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(Dix heures onze minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un
moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Présence de M. Boualem Bessaieh
Avant de débuter les affaires courantes, j'ai le plaisir de
souligner la présence dans les galeries de M. le ministre de la Culture
et du Tourisme de la République démocratique et populaire
d'Algérie, M. Boualem Bessaieh.
Aux affaires courantes.
Béclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi.
Dépôt de documents.
Mme la ministre des Affaires culturelles.
Rapport annuel de la SOOICC
Mme Bacon: M. le Président, j'ai le plaisir de
déposer le rapport d'activités au 31 mars 1987 de la
Société de développement des industries de la culture et
des communications.
Le Président: Document déposé.
M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu et ministre du Travail.
Rapport annuel de l'IRIR
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président,
conformément à la loi, je vous transmets le rapport annuel de
l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération pour
l'année financière qui a pris fin le 31 mars 1987.
Le Président: Document déposé. M. le
ministre de l'Industrie et du Commerce.
Rapport annuel de la SDC
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, M. le Président,
j'ai le plaisir de déposer le rapport annuel de la Société
de développement des coopératives pour l'année
terminée le 31 mars 1987.
Le Président: M. le ministre, votre document est
déposé.
M. le ministre délégué aux Finances et à la
Privatisation.
Rapports annuels de la CVMQ
M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport de la Commission des valeurs mobilières du
Québec pour l'année se terminant le 31 mars 1986 et le rapport de
la commission pour l'année se terminant le 31 mars 1987.
Rapport annuel sur les assurances
Aussi je dépose le rapport annuel sur les assurances tel que
présenté par l'Inspecteur général des institutions
financières sur l'état des affaires des assureurs ayant
exercé au Québec en 1986.
Le Président: M. le ministre, vos rapports sont
déposés. M. le ministre des Approvisionnements et services.
Rapport du Comité consultatif en matière
d'inondations
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de
déposer le rapport Gauvin, rapport du Comité consultatif en
matière d'inondations, juin 1987.
Le Président: Votre rapport est déposé. M.
le Solliciteur général.
Avant-projet de loi sur l'organisation
policière et modifiant la Loi de police
et diverses dispositions législatives
M. Latulippe: Oui. Merci, M. le Président. Je voudrais
déposer un avant-projet de loi sur l'organisation policière et
modifiant la Loi de police et diverses dispositions législatives.
Le Président: Votre document est déposé.
Dépôt de rapports de commission. M. le président de
la commission du budget et de l'administration et député de
Vanier.
Étude détaillée du projet de loi
3
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 16 juin 1987 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi concernant le
bureau de discipline de l'Association des courtiers d'assurances de la province
de Québec. Le projet de loi a été adopté avec
amendements.
Le Président: M. le député de Vanier, votre
rapport est déposé. M. le président de la commission de
l'éducation et député de Sauvé.
Étude détaillée du projet de loi
18
M. Parent (Sauvé): M. le Président, j'ai l'honneur
de déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a
siégé le 16 juin 1987 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 18, Loi modifiant la
Loi favorisant le développement scientifique et technologique du
Québec. Ce projet de loi a été adopté avec
amendements.
Le Président: Votre rapport est déposé, M.
le député de Sauvé. M. le vice-président de la
commission de l'aménagement et député de Drummond.
Étude détaillée du projet de loi
43
M. Saint-Roch: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé les 15 et 16 juin 1987 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 43, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Le projet
de loi a été adopté avec amendements.
Le Président: M. le député de Drummond,
votre rapport est déposé. M. le président de la commission
des institutions et député de Taillon, rapports de
commission.
Étude détaillée des projets de
loi 40, 34, 36, 35 et 26
M. Filion: Merci, M. le Président. Je dépose les
rapports de la commission des institutions qui a siégé le 16 juin
1987 afin de procéder à l'étude détaillée de
tous les projets de loi suivants: Projet de loi 40, Loi modifiant la Loi sur la
division territoriale concernant certaines divisions d'enregistrement. Ce
projet de loi a été adopté. Le projet de loi 34, Loi
modifiant le Code de procédure civile, le projet de loi 36, Loi
modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, le projet de loi 35, Loi sur
certaines ventes de parties de lot pour défaut de paiement de taxes; le
projet de loi 26, Loi modifiant la Loi sur le Protecteur du citoyen. Ces
derniers projets de loi ont été adoptés avec amendements.
'
Vérification des engagements financiers
De plus, je dépose le rapport de la commission des institutions
qui a siégé les 4 et 6 novembre 1986 et les 26 et 31 mars 1987
afin de procéder à la vérification des engagements
financiers concernant la protection du consommateur, des affaires autochtones,
des affaires intergouvernementales canadiennes, les ministères de la
Justice, du Solliciteur général et des Relations internationales
pour les mois de janvier et décembre 1986.
Le Président: M. le député de Taillon, vos
rapports sont maintenant déposés. M. le président de la
commission de l'économie et du travail, député de
Verchères.
Étude détaillée du projet de loi
161
M. Charbonneau: M. le Président, je dépose le
rapport de notre commission qui a siégé les 11 et 16 juin dernier
afin de procéder à l'étude détaillée du
projet de loi 161, Loi sur les mines. Le projet de loi a été
adopté avec amendements.
Le Président: Votre rapport est déposé, M.
le député de Verchères. Nous allons maintenant
procéder au dépôt de pétitions. Mme la
députée de Maisonneuve.
Report de la commission sur la
levée du moratoire sur la conversion des
immeubles locatifs
Mme Harel: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée par 83 pétitionnaires citoyens du quartier
Hochelaga-Maisonneuve à Montréal invoquant les faits suivants: 48
% des logements habités ont été construits avant 1920 dans
leur quartier; 78 % des logements l'ont été avant 1945 et moins
de 5 % ont été bâtis depuis I960; 05 % des familles
partagent un revenu familial moyen de moins de 20 000 $, 27 % des familles sont
monoparentales et consacrent plus de 40 % de leur budget au paiement du loyer
mensuel et concluant à ce que l'Assemblée nationale intervienne
auprès du ministre de l'Habitation pour qu'il mette fin à la
discrimination envisagée contre les femmes chefs de famille
monoparentale dans les HLM, reconnaisse l'urgente nécessité de la
construction de nouveaux logements sociaux, HLM et coopératives dans
Hochelaga-Maisonneuve et reporte en septembre la tenue de la commission
parlementaire sur la levée du moratoire, sur la conversion des immeubles
locatifs en copropriété divise.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
votre pétition est déposée. M. le député
d'Ungava.
Reconduction de l'entente entre la RAMQ et la ville de
Chapais
M. Claveau: Merci. J'ai l'honneur de déposer l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
423 pétitionnaires de la municipalité de Chapais invoquant
les
fais suivants. L'entente entre la ville de Chapais et la Régie de
l'assurance-automobile du Québec permet depuis 1981 de dispenser les
services de la régie à Chapais. Le volume annuel des transactions
inscrites au bureau de la régie à Chapais s'élève
à 350 000 $; la fermeture prévue de ce bureau obligera les
citoyens à effectuer 90 kilomètres pour avoir droit au même
service, ceci se traduisant par la perte de journées entières de
travail; et concluant à ce que l'Assemblée nationale
réclame du gouvernement du Québec que la Régie de
l'assurance automobile du Québec reconduise son entente avec la ville de
Chapais pour continuer à dispenser ses services locaux sis en cette
municipalité."
Le Président: M. le député d'Ungava, votre
pétition est déposée.
Toujours à l'étape du dépôt de
pétitions, M. le député de Viger.
Demande d'un nouveau CLSC à
Saint-Léonard
M. Maciocia: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
1200 pétitionnaires citoyens de Saint-Léonard. Les faits
invoqués sont les suivants: "Considérant que les services
actuellement offerts par le CLSC Saint-Léonard ne sont pas accessibles
autrement ni ailleurs sur le territoire de cette municipalité, la
population de Saint-Léonard a besoin d'un CLSC autonome et
spécifique respectant et reflétant ses particularités et,
par le biais de cette pétition, en manifeste la volonté à
l'Assemblée nationale." Je certifie que cet extrait est conforme au
règlement et à l'original de la pétition.
Le Président: M. le député de Viger, votre
pétition est maintenant déposée.
Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de
droit ou de privilège ou sur un fait personnel.
Nous allons maintenant procéder à la période
régulière de questions. Je vais reconnaître une
première principale, mais avant de vous reconnaître, M. le chef de
l'Opposition, je demanderais la collaboration de tous, puisque,
immédiatement après la période de questions, je
céderai la parole à l'un des membres de cette
Assemblée.
M. le chef de l'Opposition.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Préavis de motion du premier ministre sur
l'entente constitutionnelle
M. Johnson (Anjou): M. le Président, au feuilleton et
préavis, ce matin, on retrouve à la rubrique "partie 5", au
chapitre des nouveaux préavis, une motion nouvelle
présentée au nom du premier ministre et touchant l'adoption par
l'Assemblée de la résolution constitutionnelle dite de Meech ou
d'Ottawa.
On sait, par ailleurs, que de nombreuses Législatures au Canada
et le Parlement canadien procéderont à différentes
consultations sur la base des textes juridiques, bénéfice dont
les Québécois n'ont pas eu le privilège, jusqu'à
maintenant, étant donné le refus du premier ministre de faire en
sorte que les gens soient entendus sur les textes juridiques, ceux qui
pourraient lier le Québec.
Ma question s'adresse au premier ministre et je lui demande si, quant
à lui, sa décision serait prise de procéder au
dépôt de cette motion étant donné qu'elle est
inscrite en préavis et s'il a l'intention de faire en sorte que le reste
de nos travaux de la session, en toute fin de session, à la bousculade,
nous soyons soumis ici à la nécessité d'adopter par une
majorité qui utilisera son poids l'adhésion du Québec au
Canada sur des bases inadmissibles?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition me
permettra quand même de signaler le congrès du Parti
québécois, en fin de semaine, où sa thèse, ce qu'on
appelle l'affirmation nationale, a obtenu un appui de 77 %. C'est quand
même supérieur à ce qu'il avait obtenu au dernier conseil
national du Parti québécois où c'était environ 62
%. On a quand même assisté à une scène, je dirais,
un peu attendrissante, quand M. Guy Bertrand est allé serrer la main du
chef de l'Opposition. Il semblait...
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
Une voix: ...embrassé.
M. Chevrette: M. le Président, vous avez là le plus
bel exemple de la violation de l'article 79 qui dit qu'une réponse doit
être un peu connexe à la question. Je remarque que c'est le
premier ministre lui-même qui, dans cette Chambre, contribue à
ridiculiser le règlement pour ne pas dire le Parlement en ne
répondant jamais d'une façon précise à au moins un
élément relatif à la question qui a été
posée. Qu'il commence donc par faire ses congrès. Cela lui a pris
six ans d'exil, bonne mère du ciel! avant de revenir en cette Chambre et
trois élections avant de rentrer. Il me semble qu'il pourrait
répondre de la constitution - cela c'est sérieux pour l'avenir du
Québec - et nous laisser tranquilles avec nos congrès. On fera
les nôtres, vous ferez les vôtres et on ne vous achalera pas avec
les vôtres. Est-ce clair?
Le Président: M. le premier ministre, à la
question.
M. Bourassa: M. le Président, il faut quand même
rectifier certains faits. Le leader de l'Opposition est au courant qu'en quatre
tentatives pour être premier ministre, j'ai gagné trois fois,
trois sur quatre.
Une voix: 115 %.
M. Bourassa: Je voulais simplement...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bourassa: ...signaler cette grande réconciliation entre
M. Guy Bertrand et le chef de l'Opposition qui a dû en être...
M. Chevrette: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président: À la question, M. le premier
ministre. M. le premier ministre, a la question.
M. Chevrette: Non, non, VI. le Président. Je m'excuse.
Le Président: Sur une question de règlement? Sur
une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Cette fois, je vais vous demander de réagir
à la question de règlement, puisque vous êtes le gardien de
nos droits. Considérez-vous que, depuis le début de la
réponse du premier ministre, il y a un tant soit peu quelque chose de
relatif ou de connexe à la question qui a été
posée?Sinon, M. le Président, vous avez beau rire des
farces du premier ministre, mais qui appliquera le règlement? Quand on
se lève, on n'a même pas une réaction de la
présidence pour voir si cela a de l'allure ou pas. Voyons!
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je comprends mal l'impatience
du leader de l'Opposition. Il me semble que le premier ministre a droit
à un court préambule avant d'aborder la réponse comme
telle. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas coqstaté qu'on ait
dérogé un tant soit peu aux règles normales du
déroulement de la période de questions. Je vous le dis
sincèrement, M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! A
plusieurs reprises, autant d'un côté que de l'autre, on a eu
certaines opinions et parfois émis certaines remarques soit dans les
préambules à une question principale ou à une question
additionnelle et souvent les réponses du premier ministre sont
précédées de certaines remarques. Je pense que ce n'est
pas spécial, ce matin, relativement à la question qui a
été posée. J'ai mentionné à plusieurs
reprises que j'accordais une certaine souplesse au chef de l'Opposition et au
premier ministre. J'inviterais le premier ministre à répondre
à la question, s'il vous plaît.
M. Bourassa: M. le Président, je ne crois pas qu'il y
avait tellement de négatif dans mes propos. Que le chef de l'Opposition
ait été ému de cette réconciliation,
peut-être ou probablement avec un brin de scepticisme, on peut le
signaler.
Pour répondre à sa question...
Des voix: Ah!
M. Gratton: On l'interrompt, Vf. le Président.
M. Bourassa: Je ne parlerai plus de Guy Bertrand, si cela...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Johnson (Anjou): Si le premier ministre me permet...
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je pense que le
premier ministre me le permettra. Je comprends qu'il ait une obsession par
rapport au mot "Bertrand", avec ce qui est arrivé lors de la
dernière élection.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: M. le premier ministre.
Une voix: Si on regarde la majorité dans Anjou...
Le Président: M. le premier ministre, s'il vous
plaît:
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition sait
fort bien que si, dans son comté, j'avais adopté la même
attitude que celle qu'il a adoptée dans mon comté, il ne serait
pas en Chambre aujourd'hui.
Des voix: Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix: Prouvez-le donc.
Le Président: La question, M. le
premier ministre.
M. Bourassa: On n'aura pas besoin d'improviser un ministre comme
candidat libéral à la prochaine élection pour battre le
chef de l'Opposition dans son propre comté, il le sait.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Bourassa: Ce que je voudrais dire au chef de
l'Opposition...
M. Chevrette: Non, non, non.
Le Président: M. le leader de l'Opposition. (10 h 30)
M. Chevrette: M. le Président, cela fait exactement huit
minutes que la période de questions est commencée et le premier
ministre n'a même pas encore effleuré le début d'une
réponse. Il y a des limites à la bouffonnerie. S'il faut modifier
nos règlements, je serais prêt à proposer ceci: Que les
sept premières minutes de la période de questions soient
consacrées à une émission spéciale, "Les cassettes
à Boubou". Après cela, on aura la paix.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Des voix: Woh!
Le Président: Non, non, non. Une intervention, M. le
leader du gouvernement. Une intervention.
M. Gratton: M. le Président, probablement que le leader de
l'Opposition regrette déjà la dernière phrase qu'il a
prononcée. Elle n'est pas conforme à ce qu'il a l'habitude de
considérer comme le décorum minimum qu'on doit avoir à
l'Assemblée. M. le Président, je ferai remarquer qu'on a
interrompu le premier ministre à trois reprises du côté de
l'Opposition.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gratton: Si on laissait le premier ministre répondre,
je pense qu'on pourrait bâcler cela très rapidement.
Le Président: Je ne pense pas que ce soient des remarques
semblables qui puissent faire avancer les travaux. Je ne pense pas qu'à
la façon dont on procède ce matin, on puisse avancer et apporter
quoi que ce soit au fond du débat.
M. le premier ministre, s'il vous plaît, la question.
M. Bourassa: M. le Président, ce que je voudrais dire au
chef de l'Opposition, sur la motion qui a été
déposée ce matin, qui a été mise en avis, c'est que
nous sommes conscients qu'il y a eu, à la différence des autres
provinces, une commission parlementaire de 55 heures. Donc, d'ici à la
fin de la session régulière, dans l'hypothèse où le
gouvernement procédera - et nous prendrons une décision à
ce sujet au cours de la journée, très probablement - il reste
l'équivalent du temps qui avait été accordé au
débat référendaire. Grosso modo, il reste environ 35
heures de session d'ici à mardi soir prochain. Je ne vois pas en quoi le
chef de l'Opposition porte des accusations sur la précipitation dont
pourrait faire preuve le gouvernement.
En fait, depuis le 4 juin, nous avons eu une période d'une
dizaine de jours qui a permis à l'ensemble des groupes
intéressés de porter un jugement sur le contenu de l'accord
constitutionnel. Je ne vois pas en quoi on peut accuser sérieusement le
gouvernement de procéder précipitamment dans l'hypothèse
où il voudrait faire adopter cette motion avant la fin
régulière des travaux.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, toujours dans le
cadre de cette hypothèse, parce que le premier ministre évoque
que c'est une hpothèse. Le fait que ce soit en préavis
n'entraîne pas obligatoirement le dépôt et le
dépôt, n'entraîne pas obligatoirement l'adoption. Mais, dans
la mesure où le premier ministre désirerait que
l'Assemblée soit saisie, que le débat se déroule et qu'il
puisse utiliser sa majorité, ne trouve-t-il pas que le Québec
serait dans une situation un peu ridicule, face au reste du Canada, s'il devait
procéder à la vapeur ici, en fin de session, pour adopter ces
textes juridiques qui n'ont pas fait l'objet de consultation, alors que le
Parlement canadien, lui, va venir consulter les Québécois avant
d'adopter la sienne?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'ai répondu
tantôt qu'il y avait eu 55 heures de débats parlementaires et les
résultats de ces 55 heures nous ont permis de pouvoir plaider avec plus
d'efficacité sur l'addition de deux clauses de sauvegarde. Quant au
reste, l'accord du lac Meech se retrouve dans l'accord du 3 juin, si le chef de
l'Opposition veut invoquer les textes juridiques. Donc, nous avons eu cette
période de 55 heures. Nous avons, d'ici à la fin
régulière des travaux, la possibilité d'avoir un
débat qui équivaut au débat référendaire de
1980, environ 30 à 35 heures. Je ne vois pas en quoi on peut nous
accuser, toujours dans l'hypothèse où nous déciderions de
procéder,
de le faire d'une façon précipitée.
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle?
Des voix: En principale.
Le Président: En principale, M. le député de
Taillon.
L'affichage public dans la région de
Montréal
M. Filion: En principale, M. le Président, en
matière d'affichage. Il suffit de se promener un petit peu à
Montréal, dans l'Estrie, dans l'Outaouais, pour se rendre compte qu'on
assiste à une prolifération de signes, de pancartes et d'affiches
qui contreviennent aux dispositions de la loi 101. À titre
d'illustration, j'informe le ministre de la Justice que la campagne de
sensibilisation de la Société Saint-Jean-Baptiste va bien ou mal,
selon le point de vue où l'on se place. A ce jour, il y a plus de 1400
constats de contraventions qui ont été dressés en quelques
semaines et uniquement dans les régions de Notre-Dame-de-Grâce,
Outremont, Westmount, Saint-Laurent, à tout seigneur tout honneur,
Hamstead et dans l'ouest de l'île de Montréal. A tel point,
d'ailleurs, que la campagne de sensibilisation de la Société
Saint-Jean-Baptiste dépassera la date du 24 juin.
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Votre question, s'il vous plaît!
M. Filion: Tout en rappelant au ministre de la Justice
l'article...
Oie voix: Question.
M. Filion: ...3 de la loi de son ministère qui l'oblige
à faire respecter la loi, je voudrais demander au Procureur
général quand il posera des gestes concrets et fermes afin de
corriger les signaux tout croches qu'il a envoyés à la
société québécoise durant l'année 1986 en
refusant de remplir ses devoirs et d'appliquer la loi 101 en matière
d'affichage.
Le Président: M. le Procureur général.
M. Marx: M. le Président, cette question est mal
placée. II pose la question à la mauvaise personne, il se trompe
de personne. La personne à qui il doit poser cette question est le
président de la Commission de protection de la langue française
qui a la responsabilité de faire des enquêtes et d'acheminer les
dossiers au Procureur général. Nous avons reçu des
dossiers. Parfois, nous en recevons deux ou trois par semaine. Ils sont
examinés au ministère de la Justice et, depuis quelques semaines,
nous acheminons les dossiers aux procureurs dans les régions et les
poursuites seront entamées, le cas échéant. C'est
ça. Si le député a d'autres questions à poser sur
ce sujet, je pense qu'il devra s'adresser au président de la Commission
de protection de la langue française.
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle.
M. Filion: M. le Président, est-ce que le ministre de la
Justice reconnaît que le nombre de dossiers transmis par la Commission de
protection de la langue française depuis avril 1986... J'ai ici,
grâce à la collaboration de la ministre responsable de
l'application de la loi, le nombre exact qui est de 136. Comment le Procureur
général explique-t-il, après avoir reçu à
son bureau 136 dossiers transmis par la Commission de protection de la langue
française depuis avril 1986, qu'il n'y ait eu qu'à peine une
trentaine de plaintes déposées par le Procureur
général devant les tribunaux?
Le Président: M. le Procureur général.
M. Marx: M. le Président, je peux vous dire tout de suite
qu'on m'a dit qu'il y avait près de 1700 dossiers qui avaient
été oubliés dans les boîtes à la Commission
de protection de la langue française par l'ancien président, sous
l'ancien gouvernement.
Des voix: Ah! 1700?
M. Marx: 1700. En ce qui concerne les poursuites, à
l'heure actuelle, on suit exactement la même politique que l'ancien
ministre de la Justice qui est maintenant le chef de l'Opposition. L'ancien
ministre de la Justice, le chef de l'Opposition actuel, vous dira, M. le
député de Taillon, qu'il a rejeté un certain nombre de
dossiers faute de preuve.
Une voix: Zellers!
M. Marx: C'est ça. Zellers est un cas. L'ancien ministre
de la Justice n'a jamais poursuivi Zellers pendant des années. Tout ce
que je peux dire, M. le Président, c'est que nous suivons exactement la
même politique que l'ancien ministre de la Justice qui est maintenant le
chef de l'Opposition. Je ne peux pas faire mieux que lui, quand même!
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Johnson (Anjou): Le ministre de la Justice vient de dire - on
le savait - qu'il ne peut pas faire mieux que ce qu'on faisait
quand on était là. On sait ça, c'est très
clair.
Est-ce qu'il ne reconnaît pas que, contrairement à
l'époque où celui qui vous parle occupait les fonctions de
Procureur général, jamais je n'ai dit aux citoyens que nous
n'appliquerions pas la loi et j'ai toujours dit que nous appliquerions la loi,
contrairement à vous?
Des voix: Bravo: Bravo! Bravo!
Le Président: M. le Procureur général.
M. Marx: M. le Président, je n'ai pas les chiffres avec
moi aujourd'hui mais je peux vous les fournir. Je vais démontrer que
l'ancien ministre de la Justice n'a pas entamé de poursuites ou n'en a
intenté que quelques-unes pendant des années. Il y a des
années où il n'y avait pas de poursuites, même où il
y en avait une ou deux ou trois ou quatre ou cinq. La loi n'était plus
appliquée. (10 h 40)
Des voix: Ce n'est pas vrai.
M. Marx: Les exemples que le député de Taillon me
donne, souvent, ce sont des affiches qui sont là depuis un
demi-siècle. Il n'y a rien de nouveau. Je pense qu'il est inutile pour
le chef de l'Opposition de déchirer ses vêtements, de crier et
tout cela. Il n'y a rien là! Je n'ai jamais dit que la loi ne sera pas
respectée. J'ai toujours appliqué la loi comme il faut que ce
soit fait.
Le Président: M. le député de Taillon,
question additionnelle.
M. Filion: Oui. Je voudrais demander au Procureur
général quand il va réaliser que c'est son attitude molle
et négligente qui a encouragé la commission des infractions, de
sorte qu'on assiste aujourd'hui au Québec à un état quasi
généralisé de désobéissance en
matière d'affichage. On n'a qu'à sortir de cette Assemblée
nationale et à aller se promener un peu. Si vous ne le faites pas, on le
fait. C'est cela qu'on voit.
Le Président: M. le Procureur général.
M. Marx: M. le Président, tout ce que je peux dire et
répéter, c'est qu'il s'adresse à la mauvaise personne.
Tout ce que je fais, M. le Président, j'attends des plaintes. Nous avons
à peu près 15 000 plaintes par année en droit
pénal, dont un certain nombre qui viennent de la Commission de
protection de la langue française. Nous poursuivons, comme l'ancien
ministre de la Justice, le chef de l'Opposition. Comme je l'ai bien dit, M. le
Président, les plaintes sont traitées de la même
façon, elles sont acheminées aux procureurs des régions et
on va prendre des poursuites le cas échéant.
Le Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean, question additionnelle.
M. Brassard: Au premier ministre. Le premier ministre ne
reconnaît-il pas que ses déclarations nombreuses et multiples sur
le français, langue prioritaire, comme il l'a fait la semaine
dernière, ce qui signifie en pratique le bilinguisme dans l'affichage,
constituent une incitation, un encouragement et presque une absolution à
l'égard des violations - nombreuses actuellement - de la loi 101 en
matière d'affichage et contribuent ainsi à la dégradation
de la situation, tel que l'a décrit mon collègue de Taillon au
début de sa question?
Le Président: M. le premier ministre. M. Bourassa:
Non, M. le Président.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
question principale.
La privatisation de Quebecair
Mme Harel: M. le Président, une fois de plus les
Québécois des régions auront été
ignorés dans leur demande de consultation sur la privatisation de
Quebecair. Le ministre fédéral des Transports, M. Crosbie, et le
cabinet fédéral conservateur viennent de donner leur
bénédiction à la transaction en refusant d'entendre les
représentants des populations des régions, notamment les villes
de Chicoutimi, de Val d'Or et de Sept-Îles.
Le ministre des Transports peut-il nous indiquer à quelle date
maintenant aura lieu la transaction? Peut-il nous confirmer que des
négociations se poursuivent actuellement sur le prix d'achat?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
effectivement, le . gouvernement fédéral n'a pas retenu les
prétentions très largement appuyées par l'Opposition et
même encouragées et sollicitées à l'occasion par
l'Opposition. Le gouvernement fédéral a donc décidé
de reconnaître que la transaction était conforme aux lois qui
existent au Canada et au Québec.
Oui, à la suite de cela, nous sommes en phase de
négociation intensive quant à la conclusion finale de ce dossier.
Effectivement, il y avait un délai déterminé de 30 jours
et nous sommes en négociation quant aux engagements que nous avions pris
de part et d'autre soit de réaliser ces engagements avant la signature
finale.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
question additionnelle.
Mme Harel: Oui. M. le Président, le ministre
s'engage-t-il, pour nous permettre d'avoir un éclairage complet sur les
négociations qui se poursuivent présentement, à
déposer, d'ici à la fin de la session, les états
financiers 1986 qui sont actuellement utilisés dans les
négociations du prix d'achat à la baisse?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, s'il
y a quelqu'un qui, dans ce dossier, a bien prouvé qu'on n'avait rien
à cacher, c'est bien le gouvernement actuel. D'abord, en juin 1986, avec
le dépôt d'une liasse de documents qui vous permettaient de faire
vos devoirs; au moment même de la transaction, une valise au complet a
été remise aux éditorialistes, y compris le contrat. On
n'a rien caché, et on n'a, dans ce dossier, strictement rien à
cacher. La compagnie, elle-même, a fait son bilan financier, ce qui,
actuellement, est en discussion. Cela a été accepté par
ses comptables, mais n'a pas été accepté par nous comme
bilan financier. C'est là-dessus que nous travaillons actuellement. Dans
ce sens, nous allons continuer de travailler de telle sorte qu'on puisse, dans
les plus brefs délais, mettre un point final à la transaction qui
a toujours été souhaitée par le gouvernement et qui
deviendra réalité, nous l'espérons, dans les 30 prochains
jours.
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
en principale.
Vente d'une école réclamée par le
troisième âge à Chicoutimi
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Le 2 avril dernier,
le premier ministre rencontrait les membres du conseil d'administration du
centre Horizon troisième âge qui le priait d'intervenir afin que
l'école Sainte-Marie à Chicoutimi ne soit pas mise en vente, mais
qu'elle soit offerte à la municipalité pour y reloger le centre
communautaire. Le centre communautaire est tenu par des
bénévoles. C'est un centre de jour pour personnes
âgées. Ses locaux sont inadéquats et sa demande, sa
démarche de relocalisation est appuyée par tous les intervenants
du milieu. Lors de la rencontre, le premier ministre s'était
engagé à examiner la question. Il s'était même
engagé à en faire une priorité. Pourtant, l'école
est en vente. Ma question est la suivante: Le premier ministre a-t-il
été informé que l'école avait été
mise en vente? Entend-il intervenir dans le dossier, qui touche plus
particulièrement le maintien à domicile des personnes
âgées.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je me souviens très bien de la rencontre en
compagnie de la députée de Chicoutimi. J'en avais discuté
avec le ministre de l'Éducation ou son personnel. Je lui demanderais de
compléter la réponse.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Science.
M. Ryan: Oui, l'école dont parle la députée
de Chicoutimi, l'école Sainte-Marie, servait toujours pour des fins
d'entreposage et la commission scolaire avait décidé d'en
disposer afin de construire plus proche de son centre administratif un
entrepôt qui aurait un rôle plus utile. Elle nous avait dit
formellement que, si elle ne pouvait pas disposer de l'école pour cette
fin, elle n'en disposerait pas, qu'elle en garderait la
propriété. Dans les circonstances, vu que la transaction doit
servir à améliorer les installations dont a besoin la commission
scolaire pour s'acquitter de ses fonctions, je lui ai donné
l'autorisation de procéder à la vente de cet édifice.
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
en additionnelle.
Mme Blackburn: Ma question s'adresse au premier ministre. II
avait, a ce moment, pris un engagement à l'endroit de personnes qui
travaillent bénévolement au maintien des personnes
âgées à domicile. Il s'était engagé non
seulement à examiner la situation, mais également à en
faire une priorité. Deuxième point, ces personnes sont
actuellement dans les galeries. Elles viennent demander au premier ministre
s'il a l'intention d'intervenir auprès du ministre de l'Éducation
afin que cette vente ne se réalise pas. Elles attendent une
réponse, et positive de préférence.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: J'accepte, dans toute la mesure du possible, de
recevoir différentes représentations, que ce soit des
députés ministériels ou des députés de
l'Opposition. Je ne peux pas ne pas tenir compte de la situation ou des
représentations qui me sont faites par les ministères
concernés ou les commissions scolaires concernées. Je suis
convaincu que la députée de Chicoutimi ne serait pas d'accord
avec une politique autoritaire qui irait au-delà et à l'encontre
des représentations, de faits nouveaux qui peuvent nous être
soumis.
Si les circonstances sont favorables, si
ça peut se réaliser en tenant compte d'un ensemble
d'objectifs, on procède de cette façon. Si d'autres points de vue
nous sont soumis avec d'autres arguments qui vont dans un autre sens, on prend
la meilleure décision en fonction et de l'intérêt de
l'administration et de l'intérêt des communautés locales.
J'ai accepté avec plaisir de rencontrer ces représentantes, en
compagnie de la députée de Chicoutimi. J'ai demandé qu'on
accorde une attention spéciale à cette question qui est une
question très importante pour Chicoutimi. J'ai constaté le
dévouement des personnes en cause. Cela paraissait un très bon
dossier mais j'ai eu à tenir compte d'autres représentations qui
avaient été faites.
Nous n'avons pas un système politique où il s'agit
d'écouter des représentations pour décider
immédiatement, quels que soient les autres faits qui peuvent nous
être soumis. Je pense bien que la députée de Chicoutimi va
comprendre cette attitude. (10 h 50)
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
en additionnelle.
Mme Blackburn: M. le Président, une information que le
ministre de l'Education et le premier ministre semblent ignorer, l'école
Sainte-Marie est désaffectée, elle ne sert plus à
entreposer du matériel. Est-ce que le premier ministre sait que c'est
avec l'autorisation expresse du ministre de l'éducation qu'une
commission scolaire peut vendre une école et que c'est une
dérogation au règlement qui veut que les écoles soient
d'abord offertes à la municipalité, aux commissions scolaires
avoisinantes, à une série d'organismes publics, et que c'est une
décision du ministre que d'autoriser la commission scolaire? Quand on
parle de services à la communauté locale, je pense que le premier
service...
Le Président: Vous êtes en additionnelle,
madame.
Mme Blackburn: Est-ce que le premier ministre ne reconnaît
pas que les services rendus par le centre Horizon troisième âge
dans le secteur nord de Chicoutimi est un service important et que ce quartier
vieillissant a besoin de locaux pour les personnes âgées?
Le Président: Votre question, madame.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: La députée n'a pas besoin de rappeler
tous les arguments qui militaient en faveur de cette option. C'est pourquoi
j'ai accepté de faire des représentations. Quand elle invoque les
pouvoirs du ministre de l'Éducation, si je les comprends bien, ils
s'appliquent quand il y a des changements à l'intérieur des
objectifs du ministère et des commissions scolaires. Mais, quand il
s'agit d'une conversion à d'autres fins que celles qui peuvent
être relatives à l'éducation, il semble bien que les
pouvoirs du ministre de l'Éducation sont beaucoup plus restreints.
Une voix: Bien non!
Mme Blackburn: M. le Président, une dernière...
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
une dernière additionnelle.
Mme Blackburn: La dérogation est devenue la règle.
Est-ce que le premier ministre peut nous dire, lorsque les citoyens s'adressent
à la plus haute autorité, à quelles autorités il
faut qu'ils s'adressent pour avoir gain de cause?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Le ministre de l'Éducation pourra
compléter éventuellement et donner toutes les informations. J'ai
accepté de rencontrer ces représentantes, je n'ai pas
accepté d'admettre inconditionnellement, sans connaître tous les
éléments du dossier. Je pense bien que la députée
de Chicoutimi n'accepterait pas, comme principe d'administration, que le
gouvernement ou que le chef du gouvernement impose ses décisions avant
même qu'il puisse examiner toutes les implications. C'est cela qui a
été fait en l'occurrence, en tenant compte des pouvoirs
respectifs du ministère de l'Éducation et des commissions
scolaires en cause. J'avais été frappé, je l'admets, par
la pertinence des représentations qui avaient été faites,
étant donné qu'on avait affaire à des gens qui faisaient
du bénévolat, une action communautaire. J'avais été
convaincu de la pertinence des représentations, mais il y a d'autres
aspects dans le dossier qu'il m'a fallu examiner. C'est à la
lumière de ces autres aspects que la décision a été
prise.
Le Président: Je vais reconnaître une principale
à M. le député de Vimont.
Effet de la déréglementation des
marchés financiers sur les épargnants
M. Théorêt: M. le Président, on pouvait lire,
en gros titre, dans le journal La Presse d'hier et je cite: "La
déréglementation des marchés financiers, qui commence
à s'appliquer le 30 juin prochain, est susceptible d'affecter tous les
Canadiens ayant un compte en banque. La nouvelle réglementation mettrait
fin, disait-on, à la
rigidité que certains jugent très sécuritaire de
notre système financier en abolissant de nombreuses distinctions qui
étaient faites auparavant entre les quatre grands piliers de notre
système, soit les banques, les courtiers en valeurs, les fiducies et les
compagnies d'assurances. "Le concept bancaire en sera donc profondément
bouleversé et on assistera à la naissance d'une pléthore
de nouveaux courtiers en valeurs."
Vous conviendrez que ce nouveau concept financier va amener de profonds
changements qui inquiètent les consommateurs et, en particulier, les
épargnants. Ma question s'adresse donc au ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation. Est-ce
que cette nouvelle réglementation aura des conséquences sur les
lois québécoises qui régissent nos institutions
financières, entre autres la Commission des valeurs mobilières du
Québec?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Finances et à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, je remercie le
député de Vimont de sa question. Il faut bien comprendre que,
s'il est vrai que le décloisonnement des institutions financières
commencera en Ontario et pour le gouvernement canadien, le 30 juin. Au
Québec, cela a commencé il y a plusieurs années. En 1973,
un premier jalon avait été posé puisque le gouvernement
québécois avait décidé de ne pas imposer de limites
à la propriété des maisons de courtage du Québec.
Donc, les étrangers auraient pu venir ici au Québec et acheter
des maisons de courtage. C'était un premier jalon dans le sens du
décloisonnement. Le gouvernement qui nous a
précédés en 1982-1983 a également posé des
jalons importants. Nous avons l'intention d'accélérer ce
processus puisque nous avons déjà indiqué que nous
déposerons très bientôt des projets de loi touchant la loi
sur les fiducies et des amendements importants à la Loi sur les
assurances. Nous proposerons également un projet de loi touchant le
Mouvement Desjardins, qui, comme vous le savez, est en partie
décloisonné avec des actifs de 30 000 000 000 $. Nous donnerons
au Mouvement Desjardins des pouvoirs accrus. Nous proposerons également
cet automne, je l'espère, un document portant sur le
décloisonnement des intermédiaires. C'est donc dire que nous
sommes engagés dans le décloisonnement des sociétés
pratiquant dans le secteur des institutions financières. Nous irons de
l'avant d'une façon très accélérée. Le
processus engagé fonctionne au Québec depuis plusieurs
années et se continuera.
Le Président: En additionnelle, M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: Est-ce que le ministre peut nous dire
quel effet aura cette nouvelle réglementation sur les consommateurs ou
les épargnants en particulier?
Le Président: M. le ministre déléqué
aux Finances et à la Privatisation.
M. Fortier: II faut bien comprendre, M. le Président, que
ce décloisonnement ne devrait pas inquiéter les
épargnants, puisque le gouvernement du Québec en particulier et
le gouvernement canadien se donnent des moyens d'intervention très
puissants et très sévères. Au Québec en
particulier, en 1982, on a adopté la loi créant le poste
d'Inspecteur général des institutions financières. En
conséquence, je crois qu'on doit rassurer les épargnants et
peut-être les personnes âgées qui peuvent s'inquiéter
de ce mouvement qui se fait sur la scène internationale, nationale et
québécoise. On doit leur dire que les gouvernements, s'ils
permettent le décloisonnement, en môme temps se donnent des
pouvoirs d'intervention. Et même, à l'automne, lorsque nous
modifierons la Loi sur les assurances pour donner plus de pouvoirs aux
sociétés d'assurances, nous donnerons également des
pouvoirs accrus à l'Inspecteur général des institutions
financières. Donc, le décloisonnement s'accompagne d'une
réglementation accrue justement pour protéger les
épargnants et ceux qui peuvent avoir des titres des différentes
institutions financières du Québec ou du Canada.
M. Rochefort: En principale, M. le Président.
Le Président: En principale ou en additionnelle, M. le
député de Saint-Louis?
M. Chagnon: En principale, M. le Président.
Le Président: Alors, je vais reconnaître en
principale M. le député de Gouin.
Demande d'arbitrage des médecins
résidents et internes
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Un important conflit
de travail a présentement cours dans les hôpitaux du Québec
opposant le gouvernement du Québec à la Fédération
des médecins résidents et internes du Québec. On sait que
la semaine dernière, au début de la grève de ce groupe de
médecins, une grève symbolique, dois-je le rappeler, nous avons
pu lire un placard publicitaire dans les journaux du Québec qui se
lisait comme suit: M. Bourassa, accepteriez-vous de vous faire opérer
par un médecin qui n'a pas dormi depuis 32 heures? La demande
spécifique de la Fédération des
médecins résidents et internes du Québec à
la ministre de la Santé et des Services sociaux est la suivante: c'est
d'accepter d'aller en arbitrage obligatoire sur les clauses qu'il reste
à régler, notamment quant au nombre d'heures consécutives
à travailler. Est-ce que la ministre de la Santé et des Services
sociaux a l'intention de donner suite à cette demande d'aller en
arbitrage obligatoire faite par la Fédération des médecins
résidents et internes du Québec?
Le Président: Mue la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Vous avez la parole, Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis
étonnée que, après plus de deux semaines de grève,
ce soit la première fois que l'Opposition me pose une question à
ce sujet. Je voudrais d'abord dire à la population que les services
essentiels sont respectés dans une proportion de 90 % dans l'ensemble
des hôpitaux - il s'agit des hôpitaux universitaires, en
l'occurrence - et de 100 % dans le cas des soins intensifs et des services
à l'urgence. Je dois vous dire que la Fédération des
médecins résidents et internes du Québec a scrupuleusement
respecté les règles du jeu en ce qui a trait aux services
essentiels. Il y a trois points en litige et incidemment, ce sont les
mêmes que ceux qui existaient à la fin de 1985, au moment
où le gouvernement d'alors concluait une entente avec la
Fédération des médecins internes et résidents. (11
heures)
Un des points particuliers qui est soulevé - je me
réfère maintenant à la question du député de
Gouin - touchant l'arbitrage obligatoire est une demande qu'ils ont faite.
À l'heure actuelle, nous sommes à explorer. II doit y avoir une
rencontre demain ou après-demain avec la fédération et ces
questions seront discutées à ce moment-là.
Le Président: M. le député de Gouin, en
additionnelle.
M. Rochefort: En additionnelle au premier ministre, M. le
Président. Compte tenu de la réponse de la ministre, comme la
demande d'arbitrage obligatoire découle justement d'une demande faite en
février 1985, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire pourquoi
il hésite encore à donner suite à cette demande, puisque
le 20 février 1985, alors qu'il était chef de l'Opposition, le
premier ministre avait pris l'engagement et avait jugé juste et
raisonnable la demande de ces médecins d'aller en arbitrage obligatoire?
Pourquoi, deux ans après, hésite-t-il toujours à donner
suite à sa propre parole?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Nous avions parlé de cette formule pour
l'ensemble des secteurs public et parapublic, non pas pour un cas particulier,
du moins pour ce qui a trait aux affaires sociales. On sait qu'on a pu
régler l'ensemble du secteur sans grève majeure, pour la
première fois depuis l'établissement du droit de grève, et
que le gouvernement a pu réqler à des conditions raisonnables.
J'aurai sûrement l'occasion d'en discuter avec la ministre responsable
pour ce qui a trait à ce conflit particulier. Il est possible que l'on
puisse en discuter au Conseil des ministres très prochainement. La
déclaration qu'il vient de citer a trait à une réforme
d'ensemble.
Le Président: M. le député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, on va aider le premier
ministre, on va lui rafraîchir la mémoire. Comment le premier
ministre peut-il expliquer sa réponse générale, alors que
le 20 février 1985, au coeur du conflit avec la Fédération
des médecins résidents et internes, alors que ceux-ci demandent
l'arbitrage obligatoire, le premier ministre déclare... M. Bourassa y
voit une demande sensée. Je cite sa déclaration: "Comme parti
d'Opposition, nous nous engageons à appuyer ces demandes raisonnables,
notamment celle de l'arbitrage." On parle de la Fédération des
médecins résidents et internes du Québec, pas de votre
programme fourre-tout.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: C'est évident que nous faisons toujours des
demandes sensées. Je voudrais dire au député de Gouin que
nous avons un cas très particulier, la ministre le suit de très
près. Nous allons examiner ce qui peut être fait. Nous avions
parlé de cette formule comme d'un élément d'une
réforme des relations du travail... Ce n'était pas...
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bourassa: M. le Président, si le chef de l'Opposition
peut retrouver son calme. J'aurais cru qu'il aurait été plus
calme cette semaine, à la suite du congrès de la fin de semaine,
mais il s'agite constamment. Qu'est-ce que ce sera dans le débat qui
s'en vient?
Le Président: Ce n'est pas moi!
M. Bourassa: Vous, c'est l'esprit croche que vous avez. M. le
Président.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Des voix:
Bravai
Le Président: A la question, M. le premier ministre. A
l'ordre, s'il vous plattî
M. Bourassa: Je voudrais dire au député de Gouin
que c'est une modification de l'ensemble des relations du travail qui ne visait
pas un cas tout à fait particulier, comme celui que nous avons
aujourd'hui.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, en additionnelle au
premier ministre.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, le premier ministre
n'a pas répondu à la question du député de Gouin,
comme d'habitude. D'ailleurs, il ne répond jamais aux questions. Le
premier ministre peut-il concilier ce qu'il vient de dire - que ce soit dans le
cas de l'école de Chicoutimi ou à peu près tous les autres
sujets qui ont été évoqués ici - et la parole qu'il
a donnée, l'engagement qu'il a pris ici, où l'on dit, s'ils -
parlant des résidents et des internes -proposent l'arbitrage, que c'est
une demande sensée et nous nous engageons comme parti politique à
l'accorder? Il disait cela, il y a deux ans. Voyons donc!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Pour permettre au chef de l'Opposition de retrouver
un peu le sens de la mesure dans ses propos, je pourrai lui dire ce que
lui-même disait: Je ferai respecter la loi dans le domaine de
l'affichage, alors que, durant trois ans, il a négligé de prendre
des poursuites dans le cas de Zellers. Je pense, M. le Président, que le
chef de l'Opposition devrait faire des efforts du côté d'une
certaine humilité dans ses propos. J'admets plusieurs de ses grandes
qualités, mais il devrait faire un effort de ce
côté-là s'il veut garder ses 77 %. M. le Président,
j'ai répondu au chef de l'Opposition qu'il s'agissait d'une
réforme dans l'ensemble des relations du travail et non pas en vertu
d'un cas tout à fait particulier. Il devrait relire la
déclaration dans son ensemble et non pas la citer hors contexte.
Le Président: M. le député de Gouin, en
additionnelle.
M. Rochefort: M. le Président, dernière
additionnelle. Compte tenu du refus du premier ministre de donner suite
à son engagement, dois-je comprendre que le premier ministre
répond oui à la question: M. Bourassa, accepteriez-vous de vous
faire opérer par un médecin qui n'a pas dormi depuis 32
heures?
Le Président: M. le premier ministre. Une voix: La
réponse est non.
Le Président: Cette question met fin... Mme la ministre de
la Santé et des Services sociaux.
Mme. Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, sur ce point
particulier, je pense qu'il conviendrait quand même de bien situer les
choses. D'ailleurs, il y a eu, pas plus tard que ce matin, des
représentations faites par le secrétaire de la
Fédération des résidents et des internes. Ce qu'elle
demande, c'est de faire respecter ce qui existe présentement. On sait
que ce problème de prolongation d'heures est souvent relié au
fonctionnement interne des hôpitaux et nous sommes à discuter avec
l'Association des hôpitaux, à ce sujet, pour corriger une mesure
qui, dans les faits, n'existe pas mais qui, parfois, dans la pratique est mise
en application, compte tenu de certaines difficultés à
l'intérieur des centres hospitaliers.
Le Président: Cela met fin à la période
régulière de questions.
Nous allons maintenant procéder aux votes reportés.
Motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.
Consultations particulières sur
l'avant-projet de loi sur
l'organisation policière
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, à la suite du
dépôt de l'avant-projet de loi du Solliciteur
général sur l'organisation policière, j'aimerais faire une
motion d'envoi en vertu de l'article 146 du règlement de
l'Assemblée nationale qui se lit comme suit: "Que la commission des
institutions procède à des consultations particulières et
tienne des auditions publiques les 25, 26 et 27 août 1987 dans le cadre
de l'étude de l'avant-projet de loi sur l'organisation policière
et modifiant la Loi de police et diverses dispositions législatives;
"Que les mémoires soient transmis au secrétariat des commissions
au plus tard le 31 juillet 1987 et que le Solliciteur général
soit membre de ladite commission pour la durée du mandat."
Nous déposerons la liste des organismes
qui seront invités à se présenter lors de ces
consultations particulières, plus tard, au cours de la séance
d'aujourd'hui.
Le Président: Si je comprends bien, cette motion du leader
du gouvernement nécessite un consentement étant donné
qu'elle devait être en avis. Est-ce qu'il y a consentement sur la motion
présentée par M. le leader du gouvernement?
Une voix: ...
Le Président: II y a consentement? Adopté.
Je vais reconnaître maintenant, tel qu'annoncé avant le
début des affaires courantes, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Démission du député de
Notre-Dame-de-Grâce
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, c'est avec beaucoup de regret
que je vous annonce, ici, devant mes collègues en Chambre, mon intention
de démissionner de mon siège à l'Assemblée
nationale à titre de député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Je dois vous dire tout de suite que cette démission n'est
aucunement liée à quelque insatisfation que ce soit en rapport
avec vous, avec mes collègues, mon chef, le gouvernement ou mon parti.
Au contraire, cette décision est rendue beaucoup plus difficile à
cause de ma grande admiration et de mon affection pour vous tous. Les raisons
de ma démission vont devenir plus claires dans les heures qui viennent,
mais je peux vous assurer que je vais garder un souvenir très positif de
mon expérience ici. (11 h 10)
Ce que je fais, je le fais dans la continuité. J'ai pris une
décision il y a une quinzaine d'années de poursuivre une
carrière dans le service public au Québec et au Canada, surtout
au Québec depuis les dernières années, et c'est cela que
j'ai l'intention de continuer de faire. Donc, je passe d'une partie de ma vie
publique à une autre et, dès demain, je serai au travail d'une
façon aussi forte et farouche qu'hier, avec exactement le même
objectif.
Mes collègues qui ont été élus en 1985 vont
maintenant apprendre une vérité terrible. Pour avoir le droit de
parler en Chambre ici, devant tous vos collègues, vous avez trois
possibilités seulement: devenir premier ministre, prononcer le discours
sur le budget ou démissionner de votre siège.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: J'ai fait des efforts pendant neuf ans pour
régler le problème de l'une ou de l'autre des deux
premières possibilités...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: ...et je suis malheureusement rendu à la
troisième. Je dois vous dire que j'ai l'intention d'en profiter "au
boutte"...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: ...après avoir pris cette décision
difficile.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: Cependant, une fois que vous avez pris cette
décision, la première chose que vous allez devoir faire, c'est de
faire les remerciements. Parce que, si vous avez fait quelque chose dans votre
vie politique, vous allez vous rendre compte rapidement que vous n'avez pas
réussi tout seul.
