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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mercredi 9 décembre 1987 - Vol. 29 N° 153

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Moment de recueillement.

Veuillez vous asseoir.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes. À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous permettez, nous allons procéder aux affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, voulez-vous appeler l'article b du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi 94

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux présente le projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille. M. le ministre.

M. Robert Dutil

M. Dutil: M. le Président, ce projet de loi institue un organisme, le Conseil de la famille, qui aura pour fonction de conseiller le ministre sur toute question d'intérêt familial. Le conseil assumera une partie des fonctions du Conseil des affaires sociales et de la famille dont le nom et la loi son modifiés en conséquence.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se saisir...

M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, ma question est simple. Est-ce que le ministre sntend consulter, tenir une commission parlementaire, sur ledit projet de loi?

Le Président: M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Dutil: M. le Président, les consultations ont été faites dans les années passées. Nous ne prévoyons pas tenir une commission parlementaire supplémentaire là-dessus.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir du projet de loi portant le numéro 94?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Toujours à l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article d, M. le Président.

Projet de loi 230

Le Président: L'article d du feuilleton. J'ai reçu le rapport de la Direction de la législation sur le projet de loi portant le numéro 230, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. La Direction de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement concernant les projets de loi d'intérêt privé. J'aimerais déposer ledit rapport.

Mme la députée de Dorion présente le projet de loi d'intérêt privé portant le numéro 230, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Est-ce que l'Assemblée accepte de se saisir de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement, votre motion de déférence.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Cette motion de déférence concernant le projet de loi 230 est-elle acceptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. C'est préférable, adopté.

Dépôt de documents. M. le ministre du Tourisme.

Rapports annuels du ministère du

Tourisme et de la Société du

Palais des congrès de Montréal

M. Gratton: M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel du ministère du Tourisme pour l'année 1986-1987 ainsi que le rapport annuel de la Société du Palais des congrès de Montréal pour la même année.

Le Président: M. le ministre, vos deux

documents sont maintenant déposés.

Rapports de commissions. M. le président de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et député de Nicolet.

Étude détaillée du projet de loi 15

M. Richard: Je dépose le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui a siégé le 26 novembre et le 7 décembre 1987 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur les terres publiques agricoles et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été adopté avec amendements.

Étude détaillée du projet de loi 99

Je dépose aussi le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui a siégé le 8 décembre dernier afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes. Le projet de loi a été adopté sans amendement. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Nicolet, vos deux rapports sont maintenant déposés.

Toujours à l'étape des rapports de commissions. M. le président de la commission de la culture et député de Bourget.

Audition du président-directeur général de Radio-Québec

M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de la culture, qui a siégé le 8 décembre 1987 pour entendre M. Jacques Girard, président-directeur général de Radio-Québec afin qu'il explique le changement de programmation concernant la retransmission de la période de questions de l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président: M. le député de Bourget, votre rapport est déposé.

Dépôt de pétitions.

Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur une question de fait personnel. Nous allons maintenant procéder à la période de questions et réponses orales immédiatement. Je vais reconnaître en première principale, M. le leader adjoint de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Accord sur le libre-échange et article 11 du GATT

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Selon diverses sources, le texte final sur le libre-échange ne fait aucune référence à l'article 11 de l'accord du GATT. Un tel article aurait permis au gouvernement du Québec de contrôler l'importation des produits agricoles américains. On se rappelle que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation s'était engagé, lors du congrès de l'UPA, vendredi dernier, à demander et obtenir du gouvernement fédéral l'inclusion d'un tel article. Ma question s'adresse au ministre du Commerce extérieur. Le ministre peut-il nous confirmer que l'absence de cet article 11 du GATT dans le texte final vient du fait qu'il n'a aucunement demandé l'inclusion d'un tel article puisqu'il juge cette exigence inutile?

Le Président: M. le ministre du Commerce extérieur et du Développement technologique. M. le ministre.

M. MacDonald: M. le Président, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a voulu avoir une sécurité additionnelle concernant la possibilité de contingenter des importations de diverses denrées agricoles au Québec. Sur cette demande, nous avons effectivement pris avis et fait des démarches. Je n'ai pas été le seul représentant du Québec, au-delà du ministre de l'Agriculture lui-même; à faire ces démarches auprès d'Ottawa. Même si l'interprétation qui nous a été donnée, que le traité devant respecter en tout temps les règles du GATT, que ce qui n'était pas prévu devrait être contenu en quelque sorte dans la façon de faire du GATT, même s'il y avait cela et qu'on croyait qu'il y avait sécurité pour la possibilité de contingenter, le ministre lui-même a utilisé l'expression "trop fort ne casse pas" et, sur sa représentation, nous avons fait les démarches nécessaires.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, en additionnelle.

M. Jolivet: Est-ce que le ministre trouve toujours inutile l'inclusion d'un tel article?

Le Président: M. le ministre du Commerce extérieur et du Développement technologique.

M. MacOonald: Je ne suis pas un légiste, je prends conseil. Nos conseillers nous ont dit qu'il y avait dans les prévisions du texte préliminaire, tel qu'on le connaissait, suffisamment de protection. Mais, je le répète, nous croyions - et mon collègue particulièrement - qu'il était nécessaire ou qu'il valait mieux ajouter cette confirmation, c'est pourquoi nous avons fait les démarches.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: Est-ce que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation peut maintenant reconnaître que l'engagement qu'il a pris devant l'UPA était dans un but précis, soit de sauver la face, alors qu'il savait très bien que son collègue du Commerce extérieur ne voyait même pas l'utilité de mettre un tel article dans le contexte du libre-échange?

Le Président: En réponse à une question additionnelle, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le ministre.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aimerais indiquer au député qu'à la page 12 de l'accord - l'accord préliminaire, j'entends - on réfère au fait que les deux pays s'entendent, s'engagent à ne pas se prévaloir de dispositions susceptibles de limiter l'entrée des produits et cela à l'intérieur du volet de l'agriculture. On réfère aussi à une exception pour les mesures quantitatives en regard de la qualité des produits en vertu de l'article 20 du GATT. Par déduction, mes services, les services d'analyse, d'études économiques et du contentieux du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec ont jugé qu'il était plus "sécure", qu'il était préférable, pour protéger adéquatement l'agriculture québécoise, de demander une référence précise à l'article 11 des accords du GATT. C'est ce qui a été demandé non seulement par la voix de mon collègue, mais aussi par la mienne, comme ministre de l'Agriculture, lors de ma rencontre avec le ministre, M. Wise, à Toronto, lors de mes recontres avec M. Wise et M. Blais, la semaine dernière. (10 h 20)

J'ai indiqué au congrès de l'Union des producteurs agricoles, et je termine là-dessus, qu'à la lumière de nos présentations et surtout en regard de la pertinence de notre argumentation et à la lumière des échanges que j'ai eus avec les représentants fédéraux, j'avais tous les motifs raisonnables et probables de croire que la demande du Québec serait acceptée. Pour le reste, on attend l'entente. Dès qu'on l'aura, on va l'étudier, on va l'analyser et, après cela, on commentera, M. le Président.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, en additionnelle.

M. Jolivet: M. le Président, le ministre est-il prêt à reconnaître ce qu'il a dit devant les agriculteurs, la semaine dernière, à savoir que si l'article 11 ne se trouve pas dans l'accord, il va demander de ne point le signer? Le ministre maintient-il toujours cela?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: M. le Président, si le député veut faire référence à mes propos, on pourra regarder la cassette ensemble, M. le député, parce qu'on me l'a fait parvenir. Il est facile, vous savez, d'interpréter comme vous le faites. Ce sont des dossiers suffisamment sérieux qui devraient témoigner, de votre part, davantage de sens des responsabilités, M. le député.

Je dis ceci: J'ai indiqué très clairement qu'en ce qui me concerne comme ministre de l'Agriculture, on se devait de rechercher une protection adéquate et que j'avais formulé des représentations pour que l'article 11 apparaisse très clairement dans l'entente finale qui sera produite d'ici à quelques jours. De plus, j'ai indiqué que si l'article 11 n'était pas inclus ou encore, si on n'avait pas un niveau de protection accru concernant l'entrée de produits américains sur le marché canadien, particulièrement le marché québécois, en faisant référence notamment au yogourt, à la crème glacée et aux produits transformés de la volaille, je formulerais des recommandations dans ce sens au cabinet des ministres par la suite, mais une fois que l'entente sera connue.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, ma question additionnelle s'adresse au premier ministre.

Le Président: En additionnelle.

M. Chevrette: Le premier ministre considère-t-il toujours que ses ministres sont très unifiés, très efficaces alors qu'un juge que c'est inutile et que l'autre dit que c'est indispensable? J'aimerais avoir la position du premier ministre dans cela?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, ce que le chef de l'Opposition doit constater, c'est que, dans les deux cas, les ministres ont une approche concrète. Ce n'est pas une cassette, je reprends l'expression du chef de l'Opposition dans le journal La Presse aujourd'hui: "II faut des projets concrets."

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Bourassa: Et il dit que c'est une cassette, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourassa: Je dis au chef de l'Opposition que nous avons fait des

recommandations. Le ministre du Commerce extérieur a discuté de cette question. Le ministre de l'Agriculture également. J'en ai moi-même parlé au premier ministre du Canada. Attendez donc de voir le texte.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: Je suis heureux de constater que j'inspire le premier ministre dans ses réponses. Ma question est la suivante. Comment voulez-vous, comme bon négociateur - comme vous le dites, excellent négociateur, présent à tous les instants dans le processus de négociation - comment pouvez-vous avoir de l'efficacité en négociation quand le principal porte-parole, qui est le ministre du Commerce extérieur, dit que c'est une clause inutile et que l'autre ministre va se pavaner devant les agriculteurs en disant: C'est indispensable, je vais vous défendre à mort?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition marche encore sur son erre d'aller de la fin de semaine. Ce que je veux lui dire, c'est répéter ce qu'a dit le ministre du Commerce extérieur. À la rigueur, à la lettre du texte, possiblement, une interprétation juridique aurait pu nous permettre de conclure que ce n'était pas absolument nécessaire. Dans le cas où il y aurait un doute, de manière à être protégé au maximum, le ministre de l'Agriculture a fait valoir son point de vue. Nous sommes tombés tous les trois d'accord. J'ai dit que j'avais moi-même fait des représentations au premier ministre du Canada. Et on verra les résultats.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, toujours en additionnelle.

M. Chevrette: Est-ce que le premier ministre considère que l'article 11 est indispensable, M. le Président, pour véritablement apporter la protection nécessaire à l'agriculture québécoise?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Lorsque nous aurons le texte juridique, nous serons en mesure de conclure, si, oui ou non, nous avons la protection indispensable que nous réclamions.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Est-ce que le premier ministre considère normal, au moins 48 heures après la signature de l'entente, qu'il ne sache pas encore, comme premier ministre du Québec, qui a suivi à la lettre à chaque instant du jour et de la nuit, les négociations intensives, est-ce qu'il est normal que le premier ministre du Québec, qui a affirmé en cette Chambre avoir assumé un leadership incontesté et incontestable dans tout ce processus de négociations, ne sache pas, après 48 heures, si l'agriculture québécoise est protégée ou non, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, nous avons suivi le dossier de très près, constamment, particulièrement ces récents jours, y compris durant la fin de semaine. Il est normal que le chef du gouvernement agisse d'une façon prudente et réfléchie.

J'ai répondu hier au chef de l'Opposition que je ne fonctionnais pas par ouï-dire ou indirectement. J'attends que mes conseillers obtiennent le texte, demain, après-demain ou vendredi. Nous voulons l'examiner nous-mêmes, avec nos propres conseillers. Après ce moment, nous pourrons donner des réponses définitives et certaines...

Une voix: C'est cela.

M. Bourassa: ...non pas à la suite d'informations qui ont pu nous être communiquées, mais parce que nous l'aurons constaté nous-mêmes. Je pense que ce réalisme devrait être partagé par l'Opposition, même si ça lui est particulièrement difficile.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il a communiqué avec le premier ministre canadien pour obtenir une copie du texte? Comme premier ministre, un des dix partenaires de la fédération canadienne, est-ce qu'il a demandé une copie au premier ministre canadien?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, quand même, est-ce qu'on doit demander une copie? C'est évident... Le premier ministre du Canada a communiqué avec moi hier après-midi; nous avons brièvement parlé du contenu de l'entente et nous aurons une copie aussitôt qu'elle sera prête.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître une deuxième question principale, ce matin. M. le député de Roberval, vous avez la parole.

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Roberval, en principale.

La construction de frégates et

l'avenir du chantier maritime

de Sorel-Tracy

M. Gauthier: M. le Président, c'est maintenant connu, le plan de redressement préparé par les autorités de Marine Industrie prévoit que le chantier maritime de Sorel fermera. Le ministre de l'Industrie et du Commerce pourrait-il nous indiquer si, oui ou non, et de façon claire, pour une fois, l'obtention de deux frégates est la condition minimale pour garder ouvert le chantier de Sorel?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson: M. le Président, je vais répéter ce qui est en cause, avec la même clarté avec laquelle je l'ai déjà fait. Lorsque nous sommes devenus propriétaires de l'ensemble des chantiers maritimes du Québec, nous avions des responsabilités à prendre afin de maintenir les emplois. J'ai toujours indiqué, je continue à indiquer, et j'ai demandé à la direction de Marine de bien vouloir me supporter avec des scénarios éventuels, que nous sommes soucieux du maintien de l'emploi, que le maintien de l'emploi passe par une variété d'activités industrielles majeures, navales et en spécialisations de toutes sortes, dans les trois sites qui sont propriété de Marine Industrie ltée et qu'à ce titre et afin de donner suite à nos engagements de maintenir les emplois, nous devons avoir une rentabilité qui nous permette de faire des investissements. Cette rentabilité dépend, je le répète, je l'ai déjà dit, de l'attribution de la construction d'au moins deux frégates par le gouvernement fédéral à Marine Industrie ltée.

Je constate avec le député et l'ensemble des membres de cette Chambre qu'il y a un mur qui s'est dressé à Ottawa devant cette revendication en matière de développement économique pour le Québec. C'est la raison pour laquelle j'ai porté ce dossier sur la place publique il y a quelque temps, mais je suis préoccupé par le maintien des emplois et il faut deux frégates pour nous assurer du maintien des emplois sur l'ensemble du fleuve Saint-Laurent. (10 h 30)

Le Président: M. le député de Roberval, en additionnelle.

M. Gauthier: M. le Président, comment le ministre de l'Industrie et du Commerce peut-il justifier son attitude et sa revendication minimale, compte tenu du fait que deux frégates sont nécessaires pour sauver la division maritime de Sorel, compte tenu aussi du fait qu'il y a Lauzon où l'avenir à court terme nécessite une partie des contrats? Comment peut-il justifier son attitude de ministre de l'Industrie et du Commerce qui n'a revendiqué que le strict minimum pour sauver la division maritime de Sorel?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson: Cela appelle des distinctions, M. le Président, très brièvement. D'abord, quant à la division maritime, la construction navale à Sorel, il y a des contrats en cours et j'ai déjà fait état du fait que les contrats en cours nous amènent, en matière de construction navale dans différents sites, à 1991 et que par ailleurs, afin de maintenir des opérations, afin de nous donner la rentabilité qui nous permet d'investir et de donner suite à nos engagements à nous - et nous entendons y donner suite - il faut minimalement oui, deux frégates, mais aussi - le député oublie souvent - deux destroyers afin de nous préparer pour la maîtrise d'oeuvre éventuelle d'un programme à plus long terme, celui de la construction de sous-marins. C'est donc de quatre navires dont il a toujours été question comme revendications du Québec. Ce sont nos engagements qui peuvent prendre forme à partir du moment où le gouvernement fédéral, quant à lui, tient ses engagements de maintenir les emplois sur le fleuve Saint-Laurent. Nous attendons que le gouvernement fédéral tienne ses engagements.

Le Président: M. le député de Roberval, en additionnelle.

M. Gauthier: M. le Président, comment le ministre peut-il m'expliquer le fait que les autorités de Marine Industrie ltée, qui semblent être en possession d'informations que le ministre n'a pas livrées, ont prévu, à toutes fins utiles, dans le plan, la fermeture de la division maritime de Sorel et seraient, selon nos informations, de plain-pied dans ce plan de restructuration prévoyant la fermeture? Lui qui nous avait caché qu'il savait depuis six mois qu'on n'aurait pas le contrat principal nous aurait-il caché qu'on a peu de chances d'avoir maintenant quelque retombée que ce soit dans ce contrat, puisque les autorités de Marine se gouvernent, en conséquence, comme si elles avaient cette information?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson: Je dois dire que le député mêle actuellement certaines choses. Il y a, d'une part, des engagements que nous avons, comme actionnaires, de nous assurer de la

rentabilité de cette entreprise qu'est Marine Industrie. Cela explique notamment, et c'est dans le cours normal d'affaires bien conduites dans les circonstances financières qu'on connaît, qu'il y a eu des décisions quant à des mises à pied, des restructurations majeures, je dirais, au siège social notamment, ce qui se répercute, à certains égards, dans les chantiers et c'est connu; mais c'est dans le cours normal des affaires d'une entreprise qui entend être bien gérée sans frais généraux exagérés.

Il y a le deuxième dossier, le redressement à long terme dans l'activité de nos trois chantiers et, à cet égard, j'ai demandé à la direction de Marine de me préparer des scénarios. Ils sont en cours de préparation, ils seront soumis éventuellement aux actionnaires - il y a également le groupe français qui est un actionnaire de Marine Industrie - et le comité prévu au début de l'année, en janvier dernier, constitué des travailleurs des différents chantiers et de la direction sera lui aussi saisi d'abord - on n'apprendra pas cela par les journaux - des plans de redressement éventuel.

Le Président: M. le député de Roberval, en additionnelle.

M. Gauthier: M. le Président, comment le ministre veut-il qu'on prête foi aux réponses qu'il nous donne quand on parle déjà de deux chantiers plutôt que de trois au Québec, compte tenu du fait qu'à la Vickers, en plus de 700 travailleurs qui sont actuellement sur l'aide sociale, il y en aura 100 de plus à Noël? Comment veut-il qu'on le juge crédible quand il nous dit qu'il veut "sauver" les chantiers maritimes alors qu'il a déjà réussi à en fermer un?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson: Je suis dans la situation un peu difficile où on doit nécessairement faire appel à des données et des éléments techniques afin d'expliquer le dossier. Je répète, pour garder cela le plus simple possible, qu'il y a, d'une part, les engagements qu'un bon gestionnaire doit prendre, auxquels il doit donner suite afin de s'assurer que l'entreprise est bien menée, que les frais généraux ne sont pas exagérés, qu'il n'y a pas trop de travailleurs dans les bureaux ou autrement - syndiqués ou non syndiqués, cela n'a rien à voir - compte tenu du carnet de commandes.

On n'est pas nécessairement pour garder des gens qui s'adonnent à être là même s'il n'y a pas de commandes. C'est, de façon saisonnière, dans le cours normal des affaires très difficiles qu'on peut attribuer éventuellement certains de nos gestes. Ne pas confondre cela avec un redressement à long terme à l'égard duquel nous exigeons, afin d'assurer la rentabilité qui permet des investissements en spécialisation, deux frégates plus deux destroyers, donc l'engagement du gouvernement fédéral pour quatre navires, pour l'ensemble de Marine Industrie pour qu'elle soit rentable et puisse spécialiser ses sites.

Le Président: Je vais reconnaître une additionnelle.

M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: Merci, M. le Président. En additionnelle au ministre de l'Industrie et du Commerce. N'est-il pas vrai que l'administration de Marine a nié l'information de la fermeture de la division navale de Sorel?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Johnson: Je remercie le député pour son intérêt soutenu, je dirais quotidien, sinon horaire pour...

Des voix: Ha! Ha! Ha! Bravo!

M. Johnson: ...le dossier. Cela me permet de réitérer que, de fait, il y a des contrats en cours, en construction navale à Sorel-Tracy et qu'il n'est pas question de fermer la division navale maritime de Sorel-Tracy. Il y a des contrats en cours pour des mois et des mois à venir, d'une part.

Ce que la direction a nié - autre chose que ce que je viens d'expliquer - ce seraient les annonces tonitruantes qui devaient venir dans les jours prochains, disant que nos coactionnaires français manifesteraient de l'impatience et demanderaient toutes sortes d'amendements à des conventions d'actionnaires existantes. Cette semaine, comme à toutes les deuxièmes semaines de décembre depuis des années que des Français sont actionnaires de Marine Industrie, c'est l'assemblée régulière qui est en cause.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître une troisième question principale. M. le député de Verchères.

Les listes d'attente dans les services de protection de la jeunesse

M. Charbonneau: M. le Président, sur un autre sujet qui nécessiterait l'intérêt horaire du gouvernement. Hier, la ministre de la Santé et des Services sociaux a dit que plus d'argent ne changerait pas le problème et n'éliminerait pas les listes d'attente énormes qui restent actuellement, malgré les fonds qu'elle a consacrés à la protection de la jeunesse. Or, hier soir, à l'émission Le Point, le coordonnateur provincial des

admissions soutenait, au contraire, que des ressources humaines additionnelles, et donc des ressources financières additionnelles, permettraient de régler le problème et permettraient finalement au Québec de rejoindre l'Ontario qui, actuellement, a un temps d'attente de douze heures, alors qu'au Québec, on a un temps d'attente de quatre à six mois avant que les signalements puissent être évalués par les travailleurs sociaux des services sociaux.

Le Président: Votre question.

M. Charbonneau: La question que je voudrais poser à la ministre de la Santé et des Services sociaux est la suivante. La ministre ne convient-elle pas que d'attendre les conclusions d'un comité qu'elle a dit avoir mis sur pied il y a quelque temps est une façon de retarder le problème et de reporter sur le dos des enfants maltraités la responsabilité du gouvernement de mettre des moyens financiers adéquats, alors que le gouvernement dit avoir les moyens et être en période de vaches grasses, selon les propos mêmes du ministre des Finances?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je pense que, si le député de Verchères avait bien écouté hier - à moins que je me sois mal exprimée, ce dont je doute - je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas besoin de ressources supplémentaires. J'ai indiqué que nous avions déjà injecté des ressources supplémentaires et qu'il ne fallait pas fonder nos interventions strictement sur l'ajout de ressources financières, mais qu'il fallait également examiner le fonctionnement du Comité de la protection de la jeunesse quant au type d'interventions qu'il fait et quant au fonctionnement des directions de la protection de la jeunesse. Je pense que nous n'avons pas écarté, et cela a d'ailleurs été confirmé par le premier ministre, que, s'il y a des besoins supplémentaires - et je pense qu'il y en a - nous devrons injecter des deniers. Et, en ce sens, il n'y a pas de problème. Le député de Verchères a peut-être mal compris. Le député de Verchères a peut-être aussi entendu le coordonnateur dire que ces problèmes subsistaient depuis six ou sept ans. Ce dernier a indiqué aussi, en fin d'émission, que la ministre avait fait des efforts, travaillait pour corriger cette situation et qu'elle en était préoccupée.

M. Charbonneau: M. le Président.

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: Puisque la ministre est d'accord avec nous pour dire que cela prend des fonds additionnels à ceux qu'elle a déjà injectés, quand va-t-elle demander de l'argent au Conseil du trésor et combien a-t-elle demandé? Est-ce qu'elle est d'accord avec les gens du milieu des centres de services sociaux et ceux du milieu de la protection de la jeunesse sur le fait qu'il faudrait 10 000 000 $ additionnels annuellement pour faire face à la situation et pour permettre au Québec de se comporter de la même façon qu'on se comporte en Ontario?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. (10 h 40)

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'espère que le député de Verchères, alors qu'il était membre du gouvernement, non pas membre du gouvernement, mais alors qu'il faisait partie du côté ministériel a déployé les mêmes efforts pour obtenir de l'argent. Comme je le disais hier, une partie des problèmes que nous avons aujourd'hui sont dus au transfert de personnel, et c'est indiqué aussi par les centres de services sociaux, le transfert souvent arbitraire de personnel qui était affecté à la jeunesse et qu'on a transféré aux CLSC sans apporter la compensation suffisante. Nous essayons de le corriger. Je ne peux pas répondre si c'est de 10 000 000 $ dont on a besoin. Il est certain qu'on aura besoin de sommes additionnelles et, en temps et lieu, j'irai les chercher auprès du Conseil du trésor.

Le Président: Toujours en additionnelle, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui. C'est un problème urgent, en fin de compte, que vivent actuellement les jeunes qui sont en difficulté. La ministre - après le dépôt du projet de plan de travail que le CRSSS a déposé en septembre 1987, un plan de travail sur les services qu'il pourrait donner pour les jeunes en difficulté, c'est depuis le mois de septembre 1987 que ce plan de travail a été déposé par le CRSSS - entend-elle y donner suite ou si, tout simplement, la ministre veut laisser entendre que les intervenants dans les CLSC et dans les directions d'écoles qui n'ont pas pris toutes leurs responsabilités ne sont pas aptes à remplir les exigences demandées par la ministre.

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: Je dois dire que j'ai un peu de difficulté à saisir tous les éléments que la députée de Marie-Victorin a soulevés dans sa question. En ce qui a trait à un document de la conférence des CRSSS, selon ce que je crois comprendre, ça fait partie de l'ensemble des documents qui sont

étudiés et qui serviront également de fondement aux décisions que nous devrons prendre pour le prochain budget.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader de l'Opposition, en principale. M. le leader de l'Opposition en principale.

M. Chevrette: II ne faudrait pas demander au vrai ministre des Affaires sociales.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en principale.

Grève des employés de bureau d'Hydro-Québec

M. Gendron: Oui, M. le Président. Hier et aujourd'hui, dans un mouvement spontané, les 6000 employés de bureau d'Hydro-Québec entamaient un débrayage illimité pour protester contre la direction d'Hydro-Québec. Il faut comprendre que le 14 mai 1986, ces employés signaient une convention collective ne prévoyant aucune augmentation de salaire pour la première année de convention en échange de clauses normatives importantes sur la formation, la création de postes permanents et les changements technologiques. Depuis cette date du 14 mai 1986, la direction refuse systématiquement d'appliquer la convention collective. D'ailleurs, le président, M. Coulombe, a indiqué que l'impact budgétaire des clauses sur la formation prenait des proportions budgétaires difficiles à évaluer, qu'il pourrait être énorme et qu'il faudrait s'asseoir pour trouver autre chose.

La question que je pose au ministre de l'Énergie et des Ressources est: Le ministre de l'Énergie et des Ressources considère-t-il normal que la direction d'Hydro-Québec signe une convention collective et, par la suite, refuse de l'appliquer sous prétexte qu'elle n'a pas évalué les coûts directs réels?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources. M. le ministre.

M. Ciaccia: Évidemment, le leader de l'Opposition donne une version des faits. Ce n'est pas la version d'Hydro-Québec. Il y a des griefs. Mais, Hydro-Québec affirme qu'elle applique la convention. C'est une question d'interprétation. Au moment où on se parle, il y a un débrayage illégal. Je ne veux pas ajouter aux difficultés. Je veux permettre à Hydro-Québec et aux parties de s'entendre, de discuter et de pouvoir régler leurs différends, pour le moment. Pour cette raison, je n'ajouterai pas d'autres éléments à la question du leader de l'Opposition.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, toujours en additionnelle.

M. Gendron: Comment pouvons-nous comprendre, selon la réponse du ministre qu'une direction qui appliquerait la convention collective se ramasse, dans une très courte période de temps, avec plus de 2500 griefs?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, vous êtes d'accord qu'il y a un débrayage illégal. Alors, je vais répéter la réponse que je vous ai donnée. Je ne veux pas ajouter aux problèmes qui existent présentement. Je veux permettre aux dirigeants d'Hydro-Québec d'essayer de régler les conflits qui existent et de rencontrer les parties intéressées. Je rencontre moi-même les représentants d'Hydro-Québec aujourd'hui pour en discuter plus longuement. Pour le moment, pour agir de façon responsable, je ne veux pas ajouter de commentaires.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle.

M. Gendron: Est-ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources a l'intention, lors de sa rencontre avec la direction - il vient de nous l'annoncer - d'indiquer aux dirigeants d'Hydro-Québec que pour éviter une grève illégale, une des meilleures façons, c'est de respecter la convention collective signée?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Je trouve un peu curieux, sans dire...

Une voix: Elle est bonne.

M. Ciaccia: ...irresponsable, le jugement que le leader de l'Opposition porte. Vous avez jugé, vous, qu'Hydro-Québec n'a pas respecté la convention collective. Je ne suis pas arrivé à cette conclusion.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle.

M. Gendron: M. le Président, ce que je trouve irresponsable, ce sont les propos du ministre de l'Énergie et des Ressources. Je n'ai pas jugé. Il y a 6000 travailleurs qui sont en grève aujourd'hui. La question, c'est qu'ils prétendent, basé sur un nombre de griefs exagéré, qu'il y a irrespect de la convention collective. Est-ce que, à tout le moins, le ministre s'engage à en discuter avec la direction d'Hydro-Québec, soit d'assumer leurs responsabilités par rapport aux clauses de la convention collective?

Le Président: M. le ministre de

l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Je ne sais pas si le leader de l'Opposition est en bonne posture aujourd'hui pour nous faire la leçon sur le respect des conventions avec les employés de l'État quand...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre!

M. Ciaccia: ...lui-même faisait partie d'un gouvernement qui a coupé, qui n'a pas respecté ses engagements envers ses employés.

Une voix: C'est cela!

M. Ciaccia: Si les parties sont de bonne foi - et je dois présumer qu'elles veulent l'être - je pense que la première chose à faire, ce serait d'arrêter la grève illégale. Si on a des griefs, il y a des mesures, des moyens de discuter des griefs sans procéder par une grève illégale. Cependant, je vais rencontrer les représentants d'Hydro-Québec; et, pour le moment, je laisse à Hydro-Québec le soin de discuter et d'essayer d'en venir à une entente de règlement avec toutes les parties intéressées.

Le Président: Je vais reconnaître, maintenant, en principale, M. le député de Mercier.

La démolition du couvent centenaire de Montmagny

M. Godin: M. le Président, je vous remercie.

Une voix: Oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: Ma question porte sur le couvent de Montmagny, M. le Président.

Une voix: Pardonnez-moi...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le député de Mercier, en principale.

M. Godin: Le bélier mécanique enthousiaste de la ville de Montmagny a rasé un couvent de 110 ans et la ministre, marraine des biens culturels, n'a rien fait à ce jour. Qu'est-ce qu'elle compte faire pour que les coupables soient poursuivis? Rien n'a été fait, Mme la ministre. Que comptez-vous faire pour que les coupables soient poursuivis et punis?

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: Dans le dossier de Montmagny... Le député a raison, il n'existe pas au Québec, en ce moment, un consensus quant au respect du patrimoine. Je dois dire - si j'ai bien compris sa question, c'est sur le dossier de Montmagny... Je pense que cela touche au patrimoine dans l'ensemble du Québec aussi et c'est pour cela que j'ai formé un comité de travail. Il travaille en ce moment sur le dossier du patrimoine; il remettra un rapport dans six mois et il nous donnera des recommandations comme nous en avons eu dans le rapport Sauvageau sur les bibliothèques. De plus, j'ai rétabli au ministère une Direction du patrimoine qui avait été discontinuée par l'ancienne administration.

Quant au dossier de Montmagny, il suit son cours et s'il faut prendre des mesures juridiques, nous les prendrons, M. le Président.

Le Président: M. le député de Mercier, en additionnelle.

M. Godin: Est-ce que la ministre va déposer le rapport d'enquête qui se fait présentement avant que nous ajournions pour les fêtes?

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: Je devrai en aviser le député de Mercier, M. le Président. Je prends avis de sa dernière question.

Le Président: M. le député de Saint-Jacques, en principale ou en additionnelle?

M. Boulerice: En additionnelle, M. le Président...

Le Président: En additionnelle, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: ...sur le même sujet, mais cette fois-ci, elle est adressée à M. le ministre de la Justice, Procureur général, Solliciteur général, 36 métiers, 36 misères.

Une voix: En additionnelle. M. Boulerice: En additionnelle. Le Président: En additionnelle.

M. Boulerice: Votre collègue... Est-ce que...

Des voix: Hou! Hou!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de... Je vous avais reconnu en additionnelle, M. le député de Saint-Jacques. (10 h 50)

M. Boulerice: Est-ce que le ministre de la Justice peut confirmer ce que la ministre des Affaires culturelles disait le 3 juin 1987: Les affaires culturelles ont demandé au ministre de la Justice de procéder à une enquête sur les événements qui ont entouré la vente et la démolition du vieux couvent? Y a-t-il eu enquête? Et elle ajoutait: On a reçu une opinion du ministre de la Justice qui est arrivée au ministère des Affaires culturelles. L'opinion a-t-elle été donnée? Et pouvez-vous la déposer?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Marx: M. le Président, j'aimerais assurer le député que je n'ai pas de misère. En ce qui concerne sa question, j'en prends avis et je vais essayer d'avoir la réponse demain.

Le Président: M. le député de Shefford, en additionnelle?

M. Paré: Oui, en additionnelle.

Le Président: M. le député de Shefford, en additionnelle.

M. Paré: Oui, j'aimerais savoir comment le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation explique que la Société d'habitation du Québec, une société d'État, dont le ministre a l'autorité, a cédé l'immeuble pour 1 $ le vendredi et que cet immeuble a été démoli le samedi, sans que la société d'État n'ait respecté le délai de 60 jours d'avis, tel que stipulé dans la loi?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation.

M. Bourbeau: M. le Président, le député de Shefford fait état d'un délai qui n'aurait pas été respecté. Je dois dire que les faits ne sont pas si clairs que cela. Et, quand on regarde l'ensemble du dossier, il n'est pas très évident que les délais n'aient pas été respectés. Premièrement, qui devait envoyer les avis? Et, deuxièmement, qui était responsable de la situation? Tout ce que je peux dire, c'est que la SHQ a cédé l'immeuble pour 1 $. Je comprends pourquoi elle l'a fait d'ailleurs, cela lui coûtait environ 100 000 $ pour le garder, n'ayant pas d'usage pour l'immeuble. Et ce n'est pas la SHQ qui a démoli l'immeuble, cela a été fait par la municipalité.

Le Président: M. le député de Shefford, en additionnelle.

M. Paré: En additionnelle. Si le ministre laisse entendre que l'avis aurait été donné dans les délais prescrits par la loi, est-il prêt à déposer cet avis de 60 jours?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation.

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas dit que l'avis avait été donné, j'ai dit qu'il y a une espèce d'incertitude quant à la nécessité. Tout ce que je peux dire au député, c'est que la SHQ a vendu l'immeuble pour 1 $, qu'elle n'a joué aucun rôle dans la démolition du couvent de Montmagny. C'est la municipalité qui était propriétaire du couvent et qui a pris la décision. Semble-t-il qu'elle soit prête à vivre avec sa décision.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître, en principale, M. le député d'Ungava.

L'avenir de MurdochvUle et des ex-travailleurs de Mines Gaspé

M. Claveau: Merci, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Claveau: M. le Président, j'arrive de Murdochville où j'ai eu l'occasion de rencontrer l'exécutif du Syndicat des métallos, l'Assocation des ex-travailleurs de Mines Gaspé, les marchands, le comité de citoyens, le maire, des retraités vivant à Murdochville, etc. J'ai pu constater que, à cause des hésitations et des volte-face de ce gouvernement depuis plus de huit mois, on a créé un climat d'incertitude, un climat de méfiance qui est devenu presque invivable pour qui que ce soit qui demeure à Murdochville. Ma question au ministre délégué aux Mines est la suivante: quand entend-il mettre fin à ce suspense indécent et nous faire connaître, ainsi qu'à la population de Murdochville, les intérêts de son gouvernement quant à l'avenir de Murdochville et des ex-travailleurs de Mines Gaspé?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre délégué aux Mines et délégué aux Affaires autochtones. Allez, M. le ministre.

M. Savoie: M. le Président, le député d'Ungava peut se compter chanceux parce qu'il a vraiment commencé sa question en vertu de l'article 77, alinéa 5, du règlement qui dit: On ne doit pas faire des déclarations de nature à susciter un débat. C'est ce qu'il a fait. Au début de ses propos, il a fait part de tout un ensemble de situations qui sont fausses.

Notre gouvernement, depuis le début,

depuis le feu du 1er avril 1987, s'est impliqué activement dans ce dossier, et non seulement le ministre délégué aux Mines, mais tout un ensemble de personnes: le député de Gaspé, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, le ministre responsable du Développement régional, le ministre des Affaires municipales, le ministre des Finances et le député de Bonaventure se sont tous impliqués dans ce dossier et on essaie d'apporter une solution d'ensemble pour la région de Murdochville, un programme d'exploration, un programme de relance pour la municipalité. On s'est impliqué pour un montant de 2 500 000 $. Et vous revenez constamment à la charge!

D'ailleurs, je voudrais bien savoir ce que vous avez dit aux 25, 30 mineurs qui ont des résidences et qui n'ont pas encore trouvé d'emploi à l'extérieur de Murdochville. Je me demande ce que vous leur avez dit! Parce que c'est à la suite de votre visite qu'ils sont descendus dans les rues. Je me demande si c'est cela, votre rôle comme député de l'Opposition.

Une voix: Bravo! Très bien!

M. Claveau: M. le Président, c'est que les mineurs attendent ce que le ministre va dire.

Le Président: Un instant! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Ungava, avant d'adresser la parole, vous devez être reconnu. Je vous reconnais maintenant, en additionnelle, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Merci de me reconnaître, M. le Président. En additionnelle, toujours au ministre délégué aux Mines. Est-ce que le ministre délégué aux Mines peut nous confirmer qu'il n'a jamais rencontré ni l'exécutif du syndicat ni les ex-travailleurs eux-mêmes de Mines Gaspé ni les comités de citoyens, ni les commerçants de Murdochville? Sur la base de quoi va-t-il faire des recommendations pour l'avenir de ces gens s'il ne les a jamais rencontrés, ni lui ni son député de Gaspé?

Le Président: M. le ministre délégué aux Mines et responsable des Affaires autochtones.

M. Savoie: M. le Président, le député d'Ungava est malade.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président: M. le ministre! M. le ministre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre délégué aux

Mines, avant de répondre à la question, vous allez retirer immédiatement ces paroles. Immédiatement, s'il vous plaît! Immédiatement!

M. Savoie: Je m'excuse, monsieur... M. Gendron: Question de règlement.

Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît! Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Oui, question de règlement, M. le Président. Vous êtes conscient des propos qui ont été utilisés par...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!.

M. Gendron: ...le ministre des Mines, et c'est sûr qu'on n'acceptera pas, comme Opposition, même s'il a l'intention, après avoir dit ses saletés, de s'excuser, nous, M. le Président...

Le Président: Je vais terminer la première question de règlement. Je vais vous entendre, M. le leader adjoint sur la même question de règlement.

M. Gendron: Sur la question de règlement, c'est simple, M. le Président. Ce que je veux dire au ministre des Mines: Ici ce n'est pas le notaire Savoie qui est en Chambre, c'est le ministre délégué aux Mines, et on voudrait qu'il ait un comportement d'homme public.

Le Président: Tous les collègues doivent être interpellés par leur titre, ici dans cette Assemblée. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, sur la question soulevée par le leader de l'Opposition, il n'a manifestement pas prêté attention à vos propos, alors que vous avez demandé immédiatement au ministre des Mines de retirer ses paroles. Les interventions du leader de l'Opposition n'ont servi que de prétexte, quant à lui, pour soulever lui-même des propos qui sont antiparlementaires.

Le Président: Je rappelle à tout le monde que c'est dans l'intérêt des travaux de cette Assemblée, lorsqu'on s'adresse à un des collègues, on l'interpelle par le nom de la circonscription qu'il représente ou par son titre. M. le ministre délégué aux Mines...

M. Savoie: M. le Président.

Le Président: ...avant de vous reconnaître en réponse à l'additionnelle posée par M. le député d'Ungava, je vous

demande de retirer vos deux premières phrases.

M. Savoie: M. le Président, en effet, j'ai dit cela dans un sens figuratif, ce n'était pas dans un sens littéral.

Le Président: Retirez vos paroles, M. le ministre.

M. Savoie: Oui, M. le Président, je m'excuse de l'avoir traité de malade, ce n'est pas....

Le Président: Alors, à la question...

