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(Dix heures onze minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Moment de recueillement.
Veuillez vous asseoir.
Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes. À
l'ordre, s'il vous plaît! Si vous permettez, nous allons procéder
aux affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, voulez-vous appeler l'article
b du feuilleton, s'il vous plaît?
Projet de loi 94
Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le
ministre délégué à la Santé et aux Services
sociaux présente le projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille.
M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, ce projet de loi institue un
organisme, le Conseil de la famille, qui aura pour fonction de conseiller le
ministre sur toute question d'intérêt familial. Le conseil
assumera une partie des fonctions du Conseil des affaires sociales et de la
famille dont le nom et la loi son modifiés en conséquence.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir...
M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, ma question est simple.
Est-ce que le ministre sntend consulter, tenir une commission parlementaire,
sur ledit projet de loi?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Santé et aux Services sociaux.
M. Dutil: M. le Président, les consultations ont
été faites dans les années passées. Nous ne
prévoyons pas tenir une commission parlementaire supplémentaire
là-dessus.
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se
saisir du projet de loi portant le numéro 94?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Toujours à
l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Article d, M. le Président.
Projet de loi 230
Le Président: L'article d du feuilleton. J'ai reçu
le rapport de la Direction de la législation sur le projet de loi
portant le numéro 230, Loi modifiant la charte de la ville de
Montréal. La Direction de la législation a constaté que
les avis ont été faits et publiés conformément aux
règles de fonctionnement concernant les projets de loi
d'intérêt privé. J'aimerais déposer ledit
rapport.
Mme la députée de Dorion présente le projet de loi
d'intérêt privé portant le numéro 230, Loi modifiant
la charte de la ville de Montréal. Est-ce que l'Assemblée accepte
de se saisir de ce projet de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement,
votre motion de déférence.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que le
projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des
Affaires municipales en soit membre.
Le Président: Cette motion de déférence
concernant le projet de loi 230 est-elle acceptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. C'est
préférable, adopté.
Dépôt de documents. M. le ministre du Tourisme.
Rapports annuels du ministère du
Tourisme et de la Société du
Palais des congrès de Montréal
M. Gratton: M. le Président, je voudrais déposer le
rapport annuel du ministère du Tourisme pour l'année 1986-1987
ainsi que le rapport annuel de la Société du Palais des
congrès de Montréal pour la même année.
Le Président: M. le ministre, vos deux
documents sont maintenant déposés.
Rapports de commissions. M. le président de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et député
de Nicolet.
Étude détaillée du projet de loi
15
M. Richard: Je dépose le rapport de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui a
siégé le 26 novembre et le 7 décembre 1987 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 15, Loi modifiant la Loi sur les terres publiques agricoles et d'autres
dispositions législatives. Le projet de loi a été
adopté avec amendements.
Étude détaillée du projet de loi
99
Je dépose aussi le rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation qui a siégé le 8
décembre dernier afin de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le
crédit aux pêcheries maritimes. Le projet de loi a
été adopté sans amendement. Merci, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Nicolet, vos
deux rapports sont maintenant déposés.
Toujours à l'étape des rapports de commissions. M. le
président de la commission de la culture et député de
Bourget.
Audition du président-directeur
général de Radio-Québec
M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de la culture, qui a
siégé le 8 décembre 1987 pour entendre M. Jacques Girard,
président-directeur général de Radio-Québec afin
qu'il explique le changement de programmation concernant la retransmission de
la période de questions de l'Assemblée nationale du
Québec.
Le Président: M. le député de Bourget, votre
rapport est déposé.
Dépôt de pétitions.
Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de
droit ou de privilège ou sur une question de fait personnel. Nous allons
maintenant procéder à la période de questions et
réponses orales immédiatement. Je vais reconnaître en
première principale, M. le leader adjoint de l'Opposition.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Accord sur le libre-échange et article 11 du
GATT
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Selon diverses
sources, le texte final sur le libre-échange ne fait aucune
référence à l'article 11 de l'accord du GATT. Un tel
article aurait permis au gouvernement du Québec de contrôler
l'importation des produits agricoles américains. On se rappelle que le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
s'était engagé, lors du congrès de l'UPA, vendredi
dernier, à demander et obtenir du gouvernement fédéral
l'inclusion d'un tel article. Ma question s'adresse au ministre du Commerce
extérieur. Le ministre peut-il nous confirmer que l'absence de cet
article 11 du GATT dans le texte final vient du fait qu'il n'a aucunement
demandé l'inclusion d'un tel article puisqu'il juge cette exigence
inutile?
Le Président: M. le ministre du Commerce extérieur
et du Développement technologique. M. le ministre.
M. MacDonald: M. le Président, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a voulu avoir une
sécurité additionnelle concernant la possibilité de
contingenter des importations de diverses denrées agricoles au
Québec. Sur cette demande, nous avons effectivement pris avis et fait
des démarches. Je n'ai pas été le seul représentant
du Québec, au-delà du ministre de l'Agriculture lui-même;
à faire ces démarches auprès d'Ottawa. Même si
l'interprétation qui nous a été donnée, que le
traité devant respecter en tout temps les règles du GATT, que ce
qui n'était pas prévu devrait être contenu en quelque sorte
dans la façon de faire du GATT, même s'il y avait cela et qu'on
croyait qu'il y avait sécurité pour la possibilité de
contingenter, le ministre lui-même a utilisé l'expression "trop
fort ne casse pas" et, sur sa représentation, nous avons fait les
démarches nécessaires.
Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre trouve toujours inutile
l'inclusion d'un tel article?
Le Président: M. le ministre du Commerce extérieur
et du Développement technologique.
M. MacOonald: Je ne suis pas un légiste, je prends
conseil. Nos conseillers nous ont dit qu'il y avait dans les prévisions
du texte préliminaire, tel qu'on le connaissait, suffisamment de
protection. Mais, je le répète, nous croyions - et mon
collègue particulièrement - qu'il était nécessaire
ou qu'il valait mieux ajouter cette confirmation, c'est pourquoi nous avons
fait les démarches.
Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation peut maintenant reconnaître que
l'engagement qu'il a pris devant l'UPA était dans un but précis,
soit de sauver la face, alors qu'il savait très bien que son
collègue du Commerce extérieur ne voyait même pas
l'utilité de mettre un tel article dans le contexte du
libre-échange?
Le Président: En réponse à une question
additionnelle, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. M. le ministre.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aimerais
indiquer au député qu'à la page 12 de l'accord - l'accord
préliminaire, j'entends - on réfère au fait que les deux
pays s'entendent, s'engagent à ne pas se prévaloir de
dispositions susceptibles de limiter l'entrée des produits et cela
à l'intérieur du volet de l'agriculture. On réfère
aussi à une exception pour les mesures quantitatives en regard de la
qualité des produits en vertu de l'article 20 du GATT. Par
déduction, mes services, les services d'analyse, d'études
économiques et du contentieux du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation du Québec ont jugé qu'il
était plus "sécure", qu'il était préférable,
pour protéger adéquatement l'agriculture
québécoise, de demander une référence
précise à l'article 11 des accords du GATT. C'est ce qui a
été demandé non seulement par la voix de mon
collègue, mais aussi par la mienne, comme ministre de l'Agriculture,
lors de ma rencontre avec le ministre, M. Wise, à Toronto, lors de mes
recontres avec M. Wise et M. Blais, la semaine dernière. (10 h 20)
J'ai indiqué au congrès de l'Union des producteurs
agricoles, et je termine là-dessus, qu'à la lumière de nos
présentations et surtout en regard de la pertinence de notre
argumentation et à la lumière des échanges que j'ai eus
avec les représentants fédéraux, j'avais tous les motifs
raisonnables et probables de croire que la demande du Québec serait
acceptée. Pour le reste, on attend l'entente. Dès qu'on l'aura,
on va l'étudier, on va l'analyser et, après cela, on commentera,
M. le Président.
Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Jolivet: M. le Président, le ministre est-il prêt
à reconnaître ce qu'il a dit devant les agriculteurs, la semaine
dernière, à savoir que si l'article 11 ne se trouve pas dans
l'accord, il va demander de ne point le signer? Le ministre maintient-il
toujours cela?
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Pagé: M. le Président, si le
député veut faire référence à mes propos, on
pourra regarder la cassette ensemble, M. le député, parce qu'on
me l'a fait parvenir. Il est facile, vous savez, d'interpréter comme
vous le faites. Ce sont des dossiers suffisamment sérieux qui devraient
témoigner, de votre part, davantage de sens des responsabilités,
M. le député.
Je dis ceci: J'ai indiqué très clairement qu'en ce qui me
concerne comme ministre de l'Agriculture, on se devait de rechercher une
protection adéquate et que j'avais formulé des
représentations pour que l'article 11 apparaisse très clairement
dans l'entente finale qui sera produite d'ici à quelques jours. De plus,
j'ai indiqué que si l'article 11 n'était pas inclus ou encore, si
on n'avait pas un niveau de protection accru concernant l'entrée de
produits américains sur le marché canadien,
particulièrement le marché québécois, en faisant
référence notamment au yogourt, à la crème
glacée et aux produits transformés de la volaille, je formulerais
des recommandations dans ce sens au cabinet des ministres par la suite, mais
une fois que l'entente sera connue.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, ma question additionnelle
s'adresse au premier ministre.
Le Président: En additionnelle.
M. Chevrette: Le premier ministre considère-t-il toujours
que ses ministres sont très unifiés, très efficaces alors
qu'un juge que c'est inutile et que l'autre dit que c'est indispensable?
J'aimerais avoir la position du premier ministre dans cela?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, ce que le chef de
l'Opposition doit constater, c'est que, dans les deux cas, les ministres ont
une approche concrète. Ce n'est pas une cassette, je reprends
l'expression du chef de l'Opposition dans le journal La Presse
aujourd'hui: "II faut des projets concrets."
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Bourassa: Et il dit que c'est une cassette, M. le
Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bourassa: Je dis au chef de l'Opposition que nous avons fait
des
recommandations. Le ministre du Commerce extérieur a
discuté de cette question. Le ministre de l'Agriculture
également. J'en ai moi-même parlé au premier ministre du
Canada. Attendez donc de voir le texte.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: Je suis heureux de constater que j'inspire le
premier ministre dans ses réponses. Ma question est la suivante. Comment
voulez-vous, comme bon négociateur - comme vous le dites, excellent
négociateur, présent à tous les instants dans le processus
de négociation - comment pouvez-vous avoir de l'efficacité en
négociation quand le principal porte-parole, qui est le ministre du
Commerce extérieur, dit que c'est une clause inutile et que l'autre
ministre va se pavaner devant les agriculteurs en disant: C'est indispensable,
je vais vous défendre à mort?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Le chef de l'Opposition marche encore sur son erre
d'aller de la fin de semaine. Ce que je veux lui dire, c'est
répéter ce qu'a dit le ministre du Commerce extérieur.
À la rigueur, à la lettre du texte, possiblement, une
interprétation juridique aurait pu nous permettre de conclure que ce
n'était pas absolument nécessaire. Dans le cas où il y
aurait un doute, de manière à être protégé au
maximum, le ministre de l'Agriculture a fait valoir son point de vue. Nous
sommes tombés tous les trois d'accord. J'ai dit que j'avais
moi-même fait des représentations au premier ministre du Canada.
Et on verra les résultats.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, toujours en
additionnelle.
M. Chevrette: Est-ce que le premier ministre considère que
l'article 11 est indispensable, M. le Président, pour
véritablement apporter la protection nécessaire à
l'agriculture québécoise?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Lorsque nous aurons le texte juridique, nous serons
en mesure de conclure, si, oui ou non, nous avons la protection indispensable
que nous réclamions.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Est-ce que le premier ministre considère
normal, au moins 48 heures après la signature de l'entente, qu'il ne
sache pas encore, comme premier ministre du Québec, qui a suivi à
la lettre à chaque instant du jour et de la nuit, les
négociations intensives, est-ce qu'il est normal que le premier ministre
du Québec, qui a affirmé en cette Chambre avoir assumé un
leadership incontesté et incontestable dans tout ce processus de
négociations, ne sache pas, après 48 heures, si l'agriculture
québécoise est protégée ou non, M. le
Président?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, nous avons suivi le dossier
de très près, constamment, particulièrement ces
récents jours, y compris durant la fin de semaine. Il est normal que le
chef du gouvernement agisse d'une façon prudente et
réfléchie.
J'ai répondu hier au chef de l'Opposition que je ne fonctionnais
pas par ouï-dire ou indirectement. J'attends que mes conseillers
obtiennent le texte, demain, après-demain ou vendredi. Nous voulons
l'examiner nous-mêmes, avec nos propres conseillers. Après ce
moment, nous pourrons donner des réponses définitives et
certaines...
Une voix: C'est cela.
M. Bourassa: ...non pas à la suite d'informations qui ont
pu nous être communiquées, mais parce que nous l'aurons
constaté nous-mêmes. Je pense que ce réalisme devrait
être partagé par l'Opposition, même si ça lui est
particulièrement difficile.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il
a communiqué avec le premier ministre canadien pour obtenir une copie du
texte? Comme premier ministre, un des dix partenaires de la
fédération canadienne, est-ce qu'il a demandé une copie au
premier ministre canadien?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, quand même, est-ce
qu'on doit demander une copie? C'est évident... Le premier ministre du
Canada a communiqué avec moi hier après-midi; nous avons
brièvement parlé du contenu de l'entente et nous aurons une copie
aussitôt qu'elle sera prête.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître une
deuxième question principale, ce matin. M. le député de
Roberval, vous avez la parole.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Roberval, en principale.
La construction de frégates et
l'avenir du chantier maritime
de Sorel-Tracy
M. Gauthier: M. le Président, c'est maintenant connu, le
plan de redressement préparé par les autorités de Marine
Industrie prévoit que le chantier maritime de Sorel fermera. Le ministre
de l'Industrie et du Commerce pourrait-il nous indiquer si, oui ou non, et de
façon claire, pour une fois, l'obtention de deux frégates est la
condition minimale pour garder ouvert le chantier de Sorel?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson: M. le Président, je vais répéter
ce qui est en cause, avec la même clarté avec laquelle je l'ai
déjà fait. Lorsque nous sommes devenus propriétaires de
l'ensemble des chantiers maritimes du Québec, nous avions des
responsabilités à prendre afin de maintenir les emplois. J'ai
toujours indiqué, je continue à indiquer, et j'ai demandé
à la direction de Marine de bien vouloir me supporter avec des
scénarios éventuels, que nous sommes soucieux du maintien de
l'emploi, que le maintien de l'emploi passe par une variété
d'activités industrielles majeures, navales et en spécialisations
de toutes sortes, dans les trois sites qui sont propriété de
Marine Industrie ltée et qu'à ce titre et afin de donner suite
à nos engagements de maintenir les emplois, nous devons avoir une
rentabilité qui nous permette de faire des investissements. Cette
rentabilité dépend, je le répète, je l'ai
déjà dit, de l'attribution de la construction d'au moins deux
frégates par le gouvernement fédéral à Marine
Industrie ltée.
Je constate avec le député et l'ensemble des membres de
cette Chambre qu'il y a un mur qui s'est dressé à Ottawa devant
cette revendication en matière de développement économique
pour le Québec. C'est la raison pour laquelle j'ai porté ce
dossier sur la place publique il y a quelque temps, mais je suis
préoccupé par le maintien des emplois et il faut deux
frégates pour nous assurer du maintien des emplois sur l'ensemble du
fleuve Saint-Laurent. (10 h 30)
Le Président: M. le député de Roberval, en
additionnelle.
M. Gauthier: M. le Président, comment le ministre de
l'Industrie et du Commerce peut-il justifier son attitude et sa revendication
minimale, compte tenu du fait que deux frégates sont nécessaires
pour sauver la division maritime de Sorel, compte tenu aussi du fait qu'il y a
Lauzon où l'avenir à court terme nécessite une partie des
contrats? Comment peut-il justifier son attitude de ministre de l'Industrie et
du Commerce qui n'a revendiqué que le strict minimum pour sauver la
division maritime de Sorel?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson: Cela appelle des distinctions, M. le
Président, très brièvement. D'abord, quant à la
division maritime, la construction navale à Sorel, il y a des contrats
en cours et j'ai déjà fait état du fait que les contrats
en cours nous amènent, en matière de construction navale dans
différents sites, à 1991 et que par ailleurs, afin de maintenir
des opérations, afin de nous donner la rentabilité qui nous
permet d'investir et de donner suite à nos engagements à nous -
et nous entendons y donner suite - il faut minimalement oui, deux
frégates, mais aussi - le député oublie souvent - deux
destroyers afin de nous préparer pour la maîtrise d'oeuvre
éventuelle d'un programme à plus long terme, celui de la
construction de sous-marins. C'est donc de quatre navires dont il a toujours
été question comme revendications du Québec. Ce sont nos
engagements qui peuvent prendre forme à partir du moment où le
gouvernement fédéral, quant à lui, tient ses engagements
de maintenir les emplois sur le fleuve Saint-Laurent. Nous attendons que le
gouvernement fédéral tienne ses engagements.
Le Président: M. le député de Roberval, en
additionnelle.
M. Gauthier: M. le Président, comment le ministre peut-il
m'expliquer le fait que les autorités de Marine Industrie ltée,
qui semblent être en possession d'informations que le ministre n'a pas
livrées, ont prévu, à toutes fins utiles, dans le plan, la
fermeture de la division maritime de Sorel et seraient, selon nos informations,
de plain-pied dans ce plan de restructuration prévoyant la fermeture?
Lui qui nous avait caché qu'il savait depuis six mois qu'on n'aurait pas
le contrat principal nous aurait-il caché qu'on a peu de chances d'avoir
maintenant quelque retombée que ce soit dans ce contrat, puisque les
autorités de Marine se gouvernent, en conséquence, comme si elles
avaient cette information?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson: Je dois dire que le député mêle
actuellement certaines choses. Il y a, d'une part, des engagements que nous
avons, comme actionnaires, de nous assurer de la
rentabilité de cette entreprise qu'est Marine Industrie. Cela
explique notamment, et c'est dans le cours normal d'affaires bien conduites
dans les circonstances financières qu'on connaît, qu'il y a eu des
décisions quant à des mises à pied, des restructurations
majeures, je dirais, au siège social notamment, ce qui se
répercute, à certains égards, dans les chantiers et c'est
connu; mais c'est dans le cours normal des affaires d'une entreprise qui entend
être bien gérée sans frais généraux
exagérés.
Il y a le deuxième dossier, le redressement à long terme
dans l'activité de nos trois chantiers et, à cet égard,
j'ai demandé à la direction de Marine de me préparer des
scénarios. Ils sont en cours de préparation, ils seront soumis
éventuellement aux actionnaires - il y a également le groupe
français qui est un actionnaire de Marine Industrie - et le
comité prévu au début de l'année, en janvier
dernier, constitué des travailleurs des différents chantiers et
de la direction sera lui aussi saisi d'abord - on n'apprendra pas cela par les
journaux - des plans de redressement éventuel.
Le Président: M. le député de Roberval, en
additionnelle.
M. Gauthier: M. le Président, comment le ministre veut-il
qu'on prête foi aux réponses qu'il nous donne quand on parle
déjà de deux chantiers plutôt que de trois au
Québec, compte tenu du fait qu'à la Vickers, en plus de 700
travailleurs qui sont actuellement sur l'aide sociale, il y en aura 100 de plus
à Noël? Comment veut-il qu'on le juge crédible quand il nous
dit qu'il veut "sauver" les chantiers maritimes alors qu'il a
déjà réussi à en fermer un?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson: Je suis dans la situation un peu difficile où
on doit nécessairement faire appel à des données et des
éléments techniques afin d'expliquer le dossier. Je
répète, pour garder cela le plus simple possible, qu'il y a,
d'une part, les engagements qu'un bon gestionnaire doit prendre, auxquels il
doit donner suite afin de s'assurer que l'entreprise est bien menée, que
les frais généraux ne sont pas exagérés, qu'il n'y
a pas trop de travailleurs dans les bureaux ou autrement - syndiqués ou
non syndiqués, cela n'a rien à voir - compte tenu du carnet de
commandes.
On n'est pas nécessairement pour garder des gens qui s'adonnent
à être là même s'il n'y a pas de commandes. C'est, de
façon saisonnière, dans le cours normal des affaires très
difficiles qu'on peut attribuer éventuellement certains de nos gestes.
Ne pas confondre cela avec un redressement à long terme à
l'égard duquel nous exigeons, afin d'assurer la rentabilité qui
permet des investissements en spécialisation, deux frégates plus
deux destroyers, donc l'engagement du gouvernement fédéral pour
quatre navires, pour l'ensemble de Marine Industrie pour qu'elle soit rentable
et puisse spécialiser ses sites.
Le Président: Je vais reconnaître une
additionnelle.
M. le député de Richelieu.
M. Khelfa: Merci, M. le Président. En additionnelle au
ministre de l'Industrie et du Commerce. N'est-il pas vrai que l'administration
de Marine a nié l'information de la fermeture de la division navale de
Sorel?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Johnson: Je remercie le député pour son
intérêt soutenu, je dirais quotidien, sinon horaire pour...
Des voix: Ha! Ha! Ha! Bravo!
M. Johnson: ...le dossier. Cela me permet de
réitérer que, de fait, il y a des contrats en cours, en
construction navale à Sorel-Tracy et qu'il n'est pas question de fermer
la division navale maritime de Sorel-Tracy. Il y a des contrats en cours pour
des mois et des mois à venir, d'une part.
Ce que la direction a nié - autre chose que ce que je viens
d'expliquer - ce seraient les annonces tonitruantes qui devaient venir dans les
jours prochains, disant que nos coactionnaires français manifesteraient
de l'impatience et demanderaient toutes sortes d'amendements à des
conventions d'actionnaires existantes. Cette semaine, comme à toutes les
deuxièmes semaines de décembre depuis des années que des
Français sont actionnaires de Marine Industrie, c'est l'assemblée
régulière qui est en cause.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître une
troisième question principale. M. le député de
Verchères.
Les listes d'attente dans les services de protection
de la jeunesse
M. Charbonneau: M. le Président, sur un autre sujet qui
nécessiterait l'intérêt horaire du gouvernement. Hier, la
ministre de la Santé et des Services sociaux a dit que plus d'argent ne
changerait pas le problème et n'éliminerait pas les listes
d'attente énormes qui restent actuellement, malgré les fonds
qu'elle a consacrés à la protection de la jeunesse. Or, hier
soir, à l'émission Le Point, le coordonnateur provincial
des
admissions soutenait, au contraire, que des ressources humaines
additionnelles, et donc des ressources financières additionnelles,
permettraient de régler le problème et permettraient finalement
au Québec de rejoindre l'Ontario qui, actuellement, a un temps d'attente
de douze heures, alors qu'au Québec, on a un temps d'attente de quatre
à six mois avant que les signalements puissent être
évalués par les travailleurs sociaux des services sociaux.
Le Président: Votre question.
M. Charbonneau: La question que je voudrais poser à la
ministre de la Santé et des Services sociaux est la suivante. La
ministre ne convient-elle pas que d'attendre les conclusions d'un comité
qu'elle a dit avoir mis sur pied il y a quelque temps est une façon de
retarder le problème et de reporter sur le dos des enfants
maltraités la responsabilité du gouvernement de mettre des moyens
financiers adéquats, alors que le gouvernement dit avoir les moyens et
être en période de vaches grasses, selon les propos mêmes du
ministre des Finances?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je pense que, si le
député de Verchères avait bien écouté hier -
à moins que je me sois mal exprimée, ce dont je doute - je n'ai
pas dit qu'il n'y avait pas besoin de ressources supplémentaires. J'ai
indiqué que nous avions déjà injecté des ressources
supplémentaires et qu'il ne fallait pas fonder nos interventions
strictement sur l'ajout de ressources financières, mais qu'il fallait
également examiner le fonctionnement du Comité de la protection
de la jeunesse quant au type d'interventions qu'il fait et quant au
fonctionnement des directions de la protection de la jeunesse. Je pense que
nous n'avons pas écarté, et cela a d'ailleurs été
confirmé par le premier ministre, que, s'il y a des besoins
supplémentaires - et je pense qu'il y en a - nous devrons injecter des
deniers. Et, en ce sens, il n'y a pas de problème. Le
député de Verchères a peut-être mal compris. Le
député de Verchères a peut-être aussi entendu le
coordonnateur dire que ces problèmes subsistaient depuis six ou sept
ans. Ce dernier a indiqué aussi, en fin d'émission, que la
ministre avait fait des efforts, travaillait pour corriger cette situation et
qu'elle en était préoccupée.
M. Charbonneau: M. le Président.
Le Président: M. le député de
Verchères, en additionnelle.
M. Charbonneau: Puisque la ministre est d'accord avec nous pour
dire que cela prend des fonds additionnels à ceux qu'elle a
déjà injectés, quand va-t-elle demander de l'argent au
Conseil du trésor et combien a-t-elle demandé? Est-ce qu'elle est
d'accord avec les gens du milieu des centres de services sociaux et ceux du
milieu de la protection de la jeunesse sur le fait qu'il faudrait 10 000 000 $
additionnels annuellement pour faire face à la situation et pour
permettre au Québec de se comporter de la même façon qu'on
se comporte en Ontario?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. (10 h 40)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'espère que le
député de Verchères, alors qu'il était membre du
gouvernement, non pas membre du gouvernement, mais alors qu'il faisait partie
du côté ministériel a déployé les mêmes
efforts pour obtenir de l'argent. Comme je le disais hier, une partie des
problèmes que nous avons aujourd'hui sont dus au transfert de personnel,
et c'est indiqué aussi par les centres de services sociaux, le transfert
souvent arbitraire de personnel qui était affecté à la
jeunesse et qu'on a transféré aux CLSC sans apporter la
compensation suffisante. Nous essayons de le corriger. Je ne peux pas
répondre si c'est de 10 000 000 $ dont on a besoin. Il est certain qu'on
aura besoin de sommes additionnelles et, en temps et lieu, j'irai les chercher
auprès du Conseil du trésor.
Le Président: Toujours en additionnelle, Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui. C'est un problème urgent, en fin de
compte, que vivent actuellement les jeunes qui sont en difficulté. La
ministre - après le dépôt du projet de plan de travail que
le CRSSS a déposé en septembre 1987, un plan de travail sur les
services qu'il pourrait donner pour les jeunes en difficulté, c'est
depuis le mois de septembre 1987 que ce plan de travail a été
déposé par le CRSSS - entend-elle y donner suite ou si, tout
simplement, la ministre veut laisser entendre que les intervenants dans les
CLSC et dans les directions d'écoles qui n'ont pas pris toutes leurs
responsabilités ne sont pas aptes à remplir les exigences
demandées par la ministre.
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: Je dois dire que j'ai un peu de
difficulté à saisir tous les éléments que la
députée de Marie-Victorin a soulevés dans sa question. En
ce qui a trait à un document de la conférence des CRSSS, selon ce
que je crois comprendre, ça fait partie de l'ensemble des documents qui
sont
étudiés et qui serviront également de fondement aux
décisions que nous devrons prendre pour le prochain budget.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le leader de l'Opposition, en principale. M. le leader de l'Opposition en
principale.
M. Chevrette: II ne faudrait pas demander au vrai ministre des
Affaires sociales.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
principale.
Grève des employés de bureau
d'Hydro-Québec
M. Gendron: Oui, M. le Président. Hier et aujourd'hui,
dans un mouvement spontané, les 6000 employés de bureau
d'Hydro-Québec entamaient un débrayage illimité pour
protester contre la direction d'Hydro-Québec. Il faut comprendre que le
14 mai 1986, ces employés signaient une convention collective ne
prévoyant aucune augmentation de salaire pour la première
année de convention en échange de clauses normatives importantes
sur la formation, la création de postes permanents et les changements
technologiques. Depuis cette date du 14 mai 1986, la direction refuse
systématiquement d'appliquer la convention collective. D'ailleurs, le
président, M. Coulombe, a indiqué que l'impact budgétaire
des clauses sur la formation prenait des proportions budgétaires
difficiles à évaluer, qu'il pourrait être énorme et
qu'il faudrait s'asseoir pour trouver autre chose.
La question que je pose au ministre de l'Énergie et des
Ressources est: Le ministre de l'Énergie et des Ressources
considère-t-il normal que la direction d'Hydro-Québec signe une
convention collective et, par la suite, refuse de l'appliquer sous
prétexte qu'elle n'a pas évalué les coûts directs
réels?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources. M. le ministre.
M. Ciaccia: Évidemment, le leader de l'Opposition donne
une version des faits. Ce n'est pas la version d'Hydro-Québec. Il y a
des griefs. Mais, Hydro-Québec affirme qu'elle applique la convention.
C'est une question d'interprétation. Au moment où on se parle, il
y a un débrayage illégal. Je ne veux pas ajouter aux
difficultés. Je veux permettre à Hydro-Québec et aux
parties de s'entendre, de discuter et de pouvoir régler leurs
différends, pour le moment. Pour cette raison, je n'ajouterai pas
d'autres éléments à la question du leader de
l'Opposition.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, toujours en
additionnelle.
M. Gendron: Comment pouvons-nous comprendre, selon la
réponse du ministre qu'une direction qui appliquerait la convention
collective se ramasse, dans une très courte période de temps,
avec plus de 2500 griefs?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, vous êtes d'accord
qu'il y a un débrayage illégal. Alors, je vais
répéter la réponse que je vous ai donnée. Je ne
veux pas ajouter aux problèmes qui existent présentement. Je veux
permettre aux dirigeants d'Hydro-Québec d'essayer de régler les
conflits qui existent et de rencontrer les parties intéressées.
Je rencontre moi-même les représentants d'Hydro-Québec
aujourd'hui pour en discuter plus longuement. Pour le moment, pour agir de
façon responsable, je ne veux pas ajouter de commentaires.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Gendron: Est-ce que le ministre de l'Énergie et des
Ressources a l'intention, lors de sa rencontre avec la direction - il vient de
nous l'annoncer - d'indiquer aux dirigeants d'Hydro-Québec que pour
éviter une grève illégale, une des meilleures
façons, c'est de respecter la convention collective signée?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: Je trouve un peu curieux, sans dire...
Une voix: Elle est bonne.
M. Ciaccia: ...irresponsable, le jugement que le leader de
l'Opposition porte. Vous avez jugé, vous, qu'Hydro-Québec n'a pas
respecté la convention collective. Je ne suis pas arrivé à
cette conclusion.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Gendron: M. le Président, ce que je trouve
irresponsable, ce sont les propos du ministre de l'Énergie et des
Ressources. Je n'ai pas jugé. Il y a 6000 travailleurs qui sont en
grève aujourd'hui. La question, c'est qu'ils prétendent,
basé sur un nombre de griefs exagéré, qu'il y a irrespect
de la convention collective. Est-ce que, à tout le moins, le ministre
s'engage à en discuter avec la direction d'Hydro-Québec, soit
d'assumer leurs responsabilités par rapport aux clauses de la convention
collective?
Le Président: M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Je ne sais pas si le leader de l'Opposition est en
bonne posture aujourd'hui pour nous faire la leçon sur le respect des
conventions avec les employés de l'État quand...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Ciaccia: ...lui-même faisait partie d'un gouvernement
qui a coupé, qui n'a pas respecté ses engagements envers ses
employés.
Une voix: C'est cela!
M. Ciaccia: Si les parties sont de bonne foi - et je dois
présumer qu'elles veulent l'être - je pense que la première
chose à faire, ce serait d'arrêter la grève
illégale. Si on a des griefs, il y a des mesures, des moyens de discuter
des griefs sans procéder par une grève illégale.
Cependant, je vais rencontrer les représentants d'Hydro-Québec;
et, pour le moment, je laisse à Hydro-Québec le soin de discuter
et d'essayer d'en venir à une entente de règlement avec toutes
les parties intéressées.
Le Président: Je vais reconnaître, maintenant, en
principale, M. le député de Mercier.
La démolition du couvent centenaire de
Montmagny
M. Godin: M. le Président, je vous remercie.
Une voix: Oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Godin: Ma question porte sur le couvent de Montmagny, M. le
Président.
Une voix: Pardonnez-moi...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre! M. le député de Mercier, en principale.
M. Godin: Le bélier mécanique enthousiaste de la
ville de Montmagny a rasé un couvent de 110 ans et la ministre, marraine
des biens culturels, n'a rien fait à ce jour. Qu'est-ce qu'elle compte
faire pour que les coupables soient poursuivis? Rien n'a été
fait, Mme la ministre. Que comptez-vous faire pour que les coupables soient
poursuivis et punis?
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Bacon: Dans le dossier de Montmagny... Le
député a raison, il n'existe pas au Québec, en ce moment,
un consensus quant au respect du patrimoine. Je dois dire - si j'ai bien
compris sa question, c'est sur le dossier de Montmagny... Je pense que cela
touche au patrimoine dans l'ensemble du Québec aussi et c'est pour cela
que j'ai formé un comité de travail. Il travaille en ce moment
sur le dossier du patrimoine; il remettra un rapport dans six mois et il nous
donnera des recommandations comme nous en avons eu dans le rapport Sauvageau
sur les bibliothèques. De plus, j'ai rétabli au ministère
une Direction du patrimoine qui avait été discontinuée par
l'ancienne administration.
Quant au dossier de Montmagny, il suit son cours et s'il faut prendre
des mesures juridiques, nous les prendrons, M. le Président.
Le Président: M. le député de Mercier, en
additionnelle.
M. Godin: Est-ce que la ministre va déposer le rapport
d'enquête qui se fait présentement avant que nous ajournions pour
les fêtes?
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Bacon: Je devrai en aviser le député de
Mercier, M. le Président. Je prends avis de sa dernière
question.
Le Président: M. le député de Saint-Jacques,
en principale ou en additionnelle?
M. Boulerice: En additionnelle, M. le Président...
Le Président: En additionnelle, M. le député
de Saint-Jacques.
M. Boulerice: ...sur le même sujet, mais cette fois-ci,
elle est adressée à M. le ministre de la Justice, Procureur
général, Solliciteur général, 36 métiers, 36
misères.
Une voix: En additionnelle. M. Boulerice: En
additionnelle. Le Président: En additionnelle.
M. Boulerice: Votre collègue... Est-ce que...
Des voix: Hou! Hou!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de... Je vous avais reconnu en additionnelle, M. le
député de Saint-Jacques. (10 h 50)
M. Boulerice: Est-ce que le ministre de la Justice peut confirmer
ce que la ministre des Affaires culturelles disait le 3 juin 1987: Les affaires
culturelles ont demandé au ministre de la Justice de procéder
à une enquête sur les événements qui ont
entouré la vente et la démolition du vieux couvent? Y a-t-il eu
enquête? Et elle ajoutait: On a reçu une opinion du ministre de la
Justice qui est arrivée au ministère des Affaires culturelles.
L'opinion a-t-elle été donnée? Et pouvez-vous la
déposer?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Marx: M. le Président, j'aimerais assurer le
député que je n'ai pas de misère. En ce qui concerne sa
question, j'en prends avis et je vais essayer d'avoir la réponse
demain.
Le Président: M. le député de Shefford, en
additionnelle?
M. Paré: Oui, en additionnelle.
Le Président: M. le député de Shefford, en
additionnelle.
M. Paré: Oui, j'aimerais savoir comment le ministre des
Affaires municipales et responsable de l'Habitation explique que la
Société d'habitation du Québec, une société
d'État, dont le ministre a l'autorité, a cédé
l'immeuble pour 1 $ le vendredi et que cet immeuble a été
démoli le samedi, sans que la société d'État n'ait
respecté le délai de 60 jours d'avis, tel que stipulé dans
la loi?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et
responsable de l'Habitation.
M. Bourbeau: M. le Président, le député de Shefford
fait état d'un délai qui n'aurait pas été
respecté. Je dois dire que les faits ne sont pas si clairs que cela. Et,
quand on regarde l'ensemble du dossier, il n'est pas très évident
que les délais n'aient pas été respectés.
Premièrement, qui devait envoyer les avis? Et, deuxièmement, qui
était responsable de la situation? Tout ce que je peux dire, c'est que
la SHQ a cédé l'immeuble pour 1 $. Je comprends pourquoi elle l'a
fait d'ailleurs, cela lui coûtait environ 100 000 $ pour le garder,
n'ayant pas d'usage pour l'immeuble. Et ce n'est pas la SHQ qui a démoli
l'immeuble, cela a été fait par la municipalité.
Le Président: M. le député de Shefford, en
additionnelle.
M. Paré: En additionnelle. Si le ministre laisse entendre
que l'avis aurait été donné dans les délais
prescrits par la loi, est-il prêt à déposer cet avis de 60
jours?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et
responsable de l'Habitation.
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas dit que l'avis
avait été donné, j'ai dit qu'il y a une espèce
d'incertitude quant à la nécessité. Tout ce que je peux
dire au député, c'est que la SHQ a vendu l'immeuble pour 1 $,
qu'elle n'a joué aucun rôle dans la démolition du couvent
de Montmagny. C'est la municipalité qui était propriétaire
du couvent et qui a pris la décision. Semble-t-il qu'elle soit
prête à vivre avec sa décision.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître, en
principale, M. le député d'Ungava.
L'avenir de MurdochvUle et des ex-travailleurs de
Mines Gaspé
M. Claveau: Merci, M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Claveau: M. le Président, j'arrive de Murdochville
où j'ai eu l'occasion de rencontrer l'exécutif du Syndicat des
métallos, l'Assocation des ex-travailleurs de Mines Gaspé, les
marchands, le comité de citoyens, le maire, des retraités vivant
à Murdochville, etc. J'ai pu constater que, à cause des
hésitations et des volte-face de ce gouvernement depuis plus de huit
mois, on a créé un climat d'incertitude, un climat de
méfiance qui est devenu presque invivable pour qui que ce soit qui
demeure à Murdochville. Ma question au ministre
délégué aux Mines est la suivante: quand entend-il mettre
fin à ce suspense indécent et nous faire connaître, ainsi
qu'à la population de Murdochville, les intérêts de son
gouvernement quant à l'avenir de Murdochville et des ex-travailleurs de
Mines Gaspé?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre délégué
aux Mines et délégué aux Affaires autochtones. Allez, M.
le ministre.
M. Savoie: M. le Président, le député
d'Ungava peut se compter chanceux parce qu'il a vraiment commencé sa
question en vertu de l'article 77, alinéa 5, du règlement qui
dit: On ne doit pas faire des déclarations de nature à susciter
un débat. C'est ce qu'il a fait. Au début de ses propos, il a
fait part de tout un ensemble de situations qui sont fausses.
Notre gouvernement, depuis le début,
depuis le feu du 1er avril 1987, s'est impliqué activement dans
ce dossier, et non seulement le ministre délégué aux
Mines, mais tout un ensemble de personnes: le député de
Gaspé, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu, le ministre responsable du Développement régional, le
ministre des Affaires municipales, le ministre des Finances et le
député de Bonaventure se sont tous impliqués dans ce
dossier et on essaie d'apporter une solution d'ensemble pour la région
de Murdochville, un programme d'exploration, un programme de relance pour la
municipalité. On s'est impliqué pour un montant de 2 500 000 $.
Et vous revenez constamment à la charge!
D'ailleurs, je voudrais bien savoir ce que vous avez dit aux 25, 30
mineurs qui ont des résidences et qui n'ont pas encore trouvé
d'emploi à l'extérieur de Murdochville. Je me demande ce que vous
leur avez dit! Parce que c'est à la suite de votre visite qu'ils sont
descendus dans les rues. Je me demande si c'est cela, votre rôle comme
député de l'Opposition.
Une voix: Bravo! Très bien!
M. Claveau: M. le Président, c'est que les mineurs
attendent ce que le ministre va dire.
Le Président: Un instant! À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député d'Ungava, avant d'adresser la parole,
vous devez être reconnu. Je vous reconnais maintenant, en additionnelle,
M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci de me reconnaître, M. le
Président. En additionnelle, toujours au ministre
délégué aux Mines. Est-ce que le ministre
délégué aux Mines peut nous confirmer qu'il n'a jamais
rencontré ni l'exécutif du syndicat ni les ex-travailleurs
eux-mêmes de Mines Gaspé ni les comités de citoyens, ni les
commerçants de Murdochville? Sur la base de quoi va-t-il faire des
recommendations pour l'avenir de ces gens s'il ne les a jamais
rencontrés, ni lui ni son député de Gaspé?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Mines et responsable des Affaires autochtones.
M. Savoie: M. le Président, le député
d'Ungava est malade.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: M. le ministre! M. le ministre! À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le
ministre délégué aux
Mines, avant de répondre à la question, vous allez retirer
immédiatement ces paroles. Immédiatement, s'il vous plaît!
Immédiatement!
M. Savoie: Je m'excuse, monsieur... M. Gendron: Question de
règlement.
Le Président: S'il vous plaît, s'il vous
plaît! Sur une question de règlement, M. le leader de
l'Opposition.
M. Gendron: Oui, question de règlement, M. le
Président. Vous êtes conscient des propos qui ont
été utilisés par...
Le Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!.
M. Gendron: ...le ministre des Mines, et c'est sûr qu'on
n'acceptera pas, comme Opposition, même s'il a l'intention, après
avoir dit ses saletés, de s'excuser, nous, M. le Président...
Le Président: Je vais terminer la première question
de règlement. Je vais vous entendre, M. le leader adjoint sur la
même question de règlement.
M. Gendron: Sur la question de règlement, c'est simple, M.
le Président. Ce que je veux dire au ministre des Mines: Ici ce n'est
pas le notaire Savoie qui est en Chambre, c'est le ministre
délégué aux Mines, et on voudrait qu'il ait un
comportement d'homme public.
Le Président: Tous les collègues doivent être
interpellés par leur titre, ici dans cette Assemblée. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, sur la question
soulevée par le leader de l'Opposition, il n'a manifestement pas
prêté attention à vos propos, alors que vous avez
demandé immédiatement au ministre des Mines de retirer ses
paroles. Les interventions du leader de l'Opposition n'ont servi que de
prétexte, quant à lui, pour soulever lui-même des propos
qui sont antiparlementaires.
Le Président: Je rappelle à tout le monde que c'est
dans l'intérêt des travaux de cette Assemblée, lorsqu'on
s'adresse à un des collègues, on l'interpelle par le nom de la
circonscription qu'il représente ou par son titre. M. le ministre
délégué aux Mines...
M. Savoie: M. le Président.
Le Président: ...avant de vous reconnaître en
réponse à l'additionnelle posée par M. le
député d'Ungava, je vous
demande de retirer vos deux premières phrases.
M. Savoie: M. le Président, en effet, j'ai dit cela dans
un sens figuratif, ce n'était pas dans un sens littéral.
