Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures quinze minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un
moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Présence du consul général de la
République de Corée
Avant de procéder aux affaires courantes, j'ai le plaisir de
souligner la présence dans les galeries du consul général
de la République de Corée, M. Won Chan Rah.
Aux affaires courantes, déclarations ministérielles.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
Le gouvernement fixe les prix de l'essence dans les
régions périphériques
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, au cours des dernières
semaines, j'ai fait connaître à maintes reprises, publiquement et
en cette Assemblée nationale, ma grande préoccupation face
à l'évolution des prix de l'essence dans les régions
périphériques du Québec à la suite de l'abolition
de la surtaxe sur les carburants annoncée par le ministre des Finances,
en décembre 1985. Vous vous souviendrez sans doute que le ministre des
Finances avait alors décrété l'abolition de la surtaxe sur
les carburants dans les zones dites périphériques de la
Gaspésie, du SaguenayLac-Saint-Jean, de l'Abitibi et de la
Côte-Nord. Cette mesure visait à venir en aide aux consommateurs
de ces régions.
De façon générale, la réduction de 0,045 $
le litre accordée a été transmise aux consommateurs dans
les jours qui ont suivi l'annonce. Cependant, à partir de juin 1986, les
consommateurs ont commencé à perdre peu à peu cet avantage
au profit des pétrolières et, à un degré moindre,
des détaillants d'essence.
Informé de cette situation, je suis personnellement intervenu
auprès des pétrolières dès octobre 1986. À
ce moment, ces dernières ont prétendu ne pas pouvoir agir,
certaines d'entre elles imputant la responsabilité de
l'établissement des prix à la pompe au détaillant. Une
étude détaillée sur la question des disparités des
prix de l'essence au Québec a alors été
réalisée au sein de mon ministère. Cette étude a
confirmé la réduction de l'avantage fiscal et a
révélé que les augmentations n'étaient pas
uniquement imputables au détaillant.
Devant ces faits, j'intervenais à nouveau auprès des
pétrolières le 15 mai dernier, les enjoignant de procéder
immédiatement au réajustement à la baisse des prix dans
les régions périphériques de façon que les
consommateurs de ces réqions puissent: bénéficier
pleinement de cette baisse de taxe. Au cours de la même période,
j'ai rencontré personnellement les présidents de plusieurs
pétrolières pour discuter de l'ensemble de la situation et bien
établir que j'envisageais divers moyens pour m'assurer que les
consommateurs visés bénéficient pleinement de la
réduction de taxe. Ces discussions ont eu lieu non seulement à
mon niveau mais au niveau du premier ministre.
Il ressort de ces échanges qu'aucune pétrolière ne
nie que les prix aient augmenté. Dans plusieurs cas, les dirigeants de
ces compagnies ont même admis que l'augmentation est aussi le fait des
pétrolières et non seulement des détaillants.
Ainsi, malgré mes interventions et celles du premier ministre, je
n'ai d'autre choix que de constater qu'aucune pétrolière n'a,
à ce jour, corrigé la situation.
M. le Président, je me suis engagé en cette
Assemblée à agir avec fermeté. J'aimerais maintenant vous
faire connaître les décisions arrêtées par le
gouvernement pour redonner dès maintenant le plein effet à la
mesure fiscale annoncée par le ministre des Finances.
Dans un premier temps, le gouvernement a décidé de
promulguer la Loi modifiant la Loi sur le commerce des produits
pétroliers sanctionnée le 3 juin 1976.
Dans un deuxième temps, j'annonce que le gouvernement se
prévaut des dispositions de cette loi qui l'autorise à
décréter le prix maximum des produits pétroliers
lorsqu'une telle mesure s'impose dans l'intérêt public.
J'annonce que le gouvernement fixe pour une période de 90 jours
des niveaux maximums de prix à la pompe pour les différents types
d'essence dans les régions périphériques visées par
la mesure du ministre des Finances.
Des voix: Bravol Rravol
M. Ciaccia: Cette mesure aura pour effet immédiat de
réduire les prix de l'essence dans ces régions. Le décret
qui fixe les prix maximums de l'essence par type et par région
périphérique prendra effet à sa date de publication
à La Gazette officielle du Québec du 17 juin et sera en
vigueur
jusqu'au 17 septembre prochain.
M. le Président, avec le consentement de l'Assemblée, je
voudrais déposer le tableau des prix qui sera publié à
La Gazette officielle de demain.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement de cette
Assemblée de déposer ce document? Document déposé.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Ces prix donnent plein effet à la
réduction de la taxe annoncée par le ministre des Finances et
visent à en faire bénéficier les consommateurs.
Je tiens à préciser ici que les prix fixés par le
décret sur les prix de détail sont les prix de détail
maximums à la pompe. Le décret n'établit pas les prix de
vente des pétrolières aux détaillants. Je m'attends
toutefois que cette baisse de prix soit répartie équitablement
entre les pétrolières et les détaillants. Je suivrai la
situation de près et je me réserve la possibilité
d'intervenir, si nécessaire.
Dans un troisième temps, j'annonce la tenue d'une commission
parlementaire dès le 9 septembre prochain. Cette commission sera
chargée d'identifier les meilleurs moyens d'assurer le respect des
objectifs des mesures d'aide aux régions
périphériques.
M. le Président, comme gouvernement responsable et bon
gestionnaire des fonds publics, nous avons le devoir de nous assurer que les
consommateurs profitent pleinement des mesures établies en leur faveur.
C'est pourquoi nous allons examiner la situation en commission parlementaire
avec les intervenants de façon à trouver la meilleure solution
possible. En attendant, nous agissons avec fermeté et nous
n'hésitons pas à utiliser le seul moyen qui, pour le moment, nous
donne les outils nous permettant d'atteindre les résultats
recherchés.
Le Président: Je remercie M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources. Maintenant, un critique officiel de
l'Opposition en matière d'énergie. M. le député de
Roberval.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Dans ce dossier,
l'Opposition a eu raison depuis le tout début. Nous avons toujours
affirmé et nous avions mis le ministre en garde, dès le
début, du danger de ce qui pouvait se passer au détriment des
consommateurs des régions périphériques. Nous avions
avisé le ministre qu'il se faisait au Québec un contrôle
des prix pétroliers par et pour les pétrolières du
Québec.
À cinq reprises au cours de l'année, nous avons
interrogé le ministre de l'Énergie et des Ressources. Nous
l'avons supplié de faire face à ses obligations de ministre...
M. Chevrette: Question de règlement. M. Gauthier: À
cinq reprises... Le Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Question de règlement, M. le leader
de l'Opposition.
M. Chevrette: Nous avons écouté très
sérieusement le ministre et le critique a droit au même respect en
cette Chambre. J'ose espérer qu'il ne sera plus interrompu pour le temps
qu'il lui reste.
Le Président: M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Je vous remercie, M. le Président. La
vérité fait toujours mal, mais à cinq reprises, je le
rappellerai...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gauthier: ...nous avons demandé au ministre, nous avons
supplié le ministre de faire face à ses responsabilités en
cette Chambre. Nous avons demandé une commission parlementaire au
ministre afin d'entendre les compagnies pétrolières par rapport
à leur comportement antisocial. La réponse du ministre a
été d'abord: Ce n'est pas vrai, l'argent n'est pas
récupéré par les pétrolières au
Québec. Maintenant, on sait qu'il était dans l'erreur. Ses
réponses, c'était: Je vérifie auprès des
pétrolières et il ne semble pas que le montant soit tout
récupéré par les pétrolières. Aujourd'hui,
on s'aperçoit qu'il était dans l'erreur.
Une autre de ses réponses: Je ne peux pas faire de commission
parlementaire, parce que les pétrolières ne se
présenteront peut-être pas en commission parlementaire.
Aujourd'hui, on sait qu'il était dans l'erreur. M. le Président,
le ministre nous disait qu'il ne pouvait pas intervenir dans un libre
marché, même si c'était pour défendre des milliers
de contribuables du Québec. Semble-t-il qu'il ne pouvait pas le faire.
Aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il était dans l'erreur à ce
moment-là aussi. C'est bien qu'enfin, on se décide à faire
quelque chose. C'est trop tard, cependant! Il faudra toujours que le ministre
permette aux consommateurs des régions de récupérer cet
argent qui leur a été enlevé par les compagnies
pétrolières.
Une voix: Trop peu, trop tard.
M. Gauthier: D'ailleurs, quel est le rapport de forces que se
donne le ministre par rapport aux compagnies pétrolières en
promulguant une loi de 1976? On y lit que l'amende maximale est de 25
000 $ et non pas par jour. L'amende maximale est de 25 000 $! J'espère
que les compagnies pétrolières respecteront les ordres du
ministre, suivront ses indications, parce que 25 000 $, quand il s'agit d'un
rapt de 30 000 000 $ auprès des contribuables du Québec, je
trouve que c'est bien peu comme moyen incitatif. Enfin, souhaitons, M. le
Président, que ça ne pose pas de problème dans la fixation
des prix.
J'aimerais encore continuer dans la même veine que ce qu'on a fait
depuis le début dans ce dossier, soit de faire des recommandations au
ministre. J'espère que cette fois-là, il va les écouter.
Il aurait probablement avantage à le faire. D'abord, j'espère
qu'il va non seulement remettre les produits pétroliers au prix
où ils devraient être dans les régions
périphériques, mais qu'il va aussi s'assurer que les
contribuables des régions récupèrent ces 30 000 000 $ qui
leur ont été pris. J'espère que les compagnies
pétrolières ne s'en tireront pas comme cela et que le prix
fixé tiendra compte de ces 30 000 000 $. Deuxièmement, M. le
Président, j'aimerais que le ministre s'assure que la répartition
- non pas seulement qu'il souhaite - entre les détaillants et les
pétrolières se fasse justement parce que nous craignons que
l'ensemble des détaillants au Québec soient coincés entre
un prix maximum qu'ils doivent respecter et des compagnies
pétrolières qui ne décideront peut-être pas de fixer
le prix au niveau où le ministre voudrait. Ce sera le détaillant
qui sera étranglé en quelque sorte entre le gouvernement d'une
part et les pétrolières d'autre part. Il faudrait que le ministre
s'assure que cette chose ne se produise pas au nom des milliers de
détaillants d'essence du Québec.
En commission parlementaire le ministre a annoncé - je vois que
le ministre des Transports se permet de faire des commentaires. Il aurait
dû s'en occuper quand c'était le temps. Ce n'est plus le temps ce
matin, M. le ministre des Transports.
Le Président: Allez, M. le député de
Roberval. Allez, M. le député de Roberval. M. le ministre des
Transports sur une question de règlement.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, M. le Président,
M. le député de Roberval m'a impliqué. Ce que je veux lui
dire...
Le Président: M. le ministre des Transports, sur une
question de règlement.
M. Côté (Charlesbourg): ...c'est que nous, nous
baissons et eux ont augmenté de 20 % successivement. C'est cela le vrai
visage de ce parti.
Le Président: M. le député de Roberval. M.
le député de Roberval. M. le député de Roberval,
vous avez toujours la parole.
Une voix: ...une question de règlement.
Le Président: Non, non. C'est pour cela que je
reconnais...
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que c'était
une question...
Le Président: Non, ce n'est pas une question de
règlement. M. le député de Roberval.
Une voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaîtï
M. Gauthier: M. le Président, lors de la commission
parlementaire il va falloir que les compagnies pétrolières
viennent nous expliquer pourquoi cela coûte tellement plus cher de vendre
et de distribuer de l'essence au Québec. Il va falloir qu'elles viennent
nous expliquer si ce n'est pas le cas, que le prix de l'essence au
Québec servirait à subventionner certaines guerres de prix dans
des zones du Canada, principalement en Ontario où cette guerre est
particulièrement féroce. Il va falloir qu'elles viennent nous
assurer que les contribuables et les consommateurs du Québec ne font pas
les frais des guerres de prix qui se déroulent ailleurs au Canada.
Enfin, il va falloir qu'elles viennent nous expliquer pourquoi elles ont fait
du Québec un importateur d'essence alors que nous étions,
voilà encore quelques années, des exportateurs d'essence. (10 h
30)
Je termine sur cela. Les citoyens du Québec et leur gouvernement
devront-ils -c'est une interrogation à laquelle on devra répondre
- devenir partie prenante de cette guerre de prix dans le domaine de l'essence
ou les compagnies pétrolières au Québec auront-elles
décidé de se comporter en bons citoyens corporatifs? Je vous
remercie.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je vais maintenant reconnaître M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources pour son droit de
réplique.
Des voix: ...votre taux d'adrénaline... Le
Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Une voix:
...comme la taxe à Parizeau. Le Président: A l'ordre,
s'il vous plaît!
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. John Ciaccia (réplique)
M. Ciaccia: M. le Président, je comprends la frustration
du député de Roberval, car, nous, nous solutionnons les
problèmes. Eux, ils étaient impuissants face aux problèmes
qu'ils avaient eux-mêmes créés.
Une voix: C'est cela. Cela, c'est vrai.
M. Ciaccia: Ce qui m'étonne du député de
Roberval, c'est qu'en commission parlementaire où il n'y a pas de
caméra, là, il nous dit la vérité. Mais, à
l'Assemblée nationale, il oublie ce qu'il nous a dit en commission
parlementaire.
M. Gauthier: M. le Président, question de
règlement.
Une voix: C'est cela! Des voix: Bravo!
M. Gauthier: M. le Président, question de
règlement.
Le Président: Sur une question de règlement.
Une voix: Faites-le danser; il danse tout croche.
Le Président: Sur une question de règlement, M. le
député de Roberval.
M. Gauthier: M. le Président, vous aurez compris, aux
propos du ministre, que c'est tout à fait antiparlementaire.
Des voix: Ah! Ah!
M. Gauthier: M. le Président, est-ce que je peux vous
poser cette question?
Le Président: Oui, brièvement.
M. Gauthier: M. le Président, je vous demande une
directive là-dessus. Est-ce que le fait d'accuser un parlementaire de ne
pas dire la vérité est parlementaire? Moi, je vous dirai que j'ai
des chiffres pour prouver que lui, il ne la dit pas, la
vérité.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le leader du gouvernement,
brièvement.
M. Gratton: Sur la question de règlement, M. le
Président. Je pense que les dernières paroles du
député de Roberval étaient antiparlementaires lorsqu'il a
dit que le ministre ne disait pas la vérité. Mais je vous fais
remarquer, M. le Président, que ce que le ministre de l'Énergie
et des Ressources a dit, c'est qu'au contraire, le député de
Roberval avait dit la vérité en commission parlementaire. Ce
n'est pas une accusation.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources, vous avez toujours la parole. M. le ministre de l'Énergie.
Non, je ne fais pas retirer... M. le leader de l'Opposition, j'ai reconnu M. le
député de Roberval sur sa question de règlement. Une
intervention de la part de l'autre parti... Il est clair que je ne fais pas
retirer la phrase de M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Chevrette: M. le Président, tout ce que je voulais
souhaiter, c'est qu'on fasse une commission parlementaire
télévisée. On verra qui dit la vérité.
Une voix: Oui.
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources, toujours pour votre droit de réplique.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais citer le
député de Roberval, en commission parlementaire, aussi
récemment que le 3 juin, lors de l'étude des crédits du
ministère de l'Énergie et des Ressources. Il disait: "On sait que
le problème est énorme avec les pétrolières. On
sait qu'il s'agit d'un libre marché, on comprend tout cela. On sait
aussi comment l'ancien gouvernement, la première fois où c'est
arrivé, s'était fait littéralement siphonner autour de 400
000 000 $ qui devaient aller aux consommateurs."
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Si
vous me permettez, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
Une voix: C'est des propos avec plomb!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Fin de la citation. Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Ciaccia: M. le Président, je vous ferai remarquer
qu'ils se sont fait siphonner cet argent malgré le fait, qu'au mois
de
juin, le 30 juin 1976 - c'était avant le 15 novembre 1976 - le
gouvernement libéral avait fait sanctionner une loi qui aurait permis au
gouvernement précédent d'agir dans les circonstances, et il ne
l'a pas fait. Ne venez pas nous faire de reproches aujourd'hui. Nous faisons
notre devoir et nous nous assurons que les consommateurs
bénéficient pleinement de la baissé de taxe que le
ministre des Finances avait décrétée en 1985.
Je voudrais simplement corriger quelques autres propos qu'a tenus le
député de Roberval. Il a dit que je ne tiendrais pas de
commission parlementaire parce que je craignais que les
pétrolières ne se présentent pas. C'est absolument faux.
Je n'ai jamais exclu - le député de Roberval pourrait lire la
transcription des débats en commission parlementaire - la
possibilité d'une telle commission. Juste pour donner quelques exemples,
dans la région du Lac-Saint-Jean, le prix maximum est de 0,551 $ le
litre. Nous le réduisons à 0,497 $ pour l'essence sans plomb.
Une voix: Oh! Au SaguenayLac-Saint-Jean, ça gaze,
ça gaze!
M. Ciaccia: M. le Président, vous allez comprendre et je
pense que l'Assemblée nationale va comprendre que la mesure que nous
venons d'adopter ne pouvait l'être avant que nous ayons en main tous les
éléments et les chiffres nécessaires. C'est pour cette
raison que nous avons donné toute la chance possible aux
pétrolières et aux détaillants de s'assurer que la taxe
soit remise, que le consommateur bénéficie de la réduction
de taxe. C'est pour cette raison que nous avons été
obligés, avant d'agir, d'intervenir auprès des
pétrolières et de faire des études
détaillées. C'est pour cette raison qu'aujourd'hui, nous agissons
et nous prenons les mesures qui s'imposent pour agir comme un gouvernement
responsable.
Le Président: Cela met fin à la déclaration
ministérielle de M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Nous allons maintenant procéder aux présentations de
projets de loi. Je vais reconnaître M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président, je vous prierais
d'appeler l'article a du feuilleton.
Projet de loi 46
Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
présente le projet de loi 46, Loi sur le financement agricole.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Le projet de loi
propose une refonte du cadre législatif actuel du régime
québécois de financement agricole. Ce projet de loi vise une
simplification et une plus grande rationalisation de ce régime tant du
point de vue de son fonctionnement que de celui de son contenu et
prévoit notamment: de confier aux caisses d'épargne et de
crédit ainsi qu'aux banques à charte et autres institutions ou
personnes qui pourront être désignées par décret du
gouvernement le rôle de prêteur dans le cadre du régime,
tout en permettant à l'Office du crédit agricole du Québec
d'exercer, le cas échéant, un rôle supplétif pour le
consentement tant des prêts à long, moyen et court termes, que des
prêts spéciaux et des ouvertures de crédit; d'ajouter de
nouvelles dispositions concernant l'office, particulièrement pour porter
de 5 à 7 le nombre de ses membres et pour permettre au gouvernement de
constituer un comité de réexamen de décisions rendues par
l'office; de considérer comme un prêt un solde de prix d'une vente
d'une entreprise agricole effectuée par un producteur agricole en faveur
d'une personne admissible à un prêt; de rendre obligatoire
l'obtention d'un certificat ou d'une autorisation de l'office,
préalablement au consentement de tout prêt et de toute ouverture
de crédit, afin de faciliter une approche globale lors de l'étude
par l'office des besoins de financement d'un demandeur; de rendre possible le
consentement d'un prêt global comprenant une tranche utilisable à
des fins de financement à long terme, une autre à des fins de
financement à moyen terme et une autre à des fins de financement
à court terme, dont le montant maximum, compte tenu des garanties
exigées, pourrait atteindre 800 000 $; de porter à cinq ans le
terme maximum d'une ouverture de crédit, pourvu qu'elle soit revisable
périodiquement et à 200 000 $ le montant pour lequel elle peut
être autorisée, sauf pour les producteurs de bovins
d'engraissement ou de céréales où le maximum du montant
est maintenu à 500 000 $; d'accorder aux emprunteurs une contribution au
paiement de l'intérêt dans les cas et dans la mesure prévue
par règlement et selon les conditions et les modalités
déterminées par ce règlement; de permettre au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation d'accorder aux fins
d'un établissement, soit une subvention de 15 000 $, soit une subvention
applicable
durant cinq ans à l'intérêt des premiers 50 000 $
d'un prêt à long terme, selon le choix exercé par le
demandeur qui répond aux conditions d'admissibilité à
l'une ou l'autre de ces subventions. (10 h 40)
Le projet prévoit des modifications à l'article 1979a du
Code civil pour permettre, notamment d'utiliser le nantissement agricole pour
garantir un solde de prix d'une vente qui est consentie par un producteur au
sens de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Le projet
prévoit également l'abrogation de la Loi sur le crédit
aquacole et le remplacement des autres lois de financement agricole
administrées par l'office.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir du projet de loi 46, Loi sur le financement agricole?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
Consultations particulières
M. Gratton: M. le Président, je voudrais faire motion, en
vertu de l'article 235 du règlement de l'Assemblée nationale, qui
se lit comme suit: Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et
de l'alimentation procède à des consultations
particulières et tienne des auditions publiques les 18, 19 et 20
août 1987 dans le cadre de l'étude du projet de loi 46, Loi sur le
financement agricole; que les mémoires soient transmis au
Secrétariat des commissions au plus tard le 31 juillet 1987 et que le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation soit membre
de ladite commission, pour la durée du mandat.
M. le Président, j'informe l'Assemblée que nous
déposerons la liste des organismes qui seront invités à
être entendus au cours de ces consultations particulières plus
tard, au cours de la présente séance.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement, toujours à l'étape de la
présentation de projets de loi.
M. Gratton: L'article b du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 49
Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
présente le projet de loi 49, Loi modifiant la Loi sur
l'assurance-prêts agricoles et forestiers.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Ce projet de loi
propose des modifications à la Loi sur l'assurance-prêts agricoles
et forestiers qui consistent principalement à conférer au fonds
d'assurance-prêts agricoles et forestiers un pouvoir d'emprunt; a
convertir la dotation de 10 000 000 $ qui a été constituée
en faveur du fonds en une avance de pareil montant par le ministre des
Finances; à prévoir l'imposition d'un droit d'assurance, payable
selon des échéances déterminées par
règlement, à l'égard de tout prêt qui sera consenti
ou assumé à la suite d'une demande de prêt ou de prise en
charge d'un prêt soumise à l'Office du crédit agricole du
Québec; et à autoriser le ministre des Finances à pourvoir
jusqu'au 1er avril 1992, à même le fonds consolidé du
revenu, au paiement de toutes les obligations du fonds de manière
à permettre à ce dernier, au moyen de ses revenus alors
accumulés et des droits d'assurance qu'il percevra par la suite, de
suffire entièrement à ses obligations.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir du projet de loi 49, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-prêts
agricoles et forestiers?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, si vous voulez appeler
maintenant l'article c du feuilleton.
Projet de loi 54
Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le
ministre délégué aux Finances et à la Privatisation
présente le projet de loi 54, Loi sur le registre des associations et
entreprises.
M. le ministre délégué aux Finances.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: Ce projet de loi propose de modifier les
règles relatives à la publicité légale des
associations et entreprises au Québec et celles relatives à la
constitution des personnes morales.
Ainsi, il assujettit à ses dispositions les
personnes physiques et les sociétés qui exercent une
activité commerciale ou qui exercent une activité civile sous un
nom d'emprunt ainsi que les personnes morales qui sont constituées en
vertu des lois du Québec, y ont leur siège social, y exercent une
activité ou y possèdent un droit réel immobilier, et
certains groupements qui ne sont pas dotés de la personnalité
morale.
Il prévoit, à cette fin, l'établissement d'un
registre des associations et entreprises. Ce registre a pour objet de recevoir
et rendre publiques des informations relatives aux associations et entreprises
et de constater l'existence des personnes morales et la création des
sociétés en commandite.
Il impose aux personnes et groupements assujettis l'obligation
d'immatriculation. II indique les principales informations qui doivent
être déclarées à cette occasion.
Il prévoit que ces personnes et ces groupements doivent mettre
à jour les informations qui doivent être déclarées
lors de l'immatriculation au moyen de déclarations à cette
fin.
Il prévoit que la radiation de l'immatriculation d'une personne
ou d'un groupement a lieu lorsque cesse l'obligation d'immatriculation ou
lorsque certaines autres obligations n'ont pas été remplies. Il
permet également la révocation de la radiation dans certains
cas.
Il précise que toute personne peut consulter le registre et que
les informations qui y sont contenues sont présumées vraies.
Il regroupe sous un seul chapitre les règles qui régissent
le dépôt des documents ainsi que celles relatives a
l'administration du registre.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir du projet de loi 54, Loi sur le registre des associations et
entreprises?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
Consultation générale
M. Gratton: À l'égard de ce projet de loi
également, en vertu de l'article 235 du règlement de
l'Assemblée nationale, je voudrais faire motion pour que la commission
du budget et de l'administration procède à une consultation
générale et tienne des auditions publiques à compter du 13
octobre 1986 dans le cadre de l'étude du projet de loi 54, Loi sur le
registre des associations et entreprises, que les mémoires soient
transmis au Secrétariat des commissions au plus tard le 8 septembre 1987
et que le ministre délégué aux Finances et à la
Privatisation soit membre de ladite commission pour la durée du
mandat.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Article d, M. le Président.
Projet de loi 192
Le Président: À l'article d au feuilleton, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys présente le projet de loi
192, Loi modifiant la Loi concernant la ville de La Salle.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Fortin: M. le Président, je voudrais déposer le
projet de loi 192, loi qui permet à la ville de La Salle de changer des
règlements pour la décontamination des sites pollués
à la ville de La Salle.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir de ce projet de loi?
Une voix: Adopté.
Le Président: M. le leader du gouvernement, l'article
d?
M. Gratton: Oui. Si je ne m'abuse, M. le Président...
Le Président: J'ai appelé l'article e.
M. Gratton: ...vous avez appelé l'article e.
Le Président: Maintenant l'article d?
M. Gratton: Je vous prierais maintenant de revenir à
l'article d, s'il vous plaît!
Projet de loi 55
Le Président: M. le ministre des Communications
présente le projet de loi 55, Loi modifiant la Loi sur l'accès
aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
personnels.
M. le ministre des Communications.
M. Richard French
M. French: Ce projet de loi a pour objet de prolonger au 31
décembre 1987 la durée de l'effet des dispositions
législatives
et réglementaires inconciliables avec celles des chapitres 2 et 3
de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir de ce projet de loi?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Avec le consentement des membres de
l'Assemblée, étant donné qu'il s'agit là, dans le
cas du projet de loi 55, d'un projet de loi identique à un projet de loi
que nous avons adopté l'an dernier et que cela a fait l'objet de
consultations avec l'Opposition, pourrais-je solliciter le consentement pour
qu'on procède à toutes les étapes de l'adoption, d'abord
du principe, de l'étude détaillée en commission
plénière et de l'adoption dudit projet de loi à ce
moment-ci?
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, on a été mis
au courant du projet de loi et étant donné que cela permettra une
étude plus poussée jusqu'à décembre, nous
acceptons, de consentement, de procéder à toutes les
étapes immédiatement.
Le Président: Si je comprends bien, on en fait un ordre de
l'Assemblée.
Il y a un consentement pour procéder à toutes les
étapes en une seule et unique étape.
M. Gratton: Oui, mais je voudrais qu'on se comprenne, M. le
Président. Il y a consentement pour qu'on procède à toutes
les étapes en même temps et qu'on le fasse immédiatement,
donc, qu'on procède aux écritures.
Adoption
Le Président: Est-ce que le principe du projet de loi est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Qu'on procède aux
écritures. Est-ce que le projet de loi 55 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Dépôt de documents.
M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.
Rapport du ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science
M. Ryan: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer
le rapport du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science pour l'année 1985-1986.
Le Président: Document déposé. M. le
ministre des Transports, toujours à l'étape du dépôt
de documents.
Document de consultation sur les
infrastructures de transport en commun dans la
région de Montréal
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
désire déposer le document de consultation pour les
infrastructures de transport en commun de la grande région de
Montréal.
Le Président: Votre document est déposé, M.
le ministre des Transports.
Dépôt de documents.
M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
Rapport annuel de la RRQ
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président,
conformément aux lois, je vous transmets le rapport annuel de la
Régie des rentes du Québec pour l'exercice qui s'est
terminé le 31 mars 1987.
Le Président: Votre document est déposé, M.
le ministre.
M. le ministre de l'Industrie et du Commerce, dépôt de
documents.
Rapports annuels de SIDBEC
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, M. le Président,
j'ai le plaisir de déposer les rapports annuels de SIDBEC pour les
années terminées les 31 décembre 1983, 1984, 1985 et
1986.
Le Président: Les quatre rapports de VI. le ministre de
l'Industrie et du Commerce sont déposés.
M. le ministre des Communications.
Protocole d'entente entre la CSST
et la RAMQ concernant un échange
de renseignements personnels
M. French: II me fait plaisir de déposer le protocole
d'entente entre la Commission de la santé et de la
sécurité du travail et la Régie de l'assurance-maladie du
Québec concernant un échange de renseignements personnels, le
tout conforme à la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection
des renseignements personnels. (10 h 50)
Le Président: Document déposé.
Rapports de commissions. M. le président de la commission du
budget et de l'administration et député de Vanier.
Étude détaillée du projet de loi
6
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 15 juin 1987 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 6, Loi modifiant
diverses dispositions législatives concernant les valeurs
mobilières. Le projet de loi a été adopté avec
amendements.
Le Président: M. le président de la commission,
votre rapport est déposé. VI. le vice-président de la
commission de l'aménagement et des équipements et
député de Drummond.
Étude détaillée du projet de loi
100
M. Saint-Roch: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé les 5, 6, 7, 12, 13, 14, 19, 20,
21 mai et les 5, 9 et 10 juin 1987 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 100, Loi sur les
élections et les référendums dans les
municipalités. Le projet de loi a été adopté avec
amendements.
Étude détaillée du projet de loi
16
Je dépose aussi le rapport de la commission qui a
siégé le 15 juin 1987 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 16, Loi relative
à diverses mesures à caractère financier concernant les
municipalités. Le projet de loi a été adopté avec
amendements.
Le Président: Rapports déposés. Toujours
à l'étape de rapports de commissions, M. le président de
la commission des affaires sociales et député de
Laval-des-Rapides.
Étude détaillée du projet de loi
21
M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a
siégé les 12 et 15 juin 1987 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 21, c'est-à-dire
Loi concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse,
le Code civil du Québec et le Code de procédure civile. Le projet
de loi a été adopté avec amendements.
Le Président: Le rapport est déposé, M. le
président de la commission.
Dépôt de pétitions. M. le député de
Jeanne-Mance.
Requête pour un CLSC autonome à
Saint-Léonard
M- Bissonnet: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée par 1200 pétitionnaires citoyens de
Saint-Léonard invoquant les faits suivants: Considérant que les
services actuellement offerts par le CLSC Saint-Léonard ne sont pas
accessibles autrement ni ailleurs sur le territoire de cette
municipalité et concluant à ce que la population de
Saint-Léonard a besoin d'un CLSC autonome et spécifique
respectant et reflétant ses particularités et, par le biais de
cette pétition, en manifeste sa volonté à
l'Assemblée nationale. Je certifie que cet extrait de la pétition
est conforme à l'original et au règlement.
Le Président: M. le député de Jeanne-Mance,
votre pétition est déposée.
Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de
droit ou de privilège ou sur un fait personnel.
Avant de procéder à la période
régulière de questions, j'avise immédiatement les membres
de cette Assemblée que Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux apportera un complément de réponse à une
question posée par M. le député de Jonquière
concernant la maison La Chambrée.
Je vais reconnaître une première question principale. Mme
la députée de Johnson.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Engagement de Hollinger au sujet
d'UnïMédia
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre des Communications. Ce matin, La Presse confirme
que le gouvernement a manqué le bateau complètement à la
défense des intérêts québécois dans la
transaction d'UniMédia. Première constatation d'échec, le
premier ministre a été incapable de trouver des acheteurs
québécois. L'article ne dit pas s'il a cherché bien fort,
mais en tout cas.
Deuxième constatation d'échec. Le ministre des
Communications...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Juneau: ...n'a obtenu, à peu de choses près,
que des engagements moraux sur lesquels il n'a aucune emprise juridique. Le
ministre peut-il convenir qu'il aurait été
préférable de décréter un moratoire de trois
mois, suivi d'une commission parlementaire, tel que l'Opposition le lui
demande depuis trois semaines?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. French: Non, M. le Président. Si Mme la
députée peut nous donner un exemple d'un journal au Québec
ou au Canada pour lequel nous avons de meilleures assurances, plus de
détails articulés ou exprimés avec plus de volonté
et d'esprit d'ouverture, qu'elle nous le dise. Si elle ne peut le faire,
qu'elle arrête de faire la morale et de s'indigner contre une transaction
privée qui a été menée en dehors des pouvoirs
directs du gouvernement.
Nous avons eu de la part de l'acheteur des engagements qui sont pris
devant la population du Québec, qui sont dans une lettre adressée
au ministre des Communications. Nous avons maintenant une entente de principe.
Nous aurons également un contrat légal, une valeur juridique,
entre un mandataire du gouvernement du Québec, une société
d'État et Hollinger à savoir que, si jamais Hollinger se trouve
assujetti à une prise de contrôle ou si jamais Hollinger
reçoit une offre d'un acheteur de l'extérieur du Québec,
les Québécois auraient la possibilité de déposer
une offre comparable. Ceci constitue, à mon avis, les meilleures
garanties possible dans les circonstances et c'est certainement bien meilleur
que celles qu'on aurait eues si l'acheteur avait été
québécois.
Le Président: Mme la députée de Johnson, en
additionnelle.
Mme Juneau: Je m'indigne devant la méconnaissance du
ministre dans la connaissance du dossier...
Le Président: En additionnelle. En additionnelle.
Mme Juneau: Le ministre peut-il nous dire ce qui arrivera, si un
groupe situé à l'extérieur...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Juneau: ...du Québec fait à Hollinger une offre
d'achat supérieure pour Le Soleil et Le Quotidien à
celle de toutes les entreprises québécoises
intéressées, au terme du délai des 45 jours?
Qu'arrivera-t-il?
Le Président: VI. le ministre des Communications. M. le
ministre des Communications.
M. French: J'aimerais bien apprendre de Mme la
députée de Johnson, mais il faudrait que j'entende sa question au
complet. Je n'ai pas saisi la dernière partie. Si elle pouvait
répéter, il serait plus facile de répondre.
Le Président: Si vous voulez répéter votre
additionnelle, Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: Que veut-il que je lui répète? Que cela
m'intrigue!
Le Président: La question additionnelle, s'il vous
plaît! La question additionnelle, Mme la députée de
Johnson.
Mme Juneau: Je veux savoir si le ministre des
Communications...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Juneau: ...peut nous dire ce qui arrivera au bout du terme
des 45 jours que M. Black vient de garantir. Au bout du terme de 45 jours, s'il
n'y a pas d'entreprises québécoises qui font des offres valables
et si les entreprises de l'extérieur ont des offres supérieures,
je veux savoir ce que vous allez faire.
Une voix: Réponds donc à la question.
Le Président: M. le ministre des Communications. M. le
ministre des Communications.
M. French: Je comprends. La question, c'est: Si aucune entreprise
québécoise ne dépose une offre supérieure à
l'offre en vigueur d'un acheteur "extraquébécois" ou de
l'extérieur du Québec, qu'arrive-t-il? Ce qui arrive, c'est une
transaction privée qui va suivre son cours.
Des voix: Ah! Ah!
M. French: Nos amis d'en face, M. le Président, expriment
leur surprise que le gouvernement du Québec n'ait pas réussi
à convaincre l'acheteur, qui avait un contrat légal, d'accepter
une offre plus basse de la part d'un Québécois plutôt que
de quelqu'un d'autre de l'extérieur. De notre part, nous ne pensons pas
qu'une telle ingérence dans le fonctionnement du commerce au
Québec et au Canada soit souhaitable.
Le Président: Mme la députée de Johnson, en
additionnelle. En additionnelle, madame.
Mme Juneau: D'après ce qu'on peut voir, les garanties ne
sont pas fortes.
Le Président: En additionnelle, madame. Mme Juneau:
Le ministre ne reconnaît-
il pas qu'aucune garantie formelle de Hollinger ne respectera l'article
45 du Code du travail concernant les accréditations syndicales et qu'il
n'a aucune garantie que Le Soleil et Le Quotidien demeureront des
entités distinctes et autonomes?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. French: La première question touche les relations du
travail. Hollinger a l'intention de respecter le cadre juridique et
réglementaire dans lequel ont lieu les relations du travail au
Québec. Je pourrais ajouter une observation qui n'est pas
nécessairement celle du ministre des Communications, mais celle d'un
observateur de la situation. Il est difficile d'imaginer une situation moins
susceptible d'amener le genre de conflit mentionné à l'article en
question entre le syndicat et le propriétaire, que la situation du
Soleil où un propriétaire vient d'offrir un gros prix pour
l'achat et où les syndiqués ont tout intérêt
à coopérer avec le propriétaire qui amène une
capitalisation aussi intéressante pour l'entreprise.
Le deuxième volet de la question, c'était... Excusez-moi,
M. le Président, si Mme la députée...
Le Président: En additionnelle, Mme la
députée de Johnson.
M. French: Le deuxième volet de la question... Mme la
députée, j'ai oublié.
Le Président: Mme la députée de Johnson,
votre deuxième volet.
Mme Juneau: Oui. Le deuxième volet de ma question
était: Le ministre peut-il garantir que Le Soleil et Le
Quotidien seront des entités distinctes et autonomes?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. French: Le gouvernement n'a pas la responsabilité
d'organiser la structure corporative interne des entreprises
québécoises.
Le Président: Mme la députée de Johnson, en
additionnelle.
Mme Juneau: II n'y a pas grand garantie, M. le
Président.
Le Président: Mme la députée de Johnson, en
additionnelle. En additionnelle, madame.
Mme Juneau: Le ministre ne reconnaît-il pas que les
décisions concernant les activités d'UniMédia seront
prises à Toronto au siège social de Hollinger? (11 heures)
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. French: M. le Président, il est facile de faire appel
à une certaine opinion qui veut que tout ce qui se fait à
l'extérieur et tout ce qui se fait de loin, c'est mauvais. C'est une
maudite bonne chose par exemple que les lecteurs du Winnipeg Sun n'aient
pas la même attitude envers les choses qui se font du Québec.
C'est une bonne chose par exemple que les auditeurs d'à peu près
dix à douze postes radiophoniques en Ontario et dans l'Ouest canadien
n'aient pas la même attitude face aux entreprises
québécoises qui en sont les propriétaires. C'est une bonne
chose que ce ne soit pas l'attitude des lecteurs des revues en anglais, les
propriétés de Trans-Continental, de M. Pierre Péladeau et
de Télémédia, toutes des compagnies de
Montréal.
Le Président: M. le leader de l'Opposition en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre ne
reconnaît pas que l'exemple qu'il vient de donner est complètement
absurde. En Amérique du Nord, que je sache, la société
distincte ce n'est pas Winnipeg, c'est le Québec. On se doit de
maîtriser nos instruments si on veut véritablement donner du sens
à vos phrases creuses de société distincte.
Une voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. French: Encore une fois, M. le Président, j'ai toujours
pensé qu'une des meilleures façons d'exprimer sa
spécificité, de se distinguer par rapport aux autres c'est de
concurrencer l'ensemble des entreprises de tout le Canada avec succès,
comme le font de plus en plus d'entrepreneurs québécois. Je n'ai
pas l'intention, pour ma part, de voir le Québec rapetissé et
limité de la façon dont nos amis d'en face nous invitent à
le faire. Nous n'avons pas l'intention de brimer les opportunités qu'ont
les Québécois et les Québécoises qui ont de plus en
plus envie de les prendre et de les poursuivre à l'extérieur du
Québec comme au Québec. Nous avons confiance aux jeunes
Québécois.
Le Président: M. le député d'Ungava, en
principale.
La survie des municipalités de Murdochville et
de Chapais
M. Claveau: En principale, M. le
Président. Vous savez que deux villes minières du
Québec vivent actuellement des moments très difficiles et sont
à la merci de décisions prises à Toronto. Le ministre des
Communications dirait peut-être que c'est une bonne chose. D'une part,
les citoyens de Murdochville se mobilisent ouvertement afin d'assurer la survie
de leur municipalité, très menacée à la suite de
l'annonce de la fermeture de l'exploitation de Mines Gaspé. D'autre
part, il y a aussi les citoyens de Chapais qui se mobilisent eux aussi afin que
la compagnie cesse de faire planer la possibilité ou le risque d'une
fermeture définitive de l'exploitation de la mine, ce qui vient fausser
le mécanisme normal des négociations actuellement en cours entre
la compagnie et le syndicat.
Le Président: Votre question.
M. Claveau: Dans ces deux cas, M. le Président, il s'agit
de problèmes sociaux beaucoup plus graves et qui dépassent
énormément la question strictement de relations du travail et de
rentabilité d'une compagnie. Ma question: Est-ce que le ministre
délégué aux Mines peut nous dire une fois pour toutes,
sans broder, quelles sont les décisions prises et ce qu'il entend faire
afin de rassurer définitivement les citoyens de ces deux
municipalités quant à leur avenir collectif et quant à la
survie de ces municipalités?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Mines et aux Affaires autochtones.
M. Savoie: M. le Président, d'abord pour la question de
Chapais: actuellement des négociations sont en cours entre les neuf
mineurs qui sont sous terre et le sergent Masson. Nous attendons les
résultats de ces négociations d'une minute à l'autre. Je
suis en communication constante avec le maire de Chapais...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Savoie: ...et avec les représentants de Chapais
concernant ce conflit. Vous comprendrez que les mineurs à Chapais sont
en train de négocier des conditions de travail, particulièrement
concernant leurs salaires. Neuf mineurs occupent la mine sous terre. La
compagnie minière a obtenu une injonction. Elle est maintenant en train
d'obtenir un jugement d'outrage au tribunal, parce que ces mineurs ont eu
l'ordre de quitter. On va attendre les négociations entre le sergent
Masson et les mineurs sous terre.
Pour ce qui est de Murdochville, nous avons formé un
comité qui s'est réuni, entre autres, ce matin à 9 heures
sous la direction du député de Gaspé. Demain soir,
à 19 h 30, j'ai une rencontre avec la haute direction de Noranda. Jeudi
matin, on a une nouvelle rencontre entre, d'une part, le comité,
où on va présenter les résulats de nos discussions, et la
direction de Noranda.
Nous faisons tout notre possible pour présenter aux gens de
Murdochville la nature du problème et les solutions proposées
afin que tout le monde puisse comprendre, de part et d'autre, qu'il s'agit,
à Murdochville, non seulement d'un problème purement minier mais
d'un problème économique mondial.
Si la compagnie est prête à intervenir et à poser
des gestes, si les mineurs sont prêts à intervenir et à
poser des gestes et si les gens de la municipalité sont prêts
à intervenir et à poser des gestes concrets pour assurer la
continuation de cette municipalité, vous pouvez être sûrs
que le gouvernement du Québec y sera.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député d'Ungava, en
additionnelle. En additionnelle, M. le député.
M. Claveau: En additionnelle, M. le Président. Est-ce que
le ministre délégué aux Mines est conscient que la
situation de Chapais, actuellement, dépasse et de beaucoup la simple
question d'un conflit dans les relations du travail? Est-ce qu'il est
prêt à aller sur place pour rencontrer la population de Chapais
afin de prendre le pouls et de se rendre compte jusqu'à quel point le
conflit qu'il y a actuellement à Chapais affecte l'ensemble des 3000
habitants de la municipalité?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Mines et aux Affaires autochtones. M. le ministre.
M. Savoie: On comprend le souci du député de la
région de Chapais-Chibougamau devant le problème de relations du
travail à Chapais. Il a été également maire de
Chapais, M. le Président, pendant quelques années et on sait
qu'il est très soucieux de la situation et avec raison. C'est un
problème qu'il faut surveiller et de près.
Toutefois, il s'agit d'un conflit en vertu du Code du travail et il
s'agit de revendications d'ordre salarial. Ce qui est en cause, ce ne sont pas
des principes fondamentaux, ce ne sont pas des questions de
sécurité, ce ne sont pas des motifs qui relèvent de
l'application de la Loi sur les mines, il s'agit d'un conflit en vertu du Code
du travail.
Malgré tout cela, on s'en préoccupe, on intervient et on
tâche d'arbitrer. J'ai dit hier que ce qu'on voulait et ce qu'on
espère, c'est que la raison prévale sur le rapport de
forces. C'est cela qu'on continue à défendre; c'est cela
qu'on continue à présenter aux deux parties en espérant
qu'il y aura, dans les heures qui vont suivre, un règlement, tout au
moins pour les mineurs sous terre.
Le Président: M. le député d'Ungava, en
additionnelle.
M. Claveau: M. le Président, ma question au ministre est,
à l'instar de ce que j'ai moi-même fait hier, s'il veut se rendre
sur place pour aller tâter le pouls et comprendre la population et les
préoccupations fondamentales de cette population face à des
menaces de fermeture des opérations minières à
Chapais.
Le Président: M. le ministre délégué
aux Mines et aux Affaires autochtones.
M. Savoie: Je n'ai aucune information selon laquelle la compagnie
avait l'intention de fermer la mine. Vous savez que la situation du cuivre est
très difficile. Vous savez également que l'opération
d'Opémisca n'a pas beaucoup de réserves; elle a des
réserves pour un an ou un an et demi encore.
Bien sûr qu'on est conscient du problème de la ville de
Chapais. Si les intervenants de la municipalité nous demandent de nous
rendre sur les lieux, s'il y a une demande de la part soit du syndicat ou de
l'entreprise pour qu'on se rende sur les lieux, on s'y rendra.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
principale.
La fermeture de l'usine de Circuits
Hélix
M. Parent (Bertrand): En principale, M. le Président. Le 2
juin dernier, les Circuits Hélix de la ville de Mont-Royal
procédaient à une fermeture sauvage de son usine, mettant
à pied quelque 200 travailleurs. Le ministre de l'Industrie et du
Commerce apprenait, en même temps que toute la population, cette
situation inacceptable.
Est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce ou son
collègue, le ministre du Travail, entend poursuivre l'entreprise pour la
façon sauvage dont elle s'est comportée et
particulièrement pour le non-respect des délais qu'il y a eu
là-dedans et particulièrment pour donner une leçon
à toute autre entreprise qui déciderait d'agir de la même
façon, ici, au Québec?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, comme
je l'ai exprimé, dès l'annonce de fermeture je dirais
immédiate sinon carrément sauvage de cette entreprise, j'ai
communiqué autant avec la compagnie de gestion menée par M.
Webster, de même qu'avec la société d'exploitation
Hélix, menée par M. Waller afin de leur exprimer, comme je l'ai
dit ici, notre surprise d'abord et, deuxièmement, notre désaccord
total quant à la façon dont cela s'est déroulé. (11
h 10)
Afin de préserver les emplois, en ce qui me concerne, j'ai mis
sur pied un groupe de travail au ministère qui a communiqué avec
des acheteurs éventuels, qui a communiqué avec la direction de
l'entreprise pour bien nous assurer qu'on ne démantèle pas les
activités, tout en sachant que certaines pièces
d'équipement auraient déjà quitté. Mais il n'est
pas question de démantèlement. Troisièmement, nous
continuons très activement, autant avec des représentants des
travailleurs qu'avec des industries des secteurs qui pourraient être
intéressées à ramasser cette entreprise, à voir de
quelle façon nous pourrions assurer une succession aux activités
sur le site en cause.
En ce qui concerne des poursuites, au-delà de ce que nous pouvons
faire, je passerais la parole à mon collègue, le ministre du
Travail.
Le Président: M. le ministre du Travail, vous aurez
l'occasion de répondre à des questions additionnelles. M. le
ministre de l'Industrie et du Commerce a pris tout le temps pour la principale.
En additionnelle, M. le député de Rertrand.
Une voix: II parle trop!
M. Parent (Bertrand): Au ministre de l'Industrie et du Commerce.
Est-ce qu'il ne trouve pas inconcevable que les compagnies puissent, à
toutes fins utiles, mettre à pied des travailleurs à quelques
heures d'avis, fermer leurs portes, sans pour autant en aviser
particulièrement le ministre de l'Industrie et du Commerce? Est-ce que
le ministre entend procéder par une nouvelle loi, de façon
à encadrer beaucoup mieux cette situation qui semble prendre de plus en
plus d'ampleur face à l'attitude du gouvernement actuel?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, j'ai
déjà dit que c'était inacceptable, mais je rappelle au
député de Bertrand que ce n'est pas en vertu d'une loi qui serait
administrée par le ministre de l'Industrie et du Commerce que des
poursuites pourraient être entreprises ou qu'un encadrement, quant
à des périodes
d'avis, pourrait être défini. Je passe donc, tout de suite,
la parole à mon collègue, le ministre du Travail.
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): VI. le Président, dans le
cadre de ce dossier, c'est comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu que je suis chargé de voir à
l'application de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles.
Dans le cas qui nous intéresse, l'article 45 de la loi prévoit
que dans un cas de licenciement de 100 à 300 employés - c'est le
cas qui nous concerne - la compagnie aurait dû fournir un avis de trois
mois. J'ai encore vérifié ce matin, le ministère n'avait
pas reçu, conformément à la loi, l'avis de trois mois
requis. Un enquêteur a été nommé au dossier le 5
juin, il s'agit de M. Paul Dupont. Il fait enquête et il me fera rapport
dès que son enquête sera terminée.
Je tiens maintenant à apporter deux précisions. Vous
réclamez une loi plus sévère. Le chef de l'Opposition, le
12 avril dernier, réclamait que des délais plus longs soient
prévus en cas de licenciement collectif, de fermeture. Il mentionnait
même que les délais plus courts au Québec par rapport
à l'Ontario faisaient en sorte que des compagnies choisissaient de
fermer des entreprises au Québec plutôt qu'en Ontario parce que
les délais étaient plus courts. Je vous dirai simplement que,
lorsqu'il a fait cette déclaration, il devait sans doute être mal
informé parce que, dans le cas qui nous concerne, si la compagnie avait
eu ses activités en Ontario, le délai qu'ils auraient dû
fournir était un délai de deux mois. Dans le cas qui nous
concerne, c'est trois mois. C'est exactement le contraire de ce que le chef de
l'Opposition avait prétendu.
Une autre précision, M. le Président. Je vous dirai que
j'ai vérifié la jurisprudence sur l'application de l'article 45
de la loi sur la qualification professionnelle, et après
vérification, je peux vous dire que l'ancien gouvernement
péquiste n'a jamais engagé aucune poursuite contre les
entrepreneurs dans les cas de fermeture d'usines, mais que le présent
gouvernement a l'intention de faire appliquer la loi.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
additionnelle.
M. Parent (Bertrand): En additionnelle au ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Est-ce que le ministre
entend donner suite de façon particulière à la demande de
M. Claude Ducharme, qui est directeur québécois de la
Fédération des travailleurs unis de l'automobile? Est-ce qu'il
entend donner suite à cette demande faite en conférence de
presse, hier, à savoir qu'il devrait y avoir une meilleure loi? Est-ce
que le ministre entend faire quelque chose dans ce sens, plutôt que de se
plaindre par rapport à l'ancien gouvernement, étant donné
qu'eux sont censés faire beaucoup mieux?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, ce n'est
pas la première fois qu'une centrale syndicale - dans le cas qui nous
concerne, c'est M. Ducharme, président des Travailleurs canadiens de
l'automobile qui l'a fait hier - revient à la charge, demandant au
gouvernement d'avoir une meilleure loi dans le domaine. Au moment où
nous nous parlons, au Québec, la loi actuelle, à ma connaissance,
n'a jamais été appliquée. Il s'agit donc, dans un premier
temps, de s'assurer que les dispositions qui sont déjà contenues
dans la loi québécoise reçoivent une application. C'est
l'assurance et la garantie que nous donnons et aux travailleurs et aux
entreprises du Québec. En ce qui concerne la longueur des délais,
je le dis et je le répète, les dispositions de l'article 45 de la
loi québécoise sont plus sévères, contrairement
à ce qu'affirmait il y a quelques mois le chef de l'Opposition, que les
dispositions contenues dans la loi ontarienne. Nous avons l'intention de suivre
les dossiers de près et de nous assurer que nos lois sont
respectées. Si le respect de la loi ne suffit pas, oui, il faudra
amender nos lois, mais dans un premier temps, le respect de la loi doit
être assuré.
Le Président: M. le député d'Abitibi-Ouest,
en principale.
Contrat octroyé à un coût
supérieur à l'estimation
M. Gendron: M. le Président, le 9 septembre 1986, le
ministre des Transports concluait un contrat avec la compagnie de pavage
d'asphalte Beaver Limitée et son président, M. Pellegrino pour la
pose d'un enrobé bitumineux sur une longueur de 17,5 kilomètres
au montant de 695 000 $, soit environ 700 000 $, même si les estimations
du ministère pour ce même contrat étaient de 526 000 $,
soit une différence de 170 000 $. Le comble, c'est que ce contrat a
été effectué par un entrepreneur sous-traitant de
l'Abitibi-Témiscamingue pour 410 000 $, soit un profit de presque 300
000 $ pour Beaver. La question que je voudrais poser au ministre des
Transports, c'est comment peut-il continuer à affirmer, face à de
tels profits abusifs, qu'il vise à faire plus de routes avec moins
d'argent, comme il l'a affirmé plusieurs fois lors de l'étude des
crédits en commission parle-
mentaire?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
effectivement, nous sommes allés en appel d'offres, puisque
c'était un contrat qui était évalué à
au-delà de 400 000 $ et que c'est la règle. On a demandé
des soumissions publiques, les documents éta ent donc disponibles pour
les entrepreneurs de tout le Québec qui voulaient soumissionner pour
effectuer ce contrat de pose de béton bétumineux. Il y a eu 24
personnes représentant des compagnies qui sont venues au
ministère chercher des devis pour aller en soumissions publiques. De
celles-ci, il y e eu des sociétés de l'Abitibi, dont la
Société d'entreprises générales Ltée et A.
Lamothe Inc., deux compagnies de l'Abilibi-Témiscamingue. Le
délai d'ouverture des soumissions a été porté du 17
au 29 juillet, donc suffisamment longtemps pour que les gens puissent
soumissionner. Cependant, ri la Société d'entreprises
générales ni l'entreprise A. Lamothe n'a déposé de
soumission. Nous sommes étonnés de voir qu'effectivement, les
gens de l'Abitibi n'ont pas soumissionné. Quant à la question
fondamentale: Comment peut-on faire plus avec moins, des soumissions en 1986
ont démontré que 96 % des prévisions du ministère
avaient été atteintes et qu'il y avait donc une économie
d'au moins 4 % dans ces cas-là.
Le Président: M. le député d'Abitibi-Ouest,
en additionnelle.
M. Gendron: M. le Président, l'étonnement, ce n'est
pas que des gens n'ont pas pu soumissionner pour des raisons de délai,
c'est comment le ministre peut-il prétendre qu'il avait la
responsabilité d'autoriser le contrat, alors que l'évaluation du
ministère des Transports était de 526 000 $ pour un contrat
octroyé à 695 000 $? Pourquoi le ministre des Transports ne
s'est-il pas prévalu de la disposition contractuelle de n'accepter
aucune des soumissions, compte tenu de l'écart entre l'estimation du
ministère des Transports et la soumission retenue?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
d'abord, deux observations. Une première: des cinq compagnies qui ont
soumissionné, dont aucune de l'Abitibi, l'écart entre le plus bas
et le plus haut soumissionnaire est de 69 000 $, ce qui est dans les normes
acceptables de 10 % d'écart. La deuxième: Pourquoi n'est-or pas
retourné en appel d'offres public? Nous nous sommes inspirés de
ce qui s'est fait dans le passé, en ce sens que le ministère,
à partir du moment où et sous le gouvernement
précédent on est arrivé avec des soumissions
supérieures de l'ordre de 124 % ou de 130 % du prix estimé par le
ministère, a négocié avec le premier soumissionnaire. Le
coût historique est arrivé à 109 % ou 110 %, puisque les
gens, par la suite, soumissionnaient à 109 % ou 110 %. (11 h 20)
Donc, on est loin des 96 % obtenus de manière globale au
Québec par rapport à celui-là et, dans ce cas-là,
les fonctionnaires du ministère qui ont l'habitude ont recommandé
au ministre de donner le contrat, et c'est ce que le ministre a fait.
Le Président: M. le député d'Abitibi-Ouest,
en additionnelle.
M. Gendron: En additionnelle. Est-ce que le ministre des
Transports peut informer cette Chambre que, selon nos informations, il aurait
reçu de ses fonctionnaires du ministère des Transports la
recommandation de ne pas accorder la soumission à Beaver, compte tenu du
trop grand écart entre l'estimation du ministère et le montant de
la soumission? Est-ce que le ministre affirme qu'il n'a pas reçu de
recommandation de ses fonctionnaires de ne pas aller en demande de
soumissions?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. COté (Charlesbourg): M. le Président, je fouille
dans ma mémoire ce qui est intervenu au cours de l'été
dernier. Effectivement, quant à moi, je n'ai reçu aucun document
à mon cabinet faisant état d'une recommandation autre que celle
dont je vous ai parlé. Il y avait un état de situation et,
finalement, à la lumière des informations données, c'est
ce que nous avons pris comme décision, le respect des soumissions
publiques.
Le Président: En additionnelle, M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui. Est-ce que le ministre des Transports affirme
également qu'il n'aurait pas reçu de pressions d'ailleurs que du
ministère des Transports pour effectivement octroyer le contrat à
Beaver alors que, comme je l'ai mentionné tantôt, les
fonctionnaires à l'interne prétendaient que, l'écart
étant trop grand, il y aurait eu lieu de retourner en appel d'offres.
Rappelez-vous, M. le ministre des Transports, que le contrat est
effectué à 410 000 $ pour un contrat de 700 000 $.
Le Président: M. le ministre des
Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, il y
a des choses qu'il faut dire et la vérité a ses droits. Ce n'est
pas la faute du ministre des Transports si une entreprise de votre
région a accepté de le faire pour 410 000 $ alors qu'elle ne
s'est pas prévalue de son droit de déposer des soumissions alors
qu'elle a été informée et qu'elle a eu un délai
supplémentaire pour le faire, premièrement. C'est
extrêmement important. Deuxièmement, c'est une soumission publique
qui a été faite et qui a été respectée.
Qu'on me dise: Des fonctionnaires du ministère. Lesquels?
Des voix: Ha! Ha!
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en principale.
Mme Harel: Oui, M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Le déménagement à Kingston de
l'usine J. & P. Coats
Mme Harel: M. le Président, ce ne sont plus seulement les
usines qui fonctionnent mal qui ferment au Québec, mais aussi celles qui
vont bien. Je veux parler de J. & P. Coats, une usine de bobines de fil
installée depuis toujours dans mon comté et qui a
décidé d'installer ses activités florissantes, son
équipement subventionné et ses emplois à bon
marché, à Kingston, en Ontario, soi-disant pour se rapprocher,
pour assurer la proximité des marchés à desservir alors
que le centre industriel canadien du vêtement est censé être
toujours à Montréal. Ma question, M. le Président,
s'adresse au ministre de l'Industrie et du Commerce. Quelle intervention le
ministre de l'Industrie et du Commerce a-t-il faite, a-t-il conduite
auprès de la compagnie pour lui faire changer d'avis, pour l'amener
à renoncer à son intention de déménager en Ontario?
Quels patrons a-t-il rencontrés? Quels résultats peut-il
aujourd'hui transmettre à des travailleuses et à des travailleurs
qui attendent avec anxiété depuis un mois et demi le
résultat de ces démarches?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, M. le Président.
J'aime bien, avant de faire une intervention et de faire rapport sur cette
intervention, connaître tous les faits. Un des faits qui étaient
en cause, et c'est ce que les travailleurs m'ont demandé
d'éclaircir, je dirais, il y a plusieurs jours. Pas quelques semaines
quand même, mais plusieurs jours. D'ailleurs, à la suite du sommet
de la Montérégie, j'avais eu l'occasion de rencontrer des
représentants des travailleurs du textile. Un des éléments
en cause est de savoir si, dans les programmes d'aide de la SDI à
l'égard de l'équipement qui se trouvait à l'usine, il y
avait moyen, je tentais de m'en assurer auprès de la SDI, d'attacher un
élastique, si on veut, à l'égard de la subvention dans la
mesure où certains des équipements éventuellement devaient
quitter le site montréalais. Si nous pouvions récupérer -
la SDI m'indique que, dans certains scénarios, dans certaines options,
nous pourrions faire quelque chose dans ce sens - la subvention ou une partie
de la subvention, cela pourrait très certainement servir à un
comité de reclassement, un comité de formation que les
travailleurs sont disposés eux-mêmes à administrer. Je
vérifie les assises juridiques sur lesquelles nous pouvons nous appuyer
avant, évidemment, d'en faire état auprès de la
société.
Ce que j'ajouterais auprès de la compagnie, c'est
évidemment que la vocation manufacturière industrielle du site
qui se trouve dans cette région soit maintenue. Autrement dit, je l'ai
déjà dit et en le disant publiquement cela se rend aussi aux
oreilles des intéressés, je ne vois pas que des condos, centres
commerciaux ou dépanneurs sur ce site feraient quoi que ce soit pour
maintenir la vocation de ces lieux.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en additionnelle.
Mme Harel: M. le Président, le ministre de l'Industrie et
du Commerce peut-il nous indiquer depuis quand il a entrepris de mener une
enquête sur l'utilisation par la compagnie de cette subvention de 500 000
$ de la SDI?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): De mémoire, on parle de
500 000 $ de subventions autorisées dans le cadre d'un programme
régulier qui date de 1984, en l'occurrence, mais dont seulement quelque
120 000 $ ont été déboursés dans les coffres, si on
veut de la compagnie pour fins d'investissements dans de
l'équipement.
Nous sommes mardi et j'ai reçu au début ou au milieu de la
semaine dernière l'opinion de la SDI sur les scénarios que nous
pourrions suivre afin de voir ce qu'il y aurait de récupérable au
titre des subventions déjà versées.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en additionnelle.
Mme Harel: Comment le ministre peut-
il expliquer avoir attendu pour agir d'être devant le fait
accompli de la fermeture alors qu'il a reçu, le 9 mai 1986, un an et un
jour avant l'annonce de la fermeture, une lettre du syndicat des
employés de la CSD qui s'adressait à lui devant la gravité
de la situation relative au maintien et au développement de nos emplois?
"M. le ministre - disait cette lettre - nous avons toutes les raisons
d'être inquiets. Nous vous demandons de faire enquête auprès
de la SDI afin que la compagnie cesse de détruire des emplois au
Québec tout en transférant des activités en Ontario."
Quelle suite le ministre a-t-il donnée en 1986 à ce cri d'alarme
des employés?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce. Vous étiez en additionnelle, Mme la députée.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, M. le Président,
nous avions, à l'époque, constitué une équipe mixte
de représentants sectoriels du ministère de l'Industrie et du
Commerce et d'analystes financiers de la SDI qui se sont entretenus à de
nombreuses reprises très longuement avec la direction de la
société afin d'examiner les chances de continuation des
opérations, afin d'examiner le plan d'affaires, afin de prendre
connaissance de toutes les dimensions économiques et financières
qui affectaient la société à ce moment.
Les rapports que nous avions eus en septembre ou octobre ne laissaient
aucunement présager à cette époque une fermeture
quelconque. Il n'était pas question, il n'y avait eu aucune
espèce de divulgation du plan d'affaires de la société
nous indiquant qu'elle transférait d'une façon ou d'une autre ses
opérations. On le déplore, mais c'est effectivement en avril ou
mai que tout cela est venu s'inscrire dans l'histoire qu'on connaît
déjà.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
additionnelle.
M. Parent (Bertrand): Comment le ministre de l'Industrie et du
Commerce peut-il nous dire, après treize mois qu'il a été
avisé par écrit, qu'il n'a absolument rien fait, qu'il y a des
employés à la SDI qui sont en train d'enquêter?
Après treize mois, pourquoi le ministre a-t-il été tout
à fait impuissant à prendre des mesures pour régler ce
cas-là avant de fermer cette entreprise-là?
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a une
incompréhension ou une méconnaissance profonde de la part du
député de Bertrand qui se targue d'avoir été en
affaires, mais qui a sans doute connu, dans son expérience personnelle
et professionnelle, des occasions où il a lui-même
contribué par ses talents, je présume, à gérer des
entreprises, à obtenir des programmes de subvention de la SDI ou
à fermer une entreprise à cause des conditions du marché.
Ce sont des choses qui arrivent. Quand les employés nous indiquent
qu'ils sont inquiets et nous demandent de donner suite et d'aller voir ce qu'il
y a à faire, nous le faisons. Si, à l'occasion de ces
discussions, rien, mais absolument rien ne laisse présager une fermeture
ou un déménagement, il n'y a aucune raison d'édicter une
loi, un règlement quelconque qui obligerait une société
à demeurer ouverte à l'occasion d'un changement dans les
conditions du marché, d'un déplacement de son marché ou de
quelqu'autre raison économique et financière de base que ce soit.
(11 h 30)
Ce dont nous devons nous assurer à partir de ce moment, c'est que
les travailleurs doivent voir leur emploi protéqé. Si nous
pouvons récupérer des sommes de subventions et les mettre
à la disposition des travailleurs, on peut le faire. Si nous pouvons
inciter la société à maintenir sa vocation industrielle,
commerciale et manufacturière, là où elle se
déroule, nous aurons accompli quelque chose. Mais on ne remplace pas le
marché. Le député lui-même n'a pas pu le faire dans
le passé.
Le Président: M. le député de
Jonquière, question principale.
Invités à la table
Québec-municipalités
M. Dufour: Le 1er mai 1986, lors du congrès de l'Union des
municipalités du Québec le ministre des Affaires municipales
avait annoncé la tenue d'assises Québec-municipalités pour
l'automne 1986 devant porter sur les sujets suivants: l'avenir des
municipalités régionales de comté, la clarification de
l'évaluation foncière pour les industries, le suivi de la
réforme fiscale, l'étude des coûts et des structures des
corps policiers de concert avec le bureau du Solliciteur général.
Ce matin, je vais vous annoncer que la conférence n'a pas eu lieu.
Le 5 juin 1987, le même ministre annonce de nouveau des assises
Québec-municipalités les 5 et 6 août 1987. Certains sujets
de la première conférence manquée sont disparus de
l'agenda. Seul demeure l'avenir des municipalités régionales de
comté. On ajoute la fiscalité municipale versus les transferts
fiscaux et la rémunération des élus.
Devant la disparité des sujets discutés lors de ces
assises, pourquoi le ministre a-t-
il décidé, en énumérant dans son
communiqué les participants à cette conférence,
d'éliminer un grand nombre d'intervenants municipaux?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et
responsable de l'Habitation.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai de la difficulté
à comprendre le sens de la question du député. Je crois
que cela porte sur le nombre de gens qui vont participer aux assises
Québec-municipalités ou sur la composition des
représentants.
Étant donné que les sujets discutés sont d'une
importance primordiale pour l'avenir des municipalités locales et
régionales, nous avons décidé d'élargir le nombre
de participants de sorte qu'il n'y aura pas seulement les participants normaux
de la table Québec-municipalités, soit les deux exécutifs
des deux grandes unions, mais également des représentants des
grandes villes du Québec, Montréal, Québec, Longueuil,
Laval, des communautés urbaines, de la Communauté
régionale de l'Outaouais et également un nombre assez important
de préfets des MRC, de sorte que nous aurons un éventail
représentatif de l'ensemble des municipalités au
Québec.
Le Président: M. le député de
Jonquière, question additionnelle.
M. Dufour: Le ministre doit, tout de même,
reconnaître que, à la table Québec-municipalités,
l'avenir des MRC n'intéresse pas beaucoup la Communauté urbaine
de Montréal et celle de Québec. Donc, est-ce qu'il a l'intention
d'élargir les invitations et, en même temps, a-t-il l'intention
d'inviter l'Opposition?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
À l'ordre, s'il vous plaît:
M. Bourbeau: M. le Président, je vais prendre avis de la
question du député pour ce qui est d'inviter l'Opposition, tout
en soulignant que, sous l'ancien gouvernement, évidemment, l'Opposition
n'était jamais invitée. Je dirai que la raison qui fait que les
communautés urbaines sont invitées, de même que la
Communauté régionale de l'Outaouais tient au fait que la
conférence ne portera pas uniquement sur l'avenir des MRC, mais
également sur l'avenir des municipalités locales. Il y a
également des questions de fiscalité municipale qui
intéressent au plus haut point les communautés urbaines. Il y a,
par exemple, la rémunération des élus et les fonds de
retraite des élus municipaux. Tout cela, ce sont des sujets qui
intéressent autant les communautés urbaines que les
municipalités elles-mêmes.
Le Président: M. le député de
Jonquière, question additionnelle.
M. Dufour: Le ministre, en choisissant ses invités, ne
veut-il pas reconnaître que, fidèle à lui-même,
l'opération chuchotement continue et que cette conférence ne
produira pas grand résultat s'il n'apporte pas de nouveaux
éléments à discuter?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne sais que
répondre à cette question. Je pourrais peut-être citer
Victor Hugo...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bourbeau: ...parodier Victor Hugo en disant que les cas
désespérés sont les cas les plus beaux et j'en sais
d'immortels qui sont de purs sanglots.
Le Président: Question principale, M. le
député de Taillon.
Vente de données informatiques à des
compagnies de crédit
M. Filion: Merci, M. le Président. Le ministre de la
Justice est informé depuis l'étude des crédits - et c'est
l'Opposition qui l'a fait - que certains palais de justice vendent leurs
données informatiques, qui contiennent l'ensemble des
éléments des poursuites qui sont prises contre tous les
individus, tous les groupes et toutes les compagnies, à des entreprises
qui font, notamment, des enquêtes sur la recherche de crédit des
personnes. Le ministre de la Justice, à l'étude des
crédits, a pris cela en délibéré, si l'on veut,
mais il ne m'a toujours pas fourni les réponses qu'il était
censé me fournir. Je lui demande donc ce matin, premièrement,
s'il est en mesure de confirmer la vente des données informatiques
à des entreprises, tels le Bureau de crédit de Montréal et
Acrofax Inc., qui, elles, s'en servent pour remplir leurs fichiers et leurs
dossiers concernant à peu près l'ensemble de la population du
Québec.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Marx: Le député de Taillon est six ou sept mois
en retard; on a déjà fait état de cette question dans les
journaux, c'est de l'information qui est publique. Cette information est
publiée dans les journaux depuis un siècle ou plus et ça
va continuer d'être publié dans les journaux. Ce que je
peux m'engager à faire, parce que c'est vrai, ce que le
député a dit, c'est à lui écrire ou à
écrire à la secrétaire de la commission des institutions
pour faire état de cette situation. Je peux m'engager à envoyer
cette lettre ou demander à mon sous-ministre d'envoyer cette lettre avec
toute l'information, cette semaine, au plus tard, à la secrétaire
de la commission des institutions. Le cas échéant, je peux
même en déposer une copie ici.
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle.
M. Filion: Oui, en additionnelle. Le ministre de la Justice
peut-il reconnaître, d'abord, que ces transactions entre le
ministère de la Justice et les compagnies de crédit se font
moyennant rémunération et que ces sommes sont versées,
évidemment, au ministère de la Justice? Deuxièmement,
est-il prêt à reconnaître, comme le fait le ministre des
Communications et comme le fait le président de la Commission
d'accès à l'information, que cette pratique va à
l'encontre de l'esprit de la loi sur l'accès à l'information et
sur la protection des renseignements, puisque les renseignements qui sont
contenus dans les bandes informatiques des palais de justice sont
colligés à des fins autres que celles pour lesquelles ils sont
utilisés par les compagnies de crédit?
Troisièmement, est-il prêt à reconnaître -
dernier volet, M. le Président -...
Le Président: En additionnelle. En additionnelle.
M. Filion: ...le danger de la vente en bloc de ces données
informatiques à des compagnies de crédit, parce que ces
renseignements sont partiels et ne contiennent pas le jugement qui a
été rendu?
Le Président: M. le ministre de la Justice. Vous
étiez en additionnelle, M. le député de Taillon.
M. Marx: La première chose que j'aimerais dire est que je
ne vois pas pourquoi le député de Taillon est en train de
déchirer ses vêtements. Le système existait avant que je
sois nommé ministre de la Justice. Quand le chef de l'Opposition
était ministre de la Justice, la pratique était la même. Du
moins, ce que je peux dire, c'est que je suis en train d'étudier toute
cette question pour voir s'il y a des changements à apporter. J'insiste,
M. le Président, sur le fait que l'information qui est donnée est
de l'information publique. On peut même donner l'information publique
qu'on trouve dans les palais au député de Taillon ou à
toute autre personne au Québec. C'est de l'information publique. Cela a
toujours été rendu public. Cela a toujours été
publié dans les journaux. Je pense qu'il n'y a pas eu de changement
depuis longtemps. C'était la pratique sous l'ancien gouvernement.
Comme je l'ai dit il y a deux minutes, je vais écrire cette
lettre. Mon sous-ministre va écrire une lettre à la
secrétaire de la commission des institutions pour faire état de
la situation comme je l'ai promis.
M. Filion: M. le Président...
Le Président: Je m'excuse, M. le député de
Taillon, mais... Non. La période... Non. Je m'excuse, M. le
député de Taillon, le temps régulier de la période
de questions est terminé et maintenant, très terminé. Tel
qu'annoncé avant la période de questions régulière,
je vais reconnaître maintenant Mme la ministre de la Santé. Si
vous me le permettez, je n'ai pas terminé. Je vais reconnaître
maintenant Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux en
complément de réponse à une question
présentée par M. le député de Jonquière sur
la maison La Chambrée. Mme la ministre. (11 h 40)
La Chambrée, maison pour femmes
violentées
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le député
de Jonquière me posait une question, la semaine dernière, je
pense, quant au refus de mon ministère d'accorder une subvention
à la maison La Chambrée, une maison qui se consacre à
l'hébergement des femmes violentées. M. (e Président, on
se rappellera qu'il y a eu 3 000 000 $ d'accordés cette année
pour les maisons d'hébergement pour les femmes violentées, soit
une augmentation de 46 %. Nous avons divisé ce montant de la
façon suivante: la plus grande partie a été,
évidemment, pour la consolidation des maisons existantes dont plusieurs
menaçaient de fermer; deuxièmement, pour le soutien à
trois nouvelles maisons et, finalement, un montant de 200 000 $ sera
consacré à des projets pilotes pour conjoints violents.
Il y avait des demandes pour le financement de six nouvelles maisons.
Quand il nous a fallu déterminer celles qui seraient financées ou
qui ne le seraient pas, nous avons tenu compte des places disponibles dans les
différentes régions. Dans le cas de la région du
SaguenayLac-Saint-Jean, il y a déjà pour six ou sept
maisons un total de 60 places et le ministère de la Santé et des
Services sociaux subventionne pour 887 000 $, tout près de 900 000 $,
ces sept maisons.
Le dossier de La Chambrée était un bon dossier. Je pense
qu'ils font un bon travail. Mais, compte tenu qu'il y avait dans un rayon de 30
kilomètres, 26 places
disponibles pour les gens de Jonquière, j'ai favorisé le
développement d'une nouvelle maison dans la région de
l'Outaouais, qui ne compte que 26 places pour l'ensemble de la région,
comparativement à la région du SaguenayLac-Saint-Jean qui
se retrouve avec le plus grand nombre de places, je pense, de toutes les
régions éloignées du Québec - sauf Montréal,
évidemment - avec 60 places.
Le Président: Je vais maintenant permettre une seule
question additionnelle à M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Oui, je comprends la réponse de Mme la
ministre, mais, tout de même, il faut admettre que cela répond aux
besoins d'une population de 70 000 habitants. Du financement populaire se fait.
Donc, c'est appuyé très fortement par le milieu. Il y a des
activités qui se font et des groupes de femmes se sont prises en
main.
Le Président: Votre question.
M. Dufour: J'insiste auprès de la ministre pour lui dire
que non seulement le dossier est bon, mais qu'il devrait l'intéresser.
Je demande à la ministre si elle ne pourrait pas reconsidérer sa
décision en examinant tout ce qui se passe dans le milieu de
Jonquière vis-à-vis de La Chambrée.
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. M. le député, s'il vous plaît! M. le
député.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je me trouve, devant la
maison La Chambrée, dans la même position que vis-à-vis des
trois autres maisons qui ne recevront pas de financement cette année et
dont le fonctionnement est également supporté par la
communauté locale. C'est strictement à partir de l'argent
disponible, des ressources en place, qui existent dans chacune des
régions, que j'ai cru que mon choix était plus fondé en
favorisant une région où il n'y a, comme je le disais tout
à l'heure, que 26 places pour au-delà de 200 000 personnes. Je
pense que cette maison reste sur la liste et qu'éventuellement elle
recevra du financement. Pour cette année, je n'ai pas les
disponibilités financières pour acquiescer à sa
demande.
Le Président: Je remercie Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux. Ceci met fin au complément de
réponse. Ce matin, il n'y a aucun vote reporté.
Motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.
Consultation générale afin
d'examiner
les meilleurs moyens d'assurer le
respect des objectifs des mesures
d'aide aux régions
périphériques
M. Gratton: Oui, M. le Président, avec le consentement de
l'Opposition, je voudrais donner suite à la déclaration
ministérielle du ministre de l'Énergie et des Ressources et
proposer la motion de renvoi en commission suivante: Que la commission de
l'économie et du travail procède à une consultation
générale et tienne des auditions publiques à compter du 9
septembre 1987 afin d'examiner les meilleurs moyens d'assurer le respect des
objectifs des mesures d'aide aux régions périphériques
prévus dans l'énoncé budgétaire du ministre des
Finances le 18 décembre 1985; que les mémoires soient transmis au
Secrétariat des commissions au plus tard le 10 août 1987 et que le
ministre de l'Énergie et des Ressources soit membre de ladite commission
pour la durée du mandat.
Le Président: Alors, si je comprends bien, il y a
consentement. Cette motion pour consultation générale est
adoptée. Même s'il n'y avait pas de préavis, il y a eu
consentement de cette Assemblée. Adopté.
M. le leader du gouvernement, toujours à l'étape des
motions sans préavis.
Consultation générale afin
d'étudier "Les infrastructures de transport en commun de la
région de Montréal"
M. Gratton: Oui, dans le même ordre, M. le
Président, je voudrais, avec le consentement de l'Assemblée
nationale, proposer la motion suivante: Que la commission de
l'aménagement et des équipements procède à une
consultation générale et tienne des auditions publiques à
compter du 25 août 1987 afin d'étudier le document intitulé
"Les infrastructures de transport en commun de la région de
Montréal"; que les mémoires soient transmis au Secrétariat
des commissions au plus tard le 10 août 1987 et que le ministre des
Transports soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté? Alors, c'est la même
chose. Adopté. Malgré l'article 146, s'il y a consentement des
deux côtés, la motion pour consultation générale
présentée par M. le leader du gouvernement est adoptée.
Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis, M. le leader du
gouvernement ou M. le leader de l'Opposition?
Alors, avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du
gouvernement. M. le leader adjoint du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Lefebvre: J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui,
après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si
nécessaire, de 15 heures à 18 heures, à la salle du
Conseil législatif, la commission de l'aménagement et des
équipements poursuivra l'étude détaillée du projet
de loi 43, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si
nécessaire, de 15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget et de l'administration
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi
concernant le bureau de discipline de l'Association des courtiers d'assurances
de la province de Québec.
Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 h
30 à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'économie et du travail
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 30, Loi
constituant la Commission des relations du travail et modifiant diverses
dispositions législatives.
Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15
heures à 18 heures, à la salle 101 de l'édifice
Pamphile-Le May, la même commission poursuivra simultanément
l'étude détaillée du projet de loi 161, Loi sur les mines,
le tout de consentement, M. le Président, avec l'Opposition.
De 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures
à 24 heures ou dès que la commission de l'aménagement et
des équipements ou la commission du budget et de l'administration aura
complété son mandat, la commission des institutions
procédera alors à l'étude détaillée des
projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué:
projet de loi 40, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale concernant
certaines divisions d'enregistrement; projet de loi 34, Loi modifiant le Code
de procédure civile; projet de loi 36, Loi modifiant la Loi sur les
tribunaux judiciaires; projet de loi 35, Loi sur certaines ventes de parties de
lot pour défaut de paiement de taxes et projet de loi 26, Loi modifiant
la Loi sur le Protecteur du citoyen.
M. le Président, je désire également informer cette
Assemblée que, dès l'adoption du principe du projet de loi 18,
Loi modifiant la Loi favorisant le développement scientifique et
technologique du Québec, la commission de l'éducation
procédera alors à l'étude détaillée dudit
projet de loi, et ce, de 20 heures à 24 heures, à la salle 101 de
l'édifice Pamphile-Le May. Merci,' M. le Président.
Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Juste une question au leader adjoint. Si j'ai bien
compris, il y aurait une quatrième commission et ce serait une
séance de travail pour la commission de la culture.
M. Lefebvre: Oui.
M. Chevrette: En ce qui regarde la séance de travail, M.
le Président, c'est sous réserve, parce que, notre critique
n'étant pas en ces lieux, je pense que je ne peux pas, à ce
stade-ci, accorder un consentement. Qu'il se trouve un autre moment au cours de
la journée ou quitte à ce qu'on revienne en Chambre... Même
si c'est en commission, là, je donnerai le consentement requis pour
qu'on puisse siéger à un autre moment. Mais, à ce
stade-ci, je ne peux pas donner mon consentement.
Le Président: Si vous me le permettez, M. le leader de
l'Opposition, c'était l'avis que j'étais pour faire
considérant la commission de la culture. Le consentement possible que M.
le leader adjoint du gouvernement vient de mentionner, c'est relativement
à une autre commission, advenant le cas où il y en a une qui
n'aurait pas terminé ses travaux, c'est-à-dire la Loi sur les
mines. Il y a une mention dans le texte...
M. Chevrette: Cela ne cause pas de problème. C'est
vraiment la séance de travail.
Le Président: Parfait. Alors, il y a consentement des deux
côtés. Cela va là-dessus.
M. Lefebvre: Je comprends qu'on s'est compris, M. le
Président.
Le Président: Oui, très bien. Mais je vais, quand
même, donner l'avis. M. le leader de l'Opposition, on m'avait
demandé de donner l'avis quant à la commission de la culture. Je
comprends que ça prend un consentement des deux côtés. (11
h 50)
M. Chevrette: Je vais vous permettre de donner l'avis et, avec le
président de la commission, advenant le cas où le critique dans
le domaine culturel serait impliqué, on verra à prendre une
décision ensemble. Pour le moment, donnez l'avis.
Le Président: Je vous avise que la commission de la
culture qui devait se réunir en séance de travail le jeudi 11
juin 1987, après la période des affaires courantes, à la
salle 84 de l'Hôtel du Parlement, se réunira le 16 juin 1987,
après la période des affaires courantes, à la salle 84 de
l'Hôtel du Parlement. Je comprends que, pour le moment, il y a
consentement de cette Assemblée, M. le
leader de l'Opposition, étant donné que c'est une
quatrième commission.
Est-ce qu'il y a d'autres avis touchant les travaux des commissions?
Renseignements touchant les travaux de l'Assemblée.
Affaires du jour, M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler
l'article 50 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 151 Adoption
Le Président: À l'article 50 du feuilleton, il
s'agit de la motion proposant l'adoption du projet de loi 151, Loi modifiant de
nouveau la Loi sur la probation et les établissements de
détention concernant la surveillance intensive. Je vais
reconnaître M. le Solliciteur général sur cette motion,
comme premier intervenant.
M. Gérard Latulippe
M. Latulippe: M. le Président, le projet de loi 151, que
je présente aujourd'hui pour adoption, modifie la Loi sur la probation
et les établissements de détention. Essentiellement, il vise
à rendre disponible à l'ensemble des tribunaux
québécois de juridiction pénale et criminelle une nouvelle
mesure de rechange à l'incarcération, soit la surveillance
intensive. Cette dernière s'ajoute aux trois autres types d'ordonnances
de probation qui existent déjà, soit l'ordonnance de probation
sans surveillance, l'ordonnance de probation avec surveillance d'un agent de
probation et l'ordonnance de travaux communautaires.
Ce nouveau programme sera sous la responsabilité légale
des agents de probation. Ils assisteront la magistrature dans
l'exécution de l'ordonnance de surveillance intensive et seront
responsables devant la cour de la gestion de ce nouveau programme. Une personne
pourra être déclarée admissible à une ordonnance de
surveillance intensive si la gravité de son délit ou son
passé judiciaire démontrent une irresponsabilité ou une
immaturité pouvant être circonscrites par un contrôle
soutenu, si, deuxièmement, elle démontre de l'instabilité
au niveau de l'emploi ou de son lieu de résidence ou si,
troisièmement, son environnement social est déficient ou non
recommandable.
Le caractère intensif de la surveillance se traduira, dans les
faits, par l'obligation pour le contrevenant de rencontrer un surveillant
à une fréquence régulière fixée par le juge.
L'application et la mise en oeuvre de cette mesure devront se faire avec tous
les intervenants du milieu judiciaire. Il est important que le système
judiciaire adopte cette mesure afin qu'elle soit efficace. Nous avons
effectivement déjà, dans les crédits de l'année
1987-1988, prévu une somme d'argent, soit au-delà de 350 000 $,
pour débuter la mise en oeuvre de cette mesure. Je crois qu'il faut
développer des mesures sentencielles offrant des alternatives à
l'incarcération dans la mesure où la sécurité du
public n'est pas mise en danger. L'incarcération doit être
considérée comme une mesure de dernier recours.
Je tiens à souligner que le projet de loi 151 a reçu
l'assentiment unanime de cette Assemblée lors de l'adoption de son
principe, le 14 avril dernier. Je propose donc que l'Assemblée adopte la
Loi modifiant la Loi sur la probation et sur les établissements de
détention.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M.
le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Nous en sommes
effectivement à la dernière étape, si l'on veut, de
l'étude du projet de loi 151. Je n'ai pas l'intention de reprendre les
énoncés du ministre à ce sujet; je pense que le projet de
loi est bien connu.
Je voudrais, quand même, lui rappeler trois éléments
fondamentaux à ce stade-ci, à la dernière étape de
l'étude du projet de loi 151. Oui, l'Opposition a apporté son
concours à l'adoption de ce projet de loi. Oui, l'Opposition votera dans
les mêmes termes que l'équipe gouvernementale, c'est-à-dire
pour ce projet de loi. Cependant, je voudrais rappeler une dernière fois
au Solliciteur général trois choses extrêmement
importantes, puisque, une fois ce projet de loi adopté, il appartiendra
à l'équipe des fonctionnaires de le mettre en application.
Le premier élément est le suivant et, là-dessus, je
dois dire qu'on ne s'est jamais entendu avec le Solliciteur
général. Ce que le projet de loi 151 vient faire, je le rappelle,
c'est consacrer, officialiser, légaliser une pratique qui existait
déjà en partie devant nos tribunaux. Des ordonnances de probation
pouvaient porter des noms autres que surveillance intensive, mais ces
ordonnances de probation qui étaient rendues devant nos tribunaux, dans
certains cas, comportaient un contrôle extrêmement
sévère des déplacements des accusés. Je me souviens
fort bien, par exemple, d'avoir vu des ordonnances de probation où on
demandait à des individus de rester à la maison entre telle heure
et telle heure, de se rapporter tant de fois par semaine à leur agent de
probation ou à un agent de police, etc. Il s'agissait là
d'ordonnances de probation qui contenaient dans leurs
éléments
essentiels ce qu'on retrouve dans la surveillance intensive. C'est
là une première remarque. C'est important, je pense, d'expliquer
à la population qu'on n'est pas en train de révolutionner
l'univers de la probation.
Une deuxième remarque extrêmement importante: les agents de
probation ont actuellement une charge de travail énorme qui
dépasse de beaucoup celle qu'on retrouve au niveau
fédéral, notamment. Les agents de probation ne pourront arriver
à consacrer le temps suffisant pour fournir contrôle et assistance
aux détenus qui pourraient être sujets à une ordonnance de
probation intensive s'il n'y a pas de ressources humaines et financières
pour mettre en oeuvre cette politique. Encore une fois, c'est ce qu'on reproche
souvent au gouvernement. Dans le cas des femmes violentées, c'est encore
le cas. On annonce des politiques, mais on ne se donne pas les moyens. Dans le
cas qui nous concerne, se doter des moyens pour mettre en oeuvre la loi 151,
cela veut dire s'assurer que les ressources humaines soient suffisantes pour
décharger les agents de probation d'un "case load" inacceptable. On peut
bien se faire accroire des choses dans ce Parlement, mais une fois que la loi
est votée, elle est mise en application, elle doit être
administrée par des gens. Si ces gens-là n'ont pas les ressources
pour la mettre en oeuvre, comme c'est le cas actuellement, ce qu'on fait ici,
on perd notre temps, on envoie des mots en l'air et on se gargarise.
L'alternative à l'emprisonnement, on pourrait en parler durant
des heures, le Solliciteur général et moi, mais ce n'est pas cela
qui est en cause. C'est d'injecter à l'intérieur du
ministère les sommes nécessaires pour faire en sorte que cette
loi devienne un outil, une alternative attrayante pour les juges. Les juges
à la Cour des sessions de la paix, à la Cour supérieure et
ailleurs, qui auront à déterminer une sentence ne
décideront pas d'une ordonnance de probation sous surveillance intensive
s'ils savent que la surveillance intensive est uniquement une espèce de
vague caricature de ce que cela devrait être. Pour cela, il faut
libérer des ressources humaines, des énergies humaines pour
assurer à ces détenus contrôle et assistance, afin que ce
type d'ordonnance permette de désengorger un peu les prisons qui sont
actuellement devenues de véritables pacages, notamment Parthenais,
Orsainville et Bordeaux. (12 heures)
D'accord pour désengorger les prisons, d'accord pour des
alternatives à l'emprisonnement, mais il faut que ce soient de
véritables alternatives à l'emprisonnement pour que les juges qui
auront à prendre des décisions puissent être sûrs que
ces ordonnances sont véritablement mises en oeuvre dans le respect des
principes qui sous-tendent tout le Code criminel et toute la loi sur la
probation. C'est extrêmement important et je dois vous dire qu'à
l'étude des crédits nous avons, le Solliciteur
général et moi-même, échangé
là-dessus. Un effort est fait, mais cet effort est minime.
Considérant les informations qui nous ont été transmises,
cet effort est insuffisant pour vraiment garantir aux agents de probation une
latitude dans l'exercice professionnel des responsabilités que leur
confie la Loi sur la probation et les établissements de
détention. Les gens qui sont en prison, il faut qu'ils soient
réhabilités et c'est cela qui est tout le sens de la Loi sur la
probation et les établissements de détention. Pour être
réhabilités, cela prend des ressources, encore une fois, pour les
contrôler efficacement, pour protéger la société,
mais aussi pour leur fournir une assistance, et c'est là mon
troisième point, M. le Président, et mon dernier.
Je voudrais attirer l'attention du ministre sur l'article 13 de la Loi
sur la probation et les établissements de détention, et je lui
lis cet article: "Tout agent de probation doit concourir à la
réhabilitation des personnes condamnées pour avoir enfreint le
Code criminel ou une loi pénale et faciliter leur réinsertion
sociale en leur apportant aide et conseils. Il doit aussi remplir les autres
devoirs et fonctions qui sont déterminés par le directeur
général." Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que toutes
les personnes qui sont en contact avec les détenus, les agents de
probation en particulier, qui ont une responsabilité au terme de
l'article 12.4 que nous introduisons maintenant dans le projet de loi 151,
doivent toujours garder à vue leur double objectif de contrôle,
mais aussi d'aide et assistance aux détenus pour leur permettre de
réintégrer notre société.
Combien coûte à la société un détenu
qui n'est pas réhabilité, qui sort de prison, qui commet un autre
crime et qui rentre en dedans? Cela coûte une fortune au Québec au
point de vue moral, mais en termes financiers aussi, puisqu'un détenu
coûte environ 80 $ à 85 $ par jour aux contribuables. S'il est sur
le marché du travail, s'il est un élément productif de la
société, à ce moment-là il fait partie de l'actif
de la société et non pas du passif de la société,
et ce sont nos ressources humaines; c'est ce qu'on a de plus précieux au
Québec. Au-delà des lois, des structures et de tout, c'est la
population qui fait le Québec. Les détenus, ceux qui ont commis
une erreur dans leur vie, ou deux erreurs, ont le droit de recevoir aide,
assistance et conseil. Contrôle, d'accord, mais aide, assistance et
conseil dans cette fonction que l'article 13 de la loi édicte aux agents
de probation, d'aide à la réinsertion sociale et à
la réhabilitation.
J'insiste, M. le Président, sur cet aspect de la philosophie de
l'ensemble de la loi. Qu'on introduise une ordonnance de surveillance
intensive, je l'ai dit et je le répète, nous sommes d'accord.
Qu'il y ait, là-dessus, des critères qui devraient être
fixés par règlement et qui feraient en sorte que les juges
seraient plus attirés dans les cas où le contrôle de la
personne exige des ressources, d'accord, mais contrôle, dans ce cas-ci,
ne doit pas exclure l'aide et l'assistance à la réhabilitation.
Il ne faudrait pas, M. le Président, qu'à cause d'un manque de
fonds, d'un manque d'argent, on installe dans l'"opérationalisation" de
cette loi des genres de Pinkerton de la réhabilitation. Cela n'existe
pas. Ce sont des surveillants ou des agents de probation qui devraient
également avoir à coeur la réinsertion des détenus
et la réhabilitation des gens qui ont commis des erreurs dans leur vie,
et que ce ne serait pas pour épargner des sous qu'on arrive à
empêcher les détenus de se réhabiliter ou même
à ne pas leur donner tous les moyens de se réhabiliter. Encore
une fois, je le dis au Solliciteur général pour que cela puisse
l'aider dans ses négociations avec le ministre des Finances ou le
président du Conseil du trésor, cela coûte une fortune. Si
on pense économiser de l'argent en installant des Pinkerton qui vont
jouer le rôle de préfet de discipline sans jouer le
rôle-conseil que la loi leur donne, on passe complètement à
côté. Les juges ne seront pas dupes, la société ne
sera pas dupe et on va payer pour. Je dis cela évidemment à titre
de mise en garde au ministre. On ne peut pas savoir maintenant de quelle
façon cette loi sera véritablement vécue par les
intervenants. Il faut attendre, pour faire ce bilan, un an ou deux mais, au
moment de ce bilan, j'attire l'attention du Solliciteur général,
il aura complètement manqué le bateau avec sa loi 151 s'il n'a
pas réussi à maintenir ce caractère d'aide et d'assistance
à nos détenus au Québec.
Cela étant dit, d'un ton élevé, certes, M. le
Président, parce que l'enjeu est élevé pour le
Québec, nous sommes pour l'adoption du projet de loi, mais dans la mise
en oeuvre de ce projet de loi j'inscris mes trois mises en garde au Solliciteur
général et nous aurons, j'espère, peut-être l'an
prochain lors de l'étude des crédits, l'occasion d'examiner le
bilan de cette loi pour savoir si elle a atteint son véritable objectif.
Cela nous coûterait trop cher de passer à côté de
l'objectif comme société. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M.
le Solliciteur qénéral pour l'exercice de son droit de
réplique.
M. Gérard Latulippe (réplique) M. Latulippe: M. le
Président, je vou- drais tout d'abord remercier le député
de Taillon de son appui pour le projet de loi 151. Je crois sincèrement
qu'il s'agit là d'un projet de loi qui va certainemment
améliorer, bonifier le système correctionnel
québécois et qui fera en sorte que nous serons, je pense,
à l'avant-garde en Amérique du Nord en ce qui concerne le
traitement des personnes incarcérées et la réhabilitation
sociale.