Donc, la première chose que je veux faire, c'est remercier le
Parti libéral du Québec qui m'a appuyé depuis 1978. Sans
cet appui, il est certain que je ne serais pas ici et certainement pas à
titre de député de Notre-Dame-de-Grâce de toute
façon, et je lui en suis très reconnaissant. C'est un parti que
j'aime beaucoup. Il a toujours suivi une politique d'ouverture envers tous les
groupes ethniques, linguistiques et économiques de la
société ce qui est parfois difficile à maintenir. Mais je
suis persuadé que ce respect pour l'individu, même s'il
entraîne parfois des coûts politiques, est quelque chose qui,
à long terme, est très important pour notre
société. Je suis très fier d'être associé
à ce parti. Je vous assure que, dès mon retour au Québec,
je vais renouveler immédiatement mon adhésion au Parti
libéral.
Je veux aussi remercier sincèrement mon chef, M. Robert Bourassa,
et le chef qui l'a précédé et avec qui j'ai
commencé ma carrière politique, M. Claude Ryan. Le fait que ces
deux grands hommes québécois soient ici devant moi, côte
à côte presque, au service de la population du Québec, est
un témoignage de leurs capacités, de leur tolérance et de
leur compréhension mutuelle, et c'est tout le Québec qui en
profite. J'ai travaillé de très près avec M. Ryan pendant
plusieurs années et j'ai eu le privilège de travailler de
très près avec M. Bourassa, dernièrement, à titre
d'adjoint parlementaire et de conseiller économique, et je tiens
à les remercier sincèrement tous les deux pour l'appui qu'ils
m'ont toujours donné.
Je veux remercier également les citoyens de
Notre-Dame-de-Grâce, un comté
urbain très diversifié sur le plan ethnique, linguistique
et économique, mais un comté qui a quand même un coeur et
une tradition de services communautaires qui est parmi les plus admirables
qualités qu'on peut imaginer. Ce soutien qu'ils m'ont toujours
donné a pour effet de rendre cette démission aujourd'hui
excessivement difficile. J'espère que les gens de
Notre-Dame-de-Grâce vont comprendre que je les quitte avec beaucoup de
difficulté.
Je veux remercier également mon association et l'exécutif
de mon association qui m'ont toujours pleinement soutenu ainsi que le personnel
de mon bureau de comté et celui de mon bureau à Québec.
Tous les députés savent très bien qu'il est impossible
d'être efficace, d'être un bon député sans l'appui
d'une équipe de comté forte. Et je peux vous dire sans
exagération que j'avais la meilleure au Québec, dans le
comté de Notre-Dame-de-Grâce.
Je veux remercier mes collègues, vous tous, des deux
côtés de la Chambre, de la courtoisie et, très souvent, de
l'amitié que vous avez témoignées, pendant ces neuf ans,
à mon égard. Je vous en suis très reconnaissant et mon
seul regret est que je n'aurai pas le temps de vous connaître davantage
dans les années qui viennent.
En terminant, M. le Président, je veux vous remercier, non
seulement vous, mais vos prédécesseurs qui ont toujours
manifesté une tolérance et une compréhension
exagérées envers le député de
Notre-Dame-de-Grâce...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: ...pendant ses années dans l'Opposition. Je
vous demande de me donner une absolution en leur nom, parce que je sais que
j'ai commis beaucoup de péchés pendant ces années.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: Avant de m'asseoir, c'est difficile de résister
à la tentation de laisser un dernier message. J'ai décidé
de ne pas résister à la tentation.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: II y a plusieurs sujets possibles. Comme vous le
savez, j'ai toujours manifesté un intérêt dans... J'ai
déjà écrit des discours sur le développement
économique, les finances publiques et l'importance de cette grande
institution qu'est le Parlement du Québec, mais j'espère que vous
allez me pardonner si je vous parle un peu du coeur pendant deux minutes, en
disant que je n'ai pas perdu la tête non plus. Je pense que c'est ce qui
me revient à l'esprit dans ces dernières minutes.
Il y a un certain nombre de Québécois, anglophones et
francophones, qui ont peur devant l'autre groupe. Il y a des francophones qui
se sentent minoritaires, menacés, en danger de perdre ce qui leur est
cher. Il en va de même pour les anglophones. Il y en a un certain nombre
qui se sentent minoritaires. Ils voient leur pourcentage de population en
baisse et ils sont craintifs craintifs devant l'affaiblissement possible de
leur groupe. Si je suis le raisonnement des deux côtés
jusqu'à sa fin logique, dans deux générations, il ne
restera pas un seul anglophone ici au Québec, mais tout le monde parlera
anglais. C'est difficile d'imaginer...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Scowen: ...que cela pourrait être possible, mais c'est
un peu la logique devant laquelle on se trouve de temps en temps. Mais je suis
persuadé que cela ne finira pas comme cela. Les deux groupes et les deux
langues sont ici au Québec pour rester. Je pense que le temps est bel et
bien arrivé pour les deux côtés de l'accepter et de le
regarder comme quelque chose de positif, quelque chose sur quoi on peut
construire une société beaucoup plus intéressante que
comme quelque chose dont on doit avoir peur.
J'ai écouté, il y a quelques jours, M. Fernand Dumont au
salon rouge. Il essayait de définir la société distincte.
Il disait qu'une façon de comprendre ce qu'est la société
distincte est de regarder ce que vous perdez quand vous quittez la
région. Cela me fait penser que, si un Québécois
francophone quitte le Québec pour la France, il garde sa langue, il
garde son Assemblée nationale, il garde même son droit civil, mais
il sait très bien qu'il n'est pas chez lui. Si un anglophone du
Québec quitte pour Toronto, Boston ou même pour Londres, il se
rend compte très rapidement qu'il a sa langue, ses traditions et sa
Législature, mais il n'est pas chez lui. Dans cette contestation, je me
dis: Voici quelque chose qui est un élément de notre
société distincte, cette dualité ici, l'existence du fait
que les francophones sont obligés de faire face et
bénéficier de ce qui est de l'anglais et de l'anglophone dans
cette partie de notre planète. Les anglophones qui veulent vivre ici ont
aussi à faire face et doivent vivre avec ce fait francophone qui est ici
pour rester.
Cela me fait penser à quelque chose que j'ai entendu lors des
auditions de la commission Pepin-Robarts, un après-midi, quand les
groupes anglophones et les groupes francophones étaient en train de se
chicaner. Il y avait un chef indien qui était à côté
de moi et en les écoutant, il disait: J'ai l'impression que mes
ancêtres du XVIIe et du XVIIIe siècle avaient une très
mauvaise politique d'immigration. (11 h 20)
Des voix: Ha! Ha! Bravo!
M. Scowen: II nous a trouvés un peu mal
élevés. Deux groupes originaires de deux pays européens,
séparés de 20 milles à peine, avec les mêmes
traditions, avec les mêmes habitudes en grande partie... J'ai même
lu avant-hier, dans le journal, que nous partageons ensemble 50 % de notre
vocabulaire; la moitié des mots en anglais sont les mêmes en
français. Je parle du vrai français et du vrai anglais. Nous
sommes rendus au point où nous sommes maintenant ensemble depuis 300 ans
et nous avons fait énormément de progrès ensemble. Je
pense honnêtement, et je donne le crédit à qui de droit,
que depuis une dizaine d'années on a fait du progrès.
Mon message final pour vous, c'est un message très simple de
fraternité, d'amitié et de respect mutuel. J'espère que
vous, qui détenez la responsabilité de donner l'exemple au reste
de notre population qui vous écoute, qui vous suit et qui copie les
paroles et les attitudes que vous développez, vous essaierez de
poursuivre vos travaux à l'avenir dans ce respect mutuel.
M. le Président, as you know, the majority of my county of NDG is
English-speaking. Every once in a while they send me a letter and they ask me
why I do not speak English more often in the National Assembly. So, I thought
it would be only fitting if these last words I said here were in English.
I want to thank the people of NDG and all the English-speaking people of
Québec sincerely for the support, the encouragement and even the
criticism they have given me over the last nine years. We have been through a
lot together: language legislation, the referendum, the 1981 election, all the
constitutional reform proposals which, sometimes, divided us.
You have sometimes criticized me for not defending the English community
enough, but I think that most of you know that I have tried, as well as being
an English Quebecker, to be a Quebecker working for all the people of NDG and
all the people of Québec. I think, myself, that nine years later things
are better than they were in 1978 for the English-speaking community. I think
we understand the French-speaking community better and I think they understand
us better. I think we have established a kind of peace which makes it possible
for people, like the gentleman I listened to the other night from Toronto, to
say: I would like to come back and live in Québec.
In any event, if I have played a role in this, along with the other
people who have tried to steer us through these sometimes difficult years, I
want to tell you that it is because of the support, the encouragement and even
the criticism that you have given me, and I am very grateful.
En terminant, M. le Président, bon succès et bonne chance
à vous tous. Vous allez me manquer beaucoup. Merci.
Le Président: Je remercie M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. Je reconnais maintenant M. le premier ministre.
M. Robert Bourassa
M. Bourassa: M. le Président, c'est évidemment
aussi avec beaucoup de regret que nous apprenons la démission du
député de Notre-Dame-de-Grâce. Je ne crois pas qu'il soit
exagéré d'affirmer jusqu'à quel point nous avons tous
été à même d'apprécier sa contribution
exceptionnelle comme député et à l'occasion de
différentes fonctions qu'il a assumées. Disponible, certes, mais
il était aussi dévoué et consciencieux, comme ont pu le
constater tous ceux et celles qui ont eu à travailler avec lui.
Les états de service du député de
Notre-Dame-de-Grâce, M. Scowen, sont nombreux et dans divers secteurs. Il
a été conseiller spécial de la Commission de lutte contre
l'inflation. On sait jusqu'à quel point ce problème
économique était aigu au milieu des années soixante-dix.
Il a su assumer le poste de directeur général avec beaucoup
d'efficacité et avec des résultats très concrets.
Il avait été auparavant, durant deux ans, conseiller au
ministère de l'Industrie et du Commerce. Il a également
assumé le poste de directeur général au sein de la
commission Pepin-Robarts. Ceci lui a permis - il vient de le démontrer
tantôt avec beaucoup d'éloquence - de comprendre ces relations
complexes, mais combien essentielles, pour le développement et
l'unité de notre pays entre les différents groupes culturels.
Également, il a assumé des fonctions au sein de la
commission du budget et de l'administration en 1984, au sein de la commission
des institutions et depuis 1986, il a été mon adjoint de
même que mon conseiller économique. Là, j'ai pu constater
très fréquemment la qualité de son érudition
économique et la qualité de son expérience. Ses fonctions
d'économiste lui ont permis également d'assumer la direction d'un
comité sur la déréglementation, comité qui a fait
des propositions très concrètes dont plusieurs ont
été appliquées et qui ont constitué une
contribution très utile à l'élaboration de nouveaux
objectifs pour la société québécoise. On n'a
qu'à signaler notamment les remarques très positives, les
commentaires très positifs de la Chambre de commerce du Québec
sur ce comité de déréglementation. Il a également
participé à des comités pour revaloriser le rôle du
député.
Bien des qualificatifs, M. le Président,
sont utilisés pour désigner l'aspect le plus complexe et
le moins bien défini du métier de député:
médiateur, ombudsman, animateur, agent d'information, travailleur
social, agent de développement et j'en passe.
On peut certainement dire que le député de
Notre-Dame-de-Grâce a assumé toutes ces fonctions avec beaucoup de
brio et de dévouement. Homme de principe et ardent défenseur des
libertés individuelles, le député de
Notre-Dame-de-Grâce s'est révélé un
législateur intègre, humain et efficace dont l'indéniable
expertise et le profond sens de l'équité nous manqueront
sûrement.
Je me réjouis à l'idée - une décision sera
prise incessamment - que M. Scowen puisse continuer à travailler pour le
Québec dans des fonctions très importantes et qui sont
liées à son expertise économique et au
développement du progrès collectif québécois.
Gestionnaire avisé de l'administration publique, le
député de la circonscription de Notre-Dame-de-Grâce est
demeuré d'abord et avant tout un lien solide entre le gouvernement et
ses concitoyens dont il aura grandement mérité la confiance.
We all know how he was devoted and dedicated to his fellow citizens of
the NDG riding and I am sure that it is with great sadness, in his own riding,
that they are hearing the news of his departure.
Au-delà de ces remarquables contributions du député
qui nous quitte aujourd'hui, c'est d'abord et avant tout son attachement
profond à la communauté québécoise et au
progrès québécois qui aura caractérisé son
engagement public.
Le Président: Je vous remercie, M. le premier ministre. M.
le chef de l'Opposition.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson (Anjou): M. le Président, c'est avec
émotion que nous avons entendu les dernières paroles du
député de Notre-Dame-de-Grâce en cette Assemblée.
Lui-même était empreint d'une certaine émotion dans son
discours en disant, un peu avec l'humour qui l'a toujours
caractérisé dans ses rapports entre députés, ici,
ou dans les salles d'attente de l'aéroport, par exemple à
Montréal, que j'ai eu l'occasion de partager avec lui souvent, que, dans
le fond, il y a quelques occasions uniques comme cela où un
député peut peut-être aller au fond des choses dans ce que
lui permet le parlementarisme. (11 h 30)
Permettez-moi de souligner, sans reprendre la nomenclature que vient de
faire le premier ministre, que le fait que M. Scowen ait dirigé une
compagnie de papier pendant quinze ans devait sans doute le prédestiner
à nous parler de déréglementation et de diminution du
papier au gouvernement un certain temps. Le fait qu'il ait été un
des directeurs de la Commission de lutte contre l'inflation le
prédestinait sans doute à ne pas trop abuser de l'inflation
verbale, sauf à l'occasion de débats très rares, et le
fait qu'il ait été à la commission Pepin-Robarts a
sûrement expliqué sa fascination pour la question linguistique et
la nécessité pour lui, comme anglophone et comme membre
éminent de la communauté anglophone du Québec, de vivre
certaines ambiguïtés en politique.
Le fait qu'il ait été au cabinet du ministre Saint-Pierre,
à l'époque où celui-ci était ministre de
l'Industrie et du Commerce, a sans doute forgé chez lui un désir
de voir un jour le premier ministre reconnaître ses talents pour
accéder au Conseil des ministres. Heureusement, le premier ministre ne
s'est pas passé de ses services, puisqu'il l'a engagé comme
conseiller économique.
Je dois dire que M. Reed Scowen, dans son comportement, a toujours
été un homme de fair-play, un gentleman, non seulement à
l'Assemblée nationale, mais en dehors de l'Assemblée nationale,
que ce soit dans des conférences ou dans des endroits où nous
pouvions nous rencontrer plus ou moins fortuitement. Je crois qu'il
était aussi, en cette Assemblée, l'un des défenseurs
remarquables des intérêts de la communauté anglaise du
Québec et que, peut-être quand venait l'occasion de ces
débats sur la défense des intérêts ou sur la
promotion des intérêts de la communauté de langue anglaise
du Québec, il devenait un peu plus latin, un peu moins flegmatique
à l'idée qu'on se fait en général des
caractéristiques des différentes communautés. S'il a
été latin dans plusieurs de ses discours, parfois emporté,
passionné autour de cette question, je pense que cela
révélait chez lui essentiellement une qualité d'humanisme,
un humanisme dont je l'ai vu faire la preuve de façon évidente
dans la défense, notamment, d'un projet de loi privé touchant les
droits de deux personnes handicapées et à l'égard
desquelles, avec entêtement, il a su amener le ministère de la
Justice à accepter un projet de loi privé pour donner des droits
à ces personnes.
Cet humanisme chez lui s'est également traduit, je pense, dans
une certaine vision du développement économique. Je souhaite que
cela ne soit pas à cause du fait que le gouvernement n'ait pas retenu
cette vision humaniste du développement économique, qu'il nous
quitte. Il a souvent fait des appels, non seulement à l'excellence, mais
éqalement au dépassement des individus comme de la
collectivité, à l'égard du développement
économique.
Le premier ministre évoquait qu'il pourrait être
appelé bientôt à des fonctions importantes. J'ai compris
que l'ancien député de Notre-Dame-de-Grâce occupera
peut-être
un poste à l'extérieur du Québec, puisqu'il nous a
dit que, quand il sera de retour au Québec, il reprendra sa carte du
Parti libéral. Je me permets de lui dire que, comme il sera au service
du Québec à l'étranger, je suis convaincu que, même
s'il nous a annoncé son intention de reprendre la carte de membre du
Parti libéral, je suis convaincu, en gentleman et en homme de fair-play
qu'il est, qu'il exercera ses fonctions avec la compétence, la
dignité, l'engagement et l'esprit non partisan qu'on peut lui
connaître puisqu'il sera au service de tous les Québécois.
Good luck, Reed!
Le Président: Je remercie M. le chef de l'Opposition. M.
le député de Notre-Dame-de-Grâce, au nom de tous les
membres composant cette Assemblée, je tiens à vous souhaiter
bonne chance dans votre nouveau choix de vie. Merci, et je peux vous dire:
Partez rassuré. Vous n'avez pas commis de péché du temps
où j'étais président de cette Assemblée.
Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Avis touchant
les travaux des commissions. Nous allons suspendre pour quelques minutes, avant
d'aborder les avis concernant les travaux des commissions.
(Suspension de la séance à 11 h 35)
(Reprise à 11 h 40)
Le Président: Nous allons maintenant continuer les
affaires courantes. M. le leader adjoint du gouvernement, à
l'étape des avis touchant les travaux des commissions.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Lefebvre: Merci, M. le Président. J'avise cette
Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures
à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la
commission de l'aménagement et des équipements entendra les
intéressés et procédera à l'étude
détaillée des projets de loi d'intérêt privé
suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi
209, Loi modifiant la charte de la ville de Longueuil, projet de loi 212, Loi
concernant la ville de Saint-Georges, projet de loi 262, Loi concernant le
comité d'enfouissement sanitaire d'Argenteuil-Deux-Montagnes, le projet
de loi 267, Loi modifiant la charte de la ville de Salaberry-de-Valleyfield,
projet de loi 235, Loi modifiant la charte de la ville de Granby, projet de loi
203, Loi concernant certaines transactions entre la Compagnie de Jésus,
la Corporation du collège des Jésuites et la Corporation du
collège de Saint-Charles-Garnier, projet de loi 206, Loi modifiant la
charte de la ville de Sherbrooke et projet de loi 224, Loi concernant la
conversion en copropriété par déclaration de l'immeuble
appartenant à la Société d'amélioration Milton Parc
Inc.
Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15
heures à 18 heures, et si nécessaire de 20 heures à 24
heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de
l'économie et du travail poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 30, Loi constituant la Commission des
relations du travail et modifiant diverses dispositions législatives. De
15 heures à 18 heures, et si nécessaire de 20 heures à 24
heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget et de
l'administration procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 44, Loi sur
l'assurance-responsabilité professionnelle.
M. le Président, j'avise également cette Assemblée
que demain, le jeudi 18 juin 1987, de 20 heures à 24 heures, à la
salle du Conseil législatif, la commission de l'aménagement et
des équipements entendra les intéressés et
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi d'intérêt privé 200, Loi modifiant la charte de la
ville de Montréal. Merci, M. le Président.
Le Président: J'ai également un avis à
communiquer aux membres de cette Assemblée concernant les travaux des
commissions. Je vous avise que la commission des institutions se réunira
en séance de travail le mercredi 17 juin à compter de 15 heures
à la salle 84 de l'Hôtel du Parlement. Il s'agit d'une
quatrième commission et cela nécessite un consentement de cette
Assemblée pour pouvoir procéder aux travaux de cette commission
à 15 heures. Cela va?
Y a-t-il des questions concernant les travaux des commissions,
concernant les travaux de l'Assemblée?
M. Jolivet: Oui, M. le Président. Concernant les travaux
de l'Assemblée, j'ai appris que le document officiel de REXFOR indiquait
qu'il y avait un surplus budgétaire de 4 000 000 $ et que cela viendrait
à l'encontre des arguments pris pour congédier M. Michel
Duchesneau. J'aimerais savoir du leader adjoint s'il peut s'informer
auprès du ministre délégué aux Forêts s'il a
l'intention de déposer ce document ici, à la Chambre, tel que
normalement il devrait être fait, puisque c'est le rapport annuel de
REXFOR?
M. Lefebvre: M. le Président.
Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: La question posée par le député
ne concerne pas, quant à moi, les travaux de l'Assemblée et je ne
vois pas en
quoi j'aurais à m'informer des renseignements que me
suggère le député de Laviolette. Je lui suggère de
poser s'il y a lieu des questions à la période de questions
demain, M. le Président.
Le Président: S'il n'y a pas d'autre renseignement
concernant les travaux de l'Assemblée, je vais maintenant appeler les
affaires du jour. M. le leader adjoint.
M. Lefebvre: L'article 34, M. le Président.
Projet de loi 21
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Président: À l'article 34, il s'agit de la prise
en considération du rapport sur le projet de loi 21, Loi concernant
l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le Code civil
du Québec et le Code de procédure civile, présenté
par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais
reconnaître le premier des intervenants sur cette prise en
considération du rapport.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, je vous inviterais à
reconnaître le critique de l'Opposition. Mme la ministre
préférerait que l'Opposition fasse la première
intervention.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Est-ce à dire
que du côté ministériel il n'y a aucun intervenant?
Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la présidente, M. le Président, a
l'intention d'intervenir, sauf...
Le Président: Mme la ministre.
M. Lefebvre: ...qu'elle a le choix entre le faire tout de suite
ou en réplique. Alors, pour le moment, Mme la présidente
désire...
Le Président: Mme la ministre.
M. Lefebvre: ...céder à l'Opposition la
première intervention.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais être
certain d'une chose.
Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Si Mme la ministre se lève comme
deuxième intervenant, que ce ne soit pas considéré comme
le droit de réplique. En d'autres termes, si elle n'utilise pas son
droit de parole au départ et qu'elle se lève après Mme la
députée de Marie-Victorin, si vous considérez que c'est un
droit de réplique parce qu'elle serait la dernière à
parler, cela brimerait des individus de notre côté, des personnes
qui veulent intervenir de notre côté, des députés
qui veulent intervenir. Je dois vous dire qu'on ne l'accepterait pas sur le
plan de la procédure. Je veux que ce soit bien clair au
départ.
M. Lefebvre: M. le Président.
Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: On suggère que l'Opposition fasse ses
premières interventions et on n'a pas d'objection à ce que
l'intervention de la ministre soit qualifiée de réplique ou
d'intervention de façon habituelle. Je dois également informer le
leader de l'Opposition que le député de Laurier a
également l'intention d'intervenir.
Le Président: Je pense qu'il est clair que, si Mme la
ministre de la Santé et des Services sociaux intervenait d'ici à
quelques minutes, elle se doit d'annoncer si elle est en réplique ou non
pour que d'autres membres de cette Assemblée, s'ils veulent intervenir
avant Mme la ministre, puissent le faire. Je pense que c'est très
clair.
Je vais reconnaître Mme la députée de
Marie-Victorin, toujours sur l'article 34 apparaissant au feuilleton,
c'est-à-dire la prise en considération du rapport sur le projet
de loi 21 présenté par Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Oui, M. le Président, vous me voyez
honorée de pouvoir faire la réplique en ce qui concerne la
présentation du projet de loi 21. Je me réjouis que nous
puissions prendre la parole quant à l'adoption du projet de loi 21, Loi
sur l'adoption internationale, parce que des modifications et des amendements
substantiels y ont été apportés. Dans la forme telle qu'il
a été présenté, l'Opposition n'aurait pu accepter
le projet de loi dans sa première version.
Bien sûr, une commission parlementaire a été tenue
au mois de mai. Elle a favorisé des débats et elle a permis
à la ministre de comprendre l'ensemble de la problématique sur
l'adoption internationale et de répondre, par des amendements, aux
demandes répétées des parents et des associations des
adoptants
qui réagissaient, depuis novembre 1986, au décret qui
avait fermé la porte à l'adoption internationale dans
différents pays pour les couples québécois désireux
d'adopter un enfant sur la scène internationale. Depuis lors, des
parents réclamaient à leur corps défendant des mesures
beaucoup plus souples et un esprit beaucoup plus compréhensif de la
ministre et du Secrétariat à l'adoption en ce qui concerne les
projets d'adoption internationale. Il aurait été souhaitable
à cette époque que nous nous penchions en commission
parlementaire pour faire le point qui s'imposait et qui aurait permis à
l'ensemble de ces parents qui étaient déjà en processus et
qui voulaient adopter un enfant de trouver finalement les solutions les plus
humaines et les plus cohérentes par rapport à ce projet
d'adoption internationale.
Mais, Mme la Présidente, peine perdue. Les parents avaient beau
réclamer de quelque façon que ce soit un plus grand humanisme de
la part du secrétariat et une plus grande ouverture d'esprit, il
était impensable pour la ministre de favoriser ces parents et
même, dans certaines situations qui devenaient du cas par cas, de
répondre aux attentes et aux préoccupations des parents
concernés.
Mme la Présidente, nous avons dû subir le décret et
surtout les parents qui avaient déjà l'intention d'adopter un
enfant, sans avoir été avertis en aucune façon qu'on
mettait ce décret en application, ce qui fait que beaucoup de parents
qui, déjà, avaient entrepris des démarches avec d'autres
pays, se voyaient dans l'impossibilité de faire entrer leur enfant, qui
devenait leur enfant reconnu dans les pays et ils étaient donc
incapables, parce que le secrétariat ne voulait pas émettre de
visa d'entrée pour les faire entrer, ces enfants, au pays... (11 h
50)
Nous nous souvenons qu'entre le mois de novembre et le mois de
décembre, nous avons eu plein de réclamations et de demandes de
parents. Ils sont venus manifester ici, devant l'Assemblée nationale,
pour faire valoir leurs droits. Ils nous montraient des photographies d'enfants
et nous disaient: Écoutez, des enfants nous attendent dans des pays,
leur vie est menacée - vous connaissez les conditions socio-sanitaires
de ces pays en voie de développement - leur santé est
menacée et, plus les délais s'allongent, évidemment, plus
ils sont privés de ce contact important et privilégié avec
une famille, avec des parents. Sur le plan psycho-affectif, la menace
était de taille aussi, à mon avis.
Mme la Présidente, au mois de décembre, en fin de session,
la ministre nous a apporté un projet de loi. J'ouvre une
parenthèse pour dire que j'espère qu'à la prochaine
session, nous aurons trouvé des solutions plus que raisonnables pour
faire en sorte que nous n'aurons pas un projet de loi sur l'adoption
internationale à chaque session et qu'une fois pour toutes, les parents
pourront avoir la possibilité de réaliser pleinement leur souhait
de fonder une famille.
Qu'est-ce qui est arrivé en décembre 1986? Nous avons eu
un projet de loi, le projet de loi 139, qui a été
décrié par l'ensemble des parents et des intervenants, et
même par le Barreau, comme étant une intervention abusive de
l'État. Par le projet de loi 139, le gouvernement demandait à des
pays de rendre leurs lois conformes à celles du Québec. Ceci
était complètement déraisonnable et dénué de
sens et révélait une attitude très colonisatrice
vis-à-vis de ces pays étrangers.
Le décret qui avait été pris antérieurement
par le gouvernement - il faut se le rappeler - au mois de novembre cautionnait
la décision prise en août par le Secrétariat à
l'adoption internationale qui interdisait l'adoption d'enfants dans ces pays.
Par contre, en mai 1986, le juge Dorion du Tribunal de la jeunesse de Longueuil
blâmait sévèrement le secrétariat pour ses abus de
pouvoir dans ce dossier. Il concluait que, finalement, les moratoires qui
avaient été imposés au Brésil... À ce
moment-là, il était impossible de faire de l'adoption
internationale au Brésil, parce qu'on disait qu'il n'y avait pas
concordance, que c'était de l'adoption simple et que seule était
reconnue ici, au Québec, l'adoption plénière. Donc, on
avait fermé l'accès à certains pays, parce que la
majorité des pays avec qui on transige pour des projets d'adoption
favorise l'adoption simple plutôt que l'adoption plénière,
tel que cela se fait dans la majorité des pays industrialisés
à l'heure actuelle. À l'époque, le juge Dorion, dans un
mémoire de plusieurs pages, ajoutait qu'il ne nous appartenait pas de
refaire les lois des pays étrangers et que ce n'était pas
à nous de faire une tournée sur le plan international pour
imposer la volonté du Québec à l'ensemble des pays.
Je pense que, déjà, à cette époque, nous
savions à quoi nous en tenir. Nous savions par où il fallait
commencer, lorsque nous voulions écrire tout projet de loi. Mais, peine
perdue, la ministre était convaincue du bien-fondé de son
décret et, encore plus, de son projet de loi 139 qui venait, par
règlement, donner des pouvoirs au secrétariat, qui lui permettait
de devenir de plus en plus restrictif et d'imposer à l'ensemble des pays
la loi du Québec. On cherchait à leur imposer notre façon
de faire des lois.
Il y a eu des conséquences fâcheuses et dramatiques
à cette époque. Des parents ont dû avoir recours aux
tribunaux pour faire valoir leurs droits, un enfant est
décédé en cours de route à cause des délais
et je pense que nous avons causé beaucoup de préjudices
à ces familles et à ces couples qui voulaient, vraiment
honnêtement, fonder une famille.
Pourquoi autant d'interventions abusives de la part de la ministre et du
secrétariat en ce qui concerne les projets d'adoption? C'est,
soi-disant, parce qu'ils découlaient d'une démarche personnelle
des parents dans la plupart des cas. Il faut se rappeler qu'ici au
Québec, plus de 30 % des projets d'adoption sur le plan international
font l'objet d'une démarche personnelle. J'entends par démarche
personnelle que ce sont les parents eux-mêmes qui, par leur contact dans
les différents pays, ont trouvé l'enfant qu'ils désiraient
pour fonder leur famille et qu'ils ont été privés par des
gens d'autres pays. On leur gardait pour eux... on avait trouvé pour eux
l'enfant qui correspondait à leur désir et à leur souhait.
Ces gens avaient suivi la réglementation ici au Québec. Ce sont
des parents qui, dans la plupart des cas, avaient été
évalués par la DPJ.
Mais, Mme la Présidente, vous conviendrez que lorsqu'on a des
délais de deux, trois, quatre, cinq ou six ans, certains parents - je
les comprends très bien -désirent finalement mettre un terme
à leur projet et enfin le mettre d'une façon très
concrète et le réaliser très concrètement. C'est
pourquoi ces parents sont allés dans le pays, ils ont fait les
démarches nécessaires qui s'imposaient. Jamais ces parents n'ont
eu l'intention de voler un enfant ou encore moins, Mme la Présidente, de
vouloir faire du marché noir avec ces enfants ou même d'arracher
des enfants des bras de parents légitimes. Jamais. Et je me sens
très mal à l'aise de vouloir prétendre et de vouloir
étendre cette perception à l'ensemble des parents et des couples
québécois qui ont fait l'objet d'une démarche personnelle
en ce qui concerne un projet d'adoption internationale. C'est cela qu'il est
important de soulever. C'est que je crois à la responsabilité et
à la maturité des couples du Québec et en leur
honnêteté pour leur faire confiance et reconnaître ces
projets qui ont fait l'objet d'une reconnaissance légale dans le pays de
l'adoptant et qui ont suivi les règles du pays des adoptants.
Mme la Présidente, je pense que nous ne rencontrons nulle part
dans le projet de loi 21 cette ouverture si nécessaire ici au
Québec si nous voulons une fois pour toutes arrêter d'avoir des
problèmes avec l'adoption internationale. Nous nous sommes, encore une
fois, fermés à cette possibilité et à cette
démarche. Parce que la ministre conserve encore dans le projet de loi la
coordination de tous les projets et de toutes les démarches d'adoption
internationale, il sera impossible à l'heure actuelle, au Québec,
de reconnaître toute démarche personnelle...
M. Chevrette: Je m'excuse. Question de règlement. Je
demande le quorum, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Qu'on appelle les
députés. Effectivement, il n'y a pas quorum. Qu'on appelle les
députés.
Le quorum est maintenant atteint. Nous allons donc pouvoir poursuivre.
Mme la députée. (12 heures)
Mme Vermette: Oui, Mme la Présidente. Je disais donc que
par le projet de loi 21, il sera désormais impossible que tout parent
adoptant puisse entreprendre une démarche personnelle en ce qui concerne
un projet d'adoption sur le plan international. Cela veut dire, Mme la
Présidente, non pas un projet d'adoption sans contrôle, sans
respect des règlements et procédures du Québec et du pays
de l'adopté, mais un projet où les parents eux-mêmes ont eu
l'occasion, grâce à des contacts personnels, de trouver l'enfant
de leur choix. Et c'est ce que nous dénonçons, Mme la
Présidente, parce que nous croyons à la maturité et que
nous croyons au sens des responsabilités des parents et parce que nous
sommes convaincus que l'ensemble des couples qui désirent adopter des
enfants au Québec ne sont pas des voleurs d'enfants et encore moins des
gens qui veulent faire du marché noir avec les enfants.
Je pense que la loi et strictement la loi 21 apporte des dents assez
imposantes et importantes pour que tout projet qui ne considérerait pas
les lois et règlements en vigueur ici au Québec ou dans les pays
étrangers ne pourrait être accepté parce qu'il faut
reconnaître, dans le projet de loi 21, que tout projet d'adoption doit
maintenant passer et être approuvé par le Tribunal de la jeunesse.
Je pense, Mme la Présidente, que nous sommes capables ici au
Québec de reconnaître les pouvoirs discrétionnaires de nos
juges et de leur faire aussi confiance, et qu'eux aussi, ils sont capables, par
leur approbation et par la reconnaissance de ces jugements, d'apporter
l'éclairage et d'apporter aussi les jugements et les reconnaissances
nécessaires, et que nous aurions pu, compte tenu de cette nouvelle
démarche que devront faire les parents, parce que,
antérieurement, les parents ne devaient pas faire approuver leur projet
d'adoption internationale par les tribunaux. C'est une nouvelle démarche
que les parents devront dorénavant faire avant de pouvoir entreprendre,
d'une part, leur projet et, d'autre part, lorsqu'ils devront revenir
après avoir fait les démarches dans les pays étrangers. Je
pense qu'il y a là suffisamment de contrôle pour aller dans le
sens d'une ouverture d'esprit, et d'accepter l'évolution de nos
sociétés et de leurs besoins lorsque nous connaissons à
l'heure actuelle les problèmes démographiques que nous vivons ici
au Québec et lorsque nous savons que le
taux de natalité est à son point le plus faible et le plus
bas. Ce que nous devons faire à l'heure actuelle, c'est de
démontrer beaucoup plus de souplesse, beaucoup plus d'ouverture pour
favoriser, par contre, la possibilité d'augmenter les familles ici au
Québec et d'aider les gens désireux de fonder une famille de
prendre les moyens les plus humains possible pour leur permettre de
répondre à ce besoin si fondamental pour une
société, qui est de bâtir une famille.
Mme la présidente, le projet de loi 21 est un retour pratiquement
à la case zéro, c'est un retour à ce qui existait
antérieurement au décret de novembre 1986, parce que,
déjà, au Québec, il s'est toujours fait de l'adoption
plénière, et nous en sommes conscients. Mais ce dont nous
étions conscients, c'est que nous ne pouvions pas imposer les lois du
Québec à l'ensemble des pays étrangers. Cela, depuis le
début, nous nous entêtons à dire à la ministre: Mme
la ministre, vous n'avez pas raison par vos projets de loi, par votre
décret, de vouloir imposer les lois du Québec à l'ensemble
des pays. Je pense que nous avons proposé des solutions d'harmonisation
des lois qui étaient beaucoup plus respectueuses des institutions et des
pays étrangers.
L'autre point de vue, Mme la Présidente, c'est que la ministre
s'entêtait à conclure des ententes avec les différents
pays, soi-disant qui garantissaient une meilleure sécurité pour
les adoptants et pour l'adopté. Là encore, nous disions à
la ministre: Mme la ministre, vous faites fausse route. Les enfants pourraient
devenir une monnaie d'échange par ce genre d'entente, et nous croyons
qu'il serait préférable de continuer à travailler comme
cela s'est toujours fait, c'est-à-dire une reconnaissance des organismes
intermédiaires par les pays et les projets d'adoption sanctionnés
par les tribunaux des pays.
Je pense que c'était faire preuve, en tout cas, d'une
reconnaissance des institutions des pays, et cela démontrait que nous
étions, nous comme pays ici au Québec, ouverts et que nous
étions capables de reconnaître les institutions
démocratiques des différents pays avec lesquels nous devions
transiger lors d'une adoption sur le plan international.
Mme la Présidente, je pense que dans ce projet de loi, nous avons
perdu du temps parce que la ministre, déjà, au mois de novembre,
était au courant de tous ces problèmes. Déjà, les
gens, depuis le mois de novembre, groupe après groupe, venaient
s'entretenir avec elle. Même le Barreau du Québec lui avait
affirmé qu'elle était sur la mauvaise route, qu'il fallait faire
marche arrière. Je pense que si nous avions eu une autre commission
parlementaire approuvée par la ministre, comme la ministre voulait la
convoquer en février, nous aurions eu moins de délais, moins de
perte d'énergie et, déjà, beaucoup plus de parents
auraient pu mettre à profit leur projet d'adoption internationale.
Tout ce qui en résulte aujourd'hui, c'est que plein de parents se
voient refuser par le secrétariat de mettre à exécution
leur projet d'adoption sur le plan international parce qu'il attend que la loi
soit adoptée. C'est pour cela que, lorsque les amendements ont
été présentés, nous nous sommes empressés de
dire: Oui, nous apportons notre consentement à ce projet de loi parce
que nous voulons que les familles, au Québec, puissent augmenter. Nous
voulons justement favoriser de plus en plus la famille. L'adoption
internationale ne pourra pas résoudre les problèmes que nous
connaissons sur le plan démographique, mais elle fait partie d'un volet
de la solution. Les différents volets qui peuvent favoriser la famille
doivent être pris au sérieux. On devrait se donner les moyens
nécessaires pour favoriser, développer et encourager les
démarches des parents et des couples qui veulent adopter des enfants et
fonder une famille.
J'aurais espéré une plus grande ouverture d'esprit de la
part de la ministre en ce qui concerne les projets qu'on appelle d'ordre
personnel, les projets d'adoption privés légaux. Encore une fois,
j'insiste, Mme la Présidente. On essaie toujours de nous faire dire que
nous sommes pour l'adoption à n'importe quel prix, à n'importe
quelle condition, sans contrôle. Je veux rassurer la population qu'il
n'est pas de notre intention de dire que nous voulons l'adoption envers et
contre tous afin de favoriser un désir égoïste des parents.
Ce que nous disons, c'est que nous sommes capables de reconnaître la
maturité des couples, que nous sommes capables de reconnaître le
sens des responsabilités des couples et que nous sommes aussi
respectueux de nos institutions, c'est-à-dire les tribunaux tels le
Tribunal de la jeunesse.
Nous sommes convaincus que le Tribunal de la jeunesse pourrait rendre
des décisions les plus harmonieuses possible, tout en tenant compte de
la procédure des pays et de la procédure d'ici. Le rôle de
nos tribunaux est d'interpréter les lois et les règlements.
Puisque la loi 21 apporte cette nouvelle solution, nous aurions pu faire preuve
de confiance envers nos institutions et de confiance aussi envers les parents
adoptants du Québec.
Sur ce, je dois avouer à mon corps défendant que nous
n'avons pas été capables de faire chanqer l'attitude de la
ministre dans cette approche et cela aurait été souhaitable. Nous
risquons de nous retrouver encore une fois à la prochaine fin de
sesssion avec un autre projet de loi sur l'adoption internationale, puisque 30
% des projets, actuellement, au Québec, passent par le biais d'un
contact personnel. Je pense
qu'il aurait été souhaitable que l'on prenne en
considération ces démarches.
Je voudrais poser la question suivante à la ministre.
Qu'arrivera-t-il de son sous-ministre qui a un projet d'adoption
internationale? Pour lui, la façon de mettre à exécution
son projet, c'est de passer par une démarche privée. Si c'est bon
pour les hauts fonctionnaires de la fonction publique, cela devrait être
bon et cela pourrait s'appliquer aussi à l'ensemble des parents du
Québec.
Je pense que c'est l'accroc au projet de loi 21. En fait, les
amendements apportés au projet de loi 21 sont ce que nous avons
décrit à la ministre depuis le mois de novembre 1986. Il n'aurait
jamais fallu que ce décret soit déposé en novembre 1986
parce qu'il fermait des pays. Après le décret, on aurait dû
consulter les gens sur le projet de loi 139 pour savoir exactement où se
situent les vrais problèmes. On aurait peut-être aussi dû
consulter les experts en ce domaine et non pas attendre au mois de mai,
après que des règlements, qui sont caduques maintenant, aient
été adoptés au mois d'avril. Il faudra refaire de nouveaux
règlements et on apporte un projet de loi 21 qu'il faudra refaire au
complet puisque, sur quatorze articles, quatorze amendements ont
été apportés. (12 h 10)
Je pense que l'Opposition a bien joué son rôle dans ce
dossier. Je pense que l'Opposition a bien fait de demander cette commission
parlementaire et de revenir à la charge régulièrement pour
faire en sorte, justement, que la ministre puisse comprendre qu'il était
impensable et inconcevable d'avoir autant de dirigisme en ce qui concerne
l'adoption internationale et que ce qui est important, c'est de faire confiance
à l'ensemble des parents et des couples adoptants du Québec.
Mme la Présidente, depuis le début, nous étions sur
ces positions et nous avons toujours maintenu les mêmes positions. Nous
n'avons jamais eu à revenir en arrière et essayer de
prétendre... Actuellement, on essaie de prétendre que nous avons
changé l'ensemble des règles de l'adoption internationale, que
nous avons démontré une ouverture d'esprit alors qu'il n'en est
rien, alors que cette même ministre qui déposait le décret,
qui fermait l'adoption internationale aux parents, vient aujourd'hui nous dire
que dorénavant, l'adoption internationale sera beaucoup plus souple,
sera beaucoup plus ouverte aux différents pays, alors que c'est cette
même ministre qui fermait la porte à l'adoption internationale par
son décret en novembre 1986. C'est par ce décret de novembre 1986
que nous avons eu autant de problèmes et autant de cas litigieux.
Je suis heureuse d'avoir pu contribuer finalement à des
modifications importantes en ce qui concerne le projet de loi 21, surtout parce
qu'enfin, ce sera vraiment bien établi. Le consentement des États
ne sera plus nécessaire pour faire l'adoption internationale. L'adoption
simple n'est maintenant plus une cause pour fermer les pays pour des projets de
parents québécois parce qu'il y aura harmonisation des lois
devant nos tribunaux. L'ensemble des parents qui désirent le plus
ardemment fonder une famille pourront maintenant procéder. C'est ce que
nous espérons, parce que cela n'est pas terminé.
Tous les parents nous ont dit que le problème majeur,
numéro un, est un problème administratif. Il reste à
combler les lacunes administratives. Mme la Présidente, si on n'y met
pas une ouverture d'esprit, si on n'a pas une approche humanitaire, nous
n'avons rien réglé en ce qui concerne l'adoption internationale.
Je vous assure que nous serons obligés de revenir encore en commission
parlementaire pour refaire un autre projet de loi parce que nous n'aurons pas
répondu aux voeux et aux souhaits des parents et surtout à
l'ensemble de la problématique qui existe actuellement en ce qui
concerne l'adoption internationale.
Mme la Présidente, je pense que des modifications majeures
s'imposent à l'heure actuelle dans le domaine administratif pour que les
délais soient de plus en plus raccourcis en ce qui concerne l'adoption.
On a beau établir les contrôles que nous voudrons, si les
délais demeurent aussi longs qu'ils le sont à l'heure actuelle,
si l'évaluation à la DPJ prend des années, si les parents
devront attendre avant d'avoir une réponse, une approbation des
tribunaux et si, finalement, le secrétariat, encore une fois, tergiverse
en ce qui concerne les organismes et les reconnaissances des pays, nous
n'aurons rien réglé en ce qui concerne l'adoption internationale.
Nous aurons encore autant de problèmes que ceux que nous avons connus
ces derniers 18 mois.
Le projet de loi 21 n'a rien changé, si ce n'est de revenir
à la case zéro, si ce n'est de refaire... La case zéro,
c'est de faire ce qui se faisait antérieurement, c'est-à-dire
qu'on acceptait qu'il y ait de l'adoption simple dans les pays et qu'il y ait
concordance avec nos lois ici. Cela sera fait d'une façon beaucoup plus
claire maintenant, parce que cela sera écrit. Mais, une chose est
sûre et certaine, c'est que la ministre coordonne toujours toute
démarche et tout projet d'adoption internationale. Et cela, Mme la
Présidente, c'est la mort certaine de tout projet d'adoption
privé, de tout projet d'adoption qui fait l'objet d'une démarche
personnelle.
Je trouve qu'on a manqué l'occasion, pour une fois, de
répondre aux véritables besoins des parents adoptants du
Québec. Là où je trouve cela un peu "chatouillant",
c'est
que dans les cas d'amnistie, la plupart des projets que nous aurons
à amnistier seront des projets pour lesquels nous demandons justement
une reconnaissance légale. L'ensemble des projets qui devront faire
l'objet de l'amnistie seront... II aurait peut-être fallu s'attarder et
regarder davantage ces lacunes et ces projets d'adoption qui devront faire
l'objet d'amnistie. Nous aurions dû nous attarder davantage justement
à ces projets pour trouver une solution et faire en sorte qu'on ne soit
pas toujours obligé de recommencer et de revenir à des
périodes d'amnistie.
Je pense, Mme la Présidente, qu'il aurait été sage,
la prudence politique nous demande une certaine sagesse, et je pense qu'on
aurait fait preuve de cette sagesse-là et que nous aurions davantage
répondu à notre rôle de législateurs en nous
penchant davantage sur ce volet qu'est le problème de l'adoption
internationale pour trouver la solution qui peut répondre à ce
problème, d'autant plus que, maintenant, toute démarche d'un
projet d'adoption internationale devra être approuvée par les
tribunaux de la jeunesse et que le projet de jumelage se fera par la DPJ. Je
pense que tous les mécanismes de contrôle sont mis en place par la
loi. Il aurait été plus sage et plus prudent pour le
fonctionnement et la réalisation des projets d'adoption internationale
que nous nous penchions, comme nous le souhaitons, nous, de l'Opposition, pour
accepter ces projets qui faisaient l'objet d'une démarche personnelle
des parents dans un cadre, je le répète, légal, dans un
cadre respectueux des structures et des règlements autant du
Québec que des pays étrangers avec lesquels nous devons faire
affaires.
Par contre, je me réjouis, Mme la Présidente, qu'enfin les
pays se rouvriront une fois de plus à l'adoption internationale avec
l'ensemble des pays avec lesquels nous étions habitués, parents,
organismes, de transiger et que, dorénavant, l'ensemble des parents
pourront réaliser leur projet d'adoption internationale. Enfin, cela
nous permettra aussi d'avoir de bons citoyens québécois et de
faire en sorte de nous enrichir par cet apport d'enfants qui viendront par leur
créativité, leur dynamisme et leur origine nous apporter un
élément important dans le dynamisme et le développement de
notre société québécoise. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Marie-Victorin. M. le député de Laurier.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, Mme la Présidente. C'est la
deuxième fois que j'entends parler la députée de
Marie-Victorin sur le projet de loi 21 concernant l'adoption internationale et
c'est la deuxième fois qu'effectivement cela me laisse tout à
fait perplexe. D'un côté, Mme la Présidente, elle nous dit
qu'on va consentir à l'adoption du projet de loi 21 et, tout de suite
après, elle nous dit que le projet de loi 21 ne change absolument rien.
Je pense que c'étaient ses propres mots, mais on pourrait regarder le
Journal des débats.
Mme la Présidente, cela est vraiment faire fi de la
réalité que représente le projet de loi 21. La
députée nous disait, il n'y a pas plus de deux minutes, que le
projet de loi 21 ne permettrait pas de revenir à la situation
antérieure qui était de reconnaître plus de pays.
Mme la Présidente, établissons certaines choses, tout au
moins dans le respect de la vérité. Avant 1980, alors que le Code
civil a été modifié par le gouvernement
précédent, il n'y avait pas de règle, en quelque sorte,
concernant l'adoption internationale. Il y avait donc des problèmes
auxquels le gouvernement a décidé de s'attaquer, et qu'est-ce
qu'il a fait? Il a mis dans le Code civil que seuls les pays où on
reconnaissait l'adoption plénière pourraient faire l'objet d'un
processus d'adoption internationale, et c'est à partir de ce moment que,
tranquillement, le fouillis et la confusion se sont installés parce
qu'il y a eu effectivement des jugements par la suite devant les tribunaux qui
faisaient une interprétation différente de la loi qui avait
été adoptée en 1980. La loi comme telle, la
décision gouvernementale de l'époque, le parti dont la
députée de Marie-Victorin est issue décidait de faire en
sorte que seulement les adoptions plénières - et on peut
retourner aux discours de l'époque, si vous voulez - seront reconnues
ici au Québec. (12 h 20)
On est bien prêt à prendre les blâmes qui nous
reviennent, Mme la Présidente. Si un blâme devait nous être
adressé, ce serait peut-être de ne pas avoir
présenté le projet de loi 21 plus tôt, mais qu'on n'essaie
pas de mêler les décrets, les règlements, le projet de loi
139 avec le projet de loi 21.
Toutes les autres choses n'ont rien changé dans le fond de la
loi, Mme la Présidente. La loi n'a jamais été
modifiée, ni par la loi 139 qui ne faisait que donner un pouvoir de
réglementation à la ministre concernant les pouvoirs et le
rôle du Tribunal de la jeunesse, du secrétariat à
l'adoption, etc..
Le décret, ce n'est pas une loi; ça ne peut pas changer
une loi. En ce qui concerne le projet de loi 21, c'est la première fois,
depuis 1980 et 1983, où il y a eu des amendements législatifs qui
changeaient le fond de la loi, c'est la première fois qu'on
décide de changer le fond de la loi. Et qu'est-ce qu'on fait, Mme la
Présidente?