Le Président: Retirez vos paroles, M. le ministre.
M. Savoie: Oui, M. le Président, je m'excuse de l'avoir
traité de malade, ce n'est pas....
Le Président: Alors, à la question...
M. Savoie: M. le Président, vous comprendrez que pour
avoir été à Murdochville au moins trois fois depuis la
fermeture, pour avoir rencontré des gens de Murdochville dans mes
bureaux au moins deux fois, et tout cela depuis le 1er avril, pour avoir
discuté au téléphone, à plusieurs reprises, avec
les gens de Murdochville, pour avoir rencontré je ne sais pas combien de
fois les intervenants de la compagnie minière Noranda... Lui se
lève en Chambre, M. le Président, et il dit: Vous n'avez jamais
rencontré les gens. Je n'en reviens pas! C'est insupportable! C'est
intolérable comme question! La moindre vérification, la moindre
lecture des journaux - je ne lui demande de se rendre dans la section B du
Soleil, c'est trop compliqué de rester dans la section A -il
aurait appris que j'ai rencontré et que je me suis démené
dans ce dossier. Je n'accepterai pas qu'on me dise que je n'ai pas
rencontré tel groupe, que je n'ai pas rencontré tel autre. (11
heures)
Le Président: En conclusion.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: M. le député d'Ungava, en
additionnelle.
M. Claveau: Vous permettrez peut-être, avant de...
Le Président: En additionnelle. Des voix: Non,
non...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En
additionnelle, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: D'accord. Au ministre du Travail, M. le
Président, en additionnelle. Quand le ministre du Travail a-t-il
l'intention de rendre publiques les conclusions de l'enquête de la CSST
sur l'incendie du 1er avril 1987 à Mines Gaspé?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je
commencerai en vous indiquant que je partage l'ensemble des propos de mon
collègue, le ministre délégué aux Mines.
Des voix: Bravo!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons travaillé...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Brièvement, M. le ministre du Travail. À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, avec le
leadership qu'il a exercé dans ce dossier, d'autres ministres lui ont
prêté main forte, et il les a mentionnés. Qu'il s'agisse du
ministre des Finances, du ministre responsable de l'Habitation excusez, M. le
Président...
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...l'ensemble des ministres
concernés ont prêté main forte au ministre des Mines dans
cet important dossier.
Quant à l'aspect précis soulevé par le
député d'Ungava et qui concerne une enquête de la CSST,
dès que le rapport m'aura été remis, j'en ferai l'analyse
et, s'il y a lieu, je le rendrai public.
Le Président: M. le député d'Ungava, cette
dernière réponse mettait fin à la période
régulière de questions.
Des voix: Encore... Encore!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Votes
reportés.
Motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Lefebvre: M. le Président, j'avise cette
Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la
commission de l'aménagement et des équipements procédera
à l'étude détaillée du projet de loi 76, Loi sur le
camionnage. Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures,
à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de
l'administration procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 95, Loi modifiant la Loi sur le
ministère du Revenu en matière d'appel sommaire. Après
les
affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du
Conseil législatif, la commission des institutions procédera
à l'étude détaillée du projet de loi 75, Code de
procédure pénale.
De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures,
à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement
et des équipements procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur la
Régie du logement et le Code civil.
M. le Président, je désire également informer cette
Assemblée qu'une fois adopté le principe du projet de loi 88, Loi
modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les
cités et villes et le Code municipal du Québec, ledit projet de
loi sera alors étudié par la commission de l'aménagement
et des équipements, et ce, dès que ladite commission aura
terminé l'étude détaillée du projet de loi 87.
De 15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'agriculture, des pêcheries
et de l'alimentation poursuivra l'étude détaillée des
projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: le
projet de loi 89, Loi sur les courses de chevaux; le projet de loi 46, Loi sur
le financement agricole.
De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures,
à la salle du Conseil législatif, la commission de
l'économie et du travail procédera à l'étude
détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre
ci-après indiqué: le projet de loi 93, Loi sur l'utilisation des
produits pétroliers; le projet de loi 84, Loi modifiant la Loi sur les
terres du domaine public et, de 19 heures à 24 heures, et ce de
consentement avec l'Opposition, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine,
la commission des affaires sociales poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du gouvernement.
Je constate qu'à votre dernier avis, M. le leader du gouvernement, vous
nous avisez que la commission des affaires sociales devra siéger de 19
heures à 24 heures. Est-ce que j'ai le consentement de la Chambre pour
que l'on siège de 19 heures à 24 heures?
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: D'accord. Ceci met fin aux avis
touchant les travaux des commissions. Nous allons donc passer aux
renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
M. Gendron: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Lefebvre: J'ai d'autres avis à donner, Mme la
Présidente, si vous le permettez.
La Vice-Présidente: Sur les renseignements?
M. Gendron: Non, mais un instant, Mme la Présidente. Un
instant!
La Vice-Présidente: Là-dessus, j'ai reconnu le
leader de l'Opposition. Je vais l'écouter. M. le leader de
l'Opposition.
M. Gendron: Vous allez m'écouter pour savoir que ce qu'il
veut vous indiquer, c'est qu'il n'a pas terminé ses avis concernant les
travaux de la Chambre. Quant à l'appel concernant les renseignements sur
les travaux, je voudrais que vous le rappeliez après qu'il aura
terminé ses avis pour ne pas que je perde mon droit de parole.
La Vice-Présidente: Donc, il y a consentement pour que
l'on revienne aux avis touchant les travaux des commissions? Consentement. M.
le leader du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je désire
également aviser cette Assemblée que le mercredi 16
décembre 1987, après les affaires courantes jusqu'à 13
heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures,
à la salle du Conseil législatif, la commission de
l'aménagement et des équipements entendra les
intéressés et procédera à l'étude
détaillée des projets de loi d'intérêt privé
suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi
privé 249, Loi modifiant la charte de la ville de Laval, projet de loi
privé 232, Loi concernant la ville de Saint-Léonard, projet de
loi privé 252, Loi concernant la ville de Salaberry-de-Valleyfield,
projet de loi privé 233, Loi concernant la ville de Rock Forest, projet
de loi privé 216, Loi concernant la municipalité régionale
de comté de la Rivière-du-Nord et projet de loi privé 247,
Loi concernant la ville de Vaudreuil. C'est tout, Mme la Présidente,
quant aux avis.
La Vice-Présidente: Ceci met fin aux avis touchant les
travaux des commissions?
M. Gendron: Concernant les travaux, les renseignements au
leader...
La Vice-Présidente: Je vais y venir.
M. Gendron: Oui, cela met fin aux avis.
La Vice-Présidente: Nous en sommes donc aux renseignements
sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'Opposition.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
M. Gendron: Sur les renseignements concernant les travaux de
l'Assemblée, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
avait indiqué, à une question de mon collègue le
député de Dubuc, qu'il donnerait une réponse concernant la
présence ou non d'agents de conservation sur la Moyenne-Côte-Nord
et sur la Basse-Côte-Nord. Je veux juste indiquer au leader que nous
aimerions que le leader du gouvernement puisse demander au ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche de fournir cette réponse dans les
prochains jours.
La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, à la demande du
leader de l'Opposition, je peux tout de suite lui indiquer que le ministre est
en Chambre et qu'au moment où on se parle, il serait prêt à
répondre immédiatement.
La Vice-Présidente: Oui, mais nous ne sommes pas à
cet article présentement.
M. Lefebvre: Je veux rassurer le leader de l'Opposition qu'il
tienne pour acquis que demain ou dans les jours qui suivent... Ce sera dans les
prochains jours. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: II n'y a pas d'autres renseignements
sur les travaux de l'Assemblée?
Une voix: Non, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Ceci met fin aux renseignements sur
les travaux de l'Assemblée. Nous allons donc passer aux affaires du
jour. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 15 du feuilleton, s'il vous plaît!
La Vice-Présidente: S'il vous plaît: Je demanderais
aux députés, s'ils ont des caucus à faire, de les faire
à l'extérieur de la Chambre. À l'ordre, s'il vous
plaît!
Projet de loi 88
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
À l'article 15 de notre feuilleton, il s'agit de la reprise du
débat concernant l'adoption du principe du projet de loi 88, Loi
modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les
cités et villes et le Code municipal du Québec. Là-dessus,
je suis prête à reconnaître le prochain intervenant, M. le
député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Comme il a
été entendu, je serai le dernier intervenant du côté
de l'Opposition à faire un discours sur ce projet de loi qui, il faut se
le rappeler, porte actuellement à controverse. (11 h 10)
Nous étions à faire le débat de ce projet de loi
hier soir, mais il a fallu prendre des décisions et ajourner le
débat jusqu'à aujourd'hui, puisque le ministre des Affaires
municipales n'était pas présent ici, en cette Chambre, ayant
jugé, même dans ce temps normal où les ministres et les
députés sont convoqués de façon spéciale
à une session intensive, d'être à l'extérieur de la
Chambre. J'ai été tout à fait surpris et, comme nous
avions des choses à dire et que nous avons encore des choses à
dire sur le sujet, il était donc important pour nous que le ministre
soit ici, présent en cette Chambre, au lieu d'être à
Montréal ou ailleurs, et puisse nous répondre de façon
adéquate.
Hier soir, tout un menu législatif était en discussion et,
malheureusement, M. le ministre n'étant pas là, il a fallu
retarder et ajourner complètement les travaux de la Chambre, ce qui
retarde d'autant l'étude d'autres projets de loi. Je trouve cela
inconcevable, Mme la Présidente. Et je dois le dire au nom de gens qui
étaient prêts à travailler hier soir selon un rythme normal
de fin de session et qui ont dû interrompre leurs travaux pour les
raisons dont je vous ai fait mention.
Le ministre semble dormir un peu sur ce dossier pour être
inconscient de ce que disent les gens de l'Union des municipalités du
Québec, l'UMQ, de l'Union des municipalités régionales de
comté, l'UMRCQ, de l'Union des producteurs agricoles, que l'on
connaît comme étant un organisme cherchant à trouver des
solutions entre ce qu'on a appelé les zones tampons et le "spot zoning"
- dans le terme connu - ou le zonage par secteur. Un zonage qui a pour effet
qu'à l'intérieur du territoire agricole au Québec, on se
retrouve avec des possibilités à différents niveaux. J'ai
posé la question au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation qui m'a répondu: Non, le monde semble être
confiant. J'en suis moins sûr, du zonage à l'intérieur de
la zone de protection du territoire agricole pour toutes sortes de raisons.
J'ai eu l'occasion de discuter avec le ministre de l'Énergie et
des Ressources du projet de loi 102 qui est maintenant adopté et qui
parle justement des terres du domaine
public. J'ai eu - et vous avez eu le rapport ce matin à
l'Assemblée nationale - l'occasion de discuter avec le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation d'un autre projet de
loi, le projet de loi 15, portant sur les terres agricoles du domaine public.
Nous avons adopté ce projet de loi avec amendements en commission
parlementaire. Le rapport est déposé ce matin et nous aurons
l'occasion de le discuter et d'en arriver à une conclusion. Ce que je
sais, Mme la Présidente, c'est que l'ensemble des terres du domaine
public, de façon plus précise celles qui me concernent comme
porte-parole de l'Opposition, les terres agricoles... Dans la mesure où
nous avons une loi à laquelle nous devons arrimer la loi sur les MRC,
soit une loi pour l'agriculture, la Loi sur la protection du territoire
agricole, le projet de loi 90, et à côté, la loi 125 sur
l'aménagement du territoire au Québec, nous nous trouvons donc
avec deux lois dont il faut arrimer le sens et qui comportent
nécessairement des difficultés.
Il est évident que le projet de loi que nous avons devant nous
nous invite à un comité de concertation entre les
municipalités et les producteurs agricoles. Cette partie-là peut
être intéressante et j'en conviens. Je conviens que si les gens,
au lieu de se disputer, se rencontrent et trouvent des solutions, c'est
parfait. Là où j'en ai, c'est sur les difficultés qui
pourront survenir et qui feront que quelqu'un devra prendre une décision
si le comité ne peut pas la prendre. Ce qui fait qu'on a enlevé
dans la tête des gens ce qu'on a appelé la zone tampon entre le
territoire agricole et le territoire municipal, c'est qu'il y avait des
difficultés.
Que l'on ait voulu enlever cette source de difficultés pour les
agriculteurs, j'en conviens. Qu'on vienne, dans le règlement
déposé, faire en sorte qu'il y ait maintenant
réciprocité entre le secteur agricole et le secteur municipal,
cela aussi, j'en conviens. Si l'agriculteur est soumis à des normes de
contruction: distance quant à la route, distance quant aux habitations,
distance quant à la sorte de production qu'il fait, bravo! Qu'il y ait,
en même temps, la possibilité que les gens de la ville qui
viennent s'installer n'entrent pas sur son territoire pour qu'ensuite ils ne
viennent pas contester les odeurs, j'en conviens aussi, c'est une bonne
amélioration. Et je pense qu'au nom de l'ensemble des gens du milieu
agricole, il faut s'en réjouir.
Il faut s'en réjouir parce que, ce qui arrivait, c'est qu'une
personne de la ville qui s'installait dans le secteur rural - en campagne,
comme on dit - auprès d'habitations qui produisent des odeurs -qu'on le
veuille ou qu'on ne le veuille pas, quand on a des dindons, quand on a des
poules ou quand on a des porcs, il est évident qu'il y a des odeurs -
une fois rendue là, commençait à contester, ce qui faisait
en sorte que c'est l'agriculteur qui devait reculer. Mme la Présidente,
il est évident que c'est une très bonne amélioration que
de dire: Si l'agriculteur est soumis à des normes quant aux habitations
qui existent, il faudrait que l'inverse soit aussi exact. Je pense que ce sont
des améliorations qu'il faut souhaiter et qu'il faut apprécier
comme étant valables pour le monde agricole, tout comme pour le monde
urbain.
D'un autre côté, il faut éviter les affrontements.
Il faut éviter que l'arrimage de ces deux lois, la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme et la Loi sur la protection du territoire
agricole, ait pour effet de mettre deux clans l'un en face de l'autre, de
façon irréductible. Il faut donc, au nom des gens qui font partie
du monde agricole, dire qu'il ne faut pas toucher, en aucune façon,
à la Loi sur la protection du territoire agricole. Donc, si on fait
disparaître la pensée de zone tampon que l'on avait, bravo! Si, en
contrepartie, par d'autres moyens, on vient faire du zonage par secteur, zonage
parce qu'il faut protéger un territoire historique, zonage parce qu'il
faut protéger un territoire récréatif, différentes
sortes de zonage, là, on s'y oppose. Que le comité de
concertation vienne examiner cela et empêche que cela arrive ainsi, je
dis que si c'est l'idée que l'on a, bravo!
Je voudrais laisser le secteur agricole par rapport au secteur municipal
urbain et aborder un autre sujet qui me préoccupe. Il s'agit de la
possibilité, pour les municipalités régionales de
comté, d'obtenir, par vote majoritaire des deux tiers, l'assentiment des
municipalités afin d'obliger les municipalités
récalcitrantes à entériner des décisions dont elles
ne veulent pas. L'un des exemples typiques porte sur le budget et l'autre sur
les moyens qu'on voudrait se donner, additionnels à ce que la loi
prévoit. La loi dit: On doit, d'abord et avant tout, faire l'ensemble du
schéma d'aménagement et s'assurer qu'il y a les mêmes
sortes de règlement pour que, finalement, dans un territoire
donné, il n'y ait pas de chicane et qu'il n'y ait pas différentes
normes dans différents secteurs. Donc, il faut uniformiser, et le
schéma d'aménagement présenté par les
municipalités régionales de comté a cet effet
d'uniformité et est enclenché depuis l'adoption de la loi 125.
Donc, bravo!
Il y a des problèmes, et je vais vous en citer deux, d'abord, au
chapitre du budget. Il y a une dispute dans mon secteur. Le ministre en est
conscient, il a été sensibilisé à cette dispute
entre des municipalités formant la municipalité régionale
de comté du Haut-Saint-Maurice, d'abord la municipalité de
Haute-Mauricie et la municipalité de La Tuque ainsi que toutes les
autres qui la composent. La décision qui
voudrait que, désormais, toute municipalité, par les deux
tiers des voix, soit obligatoirement sujette au budget, fait en sorte d'enlever
une certaine autonomie à des municipalités qui contestent cela.
Je ne veux pas entrer dans la dispute qui existe là-bas. Je veux juste
expliquer et demander au ministre comment il voit une solution à ce
problème. (11 h 20)
La municipalité de Haute-Mauricie s'est opposée à
ce que la municipalité régionale de comté en arrive
à informatiser l'ensemble de ses services. Ce faisant, la
municipalité s'est retirée de la table de la MRC disant: Quand on
aura réglé ce problème, je reviendrai. Un autre sujet qui
a fait l'objet de discussions, qui est autre chose que le budget, mais qui est
un service additionnel, c'est la quote-part que les municipalités
veulent bien se donner pour participer au comité de développement
industriel de la Haute-Mauricie et qu'on appelle communément, chez nous,
par le sigle CDHM - le Commissariat de développement industriel de la
Haute-Mauricie. Ce groupement a besoin de l'aide des municipalités et,
sur la quote-part, on ne s'entend pas non plus.
On ne s'entend pas sur les objectifs à viser. On ne s'entend pas
sur les moyens à lui donner pour fonctionner. Dans ce sens, il y a
à la table de la MRC des discussions qui ont amené finalement les
gens à se retirer de la MRC. Comment le ministre voit-il un
problème comme celui-là? Comment voit-il -même si, à
l'intérieur du projet de loi, il dit que les deux tiers des gens votants
pourraient forcer une autre municipalité -légalement qu'on puisse
la forcer à agir si elle dit: mon autonomie personnelle comme
municipalité m'oblige à m'y opposer jusqu'à la fin,
jusqu'à ce qu'on trouve un compromis qui soit acceptable? Cela en est
un.
Un deuxième sujet qui fait l'objet actuellement de discussions
dans la municipalité du Centre-Mauricie. Dans la municipalité du
Centre-Mauricie, la municipalité régionale de comté du
Centre-Mauricie, il y a actuellement une discussion sur le tourisme. La ville
de Grand-Mère s'est donné un kiosque touristique. Elle l'a
payé elle-même. Même moi, comme député,
j'avais dit, à l'époque, que si la municipalité se donnait
une bâtisse, un kiosque touristique, un organisme touristique, je n'avais
pas d'objection mais, vu qu'on avait décidé à
l'époque de régionaliser l'ensemble des services, il fallait que
tous s'entendent s'ils voulaient bénéficier de l'aide du
ministère du Tourisme.
Le ministère du Tourisme, à l'époque, avait
décidé que la MRC avait la responsabilité. Finalement, la
MRC avait mis en place un autre organisme qui s'appelle l'ATOURCM -
l'Association touristique du Centre-Mauricie - alors qu'à
Grand-Mère, on avait, depuis fort longtemps avant, une association de
promotion touristique de la ville de Grand-Mère qui s'appelle
communément l'APTGM. Nous avons une association qui a de la vie, de la
vigueur, bien située à la sortie de l'autoroute où,
là, on donne de l'information. Il a fallu faire des batailles et le
ministre du Tourisme est même venu chez moi pour faire en sorte que la
municipalité, le kiosque touristique ou l'association touristique
reçoive l'aide qu'elle était en droit d'attendre et qu'on lui
refusait parce que la MRC lui refusait ces choses en disant que c'était
l'ATOURCM qui était responsable de l'association touristique pour la MRC
du Centre-Mauricie.
Or, ces disputes ont fait en sorte que les gens veulent chercher des
solutions, veulent participer. La ville de Grand-Mère est d'accord, mais
à condition que les gens mettent d'abord le montant qu'elle met pour son
association touristique et son kiosque touristique avant qu'elle mette de
l'argent additionnel pour une association régionale.
Les gens leur ont dit dernièrement: Écoutez, vous allez
être obligés de le faire pareil. On va l'obtenir en vertu de la
loi qui est en discussion et suivant le 66 2/3, comme vous êtes la seule
municipalité à vous opposer, vous allez être obligés
de payer quand même. La municipalité a dit: Un instant. Ça
ne se passera pas comme cela. Donc, au lieu d'avoir un projet qui unifie, on a
l'impression qu'on va avoir un projet de loi qui va les désunir. C'est
un projet de loi qui va désunir des municipalités sur un objectif
commun. Pourtant, les gens du Centre-Mauricie sont en train de réaliser
ce que tout le monde espère, c'est-à-dire une meilleure
unité, une meilleure coordination, une meilleure cohésion des
gestes.
Un exemple, Mme la Présidente, pour vous indiquer ce qui a
été fait. La Chambre de commerce de Grand-Mère, par
l'intermédiaire de sa présidente, Mme Céline
Trépanier, proposait l'an passé, un projet pour faire un salon de
l'entreprise et de l'entrepreneurship. Les gens de Shawinigan, ville voisine,
trouvent que cela a bien du bon sens et veulent eux aussi s'en organiser un.
Dans ce sens, au lieu d'en faire deux, on a dit on n'en fera qu'un seul.
Là les deux chambres de commerce avec une autre chambre de commerce, les
gens de Shawinigan-Sud qui font partie de la Chambre de commerce de Shawinigan,
se sont réunies, la MRC, tout le monde a uni ses efforts pour faire de
ce premier salon une réussiste.
Voilà donc une pensée, une idée lancée de
Grand-Mère, récupérée par l'ensemble des gens en
région et un salon qui a fait l'objet d'un accord total, d'une
réussite jamais espérée, donc au-delà de nos
espérances. Cela nous permet de penser que, l'an prochain, cela va
être encore mieux.
Pourquoi? Parce que les gens se sont réunis, parce que les gens
de Grand-Mère ont dit: Écoutez, ce n'est pas parce qu'on a eu
l'idée qu'on va nécessairement être les seuls à la
mettre en place; ils se sont réunis pour la faire.
Or, le projet de loi que nous avons devant nous risque, au point de vue
touristique, d'amener de la désunion plutôt que de l'union. C'est
cela que j'explique au ministre. Qu'est-ce qu'il va amener comme amendement
pour éviter ce que, dans le fond, il ne recherche pas? Ce qu'il
recherche, à mon avis, c'est l'union, la cohésion, la
coopération, la collaboration. Ce qu'il est en train de faire, c'est
l'inverse. L'UMQ et l'UMRCQ s'insultent; les gens de l'UPA qui, au
départ, avaient dit que cela avait bien du bon sens quant aux
règlements déposés commencent à avoir quelques
doutes. Il reste que le projet de loi est mal fait. Le projet de loi
amène des choses inverses à ce que le ministre recherche.
Dans ce sens-là, nous sommes conscients que nous voulons
être positifs dans le débat que nous faisons. Le ministre aura
beau sourire, s'exclamer et dire que ce n'est pas ce qu'ils cherchent, je n'ai
qu'à prendre, pour ce que je propose, l'exemple des
députés libéraux qui, actuellement, disent qu'en
commission parlementaire, sur d'autres sujets, je suis quelqu'un qui les aide
à connaître davantage le projet de loi parce que je pose des
questions qui sont correctes. Les questions que je pose... Non, j'ai le droit,
même le ministre de l'Agriculture fait le geste que vous avez fait envers
moi. Effectivement, nous faisons un travail positif. Nous faisons un travail
pour aider l'ensemble de la population, pour permettre aux gens d'avoir les
meilleurs projets de loi.
Ce que je pose comme question dans le cas de La Tuque en ce qui concerne
le budget et les services, c'est la même que je pose quant au centre de
la Maurice pour ce qui est des services. Ce n'est pas une question de budget,
c'est une question de services additionnels, au-delà de ce que la loi
les oblige à faire. Ce sont donc des choses qui peuvent se donner comme
mandat additionnel si tout le monde est d'accord. Le ministre, sur le budget,
dit: Les deux tiers et après cela, on fonctionne. Les gens disent: Ce
n'est pas tout à fait comme cela. Si on dit que, dans le budget, il y a
une question qui concerne le tourisme et avec laquelle je ne suis pas d'accord,
comment vais-je m'y opposer et comment vais-je demander à mes citoyens
de payer deux fois plus que ce que les autres paient actuellement pour des
services que je n'aurai même pas parce que je n'en ai pas besoin chez
moi? Donc, il faut aider à unir plutôt qu'à
désunir.
C'est la même chose, d'ailleurs, pour les gens de ma
région. Le député de Trois-Rivières pourra en faire
mention avec la
MRC de Francheville où le maire de Cap-de-la-Madeleine s'est
retiré des discussions à un certain moment. Il a même dit
qu'il ne valait pas la peine de continuer à l'intérieur de cela
parce qu'il y a eu des difficultés. Pourtant, dans le centre de la
Mauricie, on a trouvé un moyen de régler ce problème entre
les grosses municipalités qui avaient peur, à l'époque, et
les petites qui avaient peur aussi de leur bord: les grosses, de perdre leur
autonomie, et les petites, d'en perdre davantage parce que pensant être
mangées par les grosses municipalités.
On a réglé le problème; la solution a
été bien simple: pendant deux ans, le préfet provient du
milieu urbain et le sous-préfet du milieu rural; au prochain vote, c'est
l'inverse, le préfet vient du milieu rural et le sous-préfet
vient du milieu urbain. Cela a très bien fonctionné
jusqu'à maintenant. Cela a amené, justement, une pensée
davantage régionale. Comme je suis du comté de Laviolette et que
ma ville, dans le centre de la Mauricie, c'est Grand-Mère, la principale
ville dans le secteur - il y a Saint-Jean-des-Piles et
Saint-Georges-de-Champlain, mais je parle de Grand-Mère qui est de l'UMQ
- la ville de Grand-Mère a été, jusqu'à maintenant,
à l'intérieur du système, une ville très dynamique,
avec le conseil municipal et le maire en place, dans le centre de la Mauricie.
Ils s'en font un orgueil, il faut le dire à tout le monde et ce n'est
pas mauvais de le dire, dans un but d'amener une régionalisation de la
pensée et ensuite des actions.
Dans ce sens, nous allons certainement, avec le ministre, en commission
parlementaire, faire la discussion la plus profonde possible pour permettre de
retirer de ce projet de loi la meilleure possibilité pour les
municipalités régionales de comté d'être dans tous
les secteurs: agricole, comme je l'ai dit tout à l'heure, municipal,
touristique ou autres, donc, pour ces municipalités, d'avoir les moyens
de se réunir et de faire justement ce que le monde recherche, une
pensée régionale. Je vous remercie, Mme la Présidente. (11
h 30)
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. M. le ministre des Affaires municipales, en réplique. M. le
ministre.
Des voix: Bravo!
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente. Nous en sommes
maintenant à la toute fin du débat en deuxième lecture ou
sur l'adoption de principe du projet de loi 88. Le 12 novembre dernier, j'ai
déposé ici même, à l'Assemblée nationale, le
projet de loi 88 dont l'objet principal est de permettre aux MRC, les
municipalités régionales de comté,
de bénéficier désormais d'un cadre plus favorable
à leur développement et à leur fonctionnement.
Faisant suite à une consultation poussée du monde
municipal, notamment lors des assises de Québec-municipalités qui
ont eu lieu au début du mois d'août dernier, ce projet de loi va
constituer une étape significative dans l'évolution de nos
structures municipales. Je voudrais que tous les élus du Québec,
tant municipaux que provinciaux, en soient pleinement conscients et qu'ils
apportent leur collaboration au cheminement de ce dossier.
Lors du débat sur le principe du projet de loi, j'ai eu
l'occasion de situer dans leur contexte ces amendements législatifs et
de faire ressortir l'intérêt qu'ils représentent pour
l'ensemble du monde municipal. Dans mon allocution de deuxième lecture,
j'ai cru pertinent de rappeler à tous les députés
l'évolution extrêmement intéressante des
municipalités régionales de comté au cours des
dernières années, particulièrement en ce qui concerne,
bien sûr, l'élaboration des schémas d'aménagement.
Le travail qu'ont exécuté à cet égard les maires et
les mairesses du Québec et tous les élus municipaux du
Québec doit être qualifié de véritablement
impressionnant.
J'ai également indiqué qu'un très large consensus
avait été établi au sein du monde municipal sur la
nécessité de maintenir les MRC après l'adoption de
schémas d'aménagement, compte tenu des services immenses que ces
organismes régionaux pourraient fournir à leurs membres et
à toute la collectivité en général. Avec franchise,
réalisme et respect des vues exprimées par les porte-parole du
monde municipal, j'ai aussi fait état des difficultés
réelles qui ont gêné jusqu'à maintenant
l'évolution de la MRC. Pour moi et pour une très grande partie du
monde municipal, l'avenir de la MRC dépend essentiellement de notre
capacité à résoudre ces difficultés.
Mme la Présidente, le Québec a trop longtemps
été divisé entre les municipalités rurales et les
municipalités urbaines. La MRC a permis, pour une première fois,
d'asseoir autour d'une même table le milieu rural et le milieu urbain.
Bien au delà de la préparation du schéma
d'aménagement régional, les maires ont ainsi appris à
mieux se connaître, à se découvrir des
intérêts communs et à oeuvrer ensemble à l'atteinte
de leurs objectifs. Cependant, malgré les progrès
considérables qui ont été accomplis, cette
évolution ne pourra se poursuivre que si le partage du pouvoir politique
au sein de la table de la MRC est davantage équilibré et
respectueux des règles démocratiques. Ne pas reconnaître ce
problème et surtout ne pas le résoudre constituerait le plus
mauvais service à rendre à la MRC. D'ailleurs, l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec,
l'UMRCQ, et l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, ont
toutes deux reconnu qu'il était absolument nécessaire de
procéder à un rééquilibrage des forces en
présence, si on voulait favoriser le bon fonctionnement et le sain
développement de la structure régionale.
Voilà pourquoi, le projet de loi 88 s'attaque directement
à ce problème et définit les mécanismes grâce
auxquels le milieu urbanisé pourra se sentir plus à l'aise au
sein des conseils des MRC. Cela signifie que la représentation devra
être plus équitable, plus équilibrée, plus
représentative aussi du poids démographique des
municipalités. Cela signifie également que certaines
décisions majeures de la MRC devront reposer sur des consensus plus
forts que la règle usuelle de la simple majorité.
C'est ainsi, par exemple, qu'à la suite du consensus
établi lors des assises Québec-municipalités,
l'acceptation par la MRC d'une compétence gouvernementale
régionale exigera l'obtention du vote affirmatif des membres
représentant au moins 75 % de la population de la MRC. De même, le
seuil de décision requis pour la prise en charge, par la MRC, d'une
responsabilité locale, a été établi aux deux tiers
des voix des membres, avec, cependant, un droit de retrait dont pourra se
prévaloir chaque municipalité. Je vous souligne, Mme la
Présidente, que ces points-là, ces décisions-là,
ces propositions-là, qui sont dans le projet de loi présentement
ont fait l'objet d'un consensus absolu au sein des municipalités, au
sein de la table Québec-municipalités et lors des assises
Québec-municipalités du mois d'août dernier.
Un autre type de décision mérite, à mon sens, un
seuil de décision plus élevé que la simple
majorité. Il s'agit du budget. La disparité très
significative qui existe entre petites et grandes municipalités, et le
fait que le partage des quotes-parts est généralement fonction de
l'évaluation foncière, ont produit une situation très
particulière et même presque indéfendable, où les
municipalités qui paient le plus sont en même temps celles qui ont
le poids décisionnel le moins représentatif de leur population.
Même avec les correctifs que nous introduisons pour redéfinir la
représentation, les grandes et les moyennes municipalités vont
quand même continuer à assumer une part des dépenses
beaucoup plus grande que le pouvoir relatif dont elles disposent à la
table de la MRC.
Dans ce contexte, j'ai cru bon de fixer aux deux tiers des voix le seuil
nécessaire pour l'adoption du budget de la MRC. Certains porte-parole du
monde municipal auraient désiré un seuil plus
élevé. D'autres, par contre, plaidaient en faveur du
système actuel, malgré les difficultés qu'il comporte.
J'ai dû trancher à un niveau qui corrige, en partie tout au moins,
l'injustice dont se
plaignaient les municipalités, qui en raison de leur taille,
contribuent beaucoup au budget de la MRC. J'ai évité, par
ailleurs, de retenir un niveau excessif, qui aurait simplement
déplacé l'injustice qu'on dénonce présentement et
qui aurait pu être paralysant pour la MRC.
Mme la Présidente, à ce sujet, je dois souligner
l'espèce d'équivoque qui existe du côté de
l'Opposition où on plaide en faveur d'un seuil d'adoption du budget
à la majorité simple, alors que le comité d'étude
qui avait été formé par l'Union des municipalités
pour étudier la question et qui était présidé par
le futur chef du Parti québécois, M. Jacques Parizeau, le
comité Parizeau recommandait un seuil de décision à 90 %
des voix de la population. Or, nous avons, d'un côté M. Parizeau
qui recommande un seuil de 90 %, et nous avons le député de
Jonquière et les députés de l'Opposition qui recommandent
51 %. Tout ce qu'on peut dire, c'est que l'Opposition est divisée sur la
question. Le chef actuel propose 51 % et le chef futur 90 %. (11 h 40)
Nous avons tenté d'amener un peu d'harmonie non seulement dans le
monde municipal, mais également dans l'Opposition. Nous avons
tenté de susciter des compromis - c'est ce que nous tentons de faire
depuis plusieurs mois - entre des groupes qui sont parfois assez
divisés. Nous avons tenté de concilier ce qui peut paraître
inconciliable. Je dirais qu'il est probablement plus facile de concilier le
monde municipal urbain et rural que de concilier des vues de l'Opposition sur
ce sujet. De toute façon, en tranchant aux deux tiers des voix, alors
que le monde municipal urbain, par la voix de l'UMQ et du comité
Parizeau, recommandait des seuils plus élevés de 75 % et
même de 90 %, dans le cas du futur chef du Parti québécois,
je pense qu'en tranchant à 66 2/3 %, c'est-à-dire aux deux tiers
des voix, nous avons une solution mitoyenne, raisonnable, qui peut être
raisonnablement acceptée par tous les gens qui considèrent le
dossier dans une juste perspective.
Ce compromis que je voudrais inspirer par la mesure et par la raison
constitue une condition vraiment essentielle à une participation pleine
et entière des municipalités au sein de la MRC. Les villes n'ont
pas d'objection à contribuer financièrement à la bonne
marche de la structure régionale, à condition, bien sûr,
qu'un minimum d'équité leur soit reconnu dans le processus
décisionnel. Si, par simple souci de conserver un avantage qu'elles
détiennent présentement, les municipalités rurales
s'opposaient à ce minimum, c'est non seulement la collaboration de leurs
partenaires urbains qui serait mise en cause, mais c'est plus fondamentalement
l'existence même des municipalités régionales de
comté.
Par ailleurs, Mme la Présidente, je me suis montré
disposé à introduire dans le projet de loi des dispositions qui
permettraient de respecter encore mieux les principes auxquels nous avons
souscrit lors des assises du mois d'août dernier. Ces mesures
additionnelles donneraient également une souplesse plus grande aux MRC
dans l'établissement du seuil requis pour l'adoption du budget. De
même, les dispositions concernant le Comité de concertation
agricole pourraient être réajustées afin de répondre
à certaines remarques qui m'ont été formulées. Les
présidents des deux unions municipales, l'UMQ et l'UMRCQ, de même
que le porte-parole de l'Opposition ont été informés du
contenu précis de ces possibles assouplissements. Si de telles
modifications réussissaient à faire disparaître les
réserves que certains entretiennent encore, et si les unions municipales
et l'Opposition me confirmaient leur accord, je serais disposé, avec le
consentement de l'Opposition, bien sûr, à les faire insérer
dans le projet de loi 88.
Mme la Présidente, je suis d'avis que la loi 88 dans son ensemble
constitue un heureux compromis qui permettra à toutes les
municipalités du Québec de se retrouver à l'aise,
ensemble, à une table des MRC et de pouvoir collectivement travailler
à l'évolution de notre société. J'aimerais vous
signaler que lors d'une récente rencontre des préfets du
Québec, qui se sont réunis ici même à Québec
il y a une dizaine de jours, en assemblée plénière, les
préfets ont reconnu les avantages de faire adopter la loi 88 et ont
refusé d'entériner une résolution qui demandait purement
et simplement le retrait du projet de loi 88, ce qui indique bien que la
majorité des préfets du Québec a compris l'importance du
projet de loi 88 puisqu'ils ont refusé d'entériner une
proposition demandant son retrait pur et simple.
Mme la Présidente, je terminerai sur ces mots: Nous avons fait
trop d'efforts, tous ensemble, et réalisé trop de progrès
pour ne pas achever l'oeuvre de consolidation de cette structure qu'est la
municipalité régionale de comté. J'ai donc l'intention,
avec l'appui très large des maires et des mairesses du Québec, de
faire adopter le projet de loi 88 d'ici à l'ajournement de la
présente session de l'Assemblée nationale. La collaboration et le
soutien de ceux et celles qui ont à coeur les intérêts du
monde municipal nous paraissent indispensables et nous espérons que
l'Opposition soucrira au principe et à l'adoption du projet de loi 88.
Je vous remercie.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Affaires
municipales. Le débat étant clos, est-ce que le principe du
projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
la Loi sur les
cités et villes et le Code municipal du Québec, est
adopté?
M. Dufour: Sur division.
La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour
déférer le projet de loi 88 à la commission de
l'aménagement et des équipements.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, j'aimerais rappeler aux
membres de l'Assemblée que j'ai donné un avis tout à
l'heure concernant la commission de l'aménagement et des
équipements qui, après avoir étudié le projet de
loi 87, étudiera immédiatement après le projet de loi 88
que l'on vient d'adopter et que je viens de déférer à
ladite commission.
Mme la Présidente, avec le consentement de l'Opposition,
j'aimerais pouvoir rectifier un avis que j'ai donné quant à
l'heure. Je parle de la commisson des affaires sociales qui siégera ce
soir de 20 heures à 24 heures plutôt que de 19 heures à 24
heures.
Mme la Présidente, je vous demanderais maintenant d'appeler
l'article 53 du feuilleton.
Projet de loi 82
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 53 de notre
feuilleton, le ministre des Affaires municipales propose la prise en
considération du rapport et un amendement au projet de loi 82, Loi
modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et la Loi concernant les
droits sur les divertissements en matière de taxes municipales.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Mme la Présidente, je n'ai pas l'intention de
faire un long discours sur l'adoption du rapport de la commission parlementaire
sur le projet de loi 82, sinon pour donner lecture de l'amendement que je
voudrais proposer et qu'a déjà reçu l'Opposition.
Amendement
II s'agit à l'article 5 d'introduire un nouvel article 253.22.
Alors, l'amendement se lirait comme suit: L'article 253.22 de la Loi sur la
fiscalité municipale proposé par l'article 5 du projet de loi 82
est amendé par l'addition, après le deuxième
alinéa, du suivant: "L'application du présent article n'affecte
pas le privilège afférent aux taxes foncières qui
grève l'unité d'évaluation pour garantir le paiement du
solde visé au premier alinéa."
Mme la Présidente, il s'agit d'une mesure de précaution
qui pourrait être nécessaire ou ne pas être
nécessaire, selon les avis juridiques des uns et des autres, mais comme
nous ne voulons prendre aucun risque, nous avons accepté d'ajouter ce
paragraphe à l'article 253. Il s'agit du cas où une
municipalité décidait de permettre à des contribuables
d'étaler le paiement d'une partie des comptes de taxes sur une, deux ou
trois années. On se souvient que dans le projet de loi 82, on permet aux
municipalités de se servir de certains outils pour alléger le
fardeau des contribuables dans le cas d'une augmentation importante
d'évaluation qui provoquerait des hausses brusques de comptes de
taxes.
Une de ces mesures est la mesure d'étalement où la
municipalité pourrait permettre à des contribuables de reporter
jusqu'à trois ans la partie excédentaire du compte de taxes,
excédentaire d'un seuil qui sera déterminé par la
municipalité. Or, il est bien évident que si au cours de ces
trois années, par exemple - si une municipalité choisit ce
délai qui est maximum l'immeuble était vendu et qu'il subsistait
un solde de taxes non payé attribuable à la municipalité,
évidemment le montant de ces taxes demeure payable par le vendeur
à la municipalité. Mais si ces taxes n'étaient pas
payées à la municipalité lors de la vente de l'immeuble,
est-ce que la municipalité perdrait son recours privilégié
contre l'immeuble pour assurer le paiement de ce solde de taxes? Certains
prétendent que le privilège de la municipalité est
affecté à l'immeuble et que, par conséquent,
automatiquement la municipalité conserverait son privilège de
municipalité pour le paiement de ces taxes, même à
l'encontre d'un acquéreur qui n'aurait pas vu à l'acquittement de
ce solde. (11 h 50)
D'autres avocats croient qu'il y a un doute qui subsiste et qu'on
devrait probablement ajouter le paragraphe qui est devant nous pour
spécifier que, même si l'immeuble est vendu, la
municipalité conserve quand
même son droit de percevoir les taxes foncières qui ont
été reportées à l'encontre de l'acheteur de cet
immeuble-là. Pour ne pas prendre de risque, Mme la Présidente, et
comme nous voulons que le projet de loi soit le plus parfait possible, j'ai
accepté de déposer cet amendement et, avec le concours de
l'Opposition, on va l'insérer dans le projet de loi. Je vous
remercie.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Affaires
municipales.
Est-ce que je comprends qu'il n'y a pas d'autres interventions?
M. Dufour: Oui, il y en a, non pas sur l'article 5. Est-ce que
vous parlez de l'adoption en troisième lecture?
La Vice-Présidente: M. le député de
Jonquière, on parle de l'amendement et de la prise en
considération du rapport de la commission.
M. Dufour: Pour la prise en considération du rapport, je
vais demander la parole.
La Vice-Présidente: M. le député de
Jonquière, je vous reconnais.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, Mme la Présidente. Il est
peut-être heureux que le ministre ait pu parler de son autre projet de
loi avant celui-ci parce que cela nous permettra peut-être de faire le
lien entre les deux projets de loi. Lorsqu'on écoute le ministre des
Affaires municipales, il semble toujours qu'on ne comprend rien et qu'il
comprend mieux que tout le monde. Il se donne donc des certificats de
compétence, des certificats de consensus avec les municipalités
et tout le monde va bien, il n'y a que l'Opposition qui n'est pas correcte. Il
nous dit en même temps que, par rapport à ses projets de loi, il
est prêt à apporter des amendements parce qu'il est aussi
obligé de faire des arbitrages entre les parties, que ce soit entre les
deux unions, entre le rapport Parizeau et les autres intervenants.