Je voudrais, par ailleurs, répondre rapidement aux trois points
qui ont été soulevés par le député de
Taillon. D'abord, il nous dit que ce projet de loi consacre ou légalise,
à toutes fins utiles, une pratique qui existait déjà en
partie devant les tribunaux. Là-dessus, comme je l'ai dit en commission
parlementaire, je dois me dissocier des propos de mon collègue de
Taillon. Il est vrai qu'il existait des ordonnances de probation qui
étaient données par le Code criminel. Il y a déjà
quelques années, on avait prévu une ordonnance de probation
particulière lorsqu'on a instauré le programme de travaux
communautaires. C'était à l'intérieur d'une ordonnance de
probation qu'on instaurait le programme particulier des travaux communautaires
qui était fait en vertu de notre propre loi de la probation et de la
détention. Il s'agissait là d'amendements qui avaient
été apportés du temps de l'ancien gouvernement.
Dans le cas qui nous concerne, nous procédons de la même
façon pour ce qui est de la surveillance intensive. Celle-ci, telle
qu'elle est conçue dans le programme, ne pouvait pas exister parce qu'il
n'y avait pas les mesures de contrôle qui seront instaurées par la
loi 151 et parce qu'il n'y avait pas aussi les ressources permettant d'exercer
ce contrôle-là. La surveillance intensive se fera par un programme
précis de contrôle et de surveillance de personnes qui, autrement,
auraient été incarcérées; ce sera un programme de
surveillance constante de la personne gui jouira ou qui pourra adhérer
à ce programme selon que les tribunaux en décideront. Ce
programme-là n'existait pas auparavant. C'est la loi qui consacre la
mesure et qui permettra l'existence de ce programme. (12 h 10)
Deuxièmement, mon collègue, le député de
Taillon, souligne que la charge des agents de probation est grande et il nous
met en garde contre la possibilité que cette charge soit trop grande et
que nous ne puissions pas avoir les ressources requises pour mettre le
programme en oeuvre finalement. Il faut bien comprendre que la surveillance
intensive se fera par deux intervenants. Les cas ou les dossiers de
surveillance intensive seront sous la responsabilité d'un agent de
probation qui assurera non seulement la coordination mais aussi la relation
d'aide et d'assistance à
laquelle faisait référence le député de
Taillon. Le contrôle journalier, dans plusieurs des cas, de la personne
qui sera soumise au programme, la personne, qui autrement aurait
été incarcérée, qui devra, souvent quotidiennement,
se rapporter, ce contrôle sera fait par des personnes qui ne seront pas
des agents de probation, parce qu'il y a deux concepts à
l'intérieur de la surveillance intensive. Il y a la relation d'aide et
d'assistance et la relation de contrôle. Ce seront des surveillants qui
pourront être, par exemple, des agents de la paix en milieu de
détention et qui pourront exercer, à l'extérieur des
centres de détention, ce rôle de surveillants à
l'intérieur du programme de surveillance intensive.
Donc, dans un certain sens, ce n'est pas une charge de travail
substantiellement supérieure à donner aux agents de probation.
Sauf que, même là-dessus, je voudrais souligner à mon
collègue, le député de Taillon, que dans les
crédits 1987-1988 on a prévu des sommes pour deux objectifs. Des
sommes, d'abord, pour réduire justement le "case load", pour
réduire la charge de travail des agents de probation en ce qui concerne
les rapports présentenciels pour permettre que le délai de remise
des rapports présentenciels soit plus rapide. Il y a des sommes
prévues aux crédits et mon collègue m'a interrogé
là-dessus au moment des crédits. Il y a aussi d'autres sommes qui
sont prévues pour ce qui est du programme précis de surveillance
intensive, pour amorcer ce programme.
Enfin, mon collègue, le député de Taillon, nous dit
qu'il ne faut pas perdre de vue le rôle, premier souvent, des agents de
probation qui est la réhabilitation sociale des personnes qui sont
condamnées. Je dirais à mon collègue, le
député de Taillon, que c'est tout le système correctionnel
québécois qui a comme mandat et comme mission la
réhabilitation sociale des détenus. Oui, les agents de probation
ont cette mission de réhabiliter socialement les détenus parce
qu'une récidive, cela coûte cher humainement pour les personnes du
système. Une récidive, cela coûte cher aussi
économiquement.
Mais ce n'est pas uniquement le mandat des agents de probation. C'est
aussi le mandat des directeurs des centres de détention. C'est aussi le
mandat des agents de la paix en détention qui maintenant
reçoivent des cours de relation d'aide avec les détenus. C'est
aussi le mandat des directeurs des centres d'hébergement, des centres de
transition, des maisons de cautionnement. C'est le mandat aussi des personnes
à mon ministère. Je pense que ce mandat, nous le comprenons et
nous en avons fait une priorité à l'intérieur du
ministère du Solliciteur général parce que nous croyons
qu'il s'agit d'un devoir des gens de mon ministère, d'un devoir des
services correctionnels. Je pense qu'en fin de compte il s'agit aussi d'un
devoir de société, de la société
québécoise de voir à réhabiliter les personnes qui,
au cours de leur vie, commettent des écarts et sont des
contrevenants.
Là-dessus, je partage certainement les objectifs de mon
collègue. C'est un mandat, une priorité de mon ministère.
C'est aussi une de mes priorités comme Solliciteur
général.
Le Vice-Président: Le débat étant maintenant
terminé, est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 151, Loi
modifiant de nouveau la Loi sur la probation et les établissements de
détention concernant la surveillance intensive, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je vous prierais
d'appeler l'article 2 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 18 Adoption du principe
Le Vice-Président: À l'article 2 du feuilleton, M.
le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science propose que le
principe du projet de loi 18, Loi modifiant la Loi favorisant le
développement scientifique et technologique du Québec, soit
maintenant adopté. Je cède en conséquence la parole
à M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, le projet de loi 18 n'est pas un
projet très élaboré. C'est quand même un projet dont
les implications pourraient être considérables. Au Québec,
nous disposons d'un appareil de soutien financier à la recherche
scientifique, autant dans le domaine de la santé que dans celui des
sciences naturelles et du génie et dans celui des sciences sociales, qui
est parmi les plus élaborés du Canada. Le Québec, c'est
bien connu, est l'une des provinces qui accomplit le plus pour le soutien
financier à la recherche, du moins en ce qui touche son gouvernement
provincial. En vertu de la Loi favorisant le développement scientifique
et technologique du Québec, nous avons deux fonds principaux de soutien
à la recherche. Il y a d'abord le Fonds pour la formation de chercheurs
et l'aide à la recherche, que nous appelons couramment le Fonds FCAR.
C'est un fonds qui vise à favoriser le développement de
l'excellence au niveau des études
supérieures, en particulier au niveau des études de
maîtrise, de doctorat et même des études postdoctorales. Ce
fonds est sous la responsabilité immédiate du ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
Nous avons en plus un fonds spécial qui s'appelle le Fonds de la
recherche en santé du Québec. Ce fonds est sous l'autorité
de la ministre de la Santé et des Services sociaux. Il a pour objet de
soutenir financièrement la recherche dans les universités, dans
les centres hospitaliers et dans les instituts spécialisés de
recherche médicale, clinique ou autres.
La Loi favorisant le développement scientifique et technologique
prévoyait également la création d'un troisième
fonds, le Fonds de recherche en agriculture, en pêcheries et en
alimentation. Ce fonds n'a pas été créé
jusqu'à ce jour, même si le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation accorde un soutien financier
considérable à la recherche. Le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation m'informait que son ministère verse
plus de 3 000 000 $ par année en soutien à la recherche dans les
Facultés d'agronomie de l'Université Laval et de
l'Université McGill, la Faculté de médecine
vétérinaire de l'Université de Montréal et autres
centres de recherche. Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation distribue au-delà de 3 000 000 $ pour le soutien
financier à la recherche. Ces fonds, les deux principaux, par
conséquent, dont j'ai parlé... Le fonds pour la formation de
chercheurs et l'action concertée en matière de recherche
fonctionne très bien. Le Fonds de la recherche en santé du
Québec fonctionne également très bien.
Il y a une chose qui s'est produite, en 1965, le gouvernement
précédent avait fait adopter des modifications à une loi
qui avait été adoptée deux ans plus tôt.
C'était une loi qui créait le ministère de l'Enseignement
supérieur. C'était le ministère, à ce moment, du
Développement technologique et de la Science. On se souviendra
probablement que dans cette loi on avait prévu les trois fonds dont je
viens de parler. On avait prévu également un quatrième
fonds. C'était un fonds qui avait pour fin de recueillir des subventions
dans le secteur privé et dans le secteur public afin d'être en
mesure ensuite d'alimenter chacun des trois fonds spécialisés. En
1985, l'ancien gouvernement a supprimé ce quatrième fonds qui
avait pour mission d'aller chercher des ressources. Il n'a pas prévu
dans les changements qu'il a faits que les trois fonds qui restaient pourraient
aller chercher des subventions dans le secteur privé de sorte qu'on
s'est retrouvé avec trois fonds qui ne peuvent émarger
qu'à des ressources publiques, qu'à des subventions qui sont
versées par les pouvoirs publics et qui n'ont pas le pouvoir d'aller
chercher des subventions dans le secteur privé.
Il y a deux facteurs qui nous obligent à ajuster
immédiatement notre législation afin que nos organismes de
recherche québécois ne subissent pas de préjudices par
rapport à leurs homologues du reste du Canada. Tout d'abord, les
organismes fédéraux de subvention à la recherche ont
été contraints par le gouvernement fédéral à
adopter une nouvelle politique que je résumerai brièvement comme
ceci. Cela s'applique aux trois grands corps subventionnaires
fédéraux, c'est-à-dire le Conseil de recherches en
sciences humaines, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en
génie et le Conseil de recherches médicales du Canada. Chacun de
ces trois fonds s'est fait dire par le gouvernement fédéral: Les
fonds dont vous disposez pour les subventions à la recherche sont
gelés pour une période de cinq ans au montant actuel. Si vous
voulez donner plus d'argent, il faudra que vous trouviez dans le secteur
privé ce qu'on appelle les subventions de contrepartie. Pour chaque
dollar de plus que vous voudrez verser, il faudra que vous alliez chercher 1 $
dans le secteur privé, et là le gouvernement considérera
la possibilité de vous octroyer des sommes additionnelles à ces
fins. Cela veut dire qu'il y aura une grosse campagne de promotion de la part
des organismes fédéraux auprès des entreprises
privées pour aller chercher du soutien à la recherche. Il ne faut
pas que nos fonds québécois aient les mains liées
derrière le dos et qu'ils soient obligés de reqarder le train
passer pendant qu'eux n'auraient pas la possibilité d'agir. Alors, nous
voulons leur donner la même possibilité d'agir que celle qui
existe pour les organismes fédéraux. (12 h 20)
Deuxièmement, nous savons tous que le Parlement
fédéral adoptait récemment une loi sur les produits
pharmaceutiques dont l'objet principal est d'établir un nouveau
régime de protection des brevets pharmaceutiques au Canada. Comme vous
le savez, les brevets, les inventions dans le domaine des produits
pharmaceutiques ne jouissaient d'à peu près aucune protection au
Canada. Ce qui fait que n'importe quelle entreprise pouvait piller les
découvertes faites par une autre et le résultat de cette
politique nous est bien connu. Nous avons perdu un volume important
d'activités de recherche scientifique en matière pharmacologique
au Québec et à cause de cette absence de politique. Or, la loi
qui vient d'être adoptée par le Parlement fédéral et
qui est encore à l'étude au Sénat au moment où nous
nous parlons actuellement prévoit qu'une protection plus forte sera
accordée aux brevets mis au jour par une entreprise pharmaceutique,
mais, en retour, la loi exigera que les compagnies de produits pharmaceutiques
implantées au Canada
investissent une plus grande part de leurs profits dans la recherche
faite au Québec et au Canada. C'était particulièrement
névralgique pour nous du Québec parce que, même si nous
avons fait des pertes, nous conservons encore des centres de recherches
pharmacologiques loin d'être négligeables au Québec. Le
plus tôt cette loi fédérale sera sanctionnée par le
Sénat et ensuite par le gouverneur général en conseil, le
mieux ce sera pour l'essor de la recherche en matière pharmacologique au
Québec. De ce point de vue, j'appuie entièrement les
représentations qui étaient faites récemment par mon
collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, demandant que le
Sénat sorte de sa torpeur et se hâte avec toute la lenteur dont il
est capable pour que ce projet de loi devienne réalité dans les
meilleurs délais.
Pour nous du Québec, cela exige que nous nous retournions vite et
que nous procédions tout de suite aux ajustements nécessaires.
Déjà, j'apprends par les autorités du Fonds de la
recherche en santé du Québec que des pourparlers sont
engagés avec les compagnies de produits pharmaceutiques qui oeuvrent au
Québec. Ce n'est pas négligeable, il y en a plusieurs. Un bon
nombre de ces entreprises ont déjà commencé des
pourparlers avec les autorités du Fonds de la recherche en santé
en vue de conclure des ententes qui permettraient à ces entreprises de
verser des contributions financières au Fonds de la recherche en
santé qui, lui à son tour, les verserait à des chercheurs,
à des laboratoires ou à des instituts de recherche. Parmi les
compagnies que nous comptons au Québec, j'en mentionne quelques-unes. Il
y a Astra pharmaceutique Canada Ltée, Ciba-Geigy Canada Ltée,
Merck Frosst Canada Ltée, Les Laboratoires Miles et Les Laboratoires
Nordiques Inc., Rhône Poulenc
Pharmaceutique Inc., Sandoz Canada Inc., Servier Canada Inc., Squibb
Canada Inc., UpJohn du Canada. Ce sont les principales. Il faut que nous
puissions - entamer c'est déjà fait - mener à bien avec
ces entreprises des conversations qui nous permettront d'avoir notre part des
sommes qui seront investies par elles dans la recherche pharmaceutique au
Canada. On estime qu'au cours des dix prochaines années le volume des
fonds consacrés à la recherche par les entreprises
pharmaceutiques est appelé à doubler. Actuellement, elles versent
pour des fins de recherche 5 % du volume total de leurs ventes. On estime que
cette proportion passera à 10 % au cours des prochaines années.
On estime que les sommes consacrées à la recherche doubleront.
Elles étaient cette année d'à peu près 1 500 000
000 $, elles devraient passer à 3 000 000 000 $ d'après les
engagements que ces entreprises ont pris à l'occasion des
négociations qui ont précédé la présentation
du projet de loi fédéral. Cela entraîne la création
éventuelle d'au-delà de 3000 emplois additionnels de recherche,
des emplois dans la recherche. Imaginez que le Québec ait sa part. Il
avait une part plus grande que la moyenne de l'industrie pharmaceutique au
Canada. Disons que c'était entre 30 % et 40 %. Si nous allions chercher
entre 30 % et 40 % de ces emplois, cela veut dire 1000 postes de plus dans le
secteur de la recherche pharmaceutique au Québec. Cela vaut la peine de
bouger et de bouger vite. C'est pour cela que nous nous sommes
hâtés de mettre au point ce projet de loi.
Maintenant, je voudrais dire un mot quant à y être de
l'importance de la recherche au Québec et au Canada et peut-être
en profiter pour replacer brièvement certaines perspectives. On entend
toutes sortes de choses. C'est peut-être bon à l'occasion d'un
projet de loi comme celui-ci de faire le point brièvement. Je voudrais
faire le point sur les parts respectives des organimes fédéraux
de soutien à la recherche et des organismes québécois de
soutien à la recherche. On entend toutes sortes de choses
là-dessus.
On entend dire souvent: Le Québec n'a pas sa part. Le
Québec se fait jouer des tours par des organismes
fédéraux. Le Québec ne fait pas assez pour la recherche.
Je pense qu'on peut dire deux choses à ce sujet, M. le Président.
Tout d'abord, la part que touche le Québec varie selon les trois grands
conseils fédéraux dont il est question et elle varie
également selon l'effort que le Québec fait lui-même.
Je vais résumer comme ceci: en ce qui touche la santé,
pour la dernière année sur laquelle nous possédons des
statistiques, 1983-1984 - mais la tendance s'est maintenue en 1984-1985 et
même en 1985-1986 - la part du Québec est d'environ 31,5 % de
toutes les sommes versées par le Conseil fédéral de
recherches médicales et les autres organismes fédéraux de
soutien aux recherches en santé. Les sommes totales en 1983-1984
étaient de 156 000 000 $. Le Québec a touché 49 000 000 $,
c'est-à-dire, pour cette année, 31,8 %.
En ce qui touche les sciences humaines, la dernière année
pour laquelle on m'a fourni des statistiques est l'année 1985-1986. Les
subventions totales versées partout au Canada étaient de 51 400
000 $. La part touchée par le Québec a été de 20
500 000 $, c'est-à-dire 39 %, une part beaucoup plus
considérable, par conséquent, que notre proportion dans la
population canadienne, laquelle, comme chacun sait, est de 25 %.
Maintenant, en ce qui touche le Conseil de recherches en sciences
naturelles et en génie, celui-ci a versé en tout pour des
subventions à la recherche 288 000 000 $ en 1984-1985 et, de ce total,
55 000 000 $
sont allés au Québec, c'est-à-dire 20 %. Nous
n'avons pas encore tout à fait notre part dans ce domaine. Il y a encore
au moins 5 % que nous devons aller chercher et je dirais entre 5 % et 10 %.
Nous avons fait des progrès ces dernières années.
Ce serait très long d'analyser les causes de cette situation qui sont
nombreuses et complexes. On peut dire quand même que, dans l'ensemble, si
nous faisons le tableau global, le Québec va chercher tout près
de 30 % de l'ensemble des subventions fédérales versées
à des centres de recherche ou à des chercheurs de niveau
universitaire ou post-universitaire.
C'est une des précisions que j'aurais souhaité pouvoir
ajouter, l'autre jour, en Chambre, quand on a discuté cette question en
réponse à des questions de l'Opposition. Malheureusement,
l'occasion ne me fut pas fournie de présenter ces explications et je le
fais volontiers aujourd'hui. La part du Québec est d'à peu
près 125 000 000 $ dans une année en provenance de trois
organismes principaux.
Je pense que c'est une contribution qui est loin d'être
négligeable. Je m'excuse, la part que le Québec touche des
organismes fédéraux est de 125 000 000 $. La part que nous
versons au Québec est à peu près comme ceci: le Fonds de
la recherche en santé du Québec a versé 28 000 000 $ l'an
dernier en subventions à différents organismes et je vais en
parler tantôt.
Le Fonds FCAR a versé à peu près 28 000 000 $
également en subventions jusqu'à 56 000 000 t. Il y a beaucoup
d'autres organismes gouvernementaux qui contribuent à la recherche: le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, 3
000 000 $, Hydro-Québec fait des dépenses de soutien à la
recherche également. À peu près tous les ministères
ont des budgets de soutien à la recherche. Dans chaque ministère,
on a des services de recherche importants également.
Je pense bien que si on faisait le total, les dépenses du
gouvernement en matière de recherches s'élèvent fort
probablement quelque part entre 150 000 000 $ et 200 000 000 $, à tout
le moins. Le Québec, c'est reconnu, est la province qui,
proportionnellement, accomplit l'effort le plus considérable de soutien
à la recherche en ce qui touche son gouvernement. Par conséquent,
nous avons raison d'être fiers de ce que nous faisons. Nous sommes loin
d'être satisfaits. Je pense qu'il y a beaucoup de besoins qui ne sont pas
comblés pour l'heure, mais il y a quand même un effort
considérable qui s'accomplit au Québec et il vaut la peine de le
noter.
Je voudrais souligner une chose. Quand on compare le Québec
à l'Ontario, on constate qu'au Québec, la principale source de
financement de la recherche dans le domaine de la santé est le
gouvernement fédéral; en Ontario aussi. On peut dire que la
recherche en santé au Québec, c'est une industrie d'à peu
près 100 000 000 $ par année. Le gouvernement
fédéral fournit la moitié ou 55 % de cette somme, le
gouvernement québécois environ 30 % et les sources privées
environ 15 %. En Ontario, le gouvernement fédéral fournit un peu
plus de la moitié, les sources privées fournissent plus de 33 %,
contre 14 % au Québec, et le gouvernement ontarien se contente de 15 %.
(12 h 30)
II faut faire des modifications de ce côté-là, il
faut que le Québec aille chercher sa part des revenus disponibles du
côté des grandes fondations, du côté des grandes
entreprises. Nous sommes encore loin du compte de ce point de vue. C'est
très bien que nos organismes gouvernementaux apportent leur
contribution. En plus des trois fonds que j'ai mentionnés tantôt,
je voudrais en mentionner deux autres que j'allais oublier. Nous avons
l'Institut de recherche en santé et en sécurité du travail
qui a été créé à la suite de l'adoption de
la Loi sur la santé et la sécurité du travail, il y a
quelques années. Cet organisme dispose d'un budget de 2 000 000 $,
exclusivement à des fins de recherche. Nous avons l'Institut de
recherche sur l'amiante qui dispose de 1 000 000 $ par année. On
pourrait en nommer plusieurs autres, mais je pense que j'ai fait le point assez
clairement.
Je voudrais parler de l'ampleur de la recherche médicale et de la
recherche en santé au Québec. Je pense que c'est un domaine
où nous avons des réalisations formidables. La recherche en
santé au Québec porte sur cinq grands domaines. II y a d'abord le
cancer. Nous avons plusieurs foyers de recherche sur le cancer. À
l'hôpital Notre-Dame, nous savons tous que l'Institut de recherche sur le
cancer est affilié à l'Université de Montréal et
accomplit un travail formidable, sous la direction du Dr Simard. Il y a
l'Hôtel-Dieu qui est affilié à l'Université Laval et
qui accomplit également un travail considérable. Je pense que nos
chercheurs ont produit, en matière de maladies du cancer, une
contribution très utile au développement de la connaissance. Nous
entendons souvent citer, même à l'étranger, les travaux de
nos chercheurs dans ce domaine.
Un deuxième grand secteur est celui de l'endocrinologie,
l'étude des cellules, qui a eu comme pionnier au Québec - je
pense que tout le monde le sait - le fameux Dr Hans Selye qui a fondé un
institut de recherche à l'Université de Montréal, dont le
travail a été formidable. Je me souviens, j'ai connu le Dr Selye
au temps où il s'était adjoint à une équipe de
brillants collaborateurs, parmi lesquels il y avait, en particulier, le Dr
Claude Fortier qui, malheureusement, est
mort prématurément, l'an dernier, et qui avait une
réputation internationale. Il a été associé pendant
des années avec des chercheurs qui avaient oeuvré avec le docteur
Selye à l'Université de Montréal, qui ont ensuite
émigré aux États-Unis où ils ont remporté le
Prix Nobel de la médecine. Le Dr Fortier était de cette classe de
chercheurs. Il a fondé un institut de recherche à
l'Université Laval, qui a une réputation internationale
très méritée.
Inutile de dire qu'à l'Institut de recherche clinique de
Montréal, tout ce secteur de l'endocrinologie a connu un
développement considérable. Je pense qu'on ne peut pas parler de
la recherche médicale, de la recherche en santé au Québec
sans parler du rôle de leader, du rôle de pionnier absolument
exceptionnel qu'a joué le Dr Jacques Genest avec l'Institut de recherche
clinique de Montréal. C'est notre institut principal en matière
de recherches scientifiques dans le domaine de la santé. Le Dr Genest
lui-même s'est signalé par des travaux remarquables dans le
secteur de l'hypertension. À l'Institut de recherche clinique de
Montréal, on a des programmes de recherche dans à peu près
toutes les grandes disciplines de la médecine, on y réunit des
chercheurs du monde entier. C'est vraiment une ONU de la santé et de la
recherche médicale dont nous avons tous raison d'être fiers. Par
conséquent, je veux leur rendre hommage de manière
spéciale.
Nous avons des développements très importants dans le
domaine de la médecine génétique également - tout
le problème des maladies transmises héréditairement - qui
fournissent au Québec un champ particulèrement fertile pour la
recherche. On a créé, en particulier, un réseau de
recherche en médecine génétique qui regroupe des
chercheurs de différentes universités et qui est en train,
à l'aide des statistiques reposant sur des générations en
arrière, d'établir des données qui vont nous fournir des
lumières entièrement inédites sur les sources de
propagation de certaines maladies et sur les moyens d'y faire face.
Dans le domaine des neurosciences, la neurologie, la neuropsychologie,
tout le monde connaît les travaux formidables qui ont été
faits par le Dr Walter Penfield, par le Dr André Barbeau, un autre qui
est mort prématurément, un de nos plus grands chercheurs
québécois en matière médicale. Nous sommes tous
fiers, je pense, de l'Institut neurologique de Montréal qui accomplit un
travail extraordinaire, dont certains médecins ont déjà
remporté un Prix Nobel de médecine, d'ailleurs. Je pense que
c'était le Dr Taylor, si mes souvenirs sont bons, mais le grand pionnier
a été le Dr Penfield, dont les travaux sont continués
actuellement par une équipe également remarquable.
Je voudrais signaler les travaux qui sont accomplis dans le domaine des
maladies du coeur. Nous avons des centres de recherche formidables en
matière cardiaque à l'Université Laval, à
l'hôpital Notre-Dame qui est affilié à l'Université
de Montréal et, évidemment, à l'Institut de cardiologie de
Montréal. Ces centres occupent une place très importante dans le
mouvement international des recherches en matière de maladies du coeur.
Ils ont des experts, des spécialistes qui sont reconnus par leurs pairs
un peu partout à travers le monde, en particulier aux États-Unis
où on est plus avancé que dans tous les autres pays. Je pense que
ce sont tous des foyers de recherche que nous avons, que nous sommes
intéressés à continuer de soutenir. Il ne faut pas que ce
soit uniquement le gouvernement qui le fasse. Il faut également que
l'entreprise privée soit appelée à les aider
davantage.
Simplement pour compléter cet exposé, je voudrais donner
une liste d'instituts ou de centres de recherche qui sont subventionnés
à l'heure actuelle par le Fonds de la recherche en santé du
Québec. Je mentionne l'Institut du cancer de Montréal, le centre
de recherche de l'hôpital Notre-Dame, le centre de recherche de
l'hôpital Saint-Luc, l'institut de recherche de l'hôpital Royal
Victoria, le centre de recherche de l'Hôpital Général de
Montréal, l'Institut de cardiologie de Montréal, l'Institut de
cardiologie de l'Université Laval, le centre de recherche de
l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, le centre de recherche de l'hôpital
Saint-François-D'Assise, à Québec, le centre de recherche
affilié au Centre hospitalier de l'Université Laval (CHUL), le
centre de recherche affilié au Centre hospitalier de l'Université
de Sherbrooke, (CHUS), le centre de recherche Lady Davis de l'Hôpital
juif de Montréal, le centre de recherche de l'hôpital Douglas,
à Montréal, les centres de recherche de l'hôpital
Sainte-Justine et de l'hôpital de Montréal pour enfants, le centre
de recherche de l'Institut de réadaptation de Montréal, le centre
de recherche de l'hôpital Louis-Hippolyte-Lafontaine en matière...
J'ai oublié de mentionner tantôt un sixième secteur
très important, les maladies mentales. Nous avons beaucoup de centres de
recherche sur les maladies mentales au Québec qui font honneur
également à la science médicale. Nous avons ensuite le
centre de recherche de l'Hôtel-Dieu de Montréal,
évidemment.
Je finis en mentionnant seulement les domaines dans lesquels l'Institut
de recherche clinique qui, encore une fois, est notre plus important... Il y a
des recherches en marche sur le cancer du sein, sur la leucémie - cela
nous intéresse tous, car je pense qu'il n'y a personne parmi nous qui
n'a pas perdu des parents ou des amis en raison de l'une ou
l'autre de ces maladies - sur la bioéthique, les nouvelles
frontières éthiques de la science de la vie, les sciences de la
santé, la biologie, etc. Il y a un grand expert américain qui est
venu ici il y a plusieurs années. J'oublie son nom pour l'instant, mais
il porte un nom francophone; c'est un Franco-Américain qui accomplit un
travail formidable à l'Institut de recherche clinique avec le Dr Genest.
Le génie biomédical, l'hypertension, c'est le domaine propre du
Or Genest, les métabolismes intermédiaires, la neurologie
biologique et psychologique, etc. Je pense que cette énumération
nous permet de constater que nous avons un actif formidable dans ce domaine, un
actif dont nous avons raison d'être fiers et que nous pouvons pousser
encore plus loin.
Je voudrais ajouter que, dans d'autres secteurs de l'activité
scientifique, nous avons également des chercheurs de tout premier plan.
Dans le domaine des sciences humaines, ce n'est pas pour rien que le
Québec est allé chercher, l'année dernière, 39 % de
toutes les subventions de recherche versées par le Conseil canadien de
recherches en sciences humaines. C'est parce que dans nos universités,
nous avons de très bons chercheurs en économie, en sociologie, en
psychologie, en droit, en histoire, en lettres. Dans toutes les grandes
disciplines humaines, je pense que nous avons une véritable
pléiade de chercheurs, aujourd'hui, qui font honneur au Québec,
qui font avancer continuellement les frontières de la connaissance et
dont la compétence est de plus en plus reconnue par leurs pairs dans le
reste du pays. (12 h 40)
Je mentionne un point ici qui est d'importance capitale: La recherche
progresse par le jugement des pairs. Il n'appartient pas à un ministre
de décider si tel projet est meilleur qu'un autre ni à un
député, ni à un président de compagnie. En
général, la règle qui est suivie un peu partout, c'est que
les travaux d'un expert, par exemple, en neurologie psychologique, feront
l'objet d'un examen par des experts de la même discipline. On
évite toujours de faire faire l'examen par des experts de la même
institution. On en fait venir d'autres provinces, d'autres universités,
et même pour des projets importants, on en fait venir également
des États-Unis et aussi parfois d'Europe, de manière à
s'assurer que le projet a de la pertinence, que les personnes qui le proposent
ont la compétence voulue pour le mener à bien. C'est comme cela
qu'on fait avancer la recherche.
Je dois rendre hommage à nos chercheurs du secteur médical
au Québec qui ont su s'insérer dans les circuits de recherche
scientifique les plus avancés de l'Amérique du Nord. Ils font
leurs projets. Ils ne se demandent pas si on va passer d'abord par tel pays ou
par tel autre. S'ils se disent qu'il y a de très bonnes choses qui se
font à Houston, de très bonnes choses à Atlanta, de
très bonnes choses à Paris, à Londres ou à Tokyo,
ils établissent les contacts. Ils font vraiment partie des grands
réseaux internationaux. Évidemment, nos moyens demeurent
modestes. Il n'est pas question de nous comparer aux grands centres
américains qui disposent de ressources infiniment supérieures.
Mais, je pense que nous avons raison d'être fiers de ce que nous faisons.
Et, comme ministre responsable de la recherche scientifique au sein du
gouvernement du Québec, je suis très heureux de proposer ce
projet de loi qui nous permettra de franchir de nouveaux pas.
J'annonce tout de suite qu'au stade de l'étude en commission, je
voudrai examiner avec l'Opposition la possibilité d'un amendement qui
permettrait d'accorder également à l'autre fonds de soutien
à la recherche, le Fonds FCAR, la possibilité d'obtenir ou
d'accepter lui aussi les subventions en provenance du secteur privé.
C'est l'objet de notre projet de loi. Je suis convaincu que tous les
députés de cette Chambre se feront un devoir agréable de
souscrire au principe du projet de loi et de nous aider à le formuler,
si besoin en est, de la manière qui permettra le mieux d'atteindre les
objectifs proposés.
Je termine, M. le Président, en disant à nos chercheurs
scientifiques du secteur de la santé et de la médecine, pour
commencer, et aussi du secteur des sciences humaines et du secteur des sciences
naturelles et du génie, que le gouvernement attache la plus grande
importance au travail gu'ils accomplissent. C'est un travail d'importance
vitale pour l'avenir de la science, d'abord -je pense que cela doit nous
passionner en soi; il n'y a rien de plus beau que de faire avancer les
frontières de la connaissance et de la vérité - mais aussi
pour notre avenir concret, pour l'avenir de la santé, pour l'avenir de
meilleurs rapports humains au Québec, pour l'avenir économique du
Québec, pour l'avenir culturel du Québec. Il est très
important que nous ayons une activité scientifique intense, bien
organisée, rationnellement répartie dans tous les foyers
d'activité que nous comptons et solidement appuyée autant par les
pouvoirs publics que par le secteur privé.
J'en profite pour faire un appel à nos concitoyens qui dirigent
des entreprises ou des organismes privés. Je pense qu'il faut que nous
nous habituions, comme les Américains l'ont fait, M. le
Président, quand nous dirigeons de grandes entreprises
financières, commerciales ou industrielles, à considérer
qu'il y a une part des surplus de ces entreprises qui doit revenir au secteur
de la recherche, qui doit contribuer au développement de la
connaissance. Nos entreprises s'établissent et progressent en
exploitant au maximum les découvertes scientifiques qui ont
été faites par d'autres. Il est normal qu'en retour, elles
investissent une partie de leur surplus dans le développement de la
recherche afin que, tous ensemble, nous puissions connaître de nouveaux
progrès dans tous les domaines.
C'est l'objet de ce projet de loi et je pense pouvoir conjecturer
à ce moment-ci que nous pourrons compter sur l'appui de tous les
députés. Merci.
Le Vice-Président: Pour la poursuite du débat, je
cède maintenant la parole à Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Le projet de loi
18, Loi modifiant la Loi favorisant le développement scientifique et
technologique du Québec, contient, comme les nombreux projets de loi
qu'on a vu défiler devant cette Assemblée depuis l'entrée
au pouvoir de ce gouvernement, un article, deux articles. À sa face
même, il est très difficile pour nous de s'opposer à
l'adoption de ce projet de loi puisque, comme l'expliquait le ministre, d'une
part, il permettra tantôt au Fonds de la recherche en santé du
Québec d'aller chercher des dons, legs ou subventions lui permettant
ainsi d'avoir accès à des fonds fédéraux de
recherche. Je pense qu'à sa face même on ne peut pas être
contre un tel projet de loi.
Il aurait été intéressant qu'on puisse
également toucher le FCAR mais je pense que le ministre pourra nous en
parler. Il a également l'intention de le faire parce que ce qui est
prévu pour le Fonds de la recherche en santé devrait l'être
également pour le Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide
à la recherche.
Par ailleurs, je me permettrai de commenter les propos du ministre
touchant, d'une part, toute la question de l'effort du Québec en
matière de recherche scientifique de même que la part du
Québec en ce qui concerne les subventions de recherche des
différents organismes subventionnaires ou des différents
programmes de subvention, qu'ils soient des ministères ou des
différents conseils.
Les efforts du Québec en matière de recherche scientifique
sont effectivement plus élevés que dans la plupart des provinces
canadiennes. C'est un fait dont on doit prendre acte. Et on doit en être
fier parce que, investir dans la recherche, c'est investir dans l'avenir. Je
pense que je ne fais que répéter ce que nous disent nos
économistes depuis de nombreuses années. Les connaissances jouent
aujourd'hui le rôle que jouait le capital il y a quelques
décennies. Il est important, si on veut parler de développement
économique stable et viable, d'investir dans la recherche.
Il est important de rappeler aussi que les efforts du Québec en
matière de recherche trouvent leur origine dans l'action du
précédent gouvernement. Je pense qu'il est important de rappeler
ça et de donner à César ce qui appartient à
César. À l'époque, c'est-à-dire en 1979, le
gouvernement du Parti québécois déposait un livre vert, un
énoncé d'orientations sur la recherche scientifique au
Québec. Ce livre vert était suivi d'une politique qu'on appelait
"Énoncé d'orientations et plan d'action pour la mise en oeuvre
d'une politique québécoise de la recherche scientifique" et
venait l'adoption de cette loi, Loi favorisant le développement
scientifique et technologique du Québec.
Dans cette loi qui couvre différents secteurs, il y a
également la création des deux fonds de recherche, mais
également le Conseil de la science et de la technologie. Ce qu'il faut
remarquer par rapport aux actions du précédent gouvernement et
à celles du gouvernement actuel, c'est qu'il y avait alors une
politique. On a commencé par se donner une politique plus globale pour
savoir dans quelle direction on voulait aller, ce qu'on voulait
privilégier comme actions et quels seraient les principaux acteurs.
À l'époque, je me rappelle que, non seulement on s'était
assuré de prendre de plus en plus de place dans certains secteurs
d'activité, d'axer le développement sur la formation de
chercheurs, mais on avait également souhaité faire une place aux
collèges dans le réseau de la recherche au Québec.
On sait que, tout récemment, le ministre a refusé
d'accéder à la demande qui vient a la fois des collèges et
de la Fédération des cégeps de reconnaître, autant
dans la Loi sur les cégeps, les collèges d'enseignement
général et professionnel du Québec, que dans le mandat des
collèges qu'il y avait aussi un mandat de recherche.
Contrairement au précédent gouvernement, où il y
avait une action concertée, où il y avait une politique, ce qu'on
a actuellement, ce sont des choses à la pièce. On modifie un
petit bout de loi, juste pour s'assurer qu'on ne passera pas
complètement à côté de subventions de recherche qui
pourraient nous venir, à la fois, du privé ou encore du public,
particulièrement du gouvernement central.
On gère à la pièce dans ce secteur comme on
gère à la pièce un peu partout. Juste pour rappeler que le
ministre aurait pu profiter de ce projet de loi qui touche la Loi favorisant le
développement scientifique et technoloqique du Québec pour nous
dire ce qu'il entend faire du Conseil de la science et de la technologie. Le
Conseil de la science et de la technologie répond toujours de son mandat
devant le ministre de l'Éducation. En fait, la plupart de ses avis
portent sur la technologie alors que le volet technologie ne
relève plus du ministre de l'Enseignement supérieur et de
la Science. (12 h 50)
On sait que, dès son arrivée au pouvoir, le gouvernement a
scindé science et technologie. Une aberration sans
précédent et qu'on ne retrouve nulle part ailleurs, le
développement technologique relève du ministre du - vous allez me
dire son nom parce que je ne me rappelle plus son ministère - du
Commerce extérieur. C'est assez étonnant que ce soit ce ministre
qui soit responsable du développement technologique. C'est comme de
laisser penser que le développement de la technologie passe
exclusivement par le biais du commerce extérieur.
Par ailleurs, l'avantage d'avoir une politique plus
intégrée, quand on examine un tel projet de loi, est d'essayer de
voir comment les morceaux se placent. Cela nous permettrait, par exemple, de
savoir quel rôle, qui coordonne l'activité ou l'action du
gouvernement du Québec lorsqu'il s'agit de réclamer que le
Québec ait sa pleine part en matière de subventions des
différents organismes ou programmes de recherche du
fédéral.
Tout à l'heure, le ministre vient de nous faire longuement
état de la performance de nos chercheurs lorsqu'il s'agit d'aller
chercher des subventions des trois grands conseils nationaux de la recherche.
Mais le ministre sait, et je dois dire, entre parenthèses,
qu'effectivement nos chercheurs sont performants et le sont de plus en plus.
Cependant, par rapport a cette question, j'aimerais faire deux remarques. Une
première remarque: Dans le secteur où il y a le plus de
retombées économiques, c'est là que nous sommes le moins
performants. En effet, autant on va chercher une part intéressante
lorsqu'il s'agit des sciences humaines, des sciences de la santé qui
sont de l'ordre de 39 % et 31 %, autant en sciences naturelles et en
génie, notre part est plutôt congrue, c'est-à-dire de
l'ordre de 20 % alors qu'on représente à peu près 26 % de
la population.
On devrait travailler davantage dans ce secteur. Je n'ai pas vu
d'actions concrètes qui nous permettraient de devenir un peu plus
performants dans le secteur qui a des retombées directes sur le
développement de l'économie au Québec.
Par ailleurs, ma deuxième remarque à l'endroit du ministre
touche à toute cette question. Le ministre nous a réduit - je
dirais que c'est normal parce que c'est davantage dans son secteur
d'activité l'analyse de la part que le Québec tire des
différents organismes subventionnaires. Il a limité son analyse
aux trois grands conseils, alors qu'on sait que, pour tous les autres
programmes de recherche, qu'ils nous viennent des différents
ministères du Canada ou du Conseil des arts, là, on est largement
déficitaire.
Encore aujourd'hui, au moment où on se parle on est largement
déficitaire. C'est un secteur où on ne viendra pas nous dire
aujourd'hui que, dans ce secteur comme dans de nombreux autres, le
fédéralisme est rentable. Quand on parle de langue au
Québec et de reconnaissance de la société distincte du
Québec, la langue, ce n'est pas que culturel, la langue, c'est
économique. La façon qu'on a d'attribuer les contrats à
Ottawa nous permet de constater que la langue, c'est économique, parce
qu'on sait que ceux qui sélectionnent les projets de recherche
là-bas sont généralement et majoritairement des gens qui
viennent de l'Ontario ou des autres provinces. Comme la langue est
économique dans ce secteur comme dans de nombreux autres secteurs, pour
ne pas dire dans tous les autres secteurs, les contrats s'en vont souvent,
malheureusement, indépendamment de la qualité de leur
présentation, chez des collègues anglophones.
Un exemple patent de cette situation, c'est au moment où le
gouvernement d'Ottawa octroyait un budget de recherche pour la création
de logiciels en français à un organisme torontois qui n'avait
jamais rien fait d'équivalent et qui n'avait aucune expérience
dans le domaine, alors qu'on avait au Québec de jeunes entreprises
extrêmement dynamiques, très reconnues et auxquelles on n'a pas
accordé le contrat. On viendra me dire que la langue, ce n'est pas aussi
économique. Ce n'est pas que culturel, c'est économique. Avec un
gouvernement qui n'est pas capable de la défendre, on se retrouve dans
la situation où on est actuellement, c'est-à-dire que le
Québec est encore pénalisé.
Aborder la question de la recherche exclusivement par un petit
amendement à cette loi, je trouve que c'est insuffisant. Je dis: On ne
peut pas être contre, parce que ça va permettre à ce fonds
d'aller chercher des subventions en vertu de cette règle que le
fédéral a établie: pour chaque dollar que vous allez
chercher dans le privé, on pourra vous donner un dollar de subvention
à partir du conseil et des différents organismes
subventionnaires. Mais Ottawa est en train d'établir les règles
du jeu chez nous, c'est ça que ça veut dire. Cependant, on ne
peut pas être contre, car cela va leur permettre d'aller chercher des
subventions additionnelles.
Ce que je voudrais ajouter, par rapport a cette question, c'est qu'on ne
sent pas qu'il y a une direction en matière de recherche scientifique.
On a déploré le fait que le ministre responsable de la recherche
scientifique et du développement technologique était à
l'Enseignement supérieur. On a divisé les responsabilités
entre deux ministères. On ne sent actuellement
aucune direction. Malgré que le Conseil de la science et de la
technologie ait donné un avis qui propose au moins six modèles de
concertation entre les différents ministres pour voir vraiment que le
Québec tire son épingle du jeu en matière de recherche
scientifique et qu'on sache à peu près où on s'en va et
qu'on puisse mieux définir nos objectifs, on attend encore de ce
gouvernement, qu'il s'agisse du ministre du Commerce extérieur ou du
ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, qu'il donne suite
à l'avis du Conseil de la science et de la technologie.
M. le Président, j'ai annoncé que nous ne nous opposerons
pas à ce projet de loi. Nous espérons qu'il sera modifié
dans le sens où le ministre voulait bien nous l'indiquer afin de toucher
également le FCAR, pour lui permettre de recevoir des dons, des legs ou
des subventions du secteur privé. Nous ne nous opposerons donc pas
à l'adoption de ce projet de loi d'autant plus que le ministre y
introduira cette modification. Cependant, je me demande à nouveau
pourquoi on a pas élargi le débat. Ce gouvernement, je le
rappelle, gère à la petite semaine par de petites modifications.
On ne sait jamais dans quelle direction il veut nous amener. Par ailleurs, une
modification fort simple que nous nous attendions à trouver dans un
projet de loi comme cela touchait les allocations de présence aux
membres des fonds de recherche.
On sait que le gouvernement a modifié de nombreuses lois pour
donner, selon des critères définissant la nature et le rôle
des organismes consultatifs, et, pour accorder ou non, selon le cas, des
allocations de présence. Il aurait été intéressant
qu'on puisse trouver au moins dans ce projet de loi les modifications qu'il
entend apporter par rapport à cette question sur les frais de
présence des membres des fonds de recherche du FCAR ou du Fonds de la
recherche en santé du Québec. L'impression que nous avons, chaque
fois qu'il nous tombe un petit projet de loi comme cela, c'est qu'on n'a jamais
fait le moindre effort pour essayer de regarder un peu plus grand et pour
essayer de voir si ce ne serait pas l'occasion de nous apporter quelques
modifications, même si ce n'est pas l'ensemble des modifications
auxquelles on se serait attendu, au moins de retrouver l'essentiel de ce qu'on
serait en droit d'attendre au moment où on se parle.
Je dis que pour les deux questions à la fois, le FCAR et les
allocations de présence, cela me semblait tout à fait minimal.
Mais on ne retrouve pas cela là-dedans, ce qui nous laisse penser que le
gouvernement gère, à mesure qu'on y apporte un petit
problème. Il regarde le petit problème, il règle le petit
problème, mais il ne se demande pas si, en même temps, il ne
pourrait pas en solutionner quelques-uns autour.
Là, on ne parle pas de grandes politiques. Je regarde le ministre
de l'Enseignement supérieur et je sais pertinemment que pour chaque
projet de loi qui est tombé sur la table depuis que je suis ici, s'il y
a un article, on en ajoute deux ou trois ou on y apporte une modification.
Tout cela, ça ressemble à des choses qui sont faites
rapidement et sans souci de voir s'il n'y aurait pas lieu, par la même
occasion, d'examiner le projet de façon un peu plus globale.
M. le Président, en terminant, je voudrais simplement demander au
ministre quand nous pouvons nous attendre à avoir en main une
véritable politique de la recherche au Québec. Quand le ministre
entend-il présenter un projet de loi pour modifier le rôle et le
mandat du Conseil de la science et de la technologie? Quand et de quelle
façon le ministre entend-il donner suite à l'avis du Conseil de
la science et de la technologie sur les différents modèles que ce
conseil propose pour assurer une meilleure concertation des actions touchant le
développement de la recherche scientifique au Québec? Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président: Je comprends que nous avons le
consentement pour que nous dépassions 13 heures, tel que stipulé
par notre règlement, pour poursuivre le débat et terminer par la
réplique du ministre. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, si Mme la
députée de Chicoutimi y consentait, le ministre, dans sa
réplique, pourrait apporter des réponses aux questions qu'elle a
posées dans son intervention et on pourrait continuer pour quelques
brèves minutes seulement, de façon à pouvoir
adopter...
Le Vice-Président: Le principe.
M. Gratton: Est-ce que cela va? Est-ce qu'on a le
consentement?
Le Vice-Président: II y a consentement là-dessus.
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: ...qui était attendue sur ce projet de
loi.
Le Vice-Président: M. le leader du gouvernement. (13
heures)
M. Gratton: La ministre de la Santé et des Services
sociaux interviendra plutôt à l'étape de la commission
parlementaire, si nécessaire.
Mme Blackburn: Consentement, du moment que ce n'est que pour les
quelques minutes dont parle le leader.
M. Gratton: Oui, oui.
Le Vice-Président: Très bien. Donc, le consentement
est accordé pour que nous puissions poursuivre le débat et
terminer ce débat par la réplique de M. le ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
Mme Blackburn: II arrive... M. Claude Ryan (réplique)
M. Ryan: Je voulais intervenir simplement pour remercier la
députée de Chicoutimi de son intervention fort pertinente qui
ajoute à notre débat des éléments importants. Je
pense que nous aurons l'occasion, en commission, de revenir sur les aspects qui
ont été soulevés. Par conséquent, je me dispense
d'autres commentaires, sauf pour ajouter en réponse aux deux
dernières questions qui m'ont été adressées que
tout le problème de la structuration de la politique scientifique du
gouvernement est à l'étude au bureau du chef du gouvernement
à l'heure actuelle, à la suite d'un avis qui m'a
été remis à ce sujet, au début de la
présente année ou à la fin de l'année
dernière, par le Conseil de la science et de la technologie. La question
est à l'étude. C'est une chose très complexe que la
structuration des organismes qui doivent personnifier et diriger la politique
scientifique du gouvernement.
Je pense qu'il n'y a pas un pays au monde qui est arrivé à
un équilibre vraiment satisfaisant de ce côté. Les pays
font des changements de temps à autre. Il y en aura peut-être qui
seront faits. Si nous suivons l'avis du Conseil de la science et de la
technologie, il y aura sûrement certaines modifications. Je veux assurer
la députée de Chicoutimi que ces modifications sont à
l'étude, et si elles ne parviennent pas plus vite, c'est parce que les
choses vont fort convenablement à l'heure actuelle et que nous voulons
être sûrs que les changements apporteront des améliorations
et non pas une détérioration de la situation.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de loi
18, Loi modifiant la Loi favorisant le développement scientifique et
technologique du Québec, est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission de
l'éducation
M. Gratton: M. le Président, je veux faire motion pour
déférer le projet de loi à la commission de
l'éducation et pour que celle-ci soit présidée par un
président de séance.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: M. le Président, si on me permettait, je
donnerais l'avis dont nous avons donné préavis plus tôt ce
matin. Ce soir, de 20 heures à 24 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'éducation procédera
à l'étude détaillée du projet de loi 18, Loi
modifiant la Loi favorisant le développement scientifique et
technologique du Québec.
Le Vice-Président: Cet avis est reçu. Puisque nous
avons maintenant dépassé 13 heures, l'Assemblée va
suspendre ses travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 3)
(Reprise à 15 h 3)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît:
Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour que
l'Assembée nationale se transforme maintenant en commission
pléniè-re et je vous demanderais d'appeler au feuilleton
l'article 81.
La Vice-Présidente: Est-ce que la motion pour que
l'Assemblée nationale se transforme en commission plénière
afin d'étudier les crédits supplémentaires pour
l'année financière 1987-1988 est adoptée?
M. Gendron: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
Mous allons donc suspendre nos travaux quelques moments pour permettre
à l'Assemblée nationale de se transformer en commission
plénière.
(Suspension de la séance à 15 h 4)
(Reprise à 15 h 6)
Commission plénière
Étude des crédits supplémentaires
pour l'année financière 1987-1988
Mme Bégin (présidente de la commission
plénière): Nous sommes réunis en commission
plénière pour étudier les crédits
supplémentaires pour l'année financière 1987-1988.
Avant de commencer, j'aimerais aviser les deux parties que le temps
alloué est d'une demi-heure.
Je vais donc reconnaître le ministre délégué
à l'Administration et président du Conseil du trésor pour
quelques remarques préliminaires.
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Paul Gobeil
M. Gobeil: Merci, Mme la Présidente. L'enveloppe des
crédits supplémentaires déposés le 12 juin dernier
devant l'Assemblée nationale au montant de 256 800 000 $ correspond aux
dépenses additionnelles annoncées par le ministre des Finances
dans le discours sur le budget du 30 avril 1987. Comme l'a mentionné mon
collègue, le ministre des Finances, lors de son discours, l'objectif de
dépenses a été ramené de 30 150 000 000 $ à
30 080 000 000 $ pour l'année 1987-1988 et cet objectif prévoit
déjà ces crédits supplémentaires dont nous faisons
l'étude aujourd'hui.
Ces crédits s'inscrivent à l'intérieur de
l'objectif gouvernemental de dépenses et vise a bonifier certains
programmes gouvernementaux, tels que la conservation et la construction du
réseau routier, 60 000 000 $; l'augmentation de la provision pour
créances douteuses, 50 000 000 $; divers programmes concernant la
santé et les services sociaux, principalement pour des ajustements
à la base budgétaire, 34 700 000 $; une bonification du
régime de rentes pour les membres de la Sûreté du
Québec et les juges, 27 000 000 $; un montant à l'enseignement et
à la recherche universitaire, 24 600 000 $; une aide aux parents pour le
revenu de travail dans le cadre du programme APPORT, 17 000 000 $; une
augmentation des fonds au Fonds de développement régional, 10 000
000 $; une bonification de l'aide aux garderies, 8 000 000 $; l'aide à
l'industrie des courses de chevaux, 6 000 000 $; une aide supplémentaire
à la voirie municipale, 5 000 000 $; et diverses autres bonifications,
14 500 000 % pour un total de 256 800 000 $. Si vous me le permettez, Mme la
Présidente, j'expliquerai les grandes lignes de chacun de ces
éléments.
Tout d'abord, en ce qui concerne le ministère des Transports, les
programmes de conservation et de construction du réseau routier sont
bonifiés de 60 000 000 $. L'augmentation se compose comme suit: pour la
conservation du réseau routier, 38 000 000 $, et pour la construction du
réseau routier, 22 000 000 $. Cette hausse va de pair avec celle du
programme d'aide à l'amélioration du réseau municipal qui,
elle, est bonifiée de 5 000 000 $.
Afin de continuer à soutenir les activités des
particuliers et des entreprises qui travaillent à la promotion et
à la réalisation de projets qui sont importants pour le
développement socio-économique des régions en dehors des
grands centres urbains, les crédits du Fonds de développement
régional sont bonifiés de 10 000 000 $.
En ce qui a trait aux services de garde, comme ils évoluent
à un rythme toujours croissant, les crédits de la ministre
déléguée à la Condition féminine seront
majorés de 4 200 000 $. Ce montant permettra d'augmenter les places
disponibles en garderie à but lucratif, à but non lucratif et en
milieu familial. Un autre montant de 3 800 000 $ a été
réservé au Fonds de suppléance du ministère des
Finances pour d'autres projets de garderies.
S'il y avait lieu, les services de garde pourraient donc
bénéficier de crédits supplémentaires
jusqu'à 8 000 000 $, en supplément, évidemment, du budget
de base déposé par le ministre des Finances, le 30 avril dernier.
De plus, afin de conserver nos acquis sociaux et de préserver la
qualité de vie des Québécois et des
Québécoises, les crédits du ministère de la
Santé et des Services sociaux sont bonifiés de 34 700 000 $, dont
le soutien aux organismes bénévoles pour 4 000 000 $, les
services hospitaliers de courte durée, de 7 500 000 $, l'Office des
personnes handicapées, de 3 600 000 $ et divers autres programmes ou
services à l'intérieur du ministère. Quant à la
Régie de l'assurance-maladie, elle bénéficiera d'un
montant additionnel de 1 000 000 $. Nous avons réservé un autre
montant de 10 000 000 $ aux fonds de suppléance du ministère des
Finances, lesquels pourront servir à soutenir des projets particuliers
en matière de santé et de services sociaux au cours de
l'année. Je répète que les divers programmes concernant la
santé et les services sociaux sont donc bonifiés de 34 700 000
$.
Dans le même cadre, les crédits du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science augmenteront, quant à
eux, de 24 600 000 $. Cette augmentation servira principalement à
l'ajustement des bases de financement des universités, pour 12 300 000
$, au redressement des déficits des universités, pour 6 700 000 $
et à l'aide
à la recherche universitaire, pour 5 700 000 $.
Enfin, toujours dans la mission sociale, 17 000 000 $ sont
ajoutés au budget du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu dans le cadre de l'instauration du programme
d'aide aux parents pour leur revenu de travail ou le programme APPORT. Ce
programme vise à faciliter l'entrée sur le marché du
travail des parents ayant à soutenir des frais de garde d'enfants ou des
parents gui ont des enfants à l'école ou à
l'université.
Dans le cadre des nouvelles mesures que le gouvernement a prises visant
la comptabilisation des engagements budgétaires à l'égard
des régimes de retraite, le Solliciteur général et le
ministère de la Justice verront leurs crédits augmenter
respectivement de 23 000 000 $ et 4 000 000 $ pour les régimes de
retraite des membres de la Sûreté du Québec et des
juges.
De plus, le programme d'aide à l'industrie des courses de chevaux
sera bonifié de 6 000 000 % et les provisions pour mauvaises
créances augmenteront de 50 000 000 $ à l'égard
principalement de la mise à jour des intérêts des comptes
à recevoir du ministère du Revenu.
Enfin, des crédits additionnels divers de 14 500 000 $ se
retrouvent dans divers ministères, ce gui fait une augmentation des
crédits, par ces crédits supplémentaires no 1 de 256 800
000 $. Je répète, par contre, gue ces crédits
supplémentaires n'augmentent pas les crédits totaux. Au
contraire, dans le cadre du discours sur le budget, les crédits totaux
pour l'année 1987-1988 sont diminués de 30 150 000 000 $ à
30 080 000 000 $.
Mme la Présidente, les résultats de l'année
financière 1986-1987 ont démontré gue le gouvernement a
été fidèle à l'engagement qu'il avait pris de
gérer les finances publigues de façon responsable. C'est dans le
même esprit que le gouvernement entend gérer le nouveau budget de
dépenses pour l'année 1987-1988. L'objectif central demeure
encore le maintien d'une croissance des dépenses compatible avec notre
capacité de payer.
L'effort de redressement commencé l'an dernier sera donc
poursuivi et se concrétisera notamment par une gestion vigilante des
ressources humaines et financières.
En guise de conclusion, Mme la Présidente, je tiens à
souligner que ces crédits supplémentaires complètent la
présentation des crédits budgétaires 1987-1988. Ils ne
constituent pas une hausse de budget, car ils seront financés à
même les crédits périmés additionnels et d'autres
ajustements prévus dans le discours sur le budget. Je
répète encore que ces corrections ont pour effet de faire passer
les crédits totaux de 30 150 000 000 $ à 30 080 000 000 $ qui est
l'objectif finalement établi pour les dépenses de 1987-1988.
Mme la Présidente, ce budget, comme celui de 1986-1987, sera
géré de façon rigoureuse afin de respecter les objectifs
gue le gouvernement s'est donnés. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre
délégué à l'Administration et président du
Conseil du trésor. M. le député d'Abitibi-Ouest, quelques
remarques préliminaires.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Je veux remercier le
président du Conseil du trésor de sa courte présentation,
parce que ce n'est pas en-dedans d'une demi-heure, alors qu'il y a dix minutes
de passées, qu'il reste beaucoup de temps pour le critique. Mais je
pensais que c'était important de contexter la présentation de ces
crédits supplémentaires. Je voulais prendre l'occasion, puisque
c'est ma responsabilité comme critique de l'Opposition en ces
matières, pour indiquer au président du Conseil du trésor
que c'est sur que c'est davantage dans chaque ministère sectoriel que
les questions seront plus élaborées et que des précisions
seront demandées comme je pense que c'est normal de le faire à
cette place.
Si j'ai voulu solliciter auprès du président du Conseil du
trésor une demi-heure, c'est principalement pour commenter, dans un
premier temps, deux éléments qui m'apparaissent, depuis le
début, pour le moins curieux. Après la présentation qu'on
appelle communément mes remarques préliminaires, j'aurai
peut-être une ou deux questions parce que c'est le temps qu'il nous
restera de toute façon puisqu'on doit finir à 15 h 35, n'est-ce
pas? On a commencé à 15 h 5.
Ce que je constate au sujet du président du Conseil du
trésor, à quelques semaines du dépôt de ses
crédits, c'est qu'on a assisté, bien sûr, à un
moment un peu spécial, dans sa forme en tout cas, à la
présentation du budget. La présentation du budget du ministre des
Finances fait gue rapidement, même s'il y a guelques semaines seulement
qui se sont écoulées, le ministre des Finances a indiqué
un rehaussement du niveau de dépenses dans certains secteurs, dans
certaines activités gouvernementales. C'est ce que le président
du Conseil du trésor vient de nous indiquer pour une somme totale de 256
800 000 $ en disant qu'il s'agissait, selon ses propres termes, d'une
bonification des crédits déjà déposés. Je
pense qu'il a tout à fait raison. C'est comme cela que nous comprenons
cela aussi. Cependant, l'illustration que je veux faire est
la suivante. Quant à nous, en ce qui nous concerne, comme
Opposition, ça fait deux ans qu'on assiste au même spectacle et
c'est un peu curieux qu'à quelques semaines de différence on ne
soit pas en mesure de présenter des crédits avec plus de
précision, d'exactitude quant aux montants de dépenses
autorisés. Alors que, règle générale, c'est la
responsabilité du Conseil du trésor de prévoir le niveau
de dépenses autorisé à la suite de ce que peut donner
l'activité gouvernementale globale, ce que la réflexion des
Finances permet de dégager à même les revenus qui entrent,
les emprunts, le niveau de dépenses qui sera autorisé au
gouvernement du Québec puisqu'on ajoute également
l'élément du déficit autorisé, et quand on
additionne du même côté revenus autonomes, transferts
fédéraux, emprunts et niveau de déficit, ça fait le
niveau de dépenses qui peut être prévu.
Je voulais juste indiquer au président du Conseil du
trésor que je trouve curieux que lui, comme président du Conseil
du trésor, n'ait pas la volonté de s'assurer, lors d'un processus
de discussion avec ses collègues pour établir le niveau de
dépenses dans chacun des ministères, avec le plus de
précision possible, avec le plus d'exactitude possible, quel sera le
niveau de dépenses autorisé. Parce que la conséquence de
cela, Mme la Présidente, c'est qu'on dirait toujours que cela a l'air
arrangé, que cela a l'air "gammické" - il n'y a pas d'autre terme
entre le ministre des Finances et le président du Conseil du
trésor. Je suis sûr de ce que j'avance.
Je donne un exemple. Il est facile de dire: Bon, on présente 10
000 000 $ de plus. On va prendre des exemples faciles. Il est facile
aujourd'hui de venir nous dire: On discute de crédits
suplémentaires pour une somme de 10 000 000 $ à l'Office de
planification et de développement du Québec, lorsqu'on sait
très bien que probablement de connivence avec le ministre des Finances,
le président du Conseil du trésor s'est entendu pour prescrire,
ou prévoir, lors du dépôt de ses crédits, un montant
tellement inférieur à celui qui était requis par rapport
aux années antérieures, d'une part, et par rapport à la
demande, non seulement des collègues, mais des besoins
spécifiques, des besoins précis qui étaient connus et
identifiés par le président du Conseil du trésor au moment
même de l'autorisation de l'inscription des documents officiels qu'on
appelle communément le dépôt du livre des
crédits...
Vous ne me ferez jamais croire que le président du Conseil du
trésor ne savait pas qu'il ferait une rallonge qu'on appelle
budgétaire à l'Office de planification et de développement
du Québec. Il me semble que ça vient atténuer la
responsabilité de l'État de faire son travail de prévision
le mieux possible pour s'assurer que lorsqu'on dépose les
crédits, ce sont davantage les crédits qui correspondent au
niveau de dépenses que le budget. J'ai rarement vu le discours sur le
budget devenir le livre des crédits. Avec le gouvernement, on ne sait
pas ce qui va arriver, on ne sait pas si dans quelques années cela ne
deviendra pas un peu futile de prétendre déposer des
crédits puisque, sur plusieurs postes budgétaires qu'on
reconnaît au livre des crédits, il y a des ajouts importants de
dépenses. Quand on a des sommes de 23 000 000 $ au ministère de
la Santé et des Services sociaux, de 23 000 000 $ au Solliciteur
général, de 65 000 000 $ au ministère des Transports, de
50 000 000 $ aux provisions pour créances douteuses, ce ne sont pas des
ajustements.
Qu'on prévoie, par exemple, 2 000 000 % de plus au
ministère des Affaires municipales et 1 000 000 $ à la
Régie de l'assurance-maladie, je comprendrais cela. Je dirais: Fcoutez,
ils ont joué franc la problématique de l'analyse des
crédits budgétaires requis en termes de dépenses. Le
discours sur le budget arrive et on est obliqé d'apporter certains
correctifs mineurs, des ajouts, ou l'autre voie, c'est d'envisager que le
discours sur le budget exige la présentation d'un budget
supplémentaire mais après quelques mois d'exercice
budgétaire, après quelques mois dans ce qu'on appelle le
vécu ou l'avancement de l'année budgétaire d'un
gouvernement. Comment voulez-vous qu'on comprenne qu'il y a des justifications
si ce n'est qu'encore une fois on a voulu faire accroire aux
Québécois que le gouvernement par son ministre des Finances
était sensibilisé aux besoins réels de certaines rubriques
administratives ou gouvernementales alors qu'il n'en est rien puisque dans
certains cas on a toujours un niveau de crédits inférieur
à celui qui existait il y a une couple d'années? C'est le cas,
entre autres, des crédits de l'Office -mes collègues le diront -
des crédits au ministère des Transports qui, même avec 65
000 000 $ où on a l'air bon prince, gentil, très souple et
très attentif aux besoins, sont encore à un niveau de
crédits -à peu près 85 000 000 $ - inférieur aux
crédits de 1985 indexés en dollars d'aujourd'hui. C'est la
première remarque que je voulais faire. (15 h 20)
La deuxième remarque que je voulais faire: cela prouve, M. le
président du Conseil du trésor, que l'état des finances
publiques ne devait pas être si lamentable que cela puisque, à
peine en une année, on a réussi à tourner cela tellement
que même si la réaction... Le président du Conseil du
trésor le disait lors du dépôt de ses crédits: On
est en mesure, chers amis, chers citoyens, chers électeurs et chers ce
que vous voulez, d'apporter une augmentation du rythme de
croissance des dépenses significative qui était, si ma
mémoire est bonne, de près de 6,8 % pas loin de 7 %. Trois
semaines après, comme si ce n'était pas assez dans un discours
sur le budget, Mme la Présidente, on a effectué des rallonges
importantes à plusieurs postes budgétaires pour une somme de 256
000 000 $. Que je sache, cela indique, d'une façon très claire,
que l'économie va bien. Les indicateurs économiques sont
performants et, en conséquence, ces données, les informations
qu'ils avaient au moment de la présentation du discours sur le budget,
il n'y avait absolument aucune de ces informations qui ne lui était pas
connue au moment de la présentation des crédits
budgétaires.
En conséquence, nous, on souhaiterait -j'en suis uniquement sur
la présentation et sur la forme - que, dorénavant, le
président du Conseil du trésor, s'il demeure dans ses
responsabilités - ce qui est passablement incertain, étant
donné des rumeurs de remaniement important, lors du prochain
dépôt des crédits, qu'il suive d'abord la bonne voie de
cette année dans le sens que ce sont des crédits qui sont un peu
plus compréhensibles.
Mais, au moins, qu'il s'en tienne davantage à l'analyse
gouvernementale qui doit conduire à la bonne justesse et à la
bonne rétention des éléments budgétaires sur
lesquels il y a lieu de s'entendre. Ce sont les deux remarques
préliminaires que je voulais faire.
Conservation et construction de routes
Voici la première question, M. le président du Conseil du
trésor que j'aimerais vous poser. Lorsque vous avez discuté des
crédits du ministère des Transports, parce que je sais un peu
comment cela s'établit, la nécessaire provision de
dépenses à être autorisée par le président du
Conseil du trésor, c'est dans un équilibre global de l'ensemble
de l'assiette dont le gouvernement peut disposer. Sauf que je voudrais savoir
du président du Conseil du trésor si le ministre des Transports
lui a présenté une demande supérieure aux crédits
qui figurent au livre des crédits y incluant les 65 000 000 $ que nous
observons, aujourd'hui, en crédits supplémentaires.
Alors, première question: Y a-t-il eu une demande
différente de celle qu'on observe au livre des crédits? Si oui,
de quel montant cette demande était-elle?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre
délégué à l'Administration et président du
Conseil du trésor.
M. Gobeil: Merci, Mme la Présidente. Il me fera plaisir de
répondre à la question du député d'Abibiti-Ouest,
mais je voudrais juste, en réponse à certaines de ses remarques,
lui souligner que ce à quoi on assiste, aujourd'hui, au moment de
l'étude des crédits supplémentaires, démontre le
résultat d'une bonne gestion.
Nous introduisons une flexibilité, étant donné les
événements et les circonstances par lesquels, entre le
dépôt des crédits budgétaires le 25 mars et la
lecture du discours sur le budget le 30 avril, il y a eu des
événements, principalement au sujet de la révision des
paramètres économiques, qui nous ont permis, premièrement,
de diminuer l'ensemble des dépenses gouvernementales prévues pour
l'exercice 1987-1988 et, d'un autre côté, de faire certains
ajustements -ce qui est sous étude aujourd'hui - pour 256 000 000 $.
J'aimerais rappeler - je pense que c'est la quatrième fois que je
le rappelle - que l'ensemble des dépenses, des crédits et des
dépenses probables pour l'exercice 1987-1988 diminuera de 70 000 000 $
en dépit des ajouts qu'on fait, c'est-à-dire passant de 30 150
000 000 $ prévus au dépôt des crédits à 30
080 000 000 $. Que le député d'Abitibi-Ouest soit bien
rassuré, il n'y a aucune connivence entre le président du Conseil
du trésor et le ministre des Finances. Il devrait connaître le
ministre des Finances mieux que cela. Je ne lui reprocherai pas de ne pas
connaître le président du Conseil du trésor. Je suis
nouveau en politique. Mais je pense que le ministre des Finances est là
depuis tellement d'années qu'on ne fait pas de connivence avec le
ministre des Finances. Dlusieurs postes budgétaires ont
été ajustés de quelques millions, oui, c'est vrai. Mais,
par exemple, compte tenu de 34 700 000 $ sur 8 900 000 000 $ de budget à
la santé, je pense que c'est tout à fait mineur.
Pour en venir à sa question précise, le ministre des
Transports n'a pas présenté de demande officielle pour les 60 000
000 $ qui ont été ajoutés à la conservation et
à la construction de routes. Mais ce montant découle
principalement du rapport Middlemiss qui suggérait une injection
supplémentaire de 400 000 000 $ dans le réseau routier, sous
forme de conservation et sous forme de construction, et la décision
gouvernementale qui a été prise entre le dépôt des
crédits et le discours sur le budget a été d'ajouter, pour
l'exercice 1987-1988, un montant supplémentaire de 60 000 000 $ pour la
conservation et la construction de routes, dans la proportion que j'ai
mentionnée tout à l'heure, c'est-à-dire la proportion de
38 000 000 $ et 22 000 000 $. Il n'y a pas eu de demande officielle, en
réponse à la question précise du député
d'Abitibi-Ouest.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Je voudrais juste indiquer au président du
Conseil du trésor qu'on est obligé de prendre la réponse
qu'il nous donne, mais qu'on vérifiera les prétentions du
ministre des Transports lorsque mon collègue aura l'occasion d'analyser
les crédits. On avait eu l'information selon laquelle il demandait des
crédits, je ne parle pas de crédits supplémentaires, je
parle des crédits totaux, supérieurs à ce qui lui a
été attribué au dépôt des crédits.
Même avec l'ajout de 50 000 000 $, cela constituait toujours, selon ce
qu'il nous a dit, une somme inférieure à la demande
budgétaire.
Si j'ai volontairement pris cela comme ma première question,
c'était pour amener la deuxième question. Comment le
président du Conseil du trésor, dans ses responsabilités,
pas de visionnaire, mais de responsable, de gestionnaire... Ce que je veux
illustrer, c'est que c'est sa responsabilité de voir l'ensemble du
niveau de dépenses du gouvernement du Québec. C'est la
responsabilité du président du Conseil du trésor de
décider de la masse totale des dépenses qui seront
effectuées par le gouvernement du Québec. Lorsqu'il a eu à
discuter avec ses collègues sectoriels du Conseil du trésor, tout
autant pour l'établissement des premiers montants déposés
aux crédits que pour la rétention définitive ou l'octroi
du montant de 24 600 000 $, par exemple, à l'Enseignement
supérieur et à la Science, quelle était l'analyse, la
logique? Selon quels critères le président du Conseil du
trésor fait-il cette planification des besoins du gouvernement? Depuis
le début - c'est volontaire si je pose cette question - j'ai toujours eu
l'impression que le président du Conseil du trésor dit: Je ne
m'occupe pas de cela, ce sont mes collègues qui font des demandes
budgétaires et ce sont eux qui ont à ajuster le niveau des
crédits qu'ils obtiennent. Mais je pense que le président du
Conseil du trésor a toujours déterminé en matière
de responsabilité le niveau de crédits autorisé. Je veux
savoir comment il effectue sa planification pour faire les rajouts
budgétaires dans chacun des ministères sectoriels.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre
délégué à l'Administration et président du
Conseil du trésor.
M. Gobeil: Concernant la réponse à la
première question, lorsque j'ai mentionné qu'il n'y avait pas eu
de demande officielle, c'était au niveau des crédits
supplémentaires.
Si le député d'Abitibi-Ouest me demande si le ministre des
Transports a eu exactement tous les crédits qu'il a demandés pour
l'exercice 1987-1988, je suis convaincu que le ministre, dans le cadre de ses
responsabilités sectorielles, aurait voulu avoir plus de crédits.
Je pense que c'est évident. C'est probablement la même chose pour
tous les ministres.
M. Gendron: ...Mme la Présidente, je pense qu'il va le
permettre. Quand vous m'avez dit: C'est évident qu'il n'y a pas eu de
demande pour des crédits supplémentaires, vous n'avez pas
à me répondre cela. Ces crédits supplémentaires,
vous l'avez dit correctement, proviennent du discours sur le budget. Alors,
c'est sûr qu'il n'y a pas eu de demande de crédits
supplémentaires, puisque dans le discours sur le budget c'est le
ministre des Finances qui a prétendu qu'il y avait lieu de bonifier les
crédits déposés. Donc, pour ce bout-là, je suis
couvert, il n'y a personne qui a demandé cela. Les crédits
additionnels, ce n'est pas une demande officielle à vous comme
président du Conseil du trésor par le ministère des
Transports. Excusez-moi, je voulais juste faire la correction.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Gobeil: Le député d'Abitibi-Ouest a
répondu à la deuxième question concernant le montant de 24
600 000 $ d'ajout au ministère de l'Enseignement supérieur. Il
vient de dire que c'était le ministre des Finances. Je vais lui laisser
supposer que c'était le ministre des Finances autant pour l'Enseignement
supérieur que pour les Transports. (15 h 30)
Planification des besoins
M. Gendron: Pour les crédits supplémentaires. Ma
question n'est pas pour les crédits supplémentaires. On peut bien
s'amuser, mais j'ai demandé au président du Conseil du
trésor comment il exerçait sa responsabilité de
planificateur du niveau des dépenses au Conseil du trésor pour la
somme totale des crédits accordés par le président du
Conseil du trésor dans le livre des crédits. Comment fait-il sa
planification?
La Présidente (Mme Bégin): M. le président
du Conseil du trésor.
M. Gobeil: D'abord, il faut accepter qu'au départ il y a
une analyse technique qui est faite par les fonctionnaires du Conseil du
trésor, en collaboration avec les fonctionnaires du ministère des
Finances pour certains éléments, entre autres, en ce qui concerne
les paramètres économiques. II y a des enveloppes totales qui
sont dégagées, des enveloppes de continuité, compte tenu
des dépenses de l'année antérieure, compte tenu de ce
qu'il y a dans le système et compte tenu des fins de programmes ou des
nouveaux programmes qui peuvent avoir été
autorisés. Cela nous donne une enveloppe globale pour chacun des
ministères qui nous donne le total des crédits qui pourraient
être exigés en fonction de ces études strictement
mathématiques de l'ensemble des départements et/ou
ministères gouvernementaux. À la suite de cela, en discussion
d'abord avec un comité du budget et, ensuite, au Conseil des ministres,
il y a une enveloppe globale qui est établie concernant le montant
maximal que le gouvernement est prêt à consacrer en
dépenses pour un exercice donné, pour ce qui nous concerne,
l'exercice 1987-1988. Les ajustements, compte tenu de cette limite globale,
sont faits dans chacun des ministères, normalement, en fonction de
critères identifiables à chacun des ministères, mais sans
arbitraire ou avec le moins d'arbitraire possible. Il est possible qu'il
s'incorpore un peu d'arbitraire - il est sûr qu'on n'a pas
nécessairement le monopole de la vérité sur tous les
éléments - mais le moins d'arbitraire possible.
La Présidente (Mme Bégin); M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: II me reste une question dans le temps qui nous est
imparti. Vous avez affirmé il y a quelques minutes, M. le
président du Conseil du trésor, qu'entre le moment du
dépôt du livre des crédits et la présentation du
discours sur le budget - je l'ai pris intégralement - vous avez dû
réviser les paramètres économiques. Sans être un
spécialiste de ces questions, je sais ce que sont les paramètres
économiques de l'économie du Québec et cela
m'étonne. Je voudrais vous poser une question, puisqu'on a des questions
à poser et c'est à vous de répondre. Sur quel
élément précis vous êtes-vous basé pour
prétendre qu'entre le moment du dépôt des crédits et
la livraison du contenu du discours sur le budget, il y avait lieu de
réviser les paramètres économiques alors que, règle
générale, quand vous faites l'établissement du niveau de
crédits qui sera autorisé par le gouvernement du Québec...
Vous ne me ferez pas accroire que l'ensemble des mêmes paramètres
économiques sur lesquels vous vous basez pour faire votre demande de
crédits n'étaient pas connus. Qu'est-ce qu'il y aurait de
changé en trois ou quatre semaines pour prétendre que la
révision des paramètres économiques concluait, parce que
c'est votre affirmation, à la capacité pour vous de livrer pour
256 000 000 $ de crédits additionnels autofinancés?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Gobeil: D'abord, Mme la Présidente, pour le
bénéfice du député d'Abitibi-Ouest, il le sait
sûrement, je veux simplement lui rappeler que les paramètres
économiques sont la responsabilité du ministère des
Finances et que le Conseil du trésor ou le président du Conseil
du trésor n'a pas d'intervention dans ce domaine de révision. Les
paramètres économiques ont été
révisés par le ministère des Finances entre le 25 mars
1987 et le 30 avril 1987. Cette révision on peut la retrouver à
la page 31 du discours sur le budget, à "Renseignements
supplémentaires", où on démontre une réduction
totale de 130 000 000 $ - c'est écrit noir sur blanc, à la page
31 - et il y a eu l'explication entre les 30 325 000 000 $ qui étaient
les crédits déposés initialement qui, diminués d'un
montant de 175 000 000 $, nous donnaient un montant de dépenses
probables de 30 150 000 000 $. Les ajustements qu'on retrouve à cette
page, dont 130 000 000 $ pour la révision des paramètres
économiques, nous donnent le total de dépenses probables, tel
qu'on l'estime aujourd'hui, qu'on l'estimait lors du discours sur le budget et
qu'on continue d'estimer aujourd'hui, de 30 080 000 000 $. C'était la
responsabilité et c'est toujours la responsabilité du
ministère des Finances de faire la révision des paramètres
économiques.
La Présidente (Mme Bégin): Une dernière
question, M. le député d'Abitibi-Ouest. Il reste une minute.
M. Gendron: Je veux simplement indiquer au président du
Conseil du trésor qu'on l'avait lu au livre des crédits ce que
vous venez de citer comme chiffres, sauf que, là, il me semble que c'est
davantage un paramètre budgétaire que ce qu'on appelle
communément les paramètres économiques. Les
paramètres économiques, ce sont les données reliées
au produit national brut, à l'inflation, à l'indice de richesse.
Quand vous dites que tout cela, c'est de la responsabilité du ministre
des Finances, je veux bien, mais, en règle générale, le
ministre des Finances parle au président du Conseil du trésor,
après moi, tout autant pour vous que pour le ministre des Finances,
c'étaient des éléments que vous connaissiez très
bien lors du dépôt des crédits. La question est celle-ci:
Qu'est-ce qui a fait qu'il y a eu lieu de réviser les indices de
l'inflation, le produit national brut, l'indice de richesse pour, à
quelques semaines d'intervalle, justifier le dépôt de 256 000 000
$ basés sur des paramètres économiques
révisés? Parce que c'est ça, votre affirmation.
La Présidente (Mme Bégin): Une courte
réponse, M. le ministre.
M. Gobeil: Étant donné le peu de temps, un
élément, par exemple: Entre le 25 mars et le 30 avril, il y a eu
une variation des taux d'intérêt. Donc, c'est un des facteurs qui
ont fait que l'ensemble des
paramètres économiques a baissé. Ce n'est pas
nécessairement le seul. On pourrait disséquer, si on avait plus
de temps, de nombreux chiffres qui nous donneraient le résultat qu'on
connaît au livre du discours sur le budget.
M. Gendron: Je disais que ces éléments, M. le
président du Conseil du trésor, étaient prévus
avant.
M. Gobeil: Mais les taux d'intérêt varient
normalement tous les jeudis.
La Présidente (Mme Bégin): On va terminer, puisque
le délai est expiré. Je remercie les participants et nous
suspendons nos travaux pour quelques minutes pour pouvoir reprendre un peu plus
tard.
(Suspension de la séance à 15 h 37)
(Reprise à 15 h 38)
Financement des universités
La Présidente (Mme Bégin): ...pour l'année
1987-1988 concernant le financement des universités. Je tiendrais
à vous aviser qu'on a une période d'une heure. Là-dessus,
je vais reconnaître M. le ministre de l'Éducation pour quelques
remarques préliminaires. M. le ministre. M. le ministre, pour quelques
remarques préliminaires.
M. Ryan: Oui, madame.
Mme Blackburn: On aurait pu lui demander s'il était
prêt, n'est-ce pas? La présidente me demandait tout à
l'heure si j'étais prête. Ce que je dis, c'est peut-être au
ministre qu'il aurait fallu le demander.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Ryan: Mme la Présidente, vous m'aviez passé la
parole, je pense. Est-ce que je pourrais avoir un verre d'eau, s'il vous
plaît? Merci.
La Présidente (Mme Bégin): Ah! Oui, oui.
Remarques préliminaires M. Claude Ryan
M. Ryan: Au livre des crédits supplémentaires
déposé par le ministre des Finances, on trouve en page 12, au
Programme 6, Enseignement universitaire, élément 1, un montant de
24 600 000 $. La remarque inscrite en-dessous de ce montant est la suivante:
"Ce programme vise à promouvoir l'enseignement et la recherche en
fournissant aux universités les ressources financières
nécessaires à leur fonctionnement et à leur
développement."
Cette inscription dans les crédits supplémentaires fait
suite aux mesures annoncées par le ministre des Finances dans le dernier
discours sur le budget. Dans le dernier discours sur le budget le ministre des
Finances avait annoncé les mesures suivantes. D'abord, des
crédits additionnels de 15 000 000 $ par année universitaire
seront accordés aux universités pour relever de façon
permanente leur base de financement. Les fonds seront accordés en
priorité aux établissements qui sont désavantagés
par la formule actuelle de financement.
De plus, des montants de 8 000 000 $ en 1987-1988 et de 7 000 000 $ en
1988-1989 seront accordés aux universités pour les aider à
éliminer leur déficit, l'allocation de ces montants devant
être conditionnelle à la présentation par les
établissements concernés de plans de résorption de leur
déficit.
Ensuite, afin de renforcer la capacité de recherche des
universités québécoises, une somme de 44 000 000 $ est
mise à leur disposition pendant les quatre prochaines années
universitaires. L'aide accordée à ce titre servira à payer
les dépenses qui seront effectuées pour l'acquisition
d'équipement scientifique, l'achat de matériel de
référence nécessaire à la recherche et le
financement des coûts indirects associés à ce type
d'activité. Pour la prochaine année scolaire, les sommes
affectées à ces fins totaliseront 17 000 000 $.
Le montant que nous avons aux crédits supplémentaires, les
24 600 000 $, c'est la traduction en année budgétaire de ces
montants qui avaient été annoncés en fonction des
années universitaires. L'année universitaire et aussi
l'année financière des universités vont du 1er juillet au
30 juin. Alors, si on transpose en année budgétaire les mesures
annoncées par le ministre des Finances, le résultat est celui
qu'on a pu constater au livre qui était annexé au discours sur le
budget. Ça donne 24 600 000 $.
Je ne sais pas s'il faut d'autres explications là-dessus. J'en
aurai peut-être une autre à fournir. La députée de
Chicoutimi me demandera peut-être: Oui, vous avez fait l'annonce de ces
mesures, mais qu'est-ce qui est arrivé depuis? Comment ces sommes
seront-elles réparties entre les universités? Comment
procédera-ton à l'attribution des sommes suivant les
différents établissements universitaires?
Je fournirai volontiers des explications sur le processus que nous avons
décidé de retenir à cette fin, si la question fait l'objet
d'une demande d'explication de la part de la députée. Je pense
avoir dit l'essentiel. Cela veut dire en gros que pour l'année 1987-
1988, c'est-à-dire l'année universitaire commençant
le 1er juillet, des sommes additionnelles d'une valeur totale de 40 000 000 $
seront injectées dans les universités, certaines sous formes de
dépenses d'investissement, d'autres sous forme de dépenses de
fonctionnement. Le point le plus important dans toutes les mesures
annoncées, c'est évidemment le relèvement de la base de
financement de 15 000 000 $. Cela est permanent et récurrent.
Un autre point très important ce sont les mesures qui ont
été annoncées pour le financement des coûts
indirects de la recherche. Quand un département où un professeur
d'université obtient un contrat de recherche, le contrat porte
généralement sur le financement des ressources humaines qui vont
servir immédiatement à la recherche: le professeur et ses
assistants, mais les frais indirects de la recherche, les frais de locaux, les
frais de communication, les frais d'administration ne sont pas compris
là-dedans. On calcule que pour chaque dollar qui est
dépensé directement pour les buts mêmes de la recherche, il
y a un autre dollar qui doit être dépensé en frais de
soutien. Le gouvernement injecte une somme importante de 7 000 000 $ par
année pour les deux prochaines années pour le soutien des frais
indirects de la recherche.
L'autre point, c'est le redressement des déficits des
universités. Au 30 juin 1986, c'est-à-dire après neuf
années de gestion du gouvernement précédent, le
déficit accumulé des universités était
considérable; il était près de 100 000 000 $ par
année. Au moins 85 000 000 $. Cela a augmenté encore au cours de
la dernière année. Là on s'est dit: II faut mettre un
frein à ces déficits parce qu'autrement on va encourir une
situation catastrophique. C'est pourquoi le gouvernement, à compter de
la présente année, entame un processus de redressement de la
situation budgétaire qui s'est accumulée dans les
universités au cours des dernières années.
C'est l'essentiel des mesures prises. Les crédits
supplémentaires demandés par le ministre des Finances sont la
traduction de ces mesures en termes budgétaires.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Chicoutimi quelques remarques
préliminaires.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Vous savez, on se
donne entre nous l'impression qu'il y a quelque chose de nouveau dans cela. Je
dois dire que cela fait déjà quelques reprises qu'on a l'occasion
d'échanger des propos sur les crédits additionnels à
l'enseignement universitaire. Je me permettrai simplement de rappeler que c'est
devenu une habitude avec ce gouvernement pour laisser durer plus longtemps le
suspense d'annoncer qu'il va y avoir des mesures particulières qui vont
être prises après le dépôt des budgets, ce qui fait
qu'on nous arrive quelques semaines plus tard avec les crédits
additionnels. On se retrouve ensemble à ce moment en train de faire
semblant qu'il y a quelque chose de neuf dans cela. Cependant, je vais tout de
même profiter de l'occasion au moins pour dire ici en cette Chambre que
c'est fort peu si on compare avec ce que le ministre avait demandé au
premier ministre dans une note publiée dans le journal Le Devoir
au début de l'année.
On se rappellera qu'au moment où le ministre présentait un
plan de redressement au chef du gouvernement, il indiquait dans sa note que
c'était considéré comme extrêmement modeste,
très conservateur et en deça duquel les mesures seraient
considérées comme insuffisantes. D'ailleurs, c'était le
commentaire des universités qui, à ce moment, il faut se le
rappeler, de même que les organismes qui les regroupent, ont dit: Oui,
c'est bien, sauf que c'est vraiment le strict minimum et on estime que c'est
parce que le ministre n'est pas capable d'aller chercher mieux qu'on lui
accorde notre appui de manière que ce qui est considéré
comme le strict minimum au moins il puisse aller le chercher. On connaît
la réponse qu'a apportée le Trésor à la suite de
cette demande. On est obligé de constater que le ministre, même
avec l'appui des universités, n'a pas eu le poids nécessaire ou
suffisant pour faire pencher la balance en faveur des universités.
Il est peut-être intéressant de rappeler aussi, comme on
nous en donne actuellement l'occasion, que ces crédits ne permettraient
de ramener le niveau de financement qu'à celui de 1985-1986. Il n'y a
rien d'extraordinaire dans cela. Cela veut seulement dire que le niveau de
1985-1986 estimé par le ministre comme étant inacceptable, trop
bas, risquant de mettre en danger la qualité de l'enseignement, on est
tout juste en train de l'atteindre, même qu'on est encore un peu plus
bas. Le ministre va nous dire comme il nous a déjà dit: Bien
sûr, mais on est bon, on a réussi à atteindre le même
niveau. On l'aurait trouvé plus "smart" s'il avait réussi
à le maintenir et à l'élever un peu au cours des deux
premiers exercices financiers.
Mme la Présidente, si vous permettez, j'aimerais qu'on rappelle
brièvement les demandes du ministre et ce qu'il a effectivement
reçu. Dans la note qu'il adressait au premier ministre, il demandait 20
000 000 $ en matière d'ajustements de la base de financement pour
1987-1988. Il a reçu 15 000 000 $. Pour la résorbtion du
déficit, il demandait 8 000 000 $, et là on doit dire qu'il a eu
ces 8 000 000 $. Sauf
que j'ouvre une parenthèse pour dire que cela ne viendra -
à moins que le ministre ne vienne me dire le contraire - en rien
corriger l'inéquité envers les universités qui, elles,
malgré des conditions difficiles, n'ont pas de déficit. On est en
train d'aider celles qui en ont fait, qui n'ont pas respecté les
règles et qui ne sont pas soumises aux compressions. Par ailleurs,
celles qui ont respecté les règles, je ne vois rien dans cette
mesure qui vienne encourager une saine gestion ou reconnaître dans les
faits et de façon concrète que l'effort qu'elles ont fait est
effectivement apprécié par le ministre. Enfin, à l'aide
directe à la recherche, le ministre avait demandé 10 000 000 $,
il en reçoit 7 000 000 $, pour un sous-total, pour l'année
1987-1988, de 38 000 000 $ de demandes qu'il faisait, de 30 000 000 $. Il y a
donc un écart de 8 000 000 $. Si je refais l'exercice pour 1988-1989 le
même écart se répète. C'est-à-dire que le
ministre demandait 37 000 000 $ et le président du Conseil du
trésor lui offre 29 000 000 $. (15 h 50)
Au total, ce que le ministre demandait, je le rappelle, c'est qu'il
estimait être extrêmement modeste en se disant: En faisant des
demandes modestes, j'ai de bonnes chances qu'il se rende compte que je n'ai pas
été extravagant parce qu'il lui arrive d'avoir des
exagérations verbales.
Alors, il dit: À ce moment-là, je vais être
très modeste. Certain qu'on va reconnaître la justesse de mon
argumentation et la rigueur de ma gestion parce que je propose un certain
nombre de mesures susceptibles de corriger la situation et on va me donner au
moins ce que je demande. Mais cela n'a pas été le cas.
Au total, ce que le ministre demandait, c'était 75 000 000 $. Ce
qu'il a obtenu, c'est 59 000 000 $ et c'était estimé par lui
comme extrêmement modeste et cela a été
considéré par les universités, par le Conseil des
universités, par la Conférence des recteurs et principaux
d'universités comme le strict minimum. Donc, on se retrouve en
deçà de ce qui était estimé comme le strict minimum
et il s'agit des budgets de fonctionnement.
Pour les investissements, le tableau n'est guère plus reluisant.
Il l'est même moins. Le ministre demandait, en matière
d'équipement scientifique - je me rappelle les discours du ministre sur
la désuétude de certains équipements, la
nécessité de procéder rapidement, l'urqence de le faire et
te retard du Québec en ces matières - 15 000 000 $; on lui offre
exactement le tiers pour 1987-1988, c'est-à-dire 5 000 000 $. Les
bibliothèques. Dans ce cas, il a réussi à obtenir ce qu'il
demandait, c'est-à-dire 5 000 000 $. Pour le réaménagement
des immeubles, 15 000 000 $ et, là, pour le moment, c'est zéro.
J'appelle cela un 100 % d'échec. À moins que le ministre n'ait
choisi de répartir ailleurs le peu qu'on lui avait donné.
Pour un sous-total de 35 000 000 $, le ministre a obtenu 10 000 000 $.
C'est pour 1987-1988. Cela veut donc dire que, si on évalue la
performance du ministre, c'est qu'il a obtenu moins du tiers que ce qu'il avait
demandé.
Aux cartes, au jeu, on considérerait qu'il est battu. Sur la
question des crédits, on peut estimer, au-delà de la parade que
le ministre a faite pour essayer de faire passer ces gains comme des gains
appréciables, il n'a pas été à même de
défendre ce qu'il estimait être - je répète ses
propos - le strict minimum, une demande très modeste.
Pour 1988-1989, il demandait, au total, 35 000 000 $ en investissements
et il a reçu 10 000 000 $. Alors, au total, en investissements, il
demande 70 000 000 $, on lui offre 20 000 000 $.
Alors, vouloir faire une parade et essayer d'impressionner les
universités en leur disant qu'on avait fait des gains importants,
prendre la peine de présenter cela en crédits additionnels, je ne
trouvais pas que ça méritait un tel traitement. Je ne pense pas
que cela ait impressionné beaucoup les universités. Je sais que
certaines d'entre elles entendent faire des représentations, si ce n'est
déjà fait auprès du ministre.
Donc, au grand total, le ministre demandait, pour les investissements,
70 000 000 $; on lui en offre 20 000 000 $ du total de ces demandes,
c'est-à-dire investissements et fonctionnement, 145 000 000 $, il
obtient 79 000 000 $. C'est sur deux ans; il faut se le rappeler. Pas sur une
année, comme c'était estimé, mais sur deux ans. Alors,
c'est une performance que j'estime très en deçà de ce que
les universités attendaient, de ce que les universités estimaient
comme le strict minimum.
Le ministre m'a invitée, tout à l'heure, à
l'interroger sur le partage qui pourrait être fait de ces sommes. Le
ministre nous a dit qu'en ce qui concernait l'ajustement des bases de
financement il irait, selon les situations et selon les besoins des
universités.
Il s'est dit et il nous a dit également que, pour faire ce genre
d'arbitrage, il consulterait le Conseil des universités et qu'il
entendait échanger avec la CREPUQ, la Conférence des recteurs et
principaux des universités du Québec.
J'aimerais savoir du ministre si la répartition des enveloppes
supplémentaires entre les universités est complétée
par le ministère. Est-ce que les universités ont
été informées de ces répartitions?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
Discussion générale
M. Ryan: J'hésite un peu, Mme la Présidente, parce
que je cherche où j'aurais dit ce que Mme la députée
m'attribue dans le mémoire que j'ai remis au premier ministre en janvier
dernier? Vous dites que j'ai parlé d'un strict minimum dans ce
mémoire et de choses extrêmement modestes en deçà
desquelles on ne pourrait pas aller pour aucune considération. Je n'ai
pas employé de termes comme ceux-là. J'ai devant moi la
déclaration, le texte du mémoire que j'ai remis au premier
ministre, et, franchement, je ne me souviens pas du tout d'avoir employé
des termes comme ceux-là.
Mme Blackburn: Je pourrais juste rafraîchir la
mémoire du ministre tout de suite. Ce n'est pas dans le document qu'il a
communiqué, c'est en commission parlementaire, au moment où il
faisait un peu le bilan à la fois des démarches et des sommes
qu'il avait obtenues. Il a utilisé et on peut le reprendre dans les
galées de la commission parlementaire... Volontairement, il avait fait
des demandes extrêmement modestes. D'ailleurs, le commentaire du strict
minimum, je l'ai rappelé, c'était des différents
intervenants des universités. C'est seulement pour faire une mise au
point.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Ryan: Si on écoute la députée de
Chicoutimi, elle commence par nous attribuer des choses, et à mesure
qu'elle avance, elle les attribue à d'autres. J'aimerais que ce soit
clair. Vous relirez les déclarations que vous avez faites dans les
galées et vous verrez que ce que je dis est juste. Dans le
mémoire que j'ai remis au premier ministre en janvier, il n'y avait rien
qui ressemblait à une mise en demeure ou à un langage
catastrophique. Je présentais des propositions clairement et
franchement, mais sans ce genre de commentaire.