On s'attaque directement au problème central de cette question
qui est: Est-ce qu'on reconnaît juste les pays où l'adoption est
plénière ou non? Et on a décidé qu'on pourra
désormais, avec le projet de loi 21, reconnaître les adoptions qui
se font dans les pays où c'est de l'adoption simple, en pouvant
transformer ici au Québec ces adoptions simples en adoptions
plénières, c'est-à-dire permettre aux enfants qui
viendront au Québec d'avoir exactement les mêmes droits que tous
les autres enfants ici, au Québec.
C'est la première fois que cette question est posée
directement et qu'on établit clairement que l'ensemble des pays
où c'est de l'adoption simple pourront être reconnus comme des
pays d'où on peut faire des adoptions internationales. Mme la
Présidente, si cela ne change rien, comme le disait la
députée de Marie-Victorin, franchement, je pense qu'il y a un
écart immense entre la réalité et les propos tenus par la
députée.
L'effet direct de ce geste... On a souvent parlé des
délais; on nous a parlé de délais de trois, cinq, sept,
dix, douze ans, même. Je remarquais l'autre fois que, si on veut
blâmer un gouvernement de quoi que ce soit, on ne peut sûrement pas
blâmer un gouvernement qui est au pouvoir depuis 18 mois pour la
responsabilité des délais de cinq ans, dix ans et douze ans.
Mme la Présidente, je pense quand même qu'il y a un minimum
d'objectivité, de calme et de respect de la vérité dont
devraient faire preuve les députés de l'Opposition. Je comprends
que, actuellement, ils sont peut-être dans un processus parlementaire qui
s'appelle un "filibuster" dans le sens qu'ils en ont contre le fait que l'on
pourrait siéger pour discuter du lac Meech et qu'ils ont
décidé d'appeler quinze intervenants sur un projet de loi...
Une voix: Avec lequel ils sont d'accord.
M. Sirros: ...avec lequel ils sont d'accord.
Alors, je crains qu'on ait droit encore à toutes sortes de
discours qui seront pas mal déconnectés de la
réalité que représente la loi 21. Mais, au minimum, il
faudrait faire quelques discours pour replacer les choses. Les choses, c'est
comme ça. Le projet de loi 21 ouvre le nombre de pays d'où on
peut faire les adoptions internationales.
Le résultat direct de cette démarche sera de
réduire considérablement les délais. Les délais
n'étaient pas uniquement des délais administratifs, ils
étaient aussi dus au fait qu'il n'y avait pas assez d'enfants adoptables
dans les pays "pléniers", parce que le nombre de pays était
limité. En ouvrant le nombre de pays d'où on peut faire les
adoptions internationales, on augmentera le bassin d'enfants disponibles pour
l'adoption internationale, ce qui devrait conduire à une
réduction considérable des délais.
La députée de Marie-Victorin soulignait, à juste
titre, qu'il y a aussi des modifications administratives qu'il faudrait faire.
Nous en convenons, la ministre l'a dit dans son discours de deuxième
lecture, Mme la Présidente. Mais nous sommes ici à discuter d'un
projet de loi qui modifie les lois et, oui, il devrait suivre des modifications
administratives. La question, par exemple, d'une liste d'attente provinciale ou
locale, on sst prêts à la regarder.
On est prêts à faire tout ce qu'on peut, parce que
c'était le but du projet de loi 21, pour faciliter l'adoption
internationale. C'était clairement annoncé, dès le
départ, que c'est ce qu'on voulait faire. C'est pour cela qu'on a tenu
la commission parlementaire, qu'on a écouté les organismes, les
personnes, les parents adoptants, etc. et qu'on a modifié par la suite
le projet qui avait été déposé.
Cela fait partie du processus démocratique d'écouter ce
que les gens ont à dire, de modifier, par la suite, les intentions du
législateur et d'insérer cela dans un projet de loi.
Mme la Présidente, la seule façon dont je peux comprendre
les propos tenus par la députée de Marie-Victorin, c'est de faire
l'hypothèse que sa position dans l'adoption internationale, c'est
d'abolir toutes les règles, d'ouvrir cela à un "free-for-all",
que ce soient toutes sortes de procédures privées ou autres que
les gens pourraient entreprendre.
Nous avons amnistié les gens dans toutes les situations
irrégulières qui ont été portées à
notre attention ou qui ont été notées au moment du
dépôt du projet de loi. Il n'y a donc plus actuellement de
situation où les gens peuvent se trouver dans
l'illégalité, en quelque sorte. On les a amnistiés. On
annonce par la suite le projet de loi 21. On établit les règles
minimales d'encadrement en adoption internationale. Les adoptions
privées que les gens voudraient faire devraient s'insérer
à l'intérieur de ce processus, qui est un processus où la
ministre n'a plus aucune discrétion en la matière. On a
éliminé le pouvoir discrétionnaire de la ministre, contre
lequel s'insurgeait Mme la députée de Marie-Victorin.
Les organismes reconnus auront une responsabilité. Si des gens
veulent entreprendre des démarches privées, il faudrait qu'ils
les insèrent normalement à l'intérieur de ce processus qui
prévoit que les organismes reconnus soumettent des noms aux familles qui
veulent adopter.
Le projet de loi, tel qu'il est amendé, pour lequel, semble-t-il,
l'Opposition est d'accord, même si certains vont passer je ne sais
combien de temps à parler sur ce projet
de loi et comme nous n'en sommes qu'à la prise en
considération du rapport, ce projet de loi réduit au minimum
l'encadrement nécessaire en adoption internationale. Nous avons toujours
soutenu de ce côté-ci -c'était d'ailleurs la position de
l'ancien gouvernement, autrement, il n'aurait jamais
légiféré en la matière - qu'il y a quand même
une nécessité d'un minimum d'encadrement en adoption
internationale afin de ne pas laisser effectivement le champ ouvert à du
marchandage d'enfants, à un trafic d'enfants. Non pas que les parents
qui veulent adopter soient des gens qui veulent aller arracher des enfants
à leurs parents naturels, mais si on ne reconnaît pas que des
situations de cette nature se passent dans le monde, on doit être
très naïf.
Le projet de loi réduit au minimum l'encadrement. Il augmente le
nombre d'enfants. Il réduit donc les délais. Il reconnaît
les pays où l'adoption est simple à faire. Il agrandit donc le
bassin des pays où on peut adopter des enfants. Dans ce sens, je
comprends que la députée disait: Nous consentirons au projet de
loi. Dans ce sens, si l'Opposition y consent, cela veut dire qu'il doit y avoir
quelque chose là-dedans qui, même pour l'Opposition, a du bon
sens. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laurier. M. le député de Bertrand.
M. Jean-Guy Parent
M. Parent (Bertrand): Merci, Mme la Présidente. Il me fait
plaisir de venir appuyer ma collègue, Mme la députée de
Marie-Victorin, ce matin, pour apporter, au cours des quelques minutes mises
à ma disposition, quelques points de vue qui vont dans le sens de ceux
de ma collègue et pour répondre un peu au député de
Laurier, qui disait que plusieurs intervenants de ce côté-ci sont
intervenus peut-être pour ne pas dire grand-chose.
J'aimerais bien que le député de Laurier ne tienne rien
pour acquis. Les propos qui seront tenus de ce côté-ci ont
sûrement du contenu. Je devrais dire pour commencer que, si on a
décidé de voter pour le projet de loi 21, c'est parce qu'il y a
eu des reculs importants de la part de la ministre. Je dirais que ces reculs ne
sont peut-être pas exclusivement mais principalement l'effet du travail
de l'Opposition.
La ministre a elle-même créé une situation entre
précisément le 19 novembre 1986, lorsqu'elle a adopté le
décret 1728-86, et la mi-juin 1987. C'est un fouillis. L'état
dans lequel s'est retrouvé le dossier de l'adoption internationale est
particulièrement le résultat de la façon dont la ministre
a manoeuvré là-dedans. Je pense qu'il faut le comprendre. Si le
député de Laurier mentionnait tantôt qu'il fallait
rétablir les faits et la vérité, si ce n'était
qu'au nom de cela, il faut rétablir les faits. Si nous voterons pour le
projet de loi 21, c'est que, essentiellement, nous sommes d'accord avec
certaines modifications. Il y a d'autres choses sur lesquelles nous ne sommes
pas d'accord. On va aussi le dire à Mme la ministre. (12 h 30)
Nous ne sommes pas les seuls de l'Opposition, à essayer de faire
valoir que nous avons raison. Je pense que les personnes les plus
impliquées sont celles qui ont comparu en commission parlementaire et
qui ont laissé savoir à Mme la ministre, ce qui est en train de
se passer à cause du projet de loi 139 qui était le premier
dépôt de projet de loi et à cause de son décret du
19 novembre 1986 qui faisait en sorte d'interdire l'adoption internationale
dans les pays dont les règles de droit en matière d'adoption
différaient des nôtres. C'est ce qui a créé la
confusion et la situation dans laquelle on se retrouve aujourd'hui. D'ailleurs,
Le Devoir de samedi dernier le rapportait très bien.
Mme la Présidente, que sont pour les parents, qui sont les
parents dits adoptants, les amendements proposés dans le projet de loi
21? Soit dit en passant, il y a eu quatorze amendements sur quatorze articles.
Si le projet de loi était si fantastique au départ, pourquoi y
a-t-il eu quatorze amendements? Il faudrait peut-être que Mme la ministre
puisse répondre à cela, pourquoi il y a eu quatorze amendements.
Alors, pour les parents adoptants, ce projet de loi constitue finalement une
première lueur d'espoir après des mois de protestations, de
colère et d'amertume. Ce n'est pas l'Opposition qui déclare cela.
Ce que nous disons, c'est que nous sommes d'accord avec cela, parce que nous
avons vécu au cours des six derniers mois les étapes qu'a
franchies la ministre: un pas en avant, deux pas en arrière. Dans ce
sens-là, M. Philippe Godin, président de la
Fédération des parents adoptants, se réjouit
particulièrement de l'amendement qui dispense l'état
étranger de donner son consentement pour qu'une adoption soit reconnue
au Québec.
Mme la Présidente, on revient exactement à la case de
départ, comme le mentionnait si bien ma collègue, la
députée de Marie-Victorin, c'est-à-dire que l'on revient
avant le 19 novembre 1986. Je me préoccupe beaucoup de l'autre dimension
qui est la dimension, je dirais, encore plus importante et qui n'est pas
réglée dans le projet de loi 21. J'ai fait part ici de mes
appréhensions et de mes préoccupations, lorsque je suis intervenu
en deuxième lecture. Il s'agit du côté administratif et du
côté humanitaire, de ce qui, là, fera en sorte que cela ira
ou cela n'ira pas bien du
côté du Secrétariat a l'adoption internationale. De
la façon dont le projet de loi 21 est conçu, Mme la ministre
devient un peu une coordonnatrice des démarches pour les adoptants; ce
qui signifie, à toutes fins utiles, un contrôle total sur le
processus de l'adoption.
La situation qui prévaut au niveau de l'adoption internationale
est une situation difficile. Il ne s'agit pas de blâmer l'ancien
gouvernement, qu'il y avait telle ou telle situation. Voilà un
gouvernement en place depuis 18 mois qui a la chance, depuis au moins six ou
sept mois, d'apporter des correctifs supposément pour améliorer
la situation qui prévalait avant et ce que l'on nous présente
finalement, ce ne sont que des modifications à vrai dire mineures. Les
modifications majeures ne sont pas apportées. Mme la ministre manque un
peu le bateau.
Je me permets de lui dire à elle, qui a un côté
habituellement humanitaire, qu'elle aurait dû prendre des leçons
du député de Notre-Dame-de-Grâce qui a fait preuve, ce
matin, beaucoup de son côté humanitaire et hommage lui a
été rendu tant par le chef de l'Opposition que par le premier
ministre. Lorsqu'on pense à un gouvernement qui doit prendre des
décisions et penser à ce côté humanitaire, s'il y a
un projet de loi où l'on doit justement apporter des modifications et
une sensibilité quant à cette dimension humanitaire, pour
éviter qu'il y ait un processus qui soit trop lourd et qui fasse en
sorte que cela défavorise l'adoption internationale, c'est bien
celui-ci.
On sait, Mme la Présidente, à quel point l'adoption
internationale est importante quant à l'avenir du Québec, quant
à la façon dont nous allons pouvoir contrer les problèmes
démographiques que nous avons. Ce volet des parents
québécois, des hommes et des femmes qui ont décidé
d'aller dans cette voie-là, c'est-à-dire de faire le choix d'un
enfant à l'étranger pour pouvoir l'adopter, on doit essayer de le
favoriser le plus possible pour pouvoir augmenter de façon sensible la
venue de ces enfants ici et comme résultat net, que l'on ait de plus en
plus d'adoptions internationales. Mais le problème majeur demeure au
coeur. Il s'agit effectivement de tout le processus et de la lourdeur
administrative au secrétariat. Dans ce sens, la ministre aurait pu
prendre des dispositions de façon à pouvoir alléger. Non
pas, elle, aller chercher des pouvoirs additionnels pour pouvoir
contrôler toute cette adoption, mais faire en sorte que l'on pourrait
définitivement alléger la procédure.
Quant au côté humain que mentionnait ce matin le
député de Notre-Dame-de-Grâce, je pense que Mme la ministre
devrait s'en inspirer pour justement, s'il n'est pas trop tard, apporter ces
dimensions au niveau du secrétariat. Le secrétariat comme tel
regroupe plusieurs fonctionnaires, mais s'il n'y a pas une volonté
politique de réduire, avec ce projet de loi 21 et, par la suite, dans la
pratique, les délais, la paperasse et toutes les embûches qu'on
connaît actuellement et qu'on a connues particulièrement au cours
des deux dernières années, on ne réglera absolument
rien.
Ce qui me préoccupe, c'est que des parents aux prises avec le
processus enclenché pour l'adoption internationale se découragent
carrément. Vous savez, dans ce domaine, cela va vite. La
réputation et le ouï-dire qui se font, c'est que cela ne vaut pas
la peine d'enclencher un processus en adoption internationale parce que les
lois sont trop contraignantes. Il y a effectivement un gouvernement qui
était supposé alléger tout le processus administratif, la
"procédurite". Je veux bien adhérer à ces belles paroles,
mais qu'est-ce qui se passe dans les faits? Il se passe que, dans le projet de
loi 21, on n'a pas apporté de modifications et on ne permet pas,
à moins que Mme la ministre ne nous indique le contraire, d'aller de
l'avant avec un projet de loi complet.
En terminant, Mme la Présidente, parce que vous me dites que le
temps achève, je dis que Mme la ministre a certainement des
préoccupations quant au côté administratif du
secrétariat et à sa façon de fonctionner. A la suite de ce
projet de loi 21, elle devra apporter des modifications administratives de
façon à rendre plus facile, plus accessible et, je dirais, plus
humaine cette dimension, ce à quoi je tiens particulièrement. Et,
Mme la ministre, je suis sûr que vous tenez aussi à cette
dimension: que les Québécois et les Québécoises qui
vont vers l'adoption internationale y trouvent une approche humaine. Il ne
s'agit pas de transiger, d'être en affaires et de dire: Nous allons
conclure une bonne affaire. Il s'agit d'enfants que nous décidons
d'adopter, et des enfants, c'est humain. S'il y a des parents qui
décident d'adopter un enfant, Mme la Présidente, il faut leur
rendre la tâche facile et je vous dirais que je compte sur vous pour
apporter ces modifications dans les mesures qui seront inscrites, et
particulièrement au Secrétariat à l'adoption
internationale. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Bertrand. M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: Mme la Présidente, il y a une semaine, je
parlais de ce projet de loi et je me disais contre. Mais, après avoir lu
les nombreux amendements apportés par la ministre, quatorze sur
quatorze, ce qui est probablement un nouveau record depuis que nous
siégeons dans le nouveau Parlement libéral, je constate donc que
la loi a été
refaite de fond en comble. On a jeté la maison à terre et
on en a construit une autre. La question qui se pose reste la même: Le
labyrinthe, pour les parents, est-il plus court ou plus long qu'avant pour
adopter un enfant? La réponse, malheureusement, c'est que cela ne change
pas grand-chose dans ce processus d'une lenteur qui rend les parents
très mécontents contre le gouvernement et qui les fait se
demander si le gouvernement tient à ce que des enfants adoptés
arrivent ici.
La question qui se pose est: Le gouvernement veut-il que des parents
adoptent des enfants au Québec? On peut dire que la réponse de
l'Opposition là-dessus, c'est que, pour nous, il n'y aura jamais assez
d'enfants adoptés au Québec. Nous estimons que l'adoption est la
meilleure formule d'accueil pour un nouveau venu au Québec,
premièrement, et, deuxièmement, les résultats sont
là, Mme la Présidente, par centaines et centaines. Un enfant
adopté au Québec par une famille québécoise a
toutes les chances de s'intégrer en douceur et de devenir un
Québécois francophone, un citoyen à part entière
qui connaît ses droits et qui se bat pour ses droits, qui participe
totalement aux activités avec n'importe quel autre
Québécois et qui, par conséquent, devient un citoyen
à part entière rapidement. (12 h 40)
La question reste donc posée: est-ce que les quatorze nouveaux
articles du projet de loi vont accélérer le processus? La
réponse, c'est: II semble que non, Mme la Présidente.
Si je fais l'inventaire des diverses instances devant lesquelles les
parents doivent passer, la DPJ, le Secrétariat à l'adoption
internationale, l'organisme qui cherche l'enfant et le tribunal; quand l'enfant
arrive, on retourne devant le tribunal. Je crois, Mme la Présidente, que
le labyrinthe est aussi long qu'avant sinon plus. Je reproche également
à la ministre de ne pas avoir permis aux parents de chercher
eux-mêmes leur propre enfant pour l'adoption. Dans le passé, et
cela illustrait les déficiences du système que nous avions, les
parents partaient eux-mêmes à la recherche d'un enfant et souvent,
après des démarches faites avec l'empressement passionné
que les parents peuvent porter à un enfant qu'ils aiment
déjà, je disais que cela multipliait le nombre d'enfants qui
pouvaient entrer ici.
Je constate que la ministre a abandonné ce processus
parallèle de recherche d'enfants pour s'en remettre, encore une fois,
aux organismes gouvernementaux qui, eux, cherchent et sont limités,
comme chaque organisme gouvernemental, par des budgets, par des coupures, par
des appels au Trésor: on n'a pas assez d'argent, augmentez les montants.
Donc, nous nous retrouvons devant une situation peut-être pire qu'avant,
Mme la Présidente, dans la mesure où nous savons qu'il n'y a pas
un ministère qui échappe aux coupures, il n'y a pas un
ministère non plus qui échappe à des "livraisons de
compressions", comme on le dit dans le langage absolument absurde de tout le
gouvernement. Je crois que, puisque nous en sommes à quatorze
amendements, nous pourrions en faire un quinzième qui
n'enlèverait pas aux parents le droit de chercher eux-mêmes
l'enfant qu'ils veulent adopter.
Au fond, la question qui se pose est simple: voulons-nous des enfants,
oui ou non? Si la réponse est oui, je crois que, de ce
côté-ci, elle l'est et de l'autre côté aussi,
à la suite de résolutions adoptées par le Parti
libéral lui-même et par la commission des jeunes. On constate
qu'ils veulent confier à l'adoption le soin de régler une partie,
je dis bien une partie, mais une partie quand même, du déficit
démographique du Québec.
Je dirais qu'on devrait laisser les parents chercher eux-mêmes et
faire les efforts eux-mêmes pour trouver les enfants qu'ils veulent
adopter, car souvent, c'est plus rapide qu'un organisme gouvernemental. Les
parents tiennent à faire cette démarche eux-mêmes et ils
tiennent que la démarche aboutisse. Il y va souvent de leur propre sort
comme couple et c'est leur propre décision comme couple d'adopter un
enfant. Je trouve que ce qui manque à cette loi pour être aussi
parfaite que je souhaiterais personnellement, c'est qu'on laisse les parents
s'occuper eux-mêmes de leurs propres procédures d'adoption, de
leur propre processus qui est la manière - c'est prouvé par
l'expérience -la plus efficace et celle qui apporte le meilleur
résultat, Mme la Présidente.
Quand les parents cherchent eux-mêmes un enfant, on est sûr
qu'ils vont le trouver. Tandis que si nous laissons cela à un organisme
gouvernemental, les chances sont que, comme il s'agit de la fonction publique,
d'organismes et de gens des services sociaux, on n'est pas sûr que
l'organisme trouve autant d'enfants que les parents en voudraient ici, au
Québec. Donc, je crois que si nous votons contre... Pardon, cette
semaine, c'est pour. À la suite des changements faits par la ministre,
même si nous votons pour cette loi 21, nous continuons à
déplorer que la ministre ait fait sauter la possibilité pour les
parents de faire leurs propres démarches d'adoption. Nous pensons
qu'elle devrait l'ajouter si cela n'y est pas.
Je suis convaincu, Mme la Présidente, et la ministre
m'écoute tout en lisant son ARGUS du jour, j'en suis sûr, que
quand les parents eux-mêmes cherchent un enfant, ils ont plus de chances
de le trouver que si c'est un organisme gouvernemental ou un service social qui
le fait.
Mme la Présidente, malgré cette
réserve à la loi 21, nous voterons en faveur, tout en
soulignant à la ministre que la crainte reste quand même: est-ce
que le labyrinthe entre la découverte de l'enfant recherché pour
l'adoption et son adoption au Québec, conclue et entérinée
par un tribunal, sera plus court? J'ai des doutes qu'il soit aussi long
qu'avant sinon plus long.
Par conséquent, je ne crois pas que la loi actuelle
résolve les problèmes soulevés par les parents
eux-mêmes lors de la commission parlementaire et également par les
parents que nous avons rencontrés dans notre comté et ailleurs au
Québec en tant qu'Opposition officielle. Ils se plaignent des
délais interminables et, au fond, cela amène à se poser la
question: le gouvernement actuel veut-il qu'il y ait une adoption au
Québec rapide et efficace? Le gouvernement tient-il à ce que nous
comblions une partie -même si elle est très mince - du
déficit démographique du Québec par ce moyen. Les parents
en doutent, Mme la Présidente, et je crois qu'ils ont raison d'en
douter, car ce que nous avons devant les yeux est un projet qui ne
résoudra en rien les problèmes de délais posés par
la législation, telle que nous la vivons maintenant, Mme la
Présidente. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Mercier. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, sur votre
intervention de cinq minutes.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, comme vous le
mentionnez, j'ai droit, après chacune des interventions, à une
courte réplique de cinq minutes. Je voudrais l'utiliser, à ce
moment-ci, pour la première fois. Évidemment, l'Opposition - je
trouve que cela doit être assez difficile pour elle -a reçu le
mandat de son leader, probablement, de son whip ou de son chef, qu'il faut
absolument bloquer le temps de l'Assemblée nationale, parce qu'on est
encore dans l'incertitude quant à ce qui va arriver au sujet d'une
discussion éventuelle de l'accord du lac Meech à
l'Assemblée nationale. Alors, elle fait ce que font des partis
politiques d'Opposition, elle dit: On va retarder les travaux et, notre
meilleure façon de retarder les travaux, c'est de parler d'une
façon incessante. Même si on se retrouve en contradiction avec ses
propres convictions, il nous faut parler pour tenir le temps, comme on dit.
Alors, c'est un peu ce phénomène auquel on assiste dans le
moment et qui explique que, d'une part, ils vont voter pour ce projet de loi 21
- je pense que, d'ailleurs, cela nous a été indiqué en
commission parlementaire; le député de Mercier, si je ne m'abuse,
vient de répéter la même chose - mais, par contre, ils
trouvent qu'il y a eu beaucoup d'amendements, qu'il a été
beaucoup amélioré. On va voter pour, mais il faut qu'on parle
contre parce qu'il faut tenir le temps pendant dix minutes et qu'on est
l'Opposition. Alors, on parle contre la chose.
Mme la Présidente, je voudrais simplement dire certaines choses.
Quand on dit: La ministre n'a pas remis les choses telles qu'elles
étaient auparavant, c'est-à-dire que les gens puissent partir sur
une base privée pour adopter des enfants en pays étrangers,
j'aimerais leur rappeler que, quand ils étaient au gouvernement, en
1979, et que le ministre d'alors, le Dr Lazure, avait décidé pour
la première fois d'intervenir dans le domaine législatif touchant
l'adoption internationale, c'était justement pour contrer cette tendance
qui était d'aller chercher des enfants soi-même, si on en avait
les moyens, dans d'autres pays pour les adopter.
Là-dessus, j'admettrai, avec beaucoup de facilité, que,
dans la très grande majorité des cas ou la presque
totalité, les choses devaient être faites à partir de
bonnes intentions, à partir de sentiments généreux, en
toute intégrité, mais qu'il pouvait se glisser des abus, d'autant
plus que les pays, de plus en plus, se montrent réticents à ce
que les gens arrivent de pays étrangers pour adopter chez eux des
enfants sans qu'il n'y ait d'encadrement.
Quand on dit: Les choses étaient plus faciles avant, mais c'est
justement le gouvernement d'avant qui a voulu encadrer l'adoption
internationale pour éviter que des abus ne se glissent et que des
enfants ne soient adoptés dans des conditions inacceptables et qui, j'en
suis certaine, sont aussi inacceptables pour l'Opposition. C'est ce qui
crée l'ambiguïté.
On parle des quatorze amendements qu'on a apportés. Si cela leur
fait plaisir de dire quatorze... En chiffres absolus, ils ont raison. Mais ce
qu'il faut bien dire, c'est qu'il y en a deux qui sont des modifications de
fond et qui permettent vraiment à l'Opposition de voter pour le projet
de loi. Le reste - je pense que la députée de Marie-Victorin
serait la première à le reconnaître - la majorité
des autres sont des amendements de concordance. Par exemple, quand on a dit que
le Tribunal de la jeunesse, au lieu de vérifier la
régularité du projet d'adoption, l'approuvera, lui donnant une
portée plus grande dans le sens de permettre au juge d'apprécier
l'adoption, évidemment, dans chaque article où l'on parlait de
vérification d'adoption; il a donc fallu présenter un
amendement.
On va nous dire tout l'après-midi qu'il y a eu quatorze
amendements, mais il faut bien se rappeler qu'il y en a eu deux qui sont
véritablement des amendements de fond, les autres étant des
amendements de forme pour des questions de concordance, ce qu'on
fait régulièrement. (12 h 50)
Je trouve étrange qu'on nous reproche d'avoir fait des
amendements quand l'objet d'une commission parlementaire est justement
d'entendre les gens, essayer de les comprendre, essayer dans la mesure de la
"raisonnabilité" des choses d'apporter des amendements qui s'imposent
pour créer le plus grand consensus autour de l'adoption d'une loi et
surtout de son application éventuelle.
Mme la Présidente, simplement ces brèves remarques pour
vous indiquer et surtout indiquer à la population que ce qu'ils vont
entendre le reste de l'après-midi, c'est une Opposition qui est en
faveur du projet de loi, mais qui, pour tenir le temps, va devoir parler
contre.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre. M. le
député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Mme la Présidente, cela me fait
énormément plaisir de participer à ce débat parce
que, contrairement à ce qu'a dit la ministre de la Santé, je la
félicite d'apporter quatorze amendements. Je l'ai tellement connue
entêtée, impossible à faire changer d'idée, un mur
de ciment, Mme la Présidente, que de voir qu'elle apporte quatorze
amendements à son projet de loi, qu'il s'agisse de quatorze ou de deux
plus douze égale quatorze, cela m'apparaît du pareil au
même, et je voudrais la féciliter.
Il n'y a rien que je trouve pire que des ministres qui ne peuvent pas
faire des amendements et qui pensent que leurs projets de loi sont toujours
parfaits au point de départ. Je pense, au contraire, qu'il y a des
effaces au bout des crayons parce qu'on estime que les gens peuvent se tromper
et qu'ils peuvent corriger leurs travaux. Après avoir entendu les gens -
on aurait pu dire qu'ils auraient dû être entendus avant - il y a
des amendements qui sont apportés. Si je veux prendre la parole
particulièrement à ce moment-ci, c'est parce que je veux
souligner à la ministre qu'il y a encore une possibilité pour
elle d'amender encore son projet en troisième lecture. Comme le dit le
député de Mercier, qui est sensible à cette question, il
faudrait davantage favoriser l'adoption privée parce qu'on doit
permettre aux gens de s'occuper eux-mêmes de leur adoption. Ce n'est pas
nécessaire de passer uniquement par des organismes gouvernementaux pour
s'occuper d'adoption.
Le gouvernement libéral, qui s'est fait une marque de commerce,
dit-il, de favoriser l'entreprise privée, de
déréglementer, de favoriser les initiatives, pourquoi ne
voudrait-il pas que des parents eux-mêmes qui veulent adopter des enfants
ne puissent pas le faire?
Je pense qu'au contraire, s'il y a des dizaines de milliers de personnes
qui veulent adopter des enfants au Québec, on doit les encourager, les
aider, leur fournir un appui, s'ils le demandent, mais ne pas les
empêcher ni les forcer à entrer dans un canal, dans un goulot
d'étranglement bureaucratique, Mme la Présidente. C'est le but de
mon intervention parce que je crois que, si la ministre a pu, en commission
parlementaire, apporter un certain nombre d'amendements, je lui demande
d'apporter le nombre d'amendements additionnels qu'il faudra pour faire en
sorte que l'adoption privée soit privilégiée même.
Le gouvernement, selon la philosophie du Parti libéral qui nous a
tellement été exprimée dans cette Chambre, ne doit jouer
qu'un rôle supplétif dans des matières où les gens
peuvent s'occuper eux-mêmes de leurs affaires et non pas essayer de les
remplacer à tout prix. Y a-t-il quelque chose de plus incroyable que de
vouloir faire passer des parents par un canal administratif, bureaucratique,
par des fonctionnaires qui vont décider, qui vont choisir des enfants,
alors que les parents eux-mêmes, il me semble, ont droit à cette
initiative?
Deuxièmement, en matière de politique d'immigration, il me
semble que, si on veut parler d'une véritable politique familiale, d'une
véritable intégration culturelle, on doit privilégier
l'immigration d'enfants, non seulement d'une façon égoïste,
mais aussi d'une façon égoïste. Je dirais que dans une
perspective de politique familiale, dans un Québec où le taux de
natalité est réduit maintenant à sa plus simple
expression, puisque nous sommes rendus le territoire au monde où il y a
le deuxième plus bas taux de natalité, où l'on dit qu'on a
le plus bas taux de nuptialité au monde, il faut penser dans une
perspective de politique familiale.
Est-ce qu'il y a une façon de mieux faire l'immigration qu'en
permettant l'adoption d'enfants qui ont besoin de parents, qui sont dans une
situation misérable dans d'autres pays et qui ne demandent pas mieux que
d'être adoptés par des parents qui ont les moyens de les
élever en famille? En même temps, le problème de la langue
serait réglé, puisqu'ils seraient élevés dans une
famille québécoise, apprenant même notre histoire en
même temps que les autres enfants du Québec, et qu'ils seraient
parfaitement intégrés. Je dis que, dans une politique familiale,
la forme d'immigration qui devrait être privilégiée, c'est
l'adoption d'enfants qui soulagerait de la misère sur le plan
international en même temps qu'elle permettrait de combler une lacune
importante au Québec, le taux de natalité.
Mme la Présidente, je ne désespère pas. Je dois
vous dire que jusqu'à maintenant j'ai désespéré de
la ministre de la Santé. J'ai eu des problèmes dans mon
comté et je pense que cela procède d'un manque de politique
familiale. Une des grandes lacunes au Québec, c'est l'absence de
politique familiale. Je ne suis pas un spécialiste des maladies
transmises sexuellement. J'ai été amené à
étudier un dossier dans mon comté parce qu'une clinique a
été fermée. Encore là, j'ai dit à la
ministre à ce moment-là: C'est un problème parce qu'il y a
des femmes qui vont contracter la chlamydia, dont une des conséquences
apparemment est la stérilité. Si l'on veut véritablement
régler les problèmes familiaux au Québec, avoir un taux de
natalité qui corresponde à nos besoins pour un meilleur
équilibre dans notre société, il faut avoir une politique
familiale. Je pense qu'un des plus grands besoins actuellement au
Québec, c'est celui d'une politique familiale. Avant de parler d'une
politique d'immigration, d'une politique concernant les réfugiés,
d'une politique concernant les enfants, il faut d'abord avoir une politique
familiale pour savoir où l'on s'en va au Québec, dans une
société qui a des problèmes considérables. Quand on
a le plus bas taux de nuptialité au monde, il y a quelque chose qui ne
va pas. Quand on a le deuxième plus bas taux de naissances au monde, il
y a quelque chose qui ne va pas, en plus d'autres problèmes qui
procèdent d'une absence de politique familiale, d'une absence de
perspective par rapport à la politique familiale.
Je suis autant à l'aise de le constater que je vis dans un
comté, Mme la Présidente, qui a, dans une de ses
municipalités régionales de comté, la municipalité
régionale Les Chutes-de-la-Chaudière, le plus haut taux de
natalité au Québec. Je vis dans mon comté au milieu
d'enfants et je vois d'autres parties où il y a moins d'enfants et c'est
triste, parce que je vois le jour où il y aura un
déséquilibre dans notre société, où l'on
aura trop de personnes âgées par rapport au nombre de personnes
jeunes qui seront en état de payer pour les services coûteux que
va nécessiter une société où il y aura un
déséquilibre dans la pyramide des âges. C'est pourquoi, Mme
la Présidente, je pense et j'incite la ministre... Et je pense que l'on
sera tous là pour la féliciter si elle le fait, si elle voulait
apporter en troisième lecture des amendements qui favoriseraient
l'adoption privée. Il n'y a rien de mal là-dedans; quatorze
amendements, on a dit deux importants, douze de concordance, cela fait
quatorze. Quand bien même il y en aurait quinze ou seize, un ou deux de
plus, pour favoriser l'adoption privée!
Je vois des députés qui sont ici, qui ont dit qu'ils
favorisaient davantage ces initiatives privées. Je demande à ces
députés de parler avec la ministre de la Santé;
peut-être qu'ils vont plus l'influencer que les députés de
l'Opposition. Mais tous les gens souhaitent au Québec que l'adoption des
enfants soit facilitée et, dans cette perspective, si on laisse les
initiatives aux milliers de parents, il pourrait y avoir une rectification en
dernier ressort. On pourrait améliorer le Secrétariat à
l'adoption internationale, mais essentiellement, dans leur recherche
d'adoption, il faudra favoriser dans des procédures simplifiées
l'initiative des différents parents qui veulent s'occuper
eux-mêmes de cette adoption. Il faudra leur fournir des services de
renseignements, leur fournir un appui dont ils peuvent avoir besoin pour
connaître les procédures, les façons de faire, mais leur
laisser essentiellement le maximum d'initiatives, le gouvernement se contentant
peut-être de venir sanctionner cela à la fin, et souvent dans le
cadre d'organismes bénévoles qui connaissent les gens.
Vous savez, quand on permet à des organismes
bénévoles de jouer également un rôle, quand on
permet aux parents qui veulent adopter de jouer un rôle, ces gens, parce
qu'ils se connaissent, parce qu'ils sont connus dans le milieu, peuvent plus
facilement exercer leur activité. On s'assure en même temps que
les organismes bénévoles surveillent, possiblement dans une
coordination du secrétariat à l'adoption, pour qu'il n'y ait pas
d'abus, pas de trafic, etc. Personne ne veut avoir du trafic d'enfants. Mais il
y a moyen de permettre des initiatives privées pour faire en sorte que
l'adoption internationale soit un meilleur succès dans une perspective
de politique de natalité au Québec ou de plus grand nombre
d'enfants, parce qu'on a des besoins.
En rendant service aux pays étrangers, en adoptant sur le plan
international des enfants qui ont besoin d'être adoptés, nous
allons nous rendre service à nous-mêmes. Est-ce qu'il y a quelque
de chose de plus beau, Mme la Présidente, que cette concordance dans les
besoins? Je vous remercie et je demande à la ministre d'y penser encore
un peu - il paraît qu'il est possible que la session soit
prolongée un peu et d'y apporter les amendements nécessaires pour
favoriser cette adoption privée, dans le cadre de la troisième
lecture où les amendements sont possibles. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Lévis. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoïe-Roux: J'aimerais demander l'ajournement du
débat jusqu'à 15 heures.
La Vice-Présidente: L'ajournement du débat? Y
a-t-il consentement pour qu'on ajourne le débat?
M. Chevrette: On n'a pas bien bien le choix.
La Vice-Présidente: Consentement. Nous allons donc
suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 7)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez vous asseoir.
Nous allons reprendre nos travaux.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 35 du feuilleton, s'il vous plaîtl
Projet de loi 57
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 35 de notre
feuilleton, le ministre des Finances propose la prise en considération
du rapport de la commission du budget et de l'administration qui a
étudié le projet de loi 57, Loi modifiant la Loi sur la
Société Makivik.
M. le ministre des Finances.
M. Chevrette: Mme la Présidente, question de
règlement.
La Vice-Présidente: Question de règlement.
M. Chevrette: Avant l'ouverture de la séance, Mme la
Présidente, pour ouvrir la séance, je crois que la
présidence a le devoir, en vertu de nos règlements, de constater
s'il y a quorum ou pas. Que je sache, il n'y a pas quorum au moment où
l'on se parle.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition, je tiens
à vous dire que la séance se continue. Il n'y a pas quorum
effectivement, mais comme la séance se continue, si on l'a au
début, je présume qu'on l'a tout au long de la séance,
sauf, évidemment, s'il y a question de règlement... Qu'on appelle
les députés.
Le quorum étant constaté, nous allons donc poursuivre nos
travaux.
Je vais reconnaître le ministre des Finances.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: Mme la Présidente, au feuilleton aujourd'hui
nous retrouvons à l'article 35 le projet de loi 57, Loi modifiant la Loi
sur la Société Makivik, où on y lit que ce projet de loi
57 a été présenté par celui qui vous parle le 14
mai 1986. Il y a donc plus d'un an que nous essayons d'adopter un projet de loi
qui, croyez-le ou non, fait l'unanimité. En effet, le principe a
été adopté le 11 mars 1987 à l'unanimité. La
commission du budget et de l'administration a déposé son rapport
le 12 juin 1987 à la suite de travaux en commission parlementaire
où nous avons déclaré encore une fois notre
unanimité. C'est donc dire que, depuis un an et un mois, tout le monde
s'entend pour appuyer chacun des éléments de ce projet de loi qui
est pourtant bien simple, qui ne comporte en fait que huit articles, dont un
qui est un article de fond, de substance et six de concordance. Quant au
dernier article, il ne prévoit que la date d'entrée en vigueur du
projet de loi. Que s'est-il donc passé? Il s'est passé que ce
projet de loi semble être un peu malchanceux. Il arrive toujours au
moment où il y a, semble-t-il, des problèmes en cette
Assemblée. Chaque fois, il doit écoper.
J'ai essayé de faire adopter ce projet de loi à diverses
reprises, et, chaque fois, il semble que, malgré qu'il y ait
unanimité, même le député d'Ungava, qui
connaît bien la région qui est particulièrement
affectée et qui attend ce projet de loi, sait fort bien que, non
seulement nous sommes d'accord, mais il sait également l'insistance
qu'il a mise, lui, pour que nous puissions faire adopter ce projet de loi
tellement il arrive à nous faire des reproches. Or, Mme la
Présidente, je suis sûr aujourd'hui qu'étant donné
que cette unanimité est maintenant consacrée, le
député d'Ungava ne retardera pas, je l'espère bien,
l'adoption de ce projet de loi, étant donné son insistance
à voir à ce qu'il soit adopté sans délai.
Il me l'a dit l'an dernier, je ne sais combien de fois il me l'a dit au
mois de mars. H m'a même reproché au mois de mars que ce projet de
loi n'était pas encore adopté. En commission parlementaire, il
s'est empressé encore une fois de me dire son appui et, encore une fois,
il a regretté que le projet de loi ne soit pas encore adopté.
Bien là, nous avons une chance. Nous sommes réunis ici
aujourd'hui. Nous avons une chance de le voir adopté. Il n'a qu'à
se lever et me dire "adopté". Alors, nous allons adopter le rapport et,
avec le consentement unanime, nous pouvons adopter en troisième lecture,
et cela, sans plus de délai, étant donné que ces gens
attendent et que nous sommes d'accord. Je n'ai pas à plaider tellement.
Je sais que tout le monde va concourir à l'adoption immédiate de
ce projet de loi.
Qu'est-ce que c'est d'abord? Il faut que nos gens comprennent, ceux qui
n'ont peut-être pas suivi cela. C'est que le projet de loi qui s'appelle
Loi modifiant la Loi sur la
Société Makivik modifie la Loi sur la
Société Makivik de manière à accorder à
cette société la discrétion d'établir le mode
d'élection de certains membres de son conseil d'administration. C'est
tout. On se rappellera qu'en 1975 il y a eu la signature de la Convention de la
Baie James. À ce moment, on se rappellera, qu'en vue justement des
travaux de la Baie James, afin d'assurer que toutes les personnes
intéressées puissent y participer pleinement et avoir un avenir
correspondant à l'héritage, aux traditions de chacun, on est
arrivé à cette convention où il y a eu d'importantes
sommes d'argent qui ont été versées aux autochtones de
cette région. Des sommes de plusieurs centaines de millions même.
Alors, il fallait un organisme pour administrer ces fonds. Et ça a
été cette société qu'on a appelée
Société Makivik.
Cette société avait un conseil d'administration sur lequel
siègent justement des autochtones. Il y a eu, dans la loi originale, une
procédure pour l'élection des gens au conseil d'administration.
Cette procédure a été inventée selon nos propres
traditions: traditions des Blancs, si vous voulez, qui ne correspondaient pas
aux traditions des autochtones. Les autochtones réunis du 26 au 30 mars
1985 nous ont demandé, au gouvernement du temps, d'amender la loi en
question afin que la société puisse déterminer
elle-même par règlement une procédure plus souple
d'élections au conseil d'administration de la Société
Makivik.
Ils ont l'intention d'élire ces représentants au suffrage
universel exprimé localement. La procédure qui existe
présentement a été jugée difficile d'application
par les autochtones eux-mêmes. Distances à parcourir, par exemple,
pour assister à l'assemblée annuelle; faible participation des
premiers intéressés à cette élection. Tout ce que
la loi dit: Vous avez un conseil d'administration, vous avez de temps à
autres l'occasion de nommer des gens à votre conseil d'administration;
vous allez décider vous-mêmes, selon vos traditions, selon vos
besoins, du mode d'élection. Vous voulez faire cela chez vous, dans
chacune de vos communautés, faites-le à votre goût et
faites des règlements pour que vous ayez une représentation au
conseil d'administration selon vos traditions propres. C'est tout ce que cela
dit. C'est pourquoi il y a tellement d'unanimité dans cette Chambre.
Je ne voudrais pas qu'aujourd'hui, rendu au 17 juin, il y ait encore
quelqu'un qui amène je ne sais quelle objection ou qui utilise je ne
sais quelle sorte de procédure pour nous retarder. Je fais appel
à tous ceux et celles qui sont ici pour que dans un geste noble,
responsable, nous puissions indiquer cette unanimité de la façon
la plus efficace possible, c'est-à-dire que, de l'autre
côté, le représentant officiel, le député
d'Ungava se lève et qu'il me dise tout de suite: "Je suis d'accord",
afin de passer immédiatement l'étape de l'adoption du rapport.
Cela fait un an et un mois qu'on dit qu'on est d'accord. Là, il faudrait
qu'il se lève et qu'il dise: Adoptons immédiatement le rapport
et, ensuite, l'adoption, qu'on appelait autrefois la troisième lecture,
peut se faire dans deux minutes. Cela peut se faire dans cinq minutes si on
veut lui donner le temps de le dire comme il faut, mais je ne pense pas que
l'on doive faire ce qu'on a fait depuis un an et un mois; il ne faut pas
répercuter notre malchance sur le dos de ceux qui attendent cette loi.
(15 h 20)
J'espère bien que mes appréhensions ne sont pas
fondées. J'ai toujours des appréhensions quand je vois ces gens
qui me disent qu'on retarde trop, qui nous répètent que les gens
attendent cette loi. J'ai toujours des appréhensions. Devant ces
appréhensions, avec un peu d'expérience, on est toujours
très prudent. Même si mes appréhensions ne sont pas
fondées, j'espère que ces gens, particulièrement le
député d'Ungava qui insiste pour que ce soit adopté sans
délai - il m'a reproché que cela fait un an et un mois que nous
attendons et que ces gens-là attendent ce projet de loi - ne feront pas
un "filibuster" sur l'unanimité qui s'est dégagée à
toutes les instances.
La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le ministre. Une
question de règlement.
M. Claveau: Question de règlement, Mme la
Présidente. On veut bien écouter le ministre, mais on suppose
qu'il devrait y avoir des gens de sa formation aussi qui sont
intéressés. Voudriez-vous appeler le quorum, s'il vous
plaît, Mme la Présidente?
La Vice-Présidente: Qu'on appelle les
députés. Le quorum étant, nous pouvons donc poursuivre. M.
le ministre des Finances.
M. Levesque: Alors, Mme la Présidente, afin de permettre
au député d'Ungava de se lever le plus tôt possible et de
nous dire qu'il accepte cette proposition d'adopter immédiatement le
rapport et de procéder immédiatement à l'adoption du
projet de loi, je ne retarderai pas davantage mon intervention à
l'étape du rapport. Étant donné l'insistance qu'il a mise
pour que nous puissions procéder le plus rapidement possible, maintenant
que nous avons passé suffisamment de temps à étudier ce
projet de loi, je pense que nous aurons ce que nous suggérons,
c'est-à-dire l'adoption immédiatement des deux étapes de
ce projet de loi qui fait l'unanimité.
Si ce n'était pas le cas, Mme la Présidente, je ne veux
plus entendre le
député d'Ungava dire que quelqu'un a retardé ce
projet de loi parce qu'il devra faire un mea culpa lui-même. Je le mets
en garde tout de suite contre toute autre remarque qu'il pourrait faire de ce
genre. Il a l'occasion maintenant. J'espère qu'il aura l'appui de son
parti pour l'adopter immédiatement et que nous passions ce soir à
la sanction par le lieutenant-gouverneur de ce projet de loi. Ainsi, les gens
que nous voulons aider, les autochtones, les Inuit en particulier, pourront
profiter de cet amendement et procéder dans les meilleurs délais
à ce nouveau mode d'élection du conseil d'administration que ce
projet de loi, que cet amendement pourra fournir. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Finances. M.
le député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, Mme la Présidente. Effectivement, c'est
avec énormément de plaisir que j'interviens sur ce projet de loi
qui, comme l'a dit le ministre des Finances, est un projet de loi très
important pour le bon fonctionnement de l'administration de la
Société Makivik, société qui a sa raison
d'être et qui, j'en suis certain, remplit son rôle au meilleur de
sa connaissance et qui pourra sûrement continuer à le jouer d'une
façon plus efficace avec l'adoption du présent projet de loi.
Il y a une chose que je n'arrive vraiment pas à comprendre. J'ai
eu beau écouter le ministre des Finances avec toute l'attention dont
j'ai été capable, et je n'arrive pas à comprendre comment
il se fait que le ministre des Finances nous accuse, nous, de vouloir retarder
un projet de loi qu'il a laissé lui-même traîner au
feuilleton pendant près d'un an avant de l'appeler pour l'adoption du
principe.
Au lieu de m'adresser des menaces et au lieu d'adresser des menaces
à l'Opposition dans le sens que, si on veut retarder l'adoption du
projet de loi, à ce moment-là, il saura bien quoi faire, il saura
bien quoi dire, il saura bien à qui envoyer la balle, je dis au ministre
des Finances qu'il aurait mieux fait, il y a un an, d'adresser les mêmes
menaces à son leader pour lui dire: Écoute, amène le
projet de loi en Chambre, il faut l'adopter au plus vite, on n'a pas de temps
à perdre avec ce projet de loi, c'est important pour les Inuit. Mais
non, le ministre des Finances ne s'est absolument pas préoccupé
de cela, jamais il n'est allé voir son leader pour lui dire: Quand
est-ce que tu amènes mon projet de loi, cela presse, il faut qu'il
arrive sur la table. Un projet de loi semblable, Mme la Présidente.
Il eut été bien facile, il eut été beaucoup
plus agréable, tant pour nous de cette Assemblée que pour les
Inuit eux-mêmes que le projet de loi eût été
adopté dès le printemps 1986, et de cette façon, ils
auraient pu déjà, dès 1987, agir en fonction de la
nouvelle loi et avoir un conseil d'administration actuellement nommé tel
qu'ils le souhaitent et tel qu'ils en ont exprimé le voeu au ministre
à la suite, d'ailleurs, de l'assemblée générale
annuelle qu'ils ont tenue à la fin de mars 1985, de laquelle
découle la résolution qui nous amène aujourd'hui à
discuter de ce projet de loi. (15 h 30)
Si on suit les étapes que le ministre lui-même a
fixées, parce que ce n'est pas nous qui avons attendu du 11 mai 1986
jusqu'au 11 mars 1987 pour appeler le projet de loi à l'adoption de
principe. Ce n'est pas nous qui l'avons voulu. Le ministre s'est donné
dix mois pour réfléchir à son projet de loi, pour voir si
c'était bien le projet de loi que les Inuit voulaient. Mais si le
ministre s'est donné ce délai, s'il croyait que c'était
important pour lui d'avoir un tel délai de près de onze mois
entre la présentation en première lecture et l'appel pour
l'adoption de principe, il s'est donné encore jusqu'au 12 juin avant de
le présenter en commission parlementaire pour l'étude article par
article. C'est plus de deux mois, c'est trois mois, devrais-je dire. Le
ministre a tout le temps. Si on suit cette logique, si on suit cette
démarche, je ne vois pas pourquoi le ministre ne voudrait pas,
aujourd'hui, prendre le temps d'en discuter, de regarder une dernière
fois l'état du projet de loi avant de l'adopter.