M. Savoie: M. le Président, vous comprendrez que pour avoir été à Murdochville au moins trois fois depuis la fermeture, pour avoir rencontré des gens de Murdochville dans mes bureaux au moins deux fois, et tout cela depuis le 1er avril, pour avoir discuté au téléphone, à plusieurs reprises, avec les gens de Murdochville, pour avoir rencontré je ne sais pas combien de fois les intervenants de la compagnie minière Noranda... Lui se lève en Chambre, M. le Président, et il dit: Vous n'avez jamais rencontré les gens. Je n'en reviens pas! C'est insupportable! C'est intolérable comme question! La moindre vérification, la moindre lecture des journaux - je ne lui demande de se rendre dans la section B du Soleil, c'est trop compliqué de rester dans la section A -il aurait appris que j'ai rencontré et que je me suis démené dans ce dossier. Je n'accepterai pas qu'on me dise que je n'ai pas rencontré tel groupe, que je n'ai pas rencontré tel autre. (11 heures)

Le Président: En conclusion.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le député d'Ungava, en additionnelle.

M. Claveau: Vous permettrez peut-être, avant de...

Le Président: En additionnelle. Des voix: Non, non...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En additionnelle, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: D'accord. Au ministre du Travail, M. le Président, en additionnelle. Quand le ministre du Travail a-t-il l'intention de rendre publiques les conclusions de l'enquête de la CSST sur l'incendie du 1er avril 1987 à Mines Gaspé?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je commencerai en vous indiquant que je partage l'ensemble des propos de mon collègue, le ministre délégué aux Mines.

Des voix: Bravo!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous avons travaillé...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Brièvement, M. le ministre du Travail. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, avec le leadership qu'il a exercé dans ce dossier, d'autres ministres lui ont prêté main forte, et il les a mentionnés. Qu'il s'agisse du ministre des Finances, du ministre responsable de l'Habitation excusez, M. le Président...

Le Président: M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...l'ensemble des ministres concernés ont prêté main forte au ministre des Mines dans cet important dossier.

Quant à l'aspect précis soulevé par le député d'Ungava et qui concerne une enquête de la CSST, dès que le rapport m'aura été remis, j'en ferai l'analyse et, s'il y a lieu, je le rendrai public.

Le Président: M. le député d'Ungava, cette dernière réponse mettait fin à la période régulière de questions.

Des voix: Encore... Encore!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Votes reportés.

Motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Lefebvre: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée du projet de loi 76, Loi sur le camionnage. Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi 95, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu en matière d'appel sommaire. Après les

affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi 75, Code de procédure pénale.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée du projet de loi 87, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.

M. le Président, je désire également informer cette Assemblée qu'une fois adopté le principe du projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec, ledit projet de loi sera alors étudié par la commission de l'aménagement et des équipements, et ce, dès que ladite commission aura terminé l'étude détaillée du projet de loi 87.

De 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 89, Loi sur les courses de chevaux; le projet de loi 46, Loi sur le financement agricole.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 93, Loi sur l'utilisation des produits pétroliers; le projet de loi 84, Loi modifiant la Loi sur les terres du domaine public et, de 19 heures à 24 heures, et ce de consentement avec l'Opposition, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du gouvernement. Je constate qu'à votre dernier avis, M. le leader du gouvernement, vous nous avisez que la commission des affaires sociales devra siéger de 19 heures à 24 heures. Est-ce que j'ai le consentement de la Chambre pour que l'on siège de 19 heures à 24 heures?

M. Gendron: Oui, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: D'accord. Ceci met fin aux avis touchant les travaux des commissions. Nous allons donc passer aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

M. Gendron: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Lefebvre: J'ai d'autres avis à donner, Mme la Présidente, si vous le permettez.

La Vice-Présidente: Sur les renseignements?

M. Gendron: Non, mais un instant, Mme la Présidente. Un instant!

La Vice-Présidente: Là-dessus, j'ai reconnu le leader de l'Opposition. Je vais l'écouter. M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Vous allez m'écouter pour savoir que ce qu'il veut vous indiquer, c'est qu'il n'a pas terminé ses avis concernant les travaux de la Chambre. Quant à l'appel concernant les renseignements sur les travaux, je voudrais que vous le rappeliez après qu'il aura terminé ses avis pour ne pas que je perde mon droit de parole.

La Vice-Présidente: Donc, il y a consentement pour que l'on revienne aux avis touchant les travaux des commissions? Consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je désire également aviser cette Assemblée que le mercredi 16 décembre 1987, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi privé 249, Loi modifiant la charte de la ville de Laval, projet de loi privé 232, Loi concernant la ville de Saint-Léonard, projet de loi privé 252, Loi concernant la ville de Salaberry-de-Valleyfield, projet de loi privé 233, Loi concernant la ville de Rock Forest, projet de loi privé 216, Loi concernant la municipalité régionale de comté de la Rivière-du-Nord et projet de loi privé 247, Loi concernant la ville de Vaudreuil. C'est tout, Mme la Présidente, quant aux avis.

La Vice-Présidente: Ceci met fin aux avis touchant les travaux des commissions?

M. Gendron: Concernant les travaux, les renseignements au leader...

La Vice-Présidente: Je vais y venir.

M. Gendron: Oui, cela met fin aux avis.

La Vice-Présidente: Nous en sommes donc aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'Opposition.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

M. Gendron: Sur les renseignements concernant les travaux de l'Assemblée, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche avait indiqué, à une question de mon collègue le député de Dubuc, qu'il donnerait une réponse concernant la présence ou non d'agents de conservation sur la Moyenne-Côte-Nord et sur la Basse-Côte-Nord. Je veux juste indiquer au leader que nous aimerions que le leader du gouvernement puisse demander au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche de fournir cette réponse dans les prochains jours.

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, à la demande du leader de l'Opposition, je peux tout de suite lui indiquer que le ministre est en Chambre et qu'au moment où on se parle, il serait prêt à répondre immédiatement.

La Vice-Présidente: Oui, mais nous ne sommes pas à cet article présentement.

M. Lefebvre: Je veux rassurer le leader de l'Opposition qu'il tienne pour acquis que demain ou dans les jours qui suivent... Ce sera dans les prochains jours. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: II n'y a pas d'autres renseignements sur les travaux de l'Assemblée?

Une voix: Non, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Ceci met fin aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Nous allons donc passer aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 15 du feuilleton, s'il vous plaît!

La Vice-Présidente: S'il vous plaît: Je demanderais aux députés, s'ils ont des caucus à faire, de les faire à l'extérieur de la Chambre. À l'ordre, s'il vous plaît!

Projet de loi 88

Reprise du débat sur l'adoption du principe

À l'article 15 de notre feuilleton, il s'agit de la reprise du débat concernant l'adoption du principe du projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Comme il a été entendu, je serai le dernier intervenant du côté de l'Opposition à faire un discours sur ce projet de loi qui, il faut se le rappeler, porte actuellement à controverse. (11 h 10)

Nous étions à faire le débat de ce projet de loi hier soir, mais il a fallu prendre des décisions et ajourner le débat jusqu'à aujourd'hui, puisque le ministre des Affaires municipales n'était pas présent ici, en cette Chambre, ayant jugé, même dans ce temps normal où les ministres et les députés sont convoqués de façon spéciale à une session intensive, d'être à l'extérieur de la Chambre. J'ai été tout à fait surpris et, comme nous avions des choses à dire et que nous avons encore des choses à dire sur le sujet, il était donc important pour nous que le ministre soit ici, présent en cette Chambre, au lieu d'être à Montréal ou ailleurs, et puisse nous répondre de façon adéquate.

Hier soir, tout un menu législatif était en discussion et, malheureusement, M. le ministre n'étant pas là, il a fallu retarder et ajourner complètement les travaux de la Chambre, ce qui retarde d'autant l'étude d'autres projets de loi. Je trouve cela inconcevable, Mme la Présidente. Et je dois le dire au nom de gens qui étaient prêts à travailler hier soir selon un rythme normal de fin de session et qui ont dû interrompre leurs travaux pour les raisons dont je vous ai fait mention.

Le ministre semble dormir un peu sur ce dossier pour être inconscient de ce que disent les gens de l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, de l'Union des municipalités régionales de comté, l'UMRCQ, de l'Union des producteurs agricoles, que l'on connaît comme étant un organisme cherchant à trouver des solutions entre ce qu'on a appelé les zones tampons et le "spot zoning" - dans le terme connu - ou le zonage par secteur. Un zonage qui a pour effet qu'à l'intérieur du territoire agricole au Québec, on se retrouve avec des possibilités à différents niveaux. J'ai posé la question au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui m'a répondu: Non, le monde semble être confiant. J'en suis moins sûr, du zonage à l'intérieur de la zone de protection du territoire agricole pour toutes sortes de raisons.

J'ai eu l'occasion de discuter avec le ministre de l'Énergie et des Ressources du projet de loi 102 qui est maintenant adopté et qui parle justement des terres du domaine

public. J'ai eu - et vous avez eu le rapport ce matin à l'Assemblée nationale - l'occasion de discuter avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation d'un autre projet de loi, le projet de loi 15, portant sur les terres agricoles du domaine public. Nous avons adopté ce projet de loi avec amendements en commission parlementaire. Le rapport est déposé ce matin et nous aurons l'occasion de le discuter et d'en arriver à une conclusion. Ce que je sais, Mme la Présidente, c'est que l'ensemble des terres du domaine public, de façon plus précise celles qui me concernent comme porte-parole de l'Opposition, les terres agricoles... Dans la mesure où nous avons une loi à laquelle nous devons arrimer la loi sur les MRC, soit une loi pour l'agriculture, la Loi sur la protection du territoire agricole, le projet de loi 90, et à côté, la loi 125 sur l'aménagement du territoire au Québec, nous nous trouvons donc avec deux lois dont il faut arrimer le sens et qui comportent nécessairement des difficultés.

Il est évident que le projet de loi que nous avons devant nous nous invite à un comité de concertation entre les municipalités et les producteurs agricoles. Cette partie-là peut être intéressante et j'en conviens. Je conviens que si les gens, au lieu de se disputer, se rencontrent et trouvent des solutions, c'est parfait. Là où j'en ai, c'est sur les difficultés qui pourront survenir et qui feront que quelqu'un devra prendre une décision si le comité ne peut pas la prendre. Ce qui fait qu'on a enlevé dans la tête des gens ce qu'on a appelé la zone tampon entre le territoire agricole et le territoire municipal, c'est qu'il y avait des difficultés.

Que l'on ait voulu enlever cette source de difficultés pour les agriculteurs, j'en conviens. Qu'on vienne, dans le règlement déposé, faire en sorte qu'il y ait maintenant réciprocité entre le secteur agricole et le secteur municipal, cela aussi, j'en conviens. Si l'agriculteur est soumis à des normes de contruction: distance quant à la route, distance quant aux habitations, distance quant à la sorte de production qu'il fait, bravo! Qu'il y ait, en même temps, la possibilité que les gens de la ville qui viennent s'installer n'entrent pas sur son territoire pour qu'ensuite ils ne viennent pas contester les odeurs, j'en conviens aussi, c'est une bonne amélioration. Et je pense qu'au nom de l'ensemble des gens du milieu agricole, il faut s'en réjouir.

Il faut s'en réjouir parce que, ce qui arrivait, c'est qu'une personne de la ville qui s'installait dans le secteur rural - en campagne, comme on dit - auprès d'habitations qui produisent des odeurs -qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, quand on a des dindons, quand on a des poules ou quand on a des porcs, il est évident qu'il y a des odeurs - une fois rendue là, commençait à contester, ce qui faisait en sorte que c'est l'agriculteur qui devait reculer. Mme la Présidente, il est évident que c'est une très bonne amélioration que de dire: Si l'agriculteur est soumis à des normes quant aux habitations qui existent, il faudrait que l'inverse soit aussi exact. Je pense que ce sont des améliorations qu'il faut souhaiter et qu'il faut apprécier comme étant valables pour le monde agricole, tout comme pour le monde urbain.

D'un autre côté, il faut éviter les affrontements. Il faut éviter que l'arrimage de ces deux lois, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la Loi sur la protection du territoire agricole, ait pour effet de mettre deux clans l'un en face de l'autre, de façon irréductible. Il faut donc, au nom des gens qui font partie du monde agricole, dire qu'il ne faut pas toucher, en aucune façon, à la Loi sur la protection du territoire agricole. Donc, si on fait disparaître la pensée de zone tampon que l'on avait, bravo! Si, en contrepartie, par d'autres moyens, on vient faire du zonage par secteur, zonage parce qu'il faut protéger un territoire historique, zonage parce qu'il faut protéger un territoire récréatif, différentes sortes de zonage, là, on s'y oppose. Que le comité de concertation vienne examiner cela et empêche que cela arrive ainsi, je dis que si c'est l'idée que l'on a, bravo!

Je voudrais laisser le secteur agricole par rapport au secteur municipal urbain et aborder un autre sujet qui me préoccupe. Il s'agit de la possibilité, pour les municipalités régionales de comté, d'obtenir, par vote majoritaire des deux tiers, l'assentiment des municipalités afin d'obliger les municipalités récalcitrantes à entériner des décisions dont elles ne veulent pas. L'un des exemples typiques porte sur le budget et l'autre sur les moyens qu'on voudrait se donner, additionnels à ce que la loi prévoit. La loi dit: On doit, d'abord et avant tout, faire l'ensemble du schéma d'aménagement et s'assurer qu'il y a les mêmes sortes de règlement pour que, finalement, dans un territoire donné, il n'y ait pas de chicane et qu'il n'y ait pas différentes normes dans différents secteurs. Donc, il faut uniformiser, et le schéma d'aménagement présenté par les municipalités régionales de comté a cet effet d'uniformité et est enclenché depuis l'adoption de la loi 125. Donc, bravo!

Il y a des problèmes, et je vais vous en citer deux, d'abord, au chapitre du budget. Il y a une dispute dans mon secteur. Le ministre en est conscient, il a été sensibilisé à cette dispute entre des municipalités formant la municipalité régionale de comté du Haut-Saint-Maurice, d'abord la municipalité de Haute-Mauricie et la municipalité de La Tuque ainsi que toutes les autres qui la composent. La décision qui

voudrait que, désormais, toute municipalité, par les deux tiers des voix, soit obligatoirement sujette au budget, fait en sorte d'enlever une certaine autonomie à des municipalités qui contestent cela. Je ne veux pas entrer dans la dispute qui existe là-bas. Je veux juste expliquer et demander au ministre comment il voit une solution à ce problème. (11 h 20)

La municipalité de Haute-Mauricie s'est opposée à ce que la municipalité régionale de comté en arrive à informatiser l'ensemble de ses services. Ce faisant, la municipalité s'est retirée de la table de la MRC disant: Quand on aura réglé ce problème, je reviendrai. Un autre sujet qui a fait l'objet de discussions, qui est autre chose que le budget, mais qui est un service additionnel, c'est la quote-part que les municipalités veulent bien se donner pour participer au comité de développement industriel de la Haute-Mauricie et qu'on appelle communément, chez nous, par le sigle CDHM - le Commissariat de développement industriel de la Haute-Mauricie. Ce groupement a besoin de l'aide des municipalités et, sur la quote-part, on ne s'entend pas non plus.

On ne s'entend pas sur les objectifs à viser. On ne s'entend pas sur les moyens à lui donner pour fonctionner. Dans ce sens, il y a à la table de la MRC des discussions qui ont amené finalement les gens à se retirer de la MRC. Comment le ministre voit-il un problème comme celui-là? Comment voit-il -même si, à l'intérieur du projet de loi, il dit que les deux tiers des gens votants pourraient forcer une autre municipalité -légalement qu'on puisse la forcer à agir si elle dit: mon autonomie personnelle comme municipalité m'oblige à m'y opposer jusqu'à la fin, jusqu'à ce qu'on trouve un compromis qui soit acceptable? Cela en est un.

Un deuxième sujet qui fait l'objet actuellement de discussions dans la municipalité du Centre-Mauricie. Dans la municipalité du Centre-Mauricie, la municipalité régionale de comté du Centre-Mauricie, il y a actuellement une discussion sur le tourisme. La ville de Grand-Mère s'est donné un kiosque touristique. Elle l'a payé elle-même. Même moi, comme député, j'avais dit, à l'époque, que si la municipalité se donnait une bâtisse, un kiosque touristique, un organisme touristique, je n'avais pas d'objection mais, vu qu'on avait décidé à l'époque de régionaliser l'ensemble des services, il fallait que tous s'entendent s'ils voulaient bénéficier de l'aide du ministère du Tourisme.

Le ministère du Tourisme, à l'époque, avait décidé que la MRC avait la responsabilité. Finalement, la MRC avait mis en place un autre organisme qui s'appelle l'ATOURCM - l'Association touristique du Centre-Mauricie - alors qu'à Grand-Mère, on avait, depuis fort longtemps avant, une association de promotion touristique de la ville de Grand-Mère qui s'appelle communément l'APTGM. Nous avons une association qui a de la vie, de la vigueur, bien située à la sortie de l'autoroute où, là, on donne de l'information. Il a fallu faire des batailles et le ministre du Tourisme est même venu chez moi pour faire en sorte que la municipalité, le kiosque touristique ou l'association touristique reçoive l'aide qu'elle était en droit d'attendre et qu'on lui refusait parce que la MRC lui refusait ces choses en disant que c'était l'ATOURCM qui était responsable de l'association touristique pour la MRC du Centre-Mauricie.

Or, ces disputes ont fait en sorte que les gens veulent chercher des solutions, veulent participer. La ville de Grand-Mère est d'accord, mais à condition que les gens mettent d'abord le montant qu'elle met pour son association touristique et son kiosque touristique avant qu'elle mette de l'argent additionnel pour une association régionale.

Les gens leur ont dit dernièrement: Écoutez, vous allez être obligés de le faire pareil. On va l'obtenir en vertu de la loi qui est en discussion et suivant le 66 2/3, comme vous êtes la seule municipalité à vous opposer, vous allez être obligés de payer quand même. La municipalité a dit: Un instant. Ça ne se passera pas comme cela. Donc, au lieu d'avoir un projet qui unifie, on a l'impression qu'on va avoir un projet de loi qui va les désunir. C'est un projet de loi qui va désunir des municipalités sur un objectif commun. Pourtant, les gens du Centre-Mauricie sont en train de réaliser ce que tout le monde espère, c'est-à-dire une meilleure unité, une meilleure coordination, une meilleure cohésion des gestes.

Un exemple, Mme la Présidente, pour vous indiquer ce qui a été fait. La Chambre de commerce de Grand-Mère, par l'intermédiaire de sa présidente, Mme Céline Trépanier, proposait l'an passé, un projet pour faire un salon de l'entreprise et de l'entrepreneurship. Les gens de Shawinigan, ville voisine, trouvent que cela a bien du bon sens et veulent eux aussi s'en organiser un. Dans ce sens, au lieu d'en faire deux, on a dit on n'en fera qu'un seul. Là les deux chambres de commerce avec une autre chambre de commerce, les gens de Shawinigan-Sud qui font partie de la Chambre de commerce de Shawinigan, se sont réunies, la MRC, tout le monde a uni ses efforts pour faire de ce premier salon une réussiste.

Voilà donc une pensée, une idée lancée de Grand-Mère, récupérée par l'ensemble des gens en région et un salon qui a fait l'objet d'un accord total, d'une réussite jamais espérée, donc au-delà de nos espérances. Cela nous permet de penser que, l'an prochain, cela va être encore mieux.

Pourquoi? Parce que les gens se sont réunis, parce que les gens de Grand-Mère ont dit: Écoutez, ce n'est pas parce qu'on a eu l'idée qu'on va nécessairement être les seuls à la mettre en place; ils se sont réunis pour la faire.

Or, le projet de loi que nous avons devant nous risque, au point de vue touristique, d'amener de la désunion plutôt que de l'union. C'est cela que j'explique au ministre. Qu'est-ce qu'il va amener comme amendement pour éviter ce que, dans le fond, il ne recherche pas? Ce qu'il recherche, à mon avis, c'est l'union, la cohésion, la coopération, la collaboration. Ce qu'il est en train de faire, c'est l'inverse. L'UMQ et l'UMRCQ s'insultent; les gens de l'UPA qui, au départ, avaient dit que cela avait bien du bon sens quant aux règlements déposés commencent à avoir quelques doutes. Il reste que le projet de loi est mal fait. Le projet de loi amène des choses inverses à ce que le ministre recherche.

Dans ce sens-là, nous sommes conscients que nous voulons être positifs dans le débat que nous faisons. Le ministre aura beau sourire, s'exclamer et dire que ce n'est pas ce qu'ils cherchent, je n'ai qu'à prendre, pour ce que je propose, l'exemple des députés libéraux qui, actuellement, disent qu'en commission parlementaire, sur d'autres sujets, je suis quelqu'un qui les aide à connaître davantage le projet de loi parce que je pose des questions qui sont correctes. Les questions que je pose... Non, j'ai le droit, même le ministre de l'Agriculture fait le geste que vous avez fait envers moi. Effectivement, nous faisons un travail positif. Nous faisons un travail pour aider l'ensemble de la population, pour permettre aux gens d'avoir les meilleurs projets de loi.

Ce que je pose comme question dans le cas de La Tuque en ce qui concerne le budget et les services, c'est la même que je pose quant au centre de la Maurice pour ce qui est des services. Ce n'est pas une question de budget, c'est une question de services additionnels, au-delà de ce que la loi les oblige à faire. Ce sont donc des choses qui peuvent se donner comme mandat additionnel si tout le monde est d'accord. Le ministre, sur le budget, dit: Les deux tiers et après cela, on fonctionne. Les gens disent: Ce n'est pas tout à fait comme cela. Si on dit que, dans le budget, il y a une question qui concerne le tourisme et avec laquelle je ne suis pas d'accord, comment vais-je m'y opposer et comment vais-je demander à mes citoyens de payer deux fois plus que ce que les autres paient actuellement pour des services que je n'aurai même pas parce que je n'en ai pas besoin chez moi? Donc, il faut aider à unir plutôt qu'à désunir.

C'est la même chose, d'ailleurs, pour les gens de ma région. Le député de Trois-Rivières pourra en faire mention avec la

MRC de Francheville où le maire de Cap-de-la-Madeleine s'est retiré des discussions à un certain moment. Il a même dit qu'il ne valait pas la peine de continuer à l'intérieur de cela parce qu'il y a eu des difficultés. Pourtant, dans le centre de la Mauricie, on a trouvé un moyen de régler ce problème entre les grosses municipalités qui avaient peur, à l'époque, et les petites qui avaient peur aussi de leur bord: les grosses, de perdre leur autonomie, et les petites, d'en perdre davantage parce que pensant être mangées par les grosses municipalités.

On a réglé le problème; la solution a été bien simple: pendant deux ans, le préfet provient du milieu urbain et le sous-préfet du milieu rural; au prochain vote, c'est l'inverse, le préfet vient du milieu rural et le sous-préfet vient du milieu urbain. Cela a très bien fonctionné jusqu'à maintenant. Cela a amené, justement, une pensée davantage régionale. Comme je suis du comté de Laviolette et que ma ville, dans le centre de la Mauricie, c'est Grand-Mère, la principale ville dans le secteur - il y a Saint-Jean-des-Piles et Saint-Georges-de-Champlain, mais je parle de Grand-Mère qui est de l'UMQ - la ville de Grand-Mère a été, jusqu'à maintenant, à l'intérieur du système, une ville très dynamique, avec le conseil municipal et le maire en place, dans le centre de la Mauricie. Ils s'en font un orgueil, il faut le dire à tout le monde et ce n'est pas mauvais de le dire, dans un but d'amener une régionalisation de la pensée et ensuite des actions.

Dans ce sens, nous allons certainement, avec le ministre, en commission parlementaire, faire la discussion la plus profonde possible pour permettre de retirer de ce projet de loi la meilleure possibilité pour les municipalités régionales de comté d'être dans tous les secteurs: agricole, comme je l'ai dit tout à l'heure, municipal, touristique ou autres, donc, pour ces municipalités, d'avoir les moyens de se réunir et de faire justement ce que le monde recherche, une pensée régionale. Je vous remercie, Mme la Présidente. (11 h 30)

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laviolette. M. le ministre des Affaires municipales, en réplique. M. le ministre.

Des voix: Bravo!

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente. Nous en sommes maintenant à la toute fin du débat en deuxième lecture ou sur l'adoption de principe du projet de loi 88. Le 12 novembre dernier, j'ai déposé ici même, à l'Assemblée nationale, le projet de loi 88 dont l'objet principal est de permettre aux MRC, les municipalités régionales de comté,

de bénéficier désormais d'un cadre plus favorable à leur développement et à leur fonctionnement.

Faisant suite à une consultation poussée du monde municipal, notamment lors des assises de Québec-municipalités qui ont eu lieu au début du mois d'août dernier, ce projet de loi va constituer une étape significative dans l'évolution de nos structures municipales. Je voudrais que tous les élus du Québec, tant municipaux que provinciaux, en soient pleinement conscients et qu'ils apportent leur collaboration au cheminement de ce dossier.

Lors du débat sur le principe du projet de loi, j'ai eu l'occasion de situer dans leur contexte ces amendements législatifs et de faire ressortir l'intérêt qu'ils représentent pour l'ensemble du monde municipal. Dans mon allocution de deuxième lecture, j'ai cru pertinent de rappeler à tous les députés l'évolution extrêmement intéressante des municipalités régionales de comté au cours des dernières années, particulièrement en ce qui concerne, bien sûr, l'élaboration des schémas d'aménagement. Le travail qu'ont exécuté à cet égard les maires et les mairesses du Québec et tous les élus municipaux du Québec doit être qualifié de véritablement impressionnant.

J'ai également indiqué qu'un très large consensus avait été établi au sein du monde municipal sur la nécessité de maintenir les MRC après l'adoption de schémas d'aménagement, compte tenu des services immenses que ces organismes régionaux pourraient fournir à leurs membres et à toute la collectivité en général. Avec franchise, réalisme et respect des vues exprimées par les porte-parole du monde municipal, j'ai aussi fait état des difficultés réelles qui ont gêné jusqu'à maintenant l'évolution de la MRC. Pour moi et pour une très grande partie du monde municipal, l'avenir de la MRC dépend essentiellement de notre capacité à résoudre ces difficultés.

Mme la Présidente, le Québec a trop longtemps été divisé entre les municipalités rurales et les municipalités urbaines. La MRC a permis, pour une première fois, d'asseoir autour d'une même table le milieu rural et le milieu urbain. Bien au delà de la préparation du schéma d'aménagement régional, les maires ont ainsi appris à mieux se connaître, à se découvrir des intérêts communs et à oeuvrer ensemble à l'atteinte de leurs objectifs. Cependant, malgré les progrès considérables qui ont été accomplis, cette évolution ne pourra se poursuivre que si le partage du pouvoir politique au sein de la table de la MRC est davantage équilibré et respectueux des règles démocratiques. Ne pas reconnaître ce problème et surtout ne pas le résoudre constituerait le plus mauvais service à rendre à la MRC. D'ailleurs, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, l'UMRCQ, et l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, ont toutes deux reconnu qu'il était absolument nécessaire de procéder à un rééquilibrage des forces en présence, si on voulait favoriser le bon fonctionnement et le sain développement de la structure régionale.

Voilà pourquoi, le projet de loi 88 s'attaque directement à ce problème et définit les mécanismes grâce auxquels le milieu urbanisé pourra se sentir plus à l'aise au sein des conseils des MRC. Cela signifie que la représentation devra être plus équitable, plus équilibrée, plus représentative aussi du poids démographique des municipalités. Cela signifie également que certaines décisions majeures de la MRC devront reposer sur des consensus plus forts que la règle usuelle de la simple majorité.

C'est ainsi, par exemple, qu'à la suite du consensus établi lors des assises Québec-municipalités, l'acceptation par la MRC d'une compétence gouvernementale régionale exigera l'obtention du vote affirmatif des membres représentant au moins 75 % de la population de la MRC. De même, le seuil de décision requis pour la prise en charge, par la MRC, d'une responsabilité locale, a été établi aux deux tiers des voix des membres, avec, cependant, un droit de retrait dont pourra se prévaloir chaque municipalité. Je vous souligne, Mme la Présidente, que ces points-là, ces décisions-là, ces propositions-là, qui sont dans le projet de loi présentement ont fait l'objet d'un consensus absolu au sein des municipalités, au sein de la table Québec-municipalités et lors des assises Québec-municipalités du mois d'août dernier.

Un autre type de décision mérite, à mon sens, un seuil de décision plus élevé que la simple majorité. Il s'agit du budget. La disparité très significative qui existe entre petites et grandes municipalités, et le fait que le partage des quotes-parts est généralement fonction de l'évaluation foncière, ont produit une situation très particulière et même presque indéfendable, où les municipalités qui paient le plus sont en même temps celles qui ont le poids décisionnel le moins représentatif de leur population. Même avec les correctifs que nous introduisons pour redéfinir la représentation, les grandes et les moyennes municipalités vont quand même continuer à assumer une part des dépenses beaucoup plus grande que le pouvoir relatif dont elles disposent à la table de la MRC.

Dans ce contexte, j'ai cru bon de fixer aux deux tiers des voix le seuil nécessaire pour l'adoption du budget de la MRC. Certains porte-parole du monde municipal auraient désiré un seuil plus élevé. D'autres, par contre, plaidaient en faveur du système actuel, malgré les difficultés qu'il comporte. J'ai dû trancher à un niveau qui corrige, en partie tout au moins, l'injustice dont se

plaignaient les municipalités, qui en raison de leur taille, contribuent beaucoup au budget de la MRC. J'ai évité, par ailleurs, de retenir un niveau excessif, qui aurait simplement déplacé l'injustice qu'on dénonce présentement et qui aurait pu être paralysant pour la MRC.

Mme la Présidente, à ce sujet, je dois souligner l'espèce d'équivoque qui existe du côté de l'Opposition où on plaide en faveur d'un seuil d'adoption du budget à la majorité simple, alors que le comité d'étude qui avait été formé par l'Union des municipalités pour étudier la question et qui était présidé par le futur chef du Parti québécois, M. Jacques Parizeau, le comité Parizeau recommandait un seuil de décision à 90 % des voix de la population. Or, nous avons, d'un côté M. Parizeau qui recommande un seuil de 90 %, et nous avons le député de Jonquière et les députés de l'Opposition qui recommandent 51 %. Tout ce qu'on peut dire, c'est que l'Opposition est divisée sur la question. Le chef actuel propose 51 % et le chef futur 90 %. (11 h 40)

Nous avons tenté d'amener un peu d'harmonie non seulement dans le monde municipal, mais également dans l'Opposition. Nous avons tenté de susciter des compromis - c'est ce que nous tentons de faire depuis plusieurs mois - entre des groupes qui sont parfois assez divisés. Nous avons tenté de concilier ce qui peut paraître inconciliable. Je dirais qu'il est probablement plus facile de concilier le monde municipal urbain et rural que de concilier des vues de l'Opposition sur ce sujet. De toute façon, en tranchant aux deux tiers des voix, alors que le monde municipal urbain, par la voix de l'UMQ et du comité Parizeau, recommandait des seuils plus élevés de 75 % et même de 90 %, dans le cas du futur chef du Parti québécois, je pense qu'en tranchant à 66 2/3 %, c'est-à-dire aux deux tiers des voix, nous avons une solution mitoyenne, raisonnable, qui peut être raisonnablement acceptée par tous les gens qui considèrent le dossier dans une juste perspective.

Ce compromis que je voudrais inspirer par la mesure et par la raison constitue une condition vraiment essentielle à une participation pleine et entière des municipalités au sein de la MRC. Les villes n'ont pas d'objection à contribuer financièrement à la bonne marche de la structure régionale, à condition, bien sûr, qu'un minimum d'équité leur soit reconnu dans le processus décisionnel. Si, par simple souci de conserver un avantage qu'elles détiennent présentement, les municipalités rurales s'opposaient à ce minimum, c'est non seulement la collaboration de leurs partenaires urbains qui serait mise en cause, mais c'est plus fondamentalement l'existence même des municipalités régionales de comté.

Par ailleurs, Mme la Présidente, je me suis montré disposé à introduire dans le projet de loi des dispositions qui permettraient de respecter encore mieux les principes auxquels nous avons souscrit lors des assises du mois d'août dernier. Ces mesures additionnelles donneraient également une souplesse plus grande aux MRC dans l'établissement du seuil requis pour l'adoption du budget. De même, les dispositions concernant le Comité de concertation agricole pourraient être réajustées afin de répondre à certaines remarques qui m'ont été formulées. Les présidents des deux unions municipales, l'UMQ et l'UMRCQ, de même que le porte-parole de l'Opposition ont été informés du contenu précis de ces possibles assouplissements. Si de telles modifications réussissaient à faire disparaître les réserves que certains entretiennent encore, et si les unions municipales et l'Opposition me confirmaient leur accord, je serais disposé, avec le consentement de l'Opposition, bien sûr, à les faire insérer dans le projet de loi 88.

Mme la Présidente, je suis d'avis que la loi 88 dans son ensemble constitue un heureux compromis qui permettra à toutes les municipalités du Québec de se retrouver à l'aise, ensemble, à une table des MRC et de pouvoir collectivement travailler à l'évolution de notre société. J'aimerais vous signaler que lors d'une récente rencontre des préfets du Québec, qui se sont réunis ici même à Québec il y a une dizaine de jours, en assemblée plénière, les préfets ont reconnu les avantages de faire adopter la loi 88 et ont refusé d'entériner une résolution qui demandait purement et simplement le retrait du projet de loi 88, ce qui indique bien que la majorité des préfets du Québec a compris l'importance du projet de loi 88 puisqu'ils ont refusé d'entériner une proposition demandant son retrait pur et simple.

Mme la Présidente, je terminerai sur ces mots: Nous avons fait trop d'efforts, tous ensemble, et réalisé trop de progrès pour ne pas achever l'oeuvre de consolidation de cette structure qu'est la municipalité régionale de comté. J'ai donc l'intention, avec l'appui très large des maires et des mairesses du Québec, de faire adopter le projet de loi 88 d'ici à l'ajournement de la présente session de l'Assemblée nationale. La collaboration et le soutien de ceux et celles qui ont à coeur les intérêts du monde municipal nous paraissent indispensables et nous espérons que l'Opposition soucrira au principe et à l'adoption du projet de loi 88. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Le débat étant clos, est-ce que le principe du projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les

cités et villes et le Code municipal du Québec, est adopté?

M. Dufour: Sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour déférer le projet de loi 88 à la commission de l'aménagement et des équipements.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, j'aimerais rappeler aux membres de l'Assemblée que j'ai donné un avis tout à l'heure concernant la commission de l'aménagement et des équipements qui, après avoir étudié le projet de loi 87, étudiera immédiatement après le projet de loi 88 que l'on vient d'adopter et que je viens de déférer à ladite commission.

Mme la Présidente, avec le consentement de l'Opposition, j'aimerais pouvoir rectifier un avis que j'ai donné quant à l'heure. Je parle de la commisson des affaires sociales qui siégera ce soir de 20 heures à 24 heures plutôt que de 19 heures à 24 heures.

Mme la Présidente, je vous demanderais maintenant d'appeler l'article 53 du feuilleton.

Projet de loi 82

Prise en considération du

rapport de la commission qui

en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 53 de notre feuilleton, le ministre des Affaires municipales propose la prise en considération du rapport et un amendement au projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et la Loi concernant les droits sur les divertissements en matière de taxes municipales.

M. le ministre des Affaires municipales.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Mme la Présidente, je n'ai pas l'intention de faire un long discours sur l'adoption du rapport de la commission parlementaire sur le projet de loi 82, sinon pour donner lecture de l'amendement que je voudrais proposer et qu'a déjà reçu l'Opposition.

Amendement

II s'agit à l'article 5 d'introduire un nouvel article 253.22. Alors, l'amendement se lirait comme suit: L'article 253.22 de la Loi sur la fiscalité municipale proposé par l'article 5 du projet de loi 82 est amendé par l'addition, après le deuxième alinéa, du suivant: "L'application du présent article n'affecte pas le privilège afférent aux taxes foncières qui grève l'unité d'évaluation pour garantir le paiement du solde visé au premier alinéa."

Mme la Présidente, il s'agit d'une mesure de précaution qui pourrait être nécessaire ou ne pas être nécessaire, selon les avis juridiques des uns et des autres, mais comme nous ne voulons prendre aucun risque, nous avons accepté d'ajouter ce paragraphe à l'article 253. Il s'agit du cas où une municipalité décidait de permettre à des contribuables d'étaler le paiement d'une partie des comptes de taxes sur une, deux ou trois années. On se souvient que dans le projet de loi 82, on permet aux municipalités de se servir de certains outils pour alléger le fardeau des contribuables dans le cas d'une augmentation importante d'évaluation qui provoquerait des hausses brusques de comptes de taxes.

Une de ces mesures est la mesure d'étalement où la municipalité pourrait permettre à des contribuables de reporter jusqu'à trois ans la partie excédentaire du compte de taxes, excédentaire d'un seuil qui sera déterminé par la municipalité. Or, il est bien évident que si au cours de ces trois années, par exemple - si une municipalité choisit ce délai qui est maximum l'immeuble était vendu et qu'il subsistait un solde de taxes non payé attribuable à la municipalité, évidemment le montant de ces taxes demeure payable par le vendeur à la municipalité. Mais si ces taxes n'étaient pas payées à la municipalité lors de la vente de l'immeuble, est-ce que la municipalité perdrait son recours privilégié contre l'immeuble pour assurer le paiement de ce solde de taxes? Certains prétendent que le privilège de la municipalité est affecté à l'immeuble et que, par conséquent, automatiquement la municipalité conserverait son privilège de municipalité pour le paiement de ces taxes, même à l'encontre d'un acquéreur qui n'aurait pas vu à l'acquittement de ce solde. (11 h 50)

D'autres avocats croient qu'il y a un doute qui subsiste et qu'on devrait probablement ajouter le paragraphe qui est devant nous pour spécifier que, même si l'immeuble est vendu, la municipalité conserve quand

même son droit de percevoir les taxes foncières qui ont été reportées à l'encontre de l'acheteur de cet immeuble-là. Pour ne pas prendre de risque, Mme la Présidente, et comme nous voulons que le projet de loi soit le plus parfait possible, j'ai accepté de déposer cet amendement et, avec le concours de l'Opposition, on va l'insérer dans le projet de loi. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Affaires municipales.

Est-ce que je comprends qu'il n'y a pas d'autres interventions?

M. Dufour: Oui, il y en a, non pas sur l'article 5. Est-ce que vous parlez de l'adoption en troisième lecture?

La Vice-Présidente: M. le député de Jonquière, on parle de l'amendement et de la prise en considération du rapport de la commission.

M. Dufour: Pour la prise en considération du rapport, je vais demander la parole.

La Vice-Présidente: M. le député de Jonquière, je vous reconnais.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, Mme la Présidente. Il est peut-être heureux que le ministre ait pu parler de son autre projet de loi avant celui-ci parce que cela nous permettra peut-être de faire le lien entre les deux projets de loi. Lorsqu'on écoute le ministre des Affaires municipales, il semble toujours qu'on ne comprend rien et qu'il comprend mieux que tout le monde. Il se donne donc des certificats de compétence, des certificats de consensus avec les municipalités et tout le monde va bien, il n'y a que l'Opposition qui n'est pas correcte. Il nous dit en même temps que, par rapport à ses projets de loi, il est prêt à apporter des amendements parce qu'il est aussi obligé de faire des arbitrages entre les parties, que ce soit entre les deux unions, entre le rapport Parizeau et les autres intervenants.

À mes yeux, la fiscalité municipale est un dossier d'une importance capitale pour le monde municipal. Depuis deux ans que le ministre est en fonction, on se rend compte que c'est un dossier qu'il traite avec beaucoup de légèreté et avec un manque de profondeur apparent et évident.

Le dossier de la fiscalité municipale va demander de plus en plus que le ministre s'y penche et qu'il trouve des solutions permanentes à des problèmes permanents, ce qu'on n'est pas capable de déceler dans ce projet de loi, comme dans d'autres projets de loi qui ont touché la fiscalité municipale. Ce sont des solutions temporaires, des solutions ponctuelles qui ont été amenées au jour le jour, cas par cas. Tellement au jour le jour que ce projet de loi découle d'une demande de la ville de Montréal, à savoir qu'il y a des glissements de fardeau fiscal d'une section par rapport à d'autres. Tout le monde sait que la fiscalité municipale est basée sur l'évaluation foncière, donc aussi sur la valeur marchande. Cela veut dire que si le marché est très actif dans une municipalité, comme c'est le cas depuis les deux ou trois dernières années, cela a pour effet de faire augmenter l'évaluation des propriétés. Donc, il faut se méfier des gens qui nous disent, dans un quartier: Vous savez, j'ai fait une belle passe, j'ai vendu ma propriété à un prix extraordinaire, beaucoup plus que ce que j'avais payé et que ce que je pensais qu'elle valait. S'il y en a plusieurs dans un quartier, cela a pour effet de faire hausser la valeur de l'ensemble des propriétés. Et c'est le cas à Montréal.