À mes yeux, la fiscalité municipale est un dossier d'une
importance capitale pour le monde municipal. Depuis deux ans que le ministre
est en fonction, on se rend compte que c'est un dossier qu'il traite avec
beaucoup de légèreté et avec un manque de profondeur
apparent et évident.
Le dossier de la fiscalité municipale va demander de plus en plus
que le ministre s'y penche et qu'il trouve des solutions permanentes à
des problèmes permanents, ce qu'on n'est pas capable de déceler
dans ce projet de loi, comme dans d'autres projets de loi qui ont touché
la fiscalité municipale. Ce sont des solutions temporaires, des
solutions ponctuelles qui ont été amenées au jour le jour,
cas par cas. Tellement au jour le jour que ce projet de loi découle
d'une demande de la ville de Montréal, à savoir qu'il y a des
glissements de fardeau fiscal d'une section par rapport à d'autres. Tout
le monde sait que la fiscalité municipale est basée sur
l'évaluation foncière, donc aussi sur la valeur marchande. Cela
veut dire que si le marché est très actif dans une
municipalité, comme c'est le cas depuis les deux ou trois
dernières années, cela a pour effet de faire augmenter
l'évaluation des propriétés. Donc, il faut se
méfier des gens qui nous disent, dans un quartier: Vous savez, j'ai fait
une belle passe, j'ai vendu ma propriété à un prix
extraordinaire, beaucoup plus que ce que j'avais payé et que ce que je
pensais qu'elle valait. S'il y en a plusieurs dans un quartier, cela a pour
effet de faire hausser la valeur de l'ensemble des propriétés. Et
c'est le cas à Montréal.
Pour la propriété résidentielle, on est capable de
déterminer qu'il y a une valeur de marché. Le problème
qu'on retrouve dans la plupart des municipalités au Québec, c'est
que c'est beaucoup moins vrai quand il s'agit des commerces. Quand il s'agit
des commerces, il y a beaucoup moins de transactions, donc, c'est plus
difficile de déceler la valeur marchande de ces immeubles. Cela peut
causer des difficultés et a tendance à faire plafonner cette
évaluation. L'augmentation de l'évaluation ne s'effectuant pas
sur des commerces, cela a pour effet de demander un effort fiscal plus grand
à la propriété résidentielle, que ce soit d'un,
deux, trois ou quatre logements.
C'est encore plus vrai au point de vue de l'industrie puisque s'il y a
des transactions - quand on parle d'industrie, on parle d'industrie importante
- cela se fait toujours à la Bourse et on ne peut jamais fixer
l'évaluation d'une industrie par la valeur des ventes qui se font sur le
marché boursier. Donc, c'est un problème majeur. Deuxième
problème qu'on peut déceler: si cela ne bouge pas dans la section
industrielle comme cela ne bouge pas beaucoup dans la section commerciale, cela
a pour effet de transférer cet effort fiscal sur le petit contribuable.
Essentiellement, c'est ce que le projet de loi vient nous dire, et on vient
trouver des réponses à cela.
La ville de Montréal a avancé un certain nombre de
solutions dont l'étalement ou le plafonnement de l'évaluation.
Par exemple, on peut parler de l'ensemble des propriétés, dans
une municipalité, qui augmentent de 30 %, ce qui veut dire qu'il y en a
qui peuvent augmenter de 60 % comme de 20 %, donc, une valeur moyenne de 30 %.
Et le projet de loi vient nous dire que, si une propriété
individuelle augmente de plus de 10 % des 30 %, à ce
moment-là,
une municipalité pourrait appliquer une mesure de plafonnement de
l'évaluation.
En principe, on pense que cela pourrait être un projet de loi
intéressant. Mais il y a un problème, puisque, quand quelqu'un ne
paie pas, c'est un autre qui paie. Donc, on vient de permettre à la
municipalité d'étendre ou de faire de l'équité
fiscale avec un principe de fiscalité qui, de par sa nature, devrait
être neutre. Au fond, quand on regarde la fiscalité municipale, on
ne peut pas dire que c'est une loi excessivement juste par ses principes. Il
faudrait faire un long discours pour savoir comment on devrait payer nos taxes
municipales. L'État reconnaît, comme dans d'autres pays, comme
dans d'autres provinces, que c'est la valeur intrinsèque de la
propriété qui, pratiquement, est le barème devant servir
pour établir le coût du paiement des taxes foncières
à la municipalité. Donc, si on décide qu'on plafonne des
évaluations, cela veut dire qu'on tranfère le fardeau à
d'autres. Transférer un fardeau à d'autres, cela devient un
râle qui a toujours été joué par les gouvernements
supérieurs, soit qu'on peut se servir d'un ensemble de revenus pour
établir une base d'équité fiscale qui permet aux uns et
aux autres de faire une meilleure distribution de la richesse. C'est ce qu'on
fait dans ce projet de loi. Et je trouve, à ce moment-là, qu'on
attaque un principe fondamental, c'est pourquoi je dis que le ministre ne va
pas très loin dans sa recherche. Il fait du cas par cas et se
dépêche de trouver la solution le plus rapidement possible pour se
débarrasser de la patate chaude. C'est ce qu'il fait avec ce projet de
loi. Il a eu six mois pour le faire. Il nous a dit: Attendez, on va en parler
avec les gens, on va avoir un comité des assises
Québec-municipalités et on va régler le problème.
Cela lui a pris plus d'un an avant de commencer à s'asseoir et, une fois
qu'il s'est assis avec le monde municipal, on trouve essentiellement les
solutions avancées par la ville de Montréal concernant ces
problèmes ponctuels qu'on rencontre. Le problème majeur que l'on
rencontre, c'est que ce problème ponctuel qui n'est pas susceptible de
se répéter chaque année, ad vitam aeternam, on vient de le
consacrer par ce projet de loi, de façon permanente.
Donc, le ministre, qui a l'habitude de se vanter de s'appuyer sur des
principes fondamentaux lorsqu'il fonctionne au point de vue municipal, vient
d'attaquer des principes fondamentaux. Et là, je vais parler du rapport
Parizeau. Il deviendra peut-être chef, M. Parizeau, mais ce n'est
certainement pas le Parti libéral qui va le nommer. Il faudrait que ce
soient les membres du Parti québécois. Alors, même si cela
faisait plaisir au ministre des Affaires municipales, même s'il l'annonce
en grande primeur, je veux lui rappeler que le rapport Parizeau parle d'autre
chose. Il ne parle pas seulement d'une loi, il parle d'autres lois. Le rapport
de la commission d'étude sur les municipalités parlait, entre
autres et beaucoup, de la fiscalité municipale. Il parlait des MRC, mais
il parlait aussi de la fiscalité municipale, problème que M.
Parizeau connaît bien, parce qu'il l'a traité aussi comme ministre
des Finances du Québec. C'était un ministre qui s'occupait de son
affaire, qui s'occupait des affaires de son ministère et, en même
temps, qui s'occupait des municipalités, puisqu'il a permis une
réforme en profondeur.
Donc, après sept ans, huit ans, on est rendu avec des lois
générales faites à partir de problèmes ponctuels,
et c'est difficile à comprendre, j'aurais compris que cette mesure
puisse s'appliquer pour quelque temps, mais on en fait une loi de nature
permanente. C'est là que le bât blesse et c'est là qu'on
doit rappeler au ministre que son travail fondamental, c'est d'abord de
regarder et d'examiner en profondeur si la réforme fiscale qui a
été acceptée en 1979 et appliquée en 1980, a eu
tous ses effets et si elle continue à avoir et à produire les
effets pour lesquels elle a été mise sur pied. (12 heures)
Le ministre des Affaires municipales est omnubilé par d'autres
raisons. Moi je le sais. Cela le fatigue, d'abord, que les municipalités
aient des surplus à la fin de l'année. Il n'y a pas de
problèmes dans les municipalités, elles ont de l'argent en masse
comme si les problèmes étaient juste des problèmes de
fiscalité. Pas seulement cela. Cela n'empêcherait pas et ne
devrait surtout pas empêcher le ministre de se pencher sur le cas et de
l'examiner. Cela fait deux ans que je lui rappelle que la fiscalité
c'est un problème majeur et qu'il doit l'étudier en
profondeur.
Il répond à des problèmes de déplacement de
fardeau fiscal. Il y a d'autres problèmes que celui-là dans la
fiscalité municipale. Il y a la taxe industrielle qui n'a jamais
été appliquée, à mes yeux, selon les principes que
le législateur avait établis en 1979. Les évaluateurs
municipaux, chaque fois qu'ils touchent à l'évaluation
foncière, sont pris soit à passer devant le bureau de
révision de l'évaluation, à être contestés,
à amener des municipalités dans des dédales de
discussions, des dédales aussi de problèmes légaux qui
font que les municipalités dépensent beaucoup d'argent, mais qui
font aussi que le législateur devrait très rapidement se pencher
sur ce cas. À force de se pencher, on va être plié. Il n'y
aura plus moyen de redresser cela parce que là il me semble qu'on est
bien plus couché que debout par rapport à ce bout de loi.
Evidemment et essentiellement, hier, justement, il y a eu une
décision qui a été rendue par la cour à savoir que
l'article
65.1, même si le bureau de révision, même si la
plupart des compagnies ont fait de grands pas en avant... Il semble qu'à
partir d'hier il y a eu une cause qui a été gagnée par une
municipalité et qui fait que pour l'article 65.1 qui parlait de
l'évaluation industrielle il n'y a plus de problème, nulle part.
Il semble qu'il y ait un législateur qui a décidé qu'on
pouvait traiter cet article d'une autre façon.
Heureusement qu'on peut arriver à ce phénomène.
Peut-être que le ministre va comprendre que si ce n'est pas son bureau de
révision qui donne des résultats de cour, c'est peut-être
à d'autres places qu'on va avoir des réponses. Ça va
peut-être lui permettre d'essayer de faire des consensus. Il est fort
là-dessus. Il va peut-être se permettre de regarder les
décisions d'un tribunal par rapport à un bureau administratif et
d'essayer de trouver un modus vivendi dans cela. S'il est fort sur les
consensus, il faudra qu'il amène le monde à se concerter au plus
sacrant pour qu'on règle ce problème au plus coupant parce que
ça dure depuis de nombreuses années. Il y a des millions en
cause. Pendant ce temps, le ministre fait la grasse vie, il attend que cela se
règle tout seul parce que cela va se régler tout seul.
Ce n'est pas cette position qui va lui donner du trouble. On dit: C'est
un problème majeur, la fiscalité. Arrêtez de faire du cas
par cas comme vous avez fait depuis deux ans. L'étalement des taxes
foncières, ce n'est pas une grosse nouvelle à mes yeux. C'est un
déplacement de paiements, encore. Ce qui veut dire que la personne qui
va avoir un compte de taxes trop élevé, aura à le payer
sur un certain nombre d'années -trois ans - avec les
intérêts. La municipalité va jouer le rôle de
banquier. N'importe quelle banque aurait pu faire ça. Le contribuable
aurait pu aller emprunter à la banque avec un intérêt de X
et il aurait payé la municipalité. Je pense que la mesure
d'étalement n'apporte pas grand chose. Le plafonnement était plus
important à mes yeux par rapport à ce qui se passe dans le
domaine municipal.
Encore là, puisque ce fait touche beaucoup de principes,
j'inviterais et je continue à inviter le ministre à regarder plus
en profondeur ce qu'est la Loi sur la fiscalité municipale, et ce qu'il
devrait faire pour apporter des réponses à l'ensemble des
problèmes qu'affronte le monde municipal. Le gouvernement du
Québec a-t-il appliqué ou appuyé ou donné 100 % de
sa mesure concernant les taxes foncières des municipalités? Moi
je pense que non, il n'y a pas eu cette application. Elle ne s'est pas faite
complètement. Il y a des morceaux de cette loi qui ne sont pas encore
appliqués après huit ans. Le ministre pourra nous dire: On n'est
pas pressé. On a dit qu'on ferait cela dans le temps. Oui, mais le
temps, c'est le temps. Il y a des municipalités qui ont des
problèmes. Ce sont les grosses municipalités.
Incidemment, ce sont ces grosses municipalités qui pourraient
recevoir le plus du gouvernement provincial. Donc, il y a des montants... Il y
a les évaluations pour des bâtisses gouvernementales, dans le
réseau de l'éducation et dans certains autres réseaux
gouvernementaux qui ne donnent pas leur plein effet. Il y a quelques millions
de dollars qu'on pourrait donner.
Cela étant fait, on pourrait s'inspirer de l'attitude de bon
contribuable du gouvernement du Québec pour aller se présenter
à Ottawa pour exiger qu'Ottawa paie aussi ses taxes. C'est une
façon correcte, comme un bon contribuable devrait le faire. Tant que le
Québec n'aura pas payé ses taxes à 100 %, j'ai des doutes
qu'il puisse dire à Ottawa: Paie tes taxes comme nous on les paie. Ce
sont des "en lieu" de taxes. Pour bien le comprendre et que nos auditeurs le
comprennent, ce sont des "en lieu" de taxes qui sont payés par les
gouvernements, celui du Québec et celui d'Ottawa. Donc, la
municipalité ne peut pas exiger, elle ne peut pas contester les montants
qui sont donnés. On peut toujours se chicaner un peu, mais le
gouvernement du Québec ou celui d'Ottawa donnent les taxes qu'ils
pensent qu'ils doivent donner à la municipalité.
C'est ce qui fait qu'il y a beaucoup d'endroits où les taxes ne
sont pas payées. Il y a certains ports de mer où le gouvernement
supérieur ne paie pas beaucoup de taxes. Ottawa ne paie pas beaucoup de
taxes là-dessus et il y a des aéroports... Qu'on prenne
l'aéroport de Mirabel ou celui de Dorval, ou même
l'aéroport de Québec, cela ne paie pas beaucoup de taxes aux
municipalités, ces grands ensembles.
Donc, si on veut, puisqu'on a dit qu'on était de bons
négociateurs - parce que nous, le gouvernement du Parti
québécois, nous n'étions pas de bons négociateurs,
selon le gouvernement qu'on a en face de nous qui, dans le temps, faisait un
peu d'opposition, mais qui faisait peut-être un peu de démagogie
sur les bords concernant cela... On les regarde aller avec Ottawa. Ils ne
négocient pas grand-chose dans le temps. On est beaucoup plus à
la merci de ce qui se passe à Ottawa qu'on a l'air d'un gouvernement...
on a l'air bien plus à la remorque du gouvernement d'Ottawa qu'on a
l'air d'un gouvernement responsable vis-à-vis de ses administrés.
Donc, ce qui se passe avec la taxation municipale, c'est que le gouvernement du
Québec ne fait pas ses devoirs; le ministre des Affaires municipales
devrait aller dire à Ottawa: C'est le temps que vous payiez vos taxes
aux municipalités. On n'aurait peut-être pas besoin de faire
des
amendements comme on fait là si le ministre des Affaires
municipales faisait sa "job" avec Ottawa et exigeait que le gouvernement
d'Ottawa paie ses taxes aux municipalités. Ce serait une bonne chose.
Cela aiderait les municipalités et cela nous empêcherait de faire
du cas par cas, comme on fait là, parce qu'on est en train de briser
tous les principes qui ont mis sur pied cette fiscalité municipale.
Après cela, si on regarde en profondeur et qu'on est capable de
faire des corrections, il me semble qu'on serait beaucoup plus à l'aise
et on pourrait prendre un an ou deux pour savoir ce qui ne fonctionne pas.
Est-ce que c'est le temps de regarder ce qui se passe dans l'évaluation
par rapport à la fiscalité, puisque cette dernière est
basée sur l'évaluation? Ce serait peut-être le temps de
regarder l'évaluation foncière pour voir s'il y a des choses qui
ne fonctionnent pas. Ce qui nous surprend et ce qui nous frappe, c'est
qu'à chaque fois qu'une municipalité a appliqué les
principes de l'évaluation selon la réforme fiscale, on s'est
ramassé pratiquement avec des cas de cour chaque fois que les
municipalités ont été obligées de négocier
avec des industries, comme si une loi pouvait se négocier, et la
municipalité, règle générale, a été
perdante.
C'est tellement vrai ce qui se passe là, ce que je dis là.
On a juste à regarder ce qui s'est passé sur le terrain. Il y a
plusieurs municipalités qui ont subi ces préjudices. C'est encore
plus vrai parce que même le gouvernement du Québec a appris par
ses organismes que lui aussi pouvait faire de la contestation. Donc, non
seulement les compagnies ont contesté l'évaluation municipale ou
la fiscalité, mais là on est rendu que même le gouvernement
du Québec par ses organismes est en train de contester
l'évaluation foncière.
Donc, une loi qui est mise en vigueur, qui est contestée
régulièrement et qui, dans l'ensemble des cas, a subi des
accrocs. Je pense que c'est le temps que le législateur -c'est un bon
signal qu'on donne au législateur - regarde ce qui se passe
là-dedans. Est-ce que tous les évaluateurs agréés
au Québec sont des gens incompétents? On serait tenté de
dire cela. Ce sont tous des gens incompétents puisque chaque fois qu'il
y a contestation, la municipalité, à 90 % ou 95 % des cas, perd
ses causes. Donc, il doit y avoir quelque chose qui ne fonctionne pas. Je ne
suis pas prêt à dire que tous les évaluateurs ne sont pas
bons. Je suis peut-être prêt à dire qu'il y a des trous dans
la loi, que ce serait le temps qu'on corrige ces trous et qu'on apporte des
correctifs. Cela permettrait à la municipalité de mieux
s'administrer parce que, sachant à l'avance quelle est son assiette
fiscale, quel est son pouvoir de taxation, cela pourrait lui permettre de mieux
planifier et de faire une meilleure administration. (12 h 10)
Quand je parle d'organismes qui contestent leur évaluation, je
veux parler de la Société d'habitation du Québec. Elle
conteste très fortement ses évaluations. Elle va même
jusqu'à cinq ans en arrière, ce qui fait que certaines
municipalités sont obligées de rembourser jusqu'à 1 000
000 $ concernant ces évaluations.
La Société immobilière du Québec est un
autre de ces organismes gouvernementaux, elle a commencé, elle aussi,
à contester. On voit le pattern ou le portrait de la contestation de
l'évaluation et comment on fait pour attaquer et briser une loi. Ce
n'est pas compliqué. On se met tous là-dessus et je pense qu'on a
pris le bon moyen pour essayer de l'étouffer.
Cela répondrait peut-être aux attentes et aux
inquiétudes du ministre. Certaines municipalités ont des surplus
et cela est tellement inquiétant pour le gouvernement du Québec.
Il faudrait qu'ils fondent au soleil ou qu'en les contestant, on aille chercher
l'argent dans leur poche. Ou on les laisse se faire écraser, ou on leur
transfère des responsabilités, ce serait une façon
correcte pour aller au bout, pour alléger la fiscalité
municipale.
J'invite, et j'insiste pour que le ministre des Affaires municipales se
penche sur la fiscalité municipale. Tout à l'heure, il s'est
inspiré de M. Parizeau pour une loi. Je l'invite à se pencher sur
le rapport. Le ministre est enseveli sous les rapports depuis qu'il est
ministre et on n'a pas de résultats. Rapport de la commission Parizeau,
pas de réponsel Le rapport de la commission Lapointe, c'est très
hésitant, on ne sait pas trop, tout le monde en parle, il y a peu de
réponses. Il y a un autre rapport, le rapport Lemieux, pas de
réponse non plus! Il faudrait bien que le ministre prenne le temps de
lire; quand il se rend à Montréal, il pourrait lire - il a au
moins une couple d'heures pour lire, il a un chauffeur. Il pourrait prendre les
rapports, les lire et regarder ce dont il pourrait faire son profit. Ces
études-là ne sont pas faites seulement pour les enfants. Ce n'est
pas fait seulement pour mettre dans une bibliothèque, pour les regarder,
ne pas les lire et après essayer de faire du cas par cas. Le
problème sur la fiscalité est bien plus gros que ce que le
ministre veut nous faire voir. On ne parle que de la pointe de l'iceberg dans
ces petites affaires-là... Ce ne sont pas les problèmes majeurs,
mais c'est un problème. Toucher à Montréal, c'est le
problème majeur pour un ministre. Il semble que, si cela touche à
Montréal, c'est le problème de l'ensemble du Québec, mais
ce n'est pas si vrai que cela. Il n'y a pas beaucoup de municipalités
à part Québec et Montréal qui vont appliquer
l'étalement des taxes comme elles vont appliquer le
plafonnement des taxes. Il ne faut pas se faire d'illusion par rapport
à cela. Le ministre a donc du travail à faire, et je l'invite
à le faire.
Il faudrait aussi - et je veux l'y inviter - qu'il regarde vraiment les
principes de base de la fiscalité municipale. Ce n'est pas nous qui
avons inventé cela, mais on a travaillé là-dessus par
contre. Dans les principes de base, il y a l'autonomie municipale qui, je
pense, n'est pas seulement une parole, il faut que les municipalités
soient capables de s'autogérer et de s'administrer pour ne pas toujours
être à... L'équité fiscale, c'est que chaque
contribuable paie sa juste part. Il n'est pas vrai de dire que, dans ce projet
de loi qu'on a devant nous, le principe d'équité fiscale est
appliqué. Ce n'est pas vrai, parce qu'on va jouer avec la taxation de
l'un à l'autre. La municipalité va décider de passer avec
la taxe, elle va en prendre moins au plus gros et va en faire payer un peu plus
au plus petit. C'est cela qu'il fait! Ce n'est pas de l'équité
fiscale! La neutralité fiscale, je pense que c'est aussi un principe de
base. Quand c'est neutre, cela veut dire qu'il n'y a pas d'intervention, mais
c'est tellement pas neutre qu'on décide que M. Jos va payer pour M.
Pierre ou M. Paul pour M. Jean-Guy. Alors, ce n'est pas neutre du tout! La
responsabilité financière des municipalités... C'est
évident que, là, on prend la responsabilité à sa
place et qu'on lui fait jouer ce rôle. L'un des principes majeurs
était la simplicité administrative et la transparence.
Je me souviens, quand on a étudié la fiscalité
municipale, de l'un des principes majeurs: il fallait que ce soit simple, il
fallait que les contribuables soient capables de dire et d'identifier quelles
étaient les taxes qu'ils payaient. Dans son compte de taxes, qu'est-ce
qu'il payait pour les services? C'était clair dans ces
principes-là. Des efforts constants ont été fait de la
part des municipalités pour dire: On devrait faire un effort
spécial. Cela s'est concrétisé dans des comptes de taxes
où on a mis une médiane, pour dire combien cela pourrait
coûter... On l'a calculé, et les communautés urbaines
étaient à ce moment-là très exigeantes par rapport
à cette transparence, par rapport à cette simplicité
administrative. C'est tellement simple qu'il n'y a plus personne qui va
comprendre. Il faut un livre pour étudier comment on va appliquer ces
principes de fiscalité municipale. C'est ce que le ministre a
trouvé dans sa grande simplicité et dans sa grande
compréhension.
Donc, aux principes de base qui ont présidé à la
mise en place de la fiscalité municipale, le ministre des Affaires
municipales vient de faire un accroc important, puisqu'il attaque quatre
principes sur cinq. On est loin d'avoir le compte. On part d'un problème
ponctuel et on va en faire une solution permanente. Je ne peux pas croire que
le ministre ait accepté d'aller aussi loin que cela dans sa
démarche. On va lui dire comment il était sérieux. Parce
qu'il y a un autre point aussi, la situation des établissements des
mouvements coopératifs. Il faut se rappeler qu'en 1986, on avait une loi
qui s'appelait la loi 16 qui permettait de mettre des taxes d'affaires sur
certains organismes, qu'ils s'appellent des syndicats, des corporations. Je me
souviens aussi de la discussion qu'on avait eue à ce moment-là
où j'avais demandé au ministre: Est-ce que cela touche les
caisses populaires, les mouvements coopératifs? Il a dit: Non, cela ne
touche pas cela. Si cela ne touche pas cela, d'accord, on va être pour.
Mais cela touche une autre loi.
Ce n'était pas si vrai que cela. Au moment où il nous l'a
dit, cela semblait vrai, mais, dans les faits, ce n'était pas si vrai
que cela puisqu'on a été obligé d'apporter un correctif.
Il y a eu des discussions avec les mouvements coopératifs pour qu'ils
acceptent de payer leurs taxes, mais juste à partir de 1988. Ce qui veut
dire que les deux dernières années les municipalités vont
être obligées de rembourser aux caisses populaires les montants
qu'elles ont donnés, avec intérêt. À partir de 1988,
cela va s'appliquer. On peut considérer cela comme un gain pour les
municipalités. Mais, juste pour rappeler que le ministre des Affaires
municipales n'avait pas été très prudent. Il n'avait pas
été prudent parce qu'il s'était avancé sur une
décision, sur une affirmation, tout en ne connaissant pas tous les
faits, ce qui nous a obligés à faire des amendements deux
fois.
Après avoir accepté la loi 16, on a été
obligés de l'amender une fois, et on l'amende une deuxième fois,
donc deux amendements. Ce n'est pas un gouvernement qui légifère
pour des lois passées, il est obligé d'amender ses propres lois
deux fois en deux ans. Ce n'est pas un record, c'est une bonne moyenne. Cela
veut dire qu'ils vont se donner leur propre ouvrage, ce sont eux qui vont se
créer leur propre ouvrage. Ce sont des générateurs
d'emplois par rapport à leurs décisions.
J'aurais aimé parler sur la taxe d'amusement. Bien sûr, il
y avait un problème qui pouvait être soulevé dans des
villes comme Québec, Montréal. Mais encore là, je me
demande sérieusement si le ministre a bien regardé tous les
effets de dominos que cet amendement va faire dans la loi et qui va se produire
dans l'ensemble des municipalités du Québec. Je comprends qu'il y
a des villes comme Québec, Montréal, qui ont une équipe de
hockey dans la ligue nationale. Elles ont aussi des orchestres symphoniques,
des théâtres permanents. Cela peut amener ces gens à payer
des taxes d'amusement sur des billets qui ne sont pas
à la valeur réelle. Un billet de saison est censé
coûter moins cher qu'un billet régulier, suivant les endroits - je
ne parle pas de la classe A, B ou C. Je pense que les gens comprennent ce que
je veux dire, c'est que ces billets ne sont pas tous au même prix. Quand
on achète en série, normalement c'est moins cher qu'acheter
à l'unité. Donc il y avait un problème. Anciennement, la
municipalité pouvait percevoir sa taxe d'amusement, non pas sur le
montant vendu, mais sur le montant de l'unité des billets de
présence. Ce qui fait que quelqu'un qui allait au hockey ou au
théâtre pouvait avoir des rabais, comme il pouvait avoir des
billets de faveur. Ces gens qui avaient les billets de faveur ou ceux qui
donnaient ces billets devaient donner les 10 % de la taxe d'amusement. C'est un
problème particulier qui pouvait toucher, Montréal et
Québec.
Quant à l'ensemble des municipalités du Québec, je
me demande si cela n'aura pas pour effet d'enlever la taxe d'amusement sur
beaucoup de spectacles, beaucoup d'organisations, et qui fait que les
municipalités vont avoir un manque à gagner, d'une part.
Deuxièmement, cela pourrait inciter certains organismes à ne pas
charger de taxe d'entrée, de billets d'entrée, tout en sachant
bien qu'ils pourraient faire leurs profits sur d'autres activités
à l'intérieur la bâtisse où se déroule le
spectacle. Cela pourrait être des profits sur la boisson, des montants
perçus sur des activités internes, que ce soit des encans ou
autres, etc. (12 h 20)
Ce qui me fait dire que, dans ce projet de loi, ce que le ministre fait
- et c'est pour cela que je dis qu'il n'est pas correct avec les
municipalités et qu'il n'étudie peut-être pas assez
longtemps ses lois avant de les proposer - c'est qu'il dit aux
municipalités: Vous pourriez être bons garçons et
être fins avec les gens, mais nous, comme gouvernement, on ne perdra rien
parce que le gouvernement ne perçoit pas les taxes de la même
façon que les municipalités, il va chercher son argent
différemment. Le gouvernement va chercher son argent directement sur
l'ensemble de l'activité comme telle, pas juste sur le billet
d'entrée. Si quelqu'un est fin là-dedans, c'est le ministre qui
permet que les municipalités soient fines, mais lui, il s'en lave les
mains parce qu'il est complètement en dehors de cela.
Je me demande, par rapport aux problèmes particuliers qui
existent à Québec et à Montréal, si le ministre a
examiné d'une façon correcte et profonde ce qui peut se passer
ailleurs. Il pourra toujours dire n'importe quoi, qu'il y a des gens qui sont
favorables, bien oui, mais je vous dis que les municipalités ne tiennent
pas nécessairement le même langage que tous les citoyens du
Québec. À ce moment-là, on doit regarder les effets. S'il
n'y avait pas de problèmes fiscaux au Québec, on n'aurait pas
besoin de lois comme celle-là. Quand on corrige les lois fiscales, il
faut s'assurer, pour améliorer la vie de tous les citoyens du
Québec, qu'on n'enlève pas des revenus et des sources de taxation
aux municipalités.
En gros, M. le Président, c'est un projet de loi qui, bien
sûr, a certains effets et répond à des problèmes
ponctuels. On aurait eu toutes les raisons du monde de s'y opposer, notamment
celles que j'ai données et qui se rattachent à des principes
fondamentaux, mais on va donner encore la chance au ministre de faire son
travail, de se remettre au travail pour qu'un jour, il nous présente une
loi qui a de l'allure, une loi qu'il aura étudiée en profondeur,
qui sera défendable devant le Parlement et qui sera au
bénéfice des municipalités et des citoyens du
Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître le
ministre des Affaires municipales qui a droit à une intervention de cinq
minutes après chaque intervention à cette étape de
l'étude du projet de loi. M. le ministre, pour un maximum de cinq
minutes.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Je vous remercie, M. le Président. Nous avons
droit à une salade un peu vinaigrée de la part du
député de Jonquière qui a brassé un peu de tout et
de rien dans son discours. J'ai eu peine à suivre le fil conducteur de
son raisonnement, mais cela, c'est autre chose. Tout ce que je vois, c'est que
le député ne voit pas grand-vertu au projet de loi. Il a
passé les trente minutes de son intervention à décrier le
projet de loi pour conclure à la fin que, finalement, malgré
qu'il ait parlé pendant trente minutes contre le projet de loi, il va
finalement voter pour. Je ne vois pas de quelle logique procède le
député, mais enfin, je retiens qu'il est pour le projet de
loi.
Je comprends pourquoi le député va voter pour le projet de
loi, c'est parce que l'ensemble du monde municipal est d'accord avec ce projet
de loi, l'ensemble du monde municipal l'a demandé, a participé
à sa confection. Le député de Jonquière sait
très bien que ce projet de loi est le fruit d'un long compromis, d'un
long consensus. Je sais que le député de Jonquière
blâme le ministre des Affaires municipales de tenter de faire des
consensus. Il dit qu'il ne recherche que cela. Mais qu'est-ce qu'on veut que je
fasse? Que je sorte mon tomahawk et que je courre après tous les maires
du Québec pour fouter le bordel dans le monde municipal? Je n'ai pas
été nommé par le premier ministre pour tenter de semer la
zizanie partout. C'est justement mon rôle, mon devoir de tenter
d'amener une loi qui puisse rencontrer l'adhésion de l'ensemble
des gens raisonnables de notre société. C'est ce que fait ce
projet de loi.
Ce projet de loi a été préparé à la
suite d'un travail très important effectué par un comité
technique composé de représentants spécialisés en
évaluation foncière de toutes les municipalités du
Québec, des deux grandes unions municipales, des grandes villes telles
que Montréal, Laval, Québec, Longueuil. Les communautés
urbaines avaient leurs experts. Bref, l'ensemble du monde municipal plus le
monde rural représenté par l'UMRCQ ont collaboré à
la mise au point des formules que nous présentons et qui sont
disponibles pour les municipalités. Les municipalités ne sont pas
obligées d'employer ces deux formules, mais elles peuvent s'en servir si
elles le jugent opportun. Ces deux formules permettront, dans le cas où
les municipalités voudront s'en servir, de faire en sorte que certains
citoyens qui, autrement, auraient été frappés d'une
façon importante par des hausses de taxes brusques, pourront voir cet
excédent de compte de taxes, la partie du compte de taxes qui
excéderait le seuil qui aurait été déterminé
par la municipalité, dans le cas de l'étalement, être
étalée sur trois ans et, dans le cas du plafonnement,
répartie sur l'ensemble des contribuables. Ce sont deux mesures à
la disposition des municipalités qui font consensus dans le monde
municipal et je suis fier d'apporter cette contribution additionnelle à
la bonne gestion des municipalités du Québec.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Quand j'ai
entendu le ministre dire que le député responsable du dossier
dans notre formation politique, le député de Jonquière,
avait servi une salade vinaigrée, je me rends compte que si le chef
cuisinier avait donné une meilleure recette, on ne serait pas
obligé d'ajouter des condiments. C'est cela, le problème. Le
ministre responsable ne donne pas la pleine mesure de ce qu'il devrait donner
aux municipalités. Je ne suis pas la seule à le dire; cela aussi
fait consensus. Vous avez parlé de consensus tout à l'heure, M.
le ministre, et cela fait consensus: vous ne donnez pas la pleine mesure. Ce
serait beaucoup mieux pour vous et votre gouvernement si vous vous mettiez en
frais de travailler comme il se doit avec les municipalités et de
façon très large - pas ponctuelle! - sur l'ensemble des
problèmes que vivent les municipalités du Québec. Il
disait: J'ai entendu un paquet de choses qui ne veulent rien dire du
député responsable.
M. le Président, j'ai vu les jeunes députés qui ont
été élus en 1985. Il se sont mis à sourire. Ils ont
dit: "Ils parlent contre et ils votent pour." De 1976 à 1981, on a
entendu des discours de ce côté-ci de la Chambre provenant de ceux
qui sont de l'autre côté aujourd'hui, et tous les discours
étaient dans le même style. Ce n'est pas nous qui innovons dans
cela. Nous, au moins, nous essayons de chercher des situations où on
pourrait éclairer le ministre dans les projets de loi qu'il
présente et apporter une amélioration, tout autant dans le projet
de loi 82 que d'autres projets de loi que le ministre des Affaires municipales
nous apporte ici. La preuve, M. le Président, c'est que, encore
aujourd'hui, le ministre est arrivé avec un nouvel article,
c'est-à-dire l'ajout d'un article. C'est la preuve que son devoir n'est
pas bien fait; aujourd'hui même il arrive avec une correction.
Êtes-vous capable de me dire que le ministre responsable est un bon chef
cuisinier qui présente des bonnes salades, comme il le disait tout
à l'heure de mon collègue? Si c'était vraiment bon, on
n'aurait pas à corriger, on n'aurait pas à se poser des
questions.
M. le Président, pour intervenir sur un projet de loi comme
celui-là, il faut se situer un peu dans l'histoire. Je me souviens qu'en
1970, les municipalités passaient leur temps à venir ici à
Québec quémander. Rappelons-nous qui était là en
1970! C'étaient encore ces gens-là. Les municipalités
venaient ici à Québec quémander. Elles avaient 10 $ ou 15
$ par tête d'habitant pour être capables d'avoir des chemins ou
différentes choses dont elles avaient besoin. Elles n'avaient pas un sou
et n'étaient pas capables de diriger leurs municipalités comme
elles auraient dû pouvoir le faire parce qu'elles avaient besoin
d'argent.
Depuis 1979, si ma mémoire est fidèle, mon collègue
Guy Tardif, qui était ministre des Affaires municipales à
l'époque, avait évalué l'ensemble de la situation que
vivaient les municipalités et avec une grande sagesse et après
avoir consulté, il avait mis sur pied la fiscalité municipale. Il
y avait eu une réforme en profondeur. Je pense que vous étiez
là à l'époque, M. le Président. Vous vous
souviendrez qu'il y avait eu une réforme complète sur la
fiscalité municipale. À ce moment-là, on avait
apporté des correctifs très valables et très importants.
On avait dans un premier temps donné une autonomie municipale. On avait
parlé de changer l'équité fiscale, la neutralité
fiscale, la responsabilité financière des municipalités,
de simplifier l'administration et de donner de la transparence aussi à
tout cela. (12 h 30)
M. le Président, je ne disconviens pas qu'après une
dizaine d'années tout près, de 1979 à 1987 - huit ans - il
y ait certaines
choses qui étaient bien, qui étaient rassurantes et qui
étaient correctes à l'époque mais qui, aujourd'hui, ne
sont plus correctes. Je ne disconviens pas de cela parce que s'il fallait qu'on
n'évolue pas, ce serait la fin du monde. Je pense que chaque humain tant
que nous sommes évolue dans la vie, et tout autant la
réglementation municipale ou celle en affaires sociales ou ailleurs. Je
pense qu'il faut évoluer et, après huit ans, je ne disconviens
pas que c'est le temps, qu'on pourrait regarder certaines situations pour voir
quelles corrections on pourrait apporter.
M. le Président, il y a des corrections à apporter, mais
il y a quelque chose de malheureux dans tout ça. Si le ministre
s'assoyait pour regarder l'ensemble de ce qui se passe dans le monde municipal,
il aurait une évaluation différente de celle qu'il fait
aujourd'hui.
À l'époque, en 1979, il n'était pas question de
contestation industrielle comme cela l'est aujourd'hui. Je vais vous donner
juste un exemple. Dans ma municipalité, à la ville de Windsor,
cette année, les autorités municipales de l'endroit,
c'est-à-dire l'industrie Domtar ont été obligées de
remettre un montant extrêmement important en retour sur les taxes
à l'industrie principale. Il y a eu un accord hors cour. Je ne
disconviens pas que les deux parties aient été de très
bonne foi, mais vous comprendrez que si une ville de 6000 habitants est
obligée de remettre près de 500 000 $, je pense qu'il y aurait
lieu, pour le ministre des Affaires municipales, de corriger, et cela pas de
façon ponctuelle, mais de regarder l'ensemble de la situation que vivent
les municipalités et qu'on ne transfère pas du côté
résidentiel là où les gens ne peuvent pas payer. Si on dit
qu'on a des exemptions pour de la machinerie du côté des
industries et si on revient ensuite aux municipalités pour qu'elles
remettent les sommes perçues, je pense que ça ne marche plus.
À ce moment-là, les municipalités n'équilibrent
plus, leur administration n'a plus de bon sens et ce sont les petits payeurs de
taxes qui sont obligés de payer la facture. Ça n'a pas de bon
sens.
Il y a eu une évolution extrêmement importante du
côté résidentiel. Aujourd'hui, du côté
industriel, c'est assez stable, en tout cas ça bouge beaucoup moins que
du côté résidentiel, ce qui fait que c'est le monde
à l'envers. Ce sont les petits qui sont obligés de payer pour les
industries. A ce compte-là, le ministre aurait été bien
mieux de s'asseoir avec tout ce beau monde-là; les gens qui connaissent
la situation puisqu'ils la vivent quotidiennement auraient été en
mesure de l'informer correctement. Même si cela avait pris six mois ou un
an de plus, si ça avait été dans l'ensemble du projet, je
pense que ça aurait été plus valable et que ça
aurait été moins dangereux pour les petits payeurs de taxes que
ce qui arrive aujourd'hui.
Quand on dit qu'il y a eu un déplacement à cause des
fortes spéculations - il y a eu un déplacement finalement de 40 %
-c'est important; parce que les résidences se vendent beaucoup plus
cher. Je suis très inquiète de la façon dont ça
fonctionne. Si on a un cri d'alarme du côté d'un secteur en
particulier, vite le gouvernement se met à table et, ponctuellement,
arrive à trouver des solutions pour le domaine. S'il fallait qu'on fasse
ça quotidiennement, je me demande où on s'en va et ce que
ça fera finalement. Je pense qu'une chatte ne retrouverait pas ses
petits chats dans ça, ça n'a pas de bon sens. Le monde souhaite
avoir une politique municipale qui corresponde à l'ensemble du monde et
des payeurs de taxes, des citoyens, finalement. On sait que ce n'est pas
facile, les lois municipales, mais on sait aussi que ça englobe
l'ensemble des payeurs de taxes. Donc, c'est pour tous les payeurs de taxes en
particulier que le monde municipal et que le ministre devraient s'asseoir et
réviser finalement l'ensemble de la situation.
M. le Président, vous me faites signe qu'il me reste à
peine une minute pour intervenir. Je pense que la solution, je sais que mon
collègue responsable l'a mentionnée au ministre tout à
l'heure, serait de faire une réévaluation du système
d'évaluation. Finalement, le problème est là. Si on
mettait de l'avant un comité d'étude... Vous en faites, vous
êtes d'accord avec cela, vous en avez pas mal, des comités
d'étude sur toutes sortes de choses. Pourquoi le ministre n'aurait-il
pas pensé à mettre sur pied un comité d'étude pour
réformer le mode d'évaluation foncière? Je pense que ce
serait la solution. On est prêt à attendre pour avoir la
réponse là-dessus. Je vous remercie.
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant le ministre des
Affaires municipales pour une intervention de cinq minutes, au maximum.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Oui, M. le Président, pour replacer
rapidement les propos dans leur contexte. Tout à l'heure, le
représentant de l'Opposition a fait grief au ministre des Affaires
municipales de ne pas s'être occupé des conclusions du rapport
Parizeau. On parlait de fiscalité municipale, on parle encore de
fiscalité municipale. Le critique de l'Opposition a dit: On n'a pas de
réponse du ministre. Le ministre n'a rien fait à la suite des
propositions du rapport Parizeau - du nom du futur chef de l'Opposition - qui
avait été fait à la demande de l'Union des
municipalités du Québec.
Or, c'est vraiment ne pas connaître le
dossier que d'affirmer une énormité pareille. Nous avons
devant nous, ici même, sur la table, deux projets de loi qui vont
exactement dans le sens des recommandations, non seulement du rapport
Parizeau... Le député de Jonquière a également
parlé du rapport Lemieux qui avait été commandé par
l'autre union municipale; les deux unions municipales avaient commandé
chacune un rapport. Ces deux rapports ont conclu à la
nécessité d'aménager l'avenir des MRC et de prévoir
ce que les MRC pourront faire dans l'avenir. On a un projet de loi sur la table
aujourd'hui. Qu'on ne vienne pas nous dire qu'on n'a pas donné de suite.
Également, dans ces rapports, on parlait de fiscalité municipale.
Nous avons devant nous des mesures fiscales. Donc, nous donnons suite à
ces rapports, en partie tout au moins.
Pour ce qui est de la question du déplacement fiscal dont parlait
la députée de Johnson, on affirme très facilement qu'il y
a présentement un déplacement de l'effort fiscal du secteur non
résidentiel vers le secteur résidentiel. On dit, par exemple, que
les petits propriétaires, les gens qui possèdent des bungalows,
des duplex, enfin, des résidences, seraient requis d'effectuer,
année après année, un effort fiscal plus important, en
termes de paiement des taxes foncières, que le secteur commercial et le
secteur industriel.