Dans la même logique, on pourrait même dire que le ministre
devrait souhaiter que notre intervention fasse en sorte qu'il ne puisse
l'adopter cette année pour en reculer l'adoption au printemps 1988,
puisqu'il a attendu un an. On a déjà trois étapes qui ont
un an chacune: Demande des Inuit au printemps 1985; dépôt en
première lecture, printemps 1986; adoption de principe, printemps 1987
et, pourquoi pas, troisième lecture au printemps 1988? Comme cela, le
cercle serait complété et le ministre aurait pu, aux quatre
étapes différentes, maintenir sa logique d'un an de délai
et de réflexion entre chaque étape.
Le ministre arrive aujourd'hui en disant: Écoutez, si on ne
réussit pas à l'adopter, cela va être la faute de
l'Opposition. Voyons! Il faut être plus sérieux que cela.
L'Opposition, au contraire, dès le printemps 1986, il y a plus d'un an,
demandait au ministre d'appeler d'urgence ce projet de loi, parce qu'il
était important, que cela valait la peine d'en discuter, de le mettre en
application le plus rapidement possible pour le mieux-être de la
Société Makivik et, par le fait même, pour le
mieux-être de l'ensemble de la société inuit qui est
large-
ment dépendante, en ce qui concerne principalement l'application
de la Convention de la Baie James et du Nord québécois des
décisions qui sont prises par cette même société
Makivik.
On arrive aujourd'hui avec un ministre qui veut escamoter les choses,
qui nous pousse dans le dos, qui veut passer son bulldozer à la
dernière minute pour ne pas nous laisser le temps de regarder le projet
de loi dans son ensemble, dans son contexte et pour empêcher, par le fait
même, l'Opposition - du moins, c'est ce qu'il semble souhaiter - de
pouvoir fournir à la population du Québec les informations
pertinentes qui feront en sorte que l'ensemble des Québécois et
des Québécoises qui ont l'avantage et la possibilité de
nous écouter par le biais de la télédiffusion des
débats de l'Assemblée nationale puissent savoir de quoi on
traite, avoir un minimum d'idée, de compréhension du
fonctionnement de la Société Makivik, se familiariser avec la
Convention de la Baie James et du Nord québécois et, par le fait
même, pouvoir comprendre pourquoi, dans un contexte donné, dans
une situation particulière telle que celle qui est vécue au nord
du 55e parallèle, dans les communautés inuit... On peut se
permettre des règles de procédure, une façon de
fonctionner en ce qui a trait, entre autres, à la nomination des membres
du conseil d'administration d'une société, en l'occurrence, la
Société Makivik. Mais la même règle pourrait
éventuellement être élargie à l'ensemble des
sociétés qui fonctionnent en milieu inuit qui est un milieu
particulier, un milieu où il y a des difficultés qui sont
reliées à un contexte territorial précis. Peut-être
qu'on a devant nous un projet de loi qui va faire, à toutes fins utiles,
office de jurisprudence quant à la possibilité d'ouvrir le
même principe à l'ensemble des autres sociétés qui
fonctionnent dans le même territoire et qui ont toutes, elles aussi, les
mêmes intérêts, les mêmes objectifs quant à
l'avenir du développement social, économique et culturel du
milieu inuit. Le ministre voudrait que l'on prive la population du
Québec de la possibilité d'avoir l'information pertinente. Le
ministre a beau dire ce qu'il voudra, il a lui-même pris tout à
l'heure près d'une demi-heure pour nous expliquer qu'il ne fallait pas
parler du projet de loi. Bizarre, n'est-ce pas? pour un ministre qui est
pressé, un ministre qui veut, à toutes fins utiles,
empêcher l'Opposition... ou qui demande à l'Opposition de voter
sans parler. Lui-même, je suppose, doit trouver la chose
intéressante. Il doit trouver qu'il y a beaucoup à dire sur ce
projet de loi puisqu'il a pris lui-même tout près d'une demi-heure
pour nous expliquer ce que c'était, pourquoi il était
nécessaire et pourquoi il était important de voter le projet de
loi 57. Si la demi-heure ou les 25 minutes qu'il a prises sont importantes pour
lui, nous ne voyons pas pourquoi elles le seraient moins pour l'Opposition dans
ce Parlement.
Dans ce sens-là, Mme la Présidente, nous pouvons rassurer
le ministre dès maintenant car nous avons l'intention d'informer la
population du Québec sur les objectifs, sur les orientations de la
Société Makivik, sur le pourquoi de ce projet de loi, et de faire
en sorte que tous et chacun de nos concitoyens et concitoyennes sachent
à quoi s'en tenir. Lorsqu'ils entendront parler, à l'avenir, de
la Société Makivik, elle ne ressemblera pas à un monstre
un peu difficile à identifier. D'aucuns diraient un monstre du lac
Meech.
Des voix: Oh! Oh!
M. Claveau: Ils sauront à quoi se
référer.
Une voix: Un autre qui a vu un monstre.
Une voix: À l'ordre! À l'ordre!
M. Claveau: Ils sauront à quoi se référer et
ils diront: C'est bien évident, oui, la Société Makivik,
on connaît cela; effectivement, on en a entendu parler. Le ministre des
Finances, d'ailleurs, semble très intéressé par le
fonctionnement de cette société parce qu'il a pris tout le temps
en Chambre pour que l'on adopte un projet de loi qui en faciliterait le
fonctionnement dans un contexte particulier. Je crois que ce serait tout
à l'honneur du ministre des Finances de passer pour un ministre qui a
pris à coeur les intérêts des Inuit et qui a voulu aussi se
donner toute la marge de manoeuvre, toute l'élasticité possible
afin de s'assurer que son projet de loi soit bien compris dans l'ensemble de la
population québécoise. Peut-être même que, ce
faisant, il évitera certaines manifestations ou certaines
incompréhensions qui pourraient, par la suite, lui nuire dans l'exercice
de ses fonctions en tant que ministre responsable de l'application dudit projet
de loi.
Cela dit, Mme la Présidente, qu'est-ce que la
Société Makivik? La Société Makivik est une
société qui a été mise en place par le biais d'une
loi qui a été votée en ce Parlement en 1978 et qui vise
essentiellement à appliquer les résolutions ou les
résultats, si vous voulez, de ce qui ressort de la Convention de la Baie
James et du Nord québécois et qui s'adresse spécifiquement
aux Inuit du Québec. On sait que la Convention de la Baie James et du
Nord québécois est divisée en deux grandes parties.
La première partie traite de la question nordique, c'est la
Convention du Nord, avec toutes les spécificités ou toutes les
grandes orientations d'une entente territoriale et
d'une entente de répartition de biens et services et de
compensations financières pour des utilisations du territoire en milieu
inuit. La deuxième partie - les derniers chapitres -traite de
l'application de la convention dans les territoires de la Baie James, donc les
territoires des Cris du Québec. L'approche est sensiblement
différente, que l'on s'adresse au milieu cri ou au milieu inuit.
À titre d'exemple, je dirai qu'en milieu cri, dans la Convention
de la Baie James, on a défini trois sortes de territoires ou trois
catégories de terres pour lesquelles on retrouve différentes
normes et différentes modalités d'intervention des gouvernements
et des individus, des particuliers qui peuvent avoir accès à ces
territoires. On a les terres de catégorie 1 qui sont exclusivement
réservées aux autochtones cris pour les fins de leurs
développements social, culturel et économique. C'est, à
toutes fins utiles, des terres municipales telles qu'on les connaît
à l'intérieur de nos municipalités mais où il y a,
en plus, un droit d'appartenance qui se rapproche beaucoup de terrains
privés mais sans que ce soit vraiment des terres privées.
Dans cette catégorie 1, on distingue la catégorie 1A, des
terres sous juridiction fédérale et la catégorie IB, des
terres sous la juridiction du gouvernement du Québec. À la suite
de cela, on retrouve les terres de catégorie 2 sur lesquelles tous les
citoyens du Québec peuvent éventuellement intervenir en fonction
de l'utilisation de la ressource mais où il y a une exclusivité
de chasse, de pêche et de trappe pour les autochtones. Donc, il est
impossible, pour un citoyen québécois non cri, un Blanc comme on
les appelle communément sur le territoire, de même que pour tout
autre autochtone qui n'est pas de la nation crie, qui ne relève pas de
la réserve à laquelle appartiennent ces terres-là, d'aller
pêcher, chasser et trapper. Pour ce faire, ou si on veut y aller quand
même, il faut passer par un mécanisme prévu dans la
convention et qui permet aux Indiens cris, responsables de ces
territoires-là, d'émettre des permis spécifiques de
pêche, par exemple. On peut y avoir accès de cette
façon-là.
Par contre, la ressource minérale et la ressource
forestière peuvent être, avec entente avec les Cris
concernés, exploitées par des sociétés qui ne sont
pas des sociétés cries.
Enfin, on a les terres de catégorie 3 qui sont des terres sur
lesquelles tout le monde peut intervenir, des terres où l'on peut aller
chasser, pêcher, faire du prélèvement de forêt,
où on peut exploiter des mines, avoir des réserves
écologiques, faire de la protection de la faune, étudier les
petits oiseaux, etc., mais sur lesquelles certaines réserves sont faites
par rapport à certaines catégories, certaines espèces
d'animaux et de poissons qu'on ne peut pas trapper, pêcher ou chasser.
Ainsi, par exemple, dans les terres de catégorie 3, la chasse à
certaines espèces tel le renard est défendue pour un
non-autochtone. Il y a certaines espèces de poissons qui sont aussi
réservées exclusivement aux autochtones. Qu'on pense à
l'esturgeon, au corégone, des poissons dont la pêche est
réservée exclusivement aux autochtones. Ce sont, en gros, les
trois catégories de terres que l'on retrouve dans la Convention de la
Baie James, donc, en milieu cri.
Mais, en milieu inuit, il y a une différence. Il n'y a que deux
catégories de terres, les terres de catégorie 1 et celles de
catégorie 2. Là où il y a exclusivité d'utilisation
de la ressource quelle qu'elle soit pour les Inuit du Québec et les
autres terres sur lesquelles l'ensemble de la population peut intervenir. Mais,
encore là, il faut s'entendre. Quand on dit que tout le monde peut
intervenir, c'est toujours en fonction d'ententes et d'accords qui se font par
des sociétés avec des sociétés qui ont
été créées par la même Convention de la Baie
James et du Nord québécois. (15 h 40)
On retrouve dans ce sens, par exemple, le comité consultatif sur
l'environnement de la Baie James, le comité conjoint sur la gestion de
la chasse, de la trappe et de la pêche sur le territoire de la Baie
James. Enfin, il y a tout un tas de sociétés comme cela qui font
en sorte d'harmoniser ou de régulariser les relations avec les
autochtones et les non-autochtones et aussi assurer l'application globale et
entière de la Convention de la Baie James et du Nord
québécois.
En milieu cri, la Convention de la Baie James et du Nord
québécois a permis de créer le Grand Conseil des Cris du
Québec qui a son siège social à Val-d'Or, qui
représente l'ensemble des neuf communautés cries que l'on
connaît sur le territoire de la Baie James, et qui administre la partie
des compensations financières et autres qui sont données dans la
convention pour le bénéfice des Cris du Québec.
Mais, en milieu inuit, on a créé une autre
société qui fait exactement le même travail, qui a les
mêmes buts et les mêmes objectifs, qui doit administrer les fonds
qui sont donnés par la Convention de la Baie James et du Nord
québécois pour le bénéfice des Inuit, et, cette
société, justement, c'est la Société Makivik. Et la
Société Makivik a donc dans ses objectifs fondamentaux tels que
décrits dans la loi qui lui donne sa force légale, la loi qui la
solidifie et qui est d'ailleurs dans les Lois refondues du Québec, au
chapitre S-18.1, où on retrouve les objectifs de la
Société Makivik qui sont les suivants et que je vais me permettre
de vous lire, Mme la Présidente, parce que c'est important de comprendre
le contexte dans
lequel se situe ce projet de loi qui en modifie le fonctionnement.
Le premier objectif que l'on donne à la Société
Makivik, c'est de recevoir, administrer, utiliser et placer la partie,
destinée aux Inuit, de l'indemnité prévue aux articles
25.1 et 25.2 de la Convention de la Baie James et les revenus en
découlant, ainsi que tous les autres fonds. Le deuxième but de
cette société est de lutter contre la pauvreté et de
promouvoir le bien-être des Inuit et le perfectionnement de leur
instructions. Troisièmement, c'est de développer les
communautés inuit et de perfectionner leurs moyens d'action.
Quatrièmement, c'est d'exercer les autres fonctions qui lui sont
dévolues par les autres lois ou la convention. Cinquièmement,
c'est d'encourager, de promouvoir et protéger le mode de vie, les
valeurs et les traditions inuit et d'aider à les conserver.
Voilà, Mme la Présidente, une société qui a
un rôle immense, qui a donc un rôle important à jouer en
milieu inuit et qui, pour ce faire, pour pouvoir jouer ce rôle, doit
avoir des mécanismes de fonctionnement adaptés aux conditions
particulières de vie des autochtones en milieu inuit. On sait
très bien, si on se réfère à une carte du
Québec, et je suis certains que tous les députés
présents en cette Chambre connaissent très bien leur carte du
Québec, non pas uniquement celle de la vallée du Saint-Laurent
mais qu'ils sont capables de déborder un peu plus loin, que leur vision
est un peu plus ample que les simples contreforts des Laurentides que l'on a
ici pas loin sur la rive nord du Saint-Laurent et qu'ils ont
étudié attentivement la carte du Nord du Québec.
Ils ont dû comprendre qu'à partir, par exemple, du premier
petit peuplement inuit que l'on retrouve au sud sur la Baie James, donc au sud
du 55e parallèle, dans un site qui s'appelait antérieurement
Fort-George, que si on part de là et on s'en va en montant, quelques
familles inuit qui vivent là dans une population crie. Si on monte
déjà à Kuujjuarapik anciennement Poste-de-Ia-Baleine,
déjà le premier village sur la baie d'Hudson, on retrouve une
population crie et inuit mêlée, enfin, deux communautés
distinctes mais qui partagent le même territoire, la même
localité. Et on continue. On fait des étapes immenses, et on
voit, plus on monte, on s'en va vers Umiujag, le nouveau village inuit, on
arrive à Inukjuak, on s'en va vers Povungnituk et jusqu'à
Ivujivik à l'extrémité nord du Québec.
Quand on descend de là par l'autre côté et qu'on
traverse le détroit d'Hudson, on longe le détroit d'Hudson, on
descend la baie d'Ungava jusqu'à Kuujjuag, anciennement Fort-Chimo, puis
on remonte dans l'autre pointe, jusqu'à l'autre extrémité,
tout près de la Terre de Baffin, on se rend compte de l'immensité
du territoire dans lequel a à opérer la Société
Makivik. Pour ce faire, il est bien compréhensible qu'il est difficile,
à l'occasion, pour tous les partenaires, les administrateurs de cette
société qui doivent se déplacer sur un immense territoire,
d'être tous au même moment, au même endroit pour discuter des
mêmes choses. Dans ce sens, il a toujours été
extrêmement difficile pour la Société Makivik de pouvoir
former quorum, de pouvoir élire les membres de sa société,
ses administrateurs, en assemblée générale annuelle avec
quorum.
Lorsque ce n'est pas possible de le faire à une date
donnée, telle que fixée, à ce moment, on doit la reporter
à plus tard. Mais les problèmes se posent, les mêmes
problèmes de distance, de coût, de météo très
changeante, très difficile à l'occasion. Vous savez, quand vous
entrez dans un village inuit, vous savez quand vous entrez, mais vous ne savez
pas quand vous en sortez. Il est très fréquent, à
n'importe quelle période de l'année, de se retrouver
coïncé, comme on dit, de se retrouver bloqué dans un village
avec un brouillard intense et de devoir passer trois ou quatre jours à
attendre avant qu'un avion puisse venir vous chercher.
Si on considère en plus la difficulté d'accès aux
pistes qui, soit dit en passant, sont en train d'être
réparées grâce d'ailleurs à une entente
fédérale-provinciale qui a été signée par
l'ancien gouvernement... Cela, le ministre des Finances s'est bien gardé
d'en parler. L'ancien gouvernement avait signé une entente
fédérale-provinciale qui permettait de refaire l'ensemble ou la
presque totalité des pistes d'atterrissage pour chacun des villages
inuit dans le nord du Québec.
On continue ce projet. On en fait, à tous les ans, une ou deux.
Vous savez, il y a quatorze villages. C'est immense. On parle de coûts,
entre 5 000 000 $ et 7 000 000 $ pour chaque aéroport. Alors, bien des
villages devront encore pendant plusieurs années, pour les prochaines
années, se contenter de pistes de 700 à 800 pieds en gravier,
difficiles pour l'atterrissage déjà quand il fait beau, sous un
soleil radieux. Vous vous imaginez, Mme la Présidente, que, si on est
dans un brouillard où on ne voit rien, où on ne se voit
même pas le bout des pieds, il est évident qu'on ne demandera pas
à un avion d'atterrir, avec toute, sa charge, pour permettre à
ses passagers d'assister à l'assemblée annuelle de la
société. On devra la remettre à une autre date.
Je constate, étant donné l'intérêt de mes
propos, qu'il serait probablement plus intéressant pour tout le monde
que l'on ait quorum dans cette Assemblée pour que je puisse continuer
à expliquer, pour le mieux-être de l'ensemble de mes
confrères et des autres députés de cette Assemblée,
certaines
choses afin qu'ils puissent les répéter telles qu'elles
sont et non, telles qu'ils les imaginent. Quorum, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Qu'on appelle les
députés. Le quorum étant atteint, nous allons donc
poursuivre, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Je vous remercie, Mme la Présidente.
Étant donné que quelques-uns de mes collègues
députés étaient absents de cette Chambre, j'ai presque
l'intention de recommencer à zéro pour expliquer la
complexité, le contexte dans lequel se situe ce projet de loi. Mais par
respect, par contre, pour mes collègues qui ont bien voulu
écouter attentivement mes propos et qui sont toujours assis en cette
Chambre, je ne reprendrai pas. J'avise les nouveaux arrivants de s'informer
auprès de leurs collègues qui se feront sûrement un grand
plaisir d'expliquer les propos que j'ai tenus avec, je crois, suffisamment
d'éloquence pour qu'ils comprennent ce sur quoi ils vont voter le jour
où le ministre des Finances décidera finalement de nous amener ce
projet de loi pour son adoption finale, en troisième lecture. (15 h
50)
En quoi consiste exactement le projet de loi 57? Quelle est son essence?
C'est bien simple. Ce projet de loi, on l'a dit, aurait pu être
adopté, très facilement dès le début. Cela ne nous
aurait pas empêchés, soit dit en passant, de faire les mêmes
réflexions de base sur la Société Makivik, sur
l'importance de modifier certaines façons de fonctionner pour les
adapter aux conditions territoriales dans lesquelles agit la
Société Makivik. Soit! Les discours que nous tenons aujourd'hui,
les propos que j'adresse à mes collègues et à l'ensemble
de la population du Québec, je les aurais tenus l'an dernier si le
ministre m'en avait donné la chance, mais il n'a pas voulu, il ne m'a
pas donné la chance de le faire dès le mois de juin 1986. Alors,
c'est aujourd'hui qu'il faut le faire et c'est aujourd'hui que nous allons le
faire, n'en déplaise au ministre et à ses collègues, ses
collègues ministériels, j'entends, parce que je sais que ceux de
l'Opposition sont tout à fait d'accord avec le fait qu'on prenne le
temps de bien expliquer l'essence du projet de loi et le contexte dans lequel
il se trouve.
Je demanderais à mes collègues de l'aile
ministérielle de faire attention pour bien comprendre ce sur quoi ils
vont voter et d'écouter mes propos au lieu de se chuchoter à
l'oreille. Je crois qu'il est important de dire que le projet de loi 57 a, dans
son essence, une seule raison d'être, soit de modifier l'article 26 de la
loi S-18.1, Loi sur la Société Makivik. L'article 26 est
l'article de cette loi qui donne les pouvoirs réglementaires de la
société et qui dit que "sous réserve des dispositions de
la présente loi, les règlements de la société
peuvent prévoir: a, b, c, d, etc." Il y a toutes sortes de
règlements que la société peut faire.
Le projet de loi 57 ajoute un pouvoir réglementaire à la
société et lui donne le droit de réglementer au paragraphe
h. Je lis le libellé de l'article 6, paragraphe h, du projet de loi 57:
"le moment où a lieu l'élection des membres du conseil
visés à l'article 18 et la manière de les élire;
dans ce cas, les règlements doivent prévoir les règles
applicables pour combler une vacance au poste de l'un de ces membres et le
moment où débute le mandat de ces membres." Voilà
l'essence du projet de loi 57, qui est d'ajouter ce pouvoir
réglementaire, d'identifier les modalités selon lesquelles on va
procéder pour nommer les membres du conseil d'administration et, par le
fait même, les remplacer au cas où il y en a un qui fait
défaut, ce qui est toujours possible, vous le savez comme moi. On dit
quand et comment va commencer le mandat de ce membre qui aura été
nommé selon les dispositions qui auront été prises par la
société elle-même, laquelle aura exercé son pouvoir
réglementaire là-dessus.
Le reste du présent projet de loi, ce ne sont que des
applications ou des modifications des différents articles de la loi de
base, la loi créant la Société Makivik, qui font en sorte,
par les dispositions prévues à l'article 26, paragraphe h, la
nouvelle réglementation, qu'il accorde à la
société, que celle-ci puisse se fondre dans les articles de loi
correspondants. On modifie ainsi différents articles de loi qui
prévoyaient déjà un mécanisme pour
l'élection des membres du conseil d'administration de la
société, ainsi que leur remplacement, la date, l'heure et les
modalités selon lesquelles ils commençaient à exercer
leurs fonctions en tant qu'administrateurs de la Société
Makivik.
Voilà l'essence des propos ou du contenu du projet de loi 57.
C'est un projet de loi qui n'est pas très compliqué, certes,
mais, on l'a vu, on a raison de se méfier. On se souviendra, entre
autres, que dans un autre projet de loi de deux ou trois articles
présenté par le ministre des Finances, le printemps dernier, on a
constaté qu'il y avait anguille sous roche et qu'on avait tout à
fait raison de se donner le temps de réflexion nécessaire pour
bien le comprendre et savoir sur quoi on allait voter. N'eût
été de la vigilance de l'Opposition, il est fort probable que des
choses auraient été votées sans même qu'on s'en
rende compte et la population se serait vue prise dans des situations
imprévues. Cela aurait été voté de façon
anodine par le biais d'un projet de loi de deux ou trois articles.
Voilà pourquoi nous croyons, nous de l'Opposition, que nous
devons prendre tout le
temps nécessaire afin de bien situer le projet de loi, même
s'il n'a que huit articles, pour comprendre l'importance de son application et
pour dire, après l'avoir étudié, après l'avoir
compris, après avoir réfléchi sur les modalités
selon lesquelles il va s'appliquer, que, finalement, ce n'est pas un mauvais
projet de loi. C'est un projet de loi qui a été demandé
par les Inuit eux-mêmes. Il est probable, à la suite des propos
que vont tenir mes collègues là-dessus, que l'on appuie le
ministre pour que les Inuit puissent bénéficier, le plus
rapidement possible, des effets bénéfiques que pourra leur donner
l'application dudit projet de loi. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député
d'Ungava. M. le ministre des Finances, votre intervention de cinq minutes.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: Mme la Présidente, en vertu des dispositions
de l'article 253, je veux exercer ce droit.
Je ne peux laisser passer les remarques que nous venons d'entendre sans
apporter quelques précisions. Premièrement, le
député d'Ungava a dit que j'avais utilisé 30 minutes et
que j'avais ainsi retardé les travaux. Or, j'ai vérifié
avec le greffier adjoint, j'ai pris quatorze minutes. Deuxièmement, le
député d'Ungava vient de faire la preuve de ce que
j'appréhendais. Le discours qu'il vient de faire a été le
refus systématique de donner un appui à l'adoption
immédiate de ce projet de loi. Il a dit qu'il avait déjà
été retardé.
Je peux renchérir en disant simplement que la demande a
été faite au mois de mars 1985, huit ou neuf mois avant que nous
soyons au pouvoir. Cela a été fait sous l'ancien gouvernement.
Pendant tout ce temps, rien n'a été fait. Nous avons posé
des gestes. Voici qu'à cause de circonstances apparentées
à celles que nous connaissons présentement, où
l'Opposition a voulu "filibuster" - ce n'est pas la première fois qu'on
"filibuste" dans cette Chambre. Mme la Présidente, c'est sur ce projet
de loi, j'ai dit qu'on était un peu malchanceux et qu'on arrivait
toujours dans des périodes où cela "filibustait", il me semble
encore qu'on "filibuste" aujourd'hui. Là, c'est sur les dos des
autochtones, sur le dos des gens justement que ce député veut
défendre. Il utilise - je pense bien qu'il n'est pas fier de cela -ce
genre d'obstruction reliée... II l'a dit lui-même, cela a sorti
spontanément lorsqu'il a parlé du monstre du lac Meech. On s'est
aperçu que ce qu'il avait à l'esprit justement, c'était
cette obstruction qu'on devait faire sur le dos de qui que ce soit, même
des autochtones du Nord.
On doit faire l'obstruction à un accord constitutionnel
accepté par la très grande majorité de la population du
Québec. Je ne dis pas si c'était faire de l'obstruction sur
quelque chose qui n'était pas voulu par la population mais sur quelque
chose qui est voulu par la population du Québec dont la population du
Québec est fière. On veut, à ce moment, éviter
d'aborder l'accord du lac Meech et éviter même d'adopter des
projets de loi voulus et qui font l'unanimité, non pas seulement du
côté ministériel mais qui font l'unanimité, de
l'aveu même du député d'Ungava, de l'Opposition et donc de
l'ensemble de l'Assemblée nationale. C'est présentement ce qu'il
est en train de faire au lieu de parler du conseil d'administration. Il l'a dit
lui-même qu'il ne s'agissait que d'un seul principe, d'une seule raison
d'être, c'était de permettre un changement du mode
d'élection au conseil d'administration. De quoi a-t-il parlé? Il
a parlé de la chasse aux renards, Mme la Présidente. Il a
parlé des catégories des terres chez les Cris, des
catégories chez les Inuit. II a parlé de tout et presque pas du
projet de loi sur lequel il est d'accord. (16 heures)
Je voulais au moins que la vérité ait ses droits et je dit
qu'à ce moment-ci, il a au moins la franchise de dire à
l'Assemblée nationale: Je suis en train de faire quelque chose qui me
répugne mais par solidarité pour le parti séparatiste dont
je fais partie, je ne veux pas souscrire au Canada, je vais donc prendre tous
les moyens, même ceux-là, même ceux qui sont contre les gens
que je représente, que je défends, je vais faire cela pour
m'associer à ces gens qui ne veulent pas d'un accord constitutionnel qui
a été gagné par la force du Québec, de son
gouvernement, de son premier ministre. On n'aime pas cela, de l'autre
côté, et pour le prouver, pour arriver à ses fins
partisanes, on est en train de dire non aux autochtones pour quelque chose
qu'ils attendent depuis déjà trop longtemps.
Je voulais simplement faire cette remarque, Mme la Présidente,
avant de reprendre mon siège.
M. Claveau: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Est-ce que vous croyez, Mme la Présidente, que
l'intervention du ministre portait sur le fond du projet de loi 57?
La Vice-Présidente: M. le...
M. Lefebvre: Je pense que vous avez compris que la question de
règlement n'en était pas une, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Là-dessus, je suis prête
à reconnaître le prochain intervenant. M. le député
de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. J'entends le
ministre, de l'autre côté, dire que je suis contre les
autochtones. Ce n'est pas vrai, Mme la Présidente, voyons donc. Je
voudrais bien entendre le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue dire un mot, on ne l'entend pas. C'est
évident que je pourrais entendre le député de Viger, mais,
pour lui, en plein centre de Montréal, il n'y a pas beaucoup d'Inuit,
d'Améridiens et autres. En conséquence, c'est évident
qu'il ne prendra peut-être même pas son droit de parole. Il ne
m'écoute pas et, tout à l'heure, il applaudissait à vos
paroles sans avoir écouté. Je parle et je pensais qu'il
réagirait, mais comme il ne m'écoute pas, il ne réagit
pas.
Je dois vous dire que, ce matin, pour donner un exemple de ce que sont
les applaudissements béats des membres de l'Assemblée nationale
du côté ministériel, quand la ministre de la Santé
et des Services sociaux a annoncé qu'elle faisait en sorte que les CLSC
soient continués dans tout le Québec, qu'il n'y avait pas de
problème, que tout allait bien, que le rapport qui avait
été fait par celui qui avait mis en marche les CLSC, que tout
allait bien... Qu'est-il arrivé? Le député de Viger, au
nom des gens de son comté, dans Saint-Léonard, a
été obligé de déposer une pétition demandant
que les services soient donnés.
M. Lefebvre: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, depuis le début de
l'intervention du député de Laviolette, est-ce que vous avez
entendu le moindre propos qui a une relation avec la Loi modifiant la Loi sur
la Société Makivik? Sinon, pourriez-vous, s'il vous plaît,
ramener le député à la pertinence? Je comprends qu'on est
en train de faire toutes sortes de démarches sur n'importe quoi, mais la
pertinence...
M. Jolivet: Mme la Présidente, sur la question de
règlement.
La Vice-Présidente: J'ai très bien compris votre
question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement. Maintenant,
sur la même question de règlement, je vais reconnaître le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Effectivement, je
parle du sujet, je donne des exemples de la façon dont on traite un
sujet. L'exemple que je donnais, si je n'ai pas le droit de prendre les
exemples que je veux, je voudrais bien savoir quelle sorte d'exemple je vais
prendre. Je donnais un exemple pour dire que, lorsque nous n'étudions
pas à fond un projet de loi, on risque d'arriver aux résultats
qui sont là. Un autre exemple de ce que je vais dire, et c'est comme
critique de l'Opposition en matière d'éducation primaire et
secondaire, quand le ministre de I'Éducation nous a apporté un
projet de loi de quatre articles justement sur les gens du Nord, le
député d'Ungava était avec moi en commission
parlementaire. Qu'est-il arrivé? Le ministre de l'Éducation,
à la suite de nos revendications, de nos demandes, a été
obligé de retirer son projet de loi, de le réécrire et de
revenir non pas avec quatre articles, mais avec huit articles.
Donc, le but que nous recherchons, c'est que les gens de
l'Assemblée, lorsqu'ils auront à discuter et, j'espère,
à en parler -si ce n'est pas ici, parce qu'ils n'ont pas l'air à
vouloir en parler, du moins à l'extérieur - qu'ils en parlent en
connaissance de cause parce qu'on aura l'occasion de regarder, ici à
l'Assemblée nationale, l'ensemble du projet de loi.
Je dois vous dire Mme la Présidente, que les
députés de l'Assemblée nationale doivent se prononcer sur
un projet de loi qui a fait l'objet d'un dépôt, et le ministre en
a fait mention tout à l'heure en disant qu'il était
demandé depuis 1985. Ce que le ministre des Finances oublie, c'est
qu'effectivement une demande peut être faite, mais avant que cela ne
devienne un projet de loi, il faut faire les études appropriées,
il faut demander aux gens qui ont participé, il faut demander aux gens
de la législation de préparer un projet de loi. Or, il est
arrivé, en cours de route, une élection. Il était donc
évident que nous laissions à l'autre gouvernement le soin de
continuer, comme nous l'avions fait en 1976, ce qui avait été
laissé en plan, ce qui est normal en démocratie.
Il n'y a rien à vouloir se faire un peu le porte-parole de gens
qui disent: Ils n'ont rien fait à l'époque. Ils n'ont rien fait,
eux non plus, parce qu'ils ont déposé le projet de loi en mai
1986. On se retrouve un an plus tard, en 1987 et le ministre dit que le projet
de loi qui est devant nous avait fait l'objet de discussions lors de
l'étude de principe et en commission parlementaire et nous sommes rendus
à l'étape de la prise en considération du rapport... On
nous dit que ce n'est pas grave, qu'il fallait prendre le temps et,
aujourd'hui, le ministre, en commençant son intervention, vient nous
dire: II faudrait le passer vite maintenant. Quelle est la raison qui l'oblige,
aujourd'hui, à aller vite dans un projet qu'il a déposé il
y a déjà un an, qu'il
a eu l'occasion d'appeler à l'Assemblée nationale et qui,
pour des raisons qui lui appartiennent, n'a pas été appelé
par le ministre en place?
Aujourd'hui, il nous présente le projet de loi. Il dit: II
faudrait que vous l'étudiiez rapidement et il ne faudrait pas que vous
parliez là-dessus, il ne faudrait pas que vous disiez un mot. Il
faudrait que les gens de l'Opposition se taisent. Jamais! Si on a des choses
à dire, on va les dire.
Qu'est-ce que le projet de loi indique? C'est une loi qui modifie la Loi
sur la Société Makivik. Les buts, les objets
précisés dans le projet de loi sont recevoir, administrer,
utiliser et placer les parties destinées aux Inuit de l'indemnité
prévue aux articles 25.1 et 25.2 de la Convention de la Baie James et
des revenus en découlant ainsi que tous les autres... C'est un des
principes. Je pourrais en parler. Il y en a d'autres, mais je vais retenir
celui-là. J'ai eu l'occasion, avec mon collègue d'Ungava, de
discuter de cela lors d'une autre commission parlementaire qui avait trait
à la Loi sur les terres du domaine public. Il a fallu que mon
collègue, avec les avocats représentant les Inuit, fassent les
représentations, que je l'appuie, ainsi que mon collègue de
Jonquière qui était présent à la commission, pour
qu'enfin, le ministre l'accepte dans le projet de loi 102. C'est cela
défendre les droits et les privilèges d'un groupe qui, avec le
ministre actuel de l'Énergie et des Ressources avait, en 1975-1976,
signé la Convention de la Baie James. On ne voudrait pas, aujourd'hui,
qu'on parle de cela et qu'on dise que ce qui vient de s'opérer, c'est
une façon de permettre à ces gens l'obtention des pouvoirs
décrétés par la Convention de la Baie James,
qu'aujourd'hui, on ne prendrait pas le temps de l'expliquer pour dire au monde:
Écoutez, c'est important. C'est une chose qu'ils ont demandé,
c'est une chose avec laquelle nous sommes d'accord. C'est ce que mon
collègue a voulu dire tout à l'heure. Il était d'accord
avec le principe. Lui aussi désire qu'ils en profitent le plus vite
possible, mais pas à n'importe quelle condition, pas dans des conditions
où les gens vont vouloir nous bousculer pour l'étudier et faire
en sorte que, finalement, on se retrouve devant un projet de loi qui pourrait
susciter des problèmes lors de son application.
Ce que nous recherchons, c'est qu'il y ait le moins possible de
difficultés lors de sa mise en application. C'est dans ce sens que nous
intervenons cet après-midi. Mes collègues, s'ils le
désirent, le feront. J'espère que les gens de la majorité
ministérielle le feront, parce qu'il me semble, qu'effectivement, ils
ont intérêt à s'assurer que le projet de loi, dans l'un des
buts que j'ai soulignés soit le meilleur possible. Ce projet de loi ne
contient pas de nombreux articles; il n'en contient que huit, mais il traite de
la modification apportée à la Loi sur la Société
Makivik quant à la discrétion à accorder à cette
société pour établir le mode et le moment
d'élection de certains des membres de son conseil d'administration. Cela
permet à ces gens de pouvoir agir en conformité avec une loi qui
vient permettre ces modalités d'application, ces modes de
fonctionnement, ces moments où les élections peuvent... On
connaît le territoire, ce n'est pas un territoire facile. Je l'ai
vécu lors de ma première élection dans le territoire de ma
Haute Mauricie où les gens n'ont même pas été
capables de voter parce qu'une tempête de neige s'est
élevée. Il a fallu accepter les résultats parce que
personne n'est allé voter. Pourtant, il y avait un "poll", mais ils ne
peuvent pas voter le lendemain. Que voulez-vous que je vous dise? Dans ces
circonstances, il faut avoir des modes d'élection qui sont
peut-être différents de ceux que l'on connaît sur les
territoires de Québec et de Montréal. (16 h 10)
C'est dans ce sens que j'interviens aujourd'hui. D'autres auront
l'occasion de prendre d'autres parties de ce projet de loi et de les expliquer
comme il faut pour que les gens du pouvoir, s'ils n'ont pas l'intention de
parler, s'ils n'ont pas le courage de parler, s'ils n'ont pas les "guts" de
parler, au moins comprennent ce que veut dire le projet de loi et sachent sur
quoi ils vont voter. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette.
M. le ministre des Finances, votre intervention de cinq minutes.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: Mme la Présidente, en vertu des dispositions
de l'article 253, je veux exercer ce droit. Même si vous me dites que
j'ai cinq minutes, madame, je n'ai pas l'intention de les prendre étant
donné le peu de substance sur laquelle j'ai à commenter.
En effet, le député de Laviolette a tout simplement
évité de parler du projet de loi. Il a dit - et c'est presque
prophétique, c'est quelque chose de dramatique, c'est quelque chose
qu'il a voulu presque éternel -ceci: Si on a quelque chose à dire
sur cette loi, on va le dire. Et, immédiatement, il se met à
parler non pas du projet de loi 57, mais du projet de loi 102, et là, il
parle du ministère de l'Énergie et des Ressources. Jamais aucune
considération sur le projet de loi, à peine quelques mots,
étant donné qu'il a passé les quelques minutes qu'il avait
à sa disposition pour parler du retard à adopter le projet de
loi.
Or, Mme la Présidente, lui et celui qui
a parlé avant lui, le député d'Ungava, soit les
deux - l'un est aussi coupable que l'autre; l'un a pris les 30 minutes
auxquelles il avait droit, l'autre les dix minutes auxquelles il avait droit,
mais les deux sont exactement dans le même sac - au lieu de dire qu'ils
adoptaient le projet de loi, au lieu de coopérer, au lieu de s'assurer
qu'on pouvait sanctionner ce projet de loi dans quelques minutes, ont
préféré participer à un genre de "filibuster", et
ce n'est pas terminé, Mme la Présidente. Qu'est-ce que les
remarques du député de Laviolette ont ajouté au dossier?
Voulez-vous me le dire, Mme la Présidente? Absolument rien. On ne fait
que poursuivre ce genre de petit "filibuster" qui est fait encore une fois sur
le dos de ceux qu'on prétend défendre, les autochtones du
Québec. Bonne chance, continuez dans l'Opposition; vous allez y rester
longtemps.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des
Finances.
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. J'apprécie
beaucoup l'humour du député de Bonaventure et ministre des
Finances. Il accuse l'Opposition de faire de l'obstruction. Pourtant, on a
l'impression, à voir comment on procède, que c'est lui qui est en
train de faire un "filibuster". Il utilise systématiquement son droit de
réplique de cinq minutes. Alors, il faut savoir qui joue à quoi.
Je trouve cela intéressant.
Il a beaucoup d'humour et on le constatait au moment où il
présentait le projet de loi 57 dont on se rappellera que l'objectif est
de modifier la Loi sur la Société Makivik de manière
à accorder à la Société Makivik la
discrétion d'établir le mode d'élection de certains
membres de son conseil d'administration. Là où je trouvais que le
ministre avait de l'humour, c'est quand j'ai relu les propos qu'il tenait au
moment où il déposait son projet de loi. Je me permets de citer
les propos que tenait le ministre au moment où il déposait son
projet de loi. Il disait: "Le projet de loi facilitera aux Inuit l'exercice
d'une véritable démocratie sans que cela comporte d'incidences
financières pour le gouvernement du Québec." Il poursuivait: "Je
réaffirme la volonté du gouvernement d'accorder aux
communautés amérindiennes et en particulier aux Inuit l'autonomie
légitime qu'ils revendiquent dans la gestion des institutions qui sont
le reflet de leur culture et de leur façon de vivre."
C'était dire beaucoup de choses exclusivement pour expliquer une
modification à la loi qui relève du sens commun. En effet,
comment établir dans une loi qu'il ne neigera pas une telle
journée parce qu'on a décidé de tenir l'assemblée
générale de la Société Makivik? Nul doute que les
rédacteurs du projet de loi et de la Loi sur la Société
Makivik n'avaient pas souvent fréquenté le Grand-Nord. Quand, par
ailleurs, le ministre nous dit que c'est pour permettre l'exercice de la plus
grande autonomie des sociétés inuit et amérindienne, je
trouve qu'il exagère un peu, ça relève simplement du sens
commun. Au cours des années, on a éprouvé tellement de
difficultés à tenir les assemblées générales
aux dates et aux heures dites qu'on a trouvé beaucoup plus intelligent
et beaucoup plus pratique d'apporter la modification au projet de loi. Je dois
dire cependant que c'est une modification importante et intéressante
pour cette société.
Le ministre a de l'humour quand il nous accuse d'être responsables
du fait que ce projet de loi risque de ne pas être adopté au cours
de la présente session. J'ai demandé tout à l'heure au
greffier de sortir le nombre d'heures de séances de la session d'automne
1986 où on avait siégé. On sait que normalement c'est six
heures par jour, trois jours par semaine et les trois premières semaines
on a perdu presque neuf heures parce qu'on n'avait pas de menu
législatif. Pourtant, le projet de loi était
déposé. Pourtant, le ministre aurait pu, en l'absence de menu
législatif, dire: C'est tout à fait l'occasion et le temps, je
vais sortir mon petit projet de loi, le déposer et voilà! il va
être adopté. Il serait déjà en vigueur depuis
l'automne dernier, depuis le mois d'octobre dernier.
Je le trouve très amusant. Je trouve qu'il a beaucoup d'humour
parce que la semaine dernière on a passé plusieurs heures
où on réunissait les commissions parlementaires, quatre
commissions parlementaires, la Chambre ne siégeait pas tout simplement
parce qu'on manquait encore de menu législatif. Je me demande si, pour
le ministre, c'était un projet de loi aussi important qu'il veut nous le
laisser voir. Je pense qu'il a été négligent et
aujourd'hui, pour s'expliquer, pour faire passer un peu sur la
responsabilité des autres cette négligence, il accuse
l'Opposition de faire de l'obstruction systématique. Je trouve qu'il a
beaucoup d'humour.
Il serait peut-être intéressant, Mme la Présidente,
un peu comme l'ont fait mes collègues précédemment,
d'expliquer la composition du conseil d'administration et un fait que je trouve
intéressant à signaler. Il est prévu que le conseil
d'administration de la Société Makivik sera composé d'au
moins 17 personnes et d'au plus 25 personnes. Parmi ces personnes, il
était prévu que deux membres représenteraient l'un le
gouvernement fédéral et l'autre le gouvernement du Québec
et que cette mesure était en vigueur
au terme de la loi jusqu'au 31 octobre 1985. Cependant, ces personnes
pouvaient rester en fonction jusqu'à deux ans plus tard. On constatera
que ces personnes ne sont plus en poste pour une raison très simple. Les
Inuit ont estimé qu'ils étaient capables de gérer seuls
leurs affaires et qu'ils étaient assez adultes pour le faire. J'imagine
que quand on est assez adultes pour gérer une société
aussi importante, qui a des responsabilités aussi grandes, un
portefeuille aussi important, ils sont capables de décider
également à quel moment il est préférable de tenir
les assemblées générales.
Ce qu'il est important de se rappeler également par rapport
à cette composition, c'est qu'au moment où l'on se parle, il y a
actuellement quatorze communautés inuit qui ont un représentant
au conseil d'administration dont celle d'Inukjuak. Cependant, il y a deux
villages dissidents qui ne sont toujours pas membres de la
société, Ivujivik et Povungnituk, parce qu'ils n'ont pas
ratifié l'entente de la Baie James
La modification à la loi concerne les membres autres que les
représentants des différentes communautés. Cette
société est extrêmement importante. Tout à l'heure,
mes collègues ont rappelé les principaux objectifs de la
société. J'aimerais qu'on revienne un peu sur les pouvoirs de
cette société et on pourra constater qu'ils sont relativement
importants. (16 h 20)
En effet, la société peut mettre de côté,
transférer à une ou plusieurs sociétés des
portefeuilles détenus par elle à part entière ou à
des corporations à capitaux spéculatifs qu'elle détient
à part entière, constituées par une loi spéciale du
Québec; aider à la création, au financement et au
développement d'entreprises, de ressources, de biens et d'industries
appartenant aux Inuit; mettre en oeuvre, développer et encourager les
occasions de participation des Inuit à l'expansion économique de
leur société grâce à leurs talents et leur capital;
investir dans les valeurs mobilières de toute corporation
propriétaire de biens ou engagée dans des entreprises directement
reliées aux intérêts économiques ou autres des
Inuit; mettre de côté ou transférer à une ou
plusieurs corporations détenues par elle à part entière ou
entièrement contrôlée par elle, constituées par une
loi spéciale du Québec. Et un certain nombre d'autres
pouvoirs.
S'ajoute à cela, puisqu'il est important de le rappeler, que la
société - on parle d'utilisation des actifs - et les
entités légales, c'est-à-dire les entreprises, les
industries, les corporations légales visées aux articles 7 et 8
ne doivent utiliser leur actif qu'à des fins communautaires et pour
d'autres activités au profit général des Inuit. Cet actif
ne peut être distribué à quelque communauté inuit
que pour qu'elle l'utilise à son profit et non au profit personnel des
membres de la société.
Mme la Présidente, le projet de loi qui a été
déposé nous apparaît tout à fait légitime.
L'Opposition, on l'a dit à plusieurs reprises, est tout à fait
d'accord pour que ce projet soit adopté dans les meilleurs
délais. Cependant, je voudrais juste rappeler au ministre que, si on se
retrouve aujourd'hui, au moment où on se parle, à la veille des
vacances estivales, en train de discuter à nouveau de ce projet de loi,
en train d'essayer d'expliquer aux collègues de l'Assemblée
nationale ce qu'est la Société Makivik, c'est parce que le
ministre n'a pas fait son travail au moment où il y avait des grands
trous à l'Assemblée nationale. Il aurait pu à ce moment,
en octobre dernier, déposer ce projet de loi. Je le rappelle, cela
ferait neuf mois que la loi serait sanctionnée, donc en application. Je
vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Chicoutimi. M. le ministre des Finances, sur votre intervention de cinq
minutes.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: Mme la Présidente, je dois d'abord dire
à Mme la députée de Chicoutimi qu'au moins elle a
parlé du projet de loi. Je pense que ce que j'ai plaidé à
deux ou trois reprises cet après-midi a finalement été
reçu par quelqu'un de l'autre côté qui a pu au moins
apporter une contribution qui est beaucoup mieux que la chasse au renard du
député d'Ungava ou les remarques sur le projet de loi 102 du
député de Laviolette. Au moins, rendons hommage à la
députée de Chicoutimi pour avoir au moins répondu
favorablement à ma requête.
Mais elle a oublié l'essentiel, et elle l'a oublié parce
qu'elle fait partie d'une formation politique qui a voulu oublier l'importance
de ce projet de loi comme des autres projets de loi qui pourraient être
apportés les uns après les autres. Tous subiront le même
sort parce qu'il y a une stratégie de l'autre côté qui est
claire pour eux comme elle l'est pour nous, qu'il faut, à ce moment-ci,
ne pas adopter les projets de loi même lorsqu'on est d'accord, comme
c'est le cas présentement, parce qu'il faut mettre de la pression contre
une autre motion qui n'a rien à voir avec ceci mais qui ne fait pas
l'affaire de l'Opposition, c'est-à-dire l'accord du lac Meech et
l'accord constitutionnel qui est tellement important pour nos concitoyens et
concitoyennes.
Cela étant dit, Mme la Présidente, je dirai simplement
ceci en terminant. On peut toujours trouver évidemment qu'il y avait
un
moment au mois d'octobre ou un moment au mois de juin ou un autre moment
dans l'année où on aurait pu faire... C'est évident, Mme
la Présidente. Mais ce qui est également évident, c'est
que je ne pensais jamais qu'on se serait opposé à ce projet de
loi. J'étais sûr que, quel que soit le moment où on le
présentait, étant donné qu'il faisait l'unanimité,
qu'au bout de quelques minutes on l'aurait adopté. Mais il est
malchanceux, ce projet de loi. Il arrive toujours dans une époque de
"filibuster". Ce n'est pas ma faute. Je ne peux pas imaginer que ces gens vont
faire un "filibuster" le 17 juin, ou qu'ils vont faire un "filibuster" le
là décembre, le 16 octobre, je ne le sais pas d'avance quand ils
vont décider de faire un "filibuster". Ce pauvre petit projet de loi que
tout le monde approuve, que tout le monde veut voir adopté le plus
tôt possible, il arrive toujours dans le mauvais moment.
Si on voulait faire exception dans votre "filibuster", si vous vouliez
faire exception pour celui-ci, je comprends que vous allez avoir une
procédure qui va s'étendre... mais si on pouvait juste laisser
passer celui-ci, il me semble que vous pourriez faire votre "filibuster" et on
pourrait sanctionner celui-ci. Passer à d'autre chose. Vous
"filibusterez" le reste de vos jours, ce sera votre affaire, mais, au moins, on
adopterait ce projet de loi.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Finances. M.
le député de Bertrand.
M. Jean-Guy Parent
M. Parent (Bertrand): Ça me fait plaisir d'intervenir sur
le projet de loi 57 et je peux rassurer le ministre des Finances que je vais en
parler du projet de loi. Mais avant, on me permettra de faire une petite
parenthèse quant à la façon dont il l'a abordé. Je
ne comprends pas que le ministre des Finances, un homme d'expérience,
avec ses 30 ans de vie politique, ne comprenne pas ce qui est en train de se
passer. Quand le ministre des Finances dit à ma collègue de
Chicoutimi: Écoutez, je ne comprends pas que ce fameux projet de loi 57
soit aussi malchanceux... Cela arrive dans une période de "filibuster".
Je ne peux pas m'imaginer que... Mme la Présidente, le ministre des
Finances a bien plus d'expérience que ça. Il sait que, s'il
amène un projet de loi la dernière journée ou
l'avant-dernière journée des travaux, tout peut arriver.
