'a dit lui-même, dans le per capita de financement obtenu par l'Université du Québec à Montréal. Lui-même a reconnu qu'il y avait un per capita inférieur à la moyenne des autres universités par étudiant en cours.

Ici, il faut répondre que, dans le cas des professeurs de l'Université de Montréal -pas de l'Université du Québec à Montréal, l'Université de Montréal - il s'agissait d'une première convention collective, M. le ministre de l'Éducation. Je sais que cela ne vous dérange pas, mais je veux juste dire que, pour des gens qui ont une habitude des relations du travail, il y a une mosus de différence entre la première convention collective et la quatrième. J'en sais quelque chose. J'ai été syndiqué un bon bout de temps, je me rappelle ma première, à 4700 $ par année. C'est comme cela que j'ai commencé à enseigner. C'était ma première convention collective. On croyait que ce n'était pas assez. On a fait notre "job", on a fait les revendications qu'il était normal de faire puis à la deuxième c'était meilleur, et à la troisième c'était meilleur et c'est normal. Il n'y a personne dans la société qui n'essaie pas de bonifier et d'améliorer ses conditions de travail.

Pour ces gens, il faut être au courant qu'il s'agissait d'une première convention obtenue de haute lutte, après huit ans de batailles juridiques avec l'université, alors que pour ce qui est des chargés de cours de l'Université du Québec à Montréal, ils en sont à leur quatrième convention collective. Or, il me semble que tout le monde comprend que quatre, cela ne peut pas être comme un. C'est de même partout dans la société. Il me semble que cela aurait dû être normal pour les chargés de cours de l'Université de Montréal.

Il s'agissait en quelque sorte - et le ministre de l'Éducation l'a reconnu, le ministre du Travail l'a reconnu - il s'agissait d'un groupe organisé, il s'agissait d'un groupe qui effectivement voulait, avec raison, faire reconnaître une fois pour toutes le principe que l'offre éducative de ces gens, la prestation éducative de ces gens devrait être prise au mérite et considérée comme telle.

Je reconnais qu'il ne faut pas y aller globalement: il y a des situations que le ministre a dit qu'il voulait analyser parce qu'il y a des chargés de cours qui ont une autre responsabilité et un autre salaire à l'extérieur. Donc, il ne faut pas y aller sans nuance. Je sais cela. Mais il y a une différence entre ce que je réclame et ce que

l'Opposition réclamait et ce qui arrive à ces gens. Ces gens vont se retrouver lundi matin à huit heures dans les classes. Ils n'auront même pas été capables d'obtenir la dernière offre déposée par leur réel employeur. Leur réel employeur, c'est l'Université du Québec à Montréal, ce n'est pas le ministre de l'Éducation et le gouvernement du Québec directement. C'est une ingérence, c'est une intrusion dans le processus librement consenti de négociation, et ces gens voudraient dire: Écoutez, soyez beaux et gentils, parce qu'on a regardé une couple de vos amendements; donc, on ne voit pas pourquoi vous faites un plat avec cela.

Conclusion, Mme la Présidente, en ce qui me concerne et en ce qui concerne l'Opposition, cela demeure une loi spéciale. C'est une loi spéciale qui ne corrige absolument rien sur le fond des choses et ce dossier aurait mérité d'être traité sur le fond des choses, et non sur l'objectif d'une politique salariale uniforme pour le gouvernement quand on sait qu'il restait un seul point majeur - je reconnais qu'il était majeur - à négocier. Même si ces gens étaient arrivés avec un seul point de désaccord, ils reçoivent, par la tête ou autrement, une loi spéciale. En conséquence, nous pensons que cette loi spéciale était inopportune, inappropriée, surtout quand le gouvernement n'a pas voulu tenir compte des amendements qui auraient permis de restaurer un certain équilibre pour ces gens. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Il n'y a pas d'autre intervention de part et d'autre. Le débat étant clos, est-ce que le projet de loi 48, Loi sur la reprise de certains services de l'Université du Québec à Montréal, est adopté?

Des voix: Adopté sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la Présidente, avant que nous ajournions nos travaux, je désire simplement remercier l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale pour le travail accompli. Je vous demanderais d'ajourner nos travaux au mardi 12 mai, 14 heures.

La Vice-Présidente: Nous allons donc ajourner nos travaux au mardi 12 mai, 14 heures.

(Fin de la séance à 23 h 11)

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