C'est vrai qu'à l'étude des crédits, j'ai dit que
ce que nous avions demandé était extrêmement modeste, et je
le pense encore aujourd'hui. Mais je n'ai jamais voulu laisser entendre,
à aucune étape du processus, que je substituais mon jugement
à celui du gouvernement. Je fais partie du gouvernement, je fais mes
recommandations à mes collègues, au chef du gouvernement en
particulier. Là, l'ensemble du gouvernement prend ses décisions,
et, si je ne suis pas content, je prends mon chapeau et je rentre chez moi. Si
j'accepte les décisions, j'en suis solidaire, c'est parce que j'en suis
relativement satisfait, à tout le moins. C'est évident que
j'aurais mieux aimé que l'on nous accordât 100 % de ce qui
était demandé, c'est évident, mais quand on obtient une
somme comme celle qu'on a obtenue, qui est de l'ordre de 75 % à 80 %...
Je regardais un de mes collègues qui écoutait la
députée de Chicoutimi tantôt et qui avait l'air de me dire:
Si le ministre me donnait cela pour mes écoles, 80 % de ce que je
demande, je serais très bien servi dans mon comté.
Je pense que, dans le contexte où nous sommes, c'est très
satisfaisant, et je crois que la députée de Chicoutimi le sait
très bien. Je comprends que c'est un peu embarrassant pour l'Opposition
parce qu'en moins d'un an et demi, nous avons réalisé le taux
d'augmentation des subventions de fonctionnement aux universités le plus
élevé depuis de très nombreuses années. J'en ai
fait la démonstration en commission parlementaire, à
l'étude des crédits. Le taux d'augmentation des subventions de
fonctionnement pour l'année 1987-1988 sera de l'ordre de 10,9 %.
Je ne pense pas que l'on ait eu un taux comparable depuis de nombreuses
années et même cette année 1985-1986, à laquelle la
députée de Chicoutimi aime souvent se référer, non
sans raison - quoique j'aie déjà expliqué le contexte dans
lequel cette année avait donné lieu à de tels
résultats - a produit un taux d'augmentation inférieur à
10,9 %. Je pense que le taux d'augmentation cette année-là a
été d'un peu plus de 8 %. C'était très bien
comparé à la disette qui avait sévi pendant plusieurs
années antérieurement. Ce que nous faisons cette année est
pas mal mieux que ce qui est arrivé en 1985-1986. Si je me trompe,
j'aimerais qu'on m'en fasse la preuve, mais jusqu'à preuve du contraire,
je pense qu'on est obligé d'accepter mon assertion. (16 heures)
Cela, c'est un point de départ. Cela s'est fait en deux
étapes. Mais qu'on ait franchi deux étapes en l'espace d'un an,
alors que sous l'ancien gouvernement, cela a pris dix ans pour arriver à
une première étape préélectorale, je pense que
c'est quand même pas mal. On a toutes les raisons d'espérer qu'il
se produira rie nouvelles améliorations au cours des deux prochaines
années, vu que les choses faites et annoncées embrassent la
présente année mais sont la première étape d'un
programme de redressement qui va durer deux ans et au-delà duquel nous
sommes censés produire une formule permanente et stable de financement
des universités.
Partage des sommes
Cela étant dit, ces choses étant clarifiées de
manière, je l'espère, complète pour la
députée de Chicoutimi, je voudrais répondre à la
question qu'elle m'adressait tantôt quant à la démarche que
nous avons instituée afin de décider du partage des
sommes qui ont été ajoutées aux crédits des
universités dans le dernier budget. J'ai rencontré les membres de
l'exécutif de la Conférence des recteurs la semaine
dernière pour discuter précisément de ce sujet. Mes
collaborateurs du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science ont préparé avec moi depuis le dépôt du
budget une série d'hypothèses concernant la répartition
possible des ajouts de ressources consentis par le gouvernement aux
universités.
Nous avons fait à peu près toutes les hypothèses
imaginables; nous avons dû préparer une douzaine de
scénarios différents. Par exemple, on mettait un certain taux de
subventionnement pour les étudiants de premier cycle, un certain taux
pour les étudiants de deuxième cycle, un autre pour les
étudiants de troisième cycle. Disons qu'on finançait
à une unité pour le premier cycle, une unité et demie pour
le deuxième cycle, deux unités pour le troisième. Une
unité, deux unités, trois unités; une unité, une et
demie, deux, deux et demie, on a fait toutes les hypothèses
imaginables.
On a fait la même chose pour le partage de l'augmentation de la
base de financement de 15 000 000 $. On peut décider de les
répartir les 15 000 000 $ sur la base des têtes
d'étudiants. On peut décider de les répartir sur la base
du partage qui se faisait déjà l'année
précédente. On peut décider de les répartir sur la
base des calculs que nous faisons quant au degré de sous-financement
dont certaines universités ont pu souffrir. Nous avons
préparé divers scénarios, une douzaine comme je l'ai dit,
et quand j'ai rencontré les membres de la Conférence des
recteurs, la semaine dernière, j'ai déposé sur la table
l'un de ces scénarios à titre indicatif, parce que je ne voulais
pas qu'on discute dans les nuages et je voulais qu'on en vienne vite à
des conclusions. Je leur ai proposé un scénario dont je savais
qu'il ne pourrait pas être accepté à l'unanimité
illico, le soir même. Nous avons échangé des propos
là-dessus; cela a fourni une excellente base de discussion, parce que
tout de suite nous en venions aux choses concrètes.
À la fin de la réunion, les recteurs m'ont dit: Nous
aimerions y penser un peu, nous aimerions faire des projections et des calculs
de notre côté. Nous sommes convenus que nous nous donnons
jusqu'à la fin de l'été pour en venir à des
conclusions. J'ai bien prévenu les recteurs que les décisions
seront prises par le gouvernement au terme d'un échange qui aura
été loyal et suffisamment élaboré. C'est
évident qu'on ne prendra pas les décisions à 25 personnes
ensemble. Au bout de la ligne, quand nous aurons entendu tous les points de
vue, nous déciderons du partage des sommes au meilleur de notre
connaissance, mais après nous être enquis de tous les
éléments du problème.
Pour l'instant, je voudrais dire à la députée de
Chicoutimi, parce je sais l'intérêt qu'elle porte à ces
choses, ce que nous envisageons. Une partie des 15 000 000 $ pour le
redressement de la base de financement sera attribuée au prorata des
subventions déjà accordées pour l'année 1986-1987,
c'est-à-dire au prorata du nombre d'étudiants équivalence
temps complet. Il y en a une partie qui sera attribuée selon notre
appréciation du degré de sous-financement qui a pu intervenir
dans le cas d'un certain nombre d'établissements au cours des
dernières années. Évidemment, vous me demanderez: Quelle
base retiendrez-vous pour établir un degré de sous-financement?
Nous avons déjà des hypothèses, il y en a plusieurs. Vous
savez que nous sommes en train de réviser toute la base de calcul des
étudiants à temps complet. Il y a bien des choses qui
étaient imparfaites dans la base qui existait. Nous sommes en train
d'implanter un nouveau système, le sytème RECU, qui nous
permettra d'arriver a une plus grande précision, à une plus
grande clarté dans ces choses. Il faudra retenir un facteur. Ensuite, il
s'agira de décider: est-ce que ce sera 50-50, 75-25, 80-20, 66-33?
Toutes les hypothèses sont possibles, il faudra en retenir une vers la
fin de l'été. Ensuite, on indiquera à chaque
établissement le montant auquel il aura droit.
En ce qui concerne les déficits, nous ne pouvions pas commencer
à faire des procès d'intention et à imputer des mesures
diverses de culpabilité à l'un ou l'autre établissement.
Ici, nous procéderons en partant des dépenses qui étaient
jugées admissibles et, suivant les déficits qui auront
été encourus. La proposition que nous faisons aux
universités, c'est qu'il y a une part qui sera attribuée à
chaque établissement ayant encouru des déficits, une part qui
sera bien faible par rapport à l'ensemble des déficits, mais qui,
quand même, permettra un redressement. Comme vous le savez, chaque
établissement doit nous fournir aussi, avant que nous prenions les
décisions à ce sujet, un plan de redressement de sa situation
financière et j'apprends avec grand plaisir que, déjà,
l'opération que nous avons instituée est en train de produire des
fruits très salutaires.
J'apprenais qu'à l'Université de Montréal, par
exemple, on évolue, pour l'année 1987-1988, vers un budget qui,
à toutes fins utiles, sera équilibré pour la
première fois depuis de nombreuses années et inutile d'ajouter
qu'avec le surcroît de ressources, qui viendra des mesures
spéciales instituées dans le discours sur le budget, il y aura
une possibilité même de commencer à entamer la dette de
manière sérieuse.
À l'Université de Sherbrooke, j'apprenais, ces jours
derniers, que le recteur vient de déposer un budget qui, lui aussi,
sera équilibré et avec le surcroît de ressources que
nous injecterons également dans cet établissement, je pense que
les chances de respirer convenablement seront considérablement
améliorées pour l'Université de Sherbrooke, et je m'en
réjouis. J'ose espérer que, dans les autres
établissements, on fonctionnera dans la même direction.
Cela donne un peu les renseignements qui peuvent être
communiqués à ce moment-ci. J'attends des nouvelles de chaque
établissement universitaire au sujet du scénario que nous avons
communiqué aux universités l'autre jour. J'ai dit aux
universités qu'elles pourraient avoir accès à tous les
autres scénarios que nous avions établis et qu'ensemble nous
essaierons d'arriver à des conclusions acceptables de tous d'ici
à la fin de l'été.
La Présidente (Mme Bégin): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Mme la Présidente, je vais dégonfler
tout de suite les 10,9 % du ministre. Il faudrait rappeler d'abord que, l'an
passé, il a effectué des coupures et compressions de l'ordre de 4
% et qu'ensuite, cette année, les 10,9 %, cela comprend juste
l'inflation. Si on calcule la coupure de l'an passé de 4 % plus
l'inflation de cette année de 4 %, cela donne 8 %, et plus
l'augmentation de la clientèle, vous allez voir que ce n'est pas quelque
chose qui permettra aux universités de crier victoire demain matin.
Il reste quand même quelques questions concernant les informations
que le ministre vient de nous fournir. Premièrement, je voudrais dire au
ministre que ma question ne voulait pas l'inviter à faire le
procès des universités concernant les déficits. Ce n'est
pas mon intention, mais je demandais au ministre, et ma question est claire
là-dessus: Si on aide les universités qui ont fait des
déficits, dans quelle mesure, par mesure d'équité,
reconnaît-on celles qui n'en ont pas fait? La question est claire. Cela
m'a toujours un peu préoccupée. C'est comme si, tout à
coup, aujourd'hui, les universités qui ont respecté les
règles qui étaient imposées, et c'est tout le
réseau de l'UQ en particulier, ne se voient pas reconnu l'effort
qu'elles ont fait. Il me semble qu'il y a une question d'équité
dans cette question-là. Je ne veux pas faire le procès des autres
universités, mais je veux simplement voir dans quelle mesure on
reconnaît les efforts consentis par ceux qui ont coupé dans des
services et dans des programmes pour respecter les contraintes qui
étaient imposées par le gouvernement. C'est ma première
question.
Deuxièmement, le ministre nous dit que sa répartition,
c'est-à-dire la base de financement, sera établie de la
façon suivante: d'une part, une partie de cette somme qui est de 15 000
000 $, si ma mémoire est fidèle, va être répartie
selon le ratio, il dit bien, étudiant équivalent temps complet,
et l'autre, ce serait par appréciation du sous-financement des
universités. Dans quelle proportion? 50 % des 15 000 000 $ qui seraient
répartis selon le premier mode, c'est-à-dire également
entre les universités au prorata des populations étudiantes? Je
voudrais savoir cela. Ensuite, le ministre ne nous a pas dit comment il
procéderait en ce qui touche les équipements et les frais
indirects de la recherche. Ce sont deux autres questions. En fait, il y en
avait quatre.
M. Ryan: La toute dernière partie. Pourriez-vous
répéter la dernière phrase, s'il vous plaît?
Mme Blackburn: Pour les frais indirects de la recherche et des
équipements, comment il entendait répartir ces budgets.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre. (16 h
10)
M. Ryan: Très bien. Oui, Mme la Présidente, je vais
répondre volontiers à ces questions. En ce qui touche tout
d'abord les déficits, nous n'entendons pas faire le procès de
mérite ni d'intentions et je pense que la question de la
députée de Chicoutimi nous conduirait à ça. Nous ne
jugeons pas la performance passée. J'ai bien dit que le montant
demandé pour le redressement très partiel des déficits des
universités est fort réduit par rapport à l'ensemble des
déficits encourus depuis sept ou huit ans maintenant. Nous avons bien
dit que la part de déficit qui serait financée - ce serait
seulement une partie - sera fondée, dans une très grande mesure,
sur le lien qui a pu exister entre ces déficits et le
phénomène de sous-financement.
Ce n'est pas pour rien que sont arrivés des déficits,
c'est parce qu'il y a eu des phénomènes de sous-financement dans
la majorité des cas. Il y a un lien entre les deux. C'est pour ça
qu'on a demandé cette mesure-là. Par conséquent, il n'est
pas question de retourner en arrière et de dire: Ceux qui n'ont pas fait
de déficit on va les financer a posteriori. Ce serait absolument
contraire à l'esprit de cette mesure-là. C'est une mesure
à portée très limitée, mais qui ne sortira pas des
paramètres que j'ai indiqués dès le début.
Dans le mémoire que j'ai adressé au premier ministre en
janvier, cela était parfaitement clair. Ça vaudrait la peine que
je le sorte. Je vais le ressortir tout de suite. "Injection d'une somme
forfaitaire de 15 000 000 $ répartie sur deux ans pour aider les
universités à entreprendre un
programme de redressement de leurs déficits accumulés.
L'octroi de subventions à ce titre sera fonction du plan de redressement
présenté par chaque université. Toute université
ayant un déficit accumulé sera tenue de présenter un plan
de redressement."
Dans ce passage, il n'y a pas l'idée que je viens
d'énoncer. Je l'ai énoncée à plusieurs reprises
dans différentes circonstances à l'époque. Je ne serais
pas étonné qu'elle ait été retenue comme telle,
d'ailleurs, dans le... Non, ce n'est pas retenu dans le discours sur le budget
non plus, mais c'était clairement le principe qui sous-tendait cette
proposition-là. Vous vous souviendrez, j'ai dit en commission
parlementaire, l'été dernier, qu'on verrait le lien entre le
sous-financement et la situation qui a acculé un certain nombre
d'universités à des déficits. On peut discuter ça
longtemps. C'est une mesure pratique. Il fallait agir dans l'immédiat,
c'était la plus simple, c'est celle que nous retenons.
La deuxième question de la députée de Chicoutimi
porte, je pense, sur le partage des 15 000 000 $ devant servir à
redresser la base de financement entre la partie qui sera attribuée sur
la même base que les années précédentes,
c'est-à-dire sur le nombre d'étudiants à temps complet ou
équivalence à temps complet et, deuxièmement, la part qui
sera attribuée au titre du sous-financement. Je ne peux pas donner de
réponse à la députée de Chicoutimi là-dessus
parce que nous sommes à l'étude là-dessus actuellement.
Comme je l'ai dit, nous avons élaboré une douzaine de
scénarios différents à partir de 20 %-80 %, 25 %-75 %, 33
%-66 % jusqu'à 90 %-10 %, 75 %-25 %, 80 %-20 %, 75 %-25 %, etc. On a
fait tout le tour de l'arc-en-ciel. Cela donne évidemment des
résultats fort différents et je crois pouvoir dire à la
députée de Chicoutimi que la réponse se situera aux
environs de 50 %-50 % ou un montant supérieur basé sur le mode
actuel de financement parce que nous voulons créer le moins de
perturbations possible. Nous ne voulons pas effectuer de changements brusques
dans le financement des universités. C'est pour ça que nous
cherchons entre 50 % et 100 %. Cela est en discussion avec les
universités.
Justement, M. Léonce Beaupré, qui est directeur
intérimaire de la Direction des études et recherches
universitaires au ministère, m'a informé, tantôt,
qu'aujourd'hui même les vice-recteurs aux finances des universités
et les fonctionnaires du ministère sont réunis pour l'examen des
implications de ces différentes hypothèses et nous mettons tous
nos tableaux entre leurs mains pour que ce travail-là se fasse en pleine
connaissance de cause de part et d'autre.
La troisième question...
Mme Blackburn: Les frais indirects de recherche.
M. Ryan: Ah oui! Le mode de répartition des sommes
attribuées pour les bibliothèques et les équipements et
les frais de recherche. En ce qui touche les frais indirects de recherche, le
critère que nous sommes enclins à retenir, pour l'instant, est
celui du montant des contrats de recherche obtenus dans chaque
université au cours d'une année donnée, l'année la
plus récente pour laquelle nous ayons des données fiables et
à peu près complètes. Nous nous fonderions sur ces
données pour établir la part qui reviendrait à chaque
université.
En ce qui touche les montants attribués pour les
équipements et pour les bibliothèques, ce serait attribué
sur la base dans le cas des équipements de surface par étudiant
disponible dans chaque université aux fins de laboratoire et
d'équipement. Dans le cas des bibliothèques, ce serait sur le
nombre d'unités de volumes ou de documentation disponibles dans chaque
université par étudiant. C'est en partant de là qu'on
donnerait une part à chaque université. Par conséquent, il
n'y aurait pas de jugement à porter qui présumerait des
conclusions auxquelles nous en viendrons dans l'établissement de la
formule permanente de financement sur laquelle nous allons nous mettre au
travail tout de suite après. Ce sont les critères que nous avons
proposés aux universités. Je pense que cela fait une très
bonne base de travail.
La Présidente (Mme Bégin): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Juste une précision sur les frais
afférents ou les frais indirects de la recherche. Le ministre parle sur
la base des contrats de recherche, mais est-ce qu'il parle également des
subventions de recherche? J'imagine que c'est pour les deux.
M. Ryan: Très bien. Les subventions de recherche sont
incluses là-dedans aussi.
Mme Blackburn: D'accord.
M. Ryan: Les commandites provenant du secteur commercial sont
exclues. Ce sont les subventions de projets de recherche.
Mme Blackburn: Donc, c'est le contraire de ce qu'on disait
tantôt.
M. Ryan: Bien oui. Exactement.
Mme Blackburn: Ce n'est pas le contrat, ce sont des
subventions.
M. Ryan: C'est un lapsus de vocabulaire.
Mme Blackburn: On comprendra que c'est extrêmement
différent. Il y a des...
M. Ryan: D'ailleurs, il n'y a pas beaucoup de subventions de
commandite. Il n'y a pas beaucoup de contrats de commandite.
Les cégeps
Mme Blackburn: À présent, le ministre a obtenu des
crédits additionnels pour les universités. Est-ce qu'il peut nous
dire pourquoi il n'en a pas obtenu pour les collèges? On connaît
la situation actuelle des cégeps. Quelles démarches a-t-il
entreprises et est-ce qu'il peut nous faire un peu le bilan actuel par rapport
aux décisions que semble vouloir prendre la majorité des
collèges, c'est-à-dire de présenter des budgets
déficitaires?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Ryan: Je vais être obligé de m'adresser à
la présidence pour savoir si la question est pertinente parce que nous
sommes venus discuter cet après-midi, si mes impressions sont justes,
des crédits additionnels au chapitre de l'aide aux universités.
Là, la députée de Chicoutimi veut nous entraîner
dans des subventions aux collèges. Je n'ai pas d'objection, mais je
voudrais simplement avoir une indication de la présidence avant de
procéder.
Mme Blackburn: Mme la Présidente, si vous permettez, en
guise d'information.
La Présidente (Mme Bégin): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: C'est qu'on est en train de s'interroger sur
l'absence de crédits additionnels. Il me semble que cela a un
rapport.
La Présidente (Mme Bégin): Cela a un rapport avec
votre ministère, M. le ministre. Je vais reconnaître la question,
d'autant plus qu'il faut comprendre qu'on est au stade des crédits et
que le débat est très large. Donc, je vais reconnaître la
question.
M. Ryan: Mme la Présidente, j'accepte volontiers la
décision. Je n'ai même pas à décider si je
l'accepte. Je l'accepte sans aucune hésitation.
Je vais expliquer de nouveau la situation en ce qui touche les
collèges. La situation est très différente des
universités. Tout d'abord, je pense que tout le monde sait qu'à
la fin du dernier exercice scolaire, c'est-à-dire au 30 juin 1986, il y
avait dans les collèges un surplus accumulé d'à peu
près 45 000 000 $. Cette année, ce surplus sera augmenté
de peut-être quelques millions, 1 000 000 $, 2 000 000 $ ou 3 000 000 $.
Nous le saurons au cours de l'été ou au début de
l'automne. Ce n'est pas la même chose que pour les universités
où, à la fin de juin, il y aura un déficit accumulé
que nous estimons à 130 000 000 $. Je pense que c'est une grosse
différence.
Cette année, quand nous avons dressé nos crédits
budgétaires, l'exercice a commencé dès le mois de
décembre dernier. Quand nous avons dressé nos crédits, je
l'ai expliqué longuement en commission parlementaire et je l'ai
même expliqué à l'Assemblée nationale, chaque
ministre a reçu du Conseil du trésor une commande. Le
gouvernement s'était engagé à réduire le
déficit de l'État québécois, à mettre de la
santé dans les finances. Cela a été indiqué par
tout le monde au gouvernement. Je pense que tout le monde sait que nous
essayons d'amaigrir l'appareil gouvernemental, de le rendre un peu plus
allègre. Cela demande qu'on fasse des exercices de discipline dans
chaque ministère. Alors, moi, dans les deux ministères dont j'ai
la charge, j'ai reçu une commande du Conseil du trésor au
début de l'année 1987 m'indiquant qu'on aurait besoin de tels
montants sous forme de compressions dans chacun des deux ministères dont
j'ai la charge. (16 h 20)
Si les ministres sont d'accord avec la politique du gouvernement, au
lieu de se rebiffer, il faut qu'ils fassent l'effort qui leur est
demandé, il faut qu'ils le fassent loyalement. J'ai fait l'effort
loyalement dans tous les secteurs dont j'ai la charge. Nous avons
institué un certain nombre de compressions dans l'enseignement primaire
et secondaire. Dans le secteur des universités, j'ai dit au chef du
gouvernement et au président du Conseil du trésor: Je ne peux pas
vous faire de propositions de compressions cette année. Nous sommes en
déficit. Nous sommes en train de nous noyer. Le personnage était
dans l'eau jusqu'au cou. On n'allait pas dire: On va l'entrer jusque la
tête comprise. On l'aurait noyé. J'ai dit: De grâce, on va
faire attention de ce côté-ci.
Je me disais que si je ne faisais rien, rien, rien, les gens allaient
dire: II ne croit pas du tout à l'effort du gouvernement. J'ai
regardé dans les secteurs où il y avait certaines
possibilités et nous nous sommes dits: Dans le secteur des
collèges, si nous instituons une compression de 5 000 000 $ alors qu'il
y a un surplus accumulé, cumulatif de 45 000 000 $, je ne pense pas
qu'on va provoquer une catastrophe. C'est l'esprit dans lequel nous l'avons
fait, je vous le dis franchement. Après ça - nous étions
au mois de janvier, au mois de février - sont arrivées les
négociations collectives qui se sont poursuivies, qui ont fini par
aboutir à
des résultats. Il a fallu faire la somme des montants que
ça coûterait ça, le règlement des conventions
collectives. Il a fallu établir les prévisions de l'ensemble du
gouvernement. Là, il y a d'autres décisions qui sont venues
s'ajouter, dont la décision de non-indexation des dépenses du
secteur collégial. Quant à moi, j'avais pensé qu'on aurait
peut-être une certaine indexation. Il n'y en a pas eu. Évidemment,
ça allourdit la charge qui est demandée aux collèges. En
plus, il y a un troisième facteur qui est venu s'ajouter, que je ne
soupçonnais pas. Il nous a pris par surprise au ministère. Nous
avons appris, à la suite des inscriptions faites au printemps dans les
collèges, qu'il y aurait une réduction de clientèle
étudiants équivalence temps complet d'environ 5000 à 6000
pour l'année 1987-1988, ce qui va entraîner, évidemment,
une diminution de ressources correspondantes.
Les subventions sont attribuées sur la base du nombre
d'étudiants équivalence temps complet. Les collèges,
à juste titre, additionnent ces trois montants ensemble et arrivent
à un montant de manque à gagner qui va être d'environ 13
000 000 $ au lieu des 5 000 000 $ que nous avions institués au
début de l'année. Il y a un décalage qui est substantiel.
Ils nous font valoir également que ce montant devra être
trouvé à même une portion très limitée de
l'ensemble du budget des collèges. Ils nous disent: Le budget du
personnel, le budget des salariés, nous ne pouvons pas toucher à
cela. Il y a la sécurité d'emploi qui est garantie par les
conventions et les règlements gouvernementaux. Si on enlève ces
budgets, il reste peut-être 15 % du budget d'ensemble. On ne peut pas
jouer avec les dépenses de chauffage. On ne peut pas jouer avec les
dépenses d'entretien courant. Il y a une foule de dépenses avec
lesquelles on ne peut pas s'amuser. La marge qui reste pour effectuer la
compensation pour ce manque à gagner de 13 000 000 $ n'est pas
considérable. Ils nous disent que c'est trop lourd. Les collèges
vont commencer à nous saisir du problème. Je l'ai dit à la
députée de Chicoutimi en Chambre, il y a deux jours. Nous
examinons la situation. Les collèges sont en train de nous faire rapport
des implications pour eux des mesures qui ont été
décidées cette année.
En temps utile, quand je disposerai des renseignements que j'ai
demandés, je serai en mesure de prendre mes responsabilités et de
voir ce qu'il y a à faire là-dedans.
La Présidente (Mme Bégin): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Bien. Je voudrais peut-être dégonfler
un peu les 45 000 000 $ de surplus dans les collèges. Si le ministre a
examiné la répartition du surplus dans les collèges, vous
avez moins de dix collèges qui comptabilisent à eux seuls plus de
la moitié des surplus. Vous avez tous les petits collèges, et
là vous en avez dix ou douze, qui n'en ont pour ainsi dire pas. Alors,
parler de ce surplus comme étant important, majeur, sans tenir compte
des situations variées qui existent dans les collèges, je pense
que ça aussi c'est une question d'équité. Par rapport
à cette situation du surplus dans les collèges, les 45 000 000 $
ce n'est pas un surplus que les gens ont, que les collèges ont comme
ça à leur compte de banque. Ça comprend également
les inventaires.
Je pense bien que le ministre connaît également cette
situation. Il est capable de l'expliquer. Selon l'avis de la
Fédération des cégeps, si je ne m'abuse, on voyait un
détail là-dedans qui était beaucoup moins impressionnant
que cela ne semble vouloir le laisser entendre lorsqu'on parle de 45 000 000 $
comme cela. Premièrement, ça touche moins de 25 % des
collèges: souvent, pour ne pas dire presque exclusivement, les plus gros
cégeps et ça ignore, évidemment, les collèges en
régions et les petits collèges surtout. Ma question au ministre
serait la dernière question touchant les cégeps. On reviendra aux
crédits additionnels pour les universités. Ma question est la
suivante: Est-ce qu'on doit comprendre du ministre qu'effectivement on pourrait
revenir en Chambre pour voter les crédits additionnels pour les
collèges? J'ai cru comprendre que cela pouvait ressembler à
cela.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Ryan: Non, je n'ai pas donné d'indication en ce sens.
Il y a bien des manières d'examiner le problème des cégeps
et je ne suis pas au stade où je peux en arriver à
m'arrêter à une mesure particulière.
La Présidente (Mme Bégin): Mme la
députée.
Mme Blackburn: Donc, on acceptera que les collèges, pour
boucler, fassent des déficits.
M. Ryan: Je n'ai rien dit de tel. Je ne me souviens pas...
Mme Blackburn: Pour les amener au même niveau de l'eau
qu'étaient les universités, c'est-à-dire pas tout à
fait la tête dans l'eau mais proche. Bien.
M. Ryan: Mme la Présidente, j'apprécie l'effort de
dialectique de la députée de Chicoutimi, mais je n'accepte pas
les conclusions parce que les prémisses m'apparaissent flottantes.
La Présidente (Mme Bégin): Bon, je pense que vous
avez fait vos réflexions de part et d'autre. Si on allait dans le vif du
sujet.
Mme Blackburn: Est-ce que le ministre peut répéter?
Je n'ai pas...
La Présidente (Mme Bégin): C'était...
À l'ordre, s'il vous plaît:
M. Ryan: Mme la Présidente, je voudrais seulement ajouter,
si vous me permettez, à propos des déficits des collèges
et des surplus des collèges. Selon les renseignements que j'ai
recueillis, à l'heure actuelle, je pense qu'il y a un ou deux
collèges qui n'ont pas de surplus. Il y en a qui ont des surplus
modestes. Si un collège a un surplus de 50 000 $, de 100 000 $ ou de 200
000 $, ce n'est pas la même chose que s'il y a un surplus de 2 000 000 $
ou 3 000 000 $. De toute manière, nous aurons les résultats de
l'exercice financier quand il sera terminé. On peut spéculer pour
l'instant. Les livres se ferment à la fin de juin. Vers le mois
d'août ou le mois de septembre, nous saurons exactement à quoi
nous en tenir. Je l'ai dit à plusieurs reprises, s'il y a un certain
nombre de collèges qui ont une situation vraiment aiguë qui ne leur
permet pas de faire face par leurs propres ressources au problème qui
leur sera posé à la suite des mesures budgétaires de la
présente année, nous examinerons le problème avec eux et
dans l'esprit de compréhension qui a toujours existé chez
nous.
La Présidente (Mme Bégin): Mme la
députée.
Mme Blackburn: J'aimerais simplement rappeler au ministre d'abord
que ce n'est pas un surplus qui a été accumulé au cours du
dernier exercice financier. La seconde chose, c'est qu'on sait comment les
collèges finissent par accumuler des surplus: ils connaissent les
crédits additionnels qui pourraient leur être accordés
alors que l'année scolaire est terminée. Comme ils n'osent pas
faire de déficit, ils se retrouvent avec des surplus mais cependant
à quel prix? Il faut aller voir les acquisitions à la
bibliothèque, il faut aller voir ce qui se passe dans les laboratoires,
il faut aller voir l'encadrement qu'on offre à présent aux
étudiants en matière d'aide pédagogique ou en
matière de services aux étudiants. On a coupé partout.
À quel prix a-t-on fait ces économies dans les collèges?
Il faudrait peut-être s'interroger sur cela.
Je sais que le ministre n'est pas très fort sur
l'évaluation. Il n'est pas très soucieux de s'assurer que la
commission puisse procéder en collaboration avec les collèges. Il
me semble que c'est un des aspects qu'on devrait examiner. Vous savez, on
laisse planer n'importe quoi ici. On dit toujours: La députée ne
sait pas compter, elle ne comprend pas cela. Je voudrais seulement rappeler au
ministre que, l'an passé, il me disait que je ne savais pas compter, que
ce n'était pas le déficit et pourtant dans la note qu'il
remettait au premier ministre, huit mois plus tard, il reconnaissait exactement
les chiffres que j'avais communiqués ici en cette Chambre,
c'est-à-dire que le manque à gagner des universités serait
de quelque 34 000 000 $. Il me fait plaisir de le rappeler au ministre pour lui
dire que cela lui a pris seulement huit mois de plus pour le comprendre. Alors,
quand il s'agit du déficit des collèges, j'en connais un bout sur
cela, je sais d'où cela provient, comment on l'a favorisé, mais
à quel prix dans plusieurs collèges cela s'est fait. En gros, je
terminerais sur cela.
L'université hors les murs
II y a une autre question qui touche les universités, pas nos
universités traditionnelles, pas celles de notre réseau, mais je
pense à l'université hors les murs, alors que le ministre, au
moment où je lui posais une question en Chambre, m'a dit:
Écoutez, je l'ai appris en même temps que vous. Cela a de quoi
étonner. Une fois la surprise passée, I'étonnement
passé, c'est une façon de faire extrêmement discutable et
je trouve préoccupante la compétence au Québec pour parler
de l'enseignement supérieur et de science même s'il est plus
compétent pour parler de la technologie. La compétence au
Québec pour parler de ces matières, c'est le ministre de
l'Enseignement supérieur. On est en train d'organiser, de proposer au
Sommet des pays francophones la création d'une université hors
les murs. Un modèle extrêmement intéressant, je ne dirais
pas novateur parce que cela existe déjà dans les pays
anglophones, mais intéressant; ce modèle nous permettrait d'en
bénéficier particulièrement pour la formation des
études post-doctorales, des études avancées. (16 h 30)
Je trouve le modèle intéressant, mais il est surprenant
que, d'une part, le ministre n'ait même pas été
informé et qu'il apprenne cela comme moi, par les journaux. C'est
surprenant!
Seconde chose. Lorsque le ministre délégué aux
Affaires intergouvernementales canadiennes, a annoncé la création
de cette université hors les murs, issue d'un projet de l'AUPELF,
l'Association des universités partiellement ou entièrement de
langue française, il a aussi annoncé, en même temps, qu'il
y aurait création et attribution de quelque 10 000 bourses dans les
quelque 40 pays francophones. Cela représente à peu
près 1 000 000 000 $, mais comme on sait que les revenus des pays
francophones et les capacités de payer sont inégales, on peut
supposer qu'une partie de ces coûts sera imputée au budget de la
province de Québec.
Par ailleurs, selon le président de l'AUPELF, M. Guillou, il
estimait que l'année de fonctionnement de cette université
était de l'ordre de 26 000 000 $. Il se contenterait vraisemblablement,
la première année, de 7 000 000 $ à 8 000 000 $ pour jeter
les assises.
Moi, je dis au ministre que, dans les crédits additionnels, du
moment où le ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes annonce qu'un tel projet va être soumis
pour examen aux chefs d'État des pays francophones, je me dis: On
examine les crédits additionnels aujourd'hui. Qu'est-ce qui est
prévu? Ma question est la suivante: Est-ce que le ministre a
été associé, après coup? Est-ce qu'il entend
lui-même diriger ce projet pour la section québécoise et
est-ce que les budgets seront pris à même le budget de
l'Enseignement supérieur ou de celui des Affaires intergouvernementales
canadiennes?
Ce sont des questions majeures. Je m'étonne, encore aujourd'hui,
au-delà de l'effet de surprise, que le ministre n'ait pas
été associé à ce dossier avant que son
collègue, qui siège au même conseil - il n'a pas pris la
peine de l'informer - l'annonce publiquement. Si jamais le projet
proposé et qui est soumis par le ministre délégué
aux Affaires intergouvernementales canadiennes qui, rappelons-le, est
vice-président du comité d'organisation du deuxième Sommet
des pays francophones... Ce n'est pas n'importe qui. Le président, c'est
l'ambassadeur canadien, et le vice-président, c'est le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes -
il y a du poids dans la machine - alors que c'est lui qui est en train
d'annoncer que, tantôt, la participation du Québec pourrait
être, si son projet se réalisait, accepté par les chefs
d'État. C'est extrêmement important et le ministre n'a pas
été consulté.
Premièrement, est-ce qu'il l'a été depuis? Comment
va-t-il être associé au projet? Est-ce qu'il a, effectivement,
l'intention de prévoir, dans le budget du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science, des budgets pour cette
université hors les murs si, en septembre - ce qui est prévisible
- les chefs d'État acceptent le projet?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Ryan: Mme la Présidente, je suis content que la
députée de Chicoutimi ait fini par terminer sa question parce que
je commençais à avoir l'impression qu'elle ne voulait...
Mme Blackburn: ...réponse, Mme la Présidente.
M. Ryan: ...pas avoir de réponse. Je lui dirai, tout
d'abord, à propos des collèges qui ont fait l'objet de la
première moitié de son interminable intervention, que nous
suivons les choses de si près, qu'en matière d'évaluation,
nous avons fait plus de chemin en quelques mois que l'ancien gouvernement en
neuf ans.
Je viens justement d'adresser à la commission
d'évaluation, au Conseil des collèges pour sa commission
d'évaluation, une lettre dans laquelle je lui donne un mandat explicite
de procéder à l'évaluation à la fois quant à
l'aspect qu'elle détient déjà par la loi et quant à
l'aspect qui relève du ministre de l'Enseignement supérieur au
titre de l'application du régime pédagogique du
collégial.
Par conséquent, on va avoir une situation infiniment plus claire
et, pour la première fois, je pense qu'il y aura une politique du
gouvernement en matière d'évaluation au niveau
collégial.
J'en reviens à la question relative à l'université
internationale. Je l'ai dit, l'autre jour, sans l'ombre d'aucune
hésitation - je pense que c'est d'aucune équivoque - que, lorsque
le projet a été mentionné dans les journaux, cela m'a
moi-même intrigué. Par la suite, les communications se sont faites
régulièrement et je puis assurer la députée que si
jamais ce projet se réalise, ce sera avec l'accord du ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science. Je ne pense pas qu'il se
réalisera si l'accord du ministre de l'Enseignement supérieur et
de la Science n'est pas acquis.
Pour le moment, les choses sont à l'examen. Il y a toutes sortes
d'implications là-dedans. Je ne peux pas en dire davantaqe, je ne sais
même pas quel sort sera réservé à ce projet qui
figure parmi de nombreux projets dont les gouvernements discutent actuellement
dans la perspective du sommet des pays francophones qui aura lieu en septembre
prochain. En temps utiles, je pense que le gouvernement fera connaître sa
position, si ce projet est encore sur la table à ce
moment-là.
La Présidente (Mme Bégin): Une brève
question et une brève réponse, parce qu'il ne reste que deux
minutes.
Mme Blackburn: Mme la Présidente, il me semble qu'on a
commencé à moins vingt précises.
La Présidente (Mme Bégin): À 15 h 38 et il
est 16 h 36. Il reste...
Mme Blackburn: II nous reste au moins deux minutes et demie,
alors j'ai le temps
de poser la question. La réponse du ministre m'étonne et
me préoccupe. Le ministre nous dit avec beaucoup d'assurance - que
j'admire, d'ailleurs, parce que je ne suis pas sûre qu'il l'ait vraiment,
c'est une assurance apparente, à tout le moins - que ce projet ne
pourrait pas se réaliser s'il n'avait pas l'accord du ministre. Je ne
sais pas si le ministre sait à quel niveau c'est en train de se passer.
Si l'État du Québec est en train d'engager et de s'engager dans
un tel projet au niveau du chef du gouvernement, mes excuses, mais c'est comme
les frais de scolarité. Il y a comme de bonnes chances, à ce
moment-là, que le ministre va arriver un peu en retard. Cela
m'apparaît évident.
Et vous savez que, si les chefs d'État disent oui, d'autant plus
que c'est amené par le ministre des Affaires intergouvernementales du
Québec, en court-circuitant, faut-il le rappeler, le réseau de
l'information scientifique et technologique, je demande au ministre s'il a bien
compris comment cela se passait au sein de son Conseil des ministres. Le
gouvernement est en train de s'engager dans un projet qui sera soumis aux chefs
d'État et le ministre est en train de me dire aujourd'hui que cela ne
pourra fonctionner que dans la mesure où ils auront l'accord du
ministre. C'est en train de se régler au-dessus du ministre, si je ne
m'abuse.
Écoutez, j'aime bien aussi avoir les réponses, pas juste
poser les questions. Je sais que les réponses du ministre sont souvent
très longues, cela nous empêche de poser des questions. Cependant,
j'aimerais bien qu'il réponde à celle-ci, il lui reste une
minute. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): Effectivement, M. le
ministre, vous avez une minute pour répondre.
M. Ryan: Je veux seulement dire à la députée
de Chicoutimi que je répète ce que j'ai dit. Je voudrais
l'assurer d'abord, sur la question des frais de scolarité, que les vues
du chef du gouvernement et du ministre de l'Enseignement supérieur
étaient tout à fait dans la même ligne de ce point de vue.
Aucun de nous d'eux ne voulait imposer une hausse des frais de scolarité
dans l'immédiat. L'échéancier qui a été
choisi est un échéancier auquel je souscris, surtout avec les
mesures de soulagement transitoires que nous avons instituées. C'est
cela que la députée ne connaissait pas, c'était la
deuxième partie de l'équation, que nous ne pouvions pas lui
livrer à ce moment-là, mais qui a été, depuis,
communiquée dans le discours sur le budget.
En ce qui touche l'université francophone internationale, je
voudrais dire à la députée, pour la rassurer, que, pas
plus tard qu'à midi, il y avait une rencontre où étaient
présents des représentants du ministère des Relations
internationales, un représentant de mon ministère, en la personne
de mon directeur de cabinet, des représentants de l'Université du
Québec, et même un représentant de l'AUPELF, l'association
qui prend le parrainage de ce projet. Je peux vous assurer que tout le monde a
été bien informé que cette affaire était à
l'état de projet et que, tant que cela n'aura pas été
examiné dans toutes ses implications, personne n'est lié par
cela. Le reste, c'est "words":
La Présidente (Mme Bégin): C'est terminé. Je
vous remercie. Je demanderais aux personnes qui accompagnent les
députés de bien vouloir se retirer le plus rapidement possible
compte tenu du fait qu'on accuse un certain retard. Je vais suspendre pour
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 40)
(Reprise à 16 h 51)
Le Président (M. Saintonge): Nous reprenons nos travaux
à l'étape de l'étude des crédits
supplémentaires no 1 pour l'année financière 1987-1988.
Nous allons maintenant accueillir Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux pour la poursuite de nos travaux jusqu'à 18 h 30.
Santé et Services sociaux
Je laisse la parole à Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux pour ses remarques préliminaires.
Remarques préliminaires Mme
Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il s'agit
évidemment de l'étude des crédits supplémentaires
qui étaient inclus dans le budget 1987-1988. Ayant
complété il y a environ quinze jours, je pense, l'étude
des crédits qui avaient été déposés au mois
de mars ou d'avril, les crédits complets du ministère de la
Santé et des Services sociaux s'élèvent maintenant, si on
y inclut la Régie de l'assurance-maladie du Québec, à 8
923 700 000 $. Les 23 700 000 $ qui ont été ajoutés aux
crédits supplémentaires du budget 1987-1988 se ventilent comme
suit. Pour le soutien des organismes bénévoles, il y a un montant
de 4 000 000 $ dont 3 000 000 $ sont des crédits additionnels
ajoutés aux crédits qui ont été adoptés au
mois de mai et qui s'ajoutent aux 6 300 000 $ dont bénéficient
déjà les maisons d'hébergement pour femmes
violentées. Il y a 1 000 000 $ de crédits
supplémentaires aux maisons de jeunes qui
bénéficiaient déjà d'environ 6 000 000 $, mais je
vous dirai le chiffre exact plus tard.
Il y a aussi 7 500 000 $ pour les services des centres hospitaliers de
courte durée dont 3 500 000 $ pour les services de santé mentale
et 4 000 000 $ supplémentaires votés pour l'Outaouais qui font
partie du projet du rapatriement, entre autres, de la clientèle de
l'Outaouais qui présentement se dirige vers la région d'Ottawa.
Il y a du côté du secteur de la réadaptation sociale des
montants de 2 600 000 $ pour l'alcoolisme et la toxicomanie. Il y a
également 6 000 000 $ annualisés à 8 000 000 $ pour
l'alourdissement des clientèles dans les services des centres d'accueil
d'hébergement et des centres hospitaliers de soins de longue
durée. On se souviendra que ce problème a été
discuté à plusieurs reprises et est dû au fait que les
centres d'accueil reçoivent une clientèle de plus en plus lourde
et que le nombre d'heures requis par bénéficiaire
hébergé en centre d'accueil d'hébergement chez les
personnes âgées va en augmentant. En conséquence, depuis
quelques années, bien que ce ne soit pas sur une base
régulière, des montants additionnels sont ajoutés pour
permettre aux centres d'hébergement de mieux faire face à leurs
responsabilités.
Finalement, les 3 600 000 $ restants sont pour l'Office des personnes
handicapées du Québec, ce qui fait un total de 23 700 000 $.
S'ajoutent à cela les programmes de la Régie de
l'assurance-maladie pour 1 000 000 $. Il y avait évidemment - on n'en
fait pas mention ici -du côté de l'immobilisation 40 000 000 $
d'ajoutés dans les crédits supplémentaires, dont 20 000
000 $ pour les centres d'accueil privés, pour des fins de
vétusté et de sécurité. On sait, M. le
Président, qu'un bon nombre de centres d'accueil privés se
trouvaient dans des conditions physiques ou de sécurité
insatisfaisantes et qu'il y avait urgence, dans certains cas - je pense que
même le président est au courant - de procéder à des
rénovations qui s'imposaient du point de vue de la
sécurité à assurer aux bénéficiaires qui
vivent à l'intérieur de ces centres d'hébergement.
Également, pour ce qui est des immobilisations et de
l'équipement, un montant additionnel de 20 000 000 $ a été
ajouté pour la mise à jour ou le remplacement de technologies,
plus particulièrement dans le domaine de la radiothérapie, une
mise à jour qui s'impose. Ce n'est évidemment que le
début. Ceci s'ajoute à ce qui est déjà prévu
dans le budget d'immobilisations habituel pour tenter d'amorcer un rattrapage
qui, de toute évidence, si les disponibilités financières
du gouvernement le permettent, devra être continué l'an prochain
et peut-être pour quelques années à venir, parce que le
rattrapage à faire est grand dans ce domaine.
Il y a également - cela n'apparaît pas parce que l'argent
n'est pas encore distribué - un montant de 10 000 000 $ dans le fonds de
suppléance qui est disponible pour des projets prioritaires du
ministère de la Santé et des Services sociaux. À cet
égard, il y a déjà certaines démarches qui ont
été faites auprès du Conseil du trésor plus
particulièrement relativement à la question de la protection de
la jeunesse, où des sommes additionnelles ont été
ajoutées cette année, mais auxquelles il faut ajouter du
personnel, personnel qui doit être reconduit encore pour un certain temps
- je n'ose pas fixer un échéancier - probablement pour un an,
pour tenter de répondre à l'augmentation des signalements qui
sont faits dans le domaine de la protection de la jeunesse.
M. le Président, dans l'ensemble, ces budgets
supplémentaires ou ces sommes supplémentaires portent, en partie,
sur des services sociaux et également sur des services de santé
et ils viennent combler des besoins qu'il nous apparaît essentiel de
combler le mieux possible, compte tenu toujours des disponibilités
financières du gouvernement.
Je suis prête à répondre aux questions du
député de Gouin, M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): Très bien. Je
cède maintenant la parole à M. le député de Gouin
pour des remarques d'ordre général, ensuite, vous pourrez
enchaîner avec des questions. M. le député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Je vous remercie, M. le Président. Dans un
premier temps, je ferai un certain nombre de commentaires d'ordre
général et, par la suite, j'aurai un certain nombre de dossiers
spécifiques à aborder.
D'abord, M. le Président, je dirai que nous avons
été un peu surpris de la nature des crédits
supplémentaires qui ont été annoncés par le
ministre des Finances dans son discours sur le budget en ce qui concerne le
domaine de la santé et des services sociaux. On se rappellera
qu'à la suite du dépôt des crédits
budgétaires par le président du Conseil du trésor, il y
avait eu un certain nombre de réactions dans le milieu, chez des
intervenants. Un certain nombre de commentaires avaient été
émis et des demandes précises avaient été faites
auprès de la ministre pour faire en sorte qu'un certain nombre
d'enveloppes budgétaires annoncées par le président du
Conseil du trésor soient augmentées pour permettre de faire face
à un certain nombre de situations problématiques dans le
réseau de la santé et des services sociaux que les
crédits, présentés par le président du
Conseil du trésor ne permettaient pas de solutionner. Du moins, ils ne
permettaient pas de faire face convenablement à ces problèmes qui
avaient été soulevés par les différents
intervenants du réseau. (17 heures)
Lorsque nous avons pris connaissance des crédits additionnels que
le ministre des Finances... Finalement, c'est un peu la mécanique: le
président du Conseil du trésor dépose des crédits
budgétaires, on voit un peu les réactions et, au moment du
discours du ministre des Finances, on essaie généralement de
tenir compte un peu des demandes additionnelles qui ont été
faites pour essayer d'améliorer les crédits
déposés. Donc, on s'attendait que le ministre des Finances
réponde à un certain nombre de demandes très
fondées des différents intervenants du milieu de la santé
et des services sociaux au Québec quant à leur réaction
à la suite du dépôt des crédits budgétaires
sauf que, sur les grands dossiers problématiques pour lesquels on a eu
une réponse négative, une réponse plus que partielle aux
besoins, une réponse, dans un secteur donné, sur des besoins qui
n'étaient pas les plus urgents, mais, globalement, on doit dire que les
crédits supplémentaires annoncés par le ministre des
Finances, dont nous avons plus spécifiquement le mandat de faire
l'étude, aujourd'hui, ne sont pas venus répondre aux demandes les
plus importantes soulevées depuis le dépôt des
crédits budgétaires du ministère de la Santé et des
Services sociaux.
Comme premier exemple, prenons celui du domaine hospitalier. On sait
que, à la suite du dépôt des crédits
budgétaires, l'Association des hôpitaux du Québec avait
fait une déclaration importante, qu'il fallait prendre au sérieux
et dans laquelle ladite association nous a dit que, si elle n'avait pas les
crédits additionnels demandés, qui étaient de l'ordre de
40 000 000 $, les hôpitaux du Québec se verraient dans
l'obligation de couper encore plus de services qu'ils se sont vu obligés
d'en couper en 1986-1987, qu'ils se verraient dans l'obligation de fermer un
plus grand nombre de lits pour des périodes temporaires plus ou moins
longues, au cours de l'année 1987-1988, qu'ils n'avaient
été obligés de le faire dans l'année 1986-1987.
Ils ajoutaient, dans leurs remarques, qu'ils se verraient même
dans des situations, dans certains cas, où ils devraient élaborer
et établir des quotas, c'est-à-dire fixer un nombre maximum
d'utilisation de tels services dans un secteur d'activité en milieu
hospitalier et qu'une fois ce quota atteint, faute de budgets additionnels, on
devrait reporter l'utilisation de ce type de services à l'année
suivante.
C'est, au fond, l'alerte que nous a donnée l'Association des
hôpitaux du Québec à la suite du dépôt des
crédits budgétaires et force nous est de constater que, dans le
discours du ministre des Finances, par rapport aux 40 000 000 $
problématiques, quant aux questions d'équilibre
budgétaire, on ne retrouve pas les montants demandés par
l'Association des hôpitaux du Québec et cela a pour effet que,
déjà, on se retrouve dans une situation où la triste
période des mauvaises nouvelles de fermeture de lits, de coupures de
services est déjà recommencée. Déjà, un
certain nombre d'établissements hospitaliers dans tout le Québec
nous ont annoncé des fermetures de lits ou de services tenant compte du
manque à gagner dans le budget 1987-1988.
C'est un peu la même situation dans les centres d'accueil et
d'hébergement dont nous avons eu l'occasion de discuter abondamment
à l'occasion de l'étude des crédits budgétaires,
où cette association a fait une déclaration à savoir
qu'elle se trouvait face à un manque à gagner d'environ 125 000
000 $, qu'elle était, compte tenu de cette situation budgétaire,
dans l'obligation de diminuer la qualité et la quantité des
services fournis aux personnes du troisième âge en centres
d'accueil et d'hébergement pour personnes âgées, avec des
conséquences importantes sur lesquelles on a eu l'occasion de
développer abondamment, la ministre et moi, à l'occasion de la
récente commission d'étude de ses crédits
budgétaires. La réponse qu'on a retrouvée dans le discours
du ministre des Finances, c'est 6 000 000 $ quant aux 125 000 000 $ qui font
problème dans le réseau d'hébergement pour les personnes
du troisième âge.
C'est un peu la même situation dans le domaine des centres locaux
de services communautaires, où le comité Brunet, mis en place et
composé par la ministre elle-même, a fait la recommandation
d'aller de l'avant avec les centres locaux de services communautaires, de
consolider leurs activités, de développer des services de base
dans tous les centres, de parachever le réseau pour faire en sorte que
l'ensemble de la population du Québec, où qu'elle se trouve,
puisse recevoir des services de santé et des services sociaux de
première ligne.
Évidemment, pour appliquer le rapport Brunet, cela
nécessitait des crédits additionnels et se retrouve sans aucun
crédit additionnel pour le parachèvement du réseau des
centres locaux de services communautaires et pour l'application du rapport
Brunet.
On cherche aussi les crédits additionnels qui auraient dû
être adoptés pour permettre au Québec de faire face au
problème qu'est le SIDA. On sait que la ministre a pris la
décision de mettre fin aux activités de la seule équipe
permanente multidisciplinaire qui existait au Québec et
qui logeait au DSC Saint-Luc mais qui ne desservait pas que le DSC
Saint-Luc, et que la ministre a transféré cette
responsabilité aux 32 départements de santé communautaire,
sans ajouter un seul cent de plus à leur budget, avec les
conséquences que cela représente pour le Québec quant aux
reculs que nous sommes à prendre en ce qui concerne le SIDA et les
problèmes que nous observons quant aux services qu'on devrait retrouver
sur le terrain pour soutenir ces personnes qui sont atteintes du SIDA, pour les
soigner et pour soutenir leur entourage. Et on se retrouve là aussi sans
aucun crédit additionnel.
Je pourrais ajouter d'autres dossiers qu'on aura l'occasion d'aborder
dans les quelques minutes qui suivront. Et, finalement, un dernier commentaire
dans mes commentaires d'introduction. Il reste 10 000 000 $ à attribuer
si on comprend le contenu du discours du ministre des Finances qui nous a dit
que, finalement, il donnait à la ministre un coussin, une petite marge
de manoeuvre de 10 000 000 $ pour lui permettre de faire face un peu, comme
elle l'a dit tantôt, je pense, à des projets prioritaires. Sauf
erreur, c'est l'expression qu'elle a employée.
D'abord, M. le Président, 10 000 000 $ sur 9 000 000 000 $ ou
presque de budget dans le domaine de la santé et des services sociaux,
c'est peu. D'autre part, j'ai un peu la crainte que, tant que ce montant de 10
000 000 $ n'aura pas été attribué, il sera utilisé
dans le discours comme s'il représentait 100 000 000 $ ou 200 000 000 $
parce que, chaque fois que j'entends la ministre nous dire à quoi elle
pense quant à l'utilisation qu'elle compte faire des 10 000 000 % de
marge de manoeuvre, de coussin budgétaire que lui a confié le
ministre des Finances, M. le Président, je fais des additions et je me
retrouve avec des sommes qui vont bien au-delà des 10 000 000 $ en
question. Je pense qu'il serait plus sain, plus franc et plus transparent de
les attribuer et de nous indiquer franchement à quoi la ministre compte
utiliser ces 10 000 000 $ de façon que, d'abord, cet argent soit
utilisé rapidement, qu'il ne serve pas à périmer des fonds
en fin d'année budgétaire et que, deuxièmement, on
n'utilise pas cela à des fins politiques pour laisser croire à
des gens qu'on viendra répondre à un besoin qu'ils ont
exprimé à partir de cette somme, alors que, finalement, elle est
déjà prévue à d'autres fins au Conseil du
trésor.
M. le Président, je pense qu'il serait important, parce qu'il y a
des besoins importants dans le réseau qui sont nombreux, que la ministre
devrait attribuer immédiatement cette somme de 10 000 000 $ pour que
cette somme soit utilisée là où elle doit l'être et
que, deuxièmement, il n'y ait pas de fausses attentes, de fausses
illusions qui soient créées dans le réseau avec toutes les
conséquences sur l'état des troupes que cela peut
représenter sur le climat, que cela peut représenter dans le
réseau de la santé et des services sociaux.
Ce sont les commentaires d'ordre général que je voulais
faire pour l'introduction de cette scéance de travail. Par la suite,
j'aurai un certain nombre de dossiers plus particuliers à aborder.
Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le
député de Gouin. Je vais céder la parole à Mme la
ministre pour quelques réactions à la suite de vos remarques
préliminaires.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, évidemment je
vais finir par m'y habituer, mais, quand j'entends le député de
Gouin nous faire des reproches sur les investissements que le gouvernement
actuel consent à la santé, si on les compare aux coupures
réelles que l'ancien gouvernement a faites au domaine de la
santé, il faut avoir, disons, une certaine arrogance alors qu'on sait
que, quand nous sommes arrivés au gouvernement, à toutes fins
utiles, en 1986 - c'était au mois de décembre 1985 - nous avons
trouvé la santé économique des hôpitaux dans un
état difficilement descriptible avec une accumulation de déficits
depuis 1982 de l'ordre de 282 000 000 $ que le gouvernement actuel a
accepté de résorber. À ce moment-là, nous avons
investi pour l'année 1986-1987 strictement dans les hôpitaux - et
je ne parle pas des immobilisations - un montant de 133 000 000 $. (17 h
10)
Je pense que tout le monde a été d'accord. C'est
d'ailleurs l'opinion de l'Association des hôpitaux du Québec -
à laquelle le député de Gouin aime bien faire
référence par rapport au fait que l'Association des
hôpitaux du Québec aimerait bien avoir un 40 000 000 $ de plus
cette année - qui dit que l'arrivée du nouveau gouvernement a
marqué un virage net que c'était un virage qu'on attendait depuis
plusieurs années et qu'enfin il était arrivé, ce qui ne
les empêche pas d'exprimer le fait que s'ils avaient encore plus
d'argent, ils seraient encore plus heureux. Là-dessus, je pense que tout
le monde va s'entendre pour dire que dans le domaine de la santé, dans
le domaine hospitalier, les besoins sont illimités. Je n'ai pas
parlé, à ce moment, des 40 000 000 $ au niveau du fonctionnement,
qu'on a investis pour les urgences dans les hôpitaux en 1986-1987, et
cette année c'est de nouveau 39 000 000 $, 40 000 000 $ que nous
investissons, sans compter un coût de système, que nous
investissons encore cette année, d'environ 38 000 000 $.
M. le Président, je pense que le chiffre le plus éloquent
que je puisse vous donner, ne croyant pas refaire toute l'étude des
crédits, mais pensant qu'on se limiterait à l'objet même de
cette commission parlementaire qui est d'examiner les budgets
supplémentaires dont j'ai parlé au point de départ...
Quand on regarde les données du Bureau de la statistique du
Québec qui présente les données statistiques sur une
année de calendrier, on voit qu'en 1985, la dernière année
du gouvernement du Parti québécois, l'augmentation dans la
santé avait été de 4 %, et que pour l'année de
calendrier 1986, qui correspond exactement à la première
année du gouvernement libéral, l'augmentation consentie à
la santé est de 16 %, comparativement à 4 % pour la
dernière année du gouvernement du Parti
québécois.
M. le Président, j'ai parlé tout à l'heure
d'arrogance - on pourrait utiliser d'autres termes - pour entretenir
continuellement l'idée que nous massacrons la santé alors que le
gouvernement antérieur, puisqu'il veut que nous en parlions, avait
laissé se détériorer la santé. Je voudrais
également vous dire que cette année, l'augmentation dans le
domaine de la santé et des services sociaux - ceci fait abstraction
encore une fois des immobilisations - alors que l'Association des
hôpitaux du Québec nous disait que finalement on s'attaquait
vraiment à toute la question de réflexion et de
sécurité, dans le budget de fonctionnement, c'est 521 000 000 $,
ce qui représente pour la santé et les services sociaux une
augmentation de 8,3 %.
En ce qui touche le milieu hospitalier, je dois vous dire que nous
sommes fiers de notre dossier. Je pense qu'une bonne partie des
problèmes auxquels le réseau hospitalier faisait face commencent
à se résoudre d'une façon sérieuse, significative.
Nous en sommes fort heureux.
En ce qui touche les centres d'accueil d'hébergement dont nous a
parlé le député de Gouin, là-dessus je conviendrai
avec lui que les sommes qui sont investies et qui sont investies depuis 1981,
d'ailleurs, ne sont pas suffisantes pour combler les besoins
créés par l'alourdissement de la clientèle. Je l'ai dit
publiquement. Mais ce dont il faudrait bien se rappeler, c'est qu'en 1979-1980,
l'Association des centres d'accueil disait que leur manque à gagner
était de 250 000 000 $. Le gouvernement de l'époque, en 1981,
avait ajouté - je le dis de mémoire - quelque 12 000 000 $, je
pense, et n'en a pas ajouté en 1982-1983 ni en 1983-1984, il en a
ajouté en 1985-1986, nous en avons ajouté en 1986-1987 et
maintenant en 1987-1988, pour un montant global d'environ 45 000 000 $ depuis
le début de 1981.
Nous croyons - et là-dessus je pense que l'Association des
centres d'accueil est d'accord avec nous - que les besoins des centres
d'accueil doivent être évalués d'une façon plus
rigoureuse parce que normalement, si le chiffre de 250 000 000 $ qu'ils
faisaient valoir en 1980-1981 étaient des bons chiffres, on peut se
demander, même s'il y a eu depuis ce temps un montant estimé
à 40 000 000 $ ou 45 000 000 $ d'investi, pourquoi cette année on
demanderait 125 000 000 $ ou on établirait à 125 000 000 $ les
besoins alors que normalement la demande devrait être même plus
grande comparativement à 1980-1981. Tout ceci pour vous dire, M. le
Président, que je pense que de la part de l'Association des centres
d'accueil, c'est une façon de traduire leurs besoins réels. Nous
devons nous épauler l'un et l'autre pour tenter d'arriver à une
démarche articulée sur des besoins plus rigoureusement
estimés que ce qu'ils ont peut-être été
jusqu'à maintenant.
Quant aux CLSC, il faudrait quand même tenir compte des sommes
d'argent importantes qui ont été investies en 1986-1987 et
1987-1988 du côté des services et soins à domicile pour un
montant d'environ 20 000 000 $ sur deux ans, ce qui est tout de même un
montant considérable. Je pense que les CLSC le reconnaissent
également. Évidemment, on pourrait investir davantage. Ce sont
tous des domaines où les besoins ne seront jamais totalement
comblés même avec le gouvernement le plus généreux
et dans le meilleur contexte économique possible. Nous avons une
population vieillissante. Ce qui est important, c'est qu'un gouvernement
reconnaisse comme prioritaires la santé et les services sociaux. Je n'ai
aucune hésitation, à voir les gestes que le gouvernement a
posés, à dire que, hors de tout doute, la santé et les
services sociaux sont prioritaires.
Le député de Gouin est revenu également sur la
question du SIDA en disant: Nous prenons un recul vis-à-vis du SIDA.
Quand on regarde le dossier du SIDA sous l'ancien gouvernement et le dossier
actuel, là encore, ce sont des affirmations sans fondement. Ce qu'on
nous reproche, c'est d'avoir fermé selon ce que dit le
député de Gouin, la seule clinique où véritablement
on s'occupait du SIDA, le seul DSC qui s'occupait du SIDA, le DSC de Saint-Luc,
pour en avoir transféré la responsabilité à
l'ensemble des DSC. Je pense qu'il est important de dire qu'alors qu'il n'y
avait qu'une équipe à l'hôpital Saint-Luc qui le faisait
sans doute avec compétence, - ce n'est pas du tout ce que je veux
remettre en question - nous avons maintenant 21 DSC au Québec qui ont
désigné un médecin pour prendre cette
responsabilité d'information, d'éducation et de dépistage.
Cette équipe est
maintenant multipliée par 21 qui assurent aussi dans seize DSC un
suivi épidémiologique.
Ce n'est pas seulement dans le secteur de Saint-Luc même si la
région de Montréal, en général, se
référait au secteur de Saint-Luc. Il y a maintenant du
côté de Québec une prise en main de l'ensemble des DSC pour
avoir une action vu qu'il se développe plus de cas ou que plus de cas
sont diagnostiqués dans la région de Québec. Il y a
maintenant 26 départements de santé communautaire qui font de la
diffusion de matériel imprimé. Il y a 16 départements de
santé communautaire qui utilisent les services de conférenciers
précisément pour des fins d'éducation et d'information. Il
y a 15 départements de santé communautaire maintenant qui ont
à coeur la formation du personnel des établissements. On sait que
de ce côté aussi il y a des choses à compléter. (17
h 20)
Je voudrais ajouter M. le Président, qu'en 1986-1987 nous avons
fourni à la Croix-Rouge une subvention de 1 135 000 $ relativement au
SIDA du côté des diagnostics et du dépistage. Il y a les
laboratoires de santé publique du Québec auxquels on a
accordé, en 1986, 159 000 $ sur 700 000 $. Cette année, nous
avons accordé aux organismes bénévoles qui, de plus en
plus, jouent un rôle important dans la communauté, tant pour le
soutien aux personnes qui ont été diagnostiquées comme
"sidatiques" et qui font aussi de l'information et de l'éducation. Alors
qu'il y avait 10 000 $ d'accordés sous l'ancien gouvernement à
ces organismes bénévoles, cette année, nous avons
accordé 185 000 $ à quatre organismes
bénévoles.
M. le Président, en dehors des soins hospitaliers qui sont quand
même très importants dans ce domaine, c'est un montant de 2 261
000 $ que nous accordons à différentes fins d'éducation,
de dépistage et autres pour justement tenter de prévenir et
d'informer sur toute la question du SIDA.
Depuis six ou sept mois - je pense que c'est en novembre - le SIDA est
devenu une maladie à déclaration obligatoire. Je pourrais
continuer, sans compter d'autres mesures qui doivent être prises en
milieu carcéral, mesures de prévention possiblement
prénatales.
Je pense que peut-être le député de Gouin est un peu
malvenu de dire que nous prenons du retard eu égard au SIDA. Nous sommes
conscients que c'est une maladie extêmement importante et dont les effets
sont dramatiques, comme tout le monde le sait, et où le danger
épidémique est grand, quoique, encore une fois, il reste beaucoup
d'inconnue.
Nous voulons également intéresser le Fonds de recherche en
santé du Québec à s'impliquer dans la recherche sur le
SIDA.
Ce sont là quelques faits pour tenter de resituer les choses dans
leur véritable contexte.
Quant à la dernière remarque du député de
Gouin, qui dit: Si vous avez 10 000 000 $ à dépenser qui sont
prévus au budget supplémentaire, aux crédits
supplémentaires présentés par le ministre des Finances,
autant nous le dire où vous allez les dépenser. Alors, comme
cela, nous allons arrêter de nous interroger et vous allez arrêter
de tenter de faire croire à la population que ces 10 000 000 $
représentent 100 000 000 $. Je pense que personne au Québec n'a
entendu la ministre de la Santé dire qu'il y avait, en crédits
supplémentaires, 100 000 000 $.
Au contraire, j'ai répété maintes et maintes fois
qu'il y avait ID 000 000 $ disponibles pour des projets prioritaires du
ministère de la Santé et des Services sociaux. J'en ai, à
la toute fin de ma première intervention, identifié un se
rapportant à la protection de la jeunesse.
M. le Président, je voudrais bien, avec 10 000 000 $, faire 100
000 000 $, mais je n'ai pas d'illusions. Je sais que ces 10 000 000 $ feront
rapidement l'objet de demandes et je pense que c'est avec prudence que nous
devons les dépenser. Je pense que c'est après avoir
évalué les vrais besoins prioritaires que nous prendrons les
décisions quant à la façon dont ces 10 000 000 $ seront
éventuellement dépensés pour des services à la
population.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
Discussions générales
M. Rochefort: M. le Président, j'ai un certain nombre de
commentaires. Dans un premier temps, je veux dire à la ministre que je
n'ai jamais dit qu'elle avait prétendu qu'il y avait 100 000 000 $,
mais, à force d'identifier des projets qui pourraient être compris
dans les 10 000 000 $, on est en train de penser que l'addition de tous ces
projets compris dans les 10 000 000 $ vont faire 100 000 000 $ plutôt que
10 000 000 $. C'est ce que j'ai dit et je le répète.
Tantôt, la ministre nous a parlé de protection de la
jeunesse. Elle a déjà indiqué... J'ai lu dans les journaux
qu'elle disait qu'on pourrait peut-être prendre ces 10 000 000 $ pour
donner suite au rapport Brunet.
Alors, au fur et à mesure qu'elle parle de l'utilisation qu'elle
pourrait faire des 10 000 000 $, on a l'impression qu'il s'agit d'un montant
beaucoup plus important que les 10 000 000 $ concernés et que s'il ne
s'agit que de 10 000 000 $ - ce que j'ai lu, moi aussi, dans le discours du
ministre des
Finances - attribuons-le donc maintenant pour qu'ils puissent être
utilisés à bon escient.
Un deuxième commentaire, M. le Président. La ministre y
est allée d'une phrase qui illustre bien son attitude et son approche
politique du dossier de la santé et des services sociaux. Lorsque je
parle de la communication faite par l'Association des hôpitaux du
Québec, elle nous a dit que, faute d'obtenir les 40 000 000 $ de
crédits additionnels qu'elle demandait, elle se verrait dans
l'obligation de couper des services en plus grand nombre, de fermer plus de
lits en 1987 qu'elle ne l'avait fait en 1986-1987, et même
d'établir des quotas dans certains établissements hospitaliers
quant aux services disponibles pour l'année 1987-1988.
M. le Président, ce n'est pas de l'invention, ce n'est pas de
l'interprétation, ce n'est pas une perception, c'est le mot à
mot, noir sur blanc, sur un communiqué de presse diffusé
oralement par le président de l'Association des hôpitaux du
Québec, M. Chamard. La ministre nous dit... Elle vient tout juste de le
faire et je l'ai noté, M. le Président. D'abord, elle vient de
nous expliquer qu'ils sont bien heureux qu'elle soit là et qu'elle
travaille avec eux, et elle dit: "Évidemment, ils nous ont dit que,
s'ils avaient plus d'argent, ils seraient plus heureux."
M. le Président, l'Association des hôpitaux du
Québec ne nous a pas dit que, dans le fond, s'ils avaient plus d'argent,
ils seraient plus heureux. Tout le monde est capable de nous dire cela, partout
dans le réseau de la santé comme dans tous les secteurs
d'activité de la vie en société, comme chaque
ménage au Québec, comme chaque individu au Québec est
capable de nous dire que, s'il en avait plus, il serait plus heureux. Personne
au Québec n'est pas capable de nous dire cela. Ce n'est pas ce qu'ils
nous ont dit. Et je ne peux pas imaginer que la ministre ne l'a pas su, ne l'a
pas lu, ne l'a pas compris, et donc ne le sait pas.
Ce qu'ils nous ont dit, c'est que, faute d'avoir les 40 000 000 $
qu'elle n'a effectivement pas donnés et que le ministre des Finances n'a
effectivement pas débloqués, l'Association des hôpitaux du
Québec, l'association qui regroupe l'ensemble des hôpitaux du
Québec nous dit: Faute d'avoir ces 40 000 000 $, on va couper plus de
services en 1987-1988, l'année en cours, qu'on a été
obligé, par les crédits qui nous avaient été
donnés, d'en couper en 1986-1987. Ils nous ont dit: On va fermer plus de
lits en 1987-1988 qu'on a été obligé d'en fermer en
1986-1987 à partir des budgets qui nous avaient été
donnés. Ils ajoutent qu'ils seront dans l'obligation d'établir
des quotas dans certains établissements.
Que la ministre résume cela par cette belle phrase que s'ils
avaient plus d'argent, ils seraient plus heureux, c'est vraiment réduire
à sa plus simple expression la demande très claire, qui tenait
sur deux pages et demie, de l'Association des hôpitaux du Québec.
Je veux bien que la ministre ait l'impression qu'il n'en manque peut-être
pas tant que cela, mais ce que je dis, c'est ce que je lis, c'est l'avis qu'a
fait l'Association des hôpitaux du Québec à tous les
membres de l'Assemblée nationale et au public en
général.
Finalement, au sujet du SIDA, quand la ministre nous dit qu'il y aura
maintenant 21 médecins affectés à cela dans 16
départements de santé communautaire, qui feront un suivi
épidémiologique, etc., est-ce que la ministre pourrait nous dire
ce qu'on a tenté de savoir à l'occasion de l'étude de ses
crédits budgétaires, puisqu'elle a déclaré, ici
à l'Assemblée nationale, qu'il n'y aurait aucun crédit
additionnel pour les départements de santé communautaire pour
prendre la responsabilité du SIDA, de la portion SIDA qui est
exercée par l'équipe multidisciplinaire de Saint-Luc, je suppose
que ces médecins étaient occupés à autre chose et
qu'il y aura donc réduction de services dans d'autres domaines, qui
étaient donnés par des DSC, si ces médecins s'occupent
maintenant du SIDA plutôt que de s'occuper des fonctions pour lesquelles
ils étaient préalablement rémunérés dans ces
établissements?
M. le Président, il serait intéressant qu'on sache cela
et, notamment, peut-être que la ministre rende public le rapport de son
groupe de consultation SIDA-Québec pour qu'on voit un peu quel est
l'état du dossier SIDA au Québec et qu'on puisse connaître
quelles sont les recommandations de ce groupe de travail quant aux
démarches qui devraient être entreprises.
Ce sont quelques commentaires que me suggérait la réplique
de la ministre. Je ne sais pas si ces commentaires en suscitent d'autres chez
la ministre, libre à elle. Sinon, je serais disposé à
aborder des dossiers particulier.
Le Président (M. Saintonge): Alors, Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux, est-ce que vous avez quelque commentaire
à la suite des propos de M. le député de Gouin? (17 h
30)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à l'étude
des crédits, j'ai eu l'occasion de disséquer la demande de 40 000
000 $ de l'Association des hôpitaux du Québec. Je n'ai
malheureusement pas les données devant moi, mais je pense que je peux
affirmer sans crainte de me tromper que ces 40 000 000 $ étaient
fortement discutables quant au fondement sur lequel l'évaluation de
l'Association des hôpitaux du Québec reposait. Cela dit, dans
l'hypothèse où le
chiffre de 40 000 000 $ serait celui qu'il faudrait retenir, où
la demande de 40 000 000 $ serait totalement justifiée, je voudrais
quand même faire remarquer, non pas au député de Gouin,
parce qu'il ne s'en souviendra pas, mais à la population du
Québec que, par rapport aux 3 500 000 000 $ que représente le
budget des centres hospitaliers du Québec, les 40 000 000 $ dont il
parle représenteraient, dans l'hypothèse où cette somme
serait absolument exacte, moins de 1 %, soit 0,8 % du budget global des
hôpitaux du Québec. Alors, je veux bien qu'on tente de gonfler les
40 000 000 $ comme étant une catastrophe qui va être
considérable pour la population, mais je voudrais faire remarquer, entre
autres choses, que lorsque le député de Gouin affirme que
l'Association des hôpitaux du Québec nous fait part de ce besoin
et dit que la situation demeure fragile... Dire qu'il y aura plus de lits de
fermés en 1987-1988 qu'en 1986-1987... Comme on devrait donc parler de
1981, 1982, 1983, 1984 où c'était par centaines que les lits
étaient fermés dans les hôpitaux du Québec! Je peux
affirmer ici qu'il n'y aura pas plus de lits fermés en 1987-1988 qu'il
n'y en a eu en 1986-1987, que c'est un nombre minime de lits qui ont
été fermés si on tient compte de l'ensemble des lits du
Québec et qu'ils ont été fermés, pour la
très grande majorité d'entre eux, pour des périodes
très courtes. On a dépassé le temps - on l'a lu l'autre
jour dans un journal de Québec - où les lits étaient
fermés par centaines dans les régions de Québec et de
Montréal durant l'été, pour donner un exemple, ce qui
était la cause d'un cauchemar pour le fonctionnement des hôpitaux
et les besoins de la population. L'été dernier et cette
année, nous consacrons des sommes importantes à
l'intérieur du plan des urgences, ce qui permet d'ajouter un bon nombre
de lits à la disposition de la population, lits, qui, autrefois,
étaient fermés en raison de coupures budgétaires et qui
maintenant restent ouverts durant l'été,
précisément pour permettre à la population de recevoir les
services dont elle a besoin.
J'aurai peut-être tout à l'heure quelques détails
plus précis et je reviendrai sur le sujet, s'il y a lieu.
Le Président (M. Saihtonge): Très bien.
Nous allons maintenant passer à l'étude de certains
dossiers précis. M. le député de Gouin.
M. Rochefort: Oui, M. le Président. Avant d'aborder le
premier dossier, je dirai que je trouve assez extraordinaire que le
scénario 1986-1987 semble vouloir se répéter en
1987-1988.
En 1986-1987, quand les fermetures de lits ont commencé dans les
établissements hospitaliers, à cause des contraintes
budgétaires imposées par la ministre, celle-ci nous a
affirmé... D'abord, quand cela a commencé, elle nous a dit qu'il
n'y en aurait pas, qu'au contraire, elle avait injecté de l'argent neuf.
À la deuxième étape, elle nous a dit que cela se
limiterait tout au plus à la fermeture de 101 lits. Je revois la
ministre debout avec l'affirmation qu'elle faisait du haut de son siège
qu'il y aurait au maximum de 101 lits qui seraient fermés. Elle ne nous
traitait pas de menteurs parce que le règlement ne lui permettait pas de
le faire, mais elle mettait en doute tous les cas que nous citions devant elle.
À la fin, cela s'est soldé par un nombre d'au-delà 500.
Des cas pour lesquels la ministre nous avait dit: II n'en est pas question,
c'est faux ce à quoi fait allusion le député de Gouin...
On avait parlé notamment de l'hôpital Notre-Dame en 1986-1987. La
ministre disait: Pas question, il n'y a pas de lits qui vont être
fermés à Notre-Dame. Finalement, il y en a eu 62 ou 69 durant une
bonne période. Les chiffres qu'elle a déposés par rapport
à l'hôpital Fleury étaient moins élevés et
pour une moins longue période dans son document que dans ce qu'avait
déclaré et rendu public l'établissement hospitalier
lui-même.
Ce que je sais, c'est que déjà, actuellement, il y a des
établissements qui rendent publiques les conséquences de
fermetures de lits, de coupures de services, de contraintes budgétaires
qu'ils se voient imposer. La ministre nous reprend sa cassette 1986-1987 du
début de l'année: Non, non, non, non, non, il n'y en aura pas; ne
vous en faites pas, et il y en aura bien moins que quand vous autres, vous
étiez là, et arrêtez donc ces histoires-là. M. le
Président, je souhaiterais au moins qu'on soit dans la machine à
faire avancer le temps. On pourrait, en 30 secondes, entendre le discours-bilan
que la ministre pourra nous faire à la fin de cette présente
année budgétaire, comme elle a été forcée de
le faire à la fin de 1986-1987 où, finalement, la conclusion de
1987 était le contraire des propos qu'elle avait tenus au début
de l'année financière 1986-1987. M. le Président, on
repart toujours les mêmes cassettes. Ce n'est pas compliqué de
dire l'état actuel des choses et de nous le dire exactement tel que
c'est, mais j'ai l'impression qu'on repart le même stratagème.
La région de l'Outaouais
Le premier dossier particulier que je veux aborder, c'est l'Outaouais.
On sait que, depuis le mois d'octobre dernier, la région de l'Outaouais
est dans une situation de pénurie de l'effectif médical encore
plus importante, encore plus grande, encore plus durement sentie par la
population que ce n'était le cas auparavant, à cause de la
décision d'un certain nombre de médecins de l'Ontario de
ne plus accepter les taux de rémunération de la
Régie de l'assurance-maladie du Québec lorsqu'ils soignent et
qu'ils dispensent des services médicaux à des patients de
l'Outaouais québécois. Cela a amené toutes sortes de
situations déplorables. Cela a amené des problèmes
importants quant à l'accessibilité aux services médicaux
pour les citoyens de l'Outaouais québécois. Cela a amené
des situations où des médecins ontariens ont exigé que les
personnes défraient des montants importants de leur poche, qu'elles
n'étaient pas admissibles à des remboursements de la Régie
de l'assurance-maladie du Québec. Cela a amené des retards dans
certains services médicaux, par exemple, les examens diagnostiques
importants dans le domaine cardio-vasculaire ou dans d'autres domaines. Cela a
pris beaucoup de temps pour qu'on puisse passer ces examens diagnostiques avec
les conséquences que cela représentait pour les patients.
Finalement, après plusieurs reports de sa décision, plusieurs
reports de sa visite dans l'Outaouais, la ministre est finalement allée
dans l'Outaouais au nnois de mars ou au mois d'avril pour annoncer son grand
plan d'action dans l'Outaouais québécois.
Même s'il est intéressant que des sommes additionnelles
aient été mises dans l'Outaouais québécois, ce avec
quoi nous sommes pleinement d'accord et on pense qu'il faut en mettre encore
plus, la ministre n'est pas allée annoncer les ressources, les moyens
qu'elle entend prendre pour ajouter des médecins dans l'Outaouais
québécois. Elle nous a dit à ce moment-là deux
choses reliées à la pénurie de l'effectif médical
dans l'Outaouais québécois. D'abord, parmi les 50 postes
d'entrée en faculté de médecine en
spécialité qui sont réservés pour des
régions en pénurie, elle en réservait dix pour
l'Outaouais. M. le Président, vous comprendrez comme moi que cela veut
dire quatre ans ou cinq ans d'attente, parce qu'il faut former ces
médecins. Il faut qu'ils deviennent des spécialistes pour pouvoir
pratiquer dans cette région.
Deuxièmement, elle nous a dit qu'effectivement elle avait
créé un groupe de travail ou un comité de travail ou
qu'elle avait amorcé des discussions avec la Fédération
des médecins spécialistes du Québec pour en arriver
à une solution, à des moyens qui pourraient être mis en
place pour ajouter des médecins spécialistes dans l'Outaouais
québécois, compte tenu de cette situation de pénurie dans
laquelle ils se trouvent particulièrement depuis le mois d'octobre
dernier.
M. le Président, autant la première solution des dix
médecins spécialistes, c'est pour dans quatre, cinq ou six ans,
autant cette solution, commencer les discussions avec la
Fédération des médecins spécialistes du
Québec, est un peu surprenante à ce moment-ci puisque c'est
depuis le mois d'octobre dernier que cette discussion aurait dû
être commencée car, dès le mois d'octobre dernier, le
Conseil régional de la santé et des services sociaux de
l'Outaouais et l'Association des médecins omnipraticiens comme
spécialistes de l'Outaouais ont demandé la mise en place de
mesures qui iraient dans le sens d'une rémunération additionnelle
pour attirer des nouveaux médecins rapidement, à court terme,
dans l'Outaouais et pour avoir l'ensemble des moyens requis pour garder, donc
pour exercer cette force de rétention de ces nouveaux médecins
qu'on attirait dans l'Outaouais pour être sûr que trois semaines ou
trois mois plus tard, ils ne quittent pas pour aller ailleurs, notamment en
Ontario.
D'ailleurs, M. le Président, j'imagine que la ministre
reconnaîtra que c'est le point de vue d'un bon nombre des intervenants,
d'autant plus que son collègue, le ministre régional de
l'Outaouais, le député de Hull, le ministre des
Approvisionnements et Services, a donné une conférence de presse
il y a un certain nombre de mois, en mars ou avril, au printemps, pour dire
qu'il était nécessaire qu'on ajoute 60 médecins
spécialistes à court terme dans sa région. (17 h 40)
Deuxièmement, dans un mémoire préparé par
ses fonctionnaires, pour sa signature, au mois de février dernier, qui
faisait le tour de l'ensemble de la problématique dans l'Outaouais, la
première recommandation de ses hauts fonctionnaires, dans le document
prévu pour sa signature, était d'ajouter 57 effectifs en
omnipratique et 130 spécialistes pour combler l'ensemble des besoins
régionaux, et cela, dans les prochains mois. Cependant, afin de
répondre à court terme au besoin de rapatriement, il y a un
besoin urgent de 60 spécialistes d'ici à 1991 nous ont dit ses
hauts fonctionnaires du ministère de la Santé et des Services
sociaux.
J'aimerais que la ministre nous explique quand, combien et comment on va
finir par accorder des médecins additionnels dans l'Outaouais, compte
tenu de la situation particulière qu'on vit dans cette région
depuis le mois d'octobre dernier.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le député
de Gouin nous dit que c'est depuis octobre 1986 que le conseil régional
nous dit qu'il y a des problèmes de recrutement de médecins, des
problèmes quant à la dispensation des services médicaux
dans l'Outaouais si bien que les gens vont en Ontario, etc. J'ai eu l'occasion
de le dire en Chambre - je pense que, quand on veut donner une partie de
l'histoire, il faut au
moins donner l'ensemble - que deux de mes prédécesseurs
avaient été touchés par le même problème,
l'un en 1984 et l'autre en 1985 et que, pourtant, aucune mesure
particulière n'a été prise. Je ferais exception pour une
mesure quand même importante qui a été consacrée
pour la construction de l'hôpital de Gatineau. Je suis capable de
reconnaître ce que les gens font, contrairement au député
de Gouin, qui est d'un pessimisme qui nous laisse pour le moins songeurs.
Le problème de recrutement des effectifs médicaux en
régions éloignées -dans le cas de l'Outaouais, on pourrait
parler d'une région intermédiaire plutôt que d'une
région éloignée - est lié à plusieurs
mesures. D'une part, à des mesures incitatives, et, deuxièmement,
à des mesures qui rejoignent l'équipement mis à la
disposition des personnes et de la population, de l'équipement
nécessaire pour répondre aux besoins des médecins
eux-mêmes. On sait fort bien qu'une des mesures les plus importantes pour
le recrutement des médecins et leur rétention, c'est de mettre
à leur disposition de l'équipement. Dans ce sens-là, au
niveau de l'immobilisation et de l'équipement, lorsque je suis
allée dans l'Outaouais, il y a environ quatre ou cinq semaines, c'est de
l'immobilisation et de l'équipement pour un montant de 4 000 000 $ pour
l'année 1987-1988 qui ont été consentis et
également un montant de 4 895 000 $ pour le fonctionnement.
Il y a également des mesures incitatives au recrutement et
à la rétention d'effectifs médicaux dans l'Outaouais, des
primes d'installation, bourses de formation et autres pour un montant de 1 700
000 $. Je devrais vous dire que, pas plus tard qu'hier, déjà ces
mesures-là commencent à porter fruits parce que quatre
orthopédistes, à ce moment-ci, ont fait une demande pour aller
s'établir dans l'Outaouais.
M. le Président, tout le problème du rapatriement des
clientèles outaouaises dépasse de beaucoup la question des primes
d'installation, de formation, de l'équipement, des immobilisations.
C'est un ensemble de mesures qui doivent être mises à la
disposition de la population de l'Outaouais et qui sont actuellement uniquement
ou trop uniquement disponibles du côté de l'Ontario. C'est dans ce
sens qu'il y a des mesures qui touchent la santé mentale, des mesures de
réadaptation, des centres de crise et un grand nombre de mesures qui,
nous croyons, feront que les gens seront appelés à se
prévaloir des services du côté de l'Outaouais plutôt
que de recourir à ceux de l'Ontario.
Pour une première année, c'est tout près de 9 000
000 $ que nous mettons à la disposition de l'Outaouais pour une seule
année pour tenter de résoudre les problèmes dont nous
parlons. Je dois vous dire que la population a reçu cette nouvelle avec
beaucoup de satisfaction. D'ailleurs, il s'agit de se référer
à des éditoriaux ou des nouvelles qui sont sortis à cet
égard, et je pense que cela pourra confirmer le fait que les mesures qui
ont été prises sont des mesures qui devraient
éventuellement aider à résoudre le problème.
M. le Président, il n'y a personne... Et je mets au défi
le député de Gouin lui-même, en dépit de toutes ses
prétentions, de penser qu'en quelque région du Québec on
puisse résoudre le problème des effectifs médicaux dans
une seule année. Quand il lève le nez, c'est le cas de le dire,
sur le fait, par exemple, que, dans les mesures que nous avons prises touchant
le contingentement des résidents, nous avons réservé dix
postes qui, éventuellement, iront pratiquer dans l'Outaouais, ce n'est
pas une mince mesure. Je vous assure qu'il y a bien des régions qui
auraient voulu que ces mêmes dix postes leur soient
réservés. C'est vrai que cela sera dans quatre ans, mais personne
ne peut prétendre résoudre un problème qui dure depuis
au-delà de 100 ans en une seule année. Je pense que les mesures
énergiques que nous avons prises tant les montants consentis que
d'autres mesures administratives, que des ressources nouvelles qui seront mises
en place dans la région de l'Outaouais, c'est un ensemble de mesures qui
éventuellement devraient porter fruits et résoudre les
problèmes qui sont soulevés dans cette région
particulière.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: J'ai un certain nombre de commentaires. M. le
Président, je dirai à la ministre que je ne lève pas le
nez sur ses dix médecins qu'elle a réservés pour
l'Outaouais pour dans quatre ans. Ce que je lui dis, c'est que c'est bien
sympathique pour dans quatre ans, mais que le problème est
immédiat et nécessite des interventions qui nous permettront
d'avoir plus de médecins rapidement. On ne demandera quand même
pas à la population de l'Outaouais d'attendre quatre ans. C'est cela que
je dis, M. le Président.
D'autant plus que ces dix médecins ont sûrement
été pris dans l'enveloppe des 50 que la ministre nous confirme et
qui a toujours été claire. Donc, ils devaient être
prévus pour aller ailleurs. Or, il y a un jeu de dominos. D'autre part,
ils sont pris dans une enveloppe dans laquelle l'ensemble des intervenants de
la table de concertation avait demandé 270 médecins en
entrée en faculté alors que la ministre n'en a accordé que
260. M. le Président, je veux bien mais il faut replacer les choses dans
leur véritable contexte.
D'autre part, quand la ministre nous dit
que cela date de 100 ans, je veux bien qu'on fasse le tour et qu'on
prolonge le plus profondément dans les phobies de la ministre,
c'est-à-dire le passé, mais il faut quand même se
comprendre. C'est depuis le mois d'octobre dernier que les médecins
ontariens refusent de traiter des patients québécois au tarif de
la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Je veux bien qu'on
retourne à Mathusalem mais, dans le temps de Mathusalem, on soignait aux
tarifs de la régie. Il y avait des problèmes, mais pas ce type de
problème là. Ce nouveau problème a donné une
ampleur, une envergure et des effets beaucoup plus majeurs sur la population de
l'Outaouais quant à son accessibilité à des services de
santé de la part de médecins omnipraticiens ou de médecins
spécialistes.
D'autre part, la ministre nous dit: Oui, mais le député de
Gouin devrait comprendre qu'il faut situer cela dans un grand ensemble. Je veux
bien, M. le Président, mais où sont les éléments de
son grand plan d'ensemble qu'elle est allée présenter dans
l'Outaouais qui nous permettent d'avoir des médecins à court
terme. Je répète. Elle nous dit: Dans quatre ans, je vais en
avoir une dizaine. Deuxièmement, elle nous dit: Là je vais
commencer à discuter avec la Fédération des
médecins spécialistes du Québec. Pourquoi avoir attendu
novembre, décembre, janvier, février, mars, avril, mai, juin pour
commencer à discuter avec les médecins spécialistes alors
qu'on vient de perdre huit mois où l'on aurait dû faire cette
discussion.
Finalement, M. le Président, quand la ministre nous dit: Oui, et
les annonces que j'ai faites auraient permis d'ajouter ou de faire en sorte que
quatre médecins orthopédistes, je pense, nous a-t-elle dit, ont
demandé à aller pratiquer dans l'Outaouais hier, avant-hier ou
récemment, je dis: Bravo! Mais justement, si la ministre n'est pas
inquiète qu'en fonction de l'absence de mesures de rétention de
ces médecins dans l'Outaouais qu'on court avec eux les mêmes
risques que nous avons courus avec tous les autres, c'est-à-dire que
dans les mois ou les années qui vont suivre, ces médecins,
à cause de l'absence d'éléments qui les incitent à
demeurer en poste dans l'Outaouais québécois quitteront
peut-être pour aller en Ontario. C'est dans ce sens que moi je suis
d'accord avec la ministre quand elle nous dit: Ça nous prend un plan
d'ensemble. (17 h 50)
Mais l'ensemble ne peut sûrement pas fonctionner s'il n'y a pas de
mesures précises pour ajouter à court terme des médecins
et s'assurer que ceux qu'on ajoute on va les garder dans l'Outaouais. C'est
ça qui n'est pas présent dans le projet, dans le plan d'action
que nous a présenté la ministre.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai parlé des
quatre orthopédistes. On aurait pu parler aussi d'autres
spécialistes qui doivent déjà dès cette
année venir dans la région de l'Outaouais. Il s'agit de
spécialistes dans d'autres disciplines. Quand il dit qu'il n'y a aucun
plan de rétention, je pense que nous donnions à la région
de l'Outaouais des mesures qui étaient prévues pour des
régions éloignées, soit les mesures de primes
d'installation, par exemple, pour que chaque médecin spécialiste
qui ira s'établir dans l'Outaouais reçoive pendant quatre ans une
prime d'installation de 10 000 $ pour un montant de 40 000 $ après
quatre ans. Je pense que c'est là une mesure importante et qui
n'existait pas pour l'Outaouais.
Je pense que c'est là une mesure importante. Quand nous parlons
de bourses de formation et de ressourcement qui seront très
généreuses, je pense que nous avons, là aussi, des mesures
de rétention. Je pense, M. le Président, que quand nous mettons
à la disposition des médecins des ressources en équipement
qui leur permettront justement d'exercer leur spécialité avec les
outils nécessaires et avec compétence, je pense que vous avez
là également des mesures de rétention importantes. Je
crois - et le député de Gouin peut tout à fait
différer d'opinion s'il le veut - qu'avec les mesures que nous avons
prévues dès l'année 1987-1988, non seulement en termes de
mesures s'appliquant à la population, de mise à la disposition de
la population de types de différentes ressources en milieu hospitalier,
du côté de la santé mentale, du côté de la
réadaptation, du côté des personnes âgées et
également de ressources à implanter directement dans les
hôpitaux eux-mêmes, je crois que nous mettons en place les jalons
essentiels indispensables pour que nous arrivions à corriger sur une
période de quatre ans environ les problèmes auxquels fait face la
population de l'Outaouais.
M. le Président, si le député de Gouin ne
reconnaît pas ces mesures comme étant des mesures d'incitation et
de rétention, sans compter qu'il ne s'agit pas à strictement
parler d'une région éloignée mais bien davantage d'une
région intermédiaire où le problème s'est
créé à cause de la proximité de l'Ontario et du
fait que, historiquement parlant, je disais probablement un siècle, la
population est allée chercher ses services du côté de
l'Ontario... Je pense que ces mesures énergiques que nous prenons qui
vont s'étaler sur une période de quatre ans devraient
résoudre durant cette période de temps ou après cette
période de temps des problèmes qui ont été
générés il y a déjà des décennies et
qu'il nous faut maintenant corriger. Nous croyons que nous avons là les
mesures
nécessaires pour corriger la situation dans la région de
l'Outaouais. Évidemment, si nous avions mis 100 000 000 $ ce serait
mieux! Nous mettons tout près de 9 000 000 $ pour l'année
1987-1988. Nous estimons qu'il s'agit là d'un montant important.
Encore une fois, il ne s'agit pas de dépenser de l'argent pour
dépenser de l'argent, il faut que les sommes que nous prévoyons
pour des mesures telles que celles que je viens de décrire
s'insèrent dans un plan d'ensemble et dans un plan cohérent et
non pas dans des plans ad hoc qui n'ont pas d'effet durable s'ils n'ont pas
été pensés dans une vue beaucoup plus cohérente et
d'ensemble de toute la situation.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Oui, M. le Président, le premier commentaire
que je voudrais faire à la ministre, c'est que je voudrais bien qu'elle
nous situe où, dans les documents qu'elle a rendus publics dans sa
visite dans l'Outaouais, il est question des mesures de rétention des
professionnels de la santé auxquelles elle vient de faire allusion.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais ajouter une
chose pour l'information du député de Gouin. Le Conseil du
trésor et le Conseil des ministres ont accordé un mandat de
négociation aux relations du travail pour discuter justement de ces
mesures avec les médecins de l'Outaouais, de même que de certaines
mesures avec les médecins de l'Ontario, parce qu'il faut aussi
être réaliste. La population de l'Outaouais, pour les services
surspécialisés, devra continuer d'avoir recours aux services de
l'Ontario, de la région d'Ottawa, où, évidemment, il
existe des établissements sur-spécialisés et qui ne seront
jamais à la disposition de la population de Hull, à moins que la
population de Hull ne consente à venir à Montréal.