Je voudrais signaler à la députée de Johnson qui,
je ne lui en fait pas grief, n'est peut-être pas informée sur
absolument tous les aspects de la fiscalité municipale - cela me fait
plaisir d'en discuter avec elle - que les municipalités, justement, ont
des outils en leur possession pour contrer ce présumé
déplacement fiscal. Le législateur leur a donné des outils
pour annuler le déplacement fiscal appréhendé. Entre
autres, la taxe d'affaires qui est imposée par la municipalité
uniquement au secteur non résidentiel a justement pour but de faire
contribuer les commerces et les industries à une part importante du
budget municipal. Il y a également la taxation spéciale. Les
municipalités ont le pouvoir d'imposer des taxes spéciales, dans
certains cas, au secteur non résidentiel. Il y a également la
tarification. Les municipalités ont le droit de se faire payer pour les
services rendus. Par exemple, pour la consommation d'eau potable, les
municipalités peuvent installer un compteur d'eau à
l'entrée des industries pour faire en sorte qu'elles paient l'eau
à la consommation, contrairement aux résidences qui, dans la
plupart des cas, paient un montant fixe.
Donc, les municipalités peuvent imposer des tarifs aux commerces
et aux industries. Elles imposent à tout le monde des tarifs, mais, dans
le cas des gros consommateurs, les tarifs peuvent être plus importants.
Et l'ensemble de ces outils, car il y a d'autres outils, spécialement
à Montréal, fait en sorte que, par exemple, pour la ville
Montréal - on s'est penché attentivement sur ce dossier et la
députée en parlait tout à l'heure - entre les
années 1980 et 1987, il n'y a eu aucun déplacement du fardeau
fiscal du secteur non résidentiel vers le secteur résidentiel.
Cela a été admis par les représentants de la ville de
Montréal après que nous ayons mis sur la table toutes les
données. C'est simple, parce que la ville de Montréal s'est servi
de ces outils, dont je parlais tout à l'heure, pour annuler, pour
contrer totalement, le présumé déplacement fiscal qui se
serait produit. De sorte qu'aujourd'hui, à la fin de 1987, on peut dire,
dans le budget 1987, que la municipalité de Montréal a
perçu du secteur résidentiel la même proportion de son
revenu que celle qu'elle percevait en 1980 et, également, la même
proportion du secteur non résidentiel que celle qu'elle percevait en
1980, ce qui prouve hors de tout doute qu'il n'y a eu aucun déplacement
fiscal à Montréal entre l'année 1980 et l'année
1987. Et les mêmes outils, enfin la plupart des outils dont dispose la
ville de Montréal sont entre les mains des autres municipalités
du Québec. (12 h 40)
II y a quelques exceptions. La ville de Montréal a certaines
exceptions qui lui permettent d'agir spécialement dans certains cas.
D'une façon générale, les municipalités du
Québec ont les mêmes outils: la taxe d'affaires, les taxes
spéciales ou encore la tarification, de sorte que les
municipalités peuvent, si elles le veulent, annuler le
déplacement fiscal. Je suis convaincu qu'elles le feront dans la
majorité des cas, sinon dans la totalité des cas. Je vous
remercie.
Le Vice-Président: Merci, M. le ministre des Affaires
municipales. Mme Johnson - je m'excuse infiniment - Mme la
députée de Johnson demande si elle peut poser une question en
vertu de notre règlement. Acceptez-vous une question? Très bien!
Mme la députée.
Mme Juneau: Après tout ce que le ministre vient de dire,
pourquoi est-il obligé de faire un projet de loi comme le projet de loi
82 pour plafonner et étaler? Cela veut-il dire que les petits
propriétaires ne sont plus en mesure de payer la taxe, puisqu'elle a
tellement augmenté? Pourquoi dites-vous cela? Expliquez-moi donc
pourquoi vous avez fait un projet de loi 82.
Le Vice-Président: Mme la députée, c'est une
question qui ressuscite pratiquement à nouveau l'ensemble du
débat, mais je vais laisser le ministre vous répondre. Je
demanderais au ministre de répondre très brièvement, s'il
vous plaît!
M. Bourbeau: Je suis ici pour répondre à toutes les
questions, qu'elles viennent de l'Opposition ou de mes collègues. Je
suis ici pour servir les élus et la population en
général.
M. le Président, c'est une chose de parler du déplacement
fiscal de l'ensemble du budget d'une municipalité, déplacement
fiscal qui pourrait exister à partir du secteur industriel ou
commercial, par exemple, vers le secteur résidentiel. C'est une autre
chose de parler du partage entre les contribuables du fardeau fiscal. Le projet
de loi que nous avons devant nous vise à mieux partager entre les
contribuables eux-mêmes les excédents, si je peux dire,
d'évaluation qui pourraient survenir à l'occasion du
dépôt d'un nouveau rôle d'évaluation.
Prenez l'exemple de la ville de Hull qui n'avait pas
déposé de rôle d'évaluation depuis l'année
1982 et qui en dépose un en 1988. Il est bien évident, si le
rôle a été gelé pendant six ans, qu'il y a des
hausses importantes pour l'ensemble des contribuables. Tous les contribuables
voient une hausse importante. La moyenne est de 47 % dans le cas de Hull. La
moyenne! Mais, quand on dit une moyenne, il est bien évident que, pour
faire une moyenne, ça prend des contribuables qui ont un peu plus et
d'autres un peu moins que la moyenne; et c'est l'ensemble de tout cela qui fait
la moyenne.
Si vous avez, comme dans le cas de Hull, des gens dont
l'évaluation personnelle augmente de plus de 100 %, il y en a d'autres,
par contre, pour qui elle n'augmente que de 10 %. La moyenne fait 47 %. Mais,
à cause du fait qu'il y en a dont l'évaluation personnelle est
tellement plus élevée que la moyenne, ces gens vont être
frappés durement par une hausse d'évaluation, d'une part, et
subséquemment par une hausse du compte de taxes. Nous voulons,
justement, faire en sorte que ces gens qui sont fortement frappés par
une hausse de leur compte de taxes puissent avoir jusqu'à trois ans, si
tel est le voeu de la municipalité, pour rattraper, si je peux
m'exprimer ainsi, leur évaluation normale.
L'évaluation, elle, va être là, mais le compte de
taxes va être calculé sur une partie seulement de
l'évaluation. On va soustraire une petite partie de l'évaluation,
la partie qui va excéder le seuil, pour permettre à ces gens
d'avoir trois ans pour rattraper leur évaluation normale, compte tenu de
la hausse énorme qu'ils pourraient avoir subie. C'est une mesure, je
pense, qui vise à éviter que des contribuables ne subissent d'un
seul coup une augmentation de taxes énorme et, justement, à faire
en sorte que la normalité puisse revenir graduellement. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: Très bien. Je vais maintenant
reconnaître comme prochain intervenant, M. le député de
Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Étant
donné que je n'ai que dix minutes, je vais essayer de parler vite parce
que j'ai beaucoup de choses à dire sur ce projet de loi 82.
Je veux dire au ministre que oui, on va voter pour, mais cela ne nous
empêchera pas, comme Opposition responsable et positive, d'indiquer au
ministre nos craintes face à ce projet de loi. Effectivement, il y a
beaucoup de points inquiétants qui sont amenés dans ce projet de
loi et qu'on doit dénoncer, du moins prévenir. S'il y a un sujet
qui est important, c'est bien la fiscalité municipale. Cela concerne
tout le monde, finalement, tellement d'élus à d'autres niveaux
qu'on ne peut pas adopter des lois comme si cela ne changeait rien alors qu'en
réalité, c'est autre chose. C'est une loi majeure. C'est une loi
qui a été votée en 1979 et mise en vigueur le 1er janvier
1980, la Loi sur la fiscalité municipale. Elle a fait en sorte de donner
plus d'autonomie à nos municipalités et de reconnaître que
les élus au niveau municipal sont des gens responsables. C'est ce que
cela faisait.
C'est pour empêcher que ne se reproduise ce qui se passait avant.
Ma collègue, la députée de Johnson, l'a dit tantôt,
avant, il fallait que les élus municipaux viennent quémander
à Québec pour un pourcentage presque incroyable de leur budget,
qu'ils viennent supplier pour avoir de l'argent pour développer leur
municipalité; c'était du discrétionnaire. C'était
incroyable et inacceptable. Donc, nous, on a changé cela. On a
donné aux élus municipaux les moyens de pouvoir utiliser leur
autonomie, de pouvoir mettre en application leur plan de développement
municipal, mais comme des gens responsables, c'est-à-dire en allant
percevoir chez leurs contribuables l'argent nécessaire à la
réalisation de leurs programmes. Donc, on a reconnu la
responsabilité des élus municipaux par ce projet de loi.
Qu'après huit ans on vienne faire la lumière sur les
lacunes de la loi, qu'on vienne l'ajuster, qu'on vienne définir s'il y a
matière à ajustement, oui, mais pas de la façon dont c'est
présenté. C'est cela qu'on dénonce parce que c'est une
façon ponctuelle de régler des problèmes qui sont
amenés très souvent par le ministre lui-même. C'est la
nouvelle philosophie de l'autre côté. Il ne faut pas faire de
vague. Il ne faut pas qu'il y ait des malaises dans la société
ou, du moins, il faut que les malaises ne paraissent pas. Donc, si des gens
amènent quelque chose, se plaignent d'une situation, bien, on
la règle, même si cela vient mettre la hache dans de grands
principes, des principes d'égalité, d'équité. C'est
exactement ce qu'on fait toujours de l'autre côté.
Si, aujourd'hui, on est obligé d'amener une loi comme cela, c'est
à cause d'une spéculation trop forte. Là-dessus, le
ministre va certainement être obligé de faire un mea culpa. S'il y
autant de spéculation, il est coupable en très grande partie
parce que, lorsqu'il a annoncé, entre autres, la levée du
moratoire - un an trop vite et même deux ans - en disant que les
locataires auraient une protection blindée, la spéculation, on a
vu ce que cela a fait. Les chiffres le prouvent: une augmentation des cas
à la Régie du logement. La spéculation dans des quartiers
où il y a surtout de la transformation, cela aussi est prouvé.
Là où cela se produit surtout, c'est à Montréal et
à Québec. Cette loi va s'appliquer spécialement à
Montréal et à Québec. Ce n'est pas le jeu du hasard. C'est
une réalité qu'on s'en vient constater.
Donc, la spéculation nous amène à
légiférer aujourd'hui et le ministre en est en partie coupable.
Mais comme il ne faut pas faire de vague, bien on va légiférer
pour essayer d'arroser là où il risque d'y avoir certains
incendies. La fiscalité municipale, la loi de 1979, entrait en vigueur
le 1er janvier 1980. Elle reposait sur quelque chose de fondamental, sur la
justice, sur la simplicité, sur l'équité. La
simplicité! Est-ce que vous pensez que le projet de loi 82 va venir
simplifier les choses? Tout au contraire! Premièrement, c'est
discrétionnaire et les municipalités l'utiliseront si elles le
désirent. Donc, au départ, c'est une brèche dans cette
équité ou dans cette uniformité des lois au Québec.
C'est à la discrétion des municipalités et, en plus,
à l'intérieur des municipalités, elles décideront
des secteurs ou du type d'immeubles qui seront concernés. Je ne pense
pas que ce soit de cette façon qu'on va simplifier les choses autant
pour les élus municipaux que pour les citoyens payeurs de taxes.
Quand on va dans la loi, cela ne se simplifie pas davantage, parce qu'on
parle de plafonnement répétitif, de valeur fictive, de
pourcentage variable. On a dû discuter longtemps avec des
spécialistes en commission parlementaire pour éclaircir ces
points entre nous, entourés de spécialistes. Je ne pense pas que
les contribuables, quand ils recevront des factures, des comptes de taxes, avec
des termes semblables et tous les calculs qui s'y rattachent, vont trouver que
c'est bien facile. Au contraire, cela viendra plutôt compliquer les
choses pour tout le monde. Donc, à la base même, la
simplicité était l'un des points importants de la
fiscalité municipale. Là, on amène de la
complexité.
Il y a la neutralité aussi. Je ne pense pas qu'on aille beaucoup
dans le sens de la neutralité gouvernementale avec ce projet-ci. Cela
amène, encore une fois, une division des deux grandes métropoles,
spécialement de Montréal, par rapport aux autres
municipalités du Québec. De plus en plus, on regarde le ministre
s'en aller vers cette espèce de division, de mise à part, de
situations traitées de façon tout à fait
particulière pour Montréal ou la Communauté urbaine de
Montréal par rapport aux autres municipalités du Québec.
Il va falloir revenir sur cela aussi au sujet d'autres projets de loi. (12 h
50)
Je vais plutôt me consacrer au projet de loi 82, à des
choses qui sont fondamentales, entre autres l'équité. Là,
je pense qu'on ne l'a pas du tout quand on parle des deux choses importantes
qu'on retrouve dans le projet de loi 82, c'est-à-dire le plafonnement et
l'étalement, mais spécialement le plafonnement. En termes simples
et clairs, cela veut dire que les municipalités vont pouvoir
décider d'un plafonnement pour des secteurs ou des types d'immeubles,
avec des taux variables, avec des pourcentages et toutes sortes de calculs,
mais un plafonnement de l'augmentation de l'évaluation, un plafonnement
du niveau de taxes à payer. Donc, pour les gens qui auront une plus
forte augmentation de taxes due à une évaluation ou pour toutes
sortes de raisons - ce qui m'inquiète, c'est que ce seront probablement
les spéculateurs qui vont en profiter encore une fois - on va plafonnerl
Les spéculateurs dans un quartier font augmenter considérablement
le prix des maisons. Cette spéculation va amener une augmentation
considérable de l'évaluation de l'édifice, donc des taxes,
et on va plafonner! Cela veut dire qu'il ne paiera pas selon la valeur
réelle de sa maison. Celui qui va profiter de la spéculation sera
plafonné au sujet des taxes à payer.
Comme la municipalité a besoin de la même enveloppe
budgétaire, du même montant de taxes perçues pour donner
des services à sa population, elle devra faire en sorte d'aller chercher
les mêmes fonds. Mais, comme on plafonne les spéculateurs ou ceux
qui ont une augmentation considérable, cela veut dire que ces
gens-là ne paieront pas en fonction de l'évaluation
augmentée de leur maison et qu'on devra aller chercher chez les autres
contribuables. Cela voudrait donc dire que le manque à gagner par
rapport à cette évaluation sera réparti entre les autres
propriétaires qui, eux, ne sont pas plafonnés; donc, une
augmentation indirecte, par ricochet, pour ces gens-là.
Comme le budget doit être global et qu'il ne doit pas être
diminué, cela voudra dire que ceux qui sont plafonnés paieront
moins et qu'on ira chercher chez les autres contribuables municipaux le manque
à gagner
provenant du fait qu'on ne va pas chercher le maximum. C'est cette
équité qui nous inquiète. Est-ce qu'on ne va pas aller le
chercher dans la poche du petit propriétaire résidentiel, ou chez
les locataires qui vont payer indirectement s'ils habitent dans des maisons
locatives? Est-ce qu'on ne va aller chercher dans les poches des plus petits
l'économie réalisée par les spéculateurs? C'est
inquiétant.
Vous me dites qu'il ne me reste même pas deux minutes. Ce
plafonnement est inquiétant, parce qu'il risque de se faire sur le dos
des gens qui ne sont pas dans des quartiers spéculatifs, mais qui vont
devoir payer la facture. Le gouvernement devrait donner l'exemple, pour faire
en sorte qu'on ne transfère pas chez les plus petits cette augmentation
de taxe, et payer sur la valeur réelle ses "en lieu" de taxes. On n'en
parle pas beaucoup de l'autre côté. On n'en parle plus. Mais une
façon d'être un bon citoyen corporatif, c'est de payer ses taxes
en totalité et surtout de faire des pressions sur le gouvernement
fédéral qui ne paie presque rien sur ses bâtisses. Le
gouvernement fédéral devrait être un citoyen modèle,
ce qu'il n'est absolument pas. On n'entend pas beaucoup le ministre dire, de
l'autre côté, qu'il va faire des pressions pour qu'au niveau
municipal on aille chercher l'argent qui devrait revenir aux
municipalités en "en lieu" de taxes sur les édifices des
gouvernements supérieurs, dont le gouvernement fédéral.
J'incite donc le ministre à faire des pressions sur le gouvernement
fédéral et sur son gouvernement pour qu'on soit de bons citoyens
et qu'on paie la totalité de nos taxes.
On va voter pour, oui, mais je tenais à faire ces remarques pour
que le ministre soit bien conscient qu'il y a des dangers là-dedans, des
dangers pour la simplification des lois dont on a toujours parlé et qui
devrait se poursuivre, alors que, là, c'est plutôt la
complexité, mais surtout des dangers quant à
l'équité. Il ne faudrait pas faire en sorte que, par cette loi,
il y ait plus de spéculation, que les spéculateurs en profitent
non seulement en faisant des profits sur les ventes et les achats de maisons,
mais en plus par des économies de taxes. Cela nous inquiète et on
tenait à le dire.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le ministre des Affaires municipales.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, je déplore que
l'ex-critique de l'Opposition en affaires municipales ou l'ex-futur critique en
affaires municipales, le député de Shefford, ait un peu beaucoup
recours à la démagogie pour tenter de prouver les points qu'il
veut avancer. Le député nous dit que c'est un projet de loi qui
va favoriser les gros contribuables contre les petits, les spéculateurs
contre les autres citoyens. Or, le député de Shefford sait fort
bien qu'il n'en est rien. On en a discuté longuement en commission
parlementaire et, après qu'il aura compris le mécanisme que nous
avons dans cette loi, il verra que c'est impossible que cette loi
privilégie les spéculateurs à l'encontre des autres
citoyens.
Je vais vous expliquer pourquoi, M. le Président. Supposons que,
dans un quartier donné, un individu vende sa maison à un prix
très élevé, même si c'est un spéculateur,
admettons que c'est un spéculateur, automatiquement, les
évaluateurs vont considérer que toutes les maisons dans le
voisinage, les maisons semblables, ont une valeur comparable à celle de
l'individu qui vient de vendre. Là, on a une possibilité
d'augmentation de l'évaluation pour l'ensemble du quartier. Mais ces
gens qui voient l'évaluation de leur maison augmenter ne sont pas des
spéculateurs, ce sont des propriétaires. Cela peut être
dans un quartier où il y a de petits propriétaires autant que
dans un quartier où il y a de grosses maisons luxueuses. Une maison qui
se vend plus cher que les maisons voisines, cela peut se produire autant dans
un quartier où les maisons ont une valeur modeste que dans un quartier
où les maisons ont une valeur plus élevée. La
spéculation a lieu partout, autant sur les petites
propriétés, les propriétés modestes, que sur les
grosses.
À partir du moment où l'évaluateur reporte cette
plus-value à l'ensemble du quartier, tout le monde dans une
municipalité, les petits et les gros, est susceptible d'être
frappé par une hausse d'évaluation importante ou par une hausse
de taxes importante. Ce sont ces gens, les propriétaires individuels,
les petits comme les gros, que nous voulons protéger et que l'ensemble
des élus municipaux représentés, comme je l'ai dit tout
à l'heure, dans un comité technique, veulent protéger par
ce projet de loi.
M. le Président, finalement, ce que nous avons devant nous, c'est
une police d'assurance au bénéfice de tous les contribuables
d'une municipalité, quels qu'ils soient, les petits contribuables comme
les gros. Si les municipalités veulent utiliser le système, elles
vont les protéger contre des hausses brusques du compte de taxes. Il y
aura une prime à payer, ce sera 0,01 $, 0,02 $ ou 0,03 $ sur le compte
de taxes, selon la municipalité. En contrepartie, chaque
propriétaire qui verrait son compte de taxes augmenter d'une
façon plus importante que le seuil fixé par la
municipalité jouira d'une réduction du compte de taxes pour
l'excédent pendant un an, deux ans ou trois ans. Enfin, cela lui
permettra de rattraper son
évaluation.
C'est une mesure exactement équivalente à une police
d'assurance et les municipalités ont le loisir, si elles le veulent, de
l'utiliser. On ne l'impose pas, c'est la municipalité, qui est autonome
et responsable de son administration, qui décidera, oui ou non, de
l'appliquer et elle en répondra devant ses contribuables, comme le font
tous les élus.
Maintenant, M. le Président, je conclus en disant que je ne
comprends pas le député de Shefford. Avez-vous compris, M. le
Président? On nous reproche - c'est bien ce qu'il a dit - de
régler des problèmes. Est-ce qu'il est possible d'entendre en
cette Chambre un député qui reproche au gouvernement de
régler des problèmes? Ma foi, c'est comme si on nous interdisait
de régler les problèmes.
Une voix: Ils nous reprochent d'être bons.
M. Bourbeau: Nous avons été élus pour quoi?
Pour créer des problèmes, pour semer la zizanie dans la
société? Enfin, si c'est ce que vous pensez être notre
mandat, ce n'est pas ce que nous pensons. Nous pensons que le peuple du
Québec nous a confié la responsabilité d'administrer et,
entre autres choses, de régler des problèmes. C'est ce que nous
faisons, M. le Président, avec ce projet de loi. Le député
l'a admis, d'ailleurs, et il nous a reproché de régler les
problèmes. Nous en réglons quelques-uns ici pour le plus grand
bienfait des contribuables des municipalités du Québec. Je vous
remercie.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé à cette étape de l'étude du projet de loi
82, je vais maintenant mettre aux voix l'amendement déposé par le
ministre des Affaires municipales et reçu à ce stade-ci du
débat. Il s'agit d'un amendement à l'article 5 du projet de loi
82, article 5 qui a pour but d'ajouter certains articles à la Loi sur la
fiscalité municipale. L'amendement a pour effet précis d'ajouter
au nouvel article 253.22 un troisième alinéa qui se lit comme
suit: "L'application du présent article n'affecte pas le
privilège afférent aux taxes foncières qui grève
l'unité d'évaluation pour garantir le paiement du solde
visé au premier alinéa." Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Jolivet: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Cet amendement est donc
intégré au rapport qui est amendé en conséquence.
Est-ce que le rapport tel qu'amendé de la commission de
l'aménagement et des équipements, qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 82, Loi
modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et la Loi concernant les
droits sur les divertissements en matière de taxes municipales, est
adopté?
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président: Oui, M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Jolivet: ...on aurait beaucoup de raisons de ne point voter
pour, mais nous allons, quand même, voter pour.
Le Vice-Président: Très bien. Le rapport tel
qu'amendé est donc adopté. Puisque nous arrivons à 13
heures, nous allons suspendre nos débats qui reprendront à 15
heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 6)
La Vice-Présidente: Vous pouvez vous asseoir.
Nous allons reprendre la séance.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 40 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 99
Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 40 de notre
feuilleton, il s'agit de la prise en considération du rapport de la
commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi
99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes,
proposé par M. le ministre délégué aux
Pêcheries.
Avant de commencer, M. le leader du gouvernement, vous comprendrez que
le rapport a été déposé ce matin et qu'il me faut
le consentement de cette Chambre pour qu'on puisse prendre en
considération ledit rapport. Est-ce qu'il y a consentement de la
Chambre?
M. Perron: Consentement, Mme la Présidente.
M. Lefebvre: Consentement, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Consentement. Je suis prête
à reconnaître le premier intervenant.
M. le député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Oui, Mme la Présidente, ça va être
très bref, compte tenu de l'engagement que j'ai pris hier soir pour que
ce projet de loi 99 soit sanctionné dans les plus brefs délais.
Je me suis entendu avec le ministre délégué aux
Pêcheries pour qu'il n'y ait pas de discours cet après-midi, pour
que, ce soir, lors de la troisième lecture, il y ait peut-être
deux ou trois minutes. Ensuite, on passera à l'adoption en
troisième lecture et, par la suite, à la sanction aussitôt
que le lieutenant-gouverneur pourra le faire. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Duplessis.
Il n'y a pas d'autres interventions?
Est-ce que le rapport de la commission qui a étudié le
projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries
maritimes, est adopté?
M. Perron: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
maintenant d'appeler l'article 12 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 67 Adoption du principe
La Vice-Présidente: À l'article 12 de notre
feuilleton, le ministre des Communications propose l'adoption du principe du
projet de loi 67, Loi sur l'emblème aviai-re.
M. le ministre des Communications.
M. Richard French
M. French: Merci, Mme la Présidente. Je veux vous signaler
d'abord que bien que je sois le parrain technique, si vous voulez, de ce projet
de loi, puisque je suis responsable du programme d'identification visuelle du
gouvernement et responsable, de par la Loi du ministère des
Communications, des emblèmes nationaux, dont bientôt,
espérons-le, le harfang des neiges, j'ai donc eu la
responsabilité et l'honneur de déposer en cette Chambre le projet
de loi que nous débattons cet après-midi.
Cependant, et j'aimerais bien le signaler, Mme la Présidente,
pour votre bénéfice et pour celui de l'Opposition, l'heure qui
est normalement dévolue au parrain du projet de loi sera prise par mon
collègue, le ministre de l'Environnement qui, lui, est le parrain
spirituel du projet de loi et qui peut expliquer son fondement.
J'aimerais cependant, dans les quelques minutes que j'ai l'intention
d'utiliser cet après-midi, vous dire quelques mots au sujet du programme
d'identification visuelle avant de laisser la parole à mon
collègue. Mon collègue va donc expliquer pourquoi la
sélection du harfang des neiges.
Il y a presque 20 ans, en septembre 1968, l'Assemblée nationale a
adopté la fleur de lis accompagnée du mot "Québec" pour
identifier les organismes gouvernementaux. Deux ans plus tard, en 1970, on peut
dire que c'était le véritable point de départ du programme
d'identification visuelle du gouvernement du Québec, avec
l'élaboration d'un système de signalisation des bâtiments
occupés par l'État.
En 1975, il y avait l'adoption d'un nouvel emblème, soit une
fleur de lis inscrite dans un carré. Son utilisation est strictement
réservée au gouvernement à cause de la protection
légale obtenue en vertu de la Loi sur les marques de commerce. Je pense
que tout le monde, ainsi que tous les téléspectateurs qui nous
suivent, a, à un moment ou à un autre, vu ce sigle du
gouvernement du Québec, le carré bleu entourant la fleur de
lis.
En 1978, le ministre des Communications de l'époque a reçu
le mandat de développer l'image gouvernementale à l'aide de son
programme d'identification visuelle et de voir à l'application de ses
règles graphiques. Donc, en vertu de la Loi sur le ministère des
Communications, le ministre a, entre autres, le mandat de développer une
image gouvernementale forte et cohérente propre à faciliter et
à accroître la communication avec le public. On peut penser au
drapeau du Québec, à la fleur de lis accompagnée du mot
"Québec" dont j'ai parlé tantôt, à la fleur de lis
épurée inscrite dans un carré, au mot "Québec"
suivi du drapeau que nous voyons dans la publicité audiovisuelle du
gouvernement du Québec - publicité à la
télévision, entre autres - et, bientôt, au harfang des
neiges.
Cette politique d'identification visuelle touche la papeterie du
gouvernement, les formules, les publications, la publicité, les
expositions, l'audiovisuel, les véhicules automobiles, les
aéronefs et les bateaux. Il ne faut pas oublier non plus la
signalisation des bâtiments, l'habillement de certains employés de
l'État, les enseignes et les objets de promotion du gouvernement.
En règle générale, les ministres et organismes dont
le budget est voté par l'Assemblée nationale sont assujettis au
programme d'identification visuelle. D'autres organismes, comme la Régie
de l'assurance automobile du Québec, la Régie des rentes du
Québec, entre autres, sont également assujettis au même
programme même si leur budget n'est pas voté par
l'Assemblée natio-
nale, c'est-à-dire même si, techniquement, ils ne sont pas
nécessairement couverts par la législation et la
réglementation.
Par contre, certains organismes dont l'essentiel du budget est
voté par l'Assemblée nationale, dont la Sûreté du
Québec, dont Radio-Québec, ne sont pas assujettis à ce
programme. Dans les semaines et les mois à venir, mon collègue,
le ministre de l'Environnement et moi-même allons nous rencontrer pour
discuter de l'usage précis qui sera fait du harfang des neiges comme
emblème aviaire vis-à-vis des organismes gouvernementaux qui
pourraient possiblement jouir de cette identification additionnelle
qu'offrirait le harfang des neiges, avec l'État et certaines
responsabilités peut-être dans le domaine de l'environnement.
Le rôle du ministère des Communications dans le domaine des
emblèmes nationaux, c'est normalement l'administration, entre autres, de
la Loi sur l'emblème floral et de l'usage qui est fait de tous ces
emblèmes. Nous sommes aussi le ministère responsable des lois et
règlements concernant les communications. Or, les emblèmes
constituent évidemment un geste privilégié de
communication et d'identification d'un État.
Le ministre des Communications a le pouvoir de demander aux registraires
des marques de commerce de notifier le public de l'adoption d'un emblème
et de son emploi comme marque officielle pour identifier les organismes
gouvernementaux du Québec. Une fois un emblème adopté, il
revient au ministre des Communications de voir à sa diffusion, à
sa promotion et à régir ses diverses utilisations, entre autres,
dans les communications officielles du Québec. C'est ce que je vais
faire dans le cas du harfang des neiges avec la collaboration de mon
collègue, le ministre de l'Environnement.
On le sait, les emblèmes ont une signification toute
particulière dans l'histoire des peuples. Ce sont des symboles. Chaque
pays dispose de ses propres symboles qui établissent son
caractère distinctif par rapport aux autres nations. Les symboles sont
également le reflet de l'histoire d'un pays, de sa population, de son
environnement et de ses traditions. Qui plus est, ils incarnent la nature
profonde, à la fois aux yeux des autres nations et à ceux de ses
propres citoyens, d'un pays, d'une tradition importante. Ils illustrent les
valeurs, les objectifs et les aspirations de son peuple.
La flore et la faune occupent une place de choix parmi les symboles
utilisés au Canada pour des raisons évidentes. C'est un pays
privilégié du fait de l'abondance de sa faune, de ses
forêts, de ses lacs et de ses cours d'eau. L'emblème est un
symbole auquel un peuple choisit de s'identifier, l'image qu'il décide
d'avoir de lui-même et qu'il résume dans son temps et son espace;
c'est le miroir d'un peuple.
On sait qu'historiquement, les emblèmes ont joué un
rôle important. On n'a qu'à penser à des exemples de
l'histoire européenne, au symbolisme incarné des aspirations des
uns et des autres par des emblèmes particuliers. Nous nous
apprêtons, aujourd'hui, à faire la même chose pour la
société québécoise quant à son
emblème aviaire, le harfang des neiges.
Le Québec est une des rares entités politiques à ne
pas disposer d'un emblème aviaire. Au moins quatre provinces canadiennes
en possèdent un: l'Île-du-Prince-Édouard, la
Nouvelle-Écosse, l'Alberta et le Nouveau-Brunswick. Les 52 États
américains ont adopté chacun leur emblème aviaire. La
présentation d'un projet de loi pour faire du harfang des neiges un
emblème officiel du Québec et son premier emblème aviaire
apporte à cet emblème la reconnaissance officielle de
l'Assemblée nationale, lui procure une certaine publicité, permet
de mieux encadrer les utilisations éventuelles qui pourraient être
faites de cet emblème et confirme de façon non équivoque
l'importance que le Québec lui accorde.
En terminant, Mme la Présidente, l'adoption d'un emblème
aviaire va éveiller davantage la population à la
nécessité de préserver cette espèce et notre
patrimoine biologique en général. Cela va aussi souligner
l'importance que le Québec accorde à son environnement et
à ses beautés. Je suis convaincu que mon collègue va en
parler davantage tantôt. Donc, c'est avec très grand plaisir que
j'invite l'Assemblée nationale à endosser la proposition du
gouvernement par le biais du projet de loi que nous discutons cet
après-midi, à endosser le choix du harfang des neiges comme
emblème aviaire du Québec.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des
Communications. M. le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Tous les
pays, tous les peuples du monde adoptent des signes visuels distinctifs pour
que ces symboles les différencient des autres peuples du monde. De
façon générale, les pays ont un drapeau, des armoiries et
des emblèmes, autant de leur flore que de leur faune, emblème
floral ou emblème aviaire. Le Québec a tardé à se
donner des signes distinctifs. J'oserais croire que c'est, par nature, que le
peuple québécois est toujours hésitant à se doter
de signes distinctifs.
Tout d'abord, j'aimerais que mon intervention soit rassurante pour
l'ensemble des gens qui habitent le Québec. Beaucoup de personnes ont
une certaine crainte, et je crois qu'elle est injustifiée, de voir le
Parle-
ment voter un emblème aviaire. Beaucoup de gens ont peur que
l'emblème aviaire qu'on veut voter aujourd'hui, qui est le harfang des
neiges, vienne remplacer, à certains endroits, la fleur de lis ou le
fleurdelisé. Eh bien, je voudrais rassurer, d'abord, les gens que cette
possibilité est à peu près nulle. Il faut se rappeler un
peu l'histoire des emblèmes et des symboles du peuple
québécois. J'aurais apporté une photo agrandie, une photo
de cet oiseau, mais ce n'est pas permis en Chambre d'exhiber des photos et des
emballages. Il y a une règle de la Chambre qui nous interdit de le
faire, alors je n'ai pas osé l'apporter. Parce que cet oiseau en soi est
extraordinairement visuel. Mais il n'est pas permis d'apporter en Chambre des
cadres ou de grandes photos ou encore ce qu'on appelle communément des
"posters" et de les exhiber à la face de la caméra. Donc, pour
suivre les règlements, je m'en suis abstenu. (15 h 20)
Cependant, pour rassurer ceux qui auraient peur que le harfang des
neiges vienne remplacer le fleurdelisé ou la fleur de lis, dans le cadre
du débat que nous avons aujourd'hui, le projet de loi 67, Loi sur
l'emblème aviaire, qui désigne officiellement, à cette
fin, le harfang des neiges et qui peut receler un potentiel polémique,
je soumets à votre attention certains faits historiques qui permettront,
outre de distinguer diverses notions, d'atténuer certaines
appréhensions.
Tout d'abord, le drapeau du Québec, le symbole par excellence. Le
21 janvier 1948, le Conseil des ministres adopte le fleurdelisé comme
drapeau officiel du Québec par l'arrêté en conseil no 72.
C'était en 1948. Deux ans plus tard, l'Assemblée
législative adoptait la Loi sur le drapeau officiel de la province, loi
sanctionnée le 9 mars 1950. C'est donc dire que, de façon
très officielle depuis 1948-1950, nous avons un signe distinctif qui est
le drapeau du Québec et nous en sommes tous fiers aujourd'hui. Enfin,
pour que le fleurdelisé ne puisse pas être utilisé comme
emblème par n'importe quel organisme, le gouvernement du Québec
enregistre le drapeau du Québec en vertu d'une loi pour protéger
le respect que l'on doit au drapeau. C'est extrêmement normal qu'il en
soit ainsi.
Toujours relativement au drapeau du Québec, l'arrêté
en conseil du 20 août 1969 autorisait le ministère des Travaux
publics à prendre les mesures nécessaires en vue de faire arborer
le drapeau sur les édifices du gouvernement, les écoles et les
maisons d'enseignement. C'est donc dire que depuis l'arrêté en
conseil du 20 août 1969 tous les édifices, toutes les
bâtisses, les bâtiments qui appartiennent au gouvernement du
Québec doivent arborer le drapeau du Québec. De façon
générale, sauf sur certaines écoles à
Montréal, on voit le fleurdelisé.
Deuxièmement, les armoiries du Québec sont un autre signe
distinctif. En 1868, l'année après notre abdication comme
Québécois, les quatre provinces de la Confédération
canadienne reçoivent leurs armoiries par mandat de la Reine Victoria.
Alors c'est la Reine Victoria qui nous a donné nos armoiries. Un an
après notre abdication comme Québécois,
c'est-à-dire en 1868.
En décembre 1939, le gouvernement du Québec émet un
arrêté en conseil concernant l'adoption de nouvelles armoiries
pour le Québec. De nouveau, en vertu de la loi, elles sont
enregistrées pour être protégées parce que les
armoiries ne peuvent pas servir à n'importe quel emblème, soit de
vente de mortadelle ou de sifflets ou de yo-yo. Il y a une protection sur les
emblèmes distinctifs d'un peuple et d'un pays.
Vient ensuite l'emblème floral. Malgré une vive
controverse, il y a eu une très vive controverse ici sur l'adoption de
l'emblème floral. Parce que la fleur de lis... Il y a quelques fleurs
qui se ressemblent et plusieurs disaient que ce que nous choisissions
n'était pas autochtone, etc. En fin de compte, pour couper court, c'est
la fleur de jardin, la fleur de lis de jardin qui a triomphé comme
emblème floral du Québec.
En décembre 1987 voici que nous arrivons maintenant avec le
harfang des neiges comme symbole aviaire. Il y a l'identification visuelle qui
est très importante, et je dis cela, Mme la Présidente, pour vous
montrer que les gens qui ont peur que l'emblème aviaire ne vienne
remplacer, en quelques endroits, soit le fleur de lis ou le fleurdelisé
n'ont pas raison de penser cela. C'est pour ce faire, pour qu'il n'y ait pas de
polémique d'aucune sorte, que je prends la peine de le dire. J'aurais
aimé -je le répète - amener le harfang des neiges en
Chambre et l'exhiber, mais ce n'est pas permis par nos règlements. Je
n'ai pas osé le faire. C'est tellement un bel oiseau, madame, que
j'aurais aimé l'amener, mais ce n'est pas permis par nos
règlements d'exhiber des choses de cet ordre; on doit le faire à
l'extérieur de la Chambre.
J'espère que le ministre des Communications fera une
conférence de presse pour le montrer à tout le monde à la
caméra. J'aurais aimé l'amener en Chambre - je le
répète pour la quatrième fois - mais c'est défendu
par nos règlements d'amener des posters, des cadres et des choses comme
celles-là et de les exhiber en Chambre. C'est défendu par le
règlement. J'aurais aimé l'amener, Mme la Présidente, et
j'espère que vous avez déjà vu le harfang des neiges.
C'est tellement un bel oiseau qu'on pourrait succomber à la tentation de
l'exhiber en Chambre, mais ce n'est pas permis, Mme la
Présidente!
L'identification visuelle...
La Vice-Présidente: À l'ordre! À
l'ordre!
M. Blais: Le 11 septembre 1968, l'arrêté
ministériel 2951 stipule qu'il est opportun de doter les organismes
gouvernementaux du Québec d'un emblème unique pour fins
d'identification. Le fleur de lis, avec inscription transversale du mot
"Québec", est alors adopté et fait, de plus, l'objet d'un
enregistrement. Par arrêté ministériel, c'est le fleur de
lis, avec le mot "Québec" en croisée, qui est l'emblème
distinctif des organismes québécois. Donc, que ceux qui auraient
peur que ce bel oiseau vienne remplacer le fleur de lis ou le
fleurdelisé se le tiennent pour dit, c'est impossible à cause des
arrêtés ministériels précédents et du respect
que tout le monde a dans cette Chambre pour le fleur de lis, le
fleurdelisé. Alors, que les gens qui pensent que cet emblème
qu'on adopte aujourd'hui viendrait le remplacer se le tiennent pour dit. Je le
répète souvent, madame, mais il y a toujours des gens qui
pourraient penser que cet emblème pourrait être
remplacé.
Enfin, en 1975, encore par arrêté ministériel, le
gouvernement du Québec ordonne que le fleur de lis inscrit dans un
carré soit adopté et employé comme emblème
constituant l'identification des organismes gouvernementaux. Donc, il faudrait
d'abord voter un autre arrêté pour ne pas que cet emblème,
qui est le fleur de lis, représente les organismes du gouvernement du
Québec et qu'il soit remplacé par l'oiseau. Personne ici, en
cette Chambre, même si de l'autre côté on ne pèche
pas par excès de nationalisme, n'oserait faire un tel affront au
fleurdelisé. Alors, que les gens soient bien rassurés, cela ne se
fera pas.
Dans le cadre du programme d'application, en réalité, cela
a été beaucoup plus loin que les identifications: le papier pour
la correspondance, les enveloppes, les cartes de visite, les bloc-notes. Tout
ce qui, en général, sort du gouvernement est identifié par
le carré avec la fleur de lis dessus - vous savez que c'est
l'emblème du Québec, Mme la Présidente - et cette
identification ne peut être changée par un emblème
floral.
Mme la Présidente, une question de directive. J'aurais
aimé amener un grand poster du harfang des neiges ici, mais je croyais
que ce n'était pas permis par nos règlements. Je vous demande,
juste pour renseignement, s'il m'aurait été possible de
l'apporter.
Une voix: II faudrait le consentement. La
Vice-Présidente: II s'agit d'une question de règlement, M. le
député de Terrebonne, et je vais y répondre.
Effectivement, il y a déjà une jurisprudence à cet effet.
En mai 1985, un ancien président de la Chambre a rendu une
décision selon laquelle un député peut présenter un
tableau de nature didactique dans le but d'illustrer un propos, mais il s'agit
là non pas d'un droit, mais d'une permission accordée à un
parlementaire qui prononce un discours. Naturellement, si la photo est
directement reliée à un projet de loi, je pourrai, dans ces
circonstances, permettre la diffusion de l'image, pourvu que ce soit
directement relié au projet de loi.
M. Lefebvre: Mme la Présidente...
M. Blais: Question de règlement. D'accord.
M. Lefebvre: Sur la même question de règlement-La
Vice-Présidente: Sur la question de règlement.
M. Lefebvre: J'ai presque le goût d'informer tout de suite
le député de Terrebonne, en passant par vous, évidemment,
qu'on a effectivement l'intention de satisfaire sa curiosité
légitime.
M. Blais: Ce n'est pas une question de règlement.
M. Lefebvre: Le ministre exhibera la photo à laquelle le
député a fait abondamment référence depuis le
début de son discours.
La Vice-Présidente: Si vous me permettez, quand le temps
sera venu, on accordera cette permission, s'il y a lieu. Pour l'instant, nous
écoutons le député de Terrebonne et je n'aimerais pas
qu'on...
Une voix: Cela va nous permettre de parler d'autre chose.
La Vice-Présidente: M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Cela veut
dire que je n'aurais pas dû résister à la tentation
d'amener ce cadre. J'espère que l'Opposition en a une copie.