Le ministre des Finances a dû apprendre ça au cours des
années. Je devrais lui dire que ce n'est pas nous qui apportons un
élément de surprise, à ce stade-ci, mais, peut-être,
peut-il demander à son collègue, le député de
Saint-Laurent et premier ministre, pourquoi, lui, apporte à la
dernière minute, à la dernière journée quelque
chose de beaucoup plus sérieux pour la société
québécoise. Si le ministre des Finances entend, à
l'intérieur du projet de loi, parler du lac Meech, on pourrait le faire
aussi. Cependant, je trouve cela un peu dommage qu'un homme aussi
sérieux que lui, un homme qui a à coeur de faire adopter ses
projets de loi puisse faire de la diversion et nous amener comme objection que,
maintenant, on est en train de faire un "filibuster".
Quant à moi, le projet de loi 57, c'est un projet de loi qui va
de soi. C'est un projet de loi qui répond à une demande. Eh oui,
c'est curieux, mais on a le droit de parler, que je sache, d'un projet de loi
avec lequel on est d'accord. On a le droit d'en parler. Si on nous accorde
cinq, dix ou quinze minutes, on doit les prendre. C'est un projet de loi qui va
dans le bon sens. Il correspond à une demande qui était faite par
la Société Makivik elle-même lors de ses audiences
d'assemblée générale. Un projet de loi qui vise
essentiellement cinq points. Parce que les derniers intervenants,
particulièrement les propos du ministre, s'en sont peut-être un
peu éloignés... Je pense que les gens qui nous écoutent
ont peut-être oublié un peu quels sont les buts, les objectifs
visés par le projet de loi 57. J'aimerais peut-être les
rappeler.
Le projet de loi 57 avait, entre autres, parmi ses buts de recevoir,
d'administrer, d'utiliser et de placer la partie destinée aux Inuit de
l'indemnité prévue aux articles 25.1 et 25.2 de la Convention de
la Baie James et les revenus en découlant ainsi que tout autres fonds.
Il a aussi comme but et objet pour la Société Makivik de lutter
contre la pauvreté et de promouvoir le bien-être des Inuit et le
perfectionnement de leur instruction. Troisièmement, de
développer les communautés inuits et de perfectionner leurs
différents moyens d'action.
M. Chevrette: Je demanderais à mon collègue de
demander l'ajournement du débat puisqu'il y a un ordre de la Chambre,
à 16 h 30, pour passer aux crédits du ministère des
Transports. Mon collègue pourra, au moment où on rappellera cette
loi, continuer son exposé.
La Vice-Présidente: M. le député de
Bertrand. (16 h 30)
M. Parent (Bertrand): Je regrette, M. le ministre des Finances,
qu'on soit obligé d'ajourner un débat aussi intéressant.
Je demanderais l'ajournement de façon qu'on puisse procéder
à autre chose. Nous y reviendrons, M. le ministre.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Je vais donc suspendre quelques
instants pour permettre à l'Assemblée nationale de se transformer
en commission plénière afin d'étudier les crédits
supplémentaires de l'année financière 1987-1988.
(Suspension de la séance à 16 h 31)
(Reprise à 16 h 32)
La Vice-Présidente: Nous allons reprendre nos travaux. M.
le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour que
l'Assemblée nationale se transforme maintenant en commission
plénière.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons suspendre
quelques instants afin que l'Assemblée nationale puisse se transformer
en commission plénière pour étudier les crédits
supplémentaires de l'année financière 1987-1988.
(Suspension de la séance à 16 h 33)
(Reprise à 16 h 34)
Commission plénière
Étude des crédits supplémentaires
pour l'année financière 1987-1988
Mme Bégin (présidente de la commission
plénière): À l'ordre, s'il vous plaît!
Concernant le ministère des Transports, je vais céder la
parole au ministre des
Transports, pour quelques remarques préliminaires.
Transports
M. Côté (Charlesbourg): Est-ce que j'ai droit
à une demi-heure Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Bégin): Le tout est d'une
demi-heure, M. le ministre des Transports, l'entente est d'une demi-heure.
Remarques préliminaires M. Marc-Yvan
Côté
M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente,
j'ai l'impression de me retrouver exactement dans la même situation
où je me suis retrouvé au moment où l'Opposition avait
sollicité la présence du ministre des Transports pour discuter de
voirie, dans un débat du vendredi matin, au lendemain du
dépôt des crédits à l'Assemblée nationale.
Toute une série de lettres des députés de l'Opposition,
partaient pour leur maire, leur apprenant la triste nouvelle que le
gouvernement du Québec avait coupé 150 000 000 $ ou à peu
près dans les budgets de construction du réseau routier. J'ai
encore frais en mémoire les lettres signées par le
député de Roberval et quelques lettres un peu moins ardues, mais
tout aussi indicatives du manque de crédits, notamment celle de Mme la
députée de Johnson.
Effectivement, nous avions discuté pendant deux heures,
répondant aux questions de l'Opposition avec le plus d'ouverture
possible, d'honnêteté possible. Nous avons, par la suite, eu
l'agréable plaisir de procéder, pendant une quinzaine d'heures,
à l'étude des crédits, alors que nous avons fait le tour
des crédits du ministère, où nous avons très
largement parlé de ce qui allait venir, ce qui, même à
l'époque, était une réalité puisque les
crédits étaient déposés. Les bases de calcul du
débat du vendredi matin qui étaient de 150 000 000 $
s'étaient réajustées avec 85 000 000 $ en moins,
évidemment, soustrayant de 65 000 000 $ que le ministre des Finances
avait eu l'amabilité de me transférer pour être capable de
faire certains travaux d'entretien routier.
J'ai bien l'impression que, cet après-midi, je vais
réentendre exactement la même cassette du député de
Joliette qui, souvent, me parle de cassettes. Il va certainement me resservir,
dans un préambule, toute cette ribambelle de chiffres qui, il faut le
dire, à certains égards, traduisent un peu la
réalité. Je n'ai jamais tenté de le nier. J'ai
l'impression que la base de l'argumentation sera certainement celle-là.
Alors, Mme la Présidente, autant commencer dès maintenant pour
qu'on puisse, le plus rapidement possible, passer à des questions
spécifiques. C'est avec le plus grand plaisir que je répondrai
aux questions du député de Joliette ainsi qu'à celles
d'autres collègues de l'Assemblée qui voudraient bien poser un
certain nombre de questions sur cet argent additionnel que le ministre des
Finances nous a octroyé.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre
des Transports. M. le leader de l'Opposition, quelques remarques
préliminaires.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Pour permettre au
ministre de se replacer un peu dans le contexte, je me permettrai de citer
quelques chiffres à partir des engagements électoraux, d'abord.
Je lui dirai qu'au seul chapitre de la construction de routes, le ministre et
son gouvernement devaient injecter 5,2 % du budget total du Québec, ce
qui voudrait dire que, dès cette année, le gouvernement
libéral aurait dû injecter 1 057 000 000 $. C'est de l'argent.
Mais comme d'habitude, on en est... Excusez-moi, c'est 1 570 000 000 $, alors
que les chiffres fournis par le ministre nous situent à environ 354 000
000 $, à peu près cinq fois moins que les annonces. C'est ce
qu'on appelle grosse annonce, p'tit magasin! Cinq fois moins, c'est juste pour
la construction de routes.
Je regarde les autres programmes. Il lui faudrait 77 000 000 $
supplémentaires uniquement pour retrouver le niveau d'investissements du
gouvernement précédent. Malgré vos engagements de 1 570
000 000 $, après deux budgets, vous en êtes encore à 77 000
000 $ de moins que ce qu'injectait le gouvernement précédent. Il
n'y a pas de quoi se péter les bretelles. Si je continue, toujours pour
rafraîchir la mémoire du ministre... Je ne comprends pas,
d'ailleurs, que le premier ministre lui-même qui était à
Rimouski dernièrement annonçait avec pompe -vous savez que M.
Bourassa, M. le premier ministre, a ce don de transformer de piètres
résultats en d'énormes victoires: Nous injectons 60 000 000 $
pour améliorer le réseau routier.
Croyez-le ou non, sur l'ensemble des programmes au ministère des
Transports, il manque encore au ministre, pas en dollars constants, mais en
argent concret, 85 000 000 $ pour atteindre le budget total du ministère
des Transports de l'ancien gouvernement, de l'ex-gouvernement, du gouvernement
qui l'a précédé. Je vous avoue... Je vais vous donner un
exemple. C'est comme si je disais à quelqu'un: Tu gagnais 400 $ par
semaine; je t'en donne dorénavant 300 $. L'année suivante, je
t'augmente de 50 $. Et, pompeusement, tu viens annoncer au salarié
à qui tu as enlevé 100 $ que tu lui en donnes 50 $. Il a encore
un manque à gagner de 50 $. C'est un peu cela qui se passe au
ministère des Transports. Je comprends que le ministre... On dit que
toute comparaison cloche. Il n'en demeure pas moins que cela a un peu de bon
sens si on fait la comparaison. (16 h 40)
Autres crédits à l'automne?
La première question que je veux poser au ministre des Transports
est la suivante: Je voudrais savoir si le ministre des Trans- ports - c'est la
première question que je veux poser au ministre - a l'intention d'aller
en crédits supplémentaires à l'automne?
M. Côté (Charlesbourg): D'abord, vous me permettrez,
Mme la Présidente, de dire au député de Joliette, qui a
parlé de pétage de bretelles, que ce n'était pas le temps
de se péter les bretelles. Le ministre des Transports a eu la
collaboration du député de Pontiac, dans ce qu'on a appelé
le rapport Middlemiss, qui a fait un constat d'une situation et qui a fait des
suggestions au gouvernement. Après des analyses très
sérieuses, élaborées, très fouillées,
endossées par ceux qui ont fait l'histoire du ministère des
Transports et qui ont fait toute cette programmation, il a été
recommandé au gouvernement du Québec d'injecter 80 000 000 $ au
cours des cinq prochaines années afin d'être en mesure de remettre
le système de réseau routier, au niveau de l'entretien, dans son
état potable, tout cela fait en conformité avec Trip/Canada.
J'imagine qu'il doit y avoir des entrepreneurs du comté de
Joliette qui ont déjà parlé de Trip/Canada au
député de Joliette et qui nous en ont parlé à nous
aussi. Donc, on l'a toujours dit et clairement dit, je l'avais dit l'an dernier
que la priorité du ministère des Transports était
l'entretien du réseau routier. On a donc réussi à obtenir
cette année 60 000 000 $, 70 000 000 $ l'an prochain et 70 000 000 $
l'année suivante, pour un montant de 200 000 000 $, ce qui est, je
pense, très respectable dans les conditions actuelles et ce qui va nous
permettre de faire un certain rattrapage dans ce domaine. Oui, dans ce domaine,
on peut se péter les bretelles parce que c'est quand même un
rattrapage assez significatif, compte tenu de ce que le rapport Middlemiss nous
révèle. Et ce, ce n'est pas sorti de l'imagination du
député de Pontiac. C'est sorti d'analyses du ministère
où, dans certains cas, alors qu'on devait intervenir aux huit ans; on
intervient aux 31 ans. Ce n'est pas d'aujourd'hui. Ce n'est pas depuis que le
Parti libéral est arrivé au pouvoir. C'est historiquement. Par
exemple, de 1970 à 1976, sous votre gouvernement 1976-1985, il est
arrivé des périodes de rareté de ressources ou de choix
budgétaires de la part du gouvernement fort différents d'un
gouvernement à l'autre. Cela se comprend et on a dû se serrer la
ceinture. Alors, au lieu de se péter les bretelles, c'était
davantage le temps de se serrer la ceinture. Cela fait toute une
différence. Dans ce sens-là, on a fait ce qu'on avait à
faire au niveau de l'entretien.
Quant à la question précise: Est-ce que le ministre des
Transports va demander des crédits additionnels ou un budget
supplémentaire au cours de l'année? C'est non. Si jamais les
autorités gouvernementales
décidaient qu'il y avait des surplus sur le plan
budgétaire et qu'elles les offraient, il y a toujours un certain nombre
de travaux qu'on pourra effectuer au cours de l'automne. On a
déjà vu poser de l'asphalte, historiquement; je l'ai même
vu en 1976, et je l'ai vu après, très tardivement à
l'automne, et cela n'assurait pas une qualité, une survie très
longue des travaux qu'on faisait. Il faut donc être en mesure d'effectuer
des travaux qu'on veut faire dans une période qui est propice pour le
faire. Je ne suis pas convaincu que si, au mois de septembre, au mois d'octobre
ou au mois de novembre, il y avait un budget supplémentaire, cela
pourrait être d'une quelconque utilité pour les travaux à
faire pour l'exercice financier qui se terminera le 31 mars. Cependant, notre
volonté est très clairement de faire en sorte que la voirie
régionale pour le budget 1988-1989 devienne la priorité de
réajustement au ministère des Transports.
M. Chevrette: En 1988-1989?
M. Côté (Charlesbourg): Sur le budget 1988-1989? On
est sur le budget 1987-1988. Donc, le budget 1988-1989. Quant à nous, le
budget de l'an prochain devrait voir une amélioration sensible du volet
voirie régionale parce que c'est là que sont les besoins les plus
ressentis, un peu partout, dans tout le Québec quant aux exigences et
aux carences des interventions du ministère, étant bien conscient
qu'au cours des deux dernières années, en particulier l'an
dernier, nous avons subi un recul assez sérieux au plan du budget, ce
que nous tenterons de rattraper dès l'an prochain.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre
des Transports.
M. le député de Joliette.
Voirie régionale
M. Chevrette: Comment expliquer, si la voirie régionale
est prioritaire, qu'il n'y ait pas la plus forte portion des 60 000 000 $ sur
la voirie régionale?
M. Côté (Charlesbourg): On ne se comprend pas. J'ai
dit que pour le budget 1988-1989, pas celui qu'on étudie actuellement,
celui de 1987-1988 où c'est l'entretien, le prochain budget, celui sur
lequel nous commencerons à travailler dès la fin de
l'été, nous ferons des efforts et la priorité de
réajustement des crédits du ministère des Transports
portera effectivement sur la voirie régionale pour ce nouveau budget que
nous aurons en 1988-1989.
M. Chevrette: Regardons celui de 1987-1988 pour 30 secondes, VI.
le ministre. Est- ce à cause des engagements de 1986-1987 que dans les
crédits de 1987-1988 il y a une aussi large portion pour la construction
d'autoroutes par exemple? Dans les crédits supplémentaires vous
mettez 12 000 000 $; pour la construction de routes régionales, 3 000
000 $, et pour la construction d'autres routes, 7 000 000 $. Je comprends que
ce sont des routes numérotées, les autres, Étiez-vous dans
l'impossibilité, à cause des programmations, à cause des
travaux, à cause de quoi...?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je pense qu'il faut
comprendre que pour les grands travaux un certain nombre de décisions
avaient été prises où nous étions liés par
ententes fédérales-provinciales et nous n'avons pas le choix que
de les exécuter, de telle sorte que l'on voit pour la 138, par exemple,
des budgets qui sont affectés pour deux appels d'offres où nous
irons très prochainement. D'autre part, le report de certains travaux de
la A5 qui étaient en attente depuis 1976, pour un réseau
autoroutier qui attendait des autorisations, fait en sorte que nous avons
dû, effectivement, dans certains cas, prévoir des sommes pour les
grands travaux et des sommes additionnelles de ce
côté-là.
Pour bien préciser ma pensée, les sommes additionnelles
qu'obtiendra le ministère des Transports pour le budget de 1988-1989
seront affectées, pas en totalité mais en priorité, au
budget de la voirie régionale parce que c'est là que le
rattrapage est à faire. Nous en sommes fort conscients et nous tenterons
de rétablir un certain nombre de choses dès l'an prochain.
M. Chevrette: Prenons le rapport Middlemiss qui est d'une grande
clarté sur ce point précis. On parle de 80 000 000 $ pour les
prochains cinq ans.
M. Côté (Charlesbourg): Par année pour cinq
ans.
M. Chevrette: Pour l'entretien. M. Côté
(Charlesbourg): Oui.
M. Chevrette: C'est bien spécifique à
l'entretien.
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Entretien du réseau
M. Chevrette: Les 60 000 000 $ de crédits
supplémentaires, je voudrais bien l'expliquer à la poulation
parce qu'on en a l'occasion, ne vont pas à l'entretien du réseau
routier. Sur ces 60 000 000 $ de
crédits additionnels il n'y a que 38 000 000 $. Si on regarde le
rapport Middlemiss qui proposait 80 000 000 $ pour l'entretien, on a 42 000 000
$ de manque à gagner par rapport au rapport Middlemiss quant à
l'entretien du réseau routier.
M. Côté (Charlesbourg): II faut faire attention
parce que lorsqu'on parle d'entretien on parle de revêtement bitumineux,
règle générale, de rechargement en gravier. On peut parler
de prolongation de contrats de chemins d'hiver pour mieux les ajuster aux
saisons que vivent les différentes régions du Québec, de
l'ajout de calcium ou de l'expérience que nous tentons cette
année concernant le lignosol dans tout le sud du Québec et en
Abitibi. Ce sont donc des sommes ajoutées à ce montant de 38 000
000 $ qui servent et qui proviennent du fonds Middlemiss mais qui ont toujours
cette vocation d'entretien.
Quant à une partie de travaux de terrassement et de gravelage que
nous faisons ainsi que le recouvrement en béton bitumineux, ça
répond à deux critères. D'abord à des routes qu'on
doit refaire parce que sur le plan de l'entretien nous avons effectivement de
la difficulté, donc il faut faire un peu de terrassement avant la pose
du béton bitumineux. C'est ce genre de travaux que nous faisons.
Deuxièmement, un point sur lequel la Régie de l'assurance
automobile a insisté puisque c'est de l'argent qu'ont payé les
gens qui paient des frais à ladite régie, c'est la
sécurité routière. Donc, il y a certains points noirs du
réseau routier qui sont encore existants et que nous voulons
éliminer. Il faut forcément faire à ce moment-là du
terrassement et du gravelage, de la correction de courbes et d'autres mesures
de ce type-là. De même que nous intervenons pour un certain nombre
de ponts qui sont dans un état un peu lamentable actuellement et qu'il
faut refaire le plus rapidement possible.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette. (16 h 50)
M. Chevrette: Mme la Présidente, le ministre est en train
de m'expliquer que l'entretien tel qu'il a été pensé dans
le rapport Middlemiss déborde le cadre du programme d'entretien tel que
c'est spécifié dans les crédits.
M. Côté (Charlesbourg): II y a peut-être un
élément additionnel que j'ai oublié, mais c'est un
élément extrêmement important. Pour cette année, le
rapport Middlemiss prévoyait 14 000 000 $ à être
affectés pour les structures à Montréal sur le boulevard
Métropolitain et certaines autres autoroutes. Nous avons affecté
cette année 10 000 000 $ à cette correction qui ne sont pas
inclus dans les 38 000 000 $ mais qui sont inclus dans les travaux de
construction. Alors, il y a donc parent très proche entre un certain
nombre de travaux qui sont: construction, entretien, mais qui sont dans cette
zone grise et qui, dans un cas, pour 10 000 000 $, étaient très
clairement identifiés dans le rapport Middlemiss.
Il y a effectivement - et on pourra le quantifier à la fin de
l'opération - quelques travaux qui n'étaient peut-être pas
dans la philosophie même du rapport Middlemiss mais qui étaient
une des exigences que voulait la Régie de l'assurance automobile quant
à la sécurité du public, de corriger certains points qui
étaient plus dangereux sur le plan de la sécurité
routière, puisque l'argent provenait de la Régie de l'assurance
automobile.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député.
M. Chevrette: Est-ce que le ministre s'engage à nous
fournir cela pour...
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
L'octroi des contrats
M. Chevrette: Merci. Mme la Présidente, j'aurais une autre
question. Le ministre, lors de l'étude de crédits, a parlé
d'un sujet qui m'avait intéressé passablement. C'est le
député de l'Abitibi qui l'avait interrogé en particulier
sur l'octroi des contrats d'asphaltage. Est-ce que le ministre a de nouvelles
directives de son ministère concernant l'octroi des contrats? Je sais
que le ministre, il me semble... Sous toutes réserves de l'exactitude
des mots mais, dans l'esprit, je ne me tromperai sûrement pas, le
ministre avait dit: Le Conseil du trésor nous incite fortement à
ne pas accepter des contrats dont l'écart est trop large entre
l'évaluation du ministère et les soumissions.
On sait qu'il y a eu des questions là-dessus par le
député d'Abitibi-Ouest. Ce qui m'intéresse de savoir,
c'est: Est-ce qu'il y a des directives maintenant d'émises? Est-ce qu'il
y a des procédures qui sont appelées à changer? Je vous
donne un exemple. Dans une certaine région, par exemple, ne serait-il
pas préférable de négocier avec des gens du milieu,
à partir de l'évaluation même du ministère, pour se
retrouver le plus près possible de l'évaluation du
ministère? Sinon, on pourrait concourir à des aberrations.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Dans le cas précis
que nous avions évoqué lors de la commission parlementaire qui
était à 132 % de l'estimation du ministère en termes de
soumissions, c'était un contrat d'au-delà de
400 000 $, donc qui allait automatiquement en soumissions publiques.
Je ne crois pas qu'il soit utile de changer cette règle parce
que, sur le total des contrats, 1986 nous témoigne très nettement
que nous avons fait les contrats à 96 % des estimations du
ministère. Donc, un portant l'autre, cela fait en sorte qu'il y a une
certaine économie.
J'ai effectivement été étonné de
l'évocation de cette possibilité lors de la commission
parlementaire. J'ai moi-même fait l'évaluation au cours des cinq
dernières années de situations comparables. Effectivement, on
s'est retrouvé avec des situations où il y a eu des contrats
à 140 %, à 150 % et, à mon grand étonnement,
même un à 190 % de l'estimation, ce qui m'a fait poser un certain
nombre de questions aux fonctionnaires du ministère pour savoir la
règle de conduite. Il n'y a pas de règle écrite.
Finalement, il y a un certain nombre de suggestions qui peuvent venir, selon la
bonne volonté de chacun des individus qui sont là et du moment,
ce qui fait en sorte qu'effectivement si on négocie sur la même
base des contrats de moins de 400 000 $ avec l'usine la plus proche, on en
arrive à des taux de 108 %, 109 %, ce qui fait que le principe
même de la soumission publique est éliminé ou des effets
recherchés, puisque tout le monde soumissionnera 108 %, 109 %. Sur le
plan historique, il y a eu des expériences de faites et cela s'est
traduit par ces résultats.
Donc, c'est très difficile. Il y a aussi une question - du moins
d'après ce que les hauts fonctionnaires du ministère me disent
-de crédibilité pour le ministère des Transports aussi
quant aux soumissions publiques, ce qui fait que, si on brise la règle
trop souvent de cet appel de soumissions publiques, on risque à ce
moment de perdre une certaine crédibilité pour les soumissions
publiques.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député.
M. Chevrette: Je partage le point de vue du ministre
là-dessus. Ce que je voudrais lui faire comme suggestion, parce que vous
êtes à la fois ministre des Transports et responsable du
Développement régional... Je ne suis pas certain, cependant, M.
le ministre, et je vous pose la question pour que vous l'étudiiez, que,
pour une marge minime, je ne parle pas de 32 %, une marge minime de 4 %, 5 %,
on ne doive pas encourager l'économie régionale. Cela m'a
toujours trotté dans la tête. Je sais que le jeu des soumissions
publiques à ce moment est connu d'avance. Bien souvent, on sait
très bien qu'à cause de la non-abondance de contrats, il y en a
qui sont plus mal foutus pour soumissionner que d'autres qui gèrent un
territoire entier.
On parlait des achats, ce n'est pas seulement au ministère des
Transports. Il y a plusieurs individus qui disent: Si on pensait prioriser la
région, pas au détriment de la collectivité
québécoise, pas avec des pourcentages aberrants, mais avec des
pourcentages maigres. Est-ce que ça commençait à
être discuté?
M. Côté (Charlesbourg): Peut-être pour
rafraîchir un peu la mémoire du député, je sais
qu'à un certain moment donné - on ne se souvient pas de tout - le
principe même de négocier avec l'usine la plus près des
travaux à être effectués, tous les contrats de moins de 400
000 $ répondait exactement à ce qu'on recherche. Cela a
été fait spécialement pour cela, pour des économies
de coûts au ministère de façon qu'on n'ait pas à
payer des sommes mirobolantes pour le transport, mais aussi d'encourager la
localisation d'usines en régions. Il y a quand même le très
gros volume de contrats qui sont effectués sous ce principe dans les
régions.
Maintenant, est-ce que c'est le plafond qui n'est pas suffisamment
élevé à 400 000 $, et qu'il faudrait peut-être le
revoir? Cela est une autre question. Mais il ne faut pas oublier non plus, si
on prend l'exemple de la grande région de Québec, qu'il n'y a pas
un contrat même en bas de 400 000 $ actuellement dans Québec
métro qui est négocié avec le plus près, mais tout
ça va en soumissions publiques parce qu'il y a déjà de la
concurrence. Le phénomène des 400 000 $ et moins joue pour
permettre à des usines de s'implanter en régions selon les prix
qui, chaque année, sont déterminés par un comité
paritaire et qui fait qu'on respecte un certain nombre de critères
donnés. Il y a des choses. À la suite de cet
événement, il y a des révisions concernant certaines
pratiques et de tracer certaines balises qui ne pourraient pas être
transgressées.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: En conclusion, peut-être, Mme la
Présidente, parce qu'il reste à peine une minute, je souhaite au
ministre et je l'incite à exiger que l'an prochain... S'il veut que
l'Opposition change de refrain, je lui suggère d'atteindre au moins
l'équivalent du budget de la dernière année du
gouvernement qui a précédé et, pour correspondre au
rapport Middlemiss, je lui suggère qu'on retrouve bel et bien les 80 000
000 $ par an pour l'entretien de la voirie régionale.
M. Côté (Charlesbourg): Mme la
Présidente, ce que je veux vous dire, c'est qu'autant de
générosité de là part du député
de Joliette serait certainement de nature, dans la mesure où il
serait comblé, à avoir certaines retombées dans le
comté de Joliette. C'est très certainement avec un
intérêt marqué que chacun des députés entend
ces propos. Je suis déjà assuré, l'an prochain, dans la
mesure où je pourrai combler les voeux du député de
Joliette, de recevoir autant de remerciements et de considération pour
cet exploit dans la mesure où je le réussirais. J'ai eu à
écouter pendant des heures la réalité d'aujourd'hui qui
était en dollars d'aujourd'hui, comme le dit le député de
Joliette, 85 000 000 $ que nous tenterons d'affecter, dans la mesure où
nous les obtenons, à la voirie régionale en particulier.
Je veux remercier le député de Joliette de toute la
sollicitude et tous les égards qu'il a pour le budget du
ministère des Transports, de sa grande compréhension de ce qu'est
le développement régional, et vous dire et dire à mes
collègues merci. Quant à vous, Mme la Présidente, de nous
avoir endurés pendant cette demi-heure qui, quant à moi a
été trop courte, quant aux échanges, je vous remercie
beaucoup.
La Présidente (Mme Bégin): Merci beaucoup. Nous
allons donc suspendre quelques minutes pour permettre aux personnes non-membres
de cette Assemblée de pouvoir se retirer.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 9)
La Vice-Présidente: M. le président de la
commission plénière.
M. Fortin (président de la commission plénière):
Mme la Présidente, je vous avise que la commission
plénière a fini de délibérer et demande la
permission de siéger à nouveau.
La Vice-Présidente: Merci, M. le Président. M. le
leader adjoint du gouvernement, quand siégera-t-elle?
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler maintenant l'article 34 du feuilleton.
La Vice-Présidente: M. le leader adjoint, je vous ai
demandé quand la commission plénière...
M. Lefebvre: Ah! Excusez-moi, à la prochaine
séance, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Je vous demanderais d'appeler maintenant l'article
34 du feuilleton, Mme la Présidente.
Projet de loi 21
Reprise du débat sur la prise en
considération du rapport de la
commission
qui en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 34 de notre
feuilleton, il s'agit de la reprise du débat qui avait été
ajourné par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux
et qui concernait la prise en considération du rapport de la commission
des affaires sociales qui avait étudié le projet de loi 21, Loi
concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le
Code civil du Québec et le Code de procédure civile. Je suis
prête maintenant à reconnaître le prochain intervenant. Mme
la députée de...
Mme Juneau: De Johnson. La Vice-Présidente:
...Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'ai
l'honneur et le plaisir d'intervenir une deuxième fois sur le projet de
loi 21. Ma première intervention sur le projet de loi a
été faite le 11 juin dernier, la semaine dernière. Je vous
ferais remarquer que c'était la journée même où la
ministre responsable déposait ici, en Chambre, lors des interventions,
les quatorze amendements aux quatorze articles que le projet de loi 21
contient. Quatorze amendements aux quatorze articles, Mme la Présidente.
La ministre les a déposés parce qu'en commission parlementaire
sinon tous, presque tous les intervenants sont venus lui dire que le projet de
loi tel qu'il était présenté était inacceptable
parce qu'il ne répondait pas aux exigences des personnes tout à
fait impliquées dans le dossier de l'adoption internationale. Je vous
ferais aussi remarquer que, lors de ma première intervention, j'avais
parlé de cette commission parlementaire, disant que la plupart des gens
qui sont venus s'exprimer ont avoué leur désillusion par rapport
à ce projet de loi et par rapport à ce qu'ils vivaient en ce qui
a trait au Secrétariat à l'adoption internationale. Les personnes
qui sont venues s'exprimer nous disaient alors que le Secrétariat
à l'adoption internationale fonctionnait très mal, qu'il
souffrait de lenteur administrative, qu'il s'arrogeait des pouvoirs normalement
dévolus aux tribunaux. Les parents adoptants s'étaient aussi
plaints de complications inutiles, de discrimination, de démotivation,
d'intrusion dans leur vie
intime, et tout cela sous la bonne grâce du Secrétariat
à l'adoption internationale. Bien sûr, Mme la ministre regardait
passer le train à ce moment-là et laissait faire ce qui se
passait au secrétariat.
Je croyais, avec tout ce qu'on avait entendu et vécu lors de
cette commission parlementaire, que dans les amendements proposés par la
ministre responsable il y aurait eu un correctif immédiat pour le
Secrétariat à l'adoption internationale, étant
donné que presque tous les intervenants étaient d'accord pour
dire qu'ils n'acceptaient pas la façon dont le secrétariat
traitait leur dossier, que cela n'en finissait plus, qu'il y avait des attentes
inacceptables.
Je croyais, comme bien d'autres de ma formation politique, que la
ministre apporterait ce correctif en amendant son projet de loi.
Malheureusement, cela n'a pas été le cas. Le secrétariat,
au moment où on se parle, n'a pas été touché de
façon directe. Je ne sais pas si Mme la ministre a l'intention
d'évaluer l'ensemble de la situation et d'apporter ce correctif
exigé par presque tous les parents adoptants et presque toutes les
associations qui sont venues s'exprimer. J'espère et je souhaite, pour
ces familles qui ont bien hâte d'avoir un enfant chez eux, que la
ministre prenne en considération les points qu'ils ont
soulevés.
Par contre, je crois qu'il est de mon devoir de vous dire que, lorsque
je suis intervenue le 11 juin dernier, j'avais dit: S'il y a des corrections
apportées, des amendements selon la demande des gens, l'Opposition
reconsidérera son appui. Il va sans dire que nous avons
reconsidéré cet appui au projet de loi, étant donné
que la ministre responsable a fait certaines ouvertures que l'Opposition
exigeait, demandait. Elle suppliait même la ministre d'essayer d'avoir
une vue plus grande sur les problèmes que vivaient les parents adoptants
et l'ensemble de la population qui est intéressée par l'adoption
internationale. La ministre responsable a consenti à des amendements, et
nous sommes satisfaits de l'ouverture qu'elle a faite par ses amendements,
même si ce n'est pas la totalité de ce que les gens exigeaient. Ce
que je trouve malheureux, par contre, Mme la Présidente, c'est que la
ministre a attendu après cette commission parlementaire pour enfin
décider qu'elle n'allait pas de l'avant avec ce projet de loi 21 qui,
à notre point de vue, n'était pas adéquat par rapport aux
demandes insistantes de la part du public et ne correspondait pas du tout
à ce à quoi s'attendaient les parents adoptants et toutes les
autres associations.
J'ai eu aussi l'impression qu'il n'y avait pas que l'Opposition, qu'il
n'y avait pas que plusieurs intervenants, il y avait même le
président, M. Philippe Godin, président des parents adoptants,
qui disait: Du moins, la volte-face de la ministre en matière d'adoption
pourrait permettre d'élargir le bassin des pays pour adopter des enfants
étrangers. Malheureusement, disait-il, on s'est donné bien du mal
pour revenir au point de départ. L'adoption sera de beaucoup
facilitée par rapport à ce que prévoyait le projet de loi
initial. Ce n'est pas moi qui ai dit cela, c'est M. Godin, le président
de la Fédération des parents adoptants. Je pense que M. Godin
doit connaître énormément son travail. Il a dû vivre
des situations tout à fait aberrantes en ce qui a trait à
l'adoption internationale. J'imagine que les commentaires d'un homme qui
connaît le dossier depuis fort longtemps doivent certainement
ébranler la ministre responsable de la situation et du projet de loi
21.
Je crois que, si la ministre avait eu une ouverture d'esprit un peu plus
large que celle qu'elle a bien voulu consentir, tout le monde aurait
été content. Vous savez, la journée même où
se tenaient les assises de la commission en vue d'apporter des amendements,
j'ai reçu des appels des gens de l'Estrie me demandant: Est-ce que tu
crois que la ministre va consentir à l'adoption privée,
c'est-à-dire est-ce qu'elle va avoir confiance en nous, les parents, qui
souhaitons adopter un enfant? Nous sommes prêts à aller dans ces
pays, à voir une personne responsable, que ce soit un prêtre, un
président d'association, une personne responsable. Si nous le faisons
nous-mêmes, est-ce que tu crois... En étant le plus près
possible de ce que la ministre souhaite avoir, est-ce que tu crois qu'elle va
accepter que l'adoption privée se fasse encore? Malheureusement, j'ai
été dans l'obligation de leur dire non, que la ministre avait
décidé qu'il ne se faisait plus d'adoptions privées tel
que les parents le souhaiteraient. Je me suis posé la même
question qu'eux. Je me suis demandé: Est-ce un manque de confiance?
Est-ce que la ministre croit que ces parents vont aller voler des enfants
à d'autres parents? Est-ce que la ministre croit que nous ne sommes pas
assez responsables pour être capables de préparer cette adoption
qu'on désire depuis de nombreuses années et en arriver à
une situation claire en respectant les lois existantes et en arrivant avec
cette offre d'adoption privée en passant par les tribunaux et en faisant
accepter tout simplement l'enfant que nous avons choisi? (17 h 20)
II y a des milliers d'enfants abandonnés dans le monde, et
peut-être un peu plus. Nous souffrons, ici au Québec, d'un manque
d'enfants, de dénatalité. Il me semble que la ministre devrait
faire, dans un acte de générosité, une ouverture plus
grande par rapport à ce qui se passe et elle devrait avoir confiance aux
parents du Québec qui croient, avec le sens des responsabilités
qu'ils ont, avec le travail qu'ils ont accompli depuis fort longtemps, qu'ils
pourraient avoir
la confiance de la ministre et la ministre pourrait accepter la
situation d'adoption privée qu'ils souhaitent. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Johnson.
Mme la ministre, votre intervention de cinq minutes.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Deux minutes, Mme la Présidente. C'est
pour l'information de la députée de Johnson. Je ne lui en fais
pas reproche; je pense qu'elle a d'autres dossiers et le dossier de l'adoption
internationale n'est certainement pas son dossier principal. Quand elle dit: On
n'a retrouvé dans le projet de loi aucune modification touchant le
secrétariat à l'adoption, il faudrait bien qu'elle comprenne que
le secrétariat à l'adoption, qui a été
créé en 1982 par l'actuel chef de l'Opposition, n'a pas
été créé en vertu d'une loi. Il a été
créé strictement en vertu d'un geste administratif et politique
à l'époque. Vous ne pouviez pas retrouver des modifications au
Secrétariat à l'adoption internationale dans ce projet de loi qui
traite strictement des aspects juridiques de l'adoption internationale. C'est
ce qui explique le silence et ce qui ne permet pas de présumer de quoi
que ce soit de la part de la députée de Johnson. Je retiens ses
suggestions pour que les améliorations qui s'imposent soient
apportées au fonctionnement du secrétariat à l'adoption.
Il ne faudrait pas tout confondre. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre.
M. le...
Une voix: C'est lui qui se lève.
La Vice-Présidente: M. le député de
Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Mme la Présidente, je voudrais commencer
mon intervention en répliquant immédiatement aux propos que la
ministre vient de tenir. C'est évident que mes collègues de ce
côté-ci et moi-même savions que le projet de loi ne
concernait pas, juridiquement, le Secrétariat a l'adoption
internationale. Je pense que le problème de fonctionnement du
secrétariat à l'adoption, qu'il ait été
créé ou non par une loi, est au coeur même des
préoccupations et des problèmes qui sont vécus par les
familles qui veulent adopter des enfants. Il s'agit, pour s'en rendre compte et
pour s'en convaincre, de prendre connaissance des propos qui ont
été tenus par les organismes qui sont venus témoigner en
commission parlementaire, par la revue de presse qui a été
constituée a cet égard, pour se rendre compte que l'une des
principales critiques qui ont été adressées au cours de
tout ce débat sur l'adoption internationale s'adressait au
secrétariat à l'adoption. Je donne l'exemple d'un article de
Martine Corriveau, dans Le Soleil, qui écrivait: "La levée de
boucliers contre le Secrétariat à l'adoption internationale a
été quasi unanime et certains ont même
réclamé son abolition pure et simple et son remplacement par un
organisme public autonome qui assisterait et informerait les couples
désireux d'entreprendre des démarches d'adoption et coordonnerait
les activités des groupes oeuvrant auprès d'enfants
domiciliés hors Québec au lieu de jouer à la police. Au
cours de la commission parlementaire, des parents ayant adopté des
enfants à l'étranger ou en attente de le faire ont
dénoncé la bureaucratie, le dirigisme et même le manque
d'humanité du secrétariat. Ils ont souligné la lenteur du
cheminement des dossiers, les délais considérables subis tout au
long du processus du fait des obligatoires interventions des professionnels des
centres de services sociaux régionaux. À cause de chinoiseries
bureaucratiques, là où il suffisait, au début des
années quatre-vingt, d'un peu plus d'une année pour remplir
toutes les formalités préliminaires à une adoption
à l'étranger, il faut aujourd'hui compter jusqu'à cinq
ans, surtout si l'on rêve d'un bébé de moins de deux ans.
Pourtant, dans les autres provinces canadiennes, les choses diffèrent
beaucoup parce que les procédures sont moins tâtillonnes."
Je pense que la ministre sait très bien que l'un des principaux
problèmes, c'est cette bureaucratie. Si elle dit aujourd'hui:
Écoutez, ce projet de loi visait simplement à clarifier ou
à organiser autrement les règles juridiques à
l'égard de l'adoption internationale, il n'y a rien qui
l'empêchait, elle, d'introduire dans ce projet de loi des
mécanismes juridiques pour donner une existence juridique au
Secrétariat à l'adoption internationale, d'une part, et pour
s'assurer d'un fonctionnement qui soit peut-être moins bureaucratique,
plus expéditif, plus adéquat et surtout qui réponde
finalement aux besoins premiers. Je ne suis pas un expert en adoption mais je
sais que, comme père de famille, si, à un moment donné, je
voulais adopter un enfant à l'étranger et que je prenais une
décision, ce que je voudrais ce serait d'avoir la possibilité de
bénéficier de cette adoption pas dans cinq ans, pas dans quatre
ans, pas dans trois ans mais le plus rapidement possible. Ce genre de
décision d'un couple d'avoir un enfant par les voles naturelles ou par
l'adoption, généralement, quand on la prend on ne décide
pas pour dans dix ans ou dans cinq ans. Si on
décide c'est parce que c'est maintenant qu'on est prêt
à vivre cette situation-là dans le couple, d'avoir un ou des
enfants additionnels.
J'ai de la difficulté à comprendre comment on peut laisser
se perpétuer un système qui a tellement de contrôles,
tellement de paperasserie, tellement de bureaucratie, de sorte que finalement
un des endroits au monde où c'est plus difficile d'adopter c'est
probablement le Québec. On va nous dire: Écoutez! le
secrétariat à l'adoption, c'est vous autres qui avez mis
ça en place quand vous étiez au gouvernement. Sauf qu'à ce
moment-là on a mis en place une mécanique et je pense que comme
dans n'importe quelle situation de ce genre-là ce qui est important de
la part de n'importe quel gouvernement qui assume ses responsabilités -
si on avait été là on l'aurait fait -c'est de
réviser la situation. C'est vous qui êtes là par le hasard
électoral, alors assumez vos responsabilités. Ce n'est pas sur
ça que les élections ont porté la dernière
fois.
Donc, cessons de faire de la partisanerie sur cette question-là.
Vous avez la responsabilité. Quel que soit le gouvernement qui a mis en
place le mécanisme, l'important c'est de faire l'évaluation, et
on constate que ça vous a pris du temps à comprendre.
Je regarde simplement les étapes qu'on a franchies avant d'en
arriver au constat que, finalement, on est obligé de retourner à
la case départ. Mois de novembre 1986: adoption du décret qui a
pour effet d'interdire l'adoption internationale dans les pays dont les
règles de droit en matière d'adoption diffèrent des
nôtres, c'est-à-dire à peu près tous les pays,
à part quelques-uns. Il y en avait moins de dix, semble-t-il, qui
restaient accessibles. Par décret on donnait une interprétation
des dispositions du Code civil, une fonction réservée aux
tribunaux. Ce n'est pas nous qui avons fait ça, c'est vous quand vous
êtes arrivés au pouvoir.
Décembre 1986: dépôt du projet de loi 139 par lequel
le gouvernement se donne le pouvoir de préciser par règlement les
modalités d'intervention en matière d'adoption internationale du
directeur de la protection de la jeunesse ou d'un organisme reconnu par le
ministre.
Le 11 mars 1987: projet de règlement concernant l'adoption
internationale. Le 2 avril dernier: dépôt du projet de loi 21
modifiant le Code civil, le Code de procédure civile et la Loi sur la
protection de la jeunesse. Au mois de mai, du 6 au 13, pendant quatre jours,
consultations particulières portant sur. le projet de loi 21 et le
projet de règlement qui avait été déposé le
11 mars. On a entendu à ce moment-là plusieurs organismes
bénévoles: Accueillons un enfant, Enfant d'Orient, Adoption et
parrainage du Québec, Soleil des nations, les Enfants de l'arc-en-ciel
Inc., Adoption internationale démocratique pour enfants, Adoption de
l'Estrie, Fédération des parents adoptants du Québec,
Association des parents pour l'adoption internationale, Association des parents
en adoption internationale du Lac-Saint-Jean, Association Mon enfant,
Association des parents adoptifs du Québec. Des avocats et certains
organismes se sont ajoutés à eux. Cela a pris tout ça pour
convaincre la ministre que finalement elle avait fait des erreurs et qu'il
était important de recommencer le travail, finalement. Ce qui va nous
permettre maintenant de voter pour le projet de loi c'est que les amendements
qui ont été apportés par la ministre font en sorte qu'on
se retrouve à la case départ. Comme l'indiquait ma
collègue de Johnson, on se retrouve à peu près à la
case départ, c'est-à-dire à peu près dans la
situation où on était avant que la ministre ne commence à
intervenir dans le dossier. (17 h 30)
Ah! bien sûr, il reste quelques éléments qui sont
différents, parmi lesquels il y a le fait que maintenant la ministre
sera la coordinatrice des démarches des adoptants, ce qui signifie un
contrôle total sur tout le processus d'adoption et ce qui signifie
à toutes fins utiles la mort des projets d'adoption privés alors
que les parents prenaient l'initiative de trouver eux-mêmes les enfants
dans les pays étrangers. Écoutez! il me semble que si j'ai les
moyens... Je connais des gens dans mon comté. J'ai même un ami
médecin qui a adopté plusieurs enfants. Il est allé
choisir ses enfants. Il les a rencontrés avant. Il y a eu un contact
humain. Cela ne se fait pas en appuyant sur le bouton d'un ordinateur. On ne
choisit pas des enfants comme on choisit des bonbons dans un catalogue ou
n'importe quel produit. Il y a une relation qui doit s'établir entre
l'enfant qu'on veut adopter et les parents. Dans la mesure où on peut
faciliter le travail des parents et dans la mesure où les parents ont
les moyens et le goût d'aller à l'étranger et de faire
eux-mêmes les démarches, où est le problème qui fait
qu'on ne peut pas faire cela au Québec? Les Québécois et
les Québécoises qui décident d'adopter des enfants ne sont
pas assez matures pour faire cela? Ils sont assez matures pour décider
d'avoir des enfants mais, si la nature ne leur permet pas d'en avoir, ils ne
sont pas assez matures pour choisir leurs enfants à
l'étranger.
Pour un gouvernement qui se disait contre l'intervention de
l'État, pour un parti qui s'est fait le champion de la non-intervention
de l'État dans toute une série de domaines privés,
franchement, c'est de l'aberration totale. On se retrouve avec un gouvernement
qui est le plus interventionniste qu'on ait jamais vu dans un secteur
qui est, à bien des égards, une matière
privée et aussi une matière humanitaire. On ouvre les portes -
très bien - à cet égard à l'immigration et on se
pose beaucoup de questions de part et d'autre de l'Assemblée nationale
et à travers le Québec sur la façon d'intégrer dans
la communauté québécoise les francophones, les nouveaux
arrivants, les immigrants qui nous arrivent d'un peu partout. Mais, s'il y a
une façon facile d'intégrer des nouveaux arrivants, des
immigrants à la communauté, c'est de faire en sorte qu'on puisse
les accueillir jeunes et qu'on puisse les accueillir dans des familles
québécoises. À ce moment, il n'y aura pas de
problème d'intégration. Ils vont devenir rapidement des
Québécois francophones ou anglophones, mais principalement
francophones. Ils vont devenir des gens d'ici rapidement parce qu'ils vont
vivre, ils vont avoir été élevés dans ces familles
québécoises. C'est cela qu'on veut, moins de bureaucratie
possible.
S'il est encore temps pour que la ministre comprenne le bon sens, et je
termine avec cela, on lui demande de réviser sa position à cet
égard. On lui demande de faire en sorte que les projets privés,
que les démarches privées des parents du Québec puissent
être permises, quitte à ce qu'il y ait une certaine
vérification, un certain contrôle de la part du gouvernement ou
d'une instance appropriée mais qu'on laisse les gens aller faire leurs
démarches là où il faut les faire et que le gouvernement
ne mette pas en place un système où finalement cela va être
une espèce de bureaucratie inhumaine et anonyme qui va faire en sorte
que maintenant on va choisir â peu près dans un catalogue les
enfants qu'on veut adopter. On aura un catalogue de photos que le gouvernement
nous présentera et on choisira nos enfants. Il me semble que ce n'est
pas la meilleure façon d'entreprendre un processus d'adoption et de
faire en sorte que dans une famille un enfant se sente bienvenu, accueilli et
aimé. Voilà un peu les commentaires que j'avais à formuler
sur ce projet de loi. Je ne prétends pas être un expert, Mme la
ministre, mais je pense que c'est une réaction...
La Vice-Présidente: En conclusion, M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: ...de quelqu'un qui a regardé cela un peu
comme la majorité des gens au Québec ont regardé ce
débat. Je m'interroge encore sur les raisons qui motivent l'attitude du
gouvernement et de la ministre dans ce dossier.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Verchères. Mme la députée de Groulx.
Mme Madeleine Bleau
Mme Bleau: Je prends la parole, Mme la Présidente, parce
que c'est un dossier qui m'intéresse drôlement. À plusieurs
occasions, des couples sont venus me rencontrer à mon bureau justement
pour parler d'adoption internationale.
Mme la ministre, en faisant adopter la loi 21 et en instaurant le
principe de l'adoption simple, je pense qu'elle a justement aidé les
couples du Québec à pouvoir adopter plus facilement un enfant.
L'Opposition dans le moment dit qu'elle va voter pour la loi. Je me demande ce
qu'elle ferait si elle était contre ce projet de loi avec tous les
arguments qu'elle nous apporte.
Elle ne voudrait aucun contrôle dans l'adoption internationale. Je
peux vous dire qu'à ce moment, on le voit aux États-Unis, on l'a
vu au Canada, il pourrait y avoir un trafic d'enfants et je pense qu'il n'y a
personne ici dans cette Chambre qui serait pour ce genre d'adoption. Il est
vrai que l'adoption internationale pourrait être un excellent moyen pour
aider le peuple québécois à remplacer, justement, notre
faible natalité et à faire de vrais petits
Québécois de langue francophone la plupart du temps ici au
Québec en adoptant ces enfants. Il faut s'assurer, quand même, que
les parents des pays où il y a des enfants à adopter ne puissent
pas, au bout de six mois, d'un an ou de deux ans, venir réclamer aux
parents adoptifs l'enfant qu'ils avaient cédé au départ.
Je pense qu'il faut s'assurer que les parents adoptants du Québec, quand
ils ont décidé d'aller chercher un enfant, soient certains de le
garder.
M. le député de Verchères nous parlait tout
à l'heure des parents qui, par voie naturelle, décidaient d'avoir
un enfant, que ça se faisait tout de suite. M. le député,
je ne sais pas s'il a plusieurs enfants. Il y a des gens qui veulent avoir des
enfants qui sont plusieurs années à attendre et qui finissent par
en avoir, ça se voit souvent. Alors, je pense qu'il faut être
capable, quand on veut adopter un enfant, d'avoir un peu de patience aussi
vis-à-vis de nos lois québécoises, avant d'avoir l'enfant
qu'on voudrait tellement adopter.