Vous comprendrez, M. le Président, que, dans un mandat de
négociations qui est donné présentement à notre
Direction des relations du travail, il n'est pas question d'en dévoiler
le contenu d'une façon plus précise que ce que j'ai fait
jusqu'à maintenant.
Je voudrais également corriger, si vous me permettez, une
impression que le député de Gouin a pu créer -
probablement involontairement - à savoir que les médecins de
l'Ontario refusent de soigner les gens du Québec. Tel n'est pas le cas
et je peux assurer qu'aucun patient de l'Outaouais, étant donné
des gestes que nous avons posés, des discussions que nous avons eues,
les médecins de l'Ontario n'ont jamais refusé de cas d'urgence
et, à ma connaissance, ne s'apprêtent pas à le faire.
Alors, il ne faudrait quand même pas créer l'impression que les
gens de l'Outaouais sont systématiquement refusés en Ontario et
qu'ils pourraient se voir privés de services essentiels dans le domaine
de la santé.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Laurier.
M. Rochefort: M. le Président, on va respecter
l'alternance, si vous permettez?
Le Président (M. Saintonge): Si vous permettez, un
instant! Je dois vous dire là-dessus, l'alternance... Évidemment,
la ministre ne compte pas dans l'alternance, je vous le fais remarquer dans un
premier temps. Si vous avez une remarque, veuillez immédiatement la
faire sur les propos de Mme la ministre et je vais vous céder la
parole.
M. Rochefort: C'est là-dessus, M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): Allez-y, M. le
député de Gouin. M. le député de Laurier, vous
serez en deuxième.
M. Rochefort: M. le Président, je pense...
Le Président (M. Saintonge): M. le député le
député de Gouin en premier et je vais revenir à vous
ultérieurement.
M. Rochefort: M. le Président.
M. Sirros: M. le Président, est-ce que l'intervention de
la ministre compte...
Le Président (M. Saintonge): Non, c'est ce que j'ai
mentionné. Les interventions de la ministre ne comptent pas, mais disons
que pour vider la question principale...
M. Sirros: Mais c'était précisément sur la
question, M. le Président, et c'est très court. Je voulais juste
m'enquérir auprès du député...
Le Président (M. Saintonge): Un instant. J'ai
cédé la parole à M. le député de Gouin, et
je reviendrai à vous ultérieurement. M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Je suppose que
l'adjoint parlementaire de la ministre pourra discuter avec la ministre au
ministère. Je pense qu'on a là une belle illustration de la
façon qu'a la ministre de présenter les choses. Deux cas
précis. Elle vient, en toute fin d'intervention, nous dire: M. le
Président, je puis affirmer, contraire-
ment à ce qu'a laissé sous-entendre le
député de Gouin, volontairement ou involontairement - c'est
à peu près ce qu'elle a dit - que personne dans l'Outaouais
québécois ne se voit refuser des services de santé par des
médecins de l'Ontario. Dit comme cela, on a donc l'impression que ce
n'est pas vrai qu'il y a un nouveau problème d'accessibilité
créé par les événements d'octobre dernier.
M. le Président, il faut attendre la fin de son intervention pour
relativiser ce qu'elle vient de dire. Elle dit: II n'y a pas de
médecins, en Ontario, qui ont refusé jusqu'à ce jour de
donner des services d'urgence, des services essentiels. Il y a une
différence entre refuser de donner un service d'urgence ou un service
essentiel et refuser de soigner, avec les conséquences que cela
implique. Je pense que c'est une belle illustration de la façon qu'a la
ministre de présenter les dossiers pour essayer, à tout bout de
champ, de laisser sous-entendre que tout va bien dans le meilleur des mondes,
madame la marquise. Même s'il y a des citoyens qui ne sont pas en
situation d'urgence, le fait qu'ils attendent deux ou trois mois pour avoir un
service diagnostic que, comme cela a été le cas le printemps
dernier dans le domaine cardio-vasculaire, cela a des implications sur la
santé et sur l'accessibilité aux services de santé. (18
heures)
D'autre part, plus grave encore, la ministre dit: Oui, mais le
député de Gouin fait erreur quand il dit qu'il n'y a pas
d'élément de rétention des médecins dans notre plan
d'action que j'ai présenté lors de ma visite dans l'Outaouais le
19 mai dernier. Elle commence à nous citer une série de choses,
des bourses de perfectionnement, des primes à l'installation, tout cela.
Comme la ministre le sait, maintenant, j'espère, je lis ses documents,
je les ai tous les quatre. Je les avait lus à l'époque, et je
n'ai rien trouvé de tout cela dans les documents, rien du tout.
J'imagine que la ministre n'est pas allée dans l'Outaouais pour faire
des annonces dans lesquelles elle aurait caché les
éléments les plus intéressants pour la population de
l'Outaouais. Tel n'est pas le cas. La ministre a fini par corriger le tir
après coup. J'avais compris cela, on s'en est parlé, ma
recherchiste et moi, M. le Président, et c'était probablement
dans les mandats de négociation qu'elle avait donnés à ses
fonctionnaires, au sujet des relations du travail avec la
Fédération des médecins spécialistes
qu'étaient prévues les choses qu'elle venait de nous
présenter.
M. le Président, entre un mandat donné à des
fonctionnaires responsables de négocier avec la Fédération
des médecins spécialistes du Québec, des mesures de
rétention des médecins qui vont s'installer dans l'Outaouais
québécois et l'annonce d'un plan d'action qui contient ces
mesures de rétention, il y a une marge. Que la ministre nous dise
qu'elle a fini, huit mois après le début du problème, par
donner enfin un mandat à ses fonctionnaires dans lequel on trouverait
des éléments qui permettraient de retenir, des
éléments de rétention des médecins dans l'Outaouais
québécois, bravo!, c'est ce que nous demandons depuis le
début. Mais que la ministre ne vienne pas nous dire que c'est ce qu'elle
est allée annoncer, parce que ce n'est pas dans ses documents et qu'elle
ne vienne pas nous dire que c'est ce qui est en place. Elle vient nous dire
à la fin de ce chapitre, que, évidemment, c'étaient les
mandats qu'elle avait donnés et qu'elle ne pouvait pas
révéler les mandats en cours de négociation. Je veux bien,
mais ne nous dites pas qu'il y en a, dites-nous qu'on en négocie. Cela,
c'est plus clair et plus franc.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce que j'ai dit ce que
le député de Gouin me demandait: Est-ce qu'il y a des mesures de
rétention ou d'incitation pour que les médecins aillent
s'établir dans la région de l'Outaouais? Je lui en ai
donné, qui sont des mesures généralement retenues pour des
régions éloignées et qui sont possiblement des mesures qui
peuvent être retenues pour la région de l'Outaouais. Il y a
peut-être également d'autres mesures dont je ne peux pas faire
état ici, compte tenu du mandat de négociation qui a
été accordé à notre Direction des relations du
travail pour discuter avec les médecins de l'Outaouais. Alors, je ne
sais pas pourquoi... Il devrait être content que je lui aie donné
plus d'informations que je n'en ai donné aux gens de l'Outaouais. Je ne
vois pas de quoi il se plaint.
M. Rochefort: Vous pouviez bien avoir un beau sourire.
Mme Lavoie-Roux: Pardon?
M. Rochefort: Vous pouviez bien avoir un beau sourire.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas autre chose à dire, M. le
Président.
Le Président (M. Saintonge): Pas autre chose. Très
bien.
M. le député de Laurier, est-ce que vous voulez la
parole?
M. Sirros: Cela a été couvert, M. le
Président. Cela va.
Le Président (M. Saintonge): Très bien. M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Oui, M. le Président, cela a
été couvert, je n'en doute pas. Voilà une belle
illustration quand la ministre répond en Chambre que tout va bien, que
c'est réglé, que des décisons ont été
prises. Entre une décision et un mandat de négocier, on sait que,
quelquefois, il peut s'écouler trois ans. Que la ministre vienne nous
dire que je n'ai pas à me plaindre, qu'il y a des mesures de
rétention alors qu'il y a tout simplement des mandats visant à
finir par arriver à une entente sur des mesures de rétention, il
y a une grosse marge, une immense marge entre les deux et je comprends que la
ministre n'ait pas trop de commentaires à faire.
Mme Lavoie-Roux: ...réussisse...
M. Rochefort: Je comprends que la ministre... Au contraire, Mme
la ministre, les pressions que je fais sur vous ont justement pour but que cela
réussisse et vous le savez très bien. Je sais que cela motive la
ministre. C'est notre façon de faire en sorte qu'elle n'oublie pas le
dossier et qu'elle donne souvent des directives reliées à des
questions possibles autour de ces sujets. Elle sait comment cela fonctionne,
elle a pratiqué cela pendant dix ans.
Je voudrais aborder un autre sujet.
Mme Lavoie-Roux: Pas de la même façon que vous, en
tout cas.
M. Rochefort: Non, c'est vrai. Vous, vous parliez du Liban et de
la médecine de guerre dans les hôpitaux.
Mme Lavoie-Roux: Jamais, M. le Président.
M. Rochefort: Ça, c'est vrai que, vous, vous faisiez
ça...
Mme Lavoie-Roux: Jamais, M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Rochefort: ...et moi, je n'ai jamais fait ça.
Le Président (M. Saintonge): Un instant, s'il vous
plaîtl
M. Rochefort: Ça, M. le Président, je
reconnais...
Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: ...qu'il y a une différence profonde
entre...
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin, un instant. Tout autant pour Mme la ministre, je voudrais éviter
qu'on s'échange des propos directement à cette commission. Ce
sont les mêmes règles de procédure qu'en Chambre et je
demanderais de ne pas vous adresser directement l'un à l'autre pour ne
pas faire un débat entre deux parlementaires. M. le député
de Gouin.
M. Rochefort: Je respecte intégralement votre directive,
M. le Président. Je dis à M. le Président que vous
pourriez très bien dire pour moi à la députée de
L'Acadie...
Le Président (M. Saintonge): Ha! Ha!
Ha!
M. Rochefort: ...que s'il y a une chose sur laquelle je m'entends
à 100 % avec elle, c'est qu'il y a une différence profonde entre
sa façon de traiter les dossiers de santé, lorsqu'elle
était dans l'Opposition, et ma façon. C'est vrai que, moi, M. le
Président, je n'ai jamais prétendu que les services de
santé au Québec étaient des services comme on en
retrouvait au Liban ou dans des services de médecine de guerre.
Ça, c'est vrai, M. le Président, que, moi, je n'ai jamais
joué à faire peur au monde en leur faisant voir des
calamités de cette nature, comme l'a fait la députée de
L'Acadie pour devenir ministre et membre d'un gouvernement un jour.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Rochefort: Ça, c'est une différence profonde
qu'il y a entre elle et moi.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, la différence
profonde entre...
Le Président CM. Saintonge): Mme la ministre, s'il vous
plaît! On ne discutera pas...
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je reviendrai tout à l'heure,
M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): C'est cela, très bien.
M. le député de Gouin, votre question suivante.
Équipements de radiothérapie
M. Rochefort: Je vous remercie, M. le Président.
J'aimerais qu'on aborde la question de la radiothérapie et des
équipements de radiothérapie dans les établissements de
santé au Québec. On sait que les équipements de
radiothérapie sont des équipements très importants dans
les traitements pour le cancer, que des demandes importantes ont
été faites au cours des dernières années
visant à doter un certain nombre d'hôpitaux, notamment
l'Hôtel-Dieu de Québec, l'hôpital Notre-Dame et
l'hôpital Maisonneuve-Rosemont à Montréal,
d'équipements de radiothérapie pour leur permettre de donner des
services de santé relativement aux traitements du cancer, qui sont
absolument nécessaires pour le bien-être des patients
affectés, et pour permettre aux professionnels de la santé qui
sont responsables de dispenser ces services d'avoir des équipements
modernes, des équipements en qualité et en quantité
suffisantes pour faire face à la demande grandissante de traitement par
équipement de radiothérapie.
On sait qu'un certain nombre d'hôpitaux attendent un plan
d'équipement en radiothérapie. Je les ai nommés,
l'Hôtel-Dieu de Québec, l'hôpital Notre-Dame de
Montréal et l'hôpital Maisonneuve-Rosemont de Montréal.
J'aimerais que la ministre nous dise où nous en sommes rendus dans ce
dossier et quand on devrait être en mesure d'annoncer des
décisions finales d'ajout d'équipement de radiothérapie,
notamment dans ces trois établissements.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il y a un plan qui doit
m'être présenté quant à la mise à jour, si je
peux m'exprimer ainsi, des équipements de radiothérapie, non
seulement dans les trois hôpitaux de Montréal, mais aussi dans un
hôpital de Québec qui pourrait être touché par les
mêmes mesures. Il est trop tôt pour que je puisse faire état
de l'échéancier prévu et des montants accordés. Il
faut bien prendre conscience que ce sont des sommes très importantes. Je
ne suis pas capable, aujourd'hui, de faire connaître mes décisions
à ce sujet.
M. Rochefort: M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: J'aimerais que la ministre nous précise la
différence entre la réponse qu'elle nous donne maintenant et la
déclaration qu'a faite, le 8 février, un attaché politique
de son cabinet, qui, par l'intermédiaire de M. Jean-Claude Paquet,
journaliste au Soleil, reconnaissait que la ministre avait un dossier du
ministère en main et que c'était même un de ses trois
dossiers prioritaires, mais qu'elle n'avait pas encore pris de décision:
"Elle doit en discuter au Conseil des ministres, a-t-il dit, sans pouvoir fixer
de date, mais il est douteux, selon lui, qu'une décision puisse
être prise avant le prochain budget."
Mme Lavoie-Roux: Je pense que...
M. Rochefort: M. le Président, le prochain budget est
quand même passé. On est en train de le fermer actuellement.
Février, mars, avril, mai, juin, cela fait quand même quatre mois.
Est-ce que le dossier est arrivé ou non?
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que l'attaché politique qui a
fait cette déclaration ne se référait pas au même
dossier que celui auquel a fait allusion, tout à l'heure, le
député de Gouin, c'est-à-dire le dossier du renouvellement
des équipements pour la radiothérapie. Il s'agissait d'une
demande supplémentaire que j'avais adressée au Conseil des
ministres touchant des crédits supplémentaires pour le
renouvellement d'équipements. Comme nous n'avions pas encore reçu
de décision définitive et que cette décision n'a
été rendue publique par le ministre des Finances qu'au moment du
discours sur le budget, cette affirmation de l'attaché politique se
référait à une demande de crédits additionnels pour
de l'équipement technologique dans les centres hospitaliers.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Tenant compte du fait qu'on parle d'une demande
d'un montant de l'ordre de 30 000 000 $ à 40 000 000 $ pour les cinq
prochaines années afin de renouveler cet équipement de base dans
le domaine du traitement du cancer, est-ce que la ministre croit être en
mesure d'annoncer une décision dans les prochains mois à partir
des crédits déjà annoncés?
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre. (18 h
10)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, dès que les
décisions auront été prises sur les nouveaux
équipements qui seront achetés ou qui seront renouvelés,
c'est évident que les décisions seront rendues publiques.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Est-ce que Mme la ministre a un
échéancier, M. le Président?
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas d'échéancier à
donner au député de Gouin au moment où nous nous parlons,
M. le Président.
Privatisation de certains services
M. Rochefort: Bon. Alors, on va attendre.
M. le Président, j'aimerais discuter un peu de la privatisation
dans le domaine de la santé et des services sociaux. On sait que le
président du Conseil du trésor, le député de
Verdun, affectionne particulièrement l'idée d'y aller par des
expériences pilotes de privatisation de différents services dans
le domaine de la santé et des services sociaux, qu'il s'en est encore
ouvert récemment, lors d'une visite dans l'Estrie, où il disait
qu'il chérissait au fond de son coeur l'objectif de mener à terme
une expérience pilote de privatisation dans le secteur de la
santé et des services sociaux et qu'il comptait bien avoir sa chance
prochainement.
On sait que dans le rapport Gobeil, dans le rapport des sages, il
était prévu d'y aller de l'avant avec des expériences de
privatisation. On sait, M. le Président, que le groupe Champlain, un
groupe bien connu dans le domaine de l'hébergement des personnes du
troisième âge, a déjà offert au nouveau gouvernement
du Québec de prendre en main les centres d'accueil et
d'hébergement à 90 % de leur budget actuel et qu'il serait en
mesure de donner des services sans problème. On sait, M. le
Président, que ce même groupe Champlain a déjà eu
des visées quant à l'accueil des réfugiés
politiques qui sont sous la responsabilité des centres de services
sociaux. On sait que la demande traîne on ne sait trop où sur quel
bureau dans le ministère. M. le Président, on sait d'autre part
que la ministre elle-même, comme députée de L'Acadie cette
fois-là, est allée inaugurer des travaux de construction d'un
bâtiment qui sera tout près, sinon relié physiquement
à l'hôpital de Saint-Laurent, l'ancien hôpital
Notre-Dame-de-l'Espérance. N'y a-t-il pas eu une visite de la ministre
récemment dans votre comté? Quel est l'édifice dont la
mise en chantier a eu lieu dans votre comté, récemment, comme
expérience pilote?
Mme Lavoie-Roux: C'est Notre-Dame-de-la-Merci.
M. Rochefort: Notre-Dame-de-la-Merci, excusez-moi. Mon Dieu! Je
me trompe entre Notre-Dame-de-l'Espérance et Notre-Dame-de-la-Merci. Il
y aurait une relation entre les deux établissements. On sait que dans la
région de Hull, je pense que c'est à La Pieta, il y a un projet
de construire un édifice privé pour personnes retraitées
qui serait relié par un passage souterrain ou surélevé
entre l'hôpital de La Pieta et cet établissement qui donnerait
finalement une forme d'accès privilégié à des
résidents d'un établissement privé à des ressources
d'un établissement public. On sait, M. le Président, que plus
récemment, au cours de la dernière année aussi, la
ministre de la Santé et des Services sociaux, par un décret
signé par le greffier du Conseil exécutif, a donné son
autorisation, en décembre dernier, à l'acquisition par le groupe
Lavalin de l'hôpital Bellechasse qui était déjà -
faut-il le rappeler - un hôpital privé.
Je voudrais, M. le Président, que devant tous ces
éléments que je viens d'aborder, la ministre nous expose un peu
sa position à elle comme ministre de la Santé et des Services
sociaux du Québec, quant à l'idée de la privatisation de
certains services, quant aux gestes que j'ai évoqués qui ont
été posés à La Pieta, Notre-Dame-de-la-Merci,
Bellechasse, quant aux intentions du président du Conseil du
trésor et quant à ses intentions, à elle, au cours de
l'année qui vient concernant la privatisation possible de certains
services de santé ou sociaux.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quant aux intentions du
Conseil du trésor, je me permettrai de suggérer au
député de Gouin qu'il aille lui poser directement les
questions.
En ce qui a trait aux différentes situations, aux
différents cas qu'il a mentionnés, je vais commencer -
peut-être pas dans l'ordre où il les a
énumérés - par la question de l'offre du groupe Champlain
relative au centre d'accueil et d'hébergement pour les
réfugiés politiques. Je dois vous dire que du côté
des réfugiés politiques, cette demande ne s'est jamais rendue sur
mon bureau pour la bonne et simple raison, entre autres j'imagine
quoique j'en ai eu vent par les journaux également, probablement comme
le député de Gouin - que le besoin n'est plus là. Il y a
eu une recrudescence assez considérable d'arrivées de
réfugiés aux mois de décembre, janvier et février,
je pense. Puis, à la suite des mesures qui ont été
annoncées par le ministre canadien de l'Immigration ces besoins ont
regressé d'une façon considérable, si bien qu'il n'y a pas
eu de nécessité je pense, de donner des réponses si la
question avait été posée à mon ministère sur
ce sujet.
En ce qui a trait aux centres d'accueil privés d'une façon
générale. Je suis très fière de dire, M. le
Président, que dans son dernier budget, le ministre des Finances a
annoncé qu'on injectait dans le budget des immobilisations un montant de
20 000 000 $ non pas pour construire de nouveaux centres d'accueil
privés, mais pour rénover des centres d'accueil privés
déjà existants que l'ancien gouvernement avait laissé se
détériorer d'une façon honteuse si bien qu'on retrouve,
dans ces centres d'accueil, des personnes hébergées pour
lesquelles on doit corriger la situation physique des endroits où ils se
trouvent.
C'est ce qu'on appelle en jargon de la
vétusté-sécurité, mais qui appelait des
interventions immédiates et les 20 000 000 $ d'immobilisations
pour le privé sont consacrés ces centres d'accueil. Personne ne
nous en fera reproche, au contraire, les personnes diront que nous prenons nos
responsabilités.
En ce qui a trait à l'hôpital Bellechasse, c'était
un hôpital privé. À ma connaissance, il a été
privé pendant les dix années où le gouvernement
précédent était au pouvoir et il a été, de
fait, vendu au groupe Lavalin avec une condition qui m'apparaissait
essentielle: que soient prévus dans cet hôpital
général des lits de soins intensifs qui étaient
inexistants et qui sont, pour leur mise en place, à la charge du groupe
Lavalin qui administre l'hôpital. Je crois que, situé là
où il se trouve, c'est une amélioration pour la population du
nord-est de Montréal.
Quant à l'édifice dont il a parlé qui est
relié à Notre-Dame-de-la-Merci, je lui ferai remarquer que cette
partie de terrain cédée à l'assurance Desjardins qui, je
pense, est partenaire là-dedans avec un autre groupe, était la
propriété des frères de Saint-Jean-de-Dieu si je ne
m'abuse. Ils l'ont vendue et un certain nombre de ces frères habitaient
Notre-Dame-de-la-Merci si bien qu'ils ont libéré une petite
partie de Notre-Dame-de-la-Merci où ils recevaient de
l'hébergement pour aller s'héberger dans cette maison des 2-R.
Mais, cette transaction a été faite entre, comme je le disais
tout à l'heure, le Groupe Desjardins et autres et les frères de
Saint-Jean-de-Dieu. M. le Président, c'est l'autre cas que le
député de Gouin a soulevé. Vous avez fait allusion au cas
de La Pieta à Hull. Le cas m'a été soumis exactement hier.
Aucune décision n'a été prise d'aucune façon. Il
s'agit en fait d'une résidence pour personnes âgées
semi-autonomes qui serait construite sur le terrain de l'hôpital de La
Pieta avec un bail emphytéotique.
Je pense que j'ai traité de tous les cas qu'avait soulevés
le député de Gouin.
Le Président (M- Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Oui, M. le Président, formellement, c'est
vrai que la ministre a traité tous les cas, mais elle n'a pas
donné beaucoup de réponses, toutefois, notamment quant à
sa philosophie. (18 h 20)
Je dirai, dans un premier temps, que je ne suis pas surpris qu'elle me
retourne au président du Conseil du trésor quant à ses
déclarations. C'est ce qu'elle fait chaque fois que le président
du Conseil du trésor intervient dans les dossiers de santé.
J'avoue que, lorsque je lui pose des questions, le président du Conseil
du trésor, lui, me retourne à la ministre de la Santé et
des Services sociaux, M. le Président. Une chance...
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes un éternel
frustré.
M. Rochefort: Oh non! Je ne suis pas un éternel
frustré, Mme la ministre, loin de là. Mais, M. le
Président, je dirai au moins que j'essaie de ne pas jouer le
manège trop longtemps pour ne pas me faire étourdir entre les
deux ministres. Je pourrais peut-être servir de lien entre les deux,
puisqu'on sait qu'il y a des problèmes de cheminement de dossiers plus
souvent qu'autrement et que l'un attribue les responsabilités de lenteur
à l'autre et tout cela.
Donc, M. le Président, le président du Conseil du
trésor est membre du même gouvernement et il fait des
déclarations sur les secteurs de responsabilité de la ministre.
Il va bien falloir un jour que quelqu'un réponde à ces
déclarations, compte tenu du climat que cela crée dans le
réseau, et il y a des gens qui sont sensibles à cela.
D'autre part, M. le Président, quant à l'hôpital
Bellechasse... Oui, oui, cassette du passé bien couverte, cela existait
dans notre temps, le monde existait avant le 2 décembre 1985, Mme la
ministre et on donnait des services au monde avant le 2 décembre 1985.
La terre et le Québec ne sont pas nés le 2 décembre
1985.
Mme Lavoie-Roux: Elle s'est améliorée. Des voix:
Ha! Ha!
M. Rochefort: C'est ce que vous prétendez, mais l'ensemble
des observateurs, notamment dans le domaine de la santé et des services
sociaux, considère que cela ne s'est pas produit et que, même dans
bon nombre de cas, notamment les urgences, cela s'est
détérioré. Ce que je dis à la ministre s'est
produit pendant qu'elle était ministre de la Santé et des
Services sociaux, il y a eu un changement de propriétaire de
l'hôpital Bellechasse auquel elle a dû donner son accord. Ce que je
dis, c'est que, quand on est ministre de la Santé et des Services
sociaux et qu'une transaction comme celle-là se présente devant
nous, j'imagine qu'il faut qu'on regarde le dossier en fonction de notre
philosophie justement du type de vocation qu'on veut aux établissements
du réseau privé ou public. Je pense qu'on ne peut pas se
prononcer et donner un accord, une autorisation à une transaction de
cette nature sans avoir réfléchi à cette question de la
privatisation des services de santé. J'imagine que la ministre l'a fait,
et j'aimerais, M. le Président, que la ministre nous dise un peu quelle
est sa philosophie entourant ces questions?
Deuxièmement, M. le Président, dans le cas des 2-R,
j'aimerais que la ministre nous
dise s'il y aura des services qui seront accordés à des
résidents de cet édifice et qui y seront plus facilement
accessibles ou physiquement ou pour des raisons d'entente qui pourraient
intervenir entre les deux établissements, que ce n'est le cas pour
d'autres citoyens du même quartier, par exemple, qui sont chez eux et de
la même façon puisque la ministre n'a reçu le dossier
qu'hier. Pourtant, cela fait un an que je veux lui parler du dossier de La
Pieta et je n'arrive jamais avec l'ensemble des dossiers que j'ai sur mon
bureau à... Si la ministre n'a reçu le dossier qu'hier et qu'elle
est en train d'amorcer sa réflexion sur cette question, j'aimerais que
la ministre nous dise un peu à partir de quel - Quel monde! cela va
prendre les travaux publics au Parlement, M. le Président, on a des
problèmes de fauteuils - principe elle va aborder la question du dossier
de La Pieta à Hull parce que, non seulement c'est sur un terrain
d'hôpital, mais sauf erreur, ce que j'ai observé dans le dossier
que j'avais vu par des journaux, c'est qu'il y aurait un corridor souterrain ou
surélevé qui relieraient directement les deux
établissements et donc qui donneraient une accessibilité,
reconnaissons-le, privilégiée aux résidents de
l'édifice privé de La Pieta au service de l'hôpital de La
Pieta.
Or, je pense que ce sont des questions qui nécessitent des
réponses quant à la philosophie qui anime la ministre, qui se
posent doublement en soi, vu qu'il y a des dossiers qui nécessitent des
décisions de sa part et qui, quant à moi, se posent triplement,
si vous me passez l'expression en soi, puisqu'un de ses collègues,
président du Conseil du trésor, donc qui a un certain poids dans
son gouvernement, recommande et souhaite au plus profond de son être,
nous a-t-il répété récemment dans l'Estrie, tenter
des expériences de privatisation dans le domaine de la santé et
des services sociaux. Nous avons peur que cela se fasse sans être
encadré, sans savoir où on s'en va avec cela.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le député
de Gouin est sans doute emporté par ses sentiments quand il dit que le
président du Conseil du trésor avait exprimé du plus
profond de son être ses désirs de privatiser la santé et
les services sociaux ou enfin...
M. Rochefort: Je n'ai pas dit ça.
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est peut-être pas exactement ce
que vous avez dît. Redites-le donc pour que je ne déforme pas
votre pensée.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Pour une fois, merci
Mme la ministre. M. le Président, je n'ai pas dit que le
président du Conseil du trésor avait proposé de privatiser
les services de santé et les services sociaux au Québec. De
grâce, citez-moi comme il faut! J'ai dit que le président du
Conseil du trésor nous répète à
satiété, depuis qu'il est en fonction, qu'il souhaite tenter des
expériences pilotes de privatisation de certains services de
santé. Il me semble qu'il y a une différence entre les deux.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez raison.
M. Rochefort: J'espère qu'on ne vendra pas l'hôpital
Notre-Dame, demain matin, par soumissions publiques.
Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela d'ailleurs que...
M. Rochefort: J'espère que ce n'est pas dans vos
intentions. J'espère que votre réponse n'allait pas dans le sens
des conversations que vous aviez eues avec le président du Conseil du
trésor plutôt que par rapport aux questions que je vous ai
posées.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je dois vous dire qu'on n'a pas eu de telles
conversations depuis...
M. Rochefort: Vous ne vous parlez pas.
Mme Lavoie-Roux: On se parle beaucoup, mais on a des projets
prioritaires...
M. Rochefort: Cela on le sait.
Mme Lavoie-Roux: ...qui passent bien avant la privatisation, M.
le Président.
M. Rochefort: Mais qui ne passent pas au conseil.
Mme Lavoie-Roux: Pour revenir à la question de
l'hôpital Bellechasse. L'hôpital Bellechasse était un
hôpital privé depuis un nombre X d'années, je ne sais pas,
peu importe. Il fonctionne très bien, me dit-on, et on y fait de la
bonne médecine. Ils ont voulu vendre à un moment donné et
Lavalin s'est présentée comme acheteur. Il n'y avait aucune
raison de dire: II faut absolument que cet hôpital privé s'en
vienne dans le giron du public. De la même façon que je n'ai
aucune mission de dire que les hôpitaux publics doivent s'en aller dans
le giron du privé. Par contre, je pense que nous avons pris nos
responsabilités lorsque nous avons profité de cette occasion pour
exiger que le nouveau propriétaire établisse des lits de soins
intensifs à l'hôpital Bellechasse, ce qui
n'existait pas et qui nous apparaissait comme une lacune importante
tenant compte des services que même un hôpital
général doit rendre. On sait fort bien que même des petits
hôpitaux du Québec, qu'on appelle des hôpitaux
intermédiaires, ont des lits de soins intensifs. Je pense que c'est un
hôpital qui fonctionnait bien sur une base privée. S'il avait
été mal administré et qu'il n'y avait pas eu d'acheteur,
etc., peut-être, à ce moment-là, qu'on aurait dit: II faut
que le public le reprenne pour protéger le public. Le problème ne
se posait pas dans ces termes-là. Par contre, on s'est dit: Profitons de
cette occasion pour améliorer des services qu'un hôpital comme
l'hôpital Bellechasse rend à la population environnante.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: La Pieta?
Mme Lavoie-Roux: Dans le cas de La Pieta, je vous l'ai dit, le
dossier m'est arrivé hier. Je n'ai pas de décision à
indiquer aujourd'hui parce que je dois vous dire très honnêtement
que je n'ai même pas lu le dossier au complet puisqu'il m'est
arrivé hier. Je ne sais même pas s'il est question de couloir ou
pas entre La Pieta et cet édifice pour personnes âgées
semi-autonomes. Je voudrais quand même répondre à une
question plus générale reliée à cela que le
député de Gouin a posée. Est-ce que les gens seront
privilégiés par rapport à d'autres? Dans
l'hypothèse où il y aurait un couloir... D'abord, il y a
plusieurs principes en cause. Je m'étonne un peu des questions du
député de Gouin, alors qu'en pleine campagne électorale,
tout ce que son chef avait trouvé à mettre de l'avant comme
mesure pour résoudre des urgences, c'était une polyclinique
privée, totalement, sur le terrain de Maisonneuve-Rosemont. Et,
aujourd'hui, il s'inquiète beaucoup des méfaits de la
privatisation. M. le Président, je disais qu'il y a plusieurs principes
qui sont en cause, celui de céder, même par bail
emphytéotique, à un organisme privé un terrain public, une
partie de terrain public, ce que l'ancien gouvernement, de toute
évidence, n'avait aucune hésitation à faire.
Quant à la priorité à accorder à des
personnes âgées qui seraient voisines ou dans l'environnement
immédiat d'un centre hospitalier ou d'un hôpital de soins
prolongés ou autres, je pense que ces personnes, si elles sont en
besoin, vont recourir aux ressources qui sont les plus près d'elles,
mais, de la même façon, il restera toujours à l'institution
ou à l'établissement qui reçoit ces personnes
d'établir ses priorités, d'établir de quelle façon
il reçoit sa population, celle qu'il reçoit, à qui il
accorde préséance. Je pense que c'est une responsabilité
de l'établissement lui-même, M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin. (18 h 30)
M. Rochefort: M. le Président, je me permets quand
même un commentaire. Je pense que c'est aussi, au premier chef, une
responsabilité de la ministre de la Santé et des Services sociaux
de se pencher sur cette question. On me dira bien que c'est la
responsabilité de l'établissement d'élaborer une politique
d'admission, d'accueil, d'accessibilité aux différents
bénéficiaires de son établissement. Quand on construit sur
le terrain de l'hôpital un édifice qui est relié par un
corridor, on ne peut pas prétendre qu'il n'y aura pas un accès
privilégié à des bénéficiaires plutôt
qu'à d'autres, parce que ces gens-là auront les moyens d'aller
demeurer dans cette résidence. Donc, cela pose un problème
d'accessibilité et d'équité à l'endroit de
l'ensemble des bénéficiaires. Je pense que c'est à partir
de ce type de réflexion que la ministre devrait aborder le dossier.
Quant au lien qu'elle fait entre ce dossier et le dossier de la
Polyclinique de Maisonneuve-Rosemont, c'est encore une fois le monde à
l'envers. Ce qui était proposé dans le cas de
Maisonneuve-Rosemont, c'était l'établissement d'une polyclinique
privée sur les terrains de l'hôpital pour faire en sorte que les
patients ambulatoires qui se présenteraient à l'urgence de
Maisonneuve-Rosemont et qui ne nécessitent pas de soins importants,
majeurs, mais qui ont besoin de soins, puissent être
référés immédiatement à cette polyclinique
privée pour qu'on puisse leur donner des soins de qualité dans un
réseau qui est, d'une certaine façon, public, puisqu'il s'agit
là de médecins payés par la Régie de
l'assurance-maladie du Québec pour limiter l'attente à la salle
d'urgence et qu'on puisse se concentrer, à la salle d'urgence, aux cas
les plus lourds.
M. le Président, ce dont on parle dans le cas de La Pieta, c'est
exactement le contraire. C'est de donner un accès
privilégié dans l'établissement à des personnes qui
y ont un accès par leur présence dans un établissement
privé. Je ne vois pas la comparaison que la ministre peut faire entre
les deux, mis à part le fait que la ministre, encore une fois, est
préoccupée par le passé, son obsession permanente, mais
que la ministre, finalement, ne nous dit pas, elle, en vertu de quoi elle va se
pencher sur ces questions de privatisation qui animent fortement le
président du Conseil du trésor et qui se développent
progressivement dans le réseau. On a vu les interventions du groupe
Champlain, La Pieta, les 2-R et on sait que dans le cas de Bellechasse, quant
à moi, ce que j'aurais souhaité, c'est que la ministre nous dise
quelles réflexions elle s'est faite, à
ce moment-là, parce que je ne suis pas en train de dire qu'il
fallait que cela devienne un hôpital public. Mais je me dis: II y a donc
des sommes publiques qui sont investies dans le réseau de la
santé et qui sont rendues disponibles à un établissement
privé qui fera - parce que c'est son but et c'est correct,
légitime - des profits, ce qui fait en sorte qu'il y a des sommes
attribuées par le public pour des services publics de santé qui,
finalement - parce qu'il y en a une partie qui va en profits - vont dans le
réseau privé des affaires hors services de santé et
services sociaux.
Je pense que c'est une question qui doit se poser, qui doit être
analysée, et qui mériterait peut-être d'être
creusée, vu l'ensemble des problématiques auxquelles on fait face
dans le réseau de la santé et des services sociaux. C'est ce que
j'aurais souhaité que la ministre nous réponde. Je comprends que
la ministre nous dit qu'elle ne sait pas poser ses questions.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux, en conclusion.
Mme Lavoie-Roux: A-t-il fait sa conclusion, M. le
député?
M. Rochefort: M. le Président, on verra quels sont les
propos que la ministre a à nous tenir.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le député
de Gouin a trouvé un nouveau cheval de bataille. Les intentions,
peut-être cachées de la ministre, de vouloir privatiser le
système de santé et des services sociaux. Je pense, M. le
Président, que la meilleure garantie pour calmer les
appréhensions du député de Gouin ou d'autres qui
pourraient avoir les siennes, c'est vraiment les gestes que la ministre a
posés depuis un an et demi et je ne crois pas qu'il y ait eu
d'indication dans ce sens-là.
Par contre, M. le Président, je peux bien lui dire que nous ne
sommes pas un parti dogmatique et que, si des institutions privées
fonctionnent bien, je ne vois pas pourquoi nous les arrêterions de
fonctionner ou que nous prendrions la relève. Je pense que les
obligations du réseau sont déjà suffisamment lourdes et
importantes pour que nous y consacrions toutes nos énergies.
En terminant, M. le Président, compte tenu des remarques que le
député de Gouin avait faites au début de ses interventions
en citant le rapport de l'Association des hôpitaux du Québec,
j'aimerais citer à la lettre ce qu'on y retrouve sur la situation
financière des hôpitaux publics au 31 mars 1987. Il s'agit d'une
citation tirée d'une lettre ou d'un rapport ou d'une conférence
de presse de l'Association des hôpitaux du
Québec.
Voilà ce que disait l'Association des hôpitaux du
Québec: "L'année 1986 a été marquée par un
tournant majeur dans la politique de financement du système de
santé québécois. Le nouveau gouvernement a, enfin, reconnu
une partie importante de la sous-budgétisation chronique des centres
hospitaliers et il a débloqué les crédits promis depuis
plusieurs années pour le programme de sécurité et de
vétusté des immeubles. En somme, il a réglé une
partie importante de l'héritage du passé." Et là, on parle
de l'année 1986-1987 qui a été notre première
année budgétaire, M. le Président. Et, je continue la
citation de l'Association des hôpitaux du Québec: "Le gouvernement
s'est ausi résolument tourné vers l'avenir. Il a mis en place un
nouveau programme de 150 000 000 $ sur trois ans pour le désen-gorgement
des urgences dont une vingtaine de millions en 1986-1987 et 13 500 000 $ en
1987-1988 iront au budget d'exploitation des centres hospitaliers. Le solde de
120 000 000 $ sera consacré à des immobilisations et/ou au
développement du secteur social." Mais il reste, M. le Président,
et je pense que là-dessus personne ne l'a contesté, que
c'était un ensemble de mesures dont certaines s'appliquaient directement
aux hôpitaux, d'autres au secteur social. C'est une parenthèse; je
continue la citation: "Notons, en particulier, à ce chapitre des
immobilisations de 52 000 000 % et des budgets d'exploitation de 37 000 000 $
pour le développement de lits en centre d'accueil et en centre de soins
de longue durée. "Il a aussi reconnu pour la première fois le
principe d'un coût de système, c'est-à-dire qu'il a
accepté de financer en partie, sur une base prospective, l'impact du
vieillissement de la population et du développement technologique sur
les dépenses d'exploitation des centres hospitaliers. Ainsi donc,
après révision des bases budgétaires pour combler la
sous-budgétisation, les budgets d'exploitation des centres hospitaliers
de soins de courte durée ont augmenté en termes réels,
c'est-à-dire en sus de l'indexation des fournitures et des
salaires."
M. le Président, l'Association des hôpitaux du
Québec ajoute qu'elle aurait souhaité avoir 40 000 000 $ de plus,
mais je pense que ceci corrige amplement l'impression que le
député de Gouin a voulu créer en disant que, finalement,
il n'y a peut-être pas grand-chose de fait dans le secteur de la
santé alors que - encore une fois, je le répète - les
augmentations que nous avons consenties en 1986 sont de 16 %. Ce sont des
augmentations encore très considérables dans le domaine de la
santé que le gouvernement actuel consent à la population.
Le Président (M. Saintonge): M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: Un commentaire sur la dernière intervention
de la ministre. Pourquoi ce manque de transparence, de franchise et
d'honnêteté intellectuelle et pourquoi, comme elle le fait, ne pas
lire la page 2 et la page 3 du communiqué de presse? L'Association des
hôpitaux du Québec ne dit pas qu'elle aurait souhaité avoir
40 000 000 $ de plus. Faites la lecture, Mme la ministre. On est prêt, on
est devant les caméras de télévision, lisez à la
population ce que dit l'Association des hôpitaux du Québec sur les
40 000 000 $, sur les fermetures de lits, les coupures de services et sur les
quotas qu'elle se verra obligée d'imposer à la population dans
l'année qui vient. Faites-la donc, cette lecture, Mme la ministre,
plutôt que de ne lire simplement que ce qui fait votre affaire!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président.
Le Président (M. Saintonge): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Je pourrais au moins retourner les mêmes
compliments au député de Gouin, qui, tout à l'heure, a
sorti de leur contexte, en les déformant, certains points qui faisaient
son affaire.
M. Rochefort: Je n'ai rien sorti de son contexte et je n'ai rien
déformé. Je vous invite de nouveau à lire ce que dit
l'association. Est-ce que je comprends, M. le Président, que Mme la
ministre ne lira pas la déclaration de l'Association des hôpitaux
du Québec au complet?
Mme Lavoie-Roux: II y a douze pages à lire, M. le
Président.
M. Rochefort: Non, M. le Président, il y a trois pages. Je
comprends bien que la ministre refuse encore une fois d'être
transparente...
Le Président (M. Saintonge): Très bien, M.
le...
M. Rochefort: ...d'être franche et d'être
respectueuse des propos des groupes avec lesquels, ensuite, elle souhaitera
avoir une franche collaboration et une contribution positive.
Le Président (M. Saintonge): Alors, c'étaient vos
remarques...
M. Rochefort: C'est une belle illustration de son attitude, M. le
Président.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Gouin, c'étaient vos remarques...
M. Rochefort: De conclusion.
Le Président (M. Saintonge): ...finales. Mme la ministre,
avez-vous quelques autres remarques à ajouter avant de conclure nos
travaux? (18 h 40)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, tout ce que j'ajouterai
c'est que le député de Gouin est toujours fidèle à
lui-même. Déformer les faits ne le dérange pas...
M. Rochefort: Pas de vous, on parlait du député de
Gouin.
Mme Lavoie-Roux: ...faire la démagogie est sa marque de
commerce.
M. Rochefort: Je pense que la ministre, M. le Président,
parle d'elle-même.
Le Président (M. Saintonge): Alors, ceci met donc fin
à cette partie de nos travaux dans l'étude des crédits
supplémentaires no 1 pour l'année financière 1987-1988,
cette partie de nos travaux qui consistait à recevoir Mme la ministre de
la 5anté et des Services sociaux.
Je demanderais maintenant aux gens qui ne sont pas élus
députés en cette Assemblée de bien vouloir quitter
l'enceinte pour que je puisse faire rapport au président de
l'Assemblée nationale.
Le Vice-Président: Alors, M. le président de la
commission plénière pour votre rapport, s'il vous
plaît.
M. Assad (président de la commission plénière):
M. le Président, permettez-moi de vous faire rapport de la
commission plénière dans le cadre de son mandat, soit
l'étude des crédits supplémentaires no 1 pour
l'année financière 1987-1988. On n'a pas fini de
délibérer et on demande la permission de siéger à
nouveau.
Le Vice-Président: Très bien, M. le
président de la commission plénière. Quand
siégera-t-elle à nouveau, M. le leader adjoint du
gouvernement?
M. Lefebvre: M. le Président, plus tard à
l'occasion de cette même séance, la commission continuera à
siéger, M. le Président.
Le Vice-Président: Très bien, M. le leader adjoint
du gouvernement. Je comprends également que vous avez certains avis
à donner à l'Assemblée, je vous écoute.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Lefebvre: Oui, M. le Président. J'avise cette
Assemblée que ce soir, de
20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau -
cet avis est nouveau, j'en ai deux autres où il y a un rappel et une
correction - la commission du budget et de l'administration poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi concernant le
bureau de discipline de l'Association des courtiers d'assurances de la province
de Québec, et ce, de consentement avec l'Opposition, M. le
Président. Un rappel de l'avis suivant: À la salle
Louis-Hyppolite-Lafontaine, la Commission de l'économie et du travail
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 30, Loi
constituant la Commission des relations du travail et modifiant diverses
dispositions législatives. À la salle 101 de l'édifice
Pamphile-Lemay, la commission de l'éducation procédera à
l'étude détaillée du projet de loi 18, Loi modifiant la
Loi favorisant le développement scientifique et technologique du
Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Très bien, M. le leader adjoint
du gouvernement. Sur ce, l'Assemblée nationale va maintenant suspendre
ses travaux qui reprendront à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 43)
(Reprise à 20 h 04)
La Vice-Présidente: Veuillez vous asseoir! Nous allons
reprendre nos travaux. M. le leader du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour que
l'Assemblée nationale se transforme de nouveau en commission
plénière.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
Nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants afin de
permettre a l'Assemblée nationale de se transformer en commission
plénière pour étudier les crédits
supplémentaires pour l'année financière 1987-1988.
(Suspension de la séance à 20 h 5)
(Reprise à 20 h 6)
Commission plénière
Étude des crédits supplémentaires
1987-1988 (suite)
Habitation
Mme Bégin (Présidente de la commission
plénière): Nous allons procéder à
l'étude en commission plénière des crédits
supplémentaires concernant l'habitation. Là-dessus, j'aimerais
aviser les deux parties qu'il y a une entente selon laquelle le temps de parole
pour les deux formations sera au maximum d'une heure et demie. Avant de
commencer, je vais reconnaître le ministre responsable de l'Habitation
pour quelques remarques préliminaires. M. le ministre.
Remarques préliminaires M. André
Bourbeau
M. Bourbeau: Mme la Présidente, nous sommes ici ce soir
pour discuter des crédits supplémentaires qui sont
proposés à l'Assemblée nationale. Nous sommes ici à
la demande de l'Opposition qui a demandé que le ministre responsable de
l'Habitation vienne ici même pour discuter de ses crédits.
Mme la Présidente, je n'ai pas à faire l'apologie du
gouvernement. Je pense que tous les citoyens du Québec connaissent la
rigueur de l'administration gouvernementale. C'est la raison pour laquelle je
n'ai pas l'intention de faire de grand discours d'ouverture. Je vais
plutôt laisser la parole au critique de l'Opposition et
député de Shefford qui, lui, a l'air tout à fait bien
préparé. Je vais attendre qu'il pose des questions. Cela me fera
extrêmement plaisir d'y répondre, si, bien sûr, j'ai les
réponses. Sinon, je prendrai avis de la question et je lui ferai suivre
les réponses dans les prochains jours.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford, quelques remarques
préliminaires.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui, Mme la Présidente. Merci beaucoup.
Vous avez raison, M. le ministre, j'ai beaucoup de notes, j'ai beaucoup de
documents parce que c'est un sujet qui m'intéresse beaucoup, et j'ai
l'intention qu'on en discute et qu'on aille au fond des choses. Je n'ai aucun
doute que vous allez pouvoir répondre à toutes mes questions,
puisque vous êtes bien entouré. Cela présage qu'on va
passer une bonne heure.
On retrouve dans les crédits supplémentaires une somme de
2 500 000 $. Ce n'est pas une surprise et ce qu'on disait nous, c'est ce que le
ministre est allé chercher pour l'Année internationale du
logement des sans-abri. C'est ce que nous disions, c'est beaucoup trop peu. Je
vais vous prouver comment ce n'est pas comme cela qu'on peut confirmer d'une
façon tangible, d'une façon claire et précise qu'on a
une
préoccupation d'aide aux plus démunis de la
société. Le fait d'ajouter 2 500 000 $ seulement, et en plus
quand on a coupé presque partout ailleurs dans tous les autres
programmes, cela vient nous montrer que, non seulement on n'a pas une
préoccupation d'aller aux plus démunis, mais que c'est seulement
une façade pour cacher les vrais gestes qui vont plutôt à
l'encontre de l'aide aux plus démunis.
Quand je dis que ce n'est pas beaucoup, en plus, je trouve que cela ne
repose pas sur quelque chose de très sérieux. Ce que je veux dire
par là, c'est que l'Année internationale du logement des
sans-abri décrétée par les Nations-Unies, ce n'est pas une
année commençant n'importe quand et durant quelques mois. C'est
une année de calendrier, en 1987. Nous avons eu l'annonce des intentions
gouvernementales dans un communiqué de presse daté du 30 avril.
Le 30 avril, cela veut dire qu'il y a déjà quatre mois de
passés dans l'année au moment où on s'en vient annoncer
notre politique d'aide aux plus démunis de la société, aux
sans-abri, alors qu'ailleurs on avait prouvé qu'on avait vraiment une
préoccupation d'aide basée sur quelque chose de sérieux,
sur des études qui avaient eu lieu.
On peut citer comme exemple l'Ontario. Avec un comité
spécialement formé, on est arrivé avec une brique, quelque
chose qui est capable de montrer, d'exprimer d'une façon claire et
précise les besoins, les problèmes qui sont vécus par les
plus démunis de la société de façon que les gestes
posés par la suite répondent à ces besoins et soient
basés sur quelque chose de concret. Vous allez me dire: Oui, mais en
Ontario, M. Peterson a été élu avant nous, il a eu le
temps. Sauf que je vais vous citer un autre document. Je vais vous en montrer
un autre qu'on pourrait vous citer: il s'agit de celui de la ville de
Montréal.
Pour eux ce n'est pas la même chose parce que le RCM a
été élu pas mal après le gouvernement du Parti
libéral. Pourtant cela ne l'a pas empêché de mettre un
comité sur pied, de faire des consultations publiques dans les quartiers
de la ville de Montréal - c'est là que se vivent aussi en grande
partie au Québec les grands problèmes de logement pour les
sans-abri -de déposer au conseil municipal le fameux rapport avec des
recommandations précises, de décider d'aller de l'avant
dès que la politique québécoise serait connue en la
matière et de mettre sur pied aussi un comité de suivi.
On regarde l'Ontario, un document très important sur la situation
qui y est vécue où on fait des recommandations qui reposent sur
quelque chose, qui répondent aux véritables besoins des gens.
Montréal, un autre document. À Québec, qu'est-il
arrivé? À Québec ç'a été le
dépôt d'un communiqué de presse qui ne repose sur aucune
étude qui aurait été jointe à ce communiqué
de presse. Heureusement que ce fut commun parce que s'il y a quelques feuilles,
c'est que, heureusement, il y a aussi le fédéral qui s'implique.
II y a le texte de la déclaration du très honorable Brian
Mulroney, premier ministre du Canada, qui est joint, sans lequel cela aurait
été probablement deux, trois, quatre feuilles.
La politique d'aide aux plus démunis de la société,
les gens sans-abri, qui n'ont pas d'adresse où se loger, ceux qui ont le
plus de problèmes à se loger... On ne parle pas de luxe. On parle
d'avoir un toit et on ne vit pas non plus dans les pays de l'Fquateur, on vit
au Québec où il y a des saisons qui sont très rigoureuses.
Donc, c'est tout ce qu'on a eu.
À la suite de cela, qu'est-ce qui nous arrive? On nous dit: Un
bon programme d'action! Durant l'heure et demie, on va faire le tour de ce
programme qui nous a été annoncé, dans lequel on retrouve
seulement 2 500 000 $ - c'est ce qu'on disait -parce que, pour ce qui est du
reste, on l'a pris à même des fonds budgétisés.
C'est ce qui fait en sorte qu'on l'enlève à d'autres pour le leur
donner. Donc, ce que l'on risque pour aider les plus démunis actuels,
c'est d'augmenter le nombre de personnes sans-abri.
Dans le communiqué, ce qu'on retrouvait, c'est qu'il y a une aide
de 13 000 000 $ qui sera apportée pour le logement, pour aider des
groupes, des organismes à but non lucratif, pour aider les sans-abri
pour ce qui est des chambres. Je vais avoir une question là-dessus parce
qu'il est évident... Les 13 000 000 $, pour commencer, sont pris
à même le budget qui était prévu. On le retrouve
dans l'appel de propositions pour les coopératives et les OSBL qui a
été distribué ce printemps. On dit: Bien, il va y en avoir
moins parce qu'on en réserve, pour eux, dans le cadre de l'Année
internationale du logement des sans-abri. Donc, c'est juste un transfert de
groupes, sauf que l'appel de propositions du premier groupe - des projets qui
vont être faits selon la procédure habituelle par tous les groupes
de la société - cela a été fixé au printemps
avec une date limite pour présenter la proposition. On devrait
connaître les résultats ce mois-ci, au mois de juin, ou au
début du mois de juillet, à savoir ceux qui sont acceptés
ou qui sont refusés. Mais, on disait, à ce moment-là:
viendra un deuxième appel de propositions pour les projets touchant
l'Année internationale du logement des sans-abri.
J'aimerais savoir du ministre - je vais avoir d'autres questions, mais
cela en est une que je pose maintenant - si cet appel de propositions a
été envoyé aux groupes, de
façon qu'il s'en bâtisse effectivement, qu'il y ait au
moins des groupes qui soient structurés cette année, qu'il y ait
des projets qui s'enclenchent s'ils ne peuvent pas se réaliser
complètement? Comme je le disais au tout début de mon
intervention, l'Année internationale du logement des sans-abri au
Québec a commencé quatre mois en retard. J'ai hâte de voir
si on a commencé effectivement, alors que le mois de juin
s'achève, donc six mois de passés, s'il y a des choses qui ont
été réalisées ou qui sont en cours de
réalisation. Donc, il y avait cela qui était annoncé.
Le deuxième, un fonds spécial de 2 500 000 $, c'est ce
qu'on est en train d'étudier. Un budget qui permettra un soutien direct
et ponctuel des organismes intervenant au chapitre des services offerts aux
sans-abri, majoritairement pour l'achat de matériel et
d'équipement et qui favorisera la mise en place d'interventions
novatrices pour les sans-abri, donc un montant de 2 500 000 $
discrétionnaire. Cela permet de faire de la politique, c'est
évident, quand on annonce un petit montant par ici, un petit montant par
là, mais est-ce suffisant pour régler une situation
inacceptable?
Il y a aussi eu l'annonce d'une subvention de 55 199 $ répartie
ici et là à 28 organismes. Donc, cela fait une moyenne de pas
beaucoup si on divise cela. Cela ne fait même pas 3000 $ par organisme.
Lorsqu'on sait la difficulté des organismes bénévoles
communautaires qui se dévouent et à qui on dit, dans le cadre de
l'Année internationale du logement des sans-abri: Soyez heureuxl Vous
allez avoir 55 000 $ qui vont vous être distribués en petits
montants parce que c'est l'Année internationale du logement des
sans-abri pour en apporter davantage, je trouve que ce n'est pas très
encourageant. La ministre de la Santé et des Services sociaux annonce 18
lits de plus pour venir en aide aux femmes itinérantes. Quand on
connaît les problèmes majeurs vécus, à
Montréal, par les personnes itinérantes dont deux groupes
malheureusement croissent très rapidement: les femmes et les jeunes...
Dans la tête des Québécois - c'était cela pour tout
le monde - les sans-abri c'étaient des clochards, c'étaient des
gens qui avaient atteint un âge assez avancé et qui, pour toutes
sortes de raisons se retrouvaient, à un moment donné, sans
emploi, sans revenu et mal pris. Ce n'est plus cela les démunis. Ce
n'est plus cela les gens itinérants à Montréal. C'est
majoritairement maintenant des gens plus jeunes et des femmes et on ajoute 18
lits alors que ce sont des milliers de personnes dans le besoin qui attendent
d'être aidées.
Un dernier point amené dans cette vaste politique et qu'on semble
vouloir nous faire avaler pour les sans-abri, c'est la sensibilisation du
milieu québécois. Je dois vous dire que la sensibilisation du
milieu québécois à la situation vécue par les plus
démunis, on en a retrouvé dans la presse d'une façon
incroyable depuis quelque temps. Je pourrais vous en retrouver, mais je vais
vous en citer quelques-unes de mémoire où on parle de la
situation catastrophique à Montréal. Les files s'allongent devant
les "soupes". L'espérance de vie varie de onze ans entre le quartier
Saint-Henri et le quartier de Mont-Royal à cause d'une situation de
pauvreté. On dit que le centre-ville et le centre-sud sont les quartiers
les plus pauvres de Montréal. À Saint-Henri, le tiers des
écoliers ne déjeunent même pas. C'est une sensibilisation
qui n'est même pas soulevée par le ministre. C'est soulevé
précisément par les groupes bénévoles qui essaient
d'aider ces gens sur le terrain d'une façon bénévole. On
dit: La pauvreté génère la maladie, l'exode, le
désespoir et le déséquilibre social. C'est vrai. C'est une
catastrophe quand on dit que c'est au Québec qu'il y a le plus de
suicides ou de tentatives de suicide chez les jeunes. La sensibilisation qui
fait partie de votre programmation nous est amenée par les groupes
bénévoles qui trouvent que cela n'a pas de bon sens qu'on ne
fasse rien, mais qu'au contraire, on ait des politiques qui viennent aggraver
la situation. C'est cela que je trouve inquiétant.
 preuve que cela ne semble pas une préoccupation du
gouvernement de l'autre côté, quand on parle de l'Année
internationale du logement des sans-abri, c'est le logement, mais c'est
beaucoup plus que le logement. À preuve, le ministre nous a dit, dans sa
conférence de presse, que d'autres ministres étaient
impliqués, sauf qu'on ne les a pas entendus parler de l'Année
internationale du logement des sans-abri. On ne les a pas vus changer quelque
programme, quelque amélioration que ce soit à un programme
existant pour venir en aide aux sans-abri actuels, aux gens les plus
démunis de la société, aux gens qui sont démunis
présentement, mais qui sont susceptibles de devenir des sans-abri
à court terme. Au contraire, les politiques qui ont été
décidées depuis le 2 décembre 1985 font en sorte que la
clientèle des sans-abri est appelée à se multiplier. Je ne
parle pas de croître, je parle de se multiplier, si cela continue
ainsi.
En campagne électorale, on a promis d'amener la parité
pour les jeunes bénéficiaires de l'aide sociale. Je vous disais
tantôt que des jeunes par milliers sont des sans-abri à
Montréal. On leur a promis beaucoup d'espoir, la parité, et
pourtant, maintenant, après un an et demi, on s'aperçoit que la
parité sera dans l'autre sens et qu'on va plutôt appauvrir ceux
qui ont un peu plus. Je trouve que c'est une catastrophe. Non seulement on n'a
pas fait
la parité, mais on se vante d'avoir coupé 150 000 000 $
aux bénéficiaires de l'aide sociale, aux plus démunis de
la société. 150 000 000 $ de revenus de moins à ceux qui
n'ont même pas l'essentiel pour être capables de vivre
décemment. On leur coupe 150 000 000 $, c'est une clientèle qui
est en train de s'ajouter aux sans-abri. On n'a pas entendu la ministre de la
Santé et des Services sociaux manifester là-dessus. (20 h 20)
On disait aussi dans le communiqué que, finalement, le
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
sera chargé d'une recherche globale sur les sans-abri. Le ministre des
Affaires municipales et responsable de l'Habitation est responsable de
l'Année internationale du logement des sans-abri, mais pourtant c'est le
ministre de la Main-d'Oeuvre qui sera chargé d'une recherche globale sur
les sans-abri. Je reviens à ce que je vous disais au début, c'est
impensable. Alors qu'on annonce quatre mois en retard une politique sur les
sans-abri, on nous annonce que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu fera une étude, une recherche globale
sur les sans-abri. Ces recherches ont eu lieu ailleurs, elles ont
été faites. Ces gens l'on faite au moment où
c'était important, où cela devait être fait, de
façon que, lorsqu'on aurait annoncé une politique globale pour
les sans-abri, on serait arrivé avec des recommandations ou des projets
fondés sur des chiffres concrets alors que ce n'est pas ce qui arrive.
On nous dit: On vous annonce quelques petites grenailles, 2 500 000 $; le
reste, on va l'arracher aux plus démunis aussi, mais on va le
transférer, cela va bien paraître dans le cadre de l'Année
internationale des sans-abri. Ce n'est fondé sur rien de sérieux,
parce que l'étude, on va commencer à la faire et on va l'avoir
probablement après la fin de l'année internationale. Donc, on
n'aura rien fait et on aura promis encore une fois. Vous pouvez trouver que
c'est beaucoup 2 500 000 $, que ce soit pour des poêles, des frigidaires
ou quoi que ce soit.
On s'était fait reprocher quand on était de l'autre
côté d'avoir mis seulement 9 500 000 $ pour l'Année
internationale de la jeunesse. J'aurais aimé qu'on puisse mettre plus.
J'étais l'un de ceux qui auraient voulu qu'on puisse en mettre davantage
alors qu'on était en période de crise économique.
Là, on est en période de reprise économique. La reprise
est en train de se faire au détriment des plus pauvres par une classe
privilégiée de la société. Je pourrais vous
apporter d'autres preuves, pas seulement dans les autres ministères,
comme je viens de le faire, mais dans le ministère qui nous concerne ici
ce soir où on retrouve les budgets, c'est-à-dire le
ministère des Affaires municipales responsable de l'Habitation. Des
mesures qui ont été prises ou qui ont été
annoncées, des chiffres que l'on retrouve dans le budget de l'an
passé ou dans les crédits de l'année en cours ou des
gestes qui ont été posés font en sorte qu'on aide moins
les plus démunis, qu'on coupe sur les programmes d'aide qui
étaient là. Donc, on coupe davantage en cette Année
internationale des sans-abri et on essaie de venir justifier cela en se
réunissant ce soir et en disant - j'ai hâte d'entendre le ministre
là-dessus: Nous, on est intéressés, on le prouve, on est
prêt à mettre 2 500 000 $. Je dois vous dire que je trouve que ce
n'est pas beaucoup. J'espère qu'on va être capable de corriger des
choses en cours de route, mais vous allez me dire que les crédits sont
votés, que les budgets sont déposés. J'aurais
espéré qu'on ait plus, mais on a seulement 2 500 000 $ pour
l'Année internationale des sans-abri. Le reste est pris à
même les budgets déjà prévus, les budgets
réguliers. Cela veut dire qu'on n'annonce rien de plus sinon des
transferts. Tout ce qu'on peut craindre et qui risque de devenir une
réalité, c'est que les pauvres vont être plus pauvres en
cette Année internationale des sans-abri et les riches plus riches
probablement, et c'est malheureux.
Je vais terminer par deux questions, M. le ministre. On pourra
échanger ensuite quelques propos là-dessus et sur d'autres
dossiers qui touchent les plus démunis de la société. La
première question est celle que je vous ai posée tantôt:
Est-ce que l'appel de propositions pour les organismes sans but lucratif qui
veulent s'occuper du logement des sans-abri est envoyé? Est-ce qu'il y a
des groupes qui l'ont reçu? Est-ce que ces gens-là peuvent
maintenant faire leur demande? J'aimerais savoir si le ministre a
commencé à distribuer les 2 500 000 $ que l'on retrouve ici ce
soir. Sinon - ce montant ne doit certainement pas être tout
dépensé -est-ce qu'il a l'intention de répondre à
la demande des gens du milieu, des organismes communautaires de
Montréal, qui avaient demandé de pouvoir gérer ce
fonds?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre
responsable de l'Habitation.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Mme la Présidente, je ne suis pas
étonné que le député de Shefford ne broie que du
noir et ne voie que des mauvais côtés à la politique
gouvernementale en matière d'habitation. Je prends note de ses regrets
et de ses remords pour ce que l'ancien gouvernement n'a pas fait quand il
était là. Le député a dit: Quand on était
là, on n'a pas fait beaucoup; j'aurais aimé qu'on fasse mieux,
mais, malheureusement, on n'a pas fait plus. Mme la Présidente, c'est
sûr que c'est déjà louable pour le député
de
Shefford de faire acte de repentir, mais, malheureusement, la population
a jugé. Aujourd'hui, nous sommes là et nous avons à
prendre des décisions.
Sous l'ancien gouvernement, il n'y avait absolument aucun programme
spécifique pour les sans-abri. Quant aux autres programmes
gouvernementaux en matière d'habitation, l'ancien gouvernement s'est
distingué surtout vers la fin par des programmes qui étaient
plutôt destinés à stimuler la construction, des programmes
conjoncturels qui ne s'adressaient pas aux éléments les plus
démunis de la société. Ainsi, on a dépensé
des centaines de millions de dollars en matière d'habitation, d'ouvrage
et de construction à l'égard de gens qui ne comptaient pas parmi
les éléments les moins défavorisés de la
société. Or, il y a tellement peu d'argent disponible aujourd'hui
à même les fonds publics pour venir en aide aux
éléments les plus démunis de la société
qu'il faut les réserver pour cette catégorie de gens,
étant bien convaincus, tel que nous le sommes, que les citoyens à
revenus moyens ou élevés peuvent très bien se
débrouiller; en tout cas certainement mieux se débrouiller en
matière d'habitation que ceux qui ont été moins
favorisés et qui n'ont pas de revenu suffisant pour se loger
convenablement.
Le gouvernement a décidé de s'inscrire dans l'Année
internationale du logement des sans-abri qui a été
annoncée par l'Organisation des Nations unies, l'ONU. Dans sa
déclaration, l'ONU spécifiait très bien qu'on ne se
proposait pas de tenter de résoudre le problème des sans-abri
dans le monde en une seule année. L'ONU disait bien que le but de la
déclaration était de voir à mettre en place ou tenter de
mettre en place d'ici l'an 2000 des moyens visant à résoudre les
problèmes en ces matières.
Le député de Shefford, tout à l'heure, faisait tout
un plat du fait que le gouvernement a annoncé son plan d'action au mois
d'avril et non pas au mois de janvier. C'est justement, Mme la
Présidente, parce que le gouvernement n'entend pas limiter son action
à quelques mois de l'année 1987. Nous avons décidé
de nous attaquer au problème des sans-abri au Québec, puisque
c'est là que nous oeuvrons, et nous allons le faire non seulement dans
l'année 1987, mais également dans l'année 1988, dans
l'année 1989 et dans l'année 1990. Si la population nous fait
encore confiance, nous le ferons également dans l'année 1991,
1992, 1993, 1994, et qui sait, peut-être 1995, 1996, 1997, 1998.
Peut-être aurons-nous la chance de réaliser le voeu de l'ONU et de
nous rendre jusqu'en l'an 2000, Mme la Présidente. Si l'électorat
nous fait confiance, je peux vous assurer que, pour nous, l'Année
internationale du logement des sans-abri, ce ne sera pas que l'année
1987.
Si nous avons retardé de quelques semaines pour annoncer le
programme, le député de Shefford se souvient très bien que
nous étions prêts à l'annoncer avant le 30 avril, mais il y
a eu ajournement de la session. Nous voulions l'annoncer en Chambre avant
l'ajournement de la session, mais le chef de l'Opposition s'y est opposé
parce qu'il était itinérant, à ce moment-là. Il se
baladait dans la province et n'était pas en Chambre pour répondre
à la décision gouvernementale. C'est par complaisance et par
respect pour le chef de l'Opposition que nous avons retardé l'annonce
à la rentrée suivant les vacances pascales. Cela a fait en sorte
de retarder encore de plusieurs semaines l'annonce gouvernementale.
Je pense qu'il n'y a pas lieu de s'offusquer de ces quelques semaines de
retard, surtout que le gouvernement a l'intention de continuer bien
au-delà de l'année 1987.
Le député de Shefford fait des comparaisons entre l'effort
que fait le Québec et celui que fait l'Ontario. Voyons d'abord ce que
fait le Québec. Le député de Shefford a annoncé,
tout à l'heure, toutes sortes d'engagements pris par différents
ministères, que ce soit le ministère de la Santé et des
Services sociaux, celui de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu, celui des Relations internationales, celui de l'Éducation, un
grand nombre de ministères ont annoncé des programmes visant
à souligner de façon tangible l'Année internationale du
logement des sans-abri.
La Société d'habitation du Québec qui est le
maître d'oeuvre au gouvernement du Québec en matière
d'habitation a, quant à elle, pris la responsabilité de divers
engagements en cette matière. Nous avons annoncé - le
député l'a souligné, mais je crois qu'il n'a pas
très bien souligné la proposition gouvernementale - un programme
visant à faire en sorte que soient construits des immeubles ou que
soient rénovées des maisons de chambres ou, enfin, que soient
investis des fonds dans le domaine immobilier pour une somme de 13 000 000 $
conjointement avec le gouvernement fédéral. (20 h 30)
Je tiens à souligner que cet engagement est très important
parce que si les investissements immobiliers totaliseront 13 000 000 $, ils
entraîneront des déficits d'exploitation puisque, bien sûr,
les gens qui fréquenteront ces endroits, que ce soient des sans-abri
dans des maisons de chambres ou des sans-abri dans des dortoirs communautaires,
par exemple, ces gens-là ne paieront à peu près pas de
loyer ou des montants très minimes, de sorte que nous prévoyons
des déficits d'exploitation de l'ordre de 1 000 000 $ par année
pour les gouvernements. Or, comme le programme est financé sur une
période de 35 ans, on doit
reconnaître, dès le départ, que les gouvernements
fédéral et du Québec s'engagent pour une somme de 35 000
000 $ uniquement à l'égard de ce programme-là pour le
financement du déficit d'exploitation de ces maisons de chambres qui
seront restaurées ou encore ces dortoirs communautaires qui seront
aménagés.
Je pense qu'au-delà des 13 000 000 $ d'investissements
immobiliers, on ne doit pas sous-estimer la somme de 35 000 000 $, au moins, de
déficit d'exploitation qui sera apporté par ces
investissements.
Le député a également mentionné le fonds
spécial de 2 500 000 $ que nous avons annoncé et qui vise
à venir en aide d'une façon immédiate aux organismes qui
s'occupent des sans-abri en leur fournissant des ressources pour l'achat de
matériel ou d'équipement servant justement aux sans-abri. Cela
pourrait être des réfrigérateurs, des congélateurs,
des lits, des draps, des taies d'oreiller, enfin du matériel qui sert et
qui va servir à venir en aide aux sans-abri de notre
société.
Je souligne également qu'au tout début du programme, nous
avons distribué une somme d'au-delà de 50 000 $ de subventions
encore à des organismes qui s'occupent des sans-abri et visant aussi
à leur permettre d'acheter de l'équipement ou du matériel
pour venir en aide aux clochards, aux itinérants et autres personnes de
notre société qui comptent parmi ceux dont les ressources
financières sont pratiquement inexistantes.
Voilà, je pense, au-delà des mots, des voeux pieux qu'on
entend trop souvent dans le domaine de la politique où nous sommes tous,
je pense que voilà des gestes concrets qui se traduisent et se
traduiront par des réalisations qu'on pourra voir
immédiatement.
Maintenant, l'Ontario. Le député nous compare à
l'Ontario. L'Ontario a aussi annoncé un programme où on
construira des unités d'habitation. L'Ontario, d'après les
informations que nous avons, va construire des logements pour les sans-abri.
Nous construisons beaucoup de logements au Québec pour les citoyens les
plus démunis. Nous construisons cette année environ 2500
unités de logement pour les citoyens les moins fortunés de notre
société. L'Ontario a déterminé qu'elle construirait
cette année un certain nombre d'unités dont 25 % seraient
destinés aux sans-abri. Cela peut équivaloir à environ 700
unités d'habitation.
Par contre, comparativement au fonds de dépannage dont je parlais
tout à l'heure et qui, pour le gouvernement du Québec, se situe
à 2 500 000 $ pour venir en aide aux itinérants, aux clochards et
aux sans-abri par voie d'achat de matériel ou d'équipement,
l'Ontario n'a qu'un fonds de 350 000 $ à cet égard. Je pense que,
si on regarde le volet construction de logements, l'Ontario en fait
peut-être un peu plus que nous, mais, pour ce qui est du fonds de
dépannage, ce qui est très important dans le cas des sans-abri,
nous mettons une somme d'argent qui est environ sept ou huit fois plus
importante que l'Ontario.
Finalement, quand on regarde tout cela, je pense que le Québec
consacre pratiquement autant que l'Ontario, fait autant que l'Ontario pour
l'Année internationale du logement des sans-abri. Il faut quand
même considérer que le Québec a une population
d'au-delà de 2 000 000, sinon 3 000 000 inférieure à
l'Ontario.
Pour ce qui est de la ville de Montréal, le député
fait également état des recommandations de la ville de
Montréal. Il y a un comité qui s'est penché sur ces
questions et qui a fait des recommandations. Un comité ce n'est pas la
ville de Montréal. Le comité a fait quelque chose comme 40
recommandations à la ville de Montréal. Mais ce n'est pas le
comité qui décide. Un comité, ça fait des voeux,
ça soumet des recommandations, ça ne prend pas de
décision.
La ville de Montréal a annoncé jusqu'ici sont intention de
bonifier le programme PARCQ avec des fonds qui pourraient tourner autour de 5
000 000 $ sur une période d'une couple d'années. Je pense qu'on
attend toujours d'autres décisions qui, semble-t-il, pourraient
être connues incessamment. Le comité dont parlait le
député tout à l'heure avait, bien sûr,
annoncé des chiffres. On avait annoncé entre autres une demande
au gouvernement supérieur d'investir 10 000 000 $. Évidemment,
c'est facile de lancer des chiffres de 10 000 000 $. Cela fait beau à la
télévision de dire que le comité recommande 10 000 000 $
d'investissements pour alimenter un fonds spécial. Mais ces 10 000 000
$, qui devait les investir? Le comité? Pas le comité. La ville de
Montréal? Non, pas la ville de Montréal.
C'était le gouvernement provincial et le gouvernement
fédéral qui devaient, d'après le comité, fournir un
fonds de 10 000 000 $. Quant à moi, je pourrais annoncer aujourd'hui un
fonds de 100 000 000 $ pour les sans-abri pris à même la caisse du
Parti québécois, par exemple. Ça ferait beau dans les
manchettes demain matin: Le ministre de l'Habitation annonce un fonds de 100
000 000 $, mais financé par le Parti québécois. Cela donne
quoi? Cela ne donne rien du tout. Cela peut peut-être jeter de la poudre
aux yeux de ceux qui écoutent distraitement les chiffres, mais il faut
être sûr et certain que ces sommes vont être là, que
quelqu'un va être en mesure de les fournir. Je pense qu'il y a une marge
entre annoncer des chiffres et être capable de débourser l'argent.
Voilà qui couvre cette partie de l'exposé du député
de Shefford.
Maintenant, si on revient au problème fondamental du logement de
ceux qui dans notre société sont les plus démunis, nous
avons actuellement au Québec des programmes qui s'adressent à ces
éléments de notre société. Parfois là-dedans
il y a des sans-abri; souvent même il y a des sans-abri. Par exemple,
lorsque nous admettons dans nos HLM, dans nos habitations à loyer
modique des couples, des jeunes, des moins jeunes dont les revenus sont les
moins importants de notre société, il arrive parfois que ces gens
n'aient pas de toit à se mettre sur la tête. Nous avons beaucoup
dans nos programmes d'habitation de gens qui sont -ils le sont tous dans le
fond - les moins bien nantis de notre société. Or, que
faisons-nous pour ces gens? Nous dépensons actuellement, avec l'aide du
gouvernement fédéral et des municipalités du
Québec, 125 000 000 $ par année pour loger les
éléments les moins bien nantis de notre société.
Nous construisons 2500 HLM par année justement pour cette
catégorie de gens. Nous avons le programme Logirente qui s'applique aux
personnes de 60 ans et plus qui doivent dépenser plus de 30 % de leurs
revenus pour se loger. Nous dépensons cette année 22 000 000 $
pour ces gens-là. Nous avons le programme PARCQ de restauration des
logements et, également, un programme qui s'adresse aux gens qui sont
les moins bien nantis de notre société. Nous allons
dépenser 70 000 000 $ au cours de l'année qui vient dans le
programme PARCQ.
Nous avons également le programme de supplément au loyer
qui s'adresse toujours à la même catégorie de citoyens.
Nous aurons en plus le programme des sans-abri dont je viens de parler. Il ne
faudrait quand même pas dire que le gouvernement du Québec ne se
préoccupe pas des gens les moins bien nantis de notre
société ou des gens qui sont démunis
financièrement. Je reviens sur des chiffres que j'ai déjà
évoqués ici pour dire que le député de Shefford est
bien mal placé pour faire des reproches au gouvernement actuel parce
que, au cours de l'année 1987, l'année courante, nous
investissons, nous allons réaliser 37 % de plus d'unités de
logement de toute sorte pour les démunis de notre société
que ce qu'a fait l'ancien gouvernement en moyenne pour les années 1980
à 1985. Au cours de ces années, l'ancien gouvernement a
réalisé une moyenne de 3550 unités de logement par
année pour les démunis. Nous allons en réaliser,
uniquement dans l'année 1987, 4860, ce qui équivaut à plus
de 35 %, en fait 37 % de plus que ce que faisait l'ancien gouvernement. Je
pense qu'il s'agit là d'une augmentation importante, sensible de
réalisations en matière d'habitation par le gouvernement du
Québec. (20 h 40)
Je peux dire, quant à moi, que je suis fier de l'effort que fait
le gouvernement du Québec, de l'amélioration importante qu'il a
apportée au problème du logement de ceux qui, dans notre
société, comptent parmi les moins fortunés. Je peux vous
assurer que non seulement en 1987 - parce que le député de
Shefford pense que tout cela va se terminer dans l'année 1987 - mais
dans les années qui vont suivre, nous allons continuer à
accentuer nos efforts pour venir en aide aux plus démunis, en
particulier ceux qu'on appelle les sans-abri en tentant de poursuivre les
programmes que nous avons mis de l'avant cette année. Merci.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui, je vais reprendre quelques points avant de
retourner aux questions, même si aux questions précises que j'ai
posées je n'ai pas eu de réponse; je vais certainement les
reposer. Donc, si vous pouvez me préparer les réponses, cela me
fera plaisir.
La première chose, quand vous parlez de l'annonce qui a
été reportée par condescendance pour le chef de
l'Opposition, j'aimerais quand même vous rappeler que le report a
été de guinze jours, soit de la semaine avant Pâques
jusqu'à la semaine après Pâques. Le reproche qu'on vous
fait, ce n'est pas d'avoir retardé de deux ou trois semaines, c'est
d'être arrivés quatre mois en retard; cela fait toute une
différence. Non seulement vous êtes arrivés quatre mois en
retard, mais vous avez annoncé, à la fin du mois d'avril ou au
début de mai, que le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu était pour faire une recherche sur la
situation des sans-abri. Il faut avoir du culot pour faire cela, annoncer une
politique des sans-abri, mais dire que pour savoir ce dont ils ont besoin, pour
connaître la situation réelle afin d'être capable de
répondre aux vrais besoins, on va faire faire une étude, une
recherche par un autre ministère. C'est cela qu'on vous reproche et qui
n'a pas de bon sens. C'est vraiment juste une politique parce qu'à force
de vous poser la question "quand viendra-t-elle, votre politique?"... Depuis
janvier, février et mars, on vous pose des questions pour savoir si
votre politique va venir, si vous avez une préoccupation des sans-abri,
et vous nous arrivez, quatre mois après, en nous disant: Bien, on
annonce 2 500 000 $, mais les recherches, on va les faire faire par un autre
ministère et quand on les aura, on vous dira si on a répondu aux
véritables besoins. C'est le premier point où je voulais en
venir.
Le deuxième, quand vous avez dit "ce n'est certainement pas les
gens de l'Opposi-
tion qui vont venir nous dire quoi faire parce qu'ils n'ont rien fait
pour les sans-abri et pour les plus démunis", c'est sûr qu'on n'a
pas fait d'Année internationale du logement des sans-abri, même si
on était un parti avant-gardiste; on ne pouvait pas devancer
l'Année internationale du logement des sans-abri en 1985 quand elle
était fixée à 1987 et on le savait. N'oubliez pas que ce
que vous avez fait depuis que vous êtes au pouvoir, c'est d'abolir ou de
ratatiner des programmes pour les plus démunis. Les programmes que vous
avez annoncés tantôt, ce sont des programmes déjà
existants, sauf PARCQ qui est un nouveau programme, mais qui est l'ancien
Loginove, beaucoup moins payant, beaucoup moins avantageux pour les gens. Donc,
qu'on vienne se vanter d'avoir créé de nouveaux programmes au
détriment d'ex-programmes de l'ancien gouvernement du Parti
québécois plus généreux pour les plus
démunis, je pense qu'il faut avoir du culot pour faire cela.
Des chiffres, je vais vous en donner parce que c'est facile de jouer en
disant: tant de plus, tant de moins; mais, la réalité, on la
retrouve dans vos propres cahiers des crédits et du budget. Ce que cela
dit, c'est que 2500 HLM vont être construits cette année, oui, sur
une prévision de 3300; donc, c'est 800 en moins. Et vous avez dit, la
semaine passée, en commission parlementaire: À cause de
contraintes de réalisation, on ne pourra pas les réaliser. Et ne
faites pas signe que non, M. le ministre, parce que je pourrais retrouver le
communiqué. C'est exactement les chiffres que l'on donne. On parle de
3300, mais, malheureusement, à cause de contraintes de
réalisation - ce sont vos propres mots - il en manque 800. Est-ce que
ces contraintes ne seraient pas dues justement aux compressions que vous avez
faites dans d'autres organismes bénévoles, d'autres organismes
qui sont là pour stimuler cette construction? C'est facile de dire
qu'ils ne seront pas réalisés qu'il y a eu des contraintes quand
c'est vous qui avez apporté les contraintes qui viennent justifier la
non-réalisation de 800 HLM promis. Donc, cela vient dire que oui, on va
en faire plus! Bien oui, on en avait annoncé 3300, on en réalise
2500; là, on dit: C'est de toute beauté, cette année, cela
va être encore 2500, comme l'an passé. Bien oui, mais
l'année passée, on en avait déjà coupé
800.
Ensuite, quand on parle des coopératives et des organismes sans
but lucratif, dont le ministre fait présentement l'éloge, c'est
un des organismes essentiels dont on a besoin; M. le ministre, pas besoin de
dessin pour dire ce qui est arrivé aux coopératives et aux
organismes sans but lucratif, alors que vous avez mis les groupes de ressources
techniques sur le qui-vive pendant un an pour leur annoncer que, finalement,
ils vont être maintenus pour une année à 100 % et, ensuite,
être coupés en ce qui a trait à l'aide, qui passera de 35
groupes à 11 groupes, en 1990. Ensuite, on va se demander pourquoi on
n'a pas réalisé toutes les unités prévues. Ce
seront des contraintes de réalisation, les coupures que vous avez faites
aux groupes dynamiques du milieu qui aident les plus démunis à se
prendre en main. Alors qu'en 1985, sous l'ancien gouvernement du Parti
québécois, il s'était réalisé 3845
unités coopératives et OSBL, on se retrouve, en 1987, à
1850, même pas 50 %.
Vous essayez de nous dire que nous n'avons rien fait pour les plus
démunis. Quand l'aide aux plus démunis passe par les HLM, par les
coopératives d'habitation et par les organismes sans but lucratif et que
vous êtes en train de couper de moitié sur ce que nous nous
faisions en période de crise économique et vous avez le culot de
venir nous dire que nous n'avons rien fait pour les plus démunis.
Regardez vos propres chiffres, ne regardez pas seulement le petit budget
supplémentaire que vous venez de déposer, regardez le vrai
budget, le budget régulier sur lequel nous avons eu des discussions, la
semaine dernière, en commission parlementaire.
On dit que le gouvernement précédent n'a rien fait, alors
que nous avons mis aussi sur pied des maisons de jeunes et également une
politique de maison de femmes qui, malheureusement, n'est plus
respectée. Vous savez très bien que, lorsqu'on cesse d'aider les
maisons de femmes ou les maisons de jeunes, quand les personnes mal prises
n'ont pas de ressources et que les hôpitaux sont pleins et qu'elles ne
retrouvent pas d'aide ailleurs dans les institutions gouvernementales, cela
devient des personnes sans abri.
Vous aurez contribué, avec des politiques depuis un an, à
augmenter le nombre des sans-abri parmi les jeunes et les femmes à
Montréal spécialement. On nous dit que nous n'avons rien fait
alors qu'aujourd'hui on n'applique même pas le statu quo sur les normes
qui existaient avant et sur le nombre d'unités construites chaque
année. En plus, on s'en vient dire qu'on ne prendra pas de leçons
de l'ancien gouvernement. Vous avez découvert la façon de faire
accroire qu'il s'en fait plus alors que c'est coupé partout.
C'était le deuxième point que je voulais ramener.
Le troisième point, quand vous nous parlez de 2 500 000 $ comme
quelque chose d'extraordinaire, à vous écouter, M. le ministre,
je n'ai pas l'impression d'entendre le ministre des Affaires municipales et
responsable de l'Habitation du Québec. C'est comme si j'entendais un
représentant des Nations-Unies s'adresser au tiers monde. On s'en vient
dire qu'on va donner 2 500 000 $ pour des cuisinières et des
réfrigérateurs pour les sans-abri. M. le ministre, ils ne se
promèneront pas avec leur cuisinière et leur
réfrigérateur sur la rue Sainte-Catherine en attendant de se
trouver un banc au parc Lafontaine pour dormir le soir. Vous allez dire que je
charrie, vous avez le droit de le penser. Mais la réalité, c'est
qu'il y a 10 000 itinérants à Montréal. Ils n'ont pas
besoin de cuisinière ni de réfrigérateur; ils ont besoin
d'un toit. La différence avec l'Ontario, vous l'avez amenée: eux
ils traitent leur gens comme des gens responsables. S'ils mettent seulement 350
000 $ en cuisinières et en réfrigérateurs, c'est qu'ils
ont décidé de leur donner de l'électricité et du
chauffage d'abord. Je pense que c'est important. Eux, à Toronto
seulement ils ont l'intention de construire ou de trouver 1000 chambres pour
les itinérants cette année. C'est bien plus important d'avoir une
place pour coucher que d'avoir une cuisinière ou un
réfrigérateur pour se promener. Je trouve que ce n'est pas
correct. C'est beau de montrer 2 500 000 $, oui cela a l'air drôle. Sauf
qu'on peut annoncer 2 500 000 $...
M. Bourbeau: Est-ce que le député de Shefford
pourrait au moins rire pendant qu'il prononce des paroles semblables parce que
tout le monde rit autour de lui?
M. Paré: C'est vrai que c'est drôle.
M. Bourbeau: Si on pouvait le voir sourire un peu, ce serait bon
quand même!
M. Paré: C'est vrai que cela semble drôle; votre
annonce est drôle quand on l'explique, mais ce n'est pas drôle pour
les gens mal pris. Moi, cela ne me fait pas rire parce que cela n'a pas de bon
sens. Les 2 500 000 $, vous auriez été mieux de le donner
à la ville de Montréal pour qu'elle commence à appliquer
son projet. Vous avez ri du programme parce que c'est 10 000 000 $ qu'ils
demandaient d'aide aux gouvernements supérieurs. C'est normal que les 10
000 000 $ viennent des gouvernements supérieurs parce que c'est une
responsabilité des gouvernements supérieurs d'aider les plus
démunis de la société. Donc, le programme amené par
la ville de Montréal, où ils demandaient 10 000 000 $,
c'était pour résoudre des programmes urgents dus à des
actions posées par le gouvernement. Ils demandaient 10 000 000 $. Vous
ne vouliez pas donner 10 000 000 $? D'accord, vous avez le droit. Les 2 500 000
$, là où je veux en venir, au lieu de les donner en
cuisinières et en réfrigérateurs, vous auriez dû les
donner à la ville de Montréal, qui aurait, appliqué au
moins le quart de son programme d'aide aux plus démunis. (20 h 50)
Déjà, la ville de Montréal a posé des
gestes, des actions positives dans le sens de la réglementation, dans le
sens de l'aide aux petits propriétaires, dans le sens de
l'amélioration de votre programme PARCQ, de façon à aider
les sans-abri à se trouver des chambres à Montréal. Si on
lui avait donné 2 500 000 $ de plus, je suis convaincu que cela aurait
été beaucoup plus utile aux sans-abri que là où
vous allez le donner. C'est là où je veux en venir.
Quand je faisais la comparaison avec le tiers monde, c'est que,
finalement, on leur dit: On va vous donner des équipements au lieu de
vous donner des moyens d'être des citoyens à part entière
avec une adresse. C'est toujours ce que j'ai dit au sujet de la politique
internationale: On peut donner une poche de blé ou on peut indiquer aux
gens comment semer. Là, ce qu'on fait, on leur donne des
équipements au lieu de les aider à devenir des locataires comme
tous les autres, des citoyens qui ont droit à un besoin essentiel qui
est le logement. Je tenais à apporter cette précision.
Quand vous parliez de Montréal, je dois vous dire que le rapport
qui a été amené par le comité dont des membres du
RCM faisaient partie a été appuyé par le conseil municipal
de Montréal. Il ne faudrait pas le prendre comme un projet qui vient de
n'importe où, c'est à la demande du conseil municipal,
présenté au conseil municipal et entériné par le
conseil municipal de Montréal.
Pour vous montrer à quel point il y a des sans-abri à
Montréal, je vais être très d'actualité, je vous lis
une pétition qui circule présentement à Montréal.
J'espère que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu ou des gens de son ministère vont
écouter cela. Cela les aidera peut-être à aller un petit
peu plus vite dans leurs recherches. C'est une pétition qui circule
depuis quelques jours, et elle se lit comme suit: "Nous, citoyens
d'Hochelaga-Maisonneu-ve, considérant les faits suivants: 48 % des
logements habités ont été construits avant 1920 dans notre
quartier; 78 % des logements ont été construits avant 1945 et
moins de 5 % ont été bâtis depuis 1960; 85 % des familles
partagent un revenu familial moyen de moins de 20 000 $ par année -
c'est toujours à Montréal - 27 % des familles sont monoparentales
et consacrent plus de 40 % de leur budget au paiement du loyer mensuel;
demandons à l'Assemblée nationale du Québec d'intervenir
auprès du ministre de l'Habitation pour qu'il mette fin à la
discrimination envisagée contre les femmes chefs de famille
monoparentale dans les HLM." Vous parliez des HLM tantôt, M. le ministre,
voici un point important, discrimination contre les gens les plus mal pris, 27
%, entre autres, des familles du quartier Hochelaga-
Maisonneuve.
Deuxième demande qu'on retrouve dans cette pétition:
reconnaissance de l'urgence et de la nécessité de construire de
nouveaux logements sociaux, HLM, coopératives dans
Hochelaga-Maisonneuve. La troisième demande: reporter en septembre la
tenue de la commission parlementaire sur la levée du moratoire de la
conversion des immeubles locatifs en copropriétés indivises.
Je ne sais pas si vous avez l'intention de répondre dès ce
soir à ces trois demandes, mais ce sont trois demandes qui
répondent aux plus démunis. Que les listes d'attente des HLM
viennent faire de la discrimination contre les femmes chefs de famille
monoparentale, premièrement. Cela, vous l'avez reconnu, M. le ministre,
la semaine dernière en commission parlementaire, en essayant de
justifier le fait qu'on retrouve beaucoup trop de femmes dans les HLM, autant
familles que personnes âgées. Cela amène toutes sortes de
problèmes de vandalisme, de drogue, d'insécurité, de quoi
que ce soit. Vous avez tenté de justifier le rapport au lieu de dire: II
y a des problèmes dans ces HLM, où on retrouve trop de femmes. On
va trouver des solutions, on va essayer de régler le problème.
Vous dites plutôt: On va éliminer le problème et on va
faire de la discrimination. C'est la première demande.
La deuxième demande: plus de HLM. Si on respectait les 3300
prévus au lieu de 2500, on serait capable de répondre à
cette demande des gens de Hochelaga-Maisonneuve. Troisièmement, est-ce
que vous êtes prêt à reporter la commission parlementaire
sur la levée du moratoire en septembre, pour permettre à plus de
groupes de se préparer, alors que d'ici à quelques jours, on sera
en période de vacances estivales?
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre responsable de
l'Habitation.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais bien
répondre aux questions du député de Shefford, mais il a
dit tellement d'incongruités avant de poser ses questions que je vais
être obligé de répondre avant à ce qu'il a dit et,
à la fin, s'il reste un peu de temps, je pourrai répondre
à ses questions. S'il veut avoir des réponses à ses
questions, je lui suggérerais d'arrêter de faire de la
démagogie et de poser des questions. Si le député de
Shefford voulait poser des questions, je pourrais répondre à ses
questions.
Je vais commencer à répondre à toutes les
énormités que nous a servies le député de Shefford
depuis quinze minutes. Pour ce qui est des HLM, strictement des bâtisses,
des constructions HLM, parce que nous faisons beaucoup plus que des HLM en
matière d'unités d'habitation, le député dit: Vous
aviez annoncé 3300 unités et finalement vous n'en faites que
2500. J'ai expliqué cela au député à plusieurs
reprises en commission parlementaire, mais le député ne comprend
pas ou fait semblant de ne pas comprendre ce que je lui ai dit. Je lui ai dit
que nous avions 3300 unités en planification et que cette année
nous en réaliserions 2500. II faut bien comprendre que pour
réaliser des unités de construction, on ne peut pas, le 1er
janvier d'une année, dire: Nous avons zéro en planification, nous
commençons et au cours de l'année nous allons en faire 2500. Il
faut toujours qu'il y ait en planification un grand nombre d'unités,
parce que cela prend parfois deux ou trois ans avant de pouvoir commencer la
construction d'unités de HLM, de sorte qu'au début d'une
année donnée, on doit avoir 3000 ou 4000 unités en
planification sur les planches à dessin. On est en train de trouver des
terrains, de négocier l'achat de terrains, de vérifier des titres
de propriété, de faire faire des plans et devis. Tout cela
tourne. Nous avons toujours en planification 3000 ou 4000 unités de
logement et nous en réalisons à peu près 2500 par
année.
L'ancien gouvernement, au cours de la dernière année, en
avait fait 2300. Nous en faisons cette année 2500. Mais en plus de cela,
nous faisons beaucoup d'autres unités d'habitation. Nous avons dans la
programmation du gouvernement du Québec ce qu'on appelle des logements
spéciaux, nous en faisons 300. Nous avons des HLM privés, nous en
faisons 400. C'est le concours que nous avons ouvert récemment pour les
GRT et les OSBL. Nous faisons des logements pour les Inuit dans le Grand-Nord.
Nous avons des unités, des suppléments au loyer, nous faisons des
logements de concert avec le gouvernement du Canada. Selon les
négociations que nous avons avec le gouvernement du Canada, nous devons
faire des unités pour les autochtones urbains, des logements pour les
autochtones ruraux. Tout cela fait en sorte, avec les suppléments au
loyer, que nous faisons pour les éléments démunis de la
société, cette année, 4860 unités alors que
l'ancien gouvernement en faisait 3550 par année. Ce sont des faits, ce
sont des chiffres, Mme la Présidente.
Le député de Shefford dit: Vous ne dépensez pas
assez pour les éléments les moins bien nantis de la
société. Mais que faisait l'ancien gouvernement? Je signale que
l'ancien gouvernement, au cours des dernières années de son
règne, a dépensé, uniquement dans deux programmes, le
programme Équerre et le programme PAAPR, au-delà de 200 000 000
$. En fait, c'est 220 000 000 $ qui ont été
dépensés par l'ancien gouvernement et que nous continuerons
à payer
encore pendant quelques années, lesquelles sommes
n'étaient absolument pas destinées aux éléments les
plus démunis de la société. C'est environ 220 000 000 $ en
matière d'habitation qui auraient pu être dépensés
pour les sans-abri, pour les démunis, pour les gens les moins bien
nantis, mais qui ont été mis dans des programmes qui n'avaient
rien à voir avec les revenus des récipiendaires ou des
bénéficiaires.
Pour ce qui est dans sans-abri eux-mêmes, un des programmes que
nous avons annoncés vise à mettre au service des organismes qui
s'occupent des sans-abri une somme de 2 500 000 $ pour leur permettre d'acheter
de l'équipement et du matériel. Le député de
Shefford faisait des gorges chaudes tout à l'heure en caricaturant, en
disant à la population: Nous allons voir des gens se promener avec des
réfrigérateurs et des poêles sur le dos. Je vois le
député de Shefford qui rit maintenant. Tout à l'heure, il
gardait son sérieux. Je pense que c'est manquer un peu de respect pour
ces gens-là. Il faut connaître un peu la problématique des
sans-abri pour comprendre ce qui se passe sur le terrain, dans le champ.