Pour la propriété résidentielle, on est capable de déterminer qu'il y a une valeur de marché. Le problème qu'on retrouve dans la plupart des municipalités au Québec, c'est que c'est beaucoup moins vrai quand il s'agit des commerces. Quand il s'agit des commerces, il y a beaucoup moins de transactions, donc, c'est plus difficile de déceler la valeur marchande de ces immeubles. Cela peut causer des difficultés et a tendance à faire plafonner cette évaluation. L'augmentation de l'évaluation ne s'effectuant pas sur des commerces, cela a pour effet de demander un effort fiscal plus grand à la propriété résidentielle, que ce soit d'un, deux, trois ou quatre logements.

C'est encore plus vrai au point de vue de l'industrie puisque s'il y a des transactions - quand on parle d'industrie, on parle d'industrie importante - cela se fait toujours à la Bourse et on ne peut jamais fixer l'évaluation d'une industrie par la valeur des ventes qui se font sur le marché boursier. Donc, c'est un problème majeur. Deuxième problème qu'on peut déceler: si cela ne bouge pas dans la section industrielle comme cela ne bouge pas beaucoup dans la section commerciale, cela a pour effet de transférer cet effort fiscal sur le petit contribuable. Essentiellement, c'est ce que le projet de loi vient nous dire, et on vient trouver des réponses à cela.

La ville de Montréal a avancé un certain nombre de solutions dont l'étalement ou le plafonnement de l'évaluation. Par exemple, on peut parler de l'ensemble des propriétés, dans une municipalité, qui augmentent de 30 %, ce qui veut dire qu'il y en a qui peuvent augmenter de 60 % comme de 20 %, donc, une valeur moyenne de 30 %. Et le projet de loi vient nous dire que, si une propriété individuelle augmente de plus de 10 % des 30 %, à ce moment-là,

une municipalité pourrait appliquer une mesure de plafonnement de l'évaluation.

En principe, on pense que cela pourrait être un projet de loi intéressant. Mais il y a un problème, puisque, quand quelqu'un ne paie pas, c'est un autre qui paie. Donc, on vient de permettre à la municipalité d'étendre ou de faire de l'équité fiscale avec un principe de fiscalité qui, de par sa nature, devrait être neutre. Au fond, quand on regarde la fiscalité municipale, on ne peut pas dire que c'est une loi excessivement juste par ses principes. Il faudrait faire un long discours pour savoir comment on devrait payer nos taxes municipales. L'État reconnaît, comme dans d'autres pays, comme dans d'autres provinces, que c'est la valeur intrinsèque de la propriété qui, pratiquement, est le barème devant servir pour établir le coût du paiement des taxes foncières à la municipalité. Donc, si on décide qu'on plafonne des évaluations, cela veut dire qu'on tranfère le fardeau à d'autres. Transférer un fardeau à d'autres, cela devient un râle qui a toujours été joué par les gouvernements supérieurs, soit qu'on peut se servir d'un ensemble de revenus pour établir une base d'équité fiscale qui permet aux uns et aux autres de faire une meilleure distribution de la richesse. C'est ce qu'on fait dans ce projet de loi. Et je trouve, à ce moment-là, qu'on attaque un principe fondamental, c'est pourquoi je dis que le ministre ne va pas très loin dans sa recherche. Il fait du cas par cas et se dépêche de trouver la solution le plus rapidement possible pour se débarrasser de la patate chaude. C'est ce qu'il fait avec ce projet de loi. Il a eu six mois pour le faire. Il nous a dit: Attendez, on va en parler avec les gens, on va avoir un comité des assises Québec-municipalités et on va régler le problème. Cela lui a pris plus d'un an avant de commencer à s'asseoir et, une fois qu'il s'est assis avec le monde municipal, on trouve essentiellement les solutions avancées par la ville de Montréal concernant ces problèmes ponctuels qu'on rencontre. Le problème majeur que l'on rencontre, c'est que ce problème ponctuel qui n'est pas susceptible de se répéter chaque année, ad vitam aeternam, on vient de le consacrer par ce projet de loi, de façon permanente.

Donc, le ministre, qui a l'habitude de se vanter de s'appuyer sur des principes fondamentaux lorsqu'il fonctionne au point de vue municipal, vient d'attaquer des principes fondamentaux. Et là, je vais parler du rapport Parizeau. Il deviendra peut-être chef, M. Parizeau, mais ce n'est certainement pas le Parti libéral qui va le nommer. Il faudrait que ce soient les membres du Parti québécois. Alors, même si cela faisait plaisir au ministre des Affaires municipales, même s'il l'annonce en grande primeur, je veux lui rappeler que le rapport Parizeau parle d'autre chose. Il ne parle pas seulement d'une loi, il parle d'autres lois. Le rapport de la commission d'étude sur les municipalités parlait, entre autres et beaucoup, de la fiscalité municipale. Il parlait des MRC, mais il parlait aussi de la fiscalité municipale, problème que M. Parizeau connaît bien, parce qu'il l'a traité aussi comme ministre des Finances du Québec. C'était un ministre qui s'occupait de son affaire, qui s'occupait des affaires de son ministère et, en même temps, qui s'occupait des municipalités, puisqu'il a permis une réforme en profondeur.

Donc, après sept ans, huit ans, on est rendu avec des lois générales faites à partir de problèmes ponctuels, et c'est difficile à comprendre, j'aurais compris que cette mesure puisse s'appliquer pour quelque temps, mais on en fait une loi de nature permanente. C'est là que le bât blesse et c'est là qu'on doit rappeler au ministre que son travail fondamental, c'est d'abord de regarder et d'examiner en profondeur si la réforme fiscale qui a été acceptée en 1979 et appliquée en 1980, a eu tous ses effets et si elle continue à avoir et à produire les effets pour lesquels elle a été mise sur pied. (12 heures)

Le ministre des Affaires municipales est omnubilé par d'autres raisons. Moi je le sais. Cela le fatigue, d'abord, que les municipalités aient des surplus à la fin de l'année. Il n'y a pas de problèmes dans les municipalités, elles ont de l'argent en masse comme si les problèmes étaient juste des problèmes de fiscalité. Pas seulement cela. Cela n'empêcherait pas et ne devrait surtout pas empêcher le ministre de se pencher sur le cas et de l'examiner. Cela fait deux ans que je lui rappelle que la fiscalité c'est un problème majeur et qu'il doit l'étudier en profondeur.

Il répond à des problèmes de déplacement de fardeau fiscal. Il y a d'autres problèmes que celui-là dans la fiscalité municipale. Il y a la taxe industrielle qui n'a jamais été appliquée, à mes yeux, selon les principes que le législateur avait établis en 1979. Les évaluateurs municipaux, chaque fois qu'ils touchent à l'évaluation foncière, sont pris soit à passer devant le bureau de révision de l'évaluation, à être contestés, à amener des municipalités dans des dédales de discussions, des dédales aussi de problèmes légaux qui font que les municipalités dépensent beaucoup d'argent, mais qui font aussi que le législateur devrait très rapidement se pencher sur ce cas. À force de se pencher, on va être plié. Il n'y aura plus moyen de redresser cela parce que là il me semble qu'on est bien plus couché que debout par rapport à ce bout de loi.

Evidemment et essentiellement, hier, justement, il y a eu une décision qui a été rendue par la cour à savoir que l'article

65.1, même si le bureau de révision, même si la plupart des compagnies ont fait de grands pas en avant... Il semble qu'à partir d'hier il y a eu une cause qui a été gagnée par une municipalité et qui fait que pour l'article 65.1 qui parlait de l'évaluation industrielle il n'y a plus de problème, nulle part. Il semble qu'il y ait un législateur qui a décidé qu'on pouvait traiter cet article d'une autre façon.

Heureusement qu'on peut arriver à ce phénomène. Peut-être que le ministre va comprendre que si ce n'est pas son bureau de révision qui donne des résultats de cour, c'est peut-être à d'autres places qu'on va avoir des réponses. Ça va peut-être lui permettre d'essayer de faire des consensus. Il est fort là-dessus. Il va peut-être se permettre de regarder les décisions d'un tribunal par rapport à un bureau administratif et d'essayer de trouver un modus vivendi dans cela. S'il est fort sur les consensus, il faudra qu'il amène le monde à se concerter au plus sacrant pour qu'on règle ce problème au plus coupant parce que ça dure depuis de nombreuses années. Il y a des millions en cause. Pendant ce temps, le ministre fait la grasse vie, il attend que cela se règle tout seul parce que cela va se régler tout seul.

Ce n'est pas cette position qui va lui donner du trouble. On dit: C'est un problème majeur, la fiscalité. Arrêtez de faire du cas par cas comme vous avez fait depuis deux ans. L'étalement des taxes foncières, ce n'est pas une grosse nouvelle à mes yeux. C'est un déplacement de paiements, encore. Ce qui veut dire que la personne qui va avoir un compte de taxes trop élevé, aura à le payer sur un certain nombre d'années -trois ans - avec les intérêts. La municipalité va jouer le rôle de banquier. N'importe quelle banque aurait pu faire ça. Le contribuable aurait pu aller emprunter à la banque avec un intérêt de X et il aurait payé la municipalité. Je pense que la mesure d'étalement n'apporte pas grand chose. Le plafonnement était plus important à mes yeux par rapport à ce qui se passe dans le domaine municipal.

Encore là, puisque ce fait touche beaucoup de principes, j'inviterais et je continue à inviter le ministre à regarder plus en profondeur ce qu'est la Loi sur la fiscalité municipale, et ce qu'il devrait faire pour apporter des réponses à l'ensemble des problèmes qu'affronte le monde municipal. Le gouvernement du Québec a-t-il appliqué ou appuyé ou donné 100 % de sa mesure concernant les taxes foncières des municipalités? Moi je pense que non, il n'y a pas eu cette application. Elle ne s'est pas faite complètement. Il y a des morceaux de cette loi qui ne sont pas encore appliqués après huit ans. Le ministre pourra nous dire: On n'est pas pressé. On a dit qu'on ferait cela dans le temps. Oui, mais le temps, c'est le temps. Il y a des municipalités qui ont des problèmes. Ce sont les grosses municipalités.

Incidemment, ce sont ces grosses municipalités qui pourraient recevoir le plus du gouvernement provincial. Donc, il y a des montants... Il y a les évaluations pour des bâtisses gouvernementales, dans le réseau de l'éducation et dans certains autres réseaux gouvernementaux qui ne donnent pas leur plein effet. Il y a quelques millions de dollars qu'on pourrait donner.

Cela étant fait, on pourrait s'inspirer de l'attitude de bon contribuable du gouvernement du Québec pour aller se présenter à Ottawa pour exiger qu'Ottawa paie aussi ses taxes. C'est une façon correcte, comme un bon contribuable devrait le faire. Tant que le Québec n'aura pas payé ses taxes à 100 %, j'ai des doutes qu'il puisse dire à Ottawa: Paie tes taxes comme nous on les paie. Ce sont des "en lieu" de taxes. Pour bien le comprendre et que nos auditeurs le comprennent, ce sont des "en lieu" de taxes qui sont payés par les gouvernements, celui du Québec et celui d'Ottawa. Donc, la municipalité ne peut pas exiger, elle ne peut pas contester les montants qui sont donnés. On peut toujours se chicaner un peu, mais le gouvernement du Québec ou celui d'Ottawa donnent les taxes qu'ils pensent qu'ils doivent donner à la municipalité.

C'est ce qui fait qu'il y a beaucoup d'endroits où les taxes ne sont pas payées. Il y a certains ports de mer où le gouvernement supérieur ne paie pas beaucoup de taxes. Ottawa ne paie pas beaucoup de taxes là-dessus et il y a des aéroports... Qu'on prenne l'aéroport de Mirabel ou celui de Dorval, ou même l'aéroport de Québec, cela ne paie pas beaucoup de taxes aux municipalités, ces grands ensembles.

Donc, si on veut, puisqu'on a dit qu'on était de bons négociateurs - parce que nous, le gouvernement du Parti québécois, nous n'étions pas de bons négociateurs, selon le gouvernement qu'on a en face de nous qui, dans le temps, faisait un peu d'opposition, mais qui faisait peut-être un peu de démagogie sur les bords concernant cela... On les regarde aller avec Ottawa. Ils ne négocient pas grand-chose dans le temps. On est beaucoup plus à la merci de ce qui se passe à Ottawa qu'on a l'air d'un gouvernement... on a l'air bien plus à la remorque du gouvernement d'Ottawa qu'on a l'air d'un gouvernement responsable vis-à-vis de ses administrés. Donc, ce qui se passe avec la taxation municipale, c'est que le gouvernement du Québec ne fait pas ses devoirs; le ministre des Affaires municipales devrait aller dire à Ottawa: C'est le temps que vous payiez vos taxes aux municipalités. On n'aurait peut-être pas besoin de faire des

amendements comme on fait là si le ministre des Affaires municipales faisait sa "job" avec Ottawa et exigeait que le gouvernement d'Ottawa paie ses taxes aux municipalités. Ce serait une bonne chose. Cela aiderait les municipalités et cela nous empêcherait de faire du cas par cas, comme on fait là, parce qu'on est en train de briser tous les principes qui ont mis sur pied cette fiscalité municipale.

Après cela, si on regarde en profondeur et qu'on est capable de faire des corrections, il me semble qu'on serait beaucoup plus à l'aise et on pourrait prendre un an ou deux pour savoir ce qui ne fonctionne pas. Est-ce que c'est le temps de regarder ce qui se passe dans l'évaluation par rapport à la fiscalité, puisque cette dernière est basée sur l'évaluation? Ce serait peut-être le temps de regarder l'évaluation foncière pour voir s'il y a des choses qui ne fonctionnent pas. Ce qui nous surprend et ce qui nous frappe, c'est qu'à chaque fois qu'une municipalité a appliqué les principes de l'évaluation selon la réforme fiscale, on s'est ramassé pratiquement avec des cas de cour chaque fois que les municipalités ont été obligées de négocier avec des industries, comme si une loi pouvait se négocier, et la municipalité, règle générale, a été perdante.

C'est tellement vrai ce qui se passe là, ce que je dis là. On a juste à regarder ce qui s'est passé sur le terrain. Il y a plusieurs municipalités qui ont subi ces préjudices. C'est encore plus vrai parce que même le gouvernement du Québec a appris par ses organismes que lui aussi pouvait faire de la contestation. Donc, non seulement les compagnies ont contesté l'évaluation municipale ou la fiscalité, mais là on est rendu que même le gouvernement du Québec par ses organismes est en train de contester l'évaluation foncière.

Donc, une loi qui est mise en vigueur, qui est contestée régulièrement et qui, dans l'ensemble des cas, a subi des accrocs. Je pense que c'est le temps que le législateur -c'est un bon signal qu'on donne au législateur - regarde ce qui se passe là-dedans. Est-ce que tous les évaluateurs agréés au Québec sont des gens incompétents? On serait tenté de dire cela. Ce sont tous des gens incompétents puisque chaque fois qu'il y a contestation, la municipalité, à 90 % ou 95 % des cas, perd ses causes. Donc, il doit y avoir quelque chose qui ne fonctionne pas. Je ne suis pas prêt à dire que tous les évaluateurs ne sont pas bons. Je suis peut-être prêt à dire qu'il y a des trous dans la loi, que ce serait le temps qu'on corrige ces trous et qu'on apporte des correctifs. Cela permettrait à la municipalité de mieux s'administrer parce que, sachant à l'avance quelle est son assiette fiscale, quel est son pouvoir de taxation, cela pourrait lui permettre de mieux planifier et de faire une meilleure administration. (12 h 10)

Quand je parle d'organismes qui contestent leur évaluation, je veux parler de la Société d'habitation du Québec. Elle conteste très fortement ses évaluations. Elle va même jusqu'à cinq ans en arrière, ce qui fait que certaines municipalités sont obligées de rembourser jusqu'à 1 000 000 $ concernant ces évaluations.

La Société immobilière du Québec est un autre de ces organismes gouvernementaux, elle a commencé, elle aussi, à contester. On voit le pattern ou le portrait de la contestation de l'évaluation et comment on fait pour attaquer et briser une loi. Ce n'est pas compliqué. On se met tous là-dessus et je pense qu'on a pris le bon moyen pour essayer de l'étouffer.

Cela répondrait peut-être aux attentes et aux inquiétudes du ministre. Certaines municipalités ont des surplus et cela est tellement inquiétant pour le gouvernement du Québec. Il faudrait qu'ils fondent au soleil ou qu'en les contestant, on aille chercher l'argent dans leur poche. Ou on les laisse se faire écraser, ou on leur transfère des responsabilités, ce serait une façon correcte pour aller au bout, pour alléger la fiscalité municipale.

J'invite, et j'insiste pour que le ministre des Affaires municipales se penche sur la fiscalité municipale. Tout à l'heure, il s'est inspiré de M. Parizeau pour une loi. Je l'invite à se pencher sur le rapport. Le ministre est enseveli sous les rapports depuis qu'il est ministre et on n'a pas de résultats. Rapport de la commission Parizeau, pas de réponsel Le rapport de la commission Lapointe, c'est très hésitant, on ne sait pas trop, tout le monde en parle, il y a peu de réponses. Il y a un autre rapport, le rapport Lemieux, pas de réponse non plus! Il faudrait bien que le ministre prenne le temps de lire; quand il se rend à Montréal, il pourrait lire - il a au moins une couple d'heures pour lire, il a un chauffeur. Il pourrait prendre les rapports, les lire et regarder ce dont il pourrait faire son profit. Ces études-là ne sont pas faites seulement pour les enfants. Ce n'est pas fait seulement pour mettre dans une bibliothèque, pour les regarder, ne pas les lire et après essayer de faire du cas par cas. Le problème sur la fiscalité est bien plus gros que ce que le ministre veut nous faire voir. On ne parle que de la pointe de l'iceberg dans ces petites affaires-là... Ce ne sont pas les problèmes majeurs, mais c'est un problème. Toucher à Montréal, c'est le problème majeur pour un ministre. Il semble que, si cela touche à Montréal, c'est le problème de l'ensemble du Québec, mais ce n'est pas si vrai que cela. Il n'y a pas beaucoup de municipalités à part Québec et Montréal qui vont appliquer l'étalement des taxes comme elles vont appliquer le

plafonnement des taxes. Il ne faut pas se faire d'illusion par rapport à cela. Le ministre a donc du travail à faire, et je l'invite à le faire.

Il faudrait aussi - et je veux l'y inviter - qu'il regarde vraiment les principes de base de la fiscalité municipale. Ce n'est pas nous qui avons inventé cela, mais on a travaillé là-dessus par contre. Dans les principes de base, il y a l'autonomie municipale qui, je pense, n'est pas seulement une parole, il faut que les municipalités soient capables de s'autogérer et de s'administrer pour ne pas toujours être à... L'équité fiscale, c'est que chaque contribuable paie sa juste part. Il n'est pas vrai de dire que, dans ce projet de loi qu'on a devant nous, le principe d'équité fiscale est appliqué. Ce n'est pas vrai, parce qu'on va jouer avec la taxation de l'un à l'autre. La municipalité va décider de passer avec la taxe, elle va en prendre moins au plus gros et va en faire payer un peu plus au plus petit. C'est cela qu'il fait! Ce n'est pas de l'équité fiscale! La neutralité fiscale, je pense que c'est aussi un principe de base. Quand c'est neutre, cela veut dire qu'il n'y a pas d'intervention, mais c'est tellement pas neutre qu'on décide que M. Jos va payer pour M. Pierre ou M. Paul pour M. Jean-Guy. Alors, ce n'est pas neutre du tout! La responsabilité financière des municipalités... C'est évident que, là, on prend la responsabilité à sa place et qu'on lui fait jouer ce rôle. L'un des principes majeurs était la simplicité administrative et la transparence.

Je me souviens, quand on a étudié la fiscalité municipale, de l'un des principes majeurs: il fallait que ce soit simple, il fallait que les contribuables soient capables de dire et d'identifier quelles étaient les taxes qu'ils payaient. Dans son compte de taxes, qu'est-ce qu'il payait pour les services? C'était clair dans ces principes-là. Des efforts constants ont été fait de la part des municipalités pour dire: On devrait faire un effort spécial. Cela s'est concrétisé dans des comptes de taxes où on a mis une médiane, pour dire combien cela pourrait coûter... On l'a calculé, et les communautés urbaines étaient à ce moment-là très exigeantes par rapport à cette transparence, par rapport à cette simplicité administrative. C'est tellement simple qu'il n'y a plus personne qui va comprendre. Il faut un livre pour étudier comment on va appliquer ces principes de fiscalité municipale. C'est ce que le ministre a trouvé dans sa grande simplicité et dans sa grande compréhension.

Donc, aux principes de base qui ont présidé à la mise en place de la fiscalité municipale, le ministre des Affaires municipales vient de faire un accroc important, puisqu'il attaque quatre principes sur cinq. On est loin d'avoir le compte. On part d'un problème ponctuel et on va en faire une solution permanente. Je ne peux pas croire que le ministre ait accepté d'aller aussi loin que cela dans sa démarche. On va lui dire comment il était sérieux. Parce qu'il y a un autre point aussi, la situation des établissements des mouvements coopératifs. Il faut se rappeler qu'en 1986, on avait une loi qui s'appelait la loi 16 qui permettait de mettre des taxes d'affaires sur certains organismes, qu'ils s'appellent des syndicats, des corporations. Je me souviens aussi de la discussion qu'on avait eue à ce moment-là où j'avais demandé au ministre: Est-ce que cela touche les caisses populaires, les mouvements coopératifs? Il a dit: Non, cela ne touche pas cela. Si cela ne touche pas cela, d'accord, on va être pour. Mais cela touche une autre loi.

Ce n'était pas si vrai que cela. Au moment où il nous l'a dit, cela semblait vrai, mais, dans les faits, ce n'était pas si vrai que cela puisqu'on a été obligé d'apporter un correctif. Il y a eu des discussions avec les mouvements coopératifs pour qu'ils acceptent de payer leurs taxes, mais juste à partir de 1988. Ce qui veut dire que les deux dernières années les municipalités vont être obligées de rembourser aux caisses populaires les montants qu'elles ont donnés, avec intérêt. À partir de 1988, cela va s'appliquer. On peut considérer cela comme un gain pour les municipalités. Mais, juste pour rappeler que le ministre des Affaires municipales n'avait pas été très prudent. Il n'avait pas été prudent parce qu'il s'était avancé sur une décision, sur une affirmation, tout en ne connaissant pas tous les faits, ce qui nous a obligés à faire des amendements deux fois.

Après avoir accepté la loi 16, on a été obligés de l'amender une fois, et on l'amende une deuxième fois, donc deux amendements. Ce n'est pas un gouvernement qui légifère pour des lois passées, il est obligé d'amender ses propres lois deux fois en deux ans. Ce n'est pas un record, c'est une bonne moyenne. Cela veut dire qu'ils vont se donner leur propre ouvrage, ce sont eux qui vont se créer leur propre ouvrage. Ce sont des générateurs d'emplois par rapport à leurs décisions.

J'aurais aimé parler sur la taxe d'amusement. Bien sûr, il y avait un problème qui pouvait être soulevé dans des villes comme Québec, Montréal. Mais encore là, je me demande sérieusement si le ministre a bien regardé tous les effets de dominos que cet amendement va faire dans la loi et qui va se produire dans l'ensemble des municipalités du Québec. Je comprends qu'il y a des villes comme Québec, Montréal, qui ont une équipe de hockey dans la ligue nationale. Elles ont aussi des orchestres symphoniques, des théâtres permanents. Cela peut amener ces gens à payer des taxes d'amusement sur des billets qui ne sont pas

à la valeur réelle. Un billet de saison est censé coûter moins cher qu'un billet régulier, suivant les endroits - je ne parle pas de la classe A, B ou C. Je pense que les gens comprennent ce que je veux dire, c'est que ces billets ne sont pas tous au même prix. Quand on achète en série, normalement c'est moins cher qu'acheter à l'unité. Donc il y avait un problème. Anciennement, la municipalité pouvait percevoir sa taxe d'amusement, non pas sur le montant vendu, mais sur le montant de l'unité des billets de présence. Ce qui fait que quelqu'un qui allait au hockey ou au théâtre pouvait avoir des rabais, comme il pouvait avoir des billets de faveur. Ces gens qui avaient les billets de faveur ou ceux qui donnaient ces billets devaient donner les 10 % de la taxe d'amusement. C'est un problème particulier qui pouvait toucher, Montréal et Québec.

Quant à l'ensemble des municipalités du Québec, je me demande si cela n'aura pas pour effet d'enlever la taxe d'amusement sur beaucoup de spectacles, beaucoup d'organisations, et qui fait que les municipalités vont avoir un manque à gagner, d'une part. Deuxièmement, cela pourrait inciter certains organismes à ne pas charger de taxe d'entrée, de billets d'entrée, tout en sachant bien qu'ils pourraient faire leurs profits sur d'autres activités à l'intérieur la bâtisse où se déroule le spectacle. Cela pourrait être des profits sur la boisson, des montants perçus sur des activités internes, que ce soit des encans ou autres, etc. (12 h 20)

Ce qui me fait dire que, dans ce projet de loi, ce que le ministre fait - et c'est pour cela que je dis qu'il n'est pas correct avec les municipalités et qu'il n'étudie peut-être pas assez longtemps ses lois avant de les proposer - c'est qu'il dit aux municipalités: Vous pourriez être bons garçons et être fins avec les gens, mais nous, comme gouvernement, on ne perdra rien parce que le gouvernement ne perçoit pas les taxes de la même façon que les municipalités, il va chercher son argent différemment. Le gouvernement va chercher son argent directement sur l'ensemble de l'activité comme telle, pas juste sur le billet d'entrée. Si quelqu'un est fin là-dedans, c'est le ministre qui permet que les municipalités soient fines, mais lui, il s'en lave les mains parce qu'il est complètement en dehors de cela.

Je me demande, par rapport aux problèmes particuliers qui existent à Québec et à Montréal, si le ministre a examiné d'une façon correcte et profonde ce qui peut se passer ailleurs. Il pourra toujours dire n'importe quoi, qu'il y a des gens qui sont favorables, bien oui, mais je vous dis que les municipalités ne tiennent pas nécessairement le même langage que tous les citoyens du Québec. À ce moment-là, on doit regarder les effets. S'il n'y avait pas de problèmes fiscaux au Québec, on n'aurait pas besoin de lois comme celle-là. Quand on corrige les lois fiscales, il faut s'assurer, pour améliorer la vie de tous les citoyens du Québec, qu'on n'enlève pas des revenus et des sources de taxation aux municipalités.

En gros, M. le Président, c'est un projet de loi qui, bien sûr, a certains effets et répond à des problèmes ponctuels. On aurait eu toutes les raisons du monde de s'y opposer, notamment celles que j'ai données et qui se rattachent à des principes fondamentaux, mais on va donner encore la chance au ministre de faire son travail, de se remettre au travail pour qu'un jour, il nous présente une loi qui a de l'allure, une loi qu'il aura étudiée en profondeur, qui sera défendable devant le Parlement et qui sera au bénéfice des municipalités et des citoyens du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître le ministre des Affaires municipales qui a droit à une intervention de cinq minutes après chaque intervention à cette étape de l'étude du projet de loi. M. le ministre, pour un maximum de cinq minutes.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Je vous remercie, M. le Président. Nous avons droit à une salade un peu vinaigrée de la part du député de Jonquière qui a brassé un peu de tout et de rien dans son discours. J'ai eu peine à suivre le fil conducteur de son raisonnement, mais cela, c'est autre chose. Tout ce que je vois, c'est que le député ne voit pas grand-vertu au projet de loi. Il a passé les trente minutes de son intervention à décrier le projet de loi pour conclure à la fin que, finalement, malgré qu'il ait parlé pendant trente minutes contre le projet de loi, il va finalement voter pour. Je ne vois pas de quelle logique procède le député, mais enfin, je retiens qu'il est pour le projet de loi.

Je comprends pourquoi le député va voter pour le projet de loi, c'est parce que l'ensemble du monde municipal est d'accord avec ce projet de loi, l'ensemble du monde municipal l'a demandé, a participé à sa confection. Le député de Jonquière sait très bien que ce projet de loi est le fruit d'un long compromis, d'un long consensus. Je sais que le député de Jonquière blâme le ministre des Affaires municipales de tenter de faire des consensus. Il dit qu'il ne recherche que cela. Mais qu'est-ce qu'on veut que je fasse? Que je sorte mon tomahawk et que je courre après tous les maires du Québec pour fouter le bordel dans le monde municipal? Je n'ai pas été nommé par le premier ministre pour tenter de semer la zizanie partout. C'est justement mon rôle, mon devoir de tenter

d'amener une loi qui puisse rencontrer l'adhésion de l'ensemble des gens raisonnables de notre société. C'est ce que fait ce projet de loi.

Ce projet de loi a été préparé à la suite d'un travail très important effectué par un comité technique composé de représentants spécialisés en évaluation foncière de toutes les municipalités du Québec, des deux grandes unions municipales, des grandes villes telles que Montréal, Laval, Québec, Longueuil. Les communautés urbaines avaient leurs experts. Bref, l'ensemble du monde municipal plus le monde rural représenté par l'UMRCQ ont collaboré à la mise au point des formules que nous présentons et qui sont disponibles pour les municipalités. Les municipalités ne sont pas obligées d'employer ces deux formules, mais elles peuvent s'en servir si elles le jugent opportun. Ces deux formules permettront, dans le cas où les municipalités voudront s'en servir, de faire en sorte que certains citoyens qui, autrement, auraient été frappés d'une façon importante par des hausses de taxes brusques, pourront voir cet excédent de compte de taxes, la partie du compte de taxes qui excéderait le seuil qui aurait été déterminé par la municipalité, dans le cas de l'étalement, être étalée sur trois ans et, dans le cas du plafonnement, répartie sur l'ensemble des contribuables. Ce sont deux mesures à la disposition des municipalités qui font consensus dans le monde municipal et je suis fier d'apporter cette contribution additionnelle à la bonne gestion des municipalités du Québec.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Quand j'ai entendu le ministre dire que le député responsable du dossier dans notre formation politique, le député de Jonquière, avait servi une salade vinaigrée, je me rends compte que si le chef cuisinier avait donné une meilleure recette, on ne serait pas obligé d'ajouter des condiments. C'est cela, le problème. Le ministre responsable ne donne pas la pleine mesure de ce qu'il devrait donner aux municipalités. Je ne suis pas la seule à le dire; cela aussi fait consensus. Vous avez parlé de consensus tout à l'heure, M. le ministre, et cela fait consensus: vous ne donnez pas la pleine mesure. Ce serait beaucoup mieux pour vous et votre gouvernement si vous vous mettiez en frais de travailler comme il se doit avec les municipalités et de façon très large - pas ponctuelle! - sur l'ensemble des problèmes que vivent les municipalités du Québec. Il disait: J'ai entendu un paquet de choses qui ne veulent rien dire du député responsable.

M. le Président, j'ai vu les jeunes députés qui ont été élus en 1985. Il se sont mis à sourire. Ils ont dit: "Ils parlent contre et ils votent pour." De 1976 à 1981, on a entendu des discours de ce côté-ci de la Chambre provenant de ceux qui sont de l'autre côté aujourd'hui, et tous les discours étaient dans le même style. Ce n'est pas nous qui innovons dans cela. Nous, au moins, nous essayons de chercher des situations où on pourrait éclairer le ministre dans les projets de loi qu'il présente et apporter une amélioration, tout autant dans le projet de loi 82 que d'autres projets de loi que le ministre des Affaires municipales nous apporte ici. La preuve, M. le Président, c'est que, encore aujourd'hui, le ministre est arrivé avec un nouvel article, c'est-à-dire l'ajout d'un article. C'est la preuve que son devoir n'est pas bien fait; aujourd'hui même il arrive avec une correction. Êtes-vous capable de me dire que le ministre responsable est un bon chef cuisinier qui présente des bonnes salades, comme il le disait tout à l'heure de mon collègue? Si c'était vraiment bon, on n'aurait pas à corriger, on n'aurait pas à se poser des questions.

M. le Président, pour intervenir sur un projet de loi comme celui-là, il faut se situer un peu dans l'histoire. Je me souviens qu'en 1970, les municipalités passaient leur temps à venir ici à Québec quémander. Rappelons-nous qui était là en 1970! C'étaient encore ces gens-là. Les municipalités venaient ici à Québec quémander. Elles avaient 10 $ ou 15 $ par tête d'habitant pour être capables d'avoir des chemins ou différentes choses dont elles avaient besoin. Elles n'avaient pas un sou et n'étaient pas capables de diriger leurs municipalités comme elles auraient dû pouvoir le faire parce qu'elles avaient besoin d'argent.

Depuis 1979, si ma mémoire est fidèle, mon collègue Guy Tardif, qui était ministre des Affaires municipales à l'époque, avait évalué l'ensemble de la situation que vivaient les municipalités et avec une grande sagesse et après avoir consulté, il avait mis sur pied la fiscalité municipale. Il y avait eu une réforme en profondeur. Je pense que vous étiez là à l'époque, M. le Président. Vous vous souviendrez qu'il y avait eu une réforme complète sur la fiscalité municipale. À ce moment-là, on avait apporté des correctifs très valables et très importants. On avait dans un premier temps donné une autonomie municipale. On avait parlé de changer l'équité fiscale, la neutralité fiscale, la responsabilité financière des municipalités, de simplifier l'administration et de donner de la transparence aussi à tout cela. (12 h 30)

M. le Président, je ne disconviens pas qu'après une dizaine d'années tout près, de 1979 à 1987 - huit ans - il y ait certaines

choses qui étaient bien, qui étaient rassurantes et qui étaient correctes à l'époque mais qui, aujourd'hui, ne sont plus correctes. Je ne disconviens pas de cela parce que s'il fallait qu'on n'évolue pas, ce serait la fin du monde. Je pense que chaque humain tant que nous sommes évolue dans la vie, et tout autant la réglementation municipale ou celle en affaires sociales ou ailleurs. Je pense qu'il faut évoluer et, après huit ans, je ne disconviens pas que c'est le temps, qu'on pourrait regarder certaines situations pour voir quelles corrections on pourrait apporter.

M. le Président, il y a des corrections à apporter, mais il y a quelque chose de malheureux dans tout ça. Si le ministre s'assoyait pour regarder l'ensemble de ce qui se passe dans le monde municipal, il aurait une évaluation différente de celle qu'il fait aujourd'hui.

À l'époque, en 1979, il n'était pas question de contestation industrielle comme cela l'est aujourd'hui. Je vais vous donner juste un exemple. Dans ma municipalité, à la ville de Windsor, cette année, les autorités municipales de l'endroit, c'est-à-dire l'industrie Domtar ont été obligées de remettre un montant extrêmement important en retour sur les taxes à l'industrie principale. Il y a eu un accord hors cour. Je ne disconviens pas que les deux parties aient été de très bonne foi, mais vous comprendrez que si une ville de 6000 habitants est obligée de remettre près de 500 000 $, je pense qu'il y aurait lieu, pour le ministre des Affaires municipales, de corriger, et cela pas de façon ponctuelle, mais de regarder l'ensemble de la situation que vivent les municipalités et qu'on ne transfère pas du côté résidentiel là où les gens ne peuvent pas payer. Si on dit qu'on a des exemptions pour de la machinerie du côté des industries et si on revient ensuite aux municipalités pour qu'elles remettent les sommes perçues, je pense que ça ne marche plus. À ce moment-là, les municipalités n'équilibrent plus, leur administration n'a plus de bon sens et ce sont les petits payeurs de taxes qui sont obligés de payer la facture. Ça n'a pas de bon sens.

Il y a eu une évolution extrêmement importante du côté résidentiel. Aujourd'hui, du côté industriel, c'est assez stable, en tout cas ça bouge beaucoup moins que du côté résidentiel, ce qui fait que c'est le monde à l'envers. Ce sont les petits qui sont obligés de payer pour les industries. A ce compte-là, le ministre aurait été bien mieux de s'asseoir avec tout ce beau monde-là; les gens qui connaissent la situation puisqu'ils la vivent quotidiennement auraient été en mesure de l'informer correctement. Même si cela avait pris six mois ou un an de plus, si ça avait été dans l'ensemble du projet, je pense que ça aurait été plus valable et que ça aurait été moins dangereux pour les petits payeurs de taxes que ce qui arrive aujourd'hui.

Quand on dit qu'il y a eu un déplacement à cause des fortes spéculations - il y a eu un déplacement finalement de 40 % -c'est important; parce que les résidences se vendent beaucoup plus cher. Je suis très inquiète de la façon dont ça fonctionne. Si on a un cri d'alarme du côté d'un secteur en particulier, vite le gouvernement se met à table et, ponctuellement, arrive à trouver des solutions pour le domaine. S'il fallait qu'on fasse ça quotidiennement, je me demande où on s'en va et ce que ça fera finalement. Je pense qu'une chatte ne retrouverait pas ses petits chats dans ça, ça n'a pas de bon sens. Le monde souhaite avoir une politique municipale qui corresponde à l'ensemble du monde et des payeurs de taxes, des citoyens, finalement. On sait que ce n'est pas facile, les lois municipales, mais on sait aussi que ça englobe l'ensemble des payeurs de taxes. Donc, c'est pour tous les payeurs de taxes en particulier que le monde municipal et que le ministre devraient s'asseoir et réviser finalement l'ensemble de la situation.

M. le Président, vous me faites signe qu'il me reste à peine une minute pour intervenir. Je pense que la solution, je sais que mon collègue responsable l'a mentionnée au ministre tout à l'heure, serait de faire une réévaluation du système d'évaluation. Finalement, le problème est là. Si on mettait de l'avant un comité d'étude... Vous en faites, vous êtes d'accord avec cela, vous en avez pas mal, des comités d'étude sur toutes sortes de choses. Pourquoi le ministre n'aurait-il pas pensé à mettre sur pied un comité d'étude pour réformer le mode d'évaluation foncière? Je pense que ce serait la solution. On est prêt à attendre pour avoir la réponse là-dessus. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant le ministre des Affaires municipales pour une intervention de cinq minutes, au maximum.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, pour replacer rapidement les propos dans leur contexte. Tout à l'heure, le représentant de l'Opposition a fait grief au ministre des Affaires municipales de ne pas s'être occupé des conclusions du rapport Parizeau. On parlait de fiscalité municipale, on parle encore de fiscalité municipale. Le critique de l'Opposition a dit: On n'a pas de réponse du ministre. Le ministre n'a rien fait à la suite des propositions du rapport Parizeau - du nom du futur chef de l'Opposition - qui avait été fait à la demande de l'Union des municipalités du Québec.

Or, c'est vraiment ne pas connaître le

dossier que d'affirmer une énormité pareille. Nous avons devant nous, ici même, sur la table, deux projets de loi qui vont exactement dans le sens des recommandations, non seulement du rapport Parizeau... Le député de Jonquière a également parlé du rapport Lemieux qui avait été commandé par l'autre union municipale; les deux unions municipales avaient commandé chacune un rapport. Ces deux rapports ont conclu à la nécessité d'aménager l'avenir des MRC et de prévoir ce que les MRC pourront faire dans l'avenir. On a un projet de loi sur la table aujourd'hui. Qu'on ne vienne pas nous dire qu'on n'a pas donné de suite. Également, dans ces rapports, on parlait de fiscalité municipale. Nous avons devant nous des mesures fiscales. Donc, nous donnons suite à ces rapports, en partie tout au moins.

Pour ce qui est de la question du déplacement fiscal dont parlait la députée de Johnson, on affirme très facilement qu'il y a présentement un déplacement de l'effort fiscal du secteur non résidentiel vers le secteur résidentiel. On dit, par exemple, que les petits propriétaires, les gens qui possèdent des bungalows, des duplex, enfin, des résidences, seraient requis d'effectuer, année après année, un effort fiscal plus important, en termes de paiement des taxes foncières, que le secteur commercial et le secteur industriel.

Je voudrais signaler à la députée de Johnson qui, je ne lui en fait pas grief, n'est peut-être pas informée sur absolument tous les aspects de la fiscalité municipale - cela me fait plaisir d'en discuter avec elle - que les municipalités, justement, ont des outils en leur possession pour contrer ce présumé déplacement fiscal. Le législateur leur a donné des outils pour annuler le déplacement fiscal appréhendé. Entre autres, la taxe d'affaires qui est imposée par la municipalité uniquement au secteur non résidentiel a justement pour but de faire contribuer les commerces et les industries à une part importante du budget municipal. Il y a également la taxation spéciale. Les municipalités ont le pouvoir d'imposer des taxes spéciales, dans certains cas, au secteur non résidentiel. Il y a également la tarification. Les municipalités ont le droit de se faire payer pour les services rendus. Par exemple, pour la consommation d'eau potable, les municipalités peuvent installer un compteur d'eau à l'entrée des industries pour faire en sorte qu'elles paient l'eau à la consommation, contrairement aux résidences qui, dans la plupart des cas, paient un montant fixe.