Pour moi, il y a une autre chose aussi. Quand on nous parle de
déréglementation, je pense que le parti de l'Opposition ne se
rappelle pas les années 1976 à 1985 où il y avait des
tonnes de règlements dans la province de Québec et où
chacun disait que le parti et le gouvernement qui nous régissaient,
à ce moment, venaient nous faire des lois jusque dans notre chambre
à coucher. Je pense qu'on avait un peu raison. Cela m'a
été dit à plusieurs occasions quand j'ai fait mon
porte-à-porte. Je demande juste une chose à la ministre, et je
pense que cela entrerait dans les vues aussi de l'Opposition,
c'est si on pouvait, justement, faire que le processus
d'évaluation prenne un peu moins de temps. À ce moment, les
parents seraient bien satisfaits. Je demande, moi aussi, à la ministre,
si, après l'adoption de la loi, il y a possibilité dans son
ministère qu'on s'arrange pour que le processus d'évaluation se
fasse un peu plus vite dans chacun de nos CRSSS. Je pense que ce serait une
bonne chose. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Groulx. M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci. Je suis un peu abasourdi des propos de la
députée de Groulx. J'ai eu l'occasion assez souvent d'être
avec elle à la commission parlementaire de l'éducation pour vous
dire qu'elle n'a peut-être pas l'occasion de parler souvent parce qu'au
pouvoir, lorsqu'on est à l'étude des crédits ou à
l'étude d'un projet de loi, le ministre nous dit quasiment de ne pas
trop parler. Elle aurait dû prendre cette attitude aujourd'hui. Ce
qu'elle a dit, quant à moi, à propos de mon collègue
d'abord, je trouve cela aberrant. Mon collègue, comme moi, comme
d'autres gens de cette formation politique, nous sommes conscients que, si
vraiment la députée de Groulx qui vient d'arriver seulement
à l'Assemblée nationale a eu tant de personnes dans son
comté sur l'adoption internationale, c'est qu'il y avait un
problème. C'est la logique même. Quant à moi, comme
député, cela fait onze ans et je peux vous dire qu'effectivement,
depuis un bout de temps, on a plus de cas parce que le problème n'a pas
été réglé.
Dans le temps des fêtes, lors de l'étude de certains
projets de loi, ma collègue, la députée de Marie-Victorin,
que je suis allé appuyer en commission parlementaire, avait
demandé à la ministre avec les gens qui veulent l'adoption
internationale qu'elle fasse des gestes concrets et de façon rapide. La
ministre a fait la sourde oreille à l'époque. Aujourd'hui, on
peut lui dire qu'elle commence à être sur le bon chemin. Elle a
accepté, sur un projet de loi de 14 articles, 14 amendements. La
députée de Groulx est allée dire tout à l'heure -
je ne sais pas si elle s'est fourvoyée en le disant, mais j'ai cru
comprendre qu'elle disait la vérité cette fois-là -
qu'elle a changé le principe. Vous vous imaginez, par 14 amendements
nouveaux, elle change le principe de l'adoption internationale dans un projet
de loi déposé que tout le monde critiquait.
On peut dire à la ministre: Merci d'avoir accepté la
position de ma collègue de Marie-Victorin et de ceux qui ont
participé à la commission parlementaire, d'avoir, avec les gens
qui sont les parents adoptants, fait les changements qui sont arrivés.
Imaginez- vous, si on ne les avait pas eus, ce que ça serait! Ce serait
quoi? (17 h 40)
Ce serait encore l'entêtement de la ministre sur un projet de loi
que tout le monde décrie et où tout le monde disait, à
l'époque de Noël, quant aux amendements qu'elle présentait,
que cela n'avait pas de bon sens. On a vu des gens, dans mon propre
comté, avoir des problèmes avec le Secrétariat à
l'adoption internationale. J'ai fait des interventions comme
député pour aider ces personnes qui, depuis sept mois, un an, un
an et. demi, essayaient d'avoir des choses. On leur disait: Vous avez raison,
mais, malheureusement, le règlement ne nous permet pas de vous donner
raison. C'est la réponse qu'on nous donnait. On disait: La loi ne nous
le permet pas parce qu'elle ne peut s'adapter à la loi du Brésil.
C'est ce qu'on donnait comme argumentation. On disait que parce que des
parents, au Québec, pour des raisons personnelles, avaient
décidé d'aller chercher un enfant au niveau international, ils
étaient obligés d'agir, en Haïti ou ailleurs, comme des gens
qui faisaient quasiment un rapt d'enfant. Alors que les parents là-bas
et le gouvernement là-bas étaient d'accord, c'était le
Québec qui bloquait. Le Secrétariat à l'adoption
internationale disait que notre loi n'était pas compatible avec la loi
d'outre-mer.
Je pense que le travail que nous avons fait nous permet, aujourd'hui, de
dire, comme le leader de l'Opposition le disait, que nous réservons
notre décision jusqu'au moment où nous arriverons en
troisième lecture, à la suite des amendements que la ministre, en
toute dernière minute, vient de déposer. Nous allons nous
permettre de les étudier, de les regarder comme il faut et de nous
assurer que cela répond à l'ensemble des demandes des parents
adoptants.
C'est sûr qu'actuellement cela ne répond pas à
toutes ces demandes. Un exemple, c'est que la ministre nous dit: Le
Secrétariat à l'adoption internationale est formé en vertu
des règlements. Je pense qu'effectivement la ministre a raison, sauf
qu'elle ne nous donne aucune garantie quant au règlement qu'elle va
elle-même adopter. C'est dans ce sens que nous avons dit que nous
réservions notre position et qu'actuellement, compte tenu des
amendements, d e l'étude que nous avons faite des amendements, de ce que
les gens indiquent, c'est-à-dire ceux qui sont à
l'intérieur des groupes des parents adoptants, nous allons voter pour la
prise en considération et pour le projet de loi en troisième
lecture. Nous allons le faire, mais, cependant, nous allons dire à la
ministre: Attention, nous avons besoin d'une réforme complète du
Secrétariat à l'adoption internationale; nous avons besoin de
savoir de la ministre de quelle façon elle va agir comme grande
coordonnatrice des démarches
des adoptants. N'oubliez pas que cela devient un contrôle -
là, Mme la députée de Groulx devrait rester pour
écouter ce que j'ai à dire - additionnel que la ministre va se
donner. Elle qui se targuait, dans le porte-à-porte qu'elle a fait, de
venir nous dire qu'il y avait trop de contrôles, elle oublie de dire que
la ministre vient, dans ce projet de loi, de se donner un contrôle total
sur tout le processus de l'adoption. Elle vient nous dire tout bonnement que,
depuis qu'ils sont arrivés, tout est parfait, les règlements sont
tombés. Quels règlements ont-ils fait disparaître depuis
qu'ils sont au pouvoir?
Une voix: II n'y en a pas.
M. Jolivet: II n'y en a pas, à ma connaissance, Mme la
Présidente. Ils ont mis un ministre responsable de la
déréglementation et ils arrêtent de
déréglementer. Dans tous les projets de loi que j'ai eu à
discuter jusqu'à maintenant, que ce soit sur les forêts, sur les
terres du domaine public ou n'importe quoi, ils mettent plus de pouvoirs
réglementaires. C'est de la foutaise ce que nous a dit la
députée de Groulx tout à l'heure. Ce n'est pas la
réalité que nous vivons à tous les jours; elle devrait
bien le comprendre. Les parents le disent: Les démarches qui, autrefois,
étaient personnelles vont devenir des démarches responsables dans
un processus qui va les inquiéter. C'est une décision qui va
entraîner désormais la mort totale des projets d'adoption
privés alors qu'à l'époque les parents prenaient
eux-mêmes l'initiative. On va mettre cela entre les mains d'un organisme
qui va faire, comme le disait le député de Verchères tout
à l'heure, un beau catalogue Simpsons-Sears dans lequel on va mettre des
photos d'enfants avec leur âge, leurs qualités, leurs
défauts et un ensemble de notes sur la santé de l'enfant pour
déterminer si on va le prendre ou si on ne le prendra pas. Qu'est-ce
qu'on va faire? On va permettre aux gens de suivre de leur petit doigt le
catalogue. Ce n'est pas cela. Les parents ont le droit d'aller voir l'enfant
sur place et ils ont le droit de faire certaines démarches. On les
empêche de le faire. Rien ne nous garantit qu'avec les processus qu'ils
vont mettre en place il n'y aura pas des délais indus du fait que des
parents vont attendre des mois et des mois avant d'avoir la chance de pouvoir
réaliser l'un de leurs rêves.
Tout un grand débat qui a été fait jusqu'à
maintenant, Mme la Présidente, pour arriver à quoi? À la
case de départ. C'est à peu près comme un jeu de
parchési ou comme un autre jeu que la ministre devrait connaître
comme responsable des personnes handicapées, l'escargom. On monte et on
arrive en haut et, tout à coup, on redescend aussi bas que quand on a
commencé, et il faut recommencer à nouveau parce que,
malheureusement, on a pris le mauvais chemin. On est arrivé,
après un long débat, à faire comprendre à la
ministre que son entêtement n'était pas valable et qu'en
conséquence elle devrait faire des changements, ce qu'elle a fait. Cela
nous permet maintenant de voter pour le projet de loi, mais en la mettant,
cependant, en garde contre des difficultés inhérentes à
l'ensemble des règles qui vont régir l'adoption internationale.
Je pense que c'est peut-être un indice du fait que la ministre a
certaines difficultés à suivre l'ensemble de ses dossiers. C'est
un grand ministère qu'elle dirige. On le dit partout, que ce
ministère devrait être partagé pour permettre à une
personne de s'occuper d'une fonction particulière.
Un exemple, Mme la ministre, de cela. Le premier ministre, M.
Lévesque, à l'époque, avait décidé, parce
qu'il y avait un dossier prioritaire, soit les forêts, de nommer un
ministre délégué aux Forêts, ce que le premier
ministre actuel a accepté de faire. Pourquoi? Parce qu'il y avait un
dossier spécial et important sur lequel devait porter l'ensemble de la
préoccupation d'une seule personne. Avec ce vaste ensemble des
problèmes que la ministre de la Santé et des Services sociaux a,
à tous les niveaux de son ministère, dans les CLSC, dans les CSS,
dans les centres hospitaliers, dans l'organisation des groupes pour les femmes
violentées, pour les maisons de jeunes etc., c'est trop gros pour elle.
Je pense que, effectivement, on devrait peut-être s'assurer qu'une
personne a une responsabilité en ce qui a trait à ce dossier afin
de le régler dans les meilleures conditions possible. Souhaitons que les
démarches entreprises actuellement porteront les fruits que nous
espérons.
Une chose est certaine, c'est que nous la mettons en garde, cependant,
contre les écueils qui la guettent, parce que nous croyons que les
parents adoptants devraient voir faciliter leurs possibilités en ce qui
concerne l'adoption internationale plutôt que de les voir compliquer.
Nous n'avons aucune assurance que les règlements qu'elle adoptera en ce
qui a trait au Secrétariat à l'adoption internationale n'auront
pas pour effet, encore une fois, d'emberlificoter les gens plutôt que de
les aider à obtenir ce qu'ils désirent. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux sur
votre droit d'intervention de cinq minutes.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je me demande vraiment
si je devrais me lever pour répondre au député de
Laviolette qui, de toute évidence, ne connaît pas le projet de
loi, ne connaît pas le processus de
l'adoption internationale, n'est même pas au courant des lois que
son gouvernement a adoptées alors qu'il était au pouvoir. Depuis
quelque temps, je dirais presque qu'on charrie, de l'autre côté,
sur cette notion d'adoption privée qui, tout à coup, est
abolie.
Mme la Présidente, quand le gouvernement du Parti
québécois est intervenu en 1979 pour la première fois dans
le domaine de l'adoption internationale, il est intervenu, justement, pour
contrer l'adoption privée dans le domaine de l'adoption internationale -
cela l'était déjà dans le domaine de l'adoption interne au
Québec -pour contrer les abus que cela pouvait entraîner. Quand on
nous dit: Un parent ne pourra plus jamais voir son enfant s'il s'agit
d'adoption internationale, Mme la Présidente, c'est tout à fait
erroné. Les parents qui désirent adopter suivront le processus
habituel et ils pourront le faire par l'intermédiaire d'un organisme
d'adoption internationale.
Pourtant, on nous a dit durant la commission qu'il fallait absolument
reconnaître les organismes d'adoption internationale, ce avec quoi nous
sommes d'accord. Je voudrais vous laisser savoir qu'ils ne sont pas des
organismes gouvernementaux, mais des organismes bénévoles qui
concluent une entente avec le gouvernement du Québec pour agir au nom du
ministre de la Santé et des Services sociaux et procéder à
des adoptions internationales dans les pays où oeuvrent certains d'entre
eux depuis un bon nombre d'années. Pour les parents qui voudraient aller
voir l'enfant qui leur serait réservé, il n'y a absolument aucune
objection. (17 h 50)
Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que tant l'ancien gouvernement que
le gouvernement actuel ne peuvent cautionner des adoptions privées qui
se feraient sans aucun type d'encadrement, sans aucune garantie que les choses
se font en respectant, d'une part, nos propres exigences d'adoption et
également les lois du pays où on va adopter.
Je veux simplement faire remarquer -évidemment, on nous l'a
indiqué - que c'est un "filibuster" qu'on fait dans le moment. Au cas
où vous ne le sauriez pas, ils ont décidé de voter pour le
projet de loi parce qu'ils trouvent qu'il a été
amélioré au point où on peut voter pour ce projet de loi.
Mais on doit tenir le temps; alors, on dit n'importe quoi, surtout pour ceux
qui n'ont pas lu le projet de loi. Quand on nous dit, par exemple, que le
Secrétariat à l'adoption internationale fait partie d'un
règlement, c'est absolument faux; c'est strictement une décision
administrative. Un ministre, à ce moment-là - le chef de
l'Opposition actuel -a décidé de créer un
secrétariat à l'adoption pour résoudre les fameux
problèmes d'adoption qui existaient depuis que le gouvernement d'alors
était intervenu dans le domaine de l'adoption internationale. Nous
étions d'accord avec le gouvernement, quand il est intervenu, parce
qu'on pense que le principe fondamental de l'adoption, c'est
l'intérêt de l'enfant, c'est l'intérêt des parents
adoptants et c'est aussi l'intérêt des parents biologiques. On ne
doit pas aller dans ce domaine comme on irait dans un domaine commercial.
Ce matin, j'entendais le député de Lévis qui
disait: Vous êtes pour l'entreprise privée dans l'industrie et le
commerce, soyez donc pour l'entreprise privée dans l'adoption. J'ai
rarement entendu une telle irresponsabilité à l'intérieur
de la Chambre. Si on fait le commerce du bois ou si on fait le commerce des
enfants! Et on mêle règlements, décrets, lois. Il y a eu
une seule loi de présentée, la loi 21, l'autre étant une
loi pour permettre à la ministre de faire un règlement au mois de
novembre. Nous sommes allés en commission parlementaire et maintenant on
a presque l'air de nous reprocher d'être allés en commission
parlementaire et, surtout, on nous reproche d'avoir écouté les
gens puisqu'on nous dit: C'est terrible, ce projet de loi, on ne pourra pas
adopter, vous empêchez le privé, etc.
Je sais bien qu'on n'aime pas ce que je dis, de l'autre
côté de la Chambre. Moi, je veux bien qu'ils fassent un
"filibuster" jusqu'au 1er juillet, je n'ai absolument aucune espèce
d'objection. Je devais partir en mission, mais je reste au pays. Je suis
prête à les entendre jusqu'au 1er juillet, mais je veux, quand
même, qu'on respecte certains faits. On n'a pas le droit de fausser la
vérité, de fausser les faits, sous prétexte qu'on fait un
"filibuster". Je connais cela, un "filibuster"; on m'a déjà
demandé d'en faire un à l'époque où j'étais
dans l'Opposition -plus d'un d'ailleurs - mais entre cela et fausser les faits
et dire à peu près n'importe quoi, je pense qu'il y a une marge
parce qu'on a, quand même, la responsabilité d'informer la
population correctement et non pas de créer des préjugés
ou des sentiments qui font que l'adoption internationale...
Mme Juneau: Mme la Présidente, ses cinq minutes sont
terminées, cela fait déjà...
La Vice-Présidente: Mme la députée de
Johnson, si vous l'avez remarqué, j'étais en train de me lever
sur votre intervention.
Je vous demanderais, Mme la ministre, compte tenu du fait qu'il s'agit
d'une intervention de cinq minutes, de faire une courte conclusion.
Mme Lavoie-Roux: Une très courte conclusion. Mme la
Présidente, je puis vous dire que toutes les réactions que nous
avons
obtenues depuis que nous avons terminé la deuxième lecture
et que les amendements ont été rendus publics sont des
réactions extrêmement positives, qu'il s'agisse de parents, qu'il
s'agisse d'organismes d'adoption internationale reconnus, qu'il s'agisse du
Barreau ou de la Direction de la protection de la jeunesse. Alors, je pense que
nous sommes heureux.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre.
M. le député de Roberval.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Merci, Mme la Présidente. Il est exact que la
vérité a ses droits dans cette Chambre. Elle a toujours eu ses
droits, d'ailleurs, la vérité. Il y a un élément
que je voudrais préciser dans ce que la ministre vient de nous dire. La
ministre nous dit bien candidement que l'Opposition lui reproche d'avoir tenu
une commission parlementaire. Non seulement l'Opposition ne reproche pas
à la ministre d'avoir tenu une commission parlementaire, mais elle
demande à la ministre, depuis six mois, d'aller en commission
parlementaire. La ministre a retardé indûment - j'oserais dire par
un entêtement qu'on s'explique mal - à nous accorder cela. Elle
l'a fait six mois plus tard. Elle a retardé le processus de six mois
quand on sait l'attente des parents du Québec et des enfants d'outre-mer
ou d'autres pays par rapport à cet important dossier. Mme la
Présidente, je ne fais que relever cette affirmation de la ministre. Il
y a, quand même, des limites. Tous ceux qui nous ont entendus et qui
viennent d'entendre la ministre le savent: jamais l'Opposition n'a
reproché à la ministre d'avoir été en commission
parlementaire. La vérité, c'est qu'on le lui a demandé
depuis six mois. Elle a retardé par entêtement et elle a
empêché que des gens, qui attendaient son projet de loi,
obtiennent satisfaction au plus vite. Voilà les faits, voilà la
réalité, Mme la ministre.
Mme la Présidente, j'ai peu de temps, malheureusement, mais je
continuerai quand le débat reprendra parce que je vais parler à
Mme la ministre du cas Rémi Brassard, de Roberval, un cas qui fait
présentement l'actualité au Québec. Ces gens-là ont
été victimes non pas d'un projet de loi, non pas d'une
réglementation, mais d'une espèce d'insouciance qui a
caractérisé tous ceux qui sont intervenus dans le dossier de
Rémi Brassard. Je vous expliquerai, Mme la Présidente,
qu'après avoir fait une demande d'adoption internationale la famille
Rémi Brassard a été, comme le règlement le
prévoit, l'objet d'une enquête familiale. On a reconnu que la
famille Brassard, après un très long délai, était
tout à fait apte - c'est une famille modeste, soit dit en passant, mais
une honnête famille - à adopter un enfant. Mme la
Présidente, le temps d'enquête, le temps de réponse
après l'enquête et la demande d'autorisation faite par la famille
Brassard, a fait que, lorsque cette dernière a reçu le O.K. du
secrétariat à l'adoption, l'enfant choisi était
décédé.
La famille Brassard a redemandé au secrétariat à
l'adoption - l'enquête était faite; c'était une bonne
famille, on venait de le prouver; on venait de l'autoriser à adopter un
enfant - à adopter un autre enfant qu'ils ont identifié. On
aurait pu s'attendre que la famille Brassard se fasse dire: Oui, on
vérifie si l'enfant que vous voulez adopter est bel et bien dans une
situation où il demande des parents pour être adopté; on va
vérifier et on va maintenir l'accord qu'on vous a donné.
Savez-vous ce que le secrétariat à l'adoption a fait, Mme la
ministre? Il a annoncé, à nouveau, à la famille Brassard
qu'on referait enquête pour savoir si c'était une bonne famille
d'adoption. Croyez-le ou non, ils ont refait enquête.
Deuxièmement, savez-vous ce qu'ils ont fait? Ils ont pris des
délais très longs pour donner le O.K. à la famille
Brassard après que ceux-ci se furent soumis dans la même
année à deux enquêtes complètes pour savoir si
c'était une famille qui pouvait adopter un enfant. Est-ce que ça
a du bon sens, un agissement comme ça, quand on pense qu'il s'agit
d'êtres humains - on pourrait bien caricaturer - d'enfants qui, dans
d'autres pays, ont besoin de parents, sont dans la misère noire dans
bien des cas, et de parents qui, au Québec, sont prêts à
donner généreusement, comme la famille Brassard, une famille
modeste qui a dépensé au-delà de 10 000 $ pour adopter un
enfant? Or, parce que certains fonctionnaires au Secrétariat à
l'adoption internationale avaient décidé que ça prenait,
dans la même année, deux enquêtes pour savoir si
c'était une famille qui avait de l'allure, alors qu'une autorisation
avait été donnée, on a retardé ces
gens-là.
Savez-vous quelle est la conclusion de l'histoire? Quand la famille
Brassard eut passé la deuxième enquête, qu'on a voulu lui
donner la deuxième autorisation, on lui a dit: Non, on ne vous donne pas
d'autorisation; maintenant, vous allez adopter dans un autre pays parce que
là on ne fait plus affaire beaucoup avec ce pays-là et vous allez
aller ailleurs. On demandait à une famille modeste de redépenser
10 000 $ pour reprendre le processus complet d'adoption, probablement une
nouvelle enquête. Pourquoi pas trois dans la même année?
Jamais deux sans trois. Pourquoi pas encore une attente de six mois ou d'un an
pour avoir une autorisation du secrétariat - c'est ce que ça
avait pris dans les deux premiers cas - pour enfin, leur permettre d'aller
chercher cet enfant tant
désiré?
Sous la force de l'opinion publique, par les pressions de l'opinion
publique, parce que la famille Brassard a fait ce qu'elle devait faire, elle a
mis ce cas-là à la télévision, elle a eu
l'autorisation.
La Vice-Présidente: Je m'excuse, M. le
député de Roberval, mais, compte tenu du temps, nous devons avoir
le consentement pour continuer. Il reste cinq minutes au député
de Roberval.
Oui, M. le leader du gouvernement.
M. Lefebvre: Avant de donner mon consentement, j'aimerais savoir
combien il reste de temps au député de Roberval.
La Vice-Présidente: Cinq minutes.
M. Lefebvre: Consentement.
La Vice-Présidente: Consentement. M. le
député de Roberval, vous pouvez y aller.
M. Gauthier: Je remercie le député. De toute
façon, je terminerai l'histoire plus rapidement pour accommoder tout le
monde. Je dirai simplement, Mme la Présidente - et c'est absolument
déconcertant - que la famille Brassard, sous la force de l'opinion
publique, a réussi à infléchir la décision du
secrétariat et elle a été autorisée à aller
adopter l'enfant. Je vois que les députés ministériels
m'écoutent avec attention parce que c'est une histoire vraie. Ils ont
maintenant passé devant les tribunaux, ils ont franchi toutes les
étapes et aujourd'hui cet enfant est dans le comté de Roberval
avec ses parents. Il est heureux et c'est un nouveau Québécois
qu'on vient d'intégrer dans notre société. C'est un enfant
qui, au lieu de vivre les misères de son pays, vivra heureux et fera le
bonheur du couple Brassard.
Mme la Présidente, le couple Rémi Brassard, de Roberval, a
servi d'exemple pour faire bouger des gens qui, je le regrette, se sont perdus
dans la paperasse alors que des vies humaines étaient en jeu. Me Estelle
Tremblay, d'AIma, avec qui j'ai longuement conversé au sujet du cas
Brassard, est une femme qui aurait dû être écoutée
par la ministre, consultée par la ministre de la Santé et des
Services sociaux parce que c'est une experte qui donne
bénévolement son temps d'avocate pour défendre des couples
comme Rémi Brassard qui n'ont, malheureusement, pas suffisamment
d'argent pour être capables d'entreprendre toutes les procédures
et de couvrir les frais des procédures d'adoption, des procédures
susceptibles de sauver la vie d'un enfant.
Je demande donc à la ministre, quel que soit le résultat
ou le contenu du projet de loi, de faire preuve de beaucoup d'humanité,
de faire en sorte que les gens qui appliqueront la réglementation et la
loi qui sera écrite fassent preuve de discernement, d'ouverture, qu'ils
fassent preuve de créativité et de dynamisme, qu'ils fassent
comme s'ils savaient que ce sont des vies humaines qui sont en jeu dans ce
dossier. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Roberval. M. le député de Taillon.
M. Filion: Oui, Mme la Présidente. Étant
donné l'heure, je demande la suspension du débat.
La Vice-Présidente: Compte tenu de l'heure, nous allons
donc suspendre nos débats à ce soir, 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 3)
(Reprise à 20 h 4)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez vous asseoir. Nous allons donc reprendre nos travaux. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je ferais motion pour que
l'Assemblée nationale se transforme maintenant en commission
plénière. On commence par 192, je m'excuse. Mme la
Présidente, pourriez-vous appeler l'article 47 au feuilleton? Je
m'excuse, Mme la Présidente.
Projet de loi 192 Adoption du principe
La Vice-Présidente: A l'article 47, il s'agit de
l'adoption du principe du projet de loi 192, Loi modifiant la Loi concernant la
ville de La Salle, qui a été présenté par M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lefebvre: S'il n'y a pas de débat concernant le projet,
vous pourriez appeler l'adoption du projet.
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Le principe du projet de loi 192 Loi
modifiant la Loi concernant la ville de La Salle, est-il adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Lefebvre: Je fais motion pour déférer ledit
projet de loi à la commission de l'aménagement et des
équipements et que le ministre des Affaires municipales en soit
membre.
La Vice-Présidente: Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Je fais maintenant motion pour que
l'Assemblée nationale se transforme en commission
plénière.
La Vice-Présidente: Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc
suspendre quelques instants afin de permettre à l'Assemblée
nationale de se transformer en commission plénière pour
étudier les crédits supplémentaires 1987-1988.
(Suspension de la séance à 20 h 6)
(Reprise à 20 h 7)
Commission plénière
Étude des crédits supplémentaires
pour l'année financière 1987-1988
Mme Bégin (présidente de la commission
plénière): À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous allons donc commencer, en commission plénière,
l'étude des crédits supplémentaires pour l'année
1987-1988.
Main d'Oeuvre et Sécurité du
revenu
À ce stade-ci, nous allons étudier les crédits du
ministère du Travail...
Des voix: Main-d'Oeuvre...
La Présidente (Mme Bégin): ...Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu. Là-dessus, je vais
reconnaître M. le ministre pour quelques remarques
préliminaires.
Remarques préliminaires M. Pierre
Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente,
très brièvement. C'est à la demande de l'Opposition que
nous sommes réunis ce soir afin de débattre des crédits
supplémentaires, des crédits additionnels qui ont
été déposés, le 12 juin, par le ministre des
Finances à l'Assemblée nationale, crédits qui concernent
plus spécifiquement l'instauration du programme d'aide aux parents pour
leur revenu de travail, le programme appelé APPORT.
Comme vous le savez sans doute, ces crédits
supplémentaires, ces crédits additionnels prévoient pour
l'année en cours une somme de 17 000 000 $ affectée au programme
APPORT. Ainsi, il a été annoncé dans le discours sur le
budget, prononcé, vous vous en souviendrez, par le ministre des Finances
le 30 avril dernier, qu'un nouveau programme bénéficiera à
quelque 44 000 familles québécoises qui recevront au total 65 000
000 $ sur une base annuelle.
Si l'on considère que le nouveau programme sera instauré
à compter du 1er janvier 1988, si l'Assemblée nationale y
consent, comme en fait foi le discours sur le budget, le ministre des Finances
se propose donc d'injecter une somme de 17 000 000 $ afin de permettre le
versement de prestations auxdites familles au cours des mois de janvier,
février et mars 1988.
D'abord, afin de bien vous sensibiliser sur la pertinence de ces sommes
qui seront dépensées par notre gouvernement et, par
conséquent, sur la nécessité d'un tel programme, je vous
tracerai un portrait de ce que constituera le programme APPORT. Il s'agit,
essentiellement, d'un programme de soutien de revenu de travail, conçu
pour inciter les familles avec enfants à charge à demeurer sur le
marché du travail ou, dans le cas des chômeurs ou des
bénéficiaires de l'aide sociale, à les inciter à
réintégrer le marché du travail. Par la création de
ce nouveau programme nous visons la correction d'une problématique
soulevée par le ministre des Finances et qui se résume comme
suit: Les familles de travailleurs à faible revenu voient la
précarité de leur situation accentuée par certains
éléments des régimes de transfert et d'imposition. Un
premier problème est le manque d'intégration des régimes.
Ainsi, un ménage peut payer des impôts alors même qu'il
reçoit des transferts gouvernementaux en raison de revenus insuffisants.
Deux conséquences principales découlent de cette situation. D'une
part, un tel ménage doit financer par le biais de ses impôts une
partie des transferts qu'il reçoit, ce qui réduit, vous en
conviendrez, l'efficacité de l'aide gouvernementale.
D'autre part, l'effet combiné des taux d'imposition et des taux
de réduction des transferts fait en sorte que la majeure partie des
gains supplémentaires des travailleurs à faibles revenus est
récupérée par l'État, ce qui réduit
considérablement leur incitation au travail. Par exemple, en 1987 une
famille
biparentale avec deux enfants paie des impôts à partir d'un
revenu de travail de quelque 13 000 $. Alors que le supplément au revenu
de travail, communément appelé SUPRET, peut lui être
accordé jusqu'à un revenu d'environ 20 000 $. Ainsi, si un des
parents de cette famille accomplit une seule heure supplémentaire de
travail alors que les revenus de la famille sont approximativement de quelque
16 000 $, 75 % du revenu découlant de cette heure supplémentaire
sera récupéré par l'État par le biais de
l'impôt à payer et d'une baisse de l'allocation du SUPRET.
Ce problème affectant les familles à faible revenu est
accentué du fait que la rémunération du travailleur sur le
marché du travail est fixée sans tenir compte des charges
familiales alors que les programmes de transfert reconnaissent de telle charge.
Cet état de fait peut constituer un puissant mécanisme de
désincitation au travail pour les familles de travailleurs à
faible revenu. En effet, l'augmentation du revenu disponible apportée
par le travail pour une famille dont les parents gagnent des salaires peu
élevés est beaucoup plus faible qu'elle ne l'est pour un
célibataire ou un couple sans enfant. Par ailleurs, alors que le
régime d'imposition tient compte adéquatement des coûts de
garde pour les travailleurs qui paient des impôts et ce, peu importe le
mode de garde, l'aide aux travailleurs à faible revenu accordée
par les programmes de transfert est inadéquate pour les familles dont
les enfants sont gardés hors des places reconnues par l'Office des
services de garde à l'enfance. Cela constitue donc un obstacle majeur
à l'entrée sur le marché du travail pour les travailleurs
à faible revenu, particulièrement pour les chefs de familles
monoparentales avec de jeunes enfants.
Nous sommes conscients que le gouvernement doit jouer un rôle de
leadership en matière de création d'emplois, en matière de
croissance économique, en matière de justice sociale. Le
programme APPORT, qui s'inscrit dans la politique de sécurité du
revenu dont un document d'orientation sera rendu public, comme nous l'avons
annoncé au cours de la période estivale, vise donc la justice et
l'équité sociale, mais également l'incitation au travail.
En effet, APPORT donnera droit aux familles bénéficiaires
à des prestations d'incitation au travail ainsi qu'à une aide
à la garde. Ces prestations, qui seront versées mensuellement,
seront fixées en fonction de trois facteurs, soit le revenu de travail
ainsi que les autres revenus, les avoirs et le nombre d'enfants à
charge. C'est donc dire que les familles monoparentales et les couples avec
enfants qui ont un faible revenu de travail seront donc admissibles au
programme APPORT.
On sait qu'il existe déjà un programme, communément
appelé, comme je l'ai indiqué tantôt, SUPRET, qui pouvait,
dans certains cas, jouer un rôle d'incitation au travail. Il est
toutefois apparu nécessaire pour le ministre des Finances et pour notre
gouvernement de remplacer ce programme SUPRET dès 1988 dans le cas des
familles avec enfants par APPORT afin d'y apporter trois types
d'amélioration.
D'abord, le versement mensuel des prestations d'incitation au travail
sera appliqué, administré par les centres Travail-Québec,
les CTQ.
Deuxièmement, le nouveau programme facilitera l'accès sur
le marché du travail des parents ayant à assumer les frais de
garde d'enfants. L'aide accordée compensera environ 50 % des frais
réels encourus.
Troisièmement, APPORT laissera aux familles à faible
revenu une plus grande proportion de leurs gains de travail. À titre
d'exemple, Mme la Présidente, je vous rappellerai les données
citées dans le discours sur le budget. La famille biparentale avec deux
enfants qui voyait son revenu disponible augmenter de seulement 34 $
mensuellement si elle quittait l'aide sociale pour entrer sur le marché
du travail à un salaire mensuel de 1000 $, grâce au programme
APPORT, sa présence sur le marché du travail lui rapportera non
plus 34 $, mais 324 $ de plus par mois que l'aide sociale.
Nous croyons donc qu'avec de telles conséquences, aussi tangibles
et directes sur le revenu des familles de travailleurs à faible revenu,
le gouvernement franchira, grâce à APPORT et à sa politique
de sécurité du revenu, un pas important vers la
réalisation d'un objectif que nous nous sommes fixé, soit
d'inciter le maximum de Québécois et de Québécoises
à s'intégrer au marché du travail et à y demeurer.
Tout est là pour y parvenir.
En concluant, Mme la Présidente, l'économie
québécoise connaît, comme vous le savez, une relance plus
que notable en matière de création d'emplois. De mai à
mai, plus de 118 000 emplois, plus de la moitié des emplois
créés au Canada l'ont été au Québec. La
volonté politique d'incitation au travail est clairement exprimée
et constitue la toile de fond des gestes de notre gouvernement. Enfin, les
besoins de la population et de la société
québécoise dans son ensemble sont également largement
ressentis dans cette voie.
Je vous remercie, Mme la Présidente, de votre attention.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
ministre.
M. le député de Verchères, vos remarques
préliminaires.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Mme la Présidente, si je ne connaissais
pas bien le ministre comme
je le connais, je me serais laissé prendre au jeu. Sans doute,
les gens qui nous écoutent, je ne sais pas s'il y en a beaucoup, ont
dû trouver le ministre éloquent et flamboyant...
Une voix: ...ronronnant. Des voix: II est bon.
M. Charbonneau: II connaît son dossier, le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, sauf que je me suis
demandé si, finalement, je n'avais pas devant moi le ministre des
Finances.
Tout à coup, en regardant le budget qui nous a été
présenté par le ministre des Finances, je me suis rendu compte
que le ministre était en train de relire des passages du discours du
ministre des Finances. Mot à mot, Mme la Présidente. J'ai
trouvé ça bien et je me disais que ça devait être
justifié, c'est le même gouvernement. Ils se vantent un peu
mutuellement. Je me suis dit: Une chance que j'ai apporté le livre blanc
sur la fiscalité des particuliers du précédent
gouvernement. Je me rends compte que ce que le ministre nous a indiqué
tantôt comme critique du programme SUPRET qui avait été
établi en 1979... Pour les gens qui ont de la difficulté à
se démêler avec le jargon des sigles et qui veulent simplifier les
termes, SUPRET veut dire supplément au revenu de travail. (20 h 20)
Je vais vous lire, juste pour bien resituer un peu, la critique que nous
faisions, à l'époque, du programme que nous avions mis sur pied.
On est relativement en accord avec le gouvernement actuel quant à
l'opportunité et à la justification de modifier ce
programme-là, puisqu'il avait donné de bons résultats,
mais, à l'égard des objectifs qu'on cherchait à atteindre,
il y avait des failles. On disait entre autres: "Le principal effet de l'ajout
d'un supplément pour les bénéficiaires de l'aide sociale
est de réduire d'environ 75 % leur taux marginal de réduction des
transferts. Il diminue donc la désincitation au travail. Cependant,
comme le SUPRET est basé sur les revenus de l'année
précédente, son effet ne se fait sentir qu'un an ou un an et demi
plus tard, ce qui incite peu les bénéficiaires d'aide sociale
à s'en sortir à court terme, car la première partie de
leur revenu mensuel de travail sera immédiatement taxé à
près de 100 %.
Par ailleurs, un travailleur à faible revenu qui quitte l'aide
sociale demeure admissible au programme de supplément au revenu de
travail. En effet, afin d'éviter une chute brutale de la prestation
versée dans le cadre de ce programme, son taux de réduction a
été fixé à 33 1/2 % lorsque le revenu de travail
augmente. Compte tenu des impôts fédéral et
québécois qui peuvent alors s'appliquer, un chef de famille
bénéficiaire du SUPRET et gagnant actuellement 13 000 $ de
salaire brut aura malgré tout à faire face à un taux
marginal implicite de taxation d'au moins 62 % s'il reçoit une
augmentation de salaire."
En fait, quand on regarde ce taux marginal implicite de taxation, c'est
sans doute un taux marginal plus élevé que les plus riches dans
la société. C'était un des problèmes que visait
à corriger le livre blanc sur la fiscalité. On n'a
malheureusement pas eu le temps de tout mettre en oeuvre. Le gouvernement
actuel nous a succédé. Très bien! Je pense qu'on ne peut
pas lui tenir rigueur de continuer dans la lancée que le
précédent gouvernement avait préparée sauf qu'on
voudrait bien qu'il rende à César ce qui revient à
César. On ne serait pas obligé de le faire et ce serait plus
correct.
Je ne dis pas que le ministre a tort d'agir de cette façon. Je
dis juste qu'il ne faut pas qu'il prenne toute la gloire de l'opération
comme si rien de ce qui avait été fait auparavant n'aboutit
maintenant. Au fond, ce genre de modification des systèmes de transfert
et des systèmes fiscaux, ce sont des choses qui se préparent, qui
se mûrissent longtemps d'avance et qui, finalement, après analyse,
finissent par aboutir, que ce soit pour un gouvernement ou pour un autre.
Ce qui inquiète, Mme la Présidente... Et cela fait partie
des questions que je voudrais adresser au ministre. On en a déjà
parlé, mais c'est une occasion ce soir de revenir un peu sur le sujet.
Néanmoins, malgré ces failles, le programme SUPRET s'appliquait
à tout le monde, alors que le programme APPORT s'applique aux familles,
avec enfants, bien sûr. Donc, qu'est-ce qui arrive des ménages et
qu'est-ce qui arrive des célibataires? On a fait des petits calculs pour
se rendre compte que, finalement, pour les personnes et les couples sans
enfant, le gouvernement ira chercher en économie 22 000 000 $ l'an
prochain et 24 000 000 $ en 1989-1990. Quand on regarde les calculs -c'est pris
à même les données du ministre des Finances - finalement,
vous allez économiser de l'argent en ne versant pas aux couples sans
enfant et aux personnnes seules les montants d'argent que ces gens recevaient
avec le programme SUPRET. Je vous réfère à la page 40 de
l'annexe A du budget, où on dit: Abolition graduelle du SUPRET, 22 000
000 4 en 1988-1989 et 24 000 000 $ en 1989-1990. C'est la première
question que je voudrais adresser au ministre, Mme la Présidente.
Si on pouvait s'entendre avec lui sur une autre chose, j'aurais quelques
questions à poser sur le programme APPORT. D'autre part, comme le
programme APPORT est un des trois programmes qui sont liés à
la
réforme de l'aide sociale qui a été
annnoncée, j'aurais quelques autres questions à poser au
ministre. On pourrait le faire en vrac maintenant, ou, si le ministre consent
à répondre de façon succinte aux questions que je lui
pose; ce qui serait peut-être plus intéressant pour les gens qui
nous écoutent, je pourrais revenir et poser les autres questions,
après avoir eu une réponse sur l'interrogation que je lui
transmets actuellement.
Juste une parenthèse avant de lui céder la parole sur
cette question du programme APPORT. Quand il parlait de la création
d'emplois, vous savez, Mme la Présidente, ce qu'on constate comme
performance économique actuellement, c'est, à toutes fins utiles,
le même niveau de rendement qu'au cours des quatre dernières
années. En fait, on assiste actuellement à une continuation de
l'effort de reprise économique après la crise que nous avons
connue en 1982 en particulier. Il y a eu une relance. C'est évident que
lorsqu'il y a une relance, à un moment donné, il y a une
accélération de la relance. Chaque année, il y en a un peu
plus mais, globalement, on se rend compte que le rythme de croissance
économique n'est pas tellement supérieur. En fait, il est dans le
même ordre de grandeur qu'au cours des dernières années.
Dans ce sens, il ne faudrait pas que le ministre mette trop d'emphase sur la
création d'emplois.
Je pense qu'il y a une création d'emplois. Le problème
fondamental, c'est que le rythme de création d'emplois n'est pas
suffisant pour répondre aux besoins d'emplois qui se manifestent dans
notre société. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, en fin
de semaine dernière, au congrès du Parti québécois,
nous avons choisi de prendre un virage important que nous avions
commencé à prendre lorsque nous étions au gouvernement
mais trop tard malheureusement. Un virage qui devrait nous amener plutôt
à utiliser la recette appliquée actuellement dans plusieurs pays
européens, les pays Scandinaves en particulier, où il y a une
approche sociale démocrate, où on a comme objectif non pas la
croissance économique pour la croissance économique mais
où on a comme objectif le plein emploi. Dans ces sociétés,
on ne se contente pas d'un taux de chômage de 10 % ou 11 %. L'objectif,
c'est 2 % ou 3 % de chômage et, ce qui est intéressant, c'est
qu'on réussit à maintenir, même dans les périodes de
crise économique, le chômage à un niveau très bas,
autour du pourcentage que j'ai indiqué.
Or, c'est évident que si le ministre se contente du rythme de
performance économique qu'on a connu au cours des dernières
années, il va probablement atteindre l'engagement électoral qui
n'était pas bien sécurisant finalement, 80 000 emplois par
année, c'était ce que le gouver- nement du Parti
québécois avait créé au cours de ses
dernières années de mandat. Donc, si le Parti libéral
atteint ce rythme de croissance d'emplois dans les prochaines années, il
aura rempli son engagement électoral qui n'était pas dangereux
à prendre, mais on se retrouvera avec un niveau de chômage
néanmoins inacceptable. C'est-à-dire qu'on se retrouvera avec un
taux de chômage qui est, à toutes fins utiles, en haut de 10 %.
Compte tenu des nouvelles entrées sur le marché du travail et des
gens qui sont déjà en chômage actuellement, c'est clair que
ce n'est pas la direction qu'il faut utiliser.
Le programme APPORT
Je pense que le débat ce soir n'est pas le débat... Le
ministre a ouvert une porte. Il ne m'en voudra pas de lui avoir donné la
réplique sur cela, mais on n'est pas ici ce soir pour faire un
débat sur nos philosophies différentes d'atteindre une
création d'emplois plus grande. Donc, je reviens à la question
que je lui ai posée pour qu'il ne la perde pas de vue. Qu'envisage le
gouvernement pour les personnes seules et les couples sans enfant qui, eux,
vont être pénalisés par l'introduction du nouveau programme
APPORT et la disparition du programme SUPRET? Comment justifie-t-il les
économies qu'il réalise? Pour le reste, je reviendrai sur
quelques éléments additionnels par la suite.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente.
Avant de répondre à la question directe posée par le
député de Verchères, vous me permettrez de reprendre
quelques exactitudes et quelques inexactitudes de son préambule.
Lorsque le député de Verchères mentionne que ce que
j'ai dit au début comme première intervention était
largement inspiré du discours sur le budget - j'indique même qu'il
y avait des citations tirées du discours sur le budget - je vous
indiquerai que cela souligne bien le travail d'équipe que le ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu effectue avec son
collègue, le ministre des Finances.
C'était justement là une des lacunes de l'ancien
gouvernement de ne pas travailler en équipe, de ne pas faire en sorte
que les politiques qui affectaient la sécurité du revenu, les
plus faibles de notre société, tiennent compte de la
fiscalité. Celle qui m'a précédé comme ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu établissait
des politiques en matière de sécurité du revenu. D'un
autre côté, le ministre des Finances qui n'était pas au
courant de ces politiques taxait ces gens, ce
qui faisait qu'on désincitait les gens au travail. Ce
n'était absolument plus payant pour les gens de se trouver un emploi
avec comme résultat, l'accroissement du nombre de chômeurs et du
nombre d'assistés sociaux que l'on a connu sous l'ancien
gouvernement.
Quant à moi, que le député de Verchères
m'accuse de complicité avec mon collègue, le ministre des
Finances, je lui dirai que je l'en remercie et que c'est dans cette voie que je
compte bien continuer de travailler.
Quant au deuxième élément soulevé par le
député de Verchères et qui traite de la création
d'emplois, je lui indiquerai de retourner aux statistiques officielles,
Statistique Canada, Bureau de la statistique du Québec, pour
vérifier le nombre d'emplois qui existaient au Québec en avril
1981 au moment où vous avez reçu de la population du
Québec, comme Parti québécois, un deuxième mandat
de gouverner le Québec. Le nombre d'emplois qui existaient au
Québec en avril 1985, quatre ans après votre élection,
pour vous rendre compte qu'il existait exactement le même nombre
d'emplois, chiffres pour chiffres, en avril 1985 et en avril 1981... (20 h
30)
M. Charbonneau: II y a eu une crise économique. Tout le
monde le sait. Ne faites donc pas la démagogie facile. C'est une crise
qui a frappé l'Occident. Arrêtez de nous charrier.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je ne dis pas
qu'il n'y a pas eu de crise économique...
M. Charbonneau: Écoutez, il ne faut pas nous prendre pour
des enfants d'école non plus.
La Présidente (Mme Bégin): Un instant. À
l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas
eu de crise économique.
M. Charbonneau: S'il y en a eu une, soyez donc sérieux un
peu.
La Présidente (Mme Bégin): À l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous nous avez accusés de
maintenir le rythme de croisière du Parti québécois qui
était de zéro en matière de création d'emplois.
M. Charbonneau: Les deux dernières années dont je
parlais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai, Mme la
Présidente...
M. Charbonneau: Les deux dernières années du mandat
on a créé plus de 80 000 emplois. C'est ça que vous faites
aussi. Arrêtez de charrier.
La Présidente (Mme Bégin): À l'ordre! A
l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je répète, Mme la
Présidente, et j'affirme qu'il n'y avait pas un seul emploi de plus
quatre ans après la prise du pouvoir du Parti québécois.
D'avril 1981 à avril 1985, aucun emploi de plus n'a été
créé sous ce gouvernement.
M. Charbonneau: Vous ne convaincrez personne avec ce genre de
discours démagogique, ce soir.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ajoute, Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...que ce sont des statistiques,
et je suis prêt à me faire contredire sur le plan des
statistiques. J'ajoute que, suivant les mêmes statistiques du mois de mai
1985 au mois de mai 1986, il y avait 115 000 emplois de plus au Québec.
C'est ça la différence entre les deux gouvernements,
différence de philosophie...
M. Charbonneau: Mme la Présidente, ça n'a pas de
bon sens.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...différence de confiance
pour les investisseurs...
La Présidente (Mme Bégin): Qu'est-ce que je fais
là-dedans?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...différence de relations
de travail plus saines, différence de création d'emplois nette
pour la population du Québec.
M. Charbonneau: C'est faux. Arrêtez donc la
démagogie facile, vous le savez.
La Présidente (Mme Bégin): À l'ordre!
À l'ordre!
M. Charbonneau: II y a eu une crise économique. Cette
crise explique les pertes d'emplois pendant plusieurs années. Quand la
reprise est arrivée...
La Présidente (Mme Bégin): À l'ordre!
M. Charbonneau: ...c'est le Québec qui a fait la meilleure
performance sous un gouvernement péquiste, et vous avez continué
sur cette lancée...
La Présidente (Mme Bégin): Monsieur...
M. Charbonneau: ...et depuis que vous êtes là,
annuellement, pas plus d'emplois qu'on en a créés à la fin
du dernier mandat quand la reprise économique s'est fait sentir.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Verchères. M. le député de
Verchères, M. le ministre. J'avais reconnu, si vous le permettez, M. le
député de Verchères, le ministre. Je comprends que vous ne
pouvez peut-être pas partager ses opinions. Je pense que vous aurez
l'occasion par la suite de faire valoir votre point de vue.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, je n'ai pas pris
beaucoup de temps. Je n'ai pas voulu charrier. Si le ministre veut aller sur ce
terrain, il va voir qu'il y a quelqu'un en face de lui. Je vais vous dire une
affaire: II n'aura pas toute la glace ce soir.
La Présidente (Mme Bégin): À venir
jusqu'à maintenant, M. le député de Verchères,
j'essaie de partager le temps également. Là-dessus, le ministre
était en train de répondre à vos questions. Je vous
demande d'être bref sur la question, M. le ministre, pour que, par la
suite, je puisse passer la...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente.
Très brièvement, je répète donc, parce que ce sont
des statistiques qui méritent d'être
répétées, qu'entre avril 1981 et avril 1985, même
nombre d'emplois au Québec; entre mai 1985 et mai 1986, sous un autre
gouvernement, le gouvernement libéral, 115 000 nouveaux emplois
créés dans la province de Québec. Cela est fait, Mme la
Présidente!
Je vous indiquerai également - je ne voulais pas le mentionner ce
soir, ce sont des statistiques que j'ai déjà mentionnées
au député de Verchères, peut-être des statistiques
qui leur ont coûté les dernières élections
également - qu'à leur arrivée au pouvoir, en 1976, il y
avait 435 045 personnes qui dépendaient de l'aide sociale; que
lorsqu'ils ont quitté le pouvoir, en décembre 1985, il y avait
708 677 personnes qui devaient vivre de l'aide sociale au Québec.
Pendant le mandat du Parti québécois, c'est une augmentation de
plus de 273 632 personnes au Québec qui ont dû dépendre de
l'aide sociale.
Maintenant, j'ai voulu ajouter aux précisions et corriger les
imprécisions qu'avaient faites le député de
Verchères.