Plusieurs se retrouvent, le soir, sans aucun endroit pour dormir. Ils se
présentent dans ce qu'on appelle des dortoirs publics, des endroits
qu'on met à leur disposition pour une nuit, pour quelques nuits,
où ils trouvent un gîte, un lit et, souvent, de la nourriture. (21
heures)
Les organismes qui s'occupent souvent bénévolement de ces
gens-là ont besoin de ressources, d'aide financière. C'est pour
pemettre à ces organismes de répondre à ces besoins
immédiats de gens qui sont dans le dénuement que nous avons fait
en sorte qu'ils puissent acheter de l'équipement pour venir en aide aux
clochards et aux itinérants. Quand je parle de lits, de draps,
d'oreillers, je parle de choses sérieuses et la population va
apprécier que nous posions des gestes concrets et positifs pour venir en
aide aujourd'hui même à ces gens-là. Le
député dit: Vous devriez faire comme l'Ontario, faire des
logements non seulement pour leur donner un drap et une taie d'oreiller, mais
pour leur mettre un toit sur la tête. C'est sûr que nous aimerions
leur mettre un toit sur la tête, mais cela prend un an et demi, deux ans
pour construire des toits. Qu'est-ce qui va arriver pendant ce temps? Ils vont
être encore dans la rue pendant un an et demi. Alors, nous faisons les
deux. Nous faisons des logements pour leur mettre un toit sur la tête, ce
sont les décisons à moyen terme ou à court terme, si vous
voulez, et à très court terme, d'une façon
immédiate, nous mettons à la disposition des organismes une somme
d'argent considérable pour venir en aide aujourd'hui même à
ceux qui n'ont absolument rien à manger et qui n'ont absolument aucun
endroit pour dormir.
C'est une décision qui est importante et on doit louanger le
gouvernement pour avoir pris cette décision. C'est une décision
qui fait en sorte qu'on peut répondre dès maintenant à des
besoins très criants.
Il y avait également, parmi les récriminations du
député de Shefford, la question de la présumée
discrimination envers les femmes dans les HLM. Voilà un autre bobard du
député de Shefford qu'il va falloir dégonfler. Les
règlements présentement en vigueur qui sont utilisés par
les divers offices municipaux d'habitation contiennent un système de
points et ce système de points est fait de telle façon qu'il
privilégie systématiquement les femmes seules et les familles
monoparentales. Quand le député de Shefford dit qu'il y a de la
discrimination envers les femmes, Mme la Présidente, si ce
n'était pas antiparlementaire, je vous dirais qu'il a menti, mais, comme
c'est antiparlementaire, je ne dirai pas qu'il a menti. Je dirai qu'il a
singulièrement faussé la vérité parce que la
vérité, c'est exactement le contraire.
Les règlements actuels dans les HLM font en sorte que ce sont les
femmes seules et les familles monoparentales qui se retrouvent toujours en haut
de la liste d'attente parce que le système de points les
privilégie d'une façon systématique. Qu'on ne vienne pas
nous dire qu'actuellement nos règlements font en sorte de nuire ou de
discriminer envers les femmes seules ou les familles monoparentales. C'est
exactement l'inverse. Je mets au défi le député de
Shefford, la députée de Maisonneuve, tous les
députés de l'Opposition et tous ceux qui tiennent le même
langage de venir prouver le contraire. Les règlements
privilégient systématiquement les femmes seules et les familles
monoparentales. Je demande au député de Shefford de faire
l'effort d'aller regarder les règlements et il va se rendre compte que
le système de points que nous avons privilégie
systématiquement et continuellement ces deux groupes.
Pour ce qui est du projet de règlement dont parlait le
député, on doit dire que, en vertu des ententes que nous avons
avec le gouvernement fédéral, entre autres, nous nous sommes
engagés à faciliter l'accès aux HLM à toutes les
catégories de citoyens démunis. Or, comme le règlement
privilégie d'une façon systématique et totale les femmes
seules et les familles monoparentales, nous devons, à l'occasion, tenter
de faire en sorte que des ménages avec enfants, par exemple,
également démunis, puissent aussi avoir accès aux HLM, aux
habitations à loyer modique. Nous avons l'intention dans le
règlement de permettre aux municipalités qui le voudront - ce
n'est pas une obligation - d'admettre un certain nombre de ménages
démunis, avec ou sans enfants, de façon à répartir,
si je peux dire,
les ressources de l'État entre plusieurs catégories de
citoyens.
Finalement, Mme la Présidente, le député de
Shefford, tout à l'heure, posait des questions. Est-ce que le
député de Shefford veut que je réponde maintenant à
ses questions? Est-ce que mon temps est écoulé, Mme la
Présidente?
M. Paré: Je vais vous les reposer une à une, pour
être bien sûr.
La Présidente (Mme Bégin): Vous avez quatorze
minutes d'écoulées.
M. Bourbeau: Je suis disposé à répondre aux
nombreuses questions du député de Shefford, s'il veut les
poser...
M. Paré: Oui, elles vont être brèves.
M. Bourbeau: ...sans faire un préambule important qui va
faire en sorte que je vais être obligé de répondre au
préambule et que je n'aurai plus le temps de répondre à la
question. Je lui suggérerais de poser ses questions et c'est avec
plaisir que je vais y répondre.
M. Paré: Avec plaisir, M. le ministre, sauf que je vais
faire un tout petit préambule sur votre dernière intervention
parce que je trouve que cela n'a pas de bon sens d'utiliser un terme
antiparlementaire. Je ne voulais pas vous arrêter parce que je savais que
vous étiez pour le corriger vous-même et, de fait, vous l'avez
corrigé dans le reste de votre phrase où vous avez dit que
j'avais raison. Vous avez dit: Le député dit qu'on fait de la
discrimination pour les femmes alors qu'elles sont favorisées. Je n'ai
pas dit que c'était faux, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit: Vous
avez l'intention de changer le règlement actuel de façon à
faire de la discrimination. Vous l'avez confirmé à la fin de
votre intervention en disant que le projet de règlement - en mettant
ça sur le dos du fédéral, ça vous regarde - vous
étiez pour le changer, pour ouvrir cela à d'autres
clientèles, donc, en faisant de la discrimination pour les femmes.
C'était exactement la fin de votre phrase. Vous l'avez dit autrement,
mais vous m'avez donné raison quant à la crainte exprimée
à savoir qu'on va changer le règlement actuel pour permettre
à d'autres clientèles de le prendre, mais pour le changer,
ça veut dire faire de la discrimination positivie. Vous avez
utilisé vous-même cette expression en commission parlementaire.
Donc, c'est la preuve qu'on a raison quand on s'inquiète et on va
continuer le débat pour permettre que le règlement actuel ne soit
pas changé au détriment de cette clientèle qui est, ne
l'oubliez pas, la plus démunie de la société.
Je vais poser juste deux petites questions rapides de façon
à avoir des réponses. Ce sont mes deux questions du début.
Premièrement, est-ce que l'appel de propositions pour les organismes
sans but lucratif qui était réservé dans le cadre de
l'Année internationale du logement des sans-abri est déjà
envoyé pour que des gens puissent participer? Est-ce que les 2 500 000 $
dont on parle depuis le début ont commencé à être
distribués?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, le député de
Shefford vient de nous dire que le règlement d'admission dans les HLM va
discriminer les femmes seules et les familles monoparentales. D'abord, je dirai
au député de Shefford qu'il n'y a pas de règlement
provincial au Québec actuellement appliqué dans les HLM. Le Code
civil fait, d'ailleurs, l'obligation au gouvernement d'avoir un
règlement et nous n'en avons pas. C'est pour ça que nous sommes
obligés de faire un règlement pour respecter la loi existante. Ce
règlement, qui est en préparation, a fait l'objet d'une
consultation auprès d'un certain nombre d'offices municipaux
d'habitation, dont l'Office municipal d'habitation de Montréal, qui
gère quelque 13 000 unités de logement. Ce qu'il y a actuellement
dans les HLM, ce sont des règles administratives qui sont
appliquées d'une façon différente d'un office municipal
d'habitation à l'autre, ce qui fait qu'à l'occasion un office
municipal nous annonce qu'il a sur ses listes d'attente 2500 personnes alors
qu'un autre office municipal d'habitation, qui a des règles
administratives différentes, nous dira: Nous n'en avons que 1000. Nous
n'avons donc aucune façon de savoir si les 2500 du premier office sont
les mêmes personnes qui sont aussi démunies que les 1000 du
deuxième. C'est pour ça que nous devons faire un règlement
général qui fera en sorte que tous les offices municipaux
d'habitation appliqueront les mêmes règles, de sorte que nous
pourrons savoir, quand nous avons une liste d'attente, que ces gens-là
sont aussi démunis que ceux qui sont sur une autre liste d'attente.
J'ajouterai ceci: Tout à l'heure, le député de
Shefford a prétendu que l'ancien gouvernement avait fait 3845
unités d'habitation, coops et OSBL en 1985. Il semblait comparer
ça aux unités que nous faisons pour les démunis
actuellement. Je pense qu'il faut, quand même, dire les choses telles
qu'elles sont. Sur les supposées 3845 unités que faisait l'ancien
gouvernement, il y en avait 3200, d'abord, qui étaient faites par le
gouvernement fédéral lui-même et 645 par le gouvernement du
Québec dans son programme Logipop. Or, dans les 3200 que faisait le
gouvernement fédéral, il y en avait plus de 2400 qui
n'étaient absolument pas
pour les démunis. Il faut, quand même, réduire
considérablement le nombre de logements qui s'adressaient aux gens les
moins favorisés de la société.
Quant au Parti québécois, quant aux 645 Logipop compris
dans le chiffre de 3845, il y en avait à peu près 250
unités par année qui s'adressaient aux gens les moins
favorisés de la société. Cela ramène donc à
des chiffres très humbles le nombre d'unités de logement que
faisait l'ancien gouvernement destinées aux gens les moins bien
favorisés de la société et cela explique pourquoi l'ancien
gouvernement pouvait se permettre de dépenser 220 000 000 $ dans les
programmes Équerre et PAAPR, qui n'étaient absolument pas
destinés aux citoyens les moins favorisés de la
société.
Si le député veut avoir des réponses à ses
questions, Mme la Présidente, je le prierais de poser des questions. Il
me fera plaisir d'y répondre au fur et à mesure que je les
entendrai.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre
responsable de l'Habitation.
M. le député de Shefford. (21 h 10)
M. Paré: Oui. Je vais être encore très court.
Je vais essayer d'être très clair en espérant, cette
fois-ci, après une multitude de tentatives, avoir des réponses.
Première question: Est-ce que l'appel de propositions pour les
organismes sans but lucratif dans le cadre de l'Année internationale du
logement des sans-abri est envoyé? Est-ce que les 2 500 000 $ ont
commencé à être distribués? Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Bourbeau: Bon. Je vois que le député de Shefford
est revenu à de meilleurs sentiments et qu'il évite de soulever
la controverse par ses questions. D'abord, je suis étonné de voir
que le député de Shefford ne lit pas les journaux. Nous ne
publions pas seulement dans les journaux anglophones. Nous publions surtout
dans les journaux francophones. Et nous avons publié, le 22 mai dernier,
un appel de propositions pour 13 000 000 $ pour le programme d'investissements
immobiliers pour les sans-abri. Je dirais au député que, s'il se
réfère aux journaux de cette date, il va trouver l'appel de
propositions qui a été fait par la] Société
d'habitation du Québec.
Quelle était la deuxième question?
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Shefford.
M. Paré: Est-ce que les 2 500 000 $ ont commencé
à être distribués?
M. Bourbeau: Oui. Vous savez que nous avons posté à
tous les organismes connus et autres qui se sont manifestés des
documents sollicitant, s'ils le voulaient bien, des demandes de propositions au
gouvernement, des demandes de projets, des offres de projets. Nous avons
reçu un certain nombre de demandes. Je dirais qu'au moment où
nous nous parlons nous avons reçu environ une cinquantaine de demandes
d'une cinquantaine d'organismes. Ces demandes constitueraient, en tout cas,
à peu près 300 à 900 places d'hébergement pour les
sans-abri. Les sommes en cause sont d'à peu près 1 000 000 $ pour
les demandes reçues jusqu'à maintenant. Bien sûr, il en
entre tous les jours. Nous allons continuer d'en recevoir dans les semaines et
les mois à venir.
C'est donc notre intention d'annoncer vers le début de juillet ou
à la mi-juillet une première série de subventions à
des organismes spécialisés qui s'occupent des sans-abri. Les
montants des subventions pourraient tourner autour de 800 000 $ à 900
000 $.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Oui. Je suis content que l'information puisse
passer, M. le ministre, parce que c'est important que les gens sachent qu'il y
a des dates et qu'ils puissent demander d'être inscrits à ces
proqrammes. Vous devriez me remercier de vous permettre de passer une
annonce.
Maintenant, j'aimerais que vous essayiez de m'éclairer et que
vous me disiez comment vous pouvez concilier le discours que vous tenez, en
disant que vous avez l'intention d'aider considérablement les sans-abri
avec vos 13 000 000 $ pour des coopératives et des organismes sans but
lucratif, avec les gestes concrets qui se résument comme gouvernement,
et c'est normal, en termes financiers, alors que, sur deux années, dans
le budget de l'an passé et celui de cette année, c'est quelque
chose comme 6 500 000 $ de moins. Cela veut dire que dans Logipop, sur le
budget de 1985-1986, il y a eu 4 200 000 $ qui ont été
périmés, donc non dépensés. Je ne peux pas voir
comment cela peut aider les coopératives et les OSBL, comment cela peut
aider quand c'est périmé, donc pas dépensé, pas
engagé, alors qu'on l'avait mis pour être
dépensé.
Sur le budget que l'on retrouve dans Logipop pour 1987-1988, donc le
budget en cours, c'est une diminution de 2 000 000 $. Donc, on annonce 13 000
000 $ pour les sans-abri. On dit qu'on va aider les gens. Mais, en même
temps, les chiffres réels qu'on retrouve dans les crédits
actuels, donc dans le budget en cours, c'est un montant de 2 000 000 $ de moins
dans ce programme.
Comment conclure qu'on aide plus, qu'on aide davantage, qu'on favorise
ce genre de propriété collective quand, sur le budget, on
enlève 2 000 000 $ par rapport à l'an passé?
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, le député de
Shefford semble très habile au départ en allant chercher, dans
tout le budget de l'Habitation, un poste où il pourrait y avoir eu
diminution au cours de l'année courante. C'est sûr que, si on
prend une loupe et qu'on regarde tous les chiffres dans le budget de la
Société d'habitation du Québec, on peut trouver un poste
ou deux où il y a une diminution de budget par rapport à
l'année précédente. Et là il dit: Voici, vous
dépensez moins cette année que l'an dernier, "shame on you",
malheur à vous!
Mais quand on regarde l'ensemble du budget - c'est cela qu'il faut
faire, il faut regarder le budget dans son ensemble et non pas seulement un
poste - on se rend compte, par exemple, que, pour l'année 1987-1988, le
gouvernement du Québec, la Société d'habitation du
Québec a un budget de 351 900 000 $, disons 352 000 000 $ en habitation.
On sait que le gouvernement du Québec dépense la totalité
de son budget en habitation sociale, c'est-à-dire pour les
éléments les plus démunis de la société. Si
on compare cela avec l'année précédente, avec les
dépenses réelles de l'année précédente,
donc, les dépenses réelles du budget 1986-1987 avec le budget
1987-1988, il s'agit d'une augmentation de 54 000 000 $ par rapport à
l'an dernier.
C'est donc dire que, cette année, le budget 1987-1988 comporte
des dépenses de 18,1 % plus élevées que l'an dernier.
Comme on sait que les budgets du gouvernement du Québec vont pour
l'habitation sociale, je dis donc, Mme la Présidente, que le
gouvernement du Québec fait un effort énorme cette année
pour les éléments les moins bien nantis de notre
société. Je comprends assez mal que le député de
Shefford tente ce petit truc d'aller chercher dans le budget un poste où
il y aurait un peu moins. Qu'il nous parle donc des postes où il y a
plus, et pas seulement des 2 000 000 $, 3 000 000 $, mais des 10 000 000 $, 20
000 000 $ de plus. Cela est important aussi.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Je vais être obligé de reprendre
cela aussi, quant à moi, en termes financiers, parce que je n'ai pas
pris à la loupe une ligne au hasard. Il faudrait, quand même,
faire attention à ce qu'on dit. Depuis tantôt et dans votre
communiqué, tout porte sur 13 000 000 $ dans le logement
coopératif. Ce que j'ai pris, c'est au niveau de Logipop, c'est
concernant l'aide qu'on donne au développement coopératif, aux
coopératives d'habitation et aux organismes sans but lucratif. Je ne
suis pas tombé par hasard sur une ligne où il y a une coupure. Je
parle du programme dont il est question depuis le début de notre
intervention.
Si vous voulez parler du budget global et sur l'ensemble, qu'est-ce qui
fait que ça semble beaucoup plus que l'an passé? Ce sont vos 43
000 000 $ dont vous avez parlé dans le programme PARCQ. Sauf que si vous
aviez dépensé l'an passé les 35 000 000 $ que vous nous
aviez annoncés alors qu'il s'est dépensé zéro l'an
passé, il y aurait zéro d'augmentation, il y aurait une
diminution sur l'ensemble des programmes. La grosse augmentation paraît
à la fin de vos budgets, sur lesquels vous jouez beaucoup: 43 000 000 $.
Ces 43 000 000 $, c'est 8 000 000 $ des dépenses de l'an passé
qu'on ramène cette année et les 35 000 000 $ qu'on annonce depuis
un an et demi, mais qu'on n'a pas dépensés l'an passé.
Donc, il faudrait faire attention. Sur le budget total, c'est moins en termes
réels de dépenses, si on tient le discours qu'on devait
dépenser 35 000 000 $ l'an passé dans PARCQ et qu'on ne les a pas
dépensés.
Quand on parle du programme Logipop, quand on parle du
développement des coopératives et des organismes sans but
lucratif, c'est une diminution de 2 000 000 $ qui va se traduire par ] 50
unités de moins. Comment ça favorise l'aide aux plus
démunis quand on va se ramasser en termes réels avec 150
unités de moins? Je ne comprends pas, expliquez-moi.
M. Bourbeau: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Bourbeau: ...ce n'est pas difficile à expliquer. Dans
les programmes d'habitation que nous avons au Québec, il y a des
programmes qui sont destinés essentiellement et totalement aux
éléments les moins bien nantis de la société. On
utilise pour cela les échelles qui sont mises au point avec la
Société canadienne d'hypothèques et de logement et gui
font en sorte que les citoyens qui ont accès à ces programmes
sont, ceux dont les revenus sont les plus bas dans notre société.
Il y a d'autres programmes qui, eux, ne sont pas destinés principalement
aux plus démunis. Quand le député nous parle des logements
coopératifs, par exemple, les coopératives, ce ne sont pas des
logements qui prioritairement s'adressent aux clientèles les plus
démunies. Les gens qui forment les coopératives ne sont pas
essentiellement des gens qui entrent dans la catégorie de ceux
dont on dit qu'ils ont des besoins impérieux en matière de
logement. C'est pour ça que le gouvernement du Canada, le gouvernement
fédéral a commencé à diminuer son aide aux
coopératives. Non pas qu'il l'abandonne, mais on a décidé
de faire un virage vers les éléments les moins bien nantis de la
société.
Évidemment, ce virage se fait à partir de subventions qui
actuellement se donnent à d'autres catégories de citoyens qui,
eux, ont des moyens financiers plus importants. Quand le député
fait la promotion des coopératives - je suis tout en faveur des
coopératives -disons-nous bien que ce ne sont pas les
éléments les plus démunis de la société. Il
ne faudrait pas confondre. Il faudrait, quand même, dire les choses
telles qu'elles sont, M. le député de Shefford. Vous savez fort
bien comme moi que les programmes de coopératives, ce ne sont pas les
programmes qui sont essentiellement destinés aux plus démunis.
(21 h 20)
Nous prenons dans les programmes des coopératives un certain
nombre d'unités et nous appliquons là le supplément au
loyer. Ces logements, que nous subventionnons dans les coopératives,
deviennent des logements qui sont accessibles aux plus démunis, mais
seulement cette proportion, de sorte que les programmes coop ne sont pas
destinés, dans l'ensemble, aux plus démunis. C'est pour cela que
le gouvernement fédéral a ralenti son aide à ces
programmes pour l'accentuer à l'endroit des plus démunis. Le
gouvernement du Québec a fait un peu la même chose, ce qui fait en
sorte que, finalement, les GRT, les groupes de ressources techniques, ont un
peu moins d'ouvrage, si je peux dire, sur la planche qu'auparavant puisqu'ils
se spécialisaient et se spécialisent dans les logements pour
coop. C'est pour cela que nous avons incité les groupes de ressources
techniques, les GRT, à diversifier leur action, leurs sources de revenus
pour faire autre chose que des coop pour tenter de puiser des revenus ailleurs
que dans les logements coopératifs.
Je pense que le député de Shefford sait cela très
bien. Je suis étonné, d'ailleurs, qu'il revienne là-dessus
continuellement parce qu'il connaît assez bien ses dossiers pour savoir
que ce que je dis là est la vérité. Je ne comprends pas
pourquoi il tente d'entretenir continuellement l'équivoque sur cette
question.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Paré: Je suis très conscient, M. le ministre,
que les coopératives ne sont pas seulement pour les plus démunis;
elles sont pour ceux qui ont des revenus faibles et modestes. Lorsqu'on
regarde, comme je vous le disais, la pétition d'Hochelaga-Maisonneuve
où 85 % des familles gagnent moins de 20 000 $ par année, cela
veut dire que c'est une clientèle énorme - en très grande
partie qui n'a pas les moyens de devenir propriétaire de façon
individuelle; donc, il faut le leur permettre d'une façon collective.
Donc, on s'adresse à beaucoup de gens qui auraient avantage à
devenir propriétaires, si l'accès à la
propriété est une politique qu'on favorise. Mais, la façon
de le faire, c'est par ce programme. Et par ce programme, parce que vous dites
qu'il n'aide pas les plus démunis, on va pénaliser ceux qui ne
sont pas tout à fait les plus démunis, mais qui ont quand
même des revenus très modestes.
J'aurais une autre question toujours concernant ce programme des
coopératives. Est-ce que le ministre peut nous dire si l'assurance
hypothécaire pour Logipop, catégorie 2, va être
approuvée par le Conseil du trésor et quand?
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, la question que pose le
député de Shefford fait l'objet, présentement, de
discussions au Conseil du trésor du gouvernement du Québec. Je ne
suis pas en mesure, actuellement, de donner une réponse
définitive à cette question. On va attendre que le Conseil du
trésor se soit prononcé et, après cela, on verra quelle
sera sa décision. Je ne peux pas présumer de cette
décision.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Shefford.
M. Paré: J'espère que le ministre est bien
conscient de l'importance de ce point pour plusieurs coopératives,
lequel fera en sorte que les projets vont fonctionner ou ne fonctionneront pas.
Cela fait partie des conditions sine qua non pour le succès des
coopératives. J'espère que le ministre en est conscient et qu'il
est favorable à ce que cela passe positivement et rapidement. Si l'on
veut vraiment qu'il y en ait qui existent et qui soient rentables, cela prend
absolument cette mesure.
J'aurais une autre question à poser au ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, je pourrais ajouter un mot
là-dessus.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Bourbeau: Je suis très conscient de l'importance de ce
dossier et je peux dire que, comme le député de Shefford, je
souhaite que le Conseil du trésor accepte les recommandations du
ministre responsable de l'Habitation à ce sujet.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
ministre.
M. Paré: J'en prends bonne note.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, Mme la Présidente. Une autre petite
question courte. Est-il vrai que les personnes qui profitent du programme
Logirente ne sont pas ou ne seraient plus "inscrivables", excusez l'expression,
ou ne pourraient plus demander d'être inscrites sur une liste de HLM?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, j'ai consulté les
gens autour de moi parce que la question est un peu surprenante. Je ne
comprenais pas pourquoi le député posait cette question. Je peux
dire au député qu'il n'y a aucune relation entre
l'accessibilité à un HLM et le fait qu'une personne peut retirer
des bénéfices du programme Logirente, de sorte que la question ne
se pose même pas.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, Mme la Présidente. Je suis content
de l'entendre, mais il n'y a nulle part, au moment où on se parle, des
offices municipaux d'habitation qui pourraient refuser d'inscrire sur leurs
listes d'attente d'un HLM des personnes de 60 ans et plus parce qu'elles
reçoivent de l'aide dans le cadre du programme Logirente? Vous me dites
que cela ne se produit pas à l'heure actuelle et, à ce que vous
me confirmez aussi, il n'est pas de votre intention de retenir cela dans le
nouveau règlement qui va être probablement déposé
bientôt sur l'admissibilité aux listes d'attente de HLM?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Bourbeau: Évidemment, je consulte des gens près
de moi, c'est un point un peu technique. On me dit que, lorsqu'une personne
présente une demande pour entrer dans un HLM, on regarde ses revenus.
Vous savez comme moi que le loyer payé par les gens dans les HLM
correspond à 25 % des revenus de la personne. Maintenant, le fait
qu'elle reçoive une subvention de Logirente avant d'entrer dans un HLM
n'entre pas en ligne de compte et il ne devrait pas y avoir de problème
si la personne est autrement admissible dans un HLM. Je vous transmets cette
réponse. Maintenant, si vous avez un cas précis de quelqu'un qui
aurait été refusé dans un HLM pour une raison comme
celle-ci, je vous invite à m'en faire part et on vérifiera avec
les autorités de la SHQ pour tenter de régler ce
problème.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député.
M. Paré: Merci. On sait qu'il va y avoir une commission
parlementaire très bientôt sur la levée du moratoire
concernant la transformation des logements locatifs en
copropriété divise. Deux courtes questions. La première:
À la suite de la demande qui nous est faite dans une pétition que
je vous ai lue tantôt, est-ce qu'il peut être pensable de retarder
les dates déjà fixées en ce qui a trait à la
commission au mois d'août parce que les gens en font la demande? Comme la
session va être ajournée très bientôt, je pense que
ce serait bon que vous puissiez nous donner une réponse ce soir. La
deuxième: Comment le ministre peut-il concilier qu'il dit qu'il veut
aider les plus démunis et qu'en même temps, alors qu'il annonce
une levée du moratoire avec une volonté d'accès à
la propriété, il n'y ait aucun programme pour les plus
démunis? S'ils n'ont pas d'aide, c'est évident qu'ils ne pourront
jamais accéder à la propriété.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député. M. le ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, le député
sait qu'il y a deux objectifs précis dans cette démarche.
D'abord, permettre aux locataires - non pas les plus démunis, je
concède que ceux-là ne peuvent pas présentement
accéder à la propriété - dont les moyens sont
modestes ou ordinaires d'accéder à la propriété de
leur logement et, deuxièmement, consolider ou renforcer le droit des
locataires d'être maintenus dans les lieux d'une façon
indéfinie. Ce sont les deux objectifs. Or, le député sait
comme moi que, présentement, il y a certains propriétaires -je ne
veux pas dramatiser, je ne dirais pas qu'il y en a pas beaucoup - qui abusent
et qui utilisent des trucs pour tenter d'évincer les locataires de
façon à vider les appartements pour éventuellement
convertir des logements existants en copropriété par la porte de
derrière, je dirais, par des moyens détournés. Ces mesures
de contournement ont cours présentement et nous voulons y mettre fin le
plus tôt possible. La proposition que nous avons faite fait en sorte de
mettre fin à ces mesures de contournement. Je dirai au
député que plus nous allons attendre pour lever le moratoire,
plus nous allons attendre pour faire la commission parlementaire, plus nous
avons de chances de retarder le moment où nous pourrons consolider les
locataires et faire en sorte de raffermir leur droit d'être maintenus
dans les lieux.
C'est pour cela que je ne vois pas pourquoi on retarderait davantage la
tenue de la commission parlementaire. Nous avons annoncé la tenue de la
commission parlementaire au mois de mai. Cela a donné aux citoyens du
Québec trois mois pour se préparer. Nous avions
déjà fait une annonce au mois de juin l'an dernier. Le
député est même celui qui m'a reproché de l'avoir
annoncée trop tôt. Donc, ceux qui sont intéressés
par la question ont eu amplement le temps de se préparer. Cela fait
au-delà d'un an qu'ils peuvent se préparer pour venir s'exprimer
devant la commission parlementaire. (21 h 30)
Le député conviendra avec moi que le mois d'août est
une période qui, sur le plan législatif et en ce qui concerne
l'Assemblée nationale, est propice aux commissions parlementaires en ce
sens que l'Assemblée nationale ne siège pas et qu'il n'y a pas
d'autre commission parlementaire. À ce moment-là, la plupart des
gens sont revenus de vacances, si je puis dire, dans la deuxième
quinzaine du mois d'août. Donc, il nous apparaît que c'est une
période idéale pour tenir une commission parlementaire, et mon
collègue, le ministre des Transports, en est venu à la même
conclusion parce qu'il tiendra également une commission parlementaire la
semaine suivante sur le transport en commun à Montréal.
En conclusion, je ne vois pas pourquoi nous retarderions la tenue de
cette commission parlementaire après la fin du mois d'août parce
que cela nous semble être une période particulièrement
propice et sereine pour faire un débat serein sur la question.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
J'aimerais rappeler qu'il reste cinq minutes pour les interventions. M. le
député de Shefford.
M. Paré: Oui, merci, Mme la Présidente. À
vous entendre, M. le ministre, vous êtes en train de confirmer ce que je
dis depuis au-delà d'un an, finalement, à savoir que votre
annonce prématurée de la levée du moratoire a des effets
négatifs. Au tout début, quand vous êtes intervenu pour
répondre à mes deux questions, vous avez dit que le temps qui
passe, finalement, peut jouer contre les locataires. Effectivement, vous avez
annoncé, si je me souviens bien, le 6 juin 1985, non pas l'intention de
tenir une commission parlementaire, non pas l'intention d'étudier la
possibilité, mais votre intention définitive de lever le
moratoire le 1er juillet 1987. Nous vous avions dit qu'il était
impensable de le faire sans qu'il y ait une commission parlementaire. On avait
raison, il faut que les gens soient consultés sur quelque chose d'aussi
fondamental, des gens qui risquent d'avoir de graves problèmes, mais on
vous avait dit aussi que ce n'était pas correct d'annoncer votre
intention une année à l'avance. À preuve, et il y a des
chiffres qui le confirment, il y a de plus en plus de demandes, de plaintes
auprès de la Régie du logement pour des reprises de possession
cette année, comparativement à l'an passé. Ce n'est
certainement pas le hasard qui a fait que c'est ainsi.
Le fait qu'on leur dise encore maintenant, c'est un peu une invitation
qu'on fait aux spéculateurs. On leur dit: Dépêchez-vous
parce que, quand le moratoire sera levé, il y aura une protection
blindée. On y reviendra en commission parlementaire, je ne suis pas
sûr qu'elle soit aussi blindée qu'on le laisse entendre. C'est
quand même une invitation, car on dit: Dépêchez-vous parce
qu'après ce sera moins facile, il y aura plus de contraintes; si vous
voulez le faire, faites-le maintenant. C'est le fait d'avoir annoncé,
non pas une commission parlementaire, comme je le disais, mais l'intention de
lever le moratoire qui, à mon avis, a nui le plus ou qui a
stimulé davantage cette conversion qui continue sur une grande
échelle. Je pense qu'il ne faut pas se le cacher. Je vais vous faire une
invitation, c'est d'interdire toute transformation d'ici à ce qu'il y
ait cette décision gouvernementale sur une date fixe de levée du
moratoire. En fait, il sera levé lorsqu'il y aura une
réglementation qui fera en sorte qu'il n'existera plus. On pourrait
interdire jusqu'à ce que cette réglementation soit connue. C'est
une invitation que je vous fais, M. le ministre.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député de Shefford. M. le ministre.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, le député de
Shefford conclut en parlant de la levée du moratoire. Vous savez que
cela fait déjà onze ans que le Québec interdit de
convertir des logements existants en copropriétés. Le
Québec est le seul endroit en Amérique qui maintient un tel
moratoire après en avoir établi un. Tous les autres États
ou pays qui ont établi des moratoires au cours des années
soixante-dix les ont levés après avoir modifié les lois.
Nous avons décidé de faire la même chose parce que... Nous
avons parlé toute la soirée des éléments les plus
démunis de la société. Je pense avoir fait la preuve que
le gouvernement du Québec a vraiment fait un virage important à
l'endroit des plus démunis et vient en aide de plus en plus,
certainement plus que l'ancien gouvernement, à cette catégorie de
citoyens.
Mais parallèlement à cela, il y a dans la
société d'autres citoyens qui, eux, ont des revenus... Je ne
parle pas de ceux qui ont des revenus élevés, comme le
député de
Shefford, la députée de Marie-Victorin, les gens qui
peuvent très bien se loger seuls, sans besoin d'aide. Mais les autres,
ceux qui ont des revenus moyens ou des revenus faibles, mais pas les plus
démunis, pourraient possiblement accéder à la
propriété si on leur donnait les moyens de le faire. C'est ce que
nous voulons faire en levant le moratoire. C'est évident que quelqu'un
qui gagne 20 000 $ ou 22 000 $ par année ne peut pas acheter une maison
neuve, ou même une maison usagée, ne peut pas acheter un
condominium neuf, c'est trop cher. Mais si on lui permettait d'acheter un
logement existant, aux alentours de 35 000 $, 40 000 $, par exemple, avec des
conditions intéressantes, possiblement qu'il y aurait moyen d'acheter.
C'est cela que nous voulons faire.
Si nous pouvons avoir un programme d'aide à l'accès
à la propriété, tant mieux! Je serai le premier à
applaudir et je vais faire des efforts pour tenter éventuellement d'en
avoir un. Malgré cela, sans aucun programme d'aide, les statistiques que
nous avons indiquent qu'au Québec, présentement -c'est dans le
document que nous avons publié - il y a 352 000 ménages
locataires qui pourraient accéder à l'achat de leur logement sans
affecter plus de 25 % de leurs revenus à leur logement; c'est ce qu'on
appelle le taux d'effort. Je ne dis pas qu'il va y avoir 352 000 ménages
qui vont acheter un logement, je ne m'illusionnne pas du tout. Même s'il
n'y avait que 1 % de ce nombre, nous aurions fait 3500 propriétaires
québécois à partir de gens qui sont locataires. Moi, je me
dis que plus on va permettre à des gens à revenus modestes et
moyens d'avoir accès à la propriété à des
conditions intéressantes, plus on va faire avancer la
société, parce que je pense que c'est une bonne façon pour
les Québécois de protéger leur environnement que
d'accéder à la propriété, de contrôler leurs
conditions de logement.
La Présidente (Mme Bégin): En conclusion, M. le
ministre.
M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente, je termine
là-dessus. Cela leur permettra, pendant leur vie, d'amasser un capital,
ce qui est important, de façon à ne pas se retrouver au soir de
la vie aux crochets de l'État. Je pense que c'est très important.
Si nous pouvons faire cela en consolidant en plus le droit des autres
locataires qui ne veulent pas accéder à la
propriété d'être maintenus dans leur logement d'une
façon illimitée, je pense que nous aurons atteint notre but. Je
ne désespère pas de convaincre le député de
Shefford de se ranger à notre point de vue. Nous le ferons lors de la
commission parlementaire, je l'espère.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
ministre.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais de
faire le rapport intérimaire.
La Présidente (Mme Bégin): Nous allons donc faire
le rapport intérimaire et je demanderais aux personnes qui ne sont pas
membres de l'Assemblée nationale de bien vouloir se retirer pour que je
puisse faire rapport au président de l'Assemblée nationale. D'ici
là, nous allons suspendre nos travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 37)
(Reprise à 21 h 48)
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Mme la présidente de la commission plénière, votre
rapport.
Mme Bégin (présidente de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire
rapport que la commission plénière n'a pas terminé
l'étude des crédits et vous demande la permission de
siéger à nouveau.
Le Vice-Président: Très bien, Mme la
Présidente. Quand la commission siégera-t-elle à nouveau,
M. le leader adjoint du gouvernement?
M. Lefebvre: À la prochaine séance, M. le
Président.
Le Vice-Président: Très bien. Si vous voulez bien
nous indiquer, pour la poursuite de nos travaux, à quelle étape
du feuilleton nous sommes rendus.
M. Lefebvre: L'article 45 du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 22 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 45 du feuilleton, M.
le ministre des Transports propose la motion d'adoption du projet de loi 22,
Loi modifiant la Loi sur le transport par taxi.
M. le ministre des Transports.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
suis extrêmement heureux que notre leader ait pu appeler ce soir, pour la
troisième lecture, le projet de loi 22 qui a
déjà subi l'épreuve de la deuxième lecture,
soit l'adoption du principe, de même que l'étude article par
article en commission parlementaire où nous avons pu discuter avec
l'Opposition et les collègues de la majorité de l'impact de ce
projet de loi qui, soit dit en passant, Mme la Présidente, a
été salué avec enthousiasme en particulier par la ligue
A-11 de Montréal qui a expédié au ministre un
télégramme le félicitant pour son courage, son action et
sa grande lucidité quant aux solutions...
Une voix: Sa grande sagesse.
M. Côté (Charlesbourg): ...aux problèmes du
taxi dans l'agglomération de Montréal.
Je veux tout simplement vous rappeler que nous avons adopté les
principes et les grandes lignes du projet de loi article par article et qu'il y
avait, à l'intérieur de ce projet de loi, un certain nombre de
principes que je veux vous réitérer très rapidement
étant donné que nous sommes maintenant en troisième
lecture. D'abord, les taxis pourront aller ailleurs que sur leur territoire
s'il n'existe aucun taxi à cet endroit. Cela nous apparaissait
extrêmement important; d'ailleurs, c'est une pratique qui a cours
actuellement, mais qui n'était pas légalisée. Elle le sera
et elle répond véritablement à un besoin à ce
moment-ci.
Deuxièmement, l'article 25 de ce projet de loi a pour effet de
créer une nouvelle catégorie de permis, celle des limousines de
grand luxe, afin de répondre à la demande et de faire en sorte
que nous puissions avoir trois catégories de taxi, puisqu'une limousine
est un taxi, soit le taxi traditionnel, la limousine d'aéroport que nous
connaissons à Dorval, ce qui représente 190 permis à
travers le Québec et, maintenant, nous aurons droit à la
limousine de grand luxe pour qui paiera le prix. L'individu qui voudra s'en
servir, comme je l'ai fort bien dit en deuxième lecture, pour quelque
chose d'heureux, un mariage, et pour quelque chose qui, pour certains, est plus
malheureux et pour d'autres plus heureux, un divorce, pour qui voudront se le
payer... Cela fera en sorte qu'on puisse offrir un service de grand luxe pour
les gens qui pourront se le payer.
Troisièmement, le projet de loi prévoit que les permis de
limousine de grand luxe sont délivrés pour le territoire de
l'ensemble du Québec malgré le fait qu'il y ait actuellement 191
permis dans la région de Montréal, deux permis dans la
région de Hull et trois tolérances législatives dans la
grande région de Québec.
Quatrièmement - c'est un point fondamental de ce projet de loi -
on reconnaît aux ligues de taxi qui ont été
créées par un projet de loi la possibilité d'aller
défendre l'intérêt général des membres devant
la Commission des transports et faire en sorte que leurs droits soient
respectés, écoutés et entendus par la Commission des
transports du Québec, ce qui n'était pas le cas jusqu'à
maintenant.
Cinquièmement, il y aura certains ajustements, à la
demande de la communauté urbaine afin que ce soit très bien
harmonisé avec différentes lois de la ville de Montréal et
de la communauté urbaine de telle sorte que tout se passe de
manière paisible et qu'on puisse effectivement faire ce que l'on
souhaite depuis déjà fort longtemps: le ménage.
Sixièmement, un accroissement des pouvoirs des enquêteurs
de la Commission des transports du Québec et des pouvoirs additionnels
d'inspection des taxis par des employés de la communauté urbaine
de façon qu'on soit toujours plus efficace.
Enfin, globalement, c'est une loi qui est assurément plus
équitable pour l'industrie de manière générale et
qui encadrera très bien maintenant la pratique de travail des
limousines.
Peut-être une bonne nouvelle avant de terminer la troisième
lecture: en fin de semaine dernière, nous avons autorisé, quant
au plan de rachat des permis de taxi, le deuxième souffle: passer de 10
000 $ à 18 000 $. Cela a déjà eu des effets
bénéfiques puisque, hier, 55 personnes se sont
présentées pour se prévaloir du nouveau plan de rachat et
beaucoup de personnes ont demandé des informations
complémentaires. Il semble bien qu'avec cette mesure que nous avons
prise le deuxième souffle du plan de rachat des permis de taxi sera en
marche et cela réglera un certain nombre de problèmes.
Lorsqu'on parle d'équité, on parle aussi de justice, de
loi, de règlement, je pense qu'il est souhaitable... J'avais
annoncé au cours de la deuxième lecture, et je le
répète pour ceux qui ne nous auraient pas entendus, que nous
allons créer, d'ici à la fin de l'été, un poste, un
genre d'ombudsman des gens du taxi. Nous allons créer M. Taxi, qui sera
là pour défendre les intérêts des chauffeurs de
taxi, pour être à l'écoute des chauffeurs de taxi, ce qui
fera en sorte que nous pourrons avoir une sorte de guichet unique pour ceux qui
auront à se plaindre de certaines procédures ou demander des
informations quant à l'exercice du droit de taxi.
Globalement, Mme la Présidente, je pense que nous faisons un
autre pas en avant, pas un grand pas, mais un autre pas en avant et l'important
c'est d'avancer pour le règlement de tous les problèmes
reliés à l'industrie du taxi, et tout cela pour le plus grand
bénéfice des artisans du taxi. Ce sont eux qu'il faut
défendre et qu'il faut continuer d'encourager à faire cette
pratique et faire en sorte qu'elle soit le plus rentable possible et qu'on ait
réussi à discipliner l'industrie du taxi. Je pense qu'en
adoptant
la troisième lecture de ce projet de loi il est maintenant clair
que nous avons progressé dans la bonne voie et que cela aura des effets
très bénéfiques pour l'ensemble de l'industrie. Merci, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Mme la Présidente, l'Opposition entend
souscrire aux dispositions de ce projet de loi et considère
également que c'est un pas en avant dans la bonne direction
déjà engagée par le gouvernement
précédent.
Chacune des dispositions contenues dans ce projet de loi 22 va nous
l'espérons, permettre de bonifier l'ensemble de la situation de
l'industrie du taxi, mais, particulièrement, les conditions de ceux et
celles qui pratiquent ce métier. Nous avons eu l'occasion de le dire, et
nous n'entendons pas répéter l'importance de cette industrie qui
n'est pas subventionnée et qui représente un marché de 250
000 000 $ par année avec 70 000 000 d'utilisateurs. Ces chiffres ne
doivent pas, par ailleurs, masquer le fait que ceux et celles qui en vivent ont
rencontré au cours des dernières décennies des
difficultés qui, nous l'espérons, avec les diverses mesures mises
de l'avant... Et nous félicitons le ministre des Transports d'avoir
notamment annoncé la hausse du prix du rachat des permis. Cette mesure,
particulièrement sur l'île de Montréal, dans la
région de Montréal, est certainement une des conditions qui peut
favoriser l'amélioration de cette industrie sur le territoire de
l'île de Montréal.
C'est important de bonifier, d'améliorer la situation de ceux et
celles qui en vivent parce que, d'une certaine façon, la courtoisie ne
se légifère pas. Par ailleurs, on peut s'attendre à ce que
ceux et celles qui sont respectés par les conditions faites dans leur
industrie respectent également les services qu'ils offrent à leur
clientèle. Ce soir, j'en profiterai pour faire appel à ceux et
à celles des artisans qui nous écoutent pour rendre, entre
autres, témoignage, parce que je suis une utilisatrice assidue de ce
moyen de transport. Sans vouloir discréditer la façon dont il se
pratique ailleurs, je dois vous dire qu'il n'y a que des éloges à
faire sur la façon dont il se pratique ici même dans la ville de
Québec.
C'est vraiment agréable de voir que c'est un métier dont
on peut être très fier. C'est un métier qui peut se
pratiquer comme il se pratique dans la ville de Québec. Je souhaite
qu'on puisse constater que la pratique de ce métier, les standards se
relèvent dans tout le Québec. D'une certaine façon, c'est
une vitrine pour nous parce que, souvent, le premier contact du visiteur va se
faire avec le chauffeur de taxi. C'est extrêmement important, et nous
espérons que, dorénavant, des efforts seront consacrés par
les ligues pour inviter leurs membres à pratiquer certainement une
courtoisie beaucoup plus grande et, je dirais, un service accru, en particulier
auprès des personnes handicapées par la vie et qui ont souvent
à faire appel à leurs services, pour que, un peu comme les
facteurs... On parle beaucoup présentement du rôle parfois
essentiel que les facteurs jouent auprès des personnes
âgées ou des personnes qui, pour une raison ou une autre, vivent
dans la solitude.
D'une certaine façon, ce qu'on peut espérer, c'est que le
service soit tellement personnalisé que faire appel à un service
de taxi soit une façon qui soit considérée dans notre
société comme étant un service assuré. (22
heures)
Mme la Présidente, diverses dispositions - on a eu l'occasion
d'en parler abondamment en commission parlementaire lors du discours de
deuxième lecture - sont introduites dans ce projet de loi, notamment
cette disposition qui crée le permis de limousine de grand luxe. Nous
souscrivons dans la mesure, et nous avons eu l'occasion de le dire, où
le règlement qui définira ce qu'est le service de limousine de
grand luxe permettra d'offrir une qualité de service, permettra d'offrir
évidemment une haute gamme qui ne trouvera pas de comparaison avec le
service habituellement offert. Et, en conséquence, les prix devront
être en comparaison.
Nous aurions souhaité, nous l'avons dit, obtenir le
règlement au moment même où nous avons à adopter la
loi. Je pense que c'est bon de le répéter. Comme l'Opposition le
répétait au gouvernement qui siégeait de ce
côté, comme l'Opposition libérale à l'époque
le faisait, c'est extrêmement important de léqiférer en
introduisant les intentions réglementaires que l'on entend mettre en
vigueur. Une loi qui introduit, comme c'est le cas dans ce projet de loi, une
disposition prévoyant un nouveau service de limousine de grand luxe
obtient l'accord de l'Opposition et, je pense bien, l'accord des milieux
concernés par l'industrie du taxi parce que c'est souhaitable, mais
c'est souvent lors de l'application que le bât blesse, si vous me
permettez cette expression.
C'est au moment où la réglementation vient définir
l'intention législative que ça ne correspond plus à ce
qu'on pouvait souhaiter au moment où la disposition
générale a été introduite dans le projet de loi.
Cela a été l'objet de longues études d'une commission qui
s'est penchée sur la réglementation pendant des années
dans ce Parlement et qui a fait bien des recommandations à cet
effet.
Surtout en matière de transport, où nous constatons que
c'est un secteur de la vie qui est dans tous ses aspects fortement
réglementé, qui l'a toujours été et qui continuera
certainement à l'être, malgré les soubresauts de la
déréglementation, il faut souhaiter qu'il y ait un effort
particulier qui soit fait de façon à certainement permettre aux
artisans de l'industrie et aussi à l'ensemble des intervenants de
pouvoir connaître quelles seront les conditions avec lesquelles ils
auront à vivre, lorsqu'on adopte un projet de loi. Je vous remercie, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Maisonneuve. Je constate qu'il n'y a pas de réplique. Le débat
étant clos, le projet de loi 22, Loi modifiant la Loi sur le transport
par taxi, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Je vous demanderais maintenant d'appeler l'article
46 du feuilleton.
Projet de loi 23 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 46 de notre
feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du projet de loi 23,
Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports. M. le ministre des
Transports.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Mme la
Présidente, c'est un très petit projet de loi, mais qui a
des conséquences tout à fait régionales et qui est de
nature à réjouir les artisans du vrac partout dans le
Québec actuellement. C'est une mesure qui était souhaitée
depuis déjà fort longtemps, qui était appliquée par
un règlement et qui maintenant aura force de loi, donc, qui sera
inattaquable devant les tribunaux. Nous rétablissons une situation qui
était pratiquée et ceci, à la grande satisfaction des
artisans d'un peu partout au Québec, soit de faire de cette clause 75-25
une loi qui, maintenant, ne pourra donc être attaquable devant les
tribunaux.
C'était une demande de la part des artisans d'un peu partout au
Québec, à laquelle nous nous rendons, dans sa forme actuelle avec
les pouvoirs qu'elle a du point de vue du règlement. Rien de plus. Nous
allons vivre avec ce que nous décidons aujourd'hui et bien vivre. Donc,
nous allons pouvoir vivre cette expérience et, par la suite, dans la
mesure où tout ceci se passera bien... Il y a effectivement des preneurs
d'ouvrage et aussi des donneurs d'ouvrage, en ce sens que les artisans sont des
gens qui prennent le travail, alors que le gouvernement du Québec, par
l'entremise d'un certain nombre d'entrepreneurs qui soumissionnent, donne de
l'ouvrage, de même que certains entrepreneurs privés.
Ce que nous souhaitons, c'est qu'il y ait du travail qui se fasse dans
l'harmonie de ceux qui ont à donner le travail et qu'il s'exécute
dans l'harmonie également, de telle sorte qu'un plus grand nombre
d'artisans, un peu partout au Québec, puissent gagner leur vie
honorablement.
Lors de l'étude du projet de loi en deuxième lecture, il y
avait un certain nombre de craintes gui avaient été
évoquées, qui étaient aussi véhiculées par
les artisans, soit de l'incertitude vis-à-vis de la clause 75-25.
À partir de ce soir, cette clause 75-25 sera donc confirmée en
troisième lecture et il ne restera que la sanction, donc l'incertitude
est levée à partir de ce moment-là.
Il y avait un deuxième niveau d'incertitude, qui était
celui de la déréglementation et qui laissait croire aux gens du
vrac que le gouvernement du Québec, allant de l'avant du
côté de la déréglementation du transport des
marchandises, pourrait faire de même pour le vrac. Lors de la
deuxième lecture, j'ai rassuré tous les intervenants en disant
qu'il n'était pas question de déréglementer le vrac au
Québec puisque c'était du transport principalement
intraprovincial et que ce que nous visions au chapitre du transport des
marchandises en termes de déréglementation, c'était du
transport extraprovincial en particulier, mais aussi intraprovincial.
La deuxième incertitude étant levée, il en restait
une troisième, c'était celle de l'avenir des postes et des
sous-postes qui, comme vous le savez, ont été contestés
devant les tribunaux. Les tribunaux de première instance ont
effectivement reconnu des faiblesses pour ce qui est de la
réglementation, ce qui fait en sorte que, si nous n'en avions pas
appelé de cette décision, nous serions aujourd'hui devant une
situation où les postes et sous-postes n'existeraient plus.
Donc, on a fait appel pour laisser le temps aux officiers
supérieurs du ministère des Transports de rencontrer les
intervenants partout au Québec, ce gui est maintenant chose faite, pour
faire en sorte qu'on ait une très bonne connaissance de la pratique du
métier d'artisan et du rôle indispensable, à certains
degrés, des postes et sous-postes. Avec cette cueillette de
données recueillies partout au Québec auprès des postes,
des sous-postes et des gens de l'ANÇAI, on pourra dresser un tableau,
puis vérifier par des entrevues téléphoniques
auprès de 200.0
répondants sur 7700 détenteurs de permis, à partir
d'un questionnaire très bien déterminé. On verra ce qu'est
l'industrie du camionnage en vrac partout au Québec et cela nous
permettra par la suite, de concert avec les représentants des postes,
des sous-postes et de l'ANCAI, après des rencontres avec les donneurs
d'ouvrage, de tenter d'harmoniser un certain nombre de choses et de faire en
sorte qu'on puisse dépoussiérer, rajeunir le règlement no
12. Nous espérons que cela puisse se faire le plus rapidement
possible.
L'objectif fondamental que nous poursuivons c'est de stabiliser la
pratique du camionnage en vrac au Québec. C'est ce que nous
réussissons à faire avec la clause 75-25 à
l'intérieur de la loi. Nous avons réglé l'incertitude qui
planait quant à la déréglementation. Il nous reste
maintenant une dernière phase qui est celle d'harmoniser et de faire en
sorte que notre règlement no 12 corresponde davantage à ce qu'est
aujourd'hui la pratique et du moins à ce que les détenteurs de
permis veulent qu'elle soit. Dans ce sens, nous aurons donc une étape
extrêmement importante à franchir au cours de l'été
et je souhaite que ce soit le plus rapidement possible, de telle sorte que l'on
puisse, dans l'harmonie, réqler les problèmes qui subsistent dans
le camionnage en vrac au Québec. (22 h 10)
C'est donc une étape extrêmement importante, Mme la
Présidente, qui est déterminante quant à la survie de la
pratique du métier d'artisan et qui nécessite de ces personnes
des investissements très substantiels pour ce qui est du matériel
roulant, des camions. Nous devons faire en sorte que l'on puisse leur conserver
un minimum, un plancher de travaux par la clause 75-25. Au fil des ans, compte
tenu de la pratique et du progrès que nous aurons fait, on pourra
peut-être éventuellement l'augmenter et tenir compte du
phénomène tout à fait particulier du transport des
matières de la forêt qui sont aussi extrêmement importantes
dans ce dossier. C'est au cours des deux prochains mois, nous l'espérons
bien, que nous pourrons régler le troisième point incertain qui
reste, régler selon ce que les gens du milieu veulent et de concert avec
le milieu. Ce que nous recherchons effectivement, c'est de bien servir les
artisans partout au Québec, puisque c'est davantage eux qu'il faut
servir, peu importe la structure. Que ce soit les postes, les sous-postes ou
l'ANCAI, on cherche toujours à bien servir l'artisan, en fin de compte.
On le fera de concert, avec tous ces intervenants, en répondant ainsi
à la volonté du milieu. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Mme la Présidente, c'est depuis près de
quinze ans maintenant que le ministère des Transports oblige les
entrepreneurs à qui il accorde des contrats de construction à
confier une part du transport nécessaire aux camionneurs locaux. Cette
part nécessaire constituait une clause de protection dans les contrats
signés par le ministère des Transports. C'est donc depuis 1973
que cette clause était systématiquement introduite dans les
contrats du ministère. Il faut constater que le projet de loi a pour
effet d'introduire de façon législative cette clause de
protection que l'on appelle la clause 75-25 qui favorise les camionneurs en
vrac dans le transport des marchandises, que ce soit le qravier, le sable, le
sel, etc., lors de la construction ou dans les travaux.
Mon intervention sera très brève. On a eu l'occasion
également lors du discours de deuxième lecture d'en parler, mais
il nous faut constater, je pense, qu'on ne dira jamais assez combien
présentement le législateur doit mettre à l'abri des
jugements de cour ces lois, ces règlements et ces contrats gui accordent
des droits collectifs. En l'occurence, une clause de contrat qui était
utilisée depuis quinze ans s'est trouvée dernièrement
invalidée par un tribunal de la Cour supérieure pour le motif
qu'une condition de protection comme celle-ci dans le contrat était
considérée comme un pouvoir exorbitant et que c'était une
restriction inacceptable au commerce.
Vous voyez, Mme la Présidente, que c'est certainement facile de
constater combien les savants juqes sont plus sévères à
l'égard des dispositions qui accordent des droits collectifs,
interprétant de façon très restrictive les droits
collectifs au profit d'une interprétation très large des droits
individuels. Cette loi déposée devant nous aujourd'hui est un bon
exemple des efforts et des énergies qui doivent être
consacrés présentement par les Parlements pour mettre, comme je
le disais, à l'abri, leurs lois, leurs règlements ou leurs
contrats de jugement d'invalidité pour un motif ou un autre d'une charte
quelconque. Je pense qu'on ne voit plus beaucoup de poursuites
présentement intentées contre des parties sans que le poursuivant
invoque l'une ou l'autre des dispositions des chartes. On est dans une phase
juridique où on teste toutes ces dispositions. C'est le résultat
que l'on connaît maintenant.
Lors de l'étude de cette loi article par article, nous avons pu
nous rendre compte à la lecture de l'article 1... Je vais vous lire ce
que cet article prévoit: "le ministre peut, dans les contrats auxquels
il est partie, y compris ceux qui sont adjugés après demandes de
soumissions publiques, stipuler que les titulaires de permis de camionnage
en vrac - les camionneurs artisans - délivrés en vertu de
la Loi sur les transports (L.R.Q., chapitre T-12) doivent participer à
la réalisation du contrat dans la proportion - il s'agit de la clause
75-25 - et aux conditions qu'il détermine."
II faut voir, par la formulation de cette disposition du projet de loi
23, que le ministre nous a dit pouvoir établir les modalités de
distribution du travail en passant éventuellement par des centres de
distribution. C'est certainement là une formulation qui doit être
connue par les artisans de cette importante industrie du camionnage en vrac et
qui va permettre au ministre des Transports d'établir les conditions de
la distribution d'ouvrage. Ces conditions sont connues actuellement, à
savoir les postes et les sous-postes. Mais il est également connu qu'un
autre jugement de cour est venu invalider cette façon de distribuer le
travail, encore une fois pour le motif que c'était là une
restriction indue au libre commerce.
C'est donc dire que, par cette disposition législative, le
ministre se donne le pouvoir, la capacité, dorénavant,
d'établir les modalités de distribution d'ouvrage puisqu'il est
bien entendu que la clause 75-25 doit être appliquée, doit
être distribuée et que, par ces dispositions dans le projet de loi
23, non seulement la proportion est prévue, mais également les
conditions déterminées. Nous souhaitons que le ministre, comme il
l'a indiqué, puisse lever cette incertitude le plus rapidement possible.
Il est certainement souhaitable qu'une industrie de cette importance, de cette
taille - on parle d'au-delà de 7000 personnes qui en vivent directement,
sans parler des effets qu'a cette industrie, particulièrement dans le
Québec des régions - puisse connaître une période de
stabilité en connaissant les conditions et les règles du jeu dans
lesquelles elle a à évoluer.
Le Québec est la seule province qui a cette particularité
de réglementer le camionnage en vrac. Cela me permet de vous rappeler
que dans bien des domaines... On l'oublie parfois pour s'en tenir uniquement
aux questions culturelles ou linguistiques, mais ce n'est pas que dans sa
langue que le Québec est distinct. Je ne veux pas aborder toutes les
conditions dans le domaine, par exemple, des heures d'affaires ou même
dans le domaine de l'alimentation. J'entendais qu'hier, et je pense même
ce soir, il y a eu des projets de loi sur les commerces. Pensons simplement aux
magasins d'alimentation au détail: à l'inverse du Canada anglais,
60 % du commerce est encore en circulation dans des magasins au détail
plutôt que dans de grandes chaînes au Québec. Il en va de
même pour le camionnage en vrac. Le Québec est la seule province
qui a cette réglementation où des camionneurs artisans qui ne
sont propriétaires que d'un seul ou de deux camions, ou de moins de
quatre, peuvent encore gagner leur vie honorablement et assurer dans leurs
régions respectives des services adéquats pour le transport de
matériaux, sachant l'importance économigue de cette industrie. Je
vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Maisonneuve. Je constate qu'il n'y a pas de réplique; donc, le
débat est clos. Est-ce que le projet de loi 23, Loi modifiant la Loi sur
le ministère des Transports, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: L'article 44 du feuilleton, Mme la
Présidente. (22 h 20)
Projet de loi 19 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 44 de notre
feuilleton, le ministre de l'Environnement propose l'adoption du projet de loi
19, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement.
M. le ministre de l'Environnement.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Mme la Présidente, je suis content de pouvoir
parler à cette étape-ci de l'aboutissement du projet de loi 19
qui a passé tous les processus parlementaires et qui va bientôt
être ratifié et sanctionné. Je m'en réjouis, parce
que c'est l'aboutissement d'un long travail qui a commencé dans les
comités interministériels et qui a valu beaucoup de travail
commun à plusieurs collègues, surtout au sein du comité
interministériel du COMPADR. Au Comité interministériel de
l'aménagement et du développement régional, sous la
présidence très habile de mon collègue, le ministre des
Transports et responsable du Développement régional, et aussi en
collaboration avec mes collègues de l'Agriculture, des Eorêts, des
Affaires municipales, nous avons pu arriver à l'aboutissement du projet
de loi 19, de son parallèle, le projet de loi 43, et dont la
pièce maîtresse est la politique de protection des rives, du
littoral et des plaines inondables.
Il y a d'autres dispositions dans cette loi par rapport aux
résidus miniers, par rapport à des ajustements techniques dans la
loi pour les sites d'enfouissement sanitaire,
pour la tarification et aussi pour l'ajustement de la politique
gouvernementale sur les honoraires relatifs à différents
comités et organismes de travail relevant du ministère de
l'Environnement. Il est sûr que la pièce principale de cette loi
reste la protection des rives, du littoral et des plaines inondables. Pour moi,
c'est une loi bien spéciale, c'est une loi qui consacre le voeu et la
nouvelle direction du ministère, soit de nous orienter vers la
prévention, la conservation et le renouvellement des ressources
naturelles et de l'héritage naturel. Je me réjouis donc de ce que
nous soyons arrivés à cette étape avec le projet de loi
19. Je remercie tous ceux qui ont travaillé à ce projet de loi,
tous les collègues qui ont participé à son aboutissement.
Encore une fois, je remercie tant les collègues ministériels qui
m'ont assisté en commission parlementaire dans toutes les autres
étapes de l'adoption du projet de loi que les collègues de
l'Opposition qui ont fait un travail bien positif de bonification de ce projet
de loi. Je m'en réjouis sous plusieurs chefs. Je suis content d'y
être arrivé et j'espère que la loi sera sanctionnée
très bientôt.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Environnement.
M. le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. On ne peut
pas dire qu'au cours de cette session nous ayons eu une avalanche de lois
très importantes. On ne peut pas dire non plus depuis un an et demi que
nous ayons eu dans le domaine de l'environnement plusieurs lois,
évidemment, d'une importance capitale pour la qualité de la vie.
Cependant, ce soir, nous avons deux projets de loi à étudier qui
sont extrêmement importants et auxquels nous donnons le point final. En
toute justice, si on doit reprocher au gouvernement certains gestes qu'il pose
et qui ne sont pas corrects selon l'Opposition, lorsqu'il pose des gestes
positifs, nous nous devons de le reconnaître et ces deux projets de loi
sont, en soi, deux qestes positifs. Nous en étudions deux, ce soir, Mme
la Présidente, comme vous le savez.
Le premier, le projet de loi 19 en troisième lecture, est en soi
porteur d'espérance et de foi en un avenir plus prometteur, parce que le
ministre a eu la charité de le passer avant la fin de la session et je
lui en sais gré. Donc, les trois vertus théologales ont
été respectées par le ministre de l'Environnement pour
cette fin de session avec ce projet de loi.
II y a cependant de petits reproches que je ferai, comme il se doit,
mais je les ferai de façon très positive. M. le ministre a dit
que le projet de loi 19 était à regarder devant la loi 43 qui
vient de passer. J'aimerais rappeler que, dans le projet de loi 19, on dit que
le ministre de l'Environnement se doit de faire et d'écrire une
politique sur les rives, et c'est celle-là qui dominera. Dans la loi 43,
c'est une loi du ministre des Affaires municipales, on fait quelques
restrictions pour la protection des rives par les MRC et les villes. C'est de
bon aloi que les villes répondent au ministre de l'Environnement pour
des responsabilités qui lui incombent, mais on aurait
préféré qu'une loi-cadre soit faite par le ministre de
l'Environnement et qu'après les lois qui suivent soient adaptées
à celle-là. Un règlement a été adopté
le 9 avril là-dessus. II est un peu faible en soi. Il a subi beaucoup de
critiques, mais je sais qu'il n'est pas encore officialisé et que le
ministre aurait le temps d'en corriger les défauts.
Il y a une chose très positive dans la loi 19 que nous
étudions. Dorénavant, concernant la qualité de la vie,
dans la loi qui protège la vie des Québécois et des
Québécoises, la loi-cadre de l'environnement, eh bien! nous
aurons un volet qui regarde les déchets miniers sous toutes leurs
formes, sous forme d'eau, de boue, de déchets, de racailles, ainsi que
les résidus des matériaux brûlés. Il faut dire que
c'est un ajout positif à notre loi sur l'environnement et je suis
persuadé que les Québécois et les
Québécoises ont suivi les débats. Vous savez, madame, ce
soir, on ne peut pas dire qu'on bâcle les projets de loi, mais on y met
un point final en en parlant durant quelques minutes pour résumer la
situation. Nous avons passé des heures et des heures en commission
parlementaire et nous avons passé des heures et des heures en
consultation pour en arriver ce soir à finaliser un projet de loi
positif.
Là-dessus, M. le ministre, je tiens à dire que je suis
pour ce projet de loi. Nous allons l'adopter avec grande joie. Nous aimerions
cependant que plus de législation nous vienne pour améliorer la
qualité de la vie, mais cette loi est merveilleuse tout en portant
certains petits défauts que j'ai fait remarquer au cours des
consultations.
Mme la Présidente, je vous dis que nous allons voter pour ce
projet de loi et ce sera à l'unanimité, je crois, que ce projet
de loi sera adopté.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Terrebonne.
Comme il n'y a pas d'autre intervention, le débat est clos.
Est-ce que le projet de loi 19, Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: L'article 47 du feuilleton, Mme la
Présidente.
Projet de loi 27 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 47, le ministre de
l'Environnement propose l'adoption du projet de loi 27, Loi sur les
pesticides.
M. le ministre de l'Environnement.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Mme la Présidente, il y a un peu plus d'un an,
nous avons commencé le cheminement du projet de loi 27, Loi sur les
pesticides. En effet, je pense que c'était au printemps de 19R6 que
l'équipe du ministère qui s'occupait de voir à ce qu'un
projet de loi sur les pesticides puisse aboutir m'a rencontré lors d'une
séance du groupe de travail sur les pesticides, à
Montréal, et j'annonçais alors que, d'ici à un an, nous
aurions une loi sur les pesticides au Québec. Cette loi va bientôt
être une réalité. Il me semble qu'il est essentiel dans
toute société d'aujourd'hui, dans toute société
moderne où on utilise des produits chimiques, où on utilise des
pesticides, que tout gouvernement se donne un mécanisme de
contrôle, d'utilisation rationnelle de ces produits, de réduction
de la quantité de ces produits utilisés et surtout un
mécanisme qui permette pas seulement à la longue, mais le plus
tôt possible, lorsque les moyens de recherche permettront leur
aboutissement, que nous retrouvions des méthodes de gestion de produits
et de culture par un système alternatif. Nous cherchons la
prévention dans ce projet de loi. Nous cherchons à ce que de
moins en moins au Québec des pesticides et des herbicides d'oriqine
chimique soient utilisés tant en aqriculture que dans nos forêts
et dans le domaine urbain. (22 h 30)
Le projet de loi va mener à cet aboutissement sous plusieurs
chefs. D'abord, il va favoriser l'éducation des utilisateurs afin que,
ayant été sensibilisés aux réalités et aux
danqers que peuvent causer les pesticides à la santé humaine et
à l'environnement, ils les utilisent de façon de plus en plus
rationnelle, de moins en moins importants afin que petit à petit cette
réduction amène en même temps des effets
bénéfiques quant à l'environnement et à la
santé. Ce projet de loi a aussi pour but de provoquer et d'inciter
à la recherche de produits et de méthodes alternatif. C'est, dans
un sens, une loi des années quatre-vingt parce qu'elle cherche la
prévention plutôt que la coercition.
À ce stade-ci où le débat s'est largement fait
où nous avons eu une commission parlementaire en février dernier
pour écouter beaucoup d'intervenants où il y a eu une
bonification très significative de l'avant-projet de loi, je voudrais
remercier plusieurs personnes qui ont travaillé de très
très près à l'aboutissement de ce projet de loi. D'abord,
je remercie mon adjoint parlementaire, le député de Pontiac, qui
m'a assisté de façon très vigoureuse et
systématique en ne ménageant pas son temps tant par rapport au
projet de loi 27 qu'au projet de loi 19 que nous venons d'adopter en
troisième lecture. Je remercie aussi, les spécialistes du
ministère, le sous-ministre adjoint et l'équipe de M. Roland
Saint-Jean qui, depuis des années, essaient d'arriver à cet
aboutissement d'une loi sur les pesticides. M. Saint-Jean est un des grands
experts au Canada et en Amérique du Nord, de toute la question de
l'usaqe rationnel et de la gestion intégrée des pesticides.
Je voudrais encore une fois signaler le travail très positif
qu'ont réalisé mon critique de l'Opposition et son éguipe
de recherche. Ils ont fait un travail de premier ordre qui a permis que tous
ensemble on réussisse à bonifier de façon très
significative l'avant-projet de loi qui avait été
présenté pour les auditions devant la commission
parlementaire.
Je pense que nous devons tous nous réjouir qu'au Québec
nous ayons enfin une loi sur les pesticides, car aucune société
moderne aujourd'hui ne peut se permettre de ne pas en avoir une. Il faut
à tout prix, dans un système industriel, dans notre
système socio-économique où le tissu urbain utilise de
plus en plus de ces produits, où le monde agricole utilise au
Québec 85 % de tous les pesticides et herbicides, où, dans le
domaine de la forêt, on en utilise encore de façon très
importante, que nous puissions avoir un outil législatif qui nous
permette d'en contrôler l'utilisation mais surtout d'arriver petit
à petit à la réduire en espérant qu'un jour
prochain nous aurons trouvé, par la recherche, des méthodes et
des produits alternatifs qui permettront qu'un jour on n'ait plus besoin de loi
sur les pesticides parce que nous aurons alors des produits et des
méthodes beaucoup plus sécuritaires tant pour l'environnement que
pour la santé humaine.
Je trouve que ce projet de loi n'arrive pas une minute trop tôt.
Je me réjouis de son aboutissement en troisième lecture et
j'espère qu'il sera adopté unanimement par cette Chambre.
Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Environnement.
M. le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Nous sommes
rendus, encore là, au dernier jalon que nous avons à poser sur le
projet de loi 27 sur les pesticides. Ce projet de loi nous a, tout d'abord
été présenté en avant-projet de loi et
l'avant-projet de loi lui-même était tout de même -on
pourrait le qualifier ainsi - assez vide. Je l'avais qualifié à
l'époque comme un code de bienséance des manipulateurs des
pesticides plutôt qu'une loi pour régir quantitativement les
pesticides.
Bien sûr, lorsqu'on regarde le principe de loi lui-même, on
ne peut pas encore dire que ce projet de loi vise ce qu'il devrait viser,
c'est-à-dire une diminution sensible de l'utilisation quantitative des
pesticides sur le territoire québécois. C'est déjà
une amélioration, mais il est demeuré une loi où les
manipulateurs vont transporter, fabriquer, vider, mettre en réserve,
entreposer, vendre ou acheter des pesticides de façon
sécuritaire. Mais dans l'utilisation même, dans la fonction
même pour laquelle le pesticide est produit, c'est-à-dire pour
être utilisé sur le territoire, eh bien, là, dans la
limitation quantitative des pesticides, cette loi est faible.
On me dira, et avec raison, que c'est une amélioration à
la situation dans laquelle nous vivons parce que, quand on n'a pas de loi sur
un produit dangereux, eh bien, toute loi qui vient le réglementer ou qui
nomme des inspecteurs pour surveiller son application, c'est une
amélioration. Là-dessus, je suis obligé, comme vous, de
dire que c'est une amélioration sensible sur ce que nous avions.
Ce qui fait le charme du parlementarisme britannique - j'admets que le
mot sied un peu mal dans la bouche d'un souverainiste, mais il faut respecter
les nations qui nous regardent vivre et ceux qui vivent autour de nous, vu que
nous vivons dans un système parlementaire britannique -c'est que le
parlement d'affaire britannique ouvre la porte à une grande
démocratie par une consultation. Nous nous devons de consulter. Je dis
souvent au ministre de l'Environnement que sa bête noire - on en a tous
une; moi, c'est de dire le mot "parlementarisme" - c'est qu'il ne consulte pas
suffisamment. Mais, pour ce projet de loi, je me dois de lui dire chapeau parce
que la consultation a été faite, et de façon magistrale.
Tous ceux qui désiraient se faire entendre à la commission
parlementaire sur l'avant-projet pour améliorer son essence ont
été reçus. C'était un projet sur les dommages qui
pouvaient être faits sur notre territoire par les pesticides et la
commission parlementaire était ouverte à tous ceux qui avaient
quelque chose à dire pour améliorer le sort des
Québécois par l'intermédiaire de cette loi.
Là-dessus, M. le ministre, je vous félicite de l'avoir
fait. Voyez-vous, c'était juste pour les pesticides. Au lac Meech,
c'était pour le sort de toute la nation pour des décennies
à venir et là, on a réduit le nombre des intervenants. II
n'y a pas toujours deux poids, deux mesures mais parfois cela arrive qu'il y
ait deux poids, deux mesures et, même dans ce système de
parlementarisme britannique qui est en soi très démocratique, eh
bien, c'est laissé à la volonté et la discrétion du
tenant du dossier et de l'importance qu'il y met pour voir approuver un de ses
points.
Comme le ministre qui défend ici la Loi sur les pesticides
sentait une certaine faiblesse dans son avant-projet de loi et avait besoin
d'être renseiqné par l'ensemble des qens qui connaissaient
à fond les pesticides, il a dit: On consulte. Je ne suis pas en
possession tranquille de la vérité. Venez nous dire ce qu'il y a
de pas bon et ce qu'on peut améliorer dans ce projet de loi. Et il a
ouvert la porte. Son premier ministre aurait dû faire la même chose
pour le lac Meech, c'aurait peut-être été moins
pollué comme entente.
Eh bien, la consultation qui a été faite par le ministre
de l'Environnement a apporté beaucoup d'améliorations à ce
projet de loi. Pas encore suffisamment pour que je jubile, pour que
j'éclate de rire et de joie et que je sois contenté dans mon
"faible" intérieur - je le dis fortement - mais assez, au moins, pour
que le projet devienne potable et qu'on puisse voter pour dans une certaine
harmonie avec les positions que nous défendions au tout début de
l'avant-projet de loi. (22 h 40)
II souffre de faiblesse, cependant, et tous les qens qui sont venus en
commission parlementaire nous ont dit qu'il y avait des points faibles. Par
exemple, la quantité de pesticides utilisés sur le territoire
québécois n'était pas assez réglementée,
n'était pas réglementée d'une façon assez forte et
il n'y avait pas assez d'incitatifs pour que nous en utilisions moins.
Il y a quelques petites choses qui ont été faites. Un peu
de recherche a été faite avec un petit budget.
Déjà, avec ce petit budget, on cherche des solutions de rechange
pour favoriser, disons, l'agriculture biologique, pour que dans nos
forêts les sylviculteurs arrosent avec des produits biodégradables
et qu'on fasse d'autres recherches à ce sujet. C'est déjà
un commencement, mais c'est loin d'être satisfaisant et suffisant de
façon totale et entière. Je vois le ministre qui admet que ce
n'est pas suffisant, d'après son sourire, mais c'est déjà
un début et vous me savez très positif dans mon opposition
constructive. Eh bien, je dois dire que c'est déjà mieux que
l'avant-projet de loi, mais il faudrait qu'un
effort supplémentaire soit fait dans ce domaine pour qu'il y ait
vraiment des inspecteurs sur le territoire. Vous dites qu'il y en aura 19. Le
territoire du Québec est très qrand. C'est un grand pays. J'ai
hâte que vous le sachiez. C'est un très grand pays, le
Québec. Et 19 inspecteurs pour un territoire trois fois et demi plus
grand que la France, le 17e parmi les grands pays du monde, si nous
étions indépendants et à l'ONU. C'est grand comme pays, M.
le ministre de l'Environnement et 19 personnes pour surveiller ce grand
territoire, c'est peu.
Je sais que vous êtes victime de votre bonté devant le
Conseil du trésor. J'aimerais un peu plus de fermeté de votre
part pour que vous défendiez les intérêts de l'ensemble des
Québécois là-dessus, de sorte qu'il y ait des recherches
plus poussées pour que, dans différents domaines, des produits
biodégradables soient utilisés. Pour ce faire, nous avons besoin
sur notre territoire dans des laboratoires, dans nos compagnies d'un soutien,
sinon financier, au moins en philosophie imposé par le gouvernement pour
que ces gens mettent une partie de leurs revenus dans la recherche.
Ceci implique aussi - la loi sur l'environnement vous en donne le droit
- la discussion avec les gouvernements étrangers fussent-ils très
près ou très loin. On peut parler des États-Unis ou des
pays qui nous entourent autres que les États-Unis, la France ou d'autres
pays où on pourrait faire des échanges. À ce
moment-là, on pourrait dire qu'on cherche de façon positive des
produits qui remplaceraient les pesticides qui d'une façon ou d'une
autre se retrouvent dans la chaîne alimentaire, dans notre alimentation,
un jour ou l'autre, dans la pomme, dans le raisin, dans le maïs, dans le
pain, dans le lait, que sais-je encore? Dans tous nos produits alimentaires, il
y a des vestiges de pesticides qui sont extrêmement irritants pour
l'oesophage et qui donnent à l'estomac des contractions
insupportables.
Il y aurait aussi, M. le ministre, dans ce projet de loi, un
deuxième volet, c'est le volet de l'information. L'information ne
reçoit pas son dû. Il faudrait absolument qu'il y ait des plans
pour informer l'ensemble de la population qui souvent, par
méconnaissance des choses, utilise des produits. Les gens prennent par
exemple, pour le jardin, une demi-bouteille d'un produit quelconque, d'un
pesticide quelconque, et sans le savoir, ils peuvent aussi bien le verser dans
le lavabo ou dans le bol de toilettes et cela s'en va dans nos égouts,
dans nos rivières, etc. Alors, c'est très coûteux et cela
montre que l'information manque et que le public ne connaît pas les
conséquences de tous les gestes qu'il pose et qui sont destructeurs de
notre nature. Là-dessus, le projet de loi est un peu faible.
Troisièmement, du côté éducatif, je pense
qu'il y a eu quelque chose; il y a eu le mois de mai où il y a eu de
petits concours dans les écoles: dessiner des arbres et de vraies
feuilles vertes, des feuilles d'érable rouges pour la fête du
Canada. On ne faisait pas cela dans notre temps, mais on leur faisait des
concours pour les édifier avec l'histoire du Québec. Mais ce
n'est pas grave, on a chacun notre philosophie. Au moins, il devrait y avoir
des programmes éducatifs dans nos classes, dans nos écoles et un
peu partout pour que les gens, dès le bas âge, voient les dangers
de l'utilisation des pesticides. Là-dessus, le projet de loi manque un
peu de fermeté et d'ossature. Il est un peu squelettique dans ce
domaine.
Il y aurait aussi une chose que le ministre de l'Environnement pourrait
recommander: c'est que nos agronomes au Québec suivent des cours; ils
sont de fins connaisseurs du développement de l'agriculture au
Québec. Les agronomes sont venus nous voir en commission parlementaire;
on se demandait quels seraient les conseillers du ministre, qui participerait
à la formation des gens, qui les utiliserait ou qui établirait
des règles pour les certificats, qui serait inspecteur, qui ferait un
code d'éthique sur la surveillance de tout cela. Les agronomes nous ont
dit qu'ils suivent des cours pour parfaire leurs connaissances en agriculture,
mais que, sur l'utilisation des pesticides, à l'université, ce
sont des cours facultatifs et que plus de la moitié d'entre eux ne les
suivent même pas. Je pense que le ministre devrait essayer, avec le
ministre de l'Éducation, d'exiger que tous nos agronomes au
Québec, pour avoir le certificat d'agronome reçu, aient au moins
une formation de base dans ces domaines à cause de l'utilisation abusive
et que ce soient eux qui, dans les différentes régions...
Je vois le député de Joliette et, à L'Assomption,
il y a un sous-département de l'agronomie du ministère de
l'Agriculture. Je ne veux pas dire que les agronomes de ce coin ne connaissent
pas les pesticides, je n'ai pas fait enquête. Mais il y a une chance sur
deux que ces agronomes, comme tous les autres, ne connaissent pas les
conséquences de l'utilisation des pesticides. Là, il devrait y
avoir une bonne camaraderie entre le ministre de l'Éducation et le
ministre de l'Environnement pour que les cours soient obligatoires pour les
agronomes.
Ensuite, il y a une faiblesse dans ce projet de loi. Ce projet de loi,
pour le moment, ne s'appliquera qu'à 10 % ou 15 % environ des
utilisateurs des pesticides. C'est malheureux. C'est déjà mieux
que pas du tout. Dans quelques minutes, nous allons voter sur ce projet de loi;
avant ce vote, personne n'est soumis à cette loi; donc, c'est une
amélioration. Cette loi, au maximum, touchera 15 % des utilisateurs.
J'aime beaucoup qu'on discute de nos projets de loi,
qu'on les améliore et qu'on leur donne du corps, mais en faire un
qui ne touche que 15 % des gens! Parce que les sylviculteurs, surtout les
agriculteurs ne seront touchés par les règlements
découlant de cette loi -règlements, virgule, qui, soit dit en
passant, ne sont pas encore connus et qui pourraient être n'importe quoi
entre obligation 0 et obligation 100 - qu'en 1990. Que voilà une longue
période pour éclairer nos agriculteurs ou pour permettre au
ministre responsable de se faire une idée sur une réglementation
qui irait améliorer cette loi 271
C'est bien sûr qu'en troisième lecture, M. le
Président, on ne s'éternisera pas à en parler. Je sais que
j'ai parlé déjà trois minutes. J'aimerais bien dire au
ministre de l'Environnement que je suis complètement d'accord avec cette
loi, sauf les quelques petites imperfections que je viens de noter et qui
rendent la loi un peu pubère. Ce n'est pas une loi mature en soi. On est
moins porté à l'épouser parce qu'elle est encore à
l'époque de la puberté et trop jeune pour qu'on l'épouse,
dans notre idée, de façon totale. Cependant, j'aimerais lui dire,
en terminant, que cette loi est positive. C'est une amélioration de la
situation. Le ministre devrait s'armer de fermeté devant le Conseil du
trésor pour réclamer les budgets suffisants pour qu'au moins
cette loi soit appliquée, que des inspecteurs soient sur le territoire
pour faire respecter le peu qu'elle a de restrictif quant à une
utilisation abusive. De ce fait, M. le Président, je tiens à vous
dire que les Québécoises et les Québécois auront
par cette loi une amélioration à la situation actuelle. C'est
avec plaisir que je voterai pour cette loi tout en m'étant permis
certaines petites restrictions que vous jugez certainement de bon aloi et qu'il
m'a fait extrêmement plaisir de vous communiquer. (22 h 50)
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 27, Loi sur
les pesticides, est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: L'article 48 au feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 42 Adoption
Le Vice-Président: L'article 43 au feuilleton. VI. le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche propose maintenant
l'adoption du projet de loi 42, Loi sur le financement de la Fondation pour la
conservation et la mise en valeur de la faune et de son habitat. Je
cède, en conséquence, la parole à M. le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, il me fait plaisir, ce soir,
d'en arriver au terme de nos discussions en ce qui concerne le projet de loi
sur la Fondation pour la conservation et la mise en valeur de la faune et de
son habitat. J'ai eu l'occasion de le souligner à quelques reprises, je
pense que les chasseurs, les pêcheurs et les piégeurs au
Québec et tous les amants de la nature demandaient, depuis
déjà un certain temps, à celui qui vous parle d'instituer
une fondation qui soit vraiment productive et qui nous permette, encore une
fois, de protéger la nature. Il y avait quelqu'un qui me disait cet
après-midi encore: II fallait que le ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche ait du toupet pour tâcher de convaincre son
collègue, le ministre des Finances, d'accepter que des montants
d'argent, que nous prenons sous forme d'une taxe, il faut bien se le dire,
puissent être versés pour établir une fondation. Je pense
que c'étaient les objectifs que s'étaient fixés mes
prédécesseurs.
Le député de Joliette qui, du moins pour cette courte
période, est devenu mon critique officiel en matière de loisir,
de chasse et de pêche, je suis heureux de le constater, a gardé
cette verdeur et cet amour de la faune et le souci de sa protection. Je pense
que, justement, cette loi, qu'on voulait efficace depuis déjà un
certain temps, y compris au temps de mes deux prédécesseurs et de
moi-même, le sera à compter de l'adoption de ce projet de loi que
nous sommes en train d'étudier en troisième lecture.
Comme il s'agit d'une loi à but éducatif, puisqu'elle
servira à conscientiser les Québécois et les
Québécoises à protéger cette faune si importante,
ce patrimoine faunique, comme il s'agit aussi d'une loi de protection et comme
il s'agira encore de donner le ton pour que l'entreprise privée, des
mécènes, des gens qui, sans être pêcheurs, chasseurs
ou piégeurs, veulent participer activement à une fondation dans
le but d'améliorer et de protéger cette faune, comme ce sera le
point moteur qui servira à catalyser d'autres sommes qui viendront
s'ajouter à la fondation, je pense que ce sera pour nous et pour chaque
membre du Parlement, pour chacun des Québécois et chacune des
Québécoises, un moment important que celui que nous vivrons dans
quelques instants, alors que nous voterons unanimement, à
l'Assemblée nationale, pour ce projet de loi sur la fondation de la
faune.
Nous espérons que les Québécois et les
Québécoises auront ce souci si important de la protection de
notre faune, de ce patrimoine, de cette activité économique de
premier ordre. Tout en la protégeant et en permettant un certain
prélèvement, on fera en sorte, par l'adoption de cette loi,
encore une fois, que chacun et chacune d'entre nous aura le goût de
profiter de cette faune et de la protéger.
Je terminerai en disant que le député de Joliette me
parlait hier de réserves écologiques. J'ai eu l'occasion de
discuter avec mon ami, le ministre de l'Environnement, pas plus tard que cet
après-midi, et de lui dire que nous devrions, nous les parlementaires,
être un peu comme la nature qui est très bien
équilibrée, et faire en sorte que nos décisions soient
aussi bien équilibrées. Le député de Joliette
craignait qu'il n'y ait 150 réserves écologiques de
créées au Québec; je pense qu'il n'est pas question de 150
réserves écologiques. Nous en avons discuté avec le
ministre de l'Environnement et il pourrait y avoir, sur une période de
trois ans, une cinquantaine de réserves écologiques tout au plus,
ce qui viendrait assurer un équilibre, tel que la nature le fait
elle-même, ce qui nous permettrait d'en avoir pour tous les
goûts.
Je m'arrête immédiatement. Je suis persuadé
qu'à la lumière des discussions que j'ai eues avec les membres de
l'Opposition ce sera à l'unanimité que nous adopterons cette loi
et que, sans doute, compte tenu de la gentillesse de mon collègue, le
député de Joliette, et de son amour pour la faune, je n'aurai pas
besoin de faire de réplique.
Une voix: Bravo! Très bien!
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Joliette et leader de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Effectivement, je
pense que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche verra son
désir comblé puisqu'il est évident que l'Opposition
concourt à l'adoption de ce projet de loi, projet de loi qui a
été présenté il y a quelques années et qui,
pour des raisons budgétaires à l'époque... On se
rappellera que c'était durant la crise économique; il n'y a pas
beaucoup de ministres des Finances qui pouvaient se permettre de nous donner
une lueur d'espoir sur l'argent pris à même les permis. Cela
rentrait, bien sûr, dans le fonds consolidé du Québec et,
pour ne pas avoir à surtaxer parce que l'économie en
général, durant la crise, on sait ce qu'elle avait l'air, il
était impossible à court terme, si ce n'était
d'espérer les dons du secteur privé et possiblement de
décrocher des montants annuels forfaitaires du Conseil du trésor,
d'aller chercher à l'époque des sommes aussi faramineuses que 1
000 000 $, 2 000 000 $ ou 3 000 000 $.
Qu'importe, un projet de loi est là pour être
bonifié. C'est un amendement que nous avons devant nous, à toutes
fins utiles, pour rendre plus fonctionnelle la fondation. Nous allons y
concourir et je dirai que je suis doublement heureux, parce que, hier,
j'attirais précisément l'attention du ministre. Je sais que, dans
les coffres du ministère de l'Environnement, il y avait des rêves.
Je me souviens d'avoir fait face à ces rêves pour les discuter,
moi aussi. Il y a des hauts fonctionnaires qui, à l'époque,
visaient même un plan quinquennal de reconnaissance des réserves
écologiques. Certains en voyaient passablement dans tout le
Québec. J'avais pour mon dire, j'ai toujours prétendu et je suis
convaincu qu'on partagera mon point de vue, qu'il y a plusieurs manières
de sauvegarder les territoires. H y en a certains à des fins
environnementales bien spécifiques, il y en a d'autres pour la
protection de l'habitat faunique, comme tel. Mais il y a aussi toute la
dimension de la réserve faunique, la réserve écologique,
qui peut être regardée, mais dans un plan global, pour faire un
partage, pour permettre, autant à l'un et à l'autre, d'atteindre
des fins bien précises dans un territoire, une parcelle ou une partie de
terrain qu'on veut bien couvrir.
Donc, un plan triennal avec une cinquantaine de réserves
écologiques correspond, à mon point de vue, à un heureux
mariage, à un heureux compromis entre les possibilités de
l'exploitation faunique par rapport aux possibilités de
pouponnières à tous points de vue, y compris non seulement la
faune, mais la flore. Une réserve écologique a pour objectif non
seulement de protéger la faune, mais, d'abord et avant tout, de
protéger la flore. Tant mieux s'il y a de la faune à
l'intérieur; ce seront des endroits extraordinaires qu'on pourra
protéger par le biais de la reconnaissance d'une réserve
écologique.
Cela dit, M. le Président, je voudrais, avant de terminer mon
bref exposé, réitérer ma volonté et mon
désir très profond de voir aboutir très prochainement les
discussions du comité interministériel en ce qui regarde la
protection des habitats fauniques. Je suis convaincu qu'on aura franchi,
à l'Assemblée nationale, le jour où on sanctionnera une
loi sur les habitats fauniques... L'ensemble des utilisateurs, il faudrait dire
l'ensemble des Québécois s'en verront davantage
protégés, protégés, je dis bien, contre des
intérêts qui, souvent, semblent contradictoires, mais qui,
à mon point de vue, M. le Président, détonnent. J'ai dit
hier et je voudrais le répéter, on a toujours l'impression,
lorsqu'une compagnie forestière fait une coupe de bois,
qu'en allant raser un ravage de chevreuils, on fait un bon coup. On a
coupé quelques arbres pour des fins économiques. Bien, sur le
plan économique, on vient précisément aussi d'enlever un
potentiel extraordinaire eu égard à l'exploitation rationnelle de
la faune. (23 heures)
Ce sont là des discussions qui ne sont pas faciles à
faire, parce que j'ai déjà participé à des
comités interministériels. Ce n'est pas facile à faire,
d'abord entre hauts fonctionnaires, parce que déjà on voit leurs
chasses gardées et il y a une jalousie épouvantable de leurs
juridictions. C'est souvent plus facile entre ministres, mais je dois vous
avouer que, d'abord et avant tout, le premier défi du ministre n'est pas
de s'entendre avec son collègue, c'est de convaincre sa machine. Je sais
pour y avoir travaillé et avoir fait le premier débrous-saillage.
Il y a eu une commission parlementaire, le ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche se le rappellera, je crois que c'est en décembre 1984,
il y a eu une première commission parlementaire pour faire un
déblayage sur la protection des habitats fauniques. On se rend compte
jusqu'à quel point cela ne sera pas facile
Mais je dis au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche,
j'en profite parce que le ministre de l'Environnement est ici, je vous dis
qu'il y a une certaine forme d'urgence d'agir dans le domaine de la protection
des habitats fauniques. Contrairement à ce que l'ensemble des
Québécois, pas l'ensemble ni la majorité, mais un fort
pourcentage de la population, contrairement à ce qu'un fort pourcentage
de la population pense au Québec, la protection des habitats fauniques a
une importance capitale pour l'économie du Québec. Qu'on cesse de
voir la dimension faunique de la chasse et de la pêche comme un rejeton
dont on n'a pas à s'occuper. Qu'on la regarde comme une des dimensions
faisant partie intégrante du développement économique
complet du Québec et en particulier, pour certaines régions du
Québec, pour certaines petites municipalités du Québec,
où c'est souvent la faune qui est un des premiers objets de revenu.
Enlevez la faune dans certaines municipalités du nord et faites la
même chose en Mauricie. Enlevez la faune, enlevez la dimension des
pêches, ne vous en occupez pas du tout et vous verrez jusqu'à quel
point il y a des villages qui seront aussi affectés que par la fermeture
d'une usine, parce que cela donne une activité économique
constante du mois de mai au mois d'octobre. Ce sont six mois d'activité
économique qui font survivre ces petits villages et qui sont les seuls
facteurs de création d'emplois. Vous allez me dire saisonniers, oui,
mais qui sont facteurs de création d'emplois pour ces citoyens.
Je dis au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ainsi
qu'au ministre de l'Environnement, qu'il faut une législation qui
viendra protéger, qui viendra améliorer la qualité ou
encore qui viendra introduire une rationalité dans le domaine de
l'exploitation de la faune. Si on veut avoir une exploitation rationnelle, il
faut commencer par l'avoir, cette faune, et la conserver. La conserver veut
dire se préoccuper de son habitat comme tel. À cela, l'Opposition
concourra, M. le Président, à toute législation, à
toute réglementation qui tiendront compte de ces dimensions, parce que
la faune, en général au Québec, ce n'est pas seulement un
facteur pour amuser du monde une fin de semaine. C'est quelque chose qui
maintenant ne fait pas non plus seulement l'objet du plaisir des chasseurs, il
y a de plus en plus - le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
va s'en rendre compte - d'associations de gens qui veulent se promener dans les
bois, photographier les animaux et qui créent une activité de
plus en plus grande de plein air, ce qui est aussi générateur sur
le plan économique dans certaines régions. Qu'on pense à
nos parcs, qu'on pense à nos réserves, qu'on pense à nos
sites naturels.
Dans ce temps-là, l'Opposition sera constructive et je voudrais
assurer cette Chambre de toute la valeur, la dimension et la
crédibilité, en tout cas nous, que nous y apportons. Merci.
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le ministre
du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche pour l'exercice de son droit de
réplique.
M. Yvon Picotte (réplique)
M. Picotte: M. le Président, très rapidement pour
vous dire que je souscris entièrement à ce que vient de dire mon
collègue de Joliette. Nous avons certains collègues, le
député de Gatineau, le député de
Trois-Rivières, qui viennent justement de suivre un cours de maniement
d'armes et qui ont aussi ce souci de protection de la faune. Ils me
mentionnaient jusqu'à quel point cela pouvait être
intéressant à cet égard.
Je veux assurer le député de Joliette que, tel que je l'ai
mentionné hier, une loi sur la protection des habitats fauniques sera
présentée à l'automne. Je voudrais remercier publiquement
mon collègue, le ministre de l'Environnement, député de
Nelligan, et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. Il est vrai que notre ennemi premier, la plupart du temps, dans
ces cas, c'est nos fonctionnaires, mais il y avait là, jusqu'à ce
jour, une entente, une volonté politique entre le ministre de
l'Environnement, le ministre de l'Agriculture et celui qui vous parle, et c'est
la raison pour laquelle nous terminerons, au cours du mois de juillet, ce
projet de loi et nous espérons
qu'avec le concours de toute la Chambre, nous aurons au mois de
décembre prochain cette loi sur la protection des habitats fauniques, M.
le Président. Merci.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 42, Loi sur
le financement de la Fondation pour la conservation et la mise en valeur de la
faune et de son habitat, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Article 41 au feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 162
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président: À l'article 41 au feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 162, Loi sur les arrangements préalables de services
funéraires et de sépulture. Je cède maintenant la parole
à M. le ministre de la Justice, responsable de la Protection du
consommateur.