Donc, les municipalités peuvent imposer des tarifs aux commerces et aux industries. Elles imposent à tout le monde des tarifs, mais, dans le cas des gros consommateurs, les tarifs peuvent être plus importants. Et l'ensemble de ces outils, car il y a d'autres outils, spécialement à Montréal, fait en sorte que, par exemple, pour la ville Montréal - on s'est penché attentivement sur ce dossier et la députée en parlait tout à l'heure - entre les années 1980 et 1987, il n'y a eu aucun déplacement du fardeau fiscal du secteur non résidentiel vers le secteur résidentiel. Cela a été admis par les représentants de la ville de Montréal après que nous ayons mis sur la table toutes les données. C'est simple, parce que la ville de Montréal s'est servi de ces outils, dont je parlais tout à l'heure, pour annuler, pour contrer totalement, le présumé déplacement fiscal qui se serait produit. De sorte qu'aujourd'hui, à la fin de 1987, on peut dire, dans le budget 1987, que la municipalité de Montréal a perçu du secteur résidentiel la même proportion de son revenu que celle qu'elle percevait en 1980 et, également, la même proportion du secteur non résidentiel que celle qu'elle percevait en 1980, ce qui prouve hors de tout doute qu'il n'y a eu aucun déplacement fiscal à Montréal entre l'année 1980 et l'année 1987. Et les mêmes outils, enfin la plupart des outils dont dispose la ville de Montréal sont entre les mains des autres municipalités du Québec. (12 h 40)

II y a quelques exceptions. La ville de Montréal a certaines exceptions qui lui permettent d'agir spécialement dans certains cas. D'une façon générale, les municipalités du Québec ont les mêmes outils: la taxe d'affaires, les taxes spéciales ou encore la tarification, de sorte que les municipalités peuvent, si elles le veulent, annuler le déplacement fiscal. Je suis convaincu qu'elles le feront dans la majorité des cas, sinon dans la totalité des cas. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Mme Johnson - je m'excuse infiniment - Mme la députée de Johnson demande si elle peut poser une question en vertu de notre règlement. Acceptez-vous une question? Très bien! Mme la députée.

Mme Juneau: Après tout ce que le ministre vient de dire, pourquoi est-il obligé de faire un projet de loi comme le projet de loi 82 pour plafonner et étaler? Cela veut-il dire que les petits propriétaires ne sont plus en mesure de payer la taxe, puisqu'elle a tellement augmenté? Pourquoi dites-vous cela? Expliquez-moi donc pourquoi vous avez fait un projet de loi 82.

Le Vice-Président: Mme la députée, c'est une question qui ressuscite pratiquement à nouveau l'ensemble du débat, mais je vais laisser le ministre vous répondre. Je demanderais au ministre de répondre très brièvement, s'il vous plaît!

M. Bourbeau: Je suis ici pour répondre à toutes les questions, qu'elles viennent de l'Opposition ou de mes collègues. Je suis ici pour servir les élus et la population en général.

M. le Président, c'est une chose de parler du déplacement fiscal de l'ensemble du budget d'une municipalité, déplacement fiscal qui pourrait exister à partir du secteur industriel ou commercial, par exemple, vers le secteur résidentiel. C'est une autre chose de parler du partage entre les contribuables du fardeau fiscal. Le projet de loi que nous avons devant nous vise à mieux partager entre les contribuables eux-mêmes les excédents, si je peux dire, d'évaluation qui pourraient survenir à l'occasion du dépôt d'un nouveau rôle d'évaluation.

Prenez l'exemple de la ville de Hull qui n'avait pas déposé de rôle d'évaluation depuis l'année 1982 et qui en dépose un en 1988. Il est bien évident, si le rôle a été gelé pendant six ans, qu'il y a des hausses importantes pour l'ensemble des contribuables. Tous les contribuables voient une hausse importante. La moyenne est de 47 % dans le cas de Hull. La moyenne! Mais, quand on dit une moyenne, il est bien évident que, pour faire une moyenne, ça prend des contribuables qui ont un peu plus et d'autres un peu moins que la moyenne; et c'est l'ensemble de tout cela qui fait la moyenne.

Si vous avez, comme dans le cas de Hull, des gens dont l'évaluation personnelle augmente de plus de 100 %, il y en a d'autres, par contre, pour qui elle n'augmente que de 10 %. La moyenne fait 47 %. Mais, à cause du fait qu'il y en a dont l'évaluation personnelle est tellement plus élevée que la moyenne, ces gens vont être frappés durement par une hausse d'évaluation, d'une part, et subséquemment par une hausse du compte de taxes. Nous voulons, justement, faire en sorte que ces gens qui sont fortement frappés par une hausse de leur compte de taxes puissent avoir jusqu'à trois ans, si tel est le voeu de la municipalité, pour rattraper, si je peux m'exprimer ainsi, leur évaluation normale.

L'évaluation, elle, va être là, mais le compte de taxes va être calculé sur une partie seulement de l'évaluation. On va soustraire une petite partie de l'évaluation, la partie qui va excéder le seuil, pour permettre à ces gens d'avoir trois ans pour rattraper leur évaluation normale, compte tenu de la hausse énorme qu'ils pourraient avoir subie. C'est une mesure, je pense, qui vise à éviter que des contribuables ne subissent d'un seul coup une augmentation de taxes énorme et, justement, à faire en sorte que la normalité puisse revenir graduellement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Très bien. Je vais maintenant reconnaître comme prochain intervenant, M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Étant donné que je n'ai que dix minutes, je vais essayer de parler vite parce que j'ai beaucoup de choses à dire sur ce projet de loi 82.

Je veux dire au ministre que oui, on va voter pour, mais cela ne nous empêchera pas, comme Opposition responsable et positive, d'indiquer au ministre nos craintes face à ce projet de loi. Effectivement, il y a beaucoup de points inquiétants qui sont amenés dans ce projet de loi et qu'on doit dénoncer, du moins prévenir. S'il y a un sujet qui est important, c'est bien la fiscalité municipale. Cela concerne tout le monde, finalement, tellement d'élus à d'autres niveaux qu'on ne peut pas adopter des lois comme si cela ne changeait rien alors qu'en réalité, c'est autre chose. C'est une loi majeure. C'est une loi qui a été votée en 1979 et mise en vigueur le 1er janvier 1980, la Loi sur la fiscalité municipale. Elle a fait en sorte de donner plus d'autonomie à nos municipalités et de reconnaître que les élus au niveau municipal sont des gens responsables. C'est ce que cela faisait.

C'est pour empêcher que ne se reproduise ce qui se passait avant. Ma collègue, la députée de Johnson, l'a dit tantôt, avant, il fallait que les élus municipaux viennent quémander à Québec pour un pourcentage presque incroyable de leur budget, qu'ils viennent supplier pour avoir de l'argent pour développer leur municipalité; c'était du discrétionnaire. C'était incroyable et inacceptable. Donc, nous, on a changé cela. On a donné aux élus municipaux les moyens de pouvoir utiliser leur autonomie, de pouvoir mettre en application leur plan de développement municipal, mais comme des gens responsables, c'est-à-dire en allant percevoir chez leurs contribuables l'argent nécessaire à la réalisation de leurs programmes. Donc, on a reconnu la responsabilité des élus municipaux par ce projet de loi.

Qu'après huit ans on vienne faire la lumière sur les lacunes de la loi, qu'on vienne l'ajuster, qu'on vienne définir s'il y a matière à ajustement, oui, mais pas de la façon dont c'est présenté. C'est cela qu'on dénonce parce que c'est une façon ponctuelle de régler des problèmes qui sont amenés très souvent par le ministre lui-même. C'est la nouvelle philosophie de l'autre côté. Il ne faut pas faire de vague. Il ne faut pas qu'il y ait des malaises dans la société ou, du moins, il faut que les malaises ne paraissent pas. Donc, si des gens amènent quelque chose, se plaignent d'une situation, bien, on

la règle, même si cela vient mettre la hache dans de grands principes, des principes d'égalité, d'équité. C'est exactement ce qu'on fait toujours de l'autre côté.

Si, aujourd'hui, on est obligé d'amener une loi comme cela, c'est à cause d'une spéculation trop forte. Là-dessus, le ministre va certainement être obligé de faire un mea culpa. S'il y autant de spéculation, il est coupable en très grande partie parce que, lorsqu'il a annoncé, entre autres, la levée du moratoire - un an trop vite et même deux ans - en disant que les locataires auraient une protection blindée, la spéculation, on a vu ce que cela a fait. Les chiffres le prouvent: une augmentation des cas à la Régie du logement. La spéculation dans des quartiers où il y a surtout de la transformation, cela aussi est prouvé. Là où cela se produit surtout, c'est à Montréal et à Québec. Cette loi va s'appliquer spécialement à Montréal et à Québec. Ce n'est pas le jeu du hasard. C'est une réalité qu'on s'en vient constater.

Donc, la spéculation nous amène à légiférer aujourd'hui et le ministre en est en partie coupable. Mais comme il ne faut pas faire de vague, bien on va légiférer pour essayer d'arroser là où il risque d'y avoir certains incendies. La fiscalité municipale, la loi de 1979, entrait en vigueur le 1er janvier 1980. Elle reposait sur quelque chose de fondamental, sur la justice, sur la simplicité, sur l'équité. La simplicité! Est-ce que vous pensez que le projet de loi 82 va venir simplifier les choses? Tout au contraire! Premièrement, c'est discrétionnaire et les municipalités l'utiliseront si elles le désirent. Donc, au départ, c'est une brèche dans cette équité ou dans cette uniformité des lois au Québec. C'est à la discrétion des municipalités et, en plus, à l'intérieur des municipalités, elles décideront des secteurs ou du type d'immeubles qui seront concernés. Je ne pense pas que ce soit de cette façon qu'on va simplifier les choses autant pour les élus municipaux que pour les citoyens payeurs de taxes.

Quand on va dans la loi, cela ne se simplifie pas davantage, parce qu'on parle de plafonnement répétitif, de valeur fictive, de pourcentage variable. On a dû discuter longtemps avec des spécialistes en commission parlementaire pour éclaircir ces points entre nous, entourés de spécialistes. Je ne pense pas que les contribuables, quand ils recevront des factures, des comptes de taxes, avec des termes semblables et tous les calculs qui s'y rattachent, vont trouver que c'est bien facile. Au contraire, cela viendra plutôt compliquer les choses pour tout le monde. Donc, à la base même, la simplicité était l'un des points importants de la fiscalité municipale. Là, on amène de la complexité.

Il y a la neutralité aussi. Je ne pense pas qu'on aille beaucoup dans le sens de la neutralité gouvernementale avec ce projet-ci. Cela amène, encore une fois, une division des deux grandes métropoles, spécialement de Montréal, par rapport aux autres municipalités du Québec. De plus en plus, on regarde le ministre s'en aller vers cette espèce de division, de mise à part, de situations traitées de façon tout à fait particulière pour Montréal ou la Communauté urbaine de Montréal par rapport aux autres municipalités du Québec. Il va falloir revenir sur cela aussi au sujet d'autres projets de loi. (12 h 50)

Je vais plutôt me consacrer au projet de loi 82, à des choses qui sont fondamentales, entre autres l'équité. Là, je pense qu'on ne l'a pas du tout quand on parle des deux choses importantes qu'on retrouve dans le projet de loi 82, c'est-à-dire le plafonnement et l'étalement, mais spécialement le plafonnement. En termes simples et clairs, cela veut dire que les municipalités vont pouvoir décider d'un plafonnement pour des secteurs ou des types d'immeubles, avec des taux variables, avec des pourcentages et toutes sortes de calculs, mais un plafonnement de l'augmentation de l'évaluation, un plafonnement du niveau de taxes à payer. Donc, pour les gens qui auront une plus forte augmentation de taxes due à une évaluation ou pour toutes sortes de raisons - ce qui m'inquiète, c'est que ce seront probablement les spéculateurs qui vont en profiter encore une fois - on va plafonnerl Les spéculateurs dans un quartier font augmenter considérablement le prix des maisons. Cette spéculation va amener une augmentation considérable de l'évaluation de l'édifice, donc des taxes, et on va plafonner! Cela veut dire qu'il ne paiera pas selon la valeur réelle de sa maison. Celui qui va profiter de la spéculation sera plafonné au sujet des taxes à payer.

Comme la municipalité a besoin de la même enveloppe budgétaire, du même montant de taxes perçues pour donner des services à sa population, elle devra faire en sorte d'aller chercher les mêmes fonds. Mais, comme on plafonne les spéculateurs ou ceux qui ont une augmentation considérable, cela veut dire que ces gens-là ne paieront pas en fonction de l'évaluation augmentée de leur maison et qu'on devra aller chercher chez les autres contribuables. Cela voudrait donc dire que le manque à gagner par rapport à cette évaluation sera réparti entre les autres propriétaires qui, eux, ne sont pas plafonnés; donc, une augmentation indirecte, par ricochet, pour ces gens-là.

Comme le budget doit être global et qu'il ne doit pas être diminué, cela voudra dire que ceux qui sont plafonnés paieront moins et qu'on ira chercher chez les autres contribuables municipaux le manque à gagner

provenant du fait qu'on ne va pas chercher le maximum. C'est cette équité qui nous inquiète. Est-ce qu'on ne va pas aller le chercher dans la poche du petit propriétaire résidentiel, ou chez les locataires qui vont payer indirectement s'ils habitent dans des maisons locatives? Est-ce qu'on ne va aller chercher dans les poches des plus petits l'économie réalisée par les spéculateurs? C'est inquiétant.

Vous me dites qu'il ne me reste même pas deux minutes. Ce plafonnement est inquiétant, parce qu'il risque de se faire sur le dos des gens qui ne sont pas dans des quartiers spéculatifs, mais qui vont devoir payer la facture. Le gouvernement devrait donner l'exemple, pour faire en sorte qu'on ne transfère pas chez les plus petits cette augmentation de taxe, et payer sur la valeur réelle ses "en lieu" de taxes. On n'en parle pas beaucoup de l'autre côté. On n'en parle plus. Mais une façon d'être un bon citoyen corporatif, c'est de payer ses taxes en totalité et surtout de faire des pressions sur le gouvernement fédéral qui ne paie presque rien sur ses bâtisses. Le gouvernement fédéral devrait être un citoyen modèle, ce qu'il n'est absolument pas. On n'entend pas beaucoup le ministre dire, de l'autre côté, qu'il va faire des pressions pour qu'au niveau municipal on aille chercher l'argent qui devrait revenir aux municipalités en "en lieu" de taxes sur les édifices des gouvernements supérieurs, dont le gouvernement fédéral. J'incite donc le ministre à faire des pressions sur le gouvernement fédéral et sur son gouvernement pour qu'on soit de bons citoyens et qu'on paie la totalité de nos taxes.

On va voter pour, oui, mais je tenais à faire ces remarques pour que le ministre soit bien conscient qu'il y a des dangers là-dedans, des dangers pour la simplification des lois dont on a toujours parlé et qui devrait se poursuivre, alors que, là, c'est plutôt la complexité, mais surtout des dangers quant à l'équité. Il ne faudrait pas faire en sorte que, par cette loi, il y ait plus de spéculation, que les spéculateurs en profitent non seulement en faisant des profits sur les ventes et les achats de maisons, mais en plus par des économies de taxes. Cela nous inquiète et on tenait à le dire.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le ministre des Affaires municipales.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, je déplore que l'ex-critique de l'Opposition en affaires municipales ou l'ex-futur critique en affaires municipales, le député de Shefford, ait un peu beaucoup recours à la démagogie pour tenter de prouver les points qu'il veut avancer. Le député nous dit que c'est un projet de loi qui va favoriser les gros contribuables contre les petits, les spéculateurs contre les autres citoyens. Or, le député de Shefford sait fort bien qu'il n'en est rien. On en a discuté longuement en commission parlementaire et, après qu'il aura compris le mécanisme que nous avons dans cette loi, il verra que c'est impossible que cette loi privilégie les spéculateurs à l'encontre des autres citoyens.

Je vais vous expliquer pourquoi, M. le Président. Supposons que, dans un quartier donné, un individu vende sa maison à un prix très élevé, même si c'est un spéculateur, admettons que c'est un spéculateur, automatiquement, les évaluateurs vont considérer que toutes les maisons dans le voisinage, les maisons semblables, ont une valeur comparable à celle de l'individu qui vient de vendre. Là, on a une possibilité d'augmentation de l'évaluation pour l'ensemble du quartier. Mais ces gens qui voient l'évaluation de leur maison augmenter ne sont pas des spéculateurs, ce sont des propriétaires. Cela peut être dans un quartier où il y a de petits propriétaires autant que dans un quartier où il y a de grosses maisons luxueuses. Une maison qui se vend plus cher que les maisons voisines, cela peut se produire autant dans un quartier où les maisons ont une valeur modeste que dans un quartier où les maisons ont une valeur plus élevée. La spéculation a lieu partout, autant sur les petites propriétés, les propriétés modestes, que sur les grosses.

À partir du moment où l'évaluateur reporte cette plus-value à l'ensemble du quartier, tout le monde dans une municipalité, les petits et les gros, est susceptible d'être frappé par une hausse d'évaluation importante ou par une hausse de taxes importante. Ce sont ces gens, les propriétaires individuels, les petits comme les gros, que nous voulons protéger et que l'ensemble des élus municipaux représentés, comme je l'ai dit tout à l'heure, dans un comité technique, veulent protéger par ce projet de loi.

M. le Président, finalement, ce que nous avons devant nous, c'est une police d'assurance au bénéfice de tous les contribuables d'une municipalité, quels qu'ils soient, les petits contribuables comme les gros. Si les municipalités veulent utiliser le système, elles vont les protéger contre des hausses brusques du compte de taxes. Il y aura une prime à payer, ce sera 0,01 $, 0,02 $ ou 0,03 $ sur le compte de taxes, selon la municipalité. En contrepartie, chaque propriétaire qui verrait son compte de taxes augmenter d'une façon plus importante que le seuil fixé par la municipalité jouira d'une réduction du compte de taxes pour l'excédent pendant un an, deux ans ou trois ans. Enfin, cela lui permettra de rattraper son

évaluation.

C'est une mesure exactement équivalente à une police d'assurance et les municipalités ont le loisir, si elles le veulent, de l'utiliser. On ne l'impose pas, c'est la municipalité, qui est autonome et responsable de son administration, qui décidera, oui ou non, de l'appliquer et elle en répondra devant ses contribuables, comme le font tous les élus.

Maintenant, M. le Président, je conclus en disant que je ne comprends pas le député de Shefford. Avez-vous compris, M. le Président? On nous reproche - c'est bien ce qu'il a dit - de régler des problèmes. Est-ce qu'il est possible d'entendre en cette Chambre un député qui reproche au gouvernement de régler des problèmes? Ma foi, c'est comme si on nous interdisait de régler les problèmes.

Une voix: Ils nous reprochent d'être bons.

M. Bourbeau: Nous avons été élus pour quoi? Pour créer des problèmes, pour semer la zizanie dans la société? Enfin, si c'est ce que vous pensez être notre mandat, ce n'est pas ce que nous pensons. Nous pensons que le peuple du Québec nous a confié la responsabilité d'administrer et, entre autres choses, de régler des problèmes. C'est ce que nous faisons, M. le Président, avec ce projet de loi. Le député l'a admis, d'ailleurs, et il nous a reproché de régler les problèmes. Nous en réglons quelques-uns ici pour le plus grand bienfait des contribuables des municipalités du Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé à cette étape de l'étude du projet de loi 82, je vais maintenant mettre aux voix l'amendement déposé par le ministre des Affaires municipales et reçu à ce stade-ci du débat. Il s'agit d'un amendement à l'article 5 du projet de loi 82, article 5 qui a pour but d'ajouter certains articles à la Loi sur la fiscalité municipale. L'amendement a pour effet précis d'ajouter au nouvel article 253.22 un troisième alinéa qui se lit comme suit: "L'application du présent article n'affecte pas le privilège afférent aux taxes foncières qui grève l'unité d'évaluation pour garantir le paiement du solde visé au premier alinéa." Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Cet amendement est donc intégré au rapport qui est amendé en conséquence. Est-ce que le rapport tel qu'amendé de la commission de l'aménagement et des équipements, qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et la Loi concernant les droits sur les divertissements en matière de taxes municipales, est adopté?

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président: Oui, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: ...on aurait beaucoup de raisons de ne point voter pour, mais nous allons, quand même, voter pour.

Le Vice-Président: Très bien. Le rapport tel qu'amendé est donc adopté. Puisque nous arrivons à 13 heures, nous allons suspendre nos débats qui reprendront à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 6)

La Vice-Présidente: Vous pouvez vous asseoir.

Nous allons reprendre la séance.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 40 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 99

Prise en considération

du rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 40 de notre feuilleton, il s'agit de la prise en considération du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes, proposé par M. le ministre délégué aux Pêcheries.

Avant de commencer, M. le leader du gouvernement, vous comprendrez que le rapport a été déposé ce matin et qu'il me faut le consentement de cette Chambre pour qu'on puisse prendre en considération ledit rapport. Est-ce qu'il y a consentement de la Chambre?

M. Perron: Consentement, Mme la Présidente.

M. Lefebvre: Consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Consentement. Je suis prête à reconnaître le premier intervenant.

M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Oui, Mme la Présidente, ça va être très bref, compte tenu de l'engagement que j'ai pris hier soir pour que ce projet de loi 99 soit sanctionné dans les plus brefs délais. Je me suis entendu avec le ministre délégué aux Pêcheries pour qu'il n'y ait pas de discours cet après-midi, pour que, ce soir, lors de la troisième lecture, il y ait peut-être deux ou trois minutes. Ensuite, on passera à l'adoption en troisième lecture et, par la suite, à la sanction aussitôt que le lieutenant-gouverneur pourra le faire. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Duplessis.

Il n'y a pas d'autres interventions?

Est-ce que le rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes, est adopté?

M. Perron: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais maintenant d'appeler l'article 12 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 67 Adoption du principe

La Vice-Présidente: À l'article 12 de notre feuilleton, le ministre des Communications propose l'adoption du principe du projet de loi 67, Loi sur l'emblème aviai-re.

M. le ministre des Communications.

M. Richard French

M. French: Merci, Mme la Présidente. Je veux vous signaler d'abord que bien que je sois le parrain technique, si vous voulez, de ce projet de loi, puisque je suis responsable du programme d'identification visuelle du gouvernement et responsable, de par la Loi du ministère des Communications, des emblèmes nationaux, dont bientôt, espérons-le, le harfang des neiges, j'ai donc eu la responsabilité et l'honneur de déposer en cette Chambre le projet de loi que nous débattons cet après-midi.

Cependant, et j'aimerais bien le signaler, Mme la Présidente, pour votre bénéfice et pour celui de l'Opposition, l'heure qui est normalement dévolue au parrain du projet de loi sera prise par mon collègue, le ministre de l'Environnement qui, lui, est le parrain spirituel du projet de loi et qui peut expliquer son fondement.

J'aimerais cependant, dans les quelques minutes que j'ai l'intention d'utiliser cet après-midi, vous dire quelques mots au sujet du programme d'identification visuelle avant de laisser la parole à mon collègue. Mon collègue va donc expliquer pourquoi la sélection du harfang des neiges.

Il y a presque 20 ans, en septembre 1968, l'Assemblée nationale a adopté la fleur de lis accompagnée du mot "Québec" pour identifier les organismes gouvernementaux. Deux ans plus tard, en 1970, on peut dire que c'était le véritable point de départ du programme d'identification visuelle du gouvernement du Québec, avec l'élaboration d'un système de signalisation des bâtiments occupés par l'État.

En 1975, il y avait l'adoption d'un nouvel emblème, soit une fleur de lis inscrite dans un carré. Son utilisation est strictement réservée au gouvernement à cause de la protection légale obtenue en vertu de la Loi sur les marques de commerce. Je pense que tout le monde, ainsi que tous les téléspectateurs qui nous suivent, a, à un moment ou à un autre, vu ce sigle du gouvernement du Québec, le carré bleu entourant la fleur de lis.

En 1978, le ministre des Communications de l'époque a reçu le mandat de développer l'image gouvernementale à l'aide de son programme d'identification visuelle et de voir à l'application de ses règles graphiques. Donc, en vertu de la Loi sur le ministère des Communications, le ministre a, entre autres, le mandat de développer une image gouvernementale forte et cohérente propre à faciliter et à accroître la communication avec le public. On peut penser au drapeau du Québec, à la fleur de lis accompagnée du mot "Québec" dont j'ai parlé tantôt, à la fleur de lis épurée inscrite dans un carré, au mot "Québec" suivi du drapeau que nous voyons dans la publicité audiovisuelle du gouvernement du Québec - publicité à la télévision, entre autres - et, bientôt, au harfang des neiges.

Cette politique d'identification visuelle touche la papeterie du gouvernement, les formules, les publications, la publicité, les expositions, l'audiovisuel, les véhicules automobiles, les aéronefs et les bateaux. Il ne faut pas oublier non plus la signalisation des bâtiments, l'habillement de certains employés de l'État, les enseignes et les objets de promotion du gouvernement.

En règle générale, les ministres et organismes dont le budget est voté par l'Assemblée nationale sont assujettis au programme d'identification visuelle. D'autres organismes, comme la Régie de l'assurance automobile du Québec, la Régie des rentes du Québec, entre autres, sont également assujettis au même programme même si leur budget n'est pas voté par l'Assemblée natio-

nale, c'est-à-dire même si, techniquement, ils ne sont pas nécessairement couverts par la législation et la réglementation.

Par contre, certains organismes dont l'essentiel du budget est voté par l'Assemblée nationale, dont la Sûreté du Québec, dont Radio-Québec, ne sont pas assujettis à ce programme. Dans les semaines et les mois à venir, mon collègue, le ministre de l'Environnement et moi-même allons nous rencontrer pour discuter de l'usage précis qui sera fait du harfang des neiges comme emblème aviaire vis-à-vis des organismes gouvernementaux qui pourraient possiblement jouir de cette identification additionnelle qu'offrirait le harfang des neiges, avec l'État et certaines responsabilités peut-être dans le domaine de l'environnement.

Le rôle du ministère des Communications dans le domaine des emblèmes nationaux, c'est normalement l'administration, entre autres, de la Loi sur l'emblème floral et de l'usage qui est fait de tous ces emblèmes. Nous sommes aussi le ministère responsable des lois et règlements concernant les communications. Or, les emblèmes constituent évidemment un geste privilégié de communication et d'identification d'un État.

Le ministre des Communications a le pouvoir de demander aux registraires des marques de commerce de notifier le public de l'adoption d'un emblème et de son emploi comme marque officielle pour identifier les organismes gouvernementaux du Québec. Une fois un emblème adopté, il revient au ministre des Communications de voir à sa diffusion, à sa promotion et à régir ses diverses utilisations, entre autres, dans les communications officielles du Québec. C'est ce que je vais faire dans le cas du harfang des neiges avec la collaboration de mon collègue, le ministre de l'Environnement.

On le sait, les emblèmes ont une signification toute particulière dans l'histoire des peuples. Ce sont des symboles. Chaque pays dispose de ses propres symboles qui établissent son caractère distinctif par rapport aux autres nations. Les symboles sont également le reflet de l'histoire d'un pays, de sa population, de son environnement et de ses traditions. Qui plus est, ils incarnent la nature profonde, à la fois aux yeux des autres nations et à ceux de ses propres citoyens, d'un pays, d'une tradition importante. Ils illustrent les valeurs, les objectifs et les aspirations de son peuple.

La flore et la faune occupent une place de choix parmi les symboles utilisés au Canada pour des raisons évidentes. C'est un pays privilégié du fait de l'abondance de sa faune, de ses forêts, de ses lacs et de ses cours d'eau. L'emblème est un symbole auquel un peuple choisit de s'identifier, l'image qu'il décide d'avoir de lui-même et qu'il résume dans son temps et son espace; c'est le miroir d'un peuple.

On sait qu'historiquement, les emblèmes ont joué un rôle important. On n'a qu'à penser à des exemples de l'histoire européenne, au symbolisme incarné des aspirations des uns et des autres par des emblèmes particuliers. Nous nous apprêtons, aujourd'hui, à faire la même chose pour la société québécoise quant à son emblème aviaire, le harfang des neiges.

Le Québec est une des rares entités politiques à ne pas disposer d'un emblème aviaire. Au moins quatre provinces canadiennes en possèdent un: l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, l'Alberta et le Nouveau-Brunswick. Les 52 États américains ont adopté chacun leur emblème aviaire. La présentation d'un projet de loi pour faire du harfang des neiges un emblème officiel du Québec et son premier emblème aviaire apporte à cet emblème la reconnaissance officielle de l'Assemblée nationale, lui procure une certaine publicité, permet de mieux encadrer les utilisations éventuelles qui pourraient être faites de cet emblème et confirme de façon non équivoque l'importance que le Québec lui accorde.

En terminant, Mme la Présidente, l'adoption d'un emblème aviaire va éveiller davantage la population à la nécessité de préserver cette espèce et notre patrimoine biologique en général. Cela va aussi souligner l'importance que le Québec accorde à son environnement et à ses beautés. Je suis convaincu que mon collègue va en parler davantage tantôt. Donc, c'est avec très grand plaisir que j'invite l'Assemblée nationale à endosser la proposition du gouvernement par le biais du projet de loi que nous discutons cet après-midi, à endosser le choix du harfang des neiges comme emblème aviaire du Québec.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Communications. M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Tous les pays, tous les peuples du monde adoptent des signes visuels distinctifs pour que ces symboles les différencient des autres peuples du monde. De façon générale, les pays ont un drapeau, des armoiries et des emblèmes, autant de leur flore que de leur faune, emblème floral ou emblème aviaire. Le Québec a tardé à se donner des signes distinctifs. J'oserais croire que c'est, par nature, que le peuple québécois est toujours hésitant à se doter de signes distinctifs.

Tout d'abord, j'aimerais que mon intervention soit rassurante pour l'ensemble des gens qui habitent le Québec. Beaucoup de personnes ont une certaine crainte, et je crois qu'elle est injustifiée, de voir le Parle-

ment voter un emblème aviaire. Beaucoup de gens ont peur que l'emblème aviaire qu'on veut voter aujourd'hui, qui est le harfang des neiges, vienne remplacer, à certains endroits, la fleur de lis ou le fleurdelisé. Eh bien, je voudrais rassurer, d'abord, les gens que cette possibilité est à peu près nulle. Il faut se rappeler un peu l'histoire des emblèmes et des symboles du peuple québécois. J'aurais apporté une photo agrandie, une photo de cet oiseau, mais ce n'est pas permis en Chambre d'exhiber des photos et des emballages. Il y a une règle de la Chambre qui nous interdit de le faire, alors je n'ai pas osé l'apporter. Parce que cet oiseau en soi est extraordinairement visuel. Mais il n'est pas permis d'apporter en Chambre des cadres ou de grandes photos ou encore ce qu'on appelle communément des "posters" et de les exhiber à la face de la caméra. Donc, pour suivre les règlements, je m'en suis abstenu. (15 h 20)

Cependant, pour rassurer ceux qui auraient peur que le harfang des neiges vienne remplacer le fleurdelisé ou la fleur de lis, dans le cadre du débat que nous avons aujourd'hui, le projet de loi 67, Loi sur l'emblème aviaire, qui désigne officiellement, à cette fin, le harfang des neiges et qui peut receler un potentiel polémique, je soumets à votre attention certains faits historiques qui permettront, outre de distinguer diverses notions, d'atténuer certaines appréhensions.

Tout d'abord, le drapeau du Québec, le symbole par excellence. Le 21 janvier 1948, le Conseil des ministres adopte le fleurdelisé comme drapeau officiel du Québec par l'arrêté en conseil no 72. C'était en 1948. Deux ans plus tard, l'Assemblée législative adoptait la Loi sur le drapeau officiel de la province, loi sanctionnée le 9 mars 1950. C'est donc dire que, de façon très officielle depuis 1948-1950, nous avons un signe distinctif qui est le drapeau du Québec et nous en sommes tous fiers aujourd'hui. Enfin, pour que le fleurdelisé ne puisse pas être utilisé comme emblème par n'importe quel organisme, le gouvernement du Québec enregistre le drapeau du Québec en vertu d'une loi pour protéger le respect que l'on doit au drapeau. C'est extrêmement normal qu'il en soit ainsi.

Toujours relativement au drapeau du Québec, l'arrêté en conseil du 20 août 1969 autorisait le ministère des Travaux publics à prendre les mesures nécessaires en vue de faire arborer le drapeau sur les édifices du gouvernement, les écoles et les maisons d'enseignement. C'est donc dire que depuis l'arrêté en conseil du 20 août 1969 tous les édifices, toutes les bâtisses, les bâtiments qui appartiennent au gouvernement du Québec doivent arborer le drapeau du Québec. De façon générale, sauf sur certaines écoles à Montréal, on voit le fleurdelisé.

Deuxièmement, les armoiries du Québec sont un autre signe distinctif. En 1868, l'année après notre abdication comme Québécois, les quatre provinces de la Confédération canadienne reçoivent leurs armoiries par mandat de la Reine Victoria. Alors c'est la Reine Victoria qui nous a donné nos armoiries. Un an après notre abdication comme Québécois, c'est-à-dire en 1868.

En décembre 1939, le gouvernement du Québec émet un arrêté en conseil concernant l'adoption de nouvelles armoiries pour le Québec. De nouveau, en vertu de la loi, elles sont enregistrées pour être protégées parce que les armoiries ne peuvent pas servir à n'importe quel emblème, soit de vente de mortadelle ou de sifflets ou de yo-yo. Il y a une protection sur les emblèmes distinctifs d'un peuple et d'un pays.

Vient ensuite l'emblème floral. Malgré une vive controverse, il y a eu une très vive controverse ici sur l'adoption de l'emblème floral. Parce que la fleur de lis... Il y a quelques fleurs qui se ressemblent et plusieurs disaient que ce que nous choisissions n'était pas autochtone, etc. En fin de compte, pour couper court, c'est la fleur de jardin, la fleur de lis de jardin qui a triomphé comme emblème floral du Québec.

En décembre 1987 voici que nous arrivons maintenant avec le harfang des neiges comme symbole aviaire. Il y a l'identification visuelle qui est très importante, et je dis cela, Mme la Présidente, pour vous montrer que les gens qui ont peur que l'emblème aviaire ne vienne remplacer, en quelques endroits, soit le fleur de lis ou le fleurdelisé n'ont pas raison de penser cela. C'est pour ce faire, pour qu'il n'y ait pas de polémique d'aucune sorte, que je prends la peine de le dire. J'aurais aimé -je le répète - amener le harfang des neiges en Chambre et l'exhiber, mais ce n'est pas permis par nos règlements. Je n'ai pas osé le faire. C'est tellement un bel oiseau, madame, que j'aurais aimé l'amener, mais ce n'est pas permis par nos règlements d'exhiber des choses de cet ordre; on doit le faire à l'extérieur de la Chambre.

J'espère que le ministre des Communications fera une conférence de presse pour le montrer à tout le monde à la caméra. J'aurais aimé l'amener en Chambre - je le répète pour la quatrième fois - mais c'est défendu par nos règlements d'amener des posters, des cadres et des choses comme celles-là et de les exhiber en Chambre. C'est défendu par le règlement. J'aurais aimé l'amener, Mme la Présidente, et j'espère que vous avez déjà vu le harfang des neiges. C'est tellement un bel oiseau qu'on pourrait succomber à la tentation de l'exhiber en Chambre, mais ce n'est pas permis, Mme la

Présidente!

L'identification visuelle...

La Vice-Présidente: À l'ordre! À l'ordre!

M. Blais: Le 11 septembre 1968, l'arrêté ministériel 2951 stipule qu'il est opportun de doter les organismes gouvernementaux du Québec d'un emblème unique pour fins d'identification. Le fleur de lis, avec inscription transversale du mot "Québec", est alors adopté et fait, de plus, l'objet d'un enregistrement. Par arrêté ministériel, c'est le fleur de lis, avec le mot "Québec" en croisée, qui est l'emblème distinctif des organismes québécois. Donc, que ceux qui auraient peur que ce bel oiseau vienne remplacer le fleur de lis ou le fleurdelisé se le tiennent pour dit, c'est impossible à cause des arrêtés ministériels précédents et du respect que tout le monde a dans cette Chambre pour le fleur de lis, le fleurdelisé. Alors, que les gens qui pensent que cet emblème qu'on adopte aujourd'hui viendrait le remplacer se le tiennent pour dit. Je le répète souvent, madame, mais il y a toujours des gens qui pourraient penser que cet emblème pourrait être remplacé.

Enfin, en 1975, encore par arrêté ministériel, le gouvernement du Québec ordonne que le fleur de lis inscrit dans un carré soit adopté et employé comme emblème constituant l'identification des organismes gouvernementaux. Donc, il faudrait d'abord voter un autre arrêté pour ne pas que cet emblème, qui est le fleur de lis, représente les organismes du gouvernement du Québec et qu'il soit remplacé par l'oiseau. Personne ici, en cette Chambre, même si de l'autre côté on ne pèche pas par excès de nationalisme, n'oserait faire un tel affront au fleurdelisé. Alors, que les gens soient bien rassurés, cela ne se fera pas.

Dans le cadre du programme d'application, en réalité, cela a été beaucoup plus loin que les identifications: le papier pour la correspondance, les enveloppes, les cartes de visite, les bloc-notes. Tout ce qui, en général, sort du gouvernement est identifié par le carré avec la fleur de lis dessus - vous savez que c'est l'emblème du Québec, Mme la Présidente - et cette identification ne peut être changée par un emblème floral.

Mme la Présidente, une question de directive. J'aurais aimé amener un grand poster du harfang des neiges ici, mais je croyais que ce n'était pas permis par nos règlements. Je vous demande, juste pour renseignement, s'il m'aurait été possible de l'apporter.

Une voix: II faudrait le consentement. La Vice-Présidente: II s'agit d'une question de règlement, M. le député de Terrebonne, et je vais y répondre. Effectivement, il y a déjà une jurisprudence à cet effet. En mai 1985, un ancien président de la Chambre a rendu une décision selon laquelle un député peut présenter un tableau de nature didactique dans le but d'illustrer un propos, mais il s'agit là non pas d'un droit, mais d'une permission accordée à un parlementaire qui prononce un discours. Naturellement, si la photo est directement reliée à un projet de loi, je pourrai, dans ces circonstances, permettre la diffusion de l'image, pourvu que ce soit directement relié au projet de loi.

M. Lefebvre: Mme la Présidente...

M. Blais: Question de règlement. D'accord.

M. Lefebvre: Sur la même question de règlement-La Vice-Présidente: Sur la question de règlement.

M. Lefebvre: J'ai presque le goût d'informer tout de suite le député de Terrebonne, en passant par vous, évidemment, qu'on a effectivement l'intention de satisfaire sa curiosité légitime.

M. Blais: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Lefebvre: Le ministre exhibera la photo à laquelle le député a fait abondamment référence depuis le début de son discours.

La Vice-Présidente: Si vous me permettez, quand le temps sera venu, on accordera cette permission, s'il y a lieu. Pour l'instant, nous écoutons le député de Terrebonne et je n'aimerais pas qu'on...

Une voix: Cela va nous permettre de parler d'autre chose.