Quant à sa question très précise. Il nous parle, ce
soir, de la mise en place, si elle est adoptée par l'Assemblée
nationale du Québec, par les parlementaires d'un côté comme
de l'autre, du programme APPORT en remplacement du programme SUPRET. Cela
apporterait, dit-il des économies au Trésor
québécois. Je lui dis de reprendre ses calculs, je lui conseille
de reprendre ses chiffres, je lui indique là où les trouver, si
cela peut l'inspirer, dans le discours sur le budget, renseignements
supplémentaires 1987- 1988, exactement à la page 40: Pour 1988-
1989, nouveau programme d'aide aux parents pour leur revenu de travail APPORT,
61 000 000 $; abolition graduelle de 22 000 000 $. Vous faites la
différence, c'est une addition nette de quelque 40 000 000 $.
Deuxième année d'application, 1989-1990, nouveau programme d'aide
aux parents pour leur revenu de travail, APPORT, 63 000 000 $; abolition
graduelle du programme SUPRET, 24 000 000 $; différence 39 000 000 $."
Approximativement, c'est 40 000 000 $ d'argent neuf, frais, nouveau qui est
ajouté à des gens qui, dans la société, sont des
travailleurs à faible revenu, avec des familles...
M. Charbonneau: Vous venez exactement de confirmer les chiffres
que je vous ai donnés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour les inciter à
conserver leur emploi et pour inciter ceux qui sont dans cette situation, soit
sur l'assurance-chômage, soit sur l'aide sociale, à se trouver un
emploi rémunérateur.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Verchères, je vous cède la parole.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, ce que le ministre
vient de nous dire, confirme exactement ce que je lui ai dit. L'abolition
graduelle du SUPRET, c'est 22 000 000 $ de moins que vous payez. Cela
coûte un prix. Cela vous coûte 61 000 000 $ pour instaurer le
nouveau programme, mais vous économisez 22 000 000 $. Où est-ce
que vous les économisez? C'est parce que vous ne versez plus des
montants à des personnes seules et à des couples sans enfants.
Écoutez, de deux choses l'une: ou ces gens-là vont continuer
d'avoir ce qu'ils ont actuellement ou ils ne continueront plus à avoir
une aide quelconque.
Est-ce que vous pouvez me dire ce soir...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux vous apporter
une précision?
M. Charbonneau: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je
pense...
M. Charbonneau: À condition que vous ne partiez pas pour
encore 20 minutes...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non.
M. Charbonneau: ...là, on va s'entendre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'en vais directement sur les
chiffres que vous me mentionnez.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je vous dis, c'est que ce
que vous me mentionnez, les 22 000 000 $ ou 24 000 000 $, c'est le coût
total du programme SUPRET actuel. En abolissant le programme SUPRET sur une
base annuelle, oui, vous épargnez quelque 22 000 000 $ ou 24 000 000 $
par année. Le coût, maintenant, du programme APPORT est de quelque
60 000 000 $ ou 64 000 000 $, donc, une différence de quelque 40 000 000
$. De l'argent qui ira, oui, chez les familles à faible revenu avec
enfants. C'est 40 000 000 $ additionnels. Je vous indiquerais que les familles
avec enfants dans la définition donnée au programme inclut les
familles monoparentales.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Je vous cite le paragraphe à la page 30 du
même document, annexe A. On dit: "Toutefois, une période
transitoire pour les célibataires et les familles sans enfant est
introduite. Ainsi 66 2/3 % et 33 1/3 % de la prestation de supplément au
revenu de travail sera versée à de telles personnes admissibles
qui en feront la demande dans les délais prévus pour les
années 1988-1989." Donc, ce qu'on dit c'est qu'en 1988-1989, ces gens
vont perdre le tiers de ce qu'ils recevaient avant et en 1989, on ne leur
versera que le tiers de ce qu'ils avaient avant; ils vont perdre les deux
tiers. Puis après, ils n'auront plus rien. Ne venez pas me dire qu'il
n'y a pas une perte. Premièrement, il y a une perte pour ces gens.
Deuxièmement, dans la troisième année, ils n'auront pas le
droit au programme APPORT et il n'y aura plus de SUPRET. Cela ne vous
coûte rien cela.
C'est un peu comme l'indexation trimestrielle. Vous n'allez pas nous
faire croire que finalement les gens n'ont rien perdu avec cette approche. Je
ne dis pas que, à l'égard des familles avec enfants on ne
s'entend pas. On s'entend, on est d'accord. C'est exactement ce qu'on
s'apprêtait à faire. C'était cela qu'on retrouvait dans le
livre blanc sur la fiscalité. Ce que je vous demande, c'est: qu'est-ce
que vous prévoyez faire pour éviter ce qui est très
clairement identifié dans le discours sur le budget, c'est-à-dire
une perte de revenus pour des gens à faible revenu mais
célibataires ou qui forment des couples, des familles sans enfant.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais répondre
très spécifiquement en vous invitant à ne pas
arrêter à la page 30, à continuer la lecture du budget en
page 40 et même, si vous avez le temps, à continuer jusque dans
les annexes etc., pour avoir une vision d'ensemble du discours sur le budget.
En ce qui concerne les personnes seules, les couples qui n'ont pas d'enfants,
ces gens constituaient une partie très faible de la clientèle du
programme SUPRET. Les coûts que nous avons calculés, en
collaboration avec mon collègue le ministre des Finances, encore une
fois, s'élèveraient à peu près à 4 000 000 $
ou 5 000 000 $ par année. Ce que nous disons à ces gens qui
bénéficiaient déjà du programme par le passé
et qui ne sont pas les familles, chez qui nous investissons plus de 40 000 000
$ par année pour les inciter à demeurer sur le marché du
travail ou s'ils sont sur l'aide sociale ou l'assurance-chômage, à
réintégrer le marché du travail, ce que nous vous
indiquons c'est que pour 1988-1989 nous maintenons ces 4 000 000 $ et 5 000 000
$.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député. (20 h 40)
M. Charbonneau: Ce n'est pas cela qu'on vient de dire.
Écoutez, vous me dites qu'il n'y a pas de coupure. Je viens de vous
dire, c'est le discours sur le budget; ne me faites pas accroire des choses
qui... Ils perdent un tiers de ce qu'ils recevaient avant et l'année
d'après ils perdent les deux tiers et l'autre année ils perdent
tout. Même s'ils ne sont pas nombreux, on peut convenir de cela, mais ne
venez pas nous faire accroire ce soir qu'ils ne perdent rien, d'une part.
D'autre part, écoutez, entre ce que vous mettez dans le programme APPORT
et ce que le programme SUPRET coûtait, il ne faut pas charrier non plus.
Le programme SUPRET, il coûtait quelque chose. Ce que vous faites c'est
que vous prenez l'argent qu'on mettait dans le programme SUPRET et vous le
mettez dans un programme qui va être plus efficace, on en convient. On a
fait la critique du programme qu'on avait mis en place et à partir de
cette critique vous allez c'est maintenant vous qui avez la
responsabilité de l'assumer dans le temps -faire la
concrétisation de ce qu'on disait.
Très bien, on s'entend là-dessus. Moi, ce que je vous
signale, c'est le problème de ces personnes. Vous me dites qu'elles ne
sont pas nombreuses, je peux bien en convenir, mais ces gens-là sont
pénalisés dans le sens où, qu'on ait des enfants ou qu'on
n'en ait pas, quand on est dans une situation de démuni, je pense que la
préoccupation du gouvernement doit être de ne pas appauvrir les
plus pauvres. Même si on en appauvrit une minorité, des gens qui
étaient déjà dans une situation difficile, à faible
revenu... Écoutez, s'ils avaient droit au supplément au revenu de
travail, c'est parce qu'ils n'étaient pas dans une situation de richesse
exorbitante. Qu'il y ait une minorité de ces gens-là qui soit
affectée alors que la majorité va bénéficier des
mesures et de la bonification, tant mieux! Le résultat, c'est qu'une
partie va se trouver appauvrie. À cet égard, c'est un peu toute
l'histoire de l'approche du ministre au cours de la dernière
année et demie. On fait une analyse des mesures qui ont
été mises en place au niveau de l'aide sociale, des avantages et
des inconvénients et on se rend compte que, finalement, il y a eu plus
d'appauvrissement qu'autre chose pour les gens à faible revenu et qui
recevaient de l'aide sociale. J'aimerais profiter...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente, sur l'appauvrissement, je ne peux pas laisser
passer...
M. Charbonneau: Écoutez, j'aimerais que vous... Le temps
file et...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous laisser le temps,
mais je ne peux pas laisser passer... C'est que je suis ministre du Travail
également.
M. Charbonneau: Je sais que vous ne me laisserez pas passer.
Mais, moi non plus, je ne vous ai pas laissé passer tantôt.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis ministre du Travail
également et je suis conscient des augmentations de salaire qu'ont
obtenues les travailleurs,, en moyenne, l'an passé, les travailleurs
structurés, organisés, syndiqués; elles se situaient en
bas de 4 %. Les assistés sociaux ont eu une indexation de 4,1 %. Je vous
dirai que...
M. Charbonneau: Ils ont perdu l'indexation trimestrielle qui leur
a enlevé 31 000 000 $ dans leurs poches.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur une base annuelle, les
travailleurs ont obtenu moins de 4 % et les gens qui étaient sur l'aide
sociale ont obtenu plus de 4,1 %. Donc, ce que je vous indique, c'est qu'il n'y
a pas eu d'appauvrissement de ces gens-là par rapport à
l'ensemble de la société. Ils ont obtenu plus que les
travailleurs structurés et organisés ont pu obtenir dans le
rapport de forces des ententes négociées de gré à
gré dans la collectivité. Il y a des limites à dire que
ces gens-là se sont appauvris.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député.
M. Charbonneau: Ce n'est pas exact dans la mesure où vous
ne comptez pas ce que vous leur avez enlevé par l'abolition de
l'indexation trimestrielle et où vous ne comptez pas dans cela non plus
l'appauvrissement qu'ont provoqué vos mesures de resserrement. On avait
convenu en commission parlementaire, à l'étude des crédits
en détail, l'autre jour, qu'il y avait certaines catégories pour
lesquelles vous reconnaissiez vous-même qu'il y avait des
problèmes d'application des mesures de resserrement des barèmes
d'aide sociale et vous étiez prêt à les modifier. Le
résultat net, c'est que ces gens-là ont payé pour.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je prétends, M. le
député de Verchères, c'est que les travailleurs
organisés, l'an passé, ont réussi à négocier
sur une base annuelle des augmentations de salaire inférieures à
4 %. Des travailleurs organisés et syndiqués ont réussi
à obtenir des augmentations de rémunération
inférieures à 4 %, les assistés sociaux, 4,1 %, les
travailleurs au salaire minimum, à peu près une moyenne de 12,8 %
l'an passé. Ce que je vous dis, c'est que ceux qui se sont le plus
enrichis et c'était justifié - je ne vous dis pas que ce
n'était pas justifié - ce sont les plus bas salariés, les
travailleurs au salaire minimum. Deuxièmement, ce sont les gens qui sont
au bas de l'échelle dans la société, les assistés
sociaux et troisièmement, les travailleurs plus hauts dans la
société, les travailleurs organisés. Là, je vous
dis qu'il y a eu resserrement entre les classes de la société et
c'est cette justice que nous visons.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député.
M. Charbonneau: Vous savez, il y a différentes
façons de compter combien il reste dans nos poches pour faire
l'épicerie et tout. Le ministre compte les augmentations salariales et
les augmentations de prestations.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): De toute façon, il ne reste
rien.
M. Charbonneau: Moi, ce que je lui indique, c'est que ce qu'il
donnait d'une main, il l'enlevait de l'autre. Quand je vous parle
d'appauvrissement, c'est le résultat net. Moi, quand j'ai à faire
l'épicerie, je veux bien que mon patron me donne 10 % d'augmentation,
mais, si je m'en fais voler 12 % par un autre, le résultat, c'est que,
quand je fais mon épicerie, j'ai 2 % de moins que j'en avais avant.
M. Paradis (Brome-Missisquoi); Mme la
Présidente, je veux...
M. Charbonneau: Donc, j'aimerais que le ministre prenne en
considération ce qu'il a donné. Très bien, il peut s'en
vanter. Mais moi, ma responsabilité, c'est de dire aux gens: Faites
attention. Quand le ministre vous tient ce genre de discours, ce qu'il oublie
de dire, c'est ce qu'il a enlevé aux gens par ses politiques
administratives, ses coupures et ses compressions. C'est cela l'objectif.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais reprendre cela parce que
le ministre ne donne pas et ne dédonne pas. Le ministre administre en
fiducie l'argent des contribuables parce qu'il s'est vu confier...
M. Charbonneau: II prend des décisions
administratives...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II prend des décisions
administratives.
M. Charbonneau: ...qui coûtent 31 000 000 $ de perte de
pouvoir d'achat.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je dirai au député
de Verchères que je maintiens ce que j'ai dit: augmentation des revenus
pour l'ensemble des travailleurs à faible revenu, 12 % l'an
passé, salaire minimum; augmentation pour les travailleurs
organisés et syndiqués, moins de 4 %; augmentation
générale pour les bénéficiaires de l'aide sociale
sur une base annuelle, 4,1 %. Quant à ce que vous nous accusez d'avoir
récupéré, c'est vrai ce que vous dites, il y a eu de la
récupération administrative, mais elle ne s'est pas
élevée à 31 000 000 $. C'étaient les
prévisions. C'était plus bas parce que la clientèle ayant
diminué, cela s'est peut-être terminé à 27 000 000 $
à peu près.
M. Charbonneau: ...11 000 000 $...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les 27 000 000 $, cela a
été récupéré chez les gens qui
étaient prestataires de l'aide sociale qui possédaient, entre
autres, des maisons dont l'équité était
supérieure...
M. Charbonneau: On ne parle pas de la même chose.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah oui, c'est de cela qu'on parle.
Ah oui!
M. Charbonneau: Non, non, non, non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah oui! C'est de cela qu'on
parle.
M. Charbonneau: Non, non. Écoutez!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'équité
était supérieure à 50 000 $.
M. Charbonneau: Si vous me dites que vous avez
récupéré 27 000 000 $, ce dont vous me parlez, vous aviez
une prévision de 11 000 000 $. Je vous parlais des 31 000 000 $
d'abolition de l'indexation trimestrielle. À cela s'ajoutent les 11 000
000 $, ce dont vous me parlez, c'est-à-dire restrictions pour les
maisons, et tout cela, c'était 42 000 000 $. Si vous me dites que ce
n'est pas 11 000 000 $ que vous avez récupérés, mais 27
000 000 $, c'est intéressant de le savoir parce que cela s'ajoute aux 31
000 000 $ de perte de pouvoir d'achat. On va se comprendre.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, non. Je veux qu'on se
comprenne très bien. Je vais reprendre. Les travailleurs
organisés et syndiqués, moins de 4 % en moyenne l'an
passé. Les travailleurs au salaire minimum, incluant les jeunes au
salaire minimum à cause de l'abolition de la discrimination, plus 12 %,
quasiment 13 %. C'est toujours sur une base annuelle ce que je vous dis. Vous,
vous mélangez du trimestriel et tout cela. C'est sur une base annuelle
ces chiffres-là. Les 4 % de moins pour les travailleurs
syndiqués, c'est sur une base annuelle. Les 12 % pour les travailleurs
au salaire minimum, c'est sur une base annuelle. Pour les assistés
sociaux, 4,1 %, c'est une base annuelle. S'ils avaient été
indexés trimestriellement, ils auraient peut-être eu 4,2 %, 4,3 %
ou 4,4 %. Et c'est ce dont on parle.
M. Charbonneau: Le ministre, Mme la Présidente...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que je vous dis, c'est que
c'est supérieur aux travailleurs organisés.
La Présidente (Mme Bégin): Bon. M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Le ministre est habile, Mme la Présidente.
La seule chose qu'il ne faudrait pas qu'il oublie, c'est que, moi aussi, je
parlais d'une base annuelle. Les 31 000 000 $ plus les 11 000 000 $, cela fait
42 000 000 $ sur une base annuelle. C'est 42 000 000 $ de perte d'argent qui
étaient dans les poches des assistés sociaux, qu'ils n'ont pas
dépensés, qu'ils n'avaient pas pour vivre l'an dernier et que
vous avez, vous, empochés, comme gouvernement. Et 42 000 000 $, dont la
moitié...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est beaucoup plus que cela.
M. Charbonneau: Pardon?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est beaucoup plus que cela.
M. Charbonneau: Le premier geste que vous avez posé, vous
vous le rappelez, quand vous êtes arrivés au pouvoir, vous avez
réduit les impôts des plus riches de 86 000 000 $.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est beaucoup...
M. Charbonneau: Mais, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais vous n'avez pas raison, M. le
député. C'est beaucoup plus. Je ne veux pas que vous laissiez
traîner un chiffre de 41 000 000 $ comme ça. On l'a
publié...
M. Charbonneau: 42 000 000 $.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 42 000 000 $ que vous additionnez
comme vous voulez. On vous a déjà indiqué que, l'an
passé, la facture totale de l'aide sociale -parce qu'on peut prendre des
chiffres partiels et tenter de faire de la démagogie et de
l'extrapolation - a coûté quelque 200 000 000 $ de moins que
l'année d'avant. C'est certain que si vous avez moins de
bénéficiaires de l'aide sociale, parce qu'il y a moins de gens
qui se qualifient suivant la loi et les règlements, vous avez moins de
dépenses en indexation, vous avez moins de dépenses en besoins
spéciaux, vous avez moins de dépenses en assistance-maladie, vous
avez moins de dépenses à tous ces chapitres. Si vous prenez un
chiffre et l'isolez... Je vous dis que, l'an passé, c'est 200 000 000 $.
Mais c'est parce que ces gens-là n'étaient pas admissibles
à l'aide sociale, parce qu'ils se sont trouvés de l'emploi...
M. Charbonneau: Mme la Présidente.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...parce qu'au lieu de vivre aux
crochets de la société, maintenant, ce sont des apports à
la société.
M. Charbonneau: Le ministre essaie de mêler tout le
monde.
La Présidente (Mme Bégin): Bon, un instant.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Voyons donc! En train de
mêler tout le monde!
M. Charbonneau: Écoutez donc!
La Présidente (Mme Bégin): Un instant. J'aimerais
qu'on s'entende un peu.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, le ministre essaie de
mêler tout le monde.
La Présidente (Mme Bégin): Oui, M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Là, je ne veux plus aller sur ce
terrain-là, de toute façon, mais je vais simplement lui dire une
chose. Les 31 000 000 $ plus les 11 000 000 $ - il peut bien ricaner avec ses
amis à côté...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente.
M. Charbonneau: ...les 42 000 000 $ en question...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, question
de règlement.
La Présidente (Mme Bégin): Un instant.
M. Charbonneau: ...ce sont les chiffres de votre collègue
avec qui vous travaillez en concertation, vous nous l'avez dit
tantôt...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Question de règlement, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): Un instant.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Question de règlement.
M. Charbonneau: II n'y a pas de question de règlement
ici.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, il y a une question de
règlement.
La Présidente (Mme Bégin): Question de
règlement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député de
Verchères, j'ai souvent fait des débats avec vous.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, sur la question de
règlement, j'espère que ce sera une vraie question de
règlement. (20 h 50)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous demande d'être
suffisamment honnête pour retirer vos paroles lorsque vous avez
parlé de ricaner avec les voisins d'en face parce que je ne ricanais
avec personne. J'écoutais le député de Verchères
répliquer...
La Présidente (Mme Bégin): Bon, d'accord!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je
I'écoutais attentivement. S'il veut me prêter...
La Présidente (Mme Bégin): D'accord:
M. Charbonneau: C'est dommage, Mme la Présidente,
qu'à cette caméra il n'y ait pas un grand angle.
La Présidente (Mme Bégin): Bon! Cela étant
dit, je pense que chacune des parties a fait ses représentations. Vous
avez passé vos messages, je vais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Bégin): Bon!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ... si le député de
Verchères veut m'imputer des motifs, des rictus, etc, qu'il le fasse
mais qu'il le fasse de façon véridique.
La Présidente (Mme Bégin): Bon! Cela étant
dit, je pense que nous allons retourner dans le vif du sujet.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le vif du sujet, Mme la
Présidente, parce que lorsqu'on traite d'un sujet aussi
sérieux...
M. Chevrette: Il conteste, là. C'est assez, là!
La Présidente (Mme Bégin): Écoutez, M. le
ministre, je n'ai que deux yeux et je n'ai pas constaté quelque
chose.
M. Charbonneau: Mme la Présidente...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ... assez gentleman pour le
retirer parce que ce n'était pas vrai.
M. Charbonneau: Mme la Présidente... La
Présidente (Mme Bégin): Bon! Là-dessus, je vais
reconnaître le député de Verchères sur des
questions.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, le ministre sait
très bien que quand je lui parlais de 31 000 000 $ et de 11 000 000 $
j'utilisais les chiffres de son collègue, avec lequel il s'est
vanté de travailler en concertation étroite tantôt. Ces
chiffres nous indiquaient que le gouvernement entendait économiser,
à partir de la non-indexation trimestrielle. Vous nous parlez des
économies que vous avez réalisées parce que vous avez
réduit la clientèle ou que la clientèle a
été réduite. De toute façon, je pense que de part
et d'autre on a eu l'occasion d'indiquer notre façon d'apprécier
la réalité. Ce sera aux gens qui nous écoutent finalement
à porter leur jugement. C'est ça, de toute façon, le jeu
parlementaire. On est ici pour débattre et il y a des gens qui doivent
se faire une opinion à partir du débat contradictoire.
Le temps file, le ministre comprendra que j'ai deux types de questions
qui sont, dans un cas directement liées à la réforme de
l'aide sociale et, dans un autre cas, indirectement. Il comprendra, puisque ce
sont des organismes ou des personnes qui sont concernés par des
décisions, que je profite de l'occasion, un peu comme on l'avait fait
lors de l'étude des crédits, pour aborder des questions
connexes.
Les employés occasionnels
remerciés
Dans le cas des mesures de développement de
l'employabilité, le ministre a reçu -et j'ai reçu copie de
la lettre qu'il a reçue -une lettre des 540 fonctionnaires
d'expérience qu'il a décidé de remercier, de
congédier parce qu'il a choisi de ne pas demander une dérogation
à son collègue, le président du Conseil du trésor,
pour maintenir ces fonctionnaires en emploi. Ces fonctionnaires, il faut bien
se comprendre, avaient été engagés, bien sûr, sur
une base occasionnelle de trois ans. Leur responsabilité était
d'encadrer les jeunes bénéficiaires d'aide sociale pour faire en
sorte que leur stage en milieu de travail, entre autres, les programmes de
travaux communautaires aussi, le retour aux études, autrement dit que
ces mesures de développement de l'employabilité soient autre
chose que des mesures d'activité où on occupe les gens et
où on a une performance statistique en disant: On a placé tant
d'assistés sociaux.
L'objectif de l'engagement de ces
personnes, le ministre en conviendra facilement, c'était de faire
en sorte que ces programmes donnent un rendement d'employabilité plus
grand, autrement dit qu'on encadre des gens et qu'on s'assure qu'au bout des
mesures ils soient plus employables. Est-ce que le ministre, après avoir
ré-analysé l'ensemble de la question et, compte tenu des
intentions du gouvernement et du ministre à l'égard de la
réforme de l'aide sociale, lui, qui veut généraliser ces
programmes de développement de l'employabilité, qui aura besoin
de personnes d'expérience pour les généraliser et qui aura
besoin de gens qui connaissent les programmes, serait prêt ou est-il
déjà prêt, puisque peut-être a-t-il
déjà repensé à la question, serait-il prêt
tout au moins à revoir le dossier et à maintenir ces gens
à l'emploi en demandant une dérogation au Conseil du
trésor...
La Présidente (Mme Bégin): Merci, monsieur...
M. Charbonneau: ...d'autant plus que ces gens-là ont
acquis de l'expérience?
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député.
M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente. Sur
la question des occasionnels au ministère, j'ai déjà eu
l'occasion de répondre, lors de la période de questions, au
député de Verchères. Je lui indiquerai qu'il y a deux
types de problèmes sur lesquels j'ai eu à me pencher
administrativement, si je peux utiliser l'expression, depuis que je suis
ministre du Travail. Pour les gens qui, à travers nos programmes de
réinsertion sur le marché du travail du ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu étaient jadis -
ce n'est pas de cette clientèle-là qu'on parle -des
bénéficiaires de l'aide sociale qu'on engageait pour des stages
de six mois, j'ai demandé une dérogation au Conseil du
trésor. Dans un premier temps, j'ai obtenu un an et présentement,
je ne pense pas avoir obtenu la réponse, mais je suis confiant d'obtenir
une autre année pour qu'ils aient le même statut que les
occasionnels réguliers du ministère.
M. Charbonneau: Attendez! On ne parle pas des mêmes
personnes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, on ne parle pas...
M. Charbonneau: On parle des bénéficiaires de
l'aide sociale qui participent à des stages en milieu de travail, qui
sont donc des fonctionnaires stagiaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. A ce moment-là,
ces gens savent très bien qu'ils sont occasionnels et qu'au bout de
trois ans - je les préviens immédiatement -je ne retournerai pas
au Conseil du trésor en dérogation pour eux parce qu'ils seront
sur le même pied que les autres.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député.
M. Charbonneau: On ne parle pas de... Ceux-là sont des
stagiaires et des bénéficiaires de l'aide sociale. La question ne
les concernait pas.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les autres sont des contractuels
occasionnels qui ont été engagés comme tels, qui, pendant
qu'ils occupaient un emploi au ministère, ont eu accès aux
concours de promotion et, lorsque des postes permanents ont été
ouverts au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu et dans les autres ministères du gouvernement. Ce que vous me
demandez, finalement, c'est d'obtenir du Conseil du trésor l'addition de
540 postes permanents au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Pour en avoir discuté avec un de vos
collègues quant à l'addition de postes permanents au
ministère du Travail, au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et dans à peu près n'importe
quel ministère du gouvernement, il s'agit peut-être de
l'élément le plus difficile à ajouter. Le président
du Conseil du trésor, comme les présidents du Conseil du
trésor qui se sont succédé sous un gouvernement ou sous
l'autre, travaille présentement, non pas à ajouter à la
fonction publique québécoise des postes permanents, mais à
tenter de réduire, par attrition, le plus doucement possible, avec la
collaboration des syndicats, les postes permanents. Si ces gens avaient
été engagés sous un statut permanent et qu'on brimait
leurs droits, etc., je serais le premier à intervenir. Je pense que
lorsqu'ils ont été engagés, ils connaissaient les
conditions d'engagement. Comme ministre, je m'engage à respecter ces
conditions d'engagement selon lesquelles ils ont été
engagés.
Maintenant, si je garde ces 540 personnes dont les contrats n'arriveront
pas tous à échéance la même journée, je dis
à 540 autres individus dans la société
québécoise: Vous n'aurez pas la chance de venir faire un
apprentissage dans la fonction publique. Et ça, c'est une
décision qui n'est pas facile à prendre parce qu'on a tendance
à mieux connaître ou à connaître personnellement les
gens qui sont déjà en place plutôt que ceux ou celles
qui
pourraient être appelés à venir en place si les
postes étaient évacués à leur avantage.
Pour ceux et celles qui viendront comme employés occasionnels, ce
sera égale-ment une période maximale de trois ans. Cela permet
à des gens de faire un stage, de servir leur province, d'acquérir
une expérience qui fait en sorte que c'est plus facile pour eux ou pour
elles de se retremper dans le secteur privé à cause de
l'expérience qu'ils ont acquise et cela donne la chance à
d'autres jeunes d'entrer. Ce n'est pas la barrière complètement
étanche que certains souhaitent voir établir entre les
générations qui ont eu droit à des acquis dans le
passé et la génération des plus jeunes qui fait face
à cette barrière. On tente de faire en sorte que les postes qui
ont des acquis conservent leurs acquis et que les postes qui sont occasionnels
demeurent des postes occasionnels. Ce n'est pas tout le monde qui a un poste
avec droits acquis et sécurité d'emploi dans la fonction
publique.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Verchères, allez-y.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, je comprends de la
réponse du ministre - pour que les gens qui nous écoutent
comprennent eux aussi très bien - que ce qui est clair c'est que le
gouvernement et le ministre qui vient de nous répondre ont
décidé de congédier 540 fonctionnaires qui ont acquis de
l'expérience et dont la tâche était de s'assurer que les
jeunes bénéficiaires de l'aide sociale, dans leurs mesures de
développement de l'employabilité, soient effectivement plus
employables. Leur travail est un travail d'encadrement. Leurs
responsabilités, dans plusieurs cas, c'était d'éviter
qu'ils deviennent du "cheap labor".
Ce que le ministre nous dit c'est qu'il met un trait sur
l'expérience acquise par ces gens. Et là, il essaie d'être
beau joueur et dit: Écoutez, cela va donner la chance à 540
autres personnes de prendre de l'expérience. L'expérience dont on
parle, c'est l'expérience que l'on veut que les jeunes assistés
sociaux prennent dans des mesures de développement de
l'employabilité; c'est cela qu'on veut. Et ce qu'on voulait - c'est cela
qui était l'essence du programme - c'est que ces fonctionnaires, qui ont
acquis de l'expérience dans l'encadrement, gardent leur emploi parce
qu'ils ont effectivement un travail important à faire. (21 heures)
Vous qui avez essayé de faire accroire aux gens que votre
approche était maintenant de généraliser à tous les
assistés sociaux aptes au travail ces mesures de développement de
l'employabilité, on se rend compte que ce n'est pas sérieux. On
vise une performance statistique. La qualité de l'employabilité
des jeunes assistés sociaux ne préoccupe aucunement le
ministre.
Je vais lui poser une autre question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais répondre à
cette question.
M. Charbonneau: Je m'excuse, Mme la Présidente, mais je
n'ai pas abusé du temps aujourd'hui et j'aurais un autre dossier. Je
considère que la réponse qui m'a été donnée
- je l'ai enregistrée - c'est non. Je dis au ministre que c'est dommage
que ce soit le genre de réponse qu'il me donne. Cela dénote chez
lui une insensibilité au problème des assistés
sociaux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me posez une question
et...
M. Charbonneau: Mme la Présidente.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous mélangez, M. le
député de Verchères...
M. Charbonneau: Je ne mélange pas. C'est...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous mélangez deux
dossiers.
La Présidente (Mme Bégin): Bon. Un instant.
M. Charbonneau: Mme la Présidente.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous ai indiqué
très clairement dans la réponse que je vous ai
donnée...
La Présidente (Mme Bégin): Un instant. M.
Charbonneau: Mme la Présidente.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente, non.
M. Charbonneau: Mme la Présidente, je n'ai pas
terminé.
La Présidente (Mme Bégin): Un instant. M.
Charbonneau: Je n'ai pas terminé.
La Présidente (Mme Bégin): Si vous permettez, je
vais vous demander de terminer rapidement, M. le député de
Verchères, pour permettre... Par la suite, on va faire le partage du
temps le plus équitablement.
M. Chevrette: Mme la Présidente, question de
règlement.
La Présidente (Mme Bégin): Question de
règlement.
M. Chevrette: Oui. J'ai assisté à tout le
débat soit par le truchement de la télévision, soit
directement en Chambre. Je vous avoue que je ne crois pas que ce soit mon
collègue de Verchères qui ait abusé du temps.
D'abord, dans une première intervention, le ministre a pris au
moins 20 minutes. Il me semble, Mme la Présidente, que vous lui avez
donné le temps dévolu au député de Verchères
pour faire ses mises au point. L'étude des crédits ce n'est pas
pour qu'un ministre se congratule, mais pour répondre à des
questions quand elles lui sont posées, pour permettre à
l'Opposition de faire des commentaires aussi sur les crédits.
La Présidente (Mme Bégin): D'accord. Merci.
Une voix: ...question de règlement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): Sur la même
question de règlement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dix minutes.
M. Lefebvre: II y a différentes façons de poser des
questions. On peut poser des questions ou faire des affirmations auxquelles le
ministre aura, je l'espère, le droit de répondre. C'est tout ce
que le ministre demande, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): D'accord. La-dessus,
pour ce qui est du partage du temps, je peux vous dire que j'essaie de tenir le
temps le mieux possible: première intervention du ministre, onze
minutes; l'intervention du député de Verchères, dix
minutes. Par la suite, je tiens à dire que j'essaie de tenir le temps le
plus équitablement possible... S'il vous plaît!
Une voix: ...
La Présidente (Mme Bégin): Selon le temps que j'ai,
moi.
M. Chevrette: Bien... La Westclock fait défaut, n'est-ce
pas? Cela n'a pas d'allure.
La Présidente (Mme Bégin): Là-dessus, je
vais vous demander de poser votre question. Par la suite, je vais
reconnaître une question parce qu'il reste... Bon. Un instant, s'il vous
plaît! On est ici pour débattre les crédits.
Là-dessus, M. le député de Verchères, je vous
reconnais une question. Je vais reconnaître une réponse. Il reste
quatre minutes.
Le programme SEMO
M. Charbonneau: Mme la Présidente, la dernière
question que je voudrais poser au ministre, je lui ai indiqué
tantôt que c'était plutôt connexe à l'aide sociale.
Cela concerne les services externes de main-d'oeuvre.
Je viens d'apprendre qu'il y a une semaine et demie, on a avisé
les organismes SEMO qu'encore une fois leur vie était prolongée
de six mois. Sauf que cela fait depuis juillet 1984 que c'est prolongé
de six mois en six mois. En juillet 1984 jusqu'en décembre 1984, ils ont
eu un avis parce qu'une évaluation se faisait au ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu sur ces organismes,
dans lequel on disait: Votre subvention est accordée pour six mois. En
janvier 1985, cela a été bon jusqu'en juillet 1985. En juillet
1985, ils ont eu droit à une augmentation de 4,5 % jusqu'en juillet
1986. C'était sous l'ancien gouvernement. Et en juillet 1986, cela a
été prolongé de trois mois jusqu'en septembre 1986 et en
octobre 1986, on les a prolongés jusqu'au mois de juin 1987.
On est en juin 1987, ils viennent d'être avisés qu'ils vont
être prolongés jusqu'en décembre 1987. Voulez-vous me dire
quand l'évaluation du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu va finir? Est-ce que vous êtes
conscients que depuis juillet 1984, les gens qui travaillent et qui qagnent
leur vie dans les services externes de main-d'oeuvre n'ont eu droit - vous vous
vantiez tantôt que vous aviez fait preuve de plus d'équité
- qu'à une augmentation de salaire de 4,5 % depuis juillet 1984? Ne
serait-il pas temps premièrement d'ajuster à la hausse les
budgets des programmes SEMO? Deuxièmement, de vous brancher au plus
sacrant et d'arrêter de leur faire peser une épée de
Damoclès de six mois en six mois. Il me semble que le ministère,
après trois ans, doit s'être branché un peu et devrait
être capable d'offrir à ces organismes un contrat à long
terme de cinq ans pour que ces organismes puissent fonctionner, vivre et payer
leurs employés d'une façon décente.
En relation avec cela, je demande au ministre ce qui est arrivé
des 700 000 $ qui ont été économisés par les
programmes parce qu'il y a un certain nombre d'organismes communautaires qui
étaient financés par SEMO qui ont fermé leurs portes. Vous
avez économisé des fonds à partir de ces organismes qui,
semble-t-il, ont fermé leurs portes. Pourquoi ces fonds n'ont-ils pas
été réaffectés à l'ensemble des autres
organismes SEMO? En tout cas, ce sont les informations que j'ai. J'aimerais que
le ministre m'indique ce qui en est exactement.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député de Verchères. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Bégin): II vous reste deux
minutes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Très brièvement,
quant aux assistés sociaux qui sont dans les programmes
d'employabilité que le député a mélangés
tantôt, j'ai déjà indiqué que j'étais
allé une fois au Conseil du trésor pour leur permettre
d'être traités équitable-ment et également avec les
autres employés occasionnels du ministère. Je suis
retourné une deuxième fois. J'ai eu gain de cause la
première fois. Je suis retourné une deuxième fois.
J'entends faire en sorte que ces assistés sociaux aient une
expérience aussi valable, aussi longue, aussi profonde que les autres
occasionnels du ministère, de façon qu'il n'y ait pas de
discrimination au sein du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
M. Charbonneau: Vous changez les clientèles...
La Présidente (Mme Bégin): S'il vous
plaît!
M. Charbonneau: Vous faites exprès pour mêler tout
le monde.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiendrais à ce que le
député, lorsqu'il me parle...
M. Charbonneau: On ne parle pas des mêmes personnes, et le
ministre le sait.
La Présidente (Mme Bégin): S'il vous
plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis d'accord, il y a deux
groupes de personnes...
M. Charbonneau: C'est sacrant de vous entendre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a deux groupes de
personnes...
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député, on vous a entendu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...mais je voulais
démêler ce que le député de Verchères avait
mêlé tantôt.
M. Charbonneau: C'est vous qui êtes mêlé et
qui faites exprès pour mêler tout le monde.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant au programme SEMO,
j'indiquerai que je ne tiens pas à assumer complètement la
responsabilité des gestes, en tout cas de ceux qui ont été
posés entre juillet 1984 et décembre 1985. Je sais que le
député faisait partie de ce gouvernement au moins comme
député. À ce moment, s'il n'était pas
écouté, ce n'est pas ma faute. Depuis le temps où nous
avons assumé les responsabilités au gouvernement en
matière de placement de façon à éviter le double
emploi, entre autres, avec le gouvernement fédéral, nous avons
fait en sorte de ne plus effectuer d'activités de placement comme telles
dans les centres de Travail-Québec. Nous avons voulu maintenir une
activité de placement qui est de la juridiction du Québec pour
les gens qui en avaient le plus besoin dans notre société, pour
les handicapés, pour les gens qui avaient des problèmes de
toxicomanie, pour les femmes qui avaient passé plusieurs années
à la maison et qui souhaitaient retourner sur le marché du
travail.
Maintenant, nous avons hérité, si je peux m'exprimer
ainsi, de quelque 63 SEMO. Sauf un SEMO depuis que nous avons pris la direction
de la province, qui a mis fin à ses activités de lui-même,
les autres sont tous demeurés en activité. Il est vrai que nous
procédons à l'évaluation de la performance des SEMO. Ces
services externes de main-d'oeuvre réussissent-ils vraiment à
placer de la main-d'oeuvre? On tente de tenir compte au maximum, dans
l'évaluation que nous faisons de ces SEMO, du degré de
difficulté qu'il y a à placer des gens qui sont les plus
difficilement plaçables dans notre société. On ne leur
demande pas d'être aussi performant que les centres Travail-Québec
l'étaient à l'époque ou que les bureaux de Travail Canada
l'ont déjà été. On leur demande, par exemple,
lorsqu'on les compare les uns aux autres de bien se mesurer. On les incite
à placer des gens qui ont des handicaps, qui ont des problèmes de
retour au travail.
Mme la Présidente, vous aurez compris de ce débat que le
gouvernement a fait beaucoup au cours de l'année pour
rétrécir la marge qui sépare les gens qui ont les plus
faibles revenus dans notre société des autres. Nous continuerons
dans cette voie. L'année qui s'en vient est une année importante.
Nous avons besoin de la collaboration de l'Opposition si nous voulons
réussir à mettre en place pour le bénéfice de
l'ensemble de la société un programme de sécurité
du revenu qui fera en sorte que toutes les clientèles, en tenant compte
cette fois-ci de la fiscalité, ce qui avait été
négligé par le précédent gouvernement, soient mieux
desservies par l'ensemble de leurs élus. Merci.
La Présidente (Mme Bégin): Merci. Merci...
M. Charbonneau: ...est payé par le Parti libéral du
Québec.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
Le temps étant maintenant
écouté, nous allons remercier les personnes qui se sont
jointes aux parlementaires. Nous allons suspendre quelques instants pour leur
permettre de se retirer.
(Suspension de la séance à 21 h 8)
(Reprise à 21 h 15)
Loisir, Chasse et Pêche
La Présidente (Mme Bégin): A l'ordre, s'il vous
plaît! Nous reprenons l'étude des crédits
supplémentaires. Je vais céder la parole, pour quelques minutes,
au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, pour ses remarques
préliminaires. M. le ministre.
Remarques préliminaires
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. On m'a
demandé, à l'intérieur de cette période
d'étude des crédits supplémentaires, d'être
interrogé par le député de Joliette qui remplace la
députée de Marie- Victorin, laquelle, malheureusement, a dû
s'absenter pour des raisons très importantes. Alors, je vais m'en tenir
aux questions que me posera mon collègue de Joliette et je suis
prêt à répondre aux questions.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente. Je n'ai pas
l'intention de questionner le ministre très longuement sur les
crédits additionnels en ce qui regarde les hors normes permettant
à des dizaines, même à des centaines... Pour avoir
été ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, pour
avoir signé, moi aussi, des milliers et des milliers de chèques
d'hors normes, ce n'est pas l'objet de mes propos. On sait qu'on peut en
profiter, lors de l'étude de ces crédits, pour questionner le
ministère sous ces différents aspects.
Le loisir culturel
II y a un point sur lequel j'aimerais avoir des explications de la part
du ministre. Le 10 juin dernier, les organismes de loisir culturel
lançaient un cri d'alarme. J'apprécierais que le ministre nous
dise un peu ce qui se passe dans le loisir culturel pour que ces organismes
lancent des cris d'alarme, dans un premier temps. Ensuite, les organismes de
loisir culturel sont aux abois, le 11 juin, donc deux jours consécutifs
où on a pu retrouver, dans les journaux québécois, un dans
Le Soleil, je crois, et l'autre dans La Presse; le 10 juin, c'était dans
La Presse, c'était marqué "réduction du tiers de leur
budget" et on pouvait retrouver également "une coupure de près de
40 %" en ce qui regarde le journal Le Soleil.
Est-ce que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche peut
me fournir quelques explications sur ces cris d'alarme, sur ces situations
où les gens se retrouvent aux abois?
M. Picotte: Cela va prendre quelques minutes.
M. Chevrette: Oui, oui.
La Présidente (Mme Bégin): Oui, oui, vous pouvez...
M. le ministre.
M. Picotte: Mme la Présidente, je dirai au
député de Joliette que concernant ce qu'on appelle les programmes
culturels au sein de mon ministère... Comme le député le
sait sans doute, dans la foulée de ce que le gouvernement a
décidé de faire, soit d'assainir les finances publiques, le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, comme tous les
autres ministères au Québec, a dû accepter d'avoir dans son
budget moins d'argent, si bien qu'il y a eu, quand même, on doit le dire,
cette année, tout près d'une dizaine de millions de dollars de
moins d'affectés au ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. Il a fallu, à ce moment-là, examiner chacun des
programmes que nous avions dans nos ministères respectifs. (21 h 20)
Or, il y avait un programme qu'on appelle le programme culturel, dans
lequel on consacrait 475 000 $. On se rappellera -celui qui m'interroge le sait
aussi bien que moi - que souvent, dans des manifestations d'ordre culturel, ce
que les organismes font généralement c'est qu'ils viennent au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche demander un
montant d'argent pour l'organisation de manifestation culturelle. Le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche consent à
accorder un montant qui varie généralement entre 1000 $, 1500 $
et 2000 $. Les mêmes organismes la plupart du temps s'adressent au
ministère des Affaires culturelles et demandent au ministère des
Affaires culturelles s'il n'y aurait pas possibilité d'obtenir des
montants d'argent pour telle et telle organisation. Ce qui fait que souvent on
se retrouvait à être deux ou trois ministères à
subventionner soit des troupes de théâtre, soit des organismes qui
oeuvraient dans le domaine culturel.
À partir de ce moment nous avons décidé, lors du
Sommet des loisirs, que puisqu'il fallait examiner ou réenvisager la
possibilité carrément de se délester de certains
programmes on a dit: En ce qui concerne le programme des affaires culturelles
il serait préférable, selon nous, que ces organismes puissent
s'adresser au
ministère des Affaires culturelles. Nous avons entrepris une
discussion, mon sous-ministre et le sous-ministre du ministère des
Affaires culturelles pour voir s'il n'y avait pas possibilité d'en venir
à une entente et de voir si l'un ou l'autre des ministères ne
pourrait pas agir dans ce sens.
À la suite du Sommet national sur les loisirs où nous
avons fait des consensus dans tous les domaines on m'a fait part que finalement
il y aurait danger de se retirer complètement cette année, de ne
pas mettre un sou dans ce programme. Le temps que les ministères
puissent s'ajuster cela pourrait être un danger de mettre en péril
certains organismes. J'ai consenti au moment du sommet à faire la
demande au ministre des Finances de m'accorder des budgets additionnels pouvant
constituer un petit budget dans ce programme dit culturel permettant à
certains organismes de pouvoir bénéficier d'une aide quelconque
durant cette année budgétaire. Nous avons donc consenti, avec mon
collègue le ministre des Finances, dans ce 1 500 000 $ qui a
été dévolu à mon ministère par
crédits additionnels, de prendre un montant de 120 000 $ auxquels on
pourrait accepter certains projets de manifestation culturelle mais que ces
projets passeraient par les fédérations. Cela veut dire que cette
année, en principe, il y aura 120 000 $ qui seront affectés
à ce programme comparativement à 475 000 000 $.
L'intention au départ était tout simplement de demander au
ministère des Affaires culturelles d'assumer certaines
responsabilités de ce côté. Avant que l'arrimage se fasse,
nous avons consenti tout de même cette année à garder par
budgets additionnels un certain montant d'argent. Le député de
Joliette sait très bien que, dès qu'il y a une certaine coupure
dans n'importe lequel domaine du loisir ou n'importe quelle manifestation, et
dès qu'on accepte comme principe de donner un montant de 25 000 $
à une manifestation quelconque durant l'année et que
l'année suivante parce que cette manifestation a bien performé
ou, parfois aussi, a fait des profits, on leur dit: Ce ne sera plus 25 000 $ on
va vous donner 20 000 $ parce qu'on a d'autres demandes aussi et on veut
partager le gâteau. C'est évident que dès qu'on veut
diminuer les subventions il y a des cris d'alarme. Je pense que c'est la
situation et il faut vivre avec cette situation. On ne peut pas à la
fois assainir les finances publiques et continuer de donner les montants
d'argent ou même d'indexer dans certains cas. Nous ne sommes pas à
l'époque où il faut indexer.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Mme la Présidente, vous me permettrez de
diverger d'opinion avec le ministre sur le loisir socioculturel.
Personnellement je ne crois pas que ce soit l'apanage des affaires culturelles
quand on parle de loisirs culturels. Je prétends davantage qu'on doit
reconnaître - je pense que cela avait été reconnu - la
dimension du loisir culturel au Québec. Ce n'est pas tout le monde qui
joue au baseball, ce n'est pas tout le monde qui joue au hockey, ce n'est pas
tout le monde qui s'adonne aux sports et qui a des loisirs. On est allé
très loin dans les définitions du loisir au Québec, on a
parlé de loisirs scientifiques, de loisirs touristiques, de loisirs
sportifs et de loisirs culturels.
Il y a de plus en plus d'adeptes des loisirs culturels. Je suis
énormément surpris que le ministère du Loisir qui touche
le loisir culturel soit porté à se départir de cette
responsabilité auprès de ces groupes pour confier cela au
ministère des Affaires culturelles beaucoup plus reconnu pour l'aspect
professionnel ou le développement de la culture alors que c'est beaucoup
plus une occupation vis-à-vis d'un loisir de type culturel. Il y en a de
plus en plus qui pointent ici et là. Il me semble - vous me permettrez
d'être en désaccord... Je vais démontrer que... Je le dis
comme je le pense. Ce n'est pas directement une attaque à l'endroit du
ministre, mais à l'endroit du gouvernement.
Couper dans le loisir, au moment où on est dans une
société, entre vous et moi, qui négocie de plus en plus
des contrats avec des réductions de temps de travail, je suis de plus en
plus surpris qu'on coupe dans l'organisation du loisir. Il me semble qu'au
contraire, face aux problèmes que vivent les jeunes dans le domaine des
services sociaux, des centaines de millions de dollars que l'État
injecte dans les services sociaux, pour la délinquance - quand on sait
qu'un jeune dans un pavillon de détention nous coûte 60 000 $ par
année. Je suis très surpris qu'un gouvernement fasse des
ponctions dans le domaine du loisir qui vise précisément à
occuper les temps libres de ces jeunes et qui empêche par le fait
même qu'un bienfait en termes de coût social énorme... Je
suis énormément surpris de voir les ponctions majeures qu'on a
faites dans ce ministère en matière de loisir non seulement
socioculturel... Je regardais tantôt...
J'arrive tout de suite au programme de soutien aux municipalités:
disparu. Une petite municipalité de 700 ou 800 âmes, qui avait un
indice de richesse composé de moins de 125, pouvait avoir quelques
centaines de dollars. Le seul moyen qu'elle a maintenant, c'est quoi? Le volet
incitatif pour le regroupement, pour l'organisation des jeunes intermunicipale,
où est-il? Il n'est plus là. Le loisir innovateur, il n'y a plus
rien. Où est-ce qu'on s'en va? Il me semblait que ce
ministère avait une vocation primordiale vis-à-vis de
l'organisation des temps libres, de l'organisation du loisir des jeunes. Je
suis surpris.
Je pense que le ministre a eu le temps de préparer sa
réaction au moment où j'ai fait ma petite envolée, mais
c'est parce que j'y crois tellement fondamentalement que je voudrais qu'il
retrouve toute la flamme, tout le verbe pour se battre avec acharnement
auprès du Conseil des ministres, auprès du Comité des
priorités, auprès du Conseil du trésor, pour
récupérer l'argent perdu. Cela n'a pas de bon sens dans le
contexte social dans lequel on vit qu'on ampute le domaine du loisir.
Après cela, on dit: Les jeunes, c'est effrayant, ça court les
tavernes. Les jeunes, c'est-y effrayant, ça fume. Arrêtez de
couper dans le loisir, organisez-les, ils vont fumer moins et vont moins courir
les tavernes. C'est ce que je pense.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Picotte: Mme la Présidente, il ne faudrait pas que la
discussion que fait mon collègue de Joliette qui est enflammé -
cela va de soi, parce qu'il retrouve sa flamme d'antan comme ex-ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche - laisse entendre qu'il n'y a plus de
programmes socioculturels chez nous. Je devrai lui dire, d'abord, qu'au Sommet
national du loisir, il y a eu admission de part et d'autre qu'au niveau
régional, il y avait souventefois duplicata dans la demande d'aide,
c'est-à-dire qu'on s'adressait à la fois au MLCP et aux Affaires
culturelles.