Étant donné que j'ai oublié le mien, j'espère que
d'autres montreront le leur, et il me fera plaisir de le voir à la
télévision. Les gens pourront constater de visu ce que
représente vraiment ce harfang des neiges. C'est quand même un
précédent. Â l'avenir, dans mes prochains discours, si je
veux parler de quelque chose, j'arriverai toujours avec un cadre, étant
donné que vous nous le
permettez. Cela me fait plaisir. (15 h 30)
En épilogue, comme dernier emblème, nous n'avions pas
d'emblème aviaire et voici aujourd'hui que le harfang des neiges, par la
loi, devient l'emblème aviaire du Québec. J'aimerais vous dire
que, lorsqu'est arrivée la bataille en cette Chambre, c'est le
député de Terrebonne de l'époque qui avait
présenté l'emblème de la fleur de lis, et l'histoire se
répète aujourd'hui, c'est le député de Terrebonne,
dans l'Opposition, qui porte le dossier des emblèmes. C'est drôle
comme, parfois, les choses se joignent et se ressemblent. Il y a tout de
même une précaution qui a été prise par le
gouvernement précédent et qui permet aujourd'hui à
l'Opposition d'être favorable à cet emblème, parce que nous
avons un groupe d'experts qui, en 1979, se sont consultés pour choisir
cet emblème aviaire du Québec. En fait, c'est un groupe
d'ornithologues qui ont regardé la chose et qui ont fait une vaste
enquête auprès de 226 représentants ou spécialistes
des oiseaux tout simplement, pour qu'on soit compris par tout le monde. Ces
gens-là avaient à choisir entre différents oiseaux qui
sont passablement connus au Québec. Il y avait, entre autres, le canard
noir, le harfang des neiges, le geai bleu, le pinson à gorge blanche, le
bruant des neiges, etc. Les 226 spécialistes ont voté, selon
certains critères: un oiseau que la population devait connaître le
plus possible de façon générale, qui devait être
rencontré à peu près dans toutes les régions
habitées du Québec, qui devait être relativement facile
à identifier par la population. C'est bien sûr qu'aucun oiseau au
Québec ne répondait à 100 % à tous ces
critères. Et plusieurs, selon leurs sentiments, le coin du Québec
où ils habitaient ou le goût personnel aussi, voyaient
plutôt le huard ou le canard ou l'oie blanche ou le harfang des neiges.
Certains allaient même jusqu'à proposer des croisements entre
certains de ces oiseaux, mais c'est bien sûr qu'il fallait que quelqu'un
tranche quelque part. Alors, les 226 spécialistes ont
décidé de voter ainsi. Sur 226 votes, le canard noir du
Québec a reçu trois votes, le bruant des neiges, 13 votes, le
pinson à gorge blanche, 50 votes, le geai bleu, 44 votes, et le harfang
des neiges, 116 votes. Il me fait plaisir que cet oiseau ne soit ni bleu ni
rouge, parce qu'on croirait, comme quelqu'un vient de le souffler, que c'est
par partisanerie que les ornithologues auraient choisi un oiseau.
Vous savez, Mme la Présidente, qu'à choisir un oiseau, un
parti ne perd pas de plumes. C'est tout simplement une façon technique
de regarder certains critères de base qui font que l'oiseau est plus
représentatif d'un coin de territoire ou d'un autre.
Il y avait cependant pour le harfang des neiges un inconvénient
majeur, à savoir que cet oiseau vit dans l'extrême nord du
Québec, en haut du soixantième parallèle, presque la
totalité de l'année. À ce moment-là, les urbains
que nous sommes du sud, nous n'en voyons pas très très souvent.
Il vient nous visiter de temps à autre dans le sud tous les quatre ou
cinq ans, lorsque sa nourriture est moins forte dans le Grand-Nord, et nous
sommes heureux lorsque nous en voyons un. Je suis persuadé que, dans
cette Chambre, il n'y en a pas beaucoup qui ont vu des harfangs des neiges
visuellement. Il ne doit pas y en avoir beaucoup. On en a vu en photo, on a
entendu parler que certains de ces oiseaux grands et nobles, fiers et d'allure
altière se promenaient parfois dans nos villes et dans nos centres
urbains, et que, parfois, comme ils sont très très peu sauvages,
ils se faisaient frapper par une voiture et qu'on les amenait chez le
vétérinaire. Là, ça faisait la nouvelle de partout
et c'est là qu'on pouvait voir la beauté de l'oiseau.
Pour que les Québécois qui nous entendent connaissent un
peu mieux le harfang des neiges, j'aimerais faire un petit bout de description
de la bête elle-même. Pour ce faire, j'ai Forêt et
conservation, le Magazine de la forêt de 1983, volume 49. Il y a un
article... Je ne lirai pas tout cela, Mme la Présidente. Mais, tout de
même, on en a le droit, il me semble. Vous voyez, ici, il y a un symbole.
Vous l'avez ici en noir et blanc. Cela ne m'a pas coûté
très cher, c'est une photocopie, pour présenter le premier en
cette Chambre cet harfang des neiges. J'ai oublié ma copie en couleur,
mais je veux que les gens voient. Cela ressemble un peu à une chouette,
à un hibou ou à un hibou très chouette!
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: C'est un bel oiseau, Mme la Présidente. C'est un
oiseau extraordinaire, le harfang des neiges. Il y a un article ici
écrit par André Duhamel et Léopold Gaudreau. Je vais vous
en lire quelques extraits afin que les Québécois qui auront cet
oiseau comme emblème il y a unanimité dans cette Chambre - aient
un peu le sens de ce que c'est. Je vais décrire l'oiseau lui-même,
ce qu'il est physiquement, ses habitudes, ses façons de se reproduire,
son apparence visuelle et ses grandes qualités aviaires, ses grandes
qualités d'oiseau.
C'est un oiseau superbe, sublime, d'une beauté presque
inégalée, tout le monde est d'accord sur cela. M. Duhamel dit:
"Le harfang des neiges est l'oiseau qui représente le mieux la
brillance, la clarté et la force de notre climat hivernal. Il est une
merveille animale de la nature nordique. Le choix de ce rapace diurne..." On
croirait que, parce que c'est un genre de hibou, que c'est un
oiseau nocturne, qui chasse la nuit et qui vit la nuit. Non, non. C'est
un des seuls, sinon le seul hibou de la même famille - il y a le grand
duc et d'autres - qui est un chasseur diurne. C'est un oiseau qui vit le jour.
Son apparence nous laisserait croire qu'il vit la nuit parce qu'il ressemble
beaucoup au hibou, mais non. "Le choix de ce rapace diurne aux habitudes
particulières de nidification - cela veut dire qu'il a une façon
très spéciale de faire son nid et de se reproduire, j'en parlerai
un peu plus tard - ne s'impose-t-il pas comme emblème aviaire... du
Québec?"
C'était en 1983, après que le groupe qui s'appelait le
COQ, le Club des ornithologues du Québec, ait choisi le harfang des
neiges comme oiseau. Le COQ a choisi le harfang des neiges comme oiseau symbole
et proposait au gouvernement, à l'époque, de prendre le harfang
des neiges comme emblème aviaire du Québec. Vous savez qu'on
prend toujours le temps d'examiner les raisons, etc. Je crois que nous avions
regardé avec les directions, en 1985... Nous étions prêts
aussi à l'adopter. C'est pourquoi vous n'aurez aucune difficulté
avec nous; nous étions prêts, nous étions d'accord. C'est
pour cela qu'on ne fait pas de bataille sur cela. C'est normal. Aujourd'hui, le
parti au pouvoir... D'ailleurs, si le ministre peut faire venir une de nos
photographies qu'il doit avoir à son ministère. Il y en avait une
très grande avec un bel oiseau en vol. Ce serait très bon. S'il
ne l'a pas, il devrait la faire venir pour la montrer aux gens, vu que Mme la
Présidente lui en a donné la permission. Cela renseignerait les
gens de façon visuelle.
On dit: "La grande beauté du harfang en fait une merveille de la
nature nordique. C'est d'ailleurs un des plus beaux oiseaux de la
planète. Il est grand et trapu..." Écoutez, là! Ce sont
des ornithologues, des spécialistes. Il en ont vu des moineaux, eux. Ils
en ont vu des oiseaux. Ces spécialistes nous disent que c'est l'un des
plus beaux oiseaux de la planète. Quelqu'un qui serait contre ferait
l'autruche, c'est sûr. On dit aussi: "Les yeux sont..." Je vais les
décrire un peu. Ce sont des yeux jaunes et gros. "Le bec est noir et
crochu. Les pattes et les ongles sont lourdement emplumés. Le plumage du
harfang des neiges est remarquable. Sa couleur blanche est nuancée selon
les individus, le sexe et l'âge et, parfois, le temps de l'année
où il est aperçu. C'est qu'il change un peu de couleur au fil des
ans. Plus il y a de neige, plus il est blanc. Il se confond avec la nature,
c'est ce qui en fait un chasseur redoutable. (15 h 40)
Les plumes de ce rapace sont une merveille de conception. Elles sont
longues, légères, souples et si flexibles que le vol de l'oiseau
est tout à fait silencieux. Un oiseau avec des ailes de cette ampleur et
de cette grandeur vole, Mme la Présidente, sans le moindre bruit
tellement son plumage est parfait, doux, silencieux et visuellement
agréable. C'est un des plus beaux oiseaux de la planète, dit-on.
Ceux qui en ont vu un le savent certainement.
La souplesse extrême de son plumage et la
légèreté particulière de certaines plumes de ses
ailes constituent donc un atout important pour la chasse. Je le disais
tantôt et M. Duhamel ici nous le dit de façon claire comme
spécialiste de la chose. La grande acuité visuelle du harfang des
neiges est une autre de ses caractéristiques très importantes.
Son oeil peut distinguer des objets dans l'obscurité presque totale.
Même s'il est un chasseur diurne, la nuit, dans l'obscurité
totale, il discerne les parcelles des moindres frémissements et des
brindilles qu'il pourrait y avoir devant lui. C'est un oeil extraordinaire. Ce
sont presque des lentilles qu'il a.
Son oeil peut distinguer des objets dans l'obscurité la plus
totale. La rétine est couverte de cellules - on appelle cela des
bâtonnets - extrêmement sensibles à la lumière. En
plus, la large pupille peut se dilater énormément et capter la
lumière la plus infime. Cet oiseau a besoin de 100 fois écoutez
bien, Mme la Présidente, la perfection de cet oeil - moins de
lumière que l'humain pour voir dans le noir. Un instant! Cent fois moins
de lumière pour voir dans le noir en plus. C'est toute une
perfection!
Quant à son ouïe et quant à son système
auditif, elle est encore plus perfectionnée et plus précise que
sa vision. Les disques faciaux. Si vous regardez l'oiseau, on voit ici les
disques faciaux... Autour de l'oeil, il y a comme un miroir concave. Les yeux
sont au fond de cela. Au fond, il y a son système de
réverbération auditive. Quand même, Mme la
Présidente, cet oiseau, en plus d'être beau, possède des
attributs de la nature que la plupart des animaux de cette planète
peuvent lui envier.
Pour continuer sur l'ouïe, Mme la Présidente, on dit: Les
disques faciaux entourant les yeux du harfang des neiges servent à
améliorer son acuité auditive. Formés de plumes raides et
denses, ses disques faciaux servent de réflecteurs paraboliques qui,
comme le pavillon de l'oreille humaine, captent les sons et les transmettent
aux petites oreilles dissimulées sous un plumage extrêmement fin,
acoustiquement transparent.
Je prends la peine de décrire un peu ce qu'est cet oiseau parce
que beaucoup de Québécois l'ont peut-être vu, mais ne
connaissent pas sa valeur, ses capacités et ses qualités du
côté animal. C'est un des plus beaux oiseaux de la planète.
C'est un des plus perfectionnés. C'est un des meilleurs oiseaux.
Les harfangs des neiges ne sont pas migrateurs. Cela veut dire qu'en
fait ils n'émigrent pas comme les outardes ou les canards au printemps.
Ils sont toutefois nomades. Leurs déplacements très
étendus et peu prévisibles sont très mal connus. Ils
passent l'hiver dans l'Arctique. D'autres cependant descendent vers les zones
habitées en septembre pour venir à la chasse lorsque, dans leur
coin, il y a un peu moins de gibier à prendre.
D'un naturel peu farouche - c'est malheureux, il est peu farouche et
ceux qui ne le connaissent pas peuvent l'attraper pour sa beauté; il
peut être victime de gens qui n'ont pas le respect de la faune ou de la
flore au Québec - il s'approche des habitations, des quais, des
dépotoirs. C'est un animal très peu farouche. Chaque
année, les harfangs nous arrivent aux premières neiges.
Dès lors, ils délimitent un territoire respectif pour chacun
d'eux. Ils choisissent un point d'observation, sont à l'affût et
surveillent ce territoire comme leur terrain de chasse propre et ils happent et
grapillent tous les rongeurs. Ils se nourrissent de rongeurs.
En fait, on dit du harfang des neiges qu'il est timide et normalement
silencieux, et surtout silencieux au temps de la nidification. Je vais en
parler un tantinet. Ici, j'aimerais vous montrer le Québec, là.
C'est peut-être petit pour les gens qui regardent la
télévision, mais on voit qu'il fait sa nidification, il fait son
nid à l'extrême, extrême, extrême nord du
Québec. Il fait son nid au ras du sol - c'est pour cela qu'il choisit
l'extrême nord - à l'approche d'un prédateur, quand la
femelle surveille, quand ils surveillent leurs oeufs, ils ont une façon
d'intimider le prédateur de ce coin, par exemple, le renard de
l'Arctique, par des ululements et des cris qui ressemblent un peu à des
jappements. C'est un cri d'alarme et d'intimidation qui fait peur au
prédateur, le renard, à cause de ce son strident, presque
épeurant. Les harfangs qui hivernent dans le sud du Québec
reprennent le chemin du nord vers le mois de février. Pour terminer la
description que j'ai là-dessus, je vais dire en un mot que beaucoup de
gens connaissent ce qu'on appelle le ookpik. Le ookpik, c'est le petit harfang,
en fait. Les Eskimos l'appellent le ookpik. On se souvient de ça, le
symbole de l'Expo, etc. Alors, à leur naissance, les jeunes harfangs que
les Inuit nomment ookpik se présentent comme une belle boule soyeuse de
duvet blanc piqué de deux yeux jaunes. En quelque huit semaines, les
ookpik acquièrent le plumage typique de l'espèce adulte. On voit
bien que la beauté de ce rapace peut certainement à elle seule
constituer un plaidoyer en sa faveur et c'est ce que j'ai voulu faire. J'ai
résumé, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps pour en parler ici
en Chambre et il ne faut pas qu'on en abuse non plus.
Je résume beaucoup ce que j'avais à dire sur cet oiseau
extraordinaire. Je résume en fait. Prenons donc le temps d'observer son
vol calme et puissant, de regarder comment il explore son territoire, de nous
émerveiller devant ses caractéristiques. J'ai voulu donner
quelques-unes des caractéristiques de cet oiseau superbe et sublime.
Mais dans la Voix de l'Est, il y a un cahier de fin de semaine plus qui
a paru dans lequel Daniel Paquet a écrit un bout sur le harfang des
neiges. C'est tout court. J'aimerais vous en lire quelques extraits pour le
bénéfice des téléspectateurs et pour notre
enrichissement collectif. "Le Québec aura bientôt son
emblème aviaire, le harfang des neiges." Il était en faveur. Je
n'ai vu personne être contre. Je trouve cela extraordinaire, personne. Je
n'ai rien lu, je n'ai rien vu, je n'ai rien entendu, sauf certaines
appréhensions que j'ai mentionner au début pour que les gens se
calment, ceux qui pourraient penser que ça pourrait remplacer le fleur
de lis. J'ai bien pris la peine de le dire. Je ne suis pas de ceux-là.
Il faut toujours faire attention. Je n'ai entendu que des éloges envers
cet oiseau. Je crois ici que Daniel Paquet décrit cet oiseau et la
façon dont il le fait, c'est très succinct, mais c'est un
chef-d'oeuvre verbal pour décrire, saisir et comprendre cet oiseau.
"Harfang des neiges, ce nom évoque une certaine pureté et la
noblesse à cause de son manteau blanc marbré de brun et sa grande
discrétion. Cette chouette est mal connue ici dans le sud et pour cause,
elle habite les régions arctiques du monde. Dans l'est de
l'Amérique, on la retrouve à l'île d'Ellesmere, à la
terre de Baffin, à la baie d'Ungava, au nord du Québec. Elle nous
visite toutefois l'hiver, périodiquement. À tous les quatre ou
cinq ans, lorsque le lemming se fait rare..." Le lemming, c'est la souris du
nord qui sert de nourriture, en fait, au harfang des neiges. C'est quoi le
lemming? C'est ça qu'il vient de dire, c'est ce qu'il mange en hiver. Je
ne savais pas qu'il l'expliquait. Je vous le dis, madame. Le lemming, c'est une
sorte de souris nordique qui est la nourriture du harfang.
Le harfang a les ailes grandes de 60 à 70 centimètres,
etc. "Un duvet abondant, recouvrant sa peau sous ses plumes jusqu'au bout des
orteils, permet au harfang de supporter des froids de moins 40°C..." ou
centigrade. À moins 40 , les deux échelles se rejoignent. C'est
comme des partis qui s'entendent sur un projet de loi: à moins 40 , on
s'entend. Moins 40 C ou centigrade, c'est le même froid. "Il s'installe
face au vent pour que les plumes collent au corps et se blottit derrière
un objet par de vents violents." (15 h 50)
Lorsque ce futur emblème daigne nous visiter, on peut
l'apercevoir perché sur un poteau de clôture dans un champ
dégagé évoquant sa toundra natale, immobile comme un
motton de neige guettant sa proie.
Des yeux jaunes perçants, certes, mais aussi une tête
composée de deux disques paraboliques transmettant les ondes sonores aux
oreilles, une tête qui peut tourner jusqu'à 270 degrés sur
elle-même. Aucun autre animal n'a ce charme et cette beauté. Cela,
c'est de l'environnement de la flore et de la faune, un oiseau comme
celui-là. Et puisqu'il doit supporter le soleil de minuit six mois par
année, c'est un diurne. C'est entendu qu'on n'y pense pas toujours,
mais, à l'extrême nord du Québec, il fait jour six mois par
année et nuit six mois par année. Alors, il faut que les animaux
s'adaptent à cela. Québec, c'est un très grand pays pour
ceux qui pensent que c'en est un. Moi, je le crois. C'est un très grand
pays, au point que, dans ses extrémités, il y a six mois de nuit
et six mois de jour par année. Cet oiseau vit, de façon
générale, dans ce coin. Ils disent: C'est un diurne. Ceci
explique également que certains spécimens nous visitent au coeur
de l'hiver lorsque, au nord, il fait nuit 24 heures par jour.
Le harfang a un très bon appétit, etc. Cela, on va le
passer. Le harfang des neiges, à l'instar des autres rapaces, avale sa
proie tout entière, les os, la fourrure, les dents. II a un
système digestif spécial. C'est un oiseau spécial par son
aspect extérieur, et c'est un oiseau spécial aussi par sa
composition intérieure. Il est parfait sur toute la ligne. C'est un
oiseau parfait: un système digestif spécial, une apparence
superbe, des ailes... Lorsque ses ailes sont déployées, cela
ressemble presque à un bel avion sans moteur. C'est beau visuellement,
et c'est silencieux et élégant.
Ce grand solitaire timide et silencieux sort de son mutisme seulement
lors de la nidification, c'est-à-dire lorsqu'il fait son nid. Il reprend
la route du Grand-Nord, vers février, quand il est venu nous visiter. La
couvaison dure de 32 à 33 jours. La femelle pond jusqu'à quatorze
oeufs, selon les circonstances.
Terminant sa description, il nous rapporte une parole de Claude Simard
qui est, en fait, un peu le parrain du harfang des neiges comme emblème.
Claude Simard a écrit à ce propos: "Le harfang des neiges
représente l'inlassable effort de survie de la faune contre les rigueurs
du climat québécois." Sûrement une belle
référence aux vies de la toundra et aussi à tous les
autochtones et au peuple du Québec. C'est un oiseau qui a toujours
résisté parce que la nature et son environnement lui rendaient la
vie extrêmement difficile, à cause de ses qualités, de sa
beauté, de sa détermination et aussi de la fougue qu'il met
à vivre et à survivre. Cela en fait un oiseau qu'on dit un des
plus beaux de la planète. Et le comparer au peuple
québécois qui, ici, a de la difficulté à survivre,
qui a de la détermination et la fougue, je crois que cet oiseau est
vraiment l'emblème que les Québécois et les
Québécoises méritent.
Mme la Présidente, je voterai pour cette loi.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Terrebonne. M. le ministre de l'Environnement.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Mme la Présidente, je voudrais invoquer les
dispositions du règlement pour vous demander deux choses:
premièrement, de montrer, pendant mon discours, deux photos de
l'emblème aviaire du Québec; ensuite, comme je vais
représenter le premier ministre pour ce discours, afin que je puisse
dépasser 20 minutes, je voudrais avoir votre assentiment avant de
commencer.
La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Environnement,
pour ce qui est des deux photos, je vous y autorise, compte tenu de la
décision que j'ai rendue antérieurement.
Et, en vertu de notre règlement et plus spécialement en
vertu des articles 239 et 209, vous pouvez, en tant que représentant du
premier ministre, avoir un droit de parole d'une heure. Là-dessus, je
suis prête à vous reconnaître.
Une voix: L'Opposition l'a réclamé, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Environnement.
M. Lincoln: Mme la Présidente, c'est avec beaucoup de
plaisir et aussi avec beaucoup de fierté que je viens m'associer
à mon collègue le ministre des Communications que je voudrais
remercier tout particulièrement de m'avoir aidé à faire
une réalité de ce projet de loi que nous déposons
aujourd'hui. En fait, sans le concours de son ministère et le sien et de
tous les gens de son cabinet et de son ministère, je pense que ce projet
de loi ne serait pas réalité aujourd'hui.
C'est un projet de loi qui est très, très court,
peut-être un des plus courts jamais présentés à
l'Assemblée nationale. Mais ce que ce projet de loi manque en longueur,
il l'ajoute par l'importance du symbole qu'il représente. Il faudrait
que nos auditeurs, qui peut-être pensent que ce projet de loi est banal
et qu'il ne sert pas une raison particulière ou une raison importante,
sachent que ce projet de loi représente pour
nous, où que nous soyons au Québec, quel que soit notre
âge, quelle que soit notre idéologie politique - et le critique de
l'Opposition l'a démontré très clairement -un symbole bien
important de plusieurs choses auxquelles le Québec tient de plus en plus
et pour lesquelles une prise de conscience de plus en plus grande se fait, tous
les jours.
C'est d'abord le symbole de la conservation des ressources et de la
préoccupation des Québécois, surtout les jeunes, pour la
nature autour d'eux, pour leur milieu de vie, pour leur qualité de
vie.
Deuxièmement, c'est le symbole de l'intérêt de
l'humain pour la nature et tout ce qu'elle représente, surtout à
travers les espèces vivantes. Ce sont en effet les espèces
vivantes, les oiseaux, les autres espèces vivantes, les poissons et tout
ce qui vit autour de nous que nous retrouvons de plus en plus dans la nature et
que nous apprenons à aimer. Nous apprenons aussi petit à petit,
surtout à travers les jeunes qui nous donnent encore une fois une
leçon de plus en plus en ce sens, à respecter la nature et
surtout la nature vivante.
Ce symbole aviaire du Québec, le harfang des neiges que nous
voulons célébrer aujourd'hui par ce projet de loi,
représente aussi un lien important entre le nord du Québec et le
sud du Québec. En fait, symboliquement, cet oiseau qui niche dans
l'Arctique se déplace durant les saisons chaudes pour venir de plus en
plus vers le sud, excusez, pendant les périodes d'hiver, au contraire,
pour venir vers le sud. Il fait le lien entre le nord et le sud. Et ça,
c'est très important. Il représente aussi le symbole du milieu
nordique. Le milieu nordique du Québec qui est la frontière de
l'avenir pour nous et qui représente ce territoire de grand défi
pour le Québec, d'un défi non seulement économique mais
surtout d'un défi environnemental parce que nos populations autochtones
- les Indiens et les Inuit - habitent là, eux, qui ont toujours
été tellement près de la nature, qui nous donnent ce
rappel de façon continuelle qu'il faut respecter la nature, qu'il faut
respecter l'environnement, le milieu de vie et surtout les espèces
vivantes. Et le harfang des neiges, lorsqu'il vient vers le sud, vient nous
apporter ce message de ces peuples qui, eux, ont compris la nature et qui ont
aimé ces espèces vivantes et qui continuent à les
protéger de façon presque farouche.
Le harfang des neiges représente aussi un symbole de grâce,
de majesté, de beauté dans un milieu où, tous les jours,
nous voyons des laideurs autour de nous. Nous voyons de la pollution. Nous
voyons toutes sortes de choses que l'humain tellement intelligent, tellement
rempli de connaissances technologiques a, malgré tout, souillé et
saccagé de plus en plus. Et cet animal telle- ment beau, tellement
gracieux, tellement majestueux nous donne à réfléchir sur
ce que nous avons fait de la nature.
C'est enfin un symbole de ce que représente la faune autour de
nous. La faune et la flore sans lesquelles le milieu de vie serait invivable et
vide. On n'a qu'à voir ce qui est arrivé dans certains continents
où on a commencé à détruire le milieu de vie.
Aujourd'hui, là où il y avait des forêts il y a un
désert et rien ne vit là. Les humains finissent par succomber
aussi, mais certainement que les premiers à succomber sont les
espèces vivantes moins résistantes que l'humain. Ce harfang des
neiges nous donne cette leçon de protection de la faune et de la faune
aviaire, les oiseaux représentant peut-être le plus beau de la
faune. (16 heures)
En fait, le harfang des neiges, c'est une partie des espèces
sauvages que nous avons autour de nous. Ces espèces sauvages font partie
de cette vaste diversité biologique dont nous sommes tous une toute
petite partie. Ce qui arrive à une espèce vivante devrait et doit
nous toucher tous. C'est d'ailleurs par une plus grande relation entre les
humains et la nature qu'il deviendra encore plus facile de chercher des
développements qui s'harmoniseront et qui respecteront la vie.
Dans ce contexte de respect des choses vivantes, les oiseaux constituent
un grand groupe d'animaux, particulièrement intéressants à
cause de leur relation avec les hommes. Nous en retrouvons partout autour de
nous: dans les bois, dans les villes et dans les campagnes. Ils nous fascinent
par leur chant, par leur couleur et par leur conquête de l'espace.
Près de nos habitations, ils deviennent presque des amis et des objets
très familiers; ils deviennent presque une partie de notre milieu
familier.
Ce sont d'ailleurs les amateurs du monde des oiseaux, les ornithologues,
qui, au cours des dernières années, ont mené plusieurs
campagnes en faveur de la protection des oiseaux. Dans cette foulée, il
faut souligner l'apport, que le critique de l'Opposition a soulevé tout
à l'heure, du Club des ornithologues du Québec, de la
société du Québec pour la protection des oiseaux, des gens
qui ont milité tellement fort, tellement de gens qu'il serait trop long
de les nommer tous. Je pourrais penser à M. Jacques Prescott, à
son père, à M. Normand Prescott, à M. David Bird et
tellement d'autres, dont M. Léopold Gaudreau, le directeur du patrimoine
écologique au ministère de l'Environnement, que le critique de
l'Opposition a mentionné. C'est un homme convaincu de l'environnement et
de la nature, une personne dont les connaissances du monde écologique,
de la faune et de la flore en font un Québécois de
première importance pour nous et notre milieu de vie.
Quelqu'un qui s'est battu pour la défense des espèces
vivantes et de l'écologie dans notre milieu. Je voudrais saluer son
apport, dans tout ce grand effort commun pour faire que le harfang des neiges
devienne notre symbole aviaire au Québec.
En fait, comme l'a souligné mon collègue des
Communications, plusieurs provinces ont déjà des emblèmes
aviaires: l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-
Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Alberta et un grand nombre
d'États des États-Unis, sinon la majorité. La nomination
et la sélection d'un emblème aviaire n'est pas chose du hasard.
Il y a des critères mondialement reconnus qui doivent être
observés. J'aurais voulu que nos auditeurs sachent quels sont ces
critères, pour réaliser que ce n'est pas une chose qui se fait au
pied levé, que cela demande beaucoup de travail de la part de beaucoup
de gens.
Il faut d'abord nous assurer que l'espèce choisie n'a pas
été sélectionnée comme emblème aviaire par
d'autres entités politiques, n'importe où dans le monde. Il faut
que notre emblème soit présent au moins à une
période de l'année dans la majeure partie des régions
habitées du Québec. Dans le cas du harfang des neiges, nous avons
la possibilité de le retrouver, hiver après hiver, dans la
majeure partie des régions habitées du Québec.
Il faut aussi que l'oiseau choisi comme emblème ne puisse pas
porter un nom l'identifiant à une entité géographique
autre que le Québec. Par exemple, on ne pourrait pas choisir l'oriole de
Baltimore ou la bernache du Canada ou un autre oiseau qui n'est pas
identifié, par son nom, au Québec.
Un autre critère: on doit tenir compte du fait que
l'espèce doit être facilement identifiable et que la coloration de
son plumage varie peu selon les périodes de l'année et selon le
sexe. Heureusement, le harfang des neiges présente un plumage
relativement stable tout au cours d'une année et selon l'âge et le
sexe.
On recherche aussi, comme emblème aviaire, un oiseau bien connu
du public. Les oiseaux de proie ont depuis toujours fasciné les gens:
leur grandeur, leur majesté, leur vol, leur agilité en font des
oiseaux choyés.
Il faut aussi choisir un emblème qui fait partie de notre
patrimoine, de notre folklore, de notre histoire. Le harfang des neiges n'est
pas une espèce introduite, il fait partie depuis toujours de la faune
québécoise. De façon plus globale, il appartient à
la faune nordique du monde. Par conséquent, le harfang des neiges
devient l'oiseau qui, mieux que tout autre, peut représenter cette
caractéristique géographique et climatique du Québec. Le
Québec est de plus en plus ouvert sur le nord et le harfang,
étant relié au cours d'une année à cette vaste
partie du Québec, fait particulièrement bien le lien entre ces
deux réalités dont j'ai parlé, le Québec sud et le
Québec nord. En effet, la population de harfangs réside toujours
au Québec, et ce à n'importe quelle période de
l'année.
Moins d'une dizaine de nos espèces de faune aviaire pouvait
remplir tous ces critères. Pour sa part, le harfang des neiges s'est
démarqué beaucoup des autres espèces, ayant pu faire
l'objet d'un tel choix. Ce choix est particulièrement justifié.
Le harfang des neiges est le seul à nicher sur le sol de l'Arctique. Il
est une merveille de la nature nordique. Il est grand et l'un des plus beaux
oiseaux de la planète. Je vais passer la description du harfang des
neiges que vous a donnée dans la plénitude le critique de
l'Opposition, le député de Terrebonne.
Il faudrait peut-être souligner la connexion, presque l'instinct
immense du harfang des neiges pour l'environnement. Il est adapté aux
longs jours sur l'herbe de l'été arctique et, contrairement
à ses cousins, les oiseaux de proie qui travaillent de nuit, il est
aussi actif en plein jour. Le nombre d'oeufs couvés est fonction de la
disponibilité de la nourriture pour les jeunes. En cela, il est un
oiseau particulièrement intelligent. Il s'agit donc d'une espèce
qui intègre parfaitement son comportement reproducteur à
l'écologie de son milieu. Il est tout à fait adapté
à son milieu.
Les jeunes harfangs que les nordiques ont appelés ookpik - si
vous vous souvenez, c'était le symbole de l'Expo 67 - ont
été particulièrement choyés par les peuples
nordiques et les enfants nordiques. Nous espérons que, graduellement, le
même phénomène va se produire chez nous, lorsque le harfang
des neiges sera mieux connu de nous tous, maintenant qu'il sera devenu le
symbole aviaire du Québec.
Le harfang des neiges et les oiseaux de proie en général
se trouvent au sommet de la chaîne alimentaire. À ce titre, ils
constituent l'un de nos plus précieux indicateurs de la qualité
de l'environnement. Ainsi, l'impact des pesticides et la destruction des
habitats sont particulièrement néfastes à cette
espèce. Nous devons consentir des efforts immenses pour maintenir
partout au Québec des milieux de qualité et ces espèces
aviaires nous donnent ce rappel de jour en jour.
Nous parlons donc d'un symbole important pour le maintien de la
qualité générale de notre environnement. Il faut dire
qu'au Québec, nous protégeons très peu notre
environnement. À titre d'exemple, on peut constater la relative
pauvreté du nombre de sites naturels protégés au
Québec. Seulement 0,33 % de notre territoire jouit d'une
préservation. Ailleurs dans le monde, ce pourcentage varie entre 2 % et
parfois 25%. Au Canada, il se situe à 3 %. Les pays devraient consacrer
au moins 15 % à 20 %
de leur territoire à la protection des sites naturels, s'ils
veulent présenter leur faune, leur flore et le milieu
représentatif de leur diversité écologique. On estime que
quelque 500 de nos espèces biologiques présentent des
difficultés de survie. Cela constitue au moins 10 % de toute notre faune
et de notre flore qui est en péril. C'est énorme.
Je voudrais vous montrer les photos du harfang des neiges que j'ai
apportées. D'abord, cette première photo qui m'a
été donnée par le ministre des Communications. C'est une
photo prise par le photographe du ministère, M. Jules Rochon, que nous
voulons féliciter tout spécialement ici, et nous voulons
féliciter le ministre d'avoir permis à M. Rochon de produire une
si belle photo. J'ai parlé au ministre de l'idée que m'a
présentée le député de Saint-Jacques qu'on pourrait
peut-être en faire faire un poster pour le distribuer dans tous les
ministères du gouvernement et dans tout le Québec. (16 h 10)
Je voudrais aussi vous lire une petite lettre qui m'a été
envoyée par Gaston Déry qui s'est battu pour le harfang des
neiges et par François Boulay un photographe professionnel. Je vais donc
lire cette petite lettre avant de vous montrer la photo qu'ils m'ont remise
l'autre jour: "Les démarches entreprises au cours des derniers mois pour
doter le Québec d'un emblème aviaire dénotent du souci de
faire reconnaître l'environnement comme une priorité au niveau des
communications. "Le harfang des neiges est, à notre avis, un excellent
choix comme emblème aviaire pour le Québec. En effet, cet oiseau
symbolise, par sa couleur blanche, la pureté d'un environnement sain.
Ses origines nordiques rappellent que le Québec renferme des territoires
importants pour son économie et pour l'équilibre de son
environnement. Par contre, les séjours qu'il effectue plus au sud du
Québec, en saison hivernale, le rendent accessible à l'ensemble
de la population du Québec. "Cet oiseau est puissant et doté
d'une grande force; cependant, il acceptera de se laisser approcher par l'homme
quand il ne se sent pas attaqué. La présence du harfang des
neiges dans une région aura pour effet de sécuriser les gens sur
la qualité de leur environnement et sur la nécessité de le
protéger. "Le harfang des neiges fréquente annuellement
l'Île-aux-Pommes afin d'y retrouver la nourriture et le gîte qu'il
recherche pour la saison hivernale. "Cette présence du harfang des
neiges sur l'Île-aux-Pommes constitue une source de valorisation car elle
concrétise le résultat du travail de protection de ce site
privilégié amorcé par le grand-père de Gaston
Déry, le Dr David Alexis Déry, depuis maintenant plus de 60 ans.
"Nous avons voulu, bien modestement, exprimer notre reconnaissance en tant que
professionnels et aussi comme citoyens impliqués à divers niveaux
en environnement, en vous offrant cette photographie d'un harfang des neiges,
prise sur l'tle-aux-Pommes le 31 octobre 1986. "La protection de nos milieux
naturels et de l'environnement en général ne pourrait se faire
sans une sensibilisation des citoyens envers le respect de leur environnement
et le choix du harfang des neiges comme emblème aviaire du Québec
contribuera à sensibiliser les Québécois sur l'importance
des milieux permettant à ce magnifique oiseau de demeurer présent
dans notre environnement." Signé: Gaston Déry et François
Boulay, le 17 novembre 1987.
Je vais vous montrer la photo que François Boulay a prise sur
l'île-aux-Pommes et qui est intitulée Le harfang des neiges,
l'emblème aviaire du Québec, un visiteur automnal de
l'île-aux-Pommes.
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît:
M. le ministre.
M. Lincoln: Je voudrais terminer dans la langue anglaise pour
dire quelques mots au sujet d'un ami bien spécial que j'ai depuis assez
longtemps déjà, qui m'a sensibilisé à toute la
nature, aux oiseaux de proie et à l'importance des symboles aviaires. Il
s'appelle David Bird. I would like to mention a word about David and tell him
how very very proud we are today that, at last, all his efforts over the years
to recognize nature and to make us believe that nature ought to be preserved
more and more, are, at least, reaching fruition even after so many years.
I read an article whose a good friend, Don McPherson of The Gazette
the other day, Don McPherson with his biting wit always has a message to
tell. And I think his message was important. He was saying in effect: How come
at the start of an important session, two years after your mandate, you are
producing such a puny law, three articles recognizing a bird as a symbol of
Québec? I guess the point is well taken because Don was expressing the
feeling of a great majority of people who cannot see in a world facing such a
multitude of problems, economic problems, unemployment, social problems of all
kinds, health problems, that we would even bother with such a law today.
But I guess the point he makes, which is a valid point, needs to be
addressed and answered. I think David Bird has made the point very eloquently
over the years. The fact is that if we do not take time in the midst of all our
preoccupations about industrial development, the economy, unemployment, health
problems, social
problems, labor problems, if we do not take time to think about nature,
the way we live, our quality of life which is expressed by nature and all
living species, we are going to be gradually all the poorer for it.
What is the kind of world - I think this is the message that David Bird
speaks of so often and so well - that we are going to have if, more and more,
we produce magnificient skyscrapers, huge plants and our waters are more and
more polluted, our trees disappear, and with the trees disappearing, all the
living species gradually disappear as has been the case in so many places
around the world?
David Bird was one of these prophets. He started to prove that nature
can live again. He started with the peregrine falcon and has now saved the
peregrine falcon. He started the Raptor Centre at MacDonald College. Now, there
is a whole group of people, from "le Jardin zoologique de Québec,
l'institut de Saint-Hyacinthe, le centre des rapaces à MacDonald
College", who all got toghether to start a treatment centre for birds of prey.
With the help of airlines, they can bring those birds to the treatment centres;
two of the snowy owls are being treated right now. All kinds of birds are being
saved that got hurt and injured.
David Bird has managed to imprint his message all over North America. He
is known from Los Angeles to Boston, from the South to the most Northern point
of Québec, in Ontario and elsewhere. He told me that he started to love
nature because, when he was a boy, growing up in Ontario, they had made the
trillium the emblem of the flora of Ontario. And he decided that he would never
pick the trillium because, in his mind, as a young boy growing up, it was
protected. He started to think that, if we could protect our birds, our fauna,
our flora, then people would develop a consciousness as he did for nature and
for the trillium. And so, he has been fighting for years along with all kinds
of other people, Bob Carswell, Jacques Prescott, Normand Prescott and so many
others to make the snowy owl the emblem of Québec.
So, I feel that we have to sell that message, that this law is important
not because of its three articles, but because of what it represents: a symbol
of conservation, a symbol of a quality of life for us all, a symbol of the type
of way of life that we want to surround ourselves with. We have to change our
ways more and more because, as I think of the snowy owl and all the other
living species that cannot speak for themselves and the human species as well
that cannot defend itself, the young among us, the handicapped. I have a son,
myself, who cannot speak for himself. What do they say to us, we who can speak
for ourselves, who have got the power to do things and, with our power, have
polluted more and more, while the defenseless creatures, living beings and
living species, have had to suffer the consequences of our rashness. (16 h
20)
That is the message of this law. The message is: You, who have the power
to do good, what have you done? You have polluted all around us, you have
destroyed nature and this bird is a living symbol of what we should preserve.
And it is telling us: Think about us, we cannot speak for ourselves. We want a
place in that nature that is so precious to us all whether we are human beings,
animals, flora, fauna or whatever. I think this is the message that I would
like to leave with you.
En terminant, je voudrais donc exprimer la joie et la fierté que
nous ressentons parce que je pense que c'est là le message que beaucoup
de Québécois vont ressentir de plus en plus lorsqu'ils vont voir
devant eux des images tellement magnifiques qui vont leur rappeler qu'il y a
une nature à préserver, qu'il y a la conservation de nos
ressources qu'il faut de plus en plus établir dans nos mentalités
si nous voulons préserver une qualité de vie non seulement pour
nous mais pour les générations futures.
Les jeunes autour de nous, que ce soient les jeunes du Parti
québécois ou les jeunes du Parti libéral ou les jeunes qui
sont apolitiques, tous les jeunes au Québec nous passent de plus en plus
ce message tous les jours. Je pense qu'il faudra vivre de plus en plus ce
message de conservation. C'est pourquoi je me réjouis avec vous
aujourd'hui et je remercie le ministre des Communications de toute son aide et
de tous ses efforts pour avoir apporté ce projet de loi si court mais si
lourd par son symbole. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Environnement. M. le député de Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: Oui. Mme la Présidente, dans l'abondante
documentation que j'ai pour le projet de loi, - j'espère que M. le
ministre de l'Environnement va me le permettre, connaissant son sens de
l'humour, - il y a un article dans Chasse et Pêche écrit
par M. Gingras où il y a un petit encart. C'est écrit: "Par
contre, samedi le 20 décembre, j'ai eu droit à deux surprises.
-II expliquait ces surprises. - La première c'était - il parlait
d'ornithologie. - "Un moqueur polyglotte, une espèce très rare
à cette époque de l'année dans la région, s'est
pointé le bec sous ma fenêtre." Peut-être
annonçait-il le discours que vient de présenter mon
collègue, député de Nelligan et ministre de
l'Environnement.
M. le ministre a dit tantôt que c'était sans doute une des
plus petites lois. En préambule, Mme la Présidente, j'aimerais
juste le corriger et lui dire que non, ce n'est pas la plus petite. Son
collègue des Communications se fait battre à plate couture par
ses collègues de la Culture et des Communautés culturelles avec
des lois très minces d'un ou deux articles. Ce qui me fait dire que dans
certains pays, le Parlement s'appelle la Diète. On pourrait
peut-être songer à appeler l'Assemblée nationale du
Québec la Diète puisque, malheureusement, sur le plan
législatif, je pense que nous vivons une diète.