La Vice-Présidente: M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Cela veut dire que je n'aurais pas dû résister à la tentation d'amener ce cadre. J'espère que l'Opposition en a une copie. Étant donné que j'ai oublié le mien, j'espère que d'autres montreront le leur, et il me fera plaisir de le voir à la télévision. Les gens pourront constater de visu ce que représente vraiment ce harfang des neiges. C'est quand même un précédent. Â l'avenir, dans mes prochains discours, si je veux parler de quelque chose, j'arriverai toujours avec un cadre, étant donné que vous nous le

permettez. Cela me fait plaisir. (15 h 30)

En épilogue, comme dernier emblème, nous n'avions pas d'emblème aviaire et voici aujourd'hui que le harfang des neiges, par la loi, devient l'emblème aviaire du Québec. J'aimerais vous dire que, lorsqu'est arrivée la bataille en cette Chambre, c'est le député de Terrebonne de l'époque qui avait présenté l'emblème de la fleur de lis, et l'histoire se répète aujourd'hui, c'est le député de Terrebonne, dans l'Opposition, qui porte le dossier des emblèmes. C'est drôle comme, parfois, les choses se joignent et se ressemblent. Il y a tout de même une précaution qui a été prise par le gouvernement précédent et qui permet aujourd'hui à l'Opposition d'être favorable à cet emblème, parce que nous avons un groupe d'experts qui, en 1979, se sont consultés pour choisir cet emblème aviaire du Québec. En fait, c'est un groupe d'ornithologues qui ont regardé la chose et qui ont fait une vaste enquête auprès de 226 représentants ou spécialistes des oiseaux tout simplement, pour qu'on soit compris par tout le monde. Ces gens-là avaient à choisir entre différents oiseaux qui sont passablement connus au Québec. Il y avait, entre autres, le canard noir, le harfang des neiges, le geai bleu, le pinson à gorge blanche, le bruant des neiges, etc. Les 226 spécialistes ont voté, selon certains critères: un oiseau que la population devait connaître le plus possible de façon générale, qui devait être rencontré à peu près dans toutes les régions habitées du Québec, qui devait être relativement facile à identifier par la population. C'est bien sûr qu'aucun oiseau au Québec ne répondait à 100 % à tous ces critères. Et plusieurs, selon leurs sentiments, le coin du Québec où ils habitaient ou le goût personnel aussi, voyaient plutôt le huard ou le canard ou l'oie blanche ou le harfang des neiges. Certains allaient même jusqu'à proposer des croisements entre certains de ces oiseaux, mais c'est bien sûr qu'il fallait que quelqu'un tranche quelque part. Alors, les 226 spécialistes ont décidé de voter ainsi. Sur 226 votes, le canard noir du Québec a reçu trois votes, le bruant des neiges, 13 votes, le pinson à gorge blanche, 50 votes, le geai bleu, 44 votes, et le harfang des neiges, 116 votes. Il me fait plaisir que cet oiseau ne soit ni bleu ni rouge, parce qu'on croirait, comme quelqu'un vient de le souffler, que c'est par partisanerie que les ornithologues auraient choisi un oiseau.

Vous savez, Mme la Présidente, qu'à choisir un oiseau, un parti ne perd pas de plumes. C'est tout simplement une façon technique de regarder certains critères de base qui font que l'oiseau est plus représentatif d'un coin de territoire ou d'un autre.

Il y avait cependant pour le harfang des neiges un inconvénient majeur, à savoir que cet oiseau vit dans l'extrême nord du Québec, en haut du soixantième parallèle, presque la totalité de l'année. À ce moment-là, les urbains que nous sommes du sud, nous n'en voyons pas très très souvent. Il vient nous visiter de temps à autre dans le sud tous les quatre ou cinq ans, lorsque sa nourriture est moins forte dans le Grand-Nord, et nous sommes heureux lorsque nous en voyons un. Je suis persuadé que, dans cette Chambre, il n'y en a pas beaucoup qui ont vu des harfangs des neiges visuellement. Il ne doit pas y en avoir beaucoup. On en a vu en photo, on a entendu parler que certains de ces oiseaux grands et nobles, fiers et d'allure altière se promenaient parfois dans nos villes et dans nos centres urbains, et que, parfois, comme ils sont très très peu sauvages, ils se faisaient frapper par une voiture et qu'on les amenait chez le vétérinaire. Là, ça faisait la nouvelle de partout et c'est là qu'on pouvait voir la beauté de l'oiseau.

Pour que les Québécois qui nous entendent connaissent un peu mieux le harfang des neiges, j'aimerais faire un petit bout de description de la bête elle-même. Pour ce faire, j'ai Forêt et conservation, le Magazine de la forêt de 1983, volume 49. Il y a un article... Je ne lirai pas tout cela, Mme la Présidente. Mais, tout de même, on en a le droit, il me semble. Vous voyez, ici, il y a un symbole. Vous l'avez ici en noir et blanc. Cela ne m'a pas coûté très cher, c'est une photocopie, pour présenter le premier en cette Chambre cet harfang des neiges. J'ai oublié ma copie en couleur, mais je veux que les gens voient. Cela ressemble un peu à une chouette, à un hibou ou à un hibou très chouette!

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Blais: C'est un bel oiseau, Mme la Présidente. C'est un oiseau extraordinaire, le harfang des neiges. Il y a un article ici écrit par André Duhamel et Léopold Gaudreau. Je vais vous en lire quelques extraits afin que les Québécois qui auront cet oiseau comme emblème il y a unanimité dans cette Chambre - aient un peu le sens de ce que c'est. Je vais décrire l'oiseau lui-même, ce qu'il est physiquement, ses habitudes, ses façons de se reproduire, son apparence visuelle et ses grandes qualités aviaires, ses grandes qualités d'oiseau.

C'est un oiseau superbe, sublime, d'une beauté presque inégalée, tout le monde est d'accord sur cela. M. Duhamel dit: "Le harfang des neiges est l'oiseau qui représente le mieux la brillance, la clarté et la force de notre climat hivernal. Il est une merveille animale de la nature nordique. Le choix de ce rapace diurne..." On croirait que, parce que c'est un genre de hibou, que c'est un

oiseau nocturne, qui chasse la nuit et qui vit la nuit. Non, non. C'est un des seuls, sinon le seul hibou de la même famille - il y a le grand duc et d'autres - qui est un chasseur diurne. C'est un oiseau qui vit le jour. Son apparence nous laisserait croire qu'il vit la nuit parce qu'il ressemble beaucoup au hibou, mais non. "Le choix de ce rapace diurne aux habitudes particulières de nidification - cela veut dire qu'il a une façon très spéciale de faire son nid et de se reproduire, j'en parlerai un peu plus tard - ne s'impose-t-il pas comme emblème aviaire... du Québec?"

C'était en 1983, après que le groupe qui s'appelait le COQ, le Club des ornithologues du Québec, ait choisi le harfang des neiges comme oiseau. Le COQ a choisi le harfang des neiges comme oiseau symbole et proposait au gouvernement, à l'époque, de prendre le harfang des neiges comme emblème aviaire du Québec. Vous savez qu'on prend toujours le temps d'examiner les raisons, etc. Je crois que nous avions regardé avec les directions, en 1985... Nous étions prêts aussi à l'adopter. C'est pourquoi vous n'aurez aucune difficulté avec nous; nous étions prêts, nous étions d'accord. C'est pour cela qu'on ne fait pas de bataille sur cela. C'est normal. Aujourd'hui, le parti au pouvoir... D'ailleurs, si le ministre peut faire venir une de nos photographies qu'il doit avoir à son ministère. Il y en avait une très grande avec un bel oiseau en vol. Ce serait très bon. S'il ne l'a pas, il devrait la faire venir pour la montrer aux gens, vu que Mme la Présidente lui en a donné la permission. Cela renseignerait les gens de façon visuelle.

On dit: "La grande beauté du harfang en fait une merveille de la nature nordique. C'est d'ailleurs un des plus beaux oiseaux de la planète. Il est grand et trapu..." Écoutez, là! Ce sont des ornithologues, des spécialistes. Il en ont vu des moineaux, eux. Ils en ont vu des oiseaux. Ces spécialistes nous disent que c'est l'un des plus beaux oiseaux de la planète. Quelqu'un qui serait contre ferait l'autruche, c'est sûr. On dit aussi: "Les yeux sont..." Je vais les décrire un peu. Ce sont des yeux jaunes et gros. "Le bec est noir et crochu. Les pattes et les ongles sont lourdement emplumés. Le plumage du harfang des neiges est remarquable. Sa couleur blanche est nuancée selon les individus, le sexe et l'âge et, parfois, le temps de l'année où il est aperçu. C'est qu'il change un peu de couleur au fil des ans. Plus il y a de neige, plus il est blanc. Il se confond avec la nature, c'est ce qui en fait un chasseur redoutable. (15 h 40)

Les plumes de ce rapace sont une merveille de conception. Elles sont longues, légères, souples et si flexibles que le vol de l'oiseau est tout à fait silencieux. Un oiseau avec des ailes de cette ampleur et de cette grandeur vole, Mme la Présidente, sans le moindre bruit tellement son plumage est parfait, doux, silencieux et visuellement agréable. C'est un des plus beaux oiseaux de la planète, dit-on. Ceux qui en ont vu un le savent certainement.

La souplesse extrême de son plumage et la légèreté particulière de certaines plumes de ses ailes constituent donc un atout important pour la chasse. Je le disais tantôt et M. Duhamel ici nous le dit de façon claire comme spécialiste de la chose. La grande acuité visuelle du harfang des neiges est une autre de ses caractéristiques très importantes. Son oeil peut distinguer des objets dans l'obscurité presque totale. Même s'il est un chasseur diurne, la nuit, dans l'obscurité totale, il discerne les parcelles des moindres frémissements et des brindilles qu'il pourrait y avoir devant lui. C'est un oeil extraordinaire. Ce sont presque des lentilles qu'il a.

Son oeil peut distinguer des objets dans l'obscurité la plus totale. La rétine est couverte de cellules - on appelle cela des bâtonnets - extrêmement sensibles à la lumière. En plus, la large pupille peut se dilater énormément et capter la lumière la plus infime. Cet oiseau a besoin de 100 fois écoutez bien, Mme la Présidente, la perfection de cet oeil - moins de lumière que l'humain pour voir dans le noir. Un instant! Cent fois moins de lumière pour voir dans le noir en plus. C'est toute une perfection!

Quant à son ouïe et quant à son système auditif, elle est encore plus perfectionnée et plus précise que sa vision. Les disques faciaux. Si vous regardez l'oiseau, on voit ici les disques faciaux... Autour de l'oeil, il y a comme un miroir concave. Les yeux sont au fond de cela. Au fond, il y a son système de réverbération auditive. Quand même, Mme la Présidente, cet oiseau, en plus d'être beau, possède des attributs de la nature que la plupart des animaux de cette planète peuvent lui envier.

Pour continuer sur l'ouïe, Mme la Présidente, on dit: Les disques faciaux entourant les yeux du harfang des neiges servent à améliorer son acuité auditive. Formés de plumes raides et denses, ses disques faciaux servent de réflecteurs paraboliques qui, comme le pavillon de l'oreille humaine, captent les sons et les transmettent aux petites oreilles dissimulées sous un plumage extrêmement fin, acoustiquement transparent.

Je prends la peine de décrire un peu ce qu'est cet oiseau parce que beaucoup de Québécois l'ont peut-être vu, mais ne connaissent pas sa valeur, ses capacités et ses qualités du côté animal. C'est un des plus beaux oiseaux de la planète. C'est un des plus perfectionnés. C'est un des meilleurs oiseaux.

Les harfangs des neiges ne sont pas migrateurs. Cela veut dire qu'en fait ils n'émigrent pas comme les outardes ou les canards au printemps. Ils sont toutefois nomades. Leurs déplacements très étendus et peu prévisibles sont très mal connus. Ils passent l'hiver dans l'Arctique. D'autres cependant descendent vers les zones habitées en septembre pour venir à la chasse lorsque, dans leur coin, il y a un peu moins de gibier à prendre.

D'un naturel peu farouche - c'est malheureux, il est peu farouche et ceux qui ne le connaissent pas peuvent l'attraper pour sa beauté; il peut être victime de gens qui n'ont pas le respect de la faune ou de la flore au Québec - il s'approche des habitations, des quais, des dépotoirs. C'est un animal très peu farouche. Chaque année, les harfangs nous arrivent aux premières neiges. Dès lors, ils délimitent un territoire respectif pour chacun d'eux. Ils choisissent un point d'observation, sont à l'affût et surveillent ce territoire comme leur terrain de chasse propre et ils happent et grapillent tous les rongeurs. Ils se nourrissent de rongeurs.

En fait, on dit du harfang des neiges qu'il est timide et normalement silencieux, et surtout silencieux au temps de la nidification. Je vais en parler un tantinet. Ici, j'aimerais vous montrer le Québec, là. C'est peut-être petit pour les gens qui regardent la télévision, mais on voit qu'il fait sa nidification, il fait son nid à l'extrême, extrême, extrême nord du Québec. Il fait son nid au ras du sol - c'est pour cela qu'il choisit l'extrême nord - à l'approche d'un prédateur, quand la femelle surveille, quand ils surveillent leurs oeufs, ils ont une façon d'intimider le prédateur de ce coin, par exemple, le renard de l'Arctique, par des ululements et des cris qui ressemblent un peu à des jappements. C'est un cri d'alarme et d'intimidation qui fait peur au prédateur, le renard, à cause de ce son strident, presque épeurant. Les harfangs qui hivernent dans le sud du Québec reprennent le chemin du nord vers le mois de février. Pour terminer la description que j'ai là-dessus, je vais dire en un mot que beaucoup de gens connaissent ce qu'on appelle le ookpik. Le ookpik, c'est le petit harfang, en fait. Les Eskimos l'appellent le ookpik. On se souvient de ça, le symbole de l'Expo, etc. Alors, à leur naissance, les jeunes harfangs que les Inuit nomment ookpik se présentent comme une belle boule soyeuse de duvet blanc piqué de deux yeux jaunes. En quelque huit semaines, les ookpik acquièrent le plumage typique de l'espèce adulte. On voit bien que la beauté de ce rapace peut certainement à elle seule constituer un plaidoyer en sa faveur et c'est ce que j'ai voulu faire. J'ai résumé, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps pour en parler ici en Chambre et il ne faut pas qu'on en abuse non plus.

Je résume beaucoup ce que j'avais à dire sur cet oiseau extraordinaire. Je résume en fait. Prenons donc le temps d'observer son vol calme et puissant, de regarder comment il explore son territoire, de nous émerveiller devant ses caractéristiques. J'ai voulu donner quelques-unes des caractéristiques de cet oiseau superbe et sublime. Mais dans la Voix de l'Est, il y a un cahier de fin de semaine plus qui a paru dans lequel Daniel Paquet a écrit un bout sur le harfang des neiges. C'est tout court. J'aimerais vous en lire quelques extraits pour le bénéfice des téléspectateurs et pour notre enrichissement collectif. "Le Québec aura bientôt son emblème aviaire, le harfang des neiges." Il était en faveur. Je n'ai vu personne être contre. Je trouve cela extraordinaire, personne. Je n'ai rien lu, je n'ai rien vu, je n'ai rien entendu, sauf certaines appréhensions que j'ai mentionner au début pour que les gens se calment, ceux qui pourraient penser que ça pourrait remplacer le fleur de lis. J'ai bien pris la peine de le dire. Je ne suis pas de ceux-là. Il faut toujours faire attention. Je n'ai entendu que des éloges envers cet oiseau. Je crois ici que Daniel Paquet décrit cet oiseau et la façon dont il le fait, c'est très succinct, mais c'est un chef-d'oeuvre verbal pour décrire, saisir et comprendre cet oiseau. "Harfang des neiges, ce nom évoque une certaine pureté et la noblesse à cause de son manteau blanc marbré de brun et sa grande discrétion. Cette chouette est mal connue ici dans le sud et pour cause, elle habite les régions arctiques du monde. Dans l'est de l'Amérique, on la retrouve à l'île d'Ellesmere, à la terre de Baffin, à la baie d'Ungava, au nord du Québec. Elle nous visite toutefois l'hiver, périodiquement. À tous les quatre ou cinq ans, lorsque le lemming se fait rare..." Le lemming, c'est la souris du nord qui sert de nourriture, en fait, au harfang des neiges. C'est quoi le lemming? C'est ça qu'il vient de dire, c'est ce qu'il mange en hiver. Je ne savais pas qu'il l'expliquait. Je vous le dis, madame. Le lemming, c'est une sorte de souris nordique qui est la nourriture du harfang.

Le harfang a les ailes grandes de 60 à 70 centimètres, etc. "Un duvet abondant, recouvrant sa peau sous ses plumes jusqu'au bout des orteils, permet au harfang de supporter des froids de moins 40°C..." ou centigrade. À moins 40 , les deux échelles se rejoignent. C'est comme des partis qui s'entendent sur un projet de loi: à moins 40 , on s'entend. Moins 40 C ou centigrade, c'est le même froid. "Il s'installe face au vent pour que les plumes collent au corps et se blottit derrière un objet par de vents violents." (15 h 50)

Lorsque ce futur emblème daigne nous visiter, on peut l'apercevoir perché sur un poteau de clôture dans un champ dégagé évoquant sa toundra natale, immobile comme un motton de neige guettant sa proie.

Des yeux jaunes perçants, certes, mais aussi une tête composée de deux disques paraboliques transmettant les ondes sonores aux oreilles, une tête qui peut tourner jusqu'à 270 degrés sur elle-même. Aucun autre animal n'a ce charme et cette beauté. Cela, c'est de l'environnement de la flore et de la faune, un oiseau comme celui-là. Et puisqu'il doit supporter le soleil de minuit six mois par année, c'est un diurne. C'est entendu qu'on n'y pense pas toujours, mais, à l'extrême nord du Québec, il fait jour six mois par année et nuit six mois par année. Alors, il faut que les animaux s'adaptent à cela. Québec, c'est un très grand pays pour ceux qui pensent que c'en est un. Moi, je le crois. C'est un très grand pays, au point que, dans ses extrémités, il y a six mois de nuit et six mois de jour par année. Cet oiseau vit, de façon générale, dans ce coin. Ils disent: C'est un diurne. Ceci explique également que certains spécimens nous visitent au coeur de l'hiver lorsque, au nord, il fait nuit 24 heures par jour.

Le harfang a un très bon appétit, etc. Cela, on va le passer. Le harfang des neiges, à l'instar des autres rapaces, avale sa proie tout entière, les os, la fourrure, les dents. II a un système digestif spécial. C'est un oiseau spécial par son aspect extérieur, et c'est un oiseau spécial aussi par sa composition intérieure. Il est parfait sur toute la ligne. C'est un oiseau parfait: un système digestif spécial, une apparence superbe, des ailes... Lorsque ses ailes sont déployées, cela ressemble presque à un bel avion sans moteur. C'est beau visuellement, et c'est silencieux et élégant.

Ce grand solitaire timide et silencieux sort de son mutisme seulement lors de la nidification, c'est-à-dire lorsqu'il fait son nid. Il reprend la route du Grand-Nord, vers février, quand il est venu nous visiter. La couvaison dure de 32 à 33 jours. La femelle pond jusqu'à quatorze oeufs, selon les circonstances.

Terminant sa description, il nous rapporte une parole de Claude Simard qui est, en fait, un peu le parrain du harfang des neiges comme emblème. Claude Simard a écrit à ce propos: "Le harfang des neiges représente l'inlassable effort de survie de la faune contre les rigueurs du climat québécois." Sûrement une belle référence aux vies de la toundra et aussi à tous les autochtones et au peuple du Québec. C'est un oiseau qui a toujours résisté parce que la nature et son environnement lui rendaient la vie extrêmement difficile, à cause de ses qualités, de sa beauté, de sa détermination et aussi de la fougue qu'il met à vivre et à survivre. Cela en fait un oiseau qu'on dit un des plus beaux de la planète. Et le comparer au peuple québécois qui, ici, a de la difficulté à survivre, qui a de la détermination et la fougue, je crois que cet oiseau est vraiment l'emblème que les Québécois et les Québécoises méritent.

Mme la Présidente, je voterai pour cette loi.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Terrebonne. M. le ministre de l'Environnement.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: Mme la Présidente, je voudrais invoquer les dispositions du règlement pour vous demander deux choses: premièrement, de montrer, pendant mon discours, deux photos de l'emblème aviaire du Québec; ensuite, comme je vais représenter le premier ministre pour ce discours, afin que je puisse dépasser 20 minutes, je voudrais avoir votre assentiment avant de commencer.

La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Environnement, pour ce qui est des deux photos, je vous y autorise, compte tenu de la décision que j'ai rendue antérieurement.

Et, en vertu de notre règlement et plus spécialement en vertu des articles 239 et 209, vous pouvez, en tant que représentant du premier ministre, avoir un droit de parole d'une heure. Là-dessus, je suis prête à vous reconnaître.

Une voix: L'Opposition l'a réclamé, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Environnement.

M. Lincoln: Mme la Présidente, c'est avec beaucoup de plaisir et aussi avec beaucoup de fierté que je viens m'associer à mon collègue le ministre des Communications que je voudrais remercier tout particulièrement de m'avoir aidé à faire une réalité de ce projet de loi que nous déposons aujourd'hui. En fait, sans le concours de son ministère et le sien et de tous les gens de son cabinet et de son ministère, je pense que ce projet de loi ne serait pas réalité aujourd'hui.

C'est un projet de loi qui est très, très court, peut-être un des plus courts jamais présentés à l'Assemblée nationale. Mais ce que ce projet de loi manque en longueur, il l'ajoute par l'importance du symbole qu'il représente. Il faudrait que nos auditeurs, qui peut-être pensent que ce projet de loi est banal et qu'il ne sert pas une raison particulière ou une raison importante, sachent que ce projet de loi représente pour

nous, où que nous soyons au Québec, quel que soit notre âge, quelle que soit notre idéologie politique - et le critique de l'Opposition l'a démontré très clairement -un symbole bien important de plusieurs choses auxquelles le Québec tient de plus en plus et pour lesquelles une prise de conscience de plus en plus grande se fait, tous les jours.

C'est d'abord le symbole de la conservation des ressources et de la préoccupation des Québécois, surtout les jeunes, pour la nature autour d'eux, pour leur milieu de vie, pour leur qualité de vie.

Deuxièmement, c'est le symbole de l'intérêt de l'humain pour la nature et tout ce qu'elle représente, surtout à travers les espèces vivantes. Ce sont en effet les espèces vivantes, les oiseaux, les autres espèces vivantes, les poissons et tout ce qui vit autour de nous que nous retrouvons de plus en plus dans la nature et que nous apprenons à aimer. Nous apprenons aussi petit à petit, surtout à travers les jeunes qui nous donnent encore une fois une leçon de plus en plus en ce sens, à respecter la nature et surtout la nature vivante.

Ce symbole aviaire du Québec, le harfang des neiges que nous voulons célébrer aujourd'hui par ce projet de loi, représente aussi un lien important entre le nord du Québec et le sud du Québec. En fait, symboliquement, cet oiseau qui niche dans l'Arctique se déplace durant les saisons chaudes pour venir de plus en plus vers le sud, excusez, pendant les périodes d'hiver, au contraire, pour venir vers le sud. Il fait le lien entre le nord et le sud. Et ça, c'est très important. Il représente aussi le symbole du milieu nordique. Le milieu nordique du Québec qui est la frontière de l'avenir pour nous et qui représente ce territoire de grand défi pour le Québec, d'un défi non seulement économique mais surtout d'un défi environnemental parce que nos populations autochtones - les Indiens et les Inuit - habitent là, eux, qui ont toujours été tellement près de la nature, qui nous donnent ce rappel de façon continuelle qu'il faut respecter la nature, qu'il faut respecter l'environnement, le milieu de vie et surtout les espèces vivantes. Et le harfang des neiges, lorsqu'il vient vers le sud, vient nous apporter ce message de ces peuples qui, eux, ont compris la nature et qui ont aimé ces espèces vivantes et qui continuent à les protéger de façon presque farouche.

Le harfang des neiges représente aussi un symbole de grâce, de majesté, de beauté dans un milieu où, tous les jours, nous voyons des laideurs autour de nous. Nous voyons de la pollution. Nous voyons toutes sortes de choses que l'humain tellement intelligent, tellement rempli de connaissances technologiques a, malgré tout, souillé et saccagé de plus en plus. Et cet animal telle- ment beau, tellement gracieux, tellement majestueux nous donne à réfléchir sur ce que nous avons fait de la nature.

C'est enfin un symbole de ce que représente la faune autour de nous. La faune et la flore sans lesquelles le milieu de vie serait invivable et vide. On n'a qu'à voir ce qui est arrivé dans certains continents où on a commencé à détruire le milieu de vie. Aujourd'hui, là où il y avait des forêts il y a un désert et rien ne vit là. Les humains finissent par succomber aussi, mais certainement que les premiers à succomber sont les espèces vivantes moins résistantes que l'humain. Ce harfang des neiges nous donne cette leçon de protection de la faune et de la faune aviaire, les oiseaux représentant peut-être le plus beau de la faune. (16 heures)

En fait, le harfang des neiges, c'est une partie des espèces sauvages que nous avons autour de nous. Ces espèces sauvages font partie de cette vaste diversité biologique dont nous sommes tous une toute petite partie. Ce qui arrive à une espèce vivante devrait et doit nous toucher tous. C'est d'ailleurs par une plus grande relation entre les humains et la nature qu'il deviendra encore plus facile de chercher des développements qui s'harmoniseront et qui respecteront la vie.

Dans ce contexte de respect des choses vivantes, les oiseaux constituent un grand groupe d'animaux, particulièrement intéressants à cause de leur relation avec les hommes. Nous en retrouvons partout autour de nous: dans les bois, dans les villes et dans les campagnes. Ils nous fascinent par leur chant, par leur couleur et par leur conquête de l'espace. Près de nos habitations, ils deviennent presque des amis et des objets très familiers; ils deviennent presque une partie de notre milieu familier.

Ce sont d'ailleurs les amateurs du monde des oiseaux, les ornithologues, qui, au cours des dernières années, ont mené plusieurs campagnes en faveur de la protection des oiseaux. Dans cette foulée, il faut souligner l'apport, que le critique de l'Opposition a soulevé tout à l'heure, du Club des ornithologues du Québec, de la société du Québec pour la protection des oiseaux, des gens qui ont milité tellement fort, tellement de gens qu'il serait trop long de les nommer tous. Je pourrais penser à M. Jacques Prescott, à son père, à M. Normand Prescott, à M. David Bird et tellement d'autres, dont M. Léopold Gaudreau, le directeur du patrimoine écologique au ministère de l'Environnement, que le critique de l'Opposition a mentionné. C'est un homme convaincu de l'environnement et de la nature, une personne dont les connaissances du monde écologique, de la faune et de la flore en font un Québécois de première importance pour nous et notre milieu de vie.

Quelqu'un qui s'est battu pour la défense des espèces vivantes et de l'écologie dans notre milieu. Je voudrais saluer son apport, dans tout ce grand effort commun pour faire que le harfang des neiges devienne notre symbole aviaire au Québec.

En fait, comme l'a souligné mon collègue des Communications, plusieurs provinces ont déjà des emblèmes aviaires: l'Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-

Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Alberta et un grand nombre d'États des États-Unis, sinon la majorité. La nomination et la sélection d'un emblème aviaire n'est pas chose du hasard. Il y a des critères mondialement reconnus qui doivent être observés. J'aurais voulu que nos auditeurs sachent quels sont ces critères, pour réaliser que ce n'est pas une chose qui se fait au pied levé, que cela demande beaucoup de travail de la part de beaucoup de gens.

Il faut d'abord nous assurer que l'espèce choisie n'a pas été sélectionnée comme emblème aviaire par d'autres entités politiques, n'importe où dans le monde. Il faut que notre emblème soit présent au moins à une période de l'année dans la majeure partie des régions habitées du Québec. Dans le cas du harfang des neiges, nous avons la possibilité de le retrouver, hiver après hiver, dans la majeure partie des régions habitées du Québec.

Il faut aussi que l'oiseau choisi comme emblème ne puisse pas porter un nom l'identifiant à une entité géographique autre que le Québec. Par exemple, on ne pourrait pas choisir l'oriole de Baltimore ou la bernache du Canada ou un autre oiseau qui n'est pas identifié, par son nom, au Québec.

Un autre critère: on doit tenir compte du fait que l'espèce doit être facilement identifiable et que la coloration de son plumage varie peu selon les périodes de l'année et selon le sexe. Heureusement, le harfang des neiges présente un plumage relativement stable tout au cours d'une année et selon l'âge et le sexe.

On recherche aussi, comme emblème aviaire, un oiseau bien connu du public. Les oiseaux de proie ont depuis toujours fasciné les gens: leur grandeur, leur majesté, leur vol, leur agilité en font des oiseaux choyés.

Il faut aussi choisir un emblème qui fait partie de notre patrimoine, de notre folklore, de notre histoire. Le harfang des neiges n'est pas une espèce introduite, il fait partie depuis toujours de la faune québécoise. De façon plus globale, il appartient à la faune nordique du monde. Par conséquent, le harfang des neiges devient l'oiseau qui, mieux que tout autre, peut représenter cette caractéristique géographique et climatique du Québec. Le Québec est de plus en plus ouvert sur le nord et le harfang, étant relié au cours d'une année à cette vaste partie du Québec, fait particulièrement bien le lien entre ces deux réalités dont j'ai parlé, le Québec sud et le Québec nord. En effet, la population de harfangs réside toujours au Québec, et ce à n'importe quelle période de l'année.

Moins d'une dizaine de nos espèces de faune aviaire pouvait remplir tous ces critères. Pour sa part, le harfang des neiges s'est démarqué beaucoup des autres espèces, ayant pu faire l'objet d'un tel choix. Ce choix est particulièrement justifié. Le harfang des neiges est le seul à nicher sur le sol de l'Arctique. Il est une merveille de la nature nordique. Il est grand et l'un des plus beaux oiseaux de la planète. Je vais passer la description du harfang des neiges que vous a donnée dans la plénitude le critique de l'Opposition, le député de Terrebonne.

Il faudrait peut-être souligner la connexion, presque l'instinct immense du harfang des neiges pour l'environnement. Il est adapté aux longs jours sur l'herbe de l'été arctique et, contrairement à ses cousins, les oiseaux de proie qui travaillent de nuit, il est aussi actif en plein jour. Le nombre d'oeufs couvés est fonction de la disponibilité de la nourriture pour les jeunes. En cela, il est un oiseau particulièrement intelligent. Il s'agit donc d'une espèce qui intègre parfaitement son comportement reproducteur à l'écologie de son milieu. Il est tout à fait adapté à son milieu.

Les jeunes harfangs que les nordiques ont appelés ookpik - si vous vous souvenez, c'était le symbole de l'Expo 67 - ont été particulièrement choyés par les peuples nordiques et les enfants nordiques. Nous espérons que, graduellement, le même phénomène va se produire chez nous, lorsque le harfang des neiges sera mieux connu de nous tous, maintenant qu'il sera devenu le symbole aviaire du Québec.

Le harfang des neiges et les oiseaux de proie en général se trouvent au sommet de la chaîne alimentaire. À ce titre, ils constituent l'un de nos plus précieux indicateurs de la qualité de l'environnement. Ainsi, l'impact des pesticides et la destruction des habitats sont particulièrement néfastes à cette espèce. Nous devons consentir des efforts immenses pour maintenir partout au Québec des milieux de qualité et ces espèces aviaires nous donnent ce rappel de jour en jour.

Nous parlons donc d'un symbole important pour le maintien de la qualité générale de notre environnement. Il faut dire qu'au Québec, nous protégeons très peu notre environnement. À titre d'exemple, on peut constater la relative pauvreté du nombre de sites naturels protégés au Québec. Seulement 0,33 % de notre territoire jouit d'une préservation. Ailleurs dans le monde, ce pourcentage varie entre 2 % et parfois 25%. Au Canada, il se situe à 3 %. Les pays devraient consacrer au moins 15 % à 20 %

de leur territoire à la protection des sites naturels, s'ils veulent présenter leur faune, leur flore et le milieu représentatif de leur diversité écologique. On estime que quelque 500 de nos espèces biologiques présentent des difficultés de survie. Cela constitue au moins 10 % de toute notre faune et de notre flore qui est en péril. C'est énorme.

Je voudrais vous montrer les photos du harfang des neiges que j'ai apportées. D'abord, cette première photo qui m'a été donnée par le ministre des Communications. C'est une photo prise par le photographe du ministère, M. Jules Rochon, que nous voulons féliciter tout spécialement ici, et nous voulons féliciter le ministre d'avoir permis à M. Rochon de produire une si belle photo. J'ai parlé au ministre de l'idée que m'a présentée le député de Saint-Jacques qu'on pourrait peut-être en faire faire un poster pour le distribuer dans tous les ministères du gouvernement et dans tout le Québec. (16 h 10)

Je voudrais aussi vous lire une petite lettre qui m'a été envoyée par Gaston Déry qui s'est battu pour le harfang des neiges et par François Boulay un photographe professionnel. Je vais donc lire cette petite lettre avant de vous montrer la photo qu'ils m'ont remise l'autre jour: "Les démarches entreprises au cours des derniers mois pour doter le Québec d'un emblème aviaire dénotent du souci de faire reconnaître l'environnement comme une priorité au niveau des communications. "Le harfang des neiges est, à notre avis, un excellent choix comme emblème aviaire pour le Québec. En effet, cet oiseau symbolise, par sa couleur blanche, la pureté d'un environnement sain. Ses origines nordiques rappellent que le Québec renferme des territoires importants pour son économie et pour l'équilibre de son environnement. Par contre, les séjours qu'il effectue plus au sud du Québec, en saison hivernale, le rendent accessible à l'ensemble de la population du Québec. "Cet oiseau est puissant et doté d'une grande force; cependant, il acceptera de se laisser approcher par l'homme quand il ne se sent pas attaqué. La présence du harfang des neiges dans une région aura pour effet de sécuriser les gens sur la qualité de leur environnement et sur la nécessité de le protéger. "Le harfang des neiges fréquente annuellement l'Île-aux-Pommes afin d'y retrouver la nourriture et le gîte qu'il recherche pour la saison hivernale. "Cette présence du harfang des neiges sur l'Île-aux-Pommes constitue une source de valorisation car elle concrétise le résultat du travail de protection de ce site privilégié amorcé par le grand-père de Gaston Déry, le Dr David Alexis Déry, depuis maintenant plus de 60 ans. "Nous avons voulu, bien modestement, exprimer notre reconnaissance en tant que professionnels et aussi comme citoyens impliqués à divers niveaux en environnement, en vous offrant cette photographie d'un harfang des neiges, prise sur l'tle-aux-Pommes le 31 octobre 1986. "La protection de nos milieux naturels et de l'environnement en général ne pourrait se faire sans une sensibilisation des citoyens envers le respect de leur environnement et le choix du harfang des neiges comme emblème aviaire du Québec contribuera à sensibiliser les Québécois sur l'importance des milieux permettant à ce magnifique oiseau de demeurer présent dans notre environnement." Signé: Gaston Déry et François Boulay, le 17 novembre 1987.

Je vais vous montrer la photo que François Boulay a prise sur l'île-aux-Pommes et qui est intitulée Le harfang des neiges, l'emblème aviaire du Québec, un visiteur automnal de l'île-aux-Pommes.

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît:

M. le ministre.

M. Lincoln: Je voudrais terminer dans la langue anglaise pour dire quelques mots au sujet d'un ami bien spécial que j'ai depuis assez longtemps déjà, qui m'a sensibilisé à toute la nature, aux oiseaux de proie et à l'importance des symboles aviaires. Il s'appelle David Bird. I would like to mention a word about David and tell him how very very proud we are today that, at last, all his efforts over the years to recognize nature and to make us believe that nature ought to be preserved more and more, are, at least, reaching fruition even after so many years.

I read an article whose a good friend, Don McPherson of The Gazette the other day, Don McPherson with his biting wit always has a message to tell. And I think his message was important. He was saying in effect: How come at the start of an important session, two years after your mandate, you are producing such a puny law, three articles recognizing a bird as a symbol of Québec? I guess the point is well taken because Don was expressing the feeling of a great majority of people who cannot see in a world facing such a multitude of problems, economic problems, unemployment, social problems of all kinds, health problems, that we would even bother with such a law today.

But I guess the point he makes, which is a valid point, needs to be addressed and answered. I think David Bird has made the point very eloquently over the years. The fact is that if we do not take time in the midst of all our preoccupations about industrial development, the economy, unemployment, health problems, social

problems, labor problems, if we do not take time to think about nature, the way we live, our quality of life which is expressed by nature and all living species, we are going to be gradually all the poorer for it.

What is the kind of world - I think this is the message that David Bird speaks of so often and so well - that we are going to have if, more and more, we produce magnificient skyscrapers, huge plants and our waters are more and more polluted, our trees disappear, and with the trees disappearing, all the living species gradually disappear as has been the case in so many places around the world?

David Bird was one of these prophets. He started to prove that nature can live again. He started with the peregrine falcon and has now saved the peregrine falcon. He started the Raptor Centre at MacDonald College. Now, there is a whole group of people, from "le Jardin zoologique de Québec, l'institut de Saint-Hyacinthe, le centre des rapaces à MacDonald College", who all got toghether to start a treatment centre for birds of prey. With the help of airlines, they can bring those birds to the treatment centres; two of the snowy owls are being treated right now. All kinds of birds are being saved that got hurt and injured.

David Bird has managed to imprint his message all over North America. He is known from Los Angeles to Boston, from the South to the most Northern point of Québec, in Ontario and elsewhere. He told me that he started to love nature because, when he was a boy, growing up in Ontario, they had made the trillium the emblem of the flora of Ontario. And he decided that he would never pick the trillium because, in his mind, as a young boy growing up, it was protected. He started to think that, if we could protect our birds, our fauna, our flora, then people would develop a consciousness as he did for nature and for the trillium. And so, he has been fighting for years along with all kinds of other people, Bob Carswell, Jacques Prescott, Normand Prescott and so many others to make the snowy owl the emblem of Québec.

So, I feel that we have to sell that message, that this law is important not because of its three articles, but because of what it represents: a symbol of conservation, a symbol of a quality of life for us all, a symbol of the type of way of life that we want to surround ourselves with. We have to change our ways more and more because, as I think of the snowy owl and all the other living species that cannot speak for themselves and the human species as well that cannot defend itself, the young among us, the handicapped. I have a son, myself, who cannot speak for himself. What do they say to us, we who can speak for ourselves, who have got the power to do things and, with our power, have polluted more and more, while the defenseless creatures, living beings and living species, have had to suffer the consequences of our rashness. (16 h 20)

That is the message of this law. The message is: You, who have the power to do good, what have you done? You have polluted all around us, you have destroyed nature and this bird is a living symbol of what we should preserve. And it is telling us: Think about us, we cannot speak for ourselves. We want a place in that nature that is so precious to us all whether we are human beings, animals, flora, fauna or whatever. I think this is the message that I would like to leave with you.

En terminant, je voudrais donc exprimer la joie et la fierté que nous ressentons parce que je pense que c'est là le message que beaucoup de Québécois vont ressentir de plus en plus lorsqu'ils vont voir devant eux des images tellement magnifiques qui vont leur rappeler qu'il y a une nature à préserver, qu'il y a la conservation de nos ressources qu'il faut de plus en plus établir dans nos mentalités si nous voulons préserver une qualité de vie non seulement pour nous mais pour les générations futures.

Les jeunes autour de nous, que ce soient les jeunes du Parti québécois ou les jeunes du Parti libéral ou les jeunes qui sont apolitiques, tous les jeunes au Québec nous passent de plus en plus ce message tous les jours. Je pense qu'il faudra vivre de plus en plus ce message de conservation. C'est pourquoi je me réjouis avec vous aujourd'hui et je remercie le ministre des Communications de toute son aide et de tous ses efforts pour avoir apporté ce projet de loi si court mais si lourd par son symbole. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Environnement. M. le député de Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Oui. Mme la Présidente, dans l'abondante documentation que j'ai pour le projet de loi, - j'espère que M. le ministre de l'Environnement va me le permettre, connaissant son sens de l'humour, - il y a un article dans Chasse et Pêche écrit par M. Gingras où il y a un petit encart. C'est écrit: "Par contre, samedi le 20 décembre, j'ai eu droit à deux surprises. -II expliquait ces surprises. - La première c'était - il parlait d'ornithologie. - "Un moqueur polyglotte, une espèce très rare à cette époque de l'année dans la région, s'est pointé le bec sous ma fenêtre." Peut-être annonçait-il le discours que vient de présenter mon collègue, député de Nelligan et ministre de l'Environnement.

M. le ministre a dit tantôt que c'était sans doute une des plus petites lois. En préambule, Mme la Présidente, j'aimerais juste le corriger et lui dire que non, ce n'est pas la plus petite. Son collègue des Communications se fait battre à plate couture par ses collègues de la Culture et des Communautés culturelles avec des lois très minces d'un ou deux articles. Ce qui me fait dire que dans certains pays, le Parlement s'appelle la Diète. On pourrait peut-être songer à appeler l'Assemblée nationale du Québec la Diète puisque, malheureusement, sur le plan législatif, je pense que nous vivons une diète.

Au-delà de la déception de projets de loi de peu de contenu, je vais quand même vous dire, à l'instar de mon collègue, porte-parole aux Communications, que nous souscrivons d'emblée à l'adoption de l'emblème aviaire pour le Québec. C'est important et je pense que tous les pays du monde s'en sont dotés. Songeons à l'aigle américain, au coq gaulois qui symbolise la France, songeons effectivement à tous ces pays qui se sont donné des emblèmes aviaires qui les représentent au même titre qu'un drapeau qui, également, affiche avec beaucoup de fierté les couleurs d'un pays. Donc, c'est inévitable que nous souscrivions à cette loi, le projet de loi 67, Loi sur l'emblème aviaire au Québec, qui, cela dit, est un très bel oiseau.