Il y a plus que cela, comme ministre du Tourisme, je peux même
dire que ces organismes s'adressaient chez nous parce qu'on essayait de faire
la démonstration que cela incitait quelques touristes de
l'extérieur à venir à nos activités. Il y avait
parfois trois demandes: ministère du Tourisme, ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, ministère des Affaires
culturelles. Dans bien des cas, la générosité des
ministres était toujours là pour dire: Oui, on va donner un petit
montant au loisir. Le ministre du Tourisme, quand c'était un autre
ministre, disait: On va donner un montant au tourisme sans que l'autre sache ce
que le ministère du Loisir avait fait. C'est plus difficile maintenant
au Loisir et au Tourisme parce que c'est le même ministre qui porte ces
deux chapeaux différents. (21 h 30)
Le ministre du Loisir savait qu'il avait donné, quelques semaines
avant, une subvention. Il disait: Un instant, on en a donné une; il ne
faut pas faire en sorte qu'on en donne une deuxième. Mais le ministre
des Affaires culturelles ne savait pas nécessairement que le ministre du
Loisir ou le ministre du Tourisme en avait donné une. Et il y avait
répétition. Cela a été admis amplement qu'il y
avait répétition.
Concernant les programmes à mon ministère, je dirai au
député de Joliette que nous consacrons encore cette année
aux organismes provinciaux dits culturels un montant de 1 083 200 $, soit une
augmentation de 38 716 $ par rapport à l'an passé, soit 3,7 %.
Dans l'ensemble culturel, y compris les programmes, les projets et tout cela,
il y a là, je le conçois et je le mentionne, une diminution de
438 000 $. Oui, effectivement. Mais le ministère n'a pas abdiqué
sa vocation de loisir culturel puisqu'on y consacre encore, même en
périodes difficiles, un montant de 1 083 200 $.
C'est évident - le député de Joliette le sait -
qu'il s'agit d'une année par rapport à une autre. Vous avez
été titulaire de ce ministère pendant deux ans et demi.
Vous avez eu juste le temps de connaître deux festivals d'affilée
dans le même domaine. Et d'autres, oui. Quand je dis deux, c'est deux
années différentes. Par exemple, le festival de folklore de
Drummondville, vous l'avez vécu une année et, l'année
suivante, vous avez vu qu'ils sont revenus à la charge en vous demandant
encore une subvention en démontrant qu'il y avait un caractère
national, en démontrant qu'il attirait des touristes, en
démontrant tout ce qu'il avait à démontrer.
Vous avez sûrement vécu l'expérience parce que,
dès que vous aviez donné 25 000 $ une année et que vous
vous proposiez, l'année suivante, d'en donner 20 000 $, il y avait des
pleurs et des grincements de dents. Même si, comme ministre, vous
étiez susceptible de constater qu'il s'était implanté cinq
ou six autres carnavals, festivals ou activités, et que d'autres
collègues vous demandaient: Oui, mais, cette année, nous autres,
on fait une première expérience dans le festival de l'oie, est-ce
que vous pourriez... ou le festival de...
Une voix: ...
M. Picotte: Le député de Mercier est friand de ces
choses-là. Il m'écrit de temps à autre. Il me parle de
temps à autre. On s'entend bien d'ailleurs. On s'écrit
positivement. Même le député de Joliette aussi, on
s'écrit positivement. À partir de ce moment-là, le
ministre a tendance à dire: Écoutez, je n'ai pas plus de budget,
mais j'ai dix demandes additionnelles. Pour satisfaire d'autres
collègues, je suis obligé de couper 2000 $ à l'un, 3000 $
à l'autre. Comme il y a eu une bonne performance de la part de telle
association, tel organisme, qui risque d'être capable de s'autofinancer
un peu plus fort, on essaie de lui en enlever un peu pour
en donner à un autre qui veut prendre son envol. Mais cela fait
toujours des pleurs et des grincements de dents. Ne laissons pas croire, mon
cher collègue, comme vous le savez si bien - je sais que ce
n'était pas là vos intentions, vous connaissant personnellement -
qu'il n'y a plus de programmes de loisirs culturels au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Au contraire, il reste 1 083 200 $.
Mais je n'ose pas le dire trop fort parce que j'aurais de la place pour en
dépenser 3 000 000 $.
M. Chevrette: Non, je n'ai pas voulu laisser croire qu'ils
n'existaient pas. J'ai parlé de ponction de 33 % dans un article et de
40 % dans l'autre. C'est clair que je ne voulais pas le prétendre. Ce
dont j'ai parlé, c'est l'abolition de certains programmes comme le
soutien au loisir municipal. Ce qui m'inquiète, c'est qu'au moment
où la reprise économique s'effectue, au moment où on a le
plus gros budget de dépenses jamais obtenu au Québec, 30 000 000
000 $, ma surprise, c'est de constater que les gouvernements - je ne dis pas
cela pour vous nuire, je vous dis cela pour vous aider - effectuent des
ponctions dans le domaine du loisir et, à mon point de vue, ce sont des
erreurs fondamentales. Moi aussi, j'ai eu à défendre des
crédits et je sais que ce n'est pas facile. Je sais que ce n'est pas
facile de vendre à certains collègues, par exemple, que le
loisir, c'est important. Il y en a qui disent: Oui, mais de la balle, des
terrains de jeux, ce n'est pas nécessaire. Ce sont les mêmes
individus, par exemple, qui vont décrier les jeunes ensuite en disant
qu'ils ne s'organisent pas, qu'ils ne s'amusent pas, qu'ils versent dans
certains vices de société. On oublie le coût social et
c'est là-dessus que j'ai voulu attirer l'attention du ministre. Cela m'a
toujours affolé, parce que j'ai eu la chance de vivre aux deux
ministères qui, sans le savoir, pouvaient probablement avoir une
incidence l'un sur l'autre. Tomber dans la Santé et les Services
sociaux, regarder les problèmes que vit la jeunesse
québécoise au niveau des services sociaux, après avoir
vécu deux ans et demi au niveau de l'organisation du loisir, ça
nous permet de voir jusqu'à quel point les coûts sociaux sont
prohibitifs au Québec. C'est ça que je veux souligner. Je suis
surpris qu'on n'investisse pas davantage dans l'encadrement, dans le loisir
sous toutes ses formes, loisir sportif, loisir culturel, loisir touristique.
Kino-Québec! Les gens se plaignent qu'ils souffrent de petits maux
d'estomac. Bien sûr, on les empêche de se tenir en forme. On coupe
la moitié, 50 % dans Kino-Québec, un programme qui ne
coûtait à peu près rien et qui avait commencé
à faire un travail gigantesque même au sein de la moyenne et de la
grande entreprise québécoise. C'est ça que je ne comprends
pas. Vous étiez supposés faire sacrement mieux que nous autres et
vous êtes en train de tout défaire. Qu'est-ce qui se passe?
M. Picotte: Ah oui, on va vous répondre
là-dessus.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Picotte: Je pense qu'on est en train de faire pas mal mieux
que mon prédécesseur de ce côté-là. Du
côté de Kino-Québec, effectivement, et j'en suis
profondément convaincu, mais encore là c'est bien
évident... Il faut regarder ça sous deux angles
différents. Je serai d'accord avec le député de Joliette
sur beaucoup de phrases qu'il a dites tantôt. J'ai coutume de dire
à mes collègues: Dans une époque difficile où on a
des compressions budgétaires, où on veut assainir les finances
publiques, il est bien sûr important qu'on se dise ensemble: II faut
avoir une médecine de qualité supérieure, il faut avoir,
dans les salles d'urgence, toutes les facilités, il faut faire en sorte
que nous ayons les meilleurs équipements dans nos hôpitaux pour
bien traiter les Québécois et les Québécoises mais
je suis persuadé que ce n'est pas en coupant dans les loisirs qu'on va
faire en sorte de diminuer les salles d'urgence. Au contraire! Ne mettez plus
de loisirs, demain matin, au Québec et vous allez doubler le nombre de
personnes dans les salles d'urgence. C'est évident. Là-dessus, je
suis entièrement d'accord. C'est pour ça que je suis un peu
chagriné quand je vois quotidiennement le député de Gouin,
représentant de l'Opposition, poser une question sur les salles
d'urgence tous les matins comme si c'était une catastrophe nationale en
voulant inciter le Parlement à vouloir toujours en mettre plus dans les
hôpitaux. C'est un trou sans fin, on n'en mettra jamais assez. Le
député de Joliette le sait très bien. J'ai un centre
hospitalier dans mon milieu et si je voulais l'équiper demain matin de
la même façon, pour fournir une médecine de même
qualité que celle fournie à Québec ou à
Montréal, donnez-moi 200 000 000 $ et je n'en ai pas encore assez pour
équiper mon centre hospitalier, chez nous. C'est évident que, si
on met 200 000 000 $ dans un centre hospitalier chez nous pour bien
l'équiper, il faut qu'ils partent de quelque part, à moins que
vous et moi décidions de prendre notre bâton du pèlerin et
d'aller convaincre les Québécois qu'ils doivent doubler le
montant de taxes qu'ils ont à payer. Je pense que si on faisait
ça il y aurait quelqu'un d'autre, chez nos amis d'en face, qui se
lèverait pour dire que c'est bien épouvantable d'avoir
augmenté les taxes.
Bon! On s'entend bien là-dessus, on se connaît depuis
longtemps. On s'entend bien
sur cette prémisse-là. Ce qu'il faut faire, c'est
d'essayer de garder un juste équilibre. Prenons le cas de
Kino-Québec puisque vous y avez fait référence. Il y avait
51 modules de Kino-Québec au Québec. Il y avait donc 51
permanents qui travaillaient pour Kino-Québec. Il faut dire que
lorsqu'on parle de modules de Kino-Québec on veut dire inciter les
Québécois et les Québécoises à la pratique
de l'activité physique sous toutes ses formes, pour se garder en
santé. C'est dommage qu'on n'ait pas eu un module de Kino-Québec
auprès des membres de cette Assemblée. Il a déjà
été question qu'on fasse un peu de... On n'a pas tellement le
temps, nous autres, de s'occuper de notre santé ici. On siège
à des heures impossibles et ce n'est pas d'hier, ça date
déjà depuis bien longtemps. On a moins le temps de s'occuper de
notre santé. C'est malheureux mais... Ce qu'il faut faire c'est
d'inciter les Québécois et les Québécoises à
avoir le plus possible des pratiques d'activité physique. (21 h 40)
Compte tenu d'un budget réduit, on a dit: Quelle pourrait
être la façon de continuer dans la même veine et que le
programme soit aussi bon, sinon meilleur, parce que notre objectif, c'est
d'être meilleur? Il y avait les services de santé communautaire
que le ministre... Celui qui est en face de moi et qui m'interroge sait
très bien de quoi je parle quand je fais toutes ces comparaisons. Il a
eu l'avantage d'avoir été ministre de la Santé et ministre
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Je ne lui demanderai pas lequel
des deux il a préféré, mais je sais lequel de ces deux
ministères il a préféré dans sa vie politique. Il
me confirmera cela en arrière du fauteuil du président
tantôt. Je suis convaincu d'avance lequel il va... Il a connu les
départements de santé communautaire. Il sait très bien que
les départements de santé communautaire, au Québec, sont
situés dans toutes les régions du Québec. Est-ce que vous
me donnez le consentement pour finir mon petit laïus, VI. le
député de Joliette?
La Présidente (Mme Bégin): II y a d'autres
questions qui doivent venir du...
M. Chevrette: On se donnera un consentement mutuel.
M. Picotte: D'accord. On se donnera un consentement mutuel, Mme
la Présidente. Pour autant qu'il y a un consentement, pour vous, cela
va.
La Présidente (Mme Bégin): Pour moi, cela va.
M. Picotte: Tout ce qu'on peut dire, c'est que les
départements de santé communautaire qui travaillent sur le
tabagisme, sur l'alcoolisme et sur la nutrition pour inciter les
Québécois et les Québécoises à moins fumer,
à moins consommer d'alcool et à avoir une diète mieux
équilibrée travaillent déjà pour
l'amélioration de la santé des Québécois et des
Québécoises. Ils nous ont fait part du fait qu'ils seraient
disposés à accueillir des modules de Kino-Québec chez eux
pour travailler... Il y a déjà une foule de spécialistes
à l'intérieur des DSC. On va utiliser ces spécialistes en
y ajoutant nos spécialistes de Kino-Québec - et on en a dans
chacune des régions du Québec - pour faire en sorte d'avoir une
meilleure campagne. Je suis convaincu, cher collègue, que
Kino-Québec, d'ici douze mois, aura une meilleure performance que le
programme qui existait parce qu'il y a plus de ressources à
l'intérieur des DSC pour diffuser et aller convaincre les
Québécois d'améliorer leur santé, pour aller
convaincre les Québécois et les Québécoises d'avoir
de bonnes habitudes de vie, favorisant la meilleure santé des gens.
À partir de ce moment-là, je suis convaincu que ce sera un
programme additionnel. La seule lacune, j'en conviens - cela me chagrine, mais
je suis obligé de vivre avec - c'est qu'il y aura 19 modules de
Kino-Québec de moins. Personne ne sera privé de module, sauf
qu'il y aura 19 employés permanents qui ont été
embauchés - dans certaines régions, on avait deux et trois
modules Kino-Québec - et qui vont perdre leur emploi. C'est cela, la
gravité du... On ne peut pas, à la fois, assainir les finances
publiques et vouloir donner la même qualité de services. C'est
cela, le problème. Je suis persuadé - et je suis prêt
à le comparer avec n'importe qui - que d'ici douze mois ce programme
sera plus efficace qu'il l'était, non pas parce que les gens qui
étaient là n'étaient pas efficaces, mais parce que les
départements de santé communautaire ont plus de ressources
à offrir à l'ensemble de la population.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Mercier, vous aviez une question.
Budget pour les groupes ethniques
M. Godin: Mme la Présidente, ma question porte sur les
fêtes multiethniques. A l'époque où j'étais à
l'Immigration, il y avait un budget au MLCP pour les fêtes
multiethniques. Est-ce que ce budget existe encore, Mme la Présidente?
Il y avait un programme pour les fêtes multiethniques au
ministère. Est-ce qu'il y a encore un budget pour cela? C'est ma
première question. J'en aurai d'autres ensuite.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Godin: Cela a l'air compliqué.
M. Picotte: À l'intérieur de ce programme, il y
avait un montant d'argent de 60 000 $ consacré à des fêtes
ethniques ou multiethniques. On me dit que, si les mêmes personnes ou les
mêmes associations qui organisaient ces fêtes s'inscrivaient pour
un projet à l'intérieur des fédérations, elles
seraient admissibles à des projets pour obtenir des fêtes. C'est
évident qu'il y a un peu moins d'argent dans le programme, donc...
M. Godin: Dans quelles fédérations, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Bégin): Oui, M. le
député de Mercier.
M. Godin: Des loisirs?
M. Picotte: On parle de chorales, de théâtre, de
musées et c'est à l'intérieur de fédérations
dites de loisir culturel.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Mercier.
M. Godin: Donc, on pourrait recommander, parce que ces groupes
ethniques me téléphonent encore...
M. Picotte: Pour avoir des projets?
M. Godin: Pour avoir des renseignements et des lumières
quant aux budgets qui existent dans divers ministères dont le
vôtre.
M. Picotte: Ils pourraient présenter des projets et ils
pourraient être évalués avec les montants d'argent qui sont
disponibles. Il n'est pas impossible que ces projets soient
acceptés.
M. Godin: En passant par ta Fédération des loisirs
culturels.
M. Picotte: C'est cela.
M. Godin: Bon. Est-ce qu'il y a une coordination quelconque, ce
dont je rêvais à l'époque, entre le ministère des
Communautés culturelles et de l'Immigration et le vôtre sur ces
questions, sur ces fêtes?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Picotte: De ce côté, il n'y a pas eu de
discussions entre le ministère des Communautés culturelles et de
l'Immigration et le nôtre face aux problèmes que vous soulevez. Il
y a déjà eu des discussions d'entreprises avec ma
collègue, la ministre des Affaires culturelles, mais jusqu'à
maintenant je pense qu'il n'y a eu aucune discussion d'entreprise avec le
ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration
à cet égard.
M. Chevrette: Je voudrais conseiller au ministre de le faire.
M. Picotte: J'ajouterai - 30 secondes -qu'ils sont admissibles
aussi dans le programme des fêtes régionales.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: C'est cela. Je vous conseille, M. le ministre, de
parler à Mme Robic parce qu'il y a des groupes ethniques qui en avaient
eu les années antérieures et qui ont été
coupés cette année. C'est le budget hors norme du
député qui sauve les fêtes pour les groupes ethniques.
Donc, je pense bien que si cela existait il y aurait lieu d'harmoniser. Si vous
êtes capable d'harmoniser sur le plan socioculturel, cela pourrait
être intéressant de regarder la complémentarité qui
peut exister entre... En tout cas, il doit sûrement y avoir un programme
discrétionnaire pour les ethnies aussi pour permettre
précisément à ceux qui étaient soutenus dans un
programme qu'on ne les retrouve pas tous ailleurs. C'est après qu'on est
mal pris nous aussi parce que, les groupes augmentant, le budget n'augmente pas
nécessairement à ce rythme et on sait à quel rythme
augmentent les groupes. S'il y a des secteurs qui sont amputés
complètement, cela crée des problèmes majeurs.
M. Picotte: Mme Béland, mon attachée politique qui
est ici présente, va prendre bonne note de cela et va entrer en
discussion avec le cabinet de Mme Robic pour qu'on puisse établir une
discussion possible. Il y aura sans doute lieu peut-être de trouver des
fonds pour venir en aide à des organismes semblables à cela.
M. Godin: ...Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Mercier.
M. Godin: Si le ministre, mon ami le député de
Maskinongé, réalisait ce projet de regrouper les efforts de son
ministère et ceux du ministère de Mme Robic pour qu'il y ait une
seule porte, un guichet unique, comme on dit dans le domaine du commerce et des
affaires, auquel les groupes ethniques pourraient s'adresser pour avoir de la
part du MLCP aussi bien que de l'Immigration une aide pour leurs fêtes
ethniques annuelles ou leurs camps d'été ou je ne sais quoi,
à mon avis, ce serait une bonne solution sur le plan
budgétaire. Je recommande donc que le vieux rêve que
j'avais se réalise sous mes successeurs. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Picotte: Je prends bonne note de ce que vient de me dire le
député de Mercier. C'est la raison pour laquelle je pense que
l'an passé, c'est-à-dire au mois de mars, on s'était
entretenu d'une certaine troupe ou je ne sais quoi et c'est le budget hors
norme du ministre qui a fait en sorte de venir en aide à l'organisme
qu'on m'a soumis, mais je suis toujours disposé, mon cher
collègue, à vous écouter bien attentivement dans vos
doléances.
M. Godin: Ce en quoi je rends grâce et hommage au ministre
du MLCP, député de Maskinongé.
M. Picotte: Merci.
M. Godin: Pour l'instant.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette.
Régie de la sécurité dans les
sports
M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente. Quelles sont les
intentions du ministre par rapport à la Régie de la
sécurité dans les sports?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre.
M. Picotte: J'ai...
M. Chevrette: ...la Régie de la
sécurité...
M. Picotte: Le député de Joliette a sans doute
suivi avec beaucoup d'attention le dépôt que j'ai fait
dernièrement de la politique globale du sport au Québec. Je pense
que j'ai confirmé, à l'intérieur de cette politique
globale du sport, le râle important que joue la Régie de la
sécurité dans les sports au Québec. Je me dis que tant et
aussi longtemps qu'on n'aura pas fait en sorte de discuter avec toutes les
fédérations, qu'on n'aura pas mis en place nos mécanismes
de sécurité dans tous les domaines des sports la Régie de
la sécurité dans les sports est très importante et doit
continuer d'agir de la façon dont elle le fait présentement.
On se souviendra très bien, on l'a tous déploré, en
plus c'était indiqué dans les journaux, lors de la grande
série... Je vais aller dans le sport professionnel, mais quand
même. Si on le déplore dans le sport professionnel, à plus
forte raison dans le sport amateur. Dans la dernière série de
hockey entre les Canadiens et les Nordiques et d'autres équipes de la
Ligue nationale, on a déploré à pleines pages de journaux
le manque de sécurité, la violence dans les sports. On a un
organisme chez nous qui s'appelle la Régie de la sécurité
dans les sports qui travaille ardemment à mettre plus de
sécurité dans tous les domaines. Par exemple, pour le ski
présentement, ils travaillent avec les propriétaires de stations
de ski pour développer une façon d'inciter les
Québécois, les Québécoises et ceux qui viennent
nous visiter à avoir la meilleure des sécurités sur les
pentes de ski. (21 h 50)
Notre Régie de la sécurité dans les sports est
très performante. Je serai l'hôte, à la fin du mois de
septembre, de la prochaine conférence fédérale-provinciale
où je recevrai tous mes collègues de l'ensemble du Canada, des
provinces canadiennes, de même que le représentant du gouvernement
fédéral, M. Jelinek, à une conférence
fédérale-provinciale. Mes collègues m'ont demandé,
dernièrement, d'inscrire à l'ordre du jour des discussions sur la
Régie de la sécurité dans les sports parce qu'ils
voudraient prendre notre modèle de régie pour en implanter chez
eux. Ce n'est pas au moment où on va être le modèle de
toutes les autres provinces qu'on va décider chez nous de dire: La
régie, on doit l'abolir. Si un jour, quand elle aura tout fini son
travail, quand tout sera bien balisé, ça ne devient plus
nécessaire d'avoir une régie, mais que ça devrait
plutôt être une instance à l'intérieur du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, on verra ce
qu'on devra faire, mais pour le moment la Régie de la
sécurité dans les sports joue un rôle très
important, et je tiens à l'en féliciter.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Avez-vous réglé le problème
avec la Commission athlétique de Montréal?
M. Picotte: Tout est réglé. Ils se sont bien
entendus. C'est à la suite de nos discussions sur les sports dits de
combat, le kick-boxing, la boxe et la lutte. Le seul problème qu'on
avait était au sujet de la lutte. On s'est entendu - il n'y a pas eu un
combat trop serré - pour bien catégoriser la lutte et la boxe, et
voir si ce sont vraiment des sports dits de combat. Après avoir fait
l'arrimage de toutes ces discussions, la commission athlétique nous a
été d'une précieuse collaboration. Même je pense
qu'on va faire appel aux commissaires de la commission athlétique,
à certains arbitres
pour venir nous aider à mettre en place tout ce projet du
côté des sports de combat. Je pense qu'il y a eu une collaboration
très intense et très étroite entre la Commission
athlétique de Montréal et la Régie de la
sécurité dans les sports. Les règlements sur lesquels on
s'est entendu seront publiés dans un avenir rapproché.
Il y a eu une prépublication. Il y a eu des recommandations, des
remarques qui nous ont été faites. On a corrigé, on a
refait nos devoirs, comme on dit si bien en langage parlementaire. Là,
ce sera publié de façon officielle. Je pense que tout le monde va
être heureux de toute cette opération. À toutes fins
utiles, il y aura, je pense, au sujet des sports dits de combat, où il y
avait un besoin de faire un nettoyage... On se rappellera que les
députés m'avaient mentionné à ce moment... Les
députés de l'Opposition avaient voté pour cette loi
même si on me disait que c'était une loi qui était
poussée à l'extrême, qu'on donnait un pouvoir quasi
judiciaire à la Régie de la sécurité dans les
sports. Somme toute, je pense qu'encore là tout va bien fonctionner
grâce aux discussions que nous avons eues de part et d'autre.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
Compte tenu du temps, je vais permettre de part et d'autre une conclusion en
commençant par le député de Joliette. M. le
député de Joliette, je vais vous accorder à peu
près une minute de conclusion. Par la suite je donnerai la parole pour
une minute au ministre. M. le député de Joliette.
M. Chevrette: Mme la Présidente, je considère qu'on
ne peut pas cracher sur un peu plus de 1 000 000 $ de plus. Mais, à mon
point de vue, c'est encore très insuffisant. Au moment où on
dépose un budget de 30 000 000 000 $ de dépenses, il
m'apparaît que, si on avait vraiment une vision de l'avenir, une vision
globale de notre société, vu la conjoncture, le climat social ou
les climats sociaux des différentes régions du Québec, mon
point de vue, c'est un ministère à "prioriser" au cours des
prochaines années si on ne veut pas, continuellement, être
condamné à débourser dans "le curatif" des sommes
prohibitives. Le loisir, axé surtout sur la bonne forme physique,
l'encadrement des jeunes, pourrait faire en sorte que notre
société se porte mieux, avec plus de budget aux loisirs, mais
moins de coûts sociaux pour la collectivité
québécoise.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le
député de Joliette. M. le ministre, en conclusion.
M. Picotte: Je remercie ceux qui ont participé, Mme la
Présidente, à cette discussion, de même que le
député de Joliette. Je suis très heureux de voir que le
député de Joliette a encore gardé cette chaleur pour le
ministère qu'il a déjà représenté. Que c'est
agréable de discuter de ces choses avec quelqu'un qui s'y connaît!
Je suis persuadé que tous mes collègues qui ont fait en sorte
d'améliorer nos échanges vont convaincre d'autres de nos
collègues que, finalement, au loisir, il faut mettre plus de budget. Je
dirai, en terminant, qu'on a parlé de 1 500 000 $, je rajouterai que
c'est 2 500 000 $, finalement. L'autre 1 000 000 $ est important, c'est celui
qui est consacré à l'opération comté, où
certains députés pourront encore faire des heureux en aidant de
petits organismes, des troupes de théâtre. Je pense que
c'était à l'avantage de tout le monde. Je me tais
immédiatement, Mme la Présidente, ma minute est
passée.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre.
Ceci met fin au débat. Est-ce que les crédits
supplémentaires pour l'année financière 1987-1988 sont
adoptés?
M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): Adopté. Donc, je
vais remercier les personnes qui se sont jointes aux membres de cette
Assemblée pour nous permettre de discuter des crédits
supplémentaires. Nous allons ajourner pour que la commission
plénière puisse se transformer en séance de
l'Assemblée nationale.
(Suspension de la séance à 21 h 56)
(Reprise à 21 h 59)
Le Vice-Président: Mme la Présidente de la
commission plénière, pour le rapport.
Mme Bégin (présidente de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous
faire rapport que la commission plénière a adopté les
crédits supplémentaires no 1 pour l'année
financière 1987-1988.
Le Vice-Président: Est-ce que le rapport de la commission
plénière est adopté?
Une voix: Adopté.
Projet de loi 58 Adoption
Le Vice-Président: Adopté. Maintenant,
conformément a l'article 291 de notre règlement, est-ce que la
motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée se
saisisse du projet de loi 58, Loi no 4 sur les crédits,
1987-1988, en adopte le principe et adopte également le projet de loi,
est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Donc, le projet de loi
58, Loi no 4 sur les crédits, 1987-1988, est adopté. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: L'article 34 du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 21
Reprise du débat sur la prise en
considération du rapport de la
commission
qui en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 34 du feuilleton,
nous allons maintenant reprendre le débat sur la prise en
considération du rapport de la commission des affaires sociales qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 21, Loi concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de
la jeunesse, le Code civil du Québec et le Code de procédure
civile. Je reconnais à ce moment-ci, comme intervenant, M. le
député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Vous vous
rappellerez qu'en deuxième lecture nous avions dit que nous voterions
contre le projet de loi 21 s'il était maintenu sans amendement.
Heureusement, à la suite de pressions et de consultations, probablement
des bonnes discussions et des pressions de l'Opposition, la ministre a
finalement apporté des amendements, au projet de loi 21, Loi concernant
l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le Code civil
du Québec et le Code la procédure civile. Avec les nouveaux
amendements, nous allons être favorables, en fait, je devrais dire, au
nouveau projet de loi 21 ou au deuxième projet de loi 21. Le projet de
loi initial, le projet de loi 21 déposé, contenait exactement 14
articles. Pour le rendre acceptable, pour que nous puissions voter pour le
projet de loi parce qu'il est maintenant rendu acceptable pour les gens, il y a
eu 14 amendements. Donc, 14 articles, 14 amendements. C'est pour cela que je
dis: Oui, nous allons voter pour le nouveau projet de loi 21, pour le
deuxième projet de loi 21.
Étant donné que c'est un sujet, quand même,
très important, j'aimerais que vous vérifiiez si nous avons le
quorum. Une question de règlement.
Le Vice-Président: Sur une question de règlement,
M. le député de Shefford.
M. Paré: Oui, j'aimerais savoir, M. le Président,
si nous avons quorum.
Une voix: On l'a.
Le Vice-Président: Un instant, nous allons le
vérifier immédiatement.
Nous avons maintenant quorum. Vous pouvez poursuivre, M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
de pouvoir dialoguer avec mes collègues d'en face pour les sensibiliser
à une chose qui s'est passée et qui a fait en sorte que la
situation devienne intolérable, par un choix politique, par une
décision de la ministre actuelle de la Santé et des Services
sociaux. C'est quoi, le cheminement qui fait en sorte que, ce soir, on parle,
en troisième lecture, du projet de loi 21 sur l'adoption internationale?
Il y a eu une décision prise le 19 novembre 1986, alors que la ministre
actuelle a fait adopter le décret 1728-86 qui a pour effet d'interdire
l'adoption internationale dans les pays dont les règles de droit en
matière d'adoption diffèrent des nôtres. Cela veut dire
que, par décret, on donnait une interprétation des dispositions
du Code civil, une fonction qui est réservée aux tribunaux. Ce
que cela veut dire en termes pratiques, c'est qu'on a fermé six pays
à l'adoption internationale et là où on pouvait le plus
facilement aller adopter des enfants. C'est là que cela a
commencé parce qu'il n'y avait pas les problèmes qu'on a connus
depuis ce temps-là avant.
La ministre a donc décidé d'amener un décret le 19
novembre 1986 et sans consultation encore une fois, en décembre 1986, le
dépôt du projet de loi 139 par lequel le gouvernement se donne le
pouvoir de préciser par règlement les modalités
d'intervention en matière d'adoption internationale du directeur de la
protection de la jeunesse ou d'un organisme reconnu par le ministère.
Encore un autre changement. Le 11 mars 1987, voilà le projet de
règlement concernant l'adoption internationale.
Et toujours, à partir du 19 novembre 1986, la situation empirait.
Tous les députés qui sont ici, j'en suis certain, ont reçu
des gens à leur bureau de comté, qui disaient que cela devenait
inacceptable et qu'il était presque impossible d'adopter des enfants
alors qu'il y avait la volonté, la détermination de parents ou de
futurs parents ou de parents potentiels pour aller chercher un enfant. Toutes
ces décisions sont venues empirer la situation et ont fait en sorte que
cela soit plus difficile d'adopter un enfant au plan international.
Enfin, arrive, le 2 avril 1987 - cela ne fait pas tellement longtemps -
le dépôt du fameux projet de loi 21 qui, lui non plus,
n'était pas acceptable et, en commission parlementaire, pendant
quatre jours, 18 groupes sont venus demander des changements. Ils sont venus
dire que ce n'était pas acceptable et ils ont demandé tout
simplement le retrait du projet de loi 21.
Heureusement, cela a porté fruit et, le 11 juin - cela ne fait
pas tellement longtemps, c'est cette semaine; en tout cas, cela fait quelques
jours à peine - la ministre, en deuxième lecture, dépose,
comme je le disais au début de mon intervention, 14 amendements à
un projet de loi de 14 articles. Donc, c'est tout un changement.
Mais qu'est-ce que le projet de loi 21 a comme effet et qu'est-ce qu'il
signifie, tel que complètement remanié, complètement
réaménagé avec 14 amendements? Cela nous ramène,
tout simplement à avant le 19 novembre 1986. C'est, tout simplement, un
retour presque total à une situation qui existait avant que Mme la
ministre aille émettre ce fameux décret qui a amené une
situation intolérable pendant presque un an et demi et même plus
qu'un an et demi. C'est ce genre de décision qui est inacceptable, prise
sans consultation, prise sans connaître le dossier à fond, et on
se retrouve avec des problèmes qu'on a créés de toutes
pièces. Aujourd'hui, on peut faire des discours, on peut se glorifier
d'avoir réglé une situation qui était intolérable,
mais cette situation était devenue intolérable par une
décision de la même personne, l'actuelle ministre de la
Santé et des Services sociaux. Le 19 novembre 1986, par un
décret, elle rend une situation complètement invivable,
dénoncée par tout le monde, et voilà que le projet de loi
21 complètement amendé nous ramène à la situation
d'avant qui est plus tolérable, avec quelques petits changements.
Oui, on trouve maintenant que c'est beaucoup plus acceptable, mais on
aurait, quand même, souhaité et on souhaiterait que la ministre -
elle en a aussi le pouvoir - en vertu de ses responsabilités, apporte
une réforme complète du Secrétariat à l'adoption
internationale. Des règles souples et une attitude accueillante de la
part du Secrétariat à l'adoption internationale
éviteraient la création de réseaux parallèles. Si
on ne veut pas de réseaux parallèles, il faut prendre les moyens.
La structure, l'organisme qui existe pour éviter, pour contrer ces
réseaux parallèles, c'est le Secrétariat à
l'adoption internationale, sauf qu'il faudrait que cela devienne plutôt
une structure d'accueil, une structure souple, avec une attitude qui serait
changée. Vous avez certainement rencontré des gens qui sont venus
vous voir à votre bureau de comté et qui vous ont dit: Non
seulement cela prend beaucoup de temps, mais on semble nous décourager
alors qu'on veut adopter un enfant. Il faudrait plutôt que cela devienne
une structure d'accueil, comme je l'ai dit, mais aussi d'appui, de soutien,
d'aide.
Dans le projet de loi 21 amendé, d'autres changements pourraient
faire en sorte que la ministre ait moins de pouvoirs, puisqu'à l'heure
actuelle, avec le projet de loi, cela signifie un contrôle total de la
ministre sur tout le processus. On pourrait faire en sorte que ce soit moins
contrôlé par la ministre et, comme je viens de le dire, faire du
Secrétariat à l'adoption internationale une structure plus
accueillante, plus souple, avec une volonté d'aide et d'appui aux
parents désireux d'adopter un enfant. À ce moment-là, on
aura probablement réglé une situation qui est importante.
S'il y a dénatalité au Québec, si on est favorable
à l'immigration, une des meilleures façons de grossir la
population du Québec et en même temps d'avoir une
intégration totale, complète et harmonieuse, c'est par l'adoption
d'enfants dans des pays où, malheureusement, ces enfants sont
maltraités, souvent même sous-alimentés. On a une occasion
d'aider les enfants qui sont mal pris, d'aider de futurs parents ou des gens
désireux de devenir parents. On a la chance de les aider et en
même temps de poser un acte collectif favorable.
M. le Président, nous allons voter pour le nouveau projet de loi
21 et, comme je le disais, il y a toujours place à amélioration.
Merci beaucoup.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître la
prochaine intervenante, Mnne la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Cet
après-midi, j'écoutais la ministre de la Santé et des
Services sociaux accuser un des députés de l'Opposition de mal
connaître le projet de loi touchant l'adoption internationale. Je dois
dire que cela m'a étonnée, parce que j'imagine qu'aujourd'hui, au
moment où on se parle, il y a peu de Québécois qui ne sont
pas informés de ce que veut dire l'adoption internationale. (22 h
10)
La plupart d'entre nous ignoraient les règles touchant l'adoption
internationale. Les gestes et les mouvements de la ministre de la Santé
et des Services sociaux ont fait en sorte qu'aujourd'hui, je pense, la
majorité des Québécois savent ce que veut dire l'adoption
internationale. Pourquoi est-ce que tout le monde sait aujourd'hui ce que veut
dire l'adoption internationale? Parce que les gestes de la ministre ont
été maladroits. La couverture de presse, la levée de
boucliers tout à fait unanime des différents milieux
touchés par l'adoption internationale a été telle
qu'aujourd'hui, au moment où on se
parle, il y a peu de Québécois qui ne sont pas
informés de ce que ça veut dire, l'adoption internationale. Il
faut dire que la ministre était peut-être mal informée, mal
préparée ou obstinée, mais elle a pris un certain nombre
de décisions qui ont eu pour effet de soulever tous les intervenants du
milieu.
Il serait peut-être intéressant de rappeler un peu
l'historique de la démarche de la ministre à la fois pour
s'interroger ensemble sur l'efficacité de ce gouvernement et pour se
demander s'il n'y aurait pas lieu, lors de la prochaine modification d'une loi,
quelle qu'elle soit, de procéder avec un meilleur éclairage ou
avec de meilleurs conseillers, que sais-je?
Comme le rappelait le député de Shefford tout à
l'heure, le 19 novembre 1986, la ministre faisait adopter un décret qui
avait pour effet d'interdire l'adoption internationale dans les pays où
les règles de droit en matière d'adoption différaient des
nôtres. Par ce décret, on donnait une interprétation des
dispositions du Code civil et, pourtant, on le sait, c'est une fonction
réservée aux tribunaux. Mal informée, mal
conseillée, entêtée, butée, obstinée, est-ce
que je sais? Toujours est-il qu'on connaît la suite des
événements: cela a provoqué un tollé de
contestation.
En décembre, elle déposait le projet de loi 139 par lequel
le gouvernement se donnait le pouvoir de préciser par règlement
les modalités d'intervention en matière d'adoption
internationale. Elle définissait également les rôles du
directeur de la protection de la jeunesse ou d'un organisme reconnu par le
ministre. En mars, le projet de règlement concernant l'adoption
internationale et, finalement, en avril, le projet de loi 21 modifiant le Code
civil, le Code de procédure civile et la Loi sur la protection de la
jeunesse. Il y a eu consultation avec les conclusions qu'on connaît. La
ministre a dû modifier considérablement, pour ne pas dire
très profondément, son projet de loi pour revenir presque
à la situation qui était celle d'avant la présentation du
projet de loi.
Je dis: Mal informéei mal conseillée ou obstinée,
elle n'a pas su, avant qu'on ne vienne le lui dire en commission parlementaire,
qu'elle était sur la mauvaise voie et qu'elle était en train de
soulever tout le monde contre elle. Elle est revenue avec le projet de loi
presque à la case de départ. Elle aurait pu, par quelques petites
modifications, modifier la loi originale et on n'aurait pas eu tous ces
débats, on n'aurait pas provoqué tout cet émoi chez les
parents adoptants.
Elle est si bien revenue à la case de départ que le
président de la Fédération des parents adoptants
s'interrogeait sur la nécessité d'un tel débat alors qu'on
aurait pu vraisemblablement, avec une consultation certainement beaucoup plus
réduite, en arriver à de meilleurs résultats.
Par ailleurs, elle apporte une modification qui n'aura pas comme effet
d'accélérer le processus ou d'améliorer le fonctionnement
de la loi. En effet, on étatise, pour ainsi dire, toute cette question
de l'adoption internationale qui est, plus que jamais, selon le
président de la Fédération des parents adoptants, une
affaire d'État.
Dans un article qui est paru dans Le Devoir du samedi 13 juin
1987, sous la signature de Mme Isabelle Paré, "la
fédération s'inquiète de l'ingérence accrue du
gouvernement dans le processus d'adoption d'enfants étrangers. En vertu
des nouvelles modifications, les démarches personnelles d'adoption ne
seront plus possibles." Pourtant, ces mesures étaient efficaces et peu
coûteuses pour le gouvernement, mais on a l'impression que cette
décision de la ministre veut tout simplement protéger, si je peux
me permettre l'expression, une certaine chasse gardée, un certain
privilège des fonctionnaires, et plus particulièrement des
fonctionnaires du Secrétariat à l'adoption internationale.
Cet après-midi, la ministre était outrée du fait
que le député de Bertrand se demandait pourquoi on n'avait pas
agi en cette matière comme on semblait vouloir le faire en beaucoup
d'autres matières, en laissant un peu plus de liberté et
d'autonomie aux personnes. Il disait: On ne traite pas de l'adoption comme on
traite de l'entreprise. Pourtant, en ces matières, il a
été prouvé qu'avec un minimum de contrôle on pouvait
rendre l'adoption internationale plus efficace.
Je ne voudrais pas, par mon propos, laisser penser qu'on devrait laisser
l'adoption internationale à tout-venant et ne pas assurer un certain
contrôle. Nous avons eu l'occasion de le dire et de le
répéter. Il est important qu'il y ait un certain contrôle
sur l'adoption internationale, un contrôle nécessaire afin
d'éviter qu'un trafic d'enfants ne se fasse par rapport à
certains pays. On sait que cela s'est déjà fait, pas
principalement dans notre pays et non pas de façon abusive - je dirais -
mais on sait que la situation s'est déjà produite dans certains
pays.
Les règles d'encadrement adoptées par le Québec
doivent être, cependant, très souples et accueillantes pour les
couples adoptants. Quand on multiplie les embûches, quand on augmente de
façon considérable les coûts reliés à
l'adoption, il est évident qu'on décourage un nombre important
d'adoptants. Quand un couple, qui a quelques années de mariage et qui ne
peut pas avoir d'enfant, est prêt à adopter un enfant et veut un
enfant de deux ans, si cela lui prend cinq ans avant de l'avoir, il y a de
bonnes
chances, comme cela s'est produit dans certains cas, que l'enfant qu'on
avait souhaité adopter, à cause des conditions difficiles dans
lesquelles il vit, soit décédé ou encore que les parents
se découragent parce que l'enfant est rendu à quatre ou cinq ans
et qu'il est difficile, à ce moment-là, de corriger, je devrais
dire d'atténuer chez lui les effets de la malnutrition ou d'une
éducation tout à fait différente.
M. le Président, nous avons eu l'occasion de le
répéter à maintes reprises: L'Opposition est d'accord avec
le projet de loi 21 tel qu'amendé. Je voudrais juste dire qu'il est
amendé par le biais de quelque 14 amendements. Cela semble être
une manie de ce gouvernement de présenter une loi et d'être
obligé de la modifier en profondeur. J'ai vu cela souvent. Toutes les
fois que le ministre de l'Enseignement supérieur et de
l'Éducation nous présente un projet de loi, il y a un article et
un ou deux amendements. On a même vu un projet de loi qui a dû
être complètement réécrit; il avait quatre articles.
C'est une habitude. Je ne comprends pas comment il se fait qu'on ne soit pas en
mesure de travailler de façon un peu plus sérieuse lorsqu'on
prépare les projets de loi. J'essayais de comprendre pourquoi ce
problème s'est accru depuis que ce gouvernement a été
élu. Je pense comprendre que, lorsqu'on conçoit mal une
modification à un projet de loi, il est évident que le
Comité de législation ne peut pas bien rendre dans ce projet de
loi quelque chose qui est mal conçu ou pas bien exprimé. C'est la
seule explication que j'ai pu trouver.
M. le Président, l'Opposition votera en faveur du projet de loi,
mais je voudrais réitérer ici que, même modifié, le
projet de loi ne viendra pas corriger les problèmes que cause le
Secrétariat à l'adoption internationale. Et, malgré son
accord, l'Opposition exige que la ministre s'engage à effectuer une
réforme en profondeur, une réforme complète du
Secrétariat à l'adoption internationale. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant, comme prochain
intervenant, M. le député de Laval-des-Rapides. (22 h 20)
M. Guy Bélanger
M. Bélanger: M. le Président, je suis toujours un
peu ébahi quand je vois l'Opposition nous reprocher de faire des
changements dans un projet de loi. Je n'arrive pas à comprendre ces gens
qui étaient si doctrinaires, qui avaient toujours la
vérité, qui savaient, eux, tout ce qui était bon, qui
gouvernaient comme bon leur semblait parce qu'eux avaient la
vérité, qui n'acceptaient pas d'être contrariés et,
évidemment, ne voulaient jamais qu'on touche un de leurs projets de loi.
C'était la doctrine, c'était la vérité.
Vous avez, enfin, un gouvernement qui, lorsqu'il fait une commission
parlementaire, ce n'est pas du chiqué et ce n'est pas du bidon. On
écoute les gens et, à partir de là, s'il y a des
modifications à faire, on les fait. C'est un gouvernement intelligent.
Cela devient fastidieux de vous entendre toujours dire qu'on devrait gouverner
de façon doctrinaire, de façon à se conduire comme des
gens qui ont le monopole de la vérité. Nous ne l'avons pas,
madame. Nous sommes là pour gouverner avec le plus de sagesse possible
et dans le meilleur intérêt de la population. Au-delà des
perceptions, des idées et des connaissances que nous pouvons avoir, si
dans une commission des groupes nous amènent des points de vue
intelligents qui nous amènent à modifier une loi, nous le ferons
et avec grand plaisir. Je pense que c'est là le rôle d'un
gouvernement.
Dans le projet de loi 21, Mme la ministre a fait beaucoup de
modifications parce que, d'abord, il fallait au secrétariat à
l'adoption... Rappelez-vous, Mme la représentante de l'Opposition, que
le secrétariat à l'adoption est une créature de votre
parti et que le personnel en place au secrétariat à l'adoption,
c'est vous-même qui l'avez nommé. C'est le même personnel.
Et, aujourd'hui, vous descendez ces gens comme si c'étaient les derniers
des crétins. Il faudrait, quand même, être
conséquents avec les gestes que vous avez posés dans le
passé.
Quand vous dites que, dans le passé, il n'y avait pas de
problèmes, je regrette, madame. Je dirigeais un CSS et je veux vous
parler longuement et pleinement de tous les problèmes que nous avons
rencontrés jusqu'au point où des Québécoises ont
été arrêtées au Guatemala pour rapt d'enfants. Il a
fallu intervenir pour empêcher que ce geste ne se reproduise. Et vous
nous dites aujourd'hui que c'est parce qu'on avait adopté des
règlements et des décrets qui n'avaient pas d'allure. Oh, que
nonî Oh, que non! Il faudrait se rappeler que c'étaient les
règlements et les procédures que vous aviez mis en place qui
étaient appliqués à ce moment. Les procédures que
Mme la ministre avait établies, c'était pour éviter que
nos gens ne se ramassent en prison quand ils allaient faire des adoptions.
C'était cela, le décret de Mme la ministre.
Dans la présente loi, en commission parlementaire, on nous a dit:
Écoutez, vous avez un projet de loi qui est intéressant, mais il
devient lourd et crée des délais. Cela peut prendre plusieurs
années et, dans le fond, cela ne fait que consacrer davantage une
situation qui existait antérieurement. Partant de là, Mme la
ministre a eu la sagesse d'écouter ces propos, d'en tenir compte et de
trouver tous les moyens à
travers les lois pour rendre plus facile l'adoption.
Vous savez, M. le Président, l'adoption, c'est un geste d'une
grande humanité. C'est un geste qui relève de la plus grande
générosité que des gens peuvent manifester,
c'est-à-dire donner à un enfant démuni des moyens de mieux
vivre, dans des conditions meilleures, dans des conditions où il pourra
recevoir une éducation à la mesure de ses besoins et, ainsi, il
pourra plus tard dans la vie jouer un rôle beaucoup plus important que
dans son pays où il était condamné, peut-être,
à la famine, à l'orphelinat ou autres mesures drôlement pas
intéressantes.
C'est un geste d'une grande générosité. C'est aussi
un geste empreint d'une grande émotivité. Lorsque Mme la ministre
a rédigé le projet de loi et a accepté d'y faire des
amendements substantiels - et nous en sommes tout à fait heureux -
c'était dans l'optique de rendre plus facile ce geste, de le rendre
moins compliqué, parce qu'il y avait auparavant des tas de
procédures, mais, en mettant cependant un minimum de balises pour
éviter que comme pays nous ne perdions notre crédibilité,
que comme pays nous ne soyons taxés de faire du trafic d'enfants comme
cela s'est fait pour d'autres pays qui n'ont aucune règle.
C'était dans l'optique d'avoir des balises qui nous donnent cette
crédibilité nécessaire pour que partout où nous
irons faire de l'adoption internationale nous soyons les bienvenus et
même désirés.
C'est dans cette optique que le projet de loi a été
révisé et qu'on nous présente aujourd'hui, un projet de
loi qui rencontre vraiment l'assentiment de tous les groupes qui sont venus
ici. Je pense que c'est un projet de loi non seulement d'une grande
humanité, mais d'une portée législative qui va nous
permettre, dans les autres pays, d'acquérir cette
crédibilité absolument nécessaire pour pouvoir faire de
l'adoption internationale.
On sait qu'actuellement un grand nombre de pays qui ont des enfants
à donner en adoption se regroupent pour former une base de lois qui
soient communes, de telle sorte que les procédures, les lois, les
règles soient les mêmes dans tous ces pays et qu'on évite
ainsi toutes sortes de procédures ou de frustrations ou même de
déchirures pour les gens qui ont déjà identifié un
enfant et qui, deux ans après, n'ont pas encore été
capables de l'avoir avec eux.
On veut faire en sorte que ce soit plus facile, mais que les enfants et
même les parents adoptants soient, eux aussi, protégés. Le
projet de loi est rédigé exactement dans cette perspective. C'est
pourquoi je suis finalement heureux, dans le fond, que l'Opposition,
malgré tous ses grands cris... Que voulez-vous? On doit jouer son
rôle d'Opposition et on s'oppose. Cela le dit, n'est-ce pas? Il faut
s'opposer pour s'opposer, pour la forme. Cela prend un baroud d'honneur. Bon,
il est fait.
On a corrigé les inexactitudes qui ont été faites.
J'espère qu'on va arrêter la désinformation qu'on faisait
à propos de cela et qu'on va adopter à l'unanimité ce
projet de loi qui est dans le meilleur intérêt non seulement des
parents adoptants, mais aussi des enfants que nous irons adopter et qui
deviendront des Québécois dont, j'en suis convaincu, nous serons
très fiers. Merci.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé à cette étape de l'étude du projet de loi,
le rapport de la commission des affaires sociales qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 21, Loi
concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le
Code civil du Québec et le Code de procédure civile, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Je fais motion maintenant pour ajourner les travaux
à demain, 10 heures.
Le Vice-Président: Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. L'Assemblée
nationale ajourne ses travaux à demain jeudi, 19 juin, à 10
heures.
(Fin de la séance à 22 h 26)