M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, M. le Président. On a déjà
fait le débat du projet de loi en deuxième lecture ici dans cette
Chambre et on a aussi fait l'étude article par article devant la
commission des institutions. J'ai juste quelques mots à dire. On peut se
poser une question. Pourquoi adopter, à ce moment-ci, une loi sur les
préarrangements funéraires? Pourquoi? C'est parce que,
maintenant, il y a environ une centaine de millions de dollars investis par des
Québécois dans les préarrangements funéraires, et
on nous dit que ça peut être augmenté jusqu'à 600
000 000 $. Partout en Amérique du Nord, il y a une loi sur les
préarrangements funéraires pour réglementer cette
industrie. Dans toutes les provinces canadiennes, dans presque tous les
États américains, donc, les gens sont protégés dans
leurs investissements dans les préarrangements funéraires.
En tant que ministre de la Justice et ministre responsable de la
Protection du consommateur, j'ai pris l'engagement l'an dernier de
déposer et de faire adopter une loi sur les préarrangements
funéraires. Nous avons eu une vaste consultation avec des compagnies qui
sont dans cette industrie, les thanatologues, une consultation avec des groupes
de personnes âgées et d'autres groupes. En effet, nous avons
consulté tout le monde, et j'ai fait état, lors de l'étude
en commission parlementaire, de tous les groupes que nous avons
consultés.
Si on était en arrière, il y a un an, deux ans, trois ans
ou cinq ans en ce qui concerne la protection des personnes qui achètent
des préarrangements funéraires, je pense qu'on peut dire
qu'aujourd'hui, avec ce projet de loi, nous allons prendre les devants. Je
pense que c'était important de prendre les devants dans ce domaine parce
qu'en ce qui concerne la protection du consommateur, nous sommes beaucoup plus
avancés que nos voisins soit à l'est, soit à l'ouest, soit
au sud. Je pense que nous avons la meilleure loi en Amérique du Nord.
Et, pour compléter cette protection du consommateur, c'est essentiel
qu'on ait un tel projet de loi, projet qui sera adopté cette
semaine.
En terminant, M. le Président, je suis sûr et certain que
ce projet de loi sera adopté à l'unanimité en
troisième lecture étant donné les prises de position que
le député de Shefford a déjà adoptées.
Merci.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci. Oui, évidemment nous allons voter
pour le projet de loi comme nous l'avons dit en deuxième lecture et
comme on l'a confirmé d'ailleurs en commission parlementaire, parce que
c'est un projet de loi qui est important. C'est une nouvelle habitude que sont
en train de prendre les Québécois dans une proportion de plus en
plus importante. Au moment où on se parle, déjà 1 % des
Québécois se prévalent de cette possibilité de
préarrangements funéraires. Cela fait à peu près 50
000 personnes, et on sait que ça va toujours en grandissant cette
quantité de personnes intéressées aux
préarrangements funéraires. (23 h 10)
C'est une nouvelle mode. C'est une façon de faire que les
Québécois acceptent facilement et ce n'est pas surprenant non
plus. Je pense qu'on est capable de s'adapter aux nouvelles modes au
Québec, sauf que, s'il y a de bons côtés dans la loi, il y
a des craintes qu'on a exprimées. Il faut dire qu'il y a eu des plaintes
qu'il a fallu régler. Le ministre a dit, en commission parlementaire,
preuve à l'appui, qu'il n'y avait pas eu beaucoup de plaintes. C'est
encore nouveau sauf qu'il faut prévoir, il vaut mieux prévenir
que guérir, comme on dit souvent.
Quand je dis qu'il y a de bonnes choses dans la loi, c'est qu'à
l'heure actuelle, ce n'est pas réglementé. Donc, c'est une
nécessité de donner un cadre légal
réglementaire pour permettre à l'Office de la protection du
consommateur qui va être chargé de l'application de cette loi
d'avoir un cadre défini pour être capable de protéger le
consommateur le mieux possible. Donc, on est d'accord pour qu'il y ait une
réglementation, un cadre défini, un cadre légal pour
être capable d'orienter et de contrôler ce secteur
d'activité très important. Là où on est aussi
d'accord, c'est qu'il y ait cette réglementation, bien qu'on ait entendu
dire dans le rapport Gobeil qu'il fallait aller dans une direction contraire,
celle de la déréglementation, de la réduction des pouvoirs
et même, qu'il fallait enlever des secteurs à l'Office de la
protection du consommateur. Nous, on est très satisfaits qu'on aille
dans le sens tout à fait contraire et qu'on permette à l'Office
de la protection du consommateur, qui a fait ses preuves dans des secteurs qui
sont régis et même dans d'autres, de répondre davantage
à l'essence même de la vocation de l'office, c'est-à-dire
une protection globale du consommateur. Donc, on lui donne maintenant des
outils supplémentaires.
Ce que j'espère, c'est que l'office soit en mesure de
répondre à la demande, soit capable de faire appliquer cela, en
espérant qu'il n'y ait pas trop de plaintes mais que, s'il y en a, qu'il
soit capable d'y répondre le plus vite possible. Quand je parle de
capacité, je ne parle pas de volonté, ce qui est
déjà connu, et qui est exprimé dans un rapport
présenté par les membres de la commission des institutions, il y
a quelques mois, à la suite d'une audition de la commission, où
l'office demandait lui-même d'élargir son champ d'intervention en
matière de protection du consommateur. L'office est prêt. Quand je
dis prêt, je veux surtout dire avoir les moyens financiers.
On sait que les crédits ont été
déposés et qu'il n'y a pas d'augmentation de budget. La seule
augmentation qu'on retrouve, c'est celle qui répond aux nouvelles
conventions collectives, mais il n'y a pas d'augmentation pour permettre plus
de personnel, soit des espaces, des équipements, ou quoi que ce soit. Il
n'y a pas d'augmentation et il y a même diminution d'une personne. Est-ce
que l'office va être en mesure de répondre aux nouvelles demandes
qui pourraient arriver à la suite de la mise en place de cette nouvelle
réglementation? Je ne le sais pas, j'espère que oui, mais si on
veut donner de nouveaux pouvoirs, de nouvelles responsabilités à
l'office, il faudrait aussi être constant, être pertinent et donner
les fonds avec les responsabilités qu'on donne.
Il y a dans ce projet de loi de bonnes choses, sinon, on serait contre.
Il y a, entre autres, la reconnaissance qu'on aura une réglementation
qui s'applique à ce secteur d'activité économique que sont
les préarrangements funéraires. Il y a aussi les points
importants que sont les dépôts en fidéicommis. Cela veut
dire que l'argent sera protégé. Le consommateur qui voudra se
prévaloir des préarrangements pourra compter sur un
dépôt de son argent. J'espère que le ministre pourra me
répondre. Est-ce qu'on va pouvoir empêcher ou corriger des
annonces qui sont faites par une certaine compagnie -d'autres pourraient suivre
- qui disent aux gens: Signez dès maintenant des préarrangements
funéraires et vous n'aurez aucun sou à débourser. Cela
ira, après le décès, sur l'héritage. Je dois dire
que cela ne cadre pas du tout, à mon avis - si je me trompe, vous
pourrez me le dire - avec la philosophie de base de cette loi qui veut que
l'argent soit déposé en fidéicommis, que les
intérêts soient calculés, que l'indexation soit
calculée. On sait en tout temps... et même, le président de
l'office peut aller voir dans chacun des dossiers, à tout moment,
l'état de la situation de chacun des dossiers. Maintenant, comment
pourra-t-on procéder avec cette pratique qui se fait actuellement, qui
ne semble pas interdite puisqu'il n'y a pas de réglementation
définie? Mais après le vote sur la loi 162, est-ce que ce sera
une pratique qui sera encore légale, permise et acceptable?
Il y a aussi, parmi les choses importantes dans ce projet de loi,
l'insaisissabilité - excusez l'expression; c'est difficile à dire
- en cas de faillite. Si on veut vraiment protéger l'argent des
consommateurs qui ont décidé de se prévaloir du
préarrangement funéraire, il est important qu'il y ait des
clauses semblables. C'est un des points que nous trouvons positifs.
Il y a aussi la possibilité d'annulation en tout temps. Il est
sûr qu'il y a une perte de 10 %, mais au moins il y a cette
possibilité. Nous pensons qu'il est important que cela soit mis dans la
loi.
Il y a aussi un délai de 30 jours pour la vente
itinérante. Nous avions demandé qu'il n'y ait pas de vente
itinérante. C'est un point sur lequel je reviendrai dans quelques
minutes. Si on maintient la vente itinérante, on maintient les 30 jours
pour permettre aux consommateurs d'y réfléchir et de
décider de changer d'avis. C'est au moins plus que ce qu'on retrouve
habituellement concernant ce genre de vente itinérante. Ce n'est pas ce
qu'on aurait désiré, mais c'est quand même une
reconnaissance par le ministre qu'il s'agit d'un secteur d'activité qui
est différent, qui joue souvent sur des sentiments et qui mérite
qu'on donne plus de temps aux gens qui veulent se prévaloir des
préarrangements funéraires.
Il y a aussi, comme je le disais tantôt, un point important. C'est
la reconnaissance de pouvoirs accrus à l'Office de la protection du
consommateur. Je l'ai dit et
cela me fait plaisir de le répéter: Si cela peut rassurer
les gens pour qu'ils se prévalent des services de l'Office de la
protection du consommateur, l'office a fait ses preuves. On sait qu'on peut lui
donner des charges additionnelles qu'il est capable d'absorber. J'espère
qu'on lui donnera aussi des fonds si on continue à lui donner des
responsabilités parce qu'il semble, selon ce que je peux voir, que, de
plus en plus, l'office doive s'impliquer presque à tous les niveaux,
étant donné que le consommateur peut être victime de toute
décision prise, souvent par le gouvernement, mais souvent par les
grandes entreprises également.
On retrouve aussi dans le projet de loi des amendes passablement
appréciables. Cela veut dire un respect de la loi, sinon il y aura des
amendes qui feront en sorte que l'entreprise ne pourra plus aller dans le
secteur ou aura à payer des amendes qui vont l'inciter à ne pas
recommencer.
Cependant, il y a trois points que nous avons abordés. Je vais
les énumérer brièvement. Entre autres, qu'on n'aille pas
dans les ventes itinérantes parce que c'est un secteur qui est
très particulier, parce qu'on joue avec des sentiments, parce qu'on
investit, on prend la décision d'investir pour quelque chose dont,
personnellement, on n'aura pas conscience puisqu'il s'agit de son propre
service funéraire, donc après notre mort. Très souvent, on
décide de prendre cette décision dans des moments qui sont
souvent difficiles, à la suite du décès d'une personne
chère. Comme on l'a vu, les vendeurs itinérants vont s'adresser
à une clientèle tout à fait particulière, les
personnes âgées. C'était d'ailleurs reconnu par la FADOQ,
la Fédération de l'âge d'or du Québec. Donc, nous
avons demandé de ne pas permettre la vente itinérante parce que
quelqu'un qui veut s'en prévaloir aurait très bien pu se
déplacer et aller à la place d'affaires pour se prévaloir
de cette nouvelle façon de faire des arrangements funéraires.
L'autre point, c'est le dépôt à 90 %. Nous disions que le
consommateur mérite d'être protégé à 100 %.
C'était une demande faite par beaucoup de groupes de la
société, il ne faut pas l'oublier. Beaucoup d'associations
s'étaient regroupées au sein de l'Association coopérative
d'économie familiale de l'Estrie. Pardon, c'en était une, mais
c'était la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec.
L'autre point sur lequel on demandait des changements, c'était
sur les intérêts de cet argent qui est mis en fidéicommis
puisque actuellement, dans le projet de loi, on dit que les
intérêts vont être perçus par l'entreprise, par le
vendeur des préarrangements funéraires. Cela veut dire que ce
sont des profits en plus. Donc, le surplus des intérêts par
rapport au taux d'inflation va être absorbé et c'est finalement
l'entreprise qui va en profiter. Quand on regarde les chiffres - cela vaut la
peine de les spécifier - on dit qu'en 1985 il y avait, sur une base
annuelle, un chiffre d'affaires de 100 000 000 $ dans le domaine des frais
funéraires et, selon les estimations, ce sera 122 000 000 $ en 1990, une
augmentation de dépenses réelle sur des frais funéraires
de 22 000 000 $ en cinq ans. Par contre, quand on regarde les autres chiffres
dans les arrangements comme tels, on se rend compte qu'il y a une
différence majeure. Je vais vous retrouver des chiffres. Cela vaut la
peine. (23 h 20)
En 1985 on parlait de 120 000 000 $ en contrats de
préarrangements funéraires. Selon des estimations qui semblent
tout à fait réalistes, le chiffre sera de 600 000 000 $ en 1990.
Donc, vous voyez la différence. Alors que les frais réels sur une
base annuelle seront de 22 000 000 $ sur les dépenses pour des frais
funéraires, les préarrangements funéraires passeront de
120 000 000 $ à 600 000 000 $. Donc cela veut dire qu'en
intérêts cela fait beaucoup de sous. Cela fait beaucoup plus que
22 000 000 $ qui est l'augmentation entre les deux années. On joue dans
les millions, ce qui veut dire que les compagnies qui pourront signer beaucoup
de préarrangements funéraires feront plus d'argent avec les
intérêts qu'avec le service comme tel qui sera vendu. Donc il est
de l'intérêt des entreprises de se lancer dans une vaste campagne
de vente de préarrangements funéraires, surtout que l'on permet
la vente itinérante.
Ce qui sera important pour les entreprises c'est de faire de l'argent
avec le préarrangement, c'est-à-dire avec le dépôt
en fidéicommis sur les intérêts, davantage que sur les
profits sur la vente du service comme tel et de tout ce que cela comprend en
plus du service, c'est-à-dire les biens aussi: les cercueils, les fleurs
et tout le reste. Donc, est-ce que l'on ne risque pas que cela devienne une
guerre de la grande entreprise au détriment de la petite entreprise au
Québec?
Donc, c'étaient les points sur lesquels on avait des
réticences. On l'avait dit en deuxième lecture. On a fait une
lutte en commission parlementaire pour essayer d'amener des changements comme
cela. On n'a pas réussi. On va voter quand même pour le projet de
loi, c'est évident parce que, comme je vous le dis, on
préfère une réglementation qui au moins donne un cadre
réglementaire et légal à cette façon de faire. De
plus, je le disais, il y a des points positifs, même si ceux-là
n'ont pas été corrigés à la faveur de la demande
des groupes, des associations de consommateurs, mais c'est quand même un
pas dans la bonne direction et on préfère cela à la
situation actuelle.
Mais je dois dire que après ce que j'ai dit en commission
parlementaire et en deuxième lecture si, présentement, je
ramène ces points-là, c'est au nom de beaucoup de personnes au
Québec. Je l'avais dit en commission parlementaire: La
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec avait regroupé des groupes et des associations,
vingt-neuf, qui partageaient ces préoccupations. Je les ai nommés
en commission parlementaire et cela représente des
fédérations et des associations, des coopératives
funéraires d'à peu près tous les coins du Québec:
Asbestos, Charlevoix, Lotbinière, Granby, Saint-Jean, Québec,
Montréal et finalement cela fait le tour d'à peu près
toutes les régions du Québec. Ces gens-là ce qu'ils
avaient demandé au ministre c'est d'être entendus en commission
parlementaire, de pouvoir exprimer leurs points de vue.
Le ministre a dit tantôt et il va certainement
répéter: On a fait une large consultation. Le ministre a fait une
consultation ou l'Office de la protection du consommateur a fait une
consultation - je ne dirais pas une vaste consultation, une certaine
consultation - et les vingt-neuf associations ici auraient voulu se faire
entendre. Elles n'ont pas été consultées, sauf
quelques-unes à l'intérieur de cela, mais globalement ces
gens-là ne l'ont pas été, pas plus que des associations
des entreprises dans le secteur des arrangements des services
funéraires. Donc il y a des gens qui l'ont dit. Le ministre a dit en
commission parlementaire: Votre liste n'est pas bonne, parce que, entre autres,
on retrouve à l'intérieur de cette liste la FADOQ que l'on a
rencontrée et qui nous a dit qu'elle était d'accord avec le
projet de loi. Je dois vous dire que lorsque l'on regarde le journal Age
d'Or, Vie nouvelle - qui suit la commission parlementaire et non pas qui
précède, donc il peut nous faire voir effectivement le point de
vue de la FADOQ - ce n'est pas tout à fait ce qu'elle dit.
Évidemment, le titre dit: L'Office de la protection du consommateur
reçoit la Fédération de l'âge d'or du Québec.
Effectivement il y a eu rencontre. À la suite d'une invitation, la FADOQ
s'est déplacée et a rencontré l'Office de la protection du
consommateur. Les gens le disent dans le texte ici que finalement oui, il y a
eu rencontre. Cette rencontre au bureau de l'Office de la protection du
consommateur à Montréal a regroupé M. Gilles Moreau, son
adjoint, M. Jacques Vignola, l'attaché politique du ministre M. Marx,
Mme Marcoux, ainsi que Gilles Bouchard et Rita Cambron de la FADOQ. Donc il y a
eu une rencontre effectivement. On m'a dit: On a eu des explications et si
c'est ce qui est pour être adopté, comme je le disais, c'est mieux
que la situation actuelle. Les gens sont prêts. En plus dès que la
loi va entrer en vigueur l'office va informer la FADOQ pour qu'elle puisse
publiciser dans son journal Âge d'or, Vie nouvelle la nouvelle
réglementation ou ce qui va régir à l'avenir les
préarrangements funéraires. On retrouve aussi dans le même
article: "Voir encadré dans la présente page." Dans
l'encadré, c'est écrit: "Voir en page 13 les recommandations de
la FADOQ concernant les préarrangements funéraires." Je vais vous
lire seulement quelques lignes, ce n'est pas très long, mais cela nous
donne effectivement les principales recommandations de la FADOQ qui vont
exactement dans le même sens. Malgré et après la rencontre,
la FADOQ nous fait toujours valoir ce qu'elle aurait désiré comme
fédération, comme association, représentant beaucoup de
personnes au Québec. Ce que cela dit: "Ce service de
préarrangements funéraires ne peut être
considéré comme un bien de consommation au même titre que
d'autres. Il fait appel aux sentiments et soulève une grande
émotion souvent dans une période d'angoisse difficilement
surmontable pour un grand nombre de personnes vieillissantes." Et les
recommandations sont les suivantes. Premièrement, interdiction de la
vente itinérante de préarrangements funéraires.
Deuxièmement, dépôt en fidéicommis et contrôle
des sommes versées par les acheteurs. Troisièmement,
possibilité d'annuler le contrat contre un remboursement en tout temps
sans frais ni pénalité dans les 30 jours qui suivent la signature
du contrat et, par la suite, moyennant une certaine pénalité sans
remboursement, cependant, en ce qui concerne les services déjà
rendus et les articles déjà identifiés et remis ou
à remettre éventuellement à l'acheteur.
Ce sont les grands points touchés et qui vont exactement dans le
sens des préoccupations que j'ai identifiées. Quand le ministre
disait que dans les 29 groupes que j'avais identifiés qui m'avaient fait
valoir leurs points de vue et leurs recommandations et qui avaient
demandé à être entendus en commission parlementaire, la
FADOQ, à la suite de la rencontre, maintient que, pour elle,
l'idéal, ce qu'elle recommandait au ministre sans changement, ce sont
encore les mêmes préoccupations que nous avons soulevées et
que je soulève encore probablement pour une dernière fois, ce
soir, ou peut-être que je soulèverai en troisième lecture
aussi. Donc, en commission, on a fait les présentations au nom de ces
groupes de façon honnête et du mieux possible en essayant de faire
valoir les points de vue des groupes qui n'ont pas pu se faire entendre
directement en commission parlementaire. Nous n'avons pas eu les changements
que nous désirions. Le ministre évidemment n'a pas voulu les
entendre et faire en sorte que la commission puisse au moins siéger.
Nous avions demandé seulement une demi-journée
de plus pour permettre à trois ou quatre groupes
représentatifs de l'ensemble de venir se faire entendre. Il n'y a pas eu
audition malheureusement pour ces gens. Nous avons fait valoir leurs points de
vue. Le ministre décide qu'il n'y a pas de changement. Nous trouvons
cela malheureux, par contre, comme je le disais au tout début de mon
intervention, comme la loi est quand même un pas dans la bonne direction
et comme ce que l'on retrouve dans le projet de loi 162 est
préférable à la situation actuelle, M. le
Président, nous allons effectivement voter pour l'adoption du projet de
loi 162. Merci beaucoup.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le ministre de la Justice pour une brève intervention d'un
maximum de cinq minutes.
M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, M. le Président, pour votre
générosité de cinq minutes. J'ai pensé que, quatre
minutes, ce serait assez. Le député de Shefford fait toujours
allusion au rapport Gobeil. J'aimerais que le député de Shefford
me cite le paragraphe dans le rapport Gobeil qui dit qu'il ne faut pas
protéger les consommateurs. Il n'y a rien dans le rapport Gobeil qui
nous propose de ne pas défendre les droits des consommateurs.
Il ne faut pas oublier que c'est le premier gouvernement de M. Bourassa,
au début des années soixante-dix, qui a fait adopter la
première loi sur la protection du consommateur. Qu'est-ce que le Parti
québécois a fait en neuf ans de pouvoir? Ils n'ont pas
adopté une loi sur les préarrangements funéraires.
Expliquez-moi cela. Je ne blâme pas le député de Shefford,
il était un "backbencher". Il y avait le député de
Lévis, un député très important, et, comme
ministre, il n'a rien fait pour protéger les consommateurs. Il y avait
d'autres députés ici qui étaient ministres. Qu'est-ce
qu'ils ont fait? Ils ont laissé le Québec, la seule juridiction
en Amérique du Nord, sans loi sur les préarrangements
funéraires. (23 h 30)
Quand le député de Shefford parle des ressources et des
fonds de l'Office de la protection du consommateur, il ne faut pas oublier que
l'Office de la protection du consommateur a un budget de 11 000 000 $, non pas
1 000 000 $, 2 000 000 $, 3 000 000 $ ou 5 000 000 $, mais 11 000 000 $, et je
pense que c'est un budget suffisant pour remplir le mandat qu'a l'office en
vertu de la loi.
Je ne veux pas reprendre le débat que nous avons eu en commission
parlementaire en ce qui concerne les trois points que le député
de Shefford a soulevés quinze fois, mais seulement pour vous
démontrer, M. le Président, comme c'est irréaliste ce
qu'il a proposé, j'aimerais seulement vous donner un exemple. Le
député de Shefford a voulu qu'on abolisse, qu'on interdise la
vente itinérante. D'accord? Il a dit: La Fédération des
clubs de l'âge d'or est contre. Le problème, comme le
député de Lévis le sait bien, j'imagine, c'est que j'ai
une lettre de la Fédération des clubs de l'âge d'or dans
laquelle on nous félicitait de permettre la vente itinérante
encadrée, comme on le fait dans la loi, c'est-à-dire qu'une
personne qui achète des préarrangements funéraires peut
annuler le contrat dans les 30 jours suivant la signature d'un tel contrat sans
raison. Cela ne se retrouve nulle part en Amérique du Nord. Donc, pour
vous démontrer le sérieux du député de Shefford, il
nous a cité toutes sortes de choses en commission parlementaire qui
étaient malheureusement fausses.
En terminant, j'aimerais insister sur ceci: Nous avons fait une vaste
consultation ou, comme l'a dit le député de Shefford, une large
consultation. Les gens se sont exprimés une fois, deux fois, quinze
fois. On a fait des modifications au projet de loi pour tenir compte des
interventions de ces personnes et c'est pourquoi nous avons le meilleur projet
et, dans deux ou trois jours, nous aurons la meilleure loi en Amérique
du Nord.
J'aimerais demander, en terminant, au député de Shefford:
Peut-il me citer une loi qui est meilleure que cette loi
québécoise? S'il peut me citer une telle loi, je serai prêt
à amender la loi 162, mais, jusqu'à ce qu'il fasse la preuve du
contraire, c'est la meilleure loi, cela va rester la meilleure loi et on va
l'adopter à l'unanimité, comme le député de
Shefford l'a bien souligné. Merci.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que le rapport de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi loi 162, Loi sur les arrangements préalables de services
funéraires et de sépulture, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: L'article 33, M. le Président.
Projet de loi 25
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 33 du feuilleton,
nous allons aboder la prise en considération du rapport de la
commission
des institutions qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 25, Loi modifiant la Loi sur la
représentation électorale et d'autres dispositions
législatives. Je dois mentionner ici que nous avons également
reçu en temps utile trois amendements à cette loi que nous
devrons mettre aux voix, amendements qui seront mis aux voix avant l'adoption
du rapport.
Je cède maintenant la parole à M. le ministre
délégué à la Réforme électorale.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président. On sait que le projet
de loi 25 a fait l'objet d'un appui unanime parce qu'il était issu de
consensus qui ont été dégagés entre les membres de
la commission des institutions quant aux modifications apportées
à la Loi sur la représentation électorale. Donc, je me
bornerai simplement à mentionner les amendements qui ont
été déposés et auxquels vous venez de faire
référence. Trois sont plutôt d'ordre technique et ils ont
reçu l'assentiment de l'Opposition, à l'exception de celui qui
porte sur l'article 9 du projet de loi.
Effectivement, il y a lieu, M. le Président, que nous
procédions, avec le consentement de l'Opposition, à un amendement
qui a d'ailleurs été suggéré par l'Opposition et
que nous acceptons volontiers d'apporter à l'article 9, puisque,
effectivement, cela rendra le sens de nos intentions plus clair.
Donc, M. le Président, l'amendement a été
déposé dans les délais prescrits. À l'article 9, on
lisait: "Que l'article 25.2 soit de nouveau modifié par le remplacement
de la première ligne par la suivante: 25.2 Après avoir pris
connaissance des représentations des députés faites
à. Je fais motion pour que les mots "pris connaissance des" soient
remplacés par les mots "entendu les" et que le mot "faites" soit
retranché, de telle sorte que l'article se lira maintenant: "25.2
Après avoir entendu les représentations des députés
à."
M. le Président, je voudrais également...
Le Vice-Président: Un instant, M. le ministre
délégué à la Réforme électorale; tout
simplement, est-ce qu'il y a consentement à ce sous-amendement, M. le
leader de l'Opposition?
M. Chevrette: Oui, d'autant plus que je confirme que c'est le
député de Gouin qui, après entente avec le leader du
gouvernement, a apporté cet amendement.
Le Vice-Président: Donc, en conséquence, cet
amendement est reçu. Allez-y, M. le ministre
délégué à la Réforme électorale.
M. Gratton: Toujours avec le même consentement et la
même collaboration du député de Gouin et de l'Opposition,
je voudrais, à ce moment-ci, proposer un quatrième amendement qui
se lirait comme suit - il s'agit d'un amendement à l'article 8: "Que
l'article 24.2 soit remplacé par le suivant: 24.2 Aucun acte, document
ou écrit, n'engage la commission ni ne peut lui être
attribué s'il n'est signé par le président, l'adjoint ou
le secrétaire mais uniquement, dans le cas de ces deux derniers, dans la
mesure déterminée par un règlement adopté par la
commission et publié dans la Gazette officielle du
Québec."
Il s'agit, encore là, M. le Président, d'un amendement
proposé par le député de Gouin que nous faisons
nôtre et, si nous en avons le consentement, nous pourrons procéder
pour l'adopter et entendre les représentations de l'Opposition.
Le Vice-Président: Très bien. Est-ce qu'il y a
consentement à ce nouvel amendement à l'article 8? Est-ce qu'il y
a consentement à ce que cet amendement soit déposé et
reçu, M. le leader de l'Opposition?
M. Chevrette: Consentement.
Le Vice-Président: Consentement. Donc, l'amendement est
déposé et l'amendement est reçu. Est-ce qu'il y a d'autres
représentations sur le projet de loi, M. le leader de l'Opposition?
M. Chevrette: Non, M. le Président. Le seul commentaire
que je ferai, après l'avoir vérifié auprès de mon
collègue de Gouin, c'est que les partis ont tenu parole en ce sens que
toutes les modifications apportées à la Loi sur la
représentation électorale l'ont été par consensus.
Donc, je ne vois pas en quoi on pourrait ajouter énormément
à ce stade-ci.
Le Vice-Président: Très bien. En
conséquence, nous allons procéder à la mise aux voix des
amendements et, ultérieurement, du rapport de la commission. Dans un
premier temps, est-ce que le sous-amendement à l'article 9 est
adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 9 est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 29.1 est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 32 est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 8 est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que le rapport,
tel qu'amendé, de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 25, Loi modifiant la Loi sur la représentation électorale
et d'autres dispositions législatives, est adopté?
M. Chevrette: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, si vous voulez maintenant
appeler l'article 36 du feuilleton.
Projet de loi 104
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: Â l'article 36 du feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse. Je dois
également aviser ici que nous avons reçu des amendements transmis
en délais utiles et qui seront mis aux voix avant l'adoption du rapport.
Est-ce qu'il y a quelque intervention à ce moment-ci sur le projet de
loi 104 avant l'adoption du rapport de la commission des institutions, M. le
leader du gouvernement?
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, je voudrais d'abord informer
l'Assemblée que le lieutenant gouverneur a pris connaissance de ce
projet de loi et en recommande l'étude à l'Assemblée
nationale.
C'est en remplacement du premier ministre qui, comme on le sait, est le
parrain du projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, que
je voudrais, dans un premier temps, informer l'Assemblée que les
amendements auxquels vous avez fait référence ont
été communiqués à Mme la députée de
Chicoutimi qui est porte-parole de l'Opposition pour le projet de loi 104,
qu'en fait, ces amendements sont d'ordre plutôt technique et visent
à préciser davantage certaines des dispositions du projet de loi.
Il n'y a donc pas lieu, pour ma part, de discourir plus longuement sur leur
portée. (23 h 40)
Cependant, étant donné qu'en commission parlementaire, tel
que je l'ai annoncé au moment de l'adoption du principe du projet de
loi, nous avons adopté un certain nombre d'amendements beaucoup plus
significatifs, je voudrais en évoquer quelques-uns en quelques minutes.
D'ailleurs, ces amendements s'inspiraient de deux principes, soit
l'accroissement et l'équilibre de la représentation au
collège électoral et au conseil, et la notion de partenariat que
nous voulons préciser par ce projet de loi.
D'abord, on sait qu'il y a eu une consultation très exhaustive.
Environ 40 à 45 organismes oeuvrant dans le domaine de la jeunesse sont
venus faire des représentations sur le projet de loi 104, en commission
parlementaire. Plusieurs de ces organismes nous ont parlé de la
nécessité d'avoir une représentativité plus
complète et plus conforme, au sein du conseil de même qu'au sein
du collège électoral. C'est pourquoi, inspirés de ces
représentations, nous avons amendé en commission parlementaire le
projet de loi pour porter de onze à quinze le nombre des membres du
Conseil permanent de la jeunesse. Évidemment, l'augmentation du nombre
de membres permettra au collège électoral d'élire au
conseil des membres qui pourront mieux représenter les divers secteurs
d'activité de même que respecter la proportion entre les hommes et
les femmes, et les divers groupes d'âge. D'ailleurs, de façon
à accroître encore une fois l'équilibre de la
représentation, nous avons également ajouté deux nouveaux
secteurs dans la définition des organismes qui peuvent appuyer la
candidature d'une personne au collège électoral.
Également, je pense à un amendement qui a une
portée assez importante. On nous a fait valoir en commission
parlementaire qu'aux organismes qui peuvent et qui doivent appuyer les
candidatures au collèqe électoral, le projet de loi leur faisait
obligation d'être des organismes incorporés en vertu de la
troisième partie de la Loi sur les compagnies. Or, nous avons convenu
d'une nouvelle formulation de l'article qui couvrait cette partie. Nous avons
pu penser à une notion qui permettra maintenant à des organismes
qui oeuvrent dans le domaine depuis au moins douze ans de pouvoir appuyer des
candidatures sans pour autant avoir été incorporés.
Pour ce qui est du partenariat, nous avons accru les
responsabilités du collèqe électoral dans la mesure
où, alors qu'un projet de loi initial prévoyait que le
collèqe électoral recommanderait au ministre les noms des quinze
membres qui formeraient le Conseil permanent de la jeunesse, nous avons
amendé le projet de loi de façon que le collège
électoral élise les membres du Conseil permanent de la jeunesse.
Il s'agira donc pour le collège électoral de s'acquitter de cette
responsabilité à partir d'une réglementation prévue
dans le projet de loi.
Voilà ce que contiendra le projet de loi qui donne naissance au
Conseil permanent de la jeunesse. On peut se demander, à la veille de
l'adoption de la phase finale du projet de loi 104, ce qui viendra par la
suite. On est en train de préparer et on prépare
déjà la réglementation, particulièrement la
réglementation un peu spéciale qui devra présider à
l'élection des membres du conseil par le collège
électoral. Nous travaillons également présentement
à trouver les moyens de nous acquitter de la responsabilité comme
gouvernement de publiciser le plus possible la procédure des mises en
candidature de façon que toutes les personnes intéressées
de toutes les régions du Québec et de toutes les sphères
d'activité soient bien informées de la façon de
procéder pour être candidat ou pour appuyer les candidatures au
collège électoral.
Nous avons également l'intention de trouver les moyens pour que
les jeunes puissent se saisir de ce nouvel outil que sera le Conseil permanent
de la jeunesse et en connaître toutes les facettes de façon
à le rendre le plus efficace possible. Évidemment, nous
compterons sur le sens des responsabilités des groupes de jeunes pour
appuyer avec discernement les candidatures des personnes
intéressées à devenir membres du collège
électoral. Le gouvernement, dans cet esprit de partenariat, continuera
de choisir les membres du collège électoral, au nombre de 40 et
ce, de façon que l'ensemble des régions et l'ensemble des
secteurs d'activité, des groupes d'âges et leur
représentation homme-femme y soient le mieux équilibré
possible, compte tenu des candidatures qui seront proposées. Comme je
l'ai déjà mentionné, c'est le collège qui devra
ensuite se choisir un conseil le plus fort possible.
M. le Président, puisque le temps avance et que nous avons encore
d'autres travaux à abattre avant l'ajournement, je pense qu'on pourrait
conclure en disant que les jeunes pourront compter sur l'appui et le soutien du
gouvernement dans l'organisation de toutes les étapes du processus et,
plus tard, dans le fonctionnement quotidien du Conseil permanent de la
jeunesse. J'ai déjà eu l'occasion de dire, et je le
répète, qu'il n'est nullement question que nous
considérions le Conseil permanent de la jeunesse comme une
panacée, une réponse à tous les besoins du secteur
jeunesse. Mais nous pensons qu'il s'agit là d'un outil fort
intéressant. Le projet de loi 104, grâce à la collaboration
des groupes qui sont venus nous rencontrer, de celle des membres de la
commission et en particulier de celle de
Mme la députée de Chicoutimi, a été
bonifié par les amendements qui y ont été apportés.
Nous souhaitons que tout sera mis en oeuvre pour que les objectifs que nous
visons en créant ce Conseil permanent de la jeunesse soient atteints
dans les meilleurs délais et de la façon la plus efficace
possible.
Le Vice-Président: Très bien, M. le leader du
gouvernement.
Je reconnais maintenant Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. En entamant ses
propos, tout à l'heure, le ministre, en parlant de ce projet de loi 104
et de l'examen en commission parlementaire, parlait de la consultation comme
étant exhaustive, alors qu'on a eu au total un peu plus de 40 organismes
qui représentent au maximum 200 organismes jeunesse, alors que le
Secrétariat à la jeunesse en répertorie environ 750, et
que le principal organisme des regroupements des maisons de jeunes, le
Regroupement des organismes jeunesse du Montréal métropolitain,
qui représente une centaine d'organismes, ne s'est pas
présenté.
En fait, il faudrait peut-être rappeler un certain nombre de
choses pour expliquer le peu d'intérêt que les jeunes ont
manifesté à l'endroit du projet de loi 104, et la raison pour
laquelle un certain nombre de jeunes ne se sont pas présentés en
commission parlementaire. La première raison pour laquelle les jeunes ne
sont pas venus en commission parlementaire, pour un certain nombre d'entre eux
et en particulier le Regroupement des organismes jeunesse du Montréal
métropolitain, c'est - et ils l'ont fait savoir parce que le projet de
loi ne les intéressait pas, parce qu'ils estimaient que les
priorités étaient ailleurs et qu'avant d'adopter ou d'examiner un
projet de loi créant un Conseil permanent de la jeunesse, il
était beaucoup plus avantageux d'examiner, par exemple, une politique de
financement de reconnaissance des organismes jeunesse. Alors, ces organismes ne
se sont pas présentés en commission parlementaire. (23 h 50)
La seconde raison, et là il est difficile de voir dans quelle
mesure on aurait eu une plus grande participation, c'est que la commission
parlementaire a été convoquée dans un délai
extrêmement court, trois semaines, ce qu'on n'a pas fait pour de nombreux
organismes qui étaient beaucoup mieux organisés pour se
présenter en commission parlementaire. Qui plus est, au moment où
on a prolongé le délai pour présenter des mémoires,
il y a eu un manque d'information. De la même façon, aucun
organisme n'a été informé qu'il aurait pu présenter
son mémoire sur place, donc se
donner un délai additionnel pour la rédaction. Alors, je
dirais que ce projet de loi est un travail bâclé du commencement
à la fin, bâclé parce que la commission a été
convoquée à la hâte, reportée à plus tard et
sans qu'on en prévienne les organismes jeunesse et, évidemment,
une consultation alors que les jeunes ignoraient à peu près tout
de ce qu'était le Conseil permanent de la jeunesse.
La consultation nous a permis de faire un certain nombre de constats.
D'abord, plus de 50 % des organismes qui se sont présentés en
commission parlementaire n'étaient pas favorables à la
création d'un conseil permanent de la jeunesse. Lorsqu'ils se
prononçaient en faveur de la création d'un organisme, les
modifications qu'ils proposaient étaient si importantes que cela aurait
modifié la nature même de l'organisme. Cela en aurait fait
davantage un organisme plus proche d'un office ou d'un ministère que
d'un conseil permanent ou d'un conseil consultatif.
Qu'est-ce que les jeunes sont venus nous demander en commission
parlementaire? Ils sont venus nous demander que le collège
électoral soit permanent, que le collège électoral soit
élu par les jeunes. Ils sont venus nous demander une structure
régionale permanente. Ils sont venus nous demander des services
techniques en région. Ils sont venus nous demander un certain nombre de
pouvoirs, dont celui d'organiser des sommets ou des symposiums. Ils sont venus
réclamer une politique jeunesse.
Qu'est-ce qu'on retrouve dans les amendements que le ministre a
déposés? Des amendements utiles, certes, mais des amendements
à caractère technique qui n'ajoutent rien aux pouvoirs du Conseil
permanent de la jeunesse et qui ne permettent pas, par exemple, à cet
organisme d'exiger que les ministères lui présentent ses projets
de programmes touchant spécifiquement la jeunesse pour fins
d'examen.
Nous avons essayé en commission parlementaire de
représenter le plus possible et le mieux possible les différents
avis que les jeunes étaient venus nous donner sur cette question. Nous
avons proposé un certain nombre d'amendements qui visaient
essentiellement à bonifier cet organisme de manière à
rendre des services réels et de façon beaucoup plus
concrète aux jeunes de la province de Québec. Je dois dire
cependant, à regret, que même si on y a mis toute la bonne
volonté, même si on l'a fait avec le plus grand sérieux
possible, les amendements qui ont été apportés par
l'Opposition, à l'exception d'un amendement, ont été
systématiquement refusés.
Qu'est-ce que l'Opposition demandait? On disait: En l'absence de
politique touchant la jeunesse, pourquoi le gouvernement ne crée-t-il
pas auprès du conseil consultatif deux commissions, deux commissions sur
des questions qui, de l'aveu même du leader du gouvernement, sont des
questions d'extrême importance? Deux commissions, donc: l'une sur le
travail et l'autre sur l'enfance et la jeunesse. Le ministre reconnaît
qu'il y a là des problèmes, qu'il y aurait urgence d'intervenir
sur ces questions et que les premiers travaux du conseil devraient s'attaquer
à ces problèmes en particulier. Il reconnaît même que
le fait de le faire par des commissions qui seraient attachées à
ce conseil, des commissions permanentes, c'était peut-être la
façon la plus efficace. Cependant, malgré qu'on ait longuement
essayé de défendre et de convaincre le ministre que
c'était une des voies les plus intéressantes pour rendre ce
conseil efficace, les propositions d'amendement de l'Opposition ont
été refusées.
Qu'est-ce qu'on demandait? On demandait également que ce conseil
soit mandaté pour tenir ou organiser des sommets ou des consultations ou
des symposiums dans les régions ou à l'échelle nationale.
C'était, selon nous, la façon la plus efficace d'aller chercher
l'opinion des jeunes, d'éviter que ce conseil permanent qui sera
situé à Québec ne soit trop loin des préoccupations
et des réalités quotidiennes des jeunes. Cela aussi a
été refusé.
Nous avons également demandé à ce gouvernement en
commission parlementaire s'il n'y avait pas lieu de confier un mandat au
Conseil permanent de la jeunesse, à savoir qu'il examine les programmes
destinés aux jeunes, de manière à porter un jugement un
peu plus critique par rapport à ces programmes-là, qui sont issus
de différents ministères, mais également d'être un
peu ce lieu de concertation ou de coordination des programmes, dans leur examen
à tout le moins, dans leur évaluation, des programmes
destinés à relever l'employabilité chez les jeunes ou
encore des programmes touchant les maisons de jeunes, les maisons
d'hébergement, différents programmes touchant
spécifiquement la jeunesse. Cela aussi nous a été
refusé.
Alors, nous nous sommes dit que, s'il n'y avait pas moyen
d'améliorer le projet de loi, on pourrait peut-être, par un
article, obliger le gouvernement, mais en même temps le conseil
permanent, à donner un avis sur ce que devraient être les
modifications à apporter à cette loi après une
expérience de cinq ans. Donc, obligation pour le conseil de donner un
avis sur ses orientations, son mandat et ce qui pourrait constituer
éventuellement des améliorations à apporter à la
Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse ou encore peut-être
même à son abolition ou à sa modification en un office ou
un ministère.
Un tel article de loi existe déjà dans la
loi constituante de la Commission d'accès à l'information.
On sait que c'est utile. On sait par ailleurs que le gouvernement est
obligé de reporter l'obligation faite à la commission de
présenter un avis sur cette question, mais il est
préférable de s'assurer que cela se fasse dans des délais
raisonnables et il nous semblait que cinq ans d'expérience
c'était un délai intéressant. Ce gouvernement, qui se
targue de vouloir bien évaluer le fonctionnement de ses organismes
publics, on lui offrait un moyen certain d'obliger que cela se fasse
après cinq ans. Cela a également été
refusé.
Par ailleurs, le projet de loi, en commission parlementaire, a
été examiné sans la présence de conseillers en
législation, ce qui nous a donné, évidemment, des
corrections manuscrites remises sur place, refaites et j'en passe. Tout s'est
passé comme si, finalement, on avait affaire à une loi peu
importante, pour laquelle il ne fallait pas mobiliser d'énergie, de
ressources ou de spécialistes. Cela pouvait aller tout seul étant
donné que cela s'adressait à la jeunesse. Je trouve cela
infiniment déplorable et, à mon avis, ce projet de loi et son
étude en commission parlementaire, la consultation, les délais
impartis pour la convocation, la consultation générale, tout cela
s'est fait de manière hâtive, pour ne pas dire
bâclée.
C'est un manque de sérieux certain et je voudrais attirer
l'attention du ministre sur les propositions d'amendement qu'il a
déposées ce soir pour lui faire quelques remarques au sujet de
ces amendements.
Sans prétendre avoir des compétences d'un Comité de
législation, il me semble qu'à leur face même les
amendements déposés mériteraient d'être
réécrits, à tout le moins pour quelques-uns d'entre eux,
et je voudrais que le ministre m'accorde un peu son attention, parce que je ne
sais trop comment on pourra disposer de ces amendements ce soir dans la forme
où ils sont présentés, par rapport non pas au fond, mais
à la qualité de la rédaction.
Si, pédagogiquement, cela joue un rôle lorsqu'il s'agit de
la jeunesse, la qualité de rédaction de l'amendement qui nous est
proposé au paragraphe 3 de l'article 24 est, à mon avis,
boiteuse. Je demanderais au ministre de voir à examiner avec le
Comité de législation s'il n'y aurait pas lieu de corriger,
(minuit)
Je fais la lecture de cette proposition d'amendement. L'amendement vise
à remplacer le paragraphe 3 de l'article 24 par le suivant: "La
procédure à suivre par le Collège électoral pour
élire les membres du conseil et voir à transmettre la liste au
ministre." On a l'impression que c'est écrit par quelqu'un qui serait au
primaire - je ne sais pas comment cela a été structuré -
ou quelqu'un qui ne maîtrise pas bien le français.
Il serait peut-être plus juste de lire: "La procédure
à suivre par le Collège électoral pour l'élection
des membres du conseil et la transmission de la liste au ministre." Il me
semble que ce serait un peu plus français. Il faudrait voir s'il ne
serait pas souhaitable qu'on revoie la qualité de rédaction de
cet article.
Le suivant est: Remplacer l'article 21 par le suivant: "Les membres du
Collège électoral doivent, dans les 30 jours qui suivent leur
nomination, élire parmi eux les membres du conseil et voir à ce
que la liste en soit transmise au ministre dans ce délai." Je
m'interroge. Est-ce que ces amendements ont été vus par le
comité de législation?
Malheureusement, on a eu en commission parlementaire des amendements
avec ces tournures de phrases, ce qui me laissent douter qu'on les ait
effectivement fait voir par le comité de législation. Si le
conseil doit servir à aider les jeunes, il y aura un premier exercice...
Parce que ce sont les jeunes qui auront à travailler avec cette loi, ils
devront aussi en faire une certaine interprétation.
Encore faudrait-il que ce soit facilement lisible. Jusqu'à quel
point est-ce qu'on peut, ce soir, adopter les amendements qui nous sont
déposés, dans la forme où ils le sont? Je ne parle pas du
fond, évidemment, je parle de la forme et de la rédaction.
Le ministre pourra peut-être nous répondre
là-dessus. Pour ce qui est du fond -j'allais conclure là-dessus -
j'estime, et l'Opposition estime, que c'est un strict minimum. Ce qu'on offre
aux jeunes, c'est le plancher. C'est plus bas que ce qu'on donne à
certains autres organismes consultatifs. C'est vraiment le plancher; c'est
vraiment le minimum.
On a voulu leur faire croire que c'était très novateur,
parce que, par le biais de leur Collège électoral, on leur permet
d'élire les membres du conseil. Mais ce n'est pas ce qui donne des
pouvoirs réels et des pouvoirs d'intervention à un organisme. Ce
n'est pas ce qui donne des budgets à un organisme. Ce n'est pas ce qui
donne à cet organisme un prestige tel que cela lui permettrait d'avoir
un poids auprès du gouvernement.
Sur le fond, je le maintiens. On n'a pas procédé aux
modifications ou aux amendements qui auraient pu faire de ce conseil un
organisme utile, efficace et rapidement capable de donner des avis pertinents,
de faire des études riches et utiles pour les fins de l'exercice du
pouvoir d'un gouvernement.
M. le Président, devant la qualité de rédaction -
je le rappelle - est-ce qu'on peut ce soir accepter les modifications ou les
propositions d'amendement qui sont déposés? La question, à
mon avis, se pose. Comme je n'ai pas la réponse, je vous dirais, en
conclusion, que, pour ce qui est de la prise
en considération du rapport, l'Opposition accepte ce qu'on avait
vu antérieurement. Pour ce qui est de cela, il faudrait voir comment on
en dispose.
Je ne sais pas si cela appelle d'autres modifications, comment on
procède dans ce cas, s'il y a une directive, M. le Président.
Le Vice-Président: II n'y a pas d'autres interventions, le
débat est clos. J'ai reçu certains amendements. Ces amendements
ont été déclarés recevables et je me dois, à
ce moment-ci, de les mettre aux voix avant de mettre aux voix le rapport,
à moins que M. le leader du gouvernement...
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, je pense que Mme la
députée de Chicoutimi a raison de soulever une question de
rédaction quant aux amendements qui ont été
déposés dans les délais prescrits, sauf que
j'hésiterais à les amender ou à les sous-amender à
ce moment-ci, sans avoir au moins donné la chance, sinon aux juristes,
tout au moins aux linguistes de se pencher sur la question. Dans les
circonstances, je pense que nous pourrions adopter le rapport et lesdits
amendements avec l'engagement que je prends de faire en sorte que s'il y a des
améliorations qui sont susceptibles - et je pense qu'il y en a
-d'être apportées, nous pourrions le faire par le biais
d'écritures au moment de l'adoption du projet de loi à une
séance subséquente.
Le Vice-Président: Effectivement, M. le leader du
gouvernement, nous pouvons adopter les amendements tels que proposés.
D'après les vérifications auprès de la législation
et des linguistes, si vous avez des amendements ultérieurs à
proposer, ce sera toujours possible de le faire au moment de l'adoption en
troisième lecture du projet de loi, en se transformant en séance
plénière et en proposant des amendements. Le ministre pourra le
faire et corriger, s'il y a vraiment lieu, les amendements tels que
déposés actuellement.
En conséquence, nous allons procéder à la mise aux
voix des amendements. Est-ce que l'amendement visant à remplacer le
titre de la section V est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 32.1 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
au paragraphe 3 de l'article 24 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 21 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Est-ce que l'amendement
à l'article 17 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Finalement, est-ce que
l'amendement au premier alinéa de l'article 5 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. En conséquence,
est-ce que le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions,
qui a procédé à l'étude détaillée du
projet de loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, avec le consentement de
l'Opposition, que je crois déceler, j'aimerais que nous revenions
à l'article 33, alors que nous avons adopté le rapport de la
commission qui a étudié le projet de loi 25, pour que nous
puissions procéder immédiatement à l'adoption dudit projet
de loi.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement pour que
nous passions à cette étape-ci au projet de loi 25?
Des voix: Oui.
Projet de loi 25 Adoption
Le Vice-Président: Consentement. Donc, le ministre
délégué à la Réforme électorale
propose maintenant l'adoption du projet de loi 25, Loi modifiant la Loi sur la
représentation électorale et d'autres dispositions
législatives.
M. le leader du gouvernement et ministre délégué
à la Réforme électorale.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, ce n'est pas pour intervenir
sur le fond mais c'est simplement pour rassurer le député de
Lévis, qui semble s'inquiéter, qu'effectivement, ce que lui
communique le député de Shefford a été
confirmé par le leader du gouvernement. C'était tout simplement
un oubli tantôt de ne pas l'avoir rappelé. Grâce à
la
collaboration des membres de l'Assemblée, nous pouvons maintenant
corriger cet oubli.
Le Vice-Président: Très bien. Est-ce que cette
motion d'adoption du projet de loi 25 est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, si vous voulez bien appeler
l'article 34 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 38
Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait
l'étude détaillée
Le Vice-Président: À l'article 34 du feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 38, Loi sur la
transformation des produits marins, présenté par le ministre
délégué aux Pêcheries.
Comme premier intervenant, je reconnais, en conséquence, VI. le
ministre délégué aux Pêcheries.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Merci, M. le Président. Effectivement, nous en
sommes a la prise en considération du rapport de la commission sur le
projet de loi 38, Loi sur la transformation des produits marins. Ce projet de
loi a été étudié, comme on le sait, article par
article. Il y a eu quelques modifications et quelques amendements
d'apportés. Si vous permettez, je vais les revoir rapidement, l'un
après l'autre.
Nous avons ajouté l'article 9.1 qui se lit comme suit: "Un
détaillant ne peut céder, livrer ou transmettre un produit marin
qu'à un consommateur à moins d'être titulaire d'un permis
d'acquéreur". Il s'agit ici d'éviter que l'on contourne
éventuellement la loi.
Le Vice-Président: Un instant, M. le ministre
délégué aux Pêcheries. M. le député de
Lévis, sur une question de règlement?
M. Garon: Oui, M. le Président, sur une question de
règlement.
Comme le ministre considère sûrement son projet de loi
important et qu'il n'y a plus de commission qui siège
présentement à minuit dix, il serait normal d'avoir le quorum.
Puisque le leader du gouvernement considère important de siéger
à cette heure-ci, au moins, qu'il y ait un nombre de personnes suffisant
pour qu'il y ait quorum et entendre le ministre.
Le Vice-Président: Très bien. Sur la question du
quorum, M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je voudrais remercier le
député de Lévis pour sa gentillesse et son excellent
esprit de collaboration. Je constate également qu'il n'y a pas quorum au
moment où on se parle et indiquer au député de
Lévis que nous apprécions fort ce geste très magnanime et
qu'il est égal à lui-même. (0 h 10)
Le Vice-Président: Donc, très bien! M. le
secrétaire général adjoint, pouvons-nous vérifier
si toutes les commissions parlementaires ont fini de siéger? C'est
terminé? C'est en train de se faire. Nous allons attendre pour voir si
toutes les commissions ont fini de siéger. Je comprends que les ordres
de la Chambre sont que les commissions doivent siéger jusqu'à
minuit, mais il arrive, à quelques occasions, que les commissions
dépassent minuit et je dois m'en assurer avant d'appeler le quorum;
autrement, nous aurions quorum à ce moment-ci. Donc, nous allons faire
la vérification nécessaire.
Je constate maintenant que nous avons quorum. Je prierais cependant les
députés de prendre place, s'il vous plaîtl Nous pouvons
maintenant poursuivre le débat. M. le ministre
délégué aux Pêcheries.
M. Dutil: Merci beaucoup, M. le Président. Je vais
poursuivre là où j'en étais rendu. L'article que nous
avons ajouté, l'article 9.1, c'est afin d'éviter que la loi ne
soit contournée et qu'il ne se fasse de la vente en gros par un
détaillant et, donc, il faut un permis pour s'assurer que le
détaillant ne faisse pas aussi de la vente en gros sans posséder
de permis d'acquéreur.
Nous avons également modifié l'article 19, d'ailleurs,
à l'initiative du député de Lévis qui a
proposé l'amendement, ce avec quoi nous nous sommes montrés
d'accord. Je vous lis maintenant cet article: "La décision du ministre
doit être motivée. La personne visée par cette
décision en est informée par écrit." À la suite de
cela, le député de Lévis nous a proposé d'ajouter:
"Si le permis est refusé pour des motifs d'intérêt public,
le ministre doit indiquer la nature de ce motif." Cela vient préciser
tout simplement l'article. Il était bien de notre intention de
préciser un motif, la nature d'un motif éventuellement, si
c'était pour des raisons d'intérêt public, et nous avons
donc accepté de faire cet amendement.
Un autre amendement a été apporté à
l'article 45 qui se lisait comme suit: "Le ministre peut, par règlement,
prescrire les
normes minimales de transformation auxquelles doit se conformer un
exploitant pour préparer ou mettre en conserve un produit marin." Nous
l'avons amendé pour ajouter ceci: "Ces normes peuvent varier selon le
produit marin." Il s'agit tout simplement ici d'avoir davantage le souci du
détail. D'ailleurs, dans la liste que nous avons fournie au
député de Lévis et que nous avons fournie à la
commission, nous avons mentionné les degrés de transformation que
nous envisagions éventuellement dans la réglementation, et,
évidemment, ce n'était qu'un préliminaire à ce
moment-là.
Nous avons également modifié l'article 47. Ce
n'était qu'une correction de français, nous avons mis le pluriel
au lieu du singulier et, donc, c'est une modification extrêmement
mineure.
Finalement, nous avons apporté une modification à
l'article 49 qui se lisait comme suit: "Les poursuites pénales prises en
vertu de la présente loi sont intentées suivant la Loi sur les
poursuites sommaires...", ce à quoi nous avons ajouté: "par le
Procureur général ou par la personne qu'il autorise
spécialement ou généralement à cette fin". Il
s'agissait de s'assurer que tout le monde ne puisse pas intenter des poursuites
et, donc, de limiter les poursuites aux bonnes personnes.
Ce sont les seules modifications que nous avons faites au projet de loi.
Je recommande donc que nous acceptions le rapport de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation sur la loi 38, Loi sur
la transformation des produits marins. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Comme prochain intervenant, je
reconnais M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: VI. le Président, j'aimerais, au début de
mon intervention, que vous demandiez à chacun des députés
d'occuper son siège plutôt que d'être dispersés
à différents endroits et de faire du train. En vertu du
règlement, chaque député doit occuper son
siège.
Le Vice-Président: En vertu du règlement que vient
de rappeler M. le député de Lévis, je demanderais à
chacun des députés de bien vouloir regagner le siège qui
lui est assigné.
M. le député de Lévis, allez-y. Vous avez la
parole.
M. Garon: M. le Président, en même temps, il serait
peut-être bon d'appeler le quorum.
Des voix: Ah!
Le Vice-Président: J'ai un rappel au règlement, au
sujet du quorum. Je vais faire la vérification nécessaire. Qu'on
appelle les députés, s'il vous plaît!
Des voix: Ah!
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Qu'on appelle les députés! Nous avons maintenant
quorum, M. le député de Lévis.
Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je voudrais simplement
souligner que la difficulté à atteindre le quorum est
peut-être due au fait que le député de Lévis est
entouré de ses nombreux supporteurs au sein de sa formation politique,
c'est-à-dire qu'il est fin seul ce soir.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Vice-Président: Donc, M. le député de
Lévis, vous avez la parole.
M. Garon: M. le Président, ce qu'a souligné le
leader du gouvernement veut dire essentiellement que 79 députés
libéraux et une vingtaine de députés du Parti
québécois sont actuellement absents. Il y a donc quatre fois plus
de députés libéraux absents, M. le Président.
M. le Président, je dois dire que le projet de loi 38 passera
sans doute à l'histoire comme le projet de loi le plus inutile
adopté par cette Assemblée nationale, puisque le ministre
lui-même a convenu qu'il sera à toutes fins utiles
inapplicable.
Ce projet de loi porte sur la Loi sur la transformation des produits
marins et il vise, selon le ministre, un objectif louable, à faire en
sorte que des produits ne puissent être vendus sans avoir subi un certain
degré de transformation au Québec. Toutefois, son projet de loi
est inapplicable, parce que les pêcheurs qui voudront vendre à
l'extérieur, parce qu'ils obtiendront un meilleur prix, pourront le
faire facilement. Il s'agira tout simplement qu'ils aillent livrer leur produit
à une usine d'une province autre que le Québec. Par exemple, si
un pêcheur veut livrer son produit sur les quais du Nouveau-Brunswick, le
ministre sera dans l'incapacité totale de l'en empêcher. S'il veut
vendre à une entreprise américaine, il aura seulement à
livrer ailleurs que sur un quai du Québec, le faire sur un quai du
Nouveau-Brunswick qui, de toute façon, sera moins éloigné
des États-Unis qu'un quai de la Gaspésie ou de la
Côte-Nord.
Dans ce cas-là, le ministre a admis en commission parlementaire
qu'il n'aurait aucun moyen d'appliquer sa loi. S'il arrivait égale-
ment que le pêcheur qui pêche dans le golfe Saint-Laurent
fasse un transbordement de bateau à bateau en mer, le ministre, encore
une fois, n'aura aucune possibilité d'empêcher cette vente, comme
la qualifient les pêcheurs de "over-the-side sale", puisqu'il s'agit,
dans la terminologie du fédéral, de transborder du poisson de
bateau à bateau. Encore là, le ministre ne pourra même pas
surveiller cette opération puisqu'il a liquidé sa flotte de
protection qui existait au Québec depuis 1922 et qui servait à
assurer la protection des pêches du Québec. Elle est maintenant
liquidée. Le ministre est même dans l'impossibilité d'aller
voir ce qui se passe sur l'eau, parce qu'il n'a même plus de bateau ou de
chaloupe, M. le Président. Ce qui veut dire que c'est une loi, à
toutes fins utiles, inapplicable. (0 h 20)
Mais, pour mettre en oeuvre cette loi inapplicable, le ministre nous a
montré que ses objectifs étaient très restreints, mais
qu'en même temps, il mettrait en marche une mécanique incroyable
de réglementations, de paperasses, de bordereaux, de connaissements pour
tous les camionneurs du Québec qui vont transporter du poisson, pour
fins de vérification de sa loi qui sera inapplicable de toute
façon.
M. le Président, j'ai demandé au ministre quelles
étaient les espèces qu'il voulait voir davantage
transformées. D'abord, en ce qui concerne le crabe des neiges, il nous
dit qu'il veut que les sections soient cuites ou surgelées,
emballées. Je lui dis: Dans quel cas est-ce que cela peut se
présenter que le crabe n'est pas vendu en sections cuites ou
surgelées, car du crabe vendu en sections, c'est du crabe qui a subi la
moins grande transformation. Il ne s'agit pas du crabe en conserve. Il s'agit
du crabe qui est rond, découpé tout simplement en sections ou qui
est tout simplement cassé en sections, qui a été cuit ou
surgelé, mais qui devrait être emballé. Il nous a dit avec
son haut fonctionnaire qu'il avait dans l'esprit un seul cas, le cas du crabe
qui pourrait être transporté en vrac. Je lui ai demandé
s'il avait des exemples. H a dit: Oui, il y a eu un cas où dans un
camion, en prenant le bateau on a transporté à Terre-Neuve du
crabe qui avait été pêché dans la région de
Blanc-Sablon. Je lui ai demandé s'il avait l'intention de faire en sorte
que les gens soient obligés de le faire. Il a dit: Non, il ne sera pas
possible de le faire parce qu'il n'y a pas d'usine à Blanc-Sablon, cela,
parce que le ministre avait rejeté le plan d'implantation d'usine sur la
Côte-Nord que j'avais présenté à l'automne 1985. Il
n'y a plus d'usine aujourd'hui parce que le plan n'a pas été
accepté par le ministre.
Mais il fait une loi pour qu'il y ait plus de transformation du crabe.
Il admet qu'il a un seul cas en tête et qu'il devra faire une exception
dans la loi pour ne pas prévoir ce cas de toute façon, puisque le
seul endroit où s'est déjà fait du transport de sections
ou de crabe en vrac, c'est dans un endroit où il n'y a pas d'usine, de
toute façon.
Imaginez-vous, M. le Président, qu'on se trouve devant une loi
qui va être adoptée pour viser un objectif irréalisable et
où on fera une exception pour le seul cas où il aurait pu y avoir
une transformation accrue sur le territoire québécois. Je vois
des députés qui me regardent avec incrédulité, mais
c'est cela. Cela a été enregistré en commission
parlementaire. C'est le seul cas.
Une voix: Les sceptiques seront confondus.
M. Garon: Deuxièmement, pour la morue, il s'agira de morue
en filets ou en darnes emballés, tranchés et salés. J'ai
dit: Avez-vous beaucoup d'exemples de morue en darnes? On m'a dit que cela se
faisait, mais on n'a pas pu donner d'exemples parce que cela ne se fait
à peu près pas.
Troisièmement, en filets emballés. On a dit que pour
l'emballer, il faudra que ce soit dans des boîtes. La transformation
n'est pas forte et j'ai rarement vu des filets en vrac dans une boîte de
camion. On dit qu'il faudra que ce soit emballé comme le crabe devra
être dans des boîtes. Cela peut être des caisses de 10
livres, 15 livres, 20 livres, mais ce sera emballé. La transformation,
comme vous le voyez, n'est pas forte.
Une voix: En kilos.
M. Garon: On dit: tranchés. Vous savez que pour trancher,
il faut d'abord que le poisson soit éviscéré à bord
des bateaux. Donc, il est déjà tranché et vidé. On
dit qu'il pourra aussi être salé. Habituellement, le poisson est
tranché et salé ou il est éviscéré à
bord des bateaux et "fileté" mais il est rarement vendu autrement. Quand
il s'agit de plie, on parle de plie en filets emballés. Quand il s'agit
de flétan, on parle de filets emballés. Quand il s'agit de
hareng, imaginez-vous qu'on a dit: surgelé ou semi-conserve
emballé. Surgelé, cela veut dire qu'un hareng pourrait être
congelé rond, donc sans aucune transformation, dans certains cas, dans
des entrepôts subventionnés par le gouvernement et qu'il devra
être emballé. Il s'agira de harengs congelés rond, sans
même avoir été vidés, mais d'abord qu'ils seront mis
dans des caisses. Cela satisfait le ministre. Mais je n'ai jamais vu, M. le
Président, des harengs congelés et transportés en vrac
puisque comment voulez-vous transporter du hareng en vrac que vous allez
manipuler un par un ou au "payloader" pour vider des camions? Cela n'a pas de
bon sens. Le hareng qui subit le moins de transformation est celui qui est
congelé rond et qui est
vendu sous cette forme. Vous comprendrez encore là, M. le
Président, que les objectifs du ministre ne sont pas très
grands.
Quant au maquereau, il dit qu'il devra être, encore là,
surgelé, c'est-à-dire surgelé rond, en semi-conserve ou
conserve. Mais, si vous l'avez surgelé rond, là ce sera
suffisant, c'est-à-dire qu'il n'y aura aucune transformation à
faire. Je vois le député de Taschereau se frotter le menton parce
qu'il se demande un peu l'objet du projet de loi. Moi aussi, je me le
demande.
Une voix: C'est encore permis.
M. Garon: Au septièmement, on dit que les myes, les coques
devront être écalées en contenants. Voyez-vous?
Normalement, cela se fait à bord du bateau pour les mettre dans des
contenants qui pourraient être des chaudières dans lesquelles les
coques écalées auront été placées. Encore
là, il s'agit de transformation minime. Huitièmement, pour les
pétoncles, on parle de pétoncles écalés et
emballés, mais, encore là, il n'y a pas d'autres
précisions. Cela veut dire, au fond, des pétoncles qui ont
été vidés de leur coquille et placés dans des
récipients. Ils auront été emballés.
Au fond, cela veut dire que le degré de transformation
demandé par le ministre est à peu près inexistant. Il ne
demande presque pas de transformation et il va essayer de faire croire au monde
qu'il a des exigences alors qu'il n'en a pas. Je vous ai dit que la loi est
à peu près inapplicable parce que les gens qui, de toute
façon, voudront vendre aux compagnies étrangères, pourront
le faire en allant décharger leur bateau directement sur les quais de
Terre-Neuve, de l'île-du-Prince-Édouard ou du Nouveau-Brunswick.
Ils n'iront pas en Nouvelle-Écosse parce que c'est trop loin. S'ils
veulent vendre aux États-Unis, ils pourront encore là livrer sur
un de ces quais et il n'y aura aucun recours ni aucune façon
d'empêcher cette vente de poisson sans transformation.
Pour essayer d'appliquer ce projet de loi inutile, le ministre va se
donner des pouvoirs exorbitants, des pouvoirs qui sont vraiment quelque chose,
avec la réglementation. Le ministre pourra, en demandant au
gouvernement... "Le gouvernement peut, par règlement: - imaginez-vous -
1° indiquer les renseignements que doit contenir un connaissement ou un
bordereau d'expédition;". Cela veut dire que toute personne qui voudra
acheter du poisson devra avoir un permis. Si elle veut transporter du poisson,
cela lui prendra à bord un bordereau ou un connaissement pour qu'on
puisse aller vérifier de quoi il s'agit avec ce poisson. Imaginez-vous
le système que le ministre met en place puisqu'il faudra avoir un permis
d'acquéreur! On ne pourra pas acheter de poisson au Québec sans
avoir un permis.
C'est prévu dans la loi qui dit: "Une demande de permis
d'acquéreur doit être soumise au ministre par la personne qui
entend l'exploiter..." Voyez-vous? "entend l'exploiter" et "permis
d'acquéreur", cela veut dire qu'il faut un permis pour acheter. Vous ne
pourrez plus acheter de poisson au Québec sans avoir un permis. C'est
l'article 13 du projet de loi: "Une demande de permis d'acquéreur doit
être soumise au ministre par la personne qui entend l'exploiter, dans la
forme prescrite par règlement et accompagnée des documents qui y
sont prévus. "Cette demande doit être accompagnée d'un
cautionnement, d'une preuve de solvabilité ou d'une garantie aux
montants, conditions et suivant les modalités prescrits par
règlement."
Pour un gouvernement qui avait comme objectif de
déréglementer, jamais le secteur du poisson ne sera aussi
réglementé puisque, pour acheter du poisson, cela va prendre un
permis; il va falloir faire une demande au ministre, il va falloir respecter un
ensemble de conditions pour acheter du poisson. Mais le ministre veut
vérifier si vous êtes correct. Alors, il devra mettre toute une
machinerie en place. "Le gouvernement peut, par règlement: 1 indiquer
les renseignements que doit contenir un connaissement ou un bordereau
d'expédition;". Je vous disais donc que, si vous allez transporter du
poisson d'une place à une autre, le ministre veut pouvoir voir où
vous allez avec votre poisson, ce que vous voulez en faire, d'où vient
votre poisson et où il s'en va, pour vérifier s'il a le
degré de transformation souhaité, sauf qu'il ne demande presque
rien comme transformation. Mais il aura tout un système de police qui
pourra arrêter les camions pour vérifier, dans les connaissements
ou les bordereaux d'expédition, si le poisson est emballé.
Imaginez-vous! Alors qu'il est toujours transporté emballé
habituellement. (0 h 30)
On dit aussi que "le gouvernement peut déterminer par
règlement les livres, les comptes, les registres et les autres documents
que doit tenir un titulaire de permis, les lieux où il doit les
conserver, les rapports qu'il doit fournir au ministre, les renseignements que
doivent contenir ces rapports et l'époque à laquelle ils doivent
être produits;".
Imaginez-vous, M. le Président. En plus de l'assurance
chômage, des taxes, des rapports d'impôt, pour avoir le droit
d'acheter du poisson, il va falloir avoir des classeurs avec des livres pour
marquer toutes les opérations dans des endroits que spécifiera le
ministre. Cela prendra sans doute une pièce de plus dans l'immeuble pour
avoir ces renseignements, ces classeurs, ces permis et tous ces rapports que
demandera
le ministre. 3° "prescrire la forme de la demande d'un permis, les
documents qui doivent l'accompagner, les droits à verser ainsi que les
conditions de délivrance et de renouvellement d'un permis; 4°
"prescrire le montant, les conditions et modalités du cautionnement, de
la preuve de solvabilité ou de la garantie qui doit accompagner une
demande de permis; 5° "prescrire, les modalités d'inspection..."
Cela prend un règlement pour dire de quelle façon on va
surveiller le monde et voir s'il a acheté du poisson, si le poisson
qu'il a acheté est emballé. C'est à peu près ce que
demande le ministre, qu'il soit dans des bottes. Là on va avoir tout le
régime des papiers pour surveiller si ce minimum de transformation a
été fait. "prescrire les modalités d'inspection, de
prélèvement ou de saisie et établir le modèle de
tout certificat, rapport ou procès-verbal rédigé par une
personne autorisée; 6 "déterminer, parmi les dispositions d'un
règlement adopté en vertu du présent article ou de
l'article 45, celles dont la violation constitue une infraction."
M. le Président, vous auriez pensé que le ministre
considérait que c'était une inspection minime, pour
vérifier s'il y a du poisson à bord d'un camion ou dans une
usine, si le poisson est rond, dans une boîte ou s'il n'est pas dans une
botte, cela peut se faire à l'oeil nu, rapidement. Non, l'article 39 y
pourvoit. "Le produit marin ou l'objet..." Le ministre va pouvoir saisir des
poissons, son inspecteur va pouvoir le faire pour regarder le poisson.
Regardez-bien pendant combien de temps il va pouvoir le regarder: "Le produit
marin ou l'objet saisi doit être remis au propriétaire ou au
posssesseur lorsque survient l'une ou l'autre des situations suivantes: 1°
un délai de 90 jours s'est écoulé depuis la date de la
saisie et aucune poursuite n'a été intentée;". La loi dit
que, si le ministre ou son inspecteur saisit le poisson, si au bout de 90 jours
il n'a rien fait, il n'a pas poursuivi la personne pour avoir manqué au
respect de sa loi, il devra lui remettre le poisson.
Cela aura pris 90 jours, imaginez-vous, au fonctionnaire pour regarder
le poisson, pour voir s'il est emballé, s'il est rond, s'il est en
filet, ou s'il est en darne. Il aura 90 jours pour faire cela. Vous auriez
pensé que c'était suffisant, mais non. A l'article 42 le ministre
lui donne 90 jours de plus s'il en a besoin sur demande du saisissant. Le
saisissant, c'est son inspecteur ou le ministre lui-même. Un juge de paix
peut ordonner que la période de maintien sous saisie soit
prolongée pour une maximum de 90 jours. Six mois, vous me regardez
surpris, M. le Président, je n'ai jamais vu un projet de loi comme cela.
J'ai dit au ministre: je souhaite que cela ne soit pas son seul projet de loi,
parce qu'il fera sa marque. On a parlé de la tête à
Papineau, je vous garantis, quand on parlera d'un projet de loi inutile, on
parlera d'un projet de loi Dutil. Parce que l'inspecteur pourra demander 90
jours de plus pour vérifier si le poisson est emballé. C'est
quelque chose. Je sais que le ministre a copié les normes de
l'inspection des aliments, sauf que dans le cas de l'inspection des aliments...
Quand le poisson est sous saisie, c'est parce qu'on a de fortes chances de
penser qu'il ne respecte pas les normes alimentaires, qu'il faudra faire des
tests très sophistiqués pour vérifier s'il y a des
bactéries dans le poisson - c'est assez facile - mais s'il y a surtout
un taux trop élevé, par exemple, de produits chimiques, de plomb,
etc., et ces tests sont plus sophistiqués. Là, il ne s'agit pas
d'un test compliqué, il s'agit d'une vérification par le ministre
ou son inspecteur pour voir si le poisson est emballé. Je vous l'ai dit
l'objectif, que la section soit cuite ou surgelée emballée, filet
ou darne emballé, filet à emballer, le hareng, pour voir s'il est
congelé rond, emballé. Cela ne prend pas une 500 watts pour voir
si un poisson est emballé. C'est à peu près tout ce qu'il
demande, M. le Président. Il donne 90 jours au fonctionnaire pour le
faire et s'il n'en a pas assez, il peut demander 90 jours de plus. Alors, du
poisson qui est congelé comme cela dans des boîtes, six mois
après, je dois vous dire que ce poisson a besoin d'avoir une
résistance spéciale pour commencer à entrer en usine
seulement au bout de six mois.
M. le Président, cela n'a pas de bon sens. J'ai
déjà vu des projets de loi, mais je n'en ai jamais vu comme cela.
L'objectif est inapplicable, inapplicable. La méthodologie
utilisée est exorbitante. En plus, vous ne le croirez jamais, à
l'article 53, le gouvernement n'est pas encore décidé à
qui il va confier la responsabilité de cette loi. Même le ministre
s'est peut-être posé des questions parce qu'on dit: "Le
gouvernement désigne le ministre responsable de l'application de la
présente loi." Habituellement, c'est le ministre de tutelle qui
présente un projet de loi et qui l'administre. Mais non, on ne voit pas
que le gouvernement désigne le ministre, mais je sais pourquoi. C'est
sans doute qu'il voudra confier l'administration de ce projet de loi au service
d'inspection des aliments qui fait un service utile pour voir si le produit est
de qualité. Mais si cela dépend du service d'inspection des
aliments, cela devrait être sous l'administration du ministre de tutelle,
qui est le ministre de l'Agriculture. Mais je suis convaincu que le ministre
délégué aux Pêcheries n'aimera pas cela. Cela fait
qu'il n'y a pas de décision de prise. Le gouvernement désignera
plus tard qui va s'occuper de l'administration de cette loi, de cette loi
inutile, qui va demander tout un appareil administratif qui n'a ni
queue ni tête.
Une voix: C'est un poisson.
M. Garon: M. le Président, tout cela pourquoi? Parce
que... J'ai commencé à quelle heure?
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Garon: C'est pour savoir combien de temps il me reste.
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, je vais vous aviser immédiatement qu'il vous reste... 39
minutes.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Garon: D'accord. M. le Président, je suis content parce
que je pourrai davantage expliquer...
Le Vice-Président: Je m'excuse, M. le député
de Lévis, j'ai fait une erreur. Nous sommes à l'étape du
rapport de la commission. Donc, c'est 30 minutes. Vous devez soustraire 30
minutes à ce que je vous ai dit. Il vous reste 9 minutes.
Des voix: Ah!
M. Garon: Je comprends. J'ai compris, M. le Président, que
si vous m'avez donné 39 minutes, c'est que vous avez vu
l'énormité de ce projet de loi et que vous vouliez donner tout le
temps possible pour que la Chambre puisse se ressaisir et ne pas adopter un tel
projet de loi. Je suis convaincu que, si le gouvernement est sérieux,
s'il ne veut pas perdre la face... parce que je vais vous dire qu'on va
demander au gouvernement des rapports sur ce projet de loi. Il va falloir nous
dire ce qui se passe si on le met en application. Je dois vous dire que le
projet de loi est inutile de façon totalement assurée. C'est
impossible de pouvoir appliquer un tel projet de loi, M. le Président.
C'est pourquoi je veux prendre le temps...
Je vois le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation qui rit. Il ne rira pas longtemps s'il est obligé
d'appliquer ce projet de loi. Le ministre délégué aux
Pêcheries ne peut pas vraiment administrer ce projet de loi. Il a fait un
projet de loi curieux, mais pour l'administration d'un autre parce qu'il a
créé tout un appareillage nouveau pour aller vérifier dans
les camions qui se promènent au Québec un peu partout, pour aller
vérifier dans les usines, pour aller voir chez les détaillants,
pour aller voir chez les restaurateurs.
Remarquez bien ce que le ministre dit dans son projet de loi. Il faudra
un permis d'acquéreur, à moins qu'on soit... Il est dit ici: "II
est interdit, à moins d'être exploitant, titulaire de permis
d'acquéreur, restaurateur ou détaillant, de servir
d'intermédiaire pour l'acquisition ou la cession d'un produit marin." Le
ministre devra aller vérifier si le restaurateur a la transformation ou
s'il sert seulement d'entremetteur pour vendre le poisson ou
d'intermédiaire, plutôt intermédiaire qu'entremetteur. Si
le détaillant fait juste servir de valise, au fond, pour vendre du
poisson qui n'aura pas été suffisamment emballé, s'il
s'agit d'un exploitant d'usine ou encore, s'il ne s'agit ni d'un exploitant
d'usine ni d'un restaurateur ni d'un détaillant, qu'il s'agisse d'un
titulaire de permis d'acquéreur, il faudra avoir un permis pour pouvoir
acheter ou vendre du poisson. (0 h 40)
À ce moment-là, M. le Président, on met en place
une machine incroyable. Il y a 12 000 restaurateurs au Québec; des
détaillants, sûrement beaucoup plus. Je n'ai pas le nombre
précis, mais on peut parler d'environ 15 000 détaillants. Dans
les exploitants d'usines, on sait qu'actuellement il y en a 54 qui ont des
permis et il en reste 74 qui n'ont pas de permis, même si la loi exige
qu'ils aient des permis. On se retrouve encore dans une situation où
plus de la moitié des usines de transformation des produits marins n'ont
pas de permis, même si la loi exige qu'elles aient toutes des permis,
depuis le 1er avril 1986 ou le 1er avril 1987, selon qu'on est sur la
Côte-Nord ou ailleurs. Actuellement, plus de la moitié des usines
du Québec n'ont même pas leur permis pour expoiter leurs usines,
parce qu'elles ne respectent pas toutes les normes voulues pour avoir leur
permis d'usine. Le ministre est en train de mettre en place un appareillage
incroyable pour une raison, parce qu'il s'est fait organiser dans la
négociation des quotas cette année, parce qu'il n'a pas
négocié des quotas suffisants pour le Québec, qu'il n'a
pas négocié les quotas qu'il fallait.
Le Québec n'aura jamais vu de quotas aussi faibles dans son
histoire parce que le ministre, qui pouvait bien se faire poser des questions
par le député de Matane sur un permis de crevettes, mais, pendant
qu'il regardait ce permis de crevettes, il laissait passer le banc d'Esquiman
au complet situé à mi-chemin, à cheval sur une ligne
séparant le Québec de Terre-Neuve, et il laissait passer aussi le
banc d'Anticosti qui est situé dans le territoire
québécois à 100 %. Il aurait été bien mieux
de faire en sorte que le Québec ait des quotas de pêche
suffisants. Les usines auraient eu suffisamment de poisson et le poisson aurait
même été en quantité supplémentaire,
excédentaire. Mais, parce qu'il n'a pas négocié les
quotas, parce qu'il ne s'est pas occupé que, dans les territoires de
pêche traditionnellement québécois, nous ayons les quotas
suffisants,
aujourd'hui, il y a pénurie de poisson, manque
d'approvisionnement dans les usines. Il essaie de trouver une façon pour
qu'il y en ait plus, mais cela ne fonctionnera pas, parce que le
problème n'est pas là. En plus, il va créer un
problème considérable pour les pêcheurs puisqu'ils ne
pourront pas vendre en fonction du meilleur prix qu'ils pourraient obtenir.
Pensez-vous qu'un pêcheur va vendre au Nouveau-Brunswick parce
qu'il a un meilleur marché? Pensez-vous qu'il va vendre à l'usine
des États-Unis parce qu'il a un meilleur marché? C'est parce que
c'est plus cher. Et, parce qu'il a la possibilité d'avoir plus cher, le
pêcheur peut négocier en même temps de meilleurs prix sur le
territoire québécois.
Le premier ministre nous disait à quel point il ne fallait pas
imposer de normes, de représailles par rapport aux États-Unis de
crainte que, dans le cadre du libre-échange, nous ayons les mêmes
représailles. Son ministre délégué aux
Pêcheries, pendant ce temps, est en train de créer tout un
système de permis pour empêcher les Américains d'acheter
notre poisson en payant les pêcheurs plus cher pour leurs produits.
M. le Président, je vous dis que les députés de
cette Chambre n'ont pas étudié ce projet de loi parce que, s'ils
l'ont étudié, ils vont dire au ministre: Laisse mourir cela sur
le carreau, cela n'a pas de bon sens, on va faire rire de nous autres. C'est un
projet de loi, j'en ai donné seulement quelques facettes, mais un
certain nombre de facettes assez indicatrices qu'actuellement le ministre
crée une machinerie, une réglementation, un système
d'inspection pour faire en sorte que le pêcheur ne puisse pas obtenir le
meilleur prix pour son produit, brisant son pouvoir de négociation, son
pouvoir de vente aux usines à des prix supérieurs pour une
qualité supérieure.
M. le Président, cela est inacceptable. C'est un projet de loi
qui est mal conçu, mais je ne dis pas que les objectifs sont mauvais.
Là, le ministre, en panique, a voulu faire un projet de loi parce qu'il
s'est rendu compte qu'il n'avait pas les quotas suffisants pour approvisionner
les usines comme par les années passées, parce qu'il ne s'est pas
occupé de négocier les quotas. II s'est occupé de
s'harmoniser avec le gouvernement fédéral, mais il s'est fait
harmoniser. Vous savez que l'harmonie est toujours facile lorsque vous vous
faites plumer. Alors, le ministre s'est fait plumer dans les quotas, il s'est
fait organiser. Aujourd'hui, les quotas ne sont pas chez nous. Il est
évident qu'il a de bonnes relations et, pendant ce temps-là, les
travailleurs n'ont pas autant d'emplois dans les usines parce qu'il n'y a pas
autant de poisson qui arrive dans les usines.
Parce que le ministre ne s'est pas occupé d'obtenir les quotas
suffisants pour faire marcher à pleine capacité les usines du
Québec, il va essayer de faire croire aux gens que, par sa loi bidon, il
va forcer les pêcheurs à garder tout leur poisson dans les usines
du Québec. Pensez-vous qu'un pêcheur qui va pouvoir obtenir un
meilleur prix qu'une usine du Québec ne voudra pas payer ne s'organisera
pas pour vendre à l'endroit où il aura le meilleur prix?
Je me rappelle, il n'y a pas si longtemps, lorsque nos pêcheurs
commençaient à produire avec des bateaux modernisés et des
cales réfrigérées, ils commençaient à faire
un produit Al qui pouvait être vendu sur n'importe quel marché,
mais les industriels québécois ne pouvaient pas payer le montant.
Ils ont téléphoné aux États-Unis et ils ont
envoyé des vannes chercher le poisson sur les quais de la
Gaspésie. Pourquoi? Parce qu'ils voulaient obtenir un prix
suffisant.
Je pense que le ministre a erré en proposant ce projet de loi qui
est inefficace, inapplicable, dont les objectifs ne seront pas
réalisables, dont le système d'inspection sera d'un coût
exorbitant, qui coûtera cher d'administration, à tenter de
réaliser des objectifs qui ne sont pas applicables.
M. le Président, je dis à l'Assemblée nationale de
demander au ministre de se ressaisir. Il y a des effaces au bout des crayons
parce qu'on peut se tromper. Le ministre a erré en présentant un
tel projet et il devrait le laisser mourir au feuilleton pour adopter des
mesures véritablement novatrices, en négociant d'abord des bons
quotas, en travaillant avec les gens pour qu'ils aient le meilleur prix pour
leurs produits et en laissant tomber les mesures rétrogrades qui vont
absolument dans le sens contraire à celui qu'a indiqué le premier
ministre dans le cadre du libre-échange ou même dans le cadre des
journaux, lorsqu'il laisse acheter les journaux du Québec par des gens
de Toronto. Merci.
Le Vice-Président: M. le ministre
délégué aux Pêcheries pour une intervention d'un
maximum de cinq minutes.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Malheureusement, M. le Président, je n'aurai que
cinq minutes pour essayer de répondre au député de
Lévis. Nous aurons une heure demain, probablement, lors de l'adoption du
projet de loi et cela ne permettra de préciser davantage sur l'ensemble
de l'enflure verbale dont fait preuve le député de Lévis.
D'ailleurs, je voudrais rassurer le député de Lévis: sur
l'enflure verbale, sur la démagogie facile ou les blagues stupides, les
insultes personnelles et ainsi de suite, je n'ai pas l'intention de lui faire
compétition dans ce domaine. Je le considère déjà
comme le champion dans
toutes les catégories.
Mais, dans ma période de cinq minutes, je voudrais parler de
quelques points qu'il a soulevés, entre autres, de la protection de la
délégation de 1922 qu'il a lui-même perdue en 1983, lors de
ses chicanes épiques avec le gouvernement fédéral. Ce que
nous avons fait ici, au gouvernement, nous avons confirmé une chose qui
se passait déjà, c'est-à-dire que les employés de
la protection au domaine des pêcheries travaillaient déjà
pour le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche depuis
deux ans quand je suis arrivé au ministère. Nous avons
confirmé le fait en transférant ces employés d'une
façon définitive au ministère du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche. Cela a été une décision tout simplement
administrative qui a causé beaucoup de problèmes aux individus
qui travaillaient, bien souvent, depuis 25 ans dans le domaine de la protection
et qui, évidemment, ont trouvé ça extrêmement
douloureux qu'une pareille décision soit prise.
Mais cela avait été déjà une perte qu'avait
subie le député de Lévis, grâce à son style
de négociateur qui est - vous l'avez remarqué - passablement
différent de celui que nous avons adopté ici, au gouvernement,
celui que nous appelons la diplomatie tranquille et qui nous vient comme
exemple de très haut. On sait que le premier ministre et le ministre des
Affaires intergouvernementales canadiennes ont obtenu beaucoup plus de
succès en procédant de cette façon qu'en procédant
dans le style du député de Lévis, le style de l'homme de
Cro-Magnon, c'est-à-dire: on donne des coups de massue à tout le
monde et, évidemment, on reçoit des coups de massue. Cela ne fait
que des crânes défoncés et non pas des ententes et de
l'harmonie entre les deux ordres de gouvernement. C'est là que nous
avons perdu la délégation de 1982, dans les coups de massue que
le député de Lévis, avec son style d'homme de Cro-Magnon
de 70 000 ans avant Jésus-Christ, avait raffiné, comme vous avez
pu le constater.
Quant à son plan de la Basse-Côte-Nord, rapidement, son
plan de 40 000 000 $, je voudrais tout simplement préciser qu'il n'avait
reçu aucun accord de son propre gouvernement sur ce plan. Il l'a
annoncé le 10 décembre 1985, alors qu'il devait bien se douter
que le premier ministre n'allait pas l'appeler pour être ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il devait se douter de
cela le 10 décembre 1985, puisque nous étions huit jours
après les élections. Cela vous montre tout le respect qu'a le
député de Lévis envers nos traditions parlementaires, nos
traditions de démocratie, que d'aller annoncer un projet non
accepté par son propre gouvernement, en Gaspésie, huit jours
après les élections, alors que son gouvernement avait
été défait. (0 h 50)
Quant aux permis d'usines non à jour, nous aurons
également l'occasion d'en parler plus longuement. Malheureusement, je
n'ai pas le temps de préciser ce soir. Je voudrais dire au
député de Lévis qu'il aurait peut-être
été préférable, lors de l'étude des
crédits, plutôt que de parler des pétoncles géants
pendant une heure ou du comportement cannibale des homards en fonction de leur
sexe, il aurait peut-être été préférable
justement qu'il aborde ce genre de dossier et qu'on puisse le vider. Que ce
soit sur la normalisation ou sur d'autres dossiers beaucoup plus importants que
de nous faire des tirades à n'en plus finir sur les pétoncles
géants - je le répète - et sur le comportement cannibale
des homards en fonction de leur sexe. Ce sont les discours que nous avons eus
pendant environ trois heures, à l'étude des crédits du
ministre délégué aux Pêcheries.
Je ne vais pas plus loin pour ce soir. Je pense que notre cote
d'écoute est peut-être insuffisante pour tout ce que j'ai à
dire et que les gens doivent savoir au sujet des pêcheries. Demain, nous
aurons l'occasion, lors du débat d'adoption, d'en reparler, alors que
j'aurai une heure. Enfin, éventuellement, lors de l'adoption, j'aurai le
plaisir de répondre à tous les points que le député
de Lévis a soulevés. Je pense que les gens seront satisfaits de
mes réponses. Merci.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que le rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 38, Loi sur la
transformation des produits marins, est adopté?
M. Garon: Sur division.
Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je présume que si on
ne demande pas de vote enregistré, c'est qu'il y a seulement deux
députés péquistes présents. Je vous prierais
d'appeler l'article 9 du feuilleton, s'il vous plaît! Je trouve le
député de Shefford très patient.
Projet de loi 44 Adoption du principe
Le Vice-Président: À l'article 9 du feuilleton, le
ministre délégué aux Finances et à la Privatisation
propose la motion d'adoption du principe du projet de loi 44, Loi sur
l'assurance-responsabilité professionnelle. En conséquence, je
cède la parole à M. le ministre délégué aux
Finances
et à la Privatisation. Des voix: Bravo!
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, nous abordons l'adoption d'un
projet de loi qui touche plusieurs corporations professionnelles. J'imagine que
c'est le député de Lévis qui commentera le projet de loi
au nom de l'Opposition. Comme il est également membre d'une corporation
et qu'il nous a pressés d'adopter ce projet de loi le plus tôt
possible, j'ose espérer qu'il nous donnera sa plus entière
collaboration.
En effet, ce projet de loi a pour but de corriger une situation de fait
pénible pour plusieurs corporations professionnelles puisque, comme vous
le savez, depuis plusieurs années, il est nécessaire d'obtenir
une assurance-responsabilité pour pallier des erreurs et des omissions
que peuvent commettre les représentants de telle ou telle corporation et
en conséquence, il est nécessaire d'obtenir une assurance.
Malheureusement, ce qui a prévalu ces dernières
années, c'est qu'il est de plus en plus difficile d'obtenir ou d'acheter
de telles polices d'assurance permettant à des professionnels de se
protéger. En conséquence, le gouvernement du Québec a
décidé de prendre ses responsabilités, à la suite
de représentations qui nous ont été faites par diverses
corporations professionnelles, dont le Barreau du Québec et la Chambre
des notaires, et de la part également de l'Office des professions qui,
en collaboration avec l'Inspecteur des institutions financières, a mis
au point un programme qui a besoin, pour ce faire, d'un projet de loi. C'est
donc le projet de loi qui est devant nous.
J'aimerais dire immédiatement que ce projet de loi est le fruit
de la collaboration que j'ai eue du ministre de l'Éducation, qui est
responsable des corporations professionnelles. Il a fait en sorte que nous
puissions présenter ce projet de loi 44, dont nous abordons ce soir
l'étude du principe.
Au cours des 20 dernières années plus
particulièrement, la nécessité pour un professionnel
d'être protégé contre les conséquences
pécuniaires de ses erreurs et omissions, par une
assurance-responsabilité professionnelle a gagné du terrain.
 un point tel que l'achat de ce genre d'assurance est devenu la
règle de prudence à laquelle adhère la majorité.
C'est en s'appuyant d'ailleurs sur cette même règle que plusieurs
corporations professionnelles se sont donné des règlements
obligeant leurs membres à détenir une forme de protection
financière, généralement par un contrat d'assurance
destiné à indemniser des victimes d'erreurs et omissions commises
dans la prestation des services professionnels.
Dans ce contexte, les membres des plus importantes corporations ont vite
réalisé les avantages des plans d'achat regroupés ou en
groupes. Ce sont donc des achats de groupes pour des assurances de protection
professionnelle pour combler ces besoins d'assurance, et ce, d'autant plus que
les assureurs spécialisés dans cette classe de risque
n'étaient jamais très nombreux.
Nonobstant le faible nombre d'assureurs spécialisés dans
cette catégorie d'assurance, le marché au Canada était
demeuré assez ouvert et les primes relativement stables. Beaucoup plus
de perturbations furent cependant ressenties aux États-Unis au cours des
dernières années, de façon que là, les plans
d'auto-assurance ou fonds d'assurance sont déjà répandus
chez les corporations professionnelles.
La crise de l'assurance responsabilité déclenchée
en 1985 dont les causes, il y a lieu de croire, ont pris source principalement
aux États-Unis, n'a pas épargné les professionnels
canadiens, et les quelques assureurs monopolisant jusque-là ce domaine
se sont vite retirés des marchés qu'ils avaient souvent
eux-mêmes recherchés, parfois seulement un an auparavant, laissant
des groupes importants de professionnels à la merci d'un marché
presque totalement fermé et inabordable quant au coût des primes.
A ce sujet, M. le Président, j'ai des chiffres assez
révélateurs. Je pourrais vous citer le cas en particulier de
l'Ordre des chiropraticiens du Québec, qui alors qu'il payait une prime
de 530 $ pour une limite de 1 000 000 % sans franchise, passerait à 2000
$ pour une limite beaucoup moindre.
On peut citer également les omnipraticiens et les médecins
spécialisés qui ont vu leur prime passer de 440 $ en 1984
à 585 $ en 1985 et à plus de 2000 $ l'an dernier. On peut citer
également les primes des avocats et des notaires qui ont augmenté
de l'ordre de 150 % à 500 % et, en fait, plusieurs des corporations
professionnelles se sont vu imposer des primes tout à fait aberrantes
dans un secteur aussi critique pour la protection du public, par le biais de
l'assurance responsabilité.
M. le Président, ce qui est pire, c'est qu'étant
donné l'imposition qui était faite par les corporations
professionnelles aux individus, des membres de cette corporation, il
était très souvent impossible pour ces membres de corporations
professionnelles de trouver des compagnies d'assurances qui étaient
désireuses d'assurer les menbres de ces corporations professionnelles.
Par conséquent, nous avons préparé un projet de loi qui
permettra à chaque corporation professionnelle qui voudra se
prévaloir de cette loi, d'imposer aux membres des corporations
professionnelles soit l'obligation d'adhérer à une police
d'assurance qui a été
négociée pour l'ensemble des membres de cette corporation
ou soit par la contribution obligatoire à un fonds d'assurance qui sera
constitué à cette fin.