Au-delà de la déception de projets de loi de peu de
contenu, je vais quand même vous dire, à l'instar de mon
collègue, porte-parole aux Communications, que nous souscrivons
d'emblée à l'adoption de l'emblème aviaire pour le
Québec. C'est important et je pense que tous les pays du monde s'en sont
dotés. Songeons à l'aigle américain, au coq gaulois qui
symbolise la France, songeons effectivement à tous ces pays qui se sont
donné des emblèmes aviaires qui les représentent au
même titre qu'un drapeau qui, également, affiche avec beaucoup de
fierté les couleurs d'un pays. Donc, c'est inévitable que nous
souscrivions à cette loi, le projet de loi 67, Loi sur l'emblème
aviaire au Québec, qui, cela dit, est un très bel oiseau.
Je remercie le ministre d'avoir répondu à la demande
pressante de l'Opposition qui réclamait que l'on montre cet oiseau
à la population et qui nous a montré deux très belles
photos, dont l'une qui lui a été remise par M. le ministre des
Communications. Ce qu'il nous reste à espérer c'est que le
ministre, ayant fait un geste d'un certain favoritisme en ne donnant cette
photo qu'au ministre de l'Environnement, pourra se reprendre et en offrir
également une, puisque cela deviendra l'emblème aviaire national
du Québec, aux membres de l'Assemblée nationale de façon
que nous puissions l'afficher nous aussi fièrement, non pas uniquement
dans les bureaux de l'Assemblée nationale, mais dans nos bureaux de
comté, là où la population pourra se familiariser avec ce
magnifique oiseau qui va devenir l'emblème, je le répète,
aviaire du Québec.
Oui, c'est important pour le Québec qui s'est doté,
d'ailleurs, en 1948,... Nous allons célébrer, j'ose
l'espérer, le 21 janvier 1988, quoique le Parlement ne siègera
pas, mais quand même, l'adoption du fleurdelisé comme drapeau
officiel du Québec. Tantôt, justement, mon collègue parlait
du drapeau et faisait souligner un peu cette fierté timorée,
malheureusement, que certains Québécois semblent avoir et
notamment les administrations. Malgré la loi, quand on se promène
très souvent au Québec, rares sont les écoles qui
affichent fièrement, comme le prescrit la loi, l'emblème national
du Québec, le fleurdelisé. Quelquefois il y en a un, mais il est
dans un état pitoyable.
Certaines administrations scolaires m'avaient déjà fait la
remarque: il y a un coût. Je pense que le ministre des Communications
pourrait peut-être y pourvoir et distribuer gratuitement les drapeaux.
Nous avons réclamé, nous de l'Opposition, et nous avons obtenu
par le Bureau de l'Assemblée nationale d'avoir à notre
disposition des drapeaux que l'on pourra remettre à nos concitoyens. Si
on prend juste comme exemple nos voisins du sud, il n'y a aucun bâtiment
public, même les individus, les personnes, l'arborent fièrement.
On voit la bannière étoilée flotter; est un symbole de
fierté tout à l'honneur chez nos voisins américains, mais,
malheureusement, ce n'est pas aussi souvent pratiqué au Québec
qu'on le souhaiterait.
Donc, cette fierté par des mesures comme je viens de proposer au
ministre des Communications qui écoute, d'ailleurs, avec beaucoup
d'attention mes propos, je l'en remercie. Je pense que cela va lui permettre de
mieux agir tantôt. Nous allons adopter cet emblème aviaire - dont
on espère avoir nous aussi comme le ministre de l'Environnement une
photo - ce très bel oiseau, qui nous vient du nord, qui est un oiseau
superbe. C'est un oiseau magnifique, qui représente le mieux, comme on
le disait, la brillance, la clarté, la force de notre climat hivernal.
On se rappelle cette chanson de Vigneault: "Mon pays, ce n'est pas un pays,
c'est l'hiver." C'est une merveille animale de la nature nordique. Le choix de
ce rapace diurne, quoique j'aie un peu de difficulté à dire que
c'est un rapace diurne puisqu'à ce moment j'aurais peur qu'on
interprète cet oiseau comme étant un fédéraliste et
je ne crois pas qu'il le soit... Il faudrait ajouter rapace diurne et nocturne
également. Mais, heureusement, ce n'est pas le cas. C'est quand
même un oiseau avec des habitudes particulières, comme tout le
monde l'a fait ressortir, de nidification. La question se pose. Pourquoi ne pas
l'avoir comme emblème aviaire du Québec? Ma réponse, M. le
ministre, à moi aussi, spontanément, c'est: Oui, je crois qu'il
doit l'être.
Le ministre de l'Environnement parlait de protection de l'environnement.
Il disait que c'était un oiseau à protéger, à
sauvegarder, parce qu'il y avait des dangers quant à sa conservation. On
pourrait relier cela en disant que rien n'est plus symbolique à ce
moment-ci, d'abord, que de prendre cet oiseau, qui est menacé, qui
pourrait être en voie de disparition pour bien des raisons, pour
symboliser le Québec où vit une communauté francophone, la
seule majoritaire en Amérique du Nord, et qui elle aussi est
menacée, qui risque elle aussi d'être une espèce en voie
d'extinction, si on ne prend
pas, justement, des mesures pour protéger ce caractère
français du Québec. (16 h 30)
On pourrait, dans la foulée, ajouter qu'on doit également
protéger l'environnement linguistique du Québec et éviter
cette pollution du bilinguisme ou de l'unilinguisme anglais que l'on observe
dans la région montréalaise où, malheureusement, cet
oiseau ne se rend pas puisqu'il vit dans l'Arctique, qu'il a la chance de vivre
dans un décor blanc, immaculé, sans aucune tache de pollution
comme telle. Donc, cela devient effectivement symbolique qu'un oiseau qui est
à préserver, dont la population décline de façon
alarmante, dit-on d'ailleurs dans un rapport que j'ai ici, symbolise une
population qui, malheureusement, à moyen et long terme, risque de vivre
les mêmes choses comme collectivité originale distincte, puisque
cet oiseau également est distinct, en Amérique du Nord, qui est
une population majoritairement francophone dans un continent où le
prédateur 40 fois supérieur, c'est-à-dire anglophone, nous
menace quotidiennement dans ce monde où les communications se font
à travers les ondes.
Je vois mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce acquiescer aux
propos que je tiens. Je trouve que, dans son cas, c'est un pas qu'il fait, et
je l'apprécie. Donc, toute la symbolique, je le répète, de
voir cet oiseau, cette espèce menacée, devenir l'emblème
d'une société qui, je le répète, au Québec
est menacée par des prédateurs, par un prédateur
d'ailleurs sorti d'un lac, qui s'appelle le lac Meech, où on ne pensait
pas qu'une espèce de - on va employer une bonne expression
québécoise - barbotte pouvait flotter, pouvait réussir
à lever si haut et à essayer de broyer cet oiseau francophone qui
essaie de se lever, de décoller et d'assurer sa survie.
Oui, d'accord, pour que nous adoptions cet emblème aviaire pour
le Québec, ce magnifique oiseau. C'est dommage que le ministre ne me
prête pas sa photo. On pourrait de nouveau montrer ce très bel
oiseau à la population qui écoute et qui, j'en suis certain, va
littéralement adopter, au sens très affectif du terme, ce
magnifique animal, ce très bel oiseau blanc. C'est dommage... Je le vois
à côté du ministre, vous me pardonnerez cette jalousie un
petit peu que je peux avoir parce que je le trouve chanceux d'en avoir
déjà une immédiatement. Donc, je disais qu'il serait
avantageux que nous puissions le diffuser, le montrer, de façon que
l'ensemble des Québécois et des Québécoises
adoptent cet oiseau... Et voilà qu'on m'apporte cette magnifique photo
où on le voit justement, prenant son envol comme je l'expliquais
tantôt au-dessus de la seule terre francophone en Amérique du Nord
qu'est le Québec et surtout d'une partie de ce territoire qui constitue
l'Arctique, le
Nouveau-Québec, qui, effectivement, est un territoire d'avenir
pour le Québec. Là-dessus, je suis pleinement d'accord avec les
propos que tenait mon collègue de l'autre côté de la
Chambre, le député de Nelligan et ministre de l'Environnement.
C'est un territoire d'avenir pour le Québec, ce Nouveau-Québec,
et c'est là d'ailleurs que cet oiseau vit, très au nord; quelques
fois, il émigre un peu plus au sud, mais, quand on entend le sud, il ne
se rend malheureusement pas jusqu'à Montréal afin qu'on puisse
l'admirer.
Il nous reste heureusement - encore là, la nature nous
réserve des surprises - à Montréal, quelques faisans qui
se promènent sur le mont Royal, des renards roux, d'ailleurs,
près de l'Oratoire Saint-Joseph, que j'ai déjà vus il y a
quelques années. Mais, trêve d'aparté au sujet quand
même de cette merveille de la nature, je vous dirai que, oui, nous allons
pleinement y souscrire, compte tenu également de toute la symbolique que
je vous ai exprimée tantôt, de l'interrelation entre cet oiseau
majestueux, merveilleux, unique en son espèce et la population qu'il va
représenter qui est celle d'un pays majoritairement francophone en
Amérique du Nord, qui est le Québec.
Toutefois, je me dois de reprendre les propos de mon collègue,
porte-parole de l'Opposition en matière de communications et
député de Terrebonne, il ne faudrait pas, par contre, que cet
emblème aviaire en vienne, un jour, graduellement, à remplacer la
fleur de lis. Cela serait inacceptable, au même titre qu'aucun Canadien,
nos amis voisins, n'accepterait de voir le castor remplacé la feuille
d'érable. On n'imagine pas d'ailleurs, sur le drapeau du Canada, le
castor à la place de la feuille d'érable. Alors, il ne faudrait
pas qu'on soit tenté par des jeux de passe-passe habiles à
substituer progressivement...
Vous comprendrez, Mme la Présidente, que de ce
côté-ci de la Chambre, on est quand même un peu
méfiants. On a devant nous un gouvernement issu d'un grand parti, jadis,
un grand parti jadis qui était le Parti libéral à
l'époque de M. Jean Lesage qui parlait de l'État du
Québec. Le gouvernement actuel parle toujours de la province de
Québec. Moi, je trouve le mot province rapetissant, ratatinant, pour
employer cette expression savoureuse qu'utilisait fréquemment notre
ancien premier ministre, M. Lévesque. Donc, vous comprenez un peu cette
méfiance instinctive - un peu comme l'oiseau l'a - d'avoir certaines
réserves que l'on pourrait peut-être éventuellement,
graduellement, remplacer de façon subtile la fleur de lis par
l'emblème aviaire, aussi beau puisse-t-il être.
Donc, mise en garde, Mme la Présidente, mise en garde ferme!
Nous
consentons, parce que l'oiseau est beau, à ce que cet
oiseau-là devienne l'emblème aviaire du Québec. Nous
consentons. Nous savons d'ailleurs qu'il y a eu une consultation
adéquate auprès, justement, des ornithologues. Cela me fait
penser d'ailleurs qu'il y a quelques semaines il y avait une extraordinaire
exposition d'ornithologie à Place Dupuis dans la circonscription de
Saint-Jacques et j'avais le privilège de présider cette
manifestation où on a initié plusieurs Québécois
à l'ornithologie et où on leur a fait découvrir plusieurs
espèces d'oiseaux, sauf naturellement, le moqueur polyglotte dont je
parlais tantôt. Malheureusement il n'y en avait pas de disponible
à ce moment-là. Donc, il y a eu une consultation auprès
des ornithologues et tout le monde semble acquiescer au harfang des neiges.
D'ailleurs il y a ici quelques articles de presse que je ne lirai pas
puisque je sais que le temps me manque. Malheureusement, pour moi, je pense
qu'il ne reste plus que quelques minutes. Mais il y a des articles, il y a des
revues de presse où il semble qu'il y a une adhésion à ce
chapitre. Donc, nous allons, puisque cela fait consensus - et je le
répète il est bon qu'un Parlement soit consensuel et non pas
uniquement conflictuel, ce que provoque le gouvernement d'en face
malheureusement souvent - mais pour une fois que nous pouvons être
consensuels... Et je vois, Mme la Présidente, que vous m'indiquez,
à mon grand regret puisque le sujet est tellement passionnant, qu'il ne
me reste qu'une seule minute, donc je vais tenter de conclure. (16 h 40)
Oui! Nous acquiesçons: C'est un très bel oiseaul Nous
souhaitons l'avoir, nous, députés, de façon à
pouvoir le montrer à nos concitoyens et, je le répète,
qu'ils l'adoptent avec tout le sens affectif que cela représente.
Par contre, il ne faudrait pas - et c'est là la mise en garde
finale que je fais - Mme la Présidente, si beau soit-il, cet oiseau, si
noble puisse-t-il être, cet emblème aviaire du Québec,
qu'il remplace progressivement, de façon détournée,
ambiguë... Oui, je vois votre appel pressant à la conclusion, ce
que je vais faire. Je ne voudrais pas, Mme la Présidente, qu'il remplace
le fleurdelisé pour lequel il y a une charge émotive tellement
grande de la part des Québécois que cela pourrait de nouveau
troubler une paix sociale déjà précaire au Québec,
quand on regarde les agissements au niveau de la langue.
C'est donc cet avertissement que je sers en dernier, en vous disant que
je serai très heureux, Mme la Présidente, de voter pour le projet
de loi 67 puisqu'il s'agit d'un beau choix, partagé de tous, et auquel
nous acquiesçons. Nous attendons avec beaucoup d'impatience que le
ministre des Communications nous donne copie de cette merveilleuse photo.
Mais je répète la mise en garde, Mme la Présidente:
il ne faut pas que cela remplace progressivement la fleur de lis. Je pense que
le message est compris, la population du Québec l'a entendu et elle
partage mes propos, j'en suis certain. Je vous remercie, Mme la
Présidente, de m'avoir donné l'occasion d'intervenir sur ce
projet de loi. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Saint-Jacques. Dois-je conclure qu'il n'y a plus d'autres interventions?
M. Lefebvre: Non, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Non, Mme la Présidente. Je vous demanderais
d'appeler le projet de loi pour adoption, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Donc, il n'y a plus d'autres
interventions?
M. Lefebvre: Non, Mme la Présidente, non.
La Vice-Présidente: Le débat étant clos, le
principe du projet de loi 67, Loi sur l'emblème aviaire, est-il
adopté?
M. Lefebvre: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Renvoi à la commission de la culture
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour
déférer le projet de loi 67 à la commission de la culture.
Je fais également motion pour que le ministre de l'Environnement soit
membre de ladite commission.
La Vice-Présidente: Cette motion est-elle
adoptée?
M. Charbonneau: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Voulez-vous appeler l'article 43 du feuilleton, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente: Article 43? M. Lefebvre:
Oui.
Projet de loi 29
Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 43 de notre
feuilleton, le ministre de l'Environnement propose la prise en
considération du rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a étudié le projet de loi 29, Loi sur le
Conseil de la conservation et de l'environnement. M. le ministre de
l'Environnement.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Mme la Présidente, je voudrais encore une fois
proposer que le processus d'adoption de ce projet de loi se fasse de la
façon la plus rapide, la plus harmonieuse possible, parce que, d'un
côté comme de l'autre de la Chambre, nous partageons l'objectif de
créer bientôt un Conseil de la conservation et de l'environnement
pour le Québec, afin de rejoindre les deux conseils existants pour les
fusionner dans un seul conseil qui va représenter l'essence même
de notre objectif de conservation du milieu et des ressources.
Dans ce sens, je pense que les débats qui ont eu lieu en Chambre,
en vue de l'adoption du principe, et, ensuite, en commission parlementaire ont
été harmonieux, construc-tifs et, je pense, fructueux. Je tiens
à rendre hommage au critique de l'Opposition qui, comme il nous l'avait
annoncé lorsque le débat a été amorcé pour
l'adoption du principe, a reconnu le bien-fondé de l'objectif du projet
de loi, tout en soulignant des inquiétudes importantes et
sérieuses qu'il nous a fallu considérer en commission
parlementaire avec le plus grand sérieux.
Je pense que, si je peux situer les modalités du projet de loi
sur lesquelles nous avions des différences d'opinion, ce serait au
niveau suivant. D'abord, l'Opposition pensait que les avis du nouveau conseil
devaient être transmis à tous les ministères et organismes
du gouvernement afin que le conseil ait une vue d'ensemble de tout l'appareil
gouvernemental. Nous avons souligné au critique de l'Opposition - je
pense que c'est un point de vue qu'il a accepté - qu'au contraire, il
fallait responsabiliser de plus en plus le leadership du ministère de
l'Environnement et du ministre comme appareil catalyseur, comme la source
même de toutes les préoccupations gouvernementales, comme le
"rejoigneur" de toutes les préoccupations, surtout celles des citoyens
par rapport à l'environnement et à son déploiement dans
l'appareil gouvernemental.
Je crois que le critique de l'Opposition, après un débat
qui a été étoffé de part et d'autre, qui a
été constructif, a accepté le point de vue, qu'il faut
centraliser au contraire et responsabiliser de plus en plus l'action du
ministre de l'Environnement et de son ministère, comme appareil moteur
des décisions environnementales, de donner au ministre de
l'Environnement le poids pour défendre ses positions, ce qui est la
vocation même de son ministère et de son mandat.
Il y a eu d'autres points de divergence, mais sur lesquels nous sommes
arrivés, je pense, à des conclusions très heureuses. Il y
avait la question du traitement des avis du conseil. On disait que les avis du
conseil, il faudrait qu'ils soient envoyés au ministre de
l'Environnement, mais, en même temps, reconnaissant la
nécessité pour les autres ministères et organismes du
gouvernement de recevoir de tels avis, nous avons accepté une
proposition du critique de l'Opposition qui, je pense, a été
très valable. C'est ainsi qu'à l'article 14, un amendement a
été proposé et accepté qui se lit comme suit: "Le
ministre doit transmettre une copie de ces avis aux ministères
visés par tels avis dans les 30 jours qui suivent leur
réception." Je pense que nous avons rejoint la préoccupation du
critique de l'Opposition, le député de Verchères, selon
laquelle le ministre de l'Environnement, qui recevra dorénavant les
avis, aura la responsabilité de les transmettre, dans les 30 jours qui
suivent, c'est-à-dire dans un délai très court, à
ses collègues ministres afin qu'ils soient saisis des avis du conseil.
Ainsi, par cette formule, nous avons réussi à répondre
à cette préoccupation.
Il y avait une autre préoccupation du critique de l'Opposition,
et c'est celle-ci. Il ne devrait y avoir aucune référence dans le
projet de loi aux lois dont le ministère et le ministre sont
responsables. Le critique de l'Opposition a fait valoir alors les points de vue
suivants. Il disait: Pourquoi restreindre les avis du conseil aux seules lois
dont vous êtes responsable? Nous avons mentionné au critique de
l'Opposition que, selon l'article 11, le conseil avait pour fonction de
conseiller le ministre de l'Environnement sur toute question relative à
la conservation et à l'environnement. La définition de
conservation est tellement vaste qu'elle renvoie à la
préservation, à l'entretien, à l'utilisation durable,
à la restauration et à l'amélioration du milieu naturel.
(16 h 50)
Avec cette fonction, le conseil peut conseiller le ministre de
l'Environnement sur la planification des orientations, des politiques et des
stratégies relatives aux lois qui sont sous la responsabilité du
ministre et dont il a la charge.
Je pense que nous avons établi à la satisfaction du
critique de l'Opposition, du moins c'était ma perception, que les lois
du ministère offrent une balise tellement grande qu'il est justement
bénéfique pour le conseil
d'avoir cette référence à ces lois qui donnent un
appui légal et juridique de premier ordre au ministre, afin de
défendre ses positions comme le moteur même de la conservation
environnementale au sein de l'appareil gouvernemental. En même temps,
nous nous sommes mis d'accord sur un amendement très important qui
précède maintenant l'article 12 qui fait référence
aux lois sous la responsabilité du ministre.
On dit donc dans l'article 12: "Sans restreindre la portée de
l'article 11, le conseil peut..." C'est-à-dire que nous avons
clarifié de façon non équivoque que l'article 12 a une
référence et une intégration tout à fait conjointes
avec l'article 11 qui dit ceci: "Le conseil a pour fonction de conseiller le
ministre sur toute question relative à la conservation et à
l'environnement."
Je pense que ces deux amendements ont apporté des changements
très positifs et très bénéfiques à notre
projet de loi. Le débat s'est fait dans tous ses détails. Nous
avons passé plusieurs heures en commission parlementaire. Je pense que
le grand objectif d'instituer un Conseil de la conservation et de
l'environnement ne se discute plus, il est accepté de part et d'autre.
Je pense qu'avec les amendements que nous avons discutés ensemble, qui
ont été acceptés et adoptés, le projet de loi
représente maintenant le fruit d'un consensus.
Le critique de l'Opposition nous avait dit au départ: Si vous
n'apportez pas des amendements significatifs, nous aurons, en troisième
lecture, à voter contre le projet de loi. J'espère que ce projet
de loi représente maintenant un consensus de la Chambre, qu'il sera
adoté à l'unanimité par nous avec les amendements qui ont
été proposés et acceptés, que nous pourrons
instaurer bientôt ce conseil, qu'il pourra bientôt se mettre
à l'oeuvre, que nous donnerons bientôt ce grand départ
déjà amorcé par la nouvelle politique du cap
environnemental de mettre le cap sur la conservation. Alors, le conseil sera
d'un appui extraordinaire pour le ministère et surtout pour le ministre,
pour nous donner des orientations futures, pour nous indiquer les chemins
à suivre pour ce grand changement de mentalité qui devra se faire
de plus en plus au Québec, si nous voulons changer les choses, si nous
voulons passer d'un stade d'une juridiction polluante à une juridiction
qui mettra en valeur, au contraire, la nature, le milieu de vie et la
qualité de vie.
Je ne veux pas être plus long. Je pense que le débat s'est
déjà fait. Je voudrais dire que, naturellement, nous appuyons
fortement l'esprit du projet de loi, l'essence même du projet de loi
tellement important pour la conservation des ressources et de l'environnement,
et j'espère que nous aurons le concours et l'assentiment de la Chambre
entière pour adopter ce projet de loi.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Environnement.
M. le député de Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Merci, Mme la Présidente. Comme vient de
l'indiquer le ministre de l'Environnement, j'avais signifié, au moment
de l'étude du principe du projet de loi, notre accord sur le principe de
la création d'un organisme-conseil qui regrouperait les fonctions de
conseil à l'égard de la conservation des ressources et aussi de
toutes les questions plus globales de la protection de l'environnement.
Cependant, j'avais indiqué que, pour nous, tel que nous voyions
alors le projet de loi, il y avait une lacune importante, finalement, au moment
même où le gouvernement venait de se commettre dans deux textes
importants, deux textes d'orientation qui seront importants au cours des
prochaines années pour la façon dont on va avoir à
s'acquitter de cette responsabilité au sein du conseil.
D'abord, le livre blanc du gouvernement sur le nouveau cap
environnemental sous-titré: "La conservation, agent de progrès"
et qui nous indiquait clairement l'intention du ministre de l'Environnement et,
puisque c'est un document gouvernemental, l'intention du gouvernement dans sa
totalité de faire en sorte que la promotion de la conservation et le
maintien et l'amélioration des conditions naturelles de
productivité des ressources soient la responsabilité non pas
uniquement du ministère de l'Environnement, mais de l'ensemble des
ministères concernés par les ressources naturelles et par toutes
les problématiques environnementales.
Le document disait d'ailleurs: Le ministère de l'Environnement ne
doit pas revendiquer l'exclusivité de l'approche de conservation ni
celle de la pensée écologique. C'étaient les propos
mêmes qu'on retrouvait dans le livre blanc du gouvernement qui avait
été rendu public à peine quelques jours ou quelques
semaines avant la discussion que nous avons eue à l'Assemblée
nationale sur le projet de loi. Si je me rappelle bien, la veille même de
l'étude du principe du projet de loi, le ministre de l'Environnement
était à New York pour accompagner son collègue du
gouvernement fédéral et pour déposer aux Nations unies le
rapport du groupe de travail canadien sur l'environnement et
l'économie.
D'une certaine façon, c'était la contribution des
États canadiens à la commission mondiale sur l'environnement et
l'économie, commission qui a été présidée
par la première ministre de Norvège. Cette dernière a fait
un rapport fort important sur le plan des orientations fondamentales pour les
sociétés d'aujourd'hui et de demain à l'égard de la
protection de l'environnement,
de la lutte contre la pollution et de la conservation de nos ressources.
Là aussi, dans ce document, on avait des recommandations que les
gouvernements du Canada, donc y compris le gouvernement du Québec, se
faisaient mutuellement. En allant porter ce document aux Nations unies, d'une
certaine façon, on disait à la face de l'humanité: Voici
comment nous, au Canada et au Québec, on conçoit les choses. Dans
ce document, on disait: "Les premiers ministres doivent assumer le premier
rôle de leadership et démontrer leur engagement pour
l'intégration de l'environnement et de l'économie, notamment en
établissant des mécanismes formels rendant les ministres et leurs
ministères responables d'un développement économique
compatible avec l'environnement". On ajoutait un peu plus loin dans ce document
présenté par l'ensemble des ministres de l'Environnement du
Canada: "Tous les ministres doivent être tenus directement responsables
et imputables des conséquences environnementales de leurs politiques,
lois et programmes." Ce sont tous les ministres dans chacun des gouvernements,
non pas tous les ministres de l'Environnement uniquement. Tous les ministres,
dans n'importe quel gouvernement au pays, doivent avoir cette approche.
Ce qu'on voyait dans le projet de loi, ce n'était pas tout
à fait cela. C'est la raison pour laquelle, à ce
moment-là, on a fait de sérieuses mises en garde au ministre. Le
texte du projet de loi, tel que libellé, pouvait prêter à
interprétation. À notre avis, si on voulait être
cohérents avec les documents sur lesquels le gouvernement s'était
engagé et en fonction du virage qu'il nous propose comme
société, on ne pouvait pas accepter que les avis du conseil
consultatif de l'environnement et de la conservation se limitent aux seules
lois et règlements qui sont sous l'autorité du ministre de
l'Environnement. Ce qu'on voulait et ce qu'on veut toujours... (17 heures)
Avec cela, on est d'accord avec le ministre et on lui a dit clairement:
On pense que, effectivement dans l'appareil gouvernemental, c'est le ministre
de l'Environnement qui a la responsabilité d'être un peu le chef
d'orchestre. Sauf qu'à notre avis il doit y avoir un orchestre et non
pas un seul joueur dans l'orchestre. À cet égard, si le ministre
de l'Environnement a un rôle moteur, pour reprendre l'expression du
ministre, il doit par ailleurs faire en sorte que l'ensemble de ses
collègues se sente responsable de la protection de l'environnement et de
la conservation de nos ressources.
À cet égard, quand des ministères se comportent
d'une façon délinquante par rapport à ces principes et par
rapport aux exigences de la protection de l'environnement, on doit pouvoir les
interpeller directe- ment. On doit faire en sorte que le ministre de
l'Environnement - on le sait, je l'avais dit à ce moment - qui est
souvent dans les gouvernements, à l'égard des collègues
à vocation économique, un peu l'empêcheur de tourner en
rond, on doit faire en sorte que le ministre de l'Environnement ait assez de
poids politique et d'autorité morale et d'instruments d'intervention
auprès de ses collègues pour qu'il puisse obliger ceux-ci
à modifier leur approche et leur comportement.
C'est pour cela qu'on voulait que le texte de loi spécifie
très clairement que les autres ministres doivent être
interpellés également et qu'on ne peut pas se limiter uniquement
aux lois et règlements qui sont sous la responsabilité du
ministre de l'Environnement. C'est là qu'on a finalement introduit
l'amendement dont le ministre a parlé tantôt. Pour nous, sans
restreindre la portée, c'est important dans la mesure où, par la
suite... Cela était une interprétation que le ministre a faite.
Sans être totalement convaincu des arguments présentés par
le ministre, à un moment donné, il a une responsabilité
à assumer. Le ministre nous a dit que, selon ses conseillers, le fait de
faire référence aux lois et aux règlements sous sa
responsabilité, contrairement à nos craintes, renforçait
sa position à l'égard de ses collègues.
On a dit: Très bien, mais on n'est pas totalement convaincu de
vos arguments. Il faut que ce soit clair dans le texte de loi que la
définition du mandat du nouveau conseil soit telle que ce conseil se
sente toute la latitude pour interpeller le ministre de l'Environnement en
premier lieu et, par lui, ses autres collègues sur toute question
relative à la conservation et à l'environnement. Encore une fois,
si on n'est pas totalement convaincu de la justesse des avis qui ont
été présentés au ministre par ses conseillers,
néanmoins, cet amendement peut à ce moment-ci nous amener
à être moins réticents que nous ne l'étions à
l'autre étape de l'étude de ce projet de loi.
Le ministre nous a également dit, alors qu'on discutait en
commission parlementaire, qu'il fallait prendre en considération le
mandat que lui donnait une autre loi, qui est la Loi générale sur
la qualité de l'environnement, en fait la loi du ministre de
l'Environnement, qui fait que le principal conseiller du gouvernement est le
ministre de l'Environnement. II craignait, dans nos propos et dans les
propositions d'amendement qu'on lui présentait, de voir diluer son
rôle de principal conseiller au profit d'un organisme qui n'était
pas un organisme d'autorité comme lui peut l'être en fonction de
ses responsabilités de ministre. Il craignait, d'une certaine
façon, de voir ce rôle de conseiller qui lui est attribué
être dévalué par le fait qu'on permettrait à un
organisme-conseil, le nouveau conseil sur la conservation et
l'environnement, d'être le conseiller du gouvernement. Ce
n'était pas là notre intention.
Au contraire, notre intention était de renforcer la position du
ministre et que, si on reconnaissait qu'il est le principal conseiller du
gouvernement, il n'était pas le seul intervenant en matière
environnementale. Il faut être bien conscient de cela, M. le
Président. Quand on rédige des lois comme celle-ci entre autres,
on ne rédige pas des lois uniquement en fonction d'un titulaire
particulier d'un ministère, à un moment donné. On fait des
lois qui vont durer et, on l'espère, durer le plus longtemps possible
dans la mesure où elles vont être encore d'actualité et
pertinentes pour les problèmes qui pourront se présenter dans
l'avenir. C'est évident qu'à cet égard la
responsabilité du ministre de l'Environnement est une
responsabilité qui est partagée par ses collègues. En
conséquence, il faut que l'on s'assure que l'ensemble des ministres du
gouvernement se sentent responsables face au défi de l'environnement, au
défi de la protection et de la conservation de nos ressources.
Si le ministre agit comme conseiller, il ne doit pas être celui
qui va faire en sorte de tout contrôler. Un jour, il ne sera
peut-être plus là, lui. Il y aura peut-être un titulaire qui
aura peut-être moins la vocation que lui nous dit avoir et que certains
lui attribuent et que je lui reconnais, honnêtement, M. le
Président. Mais le problème, c'est que, lorsqu'il ne sera plus
là, lorsqu'une autre personne prendra sa place dans ce gouvernement ou
dans un autre gouvernement, est-ce qu'on aura, à ce moment-là, la
capacité de faire en sorte que les autres collègues à
l'intérieur du Conseil des ministres se sentent concernés,
interpellés par le titulaire du ministère de l'Environnement?
C'est de cela qu'il faut s'assurer dans le projet de loi. À cet
égard, je voudrais indiquer au ministre et à l'Assemblée
nationale - d'une certaine façon, en faisant cela, je fais une pression
directe sur le premier ministre qui a eu copie d'une lettre que j'ai eue moi
aussi, une lettre adressée au ministre de l'Environnement par l'Union
québécoise de la conservation de la nature, qui a dit au ministre
ce que je vous ai dit. Je lis une partie de cette lettre qui a
été envoyée au ministre le 21 novembre. "À ce
propos, il faut souligner la faiblesse majeure dans un nouveau cap
environnemental ainsi que dans la structure du nouveau conseil de la
conservation et de l'environnement. Je fais référence au
rôle strictement moral que le ministre de l'Environnement joue dans
l'ensemble du gouvernement, et même avec ses nouveaux outils."
À moi, M. Mead, qui est président de l'Union
québécoise pour la conservation de la nature, ajoutait: "En
effet, l'union partage vos appréhensions - en ce qui me concerne -quant
aux restrictions inhérentes au nouveau conseil de la conservation et de
l'environnement." Ce qu'il me proposait comme solution, c'est celle qu'il avait
proposée au ministre de l'Environnement et aussi au premier ministre,
c'est que, finalement, le ministre de l'Environnement devienne automatiquement,
ex officio, le président du comité ministériel permanent
d'aménagement et de développement régional. Je pense que
ce serait une solution intéressante. Si le premier ministre voulait
accepter cette solution, compte tenu des amendements que le projet de loi
introduit, qui ont été discutés, je crois que le ministre
l'a indiqué, dans un esprit constructif de part et d'autre, je crois
qu'on aurait à la fois quelques meilleures protections que celles qu'on
avait au départ, quelques garanties plus importantes, plus
significatives dans le texte de loi et on aurait aussi greffé à
cela une consolidation du rôle et du pouvoir et de la
responsabilité du ministre de l'Environnement.
C'est d'autant plus important, M. le Président, que ça
correspond à ce que le premier ministre a accepté, parce que,
dans le rapport du groupe de travail national sur l'environnement et
l'économie qui a été déposé aux Nations
unies par le ministre de l'Environnement, entre autres, et endossé par
tous les gouvernements au Canada, on pouvait lire dans les recommandations
-donc, cela a été endossé par le gouvernement actuel du
Québec -: Les ministres de l'Environnement devraient être membres
des principaux comités gouvernementaux de développement
économique et des comités des priorités et de
planification du Conseil des ministres ou y être associés de
près par des mécanismes appropriés. (17 h 10)
En somme, ce qu'on reconnaissait entre ministres de l'Environnement, et
cela a été endossé par les différents Conseils des
ministres des gouvernements des provinces et de l'État
fédéral, c'est que le ministre de l'Environnement doit... Si on
veut que nos sociétés évoluent vers des changements de
comportements, d'habitudes, d'approches à l'égard de
l'environnement, de la lutte contre la pollution et de la conservation des
ressources, il faut que le titulaire du ministère de l'Environnement
devienne un ministre senior dans l'appareil, non seulement un ministre senior
par la personnalité de l'individu, mais aussi par la fonction, la place
qu'on fait au ministre de l'Environnement dans l'organigramme, dans la
structure du Conseil des ministres et de l'appareil décisionnel
gouvernemental.
D'ailleurs, si le premier ministre acceptait cette proposition, que je
fais mienne et que je soupçonne le ministre de l'Environnement de faire
sienne aussi - mais, lui, il est mal placé pour le dire parce que
c'est un peu plus délicat dans sa position -je pense qu'on aurait
une garantie qu'à l'avenir, quelle que soit la personne, le premier
ministre serait, d'une certaine façon, obligé, il s'engagerait
à le faire, à nommer quelqu'un qui est un personnage important
dans le gouvernement comme responsable du ministère de l'Environnement.
Il ne pourrait pas nommer un junior comme ministre de l'Environnement, dans la
mesure où, justement, dans la structure même de l'appareil
gouvernemental, ce ministre aurait des responsabilités importantes de
coordination interministérielle sur toute la question de
l'aménagement et du développement régional, parce qu'on
sait que c'est dans un comité interministériel qu'on discute de
beaucoup de questions qui concernent la lutte contre la pollution et la
protection de nos ressources.
J'avais indiqué, au moment de l'étude du principe du
projet de loi, que si le ministre ne changeait pas d'attitude, s'il n'acceptait
pas de faire un certain nombre de modifications, nous serions contraints de
voter contre le projet de loi, même si, au départ, nous partagions
le principe et l'orientation générale que veut donner le ministre
de l'Environnement au nouveau conseil. Je pense qu'avec les amendements, qui,
encore une fois, ne sont pas des amendements qui nous satisfont totalement,
mais qui vont suffisamment dans le sens de nos préoccupations et,
deuxièmement, qui ont été introduits après des
explications, notamment des avis qui doivent être pris en
considération à moins qu'on veuille faire un débat avec
des oeillères...
Une voix: Obtu.
M. Charbonneau: ...obtu. Merci, M. le leader du gouvernement de
me suggérer un vocabulaire encore plus précis. Ma conception du
râle de l'Opposition, à moins que vraiment on ne soit
engagé dans une dynamique de lutte, de "filibuster" ou de
stratégie politique parlementaire particulière, je pense qu'il ne
s'agit pas de s'opposer pour s'opposer. Je pense que, dans ce cas-là, je
dois prendre en considération les répliques et les arguments qui
m'ont été donnés par le ministre de l'Environnement, mais
en lui indiquant qu'il doit convenir qu'il va lui rester après coup une
autre responsabilité, qui, elle, est la sienne et non pas celle du
premier ministre, en espérant que le premier ministre va accepter la
suggestion qui lui a été faite par l'Union
québécoise pour la conservation de la nature. C'est celle du
choix, comme je lui avais dit, des personnes qui vont composer ce nouveau
conseil.
Il faut des personnes dans cet organisme qui auront la stature, la
trempe et la capacité d'indépendance d'esprit pour qu'elles se
sentent complètement libres de toute attache, de toute amitié, de
toute influence qui les empêcherait, à un moment donné, de
dire ce qu'elles ont à dire au ministre de l'Environnement, qui est le
conseiller numéro un du gouvernement en ces matières. Et,
à travers lui, puisque le ministre a accepté un autre amendement
et que les autres ministres seront rapidement interpellés par les avis
du conseil, il faut que ces gens du conseil sentent que leur première
responsabilité, ce n'est pas à l'endroit du gouvernement ni du
ministre de l'Environnement, mais c'est à l'endroit de la population du
Québec et de l'ensemble de notre société.
Ils auront, dans les années à venir, un rôle
important à jouer, parce qu'ils contribueront à faire en sorte
que, quel que soit le titulaire du ministère de l'Environnement, quel
que soit le gouvernement et le parti qui sera à la tête de
l'État québécois, il y aura suffisamment de prise de
conscience et d'évaluation correcte des enjeux environnementaux dans
notre société pour que, quel que soit le gouvernement, on ne
puisse pas passer à côté des décisions majeures qui
doivent être prises et des correctifs aussi qui devront, à des
moments donnés ou à d'autres, être adoptés, pris par
les gouvernements qui dirigeront notre société, qui dirigeront le
Québec.
Voilà, M. le Président, ce que je voulais dire à
cette étape-ci de l'étude du rapport de la commission
parlementaire qui a étudié en détail le projet de loi. Je
ne sais pas si nous aurons à revenir longuement à l'occasion de
la discussion en troisième lecture. Cela dépendra sans doute de
la volonté de nos leaders respectifs et de la stratégie
parlementaire de fin de session. Mais qu'importe, M. le Président, je
n'ai pas pris de chance au cas où, finalement, les discussions entre les
leaders feraient en sorte qu'on n'aurait pas à revenir trop longuement.
Je pense qu'à ce moment-ci, suite à l'étude en commission
parlementaire, on peut convenir qu'il y a sur la table un projet de loi, qui
mérite d'être appuyé par l'Assemblée nationale.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Alors je cède la parole à
Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Étant
donné que c'est une brève intervention, je pense que je vais
commencer tout de suite à parier sur le projet de loi puisque j'ai
déjà pris la parole sur ce projet de loi.
À l'époque, quand je suis intervenue sur ce projet, je
m'inquiétais de savoir à quel point les ministres sectoriels,
dis-je, croyaient à l'environnement. Si vous vous souvenez,
c'était mon inquiétude. Je ne sais
pas si, entre l'étude de la deuxième lecture et ce qu'on
fait aujourd'hui, le ministre est intervenu auprès de chacun de ses
collègues, soit son collègue de l'Agriculture, soit celui du
Tourisme, soit celui de l'Industrie et du Commerce, finalement, auprès
de tous les ministres responsables de secteurs différents. Je sais que
le ministre doit intervenir cinq minutes entre nos interventions. J'aimerais
ça qu'il puisse me dire si les craintes que j'avais à
l'époque de cette intervention... si le ministre a pris le temps de
s'informer, de s'enquérir auprès des ministres sectoriels
à savoir s'ils étaient d'accord de mettre tout en oeuvre pour
que, dans chacun de leur ministère, il y ait une pensée à
ce sujet dans toutes les prochaines lois ou les réglementations qui
doivent se faire, si, éventuellement, ils avaient eu cette pensée
de conservation, cette pensée de l'environnement. Je serais très
heureuse si le ministre pouvait me répondre lors de son intervention de
cinq minutes qui suivra la mienne.
M. le Président, quand le Conseil consultatif sur les
réserves écologiques faisait porter ses interventions sur la
création du nouveau conseil, il disait vouloir que le nouveau conseil
puisse s'intéresser à d'autres mesures que celles dévolues
nécessairement aux deux anciens conseils qui étaient là
avant et qui seront remplacés présentement par la loi 29 soit la
conservation des terres agricoles, l'aménagement du territoire, les
parcs, les forêts et les autres mesures concernant la protection. Ils
souhaitaient, en plus, que le nouvel organisme conseille tous les autres
responsables de l'application des mesures liées de près ou de
loin à la conservation, à savoir les autres ministres ainsi que
j'en parlais tout à l'heure.
Parce que si le ministre dans son idée, pour lui... Le conseil
qu'il va créer par la loi 29, il faut que ce conseil-là ait une
autorité sûre, une autorité véritable, une
autorité par laquelle il ne sera pas obligé de faire des
courbettes devant les uns et les autres. Il aura une autorité pour dire
à chacun des ministères que s'il y a une directive qui est prise,
que dans cette directive-là il y aura un volet pour l'environnement. Je
pense qu'il faut bien s'entendre avec ça. Il faudra que les membres de
ce conseil soient des membres qui savent se tenir debout, premièrement.
Il faut aussi que les membres de ce conseil puissent être en mesure, pour
une raison ou pour une autre, de ne jamais changer d'optique. Il faudra que ce
soient des hommes et des femmes qui, au départ, croient
véritablement à l'environnement. (17 h 20)
J'avais dit aussi dans cette première intervention - je m'en
souviens très bien -que, tel mon collègue responsable du dossier,
je crois que le ministre de l'Environnement qui est devant nous y croit
à l'environne- ment. Je ne suis pas sûre que le gouvernement tout
entier y croit aussi fort que cela. J'espère que vous allez utiliser
votre pouvoir, M. le Président, pour que le ministre intervienne
auprès de ses collègues pour que soit enfin vraiment
respectée l'idée du ministre responsable, c'est-à-dire la
création de ce conseil qui pourrait non seulement conseiller le ministre
de l'Environnement ou les associations sur le terrain, mais conseiller aussi
les différents ministères.
Nous sommes quand même contents que le ministre ait fait un pas en
avant. Il avait dit, lors de la commission, qu'il voulait faire un pas dans la
direction. Nous sommes contents que le ministre ait apporté la motion
suivante: "sans restreindre la portée de l'article 11, le conseil peut".