Je remercie le ministre d'avoir répondu à la demande pressante de l'Opposition qui réclamait que l'on montre cet oiseau à la population et qui nous a montré deux très belles photos, dont l'une qui lui a été remise par M. le ministre des Communications. Ce qu'il nous reste à espérer c'est que le ministre, ayant fait un geste d'un certain favoritisme en ne donnant cette photo qu'au ministre de l'Environnement, pourra se reprendre et en offrir également une, puisque cela deviendra l'emblème aviaire national du Québec, aux membres de l'Assemblée nationale de façon que nous puissions l'afficher nous aussi fièrement, non pas uniquement dans les bureaux de l'Assemblée nationale, mais dans nos bureaux de comté, là où la population pourra se familiariser avec ce magnifique oiseau qui va devenir l'emblème, je le répète, aviaire du Québec.

Oui, c'est important pour le Québec qui s'est doté, d'ailleurs, en 1948,... Nous allons célébrer, j'ose l'espérer, le 21 janvier 1988, quoique le Parlement ne siègera pas, mais quand même, l'adoption du fleurdelisé comme drapeau officiel du Québec. Tantôt, justement, mon collègue parlait du drapeau et faisait souligner un peu cette fierté timorée, malheureusement, que certains Québécois semblent avoir et notamment les administrations. Malgré la loi, quand on se promène très souvent au Québec, rares sont les écoles qui affichent fièrement, comme le prescrit la loi, l'emblème national du Québec, le fleurdelisé. Quelquefois il y en a un, mais il est dans un état pitoyable.

Certaines administrations scolaires m'avaient déjà fait la remarque: il y a un coût. Je pense que le ministre des Communications pourrait peut-être y pourvoir et distribuer gratuitement les drapeaux. Nous avons réclamé, nous de l'Opposition, et nous avons obtenu par le Bureau de l'Assemblée nationale d'avoir à notre disposition des drapeaux que l'on pourra remettre à nos concitoyens. Si on prend juste comme exemple nos voisins du sud, il n'y a aucun bâtiment public, même les individus, les personnes, l'arborent fièrement. On voit la bannière étoilée flotter; est un symbole de fierté tout à l'honneur chez nos voisins américains, mais, malheureusement, ce n'est pas aussi souvent pratiqué au Québec qu'on le souhaiterait.

Donc, cette fierté par des mesures comme je viens de proposer au ministre des Communications qui écoute, d'ailleurs, avec beaucoup d'attention mes propos, je l'en remercie. Je pense que cela va lui permettre de mieux agir tantôt. Nous allons adopter cet emblème aviaire - dont on espère avoir nous aussi comme le ministre de l'Environnement une photo - ce très bel oiseau, qui nous vient du nord, qui est un oiseau superbe. C'est un oiseau magnifique, qui représente le mieux, comme on le disait, la brillance, la clarté, la force de notre climat hivernal. On se rappelle cette chanson de Vigneault: "Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est l'hiver." C'est une merveille animale de la nature nordique. Le choix de ce rapace diurne, quoique j'aie un peu de difficulté à dire que c'est un rapace diurne puisqu'à ce moment j'aurais peur qu'on interprète cet oiseau comme étant un fédéraliste et je ne crois pas qu'il le soit... Il faudrait ajouter rapace diurne et nocturne également. Mais, heureusement, ce n'est pas le cas. C'est quand même un oiseau avec des habitudes particulières, comme tout le monde l'a fait ressortir, de nidification. La question se pose. Pourquoi ne pas l'avoir comme emblème aviaire du Québec? Ma réponse, M. le ministre, à moi aussi, spontanément, c'est: Oui, je crois qu'il doit l'être.

Le ministre de l'Environnement parlait de protection de l'environnement. Il disait que c'était un oiseau à protéger, à sauvegarder, parce qu'il y avait des dangers quant à sa conservation. On pourrait relier cela en disant que rien n'est plus symbolique à ce moment-ci, d'abord, que de prendre cet oiseau, qui est menacé, qui pourrait être en voie de disparition pour bien des raisons, pour symboliser le Québec où vit une communauté francophone, la seule majoritaire en Amérique du Nord, et qui elle aussi est menacée, qui risque elle aussi d'être une espèce en voie d'extinction, si on ne prend

pas, justement, des mesures pour protéger ce caractère français du Québec. (16 h 30)

On pourrait, dans la foulée, ajouter qu'on doit également protéger l'environnement linguistique du Québec et éviter cette pollution du bilinguisme ou de l'unilinguisme anglais que l'on observe dans la région montréalaise où, malheureusement, cet oiseau ne se rend pas puisqu'il vit dans l'Arctique, qu'il a la chance de vivre dans un décor blanc, immaculé, sans aucune tache de pollution comme telle. Donc, cela devient effectivement symbolique qu'un oiseau qui est à préserver, dont la population décline de façon alarmante, dit-on d'ailleurs dans un rapport que j'ai ici, symbolise une population qui, malheureusement, à moyen et long terme, risque de vivre les mêmes choses comme collectivité originale distincte, puisque cet oiseau également est distinct, en Amérique du Nord, qui est une population majoritairement francophone dans un continent où le prédateur 40 fois supérieur, c'est-à-dire anglophone, nous menace quotidiennement dans ce monde où les communications se font à travers les ondes.

Je vois mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce acquiescer aux propos que je tiens. Je trouve que, dans son cas, c'est un pas qu'il fait, et je l'apprécie. Donc, toute la symbolique, je le répète, de voir cet oiseau, cette espèce menacée, devenir l'emblème d'une société qui, je le répète, au Québec est menacée par des prédateurs, par un prédateur d'ailleurs sorti d'un lac, qui s'appelle le lac Meech, où on ne pensait pas qu'une espèce de - on va employer une bonne expression québécoise - barbotte pouvait flotter, pouvait réussir à lever si haut et à essayer de broyer cet oiseau francophone qui essaie de se lever, de décoller et d'assurer sa survie.

Oui, d'accord, pour que nous adoptions cet emblème aviaire pour le Québec, ce magnifique oiseau. C'est dommage que le ministre ne me prête pas sa photo. On pourrait de nouveau montrer ce très bel oiseau à la population qui écoute et qui, j'en suis certain, va littéralement adopter, au sens très affectif du terme, ce magnifique animal, ce très bel oiseau blanc. C'est dommage... Je le vois à côté du ministre, vous me pardonnerez cette jalousie un petit peu que je peux avoir parce que je le trouve chanceux d'en avoir déjà une immédiatement. Donc, je disais qu'il serait avantageux que nous puissions le diffuser, le montrer, de façon que l'ensemble des Québécois et des Québécoises adoptent cet oiseau... Et voilà qu'on m'apporte cette magnifique photo où on le voit justement, prenant son envol comme je l'expliquais tantôt au-dessus de la seule terre francophone en Amérique du Nord qu'est le Québec et surtout d'une partie de ce territoire qui constitue l'Arctique, le

Nouveau-Québec, qui, effectivement, est un territoire d'avenir pour le Québec. Là-dessus, je suis pleinement d'accord avec les propos que tenait mon collègue de l'autre côté de la Chambre, le député de Nelligan et ministre de l'Environnement. C'est un territoire d'avenir pour le Québec, ce Nouveau-Québec, et c'est là d'ailleurs que cet oiseau vit, très au nord; quelques fois, il émigre un peu plus au sud, mais, quand on entend le sud, il ne se rend malheureusement pas jusqu'à Montréal afin qu'on puisse l'admirer.

Il nous reste heureusement - encore là, la nature nous réserve des surprises - à Montréal, quelques faisans qui se promènent sur le mont Royal, des renards roux, d'ailleurs, près de l'Oratoire Saint-Joseph, que j'ai déjà vus il y a quelques années. Mais, trêve d'aparté au sujet quand même de cette merveille de la nature, je vous dirai que, oui, nous allons pleinement y souscrire, compte tenu également de toute la symbolique que je vous ai exprimée tantôt, de l'interrelation entre cet oiseau majestueux, merveilleux, unique en son espèce et la population qu'il va représenter qui est celle d'un pays majoritairement francophone en Amérique du Nord, qui est le Québec.

Toutefois, je me dois de reprendre les propos de mon collègue, porte-parole de l'Opposition en matière de communications et député de Terrebonne, il ne faudrait pas, par contre, que cet emblème aviaire en vienne, un jour, graduellement, à remplacer la fleur de lis. Cela serait inacceptable, au même titre qu'aucun Canadien, nos amis voisins, n'accepterait de voir le castor remplacé la feuille d'érable. On n'imagine pas d'ailleurs, sur le drapeau du Canada, le castor à la place de la feuille d'érable. Alors, il ne faudrait pas qu'on soit tenté par des jeux de passe-passe habiles à substituer progressivement...

Vous comprendrez, Mme la Présidente, que de ce côté-ci de la Chambre, on est quand même un peu méfiants. On a devant nous un gouvernement issu d'un grand parti, jadis, un grand parti jadis qui était le Parti libéral à l'époque de M. Jean Lesage qui parlait de l'État du Québec. Le gouvernement actuel parle toujours de la province de Québec. Moi, je trouve le mot province rapetissant, ratatinant, pour employer cette expression savoureuse qu'utilisait fréquemment notre ancien premier ministre, M. Lévesque. Donc, vous comprenez un peu cette méfiance instinctive - un peu comme l'oiseau l'a - d'avoir certaines réserves que l'on pourrait peut-être éventuellement, graduellement, remplacer de façon subtile la fleur de lis par l'emblème aviaire, aussi beau puisse-t-il être.

Donc, mise en garde, Mme la Présidente, mise en garde ferme! Nous

consentons, parce que l'oiseau est beau, à ce que cet oiseau-là devienne l'emblème aviaire du Québec. Nous consentons. Nous savons d'ailleurs qu'il y a eu une consultation adéquate auprès, justement, des ornithologues. Cela me fait penser d'ailleurs qu'il y a quelques semaines il y avait une extraordinaire exposition d'ornithologie à Place Dupuis dans la circonscription de Saint-Jacques et j'avais le privilège de présider cette manifestation où on a initié plusieurs Québécois à l'ornithologie et où on leur a fait découvrir plusieurs espèces d'oiseaux, sauf naturellement, le moqueur polyglotte dont je parlais tantôt. Malheureusement il n'y en avait pas de disponible à ce moment-là. Donc, il y a eu une consultation auprès des ornithologues et tout le monde semble acquiescer au harfang des neiges.

D'ailleurs il y a ici quelques articles de presse que je ne lirai pas puisque je sais que le temps me manque. Malheureusement, pour moi, je pense qu'il ne reste plus que quelques minutes. Mais il y a des articles, il y a des revues de presse où il semble qu'il y a une adhésion à ce chapitre. Donc, nous allons, puisque cela fait consensus - et je le répète il est bon qu'un Parlement soit consensuel et non pas uniquement conflictuel, ce que provoque le gouvernement d'en face malheureusement souvent - mais pour une fois que nous pouvons être consensuels... Et je vois, Mme la Présidente, que vous m'indiquez, à mon grand regret puisque le sujet est tellement passionnant, qu'il ne me reste qu'une seule minute, donc je vais tenter de conclure. (16 h 40)

Oui! Nous acquiesçons: C'est un très bel oiseaul Nous souhaitons l'avoir, nous, députés, de façon à pouvoir le montrer à nos concitoyens et, je le répète, qu'ils l'adoptent avec tout le sens affectif que cela représente.

Par contre, il ne faudrait pas - et c'est là la mise en garde finale que je fais - Mme la Présidente, si beau soit-il, cet oiseau, si noble puisse-t-il être, cet emblème aviaire du Québec, qu'il remplace progressivement, de façon détournée, ambiguë... Oui, je vois votre appel pressant à la conclusion, ce que je vais faire. Je ne voudrais pas, Mme la Présidente, qu'il remplace le fleurdelisé pour lequel il y a une charge émotive tellement grande de la part des Québécois que cela pourrait de nouveau troubler une paix sociale déjà précaire au Québec, quand on regarde les agissements au niveau de la langue.

C'est donc cet avertissement que je sers en dernier, en vous disant que je serai très heureux, Mme la Présidente, de voter pour le projet de loi 67 puisqu'il s'agit d'un beau choix, partagé de tous, et auquel nous acquiesçons. Nous attendons avec beaucoup d'impatience que le ministre des Communications nous donne copie de cette merveilleuse photo.

Mais je répète la mise en garde, Mme la Présidente: il ne faut pas que cela remplace progressivement la fleur de lis. Je pense que le message est compris, la population du Québec l'a entendu et elle partage mes propos, j'en suis certain. Je vous remercie, Mme la Présidente, de m'avoir donné l'occasion d'intervenir sur ce projet de loi. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Saint-Jacques. Dois-je conclure qu'il n'y a plus d'autres interventions?

M. Lefebvre: Non, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Non, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler le projet de loi pour adoption, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Donc, il n'y a plus d'autres interventions?

M. Lefebvre: Non, Mme la Présidente, non.

La Vice-Présidente: Le débat étant clos, le principe du projet de loi 67, Loi sur l'emblème aviaire, est-il adopté?

M. Lefebvre: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de la culture

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour déférer le projet de loi 67 à la commission de la culture. Je fais également motion pour que le ministre de l'Environnement soit membre de ladite commission.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

M. Charbonneau: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Voulez-vous appeler l'article 43 du feuilleton, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Article 43? M. Lefebvre: Oui.

Projet de loi 29

Prise en considération

du rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 43 de notre feuilleton, le ministre de l'Environnement propose la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a étudié le projet de loi 29, Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement. M. le ministre de l'Environnement.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: Mme la Présidente, je voudrais encore une fois proposer que le processus d'adoption de ce projet de loi se fasse de la façon la plus rapide, la plus harmonieuse possible, parce que, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, nous partageons l'objectif de créer bientôt un Conseil de la conservation et de l'environnement pour le Québec, afin de rejoindre les deux conseils existants pour les fusionner dans un seul conseil qui va représenter l'essence même de notre objectif de conservation du milieu et des ressources.

Dans ce sens, je pense que les débats qui ont eu lieu en Chambre, en vue de l'adoption du principe, et, ensuite, en commission parlementaire ont été harmonieux, construc-tifs et, je pense, fructueux. Je tiens à rendre hommage au critique de l'Opposition qui, comme il nous l'avait annoncé lorsque le débat a été amorcé pour l'adoption du principe, a reconnu le bien-fondé de l'objectif du projet de loi, tout en soulignant des inquiétudes importantes et sérieuses qu'il nous a fallu considérer en commission parlementaire avec le plus grand sérieux.

Je pense que, si je peux situer les modalités du projet de loi sur lesquelles nous avions des différences d'opinion, ce serait au niveau suivant. D'abord, l'Opposition pensait que les avis du nouveau conseil devaient être transmis à tous les ministères et organismes du gouvernement afin que le conseil ait une vue d'ensemble de tout l'appareil gouvernemental. Nous avons souligné au critique de l'Opposition - je pense que c'est un point de vue qu'il a accepté - qu'au contraire, il fallait responsabiliser de plus en plus le leadership du ministère de l'Environnement et du ministre comme appareil catalyseur, comme la source même de toutes les préoccupations gouvernementales, comme le "rejoigneur" de toutes les préoccupations, surtout celles des citoyens par rapport à l'environnement et à son déploiement dans l'appareil gouvernemental.

Je crois que le critique de l'Opposition, après un débat qui a été étoffé de part et d'autre, qui a été constructif, a accepté le point de vue, qu'il faut centraliser au contraire et responsabiliser de plus en plus l'action du ministre de l'Environnement et de son ministère, comme appareil moteur des décisions environnementales, de donner au ministre de l'Environnement le poids pour défendre ses positions, ce qui est la vocation même de son ministère et de son mandat.

Il y a eu d'autres points de divergence, mais sur lesquels nous sommes arrivés, je pense, à des conclusions très heureuses. Il y avait la question du traitement des avis du conseil. On disait que les avis du conseil, il faudrait qu'ils soient envoyés au ministre de l'Environnement, mais, en même temps, reconnaissant la nécessité pour les autres ministères et organismes du gouvernement de recevoir de tels avis, nous avons accepté une proposition du critique de l'Opposition qui, je pense, a été très valable. C'est ainsi qu'à l'article 14, un amendement a été proposé et accepté qui se lit comme suit: "Le ministre doit transmettre une copie de ces avis aux ministères visés par tels avis dans les 30 jours qui suivent leur réception." Je pense que nous avons rejoint la préoccupation du critique de l'Opposition, le député de Verchères, selon laquelle le ministre de l'Environnement, qui recevra dorénavant les avis, aura la responsabilité de les transmettre, dans les 30 jours qui suivent, c'est-à-dire dans un délai très court, à ses collègues ministres afin qu'ils soient saisis des avis du conseil. Ainsi, par cette formule, nous avons réussi à répondre à cette préoccupation.

Il y avait une autre préoccupation du critique de l'Opposition, et c'est celle-ci. Il ne devrait y avoir aucune référence dans le projet de loi aux lois dont le ministère et le ministre sont responsables. Le critique de l'Opposition a fait valoir alors les points de vue suivants. Il disait: Pourquoi restreindre les avis du conseil aux seules lois dont vous êtes responsable? Nous avons mentionné au critique de l'Opposition que, selon l'article 11, le conseil avait pour fonction de conseiller le ministre de l'Environnement sur toute question relative à la conservation et à l'environnement. La définition de conservation est tellement vaste qu'elle renvoie à la préservation, à l'entretien, à l'utilisation durable, à la restauration et à l'amélioration du milieu naturel. (16 h 50)

Avec cette fonction, le conseil peut conseiller le ministre de l'Environnement sur la planification des orientations, des politiques et des stratégies relatives aux lois qui sont sous la responsabilité du ministre et dont il a la charge.

Je pense que nous avons établi à la satisfaction du critique de l'Opposition, du moins c'était ma perception, que les lois du ministère offrent une balise tellement grande qu'il est justement bénéfique pour le conseil

d'avoir cette référence à ces lois qui donnent un appui légal et juridique de premier ordre au ministre, afin de défendre ses positions comme le moteur même de la conservation environnementale au sein de l'appareil gouvernemental. En même temps, nous nous sommes mis d'accord sur un amendement très important qui précède maintenant l'article 12 qui fait référence aux lois sous la responsabilité du ministre.

On dit donc dans l'article 12: "Sans restreindre la portée de l'article 11, le conseil peut..." C'est-à-dire que nous avons clarifié de façon non équivoque que l'article 12 a une référence et une intégration tout à fait conjointes avec l'article 11 qui dit ceci: "Le conseil a pour fonction de conseiller le ministre sur toute question relative à la conservation et à l'environnement."

Je pense que ces deux amendements ont apporté des changements très positifs et très bénéfiques à notre projet de loi. Le débat s'est fait dans tous ses détails. Nous avons passé plusieurs heures en commission parlementaire. Je pense que le grand objectif d'instituer un Conseil de la conservation et de l'environnement ne se discute plus, il est accepté de part et d'autre. Je pense qu'avec les amendements que nous avons discutés ensemble, qui ont été acceptés et adoptés, le projet de loi représente maintenant le fruit d'un consensus.

Le critique de l'Opposition nous avait dit au départ: Si vous n'apportez pas des amendements significatifs, nous aurons, en troisième lecture, à voter contre le projet de loi. J'espère que ce projet de loi représente maintenant un consensus de la Chambre, qu'il sera adoté à l'unanimité par nous avec les amendements qui ont été proposés et acceptés, que nous pourrons instaurer bientôt ce conseil, qu'il pourra bientôt se mettre à l'oeuvre, que nous donnerons bientôt ce grand départ déjà amorcé par la nouvelle politique du cap environnemental de mettre le cap sur la conservation. Alors, le conseil sera d'un appui extraordinaire pour le ministère et surtout pour le ministre, pour nous donner des orientations futures, pour nous indiquer les chemins à suivre pour ce grand changement de mentalité qui devra se faire de plus en plus au Québec, si nous voulons changer les choses, si nous voulons passer d'un stade d'une juridiction polluante à une juridiction qui mettra en valeur, au contraire, la nature, le milieu de vie et la qualité de vie.

Je ne veux pas être plus long. Je pense que le débat s'est déjà fait. Je voudrais dire que, naturellement, nous appuyons fortement l'esprit du projet de loi, l'essence même du projet de loi tellement important pour la conservation des ressources et de l'environnement, et j'espère que nous aurons le concours et l'assentiment de la Chambre entière pour adopter ce projet de loi.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Environnement.

M. le député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Merci, Mme la Présidente. Comme vient de l'indiquer le ministre de l'Environnement, j'avais signifié, au moment de l'étude du principe du projet de loi, notre accord sur le principe de la création d'un organisme-conseil qui regrouperait les fonctions de conseil à l'égard de la conservation des ressources et aussi de toutes les questions plus globales de la protection de l'environnement.

Cependant, j'avais indiqué que, pour nous, tel que nous voyions alors le projet de loi, il y avait une lacune importante, finalement, au moment même où le gouvernement venait de se commettre dans deux textes importants, deux textes d'orientation qui seront importants au cours des prochaines années pour la façon dont on va avoir à s'acquitter de cette responsabilité au sein du conseil.

D'abord, le livre blanc du gouvernement sur le nouveau cap environnemental sous-titré: "La conservation, agent de progrès" et qui nous indiquait clairement l'intention du ministre de l'Environnement et, puisque c'est un document gouvernemental, l'intention du gouvernement dans sa totalité de faire en sorte que la promotion de la conservation et le maintien et l'amélioration des conditions naturelles de productivité des ressources soient la responsabilité non pas uniquement du ministère de l'Environnement, mais de l'ensemble des ministères concernés par les ressources naturelles et par toutes les problématiques environnementales.

Le document disait d'ailleurs: Le ministère de l'Environnement ne doit pas revendiquer l'exclusivité de l'approche de conservation ni celle de la pensée écologique. C'étaient les propos mêmes qu'on retrouvait dans le livre blanc du gouvernement qui avait été rendu public à peine quelques jours ou quelques semaines avant la discussion que nous avons eue à l'Assemblée nationale sur le projet de loi. Si je me rappelle bien, la veille même de l'étude du principe du projet de loi, le ministre de l'Environnement était à New York pour accompagner son collègue du gouvernement fédéral et pour déposer aux Nations unies le rapport du groupe de travail canadien sur l'environnement et l'économie.

D'une certaine façon, c'était la contribution des États canadiens à la commission mondiale sur l'environnement et l'économie, commission qui a été présidée par la première ministre de Norvège. Cette dernière a fait un rapport fort important sur le plan des orientations fondamentales pour les sociétés d'aujourd'hui et de demain à l'égard de la protection de l'environnement,

de la lutte contre la pollution et de la conservation de nos ressources. Là aussi, dans ce document, on avait des recommandations que les gouvernements du Canada, donc y compris le gouvernement du Québec, se faisaient mutuellement. En allant porter ce document aux Nations unies, d'une certaine façon, on disait à la face de l'humanité: Voici comment nous, au Canada et au Québec, on conçoit les choses. Dans ce document, on disait: "Les premiers ministres doivent assumer le premier rôle de leadership et démontrer leur engagement pour l'intégration de l'environnement et de l'économie, notamment en établissant des mécanismes formels rendant les ministres et leurs ministères responables d'un développement économique compatible avec l'environnement". On ajoutait un peu plus loin dans ce document présenté par l'ensemble des ministres de l'Environnement du Canada: "Tous les ministres doivent être tenus directement responsables et imputables des conséquences environnementales de leurs politiques, lois et programmes." Ce sont tous les ministres dans chacun des gouvernements, non pas tous les ministres de l'Environnement uniquement. Tous les ministres, dans n'importe quel gouvernement au pays, doivent avoir cette approche.

Ce qu'on voyait dans le projet de loi, ce n'était pas tout à fait cela. C'est la raison pour laquelle, à ce moment-là, on a fait de sérieuses mises en garde au ministre. Le texte du projet de loi, tel que libellé, pouvait prêter à interprétation. À notre avis, si on voulait être cohérents avec les documents sur lesquels le gouvernement s'était engagé et en fonction du virage qu'il nous propose comme société, on ne pouvait pas accepter que les avis du conseil consultatif de l'environnement et de la conservation se limitent aux seules lois et règlements qui sont sous l'autorité du ministre de l'Environnement. Ce qu'on voulait et ce qu'on veut toujours... (17 heures)

Avec cela, on est d'accord avec le ministre et on lui a dit clairement: On pense que, effectivement dans l'appareil gouvernemental, c'est le ministre de l'Environnement qui a la responsabilité d'être un peu le chef d'orchestre. Sauf qu'à notre avis il doit y avoir un orchestre et non pas un seul joueur dans l'orchestre. À cet égard, si le ministre de l'Environnement a un rôle moteur, pour reprendre l'expression du ministre, il doit par ailleurs faire en sorte que l'ensemble de ses collègues se sente responsable de la protection de l'environnement et de la conservation de nos ressources.

À cet égard, quand des ministères se comportent d'une façon délinquante par rapport à ces principes et par rapport aux exigences de la protection de l'environnement, on doit pouvoir les interpeller directe- ment. On doit faire en sorte que le ministre de l'Environnement - on le sait, je l'avais dit à ce moment - qui est souvent dans les gouvernements, à l'égard des collègues à vocation économique, un peu l'empêcheur de tourner en rond, on doit faire en sorte que le ministre de l'Environnement ait assez de poids politique et d'autorité morale et d'instruments d'intervention auprès de ses collègues pour qu'il puisse obliger ceux-ci à modifier leur approche et leur comportement.

C'est pour cela qu'on voulait que le texte de loi spécifie très clairement que les autres ministres doivent être interpellés également et qu'on ne peut pas se limiter uniquement aux lois et règlements qui sont sous la responsabilité du ministre de l'Environnement. C'est là qu'on a finalement introduit l'amendement dont le ministre a parlé tantôt. Pour nous, sans restreindre la portée, c'est important dans la mesure où, par la suite... Cela était une interprétation que le ministre a faite. Sans être totalement convaincu des arguments présentés par le ministre, à un moment donné, il a une responsabilité à assumer. Le ministre nous a dit que, selon ses conseillers, le fait de faire référence aux lois et aux règlements sous sa responsabilité, contrairement à nos craintes, renforçait sa position à l'égard de ses collègues.

On a dit: Très bien, mais on n'est pas totalement convaincu de vos arguments. Il faut que ce soit clair dans le texte de loi que la définition du mandat du nouveau conseil soit telle que ce conseil se sente toute la latitude pour interpeller le ministre de l'Environnement en premier lieu et, par lui, ses autres collègues sur toute question relative à la conservation et à l'environnement. Encore une fois, si on n'est pas totalement convaincu de la justesse des avis qui ont été présentés au ministre par ses conseillers, néanmoins, cet amendement peut à ce moment-ci nous amener à être moins réticents que nous ne l'étions à l'autre étape de l'étude de ce projet de loi.

Le ministre nous a également dit, alors qu'on discutait en commission parlementaire, qu'il fallait prendre en considération le mandat que lui donnait une autre loi, qui est la Loi générale sur la qualité de l'environnement, en fait la loi du ministre de l'Environnement, qui fait que le principal conseiller du gouvernement est le ministre de l'Environnement. II craignait, dans nos propos et dans les propositions d'amendement qu'on lui présentait, de voir diluer son rôle de principal conseiller au profit d'un organisme qui n'était pas un organisme d'autorité comme lui peut l'être en fonction de ses responsabilités de ministre. Il craignait, d'une certaine façon, de voir ce rôle de conseiller qui lui est attribué être dévalué par le fait qu'on permettrait à un organisme-conseil, le nouveau conseil sur la conservation et

l'environnement, d'être le conseiller du gouvernement. Ce n'était pas là notre intention.

Au contraire, notre intention était de renforcer la position du ministre et que, si on reconnaissait qu'il est le principal conseiller du gouvernement, il n'était pas le seul intervenant en matière environnementale. Il faut être bien conscient de cela, M. le Président. Quand on rédige des lois comme celle-ci entre autres, on ne rédige pas des lois uniquement en fonction d'un titulaire particulier d'un ministère, à un moment donné. On fait des lois qui vont durer et, on l'espère, durer le plus longtemps possible dans la mesure où elles vont être encore d'actualité et pertinentes pour les problèmes qui pourront se présenter dans l'avenir. C'est évident qu'à cet égard la responsabilité du ministre de l'Environnement est une responsabilité qui est partagée par ses collègues. En conséquence, il faut que l'on s'assure que l'ensemble des ministres du gouvernement se sentent responsables face au défi de l'environnement, au défi de la protection et de la conservation de nos ressources.

Si le ministre agit comme conseiller, il ne doit pas être celui qui va faire en sorte de tout contrôler. Un jour, il ne sera peut-être plus là, lui. Il y aura peut-être un titulaire qui aura peut-être moins la vocation que lui nous dit avoir et que certains lui attribuent et que je lui reconnais, honnêtement, M. le Président. Mais le problème, c'est que, lorsqu'il ne sera plus là, lorsqu'une autre personne prendra sa place dans ce gouvernement ou dans un autre gouvernement, est-ce qu'on aura, à ce moment-là, la capacité de faire en sorte que les autres collègues à l'intérieur du Conseil des ministres se sentent concernés, interpellés par le titulaire du ministère de l'Environnement?

C'est de cela qu'il faut s'assurer dans le projet de loi. À cet égard, je voudrais indiquer au ministre et à l'Assemblée nationale - d'une certaine façon, en faisant cela, je fais une pression directe sur le premier ministre qui a eu copie d'une lettre que j'ai eue moi aussi, une lettre adressée au ministre de l'Environnement par l'Union québécoise de la conservation de la nature, qui a dit au ministre ce que je vous ai dit. Je lis une partie de cette lettre qui a été envoyée au ministre le 21 novembre. "À ce propos, il faut souligner la faiblesse majeure dans un nouveau cap environnemental ainsi que dans la structure du nouveau conseil de la conservation et de l'environnement. Je fais référence au rôle strictement moral que le ministre de l'Environnement joue dans l'ensemble du gouvernement, et même avec ses nouveaux outils."

À moi, M. Mead, qui est président de l'Union québécoise pour la conservation de la nature, ajoutait: "En effet, l'union partage vos appréhensions - en ce qui me concerne -quant aux restrictions inhérentes au nouveau conseil de la conservation et de l'environnement." Ce qu'il me proposait comme solution, c'est celle qu'il avait proposée au ministre de l'Environnement et aussi au premier ministre, c'est que, finalement, le ministre de l'Environnement devienne automatiquement, ex officio, le président du comité ministériel permanent d'aménagement et de développement régional. Je pense que ce serait une solution intéressante. Si le premier ministre voulait accepter cette solution, compte tenu des amendements que le projet de loi introduit, qui ont été discutés, je crois que le ministre l'a indiqué, dans un esprit constructif de part et d'autre, je crois qu'on aurait à la fois quelques meilleures protections que celles qu'on avait au départ, quelques garanties plus importantes, plus significatives dans le texte de loi et on aurait aussi greffé à cela une consolidation du rôle et du pouvoir et de la responsabilité du ministre de l'Environnement.

C'est d'autant plus important, M. le Président, que ça correspond à ce que le premier ministre a accepté, parce que, dans le rapport du groupe de travail national sur l'environnement et l'économie qui a été déposé aux Nations unies par le ministre de l'Environnement, entre autres, et endossé par tous les gouvernements au Canada, on pouvait lire dans les recommandations -donc, cela a été endossé par le gouvernement actuel du Québec -: Les ministres de l'Environnement devraient être membres des principaux comités gouvernementaux de développement économique et des comités des priorités et de planification du Conseil des ministres ou y être associés de près par des mécanismes appropriés. (17 h 10)

En somme, ce qu'on reconnaissait entre ministres de l'Environnement, et cela a été endossé par les différents Conseils des ministres des gouvernements des provinces et de l'État fédéral, c'est que le ministre de l'Environnement doit... Si on veut que nos sociétés évoluent vers des changements de comportements, d'habitudes, d'approches à l'égard de l'environnement, de la lutte contre la pollution et de la conservation des ressources, il faut que le titulaire du ministère de l'Environnement devienne un ministre senior dans l'appareil, non seulement un ministre senior par la personnalité de l'individu, mais aussi par la fonction, la place qu'on fait au ministre de l'Environnement dans l'organigramme, dans la structure du Conseil des ministres et de l'appareil décisionnel gouvernemental.

D'ailleurs, si le premier ministre acceptait cette proposition, que je fais mienne et que je soupçonne le ministre de l'Environnement de faire sienne aussi - mais, lui, il est mal placé pour le dire parce que

c'est un peu plus délicat dans sa position -je pense qu'on aurait une garantie qu'à l'avenir, quelle que soit la personne, le premier ministre serait, d'une certaine façon, obligé, il s'engagerait à le faire, à nommer quelqu'un qui est un personnage important dans le gouvernement comme responsable du ministère de l'Environnement. Il ne pourrait pas nommer un junior comme ministre de l'Environnement, dans la mesure où, justement, dans la structure même de l'appareil gouvernemental, ce ministre aurait des responsabilités importantes de coordination interministérielle sur toute la question de l'aménagement et du développement régional, parce qu'on sait que c'est dans un comité interministériel qu'on discute de beaucoup de questions qui concernent la lutte contre la pollution et la protection de nos ressources.

J'avais indiqué, au moment de l'étude du principe du projet de loi, que si le ministre ne changeait pas d'attitude, s'il n'acceptait pas de faire un certain nombre de modifications, nous serions contraints de voter contre le projet de loi, même si, au départ, nous partagions le principe et l'orientation générale que veut donner le ministre de l'Environnement au nouveau conseil. Je pense qu'avec les amendements, qui, encore une fois, ne sont pas des amendements qui nous satisfont totalement, mais qui vont suffisamment dans le sens de nos préoccupations et, deuxièmement, qui ont été introduits après des explications, notamment des avis qui doivent être pris en considération à moins qu'on veuille faire un débat avec des oeillères...

Une voix: Obtu.

M. Charbonneau: ...obtu. Merci, M. le leader du gouvernement de me suggérer un vocabulaire encore plus précis. Ma conception du râle de l'Opposition, à moins que vraiment on ne soit engagé dans une dynamique de lutte, de "filibuster" ou de stratégie politique parlementaire particulière, je pense qu'il ne s'agit pas de s'opposer pour s'opposer. Je pense que, dans ce cas-là, je dois prendre en considération les répliques et les arguments qui m'ont été donnés par le ministre de l'Environnement, mais en lui indiquant qu'il doit convenir qu'il va lui rester après coup une autre responsabilité, qui, elle, est la sienne et non pas celle du premier ministre, en espérant que le premier ministre va accepter la suggestion qui lui a été faite par l'Union québécoise pour la conservation de la nature. C'est celle du choix, comme je lui avais dit, des personnes qui vont composer ce nouveau conseil.

Il faut des personnes dans cet organisme qui auront la stature, la trempe et la capacité d'indépendance d'esprit pour qu'elles se sentent complètement libres de toute attache, de toute amitié, de toute influence qui les empêcherait, à un moment donné, de dire ce qu'elles ont à dire au ministre de l'Environnement, qui est le conseiller numéro un du gouvernement en ces matières. Et, à travers lui, puisque le ministre a accepté un autre amendement et que les autres ministres seront rapidement interpellés par les avis du conseil, il faut que ces gens du conseil sentent que leur première responsabilité, ce n'est pas à l'endroit du gouvernement ni du ministre de l'Environnement, mais c'est à l'endroit de la population du Québec et de l'ensemble de notre société.

Ils auront, dans les années à venir, un rôle important à jouer, parce qu'ils contribueront à faire en sorte que, quel que soit le titulaire du ministère de l'Environnement, quel que soit le gouvernement et le parti qui sera à la tête de l'État québécois, il y aura suffisamment de prise de conscience et d'évaluation correcte des enjeux environnementaux dans notre société pour que, quel que soit le gouvernement, on ne puisse pas passer à côté des décisions majeures qui doivent être prises et des correctifs aussi qui devront, à des moments donnés ou à d'autres, être adoptés, pris par les gouvernements qui dirigeront notre société, qui dirigeront le Québec.

Voilà, M. le Président, ce que je voulais dire à cette étape-ci de l'étude du rapport de la commission parlementaire qui a étudié en détail le projet de loi. Je ne sais pas si nous aurons à revenir longuement à l'occasion de la discussion en troisième lecture. Cela dépendra sans doute de la volonté de nos leaders respectifs et de la stratégie parlementaire de fin de session. Mais qu'importe, M. le Président, je n'ai pas pris de chance au cas où, finalement, les discussions entre les leaders feraient en sorte qu'on n'aurait pas à revenir trop longuement. Je pense qu'à ce moment-ci, suite à l'étude en commission parlementaire, on peut convenir qu'il y a sur la table un projet de loi, qui mérite d'être appuyé par l'Assemblée nationale.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Alors je cède la parole à Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Étant donné que c'est une brève intervention, je pense que je vais commencer tout de suite à parier sur le projet de loi puisque j'ai déjà pris la parole sur ce projet de loi.

À l'époque, quand je suis intervenue sur ce projet, je m'inquiétais de savoir à quel point les ministres sectoriels, dis-je, croyaient à l'environnement. Si vous vous souvenez, c'était mon inquiétude. Je ne sais

pas si, entre l'étude de la deuxième lecture et ce qu'on fait aujourd'hui, le ministre est intervenu auprès de chacun de ses collègues, soit son collègue de l'Agriculture, soit celui du Tourisme, soit celui de l'Industrie et du Commerce, finalement, auprès de tous les ministres responsables de secteurs différents. Je sais que le ministre doit intervenir cinq minutes entre nos interventions. J'aimerais ça qu'il puisse me dire si les craintes que j'avais à l'époque de cette intervention... si le ministre a pris le temps de s'informer, de s'enquérir auprès des ministres sectoriels à savoir s'ils étaient d'accord de mettre tout en oeuvre pour que, dans chacun de leur ministère, il y ait une pensée à ce sujet dans toutes les prochaines lois ou les réglementations qui doivent se faire, si, éventuellement, ils avaient eu cette pensée de conservation, cette pensée de l'environnement. Je serais très heureuse si le ministre pouvait me répondre lors de son intervention de cinq minutes qui suivra la mienne.

M. le Président, quand le Conseil consultatif sur les réserves écologiques faisait porter ses interventions sur la création du nouveau conseil, il disait vouloir que le nouveau conseil puisse s'intéresser à d'autres mesures que celles dévolues nécessairement aux deux anciens conseils qui étaient là avant et qui seront remplacés présentement par la loi 29 soit la conservation des terres agricoles, l'aménagement du territoire, les parcs, les forêts et les autres mesures concernant la protection. Ils souhaitaient, en plus, que le nouvel organisme conseille tous les autres responsables de l'application des mesures liées de près ou de loin à la conservation, à savoir les autres ministres ainsi que j'en parlais tout à l'heure.

Parce que si le ministre dans son idée, pour lui... Le conseil qu'il va créer par la loi 29, il faut que ce conseil-là ait une autorité sûre, une autorité véritable, une autorité par laquelle il ne sera pas obligé de faire des courbettes devant les uns et les autres. Il aura une autorité pour dire à chacun des ministères que s'il y a une directive qui est prise, que dans cette directive-là il y aura un volet pour l'environnement. Je pense qu'il faut bien s'entendre avec ça. Il faudra que les membres de ce conseil soient des membres qui savent se tenir debout, premièrement. Il faut aussi que les membres de ce conseil puissent être en mesure, pour une raison ou pour une autre, de ne jamais changer d'optique. Il faudra que ce soient des hommes et des femmes qui, au départ, croient véritablement à l'environnement. (17 h 20)

J'avais dit aussi dans cette première intervention - je m'en souviens très bien -que, tel mon collègue responsable du dossier, je crois que le ministre de l'Environnement qui est devant nous y croit à l'environne- ment. Je ne suis pas sûre que le gouvernement tout entier y croit aussi fort que cela. J'espère que vous allez utiliser votre pouvoir, M. le Président, pour que le ministre intervienne auprès de ses collègues pour que soit enfin vraiment respectée l'idée du ministre responsable, c'est-à-dire la création de ce conseil qui pourrait non seulement conseiller le ministre de l'Environnement ou les associations sur le terrain, mais conseiller aussi les différents ministères.