À ce sujet, le projet devant nous, non seulement permet à
la corporation professionnelle de décider d'aller de l'avant avec un tel
projet, mais également impose l'obligation, si une décision est
prise dans ce sens, de s'adresser à l'inspecteur des institutions
financières et de respecter les critères imposés à
toute compagnie d'assurances et donc de s'assurer que les fonds d'assurance qui
sont créés devront respecter les critères de
solvabilité, et ce, dans le meilleur intérêt, bien
sûr, de la protection recherchée.
M. le Président, j'aimerais dire ceci: Je ne crois pas que le
projet de loi résoudra tout le problème de
l'assurance-responsabilité professionnelle pour les membres des
différentes corporations professionnelles, mais je crois qu'il permettra
à certaines corporations de trouver une solution partielle à ce
problème auquel elles font face. J'ose espérer que le Barreau
peut-être, la Chambre des notaires très certainement, voudront se
prévaloir de cette loi et pourront par conséquent constituer des
fonds d'assurance et peut-être fournir une assurance de base, quitte
à ce qu'elle soit complétée par la négociation de
polices d'assurance avec le secteur privé.
M. le Président, j'ose espérer et croire également
qu'un signal très clair sera envoyé par cette loi aux compagnies
d'assurances privées qui se sont désintéressées ou
ont négligé ce secteur et qu'en conséquence elles verront,
dans l'intervention du gouvernement, un signal très clair pour leur
demander d'assumer pleinement leurs responsabilités dans toute la mesure
du possible et que peut-être en ayant une complémentarité
entre les assurances fournies par le secteur privé et les fonds
d'assurance constitués par les corporations professionnelles, on pourra,
ce faisant, donner cette protection requise pour permettre aux membres des
corporations professionnelles de pratiquer leur profession tout en fournissant
au public qui utilise leurs services la protection nécessaire, si jamais
il y avait erreur ou omission dans l'accomplissement des actes professionnels.
(1 heure)
II s'agit donc, M. le Président, d'une loi importante pour les
corporations professionnelles et, indirectement, pour le public en
général. J'oserais espérer, étant donné le
bien-fondé de cette loi, que les membres de cette Assemblée, et
l'Opposition en particulier, appuieront notre démarche en ce sens. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais bien, si vous
voulez, avant que je commence mon intervention, que vous vous assuriez qu'il y
a quorum dans cette Chambre parce que j'aime que notre règlement soit
appliqué.
Le Vice-Président: Très bien, M. le
député de Lévis, je vérifie immédiatement.
Nous avons maintenant quorum et vous pouvez commencer, M. le
député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je dirais que le ministre
délégué aux Finances a présenté un projet de
loi préparé sous l'ancien gouvernement et on se rend compte que
le projet de loi est meilleur cette fois-ci.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Garon: Alors que le projet de loi 38, la Loi sur la
transformation des produits marins, était d'un cru libéral, on
s'est rendu compte que le projet de loi était inutile.
Par ailleurs, lorsqu'un projet de loi est préparé sous
l'ancien gouvernement, les ministres ont l'habitude de dire: Telle chose est
due à l'ancien gouvernement, et là, j'ai été
surpris de constater que le ministre délégué aux Finances
n'a pas dit que le travail avait été fait sous l'ancien
gouvernement, qu'il y avait eu beaucoup de consultation, beaucoup de travail
accompli pour la présentation de ce projet de loi, le projet de loi 44,
Loi sur l'assurance-responsabilité professionnelle.
M. le Président, le principe de ce projet de loi est bon. C'est
pourquoi nous allons voter en faveur. Nous allons même aider le ministre
à faire adopter ce projet de loi qui a été
préparé sous le gouvernement du Parti québécois.
Nous avons laissé les tiroirs pleins de projets et les ministres tardent
un peu à les présenter pour faire croire qu'ils ont
été préparés sous leur gouvernement, ce projet de
loi aurait facilement pu être présenté l'an dernier, au
début de 1986, puisqu'il était déjà prêt.
Essentiellement, le projet de loi est bon parce qu'on sait
qu'aujourd'hui, de plus en plus, les gens ne craignent pas de poursuivre les
professionnels en justice. On sait même que, dans certains domaines, on
trouve principalement, à la suite de l'exemple américain... Il
faut dire que nous n'avons pas été des innovateurs dans le
secteur parce que c'est aux États-Unis que les avocats ont pris
l'habitude de poursuivre dans le domaine de la responsabilité
professionnelle et que les tribunaux ont également pris l'habitude
d'accorder des dédommagements très importants dans le domaine de
la responsabilité professionnelle. Les montants impliqués dans
plusieurs cas étant considérables, si les professionnels
n'étaient
pas eux-mêmes très fortunés ou encore s'ils
n'avaient pas d'assurance, il arrivait que les clients de ces professionnels ne
soient pas dédommagés, même s'ils avaient gagné
devant les tribunaux. On se retrouvait, au fond, devant des
responsabilités professionnelles reconnues par les tribunaux, mais qui
ne connaissaient pas d'aboutissement au point de vue du dédommagement de
ceux qui avaient fait valoir leur droit.
M. le Président, j'aimerais bien, si c'était possible,
que...
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, en fait, je vais demander à l'ensemble des parlementaires
de contribuer au décorum de nos travaux et de respecter le droit de
parole de l'intervenant. M. le député de Lévis,
allez-y.
M. Garon: M. le Président, essentiellement, aujourd'hui
les citoyens craignent moins de faire valoir leurs droits devant les
professionnels, puisqu'une jurisprudence commence maintenant à
s'établir qui est beaucoup plus forte qu'auparavant par rapport aux
montants en dédommagement qui sont accordés. Autrefois, on
parlait beaucoup plus de dommages moraux; maintenant, on parle de dommages
réels, et les sommes accordées par les tribunaux sont assez
importantes.
Dans certains cas, les frais d'assurance individuelle peuvent être
considérables. Je vous ferais remarquer qu'à ce point de vue,
beaucoup d'associations professionnelles visent à en arriver à
avoir un genre d'assurance collective pour pouvoir pallier les coûts
considérables que peut représenter la responsabilité
professionnelle. Dans le cas des assurances, on sait que les assurances
individuelles...
M. le Président, il me semble qu'il est peut-être normal...
On n'est pas dans...
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, je ne peux découvrir l'origine du bruit que j'ai entendu.
J'aviserai promptement les députés qui s'amusent à faire
des bruits de ce genre que ce n'est pas la place pour le faire. Je les
inviterais à quitter les lieux immédiatement, s'ils le
désirent. Autrement, je leur demande de respecter l'ensemble des
parlementaires et notre institution, et d'écouter celui qui parle
présentement. Allez-y, M. le député.
M. Garon: M. le Président, ce n'est pas l'Opposition qui a
choisi de faire siéger la Chambre, de nuit. Le leader du gouvernement a
choisi de faire siéger la Chambre, de nuit, il y a un whip, il y a des
gens qui sont chargés de la discipline dans son parti. J'espère
qu'ils feront en sorte que, si on siège de nuit, qu'on siège
d'une façon raisonnable et non pas en faisant des bruits qu'on entend
plus dans une cour d'animaux que dans le salon bleu de l'Assemblée
nationale.
Une voix: Allez! Allez!
M. Garon: Je dirai que celui qui dit "allez" devrait faire son
travail comme whip afin de faire respecter l'ordre dans cette Chambre.
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, je ne permettrai pas qu'on fasse - un instant, monsieur, s'il
vous plaît: - des discussions de cet ordre. Je vous demanderais de vous
en tenir simplement à vos propos. Si quelqu'un doit rappeler les gens
à l'ordre, c'est le président. Vous vous adresserez à moi
et je ferai en sorte de faire respecter l'ordre dans cette
Assemblée.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais beaucoup que vous
fassiez respecter l'ordre, de vous-même, sans que je sois obligé
de faire appel à vos talents et à vos services à chaque
fois.
Le Vice-Président: Allez-y, M. le député de
Lévis.
M. Garon: Vous êtes obligé de faire respecter le
règlement, de vous-même.
M. le Président, je dis que les corporations professionnelles...
J'ai l'intention de parler sur le projet de loi. Je trouve que c'est un projet
de loi intéressant dont l'objectif est louable et avec lequel nous
allons concourir. Je pense que ce projet de loi sera plus utile que d'autres
qui sont souvent présentés à cette Assemblée et
pour lesquels le gouvernement doit forcer la main pour essayer de les faire
adopter. Ce sont des projets de loi qui sont méchants, qui sont mauvais
ou inutiles et qui vont occasionner aux citoyens des coûts additionnels,
qui vont représenter des frais exhorbitants ou encore une paperasse
inutile pour réaliser des objectifs irréalisables dont les
mesures préconisées par le gouvernement ne vont pas dans le sens
de la réalisation de ces objectifs.
Ce projet de loi est bon parce qu'il va permettre un genre
d'assurance-groupe de base dont pourront se servir les corporations
professionnelles, avec un certain caractère obligatoire afin que tous y
contribuent. Dans le domaine des associations professionnelles qui se sentent
une responsabilité, ce sont les membres de la corporation
professionnelle qui ne sont coupables de rien qui doivent payer pour ceux qui
représentent des risques, pour leurs confrères qui encourent des
dommages. C'est le cas pour le Barreau où des avocats qui n'ont commis
aucune faute doivent payer un montant additionnel pour couvrir des
dédommagements. En effet, le Barreau
s'occupe de dédommager les citoyens qui y ont droit pour les
membres du Barreau qui n'ont pas les moyens de payer, parce qu'ils ne sont pas
assez riches ou encore parce qu'ils n'ont pas d'assurance pour couvrir leurs
fautes dans leur pratique. Il est beaucoup plus responsable de faire partager
le coût collectif du permis de pratique par l'ensemble des membres, quel
que soit le secteur, pour donner une base d'assurance-responsabilité
à chacun des membres. À ce moment-là, on peut garantir aux
clients de ces professionnels qu'une certaine responsabilité est
garantie par l'assurance-responsabilité professionnelle. (1 h 10)
M. le Président, ceux qui vont surtout bénéficier
de ces mesures sont ceux qui, souvent, n'ont pas d'autres recours. Ce sont
souvent des citoyens qui ne sont pas fortunés qui font appel à
des services professionnels qu'ils n'ont pas véritablement reçus
ou dont la qualité était douteuse. Aujourd'hui, on commence
à fonctionner d'une façon beaucoup plus égalitaire dans
notre société, de sorte qu'on considère que ceux qui
assument des services professionnels doivent garantir une certaine
qualité de services. On se rend compte aussi que, de plus en plus, dans
les organismes professionnels ou dans les corporations professionnelles, il y a
des gens qui sont chargés de surveiller l'éthique
professionnelle, de surveiller la pratique professionnelle et qui ont
créé un organisme où ceux qui ont fait affaires avec les
membres de ce groupe professionnel peuvent porter plainte, peuvent se plaindre.
A ce moment-là, la corporation professionnelle fait enquête pour
vérifier si celui qui fait l'objet d'une plainte mérite
d'être condamné d'une façon ou d'une autre par la
corporation professionnelle, par son organisme, par sa section
disciplinaire.
Nous avons eu l'occasion d'étudier justement cet
après-midi un projet de loi concernant des plaintes qui peuvent
être portées dans un domaine particulier. Il s'agissait justement
de tenter d'améliorer ce secteur. Je ne veux pas entrer dans le secteur
particulier des courtiers d'assurances au sujet duquel nous aurons l'occasion
de faire des remarques lorsque le projet de loi 3 sera appelé en cette
Chambre. Sauf que le projet de loi qu'il y a ici va permettre -dans le cadre de
la loi, puisque ce projet de loi va modifier la Loi sur les assurances, la Loi
sur le Barreau et le Code des professions à toute corporation
professionnelle d'imposer à ses membres l'adhésion à un
contrat collectif d'assurance conclu par elle et de créer, avec
l'autorisation du ministre des Finances, un fonds d'assurance de la
responsabilité professionnelle. Il vise aussi à assurer la
répartition du coût de cette assurance-responsabilité entre
tous les membres de cette corporation professionnelle ou certaines classes
d'entre eux, en fonction du risque qu'ils représentent. Cela veut dire
que les membres d'une corporation pourront, si la corporation en décide
ainsi, créer un cadre d'opération pour
l'assurance-responsabilité professionnelle pour faire en sorte que tous
ceux qui représentent des risques contribuent à ce fonds.
Je donne l'exemple du Barreau. Au Barreau, il y a des avocats qui
pratiquent leur profession. Ils assument donc une certaine
responsabilité professionnelle personnelle dans le cadre de leur
pratique. Il y en a aussi d'autres qui sont membres du Barreau qui ne font pas
cette pratique et qui encourent cette responsabilité. Pour une raison ou
une autre, étant membres de la corporation, ils pourraient aussi
encourir des responsabilités, mais qui sont moindres que pour ceux qui
ont une pratique régulière.
C'est évident qu'il y a plusieurs bureaux qui ont un fonds
d'assurance. Dans un ordre professionnel où il peut y avoir des
poursuites importantes, une assurance de base peut aider à faire en
sorte que le supplément qui sera couvert coûtera moins cher
puisqu'il y aura déjà une assurance de base en fonction
d'ajustements qui peuvent être pris avec des organismes d'assurance par
rapport à une assurance excédentaire.
Je donne des exemples. On s'est rendu compte à un moment
donné, il y a quelques années, dans le domaine agricole, que
l'assurance individuelle devenait prohibitive parce que les risques
étaient très grands et les coûts très
élevés, de sorte que de moins en moins d'agriculteurs
s'assuraient. On a établi un régime d'assurance collectif
où, là, presque tous se sont assurés. Dans une assurance
collective, certains ont jugé opportun d'avoir une assurance
individuelle excédentaire pour couvrir certains risques qui leur
étaient particuliers. Mais parce que l'assurance collective de base
était là, les coûts étaient beaucoup moins grands
pour chacun individuellement. À ce moment-là, l'habit sur mesure
que pouvait représenter la prime excédentaire pour une
responsabilité particulière était beaucoup moins
onéreux pour chacun des membres.
Ce projet de loi va donc permettre à chacune des corporations
professionnelles qui relèvent du Code des professions de même
qu'au Barreau, puisque qu'il y a une loi particulière qui le
régit dans son cas, de faire appel à cette loi et de demander
l'autorisation du ministre des Finances...
Une voix: Au ministre délégué aux
Finances.
M. Garon: Au ministre délégué aux Finances,
parce qu'on disait dans le projet de loi: le ministre des Finances. Je vois ici
dans le projet de loi... Encore un projet de loi qu'il va falloir amender juste
en le
regardant, puisqu'on a déjà prévu que
c'était le ministre des Finances. Je suppose que le ministre
délégué aux Finances, qui se fait le parrain du projet de
loi, va vouloir assurer l'administration de cette loi.
De toute façon, qu'il s'agisse de l'un ou l'autre, on dit: "Une
corporation professionnelle (...) peut, si elle est autorisée par le
ministre et si elle est titulaire d'un permis de l'inspecteur
général - il s'agit de l'Inspecteur général des
institutions financières - assurer la responsabilité
professionnelle de ses membres." Je pense qu'il s'agit d'un bon niveau
d'autorisation, puisque l'Inspecteur général des institutions
financières est déjà le personnage approprié pour
donner son avis par rapport à cette institution financière
particulière qu'est l'assurance-responsabilité professionnelle,
et qu'il est déjà l'inspecteur général des
assurances, puisque aujourd'hui c'est lui qui couvre ces différents
champs de surveillance.
On dit également: "Aux fins d'obtenir l'autorisation du ministre,
la corporation professionnelle transmet à l'inspecteur
général une requête signée par son président
établissant: 1 qu'un règlement a été
approuvé pour imposer à ses membres ou à certaines classes
d'entre eux l'obligation de souscrire à un fonds d'assurance de la
responsabilité professionnelle..." C'est très important, M. le
Président, puisqu'il faut que tous les risques de base soient l'objet de
la contribution de chacun des membres d'un ordre professionnel. Je ne veux pas
dire que, selon les différentes catégories, cela va être le
même montant d'une catégorie à l'autre, parce qu'il y a
certains membres qui représentent des risques plus grands, mais il y
d'autres membres qui représentent des risques moins grands. Le
règlement qui sera présenté avec la requête devra
indiquer qu'il a été approuvé pour imposer aux membres de
la corporation ou à certaines classes d'entre eux l'obligation de
souscrire à un fonds d'assurance de la responsabilité
professionnelle.
Deuxièmement, "qu'elle a adopté une résolution pour
créer un tel fonds d'assurance..." M. le Président, si c'est
possible...
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, effectivement, il y a des députés qui font quelques
conversations, mais je n'entends pas ces conversations d'une façon
très forte et il y a quand même une coutume qui veut que certains
parlementaires peuvent discuter. Je vais demander la collaboration des gens, de
ne pas avoir un ton trop élevé, de faire cela à voix
très basse, pour ne pas vous déranger. D'accord? Continuez votre
exposé.
M. Garon: Le règlement dit clairement que chaque
député doit être à son siège.
C'est prévu par le règlement. Je ne vous demande pas
quelque chose d'extraordinaire, je vous demande d'appliquer le
règlement, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, d'accord. Effectivement, si vous m'y obligez, comme
président, je dois faire respecter strictement le règlement. Je
vais demander à tous les députés d'être à
leur siège. Si vous le voulez, dans ces circonstances, je l'exige, je
n'ai pas le choix. Donc, chacun des députés, veuillez prendre vos
places! M. le député de Lévis, allez-y!
M. Garon: M. le Président, ce n'est pas moi qui ai
demandé de siéger la nuit, c'est le gouvernement qui fait cela,
mais j'espère qu'à ce moment-là il est capable de garder
la discipline dans ses rangs pour que les travaux de nuit soient valables.
Autrement, les travaux que nous faisons la nuit deviennent une bouffonnerie,
parce que les députés semblent trop fatigués pour
siéger et, pour d'autres raisons, semblent un peu trop joyeux. Alors,
j'aimerais que les gens qui sont en cette Chambre...
M. Gratton: M. le Président.
Le Président: Sur une question de règlement, M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, si le député de
Lévis a des accusations à porter, s'il a des allusions à
faire, qu'il ait le courage de dire franchement ce qu'il pense ou ce qu'il veut
dire; qu'il cesse de laisser planer des doutes sur le comportement des
députés ici à l'Assemblée nationale. S'il a le
moindrement de courage, s'il reproche à des députés
quelque incapacité que ce soit, qu'il les nomme, qu'il dise de quoi il
parle et là on pourra lui donner la réplique, M. le
Président.
M. Garon: M. le Président.
Le Président: M. le député de Lévis,
allez-y! (1 h 20)
M. Garon: Pour être bien franc, c'est le leader du
gouvernement qui nous demande de siéger à cette heure tardive.
C'est son travail et son courage de faire respecter les règlements de la
Chambre.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président: Question de règlement, M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, ma décision, comme
leader, de faire siéger l'Assemblée nationale a été
prise en
consultation avec l'Opposition, avec le leader de l'Opposition. Si le
leader de l'Opposition était ici ce soir, il confirmerait qu'on a
dressé ensemble un programme législatif pour la semaine, pour la
journée, qu'il n'a pas, évidemment, à agréer, mais
dont il était informé. Si le député de Lévis
a des récriminations à faire de ce côté, je le prie
de les adresser au leader de l'Opposition. Quant à l'opportunité
ou non de siéger aux heures où nous siégeons, le
règlement le permet, M. le Président. Autrement, il y a longtemps
que vous auriez ajourné. Si le député de Lévis a
quelque chose à dire sur le projet de loi, je vous inviterais à
lui demander d'être pertinent et, s'il n'a rien à dire, on va
passer à autre chose.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: À la suite de cette question de
règlement, M. le député de Lévis, je vous demande
de vous en tenir au projet de loi en discussion.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais si Triplement vous
dire que je ne voudrais pas être obligé de faire appel à
vos services pour faire respecter le règlement en cette Chambre. Je
pense que c'est le gouvernement qui a demandé de faire siéger la
Chambre à cette heure-ci et on doit siéger d'une façon
aussi sérieuse à cette heure-ci que pendant la journée.
Autrement, qu'on demande l'ajournement si on n'est pas capable de le faire. Le
leader du gouvernement a bien fait d'ajouter que nous n'avons pas...
Le Vice-Président: VI. le député de
Lévis, simplement... Vous m'avez demandé, M. le
député de Lévis, il y a environ trois minutes, de faire
respecter intégralement le règlement, ce que je vais faire
actuellement ici, et je vous demande que vos propos s'en tiennent au projet de
loi en discussion. Je vous cède la parole.
M. Garon: M. le Président, je vais vous dire qu'il y a un
règlement, et j'aimerais que vous le fassiez respecter sans que je vous
le demande chaque fois. Je pense que c'est votre devoir de le faire. Je me sens
dérangé dans mon discours, je suis à environ trois pas ou
à quelques pas de vous et j'imagine que vous entendez aussi ces bruits
et je ne voudrais pas être obligé de faire appel à vos
services chaque fois que je les entends. Je n'ai pas porté d'accusation
envers qui que ce soit, j'ai dit: S'il y en a qui sont trop joyeux en cette
Chambre, que le leader du gouvernement les fasse remplacer par d'autres plus
tranquilles et que les gens qui veulent être joyeux le soient ailleurs
que dans la Chambre de l'Assemblée nationale où on étudie
un projet de loi actuellement...
Des voix: Ah! Ah!
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, vous êtes le premier à m'avoir demandé de
faire respecter le règlement et je le ferai respecter. Je vous ferai
remarquer que la présidence peut se lever pour rappeler les
députés à l'ordre. Il n'y a pas d'obligation, je dois le
faire suivant ma perception du déroulement des débats. Si vous,
de votre côté, vous jugez que quelque chose va à l'encontre
du règlement, c'est votre devoir et c'est votre droit le plus strict de
le faire, mais vous devez me demander d'appliquer les règlements dans
certaines circonstances et me rappeler les articles pertinents que vous voulez
que j'applique, ce que je ferai avec grand plaisir. C'est mon travail, c'est
mon devoir. Présentement, je vais vous rappeler, selon le devoir que
j'ai à faire, à nouveau à l'ordre en vous ramenant aux
débats en discussion et non plus sur quelque autre sujet. Allez-y.
M. Garon: M. le Président, c'est avec un grand plaisir
puisque j'ai choisi de participer à ce débat et d'utiliser le
temps de parole que le règlement me donne pour parler justement du
projet de loi 44, Loi sur l'assurance-responsabilité professionnelle,
qui a été présenté en cette Chambre le 13 mai 1987
et qui a été appelé par le leader du gouvernement, pour la
première fois, à une heure du matin le 17 juin, presque six
semaines plus tard. Ce projet de loi aurait pu être appelé
à d'autres périodes dans cette Chambre, alors qu'il n'y avait
personne à l'Assemblée nationale et qu'on ajournait presque
après la période des questions puisque le leader du gouvernement
ne jugeait pas opportun de faire travailler l'Assemblée nationale sur un
projet de loi d'une telle importance qui va couvrir des milliers de personnes
qui font affaire avec des millions de personnes au Québec. Le leader du
gouvernement, lui, ne considérait pas que c'était important et il
a choisi d'attendre une heure du matin, le 17 juin 1987, pour qu'on parle de
l'assurance-responsabilité professionnelle.
M. le Président, on évaluera le sérieux... Et je me
rappelle, à l'époque où les libéraux étaient
dans l'Opposition, à quel point ils voulaient mieux
légiférer et ne pas faire de travaux de nuit...
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président: Question de règlement, M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui. Pourrait-on rappeler le député de
Lévis à la pertinence des débats? Il faut parler
présentement de l'adoption du principe d'un projet de loi et non de
la
réforme parlementaire.
M. Garon: M. le Président, je pense que...
Le Vice-Président: Donc, M. le député de
Lévis, je vous rappelle à la pertinence et je vais vous citer
l'article 239: "Le débat porte exclusivement sur l'opportunité du
projet de loi, sur sa valeur intrinsèque, ou sur tout autre moyen
d'atteindre les mêmes fins." Je vous cède la parole.
M. Garon: Je vous ferai remarquer, M. le Président,
justement en vertu de l'article que vous venez de lire, que je parle de
l'opportunité de présenter ce projet de loi la nuit et vous me
dites que l'objet, c'est justement de porter sur l'opportunité du projet
de loi. Je parle strictement sur l'opportunité du projet de loi, mais je
parlais en même temps de l'opportunité de le présenter la
nuit.
Mais, mon point étant marqué, j'aurai l'occasion d'y
revenir un peu plus tard dans le cours du débat de cette soirée,
puisque j'ai l'avantage de ne pas trop me fatiguer la nuit. Alors, je fais
partie de ceux qui se sentent très à l'aise très tard le
soir, mais j'aimerais que...
M. Fortier: ...vous êtes fatigué.
M. Garon: Pardon? Je remarque le député d'Outremont
qui est ici présent en cette Chambre et avec lequel on a
participé en commission parlementaire ce matin, cet après-midi et
ce soir jusqu'à minuit. Là, une fois qu'il aura passé son
tour, je continuerai avec d'autres. Je peux vous dire qu'il n'y a pas de
problème à condition que les gens qui sont présents soient
d'accord pour le faire.
M. le Président, dans ce débat de deuxième lecture,
sur le principe de ce projet de loi 44 concernant
l'assurance-responsabilité professionnelle, je dis que c'est un bon
principe, un bon projet de loi, parce qu'il a été
préparé sous le gouvernement précédent. Mais
j'aimerais que le ministre nous en dise un mot tout à l'heure. Qu'il
nous dise, lorsqu'il parlera, les consultations qui ont été
faites par le précédent gouvernement. Cet après-midi,
lorsque nous étudiions un projet de loi sur les courtiers d'assurances,
on a vu qu'il y avait déjà un avant-projet de loi qui avait
été présenté en 1985, qui en couvrait beaucoup plus
large que le petit projet de loi qu'avait présenté le ministre
dans une session récente.
On a l'impression parfois que des projets qui ont été
présentés sous l'ancien gouvernement, on en retarde un peu la
présentation pour faire croire aux gens qu'ils sont l'oeuvre du nouveau
gouvernement alors que, dans le fond, les cahiers étaient prêts,
tout était prêt pour dépôt dès 1986, puisque,
quand un parti s'en va en élection en étant au gouvernement, il y
a déjà toute une série de projets pour l'année qui
s'en vient.
Le ministre délégué aux Finances a eu l'immense
avantage d'avoir un cartable préparé, des consultations
effectuées, des scénarios de projets de loi ou un projet de loi
de base préparé et qu'il pouvait présenter au moment
choisi. Il a choisi de le présenter, en accord, j'imagine, avec le
leader de son gouvernement, le 13 mai 1987, qui, lui, a décidé de
l'appeler à une heure du matin le mercredi 17 juin 1987.
Je vois également que ce projet de loi sera divisé, qu'il
ajoutera une section particulière dans la loi des assurances, qu'il
ajoutera une section particulière également pour couvrir un
chapitre sur les corporations professionnelles et qu'il y aura
différentes sections: une première section au sujet de
l'autorisation d'assurer les membres de la corporation, la section II sur
l'administration du fonds d'assurances et la section III concernant l'actif du
fonds d'assurance et les dispositions particulières concernant la Loi
sur le Barreau et le Code des professions.
C'est un projet de loi, je suis persuadé, qui va être bien
reçu des différents groupes professionnels. J'aurais aimé
que le projet de loi ait été présenté un peu plus
tôt, pour qu'on puisse en discuter moins à la course que comme ce
sera le cas, sans doute, au cours des prochains jours. Je ne sais pas, puisque
le leader du gouvernement ne nous a pas dit si le projet de loi était
présenté en deuxième lecture pour rester sur le carreau
jusqu'à l'automne ou s'il avait l'intention de le privilégier par
rapport à d'autres projets de loi, pour adoption avant l'ajournement de
juin.
On sait qu'il y a actuellement toutes sortes de projets ou de rumeurs
qui circulent dans les couloirs du parlement concernant les intentions du
gouvernement au cours des prochains jours. Mais je vous dirai qu'il s'agit,
dans notre esprit, d'un projet de loi dont l'approbation va permettre
l'application de fonds d'assurances qui vont être
bénéfiques et qui vont servir non seulement les membres des
corporations professionnelles, mais surtout la clientèle des
associations professionnelles. (1 h 30)
Les clients des membres des associations professionnelles sont vraiment
mal pris lorsqu'ils ont obtenu des dommages et intérêts, qu'ils
ont réussi à prouver leur point devant les tribunaux et
qu'ensuite ils se retrouvent dans une situation où le professionnel est
insolvable. Aujourd'hui, c'est de plus en plus le cas, comme je le mentionnais
tout à l'heure, puisque les gens craignent moins de faire valoir leurs
droits qu'autrefois devant les professionnels. Autrefois, la mauvaise pratique,
l'oubli de certaines responsabilités professionnelles ou
encore la négligence n'étaient pas fortement
sanctionnés. Je pense qu'on créait deux classes de citoyens dans
notre monde: les gens qui dans leur fonction normale devaient être
responsables et les professionnels qui ne garantissaient pas autant leurs
services que des gens devaient le faire dans leur travail quotidien alors
qu'ils étaient payés beaucoup moins cher.
Aujourd'hui, je pense que c'est une marque qui montre à quel
point le droit s'est démocratisé, à quel point le droit
appliqué par les tribunaux tient davantage compte des citoyens de tous
les jours. Il n'établit pas de classes autant qu'on le constatait
autrefois. Auparavant, réussir à gagner une plainte en dommages
et intérêts contre un professionnel, c'était quand
même assez rare. Il était difficile de faire réagir les
tribunaux. On se rend compte que l'exemple des tribunaux américains a
maintenant une influence considérable sur le droit au Canada et au
Québec. Aujourd'hui, les tribunaux ne se gênent pas pour accorder
des montants importants pour des causes de responsabilité
professionnelle.
Par exemple, dans le domaine de la pratique médicale, quand on
pense que quelqu'un peut être handicapé pour la vie à cause
d'une mauvaise pratique, à cause d'un oubli, il faut, par
conséquent, des montants considérables pour assurer à
quelqu'un un règlement en dommage qui va durer pendant toute une vie. On
peut également constater que, dans l'administration du droit, des sommes
d'argent importantes peuvent être en cause pour différentes
pratiques. Je parle des domaines de la médecine et du droit qui sont
mieux connus, ainsi que d'autres domaines. Je pense, par exemple, à un
ingénieur qui aurait mal conçu un pont et celui-ci va tomber, ou
encore qui a mal conçu telle bâtisse et celle-ci va
s'écrouler. Si la faute professionnelle est démontrée, il
s'agit de dommages qui peuvent être considérables, non seulement
aux biens corporels, mais aussi aux personnes qui auront été
victimes de ces dommages.
Il est évident que l'individu peut être dans
l'impossibilité de répondre à ses obligations. Il serait
donc injuste que ce soient des gens d'une corporation, qui à partir de
leurs propres fonds, pour assurer la respectabilité de leur profession,
devraient payer des sommes considérables individuellement pour
dédommager la victime d'un de leurs confrères.
Aujourd'hui, avec ce projet de loi, qu'il nous fera plaisir
d'étudier en commission parlementaire, les gens pourront donc s'adresser
à un fonds d'assurance-responsabilité professionnelle qui pourra
garantir le dédommagement des victimes des professionnels de telle ou
telle corporation.
Je ne veux pas être plus long. Je voulais simplement indiquer que
nous étions d'accord sur ce projet de loi. Contrairement à ce que
pense le leader du gouvernement, dans plusieurs projets de loi, j'ai
collaboré avec le ministre délégué aux Finances. Je
n'ai pas toujours été d'accord à 100 % avec lui. Parfois,
je lui ai fait des propositions qu'il a acceptées. Dans d'autres cas, je
pense qu'il a eu la malheureuse idée de ne pas les accepter mais, d'une
façon générale, je pense que nous avons
étudié plusieurs projets de loi ensemble et nous y avons
travaillé. Ce projet de loi provenait de l'ancien gouvernement et
j'aimerais beaucoup que le député d'Outremont, ministre
délégué aux Finances, reconnaisse ce fait dans sa
réplique, même si je vois le leader du gouvernement qui lui
suggère sûrement de n'en rien faire. Je vous remercie, M. le
Président.
M. Pierre-C. Fortier (réplique)
M. Fortier: M. le Président, une chance que le
député de Lévis était pour le projet de loi, parce
que, s'il avait été contre, combien de temps aurait-il
parlé? Il a utilisé à peu près ses 55 minutes pour
nous dire que c'était un très bon projet de loi. C'est vrai. On
règle un problème que le gouvernement... Oui, 35 minutes. C'est
un projet de loi qui, contrairement à ce qu'a dit le
député de Lévis, n'a pas été
préparé par le gouvernement précédent. J'ai ici
devant moi, M. le Président, une coupure du journal Le Barreau du
1er février 1987, un éditorial signé par le
bâtonnier du Québec, M. Serge Ménard, et je le lis: Le 8
janvier 1987 s'est produit à Québec le déblocage le plus
important dans le dossier de l'assurance-responsabilité professionnelle
depuis la dernière assemblée générale des membres
du Barreau du Québec en mai 1986. Cette réunion regroupait des
représentants du ministère des Institutions financières et
de l'Office des professions, dont son président, Me André
Desgagné, du Barreau. On s'est vite entendu pour mettre sur pied un
comité de travail devant élaborer les changements
législatifs nécessaires.
C'est donc dire, M. le député de Lévis, M. le
Président, que contrairement à ce que vous avez laissé
entendre, il n'y avait aucune législation quand nous avons
constaté l'existence d'un problème. Mes hauts fonctionnaires ont
travaillé en collaboration avec les gens de l'Office des professions et,
ensemble, nous avons préparé cet excellent projet de loi qui
recevra l'appui de tous les membres de cette Assemblée, parce qu'il est
excellent et qu'il répond au bien-être de la population. Je vous
remercie.
Le Vice-Président: Le débat étant maintenant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du principe du projet de loi
44, Loi sur l'assurance-responsabilité professionnelle, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je voudrais faire motion
pour que le projet de loi soit déféré à la
commission parlementaire du budget et de l'administration et pour que celle-ci
soit présidée par un président de séance.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: VI. le Président, je vous prierais maintenant
d'appeler l'article 49 du feuilleton.
Projet de loi 146 Adoption
Le Vice-Président: L'article 49 du feuilleton. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose
maintenant l'adoption du projet de loi 146, Loi modifiant la Loi sur les grains
et la Loi sur la mise en marché des produits agricoles.
Je cède la parole à M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Je vous remercie, M. le Président.
Effectivement, le projet de loi 146, déposé à
l'Assemblée nationale le 12 novembre 1986, a été
étudié ici même en deuxième lecture le 16
décembre dernier. La commission parlementaire de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation s'est réunie dans l'intersession et
c'est le 10 mars dernier que le rapport de la commission était
déposé et adopté ici à l'Assemblée
nationale.
Les circonstances voulant que l'on doive siéger même s'il
est tard, compte tenu de la très difficile et délicate
disponibilité du député de Lévis, qui, comme on le
sait, a plusieurs responsabilités...
M. Paré: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président: M. le ministre, je m'excuse. Il y a un
appel au règlement. M. le député de Shefford.
M. Paré: Je m'excuse de déranger le ministre de
l'Agriculture, parce que c'est un sujet très important; mais, justement
parce que c'est un sujet intéressant, je vous demanderais d'appeler le
quorum de façon que l'on soit plus nombreux, les députés,
à être conscients du problème que l'on discute
présentement. (1 h 40)
Le Vice-Président: Très bien, je vérifie le
quorum. Qu'on appelle les députés!
Qu'on sonne à nouveau les cloches, s'il vous plaît, et
qu'on appelle les députés à nouveau!
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Je constate maintenant que nous avons
quorum. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, vous pouvez poursuivre votre intervention.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je constate qu'on
ne formait pas quorum jusqu'à ce que le député de...
Une voix: Lévis.
M. Pagé: M. le Président, nous ne formions pas le
quorum jusqu'à ce que le député de Lévis se joigne
à nous. Comme on l'a constaté à l'Assemblée,
dès le moment où l'appel au quorum a été
lancé, il s'est empressé de faire comme d'autres
députés qui, légitimement, ont à travailler dans
leurs dossiers et qui avaient quitté la Chambre. Ils sont revenus,
conscients qu'ils sont de l'impact de ce projet de loi 146, pour en avoir
entendu parler à plusieurs reprises, parce que nous en avons
discuté ici pendant plusieurs heures.
Comme on le sait, le député de Lévis a
consommé plusieurs heures de la Chambre, que ce soit le 10 mars dernier
au moment de la prise en considération du rapport ou le 16
décembre 1986, au moment de l'adoption du principe du projet de loi.
Comme on le sait, plusieurs députés sont intervenus. Je voudrais
évidemment souligner la contribution importante des
députés libéraux qui se sont associés à
cette démarche législative, qui en saisissent toute la
portée et tout le sens et qui ont été intimement
associés à son élaboration. C'est explicable, compte tenu
de l'heure, que certains députés, étant donné leurs
charges nombreuses et les obligations très lourdes inhérentes
à la représentation d'un collège électoral, vaquent
à certaines occupations à cette heure-ci et travaillent dans
leurs dossiers pour préparer le menu quotidien de la journée de
demain.
M. le Président, j'en étais, avant d'être interrompu
de façon aussi cavalière par le député de Shefford,
à vous indiquer que ce projet de loi qui est appelé en
troisième
lecture à ce moment-ci a fait l'objet de plusieurs discussions et
de plusieurs échanges. Mais il faut quand même se rappeler que ce
projet de loi vient modifier la Loi sur les grains et la Loi sur la mise en
marché des produits agricoles. L'objectif qui nous anime est de
prévoir par ce projet de loi les dispositions d'ordre technique
auxquelles, j'en suis persuadé d'ailleurs, le député de
Sainte-Anne souscrit, qui permettront à la Régie des
marchés agricoles d'administrer la Loi sur les grains.
Il y a un net avantage à ce que l'application de la Loi sur les
grains soit dorénavant confiée à la Régie des
marchés agricoles puisque, en effectuant la fusion de la Régie
des grains à la Régie des marchés agricoles, la Loi sur
les grains aura une portée plus grande. Il deviendra ainsi possible
d'oeuvrer non pas uniquement dans les domaines du commerce et du classement des
céréales, mais aussi, et c'est l'objectif fondamental qui nous
anime dans cette démarche, dans la mise en marché des
céréales. Cette intégration des activités de la
Régie des grains du Québec à la Régie des
marchés agricoles nous permettra de mieux structurer nos actions faites
au regard de la mise en marché des céréales au
Québec, compte tenu évidemment du mandat de la Régie des
marchés agricoles de s'assurer ou de voir à bonifier par ses
décisions la mise en marché des produits agricoles du
Québec.
M. le Président, en 1986, comme vous le savez sans doute, bien
conscient de l'évolution de l'agriculture, la problématique que
vivent les productrices, les producteurs et les utilisateurs de
céréales est fort différente de la situation qui
prévalait lors de l'adoption de la Loi sur les grains en 1979. Depuis
l'adoption de la Loi sur les grains, la conjoncture du marché mondial
des denrées agricoles a changé complètement
entraînant, particulièrement pour nos
céréaliculteurs, des problèmes très graves et
très aigus de mise en marché.
Les surplus de céréales, ce qu'on appelle dans le langage
le stock de report, sont considérables: 400 000 000 de tonnes en surplus
à l'échelle mondiale par rapport à un niveau normal moyen
d'environ 200 000 000 de tonnes. Les prix mondiaux, comme suite de la guerre
très intense que se livrent la Communauté économique
européenne et les États-Unis, ont chuté de 40 % au cours
des douze derniers mois. En deux ans, les prix moyens auront chuté de
près de 30 %. Cette détérioration de la situation
économique et l'affaiblissement continu de notre position
concurrentielle sur les marchés nous obligent à réagir,
à intervenir et aussi à agir de façon à mieux
structurer la mise en marché des céréales au
Québec. La situation qui a changé nous dicte une autre approche
où production de qualité va de pair, selon nous, et c'est
important... D'ailleurs, c'est au coeur de l'action du gouvernement du Parti
libéral du Québec de tout faire en agriculture pour rentabiliser
et renforcer nos productions pour que les productrices et les producteurs aient
un revenu décent et le juste prix pour les produits qu'ils mettent en
marché. C'est ainsi que, pour nous, une approche de production de
qualité va de pair avec une mise en marché mieux ordonnée,
plus efficace et répondant davantage aux cibles qu'on s'est
fixées.
C'est dans cette optique où la production et la mise en
marché vont de pair que nous présentons ce projet de loi qui vise
à fusionner deux organismes. La Régie des marchés
agricoles a été instituée en vertu de la Loi sur la mise
en marché des produits agricoles. Cet organisme a pour fonction
générale de favoriser une mise en marché ordonnée,
efficace et juste des produits agricoles. De son côté, la Loi sur
les grains, si elle était administrée par la régie des
marchés - et elle le sera lorsque cette loi sera adoptée par mes
collègues de l'Assemblée nationale - lui permettra de
compléter harmonieusement son mandat général puisqu'elle
assure d'une façon particulière l'établissement et
l'application d'un système de classification et des normes de
qualité des grains produits et mis en marché au Québec. Le
fait de confier à la Régie des marchés agricoles
l'application de la Loi sur les grains comporte aussi des avantages
complémentaires pour ce secteur particulier que sont les grains. La
Régie des marchés agricoles assume déjà le mandat,
comme on le sait, de favoriser une mise en marché efficace des produits
agricoles, notamment des grains. La Loi sur les grains ajoute une nouvelle
dimension visant au surplus à favoriser un approvisionnement plus
régulier et plus constant des grains au Québec.
D'autre part, il existe un plan conjoint des producteurs de cultures
commerciales qui s'applique dans le secteur des grains, sous la surveillance de
la Régie des marchés agricoles. Une fusion entre ces deux
organismes permettrait à la clientèle d'avoir affaire à un
guichet unique. Les communications seront assurément plus efficaces et
c'est un dénominateur commun, je pense, des actions du gouvernement de
s'assurer une meilleure efficacité dans l'application de nos lois, de
nos réglementations, d'assouplir et de diminuer évidemment les
contraintes aux utilisateurs et à ceux qui ont à vivre avec ces
lois, avec comme objectif, purement et simplement, que nos productions
agricoles soient plus rentables, et c'est l'un des éléments qui
nous animent dans ce projet. (1 h 50)
Les producteurs agricoles continueront à participer à un
pouvoir décisionnel sur des
sujets qui les concernent, puisqu'ils sont et demeureront
représentés au conseil d'administration de la Régie des
marchés agricoles. Comme on le sait, pour tous les gouvernements qui se
sont succédé à Québec depuis la fondation de la
régie, il y a plusieurs années, il est important que les
régisseurs aient une expérience pertinente en agriculture et
puissent, par cette expérience, contribuer de façon utile et
significative à l'administration des lois qui ont beaucoup de
répercussions sur le vécu quotidien de l'agriculture et de la
mise en marché des produits au Québec.
La fusion de ces deux organismes va donc permettre l'harmonisation des
fonctions sous une seule autorité. Ainsi, ce sera un avantage puisque
les relations et les consultations seront désormais d'autant plus
facilitées. La Régie des marchés agricoles, grâce
à cette fusion, aura maintenant en nnain tous les pouvoirs requis pour
mettre en place et surveiller de façon adéquate l'application des
conditions d'un plan relatif aux grains afin de donner à ce secteur tout
le dynamisme et l'essor souhaités par sa clientèle et aussi par
le gouvernement. Cette intégration s'inscrit parfaitement dans le
processus de rationalisation de nos actions, en termes de gestion publique.
En 1985, nous nous sommes engagés, face à la population du
Québec, à mieux gérer l'État, à mieux
gérer les taxes et les impôts que nos citoyens et nos citoyennes
nous demandent d'administrer. Ils nous envoient annuellement par leurs
impôts et leurs taxes qu'ils paient régulièrement... Nous
nous étions engagés, notamment, à revoir la taille de
l'État ainsi que ses structures. Il nous est apparu et il m'est apparu
très clairement, comme ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, qu'on se devait de revoir certains des organismes qui
relevaient et qui relèvent de ma juridiction.
J'ai échangé des vues avec mes collègues et j'ai
été à même de constater que l'intégration
à la Régie des marchés agricoles du mandat confié
actuellement à la Régie des grains allait, dans un premier temps,
donner plus d'efficacité à la gestion et à la mise en
marché des grains au Québec et, dans un second temps, favoriser
un volet d'actions très concrètes et très
particulières, de préoccupations, d'études et d'analyses
de la part de la Régie des marchés agricoles en ce qui concerne
la mise en marché des grains produits chez nous.
Aussi, une telle mesure nous permet de récupérer 250 000 $
récurrents, annuellement. C'est beaucoup d'argent. Je retiens que
l'Opposition, par la voix de son critique, l'honorable député de
Lévis, a, à plusieurs reprises, exprimé que, pour le Parti
québécois et pour l'Opposition, le fait d'économiser 250
000 $ année après année, ce n'était pas important.
Je vous dirai, M. le Président, que, pour nous, pour notre gouvernement,
animés comme nous le sommes du désir d'une meilleure gestion, de
plus de rigueur et de plus de sérieux dans la gestion des fonds publics,
250 000 $, c'est important. Pour nous, tous les dollars que nous administrons
sont importants, à partir du premier. Nous tentons d'administrer ces
fonds avec beaucoup de parcimonie, beaucoup de circonspection et beaucoup
d'analyse, tout comme si ces montants d'argent nous appartenaient. Oonc, 250
000 $, ce n'est pas négligeable.
Autre élément. Je suis persuadé que le
député va peut-être se référer, pendant les
quelques minutes de son propos, aux recommandations qui sont apparues dans
différents rapports que le premier ministre, comme chef du gouvernement,
a demandés à certains groupes au Québec. Tout à
fait légitimement, il leur a demandé d'analyser et de formuler
des recommandations en ce qui concerne la taille de l'État et ses
structures, la privatisation et la réglementation. Le premier ministre,
l'honorable Robert Bourassa, a clairement indiqué que les rapports qui
ont été produits par des personnes de l'extérieur, mais
aussi des membres de l'Assemblée nationale dont des membres du Conseil
des ministres, constituaient des documents de travail. C'est le cas pour une
des recommandations qui a été acceptée en ce qui concerne
l'intégration de la Régie des grains. Coïncidence
très éloquente, très claire entre la volonté du
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
d'intégrer la Régie des grains à la Régie des
marchés agricoles dans la perspective de mettre en place les
éléments susceptibles de favoriser une meilleure mise en
marché des céréales du Québec et coïncidence
avec l'autre volonté, la recommandation ou l'hypothèse soumise de
revoir cette société.
Le député nous a entretenus à plusieurs reprises du
comité qu'il qualifiait "des sages". Il a référé au
fait que c'était des gens de l'extérieur, dont les gens de la
Banque d'Épargne, si ma mémoire est fidèle, le
président du conseil d'administration et le chef de direction d'un
groupe très important au Québec et bien impliqué dans la
distribution alimentaire, soit le groupe Provigo qui a tout notre respect,
toute notre appréciation.
M. le Président, je retiens que ces arguments ou ces critiques ne
s'avèrent pas fondés. J'ose espérer que le
député de Lévis, au nom de l'Opposition, va tenter de
réhabiliter quelque peu sa position à l'égard du projet de
loi 146. Peut-être que les quelques mois qui auront séparé
l'étude du projet de loi et son adoption en deuxième lecture,
soit entre le 16 décembre 1986 et la prise en considération du
rapport le 10 mars 1987, lui auront permis de se raviser et de
constater que nous mettons en place une structure qui amènera une
efficience améliorée dans le mandat qui appartenait à la
Régie des grains et qui appartiendra à la Régie des
marchés agricoles.
Je suis persuadé que, dans des délais qu'on espère
quand même assez brefs, pas trop longs, on devrait être en mesure
de constater sur le terrain, là où c'est important, pas ici dans
nos discours à l'Assemblée, mais sur le terrain, chez les
productrices et les producteurs de céréales au Québec,
l'effet positif d'une telle mesure. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a un autre intervenant?
Je cède maintenant la parole à M. le député de
Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, j'ai remarqué que des
projets de loi comme le projet de loi 38 sur la transformation des produits
marins ou le projet de loi sur la Régie des grains, le gouvernement
choisit de les faire adopter la nuit, à 2 heures du matin, sachant sans
doute que les cultivateurs...
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président: Un instant, M. le député
de Lévis! Une question de règlement, VI. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Pagé: M. le Président, à plusieurs
reprises, le député de Lévis a référé
au fait que nous siégeons tard. Je peux vous indiquer, M. le
Président, comme ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, que l'étude de mes lois ici à l'Assemblée
nationale a continuellement été reportée à cause de
la non-disponibilité du député de Lévis.
Le Vice-Président: En fait, en ce qui concerne le
règlement, et c'est bon pour tous les parlementaires en cette
Assemblée, les travaux peuvent être appelés par le leader
du gouvernement. Nous sommes en temps utile pour les étudier à
cette heure-ci. Donc, nous ne pouvons faire aucune remarque contre le fait que
nous l'étudiions à 2 heures du matin ou quelque heure que ce
soit. M. le député de Lévis, vous avez la parole.
M. Garon: VI. le Président, je dois dire que je suis
content que vous ayez corrigé les propos du député de
Portneuf en disant que c'est le leader du gouvernement qui appelle les projets
de loi et que nous devons suivre ces projets de loi quand le leader du
gouvernement les appelle. Contrairement à ce que dit le
député de Portneuf, le leader du gouvernement ne s'occupe pas
beaucoup de la disponibilité du député de Lévis qui
doit être disponible à peu près 24 heures par jour puisque
c'est le leader du gouvernement qui décide de les appeler. Mais j'ai
remarqué que le député se sentait plus à l'aise
à 2 heures du matin sachant que les cultivateurs étaient
couchés et dormaient sur leurs deux oreilles parce que, demain, ils vont
se lever à 6 heures du matin. Il n'y a pas beaucoup de cultivateurs
à cette heure comme il n'y a pas beaucoup de pêcheurs non plus qui
écoutaient le débat sur le projet de loi 38 sur la transformation
des produits marins parce que les pêcheurs, eux, se lèvent vers 4
heures du matin, et que même pour certains c'est un peu plus tôt,
pour partir à la pêche. Vous comprendrez que si les ministres, en
temps normal, pendant le jour, sont timides, ils deviennent très
volubiles en plein milieu de la nuit sachant que les clientèles de leurs
ministères ne les écoutent pas. (2 heures)
M. le Président, j'ai remarqué que le député
de Portneuf a fait comme d'habitude. Il nous a parlé de
l'économie internationale, sachant que peu de gens commenteraient ses
propos. Il nous a parlé des surplus internationaux, il nous parlé
de ce qui se passait dans le monde. Sans doute partant d'une
référence, d'une note écrite par un de ses fonctionnaires
du service des études économiques, il a discouru quelque peu sur
ce qui se passe dans le monde. Or, c'est justement parce qu'il y a des surplus
internationaux que nous devons être plus concurrentiels, que nos produits
devraient être encore de meilleure qualité. Lorsqu'il y a des
pénuries les acheteurs sont prêts à acheter les produits
même s'ils sont d'une qualité qui ne se conforme pas à tous
les standards. Mais lorsqu'il y a, comme dans le domaine des
céréales, des surplus importants dans le monde, la qualité
doit être encore plus vérifiée pour pouvoir, justement,
conquérir les marchés qui sont les nôtres.
C'est pourquoi, à toutes les étapes de ce projet de loi,
nous avons voté contre et nous allons encore voter contre ce projet de
loi en troisième lecture, espérant que le ministre va finalement
s'ouvrir les yeux. Je suis d'autant plus à l'aise pour le dire que,
juste avant de présenter le projet de loi 146 il nous a dit qu'il a fait
des grands caucus, des grandes consultations pour abolir la régie. M. le
Président, juste avant ce projet de loi, je félicitais l'autre
ministre qui présentait un projet de loi qui me semblait utile, alors
que je dis que le projet de loi du ministre de l'Agriculture est un projet de
loi inutile, dont nous n'avons pas besoin et qui va être nuisible dans le
secteur agro-alimentaire, dans le secteur agricole parce qu'il va desservir le
marché des céréales et
desservir nos producteurs céréaliers qui ont besoin de cet
organisme.
M. le Président, j'attire votre attention là-dessus parce
que je sais que vous êtes à même de comprendre à
cause de votre statut d'impartialité. Je sais que c'est difficile pour
vous; je vois parfois tous les efforts que vous devez faire pour garder votre
impartialité parce que vous seriez porté, j'en suis
persuadé, à voter avec nous sur certains projets de loi. Sur ce
projet de loi en particulier, le projet de loi sur la Régie des grains,
le député de Portneuf et ministre de l'Agriculture nous a dit
qu'il a fait de vastes consultations, qu'il a eu besoin de l'appui de ses
collègues non pas pour faire une grande réforme, mais pour abolir
un instrument important.
M. le Président, la Régie des grains est un instrument
important pour le Québec. Vous ne voyez pas le gouvernement
fédéral abolir la Commission canadienne du blé dans
l'Ouest, qui s'occupe, justement, de la qualité des grains dans l'Ouest,
qui s'occupe de fournir les inspecteurs, qui s'occupe du rôle de
représentation, qui s'occupe également de la commercialisation,
qui s'occupe de voir ce qui se passe dans le monde, d'avoir les
données.
Qu'a fait le ministre de l'Agriculture, alors qu'au Québec nous
avions un déficit alimentaire considérable dans le domaine des
céréales, alors que nous ne produisions que 30 % des
céréales pour l'alimentation animale au Québec et que
notre production en 1976-1977 était à peu près la
même? Lorsque nous sommes arrivés au gouvernement, c'était
autour de 800 000 tonnes. Nous avons mis en place, comme gouvernement du Parti
québécois, de nombreuses politiques, un éventail
considérable de mesures pour faire en sorte que la production
céréalière soit développée au Québec
et que cette production céréalière nous permette de
devenir de plus en plus autosuffisants, avec le résultat que de 800 000
tonnes en 1976-1977 nous étions passés en 1985 à plus de 2
600 000 tonnes, une production presque trois fois et demie plus grande. Vous
savez, pour être capable de passer de 800 000 tonnes à presque 3
000 000 de tonnes, ce qu'il a fallu faire? Il a fallu créer tout un
système d'entreposage, d'un bord à l'autre du Québec,
alors qu'il n'y avait aucune capacité d'entreposage au Québec
ailleurs que sur le bord du Saint-Laurent pour entreposer les grains de l'Ouest
qui venaient transiter par nos ports de mer, qu'il s'agisse de Montréal,
Trois-Rivières, Sorel ou Sept-Îles.
M. le Président, je ne comprends pas le ministre. Le ministre de
l'Agriculture, député de Portneuf, va passer pour le plus grand
ministre abolitionniste de l'histoire du Québec. Il s'est
spécialisé dans l'abolition de tout ce qui bouge dans le domaine
agricole. Il a aboli le parc des expositions agro- alimentaires, la
Société du parc des expositions agro-alimentaires. Il a aboli le
Comité de surveillance des étalons...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Garon: ...qui coûtait 2000 $. Aujourd'hui, avec son
projet de loi, il veut abolir la Régie des grains. Il a aboli, croyez-le
ou non, tous les programmes régionaux au ministère. Et il a
essayé de nous faire croire qu'il avait l'appui des cultivateurs, alors
que les cultivateurs n'ont pas appuyé le ministre, contrairement
à ce qu'il a dit. Il a aboli à peu près tout. Pourquoi?
Parce qu'il a existé un comité, un faux comité des sages,
un comité de bénévoles, a-t-on dit, qui avait
regardé ce qui se passait dans le domaine gouvernemental. Imaginez-vous:
Le ministre a dit que j'en parlerais. Eh oui, je vais en parler parce que je
trouve cela absurde.
On a nommé à ce comité - imaginez-vous! - le
président de la Banque Nationale, Michel Bélanqer. On a aussi
nommé à ce comité M. Yvon Marcoux, vice-président
d'une autre banque de Montréal. On y a nommé M. Pierre Lortie,
président de Provigo et ex-président de la Bourse de
Montréal. On a nommé M. Paul Gobeil, exvice-président de
Provigo et maintenant président du Conseil du trésor, ainsi que
M. Jean-Claude Rivest, ex-député de Jean-Talon et conseiller
politique du premier ministre. Aucun, si je ne m'abuse, ne connaît quoi
que ce soit dans le secteur agricole et encore moins dans le secteur des
céréales. Je vous dirai, M. le Président, que ce
comité a commandé un grand nombre de fermetures dans le domaine
agricole. Et le ministre de l'Agriculture s'est fait le champion toutes
catégories des fermetures dans le domaine agricole. Il a appliqué
plus vite que tous les autres les recommandations de fermeture que ce
comité de financiers de Montréal avait faites.
Et, aujourd'hui, on voit les résultats. J'avais dit au ministre
que les résultats se feraient sentir rapidement. En 1984, les
investissements étaient autour de 666 000 000 $ et de 642 000 000 $, en
1985. Le Parti libéral arrive au pouvoir. Les investissements, en 1986,
tombent à 503 000 000 $ dans le domaine agricole, 21,6 % de moins qu'en
1985, la plus basse année depuis dix ans. Il faut retourner à
avant 1978 pour voir une aussi faible année d'investissements dans le
domaine agricole, au Québec. En même temps, qu'est-ce qu'on
constate? On constate que la baisse des emplois se fait de plus en plus rapide
dans le secteur agro-alimentaire. Je viens de voir les statistiques qui
viennent de sortir pour le mois de mai et, encore là, on voit qu'alors
que l'an dernier, en .1986, la baisse d'emplois était d'une moyenne de
2000 par rapport à 1985, cette année on va vers une moyenne
qui sera entre 8000 et 9000. Alors que c'était une moyenne de
8000 depuis les quatre premiers mois de 1987 par rapport à 1986, au mois
de mai, la moyenne était encore plus considérable.
M. le Président, j'avais prévu cela et j'avais dit que
cela se passerait ainsi parce que le ministre de l'Agriculture, sous le
gouvernement actuel, a créé un climat d'insécurité
incroyable. Pourquoi? Parce qu'il a parlé de tout, qu'il a aboli toutes
sortes de choses et que plus personne ne sait dans quelle direction il s'en va.
Il a dit que les assurances agricoles coûtaient trop cher, que les fonds
actuariels étaient en mauvaise situation, alors que même le fonds
pour l'élevage des porcs, qui a payé des montants d'argent
considérables au cours des années quatre-vingt, est actuellement
en surplus, puisqu'il y a eu deux bonnes années au cours des
dernières années. Il a véhiculé l'idée que
le crédit agricole coûtait trop cher, que les programmes
coûtaient trop cher, qu'il fallait rentabiliser les fermes et les
consolider, comme si les fermes, au Québec, n'étaient pas
rentables, alors que l'Office du crédit agricole doit prêter
uniquement à des fermes rentables. Il a tenu toutes sortes de propos. Il
a même voulu enlever le lait aux enfants dans les écoles. Il a
voulu tout chambarder et faire modifier une combinaison gagnante. (2 h 10)
Auriez-vous vu Dick Irvin, gérant du Canadien, changer la "punch
line" avec Maurice Richard, Toe Blake et Elmer Lach, la meilleure ligne de la
Ligue nationale? Auriez-vous vu, dans d'autres secteurs, une équipe qui
aurait modifié une combinaison gagnante? Le seul qui a pensé le
faire avec un premier ministre qui n'a jamais eu aucune notion de ce qui se
passe dans le domaine agricole... Je pense bien que tout le monde sait que M.
Bourassa, ce n'est pas son fort l'agriculture et que le Parti libéral
n'est pas très fort dans ce domaine. C'est pourquoi le premier ministre
a laissé le ministre de l'Agriculture détruire.
Actuellement, la vapeur monte très rapidement dans le secteur
agricole. Pourquoi? Parce qu'on se rend compte que cela n'a pas de bon sens, ce
qui est en train de se faire. Mais je dis qu'il est beaucoup plus facile de
détruire que de bâtir. Bâtir des programmes, les mettre en
application et concevoir des politiques, viser des objectifs, prendre les
moyens qu'il faut, obtenir les résultats, c'est beaucoup plus difficile
que de détruire. On peut détruire en une journée ce qu'on
a pris des années à bâtir, par des mauvaises
décisions que le ministre peut prendre comme il le fait actuellement.
Actuellement, il est en train de détruire systématiquement le
domaine agricole parce qu'il n'en connaît pas les rouages.
Le projet de loi 146 que nous avons devant nous a pour but
essentiellement de détruire un rouage essentiel au développement
du secteur agro-alimentaire québécois. Pourquoi? Parce que la
base dans le secteur, c'est l'alimentation animale. 85 % de la production
québécoise dans le domaine agricole sont l'élevage
d'animaux, des produits ou des sous-produits d'animaux. Qu'il s'agisse du lait,
de la viande, des oeufs, il s'agit soit de produits animaux ou de sous-produits
des animaux. Le principal intrant nécessaire pour faire cette production
de produits animaux ou de sous-produits animaux, c'est l'alimentation qui est
essentiellement à base d'herbage ou de céréales.
Au Québec, traditionnellement, nous étions des
importateurs de céréales. Nous étions en train de devenir
autosuffisants. Il avait fallu, pour le réaliser, adopter un nombre
considérable de politiques. Il avait fallu établir, par exemple -
je le disais tantôt, en parlant d'entreposage - 20 centres
régionaux d'entreposage dans les différentes régions du
Québec, alors qu'autrefois il n'y en avait pas un seul et tout cela,
à partir de 1978, entre 1978 et 1985. Le ministre actuel n'en a
bâti aucun, zéro, depuis qu'il est là; 20 sous le
gouvernement précédent. Mais, au niveau de la ferme, on a
construit environ 15 000 systèmes de silos pour l'entreposage de
céréales, avec toutes sortes d'équipements pour
sécher les céréales pour combattre les problèmes
qu'on pouvait avoir chez nous. Chez nous, on avait un problème à
combattre, soit le degré d'humidité puisque, si les pluies
d'automne sont hâtives, il peut y avoir un problème d'entreposage
de céréales trop humides. Alors, il fallait simplement pouvoir
faire sécher les céréales et pouvoir entreposer celles qui
ont le bon degré d'humidité.
Mais, il fallait avoir les facilités pour le faire; autrement,
c'était l'insécurité complète. Vous savez quel est
le premier groupe que j'ai vu arriver à mon bureau quand j'ai
été nommé ministre de l'Agriculture, en 1976? Ce sont les
gens du Bas-Saint-Laurent qui venaient de perdre leurs récoltes, en
1976, parce que la neige était arrivée au mois d'octobre. Ils
n'avaient pas pu ramasser leurs céréales parce qu'ils n'avaient
pas l'équipement nécessaire pour faire quoi que ce soit avec cela
et les céréales rentrées trop humides auraient pourri. Ils
avaient perdu leurs récoltes. La réponse était assez
simple: il fallait de l'entreposage, mais il fallait aussi des capacités
de séchage pour que l'on puisse produire des céréales chez
nous parce qu'on avait les capacités biophysiques, mais il fallait aussi
avoir les conditions pour le faire.
Savez-vous qu'aujourd'hui, M. le Président, cette même
région du Bas-Saint-Laurent et de la Vallée de la
Matapédia est autosuffisante en céréales, qu'elle n'a
plus
besoin d'importer de céréales ou encore qu'elle en exporte
autant qu'elle en importe? C'est-à-dire que nous sommes
complètement autosuffisants dans le Bas-Saint-Laurent et la
Vallée de la Matapédia dans le domaine des
céréales. Qui l'aurait dit il y a dix ans? Personne. Et je me
rappelle, à ce moment-là, avoir passé pour un rêveur
parce que je disais que, à la suite des études que nous avions
faites, il y avait des capacités dans cette région, parce qu'il y
avait les conditions climatiques, pas pour faire du blé d'Inde, mais
pour faire de l'orge.
On sait que dans un pays très dynamique sur le plan
agro-alimentaire comme le Danemark, qui, à mon avis, est le premier pays
au monde sur le plan non seulement de la qualité agro-alimentaire, mais
de la qualité de la vie, la production céréalière
se fait principalement à base d'orge.
M. le Président, il a fallu mettre un ensemble de conditions. Je
vous disais tantôt qu'il y avait le degré d'humidité. On
pouvait sécher nos céréales. Mais il y avait aussi un
problème. S'il y a un degré d'humidité trop
élevé, il peut y avoir certains types de maladies autant en
Ontario qu'au Québec, par exemple, la maladie qu'on appelle la
fusariose. Mais il faut être capable de maîtriser, encore
là, cette question.
La Régie des grains, que le ministre abolit actuellement par son
projet de loi, a été le principal organisme qui s'est
occupé de défendre les céréaliculteurs
québécois qui faisaient l'objet de discrimination de la part du
gouvernement fédéral qui publiait les degrés
d'humidité du Québec et qui ne publiait pas les degrés
d'humidité de l'Ontario.
Lorsque l'Ontario a eu un problème comme le Québec,
immédiatement, il s'est dépêché de multiplier par
dix les seuils de tolérance dans l'alimentation animale en Ontario pour
faire en sorte que le problème soit moins grave. Alors qu'il ne publiait
pas de communiqué quand il s'agissait d'humidité dans les
céréales ou la fusariose en Ontario, alors que le problème
était bien plus grand qu'au Québec, quand, au Québec, il y
avait un peu de fusariose, il se dépêchait de faire un
communiqué pour en faire la publicité.
Aujourd'hui, c'est un problème qui est sous contrôle, parce
que la Régie des grains qui avait la principale responsabilité
dans ce secteur s'occupait de faire en sorte qu'à tous les niveaux on
puisse surveiller la qualité des céréales sur le
territoire québécois.
Quand le ministre veut abolir cet organisme, il nous dit: Je ne l'abolis
pas vraiment; je le confie à la Régie des marchés
agricoles. Il faudrait voir le travail de la Régie des marchés
agricoles. Le travail de la Régie des marchés agricoles est
considérable et elle n'a pas le temps de s'occuper de la loi sur la
Régie des grains.
Le ministre nous dit: Je vais économiser 250 000 $ dans un
secteur qui représente des centaines de millions de dollars de
production, où il y a encore un potentiel considérable. En effet,
même si, aujourd'hui, nous avons une production de près de 3 000
000 de tonnes pour l'alimentation animale, nous avons commencé à
développer, de plus en plus, l'alimentation humaine, où il y a un
potentiel de 800 000 tonnes qui est fourni, en 1985, à 14 % par le
Québec. Quelques années antérieures à 1985, on
était à 5 % et c'est auqmenté à 14 %. Le
marché des 800 000 tonnes est un marché qui est beaucoup plus
payant, mais qui exige une qualité encore supérieure à la
qualité des grains pour l'alimentation animale.
En même temps, nous nous sommes assurés d'aider au
développement de cinq centres de graines de semence de
céréales certifiées, de haute qualité, satisfaisant
aux plus grands standards de qualité. Pourquoi, M. le Président?
Bonjour. M. le Président, vous avez changé. La présidence
ne parle pas, mais elle se repose à tour de rôle. Les orateurs,
eux, ne peuvent pas prendre de répit.
Une voix: Mais vous pouvez parler.
M. Garon: Mais, M. le Président, je voulais dire que, dans
les secteurs que nous représentons, il faut avoir les énergies
nécessaires pour y travailler. C'est pourquoi, si le leader du
gouvernement pense nous épuiser en nous faisant travailler de nuit, j'ai
bien peur qu'il ne s'épuise le premier.
M. le Président...
M. Paré: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président: Question de règlement, M. le
député de Shefford.
M. Paré: M. le Président, étant donné
que, même si c'est à une heure tardive, c'est un sujet
intéressant et que mon collègue a vraiment des bons messages
à passer, j'aimerais qu'on soit plus nombreux et je vous demanderais de
vérifier si on a le quorum.
Le Vice-Président: Nous avons maintenant le quorum. M. le
député de Lévis, si vous voulez continuer. (2 h 20)
M. Garon: M. le Président, vous remarquerez que la
difficulté n'est pas d'avoir le quorum, mais de le garder. Il a tendance
à se sauver régulièrement. Ah! Je pensais que vous
resteriez là. Comme vous aviez l'air reposé, vous seriez plus
à même de le garder, en le surveillant.
Le projet de loi sur la Régie des grains
est tellement particulier que c'est peut-être une des seules lois
au Québec dont le système de permis a été
créé sur une base volontaire. Je me rappelle, en 1979, quand on
avait fait la consultation à Saint-Hyacinthe entre les différents
intervenants du monde céréalier, j'avais dit alors que nous
avions l'intention de faire une loi tellement bonne que les gens voudraient y
adhérer volontairement en se soumettant à un ensemble de
règles dans le domaine du contrôle de la qualité des
céréales. Elle serait tellement efficace qu'ils demanderaient
eux-mêmes d'avoir un permis qui les assujettirait à un ensemble de
règles. Elle serait tellement bénéfique qu'ils voudraient
eux-mêmes faire partie de ce système de permis volontaire, puisque
ceux qui sont sous le régime du projet de loi sur les grains ont un
système de permis volontaire.
Le ministre disait lui-même qu'au début de l'année
il y avait 200 permis, que 70 % des grains échangés au
Québec l'étaient par des détenteurs de permis. Tout cela
par des permis volontaires. Trouvez-moi un secteur où 70 % des gens vont
être couverts par des permis volontaires et vont réclamer ce
permis comme un droit. Plutôt que de sentir qu'ils y sont obligés,
c'est sur un système de permis volontaire.
Quand on parle de déréglementation, le plus beau
système que nous ayons mis en place avec la Régie des grains,
c'était un système de réglementation volontaire, avec des
permis volontaires, où les gens acceptaient volontairement de demander
un permis. Quand ils devenaient détenteurs de ce permis, ils demandaient
de s'assujettir volontairement à toute une réglementation pour
avoir une meilleure qualité de grains au Québec. Pourquoi? Pour
vraiment devenir autosuffisants. Nous le sommes presque devenus dans le domaine
des céréales, puisque aujourd'hui nous le sommes à environ
85 %, alors que nous ne l'étions qu'à 30 % en 1976-1977. La
production de porc a presque triplé au cours de ces mêmes
années, puisque cette production, en 1975-1976, était d'environ 1
700 000 porcs au Québec et qu'il s'agit aujourd'hui d'une production
d'environ 4 800 000 porcs, ce qui fait que la production a presque
triplé. Malgré cela, alors que les porcs sont de grands
consommateurs de céréales, que la production de boeuf a aussi
augmenté d'une façon importante, que la production de veaux de
grain, qui était nulle, était rendue à 100 000 veaux de
grain en 1985, passant de 0 en 1977 à quelques-uns en 1978, à 58
000 en 1984, à 100 000 en 1985... Nous disions que nous étions
capables - j'ai hâte de voir le résultat après quatre ans
de gouvernement libéral - de nous rendre à 250 000,
c'est-à-dire tout le potentiel en veaux lourd au Québec, en veaux
qui ont été élevés jusqu'à 450 livres
plutôt que d'être vendus aux
Américains ou aux Ontariens à 100 ou à 125 livres
à la naissance ou trois ou quatre jours après la naissance
autrefois, alors qu'eux les engraissaient et nous les vendaient ensuite,
après avoir fait le travail chez eux.
Aujourd'hui, en 1987, j'ai hâte de voir les données, le
ministre n'en parle jamais. On ne connaît pas les données de ce
secteur actuellement. En 1985, il y avait 100 000 veaux qui n'étaient
pas vendus à 100 ou à 125 livres, mais qui étaient
élevés jusqu'à 450 ou 500 livres, avec tout le travail de
retombées économiques dans les différentes régions
du Québec, pour ensuite être vendus dans différents
endroits. On peut s'en rendre compte aujourd'hui, avec le grand nombre de
restaurants italiens que nous avons au Québec, qui sont des
spécialistes du veau; on retrouve de plus en plus sur les tables de ces
restaurants la viande de veaux qu'ils ont parfois élevés
eux-mêmes dans des associations dont ils sont les participants.
Quand le ministre nous dit: Je veux épargner 250 000 $ par
année, vous savez qu'il y a certains types d'épargne qui ne sont
pas de l'épargne, mais qui sont du gaspillage, puisqu'il n'y aura plus
de Régie des grains. Il y aura une loi qui sera administrée par
la Régie des marchés agricoles qui n'aura pas le temps de faire
le travail au point de vue de la Régie des grains. Je vous dis qu'au
point de vue de la Régie des grains l'expertise est rare.
Le député de Portneuf m'avait déjà
reproché d'avoir attendu un an après l'adoption de la loi pour la
mettre en application. Pourquoi? Parce que cela nous a pris un an à
trouver un conseil d'administration, des gens qualifiés, un
président et un vice-président à temps plein qui
étaient des experts dans le domaine des grains, parce qu'il n'y en a
quasiment pas d'experts dans le domaine des grains. Les premiers que nous avons
rencontrés nous demandaient un salaire dans les six chiffres; mais pas
au début des six chiffres, six chiffres assez avancés. Ils nous
disaient à quel point ils avaient une participation aux
bénéfices et toutes sortes d'avantages que le gouvernement ne
pouvait pas payer.
Nous avons été chanceux d'avoir l'expertise de M. Fernand
Beaudet comme président et de M. Harbec, dont le ministre n'a pas
renouvelé le mandat, qui était un spécialiste de
l'économie des grains. Des spécialistes de l'économie des
grains, dans le monde ou en Amérique du Nord, il n'en pleut pas. Il y en
avait un, le ministre actuel, déjà, s'est privé de cette
expertise. C'était un économiste spécialisé dans
l'économie des grains. Il est parti du ministère. Il est parti de
la Régie des grains. Il n'est plus là. Après, on me dira
qu'à la Régie des marchés agricoles, oui, il y a des
spécialistes de l'économie du lait, mais je ne connais pas de
spécialiste de l'économie des grains. Les
spécialistes de l'économie des grains sont rares. Si nous
voulons parler sur un pied d'égalité avec les différents
organismes publics que l'on trouve aux États-Unis ou dans l'Ouest du
Canada, il faudrait avoir des gens qui sont capables de comprendre le langage
dans ce secteur. Le ministre est en train de dépouiller le Québec
et l'administration publique québécoise de l'expertise qui avait
été bâtie au cours des dernières années.
Je vois le député de Prévost qui est un
cultivateur. Il doit savoir, du fond de sa vieille sagesse de cultivateur, lui
qui a un certain nombre d'années d'expérience, à quel
point c'est beaucoup plus facile dans le domaine agricole de
débâtir que de bâtir. Mais, même s'il est
libéral, il sait les pas de géant qui ont été faits
au Québec au cours des années du gouvernement du Parti
québécois et, actuellement, c'est la stagnation, stagnation qui
apparaît dans le domaine des investissements agricoles et dans le domaine
de l'emploi. Je vous le dis: On verra de mois en mois des statistiques sur
l'emploi et on constatera à quel point 1987 aura été une
année désastreuse en termes d'emplois dans le secteur agricole.
Il s'agit de l'emploi des différentes régions du Québec
où les chances d'emploi ne sont pas multiples.
Si vous regardez actuellement au Québec le secteur qui a le plus
diminué parmi tous les secteurs économiques, et de loin, c'est le
secteur primaire. Le secteur primaire, avec l'agriculture, a diminué de
façon considérable. Les pêches ont diminué de
façon considérable également à cause des quotas qui
ont diminué. La forêt également. Tout le secteur primaire
au Québec, depuis le Parti libéral, a diminué parce que
c'est un secteur qui ne les a jamais vraiment intéressés. Quand
c'est rendu que des mineurs font la grève dans les mines, dans les trous
de mines, qu'ils passent la fin de semaine dans les trous de mines pour essayer
de faire entendre leurs revendications, M. le Président, on est rendu
loin dans un secteur prospère parce qu'on est en train de
dépouiller ce secteur primaire de ses atouts et de ses actifs les plus
importants.
Le projet de loi que nous présente le ministre est mauvais. C'est
une mauvaise loi. Souvent, j'ai eu l'occasion de le dire, au point de
départ, si une loi était bonne, et de le dire ouvertement. Dans
certains cas, par exemple, dans le cas la loi 129, le ministre des Finances a
été surpris de mes interventions, mais il a accepté
d'écouter. Non seulement il a écouté, mais il a
accepté de changer tous les articles de son projet de loi, même
les notes explicatives. Nous avons pu voter le projet de loi de façon
unanime en cette Chambre. Pourquoi? Parce qu'au lieu de se "bucker", au lieu de
dire: Non, je ne veux rien savoir, il a accepté de comprendre. J'ai vu
un projet de loi où le ministre de l'Agriculture - la loi concernant la
subvention de 15 000 $ aux jeunes agriculteurs - a accepté de faire
disparaître un article qui était nuisible. C'était un genre
de sapin qui lui avait été passé. C'était au
début, à son arrivée au ministère. J'avais fait la
remarque et il avait accepté de l'enlever. Il avait accepté de
modifier une couple d'articles. (2 h 30)
Mais, à un moment donné, il s'est senti gêné.
II a dit: Je ne veux plus rien changer. C'est moi, le ministre, ce n'est pas
vous. Je lui ai dit: C'est très beau, mais... C'est enregistré et
j'aurai l'occasion de revenir là-dessus. Je lui avais dit, à 11
heures le matin: Si vous laissez cet article tel quel -même s'il l'avait
amendé à ma suggestion -votre loi sera inapplicable. Je vous dis
que ce sera une question de temps et vous reviendrez avec des amendements.
C'était à 11 heures le matin. On a voté contre le projet
de loi, mais le gouvernement a le droit de faire adopter même ses mauvais
projets de loi. À 13 heures, c'était terminé et,
dès 17 heures lors de l'étude des crédits
supplémentaires, il me disait qu'il apporterait des amendements à
cet article en particulier. Les fonctionnaires lui avaient dit que les
représentations que j'avais faites étaient justes et que, s'il ne
modifiait pas cet article de loi, son projet de loi devenait inapplicable.
Je dis que, dans ce cas-là, le ministre aurait dû et
devrait - je le dis pour une dernière fois parce que nous sommes en
troisième lecture - retirer ce projet de loi qui est mauvais. Ce n'est
pas une économie de 250 000 $ dans un secteur où on parle de
centaines de millions de dollars, celui des céréales... Quand on
parle, par exemple, de 2 600 000 à 3 000 000 de tonnes qu'on peut
calculer sur une base de prix pas très élevée, à
150 $ la tonne - à 150 $, on sait que ce n'est pas cher; des fois,
ça peut baisser à 130 $, mais ça peut monter à 200
$ - c'est 450 000 000 $ seulement pour l'alimentation animale, sans tenir
compte de notre production - je ne sais pas quels sont les chiffres maintenant
- qui était rendue à 50 000 tonnes pour l'alimentation humaine
sur 800 000 tonnes. Mais on était parti de rien, de 14 000 tonnes pour
l'alimentation humaine quelques années auparavant et on était
rendu en 1985 à 50 000 tonnes. Il y avait encore un potentiel de
marché seulement au Québec de 750 000 tonnes dans les secteurs
les plus payants.
On avait là non pas un organisme épouvantable, mais un
organisme dont la seule fonction était, avec un bureau de cinq
personnes, deux à temps plein et trois à temps partiel qui
venaient du secteur de l'industrie, et avec une petite équipe, de
s'assurer du contrôle de la qualité.
Je sais que le ministre se préoccupe actuellement davantage
d'économie, mais je dis que ce n'est pas en économisant à
des endroits où les investissements sont nécessaires qu'on fait
un bon placement. Je connais des gens qui font des économies qui leur
coûtent plus cher dans l'avenir. Vous savez, quand vous ne remplacez pas
la toiture d'une maison quand c'est le temps, ce n'est pas une économie
parce qu'à un moment donné c'est une partie de la maison que vous
devez remplacer. Il y a certains types d'économies qui ne sont pas
très bons parce que, quand ces économies sont faites dans des
secteurs qui ont des retombées économiques multipliées par
50 ou 100, ce sont des économies de bouts de chandelle qui sont
néfastes.
Je dis que, de la même façon que je trouverais absurde si
le gouvernement canadien abolissait la Commission canadienne du blé - ce
serait absurde, ce serait fou raide - je trouve aussi absurde d'abolir la
Régie des grains du Québec parce que la Régie des grains
du Québec n'est pas la seule responsable. Les politiques du
ministère sont aussi importantes en termes de facilités de
crédit, d'entreposage, de facilités pour la manutention, pour le
nettoyage des céréales, pour les équipements à la
ferme, également, pour un ensemble de mesures, notamment sur le plan du
drainage où il s'en est fait plus entre 1977 et 1983 au Québec
que dans toute l'histoire du Québec à partir de 1908 où le
drainage a commencé. Pourquoi? Parce qu'on a libéralisé,
dans le bon sens du terme, les énergies. On a arrêté de
mettre partout la tutelle du ministère et laissé fonctionner
l'entreprise. Le ministre a déjà changé ça pour
revenir à la tutelle des fonctionnaires et l'agriculteur ne pourra plus
bouger dans le secteur agricole sans avoir une recommandation d'un
fonctionnaire du ministère.
Nous avions libéralisé tout ça pour
considérer le cultivateur comme un chef d'entreprise. On peut dire
aujourd'hui qu'un cultivateur qui est près, en termes d'actifs, de
l'investissement moyen au Québec qui est de 400 000 $ sur les 20 000 et
quelques dossiers de l'Office du crédit agricole, est sûrement le
chef d'une petite entreprise et comme tel, doit être
considéré comme quelqu'un qui doit être respecté et
qui est capable d'assumer ses responsabilités. Vous ne vous comportez
pas, par rapport à quelqu'un qui dirige une entreprise de 400 000 $
d'actifs, comme si c'était un "peewee", comme si c'était
quelqu'un qui avait besoin d'une tutelle permanente alors que cet entrepreneur
est capable d'assumer ses responsabilités.
M. Rivest, qui travaille avec moi, est au courant aussi de ces
données parce que nous les compilons régulièrement chaque
mois. Je viens d'avoir le document concernant le mois de mai dans l'emploi
agricole, je vais en dire un mot tout de suite ici parce que c'est
révélateur de la situation. Le mois de mai, l'emploi agricole au
Québec. Je vous disais que, pour les quatre premiers mois de 1986, il y
avait une baisse de 8000, mais la moyenne des cinq premiers mois de 1987 par
rapport aux cinq premiers mois de 1986 représente une baisse de 9000. La
moyenne est passée de 82 600 à 73 600. C'est quelque chose. Une
baisse de 9000 représente 10,9 % de l'emploi, presque 11 % dans les cinq
premiers mois de 1987 par rapport aux cinq premiers mois de 1986.
Pendant combien de temps devrai-je citer ces statistiques, donner des
exemples multiples de la détérioration de l'économie
agricole sous le gouvernement libéral sans qu'on réagisse, sans
que les libéraux me regardent autrement qu'avec des yeux morts qui
laissent passer la parade, qui laissent passer ce marasme qui est en train de
s'établir dans un secteur qui était dynamique jusqu'à leur
arrivée au pouvoir? M. le Président, jusqu'à quand
devrai-je crier dans ce désert où les gens n'entendent pas?
Le premier ministre est sourd à ce secteur important de notre
économie. M. le Président, je me serais attendu que certains
députés, comme le député de Berthier, fassent
valoir des arguments au premier ministre, lui disent: Dites un mot à
votre ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, il
est en train d'amener l'économie agricole chez le diable. Je me serais
attendu que le député de Prévost se réveille et
entende les voix qui autour de lui dans le domaine agricole lui disent que cela
va mal. Je me serais attendu que certains députés qui viennent
d'un comté aaricole entendraient les gens qui les entourent et
entendraient ma voix. Je cite des données sans arrêt depuis un an
et demi pour montrer que cela se détériore. Mais est-ce qu'il
faudra attendre que ce soit tellement détérioré que cela
prendra des année et des années à
récupérer?
M. le Président, je dis que le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation fait une erreur importante, fondamentale,
et que nous n'avons pas le droit de le laisser faire. Je vous disais
tantôt que, pour les cinq premiers mois de 1987 par rapport à
1986, il y a eu une perte de 9000 emplois au Québec. Dans l'ensemble du
Canada, la perte est de 5400, c'est-à-dire que la perte au Québec
est presque le double de la perte totale d'emplois au Canada. Le Québec,
à lui tout seul, justifie deux fois plus d'emplois perdus dans le
domaine agricole que tout ce qui s'est perdu dans le Canada depuis les cinq
derniers mois de 1987 par rapport aux cinq premiers mois de 1986.
C'est dans une publication du ministère de l'Industrie et du
Commerce, Direction de l'analyse économique et des relations
internationales, Direction générale de la recherche et de
la planification. Ce ne sont pas mes chiffres, ce ne sont pas mes compilations.
Les données sont là. Ce gouvernement, qui se prétend
tellement bon dans le domaine de l'emploi, devrait regarder et dire qu'il y a
au moins un secteur où il y a un député qui est critique
en la matière qui nous avertit sans arrêt. Faudra-t-il qu'un jour
quelqu'un dise: Est-ce qu'il reste un juste dans ce parti? Est-ce qu'il reste
seulement un juste qui est capable de parler et de réveiller son
gouvernement pour lui dire que cela n'a pas de bon sens, qu'il faut
arrêter cette hémorragie dans le domaine de l'économie
agricole? (2 h 40)
Ce que je ne comprends pas, c'est qu'on s'acharne à
détruire des choses qui fonctionnent. Il n'y avait aucun indicateur que
la Régie des grains n'était pas un bon organisme. Au contraire,
pourquoi vouloir détruire quelque chose qui marche? Pourquoi vouloir
détruire une régie qui joue un rôle considérable?
J'ai remarqué que, quand le président de la Régie des
grains vient dans des réunions ou en commission parlementaire, il n'a
jamais le sourire. C'est un homme joyeux, heureux, enthousiaste,
débordant d'optimisme. Depuis un an et demi, je n'ai jamais vu le
sourire dans son visage. Pourquoi? Parce que je suis certain qu'il constate que
le ministre est en train de détruire, que les autres sont partis, que
les autres ne sont plus là, qu'ils ont été
congédiés par le ministre, que l'expertise qu'il y avait à
la Régie des grains est en train de disparaître
complètement parce qu'on a congédié les personnages ou
qu'on leur a donné des fonctions tellement subalternes qu'ils n'ont plus
un mot à dire dans ce secteur.
M. le Président, ce qui a été long à faire,
ce qui a été long à bâtir au cours des années
dans le secteur des grains, cela a été l'expertise, le
savoir-faire. On a bâti au fil des années toute une infrastructure
qui permettait ce développement céréalier. Ça nous
prenait un drainage souterrain considérable à cause du type de
climat et de sols que nous avons. Cela nous a pris un nombre
considérable de moyens d'entreposage. Cela nous a pris une augmentation
de la qualité, des façons de faire nouvelles pour faire un
développement, pour être concurrentiel avec les États-Unis
et l'Ouest du point de vue de la qualité des grains pour fournir nos
marchands de grain qui sont des spécialistes. Pensez-vous que les
meuneries du Québec, pensez-vous que les marchands de grain du
Québec auraient accepté d'acquérir des grains ici au
Québec s'ils n'avaient pas été de qualité
comparable ou même supérieure à ce qu'on trouve ailleurs?
Nous sommes de grands spécialistes de l'élevage au Québec,
de l'élevage du porc en particulier, alors qu'on considère
actuellement nos éleveurs de porc comme les meilleurs au monde avec les
Danois, mais on ne fera pas un porc de première qualité avec des
grains inférieurs.
Alors qu'aujourd'hui nous sommes en train de devenir autosuffisants, on
fait disparaître les instruments de cette excellence, M. le
Président. Je trouve épouvantablement triste que le ministre de
l'Agriculture ait décidé de débâtir des instruments
importants de notre développement céréalier. Ce n'est pas
pour rien qu'au dernier congrès du mois de décembre 1986 le
président de l'UPA, M. Jacques Proulx, disait déjà: Les
lendemains qui chantent, cette phrase ne figurera plus dans la liste des
espoirs des agriculteurs et des agricultrices du Québec. Non, mes amis,
l'agriculture et celles et ceux qui la font vivre sont confrontés
à une véritable symphonie qui prend des airs de requiem.
C'était le discours du président de l'UPA. Je ne dramatise pas,
dit-il, j'analyse la réalité. En un an, nos appréhensions
se sont transformées en lutte pour la survie. Ceux qui de Québec
et d'Ottawa détiennent des mandats populaires sont devenus des experts
du double langage, du "ne vous inquiétez pas, je m'occupe de vous". La
concurrence sauvage au niveau international a saisi l'agriculture comme un os
qu'on offre en pâture à la guerre économique absurde.
Il dit: Le temps d'une paix semble être derrière nous. Le
président de l'UPA dit: Le temps d'une paix semble être
derrière nous. Il nous dit: Au niveau de la politique agricole, le
Canada, y compris le Québec, est un bateau sans capitaine et parfois
même sans voilure ni moteur, une coque à la dérive. C'est
le président de l'UPA qui parle. Voyez-vous, nous, les matelots, on est
tannés d'avoir le mal de mer à cause des manoeuvres sans bon
sens. Pas de capitaine, emparons-nous du poste, pas de voile, mettons les
nôtres; pas de moteur, on va ramer pour s'en offrir un.
Pourquoi? Parce qu'ils ont perdu confiance dans ce gouvernement qui ne
se préoccupe pas d'eux et dont le seul souci est de détruire des
instruments qui ont fait leur preuve dans le développement agricole au
Québec.
Le président de l'UPA continue pendant des pages, où il se
plaint de la situation dans laquelle est rendue l'agriculture au Québec.
J'aurais pu apporter un témoignage que j'ai encore où il se
sentait obligé, il y a encore quelques semaines, de dire à quel
point souvent le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation prenait l'UPA ou les cultivateurs à témoin dans
des consultations bidons qui n'avaient pas eu lieu ou auxquelles ils n'avaient
pas dit ce que le ministre prétendait qu'ils avaient dit; il a
dénoncé sur deux grandes pages, à simple
interligne, 8 1/2 x 14, les propos que tient le ministre en disant: Ce
n'est pas vrai, nous n'appuyons pas ces politiques.
Je vous dis que nous aurons encore l'occasion, au cours des semaines et
des mois qui viennent, de faire la preuve qu'actuellement le gouvernement est
en train de faire disparaître les principaux instruments de
développement économique dans le secteur agro-alimentaire
québécois. Ce n'est pas parce que le président de Provigo
invite des collègues libéraux à une assemblée
générale de Provigo que l'agriculture se porte bien. Ce n'est pas
de cette façon que cela se passe.
Quand nous regardons les différentes mises en oeuvre du
gouvernement depuis un an et demi, nous éprouvons une profonde tristesse
puisque, dans l'ensemble du Québec, les gens avaient repris confiance
dans le domaine agricole. Ils avaient repris confiance dans ce secteur qui
permettait un développement économique dans l'ensemble du
territoire québécois. C'est le secteur agro-alimentaire qui
comporte le plus grand nombre d'entreprises dans toutes les régions du
Québec, même dans des villes comme Montréal et
Québec. Aujourd'hui, ce secteur est en train de s'affaiblir, de changer,
de devenir moins confiant, de ne plus être présent comme il
l'était antérieurement. Aujourd'hui, vous rencontrez des gens...
Et c'est pour cela que le président de l'UPA parle d'une nouvelle
symphonie qui a des airs de requiem, requiem qui est en train d'annoncer la
mort d'un secteur ou, en tout cas, son affaiblissement qui va en faire
graduellement un moribond. Pourquoi? Parce que c'est un secteur qui
périclite. Au rythme où se fait le "périclitement"
à l'heure actuelle, où le nombre d'emplois baisse d'une
façon dramatique, d'une façon aussi rapide, il lance des signes
d'avertissement importants.
Le président de l'UPA disait aussi, à son congrès
du mois de décembre 1986: La protection du territoire agricole, la
reconnaissance syndicale agricole, le financement agricole, les avoirs de
l'État dans SOQUIA, le centre d'insémination, le centre de
distribution des médicaments vétérinaires, la Régie
des marchés agricoles et bien d'autres domaines sont des acquis qui nous
ont sortis de la dépendance, qui, associés à la
fantastique productivité des agriculteurs, ont fait de l'agriculture
québécoise une industrie performante. Tous ces facteurs
réunis ont permis à notre agriculture de faire de fantastiques
rattrapages depuis quinze ans.
Il dit, en même temps, qu'il craint ce qu'il voit s'en venir,
qu'il craint les mesures et ce qui est en train de se mettre en place. Il dit:
Je ne crois surtout pas - c'est un espoir qu'il manifeste... C'est triste de
voir que le président d'une des plus grandes centrales
québécoises doive dire cela en terminant son discours, qui n'est
pas un message d'espoir, mais un message de désespoir, quand il dit: Je
ne crois surtout pas que ni le gouvernement fédéral ni celui de
Québec soient assez fous pour nous écraser au nom de je ne sais
quel conseil de soi-disant sages. Il avait lu les rapports Gobeil, Scowen et
autres qui recommandaient de faire disparaître un nombre important
d'instruments indispensables pour le développement de l'agriculture au
Québec. (2 h 50)
Je sais que le ministre savait que j'en dirais un mot parce que je l'ai
dit à plusieurs reprises. Ce que je lui demande de faire, c'est de
regarder les résultats, de constater que les résultats ne sont
pas là, que les investissements ne sont pas là, que l'emploi
n'est plus là, que le dynamisme est en train de s'effriter et de se
dire, de commencer à avoir un doute au moins, sur les politiques qu'il
est en train de mettre en oeuvre et qui ont pour effet de détruire les
principaux instruments de développement agricole au cours des dix
dernières années.
Je ne veux pas croire que le gouvernement est le seul facteur mais le
gouvernement, dans un secteur comme celui-ci, est indispensable parce que les
insécurités sont tellement considérables tant au niveau
climatique qu'au niveau pécuniaire. Les agriculteurs ne savent jamais,
quand commence la saison, ce que va être la saison. Vous vous rappelez,
au début d'avril, à quel point il faisait beau. Les gens
pouvaient être en costume de bain. Pourtant, quelques jours plus tard, on
recommençait à connaître une période comme avant.
Les gens devaient se demander: Est-ce qu'on sème tout de suite ou est-ce
qu'on attend? Pourquoi? Parce qu'ils étaient complètement
incertains par rapport à ce climat.
Je suis persuadé que cette année, dans le domaine
agricole, on va connaître plus d'insectes. Je suis convaincu de cela.
Déjà, des gens me disent en territoire urbain: II y a plus de
fourmis cette année que les autres années. Pourquoi? Parce qu'on
a eu un printemps très hâtif. Il faut être capable de voir
la nature. Le mois d'avril a tellement été beau. La nature a
accéléré ce qui se fait et je suis persuadé qu'il
va y avoir plus d'insectes cette année que les autres années. Il
va y avoir des problèmes particuliers parce que c'est
démarré très rapidement. Cela ne veut pas dire que les
récoltes vont être meilleures à l'automne. Il y a une
insécurité considérable dans le domaine des prix parce que
le cultivateur qui fait ses dépenses au printemps ne sait pas du tout
quel prix il va obtenir à l'automne, lorsqu'il va faire ses
récoltes.
Il y a des investissements qui sont aussi considérables: des gens
qui, dans une partie de leur vie, font des investissements importants pour
aller chercher un salaire. Je
sais qu'à la fin de leur vie, à cause du gain du capital
sur la vente de leur ferme il y a un bon fonds de retraite. Pendant le cours de
leur vie, sur les 30 ou 35 ans de vie active, l'accumulation de la valeur du
capital ne donne pas de revenus additionnels. C'est évident qu'elle
fournit éventuellement un bon fonds de retraite et que, pendant ces
années, le gouvernement a besoin de donner une sécurité
additionnelle aux gens de ce secteur, parce que les gens de ce secteur doivent
faire des investissements considérables et doivent travailler durement
sans savoir quel va être le résultat à la fin de
l'année. Ils ont besoin du support du gouvernement, d'autant plus que
les possibilités de développement sont là mais à
condition qu'ils sachent s'ils peuvent compter sur le gouvernement.