Je pense que c'est vraiment un pas en avant et j'espère que cela ne
limitera pas, en quelque sorte, ce que l'article 12 venait dire dans le projet
de loi.
M. le ministre, on est quand même inquiet que le conseil que vous
allez former par la loi 29 n'ait pas l'autorité nécessaire pour
faire basculer, dans la balance de la conservation et de l'environnement, toute
l'autorité que vous semblez bien vouloir attribuer à ce conseil.
Je ne sais pas de quelle façon, de quelle manière vous pourriez
vous y prendre pour donner cette autorité au Conseil de la conservation
et de l'environnement, mais je pense que vous devriez vous asseoir et regarder
de près de quelle façon vous pourriez intervenir pour donner
l'autorité nécessaire à cette commission.
M. le Président, il y a eu aussi le rapport du groupe de travail
national sur l'environnement et l'économie qui, lui aussi, a
apporté une note tout à fait nouvelle, en ce sens qu'il disait
que les premiers ministres devraient décréter que les documents
du Conseil des ministres et les documents gouvernementaux de
développement économique portant sur les grands dossiers
démontrent qu'ils tiennent compte de l'environnement et de
l'économie.
C'est certain, M. le Président, que si on avait, dans toutes les
provinces du Canada, des ministres responsables qui croient à
l'environnement tout autant que le ministre de l'Environnement du
Québec, je pense que cela faciliterait la tâche, en ce sens que
tout le monde serait sur la même longueur d'onde. Chaque fois qu'un
ministre responsable mettrait de l'avant un projet de loi, une
réglementation, il aurait une oreille ou une écoute attentive en
ce qui a trait à la conservation et à l'environnement.
M. le Président, je me souviens aussi que, dans l'intervention
que le ministre avait faite lors de la présentation du projet de loi, il
avait dit: On met un cap. Quand je pense à un cap, je pense à un
cap vers l'espoir. Dans le quotidien, nous avons besoin de vivre d'espoir.
Quand on formule une loi en vue de
la conservation et de la protection de l'environnement, j'appelle cela
un cap vers l'espoir. Mais la CAP aussi a fait des recommandations au ministre.
J'espère que les recommandations qui ont été faites par la
CAP, soit la Conservation d'agents de progrès, le ministre va
sûrement prendre en considération ce qu'ils ont dit. La CAP dit:
Pour leur part, les ministères responsables des ressources
particulières doivent revoir leurs politiques et programmes pour les
orienter dans le sens de la conservation. Il est bien sûr que, si on
n'est pas attentif dans le sens que la CAP veut bien nous le démontrer,
il n'y aura rien qui se produira, ce sera un conseil bidon. C'est notre grande
inquiétudel II faut que ce conseil se compose d'hommes et de femmes, je
me répète, qui croient à l'environnement, qui croient
à la conservation. J'espère que le ministre en est bien
conscient.
Je suis inquiète qu'il n'y ait pas de contrainte
particulière pour obliger les différents ministères dans
leur domaine respectif à penser à l'environnement, à la
conservation. J'en suis inquiète et je serais beaucoup plus
rassurée si, publiquement, ici, le ministre responsable du dossier, le
porteur de ballon, en quelque sorte, pouvait nous indiquer comment il fera pour
forcer ses collègues à se contraindre à la conservation et
à l'environnement. Je vous remercie beaucoup, M. le
Président.
Le Vice-Président: À ce moment-ci, je vais
céder la parole à M. le ministre de l'Environnement, pour une
intervention de cinq minutes.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, pour le court délai
qui m'est alloué, je prends avec tout le sérieux qu'ils
méritent les paroles et les commentaires de Mme la députée
de Johnson. J'ai travaillé avec elle pendant plusieurs années ici
et je respecte sa sincérité et sa conviction, comme tous les
parlementaires les respectent, je pense. C'est pourquoi je prends cela
très au sérieux, et je le dis en toute
sincérité.
Je voudrais lui dire tout d'abord que, moi aussi, je suis tout à
fait conscient que, si la conviction environnementale ne se propage pas dans
l'appareil gouvernemental, tout l'objectif de la conservation ne se
réalisera jamais. C'est pourquoi, de plus en plus, nous essayons de
travailler avec les collègues des ministères économiques
et des ministères sociaux. J'ai entamé des programmes conjoints
avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de
façon systématique; je suis présentement en discussion
avec le ministre du Tourisme pour la même chose. Avec le ministère
de la Santé et des Services sociaux, nous avons établi un
protocole de travail.
Pour les ministères économiques qui, naturellement, sont
souvent en situation conflictuelle avec le ministère de l'Environnement,
nous avons déposé le rapport sur l'environnement et
l'économie auprès du premier ministre lui-même qui a
formellement accepté, par écrit, de nous donner tout son aval. On
a communiqué ce rapport et le nouveau cap environnemental aux autres
ministres et tous ont réagi très positivement. Je sais qu'on ne
fera pas le paradis en un jour, mais de toute façon le travail est
commencé. Il y a un désir très ferme de faire de la
question de l'environnement quelque chose qui va pénétrer dans
tous les ministères de plus en plus au Québec.
En terminant, je peux donner à la députée de
Johnson l'engagement que ce ne sera pas un conseil bidon, que tout conseil
bidon ne peut réaliser quelque objectif que ce soit. Nous allons agir de
telle sorte que les gens qui seront membres de ce conseil soient des
environnementalistes convaincus, qu'ils représentent tous les secteurs
de la société, l'économique, le social, les jeunes et les
moins jeunes, pour qu'il soit représentatif de la société
et, surtout, pour qu'il représente le grand mouvement de qualité
de vie, de l'environnement et qu'il travaille à la conservation de nos
ressources.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M.
le député de Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, j'insistais pour intervenir
au cours de ce débat sur l'environnement, puisque vous savez que, lors
de cette tournée que nous avons faite au Québec, j'ai eu
l'occasion de rencontrer de très nombreux groupes au sujet de
l'environnement. D'ailleurs, pour le bénéfice de mon
collègue, le député de L'Assomption, j'ai notamment
rencontré et discuté pendant de nombreuses heures avec les gens
d'À court d'eau, qu'il connaît sans doute; du moins, je
l'espère. (17 h 30)
Le ministre, avec son projet de loi 29, nous présente une Loi sur
le conseil de la conservation et de l'environnement. En se
référant à l'argumentaire, aux chapitres A, B et C, le
ministre a décidé de faire un pas -je pense qu'il faut le
reconnaître - en apportant un amendement à l'article 12, si ma
mémoire est bonne. Le premier alinéa, à ce
moment-là, se lit: "Sans restreindre la portée de l'article 1, le
conseil peut..." etc. Selon le ministre, cet amendement permettrait au conseil
de le conseiller sur toute question relative à la conservation et
à l'environnement, sans égard aux restrictions de l'article 12
qui limite le pouvoir du
conseil aux seules politiques, stratégies et lois qui sont sous
la responsabilité du ministère de l'Environnement. Cet amendement
est un compromis, je pense qu'il ne faut pas avoir peur des mots, mais il ne
fait toujours pas du conseil une espèce de conseil de tous les
ministères et organismes quant à la conservation de
l'environnement.
J'écoutais tantôt les propos de mon collègue, le
député de Verchères et porte-parole de l'Opposition en
matière d'environnement, qui disait que le ministre ne livre pas la
marchandise comme telle parce qu'il ne fait pas une préoccupation
entière, complète et totale de l'environnement pour l'ensemble de
tous les ministères, des organismes, etc.
Je pense qu'il avait raison parce qu'une vision de l'environnement doit
être une vision intégrée comme telle. Ça doit
être compatible... Je pense que l'environnement doit être
situé dans un centre de compatibilité avec tout l'ensemble du
développement économique au Québec. Je pourrais toujours
aller plus loin et vous parler du bilan négatif quant à la
conservation, la protection des berges, où l'on voit que le
ministère de l'Environnement n'exerce son autorité que sur le
territoire urbain et de villégiature en bafouant les prétentions
régionales à l'aménagement du territoire, ce qui nous
éloigne un peu d'ailleurs puisque comme je faisais allusion tantôt
à À court d'eau, à la gestion européenne des
ressources hydrauliques, enfin des bassins hydrauliques, en parlant de gestion
des bassins, où les régions sont très fortement
impliquées, notamment en France... On pourrait parler aussi des
transports. Le ministre reste coi, lorsque son collègue des Transports
met publiquement en doute, justement à propos de la route 116,
l'expertise du BAPE, le Bureau des audiences publiques sur l'environnement. On
pourrait le faire très facilement pour les enfouissements sanitaires. On
pourrait le faire pour les déchets dangereux. On pourrait le faire, et
cela nous a été souligné durant cette tournée du
Québec qui a été savoureusement appelée d'ailleurs
la tournée Grandes oreilles, pour le champ de tir dans le bout de
l'Annonciation dans les environs de Mont-Laurier, en agriculture
également. On pourrait le faire en tourisme. On pourrait effectivement
parler de nouveau du BAPE même si le leader adjoint du gouvernement
trouve drôle qu'on parle du BAPE, c'est un organisme que, nous, on a
toujours considéré avec beaucoup de sérieux. On ne lui a
pas fait subir le sort que, malheureusement, votre ministère lui a fait
subir. Et en ce qui a trait à l'information... De toute façon,
c'est un ministère à problèmes. La preuve, c'est qu'il a
dû y avoir un gigantesque remaniement à l'intérieur du
ministère au sujet des communications, etc. Ça ne va pas dans
votre ministère. C'est su, c'est connu que vous procédez à
une profonde et longue étude de restructuration interne, des
communications, etc.
Je vous vois, vous ne pouvez pas nier mon propos parce que vous savez
que j'ai raison là-dessus. Même si ce n'est pas su publiquement,
on a quand même un peu d'information. On pourrait également parler
des plages, de la rémunération des bénévoles, du
fleuve, de la pollution industrielle, de la tordeuse des bourgeons de
l'épinette, etc. Au sujet de la conservation, avouez qu'il y a un bilan
passablement négatif qu'un conseil pourrait peut-être
éventuellement corriger s'il est bien formé, d'une part, et si,
deuxièmement, il y a une écoute et une oreille attentive de la
part du ministre.
Mais, au-delà de cela, si, moi, j'avais été
ministre de l'Environnement, qu'est-ce que j'aurais fait? Je pense que j'aurais
adopté cette proposition extraordinairement intéressante pour une
société qui a l'environnement comme l'une de ses principales
préoccupations. Je parle de la société
québécoise. C'est un phénomène du monde occidental
qui devra d'ailleurs toucher le tiers-monde pour ne pas dire le deux-tiers
monde, la préoccupation environnementale. Pour une société
qui a l'environnement comme toute première préoccupation...
N'importe quel sondage va vous le dire. Je pense d'ailleurs que, l'autre
côté, dans ce qu'on appelle communément le "bunker", on
pourrait vous donner des statistiques assez intéressantes
là-dessus, mais je suis persuadé que vous les avez.
Donc, si j'étais ministre de l'Environnement dans une
société aussi préoccupée d'environnement qu'est
notre société actuelle, dans une société - M. le
ministre - où les problèmes environnementaux ne vont pas
diminuant, mais risquent d'aller plutôt en s'aggravant, qu'est-ce que
j'aurais fait? Si le député de Saint-Jacques était
ministre de l'Environnement, je pense qu'il aurait fallu d'abord partir d'un
premier principe. Si on veut faire quelque chose de significatif,
d'articulé et de cohérent, s'inscrivant dans une stratégie
et une préoccupation à long terme de l'environnement au
Québec, je pense que, comme ministre, j'aurais pris cette extraordinaire
proposition qu'a soumise le comité d'action des jeunes du Parti
québécois. Ces jeunes de chez nous, avec un dynamisme incroyable,
agissent et se préoccupent. J'aurais, au départ, soumis, ici,
à cette Assemblée nationale... Au lieu de nous soumettre des
projets de loi minces, des plus petits...
Vous vous vantiez tantôt qu'un de vos collègues
présentait le plus petit projet de loi de l'Assemblée nationale,
ce qui était un peu inexact. Il était battu par deux autres de
ses collègues qui en présentent de plus petits. J'aurais
adopté cette recommandation,
cette suggestion, cette proposition que faisait le comité
d'action politique des jeunes du Parti québécois qui
réfléchissent à l'avenir de la société et
qui sont, en premier lieu, concernés parce qu'ils ont plus
d'années devant eux que nous. Ces jeunes proposaient au Québec
une charte des droits et devoirs en matière d'environnement.
Imaginez-vous, M. le ministre, disposant d'une telle charte! On connaît
la valeur des chartes dans un système démocratique comme le
nôtre. Imaginez-vous, si ce Québec se donnait une charte des
droits et devoirs en matière d'environnement, la marge de manoeuvre que
vous auriez et surtout la cohésion que vous pourriez obtenir, puisque
votre ministère se retrouverait solidifié et assuré par un
texte fondamental au Québec. Et là, malheureusement, ce qu'on
voit, c'est un ministre qui, tant bien que mal, réussit à passer
des choses sur le plan de l'environnement. Mais, par contre, on voit,
malheureusement, que plusieurs de ses collègues, exerçant leurs
prérogatives impériales dans chacun de leurs ministères -
je conclurai là-dessus, M. le Président - vont à
contre-courant de ce que le ministre, sans aucun doute de bonne foi, aimerait
voir adopté au Québec comme politique, comme loi et comme
règlement sur l'environnement.
M. le Président, je regrette que vous ne m'accordiez pas plus de
temps. Je vais être obligé de me limiter à ces maigres dix
minutes. Mais j'ose espérer avoir le plaisir d'intervenir de nouveau sur
ce sujet.
Le Vice-Président: Très bien, M. le
député, remarquez que je n'ai rien à faire avec la limite
de temps qui vous est imposée. C'est notre règlement qui vous
impose une limite de dix minutes à ce stade-ci.
M. le ministre, pour un droit de parole de dix minutes.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Le député de Saint-Jacques a voulu
faire la preuve que notre ministère fait peu pour la conservation et que
les autres ministères ne coopèrent pas du tout. Il faudait
peut-être lui souligner - et je pense que cinq minutes ne seront pas
assez -les choses qui se sont faites en deux ans à notre
ministère de l'Environnement: l'accord avec Noranda sur les pluies
acides qui était resté sur les tablettes pendant dix ans, et par
lequel, pour la première fois, au Québec, nous pourrons
réaliser l'objectif de 50 % de réduction des pluies acides; la
Loi sur la protection des non-fumeurs qui était restée sur la
tablette, encore; la Loi sur les pesticides qui était restée sur
les tablettes, qui a demandé un accord avec les ministères
à vocation économique et le ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimen- tation pour réaliser, la protection
des rives et des plaines inondables et du littoral. (17 h 40)
Le député disait: Cela ne couvre que l'urbain, la
villégiature. Il n'a pas dû lire le projet de loi 43 et le projet
de loi 19. Cela couvre tout le Québec et le ministère de
l'Environnement est le maître d'oeuvre de toute cette politique.
Le groupe de travail sur le programme d'assainissement des eaux du
Québec était un fouillis total avant que nous prenions le
pouvoir. Ils avaient dépassé leur budget de 40 %, de 250 000 000
$, avant qu'on prenne le pouvoir. On l'a réorganisé, on a
même travaillé sans ordinateur.
La dépollution industrielle, là où il dit qu'on n'a
rien fait. Je pourrais lui citer des cas: Dioxynes, QIT, NL Chem, Expro,
récemment Dominion Textile. Je pourrais allonger la liste.
Bientôt, à Baie-Comeau, Reynolds, la Compagnie de papier
Québec et Ontario, quelque chose comme plus de 200 000 000 $ investis
par l'industrie pour la dépollution. Le Fonds 3R pour enseigner le
recyclage dans les écoles, un programme de trois ans. Il parlait d'une
charte des jeunes du Parti québécois. Peut-être qu'il n'a
pas lu ou suivi le discours inaugural du premier ministre en décembre,
où le premier ministre s'est engagé pendant notre mandat à
produire une charte, à la suggestion de ma collègue qui m'a
précédé comme critique de l'environnement, Mme la
vice-première ministre actuelle. Cette charte est en voie d'être
bâtie maintenant par le Conseil consultatif de l'environnement. Elle sera
reprise par le nouveau Conseil consultatif de la conservation et de
l'environnement. Un grand travail a été fait là-dessus et,
un de ces jours, cela va être terminé.
Il y a le récent accord de recyclage avec la SAQ, qui a
demandé un accord avec mon collègue, le ministre de l'Industrie
et du Commerce. Je pourrais lui citer quantité d'exemples où,
justement, aujourd'hui, il y a une présence de l'environnement dans tous
les ministères, où on travaille ensemble. On vient de signer un
protocole d'entente avec le ministère de la Santé et des Services
sociaux et le ministère de l'Éducation. On travaille à je
ne sais combien de projets avec le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. On travaille avec les ministères
du Tourisme, des Transports de la façon la plus harmonieuse possible.
Pour la première fois aujourd'hui, l'environnement se fait sentir dans
tout l'appareil gouvernemental.
C'est nous qui avons, en fait, produit récemment la
première politique du ministère de l'Environnement sur la
conservation. Il n'y avait pas de politique. Il n'y en avait jamais eu. Le
ministère ne savait même pas où il s'en allait. C'est nous
qui avons réalisé justement ce premier cap vers la
conservation des ressources.
Donc, aujourd'hui même, il y a deux exemples: le harfang des
neiges comme symbole de la conservation, qui l'a introduit si ce n'est nous? Le
nouveau Conseil de la conservation et de l'environnement, qui le propose si ce
n'est nous? C'est donc dire que je pense que le député de
Saint-Jacques devrait aller faire ses devoirs et regarder un peu ce qui a
été fait depuis deux ans. Je pense qu'un travail immense est en
train d'être fait et il ne sera pas fait seul par un ministère ou
un autre. Il est fait parce que nous avons l'appui des citoyens dans cette
démarche très importante vers la conservation.
Le Vice-Président: À ce moment-ci, je vais
céder la parole à Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Donc, nous avons
devant nous le projet de loi 29, la Loi sur le Conseil de la conservation et de
l'environnement. C'est la création d'un nouveau conseil qui,
dorénavant, remplacera le Conseil consultatif de l'environnement et le
Conseil consultatif sur les réserves écologiques.
J'écoutais les dernières paroles du ministre de
l'Environnement qui, comme une kyrielle, nous énonçait la
série d'interventions auxquelles il a travaillé, où il a
mis à profit ses connaissances, et le mérite de ses
qualités en tant que ministre de l'Environnement.
Je crois bien que le ministre de l'Environnement prend très au
sérieux son ministère et qu'il veut que la pensée
écologique puisse se développer ici au Québec. Je veux
bien, moi aussi, admettre que le ministre peut être de bonne foi et de
bonne volonté. Il ne faudrait tout de même pas dire qu'avant, rien
n'existait ou que rien n'avait été entrepris et que tout a
commencé depuis qu'il est arrivé au ministère de
l'Environnement et que c'est une nouvelle naissance, une renaissance de
l'écologie depuis que le ministre est en place, est en poste et
antérieurement, il n'y avait aucun souci, aucune préoccupation du
gouvernement que nous étions, à l'époque, nous du Parti
québécois.
Il ne s'était absolument rien passé. Je pense que c'est
faire preuve de fausse modestie de la part du ministre de dire que tout lui
revient et que, ma foi, nous devrions lui dire grand merci, parce qu'il est le
seul en fin de compte à avoir cette idéologie moderne.
M. le Président, la pensée écologique, c'est assez
récent. Il n'y a pas si longtemps, bon nombre d'entreprises et
d'industries se préoccupaient peu de leurs déchets, se
préoccupaient peu de la qualité de l'eau, se préoccupaient
peu de la qualité de leur environnement, et on en est arrivé
à des problèmes incroyables pour l'environnement, la pollution,
l'air, l'eau, la consommation, qui ont eu des impacts dramatiques sur la
santé des citoyens et des citoyennes du Québec.
Avant d'arriver à cette pensée écologique et
à développer une préoccupation et un souci de la
qualité de son environnement ou de la conservation de son environnement,
je crois qu'il faut établir des bases. Il faut faire de
l'éducation, il faut sensibiliser les gens à cette
préoccupation. Je pense que c'est ce que nous avons fait, nous, lorsque
nous étions au gouvernement. Nous avons sensibilisé les grandes
entreprises qui très souvent, plus souvent qu'autrement, sont les plus
grands pollueurs qui existent à l'heure actuelle. Nous avons
essayé de leur faire prendre conscience de leurs responsabilités
vis-à-vis des populations environnantes, parce qu'elles étaient
très impliquées dans la qualité de vie justement des gens
qui devaient vivre dans l'environnement de ces grandes entreprises.
Il s'est fait des choses à l'époque. Il y a des
comités et des conseils consultatifs aussi qui ont été mis
de l'avant pour justement qu'on arrive à établir des
recommandations et pour qu'on ait un contrôle sur la qualité de
l'environnement, un contrôle aussi sur la qualité de notre
conservation. Aussi beaucoup de gens, qui se sont souciés de cette
même qualité de l'environnement, ont demandé, quand le
ministre a présenté son projet de loi: M. le ministre de
l'Environnement, vous n'allez pas assez loin avec votre projet de loi. Nous
avons des mises en garde à faire quant à la teneur de votre
projet de loi, parce que, quant à nous, nous croyons que le mandat du
conseil ne va pas assez loin. Vous le limitez énormément dans ses
fonctions et, nous, nous disons que ce n'est pas de cette façon que nous
allons développer ici au Québec une pensée
écologique.
Il faut réellement, hors de tout doute, faire en sorte que le
concept de l'écologie, le concept de la conservation soit vraiment dans
les instances décisionnelles les plus hautes de nos institutions,
notamment au Conseil des ministres, et qu'ils soient une préoccupation
constante dans les discussions interministérielles.
Il faut assurer un leadership très important et très
puissant à l'intérieur des différents ministères
pour que ces gens-là aient le réflexe d'une pensée
écologique ou le réflexe de la conservation. Il y en a... Il y a
des coûts. Il y a un volet économique important lorsqu'on regarde
l'écologie, la conservation de l'espèce. Il faut qu'on ait cela
en tête et qu'on s'en préoccupe, parce que se préoccuper de
la qualité de vie a un impact direct sur la qualité de la
santé de
nos concitoyens et nos concitoyennes, de notre environnement, de la
nature et de tout ce qui permet de consommer de l'eau ou de pouvoir même
participer à des activités de plein air ou à des
activités récréatives. Je pense qu'il est important qu'on
ait ce souci en tête et que, justement, on s'en préoccupe comme on
se préoccuperait de la prévention. Faire de la conservation un
souci constant, c'est faire de la prévention et c'est permettre à
nos concitoyens et nos concitoyennes de vivre dans un environnement souhaitable
pour eux, qui leur permette de respirer un air des plus convenables et aussi de
pouvoir, sans crainte, se baigner dans des endroits publics où l'eau le
permet et pouvoir aussi participer à des sentiers de la nature, sans
qu'ils soient toujours soumis à des problèmes d'environnement.
(17 h 50)
Je pense qu'il est de l'intérêt de tous et qu'il est
important qu'on ait un souci, plus qu'une préoccupation, de faire en
sorte que l'écologie et la conservation devraient être le souci le
plus important à l'heure actuelle parce qu'il y va de notre patrimoine
écologique. Ce patrimoine écologique est très fragile
à l'heure actuelle dans nos sociétés. Nous avons vu les
préoccupations au sujet de la couche d'ozone qui commence à
diminuer, justement à cause de tout ce qui existe à l'heure
actuelle comme polluants dans l'air. Je pense que, trêve de plaisanterie,
quand on voit les bandes dessinées où, dans peu de temps, tous
les gens devront se promener avec un masque parce que l'air ne sera plus viable
et ne sera plus respirable pour les citoyens, il faut prendre plus qu'au
sérieux les problèmes de la conservation de notre
environnement.
Il y a des gens qui se sont penchés là-dessus. Il y a eu
un groupe de travail sur l'environnement et l'économie qui a fait des
recommandations au ministre et qui a demandé au ministre de
dépasser la simple recommandation aux autres ministres lorsqu'il aura
à prendre des décisions sur le plan économique afin qu'ils
se rendent compte de l'impact de l'environnement sur les décisions
économiques aussi parce qu'il y a un coût. Et il y a un coût
parce que, finalement, il faudra, de toute façon... Il y a un coût
pour la santé des individus et, si ce n'est pas un coût pour la
santé des individus, il faudra reconstituer un environnement. Il faudra
peut-être reconstituer nos forêts, nos cours d'eau. À ce
moment-là, je pense que la nature prend énormément de
temps et lorsqu'elle nous frappe, elle nous frappe toujours assez
sévèrement. J'ai l'impression qu'il est essentiel que nous ayons
des lois ayant du mordant et que nous ayons aussi des lois qui permettent
justement de donner aux différentes instances que l'on veut
créer, des pouvoirs importants, des pouvoirs avec une latitude qui leur
permettrait de faire les recommandations les plus éclairées au
ministre et qui leur permettrait de consulter le plus grand nombre de groupes
possible. Et que, cap sur la pensée écologique, on arrive
à faire en sorte que les décisions soient toujours prises en
considérant les besoins importants et de plus en plus imposants,
pressants par rapport à l'utilisation que l'on fait, à l'heure
actuelle de tout ce qui concerne notre environnement. Il faut qu'on ait un
souci des plus constants et qu'on puisse en arriver dans chaque
ministère à avoir un réflexe, une pensée
écologique importante et nécessaire au développement de
notre qualité de vie si importante pour nous tous ici et pour l'ensemble
de nos concitoyens et de nos concitoyennes.
Alors, M. le Président, il est évident qu'à force
de pressions faites par l'Opposition, je pense qu'il y a eu des concessions qui
ont été apportées au projet de loi dans sa forme
première et que ce qui a été apporté est un pas
dans la bonne direction. Nous souhaitons aller beaucoup plus loin et faire en
sorte que ce souci de la pensée écologique et de la conservation
soit un réflexe et non plus une question d'attitude mais un comportement
à l'intérieur des différents ministères. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Alors je cède la parole à
M. le député de Dubuc.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Merci, M. le Président. C'est la
première occasion que j'ai, malheureusement, de considérer le
projet de loi du ministre de l'Environnement sur le Conseil de la conservation
de l'environnement. Je crois que l'objectif qui a été poursuivi
par le ministre et dont le principe a été voté ici
à l'Assemblée nationale a permis à l'Opposition, par la
voix de mon collègue, le député de Verchères, de
faire une proposition au ministre afin de s'assurer que non seulement ce
conseil consultatif puisse émettre des avis qui viennent éclairer
ou conseiller le ministre, mais aussi qu'il puisse se prononcer sur des actions
ou des politiques qui sont mises en oeuvre par les autres ministères du
gouvernement, lorsqu'elles touchent le ministère de l'Environnement ou
l'environnement en général.
Je crois que le ministre a déjà fait un pas en commission
parlementaire en acceptant au moins, comme le dit maintenant l'article 12, que
ce conseil consultatif puisse produire des rapports pour conseiller le ministre
sur toute question relative à la conservation et à
l'environnement, sans égard, selon ce que le ministre a
déclaré en commission, semble-t-il, aux restrictions de l'article
12 qui limitent les
pouvoirs du conseil aux seules politiques, stratégies et lois qui
sont sous la responsabilité du ministère de l'Environnement.
C'est un compromis, mais cela va évidemment beaucoup moins loin que la
proposition que mon collègue de Verchères lui avait faite. Je
pense que cela va aussi beaucoup moins loin que ce qu'espèrent tous les
citoyens et citoyennes qui sont, de façon importante,
intéressés à la protection de l'environnement au
Québec.
M. le Président, je suis peut-être justement dans une
position pour rappeler au ministre combien j'aurais trouvé heureux,
comme critique de l'Opposition en matière de chasse et de pêche,
que le ministère ou le conseil consultatif ou le ministre, par son
conseil consultatif, puisse émettre son avis sur une politique que son
collègue, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, est
en train de vouloir instaurer au Québec qui, vous le savez, conserve la
privatisation d'une partie considérable, au-delà de 40 000
kilomètres carrés, du territoire actuel des réserves
fauniques en les transformant en pourvoiries privées. Quand on sait
jusqu'à quel point, sur les territoires fauniques
québécois, l'environnement, l'écologie de tout le
territoire peut être bouleversée, cela aurait été
heureux justement que le conseil consultatif, si le ministre de l'Environnement
avait cette capacité d'agir par un conseil consultatif qui en aurait le
pouvoir, puisse intervenir auprès de son collègue, membre du
gouvernement, pour lui faire valoir, lui faire ressortir ou le mettre en garde
contre certaines propositions soumises par le ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche concernant la privatisation des réserves fauniques,
et éclairer ainsi beaucoup mieux le ministre et le gouvernement, mais
surtout l'ensemble de la population sur les conséquences heureuses,
dangereuses ou malheureuses que suscite, selon les inquiétudes qu'on
ressent partout au Québec, le projet du ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche. C'est une inquiétude universelle. Étant
au-dessus de la mêlée, différent du ministère
impliqué, il pourrait apporter un éclairage beaucoup plus
objectif sur le projet d'un autre ministre, un projet qui est en cours de
réalisation.
De la même façon, pour la même préoccupation
qui me concerne... M. le Président, est-ce que je dois comprendre qu'il
faut que je demande l'ajournement du débat?
Le Vice-Président: M. le député de Dubuc,
effectivement, nous arrivons à 18 heures, et il vous reste cinq minutes.
À moins que vous ne vouliez poursuivre avec le consentement de
l'Assemblée, vous devez demander l'ajournement du débat.
M. Desbiens: Je demande l'ajournement du débat.
Le Vice-Président: M. le député de Dubuc
demande l'ajournement du débat. Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. En conséquence,
puisque nous arrivons à 18 heures, nous allons maintenant suspendre nos
travaux qui reprendront, ce soir, à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 9)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît! Veuillez regagner vos sièges. Nous allons reprendre la
séance. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais
d'appeler l'article 40 du feuilleton.
La Vice-Présidente: Vous comprendrez qu'à l'article
40, il nous faut consentement pour pouvoir passer à l'étape
d'adoption, compte tenu du fait que nous avons dû procéder
à une étape aujourd'hui même. Est-ce qu'il y a consentement
pour que l'on procède à l'adoption du projet de loi 99?
M. Jolivet: Oui, Mme la Présidente.
Projet de loi 99
Adoption
La Vice-Présidente: Consentement. Donc, le ministre
délégué aux Pêcheries propose l'adoption du projet
de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries
maritimes. Je suis prête à reconnaître le premier
intervenant. M. le député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, Mme la Présidente. Comme je le
mentionnais aux membres de cette Chambre, cet après-midi j'avais pris
une entente hier soir avec le ministre délégué aux
Pêcheries en vue de procéder, non seulement à l'adoption du
projet de loi 99 concernant le crédit maritime aux pêcheries, mais
aussi à la sanction de ce projet de loi par le
lieutenant-gouverneur.
À titre d'explication, pour savoir pourquoi
accélérer la procédure, bien sûr c'est parce que
l'article 7 de la loi actuelle est modifié par la loi 99, en particulier
par l'article 2 qui fait en sorte que le montant
où le fonds consolidé devra s'impliquer en garanties de
prêts, etc., devra être pris de 10 000 000 $ et monté
à 30 000 000 $, ce qui permettra, bien sûr,
d'accélérer la construction de bateaux, et aussi
d'accélérer certaines subventions et certaines formes de
subventions, même si on n'est pas tout à fait d'accord avec
certaines des modalités qui sont appliquées par le nouveau
gouvernement. C'est aussi pour que l'on puisse procéder à la
signature de certains documents d'importance, en particulier de la part du
ministre délégué aux Pêcheries, pour que les
contrats concernant chacun des bateaux soient signés dans les plus brefs
délais pour que les pêcheurs puissent obtenir gain de cause dans
ce dossier.
Actuellement, il existe 23 dossiers qui sont acceptés par le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
c'est-à-dire la division des pêcheries. Il y a donc 23 dossiers
qui sont en attente pour que l'on procède, et cette loi est
extrêmement importante pour que l'on puisse procéder aux
signatures des lettres d'intention et aux signatures des contrats. Il y a aussi
en traitement, au moment où l'on se parle, 20 dossiers de demandes dans
le cadre du programme du ministre délégué aux
Pêcheries, et, pour ça aussi, c'est important que l'on puisse
aller de l'avant puisqu'il est possible que ces 20 demandes en traitement
puissent être passées avant le 31 mars 1988. Donc, Mme la
Présidente, ce qui est extrêmement important dans ce dossier,
c'est que les pêcheurs qui ont actuellement des demandes pendantes devant
le ministre délégué aux Pêcheries, puissent obtenir
gain de cause, d'une part et que, d'autre part, on puisse procéder, dans
les plus brefs délais, aux autorisations nécessaires en vue des
signatures de contrats au cours des mois de décembre, janvier,
février et mars pour toutes les autres demandes qui sont en
traitement.
En conséquence, puisque j'ai discuté avec le ministre
délégué aux Pêcheries hier soir et même cet
après-midi, je crois qu'il est important que l'on procède, non
seulement à l'adoption en troisième lecture de ce projet de loi
dans les plus brefs délais, mais aussi que le gouvernement fasse en
sorte que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse aller de l'avant dans la
sanction de cette loi.
Au nom de l'Opposition officielle, Mme la Présidente, nous disons
oui à cette adoption en troisième lecture, dès ce soir et
nous demandons au gouvernement de procéder à la sanction du
projet de loi 99 dans les plus courts délais possible. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Duplessis. M. le député de Gaspé.
M. André Beaudin
M. Beaudin: Mme la Présidente au nom du ministre
délégué aux Pêcheries, je voudrais remercier le
député de Duplessis, critique en matière de pêches,
pour la collaboration qu'il a apporté en commission parlementaire et,
également, la collaboration qu'il nous apporte ce soir, en tenant pour
acquis qu'il a compris le message qu'on avait passé, lors du discours du
parti au pouvoir. J'invite le député de Duplessis à
continuer de faire de même dans les prochaines lois qui sont au
bénéfice des pêcheurs, des employés d'usines et des
transformateurs dans la région de l'Est du Québec. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Gaspé. Il n'y a pas d'autres interventions? Le débat étant
clos, est-ce que le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit
aux pêcheries maritimes est adopté.
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais
d'appeler l'article 43 du feuilleton.
Projet de loi 29
Reprise du débat sur la prise
en considération du rapport
de la commission
La Vice-Présidente: À l'article 43 de notre
feuilleton, le ministre de l'Environnement propose l'adoption du rapport du
projet de loi 29, loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement.
Je pourrai reconnaître le premier intervenant, M. le député
de Dubuc.
M. Hubert Desbiens (suite)
M. Desbiens: Merci, Mme la Présidente. J'avais
déjà commencé, avant l'heure du repas, à exprimer
quelques opinions et à donner surtout au ministre de l'Environnement un
exemple qui cherchait à illustrer pourquoi l'Opposition, par la voix du
député de Verchères, avait fait la suggestion de
modification.
Il faut peut-être rappeler, pour le bénéfice des
téléspectateurs, que l'objectif de ce projet de loi est de
remplacer deux organismes, c'est-à-dire le Conseil consultatif de
l'environnement et le Conseil consultatif sur les réserves
écologiques, pour en former un seul nouveau qui s'appellera le Conseil
de la conservation et de l'environnement. Puisque, à l'article 11 du
projet de loi, les
fonctions et les pouvoirs de ce conseil consultatif ont pour objet de
conseiller le ministre de l'Environnement uniquement sur des questions
relatives à la conservation et à l'environnement, le
député de Verchères, au nom de l'Opposition, avait
proposé que le conseil consultatif de l'environnement nouvellement
créé puisse avoir le pouvoir de se prononcer également sur
l'ensemble des actions des divers ministères du gouvernement lorsque ces
actions ont des conséquences sur l'environnement.
Je donnais justement comme premier exemple, avant la suspension des
débats, le cas du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
qui propose présentement une modification considérable aux
territoires fauniques du Québec, en faisant passer de 150 000
kilomètres carrés à 40 000 kilomètres carrés
l'étendue des réserves fauniques du Québec pour
transformer ces territoires en pourvoiries concessionnaires. Il aurait
été important, puisqu'on connaît maintenant
l'inquiétude universelle ressentie par les Québécois et
les Québécoises concernant le projet du ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche, que ce conseil consultatif de l'environnement se
prononce là-dessus, puisque, dès qu'on touche aux territoires
québécois, à la faune du Québec et aux
réserves fauniques, on touche aussi aux réserves
écologiques, aux habitats fauniques, etc.
Donc, il aurait été important, ne serait-ce que pour
rassurer la population sur les intentions et le devenir des réserves
fauniques que propose le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche,
qu'un organisme consultatif de la nature de celui que le ministre propose
puisse être en mesure, de lui-même - donc, qu'il ait une
crédibilité beaucoup plus grande quant à
l'objectivité de ses membres - par rapport à un projet de loi ou
à un projet tel celui du ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, un projet de cette nature, de l'étudier, de le scruter et
de donner son avis sur le projet.
Le deuxième exemple que je voulais donner, Mme la
Présidente, au ministre de l'Environnement, porte encore justement sur
l'utilisation du territoire québécois en relation toujours aussi
avec le projet de développement du ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche concernant les réserves fauniques et l'utilisation de
la nature à des fins de chasse, de pêche, de trappage et de
piégeage. Cela m'avait été soumis à de multiples
reprises tant par les gestionnaires de ZEC que par les pourvoyeurs. Lors de
notre tournée automnale des Grandes Oreilles, cela m'a été
soumis à maintes reprises et, aussi, au sujet de l'action du
ministère de l'Énergie et des Ressources via le ministère
des Forêts sur les territoires fauniques.
Il semble qu'un conseil consultatif tel que l'a proposé le
député de Verchères, et responsable de l'Opposition en
matière d'environnement, au ministre, pourrait, s'il avait reçu
l'assentiment du ministre, prendre sur lui, avec la crédibilité
que lui aurait donné de tels pouvoirs, de regarder de façon
attentive l'action des compagnies forestières dans les territoires
fauniques du Québec, même s'il y a déjà ce qu'on
appelle le Guide des modalités d'intervention en milieu forestier. Les
intervenants en gestion de la faune au Québec sont très inquiets
et se plaignent, et les pourvoyeurs d'une façon particulière. M.
le ministre délégué aux Forêts semble douter de ce
que je dis. Je les ai rencontrés personnellement. C'est ce qu'ils m'ont
souligné, de même que les représentants et les
gestionnaires de ZEC. (20 h 20)
II y a encore, comme le guide des modalités ne semble pas
être encore complètement appliqué, des problèmes
sérieux dans ce domaine. Donc, un comité consultatif du type
qu'on le proposait au ministre de l'Environnement aurait eu l'avantage de
permettre de rassurer la population quant à l'action de cet autre
intervenant important et fondamental, on le reconnaît, dans le milieu
forestier relié à la faune du Québec.
Ce sont les deux exemples pour illustrer justement le bien-fondé
de la proposition de mon collègue de Verchères au ministre de
l'Environnement.
Encore une fois, le ministre de l'Environnement a quand même fait
un pas en direction de la proposition de mon collègue de
Verchères, mais ce n'est pas tout à fait ce qu'on aurait voulu.
Il est bien sûr, comme le mentionnait le député de
Verchères, que nous allons quand même voter en faveur du projet de
loi modifié par le ministre de l'Environnement. Je vous remercie.
M. Jolivet: Bravo! Bravo!
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Dubuc. Il n'y a pas d'autre intervention? Le débat étant clos, le
rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 29, Loi
sur le Conseil de la conservation et de l'environnement, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui. Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 42 du feuilleton.
Projet de loi 28
Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 42 de notre
feuilleton, le ministre des Communications propose l'adoption du rapport de la
commission de la culture et des amendements qui ont été transmis
en vertu de l'article 252 de notre règlement, et qui concerne le projet
de loi 28, Loi modifiant diverses dispositions législatives eu
égard à la Loi sur l'accès aux documents des organismes
publics et sur la protection des renseignements personnels. M. le ministre des
Communications.
M. Richard French
M. French: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi au
sujet duquel je propose l'adoption du rapport de la commission aujourd'hui aura
pour effet, l'Assemblée nationale le voulant, non seulement d'harmoniser
les dispositions législatives inconciliables avec la loi-cadre, la loi
sur l'accès, mais également de rendre à cette loi son
véritable caractère de loi prépondérante.
Au terme d'un processus amorcé il y a près de trois ans
par la Commission d'accès à l'information et poursuivi par le
ministère des Communications, les nombreuses consultations et
discussions sur les dispositions inconciliables avec les ministères et
les organismes ont porté fruits. Je peux affirmer que cet exercice a eu
un effet bénéfique parce que la loi sur l'accès est
maintenant mieux connue. Tous nous ont offert leur collaboration, et le projet
de loi que nous allons adopter fait donc l'objet d'un consensus des parties
concernées. On sait qu'il s'agit d'une évaluation exhaustive des
conflits qui existent actuellement entre les grands principes incarnés
et exprimés dans le projet de loi de l'accès à
l'information et de la protection des renseignements privés, d'une part,
et les dispositions sectorielles dans les différentes lois sectorielles
du Québec qui empêchaient ou qui régissaient cette question
d'accès et cette question de la protection de la vie privée.
Dans le projet de loi actuel, on vise à compléter ce
processus et à rendre vraiment prépondérante la loi sur
l'accès à toutes les lois et à tous les règlements
du Québec. Dans le projet de loi, près de 140 dispositions de
lois sectorielles sont abrogées, modifiées ou encore maintenues
malgré la Loi sur l'accès à l'information afin
d'être rendues conformes à la loi-cadre sur l'information et la
protection de la vie privée.
Un moment pour bien comprendre le fonctionnement et le contexte du
projet de loi. Selon l'article 169 de la Loi sur l'accès, toutes les
dispositions inconciliables avec cette loi cesseront d'avoir effet le 31
décembre 1987. C'est à ce moment-là que le projet de loi
que nous examinons actuellement entrera en vigueur. Rappelons brièvement
que cette échéance a été reportée à
deux reprises. La première fois, ce fut du 1er octobre 1986 au 30 juin
1987. Le rapport qu'avait déposé la Commission d'accès
à l'information sur les dispositions inconciliables avait
été remis quelque peu tardivement au ministère des
Communications. Pour permettre à ce dernier d'entreprendre toutes les
consultations nécessaires, on a remis la date fatidique. Il y a eu un
deuxième report de même nature, juste avant la fin de la session
parlementaire du printemps dernier, celle de 1987, après une entente
avec l'Opposition, afin d'accorder tout le temps nécessaire à
l'étude détaillée du projet de loi, compte tenu de
l'ampleur et de la complexité de son contenu.