Nous sommes quand même contents que le ministre ait fait un pas en avant. Il avait dit, lors de la commission, qu'il voulait faire un pas dans la direction. Nous sommes contents que le ministre ait apporté la motion suivante: "sans restreindre la portée de l'article 11, le conseil peut". Je pense que c'est vraiment un pas en avant et j'espère que cela ne limitera pas, en quelque sorte, ce que l'article 12 venait dire dans le projet de loi.

M. le ministre, on est quand même inquiet que le conseil que vous allez former par la loi 29 n'ait pas l'autorité nécessaire pour faire basculer, dans la balance de la conservation et de l'environnement, toute l'autorité que vous semblez bien vouloir attribuer à ce conseil. Je ne sais pas de quelle façon, de quelle manière vous pourriez vous y prendre pour donner cette autorité au Conseil de la conservation et de l'environnement, mais je pense que vous devriez vous asseoir et regarder de près de quelle façon vous pourriez intervenir pour donner l'autorité nécessaire à cette commission.

M. le Président, il y a eu aussi le rapport du groupe de travail national sur l'environnement et l'économie qui, lui aussi, a apporté une note tout à fait nouvelle, en ce sens qu'il disait que les premiers ministres devraient décréter que les documents du Conseil des ministres et les documents gouvernementaux de développement économique portant sur les grands dossiers démontrent qu'ils tiennent compte de l'environnement et de l'économie.

C'est certain, M. le Président, que si on avait, dans toutes les provinces du Canada, des ministres responsables qui croient à l'environnement tout autant que le ministre de l'Environnement du Québec, je pense que cela faciliterait la tâche, en ce sens que tout le monde serait sur la même longueur d'onde. Chaque fois qu'un ministre responsable mettrait de l'avant un projet de loi, une réglementation, il aurait une oreille ou une écoute attentive en ce qui a trait à la conservation et à l'environnement.

M. le Président, je me souviens aussi que, dans l'intervention que le ministre avait faite lors de la présentation du projet de loi, il avait dit: On met un cap. Quand je pense à un cap, je pense à un cap vers l'espoir. Dans le quotidien, nous avons besoin de vivre d'espoir. Quand on formule une loi en vue de

la conservation et de la protection de l'environnement, j'appelle cela un cap vers l'espoir. Mais la CAP aussi a fait des recommandations au ministre. J'espère que les recommandations qui ont été faites par la CAP, soit la Conservation d'agents de progrès, le ministre va sûrement prendre en considération ce qu'ils ont dit. La CAP dit: Pour leur part, les ministères responsables des ressources particulières doivent revoir leurs politiques et programmes pour les orienter dans le sens de la conservation. Il est bien sûr que, si on n'est pas attentif dans le sens que la CAP veut bien nous le démontrer, il n'y aura rien qui se produira, ce sera un conseil bidon. C'est notre grande inquiétudel II faut que ce conseil se compose d'hommes et de femmes, je me répète, qui croient à l'environnement, qui croient à la conservation. J'espère que le ministre en est bien conscient.

Je suis inquiète qu'il n'y ait pas de contrainte particulière pour obliger les différents ministères dans leur domaine respectif à penser à l'environnement, à la conservation. J'en suis inquiète et je serais beaucoup plus rassurée si, publiquement, ici, le ministre responsable du dossier, le porteur de ballon, en quelque sorte, pouvait nous indiquer comment il fera pour forcer ses collègues à se contraindre à la conservation et à l'environnement. Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président: À ce moment-ci, je vais céder la parole à M. le ministre de l'Environnement, pour une intervention de cinq minutes.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, pour le court délai qui m'est alloué, je prends avec tout le sérieux qu'ils méritent les paroles et les commentaires de Mme la députée de Johnson. J'ai travaillé avec elle pendant plusieurs années ici et je respecte sa sincérité et sa conviction, comme tous les parlementaires les respectent, je pense. C'est pourquoi je prends cela très au sérieux, et je le dis en toute sincérité.

Je voudrais lui dire tout d'abord que, moi aussi, je suis tout à fait conscient que, si la conviction environnementale ne se propage pas dans l'appareil gouvernemental, tout l'objectif de la conservation ne se réalisera jamais. C'est pourquoi, de plus en plus, nous essayons de travailler avec les collègues des ministères économiques et des ministères sociaux. J'ai entamé des programmes conjoints avec le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de façon systématique; je suis présentement en discussion avec le ministre du Tourisme pour la même chose. Avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, nous avons établi un protocole de travail.

Pour les ministères économiques qui, naturellement, sont souvent en situation conflictuelle avec le ministère de l'Environnement, nous avons déposé le rapport sur l'environnement et l'économie auprès du premier ministre lui-même qui a formellement accepté, par écrit, de nous donner tout son aval. On a communiqué ce rapport et le nouveau cap environnemental aux autres ministres et tous ont réagi très positivement. Je sais qu'on ne fera pas le paradis en un jour, mais de toute façon le travail est commencé. Il y a un désir très ferme de faire de la question de l'environnement quelque chose qui va pénétrer dans tous les ministères de plus en plus au Québec.

En terminant, je peux donner à la députée de Johnson l'engagement que ce ne sera pas un conseil bidon, que tout conseil bidon ne peut réaliser quelque objectif que ce soit. Nous allons agir de telle sorte que les gens qui seront membres de ce conseil soient des environnementalistes convaincus, qu'ils représentent tous les secteurs de la société, l'économique, le social, les jeunes et les moins jeunes, pour qu'il soit représentatif de la société et, surtout, pour qu'il représente le grand mouvement de qualité de vie, de l'environnement et qu'il travaille à la conservation de nos ressources.

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M. le député de Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, j'insistais pour intervenir au cours de ce débat sur l'environnement, puisque vous savez que, lors de cette tournée que nous avons faite au Québec, j'ai eu l'occasion de rencontrer de très nombreux groupes au sujet de l'environnement. D'ailleurs, pour le bénéfice de mon collègue, le député de L'Assomption, j'ai notamment rencontré et discuté pendant de nombreuses heures avec les gens d'À court d'eau, qu'il connaît sans doute; du moins, je l'espère. (17 h 30)

Le ministre, avec son projet de loi 29, nous présente une Loi sur le conseil de la conservation et de l'environnement. En se référant à l'argumentaire, aux chapitres A, B et C, le ministre a décidé de faire un pas -je pense qu'il faut le reconnaître - en apportant un amendement à l'article 12, si ma mémoire est bonne. Le premier alinéa, à ce moment-là, se lit: "Sans restreindre la portée de l'article 1, le conseil peut..." etc. Selon le ministre, cet amendement permettrait au conseil de le conseiller sur toute question relative à la conservation et à l'environnement, sans égard aux restrictions de l'article 12 qui limite le pouvoir du

conseil aux seules politiques, stratégies et lois qui sont sous la responsabilité du ministère de l'Environnement. Cet amendement est un compromis, je pense qu'il ne faut pas avoir peur des mots, mais il ne fait toujours pas du conseil une espèce de conseil de tous les ministères et organismes quant à la conservation de l'environnement.

J'écoutais tantôt les propos de mon collègue, le député de Verchères et porte-parole de l'Opposition en matière d'environnement, qui disait que le ministre ne livre pas la marchandise comme telle parce qu'il ne fait pas une préoccupation entière, complète et totale de l'environnement pour l'ensemble de tous les ministères, des organismes, etc.

Je pense qu'il avait raison parce qu'une vision de l'environnement doit être une vision intégrée comme telle. Ça doit être compatible... Je pense que l'environnement doit être situé dans un centre de compatibilité avec tout l'ensemble du développement économique au Québec. Je pourrais toujours aller plus loin et vous parler du bilan négatif quant à la conservation, la protection des berges, où l'on voit que le ministère de l'Environnement n'exerce son autorité que sur le territoire urbain et de villégiature en bafouant les prétentions régionales à l'aménagement du territoire, ce qui nous éloigne un peu d'ailleurs puisque comme je faisais allusion tantôt à À court d'eau, à la gestion européenne des ressources hydrauliques, enfin des bassins hydrauliques, en parlant de gestion des bassins, où les régions sont très fortement impliquées, notamment en France... On pourrait parler aussi des transports. Le ministre reste coi, lorsque son collègue des Transports met publiquement en doute, justement à propos de la route 116, l'expertise du BAPE, le Bureau des audiences publiques sur l'environnement. On pourrait le faire très facilement pour les enfouissements sanitaires. On pourrait le faire pour les déchets dangereux. On pourrait le faire, et cela nous a été souligné durant cette tournée du Québec qui a été savoureusement appelée d'ailleurs la tournée Grandes oreilles, pour le champ de tir dans le bout de l'Annonciation dans les environs de Mont-Laurier, en agriculture également. On pourrait le faire en tourisme. On pourrait effectivement parler de nouveau du BAPE même si le leader adjoint du gouvernement trouve drôle qu'on parle du BAPE, c'est un organisme que, nous, on a toujours considéré avec beaucoup de sérieux. On ne lui a pas fait subir le sort que, malheureusement, votre ministère lui a fait subir. Et en ce qui a trait à l'information... De toute façon, c'est un ministère à problèmes. La preuve, c'est qu'il a dû y avoir un gigantesque remaniement à l'intérieur du ministère au sujet des communications, etc. Ça ne va pas dans votre ministère. C'est su, c'est connu que vous procédez à une profonde et longue étude de restructuration interne, des communications, etc.

Je vous vois, vous ne pouvez pas nier mon propos parce que vous savez que j'ai raison là-dessus. Même si ce n'est pas su publiquement, on a quand même un peu d'information. On pourrait également parler des plages, de la rémunération des bénévoles, du fleuve, de la pollution industrielle, de la tordeuse des bourgeons de l'épinette, etc. Au sujet de la conservation, avouez qu'il y a un bilan passablement négatif qu'un conseil pourrait peut-être éventuellement corriger s'il est bien formé, d'une part, et si, deuxièmement, il y a une écoute et une oreille attentive de la part du ministre.

Mais, au-delà de cela, si, moi, j'avais été ministre de l'Environnement, qu'est-ce que j'aurais fait? Je pense que j'aurais adopté cette proposition extraordinairement intéressante pour une société qui a l'environnement comme l'une de ses principales préoccupations. Je parle de la société québécoise. C'est un phénomène du monde occidental qui devra d'ailleurs toucher le tiers-monde pour ne pas dire le deux-tiers monde, la préoccupation environnementale. Pour une société qui a l'environnement comme toute première préoccupation... N'importe quel sondage va vous le dire. Je pense d'ailleurs que, l'autre côté, dans ce qu'on appelle communément le "bunker", on pourrait vous donner des statistiques assez intéressantes là-dessus, mais je suis persuadé que vous les avez.

Donc, si j'étais ministre de l'Environnement dans une société aussi préoccupée d'environnement qu'est notre société actuelle, dans une société - M. le ministre - où les problèmes environnementaux ne vont pas diminuant, mais risquent d'aller plutôt en s'aggravant, qu'est-ce que j'aurais fait? Si le député de Saint-Jacques était ministre de l'Environnement, je pense qu'il aurait fallu d'abord partir d'un premier principe. Si on veut faire quelque chose de significatif, d'articulé et de cohérent, s'inscrivant dans une stratégie et une préoccupation à long terme de l'environnement au Québec, je pense que, comme ministre, j'aurais pris cette extraordinaire proposition qu'a soumise le comité d'action des jeunes du Parti québécois. Ces jeunes de chez nous, avec un dynamisme incroyable, agissent et se préoccupent. J'aurais, au départ, soumis, ici, à cette Assemblée nationale... Au lieu de nous soumettre des projets de loi minces, des plus petits...

Vous vous vantiez tantôt qu'un de vos collègues présentait le plus petit projet de loi de l'Assemblée nationale, ce qui était un peu inexact. Il était battu par deux autres de ses collègues qui en présentent de plus petits. J'aurais adopté cette recommandation,

cette suggestion, cette proposition que faisait le comité d'action politique des jeunes du Parti québécois qui réfléchissent à l'avenir de la société et qui sont, en premier lieu, concernés parce qu'ils ont plus d'années devant eux que nous. Ces jeunes proposaient au Québec une charte des droits et devoirs en matière d'environnement. Imaginez-vous, M. le ministre, disposant d'une telle charte! On connaît la valeur des chartes dans un système démocratique comme le nôtre. Imaginez-vous, si ce Québec se donnait une charte des droits et devoirs en matière d'environnement, la marge de manoeuvre que vous auriez et surtout la cohésion que vous pourriez obtenir, puisque votre ministère se retrouverait solidifié et assuré par un texte fondamental au Québec. Et là, malheureusement, ce qu'on voit, c'est un ministre qui, tant bien que mal, réussit à passer des choses sur le plan de l'environnement. Mais, par contre, on voit, malheureusement, que plusieurs de ses collègues, exerçant leurs prérogatives impériales dans chacun de leurs ministères - je conclurai là-dessus, M. le Président - vont à contre-courant de ce que le ministre, sans aucun doute de bonne foi, aimerait voir adopté au Québec comme politique, comme loi et comme règlement sur l'environnement.

M. le Président, je regrette que vous ne m'accordiez pas plus de temps. Je vais être obligé de me limiter à ces maigres dix minutes. Mais j'ose espérer avoir le plaisir d'intervenir de nouveau sur ce sujet.

Le Vice-Président: Très bien, M. le député, remarquez que je n'ai rien à faire avec la limite de temps qui vous est imposée. C'est notre règlement qui vous impose une limite de dix minutes à ce stade-ci.

M. le ministre, pour un droit de parole de dix minutes.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: Le député de Saint-Jacques a voulu faire la preuve que notre ministère fait peu pour la conservation et que les autres ministères ne coopèrent pas du tout. Il faudait peut-être lui souligner - et je pense que cinq minutes ne seront pas assez -les choses qui se sont faites en deux ans à notre ministère de l'Environnement: l'accord avec Noranda sur les pluies acides qui était resté sur les tablettes pendant dix ans, et par lequel, pour la première fois, au Québec, nous pourrons réaliser l'objectif de 50 % de réduction des pluies acides; la Loi sur la protection des non-fumeurs qui était restée sur la tablette, encore; la Loi sur les pesticides qui était restée sur les tablettes, qui a demandé un accord avec les ministères à vocation économique et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimen- tation pour réaliser, la protection des rives et des plaines inondables et du littoral. (17 h 40)

Le député disait: Cela ne couvre que l'urbain, la villégiature. Il n'a pas dû lire le projet de loi 43 et le projet de loi 19. Cela couvre tout le Québec et le ministère de l'Environnement est le maître d'oeuvre de toute cette politique.

Le groupe de travail sur le programme d'assainissement des eaux du Québec était un fouillis total avant que nous prenions le pouvoir. Ils avaient dépassé leur budget de 40 %, de 250 000 000 $, avant qu'on prenne le pouvoir. On l'a réorganisé, on a même travaillé sans ordinateur.

La dépollution industrielle, là où il dit qu'on n'a rien fait. Je pourrais lui citer des cas: Dioxynes, QIT, NL Chem, Expro, récemment Dominion Textile. Je pourrais allonger la liste. Bientôt, à Baie-Comeau, Reynolds, la Compagnie de papier Québec et Ontario, quelque chose comme plus de 200 000 000 $ investis par l'industrie pour la dépollution. Le Fonds 3R pour enseigner le recyclage dans les écoles, un programme de trois ans. Il parlait d'une charte des jeunes du Parti québécois. Peut-être qu'il n'a pas lu ou suivi le discours inaugural du premier ministre en décembre, où le premier ministre s'est engagé pendant notre mandat à produire une charte, à la suggestion de ma collègue qui m'a précédé comme critique de l'environnement, Mme la vice-première ministre actuelle. Cette charte est en voie d'être bâtie maintenant par le Conseil consultatif de l'environnement. Elle sera reprise par le nouveau Conseil consultatif de la conservation et de l'environnement. Un grand travail a été fait là-dessus et, un de ces jours, cela va être terminé.

Il y a le récent accord de recyclage avec la SAQ, qui a demandé un accord avec mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce. Je pourrais lui citer quantité d'exemples où, justement, aujourd'hui, il y a une présence de l'environnement dans tous les ministères, où on travaille ensemble. On vient de signer un protocole d'entente avec le ministère de la Santé et des Services sociaux et le ministère de l'Éducation. On travaille à je ne sais combien de projets avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. On travaille avec les ministères du Tourisme, des Transports de la façon la plus harmonieuse possible. Pour la première fois aujourd'hui, l'environnement se fait sentir dans tout l'appareil gouvernemental.

C'est nous qui avons, en fait, produit récemment la première politique du ministère de l'Environnement sur la conservation. Il n'y avait pas de politique. Il n'y en avait jamais eu. Le ministère ne savait même pas où il s'en allait. C'est nous qui avons réalisé justement ce premier cap vers la

conservation des ressources.

Donc, aujourd'hui même, il y a deux exemples: le harfang des neiges comme symbole de la conservation, qui l'a introduit si ce n'est nous? Le nouveau Conseil de la conservation et de l'environnement, qui le propose si ce n'est nous? C'est donc dire que je pense que le député de Saint-Jacques devrait aller faire ses devoirs et regarder un peu ce qui a été fait depuis deux ans. Je pense qu'un travail immense est en train d'être fait et il ne sera pas fait seul par un ministère ou un autre. Il est fait parce que nous avons l'appui des citoyens dans cette démarche très importante vers la conservation.

Le Vice-Président: À ce moment-ci, je vais céder la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Donc, nous avons devant nous le projet de loi 29, la Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement. C'est la création d'un nouveau conseil qui, dorénavant, remplacera le Conseil consultatif de l'environnement et le Conseil consultatif sur les réserves écologiques.

J'écoutais les dernières paroles du ministre de l'Environnement qui, comme une kyrielle, nous énonçait la série d'interventions auxquelles il a travaillé, où il a mis à profit ses connaissances, et le mérite de ses qualités en tant que ministre de l'Environnement.

Je crois bien que le ministre de l'Environnement prend très au sérieux son ministère et qu'il veut que la pensée écologique puisse se développer ici au Québec. Je veux bien, moi aussi, admettre que le ministre peut être de bonne foi et de bonne volonté. Il ne faudrait tout de même pas dire qu'avant, rien n'existait ou que rien n'avait été entrepris et que tout a commencé depuis qu'il est arrivé au ministère de l'Environnement et que c'est une nouvelle naissance, une renaissance de l'écologie depuis que le ministre est en place, est en poste et antérieurement, il n'y avait aucun souci, aucune préoccupation du gouvernement que nous étions, à l'époque, nous du Parti québécois.

Il ne s'était absolument rien passé. Je pense que c'est faire preuve de fausse modestie de la part du ministre de dire que tout lui revient et que, ma foi, nous devrions lui dire grand merci, parce qu'il est le seul en fin de compte à avoir cette idéologie moderne.

M. le Président, la pensée écologique, c'est assez récent. Il n'y a pas si longtemps, bon nombre d'entreprises et d'industries se préoccupaient peu de leurs déchets, se préoccupaient peu de la qualité de l'eau, se préoccupaient peu de la qualité de leur environnement, et on en est arrivé à des problèmes incroyables pour l'environnement, la pollution, l'air, l'eau, la consommation, qui ont eu des impacts dramatiques sur la santé des citoyens et des citoyennes du Québec.

Avant d'arriver à cette pensée écologique et à développer une préoccupation et un souci de la qualité de son environnement ou de la conservation de son environnement, je crois qu'il faut établir des bases. Il faut faire de l'éducation, il faut sensibiliser les gens à cette préoccupation. Je pense que c'est ce que nous avons fait, nous, lorsque nous étions au gouvernement. Nous avons sensibilisé les grandes entreprises qui très souvent, plus souvent qu'autrement, sont les plus grands pollueurs qui existent à l'heure actuelle. Nous avons essayé de leur faire prendre conscience de leurs responsabilités vis-à-vis des populations environnantes, parce qu'elles étaient très impliquées dans la qualité de vie justement des gens qui devaient vivre dans l'environnement de ces grandes entreprises.

Il s'est fait des choses à l'époque. Il y a des comités et des conseils consultatifs aussi qui ont été mis de l'avant pour justement qu'on arrive à établir des recommandations et pour qu'on ait un contrôle sur la qualité de l'environnement, un contrôle aussi sur la qualité de notre conservation. Aussi beaucoup de gens, qui se sont souciés de cette même qualité de l'environnement, ont demandé, quand le ministre a présenté son projet de loi: M. le ministre de l'Environnement, vous n'allez pas assez loin avec votre projet de loi. Nous avons des mises en garde à faire quant à la teneur de votre projet de loi, parce que, quant à nous, nous croyons que le mandat du conseil ne va pas assez loin. Vous le limitez énormément dans ses fonctions et, nous, nous disons que ce n'est pas de cette façon que nous allons développer ici au Québec une pensée écologique.

Il faut réellement, hors de tout doute, faire en sorte que le concept de l'écologie, le concept de la conservation soit vraiment dans les instances décisionnelles les plus hautes de nos institutions, notamment au Conseil des ministres, et qu'ils soient une préoccupation constante dans les discussions interministérielles.

Il faut assurer un leadership très important et très puissant à l'intérieur des différents ministères pour que ces gens-là aient le réflexe d'une pensée écologique ou le réflexe de la conservation. Il y en a... Il y a des coûts. Il y a un volet économique important lorsqu'on regarde l'écologie, la conservation de l'espèce. Il faut qu'on ait cela en tête et qu'on s'en préoccupe, parce que se préoccuper de la qualité de vie a un impact direct sur la qualité de la santé de

nos concitoyens et nos concitoyennes, de notre environnement, de la nature et de tout ce qui permet de consommer de l'eau ou de pouvoir même participer à des activités de plein air ou à des activités récréatives. Je pense qu'il est important qu'on ait ce souci en tête et que, justement, on s'en préoccupe comme on se préoccuperait de la prévention. Faire de la conservation un souci constant, c'est faire de la prévention et c'est permettre à nos concitoyens et nos concitoyennes de vivre dans un environnement souhaitable pour eux, qui leur permette de respirer un air des plus convenables et aussi de pouvoir, sans crainte, se baigner dans des endroits publics où l'eau le permet et pouvoir aussi participer à des sentiers de la nature, sans qu'ils soient toujours soumis à des problèmes d'environnement. (17 h 50)

Je pense qu'il est de l'intérêt de tous et qu'il est important qu'on ait un souci, plus qu'une préoccupation, de faire en sorte que l'écologie et la conservation devraient être le souci le plus important à l'heure actuelle parce qu'il y va de notre patrimoine écologique. Ce patrimoine écologique est très fragile à l'heure actuelle dans nos sociétés. Nous avons vu les préoccupations au sujet de la couche d'ozone qui commence à diminuer, justement à cause de tout ce qui existe à l'heure actuelle comme polluants dans l'air. Je pense que, trêve de plaisanterie, quand on voit les bandes dessinées où, dans peu de temps, tous les gens devront se promener avec un masque parce que l'air ne sera plus viable et ne sera plus respirable pour les citoyens, il faut prendre plus qu'au sérieux les problèmes de la conservation de notre environnement.

Il y a des gens qui se sont penchés là-dessus. Il y a eu un groupe de travail sur l'environnement et l'économie qui a fait des recommandations au ministre et qui a demandé au ministre de dépasser la simple recommandation aux autres ministres lorsqu'il aura à prendre des décisions sur le plan économique afin qu'ils se rendent compte de l'impact de l'environnement sur les décisions économiques aussi parce qu'il y a un coût. Et il y a un coût parce que, finalement, il faudra, de toute façon... Il y a un coût pour la santé des individus et, si ce n'est pas un coût pour la santé des individus, il faudra reconstituer un environnement. Il faudra peut-être reconstituer nos forêts, nos cours d'eau. À ce moment-là, je pense que la nature prend énormément de temps et lorsqu'elle nous frappe, elle nous frappe toujours assez sévèrement. J'ai l'impression qu'il est essentiel que nous ayons des lois ayant du mordant et que nous ayons aussi des lois qui permettent justement de donner aux différentes instances que l'on veut créer, des pouvoirs importants, des pouvoirs avec une latitude qui leur permettrait de faire les recommandations les plus éclairées au ministre et qui leur permettrait de consulter le plus grand nombre de groupes possible. Et que, cap sur la pensée écologique, on arrive à faire en sorte que les décisions soient toujours prises en considérant les besoins importants et de plus en plus imposants, pressants par rapport à l'utilisation que l'on fait, à l'heure actuelle de tout ce qui concerne notre environnement. Il faut qu'on ait un souci des plus constants et qu'on puisse en arriver dans chaque ministère à avoir un réflexe, une pensée écologique importante et nécessaire au développement de notre qualité de vie si importante pour nous tous ici et pour l'ensemble de nos concitoyens et de nos concitoyennes.

Alors, M. le Président, il est évident qu'à force de pressions faites par l'Opposition, je pense qu'il y a eu des concessions qui ont été apportées au projet de loi dans sa forme première et que ce qui a été apporté est un pas dans la bonne direction. Nous souhaitons aller beaucoup plus loin et faire en sorte que ce souci de la pensée écologique et de la conservation soit un réflexe et non plus une question d'attitude mais un comportement à l'intérieur des différents ministères. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Alors je cède la parole à M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président. C'est la première occasion que j'ai, malheureusement, de considérer le projet de loi du ministre de l'Environnement sur le Conseil de la conservation de l'environnement. Je crois que l'objectif qui a été poursuivi par le ministre et dont le principe a été voté ici à l'Assemblée nationale a permis à l'Opposition, par la voix de mon collègue, le député de Verchères, de faire une proposition au ministre afin de s'assurer que non seulement ce conseil consultatif puisse émettre des avis qui viennent éclairer ou conseiller le ministre, mais aussi qu'il puisse se prononcer sur des actions ou des politiques qui sont mises en oeuvre par les autres ministères du gouvernement, lorsqu'elles touchent le ministère de l'Environnement ou l'environnement en général.

Je crois que le ministre a déjà fait un pas en commission parlementaire en acceptant au moins, comme le dit maintenant l'article 12, que ce conseil consultatif puisse produire des rapports pour conseiller le ministre sur toute question relative à la conservation et à l'environnement, sans égard, selon ce que le ministre a déclaré en commission, semble-t-il, aux restrictions de l'article 12 qui limitent les

pouvoirs du conseil aux seules politiques, stratégies et lois qui sont sous la responsabilité du ministère de l'Environnement. C'est un compromis, mais cela va évidemment beaucoup moins loin que la proposition que mon collègue de Verchères lui avait faite. Je pense que cela va aussi beaucoup moins loin que ce qu'espèrent tous les citoyens et citoyennes qui sont, de façon importante, intéressés à la protection de l'environnement au Québec.

M. le Président, je suis peut-être justement dans une position pour rappeler au ministre combien j'aurais trouvé heureux, comme critique de l'Opposition en matière de chasse et de pêche, que le ministère ou le conseil consultatif ou le ministre, par son conseil consultatif, puisse émettre son avis sur une politique que son collègue, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, est en train de vouloir instaurer au Québec qui, vous le savez, conserve la privatisation d'une partie considérable, au-delà de 40 000 kilomètres carrés, du territoire actuel des réserves fauniques en les transformant en pourvoiries privées. Quand on sait jusqu'à quel point, sur les territoires fauniques québécois, l'environnement, l'écologie de tout le territoire peut être bouleversée, cela aurait été heureux justement que le conseil consultatif, si le ministre de l'Environnement avait cette capacité d'agir par un conseil consultatif qui en aurait le pouvoir, puisse intervenir auprès de son collègue, membre du gouvernement, pour lui faire valoir, lui faire ressortir ou le mettre en garde contre certaines propositions soumises par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche concernant la privatisation des réserves fauniques, et éclairer ainsi beaucoup mieux le ministre et le gouvernement, mais surtout l'ensemble de la population sur les conséquences heureuses, dangereuses ou malheureuses que suscite, selon les inquiétudes qu'on ressent partout au Québec, le projet du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. C'est une inquiétude universelle. Étant au-dessus de la mêlée, différent du ministère impliqué, il pourrait apporter un éclairage beaucoup plus objectif sur le projet d'un autre ministre, un projet qui est en cours de réalisation.

De la même façon, pour la même préoccupation qui me concerne... M. le Président, est-ce que je dois comprendre qu'il faut que je demande l'ajournement du débat?

Le Vice-Président: M. le député de Dubuc, effectivement, nous arrivons à 18 heures, et il vous reste cinq minutes. À moins que vous ne vouliez poursuivre avec le consentement de l'Assemblée, vous devez demander l'ajournement du débat.

M. Desbiens: Je demande l'ajournement du débat.

Le Vice-Président: M. le député de Dubuc demande l'ajournement du débat. Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. En conséquence, puisque nous arrivons à 18 heures, nous allons maintenant suspendre nos travaux qui reprendront, ce soir, à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 9)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez regagner vos sièges. Nous allons reprendre la séance. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 40 du feuilleton.

La Vice-Présidente: Vous comprendrez qu'à l'article 40, il nous faut consentement pour pouvoir passer à l'étape d'adoption, compte tenu du fait que nous avons dû procéder à une étape aujourd'hui même. Est-ce qu'il y a consentement pour que l'on procède à l'adoption du projet de loi 99?

M. Jolivet: Oui, Mme la Présidente.

Projet de loi 99

Adoption

La Vice-Présidente: Consentement. Donc, le ministre délégué aux Pêcheries propose l'adoption du projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes. Je suis prête à reconnaître le premier intervenant. M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, Mme la Présidente. Comme je le mentionnais aux membres de cette Chambre, cet après-midi j'avais pris une entente hier soir avec le ministre délégué aux Pêcheries en vue de procéder, non seulement à l'adoption du projet de loi 99 concernant le crédit maritime aux pêcheries, mais aussi à la sanction de ce projet de loi par le lieutenant-gouverneur.

À titre d'explication, pour savoir pourquoi accélérer la procédure, bien sûr c'est parce que l'article 7 de la loi actuelle est modifié par la loi 99, en particulier par l'article 2 qui fait en sorte que le montant

où le fonds consolidé devra s'impliquer en garanties de prêts, etc., devra être pris de 10 000 000 $ et monté à 30 000 000 $, ce qui permettra, bien sûr, d'accélérer la construction de bateaux, et aussi d'accélérer certaines subventions et certaines formes de subventions, même si on n'est pas tout à fait d'accord avec certaines des modalités qui sont appliquées par le nouveau gouvernement. C'est aussi pour que l'on puisse procéder à la signature de certains documents d'importance, en particulier de la part du ministre délégué aux Pêcheries, pour que les contrats concernant chacun des bateaux soient signés dans les plus brefs délais pour que les pêcheurs puissent obtenir gain de cause dans ce dossier.

Actuellement, il existe 23 dossiers qui sont acceptés par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, c'est-à-dire la division des pêcheries. Il y a donc 23 dossiers qui sont en attente pour que l'on procède, et cette loi est extrêmement importante pour que l'on puisse procéder aux signatures des lettres d'intention et aux signatures des contrats. Il y a aussi en traitement, au moment où l'on se parle, 20 dossiers de demandes dans le cadre du programme du ministre délégué aux Pêcheries, et, pour ça aussi, c'est important que l'on puisse aller de l'avant puisqu'il est possible que ces 20 demandes en traitement puissent être passées avant le 31 mars 1988. Donc, Mme la Présidente, ce qui est extrêmement important dans ce dossier, c'est que les pêcheurs qui ont actuellement des demandes pendantes devant le ministre délégué aux Pêcheries, puissent obtenir gain de cause, d'une part et que, d'autre part, on puisse procéder, dans les plus brefs délais, aux autorisations nécessaires en vue des signatures de contrats au cours des mois de décembre, janvier, février et mars pour toutes les autres demandes qui sont en traitement.

En conséquence, puisque j'ai discuté avec le ministre délégué aux Pêcheries hier soir et même cet après-midi, je crois qu'il est important que l'on procède, non seulement à l'adoption en troisième lecture de ce projet de loi dans les plus brefs délais, mais aussi que le gouvernement fasse en sorte que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse aller de l'avant dans la sanction de cette loi.

Au nom de l'Opposition officielle, Mme la Présidente, nous disons oui à cette adoption en troisième lecture, dès ce soir et nous demandons au gouvernement de procéder à la sanction du projet de loi 99 dans les plus courts délais possible. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Duplessis. M. le député de Gaspé.

M. André Beaudin

M. Beaudin: Mme la Présidente au nom du ministre délégué aux Pêcheries, je voudrais remercier le député de Duplessis, critique en matière de pêches, pour la collaboration qu'il a apporté en commission parlementaire et, également, la collaboration qu'il nous apporte ce soir, en tenant pour acquis qu'il a compris le message qu'on avait passé, lors du discours du parti au pouvoir. J'invite le député de Duplessis à continuer de faire de même dans les prochaines lois qui sont au bénéfice des pêcheurs, des employés d'usines et des transformateurs dans la région de l'Est du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Gaspé. Il n'y a pas d'autres interventions? Le débat étant clos, est-ce que le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes est adopté.

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 43 du feuilleton.

Projet de loi 29

Reprise du débat sur la prise

en considération du rapport

de la commission

La Vice-Présidente: À l'article 43 de notre feuilleton, le ministre de l'Environnement propose l'adoption du rapport du projet de loi 29, loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement. Je pourrai reconnaître le premier intervenant, M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens (suite)

M. Desbiens: Merci, Mme la Présidente. J'avais déjà commencé, avant l'heure du repas, à exprimer quelques opinions et à donner surtout au ministre de l'Environnement un exemple qui cherchait à illustrer pourquoi l'Opposition, par la voix du député de Verchères, avait fait la suggestion de modification.

Il faut peut-être rappeler, pour le bénéfice des téléspectateurs, que l'objectif de ce projet de loi est de remplacer deux organismes, c'est-à-dire le Conseil consultatif de l'environnement et le Conseil consultatif sur les réserves écologiques, pour en former un seul nouveau qui s'appellera le Conseil de la conservation et de l'environnement. Puisque, à l'article 11 du projet de loi, les

fonctions et les pouvoirs de ce conseil consultatif ont pour objet de conseiller le ministre de l'Environnement uniquement sur des questions relatives à la conservation et à l'environnement, le député de Verchères, au nom de l'Opposition, avait proposé que le conseil consultatif de l'environnement nouvellement créé puisse avoir le pouvoir de se prononcer également sur l'ensemble des actions des divers ministères du gouvernement lorsque ces actions ont des conséquences sur l'environnement.

Je donnais justement comme premier exemple, avant la suspension des débats, le cas du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui propose présentement une modification considérable aux territoires fauniques du Québec, en faisant passer de 150 000 kilomètres carrés à 40 000 kilomètres carrés l'étendue des réserves fauniques du Québec pour transformer ces territoires en pourvoiries concessionnaires. Il aurait été important, puisqu'on connaît maintenant l'inquiétude universelle ressentie par les Québécois et les Québécoises concernant le projet du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, que ce conseil consultatif de l'environnement se prononce là-dessus, puisque, dès qu'on touche aux territoires québécois, à la faune du Québec et aux réserves fauniques, on touche aussi aux réserves écologiques, aux habitats fauniques, etc.

Donc, il aurait été important, ne serait-ce que pour rassurer la population sur les intentions et le devenir des réserves fauniques que propose le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qu'un organisme consultatif de la nature de celui que le ministre propose puisse être en mesure, de lui-même - donc, qu'il ait une crédibilité beaucoup plus grande quant à l'objectivité de ses membres - par rapport à un projet de loi ou à un projet tel celui du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, un projet de cette nature, de l'étudier, de le scruter et de donner son avis sur le projet.

Le deuxième exemple que je voulais donner, Mme la Présidente, au ministre de l'Environnement, porte encore justement sur l'utilisation du territoire québécois en relation toujours aussi avec le projet de développement du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche concernant les réserves fauniques et l'utilisation de la nature à des fins de chasse, de pêche, de trappage et de piégeage. Cela m'avait été soumis à de multiples reprises tant par les gestionnaires de ZEC que par les pourvoyeurs. Lors de notre tournée automnale des Grandes Oreilles, cela m'a été soumis à maintes reprises et, aussi, au sujet de l'action du ministère de l'Énergie et des Ressources via le ministère des Forêts sur les territoires fauniques.

Il semble qu'un conseil consultatif tel que l'a proposé le député de Verchères, et responsable de l'Opposition en matière d'environnement, au ministre, pourrait, s'il avait reçu l'assentiment du ministre, prendre sur lui, avec la crédibilité que lui aurait donné de tels pouvoirs, de regarder de façon attentive l'action des compagnies forestières dans les territoires fauniques du Québec, même s'il y a déjà ce qu'on appelle le Guide des modalités d'intervention en milieu forestier. Les intervenants en gestion de la faune au Québec sont très inquiets et se plaignent, et les pourvoyeurs d'une façon particulière. M. le ministre délégué aux Forêts semble douter de ce que je dis. Je les ai rencontrés personnellement. C'est ce qu'ils m'ont souligné, de même que les représentants et les gestionnaires de ZEC. (20 h 20)

II y a encore, comme le guide des modalités ne semble pas être encore complètement appliqué, des problèmes sérieux dans ce domaine. Donc, un comité consultatif du type qu'on le proposait au ministre de l'Environnement aurait eu l'avantage de permettre de rassurer la population quant à l'action de cet autre intervenant important et fondamental, on le reconnaît, dans le milieu forestier relié à la faune du Québec.

Ce sont les deux exemples pour illustrer justement le bien-fondé de la proposition de mon collègue de Verchères au ministre de l'Environnement.

Encore une fois, le ministre de l'Environnement a quand même fait un pas en direction de la proposition de mon collègue de Verchères, mais ce n'est pas tout à fait ce qu'on aurait voulu. Il est bien sûr, comme le mentionnait le député de Verchères, que nous allons quand même voter en faveur du projet de loi modifié par le ministre de l'Environnement. Je vous remercie.

M. Jolivet: Bravo! Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Dubuc. Il n'y a pas d'autre intervention? Le débat étant clos, le rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 29, Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui. Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 42 du feuilleton.

Projet de loi 28

Prise en considération

du rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 42 de notre feuilleton, le ministre des Communications propose l'adoption du rapport de la commission de la culture et des amendements qui ont été transmis en vertu de l'article 252 de notre règlement, et qui concerne le projet de loi 28, Loi modifiant diverses dispositions législatives eu égard à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. M. le ministre des Communications.

M. Richard French

M. French: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi au sujet duquel je propose l'adoption du rapport de la commission aujourd'hui aura pour effet, l'Assemblée nationale le voulant, non seulement d'harmoniser les dispositions législatives inconciliables avec la loi-cadre, la loi sur l'accès, mais également de rendre à cette loi son véritable caractère de loi prépondérante.

Au terme d'un processus amorcé il y a près de trois ans par la Commission d'accès à l'information et poursuivi par le ministère des Communications, les nombreuses consultations et discussions sur les dispositions inconciliables avec les ministères et les organismes ont porté fruits. Je peux affirmer que cet exercice a eu un effet bénéfique parce que la loi sur l'accès est maintenant mieux connue. Tous nous ont offert leur collaboration, et le projet de loi que nous allons adopter fait donc l'objet d'un consensus des parties concernées. On sait qu'il s'agit d'une évaluation exhaustive des conflits qui existent actuellement entre les grands principes incarnés et exprimés dans le projet de loi de l'accès à l'information et de la protection des renseignements privés, d'une part, et les dispositions sectorielles dans les différentes lois sectorielles du Québec qui empêchaient ou qui régissaient cette question d'accès et cette question de la protection de la vie privée.

Dans le projet de loi actuel, on vise à compléter ce processus et à rendre vraiment prépondérante la loi sur l'accès à toutes les lois et à tous les règlements du Québec. Dans le projet de loi, près de 140 dispositions de lois sectorielles sont abrogées, modifiées ou encore maintenues malgré la Loi sur l'accès à l'information afin d'être rendues conformes à la loi-cadre sur l'information et la protection de la vie privée.

Un moment pour bien comprendre le fonctionnement et le contexte du projet de loi. Selon l'article 169 de la Loi sur l'accès, toutes les dispositions inconciliables avec cette loi cesseront d'avoir effet le 31 décembre 1987. C'est à ce moment-là que le projet de loi que nous examinons actuellement entrera en vigueur. Rappelons brièvement que cette échéance a été reportée à deux reprises. La première fois, ce fut du 1er octobre 1986 au 30 juin 1987. Le rapport qu'avait déposé la Commission d'accès à l'information sur les dispositions inconciliables avait été remis quelque peu tardivement au ministère des Communications. Pour permettre à ce dernier d'entreprendre toutes les consultations nécessaires, on a remis la date fatidique. Il y a eu un deuxième report de même nature, juste avant la fin de la session parlementaire du printemps dernier, celle de 1987, après une entente avec l'Opposition, afin d'accorder tout le temps nécessaire à l'étude détaillée du projet de loi, compte tenu de l'ampleur et de la complexité de son contenu.