Dans le domaine du boeuf, on importe 800 000 000 $ de boeuf par
année. Si on veut produire ces 800 000 000 $ ici, éventuellement,
il faut que les éleveurs puissent compter, pendant plusieurs
années, sur le support constant de leur gouvernement, autrement
l'insécurité est trop forte. Nous sommes en concurrence avec
l'Ontario qui a des équipements dépréciés. Ils ont
bâti longtemps avant nous mais ils sont venus aussi avant nous. Ils ne
sont pas meilleurs que nous mais ils ont des bâtisses qui leur
coûtent moins cher, parce qu'elles ont été
dépréciées au cours des années et que nous, nous
devons bâtir en neuf à des coûts plus élevés,
aujourd'hui. À ce moment-là, la capacité concurrentielle,
pendant un certain nombre d'années, est plus difficile. C'est pourquoi
ils doivent compter sur l'appui du gouvernement.
Ces vérités fondamentales doivent être comprises du
ministre de l'Agriculture. Le ministre de l'Agriculture ne peut pas faire
abstraction des vérités que je viens de lui mentionner. Il peut
bien oublier que c'est moi qui les prononce. J'aimerais qu'il cherche à
entendre la voix de tous ceux qui commencent à lui dire, de
différentes façons, qu'ils ont besoin de politiques de support
plutôt que de politiques de coupures, qu'ils ont besoin d'un ministre qui
se batte pour eux plutôt qu'un ministre qui se batte pour le Conseil du
trésor, d'un ministre porte-parole des agriculteurs dans son
gouvernement plutôt que le porte-parole de son gouvernement auprès
des agriculteurs, d'un ministre qui les défend et qui se bat pour eux et
qui est capable de faire valoir leurs droits parce qu'il est assez vigoureux
pour le faire. Le ministre ne devrait pas passer son temps à dire
à quel point le secteur agricole coûte cher au gouvernement. C'est
sans doute celui qui coûte le moins cher au gouvernement.
Je regarde les ministres... Demandez au gouvernement combien vont
coûter les 200 000 000 $ pour le nombre d'emplois à
General Motors au Québec par rapport à ceux qu'ils vont
créer en Ontario, 200 000 000 $ sans intérêt pendant un
grand nombre d'années. Combien cela va-t-il coûter au
gouvernement? Cela va coûter beaucoup de choses. Seulement pour un
endroit.
Qu'on arrête de dire qu'actuellement... Les études que
j'avais demandé de faire à l'Université Laval et qui ont
abouti une fois que le Parti libéral est arrivé au gouvernement
démontrent, contrairement à tous les placoteux qui avaient dit
que l'agriculture québécoise est moins subventionnée que
l'agriculture canadienne et moins que l'agriculture américaine, qu'elle
est très concurrentielle, qu'elle comporte des désavantages mais
aussi beaucoup d'avantages, qu'il y a ici beaucoup d'heures d'ensoleillement,
qu'il y a de la pluie - c'est moins pire que la sécheresse comme dans le
sud de la Saskatchewan - qu'il y a beaucoup d'avantages à condition que,
lorsqu'on a un verre à moitié plein, on ne voie pas seulement la
partie qui est vide, mais qu'on voie la partie qui est pleine et qu'on soit
conscient des avantages qu'on a pour les mettre en valeur plutôt que de
courber la tête en regardant seulement les inconvénients qu'il
faut régler.
M. le Président, je vois que vous me regardez en me disant que je
dois conclure. Il n'y a pas de conclusion au message que je viens de vous
faire. La seule conclusion, c'est que le ministre comprenne qu'il faut qu'il
change de direction, parce qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents
dans le domaine agricole, parce que les politiques qu'il est en train de mettre
en oeuvre ne sont pas dignes de l'agriculture québécoise et de
son potentiel de développement, non plus que de la capacité de
nos cultivateurs au Québec, de nos producteurs de céréales
dans le cas du projet de loi qui nous intéresse et, en même temps,
de tous les éleveurs d'animaux qui vont utiliser ces
céréales produites chez nous. Ils ont le droit d'avoir des
instruments comme ailleurs dans l'Ouest du Canada, comme aux États-Unis,
pour pouvoir produire la meilleure qualité de produits tant pour ceux
qui les produisent que pour ceux qui vont les acheter qui sont d'autres
Québécois qui font l'élevage d'animaux. Je vous remercie,
M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Très
rapidement pour renchérir sur les propos tenus par mon collègue,
le député de Lévis, je vous dis très rapidement,
parce que je pense que cela vaut la peine. Je ne suis pas intervenu sur le
projet de loi précédent,
parce que nous étions d'accord avec le gouvernement. Dans ce
cas-ci, c'est différent.
C'est un projet de loi qui a pour objet d'abolir la Régie des
grains du Québec. Je pense qu'avant de décider d'abolir des
choses qui ont été utiles, il faudrait qu'on nous prouve que cela
va avoir des effets positifs. Moi, j'en doute énormément,
spécialement dans un secteur aussi important que le domaine agricole. Ce
n'est pas un domaine facile, mon collègue l'a expliqué.
Premièrement, il y a une foule de producteurs et de productrices
agricoles sur l'ensemble du territore qui ont à faire face à des
changements de température - on connaît notre climat ici - qui
doivent s'adapter, non seulement à la température, mais à
la concurrence. S'il y a un secteur où le Québec a pris sa place
au cours des dernières années, c'est bien dans le domaine des
céréales. Mon collègue le disait tantôt: On est
passé en dix ans de 30 % d'autosuffisance à plus de 85 % dans les
céréales. Mais ce n'est pas parce qu'on a fait un grand pas dans
la bonne direction, ce n'est pas parce qu'on a atteint un niveau beaucoup plus
acceptable qu'auparavant qu'on doit se départir des outils qui nous ont
permis de se rendre là et qui sont encore essentiels, non seulement pour
garder notre place, pour garder notre part du marché, mais on doit
tenter, à mon avis, de croître, d'aller en chercher davantage. Les
85 %, c'est vrai que c'est mieux que 30 %, mais ce n'est pas encore 100 %. Cela
pourrait être plus que 100 %.
Comme on ne pourra jamais produire de bananes ici, c'est essentiel,
c'est nécessaire que, dans des domaines où on peut augmenter la
production, on le fasse, pour augmenter notre autosuffisance. Donc, dans les
domaines où on peut produire, on doit dépasser les 100 % pour
compenser les domaines où notre climat, notre situation
géographique, ne nous permettent pas d'avoir l'ensemble des produits
qu'on doit consommer.
Donc, on veut abolir la Régie des grains. Je vous dis que je ne
suis pas d'accord avec des abolitions juste pour le principe d'abolir ou pour
répondre à une demande qui vient d'un comité. Je n'ai pas
la preuve que c'est pour autre chose. (3 heures)
II ne s'agit pas ici d'une institution énorme. Mon
collègue l'a dit tantôt: Quelques personnes compétentes qui
ont fait leurs preuves, des spécialistes. C'est ce que cela nous prend
dans ce domaine-là, parce que c'est une loi particulière. Donc
c'est une loi particulière et cela prend des gens compétents, des
spécialistes dans le domaine. Ils ont fait leurs preuves.
Si cela va bien dans le secteur des céréales depuis
quelques années, comment peut-on justifier que, parce que cela va bien,
on va abolir? Mon intervention se veut toute courte pour essayer de joindre ma
voix à celle de mon collègue de Lévis afin de convaincre
le ministre que l'on ne devrait pas adopter cette loi. À mon avis, c'est
une erreur. On a tout intérêt, spécialement dans ce
secteur, à prévenir plutôt que de guérir. Je vais
vous démontrer combien, souvent, cela vaut la peine de prendre le temps
d'étudier, par un exemple, dans un autre secteur, dans un autre domaine:
l'Office de la protection du consommateur. Dans les rapports des sages, on
recomandait de restreindre les lois contrôlées par l'Office de la
protection du consommateur, le champ d'application de l'Office de la protection
du consommateur. Pourtant, la commission des institutions a
décidé d'entendre l'office, de l'étudier et ensuite de
faire des recommandations.
Cette commission en est venue à la conclusion que, non seulement,
il ne fallait pas restreindre les pouvoirs de l'Office de la protection du
consommateur, qu'il ne fallait pas ratatiner l'institution comme telle, mais,
qu'au contraire, il fallait lui donner plus de pouvoir. Donc on a fait des
recommandations qui vont dans le sens d'accorder plus de pouvoirs à
l'Office de la protection du consommateur, plus de pouvoirs législatifs,
en matière de responsabilités et en moyens financiers. Une des
recommandations du rapport va justement dans le sens de permettre à
l'office d'aller au-delà des domaines prescrits par la loi à
l'Office de la protection du consommateur. Cette recommandation, vient du
député de Notre-Dame-de-Grâce. Aussi incroyable que cela
puisse paraître, il s'agit du même député qui
était pour la déréglementation, pour la simplification,
pour la limitation des conseils, des comités, des régies. Sa
recommandation à lui était à l'effet de permettre à
l'office d'avoir juridiction dans plusieurs domaines, même ceux qui ne
sont pas régis à l'heure actuelle. Ce qui veut dire: Augmentation
des responsabilités, augmentation juridique, augmentation
financière, parce que plus il y a de responsabilités, plus cela
prend de personnel.
On en est venu à la conclusion que, socialement et
économiquement, c'était un investissement qui valait la peine.
Pourquoi, si dans ce secteur on en est venu à une conclusion tout
à fait à l'opposé, cela ne serait pas la même chose,
ici, pour une régie qui a fait ses preuves, qui nous a permis
d'atteindre des sommets inégalés jusqu'à maintenant au
Québec? Dans le domaine des céréales, comme le disait mon
collègue député de Lévis tantôt,
c'était impensable que l'on puisse dans certaines régions, dont
la Gaspésie et le Bas-du-Fleuve, atteindre l'autosuffisance. Pourtant on
a réussi, grâce à des institutions comme la Régie
des grains.
On ne m'a pas fait la preuve jusqu'à maintenant que l'abolir
n'aurait pas d'effets négatifs, mais, surtout, on ne m'a pas fait la
preuve que l'abolition de la régie aidera nos producteurs. Donc il
faudrait faire attention. Il y a des économies qui n'en sont
peut-être pas en fin de compte. Il y a des décisions que l'on peut
prendre pour faire des économies, mais qui seront des erreurs et,
malheureusement les erreurs, on les découvre quand on a les effets
négatifs.
On peut bien décider d'économiser une pinte d'huile, mais
on va brûler notre moteur. II faudrait faire attention. Depuis quelques
années, en ce qui concerne les céréales, on a
augmenté considérablement la production. Je vais en profiter pour
féliciter nos producteurs et nos productrices qui ont couru des risques
puis qui ont développé comme des gens d'affaires et qui,
aujourd'hui, produisent énormément. Ils ont eu beaucoup d'aide du
gouvernement précédent et, parmi ces aides-là, il y a eu
l'Office de la régie des grains qui est encore là pour les
soutenir, pour les encourager et développer tout ce secteur. Mais si on
l'abandonne, si on adopte ce projet de loi, en quoi cela va-t-il les aider? Ne
risque-t-on pas justement qu'il manque une pinte d'huile, que l'on brûle
le moteur et que l'on recule plutôt que d'avancer? Mon collègue a
cité des chiffres, je n'en citerai pas, concernant les pertes d'emplois
dans le domaine agricole alors qu'on est en reprise économique.
Ce sont des outils comme cela qui ne sont pas très dispendieux
qu'il faut garder parce qu'ils ont l'expertise, parce que les producteurs et
productrices agricoles ont l'habitude de transiger avec ces gens-là. Je
vais vous donner un autre exemple comme quoi il y a des erreurs qu'on fait de
bonne foi. Je ne peux pas dire qu'on les fait de mauvaise foi, mais de bonne
foi. Quand on a imposé des taxes sur les ciqarettes et le tabac, on
pouvait le faire, on l'a fait jusqu'au moment où, en espérant
aller chercher des dizaines de millions de plus, on s'est aperçu qu'on
avait débordé. C'est la goutte qui a fait déborder le
vase. Ce que cela a donné comme conséquence, c'est que cette
augmentation, qui était de trop, ce qui n'était peut-être
pas envisageable - je vous le dis, ce n'était certainement pas de
mauvaise foi - a amené une baisse énorme, inattendue de la
consommation. Je ne dirais pas que je ne suis pas d'accord pour la
qualité de vie et la santé des Québécois et des
Québécoises, mais au niveau strictement fiscal, c'était le
but de l'augmentation de la taxe. Une surtaxe qui était de trop
amène une consommation beaucoup plus limitée qui fait en sorte
que, finalement, on en vend moins. En en vendant moins, on va chercher moins de
taxes que prévu et moins de taxes qu'auparavant. Donc, on se
pénalise en voulant s'aider et on pénalise aussi une autre
classe: les producteurs de tabac. Il faut donc faire attention quand on prend
des décisions.
Cette loi, en fait, n'a que seize articles, si je me rappelle bien; elle
ne semble pas énorme. Je vais parler là-dessus seulement quelques
minutes pour dire que ce n'est pas une grosse loi, mais que cela abolit une
régie qui, à mon avis, est encore utile. Je pense qu'on a les
moyens comme gouvernement de la conserver, de la garder. On a besoin de cette
régie. Quand je dis "on", j'entends nos producteurs, l'économie
du Québec, l'économie agricole. Je ne suis pas sûr qu'on
soit capable de me prouver... On peut me dire - cela sera certainement la
réponse du ministre - qu'on va transférer cela à une autre
instance qui a fait ses preuves aussi, la Régie des marchés
agricoles du Québec. Bien oui, la Régie des marchés
agricoles du Québec fait aussi un très bon boulot. Elle remplit
très bien les tâches et la fonction qu'on lui a confiées.
Mais ce n'est pas la même chose. Elle a des contrôles à
effectuer, la Régie des marchés agricoles, une surveillance sur
les marchés. Mais la Régie des grains, elle, a une loi
particulière, une fonction particulière, une autre orientation
pour le développement de l'agriculture.
Mon collègue donnait l'exemple, qui montre que c'est vraiment
particulier, dans le domaine des permis volontaires. Si 70 % des producteurs de
céréales y ont adhéré d'une façon
volontaire, c'est qu'ils considèrent cette régie comme
étant pour eux un lien indispensable, une institution positive, une
institution de développement. S'ils y adhèrent de façon
volontaire, c'est qu'ils y tiennent. Moi, je pense qu'on ne devrait pas
l'abolir. Je vais intervenir juste quelques minutes pour dire que c'est une
position défendue par l'Opposition. C'est une demande que je vous fais
de ne pas adopter cette loi, parce que non seulement on n'a pas la preuve que
cela ne nuira pas, mais on n'a surtout pas la preuve que de l'abolir n'aura pas
un effet positif. Si vous me dites que cela ne changera rien, je dois vous dire
que si elle est là, avec les progrès qu'on a connus depuis dix
ans dans les céréales, eh bien, qu'on la garde pour essayer de
faire autant de progrès au cours des dix prochaines années. Ce
n'est pas vrai que c'est fini, le développement agricole; ce n'est pas
vrai que dans les céréales, on a atteint le maximum de notre
production. Si on n'a pas atteint le maximum, c'est qu'il y a encore des
efforts à faire, il y a encore des gains à aller chercher et on a
encore besoin des instruments qui sont en place, qui nous ont aidés
à progresser considérablement et qui nous ont fait la preuve que
les gens qui étaient a l'intérieur étaient des gens
compétents. Je pense que le milieu ne peut pas s'en passer. Je vous dis,
M. le ministre, qu'on vous fera probablement nos
félicitations si vous décidez de retirer le projet de loi.
Le retrait de cette loi sera probablement, un geste de développement
agricole. Si vous l'adoptez, on va plutôt considérer que c'est un
geste nuisible au milieu agricole, spécialement aux producteurs
céréaliers.
Je vous invite donc en terminant, M. le ministre, à
reconsidérer votre décision, parce que si, pour la justifier,
vous me dites seulement que cela ne changera rien, cela ne pénalisera
pas, je dois vous dire que ce n'est pas suffisant pour l'abolir. Cela prend
plus que cela. Il faut nous prouver que le fait d'abolir va venir
améliorer l'aide à ce secteur, améliorer le
développement de la culture des céréales. À mon
avis, la preuve n'est pas faite. C'est pourquoi je vous invite à retirer
ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître
pour l'exercice de son droit de réplique M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Michel Pagé (réplique)
M. Pagé: Merci, M. le Président. C'est avec
évidemment beaucoup d'intérêt que j'ai...
M. Garon: M. le Président. (3 h 10)
Le Vice-Président: Rappel au règlement, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Je ne voudrais pas que la...
Le Vice-Président: Un rappel au règlement. M. le
député de Lévis.
M. Garon: ...j'aimerais, M. le Président, pour entendre la
réplique du ministre... On n'a pas été trop trop
chicaniers dans le cas des députés de l'Opposition, mais pour
entendre la réplique du ministre, il faudrait bien qu'il y ait quorum
à l'Assemblée, s'il vous plaît, M. le Président.
Le Vice-Président: Très bien. Qu'on appelle les
députés.
Nous avons maintenant quorum. Je cède donc la parole à M.
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Des voix:
Bravo!
M. Pagé: Merci, M. le Président. C'est avec
beaucoup d'intérêt, comme je vous le disais, que j'ai
écouté les propos tenus par le député de Shefford,
qui a certainement été influencé - je ne lui en tiens par
rigueur ni grief - par le député de Lévis. Celui-ci nous
dit, dans son discours de troisième lecture, qu'essentiellement on
s'apprête à abolir la Régie des grains. C'est
complètement faux. Ce n'est pas le cas. Vous avez été mal
informé par le député de Lévis qui a tenté
de laisser croire tout au long de ce débat...
M. Paré: Question de règlement, M. le
Président.
Des voix: Ahl
Le Vice-Président: Question de règlement, M. le
député de Shefford.
M. Paré: Je me demande comment je pourrais vous indiquer
que ce que le ministre vient de dire ne correspond pas avec la première
phrase de son projet de loi. Ce projet de loi a pour objet...
Le Vice-Président: Non. Un instant. Une voix:
D'abolir la réqie.
Le Vice-Président: M. le député de Shefford,
ce n'est pas une question de règlement. Vous avez une opinion
différente de celle du ministre. Je n'ai pas à me prononcer
là-dessus. Vous avez eu votre intervention. Votre opinion lors de votre
intervention, c'est qu'il abolit la Régie des grains. Ce n'est pas
l'opinion du ministre. Il a le droit de donner son opinion.
Une voix: C'est dans les notes explicatives.
Le Vice-Président: II a le droit de donner son opinion,
d'expliquer ses propos. Dans ce sens-là, vous avez eu le temps de parole
qui vous a été accordé en vertu de nos règlements
pour vous exprimer.
M. le ministre.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Le
député de Shefford, par le commentaire qu'il vient de faire,
témoigne encore une fois, de façon très éloquente
et très claire, de la méconnaissance profonde de ce projet de
loi, de son impact, de son implication, et témoigne aussi, finalement,
de son incompétence à en discuter. C'est d'ailleurs pourquoi je
vous indiquais qu'il avait probablement été influencé ou
qu'il avait probablement cru le député de Lévis.
Nous procédons à l'abolition d'une structure, mais cela
prévoit l'intégration des services. Le mandat de la Régie
des grains du Québec, en regard de l'application de sa loi, n'est pas
modifié, il est purement et simplement transféré à
la Réqie des marchés agricoles du Québec. Vous auriez
dû comprendre cela si vous aviez tout d'abord lu le projet de loi, si
vous l'aviez analysé et
si vous vous étiez porté, comme bien d'autres dans votre
parti, un peu critique à l'égard de ce que le
député de Lévis peut dire parce que c'est de commune
renommée qu'il faut en prendre et qu'il faut en laisser, M. le
Président. On a eu droit aujourd'hui à un discours du
député de Lévis qui s'inscrit dans la redondance à
laquelle il nous habitue, référant à beaucoup de choses et
à rien en même temps. Il a référé -
notamment, et je prends acte, évidemment, de ses attaques bien
personnelles - aux initiatives que, comme ministre de l'Agriculture, j'ai eu
à prendre pour revoir le rôle de l'Etat dans certaines
entreprises.
M. le Président, je conviens que le député de
Lévis a convié l'agriculture à un relatif
développement alors qu'il était à la tête du
ministère, de 1976 à 1985. Or, force nous est de constater
qu'autant le député de Lévis, alors qu'il était
ministre de l'Agriculture, était préoccupé par la
production: produisons! produisons! produisons! autant il ne s'est pas
soucié, mais pas du tout, des prix payés aux producteurs et
productrices agricoles du Québec, autant il ne s'est pas soucié
de la façon dont les sommes étaient dépensées.
Qu'il me suffise de référer à cet héritage sans
bénéfice d'inventaire qu'on a eu à assumer à
compter du 12 décembre 1985. Je pourrais longuement
référer, comme le faisait l'honorable ministre
délégué aux Pêcheries, même aux
dépenses du député de Lévis, de façon
irresponsable, manque de fair-play inacceptable, inopportun, qui, entre le 2
décembre 1985, alors que son gouvernement et son chef, M. Johnson,
venaient d'être battus, est allé confirmer des engagements
gouvernementaux comme ministre sans l'accord du Conseil des ministres.
Fallait-il être irresponsable à votre goût? Ça n'a
pas de bon sens! Ça ne se fait pas!
Des voix: Très bien! Très bien!
M. Pagé: L'héritage! 70 000 000 $ de déficit
dans le fonds d'assurance-prêts agricoles et forestiers. Pas un
déficit accumulé depuis le début de ce siècle;
1978-1985, près de 70 000 000 $ de déficit. Qu'est-ce que
ça veut dire, concrètement? Ça veut dire que le fonds a
dû pourvoir au financement à la suite des pertes en agriculture,
des fermetures d'entreprises et des faillites en agriculture. Et c'est lui,
aujourd'hui, qui vient tenter de nous faire la morale, convaincu qu'il l'est,
à tort, que l'agriculture au Québec est née avec lui et
que l'agriculture au Québec va mourir avec lui. Bien, voyons donc! Bien,
voyons donc! Près de 70 000 000 $ dans le fonds d'assurance-prêts
agricoles et forestiers.
De la raffinerie de sucre, il en a parlé ce soir; 32 ans de
déficit sur 42 ans de production. On produisait du sucre à 0,42 $
la livre, on le vendait 0,12 $; 115 000 000 $ d'engagements gouvernementaux; 15
000 000 $ de déficit par année. Les déficits du Parti
québécois, du député de Lévis et de mon
prédécesseur à la tête du ministère. Et si on
prend les déficits assumés par le gouvernement du Parti
québécois et du député de Lévis entre 1976
et 1985 le long de l'autoroute 20 entre Québec et Montréal. Si,
on calculait aussi ce projet auquel il a référé tout
à l'heure, la Société du parc des expositions
agro-alimentaires? Cette vitrine de l'agro-alimentaire sur l'île de
Montréal qui devait coûter, selon lui, à partir d'une
étude liminaire, improvisée, non complète et partielle et
préliminaire, 40 000 000 $ et qui, finalement, à la
lumière de documents déposés au ministère pendant
les mois d'octobre et de novembre 1985, alors qu'il était occupé
à autre chose, évidemment, après sa défaite
à la chefferie, il est apparu très clairement que cela aurait
coûté non pas 40 000 000 $ mais 70 000 000 $ au gouvernement du
Québec.
Cela me permet de conclure que la vallée "garonnienne" des
déficits du Parti québécois, du gouvernement du PQ et du
député de Lévis, entre 1976 et 1985 le long de l'autoroute
20, a coûté plus cher aux contribuables du Québec que la
construction de l'autoroute 20 elle-même, M. le Président. C'est
ça, la performance du Parti québécois!
Il a parlé encore ce soir du dossier du lait-école. J'ai,
comme ministre de l'Agriculture, demandé aux entreprises qui vendent le
lait dans les écoles, de contribuer à ce programme qui
impliquait, l'année dernière, des déboursés de plus
de 10 000 000 $ par année, tout comme j'ai demandé aux
commissions scolaires du Québec de renoncer à 0,01 $ par
berlingot qu'elles perçoivent pour distribuer le lait de façon
qu'on donne le même service avec un peu moins de dollars des impôts
de celles et ceux qui nous écoutent et faire du développement
dans d'autres secteurs aux niveaux commercial et industriel avec ces dollars
récupérés. Et cela a fonctionné. Nous avons ainsi
récupéré 2 000 000 $. Qu'est-ce que cela a voulu dire,
concrètement, ça?2 000 000 $ de moins à
dépenser par le gouvernement, par le ministère dans ce programme
qui est nécessaire, qui est important, qui contribue de façon
significative à une bonne alimentation, à une consommation de
produits de qualité que sont les produits laitiers du Québec chez
nos jeunes. Un montant de 2 000 000 $ récupérés,
même distribution, cinq jours et aussi, et surtout, même
quantité. (3 h 20)
J'aurais pu, comme ministre, agir de façon tout à fait
inacceptable, cachée, hypocrite et diminuer purement et simplement la
quantité de lait dans le berlingot. Cela n'aurait pas paru, l'aurais
pu
et on aurait pu comme cabinet, comme gouvernement, avec l'équipe
de députés qui travaillent étroitement dans nos
politiques, diminuer purement et simplement la quantité. C'est ce que le
précédent gouvernement avait fait. C'est ce que le
député de Lévis avait fait. Dans un premier temps, il a
diminué la quantité de lait dans les belingots de 200 millilitres
à 150 millilitres. Là où le bât blesse le
député de Lévis, là où l'hypocrisie se
manifeste, c'est qu'il a exigé le même contenant pour que cela ne
paraisse pas.
Alors, M. le Présidentl Qu'on ne vienne pas me faire des
leçons de morale sur ce dossier. L'action du député de
Portneuf comme ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation aura permis d'affecter 2 000 000 $ de plus. Pour qui? Pour les
productrices et les producteurs agricoles du Québec.
M. le Président, j'ai trouvé cela un peu un manque de
fair-play que le député de Lévis accuse en son absence et
qu'il procède à une attaque tout à fait contestable, pour
ne pas dire vicieuse, déplacée à l'égard du premier
ministre, l'honorable Robert Bourassa, qui est farouchement
déterminé, avec son équipe de députés, avec
l'équipe du cabinet, à faire en sorte que le renforcement de
l'économie du Québec passe particulièrement par un secteur
agricole en meilleure santé financière où les productrices
et les producteurs auront davantage un juste prix pour les produits qu'ils
mettent en marché, parce que c'est cela qui nous distingue du Parti
québécois.
Autant vous vous êtes préoccupés de
développer, de bâtir des structures, de subventionner à
coups de millions des entreprises déficitaires, autant notre
préoccupation, et c'est le dénominateur commun de nos actions,
c'est de rentabiliser nos productions et de s'assurer que ces gens feront de
l'argent. Le premier ministre a clairement exprimé la volonté de
notre gouvernement de faire en sorte que le Québec non seulement prenne
mais aussi et surtout reprenne sa place dans l'ensemble canadien, qu'on se
présente à Ottawa comme ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation non pas pour bouder dans le coin et manger
un sandwich et revenir à Québec, mais pour contribuer, pour
développer une nouvelle solidarité entre les provinces
canadiennes.
Qu'est-ce que cela a eu comme résultats? Des contributions
importantes, l'acceptation par le gouvernement fédéral
d'intervenir par le biais de l'OSPA pour aider nos producteurs agricoles dans
le cadre de l'indemnité pour les céréaliculteurs, 37 000
000 $ ici, alors qu'au début ce n'était pas un cent que le
fédéral devait nous verser. Je tiens à vous dire en
passant que je ne garderai pas le chèque un mois et demi dans mes
poches.
Qu'il suffise de me référer à l'entente
fédérale-provinciale sur la recherche signée en
février dernier ici à Québec avec le ministre, M. Wise,
pour développer la recherche, 35 000 000 $ qui s'investiront par une
contribution 50-50 entre le gouvernement du Québec et le gouvernement
fédéral. Que dire, M. le Président, des dossiers qui
évoluent très positivement à la grande satisfaction des
producteurs et des productrices agricoles en ce qui concerne tout le volet de
l'assurance-stabilisation au Canada et l'obligation pour le gouvernement
canadien d'intervenir à partir d'un principe fondamental en agriculture
qui s'appelle l'équité entre les provinces?
M. le Président, qu'il me suffise aussi de me
référer aux réformes que nous avons enclenchées
depuis que nous sommes au gouvernement. Une volonté très claire
de favoriser la relève en agriculture. On s'était engagé,
par notre programme, à augmenter les primes à
l'établissement. On n'a pas attendu trois, quatre ans. Dès la
première année, dans un premier temps on a augmenté notre
subvention de 8000 $ à 15 000 $ pour ce jeune homme ou cette jeune femme
qui veut s'établir en agriculture. On a aussi enlevé toutes les
clauses discriminatoires qui s'appliquaient et que le gouvernement
précédent a non seulement conservées, mais a entretenues
à l'égard des agricultrices du Québec.
Que dire du projet de loi sur le financement agricole qui a
été déposé ce matin et qui déjà
reçoit un accueil très favorable, très intéressant,
parce qu'il manifeste une volonté de notre gouvernement d'asseoir le
développement de l'agriculture sur des politiques de financement qui
correspondent davantage aux besoins de l'industrie, aux besoins des
producteurs, des productrices et des jeunes en agriculture?
Le député n'a pas fait référence à la
réforme des programmes. La réforme des programmes a
été annoncée le 20 mars dernier. Dès le 21 mars,
dans le journal Le Soleil de Québec: L'UPA satisfaite. Le
député de Lévis n'y a pas fait référence. M.
le Président, le député s'en tient au discours, prend des
parties du discours du président de l'UPA, du 3 décembre 1986
à Québec. S'il avait été présent, il aurait
constaté que la grande inquiétude de l'Union des producteurs
agricoles à ce moment-là était et demeure
évidemment, le libre-échange. Mais là aussi, le
gouvernement du Québec a pris ses responsabilités. Dès le
30 janvier 1986, j'exprimais au nom du gouvernement comme ministre de
l'Agriculture, à la conférence des ministres à Ottawa, un
mois et demi après notre assermentation, les conditions minimales
exigées avant d'amorcer quelque négociation que ce soit en
agriculture: le maintien de nos plans conjoints, le droit au
développement de notre production agricole et de son orientation,
le maintien du droit pour le Canada et les provinces de développer des
régimes d'assurance-stabilisation des revenus des producteurs
agricoles.
Parlons-en des régimes d'assurance-stabilisation. Déficits
qui étaient de 138 000 000 $, au-delà de 130 000 000 $, quand je
suis arrivé à la tête du ministère. Déficits
appréhendés, si aucune correction n'est ou n'était
apportée, à 400 000 000 $ en 1989; l'héritage du
précédent gouvernement, l'héritage du député
de Lévis. M. le Président, c'est de bonne guerre. Il est
explicable que l'Opposition s'oppose pour le plaisir de s'opposer. Je peux vous
indiquer que le projet de loi 146 n'affectera en rien les mandats de gestion de
la Régie des grains et les objectifs qui nous animent de renforcer ce
secteur de notre activité économique. L'intégration des
activités de la Régie des grains et de la Régie des
marchés agricoles donnera, nous en sommes persuadés c'est
l'opinion des intervenants, c'est l'opinion de ceux qui sont concernés -
des résultats positifs.
M. Garon: M. le Président, la Chambre s'est vidée
au fur et à mesure que le ministre a parlé.
Le Vice-Président: Un instant. Un instant. M. le
député de Lévis, un instant. Vous me demandez la parole
sur une question de règlement. Je vous écoute.
M. Garon: M. le Président, il faudrait faire
vérifier le quorum, parce que plus le ministre parle, plus le quorum
baisse.
Le Vice-Président: Très bien, pour le quorum. Qu'on
appelle les députés! Nous avons maintenant quorum. Je vais
céder la parole à M. le ministre de l'Agriculture pour la fin de
son intervention; il lui reste deux minutes.
M. Pagé: M. le Président, je vais faire vite.
J'étais à vous dire que ce projet de loi est un bon projet de
loi. Ce projet de loi nous permettra d'en arriver à davantage
d'efficience en ce qui concerne la gestion et surtout la mise en marché
des céréales au Québec. Je remercie mes collègues
de l'appui tout au moins majoritaire, parce que l'Opposition s'oppose pour le
plaisir de s'opposer et de discourir à la télévision. Je
les remercie, ces collègues, de l'appui manifesté à ce
projet de loi. (3 h 30)
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Alors, le débat étant
terminé...
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: ...est-ce que cette motion d'adoption
du projet de loi 146, Loi modifiant la Loi sur les grains et la Loi sur la mise
en marché des produits agricoles est adoptée?
Des voix: Adopté. Une voix: Sur division.
Le Vice-Président: Adopté, sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Article 39, M. le Président.
Projet de loi 133
Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait
l'étude détaillée
Le Vice-Président: L'article 39 du feuilleton. Nous allons
maintenant procéder à la prise en considération du rapport
de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui
a procédé à l'étude détaillée du
projet de loi 133, Loi modifiant la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés.
Je cède, en conséquence, la parole à un
intervenant. Est-ce que quelqu'un veut intervenir sur ce dossier?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: II n'y a pas d'intervention? Je
reconnais ceux qui se lèvent. M. le député de
Lévis, est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut parler?
Des voix: Adopté.
M. Garon: Bien non. Normalement, M. le Président, c'est la
prise en considération...
Le Vice-Président: Oui. Est-ce que vous désirez
parler?
M. Garon: ...et c'est d'abord du côté
ministériel.
Le Vice-Président: Non, M. le député de
Lévis, sur la prise en considération du rapport, j'appelle
l'article du feuilleton et je demande s'il y a un intervenant qui désire
se lever.
M. Garon: Ah, parfait, M. le Président.
Le Vice-Président: Donc, je vous reconnais et je vous
cède la parole.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, c'est un projet de loi que
j'attendais avec impatience puisque, en commision parlementaire, j'ai eu
l'occasion de demander au ministre s'il voulait produire l'étude
d'impact qu'avait faite son ministère, concernant ce projet de loi.
Quand le ministre nous parle de transparence, il n'a jamais voulu dire combien
cela coûtait aux cultivateurs, mais je vais le leur dire, ce soir. Je
vais dire... Le ministre, tout à l'heure, dans sa réplique
concernant son projet de loi concernant l'abolition de la Régie des
grains, n'a pas traité un seul instant de son projet de loi; pas un mot,
voyez-vousl II a sûrement convaincu fortement les députés
de l'appuyer.
Maintenant, je vais dire aux députés que ce projet de loi
que présente le ministre, le projet de loi 133, Loi modifiant la Loi sur
les produits laitiers et leurs succédanés, est un projet de loi
inutile; ce n'est pas compliqué, inutile! On dirait que le ministre se
spécialise dans ces projets de loi inutiles. Jusqu'à
présent, nous avons concouru dans un projet de loi qu'il a
adopté, où nous l'avons forcé à présenter
son projet de loi sur l'établissement des jeunes agriculteurs puisqu'il
voulait demander un moratoire d'un an. Nous l'avons obligé à
présenter son projet de loi - son engagement électoral -dans les
six mois, parce que nous avons refusé tout moratoire qui durerait un an
et qui pourrait être prolongé.
Ce projet de loi concernant la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés est un projet de loi qui vise à donner au
ministre des pouvoirs dont il n'a pas besoin, des pouvoirs exorbitants dont il
n'a pas besoin. Lui-même nous disait, en commission parlementaire, qu'il
avait l'intention d'adopter des réglementations concernant les
étables et les laiteries des cultivateurs et qu'il songeait même,
imaginez-vous, dans son règlement, à faire en sorte qu'on mette
un muret ou un mur de ciment entre la laiterie et la grange pour que les chats
ne puissent pas se promener entre les deux endroits. Imaginez-vous: un mur de
ciment pour empêcher les chats de circuler!
Je comprends pourquoi, maintenant, quand on connaît l'étude
d'impact... Je dirai, ensuite, comment l'UPA considère les consultations
dont parle le ministre. Dans une étude sous la signature du
sous-ministre, datée du 27 mars 1987, concernant le projet de
règlement sur la salubrité des produits laitiers, nous constatons
qu'il s'agit d'une étude d'impact des modifications au règlement
de la salubrité des produits laitiers, laquelle viendra, à la
suite de l'adoption de ce projet de loi, modifier la réglementation. On
indique, dans cette étude sur ce projet de loi, que les coûts pour
les cultivateurs pourraient s'élever jusqu'à près de 15
000 000 $, qu'il y aura des changements dans la réglementation
concernant...
M. Paré: Je m'excuse, question de règlement, M. le
Président.
Une voix: Debout Max!
Le Président suppléant (M. Polak):
Question de règlement.
M. Paré: Étant donné que c'est encore un
sujet très important, je vous demanderais de vérifier si on a le
quorum et sinon, je vous demanderais de l'appeler.
Le Président suppléant (M. Polak): Je constate
rapidement... Oui, il y a quorum, on continue.
M. Paré: Question de règlement.
Le Président suppléant (M. Polak):
Question de règlement.
M. Paré: Peut-être que je suis fatigué et que
je n'ai pas la vue pour me rendre jusqu'au fond de la salle, mais je pense que
le quorum est de 20 à cette heure-ci. Je ne pense pas qu'on soit 20.
Le Président suppléant (M. Polak): M. le
député, on va compter ensemble, si vous voulez.
M. Paré: Avec plaisir.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président suppléant (M. Polak): II n'y a pas de
problème, on a encore le quorum.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Vice-Président: Alors, c'est une demande de quorum, si
je comprends bien.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Paré: M. le Président.
Le Vice-Président: Quant à la demande de quorum,
nous avons le quorum à ce moment.
M. Paré: Oui, je constate qu'avec le député
de Sainte-Anne, nous avons le quorum.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Vice-Président: Donc, je cède la parole à
M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, au début de
mon intervention... J'aimerais, s'il était possible, que chaque
député, en fonction de notre règlement, regagne son
siège et que vous appliquiez notre règlement puisque chacun doit
être à son siège pour que l'Assemblée nationale ne
soit pas une bouffonnerie. J'aimerais que le député de
Sainte-Anne respecte lui aussi l'institution qu'est supposée être
l'Assemblée du peuple québécois. Je pense que ce n'est pas
avec une bouffonnerie à l'Assemblée nationale, comme cela se
passe à l'heure actuelle...
Le Vice-Président: Je demanderais à chacun des
députés de bien vouloir regagner sa place, s'il vous
plaît!
Une voix: Et que ça saute!
Une voix: ...le temps qu'on peut.
Le Vice-Président: Nous allons poursuivre nos travaux. M.
le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, comme gardien de notre
règlement, quand cela vous prend autant de temps que cela pour obtenir
le quorum et ensuite faire regagner la place aux députés, je
pense que cela devrait se faire beaucoup plus rapidement que cela. Cela est
pris sur le temps qui m'est dévolu. Ce n'est pas normal qu'à la
Chambre, quelle que soit l'heure à laquelle nous siégeons, il y
ait une telle parodie des droits des parlementaires...
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, je n'accepte absolument pas les remarques que vous venez de
faire. Je suis ici pour faire respecter le règlement et je vais faire
respecter le règlement. Si vous soulevez une question de
règlement, le temps de parole qui vous est imparti est compté
à ce moment. Je ne peux rien y faire. C'est le règlement qui est
fait comme cela et je dois l'appliquer de cette façon. Je tenterai de
mon mieux de faire respecter le règlement. Cela prend la collaboration
de tous les gens, y compris celle des orateurs. Je vous demande de collaborer
et de parler sur le projet de loi. Vous avez 30 minutes d'allouées et je
vous cède votre droit de parole.
Des voix: Bravo!
M. Garon: M. le Président, nous avons assisté, dans
les dernières minutes, à ce que j'appelle une bouffonnerie - et
je le regrette - qui n'était pas digne. Je dois dire que les minutes que
nous avons vécues n'étaient pas dignes de l'Assemblée
nationale. Je regrette que cela se soit passé au moment où vous
étiez à votre siège.
Je dis que le député de Portneuf, ministre de
l'Agriculture, n'a pas voulu indiquer les coûts qu'il y aurait pour les
agriculteurs quant au projet de loi 133 qu'il a présenté. Il y
aura des coûts d'environ 15 000 000 $ pour les agriculteurs
d'après une étude qui a été faite et
présentée au greffier adjoint du conseil exécutif, sous la
signature du sous-ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation et un projet de règlement sur la salubrité des
produits laitiers sera consécutif à l'adoption du projet de loi
que nous étudions actuellement. J'aimerais que les députés
soient conscients que ce coût de 15 000 000 $ sera assumé par les
agriculteurs, puisque le ministre a l'intention de changer les
règlements concernant les vacheries et les laiteries et selon
l'étude qu'il fournit, le coût pourrait atteindre 14 156 700 $
pour les agriculteurs, selon une approximation du 27 mars 1987. (3 h 40)
J'ai demandé au ministre de parler de ce document en commission
parlementaire. Il a refusé d'en parler, sauf que les cultivateurs, eux,
devront en assumer les coûts. C'est pourquoi on n'est pas surpris quand
on voit, par exemple, un autre document du 7 avril 1987 dans lequel le
président de l'UPA dit que le ministre de l'Agriculture confond
consultation et approbation. Il dit que l'UPA est étonnée de
constater que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation tienne l'Union des producteurs agricoles pour acquise dans tout
le dossier de l'assurance-stabilisation dans la production bovine. Il indique
que le ministre se réclame de l'UPA une multitude de fois, poursuit M.
Proulx, pour justifier des décisions qui lui appartiennent sans partage.
L'UPA a toujours accepté de collaborer avec le MAPAQ et de discuter au
sein de divers comités, mais il est injuste, comme vient de le faire le
ministre, de nous faire endosser des décisions qui, soit sont encore en
discussion ou avec lesquelles, au contraire, nous sommes en désaccord.
Souvent, le ministre a l'habitude de se réclamer de la consultation ou
d'une approbation de l'UPA qui n'existe pas, qui n'a pas eu lieu et qui
n'existe d'aucune façon.
Le président de l'UPA continue: Si le fait de participer à
ces comités signifie pour le ministre un endossement automatique de ses
décisions, ce n'est pas notre interprétation. Notre participation
ne peut justifier les détournements d'objectifs du comité qu'on
vient de créer par les annonces ministérielles. Sur deux grandes
pages, le président de l'UPA dénonce un ensemble de
décisions du ministre sur lesquelles il prétend être
appuyé et il n'a pas reçu l'appui de l'UPA. À de
nombreuses reprises, le président responsable de l'Union des producteurs
agricoles indique que les chiffres
que mentionne le ministre de l'Agriculture concernant
l'assurance-stabilisation des revenus sont faux. Il dit, entre autres, c'est le
ministre de l'Agriculture qui fait ces citations. Par ailleurs, le ministre
prétend également que c'est avec l'appui de l'UPA qu'il apporte
des changements au nombre minimal d'animaux assurables. Ceci est inexact, notre
position s'appuie sur le fait qu'il faut avant tout faire respecter les
minimums assurés existants pendant la durée du contrat envers les
producteurs et la régie.
Nous ne sommes pas opposés à des changements, explique M.
Proulx. Nous avons clairement mis en garde le ministère sur les dangers
de la position qu'il promeut. M. Pagé fait aussi état d'un
déficit dépassant les 430 000 000 $ si les régimes
étaient administrés comme antérieurement. C'est la
première fois que nous entendons ce chiffre, s'est exclamé le
président de l'UPA. Bien au contraire, le chiffre le plus pessimiste
déposé par le ministère était de l'ordre de 340 000
000 $ et, à ce sujet, nous réitérons que ce sont ceux qui
ont causé le déficit qui doivent payer. Il faudrait prendre garde
de grever des producteurs actifs de remboursements dont ils ne sont pas
responsables. En outre, le MAPAQ a le devoir d'aller chercher au
fédéral les sommes dues en la matière et, à ce
sujet, il peut compter sur notre appui.
Encore là, quand le ministre se vante d'aller chercher des sommes
à Ottawa, le président de l'UPA dit: Justement, il se vante de
choses qu'il n'a pas faites. Le président de l'UPA a cru bon de faire un
communiqué de presse de deux pages pour dénoncer les
déclarations du ministre et pour dire qu'elles n'étaient pas
exactes.
Je dirai également qu'il y a eu récemment des rencontres
au plus haut niveau à l'UPA. Encore là, on vient d'indiquer qu'on
n'est pas d'accord avec les programmes du ministre. Le genre de tutelle qu'a
mise en place le ministre dans les nouveaux programmes où il n'y a pas
de consultation, où il n'y a pas de franchise envers ceux qui vont avoir
à payer la note... Dans le projet de loi 133 que nous étudions,
cela va coûter plus de 14 000 000 $ aux agriculteurs et il n'y a eu aucun
avis, aucune démonstration alors que l'étude d'impact, elle, a
été produite au Conseil exécutif par le ministère
de l'Agriculture. Le ministre a même refusé d'en parler en
commission parlementaire parce qu'il pensait que nous n'étions pas au
courant. Au contraire, nous sommes au courant de cette étude. Cette
étude démontre qu'il va y avoir des coûts
considérables engendrés par ce projet de loi pour les
agriculteurs.
M. le Président, le ministre de l'Agriculture mélange
différentes choses. Il le fait dans le projet de loi 133, il le fait
dans le projet de loi 134 que, je suppose, il va étudier par la suite,
où il indique qu'il veut contrôler en ayant la possibilité
de fermer des usines. M. le Président, le ministre doit
déterminer si les produits sont bons ou si les produits ne sont pas
bons. Le ministre doit faire respecter ses lois, mais il n'a pas à avoir
des actions ultra vires des lois existantes puisque les lois doivent être
respectées, et ce n'est pas en ayant des pouvoirs exceptionnels que le
ministre pourra mieux administrer le secteur de la qualité des produits
laitiers et leurs succédanés.
M. le Président, le ministre modifie une loi en laissant entendre
aussi qu'il aura... D'ailleurs, il ne s'est même pas senti le goût
de défendre son projet de loi. Il n'a pas voulu prendre la parole sur
son propre projet de loi et, normalement, la présidence offre la parole
au ministre qui présente le projet de loi et l'Opposition réagit
par rapport à la présentation que le ministre fait en
troisième lecture. Le ministre ne s'est même pas senti le
goût de défendre son projet de loi parce qu'il n'est pas capable
de le défendre, parce que les arguments qu'il emploie sont nuls...
Une voix: Voyons donc!
M. Garon: ...sont inutiles et que son projet de loi, dans son
ensemble, est un projet de loi inutile, il n'est pas nécessaire.
Une voix: Voyons donc!
M. Garon: Et le ministre essaie d'adopter un projet de loi pour
se donner des pouvoirs additionnels qui ne sont pas nécessaires.
M. le Président, ce projet de loi n'est pas bon. Nous l'avons dit
antérieurement. Nous allons encore voter contre ce projet de loi en
troisième lecture... Pardon, c'est la prise en considération du
rapport de la commission parlementaire où le ministre n'a voulu donner
aucun renseignement concernant son projet de loi parce qu'il est mal à
l'aise avec son projet de loi, parce qu'il n'est pas capable d'expliquer tous
les aboutissants de son projet de loi et il ne se sent à l'aise d'aucune
façon avec le projet de loi qu'il présente.
M. le Président, ce n'est pas étonnant parce qu'il me
semble Tial comprendre ses juridictions et mal comprendre l'état de la
loi actuelle qui est sous sa responsabilité. J'avais l'occasion de lui
demander, en cette Chambre, concernant l'irradiation des aliments, ce qu'il
entendait faire. Il m'avait répondu que c'était de juridiction
fédérale. Je lui ai demandé s'il avait des opinions
juridiques à cet effet parce que je sais que ce n'est pas une
responsabilité fédérale, sauf le commerce local d'aliments
irradiés au Québec. C'est simplement l'importation internationale
ou encore le commerce interprovincial qui est de juridiction
fédérale, mais tout le commerce local est de
juridiction du gouvernement du Québec. A ce point de vue, il y a
des causes nombreuses, il y a une jurisprudence de la Cour suprême du
Canada qui établit clairement les juridictions.
M. le Président, le ministre veut, encore là, se donner
des pouvoirs considérables et il veut se donner des délais
inutilement longs pour faire l'application. Oui, c'est un peu le même
genre de délai que le ministre des Pêches... Je vois le même
genre de disposition. Imaginez-vous, la sévérité
administrative de ce gouvernement libéral, où on a des
dispositions, telle la suivante. Je suis persuadé que le
député de Taschereau, dont la famille oeuvre dans le domaine du
biscuit, aimerait bien voir de tels pouvoirs appliqués chez lui.
Écoutez bien!
Une voix: ...
(3 h 50)
M. Garon: La chose saisie doit être remise à son
propriétaire ou au possesseur lorsque survient l'une ou l'autre des
situations suivantes. Premièrement, un délai de 90 jours s'est
écoulé depuis la date de la saisie et aucune poursuite n'a
été intentée. 90 jours sans poursuite et là, on
remet la chose saisie. Cependant, on retrouve à l'article 48.6 une
possibilité de saisie qui durera six mois. Imaginez-vous, si vous
saisissez les produits laitiers et que vous les gardez six mois, dans quelle
condition ils seront. On dit à l'article 48.6: "Sur demande du
saisissant, un juge de paix peut ordonner que la période de maintien
sous saisie soit prolongée pour un maximum de 90 jours". 90 jours et 90
jours, ça fait 180 jours. Est-ce qu'on pense que ça prend 180
jours pour que le ministère se prononce sur des produits? Ça n'a
pas de bon sens. M. le Président, c'est exorbitant!
Pensez-vous qu'un inspecteur a besoin de six mois pour savoir si une
pinte de lait est correcte ou non? On est dans une application incroyable de
pouvoirs que veut se donner le ministre, dans un cadre particulier de
marchandises périssables. Il ne s'agit pas de saisir des fromages qu'on
veut faire vieillir dans des bâtisses gouvernementales, il s'agit
essentiellement, dans les produits laitiers, de produits frais. Qu'il s'agisse
de fromages de type pâte molle, qu'il s'agisse de lait nature pour
consommation, d'une façon générale, les produits laitiers,
à l'exception des fromages âgés - "old" comme on voit sur
certains types de fromages - sont des produits frais et on se donne des
pouvoirs de saisie qui vont durer six mois. Ça n'a pas de bon sens. On
copie des textes qui viennent d'autres projets de loi, qui ont
été adoptés dans d'autres circonstances, sans même
évaluer la portée de ce qu'on fait. C'est ce qu'on a sous
l'actuel ministre de l'Agriculture. Ce n'est pas étonnant que dans le
domaine des produits marins il y ait seulement 54 usines qui ont leur permis,
alors que toutes devraient l'avoir et que 73 ne l'ont pas. On se trouve devant
le même gouvernement qui a connu le scandale de la viande avariée
en 1975-1976 et je suis persuadé qu'avant longtemps on connaîtra
un scandale dans le domaine alimentaire devant le laxisme avec lequel sont
appliquées les lois.
Le ministre adopte des lois de matamore, de pouvoirs exorbitants et
ensuite l'application quotidienne n'est pas de la même nature que la
chanson que chante le ministre lorsqu'il se donne des pouvoirs dans ses projets
de loi.
M. le Président, je ne sais pas pourquoi le ministre veut
déposer autant de projets de loi qui ne sont pas
réfléchis. Le ministre n'a pas fait ses devoirs. Il n'a pas fait
les consultations nécessaires. Il n'a pas travaillé avec le
secteur industriel. Il n'a pas consulté les agriculteurs qui ne savent
pas que les mesures que veut adopter le ministre vont leur coûter plus de
14 000 000 $, estimation sans doute conservatrice de fonctionnaires qui
n'auront pas à payer la note. Mais, dans chacun des villages de nos
municipalités, des millions de dollars devront être assumés
par des agriculteurs.
Je vois actuellement le député de Prévost pensif,
la tête dans les mains, qui devra expliquer qu'il a voté en faveur
de ce projet de loi à toutes les étapes, même en commission
parlementaire où j'ai demandé des votes enregistrés
justement pour que la postérité et l'histoire se rappellent ceux
qui ont eu le manque de jugement de voter pour un tel projet de loi.
Je remarque que l'Assemblée nationale est en train de devenir la
Chambre des péripatéticiens, puisqu'on voit actuellement un peu
partout des parlementaires se promener. Ils marchent parce qu'ils se font
péripatéticiens. Je vous ferai remarquer, M. le Président,
que les députés du parti gouvernemental n'ont pas prononcé
un seul discours de toutes nos délibérations depuis le milieu de
la soirée, que pas un seul député de régions
agricoles ou de régions rurales n'a dit un mot, que pas un seul
député du territoire maritime n'a parlé sur le projet de
loi sur la transformation des produits marins. Alors que nous étudions
maintenant une Loi modifiant la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés, il n'y a sans doute pas un député du
parti gouvernemental qui va dire un mot, alors que le ministre lui-même
n'a pas jugé opportun de le faire. C'est la première fois que je
vois cela.
Je vais vous dire, M. le Président, que cela fait onze ans que je
suis dans cette Chambre et que c'est la première fois que je vois un
nninistre qui ne se donne même pas la peine de défendre son projet
pour dire, pour demander à la Chambre de voter pour
son projet de loi.
M. le Président, nous sommes dans une situation
particulière. Nous sommes dans une situation bien particulière ce
soir où les députés de cette Chambre ne jugent pas
opportun de dire un seul mot sur un projet de loi. Je suis persuadé que
même le ministre se sent trop fatigué pour pouvoir lui-même
dire quoi que ce soit sur un projet de loi qu'il nous demande d'adopter.
Pourtant, il demande des pouvoirs incroyables. "Toute personne autorisée
par le ministre à agir comme inspecteur pour les fins de la
présente loi, qui a des motifs raisonnables de croire que des produits
ou d'autres objets auxquels s'applique la présente loi se trouvent dans
un véhicule, dans un établissement de fabrication de produits
laitiers ou de succédanés et ses dépendances ou dans un
local servant au commerce ou à l'entreposage de ces produits, à
leur livraison directe à la consommation ou à loger les animaux
utilisés pour la production du lait, peut, dans l'exercice de ses
fonctions: 1° pénétrer, à toute heure raisonnable,
dans cet établissement et ses dépendances ou ce local et en faire
l'inspection."
Imaginez-vous, M. le Président. Et le ministre nous a dit en
commission parlementaire qu'il proposerait de faire des règlements pour
distinguer entre l'étable, la partie où demeurent les animaux, et
la laiterie, et de faire de nouvelles dispositions qui vont demander des
investissements importants aux agriculteurs.
M. le Président, j'aurais pensé, dans le cadre de ce
débat, que certaines questions seraient posées par des
députés ministériels qui représentent des
régions rurales. Pas un mot. Pas un mot. Pas un seul son. Je vois le
député de Marquette qui veille ce soir. Il veille. Le
député de Trois-Rivières qui n'est pas certain
actuellement s'il veille ou s'il sommeille. Mais je dois dire que, devant ce
projet de loi qui va coûter beaucoup d'argent aux agriculteurs, je n'ai
pas entendu une seule voix chez les députés ministériels.
Pas une seule voix.
Le Vice-Président: Un instant, M. le député
de Lévis. M. le député de Trois-Rivières, sur un
rappel au règlement.
M. Philibert: M. le député de Lévis fait des
commentaires sur mon occupation à l'Assemblée nationale. Je pense
que cela me porte préjudice devant ceux qui regardent les débats.
C'est non fondé. Que j'aie les yeux baissés pour regarder le
plancher pour ne pas être pris au triste spectacle de le regarder, M. le
Président, ne veut pas dire que je dors.
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, pour la fin de votre intervention. Je vous cède la parole
à nouveau
M. Garon: M. le Président, je sais que le
député de Portneuf va faire ses représentations. Il va
dire tout à l'heure à quel point il fait des choses
intéressantes. Sauf que je dirai ceci. Les résultats ne sont pas
là. Les investissements baissent de façon vertigineuse dans le
domaine agricole. Le nombre d'emplois baisse de façon massive dans le
domaine agricole. Le ministre aura beau nous tenir tous les discours qu'il
voudra, nous annoncer de belles paroles, sauf que les résultats ne sont
pas là. L'emploi baisse de façon constante dans le domaine
agricole depuis le nouveau gouvernement libéral.
Quand il nous dit qu'il a pris ses responsabilités dans le
libre-échange dans le domaine agricole, il a prononcé un
discours, mais quelle garantie a-t-il obtenue que le libre-échange sera
écarté de la négociation avec les Américains, alors
que le ministre fédéral continue à dire que l'agriculture
fait partie de la négociation avec les Américains? C'est du
placotage, alors que le parti de l'Opposition, le Parti
québécois, a dit que l'agriculture ne devrait pas faire partie du
libre-échange. Le ministre en faisant des paroles... Sauf que le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation continue
à dire qu'on continue au niveau fédéral et
américain à négocier dans le domaine agricole comme dans
les autres domaines. (4 heures)
M. le Président, il faudra quand même... Encore là,
je mets au défi le ministre de vous dire combien va coûter le
projet de loi qu'il veut vous faire adopter, combien va coûter aux
citoyens du Québec ces nouvelles réglementations, quels seront
les montants d'argent additionnels que les cultivateurs devront investir parce
qu'il veut faire une nouvelle réglementation, parce qu'il songe à
faire mettre des murs de ciment pour empêcher les chats de se promener
dans les étables? Cela a été enregistré en
commission parlementaire quand même.
J'ai posé la question moi-même au ministre. Il m'a dit
qu'il songeait justement à faire un règlement à ce sujet.
Le député de Prévost était présent. Il se
rappellera sûrement que le ministre nous a laissé entendre que
c'était une de ses préoccupations, mais il n'a jamais voulu nous
dire combien ça coûterait, quel serait l'impact économique
de son projet de loi. Je vous dis aujourd'hui, selon les propres documents du
ministère acheminés au Conseil exécutif, qu'il s'agit de
dépenses qui vont dépasser 14 000 000 $ pour les agriculteurs,
sans compter les producteurs de lait de chèvre qui devront
dépenser 219 500 $. Quant aux transformateurs, il s'agira
d'investissements beaucoup moins élevés, d'au-delà de 500
000 $. Il s'agit essentielle-
ment d'un projet de loi qui va coûter près de 15 000 $ en
investissement, selon l'estimation des fonctionnaires, et qui sera sans doute
dépassé dans la réalité. J'aurais aimé que
les députés ministériels posent des questions. Aucun ne
s'est intéressé à cela...
Le Vice-Président: En conclusion.
M. Garon: ...aucun n'a voulu demander au ministre des
explications. Aucun n'a jugé opportun de savoir quel serait le genre
d'investissements additionnels que devraient faire les cultivateurs dans chacun
des comtés qu'ils représentent. Je vous remercie, M. le
Président, et je vais vous dire que nous n'appuierons pas non plus ce
projet de loi.
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant comme
intervenant, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Que d'exagération encore une fois, M. le
Président, que de paroles qui sont teintées de démagogie
et qui s'inscrivent dans une volonté du député de
Lévis d'alarmer nos producteurs et nos productrices agricoles. Ce projet
de loi 133 vise à s'assurer une protection encore plus forte, plus
rigoureuse des consommateurs et des consommatrices du Québec, vise
à faire en sorte que la production laitière au Québec
atteigne des sommets encore plus hauts que le sommet d'excellence
déjà atteint. Comme on le sait, nous détenons 48 % des
quotas laitiers au Canada. La production laitière constitue la
principale production. Il nous est apparu clairement, et ce depuis fort
longtemps, que la réglementation concernant les établissements
où le lait est produit devait être revue, corrigée, mieux
adaptée à la situation actuelle, davantage susceptible de
répondre aux objectifs, aux normes et au haut degré de standard
de la qualité de nos produits.
Le député de Lévis fait référence
à une étude d'impact qui a effectivement été
produite en mars dernier, si ma mémoire est fidèle, au Conseil
exécutif. Or, en commission parlementaire, j'ai indiqué que cette
étude d'impact était actuellement en correction pour les motifs
que ceux qui ont confectionné cette étude ont erré sur un
point important dans la confection d'une telle étude d'impact. En effet,
les travaux inhérents à l'adoption éventuelle d'une
réglementation en vertu de cette loi ont été
calculés au taux du décret de l'industrie de la construction. Or,
le député de Lévis devrait savoir que le décret de
l'industrie de la construction ne s'applique pas en agriculture. Le
député a été à la tête du
ministère. Il devrait savoir que le caractère multidisciplinaire,
multiprofessionnel des agriculteurs du Québec explique que, dans la
très grande majorité des cas, ces travaux minimes d'une
entreprise à l'autre qui ne seront pas immédiats, travaux qui
seront échelonnés sur une période d'années, compte
tenu qu'on est conscient que la capacité d'adaptation de l'industrie
doit se faire selon un certain rythme, ces travaux vont impliquer beaucoup
moins de déboursés que ceux contenus dans l'étude d'impact
initialement déposée, parce que la très grande
majorité de ces ouvrages seront faits par les producteurs agricoles
eux-mêmes ou encore, par des travailleurs qui ne sont pas régis
par le décret de l'industrie de la construction.
M. le Président, c'est facile de lancer un chiffre en l'air, 14
000 000 $. Or, M. le Président, dès que l'étude d'impact
sera complété à la lumière, non pas des coûts
de l'industrie de la construction, mais des coûts normalement
payés pour de semblables ouvrages, je me suis engagé
auprès des membres de la commission parlementaire à la
déposer avant l'adoption du règlement par le Conseil des
ministres qui ne peut venir évidemment qu'après l'adoption du
projet de loi auquel je réfère actuellement. Donc, c'est tenter
d'être alarmiste, c'est tenter de dramatiser. Ce n'est pas le cas, mais
pas du tout, que l'adoption de ce projet de loi implique automatiquement des
déboursés de 14 000 000 $, comme il vient de le dire.
D'ailleurs, et là, il a péché encore une fois -
j'espère que le député de Lévis a beaucoup de jours
d'indulgence d'accumulés parce qu'il pèche
régulièrement dans ses discours - parce qu'il a dit que je
n'avais consulté personne. Or, M. le Président, on a
consulté - et les gens sont d'accord - le Conseil de la
coopération laitière du Québec. C'est quand même
important. L'ensemble des coopératives laitières sont d'accord
avec le règlement tel que proposé et considèrent comme
étant le minimum requis dans une production aussi importante que la
production laitière, lorsque nous sommes préoccupés par la
qualité des produits et la protection des consommateurs. La
Eédération des producteurs de lait du Québec, les 17 000
producteurs laitiers, par la voix de leur représentant, ont
été consultés et ils ont dit: oui, M. le ministre, la
Fédération des producteurs caprins du Québec, à
laquelle vous avez référé, l'Association des transporteurs
de lait du Québec, le Conseil de l'industrie laitière du
Québec qui représente les industries non coopératives, les
industries privées dans le domaine laitier et de la transformation du
lait, le Conseil québécois du commerce de détail,
l'Association des détaillants en alimentation du Québec,
l'Association des épiciers en gros, l'Association des restaurateurs du
Québec, l'Association des consommateurs et aussi, les
spécialistes de la Régie des marchés
agricoles du Québec.
M. le Président, si je n'ai pas voulu abuser du temps de la
Chambre, c'est que, dans un premier temps, le député de
Lévis arrête de se plaindre qu'on siège tard et, dans un
deuxième temps, c'est qu'à plusieurs reprises depuis la
présentation de ce projet de loi, j'ai eu l'occasion d'échanger
des avis avec mes collègues sur ce projet de loi. J'apprécie
l'adoption de la prise en considération du rapport, M. le
Président. J'ai cru comprendre tout à l'heure que le
député de Lévis acceptait la troisième lecture du
projet de loi sur division. J'apprécie aussi qu'il donne son
consentement pour l'adoption de la troisième lecture du projet de loi,
ce soir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que le rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 133, Loi modifiant la
Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés, est
adopté?
Une voix: Adopté.
M. Garon: Sur division.
Le Vice-Président: Adopté sur division, M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, dois-je comprendre qu'il y a
consentement pour qu'on procède à l'adoption du projet de loi
à ce moment-ci?
Une voix: Non, M. le Président.
Le Vice-Président: II n'y a pas de consentement.
M. Gratton: M. le Président, je vous prie d'appeler
l'article 40 du feuilleton, s'il vous plaît;
Projet de loi 134
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: L'article 40 du feuilleton. Nous allons
maintenant procéder à la prise en considération du rapport
de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui
a procédé à l'étude détaillée du
projet de loi 134, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles, les
produits marins et les aliments.
Est-ce qu'il y a un intervenant à ce moment-ci qui...
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Donc, je reconnais comme premier
intervenant M. le député de Lévis.
Des voix: Encore!
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, vous voyez encore une fois un
projet de loi que le ministre ne veut pas défendre. Le projet de loi 134
est un projet de loi qui demande, encore une fois, des pouvoirs exorbitants que
j'ai eu l'occasion d'expliquer en commission parlementaire. Mais comme il n'est
pas là, je vais vous lire cet article, M. le Président. Le projet
de loi dit: "La Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les
aliments (Lois refondues du Québec, chapitre P-29) est modifiée
par l'insertion, après l'article 33.9 édicté par l'article
261 du chapitre des lois de 1986... l'article 33.10: (4 h 10) "Le ministre
peut, pour une période d'au plus 15 jours, ordonner à
l'exploitant d'un lieu visé à l'article 33 de cesser ou de
restreindre, dans la mesure qu'il détermine l'exploitation de ce lieu,
lorsqu'à son avis il en résulte un danger immédiat pour la
vie et la santé des consommateurs. "L'ordonnance doit contenir
l'énoncé des motifs du ministre et référer à
tout procès-verbal, rapport d'analyse ou d'étude ou autre rapport
technique qu'il a considéré aux fins de l'ordonnance, en avisant
l'exploitant que, sur demande, il peut en obtenir copie. "Cette ordonnance
prend effet à la date de sa signification à l'exploitant du
lieu."
M. le Président, le pouvoir que demande le ministre, c'est le
pouvoir de fermer des usines. Or, dans le domaine de l'inspection alimentaire,
il y a deux secteurs: l'usine et les produits. L'usine doit être conforme
aux normes pour obtenir son permis. Si elle veut avoir son permis, elle doit
satisfaire à toutes les normes de construction prévues dans la
loi et dans les règlements. Elle ne peut pas passer à
côté. Si, en tout temps, l'entreprise ne satisfait pas aux normes,
elle ne peut pas maintenir son permis. Donc, obtenir son permis, pour une
usine, cela veut dire que la construction de cette usine, les matérieux
et l'état des lieux satisfont aux normes prévues, en ce qui
concerne l'inspection alimentaire au Québec, dans la Loi sur les
produits agricoles, les produits marins et les aliments.
Maintenant, la qualité des aliments ou des produits alimentaires
produits dans cette usine, c'est une autre question. Il est évident que,
lorsque les produits fabriqués dans une usine ne satisfont pas aux
normes alimentaires, ils ne peuvent pas être commercialisés, ils
ne peuvent pas aller sur le marché. Il arrive que des usines
bâties
conformément au règlement perdent le contrôle d'une
certaine production. À ce moment-là, les produits doivent
être éliminés.
Par exemple, dans le domaine de la production du fromage où il y
a des bactéries, il peut arriver qu'une usine perde le contrôle
des bactéries et que le fromage produit ne soit pas bon, qu'il ne puisse
pas être commercialisé. À ce moment-là, les produits
doivent être détruits. Mais il n'est pas nécessaire de
fermer l'usine. Qu'est-ce que cela va donner à qui que ce soit si
l'usine est fermée? Justement, s'il y a un problème de
production, c'est en le corrigeant qu'on le règle et non pas en fermant
l'usine, à la condition que les produits qui ne sont pas salubres, qui
ne satisfont pas aux standards de qualité pour aller à la
consommation n'aillent pas sur le marché de la consommation.
Le ministre ne gagnera rien à fermer une usine qui satisfait aux
normes. Pourquoi se donner un tel pouvoir? Ce qu'il faut, essentiellement,
c'est corriger le problème. J'ai vu des laiteries qui, par exemple,
n'ont pas pu commercialiser leur lait parce qu'il y avait un problème.
Le lait n'est pas allé sur le marché de la consommation. Il a
dû être jeté parce qu'il n'était pas bon; et cela
arrive. Mais l'usine n'a pas été fermée pour autant et le
problème a été corrigé. Vous avez dit que c'est
déjà arrivé dans le domaine du fromage et que les fromages
ne sont pas allés sur le marché. Pourquoi vouloir se donner - je
ne comprends pas - un tel pouvoir de fermer une usine qui a déjà
respecté les règlements qui ont été adoptés
et qui indiquent quels sont les standards de construction qu'elle doit
respecter?
M. le Président, il est évident qu'à ce
moment-là il n'est pas normal qu'on veuille fermer une usine ou enlever
son permis, même temporairement, à une usine qui est construite
conformément aux normes de construction. Mais il est normal qu'on
empêche de commercialiser les produits qui, eux, ne sont pas sains.
Il ne faut pas mélanger les deux ordres de choses puisqu'il
s'agit de deux ordres de réglementation, l'un concernant la construction
de l'usine proprement dite et, l'autre, concernant le produit fabriqué
dans cette usine.
Je suis un peu surpris et même grandement surpris que le ministre
ait senti qu'il était nécessaire pour lui d'avoir ce pouvoir. Je
dois vous dire qu'en neuf ans où j'ai été au
ministère de l'Agriculture, jamais je ne me suis fait demander un tel
pouvoir par les fonctionnaires, parce qu'il était clair que les
inspecteurs en alimentation interdisaient, et sans aucun problème, aux
usines de mettre en marché les produits qui n'étaient pas propres
à la consommation ou qui étaient impropres à la
consommation humaine.
M. le Président, j'aimerais bien, si vous le voulez, faire appel
à notre règlement. Même s'il est tard, je pense que, si on
doit siéger, il faudrait le faire avec le quorum.
Le Vice-Président: Très bien, un appel au quorum.
Je vais vérifier, M. le député de Lévis. Qu'on
appelle les députés! J'invite les députés à
prendre place à leurs sièges, s'il vous plaît! Nous avons
maintenant quorum, M. le député de Lévis, et vous avez la
parole.
M. Garon: M. le Président, voyez comme il est bien
difficile de garder la discipline dans ce parlement où les
députés ne sont pas vraiment intéressés par les
travaux de la Chambre. C'est pour cela que je pense que le leader du
gouvernement devrait s'assurer que ses députés sont
intéressés à siéger avant de faire siéger le
Parlement. Je vois que, quand il s'agit du domaine agricole, on n'a pas le
même respect que lorsqu'on est dans d'autres domaines. Je remarque que,
dans cette session, le seul moment où on a décidé de faire
siéger le Parlement la nuit, c'est pour le domaine agricole. On ne l'a
pas jugé opportun, malgré toutes les journées où le
Parlement ne siégeait pas où l'Assemblée nationale ne
siégeait pas. Le leader du gouvernement n'a pas jugé opportun
d'appeler les lois agricoles qui auraient pu être étudiées
à ces moments-là, puisque, au mois d'avril et au mois de mai,
cela a été très tranquille au parlement et que ces projets
de lois étaient au feuilleton et n'avançaient pas d'un pouce,
mais le leader du gouvernement ne s'en préoccupait pas.
Pourtant, nous sommes dans le cadre d'une loi où le ministre
prétend qu'il a besoin de ces pouvoirs exceptionnels et savez-vous
pourquoi, M. le Président? Pour des motifs d'urgence. Imaginez-vous!
Pour des motifs d'urgence! Alors que cette loi a traîné au
feuilleton pendant des mois sans que le leader du gouvernement ait
semblé considérer que les motifs d'urgence étaient si
importants. Dans les notes explicatives, le ministre de l'Agriculture dit: "Ce
projet vise à introduire, pour des motifs d'urgence, le pouvoir, pour le
ministre, d'ordonner la cessation de l'exploitation de tout lieu utilisé
à des fins d'activités industrielles ou commerciales concernant
les produits alimentaires et constituant un danger immédiat pour la vie
ou la santé des consommateurs." Pourtant, le leader du gouvernement ne
sentait pas cela comme aussi urgent. Le projet de loi pouvait traîner au
feuilleton, il ne considérait pas que le projet de loi devait cheminer
rapidement, malgré que le ministre dise dans son projet de loi que le
seul motif pour lequel il a besoin de cette loi, c'est celui de l'urgence.
M. le Président, je suis un peu
estomaqué de voir que le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation n'a pas d'abord commencé par
convaincre son propre leader de l'urgence de son projet de loi et qu'il a
attendu ce 17 juin à 4 h 10, 4 h 15, 4 h 20 pour appeler ce projet de
loi, comme si on était dans un temps de guerre, alors que pourtant ce
projet de loi a traîné au feuilleton pendant des mois et des mois
sans être appelé par le leader du gouvernement.
M. le Président, vous voyez à quel point l'agriculture,
sous tous ses aspects, est méprisée par ce gouvernement. Le seul
moment où on pense qu'on peut parler d'agriculture, c'est en pleine
nuit, alors que les agriculteurs dorment parce qu'ils doivent se
réveiller dans une demi-heure environ. Jamais, ils n'auront
l'idée d'ouvrir leurs antennes, parce que jamais, ils ne penseront que
le gouvernement est en train d'adopter les lois agricoles de nuit, parce que le
ministre sait à quel point elles ne sont pas populaires. (4 h 20)
Je me rappelle, quand je présentais des projets de loi, que
j'essayais d'avoir les meilleures heures d'antenne parce que j'étais
convaincu de la popularité de mes projets de loi. Mais le ministre est
tellement sûr que ses projets de lois sont mauvais qu'il veut les
présenter à une heure où la cote d'écoute est
sûrement la plus faible, parce qu'il est convaincu que son projet de loi
n'est pas bon, parce que le leader du gouvernement est convaincu, avec sa
grande expérience, plus que tout autre, que c'est un mauvais projet de
loi et qu'il n'est pas rentable pour son parti de le présenter à
un moment où les heures d'écoute sont bonnes.
Loin de lui l'idée de présenter ce projet de loi à
17 heures, alors que le monde peut savoir ce que concocte, ce que cuisine, ce
que prépare le ministre de l'Agriculture pour écraser davantage
le monde agro-alimentaire. La meilleure preuve que le ministre de l'Agriculture
n'a pas la confiance de son gouvernement, c'est que le seul temps qu'on lui
réserve à l'Assemblée nationale, c'est la nuit, comme si
c'étaient des projets de loi honteux, comme si c'étaient des
projets de loi dangereux que les gens n'aimeraient pas.
Si le gouvernement pensait que ce projet de loi était bon,
pensez-vous qu'il aurait présenté cela en pleine nuit? Il aurait
présenté cela en fin d'après-midi alors que les gens
reviennent du bureau, alors qu'ils sont rendus à la maison, qu'ils sont
en train de s'asseoir et de se préparer à prendre le souper entre
17 heures et 18 heures, alors que la cote d'antenne est beaucoup plus
élevée - on est dans le temps Al des cotes d'écoute - ou
encore au début de la soirée pour que le ministre de
l'Agriculture puisse faire son tour de piste sur un projet de loi qui serait
bon.
Au contraire, le gouvernement ne veut pas montrer le ministre de
l'Agriculture, qui déjà, après un an et demi, n'est plus
montrable. C'est la façon polie du leader du gouvernement qui ne veut
pas brusquer son ministre, qui sait qu'il est un ministre assez fier de lui,
qui ne se déteste pas trop. Il ne peut pas lui dire cela directement. Il
a dû trouver une formule, je ne sais pas laquelle, il a dû lui
dire: Cela va être difficile avec Garon, le député de
Lévis, tu ferais aussi bien de présenter cela la nuit. Mais au
fond, ce n'était pas cela, son problème. Son problème,
c'est qu'il savait que c'était invendable, à tel point que cela
fait deux projets de loi de suite que le ministre ne prend même pas la
peine de défendre et de présenter. Le ministre se sent impuissant
à défendre son projet de loi. Le député de Bertrand
a fait valoir à plusieurs reprises que le ministre de l'Industrie et du
Commerce était impuissant à empêcher les fermetures
d'usines. On se rend compte maintenant que le ministre de l'Agriculture est
impuissant à défendre ses projets de loi et que, de plus en plus,
il en a honte.
Il nous a dit tantôt qu'il avait pris des engagements à la
commission parlementaire; je n'ai pas vu ses engagements. Il n'a jamais voulu
même admettre l'étude d'impact qu'avait faite son ministère
concernant la loi 133. Il n'a même jamais voulu l'admettre. Je l'ai
même menacé en quelque sorte de la rendre publique moi-même
s'il ne voulait pas la rendre publique lui-même et il m'a laissé
faire. Il m'a fait des menaces légitimes dans le Parlement. J'ai dit:
J'ai un papier, je vous laisse la responsabilité de le présenter
vous-même parce qu'il vient de votre ministère; mais comme j'en ai
une copie, si vous ne voulez pas le présenter, je vais le
présenter moi-même. C'est ce que j'ai fait ce soir.
Il m'a dit que mon papier n'était pas bon. Mais il le trouvait
assez bon pour l'acheminer au Conseil des ministres le 27 mars 1987, à
moins que le ministre de l'Agriculture ne considère le Conseil des
ministres - je n'ose pas employer le terme -comme un endroit où il peut
envoyer ses papiers qui n'ont aucune valeur, puisque lui-même disait: Mon
papier n'est pas bon. Il le trouvait assez bon quand même pour l'envoyer
au Conseil des ministres, à moins qu'il n'ait pour le Conseil des
ministres cet égard particulier, surprenant, où il peut y envoyer
des études qui ne valent rien. Je suis surpris, parce que, normalement,
au Conseil des ministres, on envoie nos meilleures études, mais je ne
suis pas surpris que le ministre n'ait pas de budget. Je ne suis pas surpris
que sous sa direction, le ministère de l'Agriculture perde ses budgets,
parce qu'il n'est pas capable de défendre ses dossiers. S'il
présente des études qui ne sont pas bonnes, il y en a qui doivent
s'en
apercevoir.
M. le Président, je ne me suis pas référé
à l'une de mes études. Je me suis référé
à l'étude du ministre dans ce projet de loi 134. Je lui ai dit
également: Vous n'avez pas besoin de ce projet de loi. C'est un projet
de loi dangereux, parce que c'est évident que la fermeture des usines ne
se fait pas par le ministre lui-même. Ce n'est pas le ministre qui va
aller voir dans chacune des usines ce qui se passe, mais il va donner un
pouvoir exorbitant à ses fonctionnaires qui vont pouvoir l'utiliser.
Quel est ce gouvernement qui nous disait qu'il fallait
déréglementer, qu'il fallait "débureaucratiser", qu'il
fallait faire confiance davantage, qu'il fallait enlever toutes les tutelles -
un grand nombre de tutelles, en tout cas, administratives administrées,
régies par des fonctionnaires?
Je n'ai jamais vu, en si peu de temps, autant de nouvelles règles
administratives, autant de nouveaux règlements, autant de nouvelles
charges sur la population qui devra vivre avec des registres, des
connaissements, des bordereaux pour transporter des produits marins, qui devra
vivre sous la menace de fermeture par les inspecteurs du ministre de
l'Agriculture qui n'a pas de modération dans les lois qu'il adopte.
Évidemment, il se dit: Si je peux mettre ma marque. Ah: mais il
va mettre une marque de démolition. Encore là, ce n'est pas un
projet pour ouvrir des usines, c'est un projet pour fermer des usines, M. le
Président. A-t-on vu quelque chose de positif? On a vu tantôt tous
les projets qu'il a présentés ce soir et que nous avons
regardés, un projet pour quoi? Pour abolir la Régie des grains.
Abolir. Un projet de loi pour faire dépenser de l'argent aux
cultivateurs pour faire de petits murets pour empêcher les chats de
passer, une nouvelle réglementation qui a coûté 14 000 000
$, mais il dit: Tes chiffres sont changés, parce que ce ne sont pas les
coûts.
Une voix: Ça va faire un maudit paquet de chats.
M. Garon: II nous dit qu'actuellement, il a besoin d'une loi pour
faire quoi? Pour fermer des usines. Je vous dis, M. le Président, quel
est cet homme nouveau qui administre le ministère de l'Agriculture et
qui veut tout fermer? Bien! il y a les résultats, et je vous dis que cet
incitation à fermer a fait des petits actuellement, parce que les
investissements au Québec ont baissé dans le domaine agricole en
1986 de 21,6 % par rapport à 1985.
Ils sont passés de 642 000 000 $ en 1985 à 503 000 000 $
en 1986. C'est de l'argent, 139 000 000 $ de moins. Le nombre d'emplois a
baissé de 2000 en 1986 par rapport à 1985 et est en train de
baisser depuis cinq mois, de 1987 par rapport aux cinq premiers mois de 1986,
de 9000 emplois.
Je suis certain que le premier ministre est en train de faire
disparaître à lui seul les effets du travail de plusieurs
secteurs, parce que les résultats de ces fermetures, de ces abolitions,
de ces coupures, de ces programmes transformés ne donneront rien, parce
qu'ils mettent les cultivateurs sous tutelle.
Il nous a parlé de ses programmes. Je vais vous en dire un mot.
fcoutez bien cela. Dans ses normes générales, il dit: Seuls les
projets - imaginez-vous, c'est pour un cultivateur qui va aller voir le
ministère -qui, selon le jugement du professionnel du bureau de
renseignements agricoles, conviennent aux conditions particulières et
contribuent à améliorer la situation financière de
l'entreprise peuvent être recommandés.
Imaginez-vous! Ce n'est plus l'agriculteur qui va décider sur sa
ferme. Ce ne serait plus actuellement un projet que lui-même va analyser;
c'est le fonctionnaire qui va dire si le cultivateur a raison ou n'a pas
raison. Le cultivateur ne sera plus un chef d'entreprise; il va être un
jeune homme sous tutelle. Il va être quelqu'un qu'on ne
considérera pas comme un adulte.
Cela ne m'étonne pas, M. le Président, puisque le ministre
de l'Agriculture n'a pas compris que le sens des responsabilités
s'acquiert chez les gens à qui on confie des responsabilités. Si
le député de Marquette qui a de jeunes enfants demande à
son petit garçon qui veut une paire de patins: Sais-tu patiner? Le petit
garçon dit non. Bien, il dit: Tu auras des patins quand tu sauras
patiner.
Le petit garçon n'aura jamais de patins et il ne saura jamais
patiner parce qu'il faut d'abord être capable de confier des
responsabilités à des gens qui vont en assumer, mais il faut
être capable de travailler, supporter, épauler, aider,
encourager...
Une voix: Alouette! (4 h 30)
M. Garon: ...des gens qui, dans ce secteur, ont besoin de cette
forme d'encouragement. Le ministre nous fait un projet de loi, non pas pour
dire: Nous allons aider une entreprise en difficultés, qui a
possiblement perdu le contrôle des bactéries dans tel secteur. Il
ne dit pas: Nous allons l'aider, mais plutôt nous allons la fermer.
Au ministère de l'Agriculture, il existe différents
services: le service de l'inspection alimentaire, le service de l'aide
financière, et un autre service qui est celui de l'aide technique. Quand
une entreprise a des difficultés, il ne s'agit pas de fermer l'usine, il
s'agit plutôt d'empêcher de vendre des produits impropres à
la consommation humaine, et, en même temps, de l'aider, sur
le plan technique, à revenir dans la bonne direction et à
corriger les problèmes qui peuvent survenir.
Je sais pourquoi le ministre veut adopter de telles mesures. C'est parce
qu'il permet à des usines de fonctionner en-dehors de tout permis. Alors
que les lois exigent des permis des usines, il a permis, toléré
que les entreprises qui n'ont pas leur permis, fonctionnent même si la
loi les oblige à avoir leur permis. C'est pourquoi aujourd'hui, il ne
peut pas dire à ces usines: Fermez! Parce qu'il tolère
déjà qu'elles fonctionnent sans permis. Il veut se donner un
pouvoir additionnel de fermeture d'usines, alors qu'il devrait faire respecter
les permis qu'il administre. C'est là le problème, M. le
Président.
C'est un problème d'administration de la loi sur les produits
agricoles, les produits marins et les aliments. Le ministre tolère le
fonctionnement de l'entreprise, à laquelle la loi ne permet pas de
fonctionner. C'est pourquoi, n'administrant pas ces permis en fonction de la
réglementation sur la construction des usines, qu'est-ce qu'il fait? Il
veut se donner un pouvoir additionnel de fermer des usines parce qu'il veut
exercer une surveillance sur les produits, et qu'il veut contrôler
l'ouverture ou la non-ouverture des usines en fonction d'autres normes que
celles que devrait faire respecter le ministre de l'Agriculture.
Il est inconcevable, dans un système de droit... là, vous
pourriez consulter un ami du Parti libéral, Me René Dussault, qui
a déjà été responsable de la commission politique
et qui a écrit un traité de droit administratif sur ces
questions, à savoir que dans une société civilisée,
c'est la "Rule of Law", la règle de droit qui est fondamentale pour
qu'il y ait vraiment de la justice. Actuellement, on adopte des lois qu'on ne
fait pas respecter. Ensuite, il faut adopter d'autres mesures pour contourner
des lois qu'on aurait dû faire respecter. C'est une injustice, lorsqu'une
loi est administrée, qu'elle soit administrée pour certains et
non pour d'autres. Les lois doivent être appliquées
équitablement envers tous, de la même façon, et c'est la
seule façon de bien administrer un système d'inspection des
produits alimentaires.
On ne peut pas exiger, dans certains cas, que l'on respecte la
réglementation et, dans d'autres cas, tolérer qu'on ne la
respecte pas, sans que la loi n'y donne ouverture. Si la loi n'est pas bonne,
il faut la changer. Mais tant que la loi est là et qu'elle est en
vigueur, il faut l'appliquer ou il faut la changer pour que la pratique que
l'on veut suivre soit celle prévue par la loi.
Ce projet de loi est exorbitant. Il va donner des pouvoirs exorbitants
aux fonctionnaires et, du fait qu'ils auront des pouvoirs exorbitants, il y
aura des abus. Ce n'est pas la façon de travailler ou de fonctionner. Je
pense que ce n'est pas correct. J'aurais aimé entendre le
député de Prévost sur ce projet de loi. J'aurais
aimé entendre d'autres députés, qui sont membres de cette
Assemblée et qui ne parlent jamais sur ces projets de loi qui devraient
les intéresser grandement parce qu'ils touchent tout le monde. Ils
touchent les consommateurs. Ils touchent les producteurs.
Le député de Shefford connaît bien ces
matières parce qu'il vient d'une entreprise laitière. Il vient de
la Coopérative de Granby, qui est la plus grande entreprise
laitière du Québec. On dit même que c'est la plus grande
entreprise laitière au monde, dans le domaine coopératif. Le
député de Shefford, qui oeuvrait dans cette entreprise, pourrait
vous parler - je souhaite qu'il le fasse - sur ce projet de loi pour vous
indiquer à quel point le contrôle de la qualité, de
façon régulière et permanente dans une usine, est
fondamental. Je souhaite donc que le député de Shefford l'indique
justement aux parlementaires qui n'ont pas l'expérience de la
manière que cela se passe.
Je ne sais pas si le député de Taschereau, qui n'aime pas
qu'on lui dise que sa famille est dans le domaine du biscuit, est aussi
familier avec des questions, mais les normes de production sont très
sévères dans une industrie laitière, surtout que le
contrôle exige une qualité extraordinaire au point de vue de la
conception et de la construction des usines, des matériaux
utilisés dans ces usines et aussi de la manipulation des produits qui
doit respecter un grand nombre de normes et de règles pour qu'un produit
qui entre dans de telles conditions sorte dans les conditions idéales
pour les consommateurs à l'autre bout de la chaîne
alimentaire.
Ceux qui ont visité les usines laitières se rendent compte
à quel point on est dans un domaine où le contrôle de la
salubrité est encore plus rigoureux que dans un hôpital où
le contrôle de la qualité est surveillé d'une façon
extraordinaire. Malgré tout, il peut arriver que des bactéries ne
demandent pas la permission pour se multiplier de façon astronomique.
À un moment donné, il peut arriver que l'usine, pour une raison
ou pour une autre, pour un degré de température qui a
varié au-delà de ce que l'on avait anticipé ou que l'on
devait permettre, a généré un nombre de bactéries
plus grand et a fait en sorte que le produit n'est plus dans les mêmes
conditions où il aurait dû être au point
d'arrivée.
M. le Président, c'est évident qu'un projet comme
celui-là n'aidera l'industrie d'aucune façon, alors que le
ministre a déjà les pouvoirs d'empêcher toute consommation
de produits impropres et de faire en sorte, par ses inspecteurs,
d'empêcher la circulation dans le commerce de produits alimentaires
impropres à la consommation humaine.
Le ministre n'a pas besoin de ce pouvoir qu'il demande dans la loi 134
et je pense que, dans l'ensemble du territoire québécois, il
n'aura pas besoin de ce pouvoir. Je sais qu'il va nous parler de la ville de
Montréal, etc., mais elle ne fonctionne pas de la même
façon que la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les
aliments, dont les cadres d'inspection sont formés dans des domaines
particuliers et jusqu'à maintenant la Loi sur les produits agricoles,
les produits marins et les aliments a été administrée sans
que ces pouvoirs soient nécessaires.
M. le Président, on va se trouver rapidement, sur le plan
administratif, avec des pouvoirs encore plus grands que l'on va donner aux
fonctionnaires et, à ce moment-là, parce qu'ils auront ces
pouvoirs-là, parce que le législateur les leur aura donnés
sous l'impulsion d'un ministre qui aura passé cela au Conseil des
ministres, ils auront un comportement qui sera fonction des pouvoirs qu'on leur
aura donnés et, parce que ces pouvoirs sont exorbitants, il pourra
arriver que la conduite soit exorbitante par rapport à ce qu'elle
devrait être.
M. le Président, le rôle du ministre est beaucoup plus
d'aider l'industrie que d'essayer de la démolir. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président: Comme prochain intervenant, je
reconnais M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Une voix:
Bravo!
M. Pagé: Le député de Lévis nous
indique que le projet de loi 134 aurait traîné au feuilleton et il
accuse erronément, faussement et malhabilement le leader du gouvernement
d'appeler ce projet de loi aujourd'hui seulement pour la prise en
considération du rapport. Dois-je rappeler au député de
Lévis que les travaux en commission parlementaire sur ce projet de loi
pour l'étude article par article se sont terminés le vendredi 12
juin dernier? Nous aurions évidemment souhaité aborder la prise
en considération du rapport avec le consentement de l'Opposition
dès vendredi après-midi, mais on n'a pas siégé
compte tenu du congrès du Parti québécois où
étaient conviés évidemment le chef de l'Opposition et le
député de Lévis, l'affirmation nationale d'un
côté et l'indépendance du Québec de l'autre.
M. le Président, le député de Lévis a fait
référence au fait que l'on devait siéger à une
heure tardive. Je l'ai très clairement indiqué. Depuis plusieurs
jours les projets de loi 133 et 146 auraient pu être appelés ici
à l'Assemblée nationale, mais le député de
Lévis n'était pas disponible, retenu qu'il était en
commission parlementaire à discuter pendant des heures et des heures sur
des projets de loi d'un seul article avec d'autres de mes collègues. Le
député de Lévis, d'une façon un peu
démagogique, indique qu'on adoptera nos projets de loi alors que les
producteurs et les productrices agricoles ne peuvent écouter. Il se
vante que, lui, il les faisait adopter à 5 heures le soir, au moment
où la cote d'écoute était bonne. Je vous rappellerai que
les producteurs et les productrices agricoles, à 5 heures le soir, sont
généralement encore au travail, M. le député.
Le député fait allusion à l'article principal de ce
projet de loi 134 qui vise à donner des pouvoirs au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui peuvent, à
prime abord, paraître exorbitants, soit celui d'émettre une
ordonnance pour la cessation des opérations et des activités
d'une entreprise qui détient ou encore qui n'a pas à
détenir de permis en vertu de nos lois et où un produit
alimentaire risque d'affecter la vie et la santé d'un consommateur et
d'une consommatrice. Je l'ai indiqué en commission parlementaire, je
peux me questionner sur l'objectivité et même sur le degré
d'honnêteté de l'Opposition parce qu'elle ne met pas en relief les
motifs, que j'ai formulés et réitérés à
plusieurs reprises, qui commandent l'adoption de ce projet de loi.
Exemple concret: en 1986, une entreprise oeuvrait sans permis dans un
commerce de produits donnés. Ce produit contenait de la salmonelle. De
nombreux cas d'intoxication alimentaire et d'infection ont été
portés à mon attention. Des gens risquaient d'y perdre leur vie.
Nous sommes intervenus et on a constaté qu'on avait le pouvoir d'aller
chercher une injonction, de la plaider, des délais, et, pendant cette
période-là - ces produits originant d'une entreprise, on a les
pouvoirs en vertu de notre loi de les saisir, mais on n'a pas les pouvoirs de
faire cesser cette entreprise de produire -compte tenu des pouvoirs
limités appartenant au ministère et au ministre, cette entreprise
continuait à mettre en marché des produits susceptibles
d'affecter gravement, non seulement la santé des gens, mais même
leur vie, M. le Président.
C'est la raison pour laquelle ce projet de loi prévoit le pouvoir
pour le ministre de l'Agriculture, sur ordonnance, d'ordonner la cessation des
activités d'une entreprise pendant quinze jours, la période
nécessaire pour s'assurer qu'un tel produit ne soit pas mis en
marché et pour aller se chercher une approbation de la Cour
supérieure. Ce projet
de loi s'inscrit dans une volonté très claire de
protéger le consommateur québécois, et je dois retenir que
celui qui a occupé la fonction de ministre de l'Alimentation, pendant
neuf ans par surcroît, foule aux pieds un principe aussi fondamental que
celui de protéger nos consommateurs et, ce faisant, on protège la
crédibilité, la réputation et la renommée,
finalement, du haut degré de qualité des produits agricoles du
Québec. Le député de Lévis sera jugé
à partir des votes qu'il exprime ici, à l'Assemblée
nationale, et je suis persuadé qu'il sera sévèrement
jugé dans le cas de ce projet de loi.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que le rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 134, Loi modifiant la
Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: L'article 1, M. le Président.
Projet de loi 15 Adoption du principe
Le Vice-Président: À l'article 1 du feuilleton, M.
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose
que le principe du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur les terres
publiques agricoles et d'autres dispositions législatives, soit
maintenant adopté. Je reconnais comme premier intervenant M. le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Des voix: Bravo!
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais
remercier mes honorables collègues d'autant d'enthousiasme. Ils
démontrent très clairement la solidarité à
l'égard...
Une voix: C'est un travail d'équipe.
M. Pagé: ...du ministre de l'Agriculture dans le cadre
d'un travail d'équipe comme celui qui nous caractérise...
Une voix: Une belle équipe.
M. Pagé: ...pour l'adoption de nos lois à
l'Assemblée nationale et pour faire fi des "filibusters" nombreux et
fréquents du député de Lévis dont l'approche,
évidemment, malheureusement est de retarder l'adoption de nos projets de
loi et que je qualifierais, comme le titre de l'émission de la
distinguée Mme Janette Bertrand, de "Parler pour parler".
M. le Président, la Loi modifiant la Loi sur les terres publiques
agricoles et d'autres dispositions législatives qui est prévue
à l'article 1 de notre feuilleton, se réfère
évidemment à la Loi sur les terres publiques agricoles qui est
entrée en vigueur le 1 r juillet 1984. C'est un projet de loi
important, c'est un projet de loi qui commande évidemment une
étude en profondeur, c'est un projet de loi qui commande aussi une
discussion que je veux, comme ministre, la plus utile avec le
député de Lévis.
Il a tellement travaillé pour "filibuster" la commission
parlementaire, pour retarder l'adoption de nos projets de loi, M. le
Président, que je vais consentir à lui donner une journée
pour lire le projet de loi et l'approfondir. C'est pourquoi je demande
l'ajournement du débat.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement
au débat est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je propose que nous
ajournions nos travaux à ce matin, 10 heures.
Le Vice-Président: Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Très bien! Donc,
l'Assemblée nationale ajourne ses travaux à ce matin, mercredi 17
juin, à 10 heures.
(Fin de la séance à 4 h 47)