En fait, cet été, une commission parlementaire s'est tenue
au mois d'août pour faire l'étude détaillée du
projet de loi. Les membres de la commission ont eu l'occasion
d'apprécier et d'étudier en détail la portée des
modifications législatives du projet de loi. De plus, je me dois de le
souligner, Mme la Présidente, le gouvernement a pu
bénéficier d'une très grande collaboration de la part du
critique de l'Opposition, le député de Taillon, qui, avec ses
recherchistes, avait très bien fait ses devoirs. Il a proposé
plusieurs modifications très pertinentes qui ont été
prises en considération. Ainsi, le député de Taillon
continue la tradition établie d'une pratique de cessez-le-feu ou de
non-partisanerie à l'Assemblée nationale et dans ses commissions,
en ce qui a trait à cette Loi sur l'accès à l'information
et à la protection de la vie privée.
Il est important de noter également que le consensus qui s'est
dégagé sur l'ensemble des articles du projet de loi tient compte
et respecte pour une bonne part les recommandations de la Commission
d'accès à l'information.
Quelques mots sur les points saillants du projet de loi. Compte tenu de
la diversité des secteurs touchés par ce projet de loi et des
divers types d'harmonisation qui sont effectués, je voudrais vous
exposer brièvement les principaux points saillants du rapport. Tout
d'abord, il y a Heu de rappeler que deux types de dossiers ont fait l'objet de
chapitres particuliers dans le rapport de la Commission d'accès à
l'information et, en raison de leur nature très complexe, ils ont
reçu également un traitement particulier dans le projet de loi
28.
D'abord, les dossiers d'adoption. L'harmonisation des dispositions
législatives actuelles régissant les dossiers d'adoption
avec la loi sur l'accès fait face à un sérieux
dilemme. En effet, les deux droits que confère la loi sur l'accès
s'affrontent. Ainsi, le droit d'accès d'un adopté à son
propre dossier d'adoption entre en conflit avec le droit du parent biologique
à la protection de son identité et de sa vie privée.
À cet égard, le Code civil reconnaît au dossier d'adoption
un caractère confidentiel qui est plus étanche encore que celui
de la loi sur l'accès.
Ainsi, afin de maintenir la situation qui prévaut actuellement
à l'égard de ces dossiers, des modifications ont
été introduites dans la loi sur l'accès. Ces
modifications, d'une part, indiquent que l'accès et la protection des
renseignements contenus dans ces dossiers d'adoption continuent d'être
régis par le Code civil. Donc, le caractère confidentiel est
maintenu. D'autre part, cependant, pour ces dossiers, nous introduisons le
principe du rôle de surveillance et de contrôle de la gestion de
ces dossiers par la Commission d'accès à l'information et
à la protection de la vie privée.
Ces amendements, apportés en commission parlementaire, sont une
nette amélioration par rapport à la proposition initiale du
projet de loi 28 qui prévoyait l'exclusion totale des dossiers
d'adoption de l'application de la loi sur l'accès. Je tiens à
signaler que, sur le fond, toute la question de l'adoption fait actuellement,
au moment où l'on se parle, l'objet d'une révision globale dont
nous ne connaissons pas encore les résultats. (20 h 30)
Cette révision, menée conjointement par la ministre de la
Santé et des Services sociaux et le ministre de la Justice, aboutirait
vraisemblablement à une solution de fond pour la question de
l'accès aux dossiers d'adoption. À ce moment-là, si le
processus de révision et d'étude mène à la
conclusion qu'il faut changer cette confidentialité très forte
dont ont bénéficié les dossiers d'adoption, il y aurait
lieu, vraisemblablement, de procéder à d'autres amendements en ce
qui a trait à ce sujet litigieux et difficile.
Deuxième sujet qui a bénéficié d'un
traitement particulier, les dossiers médicaux et sociaux. À
première vue, on pourrait penser que toute personne a droit
d'accès à son dossier médical, social ou à celui de
son enfant. C'est notre réflexe le plus naturel, mais ce n'est pas du
tout aussi simple. En premier lieu, on se retrouve devant un double
régime d'accès, le régime d'accès
généralisé pour l'ensemble du gouvernement sous la loi sur
l'accès à l'information et la protection de la vie privée
et, d'autre part, un régime d'accès relevant, sectoriellement, de
la loi sur la santé et les services sociaux. Afin de clarifier et
d'assurer l'harmonie des deux régimes, il a fallu modifier ces deux
lois.
D'une part, étant donné que la loi sur l'accès
confère actuellement à la personne concernée un droit
général d'accès à son dossier médical et
social sans restriction, il a été jugé opportun de
prévoir une possibilité de refuser cet accès lorsque, de
l'avis du médecin traitant, il pourrait en résulter un
préjudice grave à la santé de cette personne. On peut
imaginer le cas de certaines maladies très graves; on pourrait donner
l'exemple de maladies en santé mentale où il pourrait être
dangereux pour une personne atteinte par une telle maladie d'avoir
nécessairement et automatiquement accès à l'ensemble de
son dossier médical.
De plus, en conformité avec la loi sectorielle, une autre
modification a été apportée à la loi sur
l'accès afin de préciser que le mineur de moins de quatorze ans
n'a pas le droit d'être informé ni de recevoir des renseignements
de nature médicale ou sociale contenus dans son dossier. Encore une
fois, il s'agit des droits des plus jeunes et certaines évaluations
faites par les professionnels de la santé pourraient, avec un diagnostic
qui jette un regard potentiellement pessimiste vers l'avenir, faire mal
à l'individu, pourraient faire en sorte de créer l'inverse de
l'impact que peuvent avoir les analyses professionnelles, c'est-à-dire
de réduire les possibilités d'épanouissement de l'individu
plutôt que de l'aider.
Par ailleurs, les renseignements contenus dans les dossiers
médicaux et sociaux sont souvent complexes. Pour donner suite à
une recommandation de la Commission d'accès à l'information
à ce sujet, une disposition a été ajoutée dans la
loi sur l'accès afin d'obliger un établissement de santé
ou de services sociaux ou un autre organisme détenant de tels
renseignements de fournir au requérant l'aide d'un professionnel
qualifié pour faciliter la compréhension des renseignements
versés à son dossier.
Quant à la Loi sur les services de santé et les services
sociaux, il a fallu lui apporter plusieurs modifications afin de l'harmoniser
avec la loi sur l'accès. En premier lieu, il est prévu qu'un
bénéficiaire ne peut recevoir communication d'un renseignement
contenu dans son dossier médical ou social et qui a été
fourni à son sujet par un tiers, à moins que ce tiers n'y
consente. Donc, on protège la possibilité pour les organismes qui
en ont besoin: les hôpitaux, la Régie de l'assurance-maladie, pour
donner deux exemples, la Régie de l'assurance automobile du
Québec, pour en donner un autre, de verser dans les dossiers des
particuliers les renseignements venant d'un tiers, sans que ces renseignements
deviennent systématiquement disponibles au bénéficiaire ou
à l'individu dont il est question.
Ensuite, comme cette loi sectorielle prévoit déjà
des recours à plusieurs tribunaux en cas de refus d'accès d'un
bénéficiaire à son dossier, il a été convenu
d'ajouter de façon explicite un recours en révision auprès
de la Commission d'accès à l'information. Encore, certaines
balises et restrictions ont dû être apportées à
l'accès du titulaire de l'autorité parentale au dossier
médical ou social du bénéficiaire mineur de moins de 14
ans et de plus de 14 ans. Dans les premiers cas, pour les moins de 14 ans, un
établissement pourrait refuser au titulaire de l'autorité
parentale l'accès au dossier du mineur de moins de 14 ans si celui-ci a
fait l'objet d'une intervention au sens de la Loi sur la protection de la
jeunesse, comme dans les cas de violence physique ou d'abus sexuel.
Cela fait mal à tout le monde de soulever de tels
problèmes, Mme la Présidente, mais, dans les cas où il y a
abus de l'enfant, le titulaire de l'autorité parentale,
vraisemblablement et normalement le parent biologique ou le conjoint ou la
conjointe du parent biologique, au cas où il y a abus, ces personnes
n'auront pas automatiquement accès au dossier. Il pourrait d'ailleurs
contenir une dénonciation de la personne demandant l'accès par
l'enfant en question avec les conséquences que l'on peut imaginer pour
l'enfant si ces renseignements étaient systématiquement
disponibles.
Dans le second cas, pour les enfants de plus de 14 ans, l'accès
au dossier d'un mineur de 14 ans et plus pourrait être refusé au
titulaire de l'autorité parentale si l'établissement qui
détient les renseignements, après avoir consulté l'enfant,
détermine que la communication de ce dossier pourrait causer un
préjudice à sa santé. Cette dernière modification
va dans le même sens que certaines autres dispositions
législatives contenues, notamment, dans le Code civil et la Loi sur la
protection de la santé publique, et qui accordent au mineur de 14 ans et
plus le droit de recevoir des soins sans le consentement de ses parents.
Le troisième secteur névralgique, le secteur municipal.
Mis à part ces dossiers d'importance majeure du projet de loi 28, il est
un autre secteur très largement touché par ledit projet de loi,
soit le secteur municipal. En effet, près de la moitié des
modifications législatives de ce projet de loi touche ce domaine. Ces
modifications sont de plusieurs ordres. En premier lieu, les lois municipales
doivent être modifiées afin que la responsabilité de donner
accès aux documents incombe désormais aux responsables de
l'accès plutôt qu'au greffier ou au
secrétaire-trésorier. Or, en pratique, dans 90 % des cas, ce
changement n'aurait aucun impact concret sur les greffiers et les
secrétaires-trésoriers qui se sont déjà vu
déléguer en tant que tels le rôle de responsable de
l'accès aux documents de la municipalité. En second lieu, une
modification a été apportée à la Loi sur la
Communauté urbaine de Montréal afin d'élargir
l'accès de certains dossiers détenus par la Commission de la
sécurité publique et de maintenir leur caractère de
confidentialité dans les seuls cas où ces renseignements
concernent directement la prévention, la détection, la
répression du crime et des infractions aux lois.
Enfin, deux dispositions des lois sur la fiscalité municipale
protègent la confidentialité des renseignements obtenus dans
l'établissement du rôle d'évaluation, sauf à
l'égard du propriétaire, du plaignant ou de l'occupant. Compte
tenu du fait que ces renseignements s'apparentent à ceux de nature
fiscale, les dispositions qui les concernent ont été maintenues
malgré la loi sur l'accès. Les autres secteurs touchés par
le projet de loi sont très diversifiés, quoique certaines
problématiques se recoupent systématiquement.
Par exemple, plusieurs dispositions de lois sectorielles qui concernent
les assurances, les biens culturels, les mines, les institutions
financières, les valeurs mobilières protègent ce
caractère de confidentialité des renseignements de nature
scientifique ou économique fournis par une tierce partie. Or les
articles de la loi sur l'accès qui créent des restrictions au
droit d'accès dans ces cas, n'offrent pas autant de garanties que les
lois sectorielles. Le responsable de l'accès appelé à
effectuer un tri parmi les documents, conformément à la loi sur
l'accès, pourrait commettre des erreurs parfois lourdes de
conséquences. Dans ces cas, des clauses, malgré la loi sur
l'accès, nous apparaissent justifiées et elles ont
été insérées dans les lois concernées. Dans
un autre cas et en réponse à la demande de l'Opposition
officielle en commission parlementaire, la discrétion que possède
la Commission des valeurs mobilières de donner accès ou non
à des renseignements, sera assujettie à un critère de
préjudice grave qui pourra, le cas échéant, être
révisé par la Commission d'accès à l'information.
(20 h 40)
En conclusion, Mme la Présidente, les modifications
législatives du projet de loi 28 qui harmonisent les lois
québécoises avec la loi sur l'accès, ont permis de faire
passer un véritable test à la loi sur l'accès aux
documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
personnels. Je suis heureux de constater que les principes fondamentaux
édictés dans la charte des droits et libertés repris et
détaillés dans la loi sur l'accès aient prévalu,
tout au long de cet exercice, afin d'assurer les droits des citoyens
québécois en matière d'accès aux documents et de
protection des renseignements personnels, tout en assurant une plus
grande transparence de l'appareil étatique.
Il ne faudrait pas croire que ces principes fondamentaux seront mis en
cause lors de la révision de la loi sur l'accès qui s'amorce
actuellement, conformément à la loi qui exige une étude,
un examen crépuscule, comme on l'appelle communément,
après cinq ans d'opération. La Commission d'accès à
l'information a produit un rapport sur la révision du fonctionnement de
l'ensemble de la loi. J'ai déposé ce rapport ici à
l'Assemblée nationale le 22 octobre dernier et ni le ministère
des Communications, ni le gouvernement, ni la Commission d'accès n'ont
remis en cause les fondements de cette loi. Cependant, c'est en février
prochain que se tiendra la commission parlementaire pour entendre la Commission
d'accès à l'information, ainsi que les personnes et les
organismes intéressés à la révision de cette
loi.
J'aimerais, en conclusion, remercier la Commission d'accès
à l'information pour le travail colossal qu'elle a réalisé
dans l'exercice d'administration des dispositions inconcialiables, et, par la
suite, pour la première révision quinquennale de cette loi, ainsi
que pour son rôle de chien de garde auprès des organismes
gouvernementaux qui doivent se conformer aux obligations de la loi. À
cet égard la commission entend publier après les fêtes le
répertoire des déclarations de fichiers détenus par les
3600 organismes publics. C'est encore là un travail de compilation
majeure.
À l'instar de la Commission d'accès à
l'information, à l'instar d'ailleurs de l'Opposition, je rappelle encore
une fois aux organismes délinquants qui n'ont pas rempli leur
déclaration de fichier leur devoir de se conformer au plus vite aux
obligations de la loi. Par la même occasion, j'aimerais offrir toute ma
gratitude au président de la Commission d'accès à
l'information, qui quittera ses fonctions le 15 décembre prochain, pour
le magnifique travail qu'il a accompli depuis sa nomination il y a cinq ans. On
sait que les responsabilités du président de la Commission
d'accès à l'information sont dévolues par
l'Assemblée nationale et non pas par le gouvernement. Je
considère que l'ensemble des Québécois et
l'Assemblée nationale, en particulier, ont été
privilégiés de bénéficier du travail de Marcel
Pépin. Il a mis la commission sur pied. Il s'est bâti une
équipe chevronnée, il a permis que cette équipe atteigne
sa vitesse de croisière. Nous sommes très reconnaissants de
l'excellent travail de M. Marcel Pépin et nous lui souhaitons beaucoup
de chance dans ses nouvelles fonctions comme responsable de l'information
radiophonique à Radio-Canada.
J'aimerais également remercier les responsables du dossier des
dispositions inconciliables dans les divers ministères et organismes,
l'équipe du ministère des
Communications qui a travaillé très très fort et
l'équipe du ministère de la Justice. Il y a plusieurs personnes
au ministère de la Justice qui ont aidé à cette
opération combien difficile d'harmonisation des lois sectorielles, un
travail de moine bien accompli par l'ensemble des gens qui se sont
affairés à conférer à la loi sur l'accès
à l'information sa véritable prépondérance.
J'aimerais ajouter que la collaboration des membres de la commission de
la culture dans ce dossier a été fructueuse et très
appréciée. Cela me permet, en présence du
député de Taillon, de répéter ce que j'ai dit plus
tôt dans mon discours, que le travail qu'il a fait dans ce dossier et le
travail de son recherchiste ont été très dignes de
l'Assemblée nationale et des plus hautes traditions du parlementarisme
québécois. On l'apprécie énormément de ce
côté-ci de la Chambre. On a bonifié le projet de loi, on a
pu faire bénéficier l'ensemble des Québécois des
améliorations ainsi apportées.
Mme la Présidente, c'est avec un très grand plaisir que je
propose à l'Assemblée nationale l'adoption du projet de loi 28
ainsi que les amendements qui y ont été apportés,
proposition qui serait, si j'ai bien compris, précisée dans les
us et coutumes lors de l'intervention du leader adjoint du gouvernement et
après l'intervention des autres députés qui veulent
prendre la parole. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des
Communications. M. le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Merci, Mme la Présidente. Nous en sommes ce
soir à peu près aux dernières étapes, aux ultimes
étapes d'un long, très long processus de révision
législative pour lequel de nombreux efforts ont été
conjugués.
D'abord, évidemment, il s'agissait pour nous, parlementaires,
d'adopter des modifications législatives afin de rendre l'ensemble du
corpus législatif compatible avec la loi sur l'accès à
l'information. Le ministre l'a souligné tantôt, il s'agissait
là d'un travail absolument phénoménal. Je pourrais
même dire que seul le projet de loi 92, qui a été
adopté un peu plus tôt durant cette même 33e
Législature, peut rivaliser d'ampleur avec le travail qui a
été accompli.
Le projet de loi 92, rappelons-le, faisait en sorte de rendre
conciliables, compatibles les dispositions de toutes nos lois avec la Charte
des droits et libertés de la personne. Dans ce cas-ci, je dois dire, Mme
la Présidente, que c'est avec beaucoup de bonheur que je me suis
associé aux autres parlementaires pour réaliser ce travail. Le
ministre a terminé avec ses remerciements. Je vais commencer avec les
miens.
D'abord, je veux remercier le ministre pour les efforts,
l'énergie, le temps qu'il a consacré, à travers ses
fonctions ministérielles, pour faire en sorte que le présent
projet de loi pour lequel on ne se battra pas dans les autobus, j'en conviens,
permette néanmoins à des tas de citoyens et de citoyennes du
Québec de recevoir à l'avenir justice en termes d'accès
à l'information et de protection des renseignements qui les concernent,
donc qui permettra à ces citoyens d'obtenir une plus grande justice, une
plus grande accessibilité, une plus grande protection dans certains
cas.
J'allais dire qu'au départ de toute initiative
législative, il y a une volonté politique qui s'exprime
généralement par la personne d'un ministre. Dans ce cas-ci, vous
savez que je suis particulièrement avare de ce type de causeries, Mme la
Présidente, mais je voudrais, avec la plus grande
sincérité, est-ce utile de le mentionner, féliciter le
ministre des Communications qui a su mener à bien cette barque.
On est à l'étape de l'adoption du rapport, mais je ne
doute pas que cette loi sera adoptée en troisième lecture,
probablement cette semaine ou la semaine prochaine, du moins avant la fin de la
session, de sorte que nous aurons rempli le mandat que nous confiait la loi
à l'époque où la loi sur l'accès à
l'information était adoptée, c'est-à-dire qu'on y avait
prévu cette opération pour rendre compatibles toutes nos lois,
nos règlements et tout ce qui en découle également. Il
faut penser à ce qui existe dans les municipalités, les chartes
des villes, etc. C'était un travail colossal.
Mes deuxièmes pensées, si l'on veut, vont
évidemment au personnel de la Commission d'accès à
l'information. M. le ministre a souligné tantôt le départ
regretté de M. Marcel Pépin, président, depuis le
début, de la Commission d'accès à l'information. Il nous
quittera dans les jours qui viennent pour retourner au milieu journalistique,
au milieu de l'information, à Radio-Canada, direction de la radiophonie,
si l'on veut, à titre de directeur de l'information. Je pense qu'on peut
dire que M. Pépin a su faire les premiers pas avec l'organisme, faire en
sorte qu'il accélère sa cadence, prenne sa vitesse de
croisière et devienne un organisme dont la crédibilité
n'est plus en doute aujourd'hui au Québec.
Evidemment, outre ces deux personnes, il y a tout un personnel, des
juristes. Le ministre a mentionné que, dans chaque ministère, il
y a un correspondant. C'est quand même là une structure assez
imposante. Ces gens ont travaillé sans partisanerie, ont
travaillé en ayant à coeur finalement le mandat que le
législateur avait confié à l'époque dans le projet
de loi original. Je le mentionne et je le répète, parce que c'est
le type de loi que nous devrions adopter le plus souvent. Peu importent les
gens qui seront ici dans quelques années, je dis et je redis qu'il n'y a
rien de mieux que d'adopter des lois en faisant en sorte qu'on puisse un jour
les rendre compatibles avec les lois qui ont préséance.
Éventuellement, comme c'est le cas de la loi sur l'accès à
l'information, d'ailleurs, faire en sorte qu'on puisse les réviser
automatiquement. (20 h 50)
On aura un rapport de mise en oeuvre qui nous a été remis,
qu'on devra étudier à l'intersession, rapport de mise en oeuvre
sur la loi sur l'accès à l'information, donc, nous serons
obligés de réviser. Voilà une procédure
intelligente, souple, efficace au service du citoyen, finalement.
Il y a eu également, évidemment, des consultations
très nombreuses, des audiences publiques qui se sont
succédé jusqu'à la publication l'an dernier du rapport de
la Commission d'accès à l'information sur les dispositions
inconciliables. Je mentionne le titre. Je l'ai déjà fait en cette
Chambre parce que le titre du rapport est passablement révélateur
de ce qu'est la loi sur l'accès à l'information et la protection
de renseignements confidentiels. Le titre du rapport qui avait
été déposé: L'État: une affaire publique
- La vie privée: un secret d'État. Ce n'est pas un jeu de
mots, Mme la Présidente. L'État est une affaire publique parce
qu'on doit avoir accès aux documents publics. Mais, d'un autre
côté, la vie privée, ce qui nous concerne, est un secret
d'État. Mon Dieu que ces choses sont bien dites dans le titre du
rapport.
Évidemment, il ne suffisait pas de faire un beau titre au
rapport. Il nous fallait examiner le contenu, ce qui a été fait.
Nous avons examiné, bien sûr, les recommandations de la Commission
d'accès sur l'opportunité dans bien des cas d'abroger, de
maintenir, de modifier, de remplacer les dispositions législatives qui
étaient contraires à la loi d'accès. Le projet de loi 28,
que vous avez appelé tantôt pour la prise en considération
du rapport, constitue ainsi le dernier maillon, si on veut, d'une longue
chaîne, d'une nécessaire chaîne d'exercices, parce qu'il
touche 52 lois, contient 133 articles qui ont pour effet d'abroger plus de 10
dispositions inconciliables, d'en modifier 96 et d'en maintenir 27, en y
joignant, dans ces derniers cas, une clause "malgré", comme disent
maintenant les juristes, qu'on appelait autrefois une clause dérogatoire
ou une clause "nonobstant", procédé qui, plus d'une fois, est
compréhensible et justifiable, mais à l'égard duquel nous
apporterons plus tard une certaine mise en garde.
C'est bien les clauses "nonobstant". Nous l'avons déjà
demandé en ce qui concerne une loi qui fait parler d'elle, la loi 101.
Nous avons donc introduit des clauses
dérogatoires, des clauses "malgré" dans 27 dispositions,
selon notre inventaire. Ce sont de bonnes formules dont il ne faut pas abuser.
Dans cet exercice total, Mme la Présidente, je crois que le ministre l'a
mentionné tantôt, lors de son discours de deuxième lecture,
il y a eu pas moins de 260 chartes municipales qui ont été
examinées, le Code civil du Québec, 495 lois publiques, 12 000
pages de textes réglementaires, qui ont été lus,
analysés, soupesés, jugés. La nomenclature que je viens de
faire, je pense, illustre bien l'ampleur et l'importance de la tâche qui
a été effectuée. Il n'est pas dans notre intention, ce
soir, de passer en revue toutes et chacune des dispositions qui ont fait
l'objet d'un débat en Chambre ou en commission parlementaire. Le
ministre de l'Industrie et du Commerce, leader adjoint du gouvernement, m'en
remercie.
D'ailleurs, je pense que le temps alloué ne me permettrait pas de
faire le tour des 12 000 pages de textes réglementaires, des 495 lois
publiques. Cependant, nous aimerions, ce soir, mettre en exergue certains cas
d'espèce qui ont fait l'objet de discussions entre parlementaires et
avec le ministre. Les bémols que je vais mettre ce soir, les nuances que
je vais apporter ce soir, ne visent en aucun cas à faire ombrage, si
l'on veut, au processus législatif consultatif qui a été
suivi. Je l'ai dit tantôt, le processus est valable et si, ce soir,
j'apporte des réserves qui pourront apparaître comme étant
vigoureuses, tenez pour acquis que cette vigueur vient plutôt de la
nature de la personnalité de celui qui vous parle, mais ne
véhicule aucune agressivité à l'égard du travail
qui a été fait et, bien plus, aucun sentiment
négativiste.
Nous avons réussi d'ailleurs, de façon
générale et globale, à établir autour du projet de
loi 28 - le ministre des Communications, celui qui vous parle et les autres
parlementaires qui ont participé à ce débat - une
collaboration que je n'hésiterais pas à qualifier de tout
à fait remarquable et tout cela aux seules fins de bonifier une loi
générale, d'assurer - j'allais employer un anglicisme, je pense
qu'il est valable peut-être dans le sens où je veux l'employer -
la performance de la loi. Je le dis souvent: Les lois qu'on adopte, il faut
qu'elles fonctionnent aussi bien en été qu'en hiver. C'est une
imagerie populaire, mais cela veut dire que les lois qu'on adopte doivent
servir les citoyens, être claires, comporter des messages précis
et faire en sorte que ces lois puissent être viables et
compréhensibles. Ce n'est pas toujours facile, comme nous le verrons. Je
vais donc énumérer certains blocs, certains sujets qui ont fait
l'objet de nos discussions et tout cela ne porte pas ombrage au reste.
D'abord, l'adoption de l'article 2 du projet de loi. Après avoir
proposé, par l'article 2 du projet de loi 28, l'exclusion
complète des dossiers d'adoption des dispositions de la loi
d'accès, le ministre des Communications, qui était appuyé
en cela par sa collègue, la ministre de la Santé et des Services
sociaux, y allait de l'ajout, à la loi générale, de
l'article 2.1 faisant en sorte d'assurer l'accès aux dossiers d'adoption
par les dispositions du Code civil et d'assurer également leur
protection par les prérogatives propres à la loi d'accès,
pour ces fins. Tout cela ne règle pas la question de la sollicitation
à laquelle peut inciter la disposition du Code civil sur
l'accès.
Deuxièmement, grand problème rencontré au cours de
nos discussions: la décision du comité interministériel
sur les retrouvailles n'est pas encore arrêtée. Je prends
peut-être une minute - je pense que vous le savez, Mme la
Présidente, les journaux en ont été remplis - les
retrouvailles: il s'agit de savoir si un enfant qui a été
adopté, qui désire retrouver ses parents naturels, peut les
retrouver de la même façon que les parents naturels qui ont
confié leur enfant à l'adoption peuvent retrouver leur enfant
naturel. Finalement, il y a donc un comité interministériel qui a
été formé à l'intérieur du gouvernement
là-dessus. C'est bien, c'est un problème qui n'est pas facile,
etc. Nous aurions aimé que, dans le projet de loi 28, l'on statue
définitivement, de façon claire, sur la question des
retrouvailles, mais le projet de loi 28 sert, comme je l'ai dit en commission
parlementaire, d'espèce de terrain de stationnement pour le dossier en
attendant la solution, la décision finale du gouvernement à
l'égard du dossier des retrouvailles.
L'Opposition, dans ce dossier, dans le double objectif de
légiférer de façon moderne et d'obliger le
législateur à tenir compte des recommandations du comité
ministériel, a suggéré, étant donné qu'on ne
peut pas forcer le gouvernement à faire son lit, il nous dit qu'il n'est
pas prêt... Quand même, on trouve que deux ans... En tout cas, le
comité interministériel a été mis sur pied il y a
déjà longtemps et on trouve qu'il aurait dû accoucher, mais
admettons qu'il n'a pas accouché pour différentes raisons. (21
heures)
Ce que nous avons suggéré en commission parlementaire,
c'est de faire en sorte d'introduire un amendement pour dire que la situation
actuelle ne peut plus être tolérée, qu'elle crée de
la confusion dans l'esprit de tout le monde. La situation actuelle est
difficilement administrable par les centres de services sociaux et on devait
précisément introduire une clause crépusculaire à
l'intérieur du projet de loi 28 concernant les dispositions d'adoption
pour faire en sorte que... Je pense que la date que nous suggérions
était le 31 décembre 1988. On s'est dit: On va donner une
autre
année au gouvernement pour qu'il fasse son lit mais, au moins,
dans un an, on aura et les citoyens du Québec auront un message clair en
matière d'adoption.
Malheureusement, ce n'est pas fait. Nous avons proposé cet
amendement et il a été rejeté après un vote nominal
des membres de la commission parlementaire. C'est un amendement à savoir
que l'article 2.1 cesse d'avoir effet le 31 décembre 1988. Donc,
première réserve sur le dossier d'adoption.
Deuxième réserve: tout le dossier de l'accès des
parents au dossier médical de leur enfant de plus de 14 ans. Le
problème est simple. Est-ce qu'un parent - il y en a plusieurs qui
m'écoutent de l'autre côté et qui ont des enfants - peut
avoir accès au dossier médical de son enfant s'il a moins de 14
ans ou s'il a entre 14 et 18 ans? Voilà un beau problème. La
réflexion qui nous venait du ministère de la Santé et des
Services sociaux n'avait aucun sens, était basée sur le fait que
la majorité des parents sont à peu près de mauvais parents
et que, si on veut prendre connaissance du dossier de nos enfants, c'est pour
les battre, pour les punir, pour leur apporter un châtiment.
Dans certains cas, on peut concevoir qu'il y a des maladies
vénériennes qui ont été attrapées par des
enfants et que les parents veulent le savoir. Dans d'autres cas, on peut
concevoir qu'il y ait eu des avortements. Or, le parent, règle
générale - c'est cela qu'on a été obligé de
dire pendant une soirée à la ministre de la Santé et des
Services sociaux - n'est pas là pour punir son enfant, il est là
pour l'aider, comme la majorité d'entre nous quand nous rencontrons nos
enfants. Les parents québécois ne sont pas pires que les autres.
Il fallait donc vraiment prendre le problème de l'autre
côté et dire: "Le parent va avoir accès au dossier
médical de son enfant sauf," au lieu de dire que le parent n'aura pas
accès au dossier médical de son enfant. Je pense qu'il a fallu
rétablir le principe général et dire: Le parent a
accès au dossier médical de son enfant. Incroyable mais vrai!
Avec mon collègue, le député de Gouin, on a
été obligés de prendre une soirée ou presque avec
la ministre de la Santé et des Services sociaux pour finalement lui
faire comprendre cela et, avec l'aide du ministre des Communications, à
force de débats très passionnés, on est venu à bout
d'adopter -c'est ce que contient le rapport - un amendement qui se tient
debout.
Pour faire le point, d'abord, il faut diviser les enfants de moins de 14
ans et ceux de plus de 14 ans. En ce qui concerne l'enfant de moins de 14 ans,
la solution retenue est la suivante: S'il est âgé de moins de 14
ans, si le bénéficiaire est âgé de moins de 14 ans
et s'il a fait l'objet d'une intervention au sens de l'article... Alors, tout
le monde a accès au dossier, sauf s'il a fait l'objet d'une
décision du Comité de la protection de la jeunesse ou du DPJ et
que la communication du dossier de l'enfant aux parents pourrait causer
préjudice à la santé physique ou mentale de l'enfant.
Donc, règle générale, sauf dans les cas où il y a
eu signalement, où il y a eu une décision du Tribunal de la
jeunesse ou du Comité de la protection de la jeunesse - encore une fois,
même dans ce cas, si la divulgation du dossier médical de l'enfant
était contraire à sa santé - sauf dans ces cas-là,
tout parent a accès au dossier de l'enfant, aura dorénavant
accès, devrais-je dire, au dossier de son enfant s'il est
âgé de moins de 14 ans.
Si l'enfant est âgé de plus de 14 ans, à ce
moment-là, cela prend deux conditions pour refuser l'accès aux
parents. Premièrement, il faut que l'adolescent lui-même refuse;
deuxièmement, il faut que l'établissement de santé ou de
services sociaux détermine que la communication du dossier pourrait
causer préjudice à l'enfant. Outre ces deux exceptions qui
doivent exister de façon concomitante pour permettre le refus de la
divulgation du dossier, le parent aura accès au dossier de l'enfant. Je
pense que c'est la meilleure solution qui a été trouvée,
qui respecte à la fois l'intérêt de l'enfant et le fait que
la majorité des parents qui nous écoutent ce soir ne sont pas
là pour battre leur fille qui serait enceinte ou leur garçon qui
aurait attrapé une maladie vénérienne ou imaginez
n'importe quel cas.
Aussi incroyable que cela puisse paraître - je l'ai dit en
commission parlementaire et je le répète - il a vraiment fallu
convaincre la ministre de la Santé et des Services sociaux que la
majorité des parents sont des gens qui se tiennent debout et qui ont de
l'allure. Cela a pris du temps, cela a pris des mois avant qu'on puisse arriver
à cet amendement qui, dans les circonstances, est définitivement,
à mon point de vue, le meilleur amendement qui pouvait être
présenté.
Quand on regarde par contre l'ensemble du déroulement de ce
processus, on est un peu déçu. D'ailleurs, à ce sujet,
citons la Commission d'accès à l'information qui, dans son
rapport sur les dispositions inconciliables, s'interrogeait sur la pertinence
d'harmoniser le régime d'accès au dossier médical ou
social et le droit de disposer de soi-même reconnu aux personnes de plus
de quatorze ans. La commission recommandait, à la page 101: "La
Commission d'accès à l'information invite donc le gouvernement
à enclencher au plus tôt une réflexion approfondie sur
l'accès exclusif du mineur de quatorze ans ou plus à son dossier
médical ou social. Une telle réflexion devra prendre en compte
les intérêts parfois conflictuels des parents et des enfants, le
droit à l'autonomie - je
comprends que, de l'autre côté, l'enfant a le droit
à l'autonomie, mais on n'est quand même pas pour peinturer le
parent en noir -déjà reconnu par la Loi sur la protection de la
santé publique au mineur de quatorze ans ou plus et, enfin, la situation
particulière du domaine de la protection de la jeunesse."
Donc, le processus de la commission parlementaire sur le projet de loi
28 a failli être lourdement hypothéqué, n'eût
été finalement de la bonne foi et de la vigilance... Le ministre
des Communications ne pouvait pas parler trop fort, c'était sa
collègue, mais l'Opposition a parlé plus fort, parce qu'on n'a
pas cette solidarité ministérielle. Si ma mémoire est
bonne, à l'époque, on a obtenu que tout le dossier soit pris
à nouveau en considération. Le ministre des Communications a
quand même su être très attentif, nous porter une oreille
attentive. Autrement, dans ce type de débat, quand un ministre bute,
malgré le GBS, le gros bon sens, quand on vote, si on est minoritaire,
on peut se faire passer sur le corps. Même s'il est écrit dans le
grand livre d'histoire qu'on a raison, la loi reste là et n'importe quel
ministre, n'importe quel député serait arrivé à
l'hôpital pour prendre connaissance du dossier de son enfant et se serait
fait dire: Bien non, vous avez adopté une loi qui interdisait aux
parents de prendre connaissance du dossier de leur enfant. Imaginez-vous,
est-ce que cela avait une once d'allure de peinturer la société
québécoise de cette façon?
On s'est fait traiter de paternalistes, de réactionnaires, de
négligents et d'irresponsables par certains membres du parti
ministériel lors du débat. Aujourd'hui, on a ici l'amendement
qu'on avait nous-mêmes suggéré. La genèse des
discussions est, pour ceux que cela intéresse, dans le Journal des
débats, et pour ceux qui voudraient comparer, je les invite à
prendre uniquement le texte du projet de loi 28 avec le texte que nous adoptons
maintenant. La différence est éclatante, évidente.
Troisième bloc. J'ai parlé de l'adoption, j'ai
parlé de l'accès des parents au dossier médical de
l'enfant. Le troisième bloc, l'accessibilité par la tarification.
Avec raison, Mme la Présidente, le projet de loi 28 abrogeait diverses
dispositions sectorielles qui autorisaient l'imposition de frais autres que
ceux prévus au règlement sur les frais exigibles pour la
transcription, la reproduction ou la transmission de renseignements ou de
documents. Toutefois, les articles 4 et 6 du projet de loi 28 entendaient
confier au ministre des Affaires municipales le pouvoir de déroger audit
règlement pour fixer en faveur d'une municipalité des frais
différents de ceux prescrits par le gouvernement, et ce, disait-on, aux
seules fins de favoriser l'autofinancement de certaines corporations
municipales. (21 h 10)
En bon français, cela veut dire quoi? Les frais pour obtenir des
copies des documents publics, notamment de la part des municipalités,
devaient être fixés par règlement adopté ici au
Conseil des ministres un mercredi matin. Et, à ce moment-là,
c'est le même règlement qui s'applique, c'est clair. Le projet de
loi initial prévoyait que le ministre des Affaires municipales pouvait,
à sa discrétion, déroger à ce règlement pour
en adopter d'autres pour permettre l'autofinancement des corporations
municipales. On voit tout de suite venir. Les documents sont publics, c'est ce
que l'on fait, c'est la loi sur l'accès à l'information. Si une
municipalité exige 10 $, l'autre 20 $ pour une photocopie, ou comme dans
certains cas que j'ai déjà vus payer 95 $ ou pas loin de 100 $
pour dix photocopies en disant que cela a pris un employé en temps
supplémentaire pour le faire et que cela a pris du temps pour trouver
les documents, et tout cela, parce qu'il faut se rendre compte qu'en dehors de
la Chambre, cette loi-là doit fonctionner en hiver comme en
été et concerne toutes les municipalités du Québec.
Bref, le projet de loi comprenait cette espèce de dérogation qui
était une ouverture comme une porte de grange à travers les
principes fondamentaux de la loi sur l'accès à l'information.
C'est un pouvoir totalement discrétionnaire d'ailleurs qui
était accordé au ministre des Affaires municipales. Et, peu
importe qui est le titulaire de ce ministère, il reste que ce pouvoir,
balisé d'aucune norme précise, inquiétait, à juste
titre d'ailleurs, la Commission d'accès à l'information et les
membres de l'Opposition qui ne voyaient pas là le meilleur moyen
d'assurer aux citoyens l'exercice de leurs droits en matière
d'accès.
Le ministre des Communications presque spontanément - cela a pris
un peu de temps, un peu de réflexions et de consultations - mais a
souscrit finalement à ces arguments et a accepté d'abroger ce
pouvoir discrétionnaire et unilatéral du ministre des Affaires
municipales. Nous ne tenons donc pas à insister ici outre mesure sur ce
cas, si ce n'est pour, d'une part, le rappeler à la mémoire du
ministre et surtout, d'autre part, pour l'exhorter à la plus grande
prudence quand vient le mercredi au "bunker" et que les règlements
passent à la vitesse des rondelles à peu près bien
frappées de la pointe, pour l'inciter à la vigilance sur les
règlements que ses collègues vont apporter avec toujours des
bonnes raisons.
D'ailleurs, ils ont des fonctionnaires qui sont là pour leur
donner de bonnes raisons d'être différents des autres
ministères. Alors donc, la plus grande prudence, la plus grande
vigilance, pour faire en sorte qu'aucune brèche
injustifiée ne vienne hypothéquer la prépondérance
de la loi sur l'accès à l'information. C'est ce que l'on avait
décidé et c'est ce que l'on a fait. Il faut être
cohérents avec nous-mêmes. Évidemment, . il ne faut pas se
leurrer, tout ne sera pas parfait.
Vous m'indiquez qu'il reste deux minutes. J'aurais voulu
évidemment glisser un mot sur d'autres blocs, les renseignements fournis
par un tiers, la multiplicité, vous vous en souviendrez, M. le ministre,
non épurée des lieux d'appel dans certains cas. Je pense
particulièrement à l'article 117, où on dit qu'un
bénéficiaire peut en appeler -tenez-vous bien! - un
bénéficiaire à qui on refuse momentanément
l'accès peut en appeler à la Cour supérieure, à la
Cour provinciale, à la Cour des sessions de la paix, au Tribunal de la
jeunesse ou à la Commission d'accès à l'information, ou
également à la Commission des affaires sociales. Je n'ai jamais
vu cela dans un texte de loi. On donne une ouverture, un appel, il peut en
appeler n'importe où. Il peut peut-être même appeler son
voisin.
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Filion: Alors, la multiplicité non épurée
des lieux d'appel et l'article 124 en ce qui concerne la Commission des valeurs
mobilières du Québec, l'article 117, je l'ai dit, les
renseignements fournis par des tiers, mais tout cela, Mme la Présidente,
finalement, ne sont que des aspects secondaires, accessoires à mon
propos principal. D'abord, encore une fois, le travail a été fait
au meilleur de la connaissance des gens impliqués, mais
deuxièmement - c'est là que je termine mon message - je
réitère cet appel à la vigilance en vous citant un cas. Le
président de la Commission d'accès à l'information est
venu ici témoigner en commission parlementaire sur le projet de loi qui
est le nôtre. Savez-vous ce qu'il nous a dit, Mme la Présidente,
pour montrer à quel point la loi sur l'accès à
l'information et la protection des renseignements confidentiels est fragile?
Les renseignements qu'on demande à l'entrée de l'Assemblée
nationale vont trop loin. Cela nous donne une belle leçon
d'humilité. On a une loi. Évidemment il y a matière
à interprétation - c'est la vie, je le dis. M. Pépin ne
sera sûrement pas fâché que je le dise en Chambre...
La Vice-Présidente: En conclusion, M. le
député.
M. Filion: Je termine, Mme la Présidente. Nos propres
règlements d'entrée à l'Assemblée nationale
contiennent probablement - je vais laisser d'autres que moi se pencher
là-dessus - des demandes de renseignements qui sont contraires à
la loi sur l'accès à l'information et la protection de
renseignements confidentiels. Cela donne une idée jusqu'à quel
point c'est une loi qui est fragile, c'est une loi qui est délicate.
C'est une loi qui demande vigilance, prudence, sagesse. C'est toutes ces bonnes
choses qu'on va souhaiter au ministre des Communications parce que c'est lui
qui l'administre. Merci, Mme la Présidente.
Adoption des amendements et du rapport
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Taillon. Il n'y a pas d'interventions? Le débat étant clos,
est-ce que les amendements qui ont été proposés par le
ministre et qui ont été transmis en vertu de l'article 252 de
notre règlement et qui concernent le projet de loi 28, loi modifiant
diverses dispositions législatives, eu égard à la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels sont adoptés?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport, tel
qu'amendé et qui concerne le projet de loi 28 est adopté?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui, Mme la Présidente, je demanderais
l'ajournement de nos travaux à demain 10 heures.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc
ajourner nos travaux à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 17)