En fait, cet été, une commission parlementaire s'est tenue au mois d'août pour faire l'étude détaillée du projet de loi. Les membres de la commission ont eu l'occasion d'apprécier et d'étudier en détail la portée des modifications législatives du projet de loi. De plus, je me dois de le souligner, Mme la Présidente, le gouvernement a pu bénéficier d'une très grande collaboration de la part du critique de l'Opposition, le député de Taillon, qui, avec ses recherchistes, avait très bien fait ses devoirs. Il a proposé plusieurs modifications très pertinentes qui ont été prises en considération. Ainsi, le député de Taillon continue la tradition établie d'une pratique de cessez-le-feu ou de non-partisanerie à l'Assemblée nationale et dans ses commissions, en ce qui a trait à cette Loi sur l'accès à l'information et à la protection de la vie privée.

Il est important de noter également que le consensus qui s'est dégagé sur l'ensemble des articles du projet de loi tient compte et respecte pour une bonne part les recommandations de la Commission d'accès à l'information.

Quelques mots sur les points saillants du projet de loi. Compte tenu de la diversité des secteurs touchés par ce projet de loi et des divers types d'harmonisation qui sont effectués, je voudrais vous exposer brièvement les principaux points saillants du rapport. Tout d'abord, il y a Heu de rappeler que deux types de dossiers ont fait l'objet de chapitres particuliers dans le rapport de la Commission d'accès à l'information et, en raison de leur nature très complexe, ils ont reçu également un traitement particulier dans le projet de loi 28.

D'abord, les dossiers d'adoption. L'harmonisation des dispositions législatives actuelles régissant les dossiers d'adoption

avec la loi sur l'accès fait face à un sérieux dilemme. En effet, les deux droits que confère la loi sur l'accès s'affrontent. Ainsi, le droit d'accès d'un adopté à son propre dossier d'adoption entre en conflit avec le droit du parent biologique à la protection de son identité et de sa vie privée. À cet égard, le Code civil reconnaît au dossier d'adoption un caractère confidentiel qui est plus étanche encore que celui de la loi sur l'accès.

Ainsi, afin de maintenir la situation qui prévaut actuellement à l'égard de ces dossiers, des modifications ont été introduites dans la loi sur l'accès. Ces modifications, d'une part, indiquent que l'accès et la protection des renseignements contenus dans ces dossiers d'adoption continuent d'être régis par le Code civil. Donc, le caractère confidentiel est maintenu. D'autre part, cependant, pour ces dossiers, nous introduisons le principe du rôle de surveillance et de contrôle de la gestion de ces dossiers par la Commission d'accès à l'information et à la protection de la vie privée.

Ces amendements, apportés en commission parlementaire, sont une nette amélioration par rapport à la proposition initiale du projet de loi 28 qui prévoyait l'exclusion totale des dossiers d'adoption de l'application de la loi sur l'accès. Je tiens à signaler que, sur le fond, toute la question de l'adoption fait actuellement, au moment où l'on se parle, l'objet d'une révision globale dont nous ne connaissons pas encore les résultats. (20 h 30)

Cette révision, menée conjointement par la ministre de la Santé et des Services sociaux et le ministre de la Justice, aboutirait vraisemblablement à une solution de fond pour la question de l'accès aux dossiers d'adoption. À ce moment-là, si le processus de révision et d'étude mène à la conclusion qu'il faut changer cette confidentialité très forte dont ont bénéficié les dossiers d'adoption, il y aurait lieu, vraisemblablement, de procéder à d'autres amendements en ce qui a trait à ce sujet litigieux et difficile.

Deuxième sujet qui a bénéficié d'un traitement particulier, les dossiers médicaux et sociaux. À première vue, on pourrait penser que toute personne a droit d'accès à son dossier médical, social ou à celui de son enfant. C'est notre réflexe le plus naturel, mais ce n'est pas du tout aussi simple. En premier lieu, on se retrouve devant un double régime d'accès, le régime d'accès généralisé pour l'ensemble du gouvernement sous la loi sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée et, d'autre part, un régime d'accès relevant, sectoriellement, de la loi sur la santé et les services sociaux. Afin de clarifier et d'assurer l'harmonie des deux régimes, il a fallu modifier ces deux lois.

D'une part, étant donné que la loi sur l'accès confère actuellement à la personne concernée un droit général d'accès à son dossier médical et social sans restriction, il a été jugé opportun de prévoir une possibilité de refuser cet accès lorsque, de l'avis du médecin traitant, il pourrait en résulter un préjudice grave à la santé de cette personne. On peut imaginer le cas de certaines maladies très graves; on pourrait donner l'exemple de maladies en santé mentale où il pourrait être dangereux pour une personne atteinte par une telle maladie d'avoir nécessairement et automatiquement accès à l'ensemble de son dossier médical.

De plus, en conformité avec la loi sectorielle, une autre modification a été apportée à la loi sur l'accès afin de préciser que le mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé ni de recevoir des renseignements de nature médicale ou sociale contenus dans son dossier. Encore une fois, il s'agit des droits des plus jeunes et certaines évaluations faites par les professionnels de la santé pourraient, avec un diagnostic qui jette un regard potentiellement pessimiste vers l'avenir, faire mal à l'individu, pourraient faire en sorte de créer l'inverse de l'impact que peuvent avoir les analyses professionnelles, c'est-à-dire de réduire les possibilités d'épanouissement de l'individu plutôt que de l'aider.

Par ailleurs, les renseignements contenus dans les dossiers médicaux et sociaux sont souvent complexes. Pour donner suite à une recommandation de la Commission d'accès à l'information à ce sujet, une disposition a été ajoutée dans la loi sur l'accès afin d'obliger un établissement de santé ou de services sociaux ou un autre organisme détenant de tels renseignements de fournir au requérant l'aide d'un professionnel qualifié pour faciliter la compréhension des renseignements versés à son dossier.

Quant à la Loi sur les services de santé et les services sociaux, il a fallu lui apporter plusieurs modifications afin de l'harmoniser avec la loi sur l'accès. En premier lieu, il est prévu qu'un bénéficiaire ne peut recevoir communication d'un renseignement contenu dans son dossier médical ou social et qui a été fourni à son sujet par un tiers, à moins que ce tiers n'y consente. Donc, on protège la possibilité pour les organismes qui en ont besoin: les hôpitaux, la Régie de l'assurance-maladie, pour donner deux exemples, la Régie de l'assurance automobile du Québec, pour en donner un autre, de verser dans les dossiers des particuliers les renseignements venant d'un tiers, sans que ces renseignements deviennent systématiquement disponibles au bénéficiaire ou à l'individu dont il est question.

Ensuite, comme cette loi sectorielle prévoit déjà des recours à plusieurs tribunaux en cas de refus d'accès d'un bénéficiaire à son dossier, il a été convenu d'ajouter de façon explicite un recours en révision auprès de la Commission d'accès à l'information. Encore, certaines balises et restrictions ont dû être apportées à l'accès du titulaire de l'autorité parentale au dossier médical ou social du bénéficiaire mineur de moins de 14 ans et de plus de 14 ans. Dans les premiers cas, pour les moins de 14 ans, un établissement pourrait refuser au titulaire de l'autorité parentale l'accès au dossier du mineur de moins de 14 ans si celui-ci a fait l'objet d'une intervention au sens de la Loi sur la protection de la jeunesse, comme dans les cas de violence physique ou d'abus sexuel.

Cela fait mal à tout le monde de soulever de tels problèmes, Mme la Présidente, mais, dans les cas où il y a abus de l'enfant, le titulaire de l'autorité parentale, vraisemblablement et normalement le parent biologique ou le conjoint ou la conjointe du parent biologique, au cas où il y a abus, ces personnes n'auront pas automatiquement accès au dossier. Il pourrait d'ailleurs contenir une dénonciation de la personne demandant l'accès par l'enfant en question avec les conséquences que l'on peut imaginer pour l'enfant si ces renseignements étaient systématiquement disponibles.

Dans le second cas, pour les enfants de plus de 14 ans, l'accès au dossier d'un mineur de 14 ans et plus pourrait être refusé au titulaire de l'autorité parentale si l'établissement qui détient les renseignements, après avoir consulté l'enfant, détermine que la communication de ce dossier pourrait causer un préjudice à sa santé. Cette dernière modification va dans le même sens que certaines autres dispositions législatives contenues, notamment, dans le Code civil et la Loi sur la protection de la santé publique, et qui accordent au mineur de 14 ans et plus le droit de recevoir des soins sans le consentement de ses parents.

Le troisième secteur névralgique, le secteur municipal. Mis à part ces dossiers d'importance majeure du projet de loi 28, il est un autre secteur très largement touché par ledit projet de loi, soit le secteur municipal. En effet, près de la moitié des modifications législatives de ce projet de loi touche ce domaine. Ces modifications sont de plusieurs ordres. En premier lieu, les lois municipales doivent être modifiées afin que la responsabilité de donner accès aux documents incombe désormais aux responsables de l'accès plutôt qu'au greffier ou au secrétaire-trésorier. Or, en pratique, dans 90 % des cas, ce changement n'aurait aucun impact concret sur les greffiers et les secrétaires-trésoriers qui se sont déjà vu déléguer en tant que tels le rôle de responsable de l'accès aux documents de la municipalité. En second lieu, une modification a été apportée à la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal afin d'élargir l'accès de certains dossiers détenus par la Commission de la sécurité publique et de maintenir leur caractère de confidentialité dans les seuls cas où ces renseignements concernent directement la prévention, la détection, la répression du crime et des infractions aux lois.

Enfin, deux dispositions des lois sur la fiscalité municipale protègent la confidentialité des renseignements obtenus dans l'établissement du rôle d'évaluation, sauf à l'égard du propriétaire, du plaignant ou de l'occupant. Compte tenu du fait que ces renseignements s'apparentent à ceux de nature fiscale, les dispositions qui les concernent ont été maintenues malgré la loi sur l'accès. Les autres secteurs touchés par le projet de loi sont très diversifiés, quoique certaines problématiques se recoupent systématiquement.

Par exemple, plusieurs dispositions de lois sectorielles qui concernent les assurances, les biens culturels, les mines, les institutions financières, les valeurs mobilières protègent ce caractère de confidentialité des renseignements de nature scientifique ou économique fournis par une tierce partie. Or les articles de la loi sur l'accès qui créent des restrictions au droit d'accès dans ces cas, n'offrent pas autant de garanties que les lois sectorielles. Le responsable de l'accès appelé à effectuer un tri parmi les documents, conformément à la loi sur l'accès, pourrait commettre des erreurs parfois lourdes de conséquences. Dans ces cas, des clauses, malgré la loi sur l'accès, nous apparaissent justifiées et elles ont été insérées dans les lois concernées. Dans un autre cas et en réponse à la demande de l'Opposition officielle en commission parlementaire, la discrétion que possède la Commission des valeurs mobilières de donner accès ou non à des renseignements, sera assujettie à un critère de préjudice grave qui pourra, le cas échéant, être révisé par la Commission d'accès à l'information. (20 h 40)

En conclusion, Mme la Présidente, les modifications législatives du projet de loi 28 qui harmonisent les lois québécoises avec la loi sur l'accès, ont permis de faire passer un véritable test à la loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Je suis heureux de constater que les principes fondamentaux édictés dans la charte des droits et libertés repris et détaillés dans la loi sur l'accès aient prévalu, tout au long de cet exercice, afin d'assurer les droits des citoyens québécois en matière d'accès aux documents et de protection des renseignements personnels, tout en assurant une plus

grande transparence de l'appareil étatique.

Il ne faudrait pas croire que ces principes fondamentaux seront mis en cause lors de la révision de la loi sur l'accès qui s'amorce actuellement, conformément à la loi qui exige une étude, un examen crépuscule, comme on l'appelle communément, après cinq ans d'opération. La Commission d'accès à l'information a produit un rapport sur la révision du fonctionnement de l'ensemble de la loi. J'ai déposé ce rapport ici à l'Assemblée nationale le 22 octobre dernier et ni le ministère des Communications, ni le gouvernement, ni la Commission d'accès n'ont remis en cause les fondements de cette loi. Cependant, c'est en février prochain que se tiendra la commission parlementaire pour entendre la Commission d'accès à l'information, ainsi que les personnes et les organismes intéressés à la révision de cette loi.

J'aimerais, en conclusion, remercier la Commission d'accès à l'information pour le travail colossal qu'elle a réalisé dans l'exercice d'administration des dispositions inconcialiables, et, par la suite, pour la première révision quinquennale de cette loi, ainsi que pour son rôle de chien de garde auprès des organismes gouvernementaux qui doivent se conformer aux obligations de la loi. À cet égard la commission entend publier après les fêtes le répertoire des déclarations de fichiers détenus par les 3600 organismes publics. C'est encore là un travail de compilation majeure.

À l'instar de la Commission d'accès à l'information, à l'instar d'ailleurs de l'Opposition, je rappelle encore une fois aux organismes délinquants qui n'ont pas rempli leur déclaration de fichier leur devoir de se conformer au plus vite aux obligations de la loi. Par la même occasion, j'aimerais offrir toute ma gratitude au président de la Commission d'accès à l'information, qui quittera ses fonctions le 15 décembre prochain, pour le magnifique travail qu'il a accompli depuis sa nomination il y a cinq ans. On sait que les responsabilités du président de la Commission d'accès à l'information sont dévolues par l'Assemblée nationale et non pas par le gouvernement. Je considère que l'ensemble des Québécois et l'Assemblée nationale, en particulier, ont été privilégiés de bénéficier du travail de Marcel Pépin. Il a mis la commission sur pied. Il s'est bâti une équipe chevronnée, il a permis que cette équipe atteigne sa vitesse de croisière. Nous sommes très reconnaissants de l'excellent travail de M. Marcel Pépin et nous lui souhaitons beaucoup de chance dans ses nouvelles fonctions comme responsable de l'information radiophonique à Radio-Canada.

J'aimerais également remercier les responsables du dossier des dispositions inconciliables dans les divers ministères et organismes, l'équipe du ministère des

Communications qui a travaillé très très fort et l'équipe du ministère de la Justice. Il y a plusieurs personnes au ministère de la Justice qui ont aidé à cette opération combien difficile d'harmonisation des lois sectorielles, un travail de moine bien accompli par l'ensemble des gens qui se sont affairés à conférer à la loi sur l'accès à l'information sa véritable prépondérance.

J'aimerais ajouter que la collaboration des membres de la commission de la culture dans ce dossier a été fructueuse et très appréciée. Cela me permet, en présence du député de Taillon, de répéter ce que j'ai dit plus tôt dans mon discours, que le travail qu'il a fait dans ce dossier et le travail de son recherchiste ont été très dignes de l'Assemblée nationale et des plus hautes traditions du parlementarisme québécois. On l'apprécie énormément de ce côté-ci de la Chambre. On a bonifié le projet de loi, on a pu faire bénéficier l'ensemble des Québécois des améliorations ainsi apportées.

Mme la Présidente, c'est avec un très grand plaisir que je propose à l'Assemblée nationale l'adoption du projet de loi 28 ainsi que les amendements qui y ont été apportés, proposition qui serait, si j'ai bien compris, précisée dans les us et coutumes lors de l'intervention du leader adjoint du gouvernement et après l'intervention des autres députés qui veulent prendre la parole. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Communications. M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Merci, Mme la Présidente. Nous en sommes ce soir à peu près aux dernières étapes, aux ultimes étapes d'un long, très long processus de révision législative pour lequel de nombreux efforts ont été conjugués.

D'abord, évidemment, il s'agissait pour nous, parlementaires, d'adopter des modifications législatives afin de rendre l'ensemble du corpus législatif compatible avec la loi sur l'accès à l'information. Le ministre l'a souligné tantôt, il s'agissait là d'un travail absolument phénoménal. Je pourrais même dire que seul le projet de loi 92, qui a été adopté un peu plus tôt durant cette même 33e Législature, peut rivaliser d'ampleur avec le travail qui a été accompli.

Le projet de loi 92, rappelons-le, faisait en sorte de rendre conciliables, compatibles les dispositions de toutes nos lois avec la Charte des droits et libertés de la personne. Dans ce cas-ci, je dois dire, Mme la Présidente, que c'est avec beaucoup de bonheur que je me suis associé aux autres parlementaires pour réaliser ce travail. Le ministre a terminé avec ses remerciements. Je vais commencer avec les miens.

D'abord, je veux remercier le ministre pour les efforts, l'énergie, le temps qu'il a consacré, à travers ses fonctions ministérielles, pour faire en sorte que le présent projet de loi pour lequel on ne se battra pas dans les autobus, j'en conviens, permette néanmoins à des tas de citoyens et de citoyennes du Québec de recevoir à l'avenir justice en termes d'accès à l'information et de protection des renseignements qui les concernent, donc qui permettra à ces citoyens d'obtenir une plus grande justice, une plus grande accessibilité, une plus grande protection dans certains cas.

J'allais dire qu'au départ de toute initiative législative, il y a une volonté politique qui s'exprime généralement par la personne d'un ministre. Dans ce cas-ci, vous savez que je suis particulièrement avare de ce type de causeries, Mme la Présidente, mais je voudrais, avec la plus grande sincérité, est-ce utile de le mentionner, féliciter le ministre des Communications qui a su mener à bien cette barque.

On est à l'étape de l'adoption du rapport, mais je ne doute pas que cette loi sera adoptée en troisième lecture, probablement cette semaine ou la semaine prochaine, du moins avant la fin de la session, de sorte que nous aurons rempli le mandat que nous confiait la loi à l'époque où la loi sur l'accès à l'information était adoptée, c'est-à-dire qu'on y avait prévu cette opération pour rendre compatibles toutes nos lois, nos règlements et tout ce qui en découle également. Il faut penser à ce qui existe dans les municipalités, les chartes des villes, etc. C'était un travail colossal.

Mes deuxièmes pensées, si l'on veut, vont évidemment au personnel de la Commission d'accès à l'information. M. le ministre a souligné tantôt le départ regretté de M. Marcel Pépin, président, depuis le début, de la Commission d'accès à l'information. Il nous quittera dans les jours qui viennent pour retourner au milieu journalistique, au milieu de l'information, à Radio-Canada, direction de la radiophonie, si l'on veut, à titre de directeur de l'information. Je pense qu'on peut dire que M. Pépin a su faire les premiers pas avec l'organisme, faire en sorte qu'il accélère sa cadence, prenne sa vitesse de croisière et devienne un organisme dont la crédibilité n'est plus en doute aujourd'hui au Québec.

Evidemment, outre ces deux personnes, il y a tout un personnel, des juristes. Le ministre a mentionné que, dans chaque ministère, il y a un correspondant. C'est quand même là une structure assez imposante. Ces gens ont travaillé sans partisanerie, ont travaillé en ayant à coeur finalement le mandat que le législateur avait confié à l'époque dans le projet de loi original. Je le mentionne et je le répète, parce que c'est le type de loi que nous devrions adopter le plus souvent. Peu importent les gens qui seront ici dans quelques années, je dis et je redis qu'il n'y a rien de mieux que d'adopter des lois en faisant en sorte qu'on puisse un jour les rendre compatibles avec les lois qui ont préséance. Éventuellement, comme c'est le cas de la loi sur l'accès à l'information, d'ailleurs, faire en sorte qu'on puisse les réviser automatiquement. (20 h 50)

On aura un rapport de mise en oeuvre qui nous a été remis, qu'on devra étudier à l'intersession, rapport de mise en oeuvre sur la loi sur l'accès à l'information, donc, nous serons obligés de réviser. Voilà une procédure intelligente, souple, efficace au service du citoyen, finalement.

Il y a eu également, évidemment, des consultations très nombreuses, des audiences publiques qui se sont succédé jusqu'à la publication l'an dernier du rapport de la Commission d'accès à l'information sur les dispositions inconciliables. Je mentionne le titre. Je l'ai déjà fait en cette Chambre parce que le titre du rapport est passablement révélateur de ce qu'est la loi sur l'accès à l'information et la protection de renseignements confidentiels. Le titre du rapport qui avait été déposé: L'État: une affaire publique - La vie privée: un secret d'État. Ce n'est pas un jeu de mots, Mme la Présidente. L'État est une affaire publique parce qu'on doit avoir accès aux documents publics. Mais, d'un autre côté, la vie privée, ce qui nous concerne, est un secret d'État. Mon Dieu que ces choses sont bien dites dans le titre du rapport.

Évidemment, il ne suffisait pas de faire un beau titre au rapport. Il nous fallait examiner le contenu, ce qui a été fait. Nous avons examiné, bien sûr, les recommandations de la Commission d'accès sur l'opportunité dans bien des cas d'abroger, de maintenir, de modifier, de remplacer les dispositions législatives qui étaient contraires à la loi d'accès. Le projet de loi 28, que vous avez appelé tantôt pour la prise en considération du rapport, constitue ainsi le dernier maillon, si on veut, d'une longue chaîne, d'une nécessaire chaîne d'exercices, parce qu'il touche 52 lois, contient 133 articles qui ont pour effet d'abroger plus de 10 dispositions inconciliables, d'en modifier 96 et d'en maintenir 27, en y joignant, dans ces derniers cas, une clause "malgré", comme disent maintenant les juristes, qu'on appelait autrefois une clause dérogatoire ou une clause "nonobstant", procédé qui, plus d'une fois, est compréhensible et justifiable, mais à l'égard duquel nous apporterons plus tard une certaine mise en garde.

C'est bien les clauses "nonobstant". Nous l'avons déjà demandé en ce qui concerne une loi qui fait parler d'elle, la loi 101. Nous avons donc introduit des clauses

dérogatoires, des clauses "malgré" dans 27 dispositions, selon notre inventaire. Ce sont de bonnes formules dont il ne faut pas abuser. Dans cet exercice total, Mme la Présidente, je crois que le ministre l'a mentionné tantôt, lors de son discours de deuxième lecture, il y a eu pas moins de 260 chartes municipales qui ont été examinées, le Code civil du Québec, 495 lois publiques, 12 000 pages de textes réglementaires, qui ont été lus, analysés, soupesés, jugés. La nomenclature que je viens de faire, je pense, illustre bien l'ampleur et l'importance de la tâche qui a été effectuée. Il n'est pas dans notre intention, ce soir, de passer en revue toutes et chacune des dispositions qui ont fait l'objet d'un débat en Chambre ou en commission parlementaire. Le ministre de l'Industrie et du Commerce, leader adjoint du gouvernement, m'en remercie.

D'ailleurs, je pense que le temps alloué ne me permettrait pas de faire le tour des 12 000 pages de textes réglementaires, des 495 lois publiques. Cependant, nous aimerions, ce soir, mettre en exergue certains cas d'espèce qui ont fait l'objet de discussions entre parlementaires et avec le ministre. Les bémols que je vais mettre ce soir, les nuances que je vais apporter ce soir, ne visent en aucun cas à faire ombrage, si l'on veut, au processus législatif consultatif qui a été suivi. Je l'ai dit tantôt, le processus est valable et si, ce soir, j'apporte des réserves qui pourront apparaître comme étant vigoureuses, tenez pour acquis que cette vigueur vient plutôt de la nature de la personnalité de celui qui vous parle, mais ne véhicule aucune agressivité à l'égard du travail qui a été fait et, bien plus, aucun sentiment négativiste.

Nous avons réussi d'ailleurs, de façon générale et globale, à établir autour du projet de loi 28 - le ministre des Communications, celui qui vous parle et les autres parlementaires qui ont participé à ce débat - une collaboration que je n'hésiterais pas à qualifier de tout à fait remarquable et tout cela aux seules fins de bonifier une loi générale, d'assurer - j'allais employer un anglicisme, je pense qu'il est valable peut-être dans le sens où je veux l'employer - la performance de la loi. Je le dis souvent: Les lois qu'on adopte, il faut qu'elles fonctionnent aussi bien en été qu'en hiver. C'est une imagerie populaire, mais cela veut dire que les lois qu'on adopte doivent servir les citoyens, être claires, comporter des messages précis et faire en sorte que ces lois puissent être viables et compréhensibles. Ce n'est pas toujours facile, comme nous le verrons. Je vais donc énumérer certains blocs, certains sujets qui ont fait l'objet de nos discussions et tout cela ne porte pas ombrage au reste.

D'abord, l'adoption de l'article 2 du projet de loi. Après avoir proposé, par l'article 2 du projet de loi 28, l'exclusion complète des dossiers d'adoption des dispositions de la loi d'accès, le ministre des Communications, qui était appuyé en cela par sa collègue, la ministre de la Santé et des Services sociaux, y allait de l'ajout, à la loi générale, de l'article 2.1 faisant en sorte d'assurer l'accès aux dossiers d'adoption par les dispositions du Code civil et d'assurer également leur protection par les prérogatives propres à la loi d'accès, pour ces fins. Tout cela ne règle pas la question de la sollicitation à laquelle peut inciter la disposition du Code civil sur l'accès.

Deuxièmement, grand problème rencontré au cours de nos discussions: la décision du comité interministériel sur les retrouvailles n'est pas encore arrêtée. Je prends peut-être une minute - je pense que vous le savez, Mme la Présidente, les journaux en ont été remplis - les retrouvailles: il s'agit de savoir si un enfant qui a été adopté, qui désire retrouver ses parents naturels, peut les retrouver de la même façon que les parents naturels qui ont confié leur enfant à l'adoption peuvent retrouver leur enfant naturel. Finalement, il y a donc un comité interministériel qui a été formé à l'intérieur du gouvernement là-dessus. C'est bien, c'est un problème qui n'est pas facile, etc. Nous aurions aimé que, dans le projet de loi 28, l'on statue définitivement, de façon claire, sur la question des retrouvailles, mais le projet de loi 28 sert, comme je l'ai dit en commission parlementaire, d'espèce de terrain de stationnement pour le dossier en attendant la solution, la décision finale du gouvernement à l'égard du dossier des retrouvailles.

L'Opposition, dans ce dossier, dans le double objectif de légiférer de façon moderne et d'obliger le législateur à tenir compte des recommandations du comité ministériel, a suggéré, étant donné qu'on ne peut pas forcer le gouvernement à faire son lit, il nous dit qu'il n'est pas prêt... Quand même, on trouve que deux ans... En tout cas, le comité interministériel a été mis sur pied il y a déjà longtemps et on trouve qu'il aurait dû accoucher, mais admettons qu'il n'a pas accouché pour différentes raisons. (21 heures)

Ce que nous avons suggéré en commission parlementaire, c'est de faire en sorte d'introduire un amendement pour dire que la situation actuelle ne peut plus être tolérée, qu'elle crée de la confusion dans l'esprit de tout le monde. La situation actuelle est difficilement administrable par les centres de services sociaux et on devait précisément introduire une clause crépusculaire à l'intérieur du projet de loi 28 concernant les dispositions d'adoption pour faire en sorte que... Je pense que la date que nous suggérions était le 31 décembre 1988. On s'est dit: On va donner une autre

année au gouvernement pour qu'il fasse son lit mais, au moins, dans un an, on aura et les citoyens du Québec auront un message clair en matière d'adoption.

Malheureusement, ce n'est pas fait. Nous avons proposé cet amendement et il a été rejeté après un vote nominal des membres de la commission parlementaire. C'est un amendement à savoir que l'article 2.1 cesse d'avoir effet le 31 décembre 1988. Donc, première réserve sur le dossier d'adoption.

Deuxième réserve: tout le dossier de l'accès des parents au dossier médical de leur enfant de plus de 14 ans. Le problème est simple. Est-ce qu'un parent - il y en a plusieurs qui m'écoutent de l'autre côté et qui ont des enfants - peut avoir accès au dossier médical de son enfant s'il a moins de 14 ans ou s'il a entre 14 et 18 ans? Voilà un beau problème. La réflexion qui nous venait du ministère de la Santé et des Services sociaux n'avait aucun sens, était basée sur le fait que la majorité des parents sont à peu près de mauvais parents et que, si on veut prendre connaissance du dossier de nos enfants, c'est pour les battre, pour les punir, pour leur apporter un châtiment.

Dans certains cas, on peut concevoir qu'il y a des maladies vénériennes qui ont été attrapées par des enfants et que les parents veulent le savoir. Dans d'autres cas, on peut concevoir qu'il y ait eu des avortements. Or, le parent, règle générale - c'est cela qu'on a été obligé de dire pendant une soirée à la ministre de la Santé et des Services sociaux - n'est pas là pour punir son enfant, il est là pour l'aider, comme la majorité d'entre nous quand nous rencontrons nos enfants. Les parents québécois ne sont pas pires que les autres. Il fallait donc vraiment prendre le problème de l'autre côté et dire: "Le parent va avoir accès au dossier médical de son enfant sauf," au lieu de dire que le parent n'aura pas accès au dossier médical de son enfant. Je pense qu'il a fallu rétablir le principe général et dire: Le parent a accès au dossier médical de son enfant. Incroyable mais vrai! Avec mon collègue, le député de Gouin, on a été obligés de prendre une soirée ou presque avec la ministre de la Santé et des Services sociaux pour finalement lui faire comprendre cela et, avec l'aide du ministre des Communications, à force de débats très passionnés, on est venu à bout d'adopter -c'est ce que contient le rapport - un amendement qui se tient debout.

Pour faire le point, d'abord, il faut diviser les enfants de moins de 14 ans et ceux de plus de 14 ans. En ce qui concerne l'enfant de moins de 14 ans, la solution retenue est la suivante: S'il est âgé de moins de 14 ans, si le bénéficiaire est âgé de moins de 14 ans et s'il a fait l'objet d'une intervention au sens de l'article... Alors, tout le monde a accès au dossier, sauf s'il a fait l'objet d'une décision du Comité de la protection de la jeunesse ou du DPJ et que la communication du dossier de l'enfant aux parents pourrait causer préjudice à la santé physique ou mentale de l'enfant. Donc, règle générale, sauf dans les cas où il y a eu signalement, où il y a eu une décision du Tribunal de la jeunesse ou du Comité de la protection de la jeunesse - encore une fois, même dans ce cas, si la divulgation du dossier médical de l'enfant était contraire à sa santé - sauf dans ces cas-là, tout parent a accès au dossier de l'enfant, aura dorénavant accès, devrais-je dire, au dossier de son enfant s'il est âgé de moins de 14 ans.

Si l'enfant est âgé de plus de 14 ans, à ce moment-là, cela prend deux conditions pour refuser l'accès aux parents. Premièrement, il faut que l'adolescent lui-même refuse; deuxièmement, il faut que l'établissement de santé ou de services sociaux détermine que la communication du dossier pourrait causer préjudice à l'enfant. Outre ces deux exceptions qui doivent exister de façon concomitante pour permettre le refus de la divulgation du dossier, le parent aura accès au dossier de l'enfant. Je pense que c'est la meilleure solution qui a été trouvée, qui respecte à la fois l'intérêt de l'enfant et le fait que la majorité des parents qui nous écoutent ce soir ne sont pas là pour battre leur fille qui serait enceinte ou leur garçon qui aurait attrapé une maladie vénérienne ou imaginez n'importe quel cas.

Aussi incroyable que cela puisse paraître - je l'ai dit en commission parlementaire et je le répète - il a vraiment fallu convaincre la ministre de la Santé et des Services sociaux que la majorité des parents sont des gens qui se tiennent debout et qui ont de l'allure. Cela a pris du temps, cela a pris des mois avant qu'on puisse arriver à cet amendement qui, dans les circonstances, est définitivement, à mon point de vue, le meilleur amendement qui pouvait être présenté.

Quand on regarde par contre l'ensemble du déroulement de ce processus, on est un peu déçu. D'ailleurs, à ce sujet, citons la Commission d'accès à l'information qui, dans son rapport sur les dispositions inconciliables, s'interrogeait sur la pertinence d'harmoniser le régime d'accès au dossier médical ou social et le droit de disposer de soi-même reconnu aux personnes de plus de quatorze ans. La commission recommandait, à la page 101: "La Commission d'accès à l'information invite donc le gouvernement à enclencher au plus tôt une réflexion approfondie sur l'accès exclusif du mineur de quatorze ans ou plus à son dossier médical ou social. Une telle réflexion devra prendre en compte les intérêts parfois conflictuels des parents et des enfants, le droit à l'autonomie - je

comprends que, de l'autre côté, l'enfant a le droit à l'autonomie, mais on n'est quand même pas pour peinturer le parent en noir -déjà reconnu par la Loi sur la protection de la santé publique au mineur de quatorze ans ou plus et, enfin, la situation particulière du domaine de la protection de la jeunesse."

Donc, le processus de la commission parlementaire sur le projet de loi 28 a failli être lourdement hypothéqué, n'eût été finalement de la bonne foi et de la vigilance... Le ministre des Communications ne pouvait pas parler trop fort, c'était sa collègue, mais l'Opposition a parlé plus fort, parce qu'on n'a pas cette solidarité ministérielle. Si ma mémoire est bonne, à l'époque, on a obtenu que tout le dossier soit pris à nouveau en considération. Le ministre des Communications a quand même su être très attentif, nous porter une oreille attentive. Autrement, dans ce type de débat, quand un ministre bute, malgré le GBS, le gros bon sens, quand on vote, si on est minoritaire, on peut se faire passer sur le corps. Même s'il est écrit dans le grand livre d'histoire qu'on a raison, la loi reste là et n'importe quel ministre, n'importe quel député serait arrivé à l'hôpital pour prendre connaissance du dossier de son enfant et se serait fait dire: Bien non, vous avez adopté une loi qui interdisait aux parents de prendre connaissance du dossier de leur enfant. Imaginez-vous, est-ce que cela avait une once d'allure de peinturer la société québécoise de cette façon?

On s'est fait traiter de paternalistes, de réactionnaires, de négligents et d'irresponsables par certains membres du parti ministériel lors du débat. Aujourd'hui, on a ici l'amendement qu'on avait nous-mêmes suggéré. La genèse des discussions est, pour ceux que cela intéresse, dans le Journal des débats, et pour ceux qui voudraient comparer, je les invite à prendre uniquement le texte du projet de loi 28 avec le texte que nous adoptons maintenant. La différence est éclatante, évidente.

Troisième bloc. J'ai parlé de l'adoption, j'ai parlé de l'accès des parents au dossier médical de l'enfant. Le troisième bloc, l'accessibilité par la tarification. Avec raison, Mme la Présidente, le projet de loi 28 abrogeait diverses dispositions sectorielles qui autorisaient l'imposition de frais autres que ceux prévus au règlement sur les frais exigibles pour la transcription, la reproduction ou la transmission de renseignements ou de documents. Toutefois, les articles 4 et 6 du projet de loi 28 entendaient confier au ministre des Affaires municipales le pouvoir de déroger audit règlement pour fixer en faveur d'une municipalité des frais différents de ceux prescrits par le gouvernement, et ce, disait-on, aux seules fins de favoriser l'autofinancement de certaines corporations municipales. (21 h 10)

En bon français, cela veut dire quoi? Les frais pour obtenir des copies des documents publics, notamment de la part des municipalités, devaient être fixés par règlement adopté ici au Conseil des ministres un mercredi matin. Et, à ce moment-là, c'est le même règlement qui s'applique, c'est clair. Le projet de loi initial prévoyait que le ministre des Affaires municipales pouvait, à sa discrétion, déroger à ce règlement pour en adopter d'autres pour permettre l'autofinancement des corporations municipales. On voit tout de suite venir. Les documents sont publics, c'est ce que l'on fait, c'est la loi sur l'accès à l'information. Si une municipalité exige 10 $, l'autre 20 $ pour une photocopie, ou comme dans certains cas que j'ai déjà vus payer 95 $ ou pas loin de 100 $ pour dix photocopies en disant que cela a pris un employé en temps supplémentaire pour le faire et que cela a pris du temps pour trouver les documents, et tout cela, parce qu'il faut se rendre compte qu'en dehors de la Chambre, cette loi-là doit fonctionner en hiver comme en été et concerne toutes les municipalités du Québec. Bref, le projet de loi comprenait cette espèce de dérogation qui était une ouverture comme une porte de grange à travers les principes fondamentaux de la loi sur l'accès à l'information.

C'est un pouvoir totalement discrétionnaire d'ailleurs qui était accordé au ministre des Affaires municipales. Et, peu importe qui est le titulaire de ce ministère, il reste que ce pouvoir, balisé d'aucune norme précise, inquiétait, à juste titre d'ailleurs, la Commission d'accès à l'information et les membres de l'Opposition qui ne voyaient pas là le meilleur moyen d'assurer aux citoyens l'exercice de leurs droits en matière d'accès.

Le ministre des Communications presque spontanément - cela a pris un peu de temps, un peu de réflexions et de consultations - mais a souscrit finalement à ces arguments et a accepté d'abroger ce pouvoir discrétionnaire et unilatéral du ministre des Affaires municipales. Nous ne tenons donc pas à insister ici outre mesure sur ce cas, si ce n'est pour, d'une part, le rappeler à la mémoire du ministre et surtout, d'autre part, pour l'exhorter à la plus grande prudence quand vient le mercredi au "bunker" et que les règlements passent à la vitesse des rondelles à peu près bien frappées de la pointe, pour l'inciter à la vigilance sur les règlements que ses collègues vont apporter avec toujours des bonnes raisons.

D'ailleurs, ils ont des fonctionnaires qui sont là pour leur donner de bonnes raisons d'être différents des autres ministères. Alors donc, la plus grande prudence, la plus grande

vigilance, pour faire en sorte qu'aucune brèche injustifiée ne vienne hypothéquer la prépondérance de la loi sur l'accès à l'information. C'est ce que l'on avait décidé et c'est ce que l'on a fait. Il faut être cohérents avec nous-mêmes. Évidemment, . il ne faut pas se leurrer, tout ne sera pas parfait.

Vous m'indiquez qu'il reste deux minutes. J'aurais voulu évidemment glisser un mot sur d'autres blocs, les renseignements fournis par un tiers, la multiplicité, vous vous en souviendrez, M. le ministre, non épurée des lieux d'appel dans certains cas. Je pense particulièrement à l'article 117, où on dit qu'un bénéficiaire peut en appeler -tenez-vous bien! - un bénéficiaire à qui on refuse momentanément l'accès peut en appeler à la Cour supérieure, à la Cour provinciale, à la Cour des sessions de la paix, au Tribunal de la jeunesse ou à la Commission d'accès à l'information, ou également à la Commission des affaires sociales. Je n'ai jamais vu cela dans un texte de loi. On donne une ouverture, un appel, il peut en appeler n'importe où. Il peut peut-être même appeler son voisin.

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Filion: Alors, la multiplicité non épurée des lieux d'appel et l'article 124 en ce qui concerne la Commission des valeurs mobilières du Québec, l'article 117, je l'ai dit, les renseignements fournis par des tiers, mais tout cela, Mme la Présidente, finalement, ne sont que des aspects secondaires, accessoires à mon propos principal. D'abord, encore une fois, le travail a été fait au meilleur de la connaissance des gens impliqués, mais deuxièmement - c'est là que je termine mon message - je réitère cet appel à la vigilance en vous citant un cas. Le président de la Commission d'accès à l'information est venu ici témoigner en commission parlementaire sur le projet de loi qui est le nôtre. Savez-vous ce qu'il nous a dit, Mme la Présidente, pour montrer à quel point la loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements confidentiels est fragile? Les renseignements qu'on demande à l'entrée de l'Assemblée nationale vont trop loin. Cela nous donne une belle leçon d'humilité. On a une loi. Évidemment il y a matière à interprétation - c'est la vie, je le dis. M. Pépin ne sera sûrement pas fâché que je le dise en Chambre...

La Vice-Présidente: En conclusion, M. le député.

M. Filion: Je termine, Mme la Présidente. Nos propres règlements d'entrée à l'Assemblée nationale contiennent probablement - je vais laisser d'autres que moi se pencher là-dessus - des demandes de renseignements qui sont contraires à la loi sur l'accès à l'information et la protection de renseignements confidentiels. Cela donne une idée jusqu'à quel point c'est une loi qui est fragile, c'est une loi qui est délicate. C'est une loi qui demande vigilance, prudence, sagesse. C'est toutes ces bonnes choses qu'on va souhaiter au ministre des Communications parce que c'est lui qui l'administre. Merci, Mme la Présidente.

Adoption des amendements et du rapport

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Taillon. Il n'y a pas d'interventions? Le débat étant clos, est-ce que les amendements qui ont été proposés par le ministre et qui ont été transmis en vertu de l'article 252 de notre règlement et qui concernent le projet de loi 28, loi modifiant diverses dispositions législatives, eu égard à la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels sont adoptés?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport, tel qu'amendé et qui concerne le projet de loi 28 est adopté?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente, je demanderais l'ajournement de nos travaux à demain 10 heures.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc ajourner nos travaux à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 17)

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